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1
p. 192-195
AU ROY. SONNET.
Début :
Puis que je suis encor sur l'Article de la Bataille / Tandis que triomphant sur la Terre & sur l'Onde, [...]
Mots clefs :
Guerre, Cambrai, Combat, Victoire
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texteReconnaissance textuelle : AU ROY. SONNET.
Puis que ie ſuis encor fur
l'Article de la Bataille de Cafſel , ie ne dois pas oublier de vousfaire pard'un Sonnet qui merited'eſtre veu,&dont cette grande journée a fourny le ſujet,ie vous l'envoye plûtoſt que les autres , parce qu'il eft tombé le premier entre mes
mains,&non pour aucune au- tre raiſon,mon deſſein n'eſtant
pas de donner rang aux Ouvragesd'eſprit ſelon leur me- rite, dont ie vous laiſſe àdécider.
140 LE MERCURE
T
AVRO Υ.
SONNET.
Andis que triomphantfur laTerre&ſur l'onde,
Tujurprends l'Univers de tespro- grezsoudains ,
Etqu'avec tant de bruit dans tes
Augustes mains,
Eclate le tonnerre enmêmetemps qu'ilgronde.
Tandis qu'en cette Guerre où le
Ciel teseconde,
Du fuperbe Cambray tombent les efforts vains,
Que ta teſte &ton cœurfont les guides certains,
Quiconduisent tespasvers l'Em- piredu monde.
GALANT. 141
1
In Freregenereux, parton exempleinstruit ,
Cherchetes ennemis, les combat ,
les détruit,
Etvientmettre àtespiedssabrillante Victoire :
De l'encens qu'il merite il n'est
pointsatisfait,
Ilveutqu'on te ledonne , &sa
plus grande gloire,
Eſt que tufois louéde toutce qu'il
afait.
l'Article de la Bataille de Cafſel , ie ne dois pas oublier de vousfaire pard'un Sonnet qui merited'eſtre veu,&dont cette grande journée a fourny le ſujet,ie vous l'envoye plûtoſt que les autres , parce qu'il eft tombé le premier entre mes
mains,&non pour aucune au- tre raiſon,mon deſſein n'eſtant
pas de donner rang aux Ouvragesd'eſprit ſelon leur me- rite, dont ie vous laiſſe àdécider.
140 LE MERCURE
T
AVRO Υ.
SONNET.
Andis que triomphantfur laTerre&ſur l'onde,
Tujurprends l'Univers de tespro- grezsoudains ,
Etqu'avec tant de bruit dans tes
Augustes mains,
Eclate le tonnerre enmêmetemps qu'ilgronde.
Tandis qu'en cette Guerre où le
Ciel teseconde,
Du fuperbe Cambray tombent les efforts vains,
Que ta teſte &ton cœurfont les guides certains,
Quiconduisent tespasvers l'Em- piredu monde.
GALANT. 141
1
In Freregenereux, parton exempleinstruit ,
Cherchetes ennemis, les combat ,
les détruit,
Etvientmettre àtespiedssabrillante Victoire :
De l'encens qu'il merite il n'est
pointsatisfait,
Ilveutqu'on te ledonne , &sa
plus grande gloire,
Eſt que tufois louéde toutce qu'il
afait.
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Résumé : AU ROY. SONNET.
L'auteur envoie un sonnet dédié à la Bataille de Cafsell, précisant que ce choix est dicté par la disponibilité plutôt que par une préférence. Il laisse au lecteur le soin de juger la valeur des œuvres. Le sonnet célèbre les triomphes et les exploits militaires d'un leader dont les actions sont soutenues par le ciel. Ce leader guide ses pas vers la domination mondiale. Le texte met en avant la générosité et la victoire, soulignant que la plus grande gloire du leader réside dans les louanges reçues pour ses actions.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 225-226
Sur la Campagne du Roy, & le Jubilé de la Reyne.
Début :
Encor ces Vers de Monsieur l'Abbé Cotin & je ferme mon / France, ne vous allarmez pas [...]
Mots clefs :
France, Combat, Reine, Roi
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texteReconnaissance textuelle : Sur la Campagne du Roy, & le Jubilé de la Reyne.
Encor ces Versde Monfieur
1
GALANT. 163 -`l'Abbé Cotin, & ie ferme mon
Paquet, On les eſtime , & ils
ont eu le bonheur de plaire à
une perfonne de la plus hau- te qualité , &dont l'eſprit n'eſt pas moins relevé que la naif- fance.
164 LE MERCURE
子子子子子
Sur la Campagne du
ROY ,
F
Et le lubilé de la Reyne.
Rance ne vous allarmez pas
Du fort incertain des com -
bats ;
Malàpropos onſe récrie Quetout est changeant icy-bas,
LeRoy combat,la Reyneprie.
On redoute peu la furie
DesRodomonsdes Païs-bas ;
Lefeu,leſang&la tûrie,
Nefontpas toûjours leurs ébats,
Etpour les mettre tous àbas,
LeRoy combat, la Reyneprie
1
GALANT. 163 -`l'Abbé Cotin, & ie ferme mon
Paquet, On les eſtime , & ils
ont eu le bonheur de plaire à
une perfonne de la plus hau- te qualité , &dont l'eſprit n'eſt pas moins relevé que la naif- fance.
164 LE MERCURE
子子子子子
Sur la Campagne du
ROY ,
F
Et le lubilé de la Reyne.
Rance ne vous allarmez pas
Du fort incertain des com -
bats ;
Malàpropos onſe récrie Quetout est changeant icy-bas,
LeRoy combat,la Reyneprie.
On redoute peu la furie
DesRodomonsdes Païs-bas ;
Lefeu,leſang&la tûrie,
Nefontpas toûjours leurs ébats,
Etpour les mettre tous àbas,
LeRoy combat, la Reyneprie
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Résumé : Sur la Campagne du Roy, & le Jubilé de la Reyne.
Le texte présente deux extraits. Le premier mentionne des vers de l'Abbé Cotin appréciés par une personne de haute qualité. Le second traite de la campagne militaire du roi et des prières de la reine, rassurant les lecteurs sur les incertitudes des combats. Il minimise la menace des ennemis, affirmant que le roi et la reine travaillent ensemble pour les vaincre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 33-64
Combat donné devant la Forteresse de Tabago, avec les Noms des Morts & des Blessez, & de tous ceux qui s'y sont signalez. [titre d'après la table]
Début :
Quoy que la France soit le plus ageable séjour que [...]
Mots clefs :
Ennemis, Morts, Blessés, Combat, Forteresse de Tabaco, Vaisseaux, Mer, Comte d'Estrées, Troupes, Attaquer, Chevalier, Amiral, Hollande, Pistolets, Capitaines, Action
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texteReconnaissance textuelle : Combat donné devant la Forteresse de Tabago, avec les Noms des Morts & des Blessez, & de tous ceux qui s'y sont signalez. [titre d'après la table]
Quoy que la France ſoit le plus agreable ſéjour que puif- fent choifir les Perſonnes de
bon gouſt, trouvez bon,Mada- me , que je vous mene audelà
C 2
18 LE MERCVRE
des Mers. Les Armesdu Royy
ont remporté une celebreVi- toire à douze ces lieuës d'icy,
vous le ſçavez , & le Combat donné devantTabaco , a tant
fait de bruit qu'il n'eſt ignoré deperſonne. Mondeffeinn'eſt
pas de repeter ce que l'Extra- ordinaire en a dit;je ne veux que vous bien marquer de quelle confequence eſt aux Ennemis la perte de leurs Vaif- feaux.On a tâché àladéguiſer,
cependant la verité ne peut eftre long-teps cachée, il n'eſt pointde nüages qu'elle ne per- cepour ſe découvrir. Si l'Ad- miral Binkes ne demeure pas d'accord de tous nos avantages, cequ'il a écrit ne ſuffit pas pour faire croire que nous ne les ayons pas remportez , &
nousydevons moins adjoûter
GALANT. 29
de foy qu'à vingt Relations , &
qu'à des Lettres de Hollande mefme qui ont eſté envoyées à
des Particuliers,&qui covien- nent toutes de la méme choſe.
Mais pourdonnerquelque or- dre à ce diſcours , parlons des forces que les Ennemis avoient avant qu'ils fuſſent attaquez,
examinons la conduite de M
le Comte d'Eſtrées , voyons ce
qu'il a fait avant le Combat,
pourquoy il l'a donné , &de quelle maniere il a combattu,
&faiſons enfuite reflexion fur
le dommage que doit cauſer aux Ennemis la perte qu'ils ont faite ſous le Canon meſme
de leur Fortereffe.
Tous ceux qui ont marque dans leurs Relations que les
Ennemis avoient quatorze
C3
30 LE MERCVRE :
Vaiſſeaux , en ont donné des
preuves convainquantes. Ils diſent enquatre endroitsqu'un Négre &unPilote qui furent pris avant le Combat, en affu- rerent Mr le Comte d'Eſtrées;
que ceux qui débarquerent pour l'Attaque du Fort eſtant arrivez fur une hauteurlesdécouvrirent dans la Rade au
mefme nombre , &que l'ordre de leurBataille endemy croif- fant , donna lieu aux Noftres
d'en faire un compte exact ,
lors qu'ils allerent les attaquer.
Il eſt vray que le Vaiſſeau de Rafimus fameux Corfaire , &
une Pinace montée de trente
huit Pieces deCanon, eſtoient
compris dans les quatorze Vaiſſeaux; & c'eſt peut-eftre parcette raiſonquelesHolan- dois foûtiennent qu'ils en a
GALANT. 3
voientmoinsquene marquent
nos Relations; mais le nom ne
fait rien à la choſe , la Pinace valoit bien un Vaifſeau , & ce- luy deRaſmusles fervoit,quoy qu'ilne fut pas venu avec eux.
Je ne parle point d'un Vaiſſeau Portugais qui estoit dans le Port, ne ſcachant pas s'il a co- batu.Tous cesVaiſſeaux étoiét
à portée de Mouſquet de leur Fort, dont les Canons à fleur d'eau defendoient l'entrée de
la Rade. Il y avoit aupres du Port un Banc qui rendoit la paffe fi étroite,qu'il n'y pouvoit entrerqu'unVaiſſeau de front.
Voilà l'eftat des forces des
Ennemis. Voyons les raiſons que M le Comte d'Eſtrées a
euës de les attaquer avec dix Vaiſſeaux ſeulement, les pré- cautions qu'il a priſes pour
32 LE MERCVRE
reuſſir , &fon intrepidité pen- dant le Combat.
CeVice-Admiral eſtant arrivé à une lieuë de l'entrée de la
Rade des Ennemis, fit mettre à
terre M de Souches , & M² le
Febvrede Mericour, accompa- gnez de quelques Habitansde laMartinique,& leur ordonna de tâcher àfaire quelques Pri- fonniers. Ils ne prirentqu'un Négre , qui rapporta ce que j'ay déja dit , que les Ennemis avoient quatorze Vaiſſeaux ,
parce qu'il leur en eſtoit arrivé cinqdepuisquelques jours. Ce Négre adjoûta que le Fortn'é-- toit pas achevé , ce qui fit ré- foudre M d'Eſtrées à le faire
attaquer avantque les Enne- mis euſſent le tempsde ſe re- connoiſtre. Il fit débarquer quelquesTroupes avec M. le
GALANT. 33
Chevalierde Grand-Fontaine.
Il alla luy-meſme à terre où il refolut d'occuper les Ennemis du côté de la Mer,tandis qu'on attaqueroit le Fort , maisune grande Plüye eſtant ſurvenuë,
& ayant fait groſſir une petite Riviere arreſta les Troupes.
Cependant on apprit que le Forteſtoitachevé. Mr le ViceAdmiral qui estoit preſque en
meſime temps ſur mer & fur
terre,&qui eftoit revenu pour faire la diverfion que je vous viens de marquer , débarqua encore une fois &fit conduire
duCanon &unMortier quine firent pas tout l'effet qu'il s'en eſtoit promis. M le Comte d'Eſtrées eftant retourné une
ſeconde fois dans ſonVaiſſeau,
envoïa Me Heroüardpour agir de concert avec MleCheva-
34 LE MERCVRE lier de Grand- Fontaine , &
s'approcher du Fort parTran- chée. Les Ennemis ayant eu le temps de ſe reconnoiſtre avant qued'eftre preſſez,&ſe prépa- rant àſe biendefendre , M² le Vice-Admiral qui l'apprie fit revenir auſſi-toft M Heroüard
pour raporter l'eſtatdes choſes dans unConſeil deGuerre. Il
dit ce qu'il avoit apris,&ajoû- taqu'il faloit trop de teps pour fe rendre maiſtredu Fortdans
les formes ; mais qu'on l'em- porteroit bien- toſt ſi l'on fai- foit une diverfion du coſtéde
laMer; &fur ce qu'onhéfitoit
àſuivre fon confeil, il ſe leva &
aſſura tellemét qu'il réüffiroit,
qu'on le crût. Il eut ordre de
faire deuxbonnes Attaques &
une fauffe,&de ne donnerque
deux heures apres que le Com
GALANT.. 35 bat de Mer ſeroit commencé.
Mr le Comte d'Eſtrées qui ap- puya cetAvis, ne le fit pas fans
en avoirbeaucoup de raiſons.
Il avoit emporté la Cayenne de la meſme maniere ; il connoiſſoit la valeurde ſes Troupes &la bõté de ſes Vaiſſeaux;
&il vit de plus des neceffitez
abſoluës d'en uſer ainſi. La
longueur d'un Siege dans les formes luy auroit fait riſquer ſesVaiſſeaux,la Rade deTabaco eſtoit mauvaiſe, &il y avoit
déja perdu pluſieurs anchres &pluſieurs cables. Il réuffit du coſté de la Mer comme vous
avez appris ; & fi l'on avoit fait du coſte de la terre ce qu'il avoit ordõné, la victoire auroit
eſté entiere,puisque les Ennemis ont perdutous leurs Vaif- ſeaux , encor qu'ils fuſſent fa-
36 LE MERCVRE
1
voriſez du Canon de leur Fort.
Si la vigilance de M'le Vice- Admiral a parû en deſcendant deux fois à terre , il n'en a pas moins fait paroiſtre ſur Mer,où ſon intrepidité s'eſt fait remar- quer. On l'a veu apres avoir eſſuyé le feude tous lesVaif- ſeaux Ennemis &des Bateries
du Fort , aborder le ContreAdmiral de Hollande, s'en rendre maiſtre, & attaquer un au- treVaiſſeau avec le mémefuccés. On l'a veu bleſſé dans un
Canot , exposé au feu desEn- nemis , faire gouverner vers leursVaiſſeaux,pour examiner l'eſtat où ils eſtoient. Ona veu
ceCanot s'enfocer apres avoir eſté percéd'un coupde Cano.
Ona veu ce Vice-Amiral dans
la Mer; &apres en eſtre ſorty
tout
GALANT. 37 tout trempé &bleffé en deux
endroits , on l'a veu appeller uneChaloupe & fe mettre de- dans pour aller encor ſe mefler parmy les Ennemis , &donner les ordres en s'expoſant de nouveau aux meſmesdangers
qu'il venoit d'éviter.
Si l'Attaquede terre n'a pas eſté ſi heureuſe que celle de Mer, la trop boüillante ardeur de ceux qui devoient inſulter
le Fort , & qui l'attaquerent plûtoſt qu'on ne leur avoit or- donné,en a eſté cauſe. La mort
de M de Bayancoury a auſſi beaucoup contribué. Les Mili- ces qu'il commandoit, & qui portoient les Echelles ſe voyat ſans Chef, ne voulurent plus avancer. Cependant tout étoit bien concerté , l'on étoit au
Tome V. D
38 LE MERCVRE haut du Parapet, &fans tous
ces malheurs que Mr le Comte d'Eſtrées ne pouvoit prévoir,
l'entrepriſe de terre auroit eu le ſuccès qu'on en attendoit,&
auroit fait réüffir celle deMer,
nonpas plusqu'elle a fait, mais avecbien moinsdeperte. Les Holladois croyent avoirbeau- coup gagné , parcequ'ils n'ont pas perdu leurFort,& que nô- tre Victoire n'a eſté entiere
quedu coſtéde la Mer; cepen- dant elle eſt ſi grande qu'elle peut affez nous récompenfer dequelques heures que nous avons perduës devant le Fort;
&fi l'on peutdire qu'on réuffit toûjours beaucoup lors qu'on a de grands deſſeins , &qu'on vient à bout deplusde lamoi- tić , nous pouvons aſſurer que
nous avons eu des avantages
GALANT. 39
confiderables , &que la moindre perte des Hollandois eſt celle de tous leurs Vaiſſeaux.
Leur Contre - Admiral eſtoit
monté de foixante &fix pieces deCanon; le Lieutenat étonné
d'y voir le feu,dit auſſi-tôt qu'il y avoit dix - huit milliers de poudre dans ce Vaifſeau , &
une grande quantité de richef- ſes. Onfit tout ceque l'on pût pour en arreſter l'embraſemét,
mais il fut impoffible. Parmy les Vaiſſeaux qui ont eſté brû- lez,ily enavoit cinq nouvelle- mentarrivez de Hollade chargez de vivres pour un an , tant pour l'Eſcadre , que pour les Colonies; ils avoient apporté fix cens Hommes & amené
pluſieursFamilles,&beaucoup de Marchandiſes & d'argent
D2
40 LE MERCVRE
pour établir des Magaſins. Ils ont perdu outre cela pluſieurs Négres avec leurs Femmes &
leurs Enfans qu'ils avoient embarquez pour tranſporter cette Colonie aillieurs. Ainfi
enbrûlat leurs Vaiſſeaux, nous
pouvons dire que nous avons entierement ruiné le commencement de leurs Habitations,
&mis les noftres en ſeureté ; il
leur faut des millions pour ſe rétablir , & pour armer une nouvelle Flote. Pluſieurs Lettres de Hollande affurent la
méme choſe, & les Particuliers- qui ſentent leur mal,loin de le déguiſer , ne peuvent s'empef- cher de s'en plaindre.
Les Victoires qui s'obtiennet facilement ne font pas les plus eſtimées. La valeur &la bravoure des Vainqueurs ne pa-
GALANT. 41
MELAVIZ
roiffent que par la forte refi- ſtace de leursEnnemis, &c'eſt
par cette raiſon que leCombat Naval donné devant Tabaco
feroit moinsglorieux aux Fra- çois s'ils y avoient perdumoins de monde. Jamais Action n'a
eſté fi vigoureuſe.On tira pen- dant le Combatprés de trente mille coups de Canon de part
&d'autre à portéede Pistoler Il n'eſt refté aux Ennemis
un ſeul Capitaine de Vaiſſeau capable de rendre ſervice,tous les autres onteſté bleſſez,tuez ou brûlez, &leurmortn'acoû- té unpeude fang à nosBraves,
que pour les faire triompher avecplus d'éclat.VoicylesNõs de ceux qui ont eſté tiez &
bleſſez enſe ſignalant, tant au CombatdeMerqu'à l'Attaque,
de la Fortereffe . D3
42 LE MERCVRE
Capitaines morts.
M Gabaret. Les Ennemis
l'ont veu combattre juſqu'àfon derniermoment,&il n'a quitté lecombatqu'avec la vie, quoy qu'il euſt pûs'en retirer,eſtant bleſſé de trois coups. Il eſtoit Parent du grandGabaret qui
commande à Meſſine, &il s'eſt
montré digne de ce Nompar toutes ſes actions.
Mrs de Léfine, de la Borde &
Heroüardde laPiogerie.
Capitaines bleſſez.
M le Chevalier deGrandFontaine. C'eſt un tres-brave
Officier qui a vieilly dans les Troupes, &qui s'eſt trouvé en beaucoup d'occaſiós périlleu- ſes où il s'eſt toûjours ſignalé.
M le Marquis de Villiers
d'O.
M le Comte de Blenac.
GALANT. 43 Mrs le Febvre, deMéricour,
de Montortier , & de Mafcarany.
Lieutenans morts.
Mr le Chevalier d'Erre.
MedelaMéleniere. Il adonné des preuvesdefon courage juſques à lamort.
Mrs Tivas, &deBellechau..
Lieutenans bleſſez.. M le Chevalier d'Hervault..
M's de Champigny, de Marti- gnac &de Courcelles. Ce der- nier a eſté bleſsé en ſe ſigna- lant à l'Attaque du Fort.
Enseignes morts.
16
M le Chevalier Merault.
Mrs de Villiers,de S.Privas,&
de Seiche, aîné&cadet.
Enseignes bleffez .
Me le Chevalier d'Augers.
Il adonnéde grandesmarques de valeur. MaleChevalier de
44 LE MERCVRE
1
Blenac. M de la Rocque. Il eſtoit Major des Troupes de la Deſcente. Il ſauta le premier par deſſus les deux paliſſades,
&alla juſques au Parapet de la Ville,où il nemonta point fau- te d'échelle..
Mrs de Veſençay, Coignard,
Herman,ComardelaMalmaifon, &du Menil-Heroüard.
Autres Officiers tuez.
M de Bayancour, Lieutenat deRoy de S.Chriftophe. M.de Richebourg, Lieutenant d'une
Barque longue. M. de Lifle Commiſſaire de l'Artillerie..
M.deParis, CapitainedesMa- telotsde M. le Cote d'Eſtrées..
Ms de la Brachetiere , &Sta-)
vay ,Gardesde Marine.
Autres Officiers bleffez,
M.DeſvauxCapitaine d'une Barque longue.M.Gifors Ecri
GALANT. 45 vain duRoy. M.Pinette Secre- taire deM. le Comte d'Eſtrées,
Fils de M. Pinette affez connu
par ſa capacitédans les Affai- res duClergé. M.de la Motte,
M. de Chatelard, M. de Vilair.
Volontaires tuez .
M.de Sainte-Marthe Fils du
Gouverneurdela Martinique.
M Cotadon & le Gras.
Ilya eu d'autres Volontaires &Gardes de Marine , qui ſe ſont ſignalez. Les uns ont eſté tuez , les autres bleſſez , & la pluſpart ont ſervy à terre en qualitéde Lieutenans d'Infan- terie. Ms Gaffan , Kermovan,
de Vaintre , Julien , Rehaut ,
Brignol , &Kercon , font de ce
nombre.
Rien ne peut égaler l'intré- pidité de M. Berthier , qui ſe jetta à la Mer , & enleva un
46 LE MERCVRE Canot ſous l'Eperon d'unVaif- ſeau Ennemy. Ceux qui ſe mirent dedans avec M. le Comte
d'Eſtrées furent M. le Chevalier d'Erbouville Major. M. le Chevalier d'Hervault qui a
apporté au Roy lanouvelle de ladéfaite des Vaiſſeaux Ennemis, &M. le Chevalier Pariſot
Volontaire. Ce dernier a accompagné M. le Vice-Amiral dans tous les perils où il s'eſt trouvé ; il a fait admirer ſon
courage , & a fait dire de luy avec beaucoup dejustice , que de pareils Volontaires valoient bien les plus braves Officiers,
&ceuxqui font les plus con- ſommez dans le Meſtier de la
Guerre.
Je croyois ne vous devoir plus riendire touchat l'Affaire deTabaco ; mais je ſuis obligé
GALANT. 47 de rendre juſtice à M.Binkes,
& de publier ſa ſincerité. Je viens de lire la Lettre qu'il a écrite auxEſtatsapresle Com-THAODE A
bat Naval , & j'ay eſté ſurpris o
YON
que nous avons veuë de M. le
Comte d'Estrées ſur le meſme
ſujet. Les Holandois ont voulu
nous perfuader que M. Binkes ne demeuroit pas d'accordde
nos avantages ; ils onteu leurs raiſons pour en uferdela forte;
&comme les pertes quiſe font
dans des Païs de commerce
font beaucoup plus ſenſibles aux Particuliers , que celles où l'Etat eſt intereſsé , il ne faut
pas s'étonner ſi on les déguife avec tant de ſoin : on y reüffit d'abord; &la verité qui vient de fi loin , demeure toûjours quelque temps cachée.
bon gouſt, trouvez bon,Mada- me , que je vous mene audelà
C 2
18 LE MERCVRE
des Mers. Les Armesdu Royy
ont remporté une celebreVi- toire à douze ces lieuës d'icy,
vous le ſçavez , & le Combat donné devantTabaco , a tant
fait de bruit qu'il n'eſt ignoré deperſonne. Mondeffeinn'eſt
pas de repeter ce que l'Extra- ordinaire en a dit;je ne veux que vous bien marquer de quelle confequence eſt aux Ennemis la perte de leurs Vaif- feaux.On a tâché àladéguiſer,
cependant la verité ne peut eftre long-teps cachée, il n'eſt pointde nüages qu'elle ne per- cepour ſe découvrir. Si l'Ad- miral Binkes ne demeure pas d'accord de tous nos avantages, cequ'il a écrit ne ſuffit pas pour faire croire que nous ne les ayons pas remportez , &
nousydevons moins adjoûter
GALANT. 29
de foy qu'à vingt Relations , &
qu'à des Lettres de Hollande mefme qui ont eſté envoyées à
des Particuliers,&qui covien- nent toutes de la méme choſe.
Mais pourdonnerquelque or- dre à ce diſcours , parlons des forces que les Ennemis avoient avant qu'ils fuſſent attaquez,
examinons la conduite de M
le Comte d'Eſtrées , voyons ce
qu'il a fait avant le Combat,
pourquoy il l'a donné , &de quelle maniere il a combattu,
&faiſons enfuite reflexion fur
le dommage que doit cauſer aux Ennemis la perte qu'ils ont faite ſous le Canon meſme
de leur Fortereffe.
Tous ceux qui ont marque dans leurs Relations que les
Ennemis avoient quatorze
C3
30 LE MERCVRE :
Vaiſſeaux , en ont donné des
preuves convainquantes. Ils diſent enquatre endroitsqu'un Négre &unPilote qui furent pris avant le Combat, en affu- rerent Mr le Comte d'Eſtrées;
que ceux qui débarquerent pour l'Attaque du Fort eſtant arrivez fur une hauteurlesdécouvrirent dans la Rade au
mefme nombre , &que l'ordre de leurBataille endemy croif- fant , donna lieu aux Noftres
d'en faire un compte exact ,
lors qu'ils allerent les attaquer.
Il eſt vray que le Vaiſſeau de Rafimus fameux Corfaire , &
une Pinace montée de trente
huit Pieces deCanon, eſtoient
compris dans les quatorze Vaiſſeaux; & c'eſt peut-eftre parcette raiſonquelesHolan- dois foûtiennent qu'ils en a
GALANT. 3
voientmoinsquene marquent
nos Relations; mais le nom ne
fait rien à la choſe , la Pinace valoit bien un Vaifſeau , & ce- luy deRaſmusles fervoit,quoy qu'ilne fut pas venu avec eux.
Je ne parle point d'un Vaiſſeau Portugais qui estoit dans le Port, ne ſcachant pas s'il a co- batu.Tous cesVaiſſeaux étoiét
à portée de Mouſquet de leur Fort, dont les Canons à fleur d'eau defendoient l'entrée de
la Rade. Il y avoit aupres du Port un Banc qui rendoit la paffe fi étroite,qu'il n'y pouvoit entrerqu'unVaiſſeau de front.
Voilà l'eftat des forces des
Ennemis. Voyons les raiſons que M le Comte d'Eſtrées a
euës de les attaquer avec dix Vaiſſeaux ſeulement, les pré- cautions qu'il a priſes pour
32 LE MERCVRE
reuſſir , &fon intrepidité pen- dant le Combat.
CeVice-Admiral eſtant arrivé à une lieuë de l'entrée de la
Rade des Ennemis, fit mettre à
terre M de Souches , & M² le
Febvrede Mericour, accompa- gnez de quelques Habitansde laMartinique,& leur ordonna de tâcher àfaire quelques Pri- fonniers. Ils ne prirentqu'un Négre , qui rapporta ce que j'ay déja dit , que les Ennemis avoient quatorze Vaiſſeaux ,
parce qu'il leur en eſtoit arrivé cinqdepuisquelques jours. Ce Négre adjoûta que le Fortn'é-- toit pas achevé , ce qui fit ré- foudre M d'Eſtrées à le faire
attaquer avantque les Enne- mis euſſent le tempsde ſe re- connoiſtre. Il fit débarquer quelquesTroupes avec M. le
GALANT. 33
Chevalierde Grand-Fontaine.
Il alla luy-meſme à terre où il refolut d'occuper les Ennemis du côté de la Mer,tandis qu'on attaqueroit le Fort , maisune grande Plüye eſtant ſurvenuë,
& ayant fait groſſir une petite Riviere arreſta les Troupes.
Cependant on apprit que le Forteſtoitachevé. Mr le ViceAdmiral qui estoit preſque en
meſime temps ſur mer & fur
terre,&qui eftoit revenu pour faire la diverfion que je vous viens de marquer , débarqua encore une fois &fit conduire
duCanon &unMortier quine firent pas tout l'effet qu'il s'en eſtoit promis. M le Comte d'Eſtrées eftant retourné une
ſeconde fois dans ſonVaiſſeau,
envoïa Me Heroüardpour agir de concert avec MleCheva-
34 LE MERCVRE lier de Grand- Fontaine , &
s'approcher du Fort parTran- chée. Les Ennemis ayant eu le temps de ſe reconnoiſtre avant qued'eftre preſſez,&ſe prépa- rant àſe biendefendre , M² le Vice-Admiral qui l'apprie fit revenir auſſi-toft M Heroüard
pour raporter l'eſtatdes choſes dans unConſeil deGuerre. Il
dit ce qu'il avoit apris,&ajoû- taqu'il faloit trop de teps pour fe rendre maiſtredu Fortdans
les formes ; mais qu'on l'em- porteroit bien- toſt ſi l'on fai- foit une diverfion du coſtéde
laMer; &fur ce qu'onhéfitoit
àſuivre fon confeil, il ſe leva &
aſſura tellemét qu'il réüffiroit,
qu'on le crût. Il eut ordre de
faire deuxbonnes Attaques &
une fauffe,&de ne donnerque
deux heures apres que le Com
GALANT.. 35 bat de Mer ſeroit commencé.
Mr le Comte d'Eſtrées qui ap- puya cetAvis, ne le fit pas fans
en avoirbeaucoup de raiſons.
Il avoit emporté la Cayenne de la meſme maniere ; il connoiſſoit la valeurde ſes Troupes &la bõté de ſes Vaiſſeaux;
&il vit de plus des neceffitez
abſoluës d'en uſer ainſi. La
longueur d'un Siege dans les formes luy auroit fait riſquer ſesVaiſſeaux,la Rade deTabaco eſtoit mauvaiſe, &il y avoit
déja perdu pluſieurs anchres &pluſieurs cables. Il réuffit du coſté de la Mer comme vous
avez appris ; & fi l'on avoit fait du coſte de la terre ce qu'il avoit ordõné, la victoire auroit
eſté entiere,puisque les Ennemis ont perdutous leurs Vaif- ſeaux , encor qu'ils fuſſent fa-
36 LE MERCVRE
1
voriſez du Canon de leur Fort.
Si la vigilance de M'le Vice- Admiral a parû en deſcendant deux fois à terre , il n'en a pas moins fait paroiſtre ſur Mer,où ſon intrepidité s'eſt fait remar- quer. On l'a veu apres avoir eſſuyé le feude tous lesVaif- ſeaux Ennemis &des Bateries
du Fort , aborder le ContreAdmiral de Hollande, s'en rendre maiſtre, & attaquer un au- treVaiſſeau avec le mémefuccés. On l'a veu bleſſé dans un
Canot , exposé au feu desEn- nemis , faire gouverner vers leursVaiſſeaux,pour examiner l'eſtat où ils eſtoient. Ona veu
ceCanot s'enfocer apres avoir eſté percéd'un coupde Cano.
Ona veu ce Vice-Amiral dans
la Mer; &apres en eſtre ſorty
tout
GALANT. 37 tout trempé &bleffé en deux
endroits , on l'a veu appeller uneChaloupe & fe mettre de- dans pour aller encor ſe mefler parmy les Ennemis , &donner les ordres en s'expoſant de nouveau aux meſmesdangers
qu'il venoit d'éviter.
Si l'Attaquede terre n'a pas eſté ſi heureuſe que celle de Mer, la trop boüillante ardeur de ceux qui devoient inſulter
le Fort , & qui l'attaquerent plûtoſt qu'on ne leur avoit or- donné,en a eſté cauſe. La mort
de M de Bayancoury a auſſi beaucoup contribué. Les Mili- ces qu'il commandoit, & qui portoient les Echelles ſe voyat ſans Chef, ne voulurent plus avancer. Cependant tout étoit bien concerté , l'on étoit au
Tome V. D
38 LE MERCVRE haut du Parapet, &fans tous
ces malheurs que Mr le Comte d'Eſtrées ne pouvoit prévoir,
l'entrepriſe de terre auroit eu le ſuccès qu'on en attendoit,&
auroit fait réüffir celle deMer,
nonpas plusqu'elle a fait, mais avecbien moinsdeperte. Les Holladois croyent avoirbeau- coup gagné , parcequ'ils n'ont pas perdu leurFort,& que nô- tre Victoire n'a eſté entiere
quedu coſtéde la Mer; cepen- dant elle eſt ſi grande qu'elle peut affez nous récompenfer dequelques heures que nous avons perduës devant le Fort;
&fi l'on peutdire qu'on réuffit toûjours beaucoup lors qu'on a de grands deſſeins , &qu'on vient à bout deplusde lamoi- tić , nous pouvons aſſurer que
nous avons eu des avantages
GALANT. 39
confiderables , &que la moindre perte des Hollandois eſt celle de tous leurs Vaiſſeaux.
Leur Contre - Admiral eſtoit
monté de foixante &fix pieces deCanon; le Lieutenat étonné
d'y voir le feu,dit auſſi-tôt qu'il y avoit dix - huit milliers de poudre dans ce Vaifſeau , &
une grande quantité de richef- ſes. Onfit tout ceque l'on pût pour en arreſter l'embraſemét,
mais il fut impoffible. Parmy les Vaiſſeaux qui ont eſté brû- lez,ily enavoit cinq nouvelle- mentarrivez de Hollade chargez de vivres pour un an , tant pour l'Eſcadre , que pour les Colonies; ils avoient apporté fix cens Hommes & amené
pluſieursFamilles,&beaucoup de Marchandiſes & d'argent
D2
40 LE MERCVRE
pour établir des Magaſins. Ils ont perdu outre cela pluſieurs Négres avec leurs Femmes &
leurs Enfans qu'ils avoient embarquez pour tranſporter cette Colonie aillieurs. Ainfi
enbrûlat leurs Vaiſſeaux, nous
pouvons dire que nous avons entierement ruiné le commencement de leurs Habitations,
&mis les noftres en ſeureté ; il
leur faut des millions pour ſe rétablir , & pour armer une nouvelle Flote. Pluſieurs Lettres de Hollande affurent la
méme choſe, & les Particuliers- qui ſentent leur mal,loin de le déguiſer , ne peuvent s'empef- cher de s'en plaindre.
Les Victoires qui s'obtiennet facilement ne font pas les plus eſtimées. La valeur &la bravoure des Vainqueurs ne pa-
GALANT. 41
MELAVIZ
roiffent que par la forte refi- ſtace de leursEnnemis, &c'eſt
par cette raiſon que leCombat Naval donné devant Tabaco
feroit moinsglorieux aux Fra- çois s'ils y avoient perdumoins de monde. Jamais Action n'a
eſté fi vigoureuſe.On tira pen- dant le Combatprés de trente mille coups de Canon de part
&d'autre à portéede Pistoler Il n'eſt refté aux Ennemis
un ſeul Capitaine de Vaiſſeau capable de rendre ſervice,tous les autres onteſté bleſſez,tuez ou brûlez, &leurmortn'acoû- té unpeude fang à nosBraves,
que pour les faire triompher avecplus d'éclat.VoicylesNõs de ceux qui ont eſté tiez &
bleſſez enſe ſignalant, tant au CombatdeMerqu'à l'Attaque,
de la Fortereffe . D3
42 LE MERCVRE
Capitaines morts.
M Gabaret. Les Ennemis
l'ont veu combattre juſqu'àfon derniermoment,&il n'a quitté lecombatqu'avec la vie, quoy qu'il euſt pûs'en retirer,eſtant bleſſé de trois coups. Il eſtoit Parent du grandGabaret qui
commande à Meſſine, &il s'eſt
montré digne de ce Nompar toutes ſes actions.
Mrs de Léfine, de la Borde &
Heroüardde laPiogerie.
Capitaines bleſſez.
M le Chevalier deGrandFontaine. C'eſt un tres-brave
Officier qui a vieilly dans les Troupes, &qui s'eſt trouvé en beaucoup d'occaſiós périlleu- ſes où il s'eſt toûjours ſignalé.
M le Marquis de Villiers
d'O.
M le Comte de Blenac.
GALANT. 43 Mrs le Febvre, deMéricour,
de Montortier , & de Mafcarany.
Lieutenans morts.
Mr le Chevalier d'Erre.
MedelaMéleniere. Il adonné des preuvesdefon courage juſques à lamort.
Mrs Tivas, &deBellechau..
Lieutenans bleſſez.. M le Chevalier d'Hervault..
M's de Champigny, de Marti- gnac &de Courcelles. Ce der- nier a eſté bleſsé en ſe ſigna- lant à l'Attaque du Fort.
Enseignes morts.
16
M le Chevalier Merault.
Mrs de Villiers,de S.Privas,&
de Seiche, aîné&cadet.
Enseignes bleffez .
Me le Chevalier d'Augers.
Il adonnéde grandesmarques de valeur. MaleChevalier de
44 LE MERCVRE
1
Blenac. M de la Rocque. Il eſtoit Major des Troupes de la Deſcente. Il ſauta le premier par deſſus les deux paliſſades,
&alla juſques au Parapet de la Ville,où il nemonta point fau- te d'échelle..
Mrs de Veſençay, Coignard,
Herman,ComardelaMalmaifon, &du Menil-Heroüard.
Autres Officiers tuez.
M de Bayancour, Lieutenat deRoy de S.Chriftophe. M.de Richebourg, Lieutenant d'une
Barque longue. M. de Lifle Commiſſaire de l'Artillerie..
M.deParis, CapitainedesMa- telotsde M. le Cote d'Eſtrées..
Ms de la Brachetiere , &Sta-)
vay ,Gardesde Marine.
Autres Officiers bleffez,
M.DeſvauxCapitaine d'une Barque longue.M.Gifors Ecri
GALANT. 45 vain duRoy. M.Pinette Secre- taire deM. le Comte d'Eſtrées,
Fils de M. Pinette affez connu
par ſa capacitédans les Affai- res duClergé. M.de la Motte,
M. de Chatelard, M. de Vilair.
Volontaires tuez .
M.de Sainte-Marthe Fils du
Gouverneurdela Martinique.
M Cotadon & le Gras.
Ilya eu d'autres Volontaires &Gardes de Marine , qui ſe ſont ſignalez. Les uns ont eſté tuez , les autres bleſſez , & la pluſpart ont ſervy à terre en qualitéde Lieutenans d'Infan- terie. Ms Gaffan , Kermovan,
de Vaintre , Julien , Rehaut ,
Brignol , &Kercon , font de ce
nombre.
Rien ne peut égaler l'intré- pidité de M. Berthier , qui ſe jetta à la Mer , & enleva un
46 LE MERCVRE Canot ſous l'Eperon d'unVaif- ſeau Ennemy. Ceux qui ſe mirent dedans avec M. le Comte
d'Eſtrées furent M. le Chevalier d'Erbouville Major. M. le Chevalier d'Hervault qui a
apporté au Roy lanouvelle de ladéfaite des Vaiſſeaux Ennemis, &M. le Chevalier Pariſot
Volontaire. Ce dernier a accompagné M. le Vice-Amiral dans tous les perils où il s'eſt trouvé ; il a fait admirer ſon
courage , & a fait dire de luy avec beaucoup dejustice , que de pareils Volontaires valoient bien les plus braves Officiers,
&ceuxqui font les plus con- ſommez dans le Meſtier de la
Guerre.
Je croyois ne vous devoir plus riendire touchat l'Affaire deTabaco ; mais je ſuis obligé
GALANT. 47 de rendre juſtice à M.Binkes,
& de publier ſa ſincerité. Je viens de lire la Lettre qu'il a écrite auxEſtatsapresle Com-THAODE A
bat Naval , & j'ay eſté ſurpris o
YON
que nous avons veuë de M. le
Comte d'Estrées ſur le meſme
ſujet. Les Holandois ont voulu
nous perfuader que M. Binkes ne demeuroit pas d'accordde
nos avantages ; ils onteu leurs raiſons pour en uferdela forte;
&comme les pertes quiſe font
dans des Païs de commerce
font beaucoup plus ſenſibles aux Particuliers , que celles où l'Etat eſt intereſsé , il ne faut
pas s'étonner ſi on les déguife avec tant de ſoin : on y reüffit d'abord; &la verité qui vient de fi loin , demeure toûjours quelque temps cachée.
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Résumé : Combat donné devant la Forteresse de Tabago, avec les Noms des Morts & des Blessez, & de tous ceux qui s'y sont signalez. [titre d'après la table]
Le texte décrit une victoire navale française près de Tabaco, où les forces du roi ont triomphé dans une bataille célèbre. Les ennemis, initialement composés de quatorze vaisseaux, ont subi une défaite significative. Parmi ces vaisseaux figuraient celui de Rasimus et une pinasse montée de trente-huit pièces de canon. Les Français, sous le commandement du Comte d'Estrées, ont attaqué malgré des conditions défavorables, telles qu'une pluie abondante et un fort en cours d'achèvement. Le Comte d'Estrées a mis en place plusieurs stratégies, incluant des reconnaissances et des attaques terrestres pour distraire les ennemis. La bataille navale a été intense, avec des échanges de tirs massifs. Les Français ont réussi à capturer ou détruire tous les vaisseaux ennemis, y compris des navires récemment arrivés de Hollande chargés de vivres et de marchandises. Les pertes françaises ont été notables, avec plusieurs officiers tués ou blessés. Parmi les victimes, on compte le Capitaine Gabaret, mort en combattant, et le Lieutenant de Bayancoury, dont la mort a perturbé l'attaque terrestre. Malgré ces pertes, la victoire est considérée comme glorieuse, ruinant les projets ennemis et assurant la sécurité des colonies françaises. Les lettres et relations de Hollande confirment la gravité de la défaite ennemie, soulignant la perte de vaisseaux et de ressources. La bataille est saluée pour sa vigueur et la bravoure des combattants français, qui ont triomphé malgré la résistance ennemie. Par ailleurs, le texte mentionne une correspondance concernant une lettre écrite par M. Binkes aux États après une rencontre avec le comte d'Estrées. L'auteur du texte exprime sa surprise face aux arguments des Hollandais, qui cherchent à convaincre que M. Binkes ne reconnaît pas les avantages mentionnés. Les Hollandais avancent des raisons solides pour justifier leur position, en soulignant que les pertes commerciales sont plus sensibles pour les particuliers que pour l'État. Ils dissimulent donc ces pertes avec soin. L'auteur note que les vérités provenant de loin mettent du temps à être révélées.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 184-216
Tout ce qui s'et passé en Catalogne depuis l'ouverture de la Campagne, avec les Noms des Morts & des Blessez, & de ceux qui se sont signalez dans la derniere Défaite des Ennemis. [titre d'après la table]
Début :
Les Espagnols avoient formé le dessein d'une grande diversion de [...]
Mots clefs :
Ennemis, Espagnols, Pays, Catalogne, Valence, Duc de Navailles, Bataillons, Canon, Régiment, Marche, Hauteur, Royaume, Combat, Troupes, Cavalerie, Morts, Bagages, Blessés, Capitaines, Tués
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texteReconnaissance textuelle : Tout ce qui s'et passé en Catalogne depuis l'ouverture de la Campagne, avec les Noms des Morts & des Blessez, & de ceux qui se sont signalez dans la derniere Défaite des Ennemis. [titre d'après la table]
Les Eſpagnols avoient formé le deffein d'une grande diver- ſion de ce coſté-là ,&cela par politique. CePaïs eſt plus pres d'eux , & les avantages qu'ils ſe tenoient affurez d'y rem- porter, devoient faire une plus forte impreffion fur l'eſprit des Peuples. Ils firent des levées
GALANT. 129
&د
dans toutes leurs Provinces ,
auſquelles ils donnent le nom de Royaumes , & choiſirent le Comte de Monterey pour Viceroy de Catalogne pourGeneral de cette Armée.
Il eſt adroit , vigilant, &d'une exactitude merveilleuſe àfaire
bien ſervir ſon Prince. Ces
grandes levées eſtant faites , &
la plupart des Nobles ayant joint l'Armée , partie comme Volontaires , partie comme Officiers , la Cour d'Eſpagne en eſpera tout , & fe fortifia encor plus dans le deſſein de de faire quelque entrepriſe conſidérable fur les François en Catalogne , pour faire oublier au Peuple de Madrid les Conquestes du Roy en Flan- dre. Ainfi le Comte de Monterey reçeut ordre de partir en
130 LE MERCURE pofte de Sarragofſe où il eſtoit,
d'aller à Barcelone , d'y arrê- ter fix Vaiſſeaux chargez de Troupes pour la Sicile , &de les faire ſervir en Catalogne.
Douze cens Fantaſſins levez
dans le Royaume de Grenade ,
arriverent en mefme temps à
Barcelone.Le Mestre de Camp
de Valence luy mena deux mille Hommes un peu apres;
&d'autres levées faites dans le
meſme Royaume &dansl'Andaloufie , les joignirent pref- que auffitoft . Le Comte de Monterey eſtant arrivé dans l'Armée qu'ildevoit comman- der , Monfieur le Marefchal
Duc de Navailles &luy s'en- voyerent faire de grandes ci- vilitez , & fe firent dire qu'ils ſe verroient. Ce Comte voufut paroiſtre le plus civil. Il fit
GALANT. 131
- avancer ſes Troupes , & mar- cha du coſté de Saint Pierre
Peſcador , où Monfieurde Navailles eſtoit poſté. Ce Duc eſtant bien aiſe de ſuy épar- gner la moitié du chemin , en- voya huit cens Chevaux pour reconnoiſtre les Ennemis , &
ces huit cens Chevaux enleverent leur grande Garde.
Deux jours apres , le Comte deMontereyvoulant paſſer un Défilé à la veuë de noſtre Armée , Monfieur de Navailles
le fit charger , &le contraignit deſe retirer en deſordre apres
une Efcarmouche de trois
2
heures , où les Eſpagnols per- dirent beaucoup de monde.
Quelque temps aprés , Mon- fieur le Duc de Navailles
ayant eu avis que le Comte de Monterey avoit comman
132 LE MERCVRE
de huit cens Miquelets avec un Détachement de Cavalerie , pour nous ofter la com- munication avec le Lampour- dan , il envoya quelques trou- pes ſous Mº de la Rablie- re , Marefchal de Camp , qui les défit. On tua les deux
Commandans, & on prit deux autres Officiers. Voilà toute la
Campagne en peu de mots juſqu'au jour delagrandeDé- faite des Ennemis dont vous
avez entendu parler , & que je vay vous apprendre , avec des particularitez que vous n'avez aſſurément point veuës enſemble. Vous treblez peut- eftre déja que je ne vous aille faire une longue Relation, que
je ne vous accable d'une infi nité de termes de Guerre , &
que je ne vous nomme tous
GALANT. 133 les Villages par où l'on a paſſé,
&tous les poſtes qu'on a oc- cupez. Rafſurez-vous , Madame , je ne vous parleray de la Guerrequed'une maniere qui n'aura rien d'ennuyeux pour vous , & qui fera tres- intelli- gible aux Dames à qui vous faites partde mes Lettres.C'eſt pour elles particulierement que j'écris , & je ne feray ce Recit que comme vousle fe- ON
riez vous-mefme. S'il n'a pas le tour aifé & naturel que vous luy donneriez , il aura du moins le charme de la brié
veté. Fiez - vous en moy , je vous prie , & hazardez - vous fur ma parole à lire ce que je vous envoye. Nous étionsen- trez en Catalogne malgré les grandes forces que les Enne- mis y avoient ; nous avions
134 LE MERCVRE
د
fait chez eux tous les dégaſts imaginables , confommé leurs Fourages , enlevé leurs Bef- tiaux & donné en meſme
temps aux Noftres le moyen de faire paiſiblement leur ré- colte dans le Rouffillon ; mais
nous n'avions pû entrer dans le Païs Ennemy , que par des paſſages étroits qui font entre les Montagnes , & queles Ef- pagnols pouvoient aiſement occuper pour nous empeſcher le retour. En effet ils s'étoient
déja ſaiſis de quelques-uns en intention de nous attaquer.
Nos Troupes leur cedoient en nombre. Il eſtoit queſtion de fortir des Montsoù nous nous
eftions engagez, & ce fut dans cette difficulté qu'éclata la prudence & la conduite de
Monfieurle Ducde Navailles.
Il
GALANT. 135 Il envoya ſes ordres à M le Chevalier d'Aubeterre , Gouverneur de Collioure,&Lieu
tenant Generaldes Arméesdu
Roy, de ſe rendre maître d'un Paſſage appellé le Col de Ba- gnols, qu'il ſçavoit qu'on avoit deſſein de luy fermer. M le Chevalier d'Aubeterre partie environ àminuit , avec undé
tachement de ſa Garniſon &
- des Milices du Païs. Il trouva
queles Ennemis avoient occu- -pé des Hauteurs &des Ro- chers eſcarpez. Il les en chaf- ſa avec une vigueur incroya- ble, &fit fuïrdeux Bataillons
qui venoient à leur ſecours.
Le chemin eſtantouvert,MonſieurdeNavailles commença à
faire marcher dés ce jour-là.
Les Ennemis vinrent camper àla portée de noſtre Canon;
D
S
S
Tome VI. M
1
136 LE MERCURE il y eut quelques eſcarmou- ches, &on les recommença le lendemain. Les Eſpagnols en Bataille voulurent gagner une Montagne fort haute, mais on les en empefcha. Cétobſtacle rompit leurs meſures , & nous occupâmes une Hauteur qui nous ofta tout lieu de rien
craindre d'eux. On demeura
trois jours en preſence,&pen- dant tout ce temps on ne fit que des eſcarmouches. On chargea trois EſcadronsEnne-- mis qui avoient paſſé une Ri- viere, &qui estoient foûtenus de ſept Regimens d'Infante- rie. L'avantage nous demeura,
avec perte pour les Eſpagnols de plus de ſept cens Hommes,
qui furent ou tuez ,
prifonniers , ou mis hors de
ou faits
combat. Nôtre General n'ayat
GALANT. 137
ان
S
و
plus rien à faire dans le Païs ,
fongea à s'en retirer , & fit marcher les premiers Bagages.
Cette marche fut dérobée à la
connoiſſance des Ennemis
auffi-bien que celle de toute l'Armée qui commença à dé- filer àminuit.Lors que le Com- te de Monterey en fut averty,
cette nouvelle le mit au deſefpoir , & il marcha avec tant de précipitation , qu'il joignit noſtre Arrieregarde. Monfieur de Navailles avec une adreffe
& une prudence admirable ,
trouva moyen de faire avan- cer encor noftre Armée ce
qui fit perdre haleine aux En- nemis qui nous pourſuivoient.
Les Eſpagnols ayans plus de
,
Troupes eftant compoſées de
S Troupes que nous ,
& ces
1
toute la Nobleſſe de leurs
Mij
138 LE MERCURE Royaumes, ſe répondoient tel- lementde la Victoire,que dans l'impatience de combattre, ils vinrentenfin àboutd'attacher
l'eſcarmouche , ce qu'ils firent avec une impétuoſité qui ſe peut àpeine concevoir. Ils oc- cuperent des Hauteurs; mais les Noſtres aprés les en avoir chaſſez en gagnerent d'autres,
& conferverent fi bien cét
avantage pendattoute la jour- née, qu'ils donnerentlieu aux Bagages d'avancer beaucoup,
&de ſe mettre en ſeureté. M
de Navailles ne craignant plus rien , & ayant fait voir au Comte de Monterey qu'il en fçavoit plus que luy , mit ſon Armée en bataille dans le lieu
qu'il jugea le plus avantageux,
&fit pofter fon Canonde for- te qu'il fut tres-bien fervy , &
GALANT. 139
1
1
incommoda fort les Ennemis.
Noftre General voulut encor
gagnerune Hauteur, &ce qui paroift incroyable , nos Trou- pes qui devoient eſtre fati- guées de tant de mouvemens,
ypaſſerent avec diligence &
fans aucune confufion , parun effet des ordres que Monfieur ☐ de Navailles donnoit avecune application & une prefence d'eſpritqui n'avoient rien d'égal que fon courage. Il animoit tous les Officiers à bien faire ;
& les Soldats encouragez par fon exemple &parſes paroles,
réſolurentde périr plûtoſt que d'abandoner ce dernierPofte.
Les Ennemis vinrent aufſi- toft
ànous en tres-bon ordre , &
le Combat s'engagea. On tira pendant trois heuresde la ſeu le longueur de deux Piques ,
Miij
140 LE MERCURE Bataillons contre Bataillons , la
Cavalerie de part & d'autre eſtant derriere l'Infanterie..
Nos Troupes ne firent aucun méchant mouvement , & on ne les pût obliger à reculer d'un ſeul pas. La Cavalerie quenous avionsſur l'aifle gau- che fit des merveilles : Elle
monta fur une Hauteur pref- que inacceffible , & en chaffa lesEnnemis. Celle de ladroite alla pluſieurs fois à la char- ge , & en tua grand nom.
bre. L'Occafion dura cinq heures & demie , &fe termina avec beaucoup de gloire pour le Roy. Les Eſpagnolsy
ont perdu plus de deux mille Hommes. On leur a entierement défait les Regimensd'Ar--
ragon, de Medina Sidonia , &
deMonteleone. TouslesOffi-
GALANT.: 141 ciers de ces trois Regimens ont eſté tuez , bleffez , ou faits
prifonniers. On a fort mal trai- té ceux de Grenade & de la
Cofte , & il y a eu un tres- grand nombre de prifonniers,
entre leſquels ſont plufieurs Perſonnes de qualité , dont quelques-uns, comme le Com- te de la Fuente, le Vicomte de S.George,& le Colonel Heffe,
✓ font morts de leurs bleſſures..
Cette Action eſt d'autant plus
glorieuſe, qu'on a batu les Ennemisdans leur Païs, quoyque plus forts, qu'ony eft demeuré maître du Champ de Bataille,
qu'on leur a pris des Dra peaux ,&tout cela en ſe reti rant ; ce qui eſt une circon - ſtance remarquable : car les
Retraites font ordinairement
- dangereuses , & on y est rar
142 LE MERCURE
rement attaqué qu'on ne ſoit batu. Les Eſpagnols n'ont rien entrepris depuis ce temps-là ,
& voilà à quoy ont abouty tous ces grands Armemens, &
toutes ces Levées, qui avoient épuiſé leurs RoyaumesdeGre- nade &d'Andaloufie. Jevous
ay tenu parole , Madame. Ce Récit n'eſt embaraſſe d'aucuns'
Noms de Paſſages,&je ne l'ay pas meſme voulu charger de ceux de nos Officiers qui ſe font fait remarquer , afin de vous en laiſſer plus aiſement fuivre le fil . Cela ne me doit
pas empeſcher de leur rendre preſentement juſtice; & pour faire honneur aux Etrangers ,
je vous diray d'abord que les Suiffes & les Allemands ne
donnerent quartier à perſon- ne , fur ce qu'un Trompette
GALANT. 143 des Ennemis vint declarer -qu'ils n'en feroient point aux Etrangers. Si les François euf- ſent ſuivy cet exemple , il ne ſeroit guere demeuré d'Eſpa- gnols.
Les Regimens de Sault, de Furſtemberg , de Navailles ,
d'Erlac , de Gaſſion , de la Rabliere , de Lanſon , de Lebret ,
&de Villeneuve , ſe ſont dif
tinguez , aufli bien que les Dragons., que rien n'a efte ca- pable d'ébranler. Jamais onn'a fi genéralement bien faitdans aucun Combat. Onn'a pas re- marqué un feul Soldat qui ait reculé,&on ne ſçait qui loüer,
particulierement des Officiers,
parce qu'ils meritent tous d'égales loüanges.
*
Monfieur le Mareſchal Duc
de Navailles diviſa ſes Trou-
144 LE MERCURE
pes enpluſieurs Corps,&quoy qu'il fuſt par tout, il ne laiſſa pas de ſe mettre à la teſte d'un de
ces Corps qu'il avoit fi judi- cieuſement diviſez. Mr de la
Rabliere Mareſchal de Camp,
eſtoit à la teſte d'un autre , &
monta fur une Hauteur où il
batit les Ennemis. Mrde Gafſion Lieutenant General , pаreillementàla teſte d'un Corps,
occupa une autre Hauteur ; &
Mr Chevreau Brigadier deCa- valerie , ſe ſignala à la teſte du quatrième Corps. Mr du Sauf- fay donna beaucoup de mar- *ques de cœur & de conduite
en cette occaſion; il commandoit la Cavalerie. M² le Marquis d'Apremont Mareſchalde Camp, y fit des merveilles. II eſtoit par tout. Ce fut luy qui foûtint les premiers efforts des
GALANT. 145
Ennemis , & qui commença à
leur faire connoiſtre qu'ils s'é- toient trompez quand ils s'é- toient voulu répondre ſi fortement de la Victoire. La con- duite des Bagages fut donnée à Mr d'Urban Brigadier d'In- fanterie. Il les mit en ſeûreté,
&revint en ſuite prendre part à la gloire de cette fameuſe journée. M' le Marquis de Villeneuve , Colonel de Cavalerie , après avoir foûtenu les efforts des Ennemis , les chargea vigoureuſement. M le Che- valier de Ganges fit des choſes
ſurprenantes , & forma des Eſcadrons , malgré tout le feu des Ennemis. Mr le Marquis
de Navailles ſervit de Briga- dier en la place de M de S. André , qui avoit eſté envoyé
depuis deux jours à Bellegarde.
146 LE MERCURE 1
Ce Marquis agit avec autant de prudence que de courage.
Il mena les Bataillons à la
Charge , & fe montradigne du Sang dont il fort. M. des
Fontaines Lieutenant d'Artillerie , fit tout ce qu'on pou- voit attendre de luy. Son Ca- non fut bien ſervy, & fi à pro- pos , que les Ennemis en fou- frirent beaucoup. Toutes les Relations parlent fi avanta- geufement de Meſſieurs de la
Rabliere & deGaffion , qu'on ne leur peut donner trop de loüanges, non--plus qu'àMon- fieur le Chevalier d'Aubeterre , qui ayant apporté une vi- gilance incroyable à ſe faifir du Col de Bagnols avant le Combat, montra une vigueur extraordinaire à chaffer les
Ennemis qui avoient occupé les
GALANT. 147
les Hauteurs des environs de
ce Paſſage, quoy qu'ils fuſſent beaucoup mieux poftez & en plus grand nombre. Monfieur de Raiſon , Capitaine au Regi- ment de Sault ,& un petit Corps de Suiffes , executerent
tres-bien ſes ordres, Monfieur
le Camus deBeaulicu , Intendant General de tout le Païs,
donna les ſiens fort à propos.
Il avoit receu une Lettre en
chifre de Monfieur le Duc de
Navailles pour faire marcher toute la Milice du Païs avec
M' le Chevalier d'Aubeterre,
& pour tenir preſtes les Munir)
tions de guerre & de bouche,
& il prit ſoin de tout avecune diligence & une ponctualité qui nepeuvent etre allezoſti mées. Il chargea Monfieur He ron, Commiſſaire ordinaire des
Tome VI. N
148 LE MERCVRE Guerres , & des Convois tant
par terre que par Mer, de l'e- xecution'de beaucoup de cho- ſes dont il s'acquita tres-fide- lement. Il ne me reſte plus qu'à vous dire les noms des Morts&des Bleſſez , tant d'actions vigoureuſes n'ayant pû fe faire ſans qu'il nous en ait couſté quelque choſe.
Capitaines tuez.
M.Choueraſqui, м. le Chevalier du Cros, M.Duran.
Capitaines bleſſez.
Mrs Praflon , Davénes, Bardonanche, Maurniay, De Tu- bas , Revellas , Tronc , Romp,
Geſſeret,Bandron,Quantagril,
Guaſque, Saint Géniez , La- barte, Sainte-Coulombe, Lan- glade, Barriere, Brouffan,Cha- tonville Vulaine M. le Marquis deVilleneu
GALANT. 149
ve Colonel de Cavalerie , &
M.de Conflans Major du Re- gimentde laRabliere, ont auffi efté bleſſez .
a
Je ne vous parle point des Eſpagnols morts oubleſſez. Ce font noms qui vous font en tierement inconnus , &d'ailleurs le nombre eneſt ſi grand,
qu'ils ne pourroient que vous ennuyer. Le ComtedeMonterey envoyé demander le Corps du Comtede la Fuente par un Trompete , & dire à
Monfieur de Navailles qu'il avoit eſté plus heureux que luy. Ce Trompete le pria en meſme temps de ſa part d'a- voir ſoin de la Nobleſſe d'ef
pagne qu'il avoit entre ſes mains.
GALANT. 129
&د
dans toutes leurs Provinces ,
auſquelles ils donnent le nom de Royaumes , & choiſirent le Comte de Monterey pour Viceroy de Catalogne pourGeneral de cette Armée.
Il eſt adroit , vigilant, &d'une exactitude merveilleuſe àfaire
bien ſervir ſon Prince. Ces
grandes levées eſtant faites , &
la plupart des Nobles ayant joint l'Armée , partie comme Volontaires , partie comme Officiers , la Cour d'Eſpagne en eſpera tout , & fe fortifia encor plus dans le deſſein de de faire quelque entrepriſe conſidérable fur les François en Catalogne , pour faire oublier au Peuple de Madrid les Conquestes du Roy en Flan- dre. Ainfi le Comte de Monterey reçeut ordre de partir en
130 LE MERCURE pofte de Sarragofſe où il eſtoit,
d'aller à Barcelone , d'y arrê- ter fix Vaiſſeaux chargez de Troupes pour la Sicile , &de les faire ſervir en Catalogne.
Douze cens Fantaſſins levez
dans le Royaume de Grenade ,
arriverent en mefme temps à
Barcelone.Le Mestre de Camp
de Valence luy mena deux mille Hommes un peu apres;
&d'autres levées faites dans le
meſme Royaume &dansl'Andaloufie , les joignirent pref- que auffitoft . Le Comte de Monterey eſtant arrivé dans l'Armée qu'ildevoit comman- der , Monfieur le Marefchal
Duc de Navailles &luy s'en- voyerent faire de grandes ci- vilitez , & fe firent dire qu'ils ſe verroient. Ce Comte voufut paroiſtre le plus civil. Il fit
GALANT. 131
- avancer ſes Troupes , & mar- cha du coſté de Saint Pierre
Peſcador , où Monfieurde Navailles eſtoit poſté. Ce Duc eſtant bien aiſe de ſuy épar- gner la moitié du chemin , en- voya huit cens Chevaux pour reconnoiſtre les Ennemis , &
ces huit cens Chevaux enleverent leur grande Garde.
Deux jours apres , le Comte deMontereyvoulant paſſer un Défilé à la veuë de noſtre Armée , Monfieur de Navailles
le fit charger , &le contraignit deſe retirer en deſordre apres
une Efcarmouche de trois
2
heures , où les Eſpagnols per- dirent beaucoup de monde.
Quelque temps aprés , Mon- fieur le Duc de Navailles
ayant eu avis que le Comte de Monterey avoit comman
132 LE MERCVRE
de huit cens Miquelets avec un Détachement de Cavalerie , pour nous ofter la com- munication avec le Lampour- dan , il envoya quelques trou- pes ſous Mº de la Rablie- re , Marefchal de Camp , qui les défit. On tua les deux
Commandans, & on prit deux autres Officiers. Voilà toute la
Campagne en peu de mots juſqu'au jour delagrandeDé- faite des Ennemis dont vous
avez entendu parler , & que je vay vous apprendre , avec des particularitez que vous n'avez aſſurément point veuës enſemble. Vous treblez peut- eftre déja que je ne vous aille faire une longue Relation, que
je ne vous accable d'une infi nité de termes de Guerre , &
que je ne vous nomme tous
GALANT. 133 les Villages par où l'on a paſſé,
&tous les poſtes qu'on a oc- cupez. Rafſurez-vous , Madame , je ne vous parleray de la Guerrequed'une maniere qui n'aura rien d'ennuyeux pour vous , & qui fera tres- intelli- gible aux Dames à qui vous faites partde mes Lettres.C'eſt pour elles particulierement que j'écris , & je ne feray ce Recit que comme vousle fe- ON
riez vous-mefme. S'il n'a pas le tour aifé & naturel que vous luy donneriez , il aura du moins le charme de la brié
veté. Fiez - vous en moy , je vous prie , & hazardez - vous fur ma parole à lire ce que je vous envoye. Nous étionsen- trez en Catalogne malgré les grandes forces que les Enne- mis y avoient ; nous avions
134 LE MERCVRE
د
fait chez eux tous les dégaſts imaginables , confommé leurs Fourages , enlevé leurs Bef- tiaux & donné en meſme
temps aux Noftres le moyen de faire paiſiblement leur ré- colte dans le Rouffillon ; mais
nous n'avions pû entrer dans le Païs Ennemy , que par des paſſages étroits qui font entre les Montagnes , & queles Ef- pagnols pouvoient aiſement occuper pour nous empeſcher le retour. En effet ils s'étoient
déja ſaiſis de quelques-uns en intention de nous attaquer.
Nos Troupes leur cedoient en nombre. Il eſtoit queſtion de fortir des Montsoù nous nous
eftions engagez, & ce fut dans cette difficulté qu'éclata la prudence & la conduite de
Monfieurle Ducde Navailles.
Il
GALANT. 135 Il envoya ſes ordres à M le Chevalier d'Aubeterre , Gouverneur de Collioure,&Lieu
tenant Generaldes Arméesdu
Roy, de ſe rendre maître d'un Paſſage appellé le Col de Ba- gnols, qu'il ſçavoit qu'on avoit deſſein de luy fermer. M le Chevalier d'Aubeterre partie environ àminuit , avec undé
tachement de ſa Garniſon &
- des Milices du Païs. Il trouva
queles Ennemis avoient occu- -pé des Hauteurs &des Ro- chers eſcarpez. Il les en chaf- ſa avec une vigueur incroya- ble, &fit fuïrdeux Bataillons
qui venoient à leur ſecours.
Le chemin eſtantouvert,MonſieurdeNavailles commença à
faire marcher dés ce jour-là.
Les Ennemis vinrent camper àla portée de noſtre Canon;
D
S
S
Tome VI. M
1
136 LE MERCURE il y eut quelques eſcarmou- ches, &on les recommença le lendemain. Les Eſpagnols en Bataille voulurent gagner une Montagne fort haute, mais on les en empefcha. Cétobſtacle rompit leurs meſures , & nous occupâmes une Hauteur qui nous ofta tout lieu de rien
craindre d'eux. On demeura
trois jours en preſence,&pen- dant tout ce temps on ne fit que des eſcarmouches. On chargea trois EſcadronsEnne-- mis qui avoient paſſé une Ri- viere, &qui estoient foûtenus de ſept Regimens d'Infante- rie. L'avantage nous demeura,
avec perte pour les Eſpagnols de plus de ſept cens Hommes,
qui furent ou tuez ,
prifonniers , ou mis hors de
ou faits
combat. Nôtre General n'ayat
GALANT. 137
ان
S
و
plus rien à faire dans le Païs ,
fongea à s'en retirer , & fit marcher les premiers Bagages.
Cette marche fut dérobée à la
connoiſſance des Ennemis
auffi-bien que celle de toute l'Armée qui commença à dé- filer àminuit.Lors que le Com- te de Monterey en fut averty,
cette nouvelle le mit au deſefpoir , & il marcha avec tant de précipitation , qu'il joignit noſtre Arrieregarde. Monfieur de Navailles avec une adreffe
& une prudence admirable ,
trouva moyen de faire avan- cer encor noftre Armée ce
qui fit perdre haleine aux En- nemis qui nous pourſuivoient.
Les Eſpagnols ayans plus de
,
Troupes eftant compoſées de
S Troupes que nous ,
& ces
1
toute la Nobleſſe de leurs
Mij
138 LE MERCURE Royaumes, ſe répondoient tel- lementde la Victoire,que dans l'impatience de combattre, ils vinrentenfin àboutd'attacher
l'eſcarmouche , ce qu'ils firent avec une impétuoſité qui ſe peut àpeine concevoir. Ils oc- cuperent des Hauteurs; mais les Noſtres aprés les en avoir chaſſez en gagnerent d'autres,
& conferverent fi bien cét
avantage pendattoute la jour- née, qu'ils donnerentlieu aux Bagages d'avancer beaucoup,
&de ſe mettre en ſeureté. M
de Navailles ne craignant plus rien , & ayant fait voir au Comte de Monterey qu'il en fçavoit plus que luy , mit ſon Armée en bataille dans le lieu
qu'il jugea le plus avantageux,
&fit pofter fon Canonde for- te qu'il fut tres-bien fervy , &
GALANT. 139
1
1
incommoda fort les Ennemis.
Noftre General voulut encor
gagnerune Hauteur, &ce qui paroift incroyable , nos Trou- pes qui devoient eſtre fati- guées de tant de mouvemens,
ypaſſerent avec diligence &
fans aucune confufion , parun effet des ordres que Monfieur ☐ de Navailles donnoit avecune application & une prefence d'eſpritqui n'avoient rien d'égal que fon courage. Il animoit tous les Officiers à bien faire ;
& les Soldats encouragez par fon exemple &parſes paroles,
réſolurentde périr plûtoſt que d'abandoner ce dernierPofte.
Les Ennemis vinrent aufſi- toft
ànous en tres-bon ordre , &
le Combat s'engagea. On tira pendant trois heuresde la ſeu le longueur de deux Piques ,
Miij
140 LE MERCURE Bataillons contre Bataillons , la
Cavalerie de part & d'autre eſtant derriere l'Infanterie..
Nos Troupes ne firent aucun méchant mouvement , & on ne les pût obliger à reculer d'un ſeul pas. La Cavalerie quenous avionsſur l'aifle gau- che fit des merveilles : Elle
monta fur une Hauteur pref- que inacceffible , & en chaffa lesEnnemis. Celle de ladroite alla pluſieurs fois à la char- ge , & en tua grand nom.
bre. L'Occafion dura cinq heures & demie , &fe termina avec beaucoup de gloire pour le Roy. Les Eſpagnolsy
ont perdu plus de deux mille Hommes. On leur a entierement défait les Regimensd'Ar--
ragon, de Medina Sidonia , &
deMonteleone. TouslesOffi-
GALANT.: 141 ciers de ces trois Regimens ont eſté tuez , bleffez , ou faits
prifonniers. On a fort mal trai- té ceux de Grenade & de la
Cofte , & il y a eu un tres- grand nombre de prifonniers,
entre leſquels ſont plufieurs Perſonnes de qualité , dont quelques-uns, comme le Com- te de la Fuente, le Vicomte de S.George,& le Colonel Heffe,
✓ font morts de leurs bleſſures..
Cette Action eſt d'autant plus
glorieuſe, qu'on a batu les Ennemisdans leur Païs, quoyque plus forts, qu'ony eft demeuré maître du Champ de Bataille,
qu'on leur a pris des Dra peaux ,&tout cela en ſe reti rant ; ce qui eſt une circon - ſtance remarquable : car les
Retraites font ordinairement
- dangereuses , & on y est rar
142 LE MERCURE
rement attaqué qu'on ne ſoit batu. Les Eſpagnols n'ont rien entrepris depuis ce temps-là ,
& voilà à quoy ont abouty tous ces grands Armemens, &
toutes ces Levées, qui avoient épuiſé leurs RoyaumesdeGre- nade &d'Andaloufie. Jevous
ay tenu parole , Madame. Ce Récit n'eſt embaraſſe d'aucuns'
Noms de Paſſages,&je ne l'ay pas meſme voulu charger de ceux de nos Officiers qui ſe font fait remarquer , afin de vous en laiſſer plus aiſement fuivre le fil . Cela ne me doit
pas empeſcher de leur rendre preſentement juſtice; & pour faire honneur aux Etrangers ,
je vous diray d'abord que les Suiffes & les Allemands ne
donnerent quartier à perſon- ne , fur ce qu'un Trompette
GALANT. 143 des Ennemis vint declarer -qu'ils n'en feroient point aux Etrangers. Si les François euf- ſent ſuivy cet exemple , il ne ſeroit guere demeuré d'Eſpa- gnols.
Les Regimens de Sault, de Furſtemberg , de Navailles ,
d'Erlac , de Gaſſion , de la Rabliere , de Lanſon , de Lebret ,
&de Villeneuve , ſe ſont dif
tinguez , aufli bien que les Dragons., que rien n'a efte ca- pable d'ébranler. Jamais onn'a fi genéralement bien faitdans aucun Combat. Onn'a pas re- marqué un feul Soldat qui ait reculé,&on ne ſçait qui loüer,
particulierement des Officiers,
parce qu'ils meritent tous d'égales loüanges.
*
Monfieur le Mareſchal Duc
de Navailles diviſa ſes Trou-
144 LE MERCURE
pes enpluſieurs Corps,&quoy qu'il fuſt par tout, il ne laiſſa pas de ſe mettre à la teſte d'un de
ces Corps qu'il avoit fi judi- cieuſement diviſez. Mr de la
Rabliere Mareſchal de Camp,
eſtoit à la teſte d'un autre , &
monta fur une Hauteur où il
batit les Ennemis. Mrde Gafſion Lieutenant General , pаreillementàla teſte d'un Corps,
occupa une autre Hauteur ; &
Mr Chevreau Brigadier deCa- valerie , ſe ſignala à la teſte du quatrième Corps. Mr du Sauf- fay donna beaucoup de mar- *ques de cœur & de conduite
en cette occaſion; il commandoit la Cavalerie. M² le Marquis d'Apremont Mareſchalde Camp, y fit des merveilles. II eſtoit par tout. Ce fut luy qui foûtint les premiers efforts des
GALANT. 145
Ennemis , & qui commença à
leur faire connoiſtre qu'ils s'é- toient trompez quand ils s'é- toient voulu répondre ſi fortement de la Victoire. La con- duite des Bagages fut donnée à Mr d'Urban Brigadier d'In- fanterie. Il les mit en ſeûreté,
&revint en ſuite prendre part à la gloire de cette fameuſe journée. M' le Marquis de Villeneuve , Colonel de Cavalerie , après avoir foûtenu les efforts des Ennemis , les chargea vigoureuſement. M le Che- valier de Ganges fit des choſes
ſurprenantes , & forma des Eſcadrons , malgré tout le feu des Ennemis. Mr le Marquis
de Navailles ſervit de Briga- dier en la place de M de S. André , qui avoit eſté envoyé
depuis deux jours à Bellegarde.
146 LE MERCURE 1
Ce Marquis agit avec autant de prudence que de courage.
Il mena les Bataillons à la
Charge , & fe montradigne du Sang dont il fort. M. des
Fontaines Lieutenant d'Artillerie , fit tout ce qu'on pou- voit attendre de luy. Son Ca- non fut bien ſervy, & fi à pro- pos , que les Ennemis en fou- frirent beaucoup. Toutes les Relations parlent fi avanta- geufement de Meſſieurs de la
Rabliere & deGaffion , qu'on ne leur peut donner trop de loüanges, non--plus qu'àMon- fieur le Chevalier d'Aubeterre , qui ayant apporté une vi- gilance incroyable à ſe faifir du Col de Bagnols avant le Combat, montra une vigueur extraordinaire à chaffer les
Ennemis qui avoient occupé les
GALANT. 147
les Hauteurs des environs de
ce Paſſage, quoy qu'ils fuſſent beaucoup mieux poftez & en plus grand nombre. Monfieur de Raiſon , Capitaine au Regi- ment de Sault ,& un petit Corps de Suiffes , executerent
tres-bien ſes ordres, Monfieur
le Camus deBeaulicu , Intendant General de tout le Païs,
donna les ſiens fort à propos.
Il avoit receu une Lettre en
chifre de Monfieur le Duc de
Navailles pour faire marcher toute la Milice du Païs avec
M' le Chevalier d'Aubeterre,
& pour tenir preſtes les Munir)
tions de guerre & de bouche,
& il prit ſoin de tout avecune diligence & une ponctualité qui nepeuvent etre allezoſti mées. Il chargea Monfieur He ron, Commiſſaire ordinaire des
Tome VI. N
148 LE MERCVRE Guerres , & des Convois tant
par terre que par Mer, de l'e- xecution'de beaucoup de cho- ſes dont il s'acquita tres-fide- lement. Il ne me reſte plus qu'à vous dire les noms des Morts&des Bleſſez , tant d'actions vigoureuſes n'ayant pû fe faire ſans qu'il nous en ait couſté quelque choſe.
Capitaines tuez.
M.Choueraſqui, м. le Chevalier du Cros, M.Duran.
Capitaines bleſſez.
Mrs Praflon , Davénes, Bardonanche, Maurniay, De Tu- bas , Revellas , Tronc , Romp,
Geſſeret,Bandron,Quantagril,
Guaſque, Saint Géniez , La- barte, Sainte-Coulombe, Lan- glade, Barriere, Brouffan,Cha- tonville Vulaine M. le Marquis deVilleneu
GALANT. 149
ve Colonel de Cavalerie , &
M.de Conflans Major du Re- gimentde laRabliere, ont auffi efté bleſſez .
a
Je ne vous parle point des Eſpagnols morts oubleſſez. Ce font noms qui vous font en tierement inconnus , &d'ailleurs le nombre eneſt ſi grand,
qu'ils ne pourroient que vous ennuyer. Le ComtedeMonterey envoyé demander le Corps du Comtede la Fuente par un Trompete , & dire à
Monfieur de Navailles qu'il avoit eſté plus heureux que luy. Ce Trompete le pria en meſme temps de ſa part d'a- voir ſoin de la Nobleſſe d'ef
pagne qu'il avoit entre ſes mains.
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Résumé : Tout ce qui s'et passé en Catalogne depuis l'ouverture de la Campagne, avec les Noms des Morts & des Blessez, & de ceux qui se sont signalez dans la derniere Défaite des Ennemis. [titre d'après la table]
Les Espagnols préparèrent une diversion en Catalogne pour compenser les conquêtes françaises en Flandre. Ils levèrent des troupes dans diverses provinces et nommèrent le Comte de Monterey vice-roi de Catalogne et général de l'armée. Les préparatifs incluaient l'arrivée de vaisseaux chargés de troupes à Barcelone et des renforts de régions comme Grenade et Valence. Le Comte de Monterey reçut l'ordre de se rendre à Barcelone et de préparer des troupes pour la Sicile. Il marcha vers Saint-Pierre-Pescador où le Duc de Navailles était posté. Après une escarmouche, les Espagnols furent contraints de se retirer en désordre. Plus tard, le Duc de Navailles envoya des troupes pour défaire un détachement espagnol près du Lampourdan. Les Français, malgré les forces espagnoles, réussirent à faire des dégâts en Catalogne et à sécuriser les récoltes dans le Roussillon. Cependant, ils étaient limités par des passages étroits entre les montagnes. Le Duc de Navailles envoya le Chevalier d'Aubeterre sécuriser le Col de Bagnols, permettant ainsi aux troupes françaises de progresser. Lors de plusieurs escarmouches, les Espagnols, bien que plus nombreux, furent repoussés. Le Duc de Navailles réussit à retirer ses troupes en sécurité malgré la poursuite des Espagnols. La bataille finale dura cinq heures et demie, se terminant par une victoire française. Les Espagnols perdirent plus de deux mille hommes et plusieurs régiments furent détruits. Les régiments français, notamment ceux de Sault, Furstemberg, et Navailles, se distinguèrent par leur bravoure. Le Duc de Navailles et plusieurs autres officiers reçurent des éloges pour leur conduite et leur courage. Après cette défaite, les Espagnols n'entreprirent plus aucune action militaire significative. Le texte mentionne également les capitaines tués et blessés lors des actions militaires, ainsi que la demande du Comte de Monterey pour le corps du Comte de la Fuente, soulignant la supériorité militaire du Duc de Navailles.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 226-239
Plusieurs avantages remportez sur Mer en divers endroits par les Vaisseaux de France, depuis le commencement de la Campagne, avec les Noms de tous ceux qui se sont distinguez. [titre d'après la table]
Début :
Retournons à la Guerre, rien n'arreste les François quand il [...]
Mots clefs :
Vaisseaux, Capitaine, Hollandais, Combat, Guerre, Mer, Corsaire, Port, Bateau
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Plusieurs avantages remportez sur Mer en divers endroits par les Vaisseaux de France, depuis le commencement de la Campagne, avec les Noms de tous ceux qui se sont distinguez. [titre d'après la table]
Retournons à la Guerre ,
1 rien n'arreſte les François quand il s'agit de ſervir leur Prince , &d'acquerir de la ré- putation. Vous venez de voir
combattre fur Terre , voyez à
preſent combattre ſur Mer.
Nous y avons remporté des avantages dont ceux qui ne ſontpasaccoûtumez àvaincre touslesjours par tout , feroient plus de bruit que nous n'en faifons.
Le Capitaine Tobias fort eſtimé chez les Hollandois ,
158 LE MERCVRE 1
éprouva il y a quelque temps combien les Armes du Roy fontàcraindre. Il revenoit de
Smirne , & commandoit une
Flote compoſée de trois gros Vaiſſeaux de guerre ,de cinq Navires , & de huit grandes Fluftes , le tout extraordinaire- ment riche. Le Vaiſſeauqu'il montoit eſtoit de foixante &
fix Pieces de Canon, & chaque Naviredequarante. Il fut rencontré dans la Manche à
la hauteur d'Oüeſſant , par M. le Chevalier de Chasteaure- naut Chefd'Efcadre, qui croi- foit de ce coſté-là, Quoy qu'il n'euſt que quatre Vaiſſeaux de guerre& trois legeres Fré- gates , cette inégalité ne l'em- pefcha pas de prendre la ré- folution de lattaquer. LesEn- nemis l'attendirent en bon
ordre,
GALANT. 159
-
ce qu'il
ordre , & voyant leurs forces beaucoup au deſſus de celles desAttaquans , ils ſe prépare- rent à les recevoir avec une
confiance qui ne leur permet- toit point de douter de la Vi- ctoire. Leurs huit Baſtimens
s'eſtant mis en ligne , & les ☐ Fluſtes ſous le vent , M. de
Chaſteaurenaut arriva fur eux
à la petitepointedujour. Il fit tout cequ'il put pour aborder Commandant , qui évita fix fois l'abordage. Le Combat fut long&opiniâtre. NosFré- gates prirent quatre grandes Fluftes chargées d'Huile , de Tabac , & d'indigo , & deux Vaiſſeaux Hollandois coulerent à fond , avec del'Argent
en barre , & plufieurs mar- chandifes de grand prix. Leurs autres Vaiſſeaux ont eſte fort
Tome VI.
le
160 LE MERCVRE
mal traitez. Ils s'échaperent à
la faveur d'une brune qui empeſcha M. le Chevalier de
Chaſteaurenaut de les ſuivre.
Chacun ſçait qu'on ne peut avoir plus de cœur qu'il en fait paroiſtre , que le peril ne l'é- tonne point , &qu'il n'est pas ſeulement bon Soldat & bon
Capitaine , mais encor bon Homme de Mer , & fort intelligentdans tout ce qui regarde l'employ qu'on luy a donné.
Meſſieurs les Comtes de Sourdis&de Rofmadec , & M. Foran Capitaines de Vaiſſeaux ,
ſe ſont extraordinairementdiſtinguez. Meſſieurs Huet du Rueaux , de Banville , & de Maiſon-neuve , ont donné des
marques de leur courage tant que le Combat a duré. M. le Baron d'Audengervat , Mef-
GALANT. 161
LYCA
ſieurs de Moran- Boiſamis &
de Sancé Lieutenans , deBoncour &de Courbon Enfeignes,
de la Haudiniere &de la Robiniere Volontaires , &deBel- limont Garde de la Marine,
ont eſté bleſſez en ſe ſignalant.
Les Ennemis ont perdu beau- coup de monde , & il ne nous en a couſté que M. Mercadet Enſeigne , qu'ils notus ont Cét avantage n'eſt pas le ſeul que nous ayons eu ur
Mer. M. leChevalierde Bre
teüil qui commande l'Efcadre desGaleres Françoiſes enRof- fillon , a enlevé deux Barques d'un Convoy qui venoit aux Eſpagnols , & dont tout le feu de laMouſqueterie des Enne- mis ne pût empeſcher la prife.
Il pourſuivit les autres juſques fous le Canon de la Tour de
O ij
162 LE MERCVRE
Palmos aux Coſtes de Catalogne. M. le Chevalier deBour- feville ſe rendit maître d'une
troiſieme , &on ne peut trop eſtimer les marques d'intrépi- dité & de valeur que tous les
deux ont données.
Il ne faut qu'eftre François pour porter la terreur en pre- nant les armes. Un Marchand
duHavre s'eſtant plaintqu'un Corſaire nommé,le Capitaine Mauvel, venoitde luy enlever une Barque affez confiderable , avec le Pilote qu'il avoit deffus , Monfieur le Duc de S.
Aignan détacha fans perdre temps fix Soldats par Compa- gnies , &les faiſant prompte- ment embarquer das des Cha- loupes,&quelques autresdans un Bateau qui ſert à porter le Bois , afin qu'on les pûft pren-
GALANT. 163 dre pour des Marchands , ils allerent joindre le Corſaire qui eftoit encor à l'ancre. M. de
Brevedent Capitaine de Fré- gate legere , & M.du Buiffon Enſeigne du Port , ſe trouve- rent à cette attaque , il y eut un Combat de Mouſquererie qui ſe fit preſque à bout tou- chant, &qui étonna tellement le Corſaire , qu'il prit la fuite.
aprés la décharge de quatre Pieces de Canon dont il eſtoit
armé. Son Pilote fut tué ,trois
de ſes Matelots demeurerent
fur la Place , & il fut bleffé
luy-meſme. Il n'y eutde l'au- tre coſté qu'un ſeul Soldat bleffé jambe , & le Maſt
de l'une des Chaloupes en- dommagé d'un coup de Ca- non. La Barque fut repriſe.. Elle eſt eſtimée à prés de mil
Oiij
164 LE MERCVRE Ecus, &c'eſt duPilote duMarchand qui estoit avec le Cor- faire pendant le Combat , &
qu'il a relâché depuis , qu'on a ſçeu ces particularitez.
Je nevous parle point d'un petit Corfaire de Saint Mało ,
armé de fix pieces de Canon ,
qui s'eſtant rendu maiſtre de trois grandes Fluftes de Dan.
nemarc chargées de Froment,
de Seigle , & de Pluſieurs au- tres chofes, les a menées dans ce Port. Ces fortes de priſes y
font ordinaires , un autre Cor- faire ayant amené preſque en -meſme temps un Hollandois ;
&deux autres , un Biſcayen chargé de diverſes marchan- difes.
Vous voyez , Madame, que le Roy triomphe de tous cô- tez fur Mer , comme il triom
GALANT. 165 phe par tout fur Terre. Il eſt vray qu'on nous imputoit une diſgrace qui donnoit grande joye à nos Ennemis. On pré- tendoit que toutes nos Gale- res avoient eſté conſommées à
Civitavechia par un Incendie dont on n'avoit pû arreſter la violence. Le bruit en courut à
Naples ; & dans le temps que cette nouvelle s'y debitoit , el- les parurent à l Iſle de Pont,
où elles prirent trois gros Vaif- ſeaux àla veuë meſme de cet.
te Ville.
1 rien n'arreſte les François quand il s'agit de ſervir leur Prince , &d'acquerir de la ré- putation. Vous venez de voir
combattre fur Terre , voyez à
preſent combattre ſur Mer.
Nous y avons remporté des avantages dont ceux qui ne ſontpasaccoûtumez àvaincre touslesjours par tout , feroient plus de bruit que nous n'en faifons.
Le Capitaine Tobias fort eſtimé chez les Hollandois ,
158 LE MERCVRE 1
éprouva il y a quelque temps combien les Armes du Roy fontàcraindre. Il revenoit de
Smirne , & commandoit une
Flote compoſée de trois gros Vaiſſeaux de guerre ,de cinq Navires , & de huit grandes Fluftes , le tout extraordinaire- ment riche. Le Vaiſſeauqu'il montoit eſtoit de foixante &
fix Pieces de Canon, & chaque Naviredequarante. Il fut rencontré dans la Manche à
la hauteur d'Oüeſſant , par M. le Chevalier de Chasteaure- naut Chefd'Efcadre, qui croi- foit de ce coſté-là, Quoy qu'il n'euſt que quatre Vaiſſeaux de guerre& trois legeres Fré- gates , cette inégalité ne l'em- pefcha pas de prendre la ré- folution de lattaquer. LesEn- nemis l'attendirent en bon
ordre,
GALANT. 159
-
ce qu'il
ordre , & voyant leurs forces beaucoup au deſſus de celles desAttaquans , ils ſe prépare- rent à les recevoir avec une
confiance qui ne leur permet- toit point de douter de la Vi- ctoire. Leurs huit Baſtimens
s'eſtant mis en ligne , & les ☐ Fluſtes ſous le vent , M. de
Chaſteaurenaut arriva fur eux
à la petitepointedujour. Il fit tout cequ'il put pour aborder Commandant , qui évita fix fois l'abordage. Le Combat fut long&opiniâtre. NosFré- gates prirent quatre grandes Fluftes chargées d'Huile , de Tabac , & d'indigo , & deux Vaiſſeaux Hollandois coulerent à fond , avec del'Argent
en barre , & plufieurs mar- chandifes de grand prix. Leurs autres Vaiſſeaux ont eſte fort
Tome VI.
le
160 LE MERCVRE
mal traitez. Ils s'échaperent à
la faveur d'une brune qui empeſcha M. le Chevalier de
Chaſteaurenaut de les ſuivre.
Chacun ſçait qu'on ne peut avoir plus de cœur qu'il en fait paroiſtre , que le peril ne l'é- tonne point , &qu'il n'est pas ſeulement bon Soldat & bon
Capitaine , mais encor bon Homme de Mer , & fort intelligentdans tout ce qui regarde l'employ qu'on luy a donné.
Meſſieurs les Comtes de Sourdis&de Rofmadec , & M. Foran Capitaines de Vaiſſeaux ,
ſe ſont extraordinairementdiſtinguez. Meſſieurs Huet du Rueaux , de Banville , & de Maiſon-neuve , ont donné des
marques de leur courage tant que le Combat a duré. M. le Baron d'Audengervat , Mef-
GALANT. 161
LYCA
ſieurs de Moran- Boiſamis &
de Sancé Lieutenans , deBoncour &de Courbon Enfeignes,
de la Haudiniere &de la Robiniere Volontaires , &deBel- limont Garde de la Marine,
ont eſté bleſſez en ſe ſignalant.
Les Ennemis ont perdu beau- coup de monde , & il ne nous en a couſté que M. Mercadet Enſeigne , qu'ils notus ont Cét avantage n'eſt pas le ſeul que nous ayons eu ur
Mer. M. leChevalierde Bre
teüil qui commande l'Efcadre desGaleres Françoiſes enRof- fillon , a enlevé deux Barques d'un Convoy qui venoit aux Eſpagnols , & dont tout le feu de laMouſqueterie des Enne- mis ne pût empeſcher la prife.
Il pourſuivit les autres juſques fous le Canon de la Tour de
O ij
162 LE MERCVRE
Palmos aux Coſtes de Catalogne. M. le Chevalier deBour- feville ſe rendit maître d'une
troiſieme , &on ne peut trop eſtimer les marques d'intrépi- dité & de valeur que tous les
deux ont données.
Il ne faut qu'eftre François pour porter la terreur en pre- nant les armes. Un Marchand
duHavre s'eſtant plaintqu'un Corſaire nommé,le Capitaine Mauvel, venoitde luy enlever une Barque affez confiderable , avec le Pilote qu'il avoit deffus , Monfieur le Duc de S.
Aignan détacha fans perdre temps fix Soldats par Compa- gnies , &les faiſant prompte- ment embarquer das des Cha- loupes,&quelques autresdans un Bateau qui ſert à porter le Bois , afin qu'on les pûft pren-
GALANT. 163 dre pour des Marchands , ils allerent joindre le Corſaire qui eftoit encor à l'ancre. M. de
Brevedent Capitaine de Fré- gate legere , & M.du Buiffon Enſeigne du Port , ſe trouve- rent à cette attaque , il y eut un Combat de Mouſquererie qui ſe fit preſque à bout tou- chant, &qui étonna tellement le Corſaire , qu'il prit la fuite.
aprés la décharge de quatre Pieces de Canon dont il eſtoit
armé. Son Pilote fut tué ,trois
de ſes Matelots demeurerent
fur la Place , & il fut bleffé
luy-meſme. Il n'y eutde l'au- tre coſté qu'un ſeul Soldat bleffé jambe , & le Maſt
de l'une des Chaloupes en- dommagé d'un coup de Ca- non. La Barque fut repriſe.. Elle eſt eſtimée à prés de mil
Oiij
164 LE MERCVRE Ecus, &c'eſt duPilote duMarchand qui estoit avec le Cor- faire pendant le Combat , &
qu'il a relâché depuis , qu'on a ſçeu ces particularitez.
Je nevous parle point d'un petit Corfaire de Saint Mało ,
armé de fix pieces de Canon ,
qui s'eſtant rendu maiſtre de trois grandes Fluftes de Dan.
nemarc chargées de Froment,
de Seigle , & de Pluſieurs au- tres chofes, les a menées dans ce Port. Ces fortes de priſes y
font ordinaires , un autre Cor- faire ayant amené preſque en -meſme temps un Hollandois ;
&deux autres , un Biſcayen chargé de diverſes marchan- difes.
Vous voyez , Madame, que le Roy triomphe de tous cô- tez fur Mer , comme il triom
GALANT. 165 phe par tout fur Terre. Il eſt vray qu'on nous imputoit une diſgrace qui donnoit grande joye à nos Ennemis. On pré- tendoit que toutes nos Gale- res avoient eſté conſommées à
Civitavechia par un Incendie dont on n'avoit pû arreſter la violence. Le bruit en courut à
Naples ; & dans le temps que cette nouvelle s'y debitoit , el- les parurent à l Iſle de Pont,
où elles prirent trois gros Vaif- ſeaux àla veuë meſme de cet.
te Ville.
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Résumé : Plusieurs avantages remportez sur Mer en divers endroits par les Vaisseaux de France, depuis le commencement de la Campagne, avec les Noms de tous ceux qui se sont distinguez. [titre d'après la table]
Le texte décrit plusieurs victoires navales françaises. Le Chevalier de Chasteaurenaut, malgré une infériorité numérique, attaque et défait une flotte hollandaise commandée par le Capitaine Tobias près d'Ouessant. Cette bataille permet aux Français de capturer plusieurs navires ennemis et d'en couler deux. Parmi les blessés français figurent plusieurs officiers et volontaires. Par ailleurs, le Chevalier de Breteuil et le Chevalier de Bourseville capturent des barques espagnoles près des côtes catalanes. Un marchand du Havre, avec l'aide de soldats et d'officiers français, repousse un corsaire qui avait enlevé sa barque. De plus, des corsaires français capturent plusieurs navires danois et biscayens chargés de marchandises. Le texte mentionne également que les galères françaises, contrairement aux rumeurs d'un incendie à Civitavecchia, apparaissent à l'île de Pont et capturent trois gros vaisseaux sous les yeux de Naples. Ces succès navals démontrent la supériorité française sur mer, complétant les victoires terrestres.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 278-285
Une Escadre de 5. Fregates Ostendoises attaque devant Fécam un Vaisseau Marchand estimé quatre-vingt mille escus. Il est sauvé par les bons ordres de M. le Duc de S. Aignan. [titre d'après la table]
Début :
Les Rencontres de Mer ne nous sont pas moins glorieuses [...]
Mots clefs :
Frégates, Rencontres de mer, Fécam, Vaisseau, Combat, Equipage, Monsieur de S. Aignan
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texteReconnaissance textuelle : Une Escadre de 5. Fregates Ostendoises attaque devant Fécam un Vaisseau Marchand estimé quatre-vingt mille escus. Il est sauvé par les bons ordres de M. le Duc de S. Aignan. [titre d'après la table]
Les Rencontres de Mer ne
nous font pas moins glorieuſes que les Attaques de terre. Il y a dix ou douze jours qu'une Eſcadre d'Ennemis parut de- vant Fécam, compoſée de cinq Frégates Oftendoiſes de 36. de 34.de 28.de 24. &de 18. Pieces de Canon. Elles chafſoient un
Vaiſſeau nommmé le S. George,
de 200. Tonneaux,de 22. Pieces
de Canon , & de 120. Hommes d'équipage , commandé par le
188 LE MERCVRE
toient tous Boulets à deux tê
tes , ils couperent force corda- ges ; & force Maneuvres avec P'Echelle, donnerent huit coups dans le corps duBaſtiment, em- porterent lacuiſſe àunMatelor,
& percerent quelques Maiſons des coups qui échaperent. Ces Frégates tinrent en ſuite une eſpece de Conſeil , apres lequel remettant le Pavillon d'Espa- gne , elles revinrent furieuſe- ment à la charge , & quafi à la portée du Piſtolet. Le combat dura cinq heures , & elles tire- rentdu moins cinq cens coups de Canon , & deux mille de
Moufquet , pendant que ceux du Vaiſſeau les attendoient à
l'abordage , le Sabre à la main,
&que deux pieces de Canon,
feules en état de cinq qui font dans le Fort , leur tirerent cent
GALAN T. 189 cinquante coups. Leur Amirale & l'autre grande de 34. furent percées de cinq ou fix coups à
l'eau, cequi les obligea dequi- ter le Combat l'une apres l'au- tre , & d'eſtre longtemps ſur le coſté pour reparer leur dom- mage. Tout le monde fit ſon devoir par les ordres de M. de Longueil , qui , quoy que ma- lade, fit tres-bien de faire défendre le Vaiſſeau avant l'arrivée de M. de S. Aignan , lequel ayant appris cette nouvelle , &
jugeant par le lieu où les Fré- gates demeuroient , qu'elles ne manqueroient point de revenir avec lamarée, partit duHavre,
gagna Fécam toute la nuit , &
eny arrivant le matin, apper- çeut les deux grandes Fregates fous voile qui revenoient vers le Vaiſſeau. Comme le péril
2
190 LE MERCVRE nel'a jamais étonné , il y monta par les cordes du dehors , & les Ennemis s'eſtant approchez peu à peu , ils ſe tinrent encor quelque temps à la veuë de Fécam , & diſparurent tout-à- faiten fuite. Alors M de S. Aignan,qui vouloit braver lesEn-:
nemis dans leur retraite , opina à remettre le Vaiſſeau à flot, &
àne leur pointcacher ſa route.
Apres qu'il eut tiré tout ſon Canon par fon ordre , il mit à
la voile fur les huit heures du
foir , & ce Duc ayant repris le chemin le longde la Coſte , ar- riva au pointdujour auHavre en meſme temps que le Vaif- ſeau. Jugez, Madame, dela joye des Intereſſez , &du Capitaine qui le croyoient perdu ſans re- fource. Tous ceux qui ont eu part à cette Action , en ont re
GALANT. 191 ceu beaucoup de loüanges ,
Me l'Abbé de Coffe , Gentilhomme de Marseille , &Frere
d'un Capitaine de Cavalerie du meſme nom , entra dés le ſoir dans le Vaiſſeau pour partager le plaifir & la gloire de cette défenſe. On a ſceu d'un Capitaine Anglois arrivé depuis cette Attaque , qu'il avoit ren- contré les cinq Frégates avec leurs Maneuvres en granddef- ordre , ſur tout l'Amirale , qui avoit pluſieurs coups à l'eau,
tout ſon Arriere briſe , & force
Gens hors de combat. Les Ennemis luy ont dit que ce qui leur avoit fait conclure leur retour, eſtoit qu'ils avoient connu les Gardes de M. de S. Aignan,
& que s'eſtant apperçeus avec,
leurlongue veuë , qu'il montoit luy-meſme dans le Vaiſſeau , ils
192 LE MERCVRE s'eſtoient bien imaginez qu'on n'oublieroit rien pour ſa dé- fenſe. Ce témoignage eſt bien glorieux pour ce Duc , qui joi- gnant la liberalité à tant d'au- tres vertus qui l'accompagnent,
ne ſe contenta pas de recom- penfer ceux de l'Equipage par des loüanges , mais leur donna de l'argent pour s'eſtre ſi di- gnement acquitez de leur de- voir. Ce fut là -deſſus qu'un agreable Eſprit deFécam fit ces deux Vers , en parlantde luy à
luy-mefme.
Il les mit enétatde ne craindre
plusrien,
Etlesrécompensad'avoirſauvé leurBien,
Les principaux Intereſſez ont eſté ravis de la maniere dont
ce Duc s'eſt pris pour ſauver Ieur Vaiſſeau contre toute apparence,
GALANT. 193 parence , & mefme contre leur
attente.
nous font pas moins glorieuſes que les Attaques de terre. Il y a dix ou douze jours qu'une Eſcadre d'Ennemis parut de- vant Fécam, compoſée de cinq Frégates Oftendoiſes de 36. de 34.de 28.de 24. &de 18. Pieces de Canon. Elles chafſoient un
Vaiſſeau nommmé le S. George,
de 200. Tonneaux,de 22. Pieces
de Canon , & de 120. Hommes d'équipage , commandé par le
188 LE MERCVRE
toient tous Boulets à deux tê
tes , ils couperent force corda- ges ; & force Maneuvres avec P'Echelle, donnerent huit coups dans le corps duBaſtiment, em- porterent lacuiſſe àunMatelor,
& percerent quelques Maiſons des coups qui échaperent. Ces Frégates tinrent en ſuite une eſpece de Conſeil , apres lequel remettant le Pavillon d'Espa- gne , elles revinrent furieuſe- ment à la charge , & quafi à la portée du Piſtolet. Le combat dura cinq heures , & elles tire- rentdu moins cinq cens coups de Canon , & deux mille de
Moufquet , pendant que ceux du Vaiſſeau les attendoient à
l'abordage , le Sabre à la main,
&que deux pieces de Canon,
feules en état de cinq qui font dans le Fort , leur tirerent cent
GALAN T. 189 cinquante coups. Leur Amirale & l'autre grande de 34. furent percées de cinq ou fix coups à
l'eau, cequi les obligea dequi- ter le Combat l'une apres l'au- tre , & d'eſtre longtemps ſur le coſté pour reparer leur dom- mage. Tout le monde fit ſon devoir par les ordres de M. de Longueil , qui , quoy que ma- lade, fit tres-bien de faire défendre le Vaiſſeau avant l'arrivée de M. de S. Aignan , lequel ayant appris cette nouvelle , &
jugeant par le lieu où les Fré- gates demeuroient , qu'elles ne manqueroient point de revenir avec lamarée, partit duHavre,
gagna Fécam toute la nuit , &
eny arrivant le matin, apper- çeut les deux grandes Fregates fous voile qui revenoient vers le Vaiſſeau. Comme le péril
2
190 LE MERCVRE nel'a jamais étonné , il y monta par les cordes du dehors , & les Ennemis s'eſtant approchez peu à peu , ils ſe tinrent encor quelque temps à la veuë de Fécam , & diſparurent tout-à- faiten fuite. Alors M de S. Aignan,qui vouloit braver lesEn-:
nemis dans leur retraite , opina à remettre le Vaiſſeau à flot, &
àne leur pointcacher ſa route.
Apres qu'il eut tiré tout ſon Canon par fon ordre , il mit à
la voile fur les huit heures du
foir , & ce Duc ayant repris le chemin le longde la Coſte , ar- riva au pointdujour auHavre en meſme temps que le Vaif- ſeau. Jugez, Madame, dela joye des Intereſſez , &du Capitaine qui le croyoient perdu ſans re- fource. Tous ceux qui ont eu part à cette Action , en ont re
GALANT. 191 ceu beaucoup de loüanges ,
Me l'Abbé de Coffe , Gentilhomme de Marseille , &Frere
d'un Capitaine de Cavalerie du meſme nom , entra dés le ſoir dans le Vaiſſeau pour partager le plaifir & la gloire de cette défenſe. On a ſceu d'un Capitaine Anglois arrivé depuis cette Attaque , qu'il avoit ren- contré les cinq Frégates avec leurs Maneuvres en granddef- ordre , ſur tout l'Amirale , qui avoit pluſieurs coups à l'eau,
tout ſon Arriere briſe , & force
Gens hors de combat. Les Ennemis luy ont dit que ce qui leur avoit fait conclure leur retour, eſtoit qu'ils avoient connu les Gardes de M. de S. Aignan,
& que s'eſtant apperçeus avec,
leurlongue veuë , qu'il montoit luy-meſme dans le Vaiſſeau , ils
192 LE MERCVRE s'eſtoient bien imaginez qu'on n'oublieroit rien pour ſa dé- fenſe. Ce témoignage eſt bien glorieux pour ce Duc , qui joi- gnant la liberalité à tant d'au- tres vertus qui l'accompagnent,
ne ſe contenta pas de recom- penfer ceux de l'Equipage par des loüanges , mais leur donna de l'argent pour s'eſtre ſi di- gnement acquitez de leur de- voir. Ce fut là -deſſus qu'un agreable Eſprit deFécam fit ces deux Vers , en parlantde luy à
luy-mefme.
Il les mit enétatde ne craindre
plusrien,
Etlesrécompensad'avoirſauvé leurBien,
Les principaux Intereſſez ont eſté ravis de la maniere dont
ce Duc s'eſt pris pour ſauver Ieur Vaiſſeau contre toute apparence,
GALANT. 193 parence , & mefme contre leur
attente.
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Résumé : Une Escadre de 5. Fregates Ostendoises attaque devant Fécam un Vaisseau Marchand estimé quatre-vingt mille escus. Il est sauvé par les bons ordres de M. le Duc de S. Aignan. [titre d'après la table]
Le texte décrit une bataille navale près de Fécam entre le vaisseau français Saint George et une escadre ennemie de cinq frégates. Le Saint George, commandé par M. de Longueil, fut attaqué par des boulets à deux têtes, subissant des dommages et blessant un matelot. Malgré une résistance acharnée, les frégates ennemies se retirèrent après avoir subi des pertes. M. de Saint Aignan, informé de l'attaque, partit du Havre pour secourir le Saint George. À son arrivée, il affronta les ennemis, qui finirent par fuir. Saint Aignan décida de remettre le vaisseau à flot et de poursuivre les ennemis. Le vaisseau et Saint Aignan arrivèrent au Havre en même temps, suscitant la joie des intéressés et du capitaine. Un abbé de Coffe rejoignit l'équipage pour partager leur gloire. Un capitaine anglais confirma les dommages subis par les frégates ennemies, soulignant l'impact de la présence de Saint Aignan. Saint Aignan récompensa l'équipage pour leur courage. Un habitant de Fécam composa des vers en l'honneur de Saint Aignan, célébrant sa bravoure et sa générosité. Les intéressés furent ravis de la manière dont Saint Aignan avait sauvé le vaisseau.
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7
p. 274-299
Ce qui s'est passé pendant toute la Campagne entre l'Armée du Roy commandée par M. le Baron de Monclar, & celle des Cercles. [titre d'après la table]
Début :
J'en aurois de grandes pour m'étendre sur la Campagne [...]
Mots clefs :
Baron de Monclar, Troupes, Cercles, Saxe, Maréchal de Créquy, Officiers allemands, Ennemis, Bataille, Armée, Strasbourg, Camp, Campagne, Eisenach, Combat
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texteReconnaissance textuelle : Ce qui s'est passé pendant toute la Campagne entre l'Armée du Roy commandée par M. le Baron de Monclar, & celle des Cercles. [titre d'après la table]
J'en auroisde grades pour m'é- tendre ſur la Campagne de M. le Baron de Monclar, fi l'accablementde la matiere qui m'a fait attendre juſqu'à aujour- d'huy à vous en parler , nem'o- bligeoit à la reſſerrer en peu de mots. Vousſcavez que l'Armée qu'il commande eſtoit oppoſée à celle Cercles , compoſée des Troupes de tantd'Etats , qu'elle
pourroit ſeule tenir teſte à un Roy moins puiſſant que celuy deFrance. Il y a plufieursCer-
-
Hv
178 LE MERCVRE
cles , comme ceux de la Baffe
Saxe , de Franconie , de Suabe,
de Baviere , juſqu'au nombre de dix, &pluſieurs Provinces font
ſous chaque Cercle. Le Prince
de Bade-Dourlach fut leurdernier General. Apres ſa mort il
en falut nommer un nouveau.
L'Affaire fut miſe en déliberation àla Diete de Ratiſbonne..
Pluſieurs grands Generauxdes plus Illuftres Maiſons d'Alle- magne y pretendoient ; mais enfin le choix tomba fur le
Prince de Saxe-Eyfenach, de la Maiſon de Saxe. Le voilà donc
ſaiſi du Commandement de
cette Armée. Le ſeul Nom en
prometbeaucoup. Lesuns l'ap- pellent l'Armée des Cercles de 'Empire ,les autres l'Armée de l'Empire , &la plupart l'Armée des Cercles duHautRhin.Pl
Y
GALANT. 179
fieurs Officiers Generaux , en
grande confideration chez les
Allemands , font nommez pour y fervir. Le Comte de Dune- vald , Officier d'un fort grand merite , eſt du nombre. Ondeſtine fon Regiment pour groffir les Troupes de cette Armée ,
auſquelles pour reconnoiſſance du Generalat , le Prince d'Eyſe- nach en joint beaucoup , auffi bien que les Ducs de Saxe- Gotha, & de Vveïmar. Toutes
ces Troupes ſe mettent en mar- che vers Strasbourg. A leur
approche le Magiſtrat proteſte qu'il ne les laiſſera point paſſer fur fon Pont ; mais on reconnoît l'intelligence fi -toſt qu'el- les font en veuë , il feint qu'il ne peut refifter , &leurpermet le paſſage. Cette Armée étant au delà du Rhin , & ayant eu
Hvj
180 LE MERCVRE
grande peine à y ſubſiſter quel- que temps , elle prenddu Pain pour dix jours, s'avance vers les Montagnes , vient juſqu'à une lieuë de Scheleftat ; & appre- nant qu'il eſt fortifié , qu'il y a
onze Redoutes de pierre,&que Mle Baronde Monclareft derriere avec des Troupes , elle noſe prendre la réſolution de l'attaquer. Dans cet embarras,
le Prince d'Eyfenach marche vers Colmar , où le bon ordre
que les François mettent par tout à leurs affaires le réduit à
faire demander une ſomme aux
Etats de Suabe pour la fubfi- ſtance de ſes Troupes. Il eſt contraint de tirer des Munitions de Philifbourg que le Ma- giſtrat de Strasbourg luienvoye querir avec une Eſcorte.Pendat
se tempsMr de Monclar couvre
GALANT. 181
fi bien toutes ſes Places , qu'à peine les Ennemis voyent - ils jour à ſurprendre le moindre Chaſteau. Ils veulent prendre celuyde Sainte Croix auprés de Colmar. M' du Fay Comman- dantde Briſac y envoyequatre- vingt-hommes. Ils le font ſommer , le Gouverneur ne veut
point ſe rendre. M de Vifſac Lieutenant de Roy de Briſac,
trouve moyen de ſe jetter de- dans avec quatre cens hommes,
malgré toute l'Armée ennemie,
& ce Chaſteau n'eſt point pris.
Enfin le Prince d'Eyſenach voyant qu'il n'avoit encor pû réüffir de ce coſté ,fait venir de
Fribourg dequoy faire un Pont de Bateaux vers Bafle. M. de
Monclar paſſe dans le Briſgau pour obſerver ſes mouvemens,
&apprend qu'il s'eſt allé cam
182 LE MERCVRE
per pres de Bafle , apres avoir fait ravager les Bleds des envi- rons de Colmar, contre ce qu'il avoit promis aux Habitans qui luy avoient donné de l'argent pour s'en garantir. C'eſt le ſeul Exploit deſa Campagne , encor ne l'auroit-il pas fait s'il n'euſt manqué de parole. Il campe ſous Bafle à Hunninguen, fait achever fon Pont de Bateaux ,
&ſe retire à Bafle ſurpris d'une Fiévre-tierce que ſes mauvais fuccés ont pûluy cauſer. M.de Monclar reçoit un renfort qui luy eſt envoyé par M. le maref- chal deCréquy, &fait repentir ceux qui ont fourny quelque ſubſiſtance aux Ennemis. Ils
font travailler àdes Retranchemens aux deux coſtez de leur
Pont. Les Noſtres favoriſent
un Convoy d'argent qui va à
GALANT. 183 Brifac, fans qu'un Détachement du Prince d'Eyſenach entre- prennede s'y oppoſer. CePrin- ce fait baſtir une Redoute dans
une Iſle pour maintenir ſon Pont, &perſonne n'oſe ſortirde fon Camp, On leur rend dans leBriſgau les violences qu'ils ont exercé autour de Ruffac.
M. de monclar avance à trois
lieuës d'eux; ils ſont venus nous
chercher , & on les cherche.
Les Païfans ſont employez àdes Redoutes pour couvrir leur Pont. Onvoit par là qu'ils fu- yent le Combat. On ſe retran- che auſſi . Cependant les Gene- raux & les Offciers ſe traitent
les uns les autres àBafle. мебſieurs les marquis de Lambert,
de Nefle & de Feuquiere, y ré- galent le Baron de Noſtits- Schirein , & d'autres Officiers
184 LE MERCVRE Allemans. En ſortant de la
Ville les Partis s'entrechargent les uns les autres. Pendant
qu'on a ainſi occafion de ſe voir
àBafle, le Comte deDunevald
pratique un Officier François nommé M de la Madelaine ,
Major du Chaſteau de Lanf- cron, qui luy doit livrer la Place moyennantdix mille eſcus. Ce Major en avertit M. de Siffredy quiy commandoit. Le Comte de Dunevald vient à l'heure
marquée avec le Neveu du Prince de Saxe,le Colonel Rofe,&des Troupes. Il s'apper- çoit qu'il eſt découvert , prend la fuite , & reçoit un coup de Mouſquet qui luy emporte fon Chapeau & fa Perruque. Plu- ſieurs y perdent la vie. Ceux qui ontpaffe la Herſe ſont faits Pri- fonniers , & il en couſte dix
GALANT. 185 mille eſcus aux Allemans. Le
Prince d'Eyſenach comméçant à ſe mieux porter, &les Trou- pes des Cercles &celles que j'ay marquées ne luy fuffiſant pas , trois nouveaux Regimens le viennent joindre. Il eſt har- celé de la Garniſon de Brifac.
Apres unemarche de huit heu- res Me deMonclar ſurprend un des Quartiers des Ennemis ,
fait quatre cens Priſonniers,
prend cinq cens Chevaux, fe rend maiſtre du Chaſteau de
Plotzeim , ſe poſte avantageu- ſement pour obſerverles Enne- mis, ſe ſaiſit d'une Hauteur, fait travailler à une Redoute qui
voit dans leur Camp & y met duCanon. Monfieur le Comte
de la Mote- Moudancourt Meftre de Camp de Cavalerie ,Ne- veu du Marefchal de ce nom,
186 LE MERCVRE
ayant l'avantgarde compoſée de quatre cens Chevaux , ren- contre un pareil nombre des Ennemis qui en couvroient un fort grand de Fourrageurs fans avoir eſté avertis de fa marche.
Il les défait, &prend ſept à huit cens Fourrageurs ou Cavaliers.
Le reſte fuit. On leur envoye huit censChevaux pourles foû- tenir. M. le Comte de la Mote
avec une vigueur incroyable ,
pouffe & défait encor ces huit
cens Chevaux, &demeure fer- me fur le champ de Bataille ,
éloigné feulement d'une demy lieuë duCampdes Ennemisfans qu'il en forte depuis aucun ſe- cours , c'eſt à dire qu'avec qua- tre cens Chevaux ilen renverſe
douze cens , ſans compter les Fourrageurs. Ce font d'illuftres commencemens , & ce jeune
GALAN T. 187 Comte ne ſçauroit marcher plus dignement ſur les pas du fameux Mareſchal dont il eſt
Neveu. Depuis cette Action on a toûjours coupé tous les Fourrages aux Ennemis , pour les obliger à repaffer tout-à-fait le Rhin, ou àſebattre. Onleur attaque en ſuite une Redoute paliſſadée &un Logement dont on ſe rend maiſtre , & on les
oblige à fe refferrer dans leur Camp. M. le Marquis de Noailles Colonel de Cavalerie
défait leur grande Garde. II fait conftruire une Redoute
pour les incommoder , & foû- tient les Travailleurs. M. de
Monclar en fait élever deux autres. M. de Caumont major de Cavalerie bat deux de leurs
Eſcadrons aux enviros deBafle.
Les Ennemis commencent à
188 LE MERCVRE
fonger à leur Retraite. Noftre Arméeeſt à la portéedu Canon de la leur. On voit tout cequi ſe paſſe dans leur Camp, fans quils puiffent voir ce qui ſe fait dans le noftre. On les
oblige de tirer du Fourrage par leur Pont, noftreCanon les defole. Onpouſſe leur Garde , on leur tuë beaucoup de monde,
&on fait quartier au Baronde Noſtits. Ils prennent toutes les précautions imaginables pour nous cacher leur Retraite. Ils
font d'abord repaſſer leur gros Bagage,& repaffent eux-mémes quelque temps apres à la faveur d'un grand Brouillard qui les empeſche d'eſtre apperceus.
Ondécouvre le matin qu'ils ont abandonné leur Redoute ; &
comme on les voit qui ſe reti- rent encor , favoriſez d'un Ca
GALAN T. 189
non qu'ils ont poſté de l'autre coſte du Rhin , M² de Monclar enfait poſter du fien ,&les oblige par là à ſe retirer avec une précipitation qui eſt cauſe que beaucoup d'entr'eux ſont noyez. Ils nous laiſſent tout les Bateaux du gros bras du Rhin ,
&s'échapent apres avoir brûlé tous ceux qui estoient par delà- 1 Ifle , auffi-bien que quelques piles de Foin , mais nous profi- tons du Fourrage qui eſt dans leur Champ. Les Ennemis ne repaſſent chez eux que pour y
eſtre battus , & c'eſt par ce Combatque finit la Campagne de l'Armée des Cercles , avant
que d'eſtre incorporée à celle du Prince Charles. Le Pont
qu'avoit fait conſtruire le Prin- ced'Eyfenach ne luy ayant fer- vy qu'aſe retirer apres enavoir
190 LE MERCVRE perdu la moitié , Monfieur de Monclar paſſe ſur celuy de Bri- fac , & entre dans le Briſgau.
M.le Marquis de la Valette le joint auſſi-toſt apres avec ſa Bri- gade. leGeneral ennemy en eſt • furpris , &plus encor d'apren- dre queM' le MareſchaldeCréquy fait conſtruire un Pont à
Rhenau pour paſſer le Rhin. II réſout de s'y oppoſer. M. de Monclar qui obferve ſes mou- vemens,envoye M.de Caumont,
Capitaine & major du Regi.. ment de Belport, avecdeux Ef- cadrons , pourſe ſaiſir d'unPaf- ſage. Ils font pouſſez par ſept des Ennemis , &ſe tirent pour- tant d'affaires ſans perdre qu'un ſeul Capitaine. Le Prince d'Ey- fenach veut gagner le Poſte de Capelqui eſt vis-à-vis de Rhe- nau ,mais il eſt embaraſſé par
GALANT. 191
L
un nouveau General. Il croit
que M. de monclar fonge à ſe faifir d'Offembourg. Cette pen- ſée luy fait diviſer ſes forces. Il y
envoye du monde , & à Fribourg ; & pendant ce temps ,
Monfieur de Créquy ſe rend maiſtre du Poſte que le Prince d'Eyſenach avoit eu deſſein d'occuper. C'eſt ce que beau- coup de Relations n'ont pas aſſez ny marqué , ny éclaircy.
M. de Créquy voulant donner de l'inquietude au Ennemis ,
- laiſſe ſes Ordres à Monfieur le
Comtede Maulevrier - Colbert
- Lieutenant General , pour faire paffer l'Armée ſur le Pont du Rhin,&fait marcher les Briga- - des de la Valete & de Dugas ,
avec les Regimens de Dragons de Liſtenay & de Theſſe, entre Strafbourg & Offembourg. Il
192 LE MERCVRE
s'avance pres de Vilſtet. Il ap- prend que les Ennemis y vien- nent camper , & juge à propos d'y attendre un plus grand CorpsdeTroupes pour paſſerla Riviere devant eux. Il n'a pas le temps de le faire. Un Party lui rapporte que le Prince d'Ey- fenach veut gagner le Fort de Kill , ce qui luy eſt bien-toſt apres confirmé par une grande pouffiere. Il croit qu'il faut ten- ter le Paſſage par des guez,quoy que difficiles, m' le marquis de Genlis fait les Détachemens de
la premiere Colomne , Monfieur le Comte de Roye ceux de la
ſeconde , & M. de monclar ſoûtient ces deux Lignes. м. lе маг- quis de Riverolles ſe met à la
teſte des Gens detachez , paffe l'eau , & tâche d'ébranler les Ennemis. Ils font grand feu fur
luy ,
Y
GALANT. 193 193
4
luy , il retourne à la charge , il eſt bleſſé ,&M. de Monteſquiou Capitainedans ſon Regiment ,
tué. Les Dragons de Liſtenay s'aprochent des hayes , mettent pied à terre , & rendent les abords de la Riviere plus faciles. M'les marquis de Ranes
de Lambert , & de Bouflairs ,
pouffent quelques Troupes , &
apres les premieres eſcarmou- ches , ébranlent les Ennemis ,
qui à la faveurd'une Digue ſe placent aſſez prés des Noſtres.
Monfieur le mareſchal de Créquy fait auſſitôt avancerlesRe- gimensde la Valete, deCayeux,
&de Villars. Le marquis de ce nom , qui en eſt Colonel , ſe met àla teſte des premiersEſca- drons , montre une vigueur ex- traordinaire , & les anime par ſon exemple. IldéfaitunegranTome VIII. I
194 LE MERCVRE deGarde des Ennemis , &pouf- ſe pluſieurs Efcadrons deCui- raffiers. M les marquis deRa- nes , de Lambert , & de Bouflairs , placent les Dragons de Theſſe & de Liſtenay le long de la Digue. Ils font voir une activité ſurprenante , & char- gent les Enriemis avec tant de vigueur&de courage , que les ayant mis en deſordre , ils les auroient entierement défaits ,
ſansl'arrivée de la nuitqui fa- voriſa leur Retraite. Pluſieurs
de leursOfficies furent tuez ,&
ils laiſſferent plus de fix cens Hommesſur la place , ſans plus de fix- vingt Chariots qu'ils abandonnerent. Cette occafion
nenouscouſtapas vingtHom- mes. M. de Roquefeüille Corne- te desGardes de M. le marefchal deCréquy ,&M. deBriail
GALANT. 195 le l'un de ſes Pages , y furent bleſſez , le dernier à la jambe ,
&l'autre au bras d'un coup de Piſtolet qu'il y reçeut. Avant le Combat , M. deGaſſion cher- chantàreconnoiſtre les Ennemis , tomba dans la Colomne de
leur premiere Ligne , &foûtint toute leur Cavalerie qui le pouſſa.Il neperditque fixHom- mes , & s'en eſtant glorieuſe- ment retiré , on peut dire que c'eſt preſque contre toute une Armée qu'il acombatu. On n'a peut-eſtre pas reflechy ſur une choſe qui fait en deux mots I'Eloge de M. le Mareſchal de Créquy. L'Armée de l'Empe- reur eftant venuë juſqu'àMou- zon ,a eſté obligée de s'en re- tourner ſans avoir rien fait ; &
M.de Créquy faitune fi extra- ordinaire diligence , qu'il eſt I ij
196 LE MERCVRE
dans les Terres de l'Empire plûtoſt qu'elle , &bat l'Armée des Cercles avantqu'aucune de ſes Troupes ſoit arrivée. C'eſt
tout ceque peutfaire &la plus ſage conduite ,& la plus exacte prévoyance. Cette déroute fut doublement ſenſible au Prince
deSaxe-Eyfenach. Meſſieurs de Strasbourg qui craignent &
cherchent àménager les Vain- queurs qui ne font pas éloi- nez n'oferent recevoir des
Troupes batuës, &celles- cy fu- rent contraintes de ſe refugier dans une Iſle appellée l'Iſle du Pont de Strasbourg. Elles s'y trouverent fort incommodées.
Elles nepouvoient aller au fou- rage, & elles eſtoient encor ſi épouvantéesdela manieredont elles avoient veu combatre les
François, qu'elles nevouloient
,
GALANT. 197 point fortir de cette Ifle ſans Sauf - conduit. Le ſeul expe- dient que le Prince d'Eyſenach trouva pourſe dégager, fut de prier M'de Strasbourg d'aller enCorps chez le Refident du
Roy, &de l'engager à joindre K
-ſes prieres aux leurs pour obte -nir unPaſſeport de Monfieurle Mareſchal de Créquy. L'ex- pedient eft nouveau , &ne pa- roiſtroit pas croyable dans un Roman. Monfieurdu Pré Réſident de France écrivit. La Lettre fut envoyée par un Trom- pete au nom de la Republique de Strasbourg , & ce qu'onde- mandoit fut accordé. Les François ſont auffi honneſtes que braves , & ne refuſent rien
quand on ſe ſoûmet. Vous avez veu lePaſſeport , il eſt imprimé dans la Gazete. Le lendemain
4
I iij
198 LE MERCVRE
du Combat , Monfieur de Créquy ſçachant que les Ennemis ayoient fait un grand amas de Fourrages dans Vilſtet , crût qu'il eſtoit de conſequence d'envoyer brûler les Magaſins & toutes les Maiſons dans lefquelles il y en avoir. M le Comte de la mothe fut détaché avec trois cens Chevaux
pour faire cette Expédition.
Apres avoir pouffé quelques Troupes qu'il rencontra en chemin , il ſe rendit à Vilſtet & fut fupris de trouver Gar- niſon dans le Chafteau. C'eſt
une Tour de grandes pierres quarrés , & environnées d'un bon Foffe. Il envoya un Trom- pete fommer laGarniſon de ſe rendre , & fur le refus qu'elle en fit, il donna ordre qu'ondiſt au Commandant , que s'il ſe
6
GALANT. 199 défendoit , il le feroit pendre à
la Porte , fans aucun quartier pour les Soldats. Ils voulurent
compofer , &ayant inutilement demandé à fortir avec armes &
bagages, ils ne furét reçeus qu'à difcretion. Il avoit fait mettre
pied àterre à ſes Cavaliers , &
quand ils le virent en reſolution de les attaquer , ils ſe rendirent.
Il envoya la Garniſon à M. de Créquy , fit mettre le feu au Chaſteau , & àtoutes les maіſons oùil y avoit du Fourrage ,
& enſuite aux magaſins de Foin qui estoient fort conſidérables.
C'eſt l'uſage de la Guerre , &
il n'y a point de voye plus prompte pour chaffer un En- nemy , quede luy oſterles mo- yens de fubfifter. Cette raiſon a
obligé Monfieur le mareſchal de Créquy à faire brûler beau I iij
200 LE MERCVRE
coup de Fourrages &de mou- linsen deçadu Rhin , & M. de Monclar a fait la meſme choſe
dans le marquiſat de Bade ,
dans les Bourgs du Briſgau, &
dans tous les Lieux où les Ennemis pouvoient prendre des Quartiers d'Hyver. C'eſt par où il a finy la Campagne , l'Ar- mée qu'il commandoit en Chef ayant eu ordre de ſe joindre à
celle de M. de Créquy , pour n'en plus compoſer qu'une fous le Commandement de се ма
refchal.
pourroit ſeule tenir teſte à un Roy moins puiſſant que celuy deFrance. Il y a plufieursCer-
-
Hv
178 LE MERCVRE
cles , comme ceux de la Baffe
Saxe , de Franconie , de Suabe,
de Baviere , juſqu'au nombre de dix, &pluſieurs Provinces font
ſous chaque Cercle. Le Prince
de Bade-Dourlach fut leurdernier General. Apres ſa mort il
en falut nommer un nouveau.
L'Affaire fut miſe en déliberation àla Diete de Ratiſbonne..
Pluſieurs grands Generauxdes plus Illuftres Maiſons d'Alle- magne y pretendoient ; mais enfin le choix tomba fur le
Prince de Saxe-Eyfenach, de la Maiſon de Saxe. Le voilà donc
ſaiſi du Commandement de
cette Armée. Le ſeul Nom en
prometbeaucoup. Lesuns l'ap- pellent l'Armée des Cercles de 'Empire ,les autres l'Armée de l'Empire , &la plupart l'Armée des Cercles duHautRhin.Pl
Y
GALANT. 179
fieurs Officiers Generaux , en
grande confideration chez les
Allemands , font nommez pour y fervir. Le Comte de Dune- vald , Officier d'un fort grand merite , eſt du nombre. Ondeſtine fon Regiment pour groffir les Troupes de cette Armée ,
auſquelles pour reconnoiſſance du Generalat , le Prince d'Eyſe- nach en joint beaucoup , auffi bien que les Ducs de Saxe- Gotha, & de Vveïmar. Toutes
ces Troupes ſe mettent en mar- che vers Strasbourg. A leur
approche le Magiſtrat proteſte qu'il ne les laiſſera point paſſer fur fon Pont ; mais on reconnoît l'intelligence fi -toſt qu'el- les font en veuë , il feint qu'il ne peut refifter , &leurpermet le paſſage. Cette Armée étant au delà du Rhin , & ayant eu
Hvj
180 LE MERCVRE
grande peine à y ſubſiſter quel- que temps , elle prenddu Pain pour dix jours, s'avance vers les Montagnes , vient juſqu'à une lieuë de Scheleftat ; & appre- nant qu'il eſt fortifié , qu'il y a
onze Redoutes de pierre,&que Mle Baronde Monclareft derriere avec des Troupes , elle noſe prendre la réſolution de l'attaquer. Dans cet embarras,
le Prince d'Eyfenach marche vers Colmar , où le bon ordre
que les François mettent par tout à leurs affaires le réduit à
faire demander une ſomme aux
Etats de Suabe pour la fubfi- ſtance de ſes Troupes. Il eſt contraint de tirer des Munitions de Philifbourg que le Ma- giſtrat de Strasbourg luienvoye querir avec une Eſcorte.Pendat
se tempsMr de Monclar couvre
GALANT. 181
fi bien toutes ſes Places , qu'à peine les Ennemis voyent - ils jour à ſurprendre le moindre Chaſteau. Ils veulent prendre celuyde Sainte Croix auprés de Colmar. M' du Fay Comman- dantde Briſac y envoyequatre- vingt-hommes. Ils le font ſommer , le Gouverneur ne veut
point ſe rendre. M de Vifſac Lieutenant de Roy de Briſac,
trouve moyen de ſe jetter de- dans avec quatre cens hommes,
malgré toute l'Armée ennemie,
& ce Chaſteau n'eſt point pris.
Enfin le Prince d'Eyſenach voyant qu'il n'avoit encor pû réüffir de ce coſté ,fait venir de
Fribourg dequoy faire un Pont de Bateaux vers Bafle. M. de
Monclar paſſe dans le Briſgau pour obſerver ſes mouvemens,
&apprend qu'il s'eſt allé cam
182 LE MERCVRE
per pres de Bafle , apres avoir fait ravager les Bleds des envi- rons de Colmar, contre ce qu'il avoit promis aux Habitans qui luy avoient donné de l'argent pour s'en garantir. C'eſt le ſeul Exploit deſa Campagne , encor ne l'auroit-il pas fait s'il n'euſt manqué de parole. Il campe ſous Bafle à Hunninguen, fait achever fon Pont de Bateaux ,
&ſe retire à Bafle ſurpris d'une Fiévre-tierce que ſes mauvais fuccés ont pûluy cauſer. M.de Monclar reçoit un renfort qui luy eſt envoyé par M. le maref- chal deCréquy, &fait repentir ceux qui ont fourny quelque ſubſiſtance aux Ennemis. Ils
font travailler àdes Retranchemens aux deux coſtez de leur
Pont. Les Noſtres favoriſent
un Convoy d'argent qui va à
GALANT. 183 Brifac, fans qu'un Détachement du Prince d'Eyſenach entre- prennede s'y oppoſer. CePrin- ce fait baſtir une Redoute dans
une Iſle pour maintenir ſon Pont, &perſonne n'oſe ſortirde fon Camp, On leur rend dans leBriſgau les violences qu'ils ont exercé autour de Ruffac.
M. de monclar avance à trois
lieuës d'eux; ils ſont venus nous
chercher , & on les cherche.
Les Païfans ſont employez àdes Redoutes pour couvrir leur Pont. Onvoit par là qu'ils fu- yent le Combat. On ſe retran- che auſſi . Cependant les Gene- raux & les Offciers ſe traitent
les uns les autres àBafle. мебſieurs les marquis de Lambert,
de Nefle & de Feuquiere, y ré- galent le Baron de Noſtits- Schirein , & d'autres Officiers
184 LE MERCVRE Allemans. En ſortant de la
Ville les Partis s'entrechargent les uns les autres. Pendant
qu'on a ainſi occafion de ſe voir
àBafle, le Comte deDunevald
pratique un Officier François nommé M de la Madelaine ,
Major du Chaſteau de Lanf- cron, qui luy doit livrer la Place moyennantdix mille eſcus. Ce Major en avertit M. de Siffredy quiy commandoit. Le Comte de Dunevald vient à l'heure
marquée avec le Neveu du Prince de Saxe,le Colonel Rofe,&des Troupes. Il s'apper- çoit qu'il eſt découvert , prend la fuite , & reçoit un coup de Mouſquet qui luy emporte fon Chapeau & fa Perruque. Plu- ſieurs y perdent la vie. Ceux qui ontpaffe la Herſe ſont faits Pri- fonniers , & il en couſte dix
GALANT. 185 mille eſcus aux Allemans. Le
Prince d'Eyſenach comméçant à ſe mieux porter, &les Trou- pes des Cercles &celles que j'ay marquées ne luy fuffiſant pas , trois nouveaux Regimens le viennent joindre. Il eſt har- celé de la Garniſon de Brifac.
Apres unemarche de huit heu- res Me deMonclar ſurprend un des Quartiers des Ennemis ,
fait quatre cens Priſonniers,
prend cinq cens Chevaux, fe rend maiſtre du Chaſteau de
Plotzeim , ſe poſte avantageu- ſement pour obſerverles Enne- mis, ſe ſaiſit d'une Hauteur, fait travailler à une Redoute qui
voit dans leur Camp & y met duCanon. Monfieur le Comte
de la Mote- Moudancourt Meftre de Camp de Cavalerie ,Ne- veu du Marefchal de ce nom,
186 LE MERCVRE
ayant l'avantgarde compoſée de quatre cens Chevaux , ren- contre un pareil nombre des Ennemis qui en couvroient un fort grand de Fourrageurs fans avoir eſté avertis de fa marche.
Il les défait, &prend ſept à huit cens Fourrageurs ou Cavaliers.
Le reſte fuit. On leur envoye huit censChevaux pourles foû- tenir. M. le Comte de la Mote
avec une vigueur incroyable ,
pouffe & défait encor ces huit
cens Chevaux, &demeure fer- me fur le champ de Bataille ,
éloigné feulement d'une demy lieuë duCampdes Ennemisfans qu'il en forte depuis aucun ſe- cours , c'eſt à dire qu'avec qua- tre cens Chevaux ilen renverſe
douze cens , ſans compter les Fourrageurs. Ce font d'illuftres commencemens , & ce jeune
GALAN T. 187 Comte ne ſçauroit marcher plus dignement ſur les pas du fameux Mareſchal dont il eſt
Neveu. Depuis cette Action on a toûjours coupé tous les Fourrages aux Ennemis , pour les obliger à repaffer tout-à-fait le Rhin, ou àſebattre. Onleur attaque en ſuite une Redoute paliſſadée &un Logement dont on ſe rend maiſtre , & on les
oblige à fe refferrer dans leur Camp. M. le Marquis de Noailles Colonel de Cavalerie
défait leur grande Garde. II fait conftruire une Redoute
pour les incommoder , & foû- tient les Travailleurs. M. de
Monclar en fait élever deux autres. M. de Caumont major de Cavalerie bat deux de leurs
Eſcadrons aux enviros deBafle.
Les Ennemis commencent à
188 LE MERCVRE
fonger à leur Retraite. Noftre Arméeeſt à la portéedu Canon de la leur. On voit tout cequi ſe paſſe dans leur Camp, fans quils puiffent voir ce qui ſe fait dans le noftre. On les
oblige de tirer du Fourrage par leur Pont, noftreCanon les defole. Onpouſſe leur Garde , on leur tuë beaucoup de monde,
&on fait quartier au Baronde Noſtits. Ils prennent toutes les précautions imaginables pour nous cacher leur Retraite. Ils
font d'abord repaſſer leur gros Bagage,& repaffent eux-mémes quelque temps apres à la faveur d'un grand Brouillard qui les empeſche d'eſtre apperceus.
Ondécouvre le matin qu'ils ont abandonné leur Redoute ; &
comme on les voit qui ſe reti- rent encor , favoriſez d'un Ca
GALAN T. 189
non qu'ils ont poſté de l'autre coſte du Rhin , M² de Monclar enfait poſter du fien ,&les oblige par là à ſe retirer avec une précipitation qui eſt cauſe que beaucoup d'entr'eux ſont noyez. Ils nous laiſſent tout les Bateaux du gros bras du Rhin ,
&s'échapent apres avoir brûlé tous ceux qui estoient par delà- 1 Ifle , auffi-bien que quelques piles de Foin , mais nous profi- tons du Fourrage qui eſt dans leur Champ. Les Ennemis ne repaſſent chez eux que pour y
eſtre battus , & c'eſt par ce Combatque finit la Campagne de l'Armée des Cercles , avant
que d'eſtre incorporée à celle du Prince Charles. Le Pont
qu'avoit fait conſtruire le Prin- ced'Eyfenach ne luy ayant fer- vy qu'aſe retirer apres enavoir
190 LE MERCVRE perdu la moitié , Monfieur de Monclar paſſe ſur celuy de Bri- fac , & entre dans le Briſgau.
M.le Marquis de la Valette le joint auſſi-toſt apres avec ſa Bri- gade. leGeneral ennemy en eſt • furpris , &plus encor d'apren- dre queM' le MareſchaldeCréquy fait conſtruire un Pont à
Rhenau pour paſſer le Rhin. II réſout de s'y oppoſer. M. de Monclar qui obferve ſes mou- vemens,envoye M.de Caumont,
Capitaine & major du Regi.. ment de Belport, avecdeux Ef- cadrons , pourſe ſaiſir d'unPaf- ſage. Ils font pouſſez par ſept des Ennemis , &ſe tirent pour- tant d'affaires ſans perdre qu'un ſeul Capitaine. Le Prince d'Ey- fenach veut gagner le Poſte de Capelqui eſt vis-à-vis de Rhe- nau ,mais il eſt embaraſſé par
GALANT. 191
L
un nouveau General. Il croit
que M. de monclar fonge à ſe faifir d'Offembourg. Cette pen- ſée luy fait diviſer ſes forces. Il y
envoye du monde , & à Fribourg ; & pendant ce temps ,
Monfieur de Créquy ſe rend maiſtre du Poſte que le Prince d'Eyſenach avoit eu deſſein d'occuper. C'eſt ce que beau- coup de Relations n'ont pas aſſez ny marqué , ny éclaircy.
M. de Créquy voulant donner de l'inquietude au Ennemis ,
- laiſſe ſes Ordres à Monfieur le
Comtede Maulevrier - Colbert
- Lieutenant General , pour faire paffer l'Armée ſur le Pont du Rhin,&fait marcher les Briga- - des de la Valete & de Dugas ,
avec les Regimens de Dragons de Liſtenay & de Theſſe, entre Strafbourg & Offembourg. Il
192 LE MERCVRE
s'avance pres de Vilſtet. Il ap- prend que les Ennemis y vien- nent camper , & juge à propos d'y attendre un plus grand CorpsdeTroupes pour paſſerla Riviere devant eux. Il n'a pas le temps de le faire. Un Party lui rapporte que le Prince d'Ey- fenach veut gagner le Fort de Kill , ce qui luy eſt bien-toſt apres confirmé par une grande pouffiere. Il croit qu'il faut ten- ter le Paſſage par des guez,quoy que difficiles, m' le marquis de Genlis fait les Détachemens de
la premiere Colomne , Monfieur le Comte de Roye ceux de la
ſeconde , & M. de monclar ſoûtient ces deux Lignes. м. lе маг- quis de Riverolles ſe met à la
teſte des Gens detachez , paffe l'eau , & tâche d'ébranler les Ennemis. Ils font grand feu fur
luy ,
Y
GALANT. 193 193
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luy , il retourne à la charge , il eſt bleſſé ,&M. de Monteſquiou Capitainedans ſon Regiment ,
tué. Les Dragons de Liſtenay s'aprochent des hayes , mettent pied à terre , & rendent les abords de la Riviere plus faciles. M'les marquis de Ranes
de Lambert , & de Bouflairs ,
pouffent quelques Troupes , &
apres les premieres eſcarmou- ches , ébranlent les Ennemis ,
qui à la faveurd'une Digue ſe placent aſſez prés des Noſtres.
Monfieur le mareſchal de Créquy fait auſſitôt avancerlesRe- gimensde la Valete, deCayeux,
&de Villars. Le marquis de ce nom , qui en eſt Colonel , ſe met àla teſte des premiersEſca- drons , montre une vigueur ex- traordinaire , & les anime par ſon exemple. IldéfaitunegranTome VIII. I
194 LE MERCVRE deGarde des Ennemis , &pouf- ſe pluſieurs Efcadrons deCui- raffiers. M les marquis deRa- nes , de Lambert , & de Bouflairs , placent les Dragons de Theſſe & de Liſtenay le long de la Digue. Ils font voir une activité ſurprenante , & char- gent les Enriemis avec tant de vigueur&de courage , que les ayant mis en deſordre , ils les auroient entierement défaits ,
ſansl'arrivée de la nuitqui fa- voriſa leur Retraite. Pluſieurs
de leursOfficies furent tuez ,&
ils laiſſferent plus de fix cens Hommesſur la place , ſans plus de fix- vingt Chariots qu'ils abandonnerent. Cette occafion
nenouscouſtapas vingtHom- mes. M. de Roquefeüille Corne- te desGardes de M. le marefchal deCréquy ,&M. deBriail
GALANT. 195 le l'un de ſes Pages , y furent bleſſez , le dernier à la jambe ,
&l'autre au bras d'un coup de Piſtolet qu'il y reçeut. Avant le Combat , M. deGaſſion cher- chantàreconnoiſtre les Ennemis , tomba dans la Colomne de
leur premiere Ligne , &foûtint toute leur Cavalerie qui le pouſſa.Il neperditque fixHom- mes , & s'en eſtant glorieuſe- ment retiré , on peut dire que c'eſt preſque contre toute une Armée qu'il acombatu. On n'a peut-eſtre pas reflechy ſur une choſe qui fait en deux mots I'Eloge de M. le Mareſchal de Créquy. L'Armée de l'Empe- reur eftant venuë juſqu'àMou- zon ,a eſté obligée de s'en re- tourner ſans avoir rien fait ; &
M.de Créquy faitune fi extra- ordinaire diligence , qu'il eſt I ij
196 LE MERCVRE
dans les Terres de l'Empire plûtoſt qu'elle , &bat l'Armée des Cercles avantqu'aucune de ſes Troupes ſoit arrivée. C'eſt
tout ceque peutfaire &la plus ſage conduite ,& la plus exacte prévoyance. Cette déroute fut doublement ſenſible au Prince
deSaxe-Eyfenach. Meſſieurs de Strasbourg qui craignent &
cherchent àménager les Vain- queurs qui ne font pas éloi- nez n'oferent recevoir des
Troupes batuës, &celles- cy fu- rent contraintes de ſe refugier dans une Iſle appellée l'Iſle du Pont de Strasbourg. Elles s'y trouverent fort incommodées.
Elles nepouvoient aller au fou- rage, & elles eſtoient encor ſi épouvantéesdela manieredont elles avoient veu combatre les
François, qu'elles nevouloient
,
GALANT. 197 point fortir de cette Ifle ſans Sauf - conduit. Le ſeul expe- dient que le Prince d'Eyſenach trouva pourſe dégager, fut de prier M'de Strasbourg d'aller enCorps chez le Refident du
Roy, &de l'engager à joindre K
-ſes prieres aux leurs pour obte -nir unPaſſeport de Monfieurle Mareſchal de Créquy. L'ex- pedient eft nouveau , &ne pa- roiſtroit pas croyable dans un Roman. Monfieurdu Pré Réſident de France écrivit. La Lettre fut envoyée par un Trom- pete au nom de la Republique de Strasbourg , & ce qu'onde- mandoit fut accordé. Les François ſont auffi honneſtes que braves , & ne refuſent rien
quand on ſe ſoûmet. Vous avez veu lePaſſeport , il eſt imprimé dans la Gazete. Le lendemain
4
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198 LE MERCVRE
du Combat , Monfieur de Créquy ſçachant que les Ennemis ayoient fait un grand amas de Fourrages dans Vilſtet , crût qu'il eſtoit de conſequence d'envoyer brûler les Magaſins & toutes les Maiſons dans lefquelles il y en avoir. M le Comte de la mothe fut détaché avec trois cens Chevaux
pour faire cette Expédition.
Apres avoir pouffé quelques Troupes qu'il rencontra en chemin , il ſe rendit à Vilſtet & fut fupris de trouver Gar- niſon dans le Chafteau. C'eſt
une Tour de grandes pierres quarrés , & environnées d'un bon Foffe. Il envoya un Trom- pete fommer laGarniſon de ſe rendre , & fur le refus qu'elle en fit, il donna ordre qu'ondiſt au Commandant , que s'il ſe
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GALANT. 199 défendoit , il le feroit pendre à
la Porte , fans aucun quartier pour les Soldats. Ils voulurent
compofer , &ayant inutilement demandé à fortir avec armes &
bagages, ils ne furét reçeus qu'à difcretion. Il avoit fait mettre
pied àterre à ſes Cavaliers , &
quand ils le virent en reſolution de les attaquer , ils ſe rendirent.
Il envoya la Garniſon à M. de Créquy , fit mettre le feu au Chaſteau , & àtoutes les maіſons oùil y avoit du Fourrage ,
& enſuite aux magaſins de Foin qui estoient fort conſidérables.
C'eſt l'uſage de la Guerre , &
il n'y a point de voye plus prompte pour chaffer un En- nemy , quede luy oſterles mo- yens de fubfifter. Cette raiſon a
obligé Monfieur le mareſchal de Créquy à faire brûler beau I iij
200 LE MERCVRE
coup de Fourrages &de mou- linsen deçadu Rhin , & M. de Monclar a fait la meſme choſe
dans le marquiſat de Bade ,
dans les Bourgs du Briſgau, &
dans tous les Lieux où les Ennemis pouvoient prendre des Quartiers d'Hyver. C'eſt par où il a finy la Campagne , l'Ar- mée qu'il commandoit en Chef ayant eu ordre de ſe joindre à
celle de M. de Créquy , pour n'en plus compoſer qu'une fous le Commandement de се ма
refchal.
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Résumé : Ce qui s'est passé pendant toute la Campagne entre l'Armée du Roy commandée par M. le Baron de Monclar, & celle des Cercles. [titre d'après la table]
Le texte relate la campagne militaire du Baron de Monclar contre l'Armée des Cercles, composée de troupes de divers États allemands. Cette armée, initialement dirigée par le Prince de Bade-Dourlach, est ensuite commandée par le Prince de Saxe-Eyfenach après la mort du premier. L'Armée des Cercles, également appelée Armée de l'Empire ou Armée des Cercles du Haut-Rhin, se dirige vers Strasbourg mais est empêchée de traverser le Rhin par le magistrat local. Après avoir traversé, elle se dirige vers Schelestat mais recule face aux fortifications. Le Prince de Saxe-Eyfenach se rend ensuite à Colmar, où il demande des fonds aux États de Suabe pour subvenir aux besoins de ses troupes. Pendant ce temps, le Baron de Monclar défend efficacement les places françaises, empêchant les ennemis de prendre des châteaux stratégiques comme celui de Sainte-Croix près de Colmar. L'armée des Cercles, après avoir ravagé les environs de Colmar, se retire à Bâle en raison de la maladie du Prince de Saxe-Eyfenach. Les deux armées s'affrontent près de Bâle, avec des escarmouches et des constructions de retranchements. Plusieurs officiers français et allemands se rencontrent à Bâle, mais les combats continuent. Une tentative de trahison par un officier français est déjouée. Les troupes françaises, sous le commandement du Baron de Monclar et du Maréchal de Créquy, harcèlent et battent les ennemis, les forçant à se retirer. Les Français construisent des redoutes et harcèlent les ennemis, les obligeant à se retirer précipitamment et à abandonner leurs positions. Le texte décrit également plusieurs affrontements où les troupes françaises, dirigées par des officiers comme le Marquis de Noailles et le Comte de la Mote, infligent des pertes significatives aux ennemis. La campagne se conclut par la retraite des troupes des Cercles, qui repassent le Rhin en laissant derrière eux des pertes humaines et matérielles. Par ailleurs, l'Armée de l'Empereur, arrivée à Mouzon, dut se retirer sans action notable. Le maréchal de Créquy, par une diligence exceptionnelle, battit l'Armée des Cercles avant l'arrivée de ses propres troupes. Cette défaite fut particulièrement dure pour le Prince de Saxe-Eyfenach. Les habitants de Strasbourg, craignant les vainqueurs, refusèrent d'accueillir les troupes battues, qui se réfugièrent sur l'Île du Pont de Strasbourg, où elles furent très inconfortables et refusèrent de quitter l'île sans sauf-conduit. Le Prince d'Eysenach demanda au représentant de France à Strasbourg d'obtenir un passeport du maréchal de Créquy, ce qui fut accordé. Le lendemain de la bataille, le maréchal de Créquy envoya le comte de la Mothe brûler les magasins de fourrage et les maisons à Vilstet. Après avoir repoussé quelques troupes ennemies, le comte de la Mothe surprit une garnison dans le château de Vilstet. Après une négociation, la garnison se rendit et fut envoyée au maréchal de Créquy. Le château et les magasins de fourrage furent incendiés. Cette stratégie, visant à priver l'ennemi des moyens de subsistance, fut également appliquée par le maréchal de Créquy et le marquis de Monclar dans diverses régions. La campagne se termina par la jonction des armées sous le commandement du maréchal de Créquy.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 40-41
REPONSE DE MADAME DES HOULIERES, A Mr LE DUC DE S. AIGNAN.
Début :
Quand vous me cedez la Victoire, [...]
Mots clefs :
Victoire, Combat
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texteReconnaissance textuelle : REPONSE DE MADAME DES HOULIERES, A Mr LE DUC DE S. AIGNAN.
REI>ONSE DE MADAME.
DES HOULIERES~
A MI LE Duc
D E S. A I G N A N~ •
Vantl VOIU me ceàez 111 n..;
Boire,
Yf/#4 vol# c<J11vrez,, d'Nne
g/ojre , .
-
•
·-"---
• -
GALANT.. 4r
Dt vojlre Madrigal tout le monde tj1
charmé. ..
Eji.ce airifi d'1tn comhat qu'on cede
l,avanta,ge ,
.f!J....N' on Je dit vAincu, defarmé?
On connoijl hien qu'à ce langage
You.s t1'cjles f M ACCOÛtumé.
DES HOULIERES~
A MI LE Duc
D E S. A I G N A N~ •
Vantl VOIU me ceàez 111 n..;
Boire,
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g/ojre , .
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Dt vojlre Madrigal tout le monde tj1
charmé. ..
Eji.ce airifi d'1tn comhat qu'on cede
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.f!J....N' on Je dit vAincu, defarmé?
On connoijl hien qu'à ce langage
You.s t1'cjles f M ACCOÛtumé.
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9
p. 173-174
« Il ne faut souvent qu'un moment heureux, & la Grace opere. [...] »
Début :
Il ne faut souvent qu'un moment heureux, & la Grace opere. [...]
Mots clefs :
Grâce, Père, Religion prétendue réformée, Conversion, Erreur, Combat, Abjuration, Mariage
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texteReconnaissance textuelle : « Il ne faut souvent qu'un moment heureux, & la Grace opere. [...] »
Il ne faut fouvent qu'un moment
heureux , & la Grace ope-
H 3
174
MERCURE
re. Le Pere Hilarion de Mortagne
, Capucin des plus zelez ,
paffant de Rouen à la Bouille ,
dans un grand Bateau où il fe
trouve toujours quantité de monde
, y decouvrit une Femme qui
eftoit de la Religion Prétenduë
Reformée . Il combatit fes erreurs
par de fi fortes raisons qu'il l'en
convainquit. Elle abjura peu de
jours apres Tous ceux de la
Bouille ont efté temoin de cette
action .
Mademoiſelle d'Uré , Fille de
Monfieur de la Chaboiffiere ,
Gentilhomme de la Rochelle , a
fait auffi abjuration du Calvinifme
depuis peu de jours . Elle a
depuis époufé Monfieur de Valion
Lieutenant Ayde - Major
au Régiment de Navarre, qui eft
d'une Famille Noble du Soiffonnois
du nom de Haftrel de
Préaux .
heureux , & la Grace ope-
H 3
174
MERCURE
re. Le Pere Hilarion de Mortagne
, Capucin des plus zelez ,
paffant de Rouen à la Bouille ,
dans un grand Bateau où il fe
trouve toujours quantité de monde
, y decouvrit une Femme qui
eftoit de la Religion Prétenduë
Reformée . Il combatit fes erreurs
par de fi fortes raisons qu'il l'en
convainquit. Elle abjura peu de
jours apres Tous ceux de la
Bouille ont efté temoin de cette
action .
Mademoiſelle d'Uré , Fille de
Monfieur de la Chaboiffiere ,
Gentilhomme de la Rochelle , a
fait auffi abjuration du Calvinifme
depuis peu de jours . Elle a
depuis époufé Monfieur de Valion
Lieutenant Ayde - Major
au Régiment de Navarre, qui eft
d'une Famille Noble du Soiffonnois
du nom de Haftrel de
Préaux .
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Résumé : « Il ne faut souvent qu'un moment heureux, & la Grace opere. [...] »
Le Père Hilarion de Mortagne a converti une femme calviniste lors d'un trajet en bateau. Elle a abjuré peu après, témoin par les habitants de La Bouille. Mademoiselle d'Uré, fille du gentilhomme de La Rochelle, a également abjuré et épousé Monsieur de Valion, lieutenant au Régiment de Navarre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
s. p.
A SON ALTESSE ROYALE MONSEIGNEUR LE DUC D'ORLEANS FRERE UNIQUE DU ROY.
Début :
MONSEIGNEUR, S'il n'y a rien de plus difficile [...]
Mots clefs :
Monseigneur, Roi, Siège, Prince, Ennemis, Place, Vie, Temps, Ordres, Âge, Lieux, Monarque, Places, Guerre, Troupes, Combat, Reine, Admiration, Actions, Attaque
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texteReconnaissance textuelle : A SON ALTESSE ROYALE MONSEIGNEUR LE DUC D'ORLEANS FRERE UNIQUE DU ROY.
ASON ALTESSE ROYALE
201
و
MONSEIGNEUR
:
0
LE DUC
D'ORLEANS
FRERE UNIQUE DU ROY
M ONSEIGNEUR,
م
S'il n'y a rien de plus
difficile àfaire que les EpiEPISTRE
.
Stres de la nature de celle
que j'ofe entreprendre ,
c'eſt ſur tout lors qu'onse
propose de donner quelque
idée d'une Vie toute glorieuse
, & qui s'est formée
Sur un Modelle où les
plushautes Vertus se trouvent
dans leur plus brillant
éclat. Quoy que les
bonnes inclinations qu'un
Prince fait voir si - toft
qu'il fort de l'Enfance ,
Semblent devoir faire croire
que la ſuite répondra à de Mon
EPISTRE .
fi beaux commencemens ,
'Histoire ne laiſſe pas de
nous fournir de grands
exemples du contrairs.
Mais , MONSEIGNEUR ,
on n'a pas douté un moment
que le temps ne donnaft
de la force aux vertus
naiſſantes deVoftreAlteffe
Royale , quand on vous a
veu pour la feuë Reyne vostre
Mere un respect 15
une tendreffe qui caufoient
de la joye & de l'admiration
à tous ceux qui avoient
EPISTRE.
P'honneur de vous aprocher.
V. A. R. n'estoit jamais
plus contente , que lors qu'-
Elle estoit avec cette Princeffe.
Vous quittiez fouvent
les plaiſirs qui ont accoutumé
d'attacher les Per-
Sonnes d'un age peu avancé
, pour ſuivre cette vertueuse
Reyne dans les lieux
où sa pieté la conduiſoit..
Vostre chagrin paroiſſoit
fenſible, lors que vous croyiez
luy avoir déplû en quelque
chofe ; & dés queV. A. R.
EPISTRE .
eut remarqué que cettefage
Princeffe fouhaitoit que
vous vous attachaßiez au
Roy, ces voeux furent außitoſt
remplis ; mais , MONSEIGNEUR
, comme vous ne
faites en cela que ſuivre
voſtre penchant naturel , il
a toûjours paru depuis ce
temps-là que rien ne pouvoit
alterer la reſpectueuse
amitié que vous aviez pour
un Monarque quieft devenu
les delices defes Peuples,
& l'admiration de toute la
EPISTRE.
Terre ; le temps n'a fait
qu'augmenter cette union ,
& la tendreſſe vous ayant
joint au Roy ainfi que le
Sang, tout a marqué la
parfaite intelligence dans
laquelle vous vivez. Lors
qu'il s'estagy des divertiffemens
que l'age autorise , &
des Spectacles qu'unSouverain
doit donner pour la
gloire deſon Etat , & pour
occuper la plus vive Feuneſſe
de fa Cour, qui ſans
ces plaisirs neceſſaires auroit
EPISTRE.
pû en chercher d'autres
moins permis on vous a vûs
briller enfemble , &vous
faire reconnoiſtre par voſtre
bonne grace & par vostre
bon air, toutes les fois que
l'usage observé dans ces
fortes de Spectacles demandoit
que vous fußiez caché.
Quandde cesfeux on apaffé
à quelque divertiſſement
Martial , on vous a veus
dans ces Festes guerrieres
dans ces Carrousels commander
l'un l'autre les
EPISTRE .
premieres Quadrilles.Enfin
lors qu'il s'estagy de veritables
fatigues , & de perils
eff ctifs, on peut dire,MONSEIGNEUR
, que vous n'avez
pas feulement accom
pagnéleRoy, mais que vous
avez toujours esté ſonOm
bre,s'ilm' eftpermisdeparler
ainsi, à moins que V.A.R.
n'ait quitté cet Augufte
Frere pour aller vaincre
fes Ennemis en prenant
des Places, ou en gagnant
des Batailles. Le doy parler
EPISTRE.
de cette union , puis que d'e
toutes les merveilles de ce
floriffantEtat, c'est ceque le
Roy deSiam ale plus admiré.
Les Relations conviennent
toutes que lors que ce
Monarque l'eut apprise, il
ditqu'il nes'étonnoitplusdes
prosperitez de la France ,
ny du malheur de quelques
Roisfes voifins, dont la di
viſion de la Famille Royale
avoit cauſe laruine. Enfin
ce Prince en parla d'une
maniere quifit paroiſtre que
EPISTRE.
cestoit la seule chose qui
manquoit au bonheur deSa
Vie , esque s'il euſt eu quelques
Souhaits à former , ils
ne pouvoient estre quesur
une choſe dans laquelle il
faisoit confifter leſouverain
bonheurd'unEtat. LesAmbaffadeurs
de ce Monarque
ne luy diront pas seulement
ce qu'ils ont veu de cetteunion;
mais aprés luy avoir
confirmé tout ce que la Renommée
a prisſoin de luy aprendre
des merveilles de la
i
Vie
EPISTRE.
Viedu Roy , ils parleront de
V. A. R. Ils enfont charmez
, & voicy la troiſiéme
Relation , où l'on peut voir
de quelle maniere ils ont expliqué
ce qu'ils en penſent.
Vostre bonté , MONSEIGNEUR,
leur a paru dans
les choses obligeantes queV.
AR a bien voulu leur dire,
Vostre magnificence a brillé
à leurs yeux dans vos Palais
&&dans vos Festes , &
ils ont paßé pendant leur
Voyage de Flandre dans
EPISTRE.
quelques - uns des lieux où
V. A. R. a fait marcher la
Victoireàses coſtez. Mais
comme ils n'ont vũ qu'une
partie de ce que vous avez
conquis pour le Roy , je ne
Sçaurois m'empescher de
marquer icy tout ce que vous
avez fait lors que vous avez
commandé en Chef les
Armées d'un FrereAuguste
qui vous est plus cher que
vous- même. QuandceMonarque
entreprit la glorieu-
Se Guerre qui vangea tant
EPISTRE.
de Rois , en humiliant une
Puissance inferieure à ces
Souverains , & qui s'en di-
Soit lArbitre. SaMajesté
commença pardesEntrepri-
Ses dont tous les Siecles paf-
Sezne luy fourniffoient aucun
exemple. Elle ouvrit la
Campagne par quatre Sieges
àla fois , &vous euftes
Pavantage , MONSEL
GNEUR, de triompher le
premier en forçant la Ville
d'Orsoy de ſe rendre à dif
cretion ; de forte qu'on ne
Tij
EPISTRE .
1
peut s'entretenir de cette fameuse
Guerre qu'aprés avoir
admiré le Roy dans
tout ce qu'il a fait pour la
Soûtenir außi glorieusement
qu'il l'avoit commencée , on
ne paſſe aux Actions du
Prince à qui est deuë la
conqueste de cette Place.Elle
couta peu de temps & peu
d'hommes ; & cependant ,
MONSEIGNEUR , le Roy ,
&V. A.R toûjours inſepables
, ſur tout dans le
peril , vous courustes risque
EPISTRE .
L
de la Vie. Sa Majestévoulant
tout voir , & donner
par ttoouuttſeess ordres elle-mefme
, alloit tantoft àun Siege
& tantoſt à l'autre. Ainfi
on peut dire qu' Ellé estoiten
meſme temps devant les
quatre Places aßiegées. Ce
Monarque estant un jour
venu dans vostre Camp ,
vous allaſtes enſemble voir
quelques attaques . Vous
bravaſtes le peril , & demeuraſtes
quelque tempsen
un lieu où M. le Chevalier
EPISTRE .
preff aftes
d Arquin,qui vousſuivoit,
fut tué d'un coup de Canon
avant que vous fußiezhors
deſa portée. Ce Siege fut
bien-toft finy, mais la maniere
dont vous preffaftes
cette Place , & voſtre inébranlable
fermetéfirent connoiſtre
que vous eſtiez capable
des plus hautes entreprifes.
Le Roy enfut bien per
Suadé, puis qu'aprés cette
conqueſte il choisit V. A. R.
pour faire le Siege de Zutphen,
Placeforte , & Capi
EPISTRE .
tale d'une Province. L'impatiente
ardeur que vous
fiftes alors paroistre fut une
preuve incontestable es de
voſtre valeur , & du desir
que vous aviez d'acquerir
de la gloire. Vous partiſtes
à trois heures du matin , &
demeurastes quatorze heures
àcheval. Enfin , MONSEIGNEUR,
vous n'arrestates
qu'àla veuë de laPlace,
où vous deviez cueillir des
Lauriers, &fi elle avoit esté
plus éloignée, l'ardeur quié
EPSSTRE .
chaufoit votre courage,vous
auroit empeſché desentirles
fatiques ausquelles l'homme
le plus robuſte auroit dûfuccomber
Vous allastes reconnoiſtre
la Place jusqu'à la
portée du Mousquet. Vous
marquâtes l'endroit où vous
vouliez que la Tranchée
fust ouverte , es les lieux
où l'on devoit drefferles Bateries
; vous poursuiviſtes le
Siege avec vigueur ,
triomphant &des ruſes que
les Ennemis mirent en ufaEPISTRE.
ام
ge, &de toute la valeur
qu'ils firent paroiſtre , vous
réduiistes ſous l'obeiffance
du Roy unePlace forte par
elle-mesme,&par une nombreuse
Garnison , &munie
de tout ce qui pouvoitfervir
àune longue défense;mais
vostre pieté vous empefcha
d'y entrer , avant que d'y
avoir rétably le culte des
Autels , eny faisant celebrer
laMeffe.
L'année ſuivante le Roy
ayant aßiegeMastric, donEPISTRE.
naà V. A. R. l'attaque dis
Fort de Veich. Ce ne devoit
estre qu'unefaufſe Attaque,
mais vous la poufſfaſtes avec
tant de chaleur le jour que
vos Troupes donnerent pour
favorifer la veritable , que
vousfiſtesrompre les Palif-
Sades,&emporterla Demylune
; deforte quefi on eust
préparé des échelles , on se
Seroit rendu Maistre de la
Place par escalade , tant
vous ſcavez inſpirer d'ardeur
aux Troupes qui com-
د.
EPISTRE.
battent ſous vos ordres .
Pendant le cours de cette
Guerre , V. A. R. prit encore
deux Places importantes,
5gagna une Bataille qui
en afſeura beaucoup autres.
Bouchain fut la premiere
qui connut que vous n'attaquezjamais
fans triompher.
Aprés avoir reconnu
vous- mefmes les endroits les
plus avantageux , vous ré-
Solûtes d'ataquer deux Baſtions
. L'un estoit convert
par un Ouvrage à corne,
>
EPISTRE .
LaCourtine qui estoit entre
ces deux Bastions estoitaußi
couverte d'une Demy-lune ,
&pour diviſerle feu desAffiegezpar
une diverſion neceffaire,
&faciliterles Travaux
de cette attaque qui
embrafſoit plusieurs grands
Ouvrages , V. A. R. jugea
àpropos d'en faire commencer
une du costé de la baffe-
Ville.
Vous estiez appliqué à
ce Siege , lors que le Roy
vous envoya avertir, fuivant
EPISTRE.
vant la parole qu'il vous
avoit donnée , Qu'il voyoit
quelque apparence deBataille
,& qu'il croyoit que
le Prince d'Orange expoſeroit
plûtoſt cinquante
mille hommes, que d'eſtre
témoin de la priſe de Bouchain.
Vous marchastes
außi- toft,laiſſant vos ordres
pour la continuation du Siege.
Vous trouvaſtes leRoy
en Bataille en presence des
Ennemis, &vous vousmi
tes àla teſte de l'aifle gauche
ū
EPISTRE .
que vous deviez commander.
Le Prince d'Orange
ayant évitéle Combat, vous
retournaſtes au Camp , 5
tout remply encore de l'ardeur
dont vous eſtiez animé
, vous ordonnaſtes qu'on
emportaft tous les Dehors
de Bouchain l'épée à la
main, ce qui fut executé,
laPlace ſe rendit bien- toft
aprés. Tant que ce Siege
dura, V. A. R. paffa toutes
les nuits à cheval. Elle viſitoit
les Attaques , les BateEPISTRE.
ries , & les Gardes des Lignes.
Elle entroit dans tous
les détails , & envoyoit
fans ceffe des rafraichiffemens
aux Soldats pour les
encourager au travail.
Fedeurois parlericy d'une
Conqueſte bien plus importante
, &dire ce que V. A.
R. fit devant Saint Omer
mais comme on en peut jugerpar
les Sieges des Places
que vous avez prifes ,dont
Je viens d'ébaucher quelques
Actions, je ne parleray
EPISTRE.
plus que de la Bataille de
Caffel ; elle est remplie de
trop de circonstances glorieuses
àV. A. R. pourn'en
marquerpas au moins quelques-
unes . L'Armée ennemie
estoit plus forte que celle
du Roy,elle estoit postée dans
des lieux naturellementfortifiez.
Des hayes vives &
des foſſez pleins d'eau luy
fervoient de rempart, elle
n'estoit point obligée de di
viſerſes forces comme vous,
MONSEIGNEUR , qui de
EPISTRE .
viez laiffer des Troupes
dans la Tranchée de Saint-
Omer,& dans les postes que
que vous aviez gagnez autour
de cette Place. Cependant
voyant la neceßité , ou
de combattre , ou d'eſtre contraint
à lever le Siege que
vous aviez ſi heureuſement
commencé, vous ne balançastes
point,quoy que leConfeildeGuerre
euft de lapeine
àSerefoudre au Combat,
dites, Que vous ne vouliez
pas eſtre obligé à lever le
EPISTRE.
Siege , & que fous voſtre
Commandement les Armes
du Roy receuffent un
affront qui ne leur eſtoit
point encorearrivé depuis
le commencement de la
Guerre. Vous vous avançaftes
enfuitepour reconnoiſtre
les Ennemis , & donnastes
des ordres pour les
aller attaquer. Ce fut - là
que vous remplistes les devoirs
& d'un brave Capitaine
, & d'un General experimenté
Vous exhortaftes
EPISTRE.
les Soldats, vous leur inspiraſtes
de l'ardeur , & vous
les menaſtes à la charge.
Ainsi vostre esprit esvostre
coeur n'agirent pas moins
que vostre bras. Dés que les
Ennemis faisoient quelque
mouvement , vous donniez
de nouveaux ordres , & vous
fuftes toûjours defangfroid
au milieu des dangers ,Sans
paroiſtre un seul moment
embaraßé. Lefeu des Ennemis
ne vous étonna point;
vous vistes pluſieurs de vos
A
EPISTRE.
Officiers bleffez autour de
vous ; vous eustes mesme un
cheval bleßé , & receustes
un coup de Mousquet dans
vos Armes. Tout cela ne
vous empécha point de chargerſouvent
à la teste des
EscadronsedesBataillons,
d'estre toûjours au plus fort
de la mêlée , & de remener
vous-mesme au Combat,des
Troupes qui avoient plié.
Le lendemain la douceur
ayant pris la place du feu
qui brilloit dans vos yeux
EPISTRE..
ود
le jour du Combat ,le foin
que vous fiftes prendre des
Bleſſez,vous rendit l'amour
des Vaincus dont vous
aviez esté la terreur , comme
vous devinſtes l'admiration
des Vainqueurs..
Mais, MONSEIGNEUR, ce
n'est pas affez , qu'aprés a
voir fait voir voſtre ſage
conduite dans un âge où la
prudence eft fi peu ordinatre
àla jeunesse , jaye fait une
legere peinture d'une partie
de vos éclatantes Actions ;
aa
EPISTRE.
Jedois ajoûter icy que nousne
voyons point de Souverains
, meſmeparmy les plus
puiſſans Monarques , qui
ayent porté la magnificence
außi loin que V. A. R. Vos
Superbes Bastimens , vos
Meubles magnifiques, &la
riche abondance de vosPierrerits
, tout marque le Sang
dont vous fortez. Cependant,
MONSEIGNEUR,tant
dechoſes n'empeſchent point
que la Nobleffe infortunée
ne trouve un azile auprés
EPSSTRE.
de vous , es que beaucoup
d'illustres Malheureux ne
foient tous les ans vangez
par vos bienfaits des injuſtices
de la fortune. Si l'on
joint à toutes ces dépenses
les grandes &galantes Feſtes
que vous donnez ſouvent
, on connoistra, MONSEIGNEUR
, que vous fçavezfoûtenir
de toutes manieres
l'éclat de vostre augufterang;
außı perſonne n'en
connoift-il mieux la grandeur
,&les droits queV.A
EPISTRE .
R. Maisquoy que vous les
Coûteniez ſi dignement ,
vous avez une bonté naturelle
, qui ſans vous faire
defcendre de vostre rang
vous attire tous les coeurs.
Iusqu où ne va- t- elle point
pour les auguſtes Perfonnes
qui vous touchent ? Quels
Soins ne prenez - vous pas
de l'éducation d'un Prince,
dont l'efprit a brillé avant
l'âge , &à qui vous donnez
ſi ſouvent d'utiles leçons.?
Quelle tendreffe n'avez-
VOUS
EPISTRE.
C
pas pour la Reyne d'Eſpagne
, & pour Madame la
DucheffeRoyalede Savoye,
vos augustes Filles ! On en
peut juger par l'empreſſo
ment que vous avez à leur
apprendre de vos nouvelles ,
& à recevoir des leurs , &
par les Preſens que vous
leur faites continuellement;
de forte que si elles ne tenoient
point la vie de vous ,
vous paroiftriez peut- estre
trop galant à leur égard.
Mais , MONSEIGNEUR
ee
EPISTRE.
on peut dire quesi l'avan
tage eft grandde vous avoir
pour Pere , il y en a außi
beaucoup à vous avoir pour
Maistre. Ceux qui ont
I'honneur de vous fervir ,
trouvent unProtecteurdans
V. A. R. Vous avez la
bonté d'entrer jusque dans
le détail de leurs affaires.
S'ils ont des proces que vous
trouviez juftes , vous les
faites recommander ; &sit
faut obtenir du Roy quetque
grace en leur faveur .
EPISTR E.
V. A. R. ne dédaigne
point de parler pour eux.
Enfin ,MONSEIGNEUR ,
-Si on vous rend quelque
Service diftingué , vous
accablez de bienfaits ceux
dont vous le recevez .Mais,
MONSEIGNEUR , je
voy qu'il faut que je finiffe
malgré l'abondance de
la matiere qui me reste ,
& que pour ne point pas-
Ser tes bornes d'une Epiſtre
, j'ajoûteſeulement icy
EPISTRE.
que je suis avec le plus profond
respect,
MONSEIGNEUR,
De Voſtre Alteſſe Royale
Le tres -humble & tres
obeïllant Serviteur
DEVIZE .
201
و
MONSEIGNEUR
:
0
LE DUC
D'ORLEANS
FRERE UNIQUE DU ROY
M ONSEIGNEUR,
م
S'il n'y a rien de plus
difficile àfaire que les EpiEPISTRE
.
Stres de la nature de celle
que j'ofe entreprendre ,
c'eſt ſur tout lors qu'onse
propose de donner quelque
idée d'une Vie toute glorieuse
, & qui s'est formée
Sur un Modelle où les
plushautes Vertus se trouvent
dans leur plus brillant
éclat. Quoy que les
bonnes inclinations qu'un
Prince fait voir si - toft
qu'il fort de l'Enfance ,
Semblent devoir faire croire
que la ſuite répondra à de Mon
EPISTRE .
fi beaux commencemens ,
'Histoire ne laiſſe pas de
nous fournir de grands
exemples du contrairs.
Mais , MONSEIGNEUR ,
on n'a pas douté un moment
que le temps ne donnaft
de la force aux vertus
naiſſantes deVoftreAlteffe
Royale , quand on vous a
veu pour la feuë Reyne vostre
Mere un respect 15
une tendreffe qui caufoient
de la joye & de l'admiration
à tous ceux qui avoient
EPISTRE.
P'honneur de vous aprocher.
V. A. R. n'estoit jamais
plus contente , que lors qu'-
Elle estoit avec cette Princeffe.
Vous quittiez fouvent
les plaiſirs qui ont accoutumé
d'attacher les Per-
Sonnes d'un age peu avancé
, pour ſuivre cette vertueuse
Reyne dans les lieux
où sa pieté la conduiſoit..
Vostre chagrin paroiſſoit
fenſible, lors que vous croyiez
luy avoir déplû en quelque
chofe ; & dés queV. A. R.
EPISTRE .
eut remarqué que cettefage
Princeffe fouhaitoit que
vous vous attachaßiez au
Roy, ces voeux furent außitoſt
remplis ; mais , MONSEIGNEUR
, comme vous ne
faites en cela que ſuivre
voſtre penchant naturel , il
a toûjours paru depuis ce
temps-là que rien ne pouvoit
alterer la reſpectueuse
amitié que vous aviez pour
un Monarque quieft devenu
les delices defes Peuples,
& l'admiration de toute la
EPISTRE.
Terre ; le temps n'a fait
qu'augmenter cette union ,
& la tendreſſe vous ayant
joint au Roy ainfi que le
Sang, tout a marqué la
parfaite intelligence dans
laquelle vous vivez. Lors
qu'il s'estagy des divertiffemens
que l'age autorise , &
des Spectacles qu'unSouverain
doit donner pour la
gloire deſon Etat , & pour
occuper la plus vive Feuneſſe
de fa Cour, qui ſans
ces plaisirs neceſſaires auroit
EPISTRE.
pû en chercher d'autres
moins permis on vous a vûs
briller enfemble , &vous
faire reconnoiſtre par voſtre
bonne grace & par vostre
bon air, toutes les fois que
l'usage observé dans ces
fortes de Spectacles demandoit
que vous fußiez caché.
Quandde cesfeux on apaffé
à quelque divertiſſement
Martial , on vous a veus
dans ces Festes guerrieres
dans ces Carrousels commander
l'un l'autre les
EPISTRE .
premieres Quadrilles.Enfin
lors qu'il s'estagy de veritables
fatigues , & de perils
eff ctifs, on peut dire,MONSEIGNEUR
, que vous n'avez
pas feulement accom
pagnéleRoy, mais que vous
avez toujours esté ſonOm
bre,s'ilm' eftpermisdeparler
ainsi, à moins que V.A.R.
n'ait quitté cet Augufte
Frere pour aller vaincre
fes Ennemis en prenant
des Places, ou en gagnant
des Batailles. Le doy parler
EPISTRE.
de cette union , puis que d'e
toutes les merveilles de ce
floriffantEtat, c'est ceque le
Roy deSiam ale plus admiré.
Les Relations conviennent
toutes que lors que ce
Monarque l'eut apprise, il
ditqu'il nes'étonnoitplusdes
prosperitez de la France ,
ny du malheur de quelques
Roisfes voifins, dont la di
viſion de la Famille Royale
avoit cauſe laruine. Enfin
ce Prince en parla d'une
maniere quifit paroiſtre que
EPISTRE.
cestoit la seule chose qui
manquoit au bonheur deSa
Vie , esque s'il euſt eu quelques
Souhaits à former , ils
ne pouvoient estre quesur
une choſe dans laquelle il
faisoit confifter leſouverain
bonheurd'unEtat. LesAmbaffadeurs
de ce Monarque
ne luy diront pas seulement
ce qu'ils ont veu de cetteunion;
mais aprés luy avoir
confirmé tout ce que la Renommée
a prisſoin de luy aprendre
des merveilles de la
i
Vie
EPISTRE.
Viedu Roy , ils parleront de
V. A. R. Ils enfont charmez
, & voicy la troiſiéme
Relation , où l'on peut voir
de quelle maniere ils ont expliqué
ce qu'ils en penſent.
Vostre bonté , MONSEIGNEUR,
leur a paru dans
les choses obligeantes queV.
AR a bien voulu leur dire,
Vostre magnificence a brillé
à leurs yeux dans vos Palais
&&dans vos Festes , &
ils ont paßé pendant leur
Voyage de Flandre dans
EPISTRE.
quelques - uns des lieux où
V. A. R. a fait marcher la
Victoireàses coſtez. Mais
comme ils n'ont vũ qu'une
partie de ce que vous avez
conquis pour le Roy , je ne
Sçaurois m'empescher de
marquer icy tout ce que vous
avez fait lors que vous avez
commandé en Chef les
Armées d'un FrereAuguste
qui vous est plus cher que
vous- même. QuandceMonarque
entreprit la glorieu-
Se Guerre qui vangea tant
EPISTRE.
de Rois , en humiliant une
Puissance inferieure à ces
Souverains , & qui s'en di-
Soit lArbitre. SaMajesté
commença pardesEntrepri-
Ses dont tous les Siecles paf-
Sezne luy fourniffoient aucun
exemple. Elle ouvrit la
Campagne par quatre Sieges
àla fois , &vous euftes
Pavantage , MONSEL
GNEUR, de triompher le
premier en forçant la Ville
d'Orsoy de ſe rendre à dif
cretion ; de forte qu'on ne
Tij
EPISTRE .
1
peut s'entretenir de cette fameuse
Guerre qu'aprés avoir
admiré le Roy dans
tout ce qu'il a fait pour la
Soûtenir außi glorieusement
qu'il l'avoit commencée , on
ne paſſe aux Actions du
Prince à qui est deuë la
conqueste de cette Place.Elle
couta peu de temps & peu
d'hommes ; & cependant ,
MONSEIGNEUR , le Roy ,
&V. A.R toûjours inſepables
, ſur tout dans le
peril , vous courustes risque
EPISTRE .
L
de la Vie. Sa Majestévoulant
tout voir , & donner
par ttoouuttſeess ordres elle-mefme
, alloit tantoft àun Siege
& tantoſt à l'autre. Ainfi
on peut dire qu' Ellé estoiten
meſme temps devant les
quatre Places aßiegées. Ce
Monarque estant un jour
venu dans vostre Camp ,
vous allaſtes enſemble voir
quelques attaques . Vous
bravaſtes le peril , & demeuraſtes
quelque tempsen
un lieu où M. le Chevalier
EPISTRE .
preff aftes
d Arquin,qui vousſuivoit,
fut tué d'un coup de Canon
avant que vous fußiezhors
deſa portée. Ce Siege fut
bien-toft finy, mais la maniere
dont vous preffaftes
cette Place , & voſtre inébranlable
fermetéfirent connoiſtre
que vous eſtiez capable
des plus hautes entreprifes.
Le Roy enfut bien per
Suadé, puis qu'aprés cette
conqueſte il choisit V. A. R.
pour faire le Siege de Zutphen,
Placeforte , & Capi
EPISTRE .
tale d'une Province. L'impatiente
ardeur que vous
fiftes alors paroistre fut une
preuve incontestable es de
voſtre valeur , & du desir
que vous aviez d'acquerir
de la gloire. Vous partiſtes
à trois heures du matin , &
demeurastes quatorze heures
àcheval. Enfin , MONSEIGNEUR,
vous n'arrestates
qu'àla veuë de laPlace,
où vous deviez cueillir des
Lauriers, &fi elle avoit esté
plus éloignée, l'ardeur quié
EPSSTRE .
chaufoit votre courage,vous
auroit empeſché desentirles
fatiques ausquelles l'homme
le plus robuſte auroit dûfuccomber
Vous allastes reconnoiſtre
la Place jusqu'à la
portée du Mousquet. Vous
marquâtes l'endroit où vous
vouliez que la Tranchée
fust ouverte , es les lieux
où l'on devoit drefferles Bateries
; vous poursuiviſtes le
Siege avec vigueur ,
triomphant &des ruſes que
les Ennemis mirent en ufaEPISTRE.
ام
ge, &de toute la valeur
qu'ils firent paroiſtre , vous
réduiistes ſous l'obeiffance
du Roy unePlace forte par
elle-mesme,&par une nombreuse
Garnison , &munie
de tout ce qui pouvoitfervir
àune longue défense;mais
vostre pieté vous empefcha
d'y entrer , avant que d'y
avoir rétably le culte des
Autels , eny faisant celebrer
laMeffe.
L'année ſuivante le Roy
ayant aßiegeMastric, donEPISTRE.
naà V. A. R. l'attaque dis
Fort de Veich. Ce ne devoit
estre qu'unefaufſe Attaque,
mais vous la poufſfaſtes avec
tant de chaleur le jour que
vos Troupes donnerent pour
favorifer la veritable , que
vousfiſtesrompre les Palif-
Sades,&emporterla Demylune
; deforte quefi on eust
préparé des échelles , on se
Seroit rendu Maistre de la
Place par escalade , tant
vous ſcavez inſpirer d'ardeur
aux Troupes qui com-
د.
EPISTRE.
battent ſous vos ordres .
Pendant le cours de cette
Guerre , V. A. R. prit encore
deux Places importantes,
5gagna une Bataille qui
en afſeura beaucoup autres.
Bouchain fut la premiere
qui connut que vous n'attaquezjamais
fans triompher.
Aprés avoir reconnu
vous- mefmes les endroits les
plus avantageux , vous ré-
Solûtes d'ataquer deux Baſtions
. L'un estoit convert
par un Ouvrage à corne,
>
EPISTRE .
LaCourtine qui estoit entre
ces deux Bastions estoitaußi
couverte d'une Demy-lune ,
&pour diviſerle feu desAffiegezpar
une diverſion neceffaire,
&faciliterles Travaux
de cette attaque qui
embrafſoit plusieurs grands
Ouvrages , V. A. R. jugea
àpropos d'en faire commencer
une du costé de la baffe-
Ville.
Vous estiez appliqué à
ce Siege , lors que le Roy
vous envoya avertir, fuivant
EPISTRE.
vant la parole qu'il vous
avoit donnée , Qu'il voyoit
quelque apparence deBataille
,& qu'il croyoit que
le Prince d'Orange expoſeroit
plûtoſt cinquante
mille hommes, que d'eſtre
témoin de la priſe de Bouchain.
Vous marchastes
außi- toft,laiſſant vos ordres
pour la continuation du Siege.
Vous trouvaſtes leRoy
en Bataille en presence des
Ennemis, &vous vousmi
tes àla teſte de l'aifle gauche
ū
EPISTRE .
que vous deviez commander.
Le Prince d'Orange
ayant évitéle Combat, vous
retournaſtes au Camp , 5
tout remply encore de l'ardeur
dont vous eſtiez animé
, vous ordonnaſtes qu'on
emportaft tous les Dehors
de Bouchain l'épée à la
main, ce qui fut executé,
laPlace ſe rendit bien- toft
aprés. Tant que ce Siege
dura, V. A. R. paffa toutes
les nuits à cheval. Elle viſitoit
les Attaques , les BateEPISTRE.
ries , & les Gardes des Lignes.
Elle entroit dans tous
les détails , & envoyoit
fans ceffe des rafraichiffemens
aux Soldats pour les
encourager au travail.
Fedeurois parlericy d'une
Conqueſte bien plus importante
, &dire ce que V. A.
R. fit devant Saint Omer
mais comme on en peut jugerpar
les Sieges des Places
que vous avez prifes ,dont
Je viens d'ébaucher quelques
Actions, je ne parleray
EPISTRE.
plus que de la Bataille de
Caffel ; elle est remplie de
trop de circonstances glorieuses
àV. A. R. pourn'en
marquerpas au moins quelques-
unes . L'Armée ennemie
estoit plus forte que celle
du Roy,elle estoit postée dans
des lieux naturellementfortifiez.
Des hayes vives &
des foſſez pleins d'eau luy
fervoient de rempart, elle
n'estoit point obligée de di
viſerſes forces comme vous,
MONSEIGNEUR , qui de
EPISTRE .
viez laiffer des Troupes
dans la Tranchée de Saint-
Omer,& dans les postes que
que vous aviez gagnez autour
de cette Place. Cependant
voyant la neceßité , ou
de combattre , ou d'eſtre contraint
à lever le Siege que
vous aviez ſi heureuſement
commencé, vous ne balançastes
point,quoy que leConfeildeGuerre
euft de lapeine
àSerefoudre au Combat,
dites, Que vous ne vouliez
pas eſtre obligé à lever le
EPISTRE.
Siege , & que fous voſtre
Commandement les Armes
du Roy receuffent un
affront qui ne leur eſtoit
point encorearrivé depuis
le commencement de la
Guerre. Vous vous avançaftes
enfuitepour reconnoiſtre
les Ennemis , & donnastes
des ordres pour les
aller attaquer. Ce fut - là
que vous remplistes les devoirs
& d'un brave Capitaine
, & d'un General experimenté
Vous exhortaftes
EPISTRE.
les Soldats, vous leur inspiraſtes
de l'ardeur , & vous
les menaſtes à la charge.
Ainsi vostre esprit esvostre
coeur n'agirent pas moins
que vostre bras. Dés que les
Ennemis faisoient quelque
mouvement , vous donniez
de nouveaux ordres , & vous
fuftes toûjours defangfroid
au milieu des dangers ,Sans
paroiſtre un seul moment
embaraßé. Lefeu des Ennemis
ne vous étonna point;
vous vistes pluſieurs de vos
A
EPISTRE.
Officiers bleffez autour de
vous ; vous eustes mesme un
cheval bleßé , & receustes
un coup de Mousquet dans
vos Armes. Tout cela ne
vous empécha point de chargerſouvent
à la teste des
EscadronsedesBataillons,
d'estre toûjours au plus fort
de la mêlée , & de remener
vous-mesme au Combat,des
Troupes qui avoient plié.
Le lendemain la douceur
ayant pris la place du feu
qui brilloit dans vos yeux
EPISTRE..
ود
le jour du Combat ,le foin
que vous fiftes prendre des
Bleſſez,vous rendit l'amour
des Vaincus dont vous
aviez esté la terreur , comme
vous devinſtes l'admiration
des Vainqueurs..
Mais, MONSEIGNEUR, ce
n'est pas affez , qu'aprés a
voir fait voir voſtre ſage
conduite dans un âge où la
prudence eft fi peu ordinatre
àla jeunesse , jaye fait une
legere peinture d'une partie
de vos éclatantes Actions ;
aa
EPISTRE.
Jedois ajoûter icy que nousne
voyons point de Souverains
, meſmeparmy les plus
puiſſans Monarques , qui
ayent porté la magnificence
außi loin que V. A. R. Vos
Superbes Bastimens , vos
Meubles magnifiques, &la
riche abondance de vosPierrerits
, tout marque le Sang
dont vous fortez. Cependant,
MONSEIGNEUR,tant
dechoſes n'empeſchent point
que la Nobleffe infortunée
ne trouve un azile auprés
EPSSTRE.
de vous , es que beaucoup
d'illustres Malheureux ne
foient tous les ans vangez
par vos bienfaits des injuſtices
de la fortune. Si l'on
joint à toutes ces dépenses
les grandes &galantes Feſtes
que vous donnez ſouvent
, on connoistra, MONSEIGNEUR
, que vous fçavezfoûtenir
de toutes manieres
l'éclat de vostre augufterang;
außı perſonne n'en
connoift-il mieux la grandeur
,&les droits queV.A
EPISTRE .
R. Maisquoy que vous les
Coûteniez ſi dignement ,
vous avez une bonté naturelle
, qui ſans vous faire
defcendre de vostre rang
vous attire tous les coeurs.
Iusqu où ne va- t- elle point
pour les auguſtes Perfonnes
qui vous touchent ? Quels
Soins ne prenez - vous pas
de l'éducation d'un Prince,
dont l'efprit a brillé avant
l'âge , &à qui vous donnez
ſi ſouvent d'utiles leçons.?
Quelle tendreffe n'avez-
VOUS
EPISTRE.
C
pas pour la Reyne d'Eſpagne
, & pour Madame la
DucheffeRoyalede Savoye,
vos augustes Filles ! On en
peut juger par l'empreſſo
ment que vous avez à leur
apprendre de vos nouvelles ,
& à recevoir des leurs , &
par les Preſens que vous
leur faites continuellement;
de forte que si elles ne tenoient
point la vie de vous ,
vous paroiftriez peut- estre
trop galant à leur égard.
Mais , MONSEIGNEUR
ee
EPISTRE.
on peut dire quesi l'avan
tage eft grandde vous avoir
pour Pere , il y en a außi
beaucoup à vous avoir pour
Maistre. Ceux qui ont
I'honneur de vous fervir ,
trouvent unProtecteurdans
V. A. R. Vous avez la
bonté d'entrer jusque dans
le détail de leurs affaires.
S'ils ont des proces que vous
trouviez juftes , vous les
faites recommander ; &sit
faut obtenir du Roy quetque
grace en leur faveur .
EPISTR E.
V. A. R. ne dédaigne
point de parler pour eux.
Enfin ,MONSEIGNEUR ,
-Si on vous rend quelque
Service diftingué , vous
accablez de bienfaits ceux
dont vous le recevez .Mais,
MONSEIGNEUR , je
voy qu'il faut que je finiffe
malgré l'abondance de
la matiere qui me reste ,
& que pour ne point pas-
Ser tes bornes d'une Epiſtre
, j'ajoûteſeulement icy
EPISTRE.
que je suis avec le plus profond
respect,
MONSEIGNEUR,
De Voſtre Alteſſe Royale
Le tres -humble & tres
obeïllant Serviteur
DEVIZE .
Fermer
Résumé : A SON ALTESSE ROYALE MONSEIGNEUR LE DUC D'ORLEANS FRERE UNIQUE DU ROY.
L'épître est adressée à Monseigneur le Duc d'Orléans, frère unique du roi, et met en lumière les vertus et les exploits du Duc. L'auteur reconnaît la difficulté de décrire une vie aussi glorieuse et vertueuse, tout en soulignant que les bonnes inclinations d'un prince peuvent se manifester dès l'enfance, bien que l'histoire offre des exemples contraires. Le Duc d'Orléans est loué pour son respect et sa tendresse envers la reine, sa mère, ainsi que pour son attachement au roi. Il a souvent préféré la compagnie de la reine aux plaisirs habituels de son âge, et son chagrin était visible lorsqu'il croyait lui avoir déplu. La reine souhaitait qu'il se rapproche du roi, ce qui fut réalisé. Leur relation est marquée par une respectueuse amitié et une parfaite intelligence, renforcée par des divertissements et des spectacles où ils brillaient ensemble. Lors des divertissements martiaux, le Duc et le roi se distinguaient dans les carrousels et les fêtes guerrières. Leur union a été admirée par le roi de Siam, qui y voyait une clé du bonheur et de la prospérité de l'État français. L'épître détaille également les exploits militaires du Duc, notamment lors de la guerre contre une puissance inférieure. Le Duc a joué un rôle crucial dans la prise de plusieurs places fortes, comme Orsoy, Zutphen, et Bouchain, montrant un courage et une détermination exceptionnels, souvent au péril de sa vie. Il a également participé à la bataille de Cassel, où il a mené les troupes avec ardeur et stratégie. Sa conduite sage et brave a été saluée par tous. Enfin, l'épître souligne la magnificence du Duc, visible dans ses bâtiments superbes, ses meubles magnifiques, et la richesse de ses pierreries, tout en notant que ces richesses n'entravent pas sa noblesse et sa générosité.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 376-393
Article contenant un grand nombre de Particularitez de l'arrivée en France, du Convoy qui a apporté des Bleds du Levant, avec beaucoup d'autres Marchandises. [titre d'après la table]
Début :
Vous sçavez que Mr de Ferriol, Ambassadeur du Roy à [...]
Mots clefs :
Vaisseaux, Frégates, Constantinople, Relations, Convoi, Ennemis, Equipage, Combat, Officiers
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article contenant un grand nombre de Particularitez de l'arrivée en France, du Convoy qui a apporté des Bleds du Levant, avec beaucoup d'autres Marchandises. [titre d'après la table]
Vous fçavez que Mr de
Ferriol , Ambaffadeur du Roy
àConftantinople , avoit obte
nu de fa Hauteffe de faire
charger des Bleds à Conftantinople & dans les Echelles du
Levant. Il s'eft heureufement
acquitté de fa Commiſſion. Il
y a plufieurs Relations qui
peuvent toutes paffer pour des
Originaux , eftant écrites par
des Officiers de confideration,
& qui font tous dans des poftès à pouvoir fçavoir ce qu'ils.
GALANY 377
mandent , qui neanmoins ne
s'accordent pas , particulierement à l'égard des dates ; tel
eft le fort des Relations que
´l'on reçoit des Affaires les plus
importantes. Perfonne ne le
connoift mieux que moy qui
ay toûjours ramaffé toutes celles qui ont efté répanduës dans
le monde des actions les plus
remarquables , & j'ay trouvé
une fois une circonſtance aſſez
confiderable , toute differente
dans neuf Relations de la même Affaire , fans qu'il m'ait
efté poffible de découvrir celle qui parloit le plus jufte.
Li iij
378 MERCURE
ގ
%%
cmAinfi en fait de nouvelles , la
premiere qu'on lit fait plaifir,
& l'on croit d'abord eftre
bien inftruit. La feconde Relation , dans laquelle on trouve
des faits differens embaraffe un
peu ; & lors qu'on en a lû
beaucoup, on fe trouve fi
baraffé qu'on eft contraint de
parler au hazard , ou de donner au Public les Extraits de
PArticle qui embaraffe afin de
fe difculper , & qu'il en juge
par luy- mefme. J'ay trouvé le
mefme embaras pour des da
tes , dans la Relation que vous
allez lire , qui d'ailleurs vous
GALANT 379
paroiftra tres- curieufe. Entre
fept ou huit Relations dont
j'ay formé celle que vous allez
lire , il y en a une feule qui
-prend l'affaire de plus haut,
par laquelle je vais commencer, & qui n'eft contredite en
rien parce qu'elle eft feule.
Mr de Feuquieres eftoit allé
àu Levant pour amener un
Convoy de bled. Tous les autres Vaiffeaux tant du Roy que
des Marchands qui eftoient allez pour le mefme ſujet s'affemblerent à Smirne fous les
ordres de Mrde Feuquieres au
nombre de 84. Baftimens tant
380 MERCURE
Vaiffeaux, Barques , Pinques ,
ou Tartanes , parmy lefquels
cftoit compris le Temeraire , de
60. canons , monté par Mr de
Feuquieres ; le Toulouſe de mêmeforce; l'Etendart & le Flenron de 50; l'Hirondelle & la Vef
tale de 36. tous Vaiffeaux de
Roy, & une trentaine d'autres
Vaiffeaux particuliers ; le refte
eftoit de petits Baftimens".
Ils partirent dans le mois d'Octobre, & quoy que la faifon
fût la plus rude de toute l'année, à caufe des divers coups
de vents qui regnent en ce
temps- là &que l'on fut obligé
GALANT 281
de paffer dans toutes les Croifieres ordinaires nonobitant
25. ou 30. gros Vaifféaux Ennemis qui font dans ces Mers ;
ce Convoy franchit tout fans
voir aucun Vaiffeau ennemy,
& fans qu'il ſe foit écarté aucun Baftiment pendant untrajet de plus de 6oo. licuês.
Comme on avoit apprisque
le Convoy eftoit parti , & que
l'on voyoit tous les jours aux
Coftes de Provence une Efcadre ennemie de huit Vaiffeaux
qui fe relevoient les uns aprés
les autres , on eftoit à Toulon
& à Marſeille dans une grande
382 MERCURE
confternation , parce qu'on découvroit tous les jours les Ennemis aux avenues , & que nos
Vaiffeaux n'eftoient pas en état
de s'oppofer à cette Efcadre ,
eftant tous chargez de bled.
Mais par un effet de la Providence , dans le temps que l'Avant-garde de ce Convoyavoit
découvert les Illes d'Hieres defquelles il s'approchoit , que les
Ennemis n'auroient pas manqué d'appercevoir , & d'en
prendre finon tout , au moins
la plus grande partie , un gros
coup de vent de Nord Oüeft
s'éleva fi fort qu'il obligea les
GALANT 383
Ennemis de pouffer au large
& le Convoy d'arriver au
Gourjan.
Dans le moment que l'on
cut appris àToulon l'arrivée de
ce Convoy au Gourjan par un
fecond effet , & tout particulier de la même Providence,qui
l'avoit ainfi reglé, Mr Caffart ,
qui monte le Parfait de 70.
canons , fe trouva enrade avec
le Serieux , de 60. & Mr Laigle avec le Phoenix , de 52. canons.
Il eſt à remarquer que le
Vaiffeau le Toulouze , de so.
canons monté par Mr Lam-
384 MERCURE
bert , & qui faifoit partie du
Convoy, s'eftant trouvé à por
tée d'entrer à Toulon le 6 informa Mr Daligre de Saint Lié
qui y commande la Marine , de
la fituation oùil avoit laiffé Mr
de Feuquieres , avec le Convoy. On ne perdit pas un moment pour décharger en partie ce Vaiffeau qui eftoir char
gé debled, afinde le foulager,
& on augmenta confiderablement fon équipage , afin de le
mettre en eftat de fortir & d'aller rejoindre Mr de Feuquieresavec les 3. autres Vaiffeaux
dont on augmenta auffi confiderablement
GALANT 385
de
fiderablement les Equipages ;
ce qui fut fait en tres - peu
temps , en forte qu'ils mirent
à la voile le 8 à 10, heures
du matin , avec un Brulot , &
un autre petit Baltiment , qui
tous enſemble avoient deux
mille hommes d'Equipage.
Quoy que je vous aye dit
dans le Prelude de cet Article,
que de plufieurs Relations j'en
formois une feule , j'en ay
trouvé deux qui regardent le
Combat qui m'ont paru dignes de vous cftre envoyées
toutes deux.
Fanvier 1710.
Кк
386 MERCURE
a
Premiere Relation duCombat.
Le 9º eftant à la vûë er de
vant le Gourjan , ils virent paroiftre deux Vaiffeaux qui faifoient route fur eux ; & lors
qu'ils furent à demy lieuë , le
Parfait les chaſſa à toutes voiles,
les joignit fe mit en travers
de ces deux Vaiffeaux , & les
canonna jufqu'à ce que
rieux le Phoenix y fuffent
arrivez le premier attaqua le
Faucon Anglois de 44. Canons
qu'il démata & qu'il prit. Mr
Caffard tomba enfuite fur le
Pembrok de 70. Canons
Mr Laigle avoit déja démâté,
dont il avoit tué le Capi-
:
le Serque
GALANT 387
taine ,
plus de hommes 70.
de l'Equipage ; ce Vaiffean fe
-rendit , & il a esté amené à
Toulon avec le Faucon. Cette
action a efté tres-vive , &n'a
pas duré plus d'une heure ; ces
deux Vaiffeaux venoient de ca
renner au Port Mahon pour fortifier l'Escadre Angloife qui croifait depuis long-temps fur les
Coftes de Provence , en attendant
Mrde Feuquieres & fon Convoy , dont aucun Baſtiment n'a
efté pris ny perdu depuis fon départ de Levant.
Seconde Relation du Combat.
Le 9ºeftant prés du moüillage
KK
388 MERCURE
•
>
où le Toulouze , avoit déja jetté
l'Ancre , on aperçut deux Vaif
feaux qui s'aprochoient de terre.
Mr de Feuquieres fit fignal au
Parfait , au Serieux & au
Phoenix , de les aller reconnoiftre ,
ce qu'ils firent. Comme nos Vaiffeauxfortoient defiprés de terre
ces deux Vaiffeaux Ennemis l'un
de 66.canons , & l'autre de 40.
crurent que c'eftoient des Vaiffeaux chargez de bleds. Ils allerent deffus ; mais ayant reconnu
aprés la force de nos Vaiſſeaux
ils tâcherent defe fauver ; mais
Mr Caffart avec le Parfait
donna une bordée à la flute qui
la mit hort d'état. En effet, elle
GALANT 389
aculafur le Parfait , &luy emporta fa Gallerie , l'ayant remife , le Serieux y alla , & la
prit. Pendant ce temps Mr de
Laigle alla augros , & l'ayant approché de prés il le combatit pendant une große heure & demie
avec unfeu extraordinaire , &il
luy emportafon Maft d'Artimon.
Le Capitainey fut tué le Capitaine en fecond voyant que
Parfait venoit à luy fe voyant
beaucoup de monde tué parle gros
feu du Canon& de la moufqueterie de MrLaigle ,ferendit à luy
nevoulutpoint connoiftrel'Of
ficier queMrCaffart luy, envoya
le
Kij
390 MERCURE
le premier; de maniere que ces 2 •
Angloisfont àToulonprefentement
avec tout le Convoy dont chaque
Baftiment va à fa deftination.
Au refte ce Convoy eft des
plus confiderables & l'on peut
affurer qu'il vaut bien huit millions , puifqu'il y a de compte
fait pour le Languedoc &pour
la Provence cent mille charges
de bled, la charge pefant à peu
prés 300. livres poids de Paris ;
à 36. livres ce font déja trois
millions fix cens mille livres :
il y en a du moins pour autant
en Marchandifes fines , & ce
qu'un grand nombre de particuliers a de provifions de
GALANT 391
bled fur ces Vaiffeaux va encore fort loin. Il faut ajoûter
à tout cela quantité de farines ,
huit mille quintaux de Legumes , fept mille quintaux de
Ris , & beaucoup de viandes.
Les Officiers qui fe font diftinguez dans le Combat , n'ont
pas attendu long- temps leur
recompenfe , puifqu'en même
temps quenous avons appris la
maniere dont ils fe font diftinguez , nousavons fçu que S. M.
a nommé Mr Caffart , Capitai
ne de Fregate ; Mr des Hayes,
Lieutenantde Vaiffeau , & Mr.
Laigle , Capitaine de Brulot .
Le Vaiffeau l'Entreprenant
392 MERCURE
1
arriva auffi de Barbarie le 12, avec cinq
mille charges de bled.
Je vous diray peu de chofes ce moiscy de l'Espagne. Elle fe trouve aujourd'huy dans une fituation tres-avantageufe par raport à celle de tous les Sou
verains de l'Europe. Elle eft tranquile
chez elle , où rien ne manque: elle tra
vaille à mettre 80. mille hommes fur
pied, avec lefquels elle ne peut faire
qu'avantageufement la paix ou la guerre,ce qui provient de la grande union
qui fe trouve entre Sa Majefté Catholique & tous fes Sujets . Ce Monarque
apour eux tout l'amour qu'un Souverain peut avoir pour fes Sujets , & depuis qu'il eft fur le Trône , il a fait plufieurs Campagnes , dans lefquelles il a
expoféfon fang pour leur défenfe , ce
que les Espagnols reconnoiffent par un
amour & une fidelité à l'épreuve de
toutes choſes. Aufli trouve-t-il abondamment de l'argent & des hommes
dans tous les Etats , & c'eft dequoy fai
re de bonnes & degrandes Armées ; car
pourpeu que les Efpagnols foient inf
GALANT 393
truits du métier de la guerre , jamais on
n'a vû de Peuple plus intrepide. Il ne
fçait ce que c'eft que de fuir, & l'Hiftoire nous fournit une infinité d'exemples
éclatans de cette intrepidité , & toute la
terre fe fouvient encore de celle du
Comte des Fontaines , dont tout le Bataillon perit dans le mefme terrain où il
eftoit en bataille , ce Comte affis au milieu du Bataillon animant tous fes Soldats.
#
Je devrois en finiffant vous parler de
l'heureufe face qu'il paroît que l'Europe
doit prendre dans peu ; mais ce font des
Affaires delquelles la prudence ne veut
pas que l'on parle trop , de crainte de
n'en pas parler jufte. Je fuis , Madame,
voftre , &c.
APariscedernierJanvier 1710.
Ferriol , Ambaffadeur du Roy
àConftantinople , avoit obte
nu de fa Hauteffe de faire
charger des Bleds à Conftantinople & dans les Echelles du
Levant. Il s'eft heureufement
acquitté de fa Commiſſion. Il
y a plufieurs Relations qui
peuvent toutes paffer pour des
Originaux , eftant écrites par
des Officiers de confideration,
& qui font tous dans des poftès à pouvoir fçavoir ce qu'ils.
GALANY 377
mandent , qui neanmoins ne
s'accordent pas , particulierement à l'égard des dates ; tel
eft le fort des Relations que
´l'on reçoit des Affaires les plus
importantes. Perfonne ne le
connoift mieux que moy qui
ay toûjours ramaffé toutes celles qui ont efté répanduës dans
le monde des actions les plus
remarquables , & j'ay trouvé
une fois une circonſtance aſſez
confiderable , toute differente
dans neuf Relations de la même Affaire , fans qu'il m'ait
efté poffible de découvrir celle qui parloit le plus jufte.
Li iij
378 MERCURE
ގ
%%
cmAinfi en fait de nouvelles , la
premiere qu'on lit fait plaifir,
& l'on croit d'abord eftre
bien inftruit. La feconde Relation , dans laquelle on trouve
des faits differens embaraffe un
peu ; & lors qu'on en a lû
beaucoup, on fe trouve fi
baraffé qu'on eft contraint de
parler au hazard , ou de donner au Public les Extraits de
PArticle qui embaraffe afin de
fe difculper , & qu'il en juge
par luy- mefme. J'ay trouvé le
mefme embaras pour des da
tes , dans la Relation que vous
allez lire , qui d'ailleurs vous
GALANT 379
paroiftra tres- curieufe. Entre
fept ou huit Relations dont
j'ay formé celle que vous allez
lire , il y en a une feule qui
-prend l'affaire de plus haut,
par laquelle je vais commencer, & qui n'eft contredite en
rien parce qu'elle eft feule.
Mr de Feuquieres eftoit allé
àu Levant pour amener un
Convoy de bled. Tous les autres Vaiffeaux tant du Roy que
des Marchands qui eftoient allez pour le mefme ſujet s'affemblerent à Smirne fous les
ordres de Mrde Feuquieres au
nombre de 84. Baftimens tant
380 MERCURE
Vaiffeaux, Barques , Pinques ,
ou Tartanes , parmy lefquels
cftoit compris le Temeraire , de
60. canons , monté par Mr de
Feuquieres ; le Toulouſe de mêmeforce; l'Etendart & le Flenron de 50; l'Hirondelle & la Vef
tale de 36. tous Vaiffeaux de
Roy, & une trentaine d'autres
Vaiffeaux particuliers ; le refte
eftoit de petits Baftimens".
Ils partirent dans le mois d'Octobre, & quoy que la faifon
fût la plus rude de toute l'année, à caufe des divers coups
de vents qui regnent en ce
temps- là &que l'on fut obligé
GALANT 281
de paffer dans toutes les Croifieres ordinaires nonobitant
25. ou 30. gros Vaifféaux Ennemis qui font dans ces Mers ;
ce Convoy franchit tout fans
voir aucun Vaiffeau ennemy,
& fans qu'il ſe foit écarté aucun Baftiment pendant untrajet de plus de 6oo. licuês.
Comme on avoit apprisque
le Convoy eftoit parti , & que
l'on voyoit tous les jours aux
Coftes de Provence une Efcadre ennemie de huit Vaiffeaux
qui fe relevoient les uns aprés
les autres , on eftoit à Toulon
& à Marſeille dans une grande
382 MERCURE
confternation , parce qu'on découvroit tous les jours les Ennemis aux avenues , & que nos
Vaiffeaux n'eftoient pas en état
de s'oppofer à cette Efcadre ,
eftant tous chargez de bled.
Mais par un effet de la Providence , dans le temps que l'Avant-garde de ce Convoyavoit
découvert les Illes d'Hieres defquelles il s'approchoit , que les
Ennemis n'auroient pas manqué d'appercevoir , & d'en
prendre finon tout , au moins
la plus grande partie , un gros
coup de vent de Nord Oüeft
s'éleva fi fort qu'il obligea les
GALANT 383
Ennemis de pouffer au large
& le Convoy d'arriver au
Gourjan.
Dans le moment que l'on
cut appris àToulon l'arrivée de
ce Convoy au Gourjan par un
fecond effet , & tout particulier de la même Providence,qui
l'avoit ainfi reglé, Mr Caffart ,
qui monte le Parfait de 70.
canons , fe trouva enrade avec
le Serieux , de 60. & Mr Laigle avec le Phoenix , de 52. canons.
Il eſt à remarquer que le
Vaiffeau le Toulouze , de so.
canons monté par Mr Lam-
384 MERCURE
bert , & qui faifoit partie du
Convoy, s'eftant trouvé à por
tée d'entrer à Toulon le 6 informa Mr Daligre de Saint Lié
qui y commande la Marine , de
la fituation oùil avoit laiffé Mr
de Feuquieres , avec le Convoy. On ne perdit pas un moment pour décharger en partie ce Vaiffeau qui eftoir char
gé debled, afinde le foulager,
& on augmenta confiderablement fon équipage , afin de le
mettre en eftat de fortir & d'aller rejoindre Mr de Feuquieresavec les 3. autres Vaiffeaux
dont on augmenta auffi confiderablement
GALANT 385
de
fiderablement les Equipages ;
ce qui fut fait en tres - peu
temps , en forte qu'ils mirent
à la voile le 8 à 10, heures
du matin , avec un Brulot , &
un autre petit Baltiment , qui
tous enſemble avoient deux
mille hommes d'Equipage.
Quoy que je vous aye dit
dans le Prelude de cet Article,
que de plufieurs Relations j'en
formois une feule , j'en ay
trouvé deux qui regardent le
Combat qui m'ont paru dignes de vous cftre envoyées
toutes deux.
Fanvier 1710.
Кк
386 MERCURE
a
Premiere Relation duCombat.
Le 9º eftant à la vûë er de
vant le Gourjan , ils virent paroiftre deux Vaiffeaux qui faifoient route fur eux ; & lors
qu'ils furent à demy lieuë , le
Parfait les chaſſa à toutes voiles,
les joignit fe mit en travers
de ces deux Vaiffeaux , & les
canonna jufqu'à ce que
rieux le Phoenix y fuffent
arrivez le premier attaqua le
Faucon Anglois de 44. Canons
qu'il démata & qu'il prit. Mr
Caffard tomba enfuite fur le
Pembrok de 70. Canons
Mr Laigle avoit déja démâté,
dont il avoit tué le Capi-
:
le Serque
GALANT 387
taine ,
plus de hommes 70.
de l'Equipage ; ce Vaiffean fe
-rendit , & il a esté amené à
Toulon avec le Faucon. Cette
action a efté tres-vive , &n'a
pas duré plus d'une heure ; ces
deux Vaiffeaux venoient de ca
renner au Port Mahon pour fortifier l'Escadre Angloife qui croifait depuis long-temps fur les
Coftes de Provence , en attendant
Mrde Feuquieres & fon Convoy , dont aucun Baſtiment n'a
efté pris ny perdu depuis fon départ de Levant.
Seconde Relation du Combat.
Le 9ºeftant prés du moüillage
KK
388 MERCURE
•
>
où le Toulouze , avoit déja jetté
l'Ancre , on aperçut deux Vaif
feaux qui s'aprochoient de terre.
Mr de Feuquieres fit fignal au
Parfait , au Serieux & au
Phoenix , de les aller reconnoiftre ,
ce qu'ils firent. Comme nos Vaiffeauxfortoient defiprés de terre
ces deux Vaiffeaux Ennemis l'un
de 66.canons , & l'autre de 40.
crurent que c'eftoient des Vaiffeaux chargez de bleds. Ils allerent deffus ; mais ayant reconnu
aprés la force de nos Vaiſſeaux
ils tâcherent defe fauver ; mais
Mr Caffart avec le Parfait
donna une bordée à la flute qui
la mit hort d'état. En effet, elle
GALANT 389
aculafur le Parfait , &luy emporta fa Gallerie , l'ayant remife , le Serieux y alla , & la
prit. Pendant ce temps Mr de
Laigle alla augros , & l'ayant approché de prés il le combatit pendant une große heure & demie
avec unfeu extraordinaire , &il
luy emportafon Maft d'Artimon.
Le Capitainey fut tué le Capitaine en fecond voyant que
Parfait venoit à luy fe voyant
beaucoup de monde tué parle gros
feu du Canon& de la moufqueterie de MrLaigle ,ferendit à luy
nevoulutpoint connoiftrel'Of
ficier queMrCaffart luy, envoya
le
Kij
390 MERCURE
le premier; de maniere que ces 2 •
Angloisfont àToulonprefentement
avec tout le Convoy dont chaque
Baftiment va à fa deftination.
Au refte ce Convoy eft des
plus confiderables & l'on peut
affurer qu'il vaut bien huit millions , puifqu'il y a de compte
fait pour le Languedoc &pour
la Provence cent mille charges
de bled, la charge pefant à peu
prés 300. livres poids de Paris ;
à 36. livres ce font déja trois
millions fix cens mille livres :
il y en a du moins pour autant
en Marchandifes fines , & ce
qu'un grand nombre de particuliers a de provifions de
GALANT 391
bled fur ces Vaiffeaux va encore fort loin. Il faut ajoûter
à tout cela quantité de farines ,
huit mille quintaux de Legumes , fept mille quintaux de
Ris , & beaucoup de viandes.
Les Officiers qui fe font diftinguez dans le Combat , n'ont
pas attendu long- temps leur
recompenfe , puifqu'en même
temps quenous avons appris la
maniere dont ils fe font diftinguez , nousavons fçu que S. M.
a nommé Mr Caffart , Capitai
ne de Fregate ; Mr des Hayes,
Lieutenantde Vaiffeau , & Mr.
Laigle , Capitaine de Brulot .
Le Vaiffeau l'Entreprenant
392 MERCURE
1
arriva auffi de Barbarie le 12, avec cinq
mille charges de bled.
Je vous diray peu de chofes ce moiscy de l'Espagne. Elle fe trouve aujourd'huy dans une fituation tres-avantageufe par raport à celle de tous les Sou
verains de l'Europe. Elle eft tranquile
chez elle , où rien ne manque: elle tra
vaille à mettre 80. mille hommes fur
pied, avec lefquels elle ne peut faire
qu'avantageufement la paix ou la guerre,ce qui provient de la grande union
qui fe trouve entre Sa Majefté Catholique & tous fes Sujets . Ce Monarque
apour eux tout l'amour qu'un Souverain peut avoir pour fes Sujets , & depuis qu'il eft fur le Trône , il a fait plufieurs Campagnes , dans lefquelles il a
expoféfon fang pour leur défenfe , ce
que les Espagnols reconnoiffent par un
amour & une fidelité à l'épreuve de
toutes choſes. Aufli trouve-t-il abondamment de l'argent & des hommes
dans tous les Etats , & c'eft dequoy fai
re de bonnes & degrandes Armées ; car
pourpeu que les Efpagnols foient inf
GALANT 393
truits du métier de la guerre , jamais on
n'a vû de Peuple plus intrepide. Il ne
fçait ce que c'eft que de fuir, & l'Hiftoire nous fournit une infinité d'exemples
éclatans de cette intrepidité , & toute la
terre fe fouvient encore de celle du
Comte des Fontaines , dont tout le Bataillon perit dans le mefme terrain où il
eftoit en bataille , ce Comte affis au milieu du Bataillon animant tous fes Soldats.
#
Je devrois en finiffant vous parler de
l'heureufe face qu'il paroît que l'Europe
doit prendre dans peu ; mais ce font des
Affaires delquelles la prudence ne veut
pas que l'on parle trop , de crainte de
n'en pas parler jufte. Je fuis , Madame,
voftre , &c.
APariscedernierJanvier 1710.
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Résumé : Article contenant un grand nombre de Particularitez de l'arrivée en France, du Convoy qui a apporté des Bleds du Levant, avec beaucoup d'autres Marchandises. [titre d'après la table]
Le texte décrit une mission diplomatique et militaire impliquant M. de Ferriol, ambassadeur du roi à Constantinople, qui a organisé le chargement de blé dans cette ville et dans les Échelles du Levant. Plusieurs rapports, rédigés par des officiers de confiance, divergent sur les détails, notamment les dates, soulignant la complexité de la vérification des informations. M. de Feuquières a été envoyé au Levant pour escorter un convoi de blé composé de 84 bâtiments, incluant des navires de guerre et des vaisseaux marchands. Malgré des conditions météorologiques difficiles et la présence d'une escadre ennemie, le convoi a quitté Smirne en octobre et a évité les ennemis grâce à un coup de vent, arrivant ainsi au Goujan. À Toulon, l'arrivée du convoi a été accueillie avec soulagement. Le vaisseau Toulouse a informé de la situation de M. de Feuquières. Les vaisseaux Parfait, Sérieux, et Phoenix, sous les ordres de M. Caffart, M. Laigle, et M. Daligre, ont été préparés pour rejoindre le convoi. Deux rapports différents relatent un combat naval le 9 janvier 1710, où les vaisseaux français ont capturé deux vaisseaux ennemis près du Goujan. Le convoi, d'une valeur estimée à huit millions de livres, comprenait cent mille charges de blé et diverses marchandises. Les officiers distingués lors du combat ont été récompensés par le roi. De plus, le vaisseau Entreprenant est arrivé de Barbarie avec cinq mille charges de blé. Le texte se conclut par une description de la situation en Espagne, soulignant sa stabilité et sa préparation militaire, ainsi que la loyauté de ses sujets envers le monarque.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 326-342
Mariage de Mademoiselle d'Enguien & de Monsieur de Vendôme, avec plusieurs choses particulières qui regardent ces deux illustres Epoux. [titre d'après la table]
Début :
Je dois vous parler d'un grand Mariage qui merite vôtre [...]
Mots clefs :
Mariage, Monsieur de Vendôme, Mademoiselle d'Enguien, Prince Eugène, Combat
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mariage de Mademoiselle d'Enguien & de Monsieur de Vendôme, avec plusieurs choses particulières qui regardent ces deux illustres Epoux. [titre d'après la table]
Je dois vous parler d'un
grand Mariage qui merite vôtre attention , & dont toute la
Cour a témoigné beaucoup de
joye ; c'eft de celuy de Mademoiſelle d'Enguien, & de Mon-
GALANT 327
fieur de Vendôme. Il eft des
Perfonnes dont la naiffance eft
fi connue , qu'il eft inutile d'en
parler , puifqu'on n'en pourroit rien dire qui ne fût connu
de tout le monde. Ainfi je vous
parleray feulement de ce qui
regarde les perfonnes de ces
deux illuftres Epoux.
Mademoiselle d Enguien eft
digne fille de Madamela Princoffe , dont la modeſtie , la fageffe, la grande &ardente charité pour les pauvres , &toutes
les vertus font connuës , & qui
en a plus tiré d'éclat , que de
la grande naiffance du feu
328 MERCURE
Prince fon Epoux & de la fienne. On peut juger par là des
bonnes qualitez de Mademoifelle d'Enguien , qui a toûjours
eu de pareils exemples devant
les yeux , & qui a toûjours fait
voir que fon inclination eftoit
toute portée à les fùivre. Enfin,
on a toûjours remarqué que
cette Princeffe a toutes les qualitez & toute la douceur qui
peuvent faire une femme du
caractere de la Princeffe fa
Mere , & l'on s'eft toûjours
fervy en parlant d'elle ,
terme qui dit beaucoup , & qui
fait comprendre encore davand'un
GALANT 329
tage , puifque l'on dit de cette
Princeffe , qu'Elle n'a point d'humeur ; c'eft à- dire , qu'elle ne fe
laiffe entefter d'aucune chofe ,
qu'elle ne s'obtine ſur rien ,
& qu'elle eft toûjours preſte à
prendre le bon party , & à faire tout ce qu'on trouvera à
propos qu'elle faffe pour
bien & pour fa gloire.
fon
A l'égard de Mr de Vendôme, il a toute fa vie preferé la
qualité d'honnête homme à
toutes les autres ; il eft ennemi du fafte , & s'il a de l'ambition ce n'eft que celle que
peut caufer la belle gloire ; il
Avril 1710. Ec
A
330 MERCURE
T
cft bon , humain , & fon éga
lité de vie fait plaifir à tous
ceux qui le connoiffent. Il aime naturellement le Roy &
toute la Maiſon Royale ; il
n'a point de volonté , & il eft
toûjours preſt à faire tout ce
que l'on fouhaite de luy ; il a
toute fa vie fervy le Roy , &
l'Etat. Il a beaucoup fervi en
Allemagne , il a eu la gloire de
fe rendre maiftre de Barcelone ; cette conqueſte étoit auſſi
difficile qu'importante , & fera
vivre éternellement fa memoire , auffi-bien que le grand
nombre de campagnes qu'ila
GALANT 330
7
faites en Italie qui luy ont efté
auffi glorieufes qu'elles étoient
utiles & glorieufes à la France
& à l'Eſpagne en ce temps là ,
& il ya toujours triomphé des
troupes du Comte de Staremberg; de celles que commandoir Mr le Prince Eugene , &
dans les temps que celles de
Monfieur le Duc de Savoye fe
font mifes de la partie , elles
n'ont pasarrefté le cours de fes
conqueftes. Il ne s'eft jamais
vû d'afcendent pareil à celuy
qu'il a toûjours eu fur Mr le
Prince Eugene qui a toûjours
paru un Ecolier auprés de luy.
E cij
332 MERCUR
Ila gagnétant de batailles contre ce Prince que j'en ay oublié
le nombre ; mais vous les trouverez dans mes Lettres dont je
vous ay toujours envoyé d'amples détails à mesure qu'elles ſe
fontdonnées , &je vous ay envoyéen même temps les Relations qu'il en envoyoit au Roy.
Il obfervoit de ne point parler
de luy ; mais irrendoit juftice à
tous ceux qui s'étoient diſtinguez , qu'il nommoit les uns
aprés les autres , en faifant le
détail de leurs actions , & en
leur donnant les loüanges qui
leurs étoient duës . Jamais perཟླ་
GALANT 333
fonne n'a plus brillé que ce
Prince dans un combat ; il étoit
par tout tant que le combat
duroit , à la tefte, à la queue ,
fur les ailes & dans le centre
& les Soldats avoient tant d'amourpour luy, & tant de confiance en fa perfonne qu'ils le .
fuivoient par tout avec le plus
grand empreffement & la plus
vive ardeur , de maniere qu'il
n'y avoit point de déroute à
craindre fous fon Commandement , & qu'il ne luy eſt jamais.
rien arrivé de femblable , &
Mrle Prince Eugene étoit auffi
petit dans ces occafions qu'il
334 MERCURE
étoit granden cetemps là dans
les Gazettes étrangeres , parce
que les Alliez ne vouloienr pas
décourager leurs Sujets , &
qu'ils vouloient au contraire
les encourager à fournir toujours aux frais de la guerre.
Enfin toute l'Europe n'a pû
s'empêcher de demeurer d'accord , que Monfieur de Vendôme a pouffé de pofte en
poſte Mr le Prince Eugenejufqu'au bout de l'Italie , l'ayant
acculé deux fois dans les Montagnes du Trentin. Il l'a chaffé des endroits oùil fe croyoit
en feureté , & dans lesquels il
GALANT 335
croyoit que l'on n'ofoit l'attaquer, & il a efté obligé de ſe
retirerdu Seraglio oùil croyoit
qu'il feroit toûjours maistre de
fortir ou de ne pas fortir , &le
Lac de Garden'a pas efté pour
luyun lieu où il ait efté plus à
couvert. Enfin il me faudroit
un Volume entier fi j'entreprenois de vous parler de routes les Batailles que Monfieur
de Vendôme a gagnées en Ita
lie , & de tous les Poftes qu'il a
remportez les uns aprés les au
tres. Toute 1 Italie parle de fa
gloire ; elle s'en fouvient avec
joye, & elle fe trouve dans la
335 MERCURE
le
derniere affliction de nele plus
avoir. Chacun y feroit maiftre
de fes biens , au lieu que les
Puiffances de cette vaſte Contrée qui devroient n'avoir nulpart en cette guerre , & qui
n'yen avoient point du temps
de ce fameux Conquerant , fe
trouvent accablées de fubfides
pour la continuation d'une
guerre à laquelle elles devroient n'avoir aucune part ,
& qui ne les regarde pas ; & on
oblige même la plûpart de
fournir jufqu'à des hommes.
Enfin toute l'Italie eft dans un
état fi violent qu'il eft impoffible
GALANT 337
fible qu'elle puiffe y refter
long- temps , & on la dégarnit
tellement d'argent & d'hommes quefe fera bien toft un de
fert, où le peud'habitans qui y
refteront ne trouveront pas de
quoyfournir à leur nourriture,
ce quifait qu'elle regrette tous
les jours les Troupes Françoifes , puifque pendant leur ſéjour la liberté y régnoit, que
tous les Peuples jouiffoient de
ce qui leur appartenoit , &que
la France loin d'en emporter
l'argent , y en envoyoits de
maniere que ces Peuples doivent dire : Oh l'heureux temps ,
Avril 1710. Ff
338 MERCURE
quand reviendra till! tala
Je ne dois pas finir cet Ar
ticle fans vous parler de l'af
cendent que Monfieur de Vendôme a encore eu en Flandre
fur Mr le Prince Eugene , & de
la maniere dont il ya brillé en
rompant tous les deffeins des
Alliez , fans qu'il ait efté queftion de Combat ; mais fculement de les empêcher avec
leurs nombreufes & formidables Troupes de prendre un
poulce de terre , ni même de
faire aucunes entrepriſes. Ils
n'ont pas fait un pas pendant
toute cette Campagne qu'il
17
GALANT 339
ne les ait empéché d'avancer ;
& quand ils avoient formé
quelque deiffein , ils fe trouvoient coupez par ce Prince,
quoy qu'il fuft fort éloigné
d'eux dans le temps qu'ils l'avoient formné , & mefme commencéà mettre en excecution;
& lors qu'ils fe vantoient de
faire quelque expedition , &
que Monfieur de Vendôme
l'ayant fçû auoit dit : Ils n'ofe
roient , il n'en eftoit rien. Enfin
avec des forces infiniment
moins confiderables que celles
des Alliez , il les arrefta par fa
grande fermeté , & par fa
Ffij
340 MERCURE
àla
grande experience dans le mé
tier de la guerre, pendant toute la Campagne, fans qu'ils fe
trouvaffent plus avancez
fin qu'au commencement.
Toute l'Europea parlé decette Campagnequ'on a regardée
avec admiration , & quand ce
Princeauroit emporté dix Places confiderables , elle luy au
roit eſté moins glorieufe qu'el
le ne luy a efté en ne faifant
autre chofe que de rompre
tous les projets des Alliez, &
en les arreftant par tout , de
même que s'il avoit cu une
grande fuperiorité fur eux
GALANT 341
quoy qu'elle fult toute de leur
cofté , & il n'y a point de General qui ne voulut avoir fait
unefiglorieufe Campagne , &
qui ne la preferaft à celles dans
lefquelles il auroit fait une
grande moiffon de Lauriers.
C'est ainsi que tout le monde
en a parlé , & a regardé cette
campagne comme une des plus
fçavantes qu'ait jamais fait aucun General , quelque grand,
heureux , & quelque habile
qu'il peut eftre.
Monfieur de Vendôme doit
mêler au premier jour fes Lauriers aux Mirthres de l'Amour.
Ffiij
342 MERCURE
On dit que fon mariage doit
eftre celebré à Seaux. Je ne
puis encore vous en parler dans
cette Lettre , quoy qu'il doive neanmoins eftre confommé dans le temps que vous la
recevrez.
grand Mariage qui merite vôtre attention , & dont toute la
Cour a témoigné beaucoup de
joye ; c'eft de celuy de Mademoiſelle d'Enguien, & de Mon-
GALANT 327
fieur de Vendôme. Il eft des
Perfonnes dont la naiffance eft
fi connue , qu'il eft inutile d'en
parler , puifqu'on n'en pourroit rien dire qui ne fût connu
de tout le monde. Ainfi je vous
parleray feulement de ce qui
regarde les perfonnes de ces
deux illuftres Epoux.
Mademoiselle d Enguien eft
digne fille de Madamela Princoffe , dont la modeſtie , la fageffe, la grande &ardente charité pour les pauvres , &toutes
les vertus font connuës , & qui
en a plus tiré d'éclat , que de
la grande naiffance du feu
328 MERCURE
Prince fon Epoux & de la fienne. On peut juger par là des
bonnes qualitez de Mademoifelle d'Enguien , qui a toûjours
eu de pareils exemples devant
les yeux , & qui a toûjours fait
voir que fon inclination eftoit
toute portée à les fùivre. Enfin,
on a toûjours remarqué que
cette Princeffe a toutes les qualitez & toute la douceur qui
peuvent faire une femme du
caractere de la Princeffe fa
Mere , & l'on s'eft toûjours
fervy en parlant d'elle ,
terme qui dit beaucoup , & qui
fait comprendre encore davand'un
GALANT 329
tage , puifque l'on dit de cette
Princeffe , qu'Elle n'a point d'humeur ; c'eft à- dire , qu'elle ne fe
laiffe entefter d'aucune chofe ,
qu'elle ne s'obtine ſur rien ,
& qu'elle eft toûjours preſte à
prendre le bon party , & à faire tout ce qu'on trouvera à
propos qu'elle faffe pour
bien & pour fa gloire.
fon
A l'égard de Mr de Vendôme, il a toute fa vie preferé la
qualité d'honnête homme à
toutes les autres ; il eft ennemi du fafte , & s'il a de l'ambition ce n'eft que celle que
peut caufer la belle gloire ; il
Avril 1710. Ec
A
330 MERCURE
T
cft bon , humain , & fon éga
lité de vie fait plaifir à tous
ceux qui le connoiffent. Il aime naturellement le Roy &
toute la Maiſon Royale ; il
n'a point de volonté , & il eft
toûjours preſt à faire tout ce
que l'on fouhaite de luy ; il a
toute fa vie fervy le Roy , &
l'Etat. Il a beaucoup fervi en
Allemagne , il a eu la gloire de
fe rendre maiftre de Barcelone ; cette conqueſte étoit auſſi
difficile qu'importante , & fera
vivre éternellement fa memoire , auffi-bien que le grand
nombre de campagnes qu'ila
GALANT 330
7
faites en Italie qui luy ont efté
auffi glorieufes qu'elles étoient
utiles & glorieufes à la France
& à l'Eſpagne en ce temps là ,
& il ya toujours triomphé des
troupes du Comte de Staremberg; de celles que commandoir Mr le Prince Eugene , &
dans les temps que celles de
Monfieur le Duc de Savoye fe
font mifes de la partie , elles
n'ont pasarrefté le cours de fes
conqueftes. Il ne s'eft jamais
vû d'afcendent pareil à celuy
qu'il a toûjours eu fur Mr le
Prince Eugene qui a toûjours
paru un Ecolier auprés de luy.
E cij
332 MERCUR
Ila gagnétant de batailles contre ce Prince que j'en ay oublié
le nombre ; mais vous les trouverez dans mes Lettres dont je
vous ay toujours envoyé d'amples détails à mesure qu'elles ſe
fontdonnées , &je vous ay envoyéen même temps les Relations qu'il en envoyoit au Roy.
Il obfervoit de ne point parler
de luy ; mais irrendoit juftice à
tous ceux qui s'étoient diſtinguez , qu'il nommoit les uns
aprés les autres , en faifant le
détail de leurs actions , & en
leur donnant les loüanges qui
leurs étoient duës . Jamais perཟླ་
GALANT 333
fonne n'a plus brillé que ce
Prince dans un combat ; il étoit
par tout tant que le combat
duroit , à la tefte, à la queue ,
fur les ailes & dans le centre
& les Soldats avoient tant d'amourpour luy, & tant de confiance en fa perfonne qu'ils le .
fuivoient par tout avec le plus
grand empreffement & la plus
vive ardeur , de maniere qu'il
n'y avoit point de déroute à
craindre fous fon Commandement , & qu'il ne luy eſt jamais.
rien arrivé de femblable , &
Mrle Prince Eugene étoit auffi
petit dans ces occafions qu'il
334 MERCURE
étoit granden cetemps là dans
les Gazettes étrangeres , parce
que les Alliez ne vouloienr pas
décourager leurs Sujets , &
qu'ils vouloient au contraire
les encourager à fournir toujours aux frais de la guerre.
Enfin toute l'Europe n'a pû
s'empêcher de demeurer d'accord , que Monfieur de Vendôme a pouffé de pofte en
poſte Mr le Prince Eugenejufqu'au bout de l'Italie , l'ayant
acculé deux fois dans les Montagnes du Trentin. Il l'a chaffé des endroits oùil fe croyoit
en feureté , & dans lesquels il
GALANT 335
croyoit que l'on n'ofoit l'attaquer, & il a efté obligé de ſe
retirerdu Seraglio oùil croyoit
qu'il feroit toûjours maistre de
fortir ou de ne pas fortir , &le
Lac de Garden'a pas efté pour
luyun lieu où il ait efté plus à
couvert. Enfin il me faudroit
un Volume entier fi j'entreprenois de vous parler de routes les Batailles que Monfieur
de Vendôme a gagnées en Ita
lie , & de tous les Poftes qu'il a
remportez les uns aprés les au
tres. Toute 1 Italie parle de fa
gloire ; elle s'en fouvient avec
joye, & elle fe trouve dans la
335 MERCURE
le
derniere affliction de nele plus
avoir. Chacun y feroit maiftre
de fes biens , au lieu que les
Puiffances de cette vaſte Contrée qui devroient n'avoir nulpart en cette guerre , & qui
n'yen avoient point du temps
de ce fameux Conquerant , fe
trouvent accablées de fubfides
pour la continuation d'une
guerre à laquelle elles devroient n'avoir aucune part ,
& qui ne les regarde pas ; & on
oblige même la plûpart de
fournir jufqu'à des hommes.
Enfin toute l'Italie eft dans un
état fi violent qu'il eft impoffible
GALANT 337
fible qu'elle puiffe y refter
long- temps , & on la dégarnit
tellement d'argent & d'hommes quefe fera bien toft un de
fert, où le peud'habitans qui y
refteront ne trouveront pas de
quoyfournir à leur nourriture,
ce quifait qu'elle regrette tous
les jours les Troupes Françoifes , puifque pendant leur ſéjour la liberté y régnoit, que
tous les Peuples jouiffoient de
ce qui leur appartenoit , &que
la France loin d'en emporter
l'argent , y en envoyoits de
maniere que ces Peuples doivent dire : Oh l'heureux temps ,
Avril 1710. Ff
338 MERCURE
quand reviendra till! tala
Je ne dois pas finir cet Ar
ticle fans vous parler de l'af
cendent que Monfieur de Vendôme a encore eu en Flandre
fur Mr le Prince Eugene , & de
la maniere dont il ya brillé en
rompant tous les deffeins des
Alliez , fans qu'il ait efté queftion de Combat ; mais fculement de les empêcher avec
leurs nombreufes & formidables Troupes de prendre un
poulce de terre , ni même de
faire aucunes entrepriſes. Ils
n'ont pas fait un pas pendant
toute cette Campagne qu'il
17
GALANT 339
ne les ait empéché d'avancer ;
& quand ils avoient formé
quelque deiffein , ils fe trouvoient coupez par ce Prince,
quoy qu'il fuft fort éloigné
d'eux dans le temps qu'ils l'avoient formné , & mefme commencéà mettre en excecution;
& lors qu'ils fe vantoient de
faire quelque expedition , &
que Monfieur de Vendôme
l'ayant fçû auoit dit : Ils n'ofe
roient , il n'en eftoit rien. Enfin
avec des forces infiniment
moins confiderables que celles
des Alliez , il les arrefta par fa
grande fermeté , & par fa
Ffij
340 MERCURE
àla
grande experience dans le mé
tier de la guerre, pendant toute la Campagne, fans qu'ils fe
trouvaffent plus avancez
fin qu'au commencement.
Toute l'Europea parlé decette Campagnequ'on a regardée
avec admiration , & quand ce
Princeauroit emporté dix Places confiderables , elle luy au
roit eſté moins glorieufe qu'el
le ne luy a efté en ne faifant
autre chofe que de rompre
tous les projets des Alliez, &
en les arreftant par tout , de
même que s'il avoit cu une
grande fuperiorité fur eux
GALANT 341
quoy qu'elle fult toute de leur
cofté , & il n'y a point de General qui ne voulut avoir fait
unefiglorieufe Campagne , &
qui ne la preferaft à celles dans
lefquelles il auroit fait une
grande moiffon de Lauriers.
C'est ainsi que tout le monde
en a parlé , & a regardé cette
campagne comme une des plus
fçavantes qu'ait jamais fait aucun General , quelque grand,
heureux , & quelque habile
qu'il peut eftre.
Monfieur de Vendôme doit
mêler au premier jour fes Lauriers aux Mirthres de l'Amour.
Ffiij
342 MERCURE
On dit que fon mariage doit
eftre celebré à Seaux. Je ne
puis encore vous en parler dans
cette Lettre , quoy qu'il doive neanmoins eftre confommé dans le temps que vous la
recevrez.
Fermer
Résumé : Mariage de Mademoiselle d'Enguien & de Monsieur de Vendôme, avec plusieurs choses particulières qui regardent ces deux illustres Epoux. [titre d'après la table]
Le texte décrit le mariage de Mademoiselle d'Enguien et de Monsieur de Vendôme, un événement célébré avec joie à la cour. Mademoiselle d'Enguien est présentée comme une jeune femme digne de sa mère, la Princesse, reconnue pour sa modestie, sa sagesse et sa charité. Elle est appréciée pour sa douceur et son absence d'humeur, ce qui la rend prête à accomplir ce qui est approprié pour son bien et sa gloire. Monsieur de Vendôme est loué pour ses qualités d'honnête homme, son aversion pour la fausseté et son ambition pour la gloire. Il est décrit comme bon, humain et égal dans sa manière de vivre, aimant naturellement le roi et la Maison Royale. Ses services militaires en Allemagne et en Italie sont particulièrement notables, notamment la conquête de Barcelone et ses victoires contre les troupes du Comte de Starhemberg et du Prince Eugène. Ses campagnes en Italie et en Flandre sont marquées par sa fermeté et son expérience, lui permettant de contrer les projets des alliés malgré des forces inférieures. Le mariage doit être célébré à Sceaux, bien que les détails précis ne soient pas encore connus au moment de la rédaction du texte.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 1-74
Historiette Espagnole.
Début :
Dans le temps que l'Espagne estoit divisée en plusieurs [...]
Mots clefs :
Prince, Amour, Coeur, Joie, Bonheur, Mariage, Princesse, Amant, Liberté, Duc, Combat, Époux, Choix, Rival, Espagne, Andalousie, Mort, Malheur, Vertu, Générosité, Père, Sensible, Aveu, Discours, Courage
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Historiette Espagnole.
Historiette Espagnole.
Dans le temps que.
l'Espagne estoit divisée
en plusieurs pays dont
chacun avoit fonSouverain,
le Duc d'Andaloufie
estoit le plus confiderable
d'entr'eux, foit par
l'estenduë de ses Estats,
soit par la sagesse avec
laquelle il les gouvernoit.
Il estoit l'arbitre
des autres Ducs sesvoisins,
dans les differens
qui les defunissoient, &
ces raisonsluyattiroient
la veneration
,
& le respectde
toute l'Espagne :
le detir qu'avaient les
jeunes Princes de voir
un Souverain dont la réputation
faisoit tant de
bruit,& qu'on leurproposoitsans
cesse comme
le plus excellent modelle
,
les attiroit dans sa
Cour, mais les charmes
de Leonore sa fille les y
retenoient: c'estoit la
beautéla plus reguliere,
&la plus touchante,
qui eustjamais paru en
Espagne
,
la beauté de
son esprit, &l'excellence
de son coeur formoient
de concert avec
ses appas tout ce qu'on
peut imaginer de plus
parfait.
Les Princes qui ornoient
une Cour déjasi
brillanteparl'esclat de
la Princesse Leonore,
joüissoient d'un je ne
scay quel charme secret,
que sa presence faisoit
sentir, ëc que la renomméen'avoit
paspûassez
publier: Ils l'aimoient,
ilsl'admiroient, mais le
respect ne leur en permettoit
que les marques
qui efchapentnecesairement
à l'admiration
,
6c à l'amour. Le
seul D0111 Juan fil^ du
Duc de Grenade osabien
tost reveler le secret
que tous les autres
cachoient avec tant de
foin. C'estoit un Prince
très - puissant
,
bc de
grands interestsd'Estat
queleperedeLeonore,&
le sien, avoient à demefler,
pouvoientfaciliter
un mariage auquel son
amour ,
& sa vanité le
faisoient aspirer, ensorte
queDom Juan sûr de
l'approbation du Duc
d'Andalousie,&constant
aussi sur son mérité declara
son amour à Leonore,
avec une hardiesse
qui dominoit dans
son caractere.
La Princesse ne luy
respondit point avec ces
vaines ostentations de
fierté ridicules sur tout
dans celles que l'amour
n'a pas touchées; mais
son discours portoit un
caractère de modération
qui luy annonçoit une
longue indifference
,
il
ne receut d'elle que
quelques marques de la
plus simple estime, sentiment
froid qui ne fait
qu'irriter les feux de l'amour,
DomJuan eust
mieuxaimé queLeonore
eust esclaté contre luy
, l'indifference est en effet
ce qui tourmente le
plus un amant, elle luy
oste le plaisir de l'esperance
aussi
-
bien que la
haine, & n'éteint pas
comme elle sa passion.
DomJuan parla souvent
deson amour à Leonore
,
& il en receut toujours
les mesmes respon
ses, rien ne put attendrir
pour luy
, ce coeur
dont l'amour reservoit
la conqueste à un autre,
mais en perdant
l'esperancede toucher
son coeur, il ne renonça
pas à celle de la posseder,
il agit auprès du
Duc plus vivement que
jamais
,
il esperoit que
Leonore aimeroit son
époux par la mesme raison
qu'il l'empeschoit
d'aimer son amant, il
pressa si fort son mariage
qu'en peu de temps
il fut conclu: quelle
fut la desolation décette
Princesse,ellen'estoit
pas insensibleàl'amour.
lePrince deMurcie avoit
sceu lui plaire, mille
qualitez héroïques le
rendoientdigne de son
amour, elle l'aimoit
quel malheur d'estre,
destinée à un autre. Cet
aimable Prince qui l'adoroit
n'avoit jamais ofé
luy parler de sonamour,
& n'avoit aussi
jamais reçu aucune mar
quedeceluy que Leonore
sentoit pour luy :
Il arrive à Seville où
estoit la Cour du Duc
d'Andalousie. Le mariage
de Dom Juan fut la
premiere nouvelle qu'-
apprit l'amoureux Prince
de Murcie, il fut frappé
comme d'un coup de
foudre. Il crut avoir
tout perdu, ainsi il ne
menagea plus rien, &
sansrendre ses premiers
devoirs au Duc, il
court chezLeonore dans
l'estat le plus violent quun
amant puisseeprouver
: Il eji doncvray,
Madame, luy dit-il, que
vous épousezDomJuan,
l'heureux Domfuan va
vous posseder.Toute la
Courqui retentit de sa
gloire deson honheur,
m'annonce le seul malleur
quiputm'accabler:
car enfin,Madame, il
n'est plus temps de vous
cacher messentiments
,
il
faut maintenant qu'ils c-
L'latent, je vous aimay
dezque vousparusses à
mes yeux, l'amour ne
peut plus se tairequand
il est reduit au desespoir;
Dom Juan seral'époux
de Leonore , Ah Prince[
Je ! quelle ressource
pour moy dans un pareil
malheur, Eh! quel
autrepartypuis-jeprendre
que celuy de mourir
: ce discours du Prince
surprit Leonore : il
luy donna encore plus
de joye
,
le respect du
Prince avoit juques-là si
bien caché son amour
qu'ellen'avoit pas mesme
peu le soupçonner,
quel charme pour elle
de se voir si tendrement
aimée d'un Prince qu'-
elle aimoit.
Leonore dont le coeur
estoit grand & incapable
des petitesses de la
feinte&dudéguisement
se livra toute entiere au
premiermouvement de
la gcnerosité, Prince,
dit elle, loin que vostre
amour m'offense, je ne
fais point difficulté de
vourdirequej'y responds
par tout celuy dont je
suiscapable; ouy,Prince,
je vous aime, &fij'epou.
sois Dom Juan je serois
encore plus à plaindre
que vous, maintenant
que jeconnoisvostre amour,
&que voussçat¡}
eZ le mien, nos malheurs
ne seront pas si
grands, la pofejjion de
vostre coeur va mefaire
surmonter les plusrudes
disgraces, &l'aveu que
je vous fais de mon amour
vous responds que
je ne seray point à un
autre que vous.
Cet aveu paroîtra sans
doute bien promt à ceux
qui croyent que l'amour
est toujours une foiblesse,
il feroit condamnable
en effet dans une
amante ordinaire, mais
l'amour heroïque plus
independant se prescrit
à
à luy mesme ses regles ,
sans violer jamais celles
dela vertu.
On peut juger combien
le Prince fut sensible
à un aveu dont il
n'auroit jamais osé se
flater
,
sa joye plus vive,&
plus forte que celle
que l'amour content
inspire d'ordinaire,ne se
monstra que par des
transports, illuy prouvoit
par le silence le plus
passionné que son bonheur
épuifoit toute sa
sensibilité, tandis que la
Princesse
,
oubliant le
danger d'estresurprise,
s'abandonnoitauplaisir
de le voir si tendre. Il
reprit l'usage dela parole
que sa joye extrémeluy
avoit osté: Est-il
possible, ma Princesse !
que vous flye{fènfihle
à mon amour, n'estoitce
pas ajJeZ que la pitié
vous interessast dans mes
malheurs ; Je comptois
sur la gloire de vous admirer,
f5 de vous aimer
plus que tout le monde
ensemble,maispouvoisje
me flater du bonheur
de vousplaire:SoyeZ,ûr,
dit Leonore, de la sincerité
de mes sentiments :
la vertu ria pas moins
de part à l'aveu que je
vous en fais que mon amour
:oüy
,
Prince, c' est
cette vertu si sensible à
la vostre qui vous afait
iJ.:I1)U que monamour,
tout violent qu'il est, ne
m'auroitjamais contraint
à vous faire f5 cejl
cette vertu qui mefait
souhaitterd'estreplus digne
devous: mais helas!
que leplaisir d'un entretien
si tendre va nous
cou,#ercl,er,noe,r,e amour
est trop violent pour ne
pas éclater, on le remarquera,
Prince, & l'on
va nousseparerpour tousjours.
Aprés une conversation
telle que se l'a peuvent
imaginer ceux qui
ont ressenti en mesme
temps l'amour, la joye
&la crainte. Le Prince
deMurcie se separa de
sa chere Leonore
,
de
peur de trahir par un
trop longentretienlemistere
si necessaire à leur
amour:il alla rendre ses
devoirs au Duc d'Andalousie,
qui luy confirma
le mariage de Leonore
avec DomJuan;savisite
futcourte,il n'aimoit
pas assez DomJuan pour
s'entretenir si long-tems
de son bonheur:la resolution
du Duc l'allarmoit
extremement ,
il
prévoyoit des éclats que
son amour pour Leonore
luy faisoit craindre
plus que la mort. Agité
de foins & d'inquietudes
il va chercher la solitude
pour y réver aux
moyens de détourner le
malheur qui le menaçoitj
il y trouva justement
Dom Juan qui se
promenoit seul dans les
jardins du Palais: quelle
rencontre que celle
d'un Rival qui rendoit
malheureux l'objet de
son amour. Si le Prince
eust suivi les mouvements
de sacolere,il auroit
sans doute terminé
sur le champ leur querelle:
mais il importoit
au Prince de dissimuler
plus quejamais; il aborda
Dom Juan avec cet
air d'enjouëment, & de
politesse qui luy estoit
particulier, & luy parla
en ces termes: Je ne
m'attendotspas, Prince,
de vous trouver enseveli
dans une profonde rêverie
lorsque toute cette
Cour ne s'occupe, & ne
s'entretient que de vostre
bonheur, le Duc d'Andalousie
vient de vous
rendre le Princed'Espagne
le plus heureux, &
nous
vousfuyeztout le monde
qui applaudità son
choîx. Est-ce ainsi que*
vous r(ce'Ve{, la plus
grandefaveurquepuisse
vous faire la fortune ?
Prince, responditDom
Juan, loin d'estre inJér;-'
sible au bonheur que le
choix du Duc me procure
,
c'est peut- estre afin
de le mieux gouster que
je cherche la solitude:
poury estreaussisensible
que je le dois, je riay beJ'oin
que de mon propre
coeury , je le possede
mieux icy qu'au milieu
d'uneseule de ccurtifans,
dont quelques-unspeutestre
donneroient des applaudissementsfcrce\
y a
un Princedontils envient
le bonheur.
Quoj qu'ilensoit, re->
prit lePrince, voflre
froideur mestonne:vous
estes trop heureux pour
veus renfermer dans les
bornes dune joye si moderee.
Eh!qui eutjamais
tant desujets de joye?
Vous allez,posseder Leonore
, &vous pofedez
apparemment son coeur,
car DomJ-uJan,delicat
&genereux comme je le
connois, nevoudraitpoint
faireson bonheurauxdépens
de celle -qu'ilaime,
il n'auroit point accepté
les offresduperesans eflrc
seur du coeur de lafille.
Leonore,-refpoilditDom
Juan, n'a point flatté
mon amour, &si setois
d'humeur a mmquieter>
je trouerois peut -
estre , quelle est sans inclination
pour moy:maisenfin
je rapporte la froideur
dontelle apayemesfeux,
à son indifférence naturelled'amour
mutuel n'est
pas necessaire dans de
pareils mariages, les raisons
d'Estat, & les interests
de famille en décident
ordinairement; &
lorsque j'accepte ïhonne"
f?' que le Dm-veut me
foeire? (avertu
pond quelle n'a point
d'tantipathiepour l'époux
que son pere luy destine ,
ni d'inclinationpourceux
que le choix du Duc riauthorisè
pas à luy lnarquer.
de l'amour. Permettezmoy
y
Seigneuryrepliqua
le Prince
,
de douter de
la sincerité de vos discours
pour estimer encore
vos sentimens, ouiy puisque
vous 'vo!/;/ez estre
l'Espoux de Leonore,
vous estes purdeJon
coeur: mais sans doute
vous vouleT^oùtrJeul de
vosplaisirs.Jevous laise
en liberté.
Si le Prince quitta
brusquementDomJuan,
c'estoit moins pour luy
plaire
, que parce qu'il
craignoit de ne pouvoir
pas assez retenir sa colere.
Il estoiteneffetbien
dangereux qu'elle n'éclatast
à la veuë d'un
Rival qui oiïLnibit également
sa delicatesse &
sa passion.
Le Prince courut rendre
compte à sa chere
Princesse de ce quis'estoit
passé entreDomJuan
& luy: mais bientost
les inquiétudes le reprirent
quand Leonore luy
dit que le Duc son pere
vouloit absolument acheverce
fatal mariage,
qu'elle en auroit esperé
plus de condescendance
,
maisqu'il paroissoit
inflexible
,
& qu'elle
craignait bien que rien
ne peut changer a resolution.
Ce fut ppur lors que
le Prince se trouva
cruellement agité: Que
de malheurs, luy dit-il,
je vais vous susctier!
quelles violences ne va
point vousfaire le Duc?
quellespersecutions de la
part de DomJuan? mais
en vain cet indigneRi- ,Zne
: valvêtitjorcervojïre inclînattoïijappujzduchoix
de vostre Pere, mon amour
& mon courage,
plus forts que leurs intercjisy
& leurs resolutions
vaincraient des obstacles
mille fois encore plys
grands: mous^wiau
meZ, je ne seray jamais
malheureux Dom
Juan nefera jamaisvostre,
Epoux ; je cours le
punir & vousvenger.
jihPrincel dit Leonore
,
auallû^vcus faire?
je ne crains point que le
bruit d'un combat suissè
ternir ma gloire, mais
que deviendrons-je lit
vous estoit funefe ? la
fortune riejïpas tousjours
du party de l'amour.
Prince, au nom de cet
Amour,n'éxposez,point
une vie à laquelle s'attache
la mienne: contenteZ:.,
vous du ferment que je
fais de rieflre jamais
qu'a vous,
Quel coeur ne feroit
pas sensible à tant de tendresse
? mais qui pourroit
l'estreautant que le
fut ce Prince le plus delicat
,
& le plus tendre
de tous les amans : on
peut croire queses transports
éclatoientsur son
visage, & ce fut en effet
ce qui trahit le mistere
de ces amans. DomJuan
venoit visiter Leonore,
il entroit dans son appartement,
dans les mamens
les plus vifs
y
&
les plus heureux où le
Prince se fust encore
trouvé; il sbupçonna
d'abord sonmalheur, &
la Princessequieraignoit
de sè trahir elle-mesme,
aprés quelques discours
de civilité feignit une
affaire, & se retira dans
son cabinet. Pour lors
Dom Juan qui n'avait
d'abord osé produire les
soupçons, ne menagea
plus rim, ces deux Rivaux
quitterent l'appartement
de la Princessè,
& sanssedonnerrendezvous
que par des regards,
ïls se trouvèrent
enfin {èu!s dans une alléeextrêmement
éloignée
du Palais, &Dom
Juan parla ainsi le premier
; Si j'avais Jeeu ,
Prince, que vous estieZ
seul avec Leonore - n'aurais eu garde de troubler
c-uoftre entretien, il
vous saisoit plasir à l'un
é5 à l'autre, ou toutes les
marquessurlesquelles on
en peut jugersont équivoques
: je mesuis pour lors
souvenu desmaximesgenereusèsquevous'VoulieZ
tantoslm'inspirer, iffen
ay reconneu la sagesse
aussî-tost que leprincipe.
Seigneur, respondit le
Prince, quand on estné
genereuxon n'ignorepoint
ces maximes, un amant
delicat se croit indigne
d'époufsr sa maijlrejje
quand il ne s'enfait pas
armer, l'epouser sans luy
plairec'est luy ojier la
liberté de concert avec
ceux qui ontdroitde disposer
d'elle, ~(jfpour
moy Pour vous,
répliquaDom Juan
,
vous accepteriez^le choix
de son Peres'il estoit
en vostre saveur ; sans
craindre dopprimer sa
liberté, ~f5 vous ferieZ
un usage plus agreable
de la delicatessè de
vos sèntiments: je rien
produirois pas du moins,
reprit le Prince avecémotion,
d'indignes f5
~â*elle&demoy.Jeferay
bientost voir, repritfierement
Dom Juan, que
cen'estpas estreindigne
du bienauquel on
que defaire desenvieux.
A ces mots le Prince sèntit
redoubler sa colere:
Un amant, luy dit-il
quinetrouveque de Findifférence
dans l'objet
qu'il
qu'ilaimerait d'ordinairepeud'envieux.
Jesuis
surpris,reprit DomJuan,
de l'audace avec laquelle
vous osèZm'insulter.
Hé! que pretendeZ:vous
sur Leonore pour en soutenirles
droits:je prétends
les luy consèrver , dit le
Prince, ~& scavoir si
Dom Juan aura le courage
de les detruire. Aces
mots, il tire son épée, &
Dom Juan se met en devoir
de se deffendre.
A voir leur mutuelle
fureur on auroit devin
sans peine l'importance
du sujet qui lesanimoitt
ces siers Rivaux, qu'un
grand courage & de
puissants. motifs rendoient
prefqumvinciblés,
combattirent lone- otemps à égal avantage:
mais enfin la force 8c
l'adresse du Prince prévalurent
; il desarma
Dom Juan
,
qui sans xvoir
receu aucune biefseure,
se trouva a la merci
de son vainqueur.
Alors le Princeloind'abuser
de sa victoire, sentit
mourir toute sa haine,
il ne put s'empescher de
plaindrele.tristeestat
dun malheureux. Dom
Juan estoit- en effet digne
de sa pitié :: il se
monstroit à la véritépeu
genereux. en poi^rfiijvant
des prétentions que
l'inclination de Leonore
n'authorisoit pas, mais
il dementoit sa générosité
pour la prèmieresois,
& jusque là le Prince
l'avoit trouvé digne de
son estime. Il ne voulut
point aussi luy donner la
mort : DomJuan, luy
dit ce genereux Rival
renoncera la possessïon de
Leonore ~f5 rvi'VeZ: Non,
non, respondit Dom
JuantermineZ ma vie
oulaissezmoy l'esperance,
depossedèrleseulbien qui
me la fait aimer. Vous
ouLeZdonc mourir, reprit
le Prince? Oüy, dit
Dom Juan, Eh! queserois-
je d'une vie qui ne.
seroit pas consacréea Leonore,
ah ! je feray trop
heureuxde luy donner
ceûtepreuve de ma constanceouijeveux
mourir..
Non, dit le Prince, que
ce discours avoit attendri
,non vous ne mourrez
point , deussai-je vivre
tousjours malheureux, je
respectedanscoeur ïa*-
mour queLeonoreyafait
naistre : Vivez Dom
Juan,vivez,&qu'on
ne puissejamais dire que
vous mourez pour avoir
aimécette divinePrincesse.
En mefine temps illuy renditsonépée,
prest à recommencer le
combat.Mais DomJuan
charmé de la generosité
du Prince, sentit tout à
coupchanger soiscoeur,
il fut quelque temps incapable
de prendre une
resolution, & mesme de
prononcer une parole:
enfin plus vaincu par la
generositédu Prince que
par ses armes, comme
s'il fust tout à coup der»
venu un autre homme,
il parlaainsi à son Rival.
Aumoment que vous me
rendez la vie , je comprends
que jemeritois la
mort, & je vaisvous
donner la plus grande
marque de mareconnoissance
:vousaime^Jans
WMte Leohore5, (3vom
estestropaimablepour
n'en
)
fjhe.pasaimé )1J
vous ceje>Prince
, tou?
tesmesprétentions, puissiez-
vousvivretousjours
heureux amantde Leànore:
pourmoyjevais lok
fuirpourjamais,&mettretoute
marlohe à eteindreunepassion
qui ojpen
selesplusillustres ama'ldu
monde"s conservez,
Prince,vostre amitiéque
vousvenezdemerendre
I!/
sipretieuse, & accomplir
tous nos souhaits. On ne
peut exprimer la joye,
&lasurprise du Prince,
il n'auroit pas cru que la
generosité eust tant de
pouvoir sur le coeur de
DomJuan,& fàrefblution
luy paroissoit si
grande, qu'àpeinepouvoit-
il suffire à l'admirer>
il le tint longtemps
entre ses bras, arrosant
son visagede ses larmes.
C'estoit un spectacle
bientouchant que ces
fiers rivauxdevenus tout,
d'uncoup sitendres. Ce
Prince déploroitlafatalité
des conjonctures qui
fQrçoieJld. Dom Juanà
luy faire un si violent sacrifice,
pendant que
DoraJuan croyoit faire
encore trop peu pour son
illustre amy. Leur genereuse
amitié fit entre eux
un fecond combat, aussi
charmant que lepremier
avoitestéterrible,
Ils se jurèrent une éternelle
amitié,&sedirent
enfinAdieu. Dom
Juan ne voulutpointretourner
sitost dans ses Etats;
craignant les esclaircissemens
que le Duc de
Grenade son pere auroit
exigé sur son retour imprevû.
Il resolutd'aller
voyager dans toute l'Êspagne.
Il ne crut pouvoirmieux
accomplir sa
:
promesse
, que par des
courses continuelles JOÙ
la multiplicité desdiffectls-
úbjets qui s'offrent
âùx Voyageurs,pouvoir
lé distraire
,
& chasser
ses premières impressions.
CependantlePrincequiavoit
tant de fîrjets
d'estre content de
l'amour,& delafortune,
prévoyant de terribles
esclats qu'il croyoit
devoirespargner à la
vertu de Leonore, estoit
accablé dedouleur. Ilse
reprochait d'avoir plus
écouté les interdis de
son amourque ceuxde
sa Princesse. Il craignoit
de s'estre rendu tout-afait
indigne d'elle. Aprés
avoir hesitéquelque
temps entre cette crainte
etledesir deluyapprendre
sa destinée
, ce dernier
sentiment l'emporta
,
&là il confia à fbn
Ecuyer une Lettrequi
apprit bientost à la Princesse
comment le Prince
l'avoitdélivrée des ira- -
portunes poursuites de
DomJuan. Si elle reçut
avec plaisir la nouvelle
delavictoire du Prince
: elle fut encore plus
charméedeladelicatesse
de ses sentimens, Quoy,
disoitelle, le Prince est
entUoneux dans un combat
qui decide definbon*
heur; & cependant craignant
de leftte rendu m-*
digne de mon amour par texceZ du sien. Il ne
peutgouster en liberté la
foyelaiplm grandeqm(
fdït capable de!rej!tlJ'ir.Ãj
nàiyEnnctiropgemr^m^
ne crainspointla iïèlcra
de Leono'm;jen'vhfvifab
ge dans .'erf:orhb:J'.qt«.:lu
fmlm ttt ')'expàfà,j,ipn
empefchrqueje,nefnjje
àun oewrequ'à:toyl
C'estainsi que cette
genereuse Princesse in-r
sensible à des revers que
le Prince craignoitpour
elle,donnoitau fort do
£>11Amant, une joyeà
laquelle il s'eftoit=lùy¿.
mmesemferrï'ï,~e.-•tru~:~-ma~ contoefi<fUerfeuftpô
gouster foiv; bonheur
sans l'y rendre sensible,
felle voulutparunelettre
Qu'elleluy écxivit]
Rendre toute sa tranquilité.
L'assuranced'estre
iimé de Leonore eïîoit
bien necessaireau Prince
pour luy faire supporter
fort absence : Il alloit
estre éloigné d'elle sans
ftjavoirquand il la re1\
erxoit,l éJpii9};i1i
Q¥elifalLfWlleJWtsJ)i\
|ettrpj4çL^nftr^&j/ç
retiraàdeu?ilicu(;'s<]e.§evine,
dityis,unJiçqu;JJl
9it.rfgiJitPjÇé.,gy
ilç'^ççUp^ l\11jq\1JtMJl}
du plaisir qLJre1F.lhf
JfUe,,^4e Ifcdgolgiif
d'enpeal('rsi6'.J.lÆp. noredesonCoftcin'avçuj:
gueresd'autre occupation
j'ics mesmesfcntimensleur
donnoientles
mesm peines 3îô^rJLes
mesmes plaisirs.
• Untemps considerable
se passa,sansqueces
deuxAmans pussent ny se11tretenlf) ny s'écrire
&Leonore qui n'avoit
de plaisir qu'enpensant
au Prince, en estoit pour
comhh de malheurs distraite
par les soupçons
defon> pere qui croyait
que les froideurs de sa
filleavaient éloigné
Dom Juan. Enfin le tumulte
d'une Cour, où
l'on nes'entretenoit que
deDomJuanluy devint
tout-à-fait insuportable?
elle pria leDucfbh perô
de luy permettre de quitter
Seville pour quelqoç
temps,sousprétexte de
rétablir sa santé
, que
l'absence de son cher
Amant avoit extrêmement
alterée:elle choisi
Saratra Maison de plaisance
à deux lieues de
Seville où elle avoit passé
une partiede sonenlance,
ellealloit tous les
soirs se promenerdans
un boisépais, ouellç
cftoitièurede trouver le
iilençe3 &la liberté:Un
jour sans s'estre apperçuë
de la longueur du
chemin ellele trouva
plus loin ql.",àl'ordi'qÇ
duChasteaudeSaratra,
elles'assit&fitassessoir
auprès d'elle Iiàbejle,
l'unede ses Filles qu'elle,
aimoit plus que les autrès,
&qui ne la quittoit
prcfqUc janlâis;elI tomba
dits UOéjft profonde
résveriè quilabelle* ne
put s'empescher deluy
en demanderle sujet,&
pourlors,foitque son
amour fortifié par un
trop long silence nepust
plus se contenir, , soit
qulfabelle méritastcettemarqué
de sa confiant
ce, Leonore luy ouvrit
fsoornt ccoeoeuurr,>&paparlrele rreécciitt,
le plustouchant luy ap- prit tout lemystere qui
estoit entre elle, & le Prince.! Ilàbelle estoit, sans
doute attendrie à la
peinture d'un si parfait
amour; mais elle se crut
obligée d'exhorter Leonore
à bannir le Prince
de son coeur: elle luy
representa respectueusement
tous les égards
.qu'exige des perssonnes
de son rang, le public à
quielles doivent, pour
ainsi dire,rendre compte
deleurssentiments 6c
de leurvertu.
chere Isabelle, reprit Leonore,
des quejeconnus le
.¡?rince, jeperdis laliberté
de-faire toutes ces reste- jfions,ma raison qui- en fit beaucoup en safaveur
rienfitaucunes contre lui.
Je l'aime enjirJ, & je
crois
, par mon amour,
estreau-dessusde celles
quin'ontpas lecoeurassez
vertueuxpour L'aimer,ce
riesipoint parcequ'il est
mïeuxfàit quelesautres
phltimïÈfneetèsf-pnriipta.Crc'eeafil*,ila
ma
iherèIJabelle,le caracte-
Yedejon coeurquefeftimc
eifHui9cèjifinamour
g'tïïereuxydélicat3dèfifr
terëjfé'', refPelJueux_'Ja.
cm que cet amour lriflreçoit
magenerositéa&
payerpar toutceluidont
jefhiscapable : plusatùntif
à ma, glomqtfà
fftôhmefmesfS indffjfc
fetitfursa félicitéparticulitre,
culiere, /<?#*çequi 12
pointderapport au* hoifc
&e$trde monarrww^ oud
facial de m'a :i.lé'li' nè
peut IjntereJJer,pouvois^
je connoistre taitr
Wtey.&wfasïefîtmer*
fomjQtSrjesèntir lepriX.
*a4hmsripmar'fait*arm.ou.r^0,> sionque ]aipoHr lui nest
fdefimnitmdee.re;ptlaire,*fqau'bosni<nyçoei.ï
AkhfmrqMifaunlqM
jefois condamme a ne le
plust¡}oir,peut-estre d()ut
t'ilde ma confiance,peut*
estre il craint que mon
amour ne saffomiJJ-es Apeine eut-elle achevécesderniers
mots,que lePrince sortit du bois
tout transporté, & se
jettant à ses pieds , s'éria:
Ah! ma Prtncejfeî
y a-t'tl un homme aujjfi
heureuxquemoi, dfpar*
ce que je vous rends un
hommage tjtIC tout l'tmivers
seroitforce de rvou;'
gendre,faut-ilque
plus heureux quç.Jont^
''Vr)ivers enseble. vv^. quellefurprifequel-,
lejoye, quels tranlports ):cçlatçf,
ces Ecnjdrcs Amaps:cçtt^
réunion impréveuë piÇrr
duifitentre eupi,ualong
silence qui ;peignoir
ntieüx leur fènfibiUtq
quetous les difçoups%<
';'"Cette {îtuatioa y;oiç
i doutçd,;cs grap!<&$
douceurs, mais l'amour rsen
trounedansles discours
passionnez quand ila
épuiséceux dusilence;
£6 futalorsque nepouvantadeziè
regarderais
ne purentle lassèr de
c:nteJldrc.-'
'i'Y0 Que fat deplaijira
n)om retrouver,cherPrince5
dit tendrement Leoîiore,
mais que ceplaisir
seracourt,peut-etrenous
ne^nousverrons\plus<:
nous ne nousverronsp'fofo,
ma Princesse,réponditil
,
ah crote^qm:tmtts
lesfois que lagloire,owfo
félicitéde Lemoreexige*
ront que je paroisse-â'fès
vousverrai-, je
vous verrai,charmante
Princessemalgrétousces
périls, maisquetousces
périlsyque.tous cesmah
heurs ne soientquepour
moi[ml9 jArai Uforcç
de lessùpporter>pmfqm
tpous. rriaimel
aJen'entreprendspoint
de pein: ici la douceurdeleurentretien
,
chacun en peut juger
- par sapropreexperience
aproportion des ,[ent..::..
nients dont il est capable.
Ilsuffrira de dire que
ces ,
plaisirs : n'ont point
debornes dans les coeurs
deceux qui n'enmettent
point à leur amour-
Chaque jourLeonore
revit for* Amant! & ce
- - A -
surentchaque jourde
nouveauxplaisirs:ils
estoient. trop heureux,
pour que leur bonheur
futde longuedurée,la
fortùrie leurdonna bien-
! tost d'antresfoins,*Lea-*
norèvrèceutiardre
; de
quitter, Saratra,&£Tdè
retourner promptement
à Seville:D'abord; elle
soupçonna quelquetrahison
de la partde [ci
domestiquer, & fit fça*
-
voirau Princel'ordre
cruel qui les SEparoit, en :de s'éloigner
inceflamineiic d'un lieu
où il avoit sans doute,
cf{tLé'ddé' couvert.
r. :,
Lessoupçons de Léo-»
nom ne se trouverent
quetrop bien sondez,
le Ducavoit appris par
un domestique de Leonore
3
qui estoit depuis
long-temps dans les
intereftsde Dom Juance
qui se passoit entre
dIe ,& le Prince:
Il
Ilrappella la Princesse
qui croyant sapassion
trop belle pourlaciefa^
yoüer;ne luyen sitplus
un mystere , non plus
que du combat entrer les
deux Princes. LàfîncePrité
de Leonore nefit
qu'exciter lacolere du
Bue,illuy ordonné de
se préparer à un pii&
grand voyage, &: afïii'
qu'ellepust oublier le
Princecepere}inflxi
ble resolut demettrela
mer entre ces deux amants,
& emmena Leonore
dansl'ille de Gades,
Cedépart fut si secret
& si precipité, que Leonore
ne put en informer
le Prince;ilapprit bien
tost quelle n'estoit plus
à Seville,mais avant
qu'il pust apprendre où
son perel'avoitreleguée,
il fut long-temps livré à
la plus cruelle douleur
qu'une pareille separatfionraiit
Dans le temps que.
l'Espagne estoit divisée
en plusieurs pays dont
chacun avoit fonSouverain,
le Duc d'Andaloufie
estoit le plus confiderable
d'entr'eux, foit par
l'estenduë de ses Estats,
soit par la sagesse avec
laquelle il les gouvernoit.
Il estoit l'arbitre
des autres Ducs sesvoisins,
dans les differens
qui les defunissoient, &
ces raisonsluyattiroient
la veneration
,
& le respectde
toute l'Espagne :
le detir qu'avaient les
jeunes Princes de voir
un Souverain dont la réputation
faisoit tant de
bruit,& qu'on leurproposoitsans
cesse comme
le plus excellent modelle
,
les attiroit dans sa
Cour, mais les charmes
de Leonore sa fille les y
retenoient: c'estoit la
beautéla plus reguliere,
&la plus touchante,
qui eustjamais paru en
Espagne
,
la beauté de
son esprit, &l'excellence
de son coeur formoient
de concert avec
ses appas tout ce qu'on
peut imaginer de plus
parfait.
Les Princes qui ornoient
une Cour déjasi
brillanteparl'esclat de
la Princesse Leonore,
joüissoient d'un je ne
scay quel charme secret,
que sa presence faisoit
sentir, ëc que la renomméen'avoit
paspûassez
publier: Ils l'aimoient,
ilsl'admiroient, mais le
respect ne leur en permettoit
que les marques
qui efchapentnecesairement
à l'admiration
,
6c à l'amour. Le
seul D0111 Juan fil^ du
Duc de Grenade osabien
tost reveler le secret
que tous les autres
cachoient avec tant de
foin. C'estoit un Prince
très - puissant
,
bc de
grands interestsd'Estat
queleperedeLeonore,&
le sien, avoient à demefler,
pouvoientfaciliter
un mariage auquel son
amour ,
& sa vanité le
faisoient aspirer, ensorte
queDom Juan sûr de
l'approbation du Duc
d'Andalousie,&constant
aussi sur son mérité declara
son amour à Leonore,
avec une hardiesse
qui dominoit dans
son caractere.
La Princesse ne luy
respondit point avec ces
vaines ostentations de
fierté ridicules sur tout
dans celles que l'amour
n'a pas touchées; mais
son discours portoit un
caractère de modération
qui luy annonçoit une
longue indifference
,
il
ne receut d'elle que
quelques marques de la
plus simple estime, sentiment
froid qui ne fait
qu'irriter les feux de l'amour,
DomJuan eust
mieuxaimé queLeonore
eust esclaté contre luy
, l'indifference est en effet
ce qui tourmente le
plus un amant, elle luy
oste le plaisir de l'esperance
aussi
-
bien que la
haine, & n'éteint pas
comme elle sa passion.
DomJuan parla souvent
deson amour à Leonore
,
& il en receut toujours
les mesmes respon
ses, rien ne put attendrir
pour luy
, ce coeur
dont l'amour reservoit
la conqueste à un autre,
mais en perdant
l'esperancede toucher
son coeur, il ne renonça
pas à celle de la posseder,
il agit auprès du
Duc plus vivement que
jamais
,
il esperoit que
Leonore aimeroit son
époux par la mesme raison
qu'il l'empeschoit
d'aimer son amant, il
pressa si fort son mariage
qu'en peu de temps
il fut conclu: quelle
fut la desolation décette
Princesse,ellen'estoit
pas insensibleàl'amour.
lePrince deMurcie avoit
sceu lui plaire, mille
qualitez héroïques le
rendoientdigne de son
amour, elle l'aimoit
quel malheur d'estre,
destinée à un autre. Cet
aimable Prince qui l'adoroit
n'avoit jamais ofé
luy parler de sonamour,
& n'avoit aussi
jamais reçu aucune mar
quedeceluy que Leonore
sentoit pour luy :
Il arrive à Seville où
estoit la Cour du Duc
d'Andalousie. Le mariage
de Dom Juan fut la
premiere nouvelle qu'-
apprit l'amoureux Prince
de Murcie, il fut frappé
comme d'un coup de
foudre. Il crut avoir
tout perdu, ainsi il ne
menagea plus rien, &
sansrendre ses premiers
devoirs au Duc, il
court chezLeonore dans
l'estat le plus violent quun
amant puisseeprouver
: Il eji doncvray,
Madame, luy dit-il, que
vous épousezDomJuan,
l'heureux Domfuan va
vous posseder.Toute la
Courqui retentit de sa
gloire deson honheur,
m'annonce le seul malleur
quiputm'accabler:
car enfin,Madame, il
n'est plus temps de vous
cacher messentiments
,
il
faut maintenant qu'ils c-
L'latent, je vous aimay
dezque vousparusses à
mes yeux, l'amour ne
peut plus se tairequand
il est reduit au desespoir;
Dom Juan seral'époux
de Leonore , Ah Prince[
Je ! quelle ressource
pour moy dans un pareil
malheur, Eh! quel
autrepartypuis-jeprendre
que celuy de mourir
: ce discours du Prince
surprit Leonore : il
luy donna encore plus
de joye
,
le respect du
Prince avoit juques-là si
bien caché son amour
qu'ellen'avoit pas mesme
peu le soupçonner,
quel charme pour elle
de se voir si tendrement
aimée d'un Prince qu'-
elle aimoit.
Leonore dont le coeur
estoit grand & incapable
des petitesses de la
feinte&dudéguisement
se livra toute entiere au
premiermouvement de
la gcnerosité, Prince,
dit elle, loin que vostre
amour m'offense, je ne
fais point difficulté de
vourdirequej'y responds
par tout celuy dont je
suiscapable; ouy,Prince,
je vous aime, &fij'epou.
sois Dom Juan je serois
encore plus à plaindre
que vous, maintenant
que jeconnoisvostre amour,
&que voussçat¡}
eZ le mien, nos malheurs
ne seront pas si
grands, la pofejjion de
vostre coeur va mefaire
surmonter les plusrudes
disgraces, &l'aveu que
je vous fais de mon amour
vous responds que
je ne seray point à un
autre que vous.
Cet aveu paroîtra sans
doute bien promt à ceux
qui croyent que l'amour
est toujours une foiblesse,
il feroit condamnable
en effet dans une
amante ordinaire, mais
l'amour heroïque plus
independant se prescrit
à
à luy mesme ses regles ,
sans violer jamais celles
dela vertu.
On peut juger combien
le Prince fut sensible
à un aveu dont il
n'auroit jamais osé se
flater
,
sa joye plus vive,&
plus forte que celle
que l'amour content
inspire d'ordinaire,ne se
monstra que par des
transports, illuy prouvoit
par le silence le plus
passionné que son bonheur
épuifoit toute sa
sensibilité, tandis que la
Princesse
,
oubliant le
danger d'estresurprise,
s'abandonnoitauplaisir
de le voir si tendre. Il
reprit l'usage dela parole
que sa joye extrémeluy
avoit osté: Est-il
possible, ma Princesse !
que vous flye{fènfihle
à mon amour, n'estoitce
pas ajJeZ que la pitié
vous interessast dans mes
malheurs ; Je comptois
sur la gloire de vous admirer,
f5 de vous aimer
plus que tout le monde
ensemble,maispouvoisje
me flater du bonheur
de vousplaire:SoyeZ,ûr,
dit Leonore, de la sincerité
de mes sentiments :
la vertu ria pas moins
de part à l'aveu que je
vous en fais que mon amour
:oüy
,
Prince, c' est
cette vertu si sensible à
la vostre qui vous afait
iJ.:I1)U que monamour,
tout violent qu'il est, ne
m'auroitjamais contraint
à vous faire f5 cejl
cette vertu qui mefait
souhaitterd'estreplus digne
devous: mais helas!
que leplaisir d'un entretien
si tendre va nous
cou,#ercl,er,noe,r,e amour
est trop violent pour ne
pas éclater, on le remarquera,
Prince, & l'on
va nousseparerpour tousjours.
Aprés une conversation
telle que se l'a peuvent
imaginer ceux qui
ont ressenti en mesme
temps l'amour, la joye
&la crainte. Le Prince
deMurcie se separa de
sa chere Leonore
,
de
peur de trahir par un
trop longentretienlemistere
si necessaire à leur
amour:il alla rendre ses
devoirs au Duc d'Andalousie,
qui luy confirma
le mariage de Leonore
avec DomJuan;savisite
futcourte,il n'aimoit
pas assez DomJuan pour
s'entretenir si long-tems
de son bonheur:la resolution
du Duc l'allarmoit
extremement ,
il
prévoyoit des éclats que
son amour pour Leonore
luy faisoit craindre
plus que la mort. Agité
de foins & d'inquietudes
il va chercher la solitude
pour y réver aux
moyens de détourner le
malheur qui le menaçoitj
il y trouva justement
Dom Juan qui se
promenoit seul dans les
jardins du Palais: quelle
rencontre que celle
d'un Rival qui rendoit
malheureux l'objet de
son amour. Si le Prince
eust suivi les mouvements
de sacolere,il auroit
sans doute terminé
sur le champ leur querelle:
mais il importoit
au Prince de dissimuler
plus quejamais; il aborda
Dom Juan avec cet
air d'enjouëment, & de
politesse qui luy estoit
particulier, & luy parla
en ces termes: Je ne
m'attendotspas, Prince,
de vous trouver enseveli
dans une profonde rêverie
lorsque toute cette
Cour ne s'occupe, & ne
s'entretient que de vostre
bonheur, le Duc d'Andalousie
vient de vous
rendre le Princed'Espagne
le plus heureux, &
nous
vousfuyeztout le monde
qui applaudità son
choîx. Est-ce ainsi que*
vous r(ce'Ve{, la plus
grandefaveurquepuisse
vous faire la fortune ?
Prince, responditDom
Juan, loin d'estre inJér;-'
sible au bonheur que le
choix du Duc me procure
,
c'est peut- estre afin
de le mieux gouster que
je cherche la solitude:
poury estreaussisensible
que je le dois, je riay beJ'oin
que de mon propre
coeury , je le possede
mieux icy qu'au milieu
d'uneseule de ccurtifans,
dont quelques-unspeutestre
donneroient des applaudissementsfcrce\
y a
un Princedontils envient
le bonheur.
Quoj qu'ilensoit, re->
prit lePrince, voflre
froideur mestonne:vous
estes trop heureux pour
veus renfermer dans les
bornes dune joye si moderee.
Eh!qui eutjamais
tant desujets de joye?
Vous allez,posseder Leonore
, &vous pofedez
apparemment son coeur,
car DomJ-uJan,delicat
&genereux comme je le
connois, nevoudraitpoint
faireson bonheurauxdépens
de celle -qu'ilaime,
il n'auroit point accepté
les offresduperesans eflrc
seur du coeur de lafille.
Leonore,-refpoilditDom
Juan, n'a point flatté
mon amour, &si setois
d'humeur a mmquieter>
je trouerois peut -
estre , quelle est sans inclination
pour moy:maisenfin
je rapporte la froideur
dontelle apayemesfeux,
à son indifférence naturelled'amour
mutuel n'est
pas necessaire dans de
pareils mariages, les raisons
d'Estat, & les interests
de famille en décident
ordinairement; &
lorsque j'accepte ïhonne"
f?' que le Dm-veut me
foeire? (avertu
pond quelle n'a point
d'tantipathiepour l'époux
que son pere luy destine ,
ni d'inclinationpourceux
que le choix du Duc riauthorisè
pas à luy lnarquer.
de l'amour. Permettezmoy
y
Seigneuryrepliqua
le Prince
,
de douter de
la sincerité de vos discours
pour estimer encore
vos sentimens, ouiy puisque
vous 'vo!/;/ez estre
l'Espoux de Leonore,
vous estes purdeJon
coeur: mais sans doute
vous vouleT^oùtrJeul de
vosplaisirs.Jevous laise
en liberté.
Si le Prince quitta
brusquementDomJuan,
c'estoit moins pour luy
plaire
, que parce qu'il
craignoit de ne pouvoir
pas assez retenir sa colere.
Il estoiteneffetbien
dangereux qu'elle n'éclatast
à la veuë d'un
Rival qui oiïLnibit également
sa delicatesse &
sa passion.
Le Prince courut rendre
compte à sa chere
Princesse de ce quis'estoit
passé entreDomJuan
& luy: mais bientost
les inquiétudes le reprirent
quand Leonore luy
dit que le Duc son pere
vouloit absolument acheverce
fatal mariage,
qu'elle en auroit esperé
plus de condescendance
,
maisqu'il paroissoit
inflexible
,
& qu'elle
craignait bien que rien
ne peut changer a resolution.
Ce fut ppur lors que
le Prince se trouva
cruellement agité: Que
de malheurs, luy dit-il,
je vais vous susctier!
quelles violences ne va
point vousfaire le Duc?
quellespersecutions de la
part de DomJuan? mais
en vain cet indigneRi- ,Zne
: valvêtitjorcervojïre inclînattoïijappujzduchoix
de vostre Pere, mon amour
& mon courage,
plus forts que leurs intercjisy
& leurs resolutions
vaincraient des obstacles
mille fois encore plys
grands: mous^wiau
meZ, je ne seray jamais
malheureux Dom
Juan nefera jamaisvostre,
Epoux ; je cours le
punir & vousvenger.
jihPrincel dit Leonore
,
auallû^vcus faire?
je ne crains point que le
bruit d'un combat suissè
ternir ma gloire, mais
que deviendrons-je lit
vous estoit funefe ? la
fortune riejïpas tousjours
du party de l'amour.
Prince, au nom de cet
Amour,n'éxposez,point
une vie à laquelle s'attache
la mienne: contenteZ:.,
vous du ferment que je
fais de rieflre jamais
qu'a vous,
Quel coeur ne feroit
pas sensible à tant de tendresse
? mais qui pourroit
l'estreautant que le
fut ce Prince le plus delicat
,
& le plus tendre
de tous les amans : on
peut croire queses transports
éclatoientsur son
visage, & ce fut en effet
ce qui trahit le mistere
de ces amans. DomJuan
venoit visiter Leonore,
il entroit dans son appartement,
dans les mamens
les plus vifs
y
&
les plus heureux où le
Prince se fust encore
trouvé; il sbupçonna
d'abord sonmalheur, &
la Princessequieraignoit
de sè trahir elle-mesme,
aprés quelques discours
de civilité feignit une
affaire, & se retira dans
son cabinet. Pour lors
Dom Juan qui n'avait
d'abord osé produire les
soupçons, ne menagea
plus rim, ces deux Rivaux
quitterent l'appartement
de la Princessè,
& sanssedonnerrendezvous
que par des regards,
ïls se trouvèrent
enfin {èu!s dans une alléeextrêmement
éloignée
du Palais, &Dom
Juan parla ainsi le premier
; Si j'avais Jeeu ,
Prince, que vous estieZ
seul avec Leonore - n'aurais eu garde de troubler
c-uoftre entretien, il
vous saisoit plasir à l'un
é5 à l'autre, ou toutes les
marquessurlesquelles on
en peut jugersont équivoques
: je mesuis pour lors
souvenu desmaximesgenereusèsquevous'VoulieZ
tantoslm'inspirer, iffen
ay reconneu la sagesse
aussî-tost que leprincipe.
Seigneur, respondit le
Prince, quand on estné
genereuxon n'ignorepoint
ces maximes, un amant
delicat se croit indigne
d'époufsr sa maijlrejje
quand il ne s'enfait pas
armer, l'epouser sans luy
plairec'est luy ojier la
liberté de concert avec
ceux qui ontdroitde disposer
d'elle, ~(jfpour
moy Pour vous,
répliquaDom Juan
,
vous accepteriez^le choix
de son Peres'il estoit
en vostre saveur ; sans
craindre dopprimer sa
liberté, ~f5 vous ferieZ
un usage plus agreable
de la delicatessè de
vos sèntiments: je rien
produirois pas du moins,
reprit le Prince avecémotion,
d'indignes f5
~â*elle&demoy.Jeferay
bientost voir, repritfierement
Dom Juan, que
cen'estpas estreindigne
du bienauquel on
que defaire desenvieux.
A ces mots le Prince sèntit
redoubler sa colere:
Un amant, luy dit-il
quinetrouveque de Findifférence
dans l'objet
qu'il
qu'ilaimerait d'ordinairepeud'envieux.
Jesuis
surpris,reprit DomJuan,
de l'audace avec laquelle
vous osèZm'insulter.
Hé! que pretendeZ:vous
sur Leonore pour en soutenirles
droits:je prétends
les luy consèrver , dit le
Prince, ~& scavoir si
Dom Juan aura le courage
de les detruire. Aces
mots, il tire son épée, &
Dom Juan se met en devoir
de se deffendre.
A voir leur mutuelle
fureur on auroit devin
sans peine l'importance
du sujet qui lesanimoitt
ces siers Rivaux, qu'un
grand courage & de
puissants. motifs rendoient
prefqumvinciblés,
combattirent lone- otemps à égal avantage:
mais enfin la force 8c
l'adresse du Prince prévalurent
; il desarma
Dom Juan
,
qui sans xvoir
receu aucune biefseure,
se trouva a la merci
de son vainqueur.
Alors le Princeloind'abuser
de sa victoire, sentit
mourir toute sa haine,
il ne put s'empescher de
plaindrele.tristeestat
dun malheureux. Dom
Juan estoit- en effet digne
de sa pitié :: il se
monstroit à la véritépeu
genereux. en poi^rfiijvant
des prétentions que
l'inclination de Leonore
n'authorisoit pas, mais
il dementoit sa générosité
pour la prèmieresois,
& jusque là le Prince
l'avoit trouvé digne de
son estime. Il ne voulut
point aussi luy donner la
mort : DomJuan, luy
dit ce genereux Rival
renoncera la possessïon de
Leonore ~f5 rvi'VeZ: Non,
non, respondit Dom
JuantermineZ ma vie
oulaissezmoy l'esperance,
depossedèrleseulbien qui
me la fait aimer. Vous
ouLeZdonc mourir, reprit
le Prince? Oüy, dit
Dom Juan, Eh! queserois-
je d'une vie qui ne.
seroit pas consacréea Leonore,
ah ! je feray trop
heureuxde luy donner
ceûtepreuve de ma constanceouijeveux
mourir..
Non, dit le Prince, que
ce discours avoit attendri
,non vous ne mourrez
point , deussai-je vivre
tousjours malheureux, je
respectedanscoeur ïa*-
mour queLeonoreyafait
naistre : Vivez Dom
Juan,vivez,&qu'on
ne puissejamais dire que
vous mourez pour avoir
aimécette divinePrincesse.
En mefine temps illuy renditsonépée,
prest à recommencer le
combat.Mais DomJuan
charmé de la generosité
du Prince, sentit tout à
coupchanger soiscoeur,
il fut quelque temps incapable
de prendre une
resolution, & mesme de
prononcer une parole:
enfin plus vaincu par la
generositédu Prince que
par ses armes, comme
s'il fust tout à coup der»
venu un autre homme,
il parlaainsi à son Rival.
Aumoment que vous me
rendez la vie , je comprends
que jemeritois la
mort, & je vaisvous
donner la plus grande
marque de mareconnoissance
:vousaime^Jans
WMte Leohore5, (3vom
estestropaimablepour
n'en
)
fjhe.pasaimé )1J
vous ceje>Prince
, tou?
tesmesprétentions, puissiez-
vousvivretousjours
heureux amantde Leànore:
pourmoyjevais lok
fuirpourjamais,&mettretoute
marlohe à eteindreunepassion
qui ojpen
selesplusillustres ama'ldu
monde"s conservez,
Prince,vostre amitiéque
vousvenezdemerendre
I!/
sipretieuse, & accomplir
tous nos souhaits. On ne
peut exprimer la joye,
&lasurprise du Prince,
il n'auroit pas cru que la
generosité eust tant de
pouvoir sur le coeur de
DomJuan,& fàrefblution
luy paroissoit si
grande, qu'àpeinepouvoit-
il suffire à l'admirer>
il le tint longtemps
entre ses bras, arrosant
son visagede ses larmes.
C'estoit un spectacle
bientouchant que ces
fiers rivauxdevenus tout,
d'uncoup sitendres. Ce
Prince déploroitlafatalité
des conjonctures qui
fQrçoieJld. Dom Juanà
luy faire un si violent sacrifice,
pendant que
DoraJuan croyoit faire
encore trop peu pour son
illustre amy. Leur genereuse
amitié fit entre eux
un fecond combat, aussi
charmant que lepremier
avoitestéterrible,
Ils se jurèrent une éternelle
amitié,&sedirent
enfinAdieu. Dom
Juan ne voulutpointretourner
sitost dans ses Etats;
craignant les esclaircissemens
que le Duc de
Grenade son pere auroit
exigé sur son retour imprevû.
Il resolutd'aller
voyager dans toute l'Êspagne.
Il ne crut pouvoirmieux
accomplir sa
:
promesse
, que par des
courses continuelles JOÙ
la multiplicité desdiffectls-
úbjets qui s'offrent
âùx Voyageurs,pouvoir
lé distraire
,
& chasser
ses premières impressions.
CependantlePrincequiavoit
tant de fîrjets
d'estre content de
l'amour,& delafortune,
prévoyant de terribles
esclats qu'il croyoit
devoirespargner à la
vertu de Leonore, estoit
accablé dedouleur. Ilse
reprochait d'avoir plus
écouté les interdis de
son amourque ceuxde
sa Princesse. Il craignoit
de s'estre rendu tout-afait
indigne d'elle. Aprés
avoir hesitéquelque
temps entre cette crainte
etledesir deluyapprendre
sa destinée
, ce dernier
sentiment l'emporta
,
&là il confia à fbn
Ecuyer une Lettrequi
apprit bientost à la Princesse
comment le Prince
l'avoitdélivrée des ira- -
portunes poursuites de
DomJuan. Si elle reçut
avec plaisir la nouvelle
delavictoire du Prince
: elle fut encore plus
charméedeladelicatesse
de ses sentimens, Quoy,
disoitelle, le Prince est
entUoneux dans un combat
qui decide definbon*
heur; & cependant craignant
de leftte rendu m-*
digne de mon amour par texceZ du sien. Il ne
peutgouster en liberté la
foyelaiplm grandeqm(
fdït capable de!rej!tlJ'ir.Ãj
nàiyEnnctiropgemr^m^
ne crainspointla iïèlcra
de Leono'm;jen'vhfvifab
ge dans .'erf:orhb:J'.qt«.:lu
fmlm ttt ')'expàfà,j,ipn
empefchrqueje,nefnjje
àun oewrequ'à:toyl
C'estainsi que cette
genereuse Princesse in-r
sensible à des revers que
le Prince craignoitpour
elle,donnoitau fort do
£>11Amant, une joyeà
laquelle il s'eftoit=lùy¿.
mmesemferrï'ï,~e.-•tru~:~-ma~ contoefi<fUerfeuftpô
gouster foiv; bonheur
sans l'y rendre sensible,
felle voulutparunelettre
Qu'elleluy écxivit]
Rendre toute sa tranquilité.
L'assuranced'estre
iimé de Leonore eïîoit
bien necessaireau Prince
pour luy faire supporter
fort absence : Il alloit
estre éloigné d'elle sans
ftjavoirquand il la re1\
erxoit,l éJpii9};i1i
Q¥elifalLfWlleJWtsJ)i\
|ettrpj4çL^nftr^&j/ç
retiraàdeu?ilicu(;'s<]e.§evine,
dityis,unJiçqu;JJl
9it.rfgiJitPjÇé.,gy
ilç'^ççUp^ l\11jq\1JtMJl}
du plaisir qLJre1F.lhf
JfUe,,^4e Ifcdgolgiif
d'enpeal('rsi6'.J.lÆp. noredesonCoftcin'avçuj:
gueresd'autre occupation
j'ics mesmesfcntimensleur
donnoientles
mesm peines 3îô^rJLes
mesmes plaisirs.
• Untemps considerable
se passa,sansqueces
deuxAmans pussent ny se11tretenlf) ny s'écrire
&Leonore qui n'avoit
de plaisir qu'enpensant
au Prince, en estoit pour
comhh de malheurs distraite
par les soupçons
defon> pere qui croyait
que les froideurs de sa
filleavaient éloigné
Dom Juan. Enfin le tumulte
d'une Cour, où
l'on nes'entretenoit que
deDomJuanluy devint
tout-à-fait insuportable?
elle pria leDucfbh perô
de luy permettre de quitter
Seville pour quelqoç
temps,sousprétexte de
rétablir sa santé
, que
l'absence de son cher
Amant avoit extrêmement
alterée:elle choisi
Saratra Maison de plaisance
à deux lieues de
Seville où elle avoit passé
une partiede sonenlance,
ellealloit tous les
soirs se promenerdans
un boisépais, ouellç
cftoitièurede trouver le
iilençe3 &la liberté:Un
jour sans s'estre apperçuë
de la longueur du
chemin ellele trouva
plus loin ql.",àl'ordi'qÇ
duChasteaudeSaratra,
elles'assit&fitassessoir
auprès d'elle Iiàbejle,
l'unede ses Filles qu'elle,
aimoit plus que les autrès,
&qui ne la quittoit
prcfqUc janlâis;elI tomba
dits UOéjft profonde
résveriè quilabelle* ne
put s'empescher deluy
en demanderle sujet,&
pourlors,foitque son
amour fortifié par un
trop long silence nepust
plus se contenir, , soit
qulfabelle méritastcettemarqué
de sa confiant
ce, Leonore luy ouvrit
fsoornt ccoeoeuurr,>&paparlrele rreécciitt,
le plustouchant luy ap- prit tout lemystere qui
estoit entre elle, & le Prince.! Ilàbelle estoit, sans
doute attendrie à la
peinture d'un si parfait
amour; mais elle se crut
obligée d'exhorter Leonore
à bannir le Prince
de son coeur: elle luy
representa respectueusement
tous les égards
.qu'exige des perssonnes
de son rang, le public à
quielles doivent, pour
ainsi dire,rendre compte
deleurssentiments 6c
de leurvertu.
chere Isabelle, reprit Leonore,
des quejeconnus le
.¡?rince, jeperdis laliberté
de-faire toutes ces reste- jfions,ma raison qui- en fit beaucoup en safaveur
rienfitaucunes contre lui.
Je l'aime enjirJ, & je
crois
, par mon amour,
estreau-dessusde celles
quin'ontpas lecoeurassez
vertueuxpour L'aimer,ce
riesipoint parcequ'il est
mïeuxfàit quelesautres
phltimïÈfneetèsf-pnriipta.Crc'eeafil*,ila
ma
iherèIJabelle,le caracte-
Yedejon coeurquefeftimc
eifHui9cèjifinamour
g'tïïereuxydélicat3dèfifr
terëjfé'', refPelJueux_'Ja.
cm que cet amour lriflreçoit
magenerositéa&
payerpar toutceluidont
jefhiscapable : plusatùntif
à ma, glomqtfà
fftôhmefmesfS indffjfc
fetitfursa félicitéparticulitre,
culiere, /<?#*çequi 12
pointderapport au* hoifc
&e$trde monarrww^ oud
facial de m'a :i.lé'li' nè
peut IjntereJJer,pouvois^
je connoistre taitr
Wtey.&wfasïefîtmer*
fomjQtSrjesèntir lepriX.
*a4hmsripmar'fait*arm.ou.r^0,> sionque ]aipoHr lui nest
fdefimnitmdee.re;ptlaire,*fqau'bosni<nyçoei.ï
AkhfmrqMifaunlqM
jefois condamme a ne le
plust¡}oir,peut-estre d()ut
t'ilde ma confiance,peut*
estre il craint que mon
amour ne saffomiJJ-es Apeine eut-elle achevécesderniers
mots,que lePrince sortit du bois
tout transporté, & se
jettant à ses pieds , s'éria:
Ah! ma Prtncejfeî
y a-t'tl un homme aujjfi
heureuxquemoi, dfpar*
ce que je vous rends un
hommage tjtIC tout l'tmivers
seroitforce de rvou;'
gendre,faut-ilque
plus heureux quç.Jont^
''Vr)ivers enseble. vv^. quellefurprifequel-,
lejoye, quels tranlports ):cçlatçf,
ces Ecnjdrcs Amaps:cçtt^
réunion impréveuë piÇrr
duifitentre eupi,ualong
silence qui ;peignoir
ntieüx leur fènfibiUtq
quetous les difçoups%<
';'"Cette {îtuatioa y;oiç
i doutçd,;cs grap!<&$
douceurs, mais l'amour rsen
trounedansles discours
passionnez quand ila
épuiséceux dusilence;
£6 futalorsque nepouvantadeziè
regarderais
ne purentle lassèr de
c:nteJldrc.-'
'i'Y0 Que fat deplaijira
n)om retrouver,cherPrince5
dit tendrement Leoîiore,
mais que ceplaisir
seracourt,peut-etrenous
ne^nousverrons\plus<:
nous ne nousverronsp'fofo,
ma Princesse,réponditil
,
ah crote^qm:tmtts
lesfois que lagloire,owfo
félicitéde Lemoreexige*
ront que je paroisse-â'fès
vousverrai-, je
vous verrai,charmante
Princessemalgrétousces
périls, maisquetousces
périlsyque.tous cesmah
heurs ne soientquepour
moi[ml9 jArai Uforcç
de lessùpporter>pmfqm
tpous. rriaimel
aJen'entreprendspoint
de pein: ici la douceurdeleurentretien
,
chacun en peut juger
- par sapropreexperience
aproportion des ,[ent..::..
nients dont il est capable.
Ilsuffrira de dire que
ces ,
plaisirs : n'ont point
debornes dans les coeurs
deceux qui n'enmettent
point à leur amour-
Chaque jourLeonore
revit for* Amant! & ce
- - A -
surentchaque jourde
nouveauxplaisirs:ils
estoient. trop heureux,
pour que leur bonheur
futde longuedurée,la
fortùrie leurdonna bien-
! tost d'antresfoins,*Lea-*
norèvrèceutiardre
; de
quitter, Saratra,&£Tdè
retourner promptement
à Seville:D'abord; elle
soupçonna quelquetrahison
de la partde [ci
domestiquer, & fit fça*
-
voirau Princel'ordre
cruel qui les SEparoit, en :de s'éloigner
inceflamineiic d'un lieu
où il avoit sans doute,
cf{tLé'ddé' couvert.
r. :,
Lessoupçons de Léo-»
nom ne se trouverent
quetrop bien sondez,
le Ducavoit appris par
un domestique de Leonore
3
qui estoit depuis
long-temps dans les
intereftsde Dom Juance
qui se passoit entre
dIe ,& le Prince:
Il
Ilrappella la Princesse
qui croyant sapassion
trop belle pourlaciefa^
yoüer;ne luyen sitplus
un mystere , non plus
que du combat entrer les
deux Princes. LàfîncePrité
de Leonore nefit
qu'exciter lacolere du
Bue,illuy ordonné de
se préparer à un pii&
grand voyage, &: afïii'
qu'ellepust oublier le
Princecepere}inflxi
ble resolut demettrela
mer entre ces deux amants,
& emmena Leonore
dansl'ille de Gades,
Cedépart fut si secret
& si precipité, que Leonore
ne put en informer
le Prince;ilapprit bien
tost quelle n'estoit plus
à Seville,mais avant
qu'il pust apprendre où
son perel'avoitreleguée,
il fut long-temps livré à
la plus cruelle douleur
qu'une pareille separatfionraiit
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Résumé : Historiette Espagnole.
En Espagne, divisée en plusieurs pays souverains, le Duc d'Andalousie se distinguait par l'étendue de ses États et sa sagesse gouvernante. Il était respecté et vénéré, attirant les jeunes princes qui admiraient son modèle de souveraineté. Sa fille, la princesse Léonore, était célèbre pour sa beauté, son esprit et son cœur excellent, attirant l'admiration des princes à la cour. Dom Juan, fils du Duc de Grenade, osa déclarer son amour à Léonore, mais elle répondit avec modération, révélant une indifférence qui irrita Dom Juan. Malgré cela, Dom Juan pressa le mariage, espérant que Léonore aimerait son époux par défaut. Léonore, cependant, aimait secrètement le Prince de Murcie, qui arriva à Séville et fut désolé d'apprendre le mariage imminent. Le Prince de Murcie, désespéré, avoua son amour à Léonore, qui lui répondit avec générosité, confessant son amour réciproque. Ils partagèrent un moment tendre mais craignirent d'être découverts. Le Prince de Murcie rencontra Dom Juan dans les jardins, dissimulant sa colère. Léonore informa le Prince que son père insistait sur le mariage, ce qui le désespéra. Le Prince de Murcie voulut défier Dom Juan, mais Léonore le supplia de ne pas risquer sa vie. Dom Juan, soupçonnant leur amour, les surprit ensemble et confronta le Prince de Murcie. Leur secret fut révélé, mettant en danger leur amour et leur vie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
14
p. 28-84
SUITE DE L'ABREGÉ de l'Iliade.
Début :
ARGUMENT du quatrième Livre. AVERTISSEMENT. On a mis dans la suite [...]
Mots clefs :
Troyens, Minerve, Grecs, Combat, Courage, Roi, Jupiter, Iliade, Bataille, Armes, Guerre, Dieu, Général, Junon, Javelot, Pandare, Diomède, Ménélas, Corps, Ordres, Char, Nestor, Chefs, Apollon, Fils, Armée, Agamemnon
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUITE DE L'ABREGÉ de l'Iliade.
SUITE DE L'ABREGE
de tjÜadc.
ARGUMENT
du quatrième Livre.
AVERTISSEMENT.
On A mis dans la suite de
cet Extrait des cedilles ainsi
marquées",,Ellessignifient
dans les endroits où elles se
trouvent,que. le Poëtey fait
parler ses Heros.
LES Dieux estanc à Table
tiennent conseil sur les
affaires de Troyes, vers
I. 4.
Jupiter raille Junon &
Minerve, de ce que de
grandes Déesses. comme
elles se tiennent à l'écart
t
loin des combats, pendant
que Venus qui n'aime que
les jeux& les plaisirs - accompagne
son favori dans
tous les penIs. Il met en
délibération s'il faut rallumer
la guerre entre les
Troyens & les Grecs, ou
les reconcilier par l'exe-
-
cution du traité qu'ils ont
_aIt,,, 'Vers. 5.
19.
Cette proposicion cause
un violent dépit aux deux
Déesses qui préparoient les
plus grands malheurs aux
Troyens. Minerve dissimule
par prudence. Junon
éclatte, & a déclaré, quelque
resolution que l'on
prenne, qu'elle ne consentira
point à la paix.,,
vers 1o. 2. 9.
Jupiter a reproché à
Junon la cruauté avec laquelle
elle poursuit les
Troyens. Ilseplaintdela
violence qu'e lleluy fait en
le forçant de luy abandonner
une Ville qu'il a honorée
sur toutes les autres.
Il l'avertit qu'en revanche,
si jamais dans sa fureur
il veut détruire quelque
Ville qu'elle ait prise
fous sa protection
,
c'est
inutilement qu'elle voudra
s'y opposer.„ vers 30.49.
Junon luy dit qu'il
peut,quandilvoudra,dit
poser d'Argos, de Mycenes
)
& de Sparte; mais
qu'il n'est pas juste qu'elle
perde le fruit de toutes ses
peines. Que tout puissant
qu'il est, il doit avoir pour
elle des égards & de la
complaisance,puisqu'elle
est sa femme & sa soeur.
Enfin elle luy demande
-
qu'il ordonne à Minerve
de descendre dans l'armée
des Troyens pour les exciter
à enfraindre le fraite.
& à insulter les Grecs.,,
vers 50. 67.
Jupiter donne cet ordre
à Minerve.„La Déesse
descend, & dansla course
rapide elle paroist fous la
forme d'une exhalaison
qui s'allume dans l'air, &
qui se partage en mille
feux. Cesigne qui est veu
dans les deuxarmées est
interprété comme un préfage
ou de la fin ou de la
continuation de la - guerre.
35 vers 68. 85.
Minerve prend la réf.
semblance de Laodocus.
fils d'Antenor. Vatrouver
Pandarus fils de Lycaon.
Luy propose « de tirer une
fleche à Menelas. L'encourage
par la gloire qu'il
aura d'avoir abbattu un si
grand guerrier, & par la
recom pense qu'il doit attendre
de Paris. Elle luy
conseille de s'addreffer auparavant
à Apollon Lycien
pour le prier de diriger
le trait.» vers 86. 103.
L'intense Pandarus se
laisse persuader. Peinture
naïve de l'action de Pandarus,
& desmesuresqu'il
prend pour frapper juste
à son but. (Son arc estoit
fait des cornes d'unechevre
sauvage qu'il avoit tuée
à l'affust; chaque corne
avoit seize paumes, c'està-
dire cinq pieds & quatre
pouces.) Il promet une
Hecatombe à Apollon. Il
tire. Le trait part avec impetuosité,
perce le baudrier
,la cuirasse & la lame
de Menelas; entre dans la
chair sans penetrer bien
avant,(car Minerve avoit
pris foin d'affoiblir le coup,
semblable à une mere qui
voyant dormir son enfant,
détourne une mouche opiniastre
qui voudroit le piquer.)
Le fang qui coule
le longdesjambes de Menejas,
compare à la pourpre
dont une femme de
Meonie a peint l'yvoire le
plus blanc, pour en faire
les boffetes d'un mords qui
fait l'admiration & le desir
des plus braves Cavaliers,
filais qui est destiné pour
un Roy. "vers 104. 119.
Agamemnon est effraié
aussi bien que Menelas.
Menelas reprend courage.
Agamemnon éclate contre
la perfidie des Troyens.
Dit que Jupiter ne la laisfera
pas impunie. Prédit
la ruine deTroye. Il s'attendrit,
& ne peut cacher
à son frere la crainte qu'il
a de le perdre - vers 120.
182.
Menelas lera ssure&le
prie de ne point allarmer
les Grecs. n Agamemnon
luy dit « qu'il faut appeller
un Medecin.» Donne ordre
à Talthybius de faire
venir Machaon fils d'Esculape.
Le Herault obeït.
Trouve Machaon & « luy
parle.» Machaon vient.
Visite la playe, & succe
le sang,& y met un appareil
que le Centaure Chiron
avoit autrefois enseigné
à Esculape. vers 183.
ii9*
Cependant les Troyens
s'avancent en bataille. Les
Grecs reprennent leurs armes
, & ne respirent plus
que lecombat. Agamemnon
laissesonchar à Eurymedon
, avec ordre de ne
le pas tenir trop éloigné.
Il parcourt à pied toute
l'armée. « Anime par ses
discours ceux qu'il trouve
disposez à bien faire».
« Réprimandé les autres,»'
les compare à des faons de
biche Arrive prés de la
Gend'armerie Cretoise, la
trouve en bon estat, Idomenée
à la teste, Merion
à la queue.» IllouëIdomenée,
le fait ressouvenir
que dans toutes les occasions;
à la guerre, dans les
festins, il l'atousjours traité
avec distinction". Idomenée
respond « qu'illuy
fera tousjours fidelle».
Agamemnoncontinue son
chemin. Il trouve les deux
Ajax deja armez au milieu
de leurs bataillons; ( ces
bataillons comparez à des
troupeaux assemblez fous
leur pasteur, qui leur cherche
un asile contre l'orage
qu'il prévoit. ) Agamemnon
louë ces deux chefs,
& leur dit qu'il n'a pas besoin
de les exhorter». Il
passe au quartier du vieux
Nestor. Le trouve qui range
ses trou pes en bataille,
& qui encourage leurs
chefs. Noms de ces chefs.
De quelle manière Nestor
disposoit sa cavalerie &son.
infanterie.« Quels conseils
il donnoit à ses cavaliers
». «Sage vieillard,
dit Agamemnon transporté
de joye, plust aux Dieux
que vos forces respondissent
à vostre grand courage
ge, &c.» Nestor respond
» qu'il n'est plus au temps
où il tua de sa main le vaillant
Ereuthalion; mais que
tout vieux qu'il est on le
verra à la teste de ses ECcadrons,
LXquïl serautile
au moins par ses ordres &
par ses conseils
, que cest
là le partage des vieillards
». Agamemnonavance.
Trouve Peteus fils de
Menefthée & Ulysse qui
ne faisoient aucun mouvement
, parce que le bruit
de ce qui estoit arrivé dans
les deux armées n'estoit pas
encore venu jusqu'à eux-
« Il leur fait de sanglants
reproches de leur inaction
». «Ulyflc respond
avec fierte». Le Roy qui
le voitirrité, change de
ton, &«luy parle obligeamment
». Il poursuit
son chemin.VoitDiomede
sur son char avec Sthelenus
fils de Capancé. Diomedene
donnoit aucun
ordre pour le combat. Agamemnon
cc
luy reproche
d'avoir degeneré dela
vertu de son pere Tydée,
luy rappelle une occasion
d'éclat, ou Tydée signala
son courage contre les
Thebains». Diomede par
respect pour le Roy ne respond
rien.Sthelenus prend
la parole & dit(( qu'ils ne
meritent ny l'unny l'autre
ie reproche qu'on leur fait,
se piquent tous deux avec
raison d'estre plus braves
encore que leur pere».
Diomede represente à
Sthelcnus que le Roy qui a
le principal interest à tout
ce qui se passe, est en droit
de leur parler comme il
fait.„ Diomede en mef-
1
me temps faute de dessus
son char. - "veys 421. 419.
On voit marcher au
combat les nonbreufes
Phalanges des Grecs, semblables
à des flots amoncelez
par les vents. Elles
suivent leurschefs dans un
profond filen-ce, pour entendre
leurs ordres. Ilsemble
3
dit le Poëre, que cette
multitude innombrable de peuples
n'ait point de njoïx. Les
Troyens au contraire,
comme des brebis qui bêlent
dans un grand patu-
Tage, sont un bruit confus
qui resulte du mélange de
leurs voix & de la diversité
des langues de toure sorte
de peuples qui forment
leurarmée, vers411.438.
Les Troyens sont animez
par le Dieu Mars, &
les Grecs par la Déesse Minerve.
Ces deux Divinitez
font suivies de la Terreur,
de la Fuite & de l'insatiable
Discorde, Image poëtique
de la Discorde. Son
progrez. Ses effets. vers
43""45.
Les deux armées se joignent
J
& en viennent aux
mains. Description de leur
choc. Le bruit des guerriers
comparé à celuy que
font d'impetueux torrens
grossis par les pluyes. vers
446, 456.
Antiloque le premier tuë
Echepolus,un des plus braves
Troyens. Elephenor
General des Abantes, voulant
le dépouiller de ses
armes,est rué par Agenor.
Il se fait en cet endroit
une cruelle boucherie des
Grecs & des Troyens qui
se jettent les uns sur les autres
comme des loups affaniez.
Simoïsius (ainsi nom.
me parce que Ía mere accoucha
de luy sur les rives
du Simoïs) est tué à la fleur
de son âge par Ajax fils
de Telamon. Il tombe sur
la poussiere comme un jeune
peuplier abbattu par le
fer d'une coignée. Antiphus
un des filsdePriam,
veut venger la mort deSimoïsius.
illance son javelot
contre Ajax; mais il
rencontre au lieu de luy
Leucus compagnond'Ulysse.
Leucus tombe sur le
corps de Simoïssus qu'il entraisnoit.
Ulysseaffligéde
cette perte, s'approche des
Troyens d'un air terrible.
Regarde autour de luy
pour chercher sa victime.
Il lance son dard. Les
Troyens effrayez se retirent
en desordre. Le javelot
va frapper Democoon
fils naturel de Priam, &
lerenverse mort. Les Troyens
reculent. Hectorluymesmeestépouventé.
Les
Grecs enflez de ces avanta
ges vont chercher les
corps morts jusqu'au milieu
de la meslée pour les
entraisner.
entraisner. Apollon irrité
de leur audace se fait entendre
aux Troyens du
hautde la forteressed'Ilion,
les exhorte & les encourage
; leur represente sur
tout qu'Achille ne combat
point„. Minerve de son
colté anime les Grecs. Pi-,
roüs General des Thraces
tuë Diorés chefdes Epéens
aprés l'avoir blessé d'un
coup de pierre. Thoas General
des Etoliens lance
son javelot contre Piroiis,
& l'acheve de son épée. Ils
vont le dépoüiller de fe$
armes, mais il en est empesché
par les Thraces qui
tombent sur luy à coups
de piques,& l'obligent de
seretirer. vers 457. 539.
-
Homere parle des ex-
FJqics de cette journée
comme d'un grand sujet
d'admiration pour un homme
que Minerve auroic
conduit par la main, & à
qui elle auroit fait parcourir
sans danger tous les endroits
de la bataille. Il auroit
veu les Troyens&les
Grecs estendus les uns prés
des autres à la mesme place
où ils avoient combat-
EU. vers544.
AKGVMENT
du cinquièmeLivre.
La jour de cette action
Minerve augmente le courage
deDiomede. Deson
calque & de son bouclier
forcoitcontinuellementun
fçjXrfemblable à celuy de
Veftoitle qui paroistà lafin
àçl'Eflre'.LaDéessè pousse
ÇÇignprr-ier au milieu dela ~n~~ j, vers 1. 8.
o.
~~q~Phesep tous deux
fils de Darés Sacrificateur
deVulcain,poussent leur
char contreDiomede qui
estoit à pied. Phegée le
premier lance ion dard
contre luy sans le blesser.
Diomede le perce de son
javelot
, ôc l'estend mort
surla place. Idée n'ayant
pas le courage de sauver
le corps de son frere, prend
la suite. Vulcain le couvre
d'un nuage & le dérobe
aux poursuites de Diomede
j pour épargner àDarés
le chagrin de perdre Ces
deui filsenun jour. Diomede
fait emmener leurs
chevaux. Les Troyens
commencent à plier. Minerve
pour augmenter leur
desordre,ditàMars«qu'il
faut laisser combattre les
Troyens & les Grecs, &
ne plus resister aux ordres
de Ju piter.„ Elle le retire
du combat, & le fait repofer
sur les rives du Scamandre.
Les Grecs enfoncent
lesTroyens. * a/fw9.37,
Odius chef des Alizoniens
est tué par Agamenvnon.
Phestus par Idomenée.
Scamandrius par Me.
nelas. (Ce Scamandrius
estoit fort entendu dans
tout ce qui concerne la
charte, & avoit esté instruit
par Minerve.) Phereclus
est tué par Merion.
( Phereclus fils d'un habile
charpentier, avoir bâti les
vaisseaux que Pâris mena
en Grece.) Pedée fils naturel
d'Antenor
,
est tué
par Megés. Eurypile blesse
Hypsenor.(Hypsenorestoit
filsde Dolophionqui
estoit Sacrificateur du Scamandre.)
rUers Î7- 83-
Idomenéesemblable à
un fleuve, qui dans ion débordement
emporte tout
ce qui s'oppose à son passage,
renverse les barait.
lons des Troyens;rien ne
luy resiste. vers 85. 94.
Pandarus, pour arrester
son audace, luy tire une
flèche qui luy traverse l'épaule
droite, & croyant
l'avoir blessé mortellement
il s'en glorifie,,, Sthele*-
jius, ( à la prière deDiomede
) luy oste cette fléche.
Diomede prie Pallas
<c de luy prester son secours
pour se venger de
Pandarus
5
& le punir de
son orguëll.,,Pallas l'exauce.
Luy redonne toutes
ses forces & route sa
legereté.Elle luy dit,
qu'il peut aller hardiment
contre les Troyens;qu'elle
a dissipé le nuage qui
l'auroit empesché de discerner
les Dieux d'avec les
hommes
:
qu'il se garde
bien de combattre contre
les Immortels, si ce n'est
contre Venus sur qui elle
luy permet de tirer.„
vers 95. 132.
Minerve se retire. Diomede
qui se sent trois fois
plus fort qu'à l'ordinaire,
se jette au milieu des ennemis.
Est comparé à un
lion qu'un berger ablesse,
& qui devenu plus furieux;
se lance sur les brebis effrayées
qui se tapissent les
unes fous les autres pendant
que le berger se cache.
Diomedetuë d'abord
Astynoüs & Hypenor.
Ensuite Abas & Poluïde,
tous deux fils du vieux Eurydamas
qui estoit Interprete
des songes. Il marcheversThoon
&Xanthe
enfans de Phenops,prive
ce pere malheureux de ses
deux filsàla fois, &luy
laisse la douleur de voir que
sa successiondoitpassèrà
des collateraux esloignez.
Diomede., comme un lion
qui se jette surun troupeau
de boeufs, tombe encore surEchemon & Chromius
enfans de Priam, les préçipite
de leur char ,les dépoüille
de leurs armes, &
prend leurs chevaux.vers
133. 16s.
Enée qui voit tous ces
ravages, cherche Pandarus
a travers les picqucs &
les javelots. Ille joint de
l'exhorte à se servir encore
deson arc& de ses
traitscontre un homme
qui cause tant de defor-
-.
dres
, ( si ce n'est que ce
guerrier dangereux soit
quelqu'un des Immortels
irrité contre lesi Grecs) ,,.
Pandarus respond qu4»I
croit reconnoistreDiomede
à sa raille & à ses armes*
Que si ce guerrier n'est pas
un Dieu,aumoinsDiomede
ne peut faire tant de
prodiges sans le secours
d'une Divinité toute puisfante.
Se repent d'avoir
laissé chez luy, contre l'avis
de son pere, onze chars
inutiles par la crainte que
ses chevaux ne souffrissent
trop dans une ville affiegée.
Se plaintd'avoir desjablessé
deux des plusvaillans
hommes, sans autre
effet que de les avoir rendus
plus furieux. Jure que
s'il revoit sa patrie, il commencera
par bruler cet
arc & ces fléches qui l'ont
si mal servi.,, Enée luy
dit cC de monter sur son
char qui est tiré par cTcxcellens
chevaux, & luy
laisse le choix ou de tenir
les resnes, ou de combattre
contre Diomede. 9%
Pandarustc conseille à Enée
de conduire luy -
mesme
ses chevaux qui connoissent
savoix & sa main;
que pourluy il recevra
Diomede avec sa lance.
Ils montent tous deux sur
le char,& vont à toute
bride contre Diomede
(quiestà pied.) Sthelenus
qtuiitles voit venir, en aver- Diomede,&" luy conseille
de les éviter.,, Diomede
'c respond qu'il n'est
pas capable de fuir, & que
ces deuxennemis si redoutables
ne retournerons
point àTroye ;luy recommande
seulement dem*
mener les chevaux d'Eiree
aussitost qu'il fera vaincu; les chevaux d'Enée ef.,
toient de la race de ceux
dont Jupiter fit presentà
Tros. ),., 0tvers16(3.zyj,
Pandarus & Enée sont
en presence. de Diomede;
Pandarus-ile, premierdità
Diomede qu'iln'a peule
vaincre avec sa fléche,
mais qu'il fera peutestre
plus heureux avec son javelot.„
En mesme temps
il lance son dard qui perce
le bouclier jusqu'à la cuirasse.
Pandarus~s'écrie~
glorieux decesuccez. Diomede
luy dit qu'il a manqué
son coup. Le frappe
de son javelot que Minerve
conduisoit
, & qui traverse
depuis l'oeil jusqu'à
la gorge. Pandarus tombe
de son char. Enée se met
en devoir de deffendre: le
corps de sonamy. Diomede
prend une grosse pierre,
telle que deux hommes à
- peinel'auroient peu lever.
Il l'a jette contre Enée, &
luy brife la cuisse. Enée
tombe sur ces genoux &
s'affoiblit. Venus le prend
entre ses bras, le couvre
de sa robe, & l'emporte.
Sthelenus, qui se souvient
des ordres de Diomede 9
prend les chevaux d'Enée
les emmeine, les remetà
son amy Deïphilus, & va
rejoindre Diomede. Diomede
,qui a reconnu Venus
,
la poursuit avec un
-
dard
dard,&la blesse à la main.
Le fang immortel coule de
sa playe. Le fang desDieux
different de celuy des hommes,
& pourquoy.Venus
laisse tomber Enée,Apollon
le releve, le couvre
d'un nuage & l'emporte,
Diomede parle en termes
picquans à Venus qui se
retire tres-affligée. Iris l'a
soustient. Elles trouvent
Mars. Venus le conjure
de luyprester ses chevaux
pour s'en retourner dans
l'Olympe.„Mars luy donna
son char. Iris le conduit.
Elles arrivent en un
moment. Iris dérelle les
chevaux, & en prend soin-
Venus se laisse tomber sur
les genoux de Dioné sa
mere. Dipné luy demande
cc qui luy a fait cette
blesseure.,, Venus respond
ic que Diomede a eu cette
audace, & que ce nretl: plus
icy une guerre des Grecs
contre les Troyens,mais
desGrecscontre les Dieux.
Dioné la console
,
luy dit
que ce n'est pas la - première
fois que les Dieux
ont esté insu Irez. par leshommes.
( Exemples, de
Mars, de Junon, &de Pluton;)
Que Diomede doit
craindre de porter quelque
jour la peine de sa temerité.„
Dionéessuye le
fang qui coule de la blesseure
de sa fille. Venus est
guene en un moment. 'Vers
275- 417.
Junon & Minerve entretiennent
Jupiter de ce qui
vient d'arriver à Venus.
Ce Plaisanterie de Minerve
a ce sujer. Jupiter foufritsappelle
Venus & u. luy recommande
de ne plus s' exposer.
4, Diomede par trois fois
se jette sur Enée.) quoy
gqnapollon l'ait pris fous
sa protection. A la quatriéme
fois ce Dieu irrité
cc luy parle d'un ton
menaçant." Diomede se
retire. Apollon porte Enée
dans son Temple sur la Citadelle
de Pergame. Latone&
Diane ont foin ellesmesmes
de le panser. ven
432. 44^
Apollon voyant que le
combat s'echauffe autour
d'un phantofme qu'il avoit
formé ressemblant à Enéc
pour tromper les Grecs,
demande à Mars, «
s'il n'y
a pas moyen d'arrester ce
Diomede qui porte sa fureur
jusqu'a poursuivre les
Dieux,,,. Ensuiteilseretire
sur la Citadelle. Mars
prend la reffernblance d'Acamas
General des Thraces.
Va de rang en rang..
«Se fait entendreaux Tro..
yens & les anime.» Sarpedon
picque le courage de
Hector par le reproche
qu'il luy fait de son inaction
, & de la lascheté de
ses freres qui tremblent
,
comme des chiens timides
en presencedun lion.»
Hector, sans repliquer
faute de son char, un jave.
lot à la main, exhorte les
Troupes. LesTroyens se
rallient. LesEscadrons des
Grecs viennent fondre sur
eux. La poussiere qu'ils élevent,&
dontilssont tout
blanchis, comparée a celle
qui couvre ces monceaux
de paille que des vanneurs
ont separée d'avec le grain.
Le combat recommence.
Enée, qu'Apollon a retiré
du Temple où il l'avoit
mis, reparoist à la reste de
ses.troupes avec toute sa
vigueur. Les soldatstransl
portezdejoyefontsurpris
en meme tem ps de le revoir
siicst ; mais l'ardeur
du combatne leur permet
pas de l'interrogersur une
si prompte guerison. ira
449.518.
: Les Grecs animez, par
lpes dIeuxlAja.x, parUlysse, attendent
les Troyens de pied ferme
,SemblablesÀ desnuages:
aÍfemblez:, qui n'attendent
que le reveil des
vents endormis pourestre
mis en mouvement. vers
Jr9. J17-
Agamemnon donne (es
ordres « Exhorte ses soldats
» Ensuite il lance son
javelot & tueDeïcoon le
pluscher compagnon d'Enée.
Enée de son costé tue
Crethon & Orsiloqueensans
de Dioclés, qui avoir
pour ayeul le' fjeuve Alphée.
Crethon & Crbiloque
com parez à deux jeunes
lions, qui aprèsavoir
laisse par tout des marques
de
de leur furie , succombent
enfin fous l'effort des pasteurs.
Ces deux jeunes
guerriers tombent fous les
coups d'Enée comme les
plus hauts sapins abbattus
par les vents. Menelas,
pour les venger, s'avance
au milieu des combattansf
pouffé par le Dieu Mars,
qui ne cherche qu'à le faire
perir de la main d'Enée.
Antiloque voyant le peril
où Menelas s'expose, court
se joindre à luy. Enée qui
voit ces deux guerriers
unis, seretire. Ilsenlevent
les corps de Crethon &
d'Orsiloque;ensuite ils retournent
dans lameslée.
Menelas tue Pylemenés
qui commandoit les Paphiagoniens.
Antiloque
blesse Mydon d'un coup
de pierre, l'acheve de Ton
épée, & emmene ses chevaux.
vers528.589
Hector ayant apperceu
Menelas & Antiloque
inarche à , eux avec impetuosiré.
Les Troyens le
suivent. Mars & Bellone
sontà leur reste.Mars accompagne
par tout Hector.
Diomede voyant ce
Dieu terrible) est saisi de
frayeur. Son estonnement
comparé à celuy d'un voyageur
qui, après avoir
traversé de vastes campagnes,
voit tout d'un coup
un grand fleuve, & retourne
sur ses pas. Diomede
se retire en disant aux
Grecs,M qu'il faut ceder
auxDieux.» WJ590.606.
LesTroyensondent sur
les Grecs. Hector tue de
sa main Menofthés & Anchiale.
Ajax fils de Telamon
s'avance pour les
Ranger, & tue Amphiusde ioix
javelot. Il accourt ensuite pour
le dépouillerj mais les Troyens
font pleuvoir sur luy une gresle
de traits, & l'obligent de se- retirer. Vers 607. 616*
Sarpedon filsde Jupiter, &
General des Lyciens, & Tle-*
poleme fils d'Hercule se ren..,
contrent.« Ils se parlent quelque
temps au sujet du parjurede
Laoimedon que Tlepoleme
reproche à Sarpedon:» Ces
deux guerriers après« s'estre
menacez fierement» lancent
leurs dards lun contre l'autre.
Les traits partent ensemble,
Sarpedonest blesséà la clÜiTe
Le dard y demeure attaché.
Tlepoleme tombe sans vie.
On emporte Sarpedon. Les
Grecs enlevent le corps de
Tlepoleme. Ulysse
, pour le
venger, tourne les armes contre
les Lyciens & en tuë un
grand nombre. Noms des Lyciens
tuez par Ulvsse. Hector
s'avance contre luy pour arrester
ses desordres.. Srrpedon
voyant Hector le prie de ne le
pas laisser en proye à ses ennemis.
» Hector passe rapidement
pour aller charger les
Grecs. Les amis de Sarpedon
le mettent fous un grand chefne.
Pelagon luy tire le javelot
de sa playe. Sarpedon s'évanouit.
Borée le rafraifchit
de son [ouille) & le ranime.
Les Grecs qui ne peuvent fouflenir
le choc du Dieu Mars
& d'Hector, se battent en re..
traite sans prendre la suite,
Noms de plusieurs braves Capitaines
tuez a cette attaque..
vers 628. 710.
Junon voyant ce qui sepasse,
dit à Minerve" qu'ilest temps
d'arrester les ravages de Mars,
& de secourir les Grecs. » Junon
prepare elle
-
mesme ses
chevaux. La Déesse Hebé luy
appresteun char superbe. Description
de ce char. Minerve
quitte ses habits pour s'armer.
Quelles font ses armes. Son
Egide. Son casque. Sa pique.
Les deux Déesses montées sur
leur char éclatant, vont à toute
bride au palais de Jupiter.
Les portes de l'Olympe,qui
font gardées par les Heures,
s'ouvrent d'elles-mesmes avec
un grand bruit. Junon parle à
Jupiter & luy demande" s'il
veut permettre de reprimer les
fureurs de Mars , & de blesser
cet insensé qui ne reconnoist
d'autre droit que la force
,,, Jupiter luy dit" de donner ce
soin à Minerve qui est accoustuméeà
le vaincre." vers 711. 766..
Junon accompagnée de Minerve
pousse ses chevaux qui
courent avec impetuositéentre
le Ciel & la terre. ( Les
chevaux des Dieux franchissent
d'un seul fault autant d'espace
qu'un homme assis sur un
cap eslevé au bord de la mer
en peutdécouvrir sur cette va- se étendue.) Les Déesses arrivent
prés de Troye. Junon
dételle les chevaux. Les environne
d'un nuage. Le Simoïs
fait naistre l'ambrosie sur ses
rives pour leur pature. Les
Déesses marchent ensemble
comme deux colombes&vont
secourir les Grecs, vers 767.
779.
Elles trouvent Diomede entouré
des plus braves guerriers
semblables aux plus frers lions,
& aux sangliers les plus terribles.
Junon s'arreste. Prend
la ressemblance de Stentor dont la , voix d'airain estoit plus
forte que celle de cinquante
hommes ensemble. Elle parle
aux Grecs, &Il les anime.,,
Minerve de son costé s'approche
de Diomedequi s'estoit retiré
un peu à l'écart pour rafraifchir
la playe que Pandarus
luy avoit faite. Elle luy
reproche de s'affoiblir quand
il faut agir, 5c de ne ressembler
gueres à son pere Tydée qu'-
elle protegeoit auAi bien que
luy
, & dont elle ne pouvoit
retenir le courage Elle luy rappelle
l'aventure de Tydée avec
les Dépendants de Cadmus.
Diomede respond
(c
qu'il ne
manque ny de force ny de resolution
,
mais qu'il se souvient
des deffenses qu'elle luy a faites
de combattre contre les
Dieux : Que Mars est maintenant
à la teste des Troyens. » Minerve luy dit de ne point
craindre Mars, 8c de le frapper
hardiment s'il vient à sa
rencontre; qu'audi bien celt
un perfide qui prend le party
des Troyens contre la promes-.
se qu'illuy avoit faite & à Junon
, de favoriser les Grecs.»
Elle fait descendre Sthelenus
& monte à sa place auprès de
Diomede sur son char. Elle
prend le casque de Pluton pour
n'estre point veuë. Pouffe les
chevaux contre Mars. Mars,,
qui vient de tuer Persphas ,
voyant Diomede
3
s'avance, &
luy veut porter un coup de sa
pique. Minervedétourne le
coup, conduit celle de Diornede
contre Mars, & la kiy fait
entrer bien avant dans les costes.
Mars la retire, & jette
un cry semblable à celuy d'une
armée de neuf ou dix mille
hommes. LesTroyens & les
Grecs en font épouvantez.
Mars retourne dans l'Olympe.
Diomede le voir s'élever comme
un nuage obscur. vers 780. 867** - Mars montrant à Jupiter le
fang qui coule de sa playe, luy
dit « qu'il a engendré une fille
pernicieusè qui se croit tout
permis, parce qu'il ne la corrige
pas pendant qu'il traite
avec severité les autres Dieux.
Que c'est Minervequi a inspiré
à Diomede l'audace debiesfer
Venus & luy ensuite.» Jupiter
rejette sa plainte, & luy
dit qu'ilest luy - mesme un
inconstant & un furieux qui
n'aime que les querelles,& que
s'il n'estoit pas son fils il y a
long-temps qu'ill'auroit precipité
dans les abylmesavec les
Titans,» Jupiter cependant
donne ordre à"'Pæon"de le guérir.
Pæonobéît& le guerit sur
le champ avec un baume exquis
qui fait sur la playe le mesme
effet & aussi promptement
que la presure sur le lait. Hebé
après avoir preparé un bain
pour Mars, luy donne des habits
magnifiques. Mars se place
auprès de Jupiter. Junon &
Minerve ne sont pas longtemps
sans remonter au Ciel.
de tjÜadc.
ARGUMENT
du quatrième Livre.
AVERTISSEMENT.
On A mis dans la suite de
cet Extrait des cedilles ainsi
marquées",,Ellessignifient
dans les endroits où elles se
trouvent,que. le Poëtey fait
parler ses Heros.
LES Dieux estanc à Table
tiennent conseil sur les
affaires de Troyes, vers
I. 4.
Jupiter raille Junon &
Minerve, de ce que de
grandes Déesses. comme
elles se tiennent à l'écart
t
loin des combats, pendant
que Venus qui n'aime que
les jeux& les plaisirs - accompagne
son favori dans
tous les penIs. Il met en
délibération s'il faut rallumer
la guerre entre les
Troyens & les Grecs, ou
les reconcilier par l'exe-
-
cution du traité qu'ils ont
_aIt,,, 'Vers. 5.
19.
Cette proposicion cause
un violent dépit aux deux
Déesses qui préparoient les
plus grands malheurs aux
Troyens. Minerve dissimule
par prudence. Junon
éclatte, & a déclaré, quelque
resolution que l'on
prenne, qu'elle ne consentira
point à la paix.,,
vers 1o. 2. 9.
Jupiter a reproché à
Junon la cruauté avec laquelle
elle poursuit les
Troyens. Ilseplaintdela
violence qu'e lleluy fait en
le forçant de luy abandonner
une Ville qu'il a honorée
sur toutes les autres.
Il l'avertit qu'en revanche,
si jamais dans sa fureur
il veut détruire quelque
Ville qu'elle ait prise
fous sa protection
,
c'est
inutilement qu'elle voudra
s'y opposer.„ vers 30.49.
Junon luy dit qu'il
peut,quandilvoudra,dit
poser d'Argos, de Mycenes
)
& de Sparte; mais
qu'il n'est pas juste qu'elle
perde le fruit de toutes ses
peines. Que tout puissant
qu'il est, il doit avoir pour
elle des égards & de la
complaisance,puisqu'elle
est sa femme & sa soeur.
Enfin elle luy demande
-
qu'il ordonne à Minerve
de descendre dans l'armée
des Troyens pour les exciter
à enfraindre le fraite.
& à insulter les Grecs.,,
vers 50. 67.
Jupiter donne cet ordre
à Minerve.„La Déesse
descend, & dansla course
rapide elle paroist fous la
forme d'une exhalaison
qui s'allume dans l'air, &
qui se partage en mille
feux. Cesigne qui est veu
dans les deuxarmées est
interprété comme un préfage
ou de la fin ou de la
continuation de la - guerre.
35 vers 68. 85.
Minerve prend la réf.
semblance de Laodocus.
fils d'Antenor. Vatrouver
Pandarus fils de Lycaon.
Luy propose « de tirer une
fleche à Menelas. L'encourage
par la gloire qu'il
aura d'avoir abbattu un si
grand guerrier, & par la
recom pense qu'il doit attendre
de Paris. Elle luy
conseille de s'addreffer auparavant
à Apollon Lycien
pour le prier de diriger
le trait.» vers 86. 103.
L'intense Pandarus se
laisse persuader. Peinture
naïve de l'action de Pandarus,
& desmesuresqu'il
prend pour frapper juste
à son but. (Son arc estoit
fait des cornes d'unechevre
sauvage qu'il avoit tuée
à l'affust; chaque corne
avoit seize paumes, c'està-
dire cinq pieds & quatre
pouces.) Il promet une
Hecatombe à Apollon. Il
tire. Le trait part avec impetuosité,
perce le baudrier
,la cuirasse & la lame
de Menelas; entre dans la
chair sans penetrer bien
avant,(car Minerve avoit
pris foin d'affoiblir le coup,
semblable à une mere qui
voyant dormir son enfant,
détourne une mouche opiniastre
qui voudroit le piquer.)
Le fang qui coule
le longdesjambes de Menejas,
compare à la pourpre
dont une femme de
Meonie a peint l'yvoire le
plus blanc, pour en faire
les boffetes d'un mords qui
fait l'admiration & le desir
des plus braves Cavaliers,
filais qui est destiné pour
un Roy. "vers 104. 119.
Agamemnon est effraié
aussi bien que Menelas.
Menelas reprend courage.
Agamemnon éclate contre
la perfidie des Troyens.
Dit que Jupiter ne la laisfera
pas impunie. Prédit
la ruine deTroye. Il s'attendrit,
& ne peut cacher
à son frere la crainte qu'il
a de le perdre - vers 120.
182.
Menelas lera ssure&le
prie de ne point allarmer
les Grecs. n Agamemnon
luy dit « qu'il faut appeller
un Medecin.» Donne ordre
à Talthybius de faire
venir Machaon fils d'Esculape.
Le Herault obeït.
Trouve Machaon & « luy
parle.» Machaon vient.
Visite la playe, & succe
le sang,& y met un appareil
que le Centaure Chiron
avoit autrefois enseigné
à Esculape. vers 183.
ii9*
Cependant les Troyens
s'avancent en bataille. Les
Grecs reprennent leurs armes
, & ne respirent plus
que lecombat. Agamemnon
laissesonchar à Eurymedon
, avec ordre de ne
le pas tenir trop éloigné.
Il parcourt à pied toute
l'armée. « Anime par ses
discours ceux qu'il trouve
disposez à bien faire».
« Réprimandé les autres,»'
les compare à des faons de
biche Arrive prés de la
Gend'armerie Cretoise, la
trouve en bon estat, Idomenée
à la teste, Merion
à la queue.» IllouëIdomenée,
le fait ressouvenir
que dans toutes les occasions;
à la guerre, dans les
festins, il l'atousjours traité
avec distinction". Idomenée
respond « qu'illuy
fera tousjours fidelle».
Agamemnoncontinue son
chemin. Il trouve les deux
Ajax deja armez au milieu
de leurs bataillons; ( ces
bataillons comparez à des
troupeaux assemblez fous
leur pasteur, qui leur cherche
un asile contre l'orage
qu'il prévoit. ) Agamemnon
louë ces deux chefs,
& leur dit qu'il n'a pas besoin
de les exhorter». Il
passe au quartier du vieux
Nestor. Le trouve qui range
ses trou pes en bataille,
& qui encourage leurs
chefs. Noms de ces chefs.
De quelle manière Nestor
disposoit sa cavalerie &son.
infanterie.« Quels conseils
il donnoit à ses cavaliers
». «Sage vieillard,
dit Agamemnon transporté
de joye, plust aux Dieux
que vos forces respondissent
à vostre grand courage
ge, &c.» Nestor respond
» qu'il n'est plus au temps
où il tua de sa main le vaillant
Ereuthalion; mais que
tout vieux qu'il est on le
verra à la teste de ses ECcadrons,
LXquïl serautile
au moins par ses ordres &
par ses conseils
, que cest
là le partage des vieillards
». Agamemnonavance.
Trouve Peteus fils de
Menefthée & Ulysse qui
ne faisoient aucun mouvement
, parce que le bruit
de ce qui estoit arrivé dans
les deux armées n'estoit pas
encore venu jusqu'à eux-
« Il leur fait de sanglants
reproches de leur inaction
». «Ulyflc respond
avec fierte». Le Roy qui
le voitirrité, change de
ton, &«luy parle obligeamment
». Il poursuit
son chemin.VoitDiomede
sur son char avec Sthelenus
fils de Capancé. Diomedene
donnoit aucun
ordre pour le combat. Agamemnon
cc
luy reproche
d'avoir degeneré dela
vertu de son pere Tydée,
luy rappelle une occasion
d'éclat, ou Tydée signala
son courage contre les
Thebains». Diomede par
respect pour le Roy ne respond
rien.Sthelenus prend
la parole & dit(( qu'ils ne
meritent ny l'unny l'autre
ie reproche qu'on leur fait,
se piquent tous deux avec
raison d'estre plus braves
encore que leur pere».
Diomede represente à
Sthelcnus que le Roy qui a
le principal interest à tout
ce qui se passe, est en droit
de leur parler comme il
fait.„ Diomede en mef-
1
me temps faute de dessus
son char. - "veys 421. 419.
On voit marcher au
combat les nonbreufes
Phalanges des Grecs, semblables
à des flots amoncelez
par les vents. Elles
suivent leurschefs dans un
profond filen-ce, pour entendre
leurs ordres. Ilsemble
3
dit le Poëre, que cette
multitude innombrable de peuples
n'ait point de njoïx. Les
Troyens au contraire,
comme des brebis qui bêlent
dans un grand patu-
Tage, sont un bruit confus
qui resulte du mélange de
leurs voix & de la diversité
des langues de toure sorte
de peuples qui forment
leurarmée, vers411.438.
Les Troyens sont animez
par le Dieu Mars, &
les Grecs par la Déesse Minerve.
Ces deux Divinitez
font suivies de la Terreur,
de la Fuite & de l'insatiable
Discorde, Image poëtique
de la Discorde. Son
progrez. Ses effets. vers
43""45.
Les deux armées se joignent
J
& en viennent aux
mains. Description de leur
choc. Le bruit des guerriers
comparé à celuy que
font d'impetueux torrens
grossis par les pluyes. vers
446, 456.
Antiloque le premier tuë
Echepolus,un des plus braves
Troyens. Elephenor
General des Abantes, voulant
le dépouiller de ses
armes,est rué par Agenor.
Il se fait en cet endroit
une cruelle boucherie des
Grecs & des Troyens qui
se jettent les uns sur les autres
comme des loups affaniez.
Simoïsius (ainsi nom.
me parce que Ía mere accoucha
de luy sur les rives
du Simoïs) est tué à la fleur
de son âge par Ajax fils
de Telamon. Il tombe sur
la poussiere comme un jeune
peuplier abbattu par le
fer d'une coignée. Antiphus
un des filsdePriam,
veut venger la mort deSimoïsius.
illance son javelot
contre Ajax; mais il
rencontre au lieu de luy
Leucus compagnond'Ulysse.
Leucus tombe sur le
corps de Simoïssus qu'il entraisnoit.
Ulysseaffligéde
cette perte, s'approche des
Troyens d'un air terrible.
Regarde autour de luy
pour chercher sa victime.
Il lance son dard. Les
Troyens effrayez se retirent
en desordre. Le javelot
va frapper Democoon
fils naturel de Priam, &
lerenverse mort. Les Troyens
reculent. Hectorluymesmeestépouventé.
Les
Grecs enflez de ces avanta
ges vont chercher les
corps morts jusqu'au milieu
de la meslée pour les
entraisner.
entraisner. Apollon irrité
de leur audace se fait entendre
aux Troyens du
hautde la forteressed'Ilion,
les exhorte & les encourage
; leur represente sur
tout qu'Achille ne combat
point„. Minerve de son
colté anime les Grecs. Pi-,
roüs General des Thraces
tuë Diorés chefdes Epéens
aprés l'avoir blessé d'un
coup de pierre. Thoas General
des Etoliens lance
son javelot contre Piroiis,
& l'acheve de son épée. Ils
vont le dépoüiller de fe$
armes, mais il en est empesché
par les Thraces qui
tombent sur luy à coups
de piques,& l'obligent de
seretirer. vers 457. 539.
-
Homere parle des ex-
FJqics de cette journée
comme d'un grand sujet
d'admiration pour un homme
que Minerve auroic
conduit par la main, & à
qui elle auroit fait parcourir
sans danger tous les endroits
de la bataille. Il auroit
veu les Troyens&les
Grecs estendus les uns prés
des autres à la mesme place
où ils avoient combat-
EU. vers544.
AKGVMENT
du cinquièmeLivre.
La jour de cette action
Minerve augmente le courage
deDiomede. Deson
calque & de son bouclier
forcoitcontinuellementun
fçjXrfemblable à celuy de
Veftoitle qui paroistà lafin
àçl'Eflre'.LaDéessè pousse
ÇÇignprr-ier au milieu dela ~n~~ j, vers 1. 8.
o.
~~q~Phesep tous deux
fils de Darés Sacrificateur
deVulcain,poussent leur
char contreDiomede qui
estoit à pied. Phegée le
premier lance ion dard
contre luy sans le blesser.
Diomede le perce de son
javelot
, ôc l'estend mort
surla place. Idée n'ayant
pas le courage de sauver
le corps de son frere, prend
la suite. Vulcain le couvre
d'un nuage & le dérobe
aux poursuites de Diomede
j pour épargner àDarés
le chagrin de perdre Ces
deui filsenun jour. Diomede
fait emmener leurs
chevaux. Les Troyens
commencent à plier. Minerve
pour augmenter leur
desordre,ditàMars«qu'il
faut laisser combattre les
Troyens & les Grecs, &
ne plus resister aux ordres
de Ju piter.„ Elle le retire
du combat, & le fait repofer
sur les rives du Scamandre.
Les Grecs enfoncent
lesTroyens. * a/fw9.37,
Odius chef des Alizoniens
est tué par Agamenvnon.
Phestus par Idomenée.
Scamandrius par Me.
nelas. (Ce Scamandrius
estoit fort entendu dans
tout ce qui concerne la
charte, & avoit esté instruit
par Minerve.) Phereclus
est tué par Merion.
( Phereclus fils d'un habile
charpentier, avoir bâti les
vaisseaux que Pâris mena
en Grece.) Pedée fils naturel
d'Antenor
,
est tué
par Megés. Eurypile blesse
Hypsenor.(Hypsenorestoit
filsde Dolophionqui
estoit Sacrificateur du Scamandre.)
rUers Î7- 83-
Idomenéesemblable à
un fleuve, qui dans ion débordement
emporte tout
ce qui s'oppose à son passage,
renverse les barait.
lons des Troyens;rien ne
luy resiste. vers 85. 94.
Pandarus, pour arrester
son audace, luy tire une
flèche qui luy traverse l'épaule
droite, & croyant
l'avoir blessé mortellement
il s'en glorifie,,, Sthele*-
jius, ( à la prière deDiomede
) luy oste cette fléche.
Diomede prie Pallas
<c de luy prester son secours
pour se venger de
Pandarus
5
& le punir de
son orguëll.,,Pallas l'exauce.
Luy redonne toutes
ses forces & route sa
legereté.Elle luy dit,
qu'il peut aller hardiment
contre les Troyens;qu'elle
a dissipé le nuage qui
l'auroit empesché de discerner
les Dieux d'avec les
hommes
:
qu'il se garde
bien de combattre contre
les Immortels, si ce n'est
contre Venus sur qui elle
luy permet de tirer.„
vers 95. 132.
Minerve se retire. Diomede
qui se sent trois fois
plus fort qu'à l'ordinaire,
se jette au milieu des ennemis.
Est comparé à un
lion qu'un berger ablesse,
& qui devenu plus furieux;
se lance sur les brebis effrayées
qui se tapissent les
unes fous les autres pendant
que le berger se cache.
Diomedetuë d'abord
Astynoüs & Hypenor.
Ensuite Abas & Poluïde,
tous deux fils du vieux Eurydamas
qui estoit Interprete
des songes. Il marcheversThoon
&Xanthe
enfans de Phenops,prive
ce pere malheureux de ses
deux filsàla fois, &luy
laisse la douleur de voir que
sa successiondoitpassèrà
des collateraux esloignez.
Diomede., comme un lion
qui se jette surun troupeau
de boeufs, tombe encore surEchemon & Chromius
enfans de Priam, les préçipite
de leur char ,les dépoüille
de leurs armes, &
prend leurs chevaux.vers
133. 16s.
Enée qui voit tous ces
ravages, cherche Pandarus
a travers les picqucs &
les javelots. Ille joint de
l'exhorte à se servir encore
deson arc& de ses
traitscontre un homme
qui cause tant de defor-
-.
dres
, ( si ce n'est que ce
guerrier dangereux soit
quelqu'un des Immortels
irrité contre lesi Grecs) ,,.
Pandarus respond qu4»I
croit reconnoistreDiomede
à sa raille & à ses armes*
Que si ce guerrier n'est pas
un Dieu,aumoinsDiomede
ne peut faire tant de
prodiges sans le secours
d'une Divinité toute puisfante.
Se repent d'avoir
laissé chez luy, contre l'avis
de son pere, onze chars
inutiles par la crainte que
ses chevaux ne souffrissent
trop dans une ville affiegée.
Se plaintd'avoir desjablessé
deux des plusvaillans
hommes, sans autre
effet que de les avoir rendus
plus furieux. Jure que
s'il revoit sa patrie, il commencera
par bruler cet
arc & ces fléches qui l'ont
si mal servi.,, Enée luy
dit cC de monter sur son
char qui est tiré par cTcxcellens
chevaux, & luy
laisse le choix ou de tenir
les resnes, ou de combattre
contre Diomede. 9%
Pandarustc conseille à Enée
de conduire luy -
mesme
ses chevaux qui connoissent
savoix & sa main;
que pourluy il recevra
Diomede avec sa lance.
Ils montent tous deux sur
le char,& vont à toute
bride contre Diomede
(quiestà pied.) Sthelenus
qtuiitles voit venir, en aver- Diomede,&" luy conseille
de les éviter.,, Diomede
'c respond qu'il n'est
pas capable de fuir, & que
ces deuxennemis si redoutables
ne retournerons
point àTroye ;luy recommande
seulement dem*
mener les chevaux d'Eiree
aussitost qu'il fera vaincu; les chevaux d'Enée ef.,
toient de la race de ceux
dont Jupiter fit presentà
Tros. ),., 0tvers16(3.zyj,
Pandarus & Enée sont
en presence. de Diomede;
Pandarus-ile, premierdità
Diomede qu'iln'a peule
vaincre avec sa fléche,
mais qu'il fera peutestre
plus heureux avec son javelot.„
En mesme temps
il lance son dard qui perce
le bouclier jusqu'à la cuirasse.
Pandarus~s'écrie~
glorieux decesuccez. Diomede
luy dit qu'il a manqué
son coup. Le frappe
de son javelot que Minerve
conduisoit
, & qui traverse
depuis l'oeil jusqu'à
la gorge. Pandarus tombe
de son char. Enée se met
en devoir de deffendre: le
corps de sonamy. Diomede
prend une grosse pierre,
telle que deux hommes à
- peinel'auroient peu lever.
Il l'a jette contre Enée, &
luy brife la cuisse. Enée
tombe sur ces genoux &
s'affoiblit. Venus le prend
entre ses bras, le couvre
de sa robe, & l'emporte.
Sthelenus, qui se souvient
des ordres de Diomede 9
prend les chevaux d'Enée
les emmeine, les remetà
son amy Deïphilus, & va
rejoindre Diomede. Diomede
,qui a reconnu Venus
,
la poursuit avec un
-
dard
dard,&la blesse à la main.
Le fang immortel coule de
sa playe. Le fang desDieux
different de celuy des hommes,
& pourquoy.Venus
laisse tomber Enée,Apollon
le releve, le couvre
d'un nuage & l'emporte,
Diomede parle en termes
picquans à Venus qui se
retire tres-affligée. Iris l'a
soustient. Elles trouvent
Mars. Venus le conjure
de luyprester ses chevaux
pour s'en retourner dans
l'Olympe.„Mars luy donna
son char. Iris le conduit.
Elles arrivent en un
moment. Iris dérelle les
chevaux, & en prend soin-
Venus se laisse tomber sur
les genoux de Dioné sa
mere. Dipné luy demande
cc qui luy a fait cette
blesseure.,, Venus respond
ic que Diomede a eu cette
audace, & que ce nretl: plus
icy une guerre des Grecs
contre les Troyens,mais
desGrecscontre les Dieux.
Dioné la console
,
luy dit
que ce n'est pas la - première
fois que les Dieux
ont esté insu Irez. par leshommes.
( Exemples, de
Mars, de Junon, &de Pluton;)
Que Diomede doit
craindre de porter quelque
jour la peine de sa temerité.„
Dionéessuye le
fang qui coule de la blesseure
de sa fille. Venus est
guene en un moment. 'Vers
275- 417.
Junon & Minerve entretiennent
Jupiter de ce qui
vient d'arriver à Venus.
Ce Plaisanterie de Minerve
a ce sujer. Jupiter foufritsappelle
Venus & u. luy recommande
de ne plus s' exposer.
4, Diomede par trois fois
se jette sur Enée.) quoy
gqnapollon l'ait pris fous
sa protection. A la quatriéme
fois ce Dieu irrité
cc luy parle d'un ton
menaçant." Diomede se
retire. Apollon porte Enée
dans son Temple sur la Citadelle
de Pergame. Latone&
Diane ont foin ellesmesmes
de le panser. ven
432. 44^
Apollon voyant que le
combat s'echauffe autour
d'un phantofme qu'il avoit
formé ressemblant à Enéc
pour tromper les Grecs,
demande à Mars, «
s'il n'y
a pas moyen d'arrester ce
Diomede qui porte sa fureur
jusqu'a poursuivre les
Dieux,,,. Ensuiteilseretire
sur la Citadelle. Mars
prend la reffernblance d'Acamas
General des Thraces.
Va de rang en rang..
«Se fait entendreaux Tro..
yens & les anime.» Sarpedon
picque le courage de
Hector par le reproche
qu'il luy fait de son inaction
, & de la lascheté de
ses freres qui tremblent
,
comme des chiens timides
en presencedun lion.»
Hector, sans repliquer
faute de son char, un jave.
lot à la main, exhorte les
Troupes. LesTroyens se
rallient. LesEscadrons des
Grecs viennent fondre sur
eux. La poussiere qu'ils élevent,&
dontilssont tout
blanchis, comparée a celle
qui couvre ces monceaux
de paille que des vanneurs
ont separée d'avec le grain.
Le combat recommence.
Enée, qu'Apollon a retiré
du Temple où il l'avoit
mis, reparoist à la reste de
ses.troupes avec toute sa
vigueur. Les soldatstransl
portezdejoyefontsurpris
en meme tem ps de le revoir
siicst ; mais l'ardeur
du combatne leur permet
pas de l'interrogersur une
si prompte guerison. ira
449.518.
: Les Grecs animez, par
lpes dIeuxlAja.x, parUlysse, attendent
les Troyens de pied ferme
,SemblablesÀ desnuages:
aÍfemblez:, qui n'attendent
que le reveil des
vents endormis pourestre
mis en mouvement. vers
Jr9. J17-
Agamemnon donne (es
ordres « Exhorte ses soldats
» Ensuite il lance son
javelot & tueDeïcoon le
pluscher compagnon d'Enée.
Enée de son costé tue
Crethon & Orsiloqueensans
de Dioclés, qui avoir
pour ayeul le' fjeuve Alphée.
Crethon & Crbiloque
com parez à deux jeunes
lions, qui aprèsavoir
laisse par tout des marques
de
de leur furie , succombent
enfin fous l'effort des pasteurs.
Ces deux jeunes
guerriers tombent fous les
coups d'Enée comme les
plus hauts sapins abbattus
par les vents. Menelas,
pour les venger, s'avance
au milieu des combattansf
pouffé par le Dieu Mars,
qui ne cherche qu'à le faire
perir de la main d'Enée.
Antiloque voyant le peril
où Menelas s'expose, court
se joindre à luy. Enée qui
voit ces deux guerriers
unis, seretire. Ilsenlevent
les corps de Crethon &
d'Orsiloque;ensuite ils retournent
dans lameslée.
Menelas tue Pylemenés
qui commandoit les Paphiagoniens.
Antiloque
blesse Mydon d'un coup
de pierre, l'acheve de Ton
épée, & emmene ses chevaux.
vers528.589
Hector ayant apperceu
Menelas & Antiloque
inarche à , eux avec impetuosiré.
Les Troyens le
suivent. Mars & Bellone
sontà leur reste.Mars accompagne
par tout Hector.
Diomede voyant ce
Dieu terrible) est saisi de
frayeur. Son estonnement
comparé à celuy d'un voyageur
qui, après avoir
traversé de vastes campagnes,
voit tout d'un coup
un grand fleuve, & retourne
sur ses pas. Diomede
se retire en disant aux
Grecs,M qu'il faut ceder
auxDieux.» WJ590.606.
LesTroyensondent sur
les Grecs. Hector tue de
sa main Menofthés & Anchiale.
Ajax fils de Telamon
s'avance pour les
Ranger, & tue Amphiusde ioix
javelot. Il accourt ensuite pour
le dépouillerj mais les Troyens
font pleuvoir sur luy une gresle
de traits, & l'obligent de se- retirer. Vers 607. 616*
Sarpedon filsde Jupiter, &
General des Lyciens, & Tle-*
poleme fils d'Hercule se ren..,
contrent.« Ils se parlent quelque
temps au sujet du parjurede
Laoimedon que Tlepoleme
reproche à Sarpedon:» Ces
deux guerriers après« s'estre
menacez fierement» lancent
leurs dards lun contre l'autre.
Les traits partent ensemble,
Sarpedonest blesséà la clÜiTe
Le dard y demeure attaché.
Tlepoleme tombe sans vie.
On emporte Sarpedon. Les
Grecs enlevent le corps de
Tlepoleme. Ulysse
, pour le
venger, tourne les armes contre
les Lyciens & en tuë un
grand nombre. Noms des Lyciens
tuez par Ulvsse. Hector
s'avance contre luy pour arrester
ses desordres.. Srrpedon
voyant Hector le prie de ne le
pas laisser en proye à ses ennemis.
» Hector passe rapidement
pour aller charger les
Grecs. Les amis de Sarpedon
le mettent fous un grand chefne.
Pelagon luy tire le javelot
de sa playe. Sarpedon s'évanouit.
Borée le rafraifchit
de son [ouille) & le ranime.
Les Grecs qui ne peuvent fouflenir
le choc du Dieu Mars
& d'Hector, se battent en re..
traite sans prendre la suite,
Noms de plusieurs braves Capitaines
tuez a cette attaque..
vers 628. 710.
Junon voyant ce qui sepasse,
dit à Minerve" qu'ilest temps
d'arrester les ravages de Mars,
& de secourir les Grecs. » Junon
prepare elle
-
mesme ses
chevaux. La Déesse Hebé luy
appresteun char superbe. Description
de ce char. Minerve
quitte ses habits pour s'armer.
Quelles font ses armes. Son
Egide. Son casque. Sa pique.
Les deux Déesses montées sur
leur char éclatant, vont à toute
bride au palais de Jupiter.
Les portes de l'Olympe,qui
font gardées par les Heures,
s'ouvrent d'elles-mesmes avec
un grand bruit. Junon parle à
Jupiter & luy demande" s'il
veut permettre de reprimer les
fureurs de Mars , & de blesser
cet insensé qui ne reconnoist
d'autre droit que la force
,,, Jupiter luy dit" de donner ce
soin à Minerve qui est accoustuméeà
le vaincre." vers 711. 766..
Junon accompagnée de Minerve
pousse ses chevaux qui
courent avec impetuositéentre
le Ciel & la terre. ( Les
chevaux des Dieux franchissent
d'un seul fault autant d'espace
qu'un homme assis sur un
cap eslevé au bord de la mer
en peutdécouvrir sur cette va- se étendue.) Les Déesses arrivent
prés de Troye. Junon
dételle les chevaux. Les environne
d'un nuage. Le Simoïs
fait naistre l'ambrosie sur ses
rives pour leur pature. Les
Déesses marchent ensemble
comme deux colombes&vont
secourir les Grecs, vers 767.
779.
Elles trouvent Diomede entouré
des plus braves guerriers
semblables aux plus frers lions,
& aux sangliers les plus terribles.
Junon s'arreste. Prend
la ressemblance de Stentor dont la , voix d'airain estoit plus
forte que celle de cinquante
hommes ensemble. Elle parle
aux Grecs, &Il les anime.,,
Minerve de son costé s'approche
de Diomedequi s'estoit retiré
un peu à l'écart pour rafraifchir
la playe que Pandarus
luy avoit faite. Elle luy
reproche de s'affoiblir quand
il faut agir, 5c de ne ressembler
gueres à son pere Tydée qu'-
elle protegeoit auAi bien que
luy
, & dont elle ne pouvoit
retenir le courage Elle luy rappelle
l'aventure de Tydée avec
les Dépendants de Cadmus.
Diomede respond
(c
qu'il ne
manque ny de force ny de resolution
,
mais qu'il se souvient
des deffenses qu'elle luy a faites
de combattre contre les
Dieux : Que Mars est maintenant
à la teste des Troyens. » Minerve luy dit de ne point
craindre Mars, 8c de le frapper
hardiment s'il vient à sa
rencontre; qu'audi bien celt
un perfide qui prend le party
des Troyens contre la promes-.
se qu'illuy avoit faite & à Junon
, de favoriser les Grecs.»
Elle fait descendre Sthelenus
& monte à sa place auprès de
Diomede sur son char. Elle
prend le casque de Pluton pour
n'estre point veuë. Pouffe les
chevaux contre Mars. Mars,,
qui vient de tuer Persphas ,
voyant Diomede
3
s'avance, &
luy veut porter un coup de sa
pique. Minervedétourne le
coup, conduit celle de Diornede
contre Mars, & la kiy fait
entrer bien avant dans les costes.
Mars la retire, & jette
un cry semblable à celuy d'une
armée de neuf ou dix mille
hommes. LesTroyens & les
Grecs en font épouvantez.
Mars retourne dans l'Olympe.
Diomede le voir s'élever comme
un nuage obscur. vers 780. 867** - Mars montrant à Jupiter le
fang qui coule de sa playe, luy
dit « qu'il a engendré une fille
pernicieusè qui se croit tout
permis, parce qu'il ne la corrige
pas pendant qu'il traite
avec severité les autres Dieux.
Que c'est Minervequi a inspiré
à Diomede l'audace debiesfer
Venus & luy ensuite.» Jupiter
rejette sa plainte, & luy
dit qu'ilest luy - mesme un
inconstant & un furieux qui
n'aime que les querelles,& que
s'il n'estoit pas son fils il y a
long-temps qu'ill'auroit precipité
dans les abylmesavec les
Titans,» Jupiter cependant
donne ordre à"'Pæon"de le guérir.
Pæonobéît& le guerit sur
le champ avec un baume exquis
qui fait sur la playe le mesme
effet & aussi promptement
que la presure sur le lait. Hebé
après avoir preparé un bain
pour Mars, luy donne des habits
magnifiques. Mars se place
auprès de Jupiter. Junon &
Minerve ne sont pas longtemps
sans remonter au Ciel.
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Résumé : SUITE DE L'ABREGÉ de l'Iliade.
Le quatrième livre de l'Iliade relate un conseil des dieux concernant la guerre de Troie. Jupiter critique Junon et Minerve pour leur absence des combats, contrairement à Vénus qui soutient son favori. Junon refuse la paix et demande à Minerve d'inciter les Troyens à rompre le traité. Minerve, déguisée en Laodocus, persuade Pandarus de tirer une flèche sur Ménélas, le blessant légèrement. Agamemnon, alarmé, appelle un médecin pour soigner Ménélas. Les Troyens avancent en bataille, et les Grecs se préparent au combat. Agamemnon encourage les soldats et réprimande les lâches. Les deux armées se rejoignent, et le combat commence, marqué par des scènes de violence et de mort. Mars soutient les Troyens, tandis que Minerve aide les Grecs. Diomède, encouragé par Minerve, se distingue par sa bravoure et tue plusieurs Troyens. Pandarus blesse Diomède, mais Minerve le guérit et l'encourage à continuer. La journée se termine par des combats acharnés, avec des pertes des deux côtés. Diomède, comparé à un lion, attaque et vainc Échémon et Chromius, fils de Priam, s'emparant de leurs armes et chevaux. Enée, voyant les ravages causés par Diomède, cherche Pandarus pour l'exhorter à utiliser son arc contre ce guerrier. Pandarus reconnaît Diomède et regrette de ne pas avoir pris plus de chars. Il jure de brûler son arc s'il revient à Troie. Enée propose à Pandarus de monter sur son char pour affronter Diomède. Pandarus conseille à Enée de conduire ses propres chevaux et se prépare à affronter Diomède avec sa lance. Diomède, malgré les conseils de Sthelenus de se retirer, décide de rester et de combattre. Pandarus lance un dard contre Diomède, qui riposte en le blessant mortellement. Enée tente de défendre le corps de Pandarus, mais Diomède le frappe à la cuisse avec une pierre, le blessant gravement. Vénus, la mère d'Enée, vient à son secours et le transporte, blessée à la main par Diomède. Apollon prend ensuite Enée sous sa protection. Diomède, encouragé par Minerve, continue de combattre avec fureur. Les dieux interviennent de manière plus directe : Junon et Minerve décident d'arrêter les ravages de Mars et de secourir les Grecs. Minerve, déguisée, incite Diomède à affronter Mars, qu'elle blesse ensuite. Mars, blessé, retourne dans l'Olympe où Jupiter le guérit. La scène se termine par la préparation des dieux pour continuer à influencer le cours de la bataille.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 53-105
ARTICLE BURLESQUE. SUITE DU PARALLELE d'Homere & de Rabelais.
Début :
J'ay cru que rien ne rendroit ce Parallele plus [...]
Mots clefs :
Homère, Rabelais, Comique, Sublime, Sujet, Éloquence, Auteur, Génie, Neptune, Beau, Idée, Paris, Vers, Paradoxe, Comparaison , Parallèle, Grandeur, Dieux, Sérieux, Combat, Tempête, Panurge, Pantagruel
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texteReconnaissance textuelle : ARTICLE BURLESQUE. SUITE DU PARALLELE d'Homere & de Rabelais.
ARTICLE BURLESQUE.
SUITE DV PARALLELE
d'Homere&de Rabelais.
*
J'Ay cru que rien ne
rendroit ce Parallele
plus amusantque d'y
mêler de petits contes,
dontle fond estdeRabelais;
mais que j'ai accommodez
de maniere
à pouvoir être lûs des
Dames,& à moins ennuyer
ceux qui ne sont
point afeZj erudits &
"affedwnnez^ Pentagruelistes,
poursavourer,
mâcher&remâcherjusqu'aux
moindres roga-*
tons, & avaler à longs
traits sa -desfuavitezRabelaisiennes
en faveur de
quelques grains de gros
sel,semez par ci par là,
ez., salmigondis & pots
pouris de Maître François.
Pour assortir, ou plûtôrpour
opposer à ces
contes, en trouverai
bien encor quelqu'un
dans Homere, mais je
respecte trop son grand
nom, pour oser rien
mettre du mien dans
ses ouvrages; à peine
ai-je osé retrancher une
bonne moitié du conte
du Cyclope, afin de
rendre l'autre moins
ennuyeuse.
: Pour oposer au grand
& au sublime du Poëte
grec, on trouvera
peut-être dans Maître
François quelques endroits
assez solides pour
faire avouer que Rabelais
cût mieux réussi
dans le sérieux, qu'Homere
n'a réussi dans le
comique, & de là je
prendrai occasion d'avancer
quelques propositions
qui seroient
hardies, téméraires,ridicules
même si on les
avançoit sérieusement,
& dont je n'ose prouver
laveritéqu'en plaisantant;
je les proposeray
donc d'abord
comme des Paradoxes
badins ; tcbadinageaT
cela de bon qu'il peut
éclaircir certaines veritez
qu'une dispute serieuse
ne seroit qu'obscurcirjlcbadinageaencore
cet avanta ge sur la
dispute, qu'au lieud'attirerla*
colere des difputcurs
graves, il n'en
attire qu'un fîlencedédaigneux
, & c'es en
être quitte à bon marché
j car la force des raisonnemens
ne fait que
les irriter au lieu de les
convaincre.
La prévention s'irrite
par la resistance, cest un
animal feroce qu'Homere
eut comparé àun
Taureau furieux
J
qui
parcourant les njaftes
campa?nes de la Lybie,
d'autre but dans sa
fureur que de heurtertête
baiJJie) & de renverser
IÙS plus fortsanimaux
qui oseront l'attaquer
de front.
C'est ainsi que dans
les vastes ambiguitez
dela dispure,les plus
fortes raisons ne tiennent
point contre la
prévention.
Comparons à present
le badinage à l'Abeille
legere, qui voltige en
folâtrant autour de ce
Taureau furieux; elle
badine en fureté entre
ses cornes, lepique legerement,
il ne fait que
secoücr l'oreille,autre
coup d'aiguillon qu'il
méprise, il ne voit point
d'ennemy, cependant
la mouche le pique, ses
piquûres sontlegeres:
maisc11es sontréïterées,
la mouc he se porte avec
agilité par tous les endroits
sensibles, les piqueures
redoublent,il
commence à s'irriter,
se ne voyant à qui s'en
prendre, il tourne sa
colerecontrelui- même,
il s'agite,ilse mord,il
se tourmente, &enfin
il s'épuise,s'affoiblit&
tombe. Procumbithumi
Bos.
Nôtre comparaison
nous a fortéloignez de
nostresujet:tant mieux,
elle n'en est que plus
Homerienne,s'il y a
quelque chose de faux
dans l'application, tant
mieux encore. Homere
est un modele qu'il faut
imiter : ses comparaisons
sont longues, fausses
& semblables les
unes aux autres, il n'importe;
c'est toûjours le
second &C le parfait
Homere.
Les comparaisons de
Rabelais sont plus variées,
plus justes,mais
elles ne sont pas
moins allongées, & la
plûpart sont si basses,
qu'àcet égard ilfaut
bien pour l'honneur du
goût donner la préferenceau
Prince des
Poëtes.
Avantcettedigression
j'ay promis,à propos
d'Homere & de Rabelais
, d'avancer pour rire
quelques proportions
étonnantes, le
premier de ces Paradoxes
c'est :
Qu'il faut pins d'étendue
d'esprit & peutcireplus
d'élévationpour
exceller dans le beau comique
, qu'il n'en faut
pour réussir dansle serieux.
Cette proposition va
révolter d'abord ceux
qui prévenus par refpcâ
pour tout ce qui
a l'air sérieux:
admirent en baillant
un ennuyeux tragique,
Et riant d'une Jjlgne's,
méprisentlecomique.
Le
Le second Paradoxe,
e'est. Que les plus excellentes
piecesserieuses
font mêlées d'excellent
comique
, & par consesquent
qu'un Authtur ne
peut excellerdans lesérieuxy
s'iln'a du talent
pour le comique.r
On trouveroitdans
tous; les siecles, 8cmême
dans lenôtrçxque
les plus grands genies
ont mêlé du winique,
dans leurs ouvrages SC
dans leurs discours,&
les genies mediocres
dérogent même quelquefois
aux prérogatives
de leur gravité,
pour hazarder d'être
plaisans; j'en ai vû s'arrêter
tout court, par
vanité, s'appercevant
qu'ils plaisantoient de
mauvaise grace, & se
déchaîner le moment
d'après contre le meilleur
genre de plaisanterie.
-
Toi qui debite gravement
Tafademédisance,
Caustique par tempec.
ramment,
Serieuxparprudence,
Tumtprifes d'un hon
r, plaisant
La comique élegance,
Comme un gouteux foi- ble&pesant
Mépriseroit la danse.
Les Vers ci-dejjus peuvent Je
chanter sur l'AirdeJÓconde.
Avantque d'avancer
mon troisiéme Paradoxe
,
il faudroit avoir
bien défini le mot de
comique, & celui de subhme
y &C aprés celà
même il seroitpeut-être
encor ridicule de
dire:Quenon-seulement
lè Jubltmerieft pas incompatibleavec<
li\comiqu^
ymais,qmlpssd-J
avoir dans certain comiquedestraitssuperieurs
ausublimeserieux. Voila
unepropositionétonnante,
par rapport à l'idée
qu'on a du sublimc,
que je définirois
volontiers, laperfection
dans le grand : mais on
peut en donner encor
d'autres définitions,&
c'est ce qui nous meneroit
trop loin, il faudroit
trop1 de temps
pourdonneràces trois
Paradoxes toutes les ex*
plications& modifications
qui pourroient
les rendre sérieusement
vrayes > c'est ce que
j'entreprendrai peutêtre
quelque jour,sij'ai
le loisir de mettre en
oeuvre les reflexions
que j'ai faites sur les
fesses idées qu'on a du
sublime, du sérieux &
du comique; contentons-
nous ici de badiner
sur nôtre dernier Paradoxe,
qui nous donnera
occasion de comparer
quelques mor-*
ceaux des deux Autheurs,
dont jecontinuë
le Parallele.
Pour parler selon les
idées communes, disons
: que le comique
nest point sublimepar
lui-mesme
,
mais qu'il
peut renfermer des sens
& des veritez sublimes,
& c'est pour sçavoir
renfermer ces grandes
veritez dans le comique,
qu'il faut un genie
tres étendu.
Ilenfaut moins,par
exemple, pour soûtenirune
morale sublime
par des expressions
fortes & nobles, qui lui
font propres, que pour
la traitter comiquement,
sansl'affoiblir,
&:. sans la dégrader.
Il est'vray que le genre
serieux est plus grand
par luy-même que le
sgaennsre comique, iltient
doute le premier
rang, mais il n'y a point.
au
au Parnasse de ceremonial
qui donne le pas a un Autheur sérieux
surun comique. Ilest
plus grand parexemple,
de traitter la guerre
de Troye ,causée
par lenlevement d'une
Princesse, que la guerre
causéepar l'enlevement
d'un Seau, La
sequi à rapita,mais cette
grandeur est dans le
sujet, & non dans TAutheur
qui le traitte.,8c
celui qui daps le Poème
del'enlevement d'un
Seau, feroit entrer les
idées les plushéroïques
, feroit sansdoute
un plus grand genie"
que celui à qui la grandeur
du sujet fournit
naturellement de grandes
idées.
On ne peut pas soûtenirqu'ily
ait quantité
de hautes idées renfermées
dans le comique
de Rabelais, mais
on prouveroit peut- être
qu'Homere doit une
bonne partie deson sublime
à la grandeurde
son sujet.; ?;!> JU ;
.,' La bassesse des sujets
que Rabelais à traitez
auroit sait tomber son
ouvrage,s'iln'avoit pas étésoustenu par: des
partiesexcellentes;
L'élévation Se lrrraportance
du sujet de
rmiadercûcsoustenuë
qu^îidniémeil yauroit
eu moins de beautez
quon,ny en trouve.
Nous voyons clairementpar
la connolt:
sance dusiecle où Rabelais
avescu, que la
plûpart de ses expressiós
fortes&naïves lui font
propres a lui seul.
Mais les sçavans sans
prévention avouent
-qu:on- neconnoist pas
assez le siecle d'Homere
pour sçavoirenquoi
il dl original:ceuxqui
connoissent le genie
oriental croiront plustost
que ses expressions
nobles& figurées, que
ses comparaisons magnifiques,&
mesme la
pluspart de sesideés
Poëtiques pouvoient
estreaussi communes
aux Grecsde son temps
que les proverbes sensez
le sont à Paris parmi
le peu ple.
Al'égard du sublime
de Rabelais, il faut convenir
qu'il est bien malâisé
de l'appercevoirà
travers le bascomique,
dont il est offusqué, il
dit en parlant de la
Loy comrnentée & embrouillée
par nos Juris-
Confulres
, que c'est
une belle robe à fondd'or
brodée de crote
: j'en dirois
autant de son sublime
,
qu'on me passe
ce mot en attendant
la définition : Mais appellez
comme il vous
plaira l'idée qu'il donne.
de la vraye & naturelle
Eloquence, par la décision
de Pcntagruel
sur le verbiage du li-,
centié, il paroit qu'elle
fit excellente: en voici
l'idée en abbregé.
LAVRAYE ELOQUENCE.
1 uN jour Penragruel
rencontra certainLice-nti.é,,
non autrement sçavant es;
sciences de son métier de
Docteur:mais en recompense
sçachant tres-foncicierement
danser & joüer
à la paume,lequel donc
rencontrépar Pentagruel,
fut interrogé d'où il venoit
5
& luy répondit,je
liens de l'urbe&citécelebrisjimt
quevulgairement onvocite
Lutece.Qu'est-ce à dire,
dit Pentagruel
,
à son truchementordinaire?
je suis
tout ebahi de tel jargon.
C'efc, répond letruchemenrjqu'il
vient de Paris:
Hé,reprit Pentagruel,.
à quoy passez-vous le
temps à Paris vous autres
licentiez^Nflw^repondit le
Licentié
, en nos occupations
dit: Quel diable de langa
ge est-cecy ? Ce nest que latinécorché, dit le Truchement,
& luy semble
qu'il est éloquent Orateur,
pource qu'ildédaigne
l'usance commune de
parler: or le Licentié
croyant que l'étonnement
Se ébahissement dePentagruel
venoit pour admirer
la haute beauté de cette
élocution, se reguinda encore
plus haut &: plus obleur,
si que par longueur
de periodes,poussa patience
à bout. Parbleu, dità
part-foi Pentagruel,je tapprendrai
quelle est vraie Se
naturelle éloquence ;puis
demadaauLicêciédequel
païs il étoit, à quoy répond
ainsi le Licencié.L'illustre
&honoriferantepropagation
demesaves&ataves, tire
son origine primordiale des
Régions Limosiniennes.J'entens
bien, dit Pentagruel,
tu n'es qu'un Limosin de
Limoge, & tu veux faire
5 le Demosthenes de Grece;
Or viens-cà que je te donne
un tour de peigne, lors
le prit à la gorge,disant :
tu écorches le Latin, moy
j'écorcheray le latiniseur,
si fort lui serroit la gorge
que le pauvre Limosin
commence à crier en Limosin,
vée Dicou Gentil.
latre : Hosaint Marsau !
secourami,bau,bau, laisias k
qu'ou AU nom de Dtous
y
dm
ne me tou cas grou.Ah5 dit
Pentagruel en le laissant ;
voila comment je te voulois
remettre en droit chemin
de vraye éloquence;
car à cette, heure viens-tu
de p, rler comme nature,
&, grand biente fasse icelle.
corrp&ion,-v.
Quoique je trouve
dans; cette;idéeune e fpece
de sublime, je ne
le. compareraipas sans
doute,à ce sublime
d'Homere, dans son
Vingtième Livre,oùil
Ïaicporter ainsiJupiter fàcNrëeibptluéendee4s'aDniseTuxA/tsembléedesDieux,
- '.i! r
Je vaisdonc m'asseoir
sur le sommet de l'Olimpe,
ôcregarder le combat :
mais pour vous autres vous
pouvez descendre,& prendre
ouvertement le party
deceux quevous favorilez,
car si Achille attaque
seullesTroyens,ils ne le
soûtiendront pas un moment
:comment le soû-
,tiendroient-ils aujourd'hui
qu'il est armé ,ôc que là
valeur est encoreaiguisée
par la douleur qu'il a de
la
mort de son amy J
qu'-
hier le voyant mêmesans
armes, ils furent remplis
/deterreur^,ôc..,
- E.î:n(.fuiteHomr ere fait
descendre les Dieux de
YOUmpC) qui animant
les troupes des deuxpartisye.
ng,agIentldfbataille, &se mêlenteux-mêmes
days le combat.
En cet endroit -je
quitte lebadinage par
respect, non pour la reputationseule
d'Homere,
mais pour la grandeur,
la majesté&l'élévation
de sa PoëGe;
quel genie! Se avec
quel art inceresse-t-il
icileCiel, la terre &
toute la nature au grad
fpe&acle qu'ilvanous
donner?il nous forceà
nousy interesser nousmêmes;&
voilal'effet
dusublime.
Pédantcecombat,continué
Homere, le Souverainmaître
des Dieux
tonne du haut duCiel,
'& Neptune élevant ses
flots ébranle laterre,
lescimes du Mont Ida
tremblent jusques dans
leurs
leursfondemens,Troye,
le champ de bataille&
les vaisseaux sontagitez.
par des secousses
violentes,le Roy; des
Enfers, épouvanté au
fond de son Palais, s'élance
de son Trône, &
s'écrie de toute sa force
dans la frayeur où il
est, que Neptune, d'un
coup de son Trident,
n'entrouvre laTerre
qui couvre les ombres,
&, qiie cet affreux séjour,
demeure éternelle
des tenebres & de la
mort, abhorré des Hommes8£
craint même des
Dieux,nereçoive pour
la premiere fois la lumiere,&
ne paroisse à
découvert, si grand eil
le bruit que font ces
Dieux, qui marchent
trleess/unsilco'rn*tre les au- ab-quor
Apollon armé detous
ses traits, attaque Neptune
; Minerves'oppose
à Mars, Diane
marche contre Junon,
mais Achille n'en
veut qu'à Hector, il le
cherche dans la mêlée,
impatient de verser le
fang deceHeros,sous
les yeux même du Dieu
Mars qui le protege.
Voila du beau, du
grand, il se fait sentir
par luy-même, il n'a
pasbesoin de Cõmentaire,
comme mille autres
endroits des anciens
Autheurs, qui ne
sont beaux qu'à proportion
de la creduliré
de ceux qui veulent
bien se prester aux. décisionsdes
Commentateurs.
Comparonsàpresent
., deux tableaux de nos
deux Autheurs sur le
même sujet, ils veulent
runU. l'autre representer
unetempeste..
,
Tout ~~p~
en peinture, en mufiqne,
En prose comme en vers.
sérieux ou comique,
Tempeste de Rubens;.
tempefle de Rablais,
jMrwe du grand Poëte
tragique*.
L'on pourroit comparer
la tempeste heroïque,.
Ala tempeste de Ma, -rais.
Ces vers sepeuvent chanter fit- PairdeJoconde.
TEMPESTE
DE
RABELAIS.
EN. nôtre nauf étions
avec Pentagruel le bon,
joyeusementtranquiles,&
étoit la mer tranquillement
triste; car Neptune
en son naturel est melancolique
& fonge-creux
pource qu'il est plus flegmatique
que sanguin.
Bonasse traîtreuse nous
invitoit à molle oisiveté
>1
ôc oisiveté nous invitoit à
boire,or à boisson vineuse
mêlions saucisses,boutargue
& jambons outrement
salez,pour plus vcu
luptueufement faire sentir,
& contraster suavité
nectarine ,douce non
comme,mais plus que lait.
O que feriez mieux, nous
cria le pilote au lieu d'icelles
salinesmangerviandes
douces,pource qu'incontinent
ne boirez peutêtreque
trop salé ; ce que
disoitlepilote par pronom
c::1:
stication; car pilotes ainsi
que chats en goutieres,
fleurent par instincpluyes
& orages.
Et de fait le beau
clair jour qui luisoit perdant
peu à peu sa transparence,
lumineuse
,
devint
d'abord comme entre
chien & loup,puis brun,
obscur, puis presquenoir,
puis si noir,si noir que
fumes saisis de mal peur;
* car autrelumiere n'éclaira
plus nos faces blêmes
&effrayées, que lueurs
d'éclairsfulminantspar
'Tecrevements
de flambantes
nuées, avec millions
de tonnerres tonigrondants
sur tous les tons
&intonations des orgues
de Jupin, les pedales ,
pou, dou ,dou
,
dou3
icy cromornes,Ton, ron,
ron ) ron &C cla
,
cla y
cla
,
clacla
,
misericorde
, crioit Panurge; détournez
l'orage, Tonnez
les cloches, mais cloches
ne sonnerent ,car en
avoit pour lors: voilà
tout en feu, voilà tout en
eau, bourasques de vents,
fiflemens horrifiques, ce1
la fait trois élements
dont de chacun , trop a-
Ivioiis n'y avoit que terre
qui nous manquoit,si
non pourtant que fondrieres
marines furent si
profondes,qu'en fin fond
d'abîmes ouverts eût-on
pu voir,harangs sur sable
-&C moruës engravées, or
'-du fio,nd d'iceuxabysmes r
vagues montoient aux
nuës
,
& d'icelles nûës.
fc precipitoient comme
torrents , montagnes
d'eau, foy disant vagues,
desquelles aucunes
tombant sur la nauf, Panurge
, qui de frayeur
extravaguoit, disoit ho
ho ho, quelle pluye estce
cy 5 vit-on jamais
pleuvoir vagues toutes
brandies: helas,helas
be be be be, , je nage, bou
bou bou bou, ha maudit
cordonnier, mes souliers
prennent l'eau par
le colet de mon pourpoint.
Ha que cette boit:
son est amere ! hala,
hola
,
je n'ay plus soif.
Te tairas - tu ?
crioit
Frere Jean, & viens
plustost nous aider à
manouvrer ,
où sont
nos boulingues
,
noftrc
trinquet est avau l'eau,
amis à ces rambades
Enfans, n'abandonnons,
le tirados, à moy, à moy.
Par icy, par la haut ,
par là bas.
Viens donc, Pcanurge,
viens, ventre de solles,
viens donc. Hé! ne jurons
point, disoit piteusement
Panurge, ne ju.
rons aujourd'huy, mais
demain tant que tu voudras
,
il est maintenant
heure de faire voeux,Se
promettre pelerinages :
ha ha
,
ha ha, ho ho
ho , ho, je nage, bou bi,
bou bous, sommes-nous
au fond? Ah je me
meurs! mais viens donc
icy nous aider, crioit
Frere Jean, au lieu de
moribonder,met la main
à l'estaransol
, gare la
pane, hau amure, amure
bas , peste soit du
pleurard qui nous est
nuisible au lieu de nous
aider. Ha! oüy oüy oüy,
reprenoit Panurge,vous
fuis nuisible
, mettezmoy
donc à terre afin
que puissiez à l'aise manouvrer
tout vostre soul-
Or icelle tempeste
ou tourmente, ou tourmentante
,comme voudrez
, commença à prendre
fin à force de durer,
comme toutes choses
mondaines: terre, terre,
cria le Pilote,& jugez
bien quelle jubilation
senfUlVlt
, a quoy prit
la plus forte part le
craintif Panurge, qui
defeendant le premier
sur l'arene,disoit,ôtrois
& quatre fois heureux.
Jardinier qui plante
choux, car au moins a-til
un pied sur terre, &
l'autre n'en est esloigné
que d'un fer de besche.
Or remettons tempeste
d'Homere à la pro- „ chaine mercuriale ainsi
que plusieurs autres bribes
des deux Autheurs
que nous paralelliferons
par maniere de passetemps
Rabelaisien, & -
non dogmatiquement ,
chose que- trop repeter
ne puis ; car pires sourds
n'y a que ceux qui ne
veulent point entendre.
SUITE DV PARALLELE
d'Homere&de Rabelais.
*
J'Ay cru que rien ne
rendroit ce Parallele
plus amusantque d'y
mêler de petits contes,
dontle fond estdeRabelais;
mais que j'ai accommodez
de maniere
à pouvoir être lûs des
Dames,& à moins ennuyer
ceux qui ne sont
point afeZj erudits &
"affedwnnez^ Pentagruelistes,
poursavourer,
mâcher&remâcherjusqu'aux
moindres roga-*
tons, & avaler à longs
traits sa -desfuavitezRabelaisiennes
en faveur de
quelques grains de gros
sel,semez par ci par là,
ez., salmigondis & pots
pouris de Maître François.
Pour assortir, ou plûtôrpour
opposer à ces
contes, en trouverai
bien encor quelqu'un
dans Homere, mais je
respecte trop son grand
nom, pour oser rien
mettre du mien dans
ses ouvrages; à peine
ai-je osé retrancher une
bonne moitié du conte
du Cyclope, afin de
rendre l'autre moins
ennuyeuse.
: Pour oposer au grand
& au sublime du Poëte
grec, on trouvera
peut-être dans Maître
François quelques endroits
assez solides pour
faire avouer que Rabelais
cût mieux réussi
dans le sérieux, qu'Homere
n'a réussi dans le
comique, & de là je
prendrai occasion d'avancer
quelques propositions
qui seroient
hardies, téméraires,ridicules
même si on les
avançoit sérieusement,
& dont je n'ose prouver
laveritéqu'en plaisantant;
je les proposeray
donc d'abord
comme des Paradoxes
badins ; tcbadinageaT
cela de bon qu'il peut
éclaircir certaines veritez
qu'une dispute serieuse
ne seroit qu'obscurcirjlcbadinageaencore
cet avanta ge sur la
dispute, qu'au lieud'attirerla*
colere des difputcurs
graves, il n'en
attire qu'un fîlencedédaigneux
, & c'es en
être quitte à bon marché
j car la force des raisonnemens
ne fait que
les irriter au lieu de les
convaincre.
La prévention s'irrite
par la resistance, cest un
animal feroce qu'Homere
eut comparé àun
Taureau furieux
J
qui
parcourant les njaftes
campa?nes de la Lybie,
d'autre but dans sa
fureur que de heurtertête
baiJJie) & de renverser
IÙS plus fortsanimaux
qui oseront l'attaquer
de front.
C'est ainsi que dans
les vastes ambiguitez
dela dispure,les plus
fortes raisons ne tiennent
point contre la
prévention.
Comparons à present
le badinage à l'Abeille
legere, qui voltige en
folâtrant autour de ce
Taureau furieux; elle
badine en fureté entre
ses cornes, lepique legerement,
il ne fait que
secoücr l'oreille,autre
coup d'aiguillon qu'il
méprise, il ne voit point
d'ennemy, cependant
la mouche le pique, ses
piquûres sontlegeres:
maisc11es sontréïterées,
la mouc he se porte avec
agilité par tous les endroits
sensibles, les piqueures
redoublent,il
commence à s'irriter,
se ne voyant à qui s'en
prendre, il tourne sa
colerecontrelui- même,
il s'agite,ilse mord,il
se tourmente, &enfin
il s'épuise,s'affoiblit&
tombe. Procumbithumi
Bos.
Nôtre comparaison
nous a fortéloignez de
nostresujet:tant mieux,
elle n'en est que plus
Homerienne,s'il y a
quelque chose de faux
dans l'application, tant
mieux encore. Homere
est un modele qu'il faut
imiter : ses comparaisons
sont longues, fausses
& semblables les
unes aux autres, il n'importe;
c'est toûjours le
second &C le parfait
Homere.
Les comparaisons de
Rabelais sont plus variées,
plus justes,mais
elles ne sont pas
moins allongées, & la
plûpart sont si basses,
qu'àcet égard ilfaut
bien pour l'honneur du
goût donner la préferenceau
Prince des
Poëtes.
Avantcettedigression
j'ay promis,à propos
d'Homere & de Rabelais
, d'avancer pour rire
quelques proportions
étonnantes, le
premier de ces Paradoxes
c'est :
Qu'il faut pins d'étendue
d'esprit & peutcireplus
d'élévationpour
exceller dans le beau comique
, qu'il n'en faut
pour réussir dansle serieux.
Cette proposition va
révolter d'abord ceux
qui prévenus par refpcâ
pour tout ce qui
a l'air sérieux:
admirent en baillant
un ennuyeux tragique,
Et riant d'une Jjlgne's,
méprisentlecomique.
Le
Le second Paradoxe,
e'est. Que les plus excellentes
piecesserieuses
font mêlées d'excellent
comique
, & par consesquent
qu'un Authtur ne
peut excellerdans lesérieuxy
s'iln'a du talent
pour le comique.r
On trouveroitdans
tous; les siecles, 8cmême
dans lenôtrçxque
les plus grands genies
ont mêlé du winique,
dans leurs ouvrages SC
dans leurs discours,&
les genies mediocres
dérogent même quelquefois
aux prérogatives
de leur gravité,
pour hazarder d'être
plaisans; j'en ai vû s'arrêter
tout court, par
vanité, s'appercevant
qu'ils plaisantoient de
mauvaise grace, & se
déchaîner le moment
d'après contre le meilleur
genre de plaisanterie.
-
Toi qui debite gravement
Tafademédisance,
Caustique par tempec.
ramment,
Serieuxparprudence,
Tumtprifes d'un hon
r, plaisant
La comique élegance,
Comme un gouteux foi- ble&pesant
Mépriseroit la danse.
Les Vers ci-dejjus peuvent Je
chanter sur l'AirdeJÓconde.
Avantque d'avancer
mon troisiéme Paradoxe
,
il faudroit avoir
bien défini le mot de
comique, & celui de subhme
y &C aprés celà
même il seroitpeut-être
encor ridicule de
dire:Quenon-seulement
lè Jubltmerieft pas incompatibleavec<
li\comiqu^
ymais,qmlpssd-J
avoir dans certain comiquedestraitssuperieurs
ausublimeserieux. Voila
unepropositionétonnante,
par rapport à l'idée
qu'on a du sublimc,
que je définirois
volontiers, laperfection
dans le grand : mais on
peut en donner encor
d'autres définitions,&
c'est ce qui nous meneroit
trop loin, il faudroit
trop1 de temps
pourdonneràces trois
Paradoxes toutes les ex*
plications& modifications
qui pourroient
les rendre sérieusement
vrayes > c'est ce que
j'entreprendrai peutêtre
quelque jour,sij'ai
le loisir de mettre en
oeuvre les reflexions
que j'ai faites sur les
fesses idées qu'on a du
sublime, du sérieux &
du comique; contentons-
nous ici de badiner
sur nôtre dernier Paradoxe,
qui nous donnera
occasion de comparer
quelques mor-*
ceaux des deux Autheurs,
dont jecontinuë
le Parallele.
Pour parler selon les
idées communes, disons
: que le comique
nest point sublimepar
lui-mesme
,
mais qu'il
peut renfermer des sens
& des veritez sublimes,
& c'est pour sçavoir
renfermer ces grandes
veritez dans le comique,
qu'il faut un genie
tres étendu.
Ilenfaut moins,par
exemple, pour soûtenirune
morale sublime
par des expressions
fortes & nobles, qui lui
font propres, que pour
la traitter comiquement,
sansl'affoiblir,
&:. sans la dégrader.
Il est'vray que le genre
serieux est plus grand
par luy-même que le
sgaennsre comique, iltient
doute le premier
rang, mais il n'y a point.
au
au Parnasse de ceremonial
qui donne le pas a un Autheur sérieux
surun comique. Ilest
plus grand parexemple,
de traitter la guerre
de Troye ,causée
par lenlevement d'une
Princesse, que la guerre
causéepar l'enlevement
d'un Seau, La
sequi à rapita,mais cette
grandeur est dans le
sujet, & non dans TAutheur
qui le traitte.,8c
celui qui daps le Poème
del'enlevement d'un
Seau, feroit entrer les
idées les plushéroïques
, feroit sansdoute
un plus grand genie"
que celui à qui la grandeur
du sujet fournit
naturellement de grandes
idées.
On ne peut pas soûtenirqu'ily
ait quantité
de hautes idées renfermées
dans le comique
de Rabelais, mais
on prouveroit peut- être
qu'Homere doit une
bonne partie deson sublime
à la grandeurde
son sujet.; ?;!> JU ;
.,' La bassesse des sujets
que Rabelais à traitez
auroit sait tomber son
ouvrage,s'iln'avoit pas étésoustenu par: des
partiesexcellentes;
L'élévation Se lrrraportance
du sujet de
rmiadercûcsoustenuë
qu^îidniémeil yauroit
eu moins de beautez
quon,ny en trouve.
Nous voyons clairementpar
la connolt:
sance dusiecle où Rabelais
avescu, que la
plûpart de ses expressiós
fortes&naïves lui font
propres a lui seul.
Mais les sçavans sans
prévention avouent
-qu:on- neconnoist pas
assez le siecle d'Homere
pour sçavoirenquoi
il dl original:ceuxqui
connoissent le genie
oriental croiront plustost
que ses expressions
nobles& figurées, que
ses comparaisons magnifiques,&
mesme la
pluspart de sesideés
Poëtiques pouvoient
estreaussi communes
aux Grecsde son temps
que les proverbes sensez
le sont à Paris parmi
le peu ple.
Al'égard du sublime
de Rabelais, il faut convenir
qu'il est bien malâisé
de l'appercevoirà
travers le bascomique,
dont il est offusqué, il
dit en parlant de la
Loy comrnentée & embrouillée
par nos Juris-
Confulres
, que c'est
une belle robe à fondd'or
brodée de crote
: j'en dirois
autant de son sublime
,
qu'on me passe
ce mot en attendant
la définition : Mais appellez
comme il vous
plaira l'idée qu'il donne.
de la vraye & naturelle
Eloquence, par la décision
de Pcntagruel
sur le verbiage du li-,
centié, il paroit qu'elle
fit excellente: en voici
l'idée en abbregé.
LAVRAYE ELOQUENCE.
1 uN jour Penragruel
rencontra certainLice-nti.é,,
non autrement sçavant es;
sciences de son métier de
Docteur:mais en recompense
sçachant tres-foncicierement
danser & joüer
à la paume,lequel donc
rencontrépar Pentagruel,
fut interrogé d'où il venoit
5
& luy répondit,je
liens de l'urbe&citécelebrisjimt
quevulgairement onvocite
Lutece.Qu'est-ce à dire,
dit Pentagruel
,
à son truchementordinaire?
je suis
tout ebahi de tel jargon.
C'efc, répond letruchemenrjqu'il
vient de Paris:
Hé,reprit Pentagruel,.
à quoy passez-vous le
temps à Paris vous autres
licentiez^Nflw^repondit le
Licentié
, en nos occupations
dit: Quel diable de langa
ge est-cecy ? Ce nest que latinécorché, dit le Truchement,
& luy semble
qu'il est éloquent Orateur,
pource qu'ildédaigne
l'usance commune de
parler: or le Licentié
croyant que l'étonnement
Se ébahissement dePentagruel
venoit pour admirer
la haute beauté de cette
élocution, se reguinda encore
plus haut &: plus obleur,
si que par longueur
de periodes,poussa patience
à bout. Parbleu, dità
part-foi Pentagruel,je tapprendrai
quelle est vraie Se
naturelle éloquence ;puis
demadaauLicêciédequel
païs il étoit, à quoy répond
ainsi le Licencié.L'illustre
&honoriferantepropagation
demesaves&ataves, tire
son origine primordiale des
Régions Limosiniennes.J'entens
bien, dit Pentagruel,
tu n'es qu'un Limosin de
Limoge, & tu veux faire
5 le Demosthenes de Grece;
Or viens-cà que je te donne
un tour de peigne, lors
le prit à la gorge,disant :
tu écorches le Latin, moy
j'écorcheray le latiniseur,
si fort lui serroit la gorge
que le pauvre Limosin
commence à crier en Limosin,
vée Dicou Gentil.
latre : Hosaint Marsau !
secourami,bau,bau, laisias k
qu'ou AU nom de Dtous
y
dm
ne me tou cas grou.Ah5 dit
Pentagruel en le laissant ;
voila comment je te voulois
remettre en droit chemin
de vraye éloquence;
car à cette, heure viens-tu
de p, rler comme nature,
&, grand biente fasse icelle.
corrp&ion,-v.
Quoique je trouve
dans; cette;idéeune e fpece
de sublime, je ne
le. compareraipas sans
doute,à ce sublime
d'Homere, dans son
Vingtième Livre,oùil
Ïaicporter ainsiJupiter fàcNrëeibptluéendee4s'aDniseTuxA/tsembléedesDieux,
- '.i! r
Je vaisdonc m'asseoir
sur le sommet de l'Olimpe,
ôcregarder le combat :
mais pour vous autres vous
pouvez descendre,& prendre
ouvertement le party
deceux quevous favorilez,
car si Achille attaque
seullesTroyens,ils ne le
soûtiendront pas un moment
:comment le soû-
,tiendroient-ils aujourd'hui
qu'il est armé ,ôc que là
valeur est encoreaiguisée
par la douleur qu'il a de
la
mort de son amy J
qu'-
hier le voyant mêmesans
armes, ils furent remplis
/deterreur^,ôc..,
- E.î:n(.fuiteHomr ere fait
descendre les Dieux de
YOUmpC) qui animant
les troupes des deuxpartisye.
ng,agIentldfbataille, &se mêlenteux-mêmes
days le combat.
En cet endroit -je
quitte lebadinage par
respect, non pour la reputationseule
d'Homere,
mais pour la grandeur,
la majesté&l'élévation
de sa PoëGe;
quel genie! Se avec
quel art inceresse-t-il
icileCiel, la terre &
toute la nature au grad
fpe&acle qu'ilvanous
donner?il nous forceà
nousy interesser nousmêmes;&
voilal'effet
dusublime.
Pédantcecombat,continué
Homere, le Souverainmaître
des Dieux
tonne du haut duCiel,
'& Neptune élevant ses
flots ébranle laterre,
lescimes du Mont Ida
tremblent jusques dans
leurs
leursfondemens,Troye,
le champ de bataille&
les vaisseaux sontagitez.
par des secousses
violentes,le Roy; des
Enfers, épouvanté au
fond de son Palais, s'élance
de son Trône, &
s'écrie de toute sa force
dans la frayeur où il
est, que Neptune, d'un
coup de son Trident,
n'entrouvre laTerre
qui couvre les ombres,
&, qiie cet affreux séjour,
demeure éternelle
des tenebres & de la
mort, abhorré des Hommes8£
craint même des
Dieux,nereçoive pour
la premiere fois la lumiere,&
ne paroisse à
découvert, si grand eil
le bruit que font ces
Dieux, qui marchent
trleess/unsilco'rn*tre les au- ab-quor
Apollon armé detous
ses traits, attaque Neptune
; Minerves'oppose
à Mars, Diane
marche contre Junon,
mais Achille n'en
veut qu'à Hector, il le
cherche dans la mêlée,
impatient de verser le
fang deceHeros,sous
les yeux même du Dieu
Mars qui le protege.
Voila du beau, du
grand, il se fait sentir
par luy-même, il n'a
pasbesoin de Cõmentaire,
comme mille autres
endroits des anciens
Autheurs, qui ne
sont beaux qu'à proportion
de la creduliré
de ceux qui veulent
bien se prester aux. décisionsdes
Commentateurs.
Comparonsàpresent
., deux tableaux de nos
deux Autheurs sur le
même sujet, ils veulent
runU. l'autre representer
unetempeste..
,
Tout ~~p~
en peinture, en mufiqne,
En prose comme en vers.
sérieux ou comique,
Tempeste de Rubens;.
tempefle de Rablais,
jMrwe du grand Poëte
tragique*.
L'on pourroit comparer
la tempeste heroïque,.
Ala tempeste de Ma, -rais.
Ces vers sepeuvent chanter fit- PairdeJoconde.
TEMPESTE
DE
RABELAIS.
EN. nôtre nauf étions
avec Pentagruel le bon,
joyeusementtranquiles,&
étoit la mer tranquillement
triste; car Neptune
en son naturel est melancolique
& fonge-creux
pource qu'il est plus flegmatique
que sanguin.
Bonasse traîtreuse nous
invitoit à molle oisiveté
>1
ôc oisiveté nous invitoit à
boire,or à boisson vineuse
mêlions saucisses,boutargue
& jambons outrement
salez,pour plus vcu
luptueufement faire sentir,
& contraster suavité
nectarine ,douce non
comme,mais plus que lait.
O que feriez mieux, nous
cria le pilote au lieu d'icelles
salinesmangerviandes
douces,pource qu'incontinent
ne boirez peutêtreque
trop salé ; ce que
disoitlepilote par pronom
c::1:
stication; car pilotes ainsi
que chats en goutieres,
fleurent par instincpluyes
& orages.
Et de fait le beau
clair jour qui luisoit perdant
peu à peu sa transparence,
lumineuse
,
devint
d'abord comme entre
chien & loup,puis brun,
obscur, puis presquenoir,
puis si noir,si noir que
fumes saisis de mal peur;
* car autrelumiere n'éclaira
plus nos faces blêmes
&effrayées, que lueurs
d'éclairsfulminantspar
'Tecrevements
de flambantes
nuées, avec millions
de tonnerres tonigrondants
sur tous les tons
&intonations des orgues
de Jupin, les pedales ,
pou, dou ,dou
,
dou3
icy cromornes,Ton, ron,
ron ) ron &C cla
,
cla y
cla
,
clacla
,
misericorde
, crioit Panurge; détournez
l'orage, Tonnez
les cloches, mais cloches
ne sonnerent ,car en
avoit pour lors: voilà
tout en feu, voilà tout en
eau, bourasques de vents,
fiflemens horrifiques, ce1
la fait trois élements
dont de chacun , trop a-
Ivioiis n'y avoit que terre
qui nous manquoit,si
non pourtant que fondrieres
marines furent si
profondes,qu'en fin fond
d'abîmes ouverts eût-on
pu voir,harangs sur sable
-&C moruës engravées, or
'-du fio,nd d'iceuxabysmes r
vagues montoient aux
nuës
,
& d'icelles nûës.
fc precipitoient comme
torrents , montagnes
d'eau, foy disant vagues,
desquelles aucunes
tombant sur la nauf, Panurge
, qui de frayeur
extravaguoit, disoit ho
ho ho, quelle pluye estce
cy 5 vit-on jamais
pleuvoir vagues toutes
brandies: helas,helas
be be be be, , je nage, bou
bou bou bou, ha maudit
cordonnier, mes souliers
prennent l'eau par
le colet de mon pourpoint.
Ha que cette boit:
son est amere ! hala,
hola
,
je n'ay plus soif.
Te tairas - tu ?
crioit
Frere Jean, & viens
plustost nous aider à
manouvrer ,
où sont
nos boulingues
,
noftrc
trinquet est avau l'eau,
amis à ces rambades
Enfans, n'abandonnons,
le tirados, à moy, à moy.
Par icy, par la haut ,
par là bas.
Viens donc, Pcanurge,
viens, ventre de solles,
viens donc. Hé! ne jurons
point, disoit piteusement
Panurge, ne ju.
rons aujourd'huy, mais
demain tant que tu voudras
,
il est maintenant
heure de faire voeux,Se
promettre pelerinages :
ha ha
,
ha ha, ho ho
ho , ho, je nage, bou bi,
bou bous, sommes-nous
au fond? Ah je me
meurs! mais viens donc
icy nous aider, crioit
Frere Jean, au lieu de
moribonder,met la main
à l'estaransol
, gare la
pane, hau amure, amure
bas , peste soit du
pleurard qui nous est
nuisible au lieu de nous
aider. Ha! oüy oüy oüy,
reprenoit Panurge,vous
fuis nuisible
, mettezmoy
donc à terre afin
que puissiez à l'aise manouvrer
tout vostre soul-
Or icelle tempeste
ou tourmente, ou tourmentante
,comme voudrez
, commença à prendre
fin à force de durer,
comme toutes choses
mondaines: terre, terre,
cria le Pilote,& jugez
bien quelle jubilation
senfUlVlt
, a quoy prit
la plus forte part le
craintif Panurge, qui
defeendant le premier
sur l'arene,disoit,ôtrois
& quatre fois heureux.
Jardinier qui plante
choux, car au moins a-til
un pied sur terre, &
l'autre n'en est esloigné
que d'un fer de besche.
Or remettons tempeste
d'Homere à la pro- „ chaine mercuriale ainsi
que plusieurs autres bribes
des deux Autheurs
que nous paralelliferons
par maniere de passetemps
Rabelaisien, & -
non dogmatiquement ,
chose que- trop repeter
ne puis ; car pires sourds
n'y a que ceux qui ne
veulent point entendre.
Fermer
Résumé : ARTICLE BURLESQUE. SUITE DU PARALLELE d'Homere & de Rabelais.
L'article compare les œuvres d'Homère et de Rabelais, en soulignant les différences de style et de réception. L'auteur décide de rendre les contes de Rabelais plus accessibles et moins ennuyeux, notamment en retranchant une partie du conte du Cyclope d'Homère pour le rendre moins ennuyeux. Il propose plusieurs paradoxes, comme l'idée que le comique nécessite plus d'étendue d'esprit que le sérieux, et que les œuvres sérieuses excellentes contiennent du comique. L'auteur utilise une métaphore pour comparer la prévention à un taureau furieux et le badinage à une abeille légère qui le pique sans le blesser gravement. Il discute de la difficulté de percevoir le sublime dans les œuvres de Rabelais en raison de leur comique bas. Il cite un exemple de la vraie éloquence dans 'Pantagruel' et le compare à un passage sublime de l'Iliade. Le texte compare également deux descriptions de tempêtes, mettant en avant la tempête de Rubens, celle de Rabelais et la tempête héroïque d'Homère. Il décrit en détail la tempête narrée par Rabelais dans 'Pantagruel'. Cette tempête commence par une mer tranquille et mélancolique, puis se transforme en un chaos de vents, d'éclairs et de vagues monumentales. Les personnages, notamment Panurge et Frère Jean, réagissent avec peur et désespoir, mais aussi avec des tentatives de manœuvre pour sauver le navire. La tempête finit par s'apaiser, apportant un soulagement général, surtout à Panurge, qui exprime sa joie d'avoir enfin un pied sur terre. L'auteur admire la grandeur et la majesté de la poésie d'Homère, qui parvient à impliquer le ciel, la terre et toute la nature dans ses descriptions. Il conclut en quittant le badinage par respect pour Homère. Le texte mentionne la comparaison des tempêtes des deux auteurs comme un passe-temps, sans intention dogmatique.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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16
p. 60-71
LA FAUSSE VALEUR. Par M. l'Abbé Mommenet. Ode qui vient de remporter le prix de Poësie des Jeux Floraux. Quis pacis inennt consilia, cos sequitur gaudium. Prov. 12.
Début :
Princes, qu'une gloire frivole [...]
Mots clefs :
Gloire, Combat, Vertus, Héros, Passions, Désir, Valeurs, Tyran, Honneur
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texteReconnaissance textuelle : LA FAUSSE VALEUR. Par M. l'Abbé Mommenet. Ode qui vient de remporter le prix de Poësie des Jeux Floraux. Quis pacis inennt consilia, cos sequitur gaudium. Prov. 12.
LA FAUSSE VALEUR
Par M. l'Abbé Mommenet.
Ole qui vient de remporter le prix .
de Poelie des Jeux Floraux.
Quipacis ineunt confilia , eos fequi--
tar gaudium: Prov. 12.
PRinces , qu'une gloire
frivole
Anime à chercher les combats ,
Qu'attendez-vous de cette:
Idole ,
Qu'un vain nom aprés le
trépas ?
GALANT.
Ignorez - vous quelles mi
feres
Mars &Bellone fanguinaires
Traînent aprés leurs chars
poudreux ?
Queje vous plains , fi la na
{ sture: V
N'excite en vous aucun
murmure ,
Quand vousfaites des mal
heureux !
#?
Loin du bruit des combats
terribles
Vigilans , au fein du repos ,
Cultivez les vertus paifibles,
62 MERCURE
Elles forment les vraisHe
ros.
Pourquoy faut-il que vôtré
épée
Dans le fang humain ſoit
trempée ,
.
Pour porter le nom de
vainqueur ?
Serez-vous moins couverts
de gloire ,
Si vous remportez la vićtoire
Sur les defirs de vôtre cœur?
Dequel droit ce Grec qu'on
admire.
Enyvré de fes paffions ,
GALANT.
Alla til defoler l'Empire
Des plus tranquilles nations?
Aprés cent combats homil
cides ,
Au gré de ſes defirs avides
C'étoit peu qu'un monde
foûmisdo
Auroit - il manqué d'exercice ,
S'il avoit fçû compter le
vice e
Au nombre de fes ennemis?
Malgré les trompeuſes ma-
.ximes
64 MERCURE
De cent lâches adulateurs ,
Sous de beaux noms les plus
grands crimes
Nous cachent des ufurpa
teurs.
Pleins de l'orgueil qui les
dévore ,
Du couchantjufques à l'aucomb orprore HeronA
On craint ces Rois ambiSortieux
-tieux.
Dans leurs mains gronde le
antonnerre ,
Ce n'eft qu'en ravageant la
terre
Qu'ils ofent s'en croire les
Dieux.
À
GALANT. 65
Adeux Tyrans de leur patrie ,
Soulez du plus beau fang
Romain,
Qui ne fçait que la flaterie
A prodigué le nom d'hu
main ?
Infenfez nous jugeons encore
De ces fantômes qu'elle a
doré
Par un faux éclat qui forz
prend.
Nous admirons fans retenue ,
LeTyran échape à la vûë¸,
May1712.
F.
66 MERCURE
On ne voit que le Conque
ranta
Ainfi de cette ardeur bru
tale
Que n'infpire point le devoir
Nôtreeftime aveugle &fatale
Accredite encor le pouvoir.
Al'afpect des villes enpou
dre ,
Des murs écrafez par la
foudre,
En vain nos yeux font of
frayez.
Victimes d'un honneur bis
zarre
GALANT 67
Nous encenfons la main
barbare
Par qui ces murs font fou
droyez.
Il en eft peu dont la pru
dence
De concertavec labonté
Renferme l'aveugle puif
fance
Dans les bornes de l'équi
τέ;
Qui forcez de prendre les
armes
Pefent & le sag &les larmes
Qu'un triomphe leur va
coûter,
Fij
68 MERCURE.
Et qui retenant leur cou-,
rage ;
Songent à diffiper Forage
Avant qu'onl'entende écla
ter.
Jadis guidé par la fageffe
Salomon, l'amour des mortels , rela
Condamna Forgüeilleufe
yvreffe el ens
A qui nous dreffons dés autels.
Sans s'armer d'un fer redoutable , T
Content de fon cœuréqui
cable,
GALANT. F69
Ses bienfaits étoient fes ex
ploits.
Il fut grand fans être terri↓
ble ,
Et ne ceffa d'être invincible.
Qu'en ceffant d'obferver less
loix.
N'eſt-il plus de ces regnes
calmes
Où les loix fervent de rem
parts?
Oùl'on n'aime à cueillir desi
palmes
Que dans la lice des beaux)
ihearts ; mid s
Qu le commerce & l'abon
dance ,
79 MERCURE
Sources de la magnificen
ce ,
Du citoyen comblent les
vœux ;..
Où la justice revérée
Semble encor du regne:
d'Aftréé
Renouveller le temps heu
reux.
Rends nous cette vie innocente ,
Douce paix , montre à ces
guerriers
Que ton olive bienfaifante
Vaut bien leurs funeftes
lauriers.
GALANT 70:
Fais de la main de ta rivale,
Tomber cette torche fa
tale "
Dont tant de cœurs font
embrafez.
Toy feule en defarmant fa
rage
Effaceras la trifte image f
De tous les maux qu'elle a
caufez....
Par M. l'Abbé Mommenet.
Ole qui vient de remporter le prix .
de Poelie des Jeux Floraux.
Quipacis ineunt confilia , eos fequi--
tar gaudium: Prov. 12.
PRinces , qu'une gloire
frivole
Anime à chercher les combats ,
Qu'attendez-vous de cette:
Idole ,
Qu'un vain nom aprés le
trépas ?
GALANT.
Ignorez - vous quelles mi
feres
Mars &Bellone fanguinaires
Traînent aprés leurs chars
poudreux ?
Queje vous plains , fi la na
{ sture: V
N'excite en vous aucun
murmure ,
Quand vousfaites des mal
heureux !
#?
Loin du bruit des combats
terribles
Vigilans , au fein du repos ,
Cultivez les vertus paifibles,
62 MERCURE
Elles forment les vraisHe
ros.
Pourquoy faut-il que vôtré
épée
Dans le fang humain ſoit
trempée ,
.
Pour porter le nom de
vainqueur ?
Serez-vous moins couverts
de gloire ,
Si vous remportez la vićtoire
Sur les defirs de vôtre cœur?
Dequel droit ce Grec qu'on
admire.
Enyvré de fes paffions ,
GALANT.
Alla til defoler l'Empire
Des plus tranquilles nations?
Aprés cent combats homil
cides ,
Au gré de ſes defirs avides
C'étoit peu qu'un monde
foûmisdo
Auroit - il manqué d'exercice ,
S'il avoit fçû compter le
vice e
Au nombre de fes ennemis?
Malgré les trompeuſes ma-
.ximes
64 MERCURE
De cent lâches adulateurs ,
Sous de beaux noms les plus
grands crimes
Nous cachent des ufurpa
teurs.
Pleins de l'orgueil qui les
dévore ,
Du couchantjufques à l'aucomb orprore HeronA
On craint ces Rois ambiSortieux
-tieux.
Dans leurs mains gronde le
antonnerre ,
Ce n'eft qu'en ravageant la
terre
Qu'ils ofent s'en croire les
Dieux.
À
GALANT. 65
Adeux Tyrans de leur patrie ,
Soulez du plus beau fang
Romain,
Qui ne fçait que la flaterie
A prodigué le nom d'hu
main ?
Infenfez nous jugeons encore
De ces fantômes qu'elle a
doré
Par un faux éclat qui forz
prend.
Nous admirons fans retenue ,
LeTyran échape à la vûë¸,
May1712.
F.
66 MERCURE
On ne voit que le Conque
ranta
Ainfi de cette ardeur bru
tale
Que n'infpire point le devoir
Nôtreeftime aveugle &fatale
Accredite encor le pouvoir.
Al'afpect des villes enpou
dre ,
Des murs écrafez par la
foudre,
En vain nos yeux font of
frayez.
Victimes d'un honneur bis
zarre
GALANT 67
Nous encenfons la main
barbare
Par qui ces murs font fou
droyez.
Il en eft peu dont la pru
dence
De concertavec labonté
Renferme l'aveugle puif
fance
Dans les bornes de l'équi
τέ;
Qui forcez de prendre les
armes
Pefent & le sag &les larmes
Qu'un triomphe leur va
coûter,
Fij
68 MERCURE.
Et qui retenant leur cou-,
rage ;
Songent à diffiper Forage
Avant qu'onl'entende écla
ter.
Jadis guidé par la fageffe
Salomon, l'amour des mortels , rela
Condamna Forgüeilleufe
yvreffe el ens
A qui nous dreffons dés autels.
Sans s'armer d'un fer redoutable , T
Content de fon cœuréqui
cable,
GALANT. F69
Ses bienfaits étoient fes ex
ploits.
Il fut grand fans être terri↓
ble ,
Et ne ceffa d'être invincible.
Qu'en ceffant d'obferver less
loix.
N'eſt-il plus de ces regnes
calmes
Où les loix fervent de rem
parts?
Oùl'on n'aime à cueillir desi
palmes
Que dans la lice des beaux)
ihearts ; mid s
Qu le commerce & l'abon
dance ,
79 MERCURE
Sources de la magnificen
ce ,
Du citoyen comblent les
vœux ;..
Où la justice revérée
Semble encor du regne:
d'Aftréé
Renouveller le temps heu
reux.
Rends nous cette vie innocente ,
Douce paix , montre à ces
guerriers
Que ton olive bienfaifante
Vaut bien leurs funeftes
lauriers.
GALANT 70:
Fais de la main de ta rivale,
Tomber cette torche fa
tale "
Dont tant de cœurs font
embrafez.
Toy feule en defarmant fa
rage
Effaceras la trifte image f
De tous les maux qu'elle a
caufez....
Fermer
Résumé : LA FAUSSE VALEUR. Par M. l'Abbé Mommenet. Ode qui vient de remporter le prix de Poësie des Jeux Floraux. Quis pacis inennt consilia, cos sequitur gaudium. Prov. 12.
Le poème 'La fausse valeur' de l'Abbé Mommenet, lauréat du prix de Poésie des Jeux Floraux, critique la quête de gloire frivole à travers les combats et les guerres. Il met en garde contre les conséquences destructrices de ces conflits et souligne que les véritables héros cultivent des vertus pacifiques. Le texte dénonce les tyrans ambitieux qui cherchent à dominer par la force, cachant leurs crimes sous des apparences trompeuses. Il exalte la sagesse et la justice, illustrées par des figures historiques comme Salomon. Le poème appelle à une vie paisible et juste, où la paix et l'abondance prévalent sur les lauriers de la guerre. Il se termine par un appel à la paix, présentée comme supérieure aux triomphes militaires.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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17
p. 42-59
MONSIEUR LE DUC de Vendosme.
Début :
Louis Joseph Duc de Vendosme, Pair de France, Prince de [...]
Mots clefs :
Duc de Vendôme, Mort, Général, Apprentissage, Armée, Commandement, Espagne, Roi, Siège, Campagne, Combat, Valeur, Victoire, Héros
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MONSIEUR LE DUC de Vendosme.
Ona différé l'article de
la mort de Monsieur de Vendosme jtifcytes à ce mois
- cy
pour avoir les memoires fui..
vantsy ileustfallu le differer
trop long-temps pourrecevoirle
détail de toutes les belles agitons
qu'il a
faites.
MONSIEUR LE DUC
de Vendosme lLOU[S joseph Duc de
Vendosme,Pair de France,
Prince de Martigues,Chevalier des Ordres du Roy,
Grand Senechal & Gouverneur de la Provence,
General des Galeres, mourutàVinaros leII. dumois
de juin,âgé de cinquante
huitans, petit fils du plus
grand Roy qui ait veseu
avant Louis le Grand ,dû_'
quel il estoitune image
vivante par le trait de son
visage
,
plus encore par
ceux de son ameIl donna dès son enfance des marques de ses raresqualitez
,
qui dans les
Princes font au dessusdes
qualitez heroïques, deson
humanité affable, généreux, compatissant donnanttout &c.
Il s'appliqua dès sa plus
tendre jeunesse à ce grand
m'estier dont il s'est servy
depuis plusieurs fois si uti-
lement pourrestablir les
affaires dans tous les lieux
où il a
esté appelle.
Dés l'âge de dix-sept
ans, il fut à la teste d'un.
Regiment d'Infanterie,&
il servit avec la mesme assiduitéque s'il avoitesperé
delà sa fortune.
Il fit son chemin avec la
mesme lenteur d'un particulier, & passa par tousles
dégrez, ce qui le rendit un
si grand General.
Il fit son apprentissage
fous Monsieur de Turenne
,
qui à cet âge
-
là luy
donnoit mille marques de
saconfiance.
Il repoussales ennemis
ayant son seulRégiment,
au combat d'Althenem où
il fut grievement blessé.
Après la mort de Monsieur de Turenne, il eut
pour Maistre Monsieur le
Mareschal de Crequy
,
&
fit voir dans toutes forte4
d'occasions combien il avoitprofité des leçons de
ces deux grands Généraux.
Tous les temps de paix
ont esté signaléc par ses
magnificencesdans sa belle Maison d'Anet, où il
donnoit presque tous les
ans des sestes à Monseigneur le Dauphin qui l'honoroit d'une tendre ami-
"hé qui n'aefté ignorée de
perfonneJamais le Roy n'adonné
à personne de sa Cour
,
de si grandes marques de
sa confiance; & Sa Majesté le fie bien paroistre
par laLettre qu'Elle luy
fit l'honneur de luy escrire en rassemblant sur sa
telle le Generalat des Ga-
leresau Gouvernement de
Provence.
Il faudrait une histoire
commecelle de Mezerec, sil'onvouloirraconter toutes les astions particulières
qu'il afaites avant de commander en chef, en Allemagne fousMonseigneur,
& fous Messieurs les Mareschaux de Duras & de
Lorge; en Flandres fous
Monsieur de Luxemborg,
où toute l'armée vit avec
plaisir que le gain du combat de Steinkerque fut deu
à un avis qu'il avoit donné.
<
A la Marfaille Monsieur
le Mareschal de Catinat
publia que c'estoit Monsieur de Vendosme qui s'estoit avisé la veille de mettre la droite à la gauche,
&la gauche à la droite,
afin d'opposer par la la
Gendarmerie aux Cuirassiers de l'Empereur
,
& il
chargea le lendemain, &
fit des actions surprenantes à la teste de cette Gendarmerie.
Les commandements
dans la Vallée de BarceJonnette
,
à Nice, ôc en
Provence suffiroient pour faire l'éloge d'un autre,
mais voyonsle comman- der en chef.
Le Roy luy donne le
commandement de l'armée de Catalogne, il y
arrive, trouve nostre armée decouragée, nos Grenadiers tremblanrs devant
les Miquelets; son arrivée
restablit tout
,
&¡;en une
campagne;il fait lever le
siege de plusieurs places,
Palamos
,
Ostallery, Calcet- soüilles, &c.
Il bat un gros corps de
Cavalerie, commande par
le Prince d'Armée, & se
seroit mis en estac de faire
le siege de Barcelonne dès
cette campagne, si la Cour
n'avoit trouve à propos de
differer à la suivante.
Quelfut ce siege de Barcelonne! Une grandeVille
qui ne peut estre investiè
,
défendue par une garnison
au dedans qui estoit aussi
forte qu'unearmée, & et
tant assiege tuy.
-
mesme
au dehors par une armée
aussi forte que la sienne,
commandée par le Vice-
roy
,
il commence par le
battre, & le mettre entièrement en deroute; & aprés
cinquante deux jours de
tranchéeouverte
,
il se
rend maître de cette place.
Tout le monde se souvient
encore des aétions furprenances qui se passerent à ce
siege ; & c'est bien dommage que la paresse de
Monsieur Capiftron Tait
empefehéde lesescrire La
< prisede cette Ville fit faire
la paix de Rifwik.
L'affairede Cremonearrive,Monsieur deVendos-
me y vole, on tremiroit à
voir sur la Carte les pays
donc les Ennemis estoient
emparez
,
& dont il les
cbufTi depuisfaine Nazaro,
& de l'Etradel, jusques à
Goito au delà de Mancouë
que l'armée de l'Empereur
tenoit bloqué, & dont il fit
lever le blocus après avoir
pris chemin faisant cinq
ou six places ausquelles il
fallut ouvrir la tranchée, ilbattitcette même Campagne Vice-conty à la Victoria, & gagna fous les or- dres du Roy d'espagne la
fameuse bataille de Luzara.
La Campagne ensuite il
penetra jusqu'à Trente
aprèsavoir pris cinq ou six
Chasteaux qui paroissoient
im prenables par leur situation, & revient à la fin de
la Campagne, battre le
mesme Vice-conty à S.
Sebastien prés d'Alexandrie, laisse le commandement de l'armée dePiémont
à Monsieur le Grand Prieur
son frere, retourne à celle
deLombardie sur la Sequia,
d'où il partit pour suivre
1.
Nuremberg, & pendant
prés de quinze jours battre
tous les soirs fort arriere
garde, marche qui fut
égalertt£ri£glorieuse à la
respectable opiniatreté de
ses grands rivaux.
Que de Villes prises en
1704. Ivrée, Verceil
,
&:
toutes les places de Monsieur de Savoye
,
Veruë priseaucommencement
de 1705. & ce Prince réduit
au seul Turin.
Le Combat de Cassan
où sa seule valeur alla plusieursfois arracherJ^;vicr
toire dans les bataillons
des Ennemis.
Quelle ouverture pour
la Campagne de 1706. que
la glorieuseaffaire de Calsinat, il l'aprojette à Mantoüe, fait ses dispositions,
& profite de la rigueur de
l'hyverquile mettoit dans
l'impossibilité de les executer
,
pour venir faire sa
cour au Roy, qu'il n'avoit
eu l'honneur de voir depuis
quatre ans, & dont il ne
pouvoit plus vivre essoigné,
reçoit à Anet les applaudissements de toute la Fran-
ce ,qui l'y traita pendant
tous les six jours qu'ily fut
avec une magnificence qui
jusques là n'avoit point eu
d'exemple. Il part enfin de
ce sejour de delices pour
aller executer son dessein
sur Calsinat le mesme jour
qu'ill'avoit projette, &
Monsieur le Prince Eugene
y
arriva à
temps pour estre
le tesmoin de savictoire.
Il est rappelled'Italie
pour aller commander l'armée de Flandres après le
malheur de Ramilly. Il y
trouve le Generaldes En-
nemis enSe de ses prosperitez
,
& prometrant à son
armée de la mener à Paris;
il rabu si bien foi} audace,
que les soldats luy disoient
tout haut que Bruxelles
n'en estoit pas le chemin.
Sa valeur sur tousjours
la mesme, mais la victoire
l'abandonna à Oudenarde,
peut estre pour relever sa
gloire. On ne voir jamais
un Heros toutentier quand
on ne le voit que dans la
prosperité.
Tout ce qui s'est passé
en Espagne est si nouveau,
que je ferois tort d'en donner des Mémoires à celuy
qui prendra le foin d'escrire ce qu'il a
fait depuis son
dernier départ d'Anet jusqua sa mort. On travaille
à present au Journal exact
de cette suite de belles actions qui ont affermi la
Couronne du Roy d'Espagné, quand ce Journal serafaitj'en donnerai un extrait.
la mort de Monsieur de Vendosme jtifcytes à ce mois
- cy
pour avoir les memoires fui..
vantsy ileustfallu le differer
trop long-temps pourrecevoirle
détail de toutes les belles agitons
qu'il a
faites.
MONSIEUR LE DUC
de Vendosme lLOU[S joseph Duc de
Vendosme,Pair de France,
Prince de Martigues,Chevalier des Ordres du Roy,
Grand Senechal & Gouverneur de la Provence,
General des Galeres, mourutàVinaros leII. dumois
de juin,âgé de cinquante
huitans, petit fils du plus
grand Roy qui ait veseu
avant Louis le Grand ,dû_'
quel il estoitune image
vivante par le trait de son
visage
,
plus encore par
ceux de son ameIl donna dès son enfance des marques de ses raresqualitez
,
qui dans les
Princes font au dessusdes
qualitez heroïques, deson
humanité affable, généreux, compatissant donnanttout &c.
Il s'appliqua dès sa plus
tendre jeunesse à ce grand
m'estier dont il s'est servy
depuis plusieurs fois si uti-
lement pourrestablir les
affaires dans tous les lieux
où il a
esté appelle.
Dés l'âge de dix-sept
ans, il fut à la teste d'un.
Regiment d'Infanterie,&
il servit avec la mesme assiduitéque s'il avoitesperé
delà sa fortune.
Il fit son chemin avec la
mesme lenteur d'un particulier, & passa par tousles
dégrez, ce qui le rendit un
si grand General.
Il fit son apprentissage
fous Monsieur de Turenne
,
qui à cet âge
-
là luy
donnoit mille marques de
saconfiance.
Il repoussales ennemis
ayant son seulRégiment,
au combat d'Althenem où
il fut grievement blessé.
Après la mort de Monsieur de Turenne, il eut
pour Maistre Monsieur le
Mareschal de Crequy
,
&
fit voir dans toutes forte4
d'occasions combien il avoitprofité des leçons de
ces deux grands Généraux.
Tous les temps de paix
ont esté signaléc par ses
magnificencesdans sa belle Maison d'Anet, où il
donnoit presque tous les
ans des sestes à Monseigneur le Dauphin qui l'honoroit d'une tendre ami-
"hé qui n'aefté ignorée de
perfonneJamais le Roy n'adonné
à personne de sa Cour
,
de si grandes marques de
sa confiance; & Sa Majesté le fie bien paroistre
par laLettre qu'Elle luy
fit l'honneur de luy escrire en rassemblant sur sa
telle le Generalat des Ga-
leresau Gouvernement de
Provence.
Il faudrait une histoire
commecelle de Mezerec, sil'onvouloirraconter toutes les astions particulières
qu'il afaites avant de commander en chef, en Allemagne fousMonseigneur,
& fous Messieurs les Mareschaux de Duras & de
Lorge; en Flandres fous
Monsieur de Luxemborg,
où toute l'armée vit avec
plaisir que le gain du combat de Steinkerque fut deu
à un avis qu'il avoit donné.
<
A la Marfaille Monsieur
le Mareschal de Catinat
publia que c'estoit Monsieur de Vendosme qui s'estoit avisé la veille de mettre la droite à la gauche,
&la gauche à la droite,
afin d'opposer par la la
Gendarmerie aux Cuirassiers de l'Empereur
,
& il
chargea le lendemain, &
fit des actions surprenantes à la teste de cette Gendarmerie.
Les commandements
dans la Vallée de BarceJonnette
,
à Nice, ôc en
Provence suffiroient pour faire l'éloge d'un autre,
mais voyonsle comman- der en chef.
Le Roy luy donne le
commandement de l'armée de Catalogne, il y
arrive, trouve nostre armée decouragée, nos Grenadiers tremblanrs devant
les Miquelets; son arrivée
restablit tout
,
&¡;en une
campagne;il fait lever le
siege de plusieurs places,
Palamos
,
Ostallery, Calcet- soüilles, &c.
Il bat un gros corps de
Cavalerie, commande par
le Prince d'Armée, & se
seroit mis en estac de faire
le siege de Barcelonne dès
cette campagne, si la Cour
n'avoit trouve à propos de
differer à la suivante.
Quelfut ce siege de Barcelonne! Une grandeVille
qui ne peut estre investiè
,
défendue par une garnison
au dedans qui estoit aussi
forte qu'unearmée, & et
tant assiege tuy.
-
mesme
au dehors par une armée
aussi forte que la sienne,
commandée par le Vice-
roy
,
il commence par le
battre, & le mettre entièrement en deroute; & aprés
cinquante deux jours de
tranchéeouverte
,
il se
rend maître de cette place.
Tout le monde se souvient
encore des aétions furprenances qui se passerent à ce
siege ; & c'est bien dommage que la paresse de
Monsieur Capiftron Tait
empefehéde lesescrire La
< prisede cette Ville fit faire
la paix de Rifwik.
L'affairede Cremonearrive,Monsieur deVendos-
me y vole, on tremiroit à
voir sur la Carte les pays
donc les Ennemis estoient
emparez
,
& dont il les
cbufTi depuisfaine Nazaro,
& de l'Etradel, jusques à
Goito au delà de Mancouë
que l'armée de l'Empereur
tenoit bloqué, & dont il fit
lever le blocus après avoir
pris chemin faisant cinq
ou six places ausquelles il
fallut ouvrir la tranchée, ilbattitcette même Campagne Vice-conty à la Victoria, & gagna fous les or- dres du Roy d'espagne la
fameuse bataille de Luzara.
La Campagne ensuite il
penetra jusqu'à Trente
aprèsavoir pris cinq ou six
Chasteaux qui paroissoient
im prenables par leur situation, & revient à la fin de
la Campagne, battre le
mesme Vice-conty à S.
Sebastien prés d'Alexandrie, laisse le commandement de l'armée dePiémont
à Monsieur le Grand Prieur
son frere, retourne à celle
deLombardie sur la Sequia,
d'où il partit pour suivre
1.
Nuremberg, & pendant
prés de quinze jours battre
tous les soirs fort arriere
garde, marche qui fut
égalertt£ri£glorieuse à la
respectable opiniatreté de
ses grands rivaux.
Que de Villes prises en
1704. Ivrée, Verceil
,
&:
toutes les places de Monsieur de Savoye
,
Veruë priseaucommencement
de 1705. & ce Prince réduit
au seul Turin.
Le Combat de Cassan
où sa seule valeur alla plusieursfois arracherJ^;vicr
toire dans les bataillons
des Ennemis.
Quelle ouverture pour
la Campagne de 1706. que
la glorieuseaffaire de Calsinat, il l'aprojette à Mantoüe, fait ses dispositions,
& profite de la rigueur de
l'hyverquile mettoit dans
l'impossibilité de les executer
,
pour venir faire sa
cour au Roy, qu'il n'avoit
eu l'honneur de voir depuis
quatre ans, & dont il ne
pouvoit plus vivre essoigné,
reçoit à Anet les applaudissements de toute la Fran-
ce ,qui l'y traita pendant
tous les six jours qu'ily fut
avec une magnificence qui
jusques là n'avoit point eu
d'exemple. Il part enfin de
ce sejour de delices pour
aller executer son dessein
sur Calsinat le mesme jour
qu'ill'avoit projette, &
Monsieur le Prince Eugene
y
arriva à
temps pour estre
le tesmoin de savictoire.
Il est rappelled'Italie
pour aller commander l'armée de Flandres après le
malheur de Ramilly. Il y
trouve le Generaldes En-
nemis enSe de ses prosperitez
,
& prometrant à son
armée de la mener à Paris;
il rabu si bien foi} audace,
que les soldats luy disoient
tout haut que Bruxelles
n'en estoit pas le chemin.
Sa valeur sur tousjours
la mesme, mais la victoire
l'abandonna à Oudenarde,
peut estre pour relever sa
gloire. On ne voir jamais
un Heros toutentier quand
on ne le voit que dans la
prosperité.
Tout ce qui s'est passé
en Espagne est si nouveau,
que je ferois tort d'en donner des Mémoires à celuy
qui prendra le foin d'escrire ce qu'il a
fait depuis son
dernier départ d'Anet jusqua sa mort. On travaille
à present au Journal exact
de cette suite de belles actions qui ont affermi la
Couronne du Roy d'Espagné, quand ce Journal serafaitj'en donnerai un extrait.
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Résumé : MONSIEUR LE DUC de Vendosme.
Le texte relate la vie et les exploits militaires de Louis Joseph de Vendôme, Duc de Vendôme, Pair de France, Prince de Martigues, Chevalier des Ordres du Roy, Grand Sénéchal et Gouverneur de la Provence, et Général des Galères. Né petit-fils d'un grand roi, il montra dès son enfance des qualités rares telles que l'humanité, l'affabilité, la générosité et la compassion. Il s'illustra très tôt dans sa carrière militaire, servant avec assiduité et gravissant les échelons jusqu'à devenir un grand général. Sous la tutelle de Turenne et de Crequy, il participa à de nombreuses batailles, comme celle d'Altenheim où il fut grièvement blessé. Il se distingua également lors des sièges de Barcelone et de Cremone, et dans diverses campagnes en Allemagne, en Flandres et en Italie. Ses actions militaires, telles que la prise de plusieurs villes et la victoire à la bataille de Luzara, contribuèrent à affermir la couronne du Roi d'Espagne. Le Duc de Vendôme était également connu pour sa magnificence et son hospitalité, notamment lors des séjours du Dauphin à sa maison d'Anet. Il reçut de grandes marques de confiance du Roi, qui lui confia divers commandements importants. Sa carrière militaire fut marquée par des succès notables, bien que la victoire lui ait parfois échappé, comme à la bataille d'Oudenarde. Le texte mentionne également la préparation d'un journal détaillant ses actions en Espagne, soulignant l'impact de ses exploits sur la couronne espagnole.
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18
p. 100-117
LA BRAVOURE prudente. Trait d'Histoire Arabe.
Début :
Abdolema étant à la guerre dans le Pays Corassan, sous le General [...]
Mots clefs :
Bravoure, Arabe, Combat, Diplomatie, Éloquence, Arme, Victoire, Rouché, Corassan
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LA BRAVOURE prudente. Trait d'Histoire Arabe.
LA BRAVOURE
I.- prudente. Í.
Trait d'Hfloirc Arabe. ABdolema étant à la
guerre dans le Pays
Corassan, fous le General
Rouché, Heros de
la race de Molhab. Un
brave de l'armée, ennemie
sortit des rangs pour
défier en combat singulier
le plus vaillant de
l'arméedeRouché; Sc
les deux armées convinrent
de ceder à celuy qui
vaincroit pour son parti,
un certain poste qui eut
faitégorger beaucoup de
soldats.»
Ce brave dit à celuy
qui vintcombatrecontre
luy, dis moy cft tu le plus,
ruai/tant homme de ton
PaysjcarJlmnel'estpas
je ne daigneray me battre
contre toy. Je ne sçais si.
je le suis, répondit }'autrè>..
c'est à toy d'en faire l'épreuve
pour me l'aprendre,
le combat fut rude
& le Corassien ne tua
son homme qu'au dépens
de plusieurs blessures qu'il
enreceut.
Ensuite il fit seulement
bander ses playes, & dit
qu'il s'était aperçu que le
pied avoit manqué par
malheur à celui qu'il avoit
tué, Se que ne
croyant pas sa victoire
legitime il vouloir combarre
un second ad versaire
:- tu as tort, la partie
ne fera plus égale, luy
dit quelqu'un deson parti,
car te voila plus icible
8Cplus fatigué que tu
n'étois5 maïsaussi reprit
le brave, n'auray- je à faire
qu'à un homme moins
redoutable, car le premier
en vaillance étoit
celui qui s'est presenté
d'abord, & pour le (è*
cond, je n'ay pas besson
de tant de force,ce second
vint, & ill'abatit à ses
pieds; mais le voyant
mort, il trouva encore
quelque raison de scrupule
sur sa victoire,& soûtenant
qu'il ne l'avoit pas
vaincu de bon jeu; il en
voulut voir un troisiéme.
Son General ayant apris
ses deux combats, lui
envoya dire qu'illuy defendoit
d'en tenter un
troisième, comment donc
répondit-il fierement,
mon General ne m'estime
gueres, ou bien il est
trembleur desontempera~
ment, & ainsi il ne mc"
rite pas de m'avoir à son
Je^tcc; après avoir dit
fierement ces paroles, il
demandaobstinementun
Champion, alors Rouché
commenda à Aboudoulema
de Ce presenter pour
combatre le fieràbras,
qui les infultoit* Abou;
doulema s'excusant prudament
, Rouché en h
pressant, lui dit for le
champ ces vers , vos.
Ayeuls ne vous ont-ils
donc pas laisse pour héritage
,l'amour & le desir
de mourirpour moy * non.
pas répondit Aboudou..
lelna, carfay renoncé a
leurfacctjjion;cependant
reprit Rouché, je t'ay vtr
brave en mille occasions,
ouï répondit Aboudoulerna,
maisma vie est
pleine d'avions temerai-.
res, je fuis âgé &- je veux
laisser dans mes ans un
peu de place pour les
actions de prudence;
mais reprit brusquement
Rouché, cesse donc de
prétendre à la gloire 8z
à la paye de ton Prince..
pour lagloire ellea déjà
volé d'Orient jufquen
Occident, elle est deja
trop loin pour revenir sur
Jes pas, à l'égard de lapaye
Je la reçois pour combatre
mais non-pas p ur estre
tué,cevilain Carajfiien
ne me traiterapas mieux
qu'il afait les autres;
mais dit Rouché, je n'ay
rien de meilleur que vous
la luy oposer,le voilà qui
s'impatiente,&je vais
vous5livrer à lui malgré
vvoouussyppuuiiffqu'ainficjt,répondit
Aboudouema
ilfaut partir, mais le
voyage de l'autremondeefi
grand9ilmefautpour tentreprendre,
une bonne &
friande provision de vins
& devivres;aussi-tost
Rouché chargea un ECclave
de gasteaux, de
viandes, de fruits & de
vins exquis, ensuite Aboudoulema
suivi des
provisions> tira son épée,
marcha vers son
ennemi, & quant il en
fut assez prés pour lui
parler, il lui dit brave
: CorajjienfçaveTyouspar
avarrtu requi ejiAboudoulema,
ouïdit le Goraffien
& si vous l'eltes vous
estes digne de me combatre,
je lefuis répliqua
jiboudoulema, &sivous
112.1croyeZ digne de vous,
vous dcvcZJ croire que je
ne veux point me battre
avec avantage5 vous
avez* perdu vosforces en
tuant deux hommes, il
faut les réparer en buvant
& mangeantavec
my» je crois que cela est
prudent, repris le Corallien
feroce, buvons
donc eniemble avant
que de nous égorger ensemble,
é,gorgerfoitreprit ^ibdoulema; mais je
lieux que ma villimefoit
refaite &en bon point9
pour mériter d'eflre immolée
par moy ; ainsi pour
repaitreen repos9je ruais
feindre de fuir devant
vous, & vous me futt¡;
reZAfin de nous dérober
a la vue des deux armées
& la coupeà la main je
vous chanttray une petite
chanson Arabe de mafaçon:
tout cela fut executé
sur le champ, & comme
Aboudoulema étoit
éloquent sur tout àtable,
il profita de quelques
plaintes que lui fit le Coraffien
sur, ce que son
General luy avoit defenduce
troisiéme combat;
il acheva de luy persuader
que ce General ne meritoit
pas qu'il portâtles
armes pour lui, & qu'au
contraire Rouché efiimoit
tant les braves gens
& étoit si brave lui-mesme,
qu'ilmeritoit un
ami commele Corallien,
enfin Aboudoulenla, à
force d'eloquence & de
bon vin, piqua au jeu le
Coraflien
)
le mena à
Rouché au galop, Rou.
ché fut surpris de les voir
revenir enlemble, Aboudoulema
lui dit.,Seigneur,
voici un camarade que j'aygagné pour vous.,
vous vouliez que nous
nous egorgeassions, nous
avons employé ce temps
à boire à vostre lante,
n'avons nous pas mieux
fait; Rouché, sans rien
répondre tira son épée
nue, elle étoit garnis de
pierres précieuses d'un
grand prix, il la donna
au Corallien lui disant
-fi pouravoir bien combatu
moy contre je te fait
ce prêtent, juge de ceux
que je te feray quand tu
auras combatu pour moy
le Corallien lui dit,,
Seigneur c'est assez de
mon épée pour te servir,
garde la tienne, celle
de mon General est beaucoup
plus riche, cest
celle-là que je veux gagner,
car ilma méprisé,
tu as raison, dit Rouché^
mais c'est à faire à moy
à la luy oster pour te la,
donner;cela dit,Rouché
se lnit à la telle de son ar-.
mée ayant à ses costez le
Corallien & Aboudouma,
ils marchèrent aux
ennemis & firent tous
trois des actions si extraordinaires"
qu'ils gagnerent
une victoire
complette: Rouché joignit
le General , le combatir,
le bIelfa, ledesarma,
&fit prefentauCoraffien
de lepée qu'il desiroit
donnala sienne à Aboudoulemà,
il leur donna
deux des premieres.
places de son armée qu'aucun
ne leur envia,ayant
été témoins de leurs hauts
faits d'armes.
I.- prudente. Í.
Trait d'Hfloirc Arabe. ABdolema étant à la
guerre dans le Pays
Corassan, fous le General
Rouché, Heros de
la race de Molhab. Un
brave de l'armée, ennemie
sortit des rangs pour
défier en combat singulier
le plus vaillant de
l'arméedeRouché; Sc
les deux armées convinrent
de ceder à celuy qui
vaincroit pour son parti,
un certain poste qui eut
faitégorger beaucoup de
soldats.»
Ce brave dit à celuy
qui vintcombatrecontre
luy, dis moy cft tu le plus,
ruai/tant homme de ton
PaysjcarJlmnel'estpas
je ne daigneray me battre
contre toy. Je ne sçais si.
je le suis, répondit }'autrè>..
c'est à toy d'en faire l'épreuve
pour me l'aprendre,
le combat fut rude
& le Corassien ne tua
son homme qu'au dépens
de plusieurs blessures qu'il
enreceut.
Ensuite il fit seulement
bander ses playes, & dit
qu'il s'était aperçu que le
pied avoit manqué par
malheur à celui qu'il avoit
tué, Se que ne
croyant pas sa victoire
legitime il vouloir combarre
un second ad versaire
:- tu as tort, la partie
ne fera plus égale, luy
dit quelqu'un deson parti,
car te voila plus icible
8Cplus fatigué que tu
n'étois5 maïsaussi reprit
le brave, n'auray- je à faire
qu'à un homme moins
redoutable, car le premier
en vaillance étoit
celui qui s'est presenté
d'abord, & pour le (è*
cond, je n'ay pas besson
de tant de force,ce second
vint, & ill'abatit à ses
pieds; mais le voyant
mort, il trouva encore
quelque raison de scrupule
sur sa victoire,& soûtenant
qu'il ne l'avoit pas
vaincu de bon jeu; il en
voulut voir un troisiéme.
Son General ayant apris
ses deux combats, lui
envoya dire qu'illuy defendoit
d'en tenter un
troisième, comment donc
répondit-il fierement,
mon General ne m'estime
gueres, ou bien il est
trembleur desontempera~
ment, & ainsi il ne mc"
rite pas de m'avoir à son
Je^tcc; après avoir dit
fierement ces paroles, il
demandaobstinementun
Champion, alors Rouché
commenda à Aboudoulema
de Ce presenter pour
combatre le fieràbras,
qui les infultoit* Abou;
doulema s'excusant prudament
, Rouché en h
pressant, lui dit for le
champ ces vers , vos.
Ayeuls ne vous ont-ils
donc pas laisse pour héritage
,l'amour & le desir
de mourirpour moy * non.
pas répondit Aboudou..
lelna, carfay renoncé a
leurfacctjjion;cependant
reprit Rouché, je t'ay vtr
brave en mille occasions,
ouï répondit Aboudoulerna,
maisma vie est
pleine d'avions temerai-.
res, je fuis âgé &- je veux
laisser dans mes ans un
peu de place pour les
actions de prudence;
mais reprit brusquement
Rouché, cesse donc de
prétendre à la gloire 8z
à la paye de ton Prince..
pour lagloire ellea déjà
volé d'Orient jufquen
Occident, elle est deja
trop loin pour revenir sur
Jes pas, à l'égard de lapaye
Je la reçois pour combatre
mais non-pas p ur estre
tué,cevilain Carajfiien
ne me traiterapas mieux
qu'il afait les autres;
mais dit Rouché, je n'ay
rien de meilleur que vous
la luy oposer,le voilà qui
s'impatiente,&je vais
vous5livrer à lui malgré
vvoouussyppuuiiffqu'ainficjt,répondit
Aboudouema
ilfaut partir, mais le
voyage de l'autremondeefi
grand9ilmefautpour tentreprendre,
une bonne &
friande provision de vins
& devivres;aussi-tost
Rouché chargea un ECclave
de gasteaux, de
viandes, de fruits & de
vins exquis, ensuite Aboudoulema
suivi des
provisions> tira son épée,
marcha vers son
ennemi, & quant il en
fut assez prés pour lui
parler, il lui dit brave
: CorajjienfçaveTyouspar
avarrtu requi ejiAboudoulema,
ouïdit le Goraffien
& si vous l'eltes vous
estes digne de me combatre,
je lefuis répliqua
jiboudoulema, &sivous
112.1croyeZ digne de vous,
vous dcvcZJ croire que je
ne veux point me battre
avec avantage5 vous
avez* perdu vosforces en
tuant deux hommes, il
faut les réparer en buvant
& mangeantavec
my» je crois que cela est
prudent, repris le Corallien
feroce, buvons
donc eniemble avant
que de nous égorger ensemble,
é,gorgerfoitreprit ^ibdoulema; mais je
lieux que ma villimefoit
refaite &en bon point9
pour mériter d'eflre immolée
par moy ; ainsi pour
repaitreen repos9je ruais
feindre de fuir devant
vous, & vous me futt¡;
reZAfin de nous dérober
a la vue des deux armées
& la coupeà la main je
vous chanttray une petite
chanson Arabe de mafaçon:
tout cela fut executé
sur le champ, & comme
Aboudoulema étoit
éloquent sur tout àtable,
il profita de quelques
plaintes que lui fit le Coraffien
sur, ce que son
General luy avoit defenduce
troisiéme combat;
il acheva de luy persuader
que ce General ne meritoit
pas qu'il portâtles
armes pour lui, & qu'au
contraire Rouché efiimoit
tant les braves gens
& étoit si brave lui-mesme,
qu'ilmeritoit un
ami commele Corallien,
enfin Aboudoulenla, à
force d'eloquence & de
bon vin, piqua au jeu le
Coraflien
)
le mena à
Rouché au galop, Rou.
ché fut surpris de les voir
revenir enlemble, Aboudoulema
lui dit.,Seigneur,
voici un camarade que j'aygagné pour vous.,
vous vouliez que nous
nous egorgeassions, nous
avons employé ce temps
à boire à vostre lante,
n'avons nous pas mieux
fait; Rouché, sans rien
répondre tira son épée
nue, elle étoit garnis de
pierres précieuses d'un
grand prix, il la donna
au Corallien lui disant
-fi pouravoir bien combatu
moy contre je te fait
ce prêtent, juge de ceux
que je te feray quand tu
auras combatu pour moy
le Corallien lui dit,,
Seigneur c'est assez de
mon épée pour te servir,
garde la tienne, celle
de mon General est beaucoup
plus riche, cest
celle-là que je veux gagner,
car ilma méprisé,
tu as raison, dit Rouché^
mais c'est à faire à moy
à la luy oster pour te la,
donner;cela dit,Rouché
se lnit à la telle de son ar-.
mée ayant à ses costez le
Corallien & Aboudouma,
ils marchèrent aux
ennemis & firent tous
trois des actions si extraordinaires"
qu'ils gagnerent
une victoire
complette: Rouché joignit
le General , le combatir,
le bIelfa, ledesarma,
&fit prefentauCoraffien
de lepée qu'il desiroit
donnala sienne à Aboudoulemà,
il leur donna
deux des premieres.
places de son armée qu'aucun
ne leur envia,ayant
été témoins de leurs hauts
faits d'armes.
Fermer
Résumé : LA BRAVOURE prudente. Trait d'Histoire Arabe.
Le texte décrit un épisode militaire mettant en scène les armées de Rouché et du général Abdolema. Un soldat corassien défie les troupes de Rouché en combat singulier pour s'emparer d'un poste stratégique. Le combat est intense, et bien que blessé, le Corassien refuse de reconnaître sa défaite et demande à affronter un second adversaire. Le général Rouché ordonne alors à Aboudoulema, un héros reconnu, de se battre contre le Corassien. Aboudoulema, prudent et âgé, hésite initialement mais finit par accepter après l'insistance de Rouché. Avant le combat, Aboudoulema utilise la ruse et l'éloquence pour convaincre le Corassien de changer de camp. Il l'amène ensuite à Rouché, qui, impressionné par cette manœuvre, offre son épée au Corassien en signe de respect. Ensemble, ils lancent une attaque contre les ennemis et remportent une victoire décisive. En reconnaissance de leurs actions, Rouché récompense les deux héros en leur offrant des places d'honneur dans son armée.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
19
p. 217-252
RELATION de Monsieur Cassart.
Début :
Nous appareillâmes de la Martinique le 12. Janvier, & fimes voile [...]
Mots clefs :
Cassart, Flibustiers , Vaisseaux, Combat, Naufrage, Mortiers, Indiens , Caracas , Contribution , Retranchement
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : RELATION de Monsieur Cassart.
HELATION
de Monsieur Cassart. NOus appareillâmes de
la Martinique le 12.
janvier, & fimes voile pour
a Guadeloupe qui en un
sle Françoise, & voisine de
a précedente. Nous y prines
trois de nos Vaisseaux
lui y estoient, .& environ
:ent cinquante Flibustiers;
lelànousallâmes à S. Eustahe,
petite Isle Hollandoise
où nous moiiiiiames, le
2.
j.}
elle a esté pillée & brulee,il
y a deux ans par les Flibu
tiers de la Martinique, les
habitans nous firent plus d
pitié que d'envie;cependant
aprés avoir pris lavaleur
de IOOOO. écus de contribution
, nous levames
l'Ancre le :.7. pour aller à
Carasol, dans nostre rout
nous eûmes deux jours d
calmc, ce qui sit prendre le
parti à MonsieurCassart de
toucher la Coste de Caraças
Espagnolle, pour y faire dt
.réau, ayant appris qu'il n'y
on avoit point à Carasol
,
le
lo. Février estant sur la
:osie qui n'est habitée que
Indiens, le calme nous 0..
Iligea de moüillerdevant
ne Plage qu'on appelle
ropsea, ou cinq jours
prés nostre Vaisseau se perit;
je n'estoit pas à bord
quand ce malheur arriva, j'aois
profité d'un Canot que
Mr Cassart avoit envoyé à la
fille de Carcaça: avec le
Baron de Mouvance, Lieuenant
de Vaisseau qui alloit
aire un compliment de sa
art auGouverneur; comme
cerce Ville est éloignée de
dix huit lieuës de l'endroi
où nos Vaisseaux estoient
mouillez, nous n'aprimes
cette perre que deux jours
aprés, Mr Cassart ayan
appareillé sur lemìnuit pour
venir mouiller avec son escadre
à la Ville, son Vaisseau
deux heures aprés toucha
sur un banc inconnû à trois
lieuës de terre, & y rella
iqluelque temps, aprés quoy revint à flot de luy mêlTIC;
mais estant crevé dans beaucoup
d'endroits & plein
d'eau
, on n'eût que le temps
Ie l'aller echouer à terre, où
lOUS raYOnS laisse. On n'a
oresque rien sauvé, bienneureux
d'avoir pû sauver les
quipages & nos hardes, à
cause de la Mer qui bat en
tofts & qui est furieuse. Mr
tTaflart mit toute son application
aprés cela, à faire débrquerdeux
Mortiers de
douze pouces pour servir a
on expedition, ilyreüssit
avec beaucoup de peines,
nais il ne pût avoir les Bombes
ny les Fusécs; aprés un
bareil naufragc nous ne derions
plus songer à aller attaquer
Carasol,ayant perdu
pour trois mois de vivres à
huitcens hommes quiétoient
dans ce Navire, la moitié dCi
leurs armes, & toutes les munitions
de guerre;cependant
Mr Cassart en decida autre
ment. Le 13. de Fevrier
nous fimes voile pour
cette
Isle avec cinq Vaisseaux qui
nous restoient, & nous
y|
moüillâmes le 16. dans un
Ance que l'on appelle Sainte
Croix, comme les courants
Tone fort rapides, & qu'ils
portent au large, nous ne
fimespointnostre descente
c lendemain, à caused'un
le nos gros Vaisseaux qui
e pouvoit gagner le moüilage.
Le 17. ce Vaisseau bien
oin de s'approcher étoit enlaine
par Ics courants & levent
contraire, ce qui nous
faisoit desesperecr de pouvoir
ien entreprendre & bien
moins de retiffir si ce Navire
venoit à nous manquer, cela
irriva cependant ainsi, & le
18. au matin nous ne le
nmesplus, il avoit avec luy
ies deux Mortiers de douze
pouces sauvez du naufrage,
qui estoient nos plus gros,
la plus grande partie des
Bombes pour d'autres que
nous avions, trois cent soldats
& quatorze ou quinze
Officiers done six
cftoicnc!
nos princi paux, tout s'opposoit
de ce coste-là a nostre
snrreprise: de l'autre nouSj
donnions le temps aux
ennemis
de s'assembler, cnnn
Mr Cassartcontre toute apparence
de reüssir prit son 1
parti sur le champ & dans la
resolution de vaincre ou d'y
rester, nous descendîmes à
terre Ie: même jour a neuf
heures du matin au nombre
de six cens soldats & de trois
cens cinquante Flibustiers;
d'abord nous trompâmes les
ennemis qui nous attendoicnt
dans l'Ance, devant
laquelle nous estions moüille
& qui nous voyoicnr partir
de nos Vaisseaux dans nos
Chaloupes, quand nous
nous fûmes un peu avanccz
& que' l'approche de terre
commenta à, couvrir nos
Chaloupes, nous vogâmes
de force sur nostre droite,
& nous mîmes pied à terre
un àun, deux à deux dans
une petitePlageque les ennemis
ne gjrdoient pas, la
croyant impratiquable, à la , ,. verite on na jamais rien veu
de pareil pour la difficult^
car s'il y avoir eu seulement
vingt hommes bien resolus,
nousaurions cfte obligez de
nous rembarquer avec perce,
c'estoit un endroit fort petit,
lequel aprés que Ton estoit
descendu à terre, il falloit
monter en grimpant par
dessus un Rocher tres dimcultueux
& passer par un
trou un à un pour s'aller former
dans un petit bois taillis
qui suivoit ce passage, nostre
bonheurnousconduisit heureusement
& nous fit former
peu à peu un corps de 400.
hommes, àl'abry desquels les
autres passoient & arrivoient
en seureté. Les ennemis qui
estoient à deux portées de
fusil de nous, ne nous sqeurent
que lorsque nous defilâmes
par quatre dans une
Plaine qui aboutissoit a ce
petit Bois, ou nous nous
rangeames en bataille,
quand nos gens furent dcfcendus
les ennemis ne nous
tirant que de tres-loin & occupant
une hauteur, nous
marchâmes à eux fort vîte
en bataille, ilsne disputerent
point leur terrain, ils nous
abandonnerent la Montagne
aprés avoir fait leur décharge
qui ne nous blessa que
cinq ou six hommes & en
tua trois, ils se jetterent sur
leur droitederriereunretranchement
qu'ils y
avoient:
comme nous avions monté
cette Montagne fort vîte
& que nos Troupes estoient
fort essouflées, Mr Caffart
les fic reposer; ce fût là que
les ennemis nous tirerent de
leur retranchement plus de
deux mil coups de fusil; mais
aux premiers tirez nous nous
couvtîmes de la Crete de la
Montage, ce qui rendit leur
grand feu sans beaucoup
d'effet, les balles nous passant
par dessus la teste,lorsque
nos soldats furent reposez
nous marchâmes droit à
eux sans beaucoup d'ordre
la bayonnete au bout du fusil;
ilssoûtinrent nostre fCll
quelque temps par le leur;
maiscomme nous avancions
toûjours à mesure que nous
avions tíré, il n'attendirent
pas l'effet denos ~bayons,
nous sautâmes dans le retranchement
qui estoitdune
bonne muraille de pierre &
les poursuivîmes l'espace de
demy lieuë, nous leurs
prîmes dans cette attaque
trois Drapeaux & la pluspart
de leurs chevaux qui nous
ont bien servi dans la suite,
nous perdîmes quarantecinq
hommes tant tuez que blessez,
Mr Cassartaesté blessé
dangereusement d'une balle
quiluy perce le pied; cette
affaire ayant ainsiréüssi nous
jugeames que ce choc intimideroit
les ennemis & que
nous irions plus loin; c'est
pourquoy l'on resolut de
s'aller emparer d'un habitation
qui nous restoit sur
nostre gauche à demy lieue
dans une belle Plaine, nous
y arrivâmes sans difficulté &
ne voyant d'ennemis d'un
costé ny d'autre, nous y
fimes nostreCamp. Comme
Mr Cassart avoit esté emporté
à bord il envoya Mr
de Bandeville, Capitaine de
Fregatte pour comm nder à
sa place & pour reglerce que
nous aurions à faire dans la
suite, nous passames la nuit
sansestreinquietezde !'ennc'"j
my, Mr Cassart, dis- je, ayanc
remis toutes choses à laprudence
de Mr de Bandeville,
soit pour le rembarquement,
foit pour penérrer
plus avant, l'on tine confcil
le lendemain matin pour
voir si il falloit marcher par
terre à la Ville qui estoit à
huit lieuës de là, & l'on fût
d'avis d'attendre un jour
pour voir si deux beatteaux
que l'on avoit envoyé à bord
de ce Vaisseau qui nous
manquoit chercher nos gros
Mortiers, & nos Troupes
'arriveroient pas, aprés ce
emps attendu nous ne vÎnlCS
ien paroistre& nous n'aons
rien vtu depuis,les bâ-
~mens n'auront jamais pû
~agner contre le vent & les
ourants. Le 20l'on retint
n nouveau conseil qui s'cn
rmic entiérement à Mr
Cassart qui conclut à pené-
~trer dans le Pays & à marher
à laVille, nous voyons
evantnousmille difficultez
ui n'estoient pas faciles à
~rnionter par un si petit
ombre de Troupes que
ous estions, ayant selon les
apparences plusieurs retranchemens
à forcer qui mineroient
nostre Troupe avant
d'arriver à la Ville qui eaoie.,
fort éloignée oucre qu'il y
avoit dans rifle trois miUcJ
hommes armez, & que nous|
estions artendus depuis plus
de six semaines; d'un autre*
costé nous n'avions point de f
Port à nous auprés de la Ville
pour pouvoir débarquer nos
Mortiers & nos Vivres, cela
n'empêcha point il fût resolu
que l'an partiroit le lendemain,
& que nos Chaloupes
partiroient en raemci
temps en côtoyant la terre
avec les vivres, les bombes
& trois Mortiers qui nous
estoient, dont les deux plus
;ros n'estoient que de neuf
~pouces & l'autre au dessus,
, nous nous preparames a
narcher tout ce jour, pour
cette effetl'on fit débarquer
~enc cinquante Matelots ar-
~ez pour nous servir de
enfort,maisilsnousincommoderent
beaucoup plus
qu'ils ne nous furent utiles,
~e n, à six heures du man
nous nous mî(\mes en
tarchc) nous fimes quatre
licacs cc jour là sans voÏII
qui que ce soit, nous couchames
forttranquillement
à une habitation que nous
trouvâmes sur le chemin
Lc 22 nous fimes la rnêm
manoeuvre dans le dessein
de nous allcr emparer _d'
petit Port qui s'appelle Piscader,
qui est éloigné de la
Ville de trois quarts de lieuë
& oùily a une batterie de &
pieces decanon quidonnesur
la Mer & qui n'a qu'un foffi
retranché du costé de terre
afin de mettre nos Chal-
oupes en seurcte qui alloient
comme j'ay déja dit le long
de la coste à mesureque
nous avancions par terre,
mais nous fûmes trompez
dans nos attentes. Le 22. au
matin aprés avoir fait environ
une lieuë & passé un fort
mauvais defilé, nous arrivâmes
dans une Plaineassez
grande qui avoic pour face
une Montagne fort étenduë;
nostre guide nous dit que le
grand chemin passoit pardessus
la hauteur & qu'il n'en
connoissoit point d'autre,
sans nous defier de l'ennemy,
puisque nousnel'avionspas
trouvé au defilé nous marchâmes,
d'abord nous apperçûmes
quelques Cavaliers
ce qui nous fit fait alte pour
nous mettre en battaille
quand cela fût fait nous
continuames nostre route
tambour battant & Drapeaux
deployez à mesure
que nous avancions du pied
de la Montagne nous appercevions
le nombre des ennemis
augmenter &qu'ilyavoit
là un fort retranchement,
quand nous en fûmes bien
persuadez, Mr de Bandeville
fit marcher le premier
bataillon par la droite pour
prendre les ennemis en flanc
le second bataillon dont ma
Compagnie estoit & dont
j'étois troisiéme Capitaine
marcha droit en face du rctranchement,&
lesFlibustiers
& Matelots marcherent par
la gauche, dans cette disposition
sans sçavoir le nombre
d'ennemis que nous avions
à combattre jle premier bataillon
marcha seul par la
droite, comme j'ay déja dit,
parce qu'il falloit beaucoup
monter & passer par un Bois.
avant d'arriver au flanc du
retran hement, comme
nous n'étionssimplement
que hors la portéedu fusil
nousattendîmes que nostre
premier bataillon eût tiré
avant de donner, aux premiers
coups nous marcharries
les ennemis nous laisserent
approcher à portée de pistolet
sans tirer,aprèsquoy l'on
n'entendit plusde route parts
qu'un fCLJ terrible, neuf
pieces de canon qu'ilsavoient
tirerent sur nous à Inirraiile,
ce quifit plier lesFlibustiers&
Matelots; nos Troupes ne
firent pas de même, comme
le
le feu du canon Sc de la
Mousqueterie nous empêphoit
de montcr au retranchement
aussi visteque nous
l'-aurions souhaite,& que la
montée étoit assez escarpée.
L'on nousfit jetter sur nostre
droite, nous montâmes au
travers les Rochers &les
rPlnes) cequi nous fit rencontrer
avec les Grenadiers
du premier Bataillon, & entramesensemble
par le lfanc
dans le retranchement que
les ennemis abandonnerent.
Comme le feu estoit fort diminué
les Flibustiers & les
Matelots reprirent courage
& donnerent par la gauche
quine tint pas, voyanc leurs
camarades en suite,ilsavoient
comme nous du blanc à
leurs chapeaux, ce qui nous
empêcha d'en tuerbeaucoup,
nous leurs prîmes encore
quatre Drapeaux & neuf
pieces de canon de bronze;
ce te action fût vive, mais
clic patoist incroyable, ils
estoient sept cens soixance
&, quinze blancs, & trois
cens noirs armcz, ce que
nous (qumes sur le champ
par les prisonniers que nous
simes, nous ne perdîmes que
quarante hommes tant tuez
que blcfleZj nous devionsen
perdre davantage & assurement
que toutnôtre bataillon
devoit y rester, nostre bonheur
vient de ce que nous
~cftions trop prests sans avoir
tiré, car ils estoient obligez
de tirer de haut en bas, ce
quifaisoit tomber la plufparc
de leurs balles derriere nous
sans effet, n'osant par trop fc
découvrir;je ne perdis que
cinq hommes de ma Compagnie
& mon Enseigne
bkLTé. Comme ceretranchement
estoit entouré de
Bois, nous ne nous y arreiames
point, nous rejoignames
legrand chemin & fimcs demi
lieue sans aucun vestige
d'ennemy nous nous reposâmes
dans lc dessein d'aller
le foir attaqucr Piscader,
mais comme nous contâmes
que cet endroit feroit fort
deffendu, nous fûmes coucher
à demi líeuë de ce petit
Port à caufc de lanuit.
Le lendemain 2. 3. nousmarchâmes
à Piscader, nous
fûmes surpris agréablement
d'y trouver pas Chaloupes
moüíllées;les ennemis épouvantez
de la veille avoicnt
abandonné cette batterie &
encloüé les canons & nos
Chaloupes estoient arrivées
demi- heure avant nous; l'é.
pouvante les avoient tellement
saisisqu'ils s'étoient
retirez en confusion dedans
leur Ville qui est fermée du
costé de la terre, par le Port
& fortifiee de quatre bons
Bastions, comme nous ne
devions pas esperer de faire
rendre cette Ville par le peu
de monde que nous estions
par la difficulté de faire débarquer
de gros canon de
nos Vaisseaux qui estoient
fort éloignez,n'y ayant point
de moüillage que dans le
Port, & par le peu de vivres
que nous avions, on se conrenta
de la bombarder à
dessein de la faire contribuer,
pour cet effet nous marchâmes
le 2.4. à la Ville, le terrein
avoic esté reconnu la .;1
veille par de mauvaisconnoisseurs,
ce qui pensa nous coûter
cher; car l'on nous mena
a portée du pistolet de cette
Ville pour aller à un Camp
que Ton avoit marqué; &
par le plus grand bon-heur
du monde, dans le temps de
nostre passage les ennemis
ayant mis lc feu à des maifons
qui cftoienc le long de
la Mer, nous passames à la
gueulle de leurs canons &
des Vaisseaux
*,
ils s'aperçeurent
cependant de nostre
marche sur la fin, ce qui les
fit tirer sur ceux qu'ils
voyoient, nous perdîmes
cinq hommes du canon ,
nous fûmes obligez de décamper
sur Itf champ, quoique
couverts d'un petit rideau,
lis chargeoient leurs
canons à demi charge, &
tirant p.ar,ricochet lis com- mençoient a nous incommoder,
cela nous fit retirer
derríere une Montagne qui
estoit proche de nous, &
nous campâmes hors la portée
du canon. Le 2 5. & le
16. nos trois mortiers furent
débarquez & mis en
batterie à rrois cens toises
delaVille. Le 27. au matin
estant prêts à tirer on envoya
sommer la Ville de contribuer,
ce que le Gouverneur
ne vouluc entendre, sa réponse
nous fit commencer
de bombarder à huit heures
du matin; on nous répondit
à bon coups de canon qui
nefirent rien dans nostre
épaulement. Sur le midy nos
mortiers cesserent de tirer,
& je montai la tranchée ce
foir la avec ma Compagnie ;
sur les huit heures du foir
nous recommençâmes de
tirer, ce qui dura jusqu'a minuit.
Le 18. au matin nous
fimeslamême chose, aprés
quoy sur les ncuf heures les
ennemis demanderent une
Tréve pour sçavoir ce que
Mr Caffard demandoit de
contnbution; cnfin apres
trois jours de pourparler a
cause de l'eloignement de
nos Vaisseaux
,
dans lesquels
Monsieur Caffart estoit, la
contribution fLIt arrêtée &
signée le 3. de Mars à quatre
cent soixante mille francs,
bien heureux d'avoir tirécela;
car si ils avoient attendus
encore un jour nous estions
obligezde nous rembarquer
faute de vivres & de munitions,
nous n'avions pas cent
bombres à tirer, encore n'étoient-
elles pas bonnes par
l'inégalitédéfusées, Le
Vaisseau absent les ayant
routes; l'on commença le
payement. Le 4, ils nous
tinrent jusqu'au 1 5. esperant
qu'il leur arriveroit quelque
nouvelle d'Europe pour leur
confirmer une Tréve avec la
France dont ils nous menaçoient.
Le 1 5. nos Troupes
se rembarquerent
& nous fimes voile le 20.
pour la Ville de S. Domingue
Espagnolle; où nous
avons fait de l'eau &. sommes
partis deux Vaisseaux pour
Europe. Le 19. Mr Caffart
ayanc mené les deux autres
en Cartagene.
de Monsieur Cassart. NOus appareillâmes de
la Martinique le 12.
janvier, & fimes voile pour
a Guadeloupe qui en un
sle Françoise, & voisine de
a précedente. Nous y prines
trois de nos Vaisseaux
lui y estoient, .& environ
:ent cinquante Flibustiers;
lelànousallâmes à S. Eustahe,
petite Isle Hollandoise
où nous moiiiiiames, le
2.
j.}
elle a esté pillée & brulee,il
y a deux ans par les Flibu
tiers de la Martinique, les
habitans nous firent plus d
pitié que d'envie;cependant
aprés avoir pris lavaleur
de IOOOO. écus de contribution
, nous levames
l'Ancre le :.7. pour aller à
Carasol, dans nostre rout
nous eûmes deux jours d
calmc, ce qui sit prendre le
parti à MonsieurCassart de
toucher la Coste de Caraças
Espagnolle, pour y faire dt
.réau, ayant appris qu'il n'y
on avoit point à Carasol
,
le
lo. Février estant sur la
:osie qui n'est habitée que
Indiens, le calme nous 0..
Iligea de moüillerdevant
ne Plage qu'on appelle
ropsea, ou cinq jours
prés nostre Vaisseau se perit;
je n'estoit pas à bord
quand ce malheur arriva, j'aois
profité d'un Canot que
Mr Cassart avoit envoyé à la
fille de Carcaça: avec le
Baron de Mouvance, Lieuenant
de Vaisseau qui alloit
aire un compliment de sa
art auGouverneur; comme
cerce Ville est éloignée de
dix huit lieuës de l'endroi
où nos Vaisseaux estoient
mouillez, nous n'aprimes
cette perre que deux jours
aprés, Mr Cassart ayan
appareillé sur lemìnuit pour
venir mouiller avec son escadre
à la Ville, son Vaisseau
deux heures aprés toucha
sur un banc inconnû à trois
lieuës de terre, & y rella
iqluelque temps, aprés quoy revint à flot de luy mêlTIC;
mais estant crevé dans beaucoup
d'endroits & plein
d'eau
, on n'eût que le temps
Ie l'aller echouer à terre, où
lOUS raYOnS laisse. On n'a
oresque rien sauvé, bienneureux
d'avoir pû sauver les
quipages & nos hardes, à
cause de la Mer qui bat en
tofts & qui est furieuse. Mr
tTaflart mit toute son application
aprés cela, à faire débrquerdeux
Mortiers de
douze pouces pour servir a
on expedition, ilyreüssit
avec beaucoup de peines,
nais il ne pût avoir les Bombes
ny les Fusécs; aprés un
bareil naufragc nous ne derions
plus songer à aller attaquer
Carasol,ayant perdu
pour trois mois de vivres à
huitcens hommes quiétoient
dans ce Navire, la moitié dCi
leurs armes, & toutes les munitions
de guerre;cependant
Mr Cassart en decida autre
ment. Le 13. de Fevrier
nous fimes voile pour
cette
Isle avec cinq Vaisseaux qui
nous restoient, & nous
y|
moüillâmes le 16. dans un
Ance que l'on appelle Sainte
Croix, comme les courants
Tone fort rapides, & qu'ils
portent au large, nous ne
fimespointnostre descente
c lendemain, à caused'un
le nos gros Vaisseaux qui
e pouvoit gagner le moüilage.
Le 17. ce Vaisseau bien
oin de s'approcher étoit enlaine
par Ics courants & levent
contraire, ce qui nous
faisoit desesperecr de pouvoir
ien entreprendre & bien
moins de retiffir si ce Navire
venoit à nous manquer, cela
irriva cependant ainsi, & le
18. au matin nous ne le
nmesplus, il avoit avec luy
ies deux Mortiers de douze
pouces sauvez du naufrage,
qui estoient nos plus gros,
la plus grande partie des
Bombes pour d'autres que
nous avions, trois cent soldats
& quatorze ou quinze
Officiers done six
cftoicnc!
nos princi paux, tout s'opposoit
de ce coste-là a nostre
snrreprise: de l'autre nouSj
donnions le temps aux
ennemis
de s'assembler, cnnn
Mr Cassartcontre toute apparence
de reüssir prit son 1
parti sur le champ & dans la
resolution de vaincre ou d'y
rester, nous descendîmes à
terre Ie: même jour a neuf
heures du matin au nombre
de six cens soldats & de trois
cens cinquante Flibustiers;
d'abord nous trompâmes les
ennemis qui nous attendoicnt
dans l'Ance, devant
laquelle nous estions moüille
& qui nous voyoicnr partir
de nos Vaisseaux dans nos
Chaloupes, quand nous
nous fûmes un peu avanccz
& que' l'approche de terre
commenta à, couvrir nos
Chaloupes, nous vogâmes
de force sur nostre droite,
& nous mîmes pied à terre
un àun, deux à deux dans
une petitePlageque les ennemis
ne gjrdoient pas, la
croyant impratiquable, à la , ,. verite on na jamais rien veu
de pareil pour la difficult^
car s'il y avoir eu seulement
vingt hommes bien resolus,
nousaurions cfte obligez de
nous rembarquer avec perce,
c'estoit un endroit fort petit,
lequel aprés que Ton estoit
descendu à terre, il falloit
monter en grimpant par
dessus un Rocher tres dimcultueux
& passer par un
trou un à un pour s'aller former
dans un petit bois taillis
qui suivoit ce passage, nostre
bonheurnousconduisit heureusement
& nous fit former
peu à peu un corps de 400.
hommes, àl'abry desquels les
autres passoient & arrivoient
en seureté. Les ennemis qui
estoient à deux portées de
fusil de nous, ne nous sqeurent
que lorsque nous defilâmes
par quatre dans une
Plaine qui aboutissoit a ce
petit Bois, ou nous nous
rangeames en bataille,
quand nos gens furent dcfcendus
les ennemis ne nous
tirant que de tres-loin & occupant
une hauteur, nous
marchâmes à eux fort vîte
en bataille, ilsne disputerent
point leur terrain, ils nous
abandonnerent la Montagne
aprés avoir fait leur décharge
qui ne nous blessa que
cinq ou six hommes & en
tua trois, ils se jetterent sur
leur droitederriereunretranchement
qu'ils y
avoient:
comme nous avions monté
cette Montagne fort vîte
& que nos Troupes estoient
fort essouflées, Mr Caffart
les fic reposer; ce fût là que
les ennemis nous tirerent de
leur retranchement plus de
deux mil coups de fusil; mais
aux premiers tirez nous nous
couvtîmes de la Crete de la
Montage, ce qui rendit leur
grand feu sans beaucoup
d'effet, les balles nous passant
par dessus la teste,lorsque
nos soldats furent reposez
nous marchâmes droit à
eux sans beaucoup d'ordre
la bayonnete au bout du fusil;
ilssoûtinrent nostre fCll
quelque temps par le leur;
maiscomme nous avancions
toûjours à mesure que nous
avions tíré, il n'attendirent
pas l'effet denos ~bayons,
nous sautâmes dans le retranchement
qui estoitdune
bonne muraille de pierre &
les poursuivîmes l'espace de
demy lieuë, nous leurs
prîmes dans cette attaque
trois Drapeaux & la pluspart
de leurs chevaux qui nous
ont bien servi dans la suite,
nous perdîmes quarantecinq
hommes tant tuez que blessez,
Mr Cassartaesté blessé
dangereusement d'une balle
quiluy perce le pied; cette
affaire ayant ainsiréüssi nous
jugeames que ce choc intimideroit
les ennemis & que
nous irions plus loin; c'est
pourquoy l'on resolut de
s'aller emparer d'un habitation
qui nous restoit sur
nostre gauche à demy lieue
dans une belle Plaine, nous
y arrivâmes sans difficulté &
ne voyant d'ennemis d'un
costé ny d'autre, nous y
fimes nostreCamp. Comme
Mr Cassart avoit esté emporté
à bord il envoya Mr
de Bandeville, Capitaine de
Fregatte pour comm nder à
sa place & pour reglerce que
nous aurions à faire dans la
suite, nous passames la nuit
sansestreinquietezde !'ennc'"j
my, Mr Cassart, dis- je, ayanc
remis toutes choses à laprudence
de Mr de Bandeville,
soit pour le rembarquement,
foit pour penérrer
plus avant, l'on tine confcil
le lendemain matin pour
voir si il falloit marcher par
terre à la Ville qui estoit à
huit lieuës de là, & l'on fût
d'avis d'attendre un jour
pour voir si deux beatteaux
que l'on avoit envoyé à bord
de ce Vaisseau qui nous
manquoit chercher nos gros
Mortiers, & nos Troupes
'arriveroient pas, aprés ce
emps attendu nous ne vÎnlCS
ien paroistre& nous n'aons
rien vtu depuis,les bâ-
~mens n'auront jamais pû
~agner contre le vent & les
ourants. Le 20l'on retint
n nouveau conseil qui s'cn
rmic entiérement à Mr
Cassart qui conclut à pené-
~trer dans le Pays & à marher
à laVille, nous voyons
evantnousmille difficultez
ui n'estoient pas faciles à
~rnionter par un si petit
ombre de Troupes que
ous estions, ayant selon les
apparences plusieurs retranchemens
à forcer qui mineroient
nostre Troupe avant
d'arriver à la Ville qui eaoie.,
fort éloignée oucre qu'il y
avoit dans rifle trois miUcJ
hommes armez, & que nous|
estions artendus depuis plus
de six semaines; d'un autre*
costé nous n'avions point de f
Port à nous auprés de la Ville
pour pouvoir débarquer nos
Mortiers & nos Vivres, cela
n'empêcha point il fût resolu
que l'an partiroit le lendemain,
& que nos Chaloupes
partiroient en raemci
temps en côtoyant la terre
avec les vivres, les bombes
& trois Mortiers qui nous
estoient, dont les deux plus
;ros n'estoient que de neuf
~pouces & l'autre au dessus,
, nous nous preparames a
narcher tout ce jour, pour
cette effetl'on fit débarquer
~enc cinquante Matelots ar-
~ez pour nous servir de
enfort,maisilsnousincommoderent
beaucoup plus
qu'ils ne nous furent utiles,
~e n, à six heures du man
nous nous mî(\mes en
tarchc) nous fimes quatre
licacs cc jour là sans voÏII
qui que ce soit, nous couchames
forttranquillement
à une habitation que nous
trouvâmes sur le chemin
Lc 22 nous fimes la rnêm
manoeuvre dans le dessein
de nous allcr emparer _d'
petit Port qui s'appelle Piscader,
qui est éloigné de la
Ville de trois quarts de lieuë
& oùily a une batterie de &
pieces decanon quidonnesur
la Mer & qui n'a qu'un foffi
retranché du costé de terre
afin de mettre nos Chal-
oupes en seurcte qui alloient
comme j'ay déja dit le long
de la coste à mesureque
nous avancions par terre,
mais nous fûmes trompez
dans nos attentes. Le 22. au
matin aprés avoir fait environ
une lieuë & passé un fort
mauvais defilé, nous arrivâmes
dans une Plaineassez
grande qui avoic pour face
une Montagne fort étenduë;
nostre guide nous dit que le
grand chemin passoit pardessus
la hauteur & qu'il n'en
connoissoit point d'autre,
sans nous defier de l'ennemy,
puisque nousnel'avionspas
trouvé au defilé nous marchâmes,
d'abord nous apperçûmes
quelques Cavaliers
ce qui nous fit fait alte pour
nous mettre en battaille
quand cela fût fait nous
continuames nostre route
tambour battant & Drapeaux
deployez à mesure
que nous avancions du pied
de la Montagne nous appercevions
le nombre des ennemis
augmenter &qu'ilyavoit
là un fort retranchement,
quand nous en fûmes bien
persuadez, Mr de Bandeville
fit marcher le premier
bataillon par la droite pour
prendre les ennemis en flanc
le second bataillon dont ma
Compagnie estoit & dont
j'étois troisiéme Capitaine
marcha droit en face du rctranchement,&
lesFlibustiers
& Matelots marcherent par
la gauche, dans cette disposition
sans sçavoir le nombre
d'ennemis que nous avions
à combattre jle premier bataillon
marcha seul par la
droite, comme j'ay déja dit,
parce qu'il falloit beaucoup
monter & passer par un Bois.
avant d'arriver au flanc du
retran hement, comme
nous n'étionssimplement
que hors la portéedu fusil
nousattendîmes que nostre
premier bataillon eût tiré
avant de donner, aux premiers
coups nous marcharries
les ennemis nous laisserent
approcher à portée de pistolet
sans tirer,aprèsquoy l'on
n'entendit plusde route parts
qu'un fCLJ terrible, neuf
pieces de canon qu'ilsavoient
tirerent sur nous à Inirraiile,
ce quifit plier lesFlibustiers&
Matelots; nos Troupes ne
firent pas de même, comme
le
le feu du canon Sc de la
Mousqueterie nous empêphoit
de montcr au retranchement
aussi visteque nous
l'-aurions souhaite,& que la
montée étoit assez escarpée.
L'on nousfit jetter sur nostre
droite, nous montâmes au
travers les Rochers &les
rPlnes) cequi nous fit rencontrer
avec les Grenadiers
du premier Bataillon, & entramesensemble
par le lfanc
dans le retranchement que
les ennemis abandonnerent.
Comme le feu estoit fort diminué
les Flibustiers & les
Matelots reprirent courage
& donnerent par la gauche
quine tint pas, voyanc leurs
camarades en suite,ilsavoient
comme nous du blanc à
leurs chapeaux, ce qui nous
empêcha d'en tuerbeaucoup,
nous leurs prîmes encore
quatre Drapeaux & neuf
pieces de canon de bronze;
ce te action fût vive, mais
clic patoist incroyable, ils
estoient sept cens soixance
&, quinze blancs, & trois
cens noirs armcz, ce que
nous (qumes sur le champ
par les prisonniers que nous
simes, nous ne perdîmes que
quarante hommes tant tuez
que blcfleZj nous devionsen
perdre davantage & assurement
que toutnôtre bataillon
devoit y rester, nostre bonheur
vient de ce que nous
~cftions trop prests sans avoir
tiré, car ils estoient obligez
de tirer de haut en bas, ce
quifaisoit tomber la plufparc
de leurs balles derriere nous
sans effet, n'osant par trop fc
découvrir;je ne perdis que
cinq hommes de ma Compagnie
& mon Enseigne
bkLTé. Comme ceretranchement
estoit entouré de
Bois, nous ne nous y arreiames
point, nous rejoignames
legrand chemin & fimcs demi
lieue sans aucun vestige
d'ennemy nous nous reposâmes
dans lc dessein d'aller
le foir attaqucr Piscader,
mais comme nous contâmes
que cet endroit feroit fort
deffendu, nous fûmes coucher
à demi líeuë de ce petit
Port à caufc de lanuit.
Le lendemain 2. 3. nousmarchâmes
à Piscader, nous
fûmes surpris agréablement
d'y trouver pas Chaloupes
moüíllées;les ennemis épouvantez
de la veille avoicnt
abandonné cette batterie &
encloüé les canons & nos
Chaloupes estoient arrivées
demi- heure avant nous; l'é.
pouvante les avoient tellement
saisisqu'ils s'étoient
retirez en confusion dedans
leur Ville qui est fermée du
costé de la terre, par le Port
& fortifiee de quatre bons
Bastions, comme nous ne
devions pas esperer de faire
rendre cette Ville par le peu
de monde que nous estions
par la difficulté de faire débarquer
de gros canon de
nos Vaisseaux qui estoient
fort éloignez,n'y ayant point
de moüillage que dans le
Port, & par le peu de vivres
que nous avions, on se conrenta
de la bombarder à
dessein de la faire contribuer,
pour cet effet nous marchâmes
le 2.4. à la Ville, le terrein
avoic esté reconnu la .;1
veille par de mauvaisconnoisseurs,
ce qui pensa nous coûter
cher; car l'on nous mena
a portée du pistolet de cette
Ville pour aller à un Camp
que Ton avoit marqué; &
par le plus grand bon-heur
du monde, dans le temps de
nostre passage les ennemis
ayant mis lc feu à des maifons
qui cftoienc le long de
la Mer, nous passames à la
gueulle de leurs canons &
des Vaisseaux
*,
ils s'aperçeurent
cependant de nostre
marche sur la fin, ce qui les
fit tirer sur ceux qu'ils
voyoient, nous perdîmes
cinq hommes du canon ,
nous fûmes obligez de décamper
sur Itf champ, quoique
couverts d'un petit rideau,
lis chargeoient leurs
canons à demi charge, &
tirant p.ar,ricochet lis com- mençoient a nous incommoder,
cela nous fit retirer
derríere une Montagne qui
estoit proche de nous, &
nous campâmes hors la portée
du canon. Le 2 5. & le
16. nos trois mortiers furent
débarquez & mis en
batterie à rrois cens toises
delaVille. Le 27. au matin
estant prêts à tirer on envoya
sommer la Ville de contribuer,
ce que le Gouverneur
ne vouluc entendre, sa réponse
nous fit commencer
de bombarder à huit heures
du matin; on nous répondit
à bon coups de canon qui
nefirent rien dans nostre
épaulement. Sur le midy nos
mortiers cesserent de tirer,
& je montai la tranchée ce
foir la avec ma Compagnie ;
sur les huit heures du foir
nous recommençâmes de
tirer, ce qui dura jusqu'a minuit.
Le 18. au matin nous
fimeslamême chose, aprés
quoy sur les ncuf heures les
ennemis demanderent une
Tréve pour sçavoir ce que
Mr Caffard demandoit de
contnbution; cnfin apres
trois jours de pourparler a
cause de l'eloignement de
nos Vaisseaux
,
dans lesquels
Monsieur Caffart estoit, la
contribution fLIt arrêtée &
signée le 3. de Mars à quatre
cent soixante mille francs,
bien heureux d'avoir tirécela;
car si ils avoient attendus
encore un jour nous estions
obligezde nous rembarquer
faute de vivres & de munitions,
nous n'avions pas cent
bombres à tirer, encore n'étoient-
elles pas bonnes par
l'inégalitédéfusées, Le
Vaisseau absent les ayant
routes; l'on commença le
payement. Le 4, ils nous
tinrent jusqu'au 1 5. esperant
qu'il leur arriveroit quelque
nouvelle d'Europe pour leur
confirmer une Tréve avec la
France dont ils nous menaçoient.
Le 1 5. nos Troupes
se rembarquerent
& nous fimes voile le 20.
pour la Ville de S. Domingue
Espagnolle; où nous
avons fait de l'eau &. sommes
partis deux Vaisseaux pour
Europe. Le 19. Mr Caffart
ayanc mené les deux autres
en Cartagene.
Fermer
Résumé : RELATION de Monsieur Cassart.
Le texte relate une expédition militaire dirigée par Monsieur Cassart, débutant le 12 janvier depuis la Martinique vers la Guadeloupe. Après avoir pillé l'île hollandaise de Saint-Eustache, les forces se dirigèrent vers Carasol. Un calme forcé les obligea à mouiller devant la plage de Ropsea, où leur vaisseau se perdit. Cassart, informé deux jours plus tard, vit également son vaisseau s'échouer, entraînant la perte de vivres et de munitions. Malgré ces revers, Cassart décida d'attaquer Carasol. Le 13 février, ils appareillèrent avec cinq vaisseaux restants et mouillèrent le 16 dans l'anse Sainte-Croix. Le 18, un vaisseau avec des mortiers et des soldats se perdit. Cassart, résolu, descendit à terre avec 650 soldats et 350 flibustiers. Ils trompèrent les ennemis en débarquant sur une plage impraticable et montèrent une attaque surprise. Après une bataille intense, ils prirent trois drapeaux et des chevaux. Cassart fut blessé. Le 20, ils décidèrent de pénétrer dans le pays malgré les difficultés. Le 22, ils affrontèrent un retranchement ennemi et prirent quatre drapeaux et neuf pièces de canon. Ils continuèrent leur avancée, repoussant les attaques ennemies et prenant des positions stratégiques. Par la suite, le texte décrit une expédition militaire à Piscader. À leur arrivée, les auteurs constatèrent que les ennemis avaient abandonné une batterie et enfermé les canons, laissant leurs chaloupes à quai. Les forces ennemies s'étaient retirées dans leur ville fortifiée, protégée par quatre bastions. Les auteurs décidèrent de bombarder la ville pour obtenir une contribution, faute de pouvoir la prendre d'assaut ou de débarquer des canons lourds. Le 24, ils marchèrent vers la ville mais furent pris sous le feu ennemi, perdant cinq hommes. Ils se retirèrent derrière une montagne pour échapper aux tirs. Les 25 et 26, trois mortiers furent débarqués et mis en batterie. Le 27, après un ultimatum refusé par le gouverneur, le bombardement commença. Les pourparlers aboutirent à une contribution de 460 000 francs, signée le 3 mars. Les troupes se rembarquèrent le 15 et partirent pour la ville de Saint-Domingue espagnole le 20.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
20
p. 3-32
Avanture tragi-comique, extraite d'une lettre Espagnole, écrite de Tolede au temps que Philippe V. s'empara de Madrid.
Début :
Je vous fais part, mon cher ami, d'une avanture [...]
Mots clefs :
Aventure tragi-comique, Tolède, Philippe V, Retraite incendiaire, Castillan, Don Quichotte, Château, Siège, Combat, Chevalerie, Claire, Mariage, Victoire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Avanture tragi-comique, extraite d'une lettre Espagnole, écrite de Tolede au temps que Philippe V. s'empara de Madrid.
jlvanture tragi-comique,extraite
d'une lettre Espagnole, écrite
de Tolede an temps que Philippe
V. s'empara de Madrid.
E vousfais part,
moncher ami,d'une
avanture veritable
,à laquelle a donné
lieu la retraite incendiaire
des ennemis : c'étoit
dans un village à
sept ou huit lieuës d'ici.
A leur approche tout
trem bla dans ce village,
excepté le Heros du lieu,
vieux Castillan, intrepide
, grand homme,
droit, sec & basané, assez
verd encore pour l'âge
de quatre-vingt-deux
étns qu'il avoit. Il se dit
de la race de Don Quixotte:
mais rien ne prouve
cette genealogie, que
sa figure & ses visions.
Il dit ordinairement qu'-
il a de Don Quixotte la
valeur, sans en avoir la
folie: mais lui seul fait
cette exception. Il lui
ressemble en tout, &
cette avanture, quoy
qu'exactement vraye, tiendroit placedans celle
de Don Quixotte, sielle
étoit un peu plus plaisante.
Mais je vous l'envoye
telle qu'elle est.
Nôtre Heros de villageétoit
retiré dans une
mazure ancienne, qu'il
appelloit château, en faveur
d'une vieille tour
bâtie du temps des Maures.
Ce fut dans cette
tour qu'il fit porter tout
son petit meuble antique,
ses vieux titres &
son argent: maiscequ'il
vouloit sur-tout mettre
à couvert du
-
pillage,
c'étoit une jeune Espagnole,
âgée feulement de
quinze ans, belle comme
le jour, & dont il
étoit héroïquement amoureux
, c'est à dire
d'un amour pur soûtenu
de quatre-vingt- deux
ans, qu'il avoit contrainte
par tyrannie à rester
dans son château, enattendant
un mariage legitimement
resolu par
les parens de Claire; c'est
le nom de celle que nous
appellerons dés à present
son épouse, comme Agnés
l'étoit d'Arnolfe:
mais cette Agnés-ci étoit
encore plus deniaisée.
Ses parens, qui ctoient
fort pauvres,s'étoient
determinez àce
mariage, pour faire heriter
bientôt leur fille
,c
du tresor de ce vieux
Espagnol. 1"
Nôtre Don Quixotte
s'étoitdonc armé de pied
en ca p, & n'avoi t pas
oublié une ceinture qui
soûtenoit six pistolets ôc
deux dagues Castillannes
, il s'étoit mis un
pot en tête, percé de tous
côtez, & mangé de
roüille,& n'avoit qu'une
moitié de cuirasse par
devant, & n'étoitarmé
par les épaules que de la
ferme resolution qu'il
avoit prise de ne point
tourner le dos à l'ennemi.
Il faisoit beaucoup
va loir à sa jeune épouse
la violence qu'il se faisoit
de n'aller pas au-devant
des ennemis, se faisant
une loy de chevalerie
de ne pas abondonner
sa Dame;& la petite
rusée feignoit de prendre
la chose du côté que
le vieux jaloux la lui
montroit:mais cette jalousie
affreuse étoit la
feule cause qui le faisoit
retrancher dans sa tour.
.>
Cependant la petite
Claire son épouse oublioitpresque
la peur
qu'elle avoit de l'approche
des ennemis, pour
rire du dessein & de l'accoutrement
ridicule de
son vieux tyran;& ce
qui diminuoit sa peur
encore,c'étoit une lettre
qu'elle avoit reçûë
secretement, & dont
nous verrons les effets
dans la fuite. Elle prenoit
un plaisir malin à
se moquer de ses rodomontades
lui disoit:
Mon cher époux, pourquoy
vous armer sipesamment
?vôtre seul aspect
fera trembler ceux
qui vous vont assieger.
Je cache ma valeur fous
mes armes,lui répondit
le Castillan ; si je la
laissois à découvert, on
ne m'attaqueroitqu'en
tremblant, &. j'aurois
moins de gloire à vaincre.
Mettez donc encore
un autre casque sur vôtre
tête, répondit la jeune
épouse; car celui-là
est tout percé, & l'on
voit vôtre valeur à tra- vers. :•••'
?
Pendant ce discours
onentendit dans la cour,
du château des cris, Lr
plusieurs soldats bien armez&
cuirassez quitâchoit
d'escalader la tour
par un côté. D'abord la
jeune femme fit remarquer
au vieux Chevalier
qu'on l'attaquoit foiblement,&
qu'il faloit qu'il
ménageât les coups qu'il
avoit à tirer, pour se défendre
quand les ennemis
feroient montez. Il
trouva l'avis bon, & ne
tira point,observant seulement
les escaladeurs.
Ils étoient déja à portée
des coups: mais ils n'osoient
avancer à caufede
la fiere contenance du
ChevalierEspagnol, qui
pendant ce temps- là se
sentit saisir par deux
bras plus forts que ceux
de sa jeune épouse, qu'il
croyoit feule avec lui
dans latour, & il fut
sort surpris quand il vie
sur sa poitrine deux -
gros bras nerveux & armez
de cuirasse. C'étoit
en effet un autre Chevalier
à peu prés armé
comme il l'étoit lui-même.
Cet homme armé
étoitentré par une fenêtre
du grenier de cette
tour, par où la jeune accordéeavoit
pris foinde
descendre avec la poulie
de la fenestre, une corbeiHe,&:
les deux bouts
de la corde à puits, avec
laquelle le Chevalier &£
trois de ses camarades
s'étoient montez reciproquement
; &ils se
saisirenttous ensuite du
Don Quixotte, parce
qu'il avoit plusieurs piftolets
&, mousquetons
chargez. Quandils eurent
jetté toutes ces armes
à feu par la fenestre,
6C qu'on ne lui eut
laissé que sa feule épée,
alors
alors les quatre ennemis
le lâcherent > & le premier
Chevalier,qui parut
leur commandant,
prit la parole sur le ton
de la Chevalerie, dont
l'autre avoit le cerveau
un peu attaqué,comme
nous l'avons déja dit.
Seigneur Manquinados,
lui dit d'abord le Chevalier,
haussant la vipère,
quoique vous soyiez nôtre
prisonnier, & que
tout vôtre butin nous
appartienne en bonne
guerre, cependant la
beauté de cette jeune infante
m'impose du respect;
elle me causeen
mesme tem ps un subit,
mais violent amour.
D'un autre côté votre
valeur me donne de la
veneration 8£ de l'estime
: ainsi voyons si vous
soûtiendrez la haute idée
que j'ai connue de votre
generosité. Je ne veux
vous ôter ni votre Dame
, ni votre tresor:
mais je veux que l'un &
l'autre foit le prix d'un
combat singulier que je
vous propose.
Le Chevalier de la
tour fut d'abord étourdi
de cette proposition;car
sa jeune Claire & son
tresor étoient à lui, à ce
qu'il croyoit, en legitime
possession, & il ne
pouvoit se resoudre à
exposer l'un & l'autreau
hazard d'un combat.
C'est ce qu'il representa
trés-fortement à sonadversaire
: mais on lui
prouva d'abord que le
coeur deClaire étoit un
bien usurpé par lui;c'est
ce qu'elle declara ellemême
trés - patetiquement
en presence des
champions : & on lui
declara de plus que la
plûpart de l'argent qui
composoit le tresor du
vieux Espagnol avoit
été usurpé presque aussi
injustement que le coeur
de Claire, par les vexations
de ce tyran de village
sur les parens de
Claire. Toutes ces raisons
ne determinoient
point le Chevalier avare
& jaloux: mais la necessité
d'acccepter le dési,
ou de se voir enlever
tour sans combattre,
lui inspira un genereux
mépris de ses tresors, de
sa maîtresse, & d'un reste
de vie qui ne valoit gueres
la peine de le défendre,
mais qu'il resolut
pourtant de vendre bien
cher à son ennemi. Ils se
reculerent, chacun l'épée
au poing, jusqu'au
mur intérieur de la tour,
pour prendre leur course
& faire irruption l'un sur
l'autre; & cependant les
autres eurent ordre detre
spectateurs tranquiles
de ce fameux combat,
dont Claire ne laissoit
pas de trembler bien
fort, quoy qu'elle s'attendît
bien que le vieux
époux y succomberoit..
Ils combattirent sur un
tas de meubles & d'utenfils
qui leurservoientde
barriere, & ilssassaillirent
l'un l'autre comme
on force un retranchement
de fascines. Je ne
sçai par quelle mauvaise
destinée le vieux Espagnol
,
qui devoit pourrant
mieux connoître
son terrainque l'autre,
voulut prendre son avantage,
en mettant le pied
sur un vieux bahuplat
qui se trouvoit de niveau
avec quelques autresmeubles
dont le
plancher étoit couvert.
Ce vieux bahu pourri
fut percé de fond en comble
par le pied du combattant,
en forte que
pieds, jambes SC cuisses
se trouverent enfoncez
& pris dans le bahu,
comme le fut jadis le
pied
pied de Ragotin dans le
pot de chambre.
Alors il cria : Quar- tier',quartier,pointde
supercherie ; & en effet
on nevoulut point prosiser
du faux pas qu'il
avoit fait. Les juges du
combat le defemboëterent,
& il fut remisen
pied. Il fut si touché d'estime
pour des ennemis
si généreux ,
qu'il promit
de ceder sans regret
le prix de la victoire à
son ad versaire:mais que
cette victoire lui coûte- j
roit cher. Je ne vous serai
point ici la description
ducombat renou- (
vellé. La foibleffc du
vieillard, la superioritéquel'autreavoitsurlui,
l'équipage du combattant,&
ladispositiondu
champ de bataille, le
rendirent si comique,
que Claire ne put s'empêcher
d'en rire, malgré
le peril que couroit encore
son amant; car le
combattant étoit en esset
un jeune François,
qui étoit devenu amoureux
& aiméd'elle depuis
peu de temps, &
qui avoit ramassé quelques
amis dans un petit
parti François, qui avoit
mis en déroute quelques
Allemans qui avoient
commence a pillertrésserieusement
la bassecour
du romanesqueEspagnol
; ensorte que les
vrais ennemis ayant pris
la suite,ceux-ci ne firent
l'attaque de la tour que
de concert avec Claire
& ses parens pour met--
tre le vieux Seigneur à
laraison.
Revenons à la fin d'un
combat oùl'amant ne
laissa pas d'estre blessé au
bras,parce qu'ilnevouloit
point tuer son rival.
Enfinaprès un combat
,
fort obstiné de la
part du vieillard, ilfut
renversésousson ennemi,
8£ contraint de lui
demander la vie & sa
chereépouse. A cette demande
Claire s'écria,
que pour la vie elle consentoit
qu'on la lui donnât,
& non feulement la
vie, continua-t-elle:
mais je veux bien qu'on
vous donne outre cela
de quoy vivre. En effet
le pere de Claire, qui
étoit l'un des cavaliers
armez & déguisez, promit
de nourrir le vieillard
tant qu'il vivroit;
& les choses tournerent
de façon qu'un bon contrat
de mariage fut la
rançon de la vie qu'on
donna au vieux Espagnol,
quisigna rncfmc
le premier au t",r",.r
Voila, Mon/leur,
tcut ce que j.'Jai f¡f;û" dde
/e/le avanfure:je souhtlite
que si elle riesipas
bien ré)outrante, elle
vous Joit du moins caution
queJApporterat tous
-
mesJoins à vous envoyer
des Jujets d'hifloriettes>
que je vouslaisserai do..
renavant lefoin d'écrire
wons - même 5 car vos
Alercures du mois passé
mont appris que vous
êtes resolu de ceder le détail
Çy lesJoins du Mercure
a un homme tout
appliqué à cet ouvrage3
fS de ne vous rejerver
c*He la peine d'écrire
quelques morceaux détachez,;
sist en vers, sist en prose, sist dissertations
:JJOit tranfitions3
sist hijtoriettes ; f.5 nous
attendons avec impatience
la nouvelleforme
de ce Mercure; car les
derniers ( il faut vous
l'avouer)feroient tort a
voire reputation 3fi ton
r7/7/etotiotpittÙpabsibeinenccoonnrvvaaiinncen
devotreparesse.
d'une lettre Espagnole, écrite
de Tolede an temps que Philippe
V. s'empara de Madrid.
E vousfais part,
moncher ami,d'une
avanture veritable
,à laquelle a donné
lieu la retraite incendiaire
des ennemis : c'étoit
dans un village à
sept ou huit lieuës d'ici.
A leur approche tout
trem bla dans ce village,
excepté le Heros du lieu,
vieux Castillan, intrepide
, grand homme,
droit, sec & basané, assez
verd encore pour l'âge
de quatre-vingt-deux
étns qu'il avoit. Il se dit
de la race de Don Quixotte:
mais rien ne prouve
cette genealogie, que
sa figure & ses visions.
Il dit ordinairement qu'-
il a de Don Quixotte la
valeur, sans en avoir la
folie: mais lui seul fait
cette exception. Il lui
ressemble en tout, &
cette avanture, quoy
qu'exactement vraye, tiendroit placedans celle
de Don Quixotte, sielle
étoit un peu plus plaisante.
Mais je vous l'envoye
telle qu'elle est.
Nôtre Heros de villageétoit
retiré dans une
mazure ancienne, qu'il
appelloit château, en faveur
d'une vieille tour
bâtie du temps des Maures.
Ce fut dans cette
tour qu'il fit porter tout
son petit meuble antique,
ses vieux titres &
son argent: maiscequ'il
vouloit sur-tout mettre
à couvert du
-
pillage,
c'étoit une jeune Espagnole,
âgée feulement de
quinze ans, belle comme
le jour, & dont il
étoit héroïquement amoureux
, c'est à dire
d'un amour pur soûtenu
de quatre-vingt- deux
ans, qu'il avoit contrainte
par tyrannie à rester
dans son château, enattendant
un mariage legitimement
resolu par
les parens de Claire; c'est
le nom de celle que nous
appellerons dés à present
son épouse, comme Agnés
l'étoit d'Arnolfe:
mais cette Agnés-ci étoit
encore plus deniaisée.
Ses parens, qui ctoient
fort pauvres,s'étoient
determinez àce
mariage, pour faire heriter
bientôt leur fille
,c
du tresor de ce vieux
Espagnol. 1"
Nôtre Don Quixotte
s'étoitdonc armé de pied
en ca p, & n'avoi t pas
oublié une ceinture qui
soûtenoit six pistolets ôc
deux dagues Castillannes
, il s'étoit mis un
pot en tête, percé de tous
côtez, & mangé de
roüille,& n'avoit qu'une
moitié de cuirasse par
devant, & n'étoitarmé
par les épaules que de la
ferme resolution qu'il
avoit prise de ne point
tourner le dos à l'ennemi.
Il faisoit beaucoup
va loir à sa jeune épouse
la violence qu'il se faisoit
de n'aller pas au-devant
des ennemis, se faisant
une loy de chevalerie
de ne pas abondonner
sa Dame;& la petite
rusée feignoit de prendre
la chose du côté que
le vieux jaloux la lui
montroit:mais cette jalousie
affreuse étoit la
feule cause qui le faisoit
retrancher dans sa tour.
.>
Cependant la petite
Claire son épouse oublioitpresque
la peur
qu'elle avoit de l'approche
des ennemis, pour
rire du dessein & de l'accoutrement
ridicule de
son vieux tyran;& ce
qui diminuoit sa peur
encore,c'étoit une lettre
qu'elle avoit reçûë
secretement, & dont
nous verrons les effets
dans la fuite. Elle prenoit
un plaisir malin à
se moquer de ses rodomontades
lui disoit:
Mon cher époux, pourquoy
vous armer sipesamment
?vôtre seul aspect
fera trembler ceux
qui vous vont assieger.
Je cache ma valeur fous
mes armes,lui répondit
le Castillan ; si je la
laissois à découvert, on
ne m'attaqueroitqu'en
tremblant, &. j'aurois
moins de gloire à vaincre.
Mettez donc encore
un autre casque sur vôtre
tête, répondit la jeune
épouse; car celui-là
est tout percé, & l'on
voit vôtre valeur à tra- vers. :•••'
?
Pendant ce discours
onentendit dans la cour,
du château des cris, Lr
plusieurs soldats bien armez&
cuirassez quitâchoit
d'escalader la tour
par un côté. D'abord la
jeune femme fit remarquer
au vieux Chevalier
qu'on l'attaquoit foiblement,&
qu'il faloit qu'il
ménageât les coups qu'il
avoit à tirer, pour se défendre
quand les ennemis
feroient montez. Il
trouva l'avis bon, & ne
tira point,observant seulement
les escaladeurs.
Ils étoient déja à portée
des coups: mais ils n'osoient
avancer à caufede
la fiere contenance du
ChevalierEspagnol, qui
pendant ce temps- là se
sentit saisir par deux
bras plus forts que ceux
de sa jeune épouse, qu'il
croyoit feule avec lui
dans latour, & il fut
sort surpris quand il vie
sur sa poitrine deux -
gros bras nerveux & armez
de cuirasse. C'étoit
en effet un autre Chevalier
à peu prés armé
comme il l'étoit lui-même.
Cet homme armé
étoitentré par une fenêtre
du grenier de cette
tour, par où la jeune accordéeavoit
pris foinde
descendre avec la poulie
de la fenestre, une corbeiHe,&:
les deux bouts
de la corde à puits, avec
laquelle le Chevalier &£
trois de ses camarades
s'étoient montez reciproquement
; &ils se
saisirenttous ensuite du
Don Quixotte, parce
qu'il avoit plusieurs piftolets
&, mousquetons
chargez. Quandils eurent
jetté toutes ces armes
à feu par la fenestre,
6C qu'on ne lui eut
laissé que sa feule épée,
alors
alors les quatre ennemis
le lâcherent > & le premier
Chevalier,qui parut
leur commandant,
prit la parole sur le ton
de la Chevalerie, dont
l'autre avoit le cerveau
un peu attaqué,comme
nous l'avons déja dit.
Seigneur Manquinados,
lui dit d'abord le Chevalier,
haussant la vipère,
quoique vous soyiez nôtre
prisonnier, & que
tout vôtre butin nous
appartienne en bonne
guerre, cependant la
beauté de cette jeune infante
m'impose du respect;
elle me causeen
mesme tem ps un subit,
mais violent amour.
D'un autre côté votre
valeur me donne de la
veneration 8£ de l'estime
: ainsi voyons si vous
soûtiendrez la haute idée
que j'ai connue de votre
generosité. Je ne veux
vous ôter ni votre Dame
, ni votre tresor:
mais je veux que l'un &
l'autre foit le prix d'un
combat singulier que je
vous propose.
Le Chevalier de la
tour fut d'abord étourdi
de cette proposition;car
sa jeune Claire & son
tresor étoient à lui, à ce
qu'il croyoit, en legitime
possession, & il ne
pouvoit se resoudre à
exposer l'un & l'autreau
hazard d'un combat.
C'est ce qu'il representa
trés-fortement à sonadversaire
: mais on lui
prouva d'abord que le
coeur deClaire étoit un
bien usurpé par lui;c'est
ce qu'elle declara ellemême
trés - patetiquement
en presence des
champions : & on lui
declara de plus que la
plûpart de l'argent qui
composoit le tresor du
vieux Espagnol avoit
été usurpé presque aussi
injustement que le coeur
de Claire, par les vexations
de ce tyran de village
sur les parens de
Claire. Toutes ces raisons
ne determinoient
point le Chevalier avare
& jaloux: mais la necessité
d'acccepter le dési,
ou de se voir enlever
tour sans combattre,
lui inspira un genereux
mépris de ses tresors, de
sa maîtresse, & d'un reste
de vie qui ne valoit gueres
la peine de le défendre,
mais qu'il resolut
pourtant de vendre bien
cher à son ennemi. Ils se
reculerent, chacun l'épée
au poing, jusqu'au
mur intérieur de la tour,
pour prendre leur course
& faire irruption l'un sur
l'autre; & cependant les
autres eurent ordre detre
spectateurs tranquiles
de ce fameux combat,
dont Claire ne laissoit
pas de trembler bien
fort, quoy qu'elle s'attendît
bien que le vieux
époux y succomberoit..
Ils combattirent sur un
tas de meubles & d'utenfils
qui leurservoientde
barriere, & ilssassaillirent
l'un l'autre comme
on force un retranchement
de fascines. Je ne
sçai par quelle mauvaise
destinée le vieux Espagnol
,
qui devoit pourrant
mieux connoître
son terrainque l'autre,
voulut prendre son avantage,
en mettant le pied
sur un vieux bahuplat
qui se trouvoit de niveau
avec quelques autresmeubles
dont le
plancher étoit couvert.
Ce vieux bahu pourri
fut percé de fond en comble
par le pied du combattant,
en forte que
pieds, jambes SC cuisses
se trouverent enfoncez
& pris dans le bahu,
comme le fut jadis le
pied
pied de Ragotin dans le
pot de chambre.
Alors il cria : Quar- tier',quartier,pointde
supercherie ; & en effet
on nevoulut point prosiser
du faux pas qu'il
avoit fait. Les juges du
combat le defemboëterent,
& il fut remisen
pied. Il fut si touché d'estime
pour des ennemis
si généreux ,
qu'il promit
de ceder sans regret
le prix de la victoire à
son ad versaire:mais que
cette victoire lui coûte- j
roit cher. Je ne vous serai
point ici la description
ducombat renou- (
vellé. La foibleffc du
vieillard, la superioritéquel'autreavoitsurlui,
l'équipage du combattant,&
ladispositiondu
champ de bataille, le
rendirent si comique,
que Claire ne put s'empêcher
d'en rire, malgré
le peril que couroit encore
son amant; car le
combattant étoit en esset
un jeune François,
qui étoit devenu amoureux
& aiméd'elle depuis
peu de temps, &
qui avoit ramassé quelques
amis dans un petit
parti François, qui avoit
mis en déroute quelques
Allemans qui avoient
commence a pillertrésserieusement
la bassecour
du romanesqueEspagnol
; ensorte que les
vrais ennemis ayant pris
la suite,ceux-ci ne firent
l'attaque de la tour que
de concert avec Claire
& ses parens pour met--
tre le vieux Seigneur à
laraison.
Revenons à la fin d'un
combat oùl'amant ne
laissa pas d'estre blessé au
bras,parce qu'ilnevouloit
point tuer son rival.
Enfinaprès un combat
,
fort obstiné de la
part du vieillard, ilfut
renversésousson ennemi,
8£ contraint de lui
demander la vie & sa
chereépouse. A cette demande
Claire s'écria,
que pour la vie elle consentoit
qu'on la lui donnât,
& non feulement la
vie, continua-t-elle:
mais je veux bien qu'on
vous donne outre cela
de quoy vivre. En effet
le pere de Claire, qui
étoit l'un des cavaliers
armez & déguisez, promit
de nourrir le vieillard
tant qu'il vivroit;
& les choses tournerent
de façon qu'un bon contrat
de mariage fut la
rançon de la vie qu'on
donna au vieux Espagnol,
quisigna rncfmc
le premier au t",r",.r
Voila, Mon/leur,
tcut ce que j.'Jai f¡f;û" dde
/e/le avanfure:je souhtlite
que si elle riesipas
bien ré)outrante, elle
vous Joit du moins caution
queJApporterat tous
-
mesJoins à vous envoyer
des Jujets d'hifloriettes>
que je vouslaisserai do..
renavant lefoin d'écrire
wons - même 5 car vos
Alercures du mois passé
mont appris que vous
êtes resolu de ceder le détail
Çy lesJoins du Mercure
a un homme tout
appliqué à cet ouvrage3
fS de ne vous rejerver
c*He la peine d'écrire
quelques morceaux détachez,;
sist en vers, sist en prose, sist dissertations
:JJOit tranfitions3
sist hijtoriettes ; f.5 nous
attendons avec impatience
la nouvelleforme
de ce Mercure; car les
derniers ( il faut vous
l'avouer)feroient tort a
voire reputation 3fi ton
r7/7/etotiotpittÙpabsibeinenccoonnrvvaaiinncen
devotreparesse.
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Résumé : Avanture tragi-comique, extraite d'une lettre Espagnole, écrite de Tolede au temps que Philippe V. s'empara de Madrid.
Le texte raconte une aventure tragi-comique inspirée d'une lettre espagnole écrite à l'époque où Philippe V s'empara de Madrid. L'histoire se déroule dans un village situé à sept ou huit lieues de Tolède. Lors de la retraite incendiaire des ennemis, un vieux Castillan de quatre-vingt-deux ans, comparé à Don Quixotte, refuse de fuir. Il se prépare à défendre son château, une ancienne masure avec une tour bâtie du temps des Maures, où il a rassemblé ses biens et une jeune Espagnole de quinze ans, Claire, dont il est amoureux et qu'il retient contre sa volonté en attendant un mariage arrangé par ses parents. Le vieil homme s'arme et se prépare à affronter les ennemis, malgré les moqueries de Claire. Alors qu'il se tient prêt, des soldats escaladent la tour. Claire, qui a reçu une lettre secrète, se moque de lui. Soudain, un autre chevalier entre par une fenêtre et maîtrise le vieux Castillan. Ce chevalier propose un combat singulier pour obtenir Claire et le trésor du vieil homme. Claire et ses parents révèlent que le trésor a été acquis par des vexations et que son cœur n'appartient pas au vieil homme. Le combat commence, mais le vieil homme trébuche et est sauvé par la générosité de son adversaire. Blessé, il est finalement vaincu. Claire accepte de pardonner la vie du vieil homme à condition qu'il soit nourri jusqu'à sa mort. Un contrat de mariage est signé, mettant fin à l'aventure.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
21
p. 145-160
LA DEFAITE des Hannetons. POEME en deux Chants.
Début :
Des Hannetons vaincus je chante la défaite, [...]
Mots clefs :
Hannetons, Défaite, Victoire, Combat, Chant, Verger, Insectes, Triomphe, Discorde, Licas
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LA DEFAITE des Hannetons. POEME en deux Chants.
LA DEFAITE
ries Hannetons. PÔ E ME
en deux Chants.
DEs Hannetons vaineusje
chante la défaite,
Et du brave Licas lavictoire
complette,
Mufe, raconte-nous quelle
bouillante ardeur
D'unvifrejjentiment es-
Novembre 1713. Nv
chauffesongrandcoeur,
Colmamentdansses projets valeuraffermie
Triompha fierément d'une
troupe ennemie.
Licas vivoit heureux ,0
tranquilleaParis,
Sonreposfusttroublesi-tost
qu'ileustappris
Que d'insèctes aislées un
partiformidable
Causoit dans ses vergers
un ravage effroyable.
Sur le haut d'un charmant
&fertilecosteau
S'ejUveunmagnifique f5
modernechass,eoeu,
Doptïart ingen«%i$>rivald&
Umfwe:9 >.
Par divers ornemens embellit
lastructure.
L'édifice est construit entre
deux verdsbosquets,
Où l'ardeur du Soleil ne
penetre jamais.
Dujardinspacieuxondécouvre
la Seine,
Qui parde longs detours
Jerpentent dans la plaines
Des ruisseaux, des valons,
des prez, & desforests,
Les presens de Bacchus f5 les dons de Cerés, ,
Les champestres beautez
dont la terresepare,
Et mille objets où l'oeil
avecplaisirs'égare.
C'est dans ce beauséjour,
c'est dans ces lieux charmans,
Qtie Licas avec soin re,.'
veille tous lesans
Favori fortuné de Flore
&dePomonne,
Et lesfleurs du Printems
(f le;fruits de l'Automne.
De quel trait de douleur
dans l'absynthetrempé,
Au rapport qu'on luyfist
son coeurfust-ilfrappé.
Deux coursiers attelez,à
son char le plus leste,
Ilpart, il arrive,&voit
quelspectaclefuneste , ;
Ses arbres dépoüillez de
verdure & defleurs,
; Il pouffe des sanglots ac-
Ilcompagnez de pleurs y'r fremit,il frissonne
,
il
fhûU5 ilchancelle
Danssesyeux enflammez
sacolère tftitoceile:
IIdcîcffc centfois un at-
£ J~ CeïftfWtemïm
qt*Aijfyiffotfdëfefpôir> Ils'addresseàPômône
çfluytimwhzgxgi y
;
O vousquipartagezavec
moy cet outrage,
Dtéeessse pvuniosselzadesninsfec,- j
Dont VÙUY voyez içyles
transportsinsolents. iliI
La Diejle aussitost à ses
yeuxfepresente
Et luy dit: mon pouvoir
remplira ton attente,
Nos ennemis communs de
t$nbonheurjaloux,
Se,ptironMï&ceptw (¡]01(( peutmon-ow>:y-- Je desim?îmz•.» ;u:> .;;• leuraudace>
Il faut extermipçr cette
coupable race.
Dés que l'ajlre du jour
dans l'empire desflots,
Aura précipitéfan char if
ses chervaux,
Armetoy de courage, &
cours a la vengeance,
De ces audacieux reprime
l'insolence ; Je conduiray tes coups ,
j'animeray ton coeur,
Et de cegrandcombat tu
sortiras vainqueur.
Fin du premier Chant.
,
SECOND CHANT.
Licas impatient attend
l'heure marquée
Où la troupe parluy doit
sevoir attaquées
Et le temps luy paroist.
couler trop lentement:,
L'astre second des Cieux
qui donne la lumiere,
\A peine eut dans les eaux
terminésa carriere
Quel'empresséLicascourt
&voleaïinjiant,
Ou le dessin l'appelle, où
c
taïgtoire.l'attend,
A l'aspect de ces lieux il
sent croistresa rage:
Surprenons j'ennemysàns
tarderdavantage*,
Frappons ditil,frappons,
ifgnalom noseffort eha^fssjmnt
rw
'f;QWvetIS~y~
&de iïwrtss
Voffenfecptonmefait j,tiF
tementme £wrrw6t<
llejbranle. acestnêup$t
plus d'unesecousse
Des Frenes,des Ormeaux,
ou l'ennemy caché,
Saisi d'effroy, tremblant,
est en euàt*ri retranché.
Des, arbresles plushauts
LaDeese.semontreau
trmjrrsdela:nuey>
AugmehitdeLicasl'héroïquevalèur,
b..
Et de son bras lasséranime
lavigueur -
A ces coups redoublez,tout
cede, toutsuccombe yZ
De momenten momentun
gros d'ennemy tombe>
Ainsi le Laboureur d'unefobujlemain,
De la gerbequ'il batfait
sortirtout legrain.
Pour eux contre la mort il
n'est aucun azyle,
A chaquepasqu'ilfait il
-
enecrasè mille;
Ainsi le Vendangeurpour
avoirplus de vin,
Sous lepesant pressoir é-
,
crase leraisin.
Les coups portentpar tout
des atteintes mortelles,
C'estenvain qu'emploiant
lesecours de leursasiles,
Pour éviter leur perte ils
traversent les airs
Des cadavresépars tous
les champssont couverts
y Les ventsfontmoins tomber
defeuilles en Automne
LaFaucilleabb, at moins
d'épis quand on mois
sonne,
Licas de toutespartsvainqueur
impetueux,
Massacre en un moment
des bataillons nombreux;
Tel un Lion de sang 0*
decarnageavide,
Exerce sa fureur sur un
troupeau timide.
Tel onvit autrefois dans
leschamps Phrygiens
Achille ason courroux immoler
les Troyens.
Par la paix, cettegrande
Qf terriblejournée
Au gré des deux partis
fust enfin terminée.
LesHannetonsvaincus
signerent un traité,
Promirent à Licas ce
vainqueur indompté,
De ne plus ravager de
formaisson domaine.
Mules, qui m'inspirez
laissezmoy prendre )
Mm#,
Préparez,d'autres vers, chantons une autrepaix
, Quele Cieffdrj&r^&fe accorde
à nossebaits
Pitrjfeparsonretourcette
,.,
Paixdesirée ,.
1 K^mner/h^^tgm'fs.
àç&atww es de Rheey
Etfinissant les maux que
nous avonssoufferts;
Enchaisnerpmp jamais
la Discordeaux Enfers.
Fin du fecond & dernier
Chant,
ries Hannetons. PÔ E ME
en deux Chants.
DEs Hannetons vaineusje
chante la défaite,
Et du brave Licas lavictoire
complette,
Mufe, raconte-nous quelle
bouillante ardeur
D'unvifrejjentiment es-
Novembre 1713. Nv
chauffesongrandcoeur,
Colmamentdansses projets valeuraffermie
Triompha fierément d'une
troupe ennemie.
Licas vivoit heureux ,0
tranquilleaParis,
Sonreposfusttroublesi-tost
qu'ileustappris
Que d'insèctes aislées un
partiformidable
Causoit dans ses vergers
un ravage effroyable.
Sur le haut d'un charmant
&fertilecosteau
S'ejUveunmagnifique f5
modernechass,eoeu,
Doptïart ingen«%i$>rivald&
Umfwe:9 >.
Par divers ornemens embellit
lastructure.
L'édifice est construit entre
deux verdsbosquets,
Où l'ardeur du Soleil ne
penetre jamais.
Dujardinspacieuxondécouvre
la Seine,
Qui parde longs detours
Jerpentent dans la plaines
Des ruisseaux, des valons,
des prez, & desforests,
Les presens de Bacchus f5 les dons de Cerés, ,
Les champestres beautez
dont la terresepare,
Et mille objets où l'oeil
avecplaisirs'égare.
C'est dans ce beauséjour,
c'est dans ces lieux charmans,
Qtie Licas avec soin re,.'
veille tous lesans
Favori fortuné de Flore
&dePomonne,
Et lesfleurs du Printems
(f le;fruits de l'Automne.
De quel trait de douleur
dans l'absynthetrempé,
Au rapport qu'on luyfist
son coeurfust-ilfrappé.
Deux coursiers attelez,à
son char le plus leste,
Ilpart, il arrive,&voit
quelspectaclefuneste , ;
Ses arbres dépoüillez de
verdure & defleurs,
; Il pouffe des sanglots ac-
Ilcompagnez de pleurs y'r fremit,il frissonne
,
il
fhûU5 ilchancelle
Danssesyeux enflammez
sacolère tftitoceile:
IIdcîcffc centfois un at-
£ J~ CeïftfWtemïm
qt*Aijfyiffotfdëfefpôir> Ils'addresseàPômône
çfluytimwhzgxgi y
;
O vousquipartagezavec
moy cet outrage,
Dtéeessse pvuniosselzadesninsfec,- j
Dont VÙUY voyez içyles
transportsinsolents. iliI
La Diejle aussitost à ses
yeuxfepresente
Et luy dit: mon pouvoir
remplira ton attente,
Nos ennemis communs de
t$nbonheurjaloux,
Se,ptironMï&ceptw (¡]01(( peutmon-ow>:y-- Je desim?îmz•.» ;u:> .;;• leuraudace>
Il faut extermipçr cette
coupable race.
Dés que l'ajlre du jour
dans l'empire desflots,
Aura précipitéfan char if
ses chervaux,
Armetoy de courage, &
cours a la vengeance,
De ces audacieux reprime
l'insolence ; Je conduiray tes coups ,
j'animeray ton coeur,
Et de cegrandcombat tu
sortiras vainqueur.
Fin du premier Chant.
,
SECOND CHANT.
Licas impatient attend
l'heure marquée
Où la troupe parluy doit
sevoir attaquées
Et le temps luy paroist.
couler trop lentement:,
L'astre second des Cieux
qui donne la lumiere,
\A peine eut dans les eaux
terminésa carriere
Quel'empresséLicascourt
&voleaïinjiant,
Ou le dessin l'appelle, où
c
taïgtoire.l'attend,
A l'aspect de ces lieux il
sent croistresa rage:
Surprenons j'ennemysàns
tarderdavantage*,
Frappons ditil,frappons,
ifgnalom noseffort eha^fssjmnt
rw
'f;QWvetIS~y~
&de iïwrtss
Voffenfecptonmefait j,tiF
tementme £wrrw6t<
llejbranle. acestnêup$t
plus d'unesecousse
Des Frenes,des Ormeaux,
ou l'ennemy caché,
Saisi d'effroy, tremblant,
est en euàt*ri retranché.
Des, arbresles plushauts
LaDeese.semontreau
trmjrrsdela:nuey>
AugmehitdeLicasl'héroïquevalèur,
b..
Et de son bras lasséranime
lavigueur -
A ces coups redoublez,tout
cede, toutsuccombe yZ
De momenten momentun
gros d'ennemy tombe>
Ainsi le Laboureur d'unefobujlemain,
De la gerbequ'il batfait
sortirtout legrain.
Pour eux contre la mort il
n'est aucun azyle,
A chaquepasqu'ilfait il
-
enecrasè mille;
Ainsi le Vendangeurpour
avoirplus de vin,
Sous lepesant pressoir é-
,
crase leraisin.
Les coups portentpar tout
des atteintes mortelles,
C'estenvain qu'emploiant
lesecours de leursasiles,
Pour éviter leur perte ils
traversent les airs
Des cadavresépars tous
les champssont couverts
y Les ventsfontmoins tomber
defeuilles en Automne
LaFaucilleabb, at moins
d'épis quand on mois
sonne,
Licas de toutespartsvainqueur
impetueux,
Massacre en un moment
des bataillons nombreux;
Tel un Lion de sang 0*
decarnageavide,
Exerce sa fureur sur un
troupeau timide.
Tel onvit autrefois dans
leschamps Phrygiens
Achille ason courroux immoler
les Troyens.
Par la paix, cettegrande
Qf terriblejournée
Au gré des deux partis
fust enfin terminée.
LesHannetonsvaincus
signerent un traité,
Promirent à Licas ce
vainqueur indompté,
De ne plus ravager de
formaisson domaine.
Mules, qui m'inspirez
laissezmoy prendre )
Mm#,
Préparez,d'autres vers, chantons une autrepaix
, Quele Cieffdrj&r^&fe accorde
à nossebaits
Pitrjfeparsonretourcette
,.,
Paixdesirée ,.
1 K^mner/h^^tgm'fs.
àç&atww es de Rheey
Etfinissant les maux que
nous avonssoufferts;
Enchaisnerpmp jamais
la Discordeaux Enfers.
Fin du fecond & dernier
Chant,
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Résumé : LA DEFAITE des Hannetons. POEME en deux Chants.
En novembre 1713, Licas, résidant paisiblement à Paris, apprend que ses vergers sont ravagés par des hannetons. Il se rend sur place et constate l'étendue des dégâts. Fou de rage, il invoque Pomone, la déesse des vergers, qui lui assure son soutien pour exterminer les hannetons. Licas attend avec impatience le moment de l'attaque et, dès l'aube, il se lance à l'assaut des insectes. Pomone l'accompagne et renforce sa détermination. Licas combat les hannetons avec une fureur comparable à celle d'Achille contre les Troyens. Après une journée de lutte acharnée, les hannetons, vaincus, signent un traité promettant de ne plus ravager les domaines de Licas. Le texte se conclut par un appel à la paix et à la fin des souffrances.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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22
p. 280-288
Supplement aux nouvelles.
Début :
On écrit de Hambourg que les dernieres lettres de Copenhague [...]
Mots clefs :
Roi, Carrosse, Hommes, Cour, Combat
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Supplement aux nouvelles.
Supplement aux nouvelles.
On écrit de Hambourg
que les dernieres lettres de
Copenhague portoient que
'armée du Roy de Danne
mark
GALANT. 281
marck ſe monte à trente
mille hommes , qu'aprés
les obſeques de la Reine
ſa Mere , il eſt revenu de
Rofſchild à Copenhague.
Cette Princeſſe étoit Fille
de Guillaume VI. Langgrave
de Heſſe- Caffel, elle
étoit née le 27. Avril 1650 .
elle épouſa le 15. Juin 1667.
Chreftien V. Roy de Dannemarck
, dont elle a eu
ſeptEnfans, deſquels qua
tre font morts. Les trois autres
font (Frederic IV. à
preſent, regnant , né le
Octobre 1671. Sophie Ed-
May 1714. Aa
282 MERCURE
vvige née le 28. Août 1677.
Charles né le 25. Octobre
1680. On dit qu'il y a eu un
combat en Finlande ,où les
Mofcovites ont eu l'avantage
; d'autres affûrent que
le Czar à la tête de so.
mille hommes fait le tour
de la mer de Bothnie, pour
s'avancer dans la Suede
malgré la longueur du
chemin, & la difficulté des
paſlages enfin le bruir
court qu'il y a eu un com
bat naval entre les Suedois
& les Danois , & que les
Danois ontétébattus : mais
1
GALANT. 22.8833
on n'ajoûte pas beaucoup
de foy à toutes ces nouvelles.
On mande de Vienne
du 13. May que les Comtes
de Goës & de Seilern , Plenipotentiaires
de l'Empereur
, font partis le 6. pour
ſe rendre à Bade en Suiſſe.
La priſon de l'Hoſpodar de
Valaquie , qu'on a arrêté
avec ſes trois fils, ſans qu'on
en ſcache la caufe , fait
fonner bien du monde.
L'Hiſtoire de la victoire du
Bacha de Bagdad n'eſt pas.
veritable : mais il eſt vray
rai-
Aa ij
284 MERCURE
1
qu'il a été battu par les
Bachas de Damas & d'A
dep. skisthanos πο
De Madridale 15. May.
Le vieux Alcade Hali qui
commandoit depuis quinze
ans les fiege de Ceuta eſt
enfin mort. Un des Fils du
Roy de Maroc a pris fa
place, fon audace , & plus
de 20. mille hommes d'aumentation
qu'il a reçûs ,
font apprehender qu'il ne
tienne à ſon pere la parole
qu'il lui a donnée de prendre
cette place en quinze
jours. Ces menaces ont dé
1
GALANT. 285
,
terminé la Cour à envoyer
en Andaloufie avec un
renfort confiderable de
troupes , une groſſe quantité
de toutes fortes de proviſions,
pour les faire paf
fer à Ceura. Il y a quelque
temps qu'on n'a reçû ici
aucune nouvelle confide
rable du camp devantBarcelonne.
On mande ſeulement
que le BrigadierDon
Geronimo de Solis eft for
ti de Tarragone avec un
gros détachement pour en
joindre un plus fort àVil
lefranche de Panados,&
286 MERCURE
aller attaquer un corps de
rebeiles, qui s'eſt retranché
au pont d'Armentera
le Cayano, th
fur
De Rome le 5. May. Les
differens entre les Genois
& cette Cour à l'occaſion
des cenfures , publiées
contre le Pere Granelli ,
Religieux de l'Ordre de S.
François , ne paroiffent ,
point encore en termes
d'accommodement. LeRoi
de Sicile ne veut rien relâcher
de ſes droits à cette
Cour. L'audiance que les
Cardinal Aquaviva eut du
GALANT. 287
1
Pape le 25. Avril ſur les dif
ferens que la Cour deMadrid
a avec celle- ci , paroît
n'être d'aucune utilité , ni
pour l'un ni pour l'autre.
Le mariage du Prince de
Paleſtrin Barbarin avec la
Fille de las Princeſſe de
Piombino a été conclu ;
c'eſt le Cardinal Ottoboni
qui'en a fait lademande au
nomdu Prince.
De Paris. Le 27. de ce
mois M. Buys & M. de Goflinga
, Ambaſſadeurs extraordinaires
de Hollande ,
firent leur entrée publique
:
288 MERCURE
en cette ville , ſuivis d'un
cortege des plus magnifiques.
Les 2. Secretaires de
l'ambaffade étoient dans le
2. caroffe deM. Buys . Les4.
Gentilshommes de l'Ambaffadeurdans
le caroffe de
Madame. Les 2.fous Secre
taires de l'ambaſſade dans le
3. caroffe de M. de Goflinga.
Dans le 3. caroffe de M. Buys
eroitM. ſon fils, avec les 2. Au.
móniers de l'abaſlade. La ſuite
deMM. les Ambaſladeurs étoit
cõpoſée de 8. Pages, 2. Ecuyers,
&15. caroffes à fix chevaux , de
pluſieurs Gentilshommes, de 2.
Suites à cheval,& de 36. Valets
depied, tons richement habillez.
FIN.
On écrit de Hambourg
que les dernieres lettres de
Copenhague portoient que
'armée du Roy de Danne
mark
GALANT. 281
marck ſe monte à trente
mille hommes , qu'aprés
les obſeques de la Reine
ſa Mere , il eſt revenu de
Rofſchild à Copenhague.
Cette Princeſſe étoit Fille
de Guillaume VI. Langgrave
de Heſſe- Caffel, elle
étoit née le 27. Avril 1650 .
elle épouſa le 15. Juin 1667.
Chreftien V. Roy de Dannemarck
, dont elle a eu
ſeptEnfans, deſquels qua
tre font morts. Les trois autres
font (Frederic IV. à
preſent, regnant , né le
Octobre 1671. Sophie Ed-
May 1714. Aa
282 MERCURE
vvige née le 28. Août 1677.
Charles né le 25. Octobre
1680. On dit qu'il y a eu un
combat en Finlande ,où les
Mofcovites ont eu l'avantage
; d'autres affûrent que
le Czar à la tête de so.
mille hommes fait le tour
de la mer de Bothnie, pour
s'avancer dans la Suede
malgré la longueur du
chemin, & la difficulté des
paſlages enfin le bruir
court qu'il y a eu un com
bat naval entre les Suedois
& les Danois , & que les
Danois ontétébattus : mais
1
GALANT. 22.8833
on n'ajoûte pas beaucoup
de foy à toutes ces nouvelles.
On mande de Vienne
du 13. May que les Comtes
de Goës & de Seilern , Plenipotentiaires
de l'Empereur
, font partis le 6. pour
ſe rendre à Bade en Suiſſe.
La priſon de l'Hoſpodar de
Valaquie , qu'on a arrêté
avec ſes trois fils, ſans qu'on
en ſcache la caufe , fait
fonner bien du monde.
L'Hiſtoire de la victoire du
Bacha de Bagdad n'eſt pas.
veritable : mais il eſt vray
rai-
Aa ij
284 MERCURE
1
qu'il a été battu par les
Bachas de Damas & d'A
dep. skisthanos πο
De Madridale 15. May.
Le vieux Alcade Hali qui
commandoit depuis quinze
ans les fiege de Ceuta eſt
enfin mort. Un des Fils du
Roy de Maroc a pris fa
place, fon audace , & plus
de 20. mille hommes d'aumentation
qu'il a reçûs ,
font apprehender qu'il ne
tienne à ſon pere la parole
qu'il lui a donnée de prendre
cette place en quinze
jours. Ces menaces ont dé
1
GALANT. 285
,
terminé la Cour à envoyer
en Andaloufie avec un
renfort confiderable de
troupes , une groſſe quantité
de toutes fortes de proviſions,
pour les faire paf
fer à Ceura. Il y a quelque
temps qu'on n'a reçû ici
aucune nouvelle confide
rable du camp devantBarcelonne.
On mande ſeulement
que le BrigadierDon
Geronimo de Solis eft for
ti de Tarragone avec un
gros détachement pour en
joindre un plus fort àVil
lefranche de Panados,&
286 MERCURE
aller attaquer un corps de
rebeiles, qui s'eſt retranché
au pont d'Armentera
le Cayano, th
fur
De Rome le 5. May. Les
differens entre les Genois
& cette Cour à l'occaſion
des cenfures , publiées
contre le Pere Granelli ,
Religieux de l'Ordre de S.
François , ne paroiffent ,
point encore en termes
d'accommodement. LeRoi
de Sicile ne veut rien relâcher
de ſes droits à cette
Cour. L'audiance que les
Cardinal Aquaviva eut du
GALANT. 287
1
Pape le 25. Avril ſur les dif
ferens que la Cour deMadrid
a avec celle- ci , paroît
n'être d'aucune utilité , ni
pour l'un ni pour l'autre.
Le mariage du Prince de
Paleſtrin Barbarin avec la
Fille de las Princeſſe de
Piombino a été conclu ;
c'eſt le Cardinal Ottoboni
qui'en a fait lademande au
nomdu Prince.
De Paris. Le 27. de ce
mois M. Buys & M. de Goflinga
, Ambaſſadeurs extraordinaires
de Hollande ,
firent leur entrée publique
:
288 MERCURE
en cette ville , ſuivis d'un
cortege des plus magnifiques.
Les 2. Secretaires de
l'ambaffade étoient dans le
2. caroffe deM. Buys . Les4.
Gentilshommes de l'Ambaffadeurdans
le caroffe de
Madame. Les 2.fous Secre
taires de l'ambaſſade dans le
3. caroffe de M. de Goflinga.
Dans le 3. caroffe de M. Buys
eroitM. ſon fils, avec les 2. Au.
móniers de l'abaſlade. La ſuite
deMM. les Ambaſladeurs étoit
cõpoſée de 8. Pages, 2. Ecuyers,
&15. caroffes à fix chevaux , de
pluſieurs Gentilshommes, de 2.
Suites à cheval,& de 36. Valets
depied, tons richement habillez.
FIN.
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Résumé : Supplement aux nouvelles.
Le texte relate divers événements politiques et militaires en Europe. À Hambourg, l'armée danoise compte trente mille hommes, et le roi est revenu à Copenhague après les funérailles de sa mère, la reine Sophie Amalie, née en 1650 et épouse de Christian V depuis 1667. Ils ont eu sept enfants, dont trois survivants : Frédéric IV, Sophie Edwige et Charles. En Finlande, des combats opposent Moscovites et Suédois, mais les détails restent incertains. À Vienne, les comtes de Goës et de Seilern se rendent en Suisse. L'arrestation de l'Hospodar de Valachie et de ses fils soulève des questions. À Madrid, la mort de l'Alcade Hali à Ceuta et les menaces du fils du roi du Maroc poussent la cour à envoyer des renforts. En Espagne, des troupes sont déployées contre des rebelles près de Barcelone. À Rome, des différends entre les Génois et la cour pontificale persistent, notamment concernant le Père Granelli. Le mariage du Prince de Palestrina avec la fille de la Princesse de Piombino est annoncé. Enfin, à Paris, les ambassadeurs extraordinaires de Hollande, M. Buys et M. de Goslinga, font une entrée publique magnifiquement orchestrée.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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23
p. 2007-2008
ALLEMAGNE.
Début :
On a appris de Bareith, que la nuit du 28. au 29. du mois dernier, le feu ayant pris [...]
Mots clefs :
Feu, Flammes, Ours, Chiens, Combat
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ALLEMAGNE.
ALLEMAGNE.
Na appris de Bareith , que la nuit du 28.
au 29. du mois dernier le feu
> ayant pris
à la maison d'un Tailleur dans la Ville de Wunsiedel
, les flames s'étoient communiquées aux
Maisons voisines avec tant de violence et de ra
pidité , que toute la Ville dans laquelle on
compte plus de 500. maisons , avoit été reduite
en cendres en moins de deux heures , sans que
les habitans eussent eu le temps de sauver leurs
Hij effets !
,
2008 MERCURE DE FRANCE
effets. Douze Personnes ont peri dans les flames
et le nombre des blessés est fort grand.
Le Margrave de Bareith s'y rendit le 30. Juillet
pour consoler les pauvres habitans , qui sont
réduits à la derniere misere ; ce Prince a ordonné
d'y faire voiturer plusieurs chariots chargés de
Pain &c.
"
On mande de Konigsberg , capitale de la Prusse
Ducale , que le Roy y avoit pris sur la fin du
mois dernier le divertissement d'un combar
assez singulier. On vit d'abord combattre deux
Boeufs sauvages contre six Ours três furieux
dont deux furent tués par les premiers. Après
que ce combat eut duré trois heures , S. M. tua
Jes . Boeufs sauvages avec des Arquebuses rayées :
une des bales que le Roi tira sur le plus grand
de ces Boeufs , donna droit au front , mais elle
n'entra point et sauta comme si elle eut été
·
tirée contre une muraille. On lâcha ensuite des
chiens contre les Ours , qu'on fit sortir un à un
Jesquels furent tués par le Comte de Schlieben et
Mr. Bock , Grand - Maître des Forêts. Le dernier
et le plus furieux de ces Ours , pensa coûter
bien cher à M. Bock : cet Animal quoique fort
blessé , ayant deux lances dans le corps , et attaqué
par quinze chiens , vint se jetter sur Mr.
Bock , et après avoir cassé la lance que ce deznier
vouloit luy enfoncer ", il le terrassa , enleva
une partie de son habit , et luy auroit fait un
mauvais parti , si le comte de Schliehen , qui
vint promptement à son secours , ne l'eût percé
d'un coup de lance.
Na appris de Bareith , que la nuit du 28.
au 29. du mois dernier le feu
> ayant pris
à la maison d'un Tailleur dans la Ville de Wunsiedel
, les flames s'étoient communiquées aux
Maisons voisines avec tant de violence et de ra
pidité , que toute la Ville dans laquelle on
compte plus de 500. maisons , avoit été reduite
en cendres en moins de deux heures , sans que
les habitans eussent eu le temps de sauver leurs
Hij effets !
,
2008 MERCURE DE FRANCE
effets. Douze Personnes ont peri dans les flames
et le nombre des blessés est fort grand.
Le Margrave de Bareith s'y rendit le 30. Juillet
pour consoler les pauvres habitans , qui sont
réduits à la derniere misere ; ce Prince a ordonné
d'y faire voiturer plusieurs chariots chargés de
Pain &c.
"
On mande de Konigsberg , capitale de la Prusse
Ducale , que le Roy y avoit pris sur la fin du
mois dernier le divertissement d'un combar
assez singulier. On vit d'abord combattre deux
Boeufs sauvages contre six Ours três furieux
dont deux furent tués par les premiers. Après
que ce combat eut duré trois heures , S. M. tua
Jes . Boeufs sauvages avec des Arquebuses rayées :
une des bales que le Roi tira sur le plus grand
de ces Boeufs , donna droit au front , mais elle
n'entra point et sauta comme si elle eut été
·
tirée contre une muraille. On lâcha ensuite des
chiens contre les Ours , qu'on fit sortir un à un
Jesquels furent tués par le Comte de Schlieben et
Mr. Bock , Grand - Maître des Forêts. Le dernier
et le plus furieux de ces Ours , pensa coûter
bien cher à M. Bock : cet Animal quoique fort
blessé , ayant deux lances dans le corps , et attaqué
par quinze chiens , vint se jetter sur Mr.
Bock , et après avoir cassé la lance que ce deznier
vouloit luy enfoncer ", il le terrassa , enleva
une partie de son habit , et luy auroit fait un
mauvais parti , si le comte de Schliehen , qui
vint promptement à son secours , ne l'eût percé
d'un coup de lance.
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Résumé : ALLEMAGNE.
Le 29 du mois dernier, un incendie a détruit plus de 500 maisons à Wunsiedel en Allemagne en moins de deux heures, causant la mort de douze personnes et blessant de nombreux habitants. Le Margrave de Bareith a visité la ville le 30 juillet pour apporter son soutien et a ordonné l'envoi de vivres aux habitants affectés. À Königsberg, capitale de la Prusse Ducale, le roi a assisté à un combat singulier à la fin du mois dernier. Deux bœufs sauvages ont affronté six ours furieux, tuant deux d'entre eux. Après trois heures de combat, le roi a abattu les bœufs avec des arquebuses. Des chiens ont ensuite été lâchés contre les ours, qui ont été tués par le Comte de Schlieben et M. Bock, Grand-Maître des Forêts. Le dernier ours, malgré ses blessures, a attaqué M. Bock, qui a été sauvé in extremis par le Comte de Schlieben.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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24
p. 2738-2761
EXTRAIT des Plaidoyers prononcez au College de Louis le Grand.
Début :
On continue à faire dans ce College tous les ans avec un succès constant [...]
Mots clefs :
Collège de Louis le Grand, Plaidoyers, Père de la Santé, Délibération, Luxe, Rhétorique, Duel, Combat, Citoyens, Oisiveté, Indépendance, Prince, Discours, France
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT des Plaidoyers prononcez au College de Louis le Grand.
EXTRAIT des Plaidoyers prononcer
an College de Louis le Grand.
Ο
N continue à faire dans ce College
tous les ans avec un succès constant
des Plaidoyers François , qui pour l'or- dinaire se font sur des sujets propres à
former l'esprit et le cœur de la jeune
Noblesse qu'on y éleve .
Le Pere de la Sante , Jesuite , l'un des
Professeurs de Rhétorique , en fit réciter
un le 27. d'Août dernier , dont nous allons donner l'Extrait , et dont voici le
sujet tel qu'il étoit dans le Programme
imprimé.
II. Vol. DE-
DECEMBRE. 1732. 2739
DELIBERATION concernant la
jeune Noblesse d'un Etat. Sujet traité
en forme de Plaidoyer François , par
les Rhétoriciens du College de Louis
LE GRAND.
Le jeune Casimir , Prince des plus verò
tueux qu'ait eûs la Pologne , indigné des désordres qui commençoient à s'introduire parmi la jeune Noblesse de sa Cour , pressa
fortement le Roy son pere de réprimer cette
licence par des Loix salutaires. Le Roy
Casimir III. surnommé le Grand , établit
pour cet effet une Commission , à la tête de
laquelle il mit le Prince son fils , avec plein.
pouvoir de regler tout ce qu'il jugeroit de
plus convenable au bien public , après avoir
entendu les discours et pris les avis des Commissaires.
Casimir nomme pour la discussion de cette
importante affaire,quelques Seigneurs des plus
reglez et des mieux instruits de la conduite
des jeunes gens ; il leur ordonne de proposer
en sa présence ce qui leur semble le plus
répréhensible , et même d'indiquer les moyens
qui leur paroissent les plus capables d'ar
rêter le cours du mal ; il leur promet au
nom du Roy une place plus ou moins distinguée dans le Conseil d'Etat , suivant
Putilité plus ou moins grande de la découII. Vol A v verte
2740 MERCURE DE FRANCE
verte qu'ils feront et de la Loy qu'ils suggereront en cette Seance.
Le premier qui parle , porte sa plainte contre le Luxe ou les folles dépenses.
Le second contre le Duel on le faux
point d'honneur.
Le troisieme , contre l'oisiveté ou la fai
neantise.
Le quatrième , contre l'indépendance des
jeunes Seigneurs.
Chacun d'eux prétend que le desordre qu'il
releve, mérite le plus l'attention du Prince ,
et la séverité des Loix. Casimir dresse les
articles de la Loy , décide sur l'ordre qu'on
·garderà dans l'execution, et regle le rang que
les quatre Commissaires tiendront dans le
Conseil d'Etat. Tel est l'objet de cette déliberation et dujugement qui la doit suivre.
Casimir , dans un Discours Préliminaire , fait voir quelle doit être la vigilance d'un Prince sur tous les Membres d'un Etat et particulierement sur la
conduite de la jeune Noblesse , dont les
exemples sont d'une utile ou dangereuse
consequence, parce que donnant des Maîtres au Peuple , elle doit aussi lui donner des modelles. Il invite les Seigneurs
qui composent son Conseil à l'éclairer de
leurs lumieres dans la délibération qui
doit préceder le Reglement general.
II. Vol. Ex-
DECEMBRE. 1732. 2741
}
EXTRAIT DU I. DISCOURS.
Contre le Luxe.
Les Partisans du Luxe employent deux
prétextes pour colorer leurs folles dépenses ; 1. elles sont , disent- ils , nécessaires pour soutenir leur rang. 2 ° . Elles
contribuent même à la gloire et à l'utilité de la Nation. Le jeune Orateur employe deux veritez pour réfuter ces deux
prétextes ; 1º . le Luxe , bien loin de
mettre la jeune Noblesse en état de soutenir son rang , ruine les esperances des
plus grandes Maisons. 2 ° . Le Luxe , bien
loin d'être glorieux et utile à la Nation
épuise les plus sures ressources.
Premiere Partie.
Sur quoi est fondée l'esperance d'une
grande Maison sur opulence qu'elle
possede ou qu'elle attend. Le Luxe épuise
l'une et met hors d'état d'acquerir l'autre. Sur le mérite de ceux qui la compo-.
sent ? Un homme livré au luxe n'a gueres d'autre mérite que celui de bien arranger un repas , et d'autre talent que
celui de se ruiner avec éclat sur les places distinguées qu'elle peut occuper ? mais
ou ces places sont venales , et alors ces
II. Vol. A vj jeunes
2742 MERCURE DE FRANCE
jeunes dissipateurs trouveront-ils de quoi
les acheter ? ou c'est la liberalité du Prince
qui en fait la récompense de la capacité
et de l'application d'un sujet habile et
laborieux ; sont- ils de ce caractere sur
les alliances honorables qu'elle peut former mais où les trouver ? parmi des
égaux ? qui d'entre eux voudra courir les
risques de voir des biens , le fruit de ses
sueurs , devenir la proye d'un prodigue
qui en a déja tant dissipé ... pour soutenir une maison chancelante; il faudra
donc la dégrader , et mêlant un sang
illustre avec celui de quelqu'une de ces
familles ennoblies par une rapide et suspecte opulence , acheter des biens aux dépens de l'honneur , et former des nœuds
peu sortables , qui font la honte des Nobles et le ridicule des Riches ... Qu'estce qui a forcé tant de familles illustres
tombées par l'indigence dans une espece
de roture , à s'ensevelir dans le sombre
réduit d'une Campagne ignoré ? quest- ce
qui a confondu avec les fils des Artisans
les descendans de tant de Héros , dont
les mains enchaînées par la pauvreté , ne
peuvent plus manier d'autre fer que celui
des vils instrumens de leur travail ! remontons à la source : c'est un Pere ou un
Ayeul prodigue qui a donné dans tous les
II. Vol. travers
DECEMBRE. 1732. 2743
travers du faste. Posterité nombreuse que
vous êtes à plaindre ! faut- il qu'un Pere
dissipateur enfante tant de miseres et dé
sole tant de miserables ? .. Le luxe n'est .
pas moins préjudiciable à l'Etat dont il
épuise les ressources.
Seconde Partie.
Il est certaines occasions d'éclat qui authorisent une magnificence extraordinaire: elle est alors légitime pour le particu .
lier , et glorieuse pour la nation. Mais
que ces mêmes Seigneurs n'écoutant que
leur passion pour le luxe , dissipent en
dépenses frivoles et le bien qu'ils ont , et
celui qu'ils doivent , et celui qu'ils esperent ; c'est un abus criminel , c'est une injustice criante contre les droits du Prince,
de leurs créanciers , de leurs enfans et de
la nation entiere , dont elle ruine le commerce , et dont par - là elle épuise les ressources.
"
Il est certains besoins qui obligent le
Prince à demander des secours pour la
conservation de tout le corps de l'Etat :
si les particuliers prodiguent leurs fonds ,
comment préteront ils leur ministere au maintien de tout ce corps ? le commerce
nesera-t-il pas détruit,quand le marchand,
faute d'être payé, sera hors d'état de payer
II. Fol lui
2744 MERCURE DE FRANCE
lui-même , et quand obligé de faire une
banqueroute imprévue , il fera succomber ses correspondants sous ses ruines ,
comment pourvoira un dissipateur à l'éducation de ses enfans , dont il risque sur
une carte la fortune et la subsistance ? les
domestiques d'un tel maître , renvoyez
sans gages après plusieurs années de services , ne sont-ils pas réduits à la plus déplorable mendicité...Quelle inhumanité,
quede se repaître les yeux des larmes ameresque l'on fait verser à tant de misérables ?
Que ne trempe-t-il ses mains parricides
dans leur sang? que ne leur arrache- t il la
vie , puisqu'il les prive de toutes ses douceurs.
Ce furent ces considérations qui firent
autrefois proscrire le luxe de toutes les Républiques bien réglées , comme une des
principales sources du renversement des
Empires...L'Orateur conclut à réprimer
par une severité sans adoucissement une
licence qui est sans bornes ; et à faire , s'il
le faut , un malheureux pour le mettre
hors d'état d'en faire des millions d'autres.
EXTRAIT DU II. DISCOURS.
Contre le Duel.
Le duel , disent ses partisans , est une
II. Vol. voie
DECEMBRE. 1732. 2745
-voie glorieuse pour réparer l'honneur outragé et c'est , ajoutent- ils, un moyen des
plus éficaces pour former des braves à
l'Etat. Pour détruire ces deux idées chimériqués , l'Orateur en établit deux réelles , par lesquelles il prouve 1 ° . que le
duel à plus de quoi deshonorer un ´homme que de quoi lui faire honneur. 2°.Que
l'Etat y perd beaucoup plus qu'il n'y gagne.
Premiere Partie.
La premiere proposition doit paroître
aux duelistes paradoxe , on en établit la
verité sur les causes et les suites du duel.
Les unes et les autres deshonorent la raison , et doivent le faire regarder comme
une insigne folie et comme l'opprobre de
l'humanité.
De quelles sources partent d'ordinaire
ces combats singuliers ? consultons les acteurs de ces scenes tragiques ; c'est selon
eux courage, intrépidité, grandeur d'ame.
Consultons l'expérience , c'est fureur ,
emportement , petitesse d'esprit qui ne.
peut digerer une raillerie , ce sont tous les
vices qui font les lâches. Tel voudroit passer pour un Achille , qui n'est au fond
qu'un Thersite decidé. On brave le peril
quand il est éloigné; approche-t- il ? la pa- 11. Vol. leur
2746 MERCURE DE FRANCE
leur peinte sur le visage des champions
annonce le trouble de leur esprit. Les uns
cherchent un lieu écarté, pour n'avoir aucun témoin qui les censure , les autres
cherchent un lieu frequenté pour avoir
des amis officieux qui les separent. Les
separe-t-on ! on blâme en public comme
un mal dont on doit se plaindre , ce qu'en
secret on regarde comme un bien dont on
se felicite. A- t -on eu du dessous dans le
combat? les glaives étoient inégaux , un
hazard imprévu a decidé la querelle &c.
D'autres vont au combat avec moins
de lâcheté y vont- ils avec moins de folie ? Quel sujet les arme communément ?
un étranger paroît dans la ville ; il passe
pour brave , on veut être son ennemi. Il
faut du sang pour cimenter la connoissance, et pour paroître brave devenir inhu
main. Cent autres sujets plus legers armcnt cent autres combatans plus coupables. Quelles horreurs ! deux rivaux se
font un divertissement de ces combats
sanguinaires on en a vu autrefois s'enfermerdans des tonneaux où ils ne pouvoient
reculer et là renouveller les scenes effrayantes des cruels Andabates , qui se portoient
des coups à l'aveugle , comme pour ne pas
voi la mortq'ils s'entredonnoient Onen
a vu d'autres s'embrasser avant que de
II. Vol. s'égorger
DECEMBRE. 1732: 27+7 27+7
s'égorger , et le symbole de l'amitié devenir le signal d'un assassinat.
Je n'attaque jamais le premier, dira quelqu'un: Je vous loue; mais pourquoi vous
attaque-t-on ? que n'êtes vous plus humain , plus poli , plus complaisant ? On
m'attaque sans raison : pourquoi accepter
le cartel ? n'est- il point d'autre voye pour
vous faire justice ? mais si je refuse , je suis deshonoré ; ouy , si vous n'êtes scrupuleux que sur l'article du duel... mais l'usa
ge le veut dites l'abus. Si vous vous trouviés dans ces contrées barbares, où la loi de
l'honneur veut qu'on se jette dans la flamme du bucher , sur lequel se consume le
corps mort d'un ami , croiriez- vous pouvoir sans folie vous assujettir à une si étran
ge coutume ? ... mais je compte icy donner la mort et non pas la recevoir. Combien d'autres l'ont reçue en comptant la,
donner ? Du moins avoués, ou que vous la
craignez , et deslors vous êtes lâche , ou
que vous la cherchez de sang froid , et
deslors vous êtes insensé , et que vous y
exposant contre les loix de la conscience ,
vous êtes impie.
Quant aux effets du duel, il n'y a qu'à jetter les yeux sur ses suites infamantes.L'indignation du Prince, la perte de la liberté,
de la noblesse,des biens, de la vie; l'indiII. Vol. gence
2748 MERCURE DE FRANCE
gence , l'inominie qu'il attire sur la posterité du coupable , tout cela ne suffit il
pas pour faire voir combien le duël flétrit
l'honneur du Vivant et du Mort, du vainqueur et du vaincu : mais quel tort ne faitil pas à l'Etat ? c'est ce qui reste à exami- ner.
Seconde Partie.
Prétendre le duel forme des Braves que
à l'Etat , c'est ne pas avoir une juste idée
de la veritable bravoure. Elle consiste dans
un courage intrépide animépar le devoir,
soutenu par la justice , armé par le zele
pour la deffense de la Patrie . La valeur
des Duelistes a- t'elle ces caracteres ? Au
lieu de produire dans l'ame cette fermeté
tranquille qu'inspire la bonté du parti
pour lequel on combat , elle n'y enfante.
que le trouble et ces violens transports
qui suivent toujours les grands crimes. Au
lieu d'allumer dans le cœur et dans les
yeux ce beau feu qui fait reconnoître les
Heros , elle répand sur le visage une sombre fureur qui caracterise les assassins.
Le Duel est une espece d'image de la
Guerre civile ; le nombre des combattans
en fait presque l'unique difference. Il est
moindre dans le Duel , mais le péril n'en
est que plus certain. Ignorent-ils donc
II. Vol. qu'ils
DECEMBR E. 1732. 2749
qu'ils doivent leur sang au service du
Prince ? Leur est-il permis d'en disposer
au gré de leur haine ? et tourner leurs armes contre les Citoyens , n'est- ce pas les
tourner contre le sein de la Patrie , leur
Mere commune.
En vain veulent - ils s'authoriser par
l'exemple des anciens Heros. Leurs combats singuliers n'étoient rien moins que
des Duels , puisqu'ils ne s'agissoit point
entr'eux de vanger des injures particulieres , mais d'épargner pour l'interêt de
la Patrie le sang de la multitude. Tel fut
le combat des trois Horaces , et des trois
Curiaces. Les Romains qui lui ont donné
de si justes éloges , étoient les ennemis
les plus déclarez du Duel. On sçait combien l'ancienne Rome cherissoit le sang
de ses Citoyens de là ces Couronnes civiques pour quiconque avoit sauvé la vie
à un de ses Enfans : de là ces peines décernées contre tout Citoyen convaincu d'en
avoir appellé un autre dans la lice sanglan
te; on cessoit dès- lors d'être Citoyen , et
la profession de Dueliste conduisoit au
rang d'esclave gladiateur.
Les Maures dans un siecle plus barbare
avoient conçû une telle horreur pour ces
sortes de combats , qu'ils ne les permettoient qu'aux valets chargés du bagage de
II. Vol.
l'Ar-
2750 MERCURE DE FRANCE
l'Armée quel modele pour nos Duelistes ?
:
C'est donc ce monstre qu'il faut exterminer de la Pologne par une loy aussi severe dans son exécution , qu'immuable
dans sa durée. Punir certains crimes , c'est
prévenir la tentation de les commettre.
Une punition sévere dispense d'une punition fréquente. Après tout , le plus sûr
moyen d'abolir le duel dépend des particuliers. Qu'ils écoutent la raison aidée de
l'honneur et de la foi ; qu'ils soient hommes et Chrétiens , et ils cesseront d'être
Duelistes.
EXTRAIT DU III. DISCOURS,
Contre P'Oisiveté
L'Oisiveté fait trop d'heureux en idée
pour ne point avoir de Partisans. Que ne
doit pas craindre l'Etat d'un vice qui est
la source de tous les autres. Plus elle a
d'attraits qui la rendent dangereuse , plus
on doit empêcher qu'elle ne devienne
commune ; pour mieux connoîtte ce qu'on
doit en penser , il faut voir ce qu'on en
peut craindre. 10. Un homme oisif est un
citoyen inutile à la République. 20. il ne
peut lui être inutile sans devenir bien- tôt
pernicieux.
II. Vol. Pre-
DECEMBRE. 1732. 2758
Premiere Partie.
Je ne suis , dit un oisif , coupable d'au
eun vice qui me deshonore : je le veux
pourroit- on lui répondre ; mais votre fai
néantise ne vous rend- elle pas capable de
tous les vices ? Vous n'entrés dans aucune
Societé mauvaise ; à la bonne heure : mais
quel rang tenez- vous dans la Societé.humaine ? Vous n'êtes point un méchant
homme , soit : mais êtes- vous un homme?
Membres d'une même famille, Sujets d'un
même Roi , Parties d'une même Societé
nous avons des devoirs à remplir à leur
égard un oisif peut - il s'en acquitter ?
?
Comment veut-on qu'un jeune effeminé , toujours occupé à ne rien faire , ou
à faire des riens , soutienne le crédit de sa
famille pourra- t'il acquerir de la réputa
tion dans un Etat ? elle est le prix du
travail ; rendre des services aux amis atta
chez à sa maison ? il n'interromproit pas son repos pour ses interêts , le sacrifierat'il aux interêts d'autrui ? Eterniser les
vertus de ses peres , et le souvenir de leurs
travaux il faudroit une noble émulation , la mollesse en a éteint le feu dans
son cœur sa famille se flattoit qu'il seI. Vol. roit
#752 MERCURE DE FRANCE
roit son appui à peine sçait- il qu'il en est
membre.
:
Est- il plus utile à la Société civile ? la
Noblesse doit être comme l'ame de tout
ce corps de citoyens : le goût d'un Seigneur qui gouverneune Province en donne à tous ceux qui l'habitent : les Sciences , les beaux Arts , tout s'anime à sa
vûë , tout prend une forme riante : à sa
place substituer un homme oisif; quel
changement ! tout languit , tout s'endort
avec lui ; non- seulement il ne fait aucun
bien , mais il rend inutile le bien qu'on
avoit fait.
Que peuvent attendre le Prince et l'Etat , d'un homme qui se regarde comme
l'unique centre où doivent aboutir tous
ses sentimens , et toutes ses pensées ? quel
poste important lui confiera- t'on ? Sçaurat'il remettre ou entretenir dans une Province le bon ordre , prévoir et réprimer
les mauxque l'on craint ? quel embarras !
il ne craint d'autre mal que le sacrifice
de son repos. Chargera t'on ses foibles
mains de cette balance redoutable , qui
pese les interêts des hommes ? quel fardeau ! il faut s'en décharger dans une
main étrangere aux dépens de son honneur
et de nos fortunes. Lui confiera- t'on la
conduite des armées ? quel tumulte ! La
II. Vol. Guerre
DECEMBRE. 1732. 1732. 2753
Guerre s'accommoda t'elle jamais avec la
mollesse ? Ainsi l'oisif devient, tout à la
fois la honte de sa famille qu'il dégrade ,
de la Societé qu'il deshonore , de l'Etat
qu'il trahit : mais son portrait n'est encore qu'ébauché , il ne peut être citoyen.
inutile sans devenir citoyen perni
cieux.
>
Seconde Partie.
Dès que le poison de l'oisiveté s'est glis
sé dans un jeune cœur , il en glace toute
l'ardeur , il dérange tous ses ressorts , il
arrête tous ses mouvemens vers le bien
il en fait le theatre de ses passions et le
jouer des passions d'autrui. C'est par là
que l'oisiveté devient funeste aux jeunes
Seigneurs , et ne les rend presque jamais
inutiles qu'elle ne les rende en même
tems pernicieux à l'Etat.
Se refuser au bien , c'est presque tou
jours se livrer au mal. Qu'une Maison , où
ces Heros de la mollesse trouvent accès
est à plaindre que de vices , un seul vice
n'y fera t'il pas entrer ! ces discours ne feront ils point baisser les yeux à la sage
Retenue , à la timide Pudeur ? La Tem
pérance et la Sobrieté seront-elles respectées dans ses repas ? mais surtout , que ne
II.Vol. doin
4754 MERCURE DE FRANCE
doit pas craindre la République en général ?
Semblables à ces Insectes odieux , qui
ne subsistent qu'aux dépens de la république laborieuse des Abeilles , et la troublent sans cesse dans ses travaux utiles
ils vivent délicieusement dans le sein et
aux frais de la Patrie , et se servent souvent de leur aiguillon contre elle. Ils boivent les sucurs des citoyens laborieux , et
s'enyvrent quelquefois de leur sang.
Ce qui doit armer le plus les loix contre l'Oisiveté , c'est qu'elle réunit ce que
les trois autres vices qui entrent en concurrence avec elle ont de plus odieux . Un
jeune oisif qui confie le soin de sa maison
à un perfide Intendant dont il n'éxige
presque aucun compte , ne perd- il pas
souvent plus de biens par sa négligence ,
que le prodigue n'en dissipe par son luxe ? Ne le verra- t- on pas secouer bien-tôt
le joug de la contrainte qui gêne son humeur , et voulant donner à tous la loy ,
ne la recevoir que de son caprice ? L'amour des oisifs pour la vie douce est un
préservatif contre la tentation du duel ;
mais la seule idée que l'on a conçue de
leur peu de courage, n'engagera-t'elle pas
de jeunes Duelistes à les attaquer , ne futII. Vol. ce
DECEMBRE. 1732 2755
ce que pour se faire une réputation aux
dépens de la leur.
L'Orateur conclut à bannir de toutes
charges ceux qui seront convaincus de ce
vice , et à les noter par quelque punition
qui caracterise leur défaut.
EXTRAIT DU IV. DISCOURS.
Contre l'Indépendance.
L'ame du bon gouvernement c'est le
bon ordre ; le bon ordre ne subsiste que
par la subordination. L'Indépendance en
sappe tous les fondemens ; quand elle se
trouve dans les jeunes Seigneurs , 1º elle
les accoûtume à braver l'autorité ; 20 elle
les porte à prétendre mêmeau droit d'impunité.
Premiere Partie.
Pour connoître le danger de l'indépen
dance, il faut voir comment elle se forme
dans la jeune Noblesse , et jusqu'où elle
peut étendre ses progrès contre l'autorité
légitime. La naissance et l'éducation , voilà
ses sources. Comment éleve- t'on les jeunes Seigneurs ? L'or sous lequel ils rampent dans l'enfance éblouit leurs yeux ; le
faste qui les environne enfle leur esprit ;
les plaisirs qu'on leur procure corrom- II. Vol.
B pent
2755 MERCURE DE FRANCE
pent leur cœur : mollesse d'éducation qui
fait les délices de l'enfance , et prépare
les révoltes de la jeunesse.
,
La raison est à peine éclose , qu'ils ferment les yeux à sa lumiere , et les oreilles
à sa voix. Les Maîtres veulent- ils les rap.
peller aux devoirs? les flatteurs les en écartent , et leur apprennent qu'ils sont plus
nés pour commander que pour obéïr ; à
force de donner la loy, on s'habituë à ne la
plus recevoir. Veut-on s'opposer au mal ,
et les confier à des Maîtres plus amis du
devoir que de la fortune ? ils ne plient
que pour se redresser bien- tôt avec plus
de force dès qu'ils en auront la li
berté.
Quel bonheur pour un jeune Indépen
dant , s'il a auprès de lui un Mentor qui
craignant beaucoup moins pour la vie
que pour l'innocence de son Telemaque ,
aime mieux se précipiter avec lui du haut
d'un affreux Rocher , que de le voir se
précipiter dans l'abîme du vice ! Mais
trouve-t'on beaucoup de Gouverneurs de
ce caractere ? Combien flattent leur Eleve dans ses desirs , se mettent de moitié
avec lui pour ses plaisirs ; et devant être
ses maîtres , deviennent ses esclaves ! détestable éducation qui d'un indépendant
fait quelquefois un scelerat.
II. Vol.
L'In-
DECEMBRE.
873202757
L'Indépendance conduit à la révolte ,
l'Eleve intraitable devient fils rebelle ;
combien en a-t'on vû braver l'autorité
paternelle , outrager la Nature , et d'indépendans qu'ils étoient , n'avoir besoin
que de changer de nom pour devenir dénaturés ? Mauvais fils sera- t'il bon sujet ?
peut- on s'en flatter surtout dans un
Royaume électif, où l'on est quelquefois
tenté , de faire avec audace , ' ce qu'on croit
pouvoir faire avec avantage ?
,
La plus florissante République de la
terre , Rome la maîtresse du monde pres- -qu'entier , se vit sur le point d'être saccagée et réduite en cendres. Qui alluma
l'incendie ? une cabale de jeunes factieux ,
conduits par Catilina , et possedés du
démon de l'indépendance. Que de sang
ne fallut- il pas répandre pour éteindre ce
feu ? Autorité domestique et publique
loix divines et humaines , tout est sacrifié
à l'impérieux désir de se rendre indépendant. La loi violée s'arme- t'elle du glaive
pour vanger ces attentats ? Après avoir bravé ses réglemens , ils bravent ses menaces , et s'arrogent le droit d'impunité.
Seconde Partie.
Si l'on en croit les jeunes Seigneurs indépendans , leur jeunesse et leur condi11. Vol.
Bij tion
4758 MERCURE DE FRANCE
tion les mettent à couvert des loix et do
la punition qu'elles prescrivent.
La jeunesse est l'âge où le feu des passions s'allume ; c'est donc aussi le tems.
où l'on doit s'appliquer à l'éteindre. Fautil attendre que l'incendie ait pris des forces et se soit communiqué ? trop de severité , il est vrai , révolte et fait hair le
devoir , mais tropd'indulgence enhardit ,
et fait violer la loi.
- La Noblesse est l'état où les exemples
sont plus contagieux ; mais c'est donc
aussi l'etat où les punitions sont plus
- nécessaires. Les sujets d'un moindre étage regardent ces jeunes Seigneurs autant
comme leurs modéles que comme leurs
maîtres. Un coupable de la sorte impuni
fait un million de coupables dans l'espé
rance de l'impunité.
Aussi Rome et Sparte punissoient- elles
séverement l'indépendance et le mépris
des loix dans les jeunes gens de qualité.
Deux Chevaliers Romains furent autrefois dégradés de leur ordre , et mis au
rang des Plebéïens , pour n'avoir pas assez promptement obéï à un Proconsul.
peu de roture parut alors un excellent
remède contre le vertige de l'indépendance. Comme l'élévation du rang produit les fumées de l'orgueil , l'humilia
Un
tion les dissipe
DECEMBRE. 1732 2750
EXTRAIT DU V. DISCOURS.
Fait par le Prince après les Plaidoyers:
Casimir après avoir entendu les discours
des Parties , fait sentir le fort et le foible
des raisons alleguées , et en ajoute plu
sieurs nouvelles dont le détail seroit long.
Il établit pour principe que le premier
desordre contre lequel doive sévir le Législateur , est celui qui porte un plus
grand préjudice au plus grand nombre des
sujets ; c'est à dire , celui qui est le plus
considérable en lui- même et le plus étendu
dans ses suites. Sur ce principe il éxamine
les quatres desordres proposez , et les balance long-tems par une infinité de preu
ves que nous sommes fâchez d'omettre
mais que ne nous permet pas la brièveté
que nous nous sommes prescrite dans les
extraits. Il résulte de cet examen que les
jeunes Seigneurs independans sont les
plus coupables , sur tout parce qu'ils violent la loi fondamentale de l'ordre politique, c'est- à- dire l'obéïssance et la soumission : et nous pouvons , dit le Juge , espe- rer de mettre un frein à l'amour des folles
dépenses , à la manie du faux point-d'hon- neur , à l'indolence et à l'oisiveté des faineans par de bons et salutaires Edits : mais
II. Vol. Biij pour
260 MERCURE DE FRANCE
2
,
cepenpour l'indépendant , si son caprice le porte à être dissipateur , dueliste , et indolent de profession , en vertu de son systeme et de ses principes d'indépendance , il
se maintiendra en possession de ces trois
desordres , et ses maximes favorites nous
répondent par avance qu'il comptera pour
rien la loi que nous allons porter contre
lui et contre ses consorts. Portons - la
dant cette loi , &c.
Là- dessus le Prince prononce , 1° contre
l'Indépendance , 2 ° contre l'Oisiveté , 3 ° .
contre le Duel , 4° contre le Luxe , et il
rend raison de l'ordre qu'il observe en ce
Jugement. Ensuite il porte differentes loix
qu'il croit les plus propres à remedier à
chaque desordre , et telles à peu près qu'Athenes en porta contre l'Indépendance ,
Lacedemone contre l'Oisiveté , Rome
contre le Luxe , et la France avec une partie de l'Europe contre le Duel.
Enfin M. d'Aligre qui avoit été complimenté par M. le Pelletier de Rosambo sur
la noblesse et la dignité avec laquelle il
avoit présidé à ce Jugement , le felicita à
son tour de la finesse et de la délicatesse
d'esprit qui avoit éclaté dans son discours ;
il fit aussi compliment à M. de Bussy sur
son éloquence et sur son talent à parler
en public; à M. Petit, sur son beau feu
II. Vol. d'imagina
DECEMBRE. 1732. 2761
d'imagination ; à M. de Verac sur l'élegance de son Plaidoyer et les graces de sa prononciation . L'illustre Assemblée souscrivit sans peine à la justice de ces éloges.
an College de Louis le Grand.
Ο
N continue à faire dans ce College
tous les ans avec un succès constant
des Plaidoyers François , qui pour l'or- dinaire se font sur des sujets propres à
former l'esprit et le cœur de la jeune
Noblesse qu'on y éleve .
Le Pere de la Sante , Jesuite , l'un des
Professeurs de Rhétorique , en fit réciter
un le 27. d'Août dernier , dont nous allons donner l'Extrait , et dont voici le
sujet tel qu'il étoit dans le Programme
imprimé.
II. Vol. DE-
DECEMBRE. 1732. 2739
DELIBERATION concernant la
jeune Noblesse d'un Etat. Sujet traité
en forme de Plaidoyer François , par
les Rhétoriciens du College de Louis
LE GRAND.
Le jeune Casimir , Prince des plus verò
tueux qu'ait eûs la Pologne , indigné des désordres qui commençoient à s'introduire parmi la jeune Noblesse de sa Cour , pressa
fortement le Roy son pere de réprimer cette
licence par des Loix salutaires. Le Roy
Casimir III. surnommé le Grand , établit
pour cet effet une Commission , à la tête de
laquelle il mit le Prince son fils , avec plein.
pouvoir de regler tout ce qu'il jugeroit de
plus convenable au bien public , après avoir
entendu les discours et pris les avis des Commissaires.
Casimir nomme pour la discussion de cette
importante affaire,quelques Seigneurs des plus
reglez et des mieux instruits de la conduite
des jeunes gens ; il leur ordonne de proposer
en sa présence ce qui leur semble le plus
répréhensible , et même d'indiquer les moyens
qui leur paroissent les plus capables d'ar
rêter le cours du mal ; il leur promet au
nom du Roy une place plus ou moins distinguée dans le Conseil d'Etat , suivant
Putilité plus ou moins grande de la découII. Vol A v verte
2740 MERCURE DE FRANCE
verte qu'ils feront et de la Loy qu'ils suggereront en cette Seance.
Le premier qui parle , porte sa plainte contre le Luxe ou les folles dépenses.
Le second contre le Duel on le faux
point d'honneur.
Le troisieme , contre l'oisiveté ou la fai
neantise.
Le quatrième , contre l'indépendance des
jeunes Seigneurs.
Chacun d'eux prétend que le desordre qu'il
releve, mérite le plus l'attention du Prince ,
et la séverité des Loix. Casimir dresse les
articles de la Loy , décide sur l'ordre qu'on
·garderà dans l'execution, et regle le rang que
les quatre Commissaires tiendront dans le
Conseil d'Etat. Tel est l'objet de cette déliberation et dujugement qui la doit suivre.
Casimir , dans un Discours Préliminaire , fait voir quelle doit être la vigilance d'un Prince sur tous les Membres d'un Etat et particulierement sur la
conduite de la jeune Noblesse , dont les
exemples sont d'une utile ou dangereuse
consequence, parce que donnant des Maîtres au Peuple , elle doit aussi lui donner des modelles. Il invite les Seigneurs
qui composent son Conseil à l'éclairer de
leurs lumieres dans la délibération qui
doit préceder le Reglement general.
II. Vol. Ex-
DECEMBRE. 1732. 2741
}
EXTRAIT DU I. DISCOURS.
Contre le Luxe.
Les Partisans du Luxe employent deux
prétextes pour colorer leurs folles dépenses ; 1. elles sont , disent- ils , nécessaires pour soutenir leur rang. 2 ° . Elles
contribuent même à la gloire et à l'utilité de la Nation. Le jeune Orateur employe deux veritez pour réfuter ces deux
prétextes ; 1º . le Luxe , bien loin de
mettre la jeune Noblesse en état de soutenir son rang , ruine les esperances des
plus grandes Maisons. 2 ° . Le Luxe , bien
loin d'être glorieux et utile à la Nation
épuise les plus sures ressources.
Premiere Partie.
Sur quoi est fondée l'esperance d'une
grande Maison sur opulence qu'elle
possede ou qu'elle attend. Le Luxe épuise
l'une et met hors d'état d'acquerir l'autre. Sur le mérite de ceux qui la compo-.
sent ? Un homme livré au luxe n'a gueres d'autre mérite que celui de bien arranger un repas , et d'autre talent que
celui de se ruiner avec éclat sur les places distinguées qu'elle peut occuper ? mais
ou ces places sont venales , et alors ces
II. Vol. A vj jeunes
2742 MERCURE DE FRANCE
jeunes dissipateurs trouveront-ils de quoi
les acheter ? ou c'est la liberalité du Prince
qui en fait la récompense de la capacité
et de l'application d'un sujet habile et
laborieux ; sont- ils de ce caractere sur
les alliances honorables qu'elle peut former mais où les trouver ? parmi des
égaux ? qui d'entre eux voudra courir les
risques de voir des biens , le fruit de ses
sueurs , devenir la proye d'un prodigue
qui en a déja tant dissipé ... pour soutenir une maison chancelante; il faudra
donc la dégrader , et mêlant un sang
illustre avec celui de quelqu'une de ces
familles ennoblies par une rapide et suspecte opulence , acheter des biens aux dépens de l'honneur , et former des nœuds
peu sortables , qui font la honte des Nobles et le ridicule des Riches ... Qu'estce qui a forcé tant de familles illustres
tombées par l'indigence dans une espece
de roture , à s'ensevelir dans le sombre
réduit d'une Campagne ignoré ? quest- ce
qui a confondu avec les fils des Artisans
les descendans de tant de Héros , dont
les mains enchaînées par la pauvreté , ne
peuvent plus manier d'autre fer que celui
des vils instrumens de leur travail ! remontons à la source : c'est un Pere ou un
Ayeul prodigue qui a donné dans tous les
II. Vol. travers
DECEMBRE. 1732. 2743
travers du faste. Posterité nombreuse que
vous êtes à plaindre ! faut- il qu'un Pere
dissipateur enfante tant de miseres et dé
sole tant de miserables ? .. Le luxe n'est .
pas moins préjudiciable à l'Etat dont il
épuise les ressources.
Seconde Partie.
Il est certaines occasions d'éclat qui authorisent une magnificence extraordinaire: elle est alors légitime pour le particu .
lier , et glorieuse pour la nation. Mais
que ces mêmes Seigneurs n'écoutant que
leur passion pour le luxe , dissipent en
dépenses frivoles et le bien qu'ils ont , et
celui qu'ils doivent , et celui qu'ils esperent ; c'est un abus criminel , c'est une injustice criante contre les droits du Prince,
de leurs créanciers , de leurs enfans et de
la nation entiere , dont elle ruine le commerce , et dont par - là elle épuise les ressources.
"
Il est certains besoins qui obligent le
Prince à demander des secours pour la
conservation de tout le corps de l'Etat :
si les particuliers prodiguent leurs fonds ,
comment préteront ils leur ministere au maintien de tout ce corps ? le commerce
nesera-t-il pas détruit,quand le marchand,
faute d'être payé, sera hors d'état de payer
II. Fol lui
2744 MERCURE DE FRANCE
lui-même , et quand obligé de faire une
banqueroute imprévue , il fera succomber ses correspondants sous ses ruines ,
comment pourvoira un dissipateur à l'éducation de ses enfans , dont il risque sur
une carte la fortune et la subsistance ? les
domestiques d'un tel maître , renvoyez
sans gages après plusieurs années de services , ne sont-ils pas réduits à la plus déplorable mendicité...Quelle inhumanité,
quede se repaître les yeux des larmes ameresque l'on fait verser à tant de misérables ?
Que ne trempe-t-il ses mains parricides
dans leur sang? que ne leur arrache- t il la
vie , puisqu'il les prive de toutes ses douceurs.
Ce furent ces considérations qui firent
autrefois proscrire le luxe de toutes les Républiques bien réglées , comme une des
principales sources du renversement des
Empires...L'Orateur conclut à réprimer
par une severité sans adoucissement une
licence qui est sans bornes ; et à faire , s'il
le faut , un malheureux pour le mettre
hors d'état d'en faire des millions d'autres.
EXTRAIT DU II. DISCOURS.
Contre le Duel.
Le duel , disent ses partisans , est une
II. Vol. voie
DECEMBRE. 1732. 2745
-voie glorieuse pour réparer l'honneur outragé et c'est , ajoutent- ils, un moyen des
plus éficaces pour former des braves à
l'Etat. Pour détruire ces deux idées chimériqués , l'Orateur en établit deux réelles , par lesquelles il prouve 1 ° . que le
duel à plus de quoi deshonorer un ´homme que de quoi lui faire honneur. 2°.Que
l'Etat y perd beaucoup plus qu'il n'y gagne.
Premiere Partie.
La premiere proposition doit paroître
aux duelistes paradoxe , on en établit la
verité sur les causes et les suites du duel.
Les unes et les autres deshonorent la raison , et doivent le faire regarder comme
une insigne folie et comme l'opprobre de
l'humanité.
De quelles sources partent d'ordinaire
ces combats singuliers ? consultons les acteurs de ces scenes tragiques ; c'est selon
eux courage, intrépidité, grandeur d'ame.
Consultons l'expérience , c'est fureur ,
emportement , petitesse d'esprit qui ne.
peut digerer une raillerie , ce sont tous les
vices qui font les lâches. Tel voudroit passer pour un Achille , qui n'est au fond
qu'un Thersite decidé. On brave le peril
quand il est éloigné; approche-t- il ? la pa- 11. Vol. leur
2746 MERCURE DE FRANCE
leur peinte sur le visage des champions
annonce le trouble de leur esprit. Les uns
cherchent un lieu écarté, pour n'avoir aucun témoin qui les censure , les autres
cherchent un lieu frequenté pour avoir
des amis officieux qui les separent. Les
separe-t-on ! on blâme en public comme
un mal dont on doit se plaindre , ce qu'en
secret on regarde comme un bien dont on
se felicite. A- t -on eu du dessous dans le
combat? les glaives étoient inégaux , un
hazard imprévu a decidé la querelle &c.
D'autres vont au combat avec moins
de lâcheté y vont- ils avec moins de folie ? Quel sujet les arme communément ?
un étranger paroît dans la ville ; il passe
pour brave , on veut être son ennemi. Il
faut du sang pour cimenter la connoissance, et pour paroître brave devenir inhu
main. Cent autres sujets plus legers armcnt cent autres combatans plus coupables. Quelles horreurs ! deux rivaux se
font un divertissement de ces combats
sanguinaires on en a vu autrefois s'enfermerdans des tonneaux où ils ne pouvoient
reculer et là renouveller les scenes effrayantes des cruels Andabates , qui se portoient
des coups à l'aveugle , comme pour ne pas
voi la mortq'ils s'entredonnoient Onen
a vu d'autres s'embrasser avant que de
II. Vol. s'égorger
DECEMBRE. 1732: 27+7 27+7
s'égorger , et le symbole de l'amitié devenir le signal d'un assassinat.
Je n'attaque jamais le premier, dira quelqu'un: Je vous loue; mais pourquoi vous
attaque-t-on ? que n'êtes vous plus humain , plus poli , plus complaisant ? On
m'attaque sans raison : pourquoi accepter
le cartel ? n'est- il point d'autre voye pour
vous faire justice ? mais si je refuse , je suis deshonoré ; ouy , si vous n'êtes scrupuleux que sur l'article du duel... mais l'usa
ge le veut dites l'abus. Si vous vous trouviés dans ces contrées barbares, où la loi de
l'honneur veut qu'on se jette dans la flamme du bucher , sur lequel se consume le
corps mort d'un ami , croiriez- vous pouvoir sans folie vous assujettir à une si étran
ge coutume ? ... mais je compte icy donner la mort et non pas la recevoir. Combien d'autres l'ont reçue en comptant la,
donner ? Du moins avoués, ou que vous la
craignez , et deslors vous êtes lâche , ou
que vous la cherchez de sang froid , et
deslors vous êtes insensé , et que vous y
exposant contre les loix de la conscience ,
vous êtes impie.
Quant aux effets du duel, il n'y a qu'à jetter les yeux sur ses suites infamantes.L'indignation du Prince, la perte de la liberté,
de la noblesse,des biens, de la vie; l'indiII. Vol. gence
2748 MERCURE DE FRANCE
gence , l'inominie qu'il attire sur la posterité du coupable , tout cela ne suffit il
pas pour faire voir combien le duël flétrit
l'honneur du Vivant et du Mort, du vainqueur et du vaincu : mais quel tort ne faitil pas à l'Etat ? c'est ce qui reste à exami- ner.
Seconde Partie.
Prétendre le duel forme des Braves que
à l'Etat , c'est ne pas avoir une juste idée
de la veritable bravoure. Elle consiste dans
un courage intrépide animépar le devoir,
soutenu par la justice , armé par le zele
pour la deffense de la Patrie . La valeur
des Duelistes a- t'elle ces caracteres ? Au
lieu de produire dans l'ame cette fermeté
tranquille qu'inspire la bonté du parti
pour lequel on combat , elle n'y enfante.
que le trouble et ces violens transports
qui suivent toujours les grands crimes. Au
lieu d'allumer dans le cœur et dans les
yeux ce beau feu qui fait reconnoître les
Heros , elle répand sur le visage une sombre fureur qui caracterise les assassins.
Le Duel est une espece d'image de la
Guerre civile ; le nombre des combattans
en fait presque l'unique difference. Il est
moindre dans le Duel , mais le péril n'en
est que plus certain. Ignorent-ils donc
II. Vol. qu'ils
DECEMBR E. 1732. 2749
qu'ils doivent leur sang au service du
Prince ? Leur est-il permis d'en disposer
au gré de leur haine ? et tourner leurs armes contre les Citoyens , n'est- ce pas les
tourner contre le sein de la Patrie , leur
Mere commune.
En vain veulent - ils s'authoriser par
l'exemple des anciens Heros. Leurs combats singuliers n'étoient rien moins que
des Duels , puisqu'ils ne s'agissoit point
entr'eux de vanger des injures particulieres , mais d'épargner pour l'interêt de
la Patrie le sang de la multitude. Tel fut
le combat des trois Horaces , et des trois
Curiaces. Les Romains qui lui ont donné
de si justes éloges , étoient les ennemis
les plus déclarez du Duel. On sçait combien l'ancienne Rome cherissoit le sang
de ses Citoyens de là ces Couronnes civiques pour quiconque avoit sauvé la vie
à un de ses Enfans : de là ces peines décernées contre tout Citoyen convaincu d'en
avoir appellé un autre dans la lice sanglan
te; on cessoit dès- lors d'être Citoyen , et
la profession de Dueliste conduisoit au
rang d'esclave gladiateur.
Les Maures dans un siecle plus barbare
avoient conçû une telle horreur pour ces
sortes de combats , qu'ils ne les permettoient qu'aux valets chargés du bagage de
II. Vol.
l'Ar-
2750 MERCURE DE FRANCE
l'Armée quel modele pour nos Duelistes ?
:
C'est donc ce monstre qu'il faut exterminer de la Pologne par une loy aussi severe dans son exécution , qu'immuable
dans sa durée. Punir certains crimes , c'est
prévenir la tentation de les commettre.
Une punition sévere dispense d'une punition fréquente. Après tout , le plus sûr
moyen d'abolir le duel dépend des particuliers. Qu'ils écoutent la raison aidée de
l'honneur et de la foi ; qu'ils soient hommes et Chrétiens , et ils cesseront d'être
Duelistes.
EXTRAIT DU III. DISCOURS,
Contre P'Oisiveté
L'Oisiveté fait trop d'heureux en idée
pour ne point avoir de Partisans. Que ne
doit pas craindre l'Etat d'un vice qui est
la source de tous les autres. Plus elle a
d'attraits qui la rendent dangereuse , plus
on doit empêcher qu'elle ne devienne
commune ; pour mieux connoîtte ce qu'on
doit en penser , il faut voir ce qu'on en
peut craindre. 10. Un homme oisif est un
citoyen inutile à la République. 20. il ne
peut lui être inutile sans devenir bien- tôt
pernicieux.
II. Vol. Pre-
DECEMBRE. 1732. 2758
Premiere Partie.
Je ne suis , dit un oisif , coupable d'au
eun vice qui me deshonore : je le veux
pourroit- on lui répondre ; mais votre fai
néantise ne vous rend- elle pas capable de
tous les vices ? Vous n'entrés dans aucune
Societé mauvaise ; à la bonne heure : mais
quel rang tenez- vous dans la Societé.humaine ? Vous n'êtes point un méchant
homme , soit : mais êtes- vous un homme?
Membres d'une même famille, Sujets d'un
même Roi , Parties d'une même Societé
nous avons des devoirs à remplir à leur
égard un oisif peut - il s'en acquitter ?
?
Comment veut-on qu'un jeune effeminé , toujours occupé à ne rien faire , ou
à faire des riens , soutienne le crédit de sa
famille pourra- t'il acquerir de la réputa
tion dans un Etat ? elle est le prix du
travail ; rendre des services aux amis atta
chez à sa maison ? il n'interromproit pas son repos pour ses interêts , le sacrifierat'il aux interêts d'autrui ? Eterniser les
vertus de ses peres , et le souvenir de leurs
travaux il faudroit une noble émulation , la mollesse en a éteint le feu dans
son cœur sa famille se flattoit qu'il seI. Vol. roit
#752 MERCURE DE FRANCE
roit son appui à peine sçait- il qu'il en est
membre.
:
Est- il plus utile à la Société civile ? la
Noblesse doit être comme l'ame de tout
ce corps de citoyens : le goût d'un Seigneur qui gouverneune Province en donne à tous ceux qui l'habitent : les Sciences , les beaux Arts , tout s'anime à sa
vûë , tout prend une forme riante : à sa
place substituer un homme oisif; quel
changement ! tout languit , tout s'endort
avec lui ; non- seulement il ne fait aucun
bien , mais il rend inutile le bien qu'on
avoit fait.
Que peuvent attendre le Prince et l'Etat , d'un homme qui se regarde comme
l'unique centre où doivent aboutir tous
ses sentimens , et toutes ses pensées ? quel
poste important lui confiera- t'on ? Sçaurat'il remettre ou entretenir dans une Province le bon ordre , prévoir et réprimer
les mauxque l'on craint ? quel embarras !
il ne craint d'autre mal que le sacrifice
de son repos. Chargera t'on ses foibles
mains de cette balance redoutable , qui
pese les interêts des hommes ? quel fardeau ! il faut s'en décharger dans une
main étrangere aux dépens de son honneur
et de nos fortunes. Lui confiera- t'on la
conduite des armées ? quel tumulte ! La
II. Vol. Guerre
DECEMBRE. 1732. 1732. 2753
Guerre s'accommoda t'elle jamais avec la
mollesse ? Ainsi l'oisif devient, tout à la
fois la honte de sa famille qu'il dégrade ,
de la Societé qu'il deshonore , de l'Etat
qu'il trahit : mais son portrait n'est encore qu'ébauché , il ne peut être citoyen.
inutile sans devenir citoyen perni
cieux.
>
Seconde Partie.
Dès que le poison de l'oisiveté s'est glis
sé dans un jeune cœur , il en glace toute
l'ardeur , il dérange tous ses ressorts , il
arrête tous ses mouvemens vers le bien
il en fait le theatre de ses passions et le
jouer des passions d'autrui. C'est par là
que l'oisiveté devient funeste aux jeunes
Seigneurs , et ne les rend presque jamais
inutiles qu'elle ne les rende en même
tems pernicieux à l'Etat.
Se refuser au bien , c'est presque tou
jours se livrer au mal. Qu'une Maison , où
ces Heros de la mollesse trouvent accès
est à plaindre que de vices , un seul vice
n'y fera t'il pas entrer ! ces discours ne feront ils point baisser les yeux à la sage
Retenue , à la timide Pudeur ? La Tem
pérance et la Sobrieté seront-elles respectées dans ses repas ? mais surtout , que ne
II.Vol. doin
4754 MERCURE DE FRANCE
doit pas craindre la République en général ?
Semblables à ces Insectes odieux , qui
ne subsistent qu'aux dépens de la république laborieuse des Abeilles , et la troublent sans cesse dans ses travaux utiles
ils vivent délicieusement dans le sein et
aux frais de la Patrie , et se servent souvent de leur aiguillon contre elle. Ils boivent les sucurs des citoyens laborieux , et
s'enyvrent quelquefois de leur sang.
Ce qui doit armer le plus les loix contre l'Oisiveté , c'est qu'elle réunit ce que
les trois autres vices qui entrent en concurrence avec elle ont de plus odieux . Un
jeune oisif qui confie le soin de sa maison
à un perfide Intendant dont il n'éxige
presque aucun compte , ne perd- il pas
souvent plus de biens par sa négligence ,
que le prodigue n'en dissipe par son luxe ? Ne le verra- t- on pas secouer bien-tôt
le joug de la contrainte qui gêne son humeur , et voulant donner à tous la loy ,
ne la recevoir que de son caprice ? L'amour des oisifs pour la vie douce est un
préservatif contre la tentation du duel ;
mais la seule idée que l'on a conçue de
leur peu de courage, n'engagera-t'elle pas
de jeunes Duelistes à les attaquer , ne futII. Vol. ce
DECEMBRE. 1732 2755
ce que pour se faire une réputation aux
dépens de la leur.
L'Orateur conclut à bannir de toutes
charges ceux qui seront convaincus de ce
vice , et à les noter par quelque punition
qui caracterise leur défaut.
EXTRAIT DU IV. DISCOURS.
Contre l'Indépendance.
L'ame du bon gouvernement c'est le
bon ordre ; le bon ordre ne subsiste que
par la subordination. L'Indépendance en
sappe tous les fondemens ; quand elle se
trouve dans les jeunes Seigneurs , 1º elle
les accoûtume à braver l'autorité ; 20 elle
les porte à prétendre mêmeau droit d'impunité.
Premiere Partie.
Pour connoître le danger de l'indépen
dance, il faut voir comment elle se forme
dans la jeune Noblesse , et jusqu'où elle
peut étendre ses progrès contre l'autorité
légitime. La naissance et l'éducation , voilà
ses sources. Comment éleve- t'on les jeunes Seigneurs ? L'or sous lequel ils rampent dans l'enfance éblouit leurs yeux ; le
faste qui les environne enfle leur esprit ;
les plaisirs qu'on leur procure corrom- II. Vol.
B pent
2755 MERCURE DE FRANCE
pent leur cœur : mollesse d'éducation qui
fait les délices de l'enfance , et prépare
les révoltes de la jeunesse.
,
La raison est à peine éclose , qu'ils ferment les yeux à sa lumiere , et les oreilles
à sa voix. Les Maîtres veulent- ils les rap.
peller aux devoirs? les flatteurs les en écartent , et leur apprennent qu'ils sont plus
nés pour commander que pour obéïr ; à
force de donner la loy, on s'habituë à ne la
plus recevoir. Veut-on s'opposer au mal ,
et les confier à des Maîtres plus amis du
devoir que de la fortune ? ils ne plient
que pour se redresser bien- tôt avec plus
de force dès qu'ils en auront la li
berté.
Quel bonheur pour un jeune Indépen
dant , s'il a auprès de lui un Mentor qui
craignant beaucoup moins pour la vie
que pour l'innocence de son Telemaque ,
aime mieux se précipiter avec lui du haut
d'un affreux Rocher , que de le voir se
précipiter dans l'abîme du vice ! Mais
trouve-t'on beaucoup de Gouverneurs de
ce caractere ? Combien flattent leur Eleve dans ses desirs , se mettent de moitié
avec lui pour ses plaisirs ; et devant être
ses maîtres , deviennent ses esclaves ! détestable éducation qui d'un indépendant
fait quelquefois un scelerat.
II. Vol.
L'In-
DECEMBRE.
873202757
L'Indépendance conduit à la révolte ,
l'Eleve intraitable devient fils rebelle ;
combien en a-t'on vû braver l'autorité
paternelle , outrager la Nature , et d'indépendans qu'ils étoient , n'avoir besoin
que de changer de nom pour devenir dénaturés ? Mauvais fils sera- t'il bon sujet ?
peut- on s'en flatter surtout dans un
Royaume électif, où l'on est quelquefois
tenté , de faire avec audace , ' ce qu'on croit
pouvoir faire avec avantage ?
,
La plus florissante République de la
terre , Rome la maîtresse du monde pres- -qu'entier , se vit sur le point d'être saccagée et réduite en cendres. Qui alluma
l'incendie ? une cabale de jeunes factieux ,
conduits par Catilina , et possedés du
démon de l'indépendance. Que de sang
ne fallut- il pas répandre pour éteindre ce
feu ? Autorité domestique et publique
loix divines et humaines , tout est sacrifié
à l'impérieux désir de se rendre indépendant. La loi violée s'arme- t'elle du glaive
pour vanger ces attentats ? Après avoir bravé ses réglemens , ils bravent ses menaces , et s'arrogent le droit d'impunité.
Seconde Partie.
Si l'on en croit les jeunes Seigneurs indépendans , leur jeunesse et leur condi11. Vol.
Bij tion
4758 MERCURE DE FRANCE
tion les mettent à couvert des loix et do
la punition qu'elles prescrivent.
La jeunesse est l'âge où le feu des passions s'allume ; c'est donc aussi le tems.
où l'on doit s'appliquer à l'éteindre. Fautil attendre que l'incendie ait pris des forces et se soit communiqué ? trop de severité , il est vrai , révolte et fait hair le
devoir , mais tropd'indulgence enhardit ,
et fait violer la loi.
- La Noblesse est l'état où les exemples
sont plus contagieux ; mais c'est donc
aussi l'etat où les punitions sont plus
- nécessaires. Les sujets d'un moindre étage regardent ces jeunes Seigneurs autant
comme leurs modéles que comme leurs
maîtres. Un coupable de la sorte impuni
fait un million de coupables dans l'espé
rance de l'impunité.
Aussi Rome et Sparte punissoient- elles
séverement l'indépendance et le mépris
des loix dans les jeunes gens de qualité.
Deux Chevaliers Romains furent autrefois dégradés de leur ordre , et mis au
rang des Plebéïens , pour n'avoir pas assez promptement obéï à un Proconsul.
peu de roture parut alors un excellent
remède contre le vertige de l'indépendance. Comme l'élévation du rang produit les fumées de l'orgueil , l'humilia
Un
tion les dissipe
DECEMBRE. 1732 2750
EXTRAIT DU V. DISCOURS.
Fait par le Prince après les Plaidoyers:
Casimir après avoir entendu les discours
des Parties , fait sentir le fort et le foible
des raisons alleguées , et en ajoute plu
sieurs nouvelles dont le détail seroit long.
Il établit pour principe que le premier
desordre contre lequel doive sévir le Législateur , est celui qui porte un plus
grand préjudice au plus grand nombre des
sujets ; c'est à dire , celui qui est le plus
considérable en lui- même et le plus étendu
dans ses suites. Sur ce principe il éxamine
les quatres desordres proposez , et les balance long-tems par une infinité de preu
ves que nous sommes fâchez d'omettre
mais que ne nous permet pas la brièveté
que nous nous sommes prescrite dans les
extraits. Il résulte de cet examen que les
jeunes Seigneurs independans sont les
plus coupables , sur tout parce qu'ils violent la loi fondamentale de l'ordre politique, c'est- à- dire l'obéïssance et la soumission : et nous pouvons , dit le Juge , espe- rer de mettre un frein à l'amour des folles
dépenses , à la manie du faux point-d'hon- neur , à l'indolence et à l'oisiveté des faineans par de bons et salutaires Edits : mais
II. Vol. Biij pour
260 MERCURE DE FRANCE
2
,
cepenpour l'indépendant , si son caprice le porte à être dissipateur , dueliste , et indolent de profession , en vertu de son systeme et de ses principes d'indépendance , il
se maintiendra en possession de ces trois
desordres , et ses maximes favorites nous
répondent par avance qu'il comptera pour
rien la loi que nous allons porter contre
lui et contre ses consorts. Portons - la
dant cette loi , &c.
Là- dessus le Prince prononce , 1° contre
l'Indépendance , 2 ° contre l'Oisiveté , 3 ° .
contre le Duel , 4° contre le Luxe , et il
rend raison de l'ordre qu'il observe en ce
Jugement. Ensuite il porte differentes loix
qu'il croit les plus propres à remedier à
chaque desordre , et telles à peu près qu'Athenes en porta contre l'Indépendance ,
Lacedemone contre l'Oisiveté , Rome
contre le Luxe , et la France avec une partie de l'Europe contre le Duel.
Enfin M. d'Aligre qui avoit été complimenté par M. le Pelletier de Rosambo sur
la noblesse et la dignité avec laquelle il
avoit présidé à ce Jugement , le felicita à
son tour de la finesse et de la délicatesse
d'esprit qui avoit éclaté dans son discours ;
il fit aussi compliment à M. de Bussy sur
son éloquence et sur son talent à parler
en public; à M. Petit, sur son beau feu
II. Vol. d'imagina
DECEMBRE. 1732. 2761
d'imagination ; à M. de Verac sur l'élegance de son Plaidoyer et les graces de sa prononciation . L'illustre Assemblée souscrivit sans peine à la justice de ces éloges.
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Résumé : EXTRAIT des Plaidoyers prononcez au College de Louis le Grand.
Le texte relate un plaidoyer prononcé au Collège de Louis le Grand, où les élèves de rhétorique abordent des sujets destinés à former l'esprit et le cœur de la jeune noblesse. Le sujet choisi est la délibération concernant la jeune noblesse d'un État, inspirée par le prince Casimir de Pologne. Indigné par les désordres parmi la noblesse, Casimir demande à son père, le roi Casimir III, d'établir une commission pour réprimer ces excès. Le roi nomme des seigneurs pour discuter des problèmes et proposer des lois. Les quatre principaux désordres identifiés sont le luxe, le duel, l'oisiveté et l'indépendance des jeunes seigneurs. Chaque orateur argue que son désordre mérite la plus grande attention et sévérité. Casimir dresse ensuite les articles de la loi, décide de l'ordre d'exécution et règle le rang des commissaires dans le Conseil d'État. Dans le premier discours, contre le luxe, l'orateur réfute les prétextes des partisans du luxe, affirmant que celui-ci ruine les grandes maisons et épuise les ressources de la nation. Il souligne que le luxe empêche la jeune noblesse de soutenir son rang et est préjudiciable à l'État. Le luxe est décrit comme une injustice criante contre les droits du prince, des créanciers, des enfants et de la nation entière. Dans le deuxième discours, contre le duel, l'orateur démontre que le duel déshonore plus qu'il n'honore et que l'État y perd plus qu'il n'y gagne. Il critique les motivations des duels, souvent basées sur la fureur et la petitesse d'esprit, et non sur le véritable courage. Le duel est comparé à une forme de guerre civile et est jugé impie et insensé. L'orateur conclut en appelant à la répression sévère de ces désordres pour le bien public. Le texte aborde également l'oisiveté, décrite comme la source de nombreux autres vices. Un homme oisif est inutile à la République et devient rapidement pernicieux. L'oisiveté est comparée à un poison qui glace l'ardeur des jeunes cœurs et les rend funestes à l'État. Les oisifs vivent aux dépens de la patrie et troublent les travaux utiles des citoyens laborieux. L'indépendance est également critiquée. Elle s'enracine dans une éducation malsaine qui enseigne aux jeunes nobles à commander plutôt qu'à obéir. Cette indépendance conduit à la révolte et au mépris des lois. Les jeunes indépendants se croient au-dessus des lois et des punitions. Le texte cite l'exemple de la République romaine, où l'indépendance a failli la détruire. Les punitions sévères sont nécessaires pour dissuader les jeunes nobles de leur comportement rebelle. Enfin, le texte mentionne un discours du Prince qui examine quatre désordres : l'indépendance, l'oisiveté, le duel et le luxe. Il conclut que les jeunes seigneurs indépendants sont les plus coupables car ils violent la loi fondamentale de l'ordre politique, l'obéissance et la soumission. Le Prince prononce des lois contre ces quatre maux, en commençant par l'indépendance. Le document mentionne également des compliments échangés lors d'un jugement. M. d'Aligre a été félicité pour la noblesse et la dignité avec lesquelles il a présidé au jugement. Il a ensuite complimenté plusieurs personnes pour leurs talents respectifs. L'assemblée a approuvé ces éloges.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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25
p. 1540-1547
SUITE des Réfléxions sur la bizarerie des Usages. Par M. Capperon, ancien Doyen de Saint Maxent.
Début :
Qu'est-il besoin d'aller chercher chez les Anciens, chez les Grecs et les [...]
Mots clefs :
Lance, Vie, Temps, Usage, Usages, Bizarrerie, Combat, Ville, Espagne, Anciens
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texteReconnaissance textuelle : SUITE des Réfléxions sur la bizarerie des Usages. Par M. Capperon, ancien Doyen de Saint Maxent.
SUITE des Réfléxions sur la bizarerie
des Usages. Par M. Capperon , ancien
Doyen de Saint Maxent.
Q
U'est-il besoin d'aller chercher chez
les Anciens , chez les Grecs et les
Romains ; des Usages bizares , provenus
du désir de faire admirer sa force , n'en
avons- nous pas éu en France qui surpas
soient en bizarerie ceux de tous les Anciens
? tels étoient nos . Tournois , où
tant de Princes et de Personnes du premier
rang ont perdu la vié : c'étoit néanmoins
alors le spectacle qui paroissoit le
plus digne des grands Seigneurs du
Royaume. Il est bon , pour qu'on en
puisse mieux juger , que je rapporte en
peu de mots comme tout s'y passoit.
Premierement ceux qui devoient combattre
dans ces Tournois , devoient être
armés de toutes pièces , c'est- à-dite , revêtus
de fer depuis les pieds jusqu'à la
tête , suivant l'usage du tems. Aux deux
extrémitez de la Lice , où le combat se
devoit faire , étoient deux espéces de petits
théatres , où les deux assaillans montoient
chacun de leur côté. Du haut de
C
leus
JUILLET. 1733 1541
leur Cuirasse sortoit par le devant un
bouton de fer , qui étoit destiné pour
entrer dans un trou percé à dessein , au
bas du Casque. Tout étant ainsi préparé ,
un Serrurier se présentoit , pour river le
clou à coup de marteau , afin que le Casque
étant ainsi arrêté avec la Cuirasse
tel coup qu'on pût donner dans le milieu
du front , la tête ne pût aucunément
plier.
Les choses étant disposées de la sorte ,
et les deux Combattans étant montez sur
leurs chevaux , tenant chacun une lance
en arrêt , dont le fer étoit émoussé , ils
partoient à toute bride , pour voir lequel
des deux pourroit désarçonner et renverser
l'autre , en le frappant de la lance
au milieu du front. De la violence du`
coup , la lance étoit souvent rompuë et
brisée ; le cheval donnoit souvent du
derriere en terre , et qui plus est , souvent
l'un des deux Combattans y étoit
blessé , ou y perdoit la vie.
La France en a eu la triste expérience ,
dans la perte qu'elle y a fait du Roi Henri
II. Long- tems auparavant , on avoit eu ce
triste spectacle dans la Ville d'Eu ; sçavoir
en 1365. lorsque le Comte d'Eu ,
Jean d'Artois , ayant donné en mariage
Diij sa
1542 MERCURE DE FRANCE
sa fille Heleine d'Artois à Simon de
Thouars , Comte de Dreux ; la solemnité ,
des nôces s'en fit dans cette Ville ; comme,
en vue de rendre les plaisirs et les divertissemens
de cette solemnité plus
complets , il fut question d'y faire un
Tournois le jour même du mariage , le
nouvel Epoux ayant voulu être de la partie
, il eut le malheur d'y recevoir un
coup si funeste , qu'il lui ôta la vie , ce
qui rendit sa triste Epouse aussi tôr veuve
que mariée. Son mariage n'ayant pas été
consommé , elle ne porta toute sa vie
que le nom de Mademoiselle de Dreux :
ils sont tous deux inhumés dans l'Eglise
de l'Abbaye d'Eu , sous l'Horloge de
cette Abbaye , où est leur Mausolée. (a)
Telles étoient les funestes suites de ce bi
zare usage , ce qui obligea les Papes et les
Evêques à fulminer des anathémes contre
ceux qui les continueroient , et ce qui
donna lieu à un Ambassadeur Turc qui
vint en France, de dire , s'y étant trouvé,
que si ces combats se faisoient pour se
tuer , c'étoit trop peu , mais que s'ils se
faisoient pour se divertir , se divertir , c'étoir trop."
Il n'y a eu néanmoins que la mort d'Hen
ry II. qui les a fait cesser.
Ce n'étoit pas un usage moins bizare
(a) Mémoires du Comtéd'Eu.
ni
JUILLET. 1733. 1543
ni moins périlleux que celui dont quel
ques grands Seigneurs se faisoient un di
vertissement en France vers le milieu
du XVI. siécle . Vigenere , dans ses Ta❤
bleaux de Philostrate , nous apprend en
quoi il consistoit. C'est dans l'Endroit de
son Livre , où parlant du Tableau que
Philostrate a intitulé des bêtes noires , (b)
il se sert de cette occasion , pour rapportercomment
un de nos Comtes d'Eu,
François de Cléves , Duc de Nevers , Pere
de Catherine de Cléves , qui épousa le
Duc de Guise , tué à Blois , comment
dis-je , ce Seigneur relevant d'une maladie
, voulut se donner ce plaisir pour contribuer
par ce moyen au rétablissement
de sa santé.
3
Il dit donc qu'on commençoit par fermer
de planches le lieu où cet exercice
se devoit faire , qu'on construisoit tour
autour une espéce d'amphithéatre pour les
Specateurs. Tout étant préparé , et chaçun
ayant pris sa place , on faisoit entrer,
dans cette espéce de Cirque , trois ou
quatre grands Sangliers , de l'âge d'environ
trois ans , qui est le tems où ils sont
dans toute leur force. Enfin paroissoient
ceux qui devoient combattre contre ces
animaux ils étoient montez sur des
(6) Page 252.
D iiij
che1544
MERCURE DE FRANCE
chevaux vigoureux , mais à selles dessanglées
, étant tous masqués , et portant
sur leur cuisse une lance mornée , pour
attaquer chacun à leur tour une de ces
bêtes féroces.
Le Cavalier qui commençoit le combat
, n'avoit pas plutôt attaqué la bête ,
et donné quelques coups de lance , que ce
Sanglier , loin de reculer et de fuir , suivant
l'instinct naturel de ces animaux
venant tout au contraire sur lui , les
yeux étincelans de fureur , la gueule touse
en écume , et présentant ses deffenses ,
se jettoit d'abord à corps perdu sur la
lance pour la briser ; puis s'avançant vers
Je Cavalier , il faisoit tous ses efforts pour
l'atteindre et le déchirer. On peut bien
croire que le Cavalier ne négligeoit rien
de sa part pour se deffendre ; mais si
dans l'agitation qu'il étoit obligé de se
donner , la selle venoit malheureusement
à tourner , c'étoit alors que tombant malgré
lui à terre , tout étoit à craindre pour
sa vie , et que tous les spectateurs tremblans
de frayeur , étoient extrêmement
allarmés du péril ; mais c'étoit aussi alors
que les autres courant promptement à
son secours , et attaquant diversement
la bête , ils lui donnoient le tems de se
tirer d'un danger si éminent : ce qui
après
JUILLET. 1733. 1545
après tout réussissoit si bien , dit l'Auteur
, qu'il n'en arriva jamais aucun accident
ficheux. Quoique cet usage ne se
soit pas étendu beaucoup , et n'ait pas
duré , on avoüera que celui qui continue
en Espagne , et qui consiste à mettre des
Taureaux en fureur et à les combattre
n'est ni moins bizare , ni moins dange
reux pour la vie .
Vigenere qui fait le détail de ce Combat
contre des Sangliers , nous apprend
dans le même Livre , * que de son tems
l'usage de combattre à la lute étoit enco
re très - fréquent : c'est dans l'endroit , où
parlant du fils aîné du Duc de Nevers
qui fut envoyé en Espagne en 1560. par
Catherine de Medicis , il dit que ce jeune
Seigneur voulant paroître avec éclat
à la Cour d'Espagne , mena avec lui 20.
des plus braves et des plus accomplis
Gentilhommes du Royaume , desquels
étoit le Baron de S. Remy , que je crois
avoir été Gentilhomme du Comté d'Eu
où est la Terre de S. Remy , dont il
portoit le nom , lequel excelloit par dessus
tout dans les Combats à la lute.
5 C'est aussi de quoi il donna des preuves
éclatantes à la Cour d'Espagne , qui
résidoit alors à Valence : car ayant ap-
Table de la Palestre , p. 544.
Dy
:
pris
1546 MERCURE DE FRANCE
pris qu'il y avoit une espece de Géant dans
la Ville , il s'offrit à luter avec lui , se faisant
fort de le terrasser , nonobstant l'inégalité
de taille. Le défi ayant été accepté , et
s'étant présentez tous deux au milieu de
la principale Place de la Ville , pour don
ner ce spectacle , non- seulement à la
Cour , mais à tout le peuple qui y étoit
accouru en foule , notre Baron de S. Remy
éxécuta avec tant d'adresse ce qu'il
avoit promis , qu'il culbuta le Géant ,
près duquel il ne paroissoit qu'un Pigmée .
Les acclamations et les cris de joye retentirent
de toutes parts. Non - seulement les
Dames l'accablerent de Bouquets et de
Couronnes de fleurs ; mais après avoir reçû
des personnes les plus distinguées , des
présens d'honneur , il fut conduit en
triomphe par toute la Ville .
aud
Enfin , il suffit de dire , que l'usage de
luter , ou de se battre pour le plaisir à
coups de poings , étoit si commun en
France , qu'il s'est perpetué même jusqu'à
nos jours en certains Lieux , au moins
parmi les enfans , comme à Amiens , par
exemple , où ils l'observent encore aujourd'hui
, avec des régles qui paroissent
venues des Anciens , et dont ils sont fideles
observateurs.
Voici en quoi consistent ces régles :
lorsJUILLET.
1733 . 1547
lorsqu'il y en a deux qui veulent ainsi
se battre , ce qu'ils appellent Mahoner
tous les autres deviennent simples spectateurs.
Si après que le Combat a duré
quelque- tems , un des deux sent . qu'il a
besoin de reprendre haleine , il lui suffit
de se mettre à terre pour que l'autre n'ose
plus lui toucher ; car s'il le faisoit ,
tous les autres se jetteroient sur lui ,
pour
le punir de son infraction aux régles du
Combat. Enfin , après ce petit relâche ,
celui des deux qui contraint l'autre de
rendre , a tout l'honneur de la victoire.
C'est ainsi qu'il reste quélquefois de foibles
vestiges des plus anciens usages.
des Usages. Par M. Capperon , ancien
Doyen de Saint Maxent.
Q
U'est-il besoin d'aller chercher chez
les Anciens , chez les Grecs et les
Romains ; des Usages bizares , provenus
du désir de faire admirer sa force , n'en
avons- nous pas éu en France qui surpas
soient en bizarerie ceux de tous les Anciens
? tels étoient nos . Tournois , où
tant de Princes et de Personnes du premier
rang ont perdu la vié : c'étoit néanmoins
alors le spectacle qui paroissoit le
plus digne des grands Seigneurs du
Royaume. Il est bon , pour qu'on en
puisse mieux juger , que je rapporte en
peu de mots comme tout s'y passoit.
Premierement ceux qui devoient combattre
dans ces Tournois , devoient être
armés de toutes pièces , c'est- à-dite , revêtus
de fer depuis les pieds jusqu'à la
tête , suivant l'usage du tems. Aux deux
extrémitez de la Lice , où le combat se
devoit faire , étoient deux espéces de petits
théatres , où les deux assaillans montoient
chacun de leur côté. Du haut de
C
leus
JUILLET. 1733 1541
leur Cuirasse sortoit par le devant un
bouton de fer , qui étoit destiné pour
entrer dans un trou percé à dessein , au
bas du Casque. Tout étant ainsi préparé ,
un Serrurier se présentoit , pour river le
clou à coup de marteau , afin que le Casque
étant ainsi arrêté avec la Cuirasse
tel coup qu'on pût donner dans le milieu
du front , la tête ne pût aucunément
plier.
Les choses étant disposées de la sorte ,
et les deux Combattans étant montez sur
leurs chevaux , tenant chacun une lance
en arrêt , dont le fer étoit émoussé , ils
partoient à toute bride , pour voir lequel
des deux pourroit désarçonner et renverser
l'autre , en le frappant de la lance
au milieu du front. De la violence du`
coup , la lance étoit souvent rompuë et
brisée ; le cheval donnoit souvent du
derriere en terre , et qui plus est , souvent
l'un des deux Combattans y étoit
blessé , ou y perdoit la vie.
La France en a eu la triste expérience ,
dans la perte qu'elle y a fait du Roi Henri
II. Long- tems auparavant , on avoit eu ce
triste spectacle dans la Ville d'Eu ; sçavoir
en 1365. lorsque le Comte d'Eu ,
Jean d'Artois , ayant donné en mariage
Diij sa
1542 MERCURE DE FRANCE
sa fille Heleine d'Artois à Simon de
Thouars , Comte de Dreux ; la solemnité ,
des nôces s'en fit dans cette Ville ; comme,
en vue de rendre les plaisirs et les divertissemens
de cette solemnité plus
complets , il fut question d'y faire un
Tournois le jour même du mariage , le
nouvel Epoux ayant voulu être de la partie
, il eut le malheur d'y recevoir un
coup si funeste , qu'il lui ôta la vie , ce
qui rendit sa triste Epouse aussi tôr veuve
que mariée. Son mariage n'ayant pas été
consommé , elle ne porta toute sa vie
que le nom de Mademoiselle de Dreux :
ils sont tous deux inhumés dans l'Eglise
de l'Abbaye d'Eu , sous l'Horloge de
cette Abbaye , où est leur Mausolée. (a)
Telles étoient les funestes suites de ce bi
zare usage , ce qui obligea les Papes et les
Evêques à fulminer des anathémes contre
ceux qui les continueroient , et ce qui
donna lieu à un Ambassadeur Turc qui
vint en France, de dire , s'y étant trouvé,
que si ces combats se faisoient pour se
tuer , c'étoit trop peu , mais que s'ils se
faisoient pour se divertir , se divertir , c'étoir trop."
Il n'y a eu néanmoins que la mort d'Hen
ry II. qui les a fait cesser.
Ce n'étoit pas un usage moins bizare
(a) Mémoires du Comtéd'Eu.
ni
JUILLET. 1733. 1543
ni moins périlleux que celui dont quel
ques grands Seigneurs se faisoient un di
vertissement en France vers le milieu
du XVI. siécle . Vigenere , dans ses Ta❤
bleaux de Philostrate , nous apprend en
quoi il consistoit. C'est dans l'Endroit de
son Livre , où parlant du Tableau que
Philostrate a intitulé des bêtes noires , (b)
il se sert de cette occasion , pour rapportercomment
un de nos Comtes d'Eu,
François de Cléves , Duc de Nevers , Pere
de Catherine de Cléves , qui épousa le
Duc de Guise , tué à Blois , comment
dis-je , ce Seigneur relevant d'une maladie
, voulut se donner ce plaisir pour contribuer
par ce moyen au rétablissement
de sa santé.
3
Il dit donc qu'on commençoit par fermer
de planches le lieu où cet exercice
se devoit faire , qu'on construisoit tour
autour une espéce d'amphithéatre pour les
Specateurs. Tout étant préparé , et chaçun
ayant pris sa place , on faisoit entrer,
dans cette espéce de Cirque , trois ou
quatre grands Sangliers , de l'âge d'environ
trois ans , qui est le tems où ils sont
dans toute leur force. Enfin paroissoient
ceux qui devoient combattre contre ces
animaux ils étoient montez sur des
(6) Page 252.
D iiij
che1544
MERCURE DE FRANCE
chevaux vigoureux , mais à selles dessanglées
, étant tous masqués , et portant
sur leur cuisse une lance mornée , pour
attaquer chacun à leur tour une de ces
bêtes féroces.
Le Cavalier qui commençoit le combat
, n'avoit pas plutôt attaqué la bête ,
et donné quelques coups de lance , que ce
Sanglier , loin de reculer et de fuir , suivant
l'instinct naturel de ces animaux
venant tout au contraire sur lui , les
yeux étincelans de fureur , la gueule touse
en écume , et présentant ses deffenses ,
se jettoit d'abord à corps perdu sur la
lance pour la briser ; puis s'avançant vers
Je Cavalier , il faisoit tous ses efforts pour
l'atteindre et le déchirer. On peut bien
croire que le Cavalier ne négligeoit rien
de sa part pour se deffendre ; mais si
dans l'agitation qu'il étoit obligé de se
donner , la selle venoit malheureusement
à tourner , c'étoit alors que tombant malgré
lui à terre , tout étoit à craindre pour
sa vie , et que tous les spectateurs tremblans
de frayeur , étoient extrêmement
allarmés du péril ; mais c'étoit aussi alors
que les autres courant promptement à
son secours , et attaquant diversement
la bête , ils lui donnoient le tems de se
tirer d'un danger si éminent : ce qui
après
JUILLET. 1733. 1545
après tout réussissoit si bien , dit l'Auteur
, qu'il n'en arriva jamais aucun accident
ficheux. Quoique cet usage ne se
soit pas étendu beaucoup , et n'ait pas
duré , on avoüera que celui qui continue
en Espagne , et qui consiste à mettre des
Taureaux en fureur et à les combattre
n'est ni moins bizare , ni moins dange
reux pour la vie .
Vigenere qui fait le détail de ce Combat
contre des Sangliers , nous apprend
dans le même Livre , * que de son tems
l'usage de combattre à la lute étoit enco
re très - fréquent : c'est dans l'endroit , où
parlant du fils aîné du Duc de Nevers
qui fut envoyé en Espagne en 1560. par
Catherine de Medicis , il dit que ce jeune
Seigneur voulant paroître avec éclat
à la Cour d'Espagne , mena avec lui 20.
des plus braves et des plus accomplis
Gentilhommes du Royaume , desquels
étoit le Baron de S. Remy , que je crois
avoir été Gentilhomme du Comté d'Eu
où est la Terre de S. Remy , dont il
portoit le nom , lequel excelloit par dessus
tout dans les Combats à la lute.
5 C'est aussi de quoi il donna des preuves
éclatantes à la Cour d'Espagne , qui
résidoit alors à Valence : car ayant ap-
Table de la Palestre , p. 544.
Dy
:
pris
1546 MERCURE DE FRANCE
pris qu'il y avoit une espece de Géant dans
la Ville , il s'offrit à luter avec lui , se faisant
fort de le terrasser , nonobstant l'inégalité
de taille. Le défi ayant été accepté , et
s'étant présentez tous deux au milieu de
la principale Place de la Ville , pour don
ner ce spectacle , non- seulement à la
Cour , mais à tout le peuple qui y étoit
accouru en foule , notre Baron de S. Remy
éxécuta avec tant d'adresse ce qu'il
avoit promis , qu'il culbuta le Géant ,
près duquel il ne paroissoit qu'un Pigmée .
Les acclamations et les cris de joye retentirent
de toutes parts. Non - seulement les
Dames l'accablerent de Bouquets et de
Couronnes de fleurs ; mais après avoir reçû
des personnes les plus distinguées , des
présens d'honneur , il fut conduit en
triomphe par toute la Ville .
aud
Enfin , il suffit de dire , que l'usage de
luter , ou de se battre pour le plaisir à
coups de poings , étoit si commun en
France , qu'il s'est perpetué même jusqu'à
nos jours en certains Lieux , au moins
parmi les enfans , comme à Amiens , par
exemple , où ils l'observent encore aujourd'hui
, avec des régles qui paroissent
venues des Anciens , et dont ils sont fideles
observateurs.
Voici en quoi consistent ces régles :
lorsJUILLET.
1733 . 1547
lorsqu'il y en a deux qui veulent ainsi
se battre , ce qu'ils appellent Mahoner
tous les autres deviennent simples spectateurs.
Si après que le Combat a duré
quelque- tems , un des deux sent . qu'il a
besoin de reprendre haleine , il lui suffit
de se mettre à terre pour que l'autre n'ose
plus lui toucher ; car s'il le faisoit ,
tous les autres se jetteroient sur lui ,
pour
le punir de son infraction aux régles du
Combat. Enfin , après ce petit relâche ,
celui des deux qui contraint l'autre de
rendre , a tout l'honneur de la victoire.
C'est ainsi qu'il reste quélquefois de foibles
vestiges des plus anciens usages.
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Résumé : SUITE des Réfléxions sur la bizarerie des Usages. Par M. Capperon, ancien Doyen de Saint Maxent.
Le texte 'Suite des Réflexions sur la bizarerie des Usages' de M. Capperon, ancien Doyen de Saint Maxent, examine diverses pratiques dangereuses et bizarres en France, comparables à celles des Anciens. Parmi ces pratiques, les tournois étaient particulièrement fréquents et mortels. Lors de ces tournois, les combattants, entièrement protégés par des armures, se lançaient des coups de lance émoussée pour désarçonner l'adversaire. La dangerosité de ces événements est illustrée par la mort du roi Henri II en 1559 et celle du comte de Dreux en 1365, lors d'un tournoi funeste à Eu le jour de son mariage. Malgré les condamnations des papes et des évêques, ces pratiques ne cessèrent qu'après la mort d'Henri II. Un autre usage dangereux mentionné est la chasse aux sangliers, où des cavaliers masqués affrontaient des sangliers féroces. Bien que rare et de courte durée, cette activité était aussi périlleuse que la corrida espagnole. Le texte évoque également les combats de lutte, très courants au XVIe siècle. Un exemple notable est le baron de Saint-Remy, qui terrassa un géant à la cour d'Espagne. Enfin, le texte note que les combats à coups de poings entre enfants, appelés 'Mahoner', sont encore pratiqués à Amiens selon des règles ancestrales.
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26
p. 2185-2189
REMARQUES sur le Combat de Cupidon, et d'un Cocq, gravé en creux sur une Cornaline antique.
Début :
Les Sçavans de l'ancienne Egypte ne communiquoient les particularitez [...]
Mots clefs :
Amour, Coq, Nuit, Chant, Dard, Soleil, Cupidon, Messager, Combat, Cornaline antique
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texteReconnaissance textuelle : REMARQUES sur le Combat de Cupidon, et d'un Cocq, gravé en creux sur une Cornaline antique.
REMARQUES sur le Combat de
Cupidon , et d'un Cocq , gravé en creux
sur une Cornaline antique.
Les
Es Sçavans de l'ancienne Egypte ne
communiquoient les particularitez
de leur Histoire , les Misteres Sacrez ,
et les secrets de la Nature , dont ils
avoient acquis la connoissance par l'experience
ou par le secours de l'Astronomie
, qu'à ceux qui étoient destinez à
la Couronne , au Ministere , ou au Sacerdoce
.
Leur science étoit si profonde et si
singuliere , que les Sages de la Grece ne
dédaignoient point de les consulter , et
d'apprendre d'eux ce qu'ils ne pouvoient
acquérir par la lecture ni par la spécu-
D lation
1186 MERCURE DE FRANCE
lation la plus laborieuse . On voit même
dans les Livres Sacrez que Moyse ne dédaigna
point de s'instruire de toutes leurs
Sciences .
Ces anciens Sçavans donnerent des
roms divins aux choses créées , pour
leur attirer plus de respect et de vénétation
de la part des hommes . Ils formerent
en même temps des Hieroglifes ou
des figures misterieuses , sous lesquelles
ils cachoient leur morale , leur politique
et même leurs passions , et ils se servoient
de ces Figures pour leurs Sceaux,
leurs Cachers, leurs Bagues. Ils gravoient
ou frappoient des Talismans sous certaines
constellations , sur diff rens métaux
propres , selon eux , à recevoir les
influences des Astres ; et cela pour rendre
leurs projets heureux et fortunez .
Le Hierogliphe dont il s'agit représente
Cupidon aîlé , avec ses attributs ,
sçavoir , un Carquois , un Dard , un Bouclier
. On n'y voit point son flambeau ,
parce qu'il y paroît en posture de Combattant,
tenant un Dard en sa main droite
et un Bouclier en sa gauche. On y voit
en même temps un Cccq qui se présente
à lui , ayant le col fort tendu , la tête
haute , avec sa fierté ordinaire.
Pour entrer dans le sujet de leur querelle
OCTOBRE. 1733. 2187
relle , il est bon de remarquer que le
Cocq a été regardé des Anciens comme
le simbole de la vigilance. C'est pourquoi
il étoit consacré au Dieu Mars ,
parce qu'un General d'Armée doit toujours
veiller et être sur ses gardes ; ou
parce que , au rapport de Lucien , Mars
changea en Cocq le Soldat Alectrion ,
en punition de ce qu'il n'avoit pas fait
bonne garde la nuit , que ce Dieu fut
surpris avec Vénus par Vulcain , lequel
les ayant envelopp z dans un filet de sa
façon , les exposa à la risée de toutes les
Divinitez Celestes. Le Cocq étoit aussi
consacré à Esculape , pour marquer la
vigilance d'un parfait Médecin,
Pausanias écrit d'ailleurs que le, Cocq
étoit respecté chez les Grecs comme le
Messager d'Apollon , à cause que par
son chant du matin , il annonce le retour
du Soleil. Ils le respectoient aussi
parce qu'ils auguroient par son chant
plus fréquent ou par son silence , les
heeureux ou les malheureux Evenemens .
Les Boetiens , par exemple , prévirent la
celebre victoire qu'ils remporterent sur
les Lacédémoniens , parce que le Cocq
avoit chanté toute la nuit qui précéda le
combat ; et selon le témoignage d'Ennius
, qui suivit Scipion l'Affricain dans
Dij toutes
2188 MERCURE DE FRANCE
toutes ses guerres , lorsque cet Oiseau est
vaincu , il se cache et se tait , mais s'il est
victorieux , il se montre fier et chante
souvent. Galli victi silere solent , canere
victores.
Je crois done que le sujet du Combat
de Cupidon contre ce Cocq , exprimé
sur cette Cornaline , est que l'Empire de
l'Amour n'est jamais plus puissant que
la nuit. C'est à ceux qui sont versez dans
l'art de la galanterie d'en juger. Comme
le Cocq annonce par son chant la fin
de la nuit et l'approche du jour , l'Amour
outré d'être obligé de ne pouvoir poursuivre
ses victoires et de les suspendre ,
s'en prend au Messager du Soleil , et
d'un coup de son Dard , tâche de lui
percer le gosier pour éteindre sa voix
incommode.
L'Amour souvent troublé par le Cocq vigilant ,
Lui dit tout en colere , et d'un ton menaçant ,
Messager du Soleil , Cocq toujours incommode,
Ne sçais-tu pas , cruel , que la nuit m'est commode
!
Ton chant précipité vient troubler les douceurs
Et les transports charmants où je plonge les
coeurs.
Qu'à ta voix le Lion manifeste sa crainte .
Que l'Oiseau de Minerve en ressente l'atteinte ,
L'Amour
+
OCTOBR E. 1733. 2189
L'Amour toujours vainqueur méprise ta fierté ;
Tu vas sentir un coup de sa dexterité.
Qu'Apollon te protege et son Fils Esculape ;
Scache qu'à mon pouvoir ici bas rien n'échappe.
L'Amour tout en furie , ayant ainsi parlé ,
Éssaya , mais en vain , de son Dard enflâmé ,
De percer le gosier du Cocq , qui par adresse ,
Ayant sçû l'éviter , entonne d'allegresse :
Co- que-ri- co Co-queri- co
S'il plaisoit à quelque ingénieux Antiquaire
de donner une exposition plus
naturelle à ce Hieroglife , le Possesseur
en auroit une parfaite reconnoissance ,
puisqu'elle donnera un nouveau mérite
à sa Pierre gravée.
Cupidon , et d'un Cocq , gravé en creux
sur une Cornaline antique.
Les
Es Sçavans de l'ancienne Egypte ne
communiquoient les particularitez
de leur Histoire , les Misteres Sacrez ,
et les secrets de la Nature , dont ils
avoient acquis la connoissance par l'experience
ou par le secours de l'Astronomie
, qu'à ceux qui étoient destinez à
la Couronne , au Ministere , ou au Sacerdoce
.
Leur science étoit si profonde et si
singuliere , que les Sages de la Grece ne
dédaignoient point de les consulter , et
d'apprendre d'eux ce qu'ils ne pouvoient
acquérir par la lecture ni par la spécu-
D lation
1186 MERCURE DE FRANCE
lation la plus laborieuse . On voit même
dans les Livres Sacrez que Moyse ne dédaigna
point de s'instruire de toutes leurs
Sciences .
Ces anciens Sçavans donnerent des
roms divins aux choses créées , pour
leur attirer plus de respect et de vénétation
de la part des hommes . Ils formerent
en même temps des Hieroglifes ou
des figures misterieuses , sous lesquelles
ils cachoient leur morale , leur politique
et même leurs passions , et ils se servoient
de ces Figures pour leurs Sceaux,
leurs Cachers, leurs Bagues. Ils gravoient
ou frappoient des Talismans sous certaines
constellations , sur diff rens métaux
propres , selon eux , à recevoir les
influences des Astres ; et cela pour rendre
leurs projets heureux et fortunez .
Le Hierogliphe dont il s'agit représente
Cupidon aîlé , avec ses attributs ,
sçavoir , un Carquois , un Dard , un Bouclier
. On n'y voit point son flambeau ,
parce qu'il y paroît en posture de Combattant,
tenant un Dard en sa main droite
et un Bouclier en sa gauche. On y voit
en même temps un Cccq qui se présente
à lui , ayant le col fort tendu , la tête
haute , avec sa fierté ordinaire.
Pour entrer dans le sujet de leur querelle
OCTOBRE. 1733. 2187
relle , il est bon de remarquer que le
Cocq a été regardé des Anciens comme
le simbole de la vigilance. C'est pourquoi
il étoit consacré au Dieu Mars ,
parce qu'un General d'Armée doit toujours
veiller et être sur ses gardes ; ou
parce que , au rapport de Lucien , Mars
changea en Cocq le Soldat Alectrion ,
en punition de ce qu'il n'avoit pas fait
bonne garde la nuit , que ce Dieu fut
surpris avec Vénus par Vulcain , lequel
les ayant envelopp z dans un filet de sa
façon , les exposa à la risée de toutes les
Divinitez Celestes. Le Cocq étoit aussi
consacré à Esculape , pour marquer la
vigilance d'un parfait Médecin,
Pausanias écrit d'ailleurs que le, Cocq
étoit respecté chez les Grecs comme le
Messager d'Apollon , à cause que par
son chant du matin , il annonce le retour
du Soleil. Ils le respectoient aussi
parce qu'ils auguroient par son chant
plus fréquent ou par son silence , les
heeureux ou les malheureux Evenemens .
Les Boetiens , par exemple , prévirent la
celebre victoire qu'ils remporterent sur
les Lacédémoniens , parce que le Cocq
avoit chanté toute la nuit qui précéda le
combat ; et selon le témoignage d'Ennius
, qui suivit Scipion l'Affricain dans
Dij toutes
2188 MERCURE DE FRANCE
toutes ses guerres , lorsque cet Oiseau est
vaincu , il se cache et se tait , mais s'il est
victorieux , il se montre fier et chante
souvent. Galli victi silere solent , canere
victores.
Je crois done que le sujet du Combat
de Cupidon contre ce Cocq , exprimé
sur cette Cornaline , est que l'Empire de
l'Amour n'est jamais plus puissant que
la nuit. C'est à ceux qui sont versez dans
l'art de la galanterie d'en juger. Comme
le Cocq annonce par son chant la fin
de la nuit et l'approche du jour , l'Amour
outré d'être obligé de ne pouvoir poursuivre
ses victoires et de les suspendre ,
s'en prend au Messager du Soleil , et
d'un coup de son Dard , tâche de lui
percer le gosier pour éteindre sa voix
incommode.
L'Amour souvent troublé par le Cocq vigilant ,
Lui dit tout en colere , et d'un ton menaçant ,
Messager du Soleil , Cocq toujours incommode,
Ne sçais-tu pas , cruel , que la nuit m'est commode
!
Ton chant précipité vient troubler les douceurs
Et les transports charmants où je plonge les
coeurs.
Qu'à ta voix le Lion manifeste sa crainte .
Que l'Oiseau de Minerve en ressente l'atteinte ,
L'Amour
+
OCTOBR E. 1733. 2189
L'Amour toujours vainqueur méprise ta fierté ;
Tu vas sentir un coup de sa dexterité.
Qu'Apollon te protege et son Fils Esculape ;
Scache qu'à mon pouvoir ici bas rien n'échappe.
L'Amour tout en furie , ayant ainsi parlé ,
Éssaya , mais en vain , de son Dard enflâmé ,
De percer le gosier du Cocq , qui par adresse ,
Ayant sçû l'éviter , entonne d'allegresse :
Co- que-ri- co Co-queri- co
S'il plaisoit à quelque ingénieux Antiquaire
de donner une exposition plus
naturelle à ce Hieroglife , le Possesseur
en auroit une parfaite reconnoissance ,
puisqu'elle donnera un nouveau mérite
à sa Pierre gravée.
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Résumé : REMARQUES sur le Combat de Cupidon, et d'un Cocq, gravé en creux sur une Cornaline antique.
Le texte décrit une gravure antique sur cornaline représentant le combat entre Cupidon et un coq. Les savants de l'ancienne Égypte partageaient leurs connaissances en histoire, mystères sacrés et secrets de la nature uniquement avec ceux destinés à la couronne, au ministère ou au sacerdoce. Leur science était si profonde que les sages grecs les consultaient. Les Égyptiens attribuaient des noms divins aux créatures pour leur attirer respect et vénération, et utilisaient des hiéroglyphes pour cacher leur morale, politique et passions. La gravure montre Cupidon ailé, muni d'un carquois, d'un dard et d'un bouclier, mais sans son flambeau, car il est en posture de combattant. Le coq, symbole de vigilance, est consacré à Mars et Esculape, et est respecté comme messager d'Apollon. Le combat entre Cupidon et le coq symbolise la lutte entre l'amour et la vigilance. Le coq, annonçant le jour, trouble les activités nocturnes de l'amour. Cupidon, furieux, tente en vain de faire taire le coq avec son dard. Le coq, évitant l'attaque, chante victorieusement. Le texte invite un antiquaire à offrir une autre interprétation de ce hiéroglyphe pour enrichir la valeur de la pierre gravée.
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27
p. 2380-2385
LE TRIOMPHE DE L'AMOUR. Dans le combat d'Atalante avec Hippomène.
Début :
Vous, de qui la beauté touchante, [...]
Mots clefs :
Combat, Amour, Atalante, Hippomène, Victoire, Coeur, Mourir, Belle
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texteReconnaissance textuelle : LE TRIOMPHE DE L'AMOUR. Dans le combat d'Atalante avec Hippomène.
LE TRIOMPHE
DE L'AMOUR.
Dans le combat d'Atalante avec Hippomène.
Vous ,de qui la beauté touchante ,
Enchaîne et captive les coeurs
Quittez , trop aimable Atalante ,
Ou vos attraits , ou vos rigueurs.
Cessez de prendre pour victimes
Des amans qui n'ont d'autres crimes ,
Que l'amour dont ils sont épris ;
De cet amour est-on le maître ?
Vous-même vous le faites naître ,
Et votre haine en est le prix !
*
Songez , qu'envain vous êtes belle
Si rien ne sçauroit vous toucher ;
Que les doux plaisirs suivent celle
NOVEMBRE . 1733 2381
Que l'Hymen a sçû s'attachér.
Tant de soins joints à tant d'allarmes ,
Tant de maux causez par vos charmes ,
Méritoient bien un sort plus doux
Est-il effort que l'on n'essaye ;
La mort n'a rien qui nous effraye
Dans l'espoir d'être aimez de vous.
En ces mots un essain fidéle ,
D'Amans pénétrez de douleur ,
Oserent à cette cruelle ,
Peindre leur flâme et leur malheur.
Hélas ! quelle fut leur ressource !
İl falloit la vaincre à la course ,
Pour fléchir son coeur inhumain
Et si l'on perdoit la victoire ,
On devoit ( pourra - t-on le croire ?
Se voir d'un Dard percer le sein.
On croit que le bien qu'on souhaitte }
N'est point au dessus du pouvoir
Tous d'une victoire complette ,
Conçoivent l'agréable espoir .
Le sort leur paroissoit propice ,
Ils ne voyoient le précipice ,
Que sous les plus belles couleurs ,
Ciij D'ac
2382 MERCURE DE FRANCE
D'accord l'Amour et la Fortune ,
Avoient d'une ardeur non commune ,
Parsemé l'abîme de fleurs.
M
Non tels que ces Rois , dont l'Elide ,
'Aime à vanter les vains Lauriers ;
Le prix d'une course rapide ,
Se devoit seul à leurs coursiers . ;
Ni pareils aux vangeurs d'Héléne ;
Qu'on vit sur la rive Troyenne ,
Affronter les fureurs de Mars ;
Il leur falloit une victoire ,
Dont chacun remportât la gloire,
Et seul essuyât les hazards.
Enfin le jour prescrit arrive ,
Qu'ils devoient ou vaincre ou mourir ,
Des amours la troupe attentive ,
Sçut à ce spectacle accourir,
Atalante insensible et fiere ,
S'avance et court dans la carriere ;
Adraste le premier l'y suit ,
Restant dans la Lice après elle ,
Sur l'heure il est par la cruelle ,
Plongé dans l'éternelle nuit.
Tous semblent se faire un mérite ;
D'être
NOVEMBRE 1733 2383.
D'être par elle mis à mort ,
Ciel ! que j'en vois mourir de suite
Tous ont déja ce triste sort .
O que l'amour est redoutable !
Malgré ce massacre effroyable ,
Son empire est-il moins puissant |
Hyppoméne , fils de Neptune ,
Vient encor tenter la Fortune ,
Si rigoureuse à chaque Amant.
D'abord la Princesse à sa veuë ,
Prend de plus tendres sentimens ,
Sa fierté tombe , elle est émeuë ,
Le trouble saisit tous ses sens :
Une naissante et vive flâme ,
Se glisse en secret dans son ame
Elle sent attendrir son coeur ,
En faveur du seul Hyppoméne ,
Un penchant violent l'entraîne ,
A désirer qu'il soit vainqueur.
Où vas - tu ? Prince , lui dit-elle ,
C'est trop peu ménager tes jours ;
Songe , dans l'ardeur de ton zéle ,
Que c'est à la mort que tu cours ;
Ciiij
Måle
2384 MERCURE DE FRANCE
Malgré ta témeraire envie ,
Je veux prendre soin de ta vie ,
Va, cesse de vouloir périr ;
Envain ; ce Héros intrépide , 1
Regarde la belle homicide ,
Et compte pour rien de mourir,
Ils courent à perte d'haleine ,
Mais les plus amoureux transports
Troublent le coeur de l'inhumaine ,
Et lui font blâmer ses efforts.
Elle tremble que sa vitesse
N'ôte à l'objet de sa tendresse ; '
Les moïens de fuïr le trépas ,
L'amour approuve ses allarmes ,
Et lui fait trouver mille charmes , 1
A moderer un peu ses pas.
Les trois Pommes d'or que présente ;
Et jette Hyppoméne en courant ,
Viennent au secours d'Atalante
Seconder son tendre penchant .
Joignant la ruse à sa surprise ,
Elle affecte d'en être éprise ,
Et pour tarder s'en fait un jeu ;
Hyppoméne couvert de gloire,
•
G
NOVEMBRE. 1733. 2385
Ne trouve plus par sa victoire ,
Aucun obstacle à son beau feu.
Après ce combat mémorable,
L'on oüit ces mots dans les airs 9
Que l'Amour , ce vainqueur aimable;
Triomphe de tout PUnivers.
Envain une belle infléxible ,
Veille sur son coeur insensible
Un seul trait peut la désarmer ;
Pour mille Amans elle est sévére ;
Mais qu'un seul ait l'art de lui plaire ,
Elle sçaura bien-tôt aimer.
DE MONTFLBURY
DE L'AMOUR.
Dans le combat d'Atalante avec Hippomène.
Vous ,de qui la beauté touchante ,
Enchaîne et captive les coeurs
Quittez , trop aimable Atalante ,
Ou vos attraits , ou vos rigueurs.
Cessez de prendre pour victimes
Des amans qui n'ont d'autres crimes ,
Que l'amour dont ils sont épris ;
De cet amour est-on le maître ?
Vous-même vous le faites naître ,
Et votre haine en est le prix !
*
Songez , qu'envain vous êtes belle
Si rien ne sçauroit vous toucher ;
Que les doux plaisirs suivent celle
NOVEMBRE . 1733 2381
Que l'Hymen a sçû s'attachér.
Tant de soins joints à tant d'allarmes ,
Tant de maux causez par vos charmes ,
Méritoient bien un sort plus doux
Est-il effort que l'on n'essaye ;
La mort n'a rien qui nous effraye
Dans l'espoir d'être aimez de vous.
En ces mots un essain fidéle ,
D'Amans pénétrez de douleur ,
Oserent à cette cruelle ,
Peindre leur flâme et leur malheur.
Hélas ! quelle fut leur ressource !
İl falloit la vaincre à la course ,
Pour fléchir son coeur inhumain
Et si l'on perdoit la victoire ,
On devoit ( pourra - t-on le croire ?
Se voir d'un Dard percer le sein.
On croit que le bien qu'on souhaitte }
N'est point au dessus du pouvoir
Tous d'une victoire complette ,
Conçoivent l'agréable espoir .
Le sort leur paroissoit propice ,
Ils ne voyoient le précipice ,
Que sous les plus belles couleurs ,
Ciij D'ac
2382 MERCURE DE FRANCE
D'accord l'Amour et la Fortune ,
Avoient d'une ardeur non commune ,
Parsemé l'abîme de fleurs.
M
Non tels que ces Rois , dont l'Elide ,
'Aime à vanter les vains Lauriers ;
Le prix d'une course rapide ,
Se devoit seul à leurs coursiers . ;
Ni pareils aux vangeurs d'Héléne ;
Qu'on vit sur la rive Troyenne ,
Affronter les fureurs de Mars ;
Il leur falloit une victoire ,
Dont chacun remportât la gloire,
Et seul essuyât les hazards.
Enfin le jour prescrit arrive ,
Qu'ils devoient ou vaincre ou mourir ,
Des amours la troupe attentive ,
Sçut à ce spectacle accourir,
Atalante insensible et fiere ,
S'avance et court dans la carriere ;
Adraste le premier l'y suit ,
Restant dans la Lice après elle ,
Sur l'heure il est par la cruelle ,
Plongé dans l'éternelle nuit.
Tous semblent se faire un mérite ;
D'être
NOVEMBRE 1733 2383.
D'être par elle mis à mort ,
Ciel ! que j'en vois mourir de suite
Tous ont déja ce triste sort .
O que l'amour est redoutable !
Malgré ce massacre effroyable ,
Son empire est-il moins puissant |
Hyppoméne , fils de Neptune ,
Vient encor tenter la Fortune ,
Si rigoureuse à chaque Amant.
D'abord la Princesse à sa veuë ,
Prend de plus tendres sentimens ,
Sa fierté tombe , elle est émeuë ,
Le trouble saisit tous ses sens :
Une naissante et vive flâme ,
Se glisse en secret dans son ame
Elle sent attendrir son coeur ,
En faveur du seul Hyppoméne ,
Un penchant violent l'entraîne ,
A désirer qu'il soit vainqueur.
Où vas - tu ? Prince , lui dit-elle ,
C'est trop peu ménager tes jours ;
Songe , dans l'ardeur de ton zéle ,
Que c'est à la mort que tu cours ;
Ciiij
Måle
2384 MERCURE DE FRANCE
Malgré ta témeraire envie ,
Je veux prendre soin de ta vie ,
Va, cesse de vouloir périr ;
Envain ; ce Héros intrépide , 1
Regarde la belle homicide ,
Et compte pour rien de mourir,
Ils courent à perte d'haleine ,
Mais les plus amoureux transports
Troublent le coeur de l'inhumaine ,
Et lui font blâmer ses efforts.
Elle tremble que sa vitesse
N'ôte à l'objet de sa tendresse ; '
Les moïens de fuïr le trépas ,
L'amour approuve ses allarmes ,
Et lui fait trouver mille charmes , 1
A moderer un peu ses pas.
Les trois Pommes d'or que présente ;
Et jette Hyppoméne en courant ,
Viennent au secours d'Atalante
Seconder son tendre penchant .
Joignant la ruse à sa surprise ,
Elle affecte d'en être éprise ,
Et pour tarder s'en fait un jeu ;
Hyppoméne couvert de gloire,
•
G
NOVEMBRE. 1733. 2385
Ne trouve plus par sa victoire ,
Aucun obstacle à son beau feu.
Après ce combat mémorable,
L'on oüit ces mots dans les airs 9
Que l'Amour , ce vainqueur aimable;
Triomphe de tout PUnivers.
Envain une belle infléxible ,
Veille sur son coeur insensible
Un seul trait peut la désarmer ;
Pour mille Amans elle est sévére ;
Mais qu'un seul ait l'art de lui plaire ,
Elle sçaura bien-tôt aimer.
DE MONTFLBURY
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Résumé : LE TRIOMPHE DE L'AMOUR. Dans le combat d'Atalante avec Hippomène.
Le texte narre la légende d'Atalante et Hippomène, mettant en avant le triomphe de l'amour. Atalante, célèbre pour sa beauté et sa cruauté envers ses prétendants, impose une course mortelle où les participants doivent la vaincre pour survivre. De nombreux amants tentent leur chance, mais tous trouvent la mort. Hippomène, fils de Neptune, se distingue par sa détermination. Atalante, malgré sa fierté, ressent une émotion nouvelle pour lui. Lors de la course, Hippomène utilise des pommes d'or pour ralentir Atalante, qui feint de les ramasser afin de retarder sa victoire. Finalement, Hippomène remporte la course, et l'amour triomphe, prouvant que même les cœurs les plus insensibles peuvent être conquis. Le texte se conclut par la célébration de l'amour, capable de désarmer les plus inflexibles.
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28
p. 143-144
LOGOGRYPHE.
Début :
Je suis très-meutrier. Six pieds forment mon corps ; [...]
Mots clefs :
Combat
29
p. 221-222
ESPAGNE.
Début :
On apprend que l'Empereur de la Chine, non seulement a [...]
Mots clefs :
Lisbonne, Madrid, Chine, Catholique, Chabecs, Combat, Don Pedre Elguero, Don Joseph de Flon, Capitaine de Frégate, Prisonniers de guerre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ESPAGNE.
ESPAGNE.
DE LISBONNE , le 20 Mars.
On apprend que l'Empereur de la Chine , non
feulement a renouvellé les Edits de quelques- uns
de fes prédéceffeurs en faveur des Chrétiens ,
mais qu'il leur fait bâtir une églife à les dépens
dans la capitale de fes Etats. Selon les mêmes
lettres , il fe trouve actuellement à la Chine plus
de cent foixante neuf mille perfonnes qui font
profeffion de la religion catholique.
DE MADRID , le 22 Avril,
Cinq Chabecs du Roi armés en courſe , &
commandés par Don Jofeph de Flon , Capitaine
de frégate , attaquerent le 16 de ce mois dans les
environs d'Alicante, trois Corfaires algériens , l'un
de vingt- quatre canons , l'autre de vingt-deux ,
& le troifiéme de quatorze. Après un combat qui .
duré plus de quatorze heures , ils s'en font
emparés. On a fait fur les bâtimens ennemis
quatre cens quatre-vingt- quatorze efclaves ; du
Côté des Efpagnols il y a eu cinquante bleffés.
Don Pedre Elguero , Lieutenant de vaiffeau ,2.
K iij
122 MERCURE DE FRANCE.
commandant le Chabec le Gavilan , a été tué ,
ainfi que cinq foldats ou matelots. Ali Mouffa
qui commandoit les trois Chabecs algériens , eft
du nombre des prifonniers faits par les Espagnols.
DE LISBONNE , le 20 Mars.
On apprend que l'Empereur de la Chine , non
feulement a renouvellé les Edits de quelques- uns
de fes prédéceffeurs en faveur des Chrétiens ,
mais qu'il leur fait bâtir une églife à les dépens
dans la capitale de fes Etats. Selon les mêmes
lettres , il fe trouve actuellement à la Chine plus
de cent foixante neuf mille perfonnes qui font
profeffion de la religion catholique.
DE MADRID , le 22 Avril,
Cinq Chabecs du Roi armés en courſe , &
commandés par Don Jofeph de Flon , Capitaine
de frégate , attaquerent le 16 de ce mois dans les
environs d'Alicante, trois Corfaires algériens , l'un
de vingt- quatre canons , l'autre de vingt-deux ,
& le troifiéme de quatorze. Après un combat qui .
duré plus de quatorze heures , ils s'en font
emparés. On a fait fur les bâtimens ennemis
quatre cens quatre-vingt- quatorze efclaves ; du
Côté des Efpagnols il y a eu cinquante bleffés.
Don Pedre Elguero , Lieutenant de vaiffeau ,2.
K iij
122 MERCURE DE FRANCE.
commandant le Chabec le Gavilan , a été tué ,
ainfi que cinq foldats ou matelots. Ali Mouffa
qui commandoit les trois Chabecs algériens , eft
du nombre des prifonniers faits par les Espagnols.
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Résumé : ESPAGNE.
Le texte présente deux événements concernant l'Espagne. Le premier événement, rapporté depuis Lisbonne le 20 mars, mentionne que l'Empereur de Chine a renouvelé les édits favorables aux Chrétiens et a financé la construction d'une église dans la capitale. Il est également indiqué qu'il y a plus de cent soixante-neuf mille pratiquants de la religion catholique en Chine. Le second événement, signalé depuis Madrid le 22 avril, relate l'attaque de trois corsaires algériens par cinq navires espagnols commandés par Don Joseph de Flon près d'Alicante. Après un combat de plus de quatorze heures, les Espagnols ont pris possession des navires ennemis. Quatre cent quatre-vingt-quatorze esclaves ont été libérés, tandis que cinquante personnes ont été blessées du côté espagnol, dont Don Pedre Elguero, lieutenant de vaisseau, et cinq soldats ou matelots ont été tués. Ali Mouffa, commandant des corsaires algériens, a été capturé.
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30
p. 201-202
ITALIE.
Début :
Le Mont Vesuve, après avoir fait longtemps entendre un grand bruit, a jetté [...]
Mots clefs :
Naples, Venise, Mont Vésuve, Nuages de cendres, Fumée, Attaque, Chabec de Tripoli, Combat
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ITALIE.
ITALI E
DE NAPLES , le 24 Avril.
Le Mont Vefuv
E Mont Vefuve , après avoir fait longtemps
entendre un grand bruit , a jetté pendant quatre
jours beaucoup de matiere bitumineule. Lorfque
cette éruption a ceffé , trois Seigneurs Angloisont
voulu monter au haut du Mont , pour examiner
les bouches du Volcan. Ils ont été prefque
fuffoqués par des nuages de cendres & de fumée
peu s'en eft fallu que leur curiofité ne leur air
fait éprouver le fort de Pline le Naturalifte .
&
DE VENISE , le 14 Mai.
Une Tartane , que commande le Comte Eva
nowitz , Dalmatien , fut attaquée le 19 du mois
dernier près des Bouches de Cattaro par un Chabec
de Tripoli , de quarante-deux canons , & de
cinq cens hommes d'équipage. Quoiqu'elle ne fût
montée que de quarante-fix Efclavons , elle s'eft
emparée du Bâtiment ennemi , après quatre heu
res de combat. Les Efclavons n'ont voulu accor--
der aucun quartier aux Tripolitains . La perte des.
premiers auroit été peu confidérable , fi le Chevalier
Evanowitz n'avoit pas été tué. Le Chabeç
I..
202 MERCURE DE FRANCE.
*
ayant été fi maltraité qu'il n'étoit plus en état de
fervir , on y a mis le feu.
DE NAPLES , le 24 Avril.
Le Mont Vefuv
E Mont Vefuve , après avoir fait longtemps
entendre un grand bruit , a jetté pendant quatre
jours beaucoup de matiere bitumineule. Lorfque
cette éruption a ceffé , trois Seigneurs Angloisont
voulu monter au haut du Mont , pour examiner
les bouches du Volcan. Ils ont été prefque
fuffoqués par des nuages de cendres & de fumée
peu s'en eft fallu que leur curiofité ne leur air
fait éprouver le fort de Pline le Naturalifte .
&
DE VENISE , le 14 Mai.
Une Tartane , que commande le Comte Eva
nowitz , Dalmatien , fut attaquée le 19 du mois
dernier près des Bouches de Cattaro par un Chabec
de Tripoli , de quarante-deux canons , & de
cinq cens hommes d'équipage. Quoiqu'elle ne fût
montée que de quarante-fix Efclavons , elle s'eft
emparée du Bâtiment ennemi , après quatre heu
res de combat. Les Efclavons n'ont voulu accor--
der aucun quartier aux Tripolitains . La perte des.
premiers auroit été peu confidérable , fi le Chevalier
Evanowitz n'avoit pas été tué. Le Chabeç
I..
202 MERCURE DE FRANCE.
*
ayant été fi maltraité qu'il n'étoit plus en état de
fervir , on y a mis le feu.
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Résumé : ITALIE.
Le 24 avril, le mont Vésuve a émis un grand bruit et expulsé une grande quantité de matière bitumineuse pendant quatre jours. À la fin de l'éruption, trois seigneurs anglais ont tenté de monter au sommet du volcan mais ont failli être asphyxiés par des nuages de cendres et de fumée. Le 14 mai, une tartane commandée par le Comte Evanowitz a été attaquée près des Bouches de Cattaro par un chébec de Tripoli équipé de quarante-deux canons et cinq cents hommes d'équipage. Malgré les quarante-six esclaves à bord de la tartane, ils ont capturé le navire ennemi après quatre heures de combat. Les esclaves n'ont accordé aucun quartier aux Tripolitains. La perte des esclaves aurait été minime si le Chevalier Evanowitz n'avait pas été tué. Le chébec, gravement endommagé, a été incendié.
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31
p. 222-223
GRANDE-BRETAGNE.
Début :
Les subsides, accordés par le Parlement pour le service de cette année, [...]
Mots clefs :
Londres, Subsides, Frégates, Combat, Vaisseaux français, Défense des îles, Escadre, Amiral Hawke, Amiral Sawnders
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : GRANDE-BRETAGNE.
GRANDE BRETAGNE.
DE LONDRES , le 28 Juin.
Les fubfides , accordés par le Parlement pour
Ε
JUILLET. 1756. 223
le fervice de cette année , montent à la fomme
de fept millions deux cent vingt -neuf mille cent
dix fept livres sterlings . On a reçu avis de Falmouth
, que le Vaiffeau le Colchester y avoit
relâché , extrêmement maltraité du combat qu'il
a foutenu conjointement avec la Frégate la Lime ,
près de Rochefort , contre deux Frégates Francoifes.
On a coulé à fond quinze ou feize des
prifes Françoifes , dont la cargaison confiftant en
poiffon s'étoit corrompue . Le Lord Anfon a
propofé d'armer quarante ou cinquante Bâtimens
de Pêcheurs , & de les faire croifer dans la Manche.
Il prétend que cet armement ne coûtera que
quarante - trois mille livres fterlings par an , &
qu'il fuffira pour la défenſe des côtes de la Grande-
Bretagne. Ces Bâtimens , qui avec leur charge
entiere ne tirent que fept pieds d'eau , font en
*état de porter dix-huit canons , trente matelots &
cinquante foldats .
Dans un des Confeils tenus à Kenfington , il a
été pris divers arrangemens pour la défenfe dés
ifles de Jerfey & de Garneley. En conféquence ,
l'Amirauté a donné ordre d'équiper une Eſcadre ,
que commandera le Chef d'Efcadre Howe , &
qui fera compofée d'un Vaiffeau de foixante
canon , d'un de cinquante , de deux de vingt ,
& de deux Chaloupes de guerre. Le Régiment
de Bochland s'eft embarqué pour ces Ifles , ou
P'on fe propofe d'envoyer quelques autres troupes.
Le 16 de ce mois , les Amiraux Hawke &
Sawnders partirent de Portſmouth , à bord du
Vaiffeau de guerre l'Antelope , pour aller joindre
P'Efcadre de l'Amiral Byng à Gibraltar
DE LONDRES , le 28 Juin.
Les fubfides , accordés par le Parlement pour
Ε
JUILLET. 1756. 223
le fervice de cette année , montent à la fomme
de fept millions deux cent vingt -neuf mille cent
dix fept livres sterlings . On a reçu avis de Falmouth
, que le Vaiffeau le Colchester y avoit
relâché , extrêmement maltraité du combat qu'il
a foutenu conjointement avec la Frégate la Lime ,
près de Rochefort , contre deux Frégates Francoifes.
On a coulé à fond quinze ou feize des
prifes Françoifes , dont la cargaison confiftant en
poiffon s'étoit corrompue . Le Lord Anfon a
propofé d'armer quarante ou cinquante Bâtimens
de Pêcheurs , & de les faire croifer dans la Manche.
Il prétend que cet armement ne coûtera que
quarante - trois mille livres fterlings par an , &
qu'il fuffira pour la défenſe des côtes de la Grande-
Bretagne. Ces Bâtimens , qui avec leur charge
entiere ne tirent que fept pieds d'eau , font en
*état de porter dix-huit canons , trente matelots &
cinquante foldats .
Dans un des Confeils tenus à Kenfington , il a
été pris divers arrangemens pour la défenfe dés
ifles de Jerfey & de Garneley. En conféquence ,
l'Amirauté a donné ordre d'équiper une Eſcadre ,
que commandera le Chef d'Efcadre Howe , &
qui fera compofée d'un Vaiffeau de foixante
canon , d'un de cinquante , de deux de vingt ,
& de deux Chaloupes de guerre. Le Régiment
de Bochland s'eft embarqué pour ces Ifles , ou
P'on fe propofe d'envoyer quelques autres troupes.
Le 16 de ce mois , les Amiraux Hawke &
Sawnders partirent de Portſmouth , à bord du
Vaiffeau de guerre l'Antelope , pour aller joindre
P'Efcadre de l'Amiral Byng à Gibraltar
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Résumé : GRANDE-BRETAGNE.
En juin 1756, la Grande-Bretagne a alloué sept millions deux cent vingt-neuf mille cent dix-sept livres sterling pour des dépenses militaires. Le navire Colchester a été endommagé lors d'un combat près de Rochefort contre des frégates françaises, entraînant la perte de quinze ou seize prises françaises. Le Lord Anson a proposé d'armer des bateaux de pêche pour défendre les côtes de la Manche, estimant le coût à quarante-trois mille livres sterling par an. Ces bateaux, équipés de dix-huit canons, trente matelots et cinquante soldats, navigueraient dans la Manche. Des mesures ont été prises pour protéger les îles de Jersey et de Guernesey, incluant l'envoi d'une escadre commandée par le chef d'escadre Howe et l'embarquement du régiment de Bochland. Les amiraux Hawke et Saunders ont quitté Portsmouth à bord du navire l'Antelope pour rejoindre l'escadre de l'amiral Byng à Gibraltar.
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32
p. 206
MORT.
Début :
Messire Louis-Marie de Foucquet, Comte de Gisors, Prince de l'Empire, [...]
Mots clefs :
Comte, Prince de l'empire, Blessure, Combat
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texteReconnaissance textuelle : MORT.
MORT
MESSIRE Louis-Marie de Foucquet , Comte de
Gifors , Prince de l'Empire , Gouverneur de Merz
& du Pays Meffin , Lieutenant général au Gouvernement
de Lorraine & du Barro's , Brigadier
des Armées du Roi , Meftre de Camp Lieutenant
du Régiment Royal des Carabiniers , mourut à
Nuys le 26 Juin dernier , dans la vingt -ſeptieme
année de fon âge , de la bleffure qu'il avoit reçue
an combat de Crewelt , où il s'étoit fort diftingué.
Il étoit fils aniqué du Maréchal Duc de Belle- Iffe.
Le Comte de Gifors enlevé à la fleur de fon âge
eft univerfellement regretté. Par les grandes qua
lités qu'il réuniffoit , il s'étoit acquis l'amour &
Feftime de toute la N tion , ainfi que des Cours
étrangeres où il avoit voyagé.
MESSIRE Louis-Marie de Foucquet , Comte de
Gifors , Prince de l'Empire , Gouverneur de Merz
& du Pays Meffin , Lieutenant général au Gouvernement
de Lorraine & du Barro's , Brigadier
des Armées du Roi , Meftre de Camp Lieutenant
du Régiment Royal des Carabiniers , mourut à
Nuys le 26 Juin dernier , dans la vingt -ſeptieme
année de fon âge , de la bleffure qu'il avoit reçue
an combat de Crewelt , où il s'étoit fort diftingué.
Il étoit fils aniqué du Maréchal Duc de Belle- Iffe.
Le Comte de Gifors enlevé à la fleur de fon âge
eft univerfellement regretté. Par les grandes qua
lités qu'il réuniffoit , il s'étoit acquis l'amour &
Feftime de toute la N tion , ainfi que des Cours
étrangeres où il avoit voyagé.
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Résumé : MORT.
Messire Louis-Marie de Foucquet, Comte de Gifors, est décédé à Nuys le 26 juin à vingt-sept ans. Brigadier des Armées du Roi et Maître de Camp Lieutenant du Régiment Royal des Carabiniers, il est mort des suites d'une blessure reçue au combat de Crewelt. Fils illégitime du Maréchal Duc de Belle-Isle, il était universellement regretté pour ses qualités, apprécié en France et à l'étranger.
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33
p. 206-207
De Barcelonne, le 20 Novembre.
Début :
Nous avons appris que le 9 de ce mois, il y eut à la hauteur [...]
Mots clefs :
Combat, Frégates, Français, Anglais, Blessés
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texteReconnaissance textuelle : De Barcelonne, le 20 Novembre.
De Barcelonne , le 20 Novembre.
Nous avons appris que le 9 de ce mois, il y eur
à la hauteur du Cap-Rofe , un combat très- vif
entre la Frégate Françoife , la Pleyade , & une
Frégate Angloife de 36 canons. Le combat dura
depuis une heure , jufqu'à fept heures du foir. La
Frégate Angloife fut contrainte de prendre la
JANVIER. 1759. 207
fuite , après avoir été défemparée de fon grand
mât de hune. La Pleyade la pourfuivit ; mais
ayant apperçu un Vailleau Anglois de haut bord ,
elle fit force de voile pour rejoindre deux Tartares
qu'elle eſcortoit . Le lendemain , elle prit un
Senaw , qui étoit à la fuite de la Frégate Angloife.
On n'y trouva que 4 hommes , 10 fufils , 4 pierriers
, & très-peu de vivres ; parce que l'Equipage
en avoit été retiré la veille , pour renforcer celui
de la Frégate. Le fieur Defepole , Lieutenant de
la Fleyade , a été bleffé légèrement à la cuiſſe.
Il n'y eut qu'un feul Matelot tué , & quelquesuns
bleflés .
Nous avons appris que le 9 de ce mois, il y eur
à la hauteur du Cap-Rofe , un combat très- vif
entre la Frégate Françoife , la Pleyade , & une
Frégate Angloife de 36 canons. Le combat dura
depuis une heure , jufqu'à fept heures du foir. La
Frégate Angloife fut contrainte de prendre la
JANVIER. 1759. 207
fuite , après avoir été défemparée de fon grand
mât de hune. La Pleyade la pourfuivit ; mais
ayant apperçu un Vailleau Anglois de haut bord ,
elle fit force de voile pour rejoindre deux Tartares
qu'elle eſcortoit . Le lendemain , elle prit un
Senaw , qui étoit à la fuite de la Frégate Angloife.
On n'y trouva que 4 hommes , 10 fufils , 4 pierriers
, & très-peu de vivres ; parce que l'Equipage
en avoit été retiré la veille , pour renforcer celui
de la Frégate. Le fieur Defepole , Lieutenant de
la Fleyade , a été bleffé légèrement à la cuiſſe.
Il n'y eut qu'un feul Matelot tué , & quelquesuns
bleflés .
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Résumé : De Barcelonne, le 20 Novembre.
Le 9 novembre, près du Cap-Rofe, la frégate française La Pleyade a affronté une frégate anglaise de 36 canons. Le combat a duré de une heure à sept heures du matin. La frégate anglaise, endommagée, a fui. La Pleyade a capturé un senau le lendemain. Le lieutenant Desepole a été légèrement blessé. Un matelot est mort et quelques autres ont été blessés.
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34
p. 203-205
De Londres, le 2 Janvier.
Début :
Les dernieres nouvelles venues de Hollande ont donné de l'inquiétude à notre [...]
Mots clefs :
Commissaires, Hollande, Traité, Comte, Lettres, Vaisseaux anglais, Violences, Cuba, Armée prussienne, Enrôlement, Amiral, Colonies américaines, Bataillons, Général Forbes, Jamaïque, Combat
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texteReconnaissance textuelle : De Londres, le 2 Janvier.
De Londres , le i Janvier.
Les dernieres nouvelles venues de Hollan le
ont donné de l'inquiétude à notre miniftere ; &
on s'eft déterminé enfin à prendre des mesures
efficaces pour terminer les conteftations qui fe
font élévées entre les deux Nations . On affure
que les fieurs Hay & Hunter , Commiffaires de
l'Amirauté , doivent fe rendre inceſſamment à la
Haye. Ils font chargés , dit - on , de travailler
avec les Commiffaires de leurs Hautes Puiffances
à un arrangement dont le Traité de Commerce
de 1674 fera la bafe , & qui mettra déſormais
les Sujets de la République à l'abri des entrepriſes
qui font la matiére de leurs plaintes .
Le 25 du même mois , la Cour reçut un Courier
dépêché par le Comte de Briſtol , Envoyé-
Extraordinaire du Roi à la Cour de Madrid.
Tout ce qu'on fçait du contenu des Lettres que
ce Courier a apportées, c'eft que Le Miniſtere Efpagnol
a témoigné beaucoup de mécontentement
de la conduite de plufieurs vaiffeaux Anglois, qui
ont commis des hoftilités & des violences contre
les Habitans de l'Ifle de Cuba . Le Comte de Briftol
a repréſenté que le Gouvernement Anglois ,
loin d'approuver ces pirateries , étoit réfolu d'en
punir exemplairement les Auteurs , fi on pouvoir
les découvrir.
On affure qu'à la fin du mois de Février toutes
les armées Pruffiennes auront reçu les recrues
qui doivent les compléter , & qu'alors le Roi de
Pruffe aura deux cens mille hommes effectifs . Ce
Monarque a donné à plufieurs Armateurs Anglois
des commiffions , qui les autorisent à faire
des courfes contre fes ennemis. Les bâtimens feront
commandés par des Officiers Anglois , & les
équipages feront pris à Hambourg , à Bréme &
à Embden,
I vj
204 MERCURE DE FRANCE
On compte recevoir bientôt des nouvelles - de
l'Eſcadre de l'Amiral Hughes ; & on defire beau--
coup d'apprendre le fuccès de l'expédition qu'il a
été chargé de tenter contre les Colonies Frangoiles
de la Martinique & de la Guadeloupe..
Notre Miniſtere ne croit pas que cette entreprife
puiffe manquer , parce que le plan a été
combiné avec bien de l'attention , & que les arrangemens
ont été pris avec beaucoup de pru
dence.
Trois bataillons des Gardes à pied , & divers
Régimens qui ont leurs quartiers en Angleterre
& en Irlande , ont reçu ordre de ſe tenir prêts à
s'embarquer pour les premiers jours du mois de
Mars. La flotte qui doit agir fur les côtes de
France , fera compofée de vingt vaiffeaux de ligne
, de plufieurs frégates , brulots , galiotes à
bombes , & d'un grand nombre de bâtimens de
transport..
Les dernieres Lettres de l'Amérique Septenarionale
nous ont appris que le Général Forbes
avoit été obligé de renoncer à la conquête du
Fort du Quefne , par une multitude d'accidens
imprévus, qui ont retardé la marche des troupes -
à fes ordres , & qui ont donné le temps aux :
Ennemis de fe mettre en défenſe .
On écrit de la Jamaïque que le 3 de Novem
bre dernier le vaiffeau de guerre Anglois le Buckingham
rencontra à la hauteur de l'Ile de
Montferrat une flotte de quinze vaiſſeaux Marchands
qui faifoient route de Saint Euſtache vers
la Martinique, & qui étoient eſcortés par le vaiffeau
de guerre François le Florissant & deux
frégates. Le Buckingham attaqua cette eſcorte, &
le combat dura deux heures fans aucun avanta➡-
de part ni d'autre. Ce vaiffeau fut obligé de
retirer après avoir eu dix hommes tues &
FEVRIER. 1759. 205
•
quarante bleffés. Pendant le combat les vailfeaux
Marchands firent force de voiles pour s'é
loigner , & ils font arrivés à leur deſtination.
Les dernieres nouvelles venues de Hollan le
ont donné de l'inquiétude à notre miniftere ; &
on s'eft déterminé enfin à prendre des mesures
efficaces pour terminer les conteftations qui fe
font élévées entre les deux Nations . On affure
que les fieurs Hay & Hunter , Commiffaires de
l'Amirauté , doivent fe rendre inceſſamment à la
Haye. Ils font chargés , dit - on , de travailler
avec les Commiffaires de leurs Hautes Puiffances
à un arrangement dont le Traité de Commerce
de 1674 fera la bafe , & qui mettra déſormais
les Sujets de la République à l'abri des entrepriſes
qui font la matiére de leurs plaintes .
Le 25 du même mois , la Cour reçut un Courier
dépêché par le Comte de Briſtol , Envoyé-
Extraordinaire du Roi à la Cour de Madrid.
Tout ce qu'on fçait du contenu des Lettres que
ce Courier a apportées, c'eft que Le Miniſtere Efpagnol
a témoigné beaucoup de mécontentement
de la conduite de plufieurs vaiffeaux Anglois, qui
ont commis des hoftilités & des violences contre
les Habitans de l'Ifle de Cuba . Le Comte de Briftol
a repréſenté que le Gouvernement Anglois ,
loin d'approuver ces pirateries , étoit réfolu d'en
punir exemplairement les Auteurs , fi on pouvoir
les découvrir.
On affure qu'à la fin du mois de Février toutes
les armées Pruffiennes auront reçu les recrues
qui doivent les compléter , & qu'alors le Roi de
Pruffe aura deux cens mille hommes effectifs . Ce
Monarque a donné à plufieurs Armateurs Anglois
des commiffions , qui les autorisent à faire
des courfes contre fes ennemis. Les bâtimens feront
commandés par des Officiers Anglois , & les
équipages feront pris à Hambourg , à Bréme &
à Embden,
I vj
204 MERCURE DE FRANCE
On compte recevoir bientôt des nouvelles - de
l'Eſcadre de l'Amiral Hughes ; & on defire beau--
coup d'apprendre le fuccès de l'expédition qu'il a
été chargé de tenter contre les Colonies Frangoiles
de la Martinique & de la Guadeloupe..
Notre Miniſtere ne croit pas que cette entreprife
puiffe manquer , parce que le plan a été
combiné avec bien de l'attention , & que les arrangemens
ont été pris avec beaucoup de pru
dence.
Trois bataillons des Gardes à pied , & divers
Régimens qui ont leurs quartiers en Angleterre
& en Irlande , ont reçu ordre de ſe tenir prêts à
s'embarquer pour les premiers jours du mois de
Mars. La flotte qui doit agir fur les côtes de
France , fera compofée de vingt vaiffeaux de ligne
, de plufieurs frégates , brulots , galiotes à
bombes , & d'un grand nombre de bâtimens de
transport..
Les dernieres Lettres de l'Amérique Septenarionale
nous ont appris que le Général Forbes
avoit été obligé de renoncer à la conquête du
Fort du Quefne , par une multitude d'accidens
imprévus, qui ont retardé la marche des troupes -
à fes ordres , & qui ont donné le temps aux :
Ennemis de fe mettre en défenſe .
On écrit de la Jamaïque que le 3 de Novem
bre dernier le vaiffeau de guerre Anglois le Buckingham
rencontra à la hauteur de l'Ile de
Montferrat une flotte de quinze vaiſſeaux Marchands
qui faifoient route de Saint Euſtache vers
la Martinique, & qui étoient eſcortés par le vaiffeau
de guerre François le Florissant & deux
frégates. Le Buckingham attaqua cette eſcorte, &
le combat dura deux heures fans aucun avanta➡-
de part ni d'autre. Ce vaiffeau fut obligé de
retirer après avoir eu dix hommes tues &
FEVRIER. 1759. 205
•
quarante bleffés. Pendant le combat les vailfeaux
Marchands firent force de voiles pour s'é
loigner , & ils font arrivés à leur deſtination.
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Résumé : De Londres, le 2 Janvier.
En janvier, le ministère britannique a pris des mesures pour résoudre les conflits avec les Pays-Bas et l'Espagne. Des commissaires ont été envoyés à La Haye pour négocier sur la base du traité de commerce de 1674. Le comte de Bristol a signalé le mécontentement espagnol concernant des hostilités en Cuba, et le gouvernement britannique a promis de punir les responsables. À la fin février, les armées prussiennes devaient atteindre deux cents mille hommes, et le roi de Prusse a autorisé des armateurs anglais à recruter des équipages pour des courses contre ses ennemis. Le ministère britannique attendait des nouvelles de l'amiral Hughes concernant les colonies françaises de Martinique et Guadeloupe. Trois bataillons des Gardes à pied et divers régiments étaient prêts à s'embarquer début mars, avec une flotte composée de vingt vaisseaux de ligne et autres bâtiments pour agir sur les côtes françaises. En Amérique septentrionale, le général Forbes a renoncé à la conquête du Fort Duquesne. À la Jamaïque, le Buckingham a combattu une flotte française sans avantage pour aucune des parties.
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35
p. 206-207
DE LONDRES, le 16 Juin.
Début :
Le vaisseau le Grantham, appartenant à la Compagnie des Indes, a été pris à la hauteur du [...]
Mots clefs :
Vaisseaux, Cap de Bonne-Espérance, Cargaison, Colonel, Capitaine, Guadeloupe, Artillerie, Retraite des ennemis, Combat, Capitulation, Escadre, Secours, Frégates, Amiral Hawke
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE LONDRES, le 16 Juin.
DE LONDRES , le 16 Juin.
Le vaiffeau le Grantham , appartenant à la
Compagnie des Indes , a été pris à la hauteur
du Cap de Bonne- Efperance par deux vaiſſeaux
de guerre François . On évalue la cargaiſon de
ce bâtiment à deux cens mille livres fterlings.
Le Colonel Clavering & le Capitaine Leffie
arriverent ici le 13 , envoyés par le Général Baringthon
, pour apporter la nouvelle de la prife
de la Guadeloupe. Le 12 Avril , ce Général envøya
à Arnouville un détachement de quinze
cens hommes avec quatre piéces de canon &
deux obufers. Les ennemis fe retirerent dans
leurs retranchemens au- delà de la riviere & s'y
défendirent avec fermeté. Le 16 ils abandonnerent
le pofte de la Baye. Mahant , & celui de-
Goyave , pour le replier fur Sainte-Marie. Nos.
troupes y marcherent le zo , & après un combat
SY
affez difputé , ils forcerent les ennemis de fe retirer
dans les montagnes où ils fe font tenus
JUILLET. 1759.
207
renfermés , jufqu'à ce que le défaut de vivres
les ait mis dans la néceffité de capituler. C'eſt
le premier de Mai que la capitulation a été
fignée. On a accordé aux troupes les honneurs
de la guerre , & des bâtimens pour les tranfporporter
à la Martinique. On a promis aux habitans
de maintenir leurs priviléges dans toute
leur étenḍue. Une heure après que la capitulation
fut fignée , les François furent avertis qu'un
fecours de fix cens hommes de troupes réglées
& de deux mille Boucaniers , commandés par le
fieur de Beauharnois , venoit de débarquer à.
Sainte Anne avec de l'artillerie & des armes.
pour deux mille hommes. L'Eſcadre du fieur de
Bompart avoit eſcorté ce convoi ; mais comme.
la capitulation étoit fignée , le fecours fut reme
barqué fur le champ.
Du 24.
-Nos frégates ne ceffent de parcourir les côtes
entre Breſt & Dunkerque , pour obferver les
mouvemens des François. Tous les avis qu'elles
nous donnent augmentent les appréhenfions
cauſées par leur armement , & en repréſentent
les effets comme très - prochains. La flotte de
l'Amiral Hawke tient ferme dans fa croifiere
fur la côte Occidentale de la Bretagne. La tempête
qu'elle a effuyée le r2 de ce mois , a confidérablement
endommagé quelques-uns de fes
vaiſſeaux. Le Héros a perdu tous les mats ; le
Temple a rompu fon mat d'artimon & ſon beaupré
; le Montagu a beaucoup fouffert dans fes
manoeuvres. Ces trois vaiſſeaux ont été obligés
de revenir à Plymouth pour ſe réparer.
Le vaiffeau le Grantham , appartenant à la
Compagnie des Indes , a été pris à la hauteur
du Cap de Bonne- Efperance par deux vaiſſeaux
de guerre François . On évalue la cargaiſon de
ce bâtiment à deux cens mille livres fterlings.
Le Colonel Clavering & le Capitaine Leffie
arriverent ici le 13 , envoyés par le Général Baringthon
, pour apporter la nouvelle de la prife
de la Guadeloupe. Le 12 Avril , ce Général envøya
à Arnouville un détachement de quinze
cens hommes avec quatre piéces de canon &
deux obufers. Les ennemis fe retirerent dans
leurs retranchemens au- delà de la riviere & s'y
défendirent avec fermeté. Le 16 ils abandonnerent
le pofte de la Baye. Mahant , & celui de-
Goyave , pour le replier fur Sainte-Marie. Nos.
troupes y marcherent le zo , & après un combat
SY
affez difputé , ils forcerent les ennemis de fe retirer
dans les montagnes où ils fe font tenus
JUILLET. 1759.
207
renfermés , jufqu'à ce que le défaut de vivres
les ait mis dans la néceffité de capituler. C'eſt
le premier de Mai que la capitulation a été
fignée. On a accordé aux troupes les honneurs
de la guerre , & des bâtimens pour les tranfporporter
à la Martinique. On a promis aux habitans
de maintenir leurs priviléges dans toute
leur étenḍue. Une heure après que la capitulation
fut fignée , les François furent avertis qu'un
fecours de fix cens hommes de troupes réglées
& de deux mille Boucaniers , commandés par le
fieur de Beauharnois , venoit de débarquer à.
Sainte Anne avec de l'artillerie & des armes.
pour deux mille hommes. L'Eſcadre du fieur de
Bompart avoit eſcorté ce convoi ; mais comme.
la capitulation étoit fignée , le fecours fut reme
barqué fur le champ.
Du 24.
-Nos frégates ne ceffent de parcourir les côtes
entre Breſt & Dunkerque , pour obferver les
mouvemens des François. Tous les avis qu'elles
nous donnent augmentent les appréhenfions
cauſées par leur armement , & en repréſentent
les effets comme très - prochains. La flotte de
l'Amiral Hawke tient ferme dans fa croifiere
fur la côte Occidentale de la Bretagne. La tempête
qu'elle a effuyée le r2 de ce mois , a confidérablement
endommagé quelques-uns de fes
vaiſſeaux. Le Héros a perdu tous les mats ; le
Temple a rompu fon mat d'artimon & ſon beaupré
; le Montagu a beaucoup fouffert dans fes
manoeuvres. Ces trois vaiſſeaux ont été obligés
de revenir à Plymouth pour ſe réparer.
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Résumé : DE LONDRES, le 16 Juin.
Le 16 juin, le vaisseau britannique Grantham a été capturé par deux navires français au large du Cap de Bonne-Espérance. Sa cargaison était évaluée à deux cent mille livres sterlings. Le Colonel Clavering et le Capitaine Leffie sont arrivés à Londres le 13 juin pour annoncer la prise de la Guadeloupe par le Général Baringthon. Le 12 avril, Baringthon a envoyé un détachement de cent cinquante hommes à Arnouville. Les ennemis se sont retirés au-delà de la rivière et ont résisté fermement. Le 16 avril, ils ont abandonné les postes de la Baye-Mahault et de Goyave pour se replier sur Sainte-Marie. Nos troupes ont pris Sainte-Marie le 20 avril après un combat. Les ennemis, manquant de vivres, ont capitulé le 1er mai. Ils ont obtenu les honneurs de la guerre et des bâtiments pour être transportés à la Martinique. Les habitants ont reçu la promesse de maintien de leurs privilèges. Une heure après la capitulation, les Français ont appris l'arrivée d'un secours à Sainte-Anne, mais celui-ci a été rembarqué immédiatement. Du 24 juillet, les frégates britanniques surveillent les côtes entre Brest et Dunkerque. La flotte de l'Amiral Hawke, endommagée par une tempête le 12 juillet, a vu plusieurs vaisseaux revenir à Plymouth pour réparations.
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36
p. 197
De Paderborn, le 11 Juillet.
Début :
Il y eut le 5 de ce mois du côté de Halle une escarmouche très-vive entre [...]
Mots clefs :
Escarmouche, Comte de Broglie, Prince Ferdinand , Alliés, Colonel, Régiment, Détachement, Troupes, Cavalerie, Grenadiers, Combat, Renforts, Canon
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De Paderborn, le 11 Juillet.
De Paderborn , le 11 Juillet.
II y a eu les de ce mois du côté de Halle une
efcarmouche très-vive entre un détacheinent des
troupes Françoifes & un corps nombreux des
Alliés. Le Comte de Broglie qui vouloit recon-
noître avec exactitude la pofition du Prince Fer-
dinand , avoit formé le projet de s'emparer de
Halle qui étoit occupé par deux cens Hanovriens.
Il chargea de cette entreprife le fieur de Com-
meyras , Colonel des Volontaires de Clermont ,
qui y marcha avec fon régiment. Il fe fit pré-
céder par un détachement de fes Volontaires
aux ordres du fieur de Romans. Celui-ci s'avança
près du village de Halle , & n'eut pas plutôt
achevé fa difpofition qu'il apperçut une nom
breuse colonne d'Infanterie qui fe déployoit pour
lui faire face. Il fondit fur elle avec tant d'im-
pétuofité , qu'il la força de rentrer dans le Vil
lage où il l'attaqua ; & elle fut contrainte de
l'abandonner. Le fieur de Commeyras arriva
dans ce moment avec le refte de fa troupe , &
pouffa le corps Hanovrien jufques fous le canon
de Ravenfberg. Ce corps eluya dans fa retraite
le feu de quatre cens Volontaires de la None
qui s'étoient embufqués dans les bois de Ra-
venfberg. Mais ayant reçu un renfort de Grena-
diers & de, Cavalerie détaché du camp du Prince
Ferdinand , il fit reculer ces quatre cens Volon-
taires. Le feur de Commeyras , pour favorifer
leur retraite , dirigea fi à propos le feu de fon
canon fur les Hanovriens , qu'ils prirent la fuite
en défordre. Ce combat , qui a duré depuis huit
heures du matin jufqu'à quatre heures après m dì,
a coûté aux Alliés la perte de plus de qub rẻ
cens hommes. Les François ont perdu beaucoup
moins, & font reftés maîtres de-Halle.
II y a eu les de ce mois du côté de Halle une
efcarmouche très-vive entre un détacheinent des
troupes Françoifes & un corps nombreux des
Alliés. Le Comte de Broglie qui vouloit recon-
noître avec exactitude la pofition du Prince Fer-
dinand , avoit formé le projet de s'emparer de
Halle qui étoit occupé par deux cens Hanovriens.
Il chargea de cette entreprife le fieur de Com-
meyras , Colonel des Volontaires de Clermont ,
qui y marcha avec fon régiment. Il fe fit pré-
céder par un détachement de fes Volontaires
aux ordres du fieur de Romans. Celui-ci s'avança
près du village de Halle , & n'eut pas plutôt
achevé fa difpofition qu'il apperçut une nom
breuse colonne d'Infanterie qui fe déployoit pour
lui faire face. Il fondit fur elle avec tant d'im-
pétuofité , qu'il la força de rentrer dans le Vil
lage où il l'attaqua ; & elle fut contrainte de
l'abandonner. Le fieur de Commeyras arriva
dans ce moment avec le refte de fa troupe , &
pouffa le corps Hanovrien jufques fous le canon
de Ravenfberg. Ce corps eluya dans fa retraite
le feu de quatre cens Volontaires de la None
qui s'étoient embufqués dans les bois de Ra-
venfberg. Mais ayant reçu un renfort de Grena-
diers & de, Cavalerie détaché du camp du Prince
Ferdinand , il fit reculer ces quatre cens Volon-
taires. Le feur de Commeyras , pour favorifer
leur retraite , dirigea fi à propos le feu de fon
canon fur les Hanovriens , qu'ils prirent la fuite
en défordre. Ce combat , qui a duré depuis huit
heures du matin jufqu'à quatre heures après m dì,
a coûté aux Alliés la perte de plus de qub rẻ
cens hommes. Les François ont perdu beaucoup
moins, & font reftés maîtres de-Halle.
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Résumé : De Paderborn, le 11 Juillet.
Le 11 juillet, une escarmouche intense a opposé les troupes françaises à un corps nombreux des Alliés près de Halle. Le Comte de Broglie, désirant connaître la position du Prince Ferdinand, avait ordonné la prise de Halle, alors occupée par deux cents Hanovriens. Cette mission fut confiée au Colonel de Commeyras, à la tête des Volontaires de Clermont. Précédé par un détachement de Volontaires sous les ordres de Romans, de Commeyras affronta une colonne d'infanterie ennemie près du village de Halle. Après avoir repoussé les Hanovriens jusqu'au canon de Ravenfberg, les Français furent à leur tour repoussés par des renforts ennemis, incluant des Grenadiers et de la Cavalerie. De Commeyras intervint avec son artillerie, permettant la retraite des Volontaires. Le combat, qui dura de huit heures du matin à quatre heures de l'après-midi, causa la perte de plus de quatre cents hommes aux Alliés, tandis que les Français perdirent beaucoup moins d'hommes et restèrent maîtres de Halle.
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37
p. 201-203
De l'Armée de l'Empire, le 26 Septembre.
Début :
Le 21, le Prince de Deux-Ponts fit un mouvement en avant avec toute l'armée, [...]
Mots clefs :
Prince, Mouvements des troupes, Ennemis, Général Haddick, Prussiens, Combat, Artillerie, Bataillons, Infanterie, Blessés et morts, Prisonniers de guerre, Maréchal Daun, Opérations militaires
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texteReconnaissance textuelle : De l'Armée de l'Empire, le 26 Septembre.
De l'Armée de l'Empire , le 26 Septembre.
Le 21 , le Prince de Deux- Ponts fit un mouvement
en avant avec toute l'armée , dans le deffein
de faire abandonner aux Ennemis la pofition
avantageufe qu'ils occupoient fur les hauteurs de
Meiffen. Le Général Haddick avoit marché la
veille pour Le porter fur le flanc droit des Pruf
Gens.
I
202 MERCURE DE FRANCE.
Toutes les difpofitions étant faites pour l'atta
que, & l'armée s'étant formée fur deux lignes
vis-à-vis de Neuftadt , le combat commença par
le feu de nos canons & de nos obufiers , qui fut
très-vif & très -foutenu pendant toute la journée.
L'Ennemiy répondit par celui de plufieurs batteries.
Le Prince de Deux- Ponts fit attaquer le Village
de Bockwen , où les Pruffiens étoient retranchés.
Nos Grenadiers y mirent le feu , & l'Ennemi
fut contraint d'abandonner ce pofte. Une partie de
notre Infanterie défila fur les hauteurs qui font du
· côté de l'Elbe , pour prendre en flanc l'avantgarde
de l'armée Prufiienne. Cette avant-garde
fut pliée , & perdit du terrein.
Le Général Haddick pofté entre Krogis & Stoifchen
, foudroyoit en même temps avec la groffe
artillerie les redoutes & les batteries des Ennemis.
Le Prince de Deux- Ponts fit un mouvement du
côté de Lomatſch , pour le rapprocher de ce Général.
Les Prulliens qui fe virent en danger de
perdre leur communication avec Torgau & Léipfick
, fe portèrent fur notre aîle gauche , & firent
avancer cinq bataillons foutenus de plufieurs efcadrons
de Cavalerie , qui la chargèrent avec la
plus grande vivacité . Nos troupes foutinrent cette
• attaque avec fermeté, & la repoufferent . La Cavalerie
ennemie fut mife eu déroute : on la pourfuivit
quelque temps ; mais on fut arrêté par la
rencontre de plufieurs bataillons Pruffiens qui
étoient poftés près de Lothayn.
-
Le gros de l'Infanterie ennemie s'avança en
même temps. Le Prince de Deux - Ponts la fic
charger par toute la Cavalerie de l'armée , qui
l'attaqua jufqu'à dix fois fans pouvoir la rompre.
Cette Infanterie venoit de s'emparer d'une de nos
batteries : alors notre Cavalerie redoubla fes efforts
; les bataillons Pruffiens plièrent , & leurs
NOVEMBRE. 1759 203
Dragons qui s'étoient préfentés pour les foutenir
, furent difperfés fans pouvoir ſe rallier . Nos
troupes reprirent la batterie dont l'ennemi s'étoit
emparé , & lui enleverent plufieurs pièces de fa
grolle artillerie. Le pofte de Lothayn étoit encore
occupé par quelques bataillons Pruffiens . Il fut
attaqué & emporté par nos troupes légères , &.
les Ennemis y mirent le feu en fe retirant.
Sur les cinq heures du foir , les Pruffiens étoient
déjà challés de tous leurs poftes . Ils avoient laiffé
fur le champ de bataille plus de dix - huit cents
morts, avec fix piéces de canon & deux étendards .
On leur avoit fait plus de deux cens prifonniers ,
& nous n'avions perdu en tout que mille hommes
tués ou bleffés .
La nuit qui furvint empêcha nos troupes de
pouffer plus loin leurs avantages. Lés Ennemis
eurent le temps de fe reconnoître & de prendre
une nouvelle pofition dans laquelle il nous fut
impoffible de les attaquer.
Du 30.
Le 29 , le Maréchal de Daun arriva à Drefde ,
& le Prince de Deux - Ponts s'y rendit pour concerter
avec lui le plan des opérations qui doivent
terminer la campagne.
Le 21 , le Prince de Deux- Ponts fit un mouvement
en avant avec toute l'armée , dans le deffein
de faire abandonner aux Ennemis la pofition
avantageufe qu'ils occupoient fur les hauteurs de
Meiffen. Le Général Haddick avoit marché la
veille pour Le porter fur le flanc droit des Pruf
Gens.
I
202 MERCURE DE FRANCE.
Toutes les difpofitions étant faites pour l'atta
que, & l'armée s'étant formée fur deux lignes
vis-à-vis de Neuftadt , le combat commença par
le feu de nos canons & de nos obufiers , qui fut
très-vif & très -foutenu pendant toute la journée.
L'Ennemiy répondit par celui de plufieurs batteries.
Le Prince de Deux- Ponts fit attaquer le Village
de Bockwen , où les Pruffiens étoient retranchés.
Nos Grenadiers y mirent le feu , & l'Ennemi
fut contraint d'abandonner ce pofte. Une partie de
notre Infanterie défila fur les hauteurs qui font du
· côté de l'Elbe , pour prendre en flanc l'avantgarde
de l'armée Prufiienne. Cette avant-garde
fut pliée , & perdit du terrein.
Le Général Haddick pofté entre Krogis & Stoifchen
, foudroyoit en même temps avec la groffe
artillerie les redoutes & les batteries des Ennemis.
Le Prince de Deux- Ponts fit un mouvement du
côté de Lomatſch , pour le rapprocher de ce Général.
Les Prulliens qui fe virent en danger de
perdre leur communication avec Torgau & Léipfick
, fe portèrent fur notre aîle gauche , & firent
avancer cinq bataillons foutenus de plufieurs efcadrons
de Cavalerie , qui la chargèrent avec la
plus grande vivacité . Nos troupes foutinrent cette
• attaque avec fermeté, & la repoufferent . La Cavalerie
ennemie fut mife eu déroute : on la pourfuivit
quelque temps ; mais on fut arrêté par la
rencontre de plufieurs bataillons Pruffiens qui
étoient poftés près de Lothayn.
-
Le gros de l'Infanterie ennemie s'avança en
même temps. Le Prince de Deux - Ponts la fic
charger par toute la Cavalerie de l'armée , qui
l'attaqua jufqu'à dix fois fans pouvoir la rompre.
Cette Infanterie venoit de s'emparer d'une de nos
batteries : alors notre Cavalerie redoubla fes efforts
; les bataillons Pruffiens plièrent , & leurs
NOVEMBRE. 1759 203
Dragons qui s'étoient préfentés pour les foutenir
, furent difperfés fans pouvoir ſe rallier . Nos
troupes reprirent la batterie dont l'ennemi s'étoit
emparé , & lui enleverent plufieurs pièces de fa
grolle artillerie. Le pofte de Lothayn étoit encore
occupé par quelques bataillons Pruffiens . Il fut
attaqué & emporté par nos troupes légères , &.
les Ennemis y mirent le feu en fe retirant.
Sur les cinq heures du foir , les Pruffiens étoient
déjà challés de tous leurs poftes . Ils avoient laiffé
fur le champ de bataille plus de dix - huit cents
morts, avec fix piéces de canon & deux étendards .
On leur avoit fait plus de deux cens prifonniers ,
& nous n'avions perdu en tout que mille hommes
tués ou bleffés .
La nuit qui furvint empêcha nos troupes de
pouffer plus loin leurs avantages. Lés Ennemis
eurent le temps de fe reconnoître & de prendre
une nouvelle pofition dans laquelle il nous fut
impoffible de les attaquer.
Du 30.
Le 29 , le Maréchal de Daun arriva à Drefde ,
& le Prince de Deux - Ponts s'y rendit pour concerter
avec lui le plan des opérations qui doivent
terminer la campagne.
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Résumé : De l'Armée de l'Empire, le 26 Septembre.
Le 21 septembre, le Prince de Deux-Ponts lança une offensive pour chasser les ennemis des hauteurs de Meissen. Le Général Haddick attaqua le flanc droit des Prussiens, débutant le combat par un échange intense d'artillerie. Les forces françaises prirent le village de Bockwen et repoussèrent l'avant-garde prussienne. Haddick, positionné entre Krogis et Stoifchen, bombardait les redoutes ennemies. Les Prussiens attaquèrent l'aile gauche française avec cinq bataillons et de la cavalerie, mais furent repoussés. L'infanterie prussienne captura une batterie française, mais la cavalerie française contre-attaqua et reprit la batterie, capturant plusieurs pièces d'artillerie. Les troupes légères françaises prirent le poste de Lothayn. À la fin de la journée, les Prussiens perdirent plus de 1 800 hommes, six pièces de canon et deux étendards, tandis que les Français firent plus de 200 prisonniers et perdirent environ 1 000 hommes. La nuit interrompit les avancées françaises, permettant aux Prussiens de se repositionner. Le 29 septembre, le Maréchal de Daun arriva à Dresde pour planifier les opérations futures avec le Prince de Deux-Ponts.
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38
p. 199-201
DE PARIS, le 1 Décembre.
Début :
Le 20 du mois dernier, l'Escadre aux ordres du Maréchal de Conflans [...]
Mots clefs :
Escadre, Maréchal, Amiral Hawke, Bretagne, Vaisseaux, Capitaine, Combat, Artillerie, Maréchal Daun, Ordre, Enrôlement, Garnison, Capitulation
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE PARIS, le 1 Décembre.
De PARIS , le 1 Décembre.
Le zo du mois dernier , l'Eſcadre aux ordres
du Maréchal de Conflans fut rencontrée à la hauteur
de Belle- Ifle par celle de l'Amiral Hawke ,
renforcée de tous les vaiffeaux que les Anglois
avoient à la côte de Bretagne. La mer étoit fort
grofle , il y a eu des changemens de vent par
grains dans la journée , ce qui n'a permis à aucune
des deux Efcadres de fe mettre en ligne . Cependant
le combat s'engagea vers deux heures aprèsmidi
entre les vaiffeaux de l'arriere garde , qui
étoient le Magnifique , le Héros & le Formidable
, lefquels furent attaqués & environnés
par huit ou dix vaiffeaux Anglois. Peu de tems
après le combat devint général , mais fans ordre
de part & d'autre. Le Formidable commandé par
le fieur de Saint-André du Verger , Chef d'Efcadre
des armées navales , eft le feul vaiffeau qui ait été
pris. On a eu le malheur de perdre le vaiffeau le
Théfée & le Superbe , commandés par les fieurs de
Kerfaint & de Montalais , Capitaines de Vaiffeau.
Ils ont coulé à fond dans le combat , pen
dant lequel un Vaiffeau de l'Eſcadre Angloife
dont on ignore le nom , a auffi coulé à fond. Le
Vailleau le Soleil Royal , que montoit le Maréchal
de Conflans , s'eſt brûlé à la côte du Croific
le 21 , après qu'on a eu fauvé l'équipage . Le
Héros , commandé par le Vicomte de Sanfay ,
qui a eu trente hommes tués , & quatre-vingt-fix
bleffés dans le combat , s'eſt brûlé au même en-
Liv
200 MERCURE DE FRANCE.
droit. Le Jufte , commandé par le fieur de Saint-
Allouarn , Capitaine de Vaiffeau , tué dans le combat,
& après lui par le fieur Rofmader de Saint-
Allouarn , fon frere , auffi tué dans le combat , a
péri à l'ance d'Ecoublas à l'entrée de la Loire , &
on a fauvé une partie de l'équipage . Les vaiffeaux
Anglois la Réfolution , de foixante- quatorze canons
, & l'Effex de foixante - dix , ont péri à la
côte du Croilic. Un autre vaiffeau Anglois dont
on ignore lenom a aufli péri à l'entrée de la Loire.
Une partie des vaiffeaux de l'efcadre de Breſt eſt à
la rade de l'lfle d'Aix , & les autres font dans la
rivière de Vilaine.
Le fieur Galibert , dépêché par le Comte de
Montazet, apporta la nouvelle fuivante . Le Maréchal
de Daun attaqua le 20 Novembre un corps
de Pruffiens d'environ vingt-quatre mille hommes
commandés par les Généraux Finck "
Wunsch & Rebentiſch. Le combat s'eft donné
à Maxen à deux lieues de Pyrna & à trois lieues
de Drefde. Il a commencé à midi & n'a fini
qu'a la nuit Les Prufliens ayant été dépoftés des
hauteurs qu'il occupoient & forcés de ſe retirer
dans un fond , ont perdu dans cette occafion
la plus grande partie de leur artillerie & toutes
leurs munitions.
Le Maréchal de Daun avoit fait fes difpofitions,
de maniere que ce Corps d'Arinée étoit entouré
par les troupes Autrichiennes & par celles de
l'Empire. Le lendemain le Général Rebentiſch fur
envoyé au Maréchal de Daun par le Général
Finck , pour capituler. Le Maréchal de Daun exigea
que cette armée mit les arines bas , & fe rendit
prifonniere de guerre ; & il ne donna que
quatre minutes pour fe déterminer . Les Pruffiens
ont été forcés de fubir ces conditions . On les a fait
partir ce même jour pour la Bohême . Il y avoit
JANVIER. 1760 .
201
dans ce corps d'armée fix mille hommes de Cavalerie.
On aifure que le Roi de Pruffe & le Prince
Henri étoient à quatre lieues du champ de bataille
avec trente mille hommes.
On affure auffi qu'il a envoyé ordre dans tous
fes Etats d'enrôler tout ce qu'il y refte d'hommes
depuis l'âge de 14 ans jufqu'à celui de 60 .
Du 8.
La garnifon de Munfter a capitulé le 21 du
mois dernier. Elle a obtenu les honneurs de la
guerre Les ennemis ont donné toutes fortes de
marques de confidérations aux troupes qui la
compofent ainsi qu'au Marquis de Gayon , Maréchal-
de-camp , qui la commande , & au fieur de
Boisclaireau , Lieutenant de Roi & de la Ville,
La garnifon eft arrivée à Wefel le 26 .
Le zo du mois dernier , l'Eſcadre aux ordres
du Maréchal de Conflans fut rencontrée à la hauteur
de Belle- Ifle par celle de l'Amiral Hawke ,
renforcée de tous les vaiffeaux que les Anglois
avoient à la côte de Bretagne. La mer étoit fort
grofle , il y a eu des changemens de vent par
grains dans la journée , ce qui n'a permis à aucune
des deux Efcadres de fe mettre en ligne . Cependant
le combat s'engagea vers deux heures aprèsmidi
entre les vaiffeaux de l'arriere garde , qui
étoient le Magnifique , le Héros & le Formidable
, lefquels furent attaqués & environnés
par huit ou dix vaiffeaux Anglois. Peu de tems
après le combat devint général , mais fans ordre
de part & d'autre. Le Formidable commandé par
le fieur de Saint-André du Verger , Chef d'Efcadre
des armées navales , eft le feul vaiffeau qui ait été
pris. On a eu le malheur de perdre le vaiffeau le
Théfée & le Superbe , commandés par les fieurs de
Kerfaint & de Montalais , Capitaines de Vaiffeau.
Ils ont coulé à fond dans le combat , pen
dant lequel un Vaiffeau de l'Eſcadre Angloife
dont on ignore le nom , a auffi coulé à fond. Le
Vailleau le Soleil Royal , que montoit le Maréchal
de Conflans , s'eſt brûlé à la côte du Croific
le 21 , après qu'on a eu fauvé l'équipage . Le
Héros , commandé par le Vicomte de Sanfay ,
qui a eu trente hommes tués , & quatre-vingt-fix
bleffés dans le combat , s'eſt brûlé au même en-
Liv
200 MERCURE DE FRANCE.
droit. Le Jufte , commandé par le fieur de Saint-
Allouarn , Capitaine de Vaiffeau , tué dans le combat,
& après lui par le fieur Rofmader de Saint-
Allouarn , fon frere , auffi tué dans le combat , a
péri à l'ance d'Ecoublas à l'entrée de la Loire , &
on a fauvé une partie de l'équipage . Les vaiffeaux
Anglois la Réfolution , de foixante- quatorze canons
, & l'Effex de foixante - dix , ont péri à la
côte du Croilic. Un autre vaiffeau Anglois dont
on ignore lenom a aufli péri à l'entrée de la Loire.
Une partie des vaiffeaux de l'efcadre de Breſt eſt à
la rade de l'lfle d'Aix , & les autres font dans la
rivière de Vilaine.
Le fieur Galibert , dépêché par le Comte de
Montazet, apporta la nouvelle fuivante . Le Maréchal
de Daun attaqua le 20 Novembre un corps
de Pruffiens d'environ vingt-quatre mille hommes
commandés par les Généraux Finck "
Wunsch & Rebentiſch. Le combat s'eft donné
à Maxen à deux lieues de Pyrna & à trois lieues
de Drefde. Il a commencé à midi & n'a fini
qu'a la nuit Les Prufliens ayant été dépoftés des
hauteurs qu'il occupoient & forcés de ſe retirer
dans un fond , ont perdu dans cette occafion
la plus grande partie de leur artillerie & toutes
leurs munitions.
Le Maréchal de Daun avoit fait fes difpofitions,
de maniere que ce Corps d'Arinée étoit entouré
par les troupes Autrichiennes & par celles de
l'Empire. Le lendemain le Général Rebentiſch fur
envoyé au Maréchal de Daun par le Général
Finck , pour capituler. Le Maréchal de Daun exigea
que cette armée mit les arines bas , & fe rendit
prifonniere de guerre ; & il ne donna que
quatre minutes pour fe déterminer . Les Pruffiens
ont été forcés de fubir ces conditions . On les a fait
partir ce même jour pour la Bohême . Il y avoit
JANVIER. 1760 .
201
dans ce corps d'armée fix mille hommes de Cavalerie.
On aifure que le Roi de Pruffe & le Prince
Henri étoient à quatre lieues du champ de bataille
avec trente mille hommes.
On affure auffi qu'il a envoyé ordre dans tous
fes Etats d'enrôler tout ce qu'il y refte d'hommes
depuis l'âge de 14 ans jufqu'à celui de 60 .
Du 8.
La garnifon de Munfter a capitulé le 21 du
mois dernier. Elle a obtenu les honneurs de la
guerre Les ennemis ont donné toutes fortes de
marques de confidérations aux troupes qui la
compofent ainsi qu'au Marquis de Gayon , Maréchal-
de-camp , qui la commande , & au fieur de
Boisclaireau , Lieutenant de Roi & de la Ville,
La garnifon eft arrivée à Wefel le 26 .
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Résumé : DE PARIS, le 1 Décembre.
Le 1er décembre, une bataille navale a opposé les escadres française et anglaise près de Belle-Île. La mer agitée et les changements de vent ont perturbé les manœuvres. Le vaisseau français Formidable a été capturé, tandis que les Thésée et Superbe ont coulé, ainsi qu'un vaisseau anglais inconnu. Le Soleil Royal, commandé par le Maréchal de Conflans, s'est échoué et a brûlé. Le Héros et le Juste ont également brûlé après de lourdes pertes. Plusieurs vaisseaux anglais ont été perdus. Sur le front terrestre, le Maréchal de Daun a attaqué un corps prussien de 24 000 hommes près de Maxen le 20 novembre. Les Prussiens ont été délogés et ont perdu une grande partie de leur artillerie et munitions. Le lendemain, le Général Rebentisch a négocié la capitulation, et les Prussiens ont été faits prisonniers et envoyés en Bohême. Le Roi de Prusse et le Prince Henri étaient proches avec 30 000 hommes. La garnison de Münster a capitulé le 21 novembre, obtenant les honneurs de la guerre, et est arrivée à Wesel le 26 novembre.
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39
p. 213-216
DE PARIS, le 19 Janvier 1760, & jours suivans.
Début :
Le 15 de ce mois, on fit dans l'Eglise Métropolitaine de cette Ville, [...]
Mots clefs :
Service religieux, Repos de l'âme, Roi d'Espagne, Madame, Cérémonies, Église, Décorations, Autel, Oraison funèbre, Marbre, Voûte, Colonne, Lumières, Registres publics, Décès, Mariages, Baptêmes, Tremblement de terre, Secousses, Vaisseaux, Combat, Loterie de l'école royale militaire, Tirage
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE PARIS, le 19 Janvier 1760, & jours suivans.
De PARIS , le 19 Janvier 1760 , &jours fuivans .
Le 1s de ce mois , on fit dans l'Eglife Métropolitaine
de cette Ville , un Service folemnel , par
ordre du Roi , pour le repos de l'ame de Ferdinand
, VI du nom , Roi d'Espagne , & de Marie-
Madelaine de Portugal , Reine d'Espagne , fon
époufe . Sa Majefté avoit nommé pour le grand
deuil du Roi d'Eſpagne, Monfeigneur le Dauphin ,
le Duc d'Orléans , le Prince de Condé ; & pour
celui de la Reine d'Espagne , Madame la Dauphine
, Madame , & Madame Victoire . Ces Princes
& Princeffes s'étant rendus à l'Archevêché , où
le Marquis de Dreux, Grand Maître des Cérémonies
, & le fieur de Nantouillet , Maître des Cérémonies
en furvivance , allerent les prendre ,
lorfque tout fut prêt. Ils les conduifirent à l'Eglife ;
ils entrèrent par la grande porte , & furent pla
cés dans les hautes Italles , à droite & à gauche.
Plusieurs Archevêques & Evêques affiftèrent à
cette cérémonie , ainfi que le Parlement , la
Chambre des Comptes , la Cour des Aides , l'Univerfité
, & le Corps de Ville. L'Archevêque de
Paris y officia pontificalement. L'Evêque de Vence
prononça l'Oraifon funèbre.
Le portail de l'Eglife étoit tendu en noir , avec
trois lès de velours, chargés d'écuffons , entre lelquels
étoient placés trois cartels chargés des
armes & des chiffres du Roi & de la Reine d'ELpagne
Le pourtour du choeur , étoit décoré d'un ordre
Ionique , en pilaftres & arcades , furmonté d'un
entablement , dont la frife étoit femée de fleursde-
lys d'or. Cette architecture étoit figurée en
marbre antique, & tous les ornemens étoient
dorés. Ses arcades étoient garnies de rideaux
noirs , rayés d'hermine , retroulés avec des cordons
treffés en or. Au-deffus de l'entablement ,
214 MERCURE DE FRANCE.
étoit un attique , orné à l'aplomb des arcades ,
de grands écullons aux armes d'Espagne , foutenus
par des lions , entourés de palmes & de guirlandes
en or , accompagnés de chiffres du Roi &
de la Rei e d'Espagne , fur un fond d'azur , groupés
de branches de cyprès.
L'Autel , élevé de plufieurs marches , étoit au
pied d'une niche , en marbre blanc. Le fond de
la niche étoit rempli par le fymbole de la Divinité
, entouré de nuages & de grands rayons dorés.
Au haut de l'attique , terminé en fronton, un
grand dais étoit placé en baldaquin , avec des
rideaux pendans & retrouffés , rayés d'hermine.
Le Catafalque , placé à l'entrée du choeur , étoit
fur un plan quarré long. Aux quatre angles, s'élevoient
quatre focles ,; d'où partoient , quatre
corps folides . Deux colonnes , d'ordre Ionique ,
étoient engagées dans chacun de ces corps , &
portoient un entablement pareil à celui de l'architecture
du choeur. Les deux petites faces de ce monument
, étoient difpofées en arcades . Les deux
grands côtés étoient terminés , quarrément , par
la plate-bande de l'entablement . Les colonnes de
verd antique , avoient leurs bafes & leurs chapiteaux
en or. Les corps folides étoient en marbre
jaune antique , avec des encadremens renfoncés ,
chargés de trophées militaires , & de médaillons
en or , liés par des guirlandes de lauriers.
Une pyramide de brêche violette, portée par un
piédeſtal de même marbre , terminoit le monument.
Sur les quatre faces de ce piédeſtal, étoient
les Ecuffons d'Eſpagne en relief, fupportés par
deux lions ; & fur les faces de la pyramide , des
Ecuffons d'Anjou , en or.
Sous la voute du Catafalque , fur une eſtrade
élevée de fix marches , pofoit un focle de verd
campan , chargé fur fes faces de bas-reliefs & de
agures de marbre en ronde boffe. Au-deffus du foFEVRIER
. 1760. 215
cle & fur les griffes de lion , étoit un farcophage
de porphire , couvert d'un drap mortuaire en or,
chargé des écuffons d'Eſpagne en broderie d'or ,
avec deux couronnes voilées d'un crêpe .
Le Catafalque étoit couvert d'un grand poêle à
quatre rideaux pendans & retrouflés , noirs , &
rayés d'hermine.
Toute cette décoration étoit dans le goût antique.
Ses ornemens , étoient du meilleur choix.
Leur éclat étoit relevé par le grand nombre &
par l'heureufe difpofition des lumieres. Il y avoit
beaucoup de richeffe dans les détails , beaucoup
de nobleſſe & de magnificence dans l'enfemble.
Cette pompe funèbre , ordonnée de la part de
Sa Majesté , par le Duc de Duras , Pair de France ,
premier Gentilhomme de la Chambre du Roi ,
a été dirigée par le fieur de la Ferté , Intendant
des Menus- plaifirs du Roi , fur les deffeins du fieur
Michel Ange Slodtz , Deffinateur ordinaire de la
Chambre & du Cabinet de Sa Majeſté .
Suivant les regiftres publics des Eglifes Paroiffiales
de cette Ville , il eft mort , pendant le cours
de l'année derniére , 18446 perfonnes ; il s'y eſt
fait 4059 mariages ; il y a eu 19058 baptêmes ; &
le nombre des enfans trouvés monte à 5 264.
Le 20 Janvier, on a reſſenti ici , à dix heures & un
quart du foir , une légère ſecoufle de tremblement
de terre ; mais elle a été fi peu fenfible , que trèspeu
de perfonnes s'en font apperçues . On l'a reffentie
plus diftinctement , à Verlailles. On a appris
depuis, que ce tremblement de terre a été fenti
à Amfterdam , à Leyde & à Utrecht. Les lettres
de Bruxelles & de Cologne , parlent de quelques
fecoufles qui le précédèrent le 19. Il a été affez
violent dans ces deux Villes . Suivant les lettres de
Cologne , on a reffenti une nouvelle fecouffe le
21 , vers les quatre heures du matin. A Peronne,
les fecouffes du 20 au foir, durerent deux ou trois
216 MERCURE DE FRANCE.
minutes , & effrayerent plufieurs perfonnes , qui
fortirent précipitamment de leurs maifons , de
crainte d'être écralées fur leurs ruines. On a ap .
pris auffi , que le 22 de Décembre , la fecouffe di
tremblement de terre s'étoit faite fentir dans la
Norwege & dans le Duché de Holſtein . Cette fecoulle
a été précédée , en divers , endroits par un
violent coup de tonnerre.L'ébranlement a été confidérable,
à Hadersleben. Dans quelques villes, routes
les tuilles ont été jettées par terre. Cet accident
n'a pas eu d'autres fuites.
Le 1 Février , le fieur Gigot , Recteur de l'Uni-¸
verfité , accompagné des Doyens des quatre Facultés
& des Procureurs des Nations , ſe rendit à Verfailles
; & fuivant l'ancien ufage, il préſenta un
cierge au Roi , à la Reine , à Monfeigneur le Dauphin
, à Madame la Dauphine , & à Monfeigneur
le Duc de Bourgogne.
Le mêmejour, le Pere Aubert, Docteur de Sorbonne
, & Commandeur de l'Ordre de Notre
Dame de la Mercy , Rédemption des Captifs, accompagné
de trois Religieux de cet Ordre , eut
l'honneur de préfenter à la Reine un cierge , en
hommage & en reconnoillance de leur établiſſement
à Paris , par la feue Reine Marie de Médicis.
On a reçu avis de Toulon , que les vaiffeaux &
les frégates , qui étoient à Cadix depuis le combat
du fieur de la Clue , font rentrés dans le premier
de ces deux ports , au nombre de cinq vaiſſeaux &
trois frégates. Ils étoient fortis de Cadix immédiatement
après la tempête qui avoit difperfé l'Efcadre
Angloife.
Le tirage de la Loterie de l'Ecole Royale Militaire
, s'eft fait le s de Février , en la manière
accoutumée. Les Numéros fortis de la roue de
fortune font 39 , 30 , 64 , 28 , 56. Le prochain
tirage fe fera le 6 du mois de Mars.
Le 1s de ce mois , on fit dans l'Eglife Métropolitaine
de cette Ville , un Service folemnel , par
ordre du Roi , pour le repos de l'ame de Ferdinand
, VI du nom , Roi d'Espagne , & de Marie-
Madelaine de Portugal , Reine d'Espagne , fon
époufe . Sa Majefté avoit nommé pour le grand
deuil du Roi d'Eſpagne, Monfeigneur le Dauphin ,
le Duc d'Orléans , le Prince de Condé ; & pour
celui de la Reine d'Espagne , Madame la Dauphine
, Madame , & Madame Victoire . Ces Princes
& Princeffes s'étant rendus à l'Archevêché , où
le Marquis de Dreux, Grand Maître des Cérémonies
, & le fieur de Nantouillet , Maître des Cérémonies
en furvivance , allerent les prendre ,
lorfque tout fut prêt. Ils les conduifirent à l'Eglife ;
ils entrèrent par la grande porte , & furent pla
cés dans les hautes Italles , à droite & à gauche.
Plusieurs Archevêques & Evêques affiftèrent à
cette cérémonie , ainfi que le Parlement , la
Chambre des Comptes , la Cour des Aides , l'Univerfité
, & le Corps de Ville. L'Archevêque de
Paris y officia pontificalement. L'Evêque de Vence
prononça l'Oraifon funèbre.
Le portail de l'Eglife étoit tendu en noir , avec
trois lès de velours, chargés d'écuffons , entre lelquels
étoient placés trois cartels chargés des
armes & des chiffres du Roi & de la Reine d'ELpagne
Le pourtour du choeur , étoit décoré d'un ordre
Ionique , en pilaftres & arcades , furmonté d'un
entablement , dont la frife étoit femée de fleursde-
lys d'or. Cette architecture étoit figurée en
marbre antique, & tous les ornemens étoient
dorés. Ses arcades étoient garnies de rideaux
noirs , rayés d'hermine , retroulés avec des cordons
treffés en or. Au-deffus de l'entablement ,
214 MERCURE DE FRANCE.
étoit un attique , orné à l'aplomb des arcades ,
de grands écullons aux armes d'Espagne , foutenus
par des lions , entourés de palmes & de guirlandes
en or , accompagnés de chiffres du Roi &
de la Rei e d'Espagne , fur un fond d'azur , groupés
de branches de cyprès.
L'Autel , élevé de plufieurs marches , étoit au
pied d'une niche , en marbre blanc. Le fond de
la niche étoit rempli par le fymbole de la Divinité
, entouré de nuages & de grands rayons dorés.
Au haut de l'attique , terminé en fronton, un
grand dais étoit placé en baldaquin , avec des
rideaux pendans & retrouffés , rayés d'hermine.
Le Catafalque , placé à l'entrée du choeur , étoit
fur un plan quarré long. Aux quatre angles, s'élevoient
quatre focles ,; d'où partoient , quatre
corps folides . Deux colonnes , d'ordre Ionique ,
étoient engagées dans chacun de ces corps , &
portoient un entablement pareil à celui de l'architecture
du choeur. Les deux petites faces de ce monument
, étoient difpofées en arcades . Les deux
grands côtés étoient terminés , quarrément , par
la plate-bande de l'entablement . Les colonnes de
verd antique , avoient leurs bafes & leurs chapiteaux
en or. Les corps folides étoient en marbre
jaune antique , avec des encadremens renfoncés ,
chargés de trophées militaires , & de médaillons
en or , liés par des guirlandes de lauriers.
Une pyramide de brêche violette, portée par un
piédeſtal de même marbre , terminoit le monument.
Sur les quatre faces de ce piédeſtal, étoient
les Ecuffons d'Eſpagne en relief, fupportés par
deux lions ; & fur les faces de la pyramide , des
Ecuffons d'Anjou , en or.
Sous la voute du Catafalque , fur une eſtrade
élevée de fix marches , pofoit un focle de verd
campan , chargé fur fes faces de bas-reliefs & de
agures de marbre en ronde boffe. Au-deffus du foFEVRIER
. 1760. 215
cle & fur les griffes de lion , étoit un farcophage
de porphire , couvert d'un drap mortuaire en or,
chargé des écuffons d'Eſpagne en broderie d'or ,
avec deux couronnes voilées d'un crêpe .
Le Catafalque étoit couvert d'un grand poêle à
quatre rideaux pendans & retrouflés , noirs , &
rayés d'hermine.
Toute cette décoration étoit dans le goût antique.
Ses ornemens , étoient du meilleur choix.
Leur éclat étoit relevé par le grand nombre &
par l'heureufe difpofition des lumieres. Il y avoit
beaucoup de richeffe dans les détails , beaucoup
de nobleſſe & de magnificence dans l'enfemble.
Cette pompe funèbre , ordonnée de la part de
Sa Majesté , par le Duc de Duras , Pair de France ,
premier Gentilhomme de la Chambre du Roi ,
a été dirigée par le fieur de la Ferté , Intendant
des Menus- plaifirs du Roi , fur les deffeins du fieur
Michel Ange Slodtz , Deffinateur ordinaire de la
Chambre & du Cabinet de Sa Majeſté .
Suivant les regiftres publics des Eglifes Paroiffiales
de cette Ville , il eft mort , pendant le cours
de l'année derniére , 18446 perfonnes ; il s'y eſt
fait 4059 mariages ; il y a eu 19058 baptêmes ; &
le nombre des enfans trouvés monte à 5 264.
Le 20 Janvier, on a reſſenti ici , à dix heures & un
quart du foir , une légère ſecoufle de tremblement
de terre ; mais elle a été fi peu fenfible , que trèspeu
de perfonnes s'en font apperçues . On l'a reffentie
plus diftinctement , à Verlailles. On a appris
depuis, que ce tremblement de terre a été fenti
à Amfterdam , à Leyde & à Utrecht. Les lettres
de Bruxelles & de Cologne , parlent de quelques
fecoufles qui le précédèrent le 19. Il a été affez
violent dans ces deux Villes . Suivant les lettres de
Cologne , on a reffenti une nouvelle fecouffe le
21 , vers les quatre heures du matin. A Peronne,
les fecouffes du 20 au foir, durerent deux ou trois
216 MERCURE DE FRANCE.
minutes , & effrayerent plufieurs perfonnes , qui
fortirent précipitamment de leurs maifons , de
crainte d'être écralées fur leurs ruines. On a ap .
pris auffi , que le 22 de Décembre , la fecouffe di
tremblement de terre s'étoit faite fentir dans la
Norwege & dans le Duché de Holſtein . Cette fecoulle
a été précédée , en divers , endroits par un
violent coup de tonnerre.L'ébranlement a été confidérable,
à Hadersleben. Dans quelques villes, routes
les tuilles ont été jettées par terre. Cet accident
n'a pas eu d'autres fuites.
Le 1 Février , le fieur Gigot , Recteur de l'Uni-¸
verfité , accompagné des Doyens des quatre Facultés
& des Procureurs des Nations , ſe rendit à Verfailles
; & fuivant l'ancien ufage, il préſenta un
cierge au Roi , à la Reine , à Monfeigneur le Dauphin
, à Madame la Dauphine , & à Monfeigneur
le Duc de Bourgogne.
Le mêmejour, le Pere Aubert, Docteur de Sorbonne
, & Commandeur de l'Ordre de Notre
Dame de la Mercy , Rédemption des Captifs, accompagné
de trois Religieux de cet Ordre , eut
l'honneur de préfenter à la Reine un cierge , en
hommage & en reconnoillance de leur établiſſement
à Paris , par la feue Reine Marie de Médicis.
On a reçu avis de Toulon , que les vaiffeaux &
les frégates , qui étoient à Cadix depuis le combat
du fieur de la Clue , font rentrés dans le premier
de ces deux ports , au nombre de cinq vaiſſeaux &
trois frégates. Ils étoient fortis de Cadix immédiatement
après la tempête qui avoit difperfé l'Efcadre
Angloife.
Le tirage de la Loterie de l'Ecole Royale Militaire
, s'eft fait le s de Février , en la manière
accoutumée. Les Numéros fortis de la roue de
fortune font 39 , 30 , 64 , 28 , 56. Le prochain
tirage fe fera le 6 du mois de Mars.
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Résumé : DE PARIS, le 19 Janvier 1760, & jours suivans.
Le 1er janvier 1760, un service solennel fut organisé dans l'église métropolitaine de Paris pour honorer la mémoire de Ferdinand VI, roi d'Espagne, et de Marie-Madeleine de Portugal, reine d'Espagne. Ce service fut ordonné par le roi de France, qui désigna le Dauphin, le Duc d'Orléans et le Prince de Condé pour le grand deuil du roi d'Espagne, et Madame la Dauphine, Madame et Madame Victoire pour celui de la reine d'Espagne. Les princes et princesses furent conduits à l'église par le Marquis de Dreux et le sieur de Nantouillet. La cérémonie fut assistée par plusieurs archevêques, évêques, ainsi que par le Parlement, la Chambre des Comptes, la Cour des Aides, l'Université et le Corps de Ville. L'archevêque de Paris officia pontificalement, et l'évêque de Vence prononça l'oraison funèbre. L'église était somptueusement décorée : le portail était tendu de noir avec des écussons, le chœur orné d'un ordre ionique en pilastres et arcades, et un catafalque richement décoré. La décoration, dirigée par le sieur de la Ferté et conçue par Michel Ange Slodtz, était dans le goût antique et d'une grande magnificence. Les registres publics des églises paroissiales de Paris indiquèrent 18 446 décès, 4 059 mariages, 19 058 baptêmes et 5 264 enfants trouvés pour l'année précédente. Le 20 janvier, une légère secousse de tremblement de terre fut ressentie à Paris, plus distinctement à Versailles, et signalée à Amsterdam, Leyde, Utrecht, Bruxelles et Cologne. Des secousses furent également ressenties en Norvège et dans le Duché de Holstein. Le 1er février, le sieur Gigot, recteur de l'Université, présenta un cierge au roi, à la reine et à d'autres membres de la famille royale à Versailles. Le même jour, le Père Aubert présenta un cierge à la reine en reconnaissance de l'établissement de l'Ordre de Notre Dame de la Mercy à Paris. Des nouvelles de Toulon indiquèrent le retour de vaisseaux et de frégates à Cadix après une tempête. Enfin, le tirage de la loterie de l'École Royale Militaire eut lieu le 6 février, avec les numéros 39, 30, 64, 28 et 56.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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40
p. 207-213
DE PARIS, le 8 Mars.
Début :
Charlotte-Godefride-Elisbeth de Rohan-Soubise, Princesse de Condé, mourut, [...]
Mots clefs :
Princesse de Condé, Décès, Prince de Soubise, Vertus, Corps embaumé, Cortège funéraire, Carosses, Couvent, Religieux, Prières, Deuil, Assemblée générale du Clergé de France, Archevêque, Audience du roi, Conseiller d'État, Ministre, Cérémonies, Assemblée du Clergé, Don, Société royale de Londres, Élection, Tremblements de terre, Ouragan, Capitaine, Irlande, Garnison, Officiers, Chevaliers, Gardes suisses, Ile de Mann, Combat, Anglais, Pondichéry, Blessés et morts, Compagnie
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texteReconnaissance textuelle : DE PARIS, le 8 Mars.
DE PARIS , le 8 Mars.
Charlotte - Godefride - Elifabeth de Rohan - Soubife,
Princeffe de Condé , mourut, a l'Hôtel de
Condé , la nuit du Mardi au Mercredi
dernier ,
dans le vingt- uniéme jour de fa maladie , &
la vingt
- troiliéme année de fon âge. Cette Princeffe
étoit fille de Charles de Rohan , Prince de
Soubife
,
Maréchal deFrance, Pair du Royaume,
Capitaine-
Lieutenant
des Gendarmes de la garde
duRoi ,
Gouverneur
de Flandre & du Hainault;
& d'Anne-Marie Louife de la Tour d'Auvergne,
Princellede Bouillon. Elle avoit été mariée le
Mai
137532
à Louis -Jofeph de Bourbon-Condé
3
208 MERCURE DE FRANCE.
Prince du Sang , Grand- Maître de la Maiſon
du Roi , & Gouverneur de la Proviuce de Bourgogne,
Elle a eu de ce mariage , N. de Bourbon-
Condé , Duc de Bourbon , né le 13 Avril 1756 ;
Marie de Bourbon- Condé, née le 16 Février 1755,
morte le 22 Juin 1759 ; & Mademoiſelle de
Bourbon- Condé , née le ƒ Octobre 1757.
Cette Princeffe réunifloit toutes les vertus Chrétiennes
& Morales : fon caractère doux & affable ,
lui avoient gagné l'affection de toutes les perfonnes
qui avoient l'honneur de l'approcher :
elle eſt univerſellement regrettée . Les pauvres
pleurent amérement , en elle , une mere & une
amie , que leurs voeux n'ont pu leur conferver.
Le corps de cette Princefle , après avoir été
embaumé , a été expofé pendant un jour furune
eſtrade , éclairée par un grand nombre de lumieres
, & tendue de noir. Il fut porté , le
8 de ce mois , au Couvent des Carmelites du
Fauxbourg Saint Jacques , pour y être inhumé. Le
cortége du Convoi étoit compofé de cent pauvres,
couverts de drap blanc , & tenant chacun un
flambeau ; des Officiers , des Suiffes , & des Valets
de chambre de la Princeffe , à cheval ; de cent
cinquante Valets de pied ; de trois caroffes drapés
, à fix chevaux , harnachés & caparallonnés
de noir , qui étoient remplis par les Ecuyers , les
Gentilshommes , & les Femmes de chambre ; &
de trois caroffes à huit chevaux . Dans le premier,
étoit l'Archevêque de Bordeaux , portant le coeur,
le Curé de Saint-Sulpice , le Confeffeur , & les
Aumôniers de la Prince ffe. Dans le fecond , étoit
le
corps de la Princelle . Dans le troifiéme , étoit
Mademoiſelle de Sens , avec la Princeffe de Marfan,
Chanoineffe de Rémiremont ; la Dame d'honneur
de Ma lemoiſelle de Sens , & les Dam's attachées
à la Princeffe défunte. Lorsqu'on fut aur
AVRIL. 1760. 209
Carmelites , le corps fut defcendu du caroffe par
huit Valets de Chambre , & porté fous le portique
intérieur de l'Eglife , où les Religieufes , tenant
chacune un cierge à la main , étoient rangées
à droite & à gauche , avec trente Eccléfiaftiques
, le Supérieur de la Maiſon à leur tête.
L'Archevêque de Bordeaux , en camail & en
rochet , accompagné du Curé de S. Sulpice , en
étole , en préfentant le corps & le coeur de la
Princeffe aux Carmelites , leur fit un Difcours ,
auquel le Supérieur répondit : enfuite les Religieufes
commencèrent l'Office des Morts. Les
Prières finies , les huit Valets de Chambre portèrent
le corps près de la foife ; & l'y ayant
defcendu , le coeur fut pofé fur la croix du cercueil.
Mademoiſelle de Sens , qui menoit le deuil,
étoit en longue mante , dont la queue étoit portée
par fon Ecuyer. La Princeffe de Marfan ; la
Dame d'honneur de Mademoiſelle de Sens , &
les Dames de la Princefle défunte , étoient auffi
en mante.
Le 6 de ce mois , l'ouverture folemnelle de
l'Affemblée générale du Clergé de France , fe fit
dans l'Eglife des Grands-Auguftins , par la Mefle
du Saint- Elprit. L'Archevêque de Narbonne y
officia pontificalement . Le 9 , les Archevêques
de Narbonne , d'Auch & de Bordeaux , & les .
Evêques de Grenoble , d'Auxerre & du Puy , Préfidens
de l'Affemblée , avec les autres Prélats &
les Députés du fecond ordre , qui compofent cette
Affemblée allerent à Verfailles rendre leurs
respects au Roi. Ils s'affemblerent dans l'appartement
qui leur avoit été deſtiné ; & le Comte de
S. Florentin , Miniftre & Secrétaire d'Etat , étant
venu les prendre pour les préfenter à Sa Majefté
, ils furent conduits à l'Audience du Roi
avec les honneurs que reçoit le Clergé lorsqu'il
>
115 MERCURE DE FRANCE.
eft en Corps. Les Gardes du Corps étoient en
haye dans leur falle , & les deux battans des
portes étoient ouverts. L'Archevêque de Narbonne
harangua le Roi , après quoi il préfenta
les Députés à Sa Majefté. Ils eurent le même
jour audience de la Reine , de Monfeigneur le
Dauphin, & de Madame la Dauphine , étant préfentés
& conduits avec les mêmes honneurs .
Le 11 , le fieur Feydeau de Brou , Confeiller
d'Etat ordinaire , & au Confeil royal ; le Comte
de Saint Florentin , Miniftre & Secrétaire d'Etat s
le fieur Trudaine , Confeiller d'Etat ordinaire , &
au Confeil royal , & Intendant des Finances ; le
fieur d'Ormeffon d'Amboile , Confeiller d'Etat &
Intendant des Finances ; & le fieur Bertin , Confeiller
ordinaire au Confeil royal , & Contrôleur
général des Finances , vinrent , en qualité de
Commiffaires du Roi , à l'Affemblée du Clergé ,
où ils furent reçus avec les cérémonies ufitées en
pareille occafion . Le fieur Feydeau de Brou, porta
la parole.
L'Alfemblée du Clergé ayant accordé unanimement
le don gratuit de feize millions , qui lui
avoit été demandé de la part du Roi ; fur le
compte que l'Archevêque de Narbonne en a rendu
à Sa Majefté , le Roi lui en a témoigné fa fatisfaction
par une Lettre remplie de marques de
bonté & d'affection pour le Clergé.
Le 24 du mois de Janvier , la Société royale
de Londres , élut , d'une commune voix , pour
Aflociés , le fieur de la Caille , de l'Académie des
Sciences , & Profefleur de Mathématiques au
Collège Mazarin ; & le fieur Pereire , Penfionnaire
du Roi , célèbre par fon art d'enfeigner à parler
aux muets de naiffance.
Les Lettres arrivées depuis peu de divers lieux
de la Syrie , confirment la nouvelle des trem
AVRIL. 1760. 211
blemens de terre réitérés qui ont détruit la plûpart
des Villes de cette contrée. Les deux principales
fecouffes fe font fait fentir le 30 Octobre
dernier , à trois heures trois quarts du matin ,
& le 25 Novembre , à fept heures & un quart du
foir. Les autres ont été en fi grand nombre, qu'on
ne put les compter. Tripoli de Syrie , n'eft plus
qu'un monceau de ruines , de même que Saphet ,
Napoulouſe , Damas , plufieurs autres Villes , &
ane multitude de bourgs & de villages.Il s'est fait,
à ce qu'on ajoute , près de Bulbec , dans la terre ,
une fente de plufieurs toifes de largeur , & de
vingt lieues de longueur.
On apprend d'Alquin , fous Vezelay, en Bourgogne
, qu'on y a effuyé , vers le milieu du mois
dernier , un furieux ouragan. Il a déraciné ou
brifé prèfque tous les arbres d'un bois de trentefix
arpens , auffi bien que ceux des campagnes
voifines. Le tremblement de terre du 20 Janvier,
s'y eft auffi fait fentir avec une violence particu
lière ; & il y caufa une très- grande frayeur.
Les nouvelles que l'on a reçues d'Angleterre
& d'Irlande , nous apprennent que le Capitaine
Thurot débarqua le 18 du mois dernier à Karickfergus
en Irlande. Le 21 , on attaqua Karickfergus
, qui fe défendit quelque temps ; mais le
Lieutenant- Colonel Jennings , le voyant prêt à
être forcé , rendit le Château ; & la garnifon fut
prifonnière de guerre. On a eu , à cette attaque ,
17 hommes tues , dont trois Officiers du Régiment
des Gardes Françoifes , les fieurs de l'Epinay
, de Novillard , & le Chevalier de Boillac ;
& environ trente hommes bleffés , du nombre
defquels font , le fieur Villepreaux , Capitaine
des Grenadiers au Régiment de Cambis , qui a
reçu un coup de fufil dans le bras , & le fieur
Flobert , Brigadier , commandant les troupes da
212 MERCURE DE FRANCE.
débarquement , qui a auffi été bleffé d'un coup
de feu à la jambe.
On a été retenu à Karickfergus jufqu'au 27 ,
par les vents contraires ; & la nuit du 27 au 28 ,
on a remis à la voile , avec des ôtages , pour 100
mille livres fterlin de contribution . Le 28 au matin
, on a été rencontré près de l'Ifle de Mann ,
par trois frégates Angloifes , de 36 canons chacune.
Le combat a été très-vif pendant plus d'une
heure ; mais les frégates , délemparées & percées
de coups de canon , fous l'eau , ont été obli
gées d'amener. Le fieur Thurot a été tué , dans le
combat . Les talens peu communs , l'expérience ,
& le courage de cet Officier , méritent les plus
grands regrets de notre part , & lui avoient acquis
l'eftime de nos ennemis même . Le fieur
Dars , Officier au Régiment des Gardes Françoi
fes , a aufli été tué. Le fieur Cavenac , Aidemajor
du même Régiment , a été bleflé à la
rête d'un coup de feu , que l'on croit n'être pas
dangereux. Le fieur Joft , Officier au Régiment
des Gardes Suiffes , a eu un bras emporté. Les
autres Officiers bleſſés font , le fieur de Brie , Capitaine
, le fieur Mafcle , Aide -major , & le fieur
Callale , Lieutenant au Régiment d'Artois. Les
fieurs de Garcin & de Brazide , Capitaines au Régiment
de Bourgogne , & le fieur Ollery , Lieutenant
dans les Volontaires étrangers.
On a appris depuis , par une Lettre , venant de
Ife de Mann , en datte du 2 Mars , que le
combat a commencé à fept heures du matin , &
n'a fini qu'à 9 heures & demie ; que M. Thurot ,
après avoir eu affaire à la premiere frégate Angloife
l'avoit forcée de fe retirer pour fe réparer ;
les deux autres font venues la remplacer , &
l'ont mis entre deux feux ; & que M. Thurot n'a
été tué , qu'après avoir tenté un nouvel abordage
que
AVRIL. 1760. 213
contre la premiere frégate , qui revenoit à lui,
après s'être réparée . On ajoute , que M. Thurot a
été enterré dans l'Iſle de Mann , par les Anglois ,
avec tous les honneurs militaires qu'ils ont cru
devoir à un homme dont la valeur , l'expérience ,
& l'humanité , n'ont point connu de bornes.
Suivant les nouvelles apportées à l'Orient , de la
côte de Coromandel , il s'eft engagé le 10 Septembre
de l'année derniere , un combat très - vif
entre l'efcadre Françoife commandée par le fieur
Daché , & l'efcadre Angloife commandée par l'Amiral
Pocock. On n'a point encore de détail circonftancié
de cette action .
Les mêmes lettres ajoutent , qu'il y a eu le 30
Septembre , un combat entre les troupes Françoiles
& Angloifes , à Vandavachi , près d'Afcate ,
arente lieues de Pondichéri. Les Anglois étoient
20 nombre de dix - fept cens blancs , & de quatre
mille noirs . l'armée Françoiſe étoit de onze cens
blancs , commandée en l'abſence du fieur de Lalli
qui étoit à Pondichéri , par le fieur de Géoghégan
Capitaine de Grenadiers du Régiment de Lalli.
L'affaire fur très-vive , & dura cinq heures . Les
François refterent enfin maîtres du champ de ba
taille.
Les Anglois ont eu 350 hommes de tués , & un
grand nombre de bleffés. On leur a fait cinq Officiers&
56 foldats prifonniers. On leur a pris quatre
piéces de canon , & deux chariots d'artillerie.
Notre perte n'a été que de 36 hommes tués , & de78 bleffés. Du nombre des premiers
, font , les fieurs Gineftoux
& de Gouyon
, Capitaines
dans le Régiment
de Lorraine
; & les Geurs de Main- ville & Papillaut
, le premier , Commandant
du
Bataillon de l'Inde , & le fecond
, Lieutenant
dans les troupes au fervice de la Compagnie
des
Indes.
Charlotte - Godefride - Elifabeth de Rohan - Soubife,
Princeffe de Condé , mourut, a l'Hôtel de
Condé , la nuit du Mardi au Mercredi
dernier ,
dans le vingt- uniéme jour de fa maladie , &
la vingt
- troiliéme année de fon âge. Cette Princeffe
étoit fille de Charles de Rohan , Prince de
Soubife
,
Maréchal deFrance, Pair du Royaume,
Capitaine-
Lieutenant
des Gendarmes de la garde
duRoi ,
Gouverneur
de Flandre & du Hainault;
& d'Anne-Marie Louife de la Tour d'Auvergne,
Princellede Bouillon. Elle avoit été mariée le
Mai
137532
à Louis -Jofeph de Bourbon-Condé
3
208 MERCURE DE FRANCE.
Prince du Sang , Grand- Maître de la Maiſon
du Roi , & Gouverneur de la Proviuce de Bourgogne,
Elle a eu de ce mariage , N. de Bourbon-
Condé , Duc de Bourbon , né le 13 Avril 1756 ;
Marie de Bourbon- Condé, née le 16 Février 1755,
morte le 22 Juin 1759 ; & Mademoiſelle de
Bourbon- Condé , née le ƒ Octobre 1757.
Cette Princeffe réunifloit toutes les vertus Chrétiennes
& Morales : fon caractère doux & affable ,
lui avoient gagné l'affection de toutes les perfonnes
qui avoient l'honneur de l'approcher :
elle eſt univerſellement regrettée . Les pauvres
pleurent amérement , en elle , une mere & une
amie , que leurs voeux n'ont pu leur conferver.
Le corps de cette Princefle , après avoir été
embaumé , a été expofé pendant un jour furune
eſtrade , éclairée par un grand nombre de lumieres
, & tendue de noir. Il fut porté , le
8 de ce mois , au Couvent des Carmelites du
Fauxbourg Saint Jacques , pour y être inhumé. Le
cortége du Convoi étoit compofé de cent pauvres,
couverts de drap blanc , & tenant chacun un
flambeau ; des Officiers , des Suiffes , & des Valets
de chambre de la Princeffe , à cheval ; de cent
cinquante Valets de pied ; de trois caroffes drapés
, à fix chevaux , harnachés & caparallonnés
de noir , qui étoient remplis par les Ecuyers , les
Gentilshommes , & les Femmes de chambre ; &
de trois caroffes à huit chevaux . Dans le premier,
étoit l'Archevêque de Bordeaux , portant le coeur,
le Curé de Saint-Sulpice , le Confeffeur , & les
Aumôniers de la Prince ffe. Dans le fecond , étoit
le
corps de la Princelle . Dans le troifiéme , étoit
Mademoiſelle de Sens , avec la Princeffe de Marfan,
Chanoineffe de Rémiremont ; la Dame d'honneur
de Ma lemoiſelle de Sens , & les Dam's attachées
à la Princeffe défunte. Lorsqu'on fut aur
AVRIL. 1760. 209
Carmelites , le corps fut defcendu du caroffe par
huit Valets de Chambre , & porté fous le portique
intérieur de l'Eglife , où les Religieufes , tenant
chacune un cierge à la main , étoient rangées
à droite & à gauche , avec trente Eccléfiaftiques
, le Supérieur de la Maiſon à leur tête.
L'Archevêque de Bordeaux , en camail & en
rochet , accompagné du Curé de S. Sulpice , en
étole , en préfentant le corps & le coeur de la
Princeffe aux Carmelites , leur fit un Difcours ,
auquel le Supérieur répondit : enfuite les Religieufes
commencèrent l'Office des Morts. Les
Prières finies , les huit Valets de Chambre portèrent
le corps près de la foife ; & l'y ayant
defcendu , le coeur fut pofé fur la croix du cercueil.
Mademoiſelle de Sens , qui menoit le deuil,
étoit en longue mante , dont la queue étoit portée
par fon Ecuyer. La Princeffe de Marfan ; la
Dame d'honneur de Mademoiſelle de Sens , &
les Dames de la Princefle défunte , étoient auffi
en mante.
Le 6 de ce mois , l'ouverture folemnelle de
l'Affemblée générale du Clergé de France , fe fit
dans l'Eglife des Grands-Auguftins , par la Mefle
du Saint- Elprit. L'Archevêque de Narbonne y
officia pontificalement . Le 9 , les Archevêques
de Narbonne , d'Auch & de Bordeaux , & les .
Evêques de Grenoble , d'Auxerre & du Puy , Préfidens
de l'Affemblée , avec les autres Prélats &
les Députés du fecond ordre , qui compofent cette
Affemblée allerent à Verfailles rendre leurs
respects au Roi. Ils s'affemblerent dans l'appartement
qui leur avoit été deſtiné ; & le Comte de
S. Florentin , Miniftre & Secrétaire d'Etat , étant
venu les prendre pour les préfenter à Sa Majefté
, ils furent conduits à l'Audience du Roi
avec les honneurs que reçoit le Clergé lorsqu'il
>
115 MERCURE DE FRANCE.
eft en Corps. Les Gardes du Corps étoient en
haye dans leur falle , & les deux battans des
portes étoient ouverts. L'Archevêque de Narbonne
harangua le Roi , après quoi il préfenta
les Députés à Sa Majefté. Ils eurent le même
jour audience de la Reine , de Monfeigneur le
Dauphin, & de Madame la Dauphine , étant préfentés
& conduits avec les mêmes honneurs .
Le 11 , le fieur Feydeau de Brou , Confeiller
d'Etat ordinaire , & au Confeil royal ; le Comte
de Saint Florentin , Miniftre & Secrétaire d'Etat s
le fieur Trudaine , Confeiller d'Etat ordinaire , &
au Confeil royal , & Intendant des Finances ; le
fieur d'Ormeffon d'Amboile , Confeiller d'Etat &
Intendant des Finances ; & le fieur Bertin , Confeiller
ordinaire au Confeil royal , & Contrôleur
général des Finances , vinrent , en qualité de
Commiffaires du Roi , à l'Affemblée du Clergé ,
où ils furent reçus avec les cérémonies ufitées en
pareille occafion . Le fieur Feydeau de Brou, porta
la parole.
L'Alfemblée du Clergé ayant accordé unanimement
le don gratuit de feize millions , qui lui
avoit été demandé de la part du Roi ; fur le
compte que l'Archevêque de Narbonne en a rendu
à Sa Majefté , le Roi lui en a témoigné fa fatisfaction
par une Lettre remplie de marques de
bonté & d'affection pour le Clergé.
Le 24 du mois de Janvier , la Société royale
de Londres , élut , d'une commune voix , pour
Aflociés , le fieur de la Caille , de l'Académie des
Sciences , & Profefleur de Mathématiques au
Collège Mazarin ; & le fieur Pereire , Penfionnaire
du Roi , célèbre par fon art d'enfeigner à parler
aux muets de naiffance.
Les Lettres arrivées depuis peu de divers lieux
de la Syrie , confirment la nouvelle des trem
AVRIL. 1760. 211
blemens de terre réitérés qui ont détruit la plûpart
des Villes de cette contrée. Les deux principales
fecouffes fe font fait fentir le 30 Octobre
dernier , à trois heures trois quarts du matin ,
& le 25 Novembre , à fept heures & un quart du
foir. Les autres ont été en fi grand nombre, qu'on
ne put les compter. Tripoli de Syrie , n'eft plus
qu'un monceau de ruines , de même que Saphet ,
Napoulouſe , Damas , plufieurs autres Villes , &
ane multitude de bourgs & de villages.Il s'est fait,
à ce qu'on ajoute , près de Bulbec , dans la terre ,
une fente de plufieurs toifes de largeur , & de
vingt lieues de longueur.
On apprend d'Alquin , fous Vezelay, en Bourgogne
, qu'on y a effuyé , vers le milieu du mois
dernier , un furieux ouragan. Il a déraciné ou
brifé prèfque tous les arbres d'un bois de trentefix
arpens , auffi bien que ceux des campagnes
voifines. Le tremblement de terre du 20 Janvier,
s'y eft auffi fait fentir avec une violence particu
lière ; & il y caufa une très- grande frayeur.
Les nouvelles que l'on a reçues d'Angleterre
& d'Irlande , nous apprennent que le Capitaine
Thurot débarqua le 18 du mois dernier à Karickfergus
en Irlande. Le 21 , on attaqua Karickfergus
, qui fe défendit quelque temps ; mais le
Lieutenant- Colonel Jennings , le voyant prêt à
être forcé , rendit le Château ; & la garnifon fut
prifonnière de guerre. On a eu , à cette attaque ,
17 hommes tues , dont trois Officiers du Régiment
des Gardes Françoifes , les fieurs de l'Epinay
, de Novillard , & le Chevalier de Boillac ;
& environ trente hommes bleffés , du nombre
defquels font , le fieur Villepreaux , Capitaine
des Grenadiers au Régiment de Cambis , qui a
reçu un coup de fufil dans le bras , & le fieur
Flobert , Brigadier , commandant les troupes da
212 MERCURE DE FRANCE.
débarquement , qui a auffi été bleffé d'un coup
de feu à la jambe.
On a été retenu à Karickfergus jufqu'au 27 ,
par les vents contraires ; & la nuit du 27 au 28 ,
on a remis à la voile , avec des ôtages , pour 100
mille livres fterlin de contribution . Le 28 au matin
, on a été rencontré près de l'Ifle de Mann ,
par trois frégates Angloifes , de 36 canons chacune.
Le combat a été très-vif pendant plus d'une
heure ; mais les frégates , délemparées & percées
de coups de canon , fous l'eau , ont été obli
gées d'amener. Le fieur Thurot a été tué , dans le
combat . Les talens peu communs , l'expérience ,
& le courage de cet Officier , méritent les plus
grands regrets de notre part , & lui avoient acquis
l'eftime de nos ennemis même . Le fieur
Dars , Officier au Régiment des Gardes Françoi
fes , a aufli été tué. Le fieur Cavenac , Aidemajor
du même Régiment , a été bleflé à la
rête d'un coup de feu , que l'on croit n'être pas
dangereux. Le fieur Joft , Officier au Régiment
des Gardes Suiffes , a eu un bras emporté. Les
autres Officiers bleſſés font , le fieur de Brie , Capitaine
, le fieur Mafcle , Aide -major , & le fieur
Callale , Lieutenant au Régiment d'Artois. Les
fieurs de Garcin & de Brazide , Capitaines au Régiment
de Bourgogne , & le fieur Ollery , Lieutenant
dans les Volontaires étrangers.
On a appris depuis , par une Lettre , venant de
Ife de Mann , en datte du 2 Mars , que le
combat a commencé à fept heures du matin , &
n'a fini qu'à 9 heures & demie ; que M. Thurot ,
après avoir eu affaire à la premiere frégate Angloife
l'avoit forcée de fe retirer pour fe réparer ;
les deux autres font venues la remplacer , &
l'ont mis entre deux feux ; & que M. Thurot n'a
été tué , qu'après avoir tenté un nouvel abordage
que
AVRIL. 1760. 213
contre la premiere frégate , qui revenoit à lui,
après s'être réparée . On ajoute , que M. Thurot a
été enterré dans l'Iſle de Mann , par les Anglois ,
avec tous les honneurs militaires qu'ils ont cru
devoir à un homme dont la valeur , l'expérience ,
& l'humanité , n'ont point connu de bornes.
Suivant les nouvelles apportées à l'Orient , de la
côte de Coromandel , il s'eft engagé le 10 Septembre
de l'année derniere , un combat très - vif
entre l'efcadre Françoife commandée par le fieur
Daché , & l'efcadre Angloife commandée par l'Amiral
Pocock. On n'a point encore de détail circonftancié
de cette action .
Les mêmes lettres ajoutent , qu'il y a eu le 30
Septembre , un combat entre les troupes Françoiles
& Angloifes , à Vandavachi , près d'Afcate ,
arente lieues de Pondichéri. Les Anglois étoient
20 nombre de dix - fept cens blancs , & de quatre
mille noirs . l'armée Françoiſe étoit de onze cens
blancs , commandée en l'abſence du fieur de Lalli
qui étoit à Pondichéri , par le fieur de Géoghégan
Capitaine de Grenadiers du Régiment de Lalli.
L'affaire fur très-vive , & dura cinq heures . Les
François refterent enfin maîtres du champ de ba
taille.
Les Anglois ont eu 350 hommes de tués , & un
grand nombre de bleffés. On leur a fait cinq Officiers&
56 foldats prifonniers. On leur a pris quatre
piéces de canon , & deux chariots d'artillerie.
Notre perte n'a été que de 36 hommes tués , & de78 bleffés. Du nombre des premiers
, font , les fieurs Gineftoux
& de Gouyon
, Capitaines
dans le Régiment
de Lorraine
; & les Geurs de Main- ville & Papillaut
, le premier , Commandant
du
Bataillon de l'Inde , & le fecond
, Lieutenant
dans les troupes au fervice de la Compagnie
des
Indes.
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Résumé : DE PARIS, le 8 Mars.
Le 8 mars, Charlotte-Godefride-Élisabeth de Rohan-Soubise, princesse de Condé, est décédée à l'Hôtel de Condé à Paris à l'âge de vingt-trois ans après vingt-et-un jours de maladie. Elle était la fille de Charles de Rohan, prince de Soubise et maréchal de France, et d'Anne-Marie Louise de la Tour d'Auvergne, princesse de Bouillon. Mariée en mai 1753 à Louis-Joseph de Bourbon-Condé, prince du sang et gouverneur de Bourgogne, elle a eu trois enfants : Louis de Bourbon-Condé, duc de Bourbon, né en 1756 ; Marie de Bourbon-Condé, née en 1755 et décédée en 1759 ; et Mademoiselle de Bourbon-Condé, née en 1757. La princesse était reconnue pour ses vertus chrétiennes et morales, ainsi que pour sa douceur et son affabilité, ce qui lui avait valu l'affection de tous. Les pauvres la pleuraient comme une mère et une amie. Son corps, après avoir été embaumé, a été exposé sur une estrade éclairée et tendue de noir avant d'être inhumé au couvent des Carmélites du faubourg Saint-Jacques. Le cortège funéraire comprenait cent pauvres, des officiers, des valets de chambre, et trois carrosses drapés de noir. L'archevêque de Bordeaux a prononcé un discours lors de la cérémonie, après quoi les religieuses ont commencé l'office des morts. La princesse de Marfan, Mademoiselle de Sens, et d'autres dames en deuil étaient présentes. Le 6 avril, l'assemblée générale du clergé de France s'est ouverte à l'église des Grands-Augustins. Le 9 avril, les prélats ont rendu visite au roi à Versailles. Le 11 avril, des commissaires du roi ont été reçus à l'assemblée du clergé, qui a accordé un don gratuit de seize millions au roi.
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41
p. 198-199
DE LONDRES, le 1 Juin.
Début :
On a été fort déconcerté ici de la résolution prise par les Puissances du Nord [...]
Mots clefs :
Résolution, Flotte, Mer baltique, Accès, Roi de Prusse, Incendies, Dégâts, Pondichéry, Combat, Amiral, Chef d'escadre, Comte, Conseil, Exécution, Maison de Shirley
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texteReconnaissance textuelle : DE LONDRES, le 1 Juin.
De LONDRES , le n. Juin.
On a été fort déconcerté ici de la réfolution
prife par les Puiflances du Nord de fermer à nos
Flottes l'entrée de la Mer Baltique . On ne s'atten
doit pas à la triple alliance qui vient d'être conclue.
L'impoffibilité de fecourir le Roi de Pruffe
de ce côté , paroît avoir déterminé la Cour à faire
de plus grands efforts en Allemagne
On a reçu , de Bo on , laitre nouvelle de
trois incendies confécutifs arrivés dans cette Ville.
Le dernier , qui a été le plus confidérable , a réduit
en cendres plus de quatre cens maiſons &
magazins remplis d'effers de toute espéce . Cet
événement eft du zo Mars.
Les nouvelles arrivées, depuis peu , de Madras,
font évanouir le bruit qui s'étoit répandu de la
prife de Pondichéri Elles contiennent des détails
du Combat donné , au moi d'Octobre dernier ,
entre notre flote commandée par l'Amiral Pocock
& celle de France fous les ordres du fieur
Daché , Chef d'Efcadre. Ce combat a duré trois
heures , pendant le quelles nous avons eu cinq
cens hommes tués ou bleflés . Les Lettres du continent
confirment au la nouvelle du combat
de Vandavachi , & du défavantage que nos troupes
y ont eu.
Le prétendu Comte de S. Germain , qui avoit
été arrêté dans cette Ville , & confié à la garde
d'un Mellager d'Etat , a été relâché fous la conJUILLET.
1760.
23111 :
199
dition de fortir inceffamment du Royaume : ce
qu'il a exécuté.
1. 3
+
Laurent Shirley , Comte de Ferrers , Pair d'An- ,
gleterre , fubit , les du mois dernier , la peine
portée contre lui le 18 du mois précédent. Il fue
conduit à Tiburn , dans fon Caroffe à fix chevaux ,
& vêtu de fon habit le plus magnifique. L'échafaur
& la potence , étoient tendus de noir. Il monta
avec fermeté fur féchafauty & après une courte
priere , il fe livra à l'Exécuteur . Une heure après
T'exécution , fon corps fut envoyé, fuivant la Sentence
, à l'Amphithéâtre des Chirurgiens . Après
y avoir fervi à une jours à
démonstration anatomique, &
avoir été expofé deux jours à la vue du Public ,
il a été rendu à fes parens qui l'ont fait tranfporter
dins le Comté de Leiceftre , buieft lehchef lieu
de fa maifon & la fepulture de fes Ancêtres. Le
cercueil oùil a été dépofé , porté cette Infcription go
Laurent Ferrers éxécuté le 5 Mai 1760. La maifon!
de Shirley , dont le chef fur décoré en 1711. des
Titres héréditaires de Comte , Vicomte & Pair ▸
d'Angleterre, eft une des plus anciennes du Royau
me. Elle tire fon origine de Safwato , qui étoit un
des premiers Seigneurs Anglo- Saxons , lors de la
conquête de l'Angleterre par Guillaume , Duc de
Normandie.
On a été fort déconcerté ici de la réfolution
prife par les Puiflances du Nord de fermer à nos
Flottes l'entrée de la Mer Baltique . On ne s'atten
doit pas à la triple alliance qui vient d'être conclue.
L'impoffibilité de fecourir le Roi de Pruffe
de ce côté , paroît avoir déterminé la Cour à faire
de plus grands efforts en Allemagne
On a reçu , de Bo on , laitre nouvelle de
trois incendies confécutifs arrivés dans cette Ville.
Le dernier , qui a été le plus confidérable , a réduit
en cendres plus de quatre cens maiſons &
magazins remplis d'effers de toute espéce . Cet
événement eft du zo Mars.
Les nouvelles arrivées, depuis peu , de Madras,
font évanouir le bruit qui s'étoit répandu de la
prife de Pondichéri Elles contiennent des détails
du Combat donné , au moi d'Octobre dernier ,
entre notre flote commandée par l'Amiral Pocock
& celle de France fous les ordres du fieur
Daché , Chef d'Efcadre. Ce combat a duré trois
heures , pendant le quelles nous avons eu cinq
cens hommes tués ou bleflés . Les Lettres du continent
confirment au la nouvelle du combat
de Vandavachi , & du défavantage que nos troupes
y ont eu.
Le prétendu Comte de S. Germain , qui avoit
été arrêté dans cette Ville , & confié à la garde
d'un Mellager d'Etat , a été relâché fous la conJUILLET.
1760.
23111 :
199
dition de fortir inceffamment du Royaume : ce
qu'il a exécuté.
1. 3
+
Laurent Shirley , Comte de Ferrers , Pair d'An- ,
gleterre , fubit , les du mois dernier , la peine
portée contre lui le 18 du mois précédent. Il fue
conduit à Tiburn , dans fon Caroffe à fix chevaux ,
& vêtu de fon habit le plus magnifique. L'échafaur
& la potence , étoient tendus de noir. Il monta
avec fermeté fur féchafauty & après une courte
priere , il fe livra à l'Exécuteur . Une heure après
T'exécution , fon corps fut envoyé, fuivant la Sentence
, à l'Amphithéâtre des Chirurgiens . Après
y avoir fervi à une jours à
démonstration anatomique, &
avoir été expofé deux jours à la vue du Public ,
il a été rendu à fes parens qui l'ont fait tranfporter
dins le Comté de Leiceftre , buieft lehchef lieu
de fa maifon & la fepulture de fes Ancêtres. Le
cercueil oùil a été dépofé , porté cette Infcription go
Laurent Ferrers éxécuté le 5 Mai 1760. La maifon!
de Shirley , dont le chef fur décoré en 1711. des
Titres héréditaires de Comte , Vicomte & Pair ▸
d'Angleterre, eft une des plus anciennes du Royau
me. Elle tire fon origine de Safwato , qui étoit un
des premiers Seigneurs Anglo- Saxons , lors de la
conquête de l'Angleterre par Guillaume , Duc de
Normandie.
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Résumé : DE LONDRES, le 1 Juin.
Le 17 juin 1760, à Londres, la décision des puissances du Nord de fermer la mer Baltique aux flottes britanniques a surpris les autorités. Cette mesure, non anticipée malgré la récente triple alliance, a conduit la Cour à renforcer ses efforts en Allemagne pour aider le roi de Prusse. À Boston, trois incendies ont été signalés, le dernier ayant détruit plus de quatre cents maisons et magasins le 20 mars. Des nouvelles de Madras ont clarifié la situation à Pondichéry, détaillant un combat naval d'octobre entre les flottes britannique et française, causant la mort ou la blessure de cinq cents Britanniques. Des lettres confirment également la défaite britannique à Vandavachi. Le prétendu Comte de Saint-Germain, arrêté à Londres, a été libéré à condition de quitter le royaume. Laurent Shirley, Comte de Ferrers, a été exécuté le 5 mai 1760 à Tyburn après avoir été condamné le 18 avril précédent. Son corps a été utilisé pour des démonstrations anatomiques avant d'être rendu à sa famille pour inhumation dans le comté de Leicester. La maison de Shirley est l'une des plus anciennes du royaume, remontant à Sawato, seigneur anglo-saxon lors de la conquête normande.
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42
p. 202-203
Extrait de la Gazette Extraordinaire de la Cour de Londres, du 17 Juin.
Début :
Un Officier arrivé aujourd'hui d'Hallifax, Ville de la nouvelle Ecosse, [...]
Mots clefs :
Écosse, Brigadier, Québec, Français, Attaque, Forces armées, Combat, Vaisseaux, Ministère anglais, Général Laudon, Officiers, Prisonniers, Artillerie, Ennemis, Défense
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Extrait de la Gazette Extraordinaire de la Cour de Londres, du 17 Juin.
Extrait de la Gazette Extraordinaire de la Cour
de Londres , du 17 Juin.
»Un Officier arrivé aujourd'hui d'Hallifax ,
" Ville de la nouvelle Ecofle , en a apporté la
nouvelle que , le 28 du mois d'Avril dernier ,
» le Brigadier Général Murray , avec trois mille
>>hommes de la garnifon de Québec , avoit at-
» taqué près de cette Place l'Armée des Fran-
» çois , que l'on fuppofoit être compoſée de tou-
>> tes les forces qu'ils ont en Canada , & qui étoit
>> en marche pour venir elle - même attaquer
>> cette Ville ; qu'après un combat fort vif &
>> une perte confidérable de ſes troupes , il avoit
» été obligé , par la fupériorité des Ennemis , de
» fe retirer derrière Québec , & d'abandonner
» même aux Troupes Françoifes plufieurs piéces
>> de canon qu'il n'avoit pû emmener. Le Briga-
>> dier Murrai ajoute , qu'il faifoit toutes les dif-
>> pofitions nécellaires pour faire dans cette Place
» la plus vigoureuſe défenſe juſqu'à l'arrivée des
» vailleaux de Sa Majefté Britannique , partisd'Hallifax
fous les ordres du Lord Colville ,
>> pour ſe rendre dans la riviere de S. Laurent.
JUILLET. 1760. 203
Les Lettres particulieres de Londres , d'après
les notions données par le Ministère Britannique
, difent que l'armée du Général Murrai
perdu onze cens hommes tant tués que priſonniers
, tout ſon canon & fon bagage ; & que l'on
croit que la Ville de Québec s'eft rendue au
vainqueur , fon ancien Maître. Depuis cette nouvelle
, les papiers publics ont baiffé confidérablement
en Angleterre.
Nous avons appris le 30 du mois dernier , la
nouvelle que le Général de Laudon avoit attaqué
près de Landshut un Corps de Troupes Pruffiennes
commandé par le Général Fouquet . Ce
Corps qui , de l'aveu de plufieurs Officiers Pruffiens
, étoit de quinze mille hommes , a été totalement
détruit ; & tout ce qui n'a pas été tué ,
a été fait prifonnier. On ne compte pas qu'il fe
foit échappé deux à trois cens hommes. Le Général
Fouquet a été bleffé & fait prifonnier avec
quatre autres Généraux . Toute l'artillerie , dont
on ne fait pas encore la quantité , & tous les bagages
, ont été pris. L'attaque a commencé le 22 ,
à une heure après minuit , & a fini à 8 heures du
matin. L'ennemi s'eft défendu avec beaucoup d'opiniâtreté
, d'une montagne à l'autre , & il a été
fuivi partout avec la plus grande ardeur de la
part des troupes Autrichiennes , qui ont fait des
merveilles. Deux ou trois petits Corps ont pris
l'ennemi par les derrières ; ils ont décidé fa perte,
par la frayeur que ces attaques inattendues lui
ont caufée .
de Londres , du 17 Juin.
»Un Officier arrivé aujourd'hui d'Hallifax ,
" Ville de la nouvelle Ecofle , en a apporté la
nouvelle que , le 28 du mois d'Avril dernier ,
» le Brigadier Général Murray , avec trois mille
>>hommes de la garnifon de Québec , avoit at-
» taqué près de cette Place l'Armée des Fran-
» çois , que l'on fuppofoit être compoſée de tou-
>> tes les forces qu'ils ont en Canada , & qui étoit
>> en marche pour venir elle - même attaquer
>> cette Ville ; qu'après un combat fort vif &
>> une perte confidérable de ſes troupes , il avoit
» été obligé , par la fupériorité des Ennemis , de
» fe retirer derrière Québec , & d'abandonner
» même aux Troupes Françoifes plufieurs piéces
>> de canon qu'il n'avoit pû emmener. Le Briga-
>> dier Murrai ajoute , qu'il faifoit toutes les dif-
>> pofitions nécellaires pour faire dans cette Place
» la plus vigoureuſe défenſe juſqu'à l'arrivée des
» vailleaux de Sa Majefté Britannique , partisd'Hallifax
fous les ordres du Lord Colville ,
>> pour ſe rendre dans la riviere de S. Laurent.
JUILLET. 1760. 203
Les Lettres particulieres de Londres , d'après
les notions données par le Ministère Britannique
, difent que l'armée du Général Murrai
perdu onze cens hommes tant tués que priſonniers
, tout ſon canon & fon bagage ; & que l'on
croit que la Ville de Québec s'eft rendue au
vainqueur , fon ancien Maître. Depuis cette nouvelle
, les papiers publics ont baiffé confidérablement
en Angleterre.
Nous avons appris le 30 du mois dernier , la
nouvelle que le Général de Laudon avoit attaqué
près de Landshut un Corps de Troupes Pruffiennes
commandé par le Général Fouquet . Ce
Corps qui , de l'aveu de plufieurs Officiers Pruffiens
, étoit de quinze mille hommes , a été totalement
détruit ; & tout ce qui n'a pas été tué ,
a été fait prifonnier. On ne compte pas qu'il fe
foit échappé deux à trois cens hommes. Le Général
Fouquet a été bleffé & fait prifonnier avec
quatre autres Généraux . Toute l'artillerie , dont
on ne fait pas encore la quantité , & tous les bagages
, ont été pris. L'attaque a commencé le 22 ,
à une heure après minuit , & a fini à 8 heures du
matin. L'ennemi s'eft défendu avec beaucoup d'opiniâtreté
, d'une montagne à l'autre , & il a été
fuivi partout avec la plus grande ardeur de la
part des troupes Autrichiennes , qui ont fait des
merveilles. Deux ou trois petits Corps ont pris
l'ennemi par les derrières ; ils ont décidé fa perte,
par la frayeur que ces attaques inattendues lui
ont caufée .
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Résumé : Extrait de la Gazette Extraordinaire de la Cour de Londres, du 17 Juin.
La Gazette Extraordinaire de la Cour de Londres du 17 juin 1760 rapporte qu'un officier arrivé d'Hallifax a annoncé qu'au 28 avril précédent, le Brigadier Général Murray, à la tête de trois mille hommes de la garnison de Québec, a affronté l'armée française près de Québec. Cette armée française, supposée rassembler toutes les forces du Canada, se dirigeait vers Québec pour l'attaquer. Après un combat intense et des pertes significatives, Murray a dû se retirer derrière les murs de Québec, abandonnant plusieurs pièces de canon. Murray a déclaré qu'il préparait une défense vigoureuse jusqu'à l'arrivée des vaisseaux britanniques commandés par le Lord Colville. Des lettres de Londres indiquent que l'armée de Murray a perdu onze cents hommes, tués ou prisonniers, ainsi que tout son canon et son bagage. Il est également rapporté que la ville de Québec s'est rendue aux forces victorieuses, entraînant une baisse notable des valeurs des papiers publics en Angleterre. Par ailleurs, le 30 du mois précédent, le Général de Laudon a attaqué près de Landshut un corps de troupes prussiennes commandé par le Général Fouquet. Ce corps, composé de quinze mille hommes, a été totalement détruit, avec seulement deux à trois cents hommes ayant pu s'échapper. Fouquet et quatre autres généraux ont été blessés et faits prisonniers. Toute l'artillerie et les bagages ont été capturés. L'attaque, commencée à une heure après minuit, s'est terminée à huit heures du matin. Les troupes autrichiennes ont montré une grande ardeur et ont pris l'ennemi par surprise, contribuant à sa défaite.
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43
p. 187-190
De VIENNE, le 7 Septembre.
Début :
On apprend de Constantinople, que les Hospodans de Valachie & de Moldavie [...]
Mots clefs :
Investiture, Principautés, Rébellion, Tremblement de terre, Maréchal Daun, Baron de Laudon, Armée, Ordres, Régiment, Cavalerie, Attaque, Combat, Artillerie, Colonel, Troupes, Ennemis, Prisonniers, Blessés et morts, Lieutenant, Prince Henri, Mouvements des troupes, Général, Fête, Mariage
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De VIENNE, le 7 Septembre.
De VIENNE , le 7 Septembre.
On apprend de Conftantinople, que les Hofpodas
de Valachie & de Moldavie ont reçu de la
Porte l'inveftiture de ces Principautés. Le Bacha
d'Iconium , ayant reçu l'ordre de venir rendre
compte de fa conduite au Grand- Seigneur , s'eft
révoltés il est à la tête de vingt mille hommes,
& il met à contribution les Pays voifins de fon
Gouvernement . On a délibéré dans un Divan
extraordinaire fur les moyens d'étouffer une
rebellion qui peut avoir de dangereufes fuites .
On a reffenti le 13 , vers les fept heures du
foir , une fecouffe de tremblement de terre ; mais
elle a été fort légére , & n'a caufé aucun dommage.
La Cour a reçu du Maréchal Comte de Daun
les détails fuivans de l'action paffée entre le
Corps du Baron de Laudon & l'Armée Pruffienne,
Ce Général , fe conformant aux ordres du
Comte de Daun , s'étoit mis en mouvement le
14 au foir , & il avoit paffé le Katzbach près de
Forthmuhle. L'avant-garde compofće de huis
188 MERCURE DE FRANCE.
'bataillons & de deux regimens de Cavalerie, étoit
commandée par le Général Baron de Wolfersdorff.
On marcha une partie de la nuit en fe dirigeant
vers les hauteurs de Banthen , où l'on devoit
le former pour attaquer le flane gauche de
l'Armée Pruffienne. Les deux bataillons des Grenadiers
de Laudon , qui formoient la tête de la
marche, rencontrerent en y arrivant , le régiment
des Huffards de Ziethen , qui fe retira avec
précipitation. Le Baron de Laudon fit alors hâter
la marche du refte de fon Corps pour s'affurer de
ces hauteurs , mais on s'apperçut , à la pointe du
jour , qu'elles étoient occupées par beaucoup d'Infanterie
& de Cavalerie Pruffienne. Il n'étoit plus
poffible d'éviter un combat ; ainfi l'ordre fut auffitôt
donné pour attaquer , & on le fit avec tant
de fuccès , que l'Ennemi fut obligé d'abandonner
ce poſte avec toute fon artillerie. Le Baron de
Laudon faifoit fes difpofitions pour profiter de cet
avantage , lorfque l'Armée Pruffienne , qui s'étoit
formée derriere le bois d'Humelen , marcha
pour l'attaquer. Le combat recommença avec la
plus grande vivacité , & devint général ; mais le
Baron de Laudon s'étant apperçu vers les fix
heures du matin qu'il avoit à foutenir l'effort de
toute l'Armée Pruſſienne , ordonna la retraite qui
fe fit fans précipitation , & avec la contenance la
plus ferme. Les deux bataillons des Grenadiers
de Laudon protégerent cette retraite en occupant
des hauteurs de Binowitz . Le Colonel de Rouvroi
y conduit l'artillerie , & il s'en fervit avec tant
d'habileté que les Corps Pruffiens , qui avoient été
détachés à notre pourſuite , furent contraints de
fe retirer .
Toutes les troupes fe font comportées dans
cette action avec la plus grande valeur, & la perte
de l'Ennemi ne peut être que fort confidérable.
OCTOBRE . 1760? 189
Les patrouilles envoyées le lendemain fur le
champ de bataille ont rapporté qu'il y avoir eu
deux Régimens Pruffiens prèfqu'entierement détruits.
Nous avons fait quantité de prifonniers
parmi lesquels font un Colonel , un Major , plufieurs
Capitaines & autres Officiers de moindre
grade.
Suivant l'état dreffé après cette affaire , nous
avons eu quatorze cens vingt & un hommes de
tués , & deux mille trois cens foixante & dix de
bleffés. Le nombre des manquans étoit de deux
mille cent quarante ; mais un grand nombre
de ces derniers rejoignent fucceffivement leurs
Corps.
Les Lieutenans- Généraux de Drafkowitz & de
Campitelli ont été bleffés ainsi que les Généraux-
Majors de Giannini,de Calemberg, de Gourcy & de
Rebbach. Le Baron de Biela & le Comte de Gondrecour,
Généraux- Majors, ont été faits prifonniers.
L'Armée du Prince Henri a fait un mouvement
depuis peu , pour fe réunir à celle du Ro
de Pruffe. Un corps de Troupes détaché de la
premiere , fous le commandement du Général
de Goltze , a paffé l'Oder à Koben . Son arrieregarde
a été attaquée par le Général de Tottleben ,
& elle a été fort maltraitée . On attend les détails
de cette petite action . Les Rufles font actuellement
dans les environs d'Herrenftadt, & leurs troupes
légéres s'étendent du côté de Wintzig & de Wohlau.
Le Général- Major de Gribauval fe rendit, le
23 du mois dernier , devant Schweidnitz , pour
diriger les opérations du fiége de cette Place.
L'Artillerie néceffaire partit le 21 , des environs
d'Olmutz. On a conduit ici depuis quelquesjours ,
fous fûre garde , un homme qui travailloit à exci
ter quelques mouvemens dans la Hongrie..
い
190 MERCURE DE FRANCE
On hâre les préparatifs des fêtes qui doivent
être exécutées à l'occafion du mariage de l'Archiduc.
Le Feld- Maréchal Prince de Lichtenſten ,
Grand- Maître de l'Artillerie , doit être à Parme
depuis le premier de ce mois. La plus grande partie
de la Maifon de la future Archiduchelle eſt en
chemin pour s'y rendre.
On apprend de Conftantinople, que les Hofpodas
de Valachie & de Moldavie ont reçu de la
Porte l'inveftiture de ces Principautés. Le Bacha
d'Iconium , ayant reçu l'ordre de venir rendre
compte de fa conduite au Grand- Seigneur , s'eft
révoltés il est à la tête de vingt mille hommes,
& il met à contribution les Pays voifins de fon
Gouvernement . On a délibéré dans un Divan
extraordinaire fur les moyens d'étouffer une
rebellion qui peut avoir de dangereufes fuites .
On a reffenti le 13 , vers les fept heures du
foir , une fecouffe de tremblement de terre ; mais
elle a été fort légére , & n'a caufé aucun dommage.
La Cour a reçu du Maréchal Comte de Daun
les détails fuivans de l'action paffée entre le
Corps du Baron de Laudon & l'Armée Pruffienne,
Ce Général , fe conformant aux ordres du
Comte de Daun , s'étoit mis en mouvement le
14 au foir , & il avoit paffé le Katzbach près de
Forthmuhle. L'avant-garde compofće de huis
188 MERCURE DE FRANCE.
'bataillons & de deux regimens de Cavalerie, étoit
commandée par le Général Baron de Wolfersdorff.
On marcha une partie de la nuit en fe dirigeant
vers les hauteurs de Banthen , où l'on devoit
le former pour attaquer le flane gauche de
l'Armée Pruffienne. Les deux bataillons des Grenadiers
de Laudon , qui formoient la tête de la
marche, rencontrerent en y arrivant , le régiment
des Huffards de Ziethen , qui fe retira avec
précipitation. Le Baron de Laudon fit alors hâter
la marche du refte de fon Corps pour s'affurer de
ces hauteurs , mais on s'apperçut , à la pointe du
jour , qu'elles étoient occupées par beaucoup d'Infanterie
& de Cavalerie Pruffienne. Il n'étoit plus
poffible d'éviter un combat ; ainfi l'ordre fut auffitôt
donné pour attaquer , & on le fit avec tant
de fuccès , que l'Ennemi fut obligé d'abandonner
ce poſte avec toute fon artillerie. Le Baron de
Laudon faifoit fes difpofitions pour profiter de cet
avantage , lorfque l'Armée Pruffienne , qui s'étoit
formée derriere le bois d'Humelen , marcha
pour l'attaquer. Le combat recommença avec la
plus grande vivacité , & devint général ; mais le
Baron de Laudon s'étant apperçu vers les fix
heures du matin qu'il avoit à foutenir l'effort de
toute l'Armée Pruſſienne , ordonna la retraite qui
fe fit fans précipitation , & avec la contenance la
plus ferme. Les deux bataillons des Grenadiers
de Laudon protégerent cette retraite en occupant
des hauteurs de Binowitz . Le Colonel de Rouvroi
y conduit l'artillerie , & il s'en fervit avec tant
d'habileté que les Corps Pruffiens , qui avoient été
détachés à notre pourſuite , furent contraints de
fe retirer .
Toutes les troupes fe font comportées dans
cette action avec la plus grande valeur, & la perte
de l'Ennemi ne peut être que fort confidérable.
OCTOBRE . 1760? 189
Les patrouilles envoyées le lendemain fur le
champ de bataille ont rapporté qu'il y avoir eu
deux Régimens Pruffiens prèfqu'entierement détruits.
Nous avons fait quantité de prifonniers
parmi lesquels font un Colonel , un Major , plufieurs
Capitaines & autres Officiers de moindre
grade.
Suivant l'état dreffé après cette affaire , nous
avons eu quatorze cens vingt & un hommes de
tués , & deux mille trois cens foixante & dix de
bleffés. Le nombre des manquans étoit de deux
mille cent quarante ; mais un grand nombre
de ces derniers rejoignent fucceffivement leurs
Corps.
Les Lieutenans- Généraux de Drafkowitz & de
Campitelli ont été bleffés ainsi que les Généraux-
Majors de Giannini,de Calemberg, de Gourcy & de
Rebbach. Le Baron de Biela & le Comte de Gondrecour,
Généraux- Majors, ont été faits prifonniers.
L'Armée du Prince Henri a fait un mouvement
depuis peu , pour fe réunir à celle du Ro
de Pruffe. Un corps de Troupes détaché de la
premiere , fous le commandement du Général
de Goltze , a paffé l'Oder à Koben . Son arrieregarde
a été attaquée par le Général de Tottleben ,
& elle a été fort maltraitée . On attend les détails
de cette petite action . Les Rufles font actuellement
dans les environs d'Herrenftadt, & leurs troupes
légéres s'étendent du côté de Wintzig & de Wohlau.
Le Général- Major de Gribauval fe rendit, le
23 du mois dernier , devant Schweidnitz , pour
diriger les opérations du fiége de cette Place.
L'Artillerie néceffaire partit le 21 , des environs
d'Olmutz. On a conduit ici depuis quelquesjours ,
fous fûre garde , un homme qui travailloit à exci
ter quelques mouvemens dans la Hongrie..
い
190 MERCURE DE FRANCE
On hâre les préparatifs des fêtes qui doivent
être exécutées à l'occafion du mariage de l'Archiduc.
Le Feld- Maréchal Prince de Lichtenſten ,
Grand- Maître de l'Artillerie , doit être à Parme
depuis le premier de ce mois. La plus grande partie
de la Maifon de la future Archiduchelle eſt en
chemin pour s'y rendre.
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Résumé : De VIENNE, le 7 Septembre.
Le 7 septembre, des nouvelles de Constantinople indiquent que les hospodars de Valachie et de Moldavie ont reçu l'investiture de la Porte pour leurs principautés. Le bacha d'Iconium, ayant reçu l'ordre de se rendre à Constantinople pour justifier sa conduite, s'est révolté et rassemble vingt mille hommes, mettant à contribution les pays voisins. Un divan extraordinaire a délibéré sur les moyens de réprimer cette rébellion. À Vienne, une secousse de tremblement de terre a été ressentie le 13 septembre sans causer de dommages. La Cour a reçu des détails du maréchal comte de Daun concernant une action entre le corps du baron de Laudon et l'armée prussienne. Le 14 septembre, le baron de Laudon, suivant les ordres du comte de Daun, a traversé le Katzbach près de Fortmuhle avec une avant-garde composée de huit bataillons et de deux régiments de cavalerie, commandée par le général baron de Wolfersdorff. L'armée a marché vers les hauteurs de Banthen pour attaquer le flanc gauche de l'armée prussienne. Les grenadiers de Laudon ont rencontré et repoussé le régiment des hussards de Ziethen. Le combat a commencé à l'aube et s'est intensifié, forçant les Prussiens à abandonner leur position avec leur artillerie. Le baron de Laudon a préparé une contre-attaque, mais l'armée prussienne, formée derrière le bois d'Humelen, a lancé une offensive. Le combat est devenu général, et Laudon a ordonné la retraite, protégée par les grenadiers et l'artillerie dirigée par le colonel de Rouvroi. Les pertes ennemies sont considérables, avec deux régiments prussiens presque entièrement détruits et de nombreux prisonniers, dont un colonel et plusieurs officiers. Les troupes autrichiennes ont subi des pertes de 1 421 tués, 2 360 blessés et 2 140 manquants, dont beaucoup ont rejoint leurs unités. Plusieurs généraux ont été blessés ou capturés. L'armée du prince Henri de Prusse a effectué un mouvement pour se réunir à celle du roi de Prusse. Un corps de troupes prussiennes, commandé par le général de Goltze, a traversé l'Oder à Koben et a été attaqué par le général de Tottleben. Les Russes sont actuellement près d'Herrenstadt, et leurs troupes légères se déplacent vers Wintzig et Wohlau. Le général-major de Gribauval dirige le siège de Schweidnitz, avec l'artillerie partie d'Olmutz. Un individu suspect a été arrêté pour avoir tenté de provoquer des troubles en Hongrie. À Vienne, les préparatifs pour les fêtes du mariage de l'archiduc sont en cours. Le feld-maréchal prince de Lichtenstein, grand-maître de l'artillerie, est attendu à Parme, et la maison de la future archiduchesse est en route pour s'y rendre.
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44
p. 190-191
De l'Armée de l'Empire, le 28 Septembre.
Début :
La Conférence du Feld Maréchal Prince de Deux-Ponts avec le Duc [...]
Mots clefs :
Conférence, Feld-maréchal, Prince, Duc, Armée prussienne, Ennemis, Mouvements des troupes, Général, Combat, Retraite, Artillerie, Colonel, Blessés et morts, Prisonniers
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De l'Armée de l'Empire, le 28 Septembre.
De l'Armée de l'Empire , le 28 Septembre .
La Conférence du Feld Maréchal Prince de
Deux- Ponts avec le Duc de Wirtemberg avoit eu
pour objet de déloger le Corps Pruffien aux ordres
du Général Hullen , du Camp avantageux qu'il
occupoit: En conféquence , les Corps avancés de
l'arméefe mirent en mouvement le 13.On occupa
Malitſchen , Elfnig , Wogellang & Weidenhayn.
En même tems , le Corps d'armée du Duc de
Wirtemberg marcha de Bitterfeld à Pretfch , & le
Général Luczinsky prit pofte à Domitſch au- deffous
de Torgau , où on lui envoya un train de
pontons.
L'armée quitta , le 24 à la pointe du jour, fon
Camp de Strehla. On délogea les ennemis deSuptitz
, de Zina & de Wollau . On campa enfuite
fur les hauteurs de Suptitz . Le Colonel de Zetwitz
délogea , de fon côté, les Pruffiens de Lockwitz
& Behrewitz , &il s'établit entre l'Elbe & le grand
étang.
un Le Général Lucfinsky fit conftruire , le 25 ,
pont fur l'Elbe à Domitſch ; il y paffa ce Fleuve
pendant la nuit , avec toute la cavalerie & quelques
bataillons , & il fe pofta fur la rive droite.
Le 26 à midi , l'armée ſe forma en bataille & s'approcha
du Camp Pruffien . Pendant qu'elle faifoit
ce mouvement , le Corps du Général Lucfinsky
longeoit l'Elbe , & faifoit replier les poftes ennemisqu'il
pourfuivit jufqu'au pontde Torgau . Alors
le Général Hulfen , craignant d'être attaqué de
tous côtés , prit le parti de la retraite & rentra
dans la Ville avec précipitation. On atteignit fon
NOVEMBRE.
1760.
arriere- garde , & le
combat fut
pendant
quelque
191
tems des plus vifs .
L'ennemi
craignant
d'être coupé
, fe retira en
défordre vers la Ville , & fe rallia
fous le feu des
remparts.
Le
Général
Hulfen
faifoit ,
pendant ce tems
paffer l'Elbe à fon armée fur le pont de la Ville &
fur un de
pontons. Le
Prince de Deux - Ponts.
s'en étant
apperçu , fit
amener de la
groffe artillerie
pour les
ruiner,
pendant
qu'on
tâchoit de pénétrer
dans la Ville.
Toutes ces
difpofitions
furent
exécutées avec
beaucoup de
concert & de
jufteffe.
On
pénétra ,
malgré le feu des
ennemis ,
jufqu'au
pont
volant dont on
s'empara , &
l'artillerie fur
fervie avec tant
d'habileté
qu'on mit le feu à l'extrémité
du pont de la Ville. Par là tout
moyen
retraite fut ôté au refte des
troupes
ennemies quide
n'avoient pu paffer
l'Elbe. Le
Prince de
Deux-
Ponts
envoya
fommer le
Colonel de
Normann
leur
Commandant , de fe
rendre ; ce qu'il fi,
après
quelques
difficultés. La
Capitulation fut fignée
le 27 à trois heures du
matin , &
auffitôt
l'armée fut miſe en
poffeffion des deux
portes de
la Ville. Les
troupes
Pruffiennes
fortirent à midi
&
mirent bas les armes . Le
nombre des
priſonniers
faits en cette
occafion eft de deux
mille cinq
cens
vingt-fept ,
parmi
lesquels ſe
trouvent un
Colonel , fix
Majors & douze
Capitaines .
Notre
perte eft très-legére , &
n'excéde pas cent hommes
, tant tués que bleffés .
L'armée
Pruſſienne
profita de la nuit pour fe retirer du côté de Wirtemberg
, le long de l'Elbe.
La Conférence du Feld Maréchal Prince de
Deux- Ponts avec le Duc de Wirtemberg avoit eu
pour objet de déloger le Corps Pruffien aux ordres
du Général Hullen , du Camp avantageux qu'il
occupoit: En conféquence , les Corps avancés de
l'arméefe mirent en mouvement le 13.On occupa
Malitſchen , Elfnig , Wogellang & Weidenhayn.
En même tems , le Corps d'armée du Duc de
Wirtemberg marcha de Bitterfeld à Pretfch , & le
Général Luczinsky prit pofte à Domitſch au- deffous
de Torgau , où on lui envoya un train de
pontons.
L'armée quitta , le 24 à la pointe du jour, fon
Camp de Strehla. On délogea les ennemis deSuptitz
, de Zina & de Wollau . On campa enfuite
fur les hauteurs de Suptitz . Le Colonel de Zetwitz
délogea , de fon côté, les Pruffiens de Lockwitz
& Behrewitz , &il s'établit entre l'Elbe & le grand
étang.
un Le Général Lucfinsky fit conftruire , le 25 ,
pont fur l'Elbe à Domitſch ; il y paffa ce Fleuve
pendant la nuit , avec toute la cavalerie & quelques
bataillons , & il fe pofta fur la rive droite.
Le 26 à midi , l'armée ſe forma en bataille & s'approcha
du Camp Pruffien . Pendant qu'elle faifoit
ce mouvement , le Corps du Général Lucfinsky
longeoit l'Elbe , & faifoit replier les poftes ennemisqu'il
pourfuivit jufqu'au pontde Torgau . Alors
le Général Hulfen , craignant d'être attaqué de
tous côtés , prit le parti de la retraite & rentra
dans la Ville avec précipitation. On atteignit fon
NOVEMBRE.
1760.
arriere- garde , & le
combat fut
pendant
quelque
191
tems des plus vifs .
L'ennemi
craignant
d'être coupé
, fe retira en
défordre vers la Ville , & fe rallia
fous le feu des
remparts.
Le
Général
Hulfen
faifoit ,
pendant ce tems
paffer l'Elbe à fon armée fur le pont de la Ville &
fur un de
pontons. Le
Prince de Deux - Ponts.
s'en étant
apperçu , fit
amener de la
groffe artillerie
pour les
ruiner,
pendant
qu'on
tâchoit de pénétrer
dans la Ville.
Toutes ces
difpofitions
furent
exécutées avec
beaucoup de
concert & de
jufteffe.
On
pénétra ,
malgré le feu des
ennemis ,
jufqu'au
pont
volant dont on
s'empara , &
l'artillerie fur
fervie avec tant
d'habileté
qu'on mit le feu à l'extrémité
du pont de la Ville. Par là tout
moyen
retraite fut ôté au refte des
troupes
ennemies quide
n'avoient pu paffer
l'Elbe. Le
Prince de
Deux-
Ponts
envoya
fommer le
Colonel de
Normann
leur
Commandant , de fe
rendre ; ce qu'il fi,
après
quelques
difficultés. La
Capitulation fut fignée
le 27 à trois heures du
matin , &
auffitôt
l'armée fut miſe en
poffeffion des deux
portes de
la Ville. Les
troupes
Pruffiennes
fortirent à midi
&
mirent bas les armes . Le
nombre des
priſonniers
faits en cette
occafion eft de deux
mille cinq
cens
vingt-fept ,
parmi
lesquels ſe
trouvent un
Colonel , fix
Majors & douze
Capitaines .
Notre
perte eft très-legére , &
n'excéde pas cent hommes
, tant tués que bleffés .
L'armée
Pruſſienne
profita de la nuit pour fe retirer du côté de Wirtemberg
, le long de l'Elbe.
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Résumé : De l'Armée de l'Empire, le 28 Septembre.
Le 28 septembre, une conférence entre le Feld Maréchal Prince de Deux-Ponts et le Duc de Wirtemberg visait à déloger le Corps Prussien du Général Hullen de sa position. Les mouvements militaires commencèrent le 13 septembre, avec l'occupation de plusieurs localités. Le Corps d'armée du Duc de Wirtemberg marcha de Bitterfeld à Pretfch, tandis que le Général Luczinsky se posta à Domitsch près de Torgau. Le 24 septembre, l'armée quitta Strehla à l'aube, délogeant les ennemis de Suptitz, Zina et Wollau, et campa sur les hauteurs de Suptitz. Le Colonel de Zetwitz délogea les Prussiens de Lockwitz et Behrewitz, et le Général Luczinsky construisit un pont sur l'Elbe à Domitsch. Le 26 septembre, l'armée se forma en bataille et s'approcha du camp prussien, repoussant les postes ennemis jusqu'au pont de Torgau. Le Général Hullen se retira dans la ville, mais un combat vif eut lieu, forçant l'ennemi à se retirer en désordre. Le Prince de Deux-Ponts fit amener de la grosse artillerie pour ruiner les ponts et pénétra dans la ville. La capitulation fut signée le 27 septembre à trois heures du matin, et les troupes prussiennes se rendirent à midi. Le nombre de prisonniers prussiens s'éleva à deux mille cinq cent vingt-sept, incluant un colonel, six majors et douze capitaines. Les pertes françaises furent légères, n'excédant pas cent hommes tués ou blessés.
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45
p. 193-197
De PARIS, le 25 Octobre.
Début :
Sa Majesté, par son Edit portant établissement de l'Ecole Royale [...]
Mots clefs :
Édit, École royale militaire, Admission, Enfants, Comte, Majestés impériales, Célébration, Mariage, Général, Prisonniers, Magasins, Prince de Deux-Ponts, Place, Attaque, Garnison, Marquis, Prince héréditaire, Blessés et morts, Combat, Infanterie, Troupes, Ennemis, Officiers, Pertes, Loterie de l'école royale militaire, Tirage
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De PARIS, le 25 Octobre.
De PARIS , le 25 Octobre
€ Sa Majellé , par fon Edit portant établiſſement
de l'Ecole Royale Militaire , avoit ordonné que ,
dans l'admiffion des Enfans qui feroient préſentés
pour entrer dans cette Ecole , on donnât la préférence
à ceux dont les Peres feroient encore actuéllement
au Service , fe réſervant néanmoins de
s'expliquer dans la fuite fur les cas où l'on pour
roit s'écarter de cette régle , ainfi que fur quelques
autres difpofitions du même Edit . Elle vient d'ordonner
par une nouvelle Déclaration , que les Enfans
des Peres que leurs bleffures , ou des infirmi
tés & des accidens naturels auront mis hors d'état
de lui continuer leurs fervices , foient reçus concurremment
avec ceux dont les Peres font encore
dans les Armées. Sa Majesté entend auffi que les
Enfans des Peres qui ont obtenu la permiffion de
fe retirer , après trente années de fervice , jouiffent
du même privilége.
Le Comte de Colloredo , Chambellan de l'Em--
pereur & de l'Impératrice , Reine de Hongrie &
de Bohême , que Leurs Majeftés Impériales ont
envoyé pour annoncer au Roi la célébration du
Mariage de l'Infante Ifabelle avec l'Archi fuc Jofeph
, arriva en cette Ville le 18 de ce mois ; il
alla le lendemain à Fontainebleau , & il s'ac
quitta de fa commiflion auprès du Roi. Il fut
préfenté à Sa Majesté par le Comte de Starhem-
I
194 MERCURE DE FRANCE.
berg , Amballadeur de Leurs Majeftés Impéria
les. Le Comte de Colloredo fut préfenté le mê-.
me jour à Monfeigneur le Dauphin , à Madame
la Dauphine, & à Madame Adélaïde, à Meſdames
Victoire , Sophie & Louife. Il fe rendit le 20 à
Verfailles , où il fut préfenté à la Reine , à Monfeigneur
le Duc de Bourgogne , Monſeigneur le
Duc de Berry, Monfeigneur le Comte de Provence
, Monfeigneur le Comte d'Artois , & à
Madame.
Nous apprenons encore que le Général Comte
de Lafcy eft entré , le 9 de ce mois , dans Berlin ,
en même temps que les Ruffes. La Garniſon de
cette Ville , compofée de trois mille hommes , a
été faite prifonniere de guerre. Les Commandans
des troupes Autrichiennes & Ruffes ont fait
obferver la plus grande difcipline . Il n'eſt entré
dans Berlin & dans Poftdam que quelques bataillons
de Grenadiers néceffaires pour garder
ces deux Places . Les Officiers des deux Nations
n'y font entrés qu'avec des permiffions par écrit
de leurs Généraux , de forte qu'il ne s'y eft pas
commis le moindre défordre , & les boutiques
des Marchands n'ont pas été fermées. Mais on a
ruiné les Fabriques de toute efpéce qui ont rapport
à la guerre. On a abandonné aux Soldats
tous les magafins remplis d'effets deſtinés à l'entretien
& à l'habillement des troupes Pruffiennes.
On a trouvé dans Berlin & dans Potſdam une
grande quantité d'armes dont on a détruit les
Manufactures , ainfi que les Fonderies d'artille
rie.
Les Ruffes ont exigé quinze cens mille écus de
contributions.
Le Prince de Deux- Ponts ayant appris que le
Roi de Pruffe avoit détaché feize mille hommes
de fon armée pour fecourir Wittemberg , prit la
NOVEMBRE. 1760. 195
réfolution de brufquer le fiége qu'il faifoit de cette
Place , en l'attaquant en même temps de plufieurs
côtés ; ce qui fut exécuté le 13. Le Commandant
de Wittemberg , qui n'avoit porté fon attention
que fur la partie la plus foible de la Place , fe
trouvant preflé de toutes parts , prit le parti de
faire battre la chamade , & de capituler le 14 au
matin ; il s'est rendu prifonnier de guerre avec
fa Garniſon , aux mêmes conditions qui avoient
été accordées à la ville de Torgau . Cette Garnifon
étoit de trois Bataillons & de quatre cens
Soldats convalefcens. On a trouvé dans la Ville
trente piéces de canon , dont douze de vingt- quatre
livres , huit mortiers , & une grande quantité
de munitions. Toutes les fortifications ont été
rafées.
On a reçu le 20 de ce mois un Courier dépêché
le 16 au foir par le Marquis de Caftries ,
Lieutenant Général , pour apporter la nouvelle
d'un Combat qui s'eſt donné le même jour près
de Rhinberg , entre les troupes du Roi , qui étoient
à les ordres , & celles qui étoient commandées
par le Prince Héréditaire de Brunfwik. L'action
a commencé une heure avant le jour , & après
un feu très- long & très- vif , le Prince Héréditaire
a été forcé de ſe retirer avec une perte trèsconfidérable
, laiffant en notre pouvoir le plus
grand nombre de fes Bleffés .
On a appris par un autre Courier dépêché le
18 , que le Prince Héréditaire de Brunfwik arepaffé
le Rhin fur les deux Ponts qu'il avoit établis
au-deffous de Wefel , & qu'il a entierement levé
le fiége de cette Place . On affure qu'il avoit pris
le chemin de Halleren fur la Lippe. Son arrieregarde
a été attaquée vivement en deçà du Rhin ,
& elle a été forcée de paffer ce fleuve en déſor-
I ij
196 MERCURE DE FRANCE
1
dre , après avoir perdu beaucoup de monde , &
fans avoir pû replier fes ponts , dont nous fommes
reflés maîtres . Dès le is , le Marquis de Caftries
avoit fait attaquer le pofte de Rhinberg ,
qu'on avoit emporté l'épée la main . Il avoit
fait entrer en même temps dans Wefel , le fieur
de Boisclaireau , Brigadier , avec fix cens hommes
d'élite. Le 18 , il y a fait entrer huit Batail-
Ions.
Le corps aux ordres du Prince Héréditaire de
vant Wefel étoit d'environ vingt- cinq mille hommes
; mais il paroît n'avoir eu au Combat que
quinze mille hommes d'Infanterie , & trois à
quatre mille chevaux . La difficulté du terein n'à
permis au Marquis de Caftries de faire combattre
que les quatre brigades d'Infanterie, de Normanmandie
, d'Auvergne , de la Tour- Dupin & d'Alface.
Ces troupes ont combattu avec la plus grande
valeur & avec la plus grande fermeré , ainfi que
la troupe
du fieur Fifcher , qui a foutenu les premiers
éfforts des ennemis à l'Abbaye de Clofter-
Camp. On n'a pas encore de détail de tout ce qui
s'eft paffé pendant l'action , ni l'état des Officiers
qui ont été tués ou bleffés ; on fçait feulement
que le Marquis de Segur , Lieutenant Général , a
été bleffé légèrement & qu'il a été fait priſonnier.
Les Marquis de Perufe & de la Tour-Dupin & le
Baron de Vangen , Brigadiers , ont auffi été bleffés
, & ce dernier a étéfait prifonnier. La Gendarmerie
, qui étoit à l'action , n'a perdu d'Officiers'
que le fieur de Greneville qui a été tué. Le Marquis
de Caftries fait les plus grands éloges des
Troupes & des Officiers Généraux & particuliers
qui ont combattu.
Nous donnerons ci- après la perte que nous avons
faire à cette journée.
NOVEMBRE. 1760. 197
Le tirage de la Loterie de l'Ecole Royale Mili
taire s'eft fait , en la maniere accoutuinée , dans
'Hôtel-de- Ville de Paris , le de ce mois. Les
Numeros qui font fortis de la roue de fortune font
57, 32 , 26 , 84 , 38. Le prochain tirage fe fera
le 6 du mois de Novembre.
€ Sa Majellé , par fon Edit portant établiſſement
de l'Ecole Royale Militaire , avoit ordonné que ,
dans l'admiffion des Enfans qui feroient préſentés
pour entrer dans cette Ecole , on donnât la préférence
à ceux dont les Peres feroient encore actuéllement
au Service , fe réſervant néanmoins de
s'expliquer dans la fuite fur les cas où l'on pour
roit s'écarter de cette régle , ainfi que fur quelques
autres difpofitions du même Edit . Elle vient d'ordonner
par une nouvelle Déclaration , que les Enfans
des Peres que leurs bleffures , ou des infirmi
tés & des accidens naturels auront mis hors d'état
de lui continuer leurs fervices , foient reçus concurremment
avec ceux dont les Peres font encore
dans les Armées. Sa Majesté entend auffi que les
Enfans des Peres qui ont obtenu la permiffion de
fe retirer , après trente années de fervice , jouiffent
du même privilége.
Le Comte de Colloredo , Chambellan de l'Em--
pereur & de l'Impératrice , Reine de Hongrie &
de Bohême , que Leurs Majeftés Impériales ont
envoyé pour annoncer au Roi la célébration du
Mariage de l'Infante Ifabelle avec l'Archi fuc Jofeph
, arriva en cette Ville le 18 de ce mois ; il
alla le lendemain à Fontainebleau , & il s'ac
quitta de fa commiflion auprès du Roi. Il fut
préfenté à Sa Majesté par le Comte de Starhem-
I
194 MERCURE DE FRANCE.
berg , Amballadeur de Leurs Majeftés Impéria
les. Le Comte de Colloredo fut préfenté le mê-.
me jour à Monfeigneur le Dauphin , à Madame
la Dauphine, & à Madame Adélaïde, à Meſdames
Victoire , Sophie & Louife. Il fe rendit le 20 à
Verfailles , où il fut préfenté à la Reine , à Monfeigneur
le Duc de Bourgogne , Monſeigneur le
Duc de Berry, Monfeigneur le Comte de Provence
, Monfeigneur le Comte d'Artois , & à
Madame.
Nous apprenons encore que le Général Comte
de Lafcy eft entré , le 9 de ce mois , dans Berlin ,
en même temps que les Ruffes. La Garniſon de
cette Ville , compofée de trois mille hommes , a
été faite prifonniere de guerre. Les Commandans
des troupes Autrichiennes & Ruffes ont fait
obferver la plus grande difcipline . Il n'eſt entré
dans Berlin & dans Poftdam que quelques bataillons
de Grenadiers néceffaires pour garder
ces deux Places . Les Officiers des deux Nations
n'y font entrés qu'avec des permiffions par écrit
de leurs Généraux , de forte qu'il ne s'y eft pas
commis le moindre défordre , & les boutiques
des Marchands n'ont pas été fermées. Mais on a
ruiné les Fabriques de toute efpéce qui ont rapport
à la guerre. On a abandonné aux Soldats
tous les magafins remplis d'effets deſtinés à l'entretien
& à l'habillement des troupes Pruffiennes.
On a trouvé dans Berlin & dans Potſdam une
grande quantité d'armes dont on a détruit les
Manufactures , ainfi que les Fonderies d'artille
rie.
Les Ruffes ont exigé quinze cens mille écus de
contributions.
Le Prince de Deux- Ponts ayant appris que le
Roi de Pruffe avoit détaché feize mille hommes
de fon armée pour fecourir Wittemberg , prit la
NOVEMBRE. 1760. 195
réfolution de brufquer le fiége qu'il faifoit de cette
Place , en l'attaquant en même temps de plufieurs
côtés ; ce qui fut exécuté le 13. Le Commandant
de Wittemberg , qui n'avoit porté fon attention
que fur la partie la plus foible de la Place , fe
trouvant preflé de toutes parts , prit le parti de
faire battre la chamade , & de capituler le 14 au
matin ; il s'est rendu prifonnier de guerre avec
fa Garniſon , aux mêmes conditions qui avoient
été accordées à la ville de Torgau . Cette Garnifon
étoit de trois Bataillons & de quatre cens
Soldats convalefcens. On a trouvé dans la Ville
trente piéces de canon , dont douze de vingt- quatre
livres , huit mortiers , & une grande quantité
de munitions. Toutes les fortifications ont été
rafées.
On a reçu le 20 de ce mois un Courier dépêché
le 16 au foir par le Marquis de Caftries ,
Lieutenant Général , pour apporter la nouvelle
d'un Combat qui s'eſt donné le même jour près
de Rhinberg , entre les troupes du Roi , qui étoient
à les ordres , & celles qui étoient commandées
par le Prince Héréditaire de Brunfwik. L'action
a commencé une heure avant le jour , & après
un feu très- long & très- vif , le Prince Héréditaire
a été forcé de ſe retirer avec une perte trèsconfidérable
, laiffant en notre pouvoir le plus
grand nombre de fes Bleffés .
On a appris par un autre Courier dépêché le
18 , que le Prince Héréditaire de Brunfwik arepaffé
le Rhin fur les deux Ponts qu'il avoit établis
au-deffous de Wefel , & qu'il a entierement levé
le fiége de cette Place . On affure qu'il avoit pris
le chemin de Halleren fur la Lippe. Son arrieregarde
a été attaquée vivement en deçà du Rhin ,
& elle a été forcée de paffer ce fleuve en déſor-
I ij
196 MERCURE DE FRANCE
1
dre , après avoir perdu beaucoup de monde , &
fans avoir pû replier fes ponts , dont nous fommes
reflés maîtres . Dès le is , le Marquis de Caftries
avoit fait attaquer le pofte de Rhinberg ,
qu'on avoit emporté l'épée la main . Il avoit
fait entrer en même temps dans Wefel , le fieur
de Boisclaireau , Brigadier , avec fix cens hommes
d'élite. Le 18 , il y a fait entrer huit Batail-
Ions.
Le corps aux ordres du Prince Héréditaire de
vant Wefel étoit d'environ vingt- cinq mille hommes
; mais il paroît n'avoir eu au Combat que
quinze mille hommes d'Infanterie , & trois à
quatre mille chevaux . La difficulté du terein n'à
permis au Marquis de Caftries de faire combattre
que les quatre brigades d'Infanterie, de Normanmandie
, d'Auvergne , de la Tour- Dupin & d'Alface.
Ces troupes ont combattu avec la plus grande
valeur & avec la plus grande fermeré , ainfi que
la troupe
du fieur Fifcher , qui a foutenu les premiers
éfforts des ennemis à l'Abbaye de Clofter-
Camp. On n'a pas encore de détail de tout ce qui
s'eft paffé pendant l'action , ni l'état des Officiers
qui ont été tués ou bleffés ; on fçait feulement
que le Marquis de Segur , Lieutenant Général , a
été bleffé légèrement & qu'il a été fait priſonnier.
Les Marquis de Perufe & de la Tour-Dupin & le
Baron de Vangen , Brigadiers , ont auffi été bleffés
, & ce dernier a étéfait prifonnier. La Gendarmerie
, qui étoit à l'action , n'a perdu d'Officiers'
que le fieur de Greneville qui a été tué. Le Marquis
de Caftries fait les plus grands éloges des
Troupes & des Officiers Généraux & particuliers
qui ont combattu.
Nous donnerons ci- après la perte que nous avons
faire à cette journée.
NOVEMBRE. 1760. 197
Le tirage de la Loterie de l'Ecole Royale Mili
taire s'eft fait , en la maniere accoutuinée , dans
'Hôtel-de- Ville de Paris , le de ce mois. Les
Numeros qui font fortis de la roue de fortune font
57, 32 , 26 , 84 , 38. Le prochain tirage fe fera
le 6 du mois de Novembre.
Fermer
Résumé : De PARIS, le 25 Octobre.
En octobre 1760, plusieurs événements militaires et administratifs ont marqué la scène politique et militaire. Le roi a décrété que les enfants des pères blessés, malades ou ayant obtenu la permission de se retirer après trente années de service soient admis à l'École Royale Militaire, aux mêmes conditions que ceux dont les pères sont encore en service. Le comte de Colloredo, représentant de l'empereur et de l'impératrice, est arrivé à Paris pour annoncer le mariage de l'infante Isabelle avec l'archiduc Joseph. Il a été reçu par le roi et plusieurs membres de la famille royale. Sur le front militaire, le général comte de Laffy, accompagné des Russes, a pris Berlin et fait prisonnier la garnison de la ville. Les troupes autrichiennes et russes ont montré une discipline exemplaire. Par ailleurs, le prince de Deux-Ponts a conquis Wittemberg après un assaut. Le marquis de Castries a remporté une victoire près de Rhinberg contre le prince héréditaire de Brunswick, forçant ce dernier à lever le siège de Wesel. À Paris, le tirage de la loterie de l'École Royale Militaire a eu lieu, révélant les numéros gagnants : 57, 32, 26, 84 et 38. Ces événements illustrent une période intense d'activités diplomatiques et militaires, marquée par des décisions royales, des alliances matrimoniales et des succès militaires significatifs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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46
p. 148-169
EXTRAIT DE L'ANGLOIS A BORDEAUX.
Début :
Représenté pour la premiere fois par les Comédiens François, le 4 Mars 1763. [...]
Mots clefs :
Valet, Marquise , Anglais, Combat, Fierté, Maître
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT DE L'ANGLOIS A BORDEAUX.
M. Malé.
La Marquife de FLORICOURT , 1
Soeur de DARMANT , Mlle Dangeville.
Mylord BRUMTON , M. Belcour.
CLARICE , Fille du Mylord, Mlle Huff.
ROBINSON , Valet du Mylord ,
M. Armand.
SUDMER , riche Négociant Anglois, M.Préville.
La Scène eft à Bordeaux , dans la Maiſon
de Darmant.
MYLORD BRUMTON s'embarque à
Dublin pour aller à Londres avec
CLARICE fa fille , il tranſporte avec lui
la plus grande partie de fa fortune :
fon Vaiffeau eft attaqué par une Fré- +
AVRIL 1763. 149
E
gate Françoife commandée par DARMANT.
Après un combat très -vif , le
Vaiffeau Anglois coule à fonds ; on n'a
que le temps de fauver les gens de
1'Equipage qui font conduits à Bordeaux.
Le Mylord & fa fille font logés
chez DARMANT , qui employe tous les
moyens poffibles pour adoucir le fort
de fes prifonniers ; mais BRUMTON ne
veut accepter aucuns fecours .
Tous ces détails font exposés dans
la prémiere Scène entre DARMANT &
la Marquife de FLORICOURT,
L'Officier François fe plaint à fa
foeur , de la fierté fuperbe & dédaigneufe
du Mylord qui aime mieux expofer
fa fille aux befoins que d'accepter
un bienfait des mains d'un ennemi.
Mais mon frere , dit la Marquife , en
cherchant à rendre fervice au Mylord ,
ne fongeriez - vous point à fa fille ?
Cette Angloife eft charmante. DARMANT
avoue qu'il adore CLARICE ;
mais il veut qu'elle l'ignore.
,, L'amour dégraderoit la générofité.
LA MARQUISE
5
Qui vous fait donc agir ?
DARMA N. T.
L'humanité.
Giij
150 MERCURE DE FRANCE .
La Marquife fe moque de fa difcré
tion , elle lui confeille de fe déclarer à
Clarice & de faire enforte de gagner
la bienveillance du Mylord.
» Devenez fon ami.
DARMANT.
" Mes foins font fuperflus ;
>>Ses principes outrés d'honneur patriotique ,
» Sa façon de penfer qu'il croit philofophique ,
» Sa haine contre les François ;
>> Tout met une barrière entre nous pour jamais.
POLA MARQUISE.
>> Je prétens la brifer , j'entreprens le Mylord ,
» Nous verrons donc ce Philofophe ,
» Et s'il veut raiſonner ; c'eſt moi qui l'apostrophe.
» Cependant obligez le Mylord en filence
» Et cherchez des moyens fecrets.....
ל כ
DARMANT.
>>J'ai déja commencé ; mais n'en parlez jamais ,
D'un bienfait divulgué, l'amour-propre s'offenfe,
>> Le Valet Robinſon eſt dans mes intérêts ;
» Par fon moyen , fon Maître a touché quelques
>> fommes.
AVRIL. 1763 151
Sous le nom fuppofé d'un Patriote Anglois.
LA MARQUISE.
»Voilà comme il faudroit toujours tromper les
» hommes.
Robinson paroît :
LA MARQUISE.
Que fait ton Maître ?
ROBINSON.
Il penſe ,
DARMAN T.
Et Clarice ,
ROBINSON.
Soupire.
DARMANT demande à ROBINSON
ce que le Mylord penſe de la lettre de
change qu'il lui a fait parvenir ; le valet
lui répond que fon Maître n'a aucun
foupçon à cet égard , & qu'il croit que
le bienfait vient de SUDMER à qui il a
promis fa fille . ROBINSON ajoute : mon :
Maître
>> Convaincu qu'il lui doit ce fervice
Hâtera le moment de lui donner Clarice.
Giv
152 MERCURE DE FRANCE.
DARMANT.
» Clarice à Sudmer ?
ROBINSON.
» Oui.
DARMANT.
» Va-t-en.
ROBINSON fe retire ; c'eft par ces
mots que l'intérêt de la Pièce s'établit
& que fe forme le noeud.
La Marquife encourage fon frère.
CLARICE paroît ; elle vient prier Madame
de FLORICOURT de tirer fon père
de la profonde mélancolie où il eft
plongé ......
Il vous a entendu
(continue Clarice).
>> Jouer au Clavecin un concerto d'Indel ;
» Notre Mufique Angloiſe éxcite ſes tranſports
» Pour la premiere fois je vois ici , Madame ,
Le plaifir dans fes yeux & le jour dans ſon âme
DARMAN T.
» Ma foeur , ma foeur , courez au Clavecin .
La Marquife fait connoître qu'elle a
AVRIL. ་
153 1763 .
un autre projet ; elle quitte la Scène.
CLARICE veut rentrer ; DARMANT
l'arrête. Ils ont enſemble un entretien
qui développe l'intérêt. L'un & l'autre
épris de l'amour le plus tendre , diffimulent
leurs fentimens & font tous leurs
éfforts pour fe cacher les mouvemens de
leurs coeurs . Cette fcène filée n'eft point
fufceptible d'un extrait , parce qu'elle
dépend des gradations & des nuances; on
citera feulement ces vers qui la terminent
, & dits fupérieurement par M.
'MOLÉ.
> Le coeur reconnoît- il un Pays différent ?
C'eſt la diverfité des moeurs, des caractères,
Qui fit imaginer chaque Gouvernement.
>> Les Loix font des freins falutaires
» Qu'il faut varier prudemment ,
Suivant chaque climat , chaque tempérament ;
» Ce font des régles néceffaires ,
&
>
Pour que l'on puiffe adopter librement
→ Dės vertus même involontaires.
» Mais ce qui tient au Sentiment ,
N'a dans tous les Pays qu'une Loi , qu'un lan
" gage :
» Tous les hommes également .
» S'accordent pour en faire usage.
François , Anglois , Efpagnol , Allemand
Vont au- devant du noeud que le coeur leur
Gy
t
» dénote ,
154 MERCURE DE FRANCE.
>> Ils font tous confondus par ce lien charmant
» Et quand on eſt ſenſible , on eſt compatriote
>> Malheur à ceux qui penſent autrement ;
>> Une âme féche , une âme dure
» Devroit rentrer dans le néant:
» C'eſt aller contre l'ordre. Un Etre indifférent
>> Eft une erreur de la Nature.
DARMANT fe retire à la vue de
ERUMTON ; ce Mylord eft furieux de
ne voir que des jeux , jeux , de n'entendre que
des ris , des férénades , & d'être étourdi
de chanteurs qui avec leurs maudits tam-.
bourins paffent inceffamment exprès
fous fes fenêtres , pour le troubler dans
fes ennuis.
» Tandis
que la Difcorde en cent climats divers
» De tant d'infortunés écrafe les afyles ,
» Le François chante , on ne voit dans fes Villes
Que feftins , jeux , bals & concerts.
» Quel Dieu le fait jouir de ces deftins tranquilles
Dans lefein de la guerre il goûre le repos.
→ Sans peines , fans befoins & libre fous un Maître
» Le François eft heureux & l'Anglois cherche à
» l'être.
CLARICE.
20. Vous pouvez l'être auffi.
AVRIL 1763. 155
BRUMTON fait rentrer fa fille ; il:
gémit de fe voir retenu chez un peuple
frivole ; il fe précipite dans un fauteuil
& porte les yeux de tous côtés.
>>Tout ne préfente ici qu'un luxe ridicule.
( Il arrête fes regards fur une Horloge : .)
>>Quoi l'art a décoré jufqu'à cette pendule ?:
>> On couronne de fleurs l'interprête du temps ,
» Qui diviſe nos jours & marque nos inftans !
>>Tandis que triftement ce globe qui balance
>> Me fait compter les pas de la mort qui s'avance.
>>Le François entraîné par de légers defirs-
» Ne voit fur ce cadran qu'un cercle de plaifirs.
On tire le Mylord de fes réfléxions ,
en lui apportant de l'argent : BRUMTON
relit la lettre attribuée à SUDMER .
Mylord , je vous envoye une lettre de
change, &c.
Après en avoir fait la lecture , le Mylord
forme le deffein de ne plus demeurer
chez DARMANT. Il charge
fon valet d'aller lui chercher un autre
logement.
5. Pour vivre feuls dans l'ombre & le filénce.
La Marquife paroit , Brumton veutfe retirer
elle l'arrête :
G.vj
156 MERCURE DE FRANCE.
» En qualité d'homme qui penſe ,
» Je ne crois pas que Monfieur fe difpenfe
›› D'éclairer ma raiſon , mon coeur & mon efprit.
» Vous êtes Philofophe , à ce que l'on m'a dit.
D
·
» Communiquez un peu votre ſcience.
LE MYLORD.
Je pense pour moi feul.
LA MARQUISE. ·
» Ah ! quelle inconſéquence i
En vain le Sage réfléchit ,
Si la fociété n'en tire aucun profit ;
>>On doit la cultiver pour elle, pour foi- même.
Eh ! laiffez -là vos fonges creux ;
>> La meilleure morale eft de fe rendre heureux,
>>On ne peut l'être feul avec votre.ſyſtême ,
» Mon inftin &t me le dit & mon coeur encor
>> mieux !
>>La chaîne des befoins rapproche tous les hom
> mes ;
» Le lien du plaifir les unit encor plus.
>> Ces noeuds fi doux pour vous font-ils rompus?
>> Pour être heureux, fayez ce que nous fommes,
LE MYLOR D.
Connoiffez mieux l'Anglois ,Madame, ſon génie
Le porte à de plus grands objets.
AVRIL. 1763. 157
Politique profond , occupé de projets,
Il prétend à l'honneur d'éclairer fa patrie.
» Le moindre Citoyen , attentif à fes droits ,
Voit les papiers publics , & régit l'Angleterre ;
Du Parlement compte les voix ,
>>Juge de l'équité des Loix ,
Prononce librement fur la paix ou la guerre ,
» Peſe les intérêts des Rois ,
Et du fond d'un Caffé leur meſure la terre.
LA MARQUISE.
Jouiffez comme nous.
LE MYLORD.
Mais d'un fi doux lonfir
Quel eft le fruit ?
LA MARQUISE
Le plaifir.
LE MYLORD.
Le plaifir
LA MARQUISE
Je parois ridicule à vos yeux , je le voi.
Mais tout confidéré , quel eft le ridicule ?
Sous des traits différens dans le monde il ci-
>> cule.
Mais au fond, quel eft-il une convention ,
158 MERCURE DE FRANCE.
» Un phantôme idéal , une prévention.
Il n'éxifta jamais aux yeux d'un homme fages
Se variant au gré de chaque Nation ,
» Le ridicule appartient à l'ufage :
L'uſage eft pour les moeurs , les habits , le lan
22
gage .
» Mais je ne vois point les rapports--
»Qu'il peut avoir avec notre âme ;
» L'homme eft homme par -tout : fi la vertu l'en
» flamme ,
» C'eſt mon héros , je laiffe les dehors.
>> Quoi ! toujours notre efprit fantafque
»Ne jugera jamais l'homme que fur le maſque
Nous avons des défauts, chaque Peuple a les fiens.
»Pourquoi s'attacher à des riens?
» Eh ! oui , des riens , des miſéres , vous dis- je ,
Sa Qui ne méritent pas d'exciter votre humeur ;
»C'eſt d'un vice réel qu'il faut qu'on fe corrige :
>>Les écarts de l'efſprit ne font pas ceux du coeur.
BRUMTON eft frappé des lumières
philofophiques qui percent à travers le
tourbillon de la gaîté.
La Marquife dit du bien des Anglois
.
> Comment donc vous penſez &
~fs'écrie Brumton , enfaififfant la main de la Mare
quife. )
Ah ! vous mefédujrjez & vous étiez Angloiſes
AVRIL, 1763. 159
Madame de FLORICOURT qui con
noît dans ce moment tous les avantages
qu'elle a fur le Mylord , va plus loin ;
elle veut l'engager à figurer dans un
ballet. BRUMTON eft indigné de la
propofition ; la Marquife lui replique
vivement.
>> Et pourquoi chercher des raifons
» Pour nourrir chaque jour votre milanthropie
» Vous pensez , & nous jouiſſons :
Laiffez-là , croyez - moi , votre Philofophie ,
Elle donne le fpléne , elle endurcit les coeurs
» Notre gaîté que vous nommez folie ,
» Nuance notre efprit de riantes couleurs
» Par un charme qui fe varie ,
Elle orne la Raifon , elle adoucit les moeurs
»C'eſt un printemps qui fait naître les fleurs
» Sur les épines de la vie.
Madame de FLORICOURT quitte
BRUMTON en ne lui donnant qu'un
moment pour fe déterminer. Mylord
refté feul , fe reproche d'avoir marqué
trop d'aigreur à la Marquife ; car malgréfon
inconféquence , dit- il ,
» Je m'apperçois qu'elle a bon coeur ,
» Et fans qu'elle y fonge elle penfe.
44
» Allons , allons , Mylord , il faut quetu t'apaiſes,
160 MERCURE DE FRANCE.
Fais effort fur toi- même & pardonne aux Fran
çoiſes ;
t
On peut s'y faire....
DARMANT s'avance , il annonce au
Mylord que l'on va renvoyer des prifonniers
Anglois pour pareil nombre
de François , & qu'il l'a fait comprendre
dans l'échange. Qui vous en a prié ?
dit BRUMTON ; je ne veux rien devoir
qu'à ma Nation. J'ai fait des dépêches
pour Londres ; je trouverai fans vous la
fin de mes malheurs . DARMANT remarque
un nouvel accès d'humeur dans
BRUMTON.
DARMANT.
Ah ! je vois ce que c'eft : vous avez vû ma ſoeur
Ses airs évaporés & la tête légére....
MYLORD , à part.
» Veut-il interroger mon coeur ?
DAR MANT.
Oui je conçois qu'elle a pu vous déplaire.
LE MYLORD.
A quoi bon votre foeur ? je l'excufſe aiſément.
a Elle eft femme.
1
AVRIL. 1763. 160
DARMANT.
Son caractere...
LE MYLORD.
M'en fuis-je plaint ?
DARMAN T.
Non , poliment.
LE MY LORD.
Je ne fais point poli.
DARMANT.
Scachez que fon fyftême
»Eftde vous confoler,de vous rendre àvous-même,
»Si je ne l'arrêtois , Monfieur , journellement
Vous feriez obfédé.
LE MYLORD.
Monfieur , laiffez-la faire.
•
DARMANT demande à BRUMTON
fon amitié ou du moins fon eftime. Le
Mylord repart.
» Eh ! malgré moi , Monfieur , vous avez mos
» eſtime ; &c.
162 MERCURE DE FRANCE .
On annonce un Anglois ; c'eft SUDMER
; il fe précipite dans les bras du
Mylord , il fe retourne vers DARMANT ,
il le reconnoît pour fon bienfaiteur.
DARMANT n'a aucune idée d'avoir vu
SUDMER . Celui-ci lui dit :
>>>Je ſuis affez heureux moi ,pour vous reconnoître .
» Rappellez-vous que je vous dois la vie.
>>Vous changeâtes pour moi la fortune ennemies
( Portant la main fur fon coeur:)
» Voilà le livre où font écrits tous les bienfaits.
>>Vous êtes mon ami , du moins je fuis le vôtre
» C'eſt par vos procédés que vous m'avez lié :
›› Je m'en fouviens , vous l'avez oublié ,
as Nous faiſons notre charge en cela l'un & l'autre,
Il raconte les obligations qu'il a a
DARMANT. BRUMTON reproche à
SUDMER l'accueil qu'il fait au François.
Vous n'êtes pas Anglois,
SUDMER.
Je fuis plus ; je fuis homme.
Qu'avez-vous contre lui ? cette froideur m'af
>>fomme ;
Efclave né d'un goût national ,
AVRIL. 1763. 163
"
» Vous êtes toujours partial !
N'admettez plus des maximes contraires ,
Et comme moi voyez d'un oeil égal , ""
" Tous les hommes qui font vos frères.
J'ai détesté toujours un préjugé fatal.
,, Quoi ! parce qu'on habite un autre coin de terre
‚ Il faut ſe déchirer & ſe faire la guerre.
" Tendons tous au bien général ;
5, Crois- moi , Mylord , j'ai parcouru le monde ,
Je ne connois fur la machine ronde
» Rien que deux Peuples différens §.
Sçavoir les hommes bons & les hommes mé→
,, chans.
,,Je trouve par- tout ma patrie
Oùje trouve d'honnêtes gens
,, En Cochinchine , en Barbarie ,
,, Chez les Sauvages mêmes ; &c.
SUDMER invite DARMANT à être
de fa nôce ; BRUMTON fe retire pour
aller avertir fa fille de l'arrivée de
SUDMER. DARMANT ne peut cacher
fon trouble ; SUDMER le foupçonne
d'être fon rival: il veut s'en éclaircir.
DARMANT le quitte .
CLARICE paroît avec fon père ;
SUDMER la trouve charmante ; il lui
demande s'il aura le bonheur d'en être
aimé ; la réponſe de CLARICE donne
encore lieu à des foupçons. BRUMTON
164 MERCURE DE FRANCE.
répond pour fa fille. Je fçais , dit-il ,
comme ma fille penfe , & la reconnoiffance
qu'elle fent comme moi de vos
rares bienfaits , doit l'attacher à vous tendrement.
Quels font ces bienfaits ? re-:
plique SUDMER. Le Mylord lui montre
la lettre qu'il a reçue de fa part ; le Négociant
n'y comprend rien.
Je fais dans un courroux extrême , dit-il, )
Comment , quelqu'an a pris mon nom ,
Pour faire une bonne aЯtion
Que j'aurois pû faire moi-même ?
Il fort pour aller demander des éclairciffemens
au Banquier qui a payé la
lettre de change.
Dans la Scène fuivante le Mylord interroge
fa fille fur les difpofitions de
fon coeur ; elle lui répond avec une franchife
Angloife , qu'elle eft prête à obéir
à fon père ; mais qu'elle n'a pu fe défendre
d'aimer DARMANT. Le Mylord
eft frappé d'étonnement : fa fille le
raffure en lui difant que rien n'a fait
connoître fes fentimens à l'Officier François
, & qu'elle ignore de même les
fiens.
SUDMER arrive ; il n'a pû rien fçavoir
du Banquier. On appelle ROBINAVRIL.
1763. 169
SON ; ce valet forcé par des menaces
de découvrir la vérité , déclare que DARMANT
eft l'auteur des bienfaits que le
Mylord a reçus
"2
LE MYLORD.
O Ciel ! aimeroit-il ma fille ?
ROBINSON.
, Oh ! non , Mylord , iln'oferoit
C'est générosité toute pure.....
Le Mylord demande à CLARICE £
elle eft inftruite ; elle protefte que non.
La Marquife arrive ; fon frère la fuit.
Elle annonce que la paix eft ratifiée &
fait une peinture très-vive de la joie
publique. BRUMTON dit à DARMANT.
Nos Nations font réconciliées .
Par vos traits généreux vous m'avez corrigé,
Et l'amitié furmonte enfin le préjugé :
Que par cette amitié nos maiſons foient liées.
,,Pour vous marquer combien vous m'êtes cher,
Vous fignerez le Contrat de ma fille ""
,, Que dès ce ſoir je marie à Sudmer.
DARMANT eft confterné. La Marquife
rit ; le Mylord en demande la
raiſon; ta Marquise découvre l'amour de
166 MERCURE DE FRANCE .
fon frère pour CLARICE. SUDMER dit
à BRUMTON qu'il pourroit faire une
fottife d'époufer fa fille ; il ajoute :
"
""
Mon rival doit au fond avoir la préférence ,
Sous mon nom il a fçu faifir l'occafion
› D'avoir pour vous ,Mylord , un procédé fort bont
Si je deviens le mari de Clarice ; ""
,, Il eft homme peut-être à rendre encor fervices
„, Je ſuis accoutumé d'être ſon prête-nom .
Le Mylord donne fa fille à DARMANT
& lui- même épouſe la Marquiſe.
SUDMER applaudit à cette double al
liance & dit au François.
,,Daignez , mon cher Darmant , en cette circon .
,, ftance ,
,, Me foulager du poids de la reconnoiffance :
,,Jefens queje fuis vieux,je me vois de grands biens,
Je n'ai point d'héritiers ; foyez tous deux les
"
""
miens....
Point de remerciment , ce feroit une offenfe.
,, Si je vous fçais heureux , mes amis , c'eſt affez ,
C'est vous , c'est vous qui me récompenfez.
La Marquife termine la Pièce
"
quatre vers fuivans.
39
par
les
Lecourage & l'honneur rapprochent les pays,
,,Et deux Peuples égaux en vertus , en lumières,,
De leurs divifions renverfent les barrières
"> Pour demeure toujours amis.
AVRIL. 1763. 167
OBSERVATIONS SUR L'ANGLOIS
A BORDEAUX.
Il ne nous refte que peu de chofes à ajouter
à ce que nous avons dit fur cette Piéce dans le
précédent Mercure , auquel nous prions les Lecteurs
de vouloir bien permettre que nous les
renvoyons.
Tout le monde conçoit aifément ce que doit
être un Drame fait & conftruit pour une circonftance
à laquelle , action , intrigue , carac
tères , fituations , jeu de Théâtre , & furtout le
dénoûment doivent ſe rapporter. On peut donc
fentir par la difficulté de l'ouvrage , le prix de
l'intelligence & de l'art qui regnent dans celleci
; puifqu'en y faifant la plus légére attention ,
on apperçoit que cette Comédie fans éprouver
beaucoup de changemens , & fans aucun renverfement
de conftruction ni dans le fond ni dans
les détails , deviendra une Comédie de tous les
temps , & une Comédie toujours agréable.
On fe difpenfera de répondre à ceux qui ju
geroient le caractère du Mylord trop obstinément
mifanthrope. Il y a dans la conſtitution du
Drame & dans la néceflité des contraſtes , dequoi
juftifier à cet égard la touche un peu forte de ce
caractère. On doit fe prêter aux difficultés de
l'art pour nuancer le fond d'un caractère national
, de manière à produire par les conféquences
des mêmes principes , des fentimens , une humeur
& une conduite auffi oppofés qu'on les voit
à tous momens entre Sudmer & ce Mylord . L'ef168
MERCURE DE FRANCE .
fet qui en réſulte eft fans contredit affez agréable
pour ne pas s'attacher à en critiquer fcrupuleufement
les moyens , d'autant qu'ils ne préfentent
rien de forcé au premier afpect .
Les détails du rôle de la Marquife le rour
agréable de fa Philofophie , ce qu'il prêtoit au
plaifir de voir & d'entendre plus longtemps Mlle
Dangeville , l'objet de regrets fi juftes & fi vivement
fentis par le Spectateur, tout devoit nous
empêcher d'examiner s'il n'y auroit pas eu quelques
moyens de rendre les progrès de la conquê
te fur le Mylord un peu plus fenfibles dans leur
gradation.
Nous avons déja parlé précédemment du coloris
de cette Piéce. Aujourd'hui que nous venons
d'en mettre une partie fous les yeux du Public ,
ce feroit faire tort à l'Auteur , que de prévenir
les éloges qu'il recevra de chaque Lecteur ,
éloges plus fateurs pour lui que ceux que nous
répéterions ici.
Les Comédiens François ont fait l'ouverture
de leur Théâtre,Lundi 11 Avril,
par Sémiramis , Tragédie de M. DE
VOLTAIRE & le Somnambule.
Nous ne pouvons plus nous diffimuler
, ni au Public , la perte que nous
avions différé de conftater. Toutes les
follicitations , les offres les plus avantageufes
& les plus honorables , l'attrait
de fa propre gloire , attrait renouvellé
autant de fois que paroiffoit Mademoifelle
DANGEVILLE rien n'a pû la
détourner du projet annoncé de fa retraite,
,
AVRIL. 1763. 169
traite , malheureuſement trop indiſpen :
fa fanté.
fable
pour
Le Public , amateur du Théâtre , a eu
d'autres regrets à joindre à celui - ci , par
la perte de Mademoiſelle GAUSSIN.
M. DANGEVILE , frère de l'admirable
Actrice dont on ne peut fe confoler ,
vient auffi de fe retirer.
Le Compliment que M. DAUBERVAL
a prononcé à l'ouverture du Théàtre
, contenant le jufte tribut d'éloges
que nous nous propofions de payer
aux deux A&trices dont on vient de
parler nous allons le rapporter en
entier.
La Marquife de FLORICOURT , 1
Soeur de DARMANT , Mlle Dangeville.
Mylord BRUMTON , M. Belcour.
CLARICE , Fille du Mylord, Mlle Huff.
ROBINSON , Valet du Mylord ,
M. Armand.
SUDMER , riche Négociant Anglois, M.Préville.
La Scène eft à Bordeaux , dans la Maiſon
de Darmant.
MYLORD BRUMTON s'embarque à
Dublin pour aller à Londres avec
CLARICE fa fille , il tranſporte avec lui
la plus grande partie de fa fortune :
fon Vaiffeau eft attaqué par une Fré- +
AVRIL 1763. 149
E
gate Françoife commandée par DARMANT.
Après un combat très -vif , le
Vaiffeau Anglois coule à fonds ; on n'a
que le temps de fauver les gens de
1'Equipage qui font conduits à Bordeaux.
Le Mylord & fa fille font logés
chez DARMANT , qui employe tous les
moyens poffibles pour adoucir le fort
de fes prifonniers ; mais BRUMTON ne
veut accepter aucuns fecours .
Tous ces détails font exposés dans
la prémiere Scène entre DARMANT &
la Marquife de FLORICOURT,
L'Officier François fe plaint à fa
foeur , de la fierté fuperbe & dédaigneufe
du Mylord qui aime mieux expofer
fa fille aux befoins que d'accepter
un bienfait des mains d'un ennemi.
Mais mon frere , dit la Marquife , en
cherchant à rendre fervice au Mylord ,
ne fongeriez - vous point à fa fille ?
Cette Angloife eft charmante. DARMANT
avoue qu'il adore CLARICE ;
mais il veut qu'elle l'ignore.
,, L'amour dégraderoit la générofité.
LA MARQUISE
5
Qui vous fait donc agir ?
DARMA N. T.
L'humanité.
Giij
150 MERCURE DE FRANCE .
La Marquife fe moque de fa difcré
tion , elle lui confeille de fe déclarer à
Clarice & de faire enforte de gagner
la bienveillance du Mylord.
» Devenez fon ami.
DARMANT.
" Mes foins font fuperflus ;
>>Ses principes outrés d'honneur patriotique ,
» Sa façon de penfer qu'il croit philofophique ,
» Sa haine contre les François ;
>> Tout met une barrière entre nous pour jamais.
POLA MARQUISE.
>> Je prétens la brifer , j'entreprens le Mylord ,
» Nous verrons donc ce Philofophe ,
» Et s'il veut raiſonner ; c'eſt moi qui l'apostrophe.
» Cependant obligez le Mylord en filence
» Et cherchez des moyens fecrets.....
ל כ
DARMANT.
>>J'ai déja commencé ; mais n'en parlez jamais ,
D'un bienfait divulgué, l'amour-propre s'offenfe,
>> Le Valet Robinſon eſt dans mes intérêts ;
» Par fon moyen , fon Maître a touché quelques
>> fommes.
AVRIL. 1763 151
Sous le nom fuppofé d'un Patriote Anglois.
LA MARQUISE.
»Voilà comme il faudroit toujours tromper les
» hommes.
Robinson paroît :
LA MARQUISE.
Que fait ton Maître ?
ROBINSON.
Il penſe ,
DARMAN T.
Et Clarice ,
ROBINSON.
Soupire.
DARMANT demande à ROBINSON
ce que le Mylord penſe de la lettre de
change qu'il lui a fait parvenir ; le valet
lui répond que fon Maître n'a aucun
foupçon à cet égard , & qu'il croit que
le bienfait vient de SUDMER à qui il a
promis fa fille . ROBINSON ajoute : mon :
Maître
>> Convaincu qu'il lui doit ce fervice
Hâtera le moment de lui donner Clarice.
Giv
152 MERCURE DE FRANCE.
DARMANT.
» Clarice à Sudmer ?
ROBINSON.
» Oui.
DARMANT.
» Va-t-en.
ROBINSON fe retire ; c'eft par ces
mots que l'intérêt de la Pièce s'établit
& que fe forme le noeud.
La Marquife encourage fon frère.
CLARICE paroît ; elle vient prier Madame
de FLORICOURT de tirer fon père
de la profonde mélancolie où il eft
plongé ......
Il vous a entendu
(continue Clarice).
>> Jouer au Clavecin un concerto d'Indel ;
» Notre Mufique Angloiſe éxcite ſes tranſports
» Pour la premiere fois je vois ici , Madame ,
Le plaifir dans fes yeux & le jour dans ſon âme
DARMAN T.
» Ma foeur , ma foeur , courez au Clavecin .
La Marquife fait connoître qu'elle a
AVRIL. ་
153 1763 .
un autre projet ; elle quitte la Scène.
CLARICE veut rentrer ; DARMANT
l'arrête. Ils ont enſemble un entretien
qui développe l'intérêt. L'un & l'autre
épris de l'amour le plus tendre , diffimulent
leurs fentimens & font tous leurs
éfforts pour fe cacher les mouvemens de
leurs coeurs . Cette fcène filée n'eft point
fufceptible d'un extrait , parce qu'elle
dépend des gradations & des nuances; on
citera feulement ces vers qui la terminent
, & dits fupérieurement par M.
'MOLÉ.
> Le coeur reconnoît- il un Pays différent ?
C'eſt la diverfité des moeurs, des caractères,
Qui fit imaginer chaque Gouvernement.
>> Les Loix font des freins falutaires
» Qu'il faut varier prudemment ,
Suivant chaque climat , chaque tempérament ;
» Ce font des régles néceffaires ,
&
>
Pour que l'on puiffe adopter librement
→ Dės vertus même involontaires.
» Mais ce qui tient au Sentiment ,
N'a dans tous les Pays qu'une Loi , qu'un lan
" gage :
» Tous les hommes également .
» S'accordent pour en faire usage.
François , Anglois , Efpagnol , Allemand
Vont au- devant du noeud que le coeur leur
Gy
t
» dénote ,
154 MERCURE DE FRANCE.
>> Ils font tous confondus par ce lien charmant
» Et quand on eſt ſenſible , on eſt compatriote
>> Malheur à ceux qui penſent autrement ;
>> Une âme féche , une âme dure
» Devroit rentrer dans le néant:
» C'eſt aller contre l'ordre. Un Etre indifférent
>> Eft une erreur de la Nature.
DARMANT fe retire à la vue de
ERUMTON ; ce Mylord eft furieux de
ne voir que des jeux , jeux , de n'entendre que
des ris , des férénades , & d'être étourdi
de chanteurs qui avec leurs maudits tam-.
bourins paffent inceffamment exprès
fous fes fenêtres , pour le troubler dans
fes ennuis.
» Tandis
que la Difcorde en cent climats divers
» De tant d'infortunés écrafe les afyles ,
» Le François chante , on ne voit dans fes Villes
Que feftins , jeux , bals & concerts.
» Quel Dieu le fait jouir de ces deftins tranquilles
Dans lefein de la guerre il goûre le repos.
→ Sans peines , fans befoins & libre fous un Maître
» Le François eft heureux & l'Anglois cherche à
» l'être.
CLARICE.
20. Vous pouvez l'être auffi.
AVRIL 1763. 155
BRUMTON fait rentrer fa fille ; il:
gémit de fe voir retenu chez un peuple
frivole ; il fe précipite dans un fauteuil
& porte les yeux de tous côtés.
>>Tout ne préfente ici qu'un luxe ridicule.
( Il arrête fes regards fur une Horloge : .)
>>Quoi l'art a décoré jufqu'à cette pendule ?:
>> On couronne de fleurs l'interprête du temps ,
» Qui diviſe nos jours & marque nos inftans !
>>Tandis que triftement ce globe qui balance
>> Me fait compter les pas de la mort qui s'avance.
>>Le François entraîné par de légers defirs-
» Ne voit fur ce cadran qu'un cercle de plaifirs.
On tire le Mylord de fes réfléxions ,
en lui apportant de l'argent : BRUMTON
relit la lettre attribuée à SUDMER .
Mylord , je vous envoye une lettre de
change, &c.
Après en avoir fait la lecture , le Mylord
forme le deffein de ne plus demeurer
chez DARMANT. Il charge
fon valet d'aller lui chercher un autre
logement.
5. Pour vivre feuls dans l'ombre & le filénce.
La Marquife paroit , Brumton veutfe retirer
elle l'arrête :
G.vj
156 MERCURE DE FRANCE.
» En qualité d'homme qui penſe ,
» Je ne crois pas que Monfieur fe difpenfe
›› D'éclairer ma raiſon , mon coeur & mon efprit.
» Vous êtes Philofophe , à ce que l'on m'a dit.
D
·
» Communiquez un peu votre ſcience.
LE MYLORD.
Je pense pour moi feul.
LA MARQUISE. ·
» Ah ! quelle inconſéquence i
En vain le Sage réfléchit ,
Si la fociété n'en tire aucun profit ;
>>On doit la cultiver pour elle, pour foi- même.
Eh ! laiffez -là vos fonges creux ;
>> La meilleure morale eft de fe rendre heureux,
>>On ne peut l'être feul avec votre.ſyſtême ,
» Mon inftin &t me le dit & mon coeur encor
>> mieux !
>>La chaîne des befoins rapproche tous les hom
> mes ;
» Le lien du plaifir les unit encor plus.
>> Ces noeuds fi doux pour vous font-ils rompus?
>> Pour être heureux, fayez ce que nous fommes,
LE MYLOR D.
Connoiffez mieux l'Anglois ,Madame, ſon génie
Le porte à de plus grands objets.
AVRIL. 1763. 157
Politique profond , occupé de projets,
Il prétend à l'honneur d'éclairer fa patrie.
» Le moindre Citoyen , attentif à fes droits ,
Voit les papiers publics , & régit l'Angleterre ;
Du Parlement compte les voix ,
>>Juge de l'équité des Loix ,
Prononce librement fur la paix ou la guerre ,
» Peſe les intérêts des Rois ,
Et du fond d'un Caffé leur meſure la terre.
LA MARQUISE.
Jouiffez comme nous.
LE MYLORD.
Mais d'un fi doux lonfir
Quel eft le fruit ?
LA MARQUISE
Le plaifir.
LE MYLORD.
Le plaifir
LA MARQUISE
Je parois ridicule à vos yeux , je le voi.
Mais tout confidéré , quel eft le ridicule ?
Sous des traits différens dans le monde il ci-
>> cule.
Mais au fond, quel eft-il une convention ,
158 MERCURE DE FRANCE.
» Un phantôme idéal , une prévention.
Il n'éxifta jamais aux yeux d'un homme fages
Se variant au gré de chaque Nation ,
» Le ridicule appartient à l'ufage :
L'uſage eft pour les moeurs , les habits , le lan
22
gage .
» Mais je ne vois point les rapports--
»Qu'il peut avoir avec notre âme ;
» L'homme eft homme par -tout : fi la vertu l'en
» flamme ,
» C'eſt mon héros , je laiffe les dehors.
>> Quoi ! toujours notre efprit fantafque
»Ne jugera jamais l'homme que fur le maſque
Nous avons des défauts, chaque Peuple a les fiens.
»Pourquoi s'attacher à des riens?
» Eh ! oui , des riens , des miſéres , vous dis- je ,
Sa Qui ne méritent pas d'exciter votre humeur ;
»C'eſt d'un vice réel qu'il faut qu'on fe corrige :
>>Les écarts de l'efſprit ne font pas ceux du coeur.
BRUMTON eft frappé des lumières
philofophiques qui percent à travers le
tourbillon de la gaîté.
La Marquife dit du bien des Anglois
.
> Comment donc vous penſez &
~fs'écrie Brumton , enfaififfant la main de la Mare
quife. )
Ah ! vous mefédujrjez & vous étiez Angloiſes
AVRIL, 1763. 159
Madame de FLORICOURT qui con
noît dans ce moment tous les avantages
qu'elle a fur le Mylord , va plus loin ;
elle veut l'engager à figurer dans un
ballet. BRUMTON eft indigné de la
propofition ; la Marquife lui replique
vivement.
>> Et pourquoi chercher des raifons
» Pour nourrir chaque jour votre milanthropie
» Vous pensez , & nous jouiſſons :
Laiffez-là , croyez - moi , votre Philofophie ,
Elle donne le fpléne , elle endurcit les coeurs
» Notre gaîté que vous nommez folie ,
» Nuance notre efprit de riantes couleurs
» Par un charme qui fe varie ,
Elle orne la Raifon , elle adoucit les moeurs
»C'eſt un printemps qui fait naître les fleurs
» Sur les épines de la vie.
Madame de FLORICOURT quitte
BRUMTON en ne lui donnant qu'un
moment pour fe déterminer. Mylord
refté feul , fe reproche d'avoir marqué
trop d'aigreur à la Marquife ; car malgréfon
inconféquence , dit- il ,
» Je m'apperçois qu'elle a bon coeur ,
» Et fans qu'elle y fonge elle penfe.
44
» Allons , allons , Mylord , il faut quetu t'apaiſes,
160 MERCURE DE FRANCE.
Fais effort fur toi- même & pardonne aux Fran
çoiſes ;
t
On peut s'y faire....
DARMANT s'avance , il annonce au
Mylord que l'on va renvoyer des prifonniers
Anglois pour pareil nombre
de François , & qu'il l'a fait comprendre
dans l'échange. Qui vous en a prié ?
dit BRUMTON ; je ne veux rien devoir
qu'à ma Nation. J'ai fait des dépêches
pour Londres ; je trouverai fans vous la
fin de mes malheurs . DARMANT remarque
un nouvel accès d'humeur dans
BRUMTON.
DARMANT.
Ah ! je vois ce que c'eft : vous avez vû ma ſoeur
Ses airs évaporés & la tête légére....
MYLORD , à part.
» Veut-il interroger mon coeur ?
DAR MANT.
Oui je conçois qu'elle a pu vous déplaire.
LE MYLORD.
A quoi bon votre foeur ? je l'excufſe aiſément.
a Elle eft femme.
1
AVRIL. 1763. 160
DARMANT.
Son caractere...
LE MYLORD.
M'en fuis-je plaint ?
DARMAN T.
Non , poliment.
LE MY LORD.
Je ne fais point poli.
DARMANT.
Scachez que fon fyftême
»Eftde vous confoler,de vous rendre àvous-même,
»Si je ne l'arrêtois , Monfieur , journellement
Vous feriez obfédé.
LE MYLORD.
Monfieur , laiffez-la faire.
•
DARMANT demande à BRUMTON
fon amitié ou du moins fon eftime. Le
Mylord repart.
» Eh ! malgré moi , Monfieur , vous avez mos
» eſtime ; &c.
162 MERCURE DE FRANCE .
On annonce un Anglois ; c'eft SUDMER
; il fe précipite dans les bras du
Mylord , il fe retourne vers DARMANT ,
il le reconnoît pour fon bienfaiteur.
DARMANT n'a aucune idée d'avoir vu
SUDMER . Celui-ci lui dit :
>>>Je ſuis affez heureux moi ,pour vous reconnoître .
» Rappellez-vous que je vous dois la vie.
>>Vous changeâtes pour moi la fortune ennemies
( Portant la main fur fon coeur:)
» Voilà le livre où font écrits tous les bienfaits.
>>Vous êtes mon ami , du moins je fuis le vôtre
» C'eſt par vos procédés que vous m'avez lié :
›› Je m'en fouviens , vous l'avez oublié ,
as Nous faiſons notre charge en cela l'un & l'autre,
Il raconte les obligations qu'il a a
DARMANT. BRUMTON reproche à
SUDMER l'accueil qu'il fait au François.
Vous n'êtes pas Anglois,
SUDMER.
Je fuis plus ; je fuis homme.
Qu'avez-vous contre lui ? cette froideur m'af
>>fomme ;
Efclave né d'un goût national ,
AVRIL. 1763. 163
"
» Vous êtes toujours partial !
N'admettez plus des maximes contraires ,
Et comme moi voyez d'un oeil égal , ""
" Tous les hommes qui font vos frères.
J'ai détesté toujours un préjugé fatal.
,, Quoi ! parce qu'on habite un autre coin de terre
‚ Il faut ſe déchirer & ſe faire la guerre.
" Tendons tous au bien général ;
5, Crois- moi , Mylord , j'ai parcouru le monde ,
Je ne connois fur la machine ronde
» Rien que deux Peuples différens §.
Sçavoir les hommes bons & les hommes mé→
,, chans.
,,Je trouve par- tout ma patrie
Oùje trouve d'honnêtes gens
,, En Cochinchine , en Barbarie ,
,, Chez les Sauvages mêmes ; &c.
SUDMER invite DARMANT à être
de fa nôce ; BRUMTON fe retire pour
aller avertir fa fille de l'arrivée de
SUDMER. DARMANT ne peut cacher
fon trouble ; SUDMER le foupçonne
d'être fon rival: il veut s'en éclaircir.
DARMANT le quitte .
CLARICE paroît avec fon père ;
SUDMER la trouve charmante ; il lui
demande s'il aura le bonheur d'en être
aimé ; la réponſe de CLARICE donne
encore lieu à des foupçons. BRUMTON
164 MERCURE DE FRANCE.
répond pour fa fille. Je fçais , dit-il ,
comme ma fille penfe , & la reconnoiffance
qu'elle fent comme moi de vos
rares bienfaits , doit l'attacher à vous tendrement.
Quels font ces bienfaits ? re-:
plique SUDMER. Le Mylord lui montre
la lettre qu'il a reçue de fa part ; le Négociant
n'y comprend rien.
Je fais dans un courroux extrême , dit-il, )
Comment , quelqu'an a pris mon nom ,
Pour faire une bonne aЯtion
Que j'aurois pû faire moi-même ?
Il fort pour aller demander des éclairciffemens
au Banquier qui a payé la
lettre de change.
Dans la Scène fuivante le Mylord interroge
fa fille fur les difpofitions de
fon coeur ; elle lui répond avec une franchife
Angloife , qu'elle eft prête à obéir
à fon père ; mais qu'elle n'a pu fe défendre
d'aimer DARMANT. Le Mylord
eft frappé d'étonnement : fa fille le
raffure en lui difant que rien n'a fait
connoître fes fentimens à l'Officier François
, & qu'elle ignore de même les
fiens.
SUDMER arrive ; il n'a pû rien fçavoir
du Banquier. On appelle ROBINAVRIL.
1763. 169
SON ; ce valet forcé par des menaces
de découvrir la vérité , déclare que DARMANT
eft l'auteur des bienfaits que le
Mylord a reçus
"2
LE MYLORD.
O Ciel ! aimeroit-il ma fille ?
ROBINSON.
, Oh ! non , Mylord , iln'oferoit
C'est générosité toute pure.....
Le Mylord demande à CLARICE £
elle eft inftruite ; elle protefte que non.
La Marquife arrive ; fon frère la fuit.
Elle annonce que la paix eft ratifiée &
fait une peinture très-vive de la joie
publique. BRUMTON dit à DARMANT.
Nos Nations font réconciliées .
Par vos traits généreux vous m'avez corrigé,
Et l'amitié furmonte enfin le préjugé :
Que par cette amitié nos maiſons foient liées.
,,Pour vous marquer combien vous m'êtes cher,
Vous fignerez le Contrat de ma fille ""
,, Que dès ce ſoir je marie à Sudmer.
DARMANT eft confterné. La Marquife
rit ; le Mylord en demande la
raiſon; ta Marquise découvre l'amour de
166 MERCURE DE FRANCE .
fon frère pour CLARICE. SUDMER dit
à BRUMTON qu'il pourroit faire une
fottife d'époufer fa fille ; il ajoute :
"
""
Mon rival doit au fond avoir la préférence ,
Sous mon nom il a fçu faifir l'occafion
› D'avoir pour vous ,Mylord , un procédé fort bont
Si je deviens le mari de Clarice ; ""
,, Il eft homme peut-être à rendre encor fervices
„, Je ſuis accoutumé d'être ſon prête-nom .
Le Mylord donne fa fille à DARMANT
& lui- même épouſe la Marquiſe.
SUDMER applaudit à cette double al
liance & dit au François.
,,Daignez , mon cher Darmant , en cette circon .
,, ftance ,
,, Me foulager du poids de la reconnoiffance :
,,Jefens queje fuis vieux,je me vois de grands biens,
Je n'ai point d'héritiers ; foyez tous deux les
"
""
miens....
Point de remerciment , ce feroit une offenfe.
,, Si je vous fçais heureux , mes amis , c'eſt affez ,
C'est vous , c'est vous qui me récompenfez.
La Marquife termine la Pièce
"
quatre vers fuivans.
39
par
les
Lecourage & l'honneur rapprochent les pays,
,,Et deux Peuples égaux en vertus , en lumières,,
De leurs divifions renverfent les barrières
"> Pour demeure toujours amis.
AVRIL. 1763. 167
OBSERVATIONS SUR L'ANGLOIS
A BORDEAUX.
Il ne nous refte que peu de chofes à ajouter
à ce que nous avons dit fur cette Piéce dans le
précédent Mercure , auquel nous prions les Lecteurs
de vouloir bien permettre que nous les
renvoyons.
Tout le monde conçoit aifément ce que doit
être un Drame fait & conftruit pour une circonftance
à laquelle , action , intrigue , carac
tères , fituations , jeu de Théâtre , & furtout le
dénoûment doivent ſe rapporter. On peut donc
fentir par la difficulté de l'ouvrage , le prix de
l'intelligence & de l'art qui regnent dans celleci
; puifqu'en y faifant la plus légére attention ,
on apperçoit que cette Comédie fans éprouver
beaucoup de changemens , & fans aucun renverfement
de conftruction ni dans le fond ni dans
les détails , deviendra une Comédie de tous les
temps , & une Comédie toujours agréable.
On fe difpenfera de répondre à ceux qui ju
geroient le caractère du Mylord trop obstinément
mifanthrope. Il y a dans la conſtitution du
Drame & dans la néceflité des contraſtes , dequoi
juftifier à cet égard la touche un peu forte de ce
caractère. On doit fe prêter aux difficultés de
l'art pour nuancer le fond d'un caractère national
, de manière à produire par les conféquences
des mêmes principes , des fentimens , une humeur
& une conduite auffi oppofés qu'on les voit
à tous momens entre Sudmer & ce Mylord . L'ef168
MERCURE DE FRANCE .
fet qui en réſulte eft fans contredit affez agréable
pour ne pas s'attacher à en critiquer fcrupuleufement
les moyens , d'autant qu'ils ne préfentent
rien de forcé au premier afpect .
Les détails du rôle de la Marquife le rour
agréable de fa Philofophie , ce qu'il prêtoit au
plaifir de voir & d'entendre plus longtemps Mlle
Dangeville , l'objet de regrets fi juftes & fi vivement
fentis par le Spectateur, tout devoit nous
empêcher d'examiner s'il n'y auroit pas eu quelques
moyens de rendre les progrès de la conquê
te fur le Mylord un peu plus fenfibles dans leur
gradation.
Nous avons déja parlé précédemment du coloris
de cette Piéce. Aujourd'hui que nous venons
d'en mettre une partie fous les yeux du Public ,
ce feroit faire tort à l'Auteur , que de prévenir
les éloges qu'il recevra de chaque Lecteur ,
éloges plus fateurs pour lui que ceux que nous
répéterions ici.
Les Comédiens François ont fait l'ouverture
de leur Théâtre,Lundi 11 Avril,
par Sémiramis , Tragédie de M. DE
VOLTAIRE & le Somnambule.
Nous ne pouvons plus nous diffimuler
, ni au Public , la perte que nous
avions différé de conftater. Toutes les
follicitations , les offres les plus avantageufes
& les plus honorables , l'attrait
de fa propre gloire , attrait renouvellé
autant de fois que paroiffoit Mademoifelle
DANGEVILLE rien n'a pû la
détourner du projet annoncé de fa retraite,
,
AVRIL. 1763. 169
traite , malheureuſement trop indiſpen :
fa fanté.
fable
pour
Le Public , amateur du Théâtre , a eu
d'autres regrets à joindre à celui - ci , par
la perte de Mademoiſelle GAUSSIN.
M. DANGEVILE , frère de l'admirable
Actrice dont on ne peut fe confoler ,
vient auffi de fe retirer.
Le Compliment que M. DAUBERVAL
a prononcé à l'ouverture du Théàtre
, contenant le jufte tribut d'éloges
que nous nous propofions de payer
aux deux A&trices dont on vient de
parler nous allons le rapporter en
entier.
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Résumé : EXTRAIT DE L'ANGLOIS A BORDEAUX.
La pièce de théâtre se déroule à Bordeaux, dans la maison de Darmant, où Lord Brumton et sa fille Clarice sont hébergés après avoir survécu à un naufrage causé par un navire français commandé par Darmant. Brumton refuse toute aide, malgré la générosité de Darmant, qui est secrètement amoureux de Clarice. La Marquise de Floricourt, sœur de Darmant, encourage ce dernier à se déclarer à Clarice et à gagner la bienveillance de Brumton. Darmant aide secrètement Brumton financièrement, en se faisant passer pour un patriote anglais via son valet Robinson. Clarice, inquiète de la mélancolie de son père, joue du clavecin pour le distraire. Une scène entre Darmant et Clarice révèle leur amour mutuel, bien que tous deux tentent de le dissimuler. Brumton, frustré par l'insouciance des Français, est confronté par la Marquise, qui défend la joie de vivre française contre la philosophie austère de Brumton. Sudmer, un riche négociant anglais, reconnaît Darmant comme son bienfaiteur et critique l'attitude nationaliste de Brumton. Dans une autre scène, Sudmer rencontre Clarice et lui demande si elle pourrait l'aimer, mais la réponse de Clarice laisse place à des soupçons. Brumton répond à sa place, affirmant que sa fille est reconnaissante des bienfaits de Sudmer. Sudmer découvre qu'il a reçu une lettre de change en son nom, ce qui le met en colère. Robinson révèle que Darmant est l'auteur des bienfaits. Clarice avoue à son père qu'elle aime Darmant, mais nie toute connaissance des sentiments de ce dernier. La Marquise annonce la ratification de la paix et propose que sa nièce, Clarice, épouse Sudmer. Cependant, Sudmer reconnaît la générosité de Darmant et accepte que Clarice épouse Darmant. Le lord épouse alors la Marquise. Sudmer applaudit à cette double alliance et offre ses biens à Darmant et Clarice. La pièce se termine par une réflexion sur la manière dont le courage et l'honneur rapprochent les peuples, abolissant les divisions.
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47
p. 136-137
De WARSOVIE, le 14 Juillet 1764.
Début :
On voit ici une relation du combat qui s'est donné le 26 [...]
Mots clefs :
Combat, Troupes, Prince, Attaques, Déplacement des troupes, Colonel, Bataille, Cavalerie, Espions, Pertes
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texteReconnaissance textuelle : De WARSOVIE, le 14 Juillet 1764.
De WARSOVIE , le 14 Juillet 1764.
OnN voit ici une relation du combat qui s'eft
donné le 26 du mois dernier , entre les Trou-
Pes de la République & celles du Prince Radziwill:
fuivant cette Relation publiée de la part de
ce Prince , il partit le 26 de Kepla pour ſe rendre
dans les Terres , & arriva à Hadzviltowize , à
deux lieues de Slonim . Après avoir foutenu en
chemin fon Avant-Garde continuellement harcelée
par de fauffes attaques dès fon arrivée en
cet endroit , il apprit que l'Avant-Garde des Ruf-
Les étoit renforcée , & que le Colonel Block
étoit rangé en bataille fur les hauteurs avec un
Corps de cinq mille hommes . Le Prince Radziwill
fe détermina à l'attaquer à trois heures après
midi , le délogea & le poursuivit jufqu'à Slonim
où ce Colonel , qui avoit déja fait préparer les
Batteries fe forma de nouveau. Alors la Cavalerie
du Prince Radziwill fut attaquée de toutes parts &
effaya feule le feu des Batteries depuis cinq heures
jufqu'à dix ayant été jointe par l'Infanterie , le
combat devint général & dura juſqu'à minuit. Les
Ruffes furent rompus deux fois & pouffés derrière
NOVEMBRE. 1764. 137
leurs Batteries : un Boulet rouge ayant fait fauter le
Magazin des poudres du Prince Radziwill , le feu
de les Troupes ceffa ainfi que celui des Ruffes.
Les deux Partis pafferent la nuit fous les armes.
Le Prince fe retira à trois heures du matin , en
très-bon ordre , du côté de fes Terres entre la
Polefie & la Volhynie. Il n'a eu dans cette occafion
que quatorze hommes tués , & vingt-deux
bleffés . Suivant le rapport des Eſpions , les Ruffes
ont enterré deux cent foixante - trois hommes , &
ont eu plus de cinq cens bleffés ; mais ces détails
font pas encore bien conftatés .
OnN voit ici une relation du combat qui s'eft
donné le 26 du mois dernier , entre les Trou-
Pes de la République & celles du Prince Radziwill:
fuivant cette Relation publiée de la part de
ce Prince , il partit le 26 de Kepla pour ſe rendre
dans les Terres , & arriva à Hadzviltowize , à
deux lieues de Slonim . Après avoir foutenu en
chemin fon Avant-Garde continuellement harcelée
par de fauffes attaques dès fon arrivée en
cet endroit , il apprit que l'Avant-Garde des Ruf-
Les étoit renforcée , & que le Colonel Block
étoit rangé en bataille fur les hauteurs avec un
Corps de cinq mille hommes . Le Prince Radziwill
fe détermina à l'attaquer à trois heures après
midi , le délogea & le poursuivit jufqu'à Slonim
où ce Colonel , qui avoit déja fait préparer les
Batteries fe forma de nouveau. Alors la Cavalerie
du Prince Radziwill fut attaquée de toutes parts &
effaya feule le feu des Batteries depuis cinq heures
jufqu'à dix ayant été jointe par l'Infanterie , le
combat devint général & dura juſqu'à minuit. Les
Ruffes furent rompus deux fois & pouffés derrière
NOVEMBRE. 1764. 137
leurs Batteries : un Boulet rouge ayant fait fauter le
Magazin des poudres du Prince Radziwill , le feu
de les Troupes ceffa ainfi que celui des Ruffes.
Les deux Partis pafferent la nuit fous les armes.
Le Prince fe retira à trois heures du matin , en
très-bon ordre , du côté de fes Terres entre la
Polefie & la Volhynie. Il n'a eu dans cette occafion
que quatorze hommes tués , & vingt-deux
bleffés . Suivant le rapport des Eſpions , les Ruffes
ont enterré deux cent foixante - trois hommes , &
ont eu plus de cinq cens bleffés ; mais ces détails
font pas encore bien conftatés .
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Résumé : De WARSOVIE, le 14 Juillet 1764.
Le 14 juillet 1764, une relation du combat entre les troupes de la République et celles du Prince Radziwill est publiée. Le 26 juin, le Prince Radziwill partit de Kepla pour se rendre dans les Terres et arriva à Hadzviltowize, près de Slonim. Son avant-garde fut harcelée dès son arrivée. Il apprit que l'avant-garde des Russes, renforcée par le Colonel Block, comptait cinq mille hommes. Le Prince Radziwill attaqua à trois heures de l'après-midi, délogea les Russes et les poursuivit jusqu'à Slonim. La cavalerie du Prince Radziwill fut attaquée de toutes parts et combattit pendant cinq heures. À dix heures, l'infanterie rejoignit la bataille, rendant le combat général jusqu'à minuit. Les Russes furent repoussés deux fois derrière leurs batteries. Un boulet rouge fit sauter le magasin de poudre du Prince Radziwill, stoppant le feu des troupes. Les deux parties passèrent la nuit sous les armes. Le Prince Radziwill se retira à trois heures du matin vers ses terres entre la Pologne et la Volhynie. Il déplora quatorze hommes tués et vingt-deux blessés. Selon des espions, les Russes auraient enterré deux cent soixante-trois hommes et compté plus de cinq cents blessés, mais ces détails ne sont pas confirmés.
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48
p. 146
De WARSOVIE, le 20 Août 1764.
Début :
La Confédération formée à Hallicz par le Comte Potocki, ancien [...]
Mots clefs :
Confédération, Comte, Attaque, Troupes, Prince, Combat, Commandant russe, Forteresse, Prisonniers
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texteReconnaissance textuelle : De WARSOVIE, le 20 Août 1764.
De WARSOVIE , le 20 Août 1764.
La Confédération formée à Hallicz par le
Comte Potocki , ancien Caſtellan de Lubackow ,
réuni à trois autres jeunes Potocki , a été attaquée
par les Troupes Rufles du Corps du Prince d'Afchow
fous Stonifla wow , Fortereffe appartenante
à la Maifon de Potocki. Les Confédérés , après
un combat très-vif , dans lequel il y a eu des
morts & des bleffés de part & d'autre , ont été
forcés de fe retirer dans la ville . Le Commandant
Ruffe les ayant fommés de fe rendre , ils ont
répondu qu'ils étoient difpofés à capituler , à
condition qu'ils refteroient neutres , qu'ils n'agiroient
point pendant tout le refte de l'interrégne ,
& qu'ils auroient la liberté de fe retirer chacun de
leur côté avec leurs Troupes refpectives . Sur ces
entrefaites le Général Branicki , Starofte de Hallicz
, ayant formé une Confédération contraire
dans ce même Canton , eft furvenu & a prétendu
que le Commandant Ruffe n'avoit pas de pouvoir
pour accorder une pareille Capitulation , & qu'il
n'avoit pas dû traiter avec les Chefs du Parti
contraire ; en confequence , il a annullé tout ce
qui a été fait , & a éxigé que les Confédérés
remiffent la Place & fe rendillent à difcrétion .
Ainfi ces quatre Seigneurs ont été faits priſonniers
avec leurs Troupes , & la Confédération de
Hallicz a été difperfée . On a trouvé dans la For
tereffe quarante-deux pièces de canon .
La Confédération formée à Hallicz par le
Comte Potocki , ancien Caſtellan de Lubackow ,
réuni à trois autres jeunes Potocki , a été attaquée
par les Troupes Rufles du Corps du Prince d'Afchow
fous Stonifla wow , Fortereffe appartenante
à la Maifon de Potocki. Les Confédérés , après
un combat très-vif , dans lequel il y a eu des
morts & des bleffés de part & d'autre , ont été
forcés de fe retirer dans la ville . Le Commandant
Ruffe les ayant fommés de fe rendre , ils ont
répondu qu'ils étoient difpofés à capituler , à
condition qu'ils refteroient neutres , qu'ils n'agiroient
point pendant tout le refte de l'interrégne ,
& qu'ils auroient la liberté de fe retirer chacun de
leur côté avec leurs Troupes refpectives . Sur ces
entrefaites le Général Branicki , Starofte de Hallicz
, ayant formé une Confédération contraire
dans ce même Canton , eft furvenu & a prétendu
que le Commandant Ruffe n'avoit pas de pouvoir
pour accorder une pareille Capitulation , & qu'il
n'avoit pas dû traiter avec les Chefs du Parti
contraire ; en confequence , il a annullé tout ce
qui a été fait , & a éxigé que les Confédérés
remiffent la Place & fe rendillent à difcrétion .
Ainfi ces quatre Seigneurs ont été faits priſonniers
avec leurs Troupes , & la Confédération de
Hallicz a été difperfée . On a trouvé dans la For
tereffe quarante-deux pièces de canon .
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Résumé : De WARSOVIE, le 20 Août 1764.
Le 20 août 1764, à Varsovie, une confédération dirigée par le comte Potocki et réunissant trois autres jeunes Potocki a été attaquée par les troupes russes du prince d'Afchow à Stonifla, une forteresse appartenant à la maison de Potocki. Après un combat intense, les confédérés se sont retirés dans la ville. Le commandant russe leur a ordonné de se rendre, et ils ont accepté de capituler à condition de rester neutres et de pouvoir se retirer avec leurs troupes respectives. Cependant, le général Branicki, staroste de Hallicz, a formé une confédération contraire et a annulé la capitulation, exigeant la reddition des confédérés. Ces derniers ont été faits prisonniers, et la confédération de Hallicz a été dissoute. Quarante-deux pièces de canon ont été trouvées dans la forteresse.
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