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Liste
1
p. 17-29
LETTRE DE MR LE MARQUIS DE L... A MR LE COMTE DE... LIEUTENANT DE ROY A...
Début :
Ayant à vous donner des nouvelles de l'Attaque du Fort, /Sans une maladie qui m'a fait garder le Lit plus de cinq semaines, [...]
Mots clefs :
Place, Marquis, Académie, Comte, Attaque, Assiégeants, Épée, Noblesse, Grenades, Prince de Soubise, Travaux, Monsieur Bernardi, Gentilhommes, Fort
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE DE MR LE MARQUIS DE L... A MR LE COMTE DE... LIEUTENANT DE ROY A...
Ayant à vous donner des nouvelles
de l'Attaque du Fort , qui
a efté faite par les Gentilshommes
de l'Académie de monfienr
Bernardi , je ne puis fatisfaire
mieux vôtre curiofité, qu'en vous
envoyant la Lettre qui fuit.
18 MERCURE
LETTRE
DE ME LE MARQUIS
DE L …….
A M LE COMTE DE ...
LIEVTENANT DE ROY A...
Sav
Ans une maladie qui m'a fait
garder le Lit plus de cinq femaines
, je n'aurois pas tant diferé
àvous rendre comte de ce que vous
m'avez demandé par voftre obligeante
Lettre , touchant l'état de
l'Académie de Monfieur Bernardi,
Neveu de l'illuftre Bernardi que
vous aimiez tant , & à vous faire
le détail de tout ce que j'ay ou an'
Fort que les Gentilshommes de cette
· Académie renouvellent tous les ans
GALANT. ) 19
Pour n'oublier rien de ce que vous
defire fçavoir , j'ay efté plufieurs
fois dans cette Maifon , remarquer
jufques à la moindre chofe , & je
puis vous affurer , Monfieur , que
toute la Nobleffe ne sçauroit affe
reconnoistre l'aplication avec laquelle
les Chefs de l'Académie travaillent
, pour leur donner une éducation
digne de leur naiffance ; &
que Monfieur Bernardi d'à preſent
n'a pas moins hérité des biens defeu
fon Oncle , que de fes beaux talens
dans ce noble Employ . Vous connoiffelle
mérite de Monfieur de Chateauneuf.
C'est le méme qui pendant
vingt-cinq ans a tenu avec
feu Monfieur Bernardi , la plus belle
& la plus, nombreuſe Académie de
l'Europe , avec tant d'ordre , & une
fi belle difcipline , qu'ils ont toujours
eu un applaudiffement univerfel.
Les chofes dans cette Maifon font
20 MERCURE
toujoursfur le mefme pied ; je n'y ay
rien trouvé de changé. L'Equipage
que vousy avez vû , a esté de tout
temps des plus confidérables de
Paris ; mais j'ay efté temoin de l'augmentation
que l'on y a faite depuis
peu de jours d'un grand nombre
de tres- bons chevaux de l'Académie
de Monfieur Coulon , ce qui
rend auiourd'huy cet Equipage plus
beau que iamais , & fans contredit
le meilleur qu'on ait encore vû dans
Aucune Académie . Ainsi , Monfieur,
vous ne devez point balancer à envoyer
Meffieurs vos Enfans profiter
des avantages que l'on a dans celle-
cy, où l'on prend unfoin tout par.
ticulier des moeurs & de la conduite
ieunes Seigneurs. Outre ce bon
ordre pour toutes chofes , la Difci
pline Militaire y eft obfervée par
› faitement dans les Attaques du
Fort dont vous avez entenduparler
do
GALANT.
"
21
& c'est encore un avantage qu'on
ne trouve que dans cette feule Maifon
, Comme vous m'en avez dé
mandé le détail , ie vous diray tout
ce qui s'y eft paffé cette année , n'en
ayant pas perdu un feul iour l'occafion
, afin de vous en pouvoir mieux
informer. l'ay vi toute cette belle
Nobleffe marcher dans les Ruës de
Paris avec un ordre admirable
I'en ay compté plus de foixante &
dix , tous le Moufquetfur l'épaule
parmy lefquels il y en avoit defi
jeunes , qu'àpeine avoient . ils laforce
de le porter. Les deux Commandans
eftoient à la Tefte. Ce font
d'ordinaire les deux Doyens de l'Académie,
Les Tambours & les Hautbois
fuivoient cette belle Troupe.
Quand on fut au Rendez vous ,
l'on commença l'Attaque du Fort
parunefurprife. Le Prince de Muf
feran , Doyen de l'Academie , qui
2.2 MERCURE
eftoit le General de cette petite Armée
, alla reconnoiftre la Place infques
à la Paliffade , & détacha
enfuite le Prince de Soubife & le
Marquis de Sourches , foutenus par
le Comte de Morftein ,, les Marquis
de Bourry , de Lomaria , de Busy,
d'offac , de Sainte Croix , de Galle,
& plufieurs autres , avec ordre de
dreffer des Echelles aux deux côte
de la Porte , pour abatffer le Pont- .
levis , & enfoncer cette Porte avec
un petard. Un autre Détachements
qui avoit à la Tefte le Marquis de
Maridor fuivy du Marquis de
Chabanes , les Comtes de Maldegben
, de Vandeuvre , de Mefgrigny
, de la Roque , de Coffe, Forbeffe,
& autres , defcendit dans le Feffé,
pour efcalader la Place . Le Gros
des Troupes , où étoient les Marquis
de Prélat , & d'Amon , le Comte
de Leoncron , le Baron du Chastel,
GALANT.
23
les Marquis de Moilie , Linard
Gauville , Boyer , Robien , & plufieurs
autres Seigneurs Etrangers
dont ie n'ay puretenir les noms , fuivoit
pour foutenir ces deux Attaques.
Les uns & les autres s'aquitérent
de leur devoir en braves
Gens. Le Pont ayant efté abaiffe,
fans que la Sentinelle s'en fuft apperçuë
, on appliqua le Petard à la
Porte fi à propos , qu'elle fut enfoncée
, mais ceux du Corps de Garde
étant accouru au bruit , eurent affez
de temps pour abatre la Herfe , &
arréterent tout court la vigueur de
ceux qui fe préfentoient l'Epée à
la main pour paffer par la Porte.
A l'autre Attaque , les plus hardis
eftant montez par des Echelles , furent
aperçus , & repouffe . Le Com
mandant de la Place ayant fair
faire divers feux , &ietter de la
paille allumée dans le Foffé pour
24 MERCURE
L'éclairer , donna fi bon ordre à la
defenfe , qu'il obligea les Affaillans
à la retraite ; mais ils ne la firent
que pour infulter la Place avec plus
de vigueur qu'auparavant . Dans
ce deffein on fit trois fauffes Attaques,
& deux veritables. La Place
fut efcaladée par plufieurs endroits,
pendant que le Prince de Soubife,
à la faveur des Grenades qui luy
rendirent l'accés de la Porte libre,
& quifirent retirer ceux qui étoient
derriere la Porte , fit appliquer un
Second Petard àla Helfe , & entra
avec fes Troupes l'Epée à la main
dans la Place. On a obfervé en
toutes ces occafions tout ce qui fe
pratique à l'Attaque d'une Place
emportée dans les formes.
A
On a vú celle- cy en état de défence.
Elle eftoit fraifée & paliffadée.
Ses Dehors étoient de la derniere
propreté, & ily avoit une
Garnifon
GALAN T.
25
Garnifon nombreuſe. D'un autre
cofté , nôtre illuftre Armée n'avoit
rienoubliépour fefortifier dans fon
Camppar des Lignes de Circonvallation
d'une jufteffe achevez. Les
Tentes & les Pavillous dont il étoit
remply , étoient dreffées avec une
fimetrie digne de remarque. On
commençafans brait par l'ouverture
de la Tranchée , apres avoir fait
la Place d' Armes. Tandis que ces
jeunes Héros travailloient à la terre
avec une chaleur incroyable , donnant
des marques de ce qu'ils feauroient
faire un jour , les Ennemis
firent une Sortie fur eux , avec
des Grenadiers , & vinrent combler
& ruiner les Travaux des Affiém
geans ; mais ils furent enfuite vigoureufement
repouffe dans la
Place par un Gros de la Grande
Garde , qui fortit fur eux l'Epée à
la main. On continua depuis à tra
Janvier 1685.
B
26 MERCURE
vailler , nonobftant le feu continuel
qu'onfaifoit de la Place , pour em
pefcher le Travail. le visun Party
de la Campagne , qui vint attaquer
les Lignes , & porter des Fafcines.
pour combler le Foffé. Ony acourut
du Camp avec un Gros , pour les
défendre , mais l'on s'aperçut bientoft
apres , que ce n'eftoit qu'une
fauffe Attaque , pour favorifer un
Convoy qui paffa de l'autre cofté,
fans que ceux du Camp puffent s'opofer
a fon paffage , les Affiégez.
ayant fait une Sortie , pourfoûtenir
ceux qui conduifoient le Convoy.
Vous fçavez que je me fuis trouve
en plufieurs occafions à l'Armée ;
mais je n'ayjamais vû un fi grand
feu , pendant plus de trois heures
que cela dura.
la
La feconde fois , apres que
Garde fat montée , & que chacun
fut pris fes Poftes , l'on commença
GALANT. 27
par avancer les Bateries plus prés
de la Place , afin de ruiner les Paliffades
, & obliger des troupes qui
étoient dans les Dehors , à fe retirer.
Les Affiégez firent une Sortie,
& à la faveur d'une pluye de Grenades
qu'ils jetterent à ceux qui
gardoient des Bateries , ils s'en ren
dirent les maiftres. Ils fe fervirent
de cette Baterie pour ruiner les
Travaux des Affiégeans ; mais elle
fut bien- toft apres regagnée , &
prefque tous ceux qui la gardoient
furent faits Prifonniers , les autres
ayant pris lafuite. Les Affiégezfe
trouvant incommodez d'une Redou
te que les Affiégeans avoient faite,
ils y firent jouer un Fourneau, ayant
fait uneSortie en mefme temps , &
y montérent à l'Affaut , & l'emportérent.
Ils ne la gardèrent pas
long- temps , car les Affiégeans la
regagnérent l'Epée à la main , à la
B 2
28 MERCURE
faveur d'une infinité de Grenades
que l'on y jettoit du Camp , pour en
chaffer ceux qui s'en étoient rendus
maîtres. On rétablit d'abord la
Bréche avec des Fafcines , & l'on
continua à avancer des Travaux,
Ily avoit ce iour - là un nombre infiny
de Gens.
Une autre fois les Affiégeans commencérent
par un Logement qu'ils
firent fur la Contrefcarpe . Ceux de
la Place lefirent fauter bien- toft
apres , par un Fourneau qu'ils firent
iouer. Ce Pofte fut encore regagné,
& le Logement refait ; ce qui obligeales
Affiégez à fe retirer dans la
Demy.lune . Cela donne lieu à la
defcente dans le Foffe . Le Mineur
fut attaché à la Demy- lume. La
Mine fit une Bréche affe confidérable
, & les Affiégeans montérent
à l'Affaut avec une vigueur & une
chaleur digne de ceux que ie vous
GALANT. 29
ay nommez. Apres le Logementfait
fur la Demy line , ceux de la Place
fe rendirent avec une Compofition
honorable. Le Canon a fait grand
bruit depart & d'autre , auffi -bien
que les Bombes , les Carcaffes & les
Grenades. Le Terrainy a efté difpu
tépied àpied , & toûjours avec un
feu continuel.
Toutes ces occafions fe font paffées
en préfence d'un grand nombre de
Perfonnes de qualité ; & les Gens
du Metier ont avoüé qu'on ne pouvoit
rien faire de plus avantageux
pourcette ieune Nobleffe.
de l'Attaque du Fort , qui
a efté faite par les Gentilshommes
de l'Académie de monfienr
Bernardi , je ne puis fatisfaire
mieux vôtre curiofité, qu'en vous
envoyant la Lettre qui fuit.
18 MERCURE
LETTRE
DE ME LE MARQUIS
DE L …….
A M LE COMTE DE ...
LIEVTENANT DE ROY A...
Sav
Ans une maladie qui m'a fait
garder le Lit plus de cinq femaines
, je n'aurois pas tant diferé
àvous rendre comte de ce que vous
m'avez demandé par voftre obligeante
Lettre , touchant l'état de
l'Académie de Monfieur Bernardi,
Neveu de l'illuftre Bernardi que
vous aimiez tant , & à vous faire
le détail de tout ce que j'ay ou an'
Fort que les Gentilshommes de cette
· Académie renouvellent tous les ans
GALANT. ) 19
Pour n'oublier rien de ce que vous
defire fçavoir , j'ay efté plufieurs
fois dans cette Maifon , remarquer
jufques à la moindre chofe , & je
puis vous affurer , Monfieur , que
toute la Nobleffe ne sçauroit affe
reconnoistre l'aplication avec laquelle
les Chefs de l'Académie travaillent
, pour leur donner une éducation
digne de leur naiffance ; &
que Monfieur Bernardi d'à preſent
n'a pas moins hérité des biens defeu
fon Oncle , que de fes beaux talens
dans ce noble Employ . Vous connoiffelle
mérite de Monfieur de Chateauneuf.
C'est le méme qui pendant
vingt-cinq ans a tenu avec
feu Monfieur Bernardi , la plus belle
& la plus, nombreuſe Académie de
l'Europe , avec tant d'ordre , & une
fi belle difcipline , qu'ils ont toujours
eu un applaudiffement univerfel.
Les chofes dans cette Maifon font
20 MERCURE
toujoursfur le mefme pied ; je n'y ay
rien trouvé de changé. L'Equipage
que vousy avez vû , a esté de tout
temps des plus confidérables de
Paris ; mais j'ay efté temoin de l'augmentation
que l'on y a faite depuis
peu de jours d'un grand nombre
de tres- bons chevaux de l'Académie
de Monfieur Coulon , ce qui
rend auiourd'huy cet Equipage plus
beau que iamais , & fans contredit
le meilleur qu'on ait encore vû dans
Aucune Académie . Ainsi , Monfieur,
vous ne devez point balancer à envoyer
Meffieurs vos Enfans profiter
des avantages que l'on a dans celle-
cy, où l'on prend unfoin tout par.
ticulier des moeurs & de la conduite
ieunes Seigneurs. Outre ce bon
ordre pour toutes chofes , la Difci
pline Militaire y eft obfervée par
› faitement dans les Attaques du
Fort dont vous avez entenduparler
do
GALANT.
"
21
& c'est encore un avantage qu'on
ne trouve que dans cette feule Maifon
, Comme vous m'en avez dé
mandé le détail , ie vous diray tout
ce qui s'y eft paffé cette année , n'en
ayant pas perdu un feul iour l'occafion
, afin de vous en pouvoir mieux
informer. l'ay vi toute cette belle
Nobleffe marcher dans les Ruës de
Paris avec un ordre admirable
I'en ay compté plus de foixante &
dix , tous le Moufquetfur l'épaule
parmy lefquels il y en avoit defi
jeunes , qu'àpeine avoient . ils laforce
de le porter. Les deux Commandans
eftoient à la Tefte. Ce font
d'ordinaire les deux Doyens de l'Académie,
Les Tambours & les Hautbois
fuivoient cette belle Troupe.
Quand on fut au Rendez vous ,
l'on commença l'Attaque du Fort
parunefurprife. Le Prince de Muf
feran , Doyen de l'Academie , qui
2.2 MERCURE
eftoit le General de cette petite Armée
, alla reconnoiftre la Place infques
à la Paliffade , & détacha
enfuite le Prince de Soubife & le
Marquis de Sourches , foutenus par
le Comte de Morftein ,, les Marquis
de Bourry , de Lomaria , de Busy,
d'offac , de Sainte Croix , de Galle,
& plufieurs autres , avec ordre de
dreffer des Echelles aux deux côte
de la Porte , pour abatffer le Pont- .
levis , & enfoncer cette Porte avec
un petard. Un autre Détachements
qui avoit à la Tefte le Marquis de
Maridor fuivy du Marquis de
Chabanes , les Comtes de Maldegben
, de Vandeuvre , de Mefgrigny
, de la Roque , de Coffe, Forbeffe,
& autres , defcendit dans le Feffé,
pour efcalader la Place . Le Gros
des Troupes , où étoient les Marquis
de Prélat , & d'Amon , le Comte
de Leoncron , le Baron du Chastel,
GALANT.
23
les Marquis de Moilie , Linard
Gauville , Boyer , Robien , & plufieurs
autres Seigneurs Etrangers
dont ie n'ay puretenir les noms , fuivoit
pour foutenir ces deux Attaques.
Les uns & les autres s'aquitérent
de leur devoir en braves
Gens. Le Pont ayant efté abaiffe,
fans que la Sentinelle s'en fuft apperçuë
, on appliqua le Petard à la
Porte fi à propos , qu'elle fut enfoncée
, mais ceux du Corps de Garde
étant accouru au bruit , eurent affez
de temps pour abatre la Herfe , &
arréterent tout court la vigueur de
ceux qui fe préfentoient l'Epée à
la main pour paffer par la Porte.
A l'autre Attaque , les plus hardis
eftant montez par des Echelles , furent
aperçus , & repouffe . Le Com
mandant de la Place ayant fair
faire divers feux , &ietter de la
paille allumée dans le Foffé pour
24 MERCURE
L'éclairer , donna fi bon ordre à la
defenfe , qu'il obligea les Affaillans
à la retraite ; mais ils ne la firent
que pour infulter la Place avec plus
de vigueur qu'auparavant . Dans
ce deffein on fit trois fauffes Attaques,
& deux veritables. La Place
fut efcaladée par plufieurs endroits,
pendant que le Prince de Soubife,
à la faveur des Grenades qui luy
rendirent l'accés de la Porte libre,
& quifirent retirer ceux qui étoient
derriere la Porte , fit appliquer un
Second Petard àla Helfe , & entra
avec fes Troupes l'Epée à la main
dans la Place. On a obfervé en
toutes ces occafions tout ce qui fe
pratique à l'Attaque d'une Place
emportée dans les formes.
A
On a vú celle- cy en état de défence.
Elle eftoit fraifée & paliffadée.
Ses Dehors étoient de la derniere
propreté, & ily avoit une
Garnifon
GALAN T.
25
Garnifon nombreuſe. D'un autre
cofté , nôtre illuftre Armée n'avoit
rienoubliépour fefortifier dans fon
Camppar des Lignes de Circonvallation
d'une jufteffe achevez. Les
Tentes & les Pavillous dont il étoit
remply , étoient dreffées avec une
fimetrie digne de remarque. On
commençafans brait par l'ouverture
de la Tranchée , apres avoir fait
la Place d' Armes. Tandis que ces
jeunes Héros travailloient à la terre
avec une chaleur incroyable , donnant
des marques de ce qu'ils feauroient
faire un jour , les Ennemis
firent une Sortie fur eux , avec
des Grenadiers , & vinrent combler
& ruiner les Travaux des Affiém
geans ; mais ils furent enfuite vigoureufement
repouffe dans la
Place par un Gros de la Grande
Garde , qui fortit fur eux l'Epée à
la main. On continua depuis à tra
Janvier 1685.
B
26 MERCURE
vailler , nonobftant le feu continuel
qu'onfaifoit de la Place , pour em
pefcher le Travail. le visun Party
de la Campagne , qui vint attaquer
les Lignes , & porter des Fafcines.
pour combler le Foffé. Ony acourut
du Camp avec un Gros , pour les
défendre , mais l'on s'aperçut bientoft
apres , que ce n'eftoit qu'une
fauffe Attaque , pour favorifer un
Convoy qui paffa de l'autre cofté,
fans que ceux du Camp puffent s'opofer
a fon paffage , les Affiégez.
ayant fait une Sortie , pourfoûtenir
ceux qui conduifoient le Convoy.
Vous fçavez que je me fuis trouve
en plufieurs occafions à l'Armée ;
mais je n'ayjamais vû un fi grand
feu , pendant plus de trois heures
que cela dura.
la
La feconde fois , apres que
Garde fat montée , & que chacun
fut pris fes Poftes , l'on commença
GALANT. 27
par avancer les Bateries plus prés
de la Place , afin de ruiner les Paliffades
, & obliger des troupes qui
étoient dans les Dehors , à fe retirer.
Les Affiégez firent une Sortie,
& à la faveur d'une pluye de Grenades
qu'ils jetterent à ceux qui
gardoient des Bateries , ils s'en ren
dirent les maiftres. Ils fe fervirent
de cette Baterie pour ruiner les
Travaux des Affiégeans ; mais elle
fut bien- toft apres regagnée , &
prefque tous ceux qui la gardoient
furent faits Prifonniers , les autres
ayant pris lafuite. Les Affiégezfe
trouvant incommodez d'une Redou
te que les Affiégeans avoient faite,
ils y firent jouer un Fourneau, ayant
fait uneSortie en mefme temps , &
y montérent à l'Affaut , & l'emportérent.
Ils ne la gardèrent pas
long- temps , car les Affiégeans la
regagnérent l'Epée à la main , à la
B 2
28 MERCURE
faveur d'une infinité de Grenades
que l'on y jettoit du Camp , pour en
chaffer ceux qui s'en étoient rendus
maîtres. On rétablit d'abord la
Bréche avec des Fafcines , & l'on
continua à avancer des Travaux,
Ily avoit ce iour - là un nombre infiny
de Gens.
Une autre fois les Affiégeans commencérent
par un Logement qu'ils
firent fur la Contrefcarpe . Ceux de
la Place lefirent fauter bien- toft
apres , par un Fourneau qu'ils firent
iouer. Ce Pofte fut encore regagné,
& le Logement refait ; ce qui obligeales
Affiégez à fe retirer dans la
Demy.lune . Cela donne lieu à la
defcente dans le Foffe . Le Mineur
fut attaché à la Demy- lume. La
Mine fit une Bréche affe confidérable
, & les Affiégeans montérent
à l'Affaut avec une vigueur & une
chaleur digne de ceux que ie vous
GALANT. 29
ay nommez. Apres le Logementfait
fur la Demy line , ceux de la Place
fe rendirent avec une Compofition
honorable. Le Canon a fait grand
bruit depart & d'autre , auffi -bien
que les Bombes , les Carcaffes & les
Grenades. Le Terrainy a efté difpu
tépied àpied , & toûjours avec un
feu continuel.
Toutes ces occafions fe font paffées
en préfence d'un grand nombre de
Perfonnes de qualité ; & les Gens
du Metier ont avoüé qu'on ne pouvoit
rien faire de plus avantageux
pourcette ieune Nobleffe.
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Résumé : LETTRE DE MR LE MARQUIS DE L... A MR LE COMTE DE... LIEUTENANT DE ROY A...
Le marquis de L... adresse une lettre au comte de..., lieutenant du roi, pour répondre à sa demande concernant l'état de l'Académie de Monsieur Bernardi et les détails de l'attaque annuelle du Fort. Après une maladie de cinq semaines, le marquis décrit l'attaque du Fort, organisée par les gentilshommes de l'Académie. Il souligne l'application et le mérite des chefs de l'Académie, notamment Monsieur de Chateauneuf, qui a collaboré avec feu Monsieur Bernardi pour maintenir l'une des académies les plus prestigieuses d'Europe. Les préparatifs de l'attaque sont minutieusement décrits, ainsi que les participants et les différentes phases de l'assaut. Les jeunes gentilshommes ont démontré discipline et bravoure durant l'événement. De nombreuses personnes de qualité ont observé l'attaque, reconnaissant la valeur éducative et militaire de cet exercice.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 87-92
Morts, [titre d'après la table]
Début :
Je ne vous parlay point la derniere fois de la mort de Messire [...]
Mots clefs :
Décès, Président du conseil, Intendant, Charge, Majesté, Église, Veuve, Comte, Mère, Seigneur, Abbé commandataire, Aumônier du roi, Érudition
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Morts, [titre d'après la table]
Je ne vous parlay point la
derniere fois de la mort de
Meffire André Scarron , Préfident
du Confeil Souverain
d'Artois , parce que je n'en
avois point encore reçû la
nouvelle . Cette mort eft arrivée
le 25. Decembre dernier
. Son rare mérite & fes
belles qualitez avoient obligé
Sa Majefté de le tirer du Parlement
de Metz en 1660. pour
kuy donner à Arras une Char88
MERCURE
ge plus honorable
, qu'il a
exercée
pendant
vingt- quatre
ans avec beaucoup
d'éclat
& de gloire. Il eft mort
dans fa foixante
& feiziéme
année , laiſſant M' fon Fils,
digne Succeffeur
de fa Charge
, dont le Roy luy avoit
donné la furvivance
. Ila efté
enterré dans l'Eglife des Peres
Récolets
d'Arras , où fix Huiffiers
du Confeil
en Robes
portérent
le Corps . Quarante
Pauvres
, reveſtus
de Noir,
tenant chacun un Flambeau
,
marchoient
à la tefte du Convoy.
Meffieurs
du Confeil y
GALANT. 89
affifterent, ainfi que le Corps
de Ville , & ceux de Juftice .
M' l'Evefque d'Arras eftoit
en l'Eglife à cofté de l'Autel,,
& quelques Abbez & Eccléfiaftiques
de marque . M
Chauvelin , Intendant de Picardie
& d'Artois fe trouva
auffi à cette lugubre Cerémonic
.
J'ay à vous apprendre trois
autres morts , arrivées icy
depuis peu de jours . La premiere
eft celle de Dame
Bonne Royer , Veuve de :
Meffire Jean Louis de Fau--
con , Seigneur de Rys, Mar
Février 1685. Hi
90 MERCURE
quis de Charleval , Comte de
Bacqueville,Confeiller d'Etat
Ordinaire , & Premier Pré
fident au Parlement de Normandie.
C'eftoit une Dame
d'une grande pieté , & que
fa vertu , & fes manieres pleines
de l'honncfteré la plus.
engageante, ont toûjours rendue
tres eftimable . Elle eftoit
Mere de M ' de Rys , Intendant
à Bordeaux , & de Madame
de Bernieres , Femme,
de M' de Bernieres , Confeiller
au Parlement de Paris .
Elle eft morte le s . de ce
mois.
$
1
GALANT. 91
Au-
Y
Meffire Claude du Val,
Seigneur de Mandre
mônier du Roy, ancien Abbé
de S. Pierre de Selincourt,
eft mort environ dans le
mefme temps aufli - bien
que Meffire Pierre Bourdelot
, Abbé Commendataire
.de S. Martin de Maffay , &
Médecin Ordinaire de Monfieur
le Prince . C'eftoit un
Homme qui avoit beaucoup
d'érudition , & des connoiffances
particulieres dans la
Médecine . Il y avoit chez
ly tous les Mardis des Conférences
publiques , où fe
·
Hi
ij
92 MERCURE
trouvoient beaucoup de Sçavans
. On y agitoit toute forte
de matieres.
derniere fois de la mort de
Meffire André Scarron , Préfident
du Confeil Souverain
d'Artois , parce que je n'en
avois point encore reçû la
nouvelle . Cette mort eft arrivée
le 25. Decembre dernier
. Son rare mérite & fes
belles qualitez avoient obligé
Sa Majefté de le tirer du Parlement
de Metz en 1660. pour
kuy donner à Arras une Char88
MERCURE
ge plus honorable
, qu'il a
exercée
pendant
vingt- quatre
ans avec beaucoup
d'éclat
& de gloire. Il eft mort
dans fa foixante
& feiziéme
année , laiſſant M' fon Fils,
digne Succeffeur
de fa Charge
, dont le Roy luy avoit
donné la furvivance
. Ila efté
enterré dans l'Eglife des Peres
Récolets
d'Arras , où fix Huiffiers
du Confeil
en Robes
portérent
le Corps . Quarante
Pauvres
, reveſtus
de Noir,
tenant chacun un Flambeau
,
marchoient
à la tefte du Convoy.
Meffieurs
du Confeil y
GALANT. 89
affifterent, ainfi que le Corps
de Ville , & ceux de Juftice .
M' l'Evefque d'Arras eftoit
en l'Eglife à cofté de l'Autel,,
& quelques Abbez & Eccléfiaftiques
de marque . M
Chauvelin , Intendant de Picardie
& d'Artois fe trouva
auffi à cette lugubre Cerémonic
.
J'ay à vous apprendre trois
autres morts , arrivées icy
depuis peu de jours . La premiere
eft celle de Dame
Bonne Royer , Veuve de :
Meffire Jean Louis de Fau--
con , Seigneur de Rys, Mar
Février 1685. Hi
90 MERCURE
quis de Charleval , Comte de
Bacqueville,Confeiller d'Etat
Ordinaire , & Premier Pré
fident au Parlement de Normandie.
C'eftoit une Dame
d'une grande pieté , & que
fa vertu , & fes manieres pleines
de l'honncfteré la plus.
engageante, ont toûjours rendue
tres eftimable . Elle eftoit
Mere de M ' de Rys , Intendant
à Bordeaux , & de Madame
de Bernieres , Femme,
de M' de Bernieres , Confeiller
au Parlement de Paris .
Elle eft morte le s . de ce
mois.
$
1
GALANT. 91
Au-
Y
Meffire Claude du Val,
Seigneur de Mandre
mônier du Roy, ancien Abbé
de S. Pierre de Selincourt,
eft mort environ dans le
mefme temps aufli - bien
que Meffire Pierre Bourdelot
, Abbé Commendataire
.de S. Martin de Maffay , &
Médecin Ordinaire de Monfieur
le Prince . C'eftoit un
Homme qui avoit beaucoup
d'érudition , & des connoiffances
particulieres dans la
Médecine . Il y avoit chez
ly tous les Mardis des Conférences
publiques , où fe
·
Hi
ij
92 MERCURE
trouvoient beaucoup de Sçavans
. On y agitoit toute forte
de matieres.
Fermer
Résumé : Morts, [titre d'après la table]
Le texte rapporte plusieurs décès récents. Meffire André Scarron, Président du Conseil Souverain d'Artois, est décédé le 25 décembre à l'âge de soixante-seize ans. Nommé à Arras en 1660, il avait succédé à une fonction au Parlement de Metz et exercé sa charge pendant vingt-quatre ans. Ses funérailles ont eu lieu dans l'église des Pères Récollets d'Arras. Dame Bonne Royer, veuve de Meffire Jean Louis de Faucon, Seigneur de Rys, est décédée en février 1685. Elle était connue pour sa piété et sa vertu et était mère de Meffire de Rys, Intendant à Bordeaux, et de Madame de Bernieres. Meffire Claude du Val, Seigneur de Mandre, moine du Roy et ancien Abbé de S. Pierre de Selincourt, est également décédé. Enfin, Meffire Pierre Bourdelot, Abbé Commendataire de S. Martin de Massay et Médecin Ordinaire du Prince, est mort. Réputé pour son érudition et ses connaissances en médecine, il organisait des conférences publiques chez lui tous les mardis.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 179-188
Histoire des malheurs du Charles II. Roy d'Angleterre, [titre d'après la table]
Début :
La mort du Roy d'Angleterre est un de ces grands évènemens, [...]
Mots clefs :
Angleterre, Prince, Comte, Marquis, Rebelles, Écosse, Armes, Prince de Galles, Irlande
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Histoire des malheurs du Charles II. Roy d'Angleterre, [titre d'après la table]
La mort du Roy d'Angle
terre eft un de ces grands :
événemens , dont tout le
monde eft inftruit fi- toft
180 MERCURE
qu'ils font arrivez . Ainfi , Madame
, je ne doute point que
vous ne l'ayez apprife prefque
en mefme temps qu'on
l'a fceue icy. Avant que de
vous en faire aucun détail,
je croy qu'il fera bon de vous.
dire en peu de mots , quelle
a efté la vie de ce Prince . Sa
fortune eft finguliere , & la.
maniére dont il est monté au
Trône apres les grands perils
qu'il a effuyez , merite bien
qu'on s'en rafraichiffe la mémoire.
Charles II . du nom,
Roy d'Angleterre , d'Irlande
& d'Ecoffe , né le 29. May
GALANT. 181
1630. étoit Fils de Charles I.
& d'Henriette
de France ,
Fille de Henry le Grand , &
de Marie de Medicis . Il eut
pour Parrains le Roy Louis
XIII. & le Prince Electeur
Palatin , repreſentez par le
Duc de Lenox , & le Marquis .
Hamilton , & pour Marraine
Anne d'Autriche , Reyne de
France, dont Madame la Ducheffe
de Richemont tenoit
la place. Il fut enfuite procla
mé Roy d'Angleterre , d'E
coffe & d'Irlande , Prince de
Galles , Duc de Cornuaille &
Comte de Cheſter , avec les
182 MERCURE
ceremonics accoûtumées.
Le foin de fon éducation fut
confié au Comte de Nevvcaſtle
, & à peine eut- il receu
les premieres impreffions
des Leçons qu'il luy donnoit,
que l'envie & l'ambition
commencerent à exciter les
Soûlevemens , dont les fuites
cnt efté fi funeftes . Le Prince
élevé dans ces defordres ,
ne refpiroit que la Guerre , &
le Roy fon Pere quiregardoit
l'ardeur naturelle de fon Fils,
comme un fecours contre
l'audace de fes Sujets , ne négligea
rien pour la cultiver.
GALANT. 183
que
Il n'avoit point encore atteint
fà feiziéme année , lors
qu'il foûtint un Party , qui
étoit beaucoup plus fort
le fien , & que commandoit
Farfax. lly fit des actions
ſurprenantes , mais ſa valeur
fut contrainte de céder au
nombre , & il ſe trouva réduit
à la néceffité de la retraite,
ce qu'il fit avec beaucoup de
prudence. Le trouble ayant
augmenté , & les forces du
Roy diminüant , le Prince fe
rendit à la Cour de France
aupres de la Reyne fa Mere,
dans l'efperance d'y agir uti
184 MERCURE
lement , pour obtenir des ſe-
Cours étrangers contre les
Rebelles. Il écrivit delà à
tous les Princes de l'Europe,
qui étoient Alliez de la Couronne
d'Angleterre
, mais
n'ayat pû obtenir affez promptement
ce qu'il demandoit,
le Roy qui demeuroit fans
Armées , fut obligé de s'aller
jetter dans les bras des Ecoffois
, fes plus mortels Ennemis
. Ils le receurent avec
toutes les marques d'un zéle
fincere , & les promefles pleines
d'artifice dont ils fe fervirent
, pour luy faire croire
GALANT. 18
qu'ils entroient veritablement
dans fes interefts , l'engagerent
à faire quitter les
Armes au Marquis de Montroffe
. C'etoit un Homme
inviolablement attaché à fon
Party , & qui avec plus de
valeur que de forces , avoit
réduit le Marquis Dargil ,,
Chef des Ecoffois rebelles,
à luy ceder deux fois la Cam--
pagne . Il avoit gagné plufieurs
Batailles , pris Edimbourg
, & fignalé fa fidélité :
par des actions qui avoient :
intimidé les Ecoffois. Il auroit
pouffé fes progrés pluss
Fevrier 1685.
Q
186 MERCURE
loin , fi la bonté du Roy
trop facile , ne l'euft obligé
à les arrefter. Il eut befoin
des ordres les plus preffans
pour obeïr , parce qu'il prévoyoit
une partie des malheurs
qu'on devoit craindre ;
mais enfin fon zéle fut inutile.
Il falut qu'il
congédiaft
fes Troupes , & il fortit déguiſé
de l'Ecoffe , délivrant
fes Ennemis des terreurs que
fa valeur leur donnoit . A peine
le virent ils éloigné , que
les Perfides , fur la foy def
quels le Roy s'eftoit confié,
le trahirent lâchement. Ils
GALANT. 187
le livrérent aux Rebelles
d'Angleterre ; & le jeune
Prince de Galles ayant appris
ces indignes trairemens,
réfolut de périr glorieufement
en tâchant de luy procurer
la liberté par les Armes.
Il envoya auffi toft Barclay
qui eftoit auprés de luy , afin
d'entrer s'il pouvoit en quelque
négotiation avec l'Armée
, mais Cromvvel & Farfax
s'eftans rendus maistres
des efprits , les Officiers ne
voulurent point l'écouter, &
fon Voyage n'eut aucun fuccés
. Le Comte de Kent fut
Qij
188 MERCURE
le feul qui pendant ces troubles
ofa marquer fa fidélité
en prenant les armes pour
le Roy. D'un autre cofté,
Keme follicité par Batten ,
qui avoit efté auparavant
Vice-Amiral du Comte de
Warvvic , agit avec tant d'adreffe
, qu'il mit dans les intéreſts
de Sa Majefté plufieurs
Capitaines de Vaiffeaux , qui
eftoient aux Dunes à l'embouchure
de laTamife . Quelque
temps auparavant , le
Duc d'York qui étoit gardé à
Londres dans le Palais de S. James
, réfolur de fe fauver.
terre eft un de ces grands :
événemens , dont tout le
monde eft inftruit fi- toft
180 MERCURE
qu'ils font arrivez . Ainfi , Madame
, je ne doute point que
vous ne l'ayez apprife prefque
en mefme temps qu'on
l'a fceue icy. Avant que de
vous en faire aucun détail,
je croy qu'il fera bon de vous.
dire en peu de mots , quelle
a efté la vie de ce Prince . Sa
fortune eft finguliere , & la.
maniére dont il est monté au
Trône apres les grands perils
qu'il a effuyez , merite bien
qu'on s'en rafraichiffe la mémoire.
Charles II . du nom,
Roy d'Angleterre , d'Irlande
& d'Ecoffe , né le 29. May
GALANT. 181
1630. étoit Fils de Charles I.
& d'Henriette
de France ,
Fille de Henry le Grand , &
de Marie de Medicis . Il eut
pour Parrains le Roy Louis
XIII. & le Prince Electeur
Palatin , repreſentez par le
Duc de Lenox , & le Marquis .
Hamilton , & pour Marraine
Anne d'Autriche , Reyne de
France, dont Madame la Ducheffe
de Richemont tenoit
la place. Il fut enfuite procla
mé Roy d'Angleterre , d'E
coffe & d'Irlande , Prince de
Galles , Duc de Cornuaille &
Comte de Cheſter , avec les
182 MERCURE
ceremonics accoûtumées.
Le foin de fon éducation fut
confié au Comte de Nevvcaſtle
, & à peine eut- il receu
les premieres impreffions
des Leçons qu'il luy donnoit,
que l'envie & l'ambition
commencerent à exciter les
Soûlevemens , dont les fuites
cnt efté fi funeftes . Le Prince
élevé dans ces defordres ,
ne refpiroit que la Guerre , &
le Roy fon Pere quiregardoit
l'ardeur naturelle de fon Fils,
comme un fecours contre
l'audace de fes Sujets , ne négligea
rien pour la cultiver.
GALANT. 183
que
Il n'avoit point encore atteint
fà feiziéme année , lors
qu'il foûtint un Party , qui
étoit beaucoup plus fort
le fien , & que commandoit
Farfax. lly fit des actions
ſurprenantes , mais ſa valeur
fut contrainte de céder au
nombre , & il ſe trouva réduit
à la néceffité de la retraite,
ce qu'il fit avec beaucoup de
prudence. Le trouble ayant
augmenté , & les forces du
Roy diminüant , le Prince fe
rendit à la Cour de France
aupres de la Reyne fa Mere,
dans l'efperance d'y agir uti
184 MERCURE
lement , pour obtenir des ſe-
Cours étrangers contre les
Rebelles. Il écrivit delà à
tous les Princes de l'Europe,
qui étoient Alliez de la Couronne
d'Angleterre
, mais
n'ayat pû obtenir affez promptement
ce qu'il demandoit,
le Roy qui demeuroit fans
Armées , fut obligé de s'aller
jetter dans les bras des Ecoffois
, fes plus mortels Ennemis
. Ils le receurent avec
toutes les marques d'un zéle
fincere , & les promefles pleines
d'artifice dont ils fe fervirent
, pour luy faire croire
GALANT. 18
qu'ils entroient veritablement
dans fes interefts , l'engagerent
à faire quitter les
Armes au Marquis de Montroffe
. C'etoit un Homme
inviolablement attaché à fon
Party , & qui avec plus de
valeur que de forces , avoit
réduit le Marquis Dargil ,,
Chef des Ecoffois rebelles,
à luy ceder deux fois la Cam--
pagne . Il avoit gagné plufieurs
Batailles , pris Edimbourg
, & fignalé fa fidélité :
par des actions qui avoient :
intimidé les Ecoffois. Il auroit
pouffé fes progrés pluss
Fevrier 1685.
Q
186 MERCURE
loin , fi la bonté du Roy
trop facile , ne l'euft obligé
à les arrefter. Il eut befoin
des ordres les plus preffans
pour obeïr , parce qu'il prévoyoit
une partie des malheurs
qu'on devoit craindre ;
mais enfin fon zéle fut inutile.
Il falut qu'il
congédiaft
fes Troupes , & il fortit déguiſé
de l'Ecoffe , délivrant
fes Ennemis des terreurs que
fa valeur leur donnoit . A peine
le virent ils éloigné , que
les Perfides , fur la foy def
quels le Roy s'eftoit confié,
le trahirent lâchement. Ils
GALANT. 187
le livrérent aux Rebelles
d'Angleterre ; & le jeune
Prince de Galles ayant appris
ces indignes trairemens,
réfolut de périr glorieufement
en tâchant de luy procurer
la liberté par les Armes.
Il envoya auffi toft Barclay
qui eftoit auprés de luy , afin
d'entrer s'il pouvoit en quelque
négotiation avec l'Armée
, mais Cromvvel & Farfax
s'eftans rendus maistres
des efprits , les Officiers ne
voulurent point l'écouter, &
fon Voyage n'eut aucun fuccés
. Le Comte de Kent fut
Qij
188 MERCURE
le feul qui pendant ces troubles
ofa marquer fa fidélité
en prenant les armes pour
le Roy. D'un autre cofté,
Keme follicité par Batten ,
qui avoit efté auparavant
Vice-Amiral du Comte de
Warvvic , agit avec tant d'adreffe
, qu'il mit dans les intéreſts
de Sa Majefté plufieurs
Capitaines de Vaiffeaux , qui
eftoient aux Dunes à l'embouchure
de laTamife . Quelque
temps auparavant , le
Duc d'York qui étoit gardé à
Londres dans le Palais de S. James
, réfolur de fe fauver.
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Résumé : Histoire des malheurs du Charles II. Roy d'Angleterre, [titre d'après la table]
Le texte relate la mort du roi d'Angleterre et les événements marquants de la vie de Charles II. La nouvelle de la mort du roi s'est rapidement répandue, incitant l'auteur à rappeler la vie singulière de Charles II, roi d'Angleterre, d'Irlande et d'Écosse, né le 29 mai 1630. Fils de Charles I et d'Henriette de France, Charles II fut élevé par le Comte de Newcastle et manifesta très tôt un intérêt pour la guerre. À seize ans, il combattit contre les forces de Farfax mais dut se retirer. Face à l'aggravation des troubles et à la diminution des forces royales, Charles se rendit en France auprès de sa mère pour solliciter l'aide des cours étrangères. Ne recevant pas le soutien espéré, il se réfugia en Écosse, où il fut trahi et livré aux rebelles anglais. Son fils, le Prince de Galles, tenta sans succès de le libérer. Pendant ces troubles, quelques fidèles, comme le Comte de Kent et Keme, restèrent loyaux au roi. Le Duc d'York, quant à lui, tenta de s'échapper de sa garde à Londres.
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4
p. 188-262
Mort du Roy d'Angleterre, [titre d'après la table]
Début :
Ce jeune Prince s'estant fait donner un jour la Clef [...]
Mots clefs :
Roi, Prince, Comte, Angleterre, Duc, Troupes, Colonnel, Peuple, Matelot, Ennemis, Noblesse, Vaisseaux, Gentilhomme, Fidélité, Obstacles, Seigneur, Commissaires, Habits, Royaume, Rivière, Général, Crainte, Avantage, Succès, Décès, Héritiers, Reine
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mort du Roy d'Angleterre, [titre d'après la table]
Ce
GALANT. 189
jeune Prince s'eftant fait donner
un jour la Clef du Parc ,
fous prétexte de chaffer, fut
affez heureux pour ſe dérober
de ceux qui l'obfervoient ; &
fe déguifant avec une Perruque
noire , & un emplaître
fur l'oeil , il fortit du Parc , &
entra dans un Carroffe , qui
le porta juſqu'au bord de la
Tamife. Une Gondole l'y
ayant reçû , il fe rendit en
un lieu où il prit un habit
de Femme. Il revint de là
dans fa Gondole , qui le rendit
à Grenvic fans aucun
obftacle ; mais en ce lieu-là)
190 MERCURE
celuy qui le conduifoit refufa
de paffer outre , non feulement
à cause d'un vent contraire
qui venoit de s'élever,
mais la crainte de conpar
tribuer à la fuite de quelque
Perfonne confidérable
, ce
qui eſtoit dangereux en ce
temps - là . Malheureuſement
pour le jeune Prince , for
Cordon bleu qu'il avoit mal
caché en ſe déguiſant
, parut
aux yeux de ce Marinier, qui
plus intelligent que plufieurs.
de fa profeffion , fçachant
qu'une marque fi illuftre ne
fe donne en Angleterre
qu
GALANTA 191
aux Perfonnes du premier
rang , comprit le miftere , &
ne douta point que ce ne fuft
le Duc d'York qu'il menoit.
L'embarras où le met cette
rencontre, le fit s'obftiner à
n'avancer plus. Banfila qui
accompagnoit le Prince , defefperé
du retardement,
conjura le Matelot de paſſer
promptement la Dame qui
étoit dans fa Gondole , parce
qu'elle avoit des affaires trespreffantes.
Il luy répondit
d'un ton fèvere , qu'il falloit
que cette Dame cuft des privileges
bien particuliers, pour
192 MERCURE
avoir receu l'Ordre de la Jar
retiére, qu'on ne donne point
aux Femmes . Le Prince qui
avoit l'ame intrépide , & les
maniéres perfuadantes , prit
une réſolution digne de lay.
Il tendit la main au Matelot,.
& avec une douceur qui auroit
gagné les moins traitables
; le fuis le Duc d'York,
luy dit- il . Tu peux tout pour
ma fortune , & peut- eftre pourma
vie . C'est à toy à voirſi tu
veux me fervir fidellement. Ce
peu de mots defarma le Matelot.
Il luy demanda pardon
de fa réfiftance ,& commença
1
GALANT:
1932
a ramer avec tant de vigueur,
qu'il fit arriver le Prince
à Tibury , plûtoft qu'il ne
l'avoit efperé. Il y trouva un
Vaiffeau Hollandois qui l'ac- ,
tendoit , & qui le porta à Mi-.
delbourg. Son evaſion inquiéta
les Etats. Il arriva des
defordres en Ecoffe. Les
Communes du Comté de
Kent
prirent les armes , pour
demander la liberté de leur
Roy. La
Nobleffe
appuya
leurs juftes
prétentions , & la
plupart
des
Vaiffeaux
qui
étoient aux Dunes , fe déclara
pour les mefmes interefts,
Fevrier 1685. R
194
MERCURE
Ce foûlevement
donna lieu à
une entrepriſe affez furprenante.
Un jeune Homme
appellé Corneille Evans , né
dans Marſeille , d'un Pere
forty du Païs de Galles , arriva
dans la Ville de Sandvvic ,
couvert d'un habit fi déchiré,
qu'étant pris par tout pour
un Homme de néant , il eut
de la peine à trouver où ſe
loger. Enfin , ayant eſté receu
dans une Maifon de peu
d'apparence
, où il fe fit affez
bien traiter , il tira fon Hofte
à part , & luy dit que pour re
connoiftre l'honnefteré
qu'il
•
GALANT. 195
yenoit d'avoir pour luy , il
vouloit luy confier un fecret
dont il pouvoit attendre de
grands avantages , s'il en fçavoit
bien ufer. Il ajoûta qu'il
étoit le Prince de Galles ; qu'il
s'étoit mis en l'état où il le
voyoit , pour le dérober aux
yeux de ſes Ennemis ; qu'
ayant appris que les Peuples
de cette Province fe foûlevoient,
il prétendoit leur donner
courage , & commencer
avec eux le fecours qu'ils devoient
au Roy fon Pere . Cet
Homme crédule fe laiffa perfuader
, & tout glorieux d'a-
Rij
196 MERCURE
voir chez luy le Fils de fort
Roy , il alla fur l'heure avertir
le Maire , qui étant venu rendre
fes refpects à ce faux
Prince , le fit loger dans la
plus belle Maifon de la Ville.
Chacun le traita de la meſme
forte. On luy donna des Gardes
avec ordre de fe tenir découverts
en fa prefence , & le
bruit de fon arrivée s'étant
répandu dans tout le Comté
de Kent , grand nombre de
Gentilshommes, & de Dames
mefme , vinrent luy offrir
leurs biens , pour le fecourir
dans fon entrepriſe. Ceux qui
GALANT. 197
s'étoient foûlevez , députe
rent auffi-toft pour le prier
de fe vouloir montrer à leur
tefte , & il auroit joué plus
long- temps ce perfonnage , fi
le Chevalier Dishinton que
la Reyne & le Prince de Gal
les avoient envoyé en Angleterre
, pour s'informer du veritable
état des affaires , n'euft
fait connoiftre la fourbe. Il fe
diſpoſoit à retourner en France
, lors qu'il apprit ce qui fe
paffoit à Sandvvic. Il y courut
, & convainquit l'Impo
fteur, qui fut arrefté, conduit
à Cantorbery , & delà à Lon
Rij
198 MERCURE
dres , d'où il ſe fauva quelques
mois apres . On n'en a
point entendu parler depuis.
Les Vaiffeaux des Dunes
que Farfax tâcha inutilement
de féduire
par Les offres , étant
paffez en Hollande , ceux qui
les
commandoient envoyerent
avertir le Prince de Galles
, qu'ils ne s'étoient fouftraits
de l'obeïffance des
Etats , que pour recevoir ſes
ordres. Il partit de S. Germain
en Laye , où il avoit
toûjoursdemeurédepuis qu'il
étoit forty d'Angleterre , &
s'étant embarqué à Calais acGALANT.
199
compagné du Prince Robert,
& d'un grand nombre de Nobleffe
Angloife & Ecoffoife,
que la perfecution des Ennemis
du Roy avoit contrainte
de fe retirer en France , il
pafla heureuſement en Hol
lande au commencement de
Juillet en 1648. Apres avoir
loué la fidelité des Officicrs
qui perfiftoient courageule
ment dans le deffein de perir
, s'il le falloit , pour s'op
pofer aux Rebelles , il monta
fur l'Amiral , fit courir un
Manifefte , par lequel il dé
clara qu'il ne prenoit les ar
R iiij
200 MERCURE
mes que pour maintenir la
Religion dans la pureté de
fes Inftructions
, pour donner
la Paix aux trois Royaumes
,en
remettant les Loix dans leur
force, & pour delivrer le Roy
fon Pere d'une tyrannique
oppreffion, & enfuite il alla fe
prefenter devant Yarmouth,
demandant que les Portes de
la Ville luy fuffent ouvertes.
Les Magiftrats réponditent
qu'ils n'en eftoient pas les
maiftres , & leur obftination
l'emporta fur l'inclination du.
Peuple qui envoya des ta
fraîchiffemens
à ce Prince.
piz
GALANT. 201
Il fe retira vers les Dunes
avec fa Flote , & n'ayant reçû
aucune réponſe favorable des
Lettres qu'il avoit écrites à
Londres fur fon Manifefte,
il alla chercher le Comte de
Warvvic , qui eftoit en mer
avec feizeVaiffeaux , & que les
Etats avoient étably Grand
Amiral du Royaume . Le
Comte évita les occafions.
d'en venir aux mains ; & la
nuit les ayant obligez de
jetter l'ancre à une lieue l'un
de l'autre, le Prince luy manda
par un Officier , qu'eftant
en perfonne fur les Vaiffeaux.
202 MERCURE
qu'il avoit veus , il luy commandoit
de le venir joindre
pour fervir le Roy , & de
mettre Pavillon bas quand il
leveroit les ancres . Le Comte
luy répondit qu'il ne reconnoiffoit
que les Etats pour
fes Maiftres , & qu'il ne devoit
attendre de luy aucune
foûmiflion . Le Prince irritée
de cet orgueil , fit mettre à
la voile fi- toft qu'il fut jour,
& alla droit à Warvic , dont
il trouva la Flote augmentée
de douze Vaiffeaux fortis du
Port de Porthmouth ; ce qui
ne l'euft pas empefché de le
GALANT. 203
combatre , fi une tempefte
qui dura vingt- quatre heures
n'euft féparé fi bien les deux
Flotes, que le Prince fut contraint
de relâcher en Hollande.
Tout ce qu'il pouvoit
tenter pour la liberté
du Roy fon Pere , eftant
ainfi renversé , & tout luy
manquant pour la fubfiftance
de fon Armée , il ne fe
remit point en mer, & atendit
le fuccés de quelques
Traitez d'Accommodement
dont on parloit ; mais apres
des Procédures qu'on ne
peut entendre fans horreur,
204 MERCURE
le Roy forcé de comparoiftre
devant fes Sujets , fut con
damné, comme Traître , Ty
ran , & Perturbateur du repos
public , à avoir la tefte
coupée ; & cet effroyable
Arreft fut exécuté le 9. Fe
vrier 1649. à la porte de fon
Palais , dans la meſme Ville
où il eftoit né , & au milieu
d'un Peuple dont fa bonté
luy devoit avoir gagné tous
les coeurs.
Le Prince ayant appris
cette funefte nouvelle à la
Haye, fçût en mefme temps
que les Etats avoient déclaré
GALANT 205
qu'on aboliroit le nom de
Roy , & que le Royaume
prendroit celuy de République.
On ne laiffa pas , malgré
ces défenſes, de voir des
Placards affichez dans toutes
les Villes d'Angleterre,
avec ces mots , CHARLES
STUART DEUXIEME
DU NOM , ROY D'ANGLETERRE,
D'IRLANDE
ET D'ECOSSE. Il y eut auffi
une fort grande conteftation
à
Londres pour les intérefts
du jeune Roy. Les Etats
qui en avoient fupprimé le
tître , ne pûrent obtenir du
206 MERCURE
Maire qu'il fift la Publica
tion de cette Ordonnance.
On l'interdit de fa Charge;
& celuy qui la remplit s'étant
diſpoſé à obeïr aux Etats,
le Peuple courut aux armes ,
en criant de toutes parts,
Vive Charles II. Le tumulte
euft efté loin , fi Cromvvel,
qui avoit prévû ce zéle des
Habitans, n'euftfait paroiftre
quatre Compagnies de Cavalerie
, qui diffipérent la
foule , & qui couvrant le
nouveau Maire , luy donnérent
le temps de publier l'injuſte
Ordonnance qui avoit
•
GALANT. 207
efté faite.
Pendant ce temps
le Prince
cherchoit à vanger
l'exécrable
Parricide qui venoit
d'eſtre commis. Il fçût
que les Ecoffois l'avoient fait
proclamer
Roy dans la grande
Place
d'Edimbourg
avec
toutes les formalitez
néceffaires
à rendre cette reconnoiffance
autentique; & comme
il avoit une haute eftime
pour la vertu du Marquis de
Montroffe
, voulant fe fervir
de luy pour remonter
fur le
Trône , il l'envoya
chercher
jufqu'en
Allemagne
, où il
s'eftoit engagé au ſervice de
208 MERCURE
l'Empereur. Montroffe ne
balança point fur ce qu'il
avoit à faire. Il fupplia l'Empereur
qui l'avoit fait Grand
Maréchal de l'Empire , de
trouver bon qu'il allaft fervir
fon Prince. L'Empereur loüa
fa fidélité. Il luy permit de
lever des Troupes ; & les
Roys de Suéde , & de Dan..
nemark , luy ayant donné
la mefme liberté dans leurs
Etats , il fit paffer fes premieres
Levées aux Ifles Or
cades , fous les ordres du
Comte de Kennoüil , l'affûrant
qu'il ne manqueroit pas
"
GALANT. 209
de le joindre avec mille Chevaux
& cinq mille Hommes
de pied. Ceux qui compo
foient lesEtats d'Ecoffe , étant
avertis que le Roy avoit envoyé
chercherMontroffe, qui
n'eftoit pas bien dans leurs
efprits , demandérent par un
des Articles de Paix qu'ils
firent avec ce Prince pour
le reconnoiftre, que ce Marquis
ne rentraft point dans
le Royaume. Le Roy nepût
fe réfoudre à l'abandonner.
Il fit voir aux Commiffaires.
envoyez à Breda pour con--
clurre le Traité , qu'il y al-
Février 1685, S
210 MERCURE
loit de fon fervice , de ne
pas laiffer inutile le courage
d'un Homme dont le zéle
& la valeur luy efſtoient connus
par de grandes preuves.
Ces Commiffaires infiftérent
fur leur demande
, & pendant
ce temps , les Troupes
qui eftoient defcenduës aux
Orcades arrivérent , & Montroffe
arriva luy-mefme peu
de temps apres avec un Corps
de quatre mille Hommes.Les
Etats s'en trouvérent alarmez.
Ils avoient plus de
douze mille Soldats fous les
armes , commandez parDavid
GALANT 211
Lelley. Ce Genéral détacha
fix Cornetes de Cavalerie tous
les ordres d'un Colonel Anglois
nommé Stranghan ,pour
aller s'oppofer au paffage du
Marquis de Montrofle. Ils
fe rencontrérent en un lieu
fort avantageux pour la Ca
valerie de Stranghan , qui
l'ayant défait , le fit prisonnier.
On le conduifit à Edimbourg
, les mains liées , &
avec les plus indigne's traitel'on
peut
faire à
mens que
un Criminel
. La Sentence
de mort qui fut exécutée con-
甘ae luy , portoit qu'il ferois
Sij
212 MERCURE
pendu, qu'on mettroit fate ftè
au plus haut lieu du Palais
d'Edimbourg , & que fon
corps partagé en quatre , feroit
expofe fur les Portes des
Villes de Sterling, Glafcovv ,
Perth , & Aberdin . La lec .
ture de cette injufte Sentence
ne l'étonna point. Il dit avec
une fermeté digne de fon
grand courage , que fos Ennemis
en le condamnant ne
luy avoient pas fait tant de
mal qu'ils avoient crû , &
qu'il eftoit faché que fon
corps ne puft eftre partagé en
autant de pieces qu'il y avoir
GALANT. 213
de Villes au Monde , parce
que c'euft efté autant de
Bouches qui auroient parlé
éternellement
de fa fidélité
pour fon Roy. Ce Prince fut
fenfiblement touché de cette
mort, qu'il connut bien qu'on
avoit précipitée de peur qu'il
ne l'empeſchaft
par fon au
torité , ou par fes prieres. Il
fut fur le point de rompre le
Traité de Breda , & tout commerce
avec les Etats d'Ecoffe
, mais la néceffité du
temps & de fes Affaires ne
le permit pas . Il s'embarqua
à Scheveling
le z. de Juin,
214 MERCURE
pour paffer dans ce Royau
me , & eftant arrivé à l'embouchure
de la Riviere de
Spey, il y prit terre. Un grand
nombre des plus confidérables
Seigneurs Ecoffois étant
venu le trouver
lefcorta
jufqu'à Dundée , où il reçût
les Députez chargez de luy
dire que tous fes Peuples
d'Ecoffe le voyoient arriver
avec une joye extréme , &
qu'ils eftoient prefts de donner
leurs biens , leur fang &
leurs vies, pour luy faire avoir
raifon de fes Ennemis. Le
Roy répondit à ce compli
GALANT 215
ment avec de grandes marques
d'affection pour les
Ecoffois; & fes empreffemens
à folliciter les Etats de lever
des Troupes , les y ayant
obligez , les Commiflions furent
données pour ſeize mille
Hommes de pied , & pour
fix mille Chevaux . On fit
le Comte de Leven Genéral
de l'Infanterie , & Holborne
de la Cavalerie , avec Mongommery
& Lefley , & le
Roy fut Genéraliffime . Le
bruit de ces Armemens s'étant
répandu en Angleterre,
Cromvvel qui avoit accepté
216 MERCURE
l'Employ de Farfax, s'avança
entre les Villes d'Edimbourg
& de Leith , où les Troupes
Ecoffoifes s'eftoient retranchées.
Apres deux Combats
donnez , fans nul avantage
pour l'un ny l'autre Party, les
Armées fe rencontrérent le
10. de Septembre prés de
Copperfpec , & vinrent aux
mains avec tant de malheur
pour celle d'Ecoffe , qu'il demeura
de ce cofté là pres de
einq mille Morts fur la place,
avec toute l'Artillerie & tout
le Bagage. Le nombre des
Prifonniers mota à huit mille.
Cette
GALANT. 217
Cette Victoire enfla le courage
de Cromvvel , qui n'eut
pas de peine enfuite de fe
rendre Maistre d'Edimbourg
+
& de Leith. Des fuccez fi
malheureux refroidirent les
Etats. Ils établirent des Comamiffaires
pour régler le nombre
des Domestiques duRoy,
& des Officiers néceffaires à
fon fervice . Ils éloignoient
les Affaires de fa connoiffance,
ne mettoient que de leurs
Créatures aupres de luy , &
ce Prince ne pouvant fouffrir
cet esclavage , réfolut enfin
de fe retirer. Il partit de faint
Fevrier 1685.
T
218 MERCURE
Johnſtons , feulement avec
quatre Hommes , & alla au
Port d'Ecoffe chercher un
azıle chez Milord Deduper,
où il fçavoit qu'il devoit trouver
le Marquis de Huntley;
les Comtes de Seaforth &
d'Atholl ; & plufieurs autres
Seigneurs , qui étoient inviolablement
attachez à luy avec
un Party affez puiſſant. Son
départ ayant fait naiſtre divers
fentimens fur la condui
te qu'on devoit tenir , il fut
réfolu qu'on l'envoyeroit fu
plier de revenir à S.Johnſtons,
pour y recevoir les témoignaGALANT.
219
1
ges du zéle que les Etats
avoient pour fon fervice.
Montgommery Genéral Major
fut honoré de cette Commiffion
. Il fe rendit chez Mi.
lord Déduper , & apres avoir
marqué au Roy le terrible
déplaifir que fon éloigne .
ment avoit caufé aux Etats ,
il le conjura de vouloir bien
le faire ceffer par la
prefence ,
& luy proteſta qu'il ne trouveroit
dans les Ecoffois que
des Sujets tres - foûmis. Le
Roy que l'experience avoit
perfuadé de leur peu de foy,
rejetta d'abord cette priere.
Tij
220 MERCURE
Il dit qu'il étoit las de fouffrir
des Maiftres dans un lieu où
il devoit commander
abfolument
; qu'eſtant né Roy , il
ignoroit comme il falloit
obéir , & qu'il avoit fait affez
d'honneur
aux Etats , pour les
engager à avoir pour luy les
déferences
qui luy étoient
deuës .
dit des chofes fi perfuafives,
& elles furent fi puiffamment
appuyées par le Marquis de
Huntley , que le Roy ſe laiſſa
vaincre. Il confidera qu'un
refus pourroitirriter ces Peuples
dont il devoit tout atten-
Montgommery luy
GALANT. 221
·
dre , & confentit à reprendre
le chemin de S. Johnftons,
Coù il receut des Etats des remercimens
qui luy firent
-perdre toute la crainte qu'il
avoit eue. Ce bonheur ne
dura pas. La divifion fe mit
entre les Generaux des Troupes
, qui avoient effé conjointement
levées par les Etats &
par le Clergé. Le Roy n'oublia
rien de ce qui pouvoit la
faire ceffer , mais il ne put en
venir à bout: Les Anglois en
profiterent. Le Château d'Edimbourg
qui avoit toûjours
refifté , fe rendit par l'infide-
✓ T iij
222 MERCURE
perte
lité de Dundaffe , qui fut féduit
par Cromvvel. Cette
& d'autres progrés que
les Anglois faifoient en Ecoffe
, firent juger aux Erats que
les querelles qui divifoient le
Royaume, ne finiroient point
que par une Autorité Royale.
Afin que tout le monde fuft
obligé de la reconnoiſtre ,
on réfolut de ne point differer
davantage le Couronnement
du Rov. La Cerémonie
s'en fit le 4. Janvier 1651. dans
l'Abbaye de Schoone
་
où
l'on avoit accouftumé de la
faire , & Charles Left le
GALANT. 223
quarante -huitiéme Roy que
l'on y a couronné. Il partit
de S. Jonftons avec une
pompe digne de fon rang.
Il eftoit accompagné de la
Nobleffe , & efcorté de l'Armée.
Milord Angus, en qualite
de Grand Chambellan ,
le reçût dans la Maifon qui
luy avoit efté préparée ; &
le Comte d'Argil , au nont
des Etats , luy fit un Difcours
plein d'affurances tres - ref
pectueuses , & de proteftations
d'une inviolable fidélité.
Apres la Harangue , le
Roy marcha vers l'Eglife,
Tij
224MERCURE
fuivy de tous les Seigneurs
d'Ecoffe , & des Officiers de
fa Maifon , fous un Dais de
Velours cramoify , qui eftoit
porté par quatre Perfonnes
confidérables . Il avoit le
Grand Connétable à fa droite,
& à fa gauche , le Grand.
Maréchal du Royaume . Le
Marquis d'Argil portoit la
Couronne , le Comte de Craford-
Lindley , le Sceptre ; le
Comte de Rothes , l'Epée ,
& le Comte d'Eglinton , les
Eperons . Le Roy , fuivant
l'ufage des Roys fes Prédeceffeurs
, fit le Serment fur.
GALANT. 224
un Trône que l'on avoit élevé
dans cette Eglife. Trois Per
fonnes qui repréfentoient les
trois Etats d'Ecofle , ſe préfentérent
devant luy , fourenant
chacune la Couronne
d'une main. Ils la remîrent
à trois Miniftres députez du
Clergé , dont l'un dit au Roy,
Sire , je vous préfente la Cou
ronne & la Dignitéde ce Royaume,
& s'eftant tourné vers le
Peuple , il ajoûta , Voulez- vous
reconnoiftre Charles II. pour vôtre
Roy, & devenir fes Sujets ?
Le Roy s'eftant auffi tourné
vers le Peuple , ce furens
226 MERCURE
par tour des cris de Vive
Charles II. Les Miniftres luy
ayant enfuite donné l'On
ction Royale , le Comte d'Argil
luy mit la Couronne fur
la tefte , & le Sceptre dans
la main. Son Couronnement
étoufa beaucoup de troubles.
On ordonna de nouvelles
Levées , & l'on fit fortifier
Sterlin .
Cromvvel voyant
l'Armée du Roy prés de cette
Ville où l'on apportoit fa
cilement toute forte de munitions
& de vivres , & apprenant
qu'elle eſtoit dans la
difpofition de marcher vers
GALANT 227
l'Angleterre , fe campa aux
environs d'Edimbourg , afin
de luy en fermer le paffage.
Il voulut engager ce Prince
à un Combat en s'aprochant
à la vue de fon Camp , &
hazarda une Attaque , dans
laquelle il fut repouffé & mis
en defordre . Ce mauvais fuc
cés le fit réfoudre à quiter
la place. Le Roy aprit qu'il
cftoit allé s'emparer de Fife,
& détacha malheureuſement
quatre mille Hommes , que
commandoit le Chevalier
Brovvn. Lambert les ataqua
avec un Party plus fort , &
228 MERCURE
❤
les défit prés de Nefterton
Ce coup , quoy que fort fenfible
au Roy , n'abatit point
fon courage. Il fit aſſembler
le Confeil de Guerre , où les
Capitaines luy ayant repréfenté
que beaucoup de fes
fidelles Sujets qui n'ofoient
fe déclarer en Angleterre,
prendroient fon Party lors
qu'ils l'y verroient entrer à la
tefte d'une Armée. Il réfolut
de le faire fans aucun retar
dement. Il partit de Sterlin
le 10. Aouft , & fitoft qu'il
fut dans le Comté de l'Enclaftre,
il fit publier une Am
GALANT. 229
nittie Genérale , & défendit
"
toutes les hoftilitez que les
Gens de Guerre ont accoûtumé
de commettre lors qu'ils
entrent dans un Païs Ennemy
, afin de montrer par là,
qu'il ne venoit qu'en Prince
qui aimoit le bien de fes Sujets.
Cromvvel le fuivit , &
Lambert voulut luy difputer
le paffage du Pont de Warifton
, mais il ne pût l'empeſcher
d'arriver àWorceſter,
dont les Habitans luy ouvri
rent les Portes le 22. Aouft,
apres luy avoir aidé à chaffer
la Garniſon que les Etats Y
230 MERCURE
avoient mife. Le Roy y ens
tra au milieu des cris de joye,
& y fit celébrer un Jeûne,
qui fat accompagné de Prieres
extraordinaires. Cromvvel
à qui les Paffages étoient
libres , arriva devant la Place
le 2. de Septembre , & fit
attaquer dés le lendemain le
Pont de Hapton , qui en défendoit
l'entrée du cofté de
la Riviere de Saverne. Ce
le Colonel Maffey
Pofte
que
défendit
avec
beaucoup
de
valeur
, fut
enfin
forcé
. La
mefme
chofe
arriva
à un autre
Pont
, appellé
Porvvik
"
GALANT. 231
1
Bridge , encore plus important
que le premier. Le
Duc d'Hamilton fut mortellement
bleffé en le défendant,
& mourut peu de jours
apres de fa bleſſure . Cetavantage
ne laiffa pas de couſter
cher à Cromvel . Le Roy
chargea luy-même fon Quartier
, bleffa de fa main le Capitaine
de fesGardes , & donna
mille preuves de conduite &
de valeur ; mais enfin un
Corps de huit mille Anglois
s'eftant approché de la Ville,
dans le trouble où le mau.
vais fuccés du Combatavoit
232
MERCURE
mis les Habitans , les Rebel
les fe rendirent maîtres d'une
de fes Portes , y traitérent impitoyablement
tout ce qu'ils
trouverent du Party du Roys
& tout ce que pût faire ce
malheureux Prince , fut de
rallier promptement mille
Chevaux , & de fortir fur le
foir par une Porte oppofée
à celle dont les Ennemis s'étoient
emparez . Toute cette
Troupe marcha plus d'une
heure fans fçavoir où elle alloit.
On s'arrefta pour tenir
Confeil. Quelques
- uns propoférent
de gagner quelque·
GALANT 233
Pofte
avantageux , pour y
attendre
le ralliement
des
Fuyards ; mais Milord Wilmot
leur fit connoiftre
qu'il
eftoit impoffible de réfilter
à cinquante
mille Hommesqui
les pourfuivroient
dés le
lendemain , & qu'il faloit fongerfeulement
à mettre le Roy
en fûreté.Le Comte de Darby
fe chargea de luy trouver une
Retraite affurée , & prenant
Wilmot pour
compagnon de
fon entreprife
, il ne voulut
eftre accompagné
que de
denx
Gentilshommes
nommez:
Giffard , & Walker, Le
Fevrier 1685 . V
1234 MERCURE
Roy partit fous la feule ef
corte de ces quatre Hommes
, & ils firent une telle
diligence , que lors que le
jour parut , ils fe trouvérent
à demy- lieue d'un Chateau
nommé Boscobel
, éloigné
de Worcester
de vingt-fix
milles . Comme
on n'y pouvoit
entrer à une heure indue
fans découvrir
le fecret,
Giffard propofa de prendre
la routed
petit Hameau
appellé les Dames Blanches,
où il répondit de la fidélité
d'un Païfan qu'on nommoit
George Pendrille . On alla
GALANT 23
chez luy mettre pied à terre ,
& le malheur du Roy luy fat
confié , ainfi qu'à trois de
fes Freres , qui promirent
tous de périr plûtoft que de
parler. Enfuite on coupa les
cheveux du Prince , il noircit
fes mains , fes habits fu
rent cachez dans la terre , on
luy en donna un de Païfan,
& George Pendrille luy ayant
fait prendre une Serpe , le
mena couper du bois avec
luy . Comme le fejour de ceux
l'accompagnoient pouqui
voit le trahir , ils s'en fop
érent , apres luy avoir u
236 MERCURE
qué par leurs larmes la vive
douleur que
leur caufoit fa
difgrace . A peine le Roy fut
dans la Foreſt , que deux cens
Chevaux arrivérent au même
Hameau . Les Commandans
voulurent d'abord en vifiter
les Maiſons , mais quelques
Femmes leur ayant dit qu'el
les n'avoient
veu que quatre
Hommes à cheval , qui s'étoient
féparez il n'y avoit
que deux heures , & avoient
pris diférentes routes , ils crûrent
que le Roy eftoit un
de ces Fuyards , & ayant fait
quatre Efcadrons de leurs
GALANT. 237
Troupes , ils prirent tous des
chemins divers. Ce Prince
paffa le jour dans le Bois , &
revint le foir avec Pendrille .
Comme il eftoit réfolu de fe
retirer au Païs de Galles , il
fe fit conduire cette mefme
nuit chez un Gentilhomme
nommé Carelos , dont il con
noiffoit la fidélité . Quoy qu'il
y
euft trois lieuës du Hameau
à la Maifon de ce Gentilhomme
, il les fit à pied avec
ardeur , & luy communiqua
le deffein où il eftoit de paf
fer la Riviere de Saverne.
Carelos l'en détourna ne luy
238 MERCURE
apprenant que tous les Paf
fages en eftoient gardez , &
la nuit fuivante
il le remena.
chez le Païſan qui l'avoit déja
caché. Pendrille craignant
que l'habit de Bucheron ne
trompaſt pas les Habitans du
Hameau , qui pouvoient le
remarquer
, luy propofa un
plus fûr azile. Il y avoit dans
le Bois un Chefne que la Nature
ſembloit avoir fait pour
un deffein extraordinaire
. Il
eftoit fi gros , & toutes fes
branches eftoient fi toufuës,
que vingt Hommes auroient
pû eftre deffus , fans qu'on
GALANT 239
les cuft découverts . Il pria
le Roy d'y vouloir monter ;
ce qu'il fit avec Carelos . Ils
s'y ajustérent fur deux Oreillers
, & y pafférent le jour,
fans autre nourriture
que du
Pain & une Bouteille d'Eau,
Ce Chefne a depuis efté nommé
le Chefne Royal . La nuit
ils retournérent dans la Maifon
de Pendrille . Le Roy y
trouva un Billet de Milord
Wilmot, par lequel il le prioit
de fe rendre chez un Gentilhomme
apellé Witgraves.
Le Roy partit auffi- toft, apres
avoir congedié Carelos . Il fit
240 MERCURE
ce petit Voyage , accompa
gné des quatre Freres , &
monté fur le Cheval d'un
Meulnier. Lajoyede Wilmot
fut grande lors qu'il vit fon
Prince . Il luy dit qu'il n'y avoit
aucune affurance pour fa vie,
s'il ne fortoit du Royaume, &
qu'il avoit pris des mefures
avec Witgraves pour
duire à Bristol, que Mademoi
felle Lane,Fille du Colonel de
ce nom , y devoit aller pour
les Couches d'une Soeur , &
qu'en qualité de Domeſtique
il la porteroit en croupe. La
chole fut fort bien exécutée,
Quelques
le conGALANT.
241
Quelques jours auparavant,
çette Demoiſelle avoit obtenu
un Pafleport pour aller à Briftol
avec un Valet. Elle étoit
adroite & fpirituelle , & déguifa
fi bien le Roy en luy la
vant le vifage d'une Eau dans
laquelle elle avoit fait bouillir
des écorces de noix , & d'au
tres drogues , qu'il eftoit
difficile de le réconnoiftre .
On luy donna un Habit conforme
à ce nouveau Perfonnage
, que la fortune luy faifoit
jouer, & dans cet état ils
prirent le chemin de Briſtol.
Wilmot feignant de chaffer
Fevrier
1685. X
242 MERCURE
un Oyſeau fur le poing , les
accompagna jufques à Brons
graves. Le Cheval du Royys
perdit un fer , & il falut luy
en faire mettre un autre. On
s'adreffarà un Maréchal , qui
en ble ferrant demanda des
nouvelles du Roy , au Roy
mefme. Le Prince ayant répondu
qu'il le croyoit en
Ecoffe , le Maréchal ajoûta
qu'affeurément il étoit caché
dans quelque Maifon d'Angleterre
, & qu'il cuft bien
voulu le découvrir parce
qu'il n'auroit plus à fe mettre
en peine de travailler , s'il
GALANT. 243
trouvoit moyen de le livrer
aux Etats . Cette converfation
finie , le Roy continua
fon chemin , avec la Demor
felle qu'il portoit toûjours en
croupe. Peu de temps apres
à l'entrée d'un Bourg, quel
ques Cavaliers envoyez pour
l'arrefter, vinrent à luy , & len
regardant attentivement , ce
luy qui les commandoit leur
dit qu'ils le laiffaffent paffer,
& que ce n'étoit pas ce qu'ils
cherchoient.
Eftant enfin arrivez chez
M'Norton à trois miiles de
Bristol , le Roy feignit de fe
X
ij
244 MERCURE
trouver mal , & Mademoiſelle
Lane qui paffoit pour la Maitreffe
, luy fit donner une
Chambre . Le lendemain un
Sommelier nommé Jean Pope
, qui avoit long- temps fervy
dans les Armées du feu
Roy , démefla les Traits du
Prince dans ceux du Conducteur
de Mademoiſelle Lane,
& l'ayant prié de defcendre
dans la Cave , il luy prefenta
du Vin , mit enfuite un genoüil
en terre , & luy fit de fi
ardentes proteftations de fidelité
, que le Roy le chargea
du foin de luy chercher un
GALANT. 245
Vaiffeau pour paffer en France
, mais il luy fut impoffible
de s'embarquer à Bristol . Milord
Wilmot l'étant venu joindre
, le conduifit chez le Co.
lonel Windhams , dans le
Comté de Dorfet. Ilssyy furent
trois femaines , attendant les
facilitez d'un Paffage à Lime.
Il y eut encore un fecond obftacle.
Un Capitaine dont on
s'étoit affeuré, manqua de parole
, & pour nouvelle difgra
le Cheval de Milord Wilce,
mot s'étant déferré , le Maréchal
connur aux clouds , que
celuy qui le montoit venoit
X
iij
246 MERCURE
C
du cofté du Nord , & le bruit
fut auffi toft répandu que le
Roy y étoit caché . Cela l'obligea
de fe rendre à Bridport
fans aucun retardement. La
nuit fuivante , il arriva à Braadvvindfor
, ou quantité de
Soldats qui s'embarquoient,
l'ayant mis dans la néceffité
de fe cacher, il retourna chez
le Colonel Windhams , avec
lequel il trouva à propos d'al
ler chez M' Hides , du cofté
de Salisbury. Eftant arrivez
à Mere, ils defcendirent à l'1-
mage S George. L'Hofte qui
connoiffoit le Colonel ,voyant
GALANT. 247
le Roy debout dans la poſture
d'un Domestique,luy demanda
fi c'étoit un de fes Gens.
Enfuite il porta la Santé du
Roy au Colonel. Ils fe rendirent
de là chez M'Hides ; mais
quoy qu'on puft faire , il fur
impoffible de trouver unVaiſ
feau dans tous les environs
de la Mer , du cofté de Southompton,
M' Philips que l'on
avoit envoyé pour cela , rencontra
le Colonel Gunter, qui
fe chargea de tenir une Barque
prefte à Britemhfthed en
Suffex. Le Roy s'y rendit en
diligence & y trouva Milord
X iiij
248 MERCURE
;
Wilmot & Maumfel Mar
chand , dont Gunter s'étoit
fervi pour le fuccés de fon en.
trepriſe . Le Capitaine du Vaifſeau
, nommé Tetershall , fe
mit à table avec le Roy &
Milord Wilmot. Comme il
avoit vû ce Prince aux Du
nes , il le reconnur, & s'apro
chant de l'oreille du Milord;
Vous avez des Domestiques de
bonne Maison , luy dic il , & je
croy qu'il y a peu de Gentils
hommes en Europe auffi bien fer
ruis que vous . Il ne perdit point
de temps. Il donna ſes ordres
pour l'embarquement ; & le
GALANT. 249
Vaiffeau fe mit en Mer le 20.
Octobre à cinq heures du
matin. Dans le Trajer un Matelot
prenant du Tabac , & le
Capitaine connoiffant que la
fumée incommodoit Sa Majefté,
il le gronda , & luy or
donna de fe retirer . Le Matelot
le fit avec peine , & luy
répondit en murmurant par
une façon de parler Angloife
, Qu'un Chat regardoit bien
in Roy. Le Voyage fe fit
fans obftacle . On arriva à
Fécamp en Normandie , où
le Milord qui n'avoit rien dit
jufque- là , avoua au Capitai250
MERCURE
ne que c'étoit le Roy qu'il
avoit paffé. Il fe jetta aux
pieds de fon Prince , qui luy
promit de récompenter un
jour fa fidelité. Le Roy ayant
changé d'habits à Rouen , où
il demeura peu de temps
chez M'Scot, vint à Paris attendre
les Révolutions qui
font ordinaires à la tyrannie.
Olivier Cromvvel, déclaré
Protecteur des trois Royaumes
en 1653. mourut en 1658
Apres fa mort on donna la
mefme qualité à Richard fon
Fils ; mais eftant incapable
de la foûtenir , le Parlement
GALANT 251
luy fit demander fa démif
fion , & il la donna . Le Ges
néral Monk fe fervit avec
tant de zéle , de prudence &
de conduire , des difpofitions
où il voyoit les efprits pour
le rétabliffement de la Monarchie,
qu'il fut réfolu qu'on
rappelleroit le Roy. Le Par
lement luy dépeſcha le 19. de
May 1660. un Gentilhomme
nommé Kilgrevv , pour luy
porter la nouvelle de fa Proclamation
, qui avoit efté faite
à Londres ce mefme jour ,
& ayant donné ordre à l'Amiral
Montagu de fe mettre en
252 MERCURE
mer pour aller le recevoir fur
les Coftes de Hollande , il
nomma dixhuit , Commiffaires
, fix de la Chambre des
Pairs , & douze de la Chambre
des Communes
, pour
le fapplier de venir prendre
poffeflion de fes trois Royau
mes. La Ville de fon cofté
choifit vingt de fes plus illuftres
Habitans
, pour luy
aller rendre les mefmes devoirs.
Tous ces Députez furent
favorablement reçûs à
la Haye , où le Roy eftoit
alors . Ce Prince en partit le
2. de Juin , &le Vaiffeau furGALANT.
253
lequel il s'embarqua , parut
au Port de Douvres deux
jours apres , 4 du mefme
mois. Il y fut reçû par Monk,
qui fe mit d'abord à genoux.
Le Roy le releva en l'embraffant
, & en l'appellant fon
Pere. Apres une conférence
d'une demie heure qu'il eut
avec luy en particulier , ce
Prince fe mit fous un Dais
qui eftoit tendu au bord de
lå Mer, fous lequel les Ducs
d'York , & de Gloceſter , fes
Freres, fe mirent auffi Ils reçûrent
là les refpects de laNobleffe,
& mótérent enfuite en
254 MERCURE
Carroffe, où le Genéral Monk
prit place , auffi-bien que le
Duc de Buckincam. Dans
le chemin de Cantorbery ils
trouvérent quelques vieux
Régimens , avec les Compagnies
de la Nobleffe en
Bataille. Le Roy monta à
cheval , & y fit fon Entrée
à leur tefte . Pendant fon féjour
dans cette Ville , il donna
l'Ordre de la Jarretiere au
Genéral Monk. Elle luy fuc
attachée par les Ducs d'York
& de Glocefter. Le Duc de
Southampton y reçût le même
honneur ; mais il y cut
GALANT. 255
·
cette diférence , que ce fut
feulement un Héraut qui luy
mit l'Ordre. Peu de jours
apres le Roy fit fon entrée à
Londres . Elle fut fort éclatante.
Plufieurs Troupes de
Gentilshommes & de Bour-
>
geois richement vétus , & fu
perbement montez mar
choient devant luy. Celle qui
l'environnoit étoit compofée
des Herauts, des Porte-Maffe ,
du Maire qui étoit teſte nuë
avec l'épée Royale à la main ,
du General Monk , & du Duc
de Buckincam
. qui le precédoient
auffi tefte nue. Il mar
256 MERCURE
•
choit entre les Ducs d'Yorck
& de Glocefter , & à pei
ne eut-il mis pied à terre à
Witheal , qu'au lieu de fe rafraîchir
, il alla au Parlement.
Il entra dans la Chambre des
Pairs , manda celle des Com
munes , & les voyant affenblez
, il les affeura qu'il fe
fouviendroit toûjours de la
fidelité qu'ils avoient gardée
pour fon fervice , & les pria
tous d'agir pour le foulage.
ment de fon Peuple. Il fut
Couronné en 1661 dans la
mefme Ville , avec une Pompe
extraordinaire , & l'année
GALANT 257
fuivante, il épousa Catherine,
Infante de Portugal , Fille de
Jean IV. & Soeur du Roy Alphonfe
VI. C'est une Princeffe
dont la vertu & la pieté,,
vont au delà de tout ce qu'on
en peut dire. Il s'eft depuis :
appliqué avec de grands foinsà
étouffer les defordres que
les Factieux tâchoient de fai
re revivre. Il en eft venu à
bout, & a remporté de grands
avantages fur les Hollandois ,,
en deux diverfes rencontres.
Une preuve incóteftable dess
grandes qualitez de ce Monarque
, c'est qu'il s'eftoire
Fevrier 1685,
Y
218 MERCURE
1
acquis l'amitié du Roy. Je
viens aux particularitez de fa
pg zed eated xusb. sb
mort.
+
97 Le Dimanche au foir 11. de
ce mois , il parut dans une
parfaite fanté, & plus gay qu'à
l'ordinaire. Il eut la nuit de
grandes inquietudes , & fon
fommeil fut interrompu . Il
ne voulut neanmoins appeller
perfonne , & s'eftant levé
dés fept heures du matin , il
demanda qu'on luy fiſt le
poil. A peine luy eut on mis
un Peignoir, qu'un fort grand
treffaillement luy fit pouffer
avec force les coudes en ar
A
GALANT
259
&
riere.
fois , Mon Il cria trots
Dies & demeura
enfuite
prés
de deux heures
fans pouvoir
parler. Un Valet de Chambre
courut
à l'Apartement
de
Monfieur
le Duc d'York
,
luy dit que l'on croyoit
le
Roy mort. Ce Duc vint toute
effrayé, & en Robe de Cham--
bre. On faigna le Roy deux:
fois , on luy appliqua
des
Vantoufes
, & on luy donna:
un Vomitif
, La connoiffance
kay revint un peu , & il de--
manda
à boire. On eut quelque
efpérance
de fa guériſon
,
jufqu'au
Mercredy
au foir
Y it
260 MERCURE
Cependant le mal l'ayant re
pris avec plus de violence , il
mourut le Vendredy 16. entre
onze heures & midy . Il
n'a eu aucuns Enfans de la
Reyne , mais il en a laiffé de
naturels , qui font
Jacques Scotty Duc de
Montmouth, Comte de Dun .
cafter , & de Dolkeith , Chevalier
de la Jarretiere , & c.
"Charles Lenox , Duc de
Richemont , Fils de la Du--
cheffe de Porthmouth ..
Charles Filts Roy, Duc de
Southampton.
Henry Files Roy , Duc de
GALANT.: 261
Grafton , qui a épousé en
1672. la Fille unique de Henry
2 Baron d'Arlington ,Secretaire
d'Etat.
-Georges
Filts Roy, Comte
de Northumberland
.
"
Anne Filts Roy , qui a
-époufé Thomas Leonard ,
Comte de Suffeк ; tous Enfans
de Barbe Villiers , Ducheffe
de Cleveland , Comteffe
de Caftelmene, Baronne
deNonfuch,& Fille du Comte
de Grandiffon.
Charles Filts Charles ,Comte
de Plimouth , Filts de Mademoiſelle
de Kyroüel , Du262
MERCURE
*
cheffe de Portzhmouth , &
Comteffe d'Aubigny. I a
épouté une Fille de Thomas
Ofborn , Comte de Damby,
Grand Tréforier d'Angle
terre. 968
3 Charlote Filts Roy , qui
a époufé le Comte de Lieghfield
.
Barbe Filts - Roy.
GALANT. 189
jeune Prince s'eftant fait donner
un jour la Clef du Parc ,
fous prétexte de chaffer, fut
affez heureux pour ſe dérober
de ceux qui l'obfervoient ; &
fe déguifant avec une Perruque
noire , & un emplaître
fur l'oeil , il fortit du Parc , &
entra dans un Carroffe , qui
le porta juſqu'au bord de la
Tamife. Une Gondole l'y
ayant reçû , il fe rendit en
un lieu où il prit un habit
de Femme. Il revint de là
dans fa Gondole , qui le rendit
à Grenvic fans aucun
obftacle ; mais en ce lieu-là)
190 MERCURE
celuy qui le conduifoit refufa
de paffer outre , non feulement
à cause d'un vent contraire
qui venoit de s'élever,
mais la crainte de conpar
tribuer à la fuite de quelque
Perfonne confidérable
, ce
qui eſtoit dangereux en ce
temps - là . Malheureuſement
pour le jeune Prince , for
Cordon bleu qu'il avoit mal
caché en ſe déguiſant
, parut
aux yeux de ce Marinier, qui
plus intelligent que plufieurs.
de fa profeffion , fçachant
qu'une marque fi illuftre ne
fe donne en Angleterre
qu
GALANTA 191
aux Perfonnes du premier
rang , comprit le miftere , &
ne douta point que ce ne fuft
le Duc d'York qu'il menoit.
L'embarras où le met cette
rencontre, le fit s'obftiner à
n'avancer plus. Banfila qui
accompagnoit le Prince , defefperé
du retardement,
conjura le Matelot de paſſer
promptement la Dame qui
étoit dans fa Gondole , parce
qu'elle avoit des affaires trespreffantes.
Il luy répondit
d'un ton fèvere , qu'il falloit
que cette Dame cuft des privileges
bien particuliers, pour
192 MERCURE
avoir receu l'Ordre de la Jar
retiére, qu'on ne donne point
aux Femmes . Le Prince qui
avoit l'ame intrépide , & les
maniéres perfuadantes , prit
une réſolution digne de lay.
Il tendit la main au Matelot,.
& avec une douceur qui auroit
gagné les moins traitables
; le fuis le Duc d'York,
luy dit- il . Tu peux tout pour
ma fortune , & peut- eftre pourma
vie . C'est à toy à voirſi tu
veux me fervir fidellement. Ce
peu de mots defarma le Matelot.
Il luy demanda pardon
de fa réfiftance ,& commença
1
GALANT:
1932
a ramer avec tant de vigueur,
qu'il fit arriver le Prince
à Tibury , plûtoft qu'il ne
l'avoit efperé. Il y trouva un
Vaiffeau Hollandois qui l'ac- ,
tendoit , & qui le porta à Mi-.
delbourg. Son evaſion inquiéta
les Etats. Il arriva des
defordres en Ecoffe. Les
Communes du Comté de
Kent
prirent les armes , pour
demander la liberté de leur
Roy. La
Nobleffe
appuya
leurs juftes
prétentions , & la
plupart
des
Vaiffeaux
qui
étoient aux Dunes , fe déclara
pour les mefmes interefts,
Fevrier 1685. R
194
MERCURE
Ce foûlevement
donna lieu à
une entrepriſe affez furprenante.
Un jeune Homme
appellé Corneille Evans , né
dans Marſeille , d'un Pere
forty du Païs de Galles , arriva
dans la Ville de Sandvvic ,
couvert d'un habit fi déchiré,
qu'étant pris par tout pour
un Homme de néant , il eut
de la peine à trouver où ſe
loger. Enfin , ayant eſté receu
dans une Maifon de peu
d'apparence
, où il fe fit affez
bien traiter , il tira fon Hofte
à part , & luy dit que pour re
connoiftre l'honnefteré
qu'il
•
GALANT. 195
yenoit d'avoir pour luy , il
vouloit luy confier un fecret
dont il pouvoit attendre de
grands avantages , s'il en fçavoit
bien ufer. Il ajoûta qu'il
étoit le Prince de Galles ; qu'il
s'étoit mis en l'état où il le
voyoit , pour le dérober aux
yeux de ſes Ennemis ; qu'
ayant appris que les Peuples
de cette Province fe foûlevoient,
il prétendoit leur donner
courage , & commencer
avec eux le fecours qu'ils devoient
au Roy fon Pere . Cet
Homme crédule fe laiffa perfuader
, & tout glorieux d'a-
Rij
196 MERCURE
voir chez luy le Fils de fort
Roy , il alla fur l'heure avertir
le Maire , qui étant venu rendre
fes refpects à ce faux
Prince , le fit loger dans la
plus belle Maifon de la Ville.
Chacun le traita de la meſme
forte. On luy donna des Gardes
avec ordre de fe tenir découverts
en fa prefence , & le
bruit de fon arrivée s'étant
répandu dans tout le Comté
de Kent , grand nombre de
Gentilshommes, & de Dames
mefme , vinrent luy offrir
leurs biens , pour le fecourir
dans fon entrepriſe. Ceux qui
GALANT. 197
s'étoient foûlevez , députe
rent auffi-toft pour le prier
de fe vouloir montrer à leur
tefte , & il auroit joué plus
long- temps ce perfonnage , fi
le Chevalier Dishinton que
la Reyne & le Prince de Gal
les avoient envoyé en Angleterre
, pour s'informer du veritable
état des affaires , n'euft
fait connoiftre la fourbe. Il fe
diſpoſoit à retourner en France
, lors qu'il apprit ce qui fe
paffoit à Sandvvic. Il y courut
, & convainquit l'Impo
fteur, qui fut arrefté, conduit
à Cantorbery , & delà à Lon
Rij
198 MERCURE
dres , d'où il ſe fauva quelques
mois apres . On n'en a
point entendu parler depuis.
Les Vaiffeaux des Dunes
que Farfax tâcha inutilement
de féduire
par Les offres , étant
paffez en Hollande , ceux qui
les
commandoient envoyerent
avertir le Prince de Galles
, qu'ils ne s'étoient fouftraits
de l'obeïffance des
Etats , que pour recevoir ſes
ordres. Il partit de S. Germain
en Laye , où il avoit
toûjoursdemeurédepuis qu'il
étoit forty d'Angleterre , &
s'étant embarqué à Calais acGALANT.
199
compagné du Prince Robert,
& d'un grand nombre de Nobleffe
Angloife & Ecoffoife,
que la perfecution des Ennemis
du Roy avoit contrainte
de fe retirer en France , il
pafla heureuſement en Hol
lande au commencement de
Juillet en 1648. Apres avoir
loué la fidelité des Officicrs
qui perfiftoient courageule
ment dans le deffein de perir
, s'il le falloit , pour s'op
pofer aux Rebelles , il monta
fur l'Amiral , fit courir un
Manifefte , par lequel il dé
clara qu'il ne prenoit les ar
R iiij
200 MERCURE
mes que pour maintenir la
Religion dans la pureté de
fes Inftructions
, pour donner
la Paix aux trois Royaumes
,en
remettant les Loix dans leur
force, & pour delivrer le Roy
fon Pere d'une tyrannique
oppreffion, & enfuite il alla fe
prefenter devant Yarmouth,
demandant que les Portes de
la Ville luy fuffent ouvertes.
Les Magiftrats réponditent
qu'ils n'en eftoient pas les
maiftres , & leur obftination
l'emporta fur l'inclination du.
Peuple qui envoya des ta
fraîchiffemens
à ce Prince.
piz
GALANT. 201
Il fe retira vers les Dunes
avec fa Flote , & n'ayant reçû
aucune réponſe favorable des
Lettres qu'il avoit écrites à
Londres fur fon Manifefte,
il alla chercher le Comte de
Warvvic , qui eftoit en mer
avec feizeVaiffeaux , & que les
Etats avoient étably Grand
Amiral du Royaume . Le
Comte évita les occafions.
d'en venir aux mains ; & la
nuit les ayant obligez de
jetter l'ancre à une lieue l'un
de l'autre, le Prince luy manda
par un Officier , qu'eftant
en perfonne fur les Vaiffeaux.
202 MERCURE
qu'il avoit veus , il luy commandoit
de le venir joindre
pour fervir le Roy , & de
mettre Pavillon bas quand il
leveroit les ancres . Le Comte
luy répondit qu'il ne reconnoiffoit
que les Etats pour
fes Maiftres , & qu'il ne devoit
attendre de luy aucune
foûmiflion . Le Prince irritée
de cet orgueil , fit mettre à
la voile fi- toft qu'il fut jour,
& alla droit à Warvic , dont
il trouva la Flote augmentée
de douze Vaiffeaux fortis du
Port de Porthmouth ; ce qui
ne l'euft pas empefché de le
GALANT. 203
combatre , fi une tempefte
qui dura vingt- quatre heures
n'euft féparé fi bien les deux
Flotes, que le Prince fut contraint
de relâcher en Hollande.
Tout ce qu'il pouvoit
tenter pour la liberté
du Roy fon Pere , eftant
ainfi renversé , & tout luy
manquant pour la fubfiftance
de fon Armée , il ne fe
remit point en mer, & atendit
le fuccés de quelques
Traitez d'Accommodement
dont on parloit ; mais apres
des Procédures qu'on ne
peut entendre fans horreur,
204 MERCURE
le Roy forcé de comparoiftre
devant fes Sujets , fut con
damné, comme Traître , Ty
ran , & Perturbateur du repos
public , à avoir la tefte
coupée ; & cet effroyable
Arreft fut exécuté le 9. Fe
vrier 1649. à la porte de fon
Palais , dans la meſme Ville
où il eftoit né , & au milieu
d'un Peuple dont fa bonté
luy devoit avoir gagné tous
les coeurs.
Le Prince ayant appris
cette funefte nouvelle à la
Haye, fçût en mefme temps
que les Etats avoient déclaré
GALANT 205
qu'on aboliroit le nom de
Roy , & que le Royaume
prendroit celuy de République.
On ne laiffa pas , malgré
ces défenſes, de voir des
Placards affichez dans toutes
les Villes d'Angleterre,
avec ces mots , CHARLES
STUART DEUXIEME
DU NOM , ROY D'ANGLETERRE,
D'IRLANDE
ET D'ECOSSE. Il y eut auffi
une fort grande conteftation
à
Londres pour les intérefts
du jeune Roy. Les Etats
qui en avoient fupprimé le
tître , ne pûrent obtenir du
206 MERCURE
Maire qu'il fift la Publica
tion de cette Ordonnance.
On l'interdit de fa Charge;
& celuy qui la remplit s'étant
diſpoſé à obeïr aux Etats,
le Peuple courut aux armes ,
en criant de toutes parts,
Vive Charles II. Le tumulte
euft efté loin , fi Cromvvel,
qui avoit prévû ce zéle des
Habitans, n'euftfait paroiftre
quatre Compagnies de Cavalerie
, qui diffipérent la
foule , & qui couvrant le
nouveau Maire , luy donnérent
le temps de publier l'injuſte
Ordonnance qui avoit
•
GALANT. 207
efté faite.
Pendant ce temps
le Prince
cherchoit à vanger
l'exécrable
Parricide qui venoit
d'eſtre commis. Il fçût
que les Ecoffois l'avoient fait
proclamer
Roy dans la grande
Place
d'Edimbourg
avec
toutes les formalitez
néceffaires
à rendre cette reconnoiffance
autentique; & comme
il avoit une haute eftime
pour la vertu du Marquis de
Montroffe
, voulant fe fervir
de luy pour remonter
fur le
Trône , il l'envoya
chercher
jufqu'en
Allemagne
, où il
s'eftoit engagé au ſervice de
208 MERCURE
l'Empereur. Montroffe ne
balança point fur ce qu'il
avoit à faire. Il fupplia l'Empereur
qui l'avoit fait Grand
Maréchal de l'Empire , de
trouver bon qu'il allaft fervir
fon Prince. L'Empereur loüa
fa fidélité. Il luy permit de
lever des Troupes ; & les
Roys de Suéde , & de Dan..
nemark , luy ayant donné
la mefme liberté dans leurs
Etats , il fit paffer fes premieres
Levées aux Ifles Or
cades , fous les ordres du
Comte de Kennoüil , l'affûrant
qu'il ne manqueroit pas
"
GALANT. 209
de le joindre avec mille Chevaux
& cinq mille Hommes
de pied. Ceux qui compo
foient lesEtats d'Ecoffe , étant
avertis que le Roy avoit envoyé
chercherMontroffe, qui
n'eftoit pas bien dans leurs
efprits , demandérent par un
des Articles de Paix qu'ils
firent avec ce Prince pour
le reconnoiftre, que ce Marquis
ne rentraft point dans
le Royaume. Le Roy nepût
fe réfoudre à l'abandonner.
Il fit voir aux Commiffaires.
envoyez à Breda pour con--
clurre le Traité , qu'il y al-
Février 1685, S
210 MERCURE
loit de fon fervice , de ne
pas laiffer inutile le courage
d'un Homme dont le zéle
& la valeur luy efſtoient connus
par de grandes preuves.
Ces Commiffaires infiftérent
fur leur demande
, & pendant
ce temps , les Troupes
qui eftoient defcenduës aux
Orcades arrivérent , & Montroffe
arriva luy-mefme peu
de temps apres avec un Corps
de quatre mille Hommes.Les
Etats s'en trouvérent alarmez.
Ils avoient plus de
douze mille Soldats fous les
armes , commandez parDavid
GALANT 211
Lelley. Ce Genéral détacha
fix Cornetes de Cavalerie tous
les ordres d'un Colonel Anglois
nommé Stranghan ,pour
aller s'oppofer au paffage du
Marquis de Montrofle. Ils
fe rencontrérent en un lieu
fort avantageux pour la Ca
valerie de Stranghan , qui
l'ayant défait , le fit prisonnier.
On le conduifit à Edimbourg
, les mains liées , &
avec les plus indigne's traitel'on
peut
faire à
mens que
un Criminel
. La Sentence
de mort qui fut exécutée con-
甘ae luy , portoit qu'il ferois
Sij
212 MERCURE
pendu, qu'on mettroit fate ftè
au plus haut lieu du Palais
d'Edimbourg , & que fon
corps partagé en quatre , feroit
expofe fur les Portes des
Villes de Sterling, Glafcovv ,
Perth , & Aberdin . La lec .
ture de cette injufte Sentence
ne l'étonna point. Il dit avec
une fermeté digne de fon
grand courage , que fos Ennemis
en le condamnant ne
luy avoient pas fait tant de
mal qu'ils avoient crû , &
qu'il eftoit faché que fon
corps ne puft eftre partagé en
autant de pieces qu'il y avoir
GALANT. 213
de Villes au Monde , parce
que c'euft efté autant de
Bouches qui auroient parlé
éternellement
de fa fidélité
pour fon Roy. Ce Prince fut
fenfiblement touché de cette
mort, qu'il connut bien qu'on
avoit précipitée de peur qu'il
ne l'empeſchaft
par fon au
torité , ou par fes prieres. Il
fut fur le point de rompre le
Traité de Breda , & tout commerce
avec les Etats d'Ecoffe
, mais la néceffité du
temps & de fes Affaires ne
le permit pas . Il s'embarqua
à Scheveling
le z. de Juin,
214 MERCURE
pour paffer dans ce Royau
me , & eftant arrivé à l'embouchure
de la Riviere de
Spey, il y prit terre. Un grand
nombre des plus confidérables
Seigneurs Ecoffois étant
venu le trouver
lefcorta
jufqu'à Dundée , où il reçût
les Députez chargez de luy
dire que tous fes Peuples
d'Ecoffe le voyoient arriver
avec une joye extréme , &
qu'ils eftoient prefts de donner
leurs biens , leur fang &
leurs vies, pour luy faire avoir
raifon de fes Ennemis. Le
Roy répondit à ce compli
GALANT 215
ment avec de grandes marques
d'affection pour les
Ecoffois; & fes empreffemens
à folliciter les Etats de lever
des Troupes , les y ayant
obligez , les Commiflions furent
données pour ſeize mille
Hommes de pied , & pour
fix mille Chevaux . On fit
le Comte de Leven Genéral
de l'Infanterie , & Holborne
de la Cavalerie , avec Mongommery
& Lefley , & le
Roy fut Genéraliffime . Le
bruit de ces Armemens s'étant
répandu en Angleterre,
Cromvvel qui avoit accepté
216 MERCURE
l'Employ de Farfax, s'avança
entre les Villes d'Edimbourg
& de Leith , où les Troupes
Ecoffoifes s'eftoient retranchées.
Apres deux Combats
donnez , fans nul avantage
pour l'un ny l'autre Party, les
Armées fe rencontrérent le
10. de Septembre prés de
Copperfpec , & vinrent aux
mains avec tant de malheur
pour celle d'Ecoffe , qu'il demeura
de ce cofté là pres de
einq mille Morts fur la place,
avec toute l'Artillerie & tout
le Bagage. Le nombre des
Prifonniers mota à huit mille.
Cette
GALANT. 217
Cette Victoire enfla le courage
de Cromvvel , qui n'eut
pas de peine enfuite de fe
rendre Maistre d'Edimbourg
+
& de Leith. Des fuccez fi
malheureux refroidirent les
Etats. Ils établirent des Comamiffaires
pour régler le nombre
des Domestiques duRoy,
& des Officiers néceffaires à
fon fervice . Ils éloignoient
les Affaires de fa connoiffance,
ne mettoient que de leurs
Créatures aupres de luy , &
ce Prince ne pouvant fouffrir
cet esclavage , réfolut enfin
de fe retirer. Il partit de faint
Fevrier 1685.
T
218 MERCURE
Johnſtons , feulement avec
quatre Hommes , & alla au
Port d'Ecoffe chercher un
azıle chez Milord Deduper,
où il fçavoit qu'il devoit trouver
le Marquis de Huntley;
les Comtes de Seaforth &
d'Atholl ; & plufieurs autres
Seigneurs , qui étoient inviolablement
attachez à luy avec
un Party affez puiſſant. Son
départ ayant fait naiſtre divers
fentimens fur la condui
te qu'on devoit tenir , il fut
réfolu qu'on l'envoyeroit fu
plier de revenir à S.Johnſtons,
pour y recevoir les témoignaGALANT.
219
1
ges du zéle que les Etats
avoient pour fon fervice.
Montgommery Genéral Major
fut honoré de cette Commiffion
. Il fe rendit chez Mi.
lord Déduper , & apres avoir
marqué au Roy le terrible
déplaifir que fon éloigne .
ment avoit caufé aux Etats ,
il le conjura de vouloir bien
le faire ceffer par la
prefence ,
& luy proteſta qu'il ne trouveroit
dans les Ecoffois que
des Sujets tres - foûmis. Le
Roy que l'experience avoit
perfuadé de leur peu de foy,
rejetta d'abord cette priere.
Tij
220 MERCURE
Il dit qu'il étoit las de fouffrir
des Maiftres dans un lieu où
il devoit commander
abfolument
; qu'eſtant né Roy , il
ignoroit comme il falloit
obéir , & qu'il avoit fait affez
d'honneur
aux Etats , pour les
engager à avoir pour luy les
déferences
qui luy étoient
deuës .
dit des chofes fi perfuafives,
& elles furent fi puiffamment
appuyées par le Marquis de
Huntley , que le Roy ſe laiſſa
vaincre. Il confidera qu'un
refus pourroitirriter ces Peuples
dont il devoit tout atten-
Montgommery luy
GALANT. 221
·
dre , & confentit à reprendre
le chemin de S. Johnftons,
Coù il receut des Etats des remercimens
qui luy firent
-perdre toute la crainte qu'il
avoit eue. Ce bonheur ne
dura pas. La divifion fe mit
entre les Generaux des Troupes
, qui avoient effé conjointement
levées par les Etats &
par le Clergé. Le Roy n'oublia
rien de ce qui pouvoit la
faire ceffer , mais il ne put en
venir à bout: Les Anglois en
profiterent. Le Château d'Edimbourg
qui avoit toûjours
refifté , fe rendit par l'infide-
✓ T iij
222 MERCURE
perte
lité de Dundaffe , qui fut féduit
par Cromvvel. Cette
& d'autres progrés que
les Anglois faifoient en Ecoffe
, firent juger aux Erats que
les querelles qui divifoient le
Royaume, ne finiroient point
que par une Autorité Royale.
Afin que tout le monde fuft
obligé de la reconnoiſtre ,
on réfolut de ne point differer
davantage le Couronnement
du Rov. La Cerémonie
s'en fit le 4. Janvier 1651. dans
l'Abbaye de Schoone
་
où
l'on avoit accouftumé de la
faire , & Charles Left le
GALANT. 223
quarante -huitiéme Roy que
l'on y a couronné. Il partit
de S. Jonftons avec une
pompe digne de fon rang.
Il eftoit accompagné de la
Nobleffe , & efcorté de l'Armée.
Milord Angus, en qualite
de Grand Chambellan ,
le reçût dans la Maifon qui
luy avoit efté préparée ; &
le Comte d'Argil , au nont
des Etats , luy fit un Difcours
plein d'affurances tres - ref
pectueuses , & de proteftations
d'une inviolable fidélité.
Apres la Harangue , le
Roy marcha vers l'Eglife,
Tij
224MERCURE
fuivy de tous les Seigneurs
d'Ecoffe , & des Officiers de
fa Maifon , fous un Dais de
Velours cramoify , qui eftoit
porté par quatre Perfonnes
confidérables . Il avoit le
Grand Connétable à fa droite,
& à fa gauche , le Grand.
Maréchal du Royaume . Le
Marquis d'Argil portoit la
Couronne , le Comte de Craford-
Lindley , le Sceptre ; le
Comte de Rothes , l'Epée ,
& le Comte d'Eglinton , les
Eperons . Le Roy , fuivant
l'ufage des Roys fes Prédeceffeurs
, fit le Serment fur.
GALANT. 224
un Trône que l'on avoit élevé
dans cette Eglife. Trois Per
fonnes qui repréfentoient les
trois Etats d'Ecofle , ſe préfentérent
devant luy , fourenant
chacune la Couronne
d'une main. Ils la remîrent
à trois Miniftres députez du
Clergé , dont l'un dit au Roy,
Sire , je vous préfente la Cou
ronne & la Dignitéde ce Royaume,
& s'eftant tourné vers le
Peuple , il ajoûta , Voulez- vous
reconnoiftre Charles II. pour vôtre
Roy, & devenir fes Sujets ?
Le Roy s'eftant auffi tourné
vers le Peuple , ce furens
226 MERCURE
par tour des cris de Vive
Charles II. Les Miniftres luy
ayant enfuite donné l'On
ction Royale , le Comte d'Argil
luy mit la Couronne fur
la tefte , & le Sceptre dans
la main. Son Couronnement
étoufa beaucoup de troubles.
On ordonna de nouvelles
Levées , & l'on fit fortifier
Sterlin .
Cromvvel voyant
l'Armée du Roy prés de cette
Ville où l'on apportoit fa
cilement toute forte de munitions
& de vivres , & apprenant
qu'elle eſtoit dans la
difpofition de marcher vers
GALANT 227
l'Angleterre , fe campa aux
environs d'Edimbourg , afin
de luy en fermer le paffage.
Il voulut engager ce Prince
à un Combat en s'aprochant
à la vue de fon Camp , &
hazarda une Attaque , dans
laquelle il fut repouffé & mis
en defordre . Ce mauvais fuc
cés le fit réfoudre à quiter
la place. Le Roy aprit qu'il
cftoit allé s'emparer de Fife,
& détacha malheureuſement
quatre mille Hommes , que
commandoit le Chevalier
Brovvn. Lambert les ataqua
avec un Party plus fort , &
228 MERCURE
❤
les défit prés de Nefterton
Ce coup , quoy que fort fenfible
au Roy , n'abatit point
fon courage. Il fit aſſembler
le Confeil de Guerre , où les
Capitaines luy ayant repréfenté
que beaucoup de fes
fidelles Sujets qui n'ofoient
fe déclarer en Angleterre,
prendroient fon Party lors
qu'ils l'y verroient entrer à la
tefte d'une Armée. Il réfolut
de le faire fans aucun retar
dement. Il partit de Sterlin
le 10. Aouft , & fitoft qu'il
fut dans le Comté de l'Enclaftre,
il fit publier une Am
GALANT. 229
nittie Genérale , & défendit
"
toutes les hoftilitez que les
Gens de Guerre ont accoûtumé
de commettre lors qu'ils
entrent dans un Païs Ennemy
, afin de montrer par là,
qu'il ne venoit qu'en Prince
qui aimoit le bien de fes Sujets.
Cromvvel le fuivit , &
Lambert voulut luy difputer
le paffage du Pont de Warifton
, mais il ne pût l'empeſcher
d'arriver àWorceſter,
dont les Habitans luy ouvri
rent les Portes le 22. Aouft,
apres luy avoir aidé à chaffer
la Garniſon que les Etats Y
230 MERCURE
avoient mife. Le Roy y ens
tra au milieu des cris de joye,
& y fit celébrer un Jeûne,
qui fat accompagné de Prieres
extraordinaires. Cromvvel
à qui les Paffages étoient
libres , arriva devant la Place
le 2. de Septembre , & fit
attaquer dés le lendemain le
Pont de Hapton , qui en défendoit
l'entrée du cofté de
la Riviere de Saverne. Ce
le Colonel Maffey
Pofte
que
défendit
avec
beaucoup
de
valeur
, fut
enfin
forcé
. La
mefme
chofe
arriva
à un autre
Pont
, appellé
Porvvik
"
GALANT. 231
1
Bridge , encore plus important
que le premier. Le
Duc d'Hamilton fut mortellement
bleffé en le défendant,
& mourut peu de jours
apres de fa bleſſure . Cetavantage
ne laiffa pas de couſter
cher à Cromvel . Le Roy
chargea luy-même fon Quartier
, bleffa de fa main le Capitaine
de fesGardes , & donna
mille preuves de conduite &
de valeur ; mais enfin un
Corps de huit mille Anglois
s'eftant approché de la Ville,
dans le trouble où le mau.
vais fuccés du Combatavoit
232
MERCURE
mis les Habitans , les Rebel
les fe rendirent maîtres d'une
de fes Portes , y traitérent impitoyablement
tout ce qu'ils
trouverent du Party du Roys
& tout ce que pût faire ce
malheureux Prince , fut de
rallier promptement mille
Chevaux , & de fortir fur le
foir par une Porte oppofée
à celle dont les Ennemis s'étoient
emparez . Toute cette
Troupe marcha plus d'une
heure fans fçavoir où elle alloit.
On s'arrefta pour tenir
Confeil. Quelques
- uns propoférent
de gagner quelque·
GALANT 233
Pofte
avantageux , pour y
attendre
le ralliement
des
Fuyards ; mais Milord Wilmot
leur fit connoiftre
qu'il
eftoit impoffible de réfilter
à cinquante
mille Hommesqui
les pourfuivroient
dés le
lendemain , & qu'il faloit fongerfeulement
à mettre le Roy
en fûreté.Le Comte de Darby
fe chargea de luy trouver une
Retraite affurée , & prenant
Wilmot pour
compagnon de
fon entreprife
, il ne voulut
eftre accompagné
que de
denx
Gentilshommes
nommez:
Giffard , & Walker, Le
Fevrier 1685 . V
1234 MERCURE
Roy partit fous la feule ef
corte de ces quatre Hommes
, & ils firent une telle
diligence , que lors que le
jour parut , ils fe trouvérent
à demy- lieue d'un Chateau
nommé Boscobel
, éloigné
de Worcester
de vingt-fix
milles . Comme
on n'y pouvoit
entrer à une heure indue
fans découvrir
le fecret,
Giffard propofa de prendre
la routed
petit Hameau
appellé les Dames Blanches,
où il répondit de la fidélité
d'un Païfan qu'on nommoit
George Pendrille . On alla
GALANT 23
chez luy mettre pied à terre ,
& le malheur du Roy luy fat
confié , ainfi qu'à trois de
fes Freres , qui promirent
tous de périr plûtoft que de
parler. Enfuite on coupa les
cheveux du Prince , il noircit
fes mains , fes habits fu
rent cachez dans la terre , on
luy en donna un de Païfan,
& George Pendrille luy ayant
fait prendre une Serpe , le
mena couper du bois avec
luy . Comme le fejour de ceux
l'accompagnoient pouqui
voit le trahir , ils s'en fop
érent , apres luy avoir u
236 MERCURE
qué par leurs larmes la vive
douleur que
leur caufoit fa
difgrace . A peine le Roy fut
dans la Foreſt , que deux cens
Chevaux arrivérent au même
Hameau . Les Commandans
voulurent d'abord en vifiter
les Maiſons , mais quelques
Femmes leur ayant dit qu'el
les n'avoient
veu que quatre
Hommes à cheval , qui s'étoient
féparez il n'y avoit
que deux heures , & avoient
pris diférentes routes , ils crûrent
que le Roy eftoit un
de ces Fuyards , & ayant fait
quatre Efcadrons de leurs
GALANT. 237
Troupes , ils prirent tous des
chemins divers. Ce Prince
paffa le jour dans le Bois , &
revint le foir avec Pendrille .
Comme il eftoit réfolu de fe
retirer au Païs de Galles , il
fe fit conduire cette mefme
nuit chez un Gentilhomme
nommé Carelos , dont il con
noiffoit la fidélité . Quoy qu'il
y
euft trois lieuës du Hameau
à la Maifon de ce Gentilhomme
, il les fit à pied avec
ardeur , & luy communiqua
le deffein où il eftoit de paf
fer la Riviere de Saverne.
Carelos l'en détourna ne luy
238 MERCURE
apprenant que tous les Paf
fages en eftoient gardez , &
la nuit fuivante
il le remena.
chez le Païſan qui l'avoit déja
caché. Pendrille craignant
que l'habit de Bucheron ne
trompaſt pas les Habitans du
Hameau , qui pouvoient le
remarquer
, luy propofa un
plus fûr azile. Il y avoit dans
le Bois un Chefne que la Nature
ſembloit avoir fait pour
un deffein extraordinaire
. Il
eftoit fi gros , & toutes fes
branches eftoient fi toufuës,
que vingt Hommes auroient
pû eftre deffus , fans qu'on
GALANT 239
les cuft découverts . Il pria
le Roy d'y vouloir monter ;
ce qu'il fit avec Carelos . Ils
s'y ajustérent fur deux Oreillers
, & y pafférent le jour,
fans autre nourriture
que du
Pain & une Bouteille d'Eau,
Ce Chefne a depuis efté nommé
le Chefne Royal . La nuit
ils retournérent dans la Maifon
de Pendrille . Le Roy y
trouva un Billet de Milord
Wilmot, par lequel il le prioit
de fe rendre chez un Gentilhomme
apellé Witgraves.
Le Roy partit auffi- toft, apres
avoir congedié Carelos . Il fit
240 MERCURE
ce petit Voyage , accompa
gné des quatre Freres , &
monté fur le Cheval d'un
Meulnier. Lajoyede Wilmot
fut grande lors qu'il vit fon
Prince . Il luy dit qu'il n'y avoit
aucune affurance pour fa vie,
s'il ne fortoit du Royaume, &
qu'il avoit pris des mefures
avec Witgraves pour
duire à Bristol, que Mademoi
felle Lane,Fille du Colonel de
ce nom , y devoit aller pour
les Couches d'une Soeur , &
qu'en qualité de Domeſtique
il la porteroit en croupe. La
chole fut fort bien exécutée,
Quelques
le conGALANT.
241
Quelques jours auparavant,
çette Demoiſelle avoit obtenu
un Pafleport pour aller à Briftol
avec un Valet. Elle étoit
adroite & fpirituelle , & déguifa
fi bien le Roy en luy la
vant le vifage d'une Eau dans
laquelle elle avoit fait bouillir
des écorces de noix , & d'au
tres drogues , qu'il eftoit
difficile de le réconnoiftre .
On luy donna un Habit conforme
à ce nouveau Perfonnage
, que la fortune luy faifoit
jouer, & dans cet état ils
prirent le chemin de Briſtol.
Wilmot feignant de chaffer
Fevrier
1685. X
242 MERCURE
un Oyſeau fur le poing , les
accompagna jufques à Brons
graves. Le Cheval du Royys
perdit un fer , & il falut luy
en faire mettre un autre. On
s'adreffarà un Maréchal , qui
en ble ferrant demanda des
nouvelles du Roy , au Roy
mefme. Le Prince ayant répondu
qu'il le croyoit en
Ecoffe , le Maréchal ajoûta
qu'affeurément il étoit caché
dans quelque Maifon d'Angleterre
, & qu'il cuft bien
voulu le découvrir parce
qu'il n'auroit plus à fe mettre
en peine de travailler , s'il
GALANT. 243
trouvoit moyen de le livrer
aux Etats . Cette converfation
finie , le Roy continua
fon chemin , avec la Demor
felle qu'il portoit toûjours en
croupe. Peu de temps apres
à l'entrée d'un Bourg, quel
ques Cavaliers envoyez pour
l'arrefter, vinrent à luy , & len
regardant attentivement , ce
luy qui les commandoit leur
dit qu'ils le laiffaffent paffer,
& que ce n'étoit pas ce qu'ils
cherchoient.
Eftant enfin arrivez chez
M'Norton à trois miiles de
Bristol , le Roy feignit de fe
X
ij
244 MERCURE
trouver mal , & Mademoiſelle
Lane qui paffoit pour la Maitreffe
, luy fit donner une
Chambre . Le lendemain un
Sommelier nommé Jean Pope
, qui avoit long- temps fervy
dans les Armées du feu
Roy , démefla les Traits du
Prince dans ceux du Conducteur
de Mademoiſelle Lane,
& l'ayant prié de defcendre
dans la Cave , il luy prefenta
du Vin , mit enfuite un genoüil
en terre , & luy fit de fi
ardentes proteftations de fidelité
, que le Roy le chargea
du foin de luy chercher un
GALANT. 245
Vaiffeau pour paffer en France
, mais il luy fut impoffible
de s'embarquer à Bristol . Milord
Wilmot l'étant venu joindre
, le conduifit chez le Co.
lonel Windhams , dans le
Comté de Dorfet. Ilssyy furent
trois femaines , attendant les
facilitez d'un Paffage à Lime.
Il y eut encore un fecond obftacle.
Un Capitaine dont on
s'étoit affeuré, manqua de parole
, & pour nouvelle difgra
le Cheval de Milord Wilce,
mot s'étant déferré , le Maréchal
connur aux clouds , que
celuy qui le montoit venoit
X
iij
246 MERCURE
C
du cofté du Nord , & le bruit
fut auffi toft répandu que le
Roy y étoit caché . Cela l'obligea
de fe rendre à Bridport
fans aucun retardement. La
nuit fuivante , il arriva à Braadvvindfor
, ou quantité de
Soldats qui s'embarquoient,
l'ayant mis dans la néceffité
de fe cacher, il retourna chez
le Colonel Windhams , avec
lequel il trouva à propos d'al
ler chez M' Hides , du cofté
de Salisbury. Eftant arrivez
à Mere, ils defcendirent à l'1-
mage S George. L'Hofte qui
connoiffoit le Colonel ,voyant
GALANT. 247
le Roy debout dans la poſture
d'un Domestique,luy demanda
fi c'étoit un de fes Gens.
Enfuite il porta la Santé du
Roy au Colonel. Ils fe rendirent
de là chez M'Hides ; mais
quoy qu'on puft faire , il fur
impoffible de trouver unVaiſ
feau dans tous les environs
de la Mer , du cofté de Southompton,
M' Philips que l'on
avoit envoyé pour cela , rencontra
le Colonel Gunter, qui
fe chargea de tenir une Barque
prefte à Britemhfthed en
Suffex. Le Roy s'y rendit en
diligence & y trouva Milord
X iiij
248 MERCURE
;
Wilmot & Maumfel Mar
chand , dont Gunter s'étoit
fervi pour le fuccés de fon en.
trepriſe . Le Capitaine du Vaifſeau
, nommé Tetershall , fe
mit à table avec le Roy &
Milord Wilmot. Comme il
avoit vû ce Prince aux Du
nes , il le reconnur, & s'apro
chant de l'oreille du Milord;
Vous avez des Domestiques de
bonne Maison , luy dic il , & je
croy qu'il y a peu de Gentils
hommes en Europe auffi bien fer
ruis que vous . Il ne perdit point
de temps. Il donna ſes ordres
pour l'embarquement ; & le
GALANT. 249
Vaiffeau fe mit en Mer le 20.
Octobre à cinq heures du
matin. Dans le Trajer un Matelot
prenant du Tabac , & le
Capitaine connoiffant que la
fumée incommodoit Sa Majefté,
il le gronda , & luy or
donna de fe retirer . Le Matelot
le fit avec peine , & luy
répondit en murmurant par
une façon de parler Angloife
, Qu'un Chat regardoit bien
in Roy. Le Voyage fe fit
fans obftacle . On arriva à
Fécamp en Normandie , où
le Milord qui n'avoit rien dit
jufque- là , avoua au Capitai250
MERCURE
ne que c'étoit le Roy qu'il
avoit paffé. Il fe jetta aux
pieds de fon Prince , qui luy
promit de récompenter un
jour fa fidelité. Le Roy ayant
changé d'habits à Rouen , où
il demeura peu de temps
chez M'Scot, vint à Paris attendre
les Révolutions qui
font ordinaires à la tyrannie.
Olivier Cromvvel, déclaré
Protecteur des trois Royaumes
en 1653. mourut en 1658
Apres fa mort on donna la
mefme qualité à Richard fon
Fils ; mais eftant incapable
de la foûtenir , le Parlement
GALANT 251
luy fit demander fa démif
fion , & il la donna . Le Ges
néral Monk fe fervit avec
tant de zéle , de prudence &
de conduire , des difpofitions
où il voyoit les efprits pour
le rétabliffement de la Monarchie,
qu'il fut réfolu qu'on
rappelleroit le Roy. Le Par
lement luy dépeſcha le 19. de
May 1660. un Gentilhomme
nommé Kilgrevv , pour luy
porter la nouvelle de fa Proclamation
, qui avoit efté faite
à Londres ce mefme jour ,
& ayant donné ordre à l'Amiral
Montagu de fe mettre en
252 MERCURE
mer pour aller le recevoir fur
les Coftes de Hollande , il
nomma dixhuit , Commiffaires
, fix de la Chambre des
Pairs , & douze de la Chambre
des Communes
, pour
le fapplier de venir prendre
poffeflion de fes trois Royau
mes. La Ville de fon cofté
choifit vingt de fes plus illuftres
Habitans
, pour luy
aller rendre les mefmes devoirs.
Tous ces Députez furent
favorablement reçûs à
la Haye , où le Roy eftoit
alors . Ce Prince en partit le
2. de Juin , &le Vaiffeau furGALANT.
253
lequel il s'embarqua , parut
au Port de Douvres deux
jours apres , 4 du mefme
mois. Il y fut reçû par Monk,
qui fe mit d'abord à genoux.
Le Roy le releva en l'embraffant
, & en l'appellant fon
Pere. Apres une conférence
d'une demie heure qu'il eut
avec luy en particulier , ce
Prince fe mit fous un Dais
qui eftoit tendu au bord de
lå Mer, fous lequel les Ducs
d'York , & de Gloceſter , fes
Freres, fe mirent auffi Ils reçûrent
là les refpects de laNobleffe,
& mótérent enfuite en
254 MERCURE
Carroffe, où le Genéral Monk
prit place , auffi-bien que le
Duc de Buckincam. Dans
le chemin de Cantorbery ils
trouvérent quelques vieux
Régimens , avec les Compagnies
de la Nobleffe en
Bataille. Le Roy monta à
cheval , & y fit fon Entrée
à leur tefte . Pendant fon féjour
dans cette Ville , il donna
l'Ordre de la Jarretiere au
Genéral Monk. Elle luy fuc
attachée par les Ducs d'York
& de Glocefter. Le Duc de
Southampton y reçût le même
honneur ; mais il y cut
GALANT. 255
·
cette diférence , que ce fut
feulement un Héraut qui luy
mit l'Ordre. Peu de jours
apres le Roy fit fon entrée à
Londres . Elle fut fort éclatante.
Plufieurs Troupes de
Gentilshommes & de Bour-
>
geois richement vétus , & fu
perbement montez mar
choient devant luy. Celle qui
l'environnoit étoit compofée
des Herauts, des Porte-Maffe ,
du Maire qui étoit teſte nuë
avec l'épée Royale à la main ,
du General Monk , & du Duc
de Buckincam
. qui le precédoient
auffi tefte nue. Il mar
256 MERCURE
•
choit entre les Ducs d'Yorck
& de Glocefter , & à pei
ne eut-il mis pied à terre à
Witheal , qu'au lieu de fe rafraîchir
, il alla au Parlement.
Il entra dans la Chambre des
Pairs , manda celle des Com
munes , & les voyant affenblez
, il les affeura qu'il fe
fouviendroit toûjours de la
fidelité qu'ils avoient gardée
pour fon fervice , & les pria
tous d'agir pour le foulage.
ment de fon Peuple. Il fut
Couronné en 1661 dans la
mefme Ville , avec une Pompe
extraordinaire , & l'année
GALANT 257
fuivante, il épousa Catherine,
Infante de Portugal , Fille de
Jean IV. & Soeur du Roy Alphonfe
VI. C'est une Princeffe
dont la vertu & la pieté,,
vont au delà de tout ce qu'on
en peut dire. Il s'eft depuis :
appliqué avec de grands foinsà
étouffer les defordres que
les Factieux tâchoient de fai
re revivre. Il en eft venu à
bout, & a remporté de grands
avantages fur les Hollandois ,,
en deux diverfes rencontres.
Une preuve incóteftable dess
grandes qualitez de ce Monarque
, c'est qu'il s'eftoire
Fevrier 1685,
Y
218 MERCURE
1
acquis l'amitié du Roy. Je
viens aux particularitez de fa
pg zed eated xusb. sb
mort.
+
97 Le Dimanche au foir 11. de
ce mois , il parut dans une
parfaite fanté, & plus gay qu'à
l'ordinaire. Il eut la nuit de
grandes inquietudes , & fon
fommeil fut interrompu . Il
ne voulut neanmoins appeller
perfonne , & s'eftant levé
dés fept heures du matin , il
demanda qu'on luy fiſt le
poil. A peine luy eut on mis
un Peignoir, qu'un fort grand
treffaillement luy fit pouffer
avec force les coudes en ar
A
GALANT
259
&
riere.
fois , Mon Il cria trots
Dies & demeura
enfuite
prés
de deux heures
fans pouvoir
parler. Un Valet de Chambre
courut
à l'Apartement
de
Monfieur
le Duc d'York
,
luy dit que l'on croyoit
le
Roy mort. Ce Duc vint toute
effrayé, & en Robe de Cham--
bre. On faigna le Roy deux:
fois , on luy appliqua
des
Vantoufes
, & on luy donna:
un Vomitif
, La connoiffance
kay revint un peu , & il de--
manda
à boire. On eut quelque
efpérance
de fa guériſon
,
jufqu'au
Mercredy
au foir
Y it
260 MERCURE
Cependant le mal l'ayant re
pris avec plus de violence , il
mourut le Vendredy 16. entre
onze heures & midy . Il
n'a eu aucuns Enfans de la
Reyne , mais il en a laiffé de
naturels , qui font
Jacques Scotty Duc de
Montmouth, Comte de Dun .
cafter , & de Dolkeith , Chevalier
de la Jarretiere , & c.
"Charles Lenox , Duc de
Richemont , Fils de la Du--
cheffe de Porthmouth ..
Charles Filts Roy, Duc de
Southampton.
Henry Files Roy , Duc de
GALANT.: 261
Grafton , qui a épousé en
1672. la Fille unique de Henry
2 Baron d'Arlington ,Secretaire
d'Etat.
-Georges
Filts Roy, Comte
de Northumberland
.
"
Anne Filts Roy , qui a
-époufé Thomas Leonard ,
Comte de Suffeк ; tous Enfans
de Barbe Villiers , Ducheffe
de Cleveland , Comteffe
de Caftelmene, Baronne
deNonfuch,& Fille du Comte
de Grandiffon.
Charles Filts Charles ,Comte
de Plimouth , Filts de Mademoiſelle
de Kyroüel , Du262
MERCURE
*
cheffe de Portzhmouth , &
Comteffe d'Aubigny. I a
épouté une Fille de Thomas
Ofborn , Comte de Damby,
Grand Tréforier d'Angle
terre. 968
3 Charlote Filts Roy , qui
a époufé le Comte de Lieghfield
.
Barbe Filts - Roy.
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Résumé : Mort du Roy d'Angleterre, [titre d'après la table]
Le texte relate les événements entourant la fuite et les tentatives de restauration du Duc d'York, futur Jacques II, et du Prince de Galles, futur Charles II. Le Duc d'York, déguisé, s'échappe d'Angleterre et parvient à embarquer malgré les réticences d'un marinier qui reconnaît son ordre de la Jarretière. Le Prince de Galles, après son évasion, suscite une révolte en Angleterre et en Écosse, mais est démasqué par le chevalier Dishinton. En 1648, Charles II tente de rallier des vaisseaux hollandais et anglais pour libérer son père, Charles Ier, mais échoue face à la résistance et à une tempête. Charles Ier est exécuté en 1649, et Charles II, proclamé roi en Écosse, cherche à venger son père. Il envoie chercher le marquis de Montrose, qui est capturé et exécuté malgré ses efforts pour rejoindre Charles II. Ce dernier, malgré les obstacles, continue ses tentatives pour restaurer la monarchie. Le texte décrit également les événements entourant le règne de Charles II en Écosse. Le roi obtient des États écossais l'autorisation de lever seize mille hommes de pied et six mille chevaux. Les commandants nommés incluent le comte de Leven pour l'infanterie et Holborne pour la cavalerie, avec Montgomery et Lefley comme adjoints. Charles II est nommé généralissime. Cependant, les troupes écossaises sont défaites par Cromwell à la bataille de Copperfpec, subissant de lourdes pertes. Cette défaite refroidit les États écossais, qui imposent des restrictions au roi et cherchent à limiter son pouvoir. Malgré ces difficultés, Charles II est couronné roi d'Écosse le 4 janvier 1651 à l'abbaye de Schoone. Après son couronnement, il marche vers l'Angleterre avec son armée, mais est finalement défait à la bataille de Worcester le 22 août 1651. Forcé de fuir, il se cache dans diverses maisons et forêts, notamment dans le célèbre 'Chêne Royal'. Avec l'aide de fidèles sujets comme George Pendrille et Milord Wilmot, il parvient à échapper à ses poursuivants et à se mettre en sécurité. Le texte relate également la fuite du roi Jacques II, déguisé en domestique, accompagné de la demoiselle Lane, vers Bristol. Déguisé grâce à un mélange d'écorces de noix et d'autres drogues, le roi parvient à éviter la reconnaissance. Leur chemin est marqué par plusieurs incidents, comme la perte d'un fer de cheval du roi, qui doit être remplacé, et des rencontres avec des cavaliers envoyés pour l'arrêter. Grâce à l'aide de fidèles sujets, dont Jean Pope et Milord Wilmot, le roi parvient à éviter les obstacles et à se cacher chez divers nobles, tels que le colonel Windhams et M. Hides. Après plusieurs tentatives infructueuses pour trouver un vaisseau, le roi s'embarque finalement à Britemhsthed en Suffolk et arrive à Fécamp en Normandie. Le voyage se déroule sans encombre, et le roi est reconnu par le capitaine du vaisseau, Tetershall. À Rouen, le roi change d'habits et se rend à Paris pour attendre les révolutions politiques. Le texte mentionne également la mort d'Olivier Cromwell et la restauration de la monarchie avec le retour du roi, proclamé par le Parlement et accueilli triomphalement à Londres. Le roi est couronné en 1661 et épouse Catherine de Portugal. Il lutte contre les factieux et remporte des victoires contre les Hollandais. Le texte se termine par la description de la mort du roi en février 1685, après une nuit d'inquiétudes et de souffrances. Le roi laisse plusieurs enfants naturels, dont Jacques Scott, duc de Monmouth, et Charles Lenox, duc de Richemont.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 265-272
Proclamation du nouveau Roy, [titre d'après la table]
Début :
Les Seigneurs du Conseil prièrent humblement le Roy, [...]
Mots clefs :
Seigneur, Serment, Conseil privé, Proclamation, Charge, Gouvernement, Cérémonie, Baron, Duc, Comte, Milord, Chevalier
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Proclamation du nouveau Roy, [titre d'après la table]
Les Seigneurs du Confeil
priérent humblement le Roy,
que les obligeantes expref
fions fuffent rendües publi-
Fevrier 1685.
Z
266 MERCURE
ques ; ce qui fut accordé
par Sa Majesté
. Elle ordonna
auffi , apres qu'Elle
cut fair
prefter
Serment
à tous ces
Seigneurs
, & autres du Confeil
Privé du feu Roy
, pour
eftre de fon Confeil
Privé, que
l'on publiaft
une Proclamafaire
fçavoir
que
tion ,
pour
fon plaifir
eftoit , que tous
ceux qui avoientCharge
dans
le Gouvernement
à la mort
du Roy Charles
II. continuaf
fent dans l'exercice
de leurs
Charges
jufqu'à
nouvel
ordre
de Sa Majesté
. Cette
Proclamation
fe fit l'aprefdînée
GALANT. 267
en ces termes , devant la
Porte de Witheall , à la Porte
deTemple- Barr, & à la Bourſe,
Royale, avec les Cerémonies.
accoûtumées.
Cremer dans
Omme il a plû à Dieu de
es mic
noftre fouverain Seigneur Char
les II, du
nom ,
nom
, de glorieuſe
mémoire
→ par la mort de qui les
Couronnes Impériales d'Angleterre,
d'Ecoffe & d'Irlande,font.
uniquement & légitimement dé
voluës à Haut & Puiffant Prince
Jacques Duc dYork & d Ah
banie, Frere Unique , &feul
Z ij
268 MERCURE
Héritier du feu Roy ; Nous les
Seigneurs Eccléfiaftiques & Sé
culiers de ce Royaume , eftant fe
condez de ceux du Confeil Privé
de Sa Majefté , & d'un grand
nombre des Principaux de la Nobleſſe,
comme aufſfidu LordMaire,
des Echevins , & de quantité
de Bourgeois de Londres , Pu
blions & Proclamons par ces
Préfentes , d'une commune voix
& d'un confentement , tant de
coeur que de bouche , que le Haut
& Puiffant Prince Facques 11.
est préfentement, par La mort de
noftre Souverain de glorieufe mé
moire , devenu nostre feul & lé
1
GALANT 269
gitime Prince , felon l'ordre de
la Succeffion , & le Droit du
Royaume , facques II. par la
grace de Dieu Roy d'Angleterre,
d'Ecoffe & d'Irlande , Défenfeur
de la Foy, &c, à qui nous
promettons toute fidélité & conftante
obeiffance de toutes les affe-
Etions de nos ames ; priant Dieu
par qui les Roys régnent , de benir
le Roy Jacques II. & de le
faire regner long- temps & heureuſementfur
nous.
Dieuconferve le Roy Jacques II.
La Proclamation fut fignée
de ceux dont yoicy les noms .
Z
iij
270 MERCURE
Guillaume Archevefque, de
Cantorbéry,
Le Baron de Guilford , Garde
"des Seaux .
Le Marquis Halyfax , Garde
du Seau Privé.
Le Comte de Rocheſter, Préfi'ent
du Confeil .
Le Duc de Norfolke.
Le Duc de Sommerfet.
Le Duc d'Albemarle.
Le Duc de Beaufort
Le Comte de Shravvdbury,
Le Comte de Kent.
Le Comte de Huntingdon ,
Le Comte de Pembroke .
Le Comte de Salisbury .
Le Comte de Brigvvater.
Le Comte de Vvoftmorland.
Le Comte de Mancheſter . ”
Le Comte de Peterborovv.
GALANT 271
Le Comte de Chefterfield..
Le Comte de Sunderland .
Le Comte de Scarfdale.
Le Comte de Clarendon .
Le Comte de Bath .
Le Comte de Craven.
Le Comte d'Ailesbury.
Le Comte de Lieckfield .
Le Comte de Feversham .
Le Comte de Berkeley.
Le Comte de Morray.
Le Comte de Mideleton .
Le Vicomte Faucomberg
.
Le Vicomte Nevvport
.
Le Vicomte de Veymouth.
Le Vicomte Lumley.
Le Vicomte Clifford .
1
Henry, Evefque de Londres .
Nathanaël , Evêque d'Arbam,
Thomas , Evefque de Rochefter.
Z iiij
272 MERCURE
Milord Nort & Gray.
Milord Maynard .
Milord Cornvvalis .
Milord Arundel .
Milord Godolphin.
Milord Drunimond.
Le Chevalier Jean Ernée.
Le Chevalier Thomas Chicheley.
Le Chevalier Lionel Jenkins.
priérent humblement le Roy,
que les obligeantes expref
fions fuffent rendües publi-
Fevrier 1685.
Z
266 MERCURE
ques ; ce qui fut accordé
par Sa Majesté
. Elle ordonna
auffi , apres qu'Elle
cut fair
prefter
Serment
à tous ces
Seigneurs
, & autres du Confeil
Privé du feu Roy
, pour
eftre de fon Confeil
Privé, que
l'on publiaft
une Proclamafaire
fçavoir
que
tion ,
pour
fon plaifir
eftoit , que tous
ceux qui avoientCharge
dans
le Gouvernement
à la mort
du Roy Charles
II. continuaf
fent dans l'exercice
de leurs
Charges
jufqu'à
nouvel
ordre
de Sa Majesté
. Cette
Proclamation
fe fit l'aprefdînée
GALANT. 267
en ces termes , devant la
Porte de Witheall , à la Porte
deTemple- Barr, & à la Bourſe,
Royale, avec les Cerémonies.
accoûtumées.
Cremer dans
Omme il a plû à Dieu de
es mic
noftre fouverain Seigneur Char
les II, du
nom ,
nom
, de glorieuſe
mémoire
→ par la mort de qui les
Couronnes Impériales d'Angleterre,
d'Ecoffe & d'Irlande,font.
uniquement & légitimement dé
voluës à Haut & Puiffant Prince
Jacques Duc dYork & d Ah
banie, Frere Unique , &feul
Z ij
268 MERCURE
Héritier du feu Roy ; Nous les
Seigneurs Eccléfiaftiques & Sé
culiers de ce Royaume , eftant fe
condez de ceux du Confeil Privé
de Sa Majefté , & d'un grand
nombre des Principaux de la Nobleſſe,
comme aufſfidu LordMaire,
des Echevins , & de quantité
de Bourgeois de Londres , Pu
blions & Proclamons par ces
Préfentes , d'une commune voix
& d'un confentement , tant de
coeur que de bouche , que le Haut
& Puiffant Prince Facques 11.
est préfentement, par La mort de
noftre Souverain de glorieufe mé
moire , devenu nostre feul & lé
1
GALANT 269
gitime Prince , felon l'ordre de
la Succeffion , & le Droit du
Royaume , facques II. par la
grace de Dieu Roy d'Angleterre,
d'Ecoffe & d'Irlande , Défenfeur
de la Foy, &c, à qui nous
promettons toute fidélité & conftante
obeiffance de toutes les affe-
Etions de nos ames ; priant Dieu
par qui les Roys régnent , de benir
le Roy Jacques II. & de le
faire regner long- temps & heureuſementfur
nous.
Dieuconferve le Roy Jacques II.
La Proclamation fut fignée
de ceux dont yoicy les noms .
Z
iij
270 MERCURE
Guillaume Archevefque, de
Cantorbéry,
Le Baron de Guilford , Garde
"des Seaux .
Le Marquis Halyfax , Garde
du Seau Privé.
Le Comte de Rocheſter, Préfi'ent
du Confeil .
Le Duc de Norfolke.
Le Duc de Sommerfet.
Le Duc d'Albemarle.
Le Duc de Beaufort
Le Comte de Shravvdbury,
Le Comte de Kent.
Le Comte de Huntingdon ,
Le Comte de Pembroke .
Le Comte de Salisbury .
Le Comte de Brigvvater.
Le Comte de Vvoftmorland.
Le Comte de Mancheſter . ”
Le Comte de Peterborovv.
GALANT 271
Le Comte de Chefterfield..
Le Comte de Sunderland .
Le Comte de Scarfdale.
Le Comte de Clarendon .
Le Comte de Bath .
Le Comte de Craven.
Le Comte d'Ailesbury.
Le Comte de Lieckfield .
Le Comte de Feversham .
Le Comte de Berkeley.
Le Comte de Morray.
Le Comte de Mideleton .
Le Vicomte Faucomberg
.
Le Vicomte Nevvport
.
Le Vicomte de Veymouth.
Le Vicomte Lumley.
Le Vicomte Clifford .
1
Henry, Evefque de Londres .
Nathanaël , Evêque d'Arbam,
Thomas , Evefque de Rochefter.
Z iiij
272 MERCURE
Milord Nort & Gray.
Milord Maynard .
Milord Cornvvalis .
Milord Arundel .
Milord Godolphin.
Milord Drunimond.
Le Chevalier Jean Ernée.
Le Chevalier Thomas Chicheley.
Le Chevalier Lionel Jenkins.
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Résumé : Proclamation du nouveau Roy, [titre d'après la table]
En février 1685, les Seigneurs du Conseil demandèrent au Roi de rendre publiques les expressions obligatoires. Le Roi accepta et ordonna que les membres du Conseil Privé du défunt Roi Charles II prêtent serment pour rejoindre son propre Conseil Privé. Une proclamation fut publiée, confirmant que les fonctionnaires en poste à la mort de Charles II continuaient leurs fonctions jusqu'à nouvel ordre. Cette proclamation fut lue à Whitehall, Temple-Barr et la Bourse Royale. La proclamation annonça également que les couronnes d'Angleterre, d'Écosse et d'Irlande étaient transmises au Prince Jacques, Duc d'York et d'Albanie, frère et héritier du défunt Roi. Les dignitaires ecclésiastiques et séculiers, ainsi que la noblesse et les représentants de Londres, proclamèrent Jacques II comme leur souverain légitime et lui jurèrent fidélité. La proclamation fut signée par divers dignitaires, incluant des archevêques, barons, marquis, comtes, vicomtes et chevaliers.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 279-281
« Le nouveau Roy a de la valeur, & de l'intrepidité. [...] »
Début :
Le nouveau Roy a de la valeur, & de l'intrepidité. [...]
Mots clefs :
Roi d'Angleterre, Valeurs, Naissance, Mariage, Anne Hyde, Comte, Enfants, Princesse, Duc
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le nouveau Roy a de la valeur, & de l'intrepidité. [...] »
Le nouveau Roy a de la
valeur , & de l'intrepidité. Il
eft ferme dans fes réſolutions,
& garde inviolablement fa
parole. Il nâquit le 14. Octobre
1633. & en 1660. il épouſa
Anne Hyde , Fille du Milord
Edouard Hyde , grand Chan280
MERCURE
celier d'Angleterre , & depuis
Comte de Clarendon , dont
il a eu plufieurs Fils qui n'ont
point vécu. Il luy eft feulement
refté deux Filles de ce
Mariage , fçavoir Marie Prin
ceffe d'York , qui en 1677.
époufa Guillaume Henry de
Naffau , Prince d'Orange , &
Anne Princeffe d'York , mariée
depuis peu de temps au
Prince George, Frere du Roy
de Dannemark . Madame la
Ducheffe d'York étant morte
le 10. Avril 1671. il épouſa en
fecondes Nopces le 30. Septembre
1673. Marie Eleonor
GALANT : 281
d'Efte , Princeffe de Modene,
Fille du Duc François. C'eſt
le charme de toute l'Angle
terre. Elle méne une vie
exemplaire , & l'ambition n'a
jamais efté capable de luy
faire faire aucune fauffe dé
marche.
valeur , & de l'intrepidité. Il
eft ferme dans fes réſolutions,
& garde inviolablement fa
parole. Il nâquit le 14. Octobre
1633. & en 1660. il épouſa
Anne Hyde , Fille du Milord
Edouard Hyde , grand Chan280
MERCURE
celier d'Angleterre , & depuis
Comte de Clarendon , dont
il a eu plufieurs Fils qui n'ont
point vécu. Il luy eft feulement
refté deux Filles de ce
Mariage , fçavoir Marie Prin
ceffe d'York , qui en 1677.
époufa Guillaume Henry de
Naffau , Prince d'Orange , &
Anne Princeffe d'York , mariée
depuis peu de temps au
Prince George, Frere du Roy
de Dannemark . Madame la
Ducheffe d'York étant morte
le 10. Avril 1671. il épouſa en
fecondes Nopces le 30. Septembre
1673. Marie Eleonor
GALANT : 281
d'Efte , Princeffe de Modene,
Fille du Duc François. C'eſt
le charme de toute l'Angle
terre. Elle méne une vie
exemplaire , & l'ambition n'a
jamais efté capable de luy
faire faire aucune fauffe dé
marche.
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Résumé : « Le nouveau Roy a de la valeur, & de l'intrepidité. [...] »
Le nouveau roi d'Angleterre, né le 14 octobre 1633, est connu pour sa valeur et son intrepidité. Il épousa Anne Hyde en 1660, avec qui il eut deux filles : Marie et Anne. Après le décès d'Anne en 1671, il se remaria avec Marie Éléonore d'Este en 1673. Cette dernière est admirée pour sa vie exemplaire.
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7
p. 153-156
Mort de Madame la Princesse de Guimené, [titre d'après la table]
Début :
Anne de Rohan, Princesse de Guemené, est morte le 14 [...]
Mots clefs :
Anne de Rohan, Princesse, Décès, Fille, Prince, Château, Duc, Maison de Rohan, Maréchal de France, Comte, Maison royale, Princesse du sang, Armes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mort de Madame la Princesse de Guimené, [titre d'après la table]
Anne de Rohan , Princeffe
de Guemené, eft morte le
14.
de ce mois , en fa Terre de
Rochefort , âgée de plus de
quatre - vingt ans . Elle eftoit
Fille de Pierre , Prince de
Guemené , & de Madelaine
de Rieux Château neuf , &
avoit épousé en 1617. Loüis
de Rohan VII. du nom , fon
Coufin Germain
, Prince de
Guemené
, depuis Duc de
Mont- Bazon , Pair & Grand-
Veneur de France , Chevalier
des Ordres du Roy , Chef du
Nom & des Armes de l'Illu
ftre & Ancienne Maiſon de
154 MERCURE
Rohan , mort à Paris en 1667 .
âgé de 68. ans. De ce Mariage
font fortis Louis &
Charles de Rohan. Charles ,
Duc de Mont- Bafon , Prince
de Guemené, Comte deMontauban
, prit Alliance avec
Jeanne Armande de Schomberg
, Fille puifnée de Henry ,
Comte de Nanteuil- le Haudouin
, Maréchal de France ,
& d'Anne de la Guiche , dont
il eut entr'autres Enfans,
Charles, Prince de Guemené,
marié en premieres Noces
avec Marie- Anne d'Albert-
Luynes , Fille de CharlesGALANT.
155
ノ
Louis , Duc de Luynes , morte
en 1679. & en fecondes
Noces , avec Charlote - Elizabeth
de Cochefilet , Fille de
M' le Comte de Vauvineux ..
Ceux de la Maifon de Rohan ,
iffue des Anciens Comtes de
Vane, qui eftoit une Branche
de la Maifon Royale & Ducale
de Bretagne , ſe font alliez
plufieurs fois avec celle
de leurs Souverains , qui ont
épousé des Filles de cette
Maifon , & qui leur ont donné
des leurs. Il en eft arrivé
de mefine dans la Maiſon
Royale de France . Plufieurs
156 MERCURE
Princes & Princeffes du Sang
fe font auffi alliez à cette Illuftre
Maiſon , auffi bien que
celles de Navarre , d'Ecoffe,
de Baviere , Lorraine, Albret,
Foix , Armagnac , & autres.
Celle cy porte pour Armes,
de Gueule à neuf Macles d'or,
3.3.3 . Ils ont pris ces Armes,
des Cailloux de leurTerre,dás
leſquels , quand on les caffe,
on trouve emprainte la Figure
des Macles , qui ont une, efpece
de couleur d'or , dont le
fond eſt un peu rougeaftre .
de Guemené, eft morte le
14.
de ce mois , en fa Terre de
Rochefort , âgée de plus de
quatre - vingt ans . Elle eftoit
Fille de Pierre , Prince de
Guemené , & de Madelaine
de Rieux Château neuf , &
avoit épousé en 1617. Loüis
de Rohan VII. du nom , fon
Coufin Germain
, Prince de
Guemené
, depuis Duc de
Mont- Bazon , Pair & Grand-
Veneur de France , Chevalier
des Ordres du Roy , Chef du
Nom & des Armes de l'Illu
ftre & Ancienne Maiſon de
154 MERCURE
Rohan , mort à Paris en 1667 .
âgé de 68. ans. De ce Mariage
font fortis Louis &
Charles de Rohan. Charles ,
Duc de Mont- Bafon , Prince
de Guemené, Comte deMontauban
, prit Alliance avec
Jeanne Armande de Schomberg
, Fille puifnée de Henry ,
Comte de Nanteuil- le Haudouin
, Maréchal de France ,
& d'Anne de la Guiche , dont
il eut entr'autres Enfans,
Charles, Prince de Guemené,
marié en premieres Noces
avec Marie- Anne d'Albert-
Luynes , Fille de CharlesGALANT.
155
ノ
Louis , Duc de Luynes , morte
en 1679. & en fecondes
Noces , avec Charlote - Elizabeth
de Cochefilet , Fille de
M' le Comte de Vauvineux ..
Ceux de la Maifon de Rohan ,
iffue des Anciens Comtes de
Vane, qui eftoit une Branche
de la Maifon Royale & Ducale
de Bretagne , ſe font alliez
plufieurs fois avec celle
de leurs Souverains , qui ont
épousé des Filles de cette
Maifon , & qui leur ont donné
des leurs. Il en eft arrivé
de mefine dans la Maiſon
Royale de France . Plufieurs
156 MERCURE
Princes & Princeffes du Sang
fe font auffi alliez à cette Illuftre
Maiſon , auffi bien que
celles de Navarre , d'Ecoffe,
de Baviere , Lorraine, Albret,
Foix , Armagnac , & autres.
Celle cy porte pour Armes,
de Gueule à neuf Macles d'or,
3.3.3 . Ils ont pris ces Armes,
des Cailloux de leurTerre,dás
leſquels , quand on les caffe,
on trouve emprainte la Figure
des Macles , qui ont une, efpece
de couleur d'or , dont le
fond eſt un peu rougeaftre .
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Résumé : Mort de Madame la Princesse de Guimené, [titre d'après la table]
Anne de Rohan, princesse de Guéméné, est décédée à l'âge de plus de quatre-vingts ans sur ses terres de Rochefort. Elle était la fille de Pierre, prince de Guéméné, et de Madeleine de Rieux Château Neuf. En 1617, elle épousa Louis de Rohan VII, son cousin germain, prince de Guéméné, duc de Montbazon, pair et grand veneur de France, chevalier des ordres du roi, et chef de la maison de Rohan. Louis de Rohan décéda à Paris en 1667 à l'âge de 68 ans. Leur union donna naissance à deux fils, Louis et Charles de Rohan. Charles, duc de Montbazon, prince de Guéméné, comte de Montauban, se maria avec Jeanne Armande de Schomberg, fille du maréchal de France Henry, comte de Nanteuil-le-Haudouin, et d'Anne de La Guiche. Ils eurent plusieurs enfants, dont Charles, prince de Guéméné, qui se maria d'abord avec Marie-Anne d'Albert-Luynes, puis avec Charlotte-Élisabeth de Cochefilet. La maison de Rohan, issue des anciens comtes de Vannes, est une branche de la maison royale et ducale de Bretagne. Elle s'est alliée à plusieurs maisons princières, telles que Navarre, Écosse, Bavière, Lorraine, Albret, Foix, et Armagnac. Les armes de la maison de Rohan sont de gueules à neuf macles d'or disposées en 3, 3, 3, inspirées des cailloux de leurs terres.
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8
p. 202-227
Description entiere du Carnaval de la Cour, & de la Course des Testes, [titre d'après la table]
Début :
Je viens à l'Article que je vous ay promis du Carnaval [...]
Mots clefs :
Monseigneur le Dauphin, Mademoiselle , Marquis, Avocat, Mascarade, Duc de Bourbon, Carnaval, Habits, Cour, Prince, Trompettes, Timbales, Course, Comte, Divertissement, Quadrille, Opéra, Bal, Comédie, Madame la Dauphine, Déguisements, Richesse, Mademoiselle , Armes, Cortège, Couleur, Foire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Description entiere du Carnaval de la Cour, & de la Course des Testes, [titre d'après la table]
Je viens à l'Article que je
vous ay promis du Carnaval
de la Cour , pendant les mois
GALANT. 203.
de Janvier & de Fevrier. Les
Divertiffemens n'y ont point
ceffé. L'Opera de Roland y
a efté repreſenté une fois cha
que Semaine , & il y avoit al
ternativement Bal , Comedie
& Opera. Toute la Cour a
maſqué ſept fois , & auroit
continué à fe donner ce plaifir
, fi la mort du Roy d'Angleterre
n'euft interrompu
pour quelques jours tous les
Divertiffemens. Chaque jour
de Maſcarade , Monſeigneur
le Dauphin changeoit quatre
ou cinq fois d'habits , où l'on
n'oublioit rien pour empef
204 MERCURE
cher qu'il ne fuft reconnu. I
furprit toute l'Affemblée dans
la premiere Mafcarade , avec
un habit de Chauve fouris ..
La magnificence & l'invention
ont paru dans tous les
déguiſemens de Monſieur le
Duc. Les habits de fa Troupe.
eſtoient à cette premiereMafcarade
de grandes Robes , de
differentes couleurs , diverfement
& richement chamarées
, d'où fortoit un Col qui
s'élevoit fort haut , & s'abaiſ
foit , & fur lequel paroiffoit
une tefte d'Animal , coeffée
en Chauve fouris. Monfieur
GALANT. 205
le Duc de Bourbon , qui étoit
fous l'une de ces Machines,
avoit un habit de Femme de
Strasbourg. Mademoiſelle de
Bourbon , qui eftoit ſous une
autre , en avoit un de Magicienne,
& les Filles d'honneur
de Madame la Dauphine,
qui en rempliffoient d'autres,
eftoient diverſement vétuës .
Je ne dois pas oublier icy à
vous dire , que Monfieur le
Duc de Bourbon n'avoit encor
fait de fejour à la Cour,
que pendant ce Carnaval , &
qu'il y a paru au fortir de fes
Etudes , avec un air , des ma
206 MERCURE
nieres , & un eſprit auffi libre
que s'il y euft paffé fes premieres
années , & qu'il cust
eu un âge plus avancé . Le
fecond jour qu'on maſqua,
la Maſcarade
de Monſeigneur
le Dauphin repreſentoit toute
la Troupe Italienne . Ce Prin
ce eftoit veſtu en Docteur.
Ceux qui formoient cette
Mafcarade , eftoient Monfieur
le Prince de Conty,
Monfieur le Prince de la
Roche-fur-Yon , M' le Prince
de Turenne , M' le Duc de
Roquelaure , Miles Marquis
de Bellefonds
, d'Alincour
,
GALANT. 207
& de Liancour. Madame la
Dauphine , fit ce jour là une
Mafcarade de Perroquets
,
Monfieur le Duc de Bourbon
parut avec un riche habit
de Seigneur Hongrois , &
Mademoiſelle de Bourbon,
avec un habit de Païfane,
d'une proprieté furprenante.
Monfieur le Duc du Maine,
fe fit admirer le mefme jour,
avec une Maſcarade de petits
vieillards & de petites vieilles.
Rien n'a paru plus beau , &
l'on ne pouvoit ſe laſſer de
les regarder. Ceux qui compofoient
cette Mafcarade ་་
208 MERCURE
eftoient , Monfieur le Duc
du Mayne , Monfieur le
Comte de Thoulouſe , M' de
Manfini , Mi le Marquis de
la Vrilliere , Mademoiſelle de
Nantes , Mademoiſelle de
Blois , & Mademoiſelle de
Château - neuf.
Dans la troifiéme Maſcarade
, Monſeigneur le Dauphin
parut d'abort déguisé
avec quatre vifages. Enfuite,
prit un habit de Flamande
avec un Mafque de Perroquet
, & changea à fon ordinaire
quatre ou cinq fois
d'habit. Monfieur le Duc de
GALANT. 209
Bourbon , parut ce foir là..
avec un habit de Noble Venitien
, & Mademoiſelle de :
Bourbon s'y fit remarquer
par la propreté , & la richeffe
d'un habit magnifique. Toute
la Cour maſqua ce foir là ,,
& le mélange des habits gro
tefques , & fuperbes , eftant
fort agréable à la vuë , divertit
beaucoup.
Le quatrième jour qu'on
mafqua , Monfeigneur le
Dauphin mit pour premier:
habit celuy d'un Operateur,
& tirant feulement un petit
cordon , il parut en un inftant
Mars 1685, Si
210 MERCURE
vétu en grand Seigneur Chinois
. Des changemens auffi
furprenans le firent paroiftre
encore le mefme foir avec
deux autres habits . Monfieur
le Duc de Bourbon mit ce
foir-là un habit de Païfan,
auffi riche que bien entendu .
Monfieur le Duc de Mortemar
, qui fe diftingue en tout
ce qu'il fait , vint à l'Affemblée
du mefme jour avec un
habit tout formé de Manchons
jufqu'à la coëffure. Ils
étoient de differentes couleurs
. Il avoit une Palatine
pour Cravate , & un Mafque
GALANT. 211
qui imitoit le vifage d'un
homme tout tranfi de froid .
Sa barbe paroiffoit toute ge
lée , & les glaçons y pen
doient . Il euft eſté impoflibie
de le reconnoiftre s'il ne te
fuft pas découvert luy- même.
Neuf Quilles & la Boulle fe
trouverent dans le Balle jour
de la cinquiéme Affemblée;
c'eftoit la Mafcarade de Monfeigneur
le Dauphin. Ceux
qui reprefentoient ces Quilles.
eftoient affis deffous , & de
petites feneftres leur donnoient
de l'air ; jugez par la
de leur contour , & de leur
Sij
212 MERCURE
hauteur ; elles eftoient peintes
de diverfes couleurs . Monſeigneur
le Dauphin fit paroiftrebeaucoup
d'agilité dans quelques-
uns des habits qu'il prit
le refte de la Soirée , les uns,
n'en demandant pas tant que:
les autres . Monfieur le Comte
de Thouloufe fe fit adinirer
en Scaramouche, & l'on n'au
roit pas eu de peine à le pren
dre pour un Amour déguiſé.
Monfieur le Duc de Bourbon
, Mademoiſelle de Bourbon
ne maſquerent ce foir- là
qu'en Avocats , mais ce fut
avec une propreté qui faifoit
GALANT 213
affez connoiftre que les Robes
de ces Avocats - là n'avoient
jamais effuyé la pouf
frere du Palais .
La Mafcarade des Cris de
Paris fut la fixiéme de Monfeigneur
le Dauphin. Ceux,
qui accompagnoient ce Prince,
étoient Monfieur le Prince.
de Conty, Monfieur le Prince:
de la Roche-fur-Yon , M' le
Grand Prieur, M' le Prince de
Türenne , M le Comte de
Brienne , M' le Prince de
Thingry, M' le Marquis d'Alincourt
, M' le Marquis de:
Courtenyau M de la Roche214
MERCURE
guion , M' de Liencourt, M
de Grignan , & M ' du S.
Efteve. Selon les Meftiers
qu'ils
reprefentoient , ils por
toient ce qu'il y avoit de plus
delicat à boire & à manger, &
quelques uns portoient jufqu'à
des Boutiques garnies.
de ce qui regardoit leur Perfonage
. Monfieur le Duc de
Bourbon , & Mademoiſelle
de Bourbon vinrent ce foirlà
au Bal avec une Troupe de
huit Perfonnnes , dont les ha
bits reprefentoient des Pavil
lons . La Mafcarade de Monfieur
le Duc du Mayne , qui
GALANT. 215
Voicy
parut le mefme foir , étoit de
dix Seigneurs Chinois , & de
cinq Dames Chinoiſes , avec
des habits auſſi magnifiques
,
que bien imaginez .
les Noms de ceux qui compofoient
cette Mafcarade ;
Monfieur le Duc du Mayne,
Monfieur le Comte de Thouloufe
M' de Mancini , M' le
Comte de Cruffol , M de Duras,
M ' de Sully , M' de Gri
gnan , M' le Marquis de la
Vrilliere , M' de Soyecourt,
M' Bontemps, Mademoiſelle
de Nantes , Mademoiſelle de
Blois , Mademoiſelle d'Ufez ,
216 MERCURE
Mademoiſelle de Senneterre,
Mademoiſelle de Chafteauneuf.
Quelques jours avant la
fin du Carnaval Monfeigneur
le Dauphin ayant refolu de
faire une Courſe de Teftes
en maniere de petit Carouſel,
avec des Quadriles , on cher
cha un Sujet, on imagina des
Habits, on les fit, on s'exerça,
& l'on courut enfin fix
jours apres qu'on cut refolu
ce divertiffement . La France
feule eft capable d'executer
des chofes de cette nature en
fi peu de temps . Vous en ſe-.
rez furpriſe , quand vous au
rezz
GALANT. 217
rez ſçeu ce que j'ay à vous en
dire . Le Dimanche de Fevrier,
le
4.
Roy,Madame la Dauphine,
& toute la Cour fe ren-,
dirent à trois heures apres
midy fur les Amphitheatres
du Manege découvert de
Verfailles. La Quadrille de
Monfeigneur le Dauphin entra
auffi- toft dans la Carriere,
au fon des Timbales & des
Trompettes , les Armes de
cette Quadrille eftoient noir
& or , les habits de deffous
noirs & brodez d'or , & toutes
les plumes tant des Hom
mes que des Chevaux étoient
Mars 1685.
T
218 MERCURE
blanches , & les garnitures de
mefme. M le Marquis de
Dangeau , fous le nom de
Charlemagne , entra le premier
comme luge du Camp.
Monfeigneur le Dauphin,
eftoit fous le nom de Zerbin;
Mr le Prince de Tingry, fous
celuy de Renaud ; M' de la
Roche Guyon , fous celuy
d'Aquilan le noir , M' le
Marquis de Liancour , fous
celuy de Grifon le blanc ;
& M' le Marquis d'Antin ,
fous celuy de Roland. La feconde
Quadrille entra auffitoft
apres , précedée de fes
GALANT. 219
Trompettes , & de ſes Timbales
. Les couleurs de cette
Quadrille eftoient or & vert,
avec des plumes blanches, &
mouchetées de vert . M' le
Duc de Gramont eftoit Juge
du Camp. Il entra le premier
fous le nom d'Agra
mant . Monfieur le Prince de
la Roche-fur-Yon , avoit celuy
de Mandricard; M le Duc
de Vandofme , celuy de Gradaffe
, M' le Prince de Turenne
, celuy de Roger ; M' le
Comte de Briône , celuy de
Rodomont
; & M' le Marquis
d'Alincour , celuy de Sacri-
Tij
220 MERCURE
"
pant. On ne peut avoir plus
de fatisfaction
que cette
Courſe en donna aux Spectateurs
, ny meriter plus d'aplaudiffemens
que Monfeigneur
le Dauphin , qui eft le
Prince du Monde , qui a la
meilleure grace les Armes à
la main. Apres une fort
longue difpute , le Prix de
meura à la feconde Quadrille,
& ceux qui la compofoient
le difputerent long - temps entr'eux
; mais enfin , M' le
Prince de Turenne l'emporta
, & reçut de la main du
Roy , au fon des Timbales,
GALANT. 221
& des Trompettes , une Epée
d'or avec de riches Boucles .
Mr du Mont Ecuyer de Monfeigneur
le Dauphin , montoit
un Cheval nud qu'il gouvernoit
, comme auroit pû
faire le plus habile Ecuyer à
qui rien n'auroit manqué,
pour bien manier un Cheval,
fur lequel il auroit eſtémonté.
Je croy que vous fçavez
de quelle maniere fe fait cette
Courſe de teftes. Il faut .
d'abord enemporter une avec
la Lance ; puis on en darde
une autre , on ſe retourne en
faite vers la Meduſe que l'on
T iij
222 MERCURE
darde auffi , apres quoy on
emporte
à l'épée la derniere
tefte , qui eft plus baffe que
les autres. Ie vous
envoyeray
le mois prochain
les Devife's
de tous ceux qui eftoient
de
cette Courſe. Le lendemain
on reprefenta
l'Opera
d'Amadis
à Verſailles . Le Roy
ne l'avoit point encore veu ,
parce que cet Opera
avoit
paru dans l'année de la mort
de la Reyne , & vous fçavez
que pendant
ce temps , le
Roy n'a pris aucun divertiſ
fement. Le jour ſuivant
qui
eftoit le dernier du Carnaval,
GALANT. 223
la Mafcarade deMonfeigneur
le Dauphin , eftoit d'un Marquis
de Mafcarille porté en
Chaife , avec un équipage
convenable à fon fracas d'ajuſtement,
Monfieur le Comte
de Thoulouſe maſqua ce
foir là avec un habit de Perfan,
& charma toute la Cour.
Parmy les Maſcarades qui ont
le plus diverty , il y en a cu
une de Suiffes , qui a donué
un fort grand plaifir , & dont
l'invention caufa beaucoup
de furprife. Toutes les fois
que Madame la Dauphine a
dancé , pendant les jours de-
T iiij
224 MERCURE
ftinez aux Mafcarades , fa
bonne grace & la jufteſſe de
fon oreille ont toûjours paru ."
Madame la Princeffe de Conty
s'y eft fouvent fait admirer
fous plufieurs habits , mais
fur tout avec un habit Grec,
dont on fut tellement charmé
, que plufieurs en firent
faire de femblables pour les
Bals fuivans . Mes Dames les
Marquifes de Richelieu & de
Bellefonds, fe font fort diftinguées
par divers habits auffi
riches que bien entendus , &
Madame la Marquiſe de Seignelay
a auffi brillé de la mef
1
GALANT. 229
me forte , & fur tout avec un
habit à la Hongroiſe . Je ferois
trop long fi j'entrois dans le
detail de toutes celles qui en
ont eu de tres riches en maf
quant. Quoy que ces habits
n'euffent le Caractere d'aucune
Nation , ils n'en eftoient
ny moins beaux , ny moins
magnifiques , ny moins bien
entendus , & n'en paroient
pas moins les Dames qui les
portoient. Il y a eu encore
un divertiffement , qui pour
n'avoir pas efté du nombre
des Mafcarades qui fe
font faites chez le Roy , n'a
226 MERCURE
pas laiffé d'eftre un des plus
agréables , dont on ayt ja
mais entendu parler. Le Roy
eftant entré un foir chez Madame
de Montefpan , fut furpris
de voir
partement repreſentoit la
Foire de S. Germain. Ce n'étoit
par tout que Boutiques.
remplies de Marchands , &
l'on voyoit mefme des Compagnies
entieres de Perfon
nes qui fe promenoient dans
cette Foire , & qui faifoient
converſation , ou entr'elles,
ou avec les Marchands & les
Marchandes. Enfin , tout ce
que tout fon apGALANT
227
que l'on a couftume de voir
à la Foire, y paroiffoit dépeint
au naturel. C'est ainsi qu'on
doit furprendre pour bien divertir
, & tous ces fortes de
divertiffemens font de bon
gouft.
vous ay promis du Carnaval
de la Cour , pendant les mois
GALANT. 203.
de Janvier & de Fevrier. Les
Divertiffemens n'y ont point
ceffé. L'Opera de Roland y
a efté repreſenté une fois cha
que Semaine , & il y avoit al
ternativement Bal , Comedie
& Opera. Toute la Cour a
maſqué ſept fois , & auroit
continué à fe donner ce plaifir
, fi la mort du Roy d'Angleterre
n'euft interrompu
pour quelques jours tous les
Divertiffemens. Chaque jour
de Maſcarade , Monſeigneur
le Dauphin changeoit quatre
ou cinq fois d'habits , où l'on
n'oublioit rien pour empef
204 MERCURE
cher qu'il ne fuft reconnu. I
furprit toute l'Affemblée dans
la premiere Mafcarade , avec
un habit de Chauve fouris ..
La magnificence & l'invention
ont paru dans tous les
déguiſemens de Monſieur le
Duc. Les habits de fa Troupe.
eſtoient à cette premiereMafcarade
de grandes Robes , de
differentes couleurs , diverfement
& richement chamarées
, d'où fortoit un Col qui
s'élevoit fort haut , & s'abaiſ
foit , & fur lequel paroiffoit
une tefte d'Animal , coeffée
en Chauve fouris. Monfieur
GALANT. 205
le Duc de Bourbon , qui étoit
fous l'une de ces Machines,
avoit un habit de Femme de
Strasbourg. Mademoiſelle de
Bourbon , qui eftoit ſous une
autre , en avoit un de Magicienne,
& les Filles d'honneur
de Madame la Dauphine,
qui en rempliffoient d'autres,
eftoient diverſement vétuës .
Je ne dois pas oublier icy à
vous dire , que Monfieur le
Duc de Bourbon n'avoit encor
fait de fejour à la Cour,
que pendant ce Carnaval , &
qu'il y a paru au fortir de fes
Etudes , avec un air , des ma
206 MERCURE
nieres , & un eſprit auffi libre
que s'il y euft paffé fes premieres
années , & qu'il cust
eu un âge plus avancé . Le
fecond jour qu'on maſqua,
la Maſcarade
de Monſeigneur
le Dauphin repreſentoit toute
la Troupe Italienne . Ce Prin
ce eftoit veſtu en Docteur.
Ceux qui formoient cette
Mafcarade , eftoient Monfieur
le Prince de Conty,
Monfieur le Prince de la
Roche-fur-Yon , M' le Prince
de Turenne , M' le Duc de
Roquelaure , Miles Marquis
de Bellefonds
, d'Alincour
,
GALANT. 207
& de Liancour. Madame la
Dauphine , fit ce jour là une
Mafcarade de Perroquets
,
Monfieur le Duc de Bourbon
parut avec un riche habit
de Seigneur Hongrois , &
Mademoiſelle de Bourbon,
avec un habit de Païfane,
d'une proprieté furprenante.
Monfieur le Duc du Maine,
fe fit admirer le mefme jour,
avec une Maſcarade de petits
vieillards & de petites vieilles.
Rien n'a paru plus beau , &
l'on ne pouvoit ſe laſſer de
les regarder. Ceux qui compofoient
cette Mafcarade ་་
208 MERCURE
eftoient , Monfieur le Duc
du Mayne , Monfieur le
Comte de Thoulouſe , M' de
Manfini , Mi le Marquis de
la Vrilliere , Mademoiſelle de
Nantes , Mademoiſelle de
Blois , & Mademoiſelle de
Château - neuf.
Dans la troifiéme Maſcarade
, Monſeigneur le Dauphin
parut d'abort déguisé
avec quatre vifages. Enfuite,
prit un habit de Flamande
avec un Mafque de Perroquet
, & changea à fon ordinaire
quatre ou cinq fois
d'habit. Monfieur le Duc de
GALANT. 209
Bourbon , parut ce foir là..
avec un habit de Noble Venitien
, & Mademoiſelle de :
Bourbon s'y fit remarquer
par la propreté , & la richeffe
d'un habit magnifique. Toute
la Cour maſqua ce foir là ,,
& le mélange des habits gro
tefques , & fuperbes , eftant
fort agréable à la vuë , divertit
beaucoup.
Le quatrième jour qu'on
mafqua , Monfeigneur le
Dauphin mit pour premier:
habit celuy d'un Operateur,
& tirant feulement un petit
cordon , il parut en un inftant
Mars 1685, Si
210 MERCURE
vétu en grand Seigneur Chinois
. Des changemens auffi
furprenans le firent paroiftre
encore le mefme foir avec
deux autres habits . Monfieur
le Duc de Bourbon mit ce
foir-là un habit de Païfan,
auffi riche que bien entendu .
Monfieur le Duc de Mortemar
, qui fe diftingue en tout
ce qu'il fait , vint à l'Affemblée
du mefme jour avec un
habit tout formé de Manchons
jufqu'à la coëffure. Ils
étoient de differentes couleurs
. Il avoit une Palatine
pour Cravate , & un Mafque
GALANT. 211
qui imitoit le vifage d'un
homme tout tranfi de froid .
Sa barbe paroiffoit toute ge
lée , & les glaçons y pen
doient . Il euft eſté impoflibie
de le reconnoiftre s'il ne te
fuft pas découvert luy- même.
Neuf Quilles & la Boulle fe
trouverent dans le Balle jour
de la cinquiéme Affemblée;
c'eftoit la Mafcarade de Monfeigneur
le Dauphin. Ceux
qui reprefentoient ces Quilles.
eftoient affis deffous , & de
petites feneftres leur donnoient
de l'air ; jugez par la
de leur contour , & de leur
Sij
212 MERCURE
hauteur ; elles eftoient peintes
de diverfes couleurs . Monſeigneur
le Dauphin fit paroiftrebeaucoup
d'agilité dans quelques-
uns des habits qu'il prit
le refte de la Soirée , les uns,
n'en demandant pas tant que:
les autres . Monfieur le Comte
de Thouloufe fe fit adinirer
en Scaramouche, & l'on n'au
roit pas eu de peine à le pren
dre pour un Amour déguiſé.
Monfieur le Duc de Bourbon
, Mademoiſelle de Bourbon
ne maſquerent ce foir- là
qu'en Avocats , mais ce fut
avec une propreté qui faifoit
GALANT 213
affez connoiftre que les Robes
de ces Avocats - là n'avoient
jamais effuyé la pouf
frere du Palais .
La Mafcarade des Cris de
Paris fut la fixiéme de Monfeigneur
le Dauphin. Ceux,
qui accompagnoient ce Prince,
étoient Monfieur le Prince.
de Conty, Monfieur le Prince:
de la Roche-fur-Yon , M' le
Grand Prieur, M' le Prince de
Türenne , M le Comte de
Brienne , M' le Prince de
Thingry, M' le Marquis d'Alincourt
, M' le Marquis de:
Courtenyau M de la Roche214
MERCURE
guion , M' de Liencourt, M
de Grignan , & M ' du S.
Efteve. Selon les Meftiers
qu'ils
reprefentoient , ils por
toient ce qu'il y avoit de plus
delicat à boire & à manger, &
quelques uns portoient jufqu'à
des Boutiques garnies.
de ce qui regardoit leur Perfonage
. Monfieur le Duc de
Bourbon , & Mademoiſelle
de Bourbon vinrent ce foirlà
au Bal avec une Troupe de
huit Perfonnnes , dont les ha
bits reprefentoient des Pavil
lons . La Mafcarade de Monfieur
le Duc du Mayne , qui
GALANT. 215
Voicy
parut le mefme foir , étoit de
dix Seigneurs Chinois , & de
cinq Dames Chinoiſes , avec
des habits auſſi magnifiques
,
que bien imaginez .
les Noms de ceux qui compofoient
cette Mafcarade ;
Monfieur le Duc du Mayne,
Monfieur le Comte de Thouloufe
M' de Mancini , M' le
Comte de Cruffol , M de Duras,
M ' de Sully , M' de Gri
gnan , M' le Marquis de la
Vrilliere , M' de Soyecourt,
M' Bontemps, Mademoiſelle
de Nantes , Mademoiſelle de
Blois , Mademoiſelle d'Ufez ,
216 MERCURE
Mademoiſelle de Senneterre,
Mademoiſelle de Chafteauneuf.
Quelques jours avant la
fin du Carnaval Monfeigneur
le Dauphin ayant refolu de
faire une Courſe de Teftes
en maniere de petit Carouſel,
avec des Quadriles , on cher
cha un Sujet, on imagina des
Habits, on les fit, on s'exerça,
& l'on courut enfin fix
jours apres qu'on cut refolu
ce divertiffement . La France
feule eft capable d'executer
des chofes de cette nature en
fi peu de temps . Vous en ſe-.
rez furpriſe , quand vous au
rezz
GALANT. 217
rez ſçeu ce que j'ay à vous en
dire . Le Dimanche de Fevrier,
le
4.
Roy,Madame la Dauphine,
& toute la Cour fe ren-,
dirent à trois heures apres
midy fur les Amphitheatres
du Manege découvert de
Verfailles. La Quadrille de
Monfeigneur le Dauphin entra
auffi- toft dans la Carriere,
au fon des Timbales & des
Trompettes , les Armes de
cette Quadrille eftoient noir
& or , les habits de deffous
noirs & brodez d'or , & toutes
les plumes tant des Hom
mes que des Chevaux étoient
Mars 1685.
T
218 MERCURE
blanches , & les garnitures de
mefme. M le Marquis de
Dangeau , fous le nom de
Charlemagne , entra le premier
comme luge du Camp.
Monfeigneur le Dauphin,
eftoit fous le nom de Zerbin;
Mr le Prince de Tingry, fous
celuy de Renaud ; M' de la
Roche Guyon , fous celuy
d'Aquilan le noir , M' le
Marquis de Liancour , fous
celuy de Grifon le blanc ;
& M' le Marquis d'Antin ,
fous celuy de Roland. La feconde
Quadrille entra auffitoft
apres , précedée de fes
GALANT. 219
Trompettes , & de ſes Timbales
. Les couleurs de cette
Quadrille eftoient or & vert,
avec des plumes blanches, &
mouchetées de vert . M' le
Duc de Gramont eftoit Juge
du Camp. Il entra le premier
fous le nom d'Agra
mant . Monfieur le Prince de
la Roche-fur-Yon , avoit celuy
de Mandricard; M le Duc
de Vandofme , celuy de Gradaffe
, M' le Prince de Turenne
, celuy de Roger ; M' le
Comte de Briône , celuy de
Rodomont
; & M' le Marquis
d'Alincour , celuy de Sacri-
Tij
220 MERCURE
"
pant. On ne peut avoir plus
de fatisfaction
que cette
Courſe en donna aux Spectateurs
, ny meriter plus d'aplaudiffemens
que Monfeigneur
le Dauphin , qui eft le
Prince du Monde , qui a la
meilleure grace les Armes à
la main. Apres une fort
longue difpute , le Prix de
meura à la feconde Quadrille,
& ceux qui la compofoient
le difputerent long - temps entr'eux
; mais enfin , M' le
Prince de Turenne l'emporta
, & reçut de la main du
Roy , au fon des Timbales,
GALANT. 221
& des Trompettes , une Epée
d'or avec de riches Boucles .
Mr du Mont Ecuyer de Monfeigneur
le Dauphin , montoit
un Cheval nud qu'il gouvernoit
, comme auroit pû
faire le plus habile Ecuyer à
qui rien n'auroit manqué,
pour bien manier un Cheval,
fur lequel il auroit eſtémonté.
Je croy que vous fçavez
de quelle maniere fe fait cette
Courſe de teftes. Il faut .
d'abord enemporter une avec
la Lance ; puis on en darde
une autre , on ſe retourne en
faite vers la Meduſe que l'on
T iij
222 MERCURE
darde auffi , apres quoy on
emporte
à l'épée la derniere
tefte , qui eft plus baffe que
les autres. Ie vous
envoyeray
le mois prochain
les Devife's
de tous ceux qui eftoient
de
cette Courſe. Le lendemain
on reprefenta
l'Opera
d'Amadis
à Verſailles . Le Roy
ne l'avoit point encore veu ,
parce que cet Opera
avoit
paru dans l'année de la mort
de la Reyne , & vous fçavez
que pendant
ce temps , le
Roy n'a pris aucun divertiſ
fement. Le jour ſuivant
qui
eftoit le dernier du Carnaval,
GALANT. 223
la Mafcarade deMonfeigneur
le Dauphin , eftoit d'un Marquis
de Mafcarille porté en
Chaife , avec un équipage
convenable à fon fracas d'ajuſtement,
Monfieur le Comte
de Thoulouſe maſqua ce
foir là avec un habit de Perfan,
& charma toute la Cour.
Parmy les Maſcarades qui ont
le plus diverty , il y en a cu
une de Suiffes , qui a donué
un fort grand plaifir , & dont
l'invention caufa beaucoup
de furprife. Toutes les fois
que Madame la Dauphine a
dancé , pendant les jours de-
T iiij
224 MERCURE
ftinez aux Mafcarades , fa
bonne grace & la jufteſſe de
fon oreille ont toûjours paru ."
Madame la Princeffe de Conty
s'y eft fouvent fait admirer
fous plufieurs habits , mais
fur tout avec un habit Grec,
dont on fut tellement charmé
, que plufieurs en firent
faire de femblables pour les
Bals fuivans . Mes Dames les
Marquifes de Richelieu & de
Bellefonds, fe font fort diftinguées
par divers habits auffi
riches que bien entendus , &
Madame la Marquiſe de Seignelay
a auffi brillé de la mef
1
GALANT. 229
me forte , & fur tout avec un
habit à la Hongroiſe . Je ferois
trop long fi j'entrois dans le
detail de toutes celles qui en
ont eu de tres riches en maf
quant. Quoy que ces habits
n'euffent le Caractere d'aucune
Nation , ils n'en eftoient
ny moins beaux , ny moins
magnifiques , ny moins bien
entendus , & n'en paroient
pas moins les Dames qui les
portoient. Il y a eu encore
un divertiffement , qui pour
n'avoir pas efté du nombre
des Mafcarades qui fe
font faites chez le Roy , n'a
226 MERCURE
pas laiffé d'eftre un des plus
agréables , dont on ayt ja
mais entendu parler. Le Roy
eftant entré un foir chez Madame
de Montefpan , fut furpris
de voir
partement repreſentoit la
Foire de S. Germain. Ce n'étoit
par tout que Boutiques.
remplies de Marchands , &
l'on voyoit mefme des Compagnies
entieres de Perfon
nes qui fe promenoient dans
cette Foire , & qui faifoient
converſation , ou entr'elles,
ou avec les Marchands & les
Marchandes. Enfin , tout ce
que tout fon apGALANT
227
que l'on a couftume de voir
à la Foire, y paroiffoit dépeint
au naturel. C'est ainsi qu'on
doit furprendre pour bien divertir
, & tous ces fortes de
divertiffemens font de bon
gouft.
Fermer
Résumé : Description entiere du Carnaval de la Cour, & de la Course des Testes, [titre d'après la table]
Le texte décrit les divertissements de la cour pendant les mois de janvier et février, marqués par une série de mascarades et de spectacles. Chaque semaine, l'opéra de Roland était représenté, alternant avec des bals, des comédies et des opéras. La cour a participé à sept mascarades, brièvement interrompues par la mort du roi d'Angleterre. Le Dauphin a changé plusieurs fois d'habits lors de chaque mascarade, se déguisant notamment en docteur, en Flamande et en opérateur. Le Duc de Bourbon et Mademoiselle de Bourbon ont également participé avec des déguisements variés, tels que des habits de magicienne, de seigneur hongrois et de païfane. Les thèmes des mascarades incluaient la troupe italienne, les perroquets et les petits vieillards. Le Duc du Maine a impressionné avec une mascarade de petits vieillards et vieilles. Ces événements étaient caractérisés par une grande magnificence et inventivité dans les déguisements. Le Carnaval s'est conclu par une course de têtes, un spectacle équestre où le Dauphin et d'autres nobles ont participé, déguisés en personnages célèbres. Cette course a été suivie par une représentation de l'opéra d'Amadis à Versailles. D'autres divertissements incluaient une mascarade de Suisses et une représentation de la foire de Saint-Germain chez Madame de Montespan.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
9
p. 246-256
Noms de ceux qui doivent estre du Carousel de Monseigneur le Dauphin, [titre d'après la table]
Début :
Je vous envoye seulement les noms de ceux qui doivent [...]
Mots clefs :
Carrousels, Monseigneur le Dauphin, Personnes distinguées, Choix, Duc de S. Aignan, Divertissements, Officiers généraux, Pages, Maréchaux, Marquis, Écuyer, Seigneurs, Duc, Chevalier, Princes, Comte, Couleurs
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Noms de ceux qui doivent estre du Carousel de Monseigneur le Dauphin, [titre d'après la table]
Je vous envoye ſeulement
les noms de ceux qui doivent
compofer leCarousel deMonſeigneur
le Dauphin. J'aurois
fatisfait plûtoft voſtre curiofré
fur cet article , mais entre
un fi grand nombre de Perfonnes
diftinguées , il eſt dif
ficile de fixer un choix . Les
maladies , & divers autres accidens
y peuvent d'ailleurs
apporter du changement , &
je ne vous répons pas qu'iln'y
en arrive point juſqu'au jour
de ce Carouſel , qui eſt remis
GALANT. 247
!
au commencement de Juin .
Me le Duc de S. Aignan qui
entend parfaitement bien ces
fortes deDivertiſſemensguerriers
, & qui ordinairement
en eſt l'Inventeur , a donné
le ſujet de celuy- cy. Il l'a tiré
des Guerres Civiles de Grenade
, & en a reglé beaucoup
de choſes comme il avoit
faità la grande Feſte de Verfailles
qui avoit pour tître, Le
Palais d'Alcine , ou Les Plaifirs
de l'Isle enchantée. Elle
eſtoit entiérement de ſon invention
, & dura trois jours,
avec diférens Spectacles. Ily
Xinj
248 MERCURE
aura huit Quadrilles dans le
Carouſel qui va paroiſtre.
Elles feront diviſées en deux
Partys. Voicy les noms des
Officiers Genéraux.
M. le Duc de Saint A
gnan Maréchal de CampGe
nérales
Il ſera ſuivy de quatre Pages
, & de quatre Eltafiers ,&
aura deux Trompettes & un
Timbalier.
a
- Les Maréchaux deCampsót
M. le Duc de Gramont.
M. le Duc d'Uzés .
M. le Marquis de Tilladen.
M.le Marquis deDangeau.
GALANT. 249
Ils auront chacun trois Pages
& trois Eſtafiers .
Monſeigneur le Dauphin
feraà la teſte de la premiere
Quadrille de ſon Party , qui
repreſentera les Abencerrages.
Sescouleurs ferontOr&
Noir, il aura quatre Eſcuyers
qui font:
M. du Mont.
M. de la Neuville.
M. du Gaſt.
M. de Caſau.
Il ſera ſuivyde vingt Pages,
& de vingt Eſtafiers, & il aura
huit Trompettes & deux
Timbaliers.
4
250 MERCURE
Vous allez lire les noms
des jeunes Seigneurs qui ſeront
de ſon Party. Souvenez.
vous , s'il vous plaiſt , Mada
me , que je mets ces noms
ſans marquer les rangs que la
naiſſance doit donner à cha
cund'eux.
M. le Marquisde Crequy.
M. le Marquis de Nangis.
M. le Comte de Brione.
M. leDucde la Trimoüille.
M.le Grand- Prieur.
M.deMailly
M. de la Roche-Guyon.
M. le Princed'Elbeuf.
M. le Duc de Vandoſime..
M. le Comtede Fieſque..
GALANT. 251
LES ALMORADY,
Dont les Couleurs feront Argent
& Couleur de Few .
M. le Chevalier Colbert..
M. de Coedelette .
M. de Plumartin.
M. de Buflolle .
M. de Mirepoix.
M. de Roully.
M.de Thiange.
M.de Caftres.
M. de la Fayette..
M. de Palavicin.
LES ALABASES,
Dont les Couleurs feront Grifdelin ,
&Argent.
M. de Hautefort.
M. de la Chaſtre.
M. le Chevalier de Broille.
M. le Marquis d'Antin.
252 MERCURE
M. le Marquis de Treſnel .
VM. de Villacerf
M. le Marquis deLivryanno
M. de Médavid .
M. de Liſtenay.
:
M. de Braffaccion M
LES GAZULES,
Qui auront pour Couleursle Violet
'Argent..
M. le Prince de Furſtemberg..
M. le Prince Camille.
M. de Chamarante.
M. le Marquis de Bellefonds.
M. de Nefle.
M.de Coniſmark.
M. de Rohan .
M le Duc de Roquelaure.
M. le Prince de Tingry .
M. de Rochefort.
Ils auront tous chacun
deux Pages , & deux Efta
fiers.
GALANT. 253
Monfieur le Duc de Bourbon
commandera le Party
contraire . Ses Ecuyers ſeront
M. de la Nouë.
M. de la Vergne. ている
Il aura dix Pages , & dix
Eſtafiers , fix Trompetes , &
deux Timballierson
LES VANEGUES,
Qui aurent pour Couleurs l'or &
l'Argent 、煤
M. deQuerouël .
M. le Marquis de Soyecourt.
M. de Villequier.
M. Milly Bouligneux .
M. le Comte d'Oſtel .
4.1 M. le Comte Danau
ail
254 MERCURE
M. de Carpéighe.
M. de Nogaret.
M. de Villars,
1.
M. le Comte de Gondrin.
LES ZEGRI,
Qui porteront Verd & or.
M. de Blanzac .
M. deValentinois.
M. le Duc de la Ferté,
M. leMarquisd'Alincourt.
M. le Chevalier de Sully.
M. de Sainte Frique .
M. d'Artagnan.
M. de Vervins.
M. le Prince de Harcourt.
M. de Liancourt.
LES MASSES,
Qui auront pour Couleurs Feuillemorte
& Argent.
M. de Vaubecourt.
M. de Surville.
GALANT. 255
M. de Murſé .
M. deQuelus.
M. de Molac.
M. de Froulé.
M. deMoüy.
M. de Baiſemaux .
M. de Bournonville.
M. d'Ancenis- Charoft.
LES GOMELES,
Dont les Couleurs feront Cramoisy
& Argent.
M.deCoffé.
M. de Vieuxbourg .
M. de Montchevreüil.
M. de Ferdinand.
M. de Bouligneux .
M. le Chevalier de Soyecourt.
M. de Vibraye.
M. de Novion .
M. le Ducd'Atris .
M. deChemerault.
:
256 MERCURE
ار Ils sauront tous chacun
deux Pages, &deux Ecuyers,
de meſme que ceux du premier
Party
les noms de ceux qui doivent
compofer leCarousel deMonſeigneur
le Dauphin. J'aurois
fatisfait plûtoft voſtre curiofré
fur cet article , mais entre
un fi grand nombre de Perfonnes
diftinguées , il eſt dif
ficile de fixer un choix . Les
maladies , & divers autres accidens
y peuvent d'ailleurs
apporter du changement , &
je ne vous répons pas qu'iln'y
en arrive point juſqu'au jour
de ce Carouſel , qui eſt remis
GALANT. 247
!
au commencement de Juin .
Me le Duc de S. Aignan qui
entend parfaitement bien ces
fortes deDivertiſſemensguerriers
, & qui ordinairement
en eſt l'Inventeur , a donné
le ſujet de celuy- cy. Il l'a tiré
des Guerres Civiles de Grenade
, & en a reglé beaucoup
de choſes comme il avoit
faità la grande Feſte de Verfailles
qui avoit pour tître, Le
Palais d'Alcine , ou Les Plaifirs
de l'Isle enchantée. Elle
eſtoit entiérement de ſon invention
, & dura trois jours,
avec diférens Spectacles. Ily
Xinj
248 MERCURE
aura huit Quadrilles dans le
Carouſel qui va paroiſtre.
Elles feront diviſées en deux
Partys. Voicy les noms des
Officiers Genéraux.
M. le Duc de Saint A
gnan Maréchal de CampGe
nérales
Il ſera ſuivy de quatre Pages
, & de quatre Eltafiers ,&
aura deux Trompettes & un
Timbalier.
a
- Les Maréchaux deCampsót
M. le Duc de Gramont.
M. le Duc d'Uzés .
M. le Marquis de Tilladen.
M.le Marquis deDangeau.
GALANT. 249
Ils auront chacun trois Pages
& trois Eſtafiers .
Monſeigneur le Dauphin
feraà la teſte de la premiere
Quadrille de ſon Party , qui
repreſentera les Abencerrages.
Sescouleurs ferontOr&
Noir, il aura quatre Eſcuyers
qui font:
M. du Mont.
M. de la Neuville.
M. du Gaſt.
M. de Caſau.
Il ſera ſuivyde vingt Pages,
& de vingt Eſtafiers, & il aura
huit Trompettes & deux
Timbaliers.
4
250 MERCURE
Vous allez lire les noms
des jeunes Seigneurs qui ſeront
de ſon Party. Souvenez.
vous , s'il vous plaiſt , Mada
me , que je mets ces noms
ſans marquer les rangs que la
naiſſance doit donner à cha
cund'eux.
M. le Marquisde Crequy.
M. le Marquis de Nangis.
M. le Comte de Brione.
M. leDucde la Trimoüille.
M.le Grand- Prieur.
M.deMailly
M. de la Roche-Guyon.
M. le Princed'Elbeuf.
M. le Duc de Vandoſime..
M. le Comtede Fieſque..
GALANT. 251
LES ALMORADY,
Dont les Couleurs feront Argent
& Couleur de Few .
M. le Chevalier Colbert..
M. de Coedelette .
M. de Plumartin.
M. de Buflolle .
M. de Mirepoix.
M. de Roully.
M.de Thiange.
M.de Caftres.
M. de la Fayette..
M. de Palavicin.
LES ALABASES,
Dont les Couleurs feront Grifdelin ,
&Argent.
M. de Hautefort.
M. de la Chaſtre.
M. le Chevalier de Broille.
M. le Marquis d'Antin.
252 MERCURE
M. le Marquis de Treſnel .
VM. de Villacerf
M. le Marquis deLivryanno
M. de Médavid .
M. de Liſtenay.
:
M. de Braffaccion M
LES GAZULES,
Qui auront pour Couleursle Violet
'Argent..
M. le Prince de Furſtemberg..
M. le Prince Camille.
M. de Chamarante.
M. le Marquis de Bellefonds.
M. de Nefle.
M.de Coniſmark.
M. de Rohan .
M le Duc de Roquelaure.
M. le Prince de Tingry .
M. de Rochefort.
Ils auront tous chacun
deux Pages , & deux Efta
fiers.
GALANT. 253
Monfieur le Duc de Bourbon
commandera le Party
contraire . Ses Ecuyers ſeront
M. de la Nouë.
M. de la Vergne. ている
Il aura dix Pages , & dix
Eſtafiers , fix Trompetes , &
deux Timballierson
LES VANEGUES,
Qui aurent pour Couleurs l'or &
l'Argent 、煤
M. deQuerouël .
M. le Marquis de Soyecourt.
M. de Villequier.
M. Milly Bouligneux .
M. le Comte d'Oſtel .
4.1 M. le Comte Danau
ail
254 MERCURE
M. de Carpéighe.
M. de Nogaret.
M. de Villars,
1.
M. le Comte de Gondrin.
LES ZEGRI,
Qui porteront Verd & or.
M. de Blanzac .
M. deValentinois.
M. le Duc de la Ferté,
M. leMarquisd'Alincourt.
M. le Chevalier de Sully.
M. de Sainte Frique .
M. d'Artagnan.
M. de Vervins.
M. le Prince de Harcourt.
M. de Liancourt.
LES MASSES,
Qui auront pour Couleurs Feuillemorte
& Argent.
M. de Vaubecourt.
M. de Surville.
GALANT. 255
M. de Murſé .
M. deQuelus.
M. de Molac.
M. de Froulé.
M. deMoüy.
M. de Baiſemaux .
M. de Bournonville.
M. d'Ancenis- Charoft.
LES GOMELES,
Dont les Couleurs feront Cramoisy
& Argent.
M.deCoffé.
M. de Vieuxbourg .
M. de Montchevreüil.
M. de Ferdinand.
M. de Bouligneux .
M. le Chevalier de Soyecourt.
M. de Vibraye.
M. de Novion .
M. le Ducd'Atris .
M. deChemerault.
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256 MERCURE
ار Ils sauront tous chacun
deux Pages, &deux Ecuyers,
de meſme que ceux du premier
Party
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10
p. 1-216
HISTOIRE DU SIEGE DE BUDE.
Début :
Nous avons vû en moins d'une année deux choses [...]
Mots clefs :
Bude, Siège de Buda, Siège, Prince, Histoire, Comte, Troupes, Place, Hommes, Armée, Ville, Attaque, Canon, Assiéger, Place, Prince Charles, Charles V de Lorraine, Électeur de Bavière, Maximilien-Emmanuel de Bavière, Général, Camp, Assiégés, Brandebourg, Assiégeants, Pièces, Travaux, Soldats, Ennemis, Rondelle, Brèche, Nuit, Turcs, Bavarois, Lieutenant, Colonel, Janissaires, Lignes, Major, Régiment, Palissades, Côté
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texteReconnaissance textuelle : HISTOIRE DU SIEGE DE BUDE.
HISTOIRE
DU SIEGE
DE BUD E.
OUS avons vu en
moins d'une annéedeux
chofes fi remarquables ,
l'une en France , & l'autre
en Hongrie , qu'il eft impoffible
qu'elles ne paffent jufqu'à la
pofterité la plus éloignée , puifque
plufieurs fiecles enſemble ne
fourniffent pas quelquefois des
actions d'un fi grand éclat. Tout
A
Hiftoire du Siege
l'Empire Ottoman employoit fes
foins & fes principales forces à
empefcher que l'on ne prît Bude,
parce que cette Ville peut ouvrir
le paffage jufques à Conftantinople
, & qu'il eft malaisé que le
Royaume de Hongrie dont elle
eft la Capitale , ne foit pasfoumis
à la domination de celuy qui
la poffede. C'eſt pour cela que les
Tures fe font toûjours attachez à
la conferver. Elle a foûtenu quatre
fieges depuis qu'ils en font les
maiſtres , & n'a efté prife qu'au
cinquième , qui eft celuy qui
vient d'eftre fait par l'Armée confedérée
des Chrétiens. L'Empereur
à qui tant de Troupes auxiliaires
jointes aux fiennes , ont
facilité cette Conquête , y va rétablir
la veritable Religion , pendant
que Sa Majefté fortifie cette
méme Religion dans huit cens
Villes
de Bude. 3
t
Villes ou Bourgs , d'où Elle a
chaffe la fauffe , que fept de fes
predeceffeurs n'avoient pû détruire.
Ces deux Nouvelles ayant
donné au Pape la plus fenfible
joye qu'il ait receue depuis fon
Exaltation au Pontificat , il a ordonné
de femblables remerciemens
à Dieu , & d'égales rejoüiffances
dans Rome, pour des actions
qui font du plus grand merite au
prés du S. Siege. On n'y a parlé
jufqu'à la prife de Bude , que de
ce que l'Eglife doit au Roy de
France , & depuis la Conquête
de cette importante Place, on n'y
parle que de l'une & de l'autre
action, & on les regardes comme
les deux plus grands Triomphes
que l'Eglife pouvoit remporter.
Je vous ay entretenue de l'une
pendant plufieurs mois , il faut
vous entretenir de l'autre ; mais
A ij
4 Hiftoire
du Siege
pour le faire avec un peu d'ordre ,
je croy qu'il fera bon de vous expliquer
en peu de mots comment
la Ville de Bude a paffé au pouvoir
des Ottomans.
Louis II. dit le Jeune , Roy de
Hongrie , ayant pery en 1526. à
la bataille de Mohacs , Jean de
Zapol , Comte de Scepus , Vaivode
de Tranfilvanie fut falué
Roy par une partie des Hongrois.
L'autre élut Ferdinand Roy de
Boheme , qui avoit époufé Anne ,
Soeur du defunt Roy Loiys . Ferdinand
affifté des forces de l'Empereur
Charle Quint fon frere ,
alla droit à Bude , dont il fe fai fit
en ayant chaffe Jean de Zapol , qui
par diverfes pratiques qu'il eut à
la Porte , vint enfin à bout de faire
venir Soliman à fon fecours . Solyman
eftant entré dans la Hongrie
avec de puiffantes forces en 1529.
marcha
de Bude.
5
€
C
marcha vers Bude , la prit & retablit
le Roy Jean dans fon Eftat.
Ce dernier pour s'y maintenir
fans trouble , fit un accord avec
Ferdinand , par lequel il devoit
jour du Royaume de Hongrie
jufques à fa mort , à condition
que Ferdinand , ou l'un de fes
Fils , luy fuccederoit , & comme
il fe pouvoit faire que Jean venant
à fe marier auroit des enfans
, il fut arrefté que s'il avoit
un Fils , ce Fils feroit Prince de
Tranfilvanie, & poffederoit toutes
les terres , Villes & Chateaux
qui avoient appartenu à Jean avant
que les Hongrois l'euffent
fait leur Roy. Ce Traité eftant
conclu, il fe maria avec Elifabeth.
fille de Sigifmond Roy de Polog.
ne, & mourut prefque auffi - toft ,
laiffant au berceau un Fils qu'il
en eut. Quelques- uns mirent la
A iij
6 .
Hiftoire du Siege
Couronne fur la tefte de l'Enfant
le jour qu'il fut baptifé , & Ferdinand
ayant demandé à Elifabeth
l'execution du Traité fait
avec le Royfon Mary cette malheureufe
Reyne qui fut avertie
qu'il preparoit une Armée pour
la contraindre à l'obeïffance , envoya
des Ambaffadeurs à Solimã .
Ils en furent bien receus , & en
rapporterent une Robe d'écarlate
en broderie , une maffe de fer
avec le pommeau & la poignée
d'or , & un cimeterre dont le fourreau
eftoit tout femé de pierreries
, pour marque de fon amitié
& de fa protection . En mefme
temps Solyman donna fes ordres
pour faire fecourir Elifabeth fi
elle eftoit attaquée , & Guillaume
Rocandolph, General des Troupes
de Ferdinand , ayant commencé
le Siege de Bude , Mahomet Bacha
de Bude ..
7
cha , & Mahomet Sangiac de
Belgrade , pour obeir à leur Empereur
, marcherent vers cette
Place avec toute la diligence poffible
. Rocandolph remüa fon
Camp à leur arrivée . Il le mit au
pied du Mont S. Girard . Le Sangiac
de Belgrade alla camper fur
les cofteaux de la Plaine qui s'étend
depuis ce Mont le long du
Danube pour enfermer les Chreftiens,
& Mahomet Bacha campa
d'un autre cofté , & fi prés de
Rocandolph , que les Tentes de
l'une & de l'autre Armée n'étoient
éloignées que d'une demie
lieuë. Il y eut de legers combats
entre les deux Camps , avec des
fuccez , tantoft favorables pour
l'un des partis , & tantoft pour
l'autre ; mais enfin Rocandolph
ayant appris que Solyman venoit
luy- mefme appuyer les deffeins
A iiij
8
Hiftoire du Siege
de fes Generaux à la tefte de
deux- cens mille hommes , jugea à
propos de fe retirer . Les Turcs
avertis de fon deffein l'attaquerent
dans fa retraite , & plus de
vingt mille Chrêtiens demeurerent
fur la place . La levée du Siege
n'empefcha pas Solyman de
pourfuivre fon voyage , & de venir
jufque devant Bude . Il envoya
de là affurer la Reine Elifabeth
de fa bienveillance ; & la fit
prier de fatisfaire l'envie qu'il
avoit de voir le jeune Eftienne
fon Fils. Elifabeth trouvant dangereux
de le refufer , parce que
c'eût été marquer de la défiance ,
& irriter un Prince puiffant, l'envoya
au Camp de Solyman , avec
les principaux Seigneurs de fa
Cour. Le Turc le receut avec
beaucoup de careffes , & le fit
loger avec Bajazet & Selim fes
Fils ,
de Bude.
Fils , qu'il avoit eus de Roxelane .
Les Bachas traiterent magnifiquement
les Seigneurs Hongrois
qui avoient accompagné leur
jeune Roy , & cependant les Janiffaires
de Solyman qui avoient
fes ordres , eftant entrez dans la
Ville comme amis , fe répandirent
par tout fous pretexte de
confiderer la beauté des Bâtimens
, & fe voyant affez forts
pour executer leur entreprife , ils
fe faifirent de toutes les Places ,
forcerent les Gardes des Portes
qui ne foupçonnoient point cette
trahifon , & les ouvrirent à quelques
Troupes qu'on avoit fait
avancer. Enfuite on commanda
aux Bourgeois de rendre les armes
, & ce fut ainfi que Solyman
s'empara de Bude , fans qu'il en
coutât le fang d'un feul homme .
Cela arriva en 1541. Apres un
•
A V
Hiftoire du Siege
évenement fi favorable , l'Empereur
Turc tint confeil , & l'on
y
mit en deliberation s'il retiendroit
le Royaume de Hongrie,
ou s'il le rendroit au jeune Roy.
Mahomet Bacha eftoit d'avis que
Solyman le menaſt à Conſtantinople
avec les Seigneurs Hongrois
qu'il avoit entre fes mains ,
& qu'il mift à Bude un Gouverneur
qui ufant de moderation ,
apprit à ce Peuple à fe foumettre
au joug Ottoman . Ruftan
, Gendre de l'Empereur &
de Roxelane , luy voulut perfuader
de garder ſa foy , qu'il ne
pouvoit violer fans honte , & le
Sangiac de Belgrade fut d'avis
qu'en reduifant la Hongrie en
Province , il fe delivraft par là
de la neceffité, où il pourroit eftre
encore de revenir de fi loin fecourir
une Femme & un Enfant.
Il
de Bude. I
Il luy reprefenta qu'ils ne pourroient
refifter aux forces Allemandes
que par le fecours de
celles de la Hauteffe , & que les
Guerres ne fe devant faire que
pour avoir le moyen de vivre en
paix , il eftoit de l'intereft du
Sultan fon Maiftre, de reduire en
Province un Royaume qu'il avoit
fi fouvent défendu ; qu'ainfi il
falloit renvoyer la Reyne en Pologne
à fon Pere Sigifmond , mener
le jeune Roy Eftienne à
Conftantinople pour l'y élever
dans la Loy Mahometane , faire
trancher la tefte à tous les
Seigneurs Hongrois prifonniers,
rafer leurs Fortereffes , tranfporter
une pattie des familles en
Afie , & tenir les autres dans le
devoir par de fortes Garnifons.
Soliman ne fuivit aucun de ces
avis. Il entra dans Bude, & aprés
avoir
12
Hiftoire du Siege
, avoir renverfé les Autels &
fait brifer toutes les Images de
l'Eglife Cathedrale pour la confacrer
felon les Superftitions Mahometanes
, il fit fortir Elifabeth
de la Ville , & l'obligea de ſe retirer
à Lippe avec fon Fils pour
gouverner la Transilvanie , l'affurant
qu'il le rétabliroit fur le
Trône quand il feroit dans un
âge plus avancé. Cependant il la
declara Tutrice de ce jeune Prince
dont il luy promit d'eftre le
Protecteur, & luy rendit Georges
Martinufius pour eftre Miniftre
de fes Eftats. Depuis ce temps-là
la Ville de Bude que les Allemans
appellent offen , eftoit toûjours
demeurée au pouvoir des Turcs.
Elle fut affiegée en 1598. fous
le Regne de Mahomet III . par
l'Archiduc Mathias . Il força le
Fauxbourg qui eft du cofté du
Da
de Bude . 13
1
I
Danube , & fe rendit maiſtre
du Fort bafty fur le Mont Saint
Girard , où il trova quatre- vingt
pieces de canon , mais il ne put
venir à bout de la Citadelle .
Elle fut & vigoureufement défendue
, que la mauvaiſe faifon
s'avançant , il fe vit contraint de
lever le Siege. Comme il n'abandonnoit
le deffein de faire
cette conquefte que par la confideration
de l'hyver , fi - toſt
qu'il vit le temps propre à l'entreprendre
, il ramena fon Armée
devant cette Place. Les
Turcs qui en apprehendoient
la perte , s'avancerent promptement
pour la fecourir. Ils furent
défaits , mais cette victoire qui
donnoit de fi grandes efperances
aux Princes Chreftiens qui attaquoient
Bude ne pût rien
diminuer de la fermeté des
,
Affie
14 Hiftoire du Siege
Affiegez à fe bien défendre .
L'Armée Chreftienne trouva
dans ce fecond Siege les mefmes
hommes , & la mefme refiftance
qui luy avoit fait quitter
le premier , & elle fe retira
encore une fois.
>
Apres la perte d'Albe - Royale
, repriſe en 1602. par les
Turcs qui l'avoient perduë
l'année precedente , le mefine
Archiduc Mathias , qui commandoit
une Armée de quarante
mille hommes , marcha pour
la troifiéme fois contre Bude.
La Ville - baffe ayant efté
facilement emportée , il affiegea
la haute , furprit la Ville de
Peft , & ces commencemens furent
fi heureux , qu'on ne douta
point qu'il ne vint à bout de
fon entrepriſe. Cependant toute
la valeur & la prévoyance
des
de Bude.
15
des Chreftiens ne put empefcher
que la Citadelle ne fût rafraîchie
d'hommes , de vivres &
de munitions . de Guerre ; ainfi
il fallut encore lever le Siège.
Charles de Gonzague , Duc de
Nevers , y fut bleffé d'un coup de
moufquet à l'épaule.
Le dernier Siege eft connu
de tout le monde. Il fut commencé
par le Prince Charles de
Lorraine le 14 de Juillet 1684.
& le fecours jetté dans la Place
, le mauvais eftat dés Troupes
, l'incommodité de la faifon
, & le hazard auquel on fe
feroit exposé en donnant un
affaut general , dans lequel on
auroit eu à combattre en meſme
temps & ceux de la Ville , &
le Seraskier qui n'eftoit pas éloigné
des Lignes , ayant fait
craindre un mauvais fuccez de
cette
16 Histoire du Siege
cette entrepriſe , l'Armée Chreftienne
fe retira le premier jour
de Septembre , fans eftre inquietée
par les Ennemis dans fa
retraite .
Je viens au cinquième Siege
de cette importante Place.
Rien n'eft plus difficile qu'u
ne Relation de cette nature ,
fur tout lors qu'un Siege a efté
long , qu'il a fait verfer beaucoup
de fang, & que l'évenement
en a efté attendu de toute
l'Europe. Comme dans celuy
que j'entreprens de décrire , le
nombre des Intereffez a efté
grand , & qu'il y a eu differens
quartiers de divers Souverains,
fans compter quantité de Volontaires
repandus de plufieurs
Nations, chacun voudroit qu'on
n'oubliaft rien de ce qui le regarde
, & c'est une exactitude
qui
de Bude.
17
,
qui eft entieremet impoffible.Cependant
s'il arrive qu'on ne parle
point d'une action d'un feul Volotaire
lors qu'il eft d'une qualité.
diftinguée, cela eft caufe que tous
ceux de la mefme Nation fe récrient
fur la fauffeté d'un ouvrage
, qui ne manque quelquefois
qu'en ces fortes de circonftances
qui ne meriteroient pas
qu'on s'en mift en peine . Il y en
a d'autres qui pouffent le point
d'honneur plus loing , & qui ne
voudroient pas qu'on marquaft
que ceux de leur Nation ont eu
fouvent du defavantage pendant
le cours du Siege , comme fi la
- Victoire qui couronne tous les
travaux par la priſe d'une Place,
& qui efface toutes les pertes,
pouvoit empécher que l'on n'euft
efté quelquefois batu avant le
triomphe. S'il ne faloit point
parler
18
Hiftoire du Siege
parler des de avantages du Vainqueur,
il faudroit feulement marquer
la Prife , & la Victoire &
ce ne feroit plus alors la Relation
d'un Siege , mais le détail de la
derniere action. Bien que l'on
foit affuré de la priſe de la Place
avant que d'écrire la premiere
ligne du Siege , & qu'on fçache
que ceux qui fe font venus rendre
aux Afliegeans ont dit la
plus - part des fauffetez , il faut
pourtant faire mention de ces
fauffetez ,quoy que dans le tems
qu'on les écrit , on les connoiffe
pour telles. Il faut mettre dans
un journal tout ce qui s'est fait
& tout ce qui s'eft dit , parce que
felon ces chofes ont voit les vraies
& les fauffes mefures qu'ont pris
tant les Affiegeans que les Affiegez.
C'eſt par là que la Pofterité
s'inftruit , & c'eft ce qui doit
donner
de Bude. 19
3:
donner des lumieres à ceux qui
en de pareilles occafions peuvent
un jour avoir des commandemens.
Ainfi quand je diray la
verité de ce qui s'eft paffe pendant
le cours du Siege de Bude
,je ne feray pas pour cela contre
les Allemans. Tout depend
de la derniere action , puifque
lors qu'on reuffit , on a toûjours
pris de juítes mefures. Je dois
dire à l'avantage de la France,
qu'une Place fans dehors , com-
I me celle que vient de reduire
l'Armée des Confederez, fe pourroit
compter prife d'abord
les François l'affiegeoient , puifqu'on
ne manque jamais de capituler
dés qu'ils ont pris les dehors
de quelque Place , & que
Bude n'en avoit point . Ils auroient
pû faire voir en cette occafion
ce qu'ils ont fouvent fait
, fi
éprou
20
Hiftoire du Siege
éprouver à plufieurs Villes , mais
l'Allemagne avoit trop connu
leur valeur en la fameufe journée
de S. Godard pour vouloir
donner lieu à d'autres qu'à fes
Sujets d'acquerir une auffi grande
gloire , & elle a mieux aimé
faire lentement cette Conquête,
quand mefme elle auroit deu
rifquer à ne la pas faire
,, que de
laiffer aux François les avantages
qu'ils font toûjours feurs de
remporter dans toutes leurs entrepriſes.
Comme le fuccés de
celle- cy paroiffoit douteux , elle
fut fort debatue au Confeil de
l'Empereur.Les fentimens étoient
partagez, & il y en avoit d'entierement
cotraires à l'avis du Prince
Charles de Lorraine , qui fouhaitoit
d'ouvrir la Campagne par
un Siege auffi confiderable que
celuy de Bude paroiffoit aux Allemans
.
de Bude. 21
lemans. Il avoit efté contraint
de le lever en 1684. & il croyoit
qu'il y alloit de fa gloire de reparer
par la prife de cette Place
qu'on jugeoit fi importante , le
malheur qu'il avoit eu l'affiegeant
inutilement. Il trouvoit l'occafion
favorable , & qu'il luy eftoit
facile d'acquerir beaucoup de
gloire , à moins qu'il n'euft toû
jours le mefme malheur , puis
qu'il devoit eftre fecondé dans
cette Expedition , non feulement
par les Troupes de l'Empire , mais
encore par celles de plufieurs
Souverains , dont il y en avoit
un tout remply de coeur , qui
vouloit commander les fiennes en
perfonne , & que ces Troupes
qui ne manquoient de rien , étoient
aguerries à l'exemple de
leur Chef , qui a déja fait voir
fon courage & fon intrepidité
en
22 Hiftoire du Siege
en plufieurs occafions . Ileft aisé
de juger que c'eft de l'Electeur
de Baviere que je parle. Outre
tout cela ,le Prince Charles voyoit
accourir en foule quantité d'illuftres
Volontaires de toutes les
Cours de l'Europe , parmi lefquels
eftoient beaucoup de François
qui fe trouvent toujours dans les
lieux où ils peuvent voir qu'il y
a de la gloire à acquerir. Ce n'étoit
pas encore tout ce qui foutenoit
l'efperance de ce Prince. Il
fçavoit que les liberalitez du Pape
fe répadoient à pleines mains,
pour faire fubfifter fes Troupes,
que chaque Souverain de l'Europe
fourniffoit des hommes , de
l'argent , ou des munitions pour
avancer le fuccés de fes deffeins,
& qu'enfin le Siege de Bude étoit
pluftoft l'entrepriſe de la
Chreftienté entiere,que de l'Empire.
de Bude.
23
pire. Comme tous ces avantages
pouvoient contribuer à fa.
gloire & le faire triompher , il
eftoit de ſes interefts de profiter
de l'occafion , puis que l'honneur
de remporter la Victoire , quoy
que deuë aux plus braves fujets
de tous les Souverains de l'Eurodevoit
réjaillir preſque fur
pe ,
luy feul.
Si ce Prince fouhaittoit avec
une extreme impatience qu'il luy
fuft permis d'affieger Bude , les
Turcs qui n'avoient point d'armée
en campagne , ne defiroient
pas avec moins d'ardeur de luy
voir former ce Siege . Celle des
Chreftiens eftoit puiffante , de
forte que l'on eftoit affeuré que
la Place qu'ils attaqueroient ne
pourroit refifter long- temps , ny
attendre le fecours , à moins
qu'on n'affiegeaft la plus forte, &
la
24 Hiftoire du Siege
la mieux remplie d'hommes , &
de munitions & tout cela fe
trouvant à Bude , les Turcs avoient
raiſon de fouhaiter qu'on
mift le Siege devant cette Place,
afin que la longue refiftace qu'elle
feroit, leur puft donner lieu de
preparer un puiffant fecours , &
de le faire mefme venir du fond
de la Turquie , s'il en eftoit befoin
. Michel Abaffi , Prince de
Tranfilvanie , qui eftoit de concert
avec eux fit entendre aux
Imperiaux qu'il fe declareroit
plus ouvertement en leur faveur,
files Ottomans n'eftoient plus
maiftres de Bude. Ainfi tout
contribua à cette entreprife,quoy
que le fuccez en fuft incertain,
parce que la Place , ainfi que la
fuite l'a fait voir , ne manquoit
ny de Soldats , ny de Chefs intrepides
& aguerris, ny d'argent,
2
ny
de Bude.
25
Ο
C
ny de toutes fortes de munitions.
D'ailleurs la forte & longue reſiſtance
que le Gouverneur avoit
faite pendant le dernier Siege
, devoit fervir de regle à celuy
à qui l'on en avoit commis
la défenfe , & comme il étoit
feur d'eftre étranglé s'il rendoit
la Place , il y avoit
apparence
qu'il la défendroit jufqu'à la derniere
extremité. Il y avoit auffi
lieu de prefumer pour plufieurs
raifons , que le grand Vizir venant
en perfonne , periroit plutoft
, que de ne la pas fecourir.
La deftinée de fes deux Predeceffeurs
le devoient engager à
cet effort , c'eftoit par la qu'il
pouvoit fe monftrer digne du
choix qu'on venoit de faire en
Il'élevant à la dignité où il fe
voyoit. Il avoit eu l'adreffe de
fe faire mettre . en la place de
B
16
Hiftoire du Siege
fon Predeceffeur, & il avoit commandé
une Armée contre la Pologne
avec affez de fuccés pour
faire attendre de plus grandes
chofes de luy , quand il feroit à
la tefte d'un plus grand nombre
de Troupes , & cependant c'eft
luy qui eft caufe que l'on a pris
Bude.
Quelque nombreuse que foit
une Armée devant une Place, &
quelque fortifiée qu'elle foit , il eft
prefque impoffible ( & c'eft ce
qu'on n'a prefque point vû depuis
plufieurs ficcles) qu'elle empefche
une Armée Royale de fecourir
la Place affiegée lors que
cette Armée a pu faire affez de
diligence pour arriver avant la
prife de la Ville qu'elle a voulu
delivrer d'un fiege . C'est pour ceque
dans la plufpart des capitulations
, les Villes affiegées metla
tent
de Bude.
27
tent qu'elles fe rendront au jour
dont on convient, pourveu qu'avant
ce jour-là il n'arrive point
d'Armée Royale pour les fecourir.
Il eft enfin conftant que de
vingt Armées qui ont donné
dans des Lignes pour les forcer,
quoy que défenduës par un plus
grand nombre de Troupes , dixneuf
y ont réuffi. La raifon en
eft facile à comprendre. Une Armée
,, quoy que tres -nombreuſe,
qui entoure une Place, peut eftre
forcée par une plus foible , parce
qu'elle eft obligée d'occuper plufieurs
lieues de terrain autour de
la Place qu'elle affiege, & quainfi
chaque quartier eft peu garny
de Troupe , au lieu que l'Armée
qui attaque eft toute raf
femblée en un corps , ce qui la
rend beaucoup plus forte. Celle
qui eft dans les lignes pour-
Bij
28 Hiftoire du Siege
roit faire la mefme chofe , &
unir auffi toutes les forces pour
défendre l'endroit par lequel elle
eft attaquée , mais quand ceux
qui la veulent forcer font habiles
, ils donnent de fauffes attaques
fi à propos qu'on n'ofe dégarnir
aucun Pofte , parce qu'on
ne peut deviner la veritable at
taque. Ainfi l'Armée qui veut
paffer dans une Place , & qui
prend toutes les mesures qu'il
faut pour cela , cela , ne trouvant que
les Troupes d'un feul quartier
à combattre , les forces , aidée
de la Garniſon qui en ce rencontre
ne manque jamais de vigoureufes
forties. Ceft par là que
les Villes affiegées qui ont be
foin d'eftre fecouruës , le font
toujours, quand les Armées qu'on
veut employer pour ce fecours,
arrivent affez à temps . Le Grand
•
Vizir
de Bude. 29
Vizir au lieu de fe fervir de
tous ces avantages , a fait quan
tité de fautes , & elles ont efté
caufe de la prife de la Place
qu'il auroit pû fecourir. Il a fait
batre plufieurs fois fes meilleures
Troupes en détail , ce qui
ne pouvoit manquer d'arriver ,
puifque les corps qu'il envoyoit
eftoient moins forts que toute
Farmée qu'ils avoient à combatre.
Il a laiffé le temps de connoiſtre
que celle qu'il amenoit,
eftoit moins nombreuſe qu'on
n'avoit crû. Il a fait rallentir la
chaleur de fes Troupes , en les
faifant battre trop fouvent , & en
sobftinant à ne pas attaquer les
lignes avec toute fon Armée . Il
a par la frequente défaite de ces
mefmes Troupes rehauffé le courage
des Chreftiens. Il leur a
donné le temps de faire venir
Bij
30
Hiftoire du Siege
le General Scheffemberg avec
les fiennes , qui n'eſtant rebutées
par aucun affaut , ont emporté
la Place ; il eſt cauſe de
la mort du Gouverneur , & de
perte de tout ce qui reftoit
de bonnes Troupes dans Bude,
parce que fi fa preſence n'euft
pas fait efperer un
la
prompt
& vigoureux fecours , on auroit
capitulé lors qu'on auroit
crû n'eftre plus en eftat de fe
défendre. Ainfi fa prefence a
donné aux Affiegeans une Vitoire
, & plus grande , & plus
complette . Elle a fait voir le
peu
de valeur , & le petit nombre
des Troupes Ottomanes
que le peu d'experience de fes
Chefs. Elle a caufé les pertes
que les Troupes ont faites depuis
la prife de Bude , & qui entraifneront
celles qui les doivent
fuivre .
•
>
ainfi
de Bude.
31
e
fuivre. Elle a donné du coeur
aux Victorieux ; elle a ofté la
terreur qui depuis long - temps
faifoit apprehender l'Empire Ot-
& fera caufe qu'aucu- toman
ne Place forte ne ſe défendra autant
qu'elle pourroit faire quand
elle fera affiegée , de crainte
d'éprouver le fort de Neuhaufel
& de Bude .
Toute l'Europe eſtoit attentive
fur l'entreprife par laquelle
les Imperiaux feroient cette année
l'ouverture de la Campagne.
L'Electeur de Baviere eſtant
arrivé à Neuftadt le vingtiéme
de May , l'Empereur y tint plufieurs
fois confeil de guerre avec
les Officiers generaux &
ſes Miniftres. On y propofa le
fiege d'Albe Royale , auquel il
y eut quantité d'avis contraires .
-
B üij
32 Hiftoire du Siege
pes
·
On reprefentoit que les Troueftant
fraifches , & l'Artillerie
en bon eftat , il feroit beaucoup
plus avantageux d'attaquer
Bude. On convenoit que ce Siege
ne fe pouvoit faire fans beaucoup
de peine , à caufe que les
fortifications en avoient efté
tres bien rétablies , & qu'on
y avoit ajouté quelques ouvrages
pour en fortifier les dehors
le long du Danube jufqu'à la
Montagne.On fçavoit encore que
le Foffe avoit efté aprofondy de
l'autre coſté de la Ville , que
avoit contreminé les endroits où
les Imperiaux avoient preparé
des mines lors qu'ils l'affiegerent
en 1684. qu'il y avoit de fauffes
portes pour faire des forties par
deffous , & qu'on avoit dépavé
les rues , ofté les toits , & fait
couvrir de terre toutes les maifons
,
l'on
de Bude.
33
C
3
fons , afin d'empefcher l'effet des
Bombes & des Carcaffes. Des
Deferteurs avoient auffi rapporté
qu'il y avoit dans la Place des
munitions de guerre & de bouche
, pour foutenir un Siege de
plus de fix mois ,,
que la garnifon
eftoit de plus de dix mille
hommes choifis entre les Janiffaires
& les Spahis , & que le
1 Bacha Abdi qui commandoit
dans la Place , eftoit un homme
tres - confommé dans le meftier
de la Guerre , qui avoit fous luy
fix autres Officiers fort experimenteż.
On balança toutes ces
raifons , & elles ne furent point
affez fortes pour empêcher qu'on
ne refoluft d'affieger Bude. Le
rendez vous general fut donné
aux Troupes pour le 29. de
ce mefme mois à la referve de
celles de Brandebourg , qui tra-
·
B v
34 Hiftoire du Siege
verfant la Silefie de fort mau
par
vais chemins, ne pouvoient marcher
qu'à petites journées. Il fut
arrefté fuivant la divifion qui
s'en fit que la grande Armée
que commanderoit le Prince
Charles de Lorraine , feroit de
cinquante- huit à foixante mille
hommes , fçavoir de quinze mille
hommes d'Infanterie Allemande
, de quatorze mille Chevaux
& Dragons Allemans , des Troupes
auxiliaires de Saxe , de Brandebourg
, & de Suabe , & de
quatre mille Hongrois , & que
l'Armée dont l'Electeur de Baviere
auroit le commandement ,
feroit compofée de douze mille
Fantaffins Allemans , de dix
mille Chevaux auffi Allemans
des Troupes de cet Electeur ,
& de celles des Cercles de Baviere
& de Franconie , & de
troisde
Bude..
35
+
trois- mille Hongrois . Dans l'Armée
du Prince Charles les
Comtes de Caprara & de Staremberg
furent nommez Marefchaux
de Camp Generaux ;
le Duc de Croy General d'Infanterie
, le Prince Louis de
Neubourg , & le Comte de Suze
Lieutenans Generaux ; les
Barons de Thingen & de Thun,
& le Marquis de Nigrelli Sergeans
Majors de Bataille ; les
Comtes de Schults & de Dunevald
Generaux de Cavalerie ;
les Comtes de Taff , & de Palfi
, & le Baron de Mercy Lieutenans
Generaux ; le Prince Eugene
de Savoye qui eftoit arrivé
d'Efpagne en pofte depuis
peu de jours , le Comte Philippe
de Thaun , le Baron de Lodron,
& le Comte de Stirum Sergeans
Majors de Bataille .
Le
Comte
36
Hiftoire
du Siege
Comte de Leſlie fut fait Maref
chal de Camp General de l'Armée
de l'Electeur de Baviere ; le
Comte de Sherini General d'Infanterie
, le Marquis de la Verne
& le Comte de Schaffemberg
Lieutenans Generaux, & les Barons
de Wallis & de Berk , &
le Comte d'Afpremont Majors
Generaux . Il fut auffi arrefté que
le Comte de Scherffemberg demeureroit
en Tranfilvanie , &
le Comte Caraffa vers Zatmar
avec les détachemens qu'ils y
commandoient pour la confervation
des Conqueftes nouvellement
faites. Quelques accés.
de fievre qui retinrent le Prince
Charles à Edembourg , l'ayant
empéché d'aller fe mettre à la tête
des Troupes dont on devoit
faire le 29. une reveue Generale
dans les Plaines de Barcam , elle
fut
de Bude.
37
fut remife au 8. de Juin. Ce Prince
partit d'Edembourg le 20.
après avoir eu une longue conference
avec l'Electeur de Baviere
, qui fe rendit à Neuſtadt
le lendemain pour en rendre
compte à l'Empereur. Cependant
tout le trajet du Danube
depuis Ratisbonne jufqu'à Presbourg
eftoit couvert de Barques
& autres petits Vaiffeaux chargez
de munitions & de vivres, & des
Troupes de Baviere , de Franconie
& de Suabe qui defcendoient
vers la Hongrie. Jamais entrepriſe
n'a efté executée avec tant de
joye. On fe preparoit au Siege
de Bude avec un courage & une
ardeur qui ne fe peut exprimer.
Les Volontaires accouroient , de
France, d'Espagne , d'Angleterre,
d'Allemagne & de tous les endroits
de la Chrêtienté , & le
Duc
E
38 Hiftoire du Siege
Duc de Bejar Grand d'Eſpagne,
vint joindre à Vienne le Marquis
de Valero fon frere , qui s'y
eftoit déja rendu avec quelques
autres. Le 29. le Prince Loüis
de Bade partit de Neuftadt en
pofte pour aller joindre l'Electeur
de Baviere , & le Prince
Charles s'y eſtant rendu de Raab
le premier de Juin pour prendre
congé de Sa Majefté Imperiale,
reprit la route de Hongrie , accompagné
du Comte Stratman,
Grand Chancelier. Le 5. il arriva
à Comorrhe , où l'Electeur de
Baviere avoit efté receu deux
jours auparavant au bruit du
Canon & de la Moufqueterie. Ils
en partirent enſemble pour aller
au rendez - vous general. Le Prince
Charles y trouva les Troupes
dont l'Armée Imperiale devoit
eftre compofée. Elles avoient eſté
affem
A
de Bude.
39
affemblées proche de Barkam ,
par les foins du Comte de Staremberg.
On ne peut s'imaginer
la joyé qu'elles témoignerent en
voyant leur General . Il fut aisé
de connoître par toutes les marques
qu'elles en donnerent l'impatience
que chacun avoit de
marcher fous fa conduite . Les
Troupes de Saxe eſtant arrivées
au nombre de mille Chevaux
, & de quatre mille hommes
d'Infanterie , le Prince de
Saxe qui les commandoit , envoya
prier le Prince Charles
de les venir voir. Ce Prince
en fit la reveuë , & alla enfuite
difner dans la Tente de l'Electeur
de Baviere , qui luy fit voir les
fiennes rangées en bataille . I
retourna de là à Comorre pour
quelques ordres qu'il avoit à y
donner. Cependant les Troupes
du
40 Hiftoire du Siege
du Cercle de Suabe , commandées
par le Marquis de Bade-
Dourlach , joignirent l'Armée.
Elles étoient de trois mille hommes
de pied , & de trois mille
Chevaux. On intercepta des
Lettres , par lesquelles on apprit
, que le Grand- Viſir eſtoit
venu à Belgrade , qu'il avoit
donné le commandement en
Chef de l'Armée Ottomane en
Hongrie à Achmet Bacha , auquel
il avoit laiffé des ordres
particuliers , de ne rien épargner
pour la confervation de
Bude & d'Effek comme des
deux Places qui leur eftoient les
plus importantes , & qui faifoient
la feureté de toutes celles
qui leur reftoient dans le Royaume,
& qu'il eftoit enſuite retourné
à Andrinople avec une extreme
diligence. On fçeut auffi
›
par
de Bude. 41
par les Efpions que l'on avoit
envoyez pour reconnoiftre les
forces des Turcs , qu'ils ne pouvoient
mettre au plus que quarante
mille hommes en Campagne
, & que les Troupes d'Afie
avoient pour la plufpart deferté
dans leur marche d'Andrinople
à Belgrade. Les Huffars de Papa,
Dotis , Vefprin & Comorre allerent
en courſe au nombre de
quinze cens jufqu'à quatre lieuës
plus bas que Bude , & jufqu'à
deux lieues du Camp que les
Turcs avoient formé entre cette
Ville & le Pont d'Effeck . Ils emmenerent
prés de deux mille
moutons , deux cens boeufs , &
quantité de chevaux , fans avoir
trouvé perfonne qui leur difputaft
tout ce butin.
9 .
Le le Confeil de guerre fut
tenu au Camp , où tous les Officiers
42 Hiftoire du Siege
ciers Generaux s'eftoient affemblez.
Le Comte Stratman s'y
trouva de la part de Sa Majesté
Imperiale . On leur fit part de ce
qu'on avoit refolu touchant le
Siege de Bude , & deux jours
aprés le Comte de Stratman partit
pour Vienne , où il rendit
compte à l'Empereur de tout ce
qui s'eftoit paffé dans ce Confeil
. Le Comte Rabata , Commif
faire general , s'en retourna auffi
à Vienne , afin de donner ſes ordres
pour faire venir inceffamment
les vivres & les munitions
neceffaires.
Le 12. le Prince Charles partit
de Comorre , & fe rendit au
Camp de Barkan . L'Electeur de
Baviere l'y joignit le lendemain ,
& aprés que l'on eut fait une Reveuë
generale des Troupes , on
commença à leur faire paffer le
Da
de Bude.
43
9
Danube fur le Pont de Gran.
Celles de Saxe marcherent à l'Avant-
garde. L'Electeur de Baviere
partit à la tefte d'un Corps
d'Armée de vingt quatre mille
hommes , compofé des Troupes
Bavaroifes , & de plufieurs Regimens
Imperiaux , & prit fa mar
che en deçà de la Riviere. I
s'avança vers Hatwan , dans le
deffein de s'en rendre Maistre ,
& d'attaquer Peft enfuite. La
priſe de ces deux Places , dont la
derniere n'eft feparée de Bude
que par le Danube , devoit empefcher
les Ennemis d'avoir aut
cune communication entre Bude
& Agria. Le 14. les Défilez,
& la difficulté des chemins qu'il
fallut élargir en plufieurs endroits
, pour les rendre pratiquables
, ayant obligé l'Infanterie à
demeurer derriere avec l'Artillerie,
44 Hiftoire du Siege
lerie , le Prince Charles la laiffa
fous la conduite du Comte de
Staremberg , & s'avança vers
Vicegrad , du côté droit du Danube
, tandis que l'Electeur de
Baviere continuoit fa marche de
l'autre cofté , à une diſtance égale
, en forte que les deux Armées
euffent pû fe fecourir reciproquement
en cas de befoin .
Le 15.
la Cavalerie Imperiale
campa à Poftkamp , & le lendemain
à Saint André. L'Electeur
de Baviere marcha toûjours fous
une meſme ligne , n'ayant que le
Danube entre deux , & vint
le 16. camper à Weitzen. Les Ennemis
qui les pouvoient découvrir
des Ramparts de Bude des
deux coftez de ce Fleuve , ne firent
aucun mouvement pour les
venir reconnoiftre. On fceut par
quelques Turcs qui furent pris
pen
de Bude.
45
pendant cette marche , que le
Commandant de Bude ne s'attendoit
point à voir fa Place affiegée
que dans la croyance
que l'Armée Chreftienne attaqueroit
Agria ou Albe Royale,
on les avoit munies de bonnes
Garnifons & de quantité de vivres
, & qu'on en avort tranf
porté à Bude la pluſpart des richeffes
& des plus beaux meubles
des Officiers & des Bourgeois
, avec les femmes , les enfans
, & les bouches inutiles ; que
fur l'avis que ce Commandant
avoit receu qu'on venoit à luy,
il avoit envoyé demander des
Troupes à ceux des Places voifines
pour en renforcer fa Garnifon
, mais qu'il n'y avoit pas
d'apparence qu'on luy en puft
envoyer avant que les Princes
eunent inveſty la Place . Certe
Gar
46 Hiftoire du Siege
Garnifon ne laiffoit pas d'eftre
forte, puis qu'elle eftoit de douze
mille hommes de pied & trois
mille Chevaux , à ce qu'on aprit
de ces mefmes prifonniers. ,
Le 17. la Cavalerie fe repofa
dans le mefme campement afin
d'attendre que l'Infanterie fuft
arrivée , & l'on fit defcendre les
Bateaux dont on fe devoit fervir
pour conftruire un Pont à faire
paffer le Corps d'Armée de l'E
lecteur de Baviere. Ce Prince
qui defcendoit à gauche du
Fleuve s'empara de Peft , d'où
la garnifon Turque s'eftoit retirée
, aprés avoir fait fauter une
partie des murailles , & tiré de
la Place les munitions & les vivres.
Elle avoit enfuite rompu le
Pont qui luy donnoit communication
avec Bude , mais elle ne
put fi bien faire fa retraite,
qu'un
de Bude.
47
qu'un Aga ne tombaft entre les
mains des Bavarois avec trente
Janiffaires. Son Alteffe Electorale,
ayant laiffé garnifon dan Peft
& donné les ordres pour en reparer
les fortifications , détacha
le Comte de Steinaw avec fix
mille hommes pour aller attar
quer Hatwan , & fe mit en marche
vers l'ifte de S. André pour
paffer le Danube fur les Ponts
que l'on devoit y avoir dieffez,
& fe trouver au Camp devanţ
Bude. Le Prince Charles y étoit
arrivé le 18 & ce mefme jour
toute l'Infanterie ayant joint
l'Armée , il luy fit prendre des
poftes à demie lieuë de la Place,
La Cavalerie les prit de l'autre
cofté vers Albe Royale , & l'on
commença à travailler aux lignes
de circonvallation . Pendant ce
temps il fut tiré des Rempars
plu
48
Hiftoire du Siege
plufieurs volées de Cañon , dont
tout l'effet fut de tuer un Païfan
. On vit auffi paroiftre un detachement
de Cavalerie & d'Infanterie
de la Garnifon de Bude
qui fe prefenta pour embaraffer
les Travailleurs , mais il fe retira
prefque auffi- toft , ne fe trouvant
pas en eftat de foutenir un
gros de Cavalerie Imperiale qui
fe preparoit à le charger . L'avantgarde
du détachement que le
Prince Charles avoit envoyé
pour inveftir la Place, enleva un
Chaoux avec vingt Turcs de
quarante qui l'eſcortoient . Il venoit
de Belgrade, & apportoit des
Lettres au Bacha de Bude . Elles
confirmoient que l'Armée Ottomane
feroit commandée par Achmet
Bacha & que le Grand-
Vifir avoit eu ordre de fe rendre
promptement auprés de fa
Hauteffe
>
>
de Bude. 49
Hauteffe qui eftoit allée à Conftantinople.
Le 19. on ferra la Place de tous
les coftez par où elle eft acceffible
, & le Quartier general fut
étably à un quart de lieuë , avec
quelques Regimens d'Infanterie .
Le lendemain les Affiegez ayant
fait une fortie de trois cens Chevaux
foûtenus d'un pareil nombre
de Janiffaires , il y eut quel
que
Efcarmouche , mais elle fut
de peu de durée , parce qu'ils fe
tinrent toûjours fous le Canon
de la Place , fans qu'on les puft
attirer plus loin . Le Comte d'Altheim
y fut bleffé. Ce mefme
jour on commença d'ouvrir les
Lignes de circonvallation , & de
tracer les premieres Places d'Armes.
On marqua auffi trois Batteries
, & autant d'épaulemens
pour tenir à couvert la Cavalerie
C
50 Hiftoire du Siege
,
dont les Travailleurs devoient
eftre foûtenus dans les approches.
Sur le foir , le Comte de
Staremberg receut ordre d'aller
fe pofter proche les Bains afin
d'attaquer le Vafferftadt ou la
Ville baffe contre laquelle on
drefla deux Batteries du cofté
qui defcend vers le Danube. I
fit ouvrir la Tranchée , & on la
pouffa affez avant. Le Bacha de
Bude trouvant à propos de fe
défaire de beaucoup de bouches
inutiles >
donna la liberté
à tous les Chreftiens .
que
l'on trouva incapables de porter
les armes , & l'on fceut par
eux , qu'ayant affemblé la Garnifon
dans la grande Place , il
leur avoit leu les ordres du
Grand Seigneur qui les exhortoit
à refifter vigoureufement;
qu'il avoit enfuite défendu aux
Sol
de Bude.
51
X
1 Soldats & aux Habitans fous
peine de la vie de parler de Capitulation
, & que s'il arrivoit
qu'il fut tué en leur donnant
l'exemple de fe bien défendre,
on avoit nommé quatre Bachas
qui devoient l'un aprés l'autre
prendre le Commandement.
Le 21. les Bavarois commencerent
à paffer le Danube fur le
Pont de Bateaux de l'Ile de
S. André , & ce jour là fut employé
à ranger les Bagages dans
les Lignes , & à divifer les Troupes
par Eſcadrons & par Batail-
Ilons , afin de faire la diftinction
des Quartiers. Le Prince Charles
occupa les mefmes Poftes qu'il
avoit pris dans le dernier Siege.
L'Electeur de Baviere fit la mefme
chofe , & vint fe camper au
pied du Mont S. Gerard .
Le 22. on dreffa une nou-
Cij
52 Hiftoire du Siege
velle Batterie de fix pieces de
Canon contre la Ville baffe , &
l'on commença en mefme temps
à travailler aux Tranchées par
l'ouverture de trois grandes Places
d'Armes ; beaucoup plus prés
de la Ville que l'on n'avoit fait
en 1684. Il fut refolu qu'il y au
roit trois Attaques ; la premiere
commandée par l'Electeur de
Baviere ; la feconde par le Comte
de Staremberg , & la troifiéme
par les Troupes de l'Electeur
de Brandebourg que l'on attendoit
inceffamment , & auf
quelles on devoit joindre quelques
Regimens Imperiaux , &
d'autres Troupes Auxiliaires . Le
Prince Charles ne garda que
dix hommes de Cavalerie par
Compagnie pour fervir au
Camp à couvrir les Travailleurs
fous les ordres du Comte de Pal-
,
fi,
de Bude.
53
fi , & il envoya le reste aux environs
d'Albe- Royale , afin d'y
confumer les Fourages, & d'ofter
par là aux Infidelles les moyens
d'y fubfifter. Les Affiegez firent
grand feu tout le jour & toute la
nuit fuivante, & il y eut neuf Soldats
tuez ou bleffez .
Le 23. la nouvelle Batterie de
fix pieces de Canon s'eftant
trouvée prefte , commença dés
le matin à tirer , & fit une Bréche
de fix pas. Ceux qui estoient
au haut des Montagnes , apperçurent
par cette bréche quantité
de Betail & de Chevaux , mais
les Ennemis ne parurent point.
Il y eut fix Soldats à la Batterie
emportez par le Canon de la Place.
Quelques Huffarts & Croates
qui s'étoient avancez trois
lieuës au delà de Bude fous la
conduite du Comte Budiani ,
C iij
$4 Hiftoire du Siege
,
ayant efté avertis que le Bacha
en avoit fait fortir quantité de
Barques chargées de femmes ,
d'enfans & de quantité de
meubles qu'il envoyoit à Belgrade
, les pourſuivirent avec
trois cens Dragons , & les rencontrerent
à l'Ile de Sainte Marguerite.
Ils taillerent en pieces
tous ceux qui les eſcortoient,
s'emparerent de leurs Trefors ,
& amenerent deux cens Prifonniers
, qui furent les Vieillards
, & autres qu'ils jugerent
les plus propres à fe faire ra
cheter.
Le 24. la bréche ayant efté
élargie de vingt pas , on examina
la contenance des Affiegez
qui s'eftoient retranchez à droit
& à gauche au nombre de quatre
cens . Il fut refolu que l'on
iroit à l'Affaut , & comme c'eftoit
de Bude.
55
1 ftoit la premiere action du Siege
, chacun à l'envy chercha à
fe diftinguer. Les difpofitions
de l'attaque furent faites , & à
dix heures du foir on en donna
le fignal par trois volées de Ca-
1 non. Cent Grenadiers s'avancerent
les premiers , ayant un Capitaine
à leur tefte ; ils furent
fuivis de deux cens Moufquetaires
que commandoit un Sergent
Major , & foûtenus de trois
cens autres fous la conduite d'un
Lieutenant Colonel. Ils allerent
vers la brèche , & attaquerent
avec tant de force & de bravoure
les Ennemis qui la défendoient,
qu'ils les forcerent d'abandonner
leurs retranchemens. Six cens
hommes d'Infanterie en deux
Brigades marcherent aprés ceuxcy
, & fe pofterent au pied de
la bréche avec cinq petites pie-
C iiij
$6
Hiftoire
du
Siege
ces de Canon qu'ils avoient fait.
conduire avec eux . Elle fut franchie
par le Prince de Vaudemont,
par le Prince de Commercy,
& par un tres grand nombre
de Volontaires qui s'eftoient
mis à la tefte de l'Infanterie , &
qui fe pofterent dans la Ville
baffe malgré le feu continuel
que firent les Affiegez . Il n'y eut
que cinq Soldats tuez & onze
bleffez. Le Comte de Marfilly,
Infpecteur general des Ingenieurs
, eut le bras caffé au deffus
du coude , d'un coup de Mouf
quet qu'il réceut dans la tranchée
avant que l'on commençant l'Attaque
.
Le 25. fut employé à perfectionner
les Poftes que l'on avoit
occupez dans la baffe Ville , &
fix Bataillons furent logez au
pied des murailles. Il y eut un
Lieu
de Bude .
57
Lieutenant des Grenadiers tué
d'un boulet qui tomba dans la
Tranchée, & qui emporta les bras
& les jambes à cinq Soldats. Un
Chevalier de Malte François fut
auffi dangereufement bleffé . Il
eftoit avec le Marquis de Souvray,
qui fit paroiftre beaucoup
de bravoure .
Le 26. on s'apperceut que les
Affiegez faifoient gliffer du monde
le long de l'eau par dedans la
Ville baffe , pour venir attaquer
un Pofte qui eftoit devant une
groffe Tour joignant le Danube.
Le Chevalier de Rhofne , Capitaine
du Regiment de Staremberg,
foûtenu du Comte d'Awersbergs
, Lieutenant Colonel du
Regiment de Mansfeld , vint à
leur rencontre , & ils les repoufferent
avec beaucoup de vigueur.
Le Prince de Vaudemont le
,
C v
58
Hiftoire
du Siege
Prince de Commercy , & plufieurs
autres Volontaires qualifiez
, accoururent à l'efcarmouche
, qui dura une heure fous le
Canon de la Place. Il n'y eut que
quinze hommes tuez ou bleffez
du cofté des Affiegeans . Le Sieur
Bourgers , Capitaine du Regiment
de Staremberg fut de ces
derniers , & Milord Mongois receut
une contufion à la temple.
Les Affiegez perdirent trente
hommes, & le nombre des bleffez
fut beaucoup plus grand. Ce jour
là le Prince de Neubourg, Grand
Maître de l'Ordre Teutonique,
Lieutenant General , qui eftoit
arrivé au Camp le 22. & le
Comte de Diepenthal , General
Major , monterent la Tranchée,
fuivant ce qui avoit efté arreſté
quelques jours auparavant au
Confeil de Guerre , que tous les
jours
de Bude.
59.
jours ce feroit un Lieutenant General
, & un General Major qui
la monteroient à chaque Attaque
avec deux mille hommes,
& qu'on les releveroit de vingtquatre
heures , en vingt- quatre
heures . Outre ces deux mille
hommes , il y avoit toûjours fix
Bataillons de referve , & une
Garde de Cavalerie pour les
foûtenir. On travailla la nuit à
pouffer une grande Coupure fur
Ela droite le long de la muraille ,
afin de couvrir une Batterie de
douze Pieces qu'on vouloit mettre
en estat contre les défences
de deux Rondelles, & de la Courtine,
vers laquelle on devoit conduire
la Tranchée. On ouvrit
auffi une porte au coin de cette
Muraille , où l'on fe logea en dedans
de la baffe Ville , à trois
cens pas du Corps de la haute,
&
60
Histoire
du siege
& en tous ces logemens on ne
perdit que quinze hommes.
Le 27. les Travaux fe trouverent
fort avancez à l'Attaque
de l'Electeur de Baviere , qui fit
dreffer une Batterie fur le panchant
de la Montagne. Il fit faire
auffi fur la hauteur de cette
meſme, Montagne un Logement
affez grand pour contenir mille
hommes , & affeurer la tefte de
la Tranchée , qui fut ouverte au
pied du Chafteau , vis à vis la
grande Tour qui en couvre la
façade. Le foir les Affiegeans firent
une fortie au nombre de
quatre
cens, Cavalerie & Infanterie,
fur cent hommes retranchez à la
teſte des Travaux qu'on avoit
faits la nuit précedente. Le Comte
de Saur, Capitaine au Regiment
de Lorraine qui les commandoit
fit une fi vigoureuſe reſiſtance,
de Bude. 61
cè , que la grande Garde eut le
temps d'y accourir. Les Ennemis
furent repouflez ; ils laifferent
feize des leurs fur la place , &.
eurent quelques bleffez.La Tranchée
fut relevée ce jour- là par
le Comte de Souches , Lieutenant
General , & par le Comte
de Tinghen , Mareſchal Major.
Le 28. on joignit les deux Attaques
par une Ligne de communication
de quatre cens pas .
On mit auffi huit groffes pieces
de Canon fur une nouvelle Baterie
à l'Attaque du Prince Charles
, devant laquelle on tira une
Ligne de deux cens pas ,
afin
qu'on y puft aller de la Tranchée
fans eftre infulté des Ennemis.
Cette Baterie fervit à tirer
contre deux Ouvrages avancez
en forme de pafté , qui défendoient
la Porte du cofté de
la
62 Hiftoire du Siege
la baffe-Ville . Les Ennemis faifoient
de là un feu continuel de
Canon , dont les Affiegeans eftoient
fort incommodez . Les Travaux
furent continuez fans beaucoup
d'obſtacle la nuit de ce
même jour , & on perfectionna la
Ligne de communication
entre
la Porte du milieu & la derniere
, ce qui donnoit moyen
moyen d'entrer
à couvert dans la nouvelle
Baterie.
Le 29. le Sieur Soulars , Ingenieur
, fut bleffé en faifant travailler
à de nouvelles Lignes
qu'on fit en forme de paralelles,
pour communiquer avec les au
tres Travaux , & s'approcher plus
prés de la Place . L'Electeur de
Baviere ayant eu quelque indifpofition
, le Prince Charles l'alla
vifiter fur les cinq heures du foir,
& dans ce temps mefme , les Af-
י
Liegez
de Bude.
63
fiegez firent une Sortie en bien
plus grand nombre qu'ils n'avoient
encore fait du cofté de
l'Attaque des Bavarois. Ils attaquerent
les Travailleurs & les
Troupes qui eftoient en garde
dans la Tranchée , & les
ayant
mis en defordre , ils euffent comblé
les Travaux , fi le Comte de
Hoffkirken n'euft promptement
amené la Garde de Cavalerie.
L'Electeur de Baviere ayant efté
averty de cette Sortie , rien ne
fut capable de le retenir. Il y
courut , quoy qu'indifpofé , auffi-
bien que le Prince Charles , &
leur prefence anima fi bien tous
ceux qui avoient déja commencé
à foûtenir les efforts des Infidelles,
qu'après en avoir tué beaucoup,
ils les forcerent à fe retirer,
& les pourſuivirent jufqu'à quarante
pas de la Tranchée Le Prin64
Hiftoire du Siege
ce Eugene de Savoye fe fit remarquer
par fa bravoure , & eut
un cheval tué fous luy
, auffibien
qu'un de fes Gentilshommes.
Le Baron de Zwitterthal ,
Lieutenant Colonel du Regiment
de Steinaw , fut tué avec
trente ou quarante Bavarois. Il
y eut auffi quelques bleffez . Le
Baron de Billes , Capitaine dans
le Regiment d'Arko , le fut dangereuſement
.
Le 30. on repara les Travaux
que les Ennemis avoient ruinez
le jour precedent , & on avança
jufqu'à fix-vingt pas de la muraille.
Ce méme jour , deux Compagnies
de Paffau & de Ratisbonne
arriverent au Camp, auffi
- bien que les Troupes de Suabe
& de Franconie . Elles étoient
en tres-bon eftat , & au nombre
de cinq à fix mille hommes . Celles
de Suede commandées par le
de Bude.
65
po-
Marquis de Turlac , arriverent
pareillement , & prirent leur
ite fur une hauteur, afin de pouvoir
agir où il feroit le plus neceffaire.
Le feu parut en differens
endroits de la Ville ; il y avoit
efté mis par des Bombes .
qu'une Baterie de Mortiers avoit
jettées. Le Comte de Dunewald
partit ce jour- là du Camp , pour
aller commander la Cavalerie
inutile au Siege , qui eftoit venuë
camper au nombre de plus
de douze mille hommes jufqu'à
la portée du Canon d'Albe Royale
, ce qui avoit obligé les Turcs
à abandonner plufieurs Chafteaux
, & d'autres petits Poftes
aux environs.
Le 1. de Juillet fut employé à
perfectionner la ligne de communication
à l'attaque du Prince
Charles , & les Poftes deftinez
66
Hiftoire du Siege
par
nez aux Poftes de Suabe & de
Franconie leur furent donnez.
On apprit par des Transfuges
qu'il y avoit une grande confternation
dans la Ville, caufée
la perte qu'avoient fait les Affiegez
à la fortie du 29. il y eut
quatorze de leurs Officiers tuez
avec quantité de Janiffaires. Les
ouvrages qui avoiết eſté comencez
fur la droite , furent achevez .
la nuit fuivante , & on pouffa
ceux de la gauche jufqu'à cent
cinquante pas de la muraille .
Le 2. douze pieces de Canon
& huit Mortiers batirent la Ville.
Deux bateries que les Affiegez
avoient , l'une fur la groffe
Tour , & l'autre fur une autre
Tour , furent démontées en peu
de temps. Les Bombes cauferent
ce jour- là beaucoup de dommage
dans la Ville , à ce qu'on apprit
de Bude. 67
prit d'un Deferteur qui dit qu'elle
n'eftoit défenduë que par ſept
ou huit mille hommes , & que
les vivres commençoient à eſtre
chers , parce qu'ils n'y eftoient
pas en grande abondance. Il parut
quelques Troupes Ennemies
du cofté de Peft , & fur l'avis
qu'on en eut , le Prince Charles
ordonn que l'on fift conſtruire
trois redoutes au bord du Danube
, que les Heiduques & les
Hongrois garderoient . On fit
une brêche de quinze pas du
cofté de l'attaque du Prince
Charles.
Le 3. le Regiment du Prince
Eugene de Savoye arriva au
Camp , & on eut avis que les
Troupes de Brandebourg n'en
eftoient qu'à une lieuë. Quatre .
Mortiers furent ajoutez aux 8.
que l'on avoit mis fur la baterie
dreffée
68
Hiftoire du Siege
dreffée à l'attaque des Imperiaux,
& tout cela fit grand feu la nuit
fuivante. La Baterie des Bavarois
n'en fit pas moins , elle eftoit de
fept Mortiers. L'Artillerie des
Ennemis fit auffi grand feu , &
les Affiegeans furent fort incommodez
des Pierres qu'on leur jetta.
Le Sieur Collery , Capitaine
dans le Regiment de Lorraine,
eut le genouil fracaffé d'un éclat
de Bombe , & un des meilleurs
Bombardiers receut un coup à la
tefte. Il y eut encore quinze ou
vingt hommes bleffez . Un Offi
cier Turc qui vint ſe rendre, fur
mené à l'Electeur de Baviere,auquel
il conta qu'ayant tué le mary
d'une femme dont il eftoit amoureux
, il avoit eſté obligé de
quitter la Ville , & s'eftoit tenu
caché pendant quelques heures
dans un endroit où fa maiftreffe
luy
de Bude. 69
luy avoit promis de le venir joindre
, mais , mais que la crainte d'eftre
découvert par les Affiegeans qui
luy auroient fait un mechant
party , ne luy avoit pas permis de
l'attendre. Il ajouta qu'il n'y avoit
dans la Place que trois mille
Janiflaires , & un pareil nombre
de Soldats ; que malgré l'effet des
Carcaffes & des Bombes , qui avoient
obligé le Commandant à
fe loger dans une cave voutée
prés du Chateau pour y eftre
plus en feureté , ils eftoient tous
refolus de fe bien défendre ; qu'il
n'eftoit entré perfonne dans la
Ville comme on l'avoit crû, mais
que des Turcs en eftoient fortis
pour aller demander un prompt
fecours à Achmet Bacha Seraf
Kier , & aux Tartares.
Le 4. ce mefme Officier montra
à l'Electeur de Baviere , &
aux
70 Hiftoire du Siege
Le
aux Princes de Bade & de Savoye
, le Magafin à poudres &
les mines des Affiegez . Il dit
qu'il y en avoit fous la Rondelle
du Chafteau & à l'endroit de la
breche des Imperiaux. Un autre
Transfuge qui fe difoit Polonois,
fe rendit au Camp & affeura que
les Affiegez ne pourroient tenir
encore un mois , fi l'Armée du
Seraskier ne les fecouroit.
Prince Charles paſſa le Danube
pour aller voir les Troupes de
Brandebourg qui eftoient arri
vées le jour precedent avec une
belle Artillerie. Elles eftoient
compofées de huit mille hommes
, en fix Eſcadrons de Cavalerie
& dix Bataillons d'Infanterie
Le General Schoning qui
les commandoit, receut ce Prince
au bruit du Canon , qui fut
ſuivy de 3. décharges de Mouſque
de Bude.
71
I
queterie. Il luy donna enfuite
un magnifique difner dans fa
tente.
Le
4
5. on fit paffer le Danube
à ces Troupes , qui prirent le pofte
qui leur avoit eſté deſtiné du
cofté de la Ville baffe. Il fut refolu
qu'on en tireroit quinze
cens hommes tous les jours pour
monter la tranchée , & qu'on les
joindroit aux Imperiaux & aux
Suedois, afin de faire quatre mille
hommes pour les Poles qui étoient
du coſté de l'attaque du
Prince Charles.
Un Deferteur Grec arriva en-
*
core au Camp & raporta que
cinq Turcs qu'on avoit fait fortit
à la nage , eftoient allez preffer
le fecours que lors
que les Trou
pes de Brandebourg avoient paru
, les Affiegez avoient fait
roiftre beaucoup de joye dans la
penfée
pa72
Hiftoire du Siege
1
penféc que ce fuft celles du Se
raskier , & que le Commendant ,
ayant appris que c'eftoit un renfort
pour l'Armée Chreftienne,
avoit taché de le déguifer à la
garnifon , en difant que c'eftoit
un mouvement que les Affiegeans
avoient fait faire à leurs Troupes
pour faire croire qu'il leur en
eftoit venu de nouvelles . La plufpart
des Bateries des Affiegez furent
miſes en defordre par le grad
feu qui fut fait de l'attaque des
Imperiaux & de celle des Bavarois.
Il leur demonta plufieurs pieces
de Canon, & fit un fort grand
dommage au couronnement des
deux Pâtez,en forte qu'ils ne pouvoient
prefque plus y demeurer
à couvert . La breche ſe trouva
large de quatre - vingt pas , &
comme les ruines n'avoient point
couvert le pied de la muraille
qui
de Bude.
73
qui paroiffoit encore haute de
dix pieds , ont refolut de l'égaler
avec des Fafcines & des facs à
terre. L'attaque des Bavarois fut
auffi fort avancée , mais la breche
n'eftoit pas fi fpacieuſe.Ceux
Ide Brandebourg qui avoient ou-
Evert la tranchée à leur attaque
avec 1200. hommes , avancerent
- leurs travaux fur la gauche avec
tant de diligence , qu'ils fe trouverent
prefque au pied de la muraille
. Ce jour- là mefme ils donnerent
des marques de leur valeur.
Les Affiegez n'avoient point
fait de fortie depuis celle du 29.
= & pour eftonner ces nouveaux
1 venus ils en firent une fort
brufque & bien concertée fur
leurs Travailleurs , mais ils furent
repouffez avec grand carnage
jufques à la porte de la
Ville , devant laquelle fe pofte-
,
D
74 Hiftoire du Siege
rent ceux qui les avoient pourfuivis.
Ils s'y maintinrent , &
travaillerent de ces Poftes avancez
en reculant , & de la tefte
de la Tranchée en avançant ,
pour rejoindre les Travaux , &
les faire communiquer les uns
avec les autres. Les Ennemis
perdirent quatre ou cinq cens
hommes , & il en coufta à ceux
de Brandebourg un de leurs Ingenieurs
, quatre Lieutenans ,
autant d'Enfeignes, environ . trente
Soldats , & le Fils aifné du
General d'Orffling . il eftoit venu
en Hongrie pour faire cette
Campagne en qualité de Volontaire
, & il fut tué d'un coup
de Moufquet au travers du corps.
La nuit on jetta quantité de
Bombes & de Carcaffes dans la
Ville , principalement du cofté
de l'attaque des Imperiaux. L'Eglife
de Bude.
75
glife de faint Jean , qui fervoit
aux Turcs de grande Moſquée,
fut reduite en cendres avec cinquante
maiſons voifines.Le nombre
des Travailleurs ayant efté
augmenté , on pouffa encore les
approches, & les Lignes de communication
entre les trois attaques
qui furent perfectionnées. ›
Le fixiéme les Troupes de
Brandebourg continuerent leurs
travaux , & ils les poufferent
de telle forte qu'ils fe trouverent
auffi avancez que ceux des
deux autres attaques. Un Capitaine
& quatre de leurs Soldats
furent bleffez , & il y en
eut huit tuez . On fit jouer du
cofté de l'attaque des Bavarois
une Batterie de dix pieces de
Canon dont une fut demontée
auffi- toft par le Canon de
la Ville. Ils fe pofterent la nuit
Dij
76 Hiftoire du Siege
tout proche les Pallades , &
eurent prés de foixante hommes
tuez ou bleffez . Le Sieur Funck,
Lieutenant
Colonel du Regiment
de Souches , fut de ces derniers.
Le 7. les Travaux furent avancez
à droit & à gauche , jufques
à dix ou douze pas de la
bréche , où les Imperiaux fe pofterent.
Ils perdirent prés de cin-
Le Sergent
quante hommes .
General de Dinghen fut bleffé
au pied , à la tefte de l'attaque,
où il eftoit cette nuit de garde
avec le Comte de Souches , &
le Chevalier de Rofne receut
un coup de Moufquet au travers
corps. Les Mineurs eurent ordre
de faire éventer les Contremines
des Affiegez dont on
avoit eſté averty , & les Troupes
de Brandebourg qui travaillerent
de Bude.
77
lerent à dreffer leurs bateries,
les mirent prefque en eftat. Le
bruit fe repandit dans le Camp
que le Grand Vizir eftoit en
marche entre Belgrade & Effek
avec une Armée confiderable,
mais on connut auffi - toft la fauffeté
de ce bruit. C'eftoit Benfi
Bacha , Aga des Jani ffaires. Il
avoit joint les Troupes des Turcs
qui eftoient campez depuis longtemps
en ce lieu - là.
Le huitiéme on travailla à
élever deux nouvelles Batteries
à l'Attaque de Lorraine , l'une
de cinq pieces de Canon , &
l'autre de quatre , afin d'élargir
les brèches. La petite Rondelle
fut abatue par le Canon des Bavarois,
qu'elle incommodoit beaucoup
dans les Tranchées , & la
nuit fuivante on tira une Ligne
qui traverfoit le long de la Ron-
Dij
78 Hiftoire du Siege
,
delle gauche vers la Courtine
droite. Comme ce travail ſe faifoit
fort prés , les pierres & les
Grenades que jetterent les Ennemis
, tuerent ou blefferent prés.
de trente hommes. Le Comte
Guido de Staremberg , Lieutenant
Colonel du Regiment de
ce nom qui commandoit à la
Tranchée , s'y fit diftinguer par
fa valeur , auffi bien que le Major
Bifchoffhaufen , qui fut bleffé
au bras d'une balle de Moufquet.
Un Capitaine de Staremberg
le fut auffi à l'épaule , &
fon Capitaine Lieutenant au
pied . Trois Turcs fe rendirent,
& on apprit d'eux que les Affiegez
avoient grande impatience
qu'il leur vinft quelque fecours,
& qu'ils fe défendoient avec
d'autant plus de réſolution &
de courage, que les belles actions
eftoient
de Bude.
79
eftoient récompenſées par le
Commandant. Quelques autres.
Turcs fortirent de la Ville , dans.
le deffein de brûler les Batteries
des Affiegeans , mais l'un d'eux
ayant efté mis par terre d'un
coup de Moufquet , tout le refte
prit la fuite.
Le neuvième les Affiegez à
la pointe du jour firent jouer
un Fourneau entre la Porte &
la Rondelle du milieu. Il ruina
la Mine que les Imperiaux
avoient faite. Il y eut fept Mineurs
enterrez , & leur Capitaine
fut dangereufement bleffé
. Ils firent enfuite une Sortie
entre cette Attaque & celle
de Brandebourg. Les Troupes
de cette derniere furent d'abord
mifes en defordre , & fe renverferent
fur les Travailleurs avec
perte d'environ cent hom-
D iiij
80
Hiftoire du Siege
mes , entre lefquels furent deux
Lieutenans Colonels ,
II
quatre Capitaines
, & quelques Officiers
fubalternes
. Cependant le Corps
de réſerve de la Place d'Armes
la plus voifine eftant accouru,
on chargea les Turcs d'une maniere
fi vigoureufe , qu'ils fe retirerent
avec plus de précipitation
qu'ils n'eftoient venus.
demeura plus de quatre - vingt
des leurs fur la Place , fans les
bleffez , & l'on fit fix prifonniers.
Aprés qu'ils eurent efté
repouffez , on travailla à retirer
les Mineurs & les Travailleurs
des ruines que le Fourneau avoit
faites. Il n'y en eut qu'un
que l'on ne put retrouver. On
continua les Travaux avec autant
d'ardeur que s'il ne s'eftoit
point fait de Sortie. Les Bavarois
firent jouer une autre Batterie
de Bude. 81
terie de dix pieces , ayant eſté
obligez de changer la premiere,
à caufe que le Canon de la Ville.
l'incommodoit , & qu'elle en
eftoit trop éloignée . Ce mefme
jour , quelques Hongrois donnerent
avis à l'Electeur de Baviere
que fept mille Tartares étoient
en marche , pour jetter
du fecours avec un Bacha dans
Bude du cofté de Peft. Cela
obligea d'envoyer en diligence
trois cens . cinquante hommes :
dans cette derniere Place , avec
ordre de travailler à des Redoutes
, afin que les Ennemis trouvant
les Paffages coupez, ne pûffent
executer leur deffein.
Le dixième on attacha les
Mineurs fous la Paliffade de la
Rondelle oppofée à l'Attaque de
Baviere , & l'on redreffa en celle
de Lorraine la Galerie qui
D v
821 Hiftoire du Siege
→
avoit efté brûlée en partie le
jour précedent . On y attacha
auffi les Mineurs , pour tâcher
d'éventer les Contre- mines fous
la Rondelle qui eftoit à gauche
& fous celle du milieu .
Quoy qu'il tombaſt ce jour- là
une groffe pluye , elle ne put
empefcher que le Prince Charles
ne fift dreffer deux nouvelles
Batteries l'une au milieu
des Travaux , & l'autre de
neuf pieces de Canon fur la
gauche .
Le 11. fut employé à perfectionner
les approches à l'Attaque
de Lorraine , & l'on mit le
Canon fur les deux nouvelles :
Batteries , & deux Mortiers fur
une autre. Il y eut quelques Soldats
tuez & bleffez , mais en
petit nombre. On travailla auffaux
Mines , & à rencontrer
celles
de Bude.
83
celles
,
que les Affiegez pouvoient
avoir préparées pour les faire fauter
contre les Affiegeans , s'ils
donnoient l'affaut. Pendant tout
ce jour , les Canons & les Mortiers
tirerent fans ceffe tant
pour élargir les bréches, que pour
ruiner les Retranchemens qu'avoient
fait les Affiegez , dans le
deffein de bien foûtenir l'affaut.
La Batterie de ceux de Brandebourg
joia , auffi- bien que
celle de Dom Antonio Gonçales
, Lieutenant general de l'Artillerie
, & d'un Ingenieur Efpagnol
, qui par l'élevation de fes
feux d'artifice donna beaucoup
de plaifirs aux Affiegeans , en
mefme temps qu'il caufoit de
grands dommages aux Affiegez .
Les Bavarois battirent inceffam-.
ment la Rondelle du Chafteau,
& y jetterent des Bombes de
deux
$4 Hiftoire du Siege
deux Batteries de trois Mortiers
chacune , dont l'une n'eftoit qu'à
trente pas de la Paliffade . Trois
de leurs Mineurs furent tuez par
leurs propres Cannoniers & le
mefme malheur feroit arrivé à
l'Electeur de Baviere , s'il n'euft
pas changé de place un moment
auparavant.Sur l'avis qu'on avoit
eu que le Seraskier s'eftoit avancé
jufqu'à trois lieuës de Peſt as
vec un Corps de huit mille hommes,
tirez des Garnifons de Themifwar,
Lippa, Giula, grand Waradin
, Segedin , Agria , Hatwan
, & autres Places des Turcs
en la baffe Hongrie , & fur
les Frontieres de Tranfylvanie,
dans le deffein de fecourir Bude
le Prince Charles détacha
le Baron de Mercy & le
Prince Eugene de Savoye avec
trois
,
de Bude. 85
un
trois mille chevaux , & fix Bataillons
d'Infanterie , qui pafferent
le Danube , & fe pofterent
proche de Peft de l'autre colté
du Pont , hors de la portée du Canon
, pour y attendre les Turcs,
& empefcher qu'ils ne fe puffent.
= jetter dans la Place . On fit auffi
un Détachement confiderable de
Cavalerie & de Dragons pour
renforcer ceux que l'on avoit envoyez
à Peſt , où ils travailloient
à de nouvelles fortifications du
cofté du Danube , & pour refferrer
la garnifon d'Albe- Royale,
qui auroit pu faire quelque diverfion
en faveur des Affiegez ,
afin de faciliter le fecours qu'ils
attendoient .
Le 12. on fit applanir à l'attaque
de Lorraine la defcente dans
les Foffez oppofez aux breches,
à la faveur du Canon & des
Bom
86
Hiftoire du Siege
Bombes , afin de pouvoir monter
à l'Affaut , & l'on fit auffi grand
feu aux attaques de Baviere &
de Brandebourg. Quoy que la
breche que l'on avoit commencé
à faire dans cette derniere le
jour precedent , fe trouvaſt élargie
de plus de quinze pas , la muraille
eftoit encore trop haute depuis
fon pied jufques à l'éboulement.
Ainfi l'on continua de
tirer le Canon avec plus de violence
, pour taſcher d'y faire des
ruines plus confiderables , & les
Affiegez qui jetterent inceffamment
des feux d'artifice & des
pierres de leurs Mortiers , n'empêcherent
point qu'en l'une &
en l'autre on n'avançaft les approches
fort prés des foffez . On
vit paroiftre la flâme pendant
plus de huit heures en plufieurs
endroits de la Ville , ce qui fit
2
juger
de Bude.
juger que
les Bombes & les Carcaffes
des Affiegeans
y avoient
caufé un grand dommage. Le
feu de la Baterie des Bavarois
prit à des Tonneaux
de poudre,
& fit fauter en l'air prés de vingt
perfonnes.
Le 13. les Regimens de Steireim
, de Pafc , & de Goucqfes
arriverent des environs de Stulweiſenbourg
au camp des Troupes
commandées par le Baron de
Mercy & par le Prince Eugene
de Savoye , ce qui fit un corps de
neufmille hommes. Les Ennemis
éventerent la mine des Imperiaux
, mais les Mineurs eurent
le loifir de fe fauver. Ils mirent
auffi le feu à un Fourneau dans
l'efperance de faire fauter la
grande garde des Imperiaux , &
l'effet en fut contraire à ce qu'ils
avoient attendu les terres retom
88
Hiftoire du Siege
tomberent fur eux , & remplirent
feulement une partie de la tefte
des travaux des Affiegeans . Cependant
le feu mis à ce Fourneau
ayant ebranlé la Tour fous
laquelle le Mineur avoit eſté attaché
, on pointa contre cette
mefme Tour huit pieces de Canon
qui y firent une breche confiderable.
On tint un Confeil de
guerre où l'on refolut de donner
Affaut par trois endroits , à la
breche de l'attaque de Lorraine.
Le Comte Guido de Staremberg
, & le Comte d'Awersberg
furent commandez , chacun avec
deux- cens quatre - vingts hommes
, le premier à la droite de
l'attaque proche la grande Rondelle
, & le fecond à la gauche.
Le Comte de Herberftein , avec
qui marchoient les Fufeliers ,
Pionniers , & Travailleurs, avoit
or
1
de Bude. 8.9
ordre de donner au milieu de la
Courtine. Il eftoit auffi fuivy de
deux cens quatre - vingts hommes
, & le refte , au nombre de
deux-mille , demeura de referve
pour les foutenir . Sur les fept
heures du foir , le Signal ayant
efté donné pour l'affaut par une
décharge de tout le Canon qui
eftoit en baterie à cette attaque,
on commença de monter à la breche
, ce qui n'eftoit pas aisé , à
caufe que les Ennemis l'avoient
I reparée par plufieurs rangs
de
Paliffades . On ne laiffa pas de les
forcer, quoy qu'ils fiffent une vigoureufe
refiftance , & l'on fe pofta
fur la brêche à la faveur de
la Moufqueterie & des Grenades
qu'on tira dans les retranchemens
paliffadez qu'ils avoient.
faits , derriere lefquels ils fe maintinrent
en tres- bon ordre. Rie
n'e
୨୦ Hiftoire du Siege
·
n'eft égal à l'ardeur que firent
paroiftre tout ce qu'il y avoit de
Volontaires & de Braves à l'Armée
, pour eſtre des premiers à
fe trouver fur la breche . On y
demeura prés de deux heures:
que l'efcarmouche dura, & pendant
ce temps les Affiegez firent
fauter deux Mines , qui cauferent
moins de perte aux Affiegeans
, que les Fleches , les Bombes
, les Grenades & les Pierres.
Cependant on ne pût venir à
bout de faire le logement ; le
defordre & la chaleur du combat
avoient éloigné les Travailleurs
, & d'ailleurs il auroit falu
plus de Fafcines & de facs à terre
, qu'on n'en avoit , pour pou
voir fe mettre à couvert & ſe retrancher.
Cela fut cauſe que l'on
ugea à propos de faire retirer les
raupes dans leurs Poftes, ce que
l'on
de Bude . 91
lon fit à neuf heures du foir, tandis
que le
Canon
, des
Bombes
&
la Moufqueterie
de
deux
Bataillons
de
Souches
&
de
Mansfeld
favorifoient
la retraite
. Le
Prince
Charles
fut
preſent
à l'action
, &
eut
deux
Pages
, l'un
tué
à fes
coftez
, &
l'autre
bleffé
.
La
perte
fut
grande
de
part
& d'autre
. On
tient
qu'il
y
eut
plus
de
cinq
cens
Soldats
tuez
du
cofté
des
Affiegeans
, &
prés
de
trois
cens
bleffez
, ' outre
quelques
Colonels
,
Capitaines
, autres
Officiers
, &
beaucoup
de
Volontaires
. Parmy
ces
derniers
fut
le
Prince
de
Commercy
, qui
demeura
longtemps
fur
la
bréche
expofé
au
feu
. Le
Sieur
du
Pleffis
, fon
Ecuyer
, fut
tué
auprés
de
luy
, &
le
Sieur
de
S. Sulpice
, l'un
de
fes
Gentilhommes
, y_receut
quelques
bleffures
. Le
Duc
de
Bejar
,
Grand
92
Hiftoire du Siege
Grand d'Espagne , monta un des
premiers à l'affaut. Il y fut bleffé
dangereufement , & mourut trois
jours aprés . Le Fils du Prince Robert,
& Milord Georges Savil, fe
cond Fils du Marquis d'Halifax,
avec plufieurs autres Seigneurs
Anglois furent tuez , ainfi que
le
Prince Palatin de Veldens,le jeune
Comte de Maldeghen , le Chevalier
de Cormaillon , le Comte
de Herberſtein , le Comte de
Kouffstein , Capitaine dans Staremberg
, le Baron de Rolle , &
le Sieur Kirchmeir , tous deux
Capitaines dans le Regiment de
Souches, le Baron de Chiffer , le
Comte de Strottembach , & plufieurs
autres Volontaires & Officiers
fubalternes. Milord Fitz-
James, Fils naturel du Roy d'Angleterre
, fut bleffé legerement.
Le Prince Picolomini mourut
dés
de Bude.
93
dés le lendemain de fes bleffures,
& fut enterré dans Peft . Les autres
Bleffez confiderables , dont
les noms ont efté fçeus , furent le
Comte de Staremberg , Lieutenant
Colonel , qui avoit le commandement
de la droite ; le
Comte d'Aversberg , auffi Lieutenant
Colonel , qui commandoit
la gauche ; le Comte de Dona ,
Colonel dans les Troupes de
Brandebourg ; le Marquis de la
Verne , Lieutenant Maréchal de
Camp ; le Duc de Scalona , Grand
d'Efpagne ; le Comte de Valero,
frere du Duc de Bejar ; Dom
Gafpard de Suneja , fon Coufin;
le Comte de Cormaillon ; le Fils
du Comte d'Urfet , & fon Ecuyer;
le Sieur de Longueval ; le Chevalier
de Rhofne ; le Sieur de Landas
, Capitaine de Starembergs
les Capitaines Herrero & le Bay,
&
94 Hiftoire du Siege
& quelques Officiers venus de
Flandre ; le Sieur de Vaubonne ,
Capitaine des Grenadiers de
Bade ; le Baron Golenski , Capitaine
de Becq ; Dom Francifco
l'Africain ; le Sieur de la Brigondelle
, & le Sieur de Vaucou-
Gentilhomme du jeune leur
Prince de Vaudemont. Le Marquis
de Blanchefort , Fils du Maréchal
de Crequi , fut auffi bleffé ,
& la maniere dont il fe diftingua
fit affez connoiftre de quel
Sang il eft forty. Les Affiegez
perdirent beaucoup de monde.
On fçeut d'un Transfuge , qu'une
feule Bombe , qui eftoit tombée
dans leurs Retranchemens après
l'action , avoit emporté deux Agas
des Janiffaires, & plus de quarante
Soldats. Comme ils croyoient les
Troupes des Affiegeans fort en
defordre, il voulurent profiter de
l'oc
de Bude.
95
l'occafion , en faifant une Sortie
fur celles de Brandebourg , mais
ils furent repouffez avec beaucoup
de vigueur, & laifferent plus
de 40. des leurs fur la place. On
fit quinze Prifonniers.
Le 14. on travailla à applanir
les débris que les Contremines
des Affiegez avoient faits à l'Attaque
de Lorraine , & à combler
les Foffez de celles de Baviere
& de Brandebourg. On continua
de canonner la Place , & d'y
jetter des Carcaffes & des Bombes.
On nettoya auffi la Tranchée
, & on en ofta les terres ,
dont les Fourneaux des Ennemis
en avoient remply une partie . On
en découvrit deux ce jour là , &
l'on en tira les Poudres. ' Il y eut
un Mineur tué par l'imprudence,
d'un Canonnier, La Mine prit
feu, & vingt Soldats & deux Ca-
$
no
96
Hiftoire du Siege
nonniers furent emportez. On
eut avis que les Troupes d'Afie
eſtoient arrivées à Belgrade fous
la conduite du Grand Vifir , qu'il
y en avoit encore pris de nouvelles
, & qu'il s'eftoit enfuite
avancé vers le Pont d'Effeck ,
aprés avoir envoyé fix mille Spahis
à Walpo & à Poffega , avec
ordre d'obferver le General
Schults , qui avoit mené huit
mille Allemans & cinq cens
Croates de ce coſté - là.
Le 15. on attacha le Mineur
à la Muraille de la grande Rondelle
, & on commença deux Galaries
au pied de la Courtine.
Quelques Païfans fortis de Bude
furent conduits à l'Attaque de
Lorraine . Ils dirent qu'à l'affaut
du 13. il y avoit eu plus de cinq
cens hommes tuez du cofté des
Ennemis. On avança les Travaux
juſqu'au
de Bude.
97
jufqu'au Foffé , fur le bord du
quel on dreffa une nouvelle bat--
terie , pour ruiner à droit le cofté
de la grande Rondelle , qu'on
n'avoit pas encore attaqué. Tandis
que les Mineurs travailloient
à deux chambres de Mine , les
Affiegez en firent fauter une à
la gauche de l'Attaque. Elle ne
fit qu'agrandir la brèche du cofté
de ceux de Brandebourg. On
en éventa deux autres qu'on n'avoit
point encore chargées. Les
Bombes que l'Ingenieur Espagnol
fembloit élever jufqu'aux Etoiles,
faifoient un effet fi prodigieux
en retombant , qu'un Transfuge
rapporta qu'une feule avoit enfoncé
deux planchers & deux
voûtes , & tué plus de
perfonnes dans la plus baffe ; ce
qui caufoit une grande defolation
, parce qu'il n'y avoit pref-
E
quarante
98
Hiftoire
du
Siege
que plus d'endroits où l'on fe
puft tenir à couvert. On eut
avis que les Turcs qui venoient
fecourir Bude , eftoient campez
vers Hatwan , aprés avoir paffe
la Teyffe avec un Convoy prés
de Segedin. On détacha auffitoft
les Regimens de Stirum , de
Taff , & de Trurks , pour aller
joindre le Barón de Mercy , afin
d'obliger les Infidelles à repaffer
la Riviere..
Le 16. les Bavarois firent jouer
deux Mines , qui au lieu de
combler le Foffe de la Rondelle
du Chafteau , & de faire fauter
la Paliffade , comme on l'avoit
creu , renverferent les premiers
poftes de leurs Tranchées,
de forte qu'il y eut plus de trente
hommes tuez ou bleffez. Le
Marquis de la Verne , qui n'avoit
efté bleffé que legerement
à
de Bude.
୨୨
#
à l'affaut du 13. le fut ce jourlà
d'un éclat de pierre. Cet accident
fit qu'on réfolut de ne
plus faire jouer de Mines , qu'on
n'euft achevé toutes celles où
l'on travailloit , afin de les faire
fauter toutes à la fois , quand
les trois Attaques donneroient
l'affaut. Un Armenien , qui avoit
fa Femme & fes Enfans à Vienne
, s'eftant échapé de Bude , vint
donner avis que les Janiffaires
avoient preffé deux fois le Bacha
de rendre la Place mais
que ne l'ayant pas trouvé de ce
fentiment , ils luy avoient déclaré
qu'ils fe défendroient encore
quelque temps , mais qu'ils
ne vouloient pas attendre l'extremité
. Il ajoûta que les Affiegez
avoient perdu beaucoup de
monde dans l'action du 13. qu'ils
auroient capitulé fi l'on avoit
E ij
TE
DE
LA
>-
LYON
1895
roo
Hiftoire du Siege
pû fe maintenir fur la brèche,
qu'ils ne s'eftoient tenus en fi
bon ordre derriere leurs rétranchemens
, que parce qu'un Deferteur
eftoit venu leur donner
avis de la refolution que l'on
avoit priſe de donner l'Affaut ;
que cependant l'ayant pris pour
un Efpion , ils luy avoient fait
couper la tefte , & qu'ils en feroient
autant à tous ceux qui
viendroient ſe rendre ; que l'on
avoit commencé à manger les
Chevaux , faute de fourage &
d'autre viande ; qu'un pain
pour vivre un feul jour couftoit
un écu , & que les Bombes de
I'Ingenieur Eſpagnol , qu'ils nommoient
le feu du Ciel , perçoient
les voûtes des Caves. La nuit
les Bavarois fe pofterent derriete
la Paliffade du Foffé de la
Rondelle du Chafteau , de forte
.
que
de Bude. ΙΟΥ
que les Ennemis furent obligez
de s'en retirer avec perte de
quelques hommes. Le Comte
de Fontaine , qui commandoit
les Bavarois , fut tué d'un coup
de Moufquet. Le Comte d'Apre
mont fut bleffé dans la mefme
occafion , auffi bien que le Capitaine
des Grenadiers du Regiment
de Bade. Son Lieutenant
fut tué , & il y eut encore environ
quarante Soldats tuez ou
bleſſez Les Ennemis deffendoient
ce poſte au nombre de deux
cens cinquante , & comme on
leur coupa d'abord le chemin
de la retraite , il n'en échappa
que vingt-fix qui demanderent
quartier. Tout le reste fut tué .
Un Turc qui fortoit de Bude fut
arrefté cette mefme nuit. Il eftoit
Mineur. On apprit de luy que
quoy que la Ville fuft extremé-
E iij
102
Hiftoire du Siege
ment incommodée de l'infection
des Cadavres , qu'on ne pouvoit
enterrer faute de trouver des
lieux où l'on puft les mettre , &
que les Habitans fouffriffent une
fort grande difette à cauſe qu'on
ne diftribuoit des vivres qu'aux
Soldats , les Affiegez ne laiffoient.
pas d'eftre refolus de continuer à
fe bien défendre , & qu'il y avoit
des Fourneaux en divers endroits
avec des coupures & des retranchemens
dans les ruës , à la teſte
defquels ils avoient mis plufieurs
pieces de Canon chargées de
Cartouches.
Le 17. le Prince Charles de
Neubourg eftant arrivé au Camp,
alla fe pofter avec fon Regiment
de l'autre cofté du Pont . Le
Maréchal Caprara , & le General
Palfi , revinrent des environs de
Stulweifembourg avec plufieurs
Re
de Bude.
103
Regimens de Cavalerie . Le premier
paffa le Danube , & prit
le commandement
des Troupes
qui eftoient campées proche de
Peft. Le Marquis de la Verne,
quoy que bleffé , eftant demeurẻ
feul à remplir la Charge de
Lieutenant Maréchal de Camp
general d'Infanterie , ne voulut
plus fortir de l'attaque à caufe
que
le Comte de Fontaine ayant
efté tué la nuit precedente , il
n'y avoit plus d'Officier de fon
caractere pour le relever. On
avança les approches des trois
attaques jufqu'au pied de la
muraille , & l'on acheva une baterie
de trois pieces de Canon à
celle de Lorraine pour battre
l'Angle de la Tour. On travailla
aux Mines à l'Attaque de Brandebourg,
& les Mineurs fe trouverent
fous la Courtine proche
E iiij
104 Hiftoire du Siege
la troifieme Rondelle de celle de
Lorraine , & fous une autre à
gauche. On applanit auffi la defcente
dans les foflez , & pendant
tout le jour & toute la nuit on
ne ceffa point aux trois Attaques
de faire un grand feu de toutes
les Bateries , afin d'agrandir les
bréches & d'achever de ruiner
toutes les defences & les coupures
qui eftoient derriere , ce qui
devoit mettre les Generaux en
eftat de faire donner l'Affaut general
, qu'ils ne vouloient point
hazarder qu'on n'euft éventé les
Contremines.
Le 18. une partie de ceux qui
eftoient campez proche de Peft ,
& qui ne compófoient point
de Regiment , retournerent à
leurs premiers Poftes , fur les
avis qu'on receut que les Troupes
Ottomanes , qu'on croyoit
de
de Bude.
105
,
devoir venir de ce cofté là jetter
du fecours dans Bude s'efloient
retirées apres avoir mis
des vivres dans Hatwan & dans
Erlaw. On apprit le mefme jour
que des Turcs eftoient venus à
deux lieues du Camp couper la
tefte à quelques Fourageurs &
Vivandiers . Sur les onze heures
du foir , les Affiegez fe montrerent
fur la breche . Ils poufferent
de grands cris , & cela fit croire
qu'ils fe preparoient à une fortie .
On fit fur eux un grand feu qui
les contraignit de fe retirer . Ils
éventerent la Mine de l'Attaque
des Imperiaux par un Fourneau
qu'ils firent jouer. Quatre Mineurs
& le Sieur Liber leur Capitaine
, y furent enfevelis . On
les chercha auffi- toft , & on ne
put trouver que deux Mineurs ,
qui n'eftoient pas morts. Les Ba
E v
106
Hiftoire du Siege
varois mirent le feu dans le Chafteau
par une Bombe qu'ils y firent
tomber. Cependant les Ennemis
barricaderent d'une nouvelle
Paliffade la Breche de la
Rondelle .
Le 19.les Affiegez travaillerent
inceffamment entre la Breche des
Imperiaux & la muraille de la
Ville, ce qui fit croire qu'ils y faifoient
un nouveau retranchement.
Les Bavarois travaillerent
de mefme pendant tout le jour à
à une Baterie fur le bord du Foffé
, afin d'abatre la Paliffade , & le
refte de la Rondelle du Cha fteau .
Ils attacherent en mefme temps
le Mineur, pour chercher les Mines
des Ennemis . La nuit les
Troupes de l'Attaque de Lorraine
donnerent un faux Affaut , &
firent jouer plufieurs Mortiers
chargez de Bombes , de Carcaffes
&
de Bude.
107
& de Grenades. L'effet en fut
terrible pour les Affiegez , qui
eftoient accourus en foule pour fe
defendre. Un Transfuge paffa
de la Ville au Camp , & en parlant
des defordres que faifoient
les Bombés dans la Place , il dit
qu'il en eftoit tombé une fur une
voute , qu'elle l'avoit enfoncée, &
que plus de cent hommes qui
eftoient deffous , en avoient efté
tuez .
Le 20. les Affiegez donnerent
trois fauffes allarmes, ce qui obligea
de faire avancer contr'eux
un détachement de Grenadiers
à chaque attaque. On s'apperceus
qu'ils s'aflembloient derriere leurs
Paliffades, & dans la penfée qu'on
eut qu'ils avoient deffein de faire
une fortie, on fit pointer le Canon
& les Mortiers de ce costé là . Les
Bateries firent un grand feu , & le
fuc
108
Hiftoire du Siege
fuccez en fut fort avantageux
aux Affiegeans. Le mefine jour le
General Palfi retourna fur fes pas
avec fix Regimens , & eut ordre
d'obferver les mouvemens des
Troupes Ottomanes , qui avoient
déja paffé le Pont d'Effeck , à ce
que difoient tous les Efpions. Le
Prince Charles alla reconnoiftre
les endroits par où les Turcs pouvoient
jetter du fecours dans la
Place. Il y eut encore un Armenien
qui fe fauva de la Ville. Il
dit que la confternation yeftoit
tres -grande ; qu'il n'y reftoit plus.
que deux mille Janiffaires dont
le nombre diminuoit tous les
jours , & qu'ils ne ſe defendoient
que parce qu'on les avoit affurez,
qu'il y avoit deux Armées en
marche , pour venir faire lever
le Siege .
Le 21. on continua d'élargir
la
de Bude. 109
la brêche à coups de Canon à
l'Attaque de Lorraine , & de
rompre la Paliffade que les Ennemis
y avoient mife. Le Baron
de Mercy , qui avoit fait repaffer
la Teyffe aux Turcs qui s'étoient
avancez vers Hatwan , &
dont il avoit défait une partie de
l'Arriere garde , receut ordre de
repaffer le Danube , & de marcher
avec la Cavalerie que l'on
avoit jugée inutile pour le Siege,
à la rencontre des Infidelles qu'on
difoit s'eftre affemblez vers le
Pont d'Effeck , au nombre de
vingt- cinq à trente mille. Un Cavalier
du Regiment de Caprara
fe faifit d'un Turc qui eftoit caché
dans un Marais . Il avoit des
Lettres pour le Grand Vizir , &
pour quelques Officiers de l'Armée
Turque. Elles furent déchifrées.
Le Bacha de Bude leur
don
110
Hiftoire du Siege
donnoit avis de l'eftat de la Place
, & du preffant befoin qu'il
avoit qu'on le fecouruft.
Le 22. de grand matin les Af
fiegez fortirent du cofté des Bavarois
, & ayant pouffe la Garde
qui étoit à la tefte de la Tracheé,
ils tuerent prés de cent hommes,
entre lefquels fe trouverent le
Sieur Lôben Colonel dans les
Troupes de Saxe , un Capitaine
, & quelques Officiers fubalternes.
Le Sieur Defchwint, Colonel
de l'Artillerie de Baviere,
fut mortellement bleffé au cou.
Ils enclouerent trois pieces de
Canon & un Mortier, & auroient
caufé un plus grand defordre , fi
un Lieutenant & quelques Fantaffins
du Regiment de Bade qui
accoururent n'euffent foûtenu
les Bavarois , & contraint les Ennemis
de fe retirer avec perte de
>
plus
de Bude. III
plus de fix- vingt des leurs, qu'ils
laifferent fur la place. L'avis en
ayant efté donné à l'Electeur de
Baviere , il vint auffi - toft dans la
Tranchée. On décloüa le Mortier
& deux pieces de Canon, &
en fuite on jetta une Bombe de
ce Mortier. Un peu après, on entendit
un bruit extraordinaire,
& il fe fit comme un tremblement
de terre qui ébranla tout
le Camp, & dont plufieurs Tentes
furent renversées. Il s'éleva
une fumée fi épaiffe qu'on' fut
quelque temps fans voir la Ville.
Soit par l'effet de la Bombe,
foit par quelque autre accident,
le feu s'eftoit mis à un Magafin
à poudre , qui eftant proche de
la muraille en renverfa plus de
quarante pas de longueur, en forte
qu'on y euft pû monter aifément;
IIZ
Hiftoire du Siege
ment , fi la Riviere n'en avoit
pas empêché l'accez. Des Fantaffs
fe jetterent fur l'Electeur
de Baviere pour le garantir des
pierres qui tomboient en quantité
dans les Tranchées . On en
trouva un fort grand nombre
dans Peft & dans tout le Camp,
de la pefanteur de deux , trois,
& quatre cens livres , jufques à
cinq cens. On dit qu'il y avoit
neuf cens Quintaux de poudre
dans ce Magafin , & qu'il fit perir
, en fautant en l'air , plus de
quinze cens perfonnes , hommes
femmes & enfans , fans compter
ceux qui demeurerent enfevelis
dans les caves voifines qui furent
couvertes des ruïnes de ce
grand bâtiment. La nuit, on travailla
à la chambre de la Mine
fous la grande Rondelle . Les Af
fiegez la contreminerent , ce qui
obligea
de Bude. 113
geans
obligea les Mineurs des Affied'abandonner
le travail. Il
n'y eut que celuy qui eftoit attaché
à la Courtine du milieu à
la gauche , qui continua . Il arri-
Iva dans la chambre de la Mine
que les Ennemis avoient éventée
, & la voulut rétablir , mais
ayant entendu travailler fous lui,
il fe retira, & laiffa quelques barils
de poudres découverts ; le
feu y prit pluftoft qu'on ne l'avoit
crû , & jetta le Lieutenant
des Mineurs jufque fur la batterie
de Brandebourg . Celuy qui
les commandoit fut brûlé . Comme
la Mine n'eftoit pas affez profonde
, l'ouverture qu'elle fit au
pied de la Courtine , fut feulement
de deux toifes. Les Turcs
fortirent en fi grand nombre ,
qu'on ne les put arrefter que par
un feu extraordinaire que l'on fit
fur eux.
Le
114 Hiftoire du Siege
a
Le 23. Le Mineur attaché à la
Rondelle du milieu, ayant achevé
de perfectionner la Mine , il
fut refolu que fi elle avoit l'effet
que l'on pouvoit s'en promettre,
on donneroit l'Affaut , general,,
Cependant le Prince Charles jugea
à propos
de faire fommer les
Afliegez avant que de l'entreprendre.
Le Magaſin fanté le
jour précedent , avoit mis un fi
grand defordre dans la Place
qu'il y avoit lieu de croire qu'on
les trouveroit moins obftinez , &
qu'ils fe refoudroient à fe rendre
fi on leur offroit des conditions
avantageufes. Ainfi fur les trois
heures aprés midy, ce Prince envoya
le Comte de Konigfek, fon
Aide de Camp general , avec un
Tambour & un Interprete pour
fommer la Ville. Les Affiegez
le voyant venir , & connoiffant
au
de Bude.
115
,
au fignal d'un mouchoir blanc
qu'il avoit quelque propofition
à leur faire planterent fur la
Muraille un Drapeau de mefme
couleur , & vinrent enfuite
prendre la Lettre du Prince
Charles pour la porter au Bacha
, qui dormoit alors , à ce
qu'ils dirent. En attendant la
réponſe , on luy laiffa trois Turcs
pour Oftages , & on luy vint
dire un peu aprés que le Bacha
avoit affemblé fes Officiers,
pour deliberer fur cette Lettre.
Il y eut de part & d'autre fufpenfion
d'armes pendant deux
heures
, & aprés ce temps on
apporta la réponſe du Bacha au
Prince Charles , envelopée d'écarlate.
Voicy les termes qu'elle
contenoit .
GRAND
116
Hiftoire du Siege
RAND VISIR DES
G&RESTIENS,
Tu es bien présomptueux de venir
une feconde fois mettre le Siege
devant Bude , qui a déja couté tant
de monde & tant d'argent aux
Chreftiens. Il est bien vray que ce
Siege nous a furpris , parce que nous
ne nous y attendions point ; mais
par l'affiftance de Dieu, & de noftre
Prophete Mahomet, vous aurez efte
par deux fois honteufement repous-
Sez, & vous n'aurez pas à nous
donner tat d'affauts que vous croiez.
Nous efperons qu'il vous en arrivera
comme il vous est déja arrivé . Si
voftre Empereur vous a commandé
de nous attaquer , nous avons ordre
du noftre de nous bien défendre .
Cette réponſe pleine de fierté
obligea les Affiegeans à faire joüer
le Canon des trois Attaques , &
de Bude.
117
à bombarder la Place avec plus
de furie que l'on n'avoit fait auparavant.
Le 24. Les Imperiaux firent
jouer une Mine , qui au lieu de
renverfer la Rondelle qui eftoit
entre leur bréche & celle des
Troupes de Brandebourg , combla
les premiers poftes de leurs
Tranchées , ce qui fâcha fort les
Hongrois , qui au nombre de
deux mille eftoient tout prefts de
monter à l'affaut , à la tefte des
Troupes de l'Attaque de Lorraine.
Le Capitaine des Mineurs &
deux Travailleurs furent accablez
par les débris de la Mine,
dont plus de deux cens Soldats
furent tuez ou bleffez. Un fugitif
vint apprendre au Prince
Charles que le Treforier des Janiffaires
avoit eu deffein de livrer
la Ville , à condition qu'on
l'en
118 Hiftoire du Siege
t
l'en feroit Vice - Commandant ,
mais que deux Païfans qui luy
devoient apporter la Lettre aïant
efté arreftez , le Bacha avoit fait
couper la tefte au Treforier , &
pendre les Païfans . Il ajoûta que
cinquante Turcs & un Aga a-
- voient efté tuez de la Mine, que
les Imperiaux avoient fait jouër
ce mefme jour, a
Le 25. une Bombe des Affiegeans
renverfa fur la Rondelle
du Chafteau quelques Paliffades,
& deux ou trois cofres chargez
de terre & de pierres qui les foûtenoient.
Le General Dunewald
receut ordre de prendre langue
de l'Armée des Infidelles. Sur les
cinq heures du foir , les Affiegez
firent une Sortie avec 200. hommes
fur la droite de l'Attaque de
Lorraine , où commandoit le
Comte de Saur , qui les repouſſa
vigou
de Bude.
119
quelque
.
vigoureufement avec
perte de leut cofté , mais elle
ne les empefcha pas d'en faire
une autre fur la gauche , où é-.
toient les Troupes de Brandebourg.
Ils couperent la tefte à
quarante hommes , & après avoir
encore efté répouffez de ce coſté
là , ils revinrent de nouveau , 1 , &
poufferent ceux de Brandebourg,
qui furent contraints de quitter
leurs Lignes. Le Prince Charles
en fut averty , & fit incontinent
avancer les Bataillons de referve,
qui eftoient poftez le long du
Danube prés des murailles de la
Ville- baffe. Les Turcs plierent
-lors qu'ils virent ce fecours , &
quoy qu'ils en euffent receu du
Bacha,qui leur envoyoit dé temps
en temps de nouvelles Troupes
pour les foûtenir , ils rentrerent
dans la Ville aprés une Efcarmouche
I 20
Hiftoire du Siege
che qui dura prés de quatre heures.
Il ne demeura que vingt
des leurs fur la place. Ceux de
Brandebourg perdirent le Lieutenant
Colonel de leurs Gardes.
Le Baron d'Ati qui commandoit
le Corps de referve , fut bleffé
au pied d'un coup de Moufquet,
& l'Aide de Camp du Comte de
Staremberg eut les deux jambes
emportées d'un coup de Canon.
Le Baron de Hoenwart fut tué
avec un Enſeigne du Regiment
de Souches , & quelques autres
Officiers.
Le 26. on prepara toutes les
chofes neceffaires pour donner le
lendemain l'Affaut general . Le
Maréchal Caprara paffa le Danube
, & vint fe camper au milieu
des Imperiaux & des Bavarois
, afin de fermer le paffage
· par où les Ennemis auroient pû
fe
de Bude. 121
fe fauver , ou faire des Sorties
fur les Affiegeans. Le Prince
Charles, qui avoit refolu de faire
donner l'Affaut à la pointe du
jour , paffa toute la nuit dans la
Tranchée , & pendant ce temps
on executa la refolution que l'on
avoit priſe d'attacher aux Paliffades
une certaine compofition
de feu artificiel pour les brûler;
elle eut un tres- grand effet .
,
Le 17. au matin les Paliffades
eftant encore toutes enflâmées
par la quantité qu'on y
avoit mis de cette compofition,
on attendit pour donner l'Affaut
qu'une petite pluye , qui
commença à tomber , euft éteint
les feux qui fervoient comme de
défenſe aux Ennemis. Tous les
ordres avoient été donnez le jour
précedent à tous les Officiers Generaux
Subalternes qui devoient
F
7 122 Hiftoire du Siege
eftre employez aux 3.Attaques,&
ils fçavoient en quel lieu & en
quelle maniere ils devoient agir
lors qu'ils auroient oüy le Signal.
Ce Signal eftoit 3. décharges de
12.petites pieces de Canon du côté
de Peft,afin qu'on en puft entendre
le bruit auffibien au quartier
de Baviere, qu'à ceux de Lorraine
& de Brandebourg. Il fut
donné fur les fix heures du foir, &
auffi- toft ceux qui eftoient commandez
à l'Attaque de Lortaine,
marcherent en fort bon ordre
vers la groffe Rondelle à droit,afin
de fe loger fur la bréche . Quarante
Grenadiers ayant un Capitaine
à leur tefte avec un Lieutenant
& un Sergent , furent fuivis
de cinquante Fufeliers , &
d'un pareil nombre d'hommes armez
de faulx , fous les ordres
d'un Capitaine , d'un Lieutenam
,
de Bude. 123
nant , d'un Sergent , & des autres
Officiers fubalternels. Cent
hommes chargez de haches &
pelles eftoient à la premiere ligne,
commandez par un Capitaine
, par un Lieutenant , & par
un Sergent, & avoient deux cens
Moufquetaires pour les foûtenir.
Le Prince de Neubourg, Grand-
Maistre de l'Ordre, Teutonique
, commandoit en cet endroit
de l'Attaque , & le Marquis de
Nigrelli , General de Bataille ,
le Colonel Keth , le Baron Reder
, Lieutenant Colonel , & le
Lieutenant Major de Staremberg
l'accompagnoient pour
porter fes ordres , & les faire
executer avec plus de promptitude.
Le Comte de Souches, qui
avoit auprés de luy le Sergent
general Diepental , le Colonel
d'Oetingen , le Comte Jorger,
,
Fij
124 Hiftoire du Siege
1
Lieutenant Colonel , & le Sergent
Major de Croy, marcha au milieu
vers la Courtine , précedé de 50.
Grenadiers , de cent Fufeliers, &
-de cent autres hommes armez de
faulx & de bâtons ferrez par les
deux bouts . Ceux - cy ayant leurs
Officiers à leur tefte , avoient
auffi pour les foûtenir 200. Moufquetaires
& 5o.hommes avec des
haches & des bêches propres à faper
& à faire des logemens après
qu'on auroit chaffe les Ennemis
de leurs poftes. La difpofition fut
pareille à l'Attaque de Brandebourg.
Ceux qui devoient donner
à la bréche de la Rondelle à gauche,
eftoient foutenus d'un pareil
nombre de Moufquetaires , & avoient
ordre de faire grand feu
contre les Turcs fi- toft qu'ils fe
montreroient hors de leurs Coupures.
Les Heiduques furent
commandez pour donner une
de Bude. 125
fauffe alarme du cofté de l'eau ,
à l'endroit où l'embrafement du
Magafin avoit ouvert la Murailles.
Trois cens hommes les foutenoient
fous les ordres d'un Sergent
Major , de trois Capitaines
& des autres Officiers Inferieurs.
Tous les autres Generaux
furent poftez en divers endroits
pour y faire la fonction
de leurs charges fuivant le commandement
qu'ils avoient receu
. On avoit mis douce cens
hommes de reſerve dans un fond
au pied de la brêche , & ils devoient
s'avancer par files afin de
remplir la place de ceux qui feroient
tuez . Le General Dinghen
les commandoit. Le refte de l'Infanterie
eftoit deftiné pour s'avancer
de la mefme forte fi les
Generaux & les autre Officiers
à qui l'on avoit confié la garde
Y
Fiij
126 Hiftoire du Siege
de la Tranchée , l'euffent jugé
à propos. Tout ayant efté difpofé
de cette forte , les Troupes
Imperiales & celles de Brandebourg
marcherent en mefme
temps du coté des brêches ,
chacun en fon rang , tant les Of
ficiers que les Soldats , principalement
vers la grande Rondelle,
dont la maçonnerie n'avoit
pas
efté bien éboulée , quoy qu'on
y euft fait jouer plufieurs Mines.
Ce fut de part & d'autre
un feu effroyable & un bruit
terrible qu'on ne sçauroit exprimer.
Si le Canon , les Bombes
, les Carcaffes , les Grenades,
& la moufqueterie des Affiegeans
, firent un fracas qui euſt
pû épouvanter les plus intrepides
, le feu que firent les Affiegez
& par leur Canon & par
leurs Mortiers à pierres qu'ils ac- .
compagnerent d'une grefle de
de Bude.
127
Fleches , de Dards , de Bombes
ardentes , & autres Machines,
qu'ils faifoient rouler du haut
des brêches où ils s'expofoient
à corps découvert , fit voir aux
Chreftiens qu'ils avoient à faire
à des gens determinez qui leur
vendroient cherement leurs vies.
Les Imperiaux s'avancerent
bord jufqu'aux Paliffades , dont
les Ennemis avoient reparé les
bréches des Rondelles . Ils eurert
peine à y conferver leur
pofte , à caufe du grand nombre
de Fourneaux qu'on y fit
jouer. Plus de trois cens hommes
furent tuez ou accablez du
premier , & la refiftance des
Affiegez qui fut extraordinaire ,
fit reculer les Imperiaux juf
qu'à trois fois. Le Prince Charles
qui s'en appercent du lieu où
il donnoit les ordres , & qui les
F
128
Hiftoire
du Siege
રે
vit au milieu des feux , tant des
Machines que les Ennemis faifoient
rouler , que de neuf Mines
& de neuf fourneaux qu'ils
firent fauter en fort peu de
temps , s'avança luy - meſme au
pied de la brêche pour les foûtenir
avec de nouvelles Troupes
Sa prefence les anima telle.
ment , que voyant leur General
s'expofer comme eux au plus
grand peril , & vouloir fe rendre
témoin de leurs actions , ils
forcerent les Paliffades , & fe
rendirent maiftres de la grande
Rondelle où ils fe logerent. Ceux
de Brandebourg n'eurent
moins de fuccez à leur attaque.
Ils vinrent à bout de fe loger
fur la Courtine & fur la Rondelle
à gauche. Les Ennemis qui
s'eftoient retirez derriere les retranchemens
qu'ils avoient faits
pas
all
de Bude. 129
= au de- là des Paliffades , firent
leurs efforts pour les en chaffer,
& jetterent fur les uns & fur
les autres quantité de Fleches ,
de feux d'artifices , & d'autres
Inftrumens remplis de foufre ;
fur tout leurs Mortiers à pierres,
les Mines & les Sacs à poudre
aufquels ils mettoient le feu en
ſe retirant des Poftes qu'on les
forçoit de quitter , tuerent &
blefferent un grand nombre de
Chreftiens. La prefence du Prince
Charles qui ne voulut point
abandonner l'entreprife , contribua
fort à l'heureux fuccez qu'elle
cut. Chacun cherchoit à fe
fignaler avec une intrepidité qui
n'eft pas croyable , & les Soldats
à envy les uns des autres,
prenoient le Pofte que leurs camarades
leur abandonnoient en
perdant la vie. Les Imperiaux
F v
130 Hiftoire du Siege.
trouverent dans la grande Rondelle
deux Etendarts des Janiffaires
, & trois Pieces de Canon,
& ceux de Brandebourg en trouverent
fept & quelques Mortiers
dans la Rondelle dont ils s'étoient
emparez à gauche.
Pendant que l'on donna l'affaut
de ce cofté - là , l'Electeur de Baviere
le donna auffi du cofté de
fon attaque . Il avoit fait brûler le
jour precedent les Paliffades que
les Ennemis avoient plantées fur
la brêche, & fi-toft qu'on eut entendu
le Signal pour y monter,les
Fufeliers , & les Grenadiers avec
les hommes armez de haches qui
avoient fes ordres pour faper celles
qui pouvoient encore embaraffer
, fortirent de la Tranchée,
fuivis de cent Moufquetaires fous
un Capitaine & deux Lieutenans
, pour monter à l'affaut, tant
à
de Bude.
à droit qu'à gauche. Ĉent Travailleurs
marcherent en fuite, 25 .
avec des Pelles , & foixante &
quinze avec des faux , pour faire
un logement fur la hauteur de la
Rondelle, aprés qu'on s'en feroit
emparé. Ils eftoient fouftenus de
50. Fufeliers , de 30. Grenadiers,
& de 200. Moufquetaires. D'autres
Moufquetaires choifis avoiết
efté commandez pour feconder
de chaque cofté les trois Bataillons
Imperiaux , Bavarois & Saxons
qui devoient fouftenir les
premiers. On fe mit en marche
par les Ouvertures qui avoient
efté faites aux foffez vers la brêche
à droit & à gauche de la
Rondelle. En mefme temps toutes
les bateries commencerent à
tirer fur les brêches, & contre les
murailles hautes & les feneftres
des maifons du Chafteau, & l'on
jetta
132
Hiftoire du Siege
jetta auffi fans aucun relâche des
bombes & des carcaffes , dont il
y en eut quantité qui furent jettées
contre les retranchemens
des Affiegez , & entre les deux
premieres murailles du cofté du
Danube. Quoy que la muraille
fuft encore haute & difficile
à monter , on s'avança vers
la brêche à droit & à gauche
avec tant de valeur , de courage
& de conduite , que l'on
s'empara de la Rondelle , malgré
les coups de Moufquets que
les Ennemis tiroient fans ceffe
des Crenaux de cette meſme
muraille . On s'empara auffi à
gauche d'un lieu fitué entre les
maifons , & la muraille exterieure
, ce qui n'eftoit pas aifé
, parce que les endroits les
plus éminens du Chateau le
commandoient , & que l'on jettoit
de Bude .
133
toit de là fur les Affiegeans
une infinité de pierres , de Grenades
, de Bombes & de Sacs
à poudre. Ce feu continuel ne
put arrefter l'ardeur qui les emportoit
, & ils l'effuyerent avec
une bravoure qu'on ne peut affez
loüer, mais la nuit qui commençoit
d'approcher , ne permit pas
qu'on avançaft davantage. On
travailla à des Logemens fur la
Rondelle , & dans les autres Poftes
que l'on avoit occupez . L'Electeur
de Baviere fe tint expofé
au feu pendant toute l'action . Il
vifita tous les Poftes , & alla par
tout donner les ordres qu'il jugea
utiles pour la feureté & pour la
perfection du travail. Non feulement
il animoit les Soldats par
fa prefence , mais il les engageoit
à continuer de bien faire en leur
donnant des marques de fa liberali
F34
Histoire du Siege
ralité . Le Prince Louis de Bade
fit paroiftre auffi beaucoup d'intrepidité
, & demeura expofé
aux coups pendant toute l'efcarmouche
, afin qu'on apprift par
fon exemple à méprifer le peril.
Le Prince de Neubourg, le Prince
Eugene de Savoye , & plufieurs
autres Generaux montrerent
de leur cofté toute la bravoure
qui pouvoit donner un
nouveau courage aux Attaquans,
& la fermeté avec laquelle ils les
voyoient foûtenir le grand feu
des Ennemis , fervit beaucoup à
leur faire remporter les avantages
qu'ils eurent en cette journée.
Ce que firent les Heiduques
ne fut pas confiderable. Auffi ne
faifoient- ils qu'une fauffe attaque
afin d'attirer les Ennemis de
ce cofté- là . Ils y trouverent les
Poftes tres -bien garnis , à caufe
que
de Bude..
135
*
que c'eftoit l'endroit où te Magafin
avoit fauté , & par confequent
le plus découvert. L'affaut:
dura trois heures avec grand
perte du côté des Affiegeans . Ils .
eurent prés de deux mille hom .
mes tuez ou bleffez , fans un fort
grand nombre d'autres qui furent
brûlez ou enterrez par les
mines. Le Prince Charles fut
atteint legerement d'un coup de
pierre à la jambe , & le Sieur
d'Artein fon Ayde de Camp general
de ce Prince , fut tué auprés
de luy. Le Duc de Croy qui
n'avoit receu d'abord qu'une
bleffure peu confiderable , receut
enfuite un coup de Moufquet qui
luy perça le genoüil . Le Duc de
Curland Colonel dans les Troudes
de Brandebourg , fut bleffé
dangereufement , auffi bien que
le Comte Schileck, & le Marquis
Sa
136
Hiftoire
du Siege
,
Sanati . Le General Major de
Thingen le fut mortellement à la
teſte. Le Baron d'Afti qui n'eſtoit
pas encore guery d'une bleffure
qu'il avoit receu e deux jours auparavant
, eut les deux cuiffes
percées , & le Baron de Welbersheim
, les deux bras caffez . Le
Prince de Comercy qui s'eft
toûjours fignalé dans les occafions
où il y avoit le plus de peril
à effuyer , receut auffi une legere
bleffure. Les autres bleffez
dont on a pû jufqu'icy fçavoir les
noms , furent le Duc de Scalona ,
le General Major Diepenthal , le
Comte & le Chevalier d'Apremont
, Freres , le Colonel Goeling
; le Comte d'Archinto ; le
Comte Zacco Sergent Major , le
Lieutenant Colonel Rotten ; le
Comte de Saur ; le Sieur Reder,
Lieutenant Colonel du Regiment
de Bude 137
ment de Neubourg . Le Sergent-
Major Pini , le Marquis de la
Verne , le General Rummel , le
Baron de Welberg , Lieutenant
Colonel de Beck , avec plufieurs
Officiers de ce mefme Regiment:
le Comte de Palfi , Lieutenant
Colonel ; le Baron d'Aversberg,
le Sergent Major , un Capitaine
& un Lieutenant de Staremberg,
& plufieurs autres Officiers
des Regimens de Bade , de Beck,
de Steinau, de Rummel , de Selbolftoff,
de Gallensfels , & autres.
Le Comte de Dona , & le Sergent
Major de Marwitz , furent
tuez à l'attaque de Brandebourg.
Le 28. on dreffa une Batterie
fur la Rondelle du milieu , dont
les Imperiaux s'eftoient rendus
maiſtres à l'Attaque de Lorraine ,
& l'on applanit les bréches , afin
d'y
138 Hiftoire du Siege
d'y pouvoir guinder l'Artillerie .
On travailla à perfectionner les
Lignes de communication des
logemens , & l'on pourfuivit le
travail de trois Mines , qui avoient
efté commencées fous la
feconde Muraille incontinent aprés
l'Affaut du jour précedent.
Le Mineur fut attaché en deux
endroits de cette mefme Muraille.
Ceux de Brandebourg tirerent
une Ligne paralelle à cette
Attaque .
Le 29. on fit fauter deux mines
à l'Attaque de Lorraine. Il y
en eut une qui renverfa quinze
toifes de maçonnerie dans le Foffé
. Elle ne laifferent pas de caufer
du dommage aux Affiegeans ,
puis que deux Capitaines des
Troupes de Brandebourg , & environ
cinquante Fantaffins , la
plufpart des mefmes Troupes.
£u
de Bude.
139
furent enterrez fous leur debris .
Une Batterie de trois pieces de
Canon fut achevée ce jour - là à
la mefine Attaque . Quelques Armeniens
fugitifs vinrent avertir
que plus de mille perfonnes , hommes
, femmes & enfans , avoient
efté tuez dans la Place le jour
qu'on avoit donné l'Affaut ; qu'une
grande quantité avoient voulu
fe fauver du cofté de la Ri
viere , mais qu'ils y avoient trouvé
tous les Bateaux enchaifnez;
que la Garnifon n'eftoit plus que
de mille Combattans , & que le
Muphti les exhortoit inceffammet
à fe rédre,mais que le Bacha
les animoit à refifter jufqu'au
bout par l'efperance du fecours
qu'il attendoit ; qu'il y avoit par
tout des Retranchemens & des
Coupures , & qu'à la derniere
extremité il avoit efté refolus
qu'on
140 Hiftoire du Siege
qu'on mettroit le feu aux Magagafins
, pour faire fauter la Ville
avec tous ceux qui fe trouveroient
dedans. La nuit , les Bavarois
avancerent environ de quarante
pas dans la Rondelle du
Chafteau , en tirant du cofté de
la Riviere , avec perte de cinquante
hommes , & ils y firent
mener deux pieces de Canon,afin
d'élargir la bréche de la feconde
Muraille .
Le 30. le Comte de Souches
& le Comte de Lodron ,Major de
Cavalerie , monterent la Tranchée
. Ce dernier avoit efté nommé
pour la relever , aina que le
Comte de Stirum , auffi Major de
Cavalerie , parce qu'il n'y avoit
plus que le Comte de Nigrelli ,
Major general d'Infanterie , qui
puft fervir. On fit jouër ce jourlà
une troifiéme Mine à l'Attaque
de Bude. 141
que de Lorraine , & deux à l'Attaque
de Baviere, qui firent affez
d'effet. Cependant le Prince
Charles jugeant qu'il y alloit du
fervice de l'Empereur de ne pas
expofer la Ville à l'affaut & au
pillage , envoya une ſeconde fois
fommer le Commandant de fe
rendre. Comme il eftoit déja
tard , les Affiegez prierent les Députez
d'attendre jufqu'au lendemain
la réponſe qu'ils leur demandoient
, parce qu'il falloit affembler
le Confeil fur une affaire
d'une fi grande importance.
Le 31. le Prince Eugene de
Savoye & un Interprete allerent
à la Porte de la Ville , où aprés
qu'on les eut fait attendre une
heure & demie , on leur apporta
deux Lettres du Commandant,
l'une adreffée au Prince Charles,
&
142 Hiftoire du Siege
& l'autre à l'Electeur de Baviere .
Elles contenoient , que la confervation
de Bude , qui eftoit la clef
de Conftantinople & de Jerufalem,
eftoit d'une telle confequence
pour les Ottomans , qu'il ne
pouvoit fe refoudre à la remettre
entre les mains des Chreftiens
mais qu'on n'avoit qu'à
choifir une autre Ville , & qu'il
eftoit preſt à la donner , efperant
par là qu'on luy voudroit bien
accorder la Paix . Ce mefme jour
le premier Capitaine d'Artillerie
eut le bras percé , & le Comte de
Staremberg , en reconnoiffant la
bréche, receut un coup de Moufquet
qui luy emporta un doigt,
& le bleffa à l'épaule . La fièvre
qui luy furvint , accompagnée
d'une diffenterie , l'obligea de fe
faire tranfporter à Comore , où le
Prince de Vaudemont , qu'une
vio
de Bude.
143
violente maladie avoit forcé de
quitter le Camp , eftoit déja depuis
quelques jours. Sur les huit
heures du foir , les Affiegez qui
n'avoient point eu de réponſe,
envoyerent deux Agas au Prince
Charles , & emmenerent avec
eux le Baron de Crentz , Ayde
de Camp du Prince Louis de
Bade , & un Interprete. On crut
que le Commandant avoit deffein
de capituler , mais toute la
negociation aboutit encore à dire
, qu'il feroit livrer telle Ville
qu'on voudroit fi on levoit le
Siege de Bude , ou qu'il rendroit
cette Place pourveu qu'on fift
une Paix generale avec l'Empire
Ottoman . Le Prince Charles
voyant que l'on n'avoit point
d'autres propofitions à luy faire,
renvoya les deux Agas , & rappella
les Oftages. Ils dirent qu'on
les
144 Hiftoire du Siege
les avoit receus fort civilement,
& qu'à leur départ ils avoient
veu beaucoup de confternation
dans la Ville. On fceut ce jour
là que l'Aga des Janiffaires eftoit
mort des bleffures qu'il avoit receues
à l'Affaut du 27. & qu'il y
avoit plus de deux mille hommes
des Ennernis bleffez ou malades.
Le premier jour d'Aouft les
Imperiaux firent jouër une Mine
qui eut un tres - bon effet. Elle fit
bréche dans la feconde Muraille,
& ébranla mefme la troifiéme , ce
qui obligea les Affiegez d'y accourir
en grand nombre. Les
Bavarois profiterent de ce moment
pour attaquer le Chafteau .
Ils y entrerent , mais ils ne purent
fe maintenir dans le logement
qu'ils y avoient commencé.
Le Marquis de la Vergne,
Gene
de Bude . 145
General Major , receut deux
coups de Fléches , dont l'un luy
perça le bras & l'autre la cuiffe .
Le Lieutenant Colonel de l'Artillerie
en receut un autre au ventre.
Quatre Fugitifs vinrent a-,
vertir que les Affiegez travailloient
à une Mine pour faire fauter
la grande Rondelle dont les
Imperiaux s'eftoient emparez. Le
General Dunewald arriva au
Camp avec la Cavalerie qu'il
commandoit aux environs de
Stulweiſembourg.
Le 2. le Comte Caraffa , Major
General, & le General Heufler
, arriverent auffi au Camp,
avec un Corps de quatre mille
hommes qu'ils commandoient
dans la haute Hongrie du cofté
de Zolnoch , & ils prirent leurs
poftes au delà du Danube , où
deux mille Hongrois comman-
G
146
Hiftoire du Siege
dez par le Comte Budiani les
joignirent . La nuit on travailla
aux Lignes de circonvallation
, pour arrefter le fecours des
Ennemis.
Le 3. on vit paroiftre des Avant-
coureurs de l'Armée des
Infidelles, & les Affiegez firet une
falve de tous leurs Canons . Comme
on s'eftoit difpofé à donner
un troifiéme Affaut , les Affiegeans
firent jouer une Mine , mais
elle n'eut pas l'effet qu'on en avoit
eſperé , & la bréche ne s'êtant
pas trouvée affez profonde,
le Prince Charles envoya dire à
l'Electeur de Baviere qu'il ne jugeoit
pas à propos de donner
l'Affaut. Les Troupes de cet Electeur
ne laifferent pas d'y monter
, foit que l'ardeur qui les ani
moit leur fift avancer l'heure du
Combat , foit qu'elles euffent
pris
de Bude.
147
-
pris le bruit de la Mine pour le
Signal dont on étoit convenu . Le
Prince Charles qui en eut avis
fit donner l'attaque de fon cofté .
Les Affiegez au nombre de plus
de deux cens , fe montrerent fur
la Bréche , le Sabre à la main , &
le corps tout découvert. Les Femmes
& les Enfans y parurent
mefme tirant des Fléches , &
faifant rouler des pierres. Il y
eut beaucoup de vigueur de part
& d'autre , & la refiftance fut
telle du cofté des Ennemis , que
tout ce que purent faire les Imperiaux
, ce fut d'avancer leurs
Logemens jufqu'au pied de la
troifiéme muraille. Ils eurent plus
de deux cens hommes tuez ou
bleffez. Les Bavarois fe faifirent
de deux ouvrages , où ils trouverent
du Canon & des Mortiers ;
mais ce ne fut pas fans perdre
G
11
148 Hiftoire du Siege
beaucoup de monde . Le Prince
de Bade receut une contufion
d'une Balle de Moufquet qui luy
perça le Ceinturon & le Jufte
au corps par derriere , & le Prince
Eugene eut un coup de Fléche
, dont le fer luy entra entierement
dans la main . Le Comte
de Caunits , Lieutenant Colonel
du Regiment de Metternich , le
Comte Hermeftein Lieutenant
Colonel de Souches , le Sieur de
Breffey , Gentilhomme Bourguignon
, Major du Regiment de
Grana , & le Major du Regiment
de la Vergne, furent bleffez à l'attaque
des Imperiaux avec plufieurs
autres Officiers. Il y eut un
jeune Comte de Staremberg tué
au commencement de cet Allaut.
Le Chevalier Huberti , Capitaine
des Gardes de l'Electeur de
Baviere , fut bleffé à l'attaque des
Ba
de Bude. 149
Bavarois avec quelques Officiers,
qui ne pûrent obliger les Fantaffins
à les fuivre , tant ils eftoient
rebutez par le feu des Ennemis,
& par les Bombes , Pierres & Grenades
qu'ils jettoient fur eux du
haut du Chateau.
Le 4. on continua de, canonner
& de bombarder la Ville , &
Fon eut avis que l'Armée Ottomane
s'approchoit . On acheva
les deux logemens à droit & à
gauche de la grande Rondelle,
& l'on conduifit quatre pieces
de Canon fur la bréche . On mit
plufieurs rangs de Pali ffades, dont
on fortifia les Travaux , que l'on
avança fort prés des Retranchemens
des Affiegez . Le Prince
Charles employa ce jour à vifiter
tous les Poftes , & à difpofer tout
ce qu'il crut neceffaire pour
eftre en eftat d'aller au devant
G iij
150 Hiftoire du Siege
de l'Armée des Ennemis.
l'Ar-
Le 5. on ne fit que travailler
aux Lignes de circonvallation, &
de contrevallation , & à des Redoutes.
On travailla auffi à des
Mines, à de nouvelles Bateries, &
à combler le Foffé à l'Attaque des
Imperiaux . On eut avis que
mée des Ottomans s'avançoit
toûjours , & que le Grand Vifir
la commandoit en perfonne. On
détacha auffi- toft differens partis ,
afin d'en avoir des nouvelles affeurées
; & cependant la garde
fut redoublée dans tous les Pofles
. Les Affiegez jetterent quantité
de Bombes. Il y en eut une
qui tomba à trois pas du Prince
Charles proche les Bateries des
Imperiaux. Elle mit le feu à
quelques barils de poudre , tua
vingt Canonniers ou Soldats , &
en bleffa plufieurs autres. Pendant
de Bude. 151
dant la nuit les Affiegez firent
defcendre un Batteau chargé de
monde & de meubles,ce qui obligea
de faire un Pont prés de Pefty
pour empefcher que la mefme
chofe n'arrivaft encore , & pour
avoir le fourage plus commodement.
Le 6. les Huffars , après avoir
battu un Party de trente Turcs,
qui s'eftoient détachez pour donner
quelques avis au Bacha de
Bude , amenerent quatre Prifonniers
, par lesquels on fçeut qu'il y
avoit une Armée de vingt mille
hommes du cofté de Stulweiſembourg,
fous le commandement du
Seraskier , & que le Grand Vifir
devoit fuivre avec une Armée de
trente mille hommes, & quarante
pieces de Canon . Le Prince Charles
donna auffi toft fes ordres
pour faire tranſporter les Mala-
Güij
152 Hiftoire du Siege
des , les Bleffez , & tout le bagage
fuperflu dans l'Ifle de S. André;
l'on travailla avec toute la diligence
poffible à perfectionner les
Ouvrages neceffaires pour mettre
le Camp en feureté , & pour
empefcher que les Ennemis ne
fecouruffent la Place . Les Bavarois
firent jouer un Fourneau qui
réüffit affez bien . Il y en avoit encore
un autre mais les Mineurs
ayant rencontré ceux de la Ville,
ne le pûrent achever.
,
Le 7. comme on fe trouvoit
fort incommodé d'une Batterie
que les Affiegez avoient derriere
la petite Rondelle , on en dref
fa une de deux . Canons pour la
démonter . Elle fit l'effet qu'on
en avoit attendu . Les , Bavarois
en firent
firent jouer une nouvelle ,
qui eftoit auffi de deux pieces
de Canon. Ils l'avoient dreffée fur
un
de Bude.
153
un échafaut bien élevé au bout
de la premiere muraille de la
Rondelle , pour abatre le Chafteau
. La nuit, on tâcha de combler
le Foffé avec des fafcines,
mais tout ce qu'on y jetta fut confumé
par des fléches ardentes que
tirerent les Affiegez , & qui y mirent
le feu. Sur le midy on fceut
par des Prifonniers que toute l'Armée
Ottomane devoit s'affembler
le lendemain devant Albe Royale.
On vint dire le foir qu'il y en
avoit partie arrivé à une lieuë du
Camp , du cofté du Chateau où
eftoit l'Attaque des Bavarois.Cela
obligea le Prince Charles à changer
fon Camp. Il fit occuper les
hauteurs & les vallons qui environnent
la Place , & nomma les
Regimens que l'on devoit envoyer
au devant des Ennemis, &
ceux qui demeureroient pour
G V
154 Hiftoire du Siege
continuer le Siege. On eut avis
ce jour là que le General Schults
eftoit mort. Il commandoit un
Camp- volant entre la Save & la
Drave.
Le 8. à la pointe du jour , trois
mille Turcs & Tartares parurent
fur une hauteur. Ils enleverent
deux Gardes avancées de douze
hommes chacune , & aprés avoir
efcarmouché avec les Huffars,
ils fe retirerent fur le midy. Cent
cinquante Hongrois qui avoient
efté détachez pour reconnoiftre
l'Armée des Infidelles , & qui
revenoient au Camp avec quelques
Prifonniers , tomberent entre
leurs mains , & en furent taillez
en pieces , à la referve de
quelques- uns qui en apporterent
la nouvelle. Ce mefme jour
les Affiegez ayant ouvert la Porte
du Chafteau , on fit un déta
de Bude.
155
tachement à l'attaque de Baviere
, pour s'avancer de ce coſtélà.
On en vit un fort grand nombre
le fabre à la main derriere
leurs retranchemens , & ils jetterent
tant de Grenades, qu'on fut
obligé de fe retirer , avec perte
de foixante hommes. On continua
de mettre les Lignes de Circonvalation
en défenfe , en les
fortifiant avec des Redoutes , fur
lofquelles on plaça quelques pieces
de Campagne.Douze hommes.
furent tuéz ou bleffez à une Batterie
à laquelle on travailloit depuis
plufieurs jours , & que les
Bombes des Ennemis ruinerent.
&
Le 9. les Tartares & les Turcs
revinrent fur le midy le long de
la Montagne vis à vis le Camp
de l'Electeur de Baviere
pafferent tout le jour à efcarmoucher.
Quoy qu'ils ne fuffent
pas,
156
Hiftoire
du Siege
pas en affez grand nombre pour
forcer les Lignes, ils ne laifferent
pas d'incommoder , parce qu'on
fut obligé de fe tenir toûjours
fous les Armes. Une Bombe des
Affiegez tomba à l'Attaque des
Imperiaux au milieu de plus
de mille Grenades . Elle mit le
feu à quelques unes dont quatre
ou cinq Moufquetaires furent
tuez. Le Comte d'Archinto
fut bleffé legerement. On pour
fuivit le travail des Mines que
l'on deftinoit à renverfer la feconde
muraille, & les retranchemens
des Paliffades dont les Ennemis
avoient reparé les brèches,
& les Heiduques furent employez
à faire des Fafcines & des
Sacs à terre , pour en remplir les
Foffez, qui eftoient de la hauteurde
deux piques .
Le 10. les Affiegez firent une
for
de Bude. 157
fique
fortie à l'Attaque des Bavarois,
& couperent la tefte à quarante
hommes qu'ils trouverent dans la
Rondelle du Chateau. Un gros
de Turcs au nombre de douze
ou quinze cens , s'approcha du
Camp , mais ils n'eurent pas
toft aperceu un détachement.
commandoit le General Dunewald,
qu'ils prirent la fuite .Trente
Huffarts ayant rencontré
quarante
Turcs, les combatirent . Ils.
en tuerent fix , & firent cinq
Prifonniers , parmy lefquels eftoit
un Aga , qui ayant efté déja pris
il y a quelques années , avoit
payé huit mille écus de rançon.
Ils dirent que le Seraskier avoit
ordre de fecourir Bude à quelque
prix que ce fuft ; mais qu'ils
croyoient que l'on auroit peine
à l'engager au Combat .. Un Efpion
vint donner avis que l'Armée
158 Hiftoire du Siege
mée Otomane, compolée de plus
de foixante mille hommes , eftoit
campée le long du Danube à
trois lieues des Affiegeans. Il dit
qu'il avoit efté la reconnoiftre en
habit de Tartare , que le Serafkier
la commandoit , qu'elle occupoit
deux lieues d'étendue, &
que le grand Vifir eftoit demeuré
derriere avec mille hommes
qu'il avoit retenus pour le
garder.
La Ligne de communication
de l'attaque des Bavarois avec
celle des Imperiaux fut achevée
, & un Foffé profond que
l'on fit avec des bons épaulemens,
mit leur Quartier hors d'eftat
d'eftre infulté par les Ennemis.
Le 11. deux mille Chevaux
Turcs parurent fur la hauteur vis
à vis de l'Attaque de Baviere.
Quelques Efcadrons furent dé
tachez pour les aller reconnoitre.
de Bude.
159
tre. Il y eut une Efcarmouche
dans laquelle
le Prince
Charles
de Neubourg
eut un Cheval
tué
fous luy ; mais les Infidelles
commencerent
à defcendre
en fi grad
nombre
qu'il fut impoffible
de
les fouftenir
. Ainfi il falut fe retirer,
& fe contenter
de faire fur
eux un feu continuel
de Canon .
Trois Mines
furent
miſes en état
de jouer le lendemain
. La plus
grande
avoit huit Chambres
, &
leur charge
eftoit de cinq milliers
de poudre
. Comme
on avoit
refolu
d'aller
à l'Affaut
fi elles
réuffiffoient
, le Prince
Charles
commanda
trois mille hommes
de pied avec quinze
cens Chevaux
ou Dragons
, pour les foûtenir
. Le Comte
Petnehafi
arriva
au Camp
avec trois mille
Hongrois
,
Le 12. on fit jouer les trois Mines,
160
Hiftoire du Siege
nes, dont la plus grande n'eut aucun
effet , ce qui fit croire qu'el
le avoit efté découverte, & qu'on
en avoit tiré les poudres. Les
deux autres ne firent qu'une ouverture
pour dix hommes de
front , encore n'eut- elle pas efté
pluftoft faite que les Affiegez la
reboucherent par le moyen des
chevaux de frife , de forte que
l'on ne jugea pas qu'on d'euft
hazerder l'affaut ,
, quoy qu'on s'y
fuft déja difpofé . On fit retirer
les detachemens , & les Mineurs
eurent ordre de commencer un
nouveau travail . Les Mines jettérent
dans la Tranchée quantité
de pierres , dont plufieurs des
Affiegeans furent bleffez ,entr'autres
le Prince de Wirtemberg , le
Comte de Ridberg , & les Lieutenans
Colonels des Regimens de
Lodron de Neubourg. L'Armée
des
de Bude. 161
des Infidelles vint camper fur le
haut d'une Montagne qui n'étoit
pas fort éloignée des Lignes.
Ceux qu'on avoit envoyez pour
s'en informer,rapporterent qu'elle
eftoit de cinquante mille hommes
avec du Canon .
Le 13. les Affiegez firent une
fortie à cheval fur la grande Garde
des Imperiaux ,dont ils tuerent
douze hommes , & emmenerent
quatre Prifonniers qu'ils firent .
Le Comte de Colonitz , Page du
Prince Charles , & un Trompette
de l'Electeur de Baviere , eurent
la tefte coupée dans cette
efcarmouche. Les Turcs parurent
en bataille devat leur Camp,
& comme ils firent defcendre une
partie de leur Armée, on crut
qu'ils avoiet envie de döner combat.
Cela obligea le Prince Charles,
quidésle jour precedent avoit
fait
162
Hiftoire du Siege
fait fortir des Lignes toute la Cavalerie
, Dragons , Huffars , &
Croates,d'en faire auffi fortir l'Infanterie
, à la referve de vingt
mille hommes ,aufquels il en confia
la garde , & celle des trois attaques.
On forma deux Efcadrons
de la plupart des Volontaires , &
deux mille Heiduques , & un pareil
nombre de Hongrois , furent
commandez pour faire l'avantgarde
de l'Armee , & pour venir
les premiers aux mains fi les
Turcs vouloient entreprendre
quelque chofe. Ceux qu'on avoit
veus d'abord ne tenterent rien,
& fe retirerent le foir dans leur
Camp.
Le 14 dés fix heures du matin
, on s'apperceut qu'ils avoient
formé un corps de trois mille Janiffaires
& d'environ 5000. Chevaux
, qui devoit fervir d'avantgarde,
de Bude.
163
que
garde à leur Armée , tandis
le refte demeureroit derriere rangé
en bataille pour les fouftenir.
On apprit que leur deſſein eftoit
de faire paffer les trois mille Janiffaires
entre le quartier des Imperiaux
, & celuy de Brandebourg,
& que pendant l'action les Affiegez
devoient faire une Sortie
pour leur faciliter le paffage, &
leur donner moyen d'entrer dans
la Ville.En meſme temps le Prince
Charles commanda le Comte
de Dunewald pour former l'aifle
gauche de la Bataille avec neuf
Kegimens Imperiaux , qui furent
ceux de Caprara , Palfi , Taff, Lodron
, Neubourg , Furftemberg,
Stirum , Serau, & Schultz , & huit
cens Huffars. Le General Heufler
eut la droite avec un pareil
nombre de Regimens , tant Imperiaux
& Bavarois, que de ceux
de
164 Hiftoire du Siege
de Saxe & de Brandebourg , qui
occuperent une hauteur dont le
terrein leur eftoit avantageux, &
d'où tous les mouvemens des Ennemis
pouvoient eftre décou
verts . Le gros de l'Armée eftoit
difpofé en fort bon ordre , &
dans une diſtance de terrein- qui
luy donnoit facilité de charger
tout ce qui s'avanceroit pour fecourir
Bude. Les huit mille Janiffaires
& Spahis qui devoient
forcer les Lignes, après avoir voltigé
derriere les hauteurs pendant
deux heures , prirent leur
marche entre ces mefmes hauteurs
, & rencontrerent d'abord
les quatre mille hommes de l'Avantgarde
, qui furent rompus au
premier choc. Le Baron de Mercy
les voyant plier , ſe mit à la
tefte du Regiment de Schultz
pour les fouftenir , & en faifant
fermé,
de Bude. 165
>
ferme , il donna le temps au
Comte de Dunewald d'avancer
avec les Regimens de Taff , de
Lodron , & autres. Ce fut alors
que l'on vint à un Combat tresrude
& tres - opiniaftré . Les
Infidelles furent chargez avec
toute la vigueur poffible , & ces
Regimens faifant leurs decharges
à propos , renverferent
leur
Cavalerie qui prit la fuite & abandonna
les Janiffaires. Il y en
eut deux mille de tuez . Chacun
d'eux portoit quatre à cinq Grenades
, & ils avoient tous , les uns
des haches , les autres des pelles
pour rompre les Lignes & les
applanir s'ils euffent pu aller jufques-
là. On prit huit pieces de
Canon , quarante Etendarts , &
fon fit quatre à cinq cens Prifonniers.
Aprés le Combat , les
Infidelles firent divers mouvemens
166
Hiftoire du Siege
mens en s'avançant dans la Plaine
oppofée au Čamp de l'Electeur
de Baviere , qui ayant fait
auffi fortir fon Armée des Lignes
, la tenoit en ordre de Bataille.
Il fut refolu dans un Confeil
general qui fe tint , qu'on iroit
les attaquer , ce qui fut executé
par cet Electeur , mais ſe voyant
pourfuivis ils fe retirerent dans
leur Camp.Le Comte de Dunewald
, & le General Heufler , qui
s'étoient avacez avec les Huffars
par de là les hauteurs , rencontrerent
un gros de Spahis , que
les Ennemis avoient laiffé pour
couvrir leur retraite. Ils en tuerent
prés de deux cens , & en
firent trente Prifonniers. Il n'y
eut qu'environ cent hommes tuez
du cofté des Imperiaux , entre
lefquels fe trouvèrent le Comte
de Lodron , Lieutenant Colonel
de Bude. 167
nel du Regiment de Croates de
ce nom , & le Major du Regiment
de Caprara On fceut que
les Tures avoient perdu plus de
quatre mille hommes , fans un
fort grand nombre de bleffez, &
qu'ils eftoient d'autant plus touchez
de cette perte , que les Janiffaires
qui avoient eſté tuez
eftoient l'élite de leurs Troupes,
& que c'eftoit par eux principalement
qu'ils s'eftoient flatez
de pouvoir jetter du fecours dans
Bude. Les Affiegez firent une
fortie pendant le Combat , mais
ils furent fi vigoureufement repouffez
, qu'ils tarderent peu à
fe retirer. L'Armée Imperiale
eſtant retournée dans ſon Camp ,
& celle de l'Electeur de Baviere
dans le fien , on fit une falve de
tout le Canon des trois Attaques.
On expofa fur des Piques
plu
168
Hiftoire du Siege
plufieurs teftes de ceux qui avoient
efté tuez dans le Combat
, & l'on planta fur la brêche
les Drapeaux gagnez , afin que
les Affiegez ne puffent douter
de la Victoire qu'on venoit de
remporter. La nuit on furprit
deux Efpions avec des lettres
pour le Grand Vifir. Le Bacha
de Bude luy mandoit qu'il avoit
beſoin d'un prompt fecours , &
qu'il falloit fe fervir de la nuit
pour enfoncer les Lignes des Affiegeans
; que pour luy il s'eftoit
retranché dans la Ville , mais
qu'ils eftoient trop avancez pour
leur pouvoir refiſter.
Le 15. on connut que les
Ennemis avoient decampé , &
qu'ils s'eftoient éloignez de deux
lieuës. Le Prince Charles ordonna
qu'on fift enterrer les
Morts qui eftoient demeurez
dans
de Bude.
169
dans le Champ de Bataille , afin
qu'ils n'infectaffent point l'air, &
aprés avoir envoyé aux Affiegez
un des Prifonniers qu'on avoit
faits , pour les informer de
l'heureux fuccez du jour precedent
, qui les devoit empefcher
d'efperer aucun fecours , il fit
partir le Comte de Lamberg
pour aller fommer la Ville , mais
il ne fut pas pluſtoſt arrivé à la
porte , qu'ils commencerent à
tirer fur luy , de forte qu'il fut
obligé de fe retirer . Le foir,
on apprit par un Transfuge que
trois Bachas eftoient demeurez
au dernier Combat que le
Grand Vifir avoit fait couper
la tefte à un autre , & qu'at- '
tribuant au Seraskier le mauvais
fuccez de cette journée , il
l'avoit infulté avec toutes for-
H
>
170 Hiftoire du Siege
tes de marques de, mépris & de
colere.
Le 16. les Affiegez firent joier
une Mine à l'Attaque des imperiaux
, & fortirent en mefme
temps pour tâcher de profiter de
la confufion où ils croyoient les
trouver dans leurs Tranchées,
mas ils connurent que leur Mine
n'avoit eu aucun effet , & fe retirerent
avec quelque perte . Les
Imperiaux mirent le feu aux Paliffades
de la brêche , & en brû
lerent une partie , mais les Affiegez
en remirent d'autres pendant
la nuit. On s'apperceut
qu'il y en avoit un double rang
derriere les premieres , & qu'ils
les avoient moüillées , afin d'empefcher
que celles qui eftoient
en feu ne les confumaffent.Cinq
Polonois qui vinrent ſe rendre,
rapporterent que les Jani ffaires
avoient
de Bude. 171
avoient declaré qu'ils ne vouloient
plus aller au Combat, parce
que la Cavalerie les abandonnoit
toûjours dans le peril. Ils
ajoûterent que le Grand Vifir en
avoit fait mourir quelques - uns
pour remettre les autres dans l'obeillance.
Le 17. une Mine des Affiegeans
fut éventée à l'Attaque des
Imperiaux. Un Transfuge rapporta
que le foir qu'on avoit brulé
les Paliffades , prés de cent
Turcs avoient été bleffez ou tuez
par les Bombes qu'ils y avoient
enterrées , & aufquelles ils auroient
mis le feu , fi Ton euſt
monté à l'affaut ; qu'il ne reftoit
dans la Ville qu'environ mille
hommes capables de porter les
armes , mais que chacun eftoit
refolu de fe défendre jufqu'à la
derniere goute de fon fang. Six
.
H ij
172 Hiftoire du Siege
Fantaffins qui avoient merité la
mort , monterent par ordre de
l'Electeur de Baviere au haut du
Chafteau pour en découvrir le
dedans , mais les Affiegez qui les
découvrirent les firent defcendre
trop toft. La nuit , trente
Volontaires qui s'eftoient détachez
voulurent mettre le feu aux
Paliffades qui défendoient la
brêche de la derniere enceinte
de la Place , mais il y avoit des
poudres répandues aux environs
qui en brûlerent quelquesuns
, & les Affiegez en tuerent
quelques autres , de forte qu'ils
ne purent executer leur def
fein.
Le 18. deux Polonois qui s'étoient
fauvez de l'Armée des
Turcs, rapporterent que le Grand
Vifir avoit promis trente écus
à chacun des Janiffaires qui
pour
de Bude.
173
pourroient forcer les Lignes &
fe jetter dans la Place , qu'ils s'étoient
mis en marche au nombre
de deux mille avec quantité
de Tartares , pour aller gagner
les Montagnes qui regardent la
Ville- baffe , que c'eftoit par là
que les Ennemis pretendoient
faire entrer dans Bude le fecours
que le Commandant continuoit
de preffer , & qu'ayant un Pont
à cinq lieues du Camp des Chrétiens,
ils avoient envoyé du monde
en de là du Danube pour
faire diverfion. Oń fit jouer une
Mine à l'Attaque des Imperiaux
, &le peu de ffuucccceezz qu'elle
eut , obligea de differer l'Affaut
general , & de retirer les
détachemens que l'on avoit faits
à ce deffein. La nuit , on refolut
de nouveau de brûler les Paliffades
, & trois cens hommes
-
Hiij
174 Hiftoire du Siege
furent commandez pour cela ,
mais il n'y eut qu'un fort petit
nombre de Grenadiers qui monterent.
Le grand feu que firent
les Affiegez , & la quantité de
Grenades & de Sacs à poudre
qu'ils jetterent , épouvanterent
fi fort les Moufquetaires qui les
devoient fouftenir , qu'une partie
fe cacha , en forte que les
Officiers s'avancerent prefque
feuls.
Le 19.les Imperiaux tâcherent
de fe pofter fur la petite Rondelle
de la feconde muraille,mais
la refiftance qu'ils trouverent les
en empefcha . Ils eurent prés
de quarante hommes tuez , ou
bleffez. On fut averty par un
Transfuge que le Grand Vifir
avoit commencé de fe mettre
en marche pour revenir vers le
Camp des Affiegeans mais
qu'ayant
de Bude.
175
qu'ayant appris d'un Deferteur
qu'il leur eftoit arrivé un corps
de dix mille hommes , cette nouvelle
l'avoit obligé de retourner
fur fes pas , & que vingt - cinq
mille Tartares eftoient au de- là
du Danube peur tâcher d'y faire
diverfion.
Le 20. à la pointe du jour,
pendant que l'Armée Ottomane
venoit le mettre en Bataille devant
le Camp de- l'Electeur de
Baviere , deux mille Janitaires
qui s'eftoient tenus cachez la
nuit , defcendirent par le grand
Vallon aprés que le Biouac fe fut
retiré , & ils paffetent les Lignes.
de circonvallation que l'on n'avoit
pû laiffer garnies faute de
monde. Ils poufferent la grande
Garde , mais les Generaux
Caprara, & Heufler s'eftant trouvez
heureuſement à cheval , y
Hij
176
Hiftoire du Siege
accoururent. Ils couperent ceux
qui avoient déja forcé les retranchemens
, & les taillerent en pieces
, mais toute leur refiftance,
quoyque des plus vigoureuſes ,
n'empefcha pas que prés de trois
cens ne paffaffent dans la Place,
le refte fut repouffé hors du
Camp. On fit trois cens Prifonniers
, & il y en eut beaucoup
de tuez. Le Sieur Sentini Chevalier
de Malte , & Capitaine
de Cavalerie dans les Troupes
de Baviere , s'eftant trop avancé
pour reconnoiftre les Ennemis,
fut fait prifonnier. Le Comte
de Konigfmark Lieutenant Cólonel
de Beck fut tué , & le General
Heufler bleffé au pied.
Quoy que ceux qui entrerent
dans la Ville , fuffent la plufpart
bleffez & en petit nombre , les
Affiegez ne laifferent pas de faire
de Bude.
177
re une falve de tous leurs Canons
, pour faire croire qu'il leur
eftoit arrivé un plus grand fecours.
On apprit par un Chrétien
qui s'échappa de l'Armée
des Ottomans , que le Grand Vifir
avoit fait affembler fes Troupes
,,
pour leur dire que le fecours
qu'il avoit envoyé , eftoit
entierement entré dans la Ville,
& qu'il donneroit à tous ceux
qui auroient envie de s'y jetter,
la mefme fomme qu'il avoit donnée
aux autres . L'Armée des Infidelles
fe retira à quelques lieuës
du Camp des Chreftiens .
>
Le 21. la Baterie de l'attaque
des Imperiaux qui battoit en
flanc les retranchemens des Af-
Liegez receut un fort grand
dommage du feu que fit leur Artillerie
. Elle en fut prefque entierement
démontée , ce qui fit
H v
178
Hiftoire
du Siege
qu'on augmenta le nombre des
Travailleurs pour la rétablir pen
dant la nuit.Ön redoubla auffi les
Troupes de la Tranchée , & l'on
fit un feu continuel afin d'occu
per les Ennemis. Cette même nuit
on fe prepara à donner un Affaut
au Chafteau du cofté de l'attaque
des Bavarois.
Le 22. le Prince . Charles fit
faire une fauffe Attaque , pour
faciliter par une diverfion celle
que l'Electeur de Baviere commençoit
de fon cofté. Les Turcs.
eftant accourus en grand nom.
bre fur la brêche du cofté des
Imperiaux , on fit fur eux une
décharge de Mortiers , qui leur
tuerent cent hommes , & pen
dant ce temps les Bavarois , qu'animoit
la prefence de leur Prince
, fe rendirent maiftres de la
plus grande partie du Chateau,
malgré
de Bude..
179
malgré la refiftance opiniaftre
de ceux qui le défendoient. Le
General Rummel qui commandoit
l'Attaque , fut tué d'un coup
de Moufquet dans les approches.
H fut extremement regretté .C'étoit
un Officier d'une grande experience
. On ne perdit que trente
hommes , mais plus de deux
cens furent bleffez , la plufpart
par des Sacs à poudre . Un Duc
de Saxe- Mesbourg , ayant une
Compagnie dans le Regiment
de Bade , receut deux coups de
Moufquet, dont l'un luy calla la
jambe. La nuit , les Ennemis
tacherent de repoufler les Bava-
Fois du Pofte qu'ils occupoient,
mais ils ne purent en venir
bout.
Le 23. les Affiegez firent une
Sortie fur la grande Garde des
Bavarois , mais ceux - cy les contrai
180 Hiftoire du Siege
traignirent de fe retirer , & les
pourfuivirent jufques aux portes.
Le Lieutenant Colonel d'Arco
y ayant efté tué d'un coup de
Moufquet , les Turcs emporterent
le corps dans la Ville . On
prit dans l'lfle de Sainte Marguerite
un Turc qui eftoit fortyde
Bude à la nage avec un More
, pendant un orage qui s'eftoit
élevé la nuit . Il dit que ce More
qu'on n'avoit pu arrefter , eftoit
envoyé au Grand Vifir avec
des lettres , par lesquelles le Bacha
de Bude le preffoit de luy
donner promptement un fecours
plus fort que celuy qu'il avoit re
ceu que la Ville ne pouvoit te
nir encore bien long- temps , &
que le Chafteau eftoit fur le
point d'eftre perdu . Il ajoûta ,
qu'il n'eftoit entré que deux
cens cinquante Janiffaires la
plus
de Bude. 181
plufparts bleffez , & hors de combat
, & que le Bacha en publioit
le nombre plus grand pour donner
courage à ceux de la Ville;
que les Affiegez avoient perdu
cent hommes le jour que les Bavarois
s'eftoient poſtez au haut
-du Chafteau & que le Bacha
avoit promis cinq cens écus à
ceux qui eftoient venus la nuit
pour les en chaffer , mais que celuy
qui les commandoit avoit
pris la fuite...
Le 24. les Bavarois fe fortifierent
dans les Poftes dont ils s'eftoient
emparez. Les Affiegez firent
contre eux de nouveaux efforts
mais ils furent inutiles.
Trente Soldats y furent tuez avec
le Lieutenant Colonel du Regiment
Saxon de Trautmansdorf.
L'Armée Ottomane parut de
nouveau à la veuë du Camp , &
sen
182
Hiftoire du Siege
›
s'en retourna le mefmejour à une
lieuë de là. Comme les Affiegez
avoient fait des feu pendant la
nuit, & allumé plufieurs fois de la
poudre au deffus de la grande
Rondelle , on ne douta point que
ce ne fuffent autant de Signaux
pour preffer les Turcs de faire
encore quelque tentative. Le
Prince Charles , pour prevenir
leurs deffeins , détacha fix Efca
drons, & fix Bataillons , qu'il fit
commander par le Baron de Mercy
, le Comte de Souches & le
General Heufler. Ils pafferent
toute la nuit fous les armes fans
qu'il fe fift aucun mouvement du
cofté des Infidelles. On continua
pendant cette mefme nuit , de
combler les Foffez, & d'affurer les
Travaux qui avoient eſté faits
du cofté de l'attaque de Lorrai
ne. On eut avis que le Comte de
Scherf
de Bade. 183
Scherffemberg dont on preffoit
Farrivée , eftoit auprés de Zolnoch
avec les Troupes qu'il commandoit
en Tranfilvanie, & qu'il
feroit toute la diligence poffible
pour le rendre promptement au
Camp , quoy que fon Infanterie
fuft fort fatiguée .
Le 25 deux Escadrons que l'on
avoit détachez , eurent ordre de
revenir au Camp , & les quatre
autres furent poftez au pied des
murailles. Le Prince Charles fit
fortifier les Lignes le long du Danube
, de plufieurs rangs de Paliffades,
& quatre cens Allemans
& deux cens Hongrois y furent
envoyez fous le commandement
du Baron d'Afti pour s'oppofer
au fecours , fi les Ennemis tachoient
d'en faire paffer par là.
Les Travaux que les Bavarois avoient
faits au hautdu Chafteau ,
fu
184 Hiftoire du Siege
furent entierement brûlez par les
facs à poudre, & autres Machines
à feu que les Affiegez y jetterent.
Ainfi l'on fut obligé de fe
retirer , & de fe pofter plus à la
droite. Il y eut en cette occafion
dix ou douze hommes tuez , &
plus de deux-cens bleſſez .
Le 26. le Canon des Affiegeans
ayant ruiné la face de la grande
Rondelle dont ils s'eftoient ren
dus maiftres , on y fit une maniere
de pont avec des poutres. Elles
alloient d'une muraille à l'autre,
& faifoient la communication
des Logemens . Les Ennemis firent
ce qu'ils purent pour bruler
ce Pont, mais on le garnit fi bien
de toutes les chofes qui le pou
voient garantir du feu, qu'ils furent
forcez d'abandonner ce deffen.
Il ne leur reftoit plus que
fept groffes pieces de Canon en
bat
de Bude.
185
batterie ; toutes les autres avoient
efté demontées. Un Turc fut arrêté
proche de la Ville. Il dit que
quantité de Janiffaires animez
par les promeffes du Grand Vifir,
montoient tous les jours à cheval
avec refolution de fe venir
jetter dans la Place , mais que le
courage leur manquoit , fſii toft
qu'ils découvroient le Camp des
Chreftiens.
Le 27. on terraffa le Pont de
communication , & on fit une
forte Redoute pour en defendre
la tefte . On travailla auffi à un
Logement fur la grande Rondelle.
Il fut étendu fur un terrain
uny qui donnoit paffage jufqu'à
la derniere muraille de la Ville.
Ainfi les Affiegeans n'eftoient
plus qu'à cinq ou fix pas des Ennemis
, qui tâcherent de redoubler
leur defence. Ils jetterent
quan
186 Hiftoire du Siege
quantité de feux d'artifice , fans
pouvoir endommager le Logement
qui touchoit leurs Palifades
. Un Croate Deferteur vint
avertir que les Ennemis avoient
receu un renfort de huit mille
hommes , & tiré de Stulweifembourg
huit groffes pieces de Canon
; que le Grand Viſir ayant
promis de récompenfer tous ceux
qui fe jetteroient dans la Ville,
plufieurs s'eftoient déja prefentez
, & que la nuit fuivante on
devoit venir attaquer le Camp
des Chrefliens par deux endroits .
Ce rapport fit qu'on la paffa toute
entiere fous les armes . On s'y
tint mefme le lendemain jufques
à midy , mais on ne vit que quelques
détachemens qui ne firent
que paroiftre, & fe retirerent prefque
auffi - toft.
Le 28. les Affiegeans fe fortific
de Bude.
187
1
fierent dans leur Logement, malgré
tout le feu des Affiegez qui
commença à diminuer. On ag
grandit la bréche du flanc de ce
Logement , & toutes chofes furent
heureuſement difpofées pour
reüffir dans l'affaut. La Baterie de
Suabe continua de faire grand
feu. Elle eftoit fur le panchant
de la Montagne d'où l'on tiroit
avec des Boulets enchaifnez,afin
qu'il fuft plus ailé d'abatre les
Paliffades. Ce mefme jour on
furprit on Turc qui eftoit encore
forty de la Ville à la nage . Il avoitpaffé
fous les deux Ponts , &
s'eftoit caché dans un trou au
de - là des Lignes . Il n'avoit fur
luy qu'une écharpe & un Sabre
avec une Lettre qu'il portoit à
l'Armée Turque pour l'Aga des
Janiffaires. Elle eftoit écrite par
ce
188 Histoire du Siege
celuy qui commandoit les Janiffaires
dans Bude , & n'avoit rien
de particulier , finon que l'Homme
que le Grand Vifir avoit envoyé
, eftoit entré dans la Ville,
& qu'elle eftoit fort preffe. Il fut
impoffible pendant tout le jour
de faire parler ce Turc , mais enfin
on l'intimida fi bien par les
menaces , qu'il avoüa fur le foir,
que le Commandant de Bude
l'avoit chargé de dire au Grand
Vifir, qu'il yavoit prés de quinze
jours qu'il eftoit campé devant
la Ville , & qu'il s'étonnoit que
fcachant le preffant danger où
ilfe trouvoit , il ne luy envoyat
pas un fecours confiderable ; que
les Troupes qu'il commandoit
témoignoient avoir moins de
courage que les Femmes de la
Ville , puifqu'on ne tentoit aucune
chofe , que pour luy il eftoit
re
de Bude. 189
refolu de fe défendre jufqu'à la
derniere goute de fon fang , mais
qu'il ne pouvoit répondre de la
Place s'il ne recevoit un prompt
fecours. Ce Turc ajoûta que le
Bacha luy avoit auffi donné ordre
de recommander la Ville de
Bude & l'honneur de l'Empire
Ottoman au Commandant des
Tartares ; qu'il y avoit encore
2000. hommes dans la Place , avec
quatre cens Janiffaires qui
s'y eftoient jettez le 20 que les
Affiegez s'eftoient bien retranchez
du coſté de l'Attaque des
Imperiaux ; que derriere la Paliffade
de la feconde brêche il y
avoit encore un Foffe & une autre
Paliffade , mais qu'ils n'avoient
point travaillé du cofté
du Chafteau , eſperant eſtre ſecourus.
Le 29. un Polonois vint ſe rendre
190 Hiftoire du Siege
dre le matin , & raporta que les
Infidelles devoient venir atta,
quer le Camp par trois endroits.
Peu de temps aprés , mille Spahis
& deux mille Janiffaires commandez
par deux Bachas, & foutenus
de quinze mille Tartares,
qui avoient ordre de leur faciliter
l'entrée dans la Ville, vinrent
du cofté d'Actoffen pour s'y jetter
, mais comme ils n'y trouve
rent point de paffage & qu'ils
virent qu'on faifoit fur eux une
vigoureufe décharge , ils gagnerent
une colline , d'où eftant enfuite
defcendus dans un Marais
qu'on trouve dans le Vallon , ils
furent envelopez par des Efcadrons
, à la tefte defquels eftoient
le Baron de Mercy & le General
Heufler , & par la garde des Bavarois
. Il en refta huit cens fur la
place. Ils avoient chacun trente
écus
de Bude. 191
écus qu'on leur trouva dans la
poche , le refte fut mis en fuite,
& il n'y en eut que quinze qui
purent paffer ; encore n'en entra↓
t- il que quatre dans la Ville , les
onze autres ayant eſté tuez avant
que d'y arriver. On coupa chemin
à cent Spahis , dont foixante
& feize furent paffez au fil de
l'épée par deux differentes Troupes
de celles de Brandebourg , &
quatre autres tuez dans le quar
tier du General. Le Baron de
Mercy receut trois coups de Sabre
dans cette action,un à l'épaule
, & deux à la tefte , Son Ayde
de Camp fut tué à ſes coftez .
Dans ce mefme temps les Affiegez
voulant faciliter l'entrée du
Secours , hazarderent une Sortie,
mais les Bavarois qui avoient la
garde de la Tranchée , les contraignirent
de fe retirer avec perte
192 Hiftoire du Siege
te de cinquante hommes. D'un
autre cofté l'Armée des Ennemis
vint en ordre de Bataille vers les
Lignes du Camp de Baviere ,
mais elle ne tenta rien , & le
Grand Vifir ayant veu paroiſtre
vingt cinq Efcadrons du corps
d'Armée du Comte de Scherffemberg
qui paffoient le Pont du
Danube , fous le commandement
du General Picolomini , prit le
parti de fe retirer. On gagna
trente Drapeaux, la plufpart rou
ges , les autres eftoient de differentes
couleurs. On fceut par un
Deferteur , que des trois mille
Janiffaires ou Spahis qui avoient
juré au Grand Vifir qu'ils ne reculeroient
, ny ne fuiroient point,
il n'en eftoit pas retourné plus de
cinq cens.
Le 30.quatre Chreftiens écha
pez des mains des Infidelles , fe
rendi
de Bude.
193
Jap
rendirent dans le Camp , & rapporterent
que l'Armée Ottomane
eftoit allée camper une lieuë plus
loin que la plufpart de leurs
Troupes defertoient avec les Drapeaux
, & qu'elles avoient une
grande difette de vivres . Ce mef
me jour le Comte de Scherffemberg
arriva de Tranfilvanie avec
les trois Regimens d'Infanterie ,
de Sherini , de Scherffemberg ,
de Spinola , & le refte de la Cavalerie
, fçavoir soo . Hongrois &
les Regimens de Picolomini ; de
Veterani , de Sainte Croix ; de
Magni , & de Tefvin. Celuy de
Sherini fut joint au corps de Ba
viere , & les autres allerent occu
per le terrein qui reftoit vuide
du cofté de la baffe Ville , depuis'
la droite des Imperiaux jufques
au Dambe."
Le 31 on eit avis, que fept
isque I
194 Hiftoire du Siege
mille Tartares s'eftoient avancez
vers Gran , afin d'empécher
qu'il ne defcendift des vivres
pour les Affiegeans. On entendit
mefme tirer le Canon de cette
Ville. Les Bavarois firent mener
de nouvelles Pieces fur leurs Batteries
à la place de celles qui avoient
eſté gaſtées . Les Troupes
demeurerent fous les armes toute
la nuit , fur ce que le bruit
s'eftoit répandu le foir , que l'Armée
des Infidelles s'eftoit mife
en marche pour les venir attaquer.
Le premier jour de Septembre
on ne ceffa de jetter dans la
Ville des Carcaffes & des Bombes
, & de battre les Paliffades
avec le Canon . Ce mefme jour on
tint un Confeil de Guerre , où ſe
trouverent tous les Generaux
des Troupes auxiliaires . Il fut
agité
de Bude.
195
agité fi l'on iroit attaquer le
Grand Vifir en laiffant affez de
Troupes pour continuer le Siege
, où fi on l'attendroit dans
les Lignes. Plufieurs crurent qu'il
falloit aller aux Ennemis & profiter
de la confternation où les
mettoit la perte qu'ils avoient faite,
mais l'avis contraire l'emporta
, & on refolut de donner l'affaut.
Cette reſolution fut tenuë
fecrette , & le Prince Charles fit
fortir des Lignes trente mille
hommes de Cavalerie & dix mille
d'Infanterie qu'il fit ranger en
Bataille dans la plaine oppofée
au front du terrain que les Infidelles
occupoient > comme s'il
euft eu deffein de les aller attaquer.
Il les empefchoit par là de
faire des détachemens pour le
fecours de la Place. Les Generaux
qui eurent le commande-
I ij
196
Hiftoire du Siege
ment de la Cavalerie , furent le
General Bielke , le Prince Eugene
de Savoye , & les Comtes de
la Torre & d'Arco . Le General
Steinau & le Comte d'Afpremont
commanderent l'Infanterie.
Les ordres furent enfuite
donnez pour l'affaut . Le Comte
de Souches fut commandé pour
l'Attaque de la droite, & le Comte
de Scherffemberg le fut pour
la gauche, chacun avec trois mille
chevaux choifis , & un pareil
nombre d'hommes de pied . La
marche des Volontaires , qui attendoient
ce grand jour avec une
extreme impatience , fut ordonnée
entre les deux aifles, avecordre
de ne pas preceder les premieres
files.
Le 2 . tous les Generaux ſe
trouverent à cheval fi- toft que le
jour parut . Ils allerent vifiter les
Tra
de Bude.
197
Travaux , & le Prince Charles
ayant fait venir les Officiers Ma-.
jors dans fa Tente , les avertit de
tenir toutes les Troupes preftes
pour donner l'affaut à deux heures
aprés midy. L'Electeur de Baviere
n'oublia de fon cofté aucun
des ordres qui pouvoient
eftre neceffaires pour achever de
fe rendre maiftres du Chateau.
Le General Schoning tint auffi
toutes chofes difpofées à l'attaque
de Brandebourg , & d'abord
que le Signal cut efté donné par
fix Pieces de Canon tirées du
quartier des Troupes de Suabe,
quatre Capitaines fuivis chacun
de cinquante Grenadiers , avec
quatre Lieutenans , quatre Sergens
, & les autres Officiers inferieurs
, marcherent à la droite
de l'Attaque. Le Baron d'Afti
eftoit à leur tefte , & ils eftoient
I iij
198 Hiftoire du Siege
fouftenus de deux cens Moufquetaires
que commandoient
quatre Capitaines & d'autres
Officiers fubalternes, ayant à leur
tefte un Lieutenant Colonel &
un Major. Ceux - cy eftoient fuivis
de cent hommes armez d'une
demie Pique & d'un Sabre , chacun
avec deux Piftolets de ceinture
. On fit marcher à quelque
diſtance trois cens Arquebufiers
commandez par quatre Capitaines,
& trois Bataillons de reſerve
les fuivoient. Ils eftoient chacun
de fix cens hommes avec leurs
Officiers. La difpofition de la
gauche fut pareille . Toute la difference
qu'il y eut , c'eſt que cent
cinquante Arquebufiers furent
les premiers qui s'avancerent, &
qu'ils n'eftoient precedez que de
cinquante Grenadiers , & de
vingt- cinq à trente hommes armez
de Bude. 199
mez de Pertuifanes , d'une Epée,
& d'une Hache . Tout fut difpofé
de la muc torte à l'Attaque
de Daviere, & à celle de Rrandebourg
, & jamais Affaut ne fut
entrepris avec plus d'ardeur , &
plus d'intrepidité . Le Baron
d'Afti qui avoit l'Avant- garde
des Grenadiers , & qui marchoit
à leur tefte , fut bleffé d'abord,
& le Sieur Bifchoff- haufen , Sergent
Major du Regiment de Diepenthal
, prit le Commandement
en fa place. Quoy qu'ils fuffent
foûtenus des Bataillons qu'on avoit
fait fuivre , ils trouverent
une fi furieuſe refiftance de la
part des Affiegez , qu'ils furent
contraints de reculer. Outre la
grande quantité de facs à poudre
qu'on jetta fur eux , les Ennemis
firent jouer une Mine qui
leur caufa un fort grand defor-
I iiij
200
Hiftoire du Siege
dre. Ils retournerent une feconde
fois à l'affaut avec une vigueur
extraordine , & ils ne
Purent encore obliger les Tercs
a fuir , mais enfin aprés une tresrude
Efcarmouche qui dura une
heure devant la Ville , les Affiegez
ayant perdu courage par la mort
du Commandant qui fut tué fur
la Bréche , ils firent fi bien qu'ils
vinrent à bout d'arracher les
Paliffades , & de forcer leurs
Retranchemens. Ils y trouverent
huit cens Janiffaires qu'ils taillerent
en pieces , fans avoir aucun
égard à la poſture foûmife
où ils fe mirent en leur demandant
quartier , & jettant leurs
Armes bas. Quelques - uns d'entre
eux voyant qu'ils ne vouloient
épargner perfonne , reprirent
leurs Armes , fe défendirent
en defefperez , & firent
jouër
•
de Bude. 201
jouer un Fourneau dont plufieurs
Maifons fauterent . Le feu
du Fourneau fe communiqua à
une certaine machine qu'il avoient
difpofée auparavant , &
produifit un autre feu bien plus
dangereux qui couroit de place
en place, & que perfonne ne prenoit
le foin d'efteindre , parce
que les Victorieux eftoient alors
occupez à pourfuivre , & à exterminer
tout ce qui pouvoit
refter d'Ennemis dans la Ville ,
où quelques ordres que les Of
ficiers puffent donner , il fut impoffible
d'empefcher le carnage.
Ainfi l'embrafement fut prefque
general. Ceux de Brandebourg
entrerent en mefme temps dans
la Ville , & penetrant dans les
rues au travers des flâmes , ils
firent main baffe fur tout ce
qu'ils rencontrerent , fans épar
I v
202 Hiftoire du Siege
gner Vieillards , Femmes & Enfans
. Les Victorieux n'en confultoient
que la fureur qui les
animoit , & qui les portoit à fe
vanger de l'opiniâtre reſiſtance
que ces malheureux avoient faite
fur la Bréche à force de Bombes
, de Mines , de Pots à feu &
autres machines roulantes qu'ils
avoient jettées à la faveur de
leur Moufqueterie , & d'une
grefle de fléches. Cependant la
Cavalerie qu'on avoit tirée des
Lignes fous les Generaux nommez
pour la commander eftoit
demeurée , ainsi que l'Infanterie,
toûjours en action , & en Bataille
avec les Ennemis , dont
l'Armée , non feulement avoit
paru de ce coſté là , mais meſme
avoit commencé à attaquer l'Avantgarde
des Chreftiens. D'un
autre cofté les Generaux Sherini
,
de Bude.
203
rini, la Vergne & de Beck , n'ou
blierent rien pour achever de
fe rendre maiftres de ce qui reftoit
à occuper du Chateau,
fouftenant avec un courage tout
heroïque l'affaut qu'ils y avoient
donné , & en mefme temps les
Grenades & les Pierres que jettoient
les Janiffaires , qui ne fçachant
encore rien du fuccez de
l'autre attaque , faifoient leurs
derniers efforts pour fe maintenir
fur une hauteur d'où dépendoit
la confervation du Chafteau.
Pendant qu'ils fe deffendoient
avec toute la bravoure
qu'on peut attendre de gens.
auffi aguerris que determinez ,
les Turcs qui eftoient auparavant
de l'autre cofté , s'eftoient
venus retirer de celuy - cy , partie
du cofté de la Riviere , &
partie du cofté du Chaſteau où
ils
204 Hiftoire du Siege
ils avoient merveilleufement renforcé
les Janiflaires. Pour s'oppofer
au fecours qu'ils leurs donnoient
, l'Electeur de Baviere ,
qui remarqua que le Grand Vifir
n'agifloit point , & qu'il ne
faifoit mine d'aucun mouvement
, commanda le Comte d'Apremont
avec 500. hommes , &
le fit aller à l'affaut avec les autres
pour les foûtenir. Le Prince
Louis de Bade s'apercevant de
l'inevitable neceffité qu'il y a
voit de s'emparer de la hauteur
qui occupoient encore les Affiegez
, pour le rendre enfuite maifres
du bas où ils avoient plufieurs
places d'armes & autres
Logemens , paffa luy mefme de
ce coflé-là , & ordonna de l'efcalader
& de grimper au deffus,
ce qui fut fait fi heureuſement,
que
de Bude.
205
que l'on envoya une grefle de
de moufquerades & de Grenades
fur les Turcs qui fe voyant foudroyez
de cette forte , arborerent
un Drapeau blanc , & jufques à
leurs Turbans , criant de toute
leur force qu'on leur donnaft
quartier & la vie. Il y en cut
plufieurs , qui ne voulant point
attendre ce qu'on refoudroit, pafferent
par deffus le mur d'un
chemin couvert , & tâcherent de
fe fauver avec quelques Juifs par
le Danube dans de petits Bateaux
qu'ils trouverent mais
les Tolpazes les ayant atteints
avec leurs Saiques , coulerent à
fond plufieurs de ces petits Baftimens
, tuerent la plupart de
ceux qui avoient cru s'échaper,
& les autres qui avoient déja
paffe la Riviere , furent taillez
2
en
206
Hiftoire du Siege
>
en pieces , ou faits prifonniers
par les Hongrois qui eftoient
dans Peft . L'Electeur de Baviere
accorda la vie au Lieutenant
du Bacha & à plus de
douze cens hommes , qui voyant
les Imperiaux Maitres de la
Place , l'avoient fuivy dans une
Rondelle où il s'eftoit retiré
entre le Chafteau & la Ville.
Il fit de mefine quartier à ce qui
reftoit de Turcs dans le Chafteau
, d'où il les envoya fous
bonne garde dans une grande
Mofquée & dans un grand Magafin
. Les Soldats qu'on ne
put faire revenir fi - toft de leur
premiere fureur , affommerent
& jetterent dans la Riviere les
vieilles Gens fans nulle diftinction
de Sexe , & il y en eut
quelques - uns de fi
,
cruels ,
qu'ayant
de Bude.
207
cruautez ,
qu'ayant trouvé des Femmes
avec des Enfans de deux ou trois
mois , ils leur ouvrirent le ventre
, & y fourrerent ces miferables
Enfans. L'Electeur de Baviere
, & le Comte de Stratman ,
Chancelier de l'Empereur , qui
arriverent dans la Ville pendant
que l'on commettoit ces
ne pûrent les faire
ceffer qu'aprés des défenfes tres
rigoureufes , & plufieurs fois reïterées.
Le feu eftoit répandu par
tout , & avec le fang qui couloit
de tous coftez , il est aisé de
s'imaginer quel affreux Spectacle
offroit cette trifte Ville abandonnée
au pillage . Cependant
la principale Mofquée , qui
avoit efté autrefois l'Eglife de
Saint Etienne , Roy de Hongrie
, fut préfervée de l'embrafement,
208
Hiftoire du Siege
>
fement , ainfi qu'un grand Magafin
, dans lequel eftoient quantité
de vivres , & un autre plein
de poudres . Ces deux Magalins
furent confervez par les foins
du Commiffaire Rabata qui
eut là - deffus beaucoup de conduite
& de vigilance . On perdit
prés de deux cens hommes
à l'Attaque de Lorraine , avec
le Marquis de Spinola , Colonel
d'un Regiment d'Infanterie . Il
y eut trois cens cinquante Soldats
tuez à celle de Baviere , à
caufe d'un Fourneau que les Ennemis
y firent jouër . Le Comte
de Tartembac fut auffi tué à
cette Attaque , & le Comte de
Zacco , Major du Regiment
d'Alpremont , y fut bleffé à
mort ainfi que le Sieur Mon-
.ticolli , Capitaine dans le meſme
>
Re
de Bude . 209
Regiment. Ceux de Brandebourg
ne perdirent que cent
hommes , & le nombre des Blef
fez ne fut que de quatre cens
dans toutes les trois Attaques .
11 y eut plus de trois mille hommes
tuez ce jour- là - du cofté des
Affiegez . On jetta les corps des
Turcs & des Juifs dans la Riviere
, & les Chretiens furent enterrez.
Le Lieutenant du Bacha
dit qu'au commencement du Siege
la Garnifon eftoit de dix mille
Janiffaires , fans compter les Juifs
& les Habitans capables de porter
les armes , qui faifoient encore
plus de cinq mille hommes.
L'Aga des Janiffaires &
le Mufthi demeurerent prifonniers
avec ce Lieutenant du Bacha
, & plufieurs autres Offciers.
L'Aga fut donné au Prince
Char
210 Hiftoire du Siege
Charles. Cette conqueſte eft
d'autant plus glorienfe , qu'elle
s'eft faite à la veuë de l'Armée
des Ottomans , qui fans ofer rien
tenter , ont laiffé prendre une
Ville auffi importante que Bude,
& dont ils eftoient en poffeffion
dépuis cent quarante-cinq ans.
On dit que lors qu'ils connurent
que les Chreftiens y eftoient entrez
, ils s'arracherent la barbe
de defefpoir , & fe jetterent par
terre. Le foir ils fe retirerent à la
faveur de la nuit .
dans la Place trois à
On a trouvé
quatre cens
dont il dont y en
pieces de Canon ,
a quantité d'un fort grand calibre
, avec foixante Mortiers,
& un nombre incroyable de Boulets
, de Grenades , de Carcaffes ,
de Bombes , & d'autres Machines
de Guerre. On fit environ
deux
de Bude. 211
deux mille prifonniers , & l'on
prit plus de cent Juifs qui s'eftoient
refugiez dans leur Synagogue.
Le Prince Charles fit tout
ce qu'on peut attendre d'un
grand & experimenté Capitaine,
donnant les ordres par tout où
fa prefence eftoit neceffaire , &
n'oubliant rien de ce qui pouvoit
contribuer à l'heureux fuccés
de cette grande journée . L'Electeur
de Baviere s'y acquit
beaucoup de gloire , & fit
roiftre combien il eft intrepide
par la maniere dont il s'expofa
au feu. Tous les Volontaires
chercherent à fe fignaler à l'envy
les uns des autres , & le Prince
de Commercy donna d'éclatantes
marques de valeur &
de courage. Comme ils pouvoient
fe trouver par tout , le
pa-
Mar
212
Hiftoire du Siege
allerent
Marquis de Blanchefort , & le
Marquis de Souvray
dans tous les Poftes où le peril
eftoit le plus apparent. C'eſt ce
qu'ils avoient déja fait pendant
tout le Siege, n'ayant laiffé échaper
aucune occafion , quelque
dangereufe quelle fuft , fans y
courir avec une ardeur qui ne
fe peut exprimer. Le Prince
Louis de Bade receut un coup
de Moufquet qui luy éfleura la
chair. Il monta un des premiers
à l'affaut , & anima les Soldats
par fa valeur . Le Prince Euge
ne de Savoye , qui eft fon Coufin
Germain , ne fe diftingua
pas
moins. Il avoit cfté deftiné
à l'Eglife , mais le Chevalier de
Savoye , fon Frere , qui commandoit
un Regiment de Dragons
au fervice de l'Empereur,
eftant
de Bude .
2137
eftant mort au Siege de Vienne,
il refolut de quitter l'Etat Ecclefiaftique
, & s'eftant rendu en
pofte à ce mefme Siege aprés a--
voir efté faluër S. M. I. qui étoit '
à Lints , il s'y fignala , & acheva
la Campagne en qualité de Volontaire
, âgé feulement de dixneuf
ans. L'Empereur voulant
reconnoiftre la valeur de ce jeune
Prince , luy donna un Regiment
de Dragons , à la tefte duquel
il fervit la Campagne fui- :
vante , & fit des chofes au delà !
de fon âge à la prife de Strigonie,
& au premier Siege de Bude , où
il fut bleffé d'un coup de Moufquet
au bras. Aprés la Campa
gne, il alla voir le Duc de Savoye
Chef de fa Maifon , qui le receut
avec toutes les marques d'honneur
deuës à ſa naiffance & à fon
me
214 Hiftoire du Siege
merite. Il paffa de là à Veniſe , revint
à la Cour de l'Empereur , &
fe trouva àla Prife de Neuhaufel
& autres Places . Au retour.
de cette Campagne , quoy qu'il
n'euft alors que vingt & un an,
l'Empereur le fit General Major.
de fes Troupes fur la fin de l'année
derniere . Le Siege de Bude
ayant efté refolu , il fe rendit au
Camp des Impériaux pour y faire
les fonctions de cet employ , dont
il s'eft acquité avec toute la gloire
poffible.
Si-toft
que
la Place
eut eſté
prife
, le Prince
Antoine
de Neubourg
, Grand
Maiftre
de l'Or.
dre Teutonique
, & le Prince
de Commercy
partirent
pour
en
apporter
la nouvelle
, l'un à l'Empereur
, & l'autre
à l'Imperatrice
.
Doüairiere
, le Comte
de Sherini
,
de Bude. 215
rini , dépefché par l'Electeur de
Baviere , l'apporta à l'Electrice fa
Femme. Le Comte de Konigfeeck
fut auffi dépeſché par le
Prince Charles avec le grand
Drapeau des Turcs trouvé dans
Bude qu'il apporta au Prince Hereditaire
Imperial .
Le 3. le Prince Charles & les
Generaux vinrent au Quartier
de l'Electeur de Baviere , où le
Te Deum fut chanté au bruit des
Trompettes , des Timbales , &
des Canons , dont on fit faire trois
décharges autour des Lignes. On
mit auffi le feu aux Bombes qu'on
y avoit enterrées pour les Ennemis,
s'ils euffent ofé entreprendre
de les
attaquer.
Le 6. toute l'Armée partit en
bon ordre pour marcher du cofté
du Pont d'Effeck. On laiffa
dans
216 Hiftoire du Siege de Dude.
dans Bude les Regimens d'In-1
fanterie de Beck , de Salme &
de Diepenthal , avec des détachemens
des Alliez fous le
Commandement du Baron de
Beck .
F I
DU SIEGE
DE BUD E.
OUS avons vu en
moins d'une annéedeux
chofes fi remarquables ,
l'une en France , & l'autre
en Hongrie , qu'il eft impoffible
qu'elles ne paffent jufqu'à la
pofterité la plus éloignée , puifque
plufieurs fiecles enſemble ne
fourniffent pas quelquefois des
actions d'un fi grand éclat. Tout
A
Hiftoire du Siege
l'Empire Ottoman employoit fes
foins & fes principales forces à
empefcher que l'on ne prît Bude,
parce que cette Ville peut ouvrir
le paffage jufques à Conftantinople
, & qu'il eft malaisé que le
Royaume de Hongrie dont elle
eft la Capitale , ne foit pasfoumis
à la domination de celuy qui
la poffede. C'eſt pour cela que les
Tures fe font toûjours attachez à
la conferver. Elle a foûtenu quatre
fieges depuis qu'ils en font les
maiſtres , & n'a efté prife qu'au
cinquième , qui eft celuy qui
vient d'eftre fait par l'Armée confedérée
des Chrétiens. L'Empereur
à qui tant de Troupes auxiliaires
jointes aux fiennes , ont
facilité cette Conquête , y va rétablir
la veritable Religion , pendant
que Sa Majefté fortifie cette
méme Religion dans huit cens
Villes
de Bude. 3
t
Villes ou Bourgs , d'où Elle a
chaffe la fauffe , que fept de fes
predeceffeurs n'avoient pû détruire.
Ces deux Nouvelles ayant
donné au Pape la plus fenfible
joye qu'il ait receue depuis fon
Exaltation au Pontificat , il a ordonné
de femblables remerciemens
à Dieu , & d'égales rejoüiffances
dans Rome, pour des actions
qui font du plus grand merite au
prés du S. Siege. On n'y a parlé
jufqu'à la prife de Bude , que de
ce que l'Eglife doit au Roy de
France , & depuis la Conquête
de cette importante Place, on n'y
parle que de l'une & de l'autre
action, & on les regardes comme
les deux plus grands Triomphes
que l'Eglife pouvoit remporter.
Je vous ay entretenue de l'une
pendant plufieurs mois , il faut
vous entretenir de l'autre ; mais
A ij
4 Hiftoire
du Siege
pour le faire avec un peu d'ordre ,
je croy qu'il fera bon de vous expliquer
en peu de mots comment
la Ville de Bude a paffé au pouvoir
des Ottomans.
Louis II. dit le Jeune , Roy de
Hongrie , ayant pery en 1526. à
la bataille de Mohacs , Jean de
Zapol , Comte de Scepus , Vaivode
de Tranfilvanie fut falué
Roy par une partie des Hongrois.
L'autre élut Ferdinand Roy de
Boheme , qui avoit époufé Anne ,
Soeur du defunt Roy Loiys . Ferdinand
affifté des forces de l'Empereur
Charle Quint fon frere ,
alla droit à Bude , dont il fe fai fit
en ayant chaffe Jean de Zapol , qui
par diverfes pratiques qu'il eut à
la Porte , vint enfin à bout de faire
venir Soliman à fon fecours . Solyman
eftant entré dans la Hongrie
avec de puiffantes forces en 1529.
marcha
de Bude.
5
€
C
marcha vers Bude , la prit & retablit
le Roy Jean dans fon Eftat.
Ce dernier pour s'y maintenir
fans trouble , fit un accord avec
Ferdinand , par lequel il devoit
jour du Royaume de Hongrie
jufques à fa mort , à condition
que Ferdinand , ou l'un de fes
Fils , luy fuccederoit , & comme
il fe pouvoit faire que Jean venant
à fe marier auroit des enfans
, il fut arrefté que s'il avoit
un Fils , ce Fils feroit Prince de
Tranfilvanie, & poffederoit toutes
les terres , Villes & Chateaux
qui avoient appartenu à Jean avant
que les Hongrois l'euffent
fait leur Roy. Ce Traité eftant
conclu, il fe maria avec Elifabeth.
fille de Sigifmond Roy de Polog.
ne, & mourut prefque auffi - toft ,
laiffant au berceau un Fils qu'il
en eut. Quelques- uns mirent la
A iij
6 .
Hiftoire du Siege
Couronne fur la tefte de l'Enfant
le jour qu'il fut baptifé , & Ferdinand
ayant demandé à Elifabeth
l'execution du Traité fait
avec le Royfon Mary cette malheureufe
Reyne qui fut avertie
qu'il preparoit une Armée pour
la contraindre à l'obeïffance , envoya
des Ambaffadeurs à Solimã .
Ils en furent bien receus , & en
rapporterent une Robe d'écarlate
en broderie , une maffe de fer
avec le pommeau & la poignée
d'or , & un cimeterre dont le fourreau
eftoit tout femé de pierreries
, pour marque de fon amitié
& de fa protection . En mefme
temps Solyman donna fes ordres
pour faire fecourir Elifabeth fi
elle eftoit attaquée , & Guillaume
Rocandolph, General des Troupes
de Ferdinand , ayant commencé
le Siege de Bude , Mahomet Bacha
de Bude ..
7
cha , & Mahomet Sangiac de
Belgrade , pour obeir à leur Empereur
, marcherent vers cette
Place avec toute la diligence poffible
. Rocandolph remüa fon
Camp à leur arrivée . Il le mit au
pied du Mont S. Girard . Le Sangiac
de Belgrade alla camper fur
les cofteaux de la Plaine qui s'étend
depuis ce Mont le long du
Danube pour enfermer les Chreftiens,
& Mahomet Bacha campa
d'un autre cofté , & fi prés de
Rocandolph , que les Tentes de
l'une & de l'autre Armée n'étoient
éloignées que d'une demie
lieuë. Il y eut de legers combats
entre les deux Camps , avec des
fuccez , tantoft favorables pour
l'un des partis , & tantoft pour
l'autre ; mais enfin Rocandolph
ayant appris que Solyman venoit
luy- mefme appuyer les deffeins
A iiij
8
Hiftoire du Siege
de fes Generaux à la tefte de
deux- cens mille hommes , jugea à
propos de fe retirer . Les Turcs
avertis de fon deffein l'attaquerent
dans fa retraite , & plus de
vingt mille Chrêtiens demeurerent
fur la place . La levée du Siege
n'empefcha pas Solyman de
pourfuivre fon voyage , & de venir
jufque devant Bude . Il envoya
de là affurer la Reine Elifabeth
de fa bienveillance ; & la fit
prier de fatisfaire l'envie qu'il
avoit de voir le jeune Eftienne
fon Fils. Elifabeth trouvant dangereux
de le refufer , parce que
c'eût été marquer de la défiance ,
& irriter un Prince puiffant, l'envoya
au Camp de Solyman , avec
les principaux Seigneurs de fa
Cour. Le Turc le receut avec
beaucoup de careffes , & le fit
loger avec Bajazet & Selim fes
Fils ,
de Bude.
Fils , qu'il avoit eus de Roxelane .
Les Bachas traiterent magnifiquement
les Seigneurs Hongrois
qui avoient accompagné leur
jeune Roy , & cependant les Janiffaires
de Solyman qui avoient
fes ordres , eftant entrez dans la
Ville comme amis , fe répandirent
par tout fous pretexte de
confiderer la beauté des Bâtimens
, & fe voyant affez forts
pour executer leur entreprife , ils
fe faifirent de toutes les Places ,
forcerent les Gardes des Portes
qui ne foupçonnoient point cette
trahifon , & les ouvrirent à quelques
Troupes qu'on avoit fait
avancer. Enfuite on commanda
aux Bourgeois de rendre les armes
, & ce fut ainfi que Solyman
s'empara de Bude , fans qu'il en
coutât le fang d'un feul homme .
Cela arriva en 1541. Apres un
•
A V
Hiftoire du Siege
évenement fi favorable , l'Empereur
Turc tint confeil , & l'on
y
mit en deliberation s'il retiendroit
le Royaume de Hongrie,
ou s'il le rendroit au jeune Roy.
Mahomet Bacha eftoit d'avis que
Solyman le menaſt à Conſtantinople
avec les Seigneurs Hongrois
qu'il avoit entre fes mains ,
& qu'il mift à Bude un Gouverneur
qui ufant de moderation ,
apprit à ce Peuple à fe foumettre
au joug Ottoman . Ruftan
, Gendre de l'Empereur &
de Roxelane , luy voulut perfuader
de garder ſa foy , qu'il ne
pouvoit violer fans honte , & le
Sangiac de Belgrade fut d'avis
qu'en reduifant la Hongrie en
Province , il fe delivraft par là
de la neceffité, où il pourroit eftre
encore de revenir de fi loin fecourir
une Femme & un Enfant.
Il
de Bude. I
Il luy reprefenta qu'ils ne pourroient
refifter aux forces Allemandes
que par le fecours de
celles de la Hauteffe , & que les
Guerres ne fe devant faire que
pour avoir le moyen de vivre en
paix , il eftoit de l'intereft du
Sultan fon Maiftre, de reduire en
Province un Royaume qu'il avoit
fi fouvent défendu ; qu'ainfi il
falloit renvoyer la Reyne en Pologne
à fon Pere Sigifmond , mener
le jeune Roy Eftienne à
Conftantinople pour l'y élever
dans la Loy Mahometane , faire
trancher la tefte à tous les
Seigneurs Hongrois prifonniers,
rafer leurs Fortereffes , tranfporter
une pattie des familles en
Afie , & tenir les autres dans le
devoir par de fortes Garnifons.
Soliman ne fuivit aucun de ces
avis. Il entra dans Bude, & aprés
avoir
12
Hiftoire du Siege
, avoir renverfé les Autels &
fait brifer toutes les Images de
l'Eglife Cathedrale pour la confacrer
felon les Superftitions Mahometanes
, il fit fortir Elifabeth
de la Ville , & l'obligea de ſe retirer
à Lippe avec fon Fils pour
gouverner la Transilvanie , l'affurant
qu'il le rétabliroit fur le
Trône quand il feroit dans un
âge plus avancé. Cependant il la
declara Tutrice de ce jeune Prince
dont il luy promit d'eftre le
Protecteur, & luy rendit Georges
Martinufius pour eftre Miniftre
de fes Eftats. Depuis ce temps-là
la Ville de Bude que les Allemans
appellent offen , eftoit toûjours
demeurée au pouvoir des Turcs.
Elle fut affiegée en 1598. fous
le Regne de Mahomet III . par
l'Archiduc Mathias . Il força le
Fauxbourg qui eft du cofté du
Da
de Bude . 13
1
I
Danube , & fe rendit maiſtre
du Fort bafty fur le Mont Saint
Girard , où il trova quatre- vingt
pieces de canon , mais il ne put
venir à bout de la Citadelle .
Elle fut & vigoureufement défendue
, que la mauvaiſe faifon
s'avançant , il fe vit contraint de
lever le Siege. Comme il n'abandonnoit
le deffein de faire
cette conquefte que par la confideration
de l'hyver , fi - toſt
qu'il vit le temps propre à l'entreprendre
, il ramena fon Armée
devant cette Place. Les
Turcs qui en apprehendoient
la perte , s'avancerent promptement
pour la fecourir. Ils furent
défaits , mais cette victoire qui
donnoit de fi grandes efperances
aux Princes Chreftiens qui attaquoient
Bude ne pût rien
diminuer de la fermeté des
,
Affie
14 Hiftoire du Siege
Affiegez à fe bien défendre .
L'Armée Chreftienne trouva
dans ce fecond Siege les mefmes
hommes , & la mefme refiftance
qui luy avoit fait quitter
le premier , & elle fe retira
encore une fois.
>
Apres la perte d'Albe - Royale
, repriſe en 1602. par les
Turcs qui l'avoient perduë
l'année precedente , le mefine
Archiduc Mathias , qui commandoit
une Armée de quarante
mille hommes , marcha pour
la troifiéme fois contre Bude.
La Ville - baffe ayant efté
facilement emportée , il affiegea
la haute , furprit la Ville de
Peft , & ces commencemens furent
fi heureux , qu'on ne douta
point qu'il ne vint à bout de
fon entrepriſe. Cependant toute
la valeur & la prévoyance
des
de Bude.
15
des Chreftiens ne put empefcher
que la Citadelle ne fût rafraîchie
d'hommes , de vivres &
de munitions . de Guerre ; ainfi
il fallut encore lever le Siège.
Charles de Gonzague , Duc de
Nevers , y fut bleffé d'un coup de
moufquet à l'épaule.
Le dernier Siege eft connu
de tout le monde. Il fut commencé
par le Prince Charles de
Lorraine le 14 de Juillet 1684.
& le fecours jetté dans la Place
, le mauvais eftat dés Troupes
, l'incommodité de la faifon
, & le hazard auquel on fe
feroit exposé en donnant un
affaut general , dans lequel on
auroit eu à combattre en meſme
temps & ceux de la Ville , &
le Seraskier qui n'eftoit pas éloigné
des Lignes , ayant fait
craindre un mauvais fuccez de
cette
16 Histoire du Siege
cette entrepriſe , l'Armée Chreftienne
fe retira le premier jour
de Septembre , fans eftre inquietée
par les Ennemis dans fa
retraite .
Je viens au cinquième Siege
de cette importante Place.
Rien n'eft plus difficile qu'u
ne Relation de cette nature ,
fur tout lors qu'un Siege a efté
long , qu'il a fait verfer beaucoup
de fang, & que l'évenement
en a efté attendu de toute
l'Europe. Comme dans celuy
que j'entreprens de décrire , le
nombre des Intereffez a efté
grand , & qu'il y a eu differens
quartiers de divers Souverains,
fans compter quantité de Volontaires
repandus de plufieurs
Nations, chacun voudroit qu'on
n'oubliaft rien de ce qui le regarde
, & c'est une exactitude
qui
de Bude.
17
,
qui eft entieremet impoffible.Cependant
s'il arrive qu'on ne parle
point d'une action d'un feul Volotaire
lors qu'il eft d'une qualité.
diftinguée, cela eft caufe que tous
ceux de la mefme Nation fe récrient
fur la fauffeté d'un ouvrage
, qui ne manque quelquefois
qu'en ces fortes de circonftances
qui ne meriteroient pas
qu'on s'en mift en peine . Il y en
a d'autres qui pouffent le point
d'honneur plus loing , & qui ne
voudroient pas qu'on marquaft
que ceux de leur Nation ont eu
fouvent du defavantage pendant
le cours du Siege , comme fi la
- Victoire qui couronne tous les
travaux par la priſe d'une Place,
& qui efface toutes les pertes,
pouvoit empécher que l'on n'euft
efté quelquefois batu avant le
triomphe. S'il ne faloit point
parler
18
Hiftoire du Siege
parler des de avantages du Vainqueur,
il faudroit feulement marquer
la Prife , & la Victoire &
ce ne feroit plus alors la Relation
d'un Siege , mais le détail de la
derniere action. Bien que l'on
foit affuré de la priſe de la Place
avant que d'écrire la premiere
ligne du Siege , & qu'on fçache
que ceux qui fe font venus rendre
aux Afliegeans ont dit la
plus - part des fauffetez , il faut
pourtant faire mention de ces
fauffetez ,quoy que dans le tems
qu'on les écrit , on les connoiffe
pour telles. Il faut mettre dans
un journal tout ce qui s'est fait
& tout ce qui s'eft dit , parce que
felon ces chofes ont voit les vraies
& les fauffes mefures qu'ont pris
tant les Affiegeans que les Affiegez.
C'eſt par là que la Pofterité
s'inftruit , & c'eft ce qui doit
donner
de Bude. 19
3:
donner des lumieres à ceux qui
en de pareilles occafions peuvent
un jour avoir des commandemens.
Ainfi quand je diray la
verité de ce qui s'eft paffe pendant
le cours du Siege de Bude
,je ne feray pas pour cela contre
les Allemans. Tout depend
de la derniere action , puifque
lors qu'on reuffit , on a toûjours
pris de juítes mefures. Je dois
dire à l'avantage de la France,
qu'une Place fans dehors , com-
I me celle que vient de reduire
l'Armée des Confederez, fe pourroit
compter prife d'abord
les François l'affiegeoient , puifqu'on
ne manque jamais de capituler
dés qu'ils ont pris les dehors
de quelque Place , & que
Bude n'en avoit point . Ils auroient
pû faire voir en cette occafion
ce qu'ils ont fouvent fait
, fi
éprou
20
Hiftoire du Siege
éprouver à plufieurs Villes , mais
l'Allemagne avoit trop connu
leur valeur en la fameufe journée
de S. Godard pour vouloir
donner lieu à d'autres qu'à fes
Sujets d'acquerir une auffi grande
gloire , & elle a mieux aimé
faire lentement cette Conquête,
quand mefme elle auroit deu
rifquer à ne la pas faire
,, que de
laiffer aux François les avantages
qu'ils font toûjours feurs de
remporter dans toutes leurs entrepriſes.
Comme le fuccés de
celle- cy paroiffoit douteux , elle
fut fort debatue au Confeil de
l'Empereur.Les fentimens étoient
partagez, & il y en avoit d'entierement
cotraires à l'avis du Prince
Charles de Lorraine , qui fouhaitoit
d'ouvrir la Campagne par
un Siege auffi confiderable que
celuy de Bude paroiffoit aux Allemans
.
de Bude. 21
lemans. Il avoit efté contraint
de le lever en 1684. & il croyoit
qu'il y alloit de fa gloire de reparer
par la prife de cette Place
qu'on jugeoit fi importante , le
malheur qu'il avoit eu l'affiegeant
inutilement. Il trouvoit l'occafion
favorable , & qu'il luy eftoit
facile d'acquerir beaucoup de
gloire , à moins qu'il n'euft toû
jours le mefme malheur , puis
qu'il devoit eftre fecondé dans
cette Expedition , non feulement
par les Troupes de l'Empire , mais
encore par celles de plufieurs
Souverains , dont il y en avoit
un tout remply de coeur , qui
vouloit commander les fiennes en
perfonne , & que ces Troupes
qui ne manquoient de rien , étoient
aguerries à l'exemple de
leur Chef , qui a déja fait voir
fon courage & fon intrepidité
en
22 Hiftoire du Siege
en plufieurs occafions . Ileft aisé
de juger que c'eft de l'Electeur
de Baviere que je parle. Outre
tout cela ,le Prince Charles voyoit
accourir en foule quantité d'illuftres
Volontaires de toutes les
Cours de l'Europe , parmi lefquels
eftoient beaucoup de François
qui fe trouvent toujours dans les
lieux où ils peuvent voir qu'il y
a de la gloire à acquerir. Ce n'étoit
pas encore tout ce qui foutenoit
l'efperance de ce Prince. Il
fçavoit que les liberalitez du Pape
fe répadoient à pleines mains,
pour faire fubfifter fes Troupes,
que chaque Souverain de l'Europe
fourniffoit des hommes , de
l'argent , ou des munitions pour
avancer le fuccés de fes deffeins,
& qu'enfin le Siege de Bude étoit
pluftoft l'entrepriſe de la
Chreftienté entiere,que de l'Empire.
de Bude.
23
pire. Comme tous ces avantages
pouvoient contribuer à fa.
gloire & le faire triompher , il
eftoit de ſes interefts de profiter
de l'occafion , puis que l'honneur
de remporter la Victoire , quoy
que deuë aux plus braves fujets
de tous les Souverains de l'Eurodevoit
réjaillir preſque fur
pe ,
luy feul.
Si ce Prince fouhaittoit avec
une extreme impatience qu'il luy
fuft permis d'affieger Bude , les
Turcs qui n'avoient point d'armée
en campagne , ne defiroient
pas avec moins d'ardeur de luy
voir former ce Siege . Celle des
Chreftiens eftoit puiffante , de
forte que l'on eftoit affeuré que
la Place qu'ils attaqueroient ne
pourroit refifter long- temps , ny
attendre le fecours , à moins
qu'on n'affiegeaft la plus forte, &
la
24 Hiftoire du Siege
la mieux remplie d'hommes , &
de munitions & tout cela fe
trouvant à Bude , les Turcs avoient
raiſon de fouhaiter qu'on
mift le Siege devant cette Place,
afin que la longue refiftace qu'elle
feroit, leur puft donner lieu de
preparer un puiffant fecours , &
de le faire mefme venir du fond
de la Turquie , s'il en eftoit befoin
. Michel Abaffi , Prince de
Tranfilvanie , qui eftoit de concert
avec eux fit entendre aux
Imperiaux qu'il fe declareroit
plus ouvertement en leur faveur,
files Ottomans n'eftoient plus
maiftres de Bude. Ainfi tout
contribua à cette entreprife,quoy
que le fuccez en fuft incertain,
parce que la Place , ainfi que la
fuite l'a fait voir , ne manquoit
ny de Soldats , ny de Chefs intrepides
& aguerris, ny d'argent,
2
ny
de Bude.
25
Ο
C
ny de toutes fortes de munitions.
D'ailleurs la forte & longue reſiſtance
que le Gouverneur avoit
faite pendant le dernier Siege
, devoit fervir de regle à celuy
à qui l'on en avoit commis
la défenfe , & comme il étoit
feur d'eftre étranglé s'il rendoit
la Place , il y avoit
apparence
qu'il la défendroit jufqu'à la derniere
extremité. Il y avoit auffi
lieu de prefumer pour plufieurs
raifons , que le grand Vizir venant
en perfonne , periroit plutoft
, que de ne la pas fecourir.
La deftinée de fes deux Predeceffeurs
le devoient engager à
cet effort , c'eftoit par la qu'il
pouvoit fe monftrer digne du
choix qu'on venoit de faire en
Il'élevant à la dignité où il fe
voyoit. Il avoit eu l'adreffe de
fe faire mettre . en la place de
B
16
Hiftoire du Siege
fon Predeceffeur, & il avoit commandé
une Armée contre la Pologne
avec affez de fuccés pour
faire attendre de plus grandes
chofes de luy , quand il feroit à
la tefte d'un plus grand nombre
de Troupes , & cependant c'eft
luy qui eft caufe que l'on a pris
Bude.
Quelque nombreuse que foit
une Armée devant une Place, &
quelque fortifiée qu'elle foit , il eft
prefque impoffible ( & c'eft ce
qu'on n'a prefque point vû depuis
plufieurs ficcles) qu'elle empefche
une Armée Royale de fecourir
la Place affiegée lors que
cette Armée a pu faire affez de
diligence pour arriver avant la
prife de la Ville qu'elle a voulu
delivrer d'un fiege . C'est pour ceque
dans la plufpart des capitulations
, les Villes affiegées metla
tent
de Bude.
27
tent qu'elles fe rendront au jour
dont on convient, pourveu qu'avant
ce jour-là il n'arrive point
d'Armée Royale pour les fecourir.
Il eft enfin conftant que de
vingt Armées qui ont donné
dans des Lignes pour les forcer,
quoy que défenduës par un plus
grand nombre de Troupes , dixneuf
y ont réuffi. La raifon en
eft facile à comprendre. Une Armée
,, quoy que tres -nombreuſe,
qui entoure une Place, peut eftre
forcée par une plus foible , parce
qu'elle eft obligée d'occuper plufieurs
lieues de terrain autour de
la Place qu'elle affiege, & quainfi
chaque quartier eft peu garny
de Troupe , au lieu que l'Armée
qui attaque eft toute raf
femblée en un corps , ce qui la
rend beaucoup plus forte. Celle
qui eft dans les lignes pour-
Bij
28 Hiftoire du Siege
roit faire la mefme chofe , &
unir auffi toutes les forces pour
défendre l'endroit par lequel elle
eft attaquée , mais quand ceux
qui la veulent forcer font habiles
, ils donnent de fauffes attaques
fi à propos qu'on n'ofe dégarnir
aucun Pofte , parce qu'on
ne peut deviner la veritable at
taque. Ainfi l'Armée qui veut
paffer dans une Place , & qui
prend toutes les mesures qu'il
faut pour cela , cela , ne trouvant que
les Troupes d'un feul quartier
à combattre , les forces , aidée
de la Garniſon qui en ce rencontre
ne manque jamais de vigoureufes
forties. Ceft par là que
les Villes affiegées qui ont be
foin d'eftre fecouruës , le font
toujours, quand les Armées qu'on
veut employer pour ce fecours,
arrivent affez à temps . Le Grand
•
Vizir
de Bude. 29
Vizir au lieu de fe fervir de
tous ces avantages , a fait quan
tité de fautes , & elles ont efté
caufe de la prife de la Place
qu'il auroit pû fecourir. Il a fait
batre plufieurs fois fes meilleures
Troupes en détail , ce qui
ne pouvoit manquer d'arriver ,
puifque les corps qu'il envoyoit
eftoient moins forts que toute
Farmée qu'ils avoient à combatre.
Il a laiffé le temps de connoiſtre
que celle qu'il amenoit,
eftoit moins nombreuſe qu'on
n'avoit crû. Il a fait rallentir la
chaleur de fes Troupes , en les
faifant battre trop fouvent , & en
sobftinant à ne pas attaquer les
lignes avec toute fon Armée . Il
a par la frequente défaite de ces
mefmes Troupes rehauffé le courage
des Chreftiens. Il leur a
donné le temps de faire venir
Bij
30
Hiftoire du Siege
le General Scheffemberg avec
les fiennes , qui n'eſtant rebutées
par aucun affaut , ont emporté
la Place ; il eſt cauſe de
la mort du Gouverneur , & de
perte de tout ce qui reftoit
de bonnes Troupes dans Bude,
parce que fi fa preſence n'euft
pas fait efperer un
la
prompt
& vigoureux fecours , on auroit
capitulé lors qu'on auroit
crû n'eftre plus en eftat de fe
défendre. Ainfi fa prefence a
donné aux Affiegeans une Vitoire
, & plus grande , & plus
complette . Elle a fait voir le
peu
de valeur , & le petit nombre
des Troupes Ottomanes
que le peu d'experience de fes
Chefs. Elle a caufé les pertes
que les Troupes ont faites depuis
la prife de Bude , & qui entraifneront
celles qui les doivent
fuivre .
•
>
ainfi
de Bude.
31
e
fuivre. Elle a donné du coeur
aux Victorieux ; elle a ofté la
terreur qui depuis long - temps
faifoit apprehender l'Empire Ot-
& fera caufe qu'aucu- toman
ne Place forte ne ſe défendra autant
qu'elle pourroit faire quand
elle fera affiegée , de crainte
d'éprouver le fort de Neuhaufel
& de Bude .
Toute l'Europe eſtoit attentive
fur l'entreprife par laquelle
les Imperiaux feroient cette année
l'ouverture de la Campagne.
L'Electeur de Baviere eſtant
arrivé à Neuftadt le vingtiéme
de May , l'Empereur y tint plufieurs
fois confeil de guerre avec
les Officiers generaux &
ſes Miniftres. On y propofa le
fiege d'Albe Royale , auquel il
y eut quantité d'avis contraires .
-
B üij
32 Hiftoire du Siege
pes
·
On reprefentoit que les Troueftant
fraifches , & l'Artillerie
en bon eftat , il feroit beaucoup
plus avantageux d'attaquer
Bude. On convenoit que ce Siege
ne fe pouvoit faire fans beaucoup
de peine , à caufe que les
fortifications en avoient efté
tres bien rétablies , & qu'on
y avoit ajouté quelques ouvrages
pour en fortifier les dehors
le long du Danube jufqu'à la
Montagne.On fçavoit encore que
le Foffe avoit efté aprofondy de
l'autre coſté de la Ville , que
avoit contreminé les endroits où
les Imperiaux avoient preparé
des mines lors qu'ils l'affiegerent
en 1684. qu'il y avoit de fauffes
portes pour faire des forties par
deffous , & qu'on avoit dépavé
les rues , ofté les toits , & fait
couvrir de terre toutes les maifons
,
l'on
de Bude.
33
C
3
fons , afin d'empefcher l'effet des
Bombes & des Carcaffes. Des
Deferteurs avoient auffi rapporté
qu'il y avoit dans la Place des
munitions de guerre & de bouche
, pour foutenir un Siege de
plus de fix mois ,,
que la garnifon
eftoit de plus de dix mille
hommes choifis entre les Janiffaires
& les Spahis , & que le
1 Bacha Abdi qui commandoit
dans la Place , eftoit un homme
tres - confommé dans le meftier
de la Guerre , qui avoit fous luy
fix autres Officiers fort experimenteż.
On balança toutes ces
raifons , & elles ne furent point
affez fortes pour empêcher qu'on
ne refoluft d'affieger Bude. Le
rendez vous general fut donné
aux Troupes pour le 29. de
ce mefme mois à la referve de
celles de Brandebourg , qui tra-
·
B v
34 Hiftoire du Siege
verfant la Silefie de fort mau
par
vais chemins, ne pouvoient marcher
qu'à petites journées. Il fut
arrefté fuivant la divifion qui
s'en fit que la grande Armée
que commanderoit le Prince
Charles de Lorraine , feroit de
cinquante- huit à foixante mille
hommes , fçavoir de quinze mille
hommes d'Infanterie Allemande
, de quatorze mille Chevaux
& Dragons Allemans , des Troupes
auxiliaires de Saxe , de Brandebourg
, & de Suabe , & de
quatre mille Hongrois , & que
l'Armée dont l'Electeur de Baviere
auroit le commandement ,
feroit compofée de douze mille
Fantaffins Allemans , de dix
mille Chevaux auffi Allemans
des Troupes de cet Electeur ,
& de celles des Cercles de Baviere
& de Franconie , & de
troisde
Bude..
35
+
trois- mille Hongrois . Dans l'Armée
du Prince Charles les
Comtes de Caprara & de Staremberg
furent nommez Marefchaux
de Camp Generaux ;
le Duc de Croy General d'Infanterie
, le Prince Louis de
Neubourg , & le Comte de Suze
Lieutenans Generaux ; les
Barons de Thingen & de Thun,
& le Marquis de Nigrelli Sergeans
Majors de Bataille ; les
Comtes de Schults & de Dunevald
Generaux de Cavalerie ;
les Comtes de Taff , & de Palfi
, & le Baron de Mercy Lieutenans
Generaux ; le Prince Eugene
de Savoye qui eftoit arrivé
d'Efpagne en pofte depuis
peu de jours , le Comte Philippe
de Thaun , le Baron de Lodron,
& le Comte de Stirum Sergeans
Majors de Bataille .
Le
Comte
36
Hiftoire
du Siege
Comte de Leſlie fut fait Maref
chal de Camp General de l'Armée
de l'Electeur de Baviere ; le
Comte de Sherini General d'Infanterie
, le Marquis de la Verne
& le Comte de Schaffemberg
Lieutenans Generaux, & les Barons
de Wallis & de Berk , &
le Comte d'Afpremont Majors
Generaux . Il fut auffi arrefté que
le Comte de Scherffemberg demeureroit
en Tranfilvanie , &
le Comte Caraffa vers Zatmar
avec les détachemens qu'ils y
commandoient pour la confervation
des Conqueftes nouvellement
faites. Quelques accés.
de fievre qui retinrent le Prince
Charles à Edembourg , l'ayant
empéché d'aller fe mettre à la tête
des Troupes dont on devoit
faire le 29. une reveue Generale
dans les Plaines de Barcam , elle
fut
de Bude.
37
fut remife au 8. de Juin. Ce Prince
partit d'Edembourg le 20.
après avoir eu une longue conference
avec l'Electeur de Baviere
, qui fe rendit à Neuſtadt
le lendemain pour en rendre
compte à l'Empereur. Cependant
tout le trajet du Danube
depuis Ratisbonne jufqu'à Presbourg
eftoit couvert de Barques
& autres petits Vaiffeaux chargez
de munitions & de vivres, & des
Troupes de Baviere , de Franconie
& de Suabe qui defcendoient
vers la Hongrie. Jamais entrepriſe
n'a efté executée avec tant de
joye. On fe preparoit au Siege
de Bude avec un courage & une
ardeur qui ne fe peut exprimer.
Les Volontaires accouroient , de
France, d'Espagne , d'Angleterre,
d'Allemagne & de tous les endroits
de la Chrêtienté , & le
Duc
E
38 Hiftoire du Siege
Duc de Bejar Grand d'Eſpagne,
vint joindre à Vienne le Marquis
de Valero fon frere , qui s'y
eftoit déja rendu avec quelques
autres. Le 29. le Prince Loüis
de Bade partit de Neuftadt en
pofte pour aller joindre l'Electeur
de Baviere , & le Prince
Charles s'y eſtant rendu de Raab
le premier de Juin pour prendre
congé de Sa Majefté Imperiale,
reprit la route de Hongrie , accompagné
du Comte Stratman,
Grand Chancelier. Le 5. il arriva
à Comorrhe , où l'Electeur de
Baviere avoit efté receu deux
jours auparavant au bruit du
Canon & de la Moufqueterie. Ils
en partirent enſemble pour aller
au rendez - vous general. Le Prince
Charles y trouva les Troupes
dont l'Armée Imperiale devoit
eftre compofée. Elles avoient eſté
affem
A
de Bude.
39
affemblées proche de Barkam ,
par les foins du Comte de Staremberg.
On ne peut s'imaginer
la joyé qu'elles témoignerent en
voyant leur General . Il fut aisé
de connoître par toutes les marques
qu'elles en donnerent l'impatience
que chacun avoit de
marcher fous fa conduite . Les
Troupes de Saxe eſtant arrivées
au nombre de mille Chevaux
, & de quatre mille hommes
d'Infanterie , le Prince de
Saxe qui les commandoit , envoya
prier le Prince Charles
de les venir voir. Ce Prince
en fit la reveuë , & alla enfuite
difner dans la Tente de l'Electeur
de Baviere , qui luy fit voir les
fiennes rangées en bataille . I
retourna de là à Comorre pour
quelques ordres qu'il avoit à y
donner. Cependant les Troupes
du
40 Hiftoire du Siege
du Cercle de Suabe , commandées
par le Marquis de Bade-
Dourlach , joignirent l'Armée.
Elles étoient de trois mille hommes
de pied , & de trois mille
Chevaux. On intercepta des
Lettres , par lesquelles on apprit
, que le Grand- Viſir eſtoit
venu à Belgrade , qu'il avoit
donné le commandement en
Chef de l'Armée Ottomane en
Hongrie à Achmet Bacha , auquel
il avoit laiffé des ordres
particuliers , de ne rien épargner
pour la confervation de
Bude & d'Effek comme des
deux Places qui leur eftoient les
plus importantes , & qui faifoient
la feureté de toutes celles
qui leur reftoient dans le Royaume,
& qu'il eftoit enſuite retourné
à Andrinople avec une extreme
diligence. On fçeut auffi
›
par
de Bude. 41
par les Efpions que l'on avoit
envoyez pour reconnoiftre les
forces des Turcs , qu'ils ne pouvoient
mettre au plus que quarante
mille hommes en Campagne
, & que les Troupes d'Afie
avoient pour la plufpart deferté
dans leur marche d'Andrinople
à Belgrade. Les Huffars de Papa,
Dotis , Vefprin & Comorre allerent
en courſe au nombre de
quinze cens jufqu'à quatre lieuës
plus bas que Bude , & jufqu'à
deux lieues du Camp que les
Turcs avoient formé entre cette
Ville & le Pont d'Effeck . Ils emmenerent
prés de deux mille
moutons , deux cens boeufs , &
quantité de chevaux , fans avoir
trouvé perfonne qui leur difputaft
tout ce butin.
9 .
Le le Confeil de guerre fut
tenu au Camp , où tous les Officiers
42 Hiftoire du Siege
ciers Generaux s'eftoient affemblez.
Le Comte Stratman s'y
trouva de la part de Sa Majesté
Imperiale . On leur fit part de ce
qu'on avoit refolu touchant le
Siege de Bude , & deux jours
aprés le Comte de Stratman partit
pour Vienne , où il rendit
compte à l'Empereur de tout ce
qui s'eftoit paffé dans ce Confeil
. Le Comte Rabata , Commif
faire general , s'en retourna auffi
à Vienne , afin de donner ſes ordres
pour faire venir inceffamment
les vivres & les munitions
neceffaires.
Le 12. le Prince Charles partit
de Comorre , & fe rendit au
Camp de Barkan . L'Electeur de
Baviere l'y joignit le lendemain ,
& aprés que l'on eut fait une Reveuë
generale des Troupes , on
commença à leur faire paffer le
Da
de Bude.
43
9
Danube fur le Pont de Gran.
Celles de Saxe marcherent à l'Avant-
garde. L'Electeur de Baviere
partit à la tefte d'un Corps
d'Armée de vingt quatre mille
hommes , compofé des Troupes
Bavaroifes , & de plufieurs Regimens
Imperiaux , & prit fa mar
che en deçà de la Riviere. I
s'avança vers Hatwan , dans le
deffein de s'en rendre Maistre ,
& d'attaquer Peft enfuite. La
priſe de ces deux Places , dont la
derniere n'eft feparée de Bude
que par le Danube , devoit empefcher
les Ennemis d'avoir aut
cune communication entre Bude
& Agria. Le 14. les Défilez,
& la difficulté des chemins qu'il
fallut élargir en plufieurs endroits
, pour les rendre pratiquables
, ayant obligé l'Infanterie à
demeurer derriere avec l'Artillerie,
44 Hiftoire du Siege
lerie , le Prince Charles la laiffa
fous la conduite du Comte de
Staremberg , & s'avança vers
Vicegrad , du côté droit du Danube
, tandis que l'Electeur de
Baviere continuoit fa marche de
l'autre cofté , à une diſtance égale
, en forte que les deux Armées
euffent pû fe fecourir reciproquement
en cas de befoin .
Le 15.
la Cavalerie Imperiale
campa à Poftkamp , & le lendemain
à Saint André. L'Electeur
de Baviere marcha toûjours fous
une meſme ligne , n'ayant que le
Danube entre deux , & vint
le 16. camper à Weitzen. Les Ennemis
qui les pouvoient découvrir
des Ramparts de Bude des
deux coftez de ce Fleuve , ne firent
aucun mouvement pour les
venir reconnoiftre. On fceut par
quelques Turcs qui furent pris
pen
de Bude.
45
pendant cette marche , que le
Commandant de Bude ne s'attendoit
point à voir fa Place affiegée
que dans la croyance
que l'Armée Chreftienne attaqueroit
Agria ou Albe Royale,
on les avoit munies de bonnes
Garnifons & de quantité de vivres
, & qu'on en avort tranf
porté à Bude la pluſpart des richeffes
& des plus beaux meubles
des Officiers & des Bourgeois
, avec les femmes , les enfans
, & les bouches inutiles ; que
fur l'avis que ce Commandant
avoit receu qu'on venoit à luy,
il avoit envoyé demander des
Troupes à ceux des Places voifines
pour en renforcer fa Garnifon
, mais qu'il n'y avoit pas
d'apparence qu'on luy en puft
envoyer avant que les Princes
eunent inveſty la Place . Certe
Gar
46 Hiftoire du Siege
Garnifon ne laiffoit pas d'eftre
forte, puis qu'elle eftoit de douze
mille hommes de pied & trois
mille Chevaux , à ce qu'on aprit
de ces mefmes prifonniers. ,
Le 17. la Cavalerie fe repofa
dans le mefme campement afin
d'attendre que l'Infanterie fuft
arrivée , & l'on fit defcendre les
Bateaux dont on fe devoit fervir
pour conftruire un Pont à faire
paffer le Corps d'Armée de l'E
lecteur de Baviere. Ce Prince
qui defcendoit à gauche du
Fleuve s'empara de Peft , d'où
la garnifon Turque s'eftoit retirée
, aprés avoir fait fauter une
partie des murailles , & tiré de
la Place les munitions & les vivres.
Elle avoit enfuite rompu le
Pont qui luy donnoit communication
avec Bude , mais elle ne
put fi bien faire fa retraite,
qu'un
de Bude.
47
qu'un Aga ne tombaft entre les
mains des Bavarois avec trente
Janiffaires. Son Alteffe Electorale,
ayant laiffé garnifon dan Peft
& donné les ordres pour en reparer
les fortifications , détacha
le Comte de Steinaw avec fix
mille hommes pour aller attar
quer Hatwan , & fe mit en marche
vers l'ifte de S. André pour
paffer le Danube fur les Ponts
que l'on devoit y avoir dieffez,
& fe trouver au Camp devanţ
Bude. Le Prince Charles y étoit
arrivé le 18 & ce mefme jour
toute l'Infanterie ayant joint
l'Armée , il luy fit prendre des
poftes à demie lieuë de la Place,
La Cavalerie les prit de l'autre
cofté vers Albe Royale , & l'on
commença à travailler aux lignes
de circonvallation . Pendant ce
temps il fut tiré des Rempars
plu
48
Hiftoire du Siege
plufieurs volées de Cañon , dont
tout l'effet fut de tuer un Païfan
. On vit auffi paroiftre un detachement
de Cavalerie & d'Infanterie
de la Garnifon de Bude
qui fe prefenta pour embaraffer
les Travailleurs , mais il fe retira
prefque auffi- toft , ne fe trouvant
pas en eftat de foutenir un
gros de Cavalerie Imperiale qui
fe preparoit à le charger . L'avantgarde
du détachement que le
Prince Charles avoit envoyé
pour inveftir la Place, enleva un
Chaoux avec vingt Turcs de
quarante qui l'eſcortoient . Il venoit
de Belgrade, & apportoit des
Lettres au Bacha de Bude . Elles
confirmoient que l'Armée Ottomane
feroit commandée par Achmet
Bacha & que le Grand-
Vifir avoit eu ordre de fe rendre
promptement auprés de fa
Hauteffe
>
>
de Bude. 49
Hauteffe qui eftoit allée à Conftantinople.
Le 19. on ferra la Place de tous
les coftez par où elle eft acceffible
, & le Quartier general fut
étably à un quart de lieuë , avec
quelques Regimens d'Infanterie .
Le lendemain les Affiegez ayant
fait une fortie de trois cens Chevaux
foûtenus d'un pareil nombre
de Janiffaires , il y eut quel
que
Efcarmouche , mais elle fut
de peu de durée , parce qu'ils fe
tinrent toûjours fous le Canon
de la Place , fans qu'on les puft
attirer plus loin . Le Comte d'Altheim
y fut bleffé. Ce mefme
jour on commença d'ouvrir les
Lignes de circonvallation , & de
tracer les premieres Places d'Armes.
On marqua auffi trois Batteries
, & autant d'épaulemens
pour tenir à couvert la Cavalerie
C
50 Hiftoire du Siege
,
dont les Travailleurs devoient
eftre foûtenus dans les approches.
Sur le foir , le Comte de
Staremberg receut ordre d'aller
fe pofter proche les Bains afin
d'attaquer le Vafferftadt ou la
Ville baffe contre laquelle on
drefla deux Batteries du cofté
qui defcend vers le Danube. I
fit ouvrir la Tranchée , & on la
pouffa affez avant. Le Bacha de
Bude trouvant à propos de fe
défaire de beaucoup de bouches
inutiles >
donna la liberté
à tous les Chreftiens .
que
l'on trouva incapables de porter
les armes , & l'on fceut par
eux , qu'ayant affemblé la Garnifon
dans la grande Place , il
leur avoit leu les ordres du
Grand Seigneur qui les exhortoit
à refifter vigoureufement;
qu'il avoit enfuite défendu aux
Sol
de Bude.
51
X
1 Soldats & aux Habitans fous
peine de la vie de parler de Capitulation
, & que s'il arrivoit
qu'il fut tué en leur donnant
l'exemple de fe bien défendre,
on avoit nommé quatre Bachas
qui devoient l'un aprés l'autre
prendre le Commandement.
Le 21. les Bavarois commencerent
à paffer le Danube fur le
Pont de Bateaux de l'Ile de
S. André , & ce jour là fut employé
à ranger les Bagages dans
les Lignes , & à divifer les Troupes
par Eſcadrons & par Batail-
Ilons , afin de faire la diftinction
des Quartiers. Le Prince Charles
occupa les mefmes Poftes qu'il
avoit pris dans le dernier Siege.
L'Electeur de Baviere fit la mefme
chofe , & vint fe camper au
pied du Mont S. Gerard .
Le 22. on dreffa une nou-
Cij
52 Hiftoire du Siege
velle Batterie de fix pieces de
Canon contre la Ville baffe , &
l'on commença en mefme temps
à travailler aux Tranchées par
l'ouverture de trois grandes Places
d'Armes ; beaucoup plus prés
de la Ville que l'on n'avoit fait
en 1684. Il fut refolu qu'il y au
roit trois Attaques ; la premiere
commandée par l'Electeur de
Baviere ; la feconde par le Comte
de Staremberg , & la troifiéme
par les Troupes de l'Electeur
de Brandebourg que l'on attendoit
inceffamment , & auf
quelles on devoit joindre quelques
Regimens Imperiaux , &
d'autres Troupes Auxiliaires . Le
Prince Charles ne garda que
dix hommes de Cavalerie par
Compagnie pour fervir au
Camp à couvrir les Travailleurs
fous les ordres du Comte de Pal-
,
fi,
de Bude.
53
fi , & il envoya le reste aux environs
d'Albe- Royale , afin d'y
confumer les Fourages, & d'ofter
par là aux Infidelles les moyens
d'y fubfifter. Les Affiegez firent
grand feu tout le jour & toute la
nuit fuivante, & il y eut neuf Soldats
tuez ou bleffez .
Le 23. la nouvelle Batterie de
fix pieces de Canon s'eftant
trouvée prefte , commença dés
le matin à tirer , & fit une Bréche
de fix pas. Ceux qui estoient
au haut des Montagnes , apperçurent
par cette bréche quantité
de Betail & de Chevaux , mais
les Ennemis ne parurent point.
Il y eut fix Soldats à la Batterie
emportez par le Canon de la Place.
Quelques Huffarts & Croates
qui s'étoient avancez trois
lieuës au delà de Bude fous la
conduite du Comte Budiani ,
C iij
$4 Hiftoire du Siege
,
ayant efté avertis que le Bacha
en avoit fait fortir quantité de
Barques chargées de femmes ,
d'enfans & de quantité de
meubles qu'il envoyoit à Belgrade
, les pourſuivirent avec
trois cens Dragons , & les rencontrerent
à l'Ile de Sainte Marguerite.
Ils taillerent en pieces
tous ceux qui les eſcortoient,
s'emparerent de leurs Trefors ,
& amenerent deux cens Prifonniers
, qui furent les Vieillards
, & autres qu'ils jugerent
les plus propres à fe faire ra
cheter.
Le 24. la bréche ayant efté
élargie de vingt pas , on examina
la contenance des Affiegez
qui s'eftoient retranchez à droit
& à gauche au nombre de quatre
cens . Il fut refolu que l'on
iroit à l'Affaut , & comme c'eftoit
de Bude.
55
1 ftoit la premiere action du Siege
, chacun à l'envy chercha à
fe diftinguer. Les difpofitions
de l'attaque furent faites , & à
dix heures du foir on en donna
le fignal par trois volées de Ca-
1 non. Cent Grenadiers s'avancerent
les premiers , ayant un Capitaine
à leur tefte ; ils furent
fuivis de deux cens Moufquetaires
que commandoit un Sergent
Major , & foûtenus de trois
cens autres fous la conduite d'un
Lieutenant Colonel. Ils allerent
vers la brèche , & attaquerent
avec tant de force & de bravoure
les Ennemis qui la défendoient,
qu'ils les forcerent d'abandonner
leurs retranchemens. Six cens
hommes d'Infanterie en deux
Brigades marcherent aprés ceuxcy
, & fe pofterent au pied de
la bréche avec cinq petites pie-
C iiij
$6
Hiftoire
du
Siege
ces de Canon qu'ils avoient fait.
conduire avec eux . Elle fut franchie
par le Prince de Vaudemont,
par le Prince de Commercy,
& par un tres grand nombre
de Volontaires qui s'eftoient
mis à la tefte de l'Infanterie , &
qui fe pofterent dans la Ville
baffe malgré le feu continuel
que firent les Affiegez . Il n'y eut
que cinq Soldats tuez & onze
bleffez. Le Comte de Marfilly,
Infpecteur general des Ingenieurs
, eut le bras caffé au deffus
du coude , d'un coup de Mouf
quet qu'il réceut dans la tranchée
avant que l'on commençant l'Attaque
.
Le 25. fut employé à perfectionner
les Poftes que l'on avoit
occupez dans la baffe Ville , &
fix Bataillons furent logez au
pied des murailles. Il y eut un
Lieu
de Bude .
57
Lieutenant des Grenadiers tué
d'un boulet qui tomba dans la
Tranchée, & qui emporta les bras
& les jambes à cinq Soldats. Un
Chevalier de Malte François fut
auffi dangereufement bleffé . Il
eftoit avec le Marquis de Souvray,
qui fit paroiftre beaucoup
de bravoure .
Le 26. on s'apperceut que les
Affiegez faifoient gliffer du monde
le long de l'eau par dedans la
Ville baffe , pour venir attaquer
un Pofte qui eftoit devant une
groffe Tour joignant le Danube.
Le Chevalier de Rhofne , Capitaine
du Regiment de Staremberg,
foûtenu du Comte d'Awersbergs
, Lieutenant Colonel du
Regiment de Mansfeld , vint à
leur rencontre , & ils les repoufferent
avec beaucoup de vigueur.
Le Prince de Vaudemont le
,
C v
58
Hiftoire
du Siege
Prince de Commercy , & plufieurs
autres Volontaires qualifiez
, accoururent à l'efcarmouche
, qui dura une heure fous le
Canon de la Place. Il n'y eut que
quinze hommes tuez ou bleffez
du cofté des Affiegeans . Le Sieur
Bourgers , Capitaine du Regiment
de Staremberg fut de ces
derniers , & Milord Mongois receut
une contufion à la temple.
Les Affiegez perdirent trente
hommes, & le nombre des bleffez
fut beaucoup plus grand. Ce jour
là le Prince de Neubourg, Grand
Maître de l'Ordre Teutonique,
Lieutenant General , qui eftoit
arrivé au Camp le 22. & le
Comte de Diepenthal , General
Major , monterent la Tranchée,
fuivant ce qui avoit efté arreſté
quelques jours auparavant au
Confeil de Guerre , que tous les
jours
de Bude.
59.
jours ce feroit un Lieutenant General
, & un General Major qui
la monteroient à chaque Attaque
avec deux mille hommes,
& qu'on les releveroit de vingtquatre
heures , en vingt- quatre
heures . Outre ces deux mille
hommes , il y avoit toûjours fix
Bataillons de referve , & une
Garde de Cavalerie pour les
foûtenir. On travailla la nuit à
pouffer une grande Coupure fur
Ela droite le long de la muraille ,
afin de couvrir une Batterie de
douze Pieces qu'on vouloit mettre
en estat contre les défences
de deux Rondelles, & de la Courtine,
vers laquelle on devoit conduire
la Tranchée. On ouvrit
auffi une porte au coin de cette
Muraille , où l'on fe logea en dedans
de la baffe Ville , à trois
cens pas du Corps de la haute,
&
60
Histoire
du siege
& en tous ces logemens on ne
perdit que quinze hommes.
Le 27. les Travaux fe trouverent
fort avancez à l'Attaque
de l'Electeur de Baviere , qui fit
dreffer une Batterie fur le panchant
de la Montagne. Il fit faire
auffi fur la hauteur de cette
meſme, Montagne un Logement
affez grand pour contenir mille
hommes , & affeurer la tefte de
la Tranchée , qui fut ouverte au
pied du Chafteau , vis à vis la
grande Tour qui en couvre la
façade. Le foir les Affiegeans firent
une fortie au nombre de
quatre
cens, Cavalerie & Infanterie,
fur cent hommes retranchez à la
teſte des Travaux qu'on avoit
faits la nuit précedente. Le Comte
de Saur, Capitaine au Regiment
de Lorraine qui les commandoit
fit une fi vigoureuſe reſiſtance,
de Bude. 61
cè , que la grande Garde eut le
temps d'y accourir. Les Ennemis
furent repouflez ; ils laifferent
feize des leurs fur la place , &.
eurent quelques bleffez.La Tranchée
fut relevée ce jour- là par
le Comte de Souches , Lieutenant
General , & par le Comte
de Tinghen , Mareſchal Major.
Le 28. on joignit les deux Attaques
par une Ligne de communication
de quatre cens pas .
On mit auffi huit groffes pieces
de Canon fur une nouvelle Baterie
à l'Attaque du Prince Charles
, devant laquelle on tira une
Ligne de deux cens pas ,
afin
qu'on y puft aller de la Tranchée
fans eftre infulté des Ennemis.
Cette Baterie fervit à tirer
contre deux Ouvrages avancez
en forme de pafté , qui défendoient
la Porte du cofté de
la
62 Hiftoire du Siege
la baffe-Ville . Les Ennemis faifoient
de là un feu continuel de
Canon , dont les Affiegeans eftoient
fort incommodez . Les Travaux
furent continuez fans beaucoup
d'obſtacle la nuit de ce
même jour , & on perfectionna la
Ligne de communication
entre
la Porte du milieu & la derniere
, ce qui donnoit moyen
moyen d'entrer
à couvert dans la nouvelle
Baterie.
Le 29. le Sieur Soulars , Ingenieur
, fut bleffé en faifant travailler
à de nouvelles Lignes
qu'on fit en forme de paralelles,
pour communiquer avec les au
tres Travaux , & s'approcher plus
prés de la Place . L'Electeur de
Baviere ayant eu quelque indifpofition
, le Prince Charles l'alla
vifiter fur les cinq heures du foir,
& dans ce temps mefme , les Af-
י
Liegez
de Bude.
63
fiegez firent une Sortie en bien
plus grand nombre qu'ils n'avoient
encore fait du cofté de
l'Attaque des Bavarois. Ils attaquerent
les Travailleurs & les
Troupes qui eftoient en garde
dans la Tranchée , & les
ayant
mis en defordre , ils euffent comblé
les Travaux , fi le Comte de
Hoffkirken n'euft promptement
amené la Garde de Cavalerie.
L'Electeur de Baviere ayant efté
averty de cette Sortie , rien ne
fut capable de le retenir. Il y
courut , quoy qu'indifpofé , auffi-
bien que le Prince Charles , &
leur prefence anima fi bien tous
ceux qui avoient déja commencé
à foûtenir les efforts des Infidelles,
qu'après en avoir tué beaucoup,
ils les forcerent à fe retirer,
& les pourſuivirent jufqu'à quarante
pas de la Tranchée Le Prin64
Hiftoire du Siege
ce Eugene de Savoye fe fit remarquer
par fa bravoure , & eut
un cheval tué fous luy
, auffibien
qu'un de fes Gentilshommes.
Le Baron de Zwitterthal ,
Lieutenant Colonel du Regiment
de Steinaw , fut tué avec
trente ou quarante Bavarois. Il
y eut auffi quelques bleffez . Le
Baron de Billes , Capitaine dans
le Regiment d'Arko , le fut dangereuſement
.
Le 30. on repara les Travaux
que les Ennemis avoient ruinez
le jour precedent , & on avança
jufqu'à fix-vingt pas de la muraille.
Ce méme jour , deux Compagnies
de Paffau & de Ratisbonne
arriverent au Camp, auffi
- bien que les Troupes de Suabe
& de Franconie . Elles étoient
en tres-bon eftat , & au nombre
de cinq à fix mille hommes . Celles
de Suede commandées par le
de Bude.
65
po-
Marquis de Turlac , arriverent
pareillement , & prirent leur
ite fur une hauteur, afin de pouvoir
agir où il feroit le plus neceffaire.
Le feu parut en differens
endroits de la Ville ; il y avoit
efté mis par des Bombes .
qu'une Baterie de Mortiers avoit
jettées. Le Comte de Dunewald
partit ce jour- là du Camp , pour
aller commander la Cavalerie
inutile au Siege , qui eftoit venuë
camper au nombre de plus
de douze mille hommes jufqu'à
la portée du Canon d'Albe Royale
, ce qui avoit obligé les Turcs
à abandonner plufieurs Chafteaux
, & d'autres petits Poftes
aux environs.
Le 1. de Juillet fut employé à
perfectionner la ligne de communication
à l'attaque du Prince
Charles , & les Poftes deftinez
66
Hiftoire du Siege
par
nez aux Poftes de Suabe & de
Franconie leur furent donnez.
On apprit par des Transfuges
qu'il y avoit une grande confternation
dans la Ville, caufée
la perte qu'avoient fait les Affiegez
à la fortie du 29. il y eut
quatorze de leurs Officiers tuez
avec quantité de Janiffaires. Les
ouvrages qui avoiết eſté comencez
fur la droite , furent achevez .
la nuit fuivante , & on pouffa
ceux de la gauche jufqu'à cent
cinquante pas de la muraille .
Le 2. douze pieces de Canon
& huit Mortiers batirent la Ville.
Deux bateries que les Affiegez
avoient , l'une fur la groffe
Tour , & l'autre fur une autre
Tour , furent démontées en peu
de temps. Les Bombes cauferent
ce jour- là beaucoup de dommage
dans la Ville , à ce qu'on apprit
de Bude. 67
prit d'un Deferteur qui dit qu'elle
n'eftoit défenduë que par ſept
ou huit mille hommes , & que
les vivres commençoient à eſtre
chers , parce qu'ils n'y eftoient
pas en grande abondance. Il parut
quelques Troupes Ennemies
du cofté de Peft , & fur l'avis
qu'on en eut , le Prince Charles
ordonn que l'on fift conſtruire
trois redoutes au bord du Danube
, que les Heiduques & les
Hongrois garderoient . On fit
une brêche de quinze pas du
cofté de l'attaque du Prince
Charles.
Le 3. le Regiment du Prince
Eugene de Savoye arriva au
Camp , & on eut avis que les
Troupes de Brandebourg n'en
eftoient qu'à une lieuë. Quatre .
Mortiers furent ajoutez aux 8.
que l'on avoit mis fur la baterie
dreffée
68
Hiftoire du Siege
dreffée à l'attaque des Imperiaux,
& tout cela fit grand feu la nuit
fuivante. La Baterie des Bavarois
n'en fit pas moins , elle eftoit de
fept Mortiers. L'Artillerie des
Ennemis fit auffi grand feu , &
les Affiegeans furent fort incommodez
des Pierres qu'on leur jetta.
Le Sieur Collery , Capitaine
dans le Regiment de Lorraine,
eut le genouil fracaffé d'un éclat
de Bombe , & un des meilleurs
Bombardiers receut un coup à la
tefte. Il y eut encore quinze ou
vingt hommes bleffez . Un Offi
cier Turc qui vint ſe rendre, fur
mené à l'Electeur de Baviere,auquel
il conta qu'ayant tué le mary
d'une femme dont il eftoit amoureux
, il avoit eſté obligé de
quitter la Ville , & s'eftoit tenu
caché pendant quelques heures
dans un endroit où fa maiftreffe
luy
de Bude. 69
luy avoit promis de le venir joindre
, mais , mais que la crainte d'eftre
découvert par les Affiegeans qui
luy auroient fait un mechant
party , ne luy avoit pas permis de
l'attendre. Il ajouta qu'il n'y avoit
dans la Place que trois mille
Janiflaires , & un pareil nombre
de Soldats ; que malgré l'effet des
Carcaffes & des Bombes , qui avoient
obligé le Commandant à
fe loger dans une cave voutée
prés du Chateau pour y eftre
plus en feureté , ils eftoient tous
refolus de fe bien défendre ; qu'il
n'eftoit entré perfonne dans la
Ville comme on l'avoit crû, mais
que des Turcs en eftoient fortis
pour aller demander un prompt
fecours à Achmet Bacha Seraf
Kier , & aux Tartares.
Le 4. ce mefme Officier montra
à l'Electeur de Baviere , &
aux
70 Hiftoire du Siege
Le
aux Princes de Bade & de Savoye
, le Magafin à poudres &
les mines des Affiegez . Il dit
qu'il y en avoit fous la Rondelle
du Chafteau & à l'endroit de la
breche des Imperiaux. Un autre
Transfuge qui fe difoit Polonois,
fe rendit au Camp & affeura que
les Affiegez ne pourroient tenir
encore un mois , fi l'Armée du
Seraskier ne les fecouroit.
Prince Charles paſſa le Danube
pour aller voir les Troupes de
Brandebourg qui eftoient arri
vées le jour precedent avec une
belle Artillerie. Elles eftoient
compofées de huit mille hommes
, en fix Eſcadrons de Cavalerie
& dix Bataillons d'Infanterie
Le General Schoning qui
les commandoit, receut ce Prince
au bruit du Canon , qui fut
ſuivy de 3. décharges de Mouſque
de Bude.
71
I
queterie. Il luy donna enfuite
un magnifique difner dans fa
tente.
Le
4
5. on fit paffer le Danube
à ces Troupes , qui prirent le pofte
qui leur avoit eſté deſtiné du
cofté de la Ville baffe. Il fut refolu
qu'on en tireroit quinze
cens hommes tous les jours pour
monter la tranchée , & qu'on les
joindroit aux Imperiaux & aux
Suedois, afin de faire quatre mille
hommes pour les Poles qui étoient
du coſté de l'attaque du
Prince Charles.
Un Deferteur Grec arriva en-
*
core au Camp & raporta que
cinq Turcs qu'on avoit fait fortit
à la nage , eftoient allez preffer
le fecours que lors
que les Trou
pes de Brandebourg avoient paru
, les Affiegez avoient fait
roiftre beaucoup de joye dans la
penfée
pa72
Hiftoire du Siege
1
penféc que ce fuft celles du Se
raskier , & que le Commendant ,
ayant appris que c'eftoit un renfort
pour l'Armée Chreftienne,
avoit taché de le déguifer à la
garnifon , en difant que c'eftoit
un mouvement que les Affiegeans
avoient fait faire à leurs Troupes
pour faire croire qu'il leur en
eftoit venu de nouvelles . La plufpart
des Bateries des Affiegez furent
miſes en defordre par le grad
feu qui fut fait de l'attaque des
Imperiaux & de celle des Bavarois.
Il leur demonta plufieurs pieces
de Canon, & fit un fort grand
dommage au couronnement des
deux Pâtez,en forte qu'ils ne pouvoient
prefque plus y demeurer
à couvert . La breche ſe trouva
large de quatre - vingt pas , &
comme les ruines n'avoient point
couvert le pied de la muraille
qui
de Bude.
73
qui paroiffoit encore haute de
dix pieds , ont refolut de l'égaler
avec des Fafcines & des facs à
terre. L'attaque des Bavarois fut
auffi fort avancée , mais la breche
n'eftoit pas fi fpacieuſe.Ceux
Ide Brandebourg qui avoient ou-
Evert la tranchée à leur attaque
avec 1200. hommes , avancerent
- leurs travaux fur la gauche avec
tant de diligence , qu'ils fe trouverent
prefque au pied de la muraille
. Ce jour- là mefme ils donnerent
des marques de leur valeur.
Les Affiegez n'avoient point
fait de fortie depuis celle du 29.
= & pour eftonner ces nouveaux
1 venus ils en firent une fort
brufque & bien concertée fur
leurs Travailleurs , mais ils furent
repouffez avec grand carnage
jufques à la porte de la
Ville , devant laquelle fe pofte-
,
D
74 Hiftoire du Siege
rent ceux qui les avoient pourfuivis.
Ils s'y maintinrent , &
travaillerent de ces Poftes avancez
en reculant , & de la tefte
de la Tranchée en avançant ,
pour rejoindre les Travaux , &
les faire communiquer les uns
avec les autres. Les Ennemis
perdirent quatre ou cinq cens
hommes , & il en coufta à ceux
de Brandebourg un de leurs Ingenieurs
, quatre Lieutenans ,
autant d'Enfeignes, environ . trente
Soldats , & le Fils aifné du
General d'Orffling . il eftoit venu
en Hongrie pour faire cette
Campagne en qualité de Volontaire
, & il fut tué d'un coup
de Moufquet au travers du corps.
La nuit on jetta quantité de
Bombes & de Carcaffes dans la
Ville , principalement du cofté
de l'attaque des Imperiaux. L'Eglife
de Bude.
75
glife de faint Jean , qui fervoit
aux Turcs de grande Moſquée,
fut reduite en cendres avec cinquante
maiſons voifines.Le nombre
des Travailleurs ayant efté
augmenté , on pouffa encore les
approches, & les Lignes de communication
entre les trois attaques
qui furent perfectionnées. ›
Le fixiéme les Troupes de
Brandebourg continuerent leurs
travaux , & ils les poufferent
de telle forte qu'ils fe trouverent
auffi avancez que ceux des
deux autres attaques. Un Capitaine
& quatre de leurs Soldats
furent bleffez , & il y en
eut huit tuez . On fit jouer du
cofté de l'attaque des Bavarois
une Batterie de dix pieces de
Canon dont une fut demontée
auffi- toft par le Canon de
la Ville. Ils fe pofterent la nuit
Dij
76 Hiftoire du Siege
tout proche les Pallades , &
eurent prés de foixante hommes
tuez ou bleffez . Le Sieur Funck,
Lieutenant
Colonel du Regiment
de Souches , fut de ces derniers.
Le 7. les Travaux furent avancez
à droit & à gauche , jufques
à dix ou douze pas de la
bréche , où les Imperiaux fe pofterent.
Ils perdirent prés de cin-
Le Sergent
quante hommes .
General de Dinghen fut bleffé
au pied , à la tefte de l'attaque,
où il eftoit cette nuit de garde
avec le Comte de Souches , &
le Chevalier de Rofne receut
un coup de Moufquet au travers
corps. Les Mineurs eurent ordre
de faire éventer les Contremines
des Affiegez dont on
avoit eſté averty , & les Troupes
de Brandebourg qui travaillerent
de Bude.
77
lerent à dreffer leurs bateries,
les mirent prefque en eftat. Le
bruit fe repandit dans le Camp
que le Grand Vizir eftoit en
marche entre Belgrade & Effek
avec une Armée confiderable,
mais on connut auffi - toft la fauffeté
de ce bruit. C'eftoit Benfi
Bacha , Aga des Jani ffaires. Il
avoit joint les Troupes des Turcs
qui eftoient campez depuis longtemps
en ce lieu - là.
Le huitiéme on travailla à
élever deux nouvelles Batteries
à l'Attaque de Lorraine , l'une
de cinq pieces de Canon , &
l'autre de quatre , afin d'élargir
les brèches. La petite Rondelle
fut abatue par le Canon des Bavarois,
qu'elle incommodoit beaucoup
dans les Tranchées , & la
nuit fuivante on tira une Ligne
qui traverfoit le long de la Ron-
Dij
78 Hiftoire du Siege
,
delle gauche vers la Courtine
droite. Comme ce travail ſe faifoit
fort prés , les pierres & les
Grenades que jetterent les Ennemis
, tuerent ou blefferent prés.
de trente hommes. Le Comte
Guido de Staremberg , Lieutenant
Colonel du Regiment de
ce nom qui commandoit à la
Tranchée , s'y fit diftinguer par
fa valeur , auffi bien que le Major
Bifchoffhaufen , qui fut bleffé
au bras d'une balle de Moufquet.
Un Capitaine de Staremberg
le fut auffi à l'épaule , &
fon Capitaine Lieutenant au
pied . Trois Turcs fe rendirent,
& on apprit d'eux que les Affiegez
avoient grande impatience
qu'il leur vinft quelque fecours,
& qu'ils fe défendoient avec
d'autant plus de réſolution &
de courage, que les belles actions
eftoient
de Bude.
79
eftoient récompenſées par le
Commandant. Quelques autres.
Turcs fortirent de la Ville , dans.
le deffein de brûler les Batteries
des Affiegeans , mais l'un d'eux
ayant efté mis par terre d'un
coup de Moufquet , tout le refte
prit la fuite.
Le neuvième les Affiegez à
la pointe du jour firent jouer
un Fourneau entre la Porte &
la Rondelle du milieu. Il ruina
la Mine que les Imperiaux
avoient faite. Il y eut fept Mineurs
enterrez , & leur Capitaine
fut dangereufement bleffé
. Ils firent enfuite une Sortie
entre cette Attaque & celle
de Brandebourg. Les Troupes
de cette derniere furent d'abord
mifes en defordre , & fe renverferent
fur les Travailleurs avec
perte d'environ cent hom-
D iiij
80
Hiftoire du Siege
mes , entre lefquels furent deux
Lieutenans Colonels ,
II
quatre Capitaines
, & quelques Officiers
fubalternes
. Cependant le Corps
de réſerve de la Place d'Armes
la plus voifine eftant accouru,
on chargea les Turcs d'une maniere
fi vigoureufe , qu'ils fe retirerent
avec plus de précipitation
qu'ils n'eftoient venus.
demeura plus de quatre - vingt
des leurs fur la Place , fans les
bleffez , & l'on fit fix prifonniers.
Aprés qu'ils eurent efté
repouffez , on travailla à retirer
les Mineurs & les Travailleurs
des ruines que le Fourneau avoit
faites. Il n'y en eut qu'un
que l'on ne put retrouver. On
continua les Travaux avec autant
d'ardeur que s'il ne s'eftoit
point fait de Sortie. Les Bavarois
firent jouer une autre Batterie
de Bude. 81
terie de dix pieces , ayant eſté
obligez de changer la premiere,
à caufe que le Canon de la Ville.
l'incommodoit , & qu'elle en
eftoit trop éloignée . Ce mefme
jour , quelques Hongrois donnerent
avis à l'Electeur de Baviere
que fept mille Tartares étoient
en marche , pour jetter
du fecours avec un Bacha dans
Bude du cofté de Peft. Cela
obligea d'envoyer en diligence
trois cens . cinquante hommes :
dans cette derniere Place , avec
ordre de travailler à des Redoutes
, afin que les Ennemis trouvant
les Paffages coupez, ne pûffent
executer leur deffein.
Le dixième on attacha les
Mineurs fous la Paliffade de la
Rondelle oppofée à l'Attaque de
Baviere , & l'on redreffa en celle
de Lorraine la Galerie qui
D v
821 Hiftoire du Siege
→
avoit efté brûlée en partie le
jour précedent . On y attacha
auffi les Mineurs , pour tâcher
d'éventer les Contre- mines fous
la Rondelle qui eftoit à gauche
& fous celle du milieu .
Quoy qu'il tombaſt ce jour- là
une groffe pluye , elle ne put
empefcher que le Prince Charles
ne fift dreffer deux nouvelles
Batteries l'une au milieu
des Travaux , & l'autre de
neuf pieces de Canon fur la
gauche .
Le 11. fut employé à perfectionner
les approches à l'Attaque
de Lorraine , & l'on mit le
Canon fur les deux nouvelles :
Batteries , & deux Mortiers fur
une autre. Il y eut quelques Soldats
tuez & bleffez , mais en
petit nombre. On travailla auffaux
Mines , & à rencontrer
celles
de Bude.
83
celles
,
que les Affiegez pouvoient
avoir préparées pour les faire fauter
contre les Affiegeans , s'ils
donnoient l'affaut. Pendant tout
ce jour , les Canons & les Mortiers
tirerent fans ceffe tant
pour élargir les bréches, que pour
ruiner les Retranchemens qu'avoient
fait les Affiegez , dans le
deffein de bien foûtenir l'affaut.
La Batterie de ceux de Brandebourg
joia , auffi- bien que
celle de Dom Antonio Gonçales
, Lieutenant general de l'Artillerie
, & d'un Ingenieur Efpagnol
, qui par l'élevation de fes
feux d'artifice donna beaucoup
de plaifirs aux Affiegeans , en
mefme temps qu'il caufoit de
grands dommages aux Affiegez .
Les Bavarois battirent inceffam-.
ment la Rondelle du Chafteau,
& y jetterent des Bombes de
deux
$4 Hiftoire du Siege
deux Batteries de trois Mortiers
chacune , dont l'une n'eftoit qu'à
trente pas de la Paliffade . Trois
de leurs Mineurs furent tuez par
leurs propres Cannoniers & le
mefme malheur feroit arrivé à
l'Electeur de Baviere , s'il n'euft
pas changé de place un moment
auparavant.Sur l'avis qu'on avoit
eu que le Seraskier s'eftoit avancé
jufqu'à trois lieuës de Peſt as
vec un Corps de huit mille hommes,
tirez des Garnifons de Themifwar,
Lippa, Giula, grand Waradin
, Segedin , Agria , Hatwan
, & autres Places des Turcs
en la baffe Hongrie , & fur
les Frontieres de Tranfylvanie,
dans le deffein de fecourir Bude
le Prince Charles détacha
le Baron de Mercy & le
Prince Eugene de Savoye avec
trois
,
de Bude. 85
un
trois mille chevaux , & fix Bataillons
d'Infanterie , qui pafferent
le Danube , & fe pofterent
proche de Peft de l'autre colté
du Pont , hors de la portée du Canon
, pour y attendre les Turcs,
& empefcher qu'ils ne fe puffent.
= jetter dans la Place . On fit auffi
un Détachement confiderable de
Cavalerie & de Dragons pour
renforcer ceux que l'on avoit envoyez
à Peſt , où ils travailloient
à de nouvelles fortifications du
cofté du Danube , & pour refferrer
la garnifon d'Albe- Royale,
qui auroit pu faire quelque diverfion
en faveur des Affiegez ,
afin de faciliter le fecours qu'ils
attendoient .
Le 12. on fit applanir à l'attaque
de Lorraine la defcente dans
les Foffez oppofez aux breches,
à la faveur du Canon & des
Bom
86
Hiftoire du Siege
Bombes , afin de pouvoir monter
à l'Affaut , & l'on fit auffi grand
feu aux attaques de Baviere &
de Brandebourg. Quoy que la
breche que l'on avoit commencé
à faire dans cette derniere le
jour precedent , fe trouvaſt élargie
de plus de quinze pas , la muraille
eftoit encore trop haute depuis
fon pied jufques à l'éboulement.
Ainfi l'on continua de
tirer le Canon avec plus de violence
, pour taſcher d'y faire des
ruines plus confiderables , & les
Affiegez qui jetterent inceffamment
des feux d'artifice & des
pierres de leurs Mortiers , n'empêcherent
point qu'en l'une &
en l'autre on n'avançaft les approches
fort prés des foffez . On
vit paroiftre la flâme pendant
plus de huit heures en plufieurs
endroits de la Ville , ce qui fit
2
juger
de Bude.
juger que
les Bombes & les Carcaffes
des Affiegeans
y avoient
caufé un grand dommage. Le
feu de la Baterie des Bavarois
prit à des Tonneaux
de poudre,
& fit fauter en l'air prés de vingt
perfonnes.
Le 13. les Regimens de Steireim
, de Pafc , & de Goucqfes
arriverent des environs de Stulweiſenbourg
au camp des Troupes
commandées par le Baron de
Mercy & par le Prince Eugene
de Savoye , ce qui fit un corps de
neufmille hommes. Les Ennemis
éventerent la mine des Imperiaux
, mais les Mineurs eurent
le loifir de fe fauver. Ils mirent
auffi le feu à un Fourneau dans
l'efperance de faire fauter la
grande garde des Imperiaux , &
l'effet en fut contraire à ce qu'ils
avoient attendu les terres retom
88
Hiftoire du Siege
tomberent fur eux , & remplirent
feulement une partie de la tefte
des travaux des Affiegeans . Cependant
le feu mis à ce Fourneau
ayant ebranlé la Tour fous
laquelle le Mineur avoit eſté attaché
, on pointa contre cette
mefme Tour huit pieces de Canon
qui y firent une breche confiderable.
On tint un Confeil de
guerre où l'on refolut de donner
Affaut par trois endroits , à la
breche de l'attaque de Lorraine.
Le Comte Guido de Staremberg
, & le Comte d'Awersberg
furent commandez , chacun avec
deux- cens quatre - vingts hommes
, le premier à la droite de
l'attaque proche la grande Rondelle
, & le fecond à la gauche.
Le Comte de Herberftein , avec
qui marchoient les Fufeliers ,
Pionniers , & Travailleurs, avoit
or
1
de Bude. 8.9
ordre de donner au milieu de la
Courtine. Il eftoit auffi fuivy de
deux cens quatre - vingts hommes
, & le refte , au nombre de
deux-mille , demeura de referve
pour les foutenir . Sur les fept
heures du foir , le Signal ayant
efté donné pour l'affaut par une
décharge de tout le Canon qui
eftoit en baterie à cette attaque,
on commença de monter à la breche
, ce qui n'eftoit pas aisé , à
caufe que les Ennemis l'avoient
I reparée par plufieurs rangs
de
Paliffades . On ne laiffa pas de les
forcer, quoy qu'ils fiffent une vigoureufe
refiftance , & l'on fe pofta
fur la brêche à la faveur de
la Moufqueterie & des Grenades
qu'on tira dans les retranchemens
paliffadez qu'ils avoient.
faits , derriere lefquels ils fe maintinrent
en tres- bon ordre. Rie
n'e
୨୦ Hiftoire du Siege
·
n'eft égal à l'ardeur que firent
paroiftre tout ce qu'il y avoit de
Volontaires & de Braves à l'Armée
, pour eſtre des premiers à
fe trouver fur la breche . On y
demeura prés de deux heures:
que l'efcarmouche dura, & pendant
ce temps les Affiegez firent
fauter deux Mines , qui cauferent
moins de perte aux Affiegeans
, que les Fleches , les Bombes
, les Grenades & les Pierres.
Cependant on ne pût venir à
bout de faire le logement ; le
defordre & la chaleur du combat
avoient éloigné les Travailleurs
, & d'ailleurs il auroit falu
plus de Fafcines & de facs à terre
, qu'on n'en avoit , pour pou
voir fe mettre à couvert & ſe retrancher.
Cela fut cauſe que l'on
ugea à propos de faire retirer les
raupes dans leurs Poftes, ce que
l'on
de Bude . 91
lon fit à neuf heures du foir, tandis
que le
Canon
, des
Bombes
&
la Moufqueterie
de
deux
Bataillons
de
Souches
&
de
Mansfeld
favorifoient
la retraite
. Le
Prince
Charles
fut
preſent
à l'action
, &
eut
deux
Pages
, l'un
tué
à fes
coftez
, &
l'autre
bleffé
.
La
perte
fut
grande
de
part
& d'autre
. On
tient
qu'il
y
eut
plus
de
cinq
cens
Soldats
tuez
du
cofté
des
Affiegeans
, &
prés
de
trois
cens
bleffez
, ' outre
quelques
Colonels
,
Capitaines
, autres
Officiers
, &
beaucoup
de
Volontaires
. Parmy
ces
derniers
fut
le
Prince
de
Commercy
, qui
demeura
longtemps
fur
la
bréche
expofé
au
feu
. Le
Sieur
du
Pleffis
, fon
Ecuyer
, fut
tué
auprés
de
luy
, &
le
Sieur
de
S. Sulpice
, l'un
de
fes
Gentilhommes
, y_receut
quelques
bleffures
. Le
Duc
de
Bejar
,
Grand
92
Hiftoire du Siege
Grand d'Espagne , monta un des
premiers à l'affaut. Il y fut bleffé
dangereufement , & mourut trois
jours aprés . Le Fils du Prince Robert,
& Milord Georges Savil, fe
cond Fils du Marquis d'Halifax,
avec plufieurs autres Seigneurs
Anglois furent tuez , ainfi que
le
Prince Palatin de Veldens,le jeune
Comte de Maldeghen , le Chevalier
de Cormaillon , le Comte
de Herberſtein , le Comte de
Kouffstein , Capitaine dans Staremberg
, le Baron de Rolle , &
le Sieur Kirchmeir , tous deux
Capitaines dans le Regiment de
Souches, le Baron de Chiffer , le
Comte de Strottembach , & plufieurs
autres Volontaires & Officiers
fubalternes. Milord Fitz-
James, Fils naturel du Roy d'Angleterre
, fut bleffé legerement.
Le Prince Picolomini mourut
dés
de Bude.
93
dés le lendemain de fes bleffures,
& fut enterré dans Peft . Les autres
Bleffez confiderables , dont
les noms ont efté fçeus , furent le
Comte de Staremberg , Lieutenant
Colonel , qui avoit le commandement
de la droite ; le
Comte d'Aversberg , auffi Lieutenant
Colonel , qui commandoit
la gauche ; le Comte de Dona ,
Colonel dans les Troupes de
Brandebourg ; le Marquis de la
Verne , Lieutenant Maréchal de
Camp ; le Duc de Scalona , Grand
d'Efpagne ; le Comte de Valero,
frere du Duc de Bejar ; Dom
Gafpard de Suneja , fon Coufin;
le Comte de Cormaillon ; le Fils
du Comte d'Urfet , & fon Ecuyer;
le Sieur de Longueval ; le Chevalier
de Rhofne ; le Sieur de Landas
, Capitaine de Starembergs
les Capitaines Herrero & le Bay,
&
94 Hiftoire du Siege
& quelques Officiers venus de
Flandre ; le Sieur de Vaubonne ,
Capitaine des Grenadiers de
Bade ; le Baron Golenski , Capitaine
de Becq ; Dom Francifco
l'Africain ; le Sieur de la Brigondelle
, & le Sieur de Vaucou-
Gentilhomme du jeune leur
Prince de Vaudemont. Le Marquis
de Blanchefort , Fils du Maréchal
de Crequi , fut auffi bleffé ,
& la maniere dont il fe diftingua
fit affez connoiftre de quel
Sang il eft forty. Les Affiegez
perdirent beaucoup de monde.
On fçeut d'un Transfuge , qu'une
feule Bombe , qui eftoit tombée
dans leurs Retranchemens après
l'action , avoit emporté deux Agas
des Janiffaires, & plus de quarante
Soldats. Comme ils croyoient les
Troupes des Affiegeans fort en
defordre, il voulurent profiter de
l'oc
de Bude.
95
l'occafion , en faifant une Sortie
fur celles de Brandebourg , mais
ils furent repouffez avec beaucoup
de vigueur, & laifferent plus
de 40. des leurs fur la place. On
fit quinze Prifonniers.
Le 14. on travailla à applanir
les débris que les Contremines
des Affiegez avoient faits à l'Attaque
de Lorraine , & à combler
les Foffez de celles de Baviere
& de Brandebourg. On continua
de canonner la Place , & d'y
jetter des Carcaffes & des Bombes.
On nettoya auffi la Tranchée
, & on en ofta les terres ,
dont les Fourneaux des Ennemis
en avoient remply une partie . On
en découvrit deux ce jour là , &
l'on en tira les Poudres. ' Il y eut
un Mineur tué par l'imprudence,
d'un Canonnier, La Mine prit
feu, & vingt Soldats & deux Ca-
$
no
96
Hiftoire du Siege
nonniers furent emportez. On
eut avis que les Troupes d'Afie
eſtoient arrivées à Belgrade fous
la conduite du Grand Vifir , qu'il
y en avoit encore pris de nouvelles
, & qu'il s'eftoit enfuite
avancé vers le Pont d'Effeck ,
aprés avoir envoyé fix mille Spahis
à Walpo & à Poffega , avec
ordre d'obferver le General
Schults , qui avoit mené huit
mille Allemans & cinq cens
Croates de ce coſté - là.
Le 15. on attacha le Mineur
à la Muraille de la grande Rondelle
, & on commença deux Galaries
au pied de la Courtine.
Quelques Païfans fortis de Bude
furent conduits à l'Attaque de
Lorraine . Ils dirent qu'à l'affaut
du 13. il y avoit eu plus de cinq
cens hommes tuez du cofté des
Ennemis. On avança les Travaux
juſqu'au
de Bude.
97
jufqu'au Foffé , fur le bord du
quel on dreffa une nouvelle bat--
terie , pour ruiner à droit le cofté
de la grande Rondelle , qu'on
n'avoit pas encore attaqué. Tandis
que les Mineurs travailloient
à deux chambres de Mine , les
Affiegez en firent fauter une à
la gauche de l'Attaque. Elle ne
fit qu'agrandir la brèche du cofté
de ceux de Brandebourg. On
en éventa deux autres qu'on n'avoit
point encore chargées. Les
Bombes que l'Ingenieur Espagnol
fembloit élever jufqu'aux Etoiles,
faifoient un effet fi prodigieux
en retombant , qu'un Transfuge
rapporta qu'une feule avoit enfoncé
deux planchers & deux
voûtes , & tué plus de
perfonnes dans la plus baffe ; ce
qui caufoit une grande defolation
, parce qu'il n'y avoit pref-
E
quarante
98
Hiftoire
du
Siege
que plus d'endroits où l'on fe
puft tenir à couvert. On eut
avis que les Turcs qui venoient
fecourir Bude , eftoient campez
vers Hatwan , aprés avoir paffe
la Teyffe avec un Convoy prés
de Segedin. On détacha auffitoft
les Regimens de Stirum , de
Taff , & de Trurks , pour aller
joindre le Barón de Mercy , afin
d'obliger les Infidelles à repaffer
la Riviere..
Le 16. les Bavarois firent jouer
deux Mines , qui au lieu de
combler le Foffe de la Rondelle
du Chafteau , & de faire fauter
la Paliffade , comme on l'avoit
creu , renverferent les premiers
poftes de leurs Tranchées,
de forte qu'il y eut plus de trente
hommes tuez ou bleffez. Le
Marquis de la Verne , qui n'avoit
efté bleffé que legerement
à
de Bude.
୨୨
#
à l'affaut du 13. le fut ce jourlà
d'un éclat de pierre. Cet accident
fit qu'on réfolut de ne
plus faire jouer de Mines , qu'on
n'euft achevé toutes celles où
l'on travailloit , afin de les faire
fauter toutes à la fois , quand
les trois Attaques donneroient
l'affaut. Un Armenien , qui avoit
fa Femme & fes Enfans à Vienne
, s'eftant échapé de Bude , vint
donner avis que les Janiffaires
avoient preffé deux fois le Bacha
de rendre la Place mais
que ne l'ayant pas trouvé de ce
fentiment , ils luy avoient déclaré
qu'ils fe défendroient encore
quelque temps , mais qu'ils
ne vouloient pas attendre l'extremité
. Il ajoûta que les Affiegez
avoient perdu beaucoup de
monde dans l'action du 13. qu'ils
auroient capitulé fi l'on avoit
E ij
TE
DE
LA
>-
LYON
1895
roo
Hiftoire du Siege
pû fe maintenir fur la brèche,
qu'ils ne s'eftoient tenus en fi
bon ordre derriere leurs rétranchemens
, que parce qu'un Deferteur
eftoit venu leur donner
avis de la refolution que l'on
avoit priſe de donner l'Affaut ;
que cependant l'ayant pris pour
un Efpion , ils luy avoient fait
couper la tefte , & qu'ils en feroient
autant à tous ceux qui
viendroient ſe rendre ; que l'on
avoit commencé à manger les
Chevaux , faute de fourage &
d'autre viande ; qu'un pain
pour vivre un feul jour couftoit
un écu , & que les Bombes de
I'Ingenieur Eſpagnol , qu'ils nommoient
le feu du Ciel , perçoient
les voûtes des Caves. La nuit
les Bavarois fe pofterent derriete
la Paliffade du Foffé de la
Rondelle du Chafteau , de forte
.
que
de Bude. ΙΟΥ
que les Ennemis furent obligez
de s'en retirer avec perte de
quelques hommes. Le Comte
de Fontaine , qui commandoit
les Bavarois , fut tué d'un coup
de Moufquet. Le Comte d'Apre
mont fut bleffé dans la mefme
occafion , auffi bien que le Capitaine
des Grenadiers du Regiment
de Bade. Son Lieutenant
fut tué , & il y eut encore environ
quarante Soldats tuez ou
bleſſez Les Ennemis deffendoient
ce poſte au nombre de deux
cens cinquante , & comme on
leur coupa d'abord le chemin
de la retraite , il n'en échappa
que vingt-fix qui demanderent
quartier. Tout le reste fut tué .
Un Turc qui fortoit de Bude fut
arrefté cette mefme nuit. Il eftoit
Mineur. On apprit de luy que
quoy que la Ville fuft extremé-
E iij
102
Hiftoire du Siege
ment incommodée de l'infection
des Cadavres , qu'on ne pouvoit
enterrer faute de trouver des
lieux où l'on puft les mettre , &
que les Habitans fouffriffent une
fort grande difette à cauſe qu'on
ne diftribuoit des vivres qu'aux
Soldats , les Affiegez ne laiffoient.
pas d'eftre refolus de continuer à
fe bien défendre , & qu'il y avoit
des Fourneaux en divers endroits
avec des coupures & des retranchemens
dans les ruës , à la teſte
defquels ils avoient mis plufieurs
pieces de Canon chargées de
Cartouches.
Le 17. le Prince Charles de
Neubourg eftant arrivé au Camp,
alla fe pofter avec fon Regiment
de l'autre cofté du Pont . Le
Maréchal Caprara , & le General
Palfi , revinrent des environs de
Stulweifembourg avec plufieurs
Re
de Bude.
103
Regimens de Cavalerie . Le premier
paffa le Danube , & prit
le commandement
des Troupes
qui eftoient campées proche de
Peft. Le Marquis de la Verne,
quoy que bleffé , eftant demeurẻ
feul à remplir la Charge de
Lieutenant Maréchal de Camp
general d'Infanterie , ne voulut
plus fortir de l'attaque à caufe
que
le Comte de Fontaine ayant
efté tué la nuit precedente , il
n'y avoit plus d'Officier de fon
caractere pour le relever. On
avança les approches des trois
attaques jufqu'au pied de la
muraille , & l'on acheva une baterie
de trois pieces de Canon à
celle de Lorraine pour battre
l'Angle de la Tour. On travailla
aux Mines à l'Attaque de Brandebourg,
& les Mineurs fe trouverent
fous la Courtine proche
E iiij
104 Hiftoire du Siege
la troifieme Rondelle de celle de
Lorraine , & fous une autre à
gauche. On applanit auffi la defcente
dans les foflez , & pendant
tout le jour & toute la nuit on
ne ceffa point aux trois Attaques
de faire un grand feu de toutes
les Bateries , afin d'agrandir les
bréches & d'achever de ruiner
toutes les defences & les coupures
qui eftoient derriere , ce qui
devoit mettre les Generaux en
eftat de faire donner l'Affaut general
, qu'ils ne vouloient point
hazarder qu'on n'euft éventé les
Contremines.
Le 18. une partie de ceux qui
eftoient campez proche de Peft ,
& qui ne compófoient point
de Regiment , retournerent à
leurs premiers Poftes , fur les
avis qu'on receut que les Troupes
Ottomanes , qu'on croyoit
de
de Bude.
105
,
devoir venir de ce cofté là jetter
du fecours dans Bude s'efloient
retirées apres avoir mis
des vivres dans Hatwan & dans
Erlaw. On apprit le mefme jour
que des Turcs eftoient venus à
deux lieues du Camp couper la
tefte à quelques Fourageurs &
Vivandiers . Sur les onze heures
du foir , les Affiegez fe montrerent
fur la breche . Ils poufferent
de grands cris , & cela fit croire
qu'ils fe preparoient à une fortie .
On fit fur eux un grand feu qui
les contraignit de fe retirer . Ils
éventerent la Mine de l'Attaque
des Imperiaux par un Fourneau
qu'ils firent jouer. Quatre Mineurs
& le Sieur Liber leur Capitaine
, y furent enfevelis . On
les chercha auffi- toft , & on ne
put trouver que deux Mineurs ,
qui n'eftoient pas morts. Les Ba
E v
106
Hiftoire du Siege
varois mirent le feu dans le Chafteau
par une Bombe qu'ils y firent
tomber. Cependant les Ennemis
barricaderent d'une nouvelle
Paliffade la Breche de la
Rondelle .
Le 19.les Affiegez travaillerent
inceffamment entre la Breche des
Imperiaux & la muraille de la
Ville, ce qui fit croire qu'ils y faifoient
un nouveau retranchement.
Les Bavarois travaillerent
de mefme pendant tout le jour à
à une Baterie fur le bord du Foffé
, afin d'abatre la Paliffade , & le
refte de la Rondelle du Cha fteau .
Ils attacherent en mefme temps
le Mineur, pour chercher les Mines
des Ennemis . La nuit les
Troupes de l'Attaque de Lorraine
donnerent un faux Affaut , &
firent jouer plufieurs Mortiers
chargez de Bombes , de Carcaffes
&
de Bude.
107
& de Grenades. L'effet en fut
terrible pour les Affiegez , qui
eftoient accourus en foule pour fe
defendre. Un Transfuge paffa
de la Ville au Camp , & en parlant
des defordres que faifoient
les Bombés dans la Place , il dit
qu'il en eftoit tombé une fur une
voute , qu'elle l'avoit enfoncée, &
que plus de cent hommes qui
eftoient deffous , en avoient efté
tuez .
Le 20. les Affiegez donnerent
trois fauffes allarmes, ce qui obligea
de faire avancer contr'eux
un détachement de Grenadiers
à chaque attaque. On s'apperceus
qu'ils s'aflembloient derriere leurs
Paliffades, & dans la penfée qu'on
eut qu'ils avoient deffein de faire
une fortie, on fit pointer le Canon
& les Mortiers de ce costé là . Les
Bateries firent un grand feu , & le
fuc
108
Hiftoire du Siege
fuccez en fut fort avantageux
aux Affiegeans. Le mefine jour le
General Palfi retourna fur fes pas
avec fix Regimens , & eut ordre
d'obferver les mouvemens des
Troupes Ottomanes , qui avoient
déja paffé le Pont d'Effeck , à ce
que difoient tous les Efpions. Le
Prince Charles alla reconnoiftre
les endroits par où les Turcs pouvoient
jetter du fecours dans la
Place. Il y eut encore un Armenien
qui fe fauva de la Ville. Il
dit que la confternation yeftoit
tres -grande ; qu'il n'y reftoit plus.
que deux mille Janiffaires dont
le nombre diminuoit tous les
jours , & qu'ils ne ſe defendoient
que parce qu'on les avoit affurez,
qu'il y avoit deux Armées en
marche , pour venir faire lever
le Siege .
Le 21. on continua d'élargir
la
de Bude. 109
la brêche à coups de Canon à
l'Attaque de Lorraine , & de
rompre la Paliffade que les Ennemis
y avoient mife. Le Baron
de Mercy , qui avoit fait repaffer
la Teyffe aux Turcs qui s'étoient
avancez vers Hatwan , &
dont il avoit défait une partie de
l'Arriere garde , receut ordre de
repaffer le Danube , & de marcher
avec la Cavalerie que l'on
avoit jugée inutile pour le Siege,
à la rencontre des Infidelles qu'on
difoit s'eftre affemblez vers le
Pont d'Effeck , au nombre de
vingt- cinq à trente mille. Un Cavalier
du Regiment de Caprara
fe faifit d'un Turc qui eftoit caché
dans un Marais . Il avoit des
Lettres pour le Grand Vizir , &
pour quelques Officiers de l'Armée
Turque. Elles furent déchifrées.
Le Bacha de Bude leur
don
110
Hiftoire du Siege
donnoit avis de l'eftat de la Place
, & du preffant befoin qu'il
avoit qu'on le fecouruft.
Le 22. de grand matin les Af
fiegez fortirent du cofté des Bavarois
, & ayant pouffe la Garde
qui étoit à la tefte de la Tracheé,
ils tuerent prés de cent hommes,
entre lefquels fe trouverent le
Sieur Lôben Colonel dans les
Troupes de Saxe , un Capitaine
, & quelques Officiers fubalternes.
Le Sieur Defchwint, Colonel
de l'Artillerie de Baviere,
fut mortellement bleffé au cou.
Ils enclouerent trois pieces de
Canon & un Mortier, & auroient
caufé un plus grand defordre , fi
un Lieutenant & quelques Fantaffins
du Regiment de Bade qui
accoururent n'euffent foûtenu
les Bavarois , & contraint les Ennemis
de fe retirer avec perte de
>
plus
de Bude. III
plus de fix- vingt des leurs, qu'ils
laifferent fur la place. L'avis en
ayant efté donné à l'Electeur de
Baviere , il vint auffi - toft dans la
Tranchée. On décloüa le Mortier
& deux pieces de Canon, &
en fuite on jetta une Bombe de
ce Mortier. Un peu après, on entendit
un bruit extraordinaire,
& il fe fit comme un tremblement
de terre qui ébranla tout
le Camp, & dont plufieurs Tentes
furent renversées. Il s'éleva
une fumée fi épaiffe qu'on' fut
quelque temps fans voir la Ville.
Soit par l'effet de la Bombe,
foit par quelque autre accident,
le feu s'eftoit mis à un Magafin
à poudre , qui eftant proche de
la muraille en renverfa plus de
quarante pas de longueur, en forte
qu'on y euft pû monter aifément;
IIZ
Hiftoire du Siege
ment , fi la Riviere n'en avoit
pas empêché l'accez. Des Fantaffs
fe jetterent fur l'Electeur
de Baviere pour le garantir des
pierres qui tomboient en quantité
dans les Tranchées . On en
trouva un fort grand nombre
dans Peft & dans tout le Camp,
de la pefanteur de deux , trois,
& quatre cens livres , jufques à
cinq cens. On dit qu'il y avoit
neuf cens Quintaux de poudre
dans ce Magafin , & qu'il fit perir
, en fautant en l'air , plus de
quinze cens perfonnes , hommes
femmes & enfans , fans compter
ceux qui demeurerent enfevelis
dans les caves voifines qui furent
couvertes des ruïnes de ce
grand bâtiment. La nuit, on travailla
à la chambre de la Mine
fous la grande Rondelle . Les Af
fiegez la contreminerent , ce qui
obligea
de Bude. 113
geans
obligea les Mineurs des Affied'abandonner
le travail. Il
n'y eut que celuy qui eftoit attaché
à la Courtine du milieu à
la gauche , qui continua . Il arri-
Iva dans la chambre de la Mine
que les Ennemis avoient éventée
, & la voulut rétablir , mais
ayant entendu travailler fous lui,
il fe retira, & laiffa quelques barils
de poudres découverts ; le
feu y prit pluftoft qu'on ne l'avoit
crû , & jetta le Lieutenant
des Mineurs jufque fur la batterie
de Brandebourg . Celuy qui
les commandoit fut brûlé . Comme
la Mine n'eftoit pas affez profonde
, l'ouverture qu'elle fit au
pied de la Courtine , fut feulement
de deux toifes. Les Turcs
fortirent en fi grand nombre ,
qu'on ne les put arrefter que par
un feu extraordinaire que l'on fit
fur eux.
Le
114 Hiftoire du Siege
a
Le 23. Le Mineur attaché à la
Rondelle du milieu, ayant achevé
de perfectionner la Mine , il
fut refolu que fi elle avoit l'effet
que l'on pouvoit s'en promettre,
on donneroit l'Affaut , general,,
Cependant le Prince Charles jugea
à propos
de faire fommer les
Afliegez avant que de l'entreprendre.
Le Magaſin fanté le
jour précedent , avoit mis un fi
grand defordre dans la Place
qu'il y avoit lieu de croire qu'on
les trouveroit moins obftinez , &
qu'ils fe refoudroient à fe rendre
fi on leur offroit des conditions
avantageufes. Ainfi fur les trois
heures aprés midy, ce Prince envoya
le Comte de Konigfek, fon
Aide de Camp general , avec un
Tambour & un Interprete pour
fommer la Ville. Les Affiegez
le voyant venir , & connoiffant
au
de Bude.
115
,
au fignal d'un mouchoir blanc
qu'il avoit quelque propofition
à leur faire planterent fur la
Muraille un Drapeau de mefme
couleur , & vinrent enfuite
prendre la Lettre du Prince
Charles pour la porter au Bacha
, qui dormoit alors , à ce
qu'ils dirent. En attendant la
réponſe , on luy laiffa trois Turcs
pour Oftages , & on luy vint
dire un peu aprés que le Bacha
avoit affemblé fes Officiers,
pour deliberer fur cette Lettre.
Il y eut de part & d'autre fufpenfion
d'armes pendant deux
heures
, & aprés ce temps on
apporta la réponſe du Bacha au
Prince Charles , envelopée d'écarlate.
Voicy les termes qu'elle
contenoit .
GRAND
116
Hiftoire du Siege
RAND VISIR DES
G&RESTIENS,
Tu es bien présomptueux de venir
une feconde fois mettre le Siege
devant Bude , qui a déja couté tant
de monde & tant d'argent aux
Chreftiens. Il est bien vray que ce
Siege nous a furpris , parce que nous
ne nous y attendions point ; mais
par l'affiftance de Dieu, & de noftre
Prophete Mahomet, vous aurez efte
par deux fois honteufement repous-
Sez, & vous n'aurez pas à nous
donner tat d'affauts que vous croiez.
Nous efperons qu'il vous en arrivera
comme il vous est déja arrivé . Si
voftre Empereur vous a commandé
de nous attaquer , nous avons ordre
du noftre de nous bien défendre .
Cette réponſe pleine de fierté
obligea les Affiegeans à faire joüer
le Canon des trois Attaques , &
de Bude.
117
à bombarder la Place avec plus
de furie que l'on n'avoit fait auparavant.
Le 24. Les Imperiaux firent
jouer une Mine , qui au lieu de
renverfer la Rondelle qui eftoit
entre leur bréche & celle des
Troupes de Brandebourg , combla
les premiers poftes de leurs
Tranchées , ce qui fâcha fort les
Hongrois , qui au nombre de
deux mille eftoient tout prefts de
monter à l'affaut , à la tefte des
Troupes de l'Attaque de Lorraine.
Le Capitaine des Mineurs &
deux Travailleurs furent accablez
par les débris de la Mine,
dont plus de deux cens Soldats
furent tuez ou bleffez. Un fugitif
vint apprendre au Prince
Charles que le Treforier des Janiffaires
avoit eu deffein de livrer
la Ville , à condition qu'on
l'en
118 Hiftoire du Siege
t
l'en feroit Vice - Commandant ,
mais que deux Païfans qui luy
devoient apporter la Lettre aïant
efté arreftez , le Bacha avoit fait
couper la tefte au Treforier , &
pendre les Païfans . Il ajoûta que
cinquante Turcs & un Aga a-
- voient efté tuez de la Mine, que
les Imperiaux avoient fait jouër
ce mefme jour, a
Le 25. une Bombe des Affiegeans
renverfa fur la Rondelle
du Chafteau quelques Paliffades,
& deux ou trois cofres chargez
de terre & de pierres qui les foûtenoient.
Le General Dunewald
receut ordre de prendre langue
de l'Armée des Infidelles. Sur les
cinq heures du foir , les Affiegez
firent une Sortie avec 200. hommes
fur la droite de l'Attaque de
Lorraine , où commandoit le
Comte de Saur , qui les repouſſa
vigou
de Bude.
119
quelque
.
vigoureufement avec
perte de leut cofté , mais elle
ne les empefcha pas d'en faire
une autre fur la gauche , où é-.
toient les Troupes de Brandebourg.
Ils couperent la tefte à
quarante hommes , & après avoir
encore efté répouffez de ce coſté
là , ils revinrent de nouveau , 1 , &
poufferent ceux de Brandebourg,
qui furent contraints de quitter
leurs Lignes. Le Prince Charles
en fut averty , & fit incontinent
avancer les Bataillons de referve,
qui eftoient poftez le long du
Danube prés des murailles de la
Ville- baffe. Les Turcs plierent
-lors qu'ils virent ce fecours , &
quoy qu'ils en euffent receu du
Bacha,qui leur envoyoit dé temps
en temps de nouvelles Troupes
pour les foûtenir , ils rentrerent
dans la Ville aprés une Efcarmouche
I 20
Hiftoire du Siege
che qui dura prés de quatre heures.
Il ne demeura que vingt
des leurs fur la place. Ceux de
Brandebourg perdirent le Lieutenant
Colonel de leurs Gardes.
Le Baron d'Ati qui commandoit
le Corps de referve , fut bleffé
au pied d'un coup de Moufquet,
& l'Aide de Camp du Comte de
Staremberg eut les deux jambes
emportées d'un coup de Canon.
Le Baron de Hoenwart fut tué
avec un Enſeigne du Regiment
de Souches , & quelques autres
Officiers.
Le 26. on prepara toutes les
chofes neceffaires pour donner le
lendemain l'Affaut general . Le
Maréchal Caprara paffa le Danube
, & vint fe camper au milieu
des Imperiaux & des Bavarois
, afin de fermer le paffage
· par où les Ennemis auroient pû
fe
de Bude. 121
fe fauver , ou faire des Sorties
fur les Affiegeans. Le Prince
Charles, qui avoit refolu de faire
donner l'Affaut à la pointe du
jour , paffa toute la nuit dans la
Tranchée , & pendant ce temps
on executa la refolution que l'on
avoit priſe d'attacher aux Paliffades
une certaine compofition
de feu artificiel pour les brûler;
elle eut un tres- grand effet .
,
Le 17. au matin les Paliffades
eftant encore toutes enflâmées
par la quantité qu'on y
avoit mis de cette compofition,
on attendit pour donner l'Affaut
qu'une petite pluye , qui
commença à tomber , euft éteint
les feux qui fervoient comme de
défenſe aux Ennemis. Tous les
ordres avoient été donnez le jour
précedent à tous les Officiers Generaux
Subalternes qui devoient
F
7 122 Hiftoire du Siege
eftre employez aux 3.Attaques,&
ils fçavoient en quel lieu & en
quelle maniere ils devoient agir
lors qu'ils auroient oüy le Signal.
Ce Signal eftoit 3. décharges de
12.petites pieces de Canon du côté
de Peft,afin qu'on en puft entendre
le bruit auffibien au quartier
de Baviere, qu'à ceux de Lorraine
& de Brandebourg. Il fut
donné fur les fix heures du foir, &
auffi- toft ceux qui eftoient commandez
à l'Attaque de Lortaine,
marcherent en fort bon ordre
vers la groffe Rondelle à droit,afin
de fe loger fur la bréche . Quarante
Grenadiers ayant un Capitaine
à leur tefte avec un Lieutenant
& un Sergent , furent fuivis
de cinquante Fufeliers , &
d'un pareil nombre d'hommes armez
de faulx , fous les ordres
d'un Capitaine , d'un Lieutenam
,
de Bude. 123
nant , d'un Sergent , & des autres
Officiers fubalternels. Cent
hommes chargez de haches &
pelles eftoient à la premiere ligne,
commandez par un Capitaine
, par un Lieutenant , & par
un Sergent, & avoient deux cens
Moufquetaires pour les foûtenir.
Le Prince de Neubourg, Grand-
Maistre de l'Ordre, Teutonique
, commandoit en cet endroit
de l'Attaque , & le Marquis de
Nigrelli , General de Bataille ,
le Colonel Keth , le Baron Reder
, Lieutenant Colonel , & le
Lieutenant Major de Staremberg
l'accompagnoient pour
porter fes ordres , & les faire
executer avec plus de promptitude.
Le Comte de Souches, qui
avoit auprés de luy le Sergent
general Diepental , le Colonel
d'Oetingen , le Comte Jorger,
,
Fij
124 Hiftoire du Siege
1
Lieutenant Colonel , & le Sergent
Major de Croy, marcha au milieu
vers la Courtine , précedé de 50.
Grenadiers , de cent Fufeliers, &
-de cent autres hommes armez de
faulx & de bâtons ferrez par les
deux bouts . Ceux - cy ayant leurs
Officiers à leur tefte , avoient
auffi pour les foûtenir 200. Moufquetaires
& 5o.hommes avec des
haches & des bêches propres à faper
& à faire des logemens après
qu'on auroit chaffe les Ennemis
de leurs poftes. La difpofition fut
pareille à l'Attaque de Brandebourg.
Ceux qui devoient donner
à la bréche de la Rondelle à gauche,
eftoient foutenus d'un pareil
nombre de Moufquetaires , & avoient
ordre de faire grand feu
contre les Turcs fi- toft qu'ils fe
montreroient hors de leurs Coupures.
Les Heiduques furent
commandez pour donner une
de Bude. 125
fauffe alarme du cofté de l'eau ,
à l'endroit où l'embrafement du
Magafin avoit ouvert la Murailles.
Trois cens hommes les foutenoient
fous les ordres d'un Sergent
Major , de trois Capitaines
& des autres Officiers Inferieurs.
Tous les autres Generaux
furent poftez en divers endroits
pour y faire la fonction
de leurs charges fuivant le commandement
qu'ils avoient receu
. On avoit mis douce cens
hommes de reſerve dans un fond
au pied de la brêche , & ils devoient
s'avancer par files afin de
remplir la place de ceux qui feroient
tuez . Le General Dinghen
les commandoit. Le refte de l'Infanterie
eftoit deftiné pour s'avancer
de la mefme forte fi les
Generaux & les autre Officiers
à qui l'on avoit confié la garde
Y
Fiij
126 Hiftoire du Siege
de la Tranchée , l'euffent jugé
à propos. Tout ayant efté difpofé
de cette forte , les Troupes
Imperiales & celles de Brandebourg
marcherent en mefme
temps du coté des brêches ,
chacun en fon rang , tant les Of
ficiers que les Soldats , principalement
vers la grande Rondelle,
dont la maçonnerie n'avoit
pas
efté bien éboulée , quoy qu'on
y euft fait jouer plufieurs Mines.
Ce fut de part & d'autre
un feu effroyable & un bruit
terrible qu'on ne sçauroit exprimer.
Si le Canon , les Bombes
, les Carcaffes , les Grenades,
& la moufqueterie des Affiegeans
, firent un fracas qui euſt
pû épouvanter les plus intrepides
, le feu que firent les Affiegez
& par leur Canon & par
leurs Mortiers à pierres qu'ils ac- .
compagnerent d'une grefle de
de Bude.
127
Fleches , de Dards , de Bombes
ardentes , & autres Machines,
qu'ils faifoient rouler du haut
des brêches où ils s'expofoient
à corps découvert , fit voir aux
Chreftiens qu'ils avoient à faire
à des gens determinez qui leur
vendroient cherement leurs vies.
Les Imperiaux s'avancerent
bord jufqu'aux Paliffades , dont
les Ennemis avoient reparé les
bréches des Rondelles . Ils eurert
peine à y conferver leur
pofte , à caufe du grand nombre
de Fourneaux qu'on y fit
jouer. Plus de trois cens hommes
furent tuez ou accablez du
premier , & la refiftance des
Affiegez qui fut extraordinaire ,
fit reculer les Imperiaux juf
qu'à trois fois. Le Prince Charles
qui s'en appercent du lieu où
il donnoit les ordres , & qui les
F
128
Hiftoire
du Siege
રે
vit au milieu des feux , tant des
Machines que les Ennemis faifoient
rouler , que de neuf Mines
& de neuf fourneaux qu'ils
firent fauter en fort peu de
temps , s'avança luy - meſme au
pied de la brêche pour les foûtenir
avec de nouvelles Troupes
Sa prefence les anima telle.
ment , que voyant leur General
s'expofer comme eux au plus
grand peril , & vouloir fe rendre
témoin de leurs actions , ils
forcerent les Paliffades , & fe
rendirent maiftres de la grande
Rondelle où ils fe logerent. Ceux
de Brandebourg n'eurent
moins de fuccez à leur attaque.
Ils vinrent à bout de fe loger
fur la Courtine & fur la Rondelle
à gauche. Les Ennemis qui
s'eftoient retirez derriere les retranchemens
qu'ils avoient faits
pas
all
de Bude. 129
= au de- là des Paliffades , firent
leurs efforts pour les en chaffer,
& jetterent fur les uns & fur
les autres quantité de Fleches ,
de feux d'artifices , & d'autres
Inftrumens remplis de foufre ;
fur tout leurs Mortiers à pierres,
les Mines & les Sacs à poudre
aufquels ils mettoient le feu en
ſe retirant des Poftes qu'on les
forçoit de quitter , tuerent &
blefferent un grand nombre de
Chreftiens. La prefence du Prince
Charles qui ne voulut point
abandonner l'entreprife , contribua
fort à l'heureux fuccez qu'elle
cut. Chacun cherchoit à fe
fignaler avec une intrepidité qui
n'eft pas croyable , & les Soldats
à envy les uns des autres,
prenoient le Pofte que leurs camarades
leur abandonnoient en
perdant la vie. Les Imperiaux
F v
130 Hiftoire du Siege.
trouverent dans la grande Rondelle
deux Etendarts des Janiffaires
, & trois Pieces de Canon,
& ceux de Brandebourg en trouverent
fept & quelques Mortiers
dans la Rondelle dont ils s'étoient
emparez à gauche.
Pendant que l'on donna l'affaut
de ce cofté - là , l'Electeur de Baviere
le donna auffi du cofté de
fon attaque . Il avoit fait brûler le
jour precedent les Paliffades que
les Ennemis avoient plantées fur
la brêche, & fi-toft qu'on eut entendu
le Signal pour y monter,les
Fufeliers , & les Grenadiers avec
les hommes armez de haches qui
avoient fes ordres pour faper celles
qui pouvoient encore embaraffer
, fortirent de la Tranchée,
fuivis de cent Moufquetaires fous
un Capitaine & deux Lieutenans
, pour monter à l'affaut, tant
à
de Bude.
à droit qu'à gauche. Ĉent Travailleurs
marcherent en fuite, 25 .
avec des Pelles , & foixante &
quinze avec des faux , pour faire
un logement fur la hauteur de la
Rondelle, aprés qu'on s'en feroit
emparé. Ils eftoient fouftenus de
50. Fufeliers , de 30. Grenadiers,
& de 200. Moufquetaires. D'autres
Moufquetaires choifis avoiết
efté commandez pour feconder
de chaque cofté les trois Bataillons
Imperiaux , Bavarois & Saxons
qui devoient fouftenir les
premiers. On fe mit en marche
par les Ouvertures qui avoient
efté faites aux foffez vers la brêche
à droit & à gauche de la
Rondelle. En mefme temps toutes
les bateries commencerent à
tirer fur les brêches, & contre les
murailles hautes & les feneftres
des maifons du Chafteau, & l'on
jetta
132
Hiftoire du Siege
jetta auffi fans aucun relâche des
bombes & des carcaffes , dont il
y en eut quantité qui furent jettées
contre les retranchemens
des Affiegez , & entre les deux
premieres murailles du cofté du
Danube. Quoy que la muraille
fuft encore haute & difficile
à monter , on s'avança vers
la brêche à droit & à gauche
avec tant de valeur , de courage
& de conduite , que l'on
s'empara de la Rondelle , malgré
les coups de Moufquets que
les Ennemis tiroient fans ceffe
des Crenaux de cette meſme
muraille . On s'empara auffi à
gauche d'un lieu fitué entre les
maifons , & la muraille exterieure
, ce qui n'eftoit pas aifé
, parce que les endroits les
plus éminens du Chateau le
commandoient , & que l'on jettoit
de Bude .
133
toit de là fur les Affiegeans
une infinité de pierres , de Grenades
, de Bombes & de Sacs
à poudre. Ce feu continuel ne
put arrefter l'ardeur qui les emportoit
, & ils l'effuyerent avec
une bravoure qu'on ne peut affez
loüer, mais la nuit qui commençoit
d'approcher , ne permit pas
qu'on avançaft davantage. On
travailla à des Logemens fur la
Rondelle , & dans les autres Poftes
que l'on avoit occupez . L'Electeur
de Baviere fe tint expofé
au feu pendant toute l'action . Il
vifita tous les Poftes , & alla par
tout donner les ordres qu'il jugea
utiles pour la feureté & pour la
perfection du travail. Non feulement
il animoit les Soldats par
fa prefence , mais il les engageoit
à continuer de bien faire en leur
donnant des marques de fa liberali
F34
Histoire du Siege
ralité . Le Prince Louis de Bade
fit paroiftre auffi beaucoup d'intrepidité
, & demeura expofé
aux coups pendant toute l'efcarmouche
, afin qu'on apprift par
fon exemple à méprifer le peril.
Le Prince de Neubourg, le Prince
Eugene de Savoye , & plufieurs
autres Generaux montrerent
de leur cofté toute la bravoure
qui pouvoit donner un
nouveau courage aux Attaquans,
& la fermeté avec laquelle ils les
voyoient foûtenir le grand feu
des Ennemis , fervit beaucoup à
leur faire remporter les avantages
qu'ils eurent en cette journée.
Ce que firent les Heiduques
ne fut pas confiderable. Auffi ne
faifoient- ils qu'une fauffe attaque
afin d'attirer les Ennemis de
ce cofté- là . Ils y trouverent les
Poftes tres -bien garnis , à caufe
que
de Bude..
135
*
que c'eftoit l'endroit où te Magafin
avoit fauté , & par confequent
le plus découvert. L'affaut:
dura trois heures avec grand
perte du côté des Affiegeans . Ils .
eurent prés de deux mille hom .
mes tuez ou bleffez , fans un fort
grand nombre d'autres qui furent
brûlez ou enterrez par les
mines. Le Prince Charles fut
atteint legerement d'un coup de
pierre à la jambe , & le Sieur
d'Artein fon Ayde de Camp general
de ce Prince , fut tué auprés
de luy. Le Duc de Croy qui
n'avoit receu d'abord qu'une
bleffure peu confiderable , receut
enfuite un coup de Moufquet qui
luy perça le genoüil . Le Duc de
Curland Colonel dans les Troudes
de Brandebourg , fut bleffé
dangereufement , auffi bien que
le Comte Schileck, & le Marquis
Sa
136
Hiftoire
du Siege
,
Sanati . Le General Major de
Thingen le fut mortellement à la
teſte. Le Baron d'Afti qui n'eſtoit
pas encore guery d'une bleffure
qu'il avoit receu e deux jours auparavant
, eut les deux cuiffes
percées , & le Baron de Welbersheim
, les deux bras caffez . Le
Prince de Comercy qui s'eft
toûjours fignalé dans les occafions
où il y avoit le plus de peril
à effuyer , receut auffi une legere
bleffure. Les autres bleffez
dont on a pû jufqu'icy fçavoir les
noms , furent le Duc de Scalona ,
le General Major Diepenthal , le
Comte & le Chevalier d'Apremont
, Freres , le Colonel Goeling
; le Comte d'Archinto ; le
Comte Zacco Sergent Major , le
Lieutenant Colonel Rotten ; le
Comte de Saur ; le Sieur Reder,
Lieutenant Colonel du Regiment
de Bude 137
ment de Neubourg . Le Sergent-
Major Pini , le Marquis de la
Verne , le General Rummel , le
Baron de Welberg , Lieutenant
Colonel de Beck , avec plufieurs
Officiers de ce mefme Regiment:
le Comte de Palfi , Lieutenant
Colonel ; le Baron d'Aversberg,
le Sergent Major , un Capitaine
& un Lieutenant de Staremberg,
& plufieurs autres Officiers
des Regimens de Bade , de Beck,
de Steinau, de Rummel , de Selbolftoff,
de Gallensfels , & autres.
Le Comte de Dona , & le Sergent
Major de Marwitz , furent
tuez à l'attaque de Brandebourg.
Le 28. on dreffa une Batterie
fur la Rondelle du milieu , dont
les Imperiaux s'eftoient rendus
maiſtres à l'Attaque de Lorraine ,
& l'on applanit les bréches , afin
d'y
138 Hiftoire du Siege
d'y pouvoir guinder l'Artillerie .
On travailla à perfectionner les
Lignes de communication des
logemens , & l'on pourfuivit le
travail de trois Mines , qui avoient
efté commencées fous la
feconde Muraille incontinent aprés
l'Affaut du jour précedent.
Le Mineur fut attaché en deux
endroits de cette mefme Muraille.
Ceux de Brandebourg tirerent
une Ligne paralelle à cette
Attaque .
Le 29. on fit fauter deux mines
à l'Attaque de Lorraine. Il y
en eut une qui renverfa quinze
toifes de maçonnerie dans le Foffé
. Elle ne laifferent pas de caufer
du dommage aux Affiegeans ,
puis que deux Capitaines des
Troupes de Brandebourg , & environ
cinquante Fantaffins , la
plufpart des mefmes Troupes.
£u
de Bude.
139
furent enterrez fous leur debris .
Une Batterie de trois pieces de
Canon fut achevée ce jour - là à
la mefine Attaque . Quelques Armeniens
fugitifs vinrent avertir
que plus de mille perfonnes , hommes
, femmes & enfans , avoient
efté tuez dans la Place le jour
qu'on avoit donné l'Affaut ; qu'une
grande quantité avoient voulu
fe fauver du cofté de la Ri
viere , mais qu'ils y avoient trouvé
tous les Bateaux enchaifnez;
que la Garnifon n'eftoit plus que
de mille Combattans , & que le
Muphti les exhortoit inceffammet
à fe rédre,mais que le Bacha
les animoit à refifter jufqu'au
bout par l'efperance du fecours
qu'il attendoit ; qu'il y avoit par
tout des Retranchemens & des
Coupures , & qu'à la derniere
extremité il avoit efté refolus
qu'on
140 Hiftoire du Siege
qu'on mettroit le feu aux Magagafins
, pour faire fauter la Ville
avec tous ceux qui fe trouveroient
dedans. La nuit , les Bavarois
avancerent environ de quarante
pas dans la Rondelle du
Chafteau , en tirant du cofté de
la Riviere , avec perte de cinquante
hommes , & ils y firent
mener deux pieces de Canon,afin
d'élargir la bréche de la feconde
Muraille .
Le 30. le Comte de Souches
& le Comte de Lodron ,Major de
Cavalerie , monterent la Tranchée
. Ce dernier avoit efté nommé
pour la relever , aina que le
Comte de Stirum , auffi Major de
Cavalerie , parce qu'il n'y avoit
plus que le Comte de Nigrelli ,
Major general d'Infanterie , qui
puft fervir. On fit jouër ce jourlà
une troifiéme Mine à l'Attaque
de Bude. 141
que de Lorraine , & deux à l'Attaque
de Baviere, qui firent affez
d'effet. Cependant le Prince
Charles jugeant qu'il y alloit du
fervice de l'Empereur de ne pas
expofer la Ville à l'affaut & au
pillage , envoya une ſeconde fois
fommer le Commandant de fe
rendre. Comme il eftoit déja
tard , les Affiegez prierent les Députez
d'attendre jufqu'au lendemain
la réponſe qu'ils leur demandoient
, parce qu'il falloit affembler
le Confeil fur une affaire
d'une fi grande importance.
Le 31. le Prince Eugene de
Savoye & un Interprete allerent
à la Porte de la Ville , où aprés
qu'on les eut fait attendre une
heure & demie , on leur apporta
deux Lettres du Commandant,
l'une adreffée au Prince Charles,
&
142 Hiftoire du Siege
& l'autre à l'Electeur de Baviere .
Elles contenoient , que la confervation
de Bude , qui eftoit la clef
de Conftantinople & de Jerufalem,
eftoit d'une telle confequence
pour les Ottomans , qu'il ne
pouvoit fe refoudre à la remettre
entre les mains des Chreftiens
mais qu'on n'avoit qu'à
choifir une autre Ville , & qu'il
eftoit preſt à la donner , efperant
par là qu'on luy voudroit bien
accorder la Paix . Ce mefme jour
le premier Capitaine d'Artillerie
eut le bras percé , & le Comte de
Staremberg , en reconnoiffant la
bréche, receut un coup de Moufquet
qui luy emporta un doigt,
& le bleffa à l'épaule . La fièvre
qui luy furvint , accompagnée
d'une diffenterie , l'obligea de fe
faire tranfporter à Comore , où le
Prince de Vaudemont , qu'une
vio
de Bude.
143
violente maladie avoit forcé de
quitter le Camp , eftoit déja depuis
quelques jours. Sur les huit
heures du foir , les Affiegez qui
n'avoient point eu de réponſe,
envoyerent deux Agas au Prince
Charles , & emmenerent avec
eux le Baron de Crentz , Ayde
de Camp du Prince Louis de
Bade , & un Interprete. On crut
que le Commandant avoit deffein
de capituler , mais toute la
negociation aboutit encore à dire
, qu'il feroit livrer telle Ville
qu'on voudroit fi on levoit le
Siege de Bude , ou qu'il rendroit
cette Place pourveu qu'on fift
une Paix generale avec l'Empire
Ottoman . Le Prince Charles
voyant que l'on n'avoit point
d'autres propofitions à luy faire,
renvoya les deux Agas , & rappella
les Oftages. Ils dirent qu'on
les
144 Hiftoire du Siege
les avoit receus fort civilement,
& qu'à leur départ ils avoient
veu beaucoup de confternation
dans la Ville. On fceut ce jour
là que l'Aga des Janiffaires eftoit
mort des bleffures qu'il avoit receues
à l'Affaut du 27. & qu'il y
avoit plus de deux mille hommes
des Ennernis bleffez ou malades.
Le premier jour d'Aouft les
Imperiaux firent jouër une Mine
qui eut un tres - bon effet. Elle fit
bréche dans la feconde Muraille,
& ébranla mefme la troifiéme , ce
qui obligea les Affiegez d'y accourir
en grand nombre. Les
Bavarois profiterent de ce moment
pour attaquer le Chafteau .
Ils y entrerent , mais ils ne purent
fe maintenir dans le logement
qu'ils y avoient commencé.
Le Marquis de la Vergne,
Gene
de Bude . 145
General Major , receut deux
coups de Fléches , dont l'un luy
perça le bras & l'autre la cuiffe .
Le Lieutenant Colonel de l'Artillerie
en receut un autre au ventre.
Quatre Fugitifs vinrent a-,
vertir que les Affiegez travailloient
à une Mine pour faire fauter
la grande Rondelle dont les
Imperiaux s'eftoient emparez. Le
General Dunewald arriva au
Camp avec la Cavalerie qu'il
commandoit aux environs de
Stulweiſembourg.
Le 2. le Comte Caraffa , Major
General, & le General Heufler
, arriverent auffi au Camp,
avec un Corps de quatre mille
hommes qu'ils commandoient
dans la haute Hongrie du cofté
de Zolnoch , & ils prirent leurs
poftes au delà du Danube , où
deux mille Hongrois comman-
G
146
Hiftoire du Siege
dez par le Comte Budiani les
joignirent . La nuit on travailla
aux Lignes de circonvallation
, pour arrefter le fecours des
Ennemis.
Le 3. on vit paroiftre des Avant-
coureurs de l'Armée des
Infidelles, & les Affiegez firet une
falve de tous leurs Canons . Comme
on s'eftoit difpofé à donner
un troifiéme Affaut , les Affiegeans
firent jouer une Mine , mais
elle n'eut pas l'effet qu'on en avoit
eſperé , & la bréche ne s'êtant
pas trouvée affez profonde,
le Prince Charles envoya dire à
l'Electeur de Baviere qu'il ne jugeoit
pas à propos de donner
l'Affaut. Les Troupes de cet Electeur
ne laifferent pas d'y monter
, foit que l'ardeur qui les ani
moit leur fift avancer l'heure du
Combat , foit qu'elles euffent
pris
de Bude.
147
-
pris le bruit de la Mine pour le
Signal dont on étoit convenu . Le
Prince Charles qui en eut avis
fit donner l'attaque de fon cofté .
Les Affiegez au nombre de plus
de deux cens , fe montrerent fur
la Bréche , le Sabre à la main , &
le corps tout découvert. Les Femmes
& les Enfans y parurent
mefme tirant des Fléches , &
faifant rouler des pierres. Il y
eut beaucoup de vigueur de part
& d'autre , & la refiftance fut
telle du cofté des Ennemis , que
tout ce que purent faire les Imperiaux
, ce fut d'avancer leurs
Logemens jufqu'au pied de la
troifiéme muraille. Ils eurent plus
de deux cens hommes tuez ou
bleffez. Les Bavarois fe faifirent
de deux ouvrages , où ils trouverent
du Canon & des Mortiers ;
mais ce ne fut pas fans perdre
G
11
148 Hiftoire du Siege
beaucoup de monde . Le Prince
de Bade receut une contufion
d'une Balle de Moufquet qui luy
perça le Ceinturon & le Jufte
au corps par derriere , & le Prince
Eugene eut un coup de Fléche
, dont le fer luy entra entierement
dans la main . Le Comte
de Caunits , Lieutenant Colonel
du Regiment de Metternich , le
Comte Hermeftein Lieutenant
Colonel de Souches , le Sieur de
Breffey , Gentilhomme Bourguignon
, Major du Regiment de
Grana , & le Major du Regiment
de la Vergne, furent bleffez à l'attaque
des Imperiaux avec plufieurs
autres Officiers. Il y eut un
jeune Comte de Staremberg tué
au commencement de cet Allaut.
Le Chevalier Huberti , Capitaine
des Gardes de l'Electeur de
Baviere , fut bleffé à l'attaque des
Ba
de Bude. 149
Bavarois avec quelques Officiers,
qui ne pûrent obliger les Fantaffins
à les fuivre , tant ils eftoient
rebutez par le feu des Ennemis,
& par les Bombes , Pierres & Grenades
qu'ils jettoient fur eux du
haut du Chateau.
Le 4. on continua de, canonner
& de bombarder la Ville , &
Fon eut avis que l'Armée Ottomane
s'approchoit . On acheva
les deux logemens à droit & à
gauche de la grande Rondelle,
& l'on conduifit quatre pieces
de Canon fur la bréche . On mit
plufieurs rangs de Pali ffades, dont
on fortifia les Travaux , que l'on
avança fort prés des Retranchemens
des Affiegez . Le Prince
Charles employa ce jour à vifiter
tous les Poftes , & à difpofer tout
ce qu'il crut neceffaire pour
eftre en eftat d'aller au devant
G iij
150 Hiftoire du Siege
de l'Armée des Ennemis.
l'Ar-
Le 5. on ne fit que travailler
aux Lignes de circonvallation, &
de contrevallation , & à des Redoutes.
On travailla auffi à des
Mines, à de nouvelles Bateries, &
à combler le Foffé à l'Attaque des
Imperiaux . On eut avis que
mée des Ottomans s'avançoit
toûjours , & que le Grand Vifir
la commandoit en perfonne. On
détacha auffi- toft differens partis ,
afin d'en avoir des nouvelles affeurées
; & cependant la garde
fut redoublée dans tous les Pofles
. Les Affiegez jetterent quantité
de Bombes. Il y en eut une
qui tomba à trois pas du Prince
Charles proche les Bateries des
Imperiaux. Elle mit le feu à
quelques barils de poudre , tua
vingt Canonniers ou Soldats , &
en bleffa plufieurs autres. Pendant
de Bude. 151
dant la nuit les Affiegez firent
defcendre un Batteau chargé de
monde & de meubles,ce qui obligea
de faire un Pont prés de Pefty
pour empefcher que la mefme
chofe n'arrivaft encore , & pour
avoir le fourage plus commodement.
Le 6. les Huffars , après avoir
battu un Party de trente Turcs,
qui s'eftoient détachez pour donner
quelques avis au Bacha de
Bude , amenerent quatre Prifonniers
, par lesquels on fçeut qu'il y
avoit une Armée de vingt mille
hommes du cofté de Stulweiſembourg,
fous le commandement du
Seraskier , & que le Grand Vifir
devoit fuivre avec une Armée de
trente mille hommes, & quarante
pieces de Canon . Le Prince Charles
donna auffi toft fes ordres
pour faire tranſporter les Mala-
Güij
152 Hiftoire du Siege
des , les Bleffez , & tout le bagage
fuperflu dans l'Ifle de S. André;
l'on travailla avec toute la diligence
poffible à perfectionner les
Ouvrages neceffaires pour mettre
le Camp en feureté , & pour
empefcher que les Ennemis ne
fecouruffent la Place . Les Bavarois
firent jouer un Fourneau qui
réüffit affez bien . Il y en avoit encore
un autre mais les Mineurs
ayant rencontré ceux de la Ville,
ne le pûrent achever.
,
Le 7. comme on fe trouvoit
fort incommodé d'une Batterie
que les Affiegez avoient derriere
la petite Rondelle , on en dref
fa une de deux . Canons pour la
démonter . Elle fit l'effet qu'on
en avoit attendu . Les , Bavarois
en firent
firent jouer une nouvelle ,
qui eftoit auffi de deux pieces
de Canon. Ils l'avoient dreffée fur
un
de Bude.
153
un échafaut bien élevé au bout
de la premiere muraille de la
Rondelle , pour abatre le Chafteau
. La nuit, on tâcha de combler
le Foffé avec des fafcines,
mais tout ce qu'on y jetta fut confumé
par des fléches ardentes que
tirerent les Affiegez , & qui y mirent
le feu. Sur le midy on fceut
par des Prifonniers que toute l'Armée
Ottomane devoit s'affembler
le lendemain devant Albe Royale.
On vint dire le foir qu'il y en
avoit partie arrivé à une lieuë du
Camp , du cofté du Chateau où
eftoit l'Attaque des Bavarois.Cela
obligea le Prince Charles à changer
fon Camp. Il fit occuper les
hauteurs & les vallons qui environnent
la Place , & nomma les
Regimens que l'on devoit envoyer
au devant des Ennemis, &
ceux qui demeureroient pour
G V
154 Hiftoire du Siege
continuer le Siege. On eut avis
ce jour là que le General Schults
eftoit mort. Il commandoit un
Camp- volant entre la Save & la
Drave.
Le 8. à la pointe du jour , trois
mille Turcs & Tartares parurent
fur une hauteur. Ils enleverent
deux Gardes avancées de douze
hommes chacune , & aprés avoir
efcarmouché avec les Huffars,
ils fe retirerent fur le midy. Cent
cinquante Hongrois qui avoient
efté détachez pour reconnoiftre
l'Armée des Infidelles , & qui
revenoient au Camp avec quelques
Prifonniers , tomberent entre
leurs mains , & en furent taillez
en pieces , à la referve de
quelques- uns qui en apporterent
la nouvelle. Ce mefme jour
les Affiegez ayant ouvert la Porte
du Chafteau , on fit un déta
de Bude.
155
tachement à l'attaque de Baviere
, pour s'avancer de ce coſtélà.
On en vit un fort grand nombre
le fabre à la main derriere
leurs retranchemens , & ils jetterent
tant de Grenades, qu'on fut
obligé de fe retirer , avec perte
de foixante hommes. On continua
de mettre les Lignes de Circonvalation
en défenfe , en les
fortifiant avec des Redoutes , fur
lofquelles on plaça quelques pieces
de Campagne.Douze hommes.
furent tuéz ou bleffez à une Batterie
à laquelle on travailloit depuis
plufieurs jours , & que les
Bombes des Ennemis ruinerent.
&
Le 9. les Tartares & les Turcs
revinrent fur le midy le long de
la Montagne vis à vis le Camp
de l'Electeur de Baviere
pafferent tout le jour à efcarmoucher.
Quoy qu'ils ne fuffent
pas,
156
Hiftoire
du Siege
pas en affez grand nombre pour
forcer les Lignes, ils ne laifferent
pas d'incommoder , parce qu'on
fut obligé de fe tenir toûjours
fous les Armes. Une Bombe des
Affiegez tomba à l'Attaque des
Imperiaux au milieu de plus
de mille Grenades . Elle mit le
feu à quelques unes dont quatre
ou cinq Moufquetaires furent
tuez. Le Comte d'Archinto
fut bleffé legerement. On pour
fuivit le travail des Mines que
l'on deftinoit à renverfer la feconde
muraille, & les retranchemens
des Paliffades dont les Ennemis
avoient reparé les brèches,
& les Heiduques furent employez
à faire des Fafcines & des
Sacs à terre , pour en remplir les
Foffez, qui eftoient de la hauteurde
deux piques .
Le 10. les Affiegez firent une
for
de Bude. 157
fique
fortie à l'Attaque des Bavarois,
& couperent la tefte à quarante
hommes qu'ils trouverent dans la
Rondelle du Chateau. Un gros
de Turcs au nombre de douze
ou quinze cens , s'approcha du
Camp , mais ils n'eurent pas
toft aperceu un détachement.
commandoit le General Dunewald,
qu'ils prirent la fuite .Trente
Huffarts ayant rencontré
quarante
Turcs, les combatirent . Ils.
en tuerent fix , & firent cinq
Prifonniers , parmy lefquels eftoit
un Aga , qui ayant efté déja pris
il y a quelques années , avoit
payé huit mille écus de rançon.
Ils dirent que le Seraskier avoit
ordre de fecourir Bude à quelque
prix que ce fuft ; mais qu'ils
croyoient que l'on auroit peine
à l'engager au Combat .. Un Efpion
vint donner avis que l'Armée
158 Hiftoire du Siege
mée Otomane, compolée de plus
de foixante mille hommes , eftoit
campée le long du Danube à
trois lieues des Affiegeans. Il dit
qu'il avoit efté la reconnoiftre en
habit de Tartare , que le Serafkier
la commandoit , qu'elle occupoit
deux lieues d'étendue, &
que le grand Vifir eftoit demeuré
derriere avec mille hommes
qu'il avoit retenus pour le
garder.
La Ligne de communication
de l'attaque des Bavarois avec
celle des Imperiaux fut achevée
, & un Foffé profond que
l'on fit avec des bons épaulemens,
mit leur Quartier hors d'eftat
d'eftre infulté par les Ennemis.
Le 11. deux mille Chevaux
Turcs parurent fur la hauteur vis
à vis de l'Attaque de Baviere.
Quelques Efcadrons furent dé
tachez pour les aller reconnoitre.
de Bude.
159
tre. Il y eut une Efcarmouche
dans laquelle
le Prince
Charles
de Neubourg
eut un Cheval
tué
fous luy ; mais les Infidelles
commencerent
à defcendre
en fi grad
nombre
qu'il fut impoffible
de
les fouftenir
. Ainfi il falut fe retirer,
& fe contenter
de faire fur
eux un feu continuel
de Canon .
Trois Mines
furent
miſes en état
de jouer le lendemain
. La plus
grande
avoit huit Chambres
, &
leur charge
eftoit de cinq milliers
de poudre
. Comme
on avoit
refolu
d'aller
à l'Affaut
fi elles
réuffiffoient
, le Prince
Charles
commanda
trois mille hommes
de pied avec quinze
cens Chevaux
ou Dragons
, pour les foûtenir
. Le Comte
Petnehafi
arriva
au Camp
avec trois mille
Hongrois
,
Le 12. on fit jouer les trois Mines,
160
Hiftoire du Siege
nes, dont la plus grande n'eut aucun
effet , ce qui fit croire qu'el
le avoit efté découverte, & qu'on
en avoit tiré les poudres. Les
deux autres ne firent qu'une ouverture
pour dix hommes de
front , encore n'eut- elle pas efté
pluftoft faite que les Affiegez la
reboucherent par le moyen des
chevaux de frife , de forte que
l'on ne jugea pas qu'on d'euft
hazerder l'affaut ,
, quoy qu'on s'y
fuft déja difpofé . On fit retirer
les detachemens , & les Mineurs
eurent ordre de commencer un
nouveau travail . Les Mines jettérent
dans la Tranchée quantité
de pierres , dont plufieurs des
Affiegeans furent bleffez ,entr'autres
le Prince de Wirtemberg , le
Comte de Ridberg , & les Lieutenans
Colonels des Regimens de
Lodron de Neubourg. L'Armée
des
de Bude. 161
des Infidelles vint camper fur le
haut d'une Montagne qui n'étoit
pas fort éloignée des Lignes.
Ceux qu'on avoit envoyez pour
s'en informer,rapporterent qu'elle
eftoit de cinquante mille hommes
avec du Canon .
Le 13. les Affiegez firent une
fortie à cheval fur la grande Garde
des Imperiaux ,dont ils tuerent
douze hommes , & emmenerent
quatre Prifonniers qu'ils firent .
Le Comte de Colonitz , Page du
Prince Charles , & un Trompette
de l'Electeur de Baviere , eurent
la tefte coupée dans cette
efcarmouche. Les Turcs parurent
en bataille devat leur Camp,
& comme ils firent defcendre une
partie de leur Armée, on crut
qu'ils avoiet envie de döner combat.
Cela obligea le Prince Charles,
quidésle jour precedent avoit
fait
162
Hiftoire du Siege
fait fortir des Lignes toute la Cavalerie
, Dragons , Huffars , &
Croates,d'en faire auffi fortir l'Infanterie
, à la referve de vingt
mille hommes ,aufquels il en confia
la garde , & celle des trois attaques.
On forma deux Efcadrons
de la plupart des Volontaires , &
deux mille Heiduques , & un pareil
nombre de Hongrois , furent
commandez pour faire l'avantgarde
de l'Armee , & pour venir
les premiers aux mains fi les
Turcs vouloient entreprendre
quelque chofe. Ceux qu'on avoit
veus d'abord ne tenterent rien,
& fe retirerent le foir dans leur
Camp.
Le 14 dés fix heures du matin
, on s'apperceut qu'ils avoient
formé un corps de trois mille Janiffaires
& d'environ 5000. Chevaux
, qui devoit fervir d'avantgarde,
de Bude.
163
que
garde à leur Armée , tandis
le refte demeureroit derriere rangé
en bataille pour les fouftenir.
On apprit que leur deſſein eftoit
de faire paffer les trois mille Janiffaires
entre le quartier des Imperiaux
, & celuy de Brandebourg,
& que pendant l'action les Affiegez
devoient faire une Sortie
pour leur faciliter le paffage, &
leur donner moyen d'entrer dans
la Ville.En meſme temps le Prince
Charles commanda le Comte
de Dunewald pour former l'aifle
gauche de la Bataille avec neuf
Kegimens Imperiaux , qui furent
ceux de Caprara , Palfi , Taff, Lodron
, Neubourg , Furftemberg,
Stirum , Serau, & Schultz , & huit
cens Huffars. Le General Heufler
eut la droite avec un pareil
nombre de Regimens , tant Imperiaux
& Bavarois, que de ceux
de
164 Hiftoire du Siege
de Saxe & de Brandebourg , qui
occuperent une hauteur dont le
terrein leur eftoit avantageux, &
d'où tous les mouvemens des Ennemis
pouvoient eftre décou
verts . Le gros de l'Armée eftoit
difpofé en fort bon ordre , &
dans une diſtance de terrein- qui
luy donnoit facilité de charger
tout ce qui s'avanceroit pour fecourir
Bude. Les huit mille Janiffaires
& Spahis qui devoient
forcer les Lignes, après avoir voltigé
derriere les hauteurs pendant
deux heures , prirent leur
marche entre ces mefmes hauteurs
, & rencontrerent d'abord
les quatre mille hommes de l'Avantgarde
, qui furent rompus au
premier choc. Le Baron de Mercy
les voyant plier , ſe mit à la
tefte du Regiment de Schultz
pour les fouftenir , & en faifant
fermé,
de Bude. 165
>
ferme , il donna le temps au
Comte de Dunewald d'avancer
avec les Regimens de Taff , de
Lodron , & autres. Ce fut alors
que l'on vint à un Combat tresrude
& tres - opiniaftré . Les
Infidelles furent chargez avec
toute la vigueur poffible , & ces
Regimens faifant leurs decharges
à propos , renverferent
leur
Cavalerie qui prit la fuite & abandonna
les Janiffaires. Il y en
eut deux mille de tuez . Chacun
d'eux portoit quatre à cinq Grenades
, & ils avoient tous , les uns
des haches , les autres des pelles
pour rompre les Lignes & les
applanir s'ils euffent pu aller jufques-
là. On prit huit pieces de
Canon , quarante Etendarts , &
fon fit quatre à cinq cens Prifonniers.
Aprés le Combat , les
Infidelles firent divers mouvemens
166
Hiftoire du Siege
mens en s'avançant dans la Plaine
oppofée au Čamp de l'Electeur
de Baviere , qui ayant fait
auffi fortir fon Armée des Lignes
, la tenoit en ordre de Bataille.
Il fut refolu dans un Confeil
general qui fe tint , qu'on iroit
les attaquer , ce qui fut executé
par cet Electeur , mais ſe voyant
pourfuivis ils fe retirerent dans
leur Camp.Le Comte de Dunewald
, & le General Heufler , qui
s'étoient avacez avec les Huffars
par de là les hauteurs , rencontrerent
un gros de Spahis , que
les Ennemis avoient laiffé pour
couvrir leur retraite. Ils en tuerent
prés de deux cens , & en
firent trente Prifonniers. Il n'y
eut qu'environ cent hommes tuez
du cofté des Imperiaux , entre
lefquels fe trouvèrent le Comte
de Lodron , Lieutenant Colonel
de Bude. 167
nel du Regiment de Croates de
ce nom , & le Major du Regiment
de Caprara On fceut que
les Tures avoient perdu plus de
quatre mille hommes , fans un
fort grand nombre de bleffez, &
qu'ils eftoient d'autant plus touchez
de cette perte , que les Janiffaires
qui avoient eſté tuez
eftoient l'élite de leurs Troupes,
& que c'eftoit par eux principalement
qu'ils s'eftoient flatez
de pouvoir jetter du fecours dans
Bude. Les Affiegez firent une
fortie pendant le Combat , mais
ils furent fi vigoureufement repouffez
, qu'ils tarderent peu à
fe retirer. L'Armée Imperiale
eſtant retournée dans ſon Camp ,
& celle de l'Electeur de Baviere
dans le fien , on fit une falve de
tout le Canon des trois Attaques.
On expofa fur des Piques
plu
168
Hiftoire du Siege
plufieurs teftes de ceux qui avoient
efté tuez dans le Combat
, & l'on planta fur la brêche
les Drapeaux gagnez , afin que
les Affiegez ne puffent douter
de la Victoire qu'on venoit de
remporter. La nuit on furprit
deux Efpions avec des lettres
pour le Grand Vifir. Le Bacha
de Bude luy mandoit qu'il avoit
beſoin d'un prompt fecours , &
qu'il falloit fe fervir de la nuit
pour enfoncer les Lignes des Affiegeans
; que pour luy il s'eftoit
retranché dans la Ville , mais
qu'ils eftoient trop avancez pour
leur pouvoir refiſter.
Le 15. on connut que les
Ennemis avoient decampé , &
qu'ils s'eftoient éloignez de deux
lieuës. Le Prince Charles ordonna
qu'on fift enterrer les
Morts qui eftoient demeurez
dans
de Bude.
169
dans le Champ de Bataille , afin
qu'ils n'infectaffent point l'air, &
aprés avoir envoyé aux Affiegez
un des Prifonniers qu'on avoit
faits , pour les informer de
l'heureux fuccez du jour precedent
, qui les devoit empefcher
d'efperer aucun fecours , il fit
partir le Comte de Lamberg
pour aller fommer la Ville , mais
il ne fut pas pluſtoſt arrivé à la
porte , qu'ils commencerent à
tirer fur luy , de forte qu'il fut
obligé de fe retirer . Le foir,
on apprit par un Transfuge que
trois Bachas eftoient demeurez
au dernier Combat que le
Grand Vifir avoit fait couper
la tefte à un autre , & qu'at- '
tribuant au Seraskier le mauvais
fuccez de cette journée , il
l'avoit infulté avec toutes for-
H
>
170 Hiftoire du Siege
tes de marques de, mépris & de
colere.
Le 16. les Affiegez firent joier
une Mine à l'Attaque des imperiaux
, & fortirent en mefme
temps pour tâcher de profiter de
la confufion où ils croyoient les
trouver dans leurs Tranchées,
mas ils connurent que leur Mine
n'avoit eu aucun effet , & fe retirerent
avec quelque perte . Les
Imperiaux mirent le feu aux Paliffades
de la brêche , & en brû
lerent une partie , mais les Affiegez
en remirent d'autres pendant
la nuit. On s'apperceut
qu'il y en avoit un double rang
derriere les premieres , & qu'ils
les avoient moüillées , afin d'empefcher
que celles qui eftoient
en feu ne les confumaffent.Cinq
Polonois qui vinrent ſe rendre,
rapporterent que les Jani ffaires
avoient
de Bude. 171
avoient declaré qu'ils ne vouloient
plus aller au Combat, parce
que la Cavalerie les abandonnoit
toûjours dans le peril. Ils
ajoûterent que le Grand Vifir en
avoit fait mourir quelques - uns
pour remettre les autres dans l'obeillance.
Le 17. une Mine des Affiegeans
fut éventée à l'Attaque des
Imperiaux. Un Transfuge rapporta
que le foir qu'on avoit brulé
les Paliffades , prés de cent
Turcs avoient été bleffez ou tuez
par les Bombes qu'ils y avoient
enterrées , & aufquelles ils auroient
mis le feu , fi Ton euſt
monté à l'affaut ; qu'il ne reftoit
dans la Ville qu'environ mille
hommes capables de porter les
armes , mais que chacun eftoit
refolu de fe défendre jufqu'à la
derniere goute de fon fang. Six
.
H ij
172 Hiftoire du Siege
Fantaffins qui avoient merité la
mort , monterent par ordre de
l'Electeur de Baviere au haut du
Chafteau pour en découvrir le
dedans , mais les Affiegez qui les
découvrirent les firent defcendre
trop toft. La nuit , trente
Volontaires qui s'eftoient détachez
voulurent mettre le feu aux
Paliffades qui défendoient la
brêche de la derniere enceinte
de la Place , mais il y avoit des
poudres répandues aux environs
qui en brûlerent quelquesuns
, & les Affiegez en tuerent
quelques autres , de forte qu'ils
ne purent executer leur def
fein.
Le 18. deux Polonois qui s'étoient
fauvez de l'Armée des
Turcs, rapporterent que le Grand
Vifir avoit promis trente écus
à chacun des Janiffaires qui
pour
de Bude.
173
pourroient forcer les Lignes &
fe jetter dans la Place , qu'ils s'étoient
mis en marche au nombre
de deux mille avec quantité
de Tartares , pour aller gagner
les Montagnes qui regardent la
Ville- baffe , que c'eftoit par là
que les Ennemis pretendoient
faire entrer dans Bude le fecours
que le Commandant continuoit
de preffer , & qu'ayant un Pont
à cinq lieues du Camp des Chrétiens,
ils avoient envoyé du monde
en de là du Danube pour
faire diverfion. Oń fit jouer une
Mine à l'Attaque des Imperiaux
, &le peu de ffuucccceezz qu'elle
eut , obligea de differer l'Affaut
general , & de retirer les
détachemens que l'on avoit faits
à ce deffein. La nuit , on refolut
de nouveau de brûler les Paliffades
, & trois cens hommes
-
Hiij
174 Hiftoire du Siege
furent commandez pour cela ,
mais il n'y eut qu'un fort petit
nombre de Grenadiers qui monterent.
Le grand feu que firent
les Affiegez , & la quantité de
Grenades & de Sacs à poudre
qu'ils jetterent , épouvanterent
fi fort les Moufquetaires qui les
devoient fouftenir , qu'une partie
fe cacha , en forte que les
Officiers s'avancerent prefque
feuls.
Le 19.les Imperiaux tâcherent
de fe pofter fur la petite Rondelle
de la feconde muraille,mais
la refiftance qu'ils trouverent les
en empefcha . Ils eurent prés
de quarante hommes tuez , ou
bleffez. On fut averty par un
Transfuge que le Grand Vifir
avoit commencé de fe mettre
en marche pour revenir vers le
Camp des Affiegeans mais
qu'ayant
de Bude.
175
qu'ayant appris d'un Deferteur
qu'il leur eftoit arrivé un corps
de dix mille hommes , cette nouvelle
l'avoit obligé de retourner
fur fes pas , & que vingt - cinq
mille Tartares eftoient au de- là
du Danube peur tâcher d'y faire
diverfion.
Le 20. à la pointe du jour,
pendant que l'Armée Ottomane
venoit le mettre en Bataille devant
le Camp de- l'Electeur de
Baviere , deux mille Janitaires
qui s'eftoient tenus cachez la
nuit , defcendirent par le grand
Vallon aprés que le Biouac fe fut
retiré , & ils paffetent les Lignes.
de circonvallation que l'on n'avoit
pû laiffer garnies faute de
monde. Ils poufferent la grande
Garde , mais les Generaux
Caprara, & Heufler s'eftant trouvez
heureuſement à cheval , y
Hij
176
Hiftoire du Siege
accoururent. Ils couperent ceux
qui avoient déja forcé les retranchemens
, & les taillerent en pieces
, mais toute leur refiftance,
quoyque des plus vigoureuſes ,
n'empefcha pas que prés de trois
cens ne paffaffent dans la Place,
le refte fut repouffé hors du
Camp. On fit trois cens Prifonniers
, & il y en eut beaucoup
de tuez. Le Sieur Sentini Chevalier
de Malte , & Capitaine
de Cavalerie dans les Troupes
de Baviere , s'eftant trop avancé
pour reconnoiftre les Ennemis,
fut fait prifonnier. Le Comte
de Konigfmark Lieutenant Cólonel
de Beck fut tué , & le General
Heufler bleffé au pied.
Quoy que ceux qui entrerent
dans la Ville , fuffent la plufpart
bleffez & en petit nombre , les
Affiegez ne laifferent pas de faire
de Bude.
177
re une falve de tous leurs Canons
, pour faire croire qu'il leur
eftoit arrivé un plus grand fecours.
On apprit par un Chrétien
qui s'échappa de l'Armée
des Ottomans , que le Grand Vifir
avoit fait affembler fes Troupes
,,
pour leur dire que le fecours
qu'il avoit envoyé , eftoit
entierement entré dans la Ville,
& qu'il donneroit à tous ceux
qui auroient envie de s'y jetter,
la mefme fomme qu'il avoit donnée
aux autres . L'Armée des Infidelles
fe retira à quelques lieuës
du Camp des Chreftiens .
>
Le 21. la Baterie de l'attaque
des Imperiaux qui battoit en
flanc les retranchemens des Af-
Liegez receut un fort grand
dommage du feu que fit leur Artillerie
. Elle en fut prefque entierement
démontée , ce qui fit
H v
178
Hiftoire
du Siege
qu'on augmenta le nombre des
Travailleurs pour la rétablir pen
dant la nuit.Ön redoubla auffi les
Troupes de la Tranchée , & l'on
fit un feu continuel afin d'occu
per les Ennemis. Cette même nuit
on fe prepara à donner un Affaut
au Chafteau du cofté de l'attaque
des Bavarois.
Le 22. le Prince . Charles fit
faire une fauffe Attaque , pour
faciliter par une diverfion celle
que l'Electeur de Baviere commençoit
de fon cofté. Les Turcs.
eftant accourus en grand nom.
bre fur la brêche du cofté des
Imperiaux , on fit fur eux une
décharge de Mortiers , qui leur
tuerent cent hommes , & pen
dant ce temps les Bavarois , qu'animoit
la prefence de leur Prince
, fe rendirent maiftres de la
plus grande partie du Chateau,
malgré
de Bude..
179
malgré la refiftance opiniaftre
de ceux qui le défendoient. Le
General Rummel qui commandoit
l'Attaque , fut tué d'un coup
de Moufquet dans les approches.
H fut extremement regretté .C'étoit
un Officier d'une grande experience
. On ne perdit que trente
hommes , mais plus de deux
cens furent bleffez , la plufpart
par des Sacs à poudre . Un Duc
de Saxe- Mesbourg , ayant une
Compagnie dans le Regiment
de Bade , receut deux coups de
Moufquet, dont l'un luy calla la
jambe. La nuit , les Ennemis
tacherent de repoufler les Bava-
Fois du Pofte qu'ils occupoient,
mais ils ne purent en venir
bout.
Le 23. les Affiegez firent une
Sortie fur la grande Garde des
Bavarois , mais ceux - cy les contrai
180 Hiftoire du Siege
traignirent de fe retirer , & les
pourfuivirent jufques aux portes.
Le Lieutenant Colonel d'Arco
y ayant efté tué d'un coup de
Moufquet , les Turcs emporterent
le corps dans la Ville . On
prit dans l'lfle de Sainte Marguerite
un Turc qui eftoit fortyde
Bude à la nage avec un More
, pendant un orage qui s'eftoit
élevé la nuit . Il dit que ce More
qu'on n'avoit pu arrefter , eftoit
envoyé au Grand Vifir avec
des lettres , par lesquelles le Bacha
de Bude le preffoit de luy
donner promptement un fecours
plus fort que celuy qu'il avoit re
ceu que la Ville ne pouvoit te
nir encore bien long- temps , &
que le Chafteau eftoit fur le
point d'eftre perdu . Il ajoûta ,
qu'il n'eftoit entré que deux
cens cinquante Janiffaires la
plus
de Bude. 181
plufparts bleffez , & hors de combat
, & que le Bacha en publioit
le nombre plus grand pour donner
courage à ceux de la Ville;
que les Affiegez avoient perdu
cent hommes le jour que les Bavarois
s'eftoient poſtez au haut
-du Chafteau & que le Bacha
avoit promis cinq cens écus à
ceux qui eftoient venus la nuit
pour les en chaffer , mais que celuy
qui les commandoit avoit
pris la fuite...
Le 24. les Bavarois fe fortifierent
dans les Poftes dont ils s'eftoient
emparez. Les Affiegez firent
contre eux de nouveaux efforts
mais ils furent inutiles.
Trente Soldats y furent tuez avec
le Lieutenant Colonel du Regiment
Saxon de Trautmansdorf.
L'Armée Ottomane parut de
nouveau à la veuë du Camp , &
sen
182
Hiftoire du Siege
›
s'en retourna le mefmejour à une
lieuë de là. Comme les Affiegez
avoient fait des feu pendant la
nuit, & allumé plufieurs fois de la
poudre au deffus de la grande
Rondelle , on ne douta point que
ce ne fuffent autant de Signaux
pour preffer les Turcs de faire
encore quelque tentative. Le
Prince Charles , pour prevenir
leurs deffeins , détacha fix Efca
drons, & fix Bataillons , qu'il fit
commander par le Baron de Mercy
, le Comte de Souches & le
General Heufler. Ils pafferent
toute la nuit fous les armes fans
qu'il fe fift aucun mouvement du
cofté des Infidelles. On continua
pendant cette mefme nuit , de
combler les Foffez, & d'affurer les
Travaux qui avoient eſté faits
du cofté de l'attaque de Lorrai
ne. On eut avis que le Comte de
Scherf
de Bade. 183
Scherffemberg dont on preffoit
Farrivée , eftoit auprés de Zolnoch
avec les Troupes qu'il commandoit
en Tranfilvanie, & qu'il
feroit toute la diligence poffible
pour le rendre promptement au
Camp , quoy que fon Infanterie
fuft fort fatiguée .
Le 25 deux Escadrons que l'on
avoit détachez , eurent ordre de
revenir au Camp , & les quatre
autres furent poftez au pied des
murailles. Le Prince Charles fit
fortifier les Lignes le long du Danube
, de plufieurs rangs de Paliffades,
& quatre cens Allemans
& deux cens Hongrois y furent
envoyez fous le commandement
du Baron d'Afti pour s'oppofer
au fecours , fi les Ennemis tachoient
d'en faire paffer par là.
Les Travaux que les Bavarois avoient
faits au hautdu Chafteau ,
fu
184 Hiftoire du Siege
furent entierement brûlez par les
facs à poudre, & autres Machines
à feu que les Affiegez y jetterent.
Ainfi l'on fut obligé de fe
retirer , & de fe pofter plus à la
droite. Il y eut en cette occafion
dix ou douze hommes tuez , &
plus de deux-cens bleſſez .
Le 26. le Canon des Affiegeans
ayant ruiné la face de la grande
Rondelle dont ils s'eftoient ren
dus maiftres , on y fit une maniere
de pont avec des poutres. Elles
alloient d'une muraille à l'autre,
& faifoient la communication
des Logemens . Les Ennemis firent
ce qu'ils purent pour bruler
ce Pont, mais on le garnit fi bien
de toutes les chofes qui le pou
voient garantir du feu, qu'ils furent
forcez d'abandonner ce deffen.
Il ne leur reftoit plus que
fept groffes pieces de Canon en
bat
de Bude.
185
batterie ; toutes les autres avoient
efté demontées. Un Turc fut arrêté
proche de la Ville. Il dit que
quantité de Janiffaires animez
par les promeffes du Grand Vifir,
montoient tous les jours à cheval
avec refolution de fe venir
jetter dans la Place , mais que le
courage leur manquoit , fſii toft
qu'ils découvroient le Camp des
Chreftiens.
Le 27. on terraffa le Pont de
communication , & on fit une
forte Redoute pour en defendre
la tefte . On travailla auffi à un
Logement fur la grande Rondelle.
Il fut étendu fur un terrain
uny qui donnoit paffage jufqu'à
la derniere muraille de la Ville.
Ainfi les Affiegeans n'eftoient
plus qu'à cinq ou fix pas des Ennemis
, qui tâcherent de redoubler
leur defence. Ils jetterent
quan
186 Hiftoire du Siege
quantité de feux d'artifice , fans
pouvoir endommager le Logement
qui touchoit leurs Palifades
. Un Croate Deferteur vint
avertir que les Ennemis avoient
receu un renfort de huit mille
hommes , & tiré de Stulweifembourg
huit groffes pieces de Canon
; que le Grand Viſir ayant
promis de récompenfer tous ceux
qui fe jetteroient dans la Ville,
plufieurs s'eftoient déja prefentez
, & que la nuit fuivante on
devoit venir attaquer le Camp
des Chrefliens par deux endroits .
Ce rapport fit qu'on la paffa toute
entiere fous les armes . On s'y
tint mefme le lendemain jufques
à midy , mais on ne vit que quelques
détachemens qui ne firent
que paroiftre, & fe retirerent prefque
auffi - toft.
Le 28. les Affiegeans fe fortific
de Bude.
187
1
fierent dans leur Logement, malgré
tout le feu des Affiegez qui
commença à diminuer. On ag
grandit la bréche du flanc de ce
Logement , & toutes chofes furent
heureuſement difpofées pour
reüffir dans l'affaut. La Baterie de
Suabe continua de faire grand
feu. Elle eftoit fur le panchant
de la Montagne d'où l'on tiroit
avec des Boulets enchaifnez,afin
qu'il fuft plus ailé d'abatre les
Paliffades. Ce mefme jour on
furprit on Turc qui eftoit encore
forty de la Ville à la nage . Il avoitpaffé
fous les deux Ponts , &
s'eftoit caché dans un trou au
de - là des Lignes . Il n'avoit fur
luy qu'une écharpe & un Sabre
avec une Lettre qu'il portoit à
l'Armée Turque pour l'Aga des
Janiffaires. Elle eftoit écrite par
ce
188 Histoire du Siege
celuy qui commandoit les Janiffaires
dans Bude , & n'avoit rien
de particulier , finon que l'Homme
que le Grand Vifir avoit envoyé
, eftoit entré dans la Ville,
& qu'elle eftoit fort preffe. Il fut
impoffible pendant tout le jour
de faire parler ce Turc , mais enfin
on l'intimida fi bien par les
menaces , qu'il avoüa fur le foir,
que le Commandant de Bude
l'avoit chargé de dire au Grand
Vifir, qu'il yavoit prés de quinze
jours qu'il eftoit campé devant
la Ville , & qu'il s'étonnoit que
fcachant le preffant danger où
ilfe trouvoit , il ne luy envoyat
pas un fecours confiderable ; que
les Troupes qu'il commandoit
témoignoient avoir moins de
courage que les Femmes de la
Ville , puifqu'on ne tentoit aucune
chofe , que pour luy il eftoit
re
de Bude. 189
refolu de fe défendre jufqu'à la
derniere goute de fon fang , mais
qu'il ne pouvoit répondre de la
Place s'il ne recevoit un prompt
fecours. Ce Turc ajoûta que le
Bacha luy avoit auffi donné ordre
de recommander la Ville de
Bude & l'honneur de l'Empire
Ottoman au Commandant des
Tartares ; qu'il y avoit encore
2000. hommes dans la Place , avec
quatre cens Janiffaires qui
s'y eftoient jettez le 20 que les
Affiegez s'eftoient bien retranchez
du coſté de l'Attaque des
Imperiaux ; que derriere la Paliffade
de la feconde brêche il y
avoit encore un Foffe & une autre
Paliffade , mais qu'ils n'avoient
point travaillé du cofté
du Chafteau , eſperant eſtre ſecourus.
Le 29. un Polonois vint ſe rendre
190 Hiftoire du Siege
dre le matin , & raporta que les
Infidelles devoient venir atta,
quer le Camp par trois endroits.
Peu de temps aprés , mille Spahis
& deux mille Janiffaires commandez
par deux Bachas, & foutenus
de quinze mille Tartares,
qui avoient ordre de leur faciliter
l'entrée dans la Ville, vinrent
du cofté d'Actoffen pour s'y jetter
, mais comme ils n'y trouve
rent point de paffage & qu'ils
virent qu'on faifoit fur eux une
vigoureufe décharge , ils gagnerent
une colline , d'où eftant enfuite
defcendus dans un Marais
qu'on trouve dans le Vallon , ils
furent envelopez par des Efcadrons
, à la tefte defquels eftoient
le Baron de Mercy & le General
Heufler , & par la garde des Bavarois
. Il en refta huit cens fur la
place. Ils avoient chacun trente
écus
de Bude. 191
écus qu'on leur trouva dans la
poche , le refte fut mis en fuite,
& il n'y en eut que quinze qui
purent paffer ; encore n'en entra↓
t- il que quatre dans la Ville , les
onze autres ayant eſté tuez avant
que d'y arriver. On coupa chemin
à cent Spahis , dont foixante
& feize furent paffez au fil de
l'épée par deux differentes Troupes
de celles de Brandebourg , &
quatre autres tuez dans le quar
tier du General. Le Baron de
Mercy receut trois coups de Sabre
dans cette action,un à l'épaule
, & deux à la tefte , Son Ayde
de Camp fut tué à ſes coftez .
Dans ce mefme temps les Affiegez
voulant faciliter l'entrée du
Secours , hazarderent une Sortie,
mais les Bavarois qui avoient la
garde de la Tranchée , les contraignirent
de fe retirer avec perte
192 Hiftoire du Siege
te de cinquante hommes. D'un
autre cofté l'Armée des Ennemis
vint en ordre de Bataille vers les
Lignes du Camp de Baviere ,
mais elle ne tenta rien , & le
Grand Vifir ayant veu paroiſtre
vingt cinq Efcadrons du corps
d'Armée du Comte de Scherffemberg
qui paffoient le Pont du
Danube , fous le commandement
du General Picolomini , prit le
parti de fe retirer. On gagna
trente Drapeaux, la plufpart rou
ges , les autres eftoient de differentes
couleurs. On fceut par un
Deferteur , que des trois mille
Janiffaires ou Spahis qui avoient
juré au Grand Vifir qu'ils ne reculeroient
, ny ne fuiroient point,
il n'en eftoit pas retourné plus de
cinq cens.
Le 30.quatre Chreftiens écha
pez des mains des Infidelles , fe
rendi
de Bude.
193
Jap
rendirent dans le Camp , & rapporterent
que l'Armée Ottomane
eftoit allée camper une lieuë plus
loin que la plufpart de leurs
Troupes defertoient avec les Drapeaux
, & qu'elles avoient une
grande difette de vivres . Ce mef
me jour le Comte de Scherffemberg
arriva de Tranfilvanie avec
les trois Regimens d'Infanterie ,
de Sherini , de Scherffemberg ,
de Spinola , & le refte de la Cavalerie
, fçavoir soo . Hongrois &
les Regimens de Picolomini ; de
Veterani , de Sainte Croix ; de
Magni , & de Tefvin. Celuy de
Sherini fut joint au corps de Ba
viere , & les autres allerent occu
per le terrein qui reftoit vuide
du cofté de la baffe Ville , depuis'
la droite des Imperiaux jufques
au Dambe."
Le 31 on eit avis, que fept
isque I
194 Hiftoire du Siege
mille Tartares s'eftoient avancez
vers Gran , afin d'empécher
qu'il ne defcendift des vivres
pour les Affiegeans. On entendit
mefme tirer le Canon de cette
Ville. Les Bavarois firent mener
de nouvelles Pieces fur leurs Batteries
à la place de celles qui avoient
eſté gaſtées . Les Troupes
demeurerent fous les armes toute
la nuit , fur ce que le bruit
s'eftoit répandu le foir , que l'Armée
des Infidelles s'eftoit mife
en marche pour les venir attaquer.
Le premier jour de Septembre
on ne ceffa de jetter dans la
Ville des Carcaffes & des Bombes
, & de battre les Paliffades
avec le Canon . Ce mefme jour on
tint un Confeil de Guerre , où ſe
trouverent tous les Generaux
des Troupes auxiliaires . Il fut
agité
de Bude.
195
agité fi l'on iroit attaquer le
Grand Vifir en laiffant affez de
Troupes pour continuer le Siege
, où fi on l'attendroit dans
les Lignes. Plufieurs crurent qu'il
falloit aller aux Ennemis & profiter
de la confternation où les
mettoit la perte qu'ils avoient faite,
mais l'avis contraire l'emporta
, & on refolut de donner l'affaut.
Cette reſolution fut tenuë
fecrette , & le Prince Charles fit
fortir des Lignes trente mille
hommes de Cavalerie & dix mille
d'Infanterie qu'il fit ranger en
Bataille dans la plaine oppofée
au front du terrain que les Infidelles
occupoient > comme s'il
euft eu deffein de les aller attaquer.
Il les empefchoit par là de
faire des détachemens pour le
fecours de la Place. Les Generaux
qui eurent le commande-
I ij
196
Hiftoire du Siege
ment de la Cavalerie , furent le
General Bielke , le Prince Eugene
de Savoye , & les Comtes de
la Torre & d'Arco . Le General
Steinau & le Comte d'Afpremont
commanderent l'Infanterie.
Les ordres furent enfuite
donnez pour l'affaut . Le Comte
de Souches fut commandé pour
l'Attaque de la droite, & le Comte
de Scherffemberg le fut pour
la gauche, chacun avec trois mille
chevaux choifis , & un pareil
nombre d'hommes de pied . La
marche des Volontaires , qui attendoient
ce grand jour avec une
extreme impatience , fut ordonnée
entre les deux aifles, avecordre
de ne pas preceder les premieres
files.
Le 2 . tous les Generaux ſe
trouverent à cheval fi- toft que le
jour parut . Ils allerent vifiter les
Tra
de Bude.
197
Travaux , & le Prince Charles
ayant fait venir les Officiers Ma-.
jors dans fa Tente , les avertit de
tenir toutes les Troupes preftes
pour donner l'affaut à deux heures
aprés midy. L'Electeur de Baviere
n'oublia de fon cofté aucun
des ordres qui pouvoient
eftre neceffaires pour achever de
fe rendre maiftres du Chateau.
Le General Schoning tint auffi
toutes chofes difpofées à l'attaque
de Brandebourg , & d'abord
que le Signal cut efté donné par
fix Pieces de Canon tirées du
quartier des Troupes de Suabe,
quatre Capitaines fuivis chacun
de cinquante Grenadiers , avec
quatre Lieutenans , quatre Sergens
, & les autres Officiers inferieurs
, marcherent à la droite
de l'Attaque. Le Baron d'Afti
eftoit à leur tefte , & ils eftoient
I iij
198 Hiftoire du Siege
fouftenus de deux cens Moufquetaires
que commandoient
quatre Capitaines & d'autres
Officiers fubalternes, ayant à leur
tefte un Lieutenant Colonel &
un Major. Ceux - cy eftoient fuivis
de cent hommes armez d'une
demie Pique & d'un Sabre , chacun
avec deux Piftolets de ceinture
. On fit marcher à quelque
diſtance trois cens Arquebufiers
commandez par quatre Capitaines,
& trois Bataillons de reſerve
les fuivoient. Ils eftoient chacun
de fix cens hommes avec leurs
Officiers. La difpofition de la
gauche fut pareille . Toute la difference
qu'il y eut , c'eſt que cent
cinquante Arquebufiers furent
les premiers qui s'avancerent, &
qu'ils n'eftoient precedez que de
cinquante Grenadiers , & de
vingt- cinq à trente hommes armez
de Bude. 199
mez de Pertuifanes , d'une Epée,
& d'une Hache . Tout fut difpofé
de la muc torte à l'Attaque
de Daviere, & à celle de Rrandebourg
, & jamais Affaut ne fut
entrepris avec plus d'ardeur , &
plus d'intrepidité . Le Baron
d'Afti qui avoit l'Avant- garde
des Grenadiers , & qui marchoit
à leur tefte , fut bleffé d'abord,
& le Sieur Bifchoff- haufen , Sergent
Major du Regiment de Diepenthal
, prit le Commandement
en fa place. Quoy qu'ils fuffent
foûtenus des Bataillons qu'on avoit
fait fuivre , ils trouverent
une fi furieuſe refiftance de la
part des Affiegez , qu'ils furent
contraints de reculer. Outre la
grande quantité de facs à poudre
qu'on jetta fur eux , les Ennemis
firent jouer une Mine qui
leur caufa un fort grand defor-
I iiij
200
Hiftoire du Siege
dre. Ils retournerent une feconde
fois à l'affaut avec une vigueur
extraordine , & ils ne
Purent encore obliger les Tercs
a fuir , mais enfin aprés une tresrude
Efcarmouche qui dura une
heure devant la Ville , les Affiegez
ayant perdu courage par la mort
du Commandant qui fut tué fur
la Bréche , ils firent fi bien qu'ils
vinrent à bout d'arracher les
Paliffades , & de forcer leurs
Retranchemens. Ils y trouverent
huit cens Janiffaires qu'ils taillerent
en pieces , fans avoir aucun
égard à la poſture foûmife
où ils fe mirent en leur demandant
quartier , & jettant leurs
Armes bas. Quelques - uns d'entre
eux voyant qu'ils ne vouloient
épargner perfonne , reprirent
leurs Armes , fe défendirent
en defefperez , & firent
jouër
•
de Bude. 201
jouer un Fourneau dont plufieurs
Maifons fauterent . Le feu
du Fourneau fe communiqua à
une certaine machine qu'il avoient
difpofée auparavant , &
produifit un autre feu bien plus
dangereux qui couroit de place
en place, & que perfonne ne prenoit
le foin d'efteindre , parce
que les Victorieux eftoient alors
occupez à pourfuivre , & à exterminer
tout ce qui pouvoit
refter d'Ennemis dans la Ville ,
où quelques ordres que les Of
ficiers puffent donner , il fut impoffible
d'empefcher le carnage.
Ainfi l'embrafement fut prefque
general. Ceux de Brandebourg
entrerent en mefme temps dans
la Ville , & penetrant dans les
rues au travers des flâmes , ils
firent main baffe fur tout ce
qu'ils rencontrerent , fans épar
I v
202 Hiftoire du Siege
gner Vieillards , Femmes & Enfans
. Les Victorieux n'en confultoient
que la fureur qui les
animoit , & qui les portoit à fe
vanger de l'opiniâtre reſiſtance
que ces malheureux avoient faite
fur la Bréche à force de Bombes
, de Mines , de Pots à feu &
autres machines roulantes qu'ils
avoient jettées à la faveur de
leur Moufqueterie , & d'une
grefle de fléches. Cependant la
Cavalerie qu'on avoit tirée des
Lignes fous les Generaux nommez
pour la commander eftoit
demeurée , ainsi que l'Infanterie,
toûjours en action , & en Bataille
avec les Ennemis , dont
l'Armée , non feulement avoit
paru de ce coſté là , mais meſme
avoit commencé à attaquer l'Avantgarde
des Chreftiens. D'un
autre cofté les Generaux Sherini
,
de Bude.
203
rini, la Vergne & de Beck , n'ou
blierent rien pour achever de
fe rendre maiftres de ce qui reftoit
à occuper du Chateau,
fouftenant avec un courage tout
heroïque l'affaut qu'ils y avoient
donné , & en mefme temps les
Grenades & les Pierres que jettoient
les Janiffaires , qui ne fçachant
encore rien du fuccez de
l'autre attaque , faifoient leurs
derniers efforts pour fe maintenir
fur une hauteur d'où dépendoit
la confervation du Chafteau.
Pendant qu'ils fe deffendoient
avec toute la bravoure
qu'on peut attendre de gens.
auffi aguerris que determinez ,
les Turcs qui eftoient auparavant
de l'autre cofté , s'eftoient
venus retirer de celuy - cy , partie
du cofté de la Riviere , &
partie du cofté du Chaſteau où
ils
204 Hiftoire du Siege
ils avoient merveilleufement renforcé
les Janiflaires. Pour s'oppofer
au fecours qu'ils leurs donnoient
, l'Electeur de Baviere ,
qui remarqua que le Grand Vifir
n'agifloit point , & qu'il ne
faifoit mine d'aucun mouvement
, commanda le Comte d'Apremont
avec 500. hommes , &
le fit aller à l'affaut avec les autres
pour les foûtenir. Le Prince
Louis de Bade s'apercevant de
l'inevitable neceffité qu'il y a
voit de s'emparer de la hauteur
qui occupoient encore les Affiegez
, pour le rendre enfuite maifres
du bas où ils avoient plufieurs
places d'armes & autres
Logemens , paffa luy mefme de
ce coflé-là , & ordonna de l'efcalader
& de grimper au deffus,
ce qui fut fait fi heureuſement,
que
de Bude.
205
que l'on envoya une grefle de
de moufquerades & de Grenades
fur les Turcs qui fe voyant foudroyez
de cette forte , arborerent
un Drapeau blanc , & jufques à
leurs Turbans , criant de toute
leur force qu'on leur donnaft
quartier & la vie. Il y en cut
plufieurs , qui ne voulant point
attendre ce qu'on refoudroit, pafferent
par deffus le mur d'un
chemin couvert , & tâcherent de
fe fauver avec quelques Juifs par
le Danube dans de petits Bateaux
qu'ils trouverent mais
les Tolpazes les ayant atteints
avec leurs Saiques , coulerent à
fond plufieurs de ces petits Baftimens
, tuerent la plupart de
ceux qui avoient cru s'échaper,
& les autres qui avoient déja
paffe la Riviere , furent taillez
2
en
206
Hiftoire du Siege
>
en pieces , ou faits prifonniers
par les Hongrois qui eftoient
dans Peft . L'Electeur de Baviere
accorda la vie au Lieutenant
du Bacha & à plus de
douze cens hommes , qui voyant
les Imperiaux Maitres de la
Place , l'avoient fuivy dans une
Rondelle où il s'eftoit retiré
entre le Chafteau & la Ville.
Il fit de mefine quartier à ce qui
reftoit de Turcs dans le Chafteau
, d'où il les envoya fous
bonne garde dans une grande
Mofquée & dans un grand Magafin
. Les Soldats qu'on ne
put faire revenir fi - toft de leur
premiere fureur , affommerent
& jetterent dans la Riviere les
vieilles Gens fans nulle diftinction
de Sexe , & il y en eut
quelques - uns de fi
,
cruels ,
qu'ayant
de Bude.
207
cruautez ,
qu'ayant trouvé des Femmes
avec des Enfans de deux ou trois
mois , ils leur ouvrirent le ventre
, & y fourrerent ces miferables
Enfans. L'Electeur de Baviere
, & le Comte de Stratman ,
Chancelier de l'Empereur , qui
arriverent dans la Ville pendant
que l'on commettoit ces
ne pûrent les faire
ceffer qu'aprés des défenfes tres
rigoureufes , & plufieurs fois reïterées.
Le feu eftoit répandu par
tout , & avec le fang qui couloit
de tous coftez , il est aisé de
s'imaginer quel affreux Spectacle
offroit cette trifte Ville abandonnée
au pillage . Cependant
la principale Mofquée , qui
avoit efté autrefois l'Eglife de
Saint Etienne , Roy de Hongrie
, fut préfervée de l'embrafement,
208
Hiftoire du Siege
>
fement , ainfi qu'un grand Magafin
, dans lequel eftoient quantité
de vivres , & un autre plein
de poudres . Ces deux Magalins
furent confervez par les foins
du Commiffaire Rabata qui
eut là - deffus beaucoup de conduite
& de vigilance . On perdit
prés de deux cens hommes
à l'Attaque de Lorraine , avec
le Marquis de Spinola , Colonel
d'un Regiment d'Infanterie . Il
y eut trois cens cinquante Soldats
tuez à celle de Baviere , à
caufe d'un Fourneau que les Ennemis
y firent jouër . Le Comte
de Tartembac fut auffi tué à
cette Attaque , & le Comte de
Zacco , Major du Regiment
d'Alpremont , y fut bleffé à
mort ainfi que le Sieur Mon-
.ticolli , Capitaine dans le meſme
>
Re
de Bude . 209
Regiment. Ceux de Brandebourg
ne perdirent que cent
hommes , & le nombre des Blef
fez ne fut que de quatre cens
dans toutes les trois Attaques .
11 y eut plus de trois mille hommes
tuez ce jour- là - du cofté des
Affiegez . On jetta les corps des
Turcs & des Juifs dans la Riviere
, & les Chretiens furent enterrez.
Le Lieutenant du Bacha
dit qu'au commencement du Siege
la Garnifon eftoit de dix mille
Janiffaires , fans compter les Juifs
& les Habitans capables de porter
les armes , qui faifoient encore
plus de cinq mille hommes.
L'Aga des Janiffaires &
le Mufthi demeurerent prifonniers
avec ce Lieutenant du Bacha
, & plufieurs autres Offciers.
L'Aga fut donné au Prince
Char
210 Hiftoire du Siege
Charles. Cette conqueſte eft
d'autant plus glorienfe , qu'elle
s'eft faite à la veuë de l'Armée
des Ottomans , qui fans ofer rien
tenter , ont laiffé prendre une
Ville auffi importante que Bude,
& dont ils eftoient en poffeffion
dépuis cent quarante-cinq ans.
On dit que lors qu'ils connurent
que les Chreftiens y eftoient entrez
, ils s'arracherent la barbe
de defefpoir , & fe jetterent par
terre. Le foir ils fe retirerent à la
faveur de la nuit .
dans la Place trois à
On a trouvé
quatre cens
dont il dont y en
pieces de Canon ,
a quantité d'un fort grand calibre
, avec foixante Mortiers,
& un nombre incroyable de Boulets
, de Grenades , de Carcaffes ,
de Bombes , & d'autres Machines
de Guerre. On fit environ
deux
de Bude. 211
deux mille prifonniers , & l'on
prit plus de cent Juifs qui s'eftoient
refugiez dans leur Synagogue.
Le Prince Charles fit tout
ce qu'on peut attendre d'un
grand & experimenté Capitaine,
donnant les ordres par tout où
fa prefence eftoit neceffaire , &
n'oubliant rien de ce qui pouvoit
contribuer à l'heureux fuccés
de cette grande journée . L'Electeur
de Baviere s'y acquit
beaucoup de gloire , & fit
roiftre combien il eft intrepide
par la maniere dont il s'expofa
au feu. Tous les Volontaires
chercherent à fe fignaler à l'envy
les uns des autres , & le Prince
de Commercy donna d'éclatantes
marques de valeur &
de courage. Comme ils pouvoient
fe trouver par tout , le
pa-
Mar
212
Hiftoire du Siege
allerent
Marquis de Blanchefort , & le
Marquis de Souvray
dans tous les Poftes où le peril
eftoit le plus apparent. C'eſt ce
qu'ils avoient déja fait pendant
tout le Siege, n'ayant laiffé échaper
aucune occafion , quelque
dangereufe quelle fuft , fans y
courir avec une ardeur qui ne
fe peut exprimer. Le Prince
Louis de Bade receut un coup
de Moufquet qui luy éfleura la
chair. Il monta un des premiers
à l'affaut , & anima les Soldats
par fa valeur . Le Prince Euge
ne de Savoye , qui eft fon Coufin
Germain , ne fe diftingua
pas
moins. Il avoit cfté deftiné
à l'Eglife , mais le Chevalier de
Savoye , fon Frere , qui commandoit
un Regiment de Dragons
au fervice de l'Empereur,
eftant
de Bude .
2137
eftant mort au Siege de Vienne,
il refolut de quitter l'Etat Ecclefiaftique
, & s'eftant rendu en
pofte à ce mefme Siege aprés a--
voir efté faluër S. M. I. qui étoit '
à Lints , il s'y fignala , & acheva
la Campagne en qualité de Volontaire
, âgé feulement de dixneuf
ans. L'Empereur voulant
reconnoiftre la valeur de ce jeune
Prince , luy donna un Regiment
de Dragons , à la tefte duquel
il fervit la Campagne fui- :
vante , & fit des chofes au delà !
de fon âge à la prife de Strigonie,
& au premier Siege de Bude , où
il fut bleffé d'un coup de Moufquet
au bras. Aprés la Campa
gne, il alla voir le Duc de Savoye
Chef de fa Maifon , qui le receut
avec toutes les marques d'honneur
deuës à ſa naiffance & à fon
me
214 Hiftoire du Siege
merite. Il paffa de là à Veniſe , revint
à la Cour de l'Empereur , &
fe trouva àla Prife de Neuhaufel
& autres Places . Au retour.
de cette Campagne , quoy qu'il
n'euft alors que vingt & un an,
l'Empereur le fit General Major.
de fes Troupes fur la fin de l'année
derniere . Le Siege de Bude
ayant efté refolu , il fe rendit au
Camp des Impériaux pour y faire
les fonctions de cet employ , dont
il s'eft acquité avec toute la gloire
poffible.
Si-toft
que
la Place
eut eſté
prife
, le Prince
Antoine
de Neubourg
, Grand
Maiftre
de l'Or.
dre Teutonique
, & le Prince
de Commercy
partirent
pour
en
apporter
la nouvelle
, l'un à l'Empereur
, & l'autre
à l'Imperatrice
.
Doüairiere
, le Comte
de Sherini
,
de Bude. 215
rini , dépefché par l'Electeur de
Baviere , l'apporta à l'Electrice fa
Femme. Le Comte de Konigfeeck
fut auffi dépeſché par le
Prince Charles avec le grand
Drapeau des Turcs trouvé dans
Bude qu'il apporta au Prince Hereditaire
Imperial .
Le 3. le Prince Charles & les
Generaux vinrent au Quartier
de l'Electeur de Baviere , où le
Te Deum fut chanté au bruit des
Trompettes , des Timbales , &
des Canons , dont on fit faire trois
décharges autour des Lignes. On
mit auffi le feu aux Bombes qu'on
y avoit enterrées pour les Ennemis,
s'ils euffent ofé entreprendre
de les
attaquer.
Le 6. toute l'Armée partit en
bon ordre pour marcher du cofté
du Pont d'Effeck. On laiffa
dans
216 Hiftoire du Siege de Dude.
dans Bude les Regimens d'In-1
fanterie de Beck , de Salme &
de Diepenthal , avec des détachemens
des Alliez fous le
Commandement du Baron de
Beck .
F I
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Résumé : HISTOIRE DU SIEGE DE BUDE.
Le texte relate les événements marquants du siège de Buda, une ville stratégique en Hongrie. En 1686, après plusieurs sièges infructueux, une armée chrétienne confédérée, soutenue par l'Empereur et diverses troupes européennes, conquiert Buda au cinquième assaut. Cette victoire permet de restaurer la religion chrétienne dans Buda et dans huit cents autres villes et bourgs, chassant la 'fausse foi' que sept prédécesseurs n'avaient pu détruire. Le Pape exprime sa joie et ordonne des remerciements à Dieu et des réjouissances à Rome. La prise de Buda est célébrée comme un des plus grands triomphes de l'Église. L'histoire de Buda commence avec la mort de Louis II de Hongrie à la bataille de Mohács en 1526. Ferdinand, roi de Bohême et frère de l'empereur Charles Quint, prend Buda avec l'aide de Charles Quint, mais Jean de Zapol, soutenu par Soliman, reprend la ville en 1529. Après la mort de Jean de Zapol, les Turcs prennent Buda en 1541 et la transforment en province ottomane. Plusieurs sièges chrétiens échouent jusqu'en 1684, où le prince Charles de Lorraine initie le cinquième siège, aboutissant à la prise de Buda. Les forces assiégeantes, composées de huit mille cavaliers et dix bataillons d'infanterie commandés par le général Schoning, traversent le Danube et prennent position près de la ville. Les préparatifs et les premières phases du siège sont détaillés, avec la nomination de divers officiers et la revue des troupes. Les travaux de siège commencent, avec des escarmouches et la capture de prisonniers. Les assiégés tentent plusieurs sorties, mais sont repoussés. Les travaux avancent malgré les pertes et les réparations nécessaires. Lors d'un assaut, les troupes impériales et de Brandebourg attaquent la 'grosse Rondelle' et d'autres positions stratégiques. L'attaque débute avec un feu intense des deux côtés. Les troupes avancent malgré les défenses ennemies, subissant de lourdes pertes. Le Prince Charles encourage ses troupes, permettant de forcer les palissades et de prendre la 'grosse Rondelle'. Les Brandebourgeois s'emparent également de la courtine et de la rondelle à gauche. L'Électeur de Bavière mène une attaque simultanée sur un autre front, prenant la rondelle malgré les tirs continus des défenseurs. L'attaque dure trois heures, avec des pertes significatives pour les assaillants et les défenseurs. Le 2 septembre, l'attaque commence avec des grenadiers et des mousquetaires, soutenus par des arquebusiers et des bataillons de réserve. Malgré une résistance farouche, les assiégés sont vaincus. Les troupes impériales entrent dans la ville, causant un carnage parmi les habitants. Les Turcs tentent de fuir mais sont capturés ou tués. Les pertes impériales sont lourdes, notamment à l'attaque de Lorraine et de Bavière. Les Brandebourgeois perdirent 100 hommes, les Bavarois 400, et les assiégés subirent plus de 3 000 pertes. Les corps des Turcs et des Juifs furent jetés dans la rivière, tandis que les chrétiens furent enterrés. Plusieurs officiers, dont l'Aga des Janissaires et le Mufti, furent capturés. La ville, détenue par les Ottomans depuis 145 ans, fut conquise sous les yeux de l'armée ottomane, qui se retira sans résister. À l'intérieur de la ville, on découvrit 400 pièces de canon, 60 mortiers et une grande quantité de munitions. Environ 2 000 prisonniers furent faits, dont plus de 100 Juifs réfugiés dans leur synagogue. Le Prince Charles, l'Électeur de Bavière, le Prince Louis de Bade et le Prince Eugène de Savoie se distinguèrent par leur bravoure. Après la prise de la ville, des messagers furent envoyés pour annoncer la nouvelle à l'Empereur et à l'Imperatrice. Le 3 septembre, un Te Deum fut chanté pour célébrer la victoire. Le 6 septembre, l'armée quitta Buda en bon ordre, laissant des régiments pour défendre la ville.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 217-234
Dunkerque. [titre d'après la table]
Début :
Ils allerent le même jour coucher à Dunkerque, Ville sur [...]
Mots clefs :
Dunkerque, Place, Intendant, Ville, Roi, Fort, Bergues, Comte, Ambassadeurs, Artillerie, Armes, Folie, Remparts, Du Verger, Mer, Citadelle, Ambassadeur, Mégron
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texteReconnaissance textuelle : Dunkerque. [titre d'après la table]
Ils allerent le même jour
coucher à Dunkerque , Ville
fur la Mer dans le Comté de
Flandres . Le Comte Baudoüin
III . dit le Jeune, la fit
bâtir en 960. Elle a de fort
bellesRuës, unPort extrémement
frequenté , & des Ha-
T
218 III . P. du Voyage
bitans fort renommez pour
la Navigation. Marie de Luxembourg
, Comteſſe de S.
Paul, Dame de Dunkerque,
Fille unique de Pierre de Luxembourg
& de Marguerite
de Savoye, épouſa François de
Bourbon, Comte de Vendôme
, quatriéme Ayeul paternel
du Roy. C'eſt ſur cela
que font fondées les legitimes
pretentions qu'a Sa Majeſté
ſur la Ville de Dunkerque.
Les François la prirent
en 1558. Le Duc de Parme
la reprit en 1583. Monfieur
le Prince , alors Duc d'An-
1
des Amb. de Siam. 319
guien, s'en rendit Maiſtre en
1646. & les Eſpagnols qui
l'emporterent en 1652. lagarderent
juſqu'en 1658. que
Mr le Maréchal de Turenne
la leur ôta. Elle fut remiſe
aux Anglois , de qui le Roy
la racheta en 1662. La Citadelle
que Sa Majeſté y a fait
faire , eft tres - confiderable ,
auſſi - bien que les Fortifications.
Les Ambaſſadeurs aprés a
voir paſſé entre le Fort du
Bois &le Fort Mardic , qu'ils
confidererent , approcherent
de la Place au bruit d'une
Tij
220 III. P. du Voyage
groffe Artillerie. M Me
gron Major qui y commandoit
, les reçût à la Porte de
la Ville. Toute la Garniſon,
parmy laquelle il y avoit
beaucoup de Compagnies
Suiffes, eſtoit ſous les Armes.
Ils furent logez à l'Hoſtel de
Ville, où ils reçûrent les complimens
des Magiftrats, & les
Preſens ordinaires. Ils furent
auſſi complimentez par
pluſieurs Corps . Le foir tout
'Hoſtel de Ville ſe trouva
éclairé par l'ordre des Magiſtrats.
Ils donnerent ce
foir- là pour Mot , La clef eft
des Amb de Siam . 221
digne de la ferrure , fur ce
qu'on leur avoit dit que Dunkerque
eſt une Clef du
Royaume. Ils furent ravis
de trouver à Dunkerque Madame
la Princeſſe de Bournonville,
Me la Comteffe de
Sore , & Ms les Princes de
Bournonville & de Robec,
qu'ils avoient veus à Berny, &
dont ils avoient reçû de grandeshonnêtetez.
MadamePatoulet,
femmede M² l'Intendant
de la Marine à Dunkerque
, eſtoit de la Compagnie.
M Deſmadrit Intendant
de Juſtice , Police des
Tiij
222 III . P. du Voyage
Troupes , & Finances de Sa
Majesté, & M Patoulet, vinrent
auſſi les ſalüer . M Defmadrit
leur dit , qu'il alloit à
Ypres , où il auroit l'honneur de
les voir , & qu'il eſperoit qu'ils
luy feroient la grace de diſner
chez luy. Ils fouperent à l'ordinaire
en bonne Compagnie.
Le lendemain ils monterent
en Carroſſe pour aller
du côté de la Mer , où ils
trouverent des Chaloupes
fort propres, & virent les Jettées
& les Forts qui ſont def
ſus, qui les ſalüerent de toute
leur Artillerie. Ils meſurerent
desAmb. de Siam, 223
eux-mêmes les épaiſſeurs &
les hauteurs des murailles , les
hauteurs & les profondeurs
des foſſez , & examinerent
tous les ouvrages avancez. Ils
virent fortir à pleines voiles
un affez gros Vaiffeau, chargé
de tout ſon Canon. De là
ils allerent au Rifban , où ils
monterent & deſcendirent
dans tous les endroits qu'ils
jugerent dignes de leur curioſité.
Ils marquerent une
ſurpriſe qui ne ſe peut exprimer
, & crûrent voir une
des premieres merveilles du
Monde. Ils vinrent enſuite
Tiiij
224 III. P. du Voyage
à pied juſqu'à la Jettée, où
l'on ſe rembarqua pour regagner
le Carroffe. Le lendemain
ils allerent à la Citadelle
que le Roy a fait bâtir.
Ils furent receus au bruit du
Canon , & trouverent l'Infanterie
ſous les Armes ; ils
virent les Magaſins & les Arcenaux
, & dirent que non
Seulement cette Fortereffe leur
paroiſſoit imprenable , mais mefme
qu'ils ne croyoient pas que
l'on pût ſonger à l'attaquer ,
parce qu'on n'attaquoit pas ce
qu'on sçavoit qu'il estoit impoffible
de prendre. On tira une
des Amb. de Siam. 225
Coulevrine , appellée la grande
Coulevrine de Nancy. Comme
on leur avoit donné les
Violons , ce qui continua
tant qu'ils ſéjournerent à
Dunkerque , ils avoient demandé
les noms de pluſieurs
Airs , & même la raiſon des
noms qu'on leur avoit dits.
La Folie d'Eſpagne s'eſtant
trouvée de ce nombre , il ne
ſe rencontra perſonne qui
-leur pût apprendre pourquoy
cét Air avoit eu ce nom : ce
qui fut cauſe que M Megron
leur ayant demádé l'Ordre
, ils dirent la Folie d'Ef
r
226 III. P. du Voyage
pagne. M: Torf leur demanda
, pourquoy ils donnoient
ce mot. Ils répondirent, qu'ils
avoient peut- estre plus de raiſon
de le donner , que le Muſicien
n'en avoit eu de nommer
Folie un Air qui paroiffoit tresbeau
, puiſque c'en estoit une tresgrande
que d'avoir laiffé prendre
une Ville comme Dunkerque.
Lejour ſuivant (car ilsſéjournerent
deux jours àDunkerque
) ils firent le tour de
la Place avec M Megron ,
& trouverent les Ramparts
d'une propreté qui paſſe tout
des Amb. de Siam. 227
د
ce qu'on s'en peut imaginer.
On n'y voit aucune ordure
de quelque nature qu'elle
puiſſe eſtre , & les Jardins les
plus propres & les mieux entretenus
du Prince le plus curieux
ne pourroient qu'à
peine approcher de ce qu'ils
virent. Cela fait connoiftre
que Me Megron ſçaitbien ſe
faire obeïr , & qui fe fait obefr,
doit eſtre du nombre
des meilleurs Officiers . M du
Verger Ingenieur de la Place,
en fit le tour avec les Ambaſſadeurs.
Illeur apprit tout
cequ'ils ſouhaiterent ſçavoir
228 III. P. du Voyage
&répondit ſi bien à toutes
leurs queſtions , qu'ils conçûrentbeaucoup
d'eftime, &
prirent même quelque forte
d'amitié pour luy. Ils dirent,
que le Roy de Siam n'épargneroit
rien pour avoir un auffi habile
Homme qu'il eſtoit , & le
prierent de vouloir bien les accompagner
jusqu'à Bergues, par
où ils devoientpaffer pour aller à
Ypres. Enfin ils luy dirent ,
qu'il s'expliquoit si bien , que
tout marquoit en luy ce qu'il
vouloit dire , & que ceux àqui
il parloit n'avoient que faire de
fçavoirfa langue , pour concedes
Amb. de Siam. 229
voir ce qu'il vouloit faire entendre.
Ils ne quitterent les Ramparts
que pour aller voir l'Arcenal,
où ils ne laiſſerent rien
à viſiter : de forte qu'eſtant
tous remplis de la beauté de
la Place , &de la grandeur du
Roy , ils fortirent en difant,
qu'ils voyoient par tout des chofes
inoüies. M Patoulet Intendant
de Marine , ayant
fait charger pluſieurs Ecluſes,
vint ſur le ſoir les prier d'en
voir l'effet , & leur dit , que
cela ne dureroit qu'un instant.
Ils demanderent, fi leRoy les
avoit fait faire comme le reste.
230 III . P. du Voyage
On leur dit que oüy. Ils repartirent
auffi -toſt , qu'ils ne
doutoient pas que cela ne répon
diſt à la magnificence de Sa Majesté
, &qu'ilsypaſſeroient non
pas un instant , mais la nuit
entiere. Ils monterent dans le
Carroffe de Me l'Intendant,
qui en avoit fait amener
d'autres pour leur Suite. Dés
qu'ils furent arrivez , on ouvrit
les Ecluſes, qui firent les
effets qu'on en attendoit.
L'Ambaſſadeur dit qu'il estoit
caution de la netteté du Port,
tant qu'on entretiendroit cesEclufes-
là. Ils virent le nouveau
L
des Amb. de Siam. 231
Baffin pour les Vaiſſeaux du
Roy , qui eſt encore un des
Ouvrages qui répond le plus
à la grandeur de Sa Majefté.
On leur montra auſſi plufieurs
Vaiſſeaux fur le chantier.
Si je voulois vous faire
un détail entier de tout ce
que les Ambaſſadeurs ont vû
& dit à Dunkerque , & de la
maniere dont le Roy y eſt
ſervy, j'avoue qu'il me feroit
difficile de trouver la fin de
certe Relation . L'Ambaſſadeur
donna ce ſoir-là pour
mot , Nous triomphons par fa
victoire, & dit que c'eſtoit une
234 III . P. du Voyage
verité , puiſque l'état où ef
toit la Ville , depuis qu'elle
avoit eſté conquiſe par Sa
Majesté , & l'opulence des
Peuples , faifoient voir qu'ils
triomphoient par la victoire
de ce
de ce grand Monarque.
Aprés avoir ſejourné à
Dunkerque le 29. & le 30. ils
en partirent avec des honneurs
qui ne peuvent eſtre
comparez qu'à ceux qu'ils avoient
receus en y entrant.
Ils s'embarquerent dés ſept
heures du matin, ſur le canal
de Bergues , qui eſt hors la
Ville, dans un batteau coudes
Amb. de Siam. 233
vert bien meublé & vîtré,
que M Deſmadrit leur avoit
fait préparer. Ils avoient prié
de trop bonne grace M du
Verger de venir avec eux jufques
à Bergues , pour en eſtre
refufez. Il les accompagna
juſque- là, & ils parlerent pendant
tout le chemin de Fortifications
& des inondations
de Siam. L'Ambaſſadeur luy
dit qu'il croyoit qu'il estoit un
homme univerſel. Ils trouverent
fur le chemin de Dunkerque
à Bergues, le long du
Canal, le Fort Louis, & le Fort
S. François , qui font deux
V
234 III. P.du Voyage
Forts Royaux , & quelques
Redoutes . Ils en furent falüez
, & les Garniſons parurent
en bataille ſur les ramparts
. Eftant arrivez à Bergues
, Mª du Verger les quit
ta , dont ils témoignerent du
regret. Ils trouverent leurs
Carroffes , dans lesquels ils
monterent pour continuër
leur route. Ils furent falüez
par l'Artillerie de Bergues , &
trouverent la Garnifon fous
les armes , depuis une Porte
juſques à l'autre. Ils furent
meſme haranguez , & receurent
les Prefens de la Ville.
coucher à Dunkerque , Ville
fur la Mer dans le Comté de
Flandres . Le Comte Baudoüin
III . dit le Jeune, la fit
bâtir en 960. Elle a de fort
bellesRuës, unPort extrémement
frequenté , & des Ha-
T
218 III . P. du Voyage
bitans fort renommez pour
la Navigation. Marie de Luxembourg
, Comteſſe de S.
Paul, Dame de Dunkerque,
Fille unique de Pierre de Luxembourg
& de Marguerite
de Savoye, épouſa François de
Bourbon, Comte de Vendôme
, quatriéme Ayeul paternel
du Roy. C'eſt ſur cela
que font fondées les legitimes
pretentions qu'a Sa Majeſté
ſur la Ville de Dunkerque.
Les François la prirent
en 1558. Le Duc de Parme
la reprit en 1583. Monfieur
le Prince , alors Duc d'An-
1
des Amb. de Siam. 319
guien, s'en rendit Maiſtre en
1646. & les Eſpagnols qui
l'emporterent en 1652. lagarderent
juſqu'en 1658. que
Mr le Maréchal de Turenne
la leur ôta. Elle fut remiſe
aux Anglois , de qui le Roy
la racheta en 1662. La Citadelle
que Sa Majeſté y a fait
faire , eft tres - confiderable ,
auſſi - bien que les Fortifications.
Les Ambaſſadeurs aprés a
voir paſſé entre le Fort du
Bois &le Fort Mardic , qu'ils
confidererent , approcherent
de la Place au bruit d'une
Tij
220 III. P. du Voyage
groffe Artillerie. M Me
gron Major qui y commandoit
, les reçût à la Porte de
la Ville. Toute la Garniſon,
parmy laquelle il y avoit
beaucoup de Compagnies
Suiffes, eſtoit ſous les Armes.
Ils furent logez à l'Hoſtel de
Ville, où ils reçûrent les complimens
des Magiftrats, & les
Preſens ordinaires. Ils furent
auſſi complimentez par
pluſieurs Corps . Le foir tout
'Hoſtel de Ville ſe trouva
éclairé par l'ordre des Magiſtrats.
Ils donnerent ce
foir- là pour Mot , La clef eft
des Amb de Siam . 221
digne de la ferrure , fur ce
qu'on leur avoit dit que Dunkerque
eſt une Clef du
Royaume. Ils furent ravis
de trouver à Dunkerque Madame
la Princeſſe de Bournonville,
Me la Comteffe de
Sore , & Ms les Princes de
Bournonville & de Robec,
qu'ils avoient veus à Berny, &
dont ils avoient reçû de grandeshonnêtetez.
MadamePatoulet,
femmede M² l'Intendant
de la Marine à Dunkerque
, eſtoit de la Compagnie.
M Deſmadrit Intendant
de Juſtice , Police des
Tiij
222 III . P. du Voyage
Troupes , & Finances de Sa
Majesté, & M Patoulet, vinrent
auſſi les ſalüer . M Defmadrit
leur dit , qu'il alloit à
Ypres , où il auroit l'honneur de
les voir , & qu'il eſperoit qu'ils
luy feroient la grace de diſner
chez luy. Ils fouperent à l'ordinaire
en bonne Compagnie.
Le lendemain ils monterent
en Carroſſe pour aller
du côté de la Mer , où ils
trouverent des Chaloupes
fort propres, & virent les Jettées
& les Forts qui ſont def
ſus, qui les ſalüerent de toute
leur Artillerie. Ils meſurerent
desAmb. de Siam, 223
eux-mêmes les épaiſſeurs &
les hauteurs des murailles , les
hauteurs & les profondeurs
des foſſez , & examinerent
tous les ouvrages avancez. Ils
virent fortir à pleines voiles
un affez gros Vaiffeau, chargé
de tout ſon Canon. De là
ils allerent au Rifban , où ils
monterent & deſcendirent
dans tous les endroits qu'ils
jugerent dignes de leur curioſité.
Ils marquerent une
ſurpriſe qui ne ſe peut exprimer
, & crûrent voir une
des premieres merveilles du
Monde. Ils vinrent enſuite
Tiiij
224 III. P. du Voyage
à pied juſqu'à la Jettée, où
l'on ſe rembarqua pour regagner
le Carroffe. Le lendemain
ils allerent à la Citadelle
que le Roy a fait bâtir.
Ils furent receus au bruit du
Canon , & trouverent l'Infanterie
ſous les Armes ; ils
virent les Magaſins & les Arcenaux
, & dirent que non
Seulement cette Fortereffe leur
paroiſſoit imprenable , mais mefme
qu'ils ne croyoient pas que
l'on pût ſonger à l'attaquer ,
parce qu'on n'attaquoit pas ce
qu'on sçavoit qu'il estoit impoffible
de prendre. On tira une
des Amb. de Siam. 225
Coulevrine , appellée la grande
Coulevrine de Nancy. Comme
on leur avoit donné les
Violons , ce qui continua
tant qu'ils ſéjournerent à
Dunkerque , ils avoient demandé
les noms de pluſieurs
Airs , & même la raiſon des
noms qu'on leur avoit dits.
La Folie d'Eſpagne s'eſtant
trouvée de ce nombre , il ne
ſe rencontra perſonne qui
-leur pût apprendre pourquoy
cét Air avoit eu ce nom : ce
qui fut cauſe que M Megron
leur ayant demádé l'Ordre
, ils dirent la Folie d'Ef
r
226 III. P. du Voyage
pagne. M: Torf leur demanda
, pourquoy ils donnoient
ce mot. Ils répondirent, qu'ils
avoient peut- estre plus de raiſon
de le donner , que le Muſicien
n'en avoit eu de nommer
Folie un Air qui paroiffoit tresbeau
, puiſque c'en estoit une tresgrande
que d'avoir laiffé prendre
une Ville comme Dunkerque.
Lejour ſuivant (car ilsſéjournerent
deux jours àDunkerque
) ils firent le tour de
la Place avec M Megron ,
& trouverent les Ramparts
d'une propreté qui paſſe tout
des Amb. de Siam. 227
د
ce qu'on s'en peut imaginer.
On n'y voit aucune ordure
de quelque nature qu'elle
puiſſe eſtre , & les Jardins les
plus propres & les mieux entretenus
du Prince le plus curieux
ne pourroient qu'à
peine approcher de ce qu'ils
virent. Cela fait connoiftre
que Me Megron ſçaitbien ſe
faire obeïr , & qui fe fait obefr,
doit eſtre du nombre
des meilleurs Officiers . M du
Verger Ingenieur de la Place,
en fit le tour avec les Ambaſſadeurs.
Illeur apprit tout
cequ'ils ſouhaiterent ſçavoir
228 III. P. du Voyage
&répondit ſi bien à toutes
leurs queſtions , qu'ils conçûrentbeaucoup
d'eftime, &
prirent même quelque forte
d'amitié pour luy. Ils dirent,
que le Roy de Siam n'épargneroit
rien pour avoir un auffi habile
Homme qu'il eſtoit , & le
prierent de vouloir bien les accompagner
jusqu'à Bergues, par
où ils devoientpaffer pour aller à
Ypres. Enfin ils luy dirent ,
qu'il s'expliquoit si bien , que
tout marquoit en luy ce qu'il
vouloit dire , & que ceux àqui
il parloit n'avoient que faire de
fçavoirfa langue , pour concedes
Amb. de Siam. 229
voir ce qu'il vouloit faire entendre.
Ils ne quitterent les Ramparts
que pour aller voir l'Arcenal,
où ils ne laiſſerent rien
à viſiter : de forte qu'eſtant
tous remplis de la beauté de
la Place , &de la grandeur du
Roy , ils fortirent en difant,
qu'ils voyoient par tout des chofes
inoüies. M Patoulet Intendant
de Marine , ayant
fait charger pluſieurs Ecluſes,
vint ſur le ſoir les prier d'en
voir l'effet , & leur dit , que
cela ne dureroit qu'un instant.
Ils demanderent, fi leRoy les
avoit fait faire comme le reste.
230 III . P. du Voyage
On leur dit que oüy. Ils repartirent
auffi -toſt , qu'ils ne
doutoient pas que cela ne répon
diſt à la magnificence de Sa Majesté
, &qu'ilsypaſſeroient non
pas un instant , mais la nuit
entiere. Ils monterent dans le
Carroffe de Me l'Intendant,
qui en avoit fait amener
d'autres pour leur Suite. Dés
qu'ils furent arrivez , on ouvrit
les Ecluſes, qui firent les
effets qu'on en attendoit.
L'Ambaſſadeur dit qu'il estoit
caution de la netteté du Port,
tant qu'on entretiendroit cesEclufes-
là. Ils virent le nouveau
L
des Amb. de Siam. 231
Baffin pour les Vaiſſeaux du
Roy , qui eſt encore un des
Ouvrages qui répond le plus
à la grandeur de Sa Majefté.
On leur montra auſſi plufieurs
Vaiſſeaux fur le chantier.
Si je voulois vous faire
un détail entier de tout ce
que les Ambaſſadeurs ont vû
& dit à Dunkerque , & de la
maniere dont le Roy y eſt
ſervy, j'avoue qu'il me feroit
difficile de trouver la fin de
certe Relation . L'Ambaſſadeur
donna ce ſoir-là pour
mot , Nous triomphons par fa
victoire, & dit que c'eſtoit une
234 III . P. du Voyage
verité , puiſque l'état où ef
toit la Ville , depuis qu'elle
avoit eſté conquiſe par Sa
Majesté , & l'opulence des
Peuples , faifoient voir qu'ils
triomphoient par la victoire
de ce
de ce grand Monarque.
Aprés avoir ſejourné à
Dunkerque le 29. & le 30. ils
en partirent avec des honneurs
qui ne peuvent eſtre
comparez qu'à ceux qu'ils avoient
receus en y entrant.
Ils s'embarquerent dés ſept
heures du matin, ſur le canal
de Bergues , qui eſt hors la
Ville, dans un batteau coudes
Amb. de Siam. 233
vert bien meublé & vîtré,
que M Deſmadrit leur avoit
fait préparer. Ils avoient prié
de trop bonne grace M du
Verger de venir avec eux jufques
à Bergues , pour en eſtre
refufez. Il les accompagna
juſque- là, & ils parlerent pendant
tout le chemin de Fortifications
& des inondations
de Siam. L'Ambaſſadeur luy
dit qu'il croyoit qu'il estoit un
homme univerſel. Ils trouverent
fur le chemin de Dunkerque
à Bergues, le long du
Canal, le Fort Louis, & le Fort
S. François , qui font deux
V
234 III. P.du Voyage
Forts Royaux , & quelques
Redoutes . Ils en furent falüez
, & les Garniſons parurent
en bataille ſur les ramparts
. Eftant arrivez à Bergues
, Mª du Verger les quit
ta , dont ils témoignerent du
regret. Ils trouverent leurs
Carroffes , dans lesquels ils
monterent pour continuër
leur route. Ils furent falüez
par l'Artillerie de Bergues , &
trouverent la Garnifon fous
les armes , depuis une Porte
juſques à l'autre. Ils furent
meſme haranguez , & receurent
les Prefens de la Ville.
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Résumé : Dunkerque. [titre d'après la table]
Le texte décrit la visite des ambassadeurs de Siam à Dunkerque, une ville située en Flandres, fondée en 960 par le Comte Baudouin III. Dunkerque est réputée pour ses rues pittoresques, son port actif et ses habitants experts en navigation. Marie de Luxembourg, Comtesse de Saint-Pol et Dame de Dunkerque, a épousé François de Bourbon, Comte de Vendôme, ancêtre du roi de France, ce qui a justifié les prétentions royales sur la ville. Dunkerque a connu plusieurs changements de mains au fil des siècles. Elle a été prise par les Français en 1558, reprise par les Espagnols en 1583, conquise par le Duc d'Anjou en 1646, puis de nouveau par les Espagnols en 1652, avant d'être finalement rachetée par le roi de France en 1662. La citadelle et les fortifications de Dunkerque sont particulièrement remarquables. Lors de leur visite, les ambassadeurs de Siam ont été accueillis avec des honneurs militaires et civils. Ils ont été logés à l'Hôtel de Ville et ont reçu des présents. Ils ont visité les fortifications, les jetées et les forts, et ont été impressionnés par la propreté et la discipline des lieux. Ils ont également assisté à des démonstrations de l'artillerie et des écluses, exprimant leur admiration pour les ouvrages et la grandeur du roi. Après deux jours à Dunkerque, ils ont quitté la ville en bateau, accompagnés par des salves d'artillerie et des honneurs militaires.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 301-306
Condé. [titre d'après la table]
Début :
Ce jour-là 8. Novembre ils arriverent à Condé. C'est [...]
Mots clefs :
Condé-sur-l'Escaut, Marie de Luxembourg, Princes de Condé, Nom de Condé, Bourbon, Ville, Place, Comte, Pétau, Roi
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Condé. [titre d'après la table]
Ce jour-là 8. Novembre ils
arriverent à Condé. C'eſt
une Ville dans le Hainaut
qui fut priſe par les François
en 1676. & où le Roy a fait
faire des Fortifications , qui
la rendent une Place tres
302 III. P. du Voyage
importante. Elle eſt ſur l'Efcaut
, & a une Egliſe Collegiale
fort ancienne. Cette
Ville eft celebre pour avoir
eu des Seigneurs d'un grand
merite , mais fur tout pour
avoir donné fon nom à pluſieurs
grands Princes de la
Royale Maiſon de Bourbon.
François de Bourbon , Comte
de Vendôme , épouſa en
1487. Marie de Luxembourg,
Fille aînée & principale heritiere
de Pierre de Luxembourg
II. du nom , Comte
de S. Paul , de Couverſan &
de Soiſſons. Elle estoit Vides
Amb. de Siam. 303
comteſſe de Meaux , Dame
d'Anguien , de Condé , &c .
Elle mourut à la Fére en 1547 .
aprés avoir eſté veuve 52. ans,
&ſes petits Enfans prirent le
nom de Princes de Condé.
Charles de Bourbon ſon Fils,
Comte & enſuite premier
Duc de Vendôme , fut Pere
d'Antoine de Bourbon , qui
eut pour Fils le Roy Henry
le Grand , & Loüis de Bourbon
Prince de Condé , qui a
fait la branche des Princes
qui portent ce nom. Lorfque
les Ambaſſadeurs approcherent
de Condé , ils trou
304 III . P. du Voyage
verent la Cavalerie de la Place
qui eſtoit venue au devant
d'eux. Aprés que le Canon
ſe fut fait entendre , M. Petau
Gouverneur de la Ville ,
parut pour les recevoir. Les
Ruës le trouverent bordées
d'Infanterie juſqu'à la porre
de leur Logis, & ils reçûrent
les complimens & les Prefens
comme dans les autres Villes .
Quoy que M' le Comte de
Sore ne fuſt pas à Condé ,
ils ne laifferent pas de loger
dans ſa maiſon qu'il leur avoit
offerte , & on leur en donna
les plus magnifiques Appardes
Amb. de Siam. 305
temens. M Petau alla prendre
l'ordre , & ils donnerent
pour Mot , le foûtiendray ſon
nom. Ils s'expliquerent là -
deffus , & dirent que le nom
de Condé eſtoit un nom fi
illuftre, qu'on feroit toûjours
beaucoup lorſqu'on en foûtiendroit
la gloire. Ainfi
vous voyez que c'eſt la Ville
qui parle , & qui dit qu'elle
foûtiendra le nom de Condé.
M Petau les traita le ſoir en
maigre , & le Repas fut magnifique.
Ils monterent à
cheval le lendemain de grand
matin, pour aller voir les For-
Cc
306 III. P. du Voyage
tifications de la Place, &M
Petau leur fit remarquer jufqu'aux
moindres endroits . Il
leur donna enſuite un fort
grand Dîner , n'ayant pas
voulu qu'ils ayent mangé ailleurs
que chez luy, tant qu'ils
ont demeuré dans la Place .
arriverent à Condé. C'eſt
une Ville dans le Hainaut
qui fut priſe par les François
en 1676. & où le Roy a fait
faire des Fortifications , qui
la rendent une Place tres
302 III. P. du Voyage
importante. Elle eſt ſur l'Efcaut
, & a une Egliſe Collegiale
fort ancienne. Cette
Ville eft celebre pour avoir
eu des Seigneurs d'un grand
merite , mais fur tout pour
avoir donné fon nom à pluſieurs
grands Princes de la
Royale Maiſon de Bourbon.
François de Bourbon , Comte
de Vendôme , épouſa en
1487. Marie de Luxembourg,
Fille aînée & principale heritiere
de Pierre de Luxembourg
II. du nom , Comte
de S. Paul , de Couverſan &
de Soiſſons. Elle estoit Vides
Amb. de Siam. 303
comteſſe de Meaux , Dame
d'Anguien , de Condé , &c .
Elle mourut à la Fére en 1547 .
aprés avoir eſté veuve 52. ans,
&ſes petits Enfans prirent le
nom de Princes de Condé.
Charles de Bourbon ſon Fils,
Comte & enſuite premier
Duc de Vendôme , fut Pere
d'Antoine de Bourbon , qui
eut pour Fils le Roy Henry
le Grand , & Loüis de Bourbon
Prince de Condé , qui a
fait la branche des Princes
qui portent ce nom. Lorfque
les Ambaſſadeurs approcherent
de Condé , ils trou
304 III . P. du Voyage
verent la Cavalerie de la Place
qui eſtoit venue au devant
d'eux. Aprés que le Canon
ſe fut fait entendre , M. Petau
Gouverneur de la Ville ,
parut pour les recevoir. Les
Ruës le trouverent bordées
d'Infanterie juſqu'à la porre
de leur Logis, & ils reçûrent
les complimens & les Prefens
comme dans les autres Villes .
Quoy que M' le Comte de
Sore ne fuſt pas à Condé ,
ils ne laifferent pas de loger
dans ſa maiſon qu'il leur avoit
offerte , & on leur en donna
les plus magnifiques Appardes
Amb. de Siam. 305
temens. M Petau alla prendre
l'ordre , & ils donnerent
pour Mot , le foûtiendray ſon
nom. Ils s'expliquerent là -
deffus , & dirent que le nom
de Condé eſtoit un nom fi
illuftre, qu'on feroit toûjours
beaucoup lorſqu'on en foûtiendroit
la gloire. Ainfi
vous voyez que c'eſt la Ville
qui parle , & qui dit qu'elle
foûtiendra le nom de Condé.
M Petau les traita le ſoir en
maigre , & le Repas fut magnifique.
Ils monterent à
cheval le lendemain de grand
matin, pour aller voir les For-
Cc
306 III. P. du Voyage
tifications de la Place, &M
Petau leur fit remarquer jufqu'aux
moindres endroits . Il
leur donna enſuite un fort
grand Dîner , n'ayant pas
voulu qu'ils ayent mangé ailleurs
que chez luy, tant qu'ils
ont demeuré dans la Place .
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Résumé : Condé. [titre d'après la table]
Le 8 novembre, des ambassadeurs arrivèrent à Condé, une ville du Hainaut prise et fortifiée par les Français en 1676. Condé, située sur l'Escaut, est connue pour son église collégiale ancienne et ses seigneurs méritants. En 1487, François de Bourbon, comte de Vendôme, épousa Marie de Luxembourg, héritière de Pierre de Luxembourg II. Marie, comtesse de Meaux et dame de Condé, mourut en 1547. Ses petits-enfants adoptèrent le nom de princes de Condé. Charles de Bourbon, fils de Marie, devint le premier duc de Vendôme et père d'Antoine de Bourbon, dont les fils furent le roi Henri IV et Louis de Bourbon, prince de Condé. À leur arrivée, les ambassadeurs furent accueillis par les forces de la ville et reçus par M. Petau, gouverneur de Condé, qui leur offrit des logements et un dîner somptueux après une visite des fortifications.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 227-231
Ils sont haranguez en 24 Langues au College de Louis le Grand ; noms de ceux qui les ont haranguez, & des 24 Langues. [titre d'après la table]
Début :
Ils avoient esté quelques jours au paravant au College de [...]
Mots clefs :
Haranguer, Langues, Collège de Louis le Grand, Marquis, Chevalier, Comte
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texteReconnaissance textuelle : Ils sont haranguez en 24 Langues au College de Louis le Grand ; noms de ceux qui les ont haranguez, & des 24 Langues. [titre d'après la table]
Ils avoient eſté quelques
jours au paravant au College
de Loüis le Grand , où ils furent
receus par tour ce qu'il
y avoit dans ce College d'enfans
de la premiere qualité de
ce Royaume,&desPaïs étrangers
, qui les complimente
rent en 24. Langues differentes
. Voicy les noms de cette
jeune Nobleffe, & les Langues
dont elle s'eſt ſervie pour ces
divers compliments.
Monfieur le Comte de Sophia
en Polonois.
228 IV.P.duVoyage
M le Chevalier de Boüil
Ion en Arabe.
Le Seigneur Foſcarini en
Italien.
M le Comte de Luna en
Espagnol.
M l'Abbé de Coet-logon
en Latin.
M le Chevalier de ColbertCroiſſy
en Stamois.
M. de Bontemps en Montaneft
de Canada.
Mr le Prince de Montmorency
en Flamand.
Me le Marquis deBordage
en Egyptien.
M l'Abbé Colbert de
2
des Amb. de Siam. 219
Maulevrier en Chinois.
M le Comte de Bouillon
en Grec vulgaire.
M de Gluë en Hollandois.
Lord Hovvar en Anglois.
M le Marquis de S. Vallier
en Algonquin.
M. Galion en Portugais.
Γ
M Ceberet en Galibi.
M le Chevalier de Roye
en Danois.
Mele Prince Emanuel de
Lorraine en Hebreu.
M le Chevalier de Ville
roy en François.
M le Marquis de la Force
enAlbanois.
230 IV. P. duVoyage
Me le Marquis de Cau
mont en Allemand.
Me l'Abbé de Villeroy en
Siriaque.
Male Marquis de Boeſſe
en Bas-Breton .
M de Caſtelnau en Turca
Ils répondirent à tous ces
Compliments d'une maniere
fort fpirituelle , & fort obligeante
, & tout- à-fait avanrageuſe
à la Nation de ceux
qui les haranguoient. On les
conduifit dans une Galerie
qui donne fur la Court pour
leur faire voir les Ecoliers du
College qu'on fit fortir de
desAmb. de Siam. 238
toutes les Claſſes. Ils furent
furpris d'en voir le nombre
monter à plus de trois mille
qui rempliſſoient toute la
court ,& ils prirent beaucoup
de plaifir aux applaudiffements
qu'ils leur donnerent
felon leur coûtume en ces
fortes d'occaſions , qui eſt de
louhaitter tous enſemble , &
àpleine voix une longue vie,
à tous ceux qui leur font donner
quelque congé extraordinaire
, où dont ils l'efperent.
jours au paravant au College
de Loüis le Grand , où ils furent
receus par tour ce qu'il
y avoit dans ce College d'enfans
de la premiere qualité de
ce Royaume,&desPaïs étrangers
, qui les complimente
rent en 24. Langues differentes
. Voicy les noms de cette
jeune Nobleffe, & les Langues
dont elle s'eſt ſervie pour ces
divers compliments.
Monfieur le Comte de Sophia
en Polonois.
228 IV.P.duVoyage
M le Chevalier de Boüil
Ion en Arabe.
Le Seigneur Foſcarini en
Italien.
M le Comte de Luna en
Espagnol.
M l'Abbé de Coet-logon
en Latin.
M le Chevalier de ColbertCroiſſy
en Stamois.
M. de Bontemps en Montaneft
de Canada.
Mr le Prince de Montmorency
en Flamand.
Me le Marquis deBordage
en Egyptien.
M l'Abbé Colbert de
2
des Amb. de Siam. 219
Maulevrier en Chinois.
M le Comte de Bouillon
en Grec vulgaire.
M de Gluë en Hollandois.
Lord Hovvar en Anglois.
M le Marquis de S. Vallier
en Algonquin.
M. Galion en Portugais.
Γ
M Ceberet en Galibi.
M le Chevalier de Roye
en Danois.
Mele Prince Emanuel de
Lorraine en Hebreu.
M le Chevalier de Ville
roy en François.
M le Marquis de la Force
enAlbanois.
230 IV. P. duVoyage
Me le Marquis de Cau
mont en Allemand.
Me l'Abbé de Villeroy en
Siriaque.
Male Marquis de Boeſſe
en Bas-Breton .
M de Caſtelnau en Turca
Ils répondirent à tous ces
Compliments d'une maniere
fort fpirituelle , & fort obligeante
, & tout- à-fait avanrageuſe
à la Nation de ceux
qui les haranguoient. On les
conduifit dans une Galerie
qui donne fur la Court pour
leur faire voir les Ecoliers du
College qu'on fit fortir de
desAmb. de Siam. 238
toutes les Claſſes. Ils furent
furpris d'en voir le nombre
monter à plus de trois mille
qui rempliſſoient toute la
court ,& ils prirent beaucoup
de plaifir aux applaudiffements
qu'ils leur donnerent
felon leur coûtume en ces
fortes d'occaſions , qui eſt de
louhaitter tous enſemble , &
àpleine voix une longue vie,
à tous ceux qui leur font donner
quelque congé extraordinaire
, où dont ils l'efperent.
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Résumé : Ils sont haranguez en 24 Langues au College de Louis le Grand ; noms de ceux qui les ont haranguez, & des 24 Langues. [titre d'après la table]
Un groupe de jeunes nobles visita le Collège de Louis le Grand. Quelques jours auparavant, ils avaient été accueillis par les élèves du collège, issus des plus hautes familles du royaume et de pays étrangers. Ces élèves les complimentèrent dans 24 langues différentes. Parmi les nobles, le Comte de Sophia reçut des compliments en polonais, le Chevalier de Bouillon en arabe, le Seigneur Foscarini en italien, et ainsi de suite pour chaque noble dans une langue spécifique. Les visiteurs répondirent de manière spirituelle et obligeante. Ils furent ensuite conduits dans une galerie pour voir les écoliers du collège, au nombre de plus de trois mille, répartis dans toutes les classes. Les visiteurs furent surpris par ce nombre et prirent plaisir aux applaudissements des écoliers, qui leur souhaitèrent une longue vie selon leur coutume.
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14
p. 1-337
JOURNAL DU VOYAGE DE SA MAJESTÉ A LUXEMBOURG.
Début :
Je vous l'ay promis, Madame. Il faut vous satisfaire [...]
Mots clefs :
Roi, Luxembourg, Sa Majesté, Prince, Place, Voyage, Ville, Cour, Gardes, Église, Verdun, François-Henri de Montmorency-Bouteville, Maison, Duc de Luxembourg, Honneur, Bonté, Paris, Comte, Fortifications, Troupes, Officiers, Évêché, Abbé, Versailles, France, Médailles, Corps, Personnes, Messe, Châlons-en-Champagne, Évêque, Marquis, Lieux, Régiment, Champagne
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : JOURNAL DU VOYAGE DE SA MAJESTÉ A LUXEMBOURG.
JOURNAL
1 DV VOYAGE
DE
SA MAJESTÉl
A LUXEMBOURG.
E vous l'aypromis
,
Madame. Il faut
vous satisfaire sur le
grand Article du Voyage
de Sa Majesté à Luxembourg,
Pc. comme vous m'avez ordonné
de n'enoublier aucune
des circonstances, elles
feront le sujet d'une Lettre
entière. Un pareil Journal
doit estre agréable aux Curieux
Tout le monde scait
que le Roy ne peut faire un
pas hors le lieu de sa résidence
ordinaire, que toute
l'Europe ne soit aussi-tost
en mouvement. Le bruit de
ce Voyage n'eut pas plûtost
Commencé à se répandre,
qu'elle fit paroistre de grandes
alarmes. Mais que pouvoit-
elle avoir à craindre?
Elle devoitestre persuadée,
que le Monarque qui luy a
donné la Paix? n'avoir aucun
dessein de la rompre.
C'est son ouvrage, & loin
de songer à le détruire,Sa
Majesté fera toûjours preste
à faire repentir ceux qui travailleront
à troubler le calme
qu'il a étably. Un pareil
dessein ne sçauroitestre
conceu que par des Ambitieux
opiniâtres, & trop constamment
jaloux de la grandeur
de ce Prince;mais c'est
àeux seuls à craindre, dans
letemps qu'ils veulent rendresuspectes
toutes ses démarches,
& jetter dans les
cfprits des frayeurs seditieuses,
afin d'exciter dans la
plus grande partie des Etats
voisinsle desordre & la confusion,
sans quoyils demeurent
dans une fâcheuse obsçuiipé?
qui leur est beaucoup
moins supportable que la
douleur que les Victoires du
Roy ont dû leur causer
, pour
ne pas dire, leurs continuelles
défaites. Comme il y a
peu de Regnes qui ne plaisent
,
a quelques chagrins
que l'on puisse estre exposé
en regnant ,ils voudroient
toûjours jouir de la tristesatisfaction
qu'ils ont de com*.
mander aux dépens de la
tranquillité de l'Europey
mais le Roy quien est leBienfai£
teur> & le Pere, voulant
luy conserver le repos qu'il
luy a si genereusement procuré,&
dontil lafait jodir.,
malgré lescontinuels obstacles
qu'on oppose inutilement
à sabonté, renverse
tous leurs desseins par sa prudente
conduite &: par sa perseverance.
Les défiances que
l'on a voulu donner de son
Voyage) donton pretendoit
que de secrets desseins estoient
les motifs, ont esté
une occasion au Roy de confondre
les Ennemis de sa
gloire. Il n'a pu soffrir qu'on
crustqu'il déguisast ses intentions
,8z pour empescher
que leur sincerité ne fust
foupçonnée
9
il a bien voulu
donner un éclaircissement,
quien faisant voir la bonté
qu'il a de'ne point chercher
à troubler l' Europe qu'il a
l, pris foin de pacifier, a servy
encore, par des assurances
publiques,& dont aucun
Prince ne pouvoir douter, à,
dissiper les frayeurs que les
.1n.1.1 intentionnez avoient
jettées dans les coeurs timides,
afin de parvenir à leur but.
Non seulement ils n'y sont
point parvenus ?
mais tout ce
qu'ils ont pû dire, n'a fait que
fairemieux voir combien le
pouvoir du Royest redoutable,
puisqu'ilsontété obligez
de faire connoistre eux-mêmes
par toutes les chosesqu'ils
ont avancées, qu'il suffitque
ce Monarque fasse une entreprise
pour y réiiflir
, & que
s'il veut vaincre, il n'a qu'à
combattre. On a sujet de les
croire. Ils n'ont pas eu desfein
de flater
,
&sur ce qui se
publie de cette nature ,
les
Ennemis sont plus croyables
que d'autres, puis que leur
sincerité ne peut estresoupçonnée.
Mais comme vous
pourriez douter de la mienne
lors que je vous parleai
& croire que je me suis formé
exprés des monstres pour
les combattre, en faisant paffer
mes conjectures pour des
veritez,à l'égard de tout ce
que je viens de vous dire dt.
l'inquietude que l'on a voulu
donner à la plus grande
partie de l'Europe, pour luy
faire prendre de l'ombrage
des desseins du Roy
?
voicy
une piece justificative.
Sa Majesté
,
à qui rien n'est
inconnu, tant à cause de sa
vive penetration
, que des
foins qu'elle prend sans cesse
pour bien s'acquiterde ce que
son rang demande,sçachant
ce qui se disoit du dessein
qu'Elle avoit pris de faire un
VoyageàLuxembourg, voulut
faire voir la mauvaise intention
de ceux qui en répandant
des bruits contraires
au repos public, pretcndoient
venir à bout de leurs entreprises.
Dans cette pensée, Elle
ordonna à Mrle Marquis de
Croissy Colbert
,
Ministre &
Secretaire d'Estat
, ayant le
département des affaires étrangeres,
d'écrire une Lettre
à Mrle Cardinal Ranuzzi,
Nonce de Sa Sainteté enFrance.
Voicy à peu prés le sujet
de cette Lettre. Ive de Croisfy
marquoit à ce Cardinal
que le Roy luy avoit commandé
d'informer son Eminence de la
resolution qu'ilavoit priscel'al.,
lerdans le mois de May à Luxembourg
, CJTouencore que Sa
Majcflr n'eustpas accoûtumé de
rendre raison de Jes actions,
comme Elle ne vouloit pas
néanmoins renouveller l'alarme
qu'on dvùitprise sans fondement
de l'ouverture qui a esté
faite du convertissement de la
Tréve en un TraitédePaix ; Elle
luy avoit ordonné de /'assurer de
sa part ,
qu'Elle ne faisoit ce
Voyage que pour satisfaire la
curiosité qu'Elle avoit de voir
Elle-mesme en quel estat estoit
otlors cette place;, d'oùelleseroit
de retour,troissemaines, ou tout
A-U plus tard un mois aprésqu'Elle
seroit partie de Versailles;
qu'Elle se promettoit que son
Eminence empescheroit par Je$
Lettres tant à Sa Sainteté que
par tout ailleurs où ellel'estimeroit
à propos , que ce Voyage ne
donnast de l'inquietude aux
Etats Voisins
, 0* qu'aucun
Prince ne pustprendre le pretexte
de la marche de Sa Majestéspour
refuseràl'Empereur lessecours
ausquels ilsseseroientengagez,
Sa Majesté n'ayantpas d'autre
dessein que celuy dontElle l'avoit
chargéde l'instruire.
Cette Lettre qui fut écrite
à Marly,estoitdattée du quatrièmed'Avril.
MrleNonce
qui s'apliqueavec tout le foin
imaginable à tout ce qui peut
maintenir la paix, la reçût
avec une extrêmejoye.Il en
envoya des copiesdans tous
les lieux, où ille crut necessaire
pour remettre les esprits,
& n'en refusa point aux Ministres
Etrangers qui sont à
Paris, ny mesme à tous ceux
qui prirent la libertédeluy
en demander ; de forte que
cesCopies s'estant multipliées
en fort peu de temps , cette
Lettre devint aussi-tost commune.
Chacun l'envoya à ses
Amis, &. elle courut incontinent
, non feulement dans
les Provinces de France;mais
encore dans les Pays Etrangers.
Comme le Roy na
jamais manqué à sa parole,
&que tout le monde en est
fortement persuadé
,
les esprits
qu'on avoit voulu inquicter
en leur faisant entendre
que le Voyage de Sa
Majestécouvroit des desseins,
€jui devoient troubler la tranqnilité
de l'Europe, furent
rassurez> & les ambitieux qui
ire cherchoient qu'à renouseller
la guerre en proposant
<de faire une Ligue pour l'éiriter
, demeurerent dans une
Extrême confusion par l'impossibilitéqu'il
y avoit de
venir à bout de leurs desseins.
On ne parla plus que du
Voyage, mais on en parla
d'une autre maniere qu'on
n'avoit fait jusque-là, & ceux
quiavoientvéritablement apprehendé
devoir le Roy à la
teste d'une Armée par les
soupçons qu'on avoit tâché
de jetter dans leurs esprits, se
proposerent de le venir admirer
lors qu'il feroit sur leurs
frontières
?
& ce fut pour eux
un fort grand sujet de joye
s d'esperer de voir de prés, &
de considerer avec toute l'attention
que demandoit leur
curiosité? un Prince qui remplit
tout l'Univers du bruit
de son naIn, & de ses vertus.
Pendant que la Noblessedes
Pays voisîns de Luxembourg:
goûtoit par avance le plaisir
qu'elle attendoit en voyant
le Koy & qu'elle en avoit
l'idée remplie,comme on l'a
ordinairement de toutes les
choses.guc l'onsouhaiteavec
passion, ceux qui estoient du
Voyage s'y preparoient; d'autres
en parloient & d'autres
écrivoient sur ce sujet.Voicy
une Devise deM Magnin de
l'Academie Royale d'Arles,
surceVoyage.Le Soleil estoit
alors au figne du Belier. Cette
Devise a pour mot
CURSUM INCHOAT
OMINE MITI.
Il renouvelle son cours
Sous de fortunezpresages;
Loin d'icy
)
sombres nuages,
Nous n'aurons que de beaux
jours.
Ces Vers convenoient a£-
sez à ce qu'on venoit de publier
touchant les desseins
cachez fous le Voyage du
Roy.
Voicy une autre Devise
de Mr Rault de Roüen, sur
ce mesme Voyage daSa Majesté,
allant visiter ses Conquestes
,&voir ses nouveaux
X Sujets. Cette Devise a pour
corps le Soleil en son midy
sansnuages & sans ombreJ
&jettant de benignes influences
sur les Regions par
où il passe. Ces mots en sontl'ame.
FELICI BEAT
ASPECTU.
Tel que paroist le Dieu du
jour
Porté dans son char de lu
miere
,
Quand par chaque Climat il
faitsonvaste tour
Pourvisiter la terre entiere
J
k
Et que parsesbrillansrayons
Il produit en tous lieux les biens
quenous voyons;
Tel l'Augure LOUIS ruifitant
ses Conquestes,
Quelque part qu'il porte les
yeux,
SurJes Sujets nouveaux qui s'offrent
en ces lieux,
Répandsesfaveurs toutesprefies,
Et quoy qu'il fajfe voir la fierté
du Dieu Mars
,
( Sesyeux nont que de doux
re7g,ardsoLe
temps du Voyage s'avançoit,
& l'on estoit presque
sur le point de partir,
lors que le Roy fut attaqué
d'un grand Rhume. Mais
loin que cet accident sist
prendre aucune résolution
contraire à ce qui avoit esté
arresté, Sa Majesté ne retrancha
pas mesme un quartd'heure
des Conseils qu'Elle
avoit accoûtumé de tenir-
Mr de Louvoispartit quelques
jours auparavant , pour
unVoyage de prés décrois-
-- - .-- - - - --
cens lieues,& Mr de Seignelay
partit de son costé pour
aller voir les Fortifications de
Dunkerque. Comme il faut
donner quelque ordre à cette
Relation, je ne parleray de
leur Voyage que quand je
vous marqueray leur retour
auprès du Roy, Je vous diray
cependant qu'en s'éloignant
de Sa Majesté,ils avoient
toujours la mesme
part aux affaires. Rien n'est
aujourd'huy épargné en
France pour le bien de l'Etat,
&.
& le Roy, par le moyen des
Courriers
> peut conferer tous
les jours avec ceux qui sont
éloignez de luy.MrdeCroissy
fut le seulMinistre qui
devoit accompagner Sa Majesté.
Le Controleur GeneraI,
dont la presence & les
foins font toûjours neccffaires
icy,ne fait jamais aucun
Voyageavec Elle. Mais comme
je viens de vous le marquer,
ceux qui ont affaire au
Roy,parlent, pour ainsi dire
i tous les jours à Sa Majesté
?
quelque longue distance
qui les en feparc ,rien n'estans
épargné pour cela, & les
Postes du Royaume n'ayant
jamais esté en si bon estat
qu'elles sont presentement.
Des raisons avantageuses à
la France empescherentMadame
la Dauphine de se préparer
à estre de ce Voyage.
Monsieur
, qui relevoit de
maladie resolut de prendre
l'air à Saint Cloud pendant
l'absence du Roy, & Madame
voulut tenir compagnie
à ce Prince, malgré le plaisir
qu'elle prend aux Voyages
& à la Chasse, cette Princesse
estantinfatigable dans
des exercices qui lassent quelquefois
les hommes les plus
robustes.
Le Roy ne voulant pas
fatiguer sa Cour pour un
Voyage qui ne devoit passer
que pour une promenade,
resolut d'aller à petites journées,&
de mener Monsieur le
Duc du Maine,&Monsieur
le Comte de Toulouse.Onne
peut trop tost leur faire voir
des. Fortifications; des Troupes,&
des Reveues,& l'on
peut dire que leur en faire
voir de cette maniere, c'est
commencer à leur apprendre
en les divertissant, tout ce
qu'ilsdoivent sçavoir? ce qui
cft cause souvent qu'ils y
prennent plus de plaisir, &
qu'ils s'y attachent davantage
dans la fuite. Ces jeunes
Princes estant du Voya,
ge )
il fut.arresté que les Dagacs
en seroient aussi;celles
qui furentnommées font
Madame la Duchesse, Madame
la Princesse de Conty,
Madame la Princesse d'Harcour)
Madame la Duchesse
de Chevreuse, Madame de
Maintenon, & Madame de
Croissy? avec les Dames, &
Filles d'honneur des Princesses.
Elles devoient toutes
aller, ou dans le Carosse
duCorps du Roy, ou dans
d'autres Carosses de Sa Majesté,
& avoir l'avantage de
manger avec ce Prince. C'est
un honneur qu'elles ont u
pendant tout le Voyage.
Il fut aussi arresté que le Regiment
desGardes ne marcheroit
point, & que suivant ce
qui s'est souvent pratiqué, le
Roy seroit gardé par l'Infanteriequi
se trouveroit dans
les Places, où Sa Majesté
passeroit, & que dans les lieux
où il n'y auroit point d'Infanterie
en garnison les
Mousquetaires mettroient
pied à terre,& feroient garde
autour
l.
du logis du Roy.
Comme les Gendarmes & les
Chevaux-Legers ne servent
que par quartier, de mesme
que les Officiers de sa Maison
, du nombre desquelsils
* sont, & que ces Corps ne
marchent entiers qu'en temps
de Guerre, & lors que Sa
Majestéfait quelque Camp
Elle ne voulut estre accompagnée
dans ce Voyage
) que
de ceux de ces Corps qui esroient
alors en quartier. A
l'égard des Gardes duCorps,
le Roy resolut de mener seulement
leGuet. Comme vous
pourriez ne pas sçavoir ce
que c'est que ce Guet, il fera
bon de vous l'expliquer. Les
Gardes du Corps font toûjours
dans le service, sans
estre néanmoins toûjoursauprés
du Roy. Ils ne fervent
point par quartier comme
les Gendarmes & les Chevaux-
Legers; mais comme
ils font en fort grand nombre,
on les fait loger en plusieurs
Villes? ce qui pourtant
ne s'appelle pas estre en garnsson
, puis qu'ils y font
moins pour garder ces Places,
que pour y attendre
qu'ils fervent auprèsduRoy,
ce qu'ils font alternativement.
On dit en parlant de
ceux qui ne font pas auprès
de Sa Majesté
,
qu'ils font
dans leurs quartiers, & l'on
appelle relever le Guet? lors
qu'il fort un nombre de Gardes
de ces quartiers
, pour
venir prendre la place de
ceux qui font auprésduRoy?
&: que ces derniers retournent
dans les quartiers où ils
estoient auparavant, Il y a
prés de dix-sept cens Gardes
du Corps, qui font divisez
en quatre Compagnies,& ces
CompagniesensixBrigades
chacune,qui font commandées
par six Officiers ; sçavoir
trois Lieutcnans & trois
Enseignes, Chaque Compagnie
elt reconnuë par les
Bandoulieres des Gardes,qui
font de couleurs differentes,
On reconnoist les Gardes de
la premiere Compagnie , au-"
trement>la Colonelle, commandée
par Mr le Duc de
Noailles, aux Bandoulieres
blanches, & aux Housses
rouges; les Gardes de la
Compagnie de Mr le Maréchal
Duc de Duras, aux Baudoulieres
- & aux Housses
bleuës; les Gardes de la Compagnie
de Mr le Duc de Luxembourg,
aux Bandoulieres
&aux Houssesvertes, 8c les
Gardes de la Compagnie de
Mr le Maréchal de Lorges,
aux Bandoulieres& aux
Housses jaunes. Cette derniere
Compagnie portoit
orangé dans son institution,
mais depuis, elle a changé
l'orangé en jaune. La Colonelle
seule a des Housses d'une
couleur différente de celle
desBandoulieres,& cela vient
de ce que le blanc n'etf pas
une couleur à estre employée
en Housses. Il est à remarquer
que le Guet des Gardes du
Corps qui sert auprès de Sa
Majesté, à pied,& à cheval,
est toûjours de deux cens
Gardes, dont une partie est
de Salle, & l'autre se repose
tour à tour. Ce Guet n'est
jamais d'une seule Compagnie
,
mais de plusieurs ensemble.
ainsi que les Officiers
qui les commandent;
de forte que le Capitaine des
Gardes qui est de quartier,
n'a jamais sousluy aucun Ofsicier
desa Compagnie quand
il est de serviceauprésduRoy.
Vousremarquerezencore que
le Guet ne sert qu'un mois
auprès du Roy> à moins qu'ij
n'y ait quelque force raison
pour le faire servir plus longtemps,
comme dans l'occasion
de quelque Voyage tel
que ccluy que l'on vient de
faire. Ce n'est pas que dans
un Voyage plus long le Guet
ne changeast de la mesme
fortequ'à Versailles
, parce
qu'alors on feroit suivre tous
les Gardes. Rien ne marque
tant la grandeur du Roy que
ce changement de deux cens
Gardes tous les mois. J'ar,
crû vous devoiraprendretoutes
ces choses , & que ce ne
feroit pas sortir de la matiere
que je me fuis proposée dans
cette Lettre? parce qu'autrement
vous n'auriez pas bien
compris ce que c'eil: que le
Guet, dont j'ay este oblige
de vous parler,pour vous faire
une Relation du Voyage
du Roy aussi exacte que celle
que j'ay entrepris de vous
envoyer.
Touteschoses estantainsi
arrestées
)
personne ne douta
du Voyage, parce qu'ontient
toûjours pour certain tout ce
que le Roy resout, &le jour
deson départ aprochant,ceux
qui ne devoient pas l'accompagner
redoublerent leurs
empressemens auprès de ce
Prince. Jamais on ne vit de
Cour si grosse. Les Ministres
Etrangers allerenr prendre
congé de Sa Majesté
,
ainsi
que les Chefs des Compagnies
superieures,& plusieurs
autres personnes distinguées
dans la Robe par leurs emplois,&
par leur mérite. Plusieurs
Etrangers se renditent
aussi à Versailles pendant les
derniers jours que le Roy y
devoit demeurer, & quantité
de Peuple de Paris y courut
pour avoir le plaisir de joüir
feulement quelques momens
de la veuë de ce Monarque'
lors qu'il iroità laMesse, ou
à la promenade, ou pendant
qu'il disneroit. Sa Majesté
devant partir un Samedy pour
aller coucher à Clayes, où la
Cour estoit obligéed'entendre
la Messe le lendemain.
parce qu'ilestoit Dimanche,
Elle eut la précaution de recommander
quelques jours
avant qu'Elle partist, qu'il s'y
rencontrait beaucoup de
Prestres pour en celebrer un
assez grand nombre, & fit
paroistre sa pieté par cet
ordre.
Le Voyage avoit esté arJ
resté d'abord pour le deuxiémede
May,mais la rougeole
quisurvinta Madame la
Duchese,fut cause que le
Roy le Temii au dixiéme dta
mesme mois. Ce jour estant
arrive, Sa Majesté
>
après avoir
entendu la Messe dans le
Chasteau de Versailles
, en
partit avec toutes les personnes
de distinction,&les
Troupes que jeviens de vous
nommer. Le nombre de celles
qui devoient faire le Voyage
estoit grand;cependant, celane
faisoit qu'une tres-petite
partie des Troupes de sa Maison
,puisque le Regimentdes
Gardes ne marchoit pas, &
qu'il n'y avoit qu'un quart des
Gendarmes
, & des Chevaux
Legers, avec la neufou dixiéme
partie des Gardes du
Corps ou environ. Il y avoit
outre cela, tous les Officiers
de sa Maison en quartier dont
je ne vous diray rien, tout ce
qui regarde cette Maison
n'estant inconnu à personne.
Comme le Roy devoit
passer à Paris, le Peuple impatient
de le voir occupa dés
le matin tous les lieux de son
passage, aimant mieux l'attendre
pendantplusieurs heul'es,
que de manquer à luy
souhaiter par ses acclamations
une longuevie, & un
heureux Voyage. Les Religieux
sortirentaussi de leurs
Convents, &: la pluspart des
Fenestres furent remplies de
personnesdistinguées.LeRoy
quis'est toûjours moins attiré
les coeurs par la grandeur
de son rang que par ses manieres
toutes engageantes, salüa presque toutes les Dames
qu'il vit aux fenestres.
Sa Majesté passa par la Place
des Victoires, où Mrle Duc
de la Feüillade & Mle Prevost
des Marchands l'attendoient
avec un grand nombre
de personnes de la premiere
qualité. Vous sçavez
sans doute qu'on n'a fait encore
qu'une partie duBastiment
qui doit embellir cette
Place. Cela fut cause qu'on
pria le Roy d'avoir la bonté
de dire de quelle maniere il
souhaitoit qu'on l'achevaft ,
& si on continueroit ce qu'on
avoit commencé , sur les
desseins de Mr Mansard son
premier Archirecte , c'est à
dire à l'égard de la figure de
la place, car les Bastimens onc
toûjours esté trouvez fort
beaux. Sa Majesté en parut
fort satisfaite, & jugea à proposque
l'on fuivift le dessein
qui avoit esté commencé.Mr
de laFeüilladeayant fait entierement
dorer la Figure du
Roy depuis que Sa Majesté
ne l'a veuë ,
Elle s'attacha à
la considerer attentivement.
Quelques-uns dirent qu'ils
l'auroient mieux aimée de
bronzerd'autresfurent d'un
sentiment contraire, &alleguerent
que la Statuë de
Marc Aurele que l'Antiquité
a tant vantée,& qui a esté
si estimée des Romains,avoit
esté dorée.Onrépondit que
ce n'estoit pas ce qui l'avoit
fait admirer,&quel'Empereur
Neron avoit fait dédorer
uneFigure d'Alexandre.Ceux
qui font profession d'estre
curieux ne prirent pas le party
île l'or, parce qu'il y a plus
de
<fcbronze que d'or dans leurs
Cabinets. Le Roy qui neparle
point sans se distinguer
,
dit
beaucoup en ne disant rien.
Il nevoulut chagriner personne,
& dit obligeamment
pourMrdela Feüillade,qu'il
nefalloitpas s'estonner qu'il eust
fait dorersa Figure
,
puisque si
l'onavoitpû la faire d'une matiere
plus precieuse
iI- & qu'il
-eujl eslé en estat d'en soûtenir ltt
dépense , il estoitpersuade qu'il
n'auraitrien épargnépourcela.
-
Je n'interprété gMnr ca.
paroles qui font voir tout le
bon sens & toute la delicatesse
d'esprit impaginable, &
dont la finesse consiste plus
en ce qu'elles font entendre,
qu'en ce qu'elles expliquent
àl'égard de la dorure.
Rienn'estant égal auzele
de Mrle Duc de la Foüillade,
qui tâche sans ccue de le faire
paroistre
,
par des augmentations
qu'il fait à tout ce qui
regarde la fiegure de la Place
es Victoires, & qui font autant
d'embellissemens nouveaux,
&: de témoins éclatans
delavive ardeur qu'il a pour
Sa Majesté
, on trouva huit
Inscriptions nouvelles écrites
en lettres dorées au feu, &
dans huit Cartouches de
bronze doré, attachezautour
du Piedestal
, qui porte cette
Figure couronnée par la Victoire.
Cette augmentation
de beautez
>
après l'estat où
Mr de la Feüillade a mis la
Figure, fait voir que lors qu'il
s'agit de faire quelque chose
qui regardelagloire du Roy
,
il n' y a rien d'assez grand
pour le pouvoir satisfaire,
Voicy ce qui remplit les huit
Cartouches.Les deux qui font
au dessous du Roy & entre les
deux Esclaves qui regardent
l'Hostel de laFeüillade
, contiennent
les paroles suivantes.
I. CARTOUCHE.
Il avoit sur pied deux cens
quarantemille hommes d'Infanterie
,
vsoixantemille chevaux
pins les Troupes de ses .drmées.
AItvalesjors qu'ildonna laPaix
à l¡''EEuropeen 1678(").
II. CARTOUCHE.
Sa fermetédans "/:,), douleurs
rassura les Peuples desolez au
mois de Novembre 1686.
Voicy ce qu'on lit dans
les deux Cartouches de la
face droite du Piedestal ,qui
est du costé de la ruë des Petits-
Champs.
III. CARTOUCHE.
Aprés avoir fait d'utiles Reglemenspour
le Commerce, (')
reformé les abus de laj'ijlicc> l
donna un grandexcnpled'équité
enjugeantcontresespropres ,jntfrests
en faveur des Habitans de
Paris dans une affaire de! sieurs millions.
IV. CARTOUCHE.
Six mille jeunes Gentilshommes
Jepa^e^ par Compagnies,
gardentsesCitadelles,ven remplacentdes
Ofifciersdeses Troupes
; & leur éducation rft dignt
de leur naissance.
Les deux Cartouches qui
font du costé de l'Eglise des
Religieux appellez les Petits-
Peres,fontvoir ce qui suit.
V.CARTOUCHE.
Deuxcens dix Places,Forts,
Citadelles
, Ports, v Ha'1-'(c5
fortifiez gjf revestusdepuis 1661»
jusques à 1086; cent quarante
mille hommesdepied, vtrentemilleChevaux
p.'ye^ par mois ;, assurent Jes Frontieres.
VI.CARTOUCHE.
Il a bastyplus de cinq cens Esqu'il a dottt'Sde riZ'c/itiy
considerables
, & il a estably
l'entretien dequatre censjeunes
Demoiselles dans la magnifique
Maison de S. Cir.
Voicy ce que renferment
les Cartouches du derriere du
piedestal qui regarde la ruë.
VII.CARTOUCHE.
Il a basty un superbe
j &*'
'Va/le édifice pour les Ofifciers &
Soldats que l'âge er les bltfju•*
res rendentincapablesdejervir^
mille livres de rente.
VIII. CARTOUCHE.
L? nombre desoixante mille.
Matelots enrolez,
,
dont vingt
miÜe fontemployer*sonservice
, (èj les quarante mille
Autres au commerce de ses Sujets,
marque la grandeur, dr le
bonordre delaMarine.
Vousvoyez Madame, que
ce qui est contenu dans ces
huit Cartouches donne uuç
haute idée de la vie du Roy,
&qu'onne peut dire plus de
choses en moins de paroles,
nyen faire concevoir davantage.
Chacun s'attacha à lire
ces Eloges,& l'on y prit beaucoup
de plaisir. Le Roy eut
ensuite la bonté d'aller voir
un des Fanaux qui font aux
quatre coins de la Place. Celuyoù
Sa Majefié alla, est le
seul qui soit achevé. Le nom
de Fanaux a estédonné à ces
ouvrages à cause des Fanaux
quifont au dessus. A chaque
endroit où ils ont esté placez,
il y a un groupe de trois colomnes
de Marbre sur un piedestal
de mesme matiere. Au
dessus de chaque groupe est
un Fanal composé de plusieurs
lampes, qui brulent
pendant toutes les nuits, &
pour l'entretien desquelles,
M le Duc de la Feüillade a
estably un fond. Enrre les
colomnes de chaque Fanal,
pendent six Médailles de
bronze
?
dans chacune desquelles
font representées
quelques actions du Roy, ce
JlUi fait vingt quatre Médailles
pour les quatre Fanaux.
Il y a dans le piedestal de chaque
groupe de colomnes , six.
Vers Latins; de maniéré que
le sujet de chaque Medaille.
cftexpliqué par deux de ces
Vers. Les lettres en font de
bronze doré au feu, ainsi que
les bordures & les autres ornemens
des Médailles.Voicy
lesavions deSaMajesté qui
font representées dans chacune
des six Médailles fonduës
en bronze. - - -
La premiere Médaille marque
la paix que le Roy a donné
à l'Europe en 1677. Elle est
expliquée par les Vers fuivans.
»
Teduce,te Domino, LODOIX,
prona omnia Gatio>
Urbesvicapere dociliquoqueparcere
captis.
La secondé represente le
passage du Raab, où les François
qui sauverent l'Allemagne
acquirent une gloire immortelle,
&: Mr de la Feüillade
une réputation
,
qui fera
vivre éternellement son n0111
dans l'Histoire, Les Vers qui
font connoistre cette grande
action, [one,
Et Traces sensere queat quid
Gallicavirtus,
Arrabo cæde tumens , &servata
Austria testis.
Onvoit dans la troisième
Medaille la grandeur, & la
magnificence des Baftimcns
duRoy, ce qui Ce reconuqi#
par les Vers suivans.
Quanta operum moles, &
-
-
quanto surgit ad auras
Vertice!sic positis LOVOIX
agit otia bellis.
Ces trois Medailles font
du costé de la Rue des Pc..
tirs-Champs, & font une
chute les unes sur les autres. ,Les trois autres font plus en
dedans de la Place
,- & en
regardent leBastiment. Elles
sontplacées de la me[mc
raani^te que celles dont jçL
viens de vous parler, c'est à
dire,qu'elles font entre deux
colomnes,&forment un rang
les unes sur les autres. La plus
élevée represente le Roy qui
ordonne qu'on rende les Places
qui ont estéprises à ses
Alliez. On n'a qu'à lire les
deux Vers suivanspourconnoistre
ce qu'elle contient.
Reddere Germanos LODOIX
regnataSueco
C> Arva jubet , Danosque
,
ladcr
~pe~ ~fflftupet Albis.
La Medaille qui suit fait
voir la jonction des deux
Mers
_j
ce que ces deux Vers
expliquent tres-bien.
Misceri tentata prius,Jeniferque
negata
Æquora,perpetuo LO D01Ji
dat foedere jungi.
On n'a qu'àjetter la veuë
sur la derniere de ces six Medailles,
pour y reconnoistre
d'abord l'Audience donnée
par le Roy aux Abassadeurs
xic Siam, & l'on n'a qu'à lire
les Vers suivans pour apprendre
que la renommée ayant
publié dans les Païs les plus
reculez, tout ce qui rend U
Roy l'admiration de l'Univers,
les Souverains de toutes
les Parties du monde, ont
envoyé des Ambassadeurs
pour estre témoins de sa
grandeur.
Ingentem Lodoicum armis,
ma^ne ,
fidemque
EgrejpimScitbia&Libit vt
nerentur~& Indi.
LLeeRoyaprès avoir consideré
avec une attention dignede
sa bonté, les changemens
qu'on avoit faits à la
Place des Victoires depuis le
jour que Sa Majesté y estoit
venuëj&:avoir fait à Mr de
la Feiiilladc»&àMr le Prévost
des Marchands tout
l'accueil qu'ils en pouvoient
cfpercr, partit aux cris de
Vive leRoy,mille&mille
foisréïterez
, car quoy que
la Place fust déjà fort remplie
de Peuple lors que Sa
Majesté y arriva, la foule
augmenta de telle forte sitost
qu'Elle y fut entrée,
qu'on auroit dit que tout
Paris y estoit,si sa grandeur
& le nombre prodigieux de
ses Habitans estoient moins
connus.
La pluspart des Officiers
qui ont accoutumé d'aller à
cheval, s'estant jointsensemble
pour prendre des Carosses,
afind'éviter la poudre qui iri1
commode beaucoup en cette
saison
)
& pour estre plus en
estat de servir le Roy, il y
tn avoit un nombre infiny
à la suite de la Cour, la dén
pense ne leur coutant rien
lors qu'il s'agit du service
d'un Monarque aussî agreable
à ceuxqui ont l'honneur
de l'approcher souvent, qu'il
est redoutable à ses Ennemis
& admiré de toute la Terre.
Je puis en parler ainsi sans
flaterie; & il merite tous M
jours de nouvelles loüanges.
par desendroits qui n'en ont
jamais attiré à aucun Prince.
Aussi peut-on dire que non
feulement il ne laisse jamais
échaper aucune occasion de
faire du bien, mais qu'il cherche
mesme de nouveaux
moyens d'en faire
, & qu'il
tft ingenieux à les trouver;
Ne croyez pas que cecy soit
avancé comme une loüange
vague. Je ne le dis que parce
que j'ay à parler d'un fait
sur ce sujet, qui découvre le
caractere de bonté du Roy,
autant que ses avions d'éclat
font connoistre sa puissance,
& la grandeur de son ame,
C'est icy le lieu demettreen
ion jour le fait qu'il faut que
Je
vous explique, puis qu'il
regarde la fuite de sonVoyage.
Je vous diray donc que
pendant toute la route? Sa
Majesté a presque toujours
dînédansdesVillages. Vous
allez sans doute vous imaginer
(& vostre sentiment fera
generalemeut suivy) que les
Villages
Villages les plus forts & lc^
plus riches ne leftoient pas
trop, pour avoir l'honneur
de recevoir un si grand Monarque.
C'estoit cependant
tout le contraire; le plus pauvre
avoit l'avantage d'estre
préferé, & l'on a veu cela
observé dans toute la route
avec une exactitude que je ,,'
ne sçaurois assez marquer.
Vous n'en pourrez douter,
lors que je vous auray dit
que Sa Majesté, qui ne fait
., point de Voyages sans avoir
la Carte des Païs où Elle va
examinoit tous les jours sur
celle qu'on luy avoit fournie,
les lieux par lesquels il falloit
qu'Elle passast. Elleyvoyoit
tous les Villages, Elle s'informoit
de leur estat, Ôc
nommoit ensuite le moins
accommodé, parce que la
Cour ne s'arreste en aucun
lieu sans y répandre beaucoup
d'argent. C'est ce qui
s'est fait dans tous les Villages
où l'on a este obligé de
s'arrester pendant ce dernier
Voyage. Le Roy dînoit
fous une Feüillée,&
l'onen dressoit aussi pour
les principales Tables de la
Cour. Ainsi tous lesPaïsans
estoientpayez pour couper
des branches de verdure, &
pour travailler à la construction
de ces Feüillées.Ils tiroient
ausside l'argent de
tout ce qu'il y avoit dans leur
Village qui pouvoit servir
aux Tables, & de tout ce
qu'ils avoient d'utile aux
é,quip- ages de la Cour, a.1insi
que de leur foin & de leur
avoine ; & le Roy ne laissoit
pas outre cela de leur faire
encore sentir ses liberalitez;
en forte que ces heureux Villages
le souviendront longtemps
d'avoir veu un Prince
qu'on vient tous les jours admirer
du fond des Climats
les plus reculez.
LeRoy estant sorty de la
Place des Victoires
, trouva
encore une infinité de peuple
dans les autres ruës de Paris.
qu'ilavoitàtraverser, Les dC4
monstrations d'allègresse ne
cesserent point, non plus que
les cris de Vive le Roy, de maniere
que cous les Peuples étant
animez duineline zelcon
eust dit que ces cris dejoye
n'estoient qu'un concert des
mesmes personnes, quoy qu'à
mesure que Saavançoit,
il fust formé par diverses
voix. Le Roydîna ce jour-là.
au Vllage de Bondy, (^ rencontra
sur le cheminM leBaron
deBeauvaisavec tous les
Gardes & les Officiers des
Chasses de sa Capitainerie,
dans toute l'étendue de laquelle
ce Prince luy permit de
l'entretenir à la portiere de
son Carosse. Les Plaines de
S. Denis dépendent de cette
Capitainerie. Mr le Prévost
des Bandes parut sur la même
route, & posta diverses
Brigadesauxenvirons des
Bois. Les Dames que je vous
ay marqué qui estoient du
Voyage, avoient l'honneur
de dîner avec Sa Majesté,
ainsi que Madame la Comtesse
de Gramont, & Madame
de Mornay, que je ne
vous ay pas nommées. Madame
de Moreüil, & Madame
de Bury? Dames d'honneur
de Madame la Duchesse,
& de Madame la Princesse
de Conty, eurent le mesme
avantage. Les Filles d'honneur
ne dînerent point avec
Sa Majesté,mais elles y souperent.
Il fut réglé ce jour-là
qu'il n'y auroit à l'avenir que
deux Filles d'honneur des
deux Princesses qui auroient
ce privilège. Le nombre des
Princesses auroit esté encore
plus grand dans ce Voyage,si
lors que le Roy partit, Mademoiselle
d'Orléans ne s'estoit
point trouvée àEu, &Madame
la Duchesse de Guise
,
aux Eaux de Bourbon. Madame
de Montespan auroit
aafli esté duVoyage, mais
le foin de sa santé l'avoit
obligée d'aller prendre de
ces mesmes Eaux. Monsieur
le Prince,Monsieur le Duc ,
lx, Monsieur le Prince de
Conty n'ont point quitté le
Roy.
Monseigneur leDauphin.
qui après avoir GÜy la Mette*
estoit party de Versailles des
le grand matin pour aller
chasser dans la Forcit de Livry
, yprit un loup des plus
vieux,&congédia Mr le Chevalier
d'Eudicour, Frere du
Grand Louvetier de France,
&toutl'équipage de la Louveterie;
à la teste duquel il
estoit.Le mesme jour,le Roy
aprèsavoirdîné alla chasser
dans les Plaines& sur les coteaux.
Sa Majesté
, a pris le
mesme divertissement pendant
toute la route, comme
je vous le diray dans la fuite
de cette Relation.
Monseigneur le Dauphin
arriva à Claye avant six heures
du soir, parce qu'ilsçavoit
que c'estoit à peu prés
l heure où le Roy devoit s'y
rendre. Il changea d'habit&
alla au devant de Sa Majesté,
On connoist par là combien
ce Prince est infatigable,qu'il
tn galant, & qu'il a beaucoup
de tendresse pour le Roy.
Sa Majestéarriva à Claye
à l'heure que je viens de vous
marquer, & fut commodementlogée
dans lamaison de7
M Enjorant, Avocat general
duGrand Conseil
>
& Seigneur
en partie de ce Village.
Il eut l'honneur de ialuer
leRoy, qui le receut avec
cet air engageant qui est
si naturel à ce grand Mo*
narque. Comme toute sa
maison estoit marquéepour
le. Roy, les Maréchaux des
Logis en marquerent une
pour luy dans le Village, lors
qu'ilsmirent la craye pour
le logement des Officiers qui
estoient du Voyage; de forte
qu'il fut regardé ce jour-là
comme estant de la Maison
de Sa Majesté. La qualité
d'Hofie duRoy futcelle que
les Maréchaux des Logisécrivirent
en mettant la craye
sur le logis qu'ils luy destinerent.
Monseigneur,& Madame
la Duchesse eurent des
[Appârtemens vers le Château
où le Roy logea.Madame la
Princesse de Conty,&Monsieur
le Duc du Maine loge- 1
rent dans la Ferme de Mr
d'Herouville, Maistred'Hostel
deSaMajesté. Messieurs
les Princes du Sang eurent
ensuite les logis les plus commodes,
&: ceux qui voulurent
estre plus au large,allerent
à Meaux.
} M de laSourdiere, Ecuyer
de Madame la Dauphine, qui
cil le mesme qu'elle envoya
cnBavicrc? pour porter à M*
l'Electeur de cc nom) la nouvelle
de la naissance de Monseigneur
le Duc de Berry,
vint à Claye de la part de
cette Princesse
, pour ravoir
si Sa Majesté y estoit arrivée
en bonne santé.
Il y aicy à remarquer une
choseque personne n'a peutestre
jamais observée.C'est
que lors que les Princes de la
Maison Royale font separez,
sans estreéloignez les uns
des autres -que d'une journée>
ilss'envoyent tous les
jours un Gentilhomme pour
s'informer de l'estat de leur
santé,maisaussi-tost qu'ils
commencent à s'éloigner davantage
,
ils ne se donnent
plus de leurs nouvelles que
par des Courriers, qui leur
en apportent tous les jours.
Dés qu'ils reviennent à une
journée de distance
,
ils recommencent
à se dépescher
un Gentilhomme,& c estpar
cette raison que Madame la
Dauphine n'en renvoya plus
qu'après que le Roy commença
d'approcher de Versailles.
Ce Prince estant arrivé à
Claye entre six & sept heures
du [oir) y receut un Gentilhomme
de Madame, &: dépescha
aussi-tost à leurs AItérés
Royales Mdu Boulay,
Gentilhomme ordinaire de
sa Maion, pour apprendre
des nouvelles de la santé de
Monsieur, qui s'estoit trouvé
mal le matin à la Messe de
Sa Majesté à Versailles.
La Cour fut tres- bien logée
à Claye,parce qu'on étendit
les logemens jusques à un
lieu voisin
)
qui est un Hameau
contigu à ce Village,
dont il n'est separé que par
un petit ruisseau? qui fait
trouver aux portes des maifons
des Païsans,desPrairiestres
agréables,plantées avec
soin &avec compartiment.
Je ne vous marque point
les lieux & les heures où le
Roy a tenu Conseil. Ce Prince
ne manque jamais de temps
pour ce qui regarde les affairesde
l'Etat.Illeur sacrifie son
repos & ses plaisirs
}
il tient
Conseil en tous lieux? & à
toute heure ,quand ille juge
important pour le bien de
son Royaume,& il a travaille
dans le Voyage de Luxembourg,
avec la mesme
application qu'il fait à Versailles.
Il est vray que ce n'a
pas esté avec tous ses Ministres
,Mrde Croissy estant le
seul qui soit party de Paris
avec ce Monarque, mais
tomme il est luy-mesme son
premier Ministre,on peut dire
qu'il travaille souvent seul
autant que dans le Conseil,
Sa Majesté donnant aux
affaires pendant ce Voyage
autant d'application qu'à
l'ordinaire
,
voulut que sa
Cour trouvast par tout les
mesmes plaisirs, pendant
qu'Elle ne vouloit se retrancher
ny les peines,ny les soins
qu'on luy a toûjours veu
prendre depuis qu'Elle gouverne
par Elle-mesme ; &
pourcet effet Elle resolutde
tenirpartout Appartement.,
Ainsi dés lapremiere couchée
,qui estoit à Claye, on
trouva plusieurs chambres
préparées pour divers Jeux.
& chacun joüa avec lamesme
tranquillité? & aussi peu
d'embaras que si l'on eust
citéencoreà Versailles, tant
les ordres avoient esté bien
donnez pour les logemens,
:& pourtoutce qui pouvoit
contribuer à la commodité
desPersonnesde clualt"lui
suivoient la Cour.Les Appartteemmeennssoonntt
pprreeslqquuee ccoonnttIinnuueétous
les jours pendant tout
le restedu Voyage.
Monseigneur le Dauphin,
partit de Claye le lendemainonzièmeàsept
heures du.
matin. Ce Princechassatout
le jour dans la Forest deMonceaux
; &commeSa Majesté
devoir coucher ce jour-là à
laFerté sur Joüare, il prit le
party d'y arriver enchaOanCp
;,&de courre le Cerf dansles
:b.uiflx>ns ; ce qu'il fîtavecles
chiens de Mr le Chevalierde
Lorraine. Il prit plusieurs
Cerfs; entre lesquels il y en
avoit un qui se fit courre
long-temps, & qui passa dixhuit
étangs à la nâge.
Le Roy, après avoir entendu
la Messe à Claye, alla
à Monceaux. Toute la Cour
passa dans Meaux, pour se
rendre à cette Maison Royale
, & lors que Sa Majesté
l'eut traversée au bruit des
acclamations du Peuple,Elle
trouva le Regiment de Vivans
qui l'attendoit en ba.
taille. C'est un Regiment de
Cavalerie
>
auquel on ne peut
rien ajoûter,tant pour la
bonté des Cavaliers, que pour
la beauté des chevaux. Ce
Regiment alloit au Camp de
laSaone,& avoit un sejourâ
Meaux?ce qui fut causequ'il
eut l'honneur d'estre veu du
Roy. Sa Majesté en fut trescontente,
de le trouva beau.
Elle eut mesme labonté de
vouloir bien recevoir un
Chien couchant de Mr Li:"
grades qui le commande. Le
Roy dîna à Monceaux. C'est
un vieux Chasteauqui a fait
le plaisir de plusieurs Rois,.
& qui appartient à Sa Majesté.
Ce lieu qui est fortriant,
a une tres-belle veuë, & le
Bastiment enest magnifique..
Le Roy voulant honorer l'ouvrage
de ses Ayeux? le fait
reparer? & bien-tost on ne
verra plusrien en France qui
ne porte des marques de sa
magnificence&de sabonté.
Toutes les Maisons Royales
ayant
ayant pour Capitaine une
personne d'une qualité distinguée,
MrleDuc deGesvres,
premier Gentilhomme
de la Chambre, & Gouverneur
de Paris,joüit de la Capitainerie
de Monceaux?que
possedoitMrle Duc de Trêmes
son Pere. Il vint recevoir
SaMajesté
,
accompagné du
Lieutenant, & de tous les
Officiers & Gardes des Chasses
qni dépendent de luy, à
l'endroit où la Capitainerie
duit jusqu'au mesme endroit
par Mr le Marquis de Livry ,
aussi Capitaine des Chasses de
Livry &c qui avoir esté recevoir
ce Prince jusques à
Bondy avec tous ses OSiciers.
Le Roy? qui avoit dépesché
le foir précedent Mr du
Pouhy
, pour sçavoir l'estat
de la fanté de Monsieur, en
apprit des nouvellesà Monceaux
parce mesme Gentilhomme
, qui arriva pendant
<qjuuee SSaa Maaj*ecsttlé' estoit à table,
êc luy rapporta que Son Altesse
Royale avoit pris du
Quinquina , & dormy assez,
tranquillement depuis quatre
heures du matin jusques
a dix. Ce Prince monta à
cheval à l'issuë de son dîné.
avec Madame la Princesse de
Conty, & deux des Filles
d'honneur decette Princesse,
& alla à la Chasse de l'Oiseau.
Tant que l'on a demeuré
dans l'étenduë de la Generalité
de Paris,Mde Menars
qui en a l'Intendance
, n'a
point quité le Roy afin d'être
toûjours en estat de recevoir
ses ordres, & luy a
rendu un compte exact de
toutes les choses qui regardent
son Employ.Cela fait
voir que Sa Majestés'applique
sans cesse,puis quemesme
dans le temps de ses plaisirs,
Elles'entretient plûtost de ce.
qui se passe dans son Royau-.
!De, que de ce qui peut avoit
rapport à son divertissement
Ce Prince ayant l'esprit ex-r
'- - -.. - -
tremement pénétrant,unmot
luy fait aprofondir bien des
choses, de forte que ce qu'il
aprend lors qu'ilsemble ne
s'informer que par converfation
de ce qui se passe
,
luy
donne lieu de remedier à
quantité de desordres, & fait
que souvent il en prévient
d'autres. Pendant toute sa
marche il a toûjours esté
prest à écouter & à satisfaire
par ses réponses, ceux à qui
sa bonté a permis de luy parler
; & quelquefois lors qu'il
avoit commencé à jouer)aiffn
<J..e la Cour se divertist, il
quittoit le jeu, & travailloit,
ou s'occupoit à faire du
bien.
Mr l'Evesque de Meaux s'est
prouvé par tout où le Roy
a passé dans son Diocese, &
sçachant que le principal
foin de ce Prince estoit que
toute sa Suite entendist la
Messe, &: particulièrement les
Dimanches, ce Prelat envoya
plusieursReligieux à Claye,
& en envoya aussi dans les
Quartiers desGardes duCorps
& dans ceux des Mousquetaires)
des Gendarmes,&des
Chevaux-Légers.LaCour ne
Cf manquoit pas d'Ecclesiastiques
pour la Maison du Roy,
-& Mr l'Evesque d'Orléans -a--
Voit ,in de regler les tempsauGjaeÊs
chacund'eux devoit
C,elcb,-e"la Messe.
Toute la Cour arriva de
bonne heure àla Ferté sur
Joüare. C'est un lieu situé
dans une gorge enchantée,
au fond d'une plaine. LaRiviere
de Marne contribuë
beaucoup à la beauté du païsage,
& à la fertilité du Terroir.
Le petit Morin vient la
grossir auprés & au dessus
de l'Abbaye, & y forme mille
Prairies abondantes en pâturages.
Ce Bourg est dans la
Brie Champenoise,entre Chasteau-
Thierry & Meaux. Les
Prétendus Reformez le prirent
vers l'an 1562. pendant
les Guerres Civiles du der-
-
nier Siecle. La Chasse y fut
tres-divertissante. Le Roy y
vola des Corneilles. Mr de
Terrameni, Capitaine du Vol
des Oiseaux du Cabinet du
Roy ,a eu beaucoup d'honneur
dans ce Voyage. Les Equipages
y ont fort paru, &
il s'en: attiré beaucoup de
louanges pour tout ce qui
regarde sa Charge.
On admira à Joüare un
Pont qui joint le Chasteau
au Fauxbourg. Ce Pont a
cousté beaucoup. Il effc fait
de bois sans appuy ) tout suspendu,
& soutenu feulement
par l'épaisseur des pieces qui
le composent Il est de soixante
& quatre pieds de
long, & depuis qu'il est construit
>
il n'a rien perd u ny de
sa beauté,ny de saforce. On
coucha dans le Chtsteau, qui
appartient à Mrle Comte de
Roye. - Il est situé dans une
petite Isle fortagreable.Monseigneur
prit place dans le
Carosse du Roy. Une des
Dames luy ceda la sienne, &
se mit dans le second Caloife)-
ce que quelques-unes
ont fait alternativement.
Monseigneur n'y estoit que
pendant une partie du jour,
parce que la Chasse
,
dont on
trouve l'exercice utile à sa
santé
)
l'occupoit souvent.
Madame la Princesse d'Harcour
eut ce jour-là un accés
de Fiévrequil'obligea de
partir plus tard. Il fut suivy
d'un second accès de Fièvre
double-tierce. Elle prit du
Quinquina, &la Fiévre ne
luy revint pas. Toute la Cour
en marqua beaucoup de LOYc..
On dîna le it. à liffct
éloignée de quelques Villages
qui sont aux environs,
&qui appartiennent aux Celestins.
On allasouper à
Monmircl
,
qui appartient à
Mr de Louvois. Toutes les
Dames,& plusieurs Seigneurs
de la Cour eurent l'honneur
de souper ce soir-là avec le
Roy. La Table estoitde seize
couverts, On apprit en ce
lieu-là la mort de Madcmoiselle
de Simiane, dont
je vousaydéjà parlé dans ma
Lettre precedente. On y apporta
aussi la nouvelle de la
mort subite de Mr l'Evesque
d'Amiens, qui surpritd'autant
plus, que M de Breteuïl
assura que depuis deux jours
il avoit soupé avec ce Prélat.
Ces deux morts firent parler
de celle d'un descent Suisses
de la Garde de Sa Majesté,
qui estoit mort le matin en
s'habillant. Il y a une tresgrande
quantité de Lievrts
>
& de Perdrix à Monmirel,
Le Roy y pritle divertissement
de la Chasse, & alla voler.
Ony sejourna le 13 & toute
la Cour y demeura avec
joye, parce que le vent estoit
violent à la campagne, &
qu'il y avoit beaucoup de
poussiere. On se promena
dans les Jardins, & le Roy
au retour de la Chasse prit
le divertissement de la promenade
avec les Dames sur
les Terrasses, qu'il trouva fort
belles. Monmirel efl dans un
territoire tres-fertile.
Mr de Louvois qui ne s'applique
pas moins à tout ce
qui peut faire fleurir les beau::
Arts dans le Royaume,qu'à
ce qui est de la Guerre , va
faire establir une Verrerie à
Montmirel
, & la Cour en vit
tous les apprêts.
Le Roy y tint deux fois
Conseil avec Mr de Ci-oiffy ;
c'est ce que Sa Majesté a fait
chaque soir
>
après estre arrivée
dans tous les lieux où
Elle a esté coucher. Elle prit
! aussiàMontmirel le divertissement
du vol du Milan. Le
sejour que l'on y fît, & qui
n'avoit pas esté marqué dans
1i route, fut cause que
l'on retrancha celuy qu'ondevoit
faire à Châlons
)
afin
que le Roy qui ne manque
jamais à executer les desseins
qu'il prend, puft se rendre à
Luxembourg le jour qu'il y
estoit attendu.
Toute la Cour partit de
Montmirelle 14. & alla dîner
à Fromentiercs. A cinq heures
on avoit paffé le défile
d'Etoges. Sa Majesté prit
congé des Dames, & monta
à cheval pour aller chasset
dans les belles plaines de
Champagne. On alla coucher
à Vertus. Ce lieu a este
autrefois considerable, & étoit
l'apanage des Cadets des
Comtes qui portoient le nom
de la Province. Du temps de
Sigebert Roy de Mets, qui
vivoit en 570. il y avoit un
Duc de Champagne nommé
Loup, qui témoigna beaucoup
de fidélité, à conserver
les Etats du jeune Roy Childebert
, contre ceux qui les
vouloient envahir. Il y eut
ensuite plusieurs Ducs de
Champagne
,
mais ce titre de
Ducqui n'estoitpas alors une
dignité perpetuelle, ne faisoit
que marquerune forte de
gouvernement. Le premier
Comtehereditaire de Champagne,
fut Robert de Vermandois
,
Fils d'Herbert IL
&d'Hildebrante, qui se ren-
,
dit maistre de la Ville de
Troye en 253.Je ne vous dfe
rien de ses Successeurs. Ils
continuerent la poiterité jusqu'à
Thibaud IV. surnommé
le Posthume ou le Faiseur de
Chansonsqui succeda à son
Oncle maternel
,
Sanche le
Fort,au Royaumede Navarre.
Il mourut à Troye en 1254.
estant de retour du Voyage
d'Outremer. ThibautV. fou
Fils qui avoit épousé Isabelle,
Fille du Roy Saint Loüis,
estant mort sans Enfans après
avoir fait lemesme Voyage.
laissà ses Estats à Henry ~HI
son Frere. Ce dernier n'avoit
qu'une Fille nommée Jeanne,
qui en 1184. épousa Philippes
le Bel pendant la vie de
Philippes le Hardy son Pere ,
&. depuis ce temps ,la Champagne
a esté inseparablement
unie à la Couronne de France.
Les Comtes de Champagne
faisoient tenir ks Etats de
leur Pays par sept Comtes
leurs Vassaux
,
qu'ils appelloient
Pairs de Champagne.
C'estoient les Comtes de
Joïgny, de Retel >de Bricnîic>
de Roucy
?
de Braine , de
Grand-Pré, &deBar-fur-
SIelinye.
a trois Eglises à Vertu,
avec deux Abbayes hors les
portes. Les Guerres yont laifsédes
marques de leur fureur,
quine peuvent estreeffacées
que par le regne deLoüisLE
GRAND. Le Roy y fut 1-ogc
fort étroitement, & comme
cestoit sur la rue
?
il fut exposé
au bruit du passage des
équipages de la Cour. Ce
Prince auroit pu estremoinsmal
;mais ne pouvant renoncer
à ses manières honnestes,
qu'il conserve mesme aux dépens
de son repos ,
il aima
mieux que celuy des Princesses,
re fust point troublé ,
fk voulue qu'elles fussent logées
plus commodementque
luy.
Le JJ: toute laCour dlfnx.
àBierge
, ôc alla coucher
à a Bierge >-,
& Châlons. Cette Ville est en
Champagne, ôcson Evesché
est Suiffragant del'Archevesché
de Rheims. Elle est ancienne
,
& dés le temps de
Julien l'Apostat, elle tenoit
rang entre les premieres Villes
de la Gaule Belgique, Il y
a de belles rues avec des
maisonsassez bienbasties. La
Place où l'on voit la Maison
de Ville, & celle où est l'Eglise
Collegiale de Nostre-
Dame,font les plus considerables.
La Cathedrale de Saint
Estienne est dans une Isle que
forme la Riviere de Marne,
dont une partie entre dans la
:Ville, &y fert beaucoup pour
la commodité des Habitans.
Elle a de ce cofté-là d'assez
bonnes Fortificarionsquele
Roy François I y a fait faire,
& elle est entouréedemurailles
avec des Fossez presque
toûjours remplis d'eau. Il y
a encore douzeParoisses,entre
lesquelles plusieurs font Collegiales
Les avenues de Châ-
Ions font tres-agreables >& il
y a autour de la Ville plufleurs
lieux de promenade,
entre lesquels celuy du Jare
cil fort renoffilné. La Riviere
,-' der
de Marne qu'on passe sur divers
Ponts, la rend une Ville
de negoce. Elle a eu des Comtes
qui ont cedé leur droit
aux Evesques. C'est par là
qu'ils font Comtes Pairs de
France.
Le Roy entra à cheval à
Châlons
) & fut receu par
le Maire & les Echevins. On
ne luy fit aucune harangue,
parce qu'il avoit fait donner
lordre dans tous les lieux par
IOÙ il devoit passer
)
qu'on ne
le haranguast point ; mais il
eut la bonté de vouloir bicri
recevoir les Presens de Ville,
Le Chapitre de la Cathédrale
eut aussi l'honneur de le famlücr,
ayant à sa teftcM l'Evê.
que deChâlons. Les Chanoines
se recrierent ensuite sur lai
douceur, & sur l'affabilité det
ce Monarque, dont ilsnecesfent
point de parler, Madame:
la DuchessedeNoailles lai
Douairière, qui a esté Dame
d'Atour de la feuë Reyne:
Mere du Roy, & dont la vertu
exemplaire a toûjours çftç:
applaudie,caril en - cft de
faussesqui n'imposent pas a
tout le monde, eut le mesme
honneur. Sa Majesté luy fit
d'autant plus d'honneftetez,
qu'il y along-temps que son
merite luy est particulierement
connu. Le Roy se retira
ensuite -pour tenir Conseil.
Mr le Duc de Noailles
> &
M l'Evesque de Châlonsfon
Frere ,
firent servir plusieurs
Tables magnifiques, pour
toutes les personnes de la
Cour qui voulurent y manger.
Le Jarc leur servit de promenade
pendant quelques
heures. Je ne m'étens point
icy sur la beauté de ce lieu,
parce que j'en ay fait une
description dans le Volume
que j'ay donné, qui ne contient
que ce qui s'est passé au
Mariage de Monseigneur le
Dauphin. Il y eut au Jare une
prodigieusequantité de personnes
de toutes conditions,
que l'impatient dehr de voir
le Roy avoit fait venir de
toute la Champagne. Les
principaux Officiers de la
Ville de Troyes se rendirent
à Châlons? & firent vingt
lieuës pour avoir l'honneur
de salüer ce Monarque. Les
Dames de la Province eurent
beaucoup de chagrin de l'ordre
qui fut donné, de n'en
laisser entre,r faulc.unIela.u1so1u- per , qui n'eust ellenommée
par Sa MLijefté.C:lles qui
crurent n'estre pas assez connuës
pour pouvoir estre du
nombre, ne se presenterent
point, dans la crainte d'estre
refusées,ce qu'on ne trouva
pas ordinaire, & qui fut fort
remarqué. Le Roy eut la bonté
de permettre qu'on les laissast
toutes entrer le lendemain
dans le Choeur de FIL
g-I.Ife>o-t'i elles eurent le temps
de considerer SaMajesté &.
Jtoute la Cour pendant que
l'on dit la Messe.La Musique
de cette Cathedrale chanta
un Motet, dont il parut que
l'on fut assez content. Mr
Evesque Comte de Châlons,
,& Mr le Ducde Noailles accompagnerent
toûjours le
Roy tant qu'il demeura dans
cette Ville. On auroit bien
voulu sejourner dans un lieu
aussi
-
beau & aussispacieux
que celuy là, où les logemens
estoient fort commodes;mais
les mesuresestant prises pour
se rendre à Luxembourg au
jour marqué, on partit le 16.
à dix heures précises du matimpour
aller coucher à Sainre-
Menehout.MdeChâlons
accompagna le Roy jusques
aux confins de son Evesché,
& Mr l'Evesque de Verdun
le reçût à l'entrée du fien.
La journée de Chalons à
Sainte-Menehout se trouva
fort longue pour les Equipages.
On dîna à Bellay, qui
n'est qu'une Ferme sans aucune
autremaison aumilieu
de la camp.-,gnc,& on rendit le
lieu agreable pour y recevoir
le Roy. Sa Majesté y chassa
pendant une partie Je l'aprésdînée,
& alla coucher à
Sainte-Menhout. Cette Place
qui avoit estéprise sur
nous pendant les temps difsiciles,
fut reprise en 1653. par
Mr le Maréchal du Plessis-
Pralin; & ce Siege que le
Roy voulut presser en per,
sonne
,
obligea Sa Majesté
d'aller en Champagne en ce
temps-là. Le Roy ne trouvant
pas la Cour assez commodement
logéedansSainte-
Menehout, resolut de n'y
passer pas la Feste du S. Sacrement
à son retour, &
nomma Chalons pour y faire
la ceremonie de cette FesteCela
obligea de retrancher
un des jours du sejour, de Luxembourg.
Le Roy conti-
Ilua de donner par là des
marques de sa bonté à toute
la Cour,& Mr l'Evesque de
Châlons montra tantdejoye
de ce qu'il auroit l'honneur
de recevoir encore ce Monarque
,que plufieufs luyen
firent compliment.
Le 17. le Roy entendit la
Messe aux Capucins, & fit
de grandes libéralités a leur
Convent. On alla ensuite dV;
ner à Vricourt ,
prés de Clermont
en Argonne. Les chemins
se trouvèrent fort rudes
,dans des bois, dans des
montagnes, & dans des valées
d'un terroir remply de
pierres. On arriva d'assez
bonne heure à Verdun?où
l'on fut si bien logé) que ce
fut avec plaisir
que l'on y
passa la Feste de la Penteccste.
Verdun est une Ville
forte sur la Meuse, & il en
est peu de mieux situées dans
la Lorraine. L'Evesché est
Suffragant de l'Archevesché
de Reims. Cette Eglise a eu
d'illustres Prelats. Ils se disent
Comtes de Verdun,&
Princes du Saint Empire. La
Riviere de Meuse rend cette
Ville agreable par diverses
Isles qu'elle y formé. Le
Roy HenryII. la prit en
IJJI. Le Chapitre de l'Eglise
Cathedrale de Nostre-Dame
est fort considerable.M l'Evesque
de Verdun receut le
Roy dans son Palais Episcopal.
Il est tres-beau, & l'on
y voit jusques à dix pieces de
plein-pied L'air y est admirable.
Ce Palaisest élevé sur un
Roc d'où toute la baffe-Ville
se découvre. Des Prairiesarrofées
par la Meuse
>
& des
vallons assez éloignez, &
tres-fertiles en tout ce qui
est necessaire pour la vie, en
rendent l'aspect des plus
riants. Les ameublemens de
ce Palais sont fort somptueux,
& fervent beaucoup
à faire voir la magnificence
de Mrde Bethune, qui joüit.
en sa retraite de quarante
mille livres de rente, que
luy rapporte son seul Evesché.
Les Anis qu'on appelle
de Verdun, autrement Dragées
de toutes manieres, se
trouvant meilleurs en cette
Ville-là qu'en aucune autre
du monde, elle ne fuit point
l'exemple des autres Villes
dans les Presens qu'elle fait
aux Souverains? & au lieu
d'offrir du Vin, elle donne
de ses Anis. Ainsi elle en sir
present de cent boëtes au
<
Roy. M l'Evesque de Verdun
est Fils d'Happolite de
Bethune? Comte de Selles,
Marquis de Chabris
>
dit le
Comte de Bcthune
, mort en
1665. aprësavoir esté honoré
du Collier desOrdres du Roy
en 16Cu & fait Chevalier
d'honneur de la Reyne Marie-
Therese d'Austriche. Il
avoit épousé en 1629.Anne-
Marie de Beauvilliers, Soeur
de M le Duc de S. Aignan,
qui tant que la feuë Reync
aYcfçuj a eu l'honneur de
la servir en qualité de Dame
d'Atour. Ce Prelat avoit avec
luy Madame de Rouville sa
Soeur,Veuve de M le Marquis
de Rouville, Gouverneur
d'Ardres.Elle eut l'honneur
de manger avec le Roy
dans les trois Repas que Sa
Majestéfit à Verdun.
Le jour de laPentecoste,pres.
que toute la Cour sir ses devotions,
à l'exemple du Roy.
C'estune choseassez extraor.
dinaire pendant le coursd'une
marche. mais quene voiton
point de nouveau fous le
Regne de Loüis XIV. sur
tout pour leschoses qui regardent
la Religion & la
pièce1 Monseigneur le Dauphin
se rendit dans l'Eglise
Cathedrale dés sept heures
du matin;&: après avoir entendu
la Messede M l'Abbé
Fleury, Aumônier du Roy,
ce Prince communia par les
mains de cet Abbé.
Sur les dix heures, le Roy
passa à travers ses Mousquetaires
rangez en haye des
deux costez de la court de
l'Evesché
, &: au milieu des
cent Suisses dela Garde, postez
dans la mesme Eglise.
SaMajestéestoitenvironnée
de ses Gardes du Corps &de
toute sa Cour. Elle se rendit
dans leChoeur, où Elle fut
suiviede Mr l'Evesque de
Verdun,&de tous les Chanoines
de cetteCathedrale.
LeRoyestoit en Habit de
cérémoniec'eit à dire
> en
Manteau,revestu de son Col-
Jjjcr de l'Ordre. Il entendit
là Méfie de Mr l'Evesque
d'Orléans, son premier Aumônier
,
dont il receut la
Communion La seconde
Messeque Sa Majesté entendit,
fut dite par l'un de ses
Chapelains. Au sortir de
l'Eglise, Sa Majesté toucha
prés de cent Malades, dont
Mr leDuc deNoailles avoit
fait amener une partie de
Chalons. Ils estoientrangez
sous les arbres de la premiere
court de l'Evesché. Ce Prince
quitta ensuite son Habit de
ceremonie, & revint avec
Monseigneur le Dauphin, &
toute la Cour, entendre la
grand' Messe, qui fut pontifïcalemenr
celebrée par Mr
l'Evesque de Verdun, &
chantée par la Musique de
la Cathedrale.Cette Musique
plut assez à toute la Cour,
& on trouva la voix d'un des
Enfans de Choeur tres-agreable.
Plusieurs mesme la jugerent
digne de la Chapelle
du Roy. Il y a quatre de ces
Enfans de Choeur qui joüent
du Violon, qui sont, une
Taille, une Haute-contre, &
deux Baffes.
Le Roy eut la bonté de
toucher encore soixante &
dix Malades en sortant de la
grand' Messe. C'estoit beaucoup
après en avoir entendu
trois,&touché d'autres Malades.
Sa Majesté vint l'aprésdînéeentendre
Vespres dans
la mesme Eglise, &: Mr de
Verdun officiaencore en Habits
pontificaux. Le Roy étoit
dans les hautes Chaises à
droite.& aprèsluy,Monseigneur,
Madame la Duchesse,
& Madame la Phnccffe de
Conty. Aprés ces Princesses
estoient Monsieur le Prince-
Monsieur le Duc , Monsieur
le Duc du Maine, & Monsieur
le Comte de Toulouse.
Les Dames occuperent le reste
des places. Jamais les peuples
de Verdun n'avoient vû
ny tant de magnificencesny
une si augusteAssemblée ; &
l'on peut mesme dire qu'ils
n'avoient jamais vû dans leur
Eglise de si grands ny de si
édifians exemples depieté.
Le Roy s'enferma après
Vespres avec le Pere de la
Chaise pour travailler à remplir
les Beneficesqui vacquoient
depuis le jour de
Pasques, qu'il avoit fait une
nomination. On fut quelque
remps sans sçavoir cette derniere
, parce que lePere de
la Chaise n'en dit rien après
qu'il fut forty du Conseil.
Enfinonappritque Mr rAb..
bé de Saint Georges,Comte
de Saint Jean de Lion vnommé
depuis quelque temps à
l'Evesché de Clermont,avoit
esté fait Archevesque de
Tours, & que l'Evesché de
Clermont avoit esté donné
à M l'Abbé de Champigny
Sarron, Chanoine del'Eglise
de Paris. Je vous parlay amplement
de M l'Abbé de S.
Georges
,
lors que le Roy le
pourveut de l'Evesché de
Clermont. M l'Abbé de
Champigny qui vient d'y
estre nommé, est Fils de François
çoisBochartdeChampigny,
Seigneur de Saron, qui après
avoir esté Maistre des Requestes,
Conseiller d'Etat, &
Intendant pendant trente années?
tant dans la Généralité
de Lyon qu'en Provence &
en Dauphiné,se noya malheureusement
en 1665. C'étoit
un homme d'un rare merite,
dont le nom se trouve
souvent dans les Ecrits des
Grands hommes de ce Siecle.
111 avoit épousé Madeleine
Luillier, Soeur de Madame la
Chanceliere d'Aligre, &
estoit Fils de JeanBochart,
Seigneur de Champigny,
Noroy & Saron, Controlleur
General, Sur Intendant des
Finances, & premier President
au Parlement de Paris,
mort en 1630. Cet illustre
Magistrat descendoit de Jean
Bochart Seigneur de Norcy,
Conseillerau Parlement, qui
fut éleu les Chambres assemblées,
pour remplir la Charge
de premier President en 1447.
Celuy-cy eut pour Fils Jean
Bochart II. du Nom, auquel
Jean Silnon, Evesque de Paris,
donna saTerre deChampigny
en luyfaisant époufer sa Niece.
On iceut aussi que l'Evesché
d' Amiens avoit esté donné
à Mr l'Abbé Feydeau de
Brou, l'un des Aumôniers du
Roy, & que M l'Abbé
d'Hantecour, Aumosnier de
la feuëReyne, avoit eu l'Abbaye
de Longuay, Ordre de
Premontré,DiocesedeReims
vacante par le deceds de M,
l'Abbé du Four. Mr l'Abbé
d'Hantecourt est Frerc du
Pere d'Hantecourt, Religieux
de Sainte Geneviéve,
&Chancelier de l'Université.
Cet Abbé estant de quartier
lorsque la Reyne mourut,
eut le triste honneur de
remplir plusieurs fonctions
qui regardoient sa Charge.
Il a esté employé depuis la
mort de cette Princesse aux
conversions des Protestans
dans plusieursVilles de
Françe. L'AbbayedeBalerme
fut donnée le mesmejourau
Frere de Mde la Chetardie,
Commandant de Brifac
?
&
l'Abbaye de Noyers au Fils
de MPinçomAvocat au Parlement,
qui entend parfaitement
les matieres Beneficiates&
Ecclesiastiques, & qui
a écrit là-dessus touchant les
droitsde SaMajesté.Il-y eut
aussi ce jour-là plusieurs Benefices
de moindre consideration
donnez à des Officiers
d'Armée & de laMaison du
Roy, pour leurs enfans otj
pour leurs parens; mais le
Roy ne les accorda qu'après
que le Pere de la Chaise l'eut
asseuré que leurs vies &
moeurs luy estoient connuës.
Les choses qui ne demandent
pas de secret estant
bien-toit répanduës,on ne
fut pas long-temps sans apprendre
les noms de ceux à
qui les Benefices avoient esté
distribuez,& toute la Courfit
paroistre tant de joye de la
nomination de M l'Abbé de
Brou à l'Evesche d' Amiens,
qu'il m'est impossible de vous
la bien exprimer.
Je ne sçaurois m'empescher
de vous marquer icy
qu'un homme qui possede
une des premieres Charges de
la Cour, ayant prié le Roy
de luy donner un Benefice
pour un de ses Fils quiest
tres-jeune) Sa Majesté luy
demanda quel âge il avoit,
& l'ayant sceu
,
Elle luy dit;
quEHe estoit bien lâchée qu'il
eust encore tant de temps à at.
tendre. Celuy qui demandoit
cettegrace voulut donner des
raisons, & rapporta mesme
quelques endroits de l'Ecrisure;
mais le Roy sit connoistre
qu'il la sçavoit beaucoup
mieux que luy, & dit
qu'il ne donneroitjamais de Benefices
qu'à despersonnes capdbles
de sçarvoir à quevelles s'engageoient,
en prenant le party
d'entrer dans l'Eglise. Ce Prince
ajoüta ,on croyait peuteftrr
qu'on emportait quelquefois
des Benefices par faveury
mmaaisisqquueessiicceeuuxxqquuiiavonrv
cette pensée , pouvaient erre témoins
de ce qui se passe dans le
Conseil
,
lors qu'ils'agit de lA
distributiondesBenefice,ils verroientpar
toutes les précautions
qu'on prend pour ne les donner
qu'a des personnesdignes de les
posseder, la peine où ilse trouve
souvent avant que d'oserfixer
son choix. Sa Majesté fit
enfin connoistre
, que ny faveur,
ny brigue) ny recommandation
,ny naissance,ny
services
, ne pouvoient rien
obtenir, à moins qu'Elle ne
fust persuadée que ceux qu'il
- A
-
luy plaisoit d'en gratifier
n'eussent toutes les qualitez
necessaires pour en remplir
les devoirs. Ce n'est pas à
dire pour cela que tous ceux
qui en possedent,s'en acquits
tent dignement. La possession
du bien, & le peu d'occupation
corrompent fouvent
les moeurs. On s'aveugle
quelquefois dans le temps
où l'on devroit avoir le plus
de fageue?&:on ne conferve
pas toûjours les bonnes incli-,
nations qu'on a fait paroistre
dans ses premieres années. Le
Roy peut donner un Benesiceà
l'homme du monde
qui le meritéle mieux dans
le tcmps qu'il l'en pourvoir,
& qui dans la fuite en deviendra
tres-indigne.
- Je pourrois ajoûter- icy
beaucoup de choses sur ce que
le Roy voulut bien dire en
public touchant la nomination
des Benefices; mais ayant.
accoûtumé de vous rapporterles
faits sans aucun taisonnement
,je vous laisse faire làdessus
toutes les reflexion
que le Roy merite qu'on flÍI.
à sa gloire.
Ce Prince après avoir efii*
ployé la plus grande partie
du jour de la Pentecoste à
des avions de devotion &
de pieté
, & tenu un long
Conseil pour la distribution
des Bencfices qui vaquoient
alors, ne crut pas avoir encore
assez fait; il alla faire
le tour de la Place pour en
viliter les Fortifications, &
vit un Bataillon du Régiment
Soissonnois? qui estoit
en bataille sur le Glacis. Ce
Bataillon luy parut fort lestes
& il futtres-content.Il estoit
commandé par M le Duc de
Valentinois, Fils de M le
Prince de Monaco. Sa Majesté
vit aussi le Regiment
des Vaisseaux dans la Citadelle)
commandé pat Mr le
Marquis de Gandelus
?
Fils
de Mle Duc de Gefvrcs, qui
cnetf Colonel, & elle en fut
fort fatisfaitc. M le Marquis
fie Vaubecour, Gouverneur
de Châlons,&Lieutenant de
Roy du Verdunois
, & du
Pays Messin
, accompagna
toujours le Roy, & tint à
Verdun, tant que Sa Majcftc
y demeura,deuxTabks fort
magnifiqueSj ainsi qu'ilavoit
fait à Châlons, pour toutes
les personnes de la Cour qui
voulurent y aller manger. Le
Roy fut fort content de ce
Marquiseluy donna inefme
des marques de la fatisfadion
qu'il avoit de sa conduite.
Enarrivantà Verdun
» on
voit appris la mort de Madmoiselle
de Jarnac Fille
d'honneur de Madame la
Dauphine.dontje vousay déja
parlé.Elle fut fort regretée
à cause de son humeurdouce,
& complaisante,
Quoy que la Ville de Verdun
soit couverte par Longvvy,
Luxembourg, Sar-Loüis,
Strasbourg &autres, on ne
laisse pas de travailler tous
les jours aux fortifications de
cette Place. Le Roy ordonna
'lu)on y preparait les Ecluses,
afin qu'il puft voir à son retour
l'espace du terrain qu'elles
pourroient occuper.
Lors que Sa Majesté visita
la Citadelle qui est de cinq
Bastions fort reguliers , on
luy fit remarquer le Bastion
nommé le Marillac, qui donna
lieu au Procès qui fut fait
au Mareschal de ce mesme
nom> pour le crime de Peculat
, dont il avoit esté accufé.
L'histoirerapporte que
le Ministre qui nomma les tgommiflàiresquile condamnerent
,
leur dit après avoir
apprissacondamnation, qu'il
falloir que les Jugesenflent des
lumieres que le reste des hommes
n'avoitpas &queplus il avoit
fait de reflexionsur l'affaire dît
Maréchal de Marillac, &sur
toutes les choses dont on l'accusoit
,
moins ill'avoit juge digne
de mort; maisquenfin ilfalloit
croire qu'il estoit coupable
j
puis
qu'ilsïanjoient condamne. Il
n'eut dans la fuite que de la
froideur & de l'indifférence
poureux.
Le19.on ne fit que quatre
lieuës & l'on alla dîner
*
& coucher à Estain ; la journéeauroitesté
trop longue si
on avoit estéjusquesàLongvvy.
Mr Mathieu de Castelus
qui y commande vint à
Estain saluer le Roy,& tecevoir
les ordres de Sa Majesté.
Estain est un gros Bourg
muré, du Diocese de Verdun.
C'est le dernier de sa Jurisditèion
du costé de Luxembourg.
Quoy que ce Diocese
foit fort petit & borné de
toutes parts, sonpeu d'étendue
ne diminue pas néanmoins,
son revenu.MrdeVerdun
accompagna le Roy jusques
à Essain. La Cour eut un
tres-beau temps pour traverser
des ruisseaux, & desPlaines
grasses
?
& fertiles. Les
pluyes l'auroient fort incommodée,
mais le Royqui fait
les beaux jours de tous ceux
qu'il regarde favorablement)
devoit estreanez heureux
pour n'en pas manquer luymesme.
Sa Majesté prit ra:
presdinée le divertissement
de la Chasse. Ertain cft un
Païs de Bois accompagné de
belles plaines) & de Vallons
bien culrivez; les Maisons y
sontgrandes, & logeables
presque toutes bastiesà l'Allemande,&
il n'yen a pas une
qui n'ait quatre Chambres
hautes où l'on peut loger.
Le Roy,Monseigneur?& les.
Princesses eurent leursAppartemens
dans la plus grande,
& chaque Corps d'Officiers
logea dans d'autres. Le lieu.
paroist avoir esté autrefois
considerable;les Guerres l'ont
ruiné , parce qu'il n'estoit pas
assez fort pour se deffendre
des courses. La Paroisse est
unassezbeauVaisseau,surtou
dans l'étendue du Choeur,qui
est tres-beau &: fort élevé
Cette Paroissea esté bastie
par les soins de Guillaume de
Huyen, lequel ayantesté in,
struit à Verdun? passa en Italie
; ou la beauté de son génie
luy acquit la bien-veillance
de la Cour de ROIne. Il fut
d'abord Chanoine de Verdun,
& par degrez elevé à la
pourpre, ayant esté fait Cardinal
au titre de Sainte Sa-;
bine. Il employa ks biens a*
l'embellissementde sa Patrie
mais la mort qui le (urpnd
dans l'exécution de ses. def-i
seins
, en rompit le cours
Les Entrepreneurs volerent
l'argenr & lainerenrnglife
imparfaite.Il avait resolude
fonder douze Prebandes,un
College-, &un Hôpital ;.lnaiscil
ne voit qu'un Choeur de-;
licatement construit
, & la
Barete de ce Cardinal suspendue
à la voûte, pour monument
de sa pieté
, & de sa dignité.
Il vivoit en 1406. Un
Curé, & un Vicaire ont foin
de cette Eglise, & du Peuple.
Les Capucins ont en ce lieu
une Maison habitée par huit
ou neuf Religieux. Ils ont
quelque peine à subsister;
mais ils en auroient encore
davantage s'ils n'estoient prés
de Verdun où on leur fait
de grandes charitez»Ces bons
Peres se sont establis en ce
lieu pour aider le Cure., à
causequ'il n'a qu'un, seul
Vicaire avec luy,
Le lendemain 20. la Cour
partit, d'Estain? &alla dîner
à Pierre-Pont qui n'en est éloigné
que de trois lieuës. La
plulpart des Officiers mangerent
surune verdure arrosée
d'un ruisseau fort agreable.
On traversa ensuite plusieurs
petits torrens;on parcourut
des Valées:on monta
des hauteurs?&on gagnaen
&~
finla cime d'une Montagne
où lenouveau Longvvy entièrement
construit par le
Roy) pour faciliter la prise de
Luxembourg. Le Vallon est
arrosé d'une très- belle eau
vive, qui roule toujours, &
qui rend la Plaine fort fertile
; laveue se promene agréablement
sans estre bornée
que des deux costez par deux
Montagnes, mais elles n'offrent
rien qui ne doive plaire.
L'une est remplie d'arbres;
l'autre est occupée par te
vieille) & par la nouvelle
Ville. On découvre dans le
milieu de la Prairie deux mai.
fons de Religieux) l'une de
Recolets. & l'autre de Carmes
) qui y sont établis, &
qui ont foin des anciens Habitans
de ce Pays-là. Ils ne
font logez que dans des hutes
sur la Colline
, & ils avoient
au dessusun Château antique
qui les mettoit à couvert
des Coureurs; mais presentement
il est ruiné) &
l'on n'y trouve que des cabancs
& des masures. Longvvy
est situé sur une hauteur
bordée d'un précipice à IJEfi:f
& au Sud, s'estendans vers le
Nord,& l'Ouest dans une
Plaine fort fertile. La Place
n'est commandée d'aucun
endroit. On y voit une grande
ruë ,
à l'extrémité de laquelle
font deux portes accompagnées
d'un double fossé
, &: défenduës de bons
Battions. Dans cette ruë principale,
sont les maisons des
Bourgeois qui font environ
deux a trois cens feux. La
Place d'Armes est au milieu.
On y voit un beau puits
) &
à gauche une Eglise une fois
aussi grande que les Recolets
de Versailles
, mais ily a
moins de Chapelles. Cette
Eglise est accompagnée d'uaeTour,
de la hauteur de celle
le Saint Jacques du Hautes
à Paris
, qui sert de Beffroy
>
& de laquelle on dé-*
couvre jusques à six lieuës
dans le Pays. La Maison du
Gouverneur est à droite , &
fait face à l'Eglise. Le reste
des Maisons est basty par fimetrie.
Le long desRamparts,
font des Cazernes pour les
Troupes,-& l'on voit d'espace
en espace des Magazins de
différentes grandeurs.Tous
ces Magasins sont soigneusement
gardez. Le Roy logea
dans la Maison du Gouverneur.
Mrle Marquis de Bouflers
, qui a le Gouvernement
de Luxembourg, vint au de.
vantdeSaMajestéàLongvvy.
Il estoit accompagné de quel..
ques-uns de fcs Gardes qui ne
parurent point avec leurs Ca.
rabines. Le Regiment d'Angoumois
commandé par Mr
de Thouy,estoit dans la Place.
Le Royen fit la Reveue>
êcille trouva tres- bon, tous
les hommes estant bien faits,
&audessus de trente ans. Ce
Regiment eut l'honneur de
garder le Roy. Il fautremarquer
que ce Prince ne fut pas
plûtost arrivé) qu'il donna
des marques de son activité
ordinaire. Pendant que cluCun
alla? ou le reposer? ou fc
divertir dans fcs Appartemens,
où il avoitdonné ordre
qu'il y eust toûjours rou.
tes fortes de Jeux preparez,ce
Prince courut? s'ilm'est permis
de m'expliquer ainsi pour
mieux marquerfonardcur.)11
courut?dis-je où la passion
digne d'un grand Capitaines
&: le devoir d'un grand Roy
rappelloient,&sedonna tout
entier le reste de la journée à
voir des Troupes? & des Fortifications.
Il y a dans Longvvy
quatre cens cinquante
Cadets. Sa Majesté leur vit
faire l'exercice, &dit hautement;,
qu'il rijyanjoitpoint de
Troupes qui s'en acquittent
mieux. Elle resolut mcfrnc
d'en prendresoixante ou quatre-
vingt , pour en faire des
Sous-Lieutenans dans tous
les Corps, excepté dans sois
Régiment ,où l'on ne reçoit
point d'Officier qui n'ait esté
Mousquetaire.Toutes les
places qui y vacquent estant
reservées à la Noblesse qui
tort de ce Corps,ils se perfectionnent
encore dans ce Regiment
en ce qui regarde le
métier de la Guerre? avant
que d'estre élevez à de plus
hauts Emplois. L'exercice
que firent les Cadets? fut à la
voix & au commandement
de leur Capitaine, ensuite au
coup de Tambour, câpres
dans le silence, par une habitude
qui est en tous également
naturelle; ce qui se fait
avec tant de justesse, qu'il
semble que ce soit un feut-
J.
homme qui remuë également
toutes les parties de
son corps. Ceux qui prirent
ce divertissement avec le
Roy eurent un tres-grand
plaisîrde voir un mouvement
uniforme dans quatre cens
cinquante personnes de différentesgrandeurs.
Le Royvisita à cheval les
dehors de la Place, & fit à
pied le tour des Remparts.
-
Ce Prince marqua luy-même
ce qui en pouvoit encore
embellir les Travaux, & ce
qu'ils avoient de plus beau
& deplus seur. Cela fait voir
la parfaite intelligence qu'il
a de l'Art de la Guerre.
Il ne faut que voir Longvvy
pour concevoir une haute
idée de la puissance du Roy,
& l'on ne pourra qu'à peine
sepersuader qu'il ait entièrement
fait bâtirune Ville,
élevée sur une cime inaccessible
r & dont les remparts
font d'une prodigieuse hauteur.
Il est impossible de s'imaginer
la dépensequ'où
a faite à couper le Roc, à
rendre le terrain uny, & à
bâtir tant de beaux logemens.
Cette Place est de figure éxagone
r ayant un Baition
coupé ducodedesprécipices
feulement. Ilestsoûtenu par
deux Delny-Iunes, & deux
Ravclins. On amis trois Cavaliers
aux endroirs foibles,
qui découvrent fort loin,&
qui feront montez de vingt
pieces de Canon. Toutes les-
Fortifications de cette Placc
fontd'une ties-grande regularité
; & ce qu'il ya de surprenantec'est
que le Roy en
aitfait entierement conftruireungrand
nombre d'autres
qui ne sont pas moins fortes,
qu'il y fasse encore tra-*
vailler tous les jours, & qu'il
commence à en faire éleyer
denouvelle.Iln'est pas moins
étonnant que SaMajesté voulant
mettre ses Sujets à couvert
des courses de la Garnison
de Luxemboutg., en la
mettant au rang de ses Conquelles,
Elle ait fait bâtu
Longvvy pour faciliter ses
desseins, cette Place ayant
servy de Magasin pour tou,
tes les provisions neceflaircs
à un Siege aulli important
qu'a esté celuy de Luxembourg.
Comme rien n'altère davantage
la fanté qu'une forte
&continuelle app licationau
travail, M de Croissy , qui
par une longue fuite d'Emplois
&par l'occupation que
luy donne celuy qui l'attache
entièrementaujourd'huy,
s'etf attiré des douleurs de
goute depuis quelques années,
en ressentit de violentes
à Longvvy. Cependant
elles ne l'empefcherent point
de servir le Roy, en quoy
il fut parfaitement bien secondé
par M le Marquis de
Torcy son Fils, qui dans un
âge fort peu avancé, a déja
veu toutes les Cours de l'Europe
> en a étudié les maniéres,
& n'ignore rien de ce
qui regarde la Charge dont
Sa Majesté luy a accordé 1:4
survivance.
La Maison du Roy eftanr
si grande) qu'à peine il se
passe une semaine
>
sans qu'on
apprenne la mort de quelque
Officier) on sceut à
Longvvy celle de M Villacienne,
Gentilhomme servant
du Roy? & celle de Mr
de la Planche ,Valet de
Chambre de SiMajesté
,
la
premiere dépendant de Monsieur
le Prince,comme Grand
Maistre delaMaisonduRoy,
& l'autre deSaMajesté parce
que le défunt xi'çftant poirr
marié
,
n'avoit point d'ensans
à qui ce Prince en eust
pû donner la survivance.
Mrde Seignelay, qui avoit
fait le Voyage de Dunkerque
avec une diligence furprenante,
depuis que le Roy
estoit party pour Luxembour,
joignit Sa Majesté à
Longvvy , & luy fit le rapport
de l'estat des Fortifications
de cette premiere Place.
Je vous en ferois icy le
détail, si je n'estois obligé de
le remettreà unautre ÀrcmS)
a cause de la quantité de choses
curieuses que j'ay encore
à vous apprendre touchant
le voyage de Sa Majesté. Je
vous diray cependant que le
Risban, lesJetrées,lesEcluses,&
le Bassin pour les Vaif-
[caux, sont des choses si extraordinaires
à Dunkerque »
<juà moins de vous en faire
la defeription, quelques paroles
dont je pusse me servir,
pour vous marquer la beauté
deces Ouvages* il me seroit
impossiblede vous rien faire
Concevoir qui en approchait,
& vous auriez mesme encore
beaucoup de peine à vous les
representer tels qu'ils [ont) si
vous ne les aviez vûs.
Le Roy estant party de
Longvvy le 21. entra dans le
Luxembourg, &: dîna à Cherasse,
premier Village de la
Province ducosté de France;
Le Païs par où l'on entra, n'a
pas tant de Bois ny de Mon.,
cagnes que les autres Cantons
de cette Province. Ce font
des Plaines grasses & fertiles?
remplies de tres-bons grains.
Les Villages y sont en affcz
grand nombre,mais les maifons
n'en font pas entièrement
rétablies. En approchantdela
Ville de Luxembourgeonvoitde
toutes parts
destrous, desquels on a tiré
de la brique,& de la chaux,
& d'autres materiaux, pour
les nouvelles Fortifications
<i'un Ouvrage qui va au delà
de tout ce que l'on en peut
concevoir.L'aspect delaVilleestbeauducostédeFrancc.
Le plan paroist égal par.
tout,&lesédifices sontgrands
8c magnifiques. On découvre
plusieursEglises couvertes
d'ardoises, descazernes, des
Magasins, des maisons considerables,
Celles des particuliers
semblent estre bâties
desimetrie; mais lors qu'on
est dans la Ville, on est furpris
de ce qu'on n'a découvertqu'une
partie des Fortifications.
Elles sont toutes irregulieres,
& continuées suivant
l'étduë du terrain, dont
la situationpeut étonner des
Assiegeans qui oseroientl'attaquer.
•*
Je devrois vous parler icy
de l'origine de cette Place,
vous entretenir des Ducs qui
en ont porté le nom, & vous
en faire comme un abregé
d Histoire; mais j'ayamplement
parlé de toutes ces choses
dans le Volume que je
vous ay envoyé du seul Journal
du Siege que le Roy fit
)
lors qu'il joignit la Ville de
Luxembourg à ses premieres
Poiiujrfedr
Conquestes. Ainsi jeme COfitenteray
de vous envoyer le
revers de la Medaille qui sur
¿;'faite en ce temps-là, & que
j'ay pris foin de faire graver.
Le Portrait du Roy [e voit
sur laface droite. Jene vous
dis rien du revers, vous le
pouvez voir.
Ce Prince fut receu à la
Porte parleMajor de la Place,
&,' traversa la Ville au milieu
de six rangs de ceux de
la Garnison qui estoient soue,
lesarmes, & en hâye>j[ufque^
au lieuoùSaMajesté alladescendre.
Ils firent trois salves,
mais on ne tira le Canon qu'aprés
l'arrivée du Roy, parce
que cela auroit marqué une
Entrée, & qu'il avoit déclaré
qu'il ne souhaitoit point
qu'on luyen fist.LesBourgeois
vinrent luy offrir leurs hommages.
oLes ruës étoient toutes
tapissèesde branches d'arbres,
suivant la coutume du Pai's.
Pendant le Soupe du Roy
qui dura deux heures, ils aL
lumcrent unfcudejoyc dans
-- .--' -,. --, -' 1er
té —*
--_.
le Pâté qui eH: entre le Paffendal
& le Grompt, vis-à-vis
les fenestres du Palais du
Gouverneur, prés de la Riviere.
Toutes les ruës furent
illuminées, &ces illuminations
continuerent pendant
tout le temps que Sa Majesté
demeura àLuxembourg. La
façade de l'Hostel de Ville parut
éclairée par plus de deux
cens Lanternes, remplies de
Devises à la gloire de ce Prince.
Les Clochers estoient en
feu, & quantité de flambeaux
de cire blanche brûlerent
toute la nuit devant la maison
du Maire. Toutes ces illuminations
furent accompagnées
de cris de Vive le
Roy. Sa Majestéfutgardée
par un Bataillon de Champagne,
commandé par Mr le
Baron de la Coste, La Ville
estoit plus remplie d'Etrangers
que de gens de la fuite
de la Cour, sans compter les
Gouverneurs, les Lieutenans
de Roy, les Officiers des Garnisons
d'Alsace, de Lorraine,
&de Flandre, qui avoient
eu permission de venir. Mr
l'Evesque
)
& Mr le premier
President du Parlement de
Mets, y estoient aussi venus,
avec tout ce qu'il y a de plus
distingué dans la mesme Ville,
suivy d'un grand peuple,
que la curiosité de voir le
Roy y avoit attiré. Il yestoit
passé plus de dix mille hommes
deTreves,deCologne,
de Mayence. de Juliers, de
Hollande, & de la Flandre
Espagnole;& l'on eust dit
que toute la Champagne s'y
estoit renduë, pour remercier
le Roy d'avoir pris cette
Place, afin deladélivrer des
courses de sa Garnison. M1 de
Louvois y estoit arrivé le
jour precedent
,
après avoir
faitun Voyage de deux cens
cinquante lieues depuis que
Sa Majesté estoit partie de
Versailles pour aller à Luxembourg.
Cette diligence
ne paroiftroit pas croyable,
si ce n'estoit une de ces choses
de fait dont on ne [sa?=-:
roit douter. Ce Ministre
rendit compte au Roy de
son Voyage pendant que Sa
Majesté demeura à Luxembourg
& je vous en feray le
détail
, avec celuy de ce qui
s'est paffé dans le temps de
ce sejour,mais il faut auparavant
vous faire la description
de cette Place.
Tous ceux qui l'ont veuë
avant le Siege ,la regardent
avac un etonnement qu'il seroit
difficile d'exprimer, &
sont fort surpris d'avoir à
chercher Luxembourg dans
Luxembourg mesme. On ne
reconnoift: plus cette Place
que par quelques Edifices publics,
presque tous ruinez
dans la Journée des Carcasses
& dans la fuite duSiège, &."
rétablis dans une plus grande
perfection
, par les soins Ôc
par la pieté duRoy. On m'a
assuré que la Ville est grande
deux fois comme Saint Germain
en Laye, &j'ay vû deux
Relations qui le marquent.-
Je ne vous garantis pas
tjue cette grandeur soit juste
On peut s'abuser dans les
choses qu'on écrit sur lerapport
de sa veuë ; cependant
on peut concevoirpar
là une idée approchante de
la grandeur d'un lieu dont
on fouhaitc avoir connoissance.
La Place d'armes de Luxembourg
peut contenir environ
deux mille hommes
rangez en bataille. Les rues
sont larges,&il yen a douze
ou quinze considerables. Les
Bâtimens y sont de deux éta.:=
ges au moins. Ils sont assez
étroits
) mais presque tous
d'une--nlefme, simetrie. La
Cour y estoit assezbien 1&--
gée. Le Commerce n'y est
pas grand, mais la Garnison
y fait rouler beaucoup d'argent
par ses dépenses. On a
esté obligé de prendre des
Domaines, & des Jardinsà
quelques Bourgeois,& à quelques
Païsans, maisils en ont
esté largement indemnisez.
L'Hostel de Ville e£tpetit?
û façade n'est pas large. La
Paroisse est étroite, & il n'y
a qu'un Doyen,&dixEcclesiastiques;
un plus grand
nombre n'en: pasnecessaire,
puis que les Religieux qui
font dans le mesme lieu, les
déchargent presque de tous
les soins qui regardent les
Pasteurs. Il y a quarante-cinq
Religieux dans le Convent
des Recolets, dont la moitié
font François
, & les autres.
Allemands. Ils vivent
des questes delaVille, & dc:
la Province, & preschent
dans l'une & dans l'autre
Langue. Ils sont commis
pour auministrer les Sacremens
à la Garnison. Les Bourgeois
quisontfort devots, &
Flamans en ce point-la?vont
souvent faire leurs dévotions
chez ces Peres, qui sont en
très-grande reputation en
cette Ville-là?&fort estimez
& aimez de tout le Peuple,
Ils ne le font pas moins de la
Garnison qui les respect
beaucoup. Je pourrois ajouter
qu'ils s'en attirent la crainte
aussi-bien que le respect,
puis que ces Peres font toutes
les fonctions Curiales en ce
qui touche cette Garnison.
LePereOlivier Javenayaprés
avoir esté Gardien, & s'estre
acquis une grande réputation
par ses Sermons, a esté éleu
Custode de douze Maisons
.dependantes de celle-là, dont
celle de Luxembourg est la
principale. Les Jesuitesyont
une tres-grande Eglise, fort
propre, & fort riche. Elle est
plusgrande que celle des
Carmes de la Place - Maubert
, & a deux aillés, &
trois beaux Autels. Ils tiennent
leCollege
, & ces Peres
font ordinairement au nombre
de vingt-cinq dans cette
Maison. Encore qu'ils soient
tous François, il yen a quelques-
unsqui sçavent fort bien
l'Allemande & qui ontesti
élever en Allemagne. Leu.
Jardin est beau & spacieux
îc leur maison toute neuve
êc bien ordonnée. Ilsontune
Musique Allemande, que la
Cour alla entendre le jour de
la Trinité. Les Capucins y
ont aussi unConvent
>
dans
lequel on ne trouve que des
Religieux François ,
dont
le nombre peut égaler celuy
des Jesuites. Il y a
deux Refuges dans la Ville,
& une Eglise, appellée le
Saint Esprit, dansunBastion,
Celle desDominicains?qui a
esté fort endommagée par le
Canon, n'est pas encore rctablieIlsdonnerent
ieui
Tour pendant le Siege, pour
placer une Batterie qui incommoda
fort nostre Camp.
On fut obligé de s'en défendre?
& cela* pensa causerla
ruine entiere de leur Eglise.
J'oubliais à vous dire que
les Recolets ont le Cimetiere
de la Garnison. Leur Eglise
est aussi grande que celle des
Cordeliers du Grand Convent
de Paris. Ils ont d'assez
beaux Ornemens, & tout est
chez eux d'une grande propreté.
Leur Jardin est aiTçz
beau pour une Ville de Guerre
Il tomba pendant le Siege
cinq cens Bombes dans leur
enclos, dont trois tomberént
dans une Chapelle,
qui fert de Mausolee auComte
de Mansfeld, l'un des plus
grands Capitaines de son
temps, & fameux par ses Exploits
fous Charles IX. Il
mourut Gouverneur de Luxembourg
âgé dequatrevingt-
six ans. Son tombeau
estde Marbre blanc; safigure
->
& celles de ses deux Fern;
mes ,
font en bronze au desfus
de ce Tombeau,chacune
de six pieds de haut. L'une
des trois Bombes qui tomberent
dans cette Chapelle,
perça une grosse voûte, fit
tin trou fort large à l'extremitédu
Tombeau duComte..,
tourna à demy une pièce
de marbre qui le couvre, &
4jui a huit pieds en quarré
ôc la rompit environ de la
largeur d'un pied. Les Jefuites&
les Recolets ne font
sjparezquepar une rue* &
ïes Capucins sont dans un autre
quartier de la Ville, proche
la Porte-neuve. Il y a
aussi trois Convents de Filles.
Le Comte de Mansfeld dont
je viensde vous parler, a fait
bastir le Palais des Gouverneurs.
Il a esté tout ruiné par
nos attaques, & si bien reparé
par les soins de Mrle Marquis
de Bouslers
, que le Roy
y logea avec Monseigneur;
& les Princesses,Ilest sur un
Bastion. qui donne sur un
Fauxbourg arrosé par la Riviere?
dont la Prairie dans laquelle
elle se répand estun
objet agreable pour la veuë,
& dans une gorge entre deux
Montagnes. Il a pour point
de veuë un reste de petit bois
de haute Futaye. Pour pouvoir
insulter ce Bastion, il
fauts'estre rendu maistre de
sesdeffenses. Le Roy y avoit
une grande Salle, une
grande Chambre pour les
Jeux, sa Chambre,&trois Cabinets.
Les Gouverneurs de
Luxembourg avoient autrefois
une Maison de plaisance
située sur la Riviere qui sert
de point de veue lieur Palais;
mais les guerres les ont
privez de ce lieu de divertis
sement. Luxembourg est fituésur
une hauteur àl'extremité
d'un grand terrain du
costé de l'Ouest & du Sud
fondé sur un roc qui a este
coupé plus de quatre pieds
en terre dans les endroits ou.
l'Esplanade duGlacis n'est pas
sélon les Réglés? & commandé
par le chemin couvert. A
son Est, & à son Nord, ct
sont des Vallées prodigieuses.
qui semblent inaccessibles à
toutes les Nations; & cependant
c'est par ces abismes
qu'on a pris la Place. L'une de
ces Vallées entre le Nord k
l'Est, estarrosée par TEfle*,
petite Riviere sans commerce
qui vient du cofté du Sud
d'Erfche Bourgade„& qui va
se rendre dans la Moselle aprés
s'estre jointe au Sours
&. àSclbourgversVasbilingrr
L'autre est remplie vers le
Sud-Est de quelques petits
Ruisseaux de Ravines. Il se
trouve pourtant entre l'Esse
une langue de terre où cft la
Porte dé Trêves
,
& une autre
langue plus spacieuse occu\.
pée parunFort nommé du
Saint Espritque l'on a fortifié
depuis que le Roy a coiv
quisla Place. Elle estdiviséce
en haute, & en basse Ville,
La haute cft l'ancien Luxembourg
,reparé,&fortifié dt
nouveau. On afaitune Porter
neuve qu'on appelle de France
vers Nostre-Dame de
Consolation, & l'on a pouse
le Bastion de Chimay,jus
ques au delà de l'Insulte. La
baffe-Ville est composée de
deux Fauxbourgs, rendus c-e*
lebres par le dernier Siege.
L'un est nommé le Passendal.,
arrosé par le principal Canal
del'Effe. L'autre est le Minstier
ou le Grompt mouille
aussi par un bras de l'Effe. Entre
ces deux Fauxbourgs
?
est
la Porte de Treves
?
& une.
Plate-forme au dessousquon
appelloit le Pasté. A l'extremité
du Minfter vers la droite
est le nouveau fort du Saint
Esprit. Mr de Montaigu a
levé avec du carton le Plan
de cette formidable Place,
où Ion en remarque aisément
toutes les beautez, avec toutes
les augmentations que le
Roy y a faites. Toute l'Allemagnea
esté surprise de voir
avec quelle promptitude on
en a reparé les brèches &
avec quelle facilite sans avoir
égard à la dépense on a aug.;
mente cette Ville de plus de
deux tiers, afin d'occuper
tout le terrain qui sembloit
estre favorable pour en approcher.
Aprés vous avoir fait voir
la situation de It Place, il faut
que je vous trace icy le Plan
de ses Fottifications. L'entreprise
est hardie, & un terme
mis au lieu d'un autre, peut
répandre de l'obscurité dans
ce que je vous diray les descriptionsde
cette nature,quelques
ques claires quelles soient,
n'eitant qu'à peine intelligibles
pour ceux qui ne sont pas
dumestier.Joignez à cela que
je puis expliquer mal des cho-
[es, dont je n'ay pas toutes
les lumieres necessaires? pour
estreafleuré que je ne me
trompe point. Cependant je
fuis persuadé que quelques
fautes que je puissefaire
, &:
que j'aye peutestre mcfme
déjà faites depuis que j'ay
commencé à vous parler de
Fortifications dans cette Ler
tre, ce que je vous en ay dit,l
& ce qui me reste à vous expliquer
) ne laissera pas de
donner de hautes idées de la
puissance du Roy? & de la
force de Luxembourg.
L'ancienne Ville qui est
toute sur un terrain élevé
cil: un Heptagone ayant un
Bastion coupé par le deffaut
duterrain de Paffendal. Elle
a trois portes ; l'une vers le
Couchant) c'est celle de France;
l'autre au Nord? c'est celle
de Passendal; la troisiéme;
vers l'Orient, c'est celle de
Trêves, & une quatrième
pour les sorties regardant le
Midy. La premiere & la derniere
sont dans la haute Ville
bien flanquées de bons basions?
& de dix Redoutes,
soutenuës de bons Cavaliers,
où l'on mettra quarante pièces
de Canon. On peut voir
dans la premiere porte quelle
supercherie peuvent faire
ceux qui se desfendent dans
leurs maisons. La premiere
entrée prise , il ne faut aller
que pied à pied à la seconde;
& la troisiéme est encore
mieux gardée que les prémieres.
Les Redoutes sont
portées aux endroits les plus
soibles des Courtines pour
deffendre le chemin couvert,
& pour commander sur toute
l'Esplanade;elles font élevées
jusques au cordon pour répondre
au rez de chauffée, &
pour raser l'Esplanade. Au
dc!fij.S est une Plate-forme
avec un Parapet dont on se
sert jusqu'à ce que le Ganofll
l'ait renversé ; on se retire au
dessous où sont des Sarbacanes
pour tirer sur le chemin
couvert & dans le glacis. Dela
on a encore un étage en
- terre d'où l'on se peut desfendre
long- temps , &quand
on est poursuivy par les Galeries,
on a clei portes avec
du Canon de Campagne. Si
les Ennemis vouloient establir
un logement autour de
ces Redoutes, il y a des Mines
& des contre-mines toutes
disposées pour empescher les
Travailleurs d'avancer leurs
ouvtages. Les Fourneaux sont
si bien menagez qu'ils ne
peuvent manquer leur coup.
On a fait deux demy
-
Lunes
dans cette ancienne enceinte..
Le Bastion de Chimay? qui
est à l'extremité du Roc, &
qui commande sur la Porte
de Paffendal, est soûtenu par
deux autres Bastions avancez
le long de cette cime,qu'on
peut appeller une Demy-lune
1-
& une autre Contre-garde,
ce qui semble estre hors.
d'insulte> parce qu'on a fait
la dépense de railler dans le
roc,&qu'on s'est attache à
le rendre inaccessible; &
comme la Riviere qui passe
au dessous de la Porte, a une
hauteur dans son bord opposé
qui commande la Ville
>
car ce fut là qu'an mit une
Batterie pendant le dernier
Siege, pour ruiner jePalais
du Gouverneur; son Badion,
& la Porte,lePvoy a fait faire
sur la cime de cette hauteur
deux Ouvrages à o cornes
qui renferment tout l'espace
par où l'on avoit à craindra
Une Ligne de communication
prend de l'extrémité de
la Contre-garde du Bastion
de Chimay, descend par la
Porte de Passendal dans la
Riviere, & va joindre ces Ouvrages
, qui sont faits avec
toute l'industrie de l'At[,.
pour batere la Plaine d'audelà,
pour commander sur le
vallon où coule l'Effe,& pour
désendre le Chemin couvert
de la Contre-garde du Baftion
de Chimay;&afin qu'on
ne prenne pas ces O1uvrages par le vallon., Sa Majesté qui
voit tout avec des liimieres
qui necedenten rien àcelle5
de les Ineenieurs? a ordonné
deux Reodoutes au dessous,
prés de la Rivière. Ainsi le
Fauxbourg du Paffendal qui
est sur l'eau, fera défendu 8c
couvert de toutes parts. On
y fait un Hôpital, & il y aura
des Cazernes, & des Magasins
comme dans la Ville.
Il est fermé à la droite par
une autre Ligne de communication
semblable à la premiere,
qui joint le sécond
Ouvrage à la Porte de Trêves,
qui se trouve à l'extremité
d'une languete prise
dans le roc qu'on a percé en
deux endroîts, pour faire
passèr les chariots, & les
Troupes du Paffendal au
Minfier, sans monter dans
la. Ville. Le Minsterest aufll
défendu par cette Porte, ôc.
par le Fort du Saint Esprit,
qui a quatre Bastions coustruits
sur une petite éminence
qui commandoit dans
le Fauxbourg. Ces quatreBastions
sont soutenus de Demy-
lunes) de Contre-gardes,
& de Redoutes, qui battent
toute une campagne qui regne
au delà. Voilà les Ouvrages
qui se trouvent dans
les Dehors de Luxembourg,
&: qui font environ onze Bastions,
quinze Redoutes, deux
Ouvrages à corne,un troisiéme
qu'on y ajoûte prés de la.
Porte des Sorties, quatre:
Demy-lunes, trois Contregardes,&
cinq ou six Cavaliers.
Tous ces Travaux n'ont
pas moins surpris la Cour,
qu'ils ont étonné tous les
Etrangers qui les ont vûs.)
car cette Place qui tiroit de
la France deux millions de
contributions
, pourroit en
temps de Guerre en tirer bien
davanrage, & faire contribuer
juseqz ues à Mayence? à
Cologne, à Rez, au Fort de
Skin,à Namur& à beaucoup
d'autres endroits, ce qui ne
seroit pas difficile à une Garnson
de sept ou huit mille
hommes. Je ne vous diray
point à combien de millions
a monté la dépense des Fortifications
de cette Place,
chacun en parle diversement
&met le prix aux Ouvrages
de cette nature, suivant Tétonnement
qu'ils luy eaufent.
Ainfiil n'est pas facile
de parler d'une dépense?
quand elle se monte à plusieurs
millions. Tout ce que
je puisvous dire, c'est que le
Roy ne cherchant que l'entiere
perfection dans tout ce
qu'il fait faire, il y a encore
de nouveaux fonds destinez
pour travailler à cette Place,
quoy qu'il paroisse qu'on ne
puisse rien ajoûter à ces Fortifications
;mais le Roy a des
yeux& deslumieres dont on
ne sçauroit trop admirer la
pénétration. Je ne dois pas
oublier que la petite Chapelle
de Nostre - Dame des
Consolation dont je vous ay
déjà parlé dans ma Relation
duSiege, est restée en son
entier, les Assiegez, & les
Assiegeans l'ayant épargnée.
Toute
-
la Province y court
avec la mesme devotion
qu'on va à Nostre-Dame de
Liesse en France.
Il faudrait pour se bien representerl'aspect
de cette
Place, avoir vû les deux Tableaux
que Mr de Vandermeulen
enafaits pour le Roy.
Ils sont à Marly, & ont chacun
onze pieds de longueur.
Ils representent deux faces dô
laPlaec, de sesFortifications,
& de ses avenuës; mais avec
une telle regularité, que ceux
qui ont veu ces Tableaux ne
sçauroient se souvenir de la
moindre chose,qu'ils ne lareconnoissentaussi-
tost dans
l'unou dans l'autre. Ces Tableaux
sont gravez avec les
Estampes de Mrde Vandermeulen
dont je vous ay déjà
parlé, qui represententtoutes
les Conquestes du Roy de la
mesme maniere. Ainsi si la
description que je viens de
faire de cette Place, excite en
vous ou en vos Amis, la curiosité
de la voir d'un coup
d'ecil, vous pouvez avoir recours
à ces Estampes, qui sont
recherchées dans toutes les
parties du monde.
Le Roy ayant resolu de ne
demeurer que deux jours àLuxembourg
; monta à cheval
aussitost qu'il y fut arrivé, &
en allavisiter les Dehors. Mr
de Louvois qui estoit de retour
depuis un jour de son
Voyage d'Alsace,&MdeVauban
, qui sont les deux personnes
qui pouvoient rendre
un compte exact à Sa Majesté
des Fortifications de cette
Place, & sur tout de celles
qui ont esté faites nouvellement
par son ordre, l'accompagnerentpar
tout. Elle vit
les attaques de ses Troupes
pendant le Siege, &: trouva
de nouveaux sujets de loüanges,
pour tous ceux qui avoientcontribué
à cette conqueste,
M le Comte de Blanchefort
s'eilant trouvé auprés
du Roy, ce Prince toûjours
plein de reconnoissance
& de bonté pour toutes les
personnes qui ont du merite,
témoigna le regret qu'il avoir
de la mort de Mr le Maréchal
de Crequi son Pere,
qui avoit fait le Siegede Luxembourg;
ce qui parut toucher
fort sensiblemenr Mr
le Comte de Blanchcfort,
& renouveller dans son
coeur le dcfir qu'il a de sui
vre ses traces, &- d'imiter sur
tout sa prudence? & sa fidelité
pour le Roy.
, Le 22. Sa Majesté donna
audience à Mrle Baron d'Ingelheim,
Envoyé
-
extraordinaire
de Mrl'Electeur de
Mayence; à Mr le Baron
d'Elts, Envoyé extraordinaire
de M l'Electeur de Tréves,
& à Mrle Comte de
Chellart, Envoyé extraordinaire
de Mr le Prince Electoral
Palatin, Duc de Juliers.
Ils estoienr venus faire compliment
à Sa Majesté de la
part des Princes leurs MaiRreS)
sur son heureuse arrivée
àLuxembourg. Ces Envoyez
eurent aussi audience
de Monseigneur, où ils furent
conduits par MrdeBonneüil
,
Introducteur des Ambassadeurs,
qui les avoit menez
chez le Roy? & les avoir
esté prendre dans les Carosses
de Sa Majesté. Ils firent
present au Roy dela part des
Princes leurs Maistres
,
de
plusieurs tonneaux de vin
du Rhin, & de vin de Moselle>
que Sa Majestéreceutavec
les manieres honnestes
qui luy sont si ordinaires, &.
pour marquer que ces Presens
luyestoient agreables
de la part dont ils venoient,
Sa Majesté voulut qu'ils fussent
conduits à Versailles par
les mesmesVoituriers qui les
avoient amenez; & les Envoyez,
suivant les ordres qu'iL
luy avoir pieu d'en donner,
furent regalez splendidement,
avec toute leur suite,par
lessoins de Mr Delrieu, Contrôleur
ordinaire dela Maifondu
Roy, qui n'oublia rien
en cette rencontre de tout
ce qu'il crut devoir faire
pour leur satisfaction, &qui
entra parfaitement bien dans
leurs manieres,
Quoy que le Palais où logeoit
le Roy sust fort spacieux,
il estoit neanmoins
impossible que tous ceux qui
estoientpressez de l'impatience
de le voir? y pussent
entrer; ainsi ce Prince eut la
bonté de sortir plusieurs fois
à cheval? & d'aller mesme
doucement, afin de satisfaire
ceux qui ne respiroient qu'aprés
sa veuë. Il alla à la Metre
aux Jesuites;& plusieurs personnes
qui jusques alors ne l'avoient
admiré que par la quantité
surprenante des grandes
choses qu'il a faites,& qui n'avoient
jamais eu le plaisir de
levoir,l'admirerent ce jour-là
par sa bonne mine, & par un
air qui perfuaderoit à ceux qui
ne sçauroient pas tout ce qu'il
a fait de grand, que tout ce
qu'on leur en diroit feroit - veritable,
véritable. Le Roy estant forty
dela Messe,vit le plan de
Luxembourg, qui estoit dans
une maisonproche de l'Eglise
des Jesuites, Il monta à
cheval l'aprésdînée, & descendit
dansles Mines;il voulutvoiraussi
les Contre-mines.
Il visita les Fossez, & se
promena sur les Ramparts.
Pendant tout ce temps il s'entretint
des beautez de cette
Place avec Monsieur le Printce,
qui fit voir la parfaite
connoissance qu'il a de tout
ce qui regarde la Guerre, &
quelle est telle qu'onladoit
attendre du Fils d'un Prince
qui auroit pu apprendre ce
grand Art à toute la terre ,
si on l'avoit ignoré. Monsieur
le Duc, Monsieur le
Prince de Conty
,
& Monsieur
le Duc du Maine su.
rent aussi de la conversation,
& firent voir qu'il est des
sciences pour lesquelles les
Princes ne sont jamais jeunes
&qu'ils semblent avoir aj>„
prises en naissant.
Le mal de Mrle Comte de
Toulouse, qui avoit esté attaqué
le jour precedent d'un
mal de teste
)
& d'un mal de
gorge, continua,& la Rougeole
s'estant declarée, le
Roy resolut de sejourner
deux jours de plus à Luxembourg
, non pas pour y attendre
la parfaite guerison dô
ce Prince, laquelle ne pourvoit
arriver si-tost, mais afin
de voir quel pourroit estre le
cours de son mal. On mir:
auprés de luyMrduChesne
Medecin?MrduTertre, Chirurgien
de Monsieur le Prince,
avec un Apoticaire de Sa
Majesté. Le bruit s'estant répanduque
le retour delaCour
estoit reculé, quelques Etrangers
en parurentinquiets,mais
ils furent rassurez si-tostqu'ils
firent reflexion que le Roy
avoit toujours gardé inviolablement
sa parole;qu'il aimait
Monsieur le Comte de
Toulouseavec tendresse; que
ce jeune Prince estoit chery
<dc toute la Cour, & quainsî
l'incertitude du mal qui luy
pouvoit arriver, estoit la
vraye cause qui portoit le
Roy à retarder son depart.
La Rougeole deMonsieur le
Comte de Toulouse, ne fut
pas la premiere qui parut
à la Cour. Une des Filles
d'honneur de Madame la
Princesse de Conty en avoit
déja esté attaquée. Il yavoit
euaussi d'autres Malades; &
la Gouvernante des Filles
d'honneur de Madame Il
Duchesseavoit eu la Fiévre.
La maladie de ce Prince contribua
à l'indisposition d'une
Dame d'un tres-grand meri-
&
re. Elle fut saignée, & son
mal se passa.
Le 13. Mrle Comte Ferdinand
de Furstemberg, & Mr
Ducker, Envoyez extraordinaires
de Cologne
, eurent
aussi Audience du Roy, &
de Monseigneur le Dauphin.
Ils y furent conduits par Mr
de Boneüil avec les mesmes
ceremonies que l'avoientesté
les autres Envoyez,& traitez
demesme.Mr le Cardinal
LangravedeEurftcmberg
faluaaussileRoyavecdeux
de ses Neveux.M le Comte
d'Avaux, Ambassadeur dfe
France auprès des EtatsGéneraux
dès- Provinces unies
s'estant rendu de la Haye à
Luxembourg, y salüa Sa Majesté,
& receut d'Elle de nouvelles
instructions touchant
les negociations ordinaires de
son Ambassade.Lorsqu'il prit
congé du Roy,ce Prince luy
dit qu'ilcontinuastàle servir
de la mesme sorte,& qu'il seroit
content. Cela fit assez
connoistre que Sa Majesté
estoit satisfaite de ses services
passez. Mr Foucher, Envoyé
extraordinaire des Etats Géneraux
auprèsdel'Electeur
de Mayence , eut aussi l'honneur
de salüer ce Monarque.
LeRoy entendit ce jour là la
Messeaux Recolets. & vit enfuite
dans ure Chambre du
Convent le Plan de Trarback
levé par Mr de Montaigu.Je
vous parleray de ce Plan dans
la fuite de ma Lettre. SaMajesté
alla l'apresdinée à la
teste des Tranchées, & des
Lignes, & en examinant la
Place, Elle previt tout ce qui
pourvoit arriver, si on osoit
un jour entreprendre de l'assieger.
Elle fit le mesme jour
la Reveuë des Troupes de la
Garnison, quiconsistoient en
cinq gros Bataillons, & en
plusieurs Escadrons.
Le 14. le Roy entendit la
Messe à la Paroisse, & tint
Conseil le matin & l'apresdînée,
ayant pendanttoutle
temps qu'il a demeuré à Luxembourg
,donné cinq à six
heures par jour, pour tousles
Conseils qu'il y a tenus; de
forte, que le temps qu'il employoit
à voir des Fortifications
& à faire des
-
Reveuës,
estoit celuy qu'il prenoit
pour donner relâche à fan
esprit. Ainsi l'on peut dire
que l'esprit ne commençait
à se reposer que pour donner
lieu au corps d'agir. Pendant
que le Roy n'eliok occupé
que des soins de son
Etat sans se donner un seul
moment de relache
,
la Cour
se partageoit, pour se divertir
selon son goust. Les uns
se
-
promenoient ,
les autres
joüoient , & quelques autres
se rafraîchissoient chez Mrde
Bouflers.Je ne vous diray
point que durant tout le sejour
- que Sa Majesté a fait
dans cette Place, ce Marquis
a tenu plusieurs Tables chaque
jour, tant le soirquele
matin,à un fart grand nombre
de couverts; ce seroitdire
trop peu,puisque non seulement,
tousceux qui ont voulu
manger chez luy y ont
trouvé a toute heure tout ce
qu'ils ont souhaité, mais
qu'on n'a mesme rien refusé
f aucun de ceux qui en ont
envoyé chercher. Commejamais
homme ne fut plus genereux
> jamais dépense n'a
esté faite de meilleure grace.
Mr deBouslers apprehendoit
si fort de n'estre pas à Luxembourgpour
la faire
a.
qu'ilfol^
licita pour n'aller au Camp
qu'ildevoitcommander,qu'aprés
que Sa Majesté seroit
partie. Le Roy qui sçait distinguerladépense
qui n'est
pas interessée,luy a fait un
Present de trois mille Loüis.
Le z5. SaMajesté entendit
encore la Messe aux Jesuites.
Elle se promena de nouveau
à cheval dans les Fossez
) & à
pied sur les Ramparts. Plus
Elle a regardé la Place avec
application,&enaexaminé
les nouvelles Fortifications,
plus Elle en a esté satisfaite ;
8c comme on ne luy rend
point de grands services sans
recevoir des marques de sa libéralité,
par dessus les recompenses
ordinaires, Elle donna
douze mille écus à Mr de
Vauba n.Toutes les Relations
conviennent qu'Elle luy fit
ce Present d'une maniere si
obligeante, que plusieurs
souhaiteroient enavoir acheté
un semblable de beaucoup
plus, & l'avoir receu
Qvec le mesme agrément. JLf
Royafait aussi des Presens
dans toutes les Eglises où il a
esté. Il donnoit une somme
pour les Ornemens. Cette
somme estoit suivie d'une autre
pour les Pauvres, & ces
deux d'une troisiéme, ou de
quelques graces dont il de":
voit revenir de l'argent pour
l'embellissement des lieux. Sa
Majesté n'ayant point mené
de Musique auVoyage )l'un
de ses Musiçiens nommé Mr
de Ville, qui est Chanoine
de Mets> y prit quelques lastrumens,
& quelques voix ,
& fit chanter dans les Eglises
où le Roy entendit la Messe
à Luxembourg, les Motets de
Mrs du Mont, Robert, &
Minoret. Sa Majesté le recompensa
de ses soins, de son
zele, & de sa dépense. Comme
l'argent n'est pas toûjours
ce qui touche davantage,quelques
charmes qu'il ait pour
tout le monde, par l'indispensable
necessité où chacun
cil d'en avoir, le Roy fïr
ouvrir les Prisons à soixante
&dix Malheureux, qui aimerent
encore mieux la liberté
que toute forte de biens;mais
ce Prince ne leur accorda des
graces que selon le genre des
crimes,ne voulant pas que sa
clemence servist à en faire
commettre de nouveaux, à
ceux qui en avoient fait d'enormes,
& que l'on jugeoit
capables d'y retomber,ce que
Mr l'Evesque d'Orléans, Mr
l'Abbé de Brou
,
nommé à
l'Evesché d'Amiens, Mes,
les Abbez de la Salle «
Fleury,& Mrde Noyon Lieu-»
tenant de Mr le Grand Prevost,
ont examiné par l'ordre
du Roy.
Le26.les uns ne songerent
qu'à partir, & les autres s'affligerent
du départ. LaCour
en voyant les Fortifications
de la place, avoir pris un
grand plaisir à se mettre devant
les yeux tout ce qui s'estoit
passé pendant le Siege-
Elle avoit examiné les Attaques&
les Tranchées) admiré
la conduite du General
)
l'intrepidité
des Soldats, le ge.
nie & l'adresse de M'de Vauban
à conserver les Aillegeans;
car le Roy sçachant
l'humeur boüillante des François
, & leur zele pour son
service
, avoit expressément
ordonné à feu Mr le Maréchal
de Crequi, & à Mrde
Vauban,d'épargner les Troupes,
& de prolonger la durée
du Siege,plûtost que de
hazarder le sang des Soldats.
Ce Prince avoit pris ses mesures
pour cela, Il estoit à la
teste d'une Armée pour em-"
pêcher lesecours,&prest à
donner bataille à ceux qui
auroient voulu le tenter.
Lors que la Cour partoit
satisfaite, & toute pleine de
ce qu'elle avoit veu, elle partoit
avec son Prince, & le
devoit toûjours voir; mais
ceuxàqui il ne s'stoit montre
que pour gagner leur
amour,& ensuite les priver
de sa presence,avoient beaucoup
de cbagrin de son départ.
Ce Prince avoit paru
à Luxembourg plûtost enPere
qu'en Roy. Sa douceur & sa
bonté s'estoient fait connoître.
Il s'estoitmontré familier
sans descendre de son
rang; on avoir eu un libre
accés auprés de luy ; ceux qui
luy avoient presenté des Requestes
avoient esté écoutez,
& la pluspart avoient obtenu
les graces qu'ils avoient demandées
;les Prisons avoient
esté ouvertes;laNoblesseavoit
eu un libre accès jusque dans
saChambre ;il avoit permis
plusieurs fois au Peuple de le
voir dîner , ce qu'il avoit
refusé dans les autres Villes,
à cause de la chaleur; ils
avoient admiré la devotion
de Sa Majesté, & la pieté que
son exemple inspire à toute
sa Cour; il avoit fait de
grands dons dans la Ville;
les dépenses ordinaires de là
Cpur y avoient répandu
beaucoup d'argent,ainsi que
le Etrangers que l'envie de
voir ce Prince avoit fait venir
en fort grandnombre; L*
Noblesse avoit esté receuë
aux Tables de la Maison du
Roy,&les Etrangers de distinctionqui
n'estoient pas
venus avec les Envoyez des
Princes Souverains des environs
, y avoient aussimangé;
enfin tout concouroit à faire
aimer, & regreter ce Grand
Prince. Il partit le 26. aprés
avoir entendu la Méfie aux
Capucins,& alla dîner à un
lieu nommé Cherasse.
J'aurois pu vous parler plûtost
du Voyage dont Mr de
Louvois rendit compte ait
Roy à Luxembourg
, mais je
n'ay pas voulu interrompre
la fuite de la Relation que
j'avois à vous faire de ce qui
s'y est passé.CezeléMinistre
partit de Versaillesle30. d'Avril,
passa à Tonnerre & à
Ancy-le-franc,&après avoir
vû les Fortifications de Besançon
, les Troupes, & les
Cadets, il se rendit le 5. de
May après midy à Befort.
C'est la Capitale du Comté
de Ferrette, située dans le
Sunggovv bb 1
Sunggovv,écheuë au Roy
avec l'Alsace par le Traité
de Munster. Mr le Marquis
dela Suze en a esté longtemps
possesseur, par engagement,
ou autrement. Mrle
<C? ardinalMazarinpossedaenfuite
ce Comté, & Mrle Duc
Mazarin, qui luy a succedé,
en jouitpresentement. La
Ville estassez belle. Il y a
un Chasteau, où l'on a fait
quatre Bastions. Mr de Saint
Justest Gouverneur de cette
Ville
>
où Mr de Dampierre,
Lieutenant de Roy, commande
c-iifôn absence. M" de
Louvois visita la Place, les
Troupes, & les nouveaux
Travaux, qu'il trouva en bon
'estât. Ce Ministre coucha
le 6. à Dainm-arie Village
d'Alsace. Il se rendit le 7. à
Huningue. C'est une Place
quiestfort proche de BaDe,
ÔZ qu'on a nouvellement
fortifiée de six Bastions sur
le Rhin ; on y a aussi fait
- des Dehors? & un Pont
ik bois fut le Rhin avec
quelques Ouvrages au bout
pour en fortifierla teste.
Cette Place rend la France
fort puissante sur le Rhin.
Elle est dans l'Alsace. Mrle
Marquis de Puisieux en est
Gouverneur, & Mr de la Sabliere
, Lieutenant de Roy-
Mrde Louvois en examina les
Fortifications,& fit faire reveuë
aux Troupes qui y et;
toient e& Garnison. Le 8. il
coucha à Fribourg, Capitale
c- duBrifgaw
,
située sur la petite
Rivière deTreiseim,i
bout d'une Plaine fertile, &
sous une hauteur qui cft le
commencement de laForest
loire. Elle est grande, bien
)euprlee.&: a diverfcsEcrllfcs,
&: plusieursMaisons Rcligieuses.
Le Chapitre de Basle
y fait sa residence, quoy que
l'Evesque ne l'y faire pas. Il la
fait à' Potentru, depuis que
les Protestans ont esté Maistres
de Basle. Il y a une Chambre
Souveraine à Fribourg,
& une celebre Université,
qu'Albert VI. dit le Debonnaire
,y fonda en 1450. Les
Ducs de Zeringuen ont possedé
autrefois cette Ville; qui
passa dans la Maisonde FULstemberg,
par le mariage d'Agnes
avec le Comte Hugue
ou Egon, dont les Descendans
l'ont gardée jusque
vers l'an 1386. après quoy les
Bourgeois s'estant mutinez,
se donnerent aux Ducs d'Austriche.
Elle fut prise trois
fois en six ans par les Suédois;
sçavoir en 1632.. en 1634. ôc
en 1638. Son nom s'est rendu
fameux dans toute leuropc,
par la celebre Victoire que
feu Monsieur le Prince, qui
n'estoit alors que Duc d'Anguien,
remporta en 1644. sur
les Troupes Bavaroises, aprés
un Combat sanglant & opïniastré
qui dura trois jours,
pour les postes difputcz de
la Montagne-noire., à une
lieuë de Fribourg. Ces trois
jours furent le 3. le 4. & le 5.
du mois d'Aoust. Feu M le
Maréchal de CrequLqui commandoit
une des Armées,du
Ro.yj.piMt cette Villele17.
Noyen).bre1677.aprèsun Sijer
gaevdoeisteapltorosuckhuuxitmjouurrasi.llIelsy»
uneCitadelle
à quatre Ri-
(rions, dç bons FolLz? o~
quelques autres Ouvrages.
Depuis ce temps-làles François
l'ont fortifiée plus regulierement.
La Rivière- du.
Trcifeim, qui n'est jamais
glacée? nettoye toutes les
rues. On a ajoutéquelques
Bastions aux anciennes muraillesde,
laVille,& les Fortifications
du Chasteau ont
este augmentées. On les a
étendues sur toute la hauteur.
C'est un chef-d'oeuvre de Mr
de Vauban. On yaaussi bâty
d'autres Forts qui commandent
à deux vallées. Les
Archiducs d'Autriche y avoient
étably une Chancelleric.
Il y a quatorze Mona.
stercs à Fribourg, & des Maisons
de trois Ordres de Chevalerie.
Mr du Fay en est
Gouverneur, Mr Barrege.
Lieutenant de Roy, & Mr
Roais commande dans leChasteau,
Mr de Louvois dîna le
,. à Brissac,&vit la Place
&les Troupes.Cest une Ville
d'Alsacedans le Brisgavv qui
donne un passage sur le
Rhin. Elle fut prise en 1638-
par Bernard de Saxe, Duc de
Vveimar, General de l'Armée
de Suede? avec le secours des
Troupes Françoises que conduisoit
le Maréchal de Guebriant.
On y trouva plus de
deux censpieces de Canon)
avec degrandesrichesse -y,
l'annéesuivante le Duc at
Vveimar estant malade à.
Nevvembourg prés de Irifac?
le mesme Maréchal de Guebriànts'aflxiraaumoia.
deJ all--
kx de cetteimportante- rl -
ce-,ôc des autres qui fuienc re-r
mises au Roy j&r TwtÇ du
9.Octobre de lamesme aPT
née.Elles surent cedées à Sll
Majesté en 1648. par leTraité
de Vvestphalie
, ce qui, fJu;
confirmé en 1^59<parcehijfr
des Pyrénées,Brisaa,que
quelques-uns juçmmenp la
Citadelle de l'Alsace, &d'autres,
laClef de l' Allemagne,
passè aujourd huy pour une
des plus fortes Places del Eu-
-
rape, soit qu'onregarde sa
situation sur un Mont,soit
qu'on examine ce eue l'arta
ccoonnctrriibbuuééaà la rreennddrree rrce~guu--
liere. Elle est sur le bord du
Rhin qu'elle commande,
C'estoit autrefois la Capitale
duBrisgavv, qui areceuson
nom d'elle, mais Fribourg
l'a emportédepuis quelque
temps. Il y a aujourd'hui
double Ville,car outre cellequi
estoit audelà du Rhin,
onafortifié une lac, qui est
presentement habitée, avec
grand nombre de Bastions.
Ilya aussi des Fortifications
en deçà du Rhin? & toutes
ensemble elles peuvent faire
environ trente Bastions. On
travaille incessamment à cette
Place, que l'on peut dire
imprenable. Il y a dans Brisac
une Compagnie de jeunes
Gentilshommes. Mr le Duc
Mazarin en est Gouverneur
Mr de la Chetardie y commande
en sa place,& Mr de
Farges y est Lieurcnant de
Roy. (
Mr deLouvois vit lemesme
jour p. d'Avril, les Fortifications
de Schleftadt. &
les Troupes qui y font en
Garnison.C'est une Place située
dans l'Alsace sur la Riviere
d'Ill qui porte Bateaux.
Elle estoit autrefois fortifiée
de bonnes murailles & de
fortes Tours, avec un Rempart,
& des Fossez très-larges
&fort profonds. On y a fait
des Battions depuis ce temps,
là. C'est une Place fort considerable
,
où l'on fait un
grand trafic. CetteVilles''est
toujours maintenue Catholique
au milreu de i'Heresie,
& il y a un College de Jesuites.
Mrde Gondreville en,est
Gouverneur, & Mrde la Provenchere,
Lieutenantde Roy.
Le 10. Mr de Louvois allacoucher
à Benfeld,petite "-il.
le de la baffe Alsace
,
assezforte,
&: des mieux entenduës..
Elle, dépend de Strasbourg-
,
dont elle n'estéloignée que
de trois lieues. Elle est sur
la Riviere d'Ill. Mr de Louvois
dîna le 10. à Strasbourg
)
ôc y sejourna le n. vit la Ville,
la Citadelle, les Forts, &
les Troupes. Mr de Chamil-
.Iy) si célébré par la défense
de Grave. en est Gouverneur.
Mr de Louvois logea chez Mr
de Monclar, qui commande
-
en Alsace. Je ne vous dis rien
de Strasbourg, comme je ne
Vous ay rien dit de Besançon,
parce que ces Places sont entièrement
connues. Ainsi je
ne vous ay parlé que de cellies
dont j'ay cru pouvoir
vous apprendre quelques particularitez
quine se trouvent
dans aucun Ouvrage imprimé.
Le 12. Mrde Louvois dîna
au Fort Louis du Rhin.
C'est un Fort qui a este construit
dans une Isle du haut
Rhin, huit licuës au dessous
de Strasboug, & autant,au
dessus de Philisbourg. Ce poste
estoit presque inconnu.
Toute l'Isle qui est au Roy,
estant dans l'Alsace qui ap.
partient à Sa Majesté
,
doit
estre fortifiée. Il doit y avoir
plusieursBastions, & des
Ponts avec des Fortifications
à la teste. Mr de Bregy est
Gouverneur de cette Place.
Mr de Louvois aprèsavoirs
examiné l'estat de ce Fort
allalemême jour coucher à
Haguenau. C'est une Ville
fort marchande en A lsace,située
entre les rivieres de Meter
& de Sorn.On gardoit autrefois
dans cette Ville-là,
la Couronne,le Sceptre, la
Pomme d'Or, & l'Epée de
Charlemagne avec les autres
ornemens Impériaux. C'est le
Siege du Bailly du Langraviat
d'Alsace. Mr de Louvois
coucha le 13. à Britche, où il
visita les troupes & la Place.
Cette Ville qui a un Châteauassez
considerable, est
dans la nouvelle Province
de la Sare. Mr de Morton
en est Gouverneur, & Mr de
laGuierleLieutenant deRoy. |
3MVT de LLoouuvvooiiss, aapprrèèss aavvooiirr
Nifité lesFortifications & les
groupes> alla dînerle14. à goù il-ne la même.
choseavec unepareille
activité.Hombourgeft assez
considerab- eoniiderable>&:estauasusmi dans la Provence de laSarre. M1
lç Marquisde laBretesche
qui commande dans cette
Province,en est Gouverneur,
& ^lr de la Gardette y
commande
en son ablençe,
M de Louvois alla ce jourlacouch
r à.jatrpctip Village
de la Province de la Sare qui
se nomme Cucelle &le1/
il passaàKirnoù il difha
en visita le Chasteau. Il cb.,.-
chaleITlefmejourlTraDeri
proche Trarback, & visita
la Presque-Isle de Traben, oi|
l'on va bastir une Placequi
s'appellera Mont-Royal. Cette
Place dont on n'a oiïy parler
qu'en apprenant qu'on y
travailloit
)
fait aujourd'huy
l'entretiende toute l'Europe,
le Roy n'entreprenant
rien qui ne soitassez grand
pour servir de conversation
au monde entier.Quoyqu'on
parle beaucoup d'une chose
ce n'est pas à dire qu'on en
partetoujours jùftc
) & il est
mesme presqueimpossible
:quton puissefejavoir au vray
toutes les pârticularitez d'une
entreprise
?
dont a peine,
at-on appris qu'on a forme,
le dessein. Tout ce que je
puis vous dire de celle-cy,
c'est que j'ay ramassé avec
grand foin* beaucoup de circonstances
qui la regardent*
&: que quandil y en aur,Qi,t;
quelques-unes qui ne feroient
pas toux à fjut vrayes;
je ne laiffer4 pas, 4c ycxuj
apprendre plusieurrs çbofcî
qu'on ne peut encore vous avoir
dites. Le Roy voulant
couvrir Luxembourg en 3
J - s cherché -lps tnoyeps ?
& lesa
trouvez danssesterresen.déT
couvrant un lieu. propre à
fairebastiruneVille. Ce lien,
se nomme Traben, & pour
parler à lamaniéré du Païs,
il eit à trente heures dç-Liirxembourg,
à douze de Tre"
ves, &à six de Coblens. Je
ne me puis tromper de beaucoup
sur le plus ou sur le
moins) & l'espace que je vous
marque) vous doit donner à
peu prés l'idée de l'éloignément
où ces Places peuvent
cftre les unes des autres. Tra.
ben est à la teste de Luxembourg.
On dit que Cesar y a
Autrefois campé, & qu'il y a
des vestiges d'une espece de
Fossé que l'on pretend avoir
autrefois fermé son Camp,
La Nature semble avoir faifre
ce lieu-là afin que le Roy le
fin: servir à sa gloire. Il n'a
que huit toises de largeur à
son entrée, que l'on dit estre
une escarpe& un rocher inaccessible.
La Moselle, qui n'eâ
point guéable en ces quartiers-
là ,envelope lereste de
son enceinte. L'entrée du
terrein elt occupée par un
plan deSapinsqu'onfaitjetter
à bas pour servir à cette
entreprise. La terre qui rcftc
lontient un des meilleurs
plans
plans de vignes de tout lePaïs,
& quelques champs qui rapportent
de tres-beaux grains,
&l'on trouve outre celaassez
de vin &de grain dans l'étendue
de cette presqu'Isle pour
nourrir une Garnison de trois
ou quatre mille hommes, Les
costes qui regnent vis-à-vis
le long dela Riviere,ne commanderont
point la Place, &
comme on ne pourra l'attaquer
que par le terrain que je
viens de vous marquer, il est
aise delarendre imprenable.
Il ya quatre Villagessur Iesr
crestes de ces costes dont on
pourra tirer de grands secours
pour les premiers Travaux,
L'extremité du plan de lapins
est une grosse source, qui se
trouvera dans lesFossez de la
Place, & qui fournira de
l'eau à la Ville. Elle aura
plusieurs Bastions
>
& fera
touteirreguliere, & tracée
sur la longueur, & la largeur
du terrain. Il y aura autour
de lapresqu'IsledesRedoutes
d'espace en espace
) pour dé-«-
fendre le passage de la Riviere.
Cequ'ilyade surprenant,
]
c'est qu'on peut dire que ce
que le Roy rcfout,est à demy
fait presqu'au moment
qu'il est resolu, au lieu que
pour l'ordinaire les grands
desseins demeurent au seul
projet. A peine eut-on plante
les piquets) que les Baraques
pour leslogemens des Soldats
le trouvèrent faites. Sept Bataillons
travaillèrent. Ils furent
bientost fortifiez d'autres
Troupest & l'onregarda
cette entr^prife avec unétonnement
donton n'cft pas encore
rovenu? sur tout pendant
que le Roy fait travail1er
dans le mcfmc temps àun
fort grand nombre de Places.
Quelque Souverainqui aitjamais
entrepris d'en faire, elles
ont estel'ouvrage du temps
plûtofi que de ceux dont elles
ont pris le nom; puis que la
pluspart nont presquerien
fait de plus, que d'en avoir
mis la première pierre. Voilà
la France à couvertdes infultes
deTAllemagne, & le Roy
fait plus à son égard
? que les
Chinoisn'ont jamais fait par
leur muraille de cinq cens
lieuës de long à l'égard des
Tarures.Le Royaume de la
Chine n'est à couvert que par
une feule muraille, & la Fran-*
ce l'est aujourdhuy par deux
rangs de Places forces, qui
doivent au Roy tour ce qui
les rend redoutables. tvir de
Louvoisaprès avoir sejourne
le 16.a Traben, & avoir,
pour ainsi dire, donnéle mouvement
à tous les bras devoient qui agir pour la gloire
du Roy,& pour la tranquillité
de l'Europe, alla coucher
le 17- a Sare-Loiiis, où il fit
la reveuë des Troupes, &vifita
les Fortifications de la Place
Elle est Capitale de laPro,
Vince de la Sare. Ce n'estoit
cjiTun Village, dont le Roy
a fait une Place tres-reguliere.
On luy a donné le nom de
-,ç,arc-Loüls, qui est un composé
deceluy duRoy,&de
celuy de la Province. Cette
Ville a six Bastions Royaux
avec quelques Demy-lunes,
& d'autres Ouvrages, M de
Choisyen est Gouverneur éc
Mr le Comtede Perin Lieutenant
de Roy. M deLouvois
y sejourna le 18. &le lendemain
il alla àThionville,
où il se donna les mesmes
soins, &pritles mesmes fatigues
que dans les autresVilles
où il avoit passé. Thionville
n'appartient à la France
que du regne du feu Roy.
C'est une Ville du Luxembourg
assise sur la Moselle.
C'estoit une des clefs du
Royaume avant les nouvelles
Conquestes de Sa Majesté.
On a razé Domvilliers, &
quelques autres petitesPlaces
voisines
>
afin de rendre celle-
là plus considerable. Mr
d'Espagne enest Gouverneur;
Mrd'Argelé,Lieutenant de
Roy, & Mr de Bouflers,Gouverneur
de Luxembourg,&:
Lieutenant general de la Pto-T
vince.Mr deLouvois a trouvé
dans toutes les places qu'il
avisitées,les Troupes & les
Fortifications fort belles. Le
Canton de Basle luyenvoya
faire compliment à Huningue,
& Mrl'Electeur de Treves
fit la mesme chose pendant
que ce Ministre estoit à
Trarbach, Les Magistrats de
tous les lieux qu'il avisitez,
l'ontaussi complimenté, &
les Gouverneurs des Provinces
&des Places que je viens
de vous nommer,& M les
Jntendans la Grange ôc la
Goupiliere ont fait tout ce
qu'ils ont pu pour le bien reé
galer; mais ce Ministre toûjours
agissant n'avoîtqu'à
peine le temps de voir les Repas
qu'on luy preparoit par
tout. Jamais on n'a fait tant
de chemin) ny vu tant de
Villes
,
de Remparts, & de
Troupes, en si peu de temps
Lors qu'on sert ainsi fou
Prince,on le fait servirde
mesme
; & quand les desseins
du Souverain font grands, on
ne voit rien qui ne sente le
prodige. Mr de Louvois dîna
le 20. à Luxembourg,où Sa
Majesté arriva l'aprésdinée.
Je vous ay fait un détail de
tout ce qui s'y est passé,&
vous ay dit que le Roy alla
le 26. dîner à Cheranc. Ce
Prince coucha à Longvvy,cù
• aprésavoir vu faire l'exercice
aux Cadets dans la Place d'armes
, il en choisit quatrevingt,
pour les mettre en diversCorpsenqualitéde
Sousl^
ieurenans, comme jevons
l'aydéja marqué. La Cour
alla dîüer le 27.à Pierre- Pànt.
Sa Majesté montaà cheval
l'apresdinée
, & arriva te soir
àEtain -en prenant le diver-^
tissement de la Chasse. Sa Ma>-
jesté y fut receuë par Mr de
Verdun. Elle entendit la
Messe le 1$. à la ParoiiTe,Se
fit de grandes liberalitez au
Curé5 & aux Capucins qui
sont établis en ce lieu-là,quoy
qu'Elleleur en eust déja fait
en y passant la premiere fois.
Elle dîna le mesme jour à
Verdun chez M" 1tveique,
à quiElleavoit donnéordre'
le jourprécedent pour 'lC{
âaiur qui fut chanté en
Musique sur les six heures dtV
soir. Toute la Cour y am,
ffcaravec une devotion qvd
répondoit à la pieté du Roy.
Le lendémain 29jour du,
S. Sacrement ,
la pluspart dM
Dames qui avoient accompagné
ce Prince , firent leurs
devotions, ce qui parut fort
édifiant. Le temps estant extremement
pluvieux, on ordonna
que la Procession se
seroit feulement jusques à
l'EglisedesJesuites, & qu'elle
reviendroitaussi-tost dans Ii
Cathedrale. La Procession
commença par les Paroisses
de la Ville, suivies des Mandians,
& autres Religieux.Le
Clergé estoit en fort grand
Nombre, accompagne des
Gardes de la Prevosté
,
des
Cent-Suisses de la Garde, ôc
des Gardes du Corps,qui marchoient
sur deux lignesa coté
de la Procession. Messieurs
les Princes du Sang estoient
immédiatement après leDais.
Monseigneur le Dauphin pa..
roissoit ensuite ; deux Huisfiers
portantdesMasses precedoient
le Roy, qui avoit auprésde
luy lePere de laChaise,
& fesAumôniers.Les Princesses
marchoient aprés, suivies
des Dames les plus distinguées,&
ces Dames l'estoient
d'ungrande nombre de Seigneurs
, & d'Officiers de la
Maison du Roy. Le Presidial
deVerdun marchoitenCorps,
Se MP de Ville suivoient le
Presidial.Aprés cette longue
file quiétoiten fort bonordre,
venoit une foule de peuple
innombrable, sans compter
ce qui se trouvoit encore dans
la Ville. Presque toute laLorraine
s'y estoit renduë,&on
en voyoit jusque sur les toits.
On s'arresta à deux Reposoirs,&
la grande Messe fut cclebrée
par Mr l'Evesque de
Verdun. Le Roy, & toute la
Cour occupoient la droite
des hautes Chaises. LesChanoines
estoient à la gauche,
& la Musique au milieu du
-Choeur; elle s'acquita assez
bien de tout ce qu'elle chanta.
Sa Majesté alla à l'Offrande,
& aprés la Messe Elle eut
à peine le temps de dîner *
pour retourner au mesme
lieu, oùla Cour entendit Vespres.
MdeVerdunofficia encore.
Au sortir de cette Eglise,
le Roy se promena autour
de la Citadelle
)
&: alla
voir les Ecluses, qui sont presentement
achevées, & dont
on se doit servit pour empêi
cher qu'on n'approche de la
Ville du costé où elles sont.
Mr deLouvois alla jufclu-aa
lieu où les eaux remontent.
Plusieurs Particuliers ayant
eu leurs beritages endommagez,
ont esté remboursez par
la bonté de Sa Majesté
, quoy
que cet ouvrage foit pour la
défense de leur Patrie.
Le 30.le Roy entendit encore
laMessedans la Cathedrale,&
Mrde Verdun luy
presenta de l'Eau-benite.Ce
Prince eut la bonté de faire
une remontrance au Chapi
tre,) pour l'exhorter de bien
vivre avec son Eve[quc) &
comme il sçavoit que les Chanoines
estoient en possession
depuis un fort grand nombre
d'années
?
d'estre debout pendant
l'Elevation, il leur deT
manda qu'en sa consideration
ilssissent une Ordonnance
pour abolir cetusage, à quoy
ils ne s'opposerent pas. La
Musique chanta un Motet sur
le rétablissement de la santé
de ce Prince, & receut en
mesme temps des marques de
sa libéralité, Toute la Cour
alla ce mesme jour dîner à.
Brabant, & arriva un peu
tard à Sainte-Menehout. M1
l'Evesque de Châlons s'y
trouva avec quelques Ecclesiastiques
qu'il y avoit ame.
nez. Mr le Duc de Noailles
ayant de son costé amené de
LuxembourgMr de Ville, &
prisà Verdun des Musicièns,
qui se joignirent à d'autres
qu'il avoit fait venir de Châlons,
le Salut fut chanté en
Musique aux Capucins sur
les septheures du soir. M de
Châlonsy donna la benediction
du S. Sacrement. Les
Capucins furent extrêmement
édifiez de voir que la
Cour, à l'exemple de son Souverain
faisoit paroistre une
grande pieté. Ils connurent
encore celle de ce Prince, par
les presens qu'il leur fit le
lendemain en partant, quoy
qu'ils en eussent déja receu
lors qu'il estoit paffé à Sainte-
Menehout, pour se rendre à
Luxembourg.
Le 31. le Cour dîna à Cense
de Bellay & allaà Châlons,
où elle trouva un nombre mfïny
depeuple qui s'y eftoic
assemblé
; croyant qu'elle y
passeroitla Feste de Dieu, cqui
seroit arrivé, si la maladie
de Monsieurle Comte de
Toulouse n'eust point rompu
les mesures que l'onavoit prises.
Le Salut fut chanté par
la Musique avec beaucoup de
iolemnité?M1deChâlonsef-
-tantà lateste desonChapi-
"tre. L'Eglise,& les ruës es-
Iaient si remplies
, qu'on
croyoit estre au milieu du
Peuple de Paris. Un nombre
infiny de routes sortes de gens
qui cherchoient à voir le
Roy, occupoit le Jare , &
Tonassure -qu'il n'y en avoit
jamais tanteu.
Ii
Le premier Juin, le Roy
dîna à Bierge, & coucha à
Vertus. Il y entendit le Salut
à la Paroisse, où il y eut une
Musique tres-agreable
,
soutenue
desHautbois des Mousquetaires.
M de Châlons y
officia,assistiéde M de Luzanfy
& de Lerry? qui ont des
Abbayes en ce lieu.
Lei. on partit de Vertus
à dix heures
du
matin, après
avoir entendu la Messe, pendant
laquelle la Musique continua
de chanter des Motets
de M1r du Mont. On ne sçauroit
trop admirer le zele&
l'activitéde Mrde Noailles,
pour le service de Dieu & du
Roy.M deChâlons aofficié
pendant l'Octave du S. Sacrement
, par tout où Sa Majesté
a esté dans son Diocese,
& il s'est par tout trouvé de
la Musique, par les soins de
M le Duc de Noailles son
frere. La Cour alla de Vertus
dîner à Etoge. C'estunlieu
toutremply d'agrémt.Lebastimentenest
beau,les Jardins
en sont charmans
, & l'abondance
des eaux y donne tous
les plaisirs que l'on en peut
recevoir. Ce lieu appartient
à Mr le Marquis d'Anglure,
& sert de retraite à deux freres
& à une soeur, qui par
leur mérité sefont fait une reputation
qui s'estrepandüe
bien avant dans le Monde. La
vertuest leur passion, la charité
fait leur employ, & leur
pieté est exemplaire. Le Roy
leuravoit fait dire qu'il difneroit
chez eux sans les embarasser,&
quoy qu'il n'euisent
pas l'avantage de donner
à mangeràSa Majesté,ny par
consequent l'honneur de la
servir,leur magnificence ne
JailTa pas de paroistre i la maniere
dont ils traiterent toute
la Cour. L'abondance fut
si grande aux tables qu'ils
firent servir
, que celle du
Chambellan ne tint point,
Monsieur le Prince qui mange
ordinairement à cette table
, ayant fait l'honneur à
cesillultres Solitaires de manger
àcelle qu'ils luyavoient
fait préparer. Le Roy inftruit
de leur vertu voulut sçavoir
le détail de leur vie dans
une solitude si peu commune
à des personnes de cette
qualité. Ce Prince apprit que
lesFreres faisoient le plaisir
- - de
de la Soeur, & la Soeur celuy
des Freres? que leurs heures
font reglées pour leurs exercices
ordinaires qui estoient
toujours égaux, sur tout la
Messe
,
les prieres frequentes,
& la visite des Pauvres. Un
fils de l'aisné qui n'a pas encore
cinq ans, eut l'honneur
de manger avec le Roy. Pendant
queSa Majestéfaisoit
son plaifirde s'entretenir de la
pieté de ses hostes,onluy apprit
que Madame la Princesse
deConty avoit un malde teste
& unedouleur de gorgequi
faisoient craindre que cette
Princesse ne fût bientost attaquée
du mesmemal qûeTilc
le Comte de Thoulouze avoit
essuyé à Luxembourg.
Le Roy ordonna qu'on
fïftauffitoft partir pourMo zmirel,
& se prepara a quitter
1-oge pour ta suivre.Il ne faut
pas que j'oublie à dire qu'il ya
une galerie dans ce Chasteau
qui plut beaucoup à Sa Majesté,
& qui auroit fait plus
long-temps le plaisir de toute
la Cour? si elle n'avoit point
esté pressée de partir. Elle
contient les Portraits- de tous
les grands hommes qui ont
paru en Europe depuis environun
Siècle, &; les Portraits
de ceux qui ont vescu
çlaAs, lemesme temps,-sont
pppofez les uns aux autres,
comme pour en faire des
paralelles; leurs principales
actions& leurs alliances font
marquées au bas. Cette Galerie
est plus curieuseque
magnifique, & l'on y voit
regner une simplicité debon
goust
, qui attire plus de
loüanges à ceux à qui appartient
cette maison, qu'une
magnificence mal entendüe..
-
Le Roy ayant quitté un lieu
jS delicieux
,
arriva de bonne
heure à Montmirel. Mr de
Louvois, comme Seigneur du
lieu, receut Sa Majesté à la
descente de son carosse. Ce
qu'on avoit soupçonné du
mal de Madame la Princesse
de Conty? arriva.Les rougeurs
parurent?&elle fut faignée
le lendemain au matin.
Sarougeolle estoit tres forse?
mais les Medecins dirent
qu'ellen'estoit pas dangereuse.
On Iaifïa aupres de
cette Princesse MrPetit,Pr-emier
Medecin de Monseigneur,&
Mr DodartsonMedecin,
avec MrPoisson, Apotiquaire
du Roy. Comme
ce Voyage approchoit de sa
-fin, la
-
Cour commença à défiler,
& M[ le Prince de
Conty partit pour Paris. On
dit ce jour-là des Messes
tout le matin, & à sept
heures du soir il y eut Salut.
LePrieur Curé, qui est un
Religieux de S. Jean de Soissons
,
fit la céremonie.Le
- 4. Monseigneurle Dauphin
ayant
beaucoup d'impatience
de - revoir Madame la
Dauphine, receut de Sa Majesté
la liberté de partir. Ce
Prince
-
arriva le soir mesme
à Versailles. Plusieurs personnes
quitterent la Cour cC;
jour-là. Les Prieres se firent
comme le jour precedent;on
fut fort en doute si on partÍroÍr,
on reeeut des ordres
pour le depart, & ces ordres
furenr révoquez. Le jour de
FOccave du S. Sacrement,le
Roy ayant sceu à quatreheures
& demie du matin l'estac
--de la maladie de Madame la
Princesse de Conty
?
Ordonna
à Mr de Louvois de faire
partir les Officiers, & cependant
cc Prince , quine songe
pas moins a
-
remplir les aevoirsdeChrestien,
que ceux
de Roy, demanda au Pere de
la Chaise
,
s'il estoit Feste dar s
le Diocese de Soissons,& s'il y
avoit obligation pour ses Officiers
d'entendre la Messe, &
pour luy
3
d'assister à la Procession.
Le Pere de la Chaise
luy repondit, qu'il estoit obligé
d'entendre la Messe
) &
non d'aller à la Procession
mais que cependant il feroit
mieux que Sa Majesté rendist
ce devoir aux ordres de l'Egli[
e,quia étably la Procession
de l'Octave. Il n'en falut
pas davantage pour faire
ordonner qu'on cLft coniti-*
nuellement des Messes, ôc
quoy que les Cloches qui
font fort grosses, fussent
près de la Chambre du Roy,
parce que l'Eglise est dans
le Chasteau, ce PrinceVOUrllut
qu'on les sonnast toutes.
Il entendità huit heures
& demie une Messe,dite par
un Chapelain de quartier.
Cependant le Prieur accom*
pagné d'un Diacre,d'un Sous-
Diacre
,
de trois Enfans de
Choeur, dehuit choristes, &
de huit Chapiers tirez de la
Chapelle du Roy, se preparoit
dans la Sacristie. La Procession
commençasur les neuf
heures; on dit ensuite la
grand' Messe,& le Roy partit
pour aller dîner à Vieu-
Maison,quiappartient à Mr
Jacquier. Monsieur le Prince
quitta la Cour, pour se rendre
à Paris. On coucha ce jourlà
à la Ferté sur Joüare dans
le Diocese de Meaux.M l'Evesque
de Meaux s'y trouva
avec quelques Abbez, & ses
Aumôniers.Onchanta le Salut
en plein Chant à la Paroisse
, & la bénédiction y fut
donnée parcePrelat. Sa Majesté,
qu'une marche continuelle
n'a détournéed'aucune
des fonctions de piet
» dont Elle s'acquite avec in
zele si édifiant, termina ce
cette forte tOétave du S.
Sacrement. On dîna à Monceaux.
Mr de Gesvres, comme
Gouverneur du lieu >^vo-t
fait au Roy pendantledîner
un present defruits,de fleurs
& de Gibier, d'une rh-iiierç
tout-à-fait galante. On traversa
Meaux iar,fulr, , &
on alla coucher à Caye. Le
lendemain, Monseigneur entendit
la Messeà Versaillesà
six heuresdumatin,&priten
suite la Poste pour se rendre
à Livry
3
où l'on attendoit le
Roy. Il estoit accompagne
de Monsieur le Prince de
Conty, de Monsieur de
Vendosme 5Se.de plusieurs
Seigneurs de la Cour. Ils
y arriverent sur les dix
heures & demie. Monseigneur
changea d'habit, & aprés
avoir pris quelques
- rafraifchissemens,
ilalla au devant
de Sa Majesté, quiarriva
sur les onze heures & demie.
Le Chasteau de Livry est
depuis long - temps dans la
Maison de MrSanguin, Sa
situation est charmante
, &
dans le voisinage d'une Forest
tres-agreable,& tres- propre
pour la Chasse. On voit un
beau Jet d'eau dans le milieu
de la court. Le grand corps
de Logisest terminé de chaque
costé par un Pavillon,
dont l'un fait face au Jardin,
& à l'Orangerie. Le Parc qui
est au bout, répond sur le
grand chemin. Le Roy descendit
de Carosse à la grille
de ce Parc. Monseigneur l'y
receut accompagné des Princes
qui l'avoient suivy. Madame
Sanguin) Mcre de Mr
le Marquis de Livry. Mr l'Evesque
de Senlis Madame de
Livry, & quelques autres personnes
de la Famille, reeeurent
Sa Majesté à la porte du
Jard in. Elle les faliiaj& leur
parla avec cet air doux &majestueux
qui luygagne tous
les coeurs. On servit le dîné à
midydansl'anti-chambre du
Roy. Elleestoit richement
meublée, & tenduë. des belles
Tapisseries
,
dont le feu
Roy d'Angleterre fit present
à M de Bordeaux, Pere de
Madame Sanguin, lors qu'il
estoit AmbaOEadeurauprés de
ce Prince. Le Buffct estoit
dressé dans une Salle qui joint
l'antichambre. On ne peut
rien ajoutera la propreté,&
au bon ordre que Madame
Sanguin avoit mis par tout.
Les Appartenons estoientornezavecun
agrément admirable,
& que l'on remarque
dans tout ce qu'elle fait. Mr
l'Evesque-de Sentis &M de
Livry sirent les honneurs;
mais ce dernier ne laissa pas
d'exercer sa Charge de premier
Maistred'Hostel. On
servitenpoisson avec autant
d'ordre qu'il yeut de delicaft{
fe & d'abondance. Monseigneurmangea
avec le Roy.
Les Dames qui eurent l'honneur
d'estre àla Table de Sa
Majcfté> furent, Madame la
Duchesse, Madame d' Armar.
gnac, Madame de Maintenon,
Madame de GramoRÇ*
Madame Sanguin, Madame
de Livry, &: Mademoiselle
de Sourdis,qui ayant esté
élevée chez Madame Sanguin,
ne la quitte point de-
-
puis long-temps. Les Princes
quiavoient suivy Monseigneur,
furent servis à une
autre Table. Celle du Grand
Maistre fut servie après le
dîné du Roy. Sa Majesté se
retira dens sa chambre au
sortir de Table. Elle y demeura
quelque temps,& partit
ensuite
,
après avoir fait
de grandes honnestetez à Madame
Sanguin,à M deSenlis,
& à Madame de Livry
)
& leur avoir dit, qu'Elle
n'avoit point esté si bien traitée
dans tout le Voyage.
Quoy que toute la Famille ait
part à l'honneur de cette Feste,
on peut dire que Madame
Sanguin s'est attiré beaucoup
de louanges , & d'estime,&
qu'elle a réussi dans
:.tour ce que la Cour attendoit
d'elle. Ce n'est pas d'aujourd'huy
que la Famille de Bordeaux
s'estdistinguée dans
toutes les choies qui ont regardé
leRoyCePrince donna
ce jour-là à Mr deMassigny,
l'un de ses Ecuyers,cinq cens
écus de pension. Cette grace qui n'avoit point esté demandée,
tomba sur un Sujet
d'autant plus estimé de toute
la Cour, qu'on luy a toûjours
remarqué un grand attachement
pour la personne
de son Prince. Le Roypassa
l'aprésdînée dé fort bbnéfe
heure par Paris, au bruit des
acclamations du Peuple, &
se rendit à Versailles
)'
ou
Monsieur & Madamel'attendoient.
Sa Majesté trouva
en y arrivant un nombre
infiny de personnes de la première
qualite, qui s' y étoient
rendues pour la salüer à la
descente deson Carosse. Plufleurs
Conseillersd'Estat?
ôc Maistres des Requestes,
eurent aussi cet honneur.
Elle montaaussi-tost à 1Appartement
de Madame la
Dauphine, pour voir certç
Princesse, & se promena
ensuite à pied pendant quatre
heures dans les Jardins
deVerailles.Ellevisita tous
les Ouvrages nouveaux qu'on
y avoit faits pendant sen
absence
,
&vitunfort grand
nombre d'Orangersquc'?Elle
avoit donné ordre de placer
dans l'Orangerie, du nom- bre desquels estoit l'Oranger
nomméleBourbon
,
qu'on dit
avoirenviron cinq cens ans.
Une si longue promenade à
pied au-retour d'un Voyage,
donna beaucoup de joye à
toutela Cour, parcequ'elle
estoit une marque de la parfaite
santé du Roy. Le 8. M"
le Cardinal Nonce, les Ambassadeurs
, les Ministres des
Princes Souverains qui sont
icy , & la pluspart des Chefs
des Compagnies superieures,
se trouvèrent au lever de Sa
Majesté, & luy firent compliment
sur son heureux retour.
Jamais ce Prince nes'étoit
mieux porte, & n'avoit
paru de meilleuremine, quoy
que pendant le cours du
Voyage, il se fust toujours
exposé à la poussieres dont il
auroit pû se garantir, si sa
bonté ne l'eust porté à vouloir
satisfaire à l'empressement
que les Peuples de la
Campagne avoient de le voir,
sur tout après une maladie
quiavoit fait paroistre l'excès
de leur amour pour ce Prince.
Le jour iuivancJa foule
continua à son lever &: cc
Prince voyant sa santé parfaitement
rétablie) puifquc
les fatigues d'un long Voyage
ne l'avoient pu alterer ) recompensa
en grand Roy,ceux
à qui, après Dieu & les voeux
de ses Sujets, il en estoit redevable.
Il donna cent mille
francs à Mr Daquin son
premier Medecin
3 quatrevingt-
mille à M Fagon, premier
Medecin de la seuë
Reyne, en qui il a beaucoup
de confiance, & dont la reputation
est solidement établie,
&: cinquante mille écus
à MrFélix, son premier Chirurgien.
Quelque temps auparavant
, Sa Majesté avoit
donné une somme considerable
à M Bessiere, qui pane
pour le plus fameux Chirurgien
de Paris, & qui avoit
esté consulté dans le temps
du mej du Roy. Voilà de
grandes recompenses , mais
qu'auroiton pu moins. faire
pour des personnes ÎL qui la
francs estsi redevable) &- à
quil'Europedoitlafuite de
1a tranquillité dont elle
jouit ?
Le Roy après son retour
donna un magnifique repas
atou-tes-lesDamesquiavoient
esté du Voyage
Jpendant
lequel
les soins de Sa Majesté
leur ont épargné beaucoup
de fatigue, les divertissemens
s'esxant mesme trouvez par
coût ainsi qu'à Versailles;
mais quandily auroit eu des
peines à essuyer pour cc qui
s'appelle la Cour,leplaisir de
voir quelquefois le Itoy sans
estreaccomrpagoné de la foule qui l'environne toûjours à
Versailles
)
& d'avoir le bonheur
de luy parler plus facilement
lour des choses qu'on
ne pourroit trop payer,Jamais
Prince n'ayant paru si
charmant que ce Monarque,
lors qu'il veut bien avoir la
bonté de se dépoüiller de sa
grandeur, il ne se montre
point dans ces momens,qu'il
ne gagne autant de coeurs
qu'il s'attire d'admirateurs
par
~par les grandes actions. Mr
e Comte de Tolouse arriva
e 8. à Versailles
, & Madame
a Princesse de Conty le 11.
'un & l'autre dans une par-
:11tc faute
> ce qui donna
beaucoup de joye à toute la
Cour,dont ils font lecharme
, & deux des principaux
ornemens.
FI N.
1 DV VOYAGE
DE
SA MAJESTÉl
A LUXEMBOURG.
E vous l'aypromis
,
Madame. Il faut
vous satisfaire sur le
grand Article du Voyage
de Sa Majesté à Luxembourg,
Pc. comme vous m'avez ordonné
de n'enoublier aucune
des circonstances, elles
feront le sujet d'une Lettre
entière. Un pareil Journal
doit estre agréable aux Curieux
Tout le monde scait
que le Roy ne peut faire un
pas hors le lieu de sa résidence
ordinaire, que toute
l'Europe ne soit aussi-tost
en mouvement. Le bruit de
ce Voyage n'eut pas plûtost
Commencé à se répandre,
qu'elle fit paroistre de grandes
alarmes. Mais que pouvoit-
elle avoir à craindre?
Elle devoitestre persuadée,
que le Monarque qui luy a
donné la Paix? n'avoir aucun
dessein de la rompre.
C'est son ouvrage, & loin
de songer à le détruire,Sa
Majesté fera toûjours preste
à faire repentir ceux qui travailleront
à troubler le calme
qu'il a étably. Un pareil
dessein ne sçauroitestre
conceu que par des Ambitieux
opiniâtres, & trop constamment
jaloux de la grandeur
de ce Prince;mais c'est
àeux seuls à craindre, dans
letemps qu'ils veulent rendresuspectes
toutes ses démarches,
& jetter dans les
cfprits des frayeurs seditieuses,
afin d'exciter dans la
plus grande partie des Etats
voisinsle desordre & la confusion,
sans quoyils demeurent
dans une fâcheuse obsçuiipé?
qui leur est beaucoup
moins supportable que la
douleur que les Victoires du
Roy ont dû leur causer
, pour
ne pas dire, leurs continuelles
défaites. Comme il y a
peu de Regnes qui ne plaisent
,
a quelques chagrins
que l'on puisse estre exposé
en regnant ,ils voudroient
toûjours jouir de la tristesatisfaction
qu'ils ont de com*.
mander aux dépens de la
tranquillité de l'Europey
mais le Roy quien est leBienfai£
teur> & le Pere, voulant
luy conserver le repos qu'il
luy a si genereusement procuré,&
dontil lafait jodir.,
malgré lescontinuels obstacles
qu'on oppose inutilement
à sabonté, renverse
tous leurs desseins par sa prudente
conduite &: par sa perseverance.
Les défiances que
l'on a voulu donner de son
Voyage) donton pretendoit
que de secrets desseins estoient
les motifs, ont esté
une occasion au Roy de confondre
les Ennemis de sa
gloire. Il n'a pu soffrir qu'on
crustqu'il déguisast ses intentions
,8z pour empescher
que leur sincerité ne fust
foupçonnée
9
il a bien voulu
donner un éclaircissement,
quien faisant voir la bonté
qu'il a de'ne point chercher
à troubler l' Europe qu'il a
l, pris foin de pacifier, a servy
encore, par des assurances
publiques,& dont aucun
Prince ne pouvoir douter, à,
dissiper les frayeurs que les
.1n.1.1 intentionnez avoient
jettées dans les coeurs timides,
afin de parvenir à leur but.
Non seulement ils n'y sont
point parvenus ?
mais tout ce
qu'ils ont pû dire, n'a fait que
fairemieux voir combien le
pouvoir du Royest redoutable,
puisqu'ilsontété obligez
de faire connoistre eux-mêmes
par toutes les chosesqu'ils
ont avancées, qu'il suffitque
ce Monarque fasse une entreprise
pour y réiiflir
, & que
s'il veut vaincre, il n'a qu'à
combattre. On a sujet de les
croire. Ils n'ont pas eu desfein
de flater
,
&sur ce qui se
publie de cette nature ,
les
Ennemis sont plus croyables
que d'autres, puis que leur
sincerité ne peut estresoupçonnée.
Mais comme vous
pourriez douter de la mienne
lors que je vous parleai
& croire que je me suis formé
exprés des monstres pour
les combattre, en faisant paffer
mes conjectures pour des
veritez,à l'égard de tout ce
que je viens de vous dire dt.
l'inquietude que l'on a voulu
donner à la plus grande
partie de l'Europe, pour luy
faire prendre de l'ombrage
des desseins du Roy
?
voicy
une piece justificative.
Sa Majesté
,
à qui rien n'est
inconnu, tant à cause de sa
vive penetration
, que des
foins qu'elle prend sans cesse
pour bien s'acquiterde ce que
son rang demande,sçachant
ce qui se disoit du dessein
qu'Elle avoit pris de faire un
VoyageàLuxembourg, voulut
faire voir la mauvaise intention
de ceux qui en répandant
des bruits contraires
au repos public, pretcndoient
venir à bout de leurs entreprises.
Dans cette pensée, Elle
ordonna à Mrle Marquis de
Croissy Colbert
,
Ministre &
Secretaire d'Estat
, ayant le
département des affaires étrangeres,
d'écrire une Lettre
à Mrle Cardinal Ranuzzi,
Nonce de Sa Sainteté enFrance.
Voicy à peu prés le sujet
de cette Lettre. Ive de Croisfy
marquoit à ce Cardinal
que le Roy luy avoit commandé
d'informer son Eminence de la
resolution qu'ilavoit priscel'al.,
lerdans le mois de May à Luxembourg
, CJTouencore que Sa
Majcflr n'eustpas accoûtumé de
rendre raison de Jes actions,
comme Elle ne vouloit pas
néanmoins renouveller l'alarme
qu'on dvùitprise sans fondement
de l'ouverture qui a esté
faite du convertissement de la
Tréve en un TraitédePaix ; Elle
luy avoit ordonné de /'assurer de
sa part ,
qu'Elle ne faisoit ce
Voyage que pour satisfaire la
curiosité qu'Elle avoit de voir
Elle-mesme en quel estat estoit
otlors cette place;, d'oùelleseroit
de retour,troissemaines, ou tout
A-U plus tard un mois aprésqu'Elle
seroit partie de Versailles;
qu'Elle se promettoit que son
Eminence empescheroit par Je$
Lettres tant à Sa Sainteté que
par tout ailleurs où ellel'estimeroit
à propos , que ce Voyage ne
donnast de l'inquietude aux
Etats Voisins
, 0* qu'aucun
Prince ne pustprendre le pretexte
de la marche de Sa Majestéspour
refuseràl'Empereur lessecours
ausquels ilsseseroientengagez,
Sa Majesté n'ayantpas d'autre
dessein que celuy dontElle l'avoit
chargéde l'instruire.
Cette Lettre qui fut écrite
à Marly,estoitdattée du quatrièmed'Avril.
MrleNonce
qui s'apliqueavec tout le foin
imaginable à tout ce qui peut
maintenir la paix, la reçût
avec une extrêmejoye.Il en
envoya des copiesdans tous
les lieux, où ille crut necessaire
pour remettre les esprits,
& n'en refusa point aux Ministres
Etrangers qui sont à
Paris, ny mesme à tous ceux
qui prirent la libertédeluy
en demander ; de forte que
cesCopies s'estant multipliées
en fort peu de temps , cette
Lettre devint aussi-tost commune.
Chacun l'envoya à ses
Amis, &. elle courut incontinent
, non feulement dans
les Provinces de France;mais
encore dans les Pays Etrangers.
Comme le Roy na
jamais manqué à sa parole,
&que tout le monde en est
fortement persuadé
,
les esprits
qu'on avoit voulu inquicter
en leur faisant entendre
que le Voyage de Sa
Majestécouvroit des desseins,
€jui devoient troubler la tranqnilité
de l'Europe, furent
rassurez> & les ambitieux qui
ire cherchoient qu'à renouseller
la guerre en proposant
<de faire une Ligue pour l'éiriter
, demeurerent dans une
Extrême confusion par l'impossibilitéqu'il
y avoit de
venir à bout de leurs desseins.
On ne parla plus que du
Voyage, mais on en parla
d'une autre maniere qu'on
n'avoit fait jusque-là, & ceux
quiavoientvéritablement apprehendé
devoir le Roy à la
teste d'une Armée par les
soupçons qu'on avoit tâché
de jetter dans leurs esprits, se
proposerent de le venir admirer
lors qu'il feroit sur leurs
frontières
?
& ce fut pour eux
un fort grand sujet de joye
s d'esperer de voir de prés, &
de considerer avec toute l'attention
que demandoit leur
curiosité? un Prince qui remplit
tout l'Univers du bruit
de son naIn, & de ses vertus.
Pendant que la Noblessedes
Pays voisîns de Luxembourg:
goûtoit par avance le plaisir
qu'elle attendoit en voyant
le Koy & qu'elle en avoit
l'idée remplie,comme on l'a
ordinairement de toutes les
choses.guc l'onsouhaiteavec
passion, ceux qui estoient du
Voyage s'y preparoient; d'autres
en parloient & d'autres
écrivoient sur ce sujet.Voicy
une Devise deM Magnin de
l'Academie Royale d'Arles,
surceVoyage.Le Soleil estoit
alors au figne du Belier. Cette
Devise a pour mot
CURSUM INCHOAT
OMINE MITI.
Il renouvelle son cours
Sous de fortunezpresages;
Loin d'icy
)
sombres nuages,
Nous n'aurons que de beaux
jours.
Ces Vers convenoient a£-
sez à ce qu'on venoit de publier
touchant les desseins
cachez fous le Voyage du
Roy.
Voicy une autre Devise
de Mr Rault de Roüen, sur
ce mesme Voyage daSa Majesté,
allant visiter ses Conquestes
,&voir ses nouveaux
X Sujets. Cette Devise a pour
corps le Soleil en son midy
sansnuages & sans ombreJ
&jettant de benignes influences
sur les Regions par
où il passe. Ces mots en sontl'ame.
FELICI BEAT
ASPECTU.
Tel que paroist le Dieu du
jour
Porté dans son char de lu
miere
,
Quand par chaque Climat il
faitsonvaste tour
Pourvisiter la terre entiere
J
k
Et que parsesbrillansrayons
Il produit en tous lieux les biens
quenous voyons;
Tel l'Augure LOUIS ruifitant
ses Conquestes,
Quelque part qu'il porte les
yeux,
SurJes Sujets nouveaux qui s'offrent
en ces lieux,
Répandsesfaveurs toutesprefies,
Et quoy qu'il fajfe voir la fierté
du Dieu Mars
,
( Sesyeux nont que de doux
re7g,ardsoLe
temps du Voyage s'avançoit,
& l'on estoit presque
sur le point de partir,
lors que le Roy fut attaqué
d'un grand Rhume. Mais
loin que cet accident sist
prendre aucune résolution
contraire à ce qui avoit esté
arresté, Sa Majesté ne retrancha
pas mesme un quartd'heure
des Conseils qu'Elle
avoit accoûtumé de tenir-
Mr de Louvoispartit quelques
jours auparavant , pour
unVoyage de prés décrois-
-- - .-- - - - --
cens lieues,& Mr de Seignelay
partit de son costé pour
aller voir les Fortifications de
Dunkerque. Comme il faut
donner quelque ordre à cette
Relation, je ne parleray de
leur Voyage que quand je
vous marqueray leur retour
auprès du Roy, Je vous diray
cependant qu'en s'éloignant
de Sa Majesté,ils avoient
toujours la mesme
part aux affaires. Rien n'est
aujourd'huy épargné en
France pour le bien de l'Etat,
&.
& le Roy, par le moyen des
Courriers
> peut conferer tous
les jours avec ceux qui sont
éloignez de luy.MrdeCroissy
fut le seulMinistre qui
devoit accompagner Sa Majesté.
Le Controleur GeneraI,
dont la presence & les
foins font toûjours neccffaires
icy,ne fait jamais aucun
Voyageavec Elle. Mais comme
je viens de vous le marquer,
ceux qui ont affaire au
Roy,parlent, pour ainsi dire
i tous les jours à Sa Majesté
?
quelque longue distance
qui les en feparc ,rien n'estans
épargné pour cela, & les
Postes du Royaume n'ayant
jamais esté en si bon estat
qu'elles sont presentement.
Des raisons avantageuses à
la France empescherentMadame
la Dauphine de se préparer
à estre de ce Voyage.
Monsieur
, qui relevoit de
maladie resolut de prendre
l'air à Saint Cloud pendant
l'absence du Roy, & Madame
voulut tenir compagnie
à ce Prince, malgré le plaisir
qu'elle prend aux Voyages
& à la Chasse, cette Princesse
estantinfatigable dans
des exercices qui lassent quelquefois
les hommes les plus
robustes.
Le Roy ne voulant pas
fatiguer sa Cour pour un
Voyage qui ne devoit passer
que pour une promenade,
resolut d'aller à petites journées,&
de mener Monsieur le
Duc du Maine,&Monsieur
le Comte de Toulouse.Onne
peut trop tost leur faire voir
des. Fortifications; des Troupes,&
des Reveues,& l'on
peut dire que leur en faire
voir de cette maniere, c'est
commencer à leur apprendre
en les divertissant, tout ce
qu'ilsdoivent sçavoir? ce qui
cft cause souvent qu'ils y
prennent plus de plaisir, &
qu'ils s'y attachent davantage
dans la fuite. Ces jeunes
Princes estant du Voya,
ge )
il fut.arresté que les Dagacs
en seroient aussi;celles
qui furentnommées font
Madame la Duchesse, Madame
la Princesse de Conty,
Madame la Princesse d'Harcour)
Madame la Duchesse
de Chevreuse, Madame de
Maintenon, & Madame de
Croissy? avec les Dames, &
Filles d'honneur des Princesses.
Elles devoient toutes
aller, ou dans le Carosse
duCorps du Roy, ou dans
d'autres Carosses de Sa Majesté,
& avoir l'avantage de
manger avec ce Prince. C'est
un honneur qu'elles ont u
pendant tout le Voyage.
Il fut aussi arresté que le Regiment
desGardes ne marcheroit
point, & que suivant ce
qui s'est souvent pratiqué, le
Roy seroit gardé par l'Infanteriequi
se trouveroit dans
les Places, où Sa Majesté
passeroit, & que dans les lieux
où il n'y auroit point d'Infanterie
en garnison les
Mousquetaires mettroient
pied à terre,& feroient garde
autour
l.
du logis du Roy.
Comme les Gendarmes & les
Chevaux-Legers ne servent
que par quartier, de mesme
que les Officiers de sa Maison
, du nombre desquelsils
* sont, & que ces Corps ne
marchent entiers qu'en temps
de Guerre, & lors que Sa
Majestéfait quelque Camp
Elle ne voulut estre accompagnée
dans ce Voyage
) que
de ceux de ces Corps qui esroient
alors en quartier. A
l'égard des Gardes duCorps,
le Roy resolut de mener seulement
leGuet. Comme vous
pourriez ne pas sçavoir ce
que c'est que ce Guet, il fera
bon de vous l'expliquer. Les
Gardes du Corps font toûjours
dans le service, sans
estre néanmoins toûjoursauprés
du Roy. Ils ne fervent
point par quartier comme
les Gendarmes & les Chevaux-
Legers; mais comme
ils font en fort grand nombre,
on les fait loger en plusieurs
Villes? ce qui pourtant
ne s'appelle pas estre en garnsson
, puis qu'ils y font
moins pour garder ces Places,
que pour y attendre
qu'ils fervent auprèsduRoy,
ce qu'ils font alternativement.
On dit en parlant de
ceux qui ne font pas auprès
de Sa Majesté
,
qu'ils font
dans leurs quartiers, & l'on
appelle relever le Guet? lors
qu'il fort un nombre de Gardes
de ces quartiers
, pour
venir prendre la place de
ceux qui font auprésduRoy?
&: que ces derniers retournent
dans les quartiers où ils
estoient auparavant, Il y a
prés de dix-sept cens Gardes
du Corps, qui font divisez
en quatre Compagnies,& ces
CompagniesensixBrigades
chacune,qui font commandées
par six Officiers ; sçavoir
trois Lieutcnans & trois
Enseignes, Chaque Compagnie
elt reconnuë par les
Bandoulieres des Gardes,qui
font de couleurs differentes,
On reconnoist les Gardes de
la premiere Compagnie , au-"
trement>la Colonelle, commandée
par Mr le Duc de
Noailles, aux Bandoulieres
blanches, & aux Housses
rouges; les Gardes de la
Compagnie de Mr le Maréchal
Duc de Duras, aux Baudoulieres
- & aux Housses
bleuës; les Gardes de la Compagnie
de Mr le Duc de Luxembourg,
aux Bandoulieres
&aux Houssesvertes, 8c les
Gardes de la Compagnie de
Mr le Maréchal de Lorges,
aux Bandoulieres& aux
Housses jaunes. Cette derniere
Compagnie portoit
orangé dans son institution,
mais depuis, elle a changé
l'orangé en jaune. La Colonelle
seule a des Housses d'une
couleur différente de celle
desBandoulieres,& cela vient
de ce que le blanc n'etf pas
une couleur à estre employée
en Housses. Il est à remarquer
que le Guet des Gardes du
Corps qui sert auprès de Sa
Majesté, à pied,& à cheval,
est toûjours de deux cens
Gardes, dont une partie est
de Salle, & l'autre se repose
tour à tour. Ce Guet n'est
jamais d'une seule Compagnie
,
mais de plusieurs ensemble.
ainsi que les Officiers
qui les commandent;
de forte que le Capitaine des
Gardes qui est de quartier,
n'a jamais sousluy aucun Ofsicier
desa Compagnie quand
il est de serviceauprésduRoy.
Vousremarquerezencore que
le Guet ne sert qu'un mois
auprès du Roy> à moins qu'ij
n'y ait quelque force raison
pour le faire servir plus longtemps,
comme dans l'occasion
de quelque Voyage tel
que ccluy que l'on vient de
faire. Ce n'est pas que dans
un Voyage plus long le Guet
ne changeast de la mesme
fortequ'à Versailles
, parce
qu'alors on feroit suivre tous
les Gardes. Rien ne marque
tant la grandeur du Roy que
ce changement de deux cens
Gardes tous les mois. J'ar,
crû vous devoiraprendretoutes
ces choses , & que ce ne
feroit pas sortir de la matiere
que je me fuis proposée dans
cette Lettre? parce qu'autrement
vous n'auriez pas bien
compris ce que c'eil: que le
Guet, dont j'ay este oblige
de vous parler,pour vous faire
une Relation du Voyage
du Roy aussi exacte que celle
que j'ay entrepris de vous
envoyer.
Touteschoses estantainsi
arrestées
)
personne ne douta
du Voyage, parce qu'ontient
toûjours pour certain tout ce
que le Roy resout, &le jour
deson départ aprochant,ceux
qui ne devoient pas l'accompagner
redoublerent leurs
empressemens auprès de ce
Prince. Jamais on ne vit de
Cour si grosse. Les Ministres
Etrangers allerenr prendre
congé de Sa Majesté
,
ainsi
que les Chefs des Compagnies
superieures,& plusieurs
autres personnes distinguées
dans la Robe par leurs emplois,&
par leur mérite. Plusieurs
Etrangers se renditent
aussi à Versailles pendant les
derniers jours que le Roy y
devoit demeurer, & quantité
de Peuple de Paris y courut
pour avoir le plaisir de joüir
feulement quelques momens
de la veuë de ce Monarque'
lors qu'il iroità laMesse, ou
à la promenade, ou pendant
qu'il disneroit. Sa Majesté
devant partir un Samedy pour
aller coucher à Clayes, où la
Cour estoit obligéed'entendre
la Messe le lendemain.
parce qu'ilestoit Dimanche,
Elle eut la précaution de recommander
quelques jours
avant qu'Elle partist, qu'il s'y
rencontrait beaucoup de
Prestres pour en celebrer un
assez grand nombre, & fit
paroistre sa pieté par cet
ordre.
Le Voyage avoit esté arJ
resté d'abord pour le deuxiémede
May,mais la rougeole
quisurvinta Madame la
Duchese,fut cause que le
Roy le Temii au dixiéme dta
mesme mois. Ce jour estant
arrive, Sa Majesté
>
après avoir
entendu la Messe dans le
Chasteau de Versailles
, en
partit avec toutes les personnes
de distinction,&les
Troupes que jeviens de vous
nommer. Le nombre de celles
qui devoient faire le Voyage
estoit grand;cependant, celane
faisoit qu'une tres-petite
partie des Troupes de sa Maison
,puisque le Regimentdes
Gardes ne marchoit pas, &
qu'il n'y avoit qu'un quart des
Gendarmes
, & des Chevaux
Legers, avec la neufou dixiéme
partie des Gardes du
Corps ou environ. Il y avoit
outre cela, tous les Officiers
de sa Maison en quartier dont
je ne vous diray rien, tout ce
qui regarde cette Maison
n'estant inconnu à personne.
Comme le Roy devoit
passer à Paris, le Peuple impatient
de le voir occupa dés
le matin tous les lieux de son
passage, aimant mieux l'attendre
pendantplusieurs heul'es,
que de manquer à luy
souhaiter par ses acclamations
une longuevie, & un
heureux Voyage. Les Religieux
sortirentaussi de leurs
Convents, &: la pluspart des
Fenestres furent remplies de
personnesdistinguées.LeRoy
quis'est toûjours moins attiré
les coeurs par la grandeur
de son rang que par ses manieres
toutes engageantes, salüa presque toutes les Dames
qu'il vit aux fenestres.
Sa Majesté passa par la Place
des Victoires, où Mrle Duc
de la Feüillade & Mle Prevost
des Marchands l'attendoient
avec un grand nombre
de personnes de la premiere
qualité. Vous sçavez
sans doute qu'on n'a fait encore
qu'une partie duBastiment
qui doit embellir cette
Place. Cela fut cause qu'on
pria le Roy d'avoir la bonté
de dire de quelle maniere il
souhaitoit qu'on l'achevaft ,
& si on continueroit ce qu'on
avoit commencé , sur les
desseins de Mr Mansard son
premier Archirecte , c'est à
dire à l'égard de la figure de
la place, car les Bastimens onc
toûjours esté trouvez fort
beaux. Sa Majesté en parut
fort satisfaite, & jugea à proposque
l'on fuivift le dessein
qui avoit esté commencé.Mr
de laFeüilladeayant fait entierement
dorer la Figure du
Roy depuis que Sa Majesté
ne l'a veuë ,
Elle s'attacha à
la considerer attentivement.
Quelques-uns dirent qu'ils
l'auroient mieux aimée de
bronzerd'autresfurent d'un
sentiment contraire, &alleguerent
que la Statuë de
Marc Aurele que l'Antiquité
a tant vantée,& qui a esté
si estimée des Romains,avoit
esté dorée.Onrépondit que
ce n'estoit pas ce qui l'avoit
fait admirer,&quel'Empereur
Neron avoit fait dédorer
uneFigure d'Alexandre.Ceux
qui font profession d'estre
curieux ne prirent pas le party
île l'or, parce qu'il y a plus
de
<fcbronze que d'or dans leurs
Cabinets. Le Roy qui neparle
point sans se distinguer
,
dit
beaucoup en ne disant rien.
Il nevoulut chagriner personne,
& dit obligeamment
pourMrdela Feüillade,qu'il
nefalloitpas s'estonner qu'il eust
fait dorersa Figure
,
puisque si
l'onavoitpû la faire d'une matiere
plus precieuse
iI- & qu'il
-eujl eslé en estat d'en soûtenir ltt
dépense , il estoitpersuade qu'il
n'auraitrien épargnépourcela.
-
Je n'interprété gMnr ca.
paroles qui font voir tout le
bon sens & toute la delicatesse
d'esprit impaginable, &
dont la finesse consiste plus
en ce qu'elles font entendre,
qu'en ce qu'elles expliquent
àl'égard de la dorure.
Rienn'estant égal auzele
de Mrle Duc de la Foüillade,
qui tâche sans ccue de le faire
paroistre
,
par des augmentations
qu'il fait à tout ce qui
regarde la fiegure de la Place
es Victoires, & qui font autant
d'embellissemens nouveaux,
&: de témoins éclatans
delavive ardeur qu'il a pour
Sa Majesté
, on trouva huit
Inscriptions nouvelles écrites
en lettres dorées au feu, &
dans huit Cartouches de
bronze doré, attachezautour
du Piedestal
, qui porte cette
Figure couronnée par la Victoire.
Cette augmentation
de beautez
>
après l'estat où
Mr de la Feüillade a mis la
Figure, fait voir que lors qu'il
s'agit de faire quelque chose
qui regardelagloire du Roy
,
il n' y a rien d'assez grand
pour le pouvoir satisfaire,
Voicy ce qui remplit les huit
Cartouches.Les deux qui font
au dessous du Roy & entre les
deux Esclaves qui regardent
l'Hostel de laFeüillade
, contiennent
les paroles suivantes.
I. CARTOUCHE.
Il avoit sur pied deux cens
quarantemille hommes d'Infanterie
,
vsoixantemille chevaux
pins les Troupes de ses .drmées.
AItvalesjors qu'ildonna laPaix
à l¡''EEuropeen 1678(").
II. CARTOUCHE.
Sa fermetédans "/:,), douleurs
rassura les Peuples desolez au
mois de Novembre 1686.
Voicy ce qu'on lit dans
les deux Cartouches de la
face droite du Piedestal ,qui
est du costé de la ruë des Petits-
Champs.
III. CARTOUCHE.
Aprés avoir fait d'utiles Reglemenspour
le Commerce, (')
reformé les abus de laj'ijlicc> l
donna un grandexcnpled'équité
enjugeantcontresespropres ,jntfrests
en faveur des Habitans de
Paris dans une affaire de! sieurs millions.
IV. CARTOUCHE.
Six mille jeunes Gentilshommes
Jepa^e^ par Compagnies,
gardentsesCitadelles,ven remplacentdes
Ofifciersdeses Troupes
; & leur éducation rft dignt
de leur naissance.
Les deux Cartouches qui
font du costé de l'Eglise des
Religieux appellez les Petits-
Peres,fontvoir ce qui suit.
V.CARTOUCHE.
Deuxcens dix Places,Forts,
Citadelles
, Ports, v Ha'1-'(c5
fortifiez gjf revestusdepuis 1661»
jusques à 1086; cent quarante
mille hommesdepied, vtrentemilleChevaux
p.'ye^ par mois ;, assurent Jes Frontieres.
VI.CARTOUCHE.
Il a bastyplus de cinq cens Esqu'il a dottt'Sde riZ'c/itiy
considerables
, & il a estably
l'entretien dequatre censjeunes
Demoiselles dans la magnifique
Maison de S. Cir.
Voicy ce que renferment
les Cartouches du derriere du
piedestal qui regarde la ruë.
VII.CARTOUCHE.
Il a basty un superbe
j &*'
'Va/le édifice pour les Ofifciers &
Soldats que l'âge er les bltfju•*
res rendentincapablesdejervir^
mille livres de rente.
VIII. CARTOUCHE.
L? nombre desoixante mille.
Matelots enrolez,
,
dont vingt
miÜe fontemployer*sonservice
, (èj les quarante mille
Autres au commerce de ses Sujets,
marque la grandeur, dr le
bonordre delaMarine.
Vousvoyez Madame, que
ce qui est contenu dans ces
huit Cartouches donne uuç
haute idée de la vie du Roy,
&qu'onne peut dire plus de
choses en moins de paroles,
nyen faire concevoir davantage.
Chacun s'attacha à lire
ces Eloges,& l'on y prit beaucoup
de plaisir. Le Roy eut
ensuite la bonté d'aller voir
un des Fanaux qui font aux
quatre coins de la Place. Celuyoù
Sa Majefié alla, est le
seul qui soit achevé. Le nom
de Fanaux a estédonné à ces
ouvrages à cause des Fanaux
quifont au dessus. A chaque
endroit où ils ont esté placez,
il y a un groupe de trois colomnes
de Marbre sur un piedestal
de mesme matiere. Au
dessus de chaque groupe est
un Fanal composé de plusieurs
lampes, qui brulent
pendant toutes les nuits, &
pour l'entretien desquelles,
M le Duc de la Feüillade a
estably un fond. Enrre les
colomnes de chaque Fanal,
pendent six Médailles de
bronze
?
dans chacune desquelles
font representées
quelques actions du Roy, ce
JlUi fait vingt quatre Médailles
pour les quatre Fanaux.
Il y a dans le piedestal de chaque
groupe de colomnes , six.
Vers Latins; de maniéré que
le sujet de chaque Medaille.
cftexpliqué par deux de ces
Vers. Les lettres en font de
bronze doré au feu, ainsi que
les bordures & les autres ornemens
des Médailles.Voicy
lesavions deSaMajesté qui
font representées dans chacune
des six Médailles fonduës
en bronze. - - -
La premiere Médaille marque
la paix que le Roy a donné
à l'Europe en 1677. Elle est
expliquée par les Vers fuivans.
»
Teduce,te Domino, LODOIX,
prona omnia Gatio>
Urbesvicapere dociliquoqueparcere
captis.
La secondé represente le
passage du Raab, où les François
qui sauverent l'Allemagne
acquirent une gloire immortelle,
&: Mr de la Feüillade
une réputation
,
qui fera
vivre éternellement son n0111
dans l'Histoire, Les Vers qui
font connoistre cette grande
action, [one,
Et Traces sensere queat quid
Gallicavirtus,
Arrabo cæde tumens , &servata
Austria testis.
Onvoit dans la troisième
Medaille la grandeur, & la
magnificence des Baftimcns
duRoy, ce qui Ce reconuqi#
par les Vers suivans.
Quanta operum moles, &
-
-
quanto surgit ad auras
Vertice!sic positis LOVOIX
agit otia bellis.
Ces trois Medailles font
du costé de la Rue des Pc..
tirs-Champs, & font une
chute les unes sur les autres. ,Les trois autres font plus en
dedans de la Place
,- & en
regardent leBastiment. Elles
sontplacées de la me[mc
raani^te que celles dont jçL
viens de vous parler, c'est à
dire,qu'elles font entre deux
colomnes,&forment un rang
les unes sur les autres. La plus
élevée represente le Roy qui
ordonne qu'on rende les Places
qui ont estéprises à ses
Alliez. On n'a qu'à lire les
deux Vers suivanspourconnoistre
ce qu'elle contient.
Reddere Germanos LODOIX
regnataSueco
C> Arva jubet , Danosque
,
ladcr
~pe~ ~fflftupet Albis.
La Medaille qui suit fait
voir la jonction des deux
Mers
_j
ce que ces deux Vers
expliquent tres-bien.
Misceri tentata prius,Jeniferque
negata
Æquora,perpetuo LO D01Ji
dat foedere jungi.
On n'a qu'àjetter la veuë
sur la derniere de ces six Medailles,
pour y reconnoistre
d'abord l'Audience donnée
par le Roy aux Abassadeurs
xic Siam, & l'on n'a qu'à lire
les Vers suivans pour apprendre
que la renommée ayant
publié dans les Païs les plus
reculez, tout ce qui rend U
Roy l'admiration de l'Univers,
les Souverains de toutes
les Parties du monde, ont
envoyé des Ambassadeurs
pour estre témoins de sa
grandeur.
Ingentem Lodoicum armis,
ma^ne ,
fidemque
EgrejpimScitbia&Libit vt
nerentur~& Indi.
LLeeRoyaprès avoir consideré
avec une attention dignede
sa bonté, les changemens
qu'on avoit faits à la
Place des Victoires depuis le
jour que Sa Majesté y estoit
venuëj&:avoir fait à Mr de
la Feiiilladc»&àMr le Prévost
des Marchands tout
l'accueil qu'ils en pouvoient
cfpercr, partit aux cris de
Vive leRoy,mille&mille
foisréïterez
, car quoy que
la Place fust déjà fort remplie
de Peuple lors que Sa
Majesté y arriva, la foule
augmenta de telle forte sitost
qu'Elle y fut entrée,
qu'on auroit dit que tout
Paris y estoit,si sa grandeur
& le nombre prodigieux de
ses Habitans estoient moins
connus.
La pluspart des Officiers
qui ont accoutumé d'aller à
cheval, s'estant jointsensemble
pour prendre des Carosses,
afind'éviter la poudre qui iri1
commode beaucoup en cette
saison
)
& pour estre plus en
estat de servir le Roy, il y
tn avoit un nombre infiny
à la suite de la Cour, la dén
pense ne leur coutant rien
lors qu'il s'agit du service
d'un Monarque aussî agreable
à ceuxqui ont l'honneur
de l'approcher souvent, qu'il
est redoutable à ses Ennemis
& admiré de toute la Terre.
Je puis en parler ainsi sans
flaterie; & il merite tous M
jours de nouvelles loüanges.
par desendroits qui n'en ont
jamais attiré à aucun Prince.
Aussi peut-on dire que non
feulement il ne laisse jamais
échaper aucune occasion de
faire du bien, mais qu'il cherche
mesme de nouveaux
moyens d'en faire
, & qu'il
tft ingenieux à les trouver;
Ne croyez pas que cecy soit
avancé comme une loüange
vague. Je ne le dis que parce
que j'ay à parler d'un fait
sur ce sujet, qui découvre le
caractere de bonté du Roy,
autant que ses avions d'éclat
font connoistre sa puissance,
& la grandeur de son ame,
C'est icy le lieu demettreen
ion jour le fait qu'il faut que
Je
vous explique, puis qu'il
regarde la fuite de sonVoyage.
Je vous diray donc que
pendant toute la route? Sa
Majesté a presque toujours
dînédansdesVillages. Vous
allez sans doute vous imaginer
(& vostre sentiment fera
generalemeut suivy) que les
Villages
Villages les plus forts & lc^
plus riches ne leftoient pas
trop, pour avoir l'honneur
de recevoir un si grand Monarque.
C'estoit cependant
tout le contraire; le plus pauvre
avoit l'avantage d'estre
préferé, & l'on a veu cela
observé dans toute la route
avec une exactitude que je ,,'
ne sçaurois assez marquer.
Vous n'en pourrez douter,
lors que je vous auray dit
que Sa Majesté, qui ne fait
., point de Voyages sans avoir
la Carte des Païs où Elle va
examinoit tous les jours sur
celle qu'on luy avoit fournie,
les lieux par lesquels il falloit
qu'Elle passast. Elleyvoyoit
tous les Villages, Elle s'informoit
de leur estat, Ôc
nommoit ensuite le moins
accommodé, parce que la
Cour ne s'arreste en aucun
lieu sans y répandre beaucoup
d'argent. C'est ce qui
s'est fait dans tous les Villages
où l'on a este obligé de
s'arrester pendant ce dernier
Voyage. Le Roy dînoit
fous une Feüillée,&
l'onen dressoit aussi pour
les principales Tables de la
Cour. Ainsi tous lesPaïsans
estoientpayez pour couper
des branches de verdure, &
pour travailler à la construction
de ces Feüillées.Ils tiroient
ausside l'argent de
tout ce qu'il y avoit dans leur
Village qui pouvoit servir
aux Tables, & de tout ce
qu'ils avoient d'utile aux
é,quip- ages de la Cour, a.1insi
que de leur foin & de leur
avoine ; & le Roy ne laissoit
pas outre cela de leur faire
encore sentir ses liberalitez;
en forte que ces heureux Villages
le souviendront longtemps
d'avoir veu un Prince
qu'on vient tous les jours admirer
du fond des Climats
les plus reculez.
LeRoy estant sorty de la
Place des Victoires
, trouva
encore une infinité de peuple
dans les autres ruës de Paris.
qu'ilavoitàtraverser, Les dC4
monstrations d'allègresse ne
cesserent point, non plus que
les cris de Vive le Roy, de maniere
que cous les Peuples étant
animez duineline zelcon
eust dit que ces cris dejoye
n'estoient qu'un concert des
mesmes personnes, quoy qu'à
mesure que Saavançoit,
il fust formé par diverses
voix. Le Roydîna ce jour-là.
au Vllage de Bondy, (^ rencontra
sur le cheminM leBaron
deBeauvaisavec tous les
Gardes & les Officiers des
Chasses de sa Capitainerie,
dans toute l'étendue de laquelle
ce Prince luy permit de
l'entretenir à la portiere de
son Carosse. Les Plaines de
S. Denis dépendent de cette
Capitainerie. Mr le Prévost
des Bandes parut sur la même
route, & posta diverses
Brigadesauxenvirons des
Bois. Les Dames que je vous
ay marqué qui estoient du
Voyage, avoient l'honneur
de dîner avec Sa Majesté,
ainsi que Madame la Comtesse
de Gramont, & Madame
de Mornay, que je ne
vous ay pas nommées. Madame
de Moreüil, & Madame
de Bury? Dames d'honneur
de Madame la Duchesse,
& de Madame la Princesse
de Conty, eurent le mesme
avantage. Les Filles d'honneur
ne dînerent point avec
Sa Majesté,mais elles y souperent.
Il fut réglé ce jour-là
qu'il n'y auroit à l'avenir que
deux Filles d'honneur des
deux Princesses qui auroient
ce privilège. Le nombre des
Princesses auroit esté encore
plus grand dans ce Voyage,si
lors que le Roy partit, Mademoiselle
d'Orléans ne s'estoit
point trouvée àEu, &Madame
la Duchesse de Guise
,
aux Eaux de Bourbon. Madame
de Montespan auroit
aafli esté duVoyage, mais
le foin de sa santé l'avoit
obligée d'aller prendre de
ces mesmes Eaux. Monsieur
le Prince,Monsieur le Duc ,
lx, Monsieur le Prince de
Conty n'ont point quitté le
Roy.
Monseigneur leDauphin.
qui après avoir GÜy la Mette*
estoit party de Versailles des
le grand matin pour aller
chasser dans la Forcit de Livry
, yprit un loup des plus
vieux,&congédia Mr le Chevalier
d'Eudicour, Frere du
Grand Louvetier de France,
&toutl'équipage de la Louveterie;
à la teste duquel il
estoit.Le mesme jour,le Roy
aprèsavoirdîné alla chasser
dans les Plaines& sur les coteaux.
Sa Majesté
, a pris le
mesme divertissement pendant
toute la route, comme
je vous le diray dans la fuite
de cette Relation.
Monseigneur le Dauphin
arriva à Claye avant six heures
du soir, parce qu'ilsçavoit
que c'estoit à peu prés
l heure où le Roy devoit s'y
rendre. Il changea d'habit&
alla au devant de Sa Majesté,
On connoist par là combien
ce Prince est infatigable,qu'il
tn galant, & qu'il a beaucoup
de tendresse pour le Roy.
Sa Majestéarriva à Claye
à l'heure que je viens de vous
marquer, & fut commodementlogée
dans lamaison de7
M Enjorant, Avocat general
duGrand Conseil
>
& Seigneur
en partie de ce Village.
Il eut l'honneur de ialuer
leRoy, qui le receut avec
cet air engageant qui est
si naturel à ce grand Mo*
narque. Comme toute sa
maison estoit marquéepour
le. Roy, les Maréchaux des
Logis en marquerent une
pour luy dans le Village, lors
qu'ilsmirent la craye pour
le logement des Officiers qui
estoient du Voyage; de forte
qu'il fut regardé ce jour-là
comme estant de la Maison
de Sa Majesté. La qualité
d'Hofie duRoy futcelle que
les Maréchaux des Logisécrivirent
en mettant la craye
sur le logis qu'ils luy destinerent.
Monseigneur,& Madame
la Duchesse eurent des
[Appârtemens vers le Château
où le Roy logea.Madame la
Princesse de Conty,&Monsieur
le Duc du Maine loge- 1
rent dans la Ferme de Mr
d'Herouville, Maistred'Hostel
deSaMajesté. Messieurs
les Princes du Sang eurent
ensuite les logis les plus commodes,
&: ceux qui voulurent
estre plus au large,allerent
à Meaux.
} M de laSourdiere, Ecuyer
de Madame la Dauphine, qui
cil le mesme qu'elle envoya
cnBavicrc? pour porter à M*
l'Electeur de cc nom) la nouvelle
de la naissance de Monseigneur
le Duc de Berry,
vint à Claye de la part de
cette Princesse
, pour ravoir
si Sa Majesté y estoit arrivée
en bonne santé.
Il y aicy à remarquer une
choseque personne n'a peutestre
jamais observée.C'est
que lors que les Princes de la
Maison Royale font separez,
sans estreéloignez les uns
des autres -que d'une journée>
ilss'envoyent tous les
jours un Gentilhomme pour
s'informer de l'estat de leur
santé,maisaussi-tost qu'ils
commencent à s'éloigner davantage
,
ils ne se donnent
plus de leurs nouvelles que
par des Courriers, qui leur
en apportent tous les jours.
Dés qu'ils reviennent à une
journée de distance
,
ils recommencent
à se dépescher
un Gentilhomme,& c estpar
cette raison que Madame la
Dauphine n'en renvoya plus
qu'après que le Roy commença
d'approcher de Versailles.
Ce Prince estant arrivé à
Claye entre six & sept heures
du [oir) y receut un Gentilhomme
de Madame, &: dépescha
aussi-tost à leurs AItérés
Royales Mdu Boulay,
Gentilhomme ordinaire de
sa Maion, pour apprendre
des nouvelles de la santé de
Monsieur, qui s'estoit trouvé
mal le matin à la Messe de
Sa Majesté à Versailles.
La Cour fut tres- bien logée
à Claye,parce qu'on étendit
les logemens jusques à un
lieu voisin
)
qui est un Hameau
contigu à ce Village,
dont il n'est separé que par
un petit ruisseau? qui fait
trouver aux portes des maifons
des Païsans,desPrairiestres
agréables,plantées avec
soin &avec compartiment.
Je ne vous marque point
les lieux & les heures où le
Roy a tenu Conseil. Ce Prince
ne manque jamais de temps
pour ce qui regarde les affairesde
l'Etat.Illeur sacrifie son
repos & ses plaisirs
}
il tient
Conseil en tous lieux? & à
toute heure ,quand ille juge
important pour le bien de
son Royaume,& il a travaille
dans le Voyage de Luxembourg,
avec la mesme
application qu'il fait à Versailles.
Il est vray que ce n'a
pas esté avec tous ses Ministres
,Mrde Croissy estant le
seul qui soit party de Paris
avec ce Monarque, mais
tomme il est luy-mesme son
premier Ministre,on peut dire
qu'il travaille souvent seul
autant que dans le Conseil,
Sa Majesté donnant aux
affaires pendant ce Voyage
autant d'application qu'à
l'ordinaire
,
voulut que sa
Cour trouvast par tout les
mesmes plaisirs, pendant
qu'Elle ne vouloit se retrancher
ny les peines,ny les soins
qu'on luy a toûjours veu
prendre depuis qu'Elle gouverne
par Elle-mesme ; &
pourcet effet Elle resolutde
tenirpartout Appartement.,
Ainsi dés lapremiere couchée
,qui estoit à Claye, on
trouva plusieurs chambres
préparées pour divers Jeux.
& chacun joüa avec lamesme
tranquillité? & aussi peu
d'embaras que si l'on eust
citéencoreà Versailles, tant
les ordres avoient esté bien
donnez pour les logemens,
:& pourtoutce qui pouvoit
contribuer à la commodité
desPersonnesde clualt"lui
suivoient la Cour.Les Appartteemmeennssoonntt
pprreeslqquuee ccoonnttIinnuueétous
les jours pendant tout
le restedu Voyage.
Monseigneur le Dauphin,
partit de Claye le lendemainonzièmeàsept
heures du.
matin. Ce Princechassatout
le jour dans la Forest deMonceaux
; &commeSa Majesté
devoir coucher ce jour-là à
laFerté sur Joüare, il prit le
party d'y arriver enchaOanCp
;,&de courre le Cerf dansles
:b.uiflx>ns ; ce qu'il fîtavecles
chiens de Mr le Chevalierde
Lorraine. Il prit plusieurs
Cerfs; entre lesquels il y en
avoit un qui se fit courre
long-temps, & qui passa dixhuit
étangs à la nâge.
Le Roy, après avoir entendu
la Messe à Claye, alla
à Monceaux. Toute la Cour
passa dans Meaux, pour se
rendre à cette Maison Royale
, & lors que Sa Majesté
l'eut traversée au bruit des
acclamations du Peuple,Elle
trouva le Regiment de Vivans
qui l'attendoit en ba.
taille. C'est un Regiment de
Cavalerie
>
auquel on ne peut
rien ajoûter,tant pour la
bonté des Cavaliers, que pour
la beauté des chevaux. Ce
Regiment alloit au Camp de
laSaone,& avoit un sejourâ
Meaux?ce qui fut causequ'il
eut l'honneur d'estre veu du
Roy. Sa Majesté en fut trescontente,
de le trouva beau.
Elle eut mesme labonté de
vouloir bien recevoir un
Chien couchant de Mr Li:"
grades qui le commande. Le
Roy dîna à Monceaux. C'est
un vieux Chasteauqui a fait
le plaisir de plusieurs Rois,.
& qui appartient à Sa Majesté.
Ce lieu qui est fortriant,
a une tres-belle veuë, & le
Bastiment enest magnifique..
Le Roy voulant honorer l'ouvrage
de ses Ayeux? le fait
reparer? & bien-tost on ne
verra plusrien en France qui
ne porte des marques de sa
magnificence&de sabonté.
Toutes les Maisons Royales
ayant
ayant pour Capitaine une
personne d'une qualité distinguée,
MrleDuc deGesvres,
premier Gentilhomme
de la Chambre, & Gouverneur
de Paris,joüit de la Capitainerie
de Monceaux?que
possedoitMrle Duc de Trêmes
son Pere. Il vint recevoir
SaMajesté
,
accompagné du
Lieutenant, & de tous les
Officiers & Gardes des Chasses
qni dépendent de luy, à
l'endroit où la Capitainerie
duit jusqu'au mesme endroit
par Mr le Marquis de Livry ,
aussi Capitaine des Chasses de
Livry &c qui avoir esté recevoir
ce Prince jusques à
Bondy avec tous ses OSiciers.
Le Roy? qui avoit dépesché
le foir précedent Mr du
Pouhy
, pour sçavoir l'estat
de la fanté de Monsieur, en
apprit des nouvellesà Monceaux
parce mesme Gentilhomme
, qui arriva pendant
<qjuuee SSaa Maaj*ecsttlé' estoit à table,
êc luy rapporta que Son Altesse
Royale avoit pris du
Quinquina , & dormy assez,
tranquillement depuis quatre
heures du matin jusques
a dix. Ce Prince monta à
cheval à l'issuë de son dîné.
avec Madame la Princesse de
Conty, & deux des Filles
d'honneur decette Princesse,
& alla à la Chasse de l'Oiseau.
Tant que l'on a demeuré
dans l'étenduë de la Generalité
de Paris,Mde Menars
qui en a l'Intendance
, n'a
point quité le Roy afin d'être
toûjours en estat de recevoir
ses ordres, & luy a
rendu un compte exact de
toutes les choses qui regardent
son Employ.Cela fait
voir que Sa Majestés'applique
sans cesse,puis quemesme
dans le temps de ses plaisirs,
Elles'entretient plûtost de ce.
qui se passe dans son Royau-.
!De, que de ce qui peut avoit
rapport à son divertissement
Ce Prince ayant l'esprit ex-r
'- - -.. - -
tremement pénétrant,unmot
luy fait aprofondir bien des
choses, de forte que ce qu'il
aprend lors qu'ilsemble ne
s'informer que par converfation
de ce qui se passe
,
luy
donne lieu de remedier à
quantité de desordres, & fait
que souvent il en prévient
d'autres. Pendant toute sa
marche il a toûjours esté
prest à écouter & à satisfaire
par ses réponses, ceux à qui
sa bonté a permis de luy parler
; & quelquefois lors qu'il
avoit commencé à jouer)aiffn
<J..e la Cour se divertist, il
quittoit le jeu, & travailloit,
ou s'occupoit à faire du
bien.
Mr l'Evesque de Meaux s'est
prouvé par tout où le Roy
a passé dans son Diocese, &
sçachant que le principal
foin de ce Prince estoit que
toute sa Suite entendist la
Messe, &: particulièrement les
Dimanches, ce Prelat envoya
plusieursReligieux à Claye,
& en envoya aussi dans les
Quartiers desGardes duCorps
& dans ceux des Mousquetaires)
des Gendarmes,&des
Chevaux-Légers.LaCour ne
Cf manquoit pas d'Ecclesiastiques
pour la Maison du Roy,
-& Mr l'Evesque d'Orléans -a--
Voit ,in de regler les tempsauGjaeÊs
chacund'eux devoit
C,elcb,-e"la Messe.
Toute la Cour arriva de
bonne heure àla Ferté sur
Joüare. C'est un lieu situé
dans une gorge enchantée,
au fond d'une plaine. LaRiviere
de Marne contribuë
beaucoup à la beauté du païsage,
& à la fertilité du Terroir.
Le petit Morin vient la
grossir auprés & au dessus
de l'Abbaye, & y forme mille
Prairies abondantes en pâturages.
Ce Bourg est dans la
Brie Champenoise,entre Chasteau-
Thierry & Meaux. Les
Prétendus Reformez le prirent
vers l'an 1562. pendant
les Guerres Civiles du der-
-
nier Siecle. La Chasse y fut
tres-divertissante. Le Roy y
vola des Corneilles. Mr de
Terrameni, Capitaine du Vol
des Oiseaux du Cabinet du
Roy ,a eu beaucoup d'honneur
dans ce Voyage. Les Equipages
y ont fort paru, &
il s'en: attiré beaucoup de
louanges pour tout ce qui
regarde sa Charge.
On admira à Joüare un
Pont qui joint le Chasteau
au Fauxbourg. Ce Pont a
cousté beaucoup. Il effc fait
de bois sans appuy ) tout suspendu,
& soutenu feulement
par l'épaisseur des pieces qui
le composent Il est de soixante
& quatre pieds de
long, & depuis qu'il est construit
>
il n'a rien perd u ny de
sa beauté,ny de saforce. On
coucha dans le Chtsteau, qui
appartient à Mrle Comte de
Roye. - Il est situé dans une
petite Isle fortagreable.Monseigneur
prit place dans le
Carosse du Roy. Une des
Dames luy ceda la sienne, &
se mit dans le second Caloife)-
ce que quelques-unes
ont fait alternativement.
Monseigneur n'y estoit que
pendant une partie du jour,
parce que la Chasse
,
dont on
trouve l'exercice utile à sa
santé
)
l'occupoit souvent.
Madame la Princesse d'Harcour
eut ce jour-là un accés
de Fiévrequil'obligea de
partir plus tard. Il fut suivy
d'un second accès de Fièvre
double-tierce. Elle prit du
Quinquina, &la Fiévre ne
luy revint pas. Toute la Cour
en marqua beaucoup de LOYc..
On dîna le it. à liffct
éloignée de quelques Villages
qui sont aux environs,
&qui appartiennent aux Celestins.
On allasouper à
Monmircl
,
qui appartient à
Mr de Louvois. Toutes les
Dames,& plusieurs Seigneurs
de la Cour eurent l'honneur
de souper ce soir-là avec le
Roy. La Table estoitde seize
couverts, On apprit en ce
lieu-là la mort de Madcmoiselle
de Simiane, dont
je vousaydéjà parlé dans ma
Lettre precedente. On y apporta
aussi la nouvelle de la
mort subite de Mr l'Evesque
d'Amiens, qui surpritd'autant
plus, que M de Breteuïl
assura que depuis deux jours
il avoit soupé avec ce Prélat.
Ces deux morts firent parler
de celle d'un descent Suisses
de la Garde de Sa Majesté,
qui estoit mort le matin en
s'habillant. Il y a une tresgrande
quantité de Lievrts
>
& de Perdrix à Monmirel,
Le Roy y pritle divertissement
de la Chasse, & alla voler.
Ony sejourna le 13 & toute
la Cour y demeura avec
joye, parce que le vent estoit
violent à la campagne, &
qu'il y avoit beaucoup de
poussiere. On se promena
dans les Jardins, & le Roy
au retour de la Chasse prit
le divertissement de la promenade
avec les Dames sur
les Terrasses, qu'il trouva fort
belles. Monmirel efl dans un
territoire tres-fertile.
Mr de Louvois qui ne s'applique
pas moins à tout ce
qui peut faire fleurir les beau::
Arts dans le Royaume,qu'à
ce qui est de la Guerre , va
faire establir une Verrerie à
Montmirel
, & la Cour en vit
tous les apprêts.
Le Roy y tint deux fois
Conseil avec Mr de Ci-oiffy ;
c'est ce que Sa Majesté a fait
chaque soir
>
après estre arrivée
dans tous les lieux où
Elle a esté coucher. Elle prit
! aussiàMontmirel le divertissement
du vol du Milan. Le
sejour que l'on y fît, & qui
n'avoit pas esté marqué dans
1i route, fut cause que
l'on retrancha celuy qu'ondevoit
faire à Châlons
)
afin
que le Roy qui ne manque
jamais à executer les desseins
qu'il prend, puft se rendre à
Luxembourg le jour qu'il y
estoit attendu.
Toute la Cour partit de
Montmirelle 14. & alla dîner
à Fromentiercs. A cinq heures
on avoit paffé le défile
d'Etoges. Sa Majesté prit
congé des Dames, & monta
à cheval pour aller chasset
dans les belles plaines de
Champagne. On alla coucher
à Vertus. Ce lieu a este
autrefois considerable, & étoit
l'apanage des Cadets des
Comtes qui portoient le nom
de la Province. Du temps de
Sigebert Roy de Mets, qui
vivoit en 570. il y avoit un
Duc de Champagne nommé
Loup, qui témoigna beaucoup
de fidélité, à conserver
les Etats du jeune Roy Childebert
, contre ceux qui les
vouloient envahir. Il y eut
ensuite plusieurs Ducs de
Champagne
,
mais ce titre de
Ducqui n'estoitpas alors une
dignité perpetuelle, ne faisoit
que marquerune forte de
gouvernement. Le premier
Comtehereditaire de Champagne,
fut Robert de Vermandois
,
Fils d'Herbert IL
&d'Hildebrante, qui se ren-
,
dit maistre de la Ville de
Troye en 253.Je ne vous dfe
rien de ses Successeurs. Ils
continuerent la poiterité jusqu'à
Thibaud IV. surnommé
le Posthume ou le Faiseur de
Chansonsqui succeda à son
Oncle maternel
,
Sanche le
Fort,au Royaumede Navarre.
Il mourut à Troye en 1254.
estant de retour du Voyage
d'Outremer. ThibautV. fou
Fils qui avoit épousé Isabelle,
Fille du Roy Saint Loüis,
estant mort sans Enfans après
avoir fait lemesme Voyage.
laissà ses Estats à Henry ~HI
son Frere. Ce dernier n'avoit
qu'une Fille nommée Jeanne,
qui en 1184. épousa Philippes
le Bel pendant la vie de
Philippes le Hardy son Pere ,
&. depuis ce temps ,la Champagne
a esté inseparablement
unie à la Couronne de France.
Les Comtes de Champagne
faisoient tenir ks Etats de
leur Pays par sept Comtes
leurs Vassaux
,
qu'ils appelloient
Pairs de Champagne.
C'estoient les Comtes de
Joïgny, de Retel >de Bricnîic>
de Roucy
?
de Braine , de
Grand-Pré, &deBar-fur-
SIelinye.
a trois Eglises à Vertu,
avec deux Abbayes hors les
portes. Les Guerres yont laifsédes
marques de leur fureur,
quine peuvent estreeffacées
que par le regne deLoüisLE
GRAND. Le Roy y fut 1-ogc
fort étroitement, & comme
cestoit sur la rue
?
il fut exposé
au bruit du passage des
équipages de la Cour. Ce
Prince auroit pu estremoinsmal
;mais ne pouvant renoncer
à ses manières honnestes,
qu'il conserve mesme aux dépens
de son repos ,
il aima
mieux que celuy des Princesses,
re fust point troublé ,
fk voulue qu'elles fussent logées
plus commodementque
luy.
Le JJ: toute laCour dlfnx.
àBierge
, ôc alla coucher
à a Bierge >-,
& Châlons. Cette Ville est en
Champagne, ôcson Evesché
est Suiffragant del'Archevesché
de Rheims. Elle est ancienne
,
& dés le temps de
Julien l'Apostat, elle tenoit
rang entre les premieres Villes
de la Gaule Belgique, Il y
a de belles rues avec des
maisonsassez bienbasties. La
Place où l'on voit la Maison
de Ville, & celle où est l'Eglise
Collegiale de Nostre-
Dame,font les plus considerables.
La Cathedrale de Saint
Estienne est dans une Isle que
forme la Riviere de Marne,
dont une partie entre dans la
:Ville, &y fert beaucoup pour
la commodité des Habitans.
Elle a de ce cofté-là d'assez
bonnes Fortificarionsquele
Roy François I y a fait faire,
& elle est entouréedemurailles
avec des Fossez presque
toûjours remplis d'eau. Il y
a encore douzeParoisses,entre
lesquelles plusieurs font Collegiales
Les avenues de Châ-
Ions font tres-agreables >& il
y a autour de la Ville plufleurs
lieux de promenade,
entre lesquels celuy du Jare
cil fort renoffilné. La Riviere
,-' der
de Marne qu'on passe sur divers
Ponts, la rend une Ville
de negoce. Elle a eu des Comtes
qui ont cedé leur droit
aux Evesques. C'est par là
qu'ils font Comtes Pairs de
France.
Le Roy entra à cheval à
Châlons
) & fut receu par
le Maire & les Echevins. On
ne luy fit aucune harangue,
parce qu'il avoit fait donner
lordre dans tous les lieux par
IOÙ il devoit passer
)
qu'on ne
le haranguast point ; mais il
eut la bonté de vouloir bicri
recevoir les Presens de Ville,
Le Chapitre de la Cathédrale
eut aussi l'honneur de le famlücr,
ayant à sa teftcM l'Evê.
que deChâlons. Les Chanoines
se recrierent ensuite sur lai
douceur, & sur l'affabilité det
ce Monarque, dont ilsnecesfent
point de parler, Madame:
la DuchessedeNoailles lai
Douairière, qui a esté Dame
d'Atour de la feuë Reyne:
Mere du Roy, & dont la vertu
exemplaire a toûjours çftç:
applaudie,caril en - cft de
faussesqui n'imposent pas a
tout le monde, eut le mesme
honneur. Sa Majesté luy fit
d'autant plus d'honneftetez,
qu'il y along-temps que son
merite luy est particulierement
connu. Le Roy se retira
ensuite -pour tenir Conseil.
Mr le Duc de Noailles
> &
M l'Evesque de Châlonsfon
Frere ,
firent servir plusieurs
Tables magnifiques, pour
toutes les personnes de la
Cour qui voulurent y manger.
Le Jarc leur servit de promenade
pendant quelques
heures. Je ne m'étens point
icy sur la beauté de ce lieu,
parce que j'en ay fait une
description dans le Volume
que j'ay donné, qui ne contient
que ce qui s'est passé au
Mariage de Monseigneur le
Dauphin. Il y eut au Jare une
prodigieusequantité de personnes
de toutes conditions,
que l'impatient dehr de voir
le Roy avoit fait venir de
toute la Champagne. Les
principaux Officiers de la
Ville de Troyes se rendirent
à Châlons? & firent vingt
lieuës pour avoir l'honneur
de salüer ce Monarque. Les
Dames de la Province eurent
beaucoup de chagrin de l'ordre
qui fut donné, de n'en
laisser entre,r faulc.unIela.u1so1u- per , qui n'eust ellenommée
par Sa MLijefté.C:lles qui
crurent n'estre pas assez connuës
pour pouvoir estre du
nombre, ne se presenterent
point, dans la crainte d'estre
refusées,ce qu'on ne trouva
pas ordinaire, & qui fut fort
remarqué. Le Roy eut la bonté
de permettre qu'on les laissast
toutes entrer le lendemain
dans le Choeur de FIL
g-I.Ife>o-t'i elles eurent le temps
de considerer SaMajesté &.
Jtoute la Cour pendant que
l'on dit la Messe.La Musique
de cette Cathedrale chanta
un Motet, dont il parut que
l'on fut assez content. Mr
Evesque Comte de Châlons,
,& Mr le Ducde Noailles accompagnerent
toûjours le
Roy tant qu'il demeura dans
cette Ville. On auroit bien
voulu sejourner dans un lieu
aussi
-
beau & aussispacieux
que celuy là, où les logemens
estoient fort commodes;mais
les mesuresestant prises pour
se rendre à Luxembourg au
jour marqué, on partit le 16.
à dix heures précises du matimpour
aller coucher à Sainre-
Menehout.MdeChâlons
accompagna le Roy jusques
aux confins de son Evesché,
& Mr l'Evesque de Verdun
le reçût à l'entrée du fien.
La journée de Chalons à
Sainte-Menehout se trouva
fort longue pour les Equipages.
On dîna à Bellay, qui
n'est qu'une Ferme sans aucune
autremaison aumilieu
de la camp.-,gnc,& on rendit le
lieu agreable pour y recevoir
le Roy. Sa Majesté y chassa
pendant une partie Je l'aprésdînée,
& alla coucher à
Sainte-Menhout. Cette Place
qui avoit estéprise sur
nous pendant les temps difsiciles,
fut reprise en 1653. par
Mr le Maréchal du Plessis-
Pralin; & ce Siege que le
Roy voulut presser en per,
sonne
,
obligea Sa Majesté
d'aller en Champagne en ce
temps-là. Le Roy ne trouvant
pas la Cour assez commodement
logéedansSainte-
Menehout, resolut de n'y
passer pas la Feste du S. Sacrement
à son retour, &
nomma Chalons pour y faire
la ceremonie de cette FesteCela
obligea de retrancher
un des jours du sejour, de Luxembourg.
Le Roy conti-
Ilua de donner par là des
marques de sa bonté à toute
la Cour,& Mr l'Evesque de
Châlons montra tantdejoye
de ce qu'il auroit l'honneur
de recevoir encore ce Monarque
,que plufieufs luyen
firent compliment.
Le 17. le Roy entendit la
Messe aux Capucins, & fit
de grandes libéralités a leur
Convent. On alla ensuite dV;
ner à Vricourt ,
prés de Clermont
en Argonne. Les chemins
se trouvèrent fort rudes
,dans des bois, dans des
montagnes, & dans des valées
d'un terroir remply de
pierres. On arriva d'assez
bonne heure à Verdun?où
l'on fut si bien logé) que ce
fut avec plaisir
que l'on y
passa la Feste de la Penteccste.
Verdun est une Ville
forte sur la Meuse, & il en
est peu de mieux situées dans
la Lorraine. L'Evesché est
Suffragant de l'Archevesché
de Reims. Cette Eglise a eu
d'illustres Prelats. Ils se disent
Comtes de Verdun,&
Princes du Saint Empire. La
Riviere de Meuse rend cette
Ville agreable par diverses
Isles qu'elle y formé. Le
Roy HenryII. la prit en
IJJI. Le Chapitre de l'Eglise
Cathedrale de Nostre-Dame
est fort considerable.M l'Evesque
de Verdun receut le
Roy dans son Palais Episcopal.
Il est tres-beau, & l'on
y voit jusques à dix pieces de
plein-pied L'air y est admirable.
Ce Palaisest élevé sur un
Roc d'où toute la baffe-Ville
se découvre. Des Prairiesarrofées
par la Meuse
>
& des
vallons assez éloignez, &
tres-fertiles en tout ce qui
est necessaire pour la vie, en
rendent l'aspect des plus
riants. Les ameublemens de
ce Palais sont fort somptueux,
& fervent beaucoup
à faire voir la magnificence
de Mrde Bethune, qui joüit.
en sa retraite de quarante
mille livres de rente, que
luy rapporte son seul Evesché.
Les Anis qu'on appelle
de Verdun, autrement Dragées
de toutes manieres, se
trouvant meilleurs en cette
Ville-là qu'en aucune autre
du monde, elle ne fuit point
l'exemple des autres Villes
dans les Presens qu'elle fait
aux Souverains? & au lieu
d'offrir du Vin, elle donne
de ses Anis. Ainsi elle en sir
present de cent boëtes au
<
Roy. M l'Evesque de Verdun
est Fils d'Happolite de
Bethune? Comte de Selles,
Marquis de Chabris
>
dit le
Comte de Bcthune
, mort en
1665. aprësavoir esté honoré
du Collier desOrdres du Roy
en 16Cu & fait Chevalier
d'honneur de la Reyne Marie-
Therese d'Austriche. Il
avoit épousé en 1629.Anne-
Marie de Beauvilliers, Soeur
de M le Duc de S. Aignan,
qui tant que la feuë Reync
aYcfçuj a eu l'honneur de
la servir en qualité de Dame
d'Atour. Ce Prelat avoit avec
luy Madame de Rouville sa
Soeur,Veuve de M le Marquis
de Rouville, Gouverneur
d'Ardres.Elle eut l'honneur
de manger avec le Roy
dans les trois Repas que Sa
Majestéfit à Verdun.
Le jour de laPentecoste,pres.
que toute la Cour sir ses devotions,
à l'exemple du Roy.
C'estune choseassez extraor.
dinaire pendant le coursd'une
marche. mais quene voiton
point de nouveau fous le
Regne de Loüis XIV. sur
tout pour leschoses qui regardent
la Religion & la
pièce1 Monseigneur le Dauphin
se rendit dans l'Eglise
Cathedrale dés sept heures
du matin;&: après avoir entendu
la Messede M l'Abbé
Fleury, Aumônier du Roy,
ce Prince communia par les
mains de cet Abbé.
Sur les dix heures, le Roy
passa à travers ses Mousquetaires
rangez en haye des
deux costez de la court de
l'Evesché
, &: au milieu des
cent Suisses dela Garde, postez
dans la mesme Eglise.
SaMajestéestoitenvironnée
de ses Gardes du Corps &de
toute sa Cour. Elle se rendit
dans leChoeur, où Elle fut
suiviede Mr l'Evesque de
Verdun,&de tous les Chanoines
de cetteCathedrale.
LeRoyestoit en Habit de
cérémoniec'eit à dire
> en
Manteau,revestu de son Col-
Jjjcr de l'Ordre. Il entendit
là Méfie de Mr l'Evesque
d'Orléans, son premier Aumônier
,
dont il receut la
Communion La seconde
Messeque Sa Majesté entendit,
fut dite par l'un de ses
Chapelains. Au sortir de
l'Eglise, Sa Majesté toucha
prés de cent Malades, dont
Mr leDuc deNoailles avoit
fait amener une partie de
Chalons. Ils estoientrangez
sous les arbres de la premiere
court de l'Evesché. Ce Prince
quitta ensuite son Habit de
ceremonie, & revint avec
Monseigneur le Dauphin, &
toute la Cour, entendre la
grand' Messe, qui fut pontifïcalemenr
celebrée par Mr
l'Evesque de Verdun, &
chantée par la Musique de
la Cathedrale.Cette Musique
plut assez à toute la Cour,
& on trouva la voix d'un des
Enfans de Choeur tres-agreable.
Plusieurs mesme la jugerent
digne de la Chapelle
du Roy. Il y a quatre de ces
Enfans de Choeur qui joüent
du Violon, qui sont, une
Taille, une Haute-contre, &
deux Baffes.
Le Roy eut la bonté de
toucher encore soixante &
dix Malades en sortant de la
grand' Messe. C'estoit beaucoup
après en avoir entendu
trois,&touché d'autres Malades.
Sa Majesté vint l'aprésdînéeentendre
Vespres dans
la mesme Eglise, &: Mr de
Verdun officiaencore en Habits
pontificaux. Le Roy étoit
dans les hautes Chaises à
droite.& aprèsluy,Monseigneur,
Madame la Duchesse,
& Madame la Phnccffe de
Conty. Aprés ces Princesses
estoient Monsieur le Prince-
Monsieur le Duc , Monsieur
le Duc du Maine, & Monsieur
le Comte de Toulouse.
Les Dames occuperent le reste
des places. Jamais les peuples
de Verdun n'avoient vû
ny tant de magnificencesny
une si augusteAssemblée ; &
l'on peut mesme dire qu'ils
n'avoient jamais vû dans leur
Eglise de si grands ny de si
édifians exemples depieté.
Le Roy s'enferma après
Vespres avec le Pere de la
Chaise pour travailler à remplir
les Beneficesqui vacquoient
depuis le jour de
Pasques, qu'il avoit fait une
nomination. On fut quelque
remps sans sçavoir cette derniere
, parce que lePere de
la Chaise n'en dit rien après
qu'il fut forty du Conseil.
Enfinonappritque Mr rAb..
bé de Saint Georges,Comte
de Saint Jean de Lion vnommé
depuis quelque temps à
l'Evesché de Clermont,avoit
esté fait Archevesque de
Tours, & que l'Evesché de
Clermont avoit esté donné
à M l'Abbé de Champigny
Sarron, Chanoine del'Eglise
de Paris. Je vous parlay amplement
de M l'Abbé de S.
Georges
,
lors que le Roy le
pourveut de l'Evesché de
Clermont. M l'Abbé de
Champigny qui vient d'y
estre nommé, est Fils de François
çoisBochartdeChampigny,
Seigneur de Saron, qui après
avoir esté Maistre des Requestes,
Conseiller d'Etat, &
Intendant pendant trente années?
tant dans la Généralité
de Lyon qu'en Provence &
en Dauphiné,se noya malheureusement
en 1665. C'étoit
un homme d'un rare merite,
dont le nom se trouve
souvent dans les Ecrits des
Grands hommes de ce Siecle.
111 avoit épousé Madeleine
Luillier, Soeur de Madame la
Chanceliere d'Aligre, &
estoit Fils de JeanBochart,
Seigneur de Champigny,
Noroy & Saron, Controlleur
General, Sur Intendant des
Finances, & premier President
au Parlement de Paris,
mort en 1630. Cet illustre
Magistrat descendoit de Jean
Bochart Seigneur de Norcy,
Conseillerau Parlement, qui
fut éleu les Chambres assemblées,
pour remplir la Charge
de premier President en 1447.
Celuy-cy eut pour Fils Jean
Bochart II. du Nom, auquel
Jean Silnon, Evesque de Paris,
donna saTerre deChampigny
en luyfaisant époufer sa Niece.
On iceut aussi que l'Evesché
d' Amiens avoit esté donné
à Mr l'Abbé Feydeau de
Brou, l'un des Aumôniers du
Roy, & que M l'Abbé
d'Hantecour, Aumosnier de
la feuëReyne, avoit eu l'Abbaye
de Longuay, Ordre de
Premontré,DiocesedeReims
vacante par le deceds de M,
l'Abbé du Four. Mr l'Abbé
d'Hantecourt est Frerc du
Pere d'Hantecourt, Religieux
de Sainte Geneviéve,
&Chancelier de l'Université.
Cet Abbé estant de quartier
lorsque la Reyne mourut,
eut le triste honneur de
remplir plusieurs fonctions
qui regardoient sa Charge.
Il a esté employé depuis la
mort de cette Princesse aux
conversions des Protestans
dans plusieursVilles de
Françe. L'AbbayedeBalerme
fut donnée le mesmejourau
Frere de Mde la Chetardie,
Commandant de Brifac
?
&
l'Abbaye de Noyers au Fils
de MPinçomAvocat au Parlement,
qui entend parfaitement
les matieres Beneficiates&
Ecclesiastiques, & qui
a écrit là-dessus touchant les
droitsde SaMajesté.Il-y eut
aussi ce jour-là plusieurs Benefices
de moindre consideration
donnez à des Officiers
d'Armée & de laMaison du
Roy, pour leurs enfans otj
pour leurs parens; mais le
Roy ne les accorda qu'après
que le Pere de la Chaise l'eut
asseuré que leurs vies &
moeurs luy estoient connuës.
Les choses qui ne demandent
pas de secret estant
bien-toit répanduës,on ne
fut pas long-temps sans apprendre
les noms de ceux à
qui les Benefices avoient esté
distribuez,& toute la Courfit
paroistre tant de joye de la
nomination de M l'Abbé de
Brou à l'Evesche d' Amiens,
qu'il m'est impossible de vous
la bien exprimer.
Je ne sçaurois m'empescher
de vous marquer icy
qu'un homme qui possede
une des premieres Charges de
la Cour, ayant prié le Roy
de luy donner un Benefice
pour un de ses Fils quiest
tres-jeune) Sa Majesté luy
demanda quel âge il avoit,
& l'ayant sceu
,
Elle luy dit;
quEHe estoit bien lâchée qu'il
eust encore tant de temps à at.
tendre. Celuy qui demandoit
cettegrace voulut donner des
raisons, & rapporta mesme
quelques endroits de l'Ecrisure;
mais le Roy sit connoistre
qu'il la sçavoit beaucoup
mieux que luy, & dit
qu'il ne donneroitjamais de Benefices
qu'à despersonnes capdbles
de sçarvoir à quevelles s'engageoient,
en prenant le party
d'entrer dans l'Eglise. Ce Prince
ajoüta ,on croyait peuteftrr
qu'on emportait quelquefois
des Benefices par faveury
mmaaisisqquueessiicceeuuxxqquuiiavonrv
cette pensée , pouvaient erre témoins
de ce qui se passe dans le
Conseil
,
lors qu'ils'agit de lA
distributiondesBenefice,ils verroientpar
toutes les précautions
qu'on prend pour ne les donner
qu'a des personnesdignes de les
posseder, la peine où ilse trouve
souvent avant que d'oserfixer
son choix. Sa Majesté fit
enfin connoistre
, que ny faveur,
ny brigue) ny recommandation
,ny naissance,ny
services
, ne pouvoient rien
obtenir, à moins qu'Elle ne
fust persuadée que ceux qu'il
- A
-
luy plaisoit d'en gratifier
n'eussent toutes les qualitez
necessaires pour en remplir
les devoirs. Ce n'est pas à
dire pour cela que tous ceux
qui en possedent,s'en acquits
tent dignement. La possession
du bien, & le peu d'occupation
corrompent fouvent
les moeurs. On s'aveugle
quelquefois dans le temps
où l'on devroit avoir le plus
de fageue?&:on ne conferve
pas toûjours les bonnes incli-,
nations qu'on a fait paroistre
dans ses premieres années. Le
Roy peut donner un Benesiceà
l'homme du monde
qui le meritéle mieux dans
le tcmps qu'il l'en pourvoir,
& qui dans la fuite en deviendra
tres-indigne.
- Je pourrois ajoûter- icy
beaucoup de choses sur ce que
le Roy voulut bien dire en
public touchant la nomination
des Benefices; mais ayant.
accoûtumé de vous rapporterles
faits sans aucun taisonnement
,je vous laisse faire làdessus
toutes les reflexion
que le Roy merite qu'on flÍI.
à sa gloire.
Ce Prince après avoir efii*
ployé la plus grande partie
du jour de la Pentecoste à
des avions de devotion &
de pieté
, & tenu un long
Conseil pour la distribution
des Bencfices qui vaquoient
alors, ne crut pas avoir encore
assez fait; il alla faire
le tour de la Place pour en
viliter les Fortifications, &
vit un Bataillon du Régiment
Soissonnois? qui estoit
en bataille sur le Glacis. Ce
Bataillon luy parut fort lestes
& il futtres-content.Il estoit
commandé par M le Duc de
Valentinois, Fils de M le
Prince de Monaco. Sa Majesté
vit aussi le Regiment
des Vaisseaux dans la Citadelle)
commandé pat Mr le
Marquis de Gandelus
?
Fils
de Mle Duc de Gefvrcs, qui
cnetf Colonel, & elle en fut
fort fatisfaitc. M le Marquis
fie Vaubecour, Gouverneur
de Châlons,&Lieutenant de
Roy du Verdunois
, & du
Pays Messin
, accompagna
toujours le Roy, & tint à
Verdun, tant que Sa Majcftc
y demeura,deuxTabks fort
magnifiqueSj ainsi qu'ilavoit
fait à Châlons, pour toutes
les personnes de la Cour qui
voulurent y aller manger. Le
Roy fut fort content de ce
Marquiseluy donna inefme
des marques de la fatisfadion
qu'il avoit de sa conduite.
Enarrivantà Verdun
» on
voit appris la mort de Madmoiselle
de Jarnac Fille
d'honneur de Madame la
Dauphine.dontje vousay déja
parlé.Elle fut fort regretée
à cause de son humeurdouce,
& complaisante,
Quoy que la Ville de Verdun
soit couverte par Longvvy,
Luxembourg, Sar-Loüis,
Strasbourg &autres, on ne
laisse pas de travailler tous
les jours aux fortifications de
cette Place. Le Roy ordonna
'lu)on y preparait les Ecluses,
afin qu'il puft voir à son retour
l'espace du terrain qu'elles
pourroient occuper.
Lors que Sa Majesté visita
la Citadelle qui est de cinq
Bastions fort reguliers , on
luy fit remarquer le Bastion
nommé le Marillac, qui donna
lieu au Procès qui fut fait
au Mareschal de ce mesme
nom> pour le crime de Peculat
, dont il avoit esté accufé.
L'histoirerapporte que
le Ministre qui nomma les tgommiflàiresquile condamnerent
,
leur dit après avoir
apprissacondamnation, qu'il
falloir que les Jugesenflent des
lumieres que le reste des hommes
n'avoitpas &queplus il avoit
fait de reflexionsur l'affaire dît
Maréchal de Marillac, &sur
toutes les choses dont on l'accusoit
,
moins ill'avoit juge digne
de mort; maisquenfin ilfalloit
croire qu'il estoit coupable
j
puis
qu'ilsïanjoient condamne. Il
n'eut dans la fuite que de la
froideur & de l'indifférence
poureux.
Le19.on ne fit que quatre
lieuës & l'on alla dîner
*
& coucher à Estain ; la journéeauroitesté
trop longue si
on avoit estéjusquesàLongvvy.
Mr Mathieu de Castelus
qui y commande vint à
Estain saluer le Roy,& tecevoir
les ordres de Sa Majesté.
Estain est un gros Bourg
muré, du Diocese de Verdun.
C'est le dernier de sa Jurisditèion
du costé de Luxembourg.
Quoy que ce Diocese
foit fort petit & borné de
toutes parts, sonpeu d'étendue
ne diminue pas néanmoins,
son revenu.MrdeVerdun
accompagna le Roy jusques
à Essain. La Cour eut un
tres-beau temps pour traverser
des ruisseaux, & desPlaines
grasses
?
& fertiles. Les
pluyes l'auroient fort incommodée,
mais le Royqui fait
les beaux jours de tous ceux
qu'il regarde favorablement)
devoit estreanez heureux
pour n'en pas manquer luymesme.
Sa Majesté prit ra:
presdinée le divertissement
de la Chasse. Ertain cft un
Païs de Bois accompagné de
belles plaines) & de Vallons
bien culrivez; les Maisons y
sontgrandes, & logeables
presque toutes bastiesà l'Allemande,&
il n'yen a pas une
qui n'ait quatre Chambres
hautes où l'on peut loger.
Le Roy,Monseigneur?& les.
Princesses eurent leursAppartemens
dans la plus grande,
& chaque Corps d'Officiers
logea dans d'autres. Le lieu.
paroist avoir esté autrefois
considerable;les Guerres l'ont
ruiné , parce qu'il n'estoit pas
assez fort pour se deffendre
des courses. La Paroisse est
unassezbeauVaisseau,surtou
dans l'étendue du Choeur,qui
est tres-beau &: fort élevé
Cette Paroissea esté bastie
par les soins de Guillaume de
Huyen, lequel ayantesté in,
struit à Verdun? passa en Italie
; ou la beauté de son génie
luy acquit la bien-veillance
de la Cour de ROIne. Il fut
d'abord Chanoine de Verdun,
& par degrez elevé à la
pourpre, ayant esté fait Cardinal
au titre de Sainte Sa-;
bine. Il employa ks biens a*
l'embellissementde sa Patrie
mais la mort qui le (urpnd
dans l'exécution de ses. def-i
seins
, en rompit le cours
Les Entrepreneurs volerent
l'argenr & lainerenrnglife
imparfaite.Il avait resolude
fonder douze Prebandes,un
College-, &un Hôpital ;.lnaiscil
ne voit qu'un Choeur de-;
licatement construit
, & la
Barete de ce Cardinal suspendue
à la voûte, pour monument
de sa pieté
, & de sa dignité.
Il vivoit en 1406. Un
Curé, & un Vicaire ont foin
de cette Eglise, & du Peuple.
Les Capucins ont en ce lieu
une Maison habitée par huit
ou neuf Religieux. Ils ont
quelque peine à subsister;
mais ils en auroient encore
davantage s'ils n'estoient prés
de Verdun où on leur fait
de grandes charitez»Ces bons
Peres se sont establis en ce
lieu pour aider le Cure., à
causequ'il n'a qu'un, seul
Vicaire avec luy,
Le lendemain 20. la Cour
partit, d'Estain? &alla dîner
à Pierre-Pont qui n'en est éloigné
que de trois lieuës. La
plulpart des Officiers mangerent
surune verdure arrosée
d'un ruisseau fort agreable.
On traversa ensuite plusieurs
petits torrens;on parcourut
des Valées:on monta
des hauteurs?&on gagnaen
&~
finla cime d'une Montagne
où lenouveau Longvvy entièrement
construit par le
Roy) pour faciliter la prise de
Luxembourg. Le Vallon est
arrosé d'une très- belle eau
vive, qui roule toujours, &
qui rend la Plaine fort fertile
; laveue se promene agréablement
sans estre bornée
que des deux costez par deux
Montagnes, mais elles n'offrent
rien qui ne doive plaire.
L'une est remplie d'arbres;
l'autre est occupée par te
vieille) & par la nouvelle
Ville. On découvre dans le
milieu de la Prairie deux mai.
fons de Religieux) l'une de
Recolets. & l'autre de Carmes
) qui y sont établis, &
qui ont foin des anciens Habitans
de ce Pays-là. Ils ne
font logez que dans des hutes
sur la Colline
, & ils avoient
au dessusun Château antique
qui les mettoit à couvert
des Coureurs; mais presentement
il est ruiné) &
l'on n'y trouve que des cabancs
& des masures. Longvvy
est situé sur une hauteur
bordée d'un précipice à IJEfi:f
& au Sud, s'estendans vers le
Nord,& l'Ouest dans une
Plaine fort fertile. La Place
n'est commandée d'aucun
endroit. On y voit une grande
ruë ,
à l'extrémité de laquelle
font deux portes accompagnées
d'un double fossé
, &: défenduës de bons
Battions. Dans cette ruë principale,
sont les maisons des
Bourgeois qui font environ
deux a trois cens feux. La
Place d'Armes est au milieu.
On y voit un beau puits
) &
à gauche une Eglise une fois
aussi grande que les Recolets
de Versailles
, mais ily a
moins de Chapelles. Cette
Eglise est accompagnée d'uaeTour,
de la hauteur de celle
le Saint Jacques du Hautes
à Paris
, qui sert de Beffroy
>
& de laquelle on dé-*
couvre jusques à six lieuës
dans le Pays. La Maison du
Gouverneur est à droite , &
fait face à l'Eglise. Le reste
des Maisons est basty par fimetrie.
Le long desRamparts,
font des Cazernes pour les
Troupes,-& l'on voit d'espace
en espace des Magazins de
différentes grandeurs.Tous
ces Magasins sont soigneusement
gardez. Le Roy logea
dans la Maison du Gouverneur.
Mrle Marquis de Bouflers
, qui a le Gouvernement
de Luxembourg, vint au de.
vantdeSaMajestéàLongvvy.
Il estoit accompagné de quel..
ques-uns de fcs Gardes qui ne
parurent point avec leurs Ca.
rabines. Le Regiment d'Angoumois
commandé par Mr
de Thouy,estoit dans la Place.
Le Royen fit la Reveue>
êcille trouva tres- bon, tous
les hommes estant bien faits,
&audessus de trente ans. Ce
Regiment eut l'honneur de
garder le Roy. Il fautremarquer
que ce Prince ne fut pas
plûtost arrivé) qu'il donna
des marques de son activité
ordinaire. Pendant que cluCun
alla? ou le reposer? ou fc
divertir dans fcs Appartemens,
où il avoitdonné ordre
qu'il y eust toûjours rou.
tes fortes de Jeux preparez,ce
Prince courut? s'ilm'est permis
de m'expliquer ainsi pour
mieux marquerfonardcur.)11
courut?dis-je où la passion
digne d'un grand Capitaines
&: le devoir d'un grand Roy
rappelloient,&sedonna tout
entier le reste de la journée à
voir des Troupes? & des Fortifications.
Il y a dans Longvvy
quatre cens cinquante
Cadets. Sa Majesté leur vit
faire l'exercice, &dit hautement;,
qu'il rijyanjoitpoint de
Troupes qui s'en acquittent
mieux. Elle resolut mcfrnc
d'en prendresoixante ou quatre-
vingt , pour en faire des
Sous-Lieutenans dans tous
les Corps, excepté dans sois
Régiment ,où l'on ne reçoit
point d'Officier qui n'ait esté
Mousquetaire.Toutes les
places qui y vacquent estant
reservées à la Noblesse qui
tort de ce Corps,ils se perfectionnent
encore dans ce Regiment
en ce qui regarde le
métier de la Guerre? avant
que d'estre élevez à de plus
hauts Emplois. L'exercice
que firent les Cadets? fut à la
voix & au commandement
de leur Capitaine, ensuite au
coup de Tambour, câpres
dans le silence, par une habitude
qui est en tous également
naturelle; ce qui se fait
avec tant de justesse, qu'il
semble que ce soit un feut-
J.
homme qui remuë également
toutes les parties de
son corps. Ceux qui prirent
ce divertissement avec le
Roy eurent un tres-grand
plaisîrde voir un mouvement
uniforme dans quatre cens
cinquante personnes de différentesgrandeurs.
Le Royvisita à cheval les
dehors de la Place, & fit à
pied le tour des Remparts.
-
Ce Prince marqua luy-même
ce qui en pouvoit encore
embellir les Travaux, & ce
qu'ils avoient de plus beau
& deplus seur. Cela fait voir
la parfaite intelligence qu'il
a de l'Art de la Guerre.
Il ne faut que voir Longvvy
pour concevoir une haute
idée de la puissance du Roy,
& l'on ne pourra qu'à peine
sepersuader qu'il ait entièrement
fait bâtirune Ville,
élevée sur une cime inaccessible
r & dont les remparts
font d'une prodigieuse hauteur.
Il est impossible de s'imaginer
la dépensequ'où
a faite à couper le Roc, à
rendre le terrain uny, & à
bâtir tant de beaux logemens.
Cette Place est de figure éxagone
r ayant un Baition
coupé ducodedesprécipices
feulement. Ilestsoûtenu par
deux Delny-Iunes, & deux
Ravclins. On amis trois Cavaliers
aux endroirs foibles,
qui découvrent fort loin,&
qui feront montez de vingt
pieces de Canon. Toutes les-
Fortifications de cette Placc
fontd'une ties-grande regularité
; & ce qu'il ya de surprenantec'est
que le Roy en
aitfait entierement conftruireungrand
nombre d'autres
qui ne sont pas moins fortes,
qu'il y fasse encore tra-*
vailler tous les jours, & qu'il
commence à en faire éleyer
denouvelle.Iln'est pas moins
étonnant que SaMajesté voulant
mettre ses Sujets à couvert
des courses de la Garnison
de Luxemboutg., en la
mettant au rang de ses Conquelles,
Elle ait fait bâtu
Longvvy pour faciliter ses
desseins, cette Place ayant
servy de Magasin pour tou,
tes les provisions neceflaircs
à un Siege aulli important
qu'a esté celuy de Luxembourg.
Comme rien n'altère davantage
la fanté qu'une forte
&continuelle app licationau
travail, M de Croissy , qui
par une longue fuite d'Emplois
&par l'occupation que
luy donne celuy qui l'attache
entièrementaujourd'huy,
s'etf attiré des douleurs de
goute depuis quelques années,
en ressentit de violentes
à Longvvy. Cependant
elles ne l'empefcherent point
de servir le Roy, en quoy
il fut parfaitement bien secondé
par M le Marquis de
Torcy son Fils, qui dans un
âge fort peu avancé, a déja
veu toutes les Cours de l'Europe
> en a étudié les maniéres,
& n'ignore rien de ce
qui regarde la Charge dont
Sa Majesté luy a accordé 1:4
survivance.
La Maison du Roy eftanr
si grande) qu'à peine il se
passe une semaine
>
sans qu'on
apprenne la mort de quelque
Officier) on sceut à
Longvvy celle de M Villacienne,
Gentilhomme servant
du Roy? & celle de Mr
de la Planche ,Valet de
Chambre de SiMajesté
,
la
premiere dépendant de Monsieur
le Prince,comme Grand
Maistre delaMaisonduRoy,
& l'autre deSaMajesté parce
que le défunt xi'çftant poirr
marié
,
n'avoit point d'ensans
à qui ce Prince en eust
pû donner la survivance.
Mrde Seignelay, qui avoit
fait le Voyage de Dunkerque
avec une diligence furprenante,
depuis que le Roy
estoit party pour Luxembour,
joignit Sa Majesté à
Longvvy , & luy fit le rapport
de l'estat des Fortifications
de cette premiere Place.
Je vous en ferois icy le
détail, si je n'estois obligé de
le remettreà unautre ÀrcmS)
a cause de la quantité de choses
curieuses que j'ay encore
à vous apprendre touchant
le voyage de Sa Majesté. Je
vous diray cependant que le
Risban, lesJetrées,lesEcluses,&
le Bassin pour les Vaif-
[caux, sont des choses si extraordinaires
à Dunkerque »
<juà moins de vous en faire
la defeription, quelques paroles
dont je pusse me servir,
pour vous marquer la beauté
deces Ouvages* il me seroit
impossiblede vous rien faire
Concevoir qui en approchait,
& vous auriez mesme encore
beaucoup de peine à vous les
representer tels qu'ils [ont) si
vous ne les aviez vûs.
Le Roy estant party de
Longvvy le 21. entra dans le
Luxembourg, &: dîna à Cherasse,
premier Village de la
Province ducosté de France;
Le Païs par où l'on entra, n'a
pas tant de Bois ny de Mon.,
cagnes que les autres Cantons
de cette Province. Ce font
des Plaines grasses & fertiles?
remplies de tres-bons grains.
Les Villages y sont en affcz
grand nombre,mais les maifons
n'en font pas entièrement
rétablies. En approchantdela
Ville de Luxembourgeonvoitde
toutes parts
destrous, desquels on a tiré
de la brique,& de la chaux,
& d'autres materiaux, pour
les nouvelles Fortifications
<i'un Ouvrage qui va au delà
de tout ce que l'on en peut
concevoir.L'aspect delaVilleestbeauducostédeFrancc.
Le plan paroist égal par.
tout,&lesédifices sontgrands
8c magnifiques. On découvre
plusieursEglises couvertes
d'ardoises, descazernes, des
Magasins, des maisons considerables,
Celles des particuliers
semblent estre bâties
desimetrie; mais lors qu'on
est dans la Ville, on est furpris
de ce qu'on n'a découvertqu'une
partie des Fortifications.
Elles sont toutes irregulieres,
& continuées suivant
l'étduë du terrain, dont
la situationpeut étonner des
Assiegeans qui oseroientl'attaquer.
•*
Je devrois vous parler icy
de l'origine de cette Place,
vous entretenir des Ducs qui
en ont porté le nom, & vous
en faire comme un abregé
d Histoire; mais j'ayamplement
parlé de toutes ces choses
dans le Volume que je
vous ay envoyé du seul Journal
du Siege que le Roy fit
)
lors qu'il joignit la Ville de
Luxembourg à ses premieres
Poiiujrfedr
Conquestes. Ainsi jeme COfitenteray
de vous envoyer le
revers de la Medaille qui sur
¿;'faite en ce temps-là, & que
j'ay pris foin de faire graver.
Le Portrait du Roy [e voit
sur laface droite. Jene vous
dis rien du revers, vous le
pouvez voir.
Ce Prince fut receu à la
Porte parleMajor de la Place,
&,' traversa la Ville au milieu
de six rangs de ceux de
la Garnison qui estoient soue,
lesarmes, & en hâye>j[ufque^
au lieuoùSaMajesté alladescendre.
Ils firent trois salves,
mais on ne tira le Canon qu'aprés
l'arrivée du Roy, parce
que cela auroit marqué une
Entrée, & qu'il avoit déclaré
qu'il ne souhaitoit point
qu'on luyen fist.LesBourgeois
vinrent luy offrir leurs hommages.
oLes ruës étoient toutes
tapissèesde branches d'arbres,
suivant la coutume du Pai's.
Pendant le Soupe du Roy
qui dura deux heures, ils aL
lumcrent unfcudejoyc dans
-- .--' -,. --, -' 1er
té —*
--_.
le Pâté qui eH: entre le Paffendal
& le Grompt, vis-à-vis
les fenestres du Palais du
Gouverneur, prés de la Riviere.
Toutes les ruës furent
illuminées, &ces illuminations
continuerent pendant
tout le temps que Sa Majesté
demeura àLuxembourg. La
façade de l'Hostel de Ville parut
éclairée par plus de deux
cens Lanternes, remplies de
Devises à la gloire de ce Prince.
Les Clochers estoient en
feu, & quantité de flambeaux
de cire blanche brûlerent
toute la nuit devant la maison
du Maire. Toutes ces illuminations
furent accompagnées
de cris de Vive le
Roy. Sa Majestéfutgardée
par un Bataillon de Champagne,
commandé par Mr le
Baron de la Coste, La Ville
estoit plus remplie d'Etrangers
que de gens de la fuite
de la Cour, sans compter les
Gouverneurs, les Lieutenans
de Roy, les Officiers des Garnisons
d'Alsace, de Lorraine,
&de Flandre, qui avoient
eu permission de venir. Mr
l'Evesque
)
& Mr le premier
President du Parlement de
Mets, y estoient aussi venus,
avec tout ce qu'il y a de plus
distingué dans la mesme Ville,
suivy d'un grand peuple,
que la curiosité de voir le
Roy y avoit attiré. Il yestoit
passé plus de dix mille hommes
deTreves,deCologne,
de Mayence. de Juliers, de
Hollande, & de la Flandre
Espagnole;& l'on eust dit
que toute la Champagne s'y
estoit renduë, pour remercier
le Roy d'avoir pris cette
Place, afin deladélivrer des
courses de sa Garnison. M1 de
Louvois y estoit arrivé le
jour precedent
,
après avoir
faitun Voyage de deux cens
cinquante lieues depuis que
Sa Majesté estoit partie de
Versailles pour aller à Luxembourg.
Cette diligence
ne paroiftroit pas croyable,
si ce n'estoit une de ces choses
de fait dont on ne [sa?=-:
roit douter. Ce Ministre
rendit compte au Roy de
son Voyage pendant que Sa
Majesté demeura à Luxembourg
& je vous en feray le
détail
, avec celuy de ce qui
s'est paffé dans le temps de
ce sejour,mais il faut auparavant
vous faire la description
de cette Place.
Tous ceux qui l'ont veuë
avant le Siege ,la regardent
avac un etonnement qu'il seroit
difficile d'exprimer, &
sont fort surpris d'avoir à
chercher Luxembourg dans
Luxembourg mesme. On ne
reconnoift: plus cette Place
que par quelques Edifices publics,
presque tous ruinez
dans la Journée des Carcasses
& dans la fuite duSiège, &."
rétablis dans une plus grande
perfection
, par les soins Ôc
par la pieté duRoy. On m'a
assuré que la Ville est grande
deux fois comme Saint Germain
en Laye, &j'ay vû deux
Relations qui le marquent.-
Je ne vous garantis pas
tjue cette grandeur soit juste
On peut s'abuser dans les
choses qu'on écrit sur lerapport
de sa veuë ; cependant
on peut concevoirpar
là une idée approchante de
la grandeur d'un lieu dont
on fouhaitc avoir connoissance.
La Place d'armes de Luxembourg
peut contenir environ
deux mille hommes
rangez en bataille. Les rues
sont larges,&il yen a douze
ou quinze considerables. Les
Bâtimens y sont de deux éta.:=
ges au moins. Ils sont assez
étroits
) mais presque tous
d'une--nlefme, simetrie. La
Cour y estoit assezbien 1&--
gée. Le Commerce n'y est
pas grand, mais la Garnison
y fait rouler beaucoup d'argent
par ses dépenses. On a
esté obligé de prendre des
Domaines, & des Jardinsà
quelques Bourgeois,& à quelques
Païsans, maisils en ont
esté largement indemnisez.
L'Hostel de Ville e£tpetit?
û façade n'est pas large. La
Paroisse est étroite, & il n'y
a qu'un Doyen,&dixEcclesiastiques;
un plus grand
nombre n'en: pasnecessaire,
puis que les Religieux qui
font dans le mesme lieu, les
déchargent presque de tous
les soins qui regardent les
Pasteurs. Il y a quarante-cinq
Religieux dans le Convent
des Recolets, dont la moitié
font François
, & les autres.
Allemands. Ils vivent
des questes delaVille, & dc:
la Province, & preschent
dans l'une & dans l'autre
Langue. Ils sont commis
pour auministrer les Sacremens
à la Garnison. Les Bourgeois
quisontfort devots, &
Flamans en ce point-la?vont
souvent faire leurs dévotions
chez ces Peres, qui sont en
très-grande reputation en
cette Ville-là?&fort estimez
& aimez de tout le Peuple,
Ils ne le font pas moins de la
Garnison qui les respect
beaucoup. Je pourrois ajouter
qu'ils s'en attirent la crainte
aussi-bien que le respect,
puis que ces Peres font toutes
les fonctions Curiales en ce
qui touche cette Garnison.
LePereOlivier Javenayaprés
avoir esté Gardien, & s'estre
acquis une grande réputation
par ses Sermons, a esté éleu
Custode de douze Maisons
.dependantes de celle-là, dont
celle de Luxembourg est la
principale. Les Jesuitesyont
une tres-grande Eglise, fort
propre, & fort riche. Elle est
plusgrande que celle des
Carmes de la Place - Maubert
, & a deux aillés, &
trois beaux Autels. Ils tiennent
leCollege
, & ces Peres
font ordinairement au nombre
de vingt-cinq dans cette
Maison. Encore qu'ils soient
tous François, il yen a quelques-
unsqui sçavent fort bien
l'Allemande & qui ontesti
élever en Allemagne. Leu.
Jardin est beau & spacieux
îc leur maison toute neuve
êc bien ordonnée. Ilsontune
Musique Allemande, que la
Cour alla entendre le jour de
la Trinité. Les Capucins y
ont aussi unConvent
>
dans
lequel on ne trouve que des
Religieux François ,
dont
le nombre peut égaler celuy
des Jesuites. Il y a
deux Refuges dans la Ville,
& une Eglise, appellée le
Saint Esprit, dansunBastion,
Celle desDominicains?qui a
esté fort endommagée par le
Canon, n'est pas encore rctablieIlsdonnerent
ieui
Tour pendant le Siege, pour
placer une Batterie qui incommoda
fort nostre Camp.
On fut obligé de s'en défendre?
& cela* pensa causerla
ruine entiere de leur Eglise.
J'oubliais à vous dire que
les Recolets ont le Cimetiere
de la Garnison. Leur Eglise
est aussi grande que celle des
Cordeliers du Grand Convent
de Paris. Ils ont d'assez
beaux Ornemens, & tout est
chez eux d'une grande propreté.
Leur Jardin est aiTçz
beau pour une Ville de Guerre
Il tomba pendant le Siege
cinq cens Bombes dans leur
enclos, dont trois tomberént
dans une Chapelle,
qui fert de Mausolee auComte
de Mansfeld, l'un des plus
grands Capitaines de son
temps, & fameux par ses Exploits
fous Charles IX. Il
mourut Gouverneur de Luxembourg
âgé dequatrevingt-
six ans. Son tombeau
estde Marbre blanc; safigure
->
& celles de ses deux Fern;
mes ,
font en bronze au desfus
de ce Tombeau,chacune
de six pieds de haut. L'une
des trois Bombes qui tomberent
dans cette Chapelle,
perça une grosse voûte, fit
tin trou fort large à l'extremitédu
Tombeau duComte..,
tourna à demy une pièce
de marbre qui le couvre, &
4jui a huit pieds en quarré
ôc la rompit environ de la
largeur d'un pied. Les Jefuites&
les Recolets ne font
sjparezquepar une rue* &
ïes Capucins sont dans un autre
quartier de la Ville, proche
la Porte-neuve. Il y a
aussi trois Convents de Filles.
Le Comte de Mansfeld dont
je viensde vous parler, a fait
bastir le Palais des Gouverneurs.
Il a esté tout ruiné par
nos attaques, & si bien reparé
par les soins de Mrle Marquis
de Bouslers
, que le Roy
y logea avec Monseigneur;
& les Princesses,Ilest sur un
Bastion. qui donne sur un
Fauxbourg arrosé par la Riviere?
dont la Prairie dans laquelle
elle se répand estun
objet agreable pour la veuë,
& dans une gorge entre deux
Montagnes. Il a pour point
de veuë un reste de petit bois
de haute Futaye. Pour pouvoir
insulter ce Bastion, il
fauts'estre rendu maistre de
sesdeffenses. Le Roy y avoit
une grande Salle, une
grande Chambre pour les
Jeux, sa Chambre,&trois Cabinets.
Les Gouverneurs de
Luxembourg avoient autrefois
une Maison de plaisance
située sur la Riviere qui sert
de point de veue lieur Palais;
mais les guerres les ont
privez de ce lieu de divertis
sement. Luxembourg est fituésur
une hauteur àl'extremité
d'un grand terrain du
costé de l'Ouest & du Sud
fondé sur un roc qui a este
coupé plus de quatre pieds
en terre dans les endroits ou.
l'Esplanade duGlacis n'est pas
sélon les Réglés? & commandé
par le chemin couvert. A
son Est, & à son Nord, ct
sont des Vallées prodigieuses.
qui semblent inaccessibles à
toutes les Nations; & cependant
c'est par ces abismes
qu'on a pris la Place. L'une de
ces Vallées entre le Nord k
l'Est, estarrosée par TEfle*,
petite Riviere sans commerce
qui vient du cofté du Sud
d'Erfche Bourgade„& qui va
se rendre dans la Moselle aprés
s'estre jointe au Sours
&. àSclbourgversVasbilingrr
L'autre est remplie vers le
Sud-Est de quelques petits
Ruisseaux de Ravines. Il se
trouve pourtant entre l'Esse
une langue de terre où cft la
Porte dé Trêves
,
& une autre
langue plus spacieuse occu\.
pée parunFort nommé du
Saint Espritque l'on a fortifié
depuis que le Roy a coiv
quisla Place. Elle estdiviséce
en haute, & en basse Ville,
La haute cft l'ancien Luxembourg
,reparé,&fortifié dt
nouveau. On afaitune Porter
neuve qu'on appelle de France
vers Nostre-Dame de
Consolation, & l'on a pouse
le Bastion de Chimay,jus
ques au delà de l'Insulte. La
baffe-Ville est composée de
deux Fauxbourgs, rendus c-e*
lebres par le dernier Siege.
L'un est nommé le Passendal.,
arrosé par le principal Canal
del'Effe. L'autre est le Minstier
ou le Grompt mouille
aussi par un bras de l'Effe. Entre
ces deux Fauxbourgs
?
est
la Porte de Treves
?
& une.
Plate-forme au dessousquon
appelloit le Pasté. A l'extremité
du Minfter vers la droite
est le nouveau fort du Saint
Esprit. Mr de Montaigu a
levé avec du carton le Plan
de cette formidable Place,
où Ion en remarque aisément
toutes les beautez, avec toutes
les augmentations que le
Roy y a faites. Toute l'Allemagnea
esté surprise de voir
avec quelle promptitude on
en a reparé les brèches &
avec quelle facilite sans avoir
égard à la dépense on a aug.;
mente cette Ville de plus de
deux tiers, afin d'occuper
tout le terrain qui sembloit
estre favorable pour en approcher.
Aprés vous avoir fait voir
la situation de It Place, il faut
que je vous trace icy le Plan
de ses Fottifications. L'entreprise
est hardie, & un terme
mis au lieu d'un autre, peut
répandre de l'obscurité dans
ce que je vous diray les descriptionsde
cette nature,quelques
ques claires quelles soient,
n'eitant qu'à peine intelligibles
pour ceux qui ne sont pas
dumestier.Joignez à cela que
je puis expliquer mal des cho-
[es, dont je n'ay pas toutes
les lumieres necessaires? pour
estreafleuré que je ne me
trompe point. Cependant je
fuis persuadé que quelques
fautes que je puissefaire
, &:
que j'aye peutestre mcfme
déjà faites depuis que j'ay
commencé à vous parler de
Fortifications dans cette Ler
tre, ce que je vous en ay dit,l
& ce qui me reste à vous expliquer
) ne laissera pas de
donner de hautes idées de la
puissance du Roy? & de la
force de Luxembourg.
L'ancienne Ville qui est
toute sur un terrain élevé
cil: un Heptagone ayant un
Bastion coupé par le deffaut
duterrain de Paffendal. Elle
a trois portes ; l'une vers le
Couchant) c'est celle de France;
l'autre au Nord? c'est celle
de Passendal; la troisiéme;
vers l'Orient, c'est celle de
Trêves, & une quatrième
pour les sorties regardant le
Midy. La premiere & la derniere
sont dans la haute Ville
bien flanquées de bons basions?
& de dix Redoutes,
soutenuës de bons Cavaliers,
où l'on mettra quarante pièces
de Canon. On peut voir
dans la premiere porte quelle
supercherie peuvent faire
ceux qui se desfendent dans
leurs maisons. La premiere
entrée prise , il ne faut aller
que pied à pied à la seconde;
& la troisiéme est encore
mieux gardée que les prémieres.
Les Redoutes sont
portées aux endroits les plus
soibles des Courtines pour
deffendre le chemin couvert,
& pour commander sur toute
l'Esplanade;elles font élevées
jusques au cordon pour répondre
au rez de chauffée, &
pour raser l'Esplanade. Au
dc!fij.S est une Plate-forme
avec un Parapet dont on se
sert jusqu'à ce que le Ganofll
l'ait renversé ; on se retire au
dessous où sont des Sarbacanes
pour tirer sur le chemin
couvert & dans le glacis. Dela
on a encore un étage en
- terre d'où l'on se peut desfendre
long- temps , &quand
on est poursuivy par les Galeries,
on a clei portes avec
du Canon de Campagne. Si
les Ennemis vouloient establir
un logement autour de
ces Redoutes, il y a des Mines
& des contre-mines toutes
disposées pour empescher les
Travailleurs d'avancer leurs
ouvtages. Les Fourneaux sont
si bien menagez qu'ils ne
peuvent manquer leur coup.
On a fait deux demy
-
Lunes
dans cette ancienne enceinte..
Le Bastion de Chimay? qui
est à l'extremité du Roc, &
qui commande sur la Porte
de Paffendal, est soûtenu par
deux autres Bastions avancez
le long de cette cime,qu'on
peut appeller une Demy-lune
1-
& une autre Contre-garde,
ce qui semble estre hors.
d'insulte> parce qu'on a fait
la dépense de railler dans le
roc,&qu'on s'est attache à
le rendre inaccessible; &
comme la Riviere qui passe
au dessous de la Porte, a une
hauteur dans son bord opposé
qui commande la Ville
>
car ce fut là qu'an mit une
Batterie pendant le dernier
Siege, pour ruiner jePalais
du Gouverneur; son Badion,
& la Porte,lePvoy a fait faire
sur la cime de cette hauteur
deux Ouvrages à o cornes
qui renferment tout l'espace
par où l'on avoit à craindra
Une Ligne de communication
prend de l'extrémité de
la Contre-garde du Bastion
de Chimay, descend par la
Porte de Passendal dans la
Riviere, & va joindre ces Ouvrages
, qui sont faits avec
toute l'industrie de l'At[,.
pour batere la Plaine d'audelà,
pour commander sur le
vallon où coule l'Effe,& pour
désendre le Chemin couvert
de la Contre-garde du Baftion
de Chimay;&afin qu'on
ne prenne pas ces O1uvrages par le vallon., Sa Majesté qui
voit tout avec des liimieres
qui necedenten rien àcelle5
de les Ineenieurs? a ordonné
deux Reodoutes au dessous,
prés de la Rivière. Ainsi le
Fauxbourg du Paffendal qui
est sur l'eau, fera défendu 8c
couvert de toutes parts. On
y fait un Hôpital, & il y aura
des Cazernes, & des Magasins
comme dans la Ville.
Il est fermé à la droite par
une autre Ligne de communication
semblable à la premiere,
qui joint le sécond
Ouvrage à la Porte de Trêves,
qui se trouve à l'extremité
d'une languete prise
dans le roc qu'on a percé en
deux endroîts, pour faire
passèr les chariots, & les
Troupes du Paffendal au
Minfier, sans monter dans
la. Ville. Le Minsterest aufll
défendu par cette Porte, ôc.
par le Fort du Saint Esprit,
qui a quatre Bastions coustruits
sur une petite éminence
qui commandoit dans
le Fauxbourg. Ces quatreBastions
sont soutenus de Demy-
lunes) de Contre-gardes,
& de Redoutes, qui battent
toute une campagne qui regne
au delà. Voilà les Ouvrages
qui se trouvent dans
les Dehors de Luxembourg,
&: qui font environ onze Bastions,
quinze Redoutes, deux
Ouvrages à corne,un troisiéme
qu'on y ajoûte prés de la.
Porte des Sorties, quatre:
Demy-lunes, trois Contregardes,&
cinq ou six Cavaliers.
Tous ces Travaux n'ont
pas moins surpris la Cour,
qu'ils ont étonné tous les
Etrangers qui les ont vûs.)
car cette Place qui tiroit de
la France deux millions de
contributions
, pourroit en
temps de Guerre en tirer bien
davanrage, & faire contribuer
juseqz ues à Mayence? à
Cologne, à Rez, au Fort de
Skin,à Namur& à beaucoup
d'autres endroits, ce qui ne
seroit pas difficile à une Garnson
de sept ou huit mille
hommes. Je ne vous diray
point à combien de millions
a monté la dépense des Fortifications
de cette Place,
chacun en parle diversement
&met le prix aux Ouvrages
de cette nature, suivant Tétonnement
qu'ils luy eaufent.
Ainfiil n'est pas facile
de parler d'une dépense?
quand elle se monte à plusieurs
millions. Tout ce que
je puisvous dire, c'est que le
Roy ne cherchant que l'entiere
perfection dans tout ce
qu'il fait faire, il y a encore
de nouveaux fonds destinez
pour travailler à cette Place,
quoy qu'il paroisse qu'on ne
puisse rien ajoûter à ces Fortifications
;mais le Roy a des
yeux& deslumieres dont on
ne sçauroit trop admirer la
pénétration. Je ne dois pas
oublier que la petite Chapelle
de Nostre - Dame des
Consolation dont je vous ay
déjà parlé dans ma Relation
duSiege, est restée en son
entier, les Assiegez, & les
Assiegeans l'ayant épargnée.
Toute
-
la Province y court
avec la mesme devotion
qu'on va à Nostre-Dame de
Liesse en France.
Il faudrait pour se bien representerl'aspect
de cette
Place, avoir vû les deux Tableaux
que Mr de Vandermeulen
enafaits pour le Roy.
Ils sont à Marly, & ont chacun
onze pieds de longueur.
Ils representent deux faces dô
laPlaec, de sesFortifications,
& de ses avenuës; mais avec
une telle regularité, que ceux
qui ont veu ces Tableaux ne
sçauroient se souvenir de la
moindre chose,qu'ils ne lareconnoissentaussi-
tost dans
l'unou dans l'autre. Ces Tableaux
sont gravez avec les
Estampes de Mrde Vandermeulen
dont je vous ay déjà
parlé, qui represententtoutes
les Conquestes du Roy de la
mesme maniere. Ainsi si la
description que je viens de
faire de cette Place, excite en
vous ou en vos Amis, la curiosité
de la voir d'un coup
d'ecil, vous pouvez avoir recours
à ces Estampes, qui sont
recherchées dans toutes les
parties du monde.
Le Roy ayant resolu de ne
demeurer que deux jours àLuxembourg
; monta à cheval
aussitost qu'il y fut arrivé, &
en allavisiter les Dehors. Mr
de Louvois qui estoit de retour
depuis un jour de son
Voyage d'Alsace,&MdeVauban
, qui sont les deux personnes
qui pouvoient rendre
un compte exact à Sa Majesté
des Fortifications de cette
Place, & sur tout de celles
qui ont esté faites nouvellement
par son ordre, l'accompagnerentpar
tout. Elle vit
les attaques de ses Troupes
pendant le Siege, &: trouva
de nouveaux sujets de loüanges,
pour tous ceux qui avoientcontribué
à cette conqueste,
M le Comte de Blanchefort
s'eilant trouvé auprés
du Roy, ce Prince toûjours
plein de reconnoissance
& de bonté pour toutes les
personnes qui ont du merite,
témoigna le regret qu'il avoir
de la mort de Mr le Maréchal
de Crequi son Pere,
qui avoit fait le Siegede Luxembourg;
ce qui parut toucher
fort sensiblemenr Mr
le Comte de Blanchcfort,
& renouveller dans son
coeur le dcfir qu'il a de sui
vre ses traces, &- d'imiter sur
tout sa prudence? & sa fidelité
pour le Roy.
, Le 22. Sa Majesté donna
audience à Mrle Baron d'Ingelheim,
Envoyé
-
extraordinaire
de Mrl'Electeur de
Mayence; à Mr le Baron
d'Elts, Envoyé extraordinaire
de M l'Electeur de Tréves,
& à Mrle Comte de
Chellart, Envoyé extraordinaire
de Mr le Prince Electoral
Palatin, Duc de Juliers.
Ils estoienr venus faire compliment
à Sa Majesté de la
part des Princes leurs MaiRreS)
sur son heureuse arrivée
àLuxembourg. Ces Envoyez
eurent aussi audience
de Monseigneur, où ils furent
conduits par MrdeBonneüil
,
Introducteur des Ambassadeurs,
qui les avoit menez
chez le Roy? & les avoir
esté prendre dans les Carosses
de Sa Majesté. Ils firent
present au Roy dela part des
Princes leurs Maistres
,
de
plusieurs tonneaux de vin
du Rhin, & de vin de Moselle>
que Sa Majestéreceutavec
les manieres honnestes
qui luy sont si ordinaires, &.
pour marquer que ces Presens
luyestoient agreables
de la part dont ils venoient,
Sa Majesté voulut qu'ils fussent
conduits à Versailles par
les mesmesVoituriers qui les
avoient amenez; & les Envoyez,
suivant les ordres qu'iL
luy avoir pieu d'en donner,
furent regalez splendidement,
avec toute leur suite,par
lessoins de Mr Delrieu, Contrôleur
ordinaire dela Maifondu
Roy, qui n'oublia rien
en cette rencontre de tout
ce qu'il crut devoir faire
pour leur satisfaction, &qui
entra parfaitement bien dans
leurs manieres,
Quoy que le Palais où logeoit
le Roy sust fort spacieux,
il estoit neanmoins
impossible que tous ceux qui
estoientpressez de l'impatience
de le voir? y pussent
entrer; ainsi ce Prince eut la
bonté de sortir plusieurs fois
à cheval? & d'aller mesme
doucement, afin de satisfaire
ceux qui ne respiroient qu'aprés
sa veuë. Il alla à la Metre
aux Jesuites;& plusieurs personnes
qui jusques alors ne l'avoient
admiré que par la quantité
surprenante des grandes
choses qu'il a faites,& qui n'avoient
jamais eu le plaisir de
levoir,l'admirerent ce jour-là
par sa bonne mine, & par un
air qui perfuaderoit à ceux qui
ne sçauroient pas tout ce qu'il
a fait de grand, que tout ce
qu'on leur en diroit feroit - veritable,
véritable. Le Roy estant forty
dela Messe,vit le plan de
Luxembourg, qui estoit dans
une maisonproche de l'Eglise
des Jesuites, Il monta à
cheval l'aprésdînée, & descendit
dansles Mines;il voulutvoiraussi
les Contre-mines.
Il visita les Fossez, & se
promena sur les Ramparts.
Pendant tout ce temps il s'entretint
des beautez de cette
Place avec Monsieur le Printce,
qui fit voir la parfaite
connoissance qu'il a de tout
ce qui regarde la Guerre, &
quelle est telle qu'onladoit
attendre du Fils d'un Prince
qui auroit pu apprendre ce
grand Art à toute la terre ,
si on l'avoit ignoré. Monsieur
le Duc, Monsieur le
Prince de Conty
,
& Monsieur
le Duc du Maine su.
rent aussi de la conversation,
& firent voir qu'il est des
sciences pour lesquelles les
Princes ne sont jamais jeunes
&qu'ils semblent avoir aj>„
prises en naissant.
Le mal de Mrle Comte de
Toulouse, qui avoit esté attaqué
le jour precedent d'un
mal de teste
)
& d'un mal de
gorge, continua,& la Rougeole
s'estant declarée, le
Roy resolut de sejourner
deux jours de plus à Luxembourg
, non pas pour y attendre
la parfaite guerison dô
ce Prince, laquelle ne pourvoit
arriver si-tost, mais afin
de voir quel pourroit estre le
cours de son mal. On mir:
auprés de luyMrduChesne
Medecin?MrduTertre, Chirurgien
de Monsieur le Prince,
avec un Apoticaire de Sa
Majesté. Le bruit s'estant répanduque
le retour delaCour
estoit reculé, quelques Etrangers
en parurentinquiets,mais
ils furent rassurez si-tostqu'ils
firent reflexion que le Roy
avoit toujours gardé inviolablement
sa parole;qu'il aimait
Monsieur le Comte de
Toulouseavec tendresse; que
ce jeune Prince estoit chery
<dc toute la Cour, & quainsî
l'incertitude du mal qui luy
pouvoit arriver, estoit la
vraye cause qui portoit le
Roy à retarder son depart.
La Rougeole deMonsieur le
Comte de Toulouse, ne fut
pas la premiere qui parut
à la Cour. Une des Filles
d'honneur de Madame la
Princesse de Conty en avoit
déja esté attaquée. Il yavoit
euaussi d'autres Malades; &
la Gouvernante des Filles
d'honneur de Madame Il
Duchesseavoit eu la Fiévre.
La maladie de ce Prince contribua
à l'indisposition d'une
Dame d'un tres-grand meri-
&
re. Elle fut saignée, & son
mal se passa.
Le 13. Mrle Comte Ferdinand
de Furstemberg, & Mr
Ducker, Envoyez extraordinaires
de Cologne
, eurent
aussi Audience du Roy, &
de Monseigneur le Dauphin.
Ils y furent conduits par Mr
de Boneüil avec les mesmes
ceremonies que l'avoientesté
les autres Envoyez,& traitez
demesme.Mr le Cardinal
LangravedeEurftcmberg
faluaaussileRoyavecdeux
de ses Neveux.M le Comte
d'Avaux, Ambassadeur dfe
France auprès des EtatsGéneraux
dès- Provinces unies
s'estant rendu de la Haye à
Luxembourg, y salüa Sa Majesté,
& receut d'Elle de nouvelles
instructions touchant
les negociations ordinaires de
son Ambassade.Lorsqu'il prit
congé du Roy,ce Prince luy
dit qu'ilcontinuastàle servir
de la mesme sorte,& qu'il seroit
content. Cela fit assez
connoistre que Sa Majesté
estoit satisfaite de ses services
passez. Mr Foucher, Envoyé
extraordinaire des Etats Géneraux
auprèsdel'Electeur
de Mayence , eut aussi l'honneur
de salüer ce Monarque.
LeRoy entendit ce jour là la
Messeaux Recolets. & vit enfuite
dans ure Chambre du
Convent le Plan de Trarback
levé par Mr de Montaigu.Je
vous parleray de ce Plan dans
la fuite de ma Lettre. SaMajesté
alla l'apresdinée à la
teste des Tranchées, & des
Lignes, & en examinant la
Place, Elle previt tout ce qui
pourvoit arriver, si on osoit
un jour entreprendre de l'assieger.
Elle fit le mesme jour
la Reveuë des Troupes de la
Garnison, quiconsistoient en
cinq gros Bataillons, & en
plusieurs Escadrons.
Le 14. le Roy entendit la
Messe à la Paroisse, & tint
Conseil le matin & l'apresdînée,
ayant pendanttoutle
temps qu'il a demeuré à Luxembourg
,donné cinq à six
heures par jour, pour tousles
Conseils qu'il y a tenus; de
forte, que le temps qu'il employoit
à voir des Fortifications
& à faire des
-
Reveuës,
estoit celuy qu'il prenoit
pour donner relâche à fan
esprit. Ainsi l'on peut dire
que l'esprit ne commençait
à se reposer que pour donner
lieu au corps d'agir. Pendant
que le Roy n'eliok occupé
que des soins de son
Etat sans se donner un seul
moment de relache
,
la Cour
se partageoit, pour se divertir
selon son goust. Les uns
se
-
promenoient ,
les autres
joüoient , & quelques autres
se rafraîchissoient chez Mrde
Bouflers.Je ne vous diray
point que durant tout le sejour
- que Sa Majesté a fait
dans cette Place, ce Marquis
a tenu plusieurs Tables chaque
jour, tant le soirquele
matin,à un fart grand nombre
de couverts; ce seroitdire
trop peu,puisque non seulement,
tousceux qui ont voulu
manger chez luy y ont
trouvé a toute heure tout ce
qu'ils ont souhaité, mais
qu'on n'a mesme rien refusé
f aucun de ceux qui en ont
envoyé chercher. Commejamais
homme ne fut plus genereux
> jamais dépense n'a
esté faite de meilleure grace.
Mr deBouslers apprehendoit
si fort de n'estre pas à Luxembourgpour
la faire
a.
qu'ilfol^
licita pour n'aller au Camp
qu'ildevoitcommander,qu'aprés
que Sa Majesté seroit
partie. Le Roy qui sçait distinguerladépense
qui n'est
pas interessée,luy a fait un
Present de trois mille Loüis.
Le z5. SaMajesté entendit
encore la Messe aux Jesuites.
Elle se promena de nouveau
à cheval dans les Fossez
) & à
pied sur les Ramparts. Plus
Elle a regardé la Place avec
application,&enaexaminé
les nouvelles Fortifications,
plus Elle en a esté satisfaite ;
8c comme on ne luy rend
point de grands services sans
recevoir des marques de sa libéralité,
par dessus les recompenses
ordinaires, Elle donna
douze mille écus à Mr de
Vauba n.Toutes les Relations
conviennent qu'Elle luy fit
ce Present d'une maniere si
obligeante, que plusieurs
souhaiteroient enavoir acheté
un semblable de beaucoup
plus, & l'avoir receu
Qvec le mesme agrément. JLf
Royafait aussi des Presens
dans toutes les Eglises où il a
esté. Il donnoit une somme
pour les Ornemens. Cette
somme estoit suivie d'une autre
pour les Pauvres, & ces
deux d'une troisiéme, ou de
quelques graces dont il de":
voit revenir de l'argent pour
l'embellissement des lieux. Sa
Majesté n'ayant point mené
de Musique auVoyage )l'un
de ses Musiçiens nommé Mr
de Ville, qui est Chanoine
de Mets> y prit quelques lastrumens,
& quelques voix ,
& fit chanter dans les Eglises
où le Roy entendit la Messe
à Luxembourg, les Motets de
Mrs du Mont, Robert, &
Minoret. Sa Majesté le recompensa
de ses soins, de son
zele, & de sa dépense. Comme
l'argent n'est pas toûjours
ce qui touche davantage,quelques
charmes qu'il ait pour
tout le monde, par l'indispensable
necessité où chacun
cil d'en avoir, le Roy fïr
ouvrir les Prisons à soixante
&dix Malheureux, qui aimerent
encore mieux la liberté
que toute forte de biens;mais
ce Prince ne leur accorda des
graces que selon le genre des
crimes,ne voulant pas que sa
clemence servist à en faire
commettre de nouveaux, à
ceux qui en avoient fait d'enormes,
& que l'on jugeoit
capables d'y retomber,ce que
Mr l'Evesque d'Orléans, Mr
l'Abbé de Brou
,
nommé à
l'Evesché d'Amiens, Mes,
les Abbez de la Salle «
Fleury,& Mrde Noyon Lieu-»
tenant de Mr le Grand Prevost,
ont examiné par l'ordre
du Roy.
Le26.les uns ne songerent
qu'à partir, & les autres s'affligerent
du départ. LaCour
en voyant les Fortifications
de la place, avoir pris un
grand plaisir à se mettre devant
les yeux tout ce qui s'estoit
passé pendant le Siege-
Elle avoit examiné les Attaques&
les Tranchées) admiré
la conduite du General
)
l'intrepidité
des Soldats, le ge.
nie & l'adresse de M'de Vauban
à conserver les Aillegeans;
car le Roy sçachant
l'humeur boüillante des François
, & leur zele pour son
service
, avoit expressément
ordonné à feu Mr le Maréchal
de Crequi, & à Mrde
Vauban,d'épargner les Troupes,
& de prolonger la durée
du Siege,plûtost que de
hazarder le sang des Soldats.
Ce Prince avoit pris ses mesures
pour cela, Il estoit à la
teste d'une Armée pour em-"
pêcher lesecours,&prest à
donner bataille à ceux qui
auroient voulu le tenter.
Lors que la Cour partoit
satisfaite, & toute pleine de
ce qu'elle avoit veu, elle partoit
avec son Prince, & le
devoit toûjours voir; mais
ceuxàqui il ne s'stoit montre
que pour gagner leur
amour,& ensuite les priver
de sa presence,avoient beaucoup
de cbagrin de son départ.
Ce Prince avoit paru
à Luxembourg plûtost enPere
qu'en Roy. Sa douceur & sa
bonté s'estoient fait connoître.
Il s'estoitmontré familier
sans descendre de son
rang; on avoir eu un libre
accés auprés de luy ; ceux qui
luy avoient presenté des Requestes
avoient esté écoutez,
& la pluspart avoient obtenu
les graces qu'ils avoient demandées
;les Prisons avoient
esté ouvertes;laNoblesseavoit
eu un libre accès jusque dans
saChambre ;il avoit permis
plusieurs fois au Peuple de le
voir dîner , ce qu'il avoit
refusé dans les autres Villes,
à cause de la chaleur; ils
avoient admiré la devotion
de Sa Majesté, & la pieté que
son exemple inspire à toute
sa Cour; il avoit fait de
grands dons dans la Ville;
les dépenses ordinaires de là
Cpur y avoient répandu
beaucoup d'argent,ainsi que
le Etrangers que l'envie de
voir ce Prince avoit fait venir
en fort grandnombre; L*
Noblesse avoit esté receuë
aux Tables de la Maison du
Roy,&les Etrangers de distinctionqui
n'estoient pas
venus avec les Envoyez des
Princes Souverains des environs
, y avoient aussimangé;
enfin tout concouroit à faire
aimer, & regreter ce Grand
Prince. Il partit le 26. aprés
avoir entendu la Méfie aux
Capucins,& alla dîner à un
lieu nommé Cherasse.
J'aurois pu vous parler plûtost
du Voyage dont Mr de
Louvois rendit compte ait
Roy à Luxembourg
, mais je
n'ay pas voulu interrompre
la fuite de la Relation que
j'avois à vous faire de ce qui
s'y est passé.CezeléMinistre
partit de Versaillesle30. d'Avril,
passa à Tonnerre & à
Ancy-le-franc,&après avoir
vû les Fortifications de Besançon
, les Troupes, & les
Cadets, il se rendit le 5. de
May après midy à Befort.
C'est la Capitale du Comté
de Ferrette, située dans le
Sunggovv bb 1
Sunggovv,écheuë au Roy
avec l'Alsace par le Traité
de Munster. Mr le Marquis
dela Suze en a esté longtemps
possesseur, par engagement,
ou autrement. Mrle
<C? ardinalMazarinpossedaenfuite
ce Comté, & Mrle Duc
Mazarin, qui luy a succedé,
en jouitpresentement. La
Ville estassez belle. Il y a
un Chasteau, où l'on a fait
quatre Bastions. Mr de Saint
Justest Gouverneur de cette
Ville
>
où Mr de Dampierre,
Lieutenant de Roy, commande
c-iifôn absence. M" de
Louvois visita la Place, les
Troupes, & les nouveaux
Travaux, qu'il trouva en bon
'estât. Ce Ministre coucha
le 6. à Dainm-arie Village
d'Alsace. Il se rendit le 7. à
Huningue. C'est une Place
quiestfort proche de BaDe,
ÔZ qu'on a nouvellement
fortifiée de six Bastions sur
le Rhin ; on y a aussi fait
- des Dehors? & un Pont
ik bois fut le Rhin avec
quelques Ouvrages au bout
pour en fortifierla teste.
Cette Place rend la France
fort puissante sur le Rhin.
Elle est dans l'Alsace. Mrle
Marquis de Puisieux en est
Gouverneur, & Mr de la Sabliere
, Lieutenant de Roy-
Mrde Louvois en examina les
Fortifications,& fit faire reveuë
aux Troupes qui y et;
toient e& Garnison. Le 8. il
coucha à Fribourg, Capitale
c- duBrifgaw
,
située sur la petite
Rivière deTreiseim,i
bout d'une Plaine fertile, &
sous une hauteur qui cft le
commencement de laForest
loire. Elle est grande, bien
)euprlee.&: a diverfcsEcrllfcs,
&: plusieursMaisons Rcligieuses.
Le Chapitre de Basle
y fait sa residence, quoy que
l'Evesque ne l'y faire pas. Il la
fait à' Potentru, depuis que
les Protestans ont esté Maistres
de Basle. Il y a une Chambre
Souveraine à Fribourg,
& une celebre Université,
qu'Albert VI. dit le Debonnaire
,y fonda en 1450. Les
Ducs de Zeringuen ont possedé
autrefois cette Ville; qui
passa dans la Maisonde FULstemberg,
par le mariage d'Agnes
avec le Comte Hugue
ou Egon, dont les Descendans
l'ont gardée jusque
vers l'an 1386. après quoy les
Bourgeois s'estant mutinez,
se donnerent aux Ducs d'Austriche.
Elle fut prise trois
fois en six ans par les Suédois;
sçavoir en 1632.. en 1634. ôc
en 1638. Son nom s'est rendu
fameux dans toute leuropc,
par la celebre Victoire que
feu Monsieur le Prince, qui
n'estoit alors que Duc d'Anguien,
remporta en 1644. sur
les Troupes Bavaroises, aprés
un Combat sanglant & opïniastré
qui dura trois jours,
pour les postes difputcz de
la Montagne-noire., à une
lieuë de Fribourg. Ces trois
jours furent le 3. le 4. & le 5.
du mois d'Aoust. Feu M le
Maréchal de CrequLqui commandoit
une des Armées,du
Ro.yj.piMt cette Villele17.
Noyen).bre1677.aprèsun Sijer
gaevdoeisteapltorosuckhuuxitmjouurrasi.llIelsy»
uneCitadelle
à quatre Ri-
(rions, dç bons FolLz? o~
quelques autres Ouvrages.
Depuis ce temps-làles François
l'ont fortifiée plus regulierement.
La Rivière- du.
Trcifeim, qui n'est jamais
glacée? nettoye toutes les
rues. On a ajoutéquelques
Bastions aux anciennes muraillesde,
laVille,& les Fortifications
du Chasteau ont
este augmentées. On les a
étendues sur toute la hauteur.
C'est un chef-d'oeuvre de Mr
de Vauban. On yaaussi bâty
d'autres Forts qui commandent
à deux vallées. Les
Archiducs d'Autriche y avoient
étably une Chancelleric.
Il y a quatorze Mona.
stercs à Fribourg, & des Maisons
de trois Ordres de Chevalerie.
Mr du Fay en est
Gouverneur, Mr Barrege.
Lieutenant de Roy, & Mr
Roais commande dans leChasteau,
Mr de Louvois dîna le
,. à Brissac,&vit la Place
&les Troupes.Cest une Ville
d'Alsacedans le Brisgavv qui
donne un passage sur le
Rhin. Elle fut prise en 1638-
par Bernard de Saxe, Duc de
Vveimar, General de l'Armée
de Suede? avec le secours des
Troupes Françoises que conduisoit
le Maréchal de Guebriant.
On y trouva plus de
deux censpieces de Canon)
avec degrandesrichesse -y,
l'annéesuivante le Duc at
Vveimar estant malade à.
Nevvembourg prés de Irifac?
le mesme Maréchal de Guebriànts'aflxiraaumoia.
deJ all--
kx de cetteimportante- rl -
ce-,ôc des autres qui fuienc re-r
mises au Roy j&r TwtÇ du
9.Octobre de lamesme aPT
née.Elles surent cedées à Sll
Majesté en 1648. par leTraité
de Vvestphalie
, ce qui, fJu;
confirmé en 1^59<parcehijfr
des Pyrénées,Brisaa,que
quelques-uns juçmmenp la
Citadelle de l'Alsace, &d'autres,
laClef de l' Allemagne,
passè aujourd huy pour une
des plus fortes Places del Eu-
-
rape, soit qu'onregarde sa
situation sur un Mont,soit
qu'on examine ce eue l'arta
ccoonnctrriibbuuééaà la rreennddrree rrce~guu--
liere. Elle est sur le bord du
Rhin qu'elle commande,
C'estoit autrefois la Capitale
duBrisgavv, qui areceuson
nom d'elle, mais Fribourg
l'a emportédepuis quelque
temps. Il y a aujourd'hui
double Ville,car outre cellequi
estoit audelà du Rhin,
onafortifié une lac, qui est
presentement habitée, avec
grand nombre de Bastions.
Ilya aussi des Fortifications
en deçà du Rhin? & toutes
ensemble elles peuvent faire
environ trente Bastions. On
travaille incessamment à cette
Place, que l'on peut dire
imprenable. Il y a dans Brisac
une Compagnie de jeunes
Gentilshommes. Mr le Duc
Mazarin en est Gouverneur
Mr de la Chetardie y commande
en sa place,& Mr de
Farges y est Lieurcnant de
Roy. (
Mr deLouvois vit lemesme
jour p. d'Avril, les Fortifications
de Schleftadt. &
les Troupes qui y font en
Garnison.C'est une Place située
dans l'Alsace sur la Riviere
d'Ill qui porte Bateaux.
Elle estoit autrefois fortifiée
de bonnes murailles & de
fortes Tours, avec un Rempart,
& des Fossez très-larges
&fort profonds. On y a fait
des Battions depuis ce temps,
là. C'est une Place fort considerable
,
où l'on fait un
grand trafic. CetteVilles''est
toujours maintenue Catholique
au milreu de i'Heresie,
& il y a un College de Jesuites.
Mrde Gondreville en,est
Gouverneur, & Mrde la Provenchere,
Lieutenantde Roy.
Le 10. Mr de Louvois allacoucher
à Benfeld,petite "-il.
le de la baffe Alsace
,
assezforte,
&: des mieux entenduës..
Elle, dépend de Strasbourg-
,
dont elle n'estéloignée que
de trois lieues. Elle est sur
la Riviere d'Ill. Mr de Louvois
dîna le 10. à Strasbourg
)
ôc y sejourna le n. vit la Ville,
la Citadelle, les Forts, &
les Troupes. Mr de Chamil-
.Iy) si célébré par la défense
de Grave. en est Gouverneur.
Mr de Louvois logea chez Mr
de Monclar, qui commande
-
en Alsace. Je ne vous dis rien
de Strasbourg, comme je ne
Vous ay rien dit de Besançon,
parce que ces Places sont entièrement
connues. Ainsi je
ne vous ay parlé que de cellies
dont j'ay cru pouvoir
vous apprendre quelques particularitez
quine se trouvent
dans aucun Ouvrage imprimé.
Le 12. Mrde Louvois dîna
au Fort Louis du Rhin.
C'est un Fort qui a este construit
dans une Isle du haut
Rhin, huit licuës au dessous
de Strasboug, & autant,au
dessus de Philisbourg. Ce poste
estoit presque inconnu.
Toute l'Isle qui est au Roy,
estant dans l'Alsace qui ap.
partient à Sa Majesté
,
doit
estre fortifiée. Il doit y avoir
plusieursBastions, & des
Ponts avec des Fortifications
à la teste. Mr de Bregy est
Gouverneur de cette Place.
Mr de Louvois aprèsavoirs
examiné l'estat de ce Fort
allalemême jour coucher à
Haguenau. C'est une Ville
fort marchande en A lsace,située
entre les rivieres de Meter
& de Sorn.On gardoit autrefois
dans cette Ville-là,
la Couronne,le Sceptre, la
Pomme d'Or, & l'Epée de
Charlemagne avec les autres
ornemens Impériaux. C'est le
Siege du Bailly du Langraviat
d'Alsace. Mr de Louvois
coucha le 13. à Britche, où il
visita les troupes & la Place.
Cette Ville qui a un Châteauassez
considerable, est
dans la nouvelle Province
de la Sare. Mr de Morton
en est Gouverneur, & Mr de
laGuierleLieutenant deRoy. |
3MVT de LLoouuvvooiiss, aapprrèèss aavvooiirr
Nifité lesFortifications & les
groupes> alla dînerle14. à goù il-ne la même.
choseavec unepareille
activité.Hombourgeft assez
considerab- eoniiderable>&:estauasusmi dans la Provence de laSarre. M1
lç Marquisde laBretesche
qui commande dans cette
Province,en est Gouverneur,
& ^lr de la Gardette y
commande
en son ablençe,
M de Louvois alla ce jourlacouch
r à.jatrpctip Village
de la Province de la Sare qui
se nomme Cucelle &le1/
il passaàKirnoù il difha
en visita le Chasteau. Il cb.,.-
chaleITlefmejourlTraDeri
proche Trarback, & visita
la Presque-Isle de Traben, oi|
l'on va bastir une Placequi
s'appellera Mont-Royal. Cette
Place dont on n'a oiïy parler
qu'en apprenant qu'on y
travailloit
)
fait aujourd'huy
l'entretiende toute l'Europe,
le Roy n'entreprenant
rien qui ne soitassez grand
pour servir de conversation
au monde entier.Quoyqu'on
parle beaucoup d'une chose
ce n'est pas à dire qu'on en
partetoujours jùftc
) & il est
mesme presqueimpossible
:quton puissefejavoir au vray
toutes les pârticularitez d'une
entreprise
?
dont a peine,
at-on appris qu'on a forme,
le dessein. Tout ce que je
puis vous dire de celle-cy,
c'est que j'ay ramassé avec
grand foin* beaucoup de circonstances
qui la regardent*
&: que quandil y en aur,Qi,t;
quelques-unes qui ne feroient
pas toux à fjut vrayes;
je ne laiffer4 pas, 4c ycxuj
apprendre plusieurrs çbofcî
qu'on ne peut encore vous avoir
dites. Le Roy voulant
couvrir Luxembourg en 3
J - s cherché -lps tnoyeps ?
& lesa
trouvez danssesterresen.déT
couvrant un lieu. propre à
fairebastiruneVille. Ce lien,
se nomme Traben, & pour
parler à lamaniéré du Païs,
il eit à trente heures dç-Liirxembourg,
à douze de Tre"
ves, &à six de Coblens. Je
ne me puis tromper de beaucoup
sur le plus ou sur le
moins) & l'espace que je vous
marque) vous doit donner à
peu prés l'idée de l'éloignément
où ces Places peuvent
cftre les unes des autres. Tra.
ben est à la teste de Luxembourg.
On dit que Cesar y a
Autrefois campé, & qu'il y a
des vestiges d'une espece de
Fossé que l'on pretend avoir
autrefois fermé son Camp,
La Nature semble avoir faifre
ce lieu-là afin que le Roy le
fin: servir à sa gloire. Il n'a
que huit toises de largeur à
son entrée, que l'on dit estre
une escarpe& un rocher inaccessible.
La Moselle, qui n'eâ
point guéable en ces quartiers-
là ,envelope lereste de
son enceinte. L'entrée du
terrein elt occupée par un
plan deSapinsqu'onfaitjetter
à bas pour servir à cette
entreprise. La terre qui rcftc
lontient un des meilleurs
plans
plans de vignes de tout lePaïs,
& quelques champs qui rapportent
de tres-beaux grains,
&l'on trouve outre celaassez
de vin &de grain dans l'étendue
de cette presqu'Isle pour
nourrir une Garnison de trois
ou quatre mille hommes, Les
costes qui regnent vis-à-vis
le long dela Riviere,ne commanderont
point la Place, &
comme on ne pourra l'attaquer
que par le terrain que je
viens de vous marquer, il est
aise delarendre imprenable.
Il ya quatre Villagessur Iesr
crestes de ces costes dont on
pourra tirer de grands secours
pour les premiers Travaux,
L'extremité du plan de lapins
est une grosse source, qui se
trouvera dans lesFossez de la
Place, & qui fournira de
l'eau à la Ville. Elle aura
plusieurs Bastions
>
& fera
touteirreguliere, & tracée
sur la longueur, & la largeur
du terrain. Il y aura autour
de lapresqu'IsledesRedoutes
d'espace en espace
) pour dé-«-
fendre le passage de la Riviere.
Cequ'ilyade surprenant,
]
c'est qu'on peut dire que ce
que le Roy rcfout,est à demy
fait presqu'au moment
qu'il est resolu, au lieu que
pour l'ordinaire les grands
desseins demeurent au seul
projet. A peine eut-on plante
les piquets) que les Baraques
pour leslogemens des Soldats
le trouvèrent faites. Sept Bataillons
travaillèrent. Ils furent
bientost fortifiez d'autres
Troupest & l'onregarda
cette entr^prife avec unétonnement
donton n'cft pas encore
rovenu? sur tout pendant
que le Roy fait travail1er
dans le mcfmc temps àun
fort grand nombre de Places.
Quelque Souverainqui aitjamais
entrepris d'en faire, elles
ont estel'ouvrage du temps
plûtofi que de ceux dont elles
ont pris le nom; puis que la
pluspart nont presquerien
fait de plus, que d'en avoir
mis la première pierre. Voilà
la France à couvertdes infultes
deTAllemagne, & le Roy
fait plus à son égard
? que les
Chinoisn'ont jamais fait par
leur muraille de cinq cens
lieuës de long à l'égard des
Tarures.Le Royaume de la
Chine n'est à couvert que par
une feule muraille, & la Fran-*
ce l'est aujourdhuy par deux
rangs de Places forces, qui
doivent au Roy tour ce qui
les rend redoutables. tvir de
Louvoisaprès avoir sejourne
le 16.a Traben, & avoir,
pour ainsi dire, donnéle mouvement
à tous les bras devoient qui agir pour la gloire
du Roy,& pour la tranquillité
de l'Europe, alla coucher
le 17- a Sare-Loiiis, où il fit
la reveuë des Troupes, &vifita
les Fortifications de la Place
Elle est Capitale de laPro,
Vince de la Sare. Ce n'estoit
cjiTun Village, dont le Roy
a fait une Place tres-reguliere.
On luy a donné le nom de
-,ç,arc-Loüls, qui est un composé
deceluy duRoy,&de
celuy de la Province. Cette
Ville a six Bastions Royaux
avec quelques Demy-lunes,
& d'autres Ouvrages, M de
Choisyen est Gouverneur éc
Mr le Comtede Perin Lieutenant
de Roy. M deLouvois
y sejourna le 18. &le lendemain
il alla àThionville,
où il se donna les mesmes
soins, &pritles mesmes fatigues
que dans les autresVilles
où il avoit passé. Thionville
n'appartient à la France
que du regne du feu Roy.
C'est une Ville du Luxembourg
assise sur la Moselle.
C'estoit une des clefs du
Royaume avant les nouvelles
Conquestes de Sa Majesté.
On a razé Domvilliers, &
quelques autres petitesPlaces
voisines
>
afin de rendre celle-
là plus considerable. Mr
d'Espagne enest Gouverneur;
Mrd'Argelé,Lieutenant de
Roy, & Mr de Bouflers,Gouverneur
de Luxembourg,&:
Lieutenant general de la Pto-T
vince.Mr deLouvois a trouvé
dans toutes les places qu'il
avisitées,les Troupes & les
Fortifications fort belles. Le
Canton de Basle luyenvoya
faire compliment à Huningue,
& Mrl'Electeur de Treves
fit la mesme chose pendant
que ce Ministre estoit à
Trarbach, Les Magistrats de
tous les lieux qu'il avisitez,
l'ontaussi complimenté, &
les Gouverneurs des Provinces
&des Places que je viens
de vous nommer,& M les
Jntendans la Grange ôc la
Goupiliere ont fait tout ce
qu'ils ont pu pour le bien reé
galer; mais ce Ministre toûjours
agissant n'avoîtqu'à
peine le temps de voir les Repas
qu'on luy preparoit par
tout. Jamais on n'a fait tant
de chemin) ny vu tant de
Villes
,
de Remparts, & de
Troupes, en si peu de temps
Lors qu'on sert ainsi fou
Prince,on le fait servirde
mesme
; & quand les desseins
du Souverain font grands, on
ne voit rien qui ne sente le
prodige. Mr de Louvois dîna
le 20. à Luxembourg,où Sa
Majesté arriva l'aprésdinée.
Je vous ay fait un détail de
tout ce qui s'y est passé,&
vous ay dit que le Roy alla
le 26. dîner à Cheranc. Ce
Prince coucha à Longvvy,cù
• aprésavoir vu faire l'exercice
aux Cadets dans la Place d'armes
, il en choisit quatrevingt,
pour les mettre en diversCorpsenqualitéde
Sousl^
ieurenans, comme jevons
l'aydéja marqué. La Cour
alla dîüer le 27.à Pierre- Pànt.
Sa Majesté montaà cheval
l'apresdinée
, & arriva te soir
àEtain -en prenant le diver-^
tissement de la Chasse. Sa Ma>-
jesté y fut receuë par Mr de
Verdun. Elle entendit la
Messe le 1$. à la ParoiiTe,Se
fit de grandes liberalitez au
Curé5 & aux Capucins qui
sont établis en ce lieu-là,quoy
qu'Elleleur en eust déja fait
en y passant la premiere fois.
Elle dîna le mesme jour à
Verdun chez M" 1tveique,
à quiElleavoit donnéordre'
le jourprécedent pour 'lC{
âaiur qui fut chanté en
Musique sur les six heures dtV
soir. Toute la Cour y am,
ffcaravec une devotion qvd
répondoit à la pieté du Roy.
Le lendémain 29jour du,
S. Sacrement ,
la pluspart dM
Dames qui avoient accompagné
ce Prince , firent leurs
devotions, ce qui parut fort
édifiant. Le temps estant extremement
pluvieux, on ordonna
que la Procession se
seroit feulement jusques à
l'EglisedesJesuites, & qu'elle
reviendroitaussi-tost dans Ii
Cathedrale. La Procession
commença par les Paroisses
de la Ville, suivies des Mandians,
& autres Religieux.Le
Clergé estoit en fort grand
Nombre, accompagne des
Gardes de la Prevosté
,
des
Cent-Suisses de la Garde, ôc
des Gardes du Corps,qui marchoient
sur deux lignesa coté
de la Procession. Messieurs
les Princes du Sang estoient
immédiatement après leDais.
Monseigneur le Dauphin pa..
roissoit ensuite ; deux Huisfiers
portantdesMasses precedoient
le Roy, qui avoit auprésde
luy lePere de laChaise,
& fesAumôniers.Les Princesses
marchoient aprés, suivies
des Dames les plus distinguées,&
ces Dames l'estoient
d'ungrande nombre de Seigneurs
, & d'Officiers de la
Maison du Roy. Le Presidial
deVerdun marchoitenCorps,
Se MP de Ville suivoient le
Presidial.Aprés cette longue
file quiétoiten fort bonordre,
venoit une foule de peuple
innombrable, sans compter
ce qui se trouvoit encore dans
la Ville. Presque toute laLorraine
s'y estoit renduë,&on
en voyoit jusque sur les toits.
On s'arresta à deux Reposoirs,&
la grande Messe fut cclebrée
par Mr l'Evesque de
Verdun. Le Roy, & toute la
Cour occupoient la droite
des hautes Chaises. LesChanoines
estoient à la gauche,
& la Musique au milieu du
-Choeur; elle s'acquita assez
bien de tout ce qu'elle chanta.
Sa Majesté alla à l'Offrande,
& aprés la Messe Elle eut
à peine le temps de dîner *
pour retourner au mesme
lieu, oùla Cour entendit Vespres.
MdeVerdunofficia encore.
Au sortir de cette Eglise,
le Roy se promena autour
de la Citadelle
)
&: alla
voir les Ecluses, qui sont presentement
achevées, & dont
on se doit servit pour empêi
cher qu'on n'approche de la
Ville du costé où elles sont.
Mr deLouvois alla jufclu-aa
lieu où les eaux remontent.
Plusieurs Particuliers ayant
eu leurs beritages endommagez,
ont esté remboursez par
la bonté de Sa Majesté
, quoy
que cet ouvrage foit pour la
défense de leur Patrie.
Le 30.le Roy entendit encore
laMessedans la Cathedrale,&
Mrde Verdun luy
presenta de l'Eau-benite.Ce
Prince eut la bonté de faire
une remontrance au Chapi
tre,) pour l'exhorter de bien
vivre avec son Eve[quc) &
comme il sçavoit que les Chanoines
estoient en possession
depuis un fort grand nombre
d'années
?
d'estre debout pendant
l'Elevation, il leur deT
manda qu'en sa consideration
ilssissent une Ordonnance
pour abolir cetusage, à quoy
ils ne s'opposerent pas. La
Musique chanta un Motet sur
le rétablissement de la santé
de ce Prince, & receut en
mesme temps des marques de
sa libéralité, Toute la Cour
alla ce mesme jour dîner à.
Brabant, & arriva un peu
tard à Sainte-Menehout. M1
l'Evesque de Châlons s'y
trouva avec quelques Ecclesiastiques
qu'il y avoit ame.
nez. Mr le Duc de Noailles
ayant de son costé amené de
LuxembourgMr de Ville, &
prisà Verdun des Musicièns,
qui se joignirent à d'autres
qu'il avoit fait venir de Châlons,
le Salut fut chanté en
Musique aux Capucins sur
les septheures du soir. M de
Châlonsy donna la benediction
du S. Sacrement. Les
Capucins furent extrêmement
édifiez de voir que la
Cour, à l'exemple de son Souverain
faisoit paroistre une
grande pieté. Ils connurent
encore celle de ce Prince, par
les presens qu'il leur fit le
lendemain en partant, quoy
qu'ils en eussent déja receu
lors qu'il estoit paffé à Sainte-
Menehout, pour se rendre à
Luxembourg.
Le 31. le Cour dîna à Cense
de Bellay & allaà Châlons,
où elle trouva un nombre mfïny
depeuple qui s'y eftoic
assemblé
; croyant qu'elle y
passeroitla Feste de Dieu, cqui
seroit arrivé, si la maladie
de Monsieurle Comte de
Toulouse n'eust point rompu
les mesures que l'onavoit prises.
Le Salut fut chanté par
la Musique avec beaucoup de
iolemnité?M1deChâlonsef-
-tantà lateste desonChapi-
"tre. L'Eglise,& les ruës es-
Iaient si remplies
, qu'on
croyoit estre au milieu du
Peuple de Paris. Un nombre
infiny de routes sortes de gens
qui cherchoient à voir le
Roy, occupoit le Jare , &
Tonassure -qu'il n'y en avoit
jamais tanteu.
Ii
Le premier Juin, le Roy
dîna à Bierge, & coucha à
Vertus. Il y entendit le Salut
à la Paroisse, où il y eut une
Musique tres-agreable
,
soutenue
desHautbois des Mousquetaires.
M de Châlons y
officia,assistiéde M de Luzanfy
& de Lerry? qui ont des
Abbayes en ce lieu.
Lei. on partit de Vertus
à dix heures
du
matin, après
avoir entendu la Messe, pendant
laquelle la Musique continua
de chanter des Motets
de M1r du Mont. On ne sçauroit
trop admirer le zele&
l'activitéde Mrde Noailles,
pour le service de Dieu & du
Roy.M deChâlons aofficié
pendant l'Octave du S. Sacrement
, par tout où Sa Majesté
a esté dans son Diocese,
& il s'est par tout trouvé de
la Musique, par les soins de
M le Duc de Noailles son
frere. La Cour alla de Vertus
dîner à Etoge. C'estunlieu
toutremply d'agrémt.Lebastimentenest
beau,les Jardins
en sont charmans
, & l'abondance
des eaux y donne tous
les plaisirs que l'on en peut
recevoir. Ce lieu appartient
à Mr le Marquis d'Anglure,
& sert de retraite à deux freres
& à une soeur, qui par
leur mérité sefont fait une reputation
qui s'estrepandüe
bien avant dans le Monde. La
vertuest leur passion, la charité
fait leur employ, & leur
pieté est exemplaire. Le Roy
leuravoit fait dire qu'il difneroit
chez eux sans les embarasser,&
quoy qu'il n'euisent
pas l'avantage de donner
à mangeràSa Majesté,ny par
consequent l'honneur de la
servir,leur magnificence ne
JailTa pas de paroistre i la maniere
dont ils traiterent toute
la Cour. L'abondance fut
si grande aux tables qu'ils
firent servir
, que celle du
Chambellan ne tint point,
Monsieur le Prince qui mange
ordinairement à cette table
, ayant fait l'honneur à
cesillultres Solitaires de manger
àcelle qu'ils luyavoient
fait préparer. Le Roy inftruit
de leur vertu voulut sçavoir
le détail de leur vie dans
une solitude si peu commune
à des personnes de cette
qualité. Ce Prince apprit que
lesFreres faisoient le plaisir
- - de
de la Soeur, & la Soeur celuy
des Freres? que leurs heures
font reglées pour leurs exercices
ordinaires qui estoient
toujours égaux, sur tout la
Messe
,
les prieres frequentes,
& la visite des Pauvres. Un
fils de l'aisné qui n'a pas encore
cinq ans, eut l'honneur
de manger avec le Roy. Pendant
queSa Majestéfaisoit
son plaifirde s'entretenir de la
pieté de ses hostes,onluy apprit
que Madame la Princesse
deConty avoit un malde teste
& unedouleur de gorgequi
faisoient craindre que cette
Princesse ne fût bientost attaquée
du mesmemal qûeTilc
le Comte de Thoulouze avoit
essuyé à Luxembourg.
Le Roy ordonna qu'on
fïftauffitoft partir pourMo zmirel,
& se prepara a quitter
1-oge pour ta suivre.Il ne faut
pas que j'oublie à dire qu'il ya
une galerie dans ce Chasteau
qui plut beaucoup à Sa Majesté,
& qui auroit fait plus
long-temps le plaisir de toute
la Cour? si elle n'avoit point
esté pressée de partir. Elle
contient les Portraits- de tous
les grands hommes qui ont
paru en Europe depuis environun
Siècle, &; les Portraits
de ceux qui ont vescu
çlaAs, lemesme temps,-sont
pppofez les uns aux autres,
comme pour en faire des
paralelles; leurs principales
actions& leurs alliances font
marquées au bas. Cette Galerie
est plus curieuseque
magnifique, & l'on y voit
regner une simplicité debon
goust
, qui attire plus de
loüanges à ceux à qui appartient
cette maison, qu'une
magnificence mal entendüe..
-
Le Roy ayant quitté un lieu
jS delicieux
,
arriva de bonne
heure à Montmirel. Mr de
Louvois, comme Seigneur du
lieu, receut Sa Majesté à la
descente de son carosse. Ce
qu'on avoit soupçonné du
mal de Madame la Princesse
de Conty? arriva.Les rougeurs
parurent?&elle fut faignée
le lendemain au matin.
Sarougeolle estoit tres forse?
mais les Medecins dirent
qu'ellen'estoit pas dangereuse.
On Iaifïa aupres de
cette Princesse MrPetit,Pr-emier
Medecin de Monseigneur,&
Mr DodartsonMedecin,
avec MrPoisson, Apotiquaire
du Roy. Comme
ce Voyage approchoit de sa
-fin, la
-
Cour commença à défiler,
& M[ le Prince de
Conty partit pour Paris. On
dit ce jour-là des Messes
tout le matin, & à sept
heures du soir il y eut Salut.
LePrieur Curé, qui est un
Religieux de S. Jean de Soissons
,
fit la céremonie.Le
- 4. Monseigneurle Dauphin
ayant
beaucoup d'impatience
de - revoir Madame la
Dauphine, receut de Sa Majesté
la liberté de partir. Ce
Prince
-
arriva le soir mesme
à Versailles. Plusieurs personnes
quitterent la Cour cC;
jour-là. Les Prieres se firent
comme le jour precedent;on
fut fort en doute si on partÍroÍr,
on reeeut des ordres
pour le depart, & ces ordres
furenr révoquez. Le jour de
FOccave du S. Sacrement,le
Roy ayant sceu à quatreheures
& demie du matin l'estac
--de la maladie de Madame la
Princesse de Conty
?
Ordonna
à Mr de Louvois de faire
partir les Officiers, & cependant
cc Prince , quine songe
pas moins a
-
remplir les aevoirsdeChrestien,
que ceux
de Roy, demanda au Pere de
la Chaise
,
s'il estoit Feste dar s
le Diocese de Soissons,& s'il y
avoit obligation pour ses Officiers
d'entendre la Messe, &
pour luy
3
d'assister à la Procession.
Le Pere de la Chaise
luy repondit, qu'il estoit obligé
d'entendre la Messe
) &
non d'aller à la Procession
mais que cependant il feroit
mieux que Sa Majesté rendist
ce devoir aux ordres de l'Egli[
e,quia étably la Procession
de l'Octave. Il n'en falut
pas davantage pour faire
ordonner qu'on cLft coniti-*
nuellement des Messes, ôc
quoy que les Cloches qui
font fort grosses, fussent
près de la Chambre du Roy,
parce que l'Eglise est dans
le Chasteau, ce PrinceVOUrllut
qu'on les sonnast toutes.
Il entendità huit heures
& demie une Messe,dite par
un Chapelain de quartier.
Cependant le Prieur accom*
pagné d'un Diacre,d'un Sous-
Diacre
,
de trois Enfans de
Choeur, dehuit choristes, &
de huit Chapiers tirez de la
Chapelle du Roy, se preparoit
dans la Sacristie. La Procession
commençasur les neuf
heures; on dit ensuite la
grand' Messe,& le Roy partit
pour aller dîner à Vieu-
Maison,quiappartient à Mr
Jacquier. Monsieur le Prince
quitta la Cour, pour se rendre
à Paris. On coucha ce jourlà
à la Ferté sur Joüare dans
le Diocese de Meaux.M l'Evesque
de Meaux s'y trouva
avec quelques Abbez, & ses
Aumôniers.Onchanta le Salut
en plein Chant à la Paroisse
, & la bénédiction y fut
donnée parcePrelat. Sa Majesté,
qu'une marche continuelle
n'a détournéed'aucune
des fonctions de piet
» dont Elle s'acquite avec in
zele si édifiant, termina ce
cette forte tOétave du S.
Sacrement. On dîna à Monceaux.
Mr de Gesvres, comme
Gouverneur du lieu >^vo-t
fait au Roy pendantledîner
un present defruits,de fleurs
& de Gibier, d'une rh-iiierç
tout-à-fait galante. On traversa
Meaux iar,fulr, , &
on alla coucher à Caye. Le
lendemain, Monseigneur entendit
la Messeà Versaillesà
six heuresdumatin,&priten
suite la Poste pour se rendre
à Livry
3
où l'on attendoit le
Roy. Il estoit accompagne
de Monsieur le Prince de
Conty, de Monsieur de
Vendosme 5Se.de plusieurs
Seigneurs de la Cour. Ils
y arriverent sur les dix
heures & demie. Monseigneur
changea d'habit, & aprés
avoir pris quelques
- rafraifchissemens,
ilalla au devant
de Sa Majesté, quiarriva
sur les onze heures & demie.
Le Chasteau de Livry est
depuis long - temps dans la
Maison de MrSanguin, Sa
situation est charmante
, &
dans le voisinage d'une Forest
tres-agreable,& tres- propre
pour la Chasse. On voit un
beau Jet d'eau dans le milieu
de la court. Le grand corps
de Logisest terminé de chaque
costé par un Pavillon,
dont l'un fait face au Jardin,
& à l'Orangerie. Le Parc qui
est au bout, répond sur le
grand chemin. Le Roy descendit
de Carosse à la grille
de ce Parc. Monseigneur l'y
receut accompagné des Princes
qui l'avoient suivy. Madame
Sanguin) Mcre de Mr
le Marquis de Livry. Mr l'Evesque
de Senlis Madame de
Livry, & quelques autres personnes
de la Famille, reeeurent
Sa Majesté à la porte du
Jard in. Elle les faliiaj& leur
parla avec cet air doux &majestueux
qui luygagne tous
les coeurs. On servit le dîné à
midydansl'anti-chambre du
Roy. Elleestoit richement
meublée, & tenduë. des belles
Tapisseries
,
dont le feu
Roy d'Angleterre fit present
à M de Bordeaux, Pere de
Madame Sanguin, lors qu'il
estoit AmbaOEadeurauprés de
ce Prince. Le Buffct estoit
dressé dans une Salle qui joint
l'antichambre. On ne peut
rien ajoutera la propreté,&
au bon ordre que Madame
Sanguin avoit mis par tout.
Les Appartenons estoientornezavecun
agrément admirable,
& que l'on remarque
dans tout ce qu'elle fait. Mr
l'Evesque-de Sentis &M de
Livry sirent les honneurs;
mais ce dernier ne laissa pas
d'exercer sa Charge de premier
Maistred'Hostel. On
servitenpoisson avec autant
d'ordre qu'il yeut de delicaft{
fe & d'abondance. Monseigneurmangea
avec le Roy.
Les Dames qui eurent l'honneur
d'estre àla Table de Sa
Majcfté> furent, Madame la
Duchesse, Madame d' Armar.
gnac, Madame de Maintenon,
Madame de GramoRÇ*
Madame Sanguin, Madame
de Livry, &: Mademoiselle
de Sourdis,qui ayant esté
élevée chez Madame Sanguin,
ne la quitte point de-
-
puis long-temps. Les Princes
quiavoient suivy Monseigneur,
furent servis à une
autre Table. Celle du Grand
Maistre fut servie après le
dîné du Roy. Sa Majesté se
retira dens sa chambre au
sortir de Table. Elle y demeura
quelque temps,& partit
ensuite
,
après avoir fait
de grandes honnestetez à Madame
Sanguin,à M deSenlis,
& à Madame de Livry
)
& leur avoir dit, qu'Elle
n'avoit point esté si bien traitée
dans tout le Voyage.
Quoy que toute la Famille ait
part à l'honneur de cette Feste,
on peut dire que Madame
Sanguin s'est attiré beaucoup
de louanges , & d'estime,&
qu'elle a réussi dans
:.tour ce que la Cour attendoit
d'elle. Ce n'est pas d'aujourd'huy
que la Famille de Bordeaux
s'estdistinguée dans
toutes les choies qui ont regardé
leRoyCePrince donna
ce jour-là à Mr deMassigny,
l'un de ses Ecuyers,cinq cens
écus de pension. Cette grace qui n'avoit point esté demandée,
tomba sur un Sujet
d'autant plus estimé de toute
la Cour, qu'on luy a toûjours
remarqué un grand attachement
pour la personne
de son Prince. Le Roypassa
l'aprésdînée dé fort bbnéfe
heure par Paris, au bruit des
acclamations du Peuple, &
se rendit à Versailles
)'
ou
Monsieur & Madamel'attendoient.
Sa Majesté trouva
en y arrivant un nombre
infiny de personnes de la première
qualite, qui s' y étoient
rendues pour la salüer à la
descente deson Carosse. Plufleurs
Conseillersd'Estat?
ôc Maistres des Requestes,
eurent aussi cet honneur.
Elle montaaussi-tost à 1Appartement
de Madame la
Dauphine, pour voir certç
Princesse, & se promena
ensuite à pied pendant quatre
heures dans les Jardins
deVerailles.Ellevisita tous
les Ouvrages nouveaux qu'on
y avoit faits pendant sen
absence
,
&vitunfort grand
nombre d'Orangersquc'?Elle
avoit donné ordre de placer
dans l'Orangerie, du nom- bre desquels estoit l'Oranger
nomméleBourbon
,
qu'on dit
avoirenviron cinq cens ans.
Une si longue promenade à
pied au-retour d'un Voyage,
donna beaucoup de joye à
toutela Cour, parcequ'elle
estoit une marque de la parfaite
santé du Roy. Le 8. M"
le Cardinal Nonce, les Ambassadeurs
, les Ministres des
Princes Souverains qui sont
icy , & la pluspart des Chefs
des Compagnies superieures,
se trouvèrent au lever de Sa
Majesté, & luy firent compliment
sur son heureux retour.
Jamais ce Prince nes'étoit
mieux porte, & n'avoit
paru de meilleuremine, quoy
que pendant le cours du
Voyage, il se fust toujours
exposé à la poussieres dont il
auroit pû se garantir, si sa
bonté ne l'eust porté à vouloir
satisfaire à l'empressement
que les Peuples de la
Campagne avoient de le voir,
sur tout après une maladie
quiavoit fait paroistre l'excès
de leur amour pour ce Prince.
Le jour iuivancJa foule
continua à son lever &: cc
Prince voyant sa santé parfaitement
rétablie) puifquc
les fatigues d'un long Voyage
ne l'avoient pu alterer ) recompensa
en grand Roy,ceux
à qui, après Dieu & les voeux
de ses Sujets, il en estoit redevable.
Il donna cent mille
francs à Mr Daquin son
premier Medecin
3 quatrevingt-
mille à M Fagon, premier
Medecin de la seuë
Reyne, en qui il a beaucoup
de confiance, & dont la reputation
est solidement établie,
&: cinquante mille écus
à MrFélix, son premier Chirurgien.
Quelque temps auparavant
, Sa Majesté avoit
donné une somme considerable
à M Bessiere, qui pane
pour le plus fameux Chirurgien
de Paris, & qui avoit
esté consulté dans le temps
du mej du Roy. Voilà de
grandes recompenses , mais
qu'auroiton pu moins. faire
pour des personnes ÎL qui la
francs estsi redevable) &- à
quil'Europedoitlafuite de
1a tranquillité dont elle
jouit ?
Le Roy après son retour
donna un magnifique repas
atou-tes-lesDamesquiavoient
esté du Voyage
Jpendant
lequel
les soins de Sa Majesté
leur ont épargné beaucoup
de fatigue, les divertissemens
s'esxant mesme trouvez par
coût ainsi qu'à Versailles;
mais quandily auroit eu des
peines à essuyer pour cc qui
s'appelle la Cour,leplaisir de
voir quelquefois le Itoy sans
estreaccomrpagoné de la foule qui l'environne toûjours à
Versailles
)
& d'avoir le bonheur
de luy parler plus facilement
lour des choses qu'on
ne pourroit trop payer,Jamais
Prince n'ayant paru si
charmant que ce Monarque,
lors qu'il veut bien avoir la
bonté de se dépoüiller de sa
grandeur, il ne se montre
point dans ces momens,qu'il
ne gagne autant de coeurs
qu'il s'attire d'admirateurs
par
~par les grandes actions. Mr
e Comte de Tolouse arriva
e 8. à Versailles
, & Madame
a Princesse de Conty le 11.
'un & l'autre dans une par-
:11tc faute
> ce qui donna
beaucoup de joye à toute la
Cour,dont ils font lecharme
, & deux des principaux
ornemens.
FI N.
Fermer
15
p. 117-159
Second Article des morts, [titre d'après la table]
Début :
Je vous manday le mois passé la mort de Mr Fléchier Evêque [...]
Mots clefs :
Morts, Seigneur, Fille, Comte, Lyon
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Second Article des morts, [titre d'après la table]
Je vous mandayle mois paffe
la mort de Mr Fléchier Evêque
de Nifmes ,
feulement pour
vous l'annoncer & vous mar
quer que je vous en parlerois
>
118 MERCURE
plus amplement. Je tiens ma
parole ; mais je ne vous en
apprendray rien qui ne fort
beaucoup au - deffous de ce
qu'on pourroit dire d'un Prelat fi generalement eftimé.
Vous fçavez que l'efprit de
Mr Fléchier a brillé de fi bonne heure par des ouvrages de
toutes les fortes de caracteres
qui font diftinguer l'esprit des
hommes , que Mrs de l'Academie Françoife curent à peine
connu l'étendue de fon vafte
genic , & remarqué la pureté
de la Langue qui fe trouvoit
dans tous les ouvragés ?, qu'il
GALANT 119
fut choisi pour eftre un des.
Membres de ce fçavant Corps;
il n'eftoit pas encore élevé à
l'Epifcopat. Quand il s'eſt agi
de parler en Orateur , jamais
perfonne n'a porté plus loin
que luy l'Art Oratoire , & lors
qu'il s'eft agi de Vers , ceux
qu'il a faits ont toûjours paru
juftes & de fi bon gouft qu'
ils ont efté generalement eftimez. Auffia- t- il toûjours paffé
pour un homme univerfel. On
a toûjours remarqué dans fa
Profe , unparfait caractere d'éloquence , & formé fur les
meilleurs modeles des anciens
120 MERCURE
Romains quand il a parlé leur
Langue , & la même choſe a
paru lorfqu'il a parlé la noſtre.
Il a fait des Odes , & des Poëmes qui ont fait beaucoup
d'honneur à la France , & en
cela , il a imité les grands Prelats des premiers ficcles de l'Eglife , qui fregardoient cette
maniere d'écrire en Vers ,
des fujets utiles ou chretiens ,
& entr'autres Saint Paulin
Saint Profper , & Saint Gregoire de Nazianze , non comme un vain amuſement ; mais
comme une fainte & loüable
occupation , &ces grands Evêfur
ques
GALANT 12T
laiffoient
ques des premiers temps ne
pas d'eftre fort bons
Orateurs , quoy qu'ils fuffent
fort bons Poëtes ; plufieurs de
ces Prelats, ont comme Mr l'Evêque de Nifmes, compofé des
Hiftoires , des Oraiſons funebres & des Sermons qu'ils ont
laiffez àla pofterité. Il a fait l'hiftoire du Cardinal Commendon , qui eft écrite avec une
grande pureté de langage; celle
de l'Empereur Theodofe qu'il
a faite par ordre du Roy pour
l'inftruction de Monfeigneur
le Dauphin, & la Vie du Cardinal Ximenés que les EfpaMars 1710. Ꮮ
122 MERCURE
gnols ont Traduite en leur
Langue. Tous ces Ouvrages
font des temoignages authen
tiques & éternels de fa grande
habileté dans l'Art de bien
écrire & de bien parler ; mais
fes Oraifons funebres l'ont
immortalifé en immortalifant
ceux pour qui elles ont efté
faites. La Morale de JefusChriſt , y regne par tout ; ainfi
au lieu que la plupart des
Oraifons funebres n'ont fou .
vent cfté que des Eloges de
ceux pour qui elles ont efté
compofées, les fiennes ont toujours confondu la vanité du
GALANT 123
fiecle & fait triompher en mêmetemps l'humilité chreſtienne, & elles ont toûjours eſté
des Chef d'œuvres d'une Eloquence qui a toujours tout rapporté à Dieu , & qui n'a rien
eu de profane. Comme on n'a
pû les entendre fans tranſport,
on ne peut les lire fans en eftre
touché. Ainfi elles n'édifient
pas moins qu'elles furprennent , & ceux qui aiment les
vertus chreftiennes ,font charmezde les voir triompher dans
des Difcours où l'on n'a fouvent vû regner que les vertus
civiles & morales , politiques
ou guerrieres.
124 MERCURE
Quant à fes Sermons , foit
qu'il y ait fait des Eloges des
Saints , foit qu'il y ait inſtruit
familierement les peuples , ou
qu'il y ait parlé d'une maniere
plus relevée aux Teftes couronnées , onen a toujours efté
également charmé. On les a
toûjours admirez quand même on les a vûs dépoüillez de
l'action qui les animoit fi noblement. Comme il eftoit extrêmement verfé dans l'Ecriture , &inftruit à fond dans la
connoiffance des Peres , on n'y
trouvoit point de ces idées
communes &vagues qui n'ont
GALANT 125.
rien que de general , qui ne
tombent fur perfonne en particulier , & que perfonne ne
s'applique , ny de ces détails
dangereux qui fervent plutoft
àapprendre les intrigues du peché qu'à convertir le pecheur.
Mais ony voit des Dogmes qui
n'inftruifent que pour éclairer
& pour confondre ; une Morale qui ne plaift que pour toucher , & par tout dequoy raffafier les ames d'une agreable &
folide nourriture. Ony voit une
Morale qui n'eft ny lâche ny
fevere; des portraits des mœurs
de ce fiecle peints au naturel, &
Liij
126 MERCURE
formez fur la parfaite connoif.
fance qu'il avoit du cœur humain , & fur l'ufage du grand
monde.
Tous fes travaux extraordinaires , & tout le temps qu'il a
donné à l'étude du Cabinet ,
ne luy ont jamais empêché un
moment de fe confacrer au
bien de fon Diocefe. Il écoutoit tout le monde avec bonté ; il foûtenoit les interefts des
Pauvres avec žele , & fon exactitude eftoit grande à remplir
toutes les fonctions de la Prelature. Les dernieres qu'il a
faites ont efté non-feulement
GALANT 127
le charme de tout fon Diocefe;
mais auffi de toute l'Europe.
Ce font les deux Lettres Pattorales qu'il a faites pendant le
fort de la calamité publique.
Elles furent trouvées li rem
plies d'onction , &fi confolantes que les plus malheureux
aprés les avoir vûës, fouffroient
avec patience , & ſe faifoient
un plaifir de leur malheur. Jamais ouvrage n'a plus touché
les cœurs , & quoy que l'Evê.
que parlaft , il fembloit que
F'on n'entendoit parler que l'Ecriture. Ces Lettres ont elté
imprimées dans toutes les ProLiiij
128 MERCURE
vinces du Royaume , & il et
peu de Peres de familles qui ne
les confervent.
La mort a auffi enlevé M de
Longueval , fœur de MⓇ de la
Ferté Senecterre. Elle fut nommée Prieure de Noftre Dame
de Bon- fecours , Ordre de S.
Benoit au mois de Janvier
1705. par Monfieur l'Archevêque de Paris. Sa douceur &
fon exactitude à obferver toutes les Regles de fon Ordre la
font extrêmement regretter
de ſes Religieufes , & elles font
penetrées de la douleur
mort leur a caufée.
que fa
GALANT 129
e
Dame N..... Alleman de
Montmartin , veuve de Mre
N.... de Cinfrans de Vauferre , eft morte dans les Terres.
Elle eftoit fœur de Mr l'Evêque de Grenoble , & fille de
Gafpard 4 du nom , Seigneur
de Montmartin, Gafpard Alleman-Montmartin fon grand
pere époufa Jeanne de Loras ,
fille d'Abel de Loras , Chevalier de l'Ordre du Roy, & de
Marguerite du Pré. Il eftoit
frere de Madeleine Alleman
mariée à Claude du Fenoil ,
d'une Maiſon tres ancienne du
"
Lyonnois. Mr de Champier ,
130 MERCUR E
( Claude Alleman ) oncle de la
Dame qui vient de mourir , a
laiffé des enfans , fçavoir , Mr
le Marquis de Champier, Mr
l'Abbé de Champier Chanoine & grand Vicaire de Grenoble & feuë MⓇ la Marquife de
Belmont. Gafpard Alleman ,
fecond fils de Falque Alleman
Seigneur de la Roche Chenard
& de Françoiſe de Saint Pricft
forma la branche de Montmartin en 1556. Antoine Alleman fut Evêque de Cahors
dans le quinziéme fiecle ; Antoine fon frere en fut Archidiacre , & Charles Chanoine
GALANT IZE
de Gap & non Evêque , commel'ont cru quelques Auteurs..
Boniface Alleman fut Comte
de Lyon dans le quinzième fieclc. Laurent Alleman fur Evê
que de Grenoble fur la fin du
même fiecle. Il eut une fœur
mariée dans la Maifon du Terrail ; d'où vint Pierre troifiéme:
du nom , Seigneur du Terrail ,
dit le Chevalier Bayard , & fils
d'Aymon du Terrail. La Maifon des Alleman a formé jufqu'à vingt branches differentes , & c'eft une de ces branches qui a donné un celebre
Evêque à l'Eglife de Cahors..
132 MERCURE
Guichenon la fait defcendre
d'un Raoul Alleman , Prince
de Foucigny , qui vivoit en
1125. d'autres la font defcendre d'un Allemandus de Vrifiaco. M de Vauferre laiffe des
enfans. Il y en a un Chanoine
de S. Mauris de Vienne , &un
beau-frere qui en eſt Chantre.
Ils ont fuccedé l'un & l'autre
à Mr l'Evêque de Grenoble.
La Maiſon de feu M' de Vauferre, beau-frere de M' l'Evêque de Grenoble , eft tres- ancienne. Sufanne de Beaumont
de la Maifon du fameux Baron
des Adrets, eftant veuve du Ba-
GALANT 133
ron de Tarnavas de Piémont ,
époufa Cefar de Vauferre
dont les enfans prirent la qualité de Barons des Adrets ; & le
diftinguerent longtemps dans
la Profeffion des Armes.
Mc la Comteffe de Vauferre
qui vient de mourir avoit eſté
une des plus belles perfonnes
de fon temps ; elle eftoit fœur
de M' le Comte de Montmartin Lieutenant de Royde Dauphiné au département de Vienne; qui a épousé une fille de
Mrle Marquis de Puyfieux , &
qui avoit épousé en premieres
nôces Mlle de Seve , niece de
134 MERCURE
M' l'Evêque d'Arras , & fille
de feu Mr de Seve premier
Prefident du Parlement de
Mets , & Intendant de la Generalité des trois Evêchez
Mets, Toul & Verdun.
La Soeur Marie Therefe du
Saint Efprit la plus ancienne
Religieufe du Convent des
Carmelites de Lyon , y cft
morte âgée de 68. ans , & de
53. ans de Religion. Elle a
efté pendant fix ans Sou Prieure de cette Maiſon & longtemps Maitreffe des Novices ;
elle avoit le don d'Oraiſon
d'une maniere tout à fait fin-
MERCURE 135
guliere ; & elle eftoit dans une
grande réputation dans tout
fon Ordre. Elle s'eftoit fait
une fi grande habitude de la
pratique de l'humilité qu'elle
eftoit devenue comme infenfible à tout ce qui fatte les fens ;
c'eft à dire qu'elle n'écoutoit
plusla nature : on a remarqué
qu'elle a demeuré 33 .
fans fe chauffer , & elle jeûnoit
quelques jours de chaque
femaine , au pain & à l'cau.
Elle avoit perdu la vûë depuis
plufieurs années , & elle foutenoit une pareille affliction avec
une vertu & une patience qui
ans
136 MERCURE
édifioient depuis long- temps
fa Communauté. Elle renouvella quelque temps avant que
demourir ,fa Profeffion , c'eftà- dire,au bout des so ans ; dés
qu'elle eut fait cette Ceremonie , elle dit à toute la Communauté qu'elle ne tenoit plus à la
terre , qu'elle s'y regardoit comme
n'y eftantplus, & elle ne penfoit
plus qu'à l'Eternité ou tendoient tous fes defirs. Il fembloit que Dieu luyavoit donné
quelque lumiere fur letemps de
fa mott, car plus il approchoit
plus fa ferveur redoubloit
& elle ne ceffoit point de dire
GALANT 137
qu'elle touchoit à ſon terme &
que fa carriere alloit finir. Cette
Sainte Religieufe , eftoit de
Lyon , & fille de feu M' de
Chapuis , ancien Echevin de la
même Ville. Ce nom-là eft
fort confiderable à Lyon , où
il y a plufieurs Maiſons qui le
portent.
La mort dont je vais vous
parler , a cauſé un fi grand
mouvement qu'elle me donne
lieu de vous entretenir d'un
grand nombre de familles de
la plus haute diftinction , &
vous ferezfurpriſe d'apprendre
que les Comtes de Saint Jean
Mars 1710. M
138 MERCURE
de Lyon, ont vû leur Chapttre compofé de foixante &
quatorze fils de Rois.
Mre N....de Chaſteauneuf,
Chanoine de l'Eglife & Comte
de Lyon , & Chamarrier de la
même Eglife , cft mort âgé
d'environ 65. ans. Il eftoit oncle de Mr l'Evêque de Noyon,
& frere de Mr le Marquis de
Rochebonne , Commandant
dans le Lyonnois , Foréz &
Baujollois , & ci- devant Meſtre
de Camp dans le Regiment de
la Reine. Ce Comte eftoit oncle de feu Mr le Marquis de
Rochebonne , Commandant.
GALANT 139
).
le Regiment de Villeroy , &
qui fut tué à la Bataille de Malplaquet l'année derniere , &de
Mr l'Abbé de Rochebonne ,
Comte de Lyon , ci - devant
Chantre de la même Eglife , &
à prefent Chamarrier à la place de fon oncle. La dignité de
Chantre qui eft la quatrième de
l'Eglife ( celle de Chamarrier
n'eftant que la cinquième, mais
d'un plus grand revenu ) a efté
donnée à Mrle Comte de Sarron, & la place que ce mouvement a fait vacquer a eſté don
née à Mr l'Abbé de Lugny
de l'illuftre Maifon de Levy , &
Mij
140 MERCURE
petit-neveu de Mr l'Archevêque de Lyon; Mcla Marquife
de Lugny, mere du nouveau
Comte , cftant fœur de Mr le
Comte de Saint- Georges Précenteur de cette Eglife , &niece de Mr l'Archevêque. La
Maifon de Chaſteauneuf eſt
tres ancienne & tres- illuftrée ;
en voicy quelques preuves.
Agnés de Chateauneuf , fille
de Bernard de Chafteauneuf,
& d'une fille de la Maifon de
Clermont , époufa fur la fin du
quatorziéme fiecle Guigues Alleman , Seigneur d'Uriage ; on
difoit autrefois que la Maiſon
GALANT 141
des Alleman venoit des Souverains de Foucigny. Pierre de
Chafteauneuf, ayeul de celuy
qui donne lieu à cet Article ,
eftoit Chevalier de l'Ordre du
Roy, Capitaine de cinquante
hommes d'Armes , Sénéchal
du Puy & Bailly de Velay. Il
époufa Huguette d'Oin de la
Maifon de Feugeres, heritiere
univerfelle de Claude de Feugeres fonpere , &de Jacqueline de Montdor , fille de Zacha-
> rie Seigneur de Chamboſt , &
de Louiſe de la Liegue. Mr de
Chafteauneufn'eut point d'enfans de cette Dame , mais il en
142 MERCURE
fut heritier , c'eft pourquoy le
pere de celuy qui vient de mourir portoit la qualité de Marquis d'Oin , & un de fes freres
Comte de Lyon & Chantre de
la même Eglife , Comte de
Chamboft ; celuy - cy fut un
de ceux de fon temps qui
curent le plus de part en la
confiance de Mr de Villeroy
Archevefque de Lyon. Mr
de Chasteauneuf fon pere fut
pendant toute fa vie , fore
attaché à Mr d'Alincourt pere
de ce Prelat. Ifabeau de Talaru petite- niece du Cardinal de
ce nom , Archevêque de Lyon,
GALANT 143
époufa dans le quinziéme fieele Antoine de Chafteauneuf,
Seigneur de Ligniec en Foréz.
Elle eftoit fœur de Guillaume
de Talaru , Chanoine &Chantre & enfuite Archidiacre de
Lyon , & fille d'Antoine de
Talaru & d'Alix d'Albon
de la Maifon du Maréchal
de Saint André , & elle eftoit
niece d'Amé de Talaru Chanoine & enfuite Archevêque
aprés fon oncle le Cardinal.
Dans le quinziéme fiecle les.
Maifons de Talaru , & de
Chateauneuf, renouvellerent
leurs alliances par le Mariage
THE LAD
144 MERCURE
ге
de M Antoine de Chateauneuf Chevalier Seigneur de
Rochebonne avec Ifabelle
de Talaru
fille de Jean de
Talaru
qui forma
la branche
de Chalmazel
, & de Catherine
de la Tour d'Auvergne
, fille
d'Annet
de la Tour Seigneur
d'Oliergues
& de Beatrix
de
Chalençon
, c'est par là que
M de Rochebonne
font
alliez à M de Bouillon
& de
Polignac
; en 1521.
Claude
de Chateauneuf
Seigneur
de
Rochebonne
, époufa
Cathe
rine de Talaru
fille de Gaſpard
Seigneur
de Chalmazel
& de
Marguerite
rs
GALANT 145
Marguerite Raulin veuve de
Philibert de Grolée Baron de
Senefcey. Cette Dame eftoit
niéce du Cardinal Raulin , &
fa mere eftoit de la Maiſon de
Levi-coufan. Enfin un peu
aprés le milieu du penultiéme
fiecle Dame Anne le Long ,
fille de Pierre Seigneur de
Chenillac , & d'Anne Barton
des Vicomtes de Montbas
& veuvede François de Talaru
Seigneur de Chalmazel , qui
fut tué au Siége de la Rochelle
en 1573. épousa en ſecondes
nôces Pierre de Chafteauneuf
Mars 1710. N
146 MERCURE
re
Chevalier Seigneur de Rochebonne Capitaine de 50. hom
mes d'armes , alors veuf d'Huguette d'Oin dont j'ay parlé
& elle en cutle Marquis d'Oin ,
pere de celuy qui vient de
mourir & pere de M Jean de
Rochebonne Chevalier de
Saint Lazare en 1668. A toutes ces illuftres alliances Mude
$ Chafteauneuf , joignoit celles de Cruffol , d'Uzés , & de
Grignan , Malla Marquife de
Rochebonne d'aujourd'huy
mere de M'Evêque de
Noyon , eftant foeur de M
de Comte de Grignan Cheva-
GALANT 147
lier des Ordres du Roy , &
-fond Lieutenant General en
Provence, 210 , amma DePa
bhu M'de Comte de Sarron
3 qui aeu la dignité de Chantre
vacantepar le mouvement qu'a
caufé la mort de M de Chaf
⚫teauneufe, eft d'une naiffance
rres Aqualifiée comme vous
allez voir. André de Sarron,
Seigneur des Forges , époufa
5 dans l'année 1535. Charlotte
d'Amanzé fille den François
d'Amanzé , & de Catherine
de Semur , d'une illuftre Maifon deBourgogne. Philippine
der Sarron , fille d'Antoine
Nij
148 MERCURE
or d'Efpinay
2 & Ide
Catherine
de Sivricu époufa
Euftache
Arod , un des ayeux
de M.l'Abbé
de Saint Rob
main Ambaſſadeur
à Munſter
lots duTraité de Paix. Jean de
Sarron
Chevalier
Seigneur
des
Forges
en Beaujollois , Lieute
nant de la Compagnie
d'Or
donnance
de M le Marquis
d'Halincourt
grand
pere de
Mle Maréchal
de Villeroy
,
époufa
labeau
de Rebé fille
d'Eftienne
de Rebésin
& Ade
Françoile
de Chabeu
; &
veuve de M le Baron de Vaux.
Cette Dame
elloit niéce de
GALANT 149
fou Mr de RebéCommandeur
des Ordres du Roy , & Archos
vêque de Narbonne. Charlotte
de Sarcon épousa dans le pe
multiéme fiecle Claude de
Salemardyd'ou vint Jaqueline
de Salemard époufe de Louis
de Thelis , un des ayeux de
Ml'Abbéde Valorges ; enfin
Philippine de Sarron fille de
Guillaume de Sarron , &
d'Yolande de Gletteins époufa
Eftienne de Varennes , d'une
illuftre Maifon du Lyonnois ,
fille du Seigneur de Cendars ,
&deDauphine Arod. Mrle
Comte de Sarron, à un frere
N iij
150 MARCURE
cader à Saint Jean nommé
Mr le Comte des Forges La
dignité de Chantre attefte
poffedée par de grands hom
mes & fur tout par Amé de
Talaru Grand Canonifte &
qui eftant Député de l'Eglife
de Lyon , au Concile de Conf
tance , fut élu pendant fon
ábfence Archevêque de la
même Eglife.
Mr l'Abbé de Lugny qui
a2 eu le Comté vacant par cette mort, eſt de l'illuftre Maifon de Levi. Il eft allié à la
Maiſon d'Agoult & à celle de
Crequy à caufe de Blanche •
GALANY 351
Y
deLevi , fille de Gilbert de Le
vi & de Jacqueline Dumas, qui
époula Louis d'Agoult , Seis
gneur de Montauban fils de
Claude d'Agoult & de Louiſe
d'Agoult , fa coufine ; Marguerite de Levi , fille d'Euftache ,
Chevalier Seigneur de Quaylus , Ville-neuve , la Perriere ,
& d'Alix Dame de Coufan ,
épouſa en 1471. Guillaume
d'Albon , Seigneur de S. Forgeux , & des ayeux du Maréchal de Saint André. Louife de
Levi , fille de Jean Seigneur de
Coulan & de Loüife de Breffoles , d'une illuftre Maiſon
Niiij
152 MERURE
d'Auvergne & de Bourgogne
dont Mrs de Breffolles Previcu
font premiers Barons ,
époufa
en premieres nôces Annet de
Talaru Seigneur de Chalmazel, & en fecondes noces Guil
laume de Talaru fon coufine
Seigneur de la Grange ; du pre
mier lit elle eut unefille quien- i
tra dansla Maifon de Montaynard de Marcieux en Dauphiné.
Louife de Levi époufa Amé
de Talaru vers la fin du quint
ziéme fiecle .
Antoine de Levi
Seigneur de Vauvert , avoit
époufé Louife de Tournon ,
fille d'Odon de Tournon , Seis
GALANT 153
vyls
gneur de Beauchaftel & d'Anne de Corgenon. Odon eſtoit
grand oncle du celebre Cardinal de Tournon Archevêquer
de Lyon. Enfin Jacques de Levy Seigneur de Chafteaumorand époufa Louiſe de Tournon, Tœur du Cardinal , &petite niece d'Odon , dont je
viens deparler. Nos Rois font
Chanoines d'honneur de l'E2
glife de Lyon ; Charles VII.
le reconnut dans une Charte
accordée à cette Eglife. , ..
In illud confortium , dit- il , en
parlant de ce Chapitre, cui ratione Delphinatus & Ducatus.
154 MERCURE
Biturienfis adfcriptifumus. C'elt
donc comme Dauphins de
Viennois & Ducs de Berryque
les Rois de France ont la qua
fité de Chanoines d'honneur
de cette Eglife. Les Ducs de
Bourgogne l'eftoient detemps
immemorial , & les Dauphins
de Viennoiss eurent la même
qualité en 1228. &enfuite elle
fut accordée aux Ducsde Ber
ry. Derubis dit qu'en 1245;
ce Chapitre eftoit compofé de
74 fils de Rois.
I
DameCharlotte Madeleine
de Blaignac eft morte à Tou
loufe âgée de 40. ans, elle eftoit
GALANT 155
Alle de Mre Charles Dumont ,
Seigneur & Baron de Blaignac ,
Commiffaire & Infpecteur ge
neral de la Marine , GrandMaistre des Eaux & Forefts au
Département de Guyenne
homme d'un grand merite ; il
s'établit à Touloufe & époufa
Dame Marguerite de Voifins ,
defcendue des anciensComtes
do Touloufe ; il maria fa fille
avec Mre Jofeph de Gargas
Seigneur de Montrave & Remonville ,d'une des plus illuf
tres Maifons de Touloufe, qui
audonnénance Parlement un
tres-grand nombre de Magif
156 MERCURE
trats depuis fa creation . Elle
a cu de ce mariage deux gato
çons qui promettent tout ce
que l'on peut attendre des
perfonnes de cette naiffance.
On peut dire avec juftice que
cette Dame eftoit d'un me
rite qui fe faifoit diftinguer
entre les perfonnes de fon
fexe , & que la nature en avoit
formé un ouvrage parfait
Auffi eft elle generalement
regrettée de tous ceux qui
l'ont connue. Il ne reste plus
de cette famille que¡ Mre
Gabriel Dumont , Seigneur &
Baron de Blaignac fon frere
GALANT 159
ancien Officier de la Marine,
où il a fervi vingt- cinq ans , &
s'eft fort diftingué dans toures les occafions où il s'eft
trouvé. Il s'eft retiré depuis
quatre ans ; il a épousé AnneMarguerite de Befançon d'une des plus illuftres Maifons
de Paris , qui a donné à ce Par
lement un grand nombre de
Magiftrats depuis qu'il a efté
rendu fedentaire ; un Evêque
à fon Eglife , un Archevêque à
celle de Reims , &.aux Armées
plufieurs Lieutenans generaux,
& alliée aux meilleures Maifons du Royaume, Leur fepul-
158 MERCURE
turc eft auk Cordeliers dans la
Chapelle que fonda Hugues
de Befançon , Confeiller au
Parlement en 131420Mrsude
Bullion y ont leur fepulture à
caufe des alliances qu'ils cont
contractéesavec cette Maifon,
La famille de Mr Dumont eft
originaire de Bourgogne , où
clle eft alliée à la plus grande
partic des perfonnes du premier rang. Elle paffa il y a environ cent cinquante ans dans
de Pays du Maine , où elle prit
alliance avec la Maifon de
Beaumanoir , & avec d'autres
perfonnes de diftinction , &
#GALANT 159
elle eft à prefent fedentaire à
Toulouſe. Ceux de cette Maifon fervent de pere en fils depuis plus de 400. an
la mort de Mr Fléchier Evêque
de Nifmes ,
feulement pour
vous l'annoncer & vous mar
quer que je vous en parlerois
>
118 MERCURE
plus amplement. Je tiens ma
parole ; mais je ne vous en
apprendray rien qui ne fort
beaucoup au - deffous de ce
qu'on pourroit dire d'un Prelat fi generalement eftimé.
Vous fçavez que l'efprit de
Mr Fléchier a brillé de fi bonne heure par des ouvrages de
toutes les fortes de caracteres
qui font diftinguer l'esprit des
hommes , que Mrs de l'Academie Françoife curent à peine
connu l'étendue de fon vafte
genic , & remarqué la pureté
de la Langue qui fe trouvoit
dans tous les ouvragés ?, qu'il
GALANT 119
fut choisi pour eftre un des.
Membres de ce fçavant Corps;
il n'eftoit pas encore élevé à
l'Epifcopat. Quand il s'eſt agi
de parler en Orateur , jamais
perfonne n'a porté plus loin
que luy l'Art Oratoire , & lors
qu'il s'eft agi de Vers , ceux
qu'il a faits ont toûjours paru
juftes & de fi bon gouft qu'
ils ont efté generalement eftimez. Auffia- t- il toûjours paffé
pour un homme univerfel. On
a toûjours remarqué dans fa
Profe , unparfait caractere d'éloquence , & formé fur les
meilleurs modeles des anciens
120 MERCURE
Romains quand il a parlé leur
Langue , & la même choſe a
paru lorfqu'il a parlé la noſtre.
Il a fait des Odes , & des Poëmes qui ont fait beaucoup
d'honneur à la France , & en
cela , il a imité les grands Prelats des premiers ficcles de l'Eglife , qui fregardoient cette
maniere d'écrire en Vers ,
des fujets utiles ou chretiens ,
& entr'autres Saint Paulin
Saint Profper , & Saint Gregoire de Nazianze , non comme un vain amuſement ; mais
comme une fainte & loüable
occupation , &ces grands Evêfur
ques
GALANT 12T
laiffoient
ques des premiers temps ne
pas d'eftre fort bons
Orateurs , quoy qu'ils fuffent
fort bons Poëtes ; plufieurs de
ces Prelats, ont comme Mr l'Evêque de Nifmes, compofé des
Hiftoires , des Oraiſons funebres & des Sermons qu'ils ont
laiffez àla pofterité. Il a fait l'hiftoire du Cardinal Commendon , qui eft écrite avec une
grande pureté de langage; celle
de l'Empereur Theodofe qu'il
a faite par ordre du Roy pour
l'inftruction de Monfeigneur
le Dauphin, & la Vie du Cardinal Ximenés que les EfpaMars 1710. Ꮮ
122 MERCURE
gnols ont Traduite en leur
Langue. Tous ces Ouvrages
font des temoignages authen
tiques & éternels de fa grande
habileté dans l'Art de bien
écrire & de bien parler ; mais
fes Oraifons funebres l'ont
immortalifé en immortalifant
ceux pour qui elles ont efté
faites. La Morale de JefusChriſt , y regne par tout ; ainfi
au lieu que la plupart des
Oraifons funebres n'ont fou .
vent cfté que des Eloges de
ceux pour qui elles ont efté
compofées, les fiennes ont toujours confondu la vanité du
GALANT 123
fiecle & fait triompher en mêmetemps l'humilité chreſtienne, & elles ont toûjours eſté
des Chef d'œuvres d'une Eloquence qui a toujours tout rapporté à Dieu , & qui n'a rien
eu de profane. Comme on n'a
pû les entendre fans tranſport,
on ne peut les lire fans en eftre
touché. Ainfi elles n'édifient
pas moins qu'elles furprennent , & ceux qui aiment les
vertus chreftiennes ,font charmezde les voir triompher dans
des Difcours où l'on n'a fouvent vû regner que les vertus
civiles & morales , politiques
ou guerrieres.
124 MERCURE
Quant à fes Sermons , foit
qu'il y ait fait des Eloges des
Saints , foit qu'il y ait inſtruit
familierement les peuples , ou
qu'il y ait parlé d'une maniere
plus relevée aux Teftes couronnées , onen a toujours efté
également charmé. On les a
toûjours admirez quand même on les a vûs dépoüillez de
l'action qui les animoit fi noblement. Comme il eftoit extrêmement verfé dans l'Ecriture , &inftruit à fond dans la
connoiffance des Peres , on n'y
trouvoit point de ces idées
communes &vagues qui n'ont
GALANT 125.
rien que de general , qui ne
tombent fur perfonne en particulier , & que perfonne ne
s'applique , ny de ces détails
dangereux qui fervent plutoft
àapprendre les intrigues du peché qu'à convertir le pecheur.
Mais ony voit des Dogmes qui
n'inftruifent que pour éclairer
& pour confondre ; une Morale qui ne plaift que pour toucher , & par tout dequoy raffafier les ames d'une agreable &
folide nourriture. Ony voit une
Morale qui n'eft ny lâche ny
fevere; des portraits des mœurs
de ce fiecle peints au naturel, &
Liij
126 MERCURE
formez fur la parfaite connoif.
fance qu'il avoit du cœur humain , & fur l'ufage du grand
monde.
Tous fes travaux extraordinaires , & tout le temps qu'il a
donné à l'étude du Cabinet ,
ne luy ont jamais empêché un
moment de fe confacrer au
bien de fon Diocefe. Il écoutoit tout le monde avec bonté ; il foûtenoit les interefts des
Pauvres avec žele , & fon exactitude eftoit grande à remplir
toutes les fonctions de la Prelature. Les dernieres qu'il a
faites ont efté non-feulement
GALANT 127
le charme de tout fon Diocefe;
mais auffi de toute l'Europe.
Ce font les deux Lettres Pattorales qu'il a faites pendant le
fort de la calamité publique.
Elles furent trouvées li rem
plies d'onction , &fi confolantes que les plus malheureux
aprés les avoir vûës, fouffroient
avec patience , & ſe faifoient
un plaifir de leur malheur. Jamais ouvrage n'a plus touché
les cœurs , & quoy que l'Evê.
que parlaft , il fembloit que
F'on n'entendoit parler que l'Ecriture. Ces Lettres ont elté
imprimées dans toutes les ProLiiij
128 MERCURE
vinces du Royaume , & il et
peu de Peres de familles qui ne
les confervent.
La mort a auffi enlevé M de
Longueval , fœur de MⓇ de la
Ferté Senecterre. Elle fut nommée Prieure de Noftre Dame
de Bon- fecours , Ordre de S.
Benoit au mois de Janvier
1705. par Monfieur l'Archevêque de Paris. Sa douceur &
fon exactitude à obferver toutes les Regles de fon Ordre la
font extrêmement regretter
de ſes Religieufes , & elles font
penetrées de la douleur
mort leur a caufée.
que fa
GALANT 129
e
Dame N..... Alleman de
Montmartin , veuve de Mre
N.... de Cinfrans de Vauferre , eft morte dans les Terres.
Elle eftoit fœur de Mr l'Evêque de Grenoble , & fille de
Gafpard 4 du nom , Seigneur
de Montmartin, Gafpard Alleman-Montmartin fon grand
pere époufa Jeanne de Loras ,
fille d'Abel de Loras , Chevalier de l'Ordre du Roy, & de
Marguerite du Pré. Il eftoit
frere de Madeleine Alleman
mariée à Claude du Fenoil ,
d'une Maiſon tres ancienne du
"
Lyonnois. Mr de Champier ,
130 MERCUR E
( Claude Alleman ) oncle de la
Dame qui vient de mourir , a
laiffé des enfans , fçavoir , Mr
le Marquis de Champier, Mr
l'Abbé de Champier Chanoine & grand Vicaire de Grenoble & feuë MⓇ la Marquife de
Belmont. Gafpard Alleman ,
fecond fils de Falque Alleman
Seigneur de la Roche Chenard
& de Françoiſe de Saint Pricft
forma la branche de Montmartin en 1556. Antoine Alleman fut Evêque de Cahors
dans le quinziéme fiecle ; Antoine fon frere en fut Archidiacre , & Charles Chanoine
GALANT IZE
de Gap & non Evêque , commel'ont cru quelques Auteurs..
Boniface Alleman fut Comte
de Lyon dans le quinzième fieclc. Laurent Alleman fur Evê
que de Grenoble fur la fin du
même fiecle. Il eut une fœur
mariée dans la Maifon du Terrail ; d'où vint Pierre troifiéme:
du nom , Seigneur du Terrail ,
dit le Chevalier Bayard , & fils
d'Aymon du Terrail. La Maifon des Alleman a formé jufqu'à vingt branches differentes , & c'eft une de ces branches qui a donné un celebre
Evêque à l'Eglife de Cahors..
132 MERCURE
Guichenon la fait defcendre
d'un Raoul Alleman , Prince
de Foucigny , qui vivoit en
1125. d'autres la font defcendre d'un Allemandus de Vrifiaco. M de Vauferre laiffe des
enfans. Il y en a un Chanoine
de S. Mauris de Vienne , &un
beau-frere qui en eſt Chantre.
Ils ont fuccedé l'un & l'autre
à Mr l'Evêque de Grenoble.
La Maiſon de feu M' de Vauferre, beau-frere de M' l'Evêque de Grenoble , eft tres- ancienne. Sufanne de Beaumont
de la Maifon du fameux Baron
des Adrets, eftant veuve du Ba-
GALANT 133
ron de Tarnavas de Piémont ,
époufa Cefar de Vauferre
dont les enfans prirent la qualité de Barons des Adrets ; & le
diftinguerent longtemps dans
la Profeffion des Armes.
Mc la Comteffe de Vauferre
qui vient de mourir avoit eſté
une des plus belles perfonnes
de fon temps ; elle eftoit fœur
de M' le Comte de Montmartin Lieutenant de Royde Dauphiné au département de Vienne; qui a épousé une fille de
Mrle Marquis de Puyfieux , &
qui avoit épousé en premieres
nôces Mlle de Seve , niece de
134 MERCURE
M' l'Evêque d'Arras , & fille
de feu Mr de Seve premier
Prefident du Parlement de
Mets , & Intendant de la Generalité des trois Evêchez
Mets, Toul & Verdun.
La Soeur Marie Therefe du
Saint Efprit la plus ancienne
Religieufe du Convent des
Carmelites de Lyon , y cft
morte âgée de 68. ans , & de
53. ans de Religion. Elle a
efté pendant fix ans Sou Prieure de cette Maiſon & longtemps Maitreffe des Novices ;
elle avoit le don d'Oraiſon
d'une maniere tout à fait fin-
MERCURE 135
guliere ; & elle eftoit dans une
grande réputation dans tout
fon Ordre. Elle s'eftoit fait
une fi grande habitude de la
pratique de l'humilité qu'elle
eftoit devenue comme infenfible à tout ce qui fatte les fens ;
c'eft à dire qu'elle n'écoutoit
plusla nature : on a remarqué
qu'elle a demeuré 33 .
fans fe chauffer , & elle jeûnoit
quelques jours de chaque
femaine , au pain & à l'cau.
Elle avoit perdu la vûë depuis
plufieurs années , & elle foutenoit une pareille affliction avec
une vertu & une patience qui
ans
136 MERCURE
édifioient depuis long- temps
fa Communauté. Elle renouvella quelque temps avant que
demourir ,fa Profeffion , c'eftà- dire,au bout des so ans ; dés
qu'elle eut fait cette Ceremonie , elle dit à toute la Communauté qu'elle ne tenoit plus à la
terre , qu'elle s'y regardoit comme
n'y eftantplus, & elle ne penfoit
plus qu'à l'Eternité ou tendoient tous fes defirs. Il fembloit que Dieu luyavoit donné
quelque lumiere fur letemps de
fa mott, car plus il approchoit
plus fa ferveur redoubloit
& elle ne ceffoit point de dire
GALANT 137
qu'elle touchoit à ſon terme &
que fa carriere alloit finir. Cette
Sainte Religieufe , eftoit de
Lyon , & fille de feu M' de
Chapuis , ancien Echevin de la
même Ville. Ce nom-là eft
fort confiderable à Lyon , où
il y a plufieurs Maiſons qui le
portent.
La mort dont je vais vous
parler , a cauſé un fi grand
mouvement qu'elle me donne
lieu de vous entretenir d'un
grand nombre de familles de
la plus haute diftinction , &
vous ferezfurpriſe d'apprendre
que les Comtes de Saint Jean
Mars 1710. M
138 MERCURE
de Lyon, ont vû leur Chapttre compofé de foixante &
quatorze fils de Rois.
Mre N....de Chaſteauneuf,
Chanoine de l'Eglife & Comte
de Lyon , & Chamarrier de la
même Eglife , cft mort âgé
d'environ 65. ans. Il eftoit oncle de Mr l'Evêque de Noyon,
& frere de Mr le Marquis de
Rochebonne , Commandant
dans le Lyonnois , Foréz &
Baujollois , & ci- devant Meſtre
de Camp dans le Regiment de
la Reine. Ce Comte eftoit oncle de feu Mr le Marquis de
Rochebonne , Commandant.
GALANT 139
).
le Regiment de Villeroy , &
qui fut tué à la Bataille de Malplaquet l'année derniere , &de
Mr l'Abbé de Rochebonne ,
Comte de Lyon , ci - devant
Chantre de la même Eglife , &
à prefent Chamarrier à la place de fon oncle. La dignité de
Chantre qui eft la quatrième de
l'Eglife ( celle de Chamarrier
n'eftant que la cinquième, mais
d'un plus grand revenu ) a efté
donnée à Mrle Comte de Sarron, & la place que ce mouvement a fait vacquer a eſté don
née à Mr l'Abbé de Lugny
de l'illuftre Maifon de Levy , &
Mij
140 MERCURE
petit-neveu de Mr l'Archevêque de Lyon; Mcla Marquife
de Lugny, mere du nouveau
Comte , cftant fœur de Mr le
Comte de Saint- Georges Précenteur de cette Eglife , &niece de Mr l'Archevêque. La
Maifon de Chaſteauneuf eſt
tres ancienne & tres- illuftrée ;
en voicy quelques preuves.
Agnés de Chateauneuf , fille
de Bernard de Chafteauneuf,
& d'une fille de la Maifon de
Clermont , époufa fur la fin du
quatorziéme fiecle Guigues Alleman , Seigneur d'Uriage ; on
difoit autrefois que la Maiſon
GALANT 141
des Alleman venoit des Souverains de Foucigny. Pierre de
Chafteauneuf, ayeul de celuy
qui donne lieu à cet Article ,
eftoit Chevalier de l'Ordre du
Roy, Capitaine de cinquante
hommes d'Armes , Sénéchal
du Puy & Bailly de Velay. Il
époufa Huguette d'Oin de la
Maifon de Feugeres, heritiere
univerfelle de Claude de Feugeres fonpere , &de Jacqueline de Montdor , fille de Zacha-
> rie Seigneur de Chamboſt , &
de Louiſe de la Liegue. Mr de
Chafteauneufn'eut point d'enfans de cette Dame , mais il en
142 MERCURE
fut heritier , c'eft pourquoy le
pere de celuy qui vient de mourir portoit la qualité de Marquis d'Oin , & un de fes freres
Comte de Lyon & Chantre de
la même Eglife , Comte de
Chamboft ; celuy - cy fut un
de ceux de fon temps qui
curent le plus de part en la
confiance de Mr de Villeroy
Archevefque de Lyon. Mr
de Chasteauneuf fon pere fut
pendant toute fa vie , fore
attaché à Mr d'Alincourt pere
de ce Prelat. Ifabeau de Talaru petite- niece du Cardinal de
ce nom , Archevêque de Lyon,
GALANT 143
époufa dans le quinziéme fieele Antoine de Chafteauneuf,
Seigneur de Ligniec en Foréz.
Elle eftoit fœur de Guillaume
de Talaru , Chanoine &Chantre & enfuite Archidiacre de
Lyon , & fille d'Antoine de
Talaru & d'Alix d'Albon
de la Maifon du Maréchal
de Saint André , & elle eftoit
niece d'Amé de Talaru Chanoine & enfuite Archevêque
aprés fon oncle le Cardinal.
Dans le quinziéme fiecle les.
Maifons de Talaru , & de
Chateauneuf, renouvellerent
leurs alliances par le Mariage
THE LAD
144 MERCURE
ге
de M Antoine de Chateauneuf Chevalier Seigneur de
Rochebonne avec Ifabelle
de Talaru
fille de Jean de
Talaru
qui forma
la branche
de Chalmazel
, & de Catherine
de la Tour d'Auvergne
, fille
d'Annet
de la Tour Seigneur
d'Oliergues
& de Beatrix
de
Chalençon
, c'est par là que
M de Rochebonne
font
alliez à M de Bouillon
& de
Polignac
; en 1521.
Claude
de Chateauneuf
Seigneur
de
Rochebonne
, époufa
Cathe
rine de Talaru
fille de Gaſpard
Seigneur
de Chalmazel
& de
Marguerite
rs
GALANT 145
Marguerite Raulin veuve de
Philibert de Grolée Baron de
Senefcey. Cette Dame eftoit
niéce du Cardinal Raulin , &
fa mere eftoit de la Maiſon de
Levi-coufan. Enfin un peu
aprés le milieu du penultiéme
fiecle Dame Anne le Long ,
fille de Pierre Seigneur de
Chenillac , & d'Anne Barton
des Vicomtes de Montbas
& veuvede François de Talaru
Seigneur de Chalmazel , qui
fut tué au Siége de la Rochelle
en 1573. épousa en ſecondes
nôces Pierre de Chafteauneuf
Mars 1710. N
146 MERCURE
re
Chevalier Seigneur de Rochebonne Capitaine de 50. hom
mes d'armes , alors veuf d'Huguette d'Oin dont j'ay parlé
& elle en cutle Marquis d'Oin ,
pere de celuy qui vient de
mourir & pere de M Jean de
Rochebonne Chevalier de
Saint Lazare en 1668. A toutes ces illuftres alliances Mude
$ Chafteauneuf , joignoit celles de Cruffol , d'Uzés , & de
Grignan , Malla Marquife de
Rochebonne d'aujourd'huy
mere de M'Evêque de
Noyon , eftant foeur de M
de Comte de Grignan Cheva-
GALANT 147
lier des Ordres du Roy , &
-fond Lieutenant General en
Provence, 210 , amma DePa
bhu M'de Comte de Sarron
3 qui aeu la dignité de Chantre
vacantepar le mouvement qu'a
caufé la mort de M de Chaf
⚫teauneufe, eft d'une naiffance
rres Aqualifiée comme vous
allez voir. André de Sarron,
Seigneur des Forges , époufa
5 dans l'année 1535. Charlotte
d'Amanzé fille den François
d'Amanzé , & de Catherine
de Semur , d'une illuftre Maifon deBourgogne. Philippine
der Sarron , fille d'Antoine
Nij
148 MERCURE
or d'Efpinay
2 & Ide
Catherine
de Sivricu époufa
Euftache
Arod , un des ayeux
de M.l'Abbé
de Saint Rob
main Ambaſſadeur
à Munſter
lots duTraité de Paix. Jean de
Sarron
Chevalier
Seigneur
des
Forges
en Beaujollois , Lieute
nant de la Compagnie
d'Or
donnance
de M le Marquis
d'Halincourt
grand
pere de
Mle Maréchal
de Villeroy
,
époufa
labeau
de Rebé fille
d'Eftienne
de Rebésin
& Ade
Françoile
de Chabeu
; &
veuve de M le Baron de Vaux.
Cette Dame
elloit niéce de
GALANT 149
fou Mr de RebéCommandeur
des Ordres du Roy , & Archos
vêque de Narbonne. Charlotte
de Sarcon épousa dans le pe
multiéme fiecle Claude de
Salemardyd'ou vint Jaqueline
de Salemard époufe de Louis
de Thelis , un des ayeux de
Ml'Abbéde Valorges ; enfin
Philippine de Sarron fille de
Guillaume de Sarron , &
d'Yolande de Gletteins époufa
Eftienne de Varennes , d'une
illuftre Maifon du Lyonnois ,
fille du Seigneur de Cendars ,
&deDauphine Arod. Mrle
Comte de Sarron, à un frere
N iij
150 MARCURE
cader à Saint Jean nommé
Mr le Comte des Forges La
dignité de Chantre attefte
poffedée par de grands hom
mes & fur tout par Amé de
Talaru Grand Canonifte &
qui eftant Député de l'Eglife
de Lyon , au Concile de Conf
tance , fut élu pendant fon
ábfence Archevêque de la
même Eglife.
Mr l'Abbé de Lugny qui
a2 eu le Comté vacant par cette mort, eſt de l'illuftre Maifon de Levi. Il eft allié à la
Maiſon d'Agoult & à celle de
Crequy à caufe de Blanche •
GALANY 351
Y
deLevi , fille de Gilbert de Le
vi & de Jacqueline Dumas, qui
époula Louis d'Agoult , Seis
gneur de Montauban fils de
Claude d'Agoult & de Louiſe
d'Agoult , fa coufine ; Marguerite de Levi , fille d'Euftache ,
Chevalier Seigneur de Quaylus , Ville-neuve , la Perriere ,
& d'Alix Dame de Coufan ,
épouſa en 1471. Guillaume
d'Albon , Seigneur de S. Forgeux , & des ayeux du Maréchal de Saint André. Louife de
Levi , fille de Jean Seigneur de
Coulan & de Loüife de Breffoles , d'une illuftre Maiſon
Niiij
152 MERURE
d'Auvergne & de Bourgogne
dont Mrs de Breffolles Previcu
font premiers Barons ,
époufa
en premieres nôces Annet de
Talaru Seigneur de Chalmazel, & en fecondes noces Guil
laume de Talaru fon coufine
Seigneur de la Grange ; du pre
mier lit elle eut unefille quien- i
tra dansla Maifon de Montaynard de Marcieux en Dauphiné.
Louife de Levi époufa Amé
de Talaru vers la fin du quint
ziéme fiecle .
Antoine de Levi
Seigneur de Vauvert , avoit
époufé Louife de Tournon ,
fille d'Odon de Tournon , Seis
GALANT 153
vyls
gneur de Beauchaftel & d'Anne de Corgenon. Odon eſtoit
grand oncle du celebre Cardinal de Tournon Archevêquer
de Lyon. Enfin Jacques de Levy Seigneur de Chafteaumorand époufa Louiſe de Tournon, Tœur du Cardinal , &petite niece d'Odon , dont je
viens deparler. Nos Rois font
Chanoines d'honneur de l'E2
glife de Lyon ; Charles VII.
le reconnut dans une Charte
accordée à cette Eglife. , ..
In illud confortium , dit- il , en
parlant de ce Chapitre, cui ratione Delphinatus & Ducatus.
154 MERCURE
Biturienfis adfcriptifumus. C'elt
donc comme Dauphins de
Viennois & Ducs de Berryque
les Rois de France ont la qua
fité de Chanoines d'honneur
de cette Eglife. Les Ducs de
Bourgogne l'eftoient detemps
immemorial , & les Dauphins
de Viennoiss eurent la même
qualité en 1228. &enfuite elle
fut accordée aux Ducsde Ber
ry. Derubis dit qu'en 1245;
ce Chapitre eftoit compofé de
74 fils de Rois.
I
DameCharlotte Madeleine
de Blaignac eft morte à Tou
loufe âgée de 40. ans, elle eftoit
GALANT 155
Alle de Mre Charles Dumont ,
Seigneur & Baron de Blaignac ,
Commiffaire & Infpecteur ge
neral de la Marine , GrandMaistre des Eaux & Forefts au
Département de Guyenne
homme d'un grand merite ; il
s'établit à Touloufe & époufa
Dame Marguerite de Voifins ,
defcendue des anciensComtes
do Touloufe ; il maria fa fille
avec Mre Jofeph de Gargas
Seigneur de Montrave & Remonville ,d'une des plus illuf
tres Maifons de Touloufe, qui
audonnénance Parlement un
tres-grand nombre de Magif
156 MERCURE
trats depuis fa creation . Elle
a cu de ce mariage deux gato
çons qui promettent tout ce
que l'on peut attendre des
perfonnes de cette naiffance.
On peut dire avec juftice que
cette Dame eftoit d'un me
rite qui fe faifoit diftinguer
entre les perfonnes de fon
fexe , & que la nature en avoit
formé un ouvrage parfait
Auffi eft elle generalement
regrettée de tous ceux qui
l'ont connue. Il ne reste plus
de cette famille que¡ Mre
Gabriel Dumont , Seigneur &
Baron de Blaignac fon frere
GALANT 159
ancien Officier de la Marine,
où il a fervi vingt- cinq ans , &
s'eft fort diftingué dans toures les occafions où il s'eft
trouvé. Il s'eft retiré depuis
quatre ans ; il a épousé AnneMarguerite de Befançon d'une des plus illuftres Maifons
de Paris , qui a donné à ce Par
lement un grand nombre de
Magiftrats depuis qu'il a efté
rendu fedentaire ; un Evêque
à fon Eglife , un Archevêque à
celle de Reims , &.aux Armées
plufieurs Lieutenans generaux,
& alliée aux meilleures Maifons du Royaume, Leur fepul-
158 MERCURE
turc eft auk Cordeliers dans la
Chapelle que fonda Hugues
de Befançon , Confeiller au
Parlement en 131420Mrsude
Bullion y ont leur fepulture à
caufe des alliances qu'ils cont
contractéesavec cette Maifon,
La famille de Mr Dumont eft
originaire de Bourgogne , où
clle eft alliée à la plus grande
partic des perfonnes du premier rang. Elle paffa il y a environ cent cinquante ans dans
de Pays du Maine , où elle prit
alliance avec la Maifon de
Beaumanoir , & avec d'autres
perfonnes de diftinction , &
#GALANT 159
elle eft à prefent fedentaire à
Toulouſe. Ceux de cette Maifon fervent de pere en fils depuis plus de 400. an
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Résumé : Second Article des morts, [titre d'après la table]
Le texte annonce la mort de Monsieur Fléchier, évêque de Nîmes, une nouvelle déjà communiquée au destinataire. Fléchier était reconnu pour son esprit brillant et ses œuvres littéraires variées, incluant l'oratoire et la poésie. Il fut membre de l'Académie française et auteur d'ouvrages historiques et d'oraisons funèbres très appréciés. Ses sermons étaient également célèbres pour leur éloquence et leur profondeur morale. Malgré ses nombreuses activités littéraires, Fléchier resta dévoué au bien de son diocèse, notamment durant une période de calamité publique. Le texte mentionne également le décès de Madame de Longueval, prieure de Notre-Dame de Bon-Secours, et de Madame Alleman de Montmartin, en fournissant des détails sur leurs familles et leurs titres.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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16
p. 173-208
Troisiéme Article des Morts. [titre d'après la table]
Début :
Dame Marie Charlotte de Roquelaure, Duchesse de [...]
Mots clefs :
Comte, Maréchal, France, Dame
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texteReconnaissance textuelle : Troisiéme Article des Morts. [titre d'après la table]
Dame Marie Charlotte de
Piij
174 MERCURE
Roquelaure , Ducheffe de
Foix , eft morte a l'âge de ss.
ans. Cette Dame épouía en
1674. Henry Charles François de Foix de Candalle , Duc
de Rendan Pair de France
Chevalier des Ordres du Roy,
Prince Captal de Bucs , Marquis Senecay , Comte de
Beunauges , de Gurfon , & de
Fleix , la Maifon de Foix dont
çe Duc cft Chef , eft , difent
quelques Auteurs , fortie de
celle des Anciens Rois de Navarre ; la Maifon de Candalle
dont le fameux Duc d'Epernon , favory d'Henry III.
GALANT 175
époufa l'heritiere , eftoit une
branche de celle de Foix , qui
a formé auffi une autre branche qui fubfifte en Savoye &
dont un Gentilhomme qui a
époufé la fœur de Mr le Comte de Blancheville eft chef.
Me la Ducheffe de Foix eftoit
fœur de Mr le Duc de Roquelaure qui commande en
Languedoc , & fille de JeanBaptifte Gaſton , Chevalier des
Ordres du Roy , Gouverneur
de Guyenne , & grand- Maiſtre
de la Garderobe & premier
Ducde Roquelaure , &de Maric- Charlotte de Daillon , feP iij
176 MERCURE
fa valeur que par La
conde fille de Timoleon de
Daillon, Comte du Lude , que
ce Duc époufa en 1653. &1
qui mourut 4. années aprés
âgée feulement de 2 1. ans. Ce
premier Duc de Roquelaure
s'éleva encore plus par fon merite & par
naiffance. Il fervit dés l'année
1635. en qualité de Capitaine
de Cavalerie , il fut bleffe & fait
prifonnier à la Bataille de la
Marfée prés de Sedan en 1641 .
en chargeant les ennemis à la
tefte de fon Efcadron. Il fervit
en qualité de Maréchal de
Camp au premier Siege de Gra-
GALANT 177
velines en 1644. à la prife de
Bourbourg en 45. au Siege de
Courtray en 46. eftant Lieutenant general. Il fut bleffé au
Siege de Bordeaux & fait Duc
au mois de Juin 1652. Il fervit à la conquefte de la Franche-Comté en 1668. & dans
la guerre de Hollande en 1672 .
Ce Duc avoit efté élevé à une
bonne Ecole. Il eftoit als d'Antoine de Roquelaure Maréchal
de France , & de Sulanne de
Baffepar fa feconde femme , &
de Catherine d'Ornezan fa premiere femme , veuve de Gilles
de Montal Baron de Roque-
178 MERCURE
bron , & fille de Jean- Claude
d'Ornezan , Sieur d'Auradé &
de Noaillan Gouverneur de
Mets , ce Maréchal cut JeanLouis Baron de Biran grandMaiftre de la Garderobe du
Roy, mort fans eftre marié ;
Louiſe premiere femme d'Antoine 2. Duc de Grammont ,
Rofe femme de François de
Noailles, Comte d'Ayen, Chevalier des Ordres du Roy ,
ayeul & ayeule de Monfieur le
Cardinal de Noailles : Catherine Abbeffe de Rhodez , morte
au Calvaire à Paris , & Marie
femme de Jacques Eſthuer ,
GALANT 179
>
Comte de la Vauguyon. Du
fecond lit outre feu Mr le Duc
de Roquelaure , il eut feuë Me
la Marquise de Mirepoix , Me
la Marquife de Balagny
Me la Marquife de Fimarcon
( Caffagnet de Narbonne.) Le
Maréchal de Roquelaure eftoit
grand- Maiſtre de la Garderobe du Roy , Chevalier de fes
Ordres , Sénéchal & Gouverneur de Rouergue & de Foix ,
Lieutenant general de la haute
Auvergne , Sénéchal & Gouverneur de Guyenne ; il porta
dans fa jeuneffe le nom de
Longart , fous lequel il ſe fit
180 MERCURE
eltimer ; la Reine Jeanne
d'Albret bifayeule du Roy ,
commença la fortune. Henry
IV. l'éleva & Louis XIII. le fit
Maréchal de France en 1615.
Me la Ducheffe de Foix fa petite fille eftoit tres - eftimée. Sa
conduite a toûjours efté reguliere & uniforme & avoit beaucoup de vertu .
Dame Charlotte Marie le
Meufnier , épouse de M™ Guillaume Bénard, Chevalier Seigneur de Rezay , Second
Prefident de la premiere
Chambre des Enquestes. Cette Dame eftoit veuve de M
GALANT 181
с
Jean Sevin , Chevalier Seigneur de Guiney , de Gometzla Ville , &c. Prefident en la
Cinquiéme Chambre des Enqueftes , mort en la 59 année de fon âge. Me la Prefidente de Rezay eftoit belle - foeur de Mr l'Evefque
d'Angoulême ; ce Prelat eftoit.
frere de Mr. le Prefident de
Rezay,& Coufin de Mre N....
Bénard de Rezay, Capitaine des
Levrettes de Monfieur le Duc
d'Orleans. Il y a prés de 26.
ans que Mr le Prefident de
Rezay exerce fa Charge. Il y
fue reçû le 30. Decembre
182 MERCURE
1684. Cette Dame eftoit proche parente de Mre René le
Meufnier , Premier Confeiller
Clerc de la Grand'Chambre ,
& qui eftoit Officier dans le
Parlement depuis le 29. May
de l'année 1665.
Me la Prefidente de Rezay
a efté fort regrettée. C'eftoit
une Dame de merite , qui s'étoit attiré l'eftime & la confideration de tout ceux qui la
connoiffoient, par les manieres
honnêtes & bienfaifantes.
Elle eftoit alliée à plufieurs
perfonnes de confideration du
Parlement, &il y en avoit peu
GALANT 183
de diftinguées par leur naiſſance à qui elle ne touchât du
côté maternel. Elle eftoit proche parente de Mr de Verthamon Villemenon , & de Mrs
de Leffeville , qui font de l'ancienne famille de le Clerc ,
connue depuis fi long- temps
dans le Parlement , & que quelques Auteurs pretendent avoir
donné un Chancellier à la
France. Elle eftoit auffi parente de Mrs Leſcalopier , & de
Mrs de Semonville , familles
dont il y en a deux actuellement Confeillers à la Grand'-
Chambre. Me la Prefidente de
184 MERCURE
Rezay a cfté fort regretée des
Pauvres, à qui elle faifoit beaucoup de bien. Elle leur a donné des marques de ſa tendreſſe
en mourant.
Dame Adrienne Philippine
de Lannoy , veuve de Jacques
Marie de la Baulme , Comte
de Montrevel &Brigadier des
Armées du Roy, tué à la Bataille de Nerwinde , eft morte
âgée de 57. ans. Elle avoit eſté
Fille d'Honneur de la Reine.
Elle avoit cu deux fils de feu
Mr le Comte de Montrevel,
dont l'aîné qui portoit la même qualité fut tué il y quel-
GALANT 185
ques années , & au commencement de cette guerre , à la
tête du Regiment de Montrevel , dont il eftoit Colonel , &
qui fut enfuite donné à Mr
fon frere , qui porte aujourd'huy le nom de Comte de
Montrevel. Il est petit neveu
de Mrle Maréchal de Mont
revel , & petit fils de Mr Id
Marquis de Saint Martin , &
de Dame N..... de Saux de
Tavanes, morte depuis quelques années à Tournay , où
elle faifoit fa refidence , & larriere petit-fils de Mr le Comte
-de Montrevel, Chevalier des
Avril 1710.
186 MERCURE
Ordres du Roy , & fon Lieute
nant General enBreffe, Bugey,
Valromay & Gex.
с
La Maifonde Lannoy eft une
des plus illuftres de Flandres ;
elle y tenoit déja un rang confiderable dans le 12 & le 13
fiecle. Elle eft alliée aux Maifons de Horne, de Robek, de
Berghes, d'Aremberg, & d'Egmont. Dans la revolution qui
ôta une partie des Païs Bas au
Royd'Espagne Philippe II. La
Maifon de Lannoy fut une
des plus fidelles à la Maiſon
d'Autriche , & elle ne prit dans
ces temps difficiles aucun en-
GALANT 187
gagement contraire à fes devoirs ; lors du Siege de Breda
par Ambroife Spinola , les
Comtes de Lannoy ne perdirent aucune occafion de donner des marques de leur fidelité au Roy Philippes IV. petit
fils de Philippes II. de mefme
qu'au Siege de Cafal fait par
le Gouverneur de Milan , & ce
fut le Comte de Lannoy ayeul
de la Damequi vient de mourir , qui empêcha les effets de
la Ligue des Provinces- Unies
contre la Maifon d'Autriche.
Cette Ligue formidable dans
fon commencement , fut diffi
Qij
188 MERCURE
pée par la prudence & par l'activité de ce Seigneur : Enfin le
nom de Lannoy a toûjours
efté cher à la Maifon d'Autriche , & la feüe Reine choifit
elle même , & par la fuite de
l'inclination naturelle qu'elle
avoit pour ce nom , ' Mlle de
Lannoy pour une de fes filles
d'honneur.
Mr
d'Olton Comte d'Aubarede ,
Lieutenant General des Armées du Roy & Gouverneur
de Salins , eft mort icy âgé de
90. ans.Il avoit elté auparavant
Gouverneur de l'Ile de Ré. Il
Bernard d'Aftorg
GALANT 189
s'eftoit diftingué dans toutes
les occafions les plus celebres
de fon temps & fes bleffures
eftoient autant de glorieufes
marques qu'il portoit fur luy
de fes fervices. Il eftoit d'une
ancienne famille originaire de
Quercy &établie à Toulouſe
dans le 13° fiecle. Il y a 412.
ans qu'un Aftorg eftoit Capitoul de Touloufe ; & cette
famille a donné fon nom àune
ruëde la même Ville. Elle a
produit plufieurs branches ; les
plus confiderables font celles
de Montbartier , & d'Aubare
de , & celuy dont je vous
190 MERCURE
apprens la mort eftoit de la
derniere.
Mr Guillaume de Vic
Baron de Clermont aujour
d'huy Confeiller au Parlement
de Toulouſe a époufé N...
d'Aftorg de Montbartier de
la même Maifon que fou M' le
Marquis d'Aubarede qui vient
de mourir. M' d'Aftorg
Lieutenant de Roy de Blaye
&Chevalier de S. Louis de la
Promotion de 1703. eft de la
même Maiſon, Mr le Comte
d'Aubarede recût le même
honneur en 1694, &en 1696.
il fut fait Lieutenant General
GALANT 191
il fut le fecond de la Promotion du 3º Janvier & Mr le
Marquis de Puyfieux fut le
premier & Mr le Maréchal
d'Arraignan fut le quatrième.
Mr d'Aubarede eftoit Gouverneur de Salins en Franchecomté depuis plufieurs années.
Cette Place fut prife le 22.
Juin de l'an 1674. Mr de
Saliere Gentilhomme de Dauphiné , proche parent de Me
I'Abbeffe be Bons de Belley,
& Lieutenant de Roy de cette Place , Mr de Fermoville,
Major , Mr Tourte Ayde- Major & Capitaine des Portes
192 MERCURE
ont fait faire un Service magnifique à Salins pour leur Gouverneur ; les Officiers des Forts
de S. André & de Blin , y ont
affifté.
Mre N... de Joyeufe Abbé
de Gorze en Touraine , eft
mort dans un âge fort avancé.
Il eftoit Preftre , & avoit toûjours mené une vie fort exemplaire ; la Maiſon de Joyeufe
eft illuftre & ancienne. Bernard Seigneur de Joyeuſe
époufa en 1312. Alix de Pey
re ; il en eut Randon qui continua la pofterité , & Jeanne
qui époufa en 1343 Geraud
Adhemar
GALANT 193
Adhemar Seigneur de Grignan , & de là vient l'alliance
de cette Maiſon avec celles de
Grignan & de RochebonneChasteauneuf. Randon fecond
du nom , petit- fils de Randon
premier, eftoit Chambellan du
Dauphin Charles , Regent du
Royaume & Gouverneur de
Dauphiné en 1422. Il époufa
en premières nôces CatherineAlberte de Monteil de Gelas ,
dite de Charlus , Dame de Botheonen Forez. Il en eut
Louis 2 Seigneur de Joyeufe , que les Anglois firent prifonnier à la journée de Crevant
Avril 1710.
R
194 MERCURE
en 1423. & Jeanne épouse du
Maréchal de la Fayette ( Gilbert ) de Jeanne fille de Jean
Louvet Prefident en Proven
ce , Louis 2 , eut TanneguyVi
comte de Joycufe , qui épouſa
en 1448. Blanche de Tournon ; il en cut Guillaume 1 .
dont je parleray, Charles Ab
bé de Chambon, nommé Evêque de S. Flour en 1483. Jeanne femme de Guy de la Baume
4. du nom Comte de Montrevel , & Louis Sieur de Bothcon
Comte de Grandpré , Cham-i
bellan des Rois Louis XI. &
Charles VIII. & Lieutenant
GALANT 195
general au Gouvernement de
Paris , Ile de France , Orlean.
nois , Champagne , Brie , Câtinois & Vermandois. Le Roy
Louis XI. luy fit épouſer Jeanne de Bourbon , fille de Jean 2.
Comte de Vendôme , un des
ayeux de S. M. Il eut de cette
illuftre alliance , Anne mariée
en 1497. à Gabriel de Levy
Comte de Courſon , & François Sieur de Botheon , Anne
de Gafte Dame de la Barge,
dont il cut Jeanne de Joyeuſe
alliée 1. à Claude Sieur de S.
Chaumont , & à François de
Montmorin Seigneur de Saint
K ij
196 MERCURE
Heran Gouverneur d'Auver
gne. Louis eut d'Ifabeau d'Halluin fa premiere femme Robett Comte de Grandpré , tige
des Comtes de Grandpré, bran
che cadette de la Maifon de
Joyeufe & dont cftoit l'Abbé
qui vient de mourir. Cette
branche eft à prefent l'aifnée,
celle des Ducs de Joyeuſe s'étant éteinte dans le 16° & dans.
le dernier fiecle. Mr l'Abbé de
Joyeuse eftoit fils d'AntoineFrançois de Joyeuſe & de Marguerite de Joyeuse heritiere du
Comte de Grandpré , & frere
de Mre Charles - François de
GALANT 197
Joyeuse , & de Jean-Armand
Maréchal de France , Chevalier des Ordres du Roy, & Gou
verneur des trois Evêchez , &
de feu Mr le Comte de Grandpré qui a laiffé des enfans , de
Charlotte de Mailly &d'Henriette Loüife de Cominges
Vervins fes deux femmes. Mr
le Maréchal n'a point eu d'enfans : pour revenir à Guillaume 1. il fut Chambellan du
Duc de Bourbon , il épouſa
Anne de Balzac fille de Rufec
de Balzac Senéchal de Beauvais,
& de Jeanne d'Albon. Il en eut
Charles Vicomte de Joyeuse ,
Riij
198 MERCURE
Louis Evêque de Saint Flour
Guillaume Evêque d'Alet ,
Jacques Abbé & General de
l'Ordre de Saint Antoine &
Doyen du Puy. Thibaud Chevalier de Rhodes, & Jean Sieur
de S. Sauveur ; Charles époufa
Françoise de Meüillon fille
d'Antoine Sieur de Preffieux
& d'Ifabeau de Peyre, dont il
cut Louis tué à la Journée de
Pavic ; Jacques Vicomte de
Joyeuse qui mourant fans en--
fans , laifla pour heritier Jean
de Saint Sauveur fon oncle , &
Jeanne mariée à Gaſpard d'Urfé. Jean de Joyeuse Sieur de
ALQUE
GALANT (199 DE
LA
VILLA
Joycufe Gouverneur de r
bonnes, Chevalier de l'Orde
du Roy , époufa en 1518.
Françoiſe de Voifins , Dame
d'Arques , de la Tour-Fenouil
let, fille unique de Jean de Voifins & de Paule de Foix de Rabat; il fut pere de Guillaume
2. Maréchal de France , qui de
Marie de Batarnay fille de René Comte du Bouchage , &
d'Ifabelle de Savoye- Tende ,
cut Anne Duc & Pair &
Maréchal de France , Favori
d'Henry III. dont il devint
beaufrere , fon frere ayant
époufé Marguerite de LorraiRiiij
200 MERCURE
ne fœur puifnée de la Reine
Louife. Il fut tué à la Bataille
de Coutras qu'il perdit le 20.
Avril de l'an 1587. François
fon frere fut, Cardinal Archevefque de Narbonne & enſuite de Toulouſe. Le Pape Gregoire XIII. l'honora de la
Pourpre , & il fut Protecteur
de la Couronne de France à
Rome. Henry Comte deBouchage , puis Duc de Joyeuſe
Pair & Maréchal de France
Chevalier des Ordres du Roy ,
grand Maiftre de la Garderobbe, Gouverneur & Lieutenant
general d'Anjou , Touraine , le "
GALANT 201
Maine, & le Perche , fe fit d'abord Capucin aprés la mort dé
fa femme. I eftoit troifiémé
fils de Guillaume 2. Maréchal
de France. La mort du Duc de
Joyeufe fon frere fut caufe
qu'il fortit des Capucins , mais
il yrentra en 1599. De Catherine de la Valette fa femme
fout puifnée du fameux Duc
d'Epernonite qu'uns fille
unique qui époufa Henry de
Bourbon Duc de Montpenfier,
d'où vint auffi une fille unique
qui épouſa feuë S. A. R. Gafton de France Duc d'Orleans
Oncle du Roy, & dont elle cut
202 MERCURE
feue S. A. R. Mademoiſelle.
Voila par où Mrs de Joyeuſe
eftoient alliez de feue Mademoifelle. Il y a encore eu un
Maréchal de France de cette
Maifon. Guillaume Vicomte
de Joyeuse Lieutenant general
pour le Roy au Gouvernement
de Languedoc , & qui eftoit fils
puifné de Jean de Joyeufe S
deSaint Sauveur, Gouverneur
de Narbene & de Françoiſe
deVoifins,dont je vous ay déja
parlé. Antoine - Scipion Chevalier de Malte , grand Prieur
de Toulouſe & puis Duc de
Joyeuse , & George Vicomte
GALANT 203
de S. Didier eftoient auffi freres
du Duc de Joyeufe Favory
d'Henry III.
Mre Louis de Baradat Evêque & Comte de Vabres , &
Abbé de Clermont eft mort
dans un âge affez avancé. Ce
Prelat eftoit d'une famille
diftinguée par fon rang & par
fon ancienneté dans le Languedoc. Elle y eftoit connue dés
le 13 ficcle. Elle eft fortie par
les femmes de celles de Balefta,
de Baragnes,& de Barthelemy.
Cette derniere a produit de
nos jours Mr l'Evêque de S.
Papoul.Mr l'Evêque deVabres
204 MERCURE
cftoit fort éloquent & il en a
donné des preuves dans des
Chaires celebres. Il fut choifi
àla mort de feu Mr l'Archevêque de Paris , pour faire
l'Oraifonfunebre de ce Prelat,
& il la fit avec un fuccés merveilleux. Il a efté Député en
plufieurs affemblées du Clergé
& il y a donné des marques
de fa Doctrine & de fon experience dans les affaires Ecclefiaftiques. L'Evêché de Vabres
eft fuffragant d'Alby . Feu Mr
Habert Docteur de Sorbonne
& Evêque de Vabres fut fort
mêlé dans les affaires du Janfe-
GALANT 205
nifme dont il fut un des plus
implacables adverfaires. Il
n'eftoit pas encore alors Evêque , & fon zele pour la faine
Doctrine fut recompenfé de
l'Epifcopat. Vabres eft une
Ville de Rouergue où il y avoit
autrefois une celebre Abbaye
de l'Ordre de S. Benoift, que
Pape Jean XXII. érigea en
Evêché en 1317. L'Abbé
Pierre Olargeo en fut le premier Evêque & il a eu d'illuftres
Succeffeurs qui ont tous eu le
titre d'Evêques Comtes de
Vabres. Saint Gregoire de
Tours parle avantageufement
le
206 MERCURE
C
de cette Ville au Chapitre 9
de fon 9 Livre , de la gloire
des Confeffeurs. Un Africain
de la Ville de Vage qui vint
s'établir à Vabres à la fin du
14°fiecle contribua beaucoup
aux embelliffemens de cette
Ville ; les foins qu'il prit pour
l'orner , ont rendu fa memoire
chere à la pofterité , & un
certain jour de l'année le
Peuple de Vabres va felon une
ancienne coûtume danfer &
fe rejouir devant une maiſon
qu'il habitoit , & on y chance
de vieilles Chanfons à ſa gloire. Le Chapitre de Vabres
GALANT 207
1
с
a produit d'excellens fujets.
Un Chanoine de cette Cathedrale fur la fin du 14 ficcle
fe diftingua entre les Interpretes de l'Ecriture. Il mir en
œuvre la plus grande partic
des memoires de Pierre Olargeo , premier Evêque de
Vabres.
Mre N... de l'Etang
Preftre , Prieur de S. Michel
en Poitou , Diocefe de Poitiers , eft mort âgé de plus
de 60 ans. Il eftoit frere de
Mrl'Abbé de l'Etang Docteur
de Sorbonne , & Prieur de
S. N. de Bourges & de Mrsde
208 MERCURE
l'Etang , tous diftinguez par
lcur merite , & par leur talens.
Ces Mrs font beaux freres de
Mr Bolduc de l'Academie des
Sciences.
Piij
174 MERCURE
Roquelaure , Ducheffe de
Foix , eft morte a l'âge de ss.
ans. Cette Dame épouía en
1674. Henry Charles François de Foix de Candalle , Duc
de Rendan Pair de France
Chevalier des Ordres du Roy,
Prince Captal de Bucs , Marquis Senecay , Comte de
Beunauges , de Gurfon , & de
Fleix , la Maifon de Foix dont
çe Duc cft Chef , eft , difent
quelques Auteurs , fortie de
celle des Anciens Rois de Navarre ; la Maifon de Candalle
dont le fameux Duc d'Epernon , favory d'Henry III.
GALANT 175
époufa l'heritiere , eftoit une
branche de celle de Foix , qui
a formé auffi une autre branche qui fubfifte en Savoye &
dont un Gentilhomme qui a
époufé la fœur de Mr le Comte de Blancheville eft chef.
Me la Ducheffe de Foix eftoit
fœur de Mr le Duc de Roquelaure qui commande en
Languedoc , & fille de JeanBaptifte Gaſton , Chevalier des
Ordres du Roy , Gouverneur
de Guyenne , & grand- Maiſtre
de la Garderobe & premier
Ducde Roquelaure , &de Maric- Charlotte de Daillon , feP iij
176 MERCURE
fa valeur que par La
conde fille de Timoleon de
Daillon, Comte du Lude , que
ce Duc époufa en 1653. &1
qui mourut 4. années aprés
âgée feulement de 2 1. ans. Ce
premier Duc de Roquelaure
s'éleva encore plus par fon merite & par
naiffance. Il fervit dés l'année
1635. en qualité de Capitaine
de Cavalerie , il fut bleffe & fait
prifonnier à la Bataille de la
Marfée prés de Sedan en 1641 .
en chargeant les ennemis à la
tefte de fon Efcadron. Il fervit
en qualité de Maréchal de
Camp au premier Siege de Gra-
GALANT 177
velines en 1644. à la prife de
Bourbourg en 45. au Siege de
Courtray en 46. eftant Lieutenant general. Il fut bleffé au
Siege de Bordeaux & fait Duc
au mois de Juin 1652. Il fervit à la conquefte de la Franche-Comté en 1668. & dans
la guerre de Hollande en 1672 .
Ce Duc avoit efté élevé à une
bonne Ecole. Il eftoit als d'Antoine de Roquelaure Maréchal
de France , & de Sulanne de
Baffepar fa feconde femme , &
de Catherine d'Ornezan fa premiere femme , veuve de Gilles
de Montal Baron de Roque-
178 MERCURE
bron , & fille de Jean- Claude
d'Ornezan , Sieur d'Auradé &
de Noaillan Gouverneur de
Mets , ce Maréchal cut JeanLouis Baron de Biran grandMaiftre de la Garderobe du
Roy, mort fans eftre marié ;
Louiſe premiere femme d'Antoine 2. Duc de Grammont ,
Rofe femme de François de
Noailles, Comte d'Ayen, Chevalier des Ordres du Roy ,
ayeul & ayeule de Monfieur le
Cardinal de Noailles : Catherine Abbeffe de Rhodez , morte
au Calvaire à Paris , & Marie
femme de Jacques Eſthuer ,
GALANT 179
>
Comte de la Vauguyon. Du
fecond lit outre feu Mr le Duc
de Roquelaure , il eut feuë Me
la Marquise de Mirepoix , Me
la Marquife de Balagny
Me la Marquife de Fimarcon
( Caffagnet de Narbonne.) Le
Maréchal de Roquelaure eftoit
grand- Maiſtre de la Garderobe du Roy , Chevalier de fes
Ordres , Sénéchal & Gouverneur de Rouergue & de Foix ,
Lieutenant general de la haute
Auvergne , Sénéchal & Gouverneur de Guyenne ; il porta
dans fa jeuneffe le nom de
Longart , fous lequel il ſe fit
180 MERCURE
eltimer ; la Reine Jeanne
d'Albret bifayeule du Roy ,
commença la fortune. Henry
IV. l'éleva & Louis XIII. le fit
Maréchal de France en 1615.
Me la Ducheffe de Foix fa petite fille eftoit tres - eftimée. Sa
conduite a toûjours efté reguliere & uniforme & avoit beaucoup de vertu .
Dame Charlotte Marie le
Meufnier , épouse de M™ Guillaume Bénard, Chevalier Seigneur de Rezay , Second
Prefident de la premiere
Chambre des Enquestes. Cette Dame eftoit veuve de M
GALANT 181
с
Jean Sevin , Chevalier Seigneur de Guiney , de Gometzla Ville , &c. Prefident en la
Cinquiéme Chambre des Enqueftes , mort en la 59 année de fon âge. Me la Prefidente de Rezay eftoit belle - foeur de Mr l'Evefque
d'Angoulême ; ce Prelat eftoit.
frere de Mr. le Prefident de
Rezay,& Coufin de Mre N....
Bénard de Rezay, Capitaine des
Levrettes de Monfieur le Duc
d'Orleans. Il y a prés de 26.
ans que Mr le Prefident de
Rezay exerce fa Charge. Il y
fue reçû le 30. Decembre
182 MERCURE
1684. Cette Dame eftoit proche parente de Mre René le
Meufnier , Premier Confeiller
Clerc de la Grand'Chambre ,
& qui eftoit Officier dans le
Parlement depuis le 29. May
de l'année 1665.
Me la Prefidente de Rezay
a efté fort regrettée. C'eftoit
une Dame de merite , qui s'étoit attiré l'eftime & la confideration de tout ceux qui la
connoiffoient, par les manieres
honnêtes & bienfaifantes.
Elle eftoit alliée à plufieurs
perfonnes de confideration du
Parlement, &il y en avoit peu
GALANT 183
de diftinguées par leur naiſſance à qui elle ne touchât du
côté maternel. Elle eftoit proche parente de Mr de Verthamon Villemenon , & de Mrs
de Leffeville , qui font de l'ancienne famille de le Clerc ,
connue depuis fi long- temps
dans le Parlement , & que quelques Auteurs pretendent avoir
donné un Chancellier à la
France. Elle eftoit auffi parente de Mrs Leſcalopier , & de
Mrs de Semonville , familles
dont il y en a deux actuellement Confeillers à la Grand'-
Chambre. Me la Prefidente de
184 MERCURE
Rezay a cfté fort regretée des
Pauvres, à qui elle faifoit beaucoup de bien. Elle leur a donné des marques de ſa tendreſſe
en mourant.
Dame Adrienne Philippine
de Lannoy , veuve de Jacques
Marie de la Baulme , Comte
de Montrevel &Brigadier des
Armées du Roy, tué à la Bataille de Nerwinde , eft morte
âgée de 57. ans. Elle avoit eſté
Fille d'Honneur de la Reine.
Elle avoit cu deux fils de feu
Mr le Comte de Montrevel,
dont l'aîné qui portoit la même qualité fut tué il y quel-
GALANT 185
ques années , & au commencement de cette guerre , à la
tête du Regiment de Montrevel , dont il eftoit Colonel , &
qui fut enfuite donné à Mr
fon frere , qui porte aujourd'huy le nom de Comte de
Montrevel. Il est petit neveu
de Mrle Maréchal de Mont
revel , & petit fils de Mr Id
Marquis de Saint Martin , &
de Dame N..... de Saux de
Tavanes, morte depuis quelques années à Tournay , où
elle faifoit fa refidence , & larriere petit-fils de Mr le Comte
-de Montrevel, Chevalier des
Avril 1710.
186 MERCURE
Ordres du Roy , & fon Lieute
nant General enBreffe, Bugey,
Valromay & Gex.
с
La Maifonde Lannoy eft une
des plus illuftres de Flandres ;
elle y tenoit déja un rang confiderable dans le 12 & le 13
fiecle. Elle eft alliée aux Maifons de Horne, de Robek, de
Berghes, d'Aremberg, & d'Egmont. Dans la revolution qui
ôta une partie des Païs Bas au
Royd'Espagne Philippe II. La
Maifon de Lannoy fut une
des plus fidelles à la Maiſon
d'Autriche , & elle ne prit dans
ces temps difficiles aucun en-
GALANT 187
gagement contraire à fes devoirs ; lors du Siege de Breda
par Ambroife Spinola , les
Comtes de Lannoy ne perdirent aucune occafion de donner des marques de leur fidelité au Roy Philippes IV. petit
fils de Philippes II. de mefme
qu'au Siege de Cafal fait par
le Gouverneur de Milan , & ce
fut le Comte de Lannoy ayeul
de la Damequi vient de mourir , qui empêcha les effets de
la Ligue des Provinces- Unies
contre la Maifon d'Autriche.
Cette Ligue formidable dans
fon commencement , fut diffi
Qij
188 MERCURE
pée par la prudence & par l'activité de ce Seigneur : Enfin le
nom de Lannoy a toûjours
efté cher à la Maifon d'Autriche , & la feüe Reine choifit
elle même , & par la fuite de
l'inclination naturelle qu'elle
avoit pour ce nom , ' Mlle de
Lannoy pour une de fes filles
d'honneur.
Mr
d'Olton Comte d'Aubarede ,
Lieutenant General des Armées du Roy & Gouverneur
de Salins , eft mort icy âgé de
90. ans.Il avoit elté auparavant
Gouverneur de l'Ile de Ré. Il
Bernard d'Aftorg
GALANT 189
s'eftoit diftingué dans toutes
les occafions les plus celebres
de fon temps & fes bleffures
eftoient autant de glorieufes
marques qu'il portoit fur luy
de fes fervices. Il eftoit d'une
ancienne famille originaire de
Quercy &établie à Toulouſe
dans le 13° fiecle. Il y a 412.
ans qu'un Aftorg eftoit Capitoul de Touloufe ; & cette
famille a donné fon nom àune
ruëde la même Ville. Elle a
produit plufieurs branches ; les
plus confiderables font celles
de Montbartier , & d'Aubare
de , & celuy dont je vous
190 MERCURE
apprens la mort eftoit de la
derniere.
Mr Guillaume de Vic
Baron de Clermont aujour
d'huy Confeiller au Parlement
de Toulouſe a époufé N...
d'Aftorg de Montbartier de
la même Maifon que fou M' le
Marquis d'Aubarede qui vient
de mourir. M' d'Aftorg
Lieutenant de Roy de Blaye
&Chevalier de S. Louis de la
Promotion de 1703. eft de la
même Maiſon, Mr le Comte
d'Aubarede recût le même
honneur en 1694, &en 1696.
il fut fait Lieutenant General
GALANT 191
il fut le fecond de la Promotion du 3º Janvier & Mr le
Marquis de Puyfieux fut le
premier & Mr le Maréchal
d'Arraignan fut le quatrième.
Mr d'Aubarede eftoit Gouverneur de Salins en Franchecomté depuis plufieurs années.
Cette Place fut prife le 22.
Juin de l'an 1674. Mr de
Saliere Gentilhomme de Dauphiné , proche parent de Me
I'Abbeffe be Bons de Belley,
& Lieutenant de Roy de cette Place , Mr de Fermoville,
Major , Mr Tourte Ayde- Major & Capitaine des Portes
192 MERCURE
ont fait faire un Service magnifique à Salins pour leur Gouverneur ; les Officiers des Forts
de S. André & de Blin , y ont
affifté.
Mre N... de Joyeufe Abbé
de Gorze en Touraine , eft
mort dans un âge fort avancé.
Il eftoit Preftre , & avoit toûjours mené une vie fort exemplaire ; la Maiſon de Joyeufe
eft illuftre & ancienne. Bernard Seigneur de Joyeuſe
époufa en 1312. Alix de Pey
re ; il en eut Randon qui continua la pofterité , & Jeanne
qui époufa en 1343 Geraud
Adhemar
GALANT 193
Adhemar Seigneur de Grignan , & de là vient l'alliance
de cette Maiſon avec celles de
Grignan & de RochebonneChasteauneuf. Randon fecond
du nom , petit- fils de Randon
premier, eftoit Chambellan du
Dauphin Charles , Regent du
Royaume & Gouverneur de
Dauphiné en 1422. Il époufa
en premières nôces CatherineAlberte de Monteil de Gelas ,
dite de Charlus , Dame de Botheonen Forez. Il en eut
Louis 2 Seigneur de Joyeufe , que les Anglois firent prifonnier à la journée de Crevant
Avril 1710.
R
194 MERCURE
en 1423. & Jeanne épouse du
Maréchal de la Fayette ( Gilbert ) de Jeanne fille de Jean
Louvet Prefident en Proven
ce , Louis 2 , eut TanneguyVi
comte de Joycufe , qui épouſa
en 1448. Blanche de Tournon ; il en cut Guillaume 1 .
dont je parleray, Charles Ab
bé de Chambon, nommé Evêque de S. Flour en 1483. Jeanne femme de Guy de la Baume
4. du nom Comte de Montrevel , & Louis Sieur de Bothcon
Comte de Grandpré , Cham-i
bellan des Rois Louis XI. &
Charles VIII. & Lieutenant
GALANT 195
general au Gouvernement de
Paris , Ile de France , Orlean.
nois , Champagne , Brie , Câtinois & Vermandois. Le Roy
Louis XI. luy fit épouſer Jeanne de Bourbon , fille de Jean 2.
Comte de Vendôme , un des
ayeux de S. M. Il eut de cette
illuftre alliance , Anne mariée
en 1497. à Gabriel de Levy
Comte de Courſon , & François Sieur de Botheon , Anne
de Gafte Dame de la Barge,
dont il cut Jeanne de Joyeuſe
alliée 1. à Claude Sieur de S.
Chaumont , & à François de
Montmorin Seigneur de Saint
K ij
196 MERCURE
Heran Gouverneur d'Auver
gne. Louis eut d'Ifabeau d'Halluin fa premiere femme Robett Comte de Grandpré , tige
des Comtes de Grandpré, bran
che cadette de la Maifon de
Joyeufe & dont cftoit l'Abbé
qui vient de mourir. Cette
branche eft à prefent l'aifnée,
celle des Ducs de Joyeuſe s'étant éteinte dans le 16° & dans.
le dernier fiecle. Mr l'Abbé de
Joyeuse eftoit fils d'AntoineFrançois de Joyeuſe & de Marguerite de Joyeuse heritiere du
Comte de Grandpré , & frere
de Mre Charles - François de
GALANT 197
Joyeuse , & de Jean-Armand
Maréchal de France , Chevalier des Ordres du Roy, & Gou
verneur des trois Evêchez , &
de feu Mr le Comte de Grandpré qui a laiffé des enfans , de
Charlotte de Mailly &d'Henriette Loüife de Cominges
Vervins fes deux femmes. Mr
le Maréchal n'a point eu d'enfans : pour revenir à Guillaume 1. il fut Chambellan du
Duc de Bourbon , il épouſa
Anne de Balzac fille de Rufec
de Balzac Senéchal de Beauvais,
& de Jeanne d'Albon. Il en eut
Charles Vicomte de Joyeuse ,
Riij
198 MERCURE
Louis Evêque de Saint Flour
Guillaume Evêque d'Alet ,
Jacques Abbé & General de
l'Ordre de Saint Antoine &
Doyen du Puy. Thibaud Chevalier de Rhodes, & Jean Sieur
de S. Sauveur ; Charles époufa
Françoise de Meüillon fille
d'Antoine Sieur de Preffieux
& d'Ifabeau de Peyre, dont il
cut Louis tué à la Journée de
Pavic ; Jacques Vicomte de
Joyeuse qui mourant fans en--
fans , laifla pour heritier Jean
de Saint Sauveur fon oncle , &
Jeanne mariée à Gaſpard d'Urfé. Jean de Joyeuse Sieur de
ALQUE
GALANT (199 DE
LA
VILLA
Joycufe Gouverneur de r
bonnes, Chevalier de l'Orde
du Roy , époufa en 1518.
Françoiſe de Voifins , Dame
d'Arques , de la Tour-Fenouil
let, fille unique de Jean de Voifins & de Paule de Foix de Rabat; il fut pere de Guillaume
2. Maréchal de France , qui de
Marie de Batarnay fille de René Comte du Bouchage , &
d'Ifabelle de Savoye- Tende ,
cut Anne Duc & Pair &
Maréchal de France , Favori
d'Henry III. dont il devint
beaufrere , fon frere ayant
époufé Marguerite de LorraiRiiij
200 MERCURE
ne fœur puifnée de la Reine
Louife. Il fut tué à la Bataille
de Coutras qu'il perdit le 20.
Avril de l'an 1587. François
fon frere fut, Cardinal Archevefque de Narbonne & enſuite de Toulouſe. Le Pape Gregoire XIII. l'honora de la
Pourpre , & il fut Protecteur
de la Couronne de France à
Rome. Henry Comte deBouchage , puis Duc de Joyeuſe
Pair & Maréchal de France
Chevalier des Ordres du Roy ,
grand Maiftre de la Garderobbe, Gouverneur & Lieutenant
general d'Anjou , Touraine , le "
GALANT 201
Maine, & le Perche , fe fit d'abord Capucin aprés la mort dé
fa femme. I eftoit troifiémé
fils de Guillaume 2. Maréchal
de France. La mort du Duc de
Joyeufe fon frere fut caufe
qu'il fortit des Capucins , mais
il yrentra en 1599. De Catherine de la Valette fa femme
fout puifnée du fameux Duc
d'Epernonite qu'uns fille
unique qui époufa Henry de
Bourbon Duc de Montpenfier,
d'où vint auffi une fille unique
qui épouſa feuë S. A. R. Gafton de France Duc d'Orleans
Oncle du Roy, & dont elle cut
202 MERCURE
feue S. A. R. Mademoiſelle.
Voila par où Mrs de Joyeuſe
eftoient alliez de feue Mademoifelle. Il y a encore eu un
Maréchal de France de cette
Maifon. Guillaume Vicomte
de Joyeuse Lieutenant general
pour le Roy au Gouvernement
de Languedoc , & qui eftoit fils
puifné de Jean de Joyeufe S
deSaint Sauveur, Gouverneur
de Narbene & de Françoiſe
deVoifins,dont je vous ay déja
parlé. Antoine - Scipion Chevalier de Malte , grand Prieur
de Toulouſe & puis Duc de
Joyeuse , & George Vicomte
GALANT 203
de S. Didier eftoient auffi freres
du Duc de Joyeufe Favory
d'Henry III.
Mre Louis de Baradat Evêque & Comte de Vabres , &
Abbé de Clermont eft mort
dans un âge affez avancé. Ce
Prelat eftoit d'une famille
diftinguée par fon rang & par
fon ancienneté dans le Languedoc. Elle y eftoit connue dés
le 13 ficcle. Elle eft fortie par
les femmes de celles de Balefta,
de Baragnes,& de Barthelemy.
Cette derniere a produit de
nos jours Mr l'Evêque de S.
Papoul.Mr l'Evêque deVabres
204 MERCURE
cftoit fort éloquent & il en a
donné des preuves dans des
Chaires celebres. Il fut choifi
àla mort de feu Mr l'Archevêque de Paris , pour faire
l'Oraifonfunebre de ce Prelat,
& il la fit avec un fuccés merveilleux. Il a efté Député en
plufieurs affemblées du Clergé
& il y a donné des marques
de fa Doctrine & de fon experience dans les affaires Ecclefiaftiques. L'Evêché de Vabres
eft fuffragant d'Alby . Feu Mr
Habert Docteur de Sorbonne
& Evêque de Vabres fut fort
mêlé dans les affaires du Janfe-
GALANT 205
nifme dont il fut un des plus
implacables adverfaires. Il
n'eftoit pas encore alors Evêque , & fon zele pour la faine
Doctrine fut recompenfé de
l'Epifcopat. Vabres eft une
Ville de Rouergue où il y avoit
autrefois une celebre Abbaye
de l'Ordre de S. Benoift, que
Pape Jean XXII. érigea en
Evêché en 1317. L'Abbé
Pierre Olargeo en fut le premier Evêque & il a eu d'illuftres
Succeffeurs qui ont tous eu le
titre d'Evêques Comtes de
Vabres. Saint Gregoire de
Tours parle avantageufement
le
206 MERCURE
C
de cette Ville au Chapitre 9
de fon 9 Livre , de la gloire
des Confeffeurs. Un Africain
de la Ville de Vage qui vint
s'établir à Vabres à la fin du
14°fiecle contribua beaucoup
aux embelliffemens de cette
Ville ; les foins qu'il prit pour
l'orner , ont rendu fa memoire
chere à la pofterité , & un
certain jour de l'année le
Peuple de Vabres va felon une
ancienne coûtume danfer &
fe rejouir devant une maiſon
qu'il habitoit , & on y chance
de vieilles Chanfons à ſa gloire. Le Chapitre de Vabres
GALANT 207
1
с
a produit d'excellens fujets.
Un Chanoine de cette Cathedrale fur la fin du 14 ficcle
fe diftingua entre les Interpretes de l'Ecriture. Il mir en
œuvre la plus grande partic
des memoires de Pierre Olargeo , premier Evêque de
Vabres.
Mre N... de l'Etang
Preftre , Prieur de S. Michel
en Poitou , Diocefe de Poitiers , eft mort âgé de plus
de 60 ans. Il eftoit frere de
Mrl'Abbé de l'Etang Docteur
de Sorbonne , & Prieur de
S. N. de Bourges & de Mrsde
208 MERCURE
l'Etang , tous diftinguez par
lcur merite , & par leur talens.
Ces Mrs font beaux freres de
Mr Bolduc de l'Academie des
Sciences.
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Résumé : Troisiéme Article des Morts. [titre d'après la table]
Le texte relate la mort de plusieurs personnalités notables et leurs lignées respectives. Marie Charlotte de Roquelaure, Duchesse de Foix, est décédée à l'âge de 66 ans. Elle avait épousé en 1674 Henry Charles François de Foix de Candalle, Duc de Rendan, Pair de France, et Chevalier des Ordres du Roy. La Maison de Foix, dont ce Duc était chef, est issue des anciens Rois de Navarre. La Maison de Candalle, dont le Duc d'Épernon était un membre célèbre, est une branche de la Maison de Foix. La Duchesse de Foix était la sœur du Duc de Roquelaure, commandant en Languedoc, et la fille de Jean-Baptiste Gaston, Chevalier des Ordres du Roy, Gouverneur de Guyenne, et premier Duc de Roquelaure. Jean-Baptiste Gaston de Roquelaure, premier Duc de Roquelaure, s'est distingué par ses mérites et sa naissance. Il a servi dès 1635 en qualité de Capitaine de Cavalerie et a été blessé à plusieurs reprises, notamment à la Bataille de la Marfée en 1641. Il a participé à divers sièges et batailles, et a été fait Duc en 1652. Il a servi dans la conquête de la Franche-Comté en 1668 et dans la guerre de Hollande en 1672. Il était le fils d'Antoine de Roquelaure, Maréchal de France, et de Sulanne de Baffepar. Dame Charlotte Marie le Meufnier, épouse de Guillaume Bénard, Chevalier Seigneur de Rezay, Second Président de la première Chambre des Enquestes, est également décédée. Elle était veuve de Jean Sevin, Chevalier Seigneur de Guiney, et était proche parente de plusieurs personnalités du Parlement. Dame Adrienne Philippine de Lannoy, veuve de Jacques Marie de la Baulme, Comte de Montrevel et Brigadier des Armées du Roy, est morte à l'âge de 57 ans. Elle avait été Fille d'Honneur de la Reine et avait deux fils, dont l'aîné a été tué à la tête du Régiment de Montrevel. Bernard d'Astorg, Comte d'Aubarede, Lieutenant Général des Armées du Roy et Gouverneur de Salins, est décédé à l'âge de 90 ans. Il était issu d'une ancienne famille originaire de Quercy et établie à Toulouse au 13ème siècle. Monsieur de Joyeuse, Abbé de Gorze en Touraine, est mort à un âge avancé. La Maison de Joyeuse est illustre et ancienne, avec des alliances notables, notamment avec les Maisons de Grignan et de Rochebonne-Chasteauneuf. Anne de Joyeuse, Duc et Pair de France, fut favori du roi Henri III et devint son beau-frère en épousant Marguerite de Lorraine, sœur de la reine Louise. Il fut tué à la bataille de Coutras en 1587. Son frère, François, fut Cardinal et Archevêque de Narbonne puis de Toulouse, et fut honoré par le pape Grégoire XIII. Henry de Joyeuse, Comte de Bouchage puis Duc de Joyeuse, fut également Maréchal de France et Chevalier des Ordres du Roi. Après la mort de sa femme, il devint Capucin, mais quitta l'ordre en 1599. Il eut une fille unique qui épousa Gaston de France, Duc d'Orléans. Guillaume de Joyeuse, Vicomte de Joyeuse, fut Lieutenant général au Gouvernement de Languedoc. Antoine-Scipion et Georges de Joyeuse étaient aussi frères du Duc de Joyeuse. Le texte mentionne également Louis de Baradat, Évêque et Comte de Vabres, issu d'une famille distinguée du Languedoc depuis le 13e siècle. Il fut connu pour son éloquence et son implication dans les affaires ecclésiastiques. L'Évêché de Vabres, suffragant d'Alby, fut créé en 1317 par le pape Jean XXII. La ville de Vabres est célèbre pour son histoire et ses figures notables, comme un Africain du 14e siècle qui contribua à son embellissement. Enfin, le texte évoque Monsieur de l'Etang, Prêtre et Prieur de Saint-Michel en Poitou, âgé de plus de 60 ans à sa mort. Il était frère de l'Abbé de l'Etang, Docteur de Sorbonne, et de plusieurs autres personnes distinguées par leur mérite et leurs talents.
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17
p. 108-116
MORTS.
Début :
Milord Griffin, qui avoit esté fait prisonnier à bord du [...]
Mots clefs :
Mort, Prince, Empereur, Comte
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texteReconnaissance textuelle : MORTS.
MORTS.
Milord Griffin, quiavoit
este fait prisonnier à bord
du Salsburi, lorsque le Roy
d'Angleterre tenta de faire
une descente en Ecosse en
1708.estmort le 21. Novembre
dans la Tour de
Londres,où il avoit esté mis
comme coupable de haute
trahison ,
son execurion
ayant esté dissetéepour raison.
Le Baron Ezechiel Spanhein
, Ambassadeuren Angleterre
pour l'Electeur de
Brandebourg, & sort connu
par ses emplois & par
quantité d'ouvrages d'erudition,
mourut à Londres
le 2 5. Novembre .1,{lq. ao .ans, ':.o.
MessirePierre Code,Archevêque
de Sebaste & Vicaire
Apostolique dans les
Pays bas, mourut à Utrecht
le12. Décembre 1710. âgé
de 60 ans.
Jean Christian
,
Prince
d'Eggenberg, Duc de Crumau
,
Comte de Gradisch
&d'Adslperg,& Conseiller
d'Etatde l'Empereur, monrut
sans posterité à Prague
en Boheme le 14. Decembre
1710. en sa 70. année
estant né le 7 Septembre
1641. Il avoir épousécn
1666.MarieErne stine, fille
de Jean Adosse, Prince de
Sclwarrzenberg,& de Marie
Justine, Comcene de-
Stahremberg.
Ce Prince estoit fils de
Jean Antoine, Prince d'Aggenberg
,
Duc de Crumau,
&c.Chevalier de la Torson
d'or, mort le 24 Mars
1647. & d'Anne Marie
filledeChristian ,
,
Marquis
de Brandebourg Bareith
,
mort le 8 Mai 1680. Il avoir
pour soeur Marie Elisabeth
,
néele26. Seprembre1656.
à Ferdinand
, Prince de Diecrichstein.
Comme le Prince d'Eggenberg
est mort sans ensans
son frere puisné Jean
Liffroidd'EggenbergConseiller
d'Etat del'Empereur,
& Gouverneur de la Carniole
,
lui a succedé dans
tous ses biens,qui sont tresconsiderables.
::.
Ce Prince qui est né le
12 Aoust 1642aépouséen
1666. Eleonore Rosalie
filledeCharles Eusebe,Prin-y
cc de Licteinstein
,
dont il
a pour fils unique Jean- Antoine
Joses, Prince d'Eg.
genberg
,
né le 6 Janvier
1669. Gouverneur de la
Carniole en survivance de
son pere & Conseillerd'E-
-
tac de l'Empereur. Il a époufé
au mois deMars 1692.
Marie Charlote, fille d AdolseUratislas
,
Comte de
Sternberg, dont il a des
enfans.
Albert Antoine, Comte
de Scwartzbourg & d'Hohustein,
estmort îe 15. Décembre
1710. à Roudolstat
en Thuringe dans sa 70.
année, estant né le 2 Aoust
1641. Il avoit épousé le 7.
Juin 1665.EmilieJulienne,
filled'Albert Frederic,Com.
te deBarby& deSosieUrsule
d'Oldembourg
,
dont
il a un fils unique qu'on
nomme Louis Frederic
,
Comte Schwanzbourg &
d'Hohnstein,né le15.Octobre1667.
& quiaépousé
le 15 Octobre 1691. Anne
Sosie fille de Frédéric Duc
de Saxe Got ha
,
& de Madeleine
Sibile,Duchesse de
Saxe Hall, dontil a 1 3 ensans.
Marie Claude,née Comtesse
de Kunige
,
est morte
à Vienne le même mois
1710. âgée de 41 ans elle
avoit épousé Mathias Leopold
Prince de Lamberg &
du S. Empire, Landegrave
de Leichtemberg
,
Chevalier
de la Toison d'or,Conseiller
d'Etat, Grand Ecuyer
de l'Empereur & GrandVeneur
hereditaire d'A utric he.
Jean HuguesdOffbeck,
qui avoir estééleu Coadjuteur
de l'ArchevêchédeTreves
en 1671. & qui y fucccdaen
1676.àCharles Gaspar
Vander Leyen son oncle
,
est mort à Coblens le
6 de ce mois. Ce Prélat qui
avoit esté auparavant Evêque
de Spire, estoit fils
de Guillaume d'Orstbeck
Seigneur de Vernich.,& de,
Marie-Catherine Van-der-
Loyen. Le Prince Charles
de Lorraine
,
Evêque d'Ofnabruch
,
& d'Olmurs &
Coadjuteur de Treves, est
parti deLuneville le11 pour
aller prendre possession de
cet Archevêché.
Milord Griffin, quiavoit
este fait prisonnier à bord
du Salsburi, lorsque le Roy
d'Angleterre tenta de faire
une descente en Ecosse en
1708.estmort le 21. Novembre
dans la Tour de
Londres,où il avoit esté mis
comme coupable de haute
trahison ,
son execurion
ayant esté dissetéepour raison.
Le Baron Ezechiel Spanhein
, Ambassadeuren Angleterre
pour l'Electeur de
Brandebourg, & sort connu
par ses emplois & par
quantité d'ouvrages d'erudition,
mourut à Londres
le 2 5. Novembre .1,{lq. ao .ans, ':.o.
MessirePierre Code,Archevêque
de Sebaste & Vicaire
Apostolique dans les
Pays bas, mourut à Utrecht
le12. Décembre 1710. âgé
de 60 ans.
Jean Christian
,
Prince
d'Eggenberg, Duc de Crumau
,
Comte de Gradisch
&d'Adslperg,& Conseiller
d'Etatde l'Empereur, monrut
sans posterité à Prague
en Boheme le 14. Decembre
1710. en sa 70. année
estant né le 7 Septembre
1641. Il avoir épousécn
1666.MarieErne stine, fille
de Jean Adosse, Prince de
Sclwarrzenberg,& de Marie
Justine, Comcene de-
Stahremberg.
Ce Prince estoit fils de
Jean Antoine, Prince d'Aggenberg
,
Duc de Crumau,
&c.Chevalier de la Torson
d'or, mort le 24 Mars
1647. & d'Anne Marie
filledeChristian ,
,
Marquis
de Brandebourg Bareith
,
mort le 8 Mai 1680. Il avoir
pour soeur Marie Elisabeth
,
néele26. Seprembre1656.
à Ferdinand
, Prince de Diecrichstein.
Comme le Prince d'Eggenberg
est mort sans ensans
son frere puisné Jean
Liffroidd'EggenbergConseiller
d'Etat del'Empereur,
& Gouverneur de la Carniole
,
lui a succedé dans
tous ses biens,qui sont tresconsiderables.
::.
Ce Prince qui est né le
12 Aoust 1642aépouséen
1666. Eleonore Rosalie
filledeCharles Eusebe,Prin-y
cc de Licteinstein
,
dont il
a pour fils unique Jean- Antoine
Joses, Prince d'Eg.
genberg
,
né le 6 Janvier
1669. Gouverneur de la
Carniole en survivance de
son pere & Conseillerd'E-
-
tac de l'Empereur. Il a époufé
au mois deMars 1692.
Marie Charlote, fille d AdolseUratislas
,
Comte de
Sternberg, dont il a des
enfans.
Albert Antoine, Comte
de Scwartzbourg & d'Hohustein,
estmort îe 15. Décembre
1710. à Roudolstat
en Thuringe dans sa 70.
année, estant né le 2 Aoust
1641. Il avoit épousé le 7.
Juin 1665.EmilieJulienne,
filled'Albert Frederic,Com.
te deBarby& deSosieUrsule
d'Oldembourg
,
dont
il a un fils unique qu'on
nomme Louis Frederic
,
Comte Schwanzbourg &
d'Hohnstein,né le15.Octobre1667.
& quiaépousé
le 15 Octobre 1691. Anne
Sosie fille de Frédéric Duc
de Saxe Got ha
,
& de Madeleine
Sibile,Duchesse de
Saxe Hall, dontil a 1 3 ensans.
Marie Claude,née Comtesse
de Kunige
,
est morte
à Vienne le même mois
1710. âgée de 41 ans elle
avoit épousé Mathias Leopold
Prince de Lamberg &
du S. Empire, Landegrave
de Leichtemberg
,
Chevalier
de la Toison d'or,Conseiller
d'Etat, Grand Ecuyer
de l'Empereur & GrandVeneur
hereditaire d'A utric he.
Jean HuguesdOffbeck,
qui avoir estééleu Coadjuteur
de l'ArchevêchédeTreves
en 1671. & qui y fucccdaen
1676.àCharles Gaspar
Vander Leyen son oncle
,
est mort à Coblens le
6 de ce mois. Ce Prélat qui
avoit esté auparavant Evêque
de Spire, estoit fils
de Guillaume d'Orstbeck
Seigneur de Vernich.,& de,
Marie-Catherine Van-der-
Loyen. Le Prince Charles
de Lorraine
,
Evêque d'Ofnabruch
,
& d'Olmurs &
Coadjuteur de Treves, est
parti deLuneville le11 pour
aller prendre possession de
cet Archevêché.
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Résumé : MORTS.
En 1710 et 1711, plusieurs personnalités notables sont décédées. Milord Griffin, capturé lors d'une tentative d'invasion en Écosse en 1708, est mort le 21 novembre 1710 dans la Tour de Londres pour haute trahison. Le Baron Ezechiel Spanhein, ambassadeur en Angleterre pour l'Électeur de Brandebourg, est décédé à Londres le 25 novembre 1710 à l'âge de 80 ans. Messire Pierre Code, Archevêque de Sebaste et Vicaire Apostolique dans les Pays-Bas, est mort à Utrecht le 12 décembre 1710 à l'âge de 60 ans. Jean Christian, Prince d'Eggenberg, Duc de Crumau, Comte de Gradisch et d'Adslperg, et Conseiller d'État de l'Empereur, est décédé sans postérité à Prague le 14 décembre 1710 à l'âge de 69 ans. Son frère cadet, Jean Liffroid d'Eggenberg, lui a succédé dans ses biens considérables. Albert Antoine, Comte de Schwartzbourg et d'Hohustein, est mort le 15 décembre 1710 à Rudolstadt en Thuringe à l'âge de 69 ans. Marie Claude, Comtesse de Kunige, est décédée à Vienne en 1710 à l'âge de 41 ans. Jean Hugues d'Offbeck, Coadjuteur de l'Archevêché de Trèves, est mort à Coblence le 6 décembre 1710. Le Prince Charles de Lorraine, Évêque d'Osnabrück et d'Olmurs, et Coadjuteur de Trèves, est parti de Lunéville le 11 décembre pour prendre possession de cet Archevêché.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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18
p. 49-64
« Le 27. Juin une partie de la Garnison de Doüay [...] »
Début :
Le 27. Juin une partie de la Garnison de Doüay [...]
Mots clefs :
Troupes, Ennemis, Hommes, Marquis, Cavalerie, Cavaliers, Chevaux, Attaque, Prince, Comte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 27. Juin une partie de la Garnison de Doüay [...] »
Le 2.7. Juin une partie
de la Garnison de Doüay
sortit dans le dessein d'aller
rompre une digue qui
retenoit les eaux de la
Scarpe & de la Sensee, &
qui estoit couverte parun
petit Chasteau & par une
Redoute prés d'Arleux.
Ces Troupes ne pouvant
rompre la Digue sans
s'élire auparavant emparées
de ces postes, elles les
attaquerent; mais quoy
qu'ils ne sussent gardez
que parsoixante & dix
hommes ils se deffendirent
si bien que les Ennemis
furent obligez de se
recirer avec perte, ainsi
qu'ils avoientdéjafaitplusieurs
autres fois auparavant.
Cependant ayant resolu
de s'en rendre maistres à
quelque prix que ce fust,
parce que cette Digue empeschoit
la navigation de
la Scarpe & du Canal de
la Deule
,
& qu'elle retenoit
les eaux de maniere
que les Moulins deDoüay
ne pouvoient tourner, ils
firent marcherla nuit du
cinq au six Juillet huitmille
hommes tant Cavalerie
qu'Infanrerie,avec quatre
pieces de canon pour les
attaquer de nouveau. Les
soixante & dix hommes
qui les gardoient, se deffendirent
si vigoureusement
qu'ils tuerent beaucoup
de monde aux ennemis
; mais enfin la breche
ayant esté faite ils furent
emportez d'assaut & faits
prisonniersau nombre de
soixante & six
, quatre
ayant esté tuez.
Les Ennemis s'en estant
rendus maistres
,
resolurent
de les bien fortifier,
afin de les mieux conferver.
Pour couvrir leurs
Travailleurs ils pofterenc
douze Escadrons & dix
Bataillons à une demi
lieuë de Doüay, la droite
à Goeulzin, & la gaucheà
Sains-leNoble, ayant derriere
eux les inondations
&leruisseaudu Moulinet.
Mr le Marechal de Villarsalla
le 9. reconoistre
ce Camp
,
& trouvaque
la droite estoit si peuappuye'e,
que sil'on pouvoit
cacher la marche de nos
Troupes ,il seroitfacile
de le forcer. La difficulté
estoit de faire arriver les
Troupes fous Bouchain
partant des Portes d'Arras
& du Camp qui estoit
entierement découvert
par les grandes Gardes des
Ennemis.
La nuit du 9.au 10. ce
Maréchal fit marcher plusieurs
Pontons, avec ordre
de les cacher le jour fous
des arbres présde l'Escaur,
& aprèsavoir fait reconnoistre
le terrain entre
Bouchain & les Ennemis
par Mr le Baron de Raski
Colonel des Houssards, il
détacha trente Escadrons
des Gardes du Corps, des
Grenadiers à cheval
,
de
Dragons, de Cavalerie &
de Houssards, fous les ordres
deMr le Comte de
Gassionavec Mrle Marquis
de Coignie,le Prince
Charles de Lorraine &
Mr le Marquis deHautefort,
des Mousquetaires ,
Marchaux de Camp ; Mr
le Duc de la Tremoille ,
Mr Gaydon, Mrle Comte
deSaumery
,
Mrde St.
Servin
,
& Mr de Bellefond
,
Brigadiers
;
Mr le
Prince de Marsillac
,
Mr
le Duc de Ç-t.Agnan., Mr
le Prince de Lanlbe[ç)Mr
de Manicamp,
,
Mr de
Chabannes, Mr d'Aremberg,
Mr de Rottembourg,
Mr de Leémour , MrduTil, Mrle Marquis
de saint ChaumontMr
des Granges
, & Mr de
Beaufremont, Colonels.
Mr le Marquis de Coignies
marcha le premier
sous Bouchain avec les
Dragons, & il se tint sur
leshauteurs, pour empesccherquedes
Villages voisins
il ne pust aller personne
au Camp des Enne-
'mis" & que leurs partis ne
pussent découvrir nos
Troupes quand elles y arriveroient.
Lorsqu'elles
Sortirent du Camp les
Houssards & les Cavaliers
disilerent laplusgrande
partie à pied, les autres
tenant leurs chevaux en
main comme s'ils estoient
allez en pasture.
Pendant une partiede
la journée on fit faire l'éxercice
aux Troupes du
Camp sur les lieux les plus
élevez, & à dix heures on
ordonna à tous les postes
de la Scarpe, de l'Éscaut
& de la Sensée, d'arrester
tous les paysans sous prétexte
de quelques Espions"'
qu'on avoit eu avis qui
avoient examiné le Camp.
Toutes ces précautions
ayant esté prises ,Mr de
Gassion arriva fous Bouchain
sans avoir esté découvert,
& marcha ensuite
avec Mr de Coignies
peur aller attaquer les Ennemis.
Il arriva àla pointe
du jour prés de leur
Camp oùil separa ses
Troupes en quatre corps,
dont il formaquatre lignes
qui Ce soutenoient
Pun-e l'autre. La premiere
estoit composée de trois
cens Dragons, & d'un pareil
nombre de Houssards
commandez par Mr le Baron
de Raski leur Colo-d
nel
,
qui avoir encore este,
la nuit
,
luy sixiéme , reconnoistre
-
s'il n'y avoit
point quelque ravin eu
emincreux qui couvrist
front des Ennemis ; la
conde estoit de Dragons
de Cavalerie, & les deux
tres entièrement de Calerie;
la quatrièmequi
voit de Reserve estoit
mmandce par Mr de la
remoille.-
Onarriva en cet ordre
sans estre découvert,
nsle Camp ennemi jusn'a
la garde del'Etendart
ui futtaillée en pieces ,
és qu'elle eut crié : Qui
ive. En mesme remps les
oussards & les Dagon.
de la premiere ligne
debanderent & donne
rent l'alarme par tout l
Camp en tuant tout c
qui se rencontra fous leui
main à coups de fusil, de
pistolet,&de sabre. Quel
ques pelotons d'lnfante
rie firent feu sur no
Troupes, mais ils furen
bientostdissipez:on en tu
une partie, & le restese
sauva dans le chemin couvert
deDoüay. Le carnage
fut beaucoup plus
grand dans la Cavalerie
ennemie qui n'eut pas le
mps de se former en
orps un grand nombre
Officiers& de Cavaliers
vant esté tuez dans leurs
entes. Il y a eu des Régilents
donc il n'est pas reé
cent hommes
,
& un
nttr'autres dont il n'en resté que cinq, ce que
on a appris par des Let
es venuës de Douay le
ndemain de l'action.
out le Camp fut pillé, &
on mit le feu à ce que l'on
e putemporter apres que
on eut ramassé prés de
eize cens chevaux qui
ont elle emmenez a
Camp avec les prison
niers. On a pris aussï plu
sieurs Etendarts & quel
quespaires de Timbales
Nous avons perdu en cet
re action Mr deCoëtmer
Colonel de Dragons; Mr
le Baron de Raski a est
blessé ainsi que quelques
Officiersde Dragons.
Apres avoir resté plus
d'une heure sur le Champ
de Bataille, Mr de Gassion
fit sa retraire sans estro
poursuivi. Ils'est
conduit
dans cette action avec
beaucoup de prudence&
d'habilleté
,
ainsi que Mr
deCoignies 3eMus les autres
Officiers Généraux&
Subalternes,& particulierement
Mr le Baron de
Rata.
1
Mr le Maréchal de Villars
, pour favoriser leur
rerraite, avoir fait avancer
Mr d'Albergoti &Mr le
Prince d'Isenghienauvillaged'Aubigny
avec deux
mille Grenadiers, & fit attaquer
par Mr le Comte
de Broglio les gardes avancées
de l'aile droite de
l'arméeennemie,afind'attirer
leur attention de ce
costéla, les Houssards les
pousserent du costé de
Lievin ; ils tuerent plusieurs
Cavaliers
, en prirentaussi
plusieurs,& ramenerent
soixante chevaux.
de la Garnison de Doüay
sortit dans le dessein d'aller
rompre une digue qui
retenoit les eaux de la
Scarpe & de la Sensee, &
qui estoit couverte parun
petit Chasteau & par une
Redoute prés d'Arleux.
Ces Troupes ne pouvant
rompre la Digue sans
s'élire auparavant emparées
de ces postes, elles les
attaquerent; mais quoy
qu'ils ne sussent gardez
que parsoixante & dix
hommes ils se deffendirent
si bien que les Ennemis
furent obligez de se
recirer avec perte, ainsi
qu'ils avoientdéjafaitplusieurs
autres fois auparavant.
Cependant ayant resolu
de s'en rendre maistres à
quelque prix que ce fust,
parce que cette Digue empeschoit
la navigation de
la Scarpe & du Canal de
la Deule
,
& qu'elle retenoit
les eaux de maniere
que les Moulins deDoüay
ne pouvoient tourner, ils
firent marcherla nuit du
cinq au six Juillet huitmille
hommes tant Cavalerie
qu'Infanrerie,avec quatre
pieces de canon pour les
attaquer de nouveau. Les
soixante & dix hommes
qui les gardoient, se deffendirent
si vigoureusement
qu'ils tuerent beaucoup
de monde aux ennemis
; mais enfin la breche
ayant esté faite ils furent
emportez d'assaut & faits
prisonniersau nombre de
soixante & six
, quatre
ayant esté tuez.
Les Ennemis s'en estant
rendus maistres
,
resolurent
de les bien fortifier,
afin de les mieux conferver.
Pour couvrir leurs
Travailleurs ils pofterenc
douze Escadrons & dix
Bataillons à une demi
lieuë de Doüay, la droite
à Goeulzin, & la gaucheà
Sains-leNoble, ayant derriere
eux les inondations
&leruisseaudu Moulinet.
Mr le Marechal de Villarsalla
le 9. reconoistre
ce Camp
,
& trouvaque
la droite estoit si peuappuye'e,
que sil'on pouvoit
cacher la marche de nos
Troupes ,il seroitfacile
de le forcer. La difficulté
estoit de faire arriver les
Troupes fous Bouchain
partant des Portes d'Arras
& du Camp qui estoit
entierement découvert
par les grandes Gardes des
Ennemis.
La nuit du 9.au 10. ce
Maréchal fit marcher plusieurs
Pontons, avec ordre
de les cacher le jour fous
des arbres présde l'Escaur,
& aprèsavoir fait reconnoistre
le terrain entre
Bouchain & les Ennemis
par Mr le Baron de Raski
Colonel des Houssards, il
détacha trente Escadrons
des Gardes du Corps, des
Grenadiers à cheval
,
de
Dragons, de Cavalerie &
de Houssards, fous les ordres
deMr le Comte de
Gassionavec Mrle Marquis
de Coignie,le Prince
Charles de Lorraine &
Mr le Marquis deHautefort,
des Mousquetaires ,
Marchaux de Camp ; Mr
le Duc de la Tremoille ,
Mr Gaydon, Mrle Comte
deSaumery
,
Mrde St.
Servin
,
& Mr de Bellefond
,
Brigadiers
;
Mr le
Prince de Marsillac
,
Mr
le Duc de Ç-t.Agnan., Mr
le Prince de Lanlbe[ç)Mr
de Manicamp,
,
Mr de
Chabannes, Mr d'Aremberg,
Mr de Rottembourg,
Mr de Leémour , MrduTil, Mrle Marquis
de saint ChaumontMr
des Granges
, & Mr de
Beaufremont, Colonels.
Mr le Marquis de Coignies
marcha le premier
sous Bouchain avec les
Dragons, & il se tint sur
leshauteurs, pour empesccherquedes
Villages voisins
il ne pust aller personne
au Camp des Enne-
'mis" & que leurs partis ne
pussent découvrir nos
Troupes quand elles y arriveroient.
Lorsqu'elles
Sortirent du Camp les
Houssards & les Cavaliers
disilerent laplusgrande
partie à pied, les autres
tenant leurs chevaux en
main comme s'ils estoient
allez en pasture.
Pendant une partiede
la journée on fit faire l'éxercice
aux Troupes du
Camp sur les lieux les plus
élevez, & à dix heures on
ordonna à tous les postes
de la Scarpe, de l'Éscaut
& de la Sensée, d'arrester
tous les paysans sous prétexte
de quelques Espions"'
qu'on avoit eu avis qui
avoient examiné le Camp.
Toutes ces précautions
ayant esté prises ,Mr de
Gassion arriva fous Bouchain
sans avoir esté découvert,
& marcha ensuite
avec Mr de Coignies
peur aller attaquer les Ennemis.
Il arriva àla pointe
du jour prés de leur
Camp oùil separa ses
Troupes en quatre corps,
dont il formaquatre lignes
qui Ce soutenoient
Pun-e l'autre. La premiere
estoit composée de trois
cens Dragons, & d'un pareil
nombre de Houssards
commandez par Mr le Baron
de Raski leur Colo-d
nel
,
qui avoir encore este,
la nuit
,
luy sixiéme , reconnoistre
-
s'il n'y avoit
point quelque ravin eu
emincreux qui couvrist
front des Ennemis ; la
conde estoit de Dragons
de Cavalerie, & les deux
tres entièrement de Calerie;
la quatrièmequi
voit de Reserve estoit
mmandce par Mr de la
remoille.-
Onarriva en cet ordre
sans estre découvert,
nsle Camp ennemi jusn'a
la garde del'Etendart
ui futtaillée en pieces ,
és qu'elle eut crié : Qui
ive. En mesme remps les
oussards & les Dagon.
de la premiere ligne
debanderent & donne
rent l'alarme par tout l
Camp en tuant tout c
qui se rencontra fous leui
main à coups de fusil, de
pistolet,&de sabre. Quel
ques pelotons d'lnfante
rie firent feu sur no
Troupes, mais ils furen
bientostdissipez:on en tu
une partie, & le restese
sauva dans le chemin couvert
deDoüay. Le carnage
fut beaucoup plus
grand dans la Cavalerie
ennemie qui n'eut pas le
mps de se former en
orps un grand nombre
Officiers& de Cavaliers
vant esté tuez dans leurs
entes. Il y a eu des Régilents
donc il n'est pas reé
cent hommes
,
& un
nttr'autres dont il n'en resté que cinq, ce que
on a appris par des Let
es venuës de Douay le
ndemain de l'action.
out le Camp fut pillé, &
on mit le feu à ce que l'on
e putemporter apres que
on eut ramassé prés de
eize cens chevaux qui
ont elle emmenez a
Camp avec les prison
niers. On a pris aussï plu
sieurs Etendarts & quel
quespaires de Timbales
Nous avons perdu en cet
re action Mr deCoëtmer
Colonel de Dragons; Mr
le Baron de Raski a est
blessé ainsi que quelques
Officiersde Dragons.
Apres avoir resté plus
d'une heure sur le Champ
de Bataille, Mr de Gassion
fit sa retraire sans estro
poursuivi. Ils'est
conduit
dans cette action avec
beaucoup de prudence&
d'habilleté
,
ainsi que Mr
deCoignies 3eMus les autres
Officiers Généraux&
Subalternes,& particulierement
Mr le Baron de
Rata.
1
Mr le Maréchal de Villars
, pour favoriser leur
rerraite, avoir fait avancer
Mr d'Albergoti &Mr le
Prince d'Isenghienauvillaged'Aubigny
avec deux
mille Grenadiers, & fit attaquer
par Mr le Comte
de Broglio les gardes avancées
de l'aile droite de
l'arméeennemie,afind'attirer
leur attention de ce
costéla, les Houssards les
pousserent du costé de
Lievin ; ils tuerent plusieurs
Cavaliers
, en prirentaussi
plusieurs,& ramenerent
soixante chevaux.
Fermer
Résumé : « Le 27. Juin une partie de la Garnison de Doüay [...] »
Le 2 juin, une partie de la garnison de Douai tenta de rompre une digue retenant les eaux de la Scarpe et de la Sensee, mais fut repoussée par les défenseurs des postes voisins. Le 5 au 6 juillet, huit mille hommes avec quatre pièces de canon attaquèrent de nouveau ces postes et les vainquirent, capturant la plupart des défenseurs à l'exception de quatre tués. Les ennemis fortifièrent ensuite les postes. Le maréchal de Villars, après avoir reconnu le camp ennemi, nota que la droite était peu appuyée. La nuit du 9 au 10 juillet, il fit marcher plusieurs troupes vers Bouchain, prenant des précautions pour éviter la découverte. Le marquis de Coignies marcha en tête avec les dragons pour empêcher toute communication avec le camp ennemi. À l'aube, les troupes françaises attaquèrent le camp ennemi en quatre lignes. La première ligne, composée de dragons et de hussards, débanda et donna l'alarme, tuant ceux qu'ils rencontrèrent. La cavalerie ennemie fut particulièrement touchée, avec de nombreux officiers et cavaliers tués. Le camp fut pillé et incendié, et près de mille deux cents chevaux furent capturés. Les Français perdirent le colonel de dragons Coëtmer et le baron de Raski fut blessé. Après avoir resté sur le champ de bataille, les troupes françaises se retirèrent sans être poursuivies, grâce à des actions de diversion menées par d'Albergotti et le prince d'Isenghien. Les hussards poussèrent également les ennemis vers Lievin, tuant et capturant plusieurs cavaliers et ramenant soixante chevaux.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
19
p. 33-70
NOUVELLES de divers endroits.
Début :
On a appris par les Lettres de Cadix du 10. Juillet, [...]
Mots clefs :
Duc, Roi, Marquis, Fille, Veuve, Prince, Comte, Guerre, Seigneur, Armée, Commandant, Vaisseau, Espagne, Officier, Chevalier, Croix, Seigneur, Fille, France, Mort
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texteReconnaissance textuelle : NOUVELLES de divers endroits.
NOUVELLES
dedivers endroits.
Onaappris par les Lettres
de Cadix du 10. Juillet r
que Mrl'Aigleaprès yavoir
amenépluseurs Prises
, erv
estoit party le quatre pour
allercroiser vers le Dérroit.
que le lendemain il avoit
attaquéune Fregate Hollandoise
de36. canons commandée
par le Capitaine
Jean Hopener
-, que lecombat
avoit duré plus de deux
heures, U qu'enfin cette
Fregate avoir esté coulée à
fond ;niais que Mr l'Aigle
y avoir été tué, alnllquc:
plusieurs Officiers & Soldats
de son équipage. Son Corps
a estéenterréà Malagaavec
tous les honneurs dûs à un
homme qui s'étoit distinguéen
plusieurs occasions
cependant le cours de cette
guerre.
Le 30, Juillet il parut à
la hauteur de Bayonne une
Escadre de11. Vaisseaux
de guerre Anglois revenant
de Lisbonne &: retournant
dans les Ports d'Angleterre.
Une heure aprèsquelle eut
fait voile une de nos Frégatesamena
deux Prises, dont
l'une estoit un Baftimenc-
Hollandois qui allait. à
Lisbonne chargé de Vins.
*
DesLettresde Lisbonne
du 17. Juin portent que le
Navire Nostra- Senora de
Torso, qui marquoit que
la Flotte de Pernambuco
avoitesté pris le 4. Avrilà
15. lieues du Tage par un
Vaisseau de guerre François
de l'Escadre de Mr du Casse
qui avoir mis l'équipage à
terre à rifle de Madere ;
queceNavire estoit chargé
de 450. caisses de Sucre,
de 400. rolles de Tabac,
de Cuirs, de bois de Bresit,
& de 40. mille Crufades
tant en argent monnayé
qu'en poudre d'or; que le
Vaisseau qui l'avoit pris,
selon le rapport de l'équipage
, estoit parti de Brest
avec fcpt ou huit autres
dont ilavoit estéseparé, &
qu'ildévoiealler à la Martinique.
Je n'ay pû vous parler
plutost de la mort de Don
Antonio Martin Alvarez
de Tolede & Beaumont,
Enriquez
,
de Rivera,Fernandez
)
Manrique, Duc
d'Albe, & de Huefcar
J Comte de Lerin, de Salvatierra,
&c. Marquis deCoria
, &c. Connestable &
Grand Chancellier de Navarre,
Sommellier de Corps
du Roy d'Espagne & Ton
Ambassadeur en France,
qui mourut icy le 28. May
en la 41.l'année de son âge.
Sa maladie a esté des j^lus
longues, &: elle ne luy a
jamaisservy de raison ny de
pretexte pour le dispenser
d'aucuns de ses devoirs, &
ce grand Ministre a toûjours
s-ofuotuernenuud'du'nueneen£ra5ie force
e le poids d'une Ambassade
aussi importante & aussï
laborieuse. Il y a succombé
à la fin, & la mort de
MonCeigneur a achevé de
l'accabler; l'interetvif&
fîneere qu'il y prenoit le fie
paroistreencore plus sensible
à cette perte qu'il ne
l'avoit paru à celle de Mr
le Connestable de Navarre
fonftls unique qui donnait
déjà de si grandes esperances,&
qu'il perdit nlalhcu..
reusement à sa 19eannée.
Comme toute la vie de
Mr le Duc d'Albe avoi-c
esté une préparation à la
mort on n'eut pas de peine
à l'y disposer. Sa résignationavoitesté
plus prompte
que le premier avis qu'oq
eut pû luy en donner. Quelques
heures avant sa mort
il fit prier un de nos, plu£
grands Ministres de vouloir
bienluy rendre encore une
visite,&de venir recevoir
ses derniers adieux. Cet
entretien fut touchant de
part & d'autre; lemourant
parla assezlong
-
temps de
choses importantes avec le
mêmeesprit,lamême force
& la même grandeur d'ame
quil avoit fait dans sa meilleure
santé. Enfinilsouhaita
de recevoir la Benediction
deMr le Cardinal de Noailles
Archevêquede Paris.
Son Eminence s'y transporta
sur l'heure.
Madame la Duchesse
d'Albe n'a pû avoir dans
une douleur aussi accablante
que Dieu pour consolation.
Elle se retira sur l'heureau
Valde Grace. Elle se
tient toujours dans cette
retraite si conforme à sa
situation. Elle a esté le modelle
des femmes mariées ;
elle l'est des veuves de son
rang.
LeRoyd'Espagne luy a
fait l'honneur de luy écrire
de sa main en langue EfpJ.¿
gnole la Lettre du monde
la plus consolante, La Reine
luyaécrit de même. S. NL
C.a joint aux honneurs
qu'elle a fait à cccccittuftre
veuve des liberalitez qui
honorent en elle lamémoire
du deffunt. Elle ;cil de la
grande Maison de Poncé de
Leon
,
fille de l'illustre Me
la Duchesse d'Aveiro
,
&
soeur de Mr le Duc d'Arcos
& de Mr le Duc de Banos
tous deux Granded'Espagne.
Mr le Duc d'Albe qui
n'arienoubliéen mouranc
a laissé par un écrit de sa
main le foin & la conduite
des Affaires d'Espagne en
France: à Mr Don Feliz-
Corncjo son Secrétaire
d'Ambassade. S. M. C. a
confirmé ce choix dans l'interim
jusqu'àce qu'il vienne
icy de sa part un nouvel
Ambassadeur. Le Portrait
en vers de Mr le Ducd'Albeestdansla
partie des Picces
Fugitives de ce moiscy.
Charlotte Armande d'Argouges
de Rannes épouse
de Guillaume Alexandre ,
Marquis de Vieuxpont
Lieutenant General des ar*.
mées du Roy
<
& Couverneur
de la Ville de Beauvais
& du Beauvoisis, mourut
le 28. Juin âgée de 36,.
ans. Elle estoit fille unique
de Nicolas d'Argouges
Marquis de Rannes, Lieutenant
General des Armées
du Roy, Colonel General
des Dragons
, & de Charlotte
de Beautru - Nogentqui
épousaen seconde nôces.
Jean
-
Baptisse Armand de
Rohan Prince de Montauban
,dont elle est veuve.
Mre N.Chabert Chevalier
de Saint Louis
)
Chef
d'Escadre des Armées Na-,
vales du Roy,fils du grand-
ChJbert)est mort à Toulon.
Ilavoit donné dans
toutes les occasions des
preuves de son courage &
de sa capacité. Il avoit ramené
du Sud une Flore d'argent
des plus riches qui
soient jamais venuës de
ces Mers. Il arriva heureusement
à Rochefort sur lafin
du mois de Mars de*
l'année 1709.aprés avoir
évité par son habileté quatre
Escadres des ennelllisr.
quil'attendoient sur sarouteen
quatre endroits differens.
Le Vaisseau du Roy
le Trident qu'il Commandoit
estle premier Vaisseau
de guerre qu'on ait vû à la
Rade de Lima depuis la découverte
de ce Continent
Marie Louis Chevalier,
Marquis de Sourdeilles,
Baron deFeissac, &c. Lieutenantde
Roy au Gouvernement
de Limosin & de
la Marche, est mort dans
son Chasteau de la Ganne
âgé de 44.ans. Ilaesté fort
regretté,&particulièrement
des Pauvres.
Il avoit épousé Marie fille
de Robert Marquis de Lignerac
Comte de Saint Chaînant
d'une des plusillustres
&de plus anciennes maisons
d'Auvergne.
Sa mere estoit de celle
des Vicomtes de Sedicre
A alliée à celles de Noailles9»
de Gimel, &c. & sa grande
mere estoit de celle d'Aubusson
la Feüillade.
Mr le Marquis de Sourdeilles
avoir d'abord pris le
party des Armes;mais la'
mort de son pere dont il
estoit filsunique, l'obligea
de quitter le Service. b
Catherine de Robeyre
3 épouse dYvesMarie dela
Bourdonnaye Seigneur de
Cotoyon
,
Maistre des Requestes
& Intendant à 0r.
leans,mourut aux eaux de
Bour bon le 24. Juin âgée
de 44. ans laissant posterité
Elle estoit fille de Mr de
Ribeyre Conseilier d'Etat,
&deCatherine Potier fills
de Mr de Novion premier
President.- Jean Guillaume Frison,
Prince de Nassau Stathouder
de Fiise., sur noyé le 14<
Juillet avec le Brigadier
WiJkeSc•
Wilkes. Il. sftoit parry de
l'Armée de Flandre pour
aller travailler à l'Affaire de
la successïon du feu Prince
dOrange qu'il avoir contre
l'Electeur de Brandebourg
qui estoit venu en Hollande
pour la terminer. Il s'embarqua
pour traverser le
passage de Moerdick,&
estanc demeuré dans son
Carosseàcause de la pluyc
avec le Brigadier Wilkes
uunnccoouuppddeevveenntt qui survint*,
renversa le ponton. On ne
trouva leurs corps que queL
ques jours après.
Ce Prince eltoïc hfe
d'Henry Casimir Prince de
Nassau & Stathouder de
Frise mort le15 Mars
1686. &d'Amelie fille de
Jean Georges Prince d'Anhalt
Dessau.
Ilestoit néle 4. Aoust;
1687.&avoirépousé le 16.
Avril 1709. Marie Louise
fille de Charles Landgrave
deHesseCassel,&deMarie
Amélie fille Jacques Duc de
Curlande. Il a laisse une
Princesse née au mois de
Septembre1710. & sa
veuve enceinte.
Les Etats Généraux ont
fait un accommodement
provisionnel entre l'Electeur
de Brandebourg &les
héritiers de ce Prince,qui ne
doit prejudicier en aucune
manière aux droits des Parties
; il porte que S.A. E.
jouira par provisionde la
Maisonde la vieille Cour à
la Haye,de la Maison du
Bois,dc HonslardiCK, de
Diercn& de quelquesTerres
qui valent six mille
florins de rente à quoy on
en ajoutera vingt
- quatre
mille pour faire la somme
de cinquante mille Horins
par an ; sur lesquels on en
retiendra dix mille pour
l'entretien de ces Maisons,
8c cela outre les biens donc
il joiiic déja; que la Princes.
se veuve, en qualité de Mere
& de Tutrice de son enfant
ou enfans
3
jouira de la
Maifoii de Loo; de la fomme
de cinquante mille florins
par an ,
qui fera prise
sur les biensde la fucceisson,
&unesomme decinquante
mille florinsune fois payée;
& que six mois après laccouchcment
de cette Prin
cess elle envoyera des Plénipotentiaires
pour termu
ner les pretentions de parc
& d'autre.
1
Madame la Duchesse de
Berry estant accouchée
avant terme le u. Juillet
d'une Princesse qui mourut
en même tem ps , on porta
son corps à SaintDenisle
13.Il y fut accompagné par
Mr la DacheffedeBeauvil
lier & par Me la Marquise
de Chastillon,& il fut inhumé
par Mr l'Evêque de
Séez premier Aumônier de
Monfcigncur le Duc de
Berry.
Charles Claude
,
Sire
& Comte de Breauté, Marquis
du Hotot
,
&c.Maistre
de la Garderobbe de S. A. R,
Philippe petitfils deFrance
Duc d'Orléans, mourut le xi. Juilleten sa 46.année,
Anne Geneviève Charr
rier épousede Charles Cesar
Le scalopier Maistre des
Requestes, & Intendant du
Commerce & de la Generalité
de Châlons,mourus
le14. Juillet.; Annele Maistre,épousede
Marc Anne Goiflard Seigneur
de Montsabert, Baron
de Toureil
)
&c. Conseiller
au Parlement
s mou- *
rut le 26. Juillet. i
MichelFrançois de Bethune
Comte de Charost mourut
le z6. Juillet dans sa
sisiemeannée.Ilestoit fils
d'Armand de Bethune Duc
de Charost& de Catherine
de Lamet sa sécondé femme.
I.(¡
Jean Baptiste Jacques
Ollier Marquis de Veneuil,
Seigneur de Preau Maistre
de la. Garderobbe de feue
S. A. R. Monsieur Frere
unique du Roy, mourut le
17. Juilletâgéde50. ans. Il
estoit Gouverneur deDomfont.
Henry Charles Arnauld
Comte de Pomponne,
mourut le 2.7.Juillet âgé
de 14.ans 7. mois. Ilestoit
fils de Nicolas Simon Arnaud
Marquis de Pomponne
, Sire Baron de Ferrieres,
Chambrois
,
Auquiville
Marqnis de Paloifeau
,
&c.
BrigadierdesArmées du
Roy; Lieutenant General
& Commandant pour Sa
Majeste aux Provinces de
l'isle de France & Soissonnois
; &de Confiance de
Harville Paloiseau.
Le Pere Jean de la Roche
, Prestre de l'Oratoire
fameux Predicateur, mourut
le 18Juittec.: -
François d'Anglure de
Bourlaymont, Docteur en
Theologie de la Faculté de
Paris, qui avoit été nommé
à l'Evêché de Pamiers
en 1681. qui s'en éroit démis
en 1685. sans avoir esté
Sacré, & qui fut nommé à
lors Abbé de Saint Florent
de Saumur, mourut le i-f.
Juillet. Il étoit fils de Nicolas
Marquis de Bourlaymont,
Gouverneur de Sesnay.
Gaspart- Claude Noler,
Docteur en Thologic de la
Faculté de Paris & Chanoi
ne de Nostre Dame, mourut
le premier Aoust âgé de j3.ans.
Mrle Cardinal de Noailles,
a donné son Canonicat
à Mr l'Abbé Vivant, son
Grand Vicaire& Penitentier
del'EglisedeParis,ci devant
.Curé de S.Leusson meriteest
connu de tout le monde..
Alsonce de. Bonne de
Crequi Duc de Lesdiguiéres,
Paire de France,mourut
le 5. Aoust âgé de 85,
ans. Son Corps a esté ports
aux Carmelitesde S. Denis
en France, où a esté inhi*.
méeAnne du Roure sa
mere, qui mourut le 18,
Février. 1686. &qui étoit
veuve de Charles Sire de"
Grequi & de Canapies, , Mestrede Camp du Regi:
ment des Gardes;.mort de
la blessure qu'il reçueau
siege de Chamberylanuitdu14.
au IJ.May 1630.
& qui étoit second fils de
Charles Sire de Crequi Duc
de Lesdiguiéres Maréchal
de France. Celuy qui vient
de mourir avoitépousé à
l'âge de 75. ans le u Septembre
1702. Gabrielle
Victoire de Rochechoüart
fille de Louis Duc de Vivonne
Pair &Maréchal de France
,
& d'Antoinette de
Mesmes, dont il n'a point
cû d'enfans.
Marie Anne Picques
épouse , de Loüis Gabriel
Portail
j
Chevalier Seigneur
de Fresnceu ,&au paravant
veuve de François Pajoc
Seigneur de Cordon,rnourut
le 6. Aoust âgée de quarante
-
iix ans, sans laisser
de postencé de ses deux alliances.
Florcnt de Marparaulr,
Marquis du même lieu
,
mourut le 7. Août.
Nicolle Miron, veuve
de DanielJacquinot
, Seigneur des Pressoirs
,
mourut le 9. Aoustâgée de
85. ans.
Claude le Pelletier
Conseillcr d'Etat ordinaire
; President Honoraire
du Parlement, Minifstr
d'Etat, cy- devant Prevost
des Marchands
,
Contrôlleur
General des Finances,
& sur-Intendant des postes
mourut le 10. Aoust en sa
8 1. année. Il y avoit déjà
long
- temps qu'ils'étoit
retiré du Monde ; & qu'il
ne s'ocupoit qu'à des oeeuvres
de Pieté., & particulièrement
à soulager les Pauvres.
1 Monsieur de Canaples,
ancien Commandant de la
Ville de Lyon dont on vient
de parler, avoir pris le nom
-
de Lesdiguiéres) & c'est luy
qui étoit le dernier de cec-
Ite Maison. Il avoir douze
mille livres de pension de
la Ville de Lyon; comme
6
Commandant, dont il s'en
estoit reservé neuf mille
i
lors qu'il se démit de ce
Commandement en faveur
de M' de Rochebonne en
luy laissant les trois autres
mille livres. Depuislamort
de M' de Canaples la penfion
de neuf mille livres
E
qu'ils'értit reservée sur
li.
celle de douze que fait la
Ville au Commandant ; a
cfté donnée,à Monsieur le
Duc de Villeroy.
Depuis la mort de Monseigneur,
le Roy a acordé
à Madame la Dauphine, la
Nef, le Cadenas, le Bâton
de Maistre d'Hotel & la
Musique. Elle mangea pour
la premiere fois à son grand
Couvert comme Dauphine
le 8. Aoust, & elle fut servie
par Monsieur le Marquis de
Vilacerfson premier Maître
d'Hostel; & le 10. elle fut
servie aussi à son grand
Couvert par Mr de la Croix
son Maître d'Hostel. Il se
rendit à la bouche avec ses
Officiers, lava ses mains; le
Contrôlleur & le Gentilhomme
servant les lavetent
ensuite; l'Ecuyer ordinaire
de la Bouche luy presenta
une Assiettesurlaquelle il
y avoir des Mouillettes - do
pain; il en prit deux avec
lefquclles il toucha tous les
Mets les uns après les autres;
il en donna une à manger à
l'Ecuyer de la Bouche, ensuite
il prit son Baston des
mains de l'Hussier du Bu-f
reau qui l'y avoit apporté.
puis la marche commença
en cet ordre. Un Garde du
Corps du Roy ayant la
Carabine sur l'épaule; un
Huissier de Salle & un
Huissier du Bureau, Mr de
la Croix marchoit derriere
eux, ayant son Baston de
Maistre d'Hostel à la main.
Un Gentil
-
homme servant
& le Contrôlieur portant
chacun un Plat, l'Ecuyer de
la Bouche & les autres
Officiers de la Bouche en
portant aussî chacun un,
marchaient ensuite. Lors
qu'ilsfurent arrivez à la Salleoù
estoit le prest, Mr de la
Croix vit mettre tous les
Plats surlaTable, où un
Gentil-homme servant qui
étoit de Garde au prest, fit
un nouvel essai de chaque
Plat: & donna la Mouillette
dont il avoit fait l'éssai à
chacun de ceux qui avoient
porté les Plats, après quoy
Mr de la Croix les vit met--
tersurla Table par les Gentils-
hommes servants. ;
*i IIlallaen suite,ayant Tonv
Baston à la main,, avertir
Monseigneur le Dauphin;
<k Madame la Dauphine;
puis il revint à la Table ou
il attendit Monseigneur le
Dauphin. Dés qu'il parut
il mit son Chapeau & son
Baston entre les mains du
Chef de Gobelet, & presensa
à ce Prince une serviette
mouilléequiétoic
encre deux Assiettes d'or
pour se laver les mains; il
prit ensuite une autre serviette
mouilléeaussï cntre
deux Alliettes d'or qu'il
presenta de mesme à Madame
la Dauphine. Un
Gentilhomme servant presenta
une autre serviette
mouillée aussi entre deux
assiettes ,à Madame
,
qui
mangea pour la première
fois avec Madame la Dauphine
à son grand couvert
Alors Mr de la Croix
reprit son Bâton & son Chapeau
,&retourna à la bouche
precedé feulement d'un
Garde du Corps & des deux
Huissiers.L'essay du second
fcrvice ne se fit point à IfI
bouche; mais au prest où
citoit la Nef. Il se plaçaen- t
:-
suite au costédroit du Fauteuil
de Monseigneur le
Dauphinoùil restapendant
toutle repasayant toujours
son Bâton à la main; les
Genciihommes servants firentle
Service de même que
cchheezz le RRooyj.
-
Il y avoir à ce repas une
tres grande Assemblée de
Dames;il y en avoit treize
qui avoient le Tabouret
,
les autresestoient debour.
Monfcigneur le Dauphin&
Madame la Dauphine tinrent
ensuite un Cercle dé
Dames comme chez le Roy
aprèssonsoupé; Cérémonie
qui si fait pour les re'--
mercier.
dedivers endroits.
Onaappris par les Lettres
de Cadix du 10. Juillet r
que Mrl'Aigleaprès yavoir
amenépluseurs Prises
, erv
estoit party le quatre pour
allercroiser vers le Dérroit.
que le lendemain il avoit
attaquéune Fregate Hollandoise
de36. canons commandée
par le Capitaine
Jean Hopener
-, que lecombat
avoit duré plus de deux
heures, U qu'enfin cette
Fregate avoir esté coulée à
fond ;niais que Mr l'Aigle
y avoir été tué, alnllquc:
plusieurs Officiers & Soldats
de son équipage. Son Corps
a estéenterréà Malagaavec
tous les honneurs dûs à un
homme qui s'étoit distinguéen
plusieurs occasions
cependant le cours de cette
guerre.
Le 30, Juillet il parut à
la hauteur de Bayonne une
Escadre de11. Vaisseaux
de guerre Anglois revenant
de Lisbonne &: retournant
dans les Ports d'Angleterre.
Une heure aprèsquelle eut
fait voile une de nos Frégatesamena
deux Prises, dont
l'une estoit un Baftimenc-
Hollandois qui allait. à
Lisbonne chargé de Vins.
*
DesLettresde Lisbonne
du 17. Juin portent que le
Navire Nostra- Senora de
Torso, qui marquoit que
la Flotte de Pernambuco
avoitesté pris le 4. Avrilà
15. lieues du Tage par un
Vaisseau de guerre François
de l'Escadre de Mr du Casse
qui avoir mis l'équipage à
terre à rifle de Madere ;
queceNavire estoit chargé
de 450. caisses de Sucre,
de 400. rolles de Tabac,
de Cuirs, de bois de Bresit,
& de 40. mille Crufades
tant en argent monnayé
qu'en poudre d'or; que le
Vaisseau qui l'avoit pris,
selon le rapport de l'équipage
, estoit parti de Brest
avec fcpt ou huit autres
dont ilavoit estéseparé, &
qu'ildévoiealler à la Martinique.
Je n'ay pû vous parler
plutost de la mort de Don
Antonio Martin Alvarez
de Tolede & Beaumont,
Enriquez
,
de Rivera,Fernandez
)
Manrique, Duc
d'Albe, & de Huefcar
J Comte de Lerin, de Salvatierra,
&c. Marquis deCoria
, &c. Connestable &
Grand Chancellier de Navarre,
Sommellier de Corps
du Roy d'Espagne & Ton
Ambassadeur en France,
qui mourut icy le 28. May
en la 41.l'année de son âge.
Sa maladie a esté des j^lus
longues, &: elle ne luy a
jamaisservy de raison ny de
pretexte pour le dispenser
d'aucuns de ses devoirs, &
ce grand Ministre a toûjours
s-ofuotuernenuud'du'nueneen£ra5ie force
e le poids d'une Ambassade
aussi importante & aussï
laborieuse. Il y a succombé
à la fin, & la mort de
MonCeigneur a achevé de
l'accabler; l'interetvif&
fîneere qu'il y prenoit le fie
paroistreencore plus sensible
à cette perte qu'il ne
l'avoit paru à celle de Mr
le Connestable de Navarre
fonftls unique qui donnait
déjà de si grandes esperances,&
qu'il perdit nlalhcu..
reusement à sa 19eannée.
Comme toute la vie de
Mr le Duc d'Albe avoi-c
esté une préparation à la
mort on n'eut pas de peine
à l'y disposer. Sa résignationavoitesté
plus prompte
que le premier avis qu'oq
eut pû luy en donner. Quelques
heures avant sa mort
il fit prier un de nos, plu£
grands Ministres de vouloir
bienluy rendre encore une
visite,&de venir recevoir
ses derniers adieux. Cet
entretien fut touchant de
part & d'autre; lemourant
parla assezlong
-
temps de
choses importantes avec le
mêmeesprit,lamême force
& la même grandeur d'ame
quil avoit fait dans sa meilleure
santé. Enfinilsouhaita
de recevoir la Benediction
deMr le Cardinal de Noailles
Archevêquede Paris.
Son Eminence s'y transporta
sur l'heure.
Madame la Duchesse
d'Albe n'a pû avoir dans
une douleur aussi accablante
que Dieu pour consolation.
Elle se retira sur l'heureau
Valde Grace. Elle se
tient toujours dans cette
retraite si conforme à sa
situation. Elle a esté le modelle
des femmes mariées ;
elle l'est des veuves de son
rang.
LeRoyd'Espagne luy a
fait l'honneur de luy écrire
de sa main en langue EfpJ.¿
gnole la Lettre du monde
la plus consolante, La Reine
luyaécrit de même. S. NL
C.a joint aux honneurs
qu'elle a fait à cccccittuftre
veuve des liberalitez qui
honorent en elle lamémoire
du deffunt. Elle ;cil de la
grande Maison de Poncé de
Leon
,
fille de l'illustre Me
la Duchesse d'Aveiro
,
&
soeur de Mr le Duc d'Arcos
& de Mr le Duc de Banos
tous deux Granded'Espagne.
Mr le Duc d'Albe qui
n'arienoubliéen mouranc
a laissé par un écrit de sa
main le foin & la conduite
des Affaires d'Espagne en
France: à Mr Don Feliz-
Corncjo son Secrétaire
d'Ambassade. S. M. C. a
confirmé ce choix dans l'interim
jusqu'àce qu'il vienne
icy de sa part un nouvel
Ambassadeur. Le Portrait
en vers de Mr le Ducd'Albeestdansla
partie des Picces
Fugitives de ce moiscy.
Charlotte Armande d'Argouges
de Rannes épouse
de Guillaume Alexandre ,
Marquis de Vieuxpont
Lieutenant General des ar*.
mées du Roy
<
& Couverneur
de la Ville de Beauvais
& du Beauvoisis, mourut
le 28. Juin âgée de 36,.
ans. Elle estoit fille unique
de Nicolas d'Argouges
Marquis de Rannes, Lieutenant
General des Armées
du Roy, Colonel General
des Dragons
, & de Charlotte
de Beautru - Nogentqui
épousaen seconde nôces.
Jean
-
Baptisse Armand de
Rohan Prince de Montauban
,dont elle est veuve.
Mre N.Chabert Chevalier
de Saint Louis
)
Chef
d'Escadre des Armées Na-,
vales du Roy,fils du grand-
ChJbert)est mort à Toulon.
Ilavoit donné dans
toutes les occasions des
preuves de son courage &
de sa capacité. Il avoit ramené
du Sud une Flore d'argent
des plus riches qui
soient jamais venuës de
ces Mers. Il arriva heureusement
à Rochefort sur lafin
du mois de Mars de*
l'année 1709.aprés avoir
évité par son habileté quatre
Escadres des ennelllisr.
quil'attendoient sur sarouteen
quatre endroits differens.
Le Vaisseau du Roy
le Trident qu'il Commandoit
estle premier Vaisseau
de guerre qu'on ait vû à la
Rade de Lima depuis la découverte
de ce Continent
Marie Louis Chevalier,
Marquis de Sourdeilles,
Baron deFeissac, &c. Lieutenantde
Roy au Gouvernement
de Limosin & de
la Marche, est mort dans
son Chasteau de la Ganne
âgé de 44.ans. Ilaesté fort
regretté,&particulièrement
des Pauvres.
Il avoit épousé Marie fille
de Robert Marquis de Lignerac
Comte de Saint Chaînant
d'une des plusillustres
&de plus anciennes maisons
d'Auvergne.
Sa mere estoit de celle
des Vicomtes de Sedicre
A alliée à celles de Noailles9»
de Gimel, &c. & sa grande
mere estoit de celle d'Aubusson
la Feüillade.
Mr le Marquis de Sourdeilles
avoir d'abord pris le
party des Armes;mais la'
mort de son pere dont il
estoit filsunique, l'obligea
de quitter le Service. b
Catherine de Robeyre
3 épouse dYvesMarie dela
Bourdonnaye Seigneur de
Cotoyon
,
Maistre des Requestes
& Intendant à 0r.
leans,mourut aux eaux de
Bour bon le 24. Juin âgée
de 44. ans laissant posterité
Elle estoit fille de Mr de
Ribeyre Conseilier d'Etat,
&deCatherine Potier fills
de Mr de Novion premier
President.- Jean Guillaume Frison,
Prince de Nassau Stathouder
de Fiise., sur noyé le 14<
Juillet avec le Brigadier
WiJkeSc•
Wilkes. Il. sftoit parry de
l'Armée de Flandre pour
aller travailler à l'Affaire de
la successïon du feu Prince
dOrange qu'il avoir contre
l'Electeur de Brandebourg
qui estoit venu en Hollande
pour la terminer. Il s'embarqua
pour traverser le
passage de Moerdick,&
estanc demeuré dans son
Carosseàcause de la pluyc
avec le Brigadier Wilkes
uunnccoouuppddeevveenntt qui survint*,
renversa le ponton. On ne
trouva leurs corps que queL
ques jours après.
Ce Prince eltoïc hfe
d'Henry Casimir Prince de
Nassau & Stathouder de
Frise mort le15 Mars
1686. &d'Amelie fille de
Jean Georges Prince d'Anhalt
Dessau.
Ilestoit néle 4. Aoust;
1687.&avoirépousé le 16.
Avril 1709. Marie Louise
fille de Charles Landgrave
deHesseCassel,&deMarie
Amélie fille Jacques Duc de
Curlande. Il a laisse une
Princesse née au mois de
Septembre1710. & sa
veuve enceinte.
Les Etats Généraux ont
fait un accommodement
provisionnel entre l'Electeur
de Brandebourg &les
héritiers de ce Prince,qui ne
doit prejudicier en aucune
manière aux droits des Parties
; il porte que S.A. E.
jouira par provisionde la
Maisonde la vieille Cour à
la Haye,de la Maison du
Bois,dc HonslardiCK, de
Diercn& de quelquesTerres
qui valent six mille
florins de rente à quoy on
en ajoutera vingt
- quatre
mille pour faire la somme
de cinquante mille Horins
par an ; sur lesquels on en
retiendra dix mille pour
l'entretien de ces Maisons,
8c cela outre les biens donc
il joiiic déja; que la Princes.
se veuve, en qualité de Mere
& de Tutrice de son enfant
ou enfans
3
jouira de la
Maifoii de Loo; de la fomme
de cinquante mille florins
par an ,
qui fera prise
sur les biensde la fucceisson,
&unesomme decinquante
mille florinsune fois payée;
& que six mois après laccouchcment
de cette Prin
cess elle envoyera des Plénipotentiaires
pour termu
ner les pretentions de parc
& d'autre.
1
Madame la Duchesse de
Berry estant accouchée
avant terme le u. Juillet
d'une Princesse qui mourut
en même tem ps , on porta
son corps à SaintDenisle
13.Il y fut accompagné par
Mr la DacheffedeBeauvil
lier & par Me la Marquise
de Chastillon,& il fut inhumé
par Mr l'Evêque de
Séez premier Aumônier de
Monfcigncur le Duc de
Berry.
Charles Claude
,
Sire
& Comte de Breauté, Marquis
du Hotot
,
&c.Maistre
de la Garderobbe de S. A. R,
Philippe petitfils deFrance
Duc d'Orléans, mourut le xi. Juilleten sa 46.année,
Anne Geneviève Charr
rier épousede Charles Cesar
Le scalopier Maistre des
Requestes, & Intendant du
Commerce & de la Generalité
de Châlons,mourus
le14. Juillet.; Annele Maistre,épousede
Marc Anne Goiflard Seigneur
de Montsabert, Baron
de Toureil
)
&c. Conseiller
au Parlement
s mou- *
rut le 26. Juillet. i
MichelFrançois de Bethune
Comte de Charost mourut
le z6. Juillet dans sa
sisiemeannée.Ilestoit fils
d'Armand de Bethune Duc
de Charost& de Catherine
de Lamet sa sécondé femme.
I.(¡
Jean Baptiste Jacques
Ollier Marquis de Veneuil,
Seigneur de Preau Maistre
de la. Garderobbe de feue
S. A. R. Monsieur Frere
unique du Roy, mourut le
17. Juilletâgéde50. ans. Il
estoit Gouverneur deDomfont.
Henry Charles Arnauld
Comte de Pomponne,
mourut le 2.7.Juillet âgé
de 14.ans 7. mois. Ilestoit
fils de Nicolas Simon Arnaud
Marquis de Pomponne
, Sire Baron de Ferrieres,
Chambrois
,
Auquiville
Marqnis de Paloifeau
,
&c.
BrigadierdesArmées du
Roy; Lieutenant General
& Commandant pour Sa
Majeste aux Provinces de
l'isle de France & Soissonnois
; &de Confiance de
Harville Paloiseau.
Le Pere Jean de la Roche
, Prestre de l'Oratoire
fameux Predicateur, mourut
le 18Juittec.: -
François d'Anglure de
Bourlaymont, Docteur en
Theologie de la Faculté de
Paris, qui avoit été nommé
à l'Evêché de Pamiers
en 1681. qui s'en éroit démis
en 1685. sans avoir esté
Sacré, & qui fut nommé à
lors Abbé de Saint Florent
de Saumur, mourut le i-f.
Juillet. Il étoit fils de Nicolas
Marquis de Bourlaymont,
Gouverneur de Sesnay.
Gaspart- Claude Noler,
Docteur en Thologic de la
Faculté de Paris & Chanoi
ne de Nostre Dame, mourut
le premier Aoust âgé de j3.ans.
Mrle Cardinal de Noailles,
a donné son Canonicat
à Mr l'Abbé Vivant, son
Grand Vicaire& Penitentier
del'EglisedeParis,ci devant
.Curé de S.Leusson meriteest
connu de tout le monde..
Alsonce de. Bonne de
Crequi Duc de Lesdiguiéres,
Paire de France,mourut
le 5. Aoust âgé de 85,
ans. Son Corps a esté ports
aux Carmelitesde S. Denis
en France, où a esté inhi*.
méeAnne du Roure sa
mere, qui mourut le 18,
Février. 1686. &qui étoit
veuve de Charles Sire de"
Grequi & de Canapies, , Mestrede Camp du Regi:
ment des Gardes;.mort de
la blessure qu'il reçueau
siege de Chamberylanuitdu14.
au IJ.May 1630.
& qui étoit second fils de
Charles Sire de Crequi Duc
de Lesdiguiéres Maréchal
de France. Celuy qui vient
de mourir avoitépousé à
l'âge de 75. ans le u Septembre
1702. Gabrielle
Victoire de Rochechoüart
fille de Louis Duc de Vivonne
Pair &Maréchal de France
,
& d'Antoinette de
Mesmes, dont il n'a point
cû d'enfans.
Marie Anne Picques
épouse , de Loüis Gabriel
Portail
j
Chevalier Seigneur
de Fresnceu ,&au paravant
veuve de François Pajoc
Seigneur de Cordon,rnourut
le 6. Aoust âgée de quarante
-
iix ans, sans laisser
de postencé de ses deux alliances.
Florcnt de Marparaulr,
Marquis du même lieu
,
mourut le 7. Août.
Nicolle Miron, veuve
de DanielJacquinot
, Seigneur des Pressoirs
,
mourut le 9. Aoustâgée de
85. ans.
Claude le Pelletier
Conseillcr d'Etat ordinaire
; President Honoraire
du Parlement, Minifstr
d'Etat, cy- devant Prevost
des Marchands
,
Contrôlleur
General des Finances,
& sur-Intendant des postes
mourut le 10. Aoust en sa
8 1. année. Il y avoit déjà
long
- temps qu'ils'étoit
retiré du Monde ; & qu'il
ne s'ocupoit qu'à des oeeuvres
de Pieté., & particulièrement
à soulager les Pauvres.
1 Monsieur de Canaples,
ancien Commandant de la
Ville de Lyon dont on vient
de parler, avoir pris le nom
-
de Lesdiguiéres) & c'est luy
qui étoit le dernier de cec-
Ite Maison. Il avoir douze
mille livres de pension de
la Ville de Lyon; comme
6
Commandant, dont il s'en
estoit reservé neuf mille
i
lors qu'il se démit de ce
Commandement en faveur
de M' de Rochebonne en
luy laissant les trois autres
mille livres. Depuislamort
de M' de Canaples la penfion
de neuf mille livres
E
qu'ils'értit reservée sur
li.
celle de douze que fait la
Ville au Commandant ; a
cfté donnée,à Monsieur le
Duc de Villeroy.
Depuis la mort de Monseigneur,
le Roy a acordé
à Madame la Dauphine, la
Nef, le Cadenas, le Bâton
de Maistre d'Hotel & la
Musique. Elle mangea pour
la premiere fois à son grand
Couvert comme Dauphine
le 8. Aoust, & elle fut servie
par Monsieur le Marquis de
Vilacerfson premier Maître
d'Hostel; & le 10. elle fut
servie aussi à son grand
Couvert par Mr de la Croix
son Maître d'Hostel. Il se
rendit à la bouche avec ses
Officiers, lava ses mains; le
Contrôlleur & le Gentilhomme
servant les lavetent
ensuite; l'Ecuyer ordinaire
de la Bouche luy presenta
une Assiettesurlaquelle il
y avoir des Mouillettes - do
pain; il en prit deux avec
lefquclles il toucha tous les
Mets les uns après les autres;
il en donna une à manger à
l'Ecuyer de la Bouche, ensuite
il prit son Baston des
mains de l'Hussier du Bu-f
reau qui l'y avoit apporté.
puis la marche commença
en cet ordre. Un Garde du
Corps du Roy ayant la
Carabine sur l'épaule; un
Huissier de Salle & un
Huissier du Bureau, Mr de
la Croix marchoit derriere
eux, ayant son Baston de
Maistre d'Hostel à la main.
Un Gentil
-
homme servant
& le Contrôlieur portant
chacun un Plat, l'Ecuyer de
la Bouche & les autres
Officiers de la Bouche en
portant aussî chacun un,
marchaient ensuite. Lors
qu'ilsfurent arrivez à la Salleoù
estoit le prest, Mr de la
Croix vit mettre tous les
Plats surlaTable, où un
Gentil-homme servant qui
étoit de Garde au prest, fit
un nouvel essai de chaque
Plat: & donna la Mouillette
dont il avoit fait l'éssai à
chacun de ceux qui avoient
porté les Plats, après quoy
Mr de la Croix les vit met--
tersurla Table par les Gentils-
hommes servants. ;
*i IIlallaen suite,ayant Tonv
Baston à la main,, avertir
Monseigneur le Dauphin;
<k Madame la Dauphine;
puis il revint à la Table ou
il attendit Monseigneur le
Dauphin. Dés qu'il parut
il mit son Chapeau & son
Baston entre les mains du
Chef de Gobelet, & presensa
à ce Prince une serviette
mouilléequiétoic
encre deux Assiettes d'or
pour se laver les mains; il
prit ensuite une autre serviette
mouilléeaussï cntre
deux Alliettes d'or qu'il
presenta de mesme à Madame
la Dauphine. Un
Gentilhomme servant presenta
une autre serviette
mouillée aussi entre deux
assiettes ,à Madame
,
qui
mangea pour la première
fois avec Madame la Dauphine
à son grand couvert
Alors Mr de la Croix
reprit son Bâton & son Chapeau
,&retourna à la bouche
precedé feulement d'un
Garde du Corps & des deux
Huissiers.L'essay du second
fcrvice ne se fit point à IfI
bouche; mais au prest où
citoit la Nef. Il se plaçaen- t
:-
suite au costédroit du Fauteuil
de Monseigneur le
Dauphinoùil restapendant
toutle repasayant toujours
son Bâton à la main; les
Genciihommes servants firentle
Service de même que
cchheezz le RRooyj.
-
Il y avoir à ce repas une
tres grande Assemblée de
Dames;il y en avoit treize
qui avoient le Tabouret
,
les autresestoient debour.
Monfcigneur le Dauphin&
Madame la Dauphine tinrent
ensuite un Cercle dé
Dames comme chez le Roy
aprèssonsoupé; Cérémonie
qui si fait pour les re'--
mercier.
Fermer
Résumé : NOUVELLES de divers endroits.
Le texte relate divers événements militaires et décès notables. Le navire français 'L'Aigle' a coulé une frégate hollandaise après un combat de plus de deux heures, mais son capitaine a été tué. Le 30 juillet, une escadre anglaise de 11 vaisseaux a été aperçue près de Bayonne. Un navire français a capturé un bateau hollandais chargé de vins près de Lisbonne. Plusieurs personnalités ont également péri, dont le duc d'Albe, ambassadeur d'Espagne en France, décédé à l'âge de 41 ans après une longue maladie. Sa veuve s'est retirée au couvent du Val-de-Grâce. Le marquis de Vieuxpont, lieutenant général des armées du roi, est mort à l'âge de 36 ans. Le chevalier de Chabert, chef d'escadre, est décédé à Toulon après avoir ramené une riche cargaison d'argent. Le marquis de Sourdeilles, lieutenant du roi en Limousin, est mort à l'âge de 44 ans. Parmi les autres décès notables, on compte le prince de Nassau, stathouder de Frise, noyé avec le brigadier Wilkes. La duchesse de Berry a accouché prématurément d'une princesse qui est décédée peu après. Le texte mentionne également des événements et des transferts de responsabilités au sein de la cour. Un commandant avait réservé neuf mille livres, laissant trois mille livres à M. de Rochebonne après sa démission. Suite au décès de M. de Canaples, la pension de neuf mille livres a été transmise au Duc de Villeroy. Après la mort de Monseigneur, le roi a accordé à Madame la Dauphine divers privilèges, dont la Nef, le Cadenas, le Bâton de Maître d'Hôtel et la Musique. Elle a participé pour la première fois à un grand couvert le 8 août, servie par le Marquis de Vilacerf, et le 10 août par M. de la Croix, son Maître d'Hôtel. Ce dernier a suivi un protocole précis, incluant la présentation des mets et l'utilisation de mouillettes. Lors du repas, une grande assemblée de dames était présente, avec treize d'entre elles ayant le privilège du tabouret. Après le souper, Monseigneur le Dauphin et Madame la Dauphine ont tenu un cercle de dames pour remercier les invités.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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20
p. 23-48
MORTS.
Début :
Loüis François de Boufflers, Pair & Maréchal de France [...]
Mots clefs :
Roi, Maréchal, Régiment, Maison de Boufflers, Gouverneur, Comte, Armée, Province, Luxembourg, Allemagne, France, Seigneur, Paris, Ville
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS.
MORTS.
Loüis François de Bouf-
Hers) Pair & Maréchal de
France, Chevalier Ordres
du Roy & de la Toison
d'Or, Capitaine des Gardes
du Corps,cydevant Colonel
du Regiment des Gardes
Françoises, Grand Bailly ôô
Gouverneur hereduaire de
la Ville de Beauvais & du
Beauvoisis
,
Gouverneur &
LieutenantGeneral des Provinces
de Flandres & de
Haynault, Gouverneur particulier
& Souverain Bailly
des Villes,Citadelle&Châ.
tellenie de Lille de General
desArmées du Roy,mourut
à Fontainebleau le 22. )âgé de Ci. ans sepe
-
mois. Son Corps a este
apporté à Saint Paul où il a
estéinhumé Il estoit né le
dix Janvier 1644. &il commença
à porter les Armes en
qualité de Cadet, dans le
Regiment
Regiment des Gardes o en
1662.. En 1663. &1664.,
il le trouva aux expéditions
de Marsal &deGigery. En
1 666. il fut fait Sous Lieutenant
dans le mêmeRégiment,
& il se distingua l'année
suivante au Sièges de
Tournay
,
de Douay
,
de
Lille ,&de pluficurs autres
Places. En 1668. il servit
d Aide Major au Regiment
des Gardes en 1669 il fut
fait Colonel du Regiment
Royal de Dragons, & l'annéesuivante
il Cervi[:'là: la
teste de ce Regiment à la
Conqueste de la Lorraine
fous Mr le Maréchal de
Crequy. A la mort de Mr
le Comte de Boufflers son
frere aine
,
il eut la Charge
- de Lieutenant General de la
Province de l'Isle de France,
& celle de grand Bailly de
Beauvais donc ce Comte é- toit pourvû. Il servit dans la
guerre de Hollande fous Mr
de Turenne & fous Mr le
Maréchal de Luxembourg
, s'y distingua en plusieurs
occasions, & entrautres au
Combat deWoerden où il
fut bleuet passa en AHeWr
gne sur la fin de l'année
1673. ilfutblessé en1674.
à la Batailled'Ensheim. En
1675.il fut fait Brigadier
de Dragons,&soutint les
efforts des Ennemis à la teste
de l'arriere Garde de l'Armée
lors qu'elle se retira
aprés la mort de Mr de
Turenne. En 1676.ilservit
en Allemagne fous Mr le
Maréchal de Luxembourg.
En 1677. il fut fait Maréchal
de Camp&servit fous
Mr le Maréchal deCrequy.
En 1678. il se trouva aux
Combats de Rhinsfeld ,dç
Seckaigen,6id
bourg, & suc pourvû la
même année de la Charge
de Colonel general de Dragons.
Ilalla l'annéesuivante
en Dauphiné avec un corps
d'armée, & en 1681. il prit
possession de Casal, & la
mêmeannéeilfut faitLieutenant
general. En J68z.
il marcha avec un corps
d'armée vers les Pyrenées
pour obliger la Ville de Fontarabie
defaireauRoy satisfaébon
que Sa Majesté luy
- demandoit.En1683. ilrejpafla
enFlandre ou il servit
sousMr le Miréchal d'Humieres.
En 1684. aprés la
reduction de Luxembourg
il campa surl' Escautavecun
corps de troupes jusques à
laconclusion de la Trêve.
En1685.il passaàBayonne,
& de là dans la Guyenne
pour y commander en
Chef En 1686. il eut le
Gouvernement de la Ville
& Province de Luxembourg - &du Comté de Chini. En
1687.il fut pourvû de celuy
de Lorraine &de la Province
de la Sarre & du Commandement
en Chef des
trois Evêchez & de Sedan,
En 1688. il Commanda
l'Armée d' Allemagne en Chef, prit Keiserloutre
Krutznac J'
,
Worms
,
Oppeinl-
ieini reduisit tout le
Palatinat à l'obeissance du
Roy,& fitentrer des Troupes
dans Mayence. Cette
même année Sa Majesté
l'honora du Collier de ses
Ordres. Il fit plusieurs autres
expeditions les deux
années suivantes
,
& Commanda
l'Armée de la Motets
le. En 1690. il eut lecommandement
en Chef du
Paysd'entre Sambre & la
Mer. Enr6sn.il fut blessé
au Siege de Mons, bombarda
la Ville de Liége ,& fut
fait Colonel des Gardes
Françoises. En 1691. il
investit la Ville de Namur
s'opposa t au Prince d'Orangequi
voulut secourircette
place, se distingua à la
BailledeSteinkerke
,
bombarda
Charleroy & reprit
Furnes que les Ennemis
avoient fortifié. Au commencement
du mois deMars
1693. le Roy l'honora du
Baston deMaréchal de France
,
& de l'Ordre de Saint
Loüis au mois d'Avril suivant.
Il servit cette même
annéeen Allemagne fous
Monseigneur le Dauphin,
& en Flandres l'année suivante
où il fut fait Gouverneur
& Lieutenant general
decette Province & du
Pays conquis. En 1695. il
deffendit la Ville de Namur
pendant plus de deux mois
assi'gée par le Prince d'Orange,
autte sir conduire
à Mastrick, ouil resta15.
jours. A son retour le Roy
érigea sa tetre de Cagny en
Duché fous le nom de Boufflers
en 1695.Il Commanda
l'Armée: du Roy enrre
Sambre& Meuse en 1696.
& en 1697.Le 4. Septembre
1701. il fit élever dans son
Chasteau de Boufflers en
Beauvoisis, la Statuëéquestre
du Roy, la même année
il eut ordre de se re-ndre à Bruxelles pour commander
dans tous les Pays Bas
Espagnols conjointement
avec Mr le Marquis de
Bedmar. En1702.il servit
fous Monseisneur le Duc
de Bourgogne. En 1703. il
commandal'Arméedu Roy
en Flandreconjointement
avec Mr le Maréchal de
Villeroy,& dessit les Hollandois
avec Mrle Marquis
de Bedmar
, au combat
d'Eckeren
; ce sur pour le
recompenser de cette action
que le Roy d'Espagne luy
envoya l'Ordre de la Toison
d'or. Cette même année
le Roy le fit Capitaine
des Gardes du Corps, & il
se démit de celle deColonel
des Gardes Françoises. En
1708. ildeffendit la Ville,
& la Citadelle de Lille d'une
maniere qui luy fit beaucoup
d'honneur, & ce qui
luy fit meriter la dignité de
Pair de France que le Roy
luy donna par Lettres Patentes
registrées le 1 9.
Mars1709. S. M.luy accordaaussi
les grandes entrées
de premier Gentilhomme
de la Chambre,& la survivance
du Gouvernement
de Flandre pour Mr le
Comte de Boufflerssonfils
aîné. La derniere a£tionou
feu Mr le Maréchal de
Boufflers s'est diliinguéa
esté la Bataille de Mdlplaquet
,
où il commandoic
l'aile droire ; il y renver sa
tour ce qui s'opposa à luy ;
mais Mr le Maréchal de
Villars qui commandoic
Jt:e gauch e ayant elle
blesse dangereusement
,
&
ayant en plusieurs de les Of.,
ficiers generaux tuez ,
Mr
le Maréchal de BoufH:rs,
soutintencore long temps
les efforts des ennemis
nonosbtant leur grande fuperiorité,
jusqu'à ce qu'il
jugeait à propos de faire sa
retraitequ'il fit en si bon
ordre que les ennemis n'ose
rent le suivre.
-
La Maison de Boufflers
est des plus anciennes de la
Province de Picardie. Elle
a pris son nom de la Terre
de Boufflers qui est dans le
Ponthieu, & qui a été possedéefans
interruption depuis
1200 ans jusqu'àcejour par
ceux de cette Maison.
JeanBaptisteleFévre de
la Barre, Commandeur, PLC.
vost & Mairre des Ceremonies
de l'Ordre Royal, Militaire
ez Hôpitalier de N0
tre-Damedu Mont Carmel
& deS. Lazare de Jerusslem,
mourut le 17. Aoust âgé de
71. ans. Antoine le Févre
,
Seigneur de la Barre Conseillerau
Parlement; son pere
avoit esté Prevost des Marchands.
Marie de Ligny, qui avoit
épouséle 1 3 Janvier 1677.
Antoine Egon, Prince de
Furstemberg mourut à Paris
le
1 8.Aoust âgé de 55.ans.
EllelaissaN.de Furstemberg
qui épousa le
1 3. Mars
1704. N.. Comte de Lannoy,
& Marie Loüise Maunce,
quiépousa le 10. Janvier
1708. Jean Baptiste
Colbert, Marquis de Seignelay.
Jean Guillemin, Seigneur
de Courchamp,Maistre
des Requestes, mourut le
18. Aoust. Il avoit épouse
Marthe-Clemence de Bailleul
fille & soeeur de Picfi"
dents au Par lement,
Jean Phelypeaux, Conseiller
d'Erat Ordinaire, cidevant
Intendant de Paris,
mourut le 19. Aoust âgé de
6S ans. Il étoit frere de Mr
le Chancclhcjr.
Le P. Charlesde RocllC"
blanche
,
Cordelier
,
Doctenr
de Soi bonne, L(d. ur
en Theologie& ancien Gardien
des Cordelters de Paris
y mourut le 17. Août en sa
6 7 année & en sa 5 o. de
Religion en reputation
d'une grane verru.
Anne
-
Elisabeth
-
David
de Vaux, épouze de François
Joseph de Sevré,Conseiller
au Parlement, mourut le 11.
Aoust âgée de 3 Y. ans.
Marie- Anne- Charlote de
Bourbon,Demoiselle d'Estouteville,
fille de feu Louis
Henry legitimé deBourbon,
Prince de Neufchastel ert
Suisse, & d'Angelique Cunegonde
de Montmorency-
Luxembourg
,
qui étoitnée
le
2. 6. Septembre 1 70 1.
mourut le 23.Aoust. Elle
laisse pour heritiere sa soeur
unique, épouse de Mr le
Duc de Luines.
JeanAubery
,
Marquis de
Vatan
y
Baron de Serricres
&c. Lieutenant de Roy au
Gouvernement d'Orleanois
& Blaisois, mourut le 28.
Aoust âgéde55.ans. Illaisse
des enfans de N. de Bailleut,
soeur de MC de Courchamp
dont on vient de parler.
Elisabeth Sophie Cheron,
de l'Academie Royale de
Peinture & Seul pture, & de
celle des Ricovrati de Padouë,
épouse de Mr le Gay,
Ingénieur ordin aire duRoy,
mourut le 4. Septembre.
Marie - Madelaine du
Moncel de Martinrast, veuve
de Georges de Scudery
,
Gouverneur de N. Dame de
la Garde, mourut le 6. Septembre
,
âgé de 90. ans. J.:rofme de Sainte Beuve,
Prieur de S Jean de Moncoriolo
, mourut aussi le 6.
Septembre. Il étoit frere de
feu Mr de S. Beuve, Docteur
de Sorbonne
,
& fort
connu de tous lesSçavans.
Marie du Clos, mourut
à Falaise
,
sur la fin du
mois d'Aoust dans sa centneuviéme
année.
Henry Colbert de Maulevrier
,Chevalier de Malthe,
Lieutenant General des
Armées du Roy,mourut à
Cambray le 15.Aoust âgé
de 34 ans. Il y avoir17 ans
qu'il servoit avec cette francjiç,
yalc fitnalurejle au1
sang des Colberts. Il fut
blessé dangereusement i en 7 1695. au siege de Namur,
où Mr le Marquis de Maulevrier
son frere aîné fut
tué. Le Roy luy donna son
Regiment, qui suc envoyé
en Italie en 170 1. où il son:
signalétantque la guerre y
a duré. Il passa ensuite en
Espagne où il servit fous
Monsieur le Ducd'Or leans;
il se distingua particulierement
au siege de Lcrida. Il
a exercé la Charged'Inspecteur
general d'Infanterie
pendant sixannéesavectougc
l'exactitude & la probité
que demande cet employé
Aussi Mr le Chevalier de
Maulevrier possedoit il toutes
les qualitez du plus excellent
Officier general & celles
du plus parfait honnestehomme
Ilest generalement
regretté des gens de guetre
& de tous ceux qui le connoissoient.
Il estoit fils de
feu Mr le Comte de Maulevrier
,
Lieutenant general o des Armées du Roy ,Chelier
de se, Ordres, Gouverneur
de Tournay
)
frere de
feu MrColbert.
Guillaume de Bautru ,, Comte de Serrant, ci- devant
Chancelier de feuëSon
A. R. Monsieur, Frere unique
du Roy,estmort à Serrant
en Anjou, âgé de 9y.
ans. Il estoit filsdeGuillaume
Bautru, Introducteur
des Ambassadeurs, Envoyé
du Royen diverses Cours,
& de l'Academie Françoise.
Mylord Jean Caryll, Baron
de Dunford en Angleterre,
Ministre & Secretaire
d'Etat du Roy de la grande
Bretagne
,
&Secretaire des
Commandemens de la Reine,
est mort à S. Germain
en Laye âgé de 94. ans. Il
s'estoit. toujoursdistingué
par sa pieté, par sa capacité,
par son attachement à fOQ
legitime Souverain, & par
sa charité envers les Pauvres.
Anne GeneviéveMartineau
épouse de François-
Fcrrand
,
Seigneur de Villemilan
,Maistre des Requêtes
&. Intendant en Bretagne,
mourut le 15. Septembre
âgée de 4 5. ans,laissant
unefille unique.
Marie-Reinede Monc.
chal, veuve de Charles- Honoré
Barentin, Seigneur
d'Hardivillers,&c.Maistre
des Requestes
, mourut le
16. Septembre âgée de 27
ans, laissant posterité.
Loüis François de Bouf-
Hers) Pair & Maréchal de
France, Chevalier Ordres
du Roy & de la Toison
d'Or, Capitaine des Gardes
du Corps,cydevant Colonel
du Regiment des Gardes
Françoises, Grand Bailly ôô
Gouverneur hereduaire de
la Ville de Beauvais & du
Beauvoisis
,
Gouverneur &
LieutenantGeneral des Provinces
de Flandres & de
Haynault, Gouverneur particulier
& Souverain Bailly
des Villes,Citadelle&Châ.
tellenie de Lille de General
desArmées du Roy,mourut
à Fontainebleau le 22. )âgé de Ci. ans sepe
-
mois. Son Corps a este
apporté à Saint Paul où il a
estéinhumé Il estoit né le
dix Janvier 1644. &il commença
à porter les Armes en
qualité de Cadet, dans le
Regiment
Regiment des Gardes o en
1662.. En 1663. &1664.,
il le trouva aux expéditions
de Marsal &deGigery. En
1 666. il fut fait Sous Lieutenant
dans le mêmeRégiment,
& il se distingua l'année
suivante au Sièges de
Tournay
,
de Douay
,
de
Lille ,&de pluficurs autres
Places. En 1668. il servit
d Aide Major au Regiment
des Gardes en 1669 il fut
fait Colonel du Regiment
Royal de Dragons, & l'annéesuivante
il Cervi[:'là: la
teste de ce Regiment à la
Conqueste de la Lorraine
fous Mr le Maréchal de
Crequy. A la mort de Mr
le Comte de Boufflers son
frere aine
,
il eut la Charge
- de Lieutenant General de la
Province de l'Isle de France,
& celle de grand Bailly de
Beauvais donc ce Comte é- toit pourvû. Il servit dans la
guerre de Hollande fous Mr
de Turenne & fous Mr le
Maréchal de Luxembourg
, s'y distingua en plusieurs
occasions, & entrautres au
Combat deWoerden où il
fut bleuet passa en AHeWr
gne sur la fin de l'année
1673. ilfutblessé en1674.
à la Batailled'Ensheim. En
1675.il fut fait Brigadier
de Dragons,&soutint les
efforts des Ennemis à la teste
de l'arriere Garde de l'Armée
lors qu'elle se retira
aprés la mort de Mr de
Turenne. En 1676.ilservit
en Allemagne fous Mr le
Maréchal de Luxembourg.
En 1677. il fut fait Maréchal
de Camp&servit fous
Mr le Maréchal deCrequy.
En 1678. il se trouva aux
Combats de Rhinsfeld ,dç
Seckaigen,6id
bourg, & suc pourvû la
même année de la Charge
de Colonel general de Dragons.
Ilalla l'annéesuivante
en Dauphiné avec un corps
d'armée, & en 1681. il prit
possession de Casal, & la
mêmeannéeilfut faitLieutenant
general. En J68z.
il marcha avec un corps
d'armée vers les Pyrenées
pour obliger la Ville de Fontarabie
defaireauRoy satisfaébon
que Sa Majesté luy
- demandoit.En1683. ilrejpafla
enFlandre ou il servit
sousMr le Miréchal d'Humieres.
En 1684. aprés la
reduction de Luxembourg
il campa surl' Escautavecun
corps de troupes jusques à
laconclusion de la Trêve.
En1685.il passaàBayonne,
& de là dans la Guyenne
pour y commander en
Chef En 1686. il eut le
Gouvernement de la Ville
& Province de Luxembourg - &du Comté de Chini. En
1687.il fut pourvû de celuy
de Lorraine &de la Province
de la Sarre & du Commandement
en Chef des
trois Evêchez & de Sedan,
En 1688. il Commanda
l'Armée d' Allemagne en Chef, prit Keiserloutre
Krutznac J'
,
Worms
,
Oppeinl-
ieini reduisit tout le
Palatinat à l'obeissance du
Roy,& fitentrer des Troupes
dans Mayence. Cette
même année Sa Majesté
l'honora du Collier de ses
Ordres. Il fit plusieurs autres
expeditions les deux
années suivantes
,
& Commanda
l'Armée de la Motets
le. En 1690. il eut lecommandement
en Chef du
Paysd'entre Sambre & la
Mer. Enr6sn.il fut blessé
au Siege de Mons, bombarda
la Ville de Liége ,& fut
fait Colonel des Gardes
Françoises. En 1691. il
investit la Ville de Namur
s'opposa t au Prince d'Orangequi
voulut secourircette
place, se distingua à la
BailledeSteinkerke
,
bombarda
Charleroy & reprit
Furnes que les Ennemis
avoient fortifié. Au commencement
du mois deMars
1693. le Roy l'honora du
Baston deMaréchal de France
,
& de l'Ordre de Saint
Loüis au mois d'Avril suivant.
Il servit cette même
annéeen Allemagne fous
Monseigneur le Dauphin,
& en Flandres l'année suivante
où il fut fait Gouverneur
& Lieutenant general
decette Province & du
Pays conquis. En 1695. il
deffendit la Ville de Namur
pendant plus de deux mois
assi'gée par le Prince d'Orange,
autte sir conduire
à Mastrick, ouil resta15.
jours. A son retour le Roy
érigea sa tetre de Cagny en
Duché fous le nom de Boufflers
en 1695.Il Commanda
l'Armée: du Roy enrre
Sambre& Meuse en 1696.
& en 1697.Le 4. Septembre
1701. il fit élever dans son
Chasteau de Boufflers en
Beauvoisis, la Statuëéquestre
du Roy, la même année
il eut ordre de se re-ndre à Bruxelles pour commander
dans tous les Pays Bas
Espagnols conjointement
avec Mr le Marquis de
Bedmar. En1702.il servit
fous Monseisneur le Duc
de Bourgogne. En 1703. il
commandal'Arméedu Roy
en Flandreconjointement
avec Mr le Maréchal de
Villeroy,& dessit les Hollandois
avec Mrle Marquis
de Bedmar
, au combat
d'Eckeren
; ce sur pour le
recompenser de cette action
que le Roy d'Espagne luy
envoya l'Ordre de la Toison
d'or. Cette même année
le Roy le fit Capitaine
des Gardes du Corps, & il
se démit de celle deColonel
des Gardes Françoises. En
1708. ildeffendit la Ville,
& la Citadelle de Lille d'une
maniere qui luy fit beaucoup
d'honneur, & ce qui
luy fit meriter la dignité de
Pair de France que le Roy
luy donna par Lettres Patentes
registrées le 1 9.
Mars1709. S. M.luy accordaaussi
les grandes entrées
de premier Gentilhomme
de la Chambre,& la survivance
du Gouvernement
de Flandre pour Mr le
Comte de Boufflerssonfils
aîné. La derniere a£tionou
feu Mr le Maréchal de
Boufflers s'est diliinguéa
esté la Bataille de Mdlplaquet
,
où il commandoic
l'aile droire ; il y renver sa
tour ce qui s'opposa à luy ;
mais Mr le Maréchal de
Villars qui commandoic
Jt:e gauch e ayant elle
blesse dangereusement
,
&
ayant en plusieurs de les Of.,
ficiers generaux tuez ,
Mr
le Maréchal de BoufH:rs,
soutintencore long temps
les efforts des ennemis
nonosbtant leur grande fuperiorité,
jusqu'à ce qu'il
jugeait à propos de faire sa
retraitequ'il fit en si bon
ordre que les ennemis n'ose
rent le suivre.
-
La Maison de Boufflers
est des plus anciennes de la
Province de Picardie. Elle
a pris son nom de la Terre
de Boufflers qui est dans le
Ponthieu, & qui a été possedéefans
interruption depuis
1200 ans jusqu'àcejour par
ceux de cette Maison.
JeanBaptisteleFévre de
la Barre, Commandeur, PLC.
vost & Mairre des Ceremonies
de l'Ordre Royal, Militaire
ez Hôpitalier de N0
tre-Damedu Mont Carmel
& deS. Lazare de Jerusslem,
mourut le 17. Aoust âgé de
71. ans. Antoine le Févre
,
Seigneur de la Barre Conseillerau
Parlement; son pere
avoit esté Prevost des Marchands.
Marie de Ligny, qui avoit
épouséle 1 3 Janvier 1677.
Antoine Egon, Prince de
Furstemberg mourut à Paris
le
1 8.Aoust âgé de 55.ans.
EllelaissaN.de Furstemberg
qui épousa le
1 3. Mars
1704. N.. Comte de Lannoy,
& Marie Loüise Maunce,
quiépousa le 10. Janvier
1708. Jean Baptiste
Colbert, Marquis de Seignelay.
Jean Guillemin, Seigneur
de Courchamp,Maistre
des Requestes, mourut le
18. Aoust. Il avoit épouse
Marthe-Clemence de Bailleul
fille & soeeur de Picfi"
dents au Par lement,
Jean Phelypeaux, Conseiller
d'Erat Ordinaire, cidevant
Intendant de Paris,
mourut le 19. Aoust âgé de
6S ans. Il étoit frere de Mr
le Chancclhcjr.
Le P. Charlesde RocllC"
blanche
,
Cordelier
,
Doctenr
de Soi bonne, L(d. ur
en Theologie& ancien Gardien
des Cordelters de Paris
y mourut le 17. Août en sa
6 7 année & en sa 5 o. de
Religion en reputation
d'une grane verru.
Anne
-
Elisabeth
-
David
de Vaux, épouze de François
Joseph de Sevré,Conseiller
au Parlement, mourut le 11.
Aoust âgée de 3 Y. ans.
Marie- Anne- Charlote de
Bourbon,Demoiselle d'Estouteville,
fille de feu Louis
Henry legitimé deBourbon,
Prince de Neufchastel ert
Suisse, & d'Angelique Cunegonde
de Montmorency-
Luxembourg
,
qui étoitnée
le
2. 6. Septembre 1 70 1.
mourut le 23.Aoust. Elle
laisse pour heritiere sa soeur
unique, épouse de Mr le
Duc de Luines.
JeanAubery
,
Marquis de
Vatan
y
Baron de Serricres
&c. Lieutenant de Roy au
Gouvernement d'Orleanois
& Blaisois, mourut le 28.
Aoust âgéde55.ans. Illaisse
des enfans de N. de Bailleut,
soeur de MC de Courchamp
dont on vient de parler.
Elisabeth Sophie Cheron,
de l'Academie Royale de
Peinture & Seul pture, & de
celle des Ricovrati de Padouë,
épouse de Mr le Gay,
Ingénieur ordin aire duRoy,
mourut le 4. Septembre.
Marie - Madelaine du
Moncel de Martinrast, veuve
de Georges de Scudery
,
Gouverneur de N. Dame de
la Garde, mourut le 6. Septembre
,
âgé de 90. ans. J.:rofme de Sainte Beuve,
Prieur de S Jean de Moncoriolo
, mourut aussi le 6.
Septembre. Il étoit frere de
feu Mr de S. Beuve, Docteur
de Sorbonne
,
& fort
connu de tous lesSçavans.
Marie du Clos, mourut
à Falaise
,
sur la fin du
mois d'Aoust dans sa centneuviéme
année.
Henry Colbert de Maulevrier
,Chevalier de Malthe,
Lieutenant General des
Armées du Roy,mourut à
Cambray le 15.Aoust âgé
de 34 ans. Il y avoir17 ans
qu'il servoit avec cette francjiç,
yalc fitnalurejle au1
sang des Colberts. Il fut
blessé dangereusement i en 7 1695. au siege de Namur,
où Mr le Marquis de Maulevrier
son frere aîné fut
tué. Le Roy luy donna son
Regiment, qui suc envoyé
en Italie en 170 1. où il son:
signalétantque la guerre y
a duré. Il passa ensuite en
Espagne où il servit fous
Monsieur le Ducd'Or leans;
il se distingua particulierement
au siege de Lcrida. Il
a exercé la Charged'Inspecteur
general d'Infanterie
pendant sixannéesavectougc
l'exactitude & la probité
que demande cet employé
Aussi Mr le Chevalier de
Maulevrier possedoit il toutes
les qualitez du plus excellent
Officier general & celles
du plus parfait honnestehomme
Ilest generalement
regretté des gens de guetre
& de tous ceux qui le connoissoient.
Il estoit fils de
feu Mr le Comte de Maulevrier
,
Lieutenant general o des Armées du Roy ,Chelier
de se, Ordres, Gouverneur
de Tournay
)
frere de
feu MrColbert.
Guillaume de Bautru ,, Comte de Serrant, ci- devant
Chancelier de feuëSon
A. R. Monsieur, Frere unique
du Roy,estmort à Serrant
en Anjou, âgé de 9y.
ans. Il estoit filsdeGuillaume
Bautru, Introducteur
des Ambassadeurs, Envoyé
du Royen diverses Cours,
& de l'Academie Françoise.
Mylord Jean Caryll, Baron
de Dunford en Angleterre,
Ministre & Secretaire
d'Etat du Roy de la grande
Bretagne
,
&Secretaire des
Commandemens de la Reine,
est mort à S. Germain
en Laye âgé de 94. ans. Il
s'estoit. toujoursdistingué
par sa pieté, par sa capacité,
par son attachement à fOQ
legitime Souverain, & par
sa charité envers les Pauvres.
Anne GeneviéveMartineau
épouse de François-
Fcrrand
,
Seigneur de Villemilan
,Maistre des Requêtes
&. Intendant en Bretagne,
mourut le 15. Septembre
âgée de 4 5. ans,laissant
unefille unique.
Marie-Reinede Monc.
chal, veuve de Charles- Honoré
Barentin, Seigneur
d'Hardivillers,&c.Maistre
des Requestes
, mourut le
16. Septembre âgée de 27
ans, laissant posterité.
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Résumé : MORTS.
Louis François de Boufflers, Pair et Maréchal de France, naquit le 10 janvier 1644. Il débuta sa carrière militaire en 1662 au sein du Régiment des Gardes Françaises et se distingua lors des sièges de Tournay, Douay et Lille en 1667. En 1668, il fut nommé Aide-Major et, en 1669, Colonel du Régiment Royal de Dragons. Il servit sous divers maréchaux, tels que Turenne et Luxembourg, et fut blessé à plusieurs reprises, notamment à la bataille d'Ensheim en 1674. Sa carrière ascensionnelle se poursuivit avec les promotions de Brigadier de Dragons en 1675, Maréchal de Camp en 1677 et Lieutenant Général en 1681. Il participa à de nombreuses campagnes en Allemagne, Flandre et Dauphiné. En 1690, il reçut le commandement en chef du Pays d'entre Sambre et Meuse et fut promu Maréchal de France en 1693. Il continua de servir dans diverses provinces et fut récompensé par le roi d'Espagne avec l'Ordre de la Toison d'Or en 1703. En 1708, il défendit Lille avec honneur et reçut la dignité de Pair de France en 1709. Sa dernière action notable fut la bataille de Malplaquet en 1709, où il commanda l'aile droite. La Maison de Boufflers est l'une des plus anciennes de Picardie, possédant la Terre de Boufflers depuis 1200 ans. Le texte mentionne également le décès de plusieurs autres personnalités, dont Jean-Baptiste Le Fèvre de la Barre, Antoine Le Fèvre, Antoine Egon, Prince de Furstemberg, et plusieurs autres nobles et ecclésiastiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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21
p. 66-70
« D'autres Lettres portent que les Ennemis font élever un [...] »
Début :
D'autres Lettres portent que les Ennemis font élever un [...]
Mots clefs :
Major, Comte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « D'autres Lettres portent que les Ennemis font élever un [...] »
D'autres Letrres portent
que les Ennemis font élever
un Fort dans le Marais de
Bouchain, à la pointe qui
cft entre l'Escaut & le Senset,
afin d'établir une communication
seure entre ces
deux Places, & pour en
rendre l'invertissement plus
difficile ; que leur Armée
fcroitdéja retirée à cause de
la disette des fourages &
des incommoditez que les
Troupes souffrent, s'il n'etoit
absolument necessaire
de repater les brèches de
Bouchainavant qu'elles se
separent; que les Provinces
de Brabant, de Flandre, &
de Haynaut avoient cfte
taxées pour fournir du foin
de la paille, & de l'avoine,
&mesme laChastellenie de
Lille, quoy que ses fourages
ayent esté consommez pendant
la Campagne; qu'on
écoit convenu de part &
d'autre de fournir des grains
aux Paysans pour ensemencer
leurs terres, de leur
rendre leurs Bestiaux, & de
deffendre aux soldats fous
peine de la vie de les leur
enlever: Que le Partisandu
Moulin, étant forti de Namur,
avec deuxmille hommes,
avoit traversé tout le
Brabant, & s'etoit avancé
jusqu'au prés de Heusden,
où il avoit surpris & pillé
le Chasteau de Mouwen.
& plusieurs autres lieux, de
la Province d Holande,
d'ou il s'eroit ensuite retiré
sans aucune perte, avec un:
grand nombre d'Otages;
& que Mr le Maréchal de
Villarsavoit accordé congé
sur leur parole au Comte
dErbach
, &- au Major de
Wasnaer
, que Mr leComte
deCoignies avoit fait prisonniers
dans unfourageprés
de Landrecies, de-mcunc
qu'au General Major Bor k,
& au Comte de Denhof,
prisà l'attaque de Hordain.
que les Ennemis font élever
un Fort dans le Marais de
Bouchain, à la pointe qui
cft entre l'Escaut & le Senset,
afin d'établir une communication
seure entre ces
deux Places, & pour en
rendre l'invertissement plus
difficile ; que leur Armée
fcroitdéja retirée à cause de
la disette des fourages &
des incommoditez que les
Troupes souffrent, s'il n'etoit
absolument necessaire
de repater les brèches de
Bouchainavant qu'elles se
separent; que les Provinces
de Brabant, de Flandre, &
de Haynaut avoient cfte
taxées pour fournir du foin
de la paille, & de l'avoine,
&mesme laChastellenie de
Lille, quoy que ses fourages
ayent esté consommez pendant
la Campagne; qu'on
écoit convenu de part &
d'autre de fournir des grains
aux Paysans pour ensemencer
leurs terres, de leur
rendre leurs Bestiaux, & de
deffendre aux soldats fous
peine de la vie de les leur
enlever: Que le Partisandu
Moulin, étant forti de Namur,
avec deuxmille hommes,
avoit traversé tout le
Brabant, & s'etoit avancé
jusqu'au prés de Heusden,
où il avoit surpris & pillé
le Chasteau de Mouwen.
& plusieurs autres lieux, de
la Province d Holande,
d'ou il s'eroit ensuite retiré
sans aucune perte, avec un:
grand nombre d'Otages;
& que Mr le Maréchal de
Villarsavoit accordé congé
sur leur parole au Comte
dErbach
, &- au Major de
Wasnaer
, que Mr leComte
deCoignies avoit fait prisonniers
dans unfourageprés
de Landrecies, de-mcunc
qu'au General Major Bor k,
& au Comte de Denhof,
prisà l'attaque de Hordain.
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Résumé : « D'autres Lettres portent que les Ennemis font élever un [...] »
Le texte décrit plusieurs événements militaires et logistiques. Les ennemis ont construit un fort dans le marais de Bouchain, entre l'Escaut et le Senset, pour sécuriser la communication entre deux places et compliquer une éventuelle attaque. Leur armée, initialement en retrait en raison de la pénurie de fourrage et des conditions difficiles, doit rester pour réparer les brèches de Bouchain. Les provinces de Brabant, de Flandre et de Hainaut, ainsi que la châtellenie de Lille, sont taxées pour fournir du foin, de la paille et de l'avoine, malgré la consommation précédente. Un accord est conclu pour fournir des grains aux paysans, leur rendre leurs bêtes et interdire aux soldats de les enlever sous peine de mort. Par ailleurs, un parti de Namur, fort de deux mille hommes, a traversé le Brabant, pillé le château de Mouwen et d'autres lieux en Hollande, avant de se retirer avec de nombreux otages. Le maréchal de Villars a libéré sur parole le comte d'Erbach et le major de Wasnaer, capturés par le comte de Coignies lors d'un fourrage près de Landrecies. De même, le général major Borck et le comte de Denhof, pris lors de l'attaque de Hordain, ont été libérés.
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22
p. 49-97
Discours nouveau sur l'origine, la Genealogie, & la Maison de Montmorency.
Début :
Tout le monde est persuadé de l'antiquité de l'illustre [...]
Mots clefs :
Généalogie, Maison de Montmorency, Noces, Origine, Alliances, France, Angleterre, Duc, Comte, Roi, Femme, Duchesse, Empereur, Branches, Armes, Mémoire, Paris, Royaume, Europe, Occident, Église, Guerre, Honneur, Seigneurs de Montmorency
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Discours nouveau sur l'origine, la Genealogie, & la Maison de Montmorency.
Discours nouveausur ïoriginey
1-t Genealogie, &la mal4
son de Montmorency. -% Tout le monde est persuadédel'antiquité
de l'illustre
Maison de Montmorency,&
personne ne
doute qu'elle ne soit une
des plus anciennes du
Royaume , la qualité de
premiersBarons Chrétiens
en France, avec lecry de
Guerre (Dieu aide au premier
Chrestien ) en marque la
grande antiquité. Mais la
révolution des siecles passez
a fait perdre les vieux
Titres
,
la negligence des
Historiens en dérobent
la memoire, & il est mal
aisé de sçavoir la verité de
son origine.
Celuy auquel nous avons
obligation de la connoissance
de cette Maison est
le fameux André Duchesne
qui par ses soins nous a
laisse dans un gros volume
toute sa posterité depuis
Bouchard I. qui vivoit en jj -' 954. maisil ne s'est pas embarrassé
de rapporter ceux
qui l'ont precedé
,
n'en
:t
ayant point trouvé de
preuves certaines; il rapporte
feulement ce que
d'anciens Autheurs ont dit
des premiers Seigneursde
Montmorency.
Ildit qu'il se trouve dans lapartiedes Gaules qu'on
appelle France deux insignes
commencemens de
conversion ; la premiere
par saint Denis premier
Evesque de Paris, qui a1 procuré la conversion des Gauloisla seconde saint par Remy, Archevesque
de Paris, qui convertit les
François; ces deux conversions
sont cause de deux
opinions touchant l'Autheur
d'une si nobleextraétion.
La premiere
, que LisbiusChevalierdune
tresgrande
Noblesse & d'autorité
parmy les Parisiens
estoit Seigneur de Mont-,
morency proche de cette
Ville, & fut le premier des
Gaulois qui embrassa la
Religion Chrestienne à la
prédication de saint Denis
vers l'an centième de nostre
Redemption, supposé
que ce fut saint Denis
l'Areopagite qui avoir esté
converty par saint Paul
Apostre : mais si l'on fuie
le sentiment de Gregoire
de Tours qui rapporte l'arrivée
de saint Denis dans
les Gaules sousle Coniulac
de Decius & de Gratus, la
conversion de Lisbius ne
pourroit estre que vers l'an
tJ3*
La seconde opinion qui
est de Robert Cenal, Evesque
d'Avranches, au premier
Livre de ses Remarques
Gau loises, & de Claude
Fauchée, au second Livre
de ses AntiquitézFrançoisesdisent
i que ce luy
qui a donné origine à la
Maison de Montmorency
nefutpas lefameux Gaulois
Lisbius,maisun Grand
Baron François nomme
Lisoie (lequel quand Clovis
premier Roy Chrestien
de France, fut baptisé par
saint Remy à Rheims en
499. ) fut le premier des
Seigneurs de sa suite
,
qui
se jetta dans la Cuve des
Fonds après luy
, en memoire
dequoy ses descendansmasles
ontestéhonorez
du titre de premiers
Barons Chrestiens deFrance
,
& ont tousjours eu depuis
pour cry de Guerre ,
Dieu aide au premier Chressien.
Quoy qu'il en soit, on
ne peut douter que les
deux qualitez qui ont tousjours
esté dans cetts illustre
Maison
,
de premier
Chrestien
, & de premier
Baron Chrestien en France,
n'ayent une origine
tres ancienne, &tr.--s illustre,
qui marque que les
anciens Seigneurs de
Montmorency eftoienc
des plus puissants du Royaume
: mais comme la
succession depuis Lisbius,
ou de Lisoie,n'apû se conserver
jusques à nous ,
il
faut s'en tenir à ce que
nous avons de plus asseuré,
& suivre ce qu'en a efcric
Duchesne auquel je renvoye
le Lecteur, qui commence
l'histoire de cette
Maison à Bouchard premier
, comme j'ay dit cydevant,
& quinous a donné
la suite desa posterité,
qui est rapportée dans la
Carte Chronologique de
cette Maison
, par MonsieurChevillard
qui donne
à ce Bouchard premier
un pere , un ayeul,
& un bisayeul
, que Duchesne
ne rapporte pas
mais les ayant trouvez
dans un autheur
)
il les a
rapportez pour faire connoistre
les alliances illustres
qu'ils avoient contractées,
puisque Jean Seigneur
de Montmorency pere de
Bouchard premier, qui vivoit
en 940. avoit épousé
Jeanne fille de Berenger
Comte de Beauvais, fils
d'AdolpheComte de Vermandois
, Everard Sei- j
gneur de Montmorency,
qui vivoit en 892. pere de
Jean & ayeul de Bouchard
premier, épousa Brunelle
fille deGaultier Comte de
Namur, & Leuto ou Leutard
Seigneur de Montmorency
qui vivoit en 845.
avoir épousé Everarde fille
d'un Comte de Ponchieu,
ce Leuto estoit pere d'Everard
& bisayeul de Bouchard
premier, c'est à luyqu'il
commence cet arbre
genealogique, afin defaire
connoistre les trois divers
changements qu'il y
a eus dans les Armes de la
Maison de Montmorency.
Ceux de cette Maison
avoient pris d'abord pour
leurs Armes, comme premiers
Chrestiens, d'or à la
croix de gueules;Bouchard
premier la cantonna de
quatre aiglettes ou allerions
d'azur, pour conservet
la memoire de quatre
Enseignes Impériales prises
à la victoire qu'il remporta
sur l'armée de tEmpereur
Othon II. Matthieu
II. dit le Grand, augmenta
les quatre allerions
de douze autres, en mémoire
de douze autres Enfeignes
Imperiales qui furent
prises à la bataille de
Bouvines sur l'Empereur
OthonIV. en1214 Ainsi
depuis ce temps- là les Seigneurs
de Montmorency
ont tousjours porté d'or à
la croix de gueules, cantonnée
de seize allerions
d'azur; & comme cette
Maison a formé quantité
de branches, ils ont brifé
leurs Armes differemment,
comme on le voit dans la
Carte genealogique, mais
à present comme labranche
aisnéeest éteinteenla
personne de Philippe de
Moutmorency Seigneur
de Nivelle, ôc Comte de
Horne décapité en 1^8.
auquel la branche de Fosfeux
a succedéàl'aisnesse,
toutes les autres branches
des Seigneurs de certe
Maison ont quitté leurs
brisures, & ont retenu les
Armes pleinesqu'ils portent
presentement.
La Maison de Montmorency
s'est separée en
quantité de branches, il y
en a eu plusieurs anciennes
qui font éteintes, mais
elle a conservé son nom
jusqu'à aujourd'huy, par la
succession de la branche
aisnée,dans plusieurs branches
qui subsistent,& quoy
qu'il paroisse de grandes
branches sorties de Mathieu
II. dit le Grand, Seigneur
de Montmorency
il n'y , a eu que la posterité
de son filsaisné Bouc hard
VI. qui ait retenule nom
de Montmorency, parce
que ion fils cadet Guyde
Montmorency fut Seigneur
de Laval, qui comme
heritier desa mereEme
de Laval, sortie d'une tres
noble & tres illustre Maison,
en atransmis le nom
à ses Descendans qui le retiennent
encore aujourd'huy,
ayant retenu les Armes
de Montmorency
,
la
Croix chargée de cinq coquilles
d'argent pour brisure,
comme cadets de sa
Maison.
Quant aux honneurs de
cette Maison, on ne peut
disconvenir qu'elle est des
plus illustrées
, tant dans
les alliances qu'ils ont contractées,
que dans les charges
qu'ils ont possedées,
les honneursqu'ils onteus
par leurs alliances, les font
toucher de près à tout ce
qu'il y a eu de Testes couronnées
dans l'Europe, &
pour le faire connoistre il
faut distinguer ses alliances
en trois manieres. Premierement
,
dans son ancienneté
: Secondement,
depuis
depuis la separation de ses
deux Branches, les Alliances
que celle de la Branche
de Montmorency a contractées
:
Troisiémement,
celle que la Branche de Laval
aeuës. Premierement, les Alliances
qu'ils ont eues anciennement
sont trcs considerables
puisque la premiere
qui estrapportée par
Duchesneestl'épouse qu'il
donne à Bouchard I.Elle
se nommoit Hildegarde,
& estoit fille de Thibaud I.
Comte de Chartres & de
de Bipis,ôc de Ledegarde
de Vermandois. Elle avoit
pour frere Eudes I. Comte
de Chartres & de Blois,
pere de Eudes II. Comte
de Champagne, duquel
sont forcis tous les Comtes
de Champagne; & pour
soeur Emme,femme de
GuillaumeIII. Duc de
Guyenne
, mere de Guillaume
IV. Ducde Guyenne
,
élu Roy d'Italie
, &
Empereur des Romains
duquel sont desçendus les,
Ducs deGuyenne,&Agnés
femme de l'Empereur
Henry III.
-
Hildegarde avoit pour
alliances du costé de sa
mere Ledgarde de Vermandois,
qui estoit fille de
Herbert II. Comte de Vermandois,&
d'une soeur de
Hugues le Grand, Duc de
France
,
& Comte de Paris
, pere du Roy Hugues
Capet; & aussi soeur d'Emme
,
Reine de France,
femme de Raoul, Duc de
Bourgogne, & Roy de
France, si bien qu'elle estoit
cousine du second au
troisiéme degré du Roy
Hugues Capec
,
chef de la
n'oineme Race des Rois
de France qui subsiste aujourd'huy.
Mathieu I. Seigneur de
Montmorency, Connestable
de France, épousa Aline
,
fille de Henry I. Roy
d'Angleterre, &en fecondes
nôces il épousa Alix de
Savoye
, veuve du Roy
Loüis VI. dit le Gros, mere
duRoy Loüis le Jeune, si
bien qu'il avoit l'honneur
d'estre beaupere du Roy
pour lors regnant.
BouchardV.s'alliaavec
Laurence, fille de Baudoüin,
Comte deHainaut,
descendu par les Comtes
de Flandres, de l'Empereur
Charlemagne; elle
estoit tante de BaudoüinV.
Comte de Flandres
, &
Empereur de Constantinople
,
d'Isabeau de Hainaut
,
Epouse du Roy de
France Philippe-Auguste,
& d'Ioland de Hainaut
Impératrice de Constanti-,
nople, femme de Pierre
de Courtenay, auquel elle
porta la Couronne
@
Imperiale.
Matthieu II. avoit épouse
en premières noces Gertrude
de Néelle
,
fille de Thomas Chastelain de ,
Bruges en Flandres
, &
d'une soeur d'Yves, Comte
de Soissons
,
Seigneur de
Néelle.C'estde cetteDame
quetoute la Maison de
Montmorency d'aujourd'huy
descend, parce que
Matthieu II épousa en secondes
noces Emme de
Laval qui luy donna pour
fils Guy de Montmorency,
Seigneur de Laval, comme
jelediray cy-aprés ; cette
Dame estoit soeur aisnée
d'Isabeau de Laval, femme
de Bouchard VI.Seigneur
de Montmorency, fils aisné
du premier lit de Mathieu
IL ainsi l'on peut dire
que dans la separation des
deux branches de Montmorency,
& de Laval, ils
ont les mesmes alliances,
puisque par les mariages
de ces deux Dames de la
Maison de Laval,ils se
trouvoient alliez des Maisons
de France ,
d'Angleterre,
d'Ecosse, de Castille,
des Comtes deThoulouse,&
de quantité d'autres
Maisons tres- considerables.
Secondement
,
les alliances
que la Maison de
Montmorency a contractéesdepuis
sa separation
d'avec la branche de Laval,
sont celles que Mathieu
III. contracta avec
Jeanne de Brienne fille de
Jean Roy de Jerusalem,
qui estoit fille de Henry
Comte de Champagne
Roy de Jerusalem. Cette
alliance leur en donna de
nouvelles avec la Maison
de France,puisque Henry
Comte
Comte de Champagne
Roy de Jerusalem
,
avoit
pour mere Marie de France
fille du Roy Loüis le
Jeune, avec les Roys de
Navarre de la Maison de
Champagne
, & avec les
Roys de Jerusalem & de
Chypre, de la Maison de
Lefignen.
Mathieu IV.ditle Grand,
Seigneur de Montmorency
,
fils de Mathieu III.
s'allia avec Marie de
Dreux Princesse du sang
de France, fille de Robert
IV. Comte de Dreux,
qui avoit pour quatriéme
ayeul Robert de France
Comte de Dreux fils du
Roy Loiiis le Gros. D'ailleurs
elle estoit sa parente
par trois endroits,d'abord
au quatriéme degré du
costé maternel par laMaison
de Craon , parce que
Maurice Seigneur de
Craon fut pere de Havoise
de Craon,femme de Guy
VI. Seigneur de Laval, qui
estoit pere d'Isabeau de Laval
mar iée à Bouchard VI.
Seigneur de Montmorency
ayeul de MathieuIV.
Et d'Amaury de Craon,
pere de Jeanne de Craon
femme de Jean Comte de
Montfort ayeulle maternelle
de ladite Dame Marie
de Dreux, par la Maison
de Montfort. Elle estoit
sa parente du quatriéme
au cinquiémedegré,
& par celle de Coucy du
cinquiéme au sixiéme.
Ce ne seroit jamais fait
si on vouloit particularifcr
toutes les alliances les unes
aprés les autres, on se renferme
aux trois recentes; sa
premiereest celle queHenry
Duc de Montmorency
II. du nom,Pair, Marechal
& Amiral de France,
contractaavec Marie Felice
des Ursins en 1612 par
l'entremise du Roy Louis
XIII. & de la Reine Marie
de Medicis sa mere 3,
pour lorsRegente du Royaume
)
qui estoit sa parente
du deuxiéme au troisiéme
degré, puisque la
Reine avoir pour pere
François deMedicisGrand
Duc de Toscane
,
qui estoit
frere d'Elisabeth de
Medicis femme de Paul
des Ursins Duc de Bracciano,
ayeul de Madame la
Duchesse de Montmorency
: ainsil'on peut voir par
cette alliance, l'estime que
le Roy Louis XIII. d'heureuse
memoire,faifoic de
cetteMaison,puisqu'il faisoitépouserà
Monsieur le
Duc de Montmorency sa
parenteau troisiéme degré.
La féconde alliance des
trois ausquelles on s'est retranché
,
est celle de Charlote
Marguerite de Montmorency
,soeur & heritiere
de HenryII. Duc de
Montmorency mort sans
posterité
,
laquelle épousa
en 1609. Henry de Bourbon
II. du nom Prince de
Condé. Cette Princesse
aprés la , mort de son frere
, herita du Duché de
Montmorency, & de plusieurs
autres biens qui sont
entrez parcette alliance
dans laMaison de Condé.
La troisiéme alliance est
celle que fit François Henry
de Montmorency Duc
de Piney -
Luxembourg,
forti de la branche de Bouteville,
quiépousaen 1661.
Magdelaine- Charlotte-
Bonne-Therese de Clermont
Duchesse de Piney-
Luxembourg,fille de Charles-
Henry de C lermont-
Tonnerre, & de Marie de
Luxembourg Duchesse de
Piney
,
qui se défit de sa
Duché en mariant sa fille, àcondition que son époux
porteroit le nom & les Armes
de Luxembourg
,
luy
transmettant le droit de sa
Duché femelle, afin de
conserver le nom de cette
illustre Maison, qui a donné
plusieurs Empereurs
des Romains, des Roys de
Boheme, des Reines de
France, & à d'autres Couronnes
de l'Europe.
Ayant cy-dessus distingué
les alliances de la Maison
de Montmorency en
trois manieres. Premierement
, dans son commencement.
Secondement, depuis la separation de ses
deux grandes branches, &
en troisiéme lieu, en celle
que la branche de Laval a
euë depuis sa separation
d'avec celle de Montmorency.
J'en rapporte quatre
qui sont d'une tresgrande
îllustration. La premiereest
celle que Guy X.
Comte de Laval contracta
en 1347. avec Beatrix
fille d'Artus Duc de Bretagne
, &dont l'arriere petite
filleIsabeau de Laval
épousa Loüis de Bourbon
Comte de Vendôme. C'est
cette seconde alliance qui
doit aujourd'huy faire plus
de plaisir à la Maison de
Montmorency; puisque
c'est de cette Isabeau de
Laval que descend toute la
Maison Royalle de Bourbon,
estant la sixémeayeulle
paternelle de nostre
grand Monarque Loüis
XIV. à present regnant;
qui voit en cette presente
année 1711. son Throfne
affermi dans sa Maison
pour plusieursannées par
la naissance de ses arriere
petits fils Monseigneur le
Duc de Bretagne, &Monseigneur
le Duc d'Anjou,
&par cette alliance toutes
les Testes couronnées de
l'Europe qui regnent aujourd'huy
,
sont alliéesà la
Maison de Montmorency,
La troisiéme alliance
qui fait encore honneur à
cette Maison, c'estdevoir
René d'Anjou Roy de Na",
ples & de Jerusalem
,
qui
épousa Jeanne de Laval en
fecondes noces, mais cette
Reine n'en ayant point eu
d'enfans ,il n'est resté à sa
famille que le plaisir de
s'en souvenir.
La quatriéme & demiere
alliance est celle de
Charlotte d'Arragon fille
de Federic d'Arragon Roy
deNaples, qui fut femme
de Guy XVI. Comte de
Laval; ils eurent plusieurs
enfans, entre autres deux
filles, dont l'aisnée Catherine
de Laval épousa Claude
Sire de Rieux,qui porta
dans la Maison deColigny
le Comté de Laval,
qui a présl'excinction de
cette branche,est tombé
dans celle de sa soeur cadette
Anne de Laval qui
épousa François de la
Tremoille Vicomte de
Thouars,dont est descendu
Monsieur le Duc de la
Tremoille qui possedeaujourd'huy
le Comté de Laval,&
quiàcause de cette
alliance,faitses protcftations
à tous les Traitez de
Paix
,
où il envoye une
personne pour le reprefen"-
ccr , prétendant au Royaume
de Naples comme
heritier d'Anne de Laval
sa quatriéme ayeulle.
-
Sans s'attacher à toutes
les alliances souveraines
de cette illustre Maison,
je diray qu'il y en a quantité
d'autres tres conGderablesquiluy
sont alliées,
& le grand nombre de
Maisons qui y ont pris des
femmes, tient à honneur
d'en estre descendu
,
& se
font un plaisir d'arborer les;
Armes de Montmorency
dansleursalliances.
L'on voit parmy les 1
Grands Officiers du Royaume
de France plus de
Seigneurs de laMaison de
Montmorency que d'aucuneautreMaisons
l'on y
compte deux grands Senéchaux,
six Connestables,&
un Connestable d'Hibcrnie,
neufMaréchaux,quatre
Grands Amiraux, trois
Grands Maistres de la
Maison du Roy, trois
Grands Chambellans,deux
Grands Bouteillers ou Eschansons,
& deux Grands
Pannetiers.
Plusieurs Connestables,
& autres Grands Officiers
de France, sont sortis de
cette Maison tres illustre,
ouenontépousédesfilles,
outre que cette Maison a
aussi produit plusieursDucs
&DuchelTes.
Quoy que la vertu & la
Religion ayent tousjours
esté le partage des Seigneurs
de Montmorency
neanmoins l'on , en voit
tres peu qui ayent estérevestus
de Dignitez Ecclesiastiques;
l'on en voitcependant
un Archevesque
Duc de Reims, des Evesques
d'Orleans, & peu
d'autres.
ilsontencore l'honneur
d'avoir un Saint reconnu
par l'Eglise,donton revere
la memoire aux Vaux
de Cernay enBeauce,c'est
saint Thibaud de Mont-
-
morency Seigneur deMarly,
fils de Mathieu premier,
&
dAline d'Angleterre, lequel
se croisa en 1173. pour
le voyage de la Terre sainte.
A son retour il se fit
Religieux de l'Ordre de
Cisteaux, en l'Abbaye du
Val, puis ilfut Abbé des
Vaux de Cernay à quatre
lieuës de Versailles, entre
Chevreuse &: Ramboüillet,
où il mourut saintementvers
l'an 1189.
Enfin tant de grandeur
dans une Maisonfaitassez
connoistre que la valeur a
esté hereditaire dans l'âme
des Seigneurs de Montmorency,
& leur a tait meriter
tous ces honneurs,
pour avoir tousjours refpandu
leur fang pour la
deffensede leurs Roys, &
de leur patrie, s'estant tousjours
trouvez à la teste des
Armées qu'ils commandoient
en chef, où ils ont
fait paroistre leur courage
avec éclat au milieu des
plus grands perils.
Je n'en veux point un
plus grand exemple que
celuy d'Anne de Montmorency
Duc, Pair, Marechal
,
Connestable
, k,
Fi
Grand Maistre de France,
lequel aprèsavoirblanchi
fous le harnois militaire,
pour la deffenseduRoy,
& de la patrie, remporta
dans le tombeau la gloire
d'estre mort au lit d' honneur
,
puisque commandant
l'Armée Royalle à la
Bataille de saint Denis, il
y receut huit coups mortels
,
dont il mourut deux
jours aprés en son Hostel
de Montmorency à Paris,
estant âgé de prés de quatre
vingt ans, comblant
par ce moyen les derniers
jours de sa vie d'une fin
tres glorieuse, a prés avoir
servy cinq Roys, & après
avoir passé par tous les degrez
d'honneur, & s'estre
trouve à huitBatailles, en
ayant commandé quatre
en chef; aussi le Roy Charles
1X. voulant honorer la
memoire de ce grand Chef
de Guerre
,
ordonna que
sa Pompe funebre fust faite
en l'Eglise de Nostreme
de Paris,avec toute la
magnificencepossible, où
toutes les Cours souveraines
assisterent par ordre du
Roy. De là son corps fut
porté en l'Eglise de saint
Martin de Montmorency,
& son coeur en celle des
Celestins de Paris, où il
futmis dans un Caveau,
proche de celuy du Roy
HenryII. Il estoit bien
juste qu'un coeur quiavoit
esté aimé de son Prince,
& qui avoit eu part à ses
plus im portantes affaires,
fust après son trépas inhumé
proche de celuy qui
luy avoit fait tant d'honneur
durant sa vie,
Mr Chevillard vient de
mettre au jour une Carte
qui a pour Titre: Succession
Chronologique des Empereurs,
&des Impératrices d'Occident,
depuis Charlemagnejusqu'à
present.
On n'entreprend point
de rapporter dans cette
Carte les Empererus Romains,
ni les Empereurs
d'Orient, on s'est borné
à rapporter la Chronologie
des Empereurs, & des
Imperatrices d'Occident,
qui sont ceux qui ont regnéen
Europe depuis l'an
800. On commence par
Charlemagne que l'erreur
commune fait le restaurateur
de l'Empired'Occident
, quoyqu'il soit vray
qu'il estoitEmpereur avant
qu'il cust eHé reconnu tel
par les Romains estantEmpereur
par sa feule qualité
de Roy des François, l'Empire
d'Occident ou du
moins celuy des Gaules
ayant este cedé à Clovis en
508. & confirmé à ses petitsfils
par l'Empereur Justinien.
Il eftvrayque depuis
l'an875. on n'a reconnu
pour Empereurs que
ceux qui ont esté reconnus
tels par les Papes, que mesme
les Rois de Germanie;
& d'autres qui ont esté couronnezEmpereurs,
n'ayant
priscetitre, du moins jusqu'ausiecle
dernier, qu'après
ce couronnement, se
contentant, jusqu'à cette
ceremonie
,
de celuy de
Roy desR omains ou d'Empereurélu.
On met neanmoins
dans cette Carte
ceux que l'erreur publique
reconnoist pour Empereurs
ou qui ont ~estéélus
im Empereurs,
Empereurs
, par des partis,
pour les opposer à ceux
qui avoient esté légitimément
élûs,ilssont distinguez
par des Couronnes
differentes.
1-t Genealogie, &la mal4
son de Montmorency. -% Tout le monde est persuadédel'antiquité
de l'illustre
Maison de Montmorency,&
personne ne
doute qu'elle ne soit une
des plus anciennes du
Royaume , la qualité de
premiersBarons Chrétiens
en France, avec lecry de
Guerre (Dieu aide au premier
Chrestien ) en marque la
grande antiquité. Mais la
révolution des siecles passez
a fait perdre les vieux
Titres
,
la negligence des
Historiens en dérobent
la memoire, & il est mal
aisé de sçavoir la verité de
son origine.
Celuy auquel nous avons
obligation de la connoissance
de cette Maison est
le fameux André Duchesne
qui par ses soins nous a
laisse dans un gros volume
toute sa posterité depuis
Bouchard I. qui vivoit en jj -' 954. maisil ne s'est pas embarrassé
de rapporter ceux
qui l'ont precedé
,
n'en
:t
ayant point trouvé de
preuves certaines; il rapporte
feulement ce que
d'anciens Autheurs ont dit
des premiers Seigneursde
Montmorency.
Ildit qu'il se trouve dans lapartiedes Gaules qu'on
appelle France deux insignes
commencemens de
conversion ; la premiere
par saint Denis premier
Evesque de Paris, qui a1 procuré la conversion des Gauloisla seconde saint par Remy, Archevesque
de Paris, qui convertit les
François; ces deux conversions
sont cause de deux
opinions touchant l'Autheur
d'une si nobleextraétion.
La premiere
, que LisbiusChevalierdune
tresgrande
Noblesse & d'autorité
parmy les Parisiens
estoit Seigneur de Mont-,
morency proche de cette
Ville, & fut le premier des
Gaulois qui embrassa la
Religion Chrestienne à la
prédication de saint Denis
vers l'an centième de nostre
Redemption, supposé
que ce fut saint Denis
l'Areopagite qui avoir esté
converty par saint Paul
Apostre : mais si l'on fuie
le sentiment de Gregoire
de Tours qui rapporte l'arrivée
de saint Denis dans
les Gaules sousle Coniulac
de Decius & de Gratus, la
conversion de Lisbius ne
pourroit estre que vers l'an
tJ3*
La seconde opinion qui
est de Robert Cenal, Evesque
d'Avranches, au premier
Livre de ses Remarques
Gau loises, & de Claude
Fauchée, au second Livre
de ses AntiquitézFrançoisesdisent
i que ce luy
qui a donné origine à la
Maison de Montmorency
nefutpas lefameux Gaulois
Lisbius,maisun Grand
Baron François nomme
Lisoie (lequel quand Clovis
premier Roy Chrestien
de France, fut baptisé par
saint Remy à Rheims en
499. ) fut le premier des
Seigneurs de sa suite
,
qui
se jetta dans la Cuve des
Fonds après luy
, en memoire
dequoy ses descendansmasles
ontestéhonorez
du titre de premiers
Barons Chrestiens deFrance
,
& ont tousjours eu depuis
pour cry de Guerre ,
Dieu aide au premier Chressien.
Quoy qu'il en soit, on
ne peut douter que les
deux qualitez qui ont tousjours
esté dans cetts illustre
Maison
,
de premier
Chrestien
, & de premier
Baron Chrestien en France,
n'ayent une origine
tres ancienne, &tr.--s illustre,
qui marque que les
anciens Seigneurs de
Montmorency eftoienc
des plus puissants du Royaume
: mais comme la
succession depuis Lisbius,
ou de Lisoie,n'apû se conserver
jusques à nous ,
il
faut s'en tenir à ce que
nous avons de plus asseuré,
& suivre ce qu'en a efcric
Duchesne auquel je renvoye
le Lecteur, qui commence
l'histoire de cette
Maison à Bouchard premier
, comme j'ay dit cydevant,
& quinous a donné
la suite desa posterité,
qui est rapportée dans la
Carte Chronologique de
cette Maison
, par MonsieurChevillard
qui donne
à ce Bouchard premier
un pere , un ayeul,
& un bisayeul
, que Duchesne
ne rapporte pas
mais les ayant trouvez
dans un autheur
)
il les a
rapportez pour faire connoistre
les alliances illustres
qu'ils avoient contractées,
puisque Jean Seigneur
de Montmorency pere de
Bouchard premier, qui vivoit
en 940. avoit épousé
Jeanne fille de Berenger
Comte de Beauvais, fils
d'AdolpheComte de Vermandois
, Everard Sei- j
gneur de Montmorency,
qui vivoit en 892. pere de
Jean & ayeul de Bouchard
premier, épousa Brunelle
fille deGaultier Comte de
Namur, & Leuto ou Leutard
Seigneur de Montmorency
qui vivoit en 845.
avoir épousé Everarde fille
d'un Comte de Ponchieu,
ce Leuto estoit pere d'Everard
& bisayeul de Bouchard
premier, c'est à luyqu'il
commence cet arbre
genealogique, afin defaire
connoistre les trois divers
changements qu'il y
a eus dans les Armes de la
Maison de Montmorency.
Ceux de cette Maison
avoient pris d'abord pour
leurs Armes, comme premiers
Chrestiens, d'or à la
croix de gueules;Bouchard
premier la cantonna de
quatre aiglettes ou allerions
d'azur, pour conservet
la memoire de quatre
Enseignes Impériales prises
à la victoire qu'il remporta
sur l'armée de tEmpereur
Othon II. Matthieu
II. dit le Grand, augmenta
les quatre allerions
de douze autres, en mémoire
de douze autres Enfeignes
Imperiales qui furent
prises à la bataille de
Bouvines sur l'Empereur
OthonIV. en1214 Ainsi
depuis ce temps- là les Seigneurs
de Montmorency
ont tousjours porté d'or à
la croix de gueules, cantonnée
de seize allerions
d'azur; & comme cette
Maison a formé quantité
de branches, ils ont brifé
leurs Armes differemment,
comme on le voit dans la
Carte genealogique, mais
à present comme labranche
aisnéeest éteinteenla
personne de Philippe de
Moutmorency Seigneur
de Nivelle, ôc Comte de
Horne décapité en 1^8.
auquel la branche de Fosfeux
a succedéàl'aisnesse,
toutes les autres branches
des Seigneurs de certe
Maison ont quitté leurs
brisures, & ont retenu les
Armes pleinesqu'ils portent
presentement.
La Maison de Montmorency
s'est separée en
quantité de branches, il y
en a eu plusieurs anciennes
qui font éteintes, mais
elle a conservé son nom
jusqu'à aujourd'huy, par la
succession de la branche
aisnée,dans plusieurs branches
qui subsistent,& quoy
qu'il paroisse de grandes
branches sorties de Mathieu
II. dit le Grand, Seigneur
de Montmorency
il n'y , a eu que la posterité
de son filsaisné Bouc hard
VI. qui ait retenule nom
de Montmorency, parce
que ion fils cadet Guyde
Montmorency fut Seigneur
de Laval, qui comme
heritier desa mereEme
de Laval, sortie d'une tres
noble & tres illustre Maison,
en atransmis le nom
à ses Descendans qui le retiennent
encore aujourd'huy,
ayant retenu les Armes
de Montmorency
,
la
Croix chargée de cinq coquilles
d'argent pour brisure,
comme cadets de sa
Maison.
Quant aux honneurs de
cette Maison, on ne peut
disconvenir qu'elle est des
plus illustrées
, tant dans
les alliances qu'ils ont contractées,
que dans les charges
qu'ils ont possedées,
les honneursqu'ils onteus
par leurs alliances, les font
toucher de près à tout ce
qu'il y a eu de Testes couronnées
dans l'Europe, &
pour le faire connoistre il
faut distinguer ses alliances
en trois manieres. Premierement
,
dans son ancienneté
: Secondement,
depuis
depuis la separation de ses
deux Branches, les Alliances
que celle de la Branche
de Montmorency a contractées
:
Troisiémement,
celle que la Branche de Laval
aeuës. Premierement, les Alliances
qu'ils ont eues anciennement
sont trcs considerables
puisque la premiere
qui estrapportée par
Duchesneestl'épouse qu'il
donne à Bouchard I.Elle
se nommoit Hildegarde,
& estoit fille de Thibaud I.
Comte de Chartres & de
de Bipis,ôc de Ledegarde
de Vermandois. Elle avoit
pour frere Eudes I. Comte
de Chartres & de Blois,
pere de Eudes II. Comte
de Champagne, duquel
sont forcis tous les Comtes
de Champagne; & pour
soeur Emme,femme de
GuillaumeIII. Duc de
Guyenne
, mere de Guillaume
IV. Ducde Guyenne
,
élu Roy d'Italie
, &
Empereur des Romains
duquel sont desçendus les,
Ducs deGuyenne,&Agnés
femme de l'Empereur
Henry III.
-
Hildegarde avoit pour
alliances du costé de sa
mere Ledgarde de Vermandois,
qui estoit fille de
Herbert II. Comte de Vermandois,&
d'une soeur de
Hugues le Grand, Duc de
France
,
& Comte de Paris
, pere du Roy Hugues
Capet; & aussi soeur d'Emme
,
Reine de France,
femme de Raoul, Duc de
Bourgogne, & Roy de
France, si bien qu'elle estoit
cousine du second au
troisiéme degré du Roy
Hugues Capec
,
chef de la
n'oineme Race des Rois
de France qui subsiste aujourd'huy.
Mathieu I. Seigneur de
Montmorency, Connestable
de France, épousa Aline
,
fille de Henry I. Roy
d'Angleterre, &en fecondes
nôces il épousa Alix de
Savoye
, veuve du Roy
Loüis VI. dit le Gros, mere
duRoy Loüis le Jeune, si
bien qu'il avoit l'honneur
d'estre beaupere du Roy
pour lors regnant.
BouchardV.s'alliaavec
Laurence, fille de Baudoüin,
Comte deHainaut,
descendu par les Comtes
de Flandres, de l'Empereur
Charlemagne; elle
estoit tante de BaudoüinV.
Comte de Flandres
, &
Empereur de Constantinople
,
d'Isabeau de Hainaut
,
Epouse du Roy de
France Philippe-Auguste,
& d'Ioland de Hainaut
Impératrice de Constanti-,
nople, femme de Pierre
de Courtenay, auquel elle
porta la Couronne
@
Imperiale.
Matthieu II. avoit épouse
en premières noces Gertrude
de Néelle
,
fille de Thomas Chastelain de ,
Bruges en Flandres
, &
d'une soeur d'Yves, Comte
de Soissons
,
Seigneur de
Néelle.C'estde cetteDame
quetoute la Maison de
Montmorency d'aujourd'huy
descend, parce que
Matthieu II épousa en secondes
noces Emme de
Laval qui luy donna pour
fils Guy de Montmorency,
Seigneur de Laval, comme
jelediray cy-aprés ; cette
Dame estoit soeur aisnée
d'Isabeau de Laval, femme
de Bouchard VI.Seigneur
de Montmorency, fils aisné
du premier lit de Mathieu
IL ainsi l'on peut dire
que dans la separation des
deux branches de Montmorency,
& de Laval, ils
ont les mesmes alliances,
puisque par les mariages
de ces deux Dames de la
Maison de Laval,ils se
trouvoient alliez des Maisons
de France ,
d'Angleterre,
d'Ecosse, de Castille,
des Comtes deThoulouse,&
de quantité d'autres
Maisons tres- considerables.
Secondement
,
les alliances
que la Maison de
Montmorency a contractéesdepuis
sa separation
d'avec la branche de Laval,
sont celles que Mathieu
III. contracta avec
Jeanne de Brienne fille de
Jean Roy de Jerusalem,
qui estoit fille de Henry
Comte de Champagne
Roy de Jerusalem. Cette
alliance leur en donna de
nouvelles avec la Maison
de France,puisque Henry
Comte
Comte de Champagne
Roy de Jerusalem
,
avoit
pour mere Marie de France
fille du Roy Loüis le
Jeune, avec les Roys de
Navarre de la Maison de
Champagne
, & avec les
Roys de Jerusalem & de
Chypre, de la Maison de
Lefignen.
Mathieu IV.ditle Grand,
Seigneur de Montmorency
,
fils de Mathieu III.
s'allia avec Marie de
Dreux Princesse du sang
de France, fille de Robert
IV. Comte de Dreux,
qui avoit pour quatriéme
ayeul Robert de France
Comte de Dreux fils du
Roy Loiiis le Gros. D'ailleurs
elle estoit sa parente
par trois endroits,d'abord
au quatriéme degré du
costé maternel par laMaison
de Craon , parce que
Maurice Seigneur de
Craon fut pere de Havoise
de Craon,femme de Guy
VI. Seigneur de Laval, qui
estoit pere d'Isabeau de Laval
mar iée à Bouchard VI.
Seigneur de Montmorency
ayeul de MathieuIV.
Et d'Amaury de Craon,
pere de Jeanne de Craon
femme de Jean Comte de
Montfort ayeulle maternelle
de ladite Dame Marie
de Dreux, par la Maison
de Montfort. Elle estoit
sa parente du quatriéme
au cinquiémedegré,
& par celle de Coucy du
cinquiéme au sixiéme.
Ce ne seroit jamais fait
si on vouloit particularifcr
toutes les alliances les unes
aprés les autres, on se renferme
aux trois recentes; sa
premiereest celle queHenry
Duc de Montmorency
II. du nom,Pair, Marechal
& Amiral de France,
contractaavec Marie Felice
des Ursins en 1612 par
l'entremise du Roy Louis
XIII. & de la Reine Marie
de Medicis sa mere 3,
pour lorsRegente du Royaume
)
qui estoit sa parente
du deuxiéme au troisiéme
degré, puisque la
Reine avoir pour pere
François deMedicisGrand
Duc de Toscane
,
qui estoit
frere d'Elisabeth de
Medicis femme de Paul
des Ursins Duc de Bracciano,
ayeul de Madame la
Duchesse de Montmorency
: ainsil'on peut voir par
cette alliance, l'estime que
le Roy Louis XIII. d'heureuse
memoire,faifoic de
cetteMaison,puisqu'il faisoitépouserà
Monsieur le
Duc de Montmorency sa
parenteau troisiéme degré.
La féconde alliance des
trois ausquelles on s'est retranché
,
est celle de Charlote
Marguerite de Montmorency
,soeur & heritiere
de HenryII. Duc de
Montmorency mort sans
posterité
,
laquelle épousa
en 1609. Henry de Bourbon
II. du nom Prince de
Condé. Cette Princesse
aprés la , mort de son frere
, herita du Duché de
Montmorency, & de plusieurs
autres biens qui sont
entrez parcette alliance
dans laMaison de Condé.
La troisiéme alliance est
celle que fit François Henry
de Montmorency Duc
de Piney -
Luxembourg,
forti de la branche de Bouteville,
quiépousaen 1661.
Magdelaine- Charlotte-
Bonne-Therese de Clermont
Duchesse de Piney-
Luxembourg,fille de Charles-
Henry de C lermont-
Tonnerre, & de Marie de
Luxembourg Duchesse de
Piney
,
qui se défit de sa
Duché en mariant sa fille, àcondition que son époux
porteroit le nom & les Armes
de Luxembourg
,
luy
transmettant le droit de sa
Duché femelle, afin de
conserver le nom de cette
illustre Maison, qui a donné
plusieurs Empereurs
des Romains, des Roys de
Boheme, des Reines de
France, & à d'autres Couronnes
de l'Europe.
Ayant cy-dessus distingué
les alliances de la Maison
de Montmorency en
trois manieres. Premierement
, dans son commencement.
Secondement, depuis la separation de ses
deux grandes branches, &
en troisiéme lieu, en celle
que la branche de Laval a
euë depuis sa separation
d'avec celle de Montmorency.
J'en rapporte quatre
qui sont d'une tresgrande
îllustration. La premiereest
celle que Guy X.
Comte de Laval contracta
en 1347. avec Beatrix
fille d'Artus Duc de Bretagne
, &dont l'arriere petite
filleIsabeau de Laval
épousa Loüis de Bourbon
Comte de Vendôme. C'est
cette seconde alliance qui
doit aujourd'huy faire plus
de plaisir à la Maison de
Montmorency; puisque
c'est de cette Isabeau de
Laval que descend toute la
Maison Royalle de Bourbon,
estant la sixémeayeulle
paternelle de nostre
grand Monarque Loüis
XIV. à present regnant;
qui voit en cette presente
année 1711. son Throfne
affermi dans sa Maison
pour plusieursannées par
la naissance de ses arriere
petits fils Monseigneur le
Duc de Bretagne, &Monseigneur
le Duc d'Anjou,
&par cette alliance toutes
les Testes couronnées de
l'Europe qui regnent aujourd'huy
,
sont alliéesà la
Maison de Montmorency,
La troisiéme alliance
qui fait encore honneur à
cette Maison, c'estdevoir
René d'Anjou Roy de Na",
ples & de Jerusalem
,
qui
épousa Jeanne de Laval en
fecondes noces, mais cette
Reine n'en ayant point eu
d'enfans ,il n'est resté à sa
famille que le plaisir de
s'en souvenir.
La quatriéme & demiere
alliance est celle de
Charlotte d'Arragon fille
de Federic d'Arragon Roy
deNaples, qui fut femme
de Guy XVI. Comte de
Laval; ils eurent plusieurs
enfans, entre autres deux
filles, dont l'aisnée Catherine
de Laval épousa Claude
Sire de Rieux,qui porta
dans la Maison deColigny
le Comté de Laval,
qui a présl'excinction de
cette branche,est tombé
dans celle de sa soeur cadette
Anne de Laval qui
épousa François de la
Tremoille Vicomte de
Thouars,dont est descendu
Monsieur le Duc de la
Tremoille qui possedeaujourd'huy
le Comté de Laval,&
quiàcause de cette
alliance,faitses protcftations
à tous les Traitez de
Paix
,
où il envoye une
personne pour le reprefen"-
ccr , prétendant au Royaume
de Naples comme
heritier d'Anne de Laval
sa quatriéme ayeulle.
-
Sans s'attacher à toutes
les alliances souveraines
de cette illustre Maison,
je diray qu'il y en a quantité
d'autres tres conGderablesquiluy
sont alliées,
& le grand nombre de
Maisons qui y ont pris des
femmes, tient à honneur
d'en estre descendu
,
& se
font un plaisir d'arborer les;
Armes de Montmorency
dansleursalliances.
L'on voit parmy les 1
Grands Officiers du Royaume
de France plus de
Seigneurs de laMaison de
Montmorency que d'aucuneautreMaisons
l'on y
compte deux grands Senéchaux,
six Connestables,&
un Connestable d'Hibcrnie,
neufMaréchaux,quatre
Grands Amiraux, trois
Grands Maistres de la
Maison du Roy, trois
Grands Chambellans,deux
Grands Bouteillers ou Eschansons,
& deux Grands
Pannetiers.
Plusieurs Connestables,
& autres Grands Officiers
de France, sont sortis de
cette Maison tres illustre,
ouenontépousédesfilles,
outre que cette Maison a
aussi produit plusieursDucs
&DuchelTes.
Quoy que la vertu & la
Religion ayent tousjours
esté le partage des Seigneurs
de Montmorency
neanmoins l'on , en voit
tres peu qui ayent estérevestus
de Dignitez Ecclesiastiques;
l'on en voitcependant
un Archevesque
Duc de Reims, des Evesques
d'Orleans, & peu
d'autres.
ilsontencore l'honneur
d'avoir un Saint reconnu
par l'Eglise,donton revere
la memoire aux Vaux
de Cernay enBeauce,c'est
saint Thibaud de Mont-
-
morency Seigneur deMarly,
fils de Mathieu premier,
&
dAline d'Angleterre, lequel
se croisa en 1173. pour
le voyage de la Terre sainte.
A son retour il se fit
Religieux de l'Ordre de
Cisteaux, en l'Abbaye du
Val, puis ilfut Abbé des
Vaux de Cernay à quatre
lieuës de Versailles, entre
Chevreuse &: Ramboüillet,
où il mourut saintementvers
l'an 1189.
Enfin tant de grandeur
dans une Maisonfaitassez
connoistre que la valeur a
esté hereditaire dans l'âme
des Seigneurs de Montmorency,
& leur a tait meriter
tous ces honneurs,
pour avoir tousjours refpandu
leur fang pour la
deffensede leurs Roys, &
de leur patrie, s'estant tousjours
trouvez à la teste des
Armées qu'ils commandoient
en chef, où ils ont
fait paroistre leur courage
avec éclat au milieu des
plus grands perils.
Je n'en veux point un
plus grand exemple que
celuy d'Anne de Montmorency
Duc, Pair, Marechal
,
Connestable
, k,
Fi
Grand Maistre de France,
lequel aprèsavoirblanchi
fous le harnois militaire,
pour la deffenseduRoy,
& de la patrie, remporta
dans le tombeau la gloire
d'estre mort au lit d' honneur
,
puisque commandant
l'Armée Royalle à la
Bataille de saint Denis, il
y receut huit coups mortels
,
dont il mourut deux
jours aprés en son Hostel
de Montmorency à Paris,
estant âgé de prés de quatre
vingt ans, comblant
par ce moyen les derniers
jours de sa vie d'une fin
tres glorieuse, a prés avoir
servy cinq Roys, & après
avoir passé par tous les degrez
d'honneur, & s'estre
trouve à huitBatailles, en
ayant commandé quatre
en chef; aussi le Roy Charles
1X. voulant honorer la
memoire de ce grand Chef
de Guerre
,
ordonna que
sa Pompe funebre fust faite
en l'Eglise de Nostreme
de Paris,avec toute la
magnificencepossible, où
toutes les Cours souveraines
assisterent par ordre du
Roy. De là son corps fut
porté en l'Eglise de saint
Martin de Montmorency,
& son coeur en celle des
Celestins de Paris, où il
futmis dans un Caveau,
proche de celuy du Roy
HenryII. Il estoit bien
juste qu'un coeur quiavoit
esté aimé de son Prince,
& qui avoit eu part à ses
plus im portantes affaires,
fust après son trépas inhumé
proche de celuy qui
luy avoit fait tant d'honneur
durant sa vie,
Mr Chevillard vient de
mettre au jour une Carte
qui a pour Titre: Succession
Chronologique des Empereurs,
&des Impératrices d'Occident,
depuis Charlemagnejusqu'à
present.
On n'entreprend point
de rapporter dans cette
Carte les Empererus Romains,
ni les Empereurs
d'Orient, on s'est borné
à rapporter la Chronologie
des Empereurs, & des
Imperatrices d'Occident,
qui sont ceux qui ont regnéen
Europe depuis l'an
800. On commence par
Charlemagne que l'erreur
commune fait le restaurateur
de l'Empired'Occident
, quoyqu'il soit vray
qu'il estoitEmpereur avant
qu'il cust eHé reconnu tel
par les Romains estantEmpereur
par sa feule qualité
de Roy des François, l'Empire
d'Occident ou du
moins celuy des Gaules
ayant este cedé à Clovis en
508. & confirmé à ses petitsfils
par l'Empereur Justinien.
Il eftvrayque depuis
l'an875. on n'a reconnu
pour Empereurs que
ceux qui ont esté reconnus
tels par les Papes, que mesme
les Rois de Germanie;
& d'autres qui ont esté couronnezEmpereurs,
n'ayant
priscetitre, du moins jusqu'ausiecle
dernier, qu'après
ce couronnement, se
contentant, jusqu'à cette
ceremonie
,
de celuy de
Roy desR omains ou d'Empereurélu.
On met neanmoins
dans cette Carte
ceux que l'erreur publique
reconnoist pour Empereurs
ou qui ont ~estéélus
im Empereurs,
Empereurs
, par des partis,
pour les opposer à ceux
qui avoient esté légitimément
élûs,ilssont distinguez
par des Couronnes
differentes.
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Résumé : Discours nouveau sur l'origine, la Genealogie, & la Maison de Montmorency.
Le texte traite de la Maison de Montmorency, une des plus anciennes et illustres familles du Royaume de France, reconnue comme les premiers Barons Chrétiens avec le cri de guerre 'Dieu aide au premier Chrétien'. La révolution des siècles passés et la négligence des historiens ont obscurci les vieux titres et l'origine exacte de cette maison. André Duchesne est l'historien ayant le plus contribué à sa connaissance, retraçant sa postérité depuis Bouchard I, vivant en 954. Deux opinions principales existent sur son origine : la première attribue son origine à Lisbius, un noble gaulois converti par saint Denis, tandis que la seconde la rattache à Lisoie, un grand baron francique converti par saint Remy. La Maison de Montmorency a toujours revendiqué les qualités de premier Chrétien et de premier Baron Chrétien, marquant ainsi son ancienne et illustre origine. La succession depuis Lisbius ou Lisoie n'a pas pu être conservée jusqu'à nos jours. Duchesne commence l'histoire de cette Maison à Bouchard I, et Chevillard ajoute des ancêtres supplémentaires pour montrer les alliances illustres contractées par la famille. Les armes de la Maison de Montmorency ont évolué, passant d'une croix de gueules sur fond d'or à une croix cantonnée de seize aiglettes d'azur. La Maison s'est séparée en plusieurs branches, certaines éteintes, mais le nom de Montmorency a été conservé jusqu'à aujourd'hui. Les alliances de la Maison de Montmorency sont extrêmement prestigieuses, incluant des mariages avec des membres des familles royales de France, d'Angleterre, et d'autres maisons nobles. Les alliances plus récentes incluent des mariages avec des membres de la Maison de Condé et de la Maison de Luxembourg. La Maison de Montmorency compte de nombreux Grands Officiers du Royaume de France, tels que des Sénéchaux, Connétables, Maréchaux, Amiraux, Maîtres de la Maison du Roi, Chambellans, Bouteillers, et Pannetiers. Plusieurs membres ont également été Ducs et Duchesses. La famille a produit des dignitaires ecclésiastiques, dont un Archevêque Duc de Reims et des Évêques. Saint Thibaud de Montmorency, Seigneur de Marly, est un membre notable, ayant participé à la croisade et fondé l'abbaye des Vaux de Cernay. La valeur et le courage des Seigneurs de Montmorency sont soulignés, notamment à travers l'exemple d'Anne de Montmorency, Duc, Pair, Maréchal, Connétable et Grand Maître de France, qui mourut glorieusement après avoir commandé l'armée royale à la bataille de Saint-Denis. La mémoire de ce grand chef de guerre fut honorée par une pompe funèbre magnifiquement organisée par le roi Charles IX.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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23
p. 290-313
SUITE des Nouvelles.
Début :
De Vienne le 30. Decembre. L'Archiduc a fait écrire au Prince [...]
Mots clefs :
Troupes, Comte, Nouvelles, Camp, Sièges, Roi, Vienne, Hambourg, Madrid, Saragosse, Utrecht, Montpellier
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUITE des Nouvelles.
SUITE
des Nouvelles.
De Vienne le 30. Decembre.
L'Archiduc a
fait écrire
au Prince Esterhafi Viceroy
de Hongrie, de faire faire X
Presbourg tous les préparatifs necessaires, parce qu'il
esperoity arriver le 2. Janvier pour y
recevoirla Couronne de ce Royaume. Il
arriva hier un Courrier de
ce Prince, dépêché de Francfort, qui a
rapportéqu'il y
avoit esté couronné le 2.2..
& qu'il en devoit partir insessamment. Quelques Lettres particulières portent
qu'après son Couronnement il avoit refusé de signer la Capitulation perpstuelle. Celles. d'Hongrie
marquent que plusieurs
Troupes de Mécontens recommençoient à faire des
courses, de maniéré qu'il
n'y a aucune seureté dans
les chemins, & qu'il y a à
apprehender qu'il ne se forme dans ce Royaume une
nouvelle Confédération;
mais on espere que par une
Diette que l'Archiduc fera
assembler à Presbourg dés
qu'ily aura estécouronné,
la tranquilitéde ce Royaume fera entierement rétablie.
De Hambourg le 8
Janvier.
Les dernieres Lettres qu'on
a
reçeues de Staden, portent.
que le Roy de-Danneinarc
& le Roy Auguste desesperant de pouvoir s'emparer
de Stralzund de vive force,
parce qu'ils
-
crouvoient de
grandes difficultez à faire
une descente dans l'Isle de
Rugen ,d'où cettePlace tiroit tous les secours dont la
Garnison avoit besoin9
avoient resolu d'attaquer
Wismar dans les formes
,
la Garnison ayant esté
considerablement affoiblie
par la dernicre sortie: que
pour cet effetils avoient renforcé les Troupes du blocus
de six mille hommes,&
qu'ils y
avoient envoyé du
canon & des mortiers,après
quoyle Comte de Rantzau
avoïc resserré cette Place
tres étroitement : que le
Gouverneur se preparoit à
une vigoureuse resistance
;
qu'il avoir fait dépaver les
ruës pour empêcher l'effet
des bombes, & fait publier
que tous les Bourgeois qui
auroientquelque répugnanceà prendre les armes pour
la deffense de leur patrie,
eussent à sortir; que le General Rantzau, avoir de son
côté fait avertir les habitans
ques'ils prenoient les armes
pour la dessense de la Place
il les traiteroit avec la derniere rigueur; que nonob-
stant ces menaces tous les
Habitans, ainsi que la Garnison
,
paroissoient resolus
de se deffendre jusqu'à la
derniere extremité; que le
17. Decembre les Assiegeans
s'approcherent à trois cens
pas de la Ville où ils dresserent des batteries de canons
&de mortiers; que le29.ils
commencerent à
y
jetter des
bombes & des boulets rouges, & continuerent jusqu'au 2. de cemois; mais
avec peu de succés, le Gouvencur ayant fait dépaver
les ruës, & fait poster des
troupes d'Ouvriers & d'autres Bourgeois dans tous les
Quartiers, pourestreàportéed'éteindre promptement
le feu
; que ces précautions,
jointes à l'incommodité,
que les Assiegeants reçoivent de l'Artillerie des Assiegez qui renversoit leurs
ouvrages&démontoit la
pluspart de leurs canons,
les obligerent à se retirer
dans leur ancien Camp, &
à convertir de nouveau le
Siege de cette Place en blocus. Que les Troup es du
Roy de Dannemarc & du
Roy Auguste avoient aussi
jeuté des bombes & des bouletsrouges pendant vingtquatre heures; mais aussi
sans aucun succés considerable, ce qui avoit déterminé ces deux Rois à mettre
leurs Troupes en quartier
d'hiver, de maniere néanmoins que cctrc Place demeureroit toujours bloquée, par les Troupes Moscovites quiestoient en marche pour venir renforcer
leur Armée, dont les Quartiers seroient à Anclam &
à Gripswald
,
& soutenuës
par les Troupes Saxoncs
qui ne retourneroient pas
en Saxe avec le Roy Auguste; & qu'à l'égard de celles du Roy de Dannemarc,
elles hiverneroient dans le
Holstein Danois.
De Madrid le 4.Janvier.
Nous venons d'apprendre
par les Lettres du Camp de
Calaf du 22. que Mr le
Comte de Muret avoit enfin esté obligé faute de vivres & de munitions de lever le SiegeduChasteau de
Cardonne; voicy ce que
portent ces Lettres, A.,
Malgré le secours que le
General Staremberg préparoit pour le Chasteau de
Cardonne, on auroit pû
s'en rendre maistres si la
bréche qu'on y
avoit faite,
cust esté dans un endroit
un peu plus accessible. On
avoit placéune autre batterie pour faire une nouvcllc
bréche, mais la plus grande
partie du canon ne put servir faute de punirions. Cependant le General Staremberg estant informéque la
Garnison eltoïc sur le point
de se rendre pareillement
faute de munitions & de vivres, dont les Assiegeants
manquoient aussi, renforça
le Détachement qui estoit,
à
Salegariga
le 2 1. avec lequel il tenta de secourir ce
Chasteau
; mais après avoir
esté repoussé trois fois, il
sur obligé de se retirer avec
beaucoup de perte;celle que
firent les Troupes du Siege
dans ces rrois attaques, fut
de soixante hommes tuez,
& d'un plus grand nombre
de blessez
;
parmi les pre-
miers il y a eu le Ser gent
Major general, deuxCapitaines du Regiment de la
Couronne Mr le Comte de
Melun
,
un Capitaine de
Grenadiers de la Compagnie desGardes à pied Espagnoles. Le General Staremberg
,
outré de n'avoir pu
réiifljr dans son entreprise,
retourna le lendemain à la
charge: ses Troupes furent
encore fortmal-traitées à
l'attaquedu Pont de las Corminas, gardé par les Regimens de la Couronne&de
Truxillo
,
sans pouvoir les
forcer, mais ayant trouvé,
moyen de passerla l:iviere.,
à gué, elles prirent ces deux
,
Regimens en £tanc,-& les
obligerent à se retirer en
desordre. Mr le Comte de
Muret donna aussi tost avis
à Monsieur de Vendosme
de ce qui s'estoit passé
; envoyaau Gouverneur du
Chasteau pour avoir une
Sauvegarde pour les mala-"^
des qui estoient dans »la
Ville, ensuite il se retira
avec les Troupes & lesBagages, abandonnantson
Artillerie faute de voitures.
Les Ennemis ne le poursuivirent point, & se contenrerent de faire entrer le secours dansle Chasteau, aprés
quoy ils se retirerent.
Lettre de Sarragosse du 3.
Janvier.
Les Ennemis, au nombre
de quatre mille hommes de
Troupes reglées & d'un plus
grand nombre de Miquelets
,
attaquerent le Camp du /{egiment de la Couronne le
vingt
-
deux du moispasséà
lapointe du jour devant.Car^
donne}javonsiT^pay un brouillardsiépais que Cm ne voyoit
pas a quatre pas devant foy.
Cependant quoy que ce fut
une especedesurprise 3ce Regiment fit tout ce que de
vieilles Troupes peuventfaire
,
mais ils fut obligé d'abandonner leur posse par la ftiperiorité des Ennemis
,
&se
retira sur une hauteur où ils
nejugerent pas à propos de le
poursuivre
ce
jour-là.
Le vingt trois les Ennemis qui estoient quatre êontre
un, l'attaqua de nouveau
,
ensorte qu'ilfutobligéde
se retirer. Il a eu plus de deux
cens hommes tuez ou
bleffi{.
Mr Bonnet, Commandant du
second Bataillon de
ce Régiment
est du nombre des Morts;
Mr Dautruy
,
Major,
a
ejlé
blepé de trois coups au travers
du corps, & on ne croit pas
qu'ilen revienne; Mrle Chevalier de TeiJé, Colonel, a
esié
perdu une heure,maisiln'aesté
ny blessénypris.Les Ennemis
ont perdu beaucoup de monde
dans cette action, puisque de
quatre cens hommes seulement
qui sortirent de la Place pou,
favorser L'entrée du secours
,
cinquante furent tuez avec
l'Officier qui les cornmandoit,
gr centfurent blcffe^.
Le soir du mêmejour, Mr
le Comte de Muret, qui commandoit au Siege
,
sçachant que
ses Troupessouffroient extrêmementfaute de vivres, les
Soldatsn'ayant depuis huit
jours qu'un quart d'une ration
de pain, prit le parti de lever
le Siege,sansyestreforcepar
d'autres raisons, laissansl'artillerie faute de mulets pour la
retirer.
LesTroupes,du Siege tJIant
arrivées au Camp, Aionjuur
de Vendosme prit le party desi
retirer: il fit lever en plein
jour les Gatdes de dcjlus les
ruisseaux qui Jéparoient les
-
deux Armée*
,
les unes après
les autres, &se mit en
bataille
à
un quart de lieuë des Ennemis, où l'Armée campa. Le lendemain il ne luyfitfaire qu'une demi-lieuë; mais le General
Starembergn'osasortirdeson
Camp pour lasuivre.
Monsieur de Vcndosme conserve le posse de Cervera
,
où
il a mis cinq Bataillons & un
Régiment de Dragons qui ria
pas foujfat
comme les autres
pendant la Campagne. Ce
Prince efl avec l'armée à Agramunte, où il diflribuë les
Quartiers d'hiver aux Troupes
qui garderont la Segre. Nous
avoKS Arens,Venasque, &
Castel-Leon de cette Campa-"
gne. Cardone l'auroit renduë
plusavantâgeuse
,
mais cen'est
pas une chose irréparable au
commencement de la Campagne
prochaine, en cas qu'on lafasse,
lesmesures que l'on a
déjà pri-
[es
,
Cm que ton prendra pour
le transport des vivres & des
munitions, donnantlieu d'ejpe-
rer que les Troupes n'en manquerontplus.
D'Utrecht le 19. Janvier,
Mrs les Plénipotentiaires
du Roy arriverent le 9. à
Gambray
,
où ils fejournerenc le 10.
Le 11. ils arrivèrent à
Valenciennes. .fLe11.vMons, où Mr
le Comte de Dhona qui en
est Gouverneur, les fit saluer par trois déchargés générales de l'artilleriey& leuc
donna un grand repas,
Le 13. ils arrivèrent à
Bruxelles, où ils furent
reçus avec les mesmes honneurs. Mr le Maréchal
d'Uxelles alla descendre
avec
Mr le Commandeur de Beringhen qui l'accompagne,
chez Me la Princessè difenghien qui les regala magniquement; Mr l'Abbé de
Polignac descendit
-
chez
Me de Rupelmonde qui luy
donnaaussi un magifique
soupé, & Mr Mesnager,
logea dans uneautre maison
avec ses Officiers.
Le 14. ils arriverent à
Anvers où ils sejournerent le15.
Le 17. à Gorcum. s
Le 18. à Ucrechr.
Ils ont été reçusdans
tous ces lieux avec les mefmes honneurs qu'ils l'avoient été à Mons & à
Bruxelles, les Hollandois les
ayant toûjours fait accompagner par des Commissaires, tant pour les faire
recevoir honorablement
,
que pour les défrayer pendant toute leur route depuis
Bruxelles.
NDe Montpellier le n, Janvier.
Les Erats de Languedoc
firent faire hier un Service
magnifique pour le repos de
l'ame de feu Monseigneur
le Dauphin. Mr l'Archeverque de Narbonne y
officia comme President de
cette Assemblée. Mr l'Evêque de Alep prononça
l'Oraison funebre, & Mrs
les Evesques de Mirepoix,
de Lodeve, d'Agde, & de
Beziers firent les Absoutes.
Tous
Tous les Deputez y
assisterent chacun dans leur rang,
avec le Chapitre de Saine
Pierre & un grand concouts
de monde.
des Nouvelles.
De Vienne le 30. Decembre.
L'Archiduc a
fait écrire
au Prince Esterhafi Viceroy
de Hongrie, de faire faire X
Presbourg tous les préparatifs necessaires, parce qu'il
esperoity arriver le 2. Janvier pour y
recevoirla Couronne de ce Royaume. Il
arriva hier un Courrier de
ce Prince, dépêché de Francfort, qui a
rapportéqu'il y
avoit esté couronné le 2.2..
& qu'il en devoit partir insessamment. Quelques Lettres particulières portent
qu'après son Couronnement il avoit refusé de signer la Capitulation perpstuelle. Celles. d'Hongrie
marquent que plusieurs
Troupes de Mécontens recommençoient à faire des
courses, de maniéré qu'il
n'y a aucune seureté dans
les chemins, & qu'il y a à
apprehender qu'il ne se forme dans ce Royaume une
nouvelle Confédération;
mais on espere que par une
Diette que l'Archiduc fera
assembler à Presbourg dés
qu'ily aura estécouronné,
la tranquilitéde ce Royaume fera entierement rétablie.
De Hambourg le 8
Janvier.
Les dernieres Lettres qu'on
a
reçeues de Staden, portent.
que le Roy de-Danneinarc
& le Roy Auguste desesperant de pouvoir s'emparer
de Stralzund de vive force,
parce qu'ils
-
crouvoient de
grandes difficultez à faire
une descente dans l'Isle de
Rugen ,d'où cettePlace tiroit tous les secours dont la
Garnison avoit besoin9
avoient resolu d'attaquer
Wismar dans les formes
,
la Garnison ayant esté
considerablement affoiblie
par la dernicre sortie: que
pour cet effetils avoient renforcé les Troupes du blocus
de six mille hommes,&
qu'ils y
avoient envoyé du
canon & des mortiers,après
quoyle Comte de Rantzau
avoïc resserré cette Place
tres étroitement : que le
Gouverneur se preparoit à
une vigoureuse resistance
;
qu'il avoir fait dépaver les
ruës pour empêcher l'effet
des bombes, & fait publier
que tous les Bourgeois qui
auroientquelque répugnanceà prendre les armes pour
la deffense de leur patrie,
eussent à sortir; que le General Rantzau, avoir de son
côté fait avertir les habitans
ques'ils prenoient les armes
pour la dessense de la Place
il les traiteroit avec la derniere rigueur; que nonob-
stant ces menaces tous les
Habitans, ainsi que la Garnison
,
paroissoient resolus
de se deffendre jusqu'à la
derniere extremité; que le
17. Decembre les Assiegeans
s'approcherent à trois cens
pas de la Ville où ils dresserent des batteries de canons
&de mortiers; que le29.ils
commencerent à
y
jetter des
bombes & des boulets rouges, & continuerent jusqu'au 2. de cemois; mais
avec peu de succés, le Gouvencur ayant fait dépaver
les ruës, & fait poster des
troupes d'Ouvriers & d'autres Bourgeois dans tous les
Quartiers, pourestreàportéed'éteindre promptement
le feu
; que ces précautions,
jointes à l'incommodité,
que les Assiegeants reçoivent de l'Artillerie des Assiegez qui renversoit leurs
ouvrages&démontoit la
pluspart de leurs canons,
les obligerent à se retirer
dans leur ancien Camp, &
à convertir de nouveau le
Siege de cette Place en blocus. Que les Troup es du
Roy de Dannemarc & du
Roy Auguste avoient aussi
jeuté des bombes & des bouletsrouges pendant vingtquatre heures; mais aussi
sans aucun succés considerable, ce qui avoit déterminé ces deux Rois à mettre
leurs Troupes en quartier
d'hiver, de maniere néanmoins que cctrc Place demeureroit toujours bloquée, par les Troupes Moscovites quiestoient en marche pour venir renforcer
leur Armée, dont les Quartiers seroient à Anclam &
à Gripswald
,
& soutenuës
par les Troupes Saxoncs
qui ne retourneroient pas
en Saxe avec le Roy Auguste; & qu'à l'égard de celles du Roy de Dannemarc,
elles hiverneroient dans le
Holstein Danois.
De Madrid le 4.Janvier.
Nous venons d'apprendre
par les Lettres du Camp de
Calaf du 22. que Mr le
Comte de Muret avoit enfin esté obligé faute de vivres & de munitions de lever le SiegeduChasteau de
Cardonne; voicy ce que
portent ces Lettres, A.,
Malgré le secours que le
General Staremberg préparoit pour le Chasteau de
Cardonne, on auroit pû
s'en rendre maistres si la
bréche qu'on y
avoit faite,
cust esté dans un endroit
un peu plus accessible. On
avoit placéune autre batterie pour faire une nouvcllc
bréche, mais la plus grande
partie du canon ne put servir faute de punirions. Cependant le General Staremberg estant informéque la
Garnison eltoïc sur le point
de se rendre pareillement
faute de munitions & de vivres, dont les Assiegeants
manquoient aussi, renforça
le Détachement qui estoit,
à
Salegariga
le 2 1. avec lequel il tenta de secourir ce
Chasteau
; mais après avoir
esté repoussé trois fois, il
sur obligé de se retirer avec
beaucoup de perte;celle que
firent les Troupes du Siege
dans ces rrois attaques, fut
de soixante hommes tuez,
& d'un plus grand nombre
de blessez
;
parmi les pre-
miers il y a eu le Ser gent
Major general, deuxCapitaines du Regiment de la
Couronne Mr le Comte de
Melun
,
un Capitaine de
Grenadiers de la Compagnie desGardes à pied Espagnoles. Le General Staremberg
,
outré de n'avoir pu
réiifljr dans son entreprise,
retourna le lendemain à la
charge: ses Troupes furent
encore fortmal-traitées à
l'attaquedu Pont de las Corminas, gardé par les Regimens de la Couronne&de
Truxillo
,
sans pouvoir les
forcer, mais ayant trouvé,
moyen de passerla l:iviere.,
à gué, elles prirent ces deux
,
Regimens en £tanc,-& les
obligerent à se retirer en
desordre. Mr le Comte de
Muret donna aussi tost avis
à Monsieur de Vendosme
de ce qui s'estoit passé
; envoyaau Gouverneur du
Chasteau pour avoir une
Sauvegarde pour les mala-"^
des qui estoient dans »la
Ville, ensuite il se retira
avec les Troupes & lesBagages, abandonnantson
Artillerie faute de voitures.
Les Ennemis ne le poursuivirent point, & se contenrerent de faire entrer le secours dansle Chasteau, aprés
quoy ils se retirerent.
Lettre de Sarragosse du 3.
Janvier.
Les Ennemis, au nombre
de quatre mille hommes de
Troupes reglées & d'un plus
grand nombre de Miquelets
,
attaquerent le Camp du /{egiment de la Couronne le
vingt
-
deux du moispasséà
lapointe du jour devant.Car^
donne}javonsiT^pay un brouillardsiépais que Cm ne voyoit
pas a quatre pas devant foy.
Cependant quoy que ce fut
une especedesurprise 3ce Regiment fit tout ce que de
vieilles Troupes peuventfaire
,
mais ils fut obligé d'abandonner leur posse par la ftiperiorité des Ennemis
,
&se
retira sur une hauteur où ils
nejugerent pas à propos de le
poursuivre
ce
jour-là.
Le vingt trois les Ennemis qui estoient quatre êontre
un, l'attaqua de nouveau
,
ensorte qu'ilfutobligéde
se retirer. Il a eu plus de deux
cens hommes tuez ou
bleffi{.
Mr Bonnet, Commandant du
second Bataillon de
ce Régiment
est du nombre des Morts;
Mr Dautruy
,
Major,
a
ejlé
blepé de trois coups au travers
du corps, & on ne croit pas
qu'ilen revienne; Mrle Chevalier de TeiJé, Colonel, a
esié
perdu une heure,maisiln'aesté
ny blessénypris.Les Ennemis
ont perdu beaucoup de monde
dans cette action, puisque de
quatre cens hommes seulement
qui sortirent de la Place pou,
favorser L'entrée du secours
,
cinquante furent tuez avec
l'Officier qui les cornmandoit,
gr centfurent blcffe^.
Le soir du mêmejour, Mr
le Comte de Muret, qui commandoit au Siege
,
sçachant que
ses Troupessouffroient extrêmementfaute de vivres, les
Soldatsn'ayant depuis huit
jours qu'un quart d'une ration
de pain, prit le parti de lever
le Siege,sansyestreforcepar
d'autres raisons, laissansl'artillerie faute de mulets pour la
retirer.
LesTroupes,du Siege tJIant
arrivées au Camp, Aionjuur
de Vendosme prit le party desi
retirer: il fit lever en plein
jour les Gatdes de dcjlus les
ruisseaux qui Jéparoient les
-
deux Armée*
,
les unes après
les autres, &se mit en
bataille
à
un quart de lieuë des Ennemis, où l'Armée campa. Le lendemain il ne luyfitfaire qu'une demi-lieuë; mais le General
Starembergn'osasortirdeson
Camp pour lasuivre.
Monsieur de Vcndosme conserve le posse de Cervera
,
où
il a mis cinq Bataillons & un
Régiment de Dragons qui ria
pas foujfat
comme les autres
pendant la Campagne. Ce
Prince efl avec l'armée à Agramunte, où il diflribuë les
Quartiers d'hiver aux Troupes
qui garderont la Segre. Nous
avoKS Arens,Venasque, &
Castel-Leon de cette Campa-"
gne. Cardone l'auroit renduë
plusavantâgeuse
,
mais cen'est
pas une chose irréparable au
commencement de la Campagne
prochaine, en cas qu'on lafasse,
lesmesures que l'on a
déjà pri-
[es
,
Cm que ton prendra pour
le transport des vivres & des
munitions, donnantlieu d'ejpe-
rer que les Troupes n'en manquerontplus.
D'Utrecht le 19. Janvier,
Mrs les Plénipotentiaires
du Roy arriverent le 9. à
Gambray
,
où ils fejournerenc le 10.
Le 11. ils arrivèrent à
Valenciennes. .fLe11.vMons, où Mr
le Comte de Dhona qui en
est Gouverneur, les fit saluer par trois déchargés générales de l'artilleriey& leuc
donna un grand repas,
Le 13. ils arrivèrent à
Bruxelles, où ils furent
reçus avec les mesmes honneurs. Mr le Maréchal
d'Uxelles alla descendre
avec
Mr le Commandeur de Beringhen qui l'accompagne,
chez Me la Princessè difenghien qui les regala magniquement; Mr l'Abbé de
Polignac descendit
-
chez
Me de Rupelmonde qui luy
donnaaussi un magifique
soupé, & Mr Mesnager,
logea dans uneautre maison
avec ses Officiers.
Le 14. ils arriverent à
Anvers où ils sejournerent le15.
Le 17. à Gorcum. s
Le 18. à Ucrechr.
Ils ont été reçusdans
tous ces lieux avec les mefmes honneurs qu'ils l'avoient été à Mons & à
Bruxelles, les Hollandois les
ayant toûjours fait accompagner par des Commissaires, tant pour les faire
recevoir honorablement
,
que pour les défrayer pendant toute leur route depuis
Bruxelles.
NDe Montpellier le n, Janvier.
Les Erats de Languedoc
firent faire hier un Service
magnifique pour le repos de
l'ame de feu Monseigneur
le Dauphin. Mr l'Archeverque de Narbonne y
officia comme President de
cette Assemblée. Mr l'Evêque de Alep prononça
l'Oraison funebre, & Mrs
les Evesques de Mirepoix,
de Lodeve, d'Agde, & de
Beziers firent les Absoutes.
Tous
Tous les Deputez y
assisterent chacun dans leur rang,
avec le Chapitre de Saine
Pierre & un grand concouts
de monde.
Fermer
Résumé : SUITE des Nouvelles.
Le texte décrit plusieurs événements politiques et militaires en Europe. À Vienne, l'archiduc se prépare pour son couronnement en Hongrie, prévu le 2 janvier. Des troubles persistent dans le royaume en raison de troupes mécontentes, mais on espère que la tenue d'une Diète après le couronnement restaurera la tranquillité. À Hambourg, les rois de Danemark et Auguste II de Pologne ont renoncé à prendre Stralsund par la force en raison de difficultés logistiques. Ils ont décidé d'attaquer Wismar, dont la garnison a été affaiblie. Malgré les menaces, les habitants et la garnison de Wismar sont résolus à se défendre. Les assaillants ont tenté de bombarder la ville sans succès et ont dû se retirer. À Madrid, le comte de Muret a levé le siège du château de Cardonne faute de vivres et de munitions. Les tentatives de secours par le général Staremberg ont échoué, entraînant des pertes importantes. À Saragosse, les ennemis ont attaqué le régiment de la Couronne, causant de lourdes pertes. Le comte de Muret a levé le siège de Cardonne en raison du manque de vivres. Les troupes se sont retirées et ont pris position à Agramunte pour l'hiver. À Utrecht, les plénipotentiaires du roi ont effectué une tournée dans plusieurs villes, recevant des honneurs et des réceptions magnifiques. À Montpellier, les États de Languedoc ont organisé un service funèbre pour le dauphin décédé, avec la participation de nombreux dignitaires religieux et laïcs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
24
p. 45-70
MORTS.
Début :
Messire Louis de la Vergne Montenart de Tressan, Abbé de Bonneval, [...]
Mots clefs :
La Vergne de Tressan, Maréchal de camp des armées du roi, Évêché de Vabres, Ordre de Saint-Louis, Maison, Comte, Chevalier, Abbé, Lieutenant général, Premier président
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS.
MORTS.
Meffire Louis de la
Vergne Montenart de
Treffan , Abbé de Bonneval , & Evêque du
Mans, y mourut le 27,
Janvier , âgé de quatrevingt - deux ans. Il fut
fait Maître de la Chapelle & de l'Oratoire de
feu Monfieur , cut l'Abbaie de Quarrente & de
46 MERCURE
a
faint Lidiguer. Le Roi
le nomma à l'Evêché de
Vabre , & lui donna
le Prieuré de Caffan.
Monfieur le fit fon premier Aumônier, & lui
donna l'Abbaie de Bonneval. Il fut transferé
de l'Evêché de Vabre à
celui du Mans , dont il
a rempli le fiege durant
quarante ans & quatre
mois. Il étoit de l'ancienne Maifon de la
Vergne de Treffent ,
GALANT. 47
établie depuis cinq cent
ans dans la Province de
Languedoc. Son frere
aîné étoit Jeremie de la
Vergne , Marquis de
Treffan , Maréchal de
Camp des Armées du
Roi, qui a laiffé de Dame
Marguerite de Beon
plufieurs enfans , done
Faîné eft François de la
Vergne , Marquis de
Treffen, ci-devant premier Guidon des Gendarmes de la Garde du
48 MERCURE
Roi, quiaépouté Dame
Louife- Magdelaine de
Brulard. Le fecond
Louis de la Vergne de
Treflan , premier Aumônier de Son Alteffe
Royale Monfeigneur le
Ducd'Orleans , Comte
de Lion , Abbéde Lepor
Il reste encore un frere
& une foeur vivans de
M. l'Evêque du Mans :
à fçavoir , Alfonſe de la
Vergne de Treffan
Comte de Lion , Maî
tre
GALANT. 49
:
tre du Choeur de faint
Jean & Dame Elifabeth de la Vergne de
Treffan, épouse de Meffire Charles Comte de
la Motte Houdancourt,
Lieutenant general des
armées du Roi , Gouverneur de Bergue faint
Vinoc.
François d'Aligre ,
Abbé de S. Jacques , eft
mort le 21. Janvier.
M. l'Abbé de S. Jacques étoit fils & petitFev.
1712.
E
fo MERCURE
fils des Chanceliers de
France d'Aligre.
Il étoit frere de M.
d'Aligre , pere du Pre
fident à Mortier d'aujourd'hui , frere auffi de
Madame de Vertamont,
mere du premier Prefident du Grand Confeil,
& depuis remariée au
Maréchal d'Eftrade ; il·
étoit frere auffi de Madame la Ducheffe de
Luines , troifiéme femme de M. le Duc de
GALANT. 51
4
Luines & de Madame
de Manneville , depuis
remariée à Monfieur le
Marquis de Verderonne , il étoit frere de M.
l'Abbé de faint Riquier,
il étoit Abbé de faint
Jacques de Provinsi
cette Abbaye eft de l'ordre de fainte Genevieve,
il étoit retiré quand fon
pere fut élevé à la dignité de Garde des fceaux
en 1674. il refta auprés
de lui jufqu'à la mort,
E ij
52 MERCURE
qui arriva en 79. &fon
pere expiré il retourna
dans fa folitude , où il
eft mort en odeur de
fainteté, il n'avoitjamais
voulu accepter que fept
mil livres de rente , defquelles il donnoit cinq
aux pauvres , ne vivant
que de legumes cuites à
l'eau & au fel, il eſtmort
âgéde 90. ans , il étoitle
feul en France qui eût
encore un benefice de la
nomination de Louis
GALANT, si
XIII.
enforte qu'on peut
dire à prefent que Louis
XIV. a nomméde fon
regne à tous les benefices de fon Royaume.
Dame Nicolle de Bellois , époufe de Meffire Jacques- Antoine de
Hennin- Lietard , Marquis de S. Phal, ci-devant Meſtre de Camp.
de Cavalerie , & SousLieutenant des Genf
darmes Bourguignons ,
mourut le 24. Février
E iij
54 MERCURE
1712. en fa 27. année ,
laiffant pofterité.
La maifon du Bellois
eft une des plus confiderables de Picardie , les
Marquis de Francier
font les aînez de cette
maifon. La mere de cette Dameétoit de la maifonde la Fite , foeur du
Marquis de Pelport , &
aîné de cette maifon ,
Maréchal de Camp des
Armées du Roy.
Damoifelle Louife.
GALANT. 55
Armande Hurault de
Vibraye , mourut fans
alliance le 26. Janvier ,
en ſa 20. année.
Monfieur le Marquis
de Vibraye , Lieutenant
general des Armées du
Roy, & commandant à
faint Malo & dans la
Bretagne eft pere de cette Damoifelle. Le Chancelier de Chiverni étoit
delamaifon de Hurault,
Madame la Marquiſe de
Vibraye s'appelle Julie
E iiij
56 MERCURE
de Caftellan , d'Adhei
mart de Monteil de Grignan, fille de Monfieur
le Comte de Grignant ,
Chevalier des Ordres
du Roy, & Lieutenant
General, Commandant
en Provence , & d'Anne
Dangene de Rambouil
let , foeurde Madame la
Ducheffe de Montau
fier.
Dame Renée Françoife de Canone , épouſe de
M. Claude- Alexandre
GALANT $7
Seguier , Chevalier , &
auparavant veuvede M.
Jacques du Boulet, Chevalier , Seigneur de Terameny , Capitaine du
Vol pour les champs de
l'équipage du Roy, mou
rut le 27.Janvier.att.com
Laifaifon de Seguier
originaire de Gafcogné
eft une des plus ancienes
de la Robe , elle a donné
un Chancelier , & plufours Prefidens aux
Mortiers au Parlement
38 MERCURE
de Paris, l'un defquelsfit
decider fous le regne du
feu Roy , que les Prefidens àMortiers auParlement de Paris auroient
le pas & la préfeance
fur les premiers Prefidens de tous lès Parlemens du Royaume.
M.Philippe de Baſſan ,
Chevalier Seigneur de
Richecrou , mourut le
27. Janvier.
M.Jean Armand Fumée, Seigneur des Ro-
GALANT. 39
€
ches, S. Quentin , Abbé
de Conques , Figeac &
S. Genous, mourut le 30.
Janvier , âgé de 82 ans.
La mere de cet Abbé
étoit de l'ancienne maifon de Bonoeuil en Poitou , elle époufa en ſecondes nôces le Marquis
de Cruffol , frere d'un
Duc d'Ufez. La maiſon
de Fumée originaire de
Tours tire fon origine
d'Adam Fumée , Seigneur des Roches , Gar-
60 MERCURE
de des Sceaux de France
fous les Rois Louis XI.
& Charles VIII.
M. Charles- Nicolas
Comte d'Hautefort
Maréchal des Camps &
Armées du Roy, Lieutenant de la feconde compagniedes Moufquetaires de fa Majefté , mourut le 2. Février 1712.
laiffant pofterité de Dame N. de Creil.
Lamerede ce Comte
étoit de l'illuftre maiſon
GALANT 61
de Bayeul. La maifon
d'Hautefort eſt une des
plus confidérables duPe
rigort,elle a donnébeaucoup de Generaux d'Armées & des Chevaliers
de l'Ordre; les deux premiers Ecuyers de la feuë
Reine étoient les Chefs
de cette maifon , le Marquis de S. Chamant ,
Enfeignedes Gardes du
Corps du Roy, eft frere
de feu Monfiur le Com
ted'Hautefort.
62 MERCURE
Dame Geneviève de
Saleux,veuve de M. Augustin de Louvencourt ,
Maître des Comptes,
mourut le 3. Fevrier.
Dame Marie Magdelaine de Vaux , veuve
de M. François de Damas,Chevalier,Marquis
d'Antezi, Meftre decamp
d'un Regiment de Cavalerie entretenu pour
le fervice de S. M. mourut le 3. Fevrier.
Le Marquisd'Antezy,
GALANT. 63
Maréchal de Camp des
Armées du Roy , Commandant à Huningue,
qui a épouſé la ſœur du
Marquis deMonperoux,
Lieutenant general des
Armées du Roy, Meftre
de Camp general de la
Cavalerie de France ,
étoit frere du mari de
cette Dame. La maifon
de Damas eft une des
plus grandes & des plus
anciennesduRoyaume,
les Ducs de Pontevaux
64 MERCURE
& les Marquis de
Thyange étoient les
Chefs de cette illuftre
maifon , Mefdames les
Ducheffes de Nevers &
de Seforce , qui font en
vie , font de la Branche
de Thyange.
tr
DameElizabeth Charlotte Jaime, épouse de
M.Eftienne de l'Eftang ,
Chevalier Seigneur de
la Valette , Chevalier
de l'Ordre militaire de
S. Louis, Commandant
pour ܢ
GALANT. 65
pour le Roy fur la
Meuſe , mourut le 4.
Fevrier.
M.Louis de Pardaillan,
Marquis de Gondrin ,
Ménin de Monfeigneur
le Dauphin, Brigadier/
des armées du Roy &
Colonel du Regiment
de Gondrin , mourut àl
Verfailles le s. Fevrier ,
âgé de 23. ans.
Cet article merite bien
qu'on enparleplus amplement lemois prochain.
Fev.1712.
F
66 MERCURE
4
Dame Marie d'Aidie ,
veuve de M. Jean François , Comte de Lambertie, mourut le 9. Fevrier.
La maifon de Lambertie eſt une des plus
anciennes & des plus
confiderables de la Lorraine.
M. Jofephde Miane
Ponponne, Chevalier de
l'Ordre militaire de S.
Louis , Gouverneur de
Fécamp , Major du
GALANT. 67
Regiment de Lionnois,
mourut le 15. Février.
M. le Prefident de
Meſmes fut inſtallé premier Prefident le 15. Février.
Lamaifon de Meſmes
tire fon origine du Château & terre de Meſmes,
dans le Dioceſe de Bazas. Elle tire fon origine d'Ecoffe , & s'établit en Guienne fous
le Regne de Philippe
Augufte, on voit en 1279.
Fij
68 MERCURE
un Henry de Mefmes:
qui rend hommage de
fa Terre à la Vicomteffe
de Marfan, cette maifon
a été dans l'épée durant
quatre fiecles. Jean Jacques de Mefmes , premierdunom, qui époufa
Nicole Hannequin , eft
le premier qui foit entré
dans la Robe , où elle a
poffedé les plus grandes
& les plus éminentes
charges , cette maiſon a
donné plufieurs Pleni-
GALANT. 69
potentiaires &Ambaffadeurs , & Officiers de
l'Ordre , qui ont tous
brillé par leur merite
& leurgrande capacité,
& qui ont toûjours fervi de protecteurs aux
gens de lettres , elle eft
alliée aux maiſons les
plus confiderables du
Royaume , comme celle
de Montluc , Clermont,
d'Amboife , Lufignan ,
S. Gelais , Rochoire &
autres. Leperede Mon-
70 MERCURE
fieur le premier Prefident étoit Jacques de
Mefmes , troifiéme du
nom Prefident aux
Mortiers, & Prevôt &
Maître des Ceremonies
de l'Ordre.
M. le Peletier deVilleneuve , Confeiller au
Parlement, qui avoit eu
l'agrément de la Charge
de Prefident de M. de
Mefmes,yfutreçu le 17.
Février.
Meffire Louis de la
Vergne Montenart de
Treffan , Abbé de Bonneval , & Evêque du
Mans, y mourut le 27,
Janvier , âgé de quatrevingt - deux ans. Il fut
fait Maître de la Chapelle & de l'Oratoire de
feu Monfieur , cut l'Abbaie de Quarrente & de
46 MERCURE
a
faint Lidiguer. Le Roi
le nomma à l'Evêché de
Vabre , & lui donna
le Prieuré de Caffan.
Monfieur le fit fon premier Aumônier, & lui
donna l'Abbaie de Bonneval. Il fut transferé
de l'Evêché de Vabre à
celui du Mans , dont il
a rempli le fiege durant
quarante ans & quatre
mois. Il étoit de l'ancienne Maifon de la
Vergne de Treffent ,
GALANT. 47
établie depuis cinq cent
ans dans la Province de
Languedoc. Son frere
aîné étoit Jeremie de la
Vergne , Marquis de
Treffan , Maréchal de
Camp des Armées du
Roi, qui a laiffé de Dame
Marguerite de Beon
plufieurs enfans , done
Faîné eft François de la
Vergne , Marquis de
Treffen, ci-devant premier Guidon des Gendarmes de la Garde du
48 MERCURE
Roi, quiaépouté Dame
Louife- Magdelaine de
Brulard. Le fecond
Louis de la Vergne de
Treflan , premier Aumônier de Son Alteffe
Royale Monfeigneur le
Ducd'Orleans , Comte
de Lion , Abbéde Lepor
Il reste encore un frere
& une foeur vivans de
M. l'Evêque du Mans :
à fçavoir , Alfonſe de la
Vergne de Treffan
Comte de Lion , Maî
tre
GALANT. 49
:
tre du Choeur de faint
Jean & Dame Elifabeth de la Vergne de
Treffan, épouse de Meffire Charles Comte de
la Motte Houdancourt,
Lieutenant general des
armées du Roi , Gouverneur de Bergue faint
Vinoc.
François d'Aligre ,
Abbé de S. Jacques , eft
mort le 21. Janvier.
M. l'Abbé de S. Jacques étoit fils & petitFev.
1712.
E
fo MERCURE
fils des Chanceliers de
France d'Aligre.
Il étoit frere de M.
d'Aligre , pere du Pre
fident à Mortier d'aujourd'hui , frere auffi de
Madame de Vertamont,
mere du premier Prefident du Grand Confeil,
& depuis remariée au
Maréchal d'Eftrade ; il·
étoit frere auffi de Madame la Ducheffe de
Luines , troifiéme femme de M. le Duc de
GALANT. 51
4
Luines & de Madame
de Manneville , depuis
remariée à Monfieur le
Marquis de Verderonne , il étoit frere de M.
l'Abbé de faint Riquier,
il étoit Abbé de faint
Jacques de Provinsi
cette Abbaye eft de l'ordre de fainte Genevieve,
il étoit retiré quand fon
pere fut élevé à la dignité de Garde des fceaux
en 1674. il refta auprés
de lui jufqu'à la mort,
E ij
52 MERCURE
qui arriva en 79. &fon
pere expiré il retourna
dans fa folitude , où il
eft mort en odeur de
fainteté, il n'avoitjamais
voulu accepter que fept
mil livres de rente , defquelles il donnoit cinq
aux pauvres , ne vivant
que de legumes cuites à
l'eau & au fel, il eſtmort
âgéde 90. ans , il étoitle
feul en France qui eût
encore un benefice de la
nomination de Louis
GALANT, si
XIII.
enforte qu'on peut
dire à prefent que Louis
XIV. a nomméde fon
regne à tous les benefices de fon Royaume.
Dame Nicolle de Bellois , époufe de Meffire Jacques- Antoine de
Hennin- Lietard , Marquis de S. Phal, ci-devant Meſtre de Camp.
de Cavalerie , & SousLieutenant des Genf
darmes Bourguignons ,
mourut le 24. Février
E iij
54 MERCURE
1712. en fa 27. année ,
laiffant pofterité.
La maifon du Bellois
eft une des plus confiderables de Picardie , les
Marquis de Francier
font les aînez de cette
maifon. La mere de cette Dameétoit de la maifonde la Fite , foeur du
Marquis de Pelport , &
aîné de cette maifon ,
Maréchal de Camp des
Armées du Roy.
Damoifelle Louife.
GALANT. 55
Armande Hurault de
Vibraye , mourut fans
alliance le 26. Janvier ,
en ſa 20. année.
Monfieur le Marquis
de Vibraye , Lieutenant
general des Armées du
Roy, & commandant à
faint Malo & dans la
Bretagne eft pere de cette Damoifelle. Le Chancelier de Chiverni étoit
delamaifon de Hurault,
Madame la Marquiſe de
Vibraye s'appelle Julie
E iiij
56 MERCURE
de Caftellan , d'Adhei
mart de Monteil de Grignan, fille de Monfieur
le Comte de Grignant ,
Chevalier des Ordres
du Roy, & Lieutenant
General, Commandant
en Provence , & d'Anne
Dangene de Rambouil
let , foeurde Madame la
Ducheffe de Montau
fier.
Dame Renée Françoife de Canone , épouſe de
M. Claude- Alexandre
GALANT $7
Seguier , Chevalier , &
auparavant veuvede M.
Jacques du Boulet, Chevalier , Seigneur de Terameny , Capitaine du
Vol pour les champs de
l'équipage du Roy, mou
rut le 27.Janvier.att.com
Laifaifon de Seguier
originaire de Gafcogné
eft une des plus ancienes
de la Robe , elle a donné
un Chancelier , & plufours Prefidens aux
Mortiers au Parlement
38 MERCURE
de Paris, l'un defquelsfit
decider fous le regne du
feu Roy , que les Prefidens àMortiers auParlement de Paris auroient
le pas & la préfeance
fur les premiers Prefidens de tous lès Parlemens du Royaume.
M.Philippe de Baſſan ,
Chevalier Seigneur de
Richecrou , mourut le
27. Janvier.
M.Jean Armand Fumée, Seigneur des Ro-
GALANT. 39
€
ches, S. Quentin , Abbé
de Conques , Figeac &
S. Genous, mourut le 30.
Janvier , âgé de 82 ans.
La mere de cet Abbé
étoit de l'ancienne maifon de Bonoeuil en Poitou , elle époufa en ſecondes nôces le Marquis
de Cruffol , frere d'un
Duc d'Ufez. La maiſon
de Fumée originaire de
Tours tire fon origine
d'Adam Fumée , Seigneur des Roches , Gar-
60 MERCURE
de des Sceaux de France
fous les Rois Louis XI.
& Charles VIII.
M. Charles- Nicolas
Comte d'Hautefort
Maréchal des Camps &
Armées du Roy, Lieutenant de la feconde compagniedes Moufquetaires de fa Majefté , mourut le 2. Février 1712.
laiffant pofterité de Dame N. de Creil.
Lamerede ce Comte
étoit de l'illuftre maiſon
GALANT 61
de Bayeul. La maifon
d'Hautefort eſt une des
plus confidérables duPe
rigort,elle a donnébeaucoup de Generaux d'Armées & des Chevaliers
de l'Ordre; les deux premiers Ecuyers de la feuë
Reine étoient les Chefs
de cette maifon , le Marquis de S. Chamant ,
Enfeignedes Gardes du
Corps du Roy, eft frere
de feu Monfiur le Com
ted'Hautefort.
62 MERCURE
Dame Geneviève de
Saleux,veuve de M. Augustin de Louvencourt ,
Maître des Comptes,
mourut le 3. Fevrier.
Dame Marie Magdelaine de Vaux , veuve
de M. François de Damas,Chevalier,Marquis
d'Antezi, Meftre decamp
d'un Regiment de Cavalerie entretenu pour
le fervice de S. M. mourut le 3. Fevrier.
Le Marquisd'Antezy,
GALANT. 63
Maréchal de Camp des
Armées du Roy , Commandant à Huningue,
qui a épouſé la ſœur du
Marquis deMonperoux,
Lieutenant general des
Armées du Roy, Meftre
de Camp general de la
Cavalerie de France ,
étoit frere du mari de
cette Dame. La maifon
de Damas eft une des
plus grandes & des plus
anciennesduRoyaume,
les Ducs de Pontevaux
64 MERCURE
& les Marquis de
Thyange étoient les
Chefs de cette illuftre
maifon , Mefdames les
Ducheffes de Nevers &
de Seforce , qui font en
vie , font de la Branche
de Thyange.
tr
DameElizabeth Charlotte Jaime, épouse de
M.Eftienne de l'Eftang ,
Chevalier Seigneur de
la Valette , Chevalier
de l'Ordre militaire de
S. Louis, Commandant
pour ܢ
GALANT. 65
pour le Roy fur la
Meuſe , mourut le 4.
Fevrier.
M.Louis de Pardaillan,
Marquis de Gondrin ,
Ménin de Monfeigneur
le Dauphin, Brigadier/
des armées du Roy &
Colonel du Regiment
de Gondrin , mourut àl
Verfailles le s. Fevrier ,
âgé de 23. ans.
Cet article merite bien
qu'on enparleplus amplement lemois prochain.
Fev.1712.
F
66 MERCURE
4
Dame Marie d'Aidie ,
veuve de M. Jean François , Comte de Lambertie, mourut le 9. Fevrier.
La maifon de Lambertie eſt une des plus
anciennes & des plus
confiderables de la Lorraine.
M. Jofephde Miane
Ponponne, Chevalier de
l'Ordre militaire de S.
Louis , Gouverneur de
Fécamp , Major du
GALANT. 67
Regiment de Lionnois,
mourut le 15. Février.
M. le Prefident de
Meſmes fut inſtallé premier Prefident le 15. Février.
Lamaifon de Meſmes
tire fon origine du Château & terre de Meſmes,
dans le Dioceſe de Bazas. Elle tire fon origine d'Ecoffe , & s'établit en Guienne fous
le Regne de Philippe
Augufte, on voit en 1279.
Fij
68 MERCURE
un Henry de Mefmes:
qui rend hommage de
fa Terre à la Vicomteffe
de Marfan, cette maifon
a été dans l'épée durant
quatre fiecles. Jean Jacques de Mefmes , premierdunom, qui époufa
Nicole Hannequin , eft
le premier qui foit entré
dans la Robe , où elle a
poffedé les plus grandes
& les plus éminentes
charges , cette maiſon a
donné plufieurs Pleni-
GALANT. 69
potentiaires &Ambaffadeurs , & Officiers de
l'Ordre , qui ont tous
brillé par leur merite
& leurgrande capacité,
& qui ont toûjours fervi de protecteurs aux
gens de lettres , elle eft
alliée aux maiſons les
plus confiderables du
Royaume , comme celle
de Montluc , Clermont,
d'Amboife , Lufignan ,
S. Gelais , Rochoire &
autres. Leperede Mon-
70 MERCURE
fieur le premier Prefident étoit Jacques de
Mefmes , troifiéme du
nom Prefident aux
Mortiers, & Prevôt &
Maître des Ceremonies
de l'Ordre.
M. le Peletier deVilleneuve , Confeiller au
Parlement, qui avoit eu
l'agrément de la Charge
de Prefident de M. de
Mefmes,yfutreçu le 17.
Février.
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Résumé : MORTS.
En 1712, plusieurs décès notables ont été enregistrés parmi la noblesse et le clergé français. Louis de la Vergne Montenart de Treffan, Abbé de Bonneval et Évêque du Mans, est décédé le 27 janvier à l'âge de quatre-vingt-deux ans. Il a occupé divers postes ecclésiastiques, dont celui de Maître de la Chapelle et de l'Oratoire, et a été transféré de l'Évêché de Vabre à celui du Mans, où il a servi pendant quarante ans et quatre mois. Il appartenait à l'ancienne maison de la Vergne de Treffan, établie depuis cinq cents ans en Languedoc. D'autres personnalités notables ont également disparu cette année-là. François d'Aligre, Abbé de Saint-Jacques, est mort le 21 janvier à l'âge de quatre-vingt-dix ans. Dame Nicolle de Bellois, épouse de Jacques-Antoine de Hennin-Liétard, Marquis de Saint-Phal, est décédée le 24 février à l'âge de vingt-sept ans. La maison de Bellois est l'une des plus considérables de Picardie. Dame Louise-Armande Hurault de Vibraye, fille du Marquis de Vibraye, Lieutenant général des Armées du Roi, est décédée le 26 janvier à l'âge de vingt ans. Dame Renée Françoise de Canone, veuve de Claude-Alexandre Seguier, est décédée le 27 janvier. La maison de Seguier, originaire de Gascogne, est l'une des plus anciennes de la Robe et a fourni plusieurs Chanceliers et Présidents au Parlement de Paris. Parmi les autres décès notables, on compte ceux de Philippe de Bassan, Chevalier Seigneur de Richecrou, de Jean Armand Fumée, Seigneur des Roches et Abbé de Conques, et de Charles-Nicolas Comte d'Hautefort, Maréchal des Camps et Armées du Roi. Le texte mentionne également les décès de Dame Geneviève de Saleux, veuve de Augustin de Louvencourt, et de Dame Marie Madeleine de Vaux, veuve de François de Damas, Marquis d'Antezy. La maison de Damas est l'une des plus grandes et des plus anciennes du Royaume.
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25
p. 309-312
NOUVELLES d'Angleterre.
Début :
Les douze Pairs furent introduits le 13. Janvier dans l'Assemblée des Seigneurs [...]
Mots clefs :
Duc, Comte, Colonels, Angleterre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : NOUVELLES d'Angleterre.
NOUVELLES
cap d'Angleterre.
PiLes douze Pairs furent
introduits le 13. Janvier
dans l'Affemblée des Seigneurs, & ilsy prirent leurs
places, aprés la lecture de
leurs Patentes. Le Comte
d'Oxford grand. Treſorier
310 MERCURE
delivra un Meffage de la
Reine contenant qu'elle fouhaitoit que la Chambre s'ajournaft jufqu'au 215. ainſi
que les Communes. Le Duc
de Sommerfet , le Comte de
Sunderland , le Comte de
Nottingham & plufieurs
autres furent pour la negative; cependant l'affirmative
l'emporta de foixante-trois
voix , contre quarante- neuf,
& la Chambre s'ajburnab
jufqu'au 25. Les Seigneurs
Ecoffois ont remontré à la
Reine que l'affaire du Duc
d'Hamilton eftoit conftaire
GALANT 11
*
à l'Acte d'Union des deux
Royaumes. Sa Majefté répondit qu'elle eſtoir fâchée
qu'on leur eut donné ce
fujet de plainte , & qu'elle
feroit en forte de leur faire
avoit fatisfaction. On a
donné au Duc de Beaufort
la Charge de Capitaine des
Gentils - hommes Penfion
naires , que le Duc de Saint
Albans, fils naturel du Roy
Charles 11. occupoir , le
Duc d'Ormont Colonel du
du premier Regiment des
Garde à pied a été nommé
Commandant de toutes les
312 MERGURE
Troupes de la grande
Bretagne.
Le Comte Rivers a efté
fait Grand Mailtre de l'Ar
tillerie & Colonel du Regi-
⚫ment des Gardes à cheval.
Le Ducde Northumberland Capitaine de lafeconde
Compagnie à cheval. Le
fieur Hill Brigadier a été
nommé Lieutenant de la
Tour à la place du General
Cadogan , plufieurs Capitaines deVaiffeau de Guerre
ont efté reformez. On croit
qu'il y aura encore dans
peu d'autres changemens.
cap d'Angleterre.
PiLes douze Pairs furent
introduits le 13. Janvier
dans l'Affemblée des Seigneurs, & ilsy prirent leurs
places, aprés la lecture de
leurs Patentes. Le Comte
d'Oxford grand. Treſorier
310 MERCURE
delivra un Meffage de la
Reine contenant qu'elle fouhaitoit que la Chambre s'ajournaft jufqu'au 215. ainſi
que les Communes. Le Duc
de Sommerfet , le Comte de
Sunderland , le Comte de
Nottingham & plufieurs
autres furent pour la negative; cependant l'affirmative
l'emporta de foixante-trois
voix , contre quarante- neuf,
& la Chambre s'ajburnab
jufqu'au 25. Les Seigneurs
Ecoffois ont remontré à la
Reine que l'affaire du Duc
d'Hamilton eftoit conftaire
GALANT 11
*
à l'Acte d'Union des deux
Royaumes. Sa Majefté répondit qu'elle eſtoir fâchée
qu'on leur eut donné ce
fujet de plainte , & qu'elle
feroit en forte de leur faire
avoit fatisfaction. On a
donné au Duc de Beaufort
la Charge de Capitaine des
Gentils - hommes Penfion
naires , que le Duc de Saint
Albans, fils naturel du Roy
Charles 11. occupoir , le
Duc d'Ormont Colonel du
du premier Regiment des
Garde à pied a été nommé
Commandant de toutes les
312 MERGURE
Troupes de la grande
Bretagne.
Le Comte Rivers a efté
fait Grand Mailtre de l'Ar
tillerie & Colonel du Regi-
⚫ment des Gardes à cheval.
Le Ducde Northumberland Capitaine de lafeconde
Compagnie à cheval. Le
fieur Hill Brigadier a été
nommé Lieutenant de la
Tour à la place du General
Cadogan , plufieurs Capitaines deVaiffeau de Guerre
ont efté reformez. On croit
qu'il y aura encore dans
peu d'autres changemens.
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Résumé : NOUVELLES d'Angleterre.
Le texte décrit des événements politiques et militaires en Angleterre. Le 13 janvier, les douze Pairs ont été introduits dans l'Assemblée des Seigneurs et ont pris leurs places après la lecture de leurs patentes. Le Comte d'Oxford, grand trésorier, a transmis un message de la Reine demandant l'ajournement de la Chambre des Seigneurs et des Communes jusqu'au 25 janvier, proposition approuvée par soixante-trois voix contre quarante-neuf. Les Seigneurs Écossais ont contesté l'affaire du Duc d'Hamilton, jugée contraire à l'Acte d'Union des deux Royaumes. La Reine a exprimé son mécontentement et promis de leur donner satisfaction. Plusieurs nominations et changements de postes ont eu lieu : le Duc de Beaufort est devenu Capitaine des Gentils-hommes Pensionnaires, le Duc d'Ormont Commandant de toutes les troupes de la Grande-Bretagne, le Comte Rivers Grand Maître de l'Artillerie et Colonel du Régiment des Gardes à cheval, et le Duc de Northumberland Capitaine de la seconde Compagnie à cheval. Le sieur Hill a été nommé Lieutenant de la Tour, remplaçant le Général Cadogan. Plusieurs capitaines de vaisseaux de guerre ont été réformés, et d'autres changements sont attendus.
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26
p. 59-65
Nouvelles d'Espagne.
Début :
Le Roy a nommé les Officiers Generaux qui doivent servir [...]
Mots clefs :
Espagne, Grenadiers, Cavalerie, Comte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles d'Espagne.
Nouvelles d'Espagne.
LeRoy a
nommé les Officiers Généraux qui doivent servir dansses armées
pendant cette Campagne.
On remplit les magasins
de Vinaros
,
de Mequinenia, de Tortose, de Penifcola & de Lerida. Le
Duc de Vendosme doit
partir dans peu pour aller
visiter lesplaces du Royaume de Valence. SaMajesté a
declaré Lieutenant
General de ses armées Dom
Miguel Pons. On mande
de Tarragone que les Anglois vendoient leurs chevaux & leurs équipa ges
,
pour s'embarquer sur les
vaiffiaux qu'ils attendoient. On écrit de Barcelone que la.cliertlé des vi-
vres est fort grande, que
le Comte de Staremberg
avoic esté obligé d'y envoyer son Regiment avec un
autre, que les Miquelers
ny les Soumettants ne font
plus si zelez pour le service de l'Archiduc.LesLettres du Gouverneur de la
Havane dans Tlfle de Cubai &celles des Magistrats
de lamesme Ville
,
marquent que leDuc de LinalésViceroy du Mexique a
envoyé une somme considerable d'argent à sa Majesté)afin qu'elle pust s'en
servir pour la campagne.
On écrit de Catalogne qu'-
un grand corps de Troupes & de Miquelets ennemisvouloients'emparer de
nouveau du pont de Suert,
mais Dom Miguel Pons en
ayant esté informé, les attaqua avec tant de vigueur
qu'il les obligea à se retirer
avec perte de plusieursdes
leurs tuez & faits prisonniers ;ilobligea le Colonel
Nebot qui venoit les secourir, à se retirer en diligence. On mande de la Conça du Tremps, qu'un Lieu-
tenant Colonel du Régiment d'Univés'estant avancé avec quelques Troupes
pour lever les contributions, rencontra un détachement desEnnemis qu'il
fit attaquer si brusquement
qu'il les mit en fuite à la
premiere décharge, en
ayant tue plusieurs & fait
plusieurs prisonniers, parmy lesquels sont quatre
Officiers. Onécrit deCervera que le General Fran-
~Kenberg estoit parti de Santa Colonna avec mille chevaux, quinze cents fantas-
sins,deux mortiers, & quelques pieces de canon dans
le dessein de surprendre
Cervera, mais le Comte
d'Hercelles qui y commande en ayant eu avis,s'estoit
préparé à les bien recevoir.
Les Ennemis arrivèrent le
14. à la pointe du jour
,
il
détachaun Lieutenant des
Grenadiers des Gardes Valonnes avec quarante Cavaliers, pour aller reconnoistre une troupe qui s'estoic avancée; il l'attaqua
avec tant de vigueur qu'il
les obligea à se retirer. Le
Comte
Comte d'Hercelles voyant
qu'ils se retiroient, sortit
avec toute sa cavalerie ôc
la pluspart des Grenadiers,
chargea leur arriere garde,
les mit en fuite
,
laissant
plusieurs morts, nombre
de prisonniers & leur artillerie. On apprend des
deserteurs & des paysans
que les Officiers & les soldats Anglois continuent à
s'embarquer, disant que
c'est pour retourner en Ail:
gleterre
LeRoy a
nommé les Officiers Généraux qui doivent servir dansses armées
pendant cette Campagne.
On remplit les magasins
de Vinaros
,
de Mequinenia, de Tortose, de Penifcola & de Lerida. Le
Duc de Vendosme doit
partir dans peu pour aller
visiter lesplaces du Royaume de Valence. SaMajesté a
declaré Lieutenant
General de ses armées Dom
Miguel Pons. On mande
de Tarragone que les Anglois vendoient leurs chevaux & leurs équipa ges
,
pour s'embarquer sur les
vaiffiaux qu'ils attendoient. On écrit de Barcelone que la.cliertlé des vi-
vres est fort grande, que
le Comte de Staremberg
avoic esté obligé d'y envoyer son Regiment avec un
autre, que les Miquelers
ny les Soumettants ne font
plus si zelez pour le service de l'Archiduc.LesLettres du Gouverneur de la
Havane dans Tlfle de Cubai &celles des Magistrats
de lamesme Ville
,
marquent que leDuc de LinalésViceroy du Mexique a
envoyé une somme considerable d'argent à sa Majesté)afin qu'elle pust s'en
servir pour la campagne.
On écrit de Catalogne qu'-
un grand corps de Troupes & de Miquelets ennemisvouloients'emparer de
nouveau du pont de Suert,
mais Dom Miguel Pons en
ayant esté informé, les attaqua avec tant de vigueur
qu'il les obligea à se retirer
avec perte de plusieursdes
leurs tuez & faits prisonniers ;ilobligea le Colonel
Nebot qui venoit les secourir, à se retirer en diligence. On mande de la Conça du Tremps, qu'un Lieu-
tenant Colonel du Régiment d'Univés'estant avancé avec quelques Troupes
pour lever les contributions, rencontra un détachement desEnnemis qu'il
fit attaquer si brusquement
qu'il les mit en fuite à la
premiere décharge, en
ayant tue plusieurs & fait
plusieurs prisonniers, parmy lesquels sont quatre
Officiers. Onécrit deCervera que le General Fran-
~Kenberg estoit parti de Santa Colonna avec mille chevaux, quinze cents fantas-
sins,deux mortiers, & quelques pieces de canon dans
le dessein de surprendre
Cervera, mais le Comte
d'Hercelles qui y commande en ayant eu avis,s'estoit
préparé à les bien recevoir.
Les Ennemis arrivèrent le
14. à la pointe du jour
,
il
détachaun Lieutenant des
Grenadiers des Gardes Valonnes avec quarante Cavaliers, pour aller reconnoistre une troupe qui s'estoic avancée; il l'attaqua
avec tant de vigueur qu'il
les obligea à se retirer. Le
Comte
Comte d'Hercelles voyant
qu'ils se retiroient, sortit
avec toute sa cavalerie ôc
la pluspart des Grenadiers,
chargea leur arriere garde,
les mit en fuite
,
laissant
plusieurs morts, nombre
de prisonniers & leur artillerie. On apprend des
deserteurs & des paysans
que les Officiers & les soldats Anglois continuent à
s'embarquer, disant que
c'est pour retourner en Ail:
gleterre
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Résumé : Nouvelles d'Espagne.
Le texte décrit divers événements militaires et logistiques en Espagne. LeRoy a nommé les officiers généraux pour la campagne en cours et a rempli les magasins de plusieurs villes, dont Vinaros, Mequinensia, Tortose, Penifcola et Lerida. Le Duc de Vendosme doit visiter les places du Royaume de Valence. Sa Majesté a désigné Dom Miguel Pons lieutenant général de ses armées. À Tarragone, les Anglais vendent leurs chevaux et équipements pour s'embarquer. À Barcelone, la cherté des vivres a conduit le Comte de Staremberg à envoyer des régiments pour maintenir l'ordre. Les Miquelers et les Soumettants montrent moins de zèle pour le service de l'Archiduc. Le Duc de Linares, Vice-roi du Mexique, a envoyé une somme d'argent pour la campagne. En Catalogne, Dom Miguel Pons a repoussé une attaque ennemie sur le pont de Suert. En Concà del Tremps, un lieutenant-colonel a mis en fuite un détachement ennemi. À Cervera, le Comte d'Hercelles a repoussé une attaque du Général Frankenberg, capturant plusieurs prisonniers et de l'artillerie. Des déserteurs et des paysans rapportent que les officiers et soldats anglais continuent de s'embarquer pour retourner en Angleterre.
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27
p. 301-307
MORTS.
Début :
Damoiselle Henriette de Conflans, Marquise d'Armentieres, mourut sans alliance le [...]
Mots clefs :
Conflans, Roi, Harville, Maison, Chancelier, Marquis, Comte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS.
MOR T S.
Damoiselle Henriette de
Conslans, Marquised'Armentieres, mourut sans alliance le 14. Avril, dansun
âge fort avancé.
La maison de Conflans
est une des plus anciennes
du Royaume: elle pretend
tirerson origine des anciens
Comtes de Brieres. Elle a
été fertile en Seigneurs illustres, qui se font distinguez par leur valeur, par les belles actions qu'ils ont
faites auservice des Rois,
& les dignitez considerables qu'ilsontpossedées
dans le Royaume. Cette
Démoiselle est la derniere
desa branche. Il reste encor
de cette illustré maison M.
le Marquis d'Armentieres,
premier Gentilhomme de
la Chambre de Son Altesse
Royale Monseigneur le
Duc d'Orleans; & M. le
Marquis de Conslans, cidevant Colonel de Dragons
,
& M. le Chevalier
de Conslans, Colonel d'infanterie. Les deux premiers
deces Messieurs ont epoulé
deux Dames de lamailon
de Rochoir, filles du Marquis de Jussac, Lieutenant
general des arméesduRoy, j& de Madamela Marquile
de Jussac, ci-devant Gouvernante de Son Alteflc
RoyaleMadame la Du- chesse d'Orléans. Ils font
tous trois fils duMarquis
de saint Remy, & dune Dame de la maison d'AgueC.
tseau.
DamoiselleLoiiifc-Victoire d'Harville, Ellede
Messire Claude
-
Antoine
d'Harville,ChevalierComte dudit lieu, Seigneur de
la Selle
,
Beaumoret, ôcc.
Lieutenantgeneral pour le
Roy au pays Chartrain,
mourut sans alliance le six
Avril 1712.
M. le Comte d'Harville a
été marie deux fois. Il a eu
du premier lit N. d'Harville, épouse de N. Palatin de
Dio, Comte de Montperoux, MestredeCamp general de la Cavalerie Legere de France, & Lieutenantgeneral des armées du
Roy.
Roy. Ce Seigneur eut pour
frere M.le Marquis de Palezeau
,
Gouverneur de
Charleville, & pour sœurs
Mesdames la Duchesse de
Bethune d'Orval &la Marquise de Montmorenci-Fosseuse. Lamaison d'Harville-Palezeau est une des plus
considerables du Royaume
,
soit par les alliances
ou les dignitez. Lamaison
des UrUns est tombée dans
cette maison. Le fameux
Chancelier JuvenaldesUrsins est un des grands-peres
du Comte d'Harville.
Ilfaut remarquerque
dansges
temps*làladi—
gnité deChancelier de
Franceétoit possédée
pardes gens de guerre.
L'histoire rapporte que
fous leregne de Charles,VII. le Comte: de
Dunoisayant prisBordeaux surles Anglois,
faisantsonentrée à Bor*-
deaux avoitàcôtéde lui
le Chancelier
,
des Ursïns, qui étoit arçné1 de
toute /pièce* On remat'-
que pareillement que le
Chancelier deRochefort marchoit en pareil
équipagedevant leRoy
Loüis XI. Ilparoîtpar
l'histoirequec'est le dernier homme de guerre
- qui ait possedé cette dignité.
Damoiselle Henriette de
Conslans, Marquised'Armentieres, mourut sans alliance le 14. Avril, dansun
âge fort avancé.
La maison de Conflans
est une des plus anciennes
du Royaume: elle pretend
tirerson origine des anciens
Comtes de Brieres. Elle a
été fertile en Seigneurs illustres, qui se font distinguez par leur valeur, par les belles actions qu'ils ont
faites auservice des Rois,
& les dignitez considerables qu'ilsontpossedées
dans le Royaume. Cette
Démoiselle est la derniere
desa branche. Il reste encor
de cette illustré maison M.
le Marquis d'Armentieres,
premier Gentilhomme de
la Chambre de Son Altesse
Royale Monseigneur le
Duc d'Orleans; & M. le
Marquis de Conslans, cidevant Colonel de Dragons
,
& M. le Chevalier
de Conslans, Colonel d'infanterie. Les deux premiers
deces Messieurs ont epoulé
deux Dames de lamailon
de Rochoir, filles du Marquis de Jussac, Lieutenant
general des arméesduRoy, j& de Madamela Marquile
de Jussac, ci-devant Gouvernante de Son Alteflc
RoyaleMadame la Du- chesse d'Orléans. Ils font
tous trois fils duMarquis
de saint Remy, & dune Dame de la maison d'AgueC.
tseau.
DamoiselleLoiiifc-Victoire d'Harville, Ellede
Messire Claude
-
Antoine
d'Harville,ChevalierComte dudit lieu, Seigneur de
la Selle
,
Beaumoret, ôcc.
Lieutenantgeneral pour le
Roy au pays Chartrain,
mourut sans alliance le six
Avril 1712.
M. le Comte d'Harville a
été marie deux fois. Il a eu
du premier lit N. d'Harville, épouse de N. Palatin de
Dio, Comte de Montperoux, MestredeCamp general de la Cavalerie Legere de France, & Lieutenantgeneral des armées du
Roy.
Roy. Ce Seigneur eut pour
frere M.le Marquis de Palezeau
,
Gouverneur de
Charleville, & pour sœurs
Mesdames la Duchesse de
Bethune d'Orval &la Marquise de Montmorenci-Fosseuse. Lamaison d'Harville-Palezeau est une des plus
considerables du Royaume
,
soit par les alliances
ou les dignitez. Lamaison
des UrUns est tombée dans
cette maison. Le fameux
Chancelier JuvenaldesUrsins est un des grands-peres
du Comte d'Harville.
Ilfaut remarquerque
dansges
temps*làladi—
gnité deChancelier de
Franceétoit possédée
pardes gens de guerre.
L'histoire rapporte que
fous leregne de Charles,VII. le Comte: de
Dunoisayant prisBordeaux surles Anglois,
faisantsonentrée à Bor*-
deaux avoitàcôtéde lui
le Chancelier
,
des Ursïns, qui étoit arçné1 de
toute /pièce* On remat'-
que pareillement que le
Chancelier deRochefort marchoit en pareil
équipagedevant leRoy
Loüis XI. Ilparoîtpar
l'histoirequec'est le dernier homme de guerre
- qui ait possedé cette dignité.
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Résumé : MORTS.
Le texte relate le décès de deux dames et fournit des informations sur leurs familles respectives. La Marquise d'Armentières, Henriette de Conflans, est décédée sans alliance le 14 avril à un âge avancé. Issue de la maison de Conflans, l'une des plus anciennes du Royaume, elle est la dernière de cette branche. La famille compte encore le Marquis d'Armentières, premier Gentilhomme de la Chambre du Duc d'Orléans, le Marquis de Conflans, ancien Colonel de Dragons, et le Chevalier de Conflans, Colonel d'infanterie. Ces trois hommes sont fils du Marquis de Saint-Rémy et d'une dame de la maison d'Aguessau, et sont mariés à des dames de la maison de Rochoir. Louise-Victoire d'Harville, fille du Chevalier Comte Claude-Antoine d'Harville, est décédée sans alliance le 6 avril 1712. Le Comte d'Harville a été marié deux fois et a eu une fille, épouse du Comte de Montperoux. Il avait pour frère le Marquis de Palezeau et pour sœurs la Duchesse de Bethune d'Orval et la Marquise de Montmorency-Fosseuse. La maison d'Harville-Palezeau est notable par ses alliances et dignités, incluant la maison des Ursins. Le Chancelier Juvenal des Ursins, grand-père du Comte d'Harville, est mentionné pour son rôle militaire sous Charles VII.
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28
p. [1]36-142
Nouvelles d'Allemagne.
Début :
L'Archiduc a cassé la Regence de l'Autriche inferieure pour en [...]
Mots clefs :
Allemagne, Troupes, Comte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles d'Allemagne.
Nouvelles d'Allemagne.
L'Archiduca caffé la Regence de l'Autriche infericu
re pour en établir une nouvelle;le Comte SigifmondFrederic de Kevenhiller en a
efté fait Prefident , ila nomméunVice- Prefident & quas
rante Conſeillers ; ce chan
GALANT. 437
gement a fait ungrand nombre de Mécontents , à caufe
que plufieurs perfonnes de
diftinction'en ont efté exi1
lées. Le Comte de Staremberg demande de prompts
& puiffants fecours ; on travaille à luy envoyer le plûtoft qu'il fera poffible de
l'argent & des Troupes. Un
Courrier arrivé de BarcelonInca rapporté que l'Archi-
-ducheffe leftoit entierement
guerie de fon indifpofiition ;
qu'elle attendoit avec impatience l'Eſcadre fur laquelle elle devoir s'embarMay 1712.
M
+38 MERGURE
quer pour retourner à Vien
no. Les Lettres de Conftantinople du 15 Mars affurent
que la guerre avoit cfté de
nouveau refoluë , à moins
que le Czar ne retiré toutes
Les Troupes de Pologne &
d'Ukraine , qu'il n'accorde
au Roy de Suede un libre
paffage par la Pologne ; qu'il
ne le mêle plus des affaitesde ce Royaume- là , & qu'il
-reſticuë à Sa Majeſté Sukdojfe toutes les conqueſtes qu'il
a faites. Commeon ne croit
pas que le Czar confente à
ces demandes , les Turcs
CALANT. 139
font de grands preparatifs.
Ils ont encore envoyé de
grandes ſommes au Roy de
Suede qui fe tient preſt
marcher vers la Pologne le
15. de May avec toutes fes
Troupes , celles du Palatin
de Kiovie & un grand renfort de Turcs & de Tarta
res entreroient en Ukraine
& en Mofcovic. Ces nouvelles donnent beaucoup
d'inquietude , daurant qu'il
ya peu de Troupes en Hongric , que les Places font en
mauvais cftat , qu'il y a un
grand nombre de Mécon
Mij
140 MERCURE
tens. Le Comte de Thaun
continuera cette . Campa
gne
1
de commander en Italic les Troupes Auftrichiennes l'Archiduc a nommé
pour commander fous luy
Je Comte de Thierheim qui
Le prepare à partir pour ce
pais là . Le depart de l'Archiduc pour aller à Pref
bourg , avoit eflé fixé au
o de ce mois, mais on croit
qu'il fera differé jufqu'aprés
la Pentecofte à caufe que le
Danubeeft débordé de nou .
veau ayant inondé la
campagne. On affure que
11
GALANT. 141
le Prince Ragotzi & le Comte Berezini ont fait entendre
à la Cour Orromane que fi
selle leur donnoit un ſecours
mediocre , ils eftoient én
eftat de faire une puiffante
-diverfion.
L'Archiduca caffé la Regence de l'Autriche infericu
re pour en établir une nouvelle;le Comte SigifmondFrederic de Kevenhiller en a
efté fait Prefident , ila nomméunVice- Prefident & quas
rante Conſeillers ; ce chan
GALANT. 437
gement a fait ungrand nombre de Mécontents , à caufe
que plufieurs perfonnes de
diftinction'en ont efté exi1
lées. Le Comte de Staremberg demande de prompts
& puiffants fecours ; on travaille à luy envoyer le plûtoft qu'il fera poffible de
l'argent & des Troupes. Un
Courrier arrivé de BarcelonInca rapporté que l'Archi-
-ducheffe leftoit entierement
guerie de fon indifpofiition ;
qu'elle attendoit avec impatience l'Eſcadre fur laquelle elle devoir s'embarMay 1712.
M
+38 MERGURE
quer pour retourner à Vien
no. Les Lettres de Conftantinople du 15 Mars affurent
que la guerre avoit cfté de
nouveau refoluë , à moins
que le Czar ne retiré toutes
Les Troupes de Pologne &
d'Ukraine , qu'il n'accorde
au Roy de Suede un libre
paffage par la Pologne ; qu'il
ne le mêle plus des affaitesde ce Royaume- là , & qu'il
-reſticuë à Sa Majeſté Sukdojfe toutes les conqueſtes qu'il
a faites. Commeon ne croit
pas que le Czar confente à
ces demandes , les Turcs
CALANT. 139
font de grands preparatifs.
Ils ont encore envoyé de
grandes ſommes au Roy de
Suede qui fe tient preſt
marcher vers la Pologne le
15. de May avec toutes fes
Troupes , celles du Palatin
de Kiovie & un grand renfort de Turcs & de Tarta
res entreroient en Ukraine
& en Mofcovic. Ces nouvelles donnent beaucoup
d'inquietude , daurant qu'il
ya peu de Troupes en Hongric , que les Places font en
mauvais cftat , qu'il y a un
grand nombre de Mécon
Mij
140 MERCURE
tens. Le Comte de Thaun
continuera cette . Campa
gne
1
de commander en Italic les Troupes Auftrichiennes l'Archiduc a nommé
pour commander fous luy
Je Comte de Thierheim qui
Le prepare à partir pour ce
pais là . Le depart de l'Archiduc pour aller à Pref
bourg , avoit eflé fixé au
o de ce mois, mais on croit
qu'il fera differé jufqu'aprés
la Pentecofte à caufe que le
Danubeeft débordé de nou .
veau ayant inondé la
campagne. On affure que
11
GALANT. 141
le Prince Ragotzi & le Comte Berezini ont fait entendre
à la Cour Orromane que fi
selle leur donnoit un ſecours
mediocre , ils eftoient én
eftat de faire une puiffante
-diverfion.
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Résumé : Nouvelles d'Allemagne.
En 1712, plusieurs événements politiques et militaires marquent l'Allemagne et l'Europe de l'Est. En Autriche, l'archiduc destitue la Régence et nomme le Comte Sigismond-Frédéric de Kevenhüller président, suscitant l'insatisfaction de certains notables exclus. Le Comte de Starhemberg sollicite des secours financiers et militaires, en cours d'envoi. L'archiduchesse, rétablie, attend une escadre pour retourner à Vienne. À Constantinople, la guerre menace de reprendre si le Czar ne retire pas ses troupes de Pologne et d'Ukraine, n'accorde pas un libre passage au roi de Suède, et ne restitue pas ses conquêtes. Les Turcs se préparent à la guerre et soutiennent le roi de Suède, qui se prépare à marcher vers la Pologne avec des renforts turcs et tartares. Cette situation inquiète en raison du faible nombre de troupes en Hongrie et de l'état déplorable des places fortes. Le Comte de Thau continuera à commander en Italie, secondé par le Comte de Thierheim. Le départ de l'archiduc pour Presbourg est reporté en raison des inondations du Danube. Enfin, le Prince Ragotzi et le Comte Berezini proposent à la Cour orromane de créer une diversion si un secours leur est accordé.
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29
p. 147-152
Nouvelles d'Angleterre.
Début :
On a imposé une taxe sur chaque feüille de parchemin [...]
Mots clefs :
Angleterre, Comte, Gouverneur, Londres, Régiments
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texteReconnaissance textuelle : Nouvelles d'Angleterre.
Nouvelles d'Angleterre.
12On a impofé une taxe
fur chaque feuille de parche
min ou papier qui feront
employées dans les Contrats
ou Actes qui fe feront dans
toute la grande Bretagne.
Une autre taxe fur chaque
feülle employée à la vente
des actions fur les fonds pug
blics que les acquereurs feront tenus de payer. Une
fur les Feuilles de nouvelles
manufcrites ou imprimées.
Une fur les cartes & les
Nij
148 MERCURE
1
dez , & une fur les Cartons
d'Angleterre & Etrangers ,
qu'on levera ces taxes durant trente deux ans Sa
Majefté Britannique a nom
mé dans fon Confeil le Duc
de Shrewsbury , Grand
Chambellan de la maifon
de fa Majefté pour eftre
Gouverneur du Comté de
Salop à la place du Comte
de Bradford.
Le Duc de Northumberland , Gouverneur du
Comté de Berks , à la place
du Comte de Craven."
1
Le Comte de Thaner ,
GALANT. 149
Gouverneur des Comtéz de
Cumberland & de Weftmorlandà la place du Comte
de Carlifle, en
Le Comte d'Avingdon,
Gouverneur du Comté
d'Oxford ,' à la place de Mylord Marlbourough.
L'Evêque de Durham , à
la place du Comte de Scar
bourough, chu 10/0
Le Vicomte Cheyne ,
Gouverneur du Comté de
Buckingham à la place du
Comte de Bridgewater ,
Gendre de Milord Marl
bouroug
N iij
MERCURE 150
1
Tous ces Seigneurs font
fort attachez à l'Eglife Anglicane.
On confirme que la Reine
a envoyé ordre en Irlande
de caffer deux Regiments
dont les Soldats feront in
corporez en d'autres corps
que Sa Majesté a donné de
pareils ordres pour refor
mer une partie des troupes
qui font en Angleterre &
celles qui ont fervi à l'expedition du Canada, afin de
rendre complettes les Gat
nifons des places d'Ecoffe au
lieu de Regiments Ecoffois
GALANT Ĵ
qui y font & qui doivent
venir en Angleterre.
Les lettres de Londres
affurent qu'il s'eft formé
une focieté de vingt -une
perfonnes de qualité &
riches pour favorifer les
fciences & les arts , en rel
compenfant & procurant
des emplois à ceux qui fe
diftingueront par leurs ou
vrages.
12On a impofé une taxe
fur chaque feuille de parche
min ou papier qui feront
employées dans les Contrats
ou Actes qui fe feront dans
toute la grande Bretagne.
Une autre taxe fur chaque
feülle employée à la vente
des actions fur les fonds pug
blics que les acquereurs feront tenus de payer. Une
fur les Feuilles de nouvelles
manufcrites ou imprimées.
Une fur les cartes & les
Nij
148 MERCURE
1
dez , & une fur les Cartons
d'Angleterre & Etrangers ,
qu'on levera ces taxes durant trente deux ans Sa
Majefté Britannique a nom
mé dans fon Confeil le Duc
de Shrewsbury , Grand
Chambellan de la maifon
de fa Majefté pour eftre
Gouverneur du Comté de
Salop à la place du Comte
de Bradford.
Le Duc de Northumberland , Gouverneur du
Comté de Berks , à la place
du Comte de Craven."
1
Le Comte de Thaner ,
GALANT. 149
Gouverneur des Comtéz de
Cumberland & de Weftmorlandà la place du Comte
de Carlifle, en
Le Comte d'Avingdon,
Gouverneur du Comté
d'Oxford ,' à la place de Mylord Marlbourough.
L'Evêque de Durham , à
la place du Comte de Scar
bourough, chu 10/0
Le Vicomte Cheyne ,
Gouverneur du Comté de
Buckingham à la place du
Comte de Bridgewater ,
Gendre de Milord Marl
bouroug
N iij
MERCURE 150
1
Tous ces Seigneurs font
fort attachez à l'Eglife Anglicane.
On confirme que la Reine
a envoyé ordre en Irlande
de caffer deux Regiments
dont les Soldats feront in
corporez en d'autres corps
que Sa Majesté a donné de
pareils ordres pour refor
mer une partie des troupes
qui font en Angleterre &
celles qui ont fervi à l'expedition du Canada, afin de
rendre complettes les Gat
nifons des places d'Ecoffe au
lieu de Regiments Ecoffois
GALANT Ĵ
qui y font & qui doivent
venir en Angleterre.
Les lettres de Londres
affurent qu'il s'eft formé
une focieté de vingt -une
perfonnes de qualité &
riches pour favorifer les
fciences & les arts , en rel
compenfant & procurant
des emplois à ceux qui fe
diftingueront par leurs ou
vrages.
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Résumé : Nouvelles d'Angleterre.
Le texte décrit plusieurs décisions administratives et fiscales en Angleterre. Une taxe a été imposée sur chaque feuille de parchemin ou de papier utilisée dans les contrats et actes en Grande-Bretagne. Des taxes supplémentaires ont été instaurées sur les feuilles utilisées pour la vente d'actions sur les fonds publics, les nouvelles manuscrites ou imprimées, les cartes et les cartons d'origine anglaise ou étrangère. Ces taxes seront levées pendant trente-deux ans. Le roi britannique a nommé plusieurs nouveaux gouverneurs de comtés : le Duc de Shrewsbury pour le comté de Salop, le Duc de Northumberland pour le comté de Berks, le Comte de Thanet pour les comtés de Cumberland et de Westmorland, le Comte d'Avingdon pour le comté d'Oxford, l'Évêque de Durham, et le Vicomte Cheyne pour le comté de Buckingham. Tous ces seigneurs sont fortement attachés à l'Église anglicane. La reine a ordonné la dissolution de deux régiments en Irlande, dont les soldats seront incorporés dans d'autres corps. Des ordres similaires ont été donnés pour réformer certaines troupes en Angleterre et celles ayant servi lors de l'expédition du Canada, afin de compléter les garnisons des places fortes. Enfin, une société de vingt-et-une personnes de qualité et riches s'est formée à Londres pour favoriser les sciences et les arts, en récompensant et en procurant des emplois à ceux qui se distingueront par leurs œuvres.
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30
p. 70-76
Nouvelles d'Allemagne.
Début :
Le départ de l'Archiduc pour aller en Hongrie a été [...]
Mots clefs :
Comte, Archiduc, Hongrie, Couronnement
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles d'Allemagne.
Nouvelles d'Allemagne.
Le départ de l'Archiduc
pour aller en Hongrie a
été fixé au 18. de May. 11
GALANT.
על
22
fera fon entrée à Prefbourg
le 19. & il fera couronné le
la ratifié tout ce que
Imperatrice fa Mere avoit
accordé aux Hongrois.
- LeComte Nicolas Illief
hafi a été confirmé dans la
Charge de Chancelier de la
Cour duRoyaume de Hongrie , qu'il avoit exercée
fous le feu Empereur Jo
feph. Ona envoyé plufieurs
Ingenieurs en Hongrie
pour faire reparer les pla
ces & faire de nouvelles
fortifications à celles qu'ils
jugeront en avoir befoin.
>
72 MERCURE
Les lettres de Presbourg,
portent que le Prince Ra
gotzi & le Comte Berzini
avoient fait délivrer à la
Diete une proteftation contre le couronnement de
L'Archiduc , à caufe que la!
depofition du feu Roy Jo
feph s'étoit faite à Onoth
du confentement de tous
les Etats du Royaume, &
que fi le couronnement ne
fe faifoit de la même ma
niere dans une Diete libre
il feroit abfolument nul...
L'Archiduc partit de cette ville le 18. il alla coucher
au
GALANT. 73
e
3
au château de Petronel, qui
appartient au Comte de
Traun. Il s'avança le 19. jufqu'à Vvolfftal , où il fut
complimenté de la part des
.3
Etats par le Comte Emerie
Czaki , Archevêque de Colocza , le Comte de Telekefi Evêque d'Agria , le
Comte Sigifmond Czaki ,
le ComteEftienne Budiani;
de la Table ou Chambre
haute des Etats , & par douze Deputez de la Table baf
fe. Al'entrée du Royaume
il rencontra le refte des Etats de Hongrie , qui , fuiJuin 1712.
G
74 MERCURE
vant l'ordre qu'il avoit donné , n'avoient point amené,
felon l'ancienne coûtume ,
leurs troupes armées avec
leurs Officiers , leurs timbales & leurs trompettes
de crainte qu'il ne ſe fit
quelque defordre. Il n'y avoit que le regiment de cavalerie de Rabutin. Aprés
avoir reçû leurs compli
mens , il monta à cheval ,
&traverfa le Danube fur le
pont debarques , gardépar
le regiment d'infanterie de
Neubourg. Il continua ſa
marche vers la ville , où les
GALANT 75
Magiftrats lui preſenterent
les clefs. Les Bourgeois ar
mez étoient rangez depuis
le pont jufqu'à la porte par
où l'on va au châteaur , ou
al entra au bruit d'une dé
charge de toute l'artillerie.
Il fut d'abord à la Chapelle,
oùl'on chanta le Te Deum.
Le 20. aprés que le Cardinal de Saze Zeits , Archevêque de Strigonie , et ce
kelebré la Meffe du Saint EL
ar
prit , il monta fur le Trône,
doù leComteIlleshafi , Chancelier de Hongrie , fit en
peu de. mots aux Etats du
G ij
76 MERCURE
Royaume les propofitions
de l'Archiduc aprés quoy
ce Prince remit entre les
mains du Cardinal Zeits un
paquet cacheté , où ces mêmes propofitions étoient
plus amplementexpliquées.
Le départ de l'Archiduc
pour aller en Hongrie a
été fixé au 18. de May. 11
GALANT.
על
22
fera fon entrée à Prefbourg
le 19. & il fera couronné le
la ratifié tout ce que
Imperatrice fa Mere avoit
accordé aux Hongrois.
- LeComte Nicolas Illief
hafi a été confirmé dans la
Charge de Chancelier de la
Cour duRoyaume de Hongrie , qu'il avoit exercée
fous le feu Empereur Jo
feph. Ona envoyé plufieurs
Ingenieurs en Hongrie
pour faire reparer les pla
ces & faire de nouvelles
fortifications à celles qu'ils
jugeront en avoir befoin.
>
72 MERCURE
Les lettres de Presbourg,
portent que le Prince Ra
gotzi & le Comte Berzini
avoient fait délivrer à la
Diete une proteftation contre le couronnement de
L'Archiduc , à caufe que la!
depofition du feu Roy Jo
feph s'étoit faite à Onoth
du confentement de tous
les Etats du Royaume, &
que fi le couronnement ne
fe faifoit de la même ma
niere dans une Diete libre
il feroit abfolument nul...
L'Archiduc partit de cette ville le 18. il alla coucher
au
GALANT. 73
e
3
au château de Petronel, qui
appartient au Comte de
Traun. Il s'avança le 19. jufqu'à Vvolfftal , où il fut
complimenté de la part des
.3
Etats par le Comte Emerie
Czaki , Archevêque de Colocza , le Comte de Telekefi Evêque d'Agria , le
Comte Sigifmond Czaki ,
le ComteEftienne Budiani;
de la Table ou Chambre
haute des Etats , & par douze Deputez de la Table baf
fe. Al'entrée du Royaume
il rencontra le refte des Etats de Hongrie , qui , fuiJuin 1712.
G
74 MERCURE
vant l'ordre qu'il avoit donné , n'avoient point amené,
felon l'ancienne coûtume ,
leurs troupes armées avec
leurs Officiers , leurs timbales & leurs trompettes
de crainte qu'il ne ſe fit
quelque defordre. Il n'y avoit que le regiment de cavalerie de Rabutin. Aprés
avoir reçû leurs compli
mens , il monta à cheval ,
&traverfa le Danube fur le
pont debarques , gardépar
le regiment d'infanterie de
Neubourg. Il continua ſa
marche vers la ville , où les
GALANT 75
Magiftrats lui preſenterent
les clefs. Les Bourgeois ar
mez étoient rangez depuis
le pont jufqu'à la porte par
où l'on va au châteaur , ou
al entra au bruit d'une dé
charge de toute l'artillerie.
Il fut d'abord à la Chapelle,
oùl'on chanta le Te Deum.
Le 20. aprés que le Cardinal de Saze Zeits , Archevêque de Strigonie , et ce
kelebré la Meffe du Saint EL
ar
prit , il monta fur le Trône,
doù leComteIlleshafi , Chancelier de Hongrie , fit en
peu de. mots aux Etats du
G ij
76 MERCURE
Royaume les propofitions
de l'Archiduc aprés quoy
ce Prince remit entre les
mains du Cardinal Zeits un
paquet cacheté , où ces mêmes propofitions étoient
plus amplementexpliquées.
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Résumé : Nouvelles d'Allemagne.
Le texte décrit les événements entourant le départ et le couronnement de l'Archiduc en Hongrie. Le départ de l'Archiduc a été fixé au 18 mai. Il a passé la nuit au château de Petronel, propriété du Comte de Traun, avant de continuer son voyage jusqu'à Vvolfftal, où il a été accueilli par des dignitaires religieux et politiques. À l'entrée du royaume, il a rencontré les États de Hongrie, qui n'avaient pas amené leurs troupes armées par crainte de désordre. L'Archiduc a ensuite traversé le Danube et est entré dans la ville, accueilli par les magistrats et les bourgeois armés. Le 20 mai, après une messe célébrée par le Cardinal de Saze Zeits, l'Archiduc a été couronné. Le Comte Illeshafi, Chancelier de Hongrie, a présenté les propositions de l'Archiduc aux États du royaume, détaillées dans un paquet cacheté remis au Cardinal Zeits. Le Comte Nicolas Illeshafi a été confirmé dans sa charge de Chancelier. Plusieurs ingénieurs ont été envoyés pour réparer et fortifier les places nécessaires. Les Princes Ragotzi et le Comte Berzini ont protesté contre le couronnement, estimant que la déposition du roi Joseph s'était faite avec le consentement de tous les États et que le couronnement devait se faire dans une Diète libre.
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31
p. 238-240
Nouvelles d'Allemagne.
Début :
Le Prince de Schwartzenberg, le Comte de Mollart, & le [...]
Mots clefs :
Comte, Allemagne, Protestants
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles d'Allemagne.
«-
«$»;.
Le Prince deSchvvartzenberg, le Comte de Mollart,
& le Comtede GalUrfch se
preparentà partir pour accompagner en Catalogne
l'Archiduchesse Marie-Elisabeth,quivatenirà Barxjçelonnelapiace,del'Arçl^i-
,
d^chelle, quelePrince
deSchvvartzenberg& le
Comte de Mollart doivent
-
ramener-,.ôc leComte de
.CaHarich yrestera en qua- kté d^GraadlMaîtredela
J)..,
Maison dela Princesse.
On écrit de Presbourg.
Que l'Archiducaaccordée
auxProtestans la permission de bâtirdes Temples
-
à
,
kurs dépens. Comme il ya
encoredesHongrois en arn)es, que fëJPrjpcç Ragotziarefuséd'accepter
-
-
l'amnistie qui lui aété of-
.'fçttt de k part de l'Archiduc, dac,.onondoit doitenvoyertrois envoyer [~ojs
regimens qui
,. campoient
gtiro'ur de Presbourg,vers
les frontieres de Hongrie&
de Transylvanie, pour dissiper ces Mécontens, &veil-
ler à la sûretéde ces pays-là.
Les lettres de Constantinop!e portent que les Turcs
persistenttoûjoursàvouloir
faire escorterle Roy de Suede dans ses Eracs;,& qu'il
paroissoit qu'ayant appris lesresolutionsprises en Angleterre pour lapaix, ils ne laconcluroient pas à preficnt avec le Czar,sielle n'é-
.,roit pas déja faite, &qu'ils
font disposezà renouveller
,,, ,
.; la guerre à
la moindrec°+t- jjr^vention '-'-'.,
«$»;.
Le Prince deSchvvartzenberg, le Comte de Mollart,
& le Comtede GalUrfch se
preparentà partir pour accompagner en Catalogne
l'Archiduchesse Marie-Elisabeth,quivatenirà Barxjçelonnelapiace,del'Arçl^i-
,
d^chelle, quelePrince
deSchvvartzenberg& le
Comte de Mollart doivent
-
ramener-,.ôc leComte de
.CaHarich yrestera en qua- kté d^GraadlMaîtredela
J)..,
Maison dela Princesse.
On écrit de Presbourg.
Que l'Archiducaaccordée
auxProtestans la permission de bâtirdes Temples
-
à
,
kurs dépens. Comme il ya
encoredesHongrois en arn)es, que fëJPrjpcç Ragotziarefuséd'accepter
-
-
l'amnistie qui lui aété of-
.'fçttt de k part de l'Archiduc, dac,.onondoit doitenvoyertrois envoyer [~ojs
regimens qui
,. campoient
gtiro'ur de Presbourg,vers
les frontieres de Hongrie&
de Transylvanie, pour dissiper ces Mécontens, &veil-
ler à la sûretéde ces pays-là.
Les lettres de Constantinop!e portent que les Turcs
persistenttoûjoursàvouloir
faire escorterle Roy de Suede dans ses Eracs;,& qu'il
paroissoit qu'ayant appris lesresolutionsprises en Angleterre pour lapaix, ils ne laconcluroient pas à preficnt avec le Czar,sielle n'é-
.,roit pas déja faite, &qu'ils
font disposezà renouveller
,,, ,
.; la guerre à
la moindrec°+t- jjr^vention '-'-'.,
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Résumé : Nouvelles d'Allemagne.
L'Archiduchesse Marie-Élisabeth se prépare à se rendre en Catalogne, accompagnée du Prince de Schwarzenberg, du Comte de Mollart et du Comte de Gallurch. Elle visitera Barcelone avant de revenir avec le Prince de Schwarzenberg et le Comte de Mollart. Le Comte de Caharich restera en tant que Grand Maître de la Maison de la Princesse. À Presbourg, l'Archiduc a autorisé les Protestants à construire des temples à leurs frais. En raison de la présence de Hongrois armés et du refus du Prince Rákóczi d'accepter l'amnistie, trois régiments sont envoyés vers les frontières de Hongrie et de Transylvanie pour disperser les mécontents et assurer la sécurité. Les lettres de Constantinople révèlent que les Turcs insistent pour escorter le Roi de Suède et sont informés des résolutions anglaises pour la paix. Ils refusent de conclure la paix avec le Czar si celle-ci n'est pas déjà faite et se tiennent prêts à renouveler les hostilités en cas d'intervention.
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32
p. 61-70
MORT.
Début :
Le Marquis de Lostanges Chevalier de l'Ordre Militaire de Saint Loüis [...]
Mots clefs :
Régiment, Mort, Cavalerie, Bataille, Comte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORT.
MORT.
LE Marquis de Loftanges
Chevalier de l'Ordre
Militaire de SaintLouis
Colonel du Regiment de,
Lostanges Infanrerie,mourut
en cette Ville le huit
Avril
,
âgé de trente ans.
Il estoit iflii de la Maison
de Lostanges, une desplus
illustres&anciennes du Li
mousin.Ellen'estpasmoins
recommandable par ses alliances
que par les grands
hommes quelle a produits.
Dans le douzième fiecltf
elleestoit trèsconnuë sous
le nom des Aymar de Lofranges.
La Branche aisnée
finitfous Henry IV. par le
fameux duel du Seigneur
de Loftanges avec le Seigneur
de S. Chamans du
Pescher; & ce fut dans ce
temps-là que la Terre de
Lostanges passa dans la
Maison de Pierre-Bussiere
par le mariage d'une fille
de Lostanges
,
d'où sont
descendus le Marquis de
Lostanges, Lieutenant des
Gardes du Roy,qui fut tué
devant Mons en 1691. Le
Comte de Lostanges qui
commandoit la Cavalerie
de Brandebourg en Italie,
& le Marquis de Lostanges
mort en Flandres en 1707.
Colonel du Regiment de
Lostanges,& Brigadierdes
armées du Roy. - -' Des l'an 1406. Jean Aymar
de Lostanges daneson fentrai de mariage avec
Anthoinette de Veirines
dite de Limeüil Dame de
saint Alvaireen Perigord
-, il prend la qualitéde Cheyalier
hDt-& puissant Seigneur
, iflii de la noble&
ancienne famille de Lo£
canges en Limousin.C'est
deluy que descendent les
Marquis de saint Alvaire
en Perigord
,
quiestaujourd'huy
la Branche aisnée,
les Marquis de Bedüer
& de Felzins en Querci,
donc estoit le Marquis de
Lostanges qui vient de
mourir, qui le distingua si
fort au Sièged'Aire en
1710. sur tout à la défense
du Chemin couvert, où il
s'attira l'estime de toute la
garnison. Il estoit fils de
Jean Margarit de Lostanges
ges Marquis de Felzins,
Capitaine dans le Régiment
de Monseigneur le
Duc de Bourgogne, Cavalerie,&
de Marguerite de
Corn Dampare
,
duquel
mariage est issu aussi Hiacinte
Marquis de Felzins
Capitaine dans Royal,
Roussillon Cavalerie
,
quiJ
atousjours servi avec beaucoup
de distinction. Leur
pere estoit fils puisné de
Jean-Louis de Loftanges
Comte de Bedüer Capitaine
commandant le Regiment
de Candale, Cavalerie
; ôc de Francoise de
Gourdon Genoüillac de
Vaillac.L'aisné estoit
François-Louis de Lostanges,
Marquis deBediier^
Capitaine de Cavalerie
dans le Regiment de Saus- eréJqui fut blessé d'un coup
de pistoler à la gorge prés
de Francfort en 1674. Il
mourut en 1671. Colonel
d'un Regiment d'Infanterie
des Milices de Roüergue
:
il avoitépousé Renée
Menardeau fille de
Claude Menardeau de
Champré Doyen du Par1cment,
Con seillerd'f. stat,
Diredeur & Controlleur
General des Finances, ôc
de Catherine Henry son
épouse
,
duquel mariage
sont iiïus Loüis-Henry
Comte de Bedüerqui fut
b'çffé à la Bataille de Fleurus,
Commandaht un Escadron
du Regiment du Rosel
: Emanuël Marquis de
Lostanges
,
Capitaine de
Cavalerie dans le Regiment
de Vaillac
,
tué en
Flandres en 1701. Jacques
Qit leChevalier deBeduer, i
Capitaine de Cavalerie
dans le Regiment de Vivans
S. Christotuéà la Bataille
de Fridlingen, Laurent
dit le ChevalierdeLostanges,
blessé au combat de
Lessingue ; & à la dernière
Batailled'Hocstet il commandoit
un Escadron où il
prit une paire de timbales.
En1711.enallantensemestreilfut
attaqué par un parti,
prit & blessa le partisan
qu'il conduisit à Abbeville:
Laurens,dit le Chevalier
de Bedüer, fut blessé â la
Bataille de Malplaquet:
autre Laurens dit le Baron
deBullac, Cornette
dans la Compagnie de son
Pere dans le Regiment de
Vivans S. Christo,fut tué
à la premiere Bataille de
Hocstet. Ils descendent
tous de Louis-François de
Loftanges leur bisayeul, &
de Jeanne de Marquessac,
qui servit fous les Rois
Henry IV.& LouisXIII.
en qualité de Colone l d'un
Regiment d'Infanterie,&
il fit en sa faveurque la
Baronnie de Bedüer fut
érigée en Vicomté. De la
Branche de faine Alvaire
est aussi sortie la Branche
des Comtes de Pailhé en
Xainconge.
Cette Maison est alliée
àcelles de Limeüil
,
d'Ufez,
d'Estrées, de Fenelon
Menardeau , - Champré
y Montmorency
-
Laval,
Montberon,Vaillac
,
Cadrieu,
Ebrard, S. Suplice,
&c.
LE Marquis de Loftanges
Chevalier de l'Ordre
Militaire de SaintLouis
Colonel du Regiment de,
Lostanges Infanrerie,mourut
en cette Ville le huit
Avril
,
âgé de trente ans.
Il estoit iflii de la Maison
de Lostanges, une desplus
illustres&anciennes du Li
mousin.Ellen'estpasmoins
recommandable par ses alliances
que par les grands
hommes quelle a produits.
Dans le douzième fiecltf
elleestoit trèsconnuë sous
le nom des Aymar de Lofranges.
La Branche aisnée
finitfous Henry IV. par le
fameux duel du Seigneur
de Loftanges avec le Seigneur
de S. Chamans du
Pescher; & ce fut dans ce
temps-là que la Terre de
Lostanges passa dans la
Maison de Pierre-Bussiere
par le mariage d'une fille
de Lostanges
,
d'où sont
descendus le Marquis de
Lostanges, Lieutenant des
Gardes du Roy,qui fut tué
devant Mons en 1691. Le
Comte de Lostanges qui
commandoit la Cavalerie
de Brandebourg en Italie,
& le Marquis de Lostanges
mort en Flandres en 1707.
Colonel du Regiment de
Lostanges,& Brigadierdes
armées du Roy. - -' Des l'an 1406. Jean Aymar
de Lostanges daneson fentrai de mariage avec
Anthoinette de Veirines
dite de Limeüil Dame de
saint Alvaireen Perigord
-, il prend la qualitéde Cheyalier
hDt-& puissant Seigneur
, iflii de la noble&
ancienne famille de Lo£
canges en Limousin.C'est
deluy que descendent les
Marquis de saint Alvaire
en Perigord
,
quiestaujourd'huy
la Branche aisnée,
les Marquis de Bedüer
& de Felzins en Querci,
donc estoit le Marquis de
Lostanges qui vient de
mourir, qui le distingua si
fort au Sièged'Aire en
1710. sur tout à la défense
du Chemin couvert, où il
s'attira l'estime de toute la
garnison. Il estoit fils de
Jean Margarit de Lostanges
ges Marquis de Felzins,
Capitaine dans le Régiment
de Monseigneur le
Duc de Bourgogne, Cavalerie,&
de Marguerite de
Corn Dampare
,
duquel
mariage est issu aussi Hiacinte
Marquis de Felzins
Capitaine dans Royal,
Roussillon Cavalerie
,
quiJ
atousjours servi avec beaucoup
de distinction. Leur
pere estoit fils puisné de
Jean-Louis de Loftanges
Comte de Bedüer Capitaine
commandant le Regiment
de Candale, Cavalerie
; ôc de Francoise de
Gourdon Genoüillac de
Vaillac.L'aisné estoit
François-Louis de Lostanges,
Marquis deBediier^
Capitaine de Cavalerie
dans le Regiment de Saus- eréJqui fut blessé d'un coup
de pistoler à la gorge prés
de Francfort en 1674. Il
mourut en 1671. Colonel
d'un Regiment d'Infanterie
des Milices de Roüergue
:
il avoitépousé Renée
Menardeau fille de
Claude Menardeau de
Champré Doyen du Par1cment,
Con seillerd'f. stat,
Diredeur & Controlleur
General des Finances, ôc
de Catherine Henry son
épouse
,
duquel mariage
sont iiïus Loüis-Henry
Comte de Bedüerqui fut
b'çffé à la Bataille de Fleurus,
Commandaht un Escadron
du Regiment du Rosel
: Emanuël Marquis de
Lostanges
,
Capitaine de
Cavalerie dans le Regiment
de Vaillac
,
tué en
Flandres en 1701. Jacques
Qit leChevalier deBeduer, i
Capitaine de Cavalerie
dans le Regiment de Vivans
S. Christotuéà la Bataille
de Fridlingen, Laurent
dit le ChevalierdeLostanges,
blessé au combat de
Lessingue ; & à la dernière
Batailled'Hocstet il commandoit
un Escadron où il
prit une paire de timbales.
En1711.enallantensemestreilfut
attaqué par un parti,
prit & blessa le partisan
qu'il conduisit à Abbeville:
Laurens,dit le Chevalier
de Bedüer, fut blessé â la
Bataille de Malplaquet:
autre Laurens dit le Baron
deBullac, Cornette
dans la Compagnie de son
Pere dans le Regiment de
Vivans S. Christo,fut tué
à la premiere Bataille de
Hocstet. Ils descendent
tous de Louis-François de
Loftanges leur bisayeul, &
de Jeanne de Marquessac,
qui servit fous les Rois
Henry IV.& LouisXIII.
en qualité de Colone l d'un
Regiment d'Infanterie,&
il fit en sa faveurque la
Baronnie de Bedüer fut
érigée en Vicomté. De la
Branche de faine Alvaire
est aussi sortie la Branche
des Comtes de Pailhé en
Xainconge.
Cette Maison est alliée
àcelles de Limeüil
,
d'Ufez,
d'Estrées, de Fenelon
Menardeau , - Champré
y Montmorency
-
Laval,
Montberon,Vaillac
,
Cadrieu,
Ebrard, S. Suplice,
&c.
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Résumé : MORT.
Le texte relate la mort du Marquis de Loftanges, Chevalier de l'Ordre Militaire de Saint-Louis et Colonel du Régiment de Lostanges Infanterie, survenue le 8 avril à l'âge de trente ans. Le Marquis appartenait à une des plus illustres et anciennes maisons du Limousin, connue sous le nom des Aymar de Loftanges depuis le douzième siècle. La branche aînée de cette famille s'est éteinte sous Henri IV à la suite d'un duel. La terre de Lostanges est passée dans la Maison de Pierre-Bussiere par le mariage d'une fille de Lostanges, d'où sont descendus plusieurs Marquis de Lostanges. Parmi eux, un Lieutenant des Gardes du Roi fut tué devant Mons en 1691, un Comte commanda la Cavalerie de Brandebourg en Italie, et un Marquis mourut en Flandres en 1707. Le Marquis de Lostanges récemment décédé appartenait à la branche des Marquis de Saint-Alvaire en Périgord, actuellement la branche aînée. Il s'est distingué lors du siège d'Aire en 1710, notamment à la défense du chemin couvert. Il était le fils de Jean Margarit de Lostanges, Marquis de Felzins, et de Marguerite de Corn Dampare. La famille de Lostanges compte plusieurs membres ayant servi avec distinction dans divers régiments de cavalerie et d'infanterie. Parmi eux, Hiacinte Marquis de Felzins et Louis-François de Loftanges, Colonel d'un Régiment d'Infanterie, ont servi sous les rois Henri IV et Louis XIII. La Maison de Lostanges est alliée à de nombreuses familles nobles, dont Limeüil, d'Ufé, d'Estrées, et Montmorency.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
33
p. 193-219
HISTORIETTE.
Début :
Il y auroit plus d'Amans heureux que l'on en voit, [...]
Mots clefs :
Amants, Marquis, Conseiller, Comte, Jeune héritière, Soeur, Parente, Coeur, Pouvoir, Amant, Mariage
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texteReconnaissance textuelle : HISTORIETTE.
HISTORIETTE,
IL y auroit plus d'Amans
heureux que l'on n'en voit
fi on laiffoit l'amour mail
tre de fes entrepriſes , mais
s'il peut toucher les coeurs
quand il luy plaiſt , il n'a
pas toûjours le pouvoir de
les unir. Des obftacles invincibles
renverfent fouvent
fes plus grands deffeins
, & ce qui eft le plus
chagrinant , c'eft qu'il fe
Mars
1714.
R
194 MERCURE
rencontre des occafions où
il fe nuit par luy même.
Un jeune Homme de qualité
, qui ayant un Marquifat
eftoit Marquis à bon titre,
devint amoureux d'une
des plus aimables Perfonnes
de la Ville où il demeuroit.
Elle eftoit d'une Famille
de Robe , & un Frere
unique qu'elle avoit
eftoit Confeiller au Parlement
de fa Province
mais il s'attendoit bien à
monter avec l'âge dans des
Charges plus confidéra-
Eles. Ce Frere eftoit alors
GALANT. 195
fur le point de revenir d'un
voyage d'Italie , & quoy
que fon retour fuft fort
proche , le Marquis nelaiffa
pas de faire affez de progrés
dans le coeur de cette
Belle , avant qu'il fuft revenu.
Elle eftoit vive naturel.
lement,, pleine de foins &
de zele pour ce qu'elle aimoit
, & fi fenfible à l'amitié
qu'on luy témoignoit
,
qu'il y avoit fujet d'efperer
que les empreffemens
de
l'amour ne luy feroient pas
indifférens
. Elle trouva le
Marquis affez aimable
Rij
196 MERCURE
>
pour le perfuader qu'elle
en pourroit eftre aimée , &
elle eftoit trop fincere pour
douter long- temps de la
fincerité des autres fur
tout quand ils eftoient agréables
. Enfin de la ma.
niere dont le Confeiller
vit les chofes difpofées à
fon retour
il jugea bien
qu'il ne feroit plus chargé
de fa Soeur , qu'autant que
des Articles de mariage à
regler le demanderoient
car elle ne dépendoit que
de luy. Le Marquis fit tous.
les pas neceffaires , & les
GALANT
* . 197
Amans alloient eftre heureux
, s'il n'y euft point eu
d'autre amour que le leur
dans leur Famille . Le Marquis
avoit une Couſine germaine
, qui eftoit demeurée
feule Heritiere d'un
grand Ben , par la mort
de fon Pere & de fa Mere.
Elle eftoit tombée fous fa
Tutelle , parce qu'un autre
Tuteur qu'elle avoit eu
d'abord , cftoit mort depuis
fix mois. C'eftoit au jeune
Tuteur à difpofer de fa jeu
ne Pupille ; mais elle avoit
difpofé elle mefme de fon
FR iij
198 MERCURE
coeur , fans avis de Parens .
Un Gentilhomme fort fpirituel
, & qui avoit affez
de naiffance , pour pouvoir
prendre le titre de Comte ,
avoit entrepris de plaire à
la Belle , & luy avoit plû.
Il avoit fait diverfes Campagnes
avec beaucoup de
dépenfe , & affez de réputation
. Cela ébloüiffoit fort:
l'aimable Héritiere
avoit le coeur tres - bien placé
. Par malheur pour le
Marquis , le Confeiller la
vit trop fouvent , & fon
coeur en fut touché. Elle
qui
THEQUE
GALANT.
BIBLIO
avoit tout l'air d'une
LY
BAD
DE
LA
VILLE
de naiſſance , une certain e
fierté qui luy feyoit bien ,
moins de beauté que de
manieres agréables , & un
art particulier de fe faire
extrémement valoir , fans
avoir pourtant d'orgueil
qui choquaft . Peut - eftre
auroit - il choqué dans une
Perfonne, qui cuft eu moins
de naiffance , moins de jeuneffe
, & moins de Bien .
Elle ne regardoit guére les
Hommes qu'avec une efpece
de dédain . Le Comre
eftoit le plus excepté ; en-
R iiij
200 MERCURE
core le traitoit elle quelquefois
comme les autres
, quand elle en avoit
envie . Tout cela charma
le Confeiller, Ileftoit affez
riche pour ne devoir pas
eftre foupçonné d'aimer la
jeune Heritiere pour fon
Bien. Cependant il ne laif
fa peut eft e pas d'avoir
quelques veues de ce coftélà.
Ce qui luy parut d'un
fort bon augure pour fa
paffion , ce fut l'amour du
Marquis & de fa Soeur. 11
trouvoit mefme quelque
chofe d'agréable à s'imaGALANT
. 201
giner la double alliance de
leurs Maifons , & l'échange
qu'elles ferojent entreelles
de ces deux jeunes
Perfonnes . Il découvrit fon
deffein au Marquis , & luy
exagera fort le plaifir qu'il
fe feroit de devenir fon
Coufin-germain , en mef
me temps qu'il deviendroit
fon Beau -frere . Le Marquis
ne reçût point cette
propofition avec autant de
joye qu'il euft dû naturellement
la recevoir . Il luy
parut auffi - toft , fans qu'il
fçuft trop pourquoy , que
202 MERCURE
4
c'eftoit une difficulté furvenue
à fes affaires il
euft beaucoup mieux aimé
qu'on n'euft parlé que d'une
alliance. Cependant
quand il y eut fait refléxion
, il ne trouva pas que
le mariage du Confeiller
avec la Parente , duft cftre
une chofe fi malaisée , &
it fe perfuada , ou il tâcha
de fe le perfuader que
quand mefme il ne fe feroit
pas , cela n'apportéroit
point d'obſtacle à fon
bonheur. Il alla donc propofer
le Confeiller à fa
.
GALANT. 103
Coufine , avec toute l'addreffe
dont fa paffion le
rendoit capable ; mais elle
luy fit connoiftre combien
elle eftoit peu difpofée à
fonger à ce Party . Il pric
encore trois ou quatre fois
le temps le plus favorable
qu'il put , pour traiter la
mefme matiere mais ce
fut toûjours inutilement .
Le Comte n'eftoit point
trop connu pour un Amant
de la Parente du Marquis ,
& moins encore pour un
Amant qu'elle aimaſt . Elle
avoit avec luy une manie-
>
204 MERCURE
re d'agir fi inégale , que
l'on eftoit bien embaraffé à
pouvoir juger de ce qui
eftoit entre eux . Ainfi le
Marquis ne fceut pas précifement
s'il devoit fe prendre
au Comte , de l'éloi
gnement que fa Coufine
montroit pour leConfeiller,
ou s'il ne devoit s'en pren
dre qu'au peu d'inclination
qu'elle faifoit voir en general
pour la Robe , ce qui
femblait eftre affez natu
rel à une jeune Perfonne ,
dont les yeux font plus fla
tez de l'équipage d'un Ca.
GALANT.
205
valier , que de celuy d'un
Magiftrat , & dont les oreilles
fe plaifent davantage au
récit d'une Campagne
qu'à celuy du jugement
d'un Procés. Le Marquis
fit entendre au Confeiller .
le plus honneftement qu'il
luy fur poffible , le mauvais
fuccés de fa négotiation. 11
ne luy en dit qu'un partie ,
pour l'accoûtumer douce
ment au déplaifir d'être refufé
, & il quita ce difcours
fort vifte , pour luy parler
de ce qui le regardoit
mais le Confeiller luy parut
206 MERCURE
fort refroidy fur le mariage
de fa Soeur , & le Marquis
jugea bien déflors qu'il auroit
de la peine à eftre le
Beau- frere du Confeiller ,
s'il ne devenoit auffi fon
Coufin. Il fit de nouveaux
efforts fur fa Parente , qui
luy parut toûjours moins
difpofée à faire ce qu'il
vouloit. Il loüa le Confeiller
& toute la Robe & dit
tout le mal qu'il put des
Gens d'Epée . Il alla meſme
jufqu'à tourner le Comte
en ridicule , & juſqu'à
le décrier , fans épargner
•
GALANT . 207
que fon nom ; mais tout
cela ne gagna rien fur cette
Parente . A la fin voyant
qu'il ne pouvoit luy donner
de gouft pour le Confeiller
, il crut devoir le dégoûter
d'elle . Il luy dit en confidence
qu'elle n'eftoit pas
d'une humeur aiſée , & qu'-
elle donneroit aſſez de peine
à un Mary ; que mefme
elle n'avoit pas autant de
Bien qu'on s'imaginoit ,
qu'il le fçavoit mieux qu'un
autre , puis qu'il eftoit fon`
Tuteur ; mais le Confeiller
ne fe rendit point à ces ar-
&
208 MERCURE
tifices . Il foupçonna que le
Marquis ne les employoit
que pour ſe diſpenſer de le
fervir de tout fon pouvoir ,
& dans l'humeur chagrine
où il fe trouva , il luy déclara
fort nettement que le
feul moyen d'obtenir la
Soeur , eftoit de le faire aimer
de fa Parente . Le Marquis
qui eftoit fort amoureux
, fut au défefpoir. Il
repréſenta au Confeiller ,
avec toute la force & toute
la vivacité imaginable
qu'il ne devoit pas eftre
puny des bizarreries de fa
Pupille
GALANT. 209
Pupille ; mais le Confeiller
fut inexorable
. Sa Soeur
commença
à fentir pour
la jeune Heritiere
, toute la
haine qu'elle euft pû avoir
pour une Rivale . Elle n'en
parloit jamais que comme
d'une Demoifelle de Campagne
, qu'une fierté ridicule
rendoit infuportable
par tout , & qui fe croyoit
d'une meilleure Maifon
qu'une autre , parce que
fes Parens n'avoient pas
coûtume de demeurer dans
les Villes . Le Comte eftoit
charmé de la réfiftance
Mars 1714.
"
S
110 MERCURE
qu'on faiſoit pour luy aux
volontez du Marquis ; mais
il fut au déſeſpoir , quand
le Marquis dit un jour à
fa Coufine , d'un ton ferme
& prefque abfolu , que
fi c'eftoit à caufe du Comte
'qu'elle refufoit le Confeiller
, elle devoit s'affeurer
qu'il s'oppoferoit toûjours
de tout fon pouvoir aux
prétentions de cet Amant.
Elle nia que le Comte fuft
fon Amant , & qu'elle l'euft
jamais regardé fur ce piedlà
. Le Comte qui vit fes
affaires en défordre , s'aviGALANT.
21I
fa d'un expédient affez extraordinaire
. Il confidera
qui s'il pouvoit rompre l'u
nion du Marquis & de l'aimable
Perfonne à qui il
eftoit fi fort attaché , le
Marquis ne s'obſtineroit
plus à vouloir donner fa
Parente au Conſeiller ;
mais comment mettre mal
enfemble deux Perfonnes
qui s'aimoient fi tendrement
1 eftoit entreprenant
ne défefperoit jamais
de rien , & fur tout
il comptoit beaucoup fur
l'inconftance des Femmes.
,
Sij
212 MERCURE
Ainfi de concert avec la
jeune Heritiere , il réfolut
de fe feindre Amant de la
Soeur du Confeiller , & de
la conduire à faire une infidélité
au Marquis . Il fe
rendit peu à peu & fans
marque d'affectation , plus
affidu à la voir. Comme il
n'eftoit pas Amant déclaré
de l'Heritiere , fa conduite
ne parut pas fi étrange.
Le Confeiller luy - mefme
qui le foupçonnoit d'eftre
fon Rival , eftoit bien - aiſe
de commencer à avoir lieu
d'en douter. L'Heritiere de
GALANT . 20:3
fon cofté , qui vouloit favorifer
les affiduitez du
Comte chez la Soeur du
Confeiller , recevoit le Confeiller
bien plus agréablement
, depuis que le Comte
alloit moins fouvent chez
elle . Ainfi il n'y ayoit que le
Marquis à qui le nouvel attachement
du Comte ne
plaifoit pas trop. Elle eftoit
née pour la tendreffe , mais
non pas pour la conftance.
Elle avoit un coeur qui recevoit
des impreffions affez
vivement mais encore plus
facilement . Enfin elle eftoit
214 MERCURE
faite comme la plupart des
Femmes ont accoûtumé de
l'eftre . Le Comte avoit de
l'aſcendant ſur le Marquis.ll
l'étoufoit , & l'empefchant
de paroiftre en fa préfence ,
il pouffoit la converſation
jufqu'à un ton de gayeté &
d'enjouëment , où le Marquis
ne pouvoit aller , &
avoit l'adreſſe de mettre
toujours fon Rival hors de
fon génie naturel . La diférence
qui eftoit entre - eux ,
frapoit trop les yeux de la
Belle pour nnee la pas déterminer
en faveur du Com-
3
GALANT .
215
te. D'abord elle luy applaudiffoit
bien plus qu'au
Marquis. Enfuite elle le
trouva beaucoup plus à dire
quand il n'eftoit pas chez
elle , que quand le Marquis
n'y eftoit pas. Enfin
foit par fes regards , foit par
fes manieres, elle luy donna
une préference fi viſible ,
que le Marquis , aprés plufieurs
plaintes qui furent
affez mal reçûës , ne pút
douter qu'il ne fuft trahy.
Le Confeiller qui fe crut
heureux , fur ce qu'il ne
trouvoit plus le Comte en
216
MERCURE
fon chemin , & qui s'apper- '
eevoit qu'il eftoit micux
dans l'efprit de l'Heritiere ,
s'imagina que
le
temps
eftoit favorable pour pref
fer le Marquis d'achever
ce qu'il avoit commencé ;
mais le Marquis luy répondit
léchement , que fa Soeur
avoit changé , qu'elle l'avoit
quitté pour un autre , qu'il
ne fongeoit plus à elle ; &
vous ne devez pas trouver
mauvais , pourfuivir - il , que
je vous redile ce que vous
m'avez dit fi fouvent , que
nous ne pouvons faire aucunc
GALANT. 217
>
cune alliance , fi nous n'en
faifons deux à la fois. Jamais
le Confeiller ne fut
plus furpris . Il querella fa
Soeur , & luy fit mille reproches
. Il éloigna tout- àfait
le Comte de chez luy
& de Comte en fut trescontent.
La Seur meſme
qui foupçonna quelque
trahison ; auroit fouhaité
de tout fon coeur fe raccommoder
avec le Marquis.
Le Confeiller y travailla
de tout fon pouvoir ;
mais le Marquis ne put digerer
l'injure qu'on luy
Mars
1714.
T
218
MERCURE
pas
;
avoit faite . Le Comte , qui
eftoit caufe de toute cette
révolution , ne fut pas plus
heureux que les autres . Son
deffein luy avoit paru plai
fant à imaginer , & à executer
mais il n'en avoit
bien préveu les fuites.
Le Marquis conceur pour
luy toute la haine que l'on
peut avoir pour un Rival.
il mit bon ordre à empef
cher qu'il ne put voir fouvent
la jeune Heritiere , &
il fouleva tellement toute
la Parenté contre luy >
qu'il n'auroit pas efté bien
GALANT .• 0219
receu à parler de Mariage .
Ainfi perfonne ne ſe maria ;
ce ne fut que divifion de
tous coftez. Peut - eftre
quand la belle Heritiere
fera en âge de difpofer
d'elle , elle fera choix du
Comte qui l'aime toujours
; mais dans le temps
qu'il faudra attendre , c'eſt
grande merveille , fi l'une
des deux paffions ne s'affoiblit.
Aprés tout pour
tant , elles pourront ne s'affoiblir
pas , car les deux
Amans ne fe voyent guére.
IL y auroit plus d'Amans
heureux que l'on n'en voit
fi on laiffoit l'amour mail
tre de fes entrepriſes , mais
s'il peut toucher les coeurs
quand il luy plaiſt , il n'a
pas toûjours le pouvoir de
les unir. Des obftacles invincibles
renverfent fouvent
fes plus grands deffeins
, & ce qui eft le plus
chagrinant , c'eft qu'il fe
Mars
1714.
R
194 MERCURE
rencontre des occafions où
il fe nuit par luy même.
Un jeune Homme de qualité
, qui ayant un Marquifat
eftoit Marquis à bon titre,
devint amoureux d'une
des plus aimables Perfonnes
de la Ville où il demeuroit.
Elle eftoit d'une Famille
de Robe , & un Frere
unique qu'elle avoit
eftoit Confeiller au Parlement
de fa Province
mais il s'attendoit bien à
monter avec l'âge dans des
Charges plus confidéra-
Eles. Ce Frere eftoit alors
GALANT. 195
fur le point de revenir d'un
voyage d'Italie , & quoy
que fon retour fuft fort
proche , le Marquis nelaiffa
pas de faire affez de progrés
dans le coeur de cette
Belle , avant qu'il fuft revenu.
Elle eftoit vive naturel.
lement,, pleine de foins &
de zele pour ce qu'elle aimoit
, & fi fenfible à l'amitié
qu'on luy témoignoit
,
qu'il y avoit fujet d'efperer
que les empreffemens
de
l'amour ne luy feroient pas
indifférens
. Elle trouva le
Marquis affez aimable
Rij
196 MERCURE
>
pour le perfuader qu'elle
en pourroit eftre aimée , &
elle eftoit trop fincere pour
douter long- temps de la
fincerité des autres fur
tout quand ils eftoient agréables
. Enfin de la ma.
niere dont le Confeiller
vit les chofes difpofées à
fon retour
il jugea bien
qu'il ne feroit plus chargé
de fa Soeur , qu'autant que
des Articles de mariage à
regler le demanderoient
car elle ne dépendoit que
de luy. Le Marquis fit tous.
les pas neceffaires , & les
GALANT
* . 197
Amans alloient eftre heureux
, s'il n'y euft point eu
d'autre amour que le leur
dans leur Famille . Le Marquis
avoit une Couſine germaine
, qui eftoit demeurée
feule Heritiere d'un
grand Ben , par la mort
de fon Pere & de fa Mere.
Elle eftoit tombée fous fa
Tutelle , parce qu'un autre
Tuteur qu'elle avoit eu
d'abord , cftoit mort depuis
fix mois. C'eftoit au jeune
Tuteur à difpofer de fa jeu
ne Pupille ; mais elle avoit
difpofé elle mefme de fon
FR iij
198 MERCURE
coeur , fans avis de Parens .
Un Gentilhomme fort fpirituel
, & qui avoit affez
de naiffance , pour pouvoir
prendre le titre de Comte ,
avoit entrepris de plaire à
la Belle , & luy avoit plû.
Il avoit fait diverfes Campagnes
avec beaucoup de
dépenfe , & affez de réputation
. Cela ébloüiffoit fort:
l'aimable Héritiere
avoit le coeur tres - bien placé
. Par malheur pour le
Marquis , le Confeiller la
vit trop fouvent , & fon
coeur en fut touché. Elle
qui
THEQUE
GALANT.
BIBLIO
avoit tout l'air d'une
LY
BAD
DE
LA
VILLE
de naiſſance , une certain e
fierté qui luy feyoit bien ,
moins de beauté que de
manieres agréables , & un
art particulier de fe faire
extrémement valoir , fans
avoir pourtant d'orgueil
qui choquaft . Peut - eftre
auroit - il choqué dans une
Perfonne, qui cuft eu moins
de naiffance , moins de jeuneffe
, & moins de Bien .
Elle ne regardoit guére les
Hommes qu'avec une efpece
de dédain . Le Comre
eftoit le plus excepté ; en-
R iiij
200 MERCURE
core le traitoit elle quelquefois
comme les autres
, quand elle en avoit
envie . Tout cela charma
le Confeiller, Ileftoit affez
riche pour ne devoir pas
eftre foupçonné d'aimer la
jeune Heritiere pour fon
Bien. Cependant il ne laif
fa peut eft e pas d'avoir
quelques veues de ce coftélà.
Ce qui luy parut d'un
fort bon augure pour fa
paffion , ce fut l'amour du
Marquis & de fa Soeur. 11
trouvoit mefme quelque
chofe d'agréable à s'imaGALANT
. 201
giner la double alliance de
leurs Maifons , & l'échange
qu'elles ferojent entreelles
de ces deux jeunes
Perfonnes . Il découvrit fon
deffein au Marquis , & luy
exagera fort le plaifir qu'il
fe feroit de devenir fon
Coufin-germain , en mef
me temps qu'il deviendroit
fon Beau -frere . Le Marquis
ne reçût point cette
propofition avec autant de
joye qu'il euft dû naturellement
la recevoir . Il luy
parut auffi - toft , fans qu'il
fçuft trop pourquoy , que
202 MERCURE
4
c'eftoit une difficulté furvenue
à fes affaires il
euft beaucoup mieux aimé
qu'on n'euft parlé que d'une
alliance. Cependant
quand il y eut fait refléxion
, il ne trouva pas que
le mariage du Confeiller
avec la Parente , duft cftre
une chofe fi malaisée , &
it fe perfuada , ou il tâcha
de fe le perfuader que
quand mefme il ne fe feroit
pas , cela n'apportéroit
point d'obſtacle à fon
bonheur. Il alla donc propofer
le Confeiller à fa
.
GALANT. 103
Coufine , avec toute l'addreffe
dont fa paffion le
rendoit capable ; mais elle
luy fit connoiftre combien
elle eftoit peu difpofée à
fonger à ce Party . Il pric
encore trois ou quatre fois
le temps le plus favorable
qu'il put , pour traiter la
mefme matiere mais ce
fut toûjours inutilement .
Le Comte n'eftoit point
trop connu pour un Amant
de la Parente du Marquis ,
& moins encore pour un
Amant qu'elle aimaſt . Elle
avoit avec luy une manie-
>
204 MERCURE
re d'agir fi inégale , que
l'on eftoit bien embaraffé à
pouvoir juger de ce qui
eftoit entre eux . Ainfi le
Marquis ne fceut pas précifement
s'il devoit fe prendre
au Comte , de l'éloi
gnement que fa Coufine
montroit pour leConfeiller,
ou s'il ne devoit s'en pren
dre qu'au peu d'inclination
qu'elle faifoit voir en general
pour la Robe , ce qui
femblait eftre affez natu
rel à une jeune Perfonne ,
dont les yeux font plus fla
tez de l'équipage d'un Ca.
GALANT.
205
valier , que de celuy d'un
Magiftrat , & dont les oreilles
fe plaifent davantage au
récit d'une Campagne
qu'à celuy du jugement
d'un Procés. Le Marquis
fit entendre au Confeiller .
le plus honneftement qu'il
luy fur poffible , le mauvais
fuccés de fa négotiation. 11
ne luy en dit qu'un partie ,
pour l'accoûtumer douce
ment au déplaifir d'être refufé
, & il quita ce difcours
fort vifte , pour luy parler
de ce qui le regardoit
mais le Confeiller luy parut
206 MERCURE
fort refroidy fur le mariage
de fa Soeur , & le Marquis
jugea bien déflors qu'il auroit
de la peine à eftre le
Beau- frere du Confeiller ,
s'il ne devenoit auffi fon
Coufin. Il fit de nouveaux
efforts fur fa Parente , qui
luy parut toûjours moins
difpofée à faire ce qu'il
vouloit. Il loüa le Confeiller
& toute la Robe & dit
tout le mal qu'il put des
Gens d'Epée . Il alla meſme
jufqu'à tourner le Comte
en ridicule , & juſqu'à
le décrier , fans épargner
•
GALANT . 207
que fon nom ; mais tout
cela ne gagna rien fur cette
Parente . A la fin voyant
qu'il ne pouvoit luy donner
de gouft pour le Confeiller
, il crut devoir le dégoûter
d'elle . Il luy dit en confidence
qu'elle n'eftoit pas
d'une humeur aiſée , & qu'-
elle donneroit aſſez de peine
à un Mary ; que mefme
elle n'avoit pas autant de
Bien qu'on s'imaginoit ,
qu'il le fçavoit mieux qu'un
autre , puis qu'il eftoit fon`
Tuteur ; mais le Confeiller
ne fe rendit point à ces ar-
&
208 MERCURE
tifices . Il foupçonna que le
Marquis ne les employoit
que pour ſe diſpenſer de le
fervir de tout fon pouvoir ,
& dans l'humeur chagrine
où il fe trouva , il luy déclara
fort nettement que le
feul moyen d'obtenir la
Soeur , eftoit de le faire aimer
de fa Parente . Le Marquis
qui eftoit fort amoureux
, fut au défefpoir. Il
repréſenta au Confeiller ,
avec toute la force & toute
la vivacité imaginable
qu'il ne devoit pas eftre
puny des bizarreries de fa
Pupille
GALANT. 209
Pupille ; mais le Confeiller
fut inexorable
. Sa Soeur
commença
à fentir pour
la jeune Heritiere
, toute la
haine qu'elle euft pû avoir
pour une Rivale . Elle n'en
parloit jamais que comme
d'une Demoifelle de Campagne
, qu'une fierté ridicule
rendoit infuportable
par tout , & qui fe croyoit
d'une meilleure Maifon
qu'une autre , parce que
fes Parens n'avoient pas
coûtume de demeurer dans
les Villes . Le Comte eftoit
charmé de la réfiftance
Mars 1714.
"
S
110 MERCURE
qu'on faiſoit pour luy aux
volontez du Marquis ; mais
il fut au déſeſpoir , quand
le Marquis dit un jour à
fa Coufine , d'un ton ferme
& prefque abfolu , que
fi c'eftoit à caufe du Comte
'qu'elle refufoit le Confeiller
, elle devoit s'affeurer
qu'il s'oppoferoit toûjours
de tout fon pouvoir aux
prétentions de cet Amant.
Elle nia que le Comte fuft
fon Amant , & qu'elle l'euft
jamais regardé fur ce piedlà
. Le Comte qui vit fes
affaires en défordre , s'aviGALANT.
21I
fa d'un expédient affez extraordinaire
. Il confidera
qui s'il pouvoit rompre l'u
nion du Marquis & de l'aimable
Perfonne à qui il
eftoit fi fort attaché , le
Marquis ne s'obſtineroit
plus à vouloir donner fa
Parente au Conſeiller ;
mais comment mettre mal
enfemble deux Perfonnes
qui s'aimoient fi tendrement
1 eftoit entreprenant
ne défefperoit jamais
de rien , & fur tout
il comptoit beaucoup fur
l'inconftance des Femmes.
,
Sij
212 MERCURE
Ainfi de concert avec la
jeune Heritiere , il réfolut
de fe feindre Amant de la
Soeur du Confeiller , & de
la conduire à faire une infidélité
au Marquis . Il fe
rendit peu à peu & fans
marque d'affectation , plus
affidu à la voir. Comme il
n'eftoit pas Amant déclaré
de l'Heritiere , fa conduite
ne parut pas fi étrange.
Le Confeiller luy - mefme
qui le foupçonnoit d'eftre
fon Rival , eftoit bien - aiſe
de commencer à avoir lieu
d'en douter. L'Heritiere de
GALANT . 20:3
fon cofté , qui vouloit favorifer
les affiduitez du
Comte chez la Soeur du
Confeiller , recevoit le Confeiller
bien plus agréablement
, depuis que le Comte
alloit moins fouvent chez
elle . Ainfi il n'y ayoit que le
Marquis à qui le nouvel attachement
du Comte ne
plaifoit pas trop. Elle eftoit
née pour la tendreffe , mais
non pas pour la conftance.
Elle avoit un coeur qui recevoit
des impreffions affez
vivement mais encore plus
facilement . Enfin elle eftoit
214 MERCURE
faite comme la plupart des
Femmes ont accoûtumé de
l'eftre . Le Comte avoit de
l'aſcendant ſur le Marquis.ll
l'étoufoit , & l'empefchant
de paroiftre en fa préfence ,
il pouffoit la converſation
jufqu'à un ton de gayeté &
d'enjouëment , où le Marquis
ne pouvoit aller , &
avoit l'adreſſe de mettre
toujours fon Rival hors de
fon génie naturel . La diférence
qui eftoit entre - eux ,
frapoit trop les yeux de la
Belle pour nnee la pas déterminer
en faveur du Com-
3
GALANT .
215
te. D'abord elle luy applaudiffoit
bien plus qu'au
Marquis. Enfuite elle le
trouva beaucoup plus à dire
quand il n'eftoit pas chez
elle , que quand le Marquis
n'y eftoit pas. Enfin
foit par fes regards , foit par
fes manieres, elle luy donna
une préference fi viſible ,
que le Marquis , aprés plufieurs
plaintes qui furent
affez mal reçûës , ne pút
douter qu'il ne fuft trahy.
Le Confeiller qui fe crut
heureux , fur ce qu'il ne
trouvoit plus le Comte en
216
MERCURE
fon chemin , & qui s'apper- '
eevoit qu'il eftoit micux
dans l'efprit de l'Heritiere ,
s'imagina que
le
temps
eftoit favorable pour pref
fer le Marquis d'achever
ce qu'il avoit commencé ;
mais le Marquis luy répondit
léchement , que fa Soeur
avoit changé , qu'elle l'avoit
quitté pour un autre , qu'il
ne fongeoit plus à elle ; &
vous ne devez pas trouver
mauvais , pourfuivir - il , que
je vous redile ce que vous
m'avez dit fi fouvent , que
nous ne pouvons faire aucunc
GALANT. 217
>
cune alliance , fi nous n'en
faifons deux à la fois. Jamais
le Confeiller ne fut
plus furpris . Il querella fa
Soeur , & luy fit mille reproches
. Il éloigna tout- àfait
le Comte de chez luy
& de Comte en fut trescontent.
La Seur meſme
qui foupçonna quelque
trahison ; auroit fouhaité
de tout fon coeur fe raccommoder
avec le Marquis.
Le Confeiller y travailla
de tout fon pouvoir ;
mais le Marquis ne put digerer
l'injure qu'on luy
Mars
1714.
T
218
MERCURE
pas
;
avoit faite . Le Comte , qui
eftoit caufe de toute cette
révolution , ne fut pas plus
heureux que les autres . Son
deffein luy avoit paru plai
fant à imaginer , & à executer
mais il n'en avoit
bien préveu les fuites.
Le Marquis conceur pour
luy toute la haine que l'on
peut avoir pour un Rival.
il mit bon ordre à empef
cher qu'il ne put voir fouvent
la jeune Heritiere , &
il fouleva tellement toute
la Parenté contre luy >
qu'il n'auroit pas efté bien
GALANT .• 0219
receu à parler de Mariage .
Ainfi perfonne ne ſe maria ;
ce ne fut que divifion de
tous coftez. Peut - eftre
quand la belle Heritiere
fera en âge de difpofer
d'elle , elle fera choix du
Comte qui l'aime toujours
; mais dans le temps
qu'il faudra attendre , c'eſt
grande merveille , fi l'une
des deux paffions ne s'affoiblit.
Aprés tout pour
tant , elles pourront ne s'affoiblir
pas , car les deux
Amans ne fe voyent guére.
Fermer
Résumé : HISTORIETTE.
Au début du XVIIIe siècle, une histoire d'amour complexe se déroule entre plusieurs personnages de la noblesse et de la robe. Un jeune marquis s'éprend d'une femme issue d'une famille de robe, dont le frère unique est conseiller au Parlement. Bien que le marquis fasse des progrès dans le cœur de cette femme, des obstacles surgissent. Le conseiller, de retour d'Italie, approuve l'union de sa sœur avec le marquis. Cependant, il est lui-même amoureux de la cousine germaine du marquis, une jeune héritière sous la tutelle de ce dernier. Cette héritière est éprise d'un comte spirituel et réputé. Le conseiller espère une double alliance et propose au marquis d'épouser l'héritière, mais celle-ci refuse. Pour faciliter son propre mariage, le comte tente de semer la discorde entre le marquis et sa bien-aimée en se faisant passer pour son amant. Cette manœuvre échoue, et les relations entre les familles se dégradent. Finalement, personne ne se marie, et les passions restent vives, bien que les amants ne se voient plus fréquemment.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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34
p. 3-79
AVANTURE nouvelle.
Début :
Un jeune Comte, d'une des meilleures Maisons du Royaume, [...]
Mots clefs :
Comte, Marquise , Conseiller, Amant, Coeur, Mari, Passion, Amour, Reproches, Monde, Liberté, Parti, Italien, Maîtresse, Caractère, Charmes, Mérite, Prétexte, Heureux, Colère, Jeu, Espérer, Nouvelles, Lettre, Campagne, Faveur, Commerce, Fidélité, Femmes, Raison
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AVANTURE nouvelle.
AVANTUR
nouvelle.
U
LYON
N jeune Comte ,
d'une des meilleures
Maifons
du Royaume , s'étant
nouvellement établi das
Avril 1714. A ij
4 MERCURE
un quartier où le jeu &
la galanterie regnoient
également , fut obligé
d'y prendre parti comme
les autres ; & parce
que fon coeur avoit des
engagemens ailleurs , il
fe declara pour le jeu ,
comme pour fa paffion
dominante mais le peu
d'empreffement qu'il y
avoit , faifoit affez voir
qu'il fe contraignoit , &
l'on jugea que c'étoir un
homme qui ne s'attaGALANT
.
S
choit à rien , & qui dans
la neceffité de choiſir
avoit encore mieux aimé
cet amuſement, que
de dire à quelque belle
ce qu'il ne fentoit pas .
Un jour une troupe de
jeunes Dames qui ne
joüoient point , l'entreprit
fur fon humeur indifferente.
Il s'en défendit
le mieux qu'il put ,
alleguant fon peu de
merite , & le peu d'ef
perance qu'il auroit d'ê-
A iij
6 MERCURE
tre heureux en amour :
mais on lui dit que
quand il fe connoîtroit
affez mal pour avoir une
fi méchante opinion de
lui - même , cette raiſon
feroit foible contre la
vûë d'une belle perfonne
; & là - deffus on le
menaça des charmes d'u
ne jeune Marquife , qui
demeuroit dans le voifinage
, & qu'on attendoit.
Il ne manqua pas de leur
repartir qu'elles-mêmes
GALANT.
7.
ne fe connoiffoient point
affez , & que s'il pouvoit
échaper au peril où il
fe trouvoit alors , il ne
devoit plus rien craindre
pour fon coeur . Pour
réponse à fa galanterie ,
elles lui montrerent la
Dame dont il étoit queftion
, qui entroit dans
ce moment . Nous parlions
de vous , Madame ,
lui dirent - elles en l'appercevant
. Voici un indifferent
que nous vous
A iiij
8 MERCURE
donnons à convertir :
Vous y êtes engagée
d'honneur ; car il femble
yous défier auffi - bien
que nous. La Dame &
le jeune Comte ſe reconnurent
, pour s'être
vûs quelquefois à la campagne
chez une de leurs
amies . Elle étoit fort convaincuë
qu'il ne meritoit
rien moins que le
reproche qu'on luy faifoit
, & il n'étoit que
trop ſenſible à ſon gré :
GALANT. 9
mais elle avoit les raifons
pour feindre de croire
ce qu'on lui difoit.
C'étoit une occafion de
commerce avec un homme
, fur lequel depuis
long - temps elle avoit
fait des deffeins qu'elle
n'avoit pû executer . Elle
lui trouvoit de l'efprit
& de l'enjouement , &
elle avoit hazardé des
complaisāces pour beaucoup
de gens qui afſurément
ne le valoient
to MERCURE
pas : mais fon plus grand
merite étoit l'opinion
qu'elle avoit qu'il fût aimé
d'une jeune Demoifelle
qu'elle haïffoit , &
dont elle vouloit fe vanger.
Elle prit donc fans
balancer le parti qu'on
lui offroit ; & aprés lui
avoit dit qu'il faloit qu'-
on ne le crût pas bien
endurci , puis qu'on s'adreffoit
à elle pour le
toucher , elle entreprit
de faire un infidele , fous
GALANT . 11
pretexte de convertir un
indifferent. Le Comte
aimoit paffionsément la
Demoiſelle dont on le
croyoit aimé, & il tenoit
à elle par des
engagemens
fi puiffans
, qu'il
ne craignoit
pas que rien
l'en pût détacher
. Sur
tout il fe croyoit
fort en
fûreté contre les charmes
de la Marquife. Il
la connoiffoit pour une
de ces coquettes de profeffion
qui veulent , à
12 MERCURE
quelque prix que ce ſoit ,
engager tout le monde ,
& qui ne trouvent rien
de plus honteux que de
manquer une conquête .
Il fçavoit encore quedepuis
peu elle avoit un
amant , dont la nouveauté
faifoit le plus grand
merite , & pour qui elle
avoit rompu avec un
autre qu'elle aimoit depuis
long - temps , & à
qui elle avoit des obligations
effentielles . Ces
と
GALANT .
13
connoiffances lui fmbloient
un remede affuré
contre les tentations
les plus preffantes. La
Dame l'avoit affez veu
pour connoître quel étoit
fon éloignement
pour des femmes
de fon
caractere
: mais cela ne
fit que flater fa vanité.
Elle trouva plus de gloire
à triompher
d'un
coeur qui devoit être fi
bien défendu. Elle lui
fit d'abord
des reproches
14 MERCURE
de ne l'eftre pas venu
voir depuis qu'il étoit
dans le quartier , & l'engagea
à reparer fa faute
dés le lendemain . Il
alla chez elle , & s'y fit
introduire par un Confeiller
de fes amis , avec
qui il logcoit , & qui
avoit des liaiſons étroites
avec le mari de la
Marquife, Les honneftetez
qu'elle lui fit l'obligerent
enfuite d'y aller
plufieurs fois fans inGALANT.
15
troducteur ; & à chaque
yifite la Dame mit en
ufage tout ce qu'elle
crut de plus propre à .
l'engager. Elle trouva
d'abord toute la refiftance
qu'elle avoit attendue.
Ses foins , loin .
de faire effet , ne lui attirerent
pas feulement
une parole qui tendît à
une declaration : mais
elle ne defefpera point
pour cela du pouvoir de
fes charmes ; ils l'avoient
16 MERCURE
fervie trop fidelement en
d'autres occafions
, pour
ne lui donner pas lieu
de fe flater d'un pareil
fuccés en celle - ci ; elle
crut mefme remarquer
bientôt qu'elle ne s'étoit
pas trompée. Les vifites
du Comte furent
plus frequentes : elle lui
trouvoit un enjouëment
que l'on n'a point quand
on n'a aucun deffein de
plaire.Mille railleries divertissantes
qu'il faifoit
fur
+
GALANT . 17
für fon nouvel amant ;
le chagrin qu'il témoignoit
quand il ne pouvoit
eftre feul avec elle ;
Fattention qu'il preftoit.
aux moindres chofes
qu'il luy voyoit faire :
tout cela lui parut d'un
augure merveilleux , &
il eft certain que fi elle
n'avoit pas encore le
coeur de ce pretendu indifferent
, elle occupoit.
du moins fon efprit . Ih
alloit plus rarement chez
Avril 1714. B :
18 MERCURE
la Demoiſelle qu'il aimoit
, & quand il étoit
avec elle, il n'avoit point
d'autre foin , que de faire
tomber le difcours fur
la Marquife . Il aimoit
mieux railler d'elle que
de n'en rien dire . Enfin
foit qu'il fût feul , ou
en compagnie , fon idée
ne l'abandonnoit jamais
. Quel dommage ,
difoit - il quelquefois
que le Ciel ait répandu
tant de graces dans une
,
GALANT . 19
coquette ? Faut - il que la
voyant fi aimable , on
ait tant de raiſon de ne
point l'aimer ? Il ne pouvoit
lui pardonner tous
fes charmes ; & plus il
lui en trouvoit , plus il
croyoit la haïr. Il s'oublia
même un foir jufques
à lui reprocher fa
conduite , mais avec une
aigreur qu'elle n'auroit,
pas ofé efperer fitoft. A
quoy bon , lui dit- il ,
Madame , toutes ces oil-
Bij
20 MERCURE
lades & ces manieres étu
diées que chacun regarde
, & dont tant de gens
fe donnent le droit de
parler Ces foins de
chercher à plaire à tout
le monde , ne font pardonnables
qu'à celles à
qui ils tiennent lieu de
beauté . Croyez - moy ,
Madame , quittez des
affectations qui font indignes
de vous. C'étoit
où on l'attendoit . La
Dame étoit trop habile
GALANT. 2ม1
pour ne diftinguer past
les confeils de l'amitié
des reproches de la jaloufie
. Elle lui en marqua
de la reconnoiſſance
, & tâcha enfuite de
lui perfuader que ce qui
paroiffoit coquetterie ,
n'étoit en elle que la
crainte
d'un veritable
attachement ; que du
naturel dont elle fe connoiffoit
, elle ne pourroit
être heureufe dans.
un engagement , parce
22 MERCURE
qu'elle ne ſe verroit jamais
aimée , ni avec la
même fincerité , ni avec
la même delicateſſe dont
elle fouhaiteroit de l'être
, & dont elle fçavoit
bien qu'elle aimeroit .
Enfin elle lui fit an faux
portrait de fon coeur , qui
fut pour lui un veritable
poifon. Il ne pouvoit
croire tout à fait qu'elle
fût fincere : mais il ne
pouvoit s'empefcher de
le fouhaiter. Il cherGALANT.
23
choit des
apparences
ce qu'elle
lui difoit , &
il lui rappelloit
mille actions
qu'il lui avoit vû
faire , afin qu'elle les juſtifiât
; & en effet , fe fervant
du pouvoir qu'elle
commençoit à prendre
fur lui , elle y donna
des couleurs qui diffiperent
une partie de fes
foupçons mais qui
pourtant n'auroient pas
trompé un homme qui
cuft moins fouhaité de
24 MERCURE
l'eftre. Cependant, ajouta-
t- elle d'un air enjoüé ,
je ne veux pas tout à fait
difconvenir d'un défaut
qui peut me donner lieu
de vous avoir quelque
obligation . Vous fçavez
ce que j'ai entrepris pour
vous corriger de celui
qu'on vous reprochoit .
Le peu de fuccés que j'ai
eu ne vous diſpenſe pas
de reconnoître mes bonnes
intentions , & vous
me devez les mefmes
foins.
GALANT. 25
foins . Voyons fi vous ne
ferez pas plus heureux à
fixer une inconftante ,
que je l'ay été à toucher
un infenfible. Cette propofition
, quoique faite
en riant , le fit rentrer en
lui - mefme , & alarma
d'abord fa fidelité . Il vit
qu'elle n'avoit peut - eftre
que trop reüffi dans
fon entrepriſe , & il reconnut
le danger où il
étoit : mais fon penchant
commençant à lui ren-
Avril 1714.
C
26 MERCURE
dre ces reflexions facheuſes
, il tâcha bientôt
à s'en délivrer . Il
penfa avec plaifir que fa
crainte étoit indigne de
lui , & de la perfonne
qu'il aimoit depuis fi
long- temps . Sa delicateffe
alla meſme juſqu'à
fe la reprocher
comme
une infidelité
; & aprés
s'eftre dit à foy- meſme
,
que c'étoit déja eſtre inconftant
que de craindre
de changer , il embraſſa
GALANT . 27
avec joye le parti qu'on
lui offroit . Ce fut un
commerce fort agreable
de part & d'autre. Le
pretexte qu'ils prenoient
rendant leur empreffement
un jeu , ils goutoient
des plaifirs qui
n'étoient troublez d'aucuns
fcrupules. L'Italien
, qu'ils fçavoient tous
deux , étoit l'interprete :
de leurs tendres fentimens.
Ils ne fe voyoient
jamais qu'ils n'euffent à
Cij
28 MERCURE
fe donner un billet en
cette langue ; car pour
plus grande feureté, ils
étoient convenus qu'ils
ne s'enverroient jamais
leurs lettres . Sur - tout
elle lui avoit défendu dé
parler de leur commerce
au Confeiller avec qui
il logcoit , parce qu'il
étoit beaucoup plus des
amis de fon mari que des
fiens , & qu'autrefois ,
fur de moindres apparences,
il lui avoit donné
GALANT . 29
des foupçons d'elle fort
defavantageux . Elle lui
marqua même des heures
où il pouvoit le moins
craindre de les rencontrer
chez elle l'un ou
l'autre , & ils convinrent
de certains fignes d'intelligence
pour les temps
qu'ilsyferoient. Cemyf
tere étoit un nouveau
charme pour le jeune
Comte. La Marquife
prit enfuite des manieres
fiéloignées d'une co-
C
iij
30 MERCURE
quette , qu'elle acheva
bientoft
de le perdre
.
Jufques là elle avoit eu
un de ces caracteres enjoüez
, qui reviennent
quafi à tout le monde ,
mais qui deſeſperent un
amant ; & elle le quitta
pour en prendre un tout
oppofé , fans le lui faire
valoir comme un facri.
fice . Elle écarta fon nouvel
amant , qui étoit un
Cavalier fort bien fait .
Enfin loin d'aimer l'éGALANT.
31
clat , toute fon application
étoit d'empêcher
qu'on ne s'apperçût de
l'attachement que le
Comte avoit pour elle :
mais malgré tous fes
foins, il tomba unjour de
ſes poches une lettre que
fon mari ramaffa fans
qu'elle y prît garde . 11
n'en connut point le caractere
, & n'en entendit
pas le langage : mais ne
doutant pas que ce ne
fût de l'Italien , il courut
Ciiij
32 MERCURE
chez le Conſeiller , qu'il
fçavoit bien n'être pas
chez lui , feignant de lui
vouloir
communiquer
quelque affaire . C'étoit
afin d'avoir occafion de
parler au Comte , qu'il
ne foupçonnoit point
d'être l'auteur de la lettre
, parce qu'elle étoit
d'une autre main. Pour
prévenir les malheurs
qui arrivent quelquefois
des lettres perduës , le
Comte faifoit écrire touGALANT
. 33
tes celles qu'il donnoit à
la Marquise par une perfonne
dont le caractere
étoit inconnu . Il lui avoit
porté le jour precedent
le billet Italien
dont il s'agiffoit. Il étoit
écrit fur ce qu'elle avoit
engagé le Confeiller à
lui donner
à fouper ce
même jour- là ; & parce
qu'elle avoit fçû qu'il
devoit aller avec fon mari
à deux lieuës de Paris
l'apréfdînée , & qu'ils
34 MERCURE
n'en reviendroient que
fort tard , elle étoit convenue
avec ſon amant
qu'elle fe rendroit chez
lui avant leur retour. La
lettre du Comte étoit
pour l'en faire fouvenir ,
& comme un avantgoût
de la fatisfaction qu'ils
promettoient cette fe
foirée. Le mari n'ayant
point trouvé le Confeiller
, demanda le Comte .
Dés qu'il le vit , il tira
de fa poche d'un air emGALANT
.
35
preffé quantité de papiers
, & le pria de les
lui remettre quand il
féroit revenu. Parmi ces
papiers étoit celui qui
lui donnoit tant d'agitation
. En voici un , lui
dit- il en feignant de s'être
mépris , qui n'en eſt
pas. Je ne fçai ce que
c'eft , voyez fi vous l'entendrez
mieux que moy :
& l'ayant ouvert , il en
lut lui - mefme les premie-i
res lignes , de peur que
36 MERCURE
le Comte
jettant les
yeux fur la fuite , ne connût
la part que la Marquife
y pouvoit avoir ,
& que la crainte de lui
apprendre de fâcheufes
nouvelles , ne l'obligeât
à lui déguifer la verité.
Le Comte fut fort furpris
quand il reconnut
fa lettre. Untrouble foudain
s'empara de fon efprit
, & il eut befoin que
le mari fût occupé de fa
lecture , pour lui donner
(
GALANT. 37
le temps de fe remettre .
Aprés en avoir entendu
le commencement : Voila
, dit - il , contrefaifant
¡ l'étonné , ce que je chersche
depuis long - temps .
C'est le rôle d'une fille
qui ne fçait que l'Italien ,
- & qui parle à ſon amant
qui ne l'entend pas . Vous
a
aurez veu cela dans une
Comedie Françoiſe qui
a paru cet hyver. Mille
gens me l'ont demandé ,
& il faut que vous me
38.
MERCURE
faffiez le plaifir de me
le laiffer. J'y confens , lui
répondit le mari , pourveu
que vous le rendiez
à ma femme , car je croy
qu'il eft à elle. Quand le
jeune Comte crut avoir
porté affez loin la crédulité
du mari , il n'y
eut pas un mot dans ce
prétendu rôle Italien ,
dont il ne lui voulût faire
entendre l'explication
: mais le mari ayant
ce qu'il fouhaitoit , béGALANT.
39
nit le Ciel en lui - mefme
de s'être trompé fi
heureuſement , & s'en
alla où l'appelloient fes
affaires . Auffitôt qu'il
e fut forti , le Comte courut
à l'Eglife , où il étoit
fûr de trouver la Dame ,
qu'il avertit par un bilelet
, qu'il lui donna ſecretement
, de ce qui ve-
-noit de fe paffer , & de
1
l'artifice dont il s'étoit
fervi pour retirer fa let
tre. Elle ne fut pas fitôt
40 MERCURE
rentrée chez elle , qu'elle
.mit tous les domeſtiques
à la quête du papier , &
fon mari étant de retour,
elle lui demanda . Il lui
avoüa qu'il l'avoit trouvé
, & que le Comte en
ayant beſoin , il lui avoit
laiffé entre les mains .
Me voyez- vous des curiofitez
femblables pour
les lettres que vous recevez
, lui répondit- elle
d'un ton qui faifoit paroître
un peu de colere ?
Si
GALANT 41
Si c'étoit un billet tendre
, fi c'étoit un rendezvous
que l'on me donnât
, feroit - il , agréable.
que vous nous vinffiez
troubler ? Son mari lui
dic en l'embraffant , qu'il
fçavoit fort bien ce que
c'étoit ; & pour l'empêcher
de croire qu'il l'eût
foupçonnée , il l'affura
qu'il avoit cru ce papier
à lui lors qu'il l'avoit ramaffe.
La Dame ne borna
pas fon reffentiment
Avril 1714. D
42 MERCURE
à une raillerie de cette
nature . Elle fe rendit
chez le Comte de meilleure
heure qu'elle n'auroit
fait . La commodité
d'un jardin dans cette
maiſon étoit un
pretexte
pour y aller avant le
temps du foupé. La jaloufie
dans un mari eft
un défaut fi blâmable ,
quand elle n'eft pas bien
fondée , qu'elle fe fit un
devoir de juftifier ce que
le fien lui en avoit fait
J
GALANT. 43
paroître. Tout favorifoit
un fi beau deffein ;
toutes fortes de témoins
étoient éloignez , & le
Comte & la Marquiſe
pouvoient le parler en
liberté. Ce n'étoit plus
par des lettres & par des
fignes qu'ils exprimoient
leur tendreffe . Loin d'avoir
recours à une langue
étrangere , à peine
trouvoient - ils qu'ils
fçuffent affez bien le
François pour fe dire
Dij
44 MERCURE
tout ce qu'ils fentoient ;
& la défiance du mari
leur rendant tout légitime
, la Dame eut des
complaifances pour le
jeune Comte , qu'il n'auroit
pas ofé efperer. Le
mari & le Confeiller étant
arrivez fort tard ,
leur firent de grandes excufes
de les avoir fait fi
long - temps attendre.
On n'eut pas de peine à
les recevoir
, parce que
jamais on ne
s'étoit
4.
GALANT . 45
moins impatienté . Pendant
le foupé leurs yeux
firent leur devoir admirablement
; & la contrainte
où ils fe trouvoient
par la préſence
de deux témoins incommodes
, prêtoit à leurs
regards une éloquence
qui les confoloit de ne
pouvoir s'expliquer avec
plus de liberté. Le mari :
gea
ayant quelque chofe à
dire au Comte
, l'engaà
venir faire avec lui
46 MERCURE
un tour de jardin . Le
Comte en marqua par
un coup d'oeil fon déplaifir
à la Dame , & la.
Dame lui fit connoître
par un autre figne combien
l'entretien du Confeiller
alloit la faire fouffrir.
On fe fepara . Jamais
le Comte n'avoit
trouvé de fi doux momens
que ceux qu'il paffa
dans fon tête - à - tête
avec la Marquife . Il la
quitta fatisfait au derGALANT
. 47
nier point :mais dés qu'il
fut ſeul , il ne put s'abandonner
à lui mefme
fans reffentir les plus
cruelles agitations. Que
n'eut- il point à fe dire
fur l'état où il furprenoit
fon coeur ! Il n'en étoit
pas à connoître que fon
trop de confiance lui avoit
fait faire plus de
chemin qu'il ne lui étoit
permis : mais il s'étoit
imaginé jufques là qu'-
un amuſement avec une
48 MERCURE
coquete ne pouvoit bleffer
en rien la fidelité qu'il
devoit à fa maîtreffe
. Il
s'étoit toujours repofé
fur ce qu'une femme qui
ne pourroit lui donner
qu'un coeur partagé , ne
feroit jamais capable
d'inſpirer au fien un vrai
amour ; & alors il commença
à voir que ce qu'il
avoit traité d'amufement
, étoit devenu une
paffion dont il n'étoit
plus le maitre. Aprés ce
qui
GALANT 49
qui s'étoit paffé avec la
Marquife
, il fe fût flaté
inutilement de l'efperance
de n'en être point
aimé uniquement , & de
bonne foy: Peut - être
même que des doutes
là - deffus auroient été
d'un foible fecours . Il
fongeoit fans ceffe à tout
ce qu'il lupavoit trouvé
de paffion , à cet air vif
& touchant qu'elle don-*
noit à toutes les actions ;
& 'ces réflexions enfin
Avril 1714.
*
E
fo MERCURE
jointes au peu de fuccés
qu'il avoit eu dans l'attachement
qu'il avoit
pris pour la premiere
maîtreffe , mirent fa raifon
dans le parti de fon
coeur, & diffiperent tous
fes remords. Ainfi il s'abandonna
fans fcrupule
à ſon penchant , & ne
fongea plus qu'à fe ménager
mille nouvelles
douceurs avec la Marquife
; mais la jalouſic
les vinte troubler lors
GALANT. S1
qu'il s'y étoit le moins
attendu. Un jour il la
furprit feule avec l'amant
qu'il croyoit qu'el
le cût banni ; & le Cavalier
ne l'eut pas fitôt
quittée , qu'il lui en fic
des reproches , comme
d'un outrage qui ne pouvoit
être pardonné . Vous
n'avez pû long - temps
vous démentir , lui ditil
, Madame. Lorfque
vous m'avez crû affez
engagé , vous avez cellé
E ij
52 MERCURE
de vous faire violence .
J'avoue que j'applaudif
fois à ma paſſion , d'avoir
pû changer vôtre
naturel ; mais des femmes
comme
vous ne
changent jamais. J'avois
tort d'efperer un miracle
en ma faveur . Il la pria
enfuite de ne ſe plus contraindre
pour lui , & l'aſfura
qu'il la laifferoit en
liberté de recevoir toutes
les vifites qu'il lui
plairoit . La Dame fe
GALANT.
$3
connoiffoit trop bien en
dépit , pour rien apprehender
de celui - là . Elle
en tira de nouvelles affurances
de fon pouvoir
fur le jeune Comte ; &
affectant une colere qu'-
elle n'avoit pas , elle lui
fic comprendre qu'elle
ne daignoit pas ſe juſtifier
, quoy qu'elle eût de
bonnes raifons , qu'elle
lui cachoit pour le punir.
Elle lui fit même
promettre plus pofitive-
E iij
$4 MERCURE
ment qc'il n'avoit fait ,
de ne plus revenir chez
elle. Ce fut là où il put
s'appercevoir combien il
étoit peu maître de ſa
paffion . Dans un moment
il fe trouva le feul
criminel ; & plus affligé
de l'avoir irritée par les
reproches , que de la trahifon
qu'il penfoit lui
eftre faite , il fe jetta à
fes genoux , trop heureux
de pouvoir efperer
le pardon , qu'il croyoit
GALANT .
$$
auparavant qu'on lui devoit
demander
. Par quelles
foumiffions ne tâcha
t- il point de le meriter !
Bien loin de lui remetles
tre devant les yeux
marques de paffion qu'il
avoit reçues d'elle , &
qui fembloient lui donner
le droit de ſe plaindre
, il paroiffoit les avoir
oubliées , ou s'il s'en
refſouvenoit , ce n'étoit
que pour le trouver cent
fois plus coupable . Il
E mij
56 MERCURE
n'alleguoit que l'excés
de fon amour qui le faifoit
ceder à la jalousie ,
& quien de pareilles occafions
ne s'explique jamais
mieux que par la
colere. Quand elle crut
avoir pouffé fon triomphe
affez loin , elle lui
jetta un regard plein de
douceur , qui en un moment
rendit à fon ame
toute fa tranquilité . C'eft
affez me contraindre ,
lui dit- elle ; auffi bien ma
•
"
GALANT. SZ
joye & mon amour commencent
à me trahir.
Non , mon cher Comte
, ne craignez point
que je me plaigne de vôtre
colere. Je me plaindrois
bien plutôt fi vous
n'en aviez point eu . Vos
reproches il est vrai ,
>
bleffent ma fidelité : mais
je leur pardonne ce qu'ils
ont d'injurieux , en faveur
de ce qu'ils ont de
paffionné. Ces affurances
de vôtre tendreffe m'é58
MERCURE
toient fi cheres , qu'elles
ont arrefté jufqu'ici l'im
patience que j'avois de
me juftifier. Là - deffus
elle lui fit connoître
combien ſes ſoupçons étoient
indignes d'elle &
de lui ; que n'ayant point
défendu au Cavalier de
venir chez elle , elle n'avoit
pu refufer de le voir;
qu'un tel refus auroit été
une faveur pour lui ; que.
s'il le
fouhaitoit pourtant
, elle lui défendroit
V
GALANT. 59
fa maiſon pour jamais :
mais qu'il confiderât
combien il feroit peu
agreable pour elle , qu'-
un homme de cette forte
s'allât vanter dans le
monde qu'elle cuft rompu
avec lui , & laiſsât
croire qu'il y euft des
gens à qui il donnoit de
l'ombrage. L'amoureux
Comte étoit fi touché
des marques de tendreſſe
qu'on venoit de lui donner
, qu'il ſe feroit vo60
MERCURE
>
lontiers payé d'une plus
méchante raiſon . Il eut
honte de fes foupçons ,
& la pria lui- meſine de
ne point changer de conduite
. Il paffa ainfi quelques
jours à recevoir fans
ceffe de nouvelles affurances
qu'il étoit aimé ,
& il merita dans peu
qu'on lui accordât une
entrevue fecrete la nuit .
Le mari étoit à la campagne
pour quelque
temps ; & la Marquife ,
*
1
GALANT. 61
maîtreffe alors d'ellemeſme
, ne voulut pas
perdre une occafion fi
favorable de voir fon a
mant avec liberté . Le
jour que le Comte étoit
attendu chez elle fur les
neuf heures du foir , le
Confeiller foupant avec
lui , ( ce qu'il faifoit fort
fouvent ) voulut le mener
à une affemblée de
femmes du voisinage ,
qu'on regaloit d'un concert
de voix & d'inftru62
MERCURE
mens. Le Comte s'en
excufa , & ayant laiffé
fortir le Confeiller , qui
le preffa inutilement de
venir jouir de ce regal ,
il fe rendit chez la Dame
, qui les reçut avec
beaucoup de marques
d'amour
. Aprés quatre
heures d'une converfation
trés-tendre , il falut
fe féparer. Le Comte cut
fait à peine dix pas dans
la ruë , qu'il ſe vit ſuivi
d'un homme qui avoit le
GALANT. 63
vifage envelopé d'un
manteau . Il marcha toujours
; & s'il le regarda
comme un efpion , il eut
du moins le plaifir de
remarquer
qu'il étoit
trop grand pour être le
mari de la Marquife . En
rentrant chez lui , il trouva
encore le pretendu
cfpion , qu'il reconnut
enfin pour le Confeiller.
Les refus du jeune Comte
touchant le concert
de voix , lui avoit fait
64 MERCURE
croire qu'il avoit un rendez-
vous. Il le foupçonnoit
déja d'aimer la Marquife
, & fur ce foupçon
il etoit venu l'attendre à
quelques pas de fa porte
, & l'avoit vû fe couler
chez elle. Il y avoit
frapé auffitôt , & la fui-:
vante lui étoit venu dire
de la part de fa maîtreffe,
qu'un grand mal de tête
l'obligeoit à fe coucher ,
& qu'il lui étoit impoffible
de le recevoir. Par
cette
GALANT. 65
cette réponſe il avoit
compris tout le myftere.
Il fuivit le Comte dans
fa chambre , & lui ayam
declaré ce qu'il avoit fait
depuis qu'ils s'étoient
quittez : Vous avez pris ,
lui dit - il , de l'engagement
pour la Marquife ;
il faut qu'en fincere ami
je vous la faffe connoître.
J'ai commencé à l'aimer
avant que vous yinfficz
loger avec moy , &
quand elle a fçû nôtre
Avril 1714.
F
66 MERCURE
liaifon , elle m'a fait promettre
par tant de fermens
, que je vous ferois
un fecret de cet amour ,
que je n'ai ofé vous en
parler . Vous fçavez , me
difoit - elle , qu'il aime
une perfonne qui me hait
mortellement . Il ne manquera
jamais de lui apprendre
combien mon
coeur eft foible pour
vous. La diſcretion qu'-
on doit à un ami ne tient
guere contre la joye que
GALANT. 67
l'on a quand on croit
pouvoir divertir une
maîtreffe. La perfide
vouloit même que je lui
fuffe obligé de ce qu'elle
conſentoit à recevoir
vos vifites. Elle me recommandoit
fans ceffe
de n'aller jamais la voir
avec vous ; & quand
vous arriviez , elle affectoit
un air chagrin dont
je me plaignois quelquefois
à elle , & qu'apparemment
elle vous laif,
F ij
68 MERCURE
foit expliquer favorablement
pour vous . Mille
fignes & mille geſtes ,
qu'elle faifoit dans ces
temps - là , nous étoient
t
fans doute communs . Je
rappelle préfentement
une infinité de chofes
que je croyois alors indifferentes
, & je ne doute
point qu'elle ne fe foit
fait un merite auprés de
vous , de la partie qu'elle
fit il y a quelque temps
de fouper ici . Cependant
GALANT . 69
quand elle vous vit engagé
dans le jardin avec
fon mari , quels tendres
reproches ne me fit- elle
point d'être revenu ' fi
tard de la campagne , &
de l'avoir laiffée filongtemps
avec un homme
qu'elle n'aimoit pas !
Hier même encore qu'-
elle me préparoit avec
vous une trahiſon ſi noire
elle eut le front de
vous faire porteur d'une
lettre , par laquelle elle
70 MERCURE
me donnoit un rendezvous
pour ce matin ,
vous difant que c'étoit
un papier que fon mari
l'avoit chargée en partant
de me remettre. Le
Comte étoit fi troublé
de tout ce que le Confeiller
lui difoit , qu'il
n'eut pas la force de l'interrompre.
Dés qu'il fut
remis , il lui apprit comme
fon amour au commencement
n'étoit qu'
un jeu , & comme dés
GALANT. 71
S
lors la Marquife lui avoit
fait les mêmes loix
de difcretion qu'à lui.
Ils firent enfuite d'autres
éclairciffemens , qui
découvrirent au Comte
qu'il ne devoit qu'à la
coquetterie de la Dame
ce qu'il croyoit devoir à
fa paffion ; car c'étoit le
Confeiller qui avoit exigé
d'elle qu'elle ne vît
plus tant de monde , &
fur- tout qu'elle éloignât
fon troifiéme amant ; &
72 MERCURE
ils trouverent que quand
elle l'eut rappellé , elle
avoit allegué le même
pretexte
au Confeiller
qu'au Comte , pour continuer
de le voir. Il n'y
a gueres
d'amour
à l'épreuve
d'une telle perfidie
; auffi ne fe piquerent-
ils pas de conftance
pour une femme qui la
méritoit fi peu . Le Comte
honteux de la trahifon
qui'l avoit faite à fa premiere
maitreſſe , refolut
de
GALANT .
73
de n'avoir plus d'affiduitez
que pour elle feule ,
& le Confeiller fut bientôt
determiné fur les mefures
qu'il avoit à prendre
mais quelque promeffe
qu'ils fe fillent l'un
à l'autre de ne plus voir
la Marquife , ils ne purent
fe refufer le foulagement
de lui faire des reproches.
Dés qu'il leur
parut qu'ils la trouveroient
levée , ils fe tendirent
chez elle . Le
Avril
1714.
G
74 MERCURE
Comte lui dit d'abord ,
que le Confeiller étant
fon ami , l'avoit voulu
faire profiter du rendezvous
qu'elle lui avoit
donné , & qu'ainſi elle
ne devoit pas s'étonner
s'ils venoient enſemble .
Le Conſeiller prit aufſi.
tôt la parole , & n'oublia
rien de tout ce qu'il
crut capable de faire
honte à la Dame , & de
le vanger de fon infidelité.
Il lui remit devant
M
GALANT . 75
les yeux l'ardeur fincere
avec laquelle il l'avoit
aimée , les marques de
paffion qu'il avoit reçûës
d'elle , & les fermens
: qu'elle lui avoit tant de
I fois reiterez de n'aimer
jamais que lui . Elle l'écouta
fans l'interrompre
; & ayant pris fon
parti pendant qu'il parloit
: Il eft vrai , lui ré-
#pondit - elle d'un air
moins embaraffé que jamais
, je vous avois pro-
Gij
76 MERCURE
mis de n'aimer que vous :
mais vous avez attiré
Monfieur le Comte dans
ce quartier , vous l'avez
amené chez moy , & il
eft venu à m'aimer .D'ailleurs
, de quoy pouvezvous
vous plaindre ?
Tout ce qui a dépendu
de moy pour vous rendre
heureux , je l'ai fait.
Vous fçavez vous - même
quelles précautions
j'ai prifes pour vous cacher
l'un à l'autre vôtre
GALANT . 77
paffion . Si vous l'aviez
fçûë , vôtre amitié vous
auroit coûté des violences
ou des remords , que
ma bonté & ma prudence
vous ont épargnez .
N'eft- il pas vrai qu'avant
cette nuit , que vous aviez
épić Monfieur le
Comte , vous étiez tous
deux les amans du monde
les plus contens ? Suisje
coupable de vôtre indifcrétion
Pourquoy me
venir chercher le foir ?
Giij
78 MERCURE
Ne vous avois - je pas averti
par une lettre que
je donnai à Monfieur le
Comte , de ne venir que
ce matin ? Tout cela fut
dit d'une maniere fi lipeu
déconcerbre
, &
fi
tée
, que
ce
trait
leur
fit
connoître la Dame encore
mieux qu'ils n'avoient
fait . Ils admirerent
un caractere fi particulier
, & laifferent à
qui le voulut la liberté
d'en être la dupe . La
"
GALANT. 79
Marquife fe confola de
leur perte , en faiſant
croire au troifieme amant
nouvellement rappellé
, qu'elle les avoit
bannis pour lui ; & comme
elle ne pouvoit vivre
fans intrigue , elle en fit
· bientôt une nouvelle .
nouvelle.
U
LYON
N jeune Comte ,
d'une des meilleures
Maifons
du Royaume , s'étant
nouvellement établi das
Avril 1714. A ij
4 MERCURE
un quartier où le jeu &
la galanterie regnoient
également , fut obligé
d'y prendre parti comme
les autres ; & parce
que fon coeur avoit des
engagemens ailleurs , il
fe declara pour le jeu ,
comme pour fa paffion
dominante mais le peu
d'empreffement qu'il y
avoit , faifoit affez voir
qu'il fe contraignoit , &
l'on jugea que c'étoir un
homme qui ne s'attaGALANT
.
S
choit à rien , & qui dans
la neceffité de choiſir
avoit encore mieux aimé
cet amuſement, que
de dire à quelque belle
ce qu'il ne fentoit pas .
Un jour une troupe de
jeunes Dames qui ne
joüoient point , l'entreprit
fur fon humeur indifferente.
Il s'en défendit
le mieux qu'il put ,
alleguant fon peu de
merite , & le peu d'ef
perance qu'il auroit d'ê-
A iij
6 MERCURE
tre heureux en amour :
mais on lui dit que
quand il fe connoîtroit
affez mal pour avoir une
fi méchante opinion de
lui - même , cette raiſon
feroit foible contre la
vûë d'une belle perfonne
; & là - deffus on le
menaça des charmes d'u
ne jeune Marquife , qui
demeuroit dans le voifinage
, & qu'on attendoit.
Il ne manqua pas de leur
repartir qu'elles-mêmes
GALANT.
7.
ne fe connoiffoient point
affez , & que s'il pouvoit
échaper au peril où il
fe trouvoit alors , il ne
devoit plus rien craindre
pour fon coeur . Pour
réponse à fa galanterie ,
elles lui montrerent la
Dame dont il étoit queftion
, qui entroit dans
ce moment . Nous parlions
de vous , Madame ,
lui dirent - elles en l'appercevant
. Voici un indifferent
que nous vous
A iiij
8 MERCURE
donnons à convertir :
Vous y êtes engagée
d'honneur ; car il femble
yous défier auffi - bien
que nous. La Dame &
le jeune Comte ſe reconnurent
, pour s'être
vûs quelquefois à la campagne
chez une de leurs
amies . Elle étoit fort convaincuë
qu'il ne meritoit
rien moins que le
reproche qu'on luy faifoit
, & il n'étoit que
trop ſenſible à ſon gré :
GALANT. 9
mais elle avoit les raifons
pour feindre de croire
ce qu'on lui difoit.
C'étoit une occafion de
commerce avec un homme
, fur lequel depuis
long - temps elle avoit
fait des deffeins qu'elle
n'avoit pû executer . Elle
lui trouvoit de l'efprit
& de l'enjouement , &
elle avoit hazardé des
complaisāces pour beaucoup
de gens qui afſurément
ne le valoient
to MERCURE
pas : mais fon plus grand
merite étoit l'opinion
qu'elle avoit qu'il fût aimé
d'une jeune Demoifelle
qu'elle haïffoit , &
dont elle vouloit fe vanger.
Elle prit donc fans
balancer le parti qu'on
lui offroit ; & aprés lui
avoit dit qu'il faloit qu'-
on ne le crût pas bien
endurci , puis qu'on s'adreffoit
à elle pour le
toucher , elle entreprit
de faire un infidele , fous
GALANT . 11
pretexte de convertir un
indifferent. Le Comte
aimoit paffionsément la
Demoiſelle dont on le
croyoit aimé, & il tenoit
à elle par des
engagemens
fi puiffans
, qu'il
ne craignoit
pas que rien
l'en pût détacher
. Sur
tout il fe croyoit
fort en
fûreté contre les charmes
de la Marquife. Il
la connoiffoit pour une
de ces coquettes de profeffion
qui veulent , à
12 MERCURE
quelque prix que ce ſoit ,
engager tout le monde ,
& qui ne trouvent rien
de plus honteux que de
manquer une conquête .
Il fçavoit encore quedepuis
peu elle avoit un
amant , dont la nouveauté
faifoit le plus grand
merite , & pour qui elle
avoit rompu avec un
autre qu'elle aimoit depuis
long - temps , & à
qui elle avoit des obligations
effentielles . Ces
と
GALANT .
13
connoiffances lui fmbloient
un remede affuré
contre les tentations
les plus preffantes. La
Dame l'avoit affez veu
pour connoître quel étoit
fon éloignement
pour des femmes
de fon
caractere
: mais cela ne
fit que flater fa vanité.
Elle trouva plus de gloire
à triompher
d'un
coeur qui devoit être fi
bien défendu. Elle lui
fit d'abord
des reproches
14 MERCURE
de ne l'eftre pas venu
voir depuis qu'il étoit
dans le quartier , & l'engagea
à reparer fa faute
dés le lendemain . Il
alla chez elle , & s'y fit
introduire par un Confeiller
de fes amis , avec
qui il logcoit , & qui
avoit des liaiſons étroites
avec le mari de la
Marquife, Les honneftetez
qu'elle lui fit l'obligerent
enfuite d'y aller
plufieurs fois fans inGALANT.
15
troducteur ; & à chaque
yifite la Dame mit en
ufage tout ce qu'elle
crut de plus propre à .
l'engager. Elle trouva
d'abord toute la refiftance
qu'elle avoit attendue.
Ses foins , loin .
de faire effet , ne lui attirerent
pas feulement
une parole qui tendît à
une declaration : mais
elle ne defefpera point
pour cela du pouvoir de
fes charmes ; ils l'avoient
16 MERCURE
fervie trop fidelement en
d'autres occafions
, pour
ne lui donner pas lieu
de fe flater d'un pareil
fuccés en celle - ci ; elle
crut mefme remarquer
bientôt qu'elle ne s'étoit
pas trompée. Les vifites
du Comte furent
plus frequentes : elle lui
trouvoit un enjouëment
que l'on n'a point quand
on n'a aucun deffein de
plaire.Mille railleries divertissantes
qu'il faifoit
fur
+
GALANT . 17
für fon nouvel amant ;
le chagrin qu'il témoignoit
quand il ne pouvoit
eftre feul avec elle ;
Fattention qu'il preftoit.
aux moindres chofes
qu'il luy voyoit faire :
tout cela lui parut d'un
augure merveilleux , &
il eft certain que fi elle
n'avoit pas encore le
coeur de ce pretendu indifferent
, elle occupoit.
du moins fon efprit . Ih
alloit plus rarement chez
Avril 1714. B :
18 MERCURE
la Demoiſelle qu'il aimoit
, & quand il étoit
avec elle, il n'avoit point
d'autre foin , que de faire
tomber le difcours fur
la Marquife . Il aimoit
mieux railler d'elle que
de n'en rien dire . Enfin
foit qu'il fût feul , ou
en compagnie , fon idée
ne l'abandonnoit jamais
. Quel dommage ,
difoit - il quelquefois
que le Ciel ait répandu
tant de graces dans une
,
GALANT . 19
coquette ? Faut - il que la
voyant fi aimable , on
ait tant de raiſon de ne
point l'aimer ? Il ne pouvoit
lui pardonner tous
fes charmes ; & plus il
lui en trouvoit , plus il
croyoit la haïr. Il s'oublia
même un foir jufques
à lui reprocher fa
conduite , mais avec une
aigreur qu'elle n'auroit,
pas ofé efperer fitoft. A
quoy bon , lui dit- il ,
Madame , toutes ces oil-
Bij
20 MERCURE
lades & ces manieres étu
diées que chacun regarde
, & dont tant de gens
fe donnent le droit de
parler Ces foins de
chercher à plaire à tout
le monde , ne font pardonnables
qu'à celles à
qui ils tiennent lieu de
beauté . Croyez - moy ,
Madame , quittez des
affectations qui font indignes
de vous. C'étoit
où on l'attendoit . La
Dame étoit trop habile
GALANT. 2ม1
pour ne diftinguer past
les confeils de l'amitié
des reproches de la jaloufie
. Elle lui en marqua
de la reconnoiſſance
, & tâcha enfuite de
lui perfuader que ce qui
paroiffoit coquetterie ,
n'étoit en elle que la
crainte
d'un veritable
attachement ; que du
naturel dont elle fe connoiffoit
, elle ne pourroit
être heureufe dans.
un engagement , parce
22 MERCURE
qu'elle ne ſe verroit jamais
aimée , ni avec la
même fincerité , ni avec
la même delicateſſe dont
elle fouhaiteroit de l'être
, & dont elle fçavoit
bien qu'elle aimeroit .
Enfin elle lui fit an faux
portrait de fon coeur , qui
fut pour lui un veritable
poifon. Il ne pouvoit
croire tout à fait qu'elle
fût fincere : mais il ne
pouvoit s'empefcher de
le fouhaiter. Il cherGALANT.
23
choit des
apparences
ce qu'elle
lui difoit , &
il lui rappelloit
mille actions
qu'il lui avoit vû
faire , afin qu'elle les juſtifiât
; & en effet , fe fervant
du pouvoir qu'elle
commençoit à prendre
fur lui , elle y donna
des couleurs qui diffiperent
une partie de fes
foupçons mais qui
pourtant n'auroient pas
trompé un homme qui
cuft moins fouhaité de
24 MERCURE
l'eftre. Cependant, ajouta-
t- elle d'un air enjoüé ,
je ne veux pas tout à fait
difconvenir d'un défaut
qui peut me donner lieu
de vous avoir quelque
obligation . Vous fçavez
ce que j'ai entrepris pour
vous corriger de celui
qu'on vous reprochoit .
Le peu de fuccés que j'ai
eu ne vous diſpenſe pas
de reconnoître mes bonnes
intentions , & vous
me devez les mefmes
foins.
GALANT. 25
foins . Voyons fi vous ne
ferez pas plus heureux à
fixer une inconftante ,
que je l'ay été à toucher
un infenfible. Cette propofition
, quoique faite
en riant , le fit rentrer en
lui - mefme , & alarma
d'abord fa fidelité . Il vit
qu'elle n'avoit peut - eftre
que trop reüffi dans
fon entrepriſe , & il reconnut
le danger où il
étoit : mais fon penchant
commençant à lui ren-
Avril 1714.
C
26 MERCURE
dre ces reflexions facheuſes
, il tâcha bientôt
à s'en délivrer . Il
penfa avec plaifir que fa
crainte étoit indigne de
lui , & de la perfonne
qu'il aimoit depuis fi
long- temps . Sa delicateffe
alla meſme juſqu'à
fe la reprocher
comme
une infidelité
; & aprés
s'eftre dit à foy- meſme
,
que c'étoit déja eſtre inconftant
que de craindre
de changer , il embraſſa
GALANT . 27
avec joye le parti qu'on
lui offroit . Ce fut un
commerce fort agreable
de part & d'autre. Le
pretexte qu'ils prenoient
rendant leur empreffement
un jeu , ils goutoient
des plaifirs qui
n'étoient troublez d'aucuns
fcrupules. L'Italien
, qu'ils fçavoient tous
deux , étoit l'interprete :
de leurs tendres fentimens.
Ils ne fe voyoient
jamais qu'ils n'euffent à
Cij
28 MERCURE
fe donner un billet en
cette langue ; car pour
plus grande feureté, ils
étoient convenus qu'ils
ne s'enverroient jamais
leurs lettres . Sur - tout
elle lui avoit défendu dé
parler de leur commerce
au Confeiller avec qui
il logcoit , parce qu'il
étoit beaucoup plus des
amis de fon mari que des
fiens , & qu'autrefois ,
fur de moindres apparences,
il lui avoit donné
GALANT . 29
des foupçons d'elle fort
defavantageux . Elle lui
marqua même des heures
où il pouvoit le moins
craindre de les rencontrer
chez elle l'un ou
l'autre , & ils convinrent
de certains fignes d'intelligence
pour les temps
qu'ilsyferoient. Cemyf
tere étoit un nouveau
charme pour le jeune
Comte. La Marquife
prit enfuite des manieres
fiéloignées d'une co-
C
iij
30 MERCURE
quette , qu'elle acheva
bientoft
de le perdre
.
Jufques là elle avoit eu
un de ces caracteres enjoüez
, qui reviennent
quafi à tout le monde ,
mais qui deſeſperent un
amant ; & elle le quitta
pour en prendre un tout
oppofé , fans le lui faire
valoir comme un facri.
fice . Elle écarta fon nouvel
amant , qui étoit un
Cavalier fort bien fait .
Enfin loin d'aimer l'éGALANT.
31
clat , toute fon application
étoit d'empêcher
qu'on ne s'apperçût de
l'attachement que le
Comte avoit pour elle :
mais malgré tous fes
foins, il tomba unjour de
ſes poches une lettre que
fon mari ramaffa fans
qu'elle y prît garde . 11
n'en connut point le caractere
, & n'en entendit
pas le langage : mais ne
doutant pas que ce ne
fût de l'Italien , il courut
Ciiij
32 MERCURE
chez le Conſeiller , qu'il
fçavoit bien n'être pas
chez lui , feignant de lui
vouloir
communiquer
quelque affaire . C'étoit
afin d'avoir occafion de
parler au Comte , qu'il
ne foupçonnoit point
d'être l'auteur de la lettre
, parce qu'elle étoit
d'une autre main. Pour
prévenir les malheurs
qui arrivent quelquefois
des lettres perduës , le
Comte faifoit écrire touGALANT
. 33
tes celles qu'il donnoit à
la Marquise par une perfonne
dont le caractere
étoit inconnu . Il lui avoit
porté le jour precedent
le billet Italien
dont il s'agiffoit. Il étoit
écrit fur ce qu'elle avoit
engagé le Confeiller à
lui donner
à fouper ce
même jour- là ; & parce
qu'elle avoit fçû qu'il
devoit aller avec fon mari
à deux lieuës de Paris
l'apréfdînée , & qu'ils
34 MERCURE
n'en reviendroient que
fort tard , elle étoit convenue
avec ſon amant
qu'elle fe rendroit chez
lui avant leur retour. La
lettre du Comte étoit
pour l'en faire fouvenir ,
& comme un avantgoût
de la fatisfaction qu'ils
promettoient cette fe
foirée. Le mari n'ayant
point trouvé le Confeiller
, demanda le Comte .
Dés qu'il le vit , il tira
de fa poche d'un air emGALANT
.
35
preffé quantité de papiers
, & le pria de les
lui remettre quand il
féroit revenu. Parmi ces
papiers étoit celui qui
lui donnoit tant d'agitation
. En voici un , lui
dit- il en feignant de s'être
mépris , qui n'en eſt
pas. Je ne fçai ce que
c'eft , voyez fi vous l'entendrez
mieux que moy :
& l'ayant ouvert , il en
lut lui - mefme les premie-i
res lignes , de peur que
36 MERCURE
le Comte
jettant les
yeux fur la fuite , ne connût
la part que la Marquife
y pouvoit avoir ,
& que la crainte de lui
apprendre de fâcheufes
nouvelles , ne l'obligeât
à lui déguifer la verité.
Le Comte fut fort furpris
quand il reconnut
fa lettre. Untrouble foudain
s'empara de fon efprit
, & il eut befoin que
le mari fût occupé de fa
lecture , pour lui donner
(
GALANT. 37
le temps de fe remettre .
Aprés en avoir entendu
le commencement : Voila
, dit - il , contrefaifant
¡ l'étonné , ce que je chersche
depuis long - temps .
C'est le rôle d'une fille
qui ne fçait que l'Italien ,
- & qui parle à ſon amant
qui ne l'entend pas . Vous
a
aurez veu cela dans une
Comedie Françoiſe qui
a paru cet hyver. Mille
gens me l'ont demandé ,
& il faut que vous me
38.
MERCURE
faffiez le plaifir de me
le laiffer. J'y confens , lui
répondit le mari , pourveu
que vous le rendiez
à ma femme , car je croy
qu'il eft à elle. Quand le
jeune Comte crut avoir
porté affez loin la crédulité
du mari , il n'y
eut pas un mot dans ce
prétendu rôle Italien ,
dont il ne lui voulût faire
entendre l'explication
: mais le mari ayant
ce qu'il fouhaitoit , béGALANT.
39
nit le Ciel en lui - mefme
de s'être trompé fi
heureuſement , & s'en
alla où l'appelloient fes
affaires . Auffitôt qu'il
e fut forti , le Comte courut
à l'Eglife , où il étoit
fûr de trouver la Dame ,
qu'il avertit par un bilelet
, qu'il lui donna ſecretement
, de ce qui ve-
-noit de fe paffer , & de
1
l'artifice dont il s'étoit
fervi pour retirer fa let
tre. Elle ne fut pas fitôt
40 MERCURE
rentrée chez elle , qu'elle
.mit tous les domeſtiques
à la quête du papier , &
fon mari étant de retour,
elle lui demanda . Il lui
avoüa qu'il l'avoit trouvé
, & que le Comte en
ayant beſoin , il lui avoit
laiffé entre les mains .
Me voyez- vous des curiofitez
femblables pour
les lettres que vous recevez
, lui répondit- elle
d'un ton qui faifoit paroître
un peu de colere ?
Si
GALANT 41
Si c'étoit un billet tendre
, fi c'étoit un rendezvous
que l'on me donnât
, feroit - il , agréable.
que vous nous vinffiez
troubler ? Son mari lui
dic en l'embraffant , qu'il
fçavoit fort bien ce que
c'étoit ; & pour l'empêcher
de croire qu'il l'eût
foupçonnée , il l'affura
qu'il avoit cru ce papier
à lui lors qu'il l'avoit ramaffe.
La Dame ne borna
pas fon reffentiment
Avril 1714. D
42 MERCURE
à une raillerie de cette
nature . Elle fe rendit
chez le Comte de meilleure
heure qu'elle n'auroit
fait . La commodité
d'un jardin dans cette
maiſon étoit un
pretexte
pour y aller avant le
temps du foupé. La jaloufie
dans un mari eft
un défaut fi blâmable ,
quand elle n'eft pas bien
fondée , qu'elle fe fit un
devoir de juftifier ce que
le fien lui en avoit fait
J
GALANT. 43
paroître. Tout favorifoit
un fi beau deffein ;
toutes fortes de témoins
étoient éloignez , & le
Comte & la Marquiſe
pouvoient le parler en
liberté. Ce n'étoit plus
par des lettres & par des
fignes qu'ils exprimoient
leur tendreffe . Loin d'avoir
recours à une langue
étrangere , à peine
trouvoient - ils qu'ils
fçuffent affez bien le
François pour fe dire
Dij
44 MERCURE
tout ce qu'ils fentoient ;
& la défiance du mari
leur rendant tout légitime
, la Dame eut des
complaifances pour le
jeune Comte , qu'il n'auroit
pas ofé efperer. Le
mari & le Confeiller étant
arrivez fort tard ,
leur firent de grandes excufes
de les avoir fait fi
long - temps attendre.
On n'eut pas de peine à
les recevoir
, parce que
jamais on ne
s'étoit
4.
GALANT . 45
moins impatienté . Pendant
le foupé leurs yeux
firent leur devoir admirablement
; & la contrainte
où ils fe trouvoient
par la préſence
de deux témoins incommodes
, prêtoit à leurs
regards une éloquence
qui les confoloit de ne
pouvoir s'expliquer avec
plus de liberté. Le mari :
gea
ayant quelque chofe à
dire au Comte
, l'engaà
venir faire avec lui
46 MERCURE
un tour de jardin . Le
Comte en marqua par
un coup d'oeil fon déplaifir
à la Dame , & la.
Dame lui fit connoître
par un autre figne combien
l'entretien du Confeiller
alloit la faire fouffrir.
On fe fepara . Jamais
le Comte n'avoit
trouvé de fi doux momens
que ceux qu'il paffa
dans fon tête - à - tête
avec la Marquife . Il la
quitta fatisfait au derGALANT
. 47
nier point :mais dés qu'il
fut ſeul , il ne put s'abandonner
à lui mefme
fans reffentir les plus
cruelles agitations. Que
n'eut- il point à fe dire
fur l'état où il furprenoit
fon coeur ! Il n'en étoit
pas à connoître que fon
trop de confiance lui avoit
fait faire plus de
chemin qu'il ne lui étoit
permis : mais il s'étoit
imaginé jufques là qu'-
un amuſement avec une
48 MERCURE
coquete ne pouvoit bleffer
en rien la fidelité qu'il
devoit à fa maîtreffe
. Il
s'étoit toujours repofé
fur ce qu'une femme qui
ne pourroit lui donner
qu'un coeur partagé , ne
feroit jamais capable
d'inſpirer au fien un vrai
amour ; & alors il commença
à voir que ce qu'il
avoit traité d'amufement
, étoit devenu une
paffion dont il n'étoit
plus le maitre. Aprés ce
qui
GALANT 49
qui s'étoit paffé avec la
Marquife
, il fe fût flaté
inutilement de l'efperance
de n'en être point
aimé uniquement , & de
bonne foy: Peut - être
même que des doutes
là - deffus auroient été
d'un foible fecours . Il
fongeoit fans ceffe à tout
ce qu'il lupavoit trouvé
de paffion , à cet air vif
& touchant qu'elle don-*
noit à toutes les actions ;
& 'ces réflexions enfin
Avril 1714.
*
E
fo MERCURE
jointes au peu de fuccés
qu'il avoit eu dans l'attachement
qu'il avoit
pris pour la premiere
maîtreffe , mirent fa raifon
dans le parti de fon
coeur, & diffiperent tous
fes remords. Ainfi il s'abandonna
fans fcrupule
à ſon penchant , & ne
fongea plus qu'à fe ménager
mille nouvelles
douceurs avec la Marquife
; mais la jalouſic
les vinte troubler lors
GALANT. S1
qu'il s'y étoit le moins
attendu. Un jour il la
furprit feule avec l'amant
qu'il croyoit qu'el
le cût banni ; & le Cavalier
ne l'eut pas fitôt
quittée , qu'il lui en fic
des reproches , comme
d'un outrage qui ne pouvoit
être pardonné . Vous
n'avez pû long - temps
vous démentir , lui ditil
, Madame. Lorfque
vous m'avez crû affez
engagé , vous avez cellé
E ij
52 MERCURE
de vous faire violence .
J'avoue que j'applaudif
fois à ma paſſion , d'avoir
pû changer vôtre
naturel ; mais des femmes
comme
vous ne
changent jamais. J'avois
tort d'efperer un miracle
en ma faveur . Il la pria
enfuite de ne ſe plus contraindre
pour lui , & l'aſfura
qu'il la laifferoit en
liberté de recevoir toutes
les vifites qu'il lui
plairoit . La Dame fe
GALANT.
$3
connoiffoit trop bien en
dépit , pour rien apprehender
de celui - là . Elle
en tira de nouvelles affurances
de fon pouvoir
fur le jeune Comte ; &
affectant une colere qu'-
elle n'avoit pas , elle lui
fic comprendre qu'elle
ne daignoit pas ſe juſtifier
, quoy qu'elle eût de
bonnes raifons , qu'elle
lui cachoit pour le punir.
Elle lui fit même
promettre plus pofitive-
E iij
$4 MERCURE
ment qc'il n'avoit fait ,
de ne plus revenir chez
elle. Ce fut là où il put
s'appercevoir combien il
étoit peu maître de ſa
paffion . Dans un moment
il fe trouva le feul
criminel ; & plus affligé
de l'avoir irritée par les
reproches , que de la trahifon
qu'il penfoit lui
eftre faite , il fe jetta à
fes genoux , trop heureux
de pouvoir efperer
le pardon , qu'il croyoit
GALANT .
$$
auparavant qu'on lui devoit
demander
. Par quelles
foumiffions ne tâcha
t- il point de le meriter !
Bien loin de lui remetles
tre devant les yeux
marques de paffion qu'il
avoit reçues d'elle , &
qui fembloient lui donner
le droit de ſe plaindre
, il paroiffoit les avoir
oubliées , ou s'il s'en
refſouvenoit , ce n'étoit
que pour le trouver cent
fois plus coupable . Il
E mij
56 MERCURE
n'alleguoit que l'excés
de fon amour qui le faifoit
ceder à la jalousie ,
& quien de pareilles occafions
ne s'explique jamais
mieux que par la
colere. Quand elle crut
avoir pouffé fon triomphe
affez loin , elle lui
jetta un regard plein de
douceur , qui en un moment
rendit à fon ame
toute fa tranquilité . C'eft
affez me contraindre ,
lui dit- elle ; auffi bien ma
•
"
GALANT. SZ
joye & mon amour commencent
à me trahir.
Non , mon cher Comte
, ne craignez point
que je me plaigne de vôtre
colere. Je me plaindrois
bien plutôt fi vous
n'en aviez point eu . Vos
reproches il est vrai ,
>
bleffent ma fidelité : mais
je leur pardonne ce qu'ils
ont d'injurieux , en faveur
de ce qu'ils ont de
paffionné. Ces affurances
de vôtre tendreffe m'é58
MERCURE
toient fi cheres , qu'elles
ont arrefté jufqu'ici l'im
patience que j'avois de
me juftifier. Là - deffus
elle lui fit connoître
combien ſes ſoupçons étoient
indignes d'elle &
de lui ; que n'ayant point
défendu au Cavalier de
venir chez elle , elle n'avoit
pu refufer de le voir;
qu'un tel refus auroit été
une faveur pour lui ; que.
s'il le
fouhaitoit pourtant
, elle lui défendroit
V
GALANT. 59
fa maiſon pour jamais :
mais qu'il confiderât
combien il feroit peu
agreable pour elle , qu'-
un homme de cette forte
s'allât vanter dans le
monde qu'elle cuft rompu
avec lui , & laiſsât
croire qu'il y euft des
gens à qui il donnoit de
l'ombrage. L'amoureux
Comte étoit fi touché
des marques de tendreſſe
qu'on venoit de lui donner
, qu'il ſe feroit vo60
MERCURE
>
lontiers payé d'une plus
méchante raiſon . Il eut
honte de fes foupçons ,
& la pria lui- meſine de
ne point changer de conduite
. Il paffa ainfi quelques
jours à recevoir fans
ceffe de nouvelles affurances
qu'il étoit aimé ,
& il merita dans peu
qu'on lui accordât une
entrevue fecrete la nuit .
Le mari étoit à la campagne
pour quelque
temps ; & la Marquife ,
*
1
GALANT. 61
maîtreffe alors d'ellemeſme
, ne voulut pas
perdre une occafion fi
favorable de voir fon a
mant avec liberté . Le
jour que le Comte étoit
attendu chez elle fur les
neuf heures du foir , le
Confeiller foupant avec
lui , ( ce qu'il faifoit fort
fouvent ) voulut le mener
à une affemblée de
femmes du voisinage ,
qu'on regaloit d'un concert
de voix & d'inftru62
MERCURE
mens. Le Comte s'en
excufa , & ayant laiffé
fortir le Confeiller , qui
le preffa inutilement de
venir jouir de ce regal ,
il fe rendit chez la Dame
, qui les reçut avec
beaucoup de marques
d'amour
. Aprés quatre
heures d'une converfation
trés-tendre , il falut
fe féparer. Le Comte cut
fait à peine dix pas dans
la ruë , qu'il ſe vit ſuivi
d'un homme qui avoit le
GALANT. 63
vifage envelopé d'un
manteau . Il marcha toujours
; & s'il le regarda
comme un efpion , il eut
du moins le plaifir de
remarquer
qu'il étoit
trop grand pour être le
mari de la Marquife . En
rentrant chez lui , il trouva
encore le pretendu
cfpion , qu'il reconnut
enfin pour le Confeiller.
Les refus du jeune Comte
touchant le concert
de voix , lui avoit fait
64 MERCURE
croire qu'il avoit un rendez-
vous. Il le foupçonnoit
déja d'aimer la Marquife
, & fur ce foupçon
il etoit venu l'attendre à
quelques pas de fa porte
, & l'avoit vû fe couler
chez elle. Il y avoit
frapé auffitôt , & la fui-:
vante lui étoit venu dire
de la part de fa maîtreffe,
qu'un grand mal de tête
l'obligeoit à fe coucher ,
& qu'il lui étoit impoffible
de le recevoir. Par
cette
GALANT. 65
cette réponſe il avoit
compris tout le myftere.
Il fuivit le Comte dans
fa chambre , & lui ayam
declaré ce qu'il avoit fait
depuis qu'ils s'étoient
quittez : Vous avez pris ,
lui dit - il , de l'engagement
pour la Marquife ;
il faut qu'en fincere ami
je vous la faffe connoître.
J'ai commencé à l'aimer
avant que vous yinfficz
loger avec moy , &
quand elle a fçû nôtre
Avril 1714.
F
66 MERCURE
liaifon , elle m'a fait promettre
par tant de fermens
, que je vous ferois
un fecret de cet amour ,
que je n'ai ofé vous en
parler . Vous fçavez , me
difoit - elle , qu'il aime
une perfonne qui me hait
mortellement . Il ne manquera
jamais de lui apprendre
combien mon
coeur eft foible pour
vous. La diſcretion qu'-
on doit à un ami ne tient
guere contre la joye que
GALANT. 67
l'on a quand on croit
pouvoir divertir une
maîtreffe. La perfide
vouloit même que je lui
fuffe obligé de ce qu'elle
conſentoit à recevoir
vos vifites. Elle me recommandoit
fans ceffe
de n'aller jamais la voir
avec vous ; & quand
vous arriviez , elle affectoit
un air chagrin dont
je me plaignois quelquefois
à elle , & qu'apparemment
elle vous laif,
F ij
68 MERCURE
foit expliquer favorablement
pour vous . Mille
fignes & mille geſtes ,
qu'elle faifoit dans ces
temps - là , nous étoient
t
fans doute communs . Je
rappelle préfentement
une infinité de chofes
que je croyois alors indifferentes
, & je ne doute
point qu'elle ne fe foit
fait un merite auprés de
vous , de la partie qu'elle
fit il y a quelque temps
de fouper ici . Cependant
GALANT . 69
quand elle vous vit engagé
dans le jardin avec
fon mari , quels tendres
reproches ne me fit- elle
point d'être revenu ' fi
tard de la campagne , &
de l'avoir laiffée filongtemps
avec un homme
qu'elle n'aimoit pas !
Hier même encore qu'-
elle me préparoit avec
vous une trahiſon ſi noire
elle eut le front de
vous faire porteur d'une
lettre , par laquelle elle
70 MERCURE
me donnoit un rendezvous
pour ce matin ,
vous difant que c'étoit
un papier que fon mari
l'avoit chargée en partant
de me remettre. Le
Comte étoit fi troublé
de tout ce que le Confeiller
lui difoit , qu'il
n'eut pas la force de l'interrompre.
Dés qu'il fut
remis , il lui apprit comme
fon amour au commencement
n'étoit qu'
un jeu , & comme dés
GALANT. 71
S
lors la Marquife lui avoit
fait les mêmes loix
de difcretion qu'à lui.
Ils firent enfuite d'autres
éclairciffemens , qui
découvrirent au Comte
qu'il ne devoit qu'à la
coquetterie de la Dame
ce qu'il croyoit devoir à
fa paffion ; car c'étoit le
Confeiller qui avoit exigé
d'elle qu'elle ne vît
plus tant de monde , &
fur- tout qu'elle éloignât
fon troifiéme amant ; &
72 MERCURE
ils trouverent que quand
elle l'eut rappellé , elle
avoit allegué le même
pretexte
au Confeiller
qu'au Comte , pour continuer
de le voir. Il n'y
a gueres
d'amour
à l'épreuve
d'une telle perfidie
; auffi ne fe piquerent-
ils pas de conftance
pour une femme qui la
méritoit fi peu . Le Comte
honteux de la trahifon
qui'l avoit faite à fa premiere
maitreſſe , refolut
de
GALANT .
73
de n'avoir plus d'affiduitez
que pour elle feule ,
& le Confeiller fut bientôt
determiné fur les mefures
qu'il avoit à prendre
mais quelque promeffe
qu'ils fe fillent l'un
à l'autre de ne plus voir
la Marquife , ils ne purent
fe refufer le foulagement
de lui faire des reproches.
Dés qu'il leur
parut qu'ils la trouveroient
levée , ils fe tendirent
chez elle . Le
Avril
1714.
G
74 MERCURE
Comte lui dit d'abord ,
que le Confeiller étant
fon ami , l'avoit voulu
faire profiter du rendezvous
qu'elle lui avoit
donné , & qu'ainſi elle
ne devoit pas s'étonner
s'ils venoient enſemble .
Le Conſeiller prit aufſi.
tôt la parole , & n'oublia
rien de tout ce qu'il
crut capable de faire
honte à la Dame , & de
le vanger de fon infidelité.
Il lui remit devant
M
GALANT . 75
les yeux l'ardeur fincere
avec laquelle il l'avoit
aimée , les marques de
paffion qu'il avoit reçûës
d'elle , & les fermens
: qu'elle lui avoit tant de
I fois reiterez de n'aimer
jamais que lui . Elle l'écouta
fans l'interrompre
; & ayant pris fon
parti pendant qu'il parloit
: Il eft vrai , lui ré-
#pondit - elle d'un air
moins embaraffé que jamais
, je vous avois pro-
Gij
76 MERCURE
mis de n'aimer que vous :
mais vous avez attiré
Monfieur le Comte dans
ce quartier , vous l'avez
amené chez moy , & il
eft venu à m'aimer .D'ailleurs
, de quoy pouvezvous
vous plaindre ?
Tout ce qui a dépendu
de moy pour vous rendre
heureux , je l'ai fait.
Vous fçavez vous - même
quelles précautions
j'ai prifes pour vous cacher
l'un à l'autre vôtre
GALANT . 77
paffion . Si vous l'aviez
fçûë , vôtre amitié vous
auroit coûté des violences
ou des remords , que
ma bonté & ma prudence
vous ont épargnez .
N'eft- il pas vrai qu'avant
cette nuit , que vous aviez
épić Monfieur le
Comte , vous étiez tous
deux les amans du monde
les plus contens ? Suisje
coupable de vôtre indifcrétion
Pourquoy me
venir chercher le foir ?
Giij
78 MERCURE
Ne vous avois - je pas averti
par une lettre que
je donnai à Monfieur le
Comte , de ne venir que
ce matin ? Tout cela fut
dit d'une maniere fi lipeu
déconcerbre
, &
fi
tée
, que
ce
trait
leur
fit
connoître la Dame encore
mieux qu'ils n'avoient
fait . Ils admirerent
un caractere fi particulier
, & laifferent à
qui le voulut la liberté
d'en être la dupe . La
"
GALANT. 79
Marquife fe confola de
leur perte , en faiſant
croire au troifieme amant
nouvellement rappellé
, qu'elle les avoit
bannis pour lui ; & comme
elle ne pouvoit vivre
fans intrigue , elle en fit
· bientôt une nouvelle .
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Résumé : AVANTURE nouvelle.
En avril 1714, un jeune comte, issu d'une famille prestigieuse du Royaume, s'installe dans un quartier de Lyon où le jeu et la galanterie dominent. Bien qu'il préfère le jeu, il n'y joue pas avec passion. Un groupe de jeunes dames tente de l'intéresser à l'amour, mais il se défend en invoquant son manque de mérite et d'espoir en amour. Elles lui parlent alors d'une jeune marquise voisine qu'elles attendent. Un jour, les jeunes dames montrent au comte la marquise en question, qui entre dans la pièce. Le comte et la marquise se reconnaissent, ayant déjà été présentés à la campagne chez une amie commune. La marquise, convaincue que le comte ne mérite pas les reproches qu'on lui fait, décide de profiter de cette occasion pour engager une relation avec lui. Elle voit en lui un homme d'esprit et d'enjouement, et elle est motivée par le désir de se venger d'une jeune demoiselle qu'elle hait et dont elle croit que le comte est amoureux. Le comte, quant à lui, est passionnément amoureux de cette demoiselle et ne craint pas de se laisser séduire par la marquise, qu'il connaît pour une coquette professionnelle. Cependant, la marquise, flattée par le défi, entreprend de le séduire. Elle l'invite chez elle et utilise divers stratagèmes pour le charmer. Le comte, malgré ses résistances initiales, finit par se laisser séduire par les attentions de la marquise. La marquise utilise des billets en italien pour communiquer avec le comte, évitant ainsi les soupçons. Elle prend des précautions pour éviter que leur relation ne soit découverte, notamment en fixant des heures où ils peuvent se voir sans risque. Le comte, de son côté, fait écrire ses lettres par une personne dont l'écriture est inconnue pour éviter les malentendus. Un jour, le mari de la marquise trouve une lettre italienne dans les poches de sa femme. Ne comprenant pas l'italien, il la montre au comte, feignant de ne pas savoir de quoi il s'agit. Le comte, pris de court, doit improviser une explication. La lettre est en réalité un message du comte à la marquise, lui rappelant un rendez-vous qu'ils doivent avoir. Le mari, sans se douter de la vérité, remet la lettre au comte, qui doit alors trouver une manière de se sortir de cette situation délicate. Le mari, un conseiller, découvre la liaison en suivant le comte jusqu'à la maison de la marquise. Il confronte le comte et révèle qu'il aime également la marquise depuis longtemps. Le comte est troublé mais apprend que la marquise avait imposé la discrétion à tous deux. Ils décident de clarifier leurs sentiments et leurs actions passées. La marquise avait été contrainte par le conseiller de se séparer de son troisième amant, mais elle avait continué à le voir en utilisant le même prétexte auprès du conseiller et du comte. Lorsque le comte et le conseiller découvrirent cette perfidie, ils décidèrent de ne plus avoir confiance en elle. Le comte, honteux de sa trahison envers sa première maîtresse, résolut de n'avoir plus d'attache que pour elle. Le conseiller prit également des mesures, mais malgré leurs promesses de ne plus voir la marquise, ils ne purent s'empêcher de lui faire des reproches.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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35
p. 12-128
HISTOIRE nouvelle.
Début :
La peste qui exerce souvent de furieux ravages dans les [...]
Mots clefs :
Amour, Monde, Veuve, Coeur, Dames, Dame, Cavalier, Chambre, Mort, Gentilhomme, Charmes, Affaires, Esprit, Comte, Rome, Pologne, Femmes, Roi, Ambassadeur, Tendresse, Hymen, Valet de chambre, Paris, Comte, Cavalier français, Aventures, Connaissances, Duc, Fête, Veuve, Yeux, Beauté, Maison, Récit, Amis, Compagnie, Voyage, Mariage, Province, Étrangers, Peste, Curiosité, Honneur, Bosquet, Hommes, Varsovie
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texteReconnaissance textuelle : HISTOIRE nouvelle.
HISTOIRE
nouvelle .
LA peſte qui exerce
ſouvent de furieux ravages
dans lesPaïsduNord,
avoit déja détruit prés
d'un tiers de la belle Ville
de Varſovie , ceux de ſes
habitans qui avoient
quelque azile dans les
campagnes , l'abandonnoient
tous les jours ;
pluſieurs alloient à cent
GALANT. 13
lieuës&plus loin encore,
chercher à ſe preſerver
des perils de la conta
gion , lorſque la Palatine
de ... arriva à Dantzic
avec pluſieurs Dames de
confideration qui n'avoient
pas voulu quitter
Varſovie ſans elle.
Le Marquis de Canop
qui eſt un des plus dignes
& des plus honneftes
homes qu'on puiſſe voir,
& qui jouoit un tresgrand
rôle en Pologne ,
14 MERCURE
eſtoit alors à Dantzic ,
où il receut la Palatine
avec tous les honneurs &
toutes les feftes qu'on
puiſſe faire àune des plus
charmantes & des plus
grandes Princeſſes du
monde.drov mes
Des intereſts d'amour,
autant que la crainte de
la maladie , avoient dé
terminé pluſieurs Sei
gneurs Polonois à ſuivre
la Palatine & les Dames
qui l'accompagnoient :
GALANT.
ces Illuſtres captifs qui
n'avoient point abandon-
-néle Char de leur Maitreffe
pendant leur route ,
regarderent leur retraite
à Dantzic , comme l'azile
dumõde le plus favorable
à leurs foupirs. Mais parmi
tant de jeunes beautez
qui briguoient peuteſtre
encore plus d'hommages
qu'elles n'en recevoient
, rien n'eftoit plus
admirable , que le droit ,
qu'uneDame autant ref-
وت
16 MERCURE
pectable par la majeſté
de ſes traits , que par le
nombre de ſes années ,
ſembloit avoir ſur les
cooeurs de tous ceux qui
l'approchoient.
Il n'eſt pas eſtonnant
qu'à un certain âge , on
plaiſe à quelqu'un , mais
quelque beau retour
qu'on puiſſe avoir , il eſt
rare que dans un âge
avancé, on plaiſe à tout
le monde.
La Dame dont je parle,
&
GALANT. 17
&qui avoit cet avantage,
ſe nommoit alors Madame
Belzeſca , elle avoit
eü déja trois maris , &
au moins mille Amants,
elle s'eſtoit tousjours conduite
avec tant de difcretion
& d'innocence , que
les plus hardis & les plus
emportés de ſes adorateurs
n'avoient jamais ofé
donner la moindre atteinte
à ſa réputation : enfin à
quinze ans elle avoit ſou
ſe faire reſpecter comme
May1714. B
18 MERCURE
à ſoixante , & à foixante
paffées ſe faire aimer &
fervir comme à quinze.
Une femme de fa Province,
de fon âge , & qui
depuis fon premier mariage
l'a ſervie juſqu'à
préſent , m'a conté dix
fois fon hiſtoire , comme
je vais la raconter.
Voicy à peu prés ce
que jay retenu de fes
avantures.
Madame Belzeſca eft
originaire d'un Villagede
:
GALANT 12
!
Tourainne , fon Pere qui
eſtoit frere du Lieutenant
Generald'une des premieres
Villes de cette Province
, y poffedoit des biens
affez confiderables . Elle
reſta ſeule de 9. enfants
qu'eut ſa Mere , qui ne
l'aima jamais. Satendreſſe
pour un fils qu'elle avoit,
lorſqu'elle vint au monde;
en fit à ſon égard une
maraſtre ſi cruelle , que
l'oin d'accorder la moindre
indulgence aux ſentih
Bij
20 MERCURE
>
ments de la nature , quelques
efforts que fit fon
mary pour la rendre plus
humaine , elle ne voulut
jamais confentir à la voir.
Cette averſion s'eſtoit
fortifiée dans ſon coeur
ſur la prédiction d'un Berger
qui luy dit un jour ,
deſeſperé des mauvais
traittements dont elle
l'accabloit , qu'elle portoit
en fon fein un enfant
qui le vangeroitdesmaux
qu'elle luy faifoit. Cette
GALANT. 21
malheureuſe Prophetie
s'imprima ſi avant dans
ſon ame , que l'exceffive
haine qu'elle conceut
pour le fruit de cette couche
, fut l'unique cauſe
de la maladie dont elle
mourut. L'enfant qui en
vint , fut nommé Georgette
Pelagie le ſecond
jour de ſa naiſſance , &le
troifiéme emmenée dans
le fond d'un Village , où
la fecrette pieté de fon
Pere , &la charité de ſa
22. MERCURE
tendre nourrice l'elevérent
juſqu'à la mort de fa
mere , qui , eutà peine les
yeux fermés, qu'on ramena
ſa fille dans les lieux
où elle avoit receu le jour.
Pelagie avoit alors prés
de douze ans , &déja elle
eſtoit l'objet de la tendrefſe
de tous les habitans ,
&de tous les voiſins du
Hameau dont les foins
avoient contribué à la
mettre à couvert des rigueurs
d'une mere inhu
4
GALANT. 23
|
€
maine. Ses charmes naiffans,
avec mille graces naturelles
, ſa taille & fes
traits qui commençoient
à ſe former , promettoient
tant de merveilles aux
yeux de ceux qui la vor
yoient, que tous les lieux
d'alentour s'entretenoient
déja du bruit de ſa beauté.
Un eſprit tranquille ,
un temperament toûjours
égal , une grande attention
ſur ſes diſcours , &&&
une douceur parfaite
1
24 MERCURE
avoient preſque réparé
en elle le déffaut de l'éducation
, lorſque ſon Pere
réſolut de la conduire à
Tours.Quoyque l'air d'une
Ville de Province , &
celuy de la campagne ſe
reffemblent affés , elle ne
laiſſa pas de trouver là
d'honneſtes gens qui regarderent
les ſoins de l'inſtruire
comme les plus
raiſonnables foins du
monde. Mais il eſtoit
temps que le Dieu qui
fait
GALANT. 25
fait aimer commençaſt a
ſe meſler de ſes affaires ,
& que fon jeune coeur
apprit à ſe ſauver des pieges
& des perils de l'amour.
La tendreſſe que
ſes charmes inſpiroient
échauffoit tous les coeurs,
à meſure que l'art poliffoit
ſon eſprit , & fon
eſprit regloit ſes ſentimens
à meſure que la
flatterie eſſayoit de corrompre
ſes moeurs. Mais
c'eſt en vain que nous
May 1714.
,
C
26 MERCURE
prétendons nous arranger
fur les deſſeins de noſtre
vie , toutes nos précautions
ſont inutiles contre
les arreſts du deſtin .
Le Ciel refervoit de
trop beaux jours à l'heureuſe
Pelagie ſous les
loix de l'amour , pour
lui faire apprehender davantage
les écuëils de fon
empire. Cependant ce fut
une des plus amoureuſes
& des plus funeftes avantures
du monde qui déGALANT.
27
termina ſon coeur à la
tendreſſe.
Un jour ſe promenant
avec une de ſes amies ſur le
bord de la Loire , au pied
de la celebre Abbaye de
Marmoutier,elle apperceut
au milieu de l'eau un petit
batteaudécouvert , dans lequel
étoient deux femmes ,
un Abbé ,& le marinier qui
les conduiſoità Tours : mais
ſoit que ce bateau ne valuſt
rien ou que quelque malheureuſe
pierre en euſt écarté
les planches , en un moment
tout ce miferable é-
Cij
28. MERCURE
quipage fut enseveli ſous
les eaux. De l'autre coſté
de la riviere deux cavaliers
bien montez ſe jetterent à
l'inſtant à la nage pour ſecourir
ces infortunez ; mais
leur diligence ne leur ſervit
au peril de leur vie , qu'au
falut d'une de ces deux femmes
, que le moins troublé
de ces cavaliers avoit heureuſement
attrapée par les
cheveux , & qu'il conduifit
aux pieds de la tendre Pelagie
, qui fut fi effrayée de
cet affreux ſpectacle , qu'elle
eutpreſque autant beſoin
GALANT. 29
!
de ſecours , que celle qui
venoit d'eſtre ſauvée de cet
évident naufrage , où l'autre
femme & l'Abbé s'eftoient
desja noyez .
:
Le cavalier qui avoit eſté
le moins utile au falut de la
perſonne que ſon ami venoit
d'arracher des bras
de la mort , eſtoir cependant
l'amant aimé de la Dame
délivrée ; mais ſon amour
, fon trouble & fon
deſeſpoir avoient telle.
ment boulversé ſon imagination
, que bien loin de ſe
courir les autres , il ne s'en
C iij
30 MERCURE
fallut preſque rien qu'il ne
perift luy meſme: enfin fon
cheval impetueux le remit
malgré luy au bord d'où il
s'eſtoit précipité ; auffi- toft
il courut à toute bride, iltraverſa
la ville , & pafla les
ponts pour ſe rendre fur le
rivage , où ſa maiſtreſſe recevoit
toute forte de nouveaux
foulagements de Pelagie
, de ſa compagne , &
de ſon ami.
L'intrepidité du liberateur,
ſa prudence , ſes ſoins
& fa bonne mine pafferent
fur le champ pour des mer
GALANT. 31
veilles aux yeux de Pelagie,
De l'admiration d'une certaine
eſpece , il n'y a ordinairement
, ſans qu'on s'en
apperçoive , qu'un pas à
faire à l'amour , & l'amour
nous mene ſi loin naturellement
qu'il arrache bientoſt
tous les conſentements
de noſtre volonté. En vain
l'on ſe flatte d'avoir le tems
de reflechir , en vain l'on
veut eſſayer de ſoumettre
le coeur à la raiſon , l'eſprit
dans ces occafions eft tousjours
ſeduit par le coeur , on
regarde d'abord l'objet avec
C iiij
32 MERCURE
complaiſance.les préjugez
viennent auſſi toſt nous é
tourdir , & nous n'eſperons
ſouvent nous mieux deffendre
, que lorſque noſtre inclination
nous determine à
luytout ceder.
La tendre Pelagie eſtonnée
de ce qu'elle vient de
voir , n'ouvre ſes yeux embaraffés
, que pour jetter
des regards languiſſans
vers la petite maiſon , où
quelques Payſans aidés de
nos deux Cavaliers emportent
la Dame qui vient d'eftre
delivrée de la fureur
GALANT. 33
des flots. Elle n'enviſage
plus l'horreur du peril
qu'elle lui a vû courir ,
comme un ſpectacle ſi digne
de compaſſion , peu
s'en faut meſme qu'elle
n'envie ſon infortune.
Quoique ſes inquietudes
épouvantent ſon coeur , fes
intereſts ſe multiplient , à
meſure que cette troupe
s'éloigne d'elle . Elle croit
desja avoir démeflé que
ſon Cavalier ne ſoupire
point pour la Dame , ni la
Dame pour lui ; neanmoins
ſon eſprit s'en fait
34 MERCURE
une Rivale , elle aprehende
qu'un ſi grand ſervice
n'ait quelqu'autre motif
que la pure generofité , ou
pluſtoſt elle tremble qu'un
amour extreſme ne ſoit la
récompenſe d'un fi grand
ſervice. Cependant elle retourne
à la Ville , elle ſe
met au lit , où elle ſe tour.
mente , s'examine & s'afflige
, à force de raiſonner
fur certe avanture , dont
chacun parle à ſa mode
elle la raconte auffi tous
و
ceux qui veulent l'entendre
, mais elle s'embaraſſe
GALANT.
35
,
د tellement dans ſon récit
qu'il n'y a que l'indulgence
qu'on a pour ſon innocence
& ſa jeuneſſe , qui déguiſe
les circonſtances
qu'elle veut qu'on ignore.
Le Chevalier de Verſan
de ſon coſté ( C'eſt le
nom du Cavalier en qui
elle s'intereſſe , ) le Chevalier
de Verſan dis-je ,
n'eſt pas plus tranquille. La
belle Pelagie eſt tousjours
preſente à ſes yeux , enchanté
de ſes attraits , il va,
court , & revient , par tout
ſa bouche ne s'ouvre , que
36 MERCURE
,
,
pour vanter les appas de
Pelagie. Le bruit que cet
Amant impetueux fait de
fon amour frappe auflitoſt
ſes oreilles , elle s'applaudit
de ſa conqueſte
elle reçoit ſes viſites , écoute
ſes ſoupirs , répond à ſes
propoſitions , enfin elle
conſent , avec ſon Pere ,
que le flambeau de l'hymen
éclaire le triomphe de
fon Amant. Cette nouvelle
allarme , & deſeſpere
en vain tous ſes Rivaux. Il
eſt heureux déja. La fortune
elle-mefme pour le com
bler de graces vient atta
cher de nouveaux préſens
aux faveurs de l'amour. La
mort de ſon frere le fait
heritier de vingt mille livres
de rente. Le Chevalier
devient Marquis : nouvel
& précieux ornement
aux douceurs d'un tendre
mariage. Mais tout s'uſe
dans la vie , l'homme ſe
demaſque , la tendreſſe reciproque
s'épuiſe imper
ceptiblement , on languit ,
on ſe quitte , peut - eſtre
meſme on ſe hait , heureux
encore ſi l'on ne fouf
38 MERCURE
fre pas infiniment des caprices
de la déſunion Mais
Prices d la mort & l'amour ſe rangent
du parti de Madame
la Marquiſe de ... que ,
pour raiſon difcrette , je
nommerai Pelagie , juſqu'à
ce qu'elle foit Madame
Belzeſca.
Ainfi l'heureuſe Pelagie
aprés avoir goufté pendant
cinq ans toutes les douceurs
de l'hymen , ne ceſſe d'aimer
fon mary ( inconſtant
huit jours avant elle )
que fix ſemaines avant ſa
mort.
GALANT. 39
Un fils unique , ſeul &
cher gage de leur union ,la
rend àvingt ansheritiere &
dépofitaire des biensdu défunt.
Elle arrange exacte
ment toutes ſes affaires, elle
abandonne tranquillement
la province , & fe rend à
Paris avec fon fils .
De quel pays , Madame ,
luy dit- on,dés qu'on la voit,
nous apportez-vous tant de
beauté? dans quelle obſcure
contrée avez - vous eu le
courage d'enſevelir ju qu'a
preſent tant de charmes ?
que vous eſtes injuſte d'a
40 MERCURE
voir ſi long - temps honoré
de voſtre preſence des lieux
preſque inconnus , vous qui
eſtes encore trop belle pour
Paris . Cependant c'eſt le
ſeul endroit du monde qui
puiſſe prétendre à la gloire
de vous regarder comme la
Reine de ſes citoyennes.
Les ſpectacles , les aſſemblées,
les promenades , tout
retentit enfin des merveillesdela
belle veuve.
Le Roy Caſimir eſtoit
alors en France , pluſieurs
grands ſeigneurs avoient
ſuivi ce Prince juſqu'à la
porte
GALANT. 41
porte de ſa retraite.
Il n'y avoit point d'eſtranger
à Paris qui ne fuſt curieux
d'apprendre noſtre
langue qui commençoit à
ſe répandre dans toutes les
cours de l'Europe , & il n'y
enavoit aucun qui ne ſceuſt
parfaitement que la connoiſſance
& le commerce
des Dames font l'art, le merite
, & le profit de cette
eftude.
Un charmant voiſinage
eſt ſouvent le premier prétexte
des liaiſons que l'on
forme.
May 1714. D
MERCURE
Pelagie avoit ſa maiſon
dans le fauxbourg S. Germain
: ce quartier eſt l'azile
le plus ordinaire de tous les
eſtrangers , que leurs affaires
ou leur curioſité attirent
à Paris .
,
La Veuve dont il eſt
queſtion eſtoit fi belle
que ſa Maiſon eſtoit tous
les jours remplie des plus
honneſtes gens de la Ville ,
& environnée de ceux qui
n'avoient chez elle ni
,
droit , ni prétexte de viſite.
Enfin on croyoit en la
voyant , que , Maiſtreſſe
GALANT. 43
!
abſoluë des mouvements
de ſon ame , elle regnoit
ſouverainement ſur l'amour
comme l'amour
qu'elle donnoit regnoit fur
tous les coeurs ; mais on ſe
trompoit , & peut- eſtre ſe
trompoit- elle elle - meſme.
Pelagie eſtoit une trop
belle conqueſte , pour n'eftre
pas bien toſt encore la
victime de l'amour.
La magnificence du plus
grand Roy du monde raviſſoit
alors les yeux des
mortels , par l'éclat & la
pompe des ſpectacles &
Dij
44 MERCURE
,
des feftes , dont rien n'avoit
jamais égalé la richefſe
& la majefté ; l'on accouroit
de toutes parts ,
pour eſtre témoins de l'excellence
de ſes plaifirs , &
chaque jour ſes peuples
eſtoient obligez d'admirer
dans le délafſſement de ſes
travaux , les merveilles de
fa grandeur.
Le dernier jour enfin
des trois deſtinés pour cette
fuperbe feſte de Verfailles,
dont la poſterité parlera
comme d'une feſte inimitable
, ce jour où l'Amour
GALANT. 45
vuida tant de fois fon Carquois
, ce jour où l'Amour
ſe plut à joüer tant de
tours malins à mille beautés
que la fplendeur de ce
Spectacle avoit attiré dans
ces lieux , fut enfin le jour
qui avança le dénoüement
du fecond du ſecond hymen de Pelagie.
Un des ſeigneurs que le
Roy Caſimir avoit amenéz
avec luy , avoit malheureuſement
veu cette belle veuve
, un mois avant de ſedéterminer
à imiter le zele &
la pieté de ſon maiſtre , elle
46 MERCURE
avoit paru à ſes yeux ornée
de tant d'agrements , ou
plutoſt ſi parfaite , que la
veuë de ſes charmes luy fit
d'abord faire le voeu de n'en
plusfaire que pour elle; mais
c'eſt un conte de prétendre
qu'il ſuffiſe d'aimer pour ef
tre aimé ; rien n'eſt plus
faux que cette maxime , &
je ſouſtiens qu'on eſt ſouvent
traité fort mal en amour
, à moins qu'une heureuſe
influence n'eſtabliſſe
des diſpoſitions reciproques.
C'eſt en vain que l'amouGALANT.
47
reux Polonois brufle pour
Pelagie , ſon eſtoille n'eft
point dans ſes interefts , elle
regarde cette flame auffi
indifféremment , qu'un feu
que d'autres auroient allumé
, & quoy qu'elle voye
tous les jours ce nouvel
eſclave l'étourdir du récit
de ſa tendreſſe , ſon coeur
ſe fait ſi peu d'honneur de
cette conquefte , qu'il femble
qu'elle ignore qu'il y
ait des Polonois au monde
.
Mais l'eſprit de l'homme
prend quelquefois des ſen48
MERCURE
timents ſi audacieux quand
il aime , que la violence
de ſa paſſion & le defefpoir
de n'eſtre point écouté
, le portent ſouvent juſqu'à
l'inſolence. D'autresfois
nos titres& noſtre rang
nous aveuglent , & nous
nous perfuadons qu'on eſt
obligé de faire , du moins
en faveur de noſtre nom
ce que nous ne meritons
,
pas qu'on faſſe pour l'amour
de nous.
Le Polonois jure , tempeſte
, & s'impatiente contre
les rigueurs de ſa Maîtreffe,
GALANT .
49
treſſe , à qui ce procedé
paroiſt ſi nouveau , qu'elle
le fait tranquillement remercier
de ſes viſites . La
rage auffi toſt s'empare de
ſon coeur , il n'eſt point de
réſolution violente qui ne
lui paroiſſe légitime , l'inſenſible
Pelagie eft injufte
de n'eſtre pas tendre pour
lui , ſa dureté la rend indigne
de ſon amour , mais
fon amour irrité doit au
moins la punir de ſa rigueur
, & quoy qu'il en
couſte à l'honneur , l'éxécution
des plus criminels
May 1714. E
10 MERCURE
projets n'est qu'une bagatelle
, lorſqu'il s'agit de ſe
vanger d'une ingratte qui
ne peut nous aimer.
Ce malheureux Amant
ſcut que ſon inhumaine
devoit se trouver à la feſte
de Verſailles, avec une Dame
de ſes amies , & un de
ſes Rivaux , dont le mérite
luy avoit d'abord fait apprehender
la concurrence ,
mais qu'il croyoit trop foible
alors pour pouvoir déconcerter
ſes deſſeins . Il
prit ainſi ſes meſures avec
des gens que ſes promeſſes
GALANT.
SI
&ſes préſents engagérent
dans ſes intereſts , & il ré.
ſolut , aſſeuré de leur courage
& de leur prudence ,
d'enlever Pelagie , pendant
que le déſordre & la confuſionde
la find'une ſi grande
feſte , lui en fourniroient
encore les moyens..
Le Carroffe & les relais
qui devoient ſervir à cet
enlevement , eſtoient déja
ſi bien diſpoſés , qu'il ne
manquoit plus que le moment
heureux de s'empa
rer de l'objet de toute cette
entrepriſe ; lorſque Pelagie
1
E ij
52
MERCURE
laſſe & accablée du ſommeilque
lui avoient dérobé
ces brillantes nuits , entra ,
avec ſon amie , dans un
fombre boſquet , où la fraîcheur
& le hazard avoient
inſenſiblement conduit ſes
pasi elle y furà peine aſſiſe,
qu'elle s'y endormit
Laiffons la pour un inftant,
dans le fein du repos
dont on va bien toſt l'arracher.
- L'occaſion est trop belle
pour n'en pas profiter ; mais
le Polonois a beſoin de tout
fon monde , pour en fortir
GALANT.
53
a ſon honneur , & il commence
à trouver tant de
difficultez , à exécuter un ſi
grand deſſein dans le Palais
d'un ſi grand Roy , qu'il
s'imagine , aveuglé de ſon
déſeſpoir & de ſon amour ,
qu'il n'y a qu'une diligence
infinie , qui puiffe réparer
le déffaut de ſes précautions.
Il court pour raffem
bler ſes confidents ; mais la
vûë de ſon Rival qui ſe préſente
à ſes yeux , fait à l'inſtant
avorter tous ſes pro
jets. Où courez- vous, Monſieur
, luy dit- il , que vous
E iij
54 MERCURE
,
importe , répond l'autre ?
rendez graces , répond le
Cavalier François au refpect
que je dois aux lieux
cù nous ſommes fans
cette conſidération je
vous aurois déja puni , &
de voſtre audace , & de
l'inſolence de vos deſſeins.
Il te fied bien de m'inſulter
icy luy dit le Polonois ; je
te le pardonne : mais ſuy
moy ? & je ne tarderay pas
à t'apprendre à me reſpecter
moi- meſme , autant que
les lieux dont tu parles . Je
conſens , luy répondit le
4
GALANT .
SS
François , à te ſuivre où tu
voudras ; mais j'ay mainte
nant quelques affaires qui
font encore plus preſſées
que les tiennes: tu peux cependant
diſpoſer du rendez
vous , où je ne le feray pas
long-temps attendre.
Le bruit de ces deux
hommes éveille pluſieurs
perſonnes qui dormoient
ſur le gazon ; on s'aſſemble
autour d'eux , ils ſe taiſent
&enfin ils ſe ſéparent,
Ainfi le Polonois ſe retire
avec ſa courte honte ,
pendant que le François
E iii
56 MERCURE
cherche de tous cotez , les
Dames qu'il a perduës :
mais cette querelle s'eſtoit
paſſée ſi prés d'elles , que le
mouvement qu'elle cauſa ,
les reveilla , comme ceux
qui en avoient entendu la
fin ; elles fortirent de leur
boſquet qu'elles trouverent
desja environné de
gens qui compoſoient &
débitoient à leur mode les
circonstances decette avanture
, ſur l'idée que pouvoit
leur en avoir donné le peu
de mots qu'ils venoient
d'entendre , lorſqu'enfin il
GALANT.
$7
les retrouva. Je prie les
Lecteurs de me diſpenſer
de le nommer , ſon nom ,
ſes armes & ſes enfans ſont
encore ſi connus en France,
que , quoy que je n'aye que
ſon éloge à faire , je ne ſçay
pas ſi les fiens approuveroient
qu'on le nommaſt.
Deux heures avant que
le Cavalier François rencontrât
le Polonois , Mon.
fieur le Duc de ... avoit
heureuſement trouvé une
lettre à fos pieds : le hazard
pluſtoſt que la curiofité
la luy avoit fait ramaf
58 MERCURE
fer , un moment avant qu'il
s'apperceut des foins extreſmes
que prenoient trois
hommes pour la chercher :
la curioſité luy fit alors un
motifd'intereſt de cet effet
du hazard ; il s'éloigna des
gens dont il avoit remarqué
l'inquiétude , il ſe tira de la
foule , & dans un lieu plus
fombre & plus écarté , il
lut enfin cette lettre , qui
eſtoit , autant que je peux
m'en ſouvenir , conceuë ,
à peu prés , en ces termes.
Quelquesjustes mesures que
nous ayons priſes , quoy que mon
GALANT. رو
Carroffe & vos Cavaliers ne
foient qu'àcent pas d'icy , il n'y
aura pas d'apparence de réuffir
fi vous attendez que le retour
du jour nous ofte les moyens de
profiter du défordre de la nuit :
quelque claire que ſoit celle-cy ,
elle n'a qu'une lumiére empruntée
dont le ſoleil que j'apprenhende
plus que la mort
bien toſt diſſipper la clarté; ainfi
hatez vous de meſuivre , &ne
me perdez pas de veuë : je vais
déſoler Pelagie par ma préfen--
ce: dés qu'elle me verra , je ne
doutepas qu'elle ne cherche à me
fuir; mais je m'y prendray de
, va
60 MERCURE
façon ,que tous les pas qu'ells
fera , la conduiront dans nostre
embuscade.
La lecture de ce billet
eſtonna fort Mr le Duc ...
quiheureuſement connoiffoit
aſſez la belle veuve pour
s'intereffer parfaitement
dans tout ce qui la regardoit
; d'ailleurs le cavalier
françois qui eſtoit l'amant
declaré de la Dame , eſtoit
ſon amy particulier : ainſi il
priatout ce qu'il putraſſembler
de gens de ſa connoifſance
de l'aider à chercher
Pelagie avant qu'elle peuſt
GALANT. 61
eftre expoſée à courir les
moindres riſques d'une pareille
avanture. Il n'y avoit
pas de tempsà perdre , auſſi
n'en perd - il pas ; il fut par
tout où il creut la pouvoir
trouver , enfin aprés bien
des pas inutiles , il rencontra
ſon ami , qui ne venoit
de quitter ces deux Dames
que pour aller leur chercher
quelques rafraichif
ſements . Il est bien maintenant
queſtion de rafraif
chiſſements pour vos Dames
, luy dit le Duc , en luy
donnant la lettre qu'il ve
62 MERCURE
noit de lire , tenez , liſez, &
dites - moy ſi vous connoifſez
cette écriture , & à quoy
l'on peut à preſent vous eftre
utile. Monfieur le Duc ,
reprit le cavalier,je connois
le caractere du Comte Piof
Ki, c'eſt aſſeurement luy qui
aécrit ce billet ; mais il n'eſt
pas encore maiſtre de Pelagie
, que j'ay laiſſée avec
Madame Dormont à vingt
pas d'icy , entre les mains
d'un officier du Roy, qui eſt
mon amy , & qui , à leur
confideration , autant qu'à
la mienne , les a obligeamGALANT
. 63
ment placées dans un endroit
où elles ſont fort à leur
aife ; ainſi je ne crains rien
de ce coſté- là ; mais je voudrois
bien voir le Comte , &
l'équipage qu'il deſtine à
cet enlevement. Ne faites
point de folie icy , mon
amy , luy dit le Duc , aſſeurez
- vous ſeulement de quelques
perſonnes de voſtre
connoiſſance ſur qui vous
puiffiez compter : je vous
offre ces Meſſieurs que vous
voyez avec moy , raſſem.
blez- les autour de vos Dames
, & mettez - les ſage
64 MERCURE
ment à couvert des inſultes
de cet extravagant : fi je
n'avois pas quelques affaires
confiderables ailleurs ,
je ne vous quitterois que
certain du fuccez de vos
précautions.
Vi
LeDuc ſe retira alors vers
un boſquet où d'autres intereſts
l'appelloient,& laifſa
ainſi le cavalier françois
avec ſes amis ,à qui il montra
l'endroit où il avoit remis
ſa maiſtreſſe entre les
mains de l'officier qui s'eftoit
chargé du ſoin de la
placer commodément ; cependant
GALANT. 65
pendant il fut de ſon coſté
à la découverte de ſon ri.
val , qu'aprés bien des détours
, il rencontra enfin à
quatre pas du boſquet dont
jay parlé , &dont il ſe ſepara
comme je l'ay dit . Neanmoins
quelque ſatisfaction
qu'il ſentit du plaifir de retrouver
ſes Dames , il leur
demanda , aprés leur avoir
conté l'hiſtoire de ce qu'il
venoit de luy arriver , par
quel haſard elles ſe trouvoient
ſi loin du lieu où il
les avoit laiſſées. Apeine ,
luy dit Pelagie , nous vous
May 1714. F
66 MERCURE
avons perdu de veuë , que le
Comte Pioski eſt venu s'affeoir
à coſté de moy , aux
dépens d'un jeune homme
timide , que ſon air brufque
& fon étalage magnifique
ont engagé à luy ceder
la place qu'il occupoit.
Ses diſcours m'ont d'abord
fi cruellement ennuyée,que
mortellement fatiguée de
les entendre ,j'ay priéMadame
de me donner le bras,
pour m'aider à me tirer des
mains de cet imprudent ; le
monde , la foulle , & les
détours m'ont derobé la
GALANT. 67
connoiſſance des pas & des
efforts que fans doute il a
faits pour nous ſuivre , &
accablée de ſommeil &
d'ennuy, je me ſuis heureuſement
ſauvée dans ce bofquet
, ſans m'aviſer ſeulement
de fonger qu'il euſt
pû nous y voir entrer ; mais
quelque peril que j'aye couru
, je ſuis bien aiſe que fon
inſolence n'ait pas plus éclaté
contre vous , que fes
deſſeins contre moy , & je
vous demande en grace de
prévenir ſagement , & par
les voyesde ladouceur,tou-
tes les ſuites facheuſes que
ſon deſeſpoir & voſtre demeſlé
pourroient avoir. Il
n'y a plus maintenant rien
à craindre , il fait grand
jour , le chemin de Verſailles
à Paris eſt plein de monde
, & vous avez icy un
grand nombre de vos amis ,
ainſi nous pouvons retourner
à la ville fans danger.
Le cavalier promit à la
belle Pelagie de luy tenir
tout ce qu'elle voulut exiger
de ſes promeſſes , & fes
conditions acceptées , illamena
juſqu'à fon carroffe,
GALANT
69
où il prit ſa place , pendant
que quatre de ſes amis ſe
diſpoſerent à le ſuivre dans
le leur.
1
Il n'eut pas plutoſt remis
les Dames chez elles , &
quitté ſes amis , qu'en entrant
chez luy , un gentila
homme luy fie preſent du
billet que voicy.
Les plus heureux Amants
ceſſeroient de l'estre autant qu'ils
ſe l'imaginent , s'ils ne rencon
troient jamais d'obstacle à leur
bonheur je m'intereſſe affez au
voſtre , pour vousyfaire trouver
des difficultez qui ne vous
70
MERCURE
establiront une felicitéparfaite,
qu'aux prix de tout lefangde
Pioski. Le Gentilhomme que
je vous envoye vous expliquera
le reſte de mes intentions.
naypas
Affoyez-vous donc, Monſieur
, luy dit froidement le
cavalier françois ,& prenez
la peine de m'apprendre les
intentions de Monfieur le
Comte Pioski . Je n'ay
beſoin de ſiege , Monfieur ,
luy répondit ſur le meſme
ton , le gentilhomme Polonois
, & je n'ay que deux
mots à vous dire. Vous eſtes
l'heureux rival de Monfieur
GALANT.
le Comte qui n'eſt pas encore
accouſtumé à de telles
préferences , il eſt ſi jaloux
qu'il veut vous tuer , & que
je le veux auſſi , il vous attend
maintenant derriere
l'Obſervatoire ; ainſi prenez
, s'il vous plaiſt , un ſecond
comme moy , qui ait
aſſez de vigueur pour m'amuſer
, pendant que vous
aurez l'honneur de vous és
ggoorrggeerreennſſeemmbbllee.
Je ne ſçay ſi le françois ſe
ſouvint, ou ne ſe ſouvint pas
alors de tout ce qu'il avoit
promis à ſa maiſtreſſe , mais
72 MERCURE
voicy à bon compte lecas
qu'il en fit.
Il appella ſon valet de
chambre , qui estoit un
grand garçon de bonne vo
lonté , il luy demanda s'il
vouloit eſtre de la partie ,
ce qu'il accepta en riant,
Aufſi - toft il dit au gentilhomme,
Monfieur leComte
eſt genereux , vous eſtes
brave, voicy voſtre homme,
& je ſuis le ſien Mais Monfieur
eft- il noble , reprit le
gentilhomme. Le valet de
chambre , Eſpagnol de nation,
piqué de cette demande
GALANT .
73
de, luy répondit fierement
ſur le champ , & en ſon langage
, avec une ſaillie romaneſque
, Quienes tu hombre
? voto a San Juan. Viejo
Chriftiano estoy , hombre blanco
,y noble como el Rey Ce que
ſon maiſtre naiſtre expliqua au Polonois
en ces termes . Il
vous demande qui vous eftes
vous mesme , & il vous
jure qu'il eſt vieux Chreftien
,homme blanc , & noble
comme le Roy. Soit ,
reprit le gentilhomme,marchons.
Ces trois braves furent
ainſi grand train au
May 1714. G
74 MERCURE
rendez vous , où ils trouverent
le Comte qui commençoit
à s'ennuyer. Aprés
le falut accouſtumé , ils mirent
tous quatre l'épée àla
main. Pioski fit en vain des
merveilles , il avoit desja
perdu beaucoup de fang ,
lang,
lorſqu'heureuſement ſon épée
ſe caſſa; le gentilhomme
fut le plus maltraité,l'Ef
pagnol ſe battit comme un
lion ,& le combat finit.
Cependant le Comte
Pioski, qui , à ces violences
prés , eftoit entout un
homme fort raiſonnable ,
GALANT. 75
eut tant de regret des extravagances
que cette derniere
paffion venoit de luy
faire faire , que la pieté étouffant
dans ſon coeur tous
les interêts du monde , il
fut s'enfermer pour le reſte
de ſa vie dans la retraitte
la plus fameuſe qui ſoit en
France , & la plus connuë
par l'auſterité de ſes maximes.
Le Cavalier françois
foupira encore quelques
temps , & enfin il devint
l'heureux & digne Epoux
d'une des plus charmantes
femmes du monde.
Gij
76 MERCURE
4
Les mariages font une fi
grande époque dans les
hiſtoires , que c'eſt ordinairement
l'endroit par où
tous les Romans finiſſent ;
mais il n'en eſt pas de meſme
icy , & il ſemble juftement
qu'ils ne ſervent à
Madame Belzeſca que de
degrés à la fortune , où ſon
bonheur & ſes vertus l'ont
amenée . Tout ce qui luy
arrive dans un engagement
qui établit communément
, ou qui doit du
moins establir pour les autres
femmes , une ſigrande
GALANT. 77
tranquilité , qu'on diroit
que l'hymen n'eſt propre ,
qu'à faire oublier juſqu'à
leur nom , eſt au contraire
pour celle cy , la baze de
ſes avantures. L'eſtalage de
ſes charmes , & le bruit de
ſabeauté ne ſont point enſevelis
dans les embraffemens
d'un eſpoux : heureuſe
maiſtreſſe d'un mary
tendre & complaiſant , &
moins eſpouſe qu'amante
infiniment aimée , comme
ſi tous les incidens du monde
ne ſe raſſembloient que
pour contribuer à luy faire
Gij
78 MERCURE
des jours heureux , innocement
& naturellement
attachée à ſes devoirs , l'amour
enchainé , à ſa fuite
ne prend pour ferrer tous
les noeuds qui l'uniſſent à
ſon eſpoux , que les formes
les plus aimables , & les
douceurs du mariage ne ſe
maſquent point pour elle
ſous les traits d'un mary.
Enfin elle joüit pendant
neuf ou dix ans , au milieu
du monde , & de ſes adorateurs
, du repos le plus
doux que l'amour ait jamais
accordé aux plus heureux
GALAN 79
Amants ; mais la mort jalouſe
de ſa fecilité luy ra
vit impitoyablement le plus
cher objet de ſa tendreſſe:
que de cris ! que de ge.
miſſements ! que de larmes
! cependant tant de
mains ſe préſentent pour
efluyer ſes pleurs , que , le
temps ,la raiſon , & la néceſſité,
aprés avoir multiplié
ſes reflexions
nent enfin au ſecours de ſa
,
viendouleur
; mais il ne luy reſte
d'un eſpoux fi regretté ,
qu'une aimable fille , que la
mort la menace encore de
(
G iiij
80 MERCURE
luy ravir , ſur le tombeaude
fon pere. Que de nouvel.
les allarmes ! que de mortelles
frayeurs ? elle tombe
dans un eſtat de langueur
qui fait preſque deſeſperer
de ſa vie. Il n'eſt point de
ſaints qu'on n'invoque ,
point de voeux qu'on ne faf
ſe, elle en fait elle-meſme
pour fon enfant , & promet
enfin de porter un tableau
magnifique à Noftre-
Dame de Lorette ſi ſa
fille en réchappe. A l'inftant,
ſoit qu'un ſuccés favo
rable recompenfat ſon zele
GALANT. 81
&fa piete , ou qu'il fur
temps que les remedes operaſſent
à la fin plus effica
cement qu'ils n'avoient fait
encore , ſa maladie diminua
preſque à veuë d'oeil ,
en tros jours l'enfant fut
hors de danger , & au bout
de neufentierement guery.
Elle reſtaencore , en attendant
le retour du printemps
, prés de fix mois à
Paris , pendant lesquels elle
s'arrangea pour l'execution
de ſon voeu. Ce temps expiré
, accompagnée de ſon
fils & de ſa fille , d'une Da82
1 MERCURE
me de ſes amis , de deux
femmes de chambre , de
deux Cavaliers , & de quatre
valets , elle prit la route de
Lyon , d'où aprés avoir
paffé Grenoble , le mont
du l'An, Briançon , le mont
Geneve & Suze , elle ſe rendit
à Turin , où elle ſéjourna
trois ſemaines avec ſa
compagnie qui ſe déffit
comme elle de tout ſon équipage,
dans cette Ville,
pour s'embarquer ſur le Po.
Elle vit en paſſant les Villes
de Cazal du Montferrat
,
d'Alexandrie , le Texin qui
GALANT. 83
1
,
paſſe à Pavie , Plaiſance ,
+ Cremone , Ferrare , & enfin
elle entra de nuit à Venife
avec la marée. Elle
deſcendit à une Auberge
moitié Allemande , &moitié
Françoiſe , & dont
l'enſeigne d'un coſté , ſur
le grand Canal , reprefente
les armes de France , &
de l'autre , fur la Place de
ES. Marc , les armes de l'Empire.
Elle reçut le lende
main à ſa toilette , comme
cela ſe pratique ordinairement
à Veniſe , avec tous
les Estrangers confidera
,
S
१
84 MERCURE
,
bles , des compliments en
proſe & en vers imprimez
à ſa loüange , fon amie
& les Cavaliers de ſa compagnie
en eurent auſſi leur
part. Ces galanteries couftent
communément , & au
moins quelques Ducats à
ceux à qui on les fait. Le
ſecond jour elle fut avec
tout fon monde ſaluer Mr
l'Ambaſſadeur qui fut
d'autant plus charmé du
plaifir de voir une ſi aimable
femme , que , quoy que
Venife ſoit une Ville , où
lesbeautez ne ſont pas car
,
GALANT. 85
Π
S
res , il n'y en avoit pas encore
vû une , faite comme
- celle dont il recevoit la viſite.
La bonne chere , les,
Spectacles , les promena-
✓ des ſur la mer& ſur la coſte,
avec le Jeu, furent les plaifirs
dont il la regala , pen-
↓ dant les quinzejours qu'elle
y reſta. Il luy fitvoir dans ſa
Gondole , la pompeuſeCeremonie
du Bucentaure qui
ſe celebre tous les ans dans
cette Ville le jour de l'Afcenfion
, avec toute la magnificence
imaginable.
Je nedoute pas que bien
3
86 MERCURE
des gens neſcachent à peu
prés ce que c'eſt que cette
feſte; mais j'auray occafion
dans une autre hiſtoire d'en
faire une deſcription meſlée
de circonstances ſi agreables
que la varieté des évenemensque
je raconteray,
pourra intereſſer mes lecteurs
au recit d'une ceremonie
dont il ignore peuteſtre
les détails.
Enfin noſtre belle veuve
prit congé de Mr l'Ambaffadeur
, & le lendemain elle
s'embarqua ſur un petit baſtiment
, qui en trois jours
GALANT. 87
لا
}}
la rendit à Lorette , où elle
accomplit avec beaucoup
de zele & de religion , le
voeu qu'elle avoit fait à Pa-
1ris. Après avoir pieuſement
fatisfait à ce devoir indifpenſable
, dégouſtée des perils
, & ennuyée des fatigues
de la mer , elle refolut
de traverſer toute l'Italie
par terre , avant de retourner
en France .
!
Il n'y avoit pas fi loin de
Lorette à Rome pour n'y
pas faire untour,& je croy
a que pour tous les voyageurs,
cinquante lieuës plus ou
88 MERCURE
moins , ne ſont qu'une bagatelle
, lorſqu'il s'agit de
voir cette capitale du mõde.
- Il faiſoit alors ſi chaud ,
qu'il eſtoit fort difficile de
faire beaucoup de chemin
par jour ; mais lorſqu'on eſt
en bonne compagnie , &
de belle humeur , rien n'ennuye
moins que les ſéjours
charmants qu'ontrouve en
Italie.
Je ne prétens pas en faire
icy un brillant tableau,pour
enchanter mes lecteurs de
la beauté de ce climat ; tant
de voyageurs en ont parlé ;
Miffon
GALANT. 89
1
Miſſon l'a ſi bien épluché,
&cette terre eſt ſi fertile
en avantures , que les hiftoires
galantes que j'en raconteray
dorenavant ſuffiront
pour inſtruire d'une
maniere peut- eftre plus agreable
que celle dont ſe
ſont ſervis les écrivains qui
en ont fait d'amples relations
, ceux qui ſe conten
teront du Mercure pour
connoiſtre aſſez particuliement
les moeurs & le plan
de ce pays . Ainſi je renonceray
pour aujourd'huy au
détail des lieux que noftre
May 1714.
H
90 MERCURE
belle veuve vit , avant d'entrer
à Rome , parce que non
ſeulement il ne luy arriva
rien fur cette route qui puifſe
rendre intereſſants les cir
conſtances de ce voyage ,
mais encore parce que je ne
veux pas faire le geographe
malà propos . Le Capitole ,
le Vatican , le Chaſteau S.
Ange , le Colizée , la Place
dEſpagne, la Place Navonne
, l'Eglife S. Pierre , le
Pantheon , les Vignes , &
enfin tous les monuments
des Anciens , & les magnifiques
ouvrages des Moder
GALANT. 91
nes,dont cette ville eſt enrichie,
n'étalérent à ſes yeux
que ce que les voyageurs
lesplus indifferents peuvent
avoirveu comme elle ; mais
lorſque jetraitteray, comme
je l'ay dit,des incidens amufants
& raifonnables que
j'ay , pour y promener mes
lecteurs , j'eſpere que leur
curioſité ſatisfaite alors , les
dédommagera fuffifamment
de la remiſe & des
frais de leur voyage...
La conduite que tint à
Rome cette charmante veuve
, fut tres eſloignée de cel- :
Hij
92 MERCURE
le que nos Dames françoi
ſes y tiennent , lorſqu'avec
des graces moindres que les
fiennes , elles ſe promettent
d'y faire valoir juſqu'à leur
plus indifferent coup d'oeil.
Celle cy parcourut les Egliſes
,les Palais , les Places
& les Vignes en femme qui
ne veut plus d'avantures ;
mais elle comptoit fans for
hoſte, & l'amourn'avoit pas
figné le traité de l'arrangement
qu'elle s'eſtoit fait.
Ungentilhomme Italien
dela ſuite de l'Ambaſſadeur
de l'Empereur , qui avoir
GALANT. 93
veu par hafard une fois à la
Vigne Farneze , le viſage
admirable de noftre belle
veuve , fur ſi ſurpris de l'é
elat de tant de charmes ,
qu'il reſtacomme immobi
le , uniquement occupé dư
foin de la regarder. Elle
s'apperceut auffi- toft de fon
eſtonnement ; mais dans
Finſtant ſon voile qu'elle
laiſſa tomber, luy déroba la
veuë de cet objet de fon admiration.
L'Italien , loin de
fe rebuter de cet inconvenient
, réſolut de l'exami
ner juſqu'à ce qu'il ſceuſt ſa
94 MERCURE
ruë , fa demeure , ſon pays ,
fes deſſeins , & fon nom.
Dés qu'il ſe fut ſuffiſamment
inſtruit de tout ce
qu'il voulut apprendre ;
aprés avoir paffé& repaffé
cent fois devant ſa maiſon ,
ſans qu'on payaſt ſes ſoins
de la moindre courtoiſie,&
pleinement convaincu qu'il
n'y avoit auprés de cette
belle veuve , nulle bonne
fortune à eſperer pour luy ,
il conclut qu'il pouvoit regaler
Monfieur l'Ambaſſadeur
du merite de ſa découverte.
A
GALANT.951
En effet un jour que l'Ambaſſadeur
de Pologne difnoit
chez ſon maiſtre , voyant
vers la fin du repas,que
la compagnie entroit en
belle humeur , & que la
- converſation rouloit de
bonne grace ſur le chapitre
- des femmes ; Meſſieurs , dit-
- il , quelques ſentimens
qu'elles vous ayent fait
prendre pour elles , je ſuis
ſeur , que ſans vous embar-
-raſſer de vouloir connoiſtre
leurs coeurs plutoſt que
leurs perſonnes,vous renonceriez
à toutes les précau
96 MERCURE
tions du monde , ſi vous
aviez vû , une ſeule fois ,
une Dame que je n'ay vûë
qu'un inſtant. Je me promenois
, ily a quinze jours
àla Vigne Farneze , elle s'y
promenoit auſſi ; mais je
vous avoue que je fus ſaiſi
d'étonnement,en la voyant,
& que je luy trouvay cant
de charmes , un ſi grand
air ,& un ſi beau viſage
que je jurerois volontiers ,
quoy que cette Ville fourmille
en beautés , qu'il n'y
a rienà Rome qui ſoit beau
comme elle. Ces Miniſtres
1
Eſtrangers
GALANT. 97
5
Eſtrangers s'échaufférent
ſur le recit du Gentilhomme
Italien , celuy de Pologne
ſur tout , ſentitun mou.
vement de curioſité fi
prompt , qu'il luy demanda
d'un air empreſſé , s'il n'a
voit pas eſté tenté de ſur
vre une ſibelle femme ,&
s'il ne sçavoit pas où elle
demeuroit. Ouy, Monfieur,
luy répondit- il , je ſçay ſon
nom , ſa demeure & les
motifs de ſon voyage à
Rome, mais je n'en ſuis
pas plus avancé pour cela ,
&je croy au contraire que
May 1714.
I
98 MERCURE
mes empreſſements l'ont
tellement inquiétée, qu'elle
ne paroiſt plus aux Eglifes ,
ny aux promenades , de
puis qu'elle s'eſt apperçuë
du ſoin que je prenois d'éxaminer
ſes démarches .
Voila une fiere beauté , dit
l'Ambafladeur de l'Empereur
, & addreſſant la parole
en riant à celuy de Pologne
, Monfieur , continuast-
il , n'ayons pas le démentide
cette découverte ,
& connoiffons à quelque
prix que ce ſoit , cette belle THEQUE DEL
BIBLI
< YON
EVILL
1893*
J'y confens reTHEQUE
DA
5,
20
LY
GALANTE
18
E
VILL
prit l'autre , férieuſent
& je ſuis fort trompé fi
dans peu de jours , je ne
vous en dis des nouvelles.
Ils auroient volontiers
bû desja à la ſanté de l'inconnue
, ſi , une Eminence
qu'on venoit d'annoncer ,
ne les avoit pas arrachez de
la table , où le vin & l'amour
commençoient
à les 0
mettre en train de dire de
de
belles choses .
e Le Gentilhomme qui
ue avoit ſi à propos mis la belle
Veuve ſur le tapis , fut au
devant du Cardinal , que
I ij
100 MERCURE
fon Maiſtre fut recevoir
juſqu'au pprreemmiieerr degré de
fon Eſcalier , & en meſme
tems il reconduifit l'Ambas
ſadeur de Pologne juſqu'à
fon Carrofle. Ce Miniſtrele
questionnaſi bien , chemin
faiſant , qu'il retourna chez
luy , parfaitement inftruit
de tout ce qu'il vouloit ſcavor.
Des qu'il fut à fon
Appartement , il appella un
Valet de chambre , à qui il
avoit ſouvent fait de pareilles
confidences & aprés
luy avoir avoüé qu'il eſtoit
desja , fur un ſimple recit ,
GALANT. 101
1
:
1
éperduëment amoureux
d'un objet qu'il n'avoit jamais
vû , il luy demanda
s'il croyoit pouvoir l'aider
de ſes conſeils de fon zele
& de ſa difcretion , dans
Tembarras où il ſe trouvoit.
Je feray , luy dit le Valet
de chambre tout ce
qu'il vous plaira ; mma.is puifque
vous me permettez de
vous donner des confeils ,
je vous avoüeray franche-
FL
د
ment , que je pennſiee que
le
portrait que vous me faites,
de la conduitte ſage & retirée
que tient la perſonne
Inj 1
102 MERCURE
dont vous me parlez , eft
fouvent le voile dont Te
fervent les plus grandes
avanturieres , pour attrapper
de meilleures dupes. Ta
pénétration eſt inutile icy ,
luy répondit l'Ambaffadeur
: tu ſçais desja ſon nom
& ſa maiſon , informe toy
ſeulement fi ce qu'on m'en
adit eft véritable ; nous
verrons aprés cela le parti
que nous aurons à prendre .
Le Confident ſe met en
campagne , il louë une
chambre dans le voiſinage
de la belle Veuveil fait
>
GALANT. 103
1
1
0
e
it
connoiſſance avec un de ſes
domeſtiques , qui le met
en liaiſon avec la femme
de chambre de la Dame
qu'il veut connoiſtre : enfin
il la voit , & il apprend
qu'elle va tous les jours à
la meſſe , entre ſept & huit
heures du matin , à l'Eglife
de ſainte Cecile. Il avertit
auffi toſt ſon Maiſtre de
tout ce qui ſe paſſe ; ce Miniſtre
ne manque point de
ſe rendre ſans ſuite à cette
Eglife , & de ſe placer auprés
de cette beauté qui n'a
garde de ſe meffier à pareil
I iiij
104 MERCURE
le heure , ni de fes char
mes , ni des ſoins , ni de la
dévotion du perſonnage
quiles adore. לכ
Cependant l'allarme fonne
,& le Valet de chambre
apprend avec bien de la
douleur , que la Damedont
ſon Maiſtre eſt épris , commence
à s'ennuyer à Rome,
&qu'enfin incertaine ſi elle
retournera en France par
Genes,où ſi elle repaſſerales
Alpes, elle veutabſolument
eſtre hors de l'Italie , avant
le retour de la mauvaiſe
faifon. A l'inſtant l'AmbafGALANT.
1ος
t
!
es
16
10
le
f
1
Tadeur informé , & defefperé
de cette nouvelles ſe
détermine à luy eſcrire en
tremblant , la lettre que
voicy.
N'eſtes vous venue àRome,
Madame , que pour y violer
le droit des gens ; fi les franchiſes
les Privileges des
Ambaffadeurs font icy de vostre
Domaine , pourquoy vous dé-
Domaine
goustez - vous du plaisir d'en
joüir plus long-temps ? Fapprends
que vous avez réfolu de
partir dans buit jours. Ab! fi
rienne peut rompre ou differer
ce funeste voyage, rende-z moy
106 MERCURE
donc ma liberté que vos yeux
m'ont ravie , & au milieu de
la Capitale du monde. Ne me
laiſſez pas , en me fuyant,la
malheureuſe victime de l'amour
que vous m'avez donné. Permettez
moy bien pluſtoſt de vous
offrir en ces lieux tout ce qui
dépend de moy , & en reeevant
ma premiere visite , recevez en
mesme temps , si vous avez
quclques sentiments d'humanité,
la fortune , le coeur , & la
main de
BELZESKI.
Le Valet de Chambre
fut chargé du ſoin de luy
rendre cette lettre à elle
meſme au nom de ſon Maître
, d'examiner tous les
mouvemens de fon viſage ,
&de lui demander un mot
de réponſe.
La Dame fut aſſez
émeuë à la vûë de ce billet ,
cependant elle ſe remit aifément
de ce petit embarras
, & aprés avoir regardé
d'un air qui n'avoit rien
de déſobligeant , le porteur
de la lettre , qu'elle
avoit vûë vingt fois ſans reflexion
, elle luy dit , ce
108 MERCURE
?
tour eſt ſans doute de voſtre
façon Monfieur mais
Monfieur l'Ambaſſadeur
qui vous envoye , ne vous
en ſera guere plus obligé,
quoyque vous ne l'ayez pas
mal ſervi. Attendez icy un
moment, je vais paſſer dans
mon Cabinet , & vous en
voyer la réponſe que vous
me demandez pour luy :
Auſſi-toſt elle le quitta pour
aller efcrire ces mors. S
Fe ne sçay dequoy je ſuis
coupable à vos yeux, Monfieur,
mais je sçay bien que je ne re
ponds que par bienfeance à l'hon-
>
BAGALAN 109
0
neur que vous me faites ,
aux avantages que vous me proposez
: & je prévoy que la
viſite que vous me rendrez , si
vous voulez , vous fera auffi
peu utile qu'à moy , puisque
rien ne peut changer la réfolution
que j'ay priſe de repaffer
inceſſamment en France.
Le Polonnois éperduëment
amoureux ( car il y
avoit de la fatalité pour elle,
à eſtre aimée des gens de ce
pays ) le Polonnois , dis- je ,
donna à tous les termes de
ce billet , qu'il expliqua en
ſa faveur, un tourde confo110
MERCURE
lation que la Dame n'avoit
peut- eſtre pas eu l'intention
d'y mettre; d'ailleurs il eſtoit
parfaitementbien fait , tres
grand ſeigneur , fort riche ,
&magnifique entout. Les
hommes ſe connoiſſent , il
n'y a pas tantde mal à cela.
Celui- cy ſçavoit aſſez ſe
rendrejustice , mais heureuſement
il ne s'en faifoit pas
trop à croire , quoy qu'il
ſentit tous ſes avantages.....
Vers les * vingt& une ou
vingt- deux heures , il ſe ren-
**C'eſt en eſté à peu prés vers les fix heures
du ſoir,ſelon noftre façon de compter.
GALANT. III
コ
el
dit au logis de la belle veuve
, qu'il trouva dans undeshabillé
charmant & modeſte
, mille fois plusaimable
qu'elle ne luy avoit jamais
paru .
Que vous eſtes , Madame ,
luy dit- il , transporté du
plafir de la voir , au deſſus
des hommages que je vous
rends ; mais en verité je vais
eſtre le plus malheureux des
hommes , fi vous ne vous
rendez pas vous meſme aux
offres que je vous fais Nous
nenous connonfons n'y l'un
ny l'autre , Monfieur , luy
70%
112 MERCURE
11
répondit - elle , & vous me
propoſez d'abord des chofes
dont nous ne pourrions
peut eſtre que nous repentir
tousdeux, mais entrons , s'il
vousplaît,dansun plus grád
détail,& commençons par
examiner , i la majeſté de
voſtre caractere s'accorde
bien avec les ſaillies de cette
paffion ; d'ailleurs n'eſt il
pas ordinaire , & vrayſemblable
qu'un feu ſi prompt
às'allumer, n'en eſt que plus
prompt à s'éteindre. Enfin
ſupposé que je voulutſe encorem'engager
ſous les loix
de :
GALANT. 113
1
1
del'hymen, ſur quel fondement,
àmoins queje nem'a.
veuglaſſe de l'eſpoir de vos
promeſſes, pourrois- je compter
que vous me tiendrez
dans un certain tems ce que
vous me propoſez aujourd'huy
. Ah ! Madame , reprit
ilavecchaleur, donnez
aujourd huy voſtre confentement
à mon amour , &
demain je vous donne la
main. Par quelles loix voulez
vous authoriſer des maximes
de connoiſſance &
d'habitude , ſur des ſujers où
le coeur doit décider tout
114 MERCURE
,
ſeul ; n'y a t'il point dans le
monde des mouvements de
ſympathie pour vous , comme
pour nous , & quelle
bonne raiſon peut vous dif
penſerde faire pour nous
enun jour,la moitié du chemin
que vos charmes nous
font faire en un inſtant. Je
ſuis perfuadé que vous avez
trop d'eſprit, pour regarder
mal à propos ces chimeriques
précautions , comme
des principes de vertu , &
vous eſtes trop belle pour
douter un moment de la
conſtante ardeur des feux
GALANT 115
mt
&
רש
la
גנ
que vous allumez. Cependant
ſi vos ſcrupules s'effrayent
de la vivacité de ma
propoſition,je vous demande
du moins quinze jours
de grace , avant de vous
prier de vous déterminer en
ma faveur ; & j'eſpere ( fi
vos yeux n'ont point de peine
à s'accouſtumer à me
voir pendant le temps que
j'exige de voſtre complaiſance
) que les ſentiments
de voſtre coeur ne tarderont
pas à répondre aux tendres
& fidelles intentions du
mien. Ne me preſſez pas da
Kij
116 MERCURE
vantage à preſent , Monfieur
, luy dit elle,& laiſſez
à mes reflexions la liberté
d'examiner les circonſtancesde
voſtre propofition.
Cette réponſe finit une
conteftation qui alloit inſenſiblement
devenir tres.
intereſſante pour l'un &
pour l'autre.
Monfieur l'Ambaſſadeur
ſe leva , & prit congé de la
belle veuve aprés avoir receu
d'elle la permiffion de
retourner la voir , lorſqu'il
le jugeroit à propos.
Ce miniſtre rentra chez
GALANT 117
-
luy , ravi d'avoir mis ſes affaires
en ſibon train , & le
lendemain au matin il écrivit
ce billet à cette Dame ,
dont il avoit abſolument refolu
la conqueſte.
Le temps que je vous ay don-
- né depuis hier , Madame , ne
fuffit-il pas pour vous tirer de
toutes vos incertitudes , s'il ne
ſuffit pas , je vais estre auffi indulgent
que vous estes aimable,
je veux bien pour vous efpargner
la peine de m'eſcrire vos
Sentiments , vous accorder, jufqu'à
ce soir , que j'iray appren
dre de vostre propre bouche , le
1
118 MERCURE
réſultat de vos reflexions.
Elles eſtoient desja faites
ces réflexions favorables à
T'heureux Polonois , & pendant
toute la nuit, cette belleveuve
n'avoit pû ſe refufer
la fatisfaction de convenir
en elle-meſme , qu'elle
meritoit bien le rang d'Ambaſſadrice.
Aufſfi luy fut-il
encore offert le meſme jour
avec des tranſports fi touchants&
fi vifs,qu'enfin elle
ne fit qu'une foible deffenſe
, avant de conſentir à la
propoſition de Mr l'Ambaffadeur.
En un mot toutes
GALANT. 119
!
les conventions faites & accordées
, entre elle & fon
amant,ſon voyage de France
fut rompu , & fon mariage
conclu , & celebré ſecretement
enquinze jours.
Legrandtheatredu monde
va maintenant eſtre le
champ où va paroiſtre dans
toute fon eſtenduë , l'excellence
du merite & du bon
efprit deMadame Belzeſca.
Elle reste encore preſque
inconnuë juſqu'à la declararion
de ſon hymen , qui
n'eſt pas plutoſt rendu public
, qu'elle ſe montre auſſi
120 MERCURE
4
éclairée dans les delicates
affaires de fon mary , que
fielle avoit toute la vie
eſte Ambaſſadrice,лэ тод
Les Miniſtres Eſtrangers,
les Prélats , les Eminences
tout rend hommage à fes
lumiéres. De concert aveo
fon Epoux , ſa pénerrap
tion abbrege , addoucit &
leve toutes les difficultez
de ſa commiffion : enfin
elle l'aide à ſortir de Rome
(ſous le bon plaifir de fon
Maſtre ) fatisfait & glorieux
du ſuccés de fonAm
baffade.altera teemal
هللا
GALANT. 121
Elle fut obligée pour le
bien de ſes affaires de repaſſer
en France avec ſon
mary : elle n'y ſéjourna que
trois ou quatre mois , de là
elle alla à Amſterdam , &
à la Haye , où elle s'embarqua
pour ſe rendre à Dant-
ZIK d'où elle fut à Varſovie
où elle jouit pendant
vingt-cinq ans , avec tous
les agréments imaginables,
de lagrande fortune , & de
la tendreſſe de ſon Epoux ,
qui fut enfin malheureufement
bleſſe à la Chaffe
d'un coup dont il mourut
May 1714.
L
127
MERCURE 122
quatreJours
Tavoir
apres la
Э
receu d'une façon toute
extraordinaire .
Rien n'eſt plus noble &
plus magnifique , que la
220
20
manière dont les Grands
Seigneurs vont à la Chaſſe
en Pologne. Ils menent ordinairement
avec eux , un
fi grand nombre deDomeftiques
, de Chevaux , & de
Chiens, que leur Equipage
reſſemble pluſtoſt à un gros
détachement de troupes reglées
, qu'à une compagnie
de gens aſſemblez , pour le
plaisir de faire la guerre à
GALANT. 123
+
20
وا
LEKCI }
des animaux. Cette précaution
me paroilt fort
raisonnable , & je trouve
qu'ils font parfaitement
bien de proportionner le
nombredes combatrants au
3
21091
nombre & à la fureur des
monſtres qu'ils attaquent.
Un jour enfin, Monfieur
Belzeſki , dans une de fes
redoutables Chaffes, fe laifſa
emporter par ſon cheval ,
à la pourſuite d'un des plus
fiers Sangliers qu'on cuſt
encore vû dans la Foreſt où
il chaſſoit alors. Le cheval
anime paſſa ſur le corps de
124 MERCURE
261
ce terrible animal , & s'abbatit
en meſme temps , à
quatre pas de luy. Monfieur
Belzeſki ſe dégagea, auflitoſt
adroitement des efriers
, avant que le Monf
tre l'attaquaft ; mais ils eftoient
trop prés l'un de Laura
tre & le Sanglier desia
bleffé trop furieux , pour ne
pas ſe meſurer
44
encore con-b
tre l'ennemi qui l'attendoit :
ainſi plein de rage , il voulut
ſe llaanncceerr fur luy , mais
dans le moment ſon ennemi
intrepide & prudent lui
abbattit la teſte d'un coup
GALANT.
1:5
ſi juſte , & fi vigoureux, que
fon fabre paffa entre le col
& le tronc de an
11
avec tant de viteſſe , que le
mouvement Violent avec
lequel il retira fon bras
entraîna fon 21911
corps , de ma
niere qu'un des pieds luy
manquant , il tomba à la
renverſe ; mais fi malheu
reuſement, qu'il alla ſe fen.
dre la tefte fur une pierfe
qui ſe trouva derriere luy.
Dans ce fatal inſtanttous
les autres Chaſſeurs arrivérent
, & emporterent en
pleurant , le Corps de leur
THAJAD
126 MERCURE
infortune maiſtre , qui vécu
encore quatre jours
qu'il employa à donner à
Madame Belzeſca les dernieres
& les plus fortes
preuves de ſon amour , if
la fiitt ſon heritiere univerſelle
, & enfin il mourut
adoré de ſa femme , & infiniment
regretté de tout
le monde.
il
Il y a plus de fix ans que
Madame Belzeſca pleure
ſa perte , malgré tous les
foins que les plus grands
Seigneurs , les Princes , &
mefme les Roys , ont pris
GALANT. 127
pour la conſoler. Enfin elle
eft depuis long-temps l'amie
inſéparable de Mada
infeparable
me la Palatine de ... elle a
maintenant foixante ans
paflez , & je puis affeurer
qu'elle est encore plus aimée
; & plus reſpectée ,
qu'elle ne le fut peut eftre
jamais , dans le plus grand
efclat de fa jeuneffe. On
parle meſme de la remarier
aun homme d'une fi grande
distinction
, que , ce
bruit , quelque fuite qu'il
ait eft toutccee qu'on en peut
dire de plus avantageux ,
Lin
128 MERCURE
pour faire un parfait éloge
de ſon mérite , & de fes
vertusaises
nouvelle .
LA peſte qui exerce
ſouvent de furieux ravages
dans lesPaïsduNord,
avoit déja détruit prés
d'un tiers de la belle Ville
de Varſovie , ceux de ſes
habitans qui avoient
quelque azile dans les
campagnes , l'abandonnoient
tous les jours ;
pluſieurs alloient à cent
GALANT. 13
lieuës&plus loin encore,
chercher à ſe preſerver
des perils de la conta
gion , lorſque la Palatine
de ... arriva à Dantzic
avec pluſieurs Dames de
confideration qui n'avoient
pas voulu quitter
Varſovie ſans elle.
Le Marquis de Canop
qui eſt un des plus dignes
& des plus honneftes
homes qu'on puiſſe voir,
& qui jouoit un tresgrand
rôle en Pologne ,
14 MERCURE
eſtoit alors à Dantzic ,
où il receut la Palatine
avec tous les honneurs &
toutes les feftes qu'on
puiſſe faire àune des plus
charmantes & des plus
grandes Princeſſes du
monde.drov mes
Des intereſts d'amour,
autant que la crainte de
la maladie , avoient dé
terminé pluſieurs Sei
gneurs Polonois à ſuivre
la Palatine & les Dames
qui l'accompagnoient :
GALANT.
ces Illuſtres captifs qui
n'avoient point abandon-
-néle Char de leur Maitreffe
pendant leur route ,
regarderent leur retraite
à Dantzic , comme l'azile
dumõde le plus favorable
à leurs foupirs. Mais parmi
tant de jeunes beautez
qui briguoient peuteſtre
encore plus d'hommages
qu'elles n'en recevoient
, rien n'eftoit plus
admirable , que le droit ,
qu'uneDame autant ref-
وت
16 MERCURE
pectable par la majeſté
de ſes traits , que par le
nombre de ſes années ,
ſembloit avoir ſur les
cooeurs de tous ceux qui
l'approchoient.
Il n'eſt pas eſtonnant
qu'à un certain âge , on
plaiſe à quelqu'un , mais
quelque beau retour
qu'on puiſſe avoir , il eſt
rare que dans un âge
avancé, on plaiſe à tout
le monde.
La Dame dont je parle,
&
GALANT. 17
&qui avoit cet avantage,
ſe nommoit alors Madame
Belzeſca , elle avoit
eü déja trois maris , &
au moins mille Amants,
elle s'eſtoit tousjours conduite
avec tant de difcretion
& d'innocence , que
les plus hardis & les plus
emportés de ſes adorateurs
n'avoient jamais ofé
donner la moindre atteinte
à ſa réputation : enfin à
quinze ans elle avoit ſou
ſe faire reſpecter comme
May1714. B
18 MERCURE
à ſoixante , & à foixante
paffées ſe faire aimer &
fervir comme à quinze.
Une femme de fa Province,
de fon âge , & qui
depuis fon premier mariage
l'a ſervie juſqu'à
préſent , m'a conté dix
fois fon hiſtoire , comme
je vais la raconter.
Voicy à peu prés ce
que jay retenu de fes
avantures.
Madame Belzeſca eft
originaire d'un Villagede
:
GALANT 12
!
Tourainne , fon Pere qui
eſtoit frere du Lieutenant
Generald'une des premieres
Villes de cette Province
, y poffedoit des biens
affez confiderables . Elle
reſta ſeule de 9. enfants
qu'eut ſa Mere , qui ne
l'aima jamais. Satendreſſe
pour un fils qu'elle avoit,
lorſqu'elle vint au monde;
en fit à ſon égard une
maraſtre ſi cruelle , que
l'oin d'accorder la moindre
indulgence aux ſentih
Bij
20 MERCURE
>
ments de la nature , quelques
efforts que fit fon
mary pour la rendre plus
humaine , elle ne voulut
jamais confentir à la voir.
Cette averſion s'eſtoit
fortifiée dans ſon coeur
ſur la prédiction d'un Berger
qui luy dit un jour ,
deſeſperé des mauvais
traittements dont elle
l'accabloit , qu'elle portoit
en fon fein un enfant
qui le vangeroitdesmaux
qu'elle luy faifoit. Cette
GALANT. 21
malheureuſe Prophetie
s'imprima ſi avant dans
ſon ame , que l'exceffive
haine qu'elle conceut
pour le fruit de cette couche
, fut l'unique cauſe
de la maladie dont elle
mourut. L'enfant qui en
vint , fut nommé Georgette
Pelagie le ſecond
jour de ſa naiſſance , &le
troifiéme emmenée dans
le fond d'un Village , où
la fecrette pieté de fon
Pere , &la charité de ſa
22. MERCURE
tendre nourrice l'elevérent
juſqu'à la mort de fa
mere , qui , eutà peine les
yeux fermés, qu'on ramena
ſa fille dans les lieux
où elle avoit receu le jour.
Pelagie avoit alors prés
de douze ans , &déja elle
eſtoit l'objet de la tendrefſe
de tous les habitans ,
&de tous les voiſins du
Hameau dont les foins
avoient contribué à la
mettre à couvert des rigueurs
d'une mere inhu
4
GALANT. 23
|
€
maine. Ses charmes naiffans,
avec mille graces naturelles
, ſa taille & fes
traits qui commençoient
à ſe former , promettoient
tant de merveilles aux
yeux de ceux qui la vor
yoient, que tous les lieux
d'alentour s'entretenoient
déja du bruit de ſa beauté.
Un eſprit tranquille ,
un temperament toûjours
égal , une grande attention
ſur ſes diſcours , &&&
une douceur parfaite
1
24 MERCURE
avoient preſque réparé
en elle le déffaut de l'éducation
, lorſque ſon Pere
réſolut de la conduire à
Tours.Quoyque l'air d'une
Ville de Province , &
celuy de la campagne ſe
reffemblent affés , elle ne
laiſſa pas de trouver là
d'honneſtes gens qui regarderent
les ſoins de l'inſtruire
comme les plus
raiſonnables foins du
monde. Mais il eſtoit
temps que le Dieu qui
fait
GALANT. 25
fait aimer commençaſt a
ſe meſler de ſes affaires ,
& que fon jeune coeur
apprit à ſe ſauver des pieges
& des perils de l'amour.
La tendreſſe que
ſes charmes inſpiroient
échauffoit tous les coeurs,
à meſure que l'art poliffoit
ſon eſprit , & fon
eſprit regloit ſes ſentimens
à meſure que la
flatterie eſſayoit de corrompre
ſes moeurs. Mais
c'eſt en vain que nous
May 1714.
,
C
26 MERCURE
prétendons nous arranger
fur les deſſeins de noſtre
vie , toutes nos précautions
ſont inutiles contre
les arreſts du deſtin .
Le Ciel refervoit de
trop beaux jours à l'heureuſe
Pelagie ſous les
loix de l'amour , pour
lui faire apprehender davantage
les écuëils de fon
empire. Cependant ce fut
une des plus amoureuſes
& des plus funeftes avantures
du monde qui déGALANT.
27
termina ſon coeur à la
tendreſſe.
Un jour ſe promenant
avec une de ſes amies ſur le
bord de la Loire , au pied
de la celebre Abbaye de
Marmoutier,elle apperceut
au milieu de l'eau un petit
batteaudécouvert , dans lequel
étoient deux femmes ,
un Abbé ,& le marinier qui
les conduiſoità Tours : mais
ſoit que ce bateau ne valuſt
rien ou que quelque malheureuſe
pierre en euſt écarté
les planches , en un moment
tout ce miferable é-
Cij
28. MERCURE
quipage fut enseveli ſous
les eaux. De l'autre coſté
de la riviere deux cavaliers
bien montez ſe jetterent à
l'inſtant à la nage pour ſecourir
ces infortunez ; mais
leur diligence ne leur ſervit
au peril de leur vie , qu'au
falut d'une de ces deux femmes
, que le moins troublé
de ces cavaliers avoit heureuſement
attrapée par les
cheveux , & qu'il conduifit
aux pieds de la tendre Pelagie
, qui fut fi effrayée de
cet affreux ſpectacle , qu'elle
eutpreſque autant beſoin
GALANT. 29
!
de ſecours , que celle qui
venoit d'eſtre ſauvée de cet
évident naufrage , où l'autre
femme & l'Abbé s'eftoient
desja noyez .
:
Le cavalier qui avoit eſté
le moins utile au falut de la
perſonne que ſon ami venoit
d'arracher des bras
de la mort , eſtoir cependant
l'amant aimé de la Dame
délivrée ; mais ſon amour
, fon trouble & fon
deſeſpoir avoient telle.
ment boulversé ſon imagination
, que bien loin de ſe
courir les autres , il ne s'en
C iij
30 MERCURE
fallut preſque rien qu'il ne
perift luy meſme: enfin fon
cheval impetueux le remit
malgré luy au bord d'où il
s'eſtoit précipité ; auffi- toft
il courut à toute bride, iltraverſa
la ville , & pafla les
ponts pour ſe rendre fur le
rivage , où ſa maiſtreſſe recevoit
toute forte de nouveaux
foulagements de Pelagie
, de ſa compagne , &
de ſon ami.
L'intrepidité du liberateur,
ſa prudence , ſes ſoins
& fa bonne mine pafferent
fur le champ pour des mer
GALANT. 31
veilles aux yeux de Pelagie,
De l'admiration d'une certaine
eſpece , il n'y a ordinairement
, ſans qu'on s'en
apperçoive , qu'un pas à
faire à l'amour , & l'amour
nous mene ſi loin naturellement
qu'il arrache bientoſt
tous les conſentements
de noſtre volonté. En vain
l'on ſe flatte d'avoir le tems
de reflechir , en vain l'on
veut eſſayer de ſoumettre
le coeur à la raiſon , l'eſprit
dans ces occafions eft tousjours
ſeduit par le coeur , on
regarde d'abord l'objet avec
C iiij
32 MERCURE
complaiſance.les préjugez
viennent auſſi toſt nous é
tourdir , & nous n'eſperons
ſouvent nous mieux deffendre
, que lorſque noſtre inclination
nous determine à
luytout ceder.
La tendre Pelagie eſtonnée
de ce qu'elle vient de
voir , n'ouvre ſes yeux embaraffés
, que pour jetter
des regards languiſſans
vers la petite maiſon , où
quelques Payſans aidés de
nos deux Cavaliers emportent
la Dame qui vient d'eftre
delivrée de la fureur
GALANT. 33
des flots. Elle n'enviſage
plus l'horreur du peril
qu'elle lui a vû courir ,
comme un ſpectacle ſi digne
de compaſſion , peu
s'en faut meſme qu'elle
n'envie ſon infortune.
Quoique ſes inquietudes
épouvantent ſon coeur , fes
intereſts ſe multiplient , à
meſure que cette troupe
s'éloigne d'elle . Elle croit
desja avoir démeflé que
ſon Cavalier ne ſoupire
point pour la Dame , ni la
Dame pour lui ; neanmoins
ſon eſprit s'en fait
34 MERCURE
une Rivale , elle aprehende
qu'un ſi grand ſervice
n'ait quelqu'autre motif
que la pure generofité , ou
pluſtoſt elle tremble qu'un
amour extreſme ne ſoit la
récompenſe d'un fi grand
ſervice. Cependant elle retourne
à la Ville , elle ſe
met au lit , où elle ſe tour.
mente , s'examine & s'afflige
, à force de raiſonner
fur certe avanture , dont
chacun parle à ſa mode
elle la raconte auffi tous
و
ceux qui veulent l'entendre
, mais elle s'embaraſſe
GALANT.
35
,
د tellement dans ſon récit
qu'il n'y a que l'indulgence
qu'on a pour ſon innocence
& ſa jeuneſſe , qui déguiſe
les circonſtances
qu'elle veut qu'on ignore.
Le Chevalier de Verſan
de ſon coſté ( C'eſt le
nom du Cavalier en qui
elle s'intereſſe , ) le Chevalier
de Verſan dis-je ,
n'eſt pas plus tranquille. La
belle Pelagie eſt tousjours
preſente à ſes yeux , enchanté
de ſes attraits , il va,
court , & revient , par tout
ſa bouche ne s'ouvre , que
36 MERCURE
,
,
pour vanter les appas de
Pelagie. Le bruit que cet
Amant impetueux fait de
fon amour frappe auflitoſt
ſes oreilles , elle s'applaudit
de ſa conqueſte
elle reçoit ſes viſites , écoute
ſes ſoupirs , répond à ſes
propoſitions , enfin elle
conſent , avec ſon Pere ,
que le flambeau de l'hymen
éclaire le triomphe de
fon Amant. Cette nouvelle
allarme , & deſeſpere
en vain tous ſes Rivaux. Il
eſt heureux déja. La fortune
elle-mefme pour le com
bler de graces vient atta
cher de nouveaux préſens
aux faveurs de l'amour. La
mort de ſon frere le fait
heritier de vingt mille livres
de rente. Le Chevalier
devient Marquis : nouvel
& précieux ornement
aux douceurs d'un tendre
mariage. Mais tout s'uſe
dans la vie , l'homme ſe
demaſque , la tendreſſe reciproque
s'épuiſe imper
ceptiblement , on languit ,
on ſe quitte , peut - eſtre
meſme on ſe hait , heureux
encore ſi l'on ne fouf
38 MERCURE
fre pas infiniment des caprices
de la déſunion Mais
Prices d la mort & l'amour ſe rangent
du parti de Madame
la Marquiſe de ... que ,
pour raiſon difcrette , je
nommerai Pelagie , juſqu'à
ce qu'elle foit Madame
Belzeſca.
Ainfi l'heureuſe Pelagie
aprés avoir goufté pendant
cinq ans toutes les douceurs
de l'hymen , ne ceſſe d'aimer
fon mary ( inconſtant
huit jours avant elle )
que fix ſemaines avant ſa
mort.
GALANT. 39
Un fils unique , ſeul &
cher gage de leur union ,la
rend àvingt ansheritiere &
dépofitaire des biensdu défunt.
Elle arrange exacte
ment toutes ſes affaires, elle
abandonne tranquillement
la province , & fe rend à
Paris avec fon fils .
De quel pays , Madame ,
luy dit- on,dés qu'on la voit,
nous apportez-vous tant de
beauté? dans quelle obſcure
contrée avez - vous eu le
courage d'enſevelir ju qu'a
preſent tant de charmes ?
que vous eſtes injuſte d'a
40 MERCURE
voir ſi long - temps honoré
de voſtre preſence des lieux
preſque inconnus , vous qui
eſtes encore trop belle pour
Paris . Cependant c'eſt le
ſeul endroit du monde qui
puiſſe prétendre à la gloire
de vous regarder comme la
Reine de ſes citoyennes.
Les ſpectacles , les aſſemblées,
les promenades , tout
retentit enfin des merveillesdela
belle veuve.
Le Roy Caſimir eſtoit
alors en France , pluſieurs
grands ſeigneurs avoient
ſuivi ce Prince juſqu'à la
porte
GALANT. 41
porte de ſa retraite.
Il n'y avoit point d'eſtranger
à Paris qui ne fuſt curieux
d'apprendre noſtre
langue qui commençoit à
ſe répandre dans toutes les
cours de l'Europe , & il n'y
enavoit aucun qui ne ſceuſt
parfaitement que la connoiſſance
& le commerce
des Dames font l'art, le merite
, & le profit de cette
eftude.
Un charmant voiſinage
eſt ſouvent le premier prétexte
des liaiſons que l'on
forme.
May 1714. D
MERCURE
Pelagie avoit ſa maiſon
dans le fauxbourg S. Germain
: ce quartier eſt l'azile
le plus ordinaire de tous les
eſtrangers , que leurs affaires
ou leur curioſité attirent
à Paris .
,
La Veuve dont il eſt
queſtion eſtoit fi belle
que ſa Maiſon eſtoit tous
les jours remplie des plus
honneſtes gens de la Ville ,
& environnée de ceux qui
n'avoient chez elle ni
,
droit , ni prétexte de viſite.
Enfin on croyoit en la
voyant , que , Maiſtreſſe
GALANT. 43
!
abſoluë des mouvements
de ſon ame , elle regnoit
ſouverainement ſur l'amour
comme l'amour
qu'elle donnoit regnoit fur
tous les coeurs ; mais on ſe
trompoit , & peut- eſtre ſe
trompoit- elle elle - meſme.
Pelagie eſtoit une trop
belle conqueſte , pour n'eftre
pas bien toſt encore la
victime de l'amour.
La magnificence du plus
grand Roy du monde raviſſoit
alors les yeux des
mortels , par l'éclat & la
pompe des ſpectacles &
Dij
44 MERCURE
,
des feftes , dont rien n'avoit
jamais égalé la richefſe
& la majefté ; l'on accouroit
de toutes parts ,
pour eſtre témoins de l'excellence
de ſes plaifirs , &
chaque jour ſes peuples
eſtoient obligez d'admirer
dans le délafſſement de ſes
travaux , les merveilles de
fa grandeur.
Le dernier jour enfin
des trois deſtinés pour cette
fuperbe feſte de Verfailles,
dont la poſterité parlera
comme d'une feſte inimitable
, ce jour où l'Amour
GALANT. 45
vuida tant de fois fon Carquois
, ce jour où l'Amour
ſe plut à joüer tant de
tours malins à mille beautés
que la fplendeur de ce
Spectacle avoit attiré dans
ces lieux , fut enfin le jour
qui avança le dénoüement
du fecond du ſecond hymen de Pelagie.
Un des ſeigneurs que le
Roy Caſimir avoit amenéz
avec luy , avoit malheureuſement
veu cette belle veuve
, un mois avant de ſedéterminer
à imiter le zele &
la pieté de ſon maiſtre , elle
46 MERCURE
avoit paru à ſes yeux ornée
de tant d'agrements , ou
plutoſt ſi parfaite , que la
veuë de ſes charmes luy fit
d'abord faire le voeu de n'en
plusfaire que pour elle; mais
c'eſt un conte de prétendre
qu'il ſuffiſe d'aimer pour ef
tre aimé ; rien n'eſt plus
faux que cette maxime , &
je ſouſtiens qu'on eſt ſouvent
traité fort mal en amour
, à moins qu'une heureuſe
influence n'eſtabliſſe
des diſpoſitions reciproques.
C'eſt en vain que l'amouGALANT.
47
reux Polonois brufle pour
Pelagie , ſon eſtoille n'eft
point dans ſes interefts , elle
regarde cette flame auffi
indifféremment , qu'un feu
que d'autres auroient allumé
, & quoy qu'elle voye
tous les jours ce nouvel
eſclave l'étourdir du récit
de ſa tendreſſe , ſon coeur
ſe fait ſi peu d'honneur de
cette conquefte , qu'il femble
qu'elle ignore qu'il y
ait des Polonois au monde
.
Mais l'eſprit de l'homme
prend quelquefois des ſen48
MERCURE
timents ſi audacieux quand
il aime , que la violence
de ſa paſſion & le defefpoir
de n'eſtre point écouté
, le portent ſouvent juſqu'à
l'inſolence. D'autresfois
nos titres& noſtre rang
nous aveuglent , & nous
nous perfuadons qu'on eſt
obligé de faire , du moins
en faveur de noſtre nom
ce que nous ne meritons
,
pas qu'on faſſe pour l'amour
de nous.
Le Polonois jure , tempeſte
, & s'impatiente contre
les rigueurs de ſa Maîtreffe,
GALANT .
49
treſſe , à qui ce procedé
paroiſt ſi nouveau , qu'elle
le fait tranquillement remercier
de ſes viſites . La
rage auffi toſt s'empare de
ſon coeur , il n'eſt point de
réſolution violente qui ne
lui paroiſſe légitime , l'inſenſible
Pelagie eft injufte
de n'eſtre pas tendre pour
lui , ſa dureté la rend indigne
de ſon amour , mais
fon amour irrité doit au
moins la punir de ſa rigueur
, & quoy qu'il en
couſte à l'honneur , l'éxécution
des plus criminels
May 1714. E
10 MERCURE
projets n'est qu'une bagatelle
, lorſqu'il s'agit de ſe
vanger d'une ingratte qui
ne peut nous aimer.
Ce malheureux Amant
ſcut que ſon inhumaine
devoit se trouver à la feſte
de Verſailles, avec une Dame
de ſes amies , & un de
ſes Rivaux , dont le mérite
luy avoit d'abord fait apprehender
la concurrence ,
mais qu'il croyoit trop foible
alors pour pouvoir déconcerter
ſes deſſeins . Il
prit ainſi ſes meſures avec
des gens que ſes promeſſes
GALANT.
SI
&ſes préſents engagérent
dans ſes intereſts , & il ré.
ſolut , aſſeuré de leur courage
& de leur prudence ,
d'enlever Pelagie , pendant
que le déſordre & la confuſionde
la find'une ſi grande
feſte , lui en fourniroient
encore les moyens..
Le Carroffe & les relais
qui devoient ſervir à cet
enlevement , eſtoient déja
ſi bien diſpoſés , qu'il ne
manquoit plus que le moment
heureux de s'empa
rer de l'objet de toute cette
entrepriſe ; lorſque Pelagie
1
E ij
52
MERCURE
laſſe & accablée du ſommeilque
lui avoient dérobé
ces brillantes nuits , entra ,
avec ſon amie , dans un
fombre boſquet , où la fraîcheur
& le hazard avoient
inſenſiblement conduit ſes
pasi elle y furà peine aſſiſe,
qu'elle s'y endormit
Laiffons la pour un inftant,
dans le fein du repos
dont on va bien toſt l'arracher.
- L'occaſion est trop belle
pour n'en pas profiter ; mais
le Polonois a beſoin de tout
fon monde , pour en fortir
GALANT.
53
a ſon honneur , & il commence
à trouver tant de
difficultez , à exécuter un ſi
grand deſſein dans le Palais
d'un ſi grand Roy , qu'il
s'imagine , aveuglé de ſon
déſeſpoir & de ſon amour ,
qu'il n'y a qu'une diligence
infinie , qui puiffe réparer
le déffaut de ſes précautions.
Il court pour raffem
bler ſes confidents ; mais la
vûë de ſon Rival qui ſe préſente
à ſes yeux , fait à l'inſtant
avorter tous ſes pro
jets. Où courez- vous, Monſieur
, luy dit- il , que vous
E iij
54 MERCURE
,
importe , répond l'autre ?
rendez graces , répond le
Cavalier François au refpect
que je dois aux lieux
cù nous ſommes fans
cette conſidération je
vous aurois déja puni , &
de voſtre audace , & de
l'inſolence de vos deſſeins.
Il te fied bien de m'inſulter
icy luy dit le Polonois ; je
te le pardonne : mais ſuy
moy ? & je ne tarderay pas
à t'apprendre à me reſpecter
moi- meſme , autant que
les lieux dont tu parles . Je
conſens , luy répondit le
4
GALANT .
SS
François , à te ſuivre où tu
voudras ; mais j'ay mainte
nant quelques affaires qui
font encore plus preſſées
que les tiennes: tu peux cependant
diſpoſer du rendez
vous , où je ne le feray pas
long-temps attendre.
Le bruit de ces deux
hommes éveille pluſieurs
perſonnes qui dormoient
ſur le gazon ; on s'aſſemble
autour d'eux , ils ſe taiſent
&enfin ils ſe ſéparent,
Ainfi le Polonois ſe retire
avec ſa courte honte ,
pendant que le François
E iii
56 MERCURE
cherche de tous cotez , les
Dames qu'il a perduës :
mais cette querelle s'eſtoit
paſſée ſi prés d'elles , que le
mouvement qu'elle cauſa ,
les reveilla , comme ceux
qui en avoient entendu la
fin ; elles fortirent de leur
boſquet qu'elles trouverent
desja environné de
gens qui compoſoient &
débitoient à leur mode les
circonstances decette avanture
, ſur l'idée que pouvoit
leur en avoir donné le peu
de mots qu'ils venoient
d'entendre , lorſqu'enfin il
GALANT.
$7
les retrouva. Je prie les
Lecteurs de me diſpenſer
de le nommer , ſon nom ,
ſes armes & ſes enfans ſont
encore ſi connus en France,
que , quoy que je n'aye que
ſon éloge à faire , je ne ſçay
pas ſi les fiens approuveroient
qu'on le nommaſt.
Deux heures avant que
le Cavalier François rencontrât
le Polonois , Mon.
fieur le Duc de ... avoit
heureuſement trouvé une
lettre à fos pieds : le hazard
pluſtoſt que la curiofité
la luy avoit fait ramaf
58 MERCURE
fer , un moment avant qu'il
s'apperceut des foins extreſmes
que prenoient trois
hommes pour la chercher :
la curioſité luy fit alors un
motifd'intereſt de cet effet
du hazard ; il s'éloigna des
gens dont il avoit remarqué
l'inquiétude , il ſe tira de la
foule , & dans un lieu plus
fombre & plus écarté , il
lut enfin cette lettre , qui
eſtoit , autant que je peux
m'en ſouvenir , conceuë ,
à peu prés , en ces termes.
Quelquesjustes mesures que
nous ayons priſes , quoy que mon
GALANT. رو
Carroffe & vos Cavaliers ne
foient qu'àcent pas d'icy , il n'y
aura pas d'apparence de réuffir
fi vous attendez que le retour
du jour nous ofte les moyens de
profiter du défordre de la nuit :
quelque claire que ſoit celle-cy ,
elle n'a qu'une lumiére empruntée
dont le ſoleil que j'apprenhende
plus que la mort
bien toſt diſſipper la clarté; ainfi
hatez vous de meſuivre , &ne
me perdez pas de veuë : je vais
déſoler Pelagie par ma préfen--
ce: dés qu'elle me verra , je ne
doutepas qu'elle ne cherche à me
fuir; mais je m'y prendray de
, va
60 MERCURE
façon ,que tous les pas qu'ells
fera , la conduiront dans nostre
embuscade.
La lecture de ce billet
eſtonna fort Mr le Duc ...
quiheureuſement connoiffoit
aſſez la belle veuve pour
s'intereffer parfaitement
dans tout ce qui la regardoit
; d'ailleurs le cavalier
françois qui eſtoit l'amant
declaré de la Dame , eſtoit
ſon amy particulier : ainſi il
priatout ce qu'il putraſſembler
de gens de ſa connoifſance
de l'aider à chercher
Pelagie avant qu'elle peuſt
GALANT. 61
eftre expoſée à courir les
moindres riſques d'une pareille
avanture. Il n'y avoit
pas de tempsà perdre , auſſi
n'en perd - il pas ; il fut par
tout où il creut la pouvoir
trouver , enfin aprés bien
des pas inutiles , il rencontra
ſon ami , qui ne venoit
de quitter ces deux Dames
que pour aller leur chercher
quelques rafraichif
ſements . Il est bien maintenant
queſtion de rafraif
chiſſements pour vos Dames
, luy dit le Duc , en luy
donnant la lettre qu'il ve
62 MERCURE
noit de lire , tenez , liſez, &
dites - moy ſi vous connoifſez
cette écriture , & à quoy
l'on peut à preſent vous eftre
utile. Monfieur le Duc ,
reprit le cavalier,je connois
le caractere du Comte Piof
Ki, c'eſt aſſeurement luy qui
aécrit ce billet ; mais il n'eſt
pas encore maiſtre de Pelagie
, que j'ay laiſſée avec
Madame Dormont à vingt
pas d'icy , entre les mains
d'un officier du Roy, qui eſt
mon amy , & qui , à leur
confideration , autant qu'à
la mienne , les a obligeamGALANT
. 63
ment placées dans un endroit
où elles ſont fort à leur
aife ; ainſi je ne crains rien
de ce coſté- là ; mais je voudrois
bien voir le Comte , &
l'équipage qu'il deſtine à
cet enlevement. Ne faites
point de folie icy , mon
amy , luy dit le Duc , aſſeurez
- vous ſeulement de quelques
perſonnes de voſtre
connoiſſance ſur qui vous
puiffiez compter : je vous
offre ces Meſſieurs que vous
voyez avec moy , raſſem.
blez- les autour de vos Dames
, & mettez - les ſage
64 MERCURE
ment à couvert des inſultes
de cet extravagant : fi je
n'avois pas quelques affaires
confiderables ailleurs ,
je ne vous quitterois que
certain du fuccez de vos
précautions.
Vi
LeDuc ſe retira alors vers
un boſquet où d'autres intereſts
l'appelloient,& laifſa
ainſi le cavalier françois
avec ſes amis ,à qui il montra
l'endroit où il avoit remis
ſa maiſtreſſe entre les
mains de l'officier qui s'eftoit
chargé du ſoin de la
placer commodément ; cependant
GALANT. 65
pendant il fut de ſon coſté
à la découverte de ſon ri.
val , qu'aprés bien des détours
, il rencontra enfin à
quatre pas du boſquet dont
jay parlé , &dont il ſe ſepara
comme je l'ay dit . Neanmoins
quelque ſatisfaction
qu'il ſentit du plaifir de retrouver
ſes Dames , il leur
demanda , aprés leur avoir
conté l'hiſtoire de ce qu'il
venoit de luy arriver , par
quel haſard elles ſe trouvoient
ſi loin du lieu où il
les avoit laiſſées. Apeine ,
luy dit Pelagie , nous vous
May 1714. F
66 MERCURE
avons perdu de veuë , que le
Comte Pioski eſt venu s'affeoir
à coſté de moy , aux
dépens d'un jeune homme
timide , que ſon air brufque
& fon étalage magnifique
ont engagé à luy ceder
la place qu'il occupoit.
Ses diſcours m'ont d'abord
fi cruellement ennuyée,que
mortellement fatiguée de
les entendre ,j'ay priéMadame
de me donner le bras,
pour m'aider à me tirer des
mains de cet imprudent ; le
monde , la foulle , & les
détours m'ont derobé la
GALANT. 67
connoiſſance des pas & des
efforts que fans doute il a
faits pour nous ſuivre , &
accablée de ſommeil &
d'ennuy, je me ſuis heureuſement
ſauvée dans ce bofquet
, ſans m'aviſer ſeulement
de fonger qu'il euſt
pû nous y voir entrer ; mais
quelque peril que j'aye couru
, je ſuis bien aiſe que fon
inſolence n'ait pas plus éclaté
contre vous , que fes
deſſeins contre moy , & je
vous demande en grace de
prévenir ſagement , & par
les voyesde ladouceur,tou-
tes les ſuites facheuſes que
ſon deſeſpoir & voſtre demeſlé
pourroient avoir. Il
n'y a plus maintenant rien
à craindre , il fait grand
jour , le chemin de Verſailles
à Paris eſt plein de monde
, & vous avez icy un
grand nombre de vos amis ,
ainſi nous pouvons retourner
à la ville fans danger.
Le cavalier promit à la
belle Pelagie de luy tenir
tout ce qu'elle voulut exiger
de ſes promeſſes , & fes
conditions acceptées , illamena
juſqu'à fon carroffe,
GALANT
69
où il prit ſa place , pendant
que quatre de ſes amis ſe
diſpoſerent à le ſuivre dans
le leur.
1
Il n'eut pas plutoſt remis
les Dames chez elles , &
quitté ſes amis , qu'en entrant
chez luy , un gentila
homme luy fie preſent du
billet que voicy.
Les plus heureux Amants
ceſſeroient de l'estre autant qu'ils
ſe l'imaginent , s'ils ne rencon
troient jamais d'obstacle à leur
bonheur je m'intereſſe affez au
voſtre , pour vousyfaire trouver
des difficultez qui ne vous
70
MERCURE
establiront une felicitéparfaite,
qu'aux prix de tout lefangde
Pioski. Le Gentilhomme que
je vous envoye vous expliquera
le reſte de mes intentions.
naypas
Affoyez-vous donc, Monſieur
, luy dit froidement le
cavalier françois ,& prenez
la peine de m'apprendre les
intentions de Monfieur le
Comte Pioski . Je n'ay
beſoin de ſiege , Monfieur ,
luy répondit ſur le meſme
ton , le gentilhomme Polonois
, & je n'ay que deux
mots à vous dire. Vous eſtes
l'heureux rival de Monfieur
GALANT.
le Comte qui n'eſt pas encore
accouſtumé à de telles
préferences , il eſt ſi jaloux
qu'il veut vous tuer , & que
je le veux auſſi , il vous attend
maintenant derriere
l'Obſervatoire ; ainſi prenez
, s'il vous plaiſt , un ſecond
comme moy , qui ait
aſſez de vigueur pour m'amuſer
, pendant que vous
aurez l'honneur de vous és
ggoorrggeerreennſſeemmbbllee.
Je ne ſçay ſi le françois ſe
ſouvint, ou ne ſe ſouvint pas
alors de tout ce qu'il avoit
promis à ſa maiſtreſſe , mais
72 MERCURE
voicy à bon compte lecas
qu'il en fit.
Il appella ſon valet de
chambre , qui estoit un
grand garçon de bonne vo
lonté , il luy demanda s'il
vouloit eſtre de la partie ,
ce qu'il accepta en riant,
Aufſi - toft il dit au gentilhomme,
Monfieur leComte
eſt genereux , vous eſtes
brave, voicy voſtre homme,
& je ſuis le ſien Mais Monfieur
eft- il noble , reprit le
gentilhomme. Le valet de
chambre , Eſpagnol de nation,
piqué de cette demande
GALANT .
73
de, luy répondit fierement
ſur le champ , & en ſon langage
, avec une ſaillie romaneſque
, Quienes tu hombre
? voto a San Juan. Viejo
Chriftiano estoy , hombre blanco
,y noble como el Rey Ce que
ſon maiſtre naiſtre expliqua au Polonois
en ces termes . Il
vous demande qui vous eftes
vous mesme , & il vous
jure qu'il eſt vieux Chreftien
,homme blanc , & noble
comme le Roy. Soit ,
reprit le gentilhomme,marchons.
Ces trois braves furent
ainſi grand train au
May 1714. G
74 MERCURE
rendez vous , où ils trouverent
le Comte qui commençoit
à s'ennuyer. Aprés
le falut accouſtumé , ils mirent
tous quatre l'épée àla
main. Pioski fit en vain des
merveilles , il avoit desja
perdu beaucoup de fang ,
lang,
lorſqu'heureuſement ſon épée
ſe caſſa; le gentilhomme
fut le plus maltraité,l'Ef
pagnol ſe battit comme un
lion ,& le combat finit.
Cependant le Comte
Pioski, qui , à ces violences
prés , eftoit entout un
homme fort raiſonnable ,
GALANT. 75
eut tant de regret des extravagances
que cette derniere
paffion venoit de luy
faire faire , que la pieté étouffant
dans ſon coeur tous
les interêts du monde , il
fut s'enfermer pour le reſte
de ſa vie dans la retraitte
la plus fameuſe qui ſoit en
France , & la plus connuë
par l'auſterité de ſes maximes.
Le Cavalier françois
foupira encore quelques
temps , & enfin il devint
l'heureux & digne Epoux
d'une des plus charmantes
femmes du monde.
Gij
76 MERCURE
4
Les mariages font une fi
grande époque dans les
hiſtoires , que c'eſt ordinairement
l'endroit par où
tous les Romans finiſſent ;
mais il n'en eſt pas de meſme
icy , & il ſemble juftement
qu'ils ne ſervent à
Madame Belzeſca que de
degrés à la fortune , où ſon
bonheur & ſes vertus l'ont
amenée . Tout ce qui luy
arrive dans un engagement
qui établit communément
, ou qui doit du
moins establir pour les autres
femmes , une ſigrande
GALANT. 77
tranquilité , qu'on diroit
que l'hymen n'eſt propre ,
qu'à faire oublier juſqu'à
leur nom , eſt au contraire
pour celle cy , la baze de
ſes avantures. L'eſtalage de
ſes charmes , & le bruit de
ſabeauté ne ſont point enſevelis
dans les embraffemens
d'un eſpoux : heureuſe
maiſtreſſe d'un mary
tendre & complaiſant , &
moins eſpouſe qu'amante
infiniment aimée , comme
ſi tous les incidens du monde
ne ſe raſſembloient que
pour contribuer à luy faire
Gij
78 MERCURE
des jours heureux , innocement
& naturellement
attachée à ſes devoirs , l'amour
enchainé , à ſa fuite
ne prend pour ferrer tous
les noeuds qui l'uniſſent à
ſon eſpoux , que les formes
les plus aimables , & les
douceurs du mariage ne ſe
maſquent point pour elle
ſous les traits d'un mary.
Enfin elle joüit pendant
neuf ou dix ans , au milieu
du monde , & de ſes adorateurs
, du repos le plus
doux que l'amour ait jamais
accordé aux plus heureux
GALAN 79
Amants ; mais la mort jalouſe
de ſa fecilité luy ra
vit impitoyablement le plus
cher objet de ſa tendreſſe:
que de cris ! que de ge.
miſſements ! que de larmes
! cependant tant de
mains ſe préſentent pour
efluyer ſes pleurs , que , le
temps ,la raiſon , & la néceſſité,
aprés avoir multiplié
ſes reflexions
nent enfin au ſecours de ſa
,
viendouleur
; mais il ne luy reſte
d'un eſpoux fi regretté ,
qu'une aimable fille , que la
mort la menace encore de
(
G iiij
80 MERCURE
luy ravir , ſur le tombeaude
fon pere. Que de nouvel.
les allarmes ! que de mortelles
frayeurs ? elle tombe
dans un eſtat de langueur
qui fait preſque deſeſperer
de ſa vie. Il n'eſt point de
ſaints qu'on n'invoque ,
point de voeux qu'on ne faf
ſe, elle en fait elle-meſme
pour fon enfant , & promet
enfin de porter un tableau
magnifique à Noftre-
Dame de Lorette ſi ſa
fille en réchappe. A l'inftant,
ſoit qu'un ſuccés favo
rable recompenfat ſon zele
GALANT. 81
&fa piete , ou qu'il fur
temps que les remedes operaſſent
à la fin plus effica
cement qu'ils n'avoient fait
encore , ſa maladie diminua
preſque à veuë d'oeil ,
en tros jours l'enfant fut
hors de danger , & au bout
de neufentierement guery.
Elle reſtaencore , en attendant
le retour du printemps
, prés de fix mois à
Paris , pendant lesquels elle
s'arrangea pour l'execution
de ſon voeu. Ce temps expiré
, accompagnée de ſon
fils & de ſa fille , d'une Da82
1 MERCURE
me de ſes amis , de deux
femmes de chambre , de
deux Cavaliers , & de quatre
valets , elle prit la route de
Lyon , d'où aprés avoir
paffé Grenoble , le mont
du l'An, Briançon , le mont
Geneve & Suze , elle ſe rendit
à Turin , où elle ſéjourna
trois ſemaines avec ſa
compagnie qui ſe déffit
comme elle de tout ſon équipage,
dans cette Ville,
pour s'embarquer ſur le Po.
Elle vit en paſſant les Villes
de Cazal du Montferrat
,
d'Alexandrie , le Texin qui
GALANT. 83
1
,
paſſe à Pavie , Plaiſance ,
+ Cremone , Ferrare , & enfin
elle entra de nuit à Venife
avec la marée. Elle
deſcendit à une Auberge
moitié Allemande , &moitié
Françoiſe , & dont
l'enſeigne d'un coſté , ſur
le grand Canal , reprefente
les armes de France , &
de l'autre , fur la Place de
ES. Marc , les armes de l'Empire.
Elle reçut le lende
main à ſa toilette , comme
cela ſe pratique ordinairement
à Veniſe , avec tous
les Estrangers confidera
,
S
१
84 MERCURE
,
bles , des compliments en
proſe & en vers imprimez
à ſa loüange , fon amie
& les Cavaliers de ſa compagnie
en eurent auſſi leur
part. Ces galanteries couftent
communément , & au
moins quelques Ducats à
ceux à qui on les fait. Le
ſecond jour elle fut avec
tout fon monde ſaluer Mr
l'Ambaſſadeur qui fut
d'autant plus charmé du
plaifir de voir une ſi aimable
femme , que , quoy que
Venife ſoit une Ville , où
lesbeautez ne ſont pas car
,
GALANT. 85
Π
S
res , il n'y en avoit pas encore
vû une , faite comme
- celle dont il recevoit la viſite.
La bonne chere , les,
Spectacles , les promena-
✓ des ſur la mer& ſur la coſte,
avec le Jeu, furent les plaifirs
dont il la regala , pen-
↓ dant les quinzejours qu'elle
y reſta. Il luy fitvoir dans ſa
Gondole , la pompeuſeCeremonie
du Bucentaure qui
ſe celebre tous les ans dans
cette Ville le jour de l'Afcenfion
, avec toute la magnificence
imaginable.
Je nedoute pas que bien
3
86 MERCURE
des gens neſcachent à peu
prés ce que c'eſt que cette
feſte; mais j'auray occafion
dans une autre hiſtoire d'en
faire une deſcription meſlée
de circonstances ſi agreables
que la varieté des évenemensque
je raconteray,
pourra intereſſer mes lecteurs
au recit d'une ceremonie
dont il ignore peuteſtre
les détails.
Enfin noſtre belle veuve
prit congé de Mr l'Ambaffadeur
, & le lendemain elle
s'embarqua ſur un petit baſtiment
, qui en trois jours
GALANT. 87
لا
}}
la rendit à Lorette , où elle
accomplit avec beaucoup
de zele & de religion , le
voeu qu'elle avoit fait à Pa-
1ris. Après avoir pieuſement
fatisfait à ce devoir indifpenſable
, dégouſtée des perils
, & ennuyée des fatigues
de la mer , elle refolut
de traverſer toute l'Italie
par terre , avant de retourner
en France .
!
Il n'y avoit pas fi loin de
Lorette à Rome pour n'y
pas faire untour,& je croy
a que pour tous les voyageurs,
cinquante lieuës plus ou
88 MERCURE
moins , ne ſont qu'une bagatelle
, lorſqu'il s'agit de
voir cette capitale du mõde.
- Il faiſoit alors ſi chaud ,
qu'il eſtoit fort difficile de
faire beaucoup de chemin
par jour ; mais lorſqu'on eſt
en bonne compagnie , &
de belle humeur , rien n'ennuye
moins que les ſéjours
charmants qu'ontrouve en
Italie.
Je ne prétens pas en faire
icy un brillant tableau,pour
enchanter mes lecteurs de
la beauté de ce climat ; tant
de voyageurs en ont parlé ;
Miffon
GALANT. 89
1
Miſſon l'a ſi bien épluché,
&cette terre eſt ſi fertile
en avantures , que les hiftoires
galantes que j'en raconteray
dorenavant ſuffiront
pour inſtruire d'une
maniere peut- eftre plus agreable
que celle dont ſe
ſont ſervis les écrivains qui
en ont fait d'amples relations
, ceux qui ſe conten
teront du Mercure pour
connoiſtre aſſez particuliement
les moeurs & le plan
de ce pays . Ainſi je renonceray
pour aujourd'huy au
détail des lieux que noftre
May 1714.
H
90 MERCURE
belle veuve vit , avant d'entrer
à Rome , parce que non
ſeulement il ne luy arriva
rien fur cette route qui puifſe
rendre intereſſants les cir
conſtances de ce voyage ,
mais encore parce que je ne
veux pas faire le geographe
malà propos . Le Capitole ,
le Vatican , le Chaſteau S.
Ange , le Colizée , la Place
dEſpagne, la Place Navonne
, l'Eglife S. Pierre , le
Pantheon , les Vignes , &
enfin tous les monuments
des Anciens , & les magnifiques
ouvrages des Moder
GALANT. 91
nes,dont cette ville eſt enrichie,
n'étalérent à ſes yeux
que ce que les voyageurs
lesplus indifferents peuvent
avoirveu comme elle ; mais
lorſque jetraitteray, comme
je l'ay dit,des incidens amufants
& raifonnables que
j'ay , pour y promener mes
lecteurs , j'eſpere que leur
curioſité ſatisfaite alors , les
dédommagera fuffifamment
de la remiſe & des
frais de leur voyage...
La conduite que tint à
Rome cette charmante veuve
, fut tres eſloignée de cel- :
Hij
92 MERCURE
le que nos Dames françoi
ſes y tiennent , lorſqu'avec
des graces moindres que les
fiennes , elles ſe promettent
d'y faire valoir juſqu'à leur
plus indifferent coup d'oeil.
Celle cy parcourut les Egliſes
,les Palais , les Places
& les Vignes en femme qui
ne veut plus d'avantures ;
mais elle comptoit fans for
hoſte, & l'amourn'avoit pas
figné le traité de l'arrangement
qu'elle s'eſtoit fait.
Ungentilhomme Italien
dela ſuite de l'Ambaſſadeur
de l'Empereur , qui avoir
GALANT. 93
veu par hafard une fois à la
Vigne Farneze , le viſage
admirable de noftre belle
veuve , fur ſi ſurpris de l'é
elat de tant de charmes ,
qu'il reſtacomme immobi
le , uniquement occupé dư
foin de la regarder. Elle
s'apperceut auffi- toft de fon
eſtonnement ; mais dans
Finſtant ſon voile qu'elle
laiſſa tomber, luy déroba la
veuë de cet objet de fon admiration.
L'Italien , loin de
fe rebuter de cet inconvenient
, réſolut de l'exami
ner juſqu'à ce qu'il ſceuſt ſa
94 MERCURE
ruë , fa demeure , ſon pays ,
fes deſſeins , & fon nom.
Dés qu'il ſe fut ſuffiſamment
inſtruit de tout ce
qu'il voulut apprendre ;
aprés avoir paffé& repaffé
cent fois devant ſa maiſon ,
ſans qu'on payaſt ſes ſoins
de la moindre courtoiſie,&
pleinement convaincu qu'il
n'y avoit auprés de cette
belle veuve , nulle bonne
fortune à eſperer pour luy ,
il conclut qu'il pouvoit regaler
Monfieur l'Ambaſſadeur
du merite de ſa découverte.
A
GALANT.951
En effet un jour que l'Ambaſſadeur
de Pologne difnoit
chez ſon maiſtre , voyant
vers la fin du repas,que
la compagnie entroit en
belle humeur , & que la
- converſation rouloit de
bonne grace ſur le chapitre
- des femmes ; Meſſieurs , dit-
- il , quelques ſentimens
qu'elles vous ayent fait
prendre pour elles , je ſuis
ſeur , que ſans vous embar-
-raſſer de vouloir connoiſtre
leurs coeurs plutoſt que
leurs perſonnes,vous renonceriez
à toutes les précau
96 MERCURE
tions du monde , ſi vous
aviez vû , une ſeule fois ,
une Dame que je n'ay vûë
qu'un inſtant. Je me promenois
, ily a quinze jours
àla Vigne Farneze , elle s'y
promenoit auſſi ; mais je
vous avoue que je fus ſaiſi
d'étonnement,en la voyant,
& que je luy trouvay cant
de charmes , un ſi grand
air ,& un ſi beau viſage
que je jurerois volontiers ,
quoy que cette Ville fourmille
en beautés , qu'il n'y
a rienà Rome qui ſoit beau
comme elle. Ces Miniſtres
1
Eſtrangers
GALANT. 97
5
Eſtrangers s'échaufférent
ſur le recit du Gentilhomme
Italien , celuy de Pologne
ſur tout , ſentitun mou.
vement de curioſité fi
prompt , qu'il luy demanda
d'un air empreſſé , s'il n'a
voit pas eſté tenté de ſur
vre une ſibelle femme ,&
s'il ne sçavoit pas où elle
demeuroit. Ouy, Monfieur,
luy répondit- il , je ſçay ſon
nom , ſa demeure & les
motifs de ſon voyage à
Rome, mais je n'en ſuis
pas plus avancé pour cela ,
&je croy au contraire que
May 1714.
I
98 MERCURE
mes empreſſements l'ont
tellement inquiétée, qu'elle
ne paroiſt plus aux Eglifes ,
ny aux promenades , de
puis qu'elle s'eſt apperçuë
du ſoin que je prenois d'éxaminer
ſes démarches .
Voila une fiere beauté , dit
l'Ambafladeur de l'Empereur
, & addreſſant la parole
en riant à celuy de Pologne
, Monfieur , continuast-
il , n'ayons pas le démentide
cette découverte ,
& connoiffons à quelque
prix que ce ſoit , cette belle THEQUE DEL
BIBLI
< YON
EVILL
1893*
J'y confens reTHEQUE
DA
5,
20
LY
GALANTE
18
E
VILL
prit l'autre , férieuſent
& je ſuis fort trompé fi
dans peu de jours , je ne
vous en dis des nouvelles.
Ils auroient volontiers
bû desja à la ſanté de l'inconnue
, ſi , une Eminence
qu'on venoit d'annoncer ,
ne les avoit pas arrachez de
la table , où le vin & l'amour
commençoient
à les 0
mettre en train de dire de
de
belles choses .
e Le Gentilhomme qui
ue avoit ſi à propos mis la belle
Veuve ſur le tapis , fut au
devant du Cardinal , que
I ij
100 MERCURE
fon Maiſtre fut recevoir
juſqu'au pprreemmiieerr degré de
fon Eſcalier , & en meſme
tems il reconduifit l'Ambas
ſadeur de Pologne juſqu'à
fon Carrofle. Ce Miniſtrele
questionnaſi bien , chemin
faiſant , qu'il retourna chez
luy , parfaitement inftruit
de tout ce qu'il vouloit ſcavor.
Des qu'il fut à fon
Appartement , il appella un
Valet de chambre , à qui il
avoit ſouvent fait de pareilles
confidences & aprés
luy avoir avoüé qu'il eſtoit
desja , fur un ſimple recit ,
GALANT. 101
1
:
1
éperduëment amoureux
d'un objet qu'il n'avoit jamais
vû , il luy demanda
s'il croyoit pouvoir l'aider
de ſes conſeils de fon zele
& de ſa difcretion , dans
Tembarras où il ſe trouvoit.
Je feray , luy dit le Valet
de chambre tout ce
qu'il vous plaira ; mma.is puifque
vous me permettez de
vous donner des confeils ,
je vous avoüeray franche-
FL
د
ment , que je pennſiee que
le
portrait que vous me faites,
de la conduitte ſage & retirée
que tient la perſonne
Inj 1
102 MERCURE
dont vous me parlez , eft
fouvent le voile dont Te
fervent les plus grandes
avanturieres , pour attrapper
de meilleures dupes. Ta
pénétration eſt inutile icy ,
luy répondit l'Ambaffadeur
: tu ſçais desja ſon nom
& ſa maiſon , informe toy
ſeulement fi ce qu'on m'en
adit eft véritable ; nous
verrons aprés cela le parti
que nous aurons à prendre .
Le Confident ſe met en
campagne , il louë une
chambre dans le voiſinage
de la belle Veuveil fait
>
GALANT. 103
1
1
0
e
it
connoiſſance avec un de ſes
domeſtiques , qui le met
en liaiſon avec la femme
de chambre de la Dame
qu'il veut connoiſtre : enfin
il la voit , & il apprend
qu'elle va tous les jours à
la meſſe , entre ſept & huit
heures du matin , à l'Eglife
de ſainte Cecile. Il avertit
auffi toſt ſon Maiſtre de
tout ce qui ſe paſſe ; ce Miniſtre
ne manque point de
ſe rendre ſans ſuite à cette
Eglife , & de ſe placer auprés
de cette beauté qui n'a
garde de ſe meffier à pareil
I iiij
104 MERCURE
le heure , ni de fes char
mes , ni des ſoins , ni de la
dévotion du perſonnage
quiles adore. לכ
Cependant l'allarme fonne
,& le Valet de chambre
apprend avec bien de la
douleur , que la Damedont
ſon Maiſtre eſt épris , commence
à s'ennuyer à Rome,
&qu'enfin incertaine ſi elle
retournera en France par
Genes,où ſi elle repaſſerales
Alpes, elle veutabſolument
eſtre hors de l'Italie , avant
le retour de la mauvaiſe
faifon. A l'inſtant l'AmbafGALANT.
1ος
t
!
es
16
10
le
f
1
Tadeur informé , & defefperé
de cette nouvelles ſe
détermine à luy eſcrire en
tremblant , la lettre que
voicy.
N'eſtes vous venue àRome,
Madame , que pour y violer
le droit des gens ; fi les franchiſes
les Privileges des
Ambaffadeurs font icy de vostre
Domaine , pourquoy vous dé-
Domaine
goustez - vous du plaisir d'en
joüir plus long-temps ? Fapprends
que vous avez réfolu de
partir dans buit jours. Ab! fi
rienne peut rompre ou differer
ce funeste voyage, rende-z moy
106 MERCURE
donc ma liberté que vos yeux
m'ont ravie , & au milieu de
la Capitale du monde. Ne me
laiſſez pas , en me fuyant,la
malheureuſe victime de l'amour
que vous m'avez donné. Permettez
moy bien pluſtoſt de vous
offrir en ces lieux tout ce qui
dépend de moy , & en reeevant
ma premiere visite , recevez en
mesme temps , si vous avez
quclques sentiments d'humanité,
la fortune , le coeur , & la
main de
BELZESKI.
Le Valet de Chambre
fut chargé du ſoin de luy
rendre cette lettre à elle
meſme au nom de ſon Maître
, d'examiner tous les
mouvemens de fon viſage ,
&de lui demander un mot
de réponſe.
La Dame fut aſſez
émeuë à la vûë de ce billet ,
cependant elle ſe remit aifément
de ce petit embarras
, & aprés avoir regardé
d'un air qui n'avoit rien
de déſobligeant , le porteur
de la lettre , qu'elle
avoit vûë vingt fois ſans reflexion
, elle luy dit , ce
108 MERCURE
?
tour eſt ſans doute de voſtre
façon Monfieur mais
Monfieur l'Ambaſſadeur
qui vous envoye , ne vous
en ſera guere plus obligé,
quoyque vous ne l'ayez pas
mal ſervi. Attendez icy un
moment, je vais paſſer dans
mon Cabinet , & vous en
voyer la réponſe que vous
me demandez pour luy :
Auſſi-toſt elle le quitta pour
aller efcrire ces mors. S
Fe ne sçay dequoy je ſuis
coupable à vos yeux, Monfieur,
mais je sçay bien que je ne re
ponds que par bienfeance à l'hon-
>
BAGALAN 109
0
neur que vous me faites ,
aux avantages que vous me proposez
: & je prévoy que la
viſite que vous me rendrez , si
vous voulez , vous fera auffi
peu utile qu'à moy , puisque
rien ne peut changer la réfolution
que j'ay priſe de repaffer
inceſſamment en France.
Le Polonnois éperduëment
amoureux ( car il y
avoit de la fatalité pour elle,
à eſtre aimée des gens de ce
pays ) le Polonnois , dis- je ,
donna à tous les termes de
ce billet , qu'il expliqua en
ſa faveur, un tourde confo110
MERCURE
lation que la Dame n'avoit
peut- eſtre pas eu l'intention
d'y mettre; d'ailleurs il eſtoit
parfaitementbien fait , tres
grand ſeigneur , fort riche ,
&magnifique entout. Les
hommes ſe connoiſſent , il
n'y a pas tantde mal à cela.
Celui- cy ſçavoit aſſez ſe
rendrejustice , mais heureuſement
il ne s'en faifoit pas
trop à croire , quoy qu'il
ſentit tous ſes avantages.....
Vers les * vingt& une ou
vingt- deux heures , il ſe ren-
**C'eſt en eſté à peu prés vers les fix heures
du ſoir,ſelon noftre façon de compter.
GALANT. III
コ
el
dit au logis de la belle veuve
, qu'il trouva dans undeshabillé
charmant & modeſte
, mille fois plusaimable
qu'elle ne luy avoit jamais
paru .
Que vous eſtes , Madame ,
luy dit- il , transporté du
plafir de la voir , au deſſus
des hommages que je vous
rends ; mais en verité je vais
eſtre le plus malheureux des
hommes , fi vous ne vous
rendez pas vous meſme aux
offres que je vous fais Nous
nenous connonfons n'y l'un
ny l'autre , Monfieur , luy
70%
112 MERCURE
11
répondit - elle , & vous me
propoſez d'abord des chofes
dont nous ne pourrions
peut eſtre que nous repentir
tousdeux, mais entrons , s'il
vousplaît,dansun plus grád
détail,& commençons par
examiner , i la majeſté de
voſtre caractere s'accorde
bien avec les ſaillies de cette
paffion ; d'ailleurs n'eſt il
pas ordinaire , & vrayſemblable
qu'un feu ſi prompt
às'allumer, n'en eſt que plus
prompt à s'éteindre. Enfin
ſupposé que je voulutſe encorem'engager
ſous les loix
de :
GALANT. 113
1
1
del'hymen, ſur quel fondement,
àmoins queje nem'a.
veuglaſſe de l'eſpoir de vos
promeſſes, pourrois- je compter
que vous me tiendrez
dans un certain tems ce que
vous me propoſez aujourd'huy
. Ah ! Madame , reprit
ilavecchaleur, donnez
aujourd huy voſtre confentement
à mon amour , &
demain je vous donne la
main. Par quelles loix voulez
vous authoriſer des maximes
de connoiſſance &
d'habitude , ſur des ſujers où
le coeur doit décider tout
114 MERCURE
,
ſeul ; n'y a t'il point dans le
monde des mouvements de
ſympathie pour vous , comme
pour nous , & quelle
bonne raiſon peut vous dif
penſerde faire pour nous
enun jour,la moitié du chemin
que vos charmes nous
font faire en un inſtant. Je
ſuis perfuadé que vous avez
trop d'eſprit, pour regarder
mal à propos ces chimeriques
précautions , comme
des principes de vertu , &
vous eſtes trop belle pour
douter un moment de la
conſtante ardeur des feux
GALANT 115
mt
&
רש
la
גנ
que vous allumez. Cependant
ſi vos ſcrupules s'effrayent
de la vivacité de ma
propoſition,je vous demande
du moins quinze jours
de grace , avant de vous
prier de vous déterminer en
ma faveur ; & j'eſpere ( fi
vos yeux n'ont point de peine
à s'accouſtumer à me
voir pendant le temps que
j'exige de voſtre complaiſance
) que les ſentiments
de voſtre coeur ne tarderont
pas à répondre aux tendres
& fidelles intentions du
mien. Ne me preſſez pas da
Kij
116 MERCURE
vantage à preſent , Monfieur
, luy dit elle,& laiſſez
à mes reflexions la liberté
d'examiner les circonſtancesde
voſtre propofition.
Cette réponſe finit une
conteftation qui alloit inſenſiblement
devenir tres.
intereſſante pour l'un &
pour l'autre.
Monfieur l'Ambaſſadeur
ſe leva , & prit congé de la
belle veuve aprés avoir receu
d'elle la permiffion de
retourner la voir , lorſqu'il
le jugeroit à propos.
Ce miniſtre rentra chez
GALANT 117
-
luy , ravi d'avoir mis ſes affaires
en ſibon train , & le
lendemain au matin il écrivit
ce billet à cette Dame ,
dont il avoit abſolument refolu
la conqueſte.
Le temps que je vous ay don-
- né depuis hier , Madame , ne
fuffit-il pas pour vous tirer de
toutes vos incertitudes , s'il ne
ſuffit pas , je vais estre auffi indulgent
que vous estes aimable,
je veux bien pour vous efpargner
la peine de m'eſcrire vos
Sentiments , vous accorder, jufqu'à
ce soir , que j'iray appren
dre de vostre propre bouche , le
1
118 MERCURE
réſultat de vos reflexions.
Elles eſtoient desja faites
ces réflexions favorables à
T'heureux Polonois , & pendant
toute la nuit, cette belleveuve
n'avoit pû ſe refufer
la fatisfaction de convenir
en elle-meſme , qu'elle
meritoit bien le rang d'Ambaſſadrice.
Aufſfi luy fut-il
encore offert le meſme jour
avec des tranſports fi touchants&
fi vifs,qu'enfin elle
ne fit qu'une foible deffenſe
, avant de conſentir à la
propoſition de Mr l'Ambaffadeur.
En un mot toutes
GALANT. 119
!
les conventions faites & accordées
, entre elle & fon
amant,ſon voyage de France
fut rompu , & fon mariage
conclu , & celebré ſecretement
enquinze jours.
Legrandtheatredu monde
va maintenant eſtre le
champ où va paroiſtre dans
toute fon eſtenduë , l'excellence
du merite & du bon
efprit deMadame Belzeſca.
Elle reste encore preſque
inconnuë juſqu'à la declararion
de ſon hymen , qui
n'eſt pas plutoſt rendu public
, qu'elle ſe montre auſſi
120 MERCURE
4
éclairée dans les delicates
affaires de fon mary , que
fielle avoit toute la vie
eſte Ambaſſadrice,лэ тод
Les Miniſtres Eſtrangers,
les Prélats , les Eminences
tout rend hommage à fes
lumiéres. De concert aveo
fon Epoux , ſa pénerrap
tion abbrege , addoucit &
leve toutes les difficultez
de ſa commiffion : enfin
elle l'aide à ſortir de Rome
(ſous le bon plaifir de fon
Maſtre ) fatisfait & glorieux
du ſuccés de fonAm
baffade.altera teemal
هللا
GALANT. 121
Elle fut obligée pour le
bien de ſes affaires de repaſſer
en France avec ſon
mary : elle n'y ſéjourna que
trois ou quatre mois , de là
elle alla à Amſterdam , &
à la Haye , où elle s'embarqua
pour ſe rendre à Dant-
ZIK d'où elle fut à Varſovie
où elle jouit pendant
vingt-cinq ans , avec tous
les agréments imaginables,
de lagrande fortune , & de
la tendreſſe de ſon Epoux ,
qui fut enfin malheureufement
bleſſe à la Chaffe
d'un coup dont il mourut
May 1714.
L
127
MERCURE 122
quatreJours
Tavoir
apres la
Э
receu d'une façon toute
extraordinaire .
Rien n'eſt plus noble &
plus magnifique , que la
220
20
manière dont les Grands
Seigneurs vont à la Chaſſe
en Pologne. Ils menent ordinairement
avec eux , un
fi grand nombre deDomeftiques
, de Chevaux , & de
Chiens, que leur Equipage
reſſemble pluſtoſt à un gros
détachement de troupes reglées
, qu'à une compagnie
de gens aſſemblez , pour le
plaisir de faire la guerre à
GALANT. 123
+
20
وا
LEKCI }
des animaux. Cette précaution
me paroilt fort
raisonnable , & je trouve
qu'ils font parfaitement
bien de proportionner le
nombredes combatrants au
3
21091
nombre & à la fureur des
monſtres qu'ils attaquent.
Un jour enfin, Monfieur
Belzeſki , dans une de fes
redoutables Chaffes, fe laifſa
emporter par ſon cheval ,
à la pourſuite d'un des plus
fiers Sangliers qu'on cuſt
encore vû dans la Foreſt où
il chaſſoit alors. Le cheval
anime paſſa ſur le corps de
124 MERCURE
261
ce terrible animal , & s'abbatit
en meſme temps , à
quatre pas de luy. Monfieur
Belzeſki ſe dégagea, auflitoſt
adroitement des efriers
, avant que le Monf
tre l'attaquaft ; mais ils eftoient
trop prés l'un de Laura
tre & le Sanglier desia
bleffé trop furieux , pour ne
pas ſe meſurer
44
encore con-b
tre l'ennemi qui l'attendoit :
ainſi plein de rage , il voulut
ſe llaanncceerr fur luy , mais
dans le moment ſon ennemi
intrepide & prudent lui
abbattit la teſte d'un coup
GALANT.
1:5
ſi juſte , & fi vigoureux, que
fon fabre paffa entre le col
& le tronc de an
11
avec tant de viteſſe , que le
mouvement Violent avec
lequel il retira fon bras
entraîna fon 21911
corps , de ma
niere qu'un des pieds luy
manquant , il tomba à la
renverſe ; mais fi malheu
reuſement, qu'il alla ſe fen.
dre la tefte fur une pierfe
qui ſe trouva derriere luy.
Dans ce fatal inſtanttous
les autres Chaſſeurs arrivérent
, & emporterent en
pleurant , le Corps de leur
THAJAD
126 MERCURE
infortune maiſtre , qui vécu
encore quatre jours
qu'il employa à donner à
Madame Belzeſca les dernieres
& les plus fortes
preuves de ſon amour , if
la fiitt ſon heritiere univerſelle
, & enfin il mourut
adoré de ſa femme , & infiniment
regretté de tout
le monde.
il
Il y a plus de fix ans que
Madame Belzeſca pleure
ſa perte , malgré tous les
foins que les plus grands
Seigneurs , les Princes , &
mefme les Roys , ont pris
GALANT. 127
pour la conſoler. Enfin elle
eft depuis long-temps l'amie
inſéparable de Mada
infeparable
me la Palatine de ... elle a
maintenant foixante ans
paflez , & je puis affeurer
qu'elle est encore plus aimée
; & plus reſpectée ,
qu'elle ne le fut peut eftre
jamais , dans le plus grand
efclat de fa jeuneffe. On
parle meſme de la remarier
aun homme d'une fi grande
distinction
, que , ce
bruit , quelque fuite qu'il
ait eft toutccee qu'on en peut
dire de plus avantageux ,
Lin
128 MERCURE
pour faire un parfait éloge
de ſon mérite , & de fes
vertusaises
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Résumé : HISTOIRE nouvelle.
La peste à Varsovie pousse de nombreux habitants à fuir vers les campagnes. La Palatine et plusieurs dames de la haute société, dont Madame Belzesca, se réfugient à Dantzic, accueillies par le Marquis de Canop. Madame Belzesca, connue pour son charme malgré son âge avancé, a déjà eu trois maris et de nombreux amants tout en conservant une réputation irréprochable. Originaire de Touraine, elle est élevée secrètement après une prédiction d'un berger. À douze ans, elle est ramenée chez elle et devient l'objet de l'admiration locale. Pelagie, de son vrai nom, reçoit une éducation soignée à Tours et rencontre le Chevalier de Versan lors d'un sauvetage dramatique sur la Loire. Ils se marient et vivent cinq ans de bonheur avant de se séparer. Pelagie devient veuve et hérite de la fortune de son mari. Elle s'installe à Paris avec son fils et devient célèbre pour sa beauté et son charme. À Paris, Pelagie attire l'attention de nombreux nobles et étrangers, notamment pendant le séjour du roi Casimir en France. Sa maison devient un lieu de rencontre pour les personnes distinguées. Un seigneur polonais, épris de Pelagie, planifie son enlèvement mais est déjoué par le duc de... et le cavalier français, amant de Pelagie. Le comte Pioski, jaloux, tente de tuer le cavalier français lors d'un duel mais se blesse gravement et se retire dans un monastère. Madame Belzesca, veuve, traverse une période de deuil intense mais se rétablit grâce à des prières et des promesses religieuses. Elle entreprend un voyage à Lorette et visite des villes italiennes. À Rome, elle rencontre un gentilhomme italien ébloui par sa beauté mais reste réservée. L'ambassadeur polonais à Rome, épris de la veuve, la retrouve et obtient son consentement. Ils se marient secrètement et retournent en Pologne, où ils vivent heureux pendant vingt-cinq ans. L'ambassadeur est mortellement blessé lors d'une chasse au sanglier. Madame Belzesca pleure sa perte depuis plus de six ans et est devenue l'amie inséparable de Madame la Palatine. À soixante ans, elle est encore respectée et aimée, et on envisage de la remarier à un homme de grande distinction.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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36
p. 128-144
MORTS.
Début :
Messire Jean Jacques de Surbechk Lieutenant General [...]
Mots clefs :
Morts, Roi, Fille, Fils, Marquis, Parlement, Lieutenant, Armées, Comte, Veuve, Conseiller, Comte, Enfants
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS.
MORT SO
Meffire Jean Jacques de
Surbechk Lieutenant Ge.
neral des armées du Roy ,
Colonel d'un Regiment
Suiffe , & Chevalier de
l'Ordre Militaire de Saint
Loüis , mourut le 4. May.
Il eſtoit Suiffe & s'eſtoit attaché
au ſervice de la France
dés ſa jeuneſſe , il avoit
Epousé Marie Magdelaine
Chapelier , Soeur de feu
GALANTA 129
Claude Chapelier mort
Doyen de l'Eglife Colle
giale de S. Germain l'Au
xerrois , & fille de Henry
Chapelier Avocat General
de la Cour des Aydes , &
de Catherine Brice , il en
a laiffé pour fille Magde
laine Anne de Surbechk
marice le Fevrier 1708.
avec Charles Comte de Berenger
Colonel du Regi
ment de Bugey tué au fiége
de S. Venant le 24. Sep
tembre 1711. fils de Mr le
Comte de Guast Berenger
Lieutenant General des ar
mées du Roy.
:
130 MERCURE
Dame,Marguerite Pic
ques Veuve de , Mellire
François le Maye Confeil
ler au grandConfeil, mourut
fans enfans le 10. May,
elle efloit filled Olivier Picques
Ecuyer Secretaire, du
Roy ,& fon mary effoit
frere de Mrle Maye Confeiller
au Parlement , & fils
de François le Maye Con
ſeiller de la Cour des Aydes
, mort l'an 1677. d'u
ne Famille originaire de
Tours,
Meffire Jean Joſeph de
Montulé Conſeiller au ParGALANT.
In
lement , & Doyen de la
premiere des Requeſtes au
Palais , mourut le 10. May,
il eſtoit fils de François de
Montulé, Maire de la Ville
deNantes& Auditeur en la
Chambre des Comptes de
Bretagne,& de Marc Regnier
, & avoit pour frere
Antoine deMontulé Abbé,
mort depuis pluſieurs an
nées , & pour ſoeur Marie
Anne de Montulé mariée
Lan 1662. avec Gilles de
Boiſbaudry Seigneur de
Langan , il fut receu Con
ſeiller au Parlement de Pay
132 MERCURE
ris le 26. Juin 1671. & eſpous
fa en premiere nopce le
26. Juin 1672. Magdelaine
Charlot fille de Claude
Charlot Seigneur de Prince
Secretaire du Roy ,
d'Anne Aymeret de Ga
zeau , elle mourut fans enfans
, au mois de Juin 1674.
&il fe remaria avec Agnes
Bouvard fille de Michel
&1
06
Bouvard Seigneur de Fourqueux
Conſeiller au Parle
ment , & de Catherine
Leſné , & Soeur de Mrde
Fourqueux, Procureur Ge29b
neral de la Chambre desm
Jiey acului siдла эка
DOG GALANT5
-le.
Je
re
Comptes de ce dernier
mariage il a laiſſé pour en
fans , Auguſte Joſephide
Montulé, qui a embraſſé le
parti de l'Eglife & eft
Doyen de l'Egliſe de Beau- b
vais , & Jean Baptifte de
Montulé , reçû Conſeiller
au Parlement le 17.Mars,
3
Meſſire Estienne de laGal
ſte Mareſchal des camps &
armées du Roy , cy - devant
Lieutenant & Ayde Major
des Gardes de ſa Majesté ,
mourut le 13. May b
Dame Anne Pithou veu134
MERCURE
ve de Meffire Loüis Charles
de la Rochefoucault , Marquis
deMontendre, mourut
le 14. May. Elle estoit fille
de Pierre Pithou Conſeiller
au Parlement , & de Chreftienne
Loizel ,& mere de
Mr le Marquis de MontendreCapitaine
des Suiſſes de
feuMonſeigneur le Ducde
Berry , & de Mr le Comte
de Jarnac , voyez pour la famille
des Pithoux la genealogiequi
en eſt dreſſée dans
le Nobiliaire de Champagne
, dreſſé par ordre de Mr
de Caumartin Intendant à
GALANT.
135
-
Chaalons en 1667. pour la
genealogie de la maiſon de
laRochefoucault , l'hiſtoire
des grands Officiers de la
Couronnendalsport
Dame MargueriteMorin
Oveuve de MeſſireJean Comte
d'Eſtrées ,premier Baron
du Boulonois, Chevalier des
Ordres du Roy , Mareſchal
& Vice- Amiral de France ,
Viceroy de l'Amerique ,
Gouverneur des Ville &
Chaſteau de Nantes , &
Lieutenant general pour ſa
Majesté au Comté de Nantois,
mourutle,16. May âgée
)
٢٤٢ THAJAD
136TMERCUREM
defoixante quinze ans. Elle
eſtoit fille de Jacques Morin
Secretaire du Roy,& mai
ftre d'hostel ordinaire de fa
Majoſté,&d'Anne Yvelin ,
elle cut pour enfans Victor-
MarieComte d'Eſtrées ,
le 30.1 Novembre 1660 à
preſent Mareſchal deFrance,
Jean Abbé d'Eltrées ,
cy-devant Ambaſſadeur
Portugal, puis en Eſpagne ,
Prélat Commandeur Prélat
en
de
l'Ordre du S. Elprit , recey
le Janvier 1705 Marie-
Anne Catherine d'Eſtrées ,
mariée le 28. Novembre 1661
GALANT. 137
i à Michel François leTel
lier , Marquis de Courten
vaux , Colonel des Cent
Suiffes de la garde du Corps
du Roy; Marie Anne d'EC
trées,Religieuse à l'Aſſomption
, & Eliſabeth Roſalie
d'Eſtrées Demoiselle de
Tourpes. Voyez pour la genealogie
de la maiſon d'Eftées
l'hiſtoire des grands
Officiers de la Courone au
chapitre des Mareſchaux
de France & des grands
Maiſtres de l'artillerie.T
Meffire Jean-François de
Blanche fort , Chevalier
May 1714, 1.83 M
S MERCURE
I
Baron d'Afnois , Saligny ,
S.Germaindes Bois , &c.
Gouverneur pour le Roy de
la province & pays de Gex ,
mourut le 16. May.
! Il eſtoit fils de Roger de
Blanchefort , Baron d'Af
nois , Lieutenant Colonel
duRegiment deNavarre,&
Maref hal des camps & armées
du Roy , petit fils de
François de Blanchefort ,
Barond'Aſnois auffi Maref
chal de camp & armées du
Roy , & arriere petit fils
d'Adrien de Blanchefort
Baron d'Afnois, gentilhom,
GALANT
139
me de la chambre de Monſieur
le Duc d'Alençon ,
Gouverneur des villes de
Nevers & de faint Jean de
Lofne, meſtre de camp d'un
Regiment , & député de la
Nobleffe de Nivernois aux
Eftats generaux de Paris ,
en 1614. & de Henriette
de Salazar Dame d'Aſnois.
Pierre de Blanchefort , Baron
d'Aſnois ſon tris ayeul ,
de l'Ordre du Roy , gentilhomme
ordinaire de fa
chambre , & député de la
Nobleſſe de Nivernois &
Donziois aux Eftats gene-
Mij
140 MERCURE
de
raux de Blas l'an 1577.e
toit perit fils d'Antoine
Blanchefort ſeigneur de
Beauregard en Roliergue ,
que quelques curieux pré.
tendent eſtre frere puilné
de Jean de Blanchefort feigneur
de S. Clement ,& S.
Janurin,duquel defcendent
les Ducs de Leſdiguieres &
de Crequin Monfieur de
Blanchefort qui vient de
mourir avoit épousé le 27.
Janvier 1702. Gabrielle-
Charlotte Bruſlart , fille de
Roger de Bruflart Mar
quis de Sillery & de Puis
GALANTM 14
Geux, Chevalier des Ordres
du Roy , Lieutenant gene
ral de fes armées, Confeill
ler d'Estatordinaire d'épée,
& Ambaſſadeur extraordinaire
en Suiffe, & deClaus
de Godet Dame de Renne
ville , dont il laiſſe un fils
unique tak toopub ans
Dame Susanne Guyonne
deCoëtlogon , veuve de
meffire Philippe - GuyMarl
quis de Coëtlogon , mous
rut le 22.May. 1σινο
abDame Eleonore du Gué,
veuve de meſſire Jean du
Noucy,ſeigneur del'Epine,
142 MERCURE
&c. Maistre des Comptes ,
mourut le 23 May âgée
de 95. ans. Elle estoit fille
de Gaspard duGué ſeigneur
de Bagnol , Treforier de
France à Lyon , tante de
Dreux Loüis du Gué , mort
Conſeiller d'Estat ordinai
re , pere de Mr du Gué de
Bagnol,receuConſeiller au
Parlement en 1703. & de
Madame la Comreffe de
Tillier. La famille de Mr
du Gué eft originaire de
Moulins en Bourbonnois,
& a donné pluſieurs Maif
tres des Requeſtes & Con
GALANT.
143
feillers au Parlement , un
Préfident des Comptes &
pluſieurs Maiſtres desCompres
à Paris витали
Mre Henry de Chaban
nes Marquis de Curton
ComtedeRochefort, mou
rut le 15. May. Il avoit ef
pouſé en premieres nopces
en 1680. Françoiſe deMontezun
de Baiſemeau ; & en
ſecondes en 1709. Catherine
Gasparde d'Eſcorailles
de Rouffil , Veuve de Sebastien
de Rofmadec Marquis
de Molac , & foeur de
feüe Madame la Duchefſe
144 MERCURE
de Fontanges. Il ne laiſſe
point d'enfans de ce dernier
mariage , mais du premier
il laiſſe entr'autres enfans
Mr le Marquisde Curton
marié en 1706. avec N.
Glueu, Veuve de Jacques
de Vaſſan Seigneur de la
Tournelle , Avocat Generalde
laChambre des Com .
ptes , & Françoiſe Gabriël
de Chabannes mariée le 2.
Juiller 1696. avec Jean Paul
de Rochechouard Marquis
de Faudras , aprés la mort
elle ſe fit Religieuſe aux
Benedictines de Montargis ,
ler . Otobre. 1701 .
Meffire Jean Jacques de
Surbechk Lieutenant Ge.
neral des armées du Roy ,
Colonel d'un Regiment
Suiffe , & Chevalier de
l'Ordre Militaire de Saint
Loüis , mourut le 4. May.
Il eſtoit Suiffe & s'eſtoit attaché
au ſervice de la France
dés ſa jeuneſſe , il avoit
Epousé Marie Magdelaine
Chapelier , Soeur de feu
GALANTA 129
Claude Chapelier mort
Doyen de l'Eglife Colle
giale de S. Germain l'Au
xerrois , & fille de Henry
Chapelier Avocat General
de la Cour des Aydes , &
de Catherine Brice , il en
a laiffé pour fille Magde
laine Anne de Surbechk
marice le Fevrier 1708.
avec Charles Comte de Berenger
Colonel du Regi
ment de Bugey tué au fiége
de S. Venant le 24. Sep
tembre 1711. fils de Mr le
Comte de Guast Berenger
Lieutenant General des ar
mées du Roy.
:
130 MERCURE
Dame,Marguerite Pic
ques Veuve de , Mellire
François le Maye Confeil
ler au grandConfeil, mourut
fans enfans le 10. May,
elle efloit filled Olivier Picques
Ecuyer Secretaire, du
Roy ,& fon mary effoit
frere de Mrle Maye Confeiller
au Parlement , & fils
de François le Maye Con
ſeiller de la Cour des Aydes
, mort l'an 1677. d'u
ne Famille originaire de
Tours,
Meffire Jean Joſeph de
Montulé Conſeiller au ParGALANT.
In
lement , & Doyen de la
premiere des Requeſtes au
Palais , mourut le 10. May,
il eſtoit fils de François de
Montulé, Maire de la Ville
deNantes& Auditeur en la
Chambre des Comptes de
Bretagne,& de Marc Regnier
, & avoit pour frere
Antoine deMontulé Abbé,
mort depuis pluſieurs an
nées , & pour ſoeur Marie
Anne de Montulé mariée
Lan 1662. avec Gilles de
Boiſbaudry Seigneur de
Langan , il fut receu Con
ſeiller au Parlement de Pay
132 MERCURE
ris le 26. Juin 1671. & eſpous
fa en premiere nopce le
26. Juin 1672. Magdelaine
Charlot fille de Claude
Charlot Seigneur de Prince
Secretaire du Roy ,
d'Anne Aymeret de Ga
zeau , elle mourut fans enfans
, au mois de Juin 1674.
&il fe remaria avec Agnes
Bouvard fille de Michel
&1
06
Bouvard Seigneur de Fourqueux
Conſeiller au Parle
ment , & de Catherine
Leſné , & Soeur de Mrde
Fourqueux, Procureur Ge29b
neral de la Chambre desm
Jiey acului siдла эка
DOG GALANT5
-le.
Je
re
Comptes de ce dernier
mariage il a laiſſé pour en
fans , Auguſte Joſephide
Montulé, qui a embraſſé le
parti de l'Eglife & eft
Doyen de l'Egliſe de Beau- b
vais , & Jean Baptifte de
Montulé , reçû Conſeiller
au Parlement le 17.Mars,
3
Meſſire Estienne de laGal
ſte Mareſchal des camps &
armées du Roy , cy - devant
Lieutenant & Ayde Major
des Gardes de ſa Majesté ,
mourut le 13. May b
Dame Anne Pithou veu134
MERCURE
ve de Meffire Loüis Charles
de la Rochefoucault , Marquis
deMontendre, mourut
le 14. May. Elle estoit fille
de Pierre Pithou Conſeiller
au Parlement , & de Chreftienne
Loizel ,& mere de
Mr le Marquis de MontendreCapitaine
des Suiſſes de
feuMonſeigneur le Ducde
Berry , & de Mr le Comte
de Jarnac , voyez pour la famille
des Pithoux la genealogiequi
en eſt dreſſée dans
le Nobiliaire de Champagne
, dreſſé par ordre de Mr
de Caumartin Intendant à
GALANT.
135
-
Chaalons en 1667. pour la
genealogie de la maiſon de
laRochefoucault , l'hiſtoire
des grands Officiers de la
Couronnendalsport
Dame MargueriteMorin
Oveuve de MeſſireJean Comte
d'Eſtrées ,premier Baron
du Boulonois, Chevalier des
Ordres du Roy , Mareſchal
& Vice- Amiral de France ,
Viceroy de l'Amerique ,
Gouverneur des Ville &
Chaſteau de Nantes , &
Lieutenant general pour ſa
Majesté au Comté de Nantois,
mourutle,16. May âgée
)
٢٤٢ THAJAD
136TMERCUREM
defoixante quinze ans. Elle
eſtoit fille de Jacques Morin
Secretaire du Roy,& mai
ftre d'hostel ordinaire de fa
Majoſté,&d'Anne Yvelin ,
elle cut pour enfans Victor-
MarieComte d'Eſtrées ,
le 30.1 Novembre 1660 à
preſent Mareſchal deFrance,
Jean Abbé d'Eltrées ,
cy-devant Ambaſſadeur
Portugal, puis en Eſpagne ,
Prélat Commandeur Prélat
en
de
l'Ordre du S. Elprit , recey
le Janvier 1705 Marie-
Anne Catherine d'Eſtrées ,
mariée le 28. Novembre 1661
GALANT. 137
i à Michel François leTel
lier , Marquis de Courten
vaux , Colonel des Cent
Suiffes de la garde du Corps
du Roy; Marie Anne d'EC
trées,Religieuse à l'Aſſomption
, & Eliſabeth Roſalie
d'Eſtrées Demoiselle de
Tourpes. Voyez pour la genealogie
de la maiſon d'Eftées
l'hiſtoire des grands
Officiers de la Courone au
chapitre des Mareſchaux
de France & des grands
Maiſtres de l'artillerie.T
Meffire Jean-François de
Blanche fort , Chevalier
May 1714, 1.83 M
S MERCURE
I
Baron d'Afnois , Saligny ,
S.Germaindes Bois , &c.
Gouverneur pour le Roy de
la province & pays de Gex ,
mourut le 16. May.
! Il eſtoit fils de Roger de
Blanchefort , Baron d'Af
nois , Lieutenant Colonel
duRegiment deNavarre,&
Maref hal des camps & armées
du Roy , petit fils de
François de Blanchefort ,
Barond'Aſnois auffi Maref
chal de camp & armées du
Roy , & arriere petit fils
d'Adrien de Blanchefort
Baron d'Afnois, gentilhom,
GALANT
139
me de la chambre de Monſieur
le Duc d'Alençon ,
Gouverneur des villes de
Nevers & de faint Jean de
Lofne, meſtre de camp d'un
Regiment , & député de la
Nobleffe de Nivernois aux
Eftats generaux de Paris ,
en 1614. & de Henriette
de Salazar Dame d'Aſnois.
Pierre de Blanchefort , Baron
d'Aſnois ſon tris ayeul ,
de l'Ordre du Roy , gentilhomme
ordinaire de fa
chambre , & député de la
Nobleſſe de Nivernois &
Donziois aux Eftats gene-
Mij
140 MERCURE
de
raux de Blas l'an 1577.e
toit perit fils d'Antoine
Blanchefort ſeigneur de
Beauregard en Roliergue ,
que quelques curieux pré.
tendent eſtre frere puilné
de Jean de Blanchefort feigneur
de S. Clement ,& S.
Janurin,duquel defcendent
les Ducs de Leſdiguieres &
de Crequin Monfieur de
Blanchefort qui vient de
mourir avoit épousé le 27.
Janvier 1702. Gabrielle-
Charlotte Bruſlart , fille de
Roger de Bruflart Mar
quis de Sillery & de Puis
GALANTM 14
Geux, Chevalier des Ordres
du Roy , Lieutenant gene
ral de fes armées, Confeill
ler d'Estatordinaire d'épée,
& Ambaſſadeur extraordinaire
en Suiffe, & deClaus
de Godet Dame de Renne
ville , dont il laiſſe un fils
unique tak toopub ans
Dame Susanne Guyonne
deCoëtlogon , veuve de
meffire Philippe - GuyMarl
quis de Coëtlogon , mous
rut le 22.May. 1σινο
abDame Eleonore du Gué,
veuve de meſſire Jean du
Noucy,ſeigneur del'Epine,
142 MERCURE
&c. Maistre des Comptes ,
mourut le 23 May âgée
de 95. ans. Elle estoit fille
de Gaspard duGué ſeigneur
de Bagnol , Treforier de
France à Lyon , tante de
Dreux Loüis du Gué , mort
Conſeiller d'Estat ordinai
re , pere de Mr du Gué de
Bagnol,receuConſeiller au
Parlement en 1703. & de
Madame la Comreffe de
Tillier. La famille de Mr
du Gué eft originaire de
Moulins en Bourbonnois,
& a donné pluſieurs Maif
tres des Requeſtes & Con
GALANT.
143
feillers au Parlement , un
Préfident des Comptes &
pluſieurs Maiſtres desCompres
à Paris витали
Mre Henry de Chaban
nes Marquis de Curton
ComtedeRochefort, mou
rut le 15. May. Il avoit ef
pouſé en premieres nopces
en 1680. Françoiſe deMontezun
de Baiſemeau ; & en
ſecondes en 1709. Catherine
Gasparde d'Eſcorailles
de Rouffil , Veuve de Sebastien
de Rofmadec Marquis
de Molac , & foeur de
feüe Madame la Duchefſe
144 MERCURE
de Fontanges. Il ne laiſſe
point d'enfans de ce dernier
mariage , mais du premier
il laiſſe entr'autres enfans
Mr le Marquisde Curton
marié en 1706. avec N.
Glueu, Veuve de Jacques
de Vaſſan Seigneur de la
Tournelle , Avocat Generalde
laChambre des Com .
ptes , & Françoiſe Gabriël
de Chabannes mariée le 2.
Juiller 1696. avec Jean Paul
de Rochechouard Marquis
de Faudras , aprés la mort
elle ſe fit Religieuſe aux
Benedictines de Montargis ,
ler . Otobre. 1701 .
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Résumé : MORTS.
Le texte relate plusieurs décès et biographies de personnalités françaises du début du XVIIIe siècle. Jean Jacques de Surbechk, lieutenant général des armées du Roy, colonel d'un régiment suisse et chevalier de l'Ordre Militaire de Saint-Louis, est décédé le 4 mai. Né en Suisse, il a servi la France dès sa jeunesse et a épousé Marie Magdelaine Chapelier. Leur fille, Magdeleine Anne de Surbechk, est mariée à Charles Comte de Berenger, colonel du régiment de Bugey, tué au siège de Saint-Venant le 24 septembre 1711. Dame Marguerite Piques, veuve de Meffire François le Maye, conseiller au grand conseil, est décédée sans enfants le 10 mai. Elle était fille d'Olivier Piques, écuyer secrétaire du Roy, et son mari était frère de Mr le Maye, conseiller au Parlement. Jean Joseph de Montulé, conseiller au Parlement et doyen de la première des Requestes au Palais, est décédé le 10 mai. Fils de François de Montulé, maire de Nantes et auditeur à la Chambre des Comptes de Bretagne, il a laissé pour enfants Auguste Joseph de Montulé, doyen de l'Église de Beauvais, et Jean Baptiste de Montulé, conseiller au Parlement. Estienne de la Galste, maréchal des camps et armées du Roy, ancien lieutenant et aide-major des Gardes de sa Majesté, est décédé le 13 mai. Dame Anne Pithou, veuve de Meffire Loüis Charles de la Rochefoucault, marquis de Montendre, est décédée le 14 mai. Elle était fille de Pierre Pithou, conseiller au Parlement, et mère de Mr le marquis de Montendre et de Mr le comte de Jarnac. Dame Marguerite Morin, veuve de Meffire Jean Comte d'Estrées, premier baron du Boulonois, chevalier des Ordres du Roy, maréchal et vice-amiral de France, est décédée le 16 mai à l'âge de soixante-quinze ans. Elle a laissé pour enfants Victor-Marie Comte d'Estrées, maréchal de France, Jean Abbé d'Estrées, prélat commandeur de l'Ordre du Saint-Esprit, Marie-Anne Catherine d'Estrées, mariée à Michel François le Tellier, marquis de Courtenvaux, et Élisabeth Rosalie d'Estrées, demoiselle de Tourpes. Jean-François de Blanchefort, chevalier, baron d'Asnois, Saligny, Saint-Germain-des-Bois, gouverneur de la province et pays de Gex, est décédé le 16 mai. Fils de Roger de Blanchefort, baron d'Asnois, et petit-fils de François de Blanchefort, baron d'Asnois, il a épousé Gabrielle-Charlotte Bruslart, laissant un fils unique âgé de six ans. Dame Susanne Guyonne de Coëtlogon, veuve de Meffire Philippe marquis de Coëtlogon, est décédée le 22 mai. Dame Eleonore du Gué, veuve de Meffire Jean du Noucy, seigneur de l'Épine, maître des Comptes, est décédée le 23 mai à l'âge de 95 ans. Elle était fille de Gaspard du Gué, trésorier de France à Lyon, et tante de Dreux Louis du Gué, conseiller d'État ordinaire. Henry de Chabannes, marquis de Curton, comte de Rochefort, est décédé le 15 mai. Il a épousé en premières noces Françoise de Montezun de Baissemeau et en secondes noces Catherine Gasparde d'Escorailles de Rouffil, veuve de Sébastien de Rosmadec, marquis de Molac. Il a laissé plusieurs enfants de son premier mariage, dont le marquis de Curton et Françoise Gabrielle de Chabannes, mariée à Jean Paul de Rochechouard, marquis de Faudras.
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37
p. 112-119
Nouvelles, [titre d'après la table]
Début :
La paix qui est à la veille d'être concluë entre tous [...]
Mots clefs :
Empereur, Roi, Comte, Camp
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texteReconnaissance textuelle : Nouvelles, [titre d'après la table]
La paix qui eſt à la veille
d'être concluë entre tous
les Princes du Nord , & la
tranquilité dont l'Europe
va joüir , vont deſormais
faciliter les moyens d'éta.
blir des correſpondances ,
dont les nouvelles ne feront
ni
GALANT . 43
J
ni moins agreables , ni
moins intereſſantes , pour
n'être plus chargées du détail
des alarmes de la
fi
Les rebeles Catalans &
Barcelonois touchent au
moment de leur reduction.
Voiciunt extrait d'une
lettre que j'ai reçûë du
camp devant Barcelone ,
dattée du 29.May.
Aprés un ample détail de
tout ce qui s'eſt paffé au
- poſte des Capucins , que
Male Comte d'Eſtaires ,
Maréchal de Camp& Che -
Juin 1714 K
114 MERCURE
人
valier de la Toiſon d'Or , a
emporté avec toute la valeur
imaginable , on ajoûte
qu'on prend de ſi juſtes
meſures pour attaquer cette
ville avec la derniere vigueur
, qu'elle ne peut évi
ter d'être miſe en poudre ;
que M. Orry eſttoûjours au
camp , où il auroit voulu
traiter avec les Barcelo
nois , qui n'en ont point
voulu entendre parler , &
qui difent toûjours qu'ils
periront plutôt tous , que
de ſe rendre fans un ordre
de l'Empereur : mais mala
GALANTI
gré leurs beaux diſcours
on eft perfuadé qu'ils ne
défendront rien, fi on les
attaque auſſi vivement qu
ils l'apprehendent
On a eu avis de Varſovie
parune lettre du 12. deMay,
que le Palatin de Maſovie
feroit forti de Conſtantinople
depuis plus d'un mois
avec une entiere fatisfacu
tion , s'il avoit voulu con
fentir à figner le traité que
leGrandViſir lui a propofé
touchant lepaſſage du Roy
de Suede par la Pologhe,
& lacceffion debrUkraine.
Kij
116 MERCURE
Le Roy de Pologne a trouvécettedemandedesTurcsi
ſi injuſte , qu'il a ordonné à
ſes Generaux Saxons de te
nir leurs troupes prêtes à
marcher au premier ordre.
On apprehende fort que la
Nobleſſe de Lithuanie
celle de la grande Pologne
ne cauſe ici des defordres
anſquels il fera fort difficile
de remedier , ſi leRoyn'arrêre
pas les vexations & les
executions militaires que
les troupes Saxones font
fur leurs terres , & dont el
les demandent la fatisfac
GALANT. 117
tion qu'elles pretendent
leur être dûë.
On écrit de Hambourg ,
que la Reine d'Angleterre
a fait propoſer une ſuſpenſion
d'armes auRoy de Danemark
, à laquelle il a refufé
de conſentir auſſi bien
que le Czar.
Toutes les lettres d'Allemagne
ne parlent que de
la bonne intelligence du
Roy de Suede avec le
Grand Seigneur,qu'il a prié
de donner les ordres neceſſaires
pour fon retour
dans ſes Etats.i.amlyngby
118 MERCURE
Le May le Comte de
Seilern , Plenipotentiaire
de l'Empereur , partit de
Vienne , pour aller à l'afſemblée
de Bade en Suiſſe
travailler à la paix entre la
France & l'Empire.....
Le 11. le Comte de Goës,
auffi Plenipotentiaire de
l'Empereur , prit la même
route. Les conferences ont
été ouvertes le 4. à l'affemblée
de Bade.
On écrit de Milan que
Don Vincenzo Gonzaga ,
Duc de Guastalla , eft mort
d'apoplexie le 28. Avril, âgé
GALANT. 119
de quatre- vingt ans, a
Le s. May Aleſſandro Aldobrandini
, Nonce duPape
, fit ſon entrée publique
dans Venife.
Le 10. Fête de l'Afcenfion
,leDoge,accompagné
dusNonce , monta fur le
Bucentaure , où il fit , comme
cela ſe pratique tous les
ans à pareil jour , la ceremonie
d'époufer la mer.
d'être concluë entre tous
les Princes du Nord , & la
tranquilité dont l'Europe
va joüir , vont deſormais
faciliter les moyens d'éta.
blir des correſpondances ,
dont les nouvelles ne feront
ni
GALANT . 43
J
ni moins agreables , ni
moins intereſſantes , pour
n'être plus chargées du détail
des alarmes de la
fi
Les rebeles Catalans &
Barcelonois touchent au
moment de leur reduction.
Voiciunt extrait d'une
lettre que j'ai reçûë du
camp devant Barcelone ,
dattée du 29.May.
Aprés un ample détail de
tout ce qui s'eſt paffé au
- poſte des Capucins , que
Male Comte d'Eſtaires ,
Maréchal de Camp& Che -
Juin 1714 K
114 MERCURE
人
valier de la Toiſon d'Or , a
emporté avec toute la valeur
imaginable , on ajoûte
qu'on prend de ſi juſtes
meſures pour attaquer cette
ville avec la derniere vigueur
, qu'elle ne peut évi
ter d'être miſe en poudre ;
que M. Orry eſttoûjours au
camp , où il auroit voulu
traiter avec les Barcelo
nois , qui n'en ont point
voulu entendre parler , &
qui difent toûjours qu'ils
periront plutôt tous , que
de ſe rendre fans un ordre
de l'Empereur : mais mala
GALANTI
gré leurs beaux diſcours
on eft perfuadé qu'ils ne
défendront rien, fi on les
attaque auſſi vivement qu
ils l'apprehendent
On a eu avis de Varſovie
parune lettre du 12. deMay,
que le Palatin de Maſovie
feroit forti de Conſtantinople
depuis plus d'un mois
avec une entiere fatisfacu
tion , s'il avoit voulu con
fentir à figner le traité que
leGrandViſir lui a propofé
touchant lepaſſage du Roy
de Suede par la Pologhe,
& lacceffion debrUkraine.
Kij
116 MERCURE
Le Roy de Pologne a trouvécettedemandedesTurcsi
ſi injuſte , qu'il a ordonné à
ſes Generaux Saxons de te
nir leurs troupes prêtes à
marcher au premier ordre.
On apprehende fort que la
Nobleſſe de Lithuanie
celle de la grande Pologne
ne cauſe ici des defordres
anſquels il fera fort difficile
de remedier , ſi leRoyn'arrêre
pas les vexations & les
executions militaires que
les troupes Saxones font
fur leurs terres , & dont el
les demandent la fatisfac
GALANT. 117
tion qu'elles pretendent
leur être dûë.
On écrit de Hambourg ,
que la Reine d'Angleterre
a fait propoſer une ſuſpenſion
d'armes auRoy de Danemark
, à laquelle il a refufé
de conſentir auſſi bien
que le Czar.
Toutes les lettres d'Allemagne
ne parlent que de
la bonne intelligence du
Roy de Suede avec le
Grand Seigneur,qu'il a prié
de donner les ordres neceſſaires
pour fon retour
dans ſes Etats.i.amlyngby
118 MERCURE
Le May le Comte de
Seilern , Plenipotentiaire
de l'Empereur , partit de
Vienne , pour aller à l'afſemblée
de Bade en Suiſſe
travailler à la paix entre la
France & l'Empire.....
Le 11. le Comte de Goës,
auffi Plenipotentiaire de
l'Empereur , prit la même
route. Les conferences ont
été ouvertes le 4. à l'affemblée
de Bade.
On écrit de Milan que
Don Vincenzo Gonzaga ,
Duc de Guastalla , eft mort
d'apoplexie le 28. Avril, âgé
GALANT. 119
de quatre- vingt ans, a
Le s. May Aleſſandro Aldobrandini
, Nonce duPape
, fit ſon entrée publique
dans Venife.
Le 10. Fête de l'Afcenfion
,leDoge,accompagné
dusNonce , monta fur le
Bucentaure , où il fit , comme
cela ſe pratique tous les
ans à pareil jour , la ceremonie
d'époufer la mer.
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Résumé : Nouvelles, [titre d'après la table]
En juin 1714, des développements politiques et militaires significatifs se produisent en Europe. Une paix entre les princes du Nord est annoncée, promettant une tranquillité facilitant les correspondances. En Espagne, les rebelles catalans et barcelonais sont sur le point d'être vaincus après un assaut réussi au poste des Capucins par le comte d'Estaires. Les mesures contre Barcelone sont décrites comme implacables, malgré la volonté des Barcelonais de résister. En Pologne, le roi refuse les demandes turques concernant le passage du roi de Suède et l'accession de l'Ukraine, préparant ses troupes à une confrontation. La reine d'Angleterre propose une suspension d'armes au roi de Danemark, mais cette proposition est refusée par le Danemark et le Czar. En Allemagne, une bonne intelligence est notée entre le roi de Suède et le Grand Seigneur. Les plénipotentiaires de l'Empereur, le comte de Seilern et le comte de Goës, se rendent à l'assemblée de Bade pour travailler à la paix entre la France et l'Empire. Enfin, le duc de Guastalla, Don Vincenzo Gonzaga, décède d'apoplexie, et le nonce du Pape, Alessandro Aldobrandini, fait son entrée publique à Venise.
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38
p. 123-143
MORTS.
Début :
Joseph Remy de Livron, Seigneur de Villenox & de [...]
Mots clefs :
Mort, Chevalier, Comte, Conseiller, Veuve, Seigneur, Roi, Fils, Dame, Marquis
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS.
MORTS.
Joſeph Remy de Livron,
Seigneur de Villenox & de
Cuile , dit le Marquis de
Livron , mourut fans alhance
le 8. May.
Il étoit frere de Jean-
Baptiſte Evrard de Livron ,
Bachelier de la Maiſon &
Societé de Sorbonne , lequel
a quitté l'Egliſe depuis
la mort de ſon frere ;
&de Marie- Françoiſe -Almodie
de Livron , mariée
le 21. Septembre 1705. avec
Lij
124
MERCURE
Marc- Antoine- Conſtantin
Valon , Seigneur de Montmain
, laquelle eſt decedée
en 1713. Il étoit fils de Joſeph-
Remy deLivron, dit le
Marquis de Livro, Colonel
d'unregimentde cavalerie,
mmoorrtteenni1687.&deFrançoiſe
Benigne de Belloix , Dame
de Villenox , & avoit pour
biſayculCharles de Livron,
Marquis deBourbone,Maréchal
desCamps&Armées
du Roy , Capitaine de so
hommes d'armes , Lieutenant
deRoy au Gouvernement
de Champagne , fait
GALANT.
125
Chevalier de l'Ordre du S.
Eſprit l'an 1633. Charles fon
ayeul , qui avoit épousé
Claude de Sallenoue , ſe fit
Prêtre aprés la mort de ſa
femme , qui mourut jeune.
Il cut l'Abbaye d'Ambournay
en Breffe. Son grandpere
maternel , M. de Villemonté
, Maître des Requêtes,
convint avec la femme
de quitter le monde ;
elley confentit ,elle ſe retira
dans un Convent : il ſe
fit Prêtre , & eut l'Evêché
de S. Malo , ſa femme vivante.
t
Liij
126 MERCURE
La maison de Livron ,
établie dans le Limoſin depuis
plus de 400. ans , eft
fortie des anciens Seigneurs
de Livron auprés de Valence
en Dauphiné , & elle
s'eſt alliée aux maiſons de
la Barre , d'Helie - Pompa.
dour, de Noailles, de Beaufremont
, de Thuiſy , de Gimel
, de Choiſeüil, d'Eſcars,
du Chatelet , de Baffompierre
, de Savigny , d'Anglure,&
autresmaiſons des
plus illuftres , tant de France
que de Lorraine. Voyez
la genealogie de Livron ,
GALANT.. 127
imprimée dans le Nobi
liaire de Champagne pa
ordre de M. de Caumartin .
Dame Genevieve - Thereſe
Chamillard , époufe de
Meffire Guy de Durfort ,
Duc de Lorge , Comte de
Quintin , mourut le 31.May
enſavingt-huitieme année.
laiſlant deux fils. Elle étoit
foeur du Marquis de Cani ,
deMadame de Dreux, femme
de M. de Dreux , grand
Maître des Ceremonies de
France , & de Madame la
Ducheſſe de la Feüillade;
Ling
128 MERCURE
tous enfans de Michel Chamillart
, Commandeur &
grandTreſorier des Ordres
du Roy , Miniſtre d'Etat ,
& ci-devant Controlleur
general des Finances , &
d'Elifabeth- Therese le Rebours.
M. de Chamillart
leur pere eſt fils de Guy
Chamillart, Maître des Requêtes
de l'Hôtel du Roy ,
mort l'an 1675. & petit- fils
de Pierre Chamillart , celebre
Avocat au Parlement
& Profeffeur en Droit,forti
d'une famille originaire de
la ville de Sens , ou des en
virons.
GALANT.
129
T
Dame Madeleine de Ri
queti, veuve de M. Jacques
du Chatelet , Seigneur de
Freſnier , Conſeiller duRoy
en fonGrandConfeil,mourut
le 3. Juin. Elle avoit été
mariée avec M. de Freſnier
en 1669. étant lors veuve de
Loüis Hurault, Seigneur de
ſaint Germain & du Cou--
dray ,& elle a eu , entre autres
enfans , Jacques du
Chatelet , Seigneur de Frefnier
, Conſeiller au Grand
Conſeil , duquel , & de Suzanne.
Genevieve Talon fa
femme, ſont ſortispluſieurs
130 MERCURE
enfans. Meſſieurs du Chatelet
ſont d'une ancienne
Nobleſſe originaire d'Artois
, alliée aux maiſons
de Rouvroy , de Choiſeuil ,
de Ligneville , de Grou
chepi , &c.
Meffire Archambaule
François Barjot d'Auneüil ,
Chanoine de la SainteChapelle
de Paris ,mourut le 9.
Juin. Il étoit fils de Loüis
Barjot, Seigneur d'Auneüil,
Maître d'Hôtel , & grand
Maître des Eaux & Forêts
de Lorraine , & Confeiller
GALANT.
131
d'Etat , & de Marie-Eliſabeth
de Baumont de ſaint
Estienne ; & pétit- fils de
Jean Barjot, Seigneur d'Auneüil
, reçû Maître des
Requêtes ordinaires de
l'Hôtel du Roy en 1587. &
depuis Conſeiller d'Etat ; &
arriere- petit fils de Philbert
| Barjot, Seigneur d'Auneüil,
Maître des Requêtes de
( l'Hôtel du Roy , & Prefident
au Grand Confeil ,
mort en 1570. & de Marie
Fernel, fille du celebre Jean
Fernel , premier Medecin
du Roy Henry II. & de
132 MERCURE
Catherine de Medicis. La
famille de Barjot eſt originaire
du Baujolois , & s'eſt
alliée aux maiſons de Beauveau
, de Broon , de Voyer
de Paulmy , & de Maillé.
Les Seigneurs d'Auneüil
font les ainez,& lesMarquis
deMoucy font les cadets.
M. Henry Jolly, Licutenant-
Colonel du regiment
de dragons de la Reine , &
Brigadier des armées du
Roy, mourut le 9. Juin.
Dame Catherine Hen
GALANT.
133
I riette d'Angennes , veuve
de Meffire Louis de la Tremoille
, Comte d'Olonne ,
mourut le 13. Juin. Elle
avoit été mariée dés l'an
1656. & avoit pour ſoeur
puînée Dame Madeleine
d'Angennes , morte depuis
peu , veuve du Maréchal
Duc de la Ferté. Elles é
toient filles de Charles
d'Angennes , Seigneur de
la Loupe , & de Marie du
Regnier de Droüé.
Meffire Claude de Saint
Georges , Archevêque &
-
34 MERCURE
Comte de Lyon , y mourut
le 9. Juin. Il avoit été d'abord
Evêque de Clermont,
puis Archevêque de Tours ,
&transferé àLyon en 1693.
Il étoit un des vingt enfans
ſortis dumariagedeClaude
de S. Georges , Seigneur de
Monceaux en Mâconnois
& de Marie de Cremeaux
d'Entragues. Il étoit frere
duChevalier de S.Georges,
Bailly de Lyon , del'Ordre
de Malte , & du Comte de
Saint Georges , Colonel du
regiment du Roy, tué à la
bataille de S. Denys en 1678.
GALANT .
138
Il étoit oncle de Marc-Antoine
de S. Georges , Seigneur
de Monceaux , marié
cn 1697. avec Claude-Eliſabeth
Apechon de Saint
André , de laquelle il a
pluſieurs enfans;& deMM.
de S. Georges , tous deux
Chanoines & Comtes de
Lyon. La maiſon dont il
étoit iſſue eſt diſtinguée par
ſon ancienneté & par ſes
alliances , & il y a grande
apparence qu'elle a la même
origine que celle des
Marquis de Verac en Poitou
, de laquelle étoit feu
136 MERCURE
M. le Marquis de Verac ,
Chevalier de l'Ordre du
S. Eſprit , pere du Marquis
de Verac d'aujourd'hui.
L'Evêque d'Autun,premier
Suffragant de l'Archevêché
de Lyon , joüit de tous les
revenus de l'Archevêché ,
en attendant que le Roy y
nomme.
M. Nicolas Meſnager
Chevalier de l'Ordre de S.
Michel , Conſeiller- Secretaire
du Roy , & ci - devant
ſon Ambaſſadeur extraor
dinaire & Plenipotentiaire
pour
3
GALANT. 137
pour la paix d'Utrecht ,
mourut le 15. Juin.
Le Chevalier de Coigni
âgé de fix ans , mourut le
18. Juin. Il étoit fils de M.
François de Franctor , Marquis
de Coigni , Colonel
general des dragons de
France , Maréchal des
Camps& Armées du Roy ,
Gouverneur & Bailly des
ville & château de Caën ,
& de Henriette de Monbourché
du Bordage ; &
petit- fils de feu M.le Comte
deCoigny, Gouverneur &
Juin 1714. M
138 MERCURE
Bailly de Caën, Lieutenant
general des armées du Roy;
& de Dame Marie - Françoiſe-
Uranie deMatignon.
Meſſieurs de Franctot d'une
famille diſtinguée dans la
Robe & dans l'Epée , & originaires
de Normandie , ſe
font alliez aux maiſons de
Montmorency , de Harcourt
,& à celles d'Ache &
de S. SimonCourtaumer, &
elle adonnédes Chevaliers
deMalthe au grandPrieuré
de France nó histoco
Dame Marie- Catherine
GALANT 139
d'Angennes , veuve de Philippe-
François Lhermite ,
Seigneur d'Hyeville de Ste
Barbe enAuge , de Mont
champ&deMelie en Normandie,
mourut le
laiſſant pour fille unique
Eliſabeth Lhermite,mariée
le Mars 1700.avec Pierre
de Monteſquiou d'Artagnan
, à preſent Maréchal
de France. Me d'Hyeville ,
qui vient de mourir , étoit
couſine-germaine de feuës
Mesdames les Comteffe
d'Olonne &Maréchale de
la Ferté , & fille de Jenn
Mij
340 MERCURE
d'Angennes , Seigneur de
Fontaine - Riant , & d'Iſabelle
Graffart ; & tante du
Comte d'Angennes , aujourd'hui
Colonel du regiment
de Normandie.
こ
: MeffireCharles Boucher,
Seigneur d'Orsay, Cóſeiller
d'Etat,& ancien Prevôt des
Marchands , mourut les.
Juin , en ſa 73. année.
Dame Marie Sebrette
Veuve de M. Jerôme Me.
reau Chevalier, Confeiller
de la Grand Chambre!
GALANT. Y
mourut le dix - ſept Juin
Dame Renée- Marie Henin,
veuve de M. de Monchalt ,
Conſeiller au Parlement , dont
la fille avoit épousé M. de Barantin
, Maître des Requêtes ,
mort Intendant de Dunkerque
, mourut le 16.de ce mois.
M. le Moyne,ancien Avocat ,
& fous-Doyen des Avocats du
Parlement de Paris , celebre
par ſa probité , & infatigable
dans le travail , mourut le 15.
M. Louis de Rochouart,Duc
deMortemar, PairdeFrance ,
Prince de Tonne- Charante
&c. prit feance au Parlement
Een qualité de Pair de France
142 MERCURE
1
le 14. Juin . Le Marquiſat de
Mortemar en Poitou fut érigé
en Duché & Pairie en faveur
de Gabriel de Rochouart , bif.
ayeul de M. le Duc de Mortemar
d'aujourd'hui , Chevalier
des Ordres du Roy , premier
Gentilhomme de ſa Chambre ,
& Gouverneur de Paris par
Lettres patentes du Roy Louis
XIV. 1653. verifiées au Parlement
le 15.Sept. 1663. La maison
de Rochouart eſt une des plus
anciennes &des plus illuſtres du
Royaume,& la genealogie s'en
trouve dans l'hiſtoire des grāds
Officiers de la Couronne , aux
chap. des Maréchaux de France
& des Generaux des galeres ,
& dans les additions aux Memoires
de Caſtelnau par le Laboureur,
GALANT. 143
Le 13. Juin Nicolas- Louis de
Bailleul , Marquis de Châteaugontier,
Confeiller au Parle
ment, fut reçû dans la Charge
de Preſident au Mortier , va-
- cante par la mort de M. fon
- pere ; & il eſt le quatrième de
pere en fils qui ait rempli cette
Charge,depuis NicolasdeBailleul
, Baron de Châteaugontier,
Chancelier de la Reine , & de-
- puis Surintendant des Finances
de France , qui y futreçû le as.
Septembre 1627410 231
M. le Pelletier des Forts, Intendant
des Financesa été
nommé Conſeiller d'Etatil
Joſeph Remy de Livron,
Seigneur de Villenox & de
Cuile , dit le Marquis de
Livron , mourut fans alhance
le 8. May.
Il étoit frere de Jean-
Baptiſte Evrard de Livron ,
Bachelier de la Maiſon &
Societé de Sorbonne , lequel
a quitté l'Egliſe depuis
la mort de ſon frere ;
&de Marie- Françoiſe -Almodie
de Livron , mariée
le 21. Septembre 1705. avec
Lij
124
MERCURE
Marc- Antoine- Conſtantin
Valon , Seigneur de Montmain
, laquelle eſt decedée
en 1713. Il étoit fils de Joſeph-
Remy deLivron, dit le
Marquis de Livro, Colonel
d'unregimentde cavalerie,
mmoorrtteenni1687.&deFrançoiſe
Benigne de Belloix , Dame
de Villenox , & avoit pour
biſayculCharles de Livron,
Marquis deBourbone,Maréchal
desCamps&Armées
du Roy , Capitaine de so
hommes d'armes , Lieutenant
deRoy au Gouvernement
de Champagne , fait
GALANT.
125
Chevalier de l'Ordre du S.
Eſprit l'an 1633. Charles fon
ayeul , qui avoit épousé
Claude de Sallenoue , ſe fit
Prêtre aprés la mort de ſa
femme , qui mourut jeune.
Il cut l'Abbaye d'Ambournay
en Breffe. Son grandpere
maternel , M. de Villemonté
, Maître des Requêtes,
convint avec la femme
de quitter le monde ;
elley confentit ,elle ſe retira
dans un Convent : il ſe
fit Prêtre , & eut l'Evêché
de S. Malo , ſa femme vivante.
t
Liij
126 MERCURE
La maison de Livron ,
établie dans le Limoſin depuis
plus de 400. ans , eft
fortie des anciens Seigneurs
de Livron auprés de Valence
en Dauphiné , & elle
s'eſt alliée aux maiſons de
la Barre , d'Helie - Pompa.
dour, de Noailles, de Beaufremont
, de Thuiſy , de Gimel
, de Choiſeüil, d'Eſcars,
du Chatelet , de Baffompierre
, de Savigny , d'Anglure,&
autresmaiſons des
plus illuftres , tant de France
que de Lorraine. Voyez
la genealogie de Livron ,
GALANT.. 127
imprimée dans le Nobi
liaire de Champagne pa
ordre de M. de Caumartin .
Dame Genevieve - Thereſe
Chamillard , époufe de
Meffire Guy de Durfort ,
Duc de Lorge , Comte de
Quintin , mourut le 31.May
enſavingt-huitieme année.
laiſlant deux fils. Elle étoit
foeur du Marquis de Cani ,
deMadame de Dreux, femme
de M. de Dreux , grand
Maître des Ceremonies de
France , & de Madame la
Ducheſſe de la Feüillade;
Ling
128 MERCURE
tous enfans de Michel Chamillart
, Commandeur &
grandTreſorier des Ordres
du Roy , Miniſtre d'Etat ,
& ci-devant Controlleur
general des Finances , &
d'Elifabeth- Therese le Rebours.
M. de Chamillart
leur pere eſt fils de Guy
Chamillart, Maître des Requêtes
de l'Hôtel du Roy ,
mort l'an 1675. & petit- fils
de Pierre Chamillart , celebre
Avocat au Parlement
& Profeffeur en Droit,forti
d'une famille originaire de
la ville de Sens , ou des en
virons.
GALANT.
129
T
Dame Madeleine de Ri
queti, veuve de M. Jacques
du Chatelet , Seigneur de
Freſnier , Conſeiller duRoy
en fonGrandConfeil,mourut
le 3. Juin. Elle avoit été
mariée avec M. de Freſnier
en 1669. étant lors veuve de
Loüis Hurault, Seigneur de
ſaint Germain & du Cou--
dray ,& elle a eu , entre autres
enfans , Jacques du
Chatelet , Seigneur de Frefnier
, Conſeiller au Grand
Conſeil , duquel , & de Suzanne.
Genevieve Talon fa
femme, ſont ſortispluſieurs
130 MERCURE
enfans. Meſſieurs du Chatelet
ſont d'une ancienne
Nobleſſe originaire d'Artois
, alliée aux maiſons
de Rouvroy , de Choiſeuil ,
de Ligneville , de Grou
chepi , &c.
Meffire Archambaule
François Barjot d'Auneüil ,
Chanoine de la SainteChapelle
de Paris ,mourut le 9.
Juin. Il étoit fils de Loüis
Barjot, Seigneur d'Auneüil,
Maître d'Hôtel , & grand
Maître des Eaux & Forêts
de Lorraine , & Confeiller
GALANT.
131
d'Etat , & de Marie-Eliſabeth
de Baumont de ſaint
Estienne ; & pétit- fils de
Jean Barjot, Seigneur d'Auneüil
, reçû Maître des
Requêtes ordinaires de
l'Hôtel du Roy en 1587. &
depuis Conſeiller d'Etat ; &
arriere- petit fils de Philbert
| Barjot, Seigneur d'Auneüil,
Maître des Requêtes de
( l'Hôtel du Roy , & Prefident
au Grand Confeil ,
mort en 1570. & de Marie
Fernel, fille du celebre Jean
Fernel , premier Medecin
du Roy Henry II. & de
132 MERCURE
Catherine de Medicis. La
famille de Barjot eſt originaire
du Baujolois , & s'eſt
alliée aux maiſons de Beauveau
, de Broon , de Voyer
de Paulmy , & de Maillé.
Les Seigneurs d'Auneüil
font les ainez,& lesMarquis
deMoucy font les cadets.
M. Henry Jolly, Licutenant-
Colonel du regiment
de dragons de la Reine , &
Brigadier des armées du
Roy, mourut le 9. Juin.
Dame Catherine Hen
GALANT.
133
I riette d'Angennes , veuve
de Meffire Louis de la Tremoille
, Comte d'Olonne ,
mourut le 13. Juin. Elle
avoit été mariée dés l'an
1656. & avoit pour ſoeur
puînée Dame Madeleine
d'Angennes , morte depuis
peu , veuve du Maréchal
Duc de la Ferté. Elles é
toient filles de Charles
d'Angennes , Seigneur de
la Loupe , & de Marie du
Regnier de Droüé.
Meffire Claude de Saint
Georges , Archevêque &
-
34 MERCURE
Comte de Lyon , y mourut
le 9. Juin. Il avoit été d'abord
Evêque de Clermont,
puis Archevêque de Tours ,
&transferé àLyon en 1693.
Il étoit un des vingt enfans
ſortis dumariagedeClaude
de S. Georges , Seigneur de
Monceaux en Mâconnois
& de Marie de Cremeaux
d'Entragues. Il étoit frere
duChevalier de S.Georges,
Bailly de Lyon , del'Ordre
de Malte , & du Comte de
Saint Georges , Colonel du
regiment du Roy, tué à la
bataille de S. Denys en 1678.
GALANT .
138
Il étoit oncle de Marc-Antoine
de S. Georges , Seigneur
de Monceaux , marié
cn 1697. avec Claude-Eliſabeth
Apechon de Saint
André , de laquelle il a
pluſieurs enfans;& deMM.
de S. Georges , tous deux
Chanoines & Comtes de
Lyon. La maiſon dont il
étoit iſſue eſt diſtinguée par
ſon ancienneté & par ſes
alliances , & il y a grande
apparence qu'elle a la même
origine que celle des
Marquis de Verac en Poitou
, de laquelle étoit feu
136 MERCURE
M. le Marquis de Verac ,
Chevalier de l'Ordre du
S. Eſprit , pere du Marquis
de Verac d'aujourd'hui.
L'Evêque d'Autun,premier
Suffragant de l'Archevêché
de Lyon , joüit de tous les
revenus de l'Archevêché ,
en attendant que le Roy y
nomme.
M. Nicolas Meſnager
Chevalier de l'Ordre de S.
Michel , Conſeiller- Secretaire
du Roy , & ci - devant
ſon Ambaſſadeur extraor
dinaire & Plenipotentiaire
pour
3
GALANT. 137
pour la paix d'Utrecht ,
mourut le 15. Juin.
Le Chevalier de Coigni
âgé de fix ans , mourut le
18. Juin. Il étoit fils de M.
François de Franctor , Marquis
de Coigni , Colonel
general des dragons de
France , Maréchal des
Camps& Armées du Roy ,
Gouverneur & Bailly des
ville & château de Caën ,
& de Henriette de Monbourché
du Bordage ; &
petit- fils de feu M.le Comte
deCoigny, Gouverneur &
Juin 1714. M
138 MERCURE
Bailly de Caën, Lieutenant
general des armées du Roy;
& de Dame Marie - Françoiſe-
Uranie deMatignon.
Meſſieurs de Franctot d'une
famille diſtinguée dans la
Robe & dans l'Epée , & originaires
de Normandie , ſe
font alliez aux maiſons de
Montmorency , de Harcourt
,& à celles d'Ache &
de S. SimonCourtaumer, &
elle adonnédes Chevaliers
deMalthe au grandPrieuré
de France nó histoco
Dame Marie- Catherine
GALANT 139
d'Angennes , veuve de Philippe-
François Lhermite ,
Seigneur d'Hyeville de Ste
Barbe enAuge , de Mont
champ&deMelie en Normandie,
mourut le
laiſſant pour fille unique
Eliſabeth Lhermite,mariée
le Mars 1700.avec Pierre
de Monteſquiou d'Artagnan
, à preſent Maréchal
de France. Me d'Hyeville ,
qui vient de mourir , étoit
couſine-germaine de feuës
Mesdames les Comteffe
d'Olonne &Maréchale de
la Ferté , & fille de Jenn
Mij
340 MERCURE
d'Angennes , Seigneur de
Fontaine - Riant , & d'Iſabelle
Graffart ; & tante du
Comte d'Angennes , aujourd'hui
Colonel du regiment
de Normandie.
こ
: MeffireCharles Boucher,
Seigneur d'Orsay, Cóſeiller
d'Etat,& ancien Prevôt des
Marchands , mourut les.
Juin , en ſa 73. année.
Dame Marie Sebrette
Veuve de M. Jerôme Me.
reau Chevalier, Confeiller
de la Grand Chambre!
GALANT. Y
mourut le dix - ſept Juin
Dame Renée- Marie Henin,
veuve de M. de Monchalt ,
Conſeiller au Parlement , dont
la fille avoit épousé M. de Barantin
, Maître des Requêtes ,
mort Intendant de Dunkerque
, mourut le 16.de ce mois.
M. le Moyne,ancien Avocat ,
& fous-Doyen des Avocats du
Parlement de Paris , celebre
par ſa probité , & infatigable
dans le travail , mourut le 15.
M. Louis de Rochouart,Duc
deMortemar, PairdeFrance ,
Prince de Tonne- Charante
&c. prit feance au Parlement
Een qualité de Pair de France
142 MERCURE
1
le 14. Juin . Le Marquiſat de
Mortemar en Poitou fut érigé
en Duché & Pairie en faveur
de Gabriel de Rochouart , bif.
ayeul de M. le Duc de Mortemar
d'aujourd'hui , Chevalier
des Ordres du Roy , premier
Gentilhomme de ſa Chambre ,
& Gouverneur de Paris par
Lettres patentes du Roy Louis
XIV. 1653. verifiées au Parlement
le 15.Sept. 1663. La maison
de Rochouart eſt une des plus
anciennes &des plus illuſtres du
Royaume,& la genealogie s'en
trouve dans l'hiſtoire des grāds
Officiers de la Couronne , aux
chap. des Maréchaux de France
& des Generaux des galeres ,
& dans les additions aux Memoires
de Caſtelnau par le Laboureur,
GALANT. 143
Le 13. Juin Nicolas- Louis de
Bailleul , Marquis de Châteaugontier,
Confeiller au Parle
ment, fut reçû dans la Charge
de Preſident au Mortier , va-
- cante par la mort de M. fon
- pere ; & il eſt le quatrième de
pere en fils qui ait rempli cette
Charge,depuis NicolasdeBailleul
, Baron de Châteaugontier,
Chancelier de la Reine , & de-
- puis Surintendant des Finances
de France , qui y futreçû le as.
Septembre 1627410 231
M. le Pelletier des Forts, Intendant
des Financesa été
nommé Conſeiller d'Etatil
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Résumé : MORTS.
Le texte présente une série de décès et de biographies de personnalités notables. Joseph Remy de Livron, Marquis de Livron, est décédé le 8 mai. Il était le frère de Jean-Baptiste Evrard de Livron et de Marie-Françoise-Almodie de Livron, mariée en 1705. Marc-Antoine-Constantin Valon, Seigneur de Montmain, est décédé en 1713. Il était le fils de Joseph-Remy de Livron, Colonel d'un régiment de cavalerie, décédé en 1687, et de Françoise Benigne de Belloix. La maison de Livron, établie en Limousin depuis plus de 400 ans, s'est alliée à plusieurs maisons illustres. Dame Geneviève-Thérèse Chamillard, épouse de Guy de Durfort, Duc de Lorge, est décédée le 31 mai à l'âge de 78 ans, laissant deux fils. Elle était la fille de Michel Chamillart, Ministre d'État et ancien Contrôleur général des Finances. Dame Madeleine de Riqueti, veuve de Jacques du Châtelet, est décédée le 3 juin. Elle avait été mariée en 1669 et avait plusieurs enfants. Messire Archambault-François Barjot d'Auneüil, Chanoine de la Sainte-Chapelle de Paris, est décédé le 9 juin. Il était issu d'une famille originaire du Baujolais, alliée à plusieurs maisons nobles. M. Henry Jolly, Lieutenant-Colonel et Brigadier des armées du Roi, est également décédé le 9 juin. Dame Catherine Henriette d'Angennes, veuve de Louis de La Trémoille, est décédée le 13 juin. Elle était la sœur de Dame Madeleine d'Angennes, veuve du Maréchal Duc de La Ferté. Messire Claude de Saint-Georges, Archevêque de Lyon, est décédé le 9 juin. Il était issu d'une famille distinguée par son ancienneté et ses alliances. Le Chevalier de Coigny, âgé de 56 ans, est décédé le 18 juin. Il était issu d'une famille distinguée dans la Robe et dans l'Épée, originaire de Normandie. Dame Marie-Catherine d'Angennes, veuve de Philippe-François Lhermite, est décédée laissant une fille unique, Élisabeth Lhermite, mariée à Pierre de Montesquiou d'Artagnan, Maréchal de France. Plusieurs autres personnalités, dont Charles Boucher, Seigneur d'Orsay, et Louis de Rochouart, Duc de Mortemar, sont également mentionnées pour leur décès ou leurs fonctions notables. Nicolas-Louis de Bailleul, Marquis de Châteaugontier, a été reçu dans la charge de Président au Mortier le 13 juin.
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39
p. 143-144
MARIAGES.
Début :
Marie-Louise-Genevieve de Bouchet de Sourches, fille de [...]
Mots clefs :
Comte, Fille
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MARIAGES.
MARIAGE
5
Marie Louiſe-Genevieve det
Bouchet de Sourches , fille de
144 MERCURE
M. Louis François de Bouchet
de Sourches, Conſeillerd'Etat,
Prevot de l'Hôtel , & grand
Prevôt de France , &de Marie-
Genevieve de Chambes , née
Comteffe de Montſorau.épou.
fa le 16. May Jean-Baptiste-Nicolas
Demés de la Chenaye ,
Comte de Rougemont, Grand
Tranchant , Porte - Cornette
blanche,Gouverneur de Meulan
, & a eu soooo. livres de
brevet de retenuë fur ſes deux
premieres Charges.
M. deBaguevilledeBonnetot
, frere de Me la Prefidente
d'Aligre , & de Me la Premiere
Preſidente de Pontcarré , a
épouſe le 23. Juín Mademoi
ſelle de Châtillon , fille de M.
le Comte de Châtillon.
5
Marie Louiſe-Genevieve det
Bouchet de Sourches , fille de
144 MERCURE
M. Louis François de Bouchet
de Sourches, Conſeillerd'Etat,
Prevot de l'Hôtel , & grand
Prevôt de France , &de Marie-
Genevieve de Chambes , née
Comteffe de Montſorau.épou.
fa le 16. May Jean-Baptiste-Nicolas
Demés de la Chenaye ,
Comte de Rougemont, Grand
Tranchant , Porte - Cornette
blanche,Gouverneur de Meulan
, & a eu soooo. livres de
brevet de retenuë fur ſes deux
premieres Charges.
M. deBaguevilledeBonnetot
, frere de Me la Prefidente
d'Aligre , & de Me la Premiere
Preſidente de Pontcarré , a
épouſe le 23. Juín Mademoi
ſelle de Châtillon , fille de M.
le Comte de Châtillon.
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Résumé : MARIAGES.
Le texte mentionne deux mariages. Le premier, le 16 mai, unit Marie Louise-Geneviève de Bouchet de Sourches à Jean-Baptiste-Nicolas Demés de la Chenaye, Comte de Rougemont. Le second, le 23 juin, concerne Monsieur de Bagueville de Bonnetot et Mademoiselle de Châtillon.
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40
p. 286-290
MORTS.
Début :
Marie Anne Mancini Duchesse de Boüillon mourue [...]
Mots clefs :
Comte, Auvergne, Conseiller, Parlement
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS.
MORTS.
Marie Anne Mancini Du
cheffe de Boüillon mourut
fubitement le 20 de ce
mois. Son corps fut porté
le 25. aux Theatins. Elle
avoit épousé le 20. Avril
1662. Godefroy Maurice de
la Tour Duc de Boüillon ,
Vicomte de Turenne , Duc
d'Albret & de Chasteau
GALANT. 287
Thierry , Comte d'Auvergne
, d'Evreux &c. Pair &
Grand Chambellan de
France , Gouverneur &
Lieutenant General du
haut & bas Auvergne ,
& eſtoir fille de Michel
Laurent Mancini , qui
avoit époufé Jeronime Mazarin
foeur puiſnée du Car .
dinal Mazarin , morte le
29. Decembre 1656. Leurs
enfans furent ; N. Comte
de Mancini , tué au combat
du Fauxbourg Saint Antoine
à Paris ; Philippe Julien
quijoignit à fon nomceluy
288 MERCURE
de Mazarin ; N. dit l'Abbé
Mancini , qui fut tué Malheureuſement
au College
en joüant avec ſes amis le
15. Decembre 1654. Alfonſe
mort le s. Janvier 1658.
âgé de 14. ans ; Laure alliée
le 4. Fevrier 1651. avec
Loüis Duc de Vendôme &
de Mercoeur , morte le 8.
Fevrier 1657. Olympe Sur-
Intendante de la Maiſon de
la Reine , mariée le 20 Fevrier
1657. à Eugene Maurice
de Savoye Comte de
Soiſſons , & Marie femme
de Laurent Colonne Conneftable
GALANT. 289
neſtable du Royaume de
Naples , Hortenſe qui ef
pouſa le 21. Fevrier 1661.
Armand Charles dela Porte
, Duc de la Meilleraye ,
ſubſtitué au nom & armes
de Mazarin , elle mourut
en Angleterre le 2. Juillet
1699. & Marie Anne Manncini
qui vient de mourir.
Paul Mancini Baron Romain
, aimoit les belles
Lettres , & fuft premier
Inſtituteur de l'Academie
des Humoristes , il vivoit
l'an 1600.
Dame Marie Ceberet ,
Juin 1714. Bb
$
190 MERCURE
Veuve de Mefire Hierofme
Merault , Conſeiller de la
Grande Chambre du Parlement,
mourut le 17. Juin
1714
MMeefſiirree François le Boultz
Seigneur d'Aubevois , Conſeiller
Clerc au Parlement
de Metz , mourut le 20,
Juin 1714.
• Nicolas Jean Geneſt de
Launay Secretaire du Roy,
&l'un des Fermier Generaux
de Sa Majesté , mourut
le
Marie Anne Mancini Du
cheffe de Boüillon mourut
fubitement le 20 de ce
mois. Son corps fut porté
le 25. aux Theatins. Elle
avoit épousé le 20. Avril
1662. Godefroy Maurice de
la Tour Duc de Boüillon ,
Vicomte de Turenne , Duc
d'Albret & de Chasteau
GALANT. 287
Thierry , Comte d'Auvergne
, d'Evreux &c. Pair &
Grand Chambellan de
France , Gouverneur &
Lieutenant General du
haut & bas Auvergne ,
& eſtoir fille de Michel
Laurent Mancini , qui
avoit époufé Jeronime Mazarin
foeur puiſnée du Car .
dinal Mazarin , morte le
29. Decembre 1656. Leurs
enfans furent ; N. Comte
de Mancini , tué au combat
du Fauxbourg Saint Antoine
à Paris ; Philippe Julien
quijoignit à fon nomceluy
288 MERCURE
de Mazarin ; N. dit l'Abbé
Mancini , qui fut tué Malheureuſement
au College
en joüant avec ſes amis le
15. Decembre 1654. Alfonſe
mort le s. Janvier 1658.
âgé de 14. ans ; Laure alliée
le 4. Fevrier 1651. avec
Loüis Duc de Vendôme &
de Mercoeur , morte le 8.
Fevrier 1657. Olympe Sur-
Intendante de la Maiſon de
la Reine , mariée le 20 Fevrier
1657. à Eugene Maurice
de Savoye Comte de
Soiſſons , & Marie femme
de Laurent Colonne Conneftable
GALANT. 289
neſtable du Royaume de
Naples , Hortenſe qui ef
pouſa le 21. Fevrier 1661.
Armand Charles dela Porte
, Duc de la Meilleraye ,
ſubſtitué au nom & armes
de Mazarin , elle mourut
en Angleterre le 2. Juillet
1699. & Marie Anne Manncini
qui vient de mourir.
Paul Mancini Baron Romain
, aimoit les belles
Lettres , & fuft premier
Inſtituteur de l'Academie
des Humoristes , il vivoit
l'an 1600.
Dame Marie Ceberet ,
Juin 1714. Bb
$
190 MERCURE
Veuve de Mefire Hierofme
Merault , Conſeiller de la
Grande Chambre du Parlement,
mourut le 17. Juin
1714
MMeefſiirree François le Boultz
Seigneur d'Aubevois , Conſeiller
Clerc au Parlement
de Metz , mourut le 20,
Juin 1714.
• Nicolas Jean Geneſt de
Launay Secretaire du Roy,
&l'un des Fermier Generaux
de Sa Majesté , mourut
le
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Résumé : MORTS.
Le texte mentionne plusieurs décès et informations biographiques. Marie Anne Mancini, duchesse de Bouillon, est décédée subitement le 20 du mois. Son corps a été porté aux Théatins le 25. Elle avait épousé Godefroy Maurice de La Tour, duc de Bouillon, le 20 avril 1662. Marie Anne Mancini était la fille de Michel Laurent Mancini et de Jeronime Mazarin, sœur du cardinal Mazarin, décédée le 29 décembre 1656. Parmi ses enfants, on compte plusieurs figures notables : un comte de Mancini tué au combat, Philippe Julien Mancini-Mazarin, l'abbé Mancini tué au collège, Alphonse décédé à 14 ans, Laure mariée au duc de Vendôme, Olympe mariée au comte de Soissons, Hortense mariée au duc de La Meilleraye et décédée en Angleterre, et Marie Anne Mancini elle-même. Paul Mancini, baron romain, était connu pour son amour des belles lettres et fut le premier instituteur de l'Académie des Humoristes. Le texte mentionne également le décès de Dame Marie Ceberet, veuve de Me Hierofme Merault, le 17 juin 1714, ainsi que celui de Mme Françoise Le Boultz, seigneur d'Aubevois, conseiller au Parlement de Metz, le 20 juin 1714, et de Nicolas Jean Genest de Launay, secrétaire du roi et fermier général.
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41
p. 178-198
Morts [titre d'après la table]
Début :
L'Article des Morts peut bien trouver sa place à la suite [...]
Mots clefs :
Marquis, Roi, Chevalier, Seigneur, Comte, Abbé, Esprit, Religion, Bordeaux, Normandie, Dame, Général, Lieutenant
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Morts [titre d'après la table]
bien trouver sa place à la fuite
de l'examen des eaux de Bourbon
, puisque quelques sçavantes
Dissertations que les
plus sçavantsMedecins fafsent
sur les specifiquesles plus
souverains,toutl'Art d'Escu-
- lape est foible contre la necessité
de mourir.
Mrle Marquis de la Charce
est mort le 6. May à Nions
en Dauphiné,touché des plus
vifs sentimens de picté & de
religion. Il avoit esté élevé
dans l'heresie de Calvin; sa
conversion à la Religion Ca..
tholique avoit attiré celle de
sa Famille,& d'une partie de
son canton, & sa mort vient
d'estre pour eux un merveilkux
exemple d'édification.
Mrle Marquis de la Charce
estoit ce qu'on pouvoitappeller
uncaractereaccompli,
& pour l'esprit, & pour les
sentimens; personne n"jgno-i
roit les raresqualitez de son
coeur: ce (iul endroit meriteroit
un éloge particulier,si
tout ce que j'en pourrois dire
n'cfkic public, & fort audessous
de tout ce qu'il meritoit.
Il avoitcommencéàservirdéssaplus
tendre enfance,
& avoit donné des marques
de son zele pour le servicedu
Roy dans les occasions les
plus remarquables. Né pour
, les plusgrandes choses, si la
fortune luy eust esté un peu
plus favorable, tous les Emplois
luy paroissoient égaux
lorsqu'il s'agissoit du fervicc.
Le seul nom de la Charce fait
l'éloge de tous ceux qui le
portent:ils ont tous esté distingucz
par un merite particulier
& par un cfprit superieur.
Mre Pierre de laTour
son pere, Marquis de la Charce,
fut fait Lieutenant general
des Armées du Royà l'age de
vingt-huit ans; cette dilHnc.
tion particulière marque assez
son merite: il seroit parvenu
aux plus hautes dignitez si de
grandes blessures & ses incommodiccz
ne l'eussent mis
hors d'état de continuer le fervice.
Il avoit épousé Dame
Catherine de la Tour sa cousine
germaine;c'est cette Dame
qui parut à laCour, il y a
quelques années, quoy que
dans un agefort avancé: elle
y fit paroître autant d'esprit
que de politesse ; son merite
fut reconnu du Roy même,
qui l'honora de mille marques
>d'eftime&dedittin£tion.L'illustre
Mcde la Charce,qui a
..- tant fait d'honneur à son (exe,
&dont il en inutile derepeter
les éloges, estoit sa fille, &
soeurs du deffunt : il en reste
encore deuxsoeurs, Me la
Marquise de Bar,mariée en
Languedoc, où elle est en
grandeconsideration; & Mlle
Dalerac, dont l'esprit & le
merire font également cono
nus Les ouvrages de Poësie
1 qu'elle a laissé échaper au Public
ont toûjours paru des
Chefs-d'oeuvre par la délicatesse
des pensées & letour
ingénieux des expressions.
Mrs de laCharce font une
branche cadette de la Maison
de la Tour. Mr le Marquis
de laCharce qui avoit autant
d'amour pour son nom que
de noblesse & de dignité à le
soûtenir,avoit fait imprimer
peu de temps avant la mort,
la genealogie de cette Maison
, qui n'a point esté renduëpublique.
LeChefdecetteMaisonestaujourd'huyMr
le Marquis deGouverner jeune
Seigneur de beaucoup d'esperance.
Les aînez ont toûjours
porté ce nom depuis le
fameux
fameux René de la Tour, qui
s'est si fort distingué fous le
nom de Gouvernet : il estoit
contemporaindu Connêtable
de Lesdiguieres : sa naissance
& lesimportans fcrvices qu'il
avoit rendus à l'Etat,l'auroient
aussi-,, élevé aux plus
grandes dignitez
,
si-kl Religion
de Calvinqu'il professoit,
&qu'il ne voulutjamais
quittermalgré son zele pour
de Roy, n'avoit esté un obstacle
invincible. Mr le Marquis
dela Charce qui donne lieu à
l'cet article, avoit épouséDameClaudede
Mazel ,Dame
d'un merite , & d'une -vertu
distinguée. Elle estoitfillede
Mrc Jacq. de Mazel , ancien
Colonel de Cavalerie. Son
mérite & fâ reputation ont
rfte également connus dans le
Service. Il en avoit mêmerendus
d'importans à l'Etat. Il
avoitépousé Dame Catherine
Arnauld d'une branche de
la mêmeMaison que Mrs
dt Pompone daujourd'huy.
.C'efi une branche de cette
famille qui s'estoit établie
d'Auvergne en Languedoc
depuis plusieurs années. Feu
M. le Marquis de la Charce :*
n'a eu de ce mariage donc je
viens de vous parler, que deux
enfans, l'aîné connu fous le
nom de Comte de la Charce,
Colonel de Dragons aux
Troupes d'Espagne ; l'estime
dont M.•de Vendosmel'ho- noroît, & le cas qu''IiI.l. en faisoit
feroientassez son éloge, si
d'ailleurs il n'estoit connu par
un merite fingulicr, & par ce
même esprit qui est héréditaire
dans sa famille. Sa Majestéqui
se plaist à recompenser lemerite,
vient d'en donner une
marque en sa personne
l'honorant depuis , en peu de
jours d'une pension de1500.
livres:elle a accompagné cette
grace d'agrémens&dedistinction
pour luy & pourtoute
sa fanillc.
Le 21. Mars dernier Dame
Louise-Eugeniede Vieil châtel
de Montalant,épouse de
Mre Claude-Louis Lombard;
Chevalier, Seigneur d'Erme-
DOUville, & autres lieux, est
morte âgée de 24. ans. Elle
laisse un garçon &,. une fille:
Elle estoit fille de Mre Glaude
Charles de Viel Chastel, Chevalier,
Comte de Montalant,
& de Dame Geneviéve-Eugenie
de Vic.
Son Bisayeul du côté paternel
estoit Jean de VielChâtel,
Maquis de Montatanc,
Gouverneur de Barle Duc ÔC
Pays Barrois, qui a esté le premicr
CommandantdesMousquetaires
du Roy. Il avoit
épousé DameSufannede Bely
de Boulainvilliers, du côtépaternelelle
est encore petitenièce
de M. le Duc de S. Simon.
Ducôté maternel elle est
arriéré petitefille de Meryde
Vie, Garde des Sceaux de
-
France,&arriérépctite-niéce
de Dominique de Vie, Vice-
Amiral de France, Gouverneur
de Calais, & Pays re.
conquis,
-
Gaspard François Ménard
âcTissages., Prellre., Dozo.
teur de Sorbonne
,
Priçur de
Clairmont, grand- Archidiacre
de l'Eghie de Bordeaux,,
mourut à Bordeaux dans le
Seminaire le 2. 1. de Juin, âgé
de 2.6. ans 4. mois. Il estoit
alle, à Bordeaux y prendre
possession de ses Bénéfices que
Mr l'Abbé de Bourlemont lui
avoit. resigné ;& peu de jours
après il y a est enlevé d'une
fièvre maligne en six jours de
Dlaladie. Ilavoir parudansle
Public comme un prodige à
son âge. Né pour toutes tes
sciences, il fit icyl'annéederniere
pendant le cours de sa
licence le Panegiriqucde S.
Louis aux grands Jesuites, ccluy
de Sainte Anneaux Theatins,
& plusieurs autres Ser-
.jnons dans les Eglises les plus
célébrés de Paris; Il estoit fils
de François Ménard de Tisfanges,
Conseiller du Roy,
son Procureur General des
Eaux & Forests à laTable de
Marbrer à la Chambre de
l'Arsenal pour la reformation
llcs Eaux& Forests >&de Maçguerite
Deshayettes sa merc,
& neveu de M. l'Abbé Ménard.
Cette familleoriginaire
de Poitou 0 & de Touraine est
tres-ancienne & tres-distinguée
par elle-même, par es
alliances,& les belles LcttrCSi.
Labranche dontestoit le defr
funt cft. établie à Paris il ya
prés de deux cent ans. t*-
,
LouisCatinat,AbbédeS.
Julien deToursy,mourut le.'
Juillet. Il estoit fils deRené
Catinat, Seigneur de Courtraïe&
de S Mars-Cônfcific'-r
au Parlement de Paris, & de
Frasçoise Frozon,& frere de
Pierre
Pierre de Catinat, Seigneur de
S. Mars, aussiConleiller au
Parlement, & neveil de Ni- ,
colas Catinat, Seigneur de S.
Gratien, Maréchal de France;.
-
Messire Leonor de Matignon,
Evêque & Comte de
Lizieux
,
Abbé de Lassay &
de Torigny, mourut le 14.
Juillet,âgéde78. ans. Ilavoit
si, If esténommé a cet Evêchhél en
1677. par lademission d'Eleonor
Goyon deMatignon son
oncle;il étoit frerc aîné de Mr
le Comte de Matignon & de
Mr le Maréchal de Matignon,
& fils de Françoisde Matignon,
Comte de Marigny,
Torigny, Montmartin, & de
Gafley,Marquis de Lonré..
Chevalier des-Ordres du Roy,
Lieutenant Générât en haLTe
Normandie) & de Anne Malot
de Bercy, & petit fils de
Charles Sire de Moignon,
Comte de Torigny, Chevalier
des Ordres du Roy, Lieutenant
General de Normandie,
& d'Eleonorde Longuevile,
Dame deGaffey ,filled'Eleonor
Duc de Longueville
94
& de Marie do Bourbon, & arrierefils de Jacques
Sire de Matignon,Maréchal
de France, Gouverneur;de
Normandie &de Bordeaux.
Lieutenant General en Guyen
ne, & Chevalier des Ordres
du Roy. La Maison de Matignon,
l'une des plus Illustres
duRoyaume,estoriginaire de
Bretagne;Estienne Goyon.
Seigneur de la Goyemiere &
deChasseau Goyon, ayant é
poufé vers l'an mo. Lucie de
Matignon, sa posterité en prit
depuis le nom & les armes.
L'Eveschéde Lizieux en
Normandie est fuffraganc de
Rouen, l'Evesqueest Seigneur
de laVille,&leDiocesest
diviséen quatre Archidiaconnez
, & contient cinqcent
quatre vingt Paroisses ; se premier
EvesqueestThibault;
quiletrouvaaud3.4.&
Conciles d'Orléans en 1538.
**541.& 1J¡.9.. :';
'McfEre JoachimTrotti ad
sa Chetardie t, Docteur en
Theologie & Curé de S. Sulpice,
mourut le 19. Mr Lan.
guetde Gergy, Vicaire de ladire
Eglise,Juy a succedé. Le
mois prochain je parleray plus
amplement de Mre -de, là
Chetardie. ," Mrl'AbbédéGould,àqui
leRoya donne l'Abbaye
RojfaledeS. LaonàThouars
en-Poitou, vaccante par la
more deMr l'Abbé Régnier,
Secretaite de l'Académie Françoise
voulant donner des
parques publiquesde sa reconnoissance
à Mr le Comte
de Pont Charrrain, a fait faire
un Servicesolemnel dans
l'Eglise de. son Abbaye, pour
lerepos de l'Ame de feuë Madame
la Chancelliere,avec
toue le zele& toute la devotionconvenable
à la dignité
&al'a pieté démettevertueuse
Dame.Tous les Corps de
laVille de Thüarsy affistelent
encérémonieaussi-bien:
que toute laNoblesse des environs
qu'il avoir eu le foin d'y
convoquer.
Mrl'AbbédeGould,Gen
til homme Irlandois a quitts
son Pays & abandonné toué
ses biens pour la Religion Ca
tholique,il s'etf rendu fort recommandable
par la quantité
de per sonnes qu'ilaconverties
en Poitou & dans les Provinces
voisines
de l'examen des eaux de Bourbon
, puisque quelques sçavantes
Dissertations que les
plus sçavantsMedecins fafsent
sur les specifiquesles plus
souverains,toutl'Art d'Escu-
- lape est foible contre la necessité
de mourir.
Mrle Marquis de la Charce
est mort le 6. May à Nions
en Dauphiné,touché des plus
vifs sentimens de picté & de
religion. Il avoit esté élevé
dans l'heresie de Calvin; sa
conversion à la Religion Ca..
tholique avoit attiré celle de
sa Famille,& d'une partie de
son canton, & sa mort vient
d'estre pour eux un merveilkux
exemple d'édification.
Mrle Marquis de la Charce
estoit ce qu'on pouvoitappeller
uncaractereaccompli,
& pour l'esprit, & pour les
sentimens; personne n"jgno-i
roit les raresqualitez de son
coeur: ce (iul endroit meriteroit
un éloge particulier,si
tout ce que j'en pourrois dire
n'cfkic public, & fort audessous
de tout ce qu'il meritoit.
Il avoitcommencéàservirdéssaplus
tendre enfance,
& avoit donné des marques
de son zele pour le servicedu
Roy dans les occasions les
plus remarquables. Né pour
, les plusgrandes choses, si la
fortune luy eust esté un peu
plus favorable, tous les Emplois
luy paroissoient égaux
lorsqu'il s'agissoit du fervicc.
Le seul nom de la Charce fait
l'éloge de tous ceux qui le
portent:ils ont tous esté distingucz
par un merite particulier
& par un cfprit superieur.
Mre Pierre de laTour
son pere, Marquis de la Charce,
fut fait Lieutenant general
des Armées du Royà l'age de
vingt-huit ans; cette dilHnc.
tion particulière marque assez
son merite: il seroit parvenu
aux plus hautes dignitez si de
grandes blessures & ses incommodiccz
ne l'eussent mis
hors d'état de continuer le fervice.
Il avoit épousé Dame
Catherine de la Tour sa cousine
germaine;c'est cette Dame
qui parut à laCour, il y a
quelques années, quoy que
dans un agefort avancé: elle
y fit paroître autant d'esprit
que de politesse ; son merite
fut reconnu du Roy même,
qui l'honora de mille marques
>d'eftime&dedittin£tion.L'illustre
Mcde la Charce,qui a
..- tant fait d'honneur à son (exe,
&dont il en inutile derepeter
les éloges, estoit sa fille, &
soeurs du deffunt : il en reste
encore deuxsoeurs, Me la
Marquise de Bar,mariée en
Languedoc, où elle est en
grandeconsideration; & Mlle
Dalerac, dont l'esprit & le
merire font également cono
nus Les ouvrages de Poësie
1 qu'elle a laissé échaper au Public
ont toûjours paru des
Chefs-d'oeuvre par la délicatesse
des pensées & letour
ingénieux des expressions.
Mrs de laCharce font une
branche cadette de la Maison
de la Tour. Mr le Marquis
de laCharce qui avoit autant
d'amour pour son nom que
de noblesse & de dignité à le
soûtenir,avoit fait imprimer
peu de temps avant la mort,
la genealogie de cette Maison
, qui n'a point esté renduëpublique.
LeChefdecetteMaisonestaujourd'huyMr
le Marquis deGouverner jeune
Seigneur de beaucoup d'esperance.
Les aînez ont toûjours
porté ce nom depuis le
fameux
fameux René de la Tour, qui
s'est si fort distingué fous le
nom de Gouvernet : il estoit
contemporaindu Connêtable
de Lesdiguieres : sa naissance
& lesimportans fcrvices qu'il
avoit rendus à l'Etat,l'auroient
aussi-,, élevé aux plus
grandes dignitez
,
si-kl Religion
de Calvinqu'il professoit,
&qu'il ne voulutjamais
quittermalgré son zele pour
de Roy, n'avoit esté un obstacle
invincible. Mr le Marquis
dela Charce qui donne lieu à
l'cet article, avoit épouséDameClaudede
Mazel ,Dame
d'un merite , & d'une -vertu
distinguée. Elle estoitfillede
Mrc Jacq. de Mazel , ancien
Colonel de Cavalerie. Son
mérite & fâ reputation ont
rfte également connus dans le
Service. Il en avoit mêmerendus
d'importans à l'Etat. Il
avoitépousé Dame Catherine
Arnauld d'une branche de
la mêmeMaison que Mrs
dt Pompone daujourd'huy.
.C'efi une branche de cette
famille qui s'estoit établie
d'Auvergne en Languedoc
depuis plusieurs années. Feu
M. le Marquis de la Charce :*
n'a eu de ce mariage donc je
viens de vous parler, que deux
enfans, l'aîné connu fous le
nom de Comte de la Charce,
Colonel de Dragons aux
Troupes d'Espagne ; l'estime
dont M.•de Vendosmel'ho- noroît, & le cas qu''IiI.l. en faisoit
feroientassez son éloge, si
d'ailleurs il n'estoit connu par
un merite fingulicr, & par ce
même esprit qui est héréditaire
dans sa famille. Sa Majestéqui
se plaist à recompenser lemerite,
vient d'en donner une
marque en sa personne
l'honorant depuis , en peu de
jours d'une pension de1500.
livres:elle a accompagné cette
grace d'agrémens&dedistinction
pour luy & pourtoute
sa fanillc.
Le 21. Mars dernier Dame
Louise-Eugeniede Vieil châtel
de Montalant,épouse de
Mre Claude-Louis Lombard;
Chevalier, Seigneur d'Erme-
DOUville, & autres lieux, est
morte âgée de 24. ans. Elle
laisse un garçon &,. une fille:
Elle estoit fille de Mre Glaude
Charles de Viel Chastel, Chevalier,
Comte de Montalant,
& de Dame Geneviéve-Eugenie
de Vic.
Son Bisayeul du côté paternel
estoit Jean de VielChâtel,
Maquis de Montatanc,
Gouverneur de Barle Duc ÔC
Pays Barrois, qui a esté le premicr
CommandantdesMousquetaires
du Roy. Il avoit
épousé DameSufannede Bely
de Boulainvilliers, du côtépaternelelle
est encore petitenièce
de M. le Duc de S. Simon.
Ducôté maternel elle est
arriéré petitefille de Meryde
Vie, Garde des Sceaux de
-
France,&arriérépctite-niéce
de Dominique de Vie, Vice-
Amiral de France, Gouverneur
de Calais, & Pays re.
conquis,
-
Gaspard François Ménard
âcTissages., Prellre., Dozo.
teur de Sorbonne
,
Priçur de
Clairmont, grand- Archidiacre
de l'Eghie de Bordeaux,,
mourut à Bordeaux dans le
Seminaire le 2. 1. de Juin, âgé
de 2.6. ans 4. mois. Il estoit
alle, à Bordeaux y prendre
possession de ses Bénéfices que
Mr l'Abbé de Bourlemont lui
avoit. resigné ;& peu de jours
après il y a est enlevé d'une
fièvre maligne en six jours de
Dlaladie. Ilavoir parudansle
Public comme un prodige à
son âge. Né pour toutes tes
sciences, il fit icyl'annéederniere
pendant le cours de sa
licence le Panegiriqucde S.
Louis aux grands Jesuites, ccluy
de Sainte Anneaux Theatins,
& plusieurs autres Ser-
.jnons dans les Eglises les plus
célébrés de Paris; Il estoit fils
de François Ménard de Tisfanges,
Conseiller du Roy,
son Procureur General des
Eaux & Forests à laTable de
Marbrer à la Chambre de
l'Arsenal pour la reformation
llcs Eaux& Forests >&de Maçguerite
Deshayettes sa merc,
& neveu de M. l'Abbé Ménard.
Cette familleoriginaire
de Poitou 0 & de Touraine est
tres-ancienne & tres-distinguée
par elle-même, par es
alliances,& les belles LcttrCSi.
Labranche dontestoit le defr
funt cft. établie à Paris il ya
prés de deux cent ans. t*-
,
LouisCatinat,AbbédeS.
Julien deToursy,mourut le.'
Juillet. Il estoit fils deRené
Catinat, Seigneur de Courtraïe&
de S Mars-Cônfcific'-r
au Parlement de Paris, & de
Frasçoise Frozon,& frere de
Pierre
Pierre de Catinat, Seigneur de
S. Mars, aussiConleiller au
Parlement, & neveil de Ni- ,
colas Catinat, Seigneur de S.
Gratien, Maréchal de France;.
-
Messire Leonor de Matignon,
Evêque & Comte de
Lizieux
,
Abbé de Lassay &
de Torigny, mourut le 14.
Juillet,âgéde78. ans. Ilavoit
si, If esténommé a cet Evêchhél en
1677. par lademission d'Eleonor
Goyon deMatignon son
oncle;il étoit frerc aîné de Mr
le Comte de Matignon & de
Mr le Maréchal de Matignon,
& fils de Françoisde Matignon,
Comte de Marigny,
Torigny, Montmartin, & de
Gafley,Marquis de Lonré..
Chevalier des-Ordres du Roy,
Lieutenant Générât en haLTe
Normandie) & de Anne Malot
de Bercy, & petit fils de
Charles Sire de Moignon,
Comte de Torigny, Chevalier
des Ordres du Roy, Lieutenant
General de Normandie,
& d'Eleonorde Longuevile,
Dame deGaffey ,filled'Eleonor
Duc de Longueville
94
& de Marie do Bourbon, & arrierefils de Jacques
Sire de Matignon,Maréchal
de France, Gouverneur;de
Normandie &de Bordeaux.
Lieutenant General en Guyen
ne, & Chevalier des Ordres
du Roy. La Maison de Matignon,
l'une des plus Illustres
duRoyaume,estoriginaire de
Bretagne;Estienne Goyon.
Seigneur de la Goyemiere &
deChasseau Goyon, ayant é
poufé vers l'an mo. Lucie de
Matignon, sa posterité en prit
depuis le nom & les armes.
L'Eveschéde Lizieux en
Normandie est fuffraganc de
Rouen, l'Evesqueest Seigneur
de laVille,&leDiocesest
diviséen quatre Archidiaconnez
, & contient cinqcent
quatre vingt Paroisses ; se premier
EvesqueestThibault;
quiletrouvaaud3.4.&
Conciles d'Orléans en 1538.
**541.& 1J¡.9.. :';
'McfEre JoachimTrotti ad
sa Chetardie t, Docteur en
Theologie & Curé de S. Sulpice,
mourut le 19. Mr Lan.
guetde Gergy, Vicaire de ladire
Eglise,Juy a succedé. Le
mois prochain je parleray plus
amplement de Mre -de, là
Chetardie. ," Mrl'AbbédéGould,àqui
leRoya donne l'Abbaye
RojfaledeS. LaonàThouars
en-Poitou, vaccante par la
more deMr l'Abbé Régnier,
Secretaite de l'Académie Françoise
voulant donner des
parques publiquesde sa reconnoissance
à Mr le Comte
de Pont Charrrain, a fait faire
un Servicesolemnel dans
l'Eglise de. son Abbaye, pour
lerepos de l'Ame de feuë Madame
la Chancelliere,avec
toue le zele& toute la devotionconvenable
à la dignité
&al'a pieté démettevertueuse
Dame.Tous les Corps de
laVille de Thüarsy affistelent
encérémonieaussi-bien:
que toute laNoblesse des environs
qu'il avoir eu le foin d'y
convoquer.
Mrl'AbbédeGould,Gen
til homme Irlandois a quitts
son Pays & abandonné toué
ses biens pour la Religion Ca
tholique,il s'etf rendu fort recommandable
par la quantité
de per sonnes qu'ilaconverties
en Poitou & dans les Provinces
voisines
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Résumé : Morts [titre d'après la table]
Le texte relate les décès et les biographies de plusieurs personnages notables. Le Marquis de la Charce est décédé le 6 mai à Nions en Dauphiné. Connu pour sa piété et sa conversion du calvinisme au catholicisme, sa mort a servi d'exemple édifiant pour sa famille et son canton. Il était reconnu pour son caractère accompli, son esprit et ses qualités de cœur. Il a servi le roi dès son jeune âge et a montré un zèle remarquable. Sa famille, les La Charce, est distinguée par un mérite particulier et un esprit supérieur. Son père, Pierre de la Tour, fut Lieutenant général des Armées du Roy à vingt-huit ans, mais des blessures l'ont empêché de continuer son service. Sa mère, Catherine de la Tour, était reconnue à la cour pour son esprit et sa politesse. Le Marquis avait épousé Claude de Mazel, fille du Colonel de Cavalerie Jacques de Mazel. Ils ont eu deux enfants, dont l'aîné, le Comte de la Charce, est Colonel de Dragons aux Troupes d'Espagne et a reçu une pension de 1500 livres. Dame Louise-Eugénie de Vieilchâtel de Montalant est décédée le 21 mars à l'âge de 24 ans, laissant un garçon et une fille. Elle était issue d'une famille noble avec des ancêtres distingués, dont Jean de Vielchâtel, Gouverneur de Bar-le-Duc. Gaspard François Ménard, docteur de Sorbonne, est décédé à Bordeaux à l'âge de 26 ans. Il était connu pour ses talents en sciences et en oratoire. Louis Catinat, Abbé de Saint-Julien de Toursy, est décédé en juillet. Il était issu d'une famille de conseillers au Parlement de Paris et neveu du Maréchal de France Nicolas Catinat. Messire Léonor de Matignon, Évêque et Comte de Lisieux, est décédé à l'âge de 78 ans. Il était issu d'une famille illustre de Bretagne, avec des ancêtres maréchaux de France et gouverneurs de provinces. L'évêché de Lisieux est suffragant de Rouen et comprend cinq cent quatre-vingt paroisses. Enfin, le texte mentionne le décès de Mère Joachim Trotti de la Chétardie, curé de Saint-Sulpice, et des actions de reconnaissance de l'Abbé de Gould envers le Comte de Pontcharrrain.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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42
p. 198-206
Mariage, [titre d'après la table]
Début :
Quelque peu de rapport qu'il y ait entre mort & mariage [...]
Mots clefs :
Maison, Comte, Roi, Fils
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mariage, [titre d'après la table]
aclque peu de rapport
qu'il y ait entre mort & ma*
riage,l'un me paroist sijuste
pour dedomager de l'autre,
que, je croy que rien ne convient
mieux que de substituer
l'article des mariages à ccluy
des morts.
Mademoisellede Lanoy de
Châtillon
,
puifnée de Mr le
Marquisde Châtillon, de l'IllustreMaison
de ce nom, a
epousé le deux Mr le Marquis
de Bagueville, Colonel
du Régiment de Bagueville,
qui est un des plus riches Gentils-
hommes de France. La
cérémonie de ce mariage a été
célébrée avec toutela pompe
& toutela magnificence imaginable.
Monseigneur le Duc
d'Orleans à qui toute la Maison
de Châtillon est fort chere,
avoit donnéleSallonde S.
Cloud pour cette Feste, où
rien de ce que l'Art peut inventer
de plus propre & de
plus éclatant ne fut épargné.
Paul Edoüart Colbert.
Comte de Creüilly,aépousé
le MademoiselleSpinola,
soeur puisnée de Madame la
Princesse de Vergagne, & fille
de Mr le Prince de Spinola,
Grand d'Espagne, forti de la
Maison. deSpinola
,
l'une des
plus anciennes & des plus puissanteMaisons
de l'Etat de Genes.
Mr le Comte de Creüilly
cft fils de feu Mr le Marquis
de Seignelay, Secretaire d'Etat,
Commandeur & grand
Tresorier des Ordres du Roy,
& de Catherine Therese de
Matignon, remariéedepuis
à Mr le Comte de Marfan de
la Maison de Lorraine, & pe- tit fils defeu, Mr Colbert, Ministre
& Secretaire d'Etat,
Controlleur General des Finances,&
grand Tresorier des
Ordres du Roy, & petitneveu
de Mr le Comte de Maulevrier,
Chevalier de rOIdrc
du S. Esprit, & Lieutenant
General des Arméesdu Roy.
Mr d'Ormesson Maistre
des Requestes ordinairede
l'Hostel,aépousé le 1i. MaÀcmolfcllc
de Beauvais, fille
de Mr de Beauvais, premier
President des Tresoreries de
France d'Orleans, & de Dame
Marie Fontaine, fillede
MrFontaine des Montée,&
soeurde Madame de Megrigny
, &de Madame la Presidented'Aligre
& de Mr l'Abbé
Fontaine , Conseiller au
Parlement, & Doyen de EgliCc
Cathedrale d'Orleans, &
; niece de Mr Fontaine des Bordsees,
Diolye.n du grand Con-
)!
Mr d'Ormesson est fils de
Mre Antoine François de Pau- le,Seigneurd'Ormesson, de
Saeicre, des Tournelles & autres
lieux,Maistredes Requestes
& Intendant, premierement
dans la Généralité de
Rouen.>, enfuite dans celle
4'^uvcrgne, & en dernier
lieu dans celle de Soissons. 11 • « 4 moururdans1"cxcrcice4ccettc
Chargele 21.Février1712. La
Maison d'Ormessonestalliée
aux maisonsde Château-neuf,
de la Vrilliere, de Hennequin,
de Brûlart, deVerthamon, de
Pomercu, de Prevost,dela
Grange,dêBaillêul, d'Hinselin,
de Feideau, &c. & eu une
des meilleuresMai(oj1$;âe<lJ
Robe.
CesGénealo^iesïnftrùifeilt
quelques Lecteurs, en ennuyent
d'autres,& quelquefois
un mot de plusou dt
moins qui y introduit ^>ir
hazard
,
fait raisonnerceux
qu'ilinteresse d'une maniere
quipasavantageuse,
commcilm'estarrivé lemoi*
dernier aufujec dela mort
de Madame laDuchesse de:
Lorge, dont la Genealogie efl:
malheureusement défigurée
parl'imprudenced'unfaux
terme;mais outreque je previendraycesinconveniens
avectoute
l'exactitude&toute
la précaution imaginables; je
promets de ne m'étendre dorresnavant
sur les Genealogies,
qu'autant que je feray indispensablement
obligé de le faire,
ou qu'autant qu'il«plairaà peu pres~ à ceux qui m'envoyenc
leurs Memoires, que
je prie sur tout de les dresser
d'unefaçon qui ne me dérobe
point la place que je destine
aux évenemens du mois.
qu'il y ait entre mort & ma*
riage,l'un me paroist sijuste
pour dedomager de l'autre,
que, je croy que rien ne convient
mieux que de substituer
l'article des mariages à ccluy
des morts.
Mademoisellede Lanoy de
Châtillon
,
puifnée de Mr le
Marquisde Châtillon, de l'IllustreMaison
de ce nom, a
epousé le deux Mr le Marquis
de Bagueville, Colonel
du Régiment de Bagueville,
qui est un des plus riches Gentils-
hommes de France. La
cérémonie de ce mariage a été
célébrée avec toutela pompe
& toutela magnificence imaginable.
Monseigneur le Duc
d'Orleans à qui toute la Maison
de Châtillon est fort chere,
avoit donnéleSallonde S.
Cloud pour cette Feste, où
rien de ce que l'Art peut inventer
de plus propre & de
plus éclatant ne fut épargné.
Paul Edoüart Colbert.
Comte de Creüilly,aépousé
le MademoiselleSpinola,
soeur puisnée de Madame la
Princesse de Vergagne, & fille
de Mr le Prince de Spinola,
Grand d'Espagne, forti de la
Maison. deSpinola
,
l'une des
plus anciennes & des plus puissanteMaisons
de l'Etat de Genes.
Mr le Comte de Creüilly
cft fils de feu Mr le Marquis
de Seignelay, Secretaire d'Etat,
Commandeur & grand
Tresorier des Ordres du Roy,
& de Catherine Therese de
Matignon, remariéedepuis
à Mr le Comte de Marfan de
la Maison de Lorraine, & pe- tit fils defeu, Mr Colbert, Ministre
& Secretaire d'Etat,
Controlleur General des Finances,&
grand Tresorier des
Ordres du Roy, & petitneveu
de Mr le Comte de Maulevrier,
Chevalier de rOIdrc
du S. Esprit, & Lieutenant
General des Arméesdu Roy.
Mr d'Ormesson Maistre
des Requestes ordinairede
l'Hostel,aépousé le 1i. MaÀcmolfcllc
de Beauvais, fille
de Mr de Beauvais, premier
President des Tresoreries de
France d'Orleans, & de Dame
Marie Fontaine, fillede
MrFontaine des Montée,&
soeurde Madame de Megrigny
, &de Madame la Presidented'Aligre
& de Mr l'Abbé
Fontaine , Conseiller au
Parlement, & Doyen de EgliCc
Cathedrale d'Orleans, &
; niece de Mr Fontaine des Bordsees,
Diolye.n du grand Con-
)!
Mr d'Ormesson est fils de
Mre Antoine François de Pau- le,Seigneurd'Ormesson, de
Saeicre, des Tournelles & autres
lieux,Maistredes Requestes
& Intendant, premierement
dans la Généralité de
Rouen.>, enfuite dans celle
4'^uvcrgne, & en dernier
lieu dans celle de Soissons. 11 • « 4 moururdans1"cxcrcice4ccettc
Chargele 21.Février1712. La
Maison d'Ormessonestalliée
aux maisonsde Château-neuf,
de la Vrilliere, de Hennequin,
de Brûlart, deVerthamon, de
Pomercu, de Prevost,dela
Grange,dêBaillêul, d'Hinselin,
de Feideau, &c. & eu une
des meilleuresMai(oj1$;âe<lJ
Robe.
CesGénealo^iesïnftrùifeilt
quelques Lecteurs, en ennuyent
d'autres,& quelquefois
un mot de plusou dt
moins qui y introduit ^>ir
hazard
,
fait raisonnerceux
qu'ilinteresse d'une maniere
quipasavantageuse,
commcilm'estarrivé lemoi*
dernier aufujec dela mort
de Madame laDuchesse de:
Lorge, dont la Genealogie efl:
malheureusement défigurée
parl'imprudenced'unfaux
terme;mais outreque je previendraycesinconveniens
avectoute
l'exactitude&toute
la précaution imaginables; je
promets de ne m'étendre dorresnavant
sur les Genealogies,
qu'autant que je feray indispensablement
obligé de le faire,
ou qu'autant qu'il«plairaà peu pres~ à ceux qui m'envoyenc
leurs Memoires, que
je prie sur tout de les dresser
d'unefaçon qui ne me dérobe
point la place que je destine
aux évenemens du mois.
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Résumé : Mariage, [titre d'après la table]
Le texte traite de mariages et de généalogies, mettant en avant l'importance des unions matrimoniales par rapport aux décès. Il mentionne plusieurs mariages notables, tels que celui de Mademoiselle de Lanoy de Châtillon avec le Marquis de Bagueville, célébré avec grande pompe et magnificence. Un autre mariage significatif est celui de Paul Édouard Colbert, Comte de Creüilly, avec Mademoiselle Spinola. Le texte détaille également les lignées et les titres des familles impliquées, comme la Maison de Châtillon et la Maison de Spinola. Il évoque aussi le mariage de Mr d'Ormesson avec Mademoiselle de Beauvais, en précisant les titres et les fonctions des familles concernées. Le texte aborde également les erreurs possibles dans les généalogies et la promesse de l'auteur de les éviter à l'avenir, tout en se concentrant sur les événements du mois.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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43
p. 267-280
Mariages. [titre d'après la table]
Début :
Le 26. du mois de Juillet dernier, Messire Guillaume Alexandre [...]
Mots clefs :
Dame, Marquis, Régiment, Roi, Colonnel, Président, Maréchal, Mariage, Parlement, Femme, Fille, Comte
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texteReconnaissance textuelle : Mariages. [titre d'après la table]
Le 2.6. du mois de Juillet
dernier, Messire Guillaume
Alexandre de Galard de
Bearn
,
Marquis de Brassac lé.
pousaDamoifcllc Luce FrançoisedeCotcntin
de Tourville,
fille unique deMlle Maréchal
de Tourville. Le mariage
s'est fait de l'agrément du
Roy & des Princes de. son
Sang qui leur ont fait l'honneur
d'en signer le Contrat.
S. A. S.Madame la Princesse,
assista à la celebration du mariage
,& Madame la Duchesse
de Vendosme mena la Mariée
à l'Eglise. Elle fit ensuite une
Festedigne de sa grandeur &
de sa magnisicence.
La Maison de Gallard eu
une des pius anciennes & des
plus illustres du Royaume
descenduë des Comtes de
Condomois. Elle a joint par
une alliance à son nom & à ses
armes, le nom & les armes
de la Maison de Bearn : Pierre
de Galard de Bearn étoit grand
Maistre des Ai balestriers fous
Philippe le Bel : plusieurs de
ses descendans ont esté Gouverneurs
de Xaintonge &
d'Augoumois : Jean de Galard
de Bearn, Comte de Brassacestoit
en 1640. Chevalier
de l'Ordre du S. Esprit, Gouverneur
de Lorraine, & Ambassadeur
du Roy àla Cour de
Rome, & Catherine de Sainte:
Maure sa femme,Dame
d honneur de la ReineMere.
La Maison de Cotentin de
Tourville,estaussi très.-ancienne&
tres illustre;Cezar de
Cotentin, Comte de Tourville,
Commandast au Siege;
dela Rochelle, sous sonEminence
Mr le Cardinal de Ri- 1
chelieu; il eut de Luce de la
Rochefoucault, entr'autres
enfans, Anne- Hilarion- de
Coreni in de Tourville, Chevalier
de Malthe,qui par les j
differentes batailles qu'il avoit *
données '& gagnées pour le
service du. Roy, est parvenu
aux dignitez de Maréchal u
Vice-Amiralde France; il a
eudeLoüise Françoised Himbercourt,
deux enfans,Loüis
Alexandre de Cotentin de
Tourville, Colonel d'un Regiment
de son nom, tué à
l'attaque des retranchemens
de Denain,&Luce-Françoise
de Cotentin de Tourville, qui
vient d'épouser Mr le Marquis
de Brassac.
Messire Pierre Gilbert de
Voisins,Maistre des Requêtes
Ordinaire de l'Hostel du
Roy, a épousé le 25. Juillet
Damoiselle de Fieubet,
soeur de Loüis Gaspard
de FieubetConseiller au Parlement,
& fille de Paul de
Ficuber, Seigneur de Launac..,
de Reveillon & de Beauregard
,
Maistre des Requestes,
& de Dame Angélique Mar,
guérite deFourey.
Mr de Voisins est frere de
Mr le Comtede Vilaines, Colonel
du Regiment de Medoc,
& fils de Messire Pierre
Gilbert, Seigneur deVoisins,
Président aux Enquestes du
Parlement de Paris, & de
Dame Françoise Dongois.
* CettefamilledeGilbert est,
ancienneàParis & descendde
Jean Gilbertsieur de Voisins.
: Correcteur desComptesmort
le 5. Janvier 1507.& enterré à S. Severin avec Jeanne Bri-
! nou sa femme; elle s'estalliée
aux familles de Bourdin, de
Viole,du Prat,de Larcher, l,&c.n-r't' f)"'t TP'••V "d- l:'
Pour celle de Ficubet elle
est originaire de Languedoc
,
& elle descend d'Arnaud Fieubet
qui fut fait Greffier des
Etats de Languedoc par la faveur
de M le Connestable
Henry deMontmorency. Elle
a donné un Président à Mortier
& un Premier Président
auParlement de Toulouse &,
trois Maistres des Requestes
donc l'un estoit Chancelier de
la ReinemereduRoy,&elle
s'est alliée aux familles de S.
Pol, de Maniban
,
& Dossunà~i Toulou se,& à celles de Nico-
Li , de Longuëil &de Castille ; àParis.
Messire Jacques de Monccaux
d' A ~uxi, Marquisd'Au- ,:
xi, ci devant Capitaine aux
Girdes, & Colonel du Régiment
Royal Comtois, fils
unique de Missire François de
Monceaux
,
créé Marquis
d'Auxi, parletresdu mois
de Septembre 1687. & de
Dame Marie Magdelaine Jabert
du Thil, sorti des anciens
Sires, & Bersd'Auxi en
Picardie, connus il y a plus de
500. ans, a épousé le 20e de
ce mois Damoiselle Marie-
MagdelainedelaGrangeTrianon,
sille du feu Messire Loüis
Armand de la Grange Trianon
, Baron Duplessis aux
Tournelles, Conseiller au
,
Grand Conseil, & de Dame
MargueriteMagdelaine Joly
d'Oudeil ; & petite fille de
Loüts de la GrangeTrianon,
Seigneur d'Aravilliers, de
Nandi de Marconville, Châtelain
de Renets en Touraine,
&-' Président de la seconde
Chambre des Requestes du
Palais, & de Dame Marguerite
Martineau. Mademoiselle
de la Grange Trianon est niece
de MessireCharlesde la
Grange Trianon Abbé de
Saint Severe, Chanoine de
Nôtre Dame * de Paris, &
ConseillerClercau Parlement
&de feuë Dame Marguerite
dela Grange u morte en 16 87;
veuve deFrançois de la TremoilleDuc
de Noirmontier.
, ;*-? ( Lafamille
dela Grange cft
t
une des plus considerablesde
} Paris, clle descend de Michel
(de laGrange Seigneur de
| Trianon, MàistredelaCham- I bre aux deniers
, & Prevôt
r_',' des Marchands de cette Ville
( dés l'an1466. & de Guille-
: mette deLongüeil, elle s'est
*alliée auxfamilles de Boucher,
*d'Orfôy, de Molé, deBailleul,
de Hercis, de Bragelonne, de
»
Fourcy, de Charon, de Menars,&
c. ici -rff
Monsieur le Marquis d'Auxi
quivient de se marier,cit
neveu de Messire Henri do
Monceaux d'Auxi, Comte
d'Hanvoille, cy-devant Colonel
du Regiment de Dragons
qui de son mariageavec Dame de Crequy
d Osseu n'a que deux filles, &
de Messire Jacques de Monceaux
d'Auxi, dit Monsieur
de la Bruiere cy devant Caps- j
taine dans le Regiment de
Champagne qui n'a aussi que
deux filles de
:
son mariage
avec Dame Marie Anne le Fé- j
vrc sa femme, Soeur de M. j
Hardouin U Fevre de Fonteray,
cy-devant-Gentilhomme de Mr
le Marquis deBonnac, Envoyé
Extraordinaire de France, O4
à present tres -digne Auteur
du nouveau Mercure Galant;
DameJeanne de Soufflas
Bisayeule de Monsieur le Niarquis
d'Auxi,étoit grande tante
de feu M le Maréchal Duc
l de Boufflers, & cette Maison
d'Auxi s'est alliée à celles de
: Craon, de Piqirgny,de Me-
: lun, de la Tremoille d'Estouteville
,
d'Enghien, de
#
Remburses, de Crevecoeur,
de Quesdes, de Trafigny,
,
de Saveufc, de Hangec, de
Villiersl'Isle-Adam,de la
Chaisede Vieux Pont,de la
Vieuville, d'O, de Tiercelin,
de Brosse, de Breauté. de Rochechoüar;
de Saint Simon
de Soyecourt&del'Ecendart
Bully.
dernier, Messire Guillaume
Alexandre de Galard de
Bearn
,
Marquis de Brassac lé.
pousaDamoifcllc Luce FrançoisedeCotcntin
de Tourville,
fille unique deMlle Maréchal
de Tourville. Le mariage
s'est fait de l'agrément du
Roy & des Princes de. son
Sang qui leur ont fait l'honneur
d'en signer le Contrat.
S. A. S.Madame la Princesse,
assista à la celebration du mariage
,& Madame la Duchesse
de Vendosme mena la Mariée
à l'Eglise. Elle fit ensuite une
Festedigne de sa grandeur &
de sa magnisicence.
La Maison de Gallard eu
une des pius anciennes & des
plus illustres du Royaume
descenduë des Comtes de
Condomois. Elle a joint par
une alliance à son nom & à ses
armes, le nom & les armes
de la Maison de Bearn : Pierre
de Galard de Bearn étoit grand
Maistre des Ai balestriers fous
Philippe le Bel : plusieurs de
ses descendans ont esté Gouverneurs
de Xaintonge &
d'Augoumois : Jean de Galard
de Bearn, Comte de Brassacestoit
en 1640. Chevalier
de l'Ordre du S. Esprit, Gouverneur
de Lorraine, & Ambassadeur
du Roy àla Cour de
Rome, & Catherine de Sainte:
Maure sa femme,Dame
d honneur de la ReineMere.
La Maison de Cotentin de
Tourville,estaussi très.-ancienne&
tres illustre;Cezar de
Cotentin, Comte de Tourville,
Commandast au Siege;
dela Rochelle, sous sonEminence
Mr le Cardinal de Ri- 1
chelieu; il eut de Luce de la
Rochefoucault, entr'autres
enfans, Anne- Hilarion- de
Coreni in de Tourville, Chevalier
de Malthe,qui par les j
differentes batailles qu'il avoit *
données '& gagnées pour le
service du. Roy, est parvenu
aux dignitez de Maréchal u
Vice-Amiralde France; il a
eudeLoüise Françoised Himbercourt,
deux enfans,Loüis
Alexandre de Cotentin de
Tourville, Colonel d'un Regiment
de son nom, tué à
l'attaque des retranchemens
de Denain,&Luce-Françoise
de Cotentin de Tourville, qui
vient d'épouser Mr le Marquis
de Brassac.
Messire Pierre Gilbert de
Voisins,Maistre des Requêtes
Ordinaire de l'Hostel du
Roy, a épousé le 25. Juillet
Damoiselle de Fieubet,
soeur de Loüis Gaspard
de FieubetConseiller au Parlement,
& fille de Paul de
Ficuber, Seigneur de Launac..,
de Reveillon & de Beauregard
,
Maistre des Requestes,
& de Dame Angélique Mar,
guérite deFourey.
Mr de Voisins est frere de
Mr le Comtede Vilaines, Colonel
du Regiment de Medoc,
& fils de Messire Pierre
Gilbert, Seigneur deVoisins,
Président aux Enquestes du
Parlement de Paris, & de
Dame Françoise Dongois.
* CettefamilledeGilbert est,
ancienneàParis & descendde
Jean Gilbertsieur de Voisins.
: Correcteur desComptesmort
le 5. Janvier 1507.& enterré à S. Severin avec Jeanne Bri-
! nou sa femme; elle s'estalliée
aux familles de Bourdin, de
Viole,du Prat,de Larcher, l,&c.n-r't' f)"'t TP'••V "d- l:'
Pour celle de Ficubet elle
est originaire de Languedoc
,
& elle descend d'Arnaud Fieubet
qui fut fait Greffier des
Etats de Languedoc par la faveur
de M le Connestable
Henry deMontmorency. Elle
a donné un Président à Mortier
& un Premier Président
auParlement de Toulouse &,
trois Maistres des Requestes
donc l'un estoit Chancelier de
la ReinemereduRoy,&elle
s'est alliée aux familles de S.
Pol, de Maniban
,
& Dossunà~i Toulou se,& à celles de Nico-
Li , de Longuëil &de Castille ; àParis.
Messire Jacques de Monccaux
d' A ~uxi, Marquisd'Au- ,:
xi, ci devant Capitaine aux
Girdes, & Colonel du Régiment
Royal Comtois, fils
unique de Missire François de
Monceaux
,
créé Marquis
d'Auxi, parletresdu mois
de Septembre 1687. & de
Dame Marie Magdelaine Jabert
du Thil, sorti des anciens
Sires, & Bersd'Auxi en
Picardie, connus il y a plus de
500. ans, a épousé le 20e de
ce mois Damoiselle Marie-
MagdelainedelaGrangeTrianon,
sille du feu Messire Loüis
Armand de la Grange Trianon
, Baron Duplessis aux
Tournelles, Conseiller au
,
Grand Conseil, & de Dame
MargueriteMagdelaine Joly
d'Oudeil ; & petite fille de
Loüts de la GrangeTrianon,
Seigneur d'Aravilliers, de
Nandi de Marconville, Châtelain
de Renets en Touraine,
&-' Président de la seconde
Chambre des Requestes du
Palais, & de Dame Marguerite
Martineau. Mademoiselle
de la Grange Trianon est niece
de MessireCharlesde la
Grange Trianon Abbé de
Saint Severe, Chanoine de
Nôtre Dame * de Paris, &
ConseillerClercau Parlement
&de feuë Dame Marguerite
dela Grange u morte en 16 87;
veuve deFrançois de la TremoilleDuc
de Noirmontier.
, ;*-? ( Lafamille
dela Grange cft
t
une des plus considerablesde
} Paris, clle descend de Michel
(de laGrange Seigneur de
| Trianon, MàistredelaCham- I bre aux deniers
, & Prevôt
r_',' des Marchands de cette Ville
( dés l'an1466. & de Guille-
: mette deLongüeil, elle s'est
*alliée auxfamilles de Boucher,
*d'Orfôy, de Molé, deBailleul,
de Hercis, de Bragelonne, de
»
Fourcy, de Charon, de Menars,&
c. ici -rff
Monsieur le Marquis d'Auxi
quivient de se marier,cit
neveu de Messire Henri do
Monceaux d'Auxi, Comte
d'Hanvoille, cy-devant Colonel
du Regiment de Dragons
qui de son mariageavec Dame de Crequy
d Osseu n'a que deux filles, &
de Messire Jacques de Monceaux
d'Auxi, dit Monsieur
de la Bruiere cy devant Caps- j
taine dans le Regiment de
Champagne qui n'a aussi que
deux filles de
:
son mariage
avec Dame Marie Anne le Fé- j
vrc sa femme, Soeur de M. j
Hardouin U Fevre de Fonteray,
cy-devant-Gentilhomme de Mr
le Marquis deBonnac, Envoyé
Extraordinaire de France, O4
à present tres -digne Auteur
du nouveau Mercure Galant;
DameJeanne de Soufflas
Bisayeule de Monsieur le Niarquis
d'Auxi,étoit grande tante
de feu M le Maréchal Duc
l de Boufflers, & cette Maison
d'Auxi s'est alliée à celles de
: Craon, de Piqirgny,de Me-
: lun, de la Tremoille d'Estouteville
,
d'Enghien, de
#
Remburses, de Crevecoeur,
de Quesdes, de Trafigny,
,
de Saveufc, de Hangec, de
Villiersl'Isle-Adam,de la
Chaisede Vieux Pont,de la
Vieuville, d'O, de Tiercelin,
de Brosse, de Breauté. de Rochechoüar;
de Saint Simon
de Soyecourt&del'Ecendart
Bully.
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Résumé : Mariages. [titre d'après la table]
Le 26 juillet dernier, Messire Guillaume Alexandre de Galard de Bearn, Marquis de Brassac, a épousé Damoiselle Luce Françoise de Cotentin de Tourville, fille unique de Mademoiselle Maréchal de Tourville. Le mariage a été approuvé par le Roi et les Princes de son Sang, qui ont signé le contrat. Madame la Princesse et Madame la Duchesse de Vendosme ont assisté à la célébration et à la fête qui a suivi. La Maison de Galard est l'une des plus anciennes et illustres du Royaume, descendant des Comtes de Condomois. Elle a été alliée à la Maison de Bearn. Plusieurs membres de cette famille ont occupé des postes prestigieux, tels que Gouverneur de Saintonge et d'Auvergne, Chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit, Gouverneur de Lorraine, et Ambassadeur du Roi à la Cour de Rome. La Maison de Cotentin de Tourville est également très ancienne et illustre. César de Cotentin, Comte de Tourville, a commandé au siège de La Rochelle sous le Cardinal de Richelieu. Son petit-fils, Anne-Hilarion de Cotentin de Tourville, a atteint les dignités de Maréchal et Vice-Amiral de France. Luce Françoise de Cotentin de Tourville, l'épouse du Marquis de Brassac, est la fille de Louise Françoise d'Himbercourt. Par ailleurs, Messire Pierre Gilbert de Voisins, Maître des Requêtes Ordinaire de l'Hostel du Roy, a épousé Damoiselle de Fieubet, sœur de Louis Gaspard de Fieubet, Conseiller au Parlement. La famille de Voisins est ancienne à Paris et descend de Jean Gilbert, Sieur de Voisins, Correcteur des Comptes. La famille de Fieubet est originaire de Languedoc et a donné plusieurs Maîtres des Requêtes. Enfin, Messire Jacques de Monceaux d'Auxi, Marquis d'Auxi, a épousé Damoiselle Marie-Magdelaine de la Grange Trianon. La famille de la Grange est l'une des plus considérables de Paris et s'est alliée à de nombreuses familles illustres.
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44
p. 130-131
Allemagne.
Début :
Le six de Decembre on afficha à Vienne deux Ordonnances contre les Mandians [...]
Mots clefs :
Mendiants, Empereur, Comte, Capitaine Pretorius
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Allemagne.
Atlemajgte.'
Le six de Décembre on afficha à Vien
ne deux Ordonnances contre les Marídians
& autres gens íâns aveu , par les
quelles les personnes charijables font in-:
Vicées' à porter Ieuf% aumônes dans le'
tronc public des Eglises , afin que la dií
tribution s'en saífe avec Comtoilsance par'
te Comte de Khevenhuller , Lieutenant
de cette Vdk.-
On imnde de hambourg que. le Ca
pitaine Pretarius , soupçonné d'être le'
principal Auteur de l'aísaífinat du feu
Comte de Rantzau avoit été arrêté à
CrbíTen en Silesie , 6c de.là conduit dans
les prisons de Rendefbòurg.
Le Comte Merích, Plenipotentiaire de
l'Empereur dans leCercle de la Bafle Saxe#
a été choisi par S.M.I. pour assister en qua
lité de son CommiiTaire àl'électionde l'E.
1
JAN V 1ER i/jrV *jî
vêque de Hildeim. On ne doute pas que
le Prince Theodore de Biviere , Evêque
de Ratiíbonne y ëc Coadjuteur de Freysingen
, ne íôit élu. Le Comte de Curìeni
a été revêtu du même caractere y
de la part de l'Empereur , à l'élection d«
^Evêque de Liege.
Le six de Décembre on afficha à Vien
ne deux Ordonnances contre les Marídians
& autres gens íâns aveu , par les
quelles les personnes charijables font in-:
Vicées' à porter Ieuf% aumônes dans le'
tronc public des Eglises , afin que la dií
tribution s'en saífe avec Comtoilsance par'
te Comte de Khevenhuller , Lieutenant
de cette Vdk.-
On imnde de hambourg que. le Ca
pitaine Pretarius , soupçonné d'être le'
principal Auteur de l'aísaífinat du feu
Comte de Rantzau avoit été arrêté à
CrbíTen en Silesie , 6c de.là conduit dans
les prisons de Rendefbòurg.
Le Comte Merích, Plenipotentiaire de
l'Empereur dans leCercle de la Bafle Saxe#
a été choisi par S.M.I. pour assister en qua
lité de son CommiiTaire àl'électionde l'E.
1
JAN V 1ER i/jrV *jî
vêque de Hildeim. On ne doute pas que
le Prince Theodore de Biviere , Evêque
de Ratiíbonne y ëc Coadjuteur de Freysingen
, ne íôit élu. Le Comte de Curìeni
a été revêtu du même caractere y
de la part de l'Empereur , à l'élection d«
^Evêque de Liege.
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Résumé : Allemagne.
Le 6 décembre, Vienne publia deux ordonnances contre les Marídians et autres personnes sans aveu, invitant à des dons charitables dans les églises, supervisés par le Comte de Khevenhuller. À Hambourg, le capitaine Pretarius, suspecté du meurtre du Comte de Rantzau, fut arrêté en Silésie et incarcéré à Rendebòurg. Le Comte Merích, représentant impérial en Basse-Saxe, fut désigné pour l'élection de l'évêque de Hildesheim, où le Prince Théodore de Bavière est pressenti. L'Empereur nomma également le Comte de Curìeni pour l'élection de l'évêque de Liège.
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45
p. 613-615
MORTS, NAISSANCES & Mariages.
Début :
Jean-Pierre Moret de Bourchenu, Marquis de Valbonnays, Seigneur de Peyre, Saint Jean [...]
Mots clefs :
Lieutenant, Roi, Comte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS, NAISSANCES & Mariages.
MORTS , NAISSANCES
& Mariages.
Ean- Pierre Moret de Bourchenu , Marquis de
Valbonnays , Seigneur de Peyre , Saint Jean
d'Octaveon , &c. Premier Preſident de la Chambre
des Comtes de Dauphiné , mourut à Grenoble
le 2. de ce mois , dans la 79e année de fon
age , étant né le 25. Juin 1651 .
Dame Marie Mallet , veuve de M. Gedeon
du Metz , Chevalier , Comte de Rofnay, Vicomte
de Perrian , Seigneur de Rance , Corbeil , Chalette
, Courcelles , &c. Confeiller du Roi en fes
Confeils , Prefident en la Chambre des Comptes
à Paris , Intendant & Contrôleur General des
Meubles de la Couronne , decedée le 4. Mars ,
en la 84° année de fon âge.
>
Dame Françoife Paparel , Epoufe de Mre Philippes-
Charles de la Fare , Chevalier de l'Ordre
de la Toifon d'or , Gouverneur des Villes &
Château d'Alais & Pays des Sevenes Maréchal
des Camps & Armées du Roi , Lieute
nant General & Commandant dans la Province
du Languedoc , mourut en cette Ville le 7. de
ce mois , âgée de 34. ans.
Charles-Louis Lallemant , Chevalier , Comte
de Lerignan , mourut le 18. Fevrier , âgé de
73. ans.
(
Le 20. Henry Bouchay d'Orsay , Chevalier
de l'Ordre Militaire de S. Louis , Brigadier des
Armées du Roi , Premier Capitaine des Grenadiers
du Régiment des Gardes Françoifes , mourut
à Paris , âgé de 49. ans. Sa Compagnie a été
donnéc
614 MERCURE DE FRANCE.
donnée à M. d'Herbouville , Capitaine dans le
même Régiment. M. de Boiffin , Premier Lieutenant
à monter & Ayde-Major , a eû la Compagnie
de ce dernier. M. de Gravelle , Lieutenant,
a obtenu l'Ayde- Majorité , & M. de Vaudreuil a
eû la Lieutenance de M. de Graville.
Dame Marguerite-Françoiſe Joffan , Epouſe
de François-Louis Martial , Comte Defmoutiers
de Merinville , Capitaine-Lieutenant des Gendarmes
de la Reine , accoucha le 26. Fevrier d'une
fille , qui fut nommée Jeanne,
-
Dame-Claude Louife de Lory , Epoufe de
Charles de Marteliere, Ecuyer, Seigneur de Chancey-
la-Corte , Orfeville , Vaux , Motteux , &c.
ancien Gouverneur pour le Roi de la Ville de
Langres , Confeiller , Secretaire du Roi , Maiſon,
Couronne de France & de fes Finances , accoucha
le 28. du même mois d'une fille , qui fut tenuë
fur les Fonts & nommée Marie -Louife-Charlotte
, par Guillaume-Charles le Févre , Seigneur,
de la Valette , Biars , la Salle , S. Remy , &c.
Gentilhomme Ordinaire de Madame la Dauphine
de Savoye, & par D.Marie- Marguerite Lhorte
Beaulieu , Epoufe d'Auguftin- Antoine Picart de
Mauny , Confeiller du Roi en fes Confeils , Maître
Ordinaire en fa Chambre des Comptes.
La nuit du 6. au 7. du mois dernier , Louis de
Bouchet , Comte de Montforeau , Marquis de
Sourches &c. Grand- Prevôt de France , époufa
Charlotte Antoinette de Gontaut de Biron , fille
de Charles Armand de Gontaut , Duc de Biron ,
Lieutenant General des Armées du Roi & Gouverneur
de Landau , & de Marie Antoinette de
Bautru-Nogent.
`Jacques Tanneguy le Veneur , Marquis de Til..
lieres™
MARS. 1730. 615
lieres , Sous-Lieutenant des Chevaux - Legers &
Gendarmes de la Reine , fils du Comte de Tillie
res , Brigadier des Armées du Roi , & de D. Michelle
Gabrielle Dugué de Bagnoles , époufa le
13. Mars Dile Michelle Julie Francoife d'Aubeterre
, fille de Louis- Pierre-Jofeph Bouchar d'Efparbes
de Luffan , d'Aubeterre , Comte de Jonfac
&c. Capitaine- Lieutenant des Gendarmes de
Monfeigneur le Dauphin, Lieutenant General des
Provinces de Saintonge & Angoumois, & de feuë
Dame Françoiſe-Marie Henault ; la celebration
du mariage fut faite par l'Archevêque de Tours
& Mariages.
Ean- Pierre Moret de Bourchenu , Marquis de
Valbonnays , Seigneur de Peyre , Saint Jean
d'Octaveon , &c. Premier Preſident de la Chambre
des Comtes de Dauphiné , mourut à Grenoble
le 2. de ce mois , dans la 79e année de fon
age , étant né le 25. Juin 1651 .
Dame Marie Mallet , veuve de M. Gedeon
du Metz , Chevalier , Comte de Rofnay, Vicomte
de Perrian , Seigneur de Rance , Corbeil , Chalette
, Courcelles , &c. Confeiller du Roi en fes
Confeils , Prefident en la Chambre des Comptes
à Paris , Intendant & Contrôleur General des
Meubles de la Couronne , decedée le 4. Mars ,
en la 84° année de fon âge.
>
Dame Françoife Paparel , Epoufe de Mre Philippes-
Charles de la Fare , Chevalier de l'Ordre
de la Toifon d'or , Gouverneur des Villes &
Château d'Alais & Pays des Sevenes Maréchal
des Camps & Armées du Roi , Lieute
nant General & Commandant dans la Province
du Languedoc , mourut en cette Ville le 7. de
ce mois , âgée de 34. ans.
Charles-Louis Lallemant , Chevalier , Comte
de Lerignan , mourut le 18. Fevrier , âgé de
73. ans.
(
Le 20. Henry Bouchay d'Orsay , Chevalier
de l'Ordre Militaire de S. Louis , Brigadier des
Armées du Roi , Premier Capitaine des Grenadiers
du Régiment des Gardes Françoifes , mourut
à Paris , âgé de 49. ans. Sa Compagnie a été
donnéc
614 MERCURE DE FRANCE.
donnée à M. d'Herbouville , Capitaine dans le
même Régiment. M. de Boiffin , Premier Lieutenant
à monter & Ayde-Major , a eû la Compagnie
de ce dernier. M. de Gravelle , Lieutenant,
a obtenu l'Ayde- Majorité , & M. de Vaudreuil a
eû la Lieutenance de M. de Graville.
Dame Marguerite-Françoiſe Joffan , Epouſe
de François-Louis Martial , Comte Defmoutiers
de Merinville , Capitaine-Lieutenant des Gendarmes
de la Reine , accoucha le 26. Fevrier d'une
fille , qui fut nommée Jeanne,
-
Dame-Claude Louife de Lory , Epoufe de
Charles de Marteliere, Ecuyer, Seigneur de Chancey-
la-Corte , Orfeville , Vaux , Motteux , &c.
ancien Gouverneur pour le Roi de la Ville de
Langres , Confeiller , Secretaire du Roi , Maiſon,
Couronne de France & de fes Finances , accoucha
le 28. du même mois d'une fille , qui fut tenuë
fur les Fonts & nommée Marie -Louife-Charlotte
, par Guillaume-Charles le Févre , Seigneur,
de la Valette , Biars , la Salle , S. Remy , &c.
Gentilhomme Ordinaire de Madame la Dauphine
de Savoye, & par D.Marie- Marguerite Lhorte
Beaulieu , Epoufe d'Auguftin- Antoine Picart de
Mauny , Confeiller du Roi en fes Confeils , Maître
Ordinaire en fa Chambre des Comptes.
La nuit du 6. au 7. du mois dernier , Louis de
Bouchet , Comte de Montforeau , Marquis de
Sourches &c. Grand- Prevôt de France , époufa
Charlotte Antoinette de Gontaut de Biron , fille
de Charles Armand de Gontaut , Duc de Biron ,
Lieutenant General des Armées du Roi & Gouverneur
de Landau , & de Marie Antoinette de
Bautru-Nogent.
`Jacques Tanneguy le Veneur , Marquis de Til..
lieres™
MARS. 1730. 615
lieres , Sous-Lieutenant des Chevaux - Legers &
Gendarmes de la Reine , fils du Comte de Tillie
res , Brigadier des Armées du Roi , & de D. Michelle
Gabrielle Dugué de Bagnoles , époufa le
13. Mars Dile Michelle Julie Francoife d'Aubeterre
, fille de Louis- Pierre-Jofeph Bouchar d'Efparbes
de Luffan , d'Aubeterre , Comte de Jonfac
&c. Capitaine- Lieutenant des Gendarmes de
Monfeigneur le Dauphin, Lieutenant General des
Provinces de Saintonge & Angoumois, & de feuë
Dame Françoiſe-Marie Henault ; la celebration
du mariage fut faite par l'Archevêque de Tours
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Résumé : MORTS, NAISSANCES & Mariages.
En mars 1730, plusieurs événements marquants ont eu lieu au sein de l'aristocratie française. Le 2 mars, Ean-Pierre Moret de Bourchenu, Marquis de Valbonnays et Premier Président de la Chambre des Comptes de Dauphiné, est décédé à Grenoble à l'âge de 79 ans. Dame Marie Mallet, veuve de M. Gedeon du Metz, Chevalier et Comte de Rosnay, est décédée le 4 mars à l'âge de 84 ans. Dame Françoise Paparel, épouse de M. Philippe-Charles de la Fare, Gouverneur des Villes et Château d'Alais, est décédée à l'âge de 34 ans. Charles-Louis Lallemant, Chevalier et Comte de Lerignan, est décédé le 18 février à l'âge de 73 ans. Henry Bouchay d'Orsay, Chevalier de l'Ordre Militaire de Saint-Louis, est décédé à Paris à l'âge de 49 ans. Des naissances ont également été enregistrées. Dame Marguerite-Françoise Joffan, épouse de François-Louis Martial, Comte Desmoutiers de Merinville, a donné naissance à une fille nommée Jeanne le 26 février. Dame Claude Louise de Lory, épouse de Charles de Martelière, ancien Gouverneur de la Ville de Langres, a accouché d'une fille nommée Marie-Louise-Charlotte le 28 février. Des mariages ont eu lieu, notamment celui de Louis de Bouchet, Comte de Montforeau, avec Charlotte Antoinette de Gontaut de Biron le 7 mars, et celui de Jacques Tanneguy le Veneur, Marquis de Tillières, avec Diane Michelle Julie Françoise d'Aubeterre le 13 mars.
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46
p. 1477-1479
MARIAGE.
Début :
Le 30 May, M. Loüis-Robert Mallet de Graville, Sous-Lieutenant des Chevaux Legers de [...]
Mots clefs :
Seigneur, Comte, Chevalier, Lieutenant
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texteReconnaissance textuelle : MARIAGE.
MARIAGE.
LE 30 May ,M. Loiis-Robert Mallet de Gra- Liville , Sous -Lieutenant des Chevaux Legers de
Berry,époufa Dame Magdeleine Bouton de Chamilly
, veuve de M. François Martel , Comte de
Clere , fille de feu M. François Bouton , Comte
de Chamilly , Lieutenant General des Armées du
Roy, cy- devant Ambaffadeur Extraordinaire en
Dannemarc , & de Dame Catherine Poncet de la
Rivière , petite Niéce de feu Noël Bouton , Mar
quis de Chamilly , Maréchal de France , Cheva,
fier des Ordres du Roy , & Gouverneur de Straf
bourg.
M. le Comte de Graville eft fils de feu Louis
II.Vol. K Malle
1478
MERCURE DE FRANCE
Mallet de Graville , Marquis de Valſemé, Lieutenant
General des Armées du Roi,
Commandant en
Provence,
Commandeur de l'Ordre de S.Louis, &
auparavant Capitaine des Chevaux-Legers d'Or
leans,mort en Décembre 1707. & de feue D.Marguerite
de Sonnyng , petit- fils de Fury Mallet
de Graville , Marquis de Valfemé , auffi Capitaine
de la Compagnie des Chevaux- Legers d'Orleans,
& de Marguerite Mandot, arriere-petit-fils de Jean
Mallet , Seigneur de Drubec & de Valfemé , & de
Dame Magdeleine de Choifeul du Pleffis Pralin ,
Soeur de Cefar , Duc de Choifeul , Pair & Maréchal
de France, il a pour Trifayeul François Mallet
, Seigneur de Drubec , marié avec Françoife de
Hautemer , proche parente de Guillaume de Hautemer,
Maréchal de France, Chevalier des Ordres
du Roi,& Lieutenant General
aúGouvernement de
Normandie , ledit François Mallet , Seigneur de
Drubec, eft forti des Seigneurs de Cramefnil Mallet,
puifnez de la Maifon de Mallet- Graville, l'une des
plus grandes & des plus illuftres de la Province de
Normandie, comme on le verra par la
Genealogie
qui en fera donnée dans la nouv . Hift. des Grands
Officiers de la Couronne , au Chap. de Jean Mallet
, Sire de Graville , Grand- Maître des Arbalêtriers
, Grand-Pannetier, & Grand - Fauconnier de
France , ès anneés 1423. & 142 5. de Louis Mallet
, Sire de Graville , Amiral de France , Gouver→
neur de Picardie & Normandie , Chevalier des
Ordres du Roy , Capitaine des cent Gentilshom→
mes de fa Maifon , mort l'an 1516. & de Guillaume,
Seigneur de Cramefnil, Chevalier, Chambellan
du Roi , cominis par S. M. à l'exercice de
Maître des
Arbalêtriers de France au mois de Janvier
de l'an 1415. lequel est le 7e Ayeul de M. le
Comte de Graville , qui donne lieu à cet article .
La Généalogie de la Maifon de Bouton - Chamilli
,l'une des
premieres du Duché de
Bourgo-
II. Vol.
gne ,
JUIN. 1730. 1479
gne, fera auffi rapportée dans la même Hiftoire,
au Chapitre des Maréchaux de France , de même
que celle de la Maifon de Martel , l'une des plus
anciennes & des plus illuftres de Normandie ,
1'occafion de Guillaume Martel , Seigneur de Ba-
Confeiller Chambellan queville , Chevalier ,
établi Garde de l'Oriflame de France , en 1414.
LE 30 May ,M. Loiis-Robert Mallet de Gra- Liville , Sous -Lieutenant des Chevaux Legers de
Berry,époufa Dame Magdeleine Bouton de Chamilly
, veuve de M. François Martel , Comte de
Clere , fille de feu M. François Bouton , Comte
de Chamilly , Lieutenant General des Armées du
Roy, cy- devant Ambaffadeur Extraordinaire en
Dannemarc , & de Dame Catherine Poncet de la
Rivière , petite Niéce de feu Noël Bouton , Mar
quis de Chamilly , Maréchal de France , Cheva,
fier des Ordres du Roy , & Gouverneur de Straf
bourg.
M. le Comte de Graville eft fils de feu Louis
II.Vol. K Malle
1478
MERCURE DE FRANCE
Mallet de Graville , Marquis de Valſemé, Lieutenant
General des Armées du Roi,
Commandant en
Provence,
Commandeur de l'Ordre de S.Louis, &
auparavant Capitaine des Chevaux-Legers d'Or
leans,mort en Décembre 1707. & de feue D.Marguerite
de Sonnyng , petit- fils de Fury Mallet
de Graville , Marquis de Valfemé , auffi Capitaine
de la Compagnie des Chevaux- Legers d'Orleans,
& de Marguerite Mandot, arriere-petit-fils de Jean
Mallet , Seigneur de Drubec & de Valfemé , & de
Dame Magdeleine de Choifeul du Pleffis Pralin ,
Soeur de Cefar , Duc de Choifeul , Pair & Maréchal
de France, il a pour Trifayeul François Mallet
, Seigneur de Drubec , marié avec Françoife de
Hautemer , proche parente de Guillaume de Hautemer,
Maréchal de France, Chevalier des Ordres
du Roi,& Lieutenant General
aúGouvernement de
Normandie , ledit François Mallet , Seigneur de
Drubec, eft forti des Seigneurs de Cramefnil Mallet,
puifnez de la Maifon de Mallet- Graville, l'une des
plus grandes & des plus illuftres de la Province de
Normandie, comme on le verra par la
Genealogie
qui en fera donnée dans la nouv . Hift. des Grands
Officiers de la Couronne , au Chap. de Jean Mallet
, Sire de Graville , Grand- Maître des Arbalêtriers
, Grand-Pannetier, & Grand - Fauconnier de
France , ès anneés 1423. & 142 5. de Louis Mallet
, Sire de Graville , Amiral de France , Gouver→
neur de Picardie & Normandie , Chevalier des
Ordres du Roy , Capitaine des cent Gentilshom→
mes de fa Maifon , mort l'an 1516. & de Guillaume,
Seigneur de Cramefnil, Chevalier, Chambellan
du Roi , cominis par S. M. à l'exercice de
Maître des
Arbalêtriers de France au mois de Janvier
de l'an 1415. lequel est le 7e Ayeul de M. le
Comte de Graville , qui donne lieu à cet article .
La Généalogie de la Maifon de Bouton - Chamilli
,l'une des
premieres du Duché de
Bourgo-
II. Vol.
gne ,
JUIN. 1730. 1479
gne, fera auffi rapportée dans la même Hiftoire,
au Chapitre des Maréchaux de France , de même
que celle de la Maifon de Martel , l'une des plus
anciennes & des plus illuftres de Normandie ,
1'occafion de Guillaume Martel , Seigneur de Ba-
Confeiller Chambellan queville , Chevalier ,
établi Garde de l'Oriflame de France , en 1414.
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Résumé : MARIAGE.
Le 30 mai, Louis-Robert Mallet de Graville, sous-lieutenant des Chevaux-Légers de Berry, épousa Magdeleine Bouton de Chamilly, veuve de François Martel, Comte de Clere. Magdeleine était la fille de François Bouton, Comte de Chamilly, lieutenant général des armées du roi et ancien ambassadeur au Danemark, et de Catherine Poncet de la Rivière. Elle était également la petite-nièce de Noël Bouton, Marquis de Chamilly, Maréchal de France. Louis-Robert Mallet de Graville est le fils de Louis Mallet de Graville, Marquis de Valsemé, lieutenant général des armées du roi et Commandeur de l'Ordre de Saint-Louis, décédé en décembre 1707, et de Marguerite de Sonnyn. Il est le petit-fils de Fury Mallet de Graville et de Marguerite Mandot, et l'arrière-petit-fils de Jean Mallet, Seigneur de Drubec et de Valfemé, et de Magdeleine de Choiseul du Plessis Pralin. La famille Mallet de Graville est une des plus illustres de Normandie. La généalogie des familles Mallet de Graville, Bouton-Chamilly et Martel sera présentée dans la nouvelle histoire des Grands Officiers de la Couronne.
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47
p. 1653-1659
INSTALLATION du Duc de Cumberland & des Comtes de Chesterfield & de Burlington, Chevaliers de l'Ordre de la Jarretiere, faite à Windsor, le 29 Juin dernier.
Début :
Les Chevaliers qui étoient presens à cette Installation étoient LE ROY, Souverain de [...]
Mots clefs :
Duc de Cumberland, Comte de Chesterfield, Chevaliers, Roi d'Angleterre, Chancelier, Comte, Roi, Chanoines, Cérémonie, Chapelle
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texteReconnaissance textuelle : INSTALLATION du Duc de Cumberland & des Comtes de Chesterfield & de Burlington, Chevaliers de l'Ordre de la Jarretiere, faite à Windsor, le 29 Juin dernier.
INSTALLATION du Duc de
Cumberland & des Comtes de Chefter
field & de Burlington , Chevaliers de
l'Ordre de la Jarretiere, faite à windfor, le
29 Juin dernier.
Lalla
Es Chevaliers qui étoient prefens à cette Inf
tallation étoient LE ROY , Souverain de
l'Ordre , le Pr. de Galles , les Ducs de Somerset ,
d'Argyle , de Kent , de Dorfet , de Montagu , de
Newcaſtle , de Grafton , de Bolton,de Richmond;
les Comtes de S :rafford , de Peterborough & de
Scarborough ; & le Chevalier Robert Walpole
Après que les Chevaliers, les Officiers de l'Ordre,
les pauvres Chevaliers , les Chanoines de la Cha
pelle de S. George, & les autres perfonnes qui ont
droit d'affifter a l'Installation , eurent pris leurs
places dans cette Chapelle , le Roy y entra, & fut
reçu par les Chevaliers. Il fe rendit enfuite en
Proceffion dans la Chambre du Chapitre . Le Duc
de Cumberland & les Comtes de Cheſterfield &
de Burlington refterent à l'entrée de cette Chambre
fur des Chaifes qu'on y avoit placées pour
eux .
Le Roy ayant nommé M. Anftis pour exercer
la charge de Garter, ou premier Heraut d'Armes
d'Angleterre. S. M. lui ordonna d'introduire dans
la Chambre le Duc de Cumberland. S. A. R. füt
reçue à la porte par les deux plus anciens Chevaliers
, qui font les Ducs de Somerfet & d'Argyle,
lefquels conduifirent le Duc de Cumberland au
haut bout de la Chambre. Garter prefenta la Robe
de S.A.R. aux Chevaliers, qui l'en revêtirent ,
Hy pendant
1654 MERCURE DE FRANCE
pendant que le Chancelier de l'Ordre lifoit l'Admonition.
Prenez cette Robe , &c. Les mêmes
Chevaliers mirent enfuite à S. A. R. fa Ceinture
& fon Epée.Garter introduifit auffi les deux Comtes
, qui furent reçûs avec les mêmes ceremonies
par les deux plus jeunes Chevaliers ; fçavoir le
Duc de Richmond & le Chevalier Robert Walpole
, après quoi on fe rendit en Proceffion dans
le Choeur de la Chapelle. Cette Proceffion fe fit
avec beaucoup de ceremonie.
Les pauvres Chevaliers & les Chanoines de la
Chapelle y entrerent deux à deux , firent le tour
du Choeur, & ayant fait la révérence devant l'Autel
& l'Eftrade deftinée pour le Roy , ils fe mirent
à leurs places. Les Chevaliers de l'Ordre entrerent
enfuite, & après avoir fait de pareilles révérences
, ils fe mirent fous leurs Bannieres. Les
Officiers & les Prélats de l'Ordre y entrerent avec
les mêmes cérémonles ; & après eux vint le Roy,
précédé du Duc de S.Albans , portant l'Epée d'Etat.
La queue de la Robe de S.M. étoit portée par
les Fils ainez des Ducs de Grafton & de Dorfet, &
par le Maître de la Garde- Robe. Le Roy après
avoir fait la révérence devant l'Autel , fe mit fur
fon Eftrade. Enfuite Garter vint au milieu du
Choeur , y fit fes révérences , tenant le Sceptre
dans la main , & fe tourna vers le Pr, de Galles ,
qui là - deffus quitta fa Banniere ; & après avoir
fait la révérence devant l'Autel & le Roy , il alla
s'affeoir fur fa place , les autres Chevaliers refterent
debout fous leurs Bannieres.
L'Evêque de Winchefter , Prélat de l'Ordre ,
ayant été conduit à l'Autel avec deux Chanoines
de la Chapelle, Garter prit la Banniere du feu Duc
d'York , qu'il remit aux deux plus anciens Chevaliers
, & ceux-cy, après les révérences ordinaires,
la porterent au Prélat de l'Ordre, qui la donna
JUILLET . 1730. 1655
na aux deux Chanoines , pour la placer à côté de
l'Autel. Garter remit enfuite l'Epée du feu Duc
d'York au Duc de Kent & au Comte de Stafford,
& le Cafque avec le Cimier au Comte de Peterborough
& au Duc de Dorfet , qui porterent pareillement
ces Enfeignes au Prélat de l'Ordre, La
même cérémonie fut obfervée touchant la Banniere
, l'Epée & le Cafque des feus Ducs de Devonshire
& Comte de Lincoln .
Aprés cette cérémonie,Garter fe rendit au milieu
du Choeur , fit fes révérences ordinaires ; 86
s'étant tourné vers le plus ancien Chevalier , il lui
fit un figne de fa Verge. Le Chevalier quitta làdeffus
fa Banniere & alla fe mettre à fa place fur
l'Eftrade. Garter fit la même chofe aux autres
Chevaliers,à chacun fuivant fon ancienneté.Après
que tous les Chevaliers eurent pris leurs places ,
Garder appella les deux plus anciens Chevaliers
nommez.par le Roy ,, pour inſtaller le Duc de
Cumberland.
2
Ces deux Chevaliers defcendirent de leur Eftrade,'
& s'étant remis fous leurs Bannieres , les pauvres
Chevaliers & les Hérauts d'Armes fortirent de la
Chapelle , marcherent proceffionellement vers la
Chambre du Chapitre , & fe rangerent aux deux
côtez de la Porte.
Les deux plus anciens Chevaliers , accompagnez
des Officiers de l'Ordre , entrerent enfuite
dans la chambre du Chapitre , d'où ils conduifirent
le Duc de Cumberland au Choeur. S. A. R.
marchant entre les deux Chevaliers , fut menée
directement à fon Eftrade , le Roy l'ayant , à
caufe de fon grand âge , difpenfé du ferment
que les Chevaliers doivent prêter avant que d'y
entrer.
-Les deux Chevaliers ayant reçu des mains de
Garter, affifté du Chancelier de l'Ordre , le Man-
H vj
teau,
1656 MERCURE DE FRANCE
teau , le Chaperon , & le grand Collier de l'Ordre
, en revêtirent le Duc de Cumberland , &
après avoir préfenté à S. A. R. le Livre des Statuts
de l'Ordre , ils luy mirent fur la tête le Bonnet
de l'Ordre , & la firent affeoir . Le Duc de
Cumberland fe leva auffi -tôt ; & après qu'il eût
fait fes revérences , les deux Chevaliers l'embraf
ferent , & fe rendirent enfuite à leur place.
On obferva les mêmes Cerémonies pour l'Inallation
des Comtes de Cheſterfield & de Burlington
, avec cette difference que les deux nouveaux
Chevaliers prêterent ferment à leur en
trée dans le Choeur , ce qui fe fait de la maniere
fuivante. Garter ayant à ſa droite le Greffier de
l'Ordre , porta le Nouveau Teftament & la forme
du Serment , & à fa gauche l'Huiffier à la
verge noire , s'approche du Chevalier ; l'Huiffier
prend enfuite le Nouveau Teftament , le tient
ouvert , & le Chevalier met la main droite fur
ce Livre , pendant que le Greffier lit tout haut le
Serment ordinaire , après quoy le Chevalier baife
le Livre.
Après que les deux Comtes eurent été inſtalez
, le Comte de Chefterfield par le Duc de Kent
& par le Comte de Strafford , & le Comte de
Burlington par le Comte de Peterboroug & par
le Duc de Dorfet , an commença le Service Divin
, qui fut interrompu pour faire les Offrandes
ordinaires ; ce qui fe fit de la maniere fuivante :
Les Chevaliers ayant été fommez par Garter de
defcendre de leurs Eftradęs , allerent , après les
revérences ordinaires , fe mettre fous leurs Bannieres
, le Prince de Calles & le Duc de Cumberland
firent la même chofe. Le Prelat de l'Ordre
accompagné de deux Chanoines , fe mit devant
l'Autel , tenant le Baffin d'or deſtiné pour
recevoir les Offrandes des Chevaliers.
Enfuite
JUILLET . 1730. 1657.
Enfuite le Roy proceffionellement alla à l'Autel :
Sa M. étoit précedée par Garter , le Greffier &
le Chancelier de l'Ordre , & par le Duc de Saint
Albans , portant l'Epée d'Etat : le Duc de Somerset
, nommé par le Roy pour luy préfenter
l'Offrande , & le Duc de Grafton , en qualité de
Chambellan de la Maifon de S. M. fe mirent
derriere le Roy , le premier à la droite , & l'autre
à la gauche. S. M. en fe levant de fa place
pour aller à l'Offrande , fit une revérence vers
' Autel ; elle en fit une ſeconde vers le milieu da
Choeur , & une troifiéme en approchant de la
balustrade de l'Autel . Le Roy y étant arrivé , fe
mit à genoux fur deux carreaux placez fur un
riche tapis , ôta fon bonnet , & mit dans le baffin
P'Offrande qui luy avoit été préfentée par le Duc
de Somerfet ; après quoy S. M. fit en fe levant
une reverence , une feconde au bas du degré ,
une troifiéme au milieu du Choeur , & une quatriéme
lorfqu'elle fut retournée à fa place , toutes
vers l'Autel.
.
Ceux qui avoient accompagné le Roy firent
de pareilles revérences , & retournerent , les deux
Chevaliers fous leur Banniere , & les autres à
leurs places refpectives .
t
On avoit pendant ce temps- là ôté le riche Tapis
& les deux Carreaux , fur lesquels le Roy
s'étoit mis à genoux , & on en avoit mis d'autres
pour les Chevaliers qui furent conduits á
PAutel par
deux Heraults d'armes , & ils firent
leurs Offrandes. Le Prince de Galles y alla le premiet
, enfuite le Duc de Cumberland , & enfuite
les autres Chevaliers , chacun fuivant "fon ancienneté.
Les Chevaliers & les Officiers de l'Or
dre ayant repris leurs places , on continua le
Service Divin , après lequel les pauvres Chevaliers
& les Chanoines fortirent en proceffion de
la
1658 MERCURE DE FRANCE.
la Chapelle , & allerent fe ranger dans la Sale
des Gardes.
Les Heraults d'armes , les Chevaliers & les
. Officiers de l'Ordre fortirent de la même maniere
, & allerent dans la Sale de Prefence ; ils
furent fuivis par le Roy , précedé du Vice-
Chambellan , portant l'Epée d'Etat , du Chancelier
& du Prelat de l'Ordre , du Duc de Cum →
berland , & du Prince de Galles. S. M. paffa par
la Salle de Prefence , y falua les Chevaliers en
ôtant fon Bonnet , & fe retira dans fon Appartement.
Le Dîner étant prêt , le Roy fe rendit en proceffion
, précedé des Heraults d'armes , des Chevaliers
, du Duc de Cumberland , du Prince de
Galles , & du Prelat de l'Ordre , dans la Sale de
S. George. S. M. y étant arrivée , fe mit à table,
ayan à fa droite le Prince de Galles , & à fa
gauche le Duc de Cumberland . Les Chevaliers
fe mirent à une autre table ; ils étoient rangez
fur une même ligne , & avoient le Bonnet fur la
tête. Après le premier Service , on porta au Roy
une Coupe d'or , & S. M. but aux Chevaliers
qui fe tinrent debout & découverts , & après
qu'on eût porté à chaque Chevalier un verre de
ils firent raiſon au Roy , & ſe remirent à
leurs places.
vin ,
Le fecond Service étant fini , Garter s'étant
approché de la Table du Roy avec les ceremo
nies ordinaires , cria trois fois Largeffe , & pro
nonça les Titres du Roy en Latin , en François
& en Anglois. S'étant enfuite tourné vers le Duc
de Cumberland , il cria deux fois Largeffe , &
prononça pareillement les Titres de S. A. R. en
Anglois feulement ; ce qui étant fait , il s'approcha
de la Table des Chevaliers , & cria une fois
Largeffe pour le Comte de Chesterfield , & une
autre
JUILLET . 1730. 165s
autre fois pour le Comte de Burlington , & pro
nonça auffi leurs Titres en Anglois, Après qu'on
eût dîné les Chevaliers fe leverent , & fe rangerent
dans la Sale ; le Prelat de l'Ordre dit enfuite
Graces , après quoy les Chevaliers firent
une revérence au Roy , qui ôta fon Bonnet & les
falua. S. M. précedée des Chevaliers & des Officiers
de l'Ordre , fe rendit enfuite dans la Sale
de S George , dans celle de Prefence , d'où après
les avoir encore faluez , il fe retira dans fon Appartement.
Cumberland & des Comtes de Chefter
field & de Burlington , Chevaliers de
l'Ordre de la Jarretiere, faite à windfor, le
29 Juin dernier.
Lalla
Es Chevaliers qui étoient prefens à cette Inf
tallation étoient LE ROY , Souverain de
l'Ordre , le Pr. de Galles , les Ducs de Somerset ,
d'Argyle , de Kent , de Dorfet , de Montagu , de
Newcaſtle , de Grafton , de Bolton,de Richmond;
les Comtes de S :rafford , de Peterborough & de
Scarborough ; & le Chevalier Robert Walpole
Après que les Chevaliers, les Officiers de l'Ordre,
les pauvres Chevaliers , les Chanoines de la Cha
pelle de S. George, & les autres perfonnes qui ont
droit d'affifter a l'Installation , eurent pris leurs
places dans cette Chapelle , le Roy y entra, & fut
reçu par les Chevaliers. Il fe rendit enfuite en
Proceffion dans la Chambre du Chapitre . Le Duc
de Cumberland & les Comtes de Cheſterfield &
de Burlington refterent à l'entrée de cette Chambre
fur des Chaifes qu'on y avoit placées pour
eux .
Le Roy ayant nommé M. Anftis pour exercer
la charge de Garter, ou premier Heraut d'Armes
d'Angleterre. S. M. lui ordonna d'introduire dans
la Chambre le Duc de Cumberland. S. A. R. füt
reçue à la porte par les deux plus anciens Chevaliers
, qui font les Ducs de Somerfet & d'Argyle,
lefquels conduifirent le Duc de Cumberland au
haut bout de la Chambre. Garter prefenta la Robe
de S.A.R. aux Chevaliers, qui l'en revêtirent ,
Hy pendant
1654 MERCURE DE FRANCE
pendant que le Chancelier de l'Ordre lifoit l'Admonition.
Prenez cette Robe , &c. Les mêmes
Chevaliers mirent enfuite à S. A. R. fa Ceinture
& fon Epée.Garter introduifit auffi les deux Comtes
, qui furent reçûs avec les mêmes ceremonies
par les deux plus jeunes Chevaliers ; fçavoir le
Duc de Richmond & le Chevalier Robert Walpole
, après quoi on fe rendit en Proceffion dans
le Choeur de la Chapelle. Cette Proceffion fe fit
avec beaucoup de ceremonie.
Les pauvres Chevaliers & les Chanoines de la
Chapelle y entrerent deux à deux , firent le tour
du Choeur, & ayant fait la révérence devant l'Autel
& l'Eftrade deftinée pour le Roy , ils fe mirent
à leurs places. Les Chevaliers de l'Ordre entrerent
enfuite, & après avoir fait de pareilles révérences
, ils fe mirent fous leurs Bannieres. Les
Officiers & les Prélats de l'Ordre y entrerent avec
les mêmes cérémonles ; & après eux vint le Roy,
précédé du Duc de S.Albans , portant l'Epée d'Etat.
La queue de la Robe de S.M. étoit portée par
les Fils ainez des Ducs de Grafton & de Dorfet, &
par le Maître de la Garde- Robe. Le Roy après
avoir fait la révérence devant l'Autel , fe mit fur
fon Eftrade. Enfuite Garter vint au milieu du
Choeur , y fit fes révérences , tenant le Sceptre
dans la main , & fe tourna vers le Pr, de Galles ,
qui là - deffus quitta fa Banniere ; & après avoir
fait la révérence devant l'Autel & le Roy , il alla
s'affeoir fur fa place , les autres Chevaliers refterent
debout fous leurs Bannieres.
L'Evêque de Winchefter , Prélat de l'Ordre ,
ayant été conduit à l'Autel avec deux Chanoines
de la Chapelle, Garter prit la Banniere du feu Duc
d'York , qu'il remit aux deux plus anciens Chevaliers
, & ceux-cy, après les révérences ordinaires,
la porterent au Prélat de l'Ordre, qui la donna
JUILLET . 1730. 1655
na aux deux Chanoines , pour la placer à côté de
l'Autel. Garter remit enfuite l'Epée du feu Duc
d'York au Duc de Kent & au Comte de Stafford,
& le Cafque avec le Cimier au Comte de Peterborough
& au Duc de Dorfet , qui porterent pareillement
ces Enfeignes au Prélat de l'Ordre, La
même cérémonie fut obfervée touchant la Banniere
, l'Epée & le Cafque des feus Ducs de Devonshire
& Comte de Lincoln .
Aprés cette cérémonie,Garter fe rendit au milieu
du Choeur , fit fes révérences ordinaires ; 86
s'étant tourné vers le plus ancien Chevalier , il lui
fit un figne de fa Verge. Le Chevalier quitta làdeffus
fa Banniere & alla fe mettre à fa place fur
l'Eftrade. Garter fit la même chofe aux autres
Chevaliers,à chacun fuivant fon ancienneté.Après
que tous les Chevaliers eurent pris leurs places ,
Garder appella les deux plus anciens Chevaliers
nommez.par le Roy ,, pour inſtaller le Duc de
Cumberland.
2
Ces deux Chevaliers defcendirent de leur Eftrade,'
& s'étant remis fous leurs Bannieres , les pauvres
Chevaliers & les Hérauts d'Armes fortirent de la
Chapelle , marcherent proceffionellement vers la
Chambre du Chapitre , & fe rangerent aux deux
côtez de la Porte.
Les deux plus anciens Chevaliers , accompagnez
des Officiers de l'Ordre , entrerent enfuite
dans la chambre du Chapitre , d'où ils conduifirent
le Duc de Cumberland au Choeur. S. A. R.
marchant entre les deux Chevaliers , fut menée
directement à fon Eftrade , le Roy l'ayant , à
caufe de fon grand âge , difpenfé du ferment
que les Chevaliers doivent prêter avant que d'y
entrer.
-Les deux Chevaliers ayant reçu des mains de
Garter, affifté du Chancelier de l'Ordre , le Man-
H vj
teau,
1656 MERCURE DE FRANCE
teau , le Chaperon , & le grand Collier de l'Ordre
, en revêtirent le Duc de Cumberland , &
après avoir préfenté à S. A. R. le Livre des Statuts
de l'Ordre , ils luy mirent fur la tête le Bonnet
de l'Ordre , & la firent affeoir . Le Duc de
Cumberland fe leva auffi -tôt ; & après qu'il eût
fait fes revérences , les deux Chevaliers l'embraf
ferent , & fe rendirent enfuite à leur place.
On obferva les mêmes Cerémonies pour l'Inallation
des Comtes de Cheſterfield & de Burlington
, avec cette difference que les deux nouveaux
Chevaliers prêterent ferment à leur en
trée dans le Choeur , ce qui fe fait de la maniere
fuivante. Garter ayant à ſa droite le Greffier de
l'Ordre , porta le Nouveau Teftament & la forme
du Serment , & à fa gauche l'Huiffier à la
verge noire , s'approche du Chevalier ; l'Huiffier
prend enfuite le Nouveau Teftament , le tient
ouvert , & le Chevalier met la main droite fur
ce Livre , pendant que le Greffier lit tout haut le
Serment ordinaire , après quoy le Chevalier baife
le Livre.
Après que les deux Comtes eurent été inſtalez
, le Comte de Chefterfield par le Duc de Kent
& par le Comte de Strafford , & le Comte de
Burlington par le Comte de Peterboroug & par
le Duc de Dorfet , an commença le Service Divin
, qui fut interrompu pour faire les Offrandes
ordinaires ; ce qui fe fit de la maniere fuivante :
Les Chevaliers ayant été fommez par Garter de
defcendre de leurs Eftradęs , allerent , après les
revérences ordinaires , fe mettre fous leurs Bannieres
, le Prince de Calles & le Duc de Cumberland
firent la même chofe. Le Prelat de l'Ordre
accompagné de deux Chanoines , fe mit devant
l'Autel , tenant le Baffin d'or deſtiné pour
recevoir les Offrandes des Chevaliers.
Enfuite
JUILLET . 1730. 1657.
Enfuite le Roy proceffionellement alla à l'Autel :
Sa M. étoit précedée par Garter , le Greffier &
le Chancelier de l'Ordre , & par le Duc de Saint
Albans , portant l'Epée d'Etat : le Duc de Somerset
, nommé par le Roy pour luy préfenter
l'Offrande , & le Duc de Grafton , en qualité de
Chambellan de la Maifon de S. M. fe mirent
derriere le Roy , le premier à la droite , & l'autre
à la gauche. S. M. en fe levant de fa place
pour aller à l'Offrande , fit une revérence vers
' Autel ; elle en fit une ſeconde vers le milieu da
Choeur , & une troifiéme en approchant de la
balustrade de l'Autel . Le Roy y étant arrivé , fe
mit à genoux fur deux carreaux placez fur un
riche tapis , ôta fon bonnet , & mit dans le baffin
P'Offrande qui luy avoit été préfentée par le Duc
de Somerfet ; après quoy S. M. fit en fe levant
une reverence , une feconde au bas du degré ,
une troifiéme au milieu du Choeur , & une quatriéme
lorfqu'elle fut retournée à fa place , toutes
vers l'Autel.
.
Ceux qui avoient accompagné le Roy firent
de pareilles revérences , & retournerent , les deux
Chevaliers fous leur Banniere , & les autres à
leurs places refpectives .
t
On avoit pendant ce temps- là ôté le riche Tapis
& les deux Carreaux , fur lesquels le Roy
s'étoit mis à genoux , & on en avoit mis d'autres
pour les Chevaliers qui furent conduits á
PAutel par
deux Heraults d'armes , & ils firent
leurs Offrandes. Le Prince de Galles y alla le premiet
, enfuite le Duc de Cumberland , & enfuite
les autres Chevaliers , chacun fuivant "fon ancienneté.
Les Chevaliers & les Officiers de l'Or
dre ayant repris leurs places , on continua le
Service Divin , après lequel les pauvres Chevaliers
& les Chanoines fortirent en proceffion de
la
1658 MERCURE DE FRANCE.
la Chapelle , & allerent fe ranger dans la Sale
des Gardes.
Les Heraults d'armes , les Chevaliers & les
. Officiers de l'Ordre fortirent de la même maniere
, & allerent dans la Sale de Prefence ; ils
furent fuivis par le Roy , précedé du Vice-
Chambellan , portant l'Epée d'Etat , du Chancelier
& du Prelat de l'Ordre , du Duc de Cum →
berland , & du Prince de Galles. S. M. paffa par
la Salle de Prefence , y falua les Chevaliers en
ôtant fon Bonnet , & fe retira dans fon Appartement.
Le Dîner étant prêt , le Roy fe rendit en proceffion
, précedé des Heraults d'armes , des Chevaliers
, du Duc de Cumberland , du Prince de
Galles , & du Prelat de l'Ordre , dans la Sale de
S. George. S. M. y étant arrivée , fe mit à table,
ayan à fa droite le Prince de Galles , & à fa
gauche le Duc de Cumberland . Les Chevaliers
fe mirent à une autre table ; ils étoient rangez
fur une même ligne , & avoient le Bonnet fur la
tête. Après le premier Service , on porta au Roy
une Coupe d'or , & S. M. but aux Chevaliers
qui fe tinrent debout & découverts , & après
qu'on eût porté à chaque Chevalier un verre de
ils firent raiſon au Roy , & ſe remirent à
leurs places.
vin ,
Le fecond Service étant fini , Garter s'étant
approché de la Table du Roy avec les ceremo
nies ordinaires , cria trois fois Largeffe , & pro
nonça les Titres du Roy en Latin , en François
& en Anglois. S'étant enfuite tourné vers le Duc
de Cumberland , il cria deux fois Largeffe , &
prononça pareillement les Titres de S. A. R. en
Anglois feulement ; ce qui étant fait , il s'approcha
de la Table des Chevaliers , & cria une fois
Largeffe pour le Comte de Chesterfield , & une
autre
JUILLET . 1730. 165s
autre fois pour le Comte de Burlington , & pro
nonça auffi leurs Titres en Anglois, Après qu'on
eût dîné les Chevaliers fe leverent , & fe rangerent
dans la Sale ; le Prelat de l'Ordre dit enfuite
Graces , après quoy les Chevaliers firent
une revérence au Roy , qui ôta fon Bonnet & les
falua. S. M. précedée des Chevaliers & des Officiers
de l'Ordre , fe rendit enfuite dans la Sale
de S George , dans celle de Prefence , d'où après
les avoir encore faluez , il fe retira dans fon Appartement.
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Résumé : INSTALLATION du Duc de Cumberland & des Comtes de Chesterfield & de Burlington, Chevaliers de l'Ordre de la Jarretiere, faite à Windsor, le 29 Juin dernier.
Le 29 juin, le Duc de Cumberland et les Comtes de Chesterfield et de Burlington ont été installés comme Chevaliers de l'Ordre de la Jarretière à Windsor. La cérémonie, présidée par le Roi, Souverain de l'Ordre, a réuni plusieurs dignitaires, dont le Prince de Galles et divers Ducs et Comtes. La procession a débuté dans la Chapelle de Saint-Georges, où les participants ont pris leurs places respectives. Le Duc de Cumberland a été introduit par le Garter, ou premier Héraut d'Armes, et revêtu de la robe de l'Ordre par les Ducs de Somerset et d'Argyle. Les Comtes de Chesterfield et de Burlington ont été introduits de manière similaire par les Ducs de Richmond et Robert Walpole. Après les cérémonies d'investiture, les nouveaux Chevaliers ont prêté serment et ont été conduits à leurs places. La cérémonie s'est poursuivie par un service divin, des offrandes à l'autel, et un dîner où le Roi a porté un toast aux nouveaux Chevaliers. Les titres des nouveaux Chevaliers ont été proclamés par le Garter, et la cérémonie s'est conclue par des salutations et des prières.
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48
p. 2113-2114
MORTS, NAISSANCES & Mariages.
Début :
Jean-Baptiste Foubert de Bizy, Chevalier de l'Ordre Militaire de S. Jean de Latran, premier [...]
Mots clefs :
Marquis, Comte, Lieutenant, Armée, Chevalier
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS, NAISSANCES & Mariages.
MORTS , NAISSANCES
& Mariages.
J
Ean - Baptifte Foubert de Bizy , Chevalier de
P'Ordre Militaire de S. Jean de Latran , premier
Secretaire dans les Ambaffades du Marquis
de Bonac à la Porte Ottomanne & en Suiffe ,
mourut le 22. Août , âgé d'environ 42. ans,
Louis de Quelen- Stuart de Cauffade , Comt
de la Vauguyon , Meftre de Camp de Cavaleriee
mourut à Valenciennes le 25. du mois dernier
âgé de 25. ans.
M. Henry de Fabry , Comte d'Autrey , Meſtré
de Camp du Regiment de la Sarre , mourut à
Verfailles le 1. de ce mois , âgé de 42. ans .
Monfieur Benjamin - Louis Frottier , Marquis
de la Cofte Meffeliere , Lieutenant de Roy du
Poitou , mourut à Paris le 5. âgé de 64. ans .
Dame Marie-Anne Delorme , veuve de Meffire
Pierre Debas , Seigneur Dujelle , & au jour de
fon décès époufa M.Louis le Couftellier, Ecuyer,
'Comte de Liliers ; Brigadier des Armées du Roy
Chevalier de l'Ordre de S. Louis , décedée le 8.
Septembre , âgée de 95. ans.
Le 1o. Guichard-Jofeph Duvernay , Confeiller
, Medecin ordinaire du Roy , Profeffeur en
Anatomie & Chirurgie au Jardin Royal des
Plantes , & de l'Académie Royale des Sciences ,
mourut âgé de 82. ans , extrémement regretté.
Le même jour , Louis- Charles , Marquis de
la Châtre , Lieutenant General des Armées du
Roy , & Gouverneur du Fort de Pequay , mourut
à Paris âgé de 69. ans. Il y a quelques an
nées que le Roy avoit accordé au Comte de
Nançai, Mestre de Camp du Regiment de Bearn,
9
$1
2114 MERCURE DE FRANCE
le Gouvernement du Fort de Pequay , en furvi .
vance du Marquis de la Châtre , fon pere .
Le 18. Septembre , Dame Louife de Meures ,
veuve de Jean de Vivans , Marquis de Noaillac ,
Seigneur de Pufches , Montluc , & c. Lieutenant
General des Armées du Roy , mourut dans une
des Terres du Marquis de Jaucourt fon gendre ,
dans le Nivernois , âgée de 51 , ans d'une efquinancie
, après cinq jours de maladie : c'étoit
une Dame très- vertueufe & très-charitable. Elle
laiffe une fille unique qui eft Madame la Marquife
de Jaucourt , heritiere de tous les biens ,
ainfi que de fes vertus.
>
Cefar Alexandre , Comte de Gouffier , veuf
de Marguerite Henriette de Gouffier , époufa le
7. Septembre D. Marie Charlotte de Gouffier
veuve de Charles Madeleine Colbert , Cornette
des Chevaux -Legers de la Garde du Roi .
Anne Leon de Montmorency , fils de Leon de
Montmorency , & de D. Marie Madeleine de
Ponflemotte de l'Etoile de Montbrifeuil , époufa
le 11. D. Anne Marie Barbe - de- ville , fille de feu
Armand , Baron de ville &c . & de D. Anne Barbe
de Courcelles .
Gafpard de Fortia , Marquis de Montreal
Meftre de Camp de Cavalerie , Chevalier de Saint
Louis , veuf de D. Anne Marie de Vaugué, époufa
le 14. Marie- Anne de Fortia , fille de Charles-
Jofeph de Fortia , Confeiller d'Etat , & de feu D:
Marie Madeleine Thomas.
Jofeph d'Apchier , Comte de la Baume &c.
Grand Sénéchal de Provence , fils de feu Philip
pes d'Apchier ; Comte de la Baume &c. & de D,
Gabrielle de Genitoux de la Tourelle , époufa le
23. D. Anne Marguerite Guénet de Franqueville,
fille de feu Touffaint , Marquis de Franqueville ,
&c. & de D, Madeleine d'Anviré de Machon
ville.
& Mariages.
J
Ean - Baptifte Foubert de Bizy , Chevalier de
P'Ordre Militaire de S. Jean de Latran , premier
Secretaire dans les Ambaffades du Marquis
de Bonac à la Porte Ottomanne & en Suiffe ,
mourut le 22. Août , âgé d'environ 42. ans,
Louis de Quelen- Stuart de Cauffade , Comt
de la Vauguyon , Meftre de Camp de Cavaleriee
mourut à Valenciennes le 25. du mois dernier
âgé de 25. ans.
M. Henry de Fabry , Comte d'Autrey , Meſtré
de Camp du Regiment de la Sarre , mourut à
Verfailles le 1. de ce mois , âgé de 42. ans .
Monfieur Benjamin - Louis Frottier , Marquis
de la Cofte Meffeliere , Lieutenant de Roy du
Poitou , mourut à Paris le 5. âgé de 64. ans .
Dame Marie-Anne Delorme , veuve de Meffire
Pierre Debas , Seigneur Dujelle , & au jour de
fon décès époufa M.Louis le Couftellier, Ecuyer,
'Comte de Liliers ; Brigadier des Armées du Roy
Chevalier de l'Ordre de S. Louis , décedée le 8.
Septembre , âgée de 95. ans.
Le 1o. Guichard-Jofeph Duvernay , Confeiller
, Medecin ordinaire du Roy , Profeffeur en
Anatomie & Chirurgie au Jardin Royal des
Plantes , & de l'Académie Royale des Sciences ,
mourut âgé de 82. ans , extrémement regretté.
Le même jour , Louis- Charles , Marquis de
la Châtre , Lieutenant General des Armées du
Roy , & Gouverneur du Fort de Pequay , mourut
à Paris âgé de 69. ans. Il y a quelques an
nées que le Roy avoit accordé au Comte de
Nançai, Mestre de Camp du Regiment de Bearn,
9
$1
2114 MERCURE DE FRANCE
le Gouvernement du Fort de Pequay , en furvi .
vance du Marquis de la Châtre , fon pere .
Le 18. Septembre , Dame Louife de Meures ,
veuve de Jean de Vivans , Marquis de Noaillac ,
Seigneur de Pufches , Montluc , & c. Lieutenant
General des Armées du Roy , mourut dans une
des Terres du Marquis de Jaucourt fon gendre ,
dans le Nivernois , âgée de 51 , ans d'une efquinancie
, après cinq jours de maladie : c'étoit
une Dame très- vertueufe & très-charitable. Elle
laiffe une fille unique qui eft Madame la Marquife
de Jaucourt , heritiere de tous les biens ,
ainfi que de fes vertus.
>
Cefar Alexandre , Comte de Gouffier , veuf
de Marguerite Henriette de Gouffier , époufa le
7. Septembre D. Marie Charlotte de Gouffier
veuve de Charles Madeleine Colbert , Cornette
des Chevaux -Legers de la Garde du Roi .
Anne Leon de Montmorency , fils de Leon de
Montmorency , & de D. Marie Madeleine de
Ponflemotte de l'Etoile de Montbrifeuil , époufa
le 11. D. Anne Marie Barbe - de- ville , fille de feu
Armand , Baron de ville &c . & de D. Anne Barbe
de Courcelles .
Gafpard de Fortia , Marquis de Montreal
Meftre de Camp de Cavalerie , Chevalier de Saint
Louis , veuf de D. Anne Marie de Vaugué, époufa
le 14. Marie- Anne de Fortia , fille de Charles-
Jofeph de Fortia , Confeiller d'Etat , & de feu D:
Marie Madeleine Thomas.
Jofeph d'Apchier , Comte de la Baume &c.
Grand Sénéchal de Provence , fils de feu Philip
pes d'Apchier ; Comte de la Baume &c. & de D,
Gabrielle de Genitoux de la Tourelle , époufa le
23. D. Anne Marguerite Guénet de Franqueville,
fille de feu Touffaint , Marquis de Franqueville ,
&c. & de D, Madeleine d'Anviré de Machon
ville.
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Résumé : MORTS, NAISSANCES & Mariages.
Le texte mentionne plusieurs décès de personnalités notables. Jean-Baptiste Foubert de Bizy, secrétaire dans les ambassades, est mort à 42 ans. Louis de Quelen-Stuart de Cauffade, maître de camp de cavalerie, est décédé à 25 ans. Henry de Fabry, comte d'Autrey et maître de camp du régiment de la Sarre, est mort à 42 ans. Benjamin-Louis Frottier, marquis de la Coste-Messeliere et lieutenant du roi du Poitou, est décédé à 64 ans. Marie-Anne Delorme, veuve de Pierre Debas, est morte à 95 ans. Guichard-Joseph Duvernay, médecin du roi et professeur en anatomie, est décédé à 82 ans. Louis-Charles, marquis de la Châtre et lieutenant général des armées du roi, est mort à 69 ans. Louise de Meures, veuve de Jean de Vivans et marquise de Noaillac, est décédée à 51 ans. Le texte évoque également plusieurs mariages. César Alexandre, comte de Gouffier, a épousé Marie Charlotte de Gouffier. Anne Léon de Montmorency a épousé Anne Marie Barbe de Ville. Gaspard de Fortia, marquis de Montréal, a épousé Marie-Anne de Fortia. Joseph d'Apchier, comte de la Baume, a épousé Anne Marguerite Guénet de Franqueville.
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49
p. 2532-2534
MORTS, NAISSANCES & Mariages.
Début :
Dame Marie Anne Boucher, Epouse de M. Anne François, Marquis de Harville, [...]
Mots clefs :
Marquis, Épouse, Lieutenant, Armées, Diocèse, Comte, Gouverneur, Duc, Ambassadeur, Général
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS, NAISSANCES & Mariages.
MORTS , NAISSANCES.
DM.
& Mariages.
Ame Marie Anne Boucher , Epoufe de
M. Anne François , Marquis de Harville ,
Brigadier des Armées du Roi , & Meftre de Camp
Lieutenant du Régiment de Clermont , Cavalerie,
mourut à Bordeaux le 15. du mois dernier , âgée
d'environ 25. ans.
Jacques Dumetz , Brigadier des Armées du
Rof , mourut le 19. Octobre , âgé de 48. ans.
M. Jofeph de Nagu , Marquis de Varenne ,..
Capitaine des Suiffes de la Reine d'Espagne , veuve
du Roi Louis I , mourut à Paris le 27. du même
mois dans la 48. année de fon âge.
Dame Charlotte le Normand veuve des
M. Louis Godefroi , Comte d'Estrades , Lieutenant
Genéral des Armées du Roi , & Maire per
petuel de la Ville de Bordeaux , mourut à Paris .
le 30. du mois dernier , âgée d'environ 58. ans.
Jacques Deshayes , Secrétaire du Roi ; & Di-.
гостенк
NOVEMBRE. 1730 : 2533
recteur General de la Compagnie des Indes , mous
rut le 31. Octobre , âgé de 57. ans .
D. Elifabeth Mignot , veuve de Louis Goffeau
de Rochebrune , Capitaine au Régiment des
Gardes Françoiles , mourut le 7 Novembre
âgée de 92. ans.
Denis-François Boutheillier de Chavigny , Archevêque
de Sens , Abbé de N. D. d'Oigny , Or
dre de S. Auguftin, Diocéfe d'Autun , de S. Loup,
même Ordre, Diocéfe de Troyes ,& de Vauluifant,
Ordre de Citeaux,Diocéfe de Sens, Prieur de S.Denis
de Marnay, ci -devant Evêque de Troyes,mourut
dans fon Diocéfe , le 9. de ce mois , âgé
d'environ 65. ans.
Dame Anne- Marie - Françoife- Loüife Boucherat
, veuve de M. Nicolas-Augufte de Harlay
Comte de Cely , Confeiller d'Etat ordinaire , Ambaffadeur
Extraordinaire & Plenipotentiaire à
l'Amffemblée de Francfort, & aux Conferences de
l'Empire, & depuis premier Ambaffadeur & Plenipotentiaire
pour la Paix de Rifwick , mourut en
cette Ville , le 23. de ce mois , dans la foixante
quatorziéme année de fon âge..
Claude- Jean- Baptifte Dodard , premier Medecin
du Roi , mourut à Verfailles le 25. de ce
mois , âgé d'environ 36. ans. Il avoit été premier
Medecin de feu Monfeigneur le Dauphin , Pere de
Sa Majesté.
Le 20. de ce mois , D. Marguerite Delphine
de Valbelle , époufe d'André Géonroy de Valbelle,
Marquis de Rians , Baron de Méyrargués & de.
Cadarache , Mestre de Camp de Cavalerie , accoucha
d'un fils , qui fut tenu fur les Fonts , & nom
mé François , Felix , Alphonfe , par Côme- Alphonfe
de Valbelle , Marquis de Montfuron
Comte de Ribiers, Capitaine- Sous -Lieutenant des
Gen-
23
2534 MERCURE DE FRANCE
Gendarmes de la Garde ordinaire du Roi , Bri¬
gadier de fes Armées , Commandeur de l'Ordre-
Royal & Militaire de S. Louis , & par Madame
Françoife- Felicité Colbert de Torcy, époufe d'André
Jofeph Ancezune , D'otaifon , Marquis d'Ancezune
, Meftre de Camp de Cavalerie.
Elifabeth de Champeron , époufe de Dominique
Anel , Premier Chirurgien de feuë Madame
Royale de Savoye , accoucha le 13. Septembre
d'un fils , qui fut tenu fur les Fonts le 20. Novembre
& nommé Antoine Charles , par Charles
de Rohan, Prince de Soubife, & par Dame Marie.
Therefe Ifidore , Comteffe de Zanoy , époufe da
Comte de Kinigzeg , Ambaffadeur Extraordinai
re de S. M. I. au Congrès de Soiffons , & Maréchal
de l'Empire.
Dame Marie- Sophie de Courcillon , époufe.de-
Charles- François Dalbert Dailly , Duc de Pequigny
, Pair de France , Capitaine - Lieutenant de la
Compagnie des Chevaux-Legers de la Garde du
Roi , accoucha le 18. Novembre d'une fille , qui
fut nommée Marie- Thereze , par Leonard Elie ,
Marquis de Pompadour &c. Gouverneur & -
Grand-Senechal Honoraire de Périgord , & par
Dame Jeanne-Marie Colbert , veuve de Charles
Honoré Dalbert, Duc de Luynes & de Chevreule,
Pair de France , Chevalier des Ordres du Roi ,
Gouverneur de la Province de Guyenne .
Jean -Luc de Lauzieres , Marquis de Themines,
de Cardaillac , & c. Gentilhomme de la Chambre
du Duc d'Orleans , Premier Prince du Sang, Gouverneur
des Ville & Châteaux de Dommes , épou--
fa le 13.Novembre D.Angelique Sophie d'Hautefort,
fille de feu Louis - Charles d'Hautefort, Marquis
de Surville , Lieutenant General des Armées.
du Roi, & de Dame Louife de Crevant d'Huinieres.
DM.
& Mariages.
Ame Marie Anne Boucher , Epoufe de
M. Anne François , Marquis de Harville ,
Brigadier des Armées du Roi , & Meftre de Camp
Lieutenant du Régiment de Clermont , Cavalerie,
mourut à Bordeaux le 15. du mois dernier , âgée
d'environ 25. ans.
Jacques Dumetz , Brigadier des Armées du
Rof , mourut le 19. Octobre , âgé de 48. ans.
M. Jofeph de Nagu , Marquis de Varenne ,..
Capitaine des Suiffes de la Reine d'Espagne , veuve
du Roi Louis I , mourut à Paris le 27. du même
mois dans la 48. année de fon âge.
Dame Charlotte le Normand veuve des
M. Louis Godefroi , Comte d'Estrades , Lieutenant
Genéral des Armées du Roi , & Maire per
petuel de la Ville de Bordeaux , mourut à Paris .
le 30. du mois dernier , âgée d'environ 58. ans.
Jacques Deshayes , Secrétaire du Roi ; & Di-.
гостенк
NOVEMBRE. 1730 : 2533
recteur General de la Compagnie des Indes , mous
rut le 31. Octobre , âgé de 57. ans .
D. Elifabeth Mignot , veuve de Louis Goffeau
de Rochebrune , Capitaine au Régiment des
Gardes Françoiles , mourut le 7 Novembre
âgée de 92. ans.
Denis-François Boutheillier de Chavigny , Archevêque
de Sens , Abbé de N. D. d'Oigny , Or
dre de S. Auguftin, Diocéfe d'Autun , de S. Loup,
même Ordre, Diocéfe de Troyes ,& de Vauluifant,
Ordre de Citeaux,Diocéfe de Sens, Prieur de S.Denis
de Marnay, ci -devant Evêque de Troyes,mourut
dans fon Diocéfe , le 9. de ce mois , âgé
d'environ 65. ans.
Dame Anne- Marie - Françoife- Loüife Boucherat
, veuve de M. Nicolas-Augufte de Harlay
Comte de Cely , Confeiller d'Etat ordinaire , Ambaffadeur
Extraordinaire & Plenipotentiaire à
l'Amffemblée de Francfort, & aux Conferences de
l'Empire, & depuis premier Ambaffadeur & Plenipotentiaire
pour la Paix de Rifwick , mourut en
cette Ville , le 23. de ce mois , dans la foixante
quatorziéme année de fon âge..
Claude- Jean- Baptifte Dodard , premier Medecin
du Roi , mourut à Verfailles le 25. de ce
mois , âgé d'environ 36. ans. Il avoit été premier
Medecin de feu Monfeigneur le Dauphin , Pere de
Sa Majesté.
Le 20. de ce mois , D. Marguerite Delphine
de Valbelle , époufe d'André Géonroy de Valbelle,
Marquis de Rians , Baron de Méyrargués & de.
Cadarache , Mestre de Camp de Cavalerie , accoucha
d'un fils , qui fut tenu fur les Fonts , & nom
mé François , Felix , Alphonfe , par Côme- Alphonfe
de Valbelle , Marquis de Montfuron
Comte de Ribiers, Capitaine- Sous -Lieutenant des
Gen-
23
2534 MERCURE DE FRANCE
Gendarmes de la Garde ordinaire du Roi , Bri¬
gadier de fes Armées , Commandeur de l'Ordre-
Royal & Militaire de S. Louis , & par Madame
Françoife- Felicité Colbert de Torcy, époufe d'André
Jofeph Ancezune , D'otaifon , Marquis d'Ancezune
, Meftre de Camp de Cavalerie.
Elifabeth de Champeron , époufe de Dominique
Anel , Premier Chirurgien de feuë Madame
Royale de Savoye , accoucha le 13. Septembre
d'un fils , qui fut tenu fur les Fonts le 20. Novembre
& nommé Antoine Charles , par Charles
de Rohan, Prince de Soubife, & par Dame Marie.
Therefe Ifidore , Comteffe de Zanoy , époufe da
Comte de Kinigzeg , Ambaffadeur Extraordinai
re de S. M. I. au Congrès de Soiffons , & Maréchal
de l'Empire.
Dame Marie- Sophie de Courcillon , époufe.de-
Charles- François Dalbert Dailly , Duc de Pequigny
, Pair de France , Capitaine - Lieutenant de la
Compagnie des Chevaux-Legers de la Garde du
Roi , accoucha le 18. Novembre d'une fille , qui
fut nommée Marie- Thereze , par Leonard Elie ,
Marquis de Pompadour &c. Gouverneur & -
Grand-Senechal Honoraire de Périgord , & par
Dame Jeanne-Marie Colbert , veuve de Charles
Honoré Dalbert, Duc de Luynes & de Chevreule,
Pair de France , Chevalier des Ordres du Roi ,
Gouverneur de la Province de Guyenne .
Jean -Luc de Lauzieres , Marquis de Themines,
de Cardaillac , & c. Gentilhomme de la Chambre
du Duc d'Orleans , Premier Prince du Sang, Gouverneur
des Ville & Châteaux de Dommes , épou--
fa le 13.Novembre D.Angelique Sophie d'Hautefort,
fille de feu Louis - Charles d'Hautefort, Marquis
de Surville , Lieutenant General des Armées.
du Roi, & de Dame Louife de Crevant d'Huinieres.
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Résumé : MORTS, NAISSANCES & Mariages.
Le document relate divers événements survenus en octobre et novembre 1730, incluant des décès et des naissances. Parmi les décès notables, Ame Marie Anne Boucher, épouse du Marquis de Harville, est décédée à Bordeaux à l'âge de 25 ans. Jacques Dumetz, Brigadier des Armées du Roi, est mort à 48 ans. Le Marquis de Varenne, capitaine des Suisses de la Reine d'Espagne, est décédé à Paris à 48 ans. Dame Charlotte le Normand, veuve du Comte d'Estrades, est morte à Paris à 58 ans. Jacques Deshayes, Secrétaire du Roi et Directeur général de la Compagnie des Indes, est décédé à 57 ans. D. Élisabeth Mignot, veuve de Louis Goffeau de Rochebrune, est morte à 92 ans. Denis-François Boutheillier de Chavigny, Archevêque de Sens, est décédé à 65 ans. Dame Anne-Marie-Françoise-Louise Boucherat, veuve du Comte de Cely, est morte à 64 ans. Claude-Jean-Baptiste Dodard, premier Médecin du Roi, est décédé à Versailles à 36 ans. En ce qui concerne les naissances, Dame Marguerite Delphine de Valbelle a accouché d'un fils nommé François, Félix, Alphonse, le 20 novembre. Élisabeth de Champeron a accouché d'un fils nommé Antoine Charles le 13 septembre, baptisé le 20 novembre. Dame Marie-Sophie de Courcillon a accouché d'une fille nommée Marie-Thérèse le 18 novembre. Enfin, Jean-Luc de Lauzieres, Marquis de Thémines, a épousé D'Angélique Sophie d'Hautefort le 13 novembre.
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50
p. 2753-2755
Entrée publique & Audience du Roy, de l'Ambassadeur de Venise, [titre d'après la table]
Début :
Le 3. de ce mois, M. Aluise Mocenigo, Ambassadeur Ordinaire de la République [...]
Mots clefs :
Ambassadeur de Venise, Roi, Reine, Chevalier, Comte, Duchesse
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Entrée publique & Audience du Roy, de l'Ambassadeur de Venise, [titre d'après la table]
Le 3. de ce mois , M. Aluife Mocenigo ,
Ambaffadeur Ordinaire de la Républi
que de Venife , fit fon Entrée publique
dans la Ville de Paris. Le Maréchal de
Roquelaure & le Chevalier de Sainctor ,
Introducteur des Ambaffadeurs , allerent
le prendre dans les Caroffes du Roi &
de la Reine au Convent de Picpus , d'où
la Marche fe fit dans l'ordre fuivant : le
Caroffe de l'Introducteur , le Caroffe du
Maréchal de Roquelaure , précedés de
fon Ecuyer & de deux Pages à cheval ;
un Suiffe de l'Ambaffadeur à cheval , la
SAL. Vol. livrés
2754 MERCURE DE FRANCE
livrée de l'Ambaffadeur à pied , fix Officiers
à cheval , deux Ecuyers & fix Pages.
à cheval , le Caroffe du Roi , aux côtés
duquel marchoient la livrée du Maréchal
de Roquelaure & celle du Chevalier de
Sainctor ; le Caroffe de la Reine , celui
de Madame la Ducheffe d'Orleans ,
Douairiere , ceux du Duc d'Orleans , de
la Ducheffe de Bourbon
J
"
> Douairiere
du Duc de Bourbon , de la Ducheffe de
Bourbon , du Comte de Charolois , du
Comte de Clermont , de la Princeffe de
Conti , Douairiere , de la Princeffe de
Conti , Seconde Douairiere , de la Princeffe
de Conti , Troifiéme Douairiere ,
du Prince de Conti , du Duc & de la
Ducheffe du Maine , du Prince de Dombes
, du Comte d'Eu , du Comte & de
la Comteffe de Touloufe , & celui de M.
Chauvelin , Garde des Sceaux , Miniftre
& Secretaire d'Etat , ayant le département
des affaires étrangeres , & à unc
diſtance de 30 à 40. pas , un Suiffe de
l'Ambaffadeur marchant à cheval devant
fes quatre Caroffes.
part
Après qu'il fut arrivé à fon Hôtel , if
fut complimenté de la
du Roi par
le Duc de Rochechouart , Premier Gentilhomme
de la Chambre , de lapart
de
la Reine par le Comte de Teffé , fon
Premier Ecuyer , & de la part de Mada-
1. Vol. me
DECEMBRE . 1730. 2755
me la Ducheffe d'Orleans , Douairiere
par le Marquis de Crevecoeur , fon Premier
Ecuyer.
Le 5. le Prince de Pons & le Chevalier
de Sainctot , Introducteur des Ambaffadeurs
, allerent prendre l'Ambaffadeur
en fon Hôtel dans les Caroffes du
Roi & de la Reine , & le conduifirent à
Verſailles , où il eut fa premiere audiance
publique du Roi. Il trouva à fon paffage
dans l'avant court du Château les Compagnies
des Gardes Françoifes & Suiffes
fous les armes , les tambours appellant ;
dans la Cour les Gardes de la Porte &
ceux de la Prevôté fous les armes à leurs
poftes ordinaires , & fur l'efcalier les
Cent Suiffes en habits de cerémonie , la
hallebarde à la main . Il fut reçû en dedans
de la Salle des Gardes par le Duc
d'Harcourt , Capitaine des Gardes du
Corps , qui étoient en haye & fous les
armes. Après l'audience du Roi , l'Ambaffadeur
fut conduit à celle de la Reine
& de Monfeigneur le Dauphin par le
Prince de Pons & le Chevalier de Sainctot.
I alla à ces Audiences en Robe
conformément à l'uſage des Ambaſſadeurs
de Venife , & après avoir été traité par
les Officiers du Roi , il fut reconduit à
Paris par le Chevalier de Sainctot dans
les Caroffes de L. M. avec les cerémonies
accoutumées .
Ambaffadeur Ordinaire de la Républi
que de Venife , fit fon Entrée publique
dans la Ville de Paris. Le Maréchal de
Roquelaure & le Chevalier de Sainctor ,
Introducteur des Ambaffadeurs , allerent
le prendre dans les Caroffes du Roi &
de la Reine au Convent de Picpus , d'où
la Marche fe fit dans l'ordre fuivant : le
Caroffe de l'Introducteur , le Caroffe du
Maréchal de Roquelaure , précedés de
fon Ecuyer & de deux Pages à cheval ;
un Suiffe de l'Ambaffadeur à cheval , la
SAL. Vol. livrés
2754 MERCURE DE FRANCE
livrée de l'Ambaffadeur à pied , fix Officiers
à cheval , deux Ecuyers & fix Pages.
à cheval , le Caroffe du Roi , aux côtés
duquel marchoient la livrée du Maréchal
de Roquelaure & celle du Chevalier de
Sainctor ; le Caroffe de la Reine , celui
de Madame la Ducheffe d'Orleans ,
Douairiere , ceux du Duc d'Orleans , de
la Ducheffe de Bourbon
J
"
> Douairiere
du Duc de Bourbon , de la Ducheffe de
Bourbon , du Comte de Charolois , du
Comte de Clermont , de la Princeffe de
Conti , Douairiere , de la Princeffe de
Conti , Seconde Douairiere , de la Princeffe
de Conti , Troifiéme Douairiere ,
du Prince de Conti , du Duc & de la
Ducheffe du Maine , du Prince de Dombes
, du Comte d'Eu , du Comte & de
la Comteffe de Touloufe , & celui de M.
Chauvelin , Garde des Sceaux , Miniftre
& Secretaire d'Etat , ayant le département
des affaires étrangeres , & à unc
diſtance de 30 à 40. pas , un Suiffe de
l'Ambaffadeur marchant à cheval devant
fes quatre Caroffes.
part
Après qu'il fut arrivé à fon Hôtel , if
fut complimenté de la
du Roi par
le Duc de Rochechouart , Premier Gentilhomme
de la Chambre , de lapart
de
la Reine par le Comte de Teffé , fon
Premier Ecuyer , & de la part de Mada-
1. Vol. me
DECEMBRE . 1730. 2755
me la Ducheffe d'Orleans , Douairiere
par le Marquis de Crevecoeur , fon Premier
Ecuyer.
Le 5. le Prince de Pons & le Chevalier
de Sainctot , Introducteur des Ambaffadeurs
, allerent prendre l'Ambaffadeur
en fon Hôtel dans les Caroffes du
Roi & de la Reine , & le conduifirent à
Verſailles , où il eut fa premiere audiance
publique du Roi. Il trouva à fon paffage
dans l'avant court du Château les Compagnies
des Gardes Françoifes & Suiffes
fous les armes , les tambours appellant ;
dans la Cour les Gardes de la Porte &
ceux de la Prevôté fous les armes à leurs
poftes ordinaires , & fur l'efcalier les
Cent Suiffes en habits de cerémonie , la
hallebarde à la main . Il fut reçû en dedans
de la Salle des Gardes par le Duc
d'Harcourt , Capitaine des Gardes du
Corps , qui étoient en haye & fous les
armes. Après l'audience du Roi , l'Ambaffadeur
fut conduit à celle de la Reine
& de Monfeigneur le Dauphin par le
Prince de Pons & le Chevalier de Sainctot.
I alla à ces Audiences en Robe
conformément à l'uſage des Ambaſſadeurs
de Venife , & après avoir été traité par
les Officiers du Roi , il fut reconduit à
Paris par le Chevalier de Sainctot dans
les Caroffes de L. M. avec les cerémonies
accoutumées .
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Résumé : Entrée publique & Audience du Roy, de l'Ambassadeur de Venise, [titre d'après la table]
Le 3 décembre 1730, M. Alvise Mocenigo, ambassadeur de la République de Venise, arriva à Paris. Il fut accueilli par le maréchal de Roquelaure et le chevalier de Sainctot, qui l'escortèrent jusqu'à son hôtel dans un cortège cérémoniel comprenant des carrosses du roi, de la reine, de Madame la duchesse d'Orléans douairière, du duc d'Orléans et d'autres nobles. À son arrivée, Mocenigo reçut des compliments de représentants royaux. Le 5 décembre, le prince de Pons et le chevalier de Sainctot conduisirent l'ambassadeur à Versailles pour sa première audience publique avec le roi. Les Gardes Françaises et Suisses étaient sous les armes, et les Cent Suisses en habits de cérémonie l'attendaient sur l'escalier. Après l'audience, Mocenigo fut reçu par la reine et le Dauphin. Il porta une robe conforme à l'usage des ambassadeurs vénitiens et fut reconduit à Paris par le chevalier de Sainctot avec les cérémonies habituelles.
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