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1
p. 54-59
Histoire de l'Enfant Ours. [titre d'après la table]
Début :
Voila comme les Grands Hommes ne meurent jamais. Leur nom [...]
Mots clefs :
Naissance, Enfant-ours, Lituanie, Bois
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texteReconnaissance textuelle : Histoire de l'Enfant Ours. [titre d'après la table]
Voila comme les Grand's Hommes ne meurent jamais. Leur nom demeure apres eux , & ils n'ont rien à craindre du temps.
Il eſt vray qu'il n'eſt pas permis d'eſtregrandHommeà tous ceux qui le voudroient devenir. On a
beau faire debelles actions , elles font longtemps ignorées , fi on n'eſt d'une naiſſance à ſe faire
GALANT. : 35 d'abord remarquer maisaumoins fi les occafions d'une bravoure
d'éclat ne s'offrent pas , l'Eſprit eſt une reſſource avec laquelle on peut toûjours faire figure dans le monde ; & qui ne s'y diftingue par aucune qualité recomman- dable , n'eſt àmon avis guere di- ferent de ce Enfant-Ours que la feuë Reyne de Pologne faiſoit élever. Je ne ſçay , Madame , fi vous en avez entendu parler. Il fut trouvé dans les Foreſts de Lithuanie,&pouvoit avoir ſept ou huit ans. Toutes ces manieres firent préfumer qu'il avoit eſté nourry par une Ourſe. Les traits deſon viſage estoient aſſezbeaux,
mais on y voyoit partoutdesci- catrices. On ne ſçait ſi elles venoient des ongles des jeunes Ours fes Freres avec leſquels il pou- voit s'eſtre joüé , ou des ronces &
Bvj.
36 LE MERCVRE
desbranchages desBois qu'il tra- verſoit , quand il fut pris , avec une agilite merveilleuſe. La Rey- ne à qui on l'apporta , le fit met- tre chez les Filles de la Charité.
qu'elle a fondées à Varfovie , &
ordonna qu'on en prift tout le foin poffible pour voir fi on pour-- roit tirer quelque éclairciffement de ſa vie paffée , quand il auroit appris à parler. Mais c'eſt ce qu'il n'a pû faire quelque peine qu'on ait priſe pour luy faire prononcer quelques paroles. On afeulement remarquéqu'il entendoit, & au- cunuſage de raiſonne luy eſt ve- nu.Ils'approchoit de tout le mon- de, &faisoitle Signe de la Croix,
parce qu'à ce Signe on luy don- noit du pain , qu'il alloiten ſuite dévorer enBête. Ildéchiroit tout
cequ'ifrencõtroit avec ſes ongles & ſes dents , & n'épargnoit pas.
GALANT 37
meſme ſes habits. Son plus grand plaifir eſtoitde grater la terre , d'y fairedes ouvertures , &de ſe ſauverdedans. J'ay voulu ſçavoir ce qu'il eſtoit devenu. , & on m'a écrit depuis quinze jours qu'a- pres la mortde la Reyne on l'a- voit donné à un Eveſque de Li- thuanie , qui s'eſtoit chargé d'en prendre foin. Apparemment c'e- ſtoit quelque larcin fait àl'hon- neur qu'on avoitvoulu cacher en l'expoſant dans les Bois
Il eſt vray qu'il n'eſt pas permis d'eſtregrandHommeà tous ceux qui le voudroient devenir. On a
beau faire debelles actions , elles font longtemps ignorées , fi on n'eſt d'une naiſſance à ſe faire
GALANT. : 35 d'abord remarquer maisaumoins fi les occafions d'une bravoure
d'éclat ne s'offrent pas , l'Eſprit eſt une reſſource avec laquelle on peut toûjours faire figure dans le monde ; & qui ne s'y diftingue par aucune qualité recomman- dable , n'eſt àmon avis guere di- ferent de ce Enfant-Ours que la feuë Reyne de Pologne faiſoit élever. Je ne ſçay , Madame , fi vous en avez entendu parler. Il fut trouvé dans les Foreſts de Lithuanie,&pouvoit avoir ſept ou huit ans. Toutes ces manieres firent préfumer qu'il avoit eſté nourry par une Ourſe. Les traits deſon viſage estoient aſſezbeaux,
mais on y voyoit partoutdesci- catrices. On ne ſçait ſi elles venoient des ongles des jeunes Ours fes Freres avec leſquels il pou- voit s'eſtre joüé , ou des ronces &
Bvj.
36 LE MERCVRE
desbranchages desBois qu'il tra- verſoit , quand il fut pris , avec une agilite merveilleuſe. La Rey- ne à qui on l'apporta , le fit met- tre chez les Filles de la Charité.
qu'elle a fondées à Varfovie , &
ordonna qu'on en prift tout le foin poffible pour voir fi on pour-- roit tirer quelque éclairciffement de ſa vie paffée , quand il auroit appris à parler. Mais c'eſt ce qu'il n'a pû faire quelque peine qu'on ait priſe pour luy faire prononcer quelques paroles. On afeulement remarquéqu'il entendoit, & au- cunuſage de raiſonne luy eſt ve- nu.Ils'approchoit de tout le mon- de, &faisoitle Signe de la Croix,
parce qu'à ce Signe on luy don- noit du pain , qu'il alloiten ſuite dévorer enBête. Ildéchiroit tout
cequ'ifrencõtroit avec ſes ongles & ſes dents , & n'épargnoit pas.
GALANT 37
meſme ſes habits. Son plus grand plaifir eſtoitde grater la terre , d'y fairedes ouvertures , &de ſe ſauverdedans. J'ay voulu ſçavoir ce qu'il eſtoit devenu. , & on m'a écrit depuis quinze jours qu'a- pres la mortde la Reyne on l'a- voit donné à un Eveſque de Li- thuanie , qui s'eſtoit chargé d'en prendre foin. Apparemment c'e- ſtoit quelque larcin fait àl'hon- neur qu'on avoitvoulu cacher en l'expoſant dans les Bois
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Résumé : Histoire de l'Enfant Ours. [titre d'après la table]
Le texte explore la pérennité des grands hommes et les obstacles pour y accéder, soulignant que les actions remarquables sont souvent méconnues sans une naissance prestigieuse ou des occasions de bravoure. Il relate l'histoire d'un enfant trouvé dans les forêts de Lituanie, probablement élevé par une ourse, en raison de ses cicatrices et de son comportement animalier. La reine de Pologne, qui l'avait recueilli, tenta en vain de lui apprendre à parler. L'enfant, nommé 'Enfant-Ours', montrait des signes de compréhension mais aucun usage de la raison. Il mangeait comme une bête, déchirait tout avec ses ongles et ses dents, et aimait creuser la terre. Après la mort de la reine, il fut confié à un évêque de Lituanie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 231-245
« Ce Quatrain est de Mr de Tierceville-Mahaut, à qui [...] »
Début :
Ce Quatrain est de Mr de Tierceville-Mahaut, à qui [...]
Mots clefs :
Prince, Dauphin, Esprit, Naissance, Monsieur de Montausier, Evêque de Condom, Précepteur, Ouvrages, Monsieur Blondel, Enseigner
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texteReconnaissance textuelle : « Ce Quatrain est de Mr de Tierceville-Mahaut, à qui [...] »
Ce Quatrain eſt de M de Tierceville-Mahaut,àqui Monfieurle DucdeMontaufier,qui a pour luy beaucoup d'eſtime & de bienveillance , avoit faitvoir ce petit Ouvrage de Mon- ſeigneur le Dauphin. C'eſt un Gentilhomme que ſon merite rend affez connu. Quand une infinité de Sonnets , de Madrigaux , &d'autres Pieces galan- tes qu'on a veuës de luy , n'au- roient pas fait connoiſtre qu'il a
autantdefeu que de delicateſſe
dans l'Eſprit , il ne faudroit que l'entendre pour en eſtre perſua- dé. Sa converſation eſt fort agreable , & on eft afſuré de ne s'ennuyer jamais avec luy. Le ſoin que daigne prendre le Roy
GALANT. 147 I
de dreſſer des Memoires de ſa
main pour I inſtruction de Mon-- ſeigneur le Dauphin , eſt une ſenſible marquede l'amourqu'il a pour ſes Peuples , à qui par cette bonté qui luy eſt ſi natu- relle poureux , il voudroit laif- fer, s'il ſe pouvoit , un Succef- ſeur qui allaſt encor au delà de ſes grandes qualitez. Sa Maje- THEOUD
ontTIA
ſté qui a toûjours eu de particulieres conſidératiós pour toutes les Perfonnes qui l'honneur d'eſtre de fon Sang fait élever avec luy Meſſieurs les Princes de Conty & de la Roche-fur-Yon. Quelque hau- te que ſoit leur Naiſſance , on peut dire qu'elle n'eſt pas le plus grand de leurs avantages. Leur Eſprit ſembleeſtre encor au def- ſus,&ils ſe montrentpar làdi- gnes Fils de feu Monfieur le
Gij
148 LE MERCVRE Prince de Conty leur Pere , qui en avoit infiniment; & dignes Neveux de Son Alteſſe Sereniffime Monfieur le Prince , dont
les grandes lumieres nefont pas moins l'admiration de tout le
monde, que fon extraordinaire
valeur. On a veu encoraupres deMonſeigneurle Dauphindes Enfans d'honneurd'une grande qualité, mais qui n'eſtoientpas moins conſidérables par les ta- lens qui les accompagnoient.
Ainſi ce jeune Prince n'ayant jamais veu que de l'Eſprit dans tout ce qui l'a environné,eftant fort éclairé de luy-meſime &
ayant pour Gouverneur Mon- fieur le Ducde Montaufier , &
MonfieurBoffuet ancien Evefque de Condom pour Prece- pteur , on n'a point à douter qu'iln'atteigne cedegréde per-
:
GALANT. 149
1
fection que Sa Majesté luy fou- haite. Vous avez entendu par- ler ſi avantageuſement de l'un &de l'autre , que je ne puis preſque vous en riendire quine vous foit déjatres-connu. Mon- fieurdeMoutaufierpoffede tou- tes les qualitez d'un grand Homme. Ila une rectitude d'amequi le rend auffi peu com- plaiſantpourceux qui font mal,
qu'il ſe montre zele Protecteur
de laVertu. Ilprendtoûjours le party de la Juſtice avec une ar- deur incroyable, &ne loüe que ce qui merite veritablement d'eſtre loué, mais ſes loüanges ne ſont point des paroles , ce fontdes chofes de fait dont tou
telaCourretentit. Vousſçavez qu'il eſt de laMaiſonde Sainte- Maure,dont l'ancienneté jufti- fie aſſez la grandeur. Dés l'an Güj
150 LE MERCVRE
mil dix il paroiſt que Gofſelin de Sainte- Maure eſtoit un des
plusgrands Seigneurs duRoyau- me; & en 1334. on a veu un Guillaume de Sainte- Maure
Chancelier de France. Leur Poſterité qui s'eſt divisée en plu- fieurs Branches , & qui ayant toûjours pris de tres-grandes Alliances, enadonné aux plus Illuftres Maiſons , s'eſt conti- nuée par vingtdegrés de décen te directe de mafle en mafle,
juſqu'à Monfieur de Montau- fier , à qui le Marquiſat qui por- te cenom, érigé enDuché , ap- partient enpropre. Il fut tranf mis il y a pres de quatre cens ans à laMaiſonde Sainte-Maure par une des Filles d'un Duc d'Angoulefme. Je ne vous par- leray nyde fon courage , ny de ſa valeur. La France en a eſté
)
GALANT témoin , auffi-bien que l'Italie,
la Lorraine , l'Alface, & l'Alle- magne. Dans les derniers Mou- vemens fomentez par les Enne- mis de la Couronne , non ſeulement ilmaintint dans l'obeïffance du Roy les Provinces de Xaintonge & d'Angoulmois dontil eſtoit Gouverneur ; mais
apres avoir rejetté avecune fi- delité inviolable les Propoſitions -avantageuſes qui luy furentfai- -tes pour l'obliger d'entrer dans -lepartydes Rebelles , il chaffa -lesEnnemis des Places de Xaintes, de Taillebourg , & de Tal- lemont, dont ils s'eſtoient em- parez; & les ayant pourſuivis,
quoy que fort inégal en nom- bre , ilchargea &défit une par- tie de leur Armée à Montanić
enPérigord, fans qu'une bleffu- re qu'il reçeut aubras, &dont Giv
152 LE MERCVRE il eſt demeuré eſtropić , luy fie rienrelâcher de la vigueur avee laquelle il ſe ſignala dans une fi glorieuſe occafion. LeGouvernement de Normandie ayant vaqué par lamort defenMon- fieurde Longueville,Sa Majesté l'en gratifia , tant en conſidera- tiondeſesſervices, quede ceux qu'Hector de Sainte Maure fon
Frere aifné avoit rendus àl'E
tat, non ſeulement en défendantRofignan dansleMontferrat contre le Marquis de Spino- Ja, mais en pluſieurs autres oc- cafions, &fur tout dans la Valteline , où il fut tué enforçant les Bains deBorino , & menant
l'Avantgarde de l'Armée que commandoit feu Monfieur le
Duc de Rohan.
.2
Monfieur l'Eveſque deCon- dom qui a fuccedé à feu M le
GALANT. 153
1
1
1
Preſident de Perigny dans la Charge de Precepteur deMon- ſeigneur le Dauphin , a prêché longtemps avec un ſuccés qui P'a rendu dignede la réputation qu'il s'eſt acquiſe. Il mene une vie fort exemplaire , &n'ayant pas moins de pieté que de do- trine , il ne peut inſpirer à ce jeune Prince que des ſentimens conformes au deſſein pour le- quel le Roy luy a fait l'honneur de le choiſir. Il a beaucoup de douceur , des manieres aiſees &
infinuantes , qui jointes aux fa- vorables diſpoſitions qu'il a
trouvées dans l'Eſprit de cet AuguſteDiſciple , y font paſſer adroitement , & fans qu'il ait lieu de s'en rebuter , toutes les connoiſſances qui peuvent étre de fon employ. Il eſt de l'Aca- demieFrançoiſe ,auffi bien que Gv
154 LE MERCVRE Mr Huet Sous-Précepteur de
ce Prince. C'eſt un Homme
d'une fort grande érudition , à
qui nous devons pluſieurs Ma- nufcrits des Ouvrages d'Ori- gene , qui n'avoient jamais eſté publiez. Vous vous plaindriez,
Madame , ſi je finiſſois l'Article de l'Education de monſeigneur le Dauphin, ſans vous parlerde M. Milet qui en eſt le SousGouverneur. Les Négociations dans leſquelles il a eſté em- ployé par m' le Cardinal de Richelieu & par м le Cardinal Mazarin, tant dedans que de- hors le Royaume, font une mar- que incontestable de fon merite. Il eſt mareſchal desCamps &Arméesdu Roy, &a eſté en- voyé par Sa majeſté en Allema- gne & en Pologue , où il a tres- utilement ſervy.
GALANT. 155
C M' Blondel qui enſeigne les Mathématiques à Monſeigneur leDauphin , eſt auſſi mareſchal deCamp. Onl'a employéquel- que temps aux Indes. Il a eſté Capitaine de Galere & de Vaif- feau , & Envoyé extraordinaire à Conſtantinople , en Suéde, &
aupres de l'Electeur de Brande- bourg. Il a beaucoupde litte- rature , &a fait pluſieurs Livres qui n'en laiſſent point douter.
Il en a mis au jour quelques au tres de Fortifications &de маthématiques , fort eſtimez des François & des Etrangers. Il a
travaillé en particulier aupres du Roy,qui le confidere. C'eſt luy qui a fait le nouveau Plan de Paris , & qui a donné les Deffeins des nouvelles Portes,
&du nouveauRamparten for medeCours.
Gvj
156 LE MERCVRE
Je ne vous diray rien deM
Sylvestre , qui a montré àdeffi- gner à Monſeigneur le Dau- phin, & qui eſt un tres habile Homme dans fon Art,auffi-bien
quetous les autres Maiſtres qui ont de l'employ aupres de ce jeune Prince.
autantdefeu que de delicateſſe
dans l'Eſprit , il ne faudroit que l'entendre pour en eſtre perſua- dé. Sa converſation eſt fort agreable , & on eft afſuré de ne s'ennuyer jamais avec luy. Le ſoin que daigne prendre le Roy
GALANT. 147 I
de dreſſer des Memoires de ſa
main pour I inſtruction de Mon-- ſeigneur le Dauphin , eſt une ſenſible marquede l'amourqu'il a pour ſes Peuples , à qui par cette bonté qui luy eſt ſi natu- relle poureux , il voudroit laif- fer, s'il ſe pouvoit , un Succef- ſeur qui allaſt encor au delà de ſes grandes qualitez. Sa Maje- THEOUD
ontTIA
ſté qui a toûjours eu de particulieres conſidératiós pour toutes les Perfonnes qui l'honneur d'eſtre de fon Sang fait élever avec luy Meſſieurs les Princes de Conty & de la Roche-fur-Yon. Quelque hau- te que ſoit leur Naiſſance , on peut dire qu'elle n'eſt pas le plus grand de leurs avantages. Leur Eſprit ſembleeſtre encor au def- ſus,&ils ſe montrentpar làdi- gnes Fils de feu Monfieur le
Gij
148 LE MERCVRE Prince de Conty leur Pere , qui en avoit infiniment; & dignes Neveux de Son Alteſſe Sereniffime Monfieur le Prince , dont
les grandes lumieres nefont pas moins l'admiration de tout le
monde, que fon extraordinaire
valeur. On a veu encoraupres deMonſeigneurle Dauphindes Enfans d'honneurd'une grande qualité, mais qui n'eſtoientpas moins conſidérables par les ta- lens qui les accompagnoient.
Ainſi ce jeune Prince n'ayant jamais veu que de l'Eſprit dans tout ce qui l'a environné,eftant fort éclairé de luy-meſime &
ayant pour Gouverneur Mon- fieur le Ducde Montaufier , &
MonfieurBoffuet ancien Evefque de Condom pour Prece- pteur , on n'a point à douter qu'iln'atteigne cedegréde per-
:
GALANT. 149
1
fection que Sa Majesté luy fou- haite. Vous avez entendu par- ler ſi avantageuſement de l'un &de l'autre , que je ne puis preſque vous en riendire quine vous foit déjatres-connu. Mon- fieurdeMoutaufierpoffede tou- tes les qualitez d'un grand Homme. Ila une rectitude d'amequi le rend auffi peu com- plaiſantpourceux qui font mal,
qu'il ſe montre zele Protecteur
de laVertu. Ilprendtoûjours le party de la Juſtice avec une ar- deur incroyable, &ne loüe que ce qui merite veritablement d'eſtre loué, mais ſes loüanges ne ſont point des paroles , ce fontdes chofes de fait dont tou
telaCourretentit. Vousſçavez qu'il eſt de laMaiſonde Sainte- Maure,dont l'ancienneté jufti- fie aſſez la grandeur. Dés l'an Güj
150 LE MERCVRE
mil dix il paroiſt que Gofſelin de Sainte- Maure eſtoit un des
plusgrands Seigneurs duRoyau- me; & en 1334. on a veu un Guillaume de Sainte- Maure
Chancelier de France. Leur Poſterité qui s'eſt divisée en plu- fieurs Branches , & qui ayant toûjours pris de tres-grandes Alliances, enadonné aux plus Illuftres Maiſons , s'eſt conti- nuée par vingtdegrés de décen te directe de mafle en mafle,
juſqu'à Monfieur de Montau- fier , à qui le Marquiſat qui por- te cenom, érigé enDuché , ap- partient enpropre. Il fut tranf mis il y a pres de quatre cens ans à laMaiſonde Sainte-Maure par une des Filles d'un Duc d'Angoulefme. Je ne vous par- leray nyde fon courage , ny de ſa valeur. La France en a eſté
)
GALANT témoin , auffi-bien que l'Italie,
la Lorraine , l'Alface, & l'Alle- magne. Dans les derniers Mou- vemens fomentez par les Enne- mis de la Couronne , non ſeulement ilmaintint dans l'obeïffance du Roy les Provinces de Xaintonge & d'Angoulmois dontil eſtoit Gouverneur ; mais
apres avoir rejetté avecune fi- delité inviolable les Propoſitions -avantageuſes qui luy furentfai- -tes pour l'obliger d'entrer dans -lepartydes Rebelles , il chaffa -lesEnnemis des Places de Xaintes, de Taillebourg , & de Tal- lemont, dont ils s'eſtoient em- parez; & les ayant pourſuivis,
quoy que fort inégal en nom- bre , ilchargea &défit une par- tie de leur Armée à Montanić
enPérigord, fans qu'une bleffu- re qu'il reçeut aubras, &dont Giv
152 LE MERCVRE il eſt demeuré eſtropić , luy fie rienrelâcher de la vigueur avee laquelle il ſe ſignala dans une fi glorieuſe occafion. LeGouvernement de Normandie ayant vaqué par lamort defenMon- fieurde Longueville,Sa Majesté l'en gratifia , tant en conſidera- tiondeſesſervices, quede ceux qu'Hector de Sainte Maure fon
Frere aifné avoit rendus àl'E
tat, non ſeulement en défendantRofignan dansleMontferrat contre le Marquis de Spino- Ja, mais en pluſieurs autres oc- cafions, &fur tout dans la Valteline , où il fut tué enforçant les Bains deBorino , & menant
l'Avantgarde de l'Armée que commandoit feu Monfieur le
Duc de Rohan.
.2
Monfieur l'Eveſque deCon- dom qui a fuccedé à feu M le
GALANT. 153
1
1
1
Preſident de Perigny dans la Charge de Precepteur deMon- ſeigneur le Dauphin , a prêché longtemps avec un ſuccés qui P'a rendu dignede la réputation qu'il s'eſt acquiſe. Il mene une vie fort exemplaire , &n'ayant pas moins de pieté que de do- trine , il ne peut inſpirer à ce jeune Prince que des ſentimens conformes au deſſein pour le- quel le Roy luy a fait l'honneur de le choiſir. Il a beaucoup de douceur , des manieres aiſees &
infinuantes , qui jointes aux fa- vorables diſpoſitions qu'il a
trouvées dans l'Eſprit de cet AuguſteDiſciple , y font paſſer adroitement , & fans qu'il ait lieu de s'en rebuter , toutes les connoiſſances qui peuvent étre de fon employ. Il eſt de l'Aca- demieFrançoiſe ,auffi bien que Gv
154 LE MERCVRE Mr Huet Sous-Précepteur de
ce Prince. C'eſt un Homme
d'une fort grande érudition , à
qui nous devons pluſieurs Ma- nufcrits des Ouvrages d'Ori- gene , qui n'avoient jamais eſté publiez. Vous vous plaindriez,
Madame , ſi je finiſſois l'Article de l'Education de monſeigneur le Dauphin, ſans vous parlerde M. Milet qui en eſt le SousGouverneur. Les Négociations dans leſquelles il a eſté em- ployé par m' le Cardinal de Richelieu & par м le Cardinal Mazarin, tant dedans que de- hors le Royaume, font une mar- que incontestable de fon merite. Il eſt mareſchal desCamps &Arméesdu Roy, &a eſté en- voyé par Sa majeſté en Allema- gne & en Pologue , où il a tres- utilement ſervy.
GALANT. 155
C M' Blondel qui enſeigne les Mathématiques à Monſeigneur leDauphin , eſt auſſi mareſchal deCamp. Onl'a employéquel- que temps aux Indes. Il a eſté Capitaine de Galere & de Vaif- feau , & Envoyé extraordinaire à Conſtantinople , en Suéde, &
aupres de l'Electeur de Brande- bourg. Il a beaucoupde litte- rature , &a fait pluſieurs Livres qui n'en laiſſent point douter.
Il en a mis au jour quelques au tres de Fortifications &de маthématiques , fort eſtimez des François & des Etrangers. Il a
travaillé en particulier aupres du Roy,qui le confidere. C'eſt luy qui a fait le nouveau Plan de Paris , & qui a donné les Deffeins des nouvelles Portes,
&du nouveauRamparten for medeCours.
Gvj
156 LE MERCVRE
Je ne vous diray rien deM
Sylvestre , qui a montré àdeffi- gner à Monſeigneur le Dau- phin, & qui eſt un tres habile Homme dans fon Art,auffi-bien
quetous les autres Maiſtres qui ont de l'employ aupres de ce jeune Prince.
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Résumé : « Ce Quatrain est de Mr de Tierceville-Mahaut, à qui [...] »
Le texte présente un quatrain de M. de Tierceville-Mahaut dédié au duc de Montaufier, qui a montré un ouvrage du dauphin. Le duc est décrit comme un gentilhomme de mérite, connu pour ses sonnets, madrigaux et autres pièces galantes. Sa conversation est agréable et il ne s'ennuie jamais en sa compagnie. Le roi, par son amour pour ses peuples, rédige des mémoires pour l'instruction du dauphin, souhaitant lui léguer un successeur exceptionnel. Le dauphin est entouré de personnes d'esprit, notamment les princes de Conty et de La Roche-sur-Yon, dignes fils et neveux de leurs pères respectifs. Le duc de Montaufier, gouverneur du dauphin, est loué pour sa rectitude et son zèle pour la vertu. Il appartient à la maison de Sainte-Maure, illustre par son ancienneté et ses alliances prestigieuses. Le duc a montré son courage et sa valeur en France, en Italie, en Lorraine, en Alsace et en Allemagne, notamment en défendant les provinces de Saintonge et d'Angoulême. Le gouvernement de Normandie lui a été confié en reconnaissance de ses services et de ceux de son frère Hector. L'évêque de Condom, précepteur du dauphin, est reconnu pour sa piété et sa doctrine. Il est aidé par M. Huet, sous-précepteur et membre de l'Académie française. M. Milet, sous-gouverneur, est un diplomate expérimenté. M. Blondel, enseignant les mathématiques, est un érudit et un ingénieur réputé, ayant travaillé sur le nouveau plan de Paris. Enfin, M. Sylvestre, maître en dessin, est également mentionné pour son habileté.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 16-17
POUR MONSEIGNEUR LE DAUPHIN.
Début :
Et pour vous Monseigneur, dont l'heureuse naissance [...]
Mots clefs :
Monseigneur, Naissance, Dieu, Trône, César
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texteReconnaissance textuelle : POUR MONSEIGNEUR LE DAUPHIN.
POUR MONSEIGNEUR
LE DAUPHIN.
Et pour vous . Monfeigneur , dont
L'heureufe naiffance
GALANT. 17
Et d'un fi beau préfage , eftant du
jour de Mars ;
Ce Dieu,dufecond Lot vous donnant
l'espérance,
Ioindra par ce Préfent au bonheur
de la France
Le Trône des Céfars
LE DAUPHIN.
Et pour vous . Monfeigneur , dont
L'heureufe naiffance
GALANT. 17
Et d'un fi beau préfage , eftant du
jour de Mars ;
Ce Dieu,dufecond Lot vous donnant
l'espérance,
Ioindra par ce Préfent au bonheur
de la France
Le Trône des Céfars
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4
p. 279-281
« Le nouveau Roy a de la valeur, & de l'intrepidité. [...] »
Début :
Le nouveau Roy a de la valeur, & de l'intrepidité. [...]
Mots clefs :
Roi d'Angleterre, Valeurs, Naissance, Mariage, Anne Hyde, Comte, Enfants, Princesse, Duc
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le nouveau Roy a de la valeur, & de l'intrepidité. [...] »
Le nouveau Roy a de la
valeur , & de l'intrepidité. Il
eft ferme dans fes réſolutions,
& garde inviolablement fa
parole. Il nâquit le 14. Octobre
1633. & en 1660. il épouſa
Anne Hyde , Fille du Milord
Edouard Hyde , grand Chan280
MERCURE
celier d'Angleterre , & depuis
Comte de Clarendon , dont
il a eu plufieurs Fils qui n'ont
point vécu. Il luy eft feulement
refté deux Filles de ce
Mariage , fçavoir Marie Prin
ceffe d'York , qui en 1677.
époufa Guillaume Henry de
Naffau , Prince d'Orange , &
Anne Princeffe d'York , mariée
depuis peu de temps au
Prince George, Frere du Roy
de Dannemark . Madame la
Ducheffe d'York étant morte
le 10. Avril 1671. il épouſa en
fecondes Nopces le 30. Septembre
1673. Marie Eleonor
GALANT : 281
d'Efte , Princeffe de Modene,
Fille du Duc François. C'eſt
le charme de toute l'Angle
terre. Elle méne une vie
exemplaire , & l'ambition n'a
jamais efté capable de luy
faire faire aucune fauffe dé
marche.
valeur , & de l'intrepidité. Il
eft ferme dans fes réſolutions,
& garde inviolablement fa
parole. Il nâquit le 14. Octobre
1633. & en 1660. il épouſa
Anne Hyde , Fille du Milord
Edouard Hyde , grand Chan280
MERCURE
celier d'Angleterre , & depuis
Comte de Clarendon , dont
il a eu plufieurs Fils qui n'ont
point vécu. Il luy eft feulement
refté deux Filles de ce
Mariage , fçavoir Marie Prin
ceffe d'York , qui en 1677.
époufa Guillaume Henry de
Naffau , Prince d'Orange , &
Anne Princeffe d'York , mariée
depuis peu de temps au
Prince George, Frere du Roy
de Dannemark . Madame la
Ducheffe d'York étant morte
le 10. Avril 1671. il épouſa en
fecondes Nopces le 30. Septembre
1673. Marie Eleonor
GALANT : 281
d'Efte , Princeffe de Modene,
Fille du Duc François. C'eſt
le charme de toute l'Angle
terre. Elle méne une vie
exemplaire , & l'ambition n'a
jamais efté capable de luy
faire faire aucune fauffe dé
marche.
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Résumé : « Le nouveau Roy a de la valeur, & de l'intrepidité. [...] »
Le nouveau roi d'Angleterre, né le 14 octobre 1633, est connu pour sa valeur et son intrepidité. Il épousa Anne Hyde en 1660, avec qui il eut deux filles : Marie et Anne. Après le décès d'Anne en 1671, il se remaria avec Marie Éléonore d'Este en 1673. Cette dernière est admirée pour sa vie exemplaire.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 72-76
Lettre en Vers, [titre d'après la table]
Début :
L'autre Lettre a esté écrite par l'Autheur à un de ses Amis, / Mon cher Lisis, j'ay receu le Billet [...]
Mots clefs :
Naissance, Mardi gras, Coeur, Joie, Père, Fils, Enfant, Honneur, Festin, Réjouissances
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texteReconnaissance textuelle : Lettre en Vers, [titre d'après la table]
L'autre Lettre a efté écrite.
par l'Autheur à un de fes
Amis,
GALANT. 73
Amis , de qui la Femme accoucha
d'un Garçon le jour
du Mardy Gras.
On cher Lifis , j'ay receu le
Billet
Mo
Que m'aporta ton verdoyant Valet;
Et quoy qu'ennuy de tous coffez m'aboye,
Moncoeur pourtant a treffailly de joye,
Pour avoirfçu que ta chere Moitié,
Apres douleurs qui font moult grand
pitié,
Enfin t'avoit de rechefrendu Père.
l'heureux Fils ! ©fortune profpere!
o Cielbenin , que de contentement
Vous promettez à ce nouvel Enfant!
Un Mardy- Gras éclairefa naiſſances
Les Ieux, les ris, les Feftins, & la
Dance,
Semblent par tout venirfaire la cour
Mars 1685. G
74 MERCURE
Au bel Enfant qui par toy voit lejour.
O qu'ilfera grand amateur d'Epices!
Langues de Boeuf, Saucissons & San
ciffes,
Iambonsfumez, gros & courts Cervelas
Feront unjour l'honneur de fes Repas?
Goute de vin ne lairra dans fa Couppe,
Agrosmonceaux mettra lefel en Soupe,
Et neferajamais dansfon Tonneau,
Pour le remplir,y répandre de l'eau.
Plante, croy-moy , pour cet Enfant infigne
Le meilleurplan de la meilleure Vigne
O quel transport ! O quel plaifant
foulas,
Quand ii verra courber les Echalas
Sous le fardeau de mainte & mainte
Grappe,
Etgros Flacons arangezfur la Nappe!
Mais garde- toy que celle qui nourrit
GALANT. 75
Cet Enfançon à qui Mardy- Grasrit,
Faffe Carefme, & mange de Molüe.
Prens les Chapons les plus gras de la
Müe,
Iarret de Veau, longe, éclanche &
roignon,
Fais fairefauce, ou d'Ail , ou - bien
d'Oignon,
Et
Et fois certain que cette nourriture
Aide beaucoup à la bonne nature,
que l'Enfant qui fucce de ce lait ,
Un temps viendraferamaître Poulet,
Etneferapar amour d'abftinence,
Affront aujour qui luy donna naif-
Sance.
Mais j'en dis trop pour un Homme
chagrin,
Quipourrimer n'eft pas en trop bon
train.
Un malde dents, douleur des plus
cruelle,
Gij
76 MERCURE
Quejour, que nuit me devore & bou
relle .
Atends ; adicu. Si j'obtiens guériſon,
I'iray te voir en ta belle Maifon,
M'yfaluft - il courre à beaupiedfans
Lance;
Onquesje n'eus tant de réjouissance,
Quej'en auray de prendre entre mes
... bras
Ce bel Enfant, ce Fils du Mardy-
Gras.
par l'Autheur à un de fes
Amis,
GALANT. 73
Amis , de qui la Femme accoucha
d'un Garçon le jour
du Mardy Gras.
On cher Lifis , j'ay receu le
Billet
Mo
Que m'aporta ton verdoyant Valet;
Et quoy qu'ennuy de tous coffez m'aboye,
Moncoeur pourtant a treffailly de joye,
Pour avoirfçu que ta chere Moitié,
Apres douleurs qui font moult grand
pitié,
Enfin t'avoit de rechefrendu Père.
l'heureux Fils ! ©fortune profpere!
o Cielbenin , que de contentement
Vous promettez à ce nouvel Enfant!
Un Mardy- Gras éclairefa naiſſances
Les Ieux, les ris, les Feftins, & la
Dance,
Semblent par tout venirfaire la cour
Mars 1685. G
74 MERCURE
Au bel Enfant qui par toy voit lejour.
O qu'ilfera grand amateur d'Epices!
Langues de Boeuf, Saucissons & San
ciffes,
Iambonsfumez, gros & courts Cervelas
Feront unjour l'honneur de fes Repas?
Goute de vin ne lairra dans fa Couppe,
Agrosmonceaux mettra lefel en Soupe,
Et neferajamais dansfon Tonneau,
Pour le remplir,y répandre de l'eau.
Plante, croy-moy , pour cet Enfant infigne
Le meilleurplan de la meilleure Vigne
O quel transport ! O quel plaifant
foulas,
Quand ii verra courber les Echalas
Sous le fardeau de mainte & mainte
Grappe,
Etgros Flacons arangezfur la Nappe!
Mais garde- toy que celle qui nourrit
GALANT. 75
Cet Enfançon à qui Mardy- Grasrit,
Faffe Carefme, & mange de Molüe.
Prens les Chapons les plus gras de la
Müe,
Iarret de Veau, longe, éclanche &
roignon,
Fais fairefauce, ou d'Ail , ou - bien
d'Oignon,
Et
Et fois certain que cette nourriture
Aide beaucoup à la bonne nature,
que l'Enfant qui fucce de ce lait ,
Un temps viendraferamaître Poulet,
Etneferapar amour d'abftinence,
Affront aujour qui luy donna naif-
Sance.
Mais j'en dis trop pour un Homme
chagrin,
Quipourrimer n'eft pas en trop bon
train.
Un malde dents, douleur des plus
cruelle,
Gij
76 MERCURE
Quejour, que nuit me devore & bou
relle .
Atends ; adicu. Si j'obtiens guériſon,
I'iray te voir en ta belle Maifon,
M'yfaluft - il courre à beaupiedfans
Lance;
Onquesje n'eus tant de réjouissance,
Quej'en auray de prendre entre mes
... bras
Ce bel Enfant, ce Fils du Mardy-
Gras.
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Résumé : Lettre en Vers, [titre d'après la table]
L'auteur écrit à un ami pour célébrer la naissance de son fils, survenue le jour du Mardi Gras. Il exprime sa joie malgré un certain ennui et anticipe une vie prospère pour l'enfant. Il imagine un avenir où le garçon sera entouré de festins et de danses, savourant des mets délicats et des vins fins. L'auteur conseille à son ami de bien nourrir l'enfant pour qu'il devienne robuste et évite les privations. Cependant, il mentionne une douleur dentaire persistante qui l'empêche de se réjouir pleinement. Il espère se rétablir pour rendre visite à son ami et voir l'enfant.
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6
p. 76-87
INSCRIPTIONS FRANCOISES, MISES DANS L'HÔTEL DE VILLE DE PARIS, Contenant en abregé les principaux Evenemens du Regne de Loüis Le GRAND.
Début :
Le plaisir que vous avez eu, Madame, de lire les Inscriptions / 1660. Entreveüe de Loüis XIV Roy de France & [...]
Mots clefs :
Inscriptions, Règne, Roi de France, Marbre, Ornements, Louis XIV, Mariage, Naissance, Victoire, Armes, Conquête, Paix, Armée, Siège
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texteReconnaissance textuelle : INSCRIPTIONS FRANCOISES, MISES DANS L'HÔTEL DE VILLE DE PARIS, Contenant en abregé les principaux Evenemens du Regne de Loüis Le GRAND.
Le plaifir que vous avez eu,
Madame , de lire les Infcriptions
Françoiſes de la Galerie
de Verſailles , fera augmenté
fans doute, quand vous
fçaurez que l'ufage s'en établit
de jour à autre , & que
deformais tous lesMonumens
GALANT. 77
publics qui s'élevent à la
Gloire du Roy , font accompagnez
d'Infcriptions
Françoifes
. Nous en avons un
exemple magnifique , dans
l'Hoſtel de Ville de Paris , où
l'on a mis depuis peu par
l'or
dre de Mle Prevolt des
Marchands , quantité de ces
Infcriptions , contenant les
principaux Evenemens du
Regne du Roy , depuis la
Paix des Pyrenées , juſqu'à
l'année derniere. Elles font
écrites für de grandes Tables
de Marbre noir , qui regnent
tout autour de la Cour , au
G iij
78 MERCURE
deffus des Feneftres , ce qui
adjouſte un riche Ornement
à toutes les autres beautez de
ce fuperbe Edifice . La premiere
& la derniere , ont plus
d'étendue que les autres , &
font au deffus de la Porte
principale par où l'on, forr .
Quoy que les grandes
Actions de Sa Majesté
foient fortement imprimées
dans l'efprit de tous les François
, il n'y en a pas un néanmoins
qui ne foit bien aife
de s'en rafraîchir la mémoire
par cette lecture , d'autant
plus qu'ils en gouftent toute
GALANT. 79
la joye , dans la naïveté des
expreffions de leur Langue'
naturelle , fans partager leur
attention avec les conftructions
obfcures & embaraf
fées d'une Langue Etrangere.
Voftre Approbation caufera
bien du plaifir à celuy qui les
a faites , mais il ne m'eft
permis de vous le nommer.
pas>
G iiij
80 MERCURE
255 :22222 2522:2222
INSCRIPTIONS
FRANÇOISES,
3.
MISES
DANS L'HÔTEL DE VILLE
DE PARIS,
Contenant en abregé les principaux
Evenemens du Regne
de Louis LE GRAND.
E
1660.
Ntreveuë de Louis XIV.
Roy de France & de Philippes
IV . Roy d'Espagne , dans
Ifle des Faifans , où la Paix.
"
GALANT. 81
fut jurée entre les deux Roys.
Mariage du Roy avec Marie
Therefe d'Autriche , Infante
d'Espagne. Entrée folemnelle de
leurs Majeftez dans la Ville de
Paris , au milieu des Acclamations
des Peuples .
1661 .
Naiffance de Monfeigneur le
Dauphin à Fontainebleau le
premier Novembre.
1662.
Le Roy d'Espagne defavouë
I Action de fon Ambaſſadeur en
Angleterre , & céde la Préfeance
à la France.
82 MERCURE
-
1663 .
Redition de Marfal . Renou
vellement d'Alliance avec les
Suiffes.
1664
Le Legat vientfaire Satisfaetion
au Roy , de l'Attentat commis
contrefon Ambaſſadeur dans
Rome.
1665.
Victoire remportée contre les
Corfaires de Thunis & d'Alger,
fur les Coftes d'Afrique..
1666.
Secours accordé par le Roy aux
Hollandois , contre l'Angleterre..
GALANT. 83
16.67.
Le Roy porte fes Armes en
Flandre , pour la défense des
Droits de la Reyne , & prend
plufieurs Villes.
16.68.
Conquefte de toute la Franche-
Comté , en dix jours , au milieu
de l'Hyver
.
166.9.
Depuis la Paix d'Aix la Chapelle
, le Roy employe fes forces de
Mer contre les Turcs.
1.670.-
Prife de Pont à Mouſſon &
autres Places . Toute la Lorraine
foumise à l'obeiffance du Roy..
84 MERCURE
1671.
Le Roy vifite & fait fortifier
toutes les Places qu'il a conquifes
en Flandre.
་
1672.
Le Roy juftement irrité contre
les Hollandois , entre dans leur
Pais s'en rend Maiftre.
1673.
Le Roy Affiege Maftrich &
l'emporte en treize jours. Les
Flottes de France & d'Angleter
re , défont celle d'Hollande.
1674.
Seconde Conquefte de la Franthe-
Comté. Victoire fur les Imperiaux
, les Espagnols & les
Hollandois
à Senef.
GALANT. 85
1675.
L'Armée Imperiale chaffée de
l'Alface , forcée de repaffer le
Rhin.
par
1676
.
Levée du Siege de Maftrick
le Prince d'Orange. Les
Flottes d'Espagne & de Hollande
, brûlées dans le Port de Pa
lerme .
1677.
Prife de Valenciennes de
Cambray Bataille de Mont-
Caffel , fuivie de la Réduction
de S. Omer.
1678%
Prife de Gand d'Ypre par
86 MERCURE
le Roy en perfonne. Prife de
Puy- Cerda en Catalogne.
1679.
Le Roy fait reftituer àſes Alliez
les Villes qui leur avoient
efté prifes. Paix Generale.
1680.
Mariage de Monfeigneur le
Dauphin , avec la Princeffe
Anne- Marie- Chriftine - Victoire
de Baviere.
1681.
En un mefme jour Strasbourg
Cazal reçoivent les Troupes,
& la protection du Roy.
1682 .
Naiffance de Monseigneur le
GALANT. 87
Duc de Bourgogne. Alger fou
droyé par les Vaiffeaux du Roy.
1683.
Les Algeriens forcez à rendre
tous les Efclaves François. Prife
de Courtray & de Dixmude.
1684.
Le Roy accorde la Paix aux
Algeriens , punit les Génois,
prend Luxembourg , force les
Ennemis d'accepter une Tréve de
vingt ans , & remet à la priere
des Espagnols trois millions cing
cens mille livres de Contribu
tions.
Madame , de lire les Infcriptions
Françoiſes de la Galerie
de Verſailles , fera augmenté
fans doute, quand vous
fçaurez que l'ufage s'en établit
de jour à autre , & que
deformais tous lesMonumens
GALANT. 77
publics qui s'élevent à la
Gloire du Roy , font accompagnez
d'Infcriptions
Françoifes
. Nous en avons un
exemple magnifique , dans
l'Hoſtel de Ville de Paris , où
l'on a mis depuis peu par
l'or
dre de Mle Prevolt des
Marchands , quantité de ces
Infcriptions , contenant les
principaux Evenemens du
Regne du Roy , depuis la
Paix des Pyrenées , juſqu'à
l'année derniere. Elles font
écrites für de grandes Tables
de Marbre noir , qui regnent
tout autour de la Cour , au
G iij
78 MERCURE
deffus des Feneftres , ce qui
adjouſte un riche Ornement
à toutes les autres beautez de
ce fuperbe Edifice . La premiere
& la derniere , ont plus
d'étendue que les autres , &
font au deffus de la Porte
principale par où l'on, forr .
Quoy que les grandes
Actions de Sa Majesté
foient fortement imprimées
dans l'efprit de tous les François
, il n'y en a pas un néanmoins
qui ne foit bien aife
de s'en rafraîchir la mémoire
par cette lecture , d'autant
plus qu'ils en gouftent toute
GALANT. 79
la joye , dans la naïveté des
expreffions de leur Langue'
naturelle , fans partager leur
attention avec les conftructions
obfcures & embaraf
fées d'une Langue Etrangere.
Voftre Approbation caufera
bien du plaifir à celuy qui les
a faites , mais il ne m'eft
permis de vous le nommer.
pas>
G iiij
80 MERCURE
255 :22222 2522:2222
INSCRIPTIONS
FRANÇOISES,
3.
MISES
DANS L'HÔTEL DE VILLE
DE PARIS,
Contenant en abregé les principaux
Evenemens du Regne
de Louis LE GRAND.
E
1660.
Ntreveuë de Louis XIV.
Roy de France & de Philippes
IV . Roy d'Espagne , dans
Ifle des Faifans , où la Paix.
"
GALANT. 81
fut jurée entre les deux Roys.
Mariage du Roy avec Marie
Therefe d'Autriche , Infante
d'Espagne. Entrée folemnelle de
leurs Majeftez dans la Ville de
Paris , au milieu des Acclamations
des Peuples .
1661 .
Naiffance de Monfeigneur le
Dauphin à Fontainebleau le
premier Novembre.
1662.
Le Roy d'Espagne defavouë
I Action de fon Ambaſſadeur en
Angleterre , & céde la Préfeance
à la France.
82 MERCURE
-
1663 .
Redition de Marfal . Renou
vellement d'Alliance avec les
Suiffes.
1664
Le Legat vientfaire Satisfaetion
au Roy , de l'Attentat commis
contrefon Ambaſſadeur dans
Rome.
1665.
Victoire remportée contre les
Corfaires de Thunis & d'Alger,
fur les Coftes d'Afrique..
1666.
Secours accordé par le Roy aux
Hollandois , contre l'Angleterre..
GALANT. 83
16.67.
Le Roy porte fes Armes en
Flandre , pour la défense des
Droits de la Reyne , & prend
plufieurs Villes.
16.68.
Conquefte de toute la Franche-
Comté , en dix jours , au milieu
de l'Hyver
.
166.9.
Depuis la Paix d'Aix la Chapelle
, le Roy employe fes forces de
Mer contre les Turcs.
1.670.-
Prife de Pont à Mouſſon &
autres Places . Toute la Lorraine
foumise à l'obeiffance du Roy..
84 MERCURE
1671.
Le Roy vifite & fait fortifier
toutes les Places qu'il a conquifes
en Flandre.
་
1672.
Le Roy juftement irrité contre
les Hollandois , entre dans leur
Pais s'en rend Maiftre.
1673.
Le Roy Affiege Maftrich &
l'emporte en treize jours. Les
Flottes de France & d'Angleter
re , défont celle d'Hollande.
1674.
Seconde Conquefte de la Franthe-
Comté. Victoire fur les Imperiaux
, les Espagnols & les
Hollandois
à Senef.
GALANT. 85
1675.
L'Armée Imperiale chaffée de
l'Alface , forcée de repaffer le
Rhin.
par
1676
.
Levée du Siege de Maftrick
le Prince d'Orange. Les
Flottes d'Espagne & de Hollande
, brûlées dans le Port de Pa
lerme .
1677.
Prife de Valenciennes de
Cambray Bataille de Mont-
Caffel , fuivie de la Réduction
de S. Omer.
1678%
Prife de Gand d'Ypre par
86 MERCURE
le Roy en perfonne. Prife de
Puy- Cerda en Catalogne.
1679.
Le Roy fait reftituer àſes Alliez
les Villes qui leur avoient
efté prifes. Paix Generale.
1680.
Mariage de Monfeigneur le
Dauphin , avec la Princeffe
Anne- Marie- Chriftine - Victoire
de Baviere.
1681.
En un mefme jour Strasbourg
Cazal reçoivent les Troupes,
& la protection du Roy.
1682 .
Naiffance de Monseigneur le
GALANT. 87
Duc de Bourgogne. Alger fou
droyé par les Vaiffeaux du Roy.
1683.
Les Algeriens forcez à rendre
tous les Efclaves François. Prife
de Courtray & de Dixmude.
1684.
Le Roy accorde la Paix aux
Algeriens , punit les Génois,
prend Luxembourg , force les
Ennemis d'accepter une Tréve de
vingt ans , & remet à la priere
des Espagnols trois millions cing
cens mille livres de Contribu
tions.
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Résumé : INSCRIPTIONS FRANCOISES, MISES DANS L'HÔTEL DE VILLE DE PARIS, Contenant en abregé les principaux Evenemens du Regne de Loüis Le GRAND.
Le texte évoque l'intérêt croissant pour la lecture des inscriptions françaises de la Galerie de Versailles, dont l'usage se répand. Ces inscriptions accompagnent désormais les monuments publics dédiés à la gloire du roi. Un exemple marquant est l'Hôtel de Ville de Paris, où des inscriptions relatant les principaux événements du règne de Louis XIV, de la Paix des Pyrénées à l'année précédente, ont été ajoutées sur des tables de marbre noir. Ces inscriptions, écrites en français, permettent aux Français de se remémorer les grandes actions du roi dans leur langue maternelle, sans être distraits par des constructions obscures d'une langue étrangère. Les inscriptions de l'Hôtel de Ville de Paris couvrent plusieurs événements significatifs. Elles mentionnent la rencontre entre Louis XIV et Philippe IV d'Espagne en 1660, le mariage de Louis XIV avec Marie-Thérèse d'Autriche, et la naissance du Dauphin en 1661. Elles relatent également diverses victoires militaires et conquêtes territoriales, telles que la prise de Marsfal en 1663, la victoire contre les corsaires de Tunis et d'Alger en 1665, et la conquête de la Franche-Comté en 1668. Les inscriptions font état d'actions diplomatiques, comme le secours apporté aux Hollandais contre l'Angleterre en 1666 et la visite du légat pour satisfaire le roi après un attentat contre l'ambassadeur en 1664. Les événements mentionnés se poursuivent jusqu'en 1684, incluant des mariages royaux, des prises de villes, et des traités de paix.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
s. p.
A MONSIEUR LE COMTE DE S. AIGNAN.
Début :
MONSIEUR, Je croy que personne ne s'étonnera de voir [...]
Mots clefs :
Âge, Roi, Temps, Sang, Naissance, Jeune, Actions, Apprendre, Vertu, Duc de Beauvillier, Saint-Aignan
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texteReconnaissance textuelle : A MONSIEUR LE COMTE DE S. AIGNAN.
A MONSIEUR
LE COMTE
DES.AIGNAN.
M
ONSIEUR
Je croy que perſonne ne
s'étonnera de voir voſtre
a ij
EPISTRE.
Nom à la teſte de cet Ouvrage.
Le Nom de S. Aignan
est trop fameux dans
l'Empire des Lettres , pour
ne ne se pas attirer l'hommage
de tous ceux qui en
font profeſſion. Vous fortés
d'un fangfameux par luymesme
, comme il l'est par
les plus grandes Alliances;
Vous comptés des Souverains
dans vostre Maiſon ,
& le Portugal , & la Savoye
font de grands témoins
de cette éclatante
EPISTRE.
verité. Quoy que vous
Soyez encore fort jeune ,
j'ay beaucoup à vous dire,
les perſonnes de vostre qualite
ont presques toûjours
l'esprit au- deſſus de leur
âge , parce que l'on trouve
moyen de leur apprendre
dés le berceau des choses
qui demanderoient un âge
plus avancê. Auffi Monfieur
l'on ne peut douter que
vos lumieres ne devancent
bien- toft vos années , &je
croy qu'il m'est permis de
EPISTRE.
vous dire que ſi en entrant
dans le monde , vous voulez
vous proposer degrands
exemples à fuiure , vous
devez d'abord jetter les
yeuxfurvostreAyeul LHiſtoire
vous apprendra qu'il
estoit Mestre de Camp
General de toute la Cavalerie
Legere de France , &
t'un des premiers aiſſallans
du fameux Carrousel , qui
futfait à la Place Royale
en réjouiſſance du mariage
de Louis XIII. Apres a-ه
EPISTRE.
(
voir examiné toutes ses actions
qui vous le feront
paroître aussi brave que
galant , fuivez la route
glorieuse que vous trouveres
tracée par vostre fang,
& regardez celuy dont
vous tenés la naiſſance
vous verrez qu'il a merité
parluy-mefme , autant que
parce qu'il doit àses illuftres
Ayeux , le haut rang
où il est élevé , & l'estime
d'un Monarque qui ne la
prodigue pas , & qu'il y
EPISTRE.
eft parvenu par tous les
degrés qui conduifent dans
le chemin de la gloire. Il
s'est signalé aux Combats
de Steimbrug , & de Vaudrevanges
, & à la retraite
de Mayence , où il fit des
chofes dignes d'immortaliferfon
nom. Il s'est trouvé
aux Sieges de Château
Porcien , de fainte Merehou
, & de Montmedy ; il
a triomphé devant Bourges
, pris le Fort de Baugy,
& confervé le Berry au
EPISTRE
Roy. Toutes ces actionsle
firent nommer Maréchal
des Camps & Armées
de Sa Majesté, & peu de
temps apres LieutenantGeneral
; &la mesme année
au fortir de dix Campagnes
, qu'il venoit d'achever
glorieusement , il amena
quatre cent Gentilshommes
au Roy , tous refolus
à repandre leur fang pour
ce Prince , à l'exemple de
leur Conducteur , qui dans
les temps difficiles leur as
EPISTRE
voit inspiré ce sentiment.
Il avoit alors la mesme a-
Etivité en courant aux dangers
pour lefervice de fon
Roy , qu'il en a fait paroître
pour ſes plaiſirs dansſes
Feftes galantes , & dans
fes Carrousels , &la même
ardeur pour les belles
Lettres qu'il a toûjours protegees
. La place qu'il tient
dans l'Academie Françoife,
& dans cellede Padouë ,
en est une marque auffibien
que le nom de ProteEPISTRE.
Eteur qu'il soutient avec
tant degloiredans l'Acade
mie Royale d'Arles. Je ne
dis rien icy deſon inviolable
fidelité pour le Roy. Elle a
paru dans toute la pureté
que l'on en pouvoit attendre
, puiſque rien n'a esté
capable de l'ébranler un
moment , dans un temps
qu'on nesçauroit croire aujourd'huy
qu'il ait eſté.
Lorsque vous aurez examiné
la glorieuse vie de
celuy dont vous devez imiEPISTRE.
fer toutes les actions , jettez
les yeux fur les modeſtes
vertusde celle dont vous
tenés une partie du fang
qui vous a formé. Vous
la verrez briller par ces
feuls endroits,fuirla pompe
de la Courfans la mépriſer,
nes'attacherqu'aux
Autels,& ne regarder que
L'illustre Epoux que le Ciel
luy a donné. Comme les
exemplesqui nous doivent
toucher , ont beaucoup de
force pour porter à la vertu
EPISTRE.
tu , fi vous voulez, Mon
fieur, devenir parfaitement
honneste homme , & vous
acquerir une estime generale
, regardés , examinés.
& imités Monsieur le
Duc de Beauviliers . On
vous dira que dans un
âge fait pour les plaisirs ,
environné de toute la jeune
Noblesse de la Cour
dont l'exemple pouvoit eſtre
dangereux , il s'est toujours
distingué par sa moderation
, parsa vertu ,&par
:
1
EPISTRE
une ſageſſe qui luy a fait
meriter des Emplois , qui
avoient juſques icy paru
au- deſſus des personnes de
fon âge. Je ne doute point,
Monsieur , qu'avec de pareilsfecours,
vous nefaffiez
compter vosvertus bien plûtoft
que vos années. Ce
qu'on voit faire de glorieux
au sang dont on a l'avantage
defortir,frape beaucoup,&
perfuade plus que
Les vertus étrangeres. Vous
avez d'ailleurs le bonheur
L
EPISTRE .
d'estre né dans un temps
où les vertus du Roy l'ont
élevé dans un fi haut degre
de gloire , qu'à peine la
peut- on concevoir , & comme
vostre naiſſance vous
doit acquerir le Privilege
d'eſtre ſouvent témoin des
actions qui luyferoient chaque
jour meriter le furnom
de Grand , fi toute la terre
ne le luy avoit pas déja
donné , la justice qu'il rend
vous apprendra à tous
و
que vostre qualité ne vous
é ij
EPISTRE
doit pas empecher de la
rendre à tous ceux à qui
vous la devrez , fa prudence
vous fera connoître
que rien n'est plus neceffaire
aux hommes que cette
vertu dans quelque élevation
qu'ils foient , la ma
niere dont il garde ſon fe
2 cret , & celuy des autres
vous fera voir de quelle utilité
le fecret est dans la
vie , lors qu'on le garde
pourses propres affaires, &
que celuy d'autruy n'est
EPISTRE
point à nous , puisqu'un fi
grandRoy nerevellejamais
les fecrets qu'il a souhaité
desçavoir. La clemence de
ce Monarque vous apprendra
à pardonner , fa douceur
à estre humain , & à
n'avoir jamais d'emportement
, fa bonté à excufer
les defauts d'autruy ,fa-vigilance
à ne vous point
laiſſer ſurprendre , fa libe
ralité à n'eſtre point avare
, & à faire du bien,fa
fermeté à ne vous étonner
é ij
EPISTRE.
de rien quand la justice
fera pour vous , &sa pietéàvivre
en honneste homme
, & en vray Chrétien .
Pendant que vous verrez
pratiquer ces vertus, au
Roy , voſtre âge ,& vostre
naiſſance vous permettent
on meſme temps de voir de
pres de quelle maniere une
grande Princeffe , dont l'ef
prit est aussi élevé que sa
naiſſance &fon rang , t
dont le goût est d'une juf
teffe admirable,lesfait inEPISTRE
!
Sinuer à Monseigneur te
Duc de Bourgogne. Il est
vray que ce jeune Prince
n'est pas encore non plus
que vous en âge de lespratiquer,
mais il en retient du
moins quelques - unes , qui
avec le temps ferant encore
plus d'impreffion fur fon
ofprit. Cependant voyez le
tout remply de la boüillante
, & genereuse ardeur
qu'il tient de fon fang ,ne
respirer que le bruit de la
Guerre,faire faire l'ExerEPISTRE
cice , & nommer les Offi
ciers aux Gardes par leur
nom , ce qui fait voir que
la plus grande partie luy
en est déja connuë . Profités
, Monsieur , de tant de
choſes avantageuses. Vous
avez deja donné desmarques
que vous ne manquerez
pas du coſté du coeurs
à peinesçaviez - vous prononcer
quelques paroles,
qu'ayant vu saigner Madame
la Ducheffe vostre
mere , vous vous fentites
EPISTRE. 4
ausfi- toſt émů de colere à
la veuë de fon sang , &
cherchâtes vostre epée pour
punir celuy qui l'avoit fait
couler. Ainsi, Monsieur
je n'ay rien à dire du cofté
de la valeur ; & l'on
connoît affez par ces genereux
commencemens , que
vous ne laiſſerés pas v ſtre
épée inutile ; du reste attachés
vous ſouvent à regarder
les exemples que
vous fourniſſent vos Maiftres,&
vostre fang;faites
EPISTRE.
2
en ſouvent une étude particuliere
, &foyez perfuadé
qu'en les ſuivant , vous
remplirés dignement , &
avec éclat la carriere où
vous entrerés bien- toft. Ce
fera alors que vous me
fournirés de grands fujets
de parler de vous , & de
vous marquer ſouvent que
jefuis ,
MONSIEVR,
Vottretres-humble & tres -obeïſſant
Serviteur , DEVIZE .
LE COMTE
DES.AIGNAN.
M
ONSIEUR
Je croy que perſonne ne
s'étonnera de voir voſtre
a ij
EPISTRE.
Nom à la teſte de cet Ouvrage.
Le Nom de S. Aignan
est trop fameux dans
l'Empire des Lettres , pour
ne ne se pas attirer l'hommage
de tous ceux qui en
font profeſſion. Vous fortés
d'un fangfameux par luymesme
, comme il l'est par
les plus grandes Alliances;
Vous comptés des Souverains
dans vostre Maiſon ,
& le Portugal , & la Savoye
font de grands témoins
de cette éclatante
EPISTRE.
verité. Quoy que vous
Soyez encore fort jeune ,
j'ay beaucoup à vous dire,
les perſonnes de vostre qualite
ont presques toûjours
l'esprit au- deſſus de leur
âge , parce que l'on trouve
moyen de leur apprendre
dés le berceau des choses
qui demanderoient un âge
plus avancê. Auffi Monfieur
l'on ne peut douter que
vos lumieres ne devancent
bien- toft vos années , &je
croy qu'il m'est permis de
EPISTRE.
vous dire que ſi en entrant
dans le monde , vous voulez
vous proposer degrands
exemples à fuiure , vous
devez d'abord jetter les
yeuxfurvostreAyeul LHiſtoire
vous apprendra qu'il
estoit Mestre de Camp
General de toute la Cavalerie
Legere de France , &
t'un des premiers aiſſallans
du fameux Carrousel , qui
futfait à la Place Royale
en réjouiſſance du mariage
de Louis XIII. Apres a-ه
EPISTRE.
(
voir examiné toutes ses actions
qui vous le feront
paroître aussi brave que
galant , fuivez la route
glorieuse que vous trouveres
tracée par vostre fang,
& regardez celuy dont
vous tenés la naiſſance
vous verrez qu'il a merité
parluy-mefme , autant que
parce qu'il doit àses illuftres
Ayeux , le haut rang
où il est élevé , & l'estime
d'un Monarque qui ne la
prodigue pas , & qu'il y
EPISTRE.
eft parvenu par tous les
degrés qui conduifent dans
le chemin de la gloire. Il
s'est signalé aux Combats
de Steimbrug , & de Vaudrevanges
, & à la retraite
de Mayence , où il fit des
chofes dignes d'immortaliferfon
nom. Il s'est trouvé
aux Sieges de Château
Porcien , de fainte Merehou
, & de Montmedy ; il
a triomphé devant Bourges
, pris le Fort de Baugy,
& confervé le Berry au
EPISTRE
Roy. Toutes ces actionsle
firent nommer Maréchal
des Camps & Armées
de Sa Majesté, & peu de
temps apres LieutenantGeneral
; &la mesme année
au fortir de dix Campagnes
, qu'il venoit d'achever
glorieusement , il amena
quatre cent Gentilshommes
au Roy , tous refolus
à repandre leur fang pour
ce Prince , à l'exemple de
leur Conducteur , qui dans
les temps difficiles leur as
EPISTRE
voit inspiré ce sentiment.
Il avoit alors la mesme a-
Etivité en courant aux dangers
pour lefervice de fon
Roy , qu'il en a fait paroître
pour ſes plaiſirs dansſes
Feftes galantes , & dans
fes Carrousels , &la même
ardeur pour les belles
Lettres qu'il a toûjours protegees
. La place qu'il tient
dans l'Academie Françoife,
& dans cellede Padouë ,
en est une marque auffibien
que le nom de ProteEPISTRE.
Eteur qu'il soutient avec
tant degloiredans l'Acade
mie Royale d'Arles. Je ne
dis rien icy deſon inviolable
fidelité pour le Roy. Elle a
paru dans toute la pureté
que l'on en pouvoit attendre
, puiſque rien n'a esté
capable de l'ébranler un
moment , dans un temps
qu'on nesçauroit croire aujourd'huy
qu'il ait eſté.
Lorsque vous aurez examiné
la glorieuse vie de
celuy dont vous devez imiEPISTRE.
fer toutes les actions , jettez
les yeux fur les modeſtes
vertusde celle dont vous
tenés une partie du fang
qui vous a formé. Vous
la verrez briller par ces
feuls endroits,fuirla pompe
de la Courfans la mépriſer,
nes'attacherqu'aux
Autels,& ne regarder que
L'illustre Epoux que le Ciel
luy a donné. Comme les
exemplesqui nous doivent
toucher , ont beaucoup de
force pour porter à la vertu
EPISTRE.
tu , fi vous voulez, Mon
fieur, devenir parfaitement
honneste homme , & vous
acquerir une estime generale
, regardés , examinés.
& imités Monsieur le
Duc de Beauviliers . On
vous dira que dans un
âge fait pour les plaisirs ,
environné de toute la jeune
Noblesse de la Cour
dont l'exemple pouvoit eſtre
dangereux , il s'est toujours
distingué par sa moderation
, parsa vertu ,&par
:
1
EPISTRE
une ſageſſe qui luy a fait
meriter des Emplois , qui
avoient juſques icy paru
au- deſſus des personnes de
fon âge. Je ne doute point,
Monsieur , qu'avec de pareilsfecours,
vous nefaffiez
compter vosvertus bien plûtoft
que vos années. Ce
qu'on voit faire de glorieux
au sang dont on a l'avantage
defortir,frape beaucoup,&
perfuade plus que
Les vertus étrangeres. Vous
avez d'ailleurs le bonheur
L
EPISTRE .
d'estre né dans un temps
où les vertus du Roy l'ont
élevé dans un fi haut degre
de gloire , qu'à peine la
peut- on concevoir , & comme
vostre naiſſance vous
doit acquerir le Privilege
d'eſtre ſouvent témoin des
actions qui luyferoient chaque
jour meriter le furnom
de Grand , fi toute la terre
ne le luy avoit pas déja
donné , la justice qu'il rend
vous apprendra à tous
و
que vostre qualité ne vous
é ij
EPISTRE
doit pas empecher de la
rendre à tous ceux à qui
vous la devrez , fa prudence
vous fera connoître
que rien n'est plus neceffaire
aux hommes que cette
vertu dans quelque élevation
qu'ils foient , la ma
niere dont il garde ſon fe
2 cret , & celuy des autres
vous fera voir de quelle utilité
le fecret est dans la
vie , lors qu'on le garde
pourses propres affaires, &
que celuy d'autruy n'est
EPISTRE
point à nous , puisqu'un fi
grandRoy nerevellejamais
les fecrets qu'il a souhaité
desçavoir. La clemence de
ce Monarque vous apprendra
à pardonner , fa douceur
à estre humain , & à
n'avoir jamais d'emportement
, fa bonté à excufer
les defauts d'autruy ,fa-vigilance
à ne vous point
laiſſer ſurprendre , fa libe
ralité à n'eſtre point avare
, & à faire du bien,fa
fermeté à ne vous étonner
é ij
EPISTRE.
de rien quand la justice
fera pour vous , &sa pietéàvivre
en honneste homme
, & en vray Chrétien .
Pendant que vous verrez
pratiquer ces vertus, au
Roy , voſtre âge ,& vostre
naiſſance vous permettent
on meſme temps de voir de
pres de quelle maniere une
grande Princeffe , dont l'ef
prit est aussi élevé que sa
naiſſance &fon rang , t
dont le goût est d'une juf
teffe admirable,lesfait inEPISTRE
!
Sinuer à Monseigneur te
Duc de Bourgogne. Il est
vray que ce jeune Prince
n'est pas encore non plus
que vous en âge de lespratiquer,
mais il en retient du
moins quelques - unes , qui
avec le temps ferant encore
plus d'impreffion fur fon
ofprit. Cependant voyez le
tout remply de la boüillante
, & genereuse ardeur
qu'il tient de fon fang ,ne
respirer que le bruit de la
Guerre,faire faire l'ExerEPISTRE
cice , & nommer les Offi
ciers aux Gardes par leur
nom , ce qui fait voir que
la plus grande partie luy
en est déja connuë . Profités
, Monsieur , de tant de
choſes avantageuses. Vous
avez deja donné desmarques
que vous ne manquerez
pas du coſté du coeurs
à peinesçaviez - vous prononcer
quelques paroles,
qu'ayant vu saigner Madame
la Ducheffe vostre
mere , vous vous fentites
EPISTRE. 4
ausfi- toſt émů de colere à
la veuë de fon sang , &
cherchâtes vostre epée pour
punir celuy qui l'avoit fait
couler. Ainsi, Monsieur
je n'ay rien à dire du cofté
de la valeur ; & l'on
connoît affez par ces genereux
commencemens , que
vous ne laiſſerés pas v ſtre
épée inutile ; du reste attachés
vous ſouvent à regarder
les exemples que
vous fourniſſent vos Maiftres,&
vostre fang;faites
EPISTRE.
2
en ſouvent une étude particuliere
, &foyez perfuadé
qu'en les ſuivant , vous
remplirés dignement , &
avec éclat la carriere où
vous entrerés bien- toft. Ce
fera alors que vous me
fournirés de grands fujets
de parler de vous , & de
vous marquer ſouvent que
jefuis ,
MONSIEVR,
Vottretres-humble & tres -obeïſſant
Serviteur , DEVIZE .
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Résumé : A MONSIEUR LE COMTE DE S. AIGNAN.
L'épître est adressée à Monsieur le Comte des Aignan et exprime l'admiration de l'auteur pour la renommée littéraire et les alliances prestigieuses de la famille du Comte. L'auteur reconnaît la jeunesse du Comte tout en soulignant son esprit mature et ses lumières précoces. Il encourage le Comte à suivre l'exemple de son aïeul, qui fut Maître de Camp Général de la Cavalerie Légère de France et participa au célèbre Carrousel de la Place Royale pour le mariage de Louis XIII. L'aïeul se distingua par sa bravoure et sa galanterie lors des combats de Steimbrug, de Vaudrevanges, et de la retraite de Mayence, ainsi que lors des sièges de Château Porcien, Sainte Mèrehou, et Montmedy. Après dix campagnes glorieuses, il fut nommé Maréchal des Camps et Armées du Roi et Lieutenant Général. L'aïeul était également connu pour sa fidélité inviolable envers le Roi et son engagement dans les lettres, ayant des places à l'Académie Française et à celle de Padoue. L'épître invite le Comte à imiter les vertus de ses ancêtres et à suivre les exemples de modération, de vertu, et de sagesse du Duc de Beauvilliers. Elle met en avant les vertus du Roi, telles que la justice, la prudence, la clémence, la douceur, la bonté, la vigilance, la libéralité, la fermeté, et la piété, que le Comte peut observer et imiter. Enfin, l'auteur encourage le Comte à profiter de son environnement et de son éducation pour devenir un homme vertueux et honorable.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 231-235
Ils vont à l'Hôtel de Guise, où ils sont regalez d'un fort beau concert. [titre d'après la table]
Début :
Ces Ambassadeurs allerent le même jour à l'Hôtel de [...]
Mots clefs :
Hôtel de Guise, Concert, Mademoiselle de Guise, Ambassadeurs, Naissance, Meubles, Princesse
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Ils vont à l'Hôtel de Guise, où ils sont regalez d'un fort beau concert. [titre d'après la table]
Ces Ambaſſadeurs allerent
le même jour à l'Hôtel de
232 IV. P. duVoyage
Guiſe , on voulut d'abord
leur faire entendre un fort
beau Concert. Ils demanderent
fi Mademoiſelle de Guiſe
eſtoit dans l'Hôtel , &comme
on leur eût répondu que
oiy , ils répondirent qu'ils
n'entendroient & ne verroient
rien , qu'ils n'euſſent eu l'hon
neur de la faluer , ils furent
conduits dans l'Appartement
de cette Princefle , à laquelle
ils marquerent dans le complimentqu'ils
luy firent qu'ils
auroient crû commettre une grande
faute , s'ils estoient entrez
dans cet Hôtel,fans luyrendre
desAmb. deSiam. 233
ce qu'ils devoient à une perſonne
de sa naiſſance. Ils vifiterent
tous les Appartements fans
eftre incommodés par la foule
qui fe trouva ce jour-là à l'Hôtel
de Guiſe , tant les ordres
qu'on avoit donnez pour cela,
furent bien executez. Ils
admirerent la magnificence
des meubles , & la beauté de
l'Hôtel , & dirent qu'il eſtoit
digne de la grande Princeße qui
l'habitoit. Quoy que cet Hôtel
fut déja vaſte &beau,Mademoifelle
de Guiſe qui eft
toute magnifique , y a fait
beaucoup travailler , & l'on
V
L
\
234 IV. P. du Voyage
fçait que de tout temps , on a
parlé de la ſumptuoſité des
meubles de la Maiſon de
Guife , & de fes richesTapif
feries . Les Ambaſſadeurs , apres
avoir vû toutes ces chofes
, furent conduits dans le
lieu où ſe devoitfaire le Con
cert. Il n'eſtoit compofé que
de la Muſique de cette Princeffe
, qui foûtienten tout la
gradeur de fa naiſſance,& qui
la marque par des chofes que
beaucoup de Souverains ne
font pas. Les Ambaffadeurs
témoignerent pluſieurs fois à
Mademoiselle de Guiſe pens
des Amb de Siam. 235
dant le Concert , le plaifir
qu'ils y prenoient , & fortirent
charmez des honneſtetés
de cette Princeffe , & de
tout ce qu'ils avoient vû &
entendu.
le même jour à l'Hôtel de
232 IV. P. duVoyage
Guiſe , on voulut d'abord
leur faire entendre un fort
beau Concert. Ils demanderent
fi Mademoiſelle de Guiſe
eſtoit dans l'Hôtel , &comme
on leur eût répondu que
oiy , ils répondirent qu'ils
n'entendroient & ne verroient
rien , qu'ils n'euſſent eu l'hon
neur de la faluer , ils furent
conduits dans l'Appartement
de cette Princefle , à laquelle
ils marquerent dans le complimentqu'ils
luy firent qu'ils
auroient crû commettre une grande
faute , s'ils estoient entrez
dans cet Hôtel,fans luyrendre
desAmb. deSiam. 233
ce qu'ils devoient à une perſonne
de sa naiſſance. Ils vifiterent
tous les Appartements fans
eftre incommodés par la foule
qui fe trouva ce jour-là à l'Hôtel
de Guiſe , tant les ordres
qu'on avoit donnez pour cela,
furent bien executez. Ils
admirerent la magnificence
des meubles , & la beauté de
l'Hôtel , & dirent qu'il eſtoit
digne de la grande Princeße qui
l'habitoit. Quoy que cet Hôtel
fut déja vaſte &beau,Mademoifelle
de Guiſe qui eft
toute magnifique , y a fait
beaucoup travailler , & l'on
V
L
\
234 IV. P. du Voyage
fçait que de tout temps , on a
parlé de la ſumptuoſité des
meubles de la Maiſon de
Guife , & de fes richesTapif
feries . Les Ambaſſadeurs , apres
avoir vû toutes ces chofes
, furent conduits dans le
lieu où ſe devoitfaire le Con
cert. Il n'eſtoit compofé que
de la Muſique de cette Princeffe
, qui foûtienten tout la
gradeur de fa naiſſance,& qui
la marque par des chofes que
beaucoup de Souverains ne
font pas. Les Ambaffadeurs
témoignerent pluſieurs fois à
Mademoiselle de Guiſe pens
des Amb de Siam. 235
dant le Concert , le plaifir
qu'ils y prenoient , & fortirent
charmez des honneſtetés
de cette Princeffe , & de
tout ce qu'ils avoient vû &
entendu.
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Résumé : Ils vont à l'Hôtel de Guise, où ils sont regalez d'un fort beau concert. [titre d'après la table]
Les ambassadeurs de Siam visitèrent l'Hôtel de Guise, où ils demandèrent à rencontrer Mademoiselle de Guise avant d'assister à un concert. Ils exprimèrent leur respect et admiration pour sa naissance. Ils visitèrent ensuite les appartements sans être gênés par la foule, grâce à des ordres bien exécutés. Ils admirèrent la magnificence des meubles et la beauté de l'hôtel, le jugeant digne de la princesse. Mademoiselle de Guise, connue pour sa magnificence, avait entrepris des travaux pour embellir l'hôtel déjà vaste et beau. Les ambassadeurs assistèrent à un concert composé de la musique de la princesse, qu'ils apprécièrent grandement. Ils témoignèrent à plusieurs reprises leur plaisir et sortirent charmés par les honnêtetés de la princesse et par tout ce qu'ils avaient vu et entendu.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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9
p. 299-325
Ce qui se passa à Versailles le 19 de ce mois lorsque Monsieur le Cardinal de Noailles s'y rendit à la teste du Clergé, & les Harangues que son Eminence fit au Roy & à Monseigneur le Dauphin, [titre d'après la table]
Début :
Je vous ay si souvent parlé de ces illustres familles, & [...]
Mots clefs :
Clergé, Église des grands Augustins, Messe de Saint Esprit, Versailles, Cardinal de Noailles, Discours, Roi, Gloire, Religion, Coeur, Naissance, Dieu, Peuples
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Ce qui se passa à Versailles le 19 de ce mois lorsque Monsieur le Cardinal de Noailles s'y rendit à la teste du Clergé, & les Harangues que son Eminence fit au Roy & à Monseigneur le Dauphin, [titre d'après la table]
Je vous ay fi fouvent parlé
de ces illuftres familles , &
en particulier du merite de
ceux qui les compofent , &
des actions par lesquelles ils
fe font diftinguez que je ne
crois pas vous en devoir dire
d'avantage aujourd'huy.
Je vous ay déja parlé de
tout ce qui fe paffa aux grands
Auguftins les de ce mois
с
300 MERCURE
y
lors queLle Clergé s'y affem .>
bla pour la premiere fois , de
la Meffe du Saint Efprit qui
fut celebrée , & je vous ay
donné un Extrait du Sermon
qui yfut prêché le mêmejour.
al Le 19.cet Auguſte Corps
fe rendit à Verfailles dans un
Appartement du Chateau
qui luy avoit efté preparé. Mr
le Comte de Pontchartrain ,
Secretaire d'Etat l'y vint prendre avec Mr le Marquis de
Dreux Grand Maiftre des
Ceremonies ,& Mr des Granges Maiftre des Ceremonies,
& il fut ainfi conduit à l'Au
GALANT gor ༢or
diance du Roy les Gardes du
Corps eftant en haye dans
leur Salle , & fous les Armes ,
&les deux battans des Portes
ayant cfté ouverts. Monfieur
le Cardinal de Noailles prit
la parole , & fit au Roy le
Difcours fuivant. bl
१
IMSIRE,
-
Nous venons avecjoye & eme
preſſement rendre àVoſtre Majefté
nos tres - humbles hommages , &
ceux de tout le Clergé de France
que cette Affembléereprefente , &
qui eft beaucoup moins le premier
302 MERCURE
Corps de voftre Royaume parfon
rang, que parfon zele pour vostre
fervice,
༢༠༡༥།
Nous venons en renouveller à
V. M.les proteftations lesplusfinceres , nousfouhaiterions qu'il
nous fuft poffible d'en donner des
preuves plus fortes coplus écla osdans le cours de cet Affemblée, que nous n'avons fait encore
dans les autres.ian bus
La mesure de noftre zele nefera
jamais celle de nos forces , telles
qu'elles puiffent eftre, grandes ou
perites , entieres ou épuifées , il ira
toûjours beaucoup au-delà , ilfera
au deffus de tous les évenemens
GALANT 303
rien ne le diminuëtajamais.
** Ce qui pourroit affaiblir celuy des autres , ne fervira , qu'
fortifier le nostre. Les malheurs
de cette vie , les revolutions qui
arrivent dans tous les Etats ,
peuvent ébranler la fidelité des
peuples conduits par des vûës bafJes e intereffées , mais elles ne
font qu'affermircelle des Miniftrès
de Dieu , qui doivent entrer dans
fes deffeins , & avoir des vûës
plus élevées.
1
Que David foit heureux ou
malheureux, le grand Preftre eft
également attaché à luy , ilfe déclare même plus hautement enfa
304 MERCURE
faveur, &faitplus d'effortspour
Le fecourir , quand il le voit dans
unplusgrand befoin.
Illuy donne les pains offerts à
Dieu , qui eftoient dans le Temple ,
dont il n'eftoit permis qu'aux
Preftres de manger. Il luy laiffe
prendre l'épée de Goliath , confacrée à la gloire du Seigneur ,parce
qu'il n'en avoitpoint d'autre à lug
donner, &il s'expofe genereufe
mentpar cet office de religion à la
mort que Sail luy fit fouffrir peu
aprés.
C'est une leçon pour nous , &
un exemple que nos cœurs ne nous
preffent pas moins que noftre de-
GALANT 305
voir de remplirà l'égard de Voftre
Majesté.
Sile cours defes victoires a été interrompu parar les ordres fecrets &
impenetrables de lafageffe deDieu,
qui fait ce qu'il luy plaift desplus
grands hommes , comme des plus petits pendap
pourfaire د que
grandeur & toute puiffance vient
de luy. Si
Vos armed
à qui rien
•
toune refiftoit autresfois n'ont pas
jours eu le mêmefort. Sicette gloire
humaine qu'elles vous ont attirée ,
qui a étonné le monde entier , au
point qu'on enen peut dire ce que
Ecriture dit de celle d'Alexandre
le Grand , que toute la terre en
Mars 1710.
Ca
306 MERCURE
eft tombée dans le filence. Sz
cette gloire , dis je , a reçu quelque
atteinte par les malheurs de la
guerre , noftre attachement pour
V. M. n'en eft que plusferme
plus ardent.
Nous adorons la main qui vous
frape , nous vous refpectonsda
vantage , s'il eftpoffible ,fous cette
main divine , dont les coupsfalu
taires vous rendent plus reſpectable auxyeux de la Foy.
Elle nous apprend qu'une trop
longue e trop grande profperité
annonce un malheurplus grand
plus long, puifqu'il fera éternel ,
&que le bonheur continuel de
GALANT: 307
cette vie eft le Paradis des repron
me ?• +
· L'experience ne l'enſeigne pas
moins que la Foy ; car ne voit on
pas dans toutes les biftoires , que
Les Princes qui n'ont jamais fenti
la main de Dieu , qu'il a laiſſe
joüirpaiſiblement des plaiſirs , des
grandeurs &'rde toute la gloire de
ce monde,fans y répandre aucunè
amertume, ont eſté enyvrez de leur
bonheur , ont vecu dans l'aveuglement , font morts dans l'impenitence nu
2.Se font done ,felon l'esprit de
la Religion, des graces & desfam
yeurs que ce que le monde appelle
Ccij
308 MERCURE
malheur & difgrace ; cefont des
moyens de meriter unbonheurplus
pur & plus folide que celuy de
cette vie , Dieu compte pour rien
ce qui n'eft pas éternel , & netrou
ve dans aucun bien periſſable une
digne récompenfe pour fes: Elús
ainfi il ne leur ofte lafauffegloire
de ce monde , que les hommes onta
beau appeller immortelle , &qui
paffe toujours , que pour les pre
parer à la gloire de l'éternitéfeule
folide & veritable immortelle.
C'eftce quenous envifageons ,
SIRE , dans vos peines nous
yvozons avecconfolation la bonté
de Dieu pour vous , & nous
GALANT 309
admirons avec veneration lecou
rage & la foy que vous yfaites
paroître sap sailo Tag
Ellemeritefans doute beaucoup
mieux , que les exploits militaires
d'Alexandre , ce filence d'admira."
tion où toute la terre tomba devant luy , & elle est encore plus
digne du refpect , de l'amour
du zele de vos Evêques , &de
tout le Clergé attaché à V. M.
par des liens plus purs & plus
facrez que vos autres Sujets.
Mais ce qui doit les remplir
tous , de quelque profeffion qu'ils
foient , de reconnoiffance , auffi
bienque d'admirationpourV. M.
30 MERCURE
eft le grand defir qu'elle a de
leur donner lapaix. I's fçavent
tous ce qu'elle veut bien facrifier
pour leur procurer un bien
precieux & fi neceffaire , es
qu'elle ne l'a retarde quepour le
rendre plus feur & plus folide
& ne pas prendre l'ombre
l'apparence d'une paix ; pour une
paix réelle veritable.
Perfonne n'ignore que V. M.
s'oublie elle même , pour ne fe
fouvenir que de l'extrême befoin
defespeuples qu'elle abandonne
genereufement fespropres interefts
pour leur repos ; que même la
tendreffe paternelle Jemimentfo
GALANT 311
t
jufte , fi vif, & fi puiffant
fur tout pour les bons cœurs , ne
peut l'emporter fur le defir que
vous avezdefoulagervospeuples.
Quelfacrifice & quel effort
de vostre bonté pour eux ; mais
il est vrai qu'ils l'ont bien
merité par tout ce qu'ils ont fait
&fouffert pour voftre fervice
dans des guerres fi frequentes
fi longues & fi dures :
jufte qu'eftant les meilleurs detous
les peuples , ils trouvent en "yous
le meilleur de tous les Rois.
Mais ce n'eft pas feulement
l'intereft de vos Sujets , c'est la
caufe de sans les peuples que vous
il eft
310 MERCURE
ils
foûtenez, en travaillant fifortement à la paix de l'Europe's car
ne fçait- on pas que par tout
fouffrent, & que vos Ennemis
avec toute la joye de leursfuccés,
n'en ont pas moins la douleur de
voir leur pays ruiné , leurs peuples gémir comme les autres ,
qu'ils n'ontque les évenemenspour
eux. Fantil eft vray que la guerre eft un mal univerfel que Dieu
fait fentir aux heureux ,
heureux , comme
aux malheureux , pour les punir
tous.
S'il vous en coûte donc, SIRE,
pourfaire lapaix , fi vous l'achetez cherement, que vous enferez
avanta-
GALANT 313
avantageufement & glorieufement dédommagé par la grandeur
d'ame que vousyferez paroiftre ,
par le bien infini que vous procurerez à tant de peuples accablez ,
&fur toutpar le trefor pretieux
que vous acquererez de nouveau ,
en vous attachantplus fortement
que jamais les cœurs de vos Sujets.
Quelle richeffe & quelle force
pour un Roy, que la tendreffe &
la confiance de fes Sujets ; que ne
trouve- t-il pas dans leurs cœurs
quand ils font veritablement à
luy?
Quel Empire , écrivoit ungrand
Mars 1710.
Dd .
314 MERCURE
Evefque aun Empereur , y a-t-il
mieux établi , & dont les fondemens foient plus folides &
plus feurs , que celuy qui eft
muni par l'affection & lattachement des peuples ? Qui eftce qui eft plus en affurance &
a moins à craindre , qu'un
Prince qu'on ne craint point,
&pour qui tous fes Sujets craignent ?
Que n'avez vous donc pas
attendre, SIRE , des voftres ,
leur donnant des preuvesfi effecti
ves de vostre bonté pour eux ?
Que ne devons-nous pas faire en
noftre particulier , pour vous en
à
GALANT 3'5
1
marquer noftre reconnoiffance ;
nous qui fommes les Pafteurs &
les peres fpirituels de vos peuples ,
plus intereffez & plus fenfibles
que d'autres à leurs miferes ; nous
quipar noftre caractere fommes
des Miniftres depaix obligez àla
defirer , à la demander , & à la
procurer par tous les moyens qui
peuvent dépendre de nous ?
Heureux fi nous pouvons y
1 contribuerparquelqu'endroit, nonfeulement par nos vœux & nos
prieres , mais auffi par nos biens.
Nous les tiendrons bien employez
à payer un don fi pretieux, &
nous ne craindrons point d'en chanう
Dd ij
316 MERCURE
ger la deftination, ce que nouspourrions fairefans crime , en les faifantfervirà foulager vos peuples,
à les faire jouir de la paix , ou à
les deffendre par une bonne guerre
de la fureur de vos Ennemis , &
en deffendre mefme l'Eglife , qui
n'eftpas moins attaquée que vostre
Royaume, dont les interefts ne
peuvent estre feparez de ceux de
Voſtre Majefté , parce qu'elle en
eft le plus ferme & le plus folide
appuy.
Faffe le Ciel que lesgrands
importans fervices que V. M. a
rendus , & rend encore tous les
jours à la Religion , foient prom-
GALANT 317
& les
ptement recompenfezpar unepaix
feure durable. Que Dieu de
quifeul elle dépend, & qui l'arefuféejufqu'à prefentdans fa juftice enpunition despechez du monde, appaife par les prieres
gemiffemens de tant de peuples
affligez l'accorde enfin dans fa
mifericorde. Que Voftre Majefté
aprés avoir efté long- temps un
David guerrier & genereux ,
foit le refte de fes jours un pacifique Salomon. Que fes jours fi
pretieux pour nous , &pour tous
fes Sujets , approchent autant qu'il
fera poffible de ceux des Patriarches avantle deluge. Qu'elle voye
Dd iii
318 MERCURE
,
naiſtre encore dans fa Famille
Royale plufieurs Princes , quiperpetuëntfaRace & lafaſſent durer jufqu' à la confommation du
ficcle ; qu'elle ait la joye de les former elle-même, & de leur infpirer
parſesgrands exemples & fesfages maximes des fentimens dignes
de leur augufte naiffance. Mais
qu'elle ait auffi la confolation de
voirfes peuples heureux ; qu'ils
puiffent fe repofer tranquilement,felon l'expreffion d'un Prophete , chacun fous fa vigne &
fous fon figuier , fans craindre
aucun Ennemi ; qu'ils faffent
de leurs épées des focs de char-
GALANT 319
rues , & deleurs lances des inftrumens à remuer la terre.
QueV. M regne deplus en plus
dans leur cœur , & qu'elle yfot
tienne toûjours plus fortement le
Royaume de Dieu par une Relis
gion pure & fans tache e' une
pieté fincere e folide , telle qui
convient à un Roy & à un
Royaume tres-Chreftien.
es
Le Clergé fe rendit enfuite
chez Monfeigneur le Dau
phin , & Monfieur le Cardinal
de Noailles luy parla en ces
termes :
Dd iiij
320 MERCURE
MONSEIGNEUR,
Cleft toûjours avec la même
joyer le même empreffement
que nous venons vous rendre nos ›
tres - profonds refpects. C'est un
devoir où nous ne trouvons pas
moins de plaifir que dejuftice.
Nous reconnoiffons ce qui eft
dú aurangque vous donne vostre
augufte naiffance ; mais nous
ne fentons pas moins ce que
mande de nous voſtre bonté
naturelle , qualitéfi rare , quoyque
neceſſaire , dans une fi grande
élevation , parce que le cœur
s'éleve ordinairement àproportion
de-
GALANT 321
de ce qu'il fe voit au deffus des
autres.
Combien de Princes croyent
n'eftre fur le Trône que pour
eux-mêmes , que pour fatisfaire
leurs defirs ne regardent leurs
Sujets que comme leurs efclaves ,
&font infenfibles à leurs peines.
Voftre religion , MONSEIGNEUR , & voftre
bon cœur vous donnent d'autres
fentimens vous fçavez que
Dieun'a mis les Souverains fur
la tête des autres hommes, quepour
les proteger, les fecourir
foulagerdans leurs maux , qu'ils
doivent comme luy defcendre de
les
A
322 MERCURE
leur élevation pour voir ce que
les peuples fouffrent entrer
dans leurspeines , & travailler
à les en délivrer
&
DNA ?
l'attaEn rempliffant un fojufte devoir , non feulement ils rendent
à Dieu ce qu'ils luy doivent,
mais ils fe foutiennent & fe
fortifient eux - mêmes , parce
qu'ils gagnent le cœur
chement des peuples , qui fait la
plus grande force des Rois. La
mifericorde & la verité gar
dent le Roy , & la clemence
affermit fon Trône , difoit le
plus fage & le plus heureux de
tous les Rois tant qu'il s'eft
GALANT 323
laiffe conduire par lafageffe de
Dieu.
Confervez donc , MONSEIGNEUR , cette bonté
fi agreable à Dieu , fi aimable
• pour tous ceux qui dépendent de
vous fi utile pour vousmême. Augmentez - la pour le
Clergé attaché à vous par tant
de liens , par religion , par reconnoiffance , par zelepour le Roy ,
dont on ne peut vous feparer
puifque le cœur & la tendreffe
vous unit à Sa Majesté encore
plus que la naiffance & le devoir.
Vous fçavez à quel point
nous luyfommes dévoüez , quels
1
324 MERCURE
efforts nous avons fait & voulons faire encore pourfonfervice ,
&que nous ne confultons plus
que nos cœurs &point nosforces
d'abord qu'il a beſoin de nous.
Tout cela vous répond
MONSEIGNEUR , de
noftre attachement pour vous
&nousfait efperer vostre bonté
pour nous , la continuation de
l'honneur de votre protection
pour tout le Clergé , nous vous
la demandons avec inftance ;
nous ofons affeurer que nous la
meritonspar noftreprofond respect,
par une fidelité à toute épreuve ,
& par les vœux finceres &
GALANT 25
• ardens que nous faifons pour
voftre longue confervation , pour
voftre profperité ,
de toute la Maifon Royale."
pour cel
de ces illuftres familles , &
en particulier du merite de
ceux qui les compofent , &
des actions par lesquelles ils
fe font diftinguez que je ne
crois pas vous en devoir dire
d'avantage aujourd'huy.
Je vous ay déja parlé de
tout ce qui fe paffa aux grands
Auguftins les de ce mois
с
300 MERCURE
y
lors queLle Clergé s'y affem .>
bla pour la premiere fois , de
la Meffe du Saint Efprit qui
fut celebrée , & je vous ay
donné un Extrait du Sermon
qui yfut prêché le mêmejour.
al Le 19.cet Auguſte Corps
fe rendit à Verfailles dans un
Appartement du Chateau
qui luy avoit efté preparé. Mr
le Comte de Pontchartrain ,
Secretaire d'Etat l'y vint prendre avec Mr le Marquis de
Dreux Grand Maiftre des
Ceremonies ,& Mr des Granges Maiftre des Ceremonies,
& il fut ainfi conduit à l'Au
GALANT gor ༢or
diance du Roy les Gardes du
Corps eftant en haye dans
leur Salle , & fous les Armes ,
&les deux battans des Portes
ayant cfté ouverts. Monfieur
le Cardinal de Noailles prit
la parole , & fit au Roy le
Difcours fuivant. bl
१
IMSIRE,
-
Nous venons avecjoye & eme
preſſement rendre àVoſtre Majefté
nos tres - humbles hommages , &
ceux de tout le Clergé de France
que cette Affembléereprefente , &
qui eft beaucoup moins le premier
302 MERCURE
Corps de voftre Royaume parfon
rang, que parfon zele pour vostre
fervice,
༢༠༡༥།
Nous venons en renouveller à
V. M.les proteftations lesplusfinceres , nousfouhaiterions qu'il
nous fuft poffible d'en donner des
preuves plus fortes coplus écla osdans le cours de cet Affemblée, que nous n'avons fait encore
dans les autres.ian bus
La mesure de noftre zele nefera
jamais celle de nos forces , telles
qu'elles puiffent eftre, grandes ou
perites , entieres ou épuifées , il ira
toûjours beaucoup au-delà , ilfera
au deffus de tous les évenemens
GALANT 303
rien ne le diminuëtajamais.
** Ce qui pourroit affaiblir celuy des autres , ne fervira , qu'
fortifier le nostre. Les malheurs
de cette vie , les revolutions qui
arrivent dans tous les Etats ,
peuvent ébranler la fidelité des
peuples conduits par des vûës bafJes e intereffées , mais elles ne
font qu'affermircelle des Miniftrès
de Dieu , qui doivent entrer dans
fes deffeins , & avoir des vûës
plus élevées.
1
Que David foit heureux ou
malheureux, le grand Preftre eft
également attaché à luy , ilfe déclare même plus hautement enfa
304 MERCURE
faveur, &faitplus d'effortspour
Le fecourir , quand il le voit dans
unplusgrand befoin.
Illuy donne les pains offerts à
Dieu , qui eftoient dans le Temple ,
dont il n'eftoit permis qu'aux
Preftres de manger. Il luy laiffe
prendre l'épée de Goliath , confacrée à la gloire du Seigneur ,parce
qu'il n'en avoitpoint d'autre à lug
donner, &il s'expofe genereufe
mentpar cet office de religion à la
mort que Sail luy fit fouffrir peu
aprés.
C'est une leçon pour nous , &
un exemple que nos cœurs ne nous
preffent pas moins que noftre de-
GALANT 305
voir de remplirà l'égard de Voftre
Majesté.
Sile cours defes victoires a été interrompu parar les ordres fecrets &
impenetrables de lafageffe deDieu,
qui fait ce qu'il luy plaift desplus
grands hommes , comme des plus petits pendap
pourfaire د que
grandeur & toute puiffance vient
de luy. Si
Vos armed
à qui rien
•
toune refiftoit autresfois n'ont pas
jours eu le mêmefort. Sicette gloire
humaine qu'elles vous ont attirée ,
qui a étonné le monde entier , au
point qu'on enen peut dire ce que
Ecriture dit de celle d'Alexandre
le Grand , que toute la terre en
Mars 1710.
Ca
306 MERCURE
eft tombée dans le filence. Sz
cette gloire , dis je , a reçu quelque
atteinte par les malheurs de la
guerre , noftre attachement pour
V. M. n'en eft que plusferme
plus ardent.
Nous adorons la main qui vous
frape , nous vous refpectonsda
vantage , s'il eftpoffible ,fous cette
main divine , dont les coupsfalu
taires vous rendent plus reſpectable auxyeux de la Foy.
Elle nous apprend qu'une trop
longue e trop grande profperité
annonce un malheurplus grand
plus long, puifqu'il fera éternel ,
&que le bonheur continuel de
GALANT: 307
cette vie eft le Paradis des repron
me ?• +
· L'experience ne l'enſeigne pas
moins que la Foy ; car ne voit on
pas dans toutes les biftoires , que
Les Princes qui n'ont jamais fenti
la main de Dieu , qu'il a laiſſe
joüirpaiſiblement des plaiſirs , des
grandeurs &'rde toute la gloire de
ce monde,fans y répandre aucunè
amertume, ont eſté enyvrez de leur
bonheur , ont vecu dans l'aveuglement , font morts dans l'impenitence nu
2.Se font done ,felon l'esprit de
la Religion, des graces & desfam
yeurs que ce que le monde appelle
Ccij
308 MERCURE
malheur & difgrace ; cefont des
moyens de meriter unbonheurplus
pur & plus folide que celuy de
cette vie , Dieu compte pour rien
ce qui n'eft pas éternel , & netrou
ve dans aucun bien periſſable une
digne récompenfe pour fes: Elús
ainfi il ne leur ofte lafauffegloire
de ce monde , que les hommes onta
beau appeller immortelle , &qui
paffe toujours , que pour les pre
parer à la gloire de l'éternitéfeule
folide & veritable immortelle.
C'eftce quenous envifageons ,
SIRE , dans vos peines nous
yvozons avecconfolation la bonté
de Dieu pour vous , & nous
GALANT 309
admirons avec veneration lecou
rage & la foy que vous yfaites
paroître sap sailo Tag
Ellemeritefans doute beaucoup
mieux , que les exploits militaires
d'Alexandre , ce filence d'admira."
tion où toute la terre tomba devant luy , & elle est encore plus
digne du refpect , de l'amour
du zele de vos Evêques , &de
tout le Clergé attaché à V. M.
par des liens plus purs & plus
facrez que vos autres Sujets.
Mais ce qui doit les remplir
tous , de quelque profeffion qu'ils
foient , de reconnoiffance , auffi
bienque d'admirationpourV. M.
30 MERCURE
eft le grand defir qu'elle a de
leur donner lapaix. I's fçavent
tous ce qu'elle veut bien facrifier
pour leur procurer un bien
precieux & fi neceffaire , es
qu'elle ne l'a retarde quepour le
rendre plus feur & plus folide
& ne pas prendre l'ombre
l'apparence d'une paix ; pour une
paix réelle veritable.
Perfonne n'ignore que V. M.
s'oublie elle même , pour ne fe
fouvenir que de l'extrême befoin
defespeuples qu'elle abandonne
genereufement fespropres interefts
pour leur repos ; que même la
tendreffe paternelle Jemimentfo
GALANT 311
t
jufte , fi vif, & fi puiffant
fur tout pour les bons cœurs , ne
peut l'emporter fur le defir que
vous avezdefoulagervospeuples.
Quelfacrifice & quel effort
de vostre bonté pour eux ; mais
il est vrai qu'ils l'ont bien
merité par tout ce qu'ils ont fait
&fouffert pour voftre fervice
dans des guerres fi frequentes
fi longues & fi dures :
jufte qu'eftant les meilleurs detous
les peuples , ils trouvent en "yous
le meilleur de tous les Rois.
Mais ce n'eft pas feulement
l'intereft de vos Sujets , c'est la
caufe de sans les peuples que vous
il eft
310 MERCURE
ils
foûtenez, en travaillant fifortement à la paix de l'Europe's car
ne fçait- on pas que par tout
fouffrent, & que vos Ennemis
avec toute la joye de leursfuccés,
n'en ont pas moins la douleur de
voir leur pays ruiné , leurs peuples gémir comme les autres ,
qu'ils n'ontque les évenemenspour
eux. Fantil eft vray que la guerre eft un mal univerfel que Dieu
fait fentir aux heureux ,
heureux , comme
aux malheureux , pour les punir
tous.
S'il vous en coûte donc, SIRE,
pourfaire lapaix , fi vous l'achetez cherement, que vous enferez
avanta-
GALANT 313
avantageufement & glorieufement dédommagé par la grandeur
d'ame que vousyferez paroiftre ,
par le bien infini que vous procurerez à tant de peuples accablez ,
&fur toutpar le trefor pretieux
que vous acquererez de nouveau ,
en vous attachantplus fortement
que jamais les cœurs de vos Sujets.
Quelle richeffe & quelle force
pour un Roy, que la tendreffe &
la confiance de fes Sujets ; que ne
trouve- t-il pas dans leurs cœurs
quand ils font veritablement à
luy?
Quel Empire , écrivoit ungrand
Mars 1710.
Dd .
314 MERCURE
Evefque aun Empereur , y a-t-il
mieux établi , & dont les fondemens foient plus folides &
plus feurs , que celuy qui eft
muni par l'affection & lattachement des peuples ? Qui eftce qui eft plus en affurance &
a moins à craindre , qu'un
Prince qu'on ne craint point,
&pour qui tous fes Sujets craignent ?
Que n'avez vous donc pas
attendre, SIRE , des voftres ,
leur donnant des preuvesfi effecti
ves de vostre bonté pour eux ?
Que ne devons-nous pas faire en
noftre particulier , pour vous en
à
GALANT 3'5
1
marquer noftre reconnoiffance ;
nous qui fommes les Pafteurs &
les peres fpirituels de vos peuples ,
plus intereffez & plus fenfibles
que d'autres à leurs miferes ; nous
quipar noftre caractere fommes
des Miniftres depaix obligez àla
defirer , à la demander , & à la
procurer par tous les moyens qui
peuvent dépendre de nous ?
Heureux fi nous pouvons y
1 contribuerparquelqu'endroit, nonfeulement par nos vœux & nos
prieres , mais auffi par nos biens.
Nous les tiendrons bien employez
à payer un don fi pretieux, &
nous ne craindrons point d'en chanう
Dd ij
316 MERCURE
ger la deftination, ce que nouspourrions fairefans crime , en les faifantfervirà foulager vos peuples,
à les faire jouir de la paix , ou à
les deffendre par une bonne guerre
de la fureur de vos Ennemis , &
en deffendre mefme l'Eglife , qui
n'eftpas moins attaquée que vostre
Royaume, dont les interefts ne
peuvent estre feparez de ceux de
Voſtre Majefté , parce qu'elle en
eft le plus ferme & le plus folide
appuy.
Faffe le Ciel que lesgrands
importans fervices que V. M. a
rendus , & rend encore tous les
jours à la Religion , foient prom-
GALANT 317
& les
ptement recompenfezpar unepaix
feure durable. Que Dieu de
quifeul elle dépend, & qui l'arefuféejufqu'à prefentdans fa juftice enpunition despechez du monde, appaife par les prieres
gemiffemens de tant de peuples
affligez l'accorde enfin dans fa
mifericorde. Que Voftre Majefté
aprés avoir efté long- temps un
David guerrier & genereux ,
foit le refte de fes jours un pacifique Salomon. Que fes jours fi
pretieux pour nous , &pour tous
fes Sujets , approchent autant qu'il
fera poffible de ceux des Patriarches avantle deluge. Qu'elle voye
Dd iii
318 MERCURE
,
naiſtre encore dans fa Famille
Royale plufieurs Princes , quiperpetuëntfaRace & lafaſſent durer jufqu' à la confommation du
ficcle ; qu'elle ait la joye de les former elle-même, & de leur infpirer
parſesgrands exemples & fesfages maximes des fentimens dignes
de leur augufte naiffance. Mais
qu'elle ait auffi la confolation de
voirfes peuples heureux ; qu'ils
puiffent fe repofer tranquilement,felon l'expreffion d'un Prophete , chacun fous fa vigne &
fous fon figuier , fans craindre
aucun Ennemi ; qu'ils faffent
de leurs épées des focs de char-
GALANT 319
rues , & deleurs lances des inftrumens à remuer la terre.
QueV. M regne deplus en plus
dans leur cœur , & qu'elle yfot
tienne toûjours plus fortement le
Royaume de Dieu par une Relis
gion pure & fans tache e' une
pieté fincere e folide , telle qui
convient à un Roy & à un
Royaume tres-Chreftien.
es
Le Clergé fe rendit enfuite
chez Monfeigneur le Dau
phin , & Monfieur le Cardinal
de Noailles luy parla en ces
termes :
Dd iiij
320 MERCURE
MONSEIGNEUR,
Cleft toûjours avec la même
joyer le même empreffement
que nous venons vous rendre nos ›
tres - profonds refpects. C'est un
devoir où nous ne trouvons pas
moins de plaifir que dejuftice.
Nous reconnoiffons ce qui eft
dú aurangque vous donne vostre
augufte naiffance ; mais nous
ne fentons pas moins ce que
mande de nous voſtre bonté
naturelle , qualitéfi rare , quoyque
neceſſaire , dans une fi grande
élevation , parce que le cœur
s'éleve ordinairement àproportion
de-
GALANT 321
de ce qu'il fe voit au deffus des
autres.
Combien de Princes croyent
n'eftre fur le Trône que pour
eux-mêmes , que pour fatisfaire
leurs defirs ne regardent leurs
Sujets que comme leurs efclaves ,
&font infenfibles à leurs peines.
Voftre religion , MONSEIGNEUR , & voftre
bon cœur vous donnent d'autres
fentimens vous fçavez que
Dieun'a mis les Souverains fur
la tête des autres hommes, quepour
les proteger, les fecourir
foulagerdans leurs maux , qu'ils
doivent comme luy defcendre de
les
A
322 MERCURE
leur élevation pour voir ce que
les peuples fouffrent entrer
dans leurspeines , & travailler
à les en délivrer
&
DNA ?
l'attaEn rempliffant un fojufte devoir , non feulement ils rendent
à Dieu ce qu'ils luy doivent,
mais ils fe foutiennent & fe
fortifient eux - mêmes , parce
qu'ils gagnent le cœur
chement des peuples , qui fait la
plus grande force des Rois. La
mifericorde & la verité gar
dent le Roy , & la clemence
affermit fon Trône , difoit le
plus fage & le plus heureux de
tous les Rois tant qu'il s'eft
GALANT 323
laiffe conduire par lafageffe de
Dieu.
Confervez donc , MONSEIGNEUR , cette bonté
fi agreable à Dieu , fi aimable
• pour tous ceux qui dépendent de
vous fi utile pour vousmême. Augmentez - la pour le
Clergé attaché à vous par tant
de liens , par religion , par reconnoiffance , par zelepour le Roy ,
dont on ne peut vous feparer
puifque le cœur & la tendreffe
vous unit à Sa Majesté encore
plus que la naiffance & le devoir.
Vous fçavez à quel point
nous luyfommes dévoüez , quels
1
324 MERCURE
efforts nous avons fait & voulons faire encore pourfonfervice ,
&que nous ne confultons plus
que nos cœurs &point nosforces
d'abord qu'il a beſoin de nous.
Tout cela vous répond
MONSEIGNEUR , de
noftre attachement pour vous
&nousfait efperer vostre bonté
pour nous , la continuation de
l'honneur de votre protection
pour tout le Clergé , nous vous
la demandons avec inftance ;
nous ofons affeurer que nous la
meritonspar noftreprofond respect,
par une fidelité à toute épreuve ,
& par les vœux finceres &
GALANT 25
• ardens que nous faifons pour
voftre longue confervation , pour
voftre profperité ,
de toute la Maifon Royale."
pour cel
Fermer
Résumé : Ce qui se passa à Versailles le 19 de ce mois lorsque Monsieur le Cardinal de Noailles s'y rendit à la teste du Clergé, & les Harangues que son Eminence fit au Roy & à Monseigneur le Dauphin, [titre d'après la table]
En août 1710, le clergé français a organisé une assemblée marquée par plusieurs événements notables. Le clergé a célébré pour la première fois la Messe du Saint-Esprit. Le 19 août, les membres du clergé se sont rendus à Versailles, où ils ont été accueillis par le comte de Pontchartrain, le marquis de Dreux et le maître des cérémonies des Granges. Le cardinal de Noailles a prononcé un discours au roi, exprimant la loyauté et le zèle du clergé envers la monarchie. Il a souligné que les malheurs et les révolutions n'affaiblissent pas leur fidélité, citant l'exemple du grand prêtre de David. Le cardinal a également évoqué les victoires du roi et les épreuves actuelles, exhortant à voir dans les peines une occasion de mériter un bonheur éternel. Il a loué le désir du roi de procurer la paix à ses sujets et à l'Europe, soulignant que la tendresse et la confiance des sujets sont les plus grandes richesses d'un roi. Par la suite, le clergé a rendu visite au Dauphin, où le cardinal de Noailles a réitéré les mêmes sentiments de respect et de dévouement, insistant sur la nécessité pour les souverains de protéger et de soulager leurs sujets. Le texte est également une lettre adressée à un haut dignitaire, probablement un membre de la famille royale ou un représentant du roi. Les auteurs expriment leur loyauté et leur dévouement envers le roi, affirmant que leur attachement est plus profond que les simples obligations de naissance et de devoir. Ils déclarent leur volonté de servir le roi avec dévotion et de mettre toutes leurs forces à sa disposition lorsqu'il en a besoin. La lettre demande la continuité de la protection et de l'honneur du dignitaire envers le clergé, assurant que cette protection est méritée par leur respect profond, leur fidélité inébranlable et leurs vœux sincères et ardents pour la longue conservation et la prospérité de la maison royale.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
10
p. 109-113
Nouvelles d'Utrecht.
Début :
On écrit d'Utrecht, que le 5. Octobre les Ambassadeurs [...]
Mots clefs :
Ambassadeurs, Naissance, Prince Ferdinand , Conférence, Troupes, Cologne
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles d'Utrecht.
NouvellescTVtrtcht.
;
On écrit d'Utrecht,quq
le5 Octobre les Ambassadeurs
d'Espagnereçurent
un courier qui leur apporta
la nouvelle que la Reine
éçpje., accouchéed'un trou
sime Pri'nçeiqtji,,,Ivçit
nommé Ferdinand;que le
9.le Duc d'Ossone, pourcelebrer
la naissancedece
Prince, donnaun magnifique
repas à divers Ministres
& autres personnes de
diftinftion, & quç-t le soir
son Hôtel fut illuminé en
dehors & en dedans,&orné
d'une decoration magnifique
d'emblêmes&de
devises sur des médaillons,
Les lettres de la Haye
portent que le Comte de
Strafford & les dépurez des
Estats Générauxeurent une
conférence avec le Prince
Kurakin & le Baron de
Gersdorf, envoyez du Czar
&duRoyAuguste,&enfuite
avec le Baron Palmquist
envoyé du Roy de
Suede, touchant les affaires
duNord,Seque les EÙ
tats de Hollande avoient
donné la charge de contre-
Amiral de l'Amirauté de
la Meuse au Capitaine ja,
cob van Koperen,& celle
de l'Amirautéd'Amsterdam
au Capitaine Lucas
de Veth.Les nouvelles d'Allemagne
portent qu*tnpa$e
ti Françoisavoit enlevécinquante
soldats Allemans à
une lieuë au-dessus deCologne
;que le 7.les troupes
de Prusse ôc de Hanover
étoient encore au-deçà du
Mein; & que le Prince Eugene
, qui étoit encore le
6. en son camp de Mulberg,
avoit détaché six regimens
de cavalerie & dix bataillons
, pour renforcer le
camp du General Vaubonne
qui se retranchoit près
de Rotvveil.
: On écrit de Cologne,
queleRoy dePrusse fait
fairedes levées à Vesel &
dans tous ses Estats, & qu'il
prend à son service lessoldatslicentiez
par lesEstats
voisins,que les troupes de.
ce Prince qui se preparoienc
à passer le Mein pouraller
joindre l'armc'cdel'Em--
pire,
pire,avoient recû un contre
ordre.
;
On écrit d'Utrecht,quq
le5 Octobre les Ambassadeurs
d'Espagnereçurent
un courier qui leur apporta
la nouvelle que la Reine
éçpje., accouchéed'un trou
sime Pri'nçeiqtji,,,Ivçit
nommé Ferdinand;que le
9.le Duc d'Ossone, pourcelebrer
la naissancedece
Prince, donnaun magnifique
repas à divers Ministres
& autres personnes de
diftinftion, & quç-t le soir
son Hôtel fut illuminé en
dehors & en dedans,&orné
d'une decoration magnifique
d'emblêmes&de
devises sur des médaillons,
Les lettres de la Haye
portent que le Comte de
Strafford & les dépurez des
Estats Générauxeurent une
conférence avec le Prince
Kurakin & le Baron de
Gersdorf, envoyez du Czar
&duRoyAuguste,&enfuite
avec le Baron Palmquist
envoyé du Roy de
Suede, touchant les affaires
duNord,Seque les EÙ
tats de Hollande avoient
donné la charge de contre-
Amiral de l'Amirauté de
la Meuse au Capitaine ja,
cob van Koperen,& celle
de l'Amirautéd'Amsterdam
au Capitaine Lucas
de Veth.Les nouvelles d'Allemagne
portent qu*tnpa$e
ti Françoisavoit enlevécinquante
soldats Allemans à
une lieuë au-dessus deCologne
;que le 7.les troupes
de Prusse ôc de Hanover
étoient encore au-deçà du
Mein; & que le Prince Eugene
, qui étoit encore le
6. en son camp de Mulberg,
avoit détaché six regimens
de cavalerie & dix bataillons
, pour renforcer le
camp du General Vaubonne
qui se retranchoit près
de Rotvveil.
: On écrit de Cologne,
queleRoy dePrusse fait
fairedes levées à Vesel &
dans tous ses Estats, & qu'il
prend à son service lessoldatslicentiez
par lesEstats
voisins,que les troupes de.
ce Prince qui se preparoienc
à passer le Mein pouraller
joindre l'armc'cdel'Em--
pire,
pire,avoient recû un contre
ordre.
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Résumé : Nouvelles d'Utrecht.
Le 5 octobre, les ambassadeurs d'Espagne à Utrecht apprirent la naissance du prince Ferdinand, fils de la reine d'Espagne. Le duc d'Ossone organisa un repas somptueux pour célébrer cet événement, illuminant et décorant son hôtel avec des symboles et devises. À La Haye, le comte de Strafford et les députés des États Généraux eurent des conférences avec des envoyés du tsar, du roi Auguste, et du roi de Suède concernant les affaires du Nord. Les États de Hollande nommèrent Jacob van Koperen contre-amiral de l'Amirauté de la Meuse et Lucas de Veth à l'Amirauté d'Amsterdam. En Allemagne, François Ier captura cinquante soldats allemands près de Cologne. Les troupes prussiennes et hanovriennes étaient positionnées au-delà du Mein. Le prince Eugène envoya des renforts au général Vaubonne près de Rotweil. À Cologne, on rapporta que le roi de Prusse levait des troupes à Wesel et dans ses États, recrutant également des soldats licenciés par les États voisins. Les troupes prussiennes, initialement prêtes à traverser le Mein pour rejoindre l'armée impériale, reçurent un contre-ordre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 217-241
Extrait curieux d'un Procès qui a esté depuis peu plaidé au grand Conseil, [titre d'après la table]
Début :
Je suis fort redevable à Mr L. V. du present qu'on [...]
Mots clefs :
Enfant, Mariage, Père, Époux, Épouse, Naissance, Province, Gendre, Procès, Chagrin, Mari
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Extrait curieux d'un Procès qui a esté depuis peu plaidé au grand Conseil, [titre d'après la table]
Je fuis fort redevable à
Mr L. V. du present qu'on
vient de me faire de sa part,
& je ne doute point que
tout le monde ne luy fçaJ
che autant de gré que moy
; de la peine qu'il a prise de
décacher tous les Articles
; principaux d'un procez extraordinaire
qui vient d'cc.
trejugéà un des premiers
tribunaux de Paris, pouren
composer(sans s'écarter de
la vérité) l'histoire qui suit
sur les pieces originales qui
en font la matiere.
Mademoiselle Nassulvaved
estnée dans une des
plus considerables provinces
du Royaume; ses parens
qui y tenoient les premiers
rangs dans la robe, & qui
possedoient de grands
biens, luy donnerent une
éducation conforme à sa
naissance, leurs foins ne furent
pas infructueux. Elle
eut a peine quinze ansquelle
fut l'admiration de toute
sa province, les plus honnestes
gens luy rendirent
des soins; sa beauté, sa ieunesse,
& son esprit au dessus
de son âgeluy attirerent
bien-tost une grosse cour. De tous ceux qui s'empresserent
à la servir, le
seul Emselad son parent fut
celuy qui trouva le secret de
la rendre sensible
,
le libre
accez qu'il avoit dans la
maison de son pere ,
luy
fit faire en peu de temps
un progrez considerable
sur son coeur. Les premierres
inclinations sont viol
lentes, on oublie facilement
le devoir pour ne suivre
que les mouvements
d'unepassion agreable.
La pauvre Demoiselle fen*
tit bien-tost avec douleur;
ce que Forcez de sa complaisance
alloit lyy couster;
lacrainte que sa hontene;
le:, decouvrist, l'accabla
d'horreur & de tristiesse,
elle pressa, mais inutilement
,Emcelad à la demander
en mariage, des raisons
de famille luy servirent de
prpérétetexxttee ppoouurr ll''eesnlooii~gnneerr de
cette proposition. Lnnnuii
autre parti se presenta, ce
fut Lezariu magistrat illustre,
riche &connu, particulierement
du pere de
Nassulvaved, quifutécoute
ir- favorablement.Le pere
sans consulter sa fille regle
avec luy, & les conditions
Ôc le temps du mariage.
Quel coup de foudre pour
cette tendre amante ! de
quels mouvements ne futelle
pointagitée quand elle
,~
apprit cette fatale resolution.
Il falloit renoncer
pour cousjours à la feule
r personne qui luy estoirchere,
s'engager avec une àurre
qu'elle ne pouvoit souffris,
& plus que cela, s'exporer
à l'accablante confusion de
voir découvrir parun
les fuites d'un commerce
qu'elle auroit fouhairé pouvoir
se cacker à elle-mesme.
Quellesituation 1 daps le
fort de sa douleur, elle chercha
de la consolation dans
les conseils de ses alTIies.,
elles luy proposerent ( entre
autres une Religieuse )
de se jetter aux pieds de son
pere, & deluy avoüer l'estac
où elle estoit
, pour ledé-
-
tourner du dessein qu'il
avoit formé, enÍÙite de ne
pas s'éloigner, au cas que Lezariu
fit quelques démarches
pour obtenir des
1. faveurs,& enfin de prendre
desremedes qu'elle s'offrit
de luy faire avoir pour
| empescher raccroiflement,
, ou plustost pour étouffer le
fruit de son premier amour;
; mais s'estanttrouvédes ob
tfaclesinfurmontablesàcecexpedient,
ktrifte Nassulvaved
se determinaà envo-
: yer chercher Emcelad,elle
,
l'informa de ce qui se pas-
> soit,Iuy peignitsontion
avec les traits les plus
vifs)le conjura de rompre l'engagement que l'on avoit
projetté, & quiestoit sur le
point de se conclure. Ses
prieres& ses larmes furent
sans effet,cet amant lasche,
infidele
, ou degousté, demeura
dans l'inaction, la
victime fut menée à l'aucel,
& le mariage célébré avec
Lezariu, sans qu'Emcelad
fit le moindre mouvement
pours'y opposer.
Les premiers jours de ce
mariage qui paroissoit si
convenable,& qui l'estoit
si peu, se passerent en apparence
asseztranquillement
; mais ce calme dura
peu, l'époux s'a pperceut du
malheur de son épouse
,
il
s'abandonna aux fureurs de
la plus noire jalousîe,& de
la plus violente colere, il la
força de luy avouër son crime,
luy fit nommer son seducteur,&
Tengageaàfaire
le mesme aveu devant son
pere, qu'il avoit fait venir
chez luy pour cela. Le pere
au desespoir porta son resfentimeot
jusqu'à vouloir
faire enfermer sa fille; mais
le mary qui prévit l'éclat
que cela feroit dans lemonde,
& que la honte en réjailliroit
sur luy, prit le par.
ty que tous les hommes sages
devroient prendre en
pareille occasion
;
il opposa
la puissance maritale à la
paternelle,pria son beaupere
d'écouffer son chagrin,
& exigea feulement de luy
que l'enfant qui naistroit
de son épouse ne sust point
confideré comme le sien;
on prit sur cela des temperaments,
oti convint quimmediatement
après la naissance
de l'enfant, il feroit
secretement exposé
, &
qu'on feroit ensorte qu'il
ignorast toujours son origine.
-
Le mary cependant qui
portoit tousjours dans le
coeur le trait de la jalousie
dont il avoit esté blessé
n'eut depuis , pour son epouse
qu'un extrêmeéloignement.
Il ne la voulut plus
voir pendant plus de six
mois, il fit plusieurs voyages
,
fut prendre les eaux,
trop heureux s'il eust peu
trouver celles de l'oubli.
Dans le septiéme mois du
mariage, sonépouse accoucha
d'une fille à une maison
de campagne de son
mary; l'enfant fut misaussitost
dans un panier, &por.
téàdix lieuësde là par un
laquais chez une nourrice
qui s'en chargea, &le fit
baptiser le lendemain fous
lenom de Catherine ccinime
un enfant trouvé; il ne
fut point parlé du nom hy
du pere ny de la mere , on
tut mesmejusqu'à celuy du
parain & de la maraine, ce
furent deux enfans de paysans
quien servirent.
Le pere de l'épouse, qui
par un principe de charité
n'avoit pu le déterminerà
faire exposer l'enfant,voulutCependant
rassurer Tépouxsur
la creance qu'il auroit
eue,s'ilavoit seeu qu'on
lefit secretement élever,il
luy écrivit le mesme jour des
couches qu'ilpouvoir se
tranquiliser
, que l'enfant
estoit mort en naissant.Cela
luy fut confirmé à son retour
par tous les domestiques,
& toutes les personnes
Iqui pouvoient avoir con-
»rçoifTance des couches; le
mary qui
,
le croyoit fince-
'; rement n'enparla plus depuis,
il fut trois ans sans s'en
»
informer.
Le beaupere cependant
qui vouloit empescher quon
ne sceut quel estoit l'ensant,
le fit pendant ces trois
annéespromenerde province
en province, de village
en village, & enfin il
le fit revenir dans le lieu de
sa naissance. Tout cela se
fit tousjours avec un exrréme
mystere ,& ce ne fut
qu'à des personnes de la lie
du peuple,&en dernier lieu
à des femmes de mauvâise
vie que son éducation fut
confiée.
L'épouse qui ne voyoit
point de retour sincere pour
elle dans son époux,avait
paffé tout ce temps dans
une langueur qui ne luy laisfoit
qu'une santé fort imparfaite,
le temps ne diminuoit
rien de la violence de
son chagrin, il sembloit au
contraire l'augmenter: elle
en fut si accablée qu'elle
tomba malade,& mourut
sans avoir lainea sonmary
aucun autre enfant de son
mariage
Elle estoit une des plus riches
heritieres de la province.
Lemary qui par cette
mort estoit obligé de restituer
une dote considerable
qu'il avoit touchée:, & qui
d'un autre cofté se voyoit
privé de l'esperance des successions
opulentes de son
beaupere ou de sa bellemere,
marqua un extrême chagrin
de n'avoir point d'enfants.
Quelques uns desesamis
à qui il en parla, s'eftonnerent
du motifqu'il donnoit
a son chagrin, luy dirent
qu'il avoit un enfant, luy
indiquèrent le lieu oùil estoit.
Transporté de joye, il
«
le
le fut prendre, &le remit
dans la maison paternelle,
oùilademeuré tranquillement
pendant plusieurs-années.
•-Le beaupere devoit à l'époux
une rente pour le restant
de la dote de son épouse
qu'il navoit pas payé, il
en estoit esheu quelques
années d'arrerages, l'époux
.-les luy demanda, & faute
de payement le-fît ensuite
ussigner pourestrecondarn
aie à les luy payer*^ :
Uninterest aussi leger Ici
broüilla ensemble;le beaupere
que loin de
riendevoir à son gendre,
c'estoit son gendre qui luy
devoir, que la mort de sa
femme sans enfants le met.
toit dans l'obligation de restituer
sa doc.
< - Cela fit une contestation
entre eux, qui fut portée
dans un tribunal de la province.
Le gendre surpris de
la prétention de son beaupere,
soustint qu'elle n'estoit
pas légitime, il dit fay
un enfant,il le representa
ce fut , celuy dont nous
avons parlé.) il futquestion
:en premier lieu de sçavoir
si cet enfant representé eC:
toit celuy dont l'épouse estoit
accouchée,& duquel on
avoit si fort enveloppé la
naissance dans les trois premieres
années de sa vie;
mais ce systeme ayant été
abandonné par le beaupere.
il se retrancha ensuite à dire
que l'enfant n'estoit pas legiume,
parce qu'il avoit
esle conceu d'un autre que
de l'époux deux mois avant
son mariage. Cela donna
lieu à des enquestesqui furentfaites
de part &d autre,
plusieurs tesmoins y déposerent,
les uns qu'avant le
mariage la femme leur avoit
confié les chagrins qus-t
elle avoit au sujet de sa grossesse,
quelle leur en avoit
nommél'auteur
,
qu'elle
leur avoit dit que c'estoit
Emcelad son parentqui restoit
; d'autres dirent luy
avoir ouy dire ce qui s'estoit
passéà ce sujet immédiatement
après son mariage entre
son pere, son époux &
elle, & d'autres enfin expliquèrent
ce qui est arrive
dans le temps & depuis les
couches. Dit ces differentes
depositions on prétendoit
tirer la consequence que
¡ l'enfant n'estoitpaslegitime.
L'époux n'avoit pour
asseurer l'estat de l'enfant
que sa naissance dans le septiéme
mois du mariage, &
la possession où elle estoit
de sonestat dans la maison
;apanternnelleédepeuisspl.usieurs
Les premiers Juges ne
trouvèrent pas que ce fust
assez pour l'époux de justi-
1.
fier que l'enfant estoit né
dans le septiéme mois du
mariage, ils luy ordonnerent
de faire preuve qu'il
estoit conceu dumariage &
pendant le mariage
,
c'esta
dire de luy & depuis son
mariage.
Une pareille preuve n'estoit
pas facile,elle ne pouvoit
estre ny demandée ny
ordonnée;l'époux a interjette
appel de ce jugement.
Le tribunal auguste où cet
appel a esté porté,est composé
de Magistrarstrès-éclairez,
& justes dispensateurs
de la justice. En vain
on y a renouvelle fous le
nom de tierces personnes le
systemedesupposicion qu'-
onavoiraban donné devanr
les premiers Juges, inutilement
on a voulu employer
le testament du beaupere
,
& un écrit qu'il avoit fait
avant sa mort pour prouver
riitegicimice de l'enfant,
pour faire voir qu'il la tousjours
regardé comme tel,
qu'il la privé de sa succes-
, sion; on ya employé avec
aussipeu de succez les paroles
foudroyantes addressées
par le beaupere au gendre
un moment avant sa mort à
l'occasion de la renonciation
qu'on vouloir quise fit
entre eux: Je vous fAfidonne
en dieu, luy dit-il, mais je
ne vous pardonne point leton
que vous faites a ma famille
,
je vous adjourne devant Dieu,
il nous jugera jal/és.jè riay
,plus rien a vous dire. L'éloquence
& l'art des orateurs
,na pu faire d'impression sur
cesesprits su blimes,unique-.
mentattachez à l'observance
des loix
,
ils ontjudicieusement
separé tout ce qui
contre le droit public& la
saintetédu mariage , pouvoit
voit aller à faire douter de
lalegitimité de l'enfant; &
par un Arrest celebre ils ont
aÍfeuré l'estat de l'enfant,en
le déclarant légitimé.
Tout Paris, toute la pro-.
vince, attentifs à cette decision,
luy ont donné toutes
les loüanges qu'elle merireJ
& cette jeune, &belle
fille qui a prés de quatorze
ans, va estre un des riches
Mr L. V. du present qu'on
vient de me faire de sa part,
& je ne doute point que
tout le monde ne luy fçaJ
che autant de gré que moy
; de la peine qu'il a prise de
décacher tous les Articles
; principaux d'un procez extraordinaire
qui vient d'cc.
trejugéà un des premiers
tribunaux de Paris, pouren
composer(sans s'écarter de
la vérité) l'histoire qui suit
sur les pieces originales qui
en font la matiere.
Mademoiselle Nassulvaved
estnée dans une des
plus considerables provinces
du Royaume; ses parens
qui y tenoient les premiers
rangs dans la robe, & qui
possedoient de grands
biens, luy donnerent une
éducation conforme à sa
naissance, leurs foins ne furent
pas infructueux. Elle
eut a peine quinze ansquelle
fut l'admiration de toute
sa province, les plus honnestes
gens luy rendirent
des soins; sa beauté, sa ieunesse,
& son esprit au dessus
de son âgeluy attirerent
bien-tost une grosse cour. De tous ceux qui s'empresserent
à la servir, le
seul Emselad son parent fut
celuy qui trouva le secret de
la rendre sensible
,
le libre
accez qu'il avoit dans la
maison de son pere ,
luy
fit faire en peu de temps
un progrez considerable
sur son coeur. Les premierres
inclinations sont viol
lentes, on oublie facilement
le devoir pour ne suivre
que les mouvements
d'unepassion agreable.
La pauvre Demoiselle fen*
tit bien-tost avec douleur;
ce que Forcez de sa complaisance
alloit lyy couster;
lacrainte que sa hontene;
le:, decouvrist, l'accabla
d'horreur & de tristiesse,
elle pressa, mais inutilement
,Emcelad à la demander
en mariage, des raisons
de famille luy servirent de
prpérétetexxttee ppoouurr ll''eesnlooii~gnneerr de
cette proposition. Lnnnuii
autre parti se presenta, ce
fut Lezariu magistrat illustre,
riche &connu, particulierement
du pere de
Nassulvaved, quifutécoute
ir- favorablement.Le pere
sans consulter sa fille regle
avec luy, & les conditions
Ôc le temps du mariage.
Quel coup de foudre pour
cette tendre amante ! de
quels mouvements ne futelle
pointagitée quand elle
,~
apprit cette fatale resolution.
Il falloit renoncer
pour cousjours à la feule
r personne qui luy estoirchere,
s'engager avec une àurre
qu'elle ne pouvoit souffris,
& plus que cela, s'exporer
à l'accablante confusion de
voir découvrir parun
les fuites d'un commerce
qu'elle auroit fouhairé pouvoir
se cacker à elle-mesme.
Quellesituation 1 daps le
fort de sa douleur, elle chercha
de la consolation dans
les conseils de ses alTIies.,
elles luy proposerent ( entre
autres une Religieuse )
de se jetter aux pieds de son
pere, & deluy avoüer l'estac
où elle estoit
, pour ledé-
-
tourner du dessein qu'il
avoit formé, enÍÙite de ne
pas s'éloigner, au cas que Lezariu
fit quelques démarches
pour obtenir des
1. faveurs,& enfin de prendre
desremedes qu'elle s'offrit
de luy faire avoir pour
| empescher raccroiflement,
, ou plustost pour étouffer le
fruit de son premier amour;
; mais s'estanttrouvédes ob
tfaclesinfurmontablesàcecexpedient,
ktrifte Nassulvaved
se determinaà envo-
: yer chercher Emcelad,elle
,
l'informa de ce qui se pas-
> soit,Iuy peignitsontion
avec les traits les plus
vifs)le conjura de rompre l'engagement que l'on avoit
projetté, & quiestoit sur le
point de se conclure. Ses
prieres& ses larmes furent
sans effet,cet amant lasche,
infidele
, ou degousté, demeura
dans l'inaction, la
victime fut menée à l'aucel,
& le mariage célébré avec
Lezariu, sans qu'Emcelad
fit le moindre mouvement
pours'y opposer.
Les premiers jours de ce
mariage qui paroissoit si
convenable,& qui l'estoit
si peu, se passerent en apparence
asseztranquillement
; mais ce calme dura
peu, l'époux s'a pperceut du
malheur de son épouse
,
il
s'abandonna aux fureurs de
la plus noire jalousîe,& de
la plus violente colere, il la
força de luy avouër son crime,
luy fit nommer son seducteur,&
Tengageaàfaire
le mesme aveu devant son
pere, qu'il avoit fait venir
chez luy pour cela. Le pere
au desespoir porta son resfentimeot
jusqu'à vouloir
faire enfermer sa fille; mais
le mary qui prévit l'éclat
que cela feroit dans lemonde,
& que la honte en réjailliroit
sur luy, prit le par.
ty que tous les hommes sages
devroient prendre en
pareille occasion
;
il opposa
la puissance maritale à la
paternelle,pria son beaupere
d'écouffer son chagrin,
& exigea feulement de luy
que l'enfant qui naistroit
de son épouse ne sust point
confideré comme le sien;
on prit sur cela des temperaments,
oti convint quimmediatement
après la naissance
de l'enfant, il feroit
secretement exposé
, &
qu'on feroit ensorte qu'il
ignorast toujours son origine.
-
Le mary cependant qui
portoit tousjours dans le
coeur le trait de la jalousie
dont il avoit esté blessé
n'eut depuis , pour son epouse
qu'un extrêmeéloignement.
Il ne la voulut plus
voir pendant plus de six
mois, il fit plusieurs voyages
,
fut prendre les eaux,
trop heureux s'il eust peu
trouver celles de l'oubli.
Dans le septiéme mois du
mariage, sonépouse accoucha
d'une fille à une maison
de campagne de son
mary; l'enfant fut misaussitost
dans un panier, &por.
téàdix lieuësde là par un
laquais chez une nourrice
qui s'en chargea, &le fit
baptiser le lendemain fous
lenom de Catherine ccinime
un enfant trouvé; il ne
fut point parlé du nom hy
du pere ny de la mere , on
tut mesmejusqu'à celuy du
parain & de la maraine, ce
furent deux enfans de paysans
quien servirent.
Le pere de l'épouse, qui
par un principe de charité
n'avoit pu le déterminerà
faire exposer l'enfant,voulutCependant
rassurer Tépouxsur
la creance qu'il auroit
eue,s'ilavoit seeu qu'on
lefit secretement élever,il
luy écrivit le mesme jour des
couches qu'ilpouvoir se
tranquiliser
, que l'enfant
estoit mort en naissant.Cela
luy fut confirmé à son retour
par tous les domestiques,
& toutes les personnes
Iqui pouvoient avoir con-
»rçoifTance des couches; le
mary qui
,
le croyoit fince-
'; rement n'enparla plus depuis,
il fut trois ans sans s'en
»
informer.
Le beaupere cependant
qui vouloit empescher quon
ne sceut quel estoit l'ensant,
le fit pendant ces trois
annéespromenerde province
en province, de village
en village, & enfin il
le fit revenir dans le lieu de
sa naissance. Tout cela se
fit tousjours avec un exrréme
mystere ,& ce ne fut
qu'à des personnes de la lie
du peuple,&en dernier lieu
à des femmes de mauvâise
vie que son éducation fut
confiée.
L'épouse qui ne voyoit
point de retour sincere pour
elle dans son époux,avait
paffé tout ce temps dans
une langueur qui ne luy laisfoit
qu'une santé fort imparfaite,
le temps ne diminuoit
rien de la violence de
son chagrin, il sembloit au
contraire l'augmenter: elle
en fut si accablée qu'elle
tomba malade,& mourut
sans avoir lainea sonmary
aucun autre enfant de son
mariage
Elle estoit une des plus riches
heritieres de la province.
Lemary qui par cette
mort estoit obligé de restituer
une dote considerable
qu'il avoit touchée:, & qui
d'un autre cofté se voyoit
privé de l'esperance des successions
opulentes de son
beaupere ou de sa bellemere,
marqua un extrême chagrin
de n'avoir point d'enfants.
Quelques uns desesamis
à qui il en parla, s'eftonnerent
du motifqu'il donnoit
a son chagrin, luy dirent
qu'il avoit un enfant, luy
indiquèrent le lieu oùil estoit.
Transporté de joye, il
«
le
le fut prendre, &le remit
dans la maison paternelle,
oùilademeuré tranquillement
pendant plusieurs-années.
•-Le beaupere devoit à l'époux
une rente pour le restant
de la dote de son épouse
qu'il navoit pas payé, il
en estoit esheu quelques
années d'arrerages, l'époux
.-les luy demanda, & faute
de payement le-fît ensuite
ussigner pourestrecondarn
aie à les luy payer*^ :
Uninterest aussi leger Ici
broüilla ensemble;le beaupere
que loin de
riendevoir à son gendre,
c'estoit son gendre qui luy
devoir, que la mort de sa
femme sans enfants le met.
toit dans l'obligation de restituer
sa doc.
< - Cela fit une contestation
entre eux, qui fut portée
dans un tribunal de la province.
Le gendre surpris de
la prétention de son beaupere,
soustint qu'elle n'estoit
pas légitime, il dit fay
un enfant,il le representa
ce fut , celuy dont nous
avons parlé.) il futquestion
:en premier lieu de sçavoir
si cet enfant representé eC:
toit celuy dont l'épouse estoit
accouchée,& duquel on
avoit si fort enveloppé la
naissance dans les trois premieres
années de sa vie;
mais ce systeme ayant été
abandonné par le beaupere.
il se retrancha ensuite à dire
que l'enfant n'estoit pas legiume,
parce qu'il avoit
esle conceu d'un autre que
de l'époux deux mois avant
son mariage. Cela donna
lieu à des enquestesqui furentfaites
de part &d autre,
plusieurs tesmoins y déposerent,
les uns qu'avant le
mariage la femme leur avoit
confié les chagrins qus-t
elle avoit au sujet de sa grossesse,
quelle leur en avoit
nommél'auteur
,
qu'elle
leur avoit dit que c'estoit
Emcelad son parentqui restoit
; d'autres dirent luy
avoir ouy dire ce qui s'estoit
passéà ce sujet immédiatement
après son mariage entre
son pere, son époux &
elle, & d'autres enfin expliquèrent
ce qui est arrive
dans le temps & depuis les
couches. Dit ces differentes
depositions on prétendoit
tirer la consequence que
¡ l'enfant n'estoitpaslegitime.
L'époux n'avoit pour
asseurer l'estat de l'enfant
que sa naissance dans le septiéme
mois du mariage, &
la possession où elle estoit
de sonestat dans la maison
;apanternnelleédepeuisspl.usieurs
Les premiers Juges ne
trouvèrent pas que ce fust
assez pour l'époux de justi-
1.
fier que l'enfant estoit né
dans le septiéme mois du
mariage, ils luy ordonnerent
de faire preuve qu'il
estoit conceu dumariage &
pendant le mariage
,
c'esta
dire de luy & depuis son
mariage.
Une pareille preuve n'estoit
pas facile,elle ne pouvoit
estre ny demandée ny
ordonnée;l'époux a interjette
appel de ce jugement.
Le tribunal auguste où cet
appel a esté porté,est composé
de Magistrarstrès-éclairez,
& justes dispensateurs
de la justice. En vain
on y a renouvelle fous le
nom de tierces personnes le
systemedesupposicion qu'-
onavoiraban donné devanr
les premiers Juges, inutilement
on a voulu employer
le testament du beaupere
,
& un écrit qu'il avoit fait
avant sa mort pour prouver
riitegicimice de l'enfant,
pour faire voir qu'il la tousjours
regardé comme tel,
qu'il la privé de sa succes-
, sion; on ya employé avec
aussipeu de succez les paroles
foudroyantes addressées
par le beaupere au gendre
un moment avant sa mort à
l'occasion de la renonciation
qu'on vouloir quise fit
entre eux: Je vous fAfidonne
en dieu, luy dit-il, mais je
ne vous pardonne point leton
que vous faites a ma famille
,
je vous adjourne devant Dieu,
il nous jugera jal/és.jè riay
,plus rien a vous dire. L'éloquence
& l'art des orateurs
,na pu faire d'impression sur
cesesprits su blimes,unique-.
mentattachez à l'observance
des loix
,
ils ontjudicieusement
separé tout ce qui
contre le droit public& la
saintetédu mariage , pouvoit
voit aller à faire douter de
lalegitimité de l'enfant; &
par un Arrest celebre ils ont
aÍfeuré l'estat de l'enfant,en
le déclarant légitimé.
Tout Paris, toute la pro-.
vince, attentifs à cette decision,
luy ont donné toutes
les loüanges qu'elle merireJ
& cette jeune, &belle
fille qui a prés de quatorze
ans, va estre un des riches
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Résumé : Extrait curieux d'un Procès qui a esté depuis peu plaidé au grand Conseil, [titre d'après la table]
Le texte relate une histoire judiciaire complexe impliquant trois personnages principaux : Mademoiselle Nassulvaved, Emcelad, et Lezariu. Nassulvaved, issue d'une famille influente et riche d'une province du Royaume, attire l'attention de nombreux prétendants à l'âge de quinze ans. Emcelad, son parent, parvient à gagner son affection, mais elle se retrouve forcée d'épouser Lezariu, un magistrat riche et connu, à la demande de son père. Nassulvaved, désespérée, tente en vain de convaincre Emcelad de l'épouser. Après le mariage, Lezariu découvre la grossesse de Nassulvaved et, dans un accès de jalousie, la force à avouer sa relation avec Emcelad. Lezariu exige que l'enfant soit exposé et élevé secrètement. L'enfant, une fille nommée Catherine, est confiée à une nourrice et élevée dans le secret. Nassulvaved meurt quelques années plus tard sans avoir eu d'autres enfants. Lezariu, ignorant la survie de l'enfant, la récupère après avoir été informé de son existence. Une dispute éclate entre Lezariu et le père de Nassulvaved concernant la légitimité de l'enfant et la restitution de la dot. Le tribunal, après avoir examiné les témoignages et les preuves, déclare l'enfant légitime, confirmant ainsi son statut dans la famille.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 386-387
ESPAGNE
Début :
On a apris de Seville, que les Fêtes que le Corps de Ville devoit celebrer pour [...]
Mots clefs :
Course de Taureaux, Fête, Naissance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ESPAGNE
Espagne
ON a aprís deSeville , que íes Fêtes qui
le Corps de Ville dévoie célébrer pour
l'heureux Accouchement de la Reine, & la
Naissance de l'Infante Dona Maria Antoinet
te Ferdinante, commencèrent le n- Janvier
au matin , dans la Place de S. François , qu'on
avoit ornée de magnifiques Tapisseries , par la
Course de dix Taureaux qui furent attaquez
par des homme à pied , & par quelques
Cavaliers armez de lances ; les uns & les au
tres s'en acquittèrent avec beaucoup d'adresse;
Vers ies deux heuras aprés Midy , le Roy
& la Re ie , accompagnez du Prince & de la
Princeiï* des Aíturies , des Infants Don Car*
los-, Do i Philippe & Don Louis , & de l'In
fante Dona Marie Thérèse , se rendirent aux
balcons de l'Hôtel de Ville , suivies des OrTíciers
de leurs Maisons , des Dames de la Cour,
& escortées par les Gardes d-u Corps & fa
Compagnie des Hallebardiers de la Garde : les
Regimens des Gardes Espagnoles &Walones
ètoient en haye & fous les armes. Aussi tôt
que Leurs Majestez parurent on commença la
Course des Cannes, huic Quadrilles composées
chacune de quatre Cavalia.s.&r diílíng.uées par
la couleur des habits &par les Devises , étant
entrées dans la Place , se divisèrent en deux
Corps ou Escadrons, dont le premier avoit
four Parrain Don Rodolphe Acquaviva » &
autre le Marquis de Monte-Suertí. Le premier
Parrain étoit suivi de vingt-quatre Laquais
vêtus en Esclaves Negxes , avec des chaînes,
FEVRIER. i7$ o; îtij
des grelots & des menotes dorées , des brode
quins & des turbans. Le second avoit à sa
suite un pareil nombre de Laquais vêtus en
Hussarts , avec des bonnets d'hermine & des
sabres : outre cette fuite chaque Parrain avoit
encore huit Laquais de fa livrée très » bien'
montez , & cette Marche étoit terminée par/
seize chevaux de main des Cavaliers qui cemÎosorent
les Quadrilles , conduits par leurs'
aquais , de différentes livrées , & precedezí
les uns & les autres de Clairons & de Ti'rrw
baies.
Les Parrains ayant donné se lignai, les Qua
drilles coururent les Cannes avec beaucoup
d'agilité & d'adreiTe : ensuite les Cavaliers fi
rent faire l'exercice à leurs chevaux , & I»
Fête fut terminée ce jour-là par une Course
de sept Taureaux.
Le lendemain matin il y eut Une Course
d'onze Taureaux . & l'après-midy te Roy &
la Reine , les Princes & Princesses de la Fa
mille Roïile , étant retournez à l'Hôte! de"
Ville avec la même fuite que le jour précé
dent, Don Niçois de Toledo , Don Simondé
Legorbura , & Don Antoine de Bertendona
, tous trois natifs de Seville, & suivis
chacun de cinquante. Laquais de leur livrée ,
entrèrent dans la Place , où ils attaquèrent
Siuinze Taureaux avec tant de vivacité, que
è Roy voyant le danger où ils s'exposoient ,
leur ordonna de fe retirer ; cette seconde Fête
fut terminée par sept autres Taureaux, que de
jeunes gens du peuple actaquerent à piea.S.M.
a été si satisfaite de l'adrelìè des trois Cava
liers dont on vient de parler , qu'elle les a
fait ses Ecuyers , avec les mêmes appointemens
dont jouissent ceux qui font en charge"
depuis plusieurs années.
ON a aprís deSeville , que íes Fêtes qui
le Corps de Ville dévoie célébrer pour
l'heureux Accouchement de la Reine, & la
Naissance de l'Infante Dona Maria Antoinet
te Ferdinante, commencèrent le n- Janvier
au matin , dans la Place de S. François , qu'on
avoit ornée de magnifiques Tapisseries , par la
Course de dix Taureaux qui furent attaquez
par des homme à pied , & par quelques
Cavaliers armez de lances ; les uns & les au
tres s'en acquittèrent avec beaucoup d'adresse;
Vers ies deux heuras aprés Midy , le Roy
& la Re ie , accompagnez du Prince & de la
Princeiï* des Aíturies , des Infants Don Car*
los-, Do i Philippe & Don Louis , & de l'In
fante Dona Marie Thérèse , se rendirent aux
balcons de l'Hôtel de Ville , suivies des OrTíciers
de leurs Maisons , des Dames de la Cour,
& escortées par les Gardes d-u Corps & fa
Compagnie des Hallebardiers de la Garde : les
Regimens des Gardes Espagnoles &Walones
ètoient en haye & fous les armes. Aussi tôt
que Leurs Majestez parurent on commença la
Course des Cannes, huic Quadrilles composées
chacune de quatre Cavalia.s.&r diílíng.uées par
la couleur des habits &par les Devises , étant
entrées dans la Place , se divisèrent en deux
Corps ou Escadrons, dont le premier avoit
four Parrain Don Rodolphe Acquaviva » &
autre le Marquis de Monte-Suertí. Le premier
Parrain étoit suivi de vingt-quatre Laquais
vêtus en Esclaves Negxes , avec des chaînes,
FEVRIER. i7$ o; îtij
des grelots & des menotes dorées , des brode
quins & des turbans. Le second avoit à sa
suite un pareil nombre de Laquais vêtus en
Hussarts , avec des bonnets d'hermine & des
sabres : outre cette fuite chaque Parrain avoit
encore huit Laquais de fa livrée très » bien'
montez , & cette Marche étoit terminée par/
seize chevaux de main des Cavaliers qui cemÎosorent
les Quadrilles , conduits par leurs'
aquais , de différentes livrées , & precedezí
les uns & les autres de Clairons & de Ti'rrw
baies.
Les Parrains ayant donné se lignai, les Qua
drilles coururent les Cannes avec beaucoup
d'agilité & d'adreiTe : ensuite les Cavaliers fi
rent faire l'exercice à leurs chevaux , & I»
Fête fut terminée ce jour-là par une Course
de sept Taureaux.
Le lendemain matin il y eut Une Course
d'onze Taureaux . & l'après-midy te Roy &
la Reine , les Princes & Princesses de la Fa
mille Roïile , étant retournez à l'Hôte! de"
Ville avec la même fuite que le jour précé
dent, Don Niçois de Toledo , Don Simondé
Legorbura , & Don Antoine de Bertendona
, tous trois natifs de Seville, & suivis
chacun de cinquante. Laquais de leur livrée ,
entrèrent dans la Place , où ils attaquèrent
Siuinze Taureaux avec tant de vivacité, que
è Roy voyant le danger où ils s'exposoient ,
leur ordonna de fe retirer ; cette seconde Fête
fut terminée par sept autres Taureaux, que de
jeunes gens du peuple actaquerent à piea.S.M.
a été si satisfaite de l'adrelìè des trois Cava
liers dont on vient de parler , qu'elle les a
fait ses Ecuyers , avec les mêmes appointemens
dont jouissent ceux qui font en charge"
depuis plusieurs années.
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Résumé : ESPAGNE
En Espagne, des fêtes ont été organisées à Séville pour célébrer l'accouchement de la Reine et la naissance de l'Infante Dona Maria Antoinette Ferdinande. Les festivités ont débuté le 1er janvier sur la Place de S. François, décorée de tapisseries. La journée a commencé par une course de dix taureaux attaqués par des hommes à pied et des cavaliers armés de lances. L'après-midi, le Roi, la Reine et la famille royale se sont rendus aux balcons de l'Hôtel de Ville, escortés par les Gardes du Corps et la Compagnie des Hallebardiers. La course des cannes a suivi, impliquant huit quadrilles de cavaliers. Chaque quadrille était dirigé par un parrain et suivi de laquais et de chevaux de main. Après les courses des cannes, les cavaliers ont fait exercer leurs chevaux, et la fête s'est terminée par une course de sept taureaux. Le lendemain, une course de onze taureaux a eu lieu le matin, suivie d'une autre course l'après-midi. Trois cavaliers sévillans ont attaqué seize taureaux, impressionnant le Roi qui les a nommés écuyers. La fête s'est conclue par une course de sept taureaux attaqués par des jeunes du peuple.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 2090-2092
Mandement [titre d'après la table]
Début :
CHARLES, &c. Salut & benediction. Dieu vient de répandre, mes très-chers Fréres, [...]
Mots clefs :
Mandement, Roi, Naissance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mandement [titre d'après la table]
En confequence de la Lettre du Roy ;
M. l'Archevêque donna , le 1 Septembre,
un
SEPTEMBRE. 1730. 2091
an Mandement qui fut reçu avec un applaudiffement
univerfel . En voici la teneur
:
CHARLES , &c. Salut & benediction.
Dieu vient de répandre, mes très- chers Fréres,
une nouvelle Bénédiction fur le Mariage du Roy
& de nous donner un gage éclatant de fa protec
tion fur ce grand Royaume,
Par la Naiffance d'un fecond Fils de France
le premier Trône de l'Europe, ce Trône que tant
de Rois , felon le coeur de Dieu , ont rempli &
dont l'irreligion & l'erreur n'ont jamais approché
, eft environné d'une nouvelle gloire ; le repos
de l'Etat & le bonheur des Peuples font pleinement
affurés .
Dans un évenement fi heureux , le Roy pénétré
de fentimens de Foy & de Religion , reconnoit
tout ce qu'il doit à celui de qui il tient fa Couronne
, qui difpoſe à ſon gré du fort des Rois
qui affermit ou qui renverfe , comme il lui plaît
les Royaumes & les Empires ; & c'eft pour donà
toute la France des preuves de fa reconnoiffance
envers Dieu, que M. veut aſſiſter aux
Actions folemnelles de graces que nous allons
rendre conformément à fes intentions .
ner
A l'exemple du Roy , que les bienfaits de Dieu,
foient pour nous un motif de ranimer notre fer <
veur. Nous fervons un Dieu jaloux , qui felon la
parole de ( 1 ) Jefus - Chrift , exige beaucoup de
ceux à qui il a beaucoup donné. Marquons- lui
notre reconnoiffance en obfervant fes faintes Loix
avec une nouvelle fidélité , & en confervant une
jufte horreur de tout ce qui peut lui déplaire .
Les faveurs qu'il nous accorde & les graces
dont il nous prévient , font autant de titres pour
( 1 ) Luc. 12. v. 48e
2092 MERCURE
DE FRANCE
en demander & pour en obtenir de nouvelles, Joignons donc aujourd'hui avec confiance , felon
le précepte de ( 2 ) S. Paul , aux Actions de graces
, des fupplications
& des Prieres pour la confervation
d'un Roy qui nous gouverne avec tant
de fagefle & de juftice ; profitons de la paix & de
la tranquillité dont nous jouiffons fous fon Empire,
pour vivre felon la parole du même Apôtre
avec toute forte de piété.
Prions pour la fanté d'une Reine dont l'heureufe
fécondité doit être regardé comme le fruit
de fes vertus.
pen-
Demandons avec ferveur , rendons- nous dignes
par notre conduite que Dieu nous conferve les
formez
que
Princes qu'il nous a donnez ,afin
par les
dant long -tems par les inftructions &
exemples de leur augufte pere , la Religion trouve
en eux le précieux avantage dont elle jouit fous le
Regne de S. M. d'avoir dans le Souverain uu fidéle
deffenfeur de fes Autels , & un zélé protecteur
de l'Eglife de Jeſus-Chriſt.
Que celui des Princes qui doit être un jour
l'héritier de la Couronne , le foit auffi des vertus
du Roy ; qu'à l'exemple de S. M. il foit encore
plus touché d'être aimé des Peuples , comme leur
Pere , que de tous les hommages qu'ils lui rendent
comme à leur Maître; & que felon la parole
du S. Efprit ( 3 ) , il regarde la Juftice & la clémence,
comme la veritable force du Trône & fon
plus ferme appui. A ces cauſes , &c.
M. l'Archevêque donna , le 1 Septembre,
un
SEPTEMBRE. 1730. 2091
an Mandement qui fut reçu avec un applaudiffement
univerfel . En voici la teneur
:
CHARLES , &c. Salut & benediction.
Dieu vient de répandre, mes très- chers Fréres,
une nouvelle Bénédiction fur le Mariage du Roy
& de nous donner un gage éclatant de fa protec
tion fur ce grand Royaume,
Par la Naiffance d'un fecond Fils de France
le premier Trône de l'Europe, ce Trône que tant
de Rois , felon le coeur de Dieu , ont rempli &
dont l'irreligion & l'erreur n'ont jamais approché
, eft environné d'une nouvelle gloire ; le repos
de l'Etat & le bonheur des Peuples font pleinement
affurés .
Dans un évenement fi heureux , le Roy pénétré
de fentimens de Foy & de Religion , reconnoit
tout ce qu'il doit à celui de qui il tient fa Couronne
, qui difpoſe à ſon gré du fort des Rois
qui affermit ou qui renverfe , comme il lui plaît
les Royaumes & les Empires ; & c'eft pour donà
toute la France des preuves de fa reconnoiffance
envers Dieu, que M. veut aſſiſter aux
Actions folemnelles de graces que nous allons
rendre conformément à fes intentions .
ner
A l'exemple du Roy , que les bienfaits de Dieu,
foient pour nous un motif de ranimer notre fer <
veur. Nous fervons un Dieu jaloux , qui felon la
parole de ( 1 ) Jefus - Chrift , exige beaucoup de
ceux à qui il a beaucoup donné. Marquons- lui
notre reconnoiffance en obfervant fes faintes Loix
avec une nouvelle fidélité , & en confervant une
jufte horreur de tout ce qui peut lui déplaire .
Les faveurs qu'il nous accorde & les graces
dont il nous prévient , font autant de titres pour
( 1 ) Luc. 12. v. 48e
2092 MERCURE
DE FRANCE
en demander & pour en obtenir de nouvelles, Joignons donc aujourd'hui avec confiance , felon
le précepte de ( 2 ) S. Paul , aux Actions de graces
, des fupplications
& des Prieres pour la confervation
d'un Roy qui nous gouverne avec tant
de fagefle & de juftice ; profitons de la paix & de
la tranquillité dont nous jouiffons fous fon Empire,
pour vivre felon la parole du même Apôtre
avec toute forte de piété.
Prions pour la fanté d'une Reine dont l'heureufe
fécondité doit être regardé comme le fruit
de fes vertus.
pen-
Demandons avec ferveur , rendons- nous dignes
par notre conduite que Dieu nous conferve les
formez
que
Princes qu'il nous a donnez ,afin
par les
dant long -tems par les inftructions &
exemples de leur augufte pere , la Religion trouve
en eux le précieux avantage dont elle jouit fous le
Regne de S. M. d'avoir dans le Souverain uu fidéle
deffenfeur de fes Autels , & un zélé protecteur
de l'Eglife de Jeſus-Chriſt.
Que celui des Princes qui doit être un jour
l'héritier de la Couronne , le foit auffi des vertus
du Roy ; qu'à l'exemple de S. M. il foit encore
plus touché d'être aimé des Peuples , comme leur
Pere , que de tous les hommages qu'ils lui rendent
comme à leur Maître; & que felon la parole
du S. Efprit ( 3 ) , il regarde la Juftice & la clémence,
comme la veritable force du Trône & fon
plus ferme appui. A ces cauſes , &c.
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Résumé : Mandement [titre d'après la table]
Le 1er septembre 1730, l'Archevêque publia un mandement en réponse à une lettre du Roi, acclamé par tous. Ce mandement célébrait la naissance du second fils du Roi, renforçant ainsi la gloire et la stabilité du royaume. Le Roi exprima sa gratitude envers Dieu et décida de participer aux actions de grâce. L'Archevêque exhorta les fidèles à imiter le Roi en renouvelant leur dévotion et en respectant les lois divines. Il encouragea également à prier pour la santé de la Reine et pour la préservation du Roi, loué pour sa sagesse et sa justice. Le mandement invita à profiter de la paix pour vivre pieusement et à prier pour que les princes, éduqués par leur père, deviennent des défenseurs de la religion et des protecteurs de l'Église. Enfin, il souhaita que l'héritier du trône hérite des vertus du Roi et gouverne avec justice et clémence.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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14
p. 2092-2095
« Cette heureuse Naissance étant une suite des Benedictions que Dieu répand sur [...] »
Début :
Cette heureuse Naissance étant une suite des Benedictions que Dieu répand sur [...]
Mots clefs :
Dieu, Roi, Officiers, Archevêque, Naissance, Feux d'artifice
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Cette heureuse Naissance étant une suite des Benedictions que Dieu répand sur [...] »
Cette heureufe Naiffance étant une fuite
des Benedictions que Dieu répand fur
la Perfonne du Roy & fur l'Etats le
-( 2 ) Ad Tim. c. 2. v. 3. & 2,
( 3 ) Prov. 20. v. 28.
premier
SEPTEMBRE. 1730. 2098
mier foin de S.M. dans cet heureux évenement
, a été d'en rendre à Dieu de folemnelles
actions de graces ; & le 2 de ce
mois , le Roy fe rendit à Paris , pour af
fifter au Te Deum , qui devoit y être chanté,
fuivant les Ordres que l'Archevêque de
Paris en avoit reçus de S. M.
Le Roy partit du Château de Verfailles
vers les trois heures après midi , accompagné
, dans fon Caroffe , du Comte de
Clermont , du Prince de Conti , du Prince
de Dombes , du Comte d'Eu & du
Comte de Toulouſe. Les trois autres Caroffes
étoient remplis par les principaux
Officiers de Sa Maifon , & par les Seigneurs
de la Cour. Les détachemens des
Gendarmes , des Chevaux - Legers & les
deux Compagnies des Moufquetaires de
la Garde du Roy , & le détachement des
Gardes du Corps précédoient & fuivoient
le Caroffe de S. M. & le Vol du Cabinet
étoit immédiatement devant le Caroffe de
fuite.
Le Roy arriva vers les cinq heures à la
Porte S. Honoré , d'où S. M. fe rendit à
l'Eglife Métropolitaine.Les Regimens des
Gardes Françoifes & Suiffes étoient rangez
en haye , & préfentoient leurs Armes,
dans toutes les rues par lefquelles le Roy
paffa en allant à l'Eglife Métropolitaine ,
& en retournant à Verfailles.
I Le
2094 MERCURE DE FRANCE
Le Roy fut reçu à la porte de l'Eglife
par le Chapitre , à la tête duquel l'Archevêque
de Paris complimenta S. M. & lui
prefenta l'Eau benite. Le Roy entra dans
f'Eglife au bruit des Trompettes & des
Hautbois de la Chambre , étant précédé
du Grand Maître & du Maître des Cérémonies
, devant lefquels marchoient le
-Roy & les Hérauts d'Armes , & S. M.
alla fe placer au milieu du Choeur , fur un
Prie - Dieu , au deffus duquel étoit un Dais .
Le Duc d'Orleans , le Duc de Bourbon ,
le Comte de Charolois, le Comte de Cletmont
, le Prince de Conti , le Prince de
Dombes , le Comte d'Eu & le Comte de
Toulouſe , le Cardinal de Fleury , les Officiers
de la Couronne, les Principaux Of
ficiers de S.M. & les Seigneurs de la Cour
étoient placez auprès du Roy' pendant le
Te Deum , auquel le Chancelier de France
& le Garde des Sceaux affifterent, étant I
accompagnez de plufieurs Confeillers d'Etat
& Maîtres des Requêtes.
C
>
Le Clergé , le Parlement , la Chambre
des Comptes , la Cour des Aydes & lo
Corps de Ville ayant été invitez en la maniére
accoutumée y affifterent en Robes
de Ceremonie & à leurs places ordinaires
. L'Archevêque de Paris officia pontificalement
au Te Deum , qui fut chanté au
bruit d'une Salve generale des Canons de
la Baftille & de ceux de la Ville.
Lcs
SEPTEMBRE. 1730. 2095
Les Regimens des Gardes Françoiles &
Suiffes y répondirent par trois décharges
de leur Moufqueterie.
Après le Te Deum , le Roy vint faire fa
Priére devant l'Autel de la fainte Vierge ,
d'où S.M.fut reconduite à la porte de l'Eglife
, avec les cérémonies qui avoient été
obfervées à fon arrivée. Et S. M. étant remontée
en caroffe , partit pour retourner
à Verfalles avec le même Cortege qui
l'avoit accompagnée en entrant dans Paris.
Pendant la Marche , les Officiers des Gardes
du Corps qui étoient auprès du carof
fe du Roy,jetterent de l'argent au peuple,
qui par fes acclamations cherchoit à don
ner à S. M. des preuves de fon amour ,de
fon zele & de fa joye.
Le même jour,les Prevot des Marchands
& Echevins qui la furveille avoient fait
'lluminer l'Hôtel de Ville avec beaucoup
de magnificence , firent couler des Fontaines
de vin dans la place , & le foir ils firent
tirer un tres-beau Feu d'artifice, qui
fut précédé d'une décharge de Boëtes &
de Canons de la Ville . Il y eut en même
temps chez le Duc de Gévres , chez les
Prevôt des Marchands & Echevins , ainfi
que dans toutes les rues , des Illuminations
, des Feux & toutes autres marques
de réjouiffance poffible.
des Benedictions que Dieu répand fur
la Perfonne du Roy & fur l'Etats le
-( 2 ) Ad Tim. c. 2. v. 3. & 2,
( 3 ) Prov. 20. v. 28.
premier
SEPTEMBRE. 1730. 2098
mier foin de S.M. dans cet heureux évenement
, a été d'en rendre à Dieu de folemnelles
actions de graces ; & le 2 de ce
mois , le Roy fe rendit à Paris , pour af
fifter au Te Deum , qui devoit y être chanté,
fuivant les Ordres que l'Archevêque de
Paris en avoit reçus de S. M.
Le Roy partit du Château de Verfailles
vers les trois heures après midi , accompagné
, dans fon Caroffe , du Comte de
Clermont , du Prince de Conti , du Prince
de Dombes , du Comte d'Eu & du
Comte de Toulouſe. Les trois autres Caroffes
étoient remplis par les principaux
Officiers de Sa Maifon , & par les Seigneurs
de la Cour. Les détachemens des
Gendarmes , des Chevaux - Legers & les
deux Compagnies des Moufquetaires de
la Garde du Roy , & le détachement des
Gardes du Corps précédoient & fuivoient
le Caroffe de S. M. & le Vol du Cabinet
étoit immédiatement devant le Caroffe de
fuite.
Le Roy arriva vers les cinq heures à la
Porte S. Honoré , d'où S. M. fe rendit à
l'Eglife Métropolitaine.Les Regimens des
Gardes Françoifes & Suiffes étoient rangez
en haye , & préfentoient leurs Armes,
dans toutes les rues par lefquelles le Roy
paffa en allant à l'Eglife Métropolitaine ,
& en retournant à Verfailles.
I Le
2094 MERCURE DE FRANCE
Le Roy fut reçu à la porte de l'Eglife
par le Chapitre , à la tête duquel l'Archevêque
de Paris complimenta S. M. & lui
prefenta l'Eau benite. Le Roy entra dans
f'Eglife au bruit des Trompettes & des
Hautbois de la Chambre , étant précédé
du Grand Maître & du Maître des Cérémonies
, devant lefquels marchoient le
-Roy & les Hérauts d'Armes , & S. M.
alla fe placer au milieu du Choeur , fur un
Prie - Dieu , au deffus duquel étoit un Dais .
Le Duc d'Orleans , le Duc de Bourbon ,
le Comte de Charolois, le Comte de Cletmont
, le Prince de Conti , le Prince de
Dombes , le Comte d'Eu & le Comte de
Toulouſe , le Cardinal de Fleury , les Officiers
de la Couronne, les Principaux Of
ficiers de S.M. & les Seigneurs de la Cour
étoient placez auprès du Roy' pendant le
Te Deum , auquel le Chancelier de France
& le Garde des Sceaux affifterent, étant I
accompagnez de plufieurs Confeillers d'Etat
& Maîtres des Requêtes.
C
>
Le Clergé , le Parlement , la Chambre
des Comptes , la Cour des Aydes & lo
Corps de Ville ayant été invitez en la maniére
accoutumée y affifterent en Robes
de Ceremonie & à leurs places ordinaires
. L'Archevêque de Paris officia pontificalement
au Te Deum , qui fut chanté au
bruit d'une Salve generale des Canons de
la Baftille & de ceux de la Ville.
Lcs
SEPTEMBRE. 1730. 2095
Les Regimens des Gardes Françoiles &
Suiffes y répondirent par trois décharges
de leur Moufqueterie.
Après le Te Deum , le Roy vint faire fa
Priére devant l'Autel de la fainte Vierge ,
d'où S.M.fut reconduite à la porte de l'Eglife
, avec les cérémonies qui avoient été
obfervées à fon arrivée. Et S. M. étant remontée
en caroffe , partit pour retourner
à Verfalles avec le même Cortege qui
l'avoit accompagnée en entrant dans Paris.
Pendant la Marche , les Officiers des Gardes
du Corps qui étoient auprès du carof
fe du Roy,jetterent de l'argent au peuple,
qui par fes acclamations cherchoit à don
ner à S. M. des preuves de fon amour ,de
fon zele & de fa joye.
Le même jour,les Prevot des Marchands
& Echevins qui la furveille avoient fait
'lluminer l'Hôtel de Ville avec beaucoup
de magnificence , firent couler des Fontaines
de vin dans la place , & le foir ils firent
tirer un tres-beau Feu d'artifice, qui
fut précédé d'une décharge de Boëtes &
de Canons de la Ville . Il y eut en même
temps chez le Duc de Gévres , chez les
Prevôt des Marchands & Echevins , ainfi
que dans toutes les rues , des Illuminations
, des Feux & toutes autres marques
de réjouiffance poffible.
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Résumé : « Cette heureuse Naissance étant une suite des Benedictions que Dieu répand sur [...] »
Le 1er septembre 1730, le roi exprima sa gratitude à Dieu pour un événement heureux. Le 2 septembre, il se rendit à Paris pour assister au Te Deum à l'église métropolitaine. Accompagné de nobles et d'officiers, le cortège royal comprenait des gendarmes, des chevau-légers, des mousquetaires et des gardes du corps. À la porte Saint-Honoré, le roi fut accueilli par le chapitre de l'église, dirigé par l'archevêque de Paris, qui lui présenta l'eau bénite. Le Te Deum fut chanté au son des canons de la Bastille et de la ville, et des régiments des gardes françaises et suisses répondirent par des salves de mousqueterie. Après la cérémonie, le roi pria devant l'autel de la sainte Vierge et fut reconduit à la porte de l'église avec les mêmes honneurs. Pendant le retour à Versailles, les officiers des gardes du corps distribuèrent de l'argent au peuple. À Paris, les prévôts des marchands et échevins illuminèrent l'hôtel de ville, firent couler des fontaines de vin et tirèrent un feu d'artifice. Des illuminations et des feux furent également allumés chez le duc de Guèvres, chez les prévôts des marchands et échevins, ainsi que dans toutes les rues.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 2097-2099
POUR LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU. ODE.
Début :
L'Amour n'est plus Fils unique, [...]
Mots clefs :
Naissance du duc d'Anjou, Naissance, Enfants
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : POUR LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU. ODE.
POUR LA NAISSANCE
DE MONSEIGNEUR
LE DUC D'ANJOU.
O D E.
' Amour n'eft plus Fils unique ,
Et le fein chafte & fécond
D'une Reine magnifique ,
Nous enrichit d'un fecond :
Voyez comme il ſe préſente !
D'une douceur conquerante
Son Orient eft orné ;
Et fa grace fans feconde
"Pour affervir tout le monde
Ne céde qu'à fon Aîné.
I iij Jeux,
t
2098
MERCURE DE FRANCE
Jeux charmans , grace enfantine ,
Qui folâtrez dans fa Cour ;
Vous n'y prendrez point racine ,
Votre Regne n'a qu'un jour ;
De l'illuftre nom qu'il porte
La grandeur déja l'exhorte
A des exploits triomphants
Déja la gloire l'appelle ,
Enfants de Race immortelle
A peine font-ils Enfants.
C'eſt ainſi qu'en fon jeune âge
On nous apprend qu'Appollon
Fit l'effay de fon courage
Sur le monstrueux Pyrhon :
Au berceau le jeune Hercule
De fes hauts faits préambule
Deux Couleuvres étouffa ;
Et le beau fils de Sémélé
Comblé de gloire immortelle
Dans les Indes triompha.
$2
Déja fa tendre mémoire
Se remplit du nom d'Anjou ,
Son joüet , c'eft la victoire ,
Son épée eft fon bijou :
Il mêdite les louanges ,
Enveloppé dans fes langes ;
Dont
SEPTEMBRE. 1730. 209g
Dont il eft embaraffé ;
de Lunes
Et n'attend que peu
Pour venger les infortunes
Des Anjous du temps paffé.
Soyez unis , jeunes Freres ,
D'un noeud ferme autant que doux ;
Et choififfez d'Hémisphères ;
Tout l'Univers eft à vous.
Qu'en fi belle & noble chaîne ,
Jamais les Fréres d'Héleine ( 2 ),
N'entrent en comparaifon
›
Euffent ces fiers Argonautes
Fait des Princeffes plus hautes
Que leur Commandant Jafon.
O LOUIS , fage Monarque
A qui le Dieu de Sion
Donne une nouvelle marque
De fa Bénédiction
Daigne fa bonté fuprême
Propice à ce coeur qui l'aime
Et le fert fi volontiers ,
Vous donner en récompenſe
Autant de tels Fils de France ,
Que Jacob eut d'héritiers.
1 Rois de Naples & de Siciler
2 Caftor & Pollux.
DE MONSEIGNEUR
LE DUC D'ANJOU.
O D E.
' Amour n'eft plus Fils unique ,
Et le fein chafte & fécond
D'une Reine magnifique ,
Nous enrichit d'un fecond :
Voyez comme il ſe préſente !
D'une douceur conquerante
Son Orient eft orné ;
Et fa grace fans feconde
"Pour affervir tout le monde
Ne céde qu'à fon Aîné.
I iij Jeux,
t
2098
MERCURE DE FRANCE
Jeux charmans , grace enfantine ,
Qui folâtrez dans fa Cour ;
Vous n'y prendrez point racine ,
Votre Regne n'a qu'un jour ;
De l'illuftre nom qu'il porte
La grandeur déja l'exhorte
A des exploits triomphants
Déja la gloire l'appelle ,
Enfants de Race immortelle
A peine font-ils Enfants.
C'eſt ainſi qu'en fon jeune âge
On nous apprend qu'Appollon
Fit l'effay de fon courage
Sur le monstrueux Pyrhon :
Au berceau le jeune Hercule
De fes hauts faits préambule
Deux Couleuvres étouffa ;
Et le beau fils de Sémélé
Comblé de gloire immortelle
Dans les Indes triompha.
$2
Déja fa tendre mémoire
Se remplit du nom d'Anjou ,
Son joüet , c'eft la victoire ,
Son épée eft fon bijou :
Il mêdite les louanges ,
Enveloppé dans fes langes ;
Dont
SEPTEMBRE. 1730. 209g
Dont il eft embaraffé ;
de Lunes
Et n'attend que peu
Pour venger les infortunes
Des Anjous du temps paffé.
Soyez unis , jeunes Freres ,
D'un noeud ferme autant que doux ;
Et choififfez d'Hémisphères ;
Tout l'Univers eft à vous.
Qu'en fi belle & noble chaîne ,
Jamais les Fréres d'Héleine ( 2 ),
N'entrent en comparaifon
›
Euffent ces fiers Argonautes
Fait des Princeffes plus hautes
Que leur Commandant Jafon.
O LOUIS , fage Monarque
A qui le Dieu de Sion
Donne une nouvelle marque
De fa Bénédiction
Daigne fa bonté fuprême
Propice à ce coeur qui l'aime
Et le fert fi volontiers ,
Vous donner en récompenſe
Autant de tels Fils de France ,
Que Jacob eut d'héritiers.
1 Rois de Naples & de Siciler
2 Caftor & Pollux.
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Résumé : POUR LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU. ODE.
Le texte célèbre la naissance du duc d'Anjou en septembre 1730. Il met en avant l'amour de la reine, décrite comme magnifique et féconde, qui a donné un nouvel héritier. Cet enfant, par sa grâce et sa douceur, est destiné à des exploits triomphants et est déjà appelé par la gloire. Le duc d'Anjou est comparé à des figures mythologiques comme Apollon et Hercule, connus pour leur courage dès leur jeune âge. Il est présenté comme ayant une mémoire remplie du nom de sa lignée et une épée prête pour la victoire. Le texte encourage également l'union entre les jeunes frères et souhaite au roi Louis, sage monarque, d'avoir autant de fils de France que Jacob eut d'héritiers. Le duc d'Anjou est perçu comme un futur roi de Naples et de Sicile, digne des plus grandes louanges et des plus grands exploits.
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16
p. 2163-2168
LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU. ODE.
Début :
Favorable Fils de Latonne, [...]
Mots clefs :
Naissance, Duc d'Anjou, Ciel, Héros, Rois, Roi
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texteReconnaissance textuelle : LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU. ODE.
LA NAISSANCE
DE MONSEIGNEUR
LE DUC D'ANJOU.
O D E.
Favorable Fils de Latonne
Je ne t'invoque point en vain
Au vif éclat qui m'environne ,
Je voi , je fens ton feu divin.
J'entre dans un facré délire ;
Puiffe mon orgueilleufe Lyre
Enfanter ces accents vainqueurs ,
Qui naiffent d'un heureux génie ,
Et dont la fublime harmonie
Enchante & ravit tous les cours.
Quel aftre nouveau fur nos têtes
Répand fa brillante clarté ?
Quel Dieu ? de nos tranquilles fêtes ;
Redouble la folemnité !
Ce n'eft pas une vaine image ;
Chafte Lucine , cet ouvrage
Eft-il le fruit de ton fecours ?
Ainfi notre Reine féconde
Cij Par
2164 MERCURE DE FRANCE
Par toy du plus beau fang du monde
Promet d'éternifer le cours.
Mais , que dis-je ? Augufte Princeffe
Ces fabuleufes Déitez
'Aux yeux de ta haute fageffe
Ne font que folles vanitez.
Humble dans fa grandeur extrême
Ton coeur adore un Dieu fuprême ;
Qui confond tous les autres Dieux ;
Et dans cette faveur nouvelle ,
Reconnoit la fource immortelle
Des tréfors les plus précieux,
Déja de fa Toute- puiffance
Tu tiens cet aimable Dauphin ,
Ce Fils dont l'heureuſe naiffance
Eft un don parti de fa main.
Cette main encor libérale
Par un nouveau don qu'elle étale
Vient mettre le comble à tes voeux
Et prodigue elle fait connoître
Dans le Prince qui vient de naître ,
Combien le Ciel nous rend heureux,
Puiffe de ces précieux gages
Le nombre fans ceffe augmenter !
Puille
OCTOBRE. 1736. 2165
Puiffent nos plus parfaits hommages
: Les voir croître & les mériter
Qu'à jamais ton auguſte race ,
De fes ayeuls fuivant la trace ,
A l'Univers donne des Loix ;
Et qu'un jour la terre étonnée
Dans cette race fortunée ,
Compte fes Héros & les Rois !
Quel pompeux fpectacle m'enchante !
Prophanes , fuyez loin de moi ;
Une fainte horreur m'épouvante ,
Tous mes fens font faifis d'effroi.
Quel nouvel éclat ! Les Cieux s'ouvrent ;
A mes yeux les deftins découvrent
Leurs immuables jugemens ;
Dans l'avenir j'oſe les lire ,
Je voi , j'examine , j'admire
Les plus fameux Evenemens.
Dans les Climats où naît l'Aurore}
Je voi des Peuples confternez ;
Malgré l'orgueil qui les dévore
Ils font foumis & profternez.
Un Héros court brifer leur chaîne ,
Il quitte les bords de la Seine ,
Et va dans leur triſte ſéjour ;
Je yoi fon Char brillant de gloire ;
Diij De
2166 MERCURE DE FRANCE
Devant lui vole la Victoire ,
A fes côtez marche l'Amour.
Il vient ; & la guerre fanglante
'Auffi - tôt calme ſa fureur ;
La paix tranquille , bien -faifante
Des efprits diffipe l'erreur.
Cher Prince , à ta clemence extrême
On court offrir un Diadême
Que ta valeur a mérité ;
Ton nouveau Peuple qui t'admire ,
Goute les douceurs d'un Empire
Préférable à la liberté.
Ainfi la Divine Sageffe ,
Verra fes Décrets accomplis ;
LOUIS ; crois en ma fainte yvreffe ,
Le ciel couronnera ton Fils.
Déja ta piété folide ,
Et la vérité qui te guide
De ce fuccès font les garants
De ton fang la fource féconde
Doit à jamais peupler le monde
De Héros & de Conquerants.
D'un héritage légitime ,
L'Orphelin , libre poffeffeur ,
N'ek
OCTOBRE. 1730. 2167
N'eft plus la funefte victime ,
D'un tyrannique raviffeur.
Un Roy , que le ciel daigne inftruire ;
De l'erreur qui cherche à ſéduire¸
Fait triompher la véritéé ;
Qui que ru fois , tremble , coupable ;
Et voi ta perte inévitable
Dans la fouveraine équité .
Enfin le crime fanguinaire
Tombe fous les Loix abbatu
Je vois l'interêt mercènaire ,
Fuïr à l'afpect de la vertu.
L'impofture au maintien perfide ,
La fraude qui lui fert de guide ,
L'audace à l'oeil féditieux ,
Abbandonnent une contrée ,
Qui de la favorable Aftrée
Eft le féjour délicieux.
Peuples , fignalez votre zéle ,
Pour LOUIS , en cet heureux jour
Que tout icy lui renouvelle
Votre refpect & votre amour ;
Puiffe une ingénieuſe addreffe ,
Parmi la pompe & l'allegreffe
Vous prolonger un jour fi beau :
Que mille feux d'intelligence ,
C iiij
Imi2168
MERCURE DE FRANCE
Imitent , pendant fon abfence ,
L'éclat du celefte flambeau.
Qué la joye en tous lieux féconde ,
Enfante des plaifirs divers ;
Que les Cieux , que la Terre & l'Onde
Retentiffent de nos Concerts.
Que dans les Palais magnifiques ,
Que fous les toits les plus ruftiques
Les graces , les ris & les jeux
Soient déformais unis enſemble ;
Qu'un même bienfait les raffemble ;
Qu'à jamais il comble nos voeux.
Par M. de M. D. S. d'Aix
DE MONSEIGNEUR
LE DUC D'ANJOU.
O D E.
Favorable Fils de Latonne
Je ne t'invoque point en vain
Au vif éclat qui m'environne ,
Je voi , je fens ton feu divin.
J'entre dans un facré délire ;
Puiffe mon orgueilleufe Lyre
Enfanter ces accents vainqueurs ,
Qui naiffent d'un heureux génie ,
Et dont la fublime harmonie
Enchante & ravit tous les cours.
Quel aftre nouveau fur nos têtes
Répand fa brillante clarté ?
Quel Dieu ? de nos tranquilles fêtes ;
Redouble la folemnité !
Ce n'eft pas une vaine image ;
Chafte Lucine , cet ouvrage
Eft-il le fruit de ton fecours ?
Ainfi notre Reine féconde
Cij Par
2164 MERCURE DE FRANCE
Par toy du plus beau fang du monde
Promet d'éternifer le cours.
Mais , que dis-je ? Augufte Princeffe
Ces fabuleufes Déitez
'Aux yeux de ta haute fageffe
Ne font que folles vanitez.
Humble dans fa grandeur extrême
Ton coeur adore un Dieu fuprême ;
Qui confond tous les autres Dieux ;
Et dans cette faveur nouvelle ,
Reconnoit la fource immortelle
Des tréfors les plus précieux,
Déja de fa Toute- puiffance
Tu tiens cet aimable Dauphin ,
Ce Fils dont l'heureuſe naiffance
Eft un don parti de fa main.
Cette main encor libérale
Par un nouveau don qu'elle étale
Vient mettre le comble à tes voeux
Et prodigue elle fait connoître
Dans le Prince qui vient de naître ,
Combien le Ciel nous rend heureux,
Puiffe de ces précieux gages
Le nombre fans ceffe augmenter !
Puille
OCTOBRE. 1736. 2165
Puiffent nos plus parfaits hommages
: Les voir croître & les mériter
Qu'à jamais ton auguſte race ,
De fes ayeuls fuivant la trace ,
A l'Univers donne des Loix ;
Et qu'un jour la terre étonnée
Dans cette race fortunée ,
Compte fes Héros & les Rois !
Quel pompeux fpectacle m'enchante !
Prophanes , fuyez loin de moi ;
Une fainte horreur m'épouvante ,
Tous mes fens font faifis d'effroi.
Quel nouvel éclat ! Les Cieux s'ouvrent ;
A mes yeux les deftins découvrent
Leurs immuables jugemens ;
Dans l'avenir j'oſe les lire ,
Je voi , j'examine , j'admire
Les plus fameux Evenemens.
Dans les Climats où naît l'Aurore}
Je voi des Peuples confternez ;
Malgré l'orgueil qui les dévore
Ils font foumis & profternez.
Un Héros court brifer leur chaîne ,
Il quitte les bords de la Seine ,
Et va dans leur triſte ſéjour ;
Je yoi fon Char brillant de gloire ;
Diij De
2166 MERCURE DE FRANCE
Devant lui vole la Victoire ,
A fes côtez marche l'Amour.
Il vient ; & la guerre fanglante
'Auffi - tôt calme ſa fureur ;
La paix tranquille , bien -faifante
Des efprits diffipe l'erreur.
Cher Prince , à ta clemence extrême
On court offrir un Diadême
Que ta valeur a mérité ;
Ton nouveau Peuple qui t'admire ,
Goute les douceurs d'un Empire
Préférable à la liberté.
Ainfi la Divine Sageffe ,
Verra fes Décrets accomplis ;
LOUIS ; crois en ma fainte yvreffe ,
Le ciel couronnera ton Fils.
Déja ta piété folide ,
Et la vérité qui te guide
De ce fuccès font les garants
De ton fang la fource féconde
Doit à jamais peupler le monde
De Héros & de Conquerants.
D'un héritage légitime ,
L'Orphelin , libre poffeffeur ,
N'ek
OCTOBRE. 1730. 2167
N'eft plus la funefte victime ,
D'un tyrannique raviffeur.
Un Roy , que le ciel daigne inftruire ;
De l'erreur qui cherche à ſéduire¸
Fait triompher la véritéé ;
Qui que ru fois , tremble , coupable ;
Et voi ta perte inévitable
Dans la fouveraine équité .
Enfin le crime fanguinaire
Tombe fous les Loix abbatu
Je vois l'interêt mercènaire ,
Fuïr à l'afpect de la vertu.
L'impofture au maintien perfide ,
La fraude qui lui fert de guide ,
L'audace à l'oeil féditieux ,
Abbandonnent une contrée ,
Qui de la favorable Aftrée
Eft le féjour délicieux.
Peuples , fignalez votre zéle ,
Pour LOUIS , en cet heureux jour
Que tout icy lui renouvelle
Votre refpect & votre amour ;
Puiffe une ingénieuſe addreffe ,
Parmi la pompe & l'allegreffe
Vous prolonger un jour fi beau :
Que mille feux d'intelligence ,
C iiij
Imi2168
MERCURE DE FRANCE
Imitent , pendant fon abfence ,
L'éclat du celefte flambeau.
Qué la joye en tous lieux féconde ,
Enfante des plaifirs divers ;
Que les Cieux , que la Terre & l'Onde
Retentiffent de nos Concerts.
Que dans les Palais magnifiques ,
Que fous les toits les plus ruftiques
Les graces , les ris & les jeux
Soient déformais unis enſemble ;
Qu'un même bienfait les raffemble ;
Qu'à jamais il comble nos voeux.
Par M. de M. D. S. d'Aix
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Résumé : LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU. ODE.
Le texte célèbre la naissance du duc d'Anjou, fils de la reine de France, survenue en octobre 1736. Il commence par une invocation à la muse pour inspirer des vers dignes de cet événement. Le poème exalte la naissance du prince, perçue comme un don divin, et souhaite une descendance nombreuse et glorieuse pour la famille royale. Il prophétise également des conquêtes futures pour un héros qui apportera la paix et sera adoré par son peuple. Le texte loue la piété et la vérité du roi Louis, garantissant ainsi le succès de sa lignée. Il se termine par des vœux de joie et de célébrations pour marquer cet heureux événement, appelant à des réjouissances dans tout le royaume.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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17
p. 2417-2419
ODE SUR LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU.
Début :
Approchez, Enfans de la Lyre ; [...]
Mots clefs :
Naissance, Duc d'Anjou, Roi, Monarque, France, Dieu
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ODE SUR LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU.
ODE
SUR LA NAISSANCE
DE MONSEIGNEUR
LE DUC D'ANJOU
APprochez , Enfans de la Lyre ;
Uniffez vos fons à mon chant :
Un Dieu redoutable m'infpire
D'annoncer un Héros naiffant.
Lucine à qui la France eſt chere ,
Au préfent qu'elle vient de faire
Ajoute de nouveaux bienfaits.
Оные
2418 MERCURE DE FRANCE
Que l'Anjou treffaille de joye ;
Un Prince que le Ciel envoye
Comble en ce jour tous les fouhairs
Agde qu'on vit fi plein de zele
Pour le premier né de LOUIS ,
Que ton ardeur ſe renouvelle
A l'afpect de fon fecond fils.
L'un précieux fruit de nos larmes
Vint au plus fort de nos allarmes
Calmer notre jufte frayeur.
Digne objet de notre tendreffe ,
Celui- ci naît dans l'allegreffe
Pour confirmer notre bonheur.
Pour le Monarque , pour le Trône ,
Qu'avons-nous à craindre aujourd'hui a
De fon Sceptre , de ſa Couronne
Les Dieux font eux - mêmes l'appui.
C'est par leur faveur falutaire
Que LOUIS eft devenu pere
Du Dauphin , l'objet de nos voeux
Si fon augufte Race augmente ,
Peuple , c'eft à leur main paillante
Que tu dois ce fæccès heureur.
Grand Dieu , ce que ta main commence ;
Elle feule peut l'achever ;
Tu
NOVEMBRE. 1730. 2419
Tu donnes des Rois à la France ;
C'eft à toi de les conferver.
Fais croître ces Enfans aimables
Qui fur des Peuples redoutables
Feront un jour regner tes Loix :
Et dès leur plus tendre jeuneffe
Infpire -leur cette fageffe
Qui feule forme les grands Rois.
L'Abbé L.. d'Agde:
SUR LA NAISSANCE
DE MONSEIGNEUR
LE DUC D'ANJOU
APprochez , Enfans de la Lyre ;
Uniffez vos fons à mon chant :
Un Dieu redoutable m'infpire
D'annoncer un Héros naiffant.
Lucine à qui la France eſt chere ,
Au préfent qu'elle vient de faire
Ajoute de nouveaux bienfaits.
Оные
2418 MERCURE DE FRANCE
Que l'Anjou treffaille de joye ;
Un Prince que le Ciel envoye
Comble en ce jour tous les fouhairs
Agde qu'on vit fi plein de zele
Pour le premier né de LOUIS ,
Que ton ardeur ſe renouvelle
A l'afpect de fon fecond fils.
L'un précieux fruit de nos larmes
Vint au plus fort de nos allarmes
Calmer notre jufte frayeur.
Digne objet de notre tendreffe ,
Celui- ci naît dans l'allegreffe
Pour confirmer notre bonheur.
Pour le Monarque , pour le Trône ,
Qu'avons-nous à craindre aujourd'hui a
De fon Sceptre , de ſa Couronne
Les Dieux font eux - mêmes l'appui.
C'est par leur faveur falutaire
Que LOUIS eft devenu pere
Du Dauphin , l'objet de nos voeux
Si fon augufte Race augmente ,
Peuple , c'eft à leur main paillante
Que tu dois ce fæccès heureur.
Grand Dieu , ce que ta main commence ;
Elle feule peut l'achever ;
Tu
NOVEMBRE. 1730. 2419
Tu donnes des Rois à la France ;
C'eft à toi de les conferver.
Fais croître ces Enfans aimables
Qui fur des Peuples redoutables
Feront un jour regner tes Loix :
Et dès leur plus tendre jeuneffe
Infpire -leur cette fageffe
Qui feule forme les grands Rois.
L'Abbé L.. d'Agde:
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Résumé : ODE SUR LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU.
L'ode célèbre la naissance du Duc d'Anjou, fils du roi Louis, en novembre 1730. L'auteur, l'abbé d'Agde, invite les poètes à proclamer cet événement joyeux. La France est bénie par cette naissance, qui apporte joie et sécurité. Le Duc d'Anjou est décrit comme un prince céleste destiné à combler les désirs et apaiser les craintes. Sa venue est perçue comme un signe de bonheur et de continuité pour le trône. Les dieux sont appelés à protéger et guider le jeune prince, afin qu'il devienne un roi sage et redoutable, capable de régner sur la France et de faire respecter les lois divines.
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18
p. [2695]-2700
ODE SUR LA NAISSANCE DE LA SAINTE VIERGE.
Début :
Qu'elle est cette brillante Aurore, [...]
Mots clefs :
Aurore, Sainte Vierge, Rubis, Splendeur, Cieux, Anne, Trinité, Naissance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ODE SUR LA NAISSANCE DE LA SAINTE VIERGE.
ODE
SUR LA NAISSANCE
DE LA SAINTE VIERGE.
Q
U'elle est cette brillante Aurore ,
Qui vient arrêter mes regards ?
Dans les Airs que sa lueur dore
Je ne vois que Rubis épars.
Vois-je l'Etoile matiniere ?
Elle paroît sur la barriere ,
Et brille de cent feux divers ;
1. Vol A i Le
2696 MERCURE DE FRANCE
La vive splendeur qu'elle entraîne ,
Semble annoncer la Souveraine ,
Des Cieux, de la Terre , et des Mers
Quel charme ! est - ce une vaine image
Mortels , j'abandonne ces lieux;
Un chant mélodieux m'engage ,
A prendre un essor vers les Cieux,
Me voici porté dans les nuës ;
Ah ! de Terres inconnuës ?
que
Je passe , je franchis les Mers ;
Compagnon d'une Troupe aîlée ,
Je plane sur la Galilée ;
Je plonge , j'ay quitté les Airs.
*
Que yeut ce Choeur d'Esprits Celestes ,
Ministres Saints du Dieu de paix ,
Qui respectueux
et modestes ,
D'Anne environnent le Palais ?
Le Dieu , qui ses oeuvres contemple ,
A-t'il fait choix d'un nouveau Temple ,
Qu'il remplit de sa Majesté ?
Oui , des Lys l'odeur ravissante ,
M'assure déja qu'Anne enfante
Le Temple de la Trinité,
1. Vol
C'est
DECEMBRE . 1731. 2697
C'est donc vous , tant de fois prédite ,
'Auguste Fille d'un saint Roy ,
Du Roy des Rois la Favorite,
Des Enfers la rage et l'effroy;
Espoir , amour de tous les âges ,
Des Peuples , des Rois et des Sages ,
Par ma voix recevez sa foy ;
Purs Esprits , souffrez ma presence ;
Les fruits d'une telle Naissance ,
Ne sont pas pour vous , mais
讚
pour
Anges du Ciel , Troupe fidelle ,
Zelez Champions du Très- Haut
Qui du Chefdu Parti rebelle
Jadis repoussâtes l'assaut ,
Honorez cette Chair naissante ;
Révérez cette Arche vivante ,
Où le Saint des Saints entrera ;
Celui qui commande aux tempêtes
Et qui fait tonner sur nos têtes ,
Dans son sein se reposera.
moit
Grand Dieu , que de profond's Misteres
Dévoile un saint ravissement !
Exempt des sentimens vulgaires ,
Que vois-je sur le Firmament-
I. Vol.
A iij Je
2698 MERCURE DE FRANCE
Je prôneray seul Adorable ,
L'Alliance à jamais durable ,
Que tu fais avec les Mortels :
Peuples heureux , venez entendre ,
Quels trésors le Ciel va répandre ,
Sur la Terre et sur vos Autels.
M
L'oeil ne l'a vûë : eh ! qui l'a peinte,
La Majesté du Dieu vivant ?
Gloire , splendeur , terreur et crainte ,
Peignent mal son Trône éclatant.
Qu'elle est brillante cette lame "
Empreinte d'un Burin de flâme ,
Au sein de la Divinité ?
Son Image me représente ,
Qu'après quatre mille ans d'attente
Israël sera visité.
Sacrée Image es- tu fidelle ?
Celui qui meut l'Astre du jour ,
D'une Ambassade solemnelle ,
Honore-t'il l'humain séjour ?
Le divin Messager s'envole ;
Il a de son Dieu la parole ,
D'une Vierge il veut l'agrément ,
Du haut de la Voute azurée ,
I. Vol. L'auguste
DECEMBRE . 1731. 2699
L'auguste Cour de l'Empirée ,
En suspens , le voit et l'attend .
Salut , ô divine allegresse !
L'état de l'homme est immortel ,
Marie a rempli la promesse ,
Qu'autrefois nous fit l'Eternel.
Mais, ô l'inéfable Mistere !
Mere de son Dieu , Vierge et Mere ,
C'est ton sort , Fleur de chasteté ;
Non , non , le Soleil de Justice ,
Aux chastes desirs si propice ,
Ne peut souiller ta pureté.
*
Quel bruit , quel siflement horrible ,
Sort de l'abîme tenebreux ?
Quel Monstre , quel Serpent horrible ,
Fait mugir ces cachots affreux ?
#
Roy du Ciel , lance ton Tonnerres
Ce Dragon ébranle la Terre ,
La terreur saisit les Humains ;
Mais non , le doux fruit de Maric ,
Brise la tête à la Furie ;
Calmons- nous , ses efforts sont vains
味
Sacrez Flancs d'une Vierge pure ,
I. Vol. A iiij
Dont
2700 MERCURE DE FRANCE
Dont l'heureuse fécondité ,
·
Eleve l'humaine Nature
Au rang de la Divinité ;
C'est par vous que l'homme rebelle ,
Rentre en ses droits , devient fidelle ,
Son Dieu présent reçoit ses voeux ;
Quelle bonté ! si le coupable ,
Eût pû n'être pas miserable ,
Il auroit été moins heureux .
Par M. Julien , fuge de Montblanc
SUR LA NAISSANCE
DE LA SAINTE VIERGE.
Q
U'elle est cette brillante Aurore ,
Qui vient arrêter mes regards ?
Dans les Airs que sa lueur dore
Je ne vois que Rubis épars.
Vois-je l'Etoile matiniere ?
Elle paroît sur la barriere ,
Et brille de cent feux divers ;
1. Vol A i Le
2696 MERCURE DE FRANCE
La vive splendeur qu'elle entraîne ,
Semble annoncer la Souveraine ,
Des Cieux, de la Terre , et des Mers
Quel charme ! est - ce une vaine image
Mortels , j'abandonne ces lieux;
Un chant mélodieux m'engage ,
A prendre un essor vers les Cieux,
Me voici porté dans les nuës ;
Ah ! de Terres inconnuës ?
que
Je passe , je franchis les Mers ;
Compagnon d'une Troupe aîlée ,
Je plane sur la Galilée ;
Je plonge , j'ay quitté les Airs.
*
Que yeut ce Choeur d'Esprits Celestes ,
Ministres Saints du Dieu de paix ,
Qui respectueux
et modestes ,
D'Anne environnent le Palais ?
Le Dieu , qui ses oeuvres contemple ,
A-t'il fait choix d'un nouveau Temple ,
Qu'il remplit de sa Majesté ?
Oui , des Lys l'odeur ravissante ,
M'assure déja qu'Anne enfante
Le Temple de la Trinité,
1. Vol
C'est
DECEMBRE . 1731. 2697
C'est donc vous , tant de fois prédite ,
'Auguste Fille d'un saint Roy ,
Du Roy des Rois la Favorite,
Des Enfers la rage et l'effroy;
Espoir , amour de tous les âges ,
Des Peuples , des Rois et des Sages ,
Par ma voix recevez sa foy ;
Purs Esprits , souffrez ma presence ;
Les fruits d'une telle Naissance ,
Ne sont pas pour vous , mais
讚
pour
Anges du Ciel , Troupe fidelle ,
Zelez Champions du Très- Haut
Qui du Chefdu Parti rebelle
Jadis repoussâtes l'assaut ,
Honorez cette Chair naissante ;
Révérez cette Arche vivante ,
Où le Saint des Saints entrera ;
Celui qui commande aux tempêtes
Et qui fait tonner sur nos têtes ,
Dans son sein se reposera.
moit
Grand Dieu , que de profond's Misteres
Dévoile un saint ravissement !
Exempt des sentimens vulgaires ,
Que vois-je sur le Firmament-
I. Vol.
A iij Je
2698 MERCURE DE FRANCE
Je prôneray seul Adorable ,
L'Alliance à jamais durable ,
Que tu fais avec les Mortels :
Peuples heureux , venez entendre ,
Quels trésors le Ciel va répandre ,
Sur la Terre et sur vos Autels.
M
L'oeil ne l'a vûë : eh ! qui l'a peinte,
La Majesté du Dieu vivant ?
Gloire , splendeur , terreur et crainte ,
Peignent mal son Trône éclatant.
Qu'elle est brillante cette lame "
Empreinte d'un Burin de flâme ,
Au sein de la Divinité ?
Son Image me représente ,
Qu'après quatre mille ans d'attente
Israël sera visité.
Sacrée Image es- tu fidelle ?
Celui qui meut l'Astre du jour ,
D'une Ambassade solemnelle ,
Honore-t'il l'humain séjour ?
Le divin Messager s'envole ;
Il a de son Dieu la parole ,
D'une Vierge il veut l'agrément ,
Du haut de la Voute azurée ,
I. Vol. L'auguste
DECEMBRE . 1731. 2699
L'auguste Cour de l'Empirée ,
En suspens , le voit et l'attend .
Salut , ô divine allegresse !
L'état de l'homme est immortel ,
Marie a rempli la promesse ,
Qu'autrefois nous fit l'Eternel.
Mais, ô l'inéfable Mistere !
Mere de son Dieu , Vierge et Mere ,
C'est ton sort , Fleur de chasteté ;
Non , non , le Soleil de Justice ,
Aux chastes desirs si propice ,
Ne peut souiller ta pureté.
*
Quel bruit , quel siflement horrible ,
Sort de l'abîme tenebreux ?
Quel Monstre , quel Serpent horrible ,
Fait mugir ces cachots affreux ?
#
Roy du Ciel , lance ton Tonnerres
Ce Dragon ébranle la Terre ,
La terreur saisit les Humains ;
Mais non , le doux fruit de Maric ,
Brise la tête à la Furie ;
Calmons- nous , ses efforts sont vains
味
Sacrez Flancs d'une Vierge pure ,
I. Vol. A iiij
Dont
2700 MERCURE DE FRANCE
Dont l'heureuse fécondité ,
·
Eleve l'humaine Nature
Au rang de la Divinité ;
C'est par vous que l'homme rebelle ,
Rentre en ses droits , devient fidelle ,
Son Dieu présent reçoit ses voeux ;
Quelle bonté ! si le coupable ,
Eût pû n'être pas miserable ,
Il auroit été moins heureux .
Par M. Julien , fuge de Montblanc
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Résumé : ODE SUR LA NAISSANCE DE LA SAINTE VIERGE.
L''Ode sur la naissance de la Sainte Vierge' décrit la naissance de Marie comme un événement céleste et miraculeux. L'auteur commence par une vision d'une brillante aurore et d'une étoile matinière annonçant la venue d'une souveraine des Cieux, de la Terre et des Mers. Transporté dans les airs, il observe un chœur d'esprits célestes autour du palais d'Anne, la mère de Marie. Le poème célèbre Marie comme la fille prédite et favorite du Roi des Rois, espérance de tous les âges. Il mentionne les mystères divins et l'alliance éternelle entre Dieu et les mortels. Le texte évoque la majesté de Dieu et la promesse faite à Israël. Il se termine par la description de Marie comme la mère de Dieu, vierge et pure, et par la victoire sur les forces du mal, symbolisées par un monstre ou un serpent. La naissance de Marie est présentée comme un événement qui élève l'humanité et permet à l'homme de retrouver sa fidélité à Dieu.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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19
p. 51-59
DISCOURS, sur l'obligation qu'il y a pour les Femmes, de nourrir elles-mêmes leurs enfans.
Début :
LA Comtesse de *** étant heureusement accouchée d'un Garçon, [...]
Mots clefs :
Mère et enfant, Nourrir un enfant, Naissance, Lait, Sang, Nourrice, Lait de brebis
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DISCOURS, sur l'obligation qu'il y a pour les Femmes, de nourrir elles-mêmes leurs enfans.
DISCOURS, sur l'obligation qu'il y as
pour les Femmes, de nourrir elles- mêmes
leurs enfans.
LA
A Comtesse de *** étant heureuse
'ment accouchée d'un Garçon , M.
de *** son cousin germain en ayant
apris la nouvelle , monta aussi- tôt à
son appartement , après lui avoir fait
les complimens ordinaires , il se rendit
dans la Chambre où toute la famille
étoit assemblée pour la féciliter sur cette
agréable naissance : Je viens , dit - il , en
entrant , de laisser Madame dans une
tranquilité et une santé qui nous promet
les plus heureuses suites de son accouchement..
52 MERCURE DE FRANCE.
ment. Je ne doute point , ajouta - t - ik;
qu'elle ne nourrisse son fils de son propre lait.
Il alloit continuer , mais la mere de la
Comtesse qui se trouvoit présente , l'interrompit ; et d'un ton , mêlé de colere et
de raillerie , dit qu'elle se donneroit bien
de garde de suivre ses leçons ; qu'elle
sçauroit ménager la délicatesse de sa fille,
et donner promptement une Nourrice à
l'Enfant ; pour ne point ajouter aux tra
vaux de l'accouchement , l'étrange et pénible fonction de nourrir elle- même le
fils qu'elle venoit de mettre au monde.
De grace , Madame , repliqua M✶✶* * *
trouvez bon qu'elle ne soit pas mere à
demi ; car enfin quelle seroit cette espece de maternité imparfaite ; et si j'ose le
dire, manquée , d'enfanter un fils et de le
rejetter aussitôt loin d'elle , d'avoir
nourri dans ses entrailles du plus pur de
son sang je ne sçai quel enfant qu'elle
ne voyoit point , qu'elle ne connoissoit
point , et de cesser de le nourrir du lait
que la nature lui donne si liberalement à
ce dessein , dès qu'elle le voit né ,
dès
qu'il commence même à le demander par
ees cris touchants qui implorent si vivement le secours de sa mere. Eh quoi !
pensez - vous donc que ce ne soit que
pour
JANVIER. 1732. 53.
par
و
pour un vain ornement , ou pour l'art
dangereux de plaire , et non pour nourrir leurs enfans , que la nature ait donné
les mammelles aux femmes; et cependant
par un étrange renversement la pluspart
des meres s'empressent à tarir et à éteindre cette source sainte ; cette nourrice
précieuse du genre humain , aux hazards
des maux qu'un lait ainsi détourné , et
là corrompu , ne leur cause que trop
souvent. Aveugles de sacrifier à l'opinion et à une vaine délicatesse leurs interêts et
leurs devoirs les plus pressans? Leur faute est-elle donc bien differente du crime de
ces meres dénaturées , qui par de cruels
artifices , font avorter l'enfant que la nature a créé dans leur sein , de peur que
le poids de la grossesse , et le travail de
l'enfantement n'alterent la beauté et les
graces d'un corps dont elles sont idolâtres. Quesi c'est une action digne de l'éxécration publique d'aller chercher une
créature vivante et raisonnable pour lui
porter le coup de la mort , jusques dans
les mains même de la nature qui s'empressoit de l'animer et de la former, qu'il
s'en faut peu qu'il ne soit aussi criminel de
priver un enfant déja né, déja devenu son
propre fils , d'un aliment dont la nature
Pavoit mis en possession , qu'elle a fait
pour
54 MERCURE DE FRANCE
pour lui , et sur lequel il a des droits
qu'on ne peut lui ravir sans injustice et
sans cruauté !
Mais , dit - on , pourvû que l'enfant
vive et soit nourri , qu'importe de quel
lait il le soit. O vous , qui me faites cette
objection , si vous sçavez si peu démêler
les vrais sentimens de la niture ; croyezvous donc aussi , qu'il n'importe dans le
sein de quelle mere, et de quel sang un
enfant ait été engendré ; non sans doute.
Mais ce sang qui par l'action des esprits
et par une douce chaleur , a blanchi les
mammelles. N'est il pas toujours le même
qu'il étoit dans les entrailles de la mere ,
et c'est icy que l'adresse de la nature est
bien remarquable, car après que ce sang,
mis en œuvre par ses adroites mains , a
perfectionné le corps de l'enfant , lorsque
le temps de l'accouchement approche ,
n'ayant plus rien à faire en bas , il s'élevé
en haut, se filtre et se place dans les mam
melles , tout prêt d'y entretenir et de fortifier cette source de vie et de lumiere
que l'enfant reçoit en venant au monde
et de lui offrir une nourriture déja connuë et familiere.
st
C'est sur ce fondement que l'on penavec raison que la nature et les propriétez du lait ne contribuoient pis
moins
JANVIER. 173 2 . 35
moins à tracer et dans le corps et dans
l'esprit des enfans ces ressemblances .
avec leurs parens , si fortes et si frequentes , que la vertu même et l'impression
de la sémence.
.certain
L'experience nous montre cette vérité
non seulement dans les hommes , mais
encore dans les animaux ; car si , les Chevreaux sont allaitez de lait de Brebis , et
les Agneaux de celui de Chévre , il est
la laine de ceux - cy sera que
moins fine , et le poil de ceux - là plus
doux ; jusques dans les Plantes et les
Grains , l'on observe que les terres qui
les contiennent et les eaux qui les humectent ont plus de force et de puissance,
soit pour fortifier , soit pour alterer leurs
qualitez naturelles que la semence même;
et ne voyons- nous pas souvent des arbres
pleins de force et de vigueur , périr bientôt , lorsque transplantez , ils reçoivent
les tristes influences d'un súc étranger.
Quelle raison donc , grand Dieu , on
plutôt quel aveuglement de laisser alte-.
rer la pureté et la noblesse naturelle de
ce sang, qui coule dans les veines d'un
enfant nouveau né , par l'aliment souvent pernicieux , mais toujours étranger
d'un lait qui degeneres sur tout , si la
nourrice qu'on lui donne est de condi- tion
yo MERCURE DE FRANCE
tion servile et d'une naissance extrêmement basse , comme il arrive ordinairement si elle est laide ou méchante , si
elle aime le vin ou même la débauche
car pour comble de mal on prend presque toujours sans choix et sans discernement , celle qui se presente pour être
nourrice.
›
Exposerons-nous donc cet Enfant chéri , qui nous vient de naître , à être infecté d'une contagion si dangereuse , soufririons- nous que son ame et son corps
encore tendres reçoivent les esprits qui
forment et entretiennent la vie par les organes d'un corps souvent aussi vicieux
que l'ame qui l'habite.
C'est-là >, sans doute , la cause de ce que
nous voyons arriver tous les jours avec
surprise , que des femmes tres- vertueuses , ont des enfans qui leur ressemblent
si peu , et qui par leur temperamment
vicieux, semblent desavoüer leur origine.
Virgile qui n'étoit pas moins grand Philosophe que parfait Poëte , a bien senti
cette verité dans ces Vers , où la tendre
Didon reproche au trop vertueux Enée ,
qu'il ne pouvoit être le fils d'une Déesse,
et qu'il falloit , cruel comme il étoit, que
le Caucase l'eut engendré , dans ses affreuses Roches , car Didon ajoute incontinent
JANVIER. 1732. 57.
nent: Une Tigresse féroce t'a sans
doute allaité,
.... Hyrcanaque admorunt ubera
Tygrés.
Æneid. IV.
En effet , la nature du lait et le caractere de la nourrice , doivent avoir une
grande part dans la formation du tempe- famment et du caractere de l'Enfant. Ce
lait , n'en doutons point , empreint d'abord de la semence paternelle , figure
le naturel tendre de l'enfant qui le reçoit
des traits de l'esprit et du corps de la
'nourrice qui le donne. Mais quand tou
tes ces raisons manqueroient , devroiton compter pour rien , que les meres qui
abandonnent ainsi leurs enfans loin d'el
les et les donnent à nourrir d'un lait mercenaire, rompent, ou du moins relâchent extrêmement ces noeuds et ces ressorts
secrets dont la nature les avoit liez à eux;
car dès que la mere n'a plus devant ses
yeux l'Enfant emmené en nourrice, toute
la force et l'ardeur de l'amour maternelle
s'éteint insensiblement. Cette tendre inquiétude et ce doux soin qui en fait le
principal caractere , languit bien-tôt à un
tel point , qu'un fils relégué entre les
bras d'une nourrice , n'est gueres moins
oublié qu'un fils qui ne seroit plus ; l'EnD fant
MERCURE DE FRANCE
fant donne de son côté à sa nourrice toure
son affection , tout son attachement.C'est
le centre où se réunissent tous ses sentimens ; elle devient pour lui sa veritable
mere , tandis que celle qui devoit l'être ,
a laissé éteindre ses droits dans le cœur
de son enfant; et c'est ainsi que les plus
intimes et les premiers sentimens de l'amour filial étant perdus , tout l'amour
que des enfans peuvent concevoir dans la suite pour leurs parens , n'est point cet
amour naturel , qui seul dure toujours
mais un amour d'institution , un amour
arbitraire , aussi foible que le principe"
qui l'a produit.
Tel est à peu près le discours que j'entendis faire sur ce sujet à M. de ****
avec tout le feu et toute l'éloquence dont
il étoit capable.
Au reste,en le publiant , je ' ne me suis
pas flatté de réformer l'usage qui y est
combattu. Les hommes esclaves de l'opinion, se contentent d'ordinaire d'approuver spéculativement le parti le plus conforme à la raison ; lorsqu'on l'expose vi
vement à leurs yeux , et qu'on les force
par là de le reconnoître ; mais cette ap
probation stérile n'influë presque jamais
sur leur conduite , contre la tirannie de
Pusage.
J'avoue
JANVIER 1732. 5
J'avoue donc que j'ai senti que je ne
serois pas icy plus heureux , que lorsque
par la bouche de Pitagore et de Plutarque , j'ai tâché de montrer dans une Dissertation sur les Vers qu'Ovide met dans
la bouche de Pithagore, au liv . xiv. de ses
Métamorphoses , combien l'usage de tuer
et de manger les animaux est contraire
aux sentimens d'une raison pure et éclairées mais qu'importe , c'est toujours rendre à la vérité un hommage bien digne
de l'homme , que d'oser s'élever contre
des erreurs dominantes, et il est bon pour
l'honneur de la raison qu'il y ait toujours
des gens qui reclament en sa faveur
contre le préjugez , même sans esperancè de succès.
pour les Femmes, de nourrir elles- mêmes
leurs enfans.
LA
A Comtesse de *** étant heureuse
'ment accouchée d'un Garçon , M.
de *** son cousin germain en ayant
apris la nouvelle , monta aussi- tôt à
son appartement , après lui avoir fait
les complimens ordinaires , il se rendit
dans la Chambre où toute la famille
étoit assemblée pour la féciliter sur cette
agréable naissance : Je viens , dit - il , en
entrant , de laisser Madame dans une
tranquilité et une santé qui nous promet
les plus heureuses suites de son accouchement..
52 MERCURE DE FRANCE.
ment. Je ne doute point , ajouta - t - ik;
qu'elle ne nourrisse son fils de son propre lait.
Il alloit continuer , mais la mere de la
Comtesse qui se trouvoit présente , l'interrompit ; et d'un ton , mêlé de colere et
de raillerie , dit qu'elle se donneroit bien
de garde de suivre ses leçons ; qu'elle
sçauroit ménager la délicatesse de sa fille,
et donner promptement une Nourrice à
l'Enfant ; pour ne point ajouter aux tra
vaux de l'accouchement , l'étrange et pénible fonction de nourrir elle- même le
fils qu'elle venoit de mettre au monde.
De grace , Madame , repliqua M✶✶* * *
trouvez bon qu'elle ne soit pas mere à
demi ; car enfin quelle seroit cette espece de maternité imparfaite ; et si j'ose le
dire, manquée , d'enfanter un fils et de le
rejetter aussitôt loin d'elle , d'avoir
nourri dans ses entrailles du plus pur de
son sang je ne sçai quel enfant qu'elle
ne voyoit point , qu'elle ne connoissoit
point , et de cesser de le nourrir du lait
que la nature lui donne si liberalement à
ce dessein , dès qu'elle le voit né ,
dès
qu'il commence même à le demander par
ees cris touchants qui implorent si vivement le secours de sa mere. Eh quoi !
pensez - vous donc que ce ne soit que
pour
JANVIER. 1732. 53.
par
و
pour un vain ornement , ou pour l'art
dangereux de plaire , et non pour nourrir leurs enfans , que la nature ait donné
les mammelles aux femmes; et cependant
par un étrange renversement la pluspart
des meres s'empressent à tarir et à éteindre cette source sainte ; cette nourrice
précieuse du genre humain , aux hazards
des maux qu'un lait ainsi détourné , et
là corrompu , ne leur cause que trop
souvent. Aveugles de sacrifier à l'opinion et à une vaine délicatesse leurs interêts et
leurs devoirs les plus pressans? Leur faute est-elle donc bien differente du crime de
ces meres dénaturées , qui par de cruels
artifices , font avorter l'enfant que la nature a créé dans leur sein , de peur que
le poids de la grossesse , et le travail de
l'enfantement n'alterent la beauté et les
graces d'un corps dont elles sont idolâtres. Quesi c'est une action digne de l'éxécration publique d'aller chercher une
créature vivante et raisonnable pour lui
porter le coup de la mort , jusques dans
les mains même de la nature qui s'empressoit de l'animer et de la former, qu'il
s'en faut peu qu'il ne soit aussi criminel de
priver un enfant déja né, déja devenu son
propre fils , d'un aliment dont la nature
Pavoit mis en possession , qu'elle a fait
pour
54 MERCURE DE FRANCE
pour lui , et sur lequel il a des droits
qu'on ne peut lui ravir sans injustice et
sans cruauté !
Mais , dit - on , pourvû que l'enfant
vive et soit nourri , qu'importe de quel
lait il le soit. O vous , qui me faites cette
objection , si vous sçavez si peu démêler
les vrais sentimens de la niture ; croyezvous donc aussi , qu'il n'importe dans le
sein de quelle mere, et de quel sang un
enfant ait été engendré ; non sans doute.
Mais ce sang qui par l'action des esprits
et par une douce chaleur , a blanchi les
mammelles. N'est il pas toujours le même
qu'il étoit dans les entrailles de la mere ,
et c'est icy que l'adresse de la nature est
bien remarquable, car après que ce sang,
mis en œuvre par ses adroites mains , a
perfectionné le corps de l'enfant , lorsque
le temps de l'accouchement approche ,
n'ayant plus rien à faire en bas , il s'élevé
en haut, se filtre et se place dans les mam
melles , tout prêt d'y entretenir et de fortifier cette source de vie et de lumiere
que l'enfant reçoit en venant au monde
et de lui offrir une nourriture déja connuë et familiere.
st
C'est sur ce fondement que l'on penavec raison que la nature et les propriétez du lait ne contribuoient pis
moins
JANVIER. 173 2 . 35
moins à tracer et dans le corps et dans
l'esprit des enfans ces ressemblances .
avec leurs parens , si fortes et si frequentes , que la vertu même et l'impression
de la sémence.
.certain
L'experience nous montre cette vérité
non seulement dans les hommes , mais
encore dans les animaux ; car si , les Chevreaux sont allaitez de lait de Brebis , et
les Agneaux de celui de Chévre , il est
la laine de ceux - cy sera que
moins fine , et le poil de ceux - là plus
doux ; jusques dans les Plantes et les
Grains , l'on observe que les terres qui
les contiennent et les eaux qui les humectent ont plus de force et de puissance,
soit pour fortifier , soit pour alterer leurs
qualitez naturelles que la semence même;
et ne voyons- nous pas souvent des arbres
pleins de force et de vigueur , périr bientôt , lorsque transplantez , ils reçoivent
les tristes influences d'un súc étranger.
Quelle raison donc , grand Dieu , on
plutôt quel aveuglement de laisser alte-.
rer la pureté et la noblesse naturelle de
ce sang, qui coule dans les veines d'un
enfant nouveau né , par l'aliment souvent pernicieux , mais toujours étranger
d'un lait qui degeneres sur tout , si la
nourrice qu'on lui donne est de condi- tion
yo MERCURE DE FRANCE
tion servile et d'une naissance extrêmement basse , comme il arrive ordinairement si elle est laide ou méchante , si
elle aime le vin ou même la débauche
car pour comble de mal on prend presque toujours sans choix et sans discernement , celle qui se presente pour être
nourrice.
›
Exposerons-nous donc cet Enfant chéri , qui nous vient de naître , à être infecté d'une contagion si dangereuse , soufririons- nous que son ame et son corps
encore tendres reçoivent les esprits qui
forment et entretiennent la vie par les organes d'un corps souvent aussi vicieux
que l'ame qui l'habite.
C'est-là >, sans doute , la cause de ce que
nous voyons arriver tous les jours avec
surprise , que des femmes tres- vertueuses , ont des enfans qui leur ressemblent
si peu , et qui par leur temperamment
vicieux, semblent desavoüer leur origine.
Virgile qui n'étoit pas moins grand Philosophe que parfait Poëte , a bien senti
cette verité dans ces Vers , où la tendre
Didon reproche au trop vertueux Enée ,
qu'il ne pouvoit être le fils d'une Déesse,
et qu'il falloit , cruel comme il étoit, que
le Caucase l'eut engendré , dans ses affreuses Roches , car Didon ajoute incontinent
JANVIER. 1732. 57.
nent: Une Tigresse féroce t'a sans
doute allaité,
.... Hyrcanaque admorunt ubera
Tygrés.
Æneid. IV.
En effet , la nature du lait et le caractere de la nourrice , doivent avoir une
grande part dans la formation du tempe- famment et du caractere de l'Enfant. Ce
lait , n'en doutons point , empreint d'abord de la semence paternelle , figure
le naturel tendre de l'enfant qui le reçoit
des traits de l'esprit et du corps de la
'nourrice qui le donne. Mais quand tou
tes ces raisons manqueroient , devroiton compter pour rien , que les meres qui
abandonnent ainsi leurs enfans loin d'el
les et les donnent à nourrir d'un lait mercenaire, rompent, ou du moins relâchent extrêmement ces noeuds et ces ressorts
secrets dont la nature les avoit liez à eux;
car dès que la mere n'a plus devant ses
yeux l'Enfant emmené en nourrice, toute
la force et l'ardeur de l'amour maternelle
s'éteint insensiblement. Cette tendre inquiétude et ce doux soin qui en fait le
principal caractere , languit bien-tôt à un
tel point , qu'un fils relégué entre les
bras d'une nourrice , n'est gueres moins
oublié qu'un fils qui ne seroit plus ; l'EnD fant
MERCURE DE FRANCE
fant donne de son côté à sa nourrice toure
son affection , tout son attachement.C'est
le centre où se réunissent tous ses sentimens ; elle devient pour lui sa veritable
mere , tandis que celle qui devoit l'être ,
a laissé éteindre ses droits dans le cœur
de son enfant; et c'est ainsi que les plus
intimes et les premiers sentimens de l'amour filial étant perdus , tout l'amour
que des enfans peuvent concevoir dans la suite pour leurs parens , n'est point cet
amour naturel , qui seul dure toujours
mais un amour d'institution , un amour
arbitraire , aussi foible que le principe"
qui l'a produit.
Tel est à peu près le discours que j'entendis faire sur ce sujet à M. de ****
avec tout le feu et toute l'éloquence dont
il étoit capable.
Au reste,en le publiant , je ' ne me suis
pas flatté de réformer l'usage qui y est
combattu. Les hommes esclaves de l'opinion, se contentent d'ordinaire d'approuver spéculativement le parti le plus conforme à la raison ; lorsqu'on l'expose vi
vement à leurs yeux , et qu'on les force
par là de le reconnoître ; mais cette ap
probation stérile n'influë presque jamais
sur leur conduite , contre la tirannie de
Pusage.
J'avoue
JANVIER 1732. 5
J'avoue donc que j'ai senti que je ne
serois pas icy plus heureux , que lorsque
par la bouche de Pitagore et de Plutarque , j'ai tâché de montrer dans une Dissertation sur les Vers qu'Ovide met dans
la bouche de Pithagore, au liv . xiv. de ses
Métamorphoses , combien l'usage de tuer
et de manger les animaux est contraire
aux sentimens d'une raison pure et éclairées mais qu'importe , c'est toujours rendre à la vérité un hommage bien digne
de l'homme , que d'oser s'élever contre
des erreurs dominantes, et il est bon pour
l'honneur de la raison qu'il y ait toujours
des gens qui reclament en sa faveur
contre le préjugez , même sans esperancè de succès.
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Résumé : DISCOURS, sur l'obligation qu'il y a pour les Femmes, de nourrir elles-mêmes leurs enfans.
Le texte relate un discours prononcé par M. de *** à l'occasion de la naissance d'un garçon à la Comtesse de ***. M. de *** exprime son espoir que la Comtesse nourrisse elle-même son enfant, soulignant l'importance de la maternité complète. La mère de la Comtesse, présente, s'oppose à cette idée, préférant engager une nourrice pour éviter à sa fille les tracas de l'allaitement. M. de *** argue que nourrir son enfant est un devoir naturel et essentiel. Il critique les mères qui privilégient leur apparence et leur confort au détriment de la santé de leur enfant. Il compare cette pratique à l'avortement, qualifiant les deux actes de cruels et inhumains. Il insiste sur l'importance du lait maternel, qui est adapté aux besoins spécifiques de l'enfant, et sur les dangers des nourrices mercenaires, souvent de condition sociale basse ou de mauvaise moralité. Le discours met en avant les effets néfastes de l'allaitement par une nourrice sur le développement physique et moral de l'enfant. Il cite des exemples tirés de la nature et de la littérature pour illustrer ses propos. M. de *** conclut en soulignant que les mères qui abandonnent leurs enfants à des nourrices affaiblissent les liens maternels et filiaux. Le texte se termine par une réflexion sur la difficulté de réformer les usages sociaux, même lorsqu'ils sont contraires à la raison.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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20
p. 1234-1236
Voyage de la Reine à Chartres, [titre d'après la table]
Début :
La Reine, qui depuis la Naissance de Monseigneur le Dauphin, [...]
Mots clefs :
Reine, Naissance, Chartres, Versailles
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texteReconnaissance textuelle : Voyage de la Reine à Chartres, [titre d'après la table]
FRANCE,
Nouvelles de la Cour , de Paris , &c.
LdeMonseigneur le Dauphin , desiA Reine , qui depuis la Naissance
roit d'en aller rendre ses actions de graces à Dieu , dans l'Eglise Cathedrale de
Chartres , dediée à la sainte Vierge , partit de Versailles le 26 du mois dernier
pour se rendre à Chartres , étant accompagnée de Mademoiselle de Clermont ,
Surintendante de sa Maison , des Dames
de sa Cour et de ses principaux Officiers.
Elle arriva le même jour au Château de
Rambouillet , où S. M. fut reçue par le
Comte et la Comtesse de Toulouse.
Le 27 la Reine , après avoir entendu
la Messe dans la Chapelle du Château,
partit pour Maintenon , où le Duc de
Noailles la reçut : S. M. y dîna , et arriva
à Chartres vers les sept heures du soir.
Le Marquis d'Armenonville , Gouverneur et Grand- Bailly de la Ville , accom
pagné des Maire et Echevins , complimenta la Reine à la porte de la Ville et
lui en presenta les clefs. Les rues par lesI. Vol quelles
JUIN. 1732 1235
quelles S. M. passa étoient tapissées , et
la Bourgeoisie y étoit rangée en haye et
sous les armes. La Reine alla descendre à
l'Eglise Cathédrale , devant laquelle S. M.
trouva les Gardes Françoises et Suisses en
haye et sous les armes. L'Evêque de Chartres , revêtu de ses habits pontificaux, et
à la tête des Chanoines en chappe , reçut
la Reine à la porte de l'Eglise , avec les
céremonies accoutumées ; et après l'avoir
complimentée, et lui avoir présenté l'eau
bénite , la conduisit dans le Chœur,
On chanta le Te Deum après lequel la
Reine fut accompagnée par l'Evêque et
par le Chapitre jusqu'à l'Evêché où S. M.
a logé.
Le 28 , la Reine fut conduite par l'Evêque et par le Chapitre à l'Eglise Cathé
drale et ensuite à la Chapelle basse dédiée
à la sainte Vierge. S. M. y entendit la
Messe, et y communia par les mains de
l'Abbé de S. Hermine son Aumônier en
quartier.
Le même jour , la Reine retourna à
l'Eglise Cathédrale , où S. M. entendit la
Messe qui fut célébrée par l'Evêque , pendant laquelle on chanta un Motet en Musique. Après la Messe , la Reine s'approcha de l'Autel où l'Evêque lui fit voir
toutes les Reliques et les présens que les
I. Vol. Rois
1236 MERCURE DE FRANCE
Rois et les Reines de France ont faits à
l'Eglise de Chartres : S. M. alla ensuite
faire sa priere à la Chapelle de la Vierge ,
où elle retourna le soir après avoir assisté
au Salut et reçu la bénédiction du S. Sacrement qui fut donnée par l'Evêque.
Le mêmejour , la Reine alla au Monastere des Religieuses Carmelites et à celui
des Religieuses de la Visitation. Le soir,
pendant le souper de la Reine , on tira
un grand nombre de boëtes et de fusées
dans le jardin de l'Evêché. Il y eut , comme le jour précedent , des illuminations
dans toute la Ville ; et pendant le sejour
que la Reine y a fait , le peuple a donné par des acclamations continuelles , des
marques de son respect et de son amour
pour S. M.
Le 29 , la Reine après avoir entendu la
Messe dans la Chapelle basse , partit de
Chartres : S. M. dîna à Maintenon , coucha à Rambouillet et le lendemain elle
arriva à Versailles vers les cinq heures du
soir
Nouvelles de la Cour , de Paris , &c.
LdeMonseigneur le Dauphin , desiA Reine , qui depuis la Naissance
roit d'en aller rendre ses actions de graces à Dieu , dans l'Eglise Cathedrale de
Chartres , dediée à la sainte Vierge , partit de Versailles le 26 du mois dernier
pour se rendre à Chartres , étant accompagnée de Mademoiselle de Clermont ,
Surintendante de sa Maison , des Dames
de sa Cour et de ses principaux Officiers.
Elle arriva le même jour au Château de
Rambouillet , où S. M. fut reçue par le
Comte et la Comtesse de Toulouse.
Le 27 la Reine , après avoir entendu
la Messe dans la Chapelle du Château,
partit pour Maintenon , où le Duc de
Noailles la reçut : S. M. y dîna , et arriva
à Chartres vers les sept heures du soir.
Le Marquis d'Armenonville , Gouverneur et Grand- Bailly de la Ville , accom
pagné des Maire et Echevins , complimenta la Reine à la porte de la Ville et
lui en presenta les clefs. Les rues par lesI. Vol quelles
JUIN. 1732 1235
quelles S. M. passa étoient tapissées , et
la Bourgeoisie y étoit rangée en haye et
sous les armes. La Reine alla descendre à
l'Eglise Cathédrale , devant laquelle S. M.
trouva les Gardes Françoises et Suisses en
haye et sous les armes. L'Evêque de Chartres , revêtu de ses habits pontificaux, et
à la tête des Chanoines en chappe , reçut
la Reine à la porte de l'Eglise , avec les
céremonies accoutumées ; et après l'avoir
complimentée, et lui avoir présenté l'eau
bénite , la conduisit dans le Chœur,
On chanta le Te Deum après lequel la
Reine fut accompagnée par l'Evêque et
par le Chapitre jusqu'à l'Evêché où S. M.
a logé.
Le 28 , la Reine fut conduite par l'Evêque et par le Chapitre à l'Eglise Cathé
drale et ensuite à la Chapelle basse dédiée
à la sainte Vierge. S. M. y entendit la
Messe, et y communia par les mains de
l'Abbé de S. Hermine son Aumônier en
quartier.
Le même jour , la Reine retourna à
l'Eglise Cathédrale , où S. M. entendit la
Messe qui fut célébrée par l'Evêque , pendant laquelle on chanta un Motet en Musique. Après la Messe , la Reine s'approcha de l'Autel où l'Evêque lui fit voir
toutes les Reliques et les présens que les
I. Vol. Rois
1236 MERCURE DE FRANCE
Rois et les Reines de France ont faits à
l'Eglise de Chartres : S. M. alla ensuite
faire sa priere à la Chapelle de la Vierge ,
où elle retourna le soir après avoir assisté
au Salut et reçu la bénédiction du S. Sacrement qui fut donnée par l'Evêque.
Le mêmejour , la Reine alla au Monastere des Religieuses Carmelites et à celui
des Religieuses de la Visitation. Le soir,
pendant le souper de la Reine , on tira
un grand nombre de boëtes et de fusées
dans le jardin de l'Evêché. Il y eut , comme le jour précedent , des illuminations
dans toute la Ville ; et pendant le sejour
que la Reine y a fait , le peuple a donné par des acclamations continuelles , des
marques de son respect et de son amour
pour S. M.
Le 29 , la Reine après avoir entendu la
Messe dans la Chapelle basse , partit de
Chartres : S. M. dîna à Maintenon , coucha à Rambouillet et le lendemain elle
arriva à Versailles vers les cinq heures du
soir
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Résumé : Voyage de la Reine à Chartres, [titre d'après la table]
En juin 1732, la Reine de France entreprit un voyage à Chartres. Le 26 juin, elle quitta Versailles avec Mademoiselle de Clermont et sa cour, s'arrêtant d'abord au Château de Rambouillet où elle fut reçue par le Comte et la Comtesse de Toulouse. Le lendemain, elle se rendit à Maintenon, accueillie par le Duc de Noailles, avant d'arriver à Chartres en soirée. À Chartres, elle fut accueillie par le Marquis d'Armenonville, le Maire et les Échevins, qui lui remirent les clefs de la ville. Les rues étaient décorées et la bourgeoisie était en armes. La Reine se rendit à la cathédrale, où elle fut reçue par l'Évêque de Chartres et les Chanoines, et un Te Deum fut chanté. Elle logea à l'Évêché. Le 28 juin, elle assista à la messe, communia, visita les reliques et les présents royaux, pria à la chapelle de la Vierge et visita les monastères des Carmélites et des Visitandines. Des feux d'artifice et des illuminations eurent lieu en son honneur. Le 29 juin, après la messe, elle quitta Chartres pour revenir à Versailles, en passant par Maintenon et Rambouillet.
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21
p. 5-18
QUESTION NOTABLE, jugée par Arrêt du Parlement de Dijon.
Début :
Si une Veuve qui se remarie après l'an du deüil, et qui accouche dans le Septième [...]
Mots clefs :
Enfant, Mois, Deuil, Loi, Mariage, Catherine Morlot, Mari, Septième mois, Veuve, Naissance
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texteReconnaissance textuelle : QUESTION NOTABLE, jugée par Arrêt du Parlement de Dijon.
QUESTION NOTABLE , jugée
par Arrêt du Parlement de Dijon.
‘q l une Veuve qui se remarie après l'au
q. du deuil , et qui accouche dan: le S ep
tiéme mois après le deuil , n'ait Être reputée
‘ avoir vêcu impudiquement dans l'an du
deuil , et être déclarée indigne dîme dona
tion mutuelle d’entre elle et son premier
Mari 3 '
‘FAIT.
Jacques Pouflîer , Boulanger â Nuys ÿ
et Catherine Morlot , sa femme , se firent
une donation de tous leurs biens men)
bles cr immeubles le I7 Mai 172.8. Le
mari mourut le z Avril I729. sans laisser
des cnfans; sa veuve fir homologuer le
"don mutuel. Elle passe un Contrat de
Mariage avec Pierre Oudot , GarçonBou
langer et son Ç mpagnon le 24. Février
1750. elle l’êp' se le 1.8 Mai suivant , et
accouche d’un enfant bien formé et vi-î
gourcux le 9 Octobre de la même année ,‘
ctsr-à-dire, quatre mois et onze jours
aptes son manage , et 51x mois et sept
jours depuis la. fin de son deüil. Les pa
cens
à MERCURE DE FRANCE
rens collateraux de son premier mari ap
pclllent de Phomologarion du don mu-g‘
tue . r = -
Me De la Motte , Avocat , plaidant
pour la ‘veuve , dit que les mêmes motifs
sur lesquels on déclare légitime un enfant
\ né dans le septiême mois, concourent a 7
faire rejctter l'accusation dïndigniré con
tre la mere; parce qu'en toute question
d’Etat,on se détermine par le parti le
plus favorable ; de sorte qu'il suHît qu’ou
y trouve de la possibilité ,_pour en l΀VC-_
nir à la présomption de la Loi.
La Loi I 2. fi. de statu_hominum est pré
cise en faveur des cnfans nez dans le sep
tième mois. Et afin qu'on ne croye‘ pas
yqu’cllc parle de sept mois complets, ce
qui entrevoit dans le huitième mois, la.
Loi 3. j. 12. fi. de suis et legit. hiered. dé
cide qu’il suflit que Penfanr naisse au 1S2.‘
jour , pour être tiéclaré viable et. né dans
4 un terme naturel et légal tout ensemble.
Cathcrine Morlot étoit affranchie de la
servitude du dcüil ct de la Loi penale ,
renfermée dans le même terme , 1l y
avoir dêja 190. jours, ct la Loi n’cn re
quiert que 182. qui font six mois lunai
V rcs et cinq jours, au lieu que les 190.
composent six mois lunaires et quatorze
jours ,
\
JANVIER. i733. 9
jours , ou six mois solaires et sept ou huit
jours
Dans Pcspêce qui se présente, il y:
trutant moins de diflîculté à prendre ce
parti que le second mariage ayant un effet
rétroactif pour mettre l'enfant à l'abri de
tous reproches d’une conception illégiti;
me , la. considération du nouvel état de
la merc doit pareillement la garantir des
mêmes reproches.
Ajoutons que la circonstance du Con-a
ttat passé avec le sccond mari , la rendoit
en quelque sorte excusable , joint à l'oc.
casion d'un même domicile devenu né
cessaire par rapport â sa Profession.
Enfin , ce sont des Collateraux qui la
oursuivent, à qui il sied moins de flétrir
lîhonneur de son mariage , et de censurer
sa conduite en cherchantà la confondre
avec les femmes qui auroient vêcu dans
le désordre : moins encore leur convient
il d’cnvier à cette femme tresse: d'une
donation mittucllc, qui par Pincertitude
de Pévenement participe du titre oné-j
reux.
M. Davot puîné , Avocat pourles heà
ritiers collateraux , rêponcloit quelcs do
nations mutucllessont regardées comme
de véritables v libcralitez par toutes les
‘Coutumegqui interdisent aux conjoints
le
O
""8 MERCURE DE FRANCE
le pouvoir de disposer en faveur l'un de
l'autre. v. Depringlcs , dans sa Note sur
l'art. 7. tit.4. de la Cour. de Bourgogne.
Taisand , sur le même article. Ricard,
en son Traité du Dom mutuel , chap. 5.
lect. 5. du Moulin, dans sa Note, sur
Part. 87. de la Coutume de Chartrcs.
- Selon la Loy dernicre,C.de revoe. donat.
toutes sortes de Donations peuvent être
révoquées pour cause (l'ingratitude. Or
l'incontinence de Cathcrine Morlot est
une injure faire à la mémoire de son ma
ri ; les injures sont une des ingratitudes
que les Loix condamnent, elle doit donc
perdre le fruit de la donation de Jacques
Pouflier. Enfin c’cst en conséquence dcla
volonté de‘ son mari qu'elle joüit de tous
les biens qu’il a délaissez, et selon la Loi,
une Veuve incontinente est indigne de
profiter de ces sortes dävantages. L. 2.
C. de secundis Nupt.
vOn ne doit point présumer , sans preu.
vc'ou sans des raisons trcs-fortes , qu’un
enfant est né dans le septième mois , par
ce que , suivant le sentiment des Mede
cins,lcs accouchemens à sept mois sont
tares, contraires à la nature , et ne pro
duisent que des cnfans {dont la foiblessc
et Pimperfcction est une preuve quîls ne
devaient pas encore voir le jour , selpn
es
moe.
5ANVIER. 173;.‘ ‘f
l
les tegles ordinaires. C’est le sentiment
dflippocrate , dans son Livre - D: par!»
teptimextri ; de Galien , dans le Commen
taire qu’il a fait sur cet Ouvrage sd’Ari9
rote , dans PHistoire des Animaux, liv.7.
ch. 4. dejDulaurens, liv. 8. quest. 3o. de
Fernel, Conseil 55. de Paul Zachias, dans
ses uest. Medicolegales, llVL/I.tlt.2..(1ucSlÎ.
3. ou il rapporte les imperfections aus
quelles sont sujets les enfans nez à seps
. mois‘. Ces accouchemens sont contre l’or
drc ct Pintention de la nature 3 car,.selon
Hippocrare , de naturâ puerperii , l’accou
chement tfest causé que par le deflàut
d’alimens; quand Faliment manque par
un accident ou par quelque maladie ,
c'est contre lîintention et l’ordre de la na-,
turc; les Enfans à se t mois sont encore
petits , foibles et ma formez; c’est donc
par une maladie, ou par une violence ex
traordinaire que leur naissancea été pré.
cipitée. v. Paul Zachias, queshg. tlt.z.l.r.*
Or puisque ces sortes däccouchemens
sont si rares et si contraires à la nature ,
on ne doitlpas les supposer sans des preu
ves convaincantes ou des motifs tres
Puissans , c’est le sentiment de Menoch ,
Je Pmmmpt. lib. 6. P7193. 52..
Catherine «Morlot étant forcée d’a-'
ÿoüer que son Enfant est le fruit d’un
_ .q fi 60m3
3o M ERCURE DE FRÂNCË.‘
commerce illégitime , ne peut employer
en sa faveur les Loix qui présument quïm
Enfant cll: né à 7 mois , parce que ces
Loix n’ont eu en vuë que d'assister la 1c’
gitimité des Enfans, et de les sauver de la.
servitude; c'est ce qui ell; prouvé par; les
termes mêmes, des Loix qu’elle allegue,
La Loi 12. de Statu hominum , ÿexplique
ainsi zSeptimo monse nascipetftectum partum
jam reeeptum esgpropter auctaritatem doctisgj.
mi viriHippocratisget ide?) aredendum est mm
qui ex justis septirno nuptii: mense natu: est,
justum filium esse. OEoique Calherine
Morlot ait voulu ‘se servir de la premier-e
Partie de cette Loi pour établir qu’un
Enfant peut naître parfait à 7 mois,il est
certain qu’elle n’en peut tiret aucun
avantage , parce que’ le J urisconsulte n'a
fait que‘ transcrire la décision dT-Iippo
crarc ,et qtfainsi c’est par le sentiment
de ce grand Medecin , que l’on doit ju.
5er des Enfansqui naissent dans le se
1ième mois. Or , selon Hippocratc me
mqdans le Livre: De natures puerperii, le
a septième mois ne fait qu’apportet e com
mencement de la perfection au Foetus;
donc il n’est pas encore parfait dans ce
temps -, il est seulement assez formé pour
rïêtrc pas incapable de vie 5 mais il n’a
pas encore acquis la force ni la perfecar’
* -’ ‘* tien
JANVIER. I733‘; Il‘.
tien ue naturellementil doit avoir avant
que e naître. Il paroi: évidemment par
_ le Passage du même Auteur, qui se trou
vc dans son Traité de S eptimestri partu ,
que ce n'est que d’une simple possibilité de
‘ vivre qu’il a parlé, en disant que l’Enfant -
naît parfaità 7 mois,puisqu'il assure qu’il
en naît peu l; que de ce peu , il en meurt‘
lusieurs e qu’ils sont tous foibles et ma
lîtdxfs s ce seroit donc supposer une con:
(radiation manifeste dans ces difiercns
passages cH-Iippocrate, que cl’expliqucr
celui qui est rapporté par la Loi , d’une
façon diiÏerehte de celle qui vient d'être
exposée. . .
La seconde partie de la Loi cy-dessus
citée , est absolument contraire aux pré:
tentions de Cathxrine Morlot; ce n'est
qu’en faveur d’un Enfant né d’un maria
ge illégitime; que la Loi admet sa pré; *
somption -, FEnFant de Catherine Morlot
est le fruit d'un commerce illegitimeia
Loi nÎest donc plus applicable. _
Et qu’on ne dise pas que l’on ne doit.’
point présumer un crime tel qu’est Pin
continence d'une Veuve , pendant Pan!
née de son Deuil, sur de simples appa;
rences, et que ce n’est que par des'preu—
vcs convaincantes que l'on peut détruire
la présomption de la naissance de son En
r B fang
u: MERCURE DE FRANCE:
fant à 7 mois. Ce raisonnement pourroit
avoir lieu si Pimpudicité de Catherine
Morlor n'étoit pas avérée; mais sa pro
‘ re confession , et la naissance de son En
Ëint en sont des preuves invinciblesll ne
‘s'agir donc plus que de fixer la datte de
son crime; elle ne doit pas attendre que
pour la placer a son gré , on admette une
supposition contre nature , et u1 n’est
reçuë par les Loix qu’en faveur . c la lé
gitimité ou de la liberté des Enfans. Il se
roit absurde de penser que cette Veuve
‘eut passé son année de Deuil dans la con
tinence , et que dès le lendemain elle se
fut abandonnée , et eût accouché au bout
de six mois d’un Enfant aussi vigoureux
que le sont ordinairement ceux qui nais
sent à neufmois,avec toute la perfection
=que l’on peut espere: dans un age aussi
tendre, p
La Loi I3. de suis et lcgit, kami. n’est
pas non plus favorable àCatherine Mor
ot; ce n’est qu’en faveur de la liberté de
PEnfant , qu’elle présume sa naissance à
sept mois. Catherine Motlot ne peut as
employer cette présomption pour el e ;
et puisque l’on n’attaque point la liberty’
de son Enfant, elle n'a pas dû regarde:
comme une servitude , la nécessité de pas
ser son veuvage dans la continence.
l‘: KL
\
JANVÏER. 173;: 2;“
C’est‘sans aucune apparence de raison
‘qu'elle a recours à une fiction de Droit ,'
c’est à-dire ,à lïffet rétroactif du maria
ge, pour en conclure qu’elle est bien’
fondée à employer la présomption que
les Loix ont introduite; ce n'est pas sur
une fiction , mais sur une réalité que l’on
doit fixer 1a date d'un mariage °, ce n’est
que par une indulgence des loix qu'il a un
effet rétroactif pour la légitimation des
enfans; mais il ne peut donner lieu à la
présomptionde sa naissance dans le sep
tiéme mois , parce que ce_ n'est qu’en con
séquence d’un signe certain que l’on doit
admettre les présomptions des Loix.
Voyez Menoch. De PmsumpLliv. 1. ch. 8.
Qand un Enfant est né dans le sep
tiéme mois d’un mariage légitime , ce
mariage est le signe certain et légal qui
fait présumer le temps au uel il a-été
conçu 3 mais Catherine Moflot n’a que la.
naissance de son Enfant qui puisse déter
miner le temps’de la conception; elle
n’esr dans aucun des cas ‘prévûs par les‘
Loix , on n'en doit donc juger que selon
le cours ordinaire de la nature; et la pré:
somption lui devient contraire, puisqu'il.
n'y a rien icy de certain que son incon
tinence , dont il faut fixer Pépoque.
i Enfin Catherine Morlot prouveroit
B inu-j
‘r4 MERCURE DEVFRANCE:
inutilement que son Enfant n’a été con-î
çu qifaprês Pexpiation de son année de
Deuil; dès qu’il est le fruit d'un commer
ce illicite , elle ne peut éviter de subir les
mêmes peines quïme Veuve qui se seroit
remariée dans Pannée qui suit le décès de
son mari. Tantquïme Femme n'est point
remariée, elle ioüit de tous les avantages
que son mari lui avoit procurez, puisque
son mariage est censé subsister , elle ne
peut s'abandonner sans commrttre une
espece d’adultere; son impudicité désho
normt davantage la mémoire de son mari
qu’un mariage trop précipité; elle ne
doit pas ê.re punie moinsseverement
u'une Veuve qui se remarie dans l’an
du DeuiLCtla suffit pour établir que l’in
continence de Catherine Morlot pendant
son année de Deuil est suflisamment preu
vée,par la naissance de son Enfant, et que
uand elle ne le seroit pas, dès qu’elle est:
forcée d’avoücr son commerce criminel
avec Jacques Oudot, elle ne peut éviter
sa condamnation. .
On répliqua pour Catherine Morlot;
qu’envain voudroit-on affoiblir Pautho
tiré de la Loy , en citant Dulaurent et
' Paul Zachias;1’un qui prétend qu’I-Iip
pocrate a varié, et l’au‘tre qui s’ingere de
le censurer. Paul Zachias après avoir dit
que.
I
«ÏANVIER». 1733.‘ r;
que le terme de sept mois n’esr pas coma
mun , avoue‘ néanmoins , au nombre 63.‘
età Pendroit même qu’ont obfecté ‘les
Heritiers collateraux de Jacques Pouflier,‘
que lesepziéme mois ne laisse pas d’être
un terme légitime : Exindè concludendttm '
minimè est amnes septima mens: mua: illegiq
rima: me , si vivant. Er cela suffit pour
sauver l’Enfant , la Mere et le second
mari de Popprobre dont on veut les char
ger. Mais ce qui doit faire rejetter les sub
tilitez cle ces deux Medecins, est que s’iI
s'agissait de Fétara. d'un Enfant , il ifest
personne qui osât le lui contester dans
e septième mois , sous le prétexte ‘des
variations que Dulaurent impute à Hip
pocrare , ou des conjectures hazardées
par Zachias , dès qu’on a_ contfeux la dé—
cision de la Loi , afFermie encore par une
Jurisprudence uniforme et universelle
en faveur de Yllnfant né dans le septié-g‘
me mois. p
Alphonse de Caranza, Jurisconsulte
du dernier sieclc,dans un Traité de Pur-m,
ui est n'es-estimé , nous donne la Liste
des erreurs du hlcdecin Zachias , su:
cette matiere: Ego cartè cttm Hippocmt:
ferfictianis Jmrtûs principium- tvgttlariter
constitua, ira ut parfactus mm foetus asse in
çtjziat 146i dimidtb axttata arma particttlam
B alla:
u? MERCURE DE FÎÏANCËJ‘
"décidé' pour l’état de l’Enfant né
alterna: atrigerit , quasi evenit principio sepl
timi mensis, quo tempare, ut caeteramm Me
dicorumSchalu afirmeit , muturus jum foetus
pelliculas eulcizmtu disrumpit, et purtmh fieri
nutum cagil. M. Cujas, liv.‘ 4.. des Répon
ses de Papinien , s’explique de la même
maniere : Si querutur un is sit metturus qui
4d initia septimi mensis natus est, dimm
esse muturum , ut putu si nntus sit r82. die,
quiet 182. dits septimum mensem attingunt.
Le Brun , des Success. ch. 4.. Sect. I. n. 6.
7.8.et 9. observe qu’il suiiit que le septié
me mois lunaire soit commencé. Dunod
des Prescriptions, part. z. ch. r 5. pag. zzo.
atteste la même maxime; à quoi il faut
ajoûrer les Arrêts rapporrez par Brodeau,
lettre E. Som. 5. n. r;.par Boniface, tom.
zrpatt. z. liv. 3. tir, 8. ch. 3.dans M.May
nard , et dans Charondas. Or ce cciulian‘s eslte
septiéme mois,'doit l'être également pour
la Mere remariée, parce que Popprobre
de la Mere rejaillit sur son enfant, ct sur
son mariageâ parce que les motifs d’hu
manité sont les mêmes s parce que les
.I.oix pénales sont toujours à restraindre ,
\
jamais a présumer le crime, ou qu’en tout
cas , on présume les moindres foiblesses
les plus pardonnablesfl, les plus faciles à ré
parer; parce qu’enfin la reglc est une, inq
variable sur le septième mois.
‘ CI!
JANVIER. 173;.‘ "x71
Un n’a garde de disconvenir que la Veu-l
vc qui vit dans le désordre ne soir infini
ment plus punissable que celle qui se re
marie; aussi la punit-on , dans les Parle-Ï
lemcns même où l’on excuse le mariage
durant le deuil; mais il ne s'ensuit pas, ni
Hue la peine doive s’étendre sur ce qui se
passe après le deuil, ni qu'il failIe donner
aux faiblesses par où aura pû commencer
1e mariage, un effet rétroactif pour les
réputer commises dans l’an même du deuil,
lorsque par la décision de la Loi il reste
assez de temps après le deuil, pour que
yPEnfant soir réputé conçu hors du temps
de prohibition. _
»- Qfil y aît eu un Contrat de mariage
dans l’an du deull , c’est une circonstance
ui" excuse les foiblesses posrerieures au
deuil, sans ‘qu’on doive les reporter ä.
cette époque; il faut se renfermer dans la
présomption des Loix. Le second maria
ge a un eñiet ‘rétroactif au temps où l’on
doit présumer: la conception de PEnfanr,
pour légitimer PEnfant et itistifier la Me
re, c’est après le deuil ; dès que ce temps
suffit pour se retrouver dans le septiéme
mois , et l’on s’y trouve icy de i4. jours;
car au reste ilén’y a pas de reproches à fai
re sur ce quevle Contrat est dans l’an du
deuil , la prohibition ni les peines ne s’y_
‘ ' B v_ éreng
t8 MERCURE DE FRANCE.‘
étendirent jamais ; la Loi a même prévû‘
ce cas et a condamné l'extension des pei—
«nes qu'une rigueur outrée tentetoit d'y
appliquer : Qge virum elugwt , sponsumfuis
a‘: non noce: , no. 10.5. 1.35‘: de 19j; 7mm.
tuntur infumiii.
M‘ Genreau , Avocat General , ayant
conclu avec beaucoup de solid té et avec
son éloquence ordinaire, en faveur de
Catherine Morlot. LA COUR , par Arrêt
rendu a l’Audience publique,du r7 Juil
let 173:. confirma la donation mutuelle,
par Arrêt du Parlement de Dijon.
‘q l une Veuve qui se remarie après l'au
q. du deuil , et qui accouche dan: le S ep
tiéme mois après le deuil , n'ait Être reputée
‘ avoir vêcu impudiquement dans l'an du
deuil , et être déclarée indigne dîme dona
tion mutuelle d’entre elle et son premier
Mari 3 '
‘FAIT.
Jacques Pouflîer , Boulanger â Nuys ÿ
et Catherine Morlot , sa femme , se firent
une donation de tous leurs biens men)
bles cr immeubles le I7 Mai 172.8. Le
mari mourut le z Avril I729. sans laisser
des cnfans; sa veuve fir homologuer le
"don mutuel. Elle passe un Contrat de
Mariage avec Pierre Oudot , GarçonBou
langer et son Ç mpagnon le 24. Février
1750. elle l’êp' se le 1.8 Mai suivant , et
accouche d’un enfant bien formé et vi-î
gourcux le 9 Octobre de la même année ,‘
ctsr-à-dire, quatre mois et onze jours
aptes son manage , et 51x mois et sept
jours depuis la. fin de son deüil. Les pa
cens
à MERCURE DE FRANCE
rens collateraux de son premier mari ap
pclllent de Phomologarion du don mu-g‘
tue . r = -
Me De la Motte , Avocat , plaidant
pour la ‘veuve , dit que les mêmes motifs
sur lesquels on déclare légitime un enfant
\ né dans le septiême mois, concourent a 7
faire rejctter l'accusation dïndigniré con
tre la mere; parce qu'en toute question
d’Etat,on se détermine par le parti le
plus favorable ; de sorte qu'il suHît qu’ou
y trouve de la possibilité ,_pour en l΀VC-_
nir à la présomption de la Loi.
La Loi I 2. fi. de statu_hominum est pré
cise en faveur des cnfans nez dans le sep
tième mois. Et afin qu'on ne croye‘ pas
yqu’cllc parle de sept mois complets, ce
qui entrevoit dans le huitième mois, la.
Loi 3. j. 12. fi. de suis et legit. hiered. dé
cide qu’il suflit que Penfanr naisse au 1S2.‘
jour , pour être tiéclaré viable et. né dans
4 un terme naturel et légal tout ensemble.
Cathcrine Morlot étoit affranchie de la
servitude du dcüil ct de la Loi penale ,
renfermée dans le même terme , 1l y
avoir dêja 190. jours, ct la Loi n’cn re
quiert que 182. qui font six mois lunai
V rcs et cinq jours, au lieu que les 190.
composent six mois lunaires et quatorze
jours ,
\
JANVIER. i733. 9
jours , ou six mois solaires et sept ou huit
jours
Dans Pcspêce qui se présente, il y:
trutant moins de diflîculté à prendre ce
parti que le second mariage ayant un effet
rétroactif pour mettre l'enfant à l'abri de
tous reproches d’une conception illégiti;
me , la. considération du nouvel état de
la merc doit pareillement la garantir des
mêmes reproches.
Ajoutons que la circonstance du Con-a
ttat passé avec le sccond mari , la rendoit
en quelque sorte excusable , joint à l'oc.
casion d'un même domicile devenu né
cessaire par rapport â sa Profession.
Enfin , ce sont des Collateraux qui la
oursuivent, à qui il sied moins de flétrir
lîhonneur de son mariage , et de censurer
sa conduite en cherchantà la confondre
avec les femmes qui auroient vêcu dans
le désordre : moins encore leur convient
il d’cnvier à cette femme tresse: d'une
donation mittucllc, qui par Pincertitude
de Pévenement participe du titre oné-j
reux.
M. Davot puîné , Avocat pourles heà
ritiers collateraux , rêponcloit quelcs do
nations mutucllessont regardées comme
de véritables v libcralitez par toutes les
‘Coutumegqui interdisent aux conjoints
le
O
""8 MERCURE DE FRANCE
le pouvoir de disposer en faveur l'un de
l'autre. v. Depringlcs , dans sa Note sur
l'art. 7. tit.4. de la Cour. de Bourgogne.
Taisand , sur le même article. Ricard,
en son Traité du Dom mutuel , chap. 5.
lect. 5. du Moulin, dans sa Note, sur
Part. 87. de la Coutume de Chartrcs.
- Selon la Loy dernicre,C.de revoe. donat.
toutes sortes de Donations peuvent être
révoquées pour cause (l'ingratitude. Or
l'incontinence de Cathcrine Morlot est
une injure faire à la mémoire de son ma
ri ; les injures sont une des ingratitudes
que les Loix condamnent, elle doit donc
perdre le fruit de la donation de Jacques
Pouflier. Enfin c’cst en conséquence dcla
volonté de‘ son mari qu'elle joüit de tous
les biens qu’il a délaissez, et selon la Loi,
une Veuve incontinente est indigne de
profiter de ces sortes dävantages. L. 2.
C. de secundis Nupt.
vOn ne doit point présumer , sans preu.
vc'ou sans des raisons trcs-fortes , qu’un
enfant est né dans le septième mois , par
ce que , suivant le sentiment des Mede
cins,lcs accouchemens à sept mois sont
tares, contraires à la nature , et ne pro
duisent que des cnfans {dont la foiblessc
et Pimperfcction est une preuve quîls ne
devaient pas encore voir le jour , selpn
es
moe.
5ANVIER. 173;.‘ ‘f
l
les tegles ordinaires. C’est le sentiment
dflippocrate , dans son Livre - D: par!»
teptimextri ; de Galien , dans le Commen
taire qu’il a fait sur cet Ouvrage sd’Ari9
rote , dans PHistoire des Animaux, liv.7.
ch. 4. dejDulaurens, liv. 8. quest. 3o. de
Fernel, Conseil 55. de Paul Zachias, dans
ses uest. Medicolegales, llVL/I.tlt.2..(1ucSlÎ.
3. ou il rapporte les imperfections aus
quelles sont sujets les enfans nez à seps
. mois‘. Ces accouchemens sont contre l’or
drc ct Pintention de la nature 3 car,.selon
Hippocrare , de naturâ puerperii , l’accou
chement tfest causé que par le deflàut
d’alimens; quand Faliment manque par
un accident ou par quelque maladie ,
c'est contre lîintention et l’ordre de la na-,
turc; les Enfans à se t mois sont encore
petits , foibles et ma formez; c’est donc
par une maladie, ou par une violence ex
traordinaire que leur naissancea été pré.
cipitée. v. Paul Zachias, queshg. tlt.z.l.r.*
Or puisque ces sortes däccouchemens
sont si rares et si contraires à la nature ,
on ne doitlpas les supposer sans des preu
ves convaincantes ou des motifs tres
Puissans , c’est le sentiment de Menoch ,
Je Pmmmpt. lib. 6. P7193. 52..
Catherine «Morlot étant forcée d’a-'
ÿoüer que son Enfant est le fruit d’un
_ .q fi 60m3
3o M ERCURE DE FRÂNCË.‘
commerce illégitime , ne peut employer
en sa faveur les Loix qui présument quïm
Enfant cll: né à 7 mois , parce que ces
Loix n’ont eu en vuë que d'assister la 1c’
gitimité des Enfans, et de les sauver de la.
servitude; c'est ce qui ell; prouvé par; les
termes mêmes, des Loix qu’elle allegue,
La Loi 12. de Statu hominum , ÿexplique
ainsi zSeptimo monse nascipetftectum partum
jam reeeptum esgpropter auctaritatem doctisgj.
mi viriHippocratisget ide?) aredendum est mm
qui ex justis septirno nuptii: mense natu: est,
justum filium esse. OEoique Calherine
Morlot ait voulu ‘se servir de la premier-e
Partie de cette Loi pour établir qu’un
Enfant peut naître parfait à 7 mois,il est
certain qu’elle n’en peut tiret aucun
avantage , parce que’ le J urisconsulte n'a
fait que‘ transcrire la décision dT-Iippo
crarc ,et qtfainsi c’est par le sentiment
de ce grand Medecin , que l’on doit ju.
5er des Enfansqui naissent dans le se
1ième mois. Or , selon Hippocratc me
mqdans le Livre: De natures puerperii, le
a septième mois ne fait qu’apportet e com
mencement de la perfection au Foetus;
donc il n’est pas encore parfait dans ce
temps -, il est seulement assez formé pour
rïêtrc pas incapable de vie 5 mais il n’a
pas encore acquis la force ni la perfecar’
* -’ ‘* tien
JANVIER. I733‘; Il‘.
tien ue naturellementil doit avoir avant
que e naître. Il paroi: évidemment par
_ le Passage du même Auteur, qui se trou
vc dans son Traité de S eptimestri partu ,
que ce n'est que d’une simple possibilité de
‘ vivre qu’il a parlé, en disant que l’Enfant -
naît parfaità 7 mois,puisqu'il assure qu’il
en naît peu l; que de ce peu , il en meurt‘
lusieurs e qu’ils sont tous foibles et ma
lîtdxfs s ce seroit donc supposer une con:
(radiation manifeste dans ces difiercns
passages cH-Iippocrate, que cl’expliqucr
celui qui est rapporté par la Loi , d’une
façon diiÏerehte de celle qui vient d'être
exposée. . .
La seconde partie de la Loi cy-dessus
citée , est absolument contraire aux pré:
tentions de Cathxrine Morlot; ce n'est
qu’en faveur d’un Enfant né d’un maria
ge illégitime; que la Loi admet sa pré; *
somption -, FEnFant de Catherine Morlot
est le fruit d'un commerce illegitimeia
Loi nÎest donc plus applicable. _
Et qu’on ne dise pas que l’on ne doit.’
point présumer un crime tel qu’est Pin
continence d'une Veuve , pendant Pan!
née de son Deuil, sur de simples appa;
rences, et que ce n’est que par des'preu—
vcs convaincantes que l'on peut détruire
la présomption de la naissance de son En
r B fang
u: MERCURE DE FRANCE:
fant à 7 mois. Ce raisonnement pourroit
avoir lieu si Pimpudicité de Catherine
Morlor n'étoit pas avérée; mais sa pro
‘ re confession , et la naissance de son En
Ëint en sont des preuves invinciblesll ne
‘s'agir donc plus que de fixer la datte de
son crime; elle ne doit pas attendre que
pour la placer a son gré , on admette une
supposition contre nature , et u1 n’est
reçuë par les Loix qu’en faveur . c la lé
gitimité ou de la liberté des Enfans. Il se
roit absurde de penser que cette Veuve
‘eut passé son année de Deuil dans la con
tinence , et que dès le lendemain elle se
fut abandonnée , et eût accouché au bout
de six mois d’un Enfant aussi vigoureux
que le sont ordinairement ceux qui nais
sent à neufmois,avec toute la perfection
=que l’on peut espere: dans un age aussi
tendre, p
La Loi I3. de suis et lcgit, kami. n’est
pas non plus favorable àCatherine Mor
ot; ce n’est qu’en faveur de la liberté de
PEnfant , qu’elle présume sa naissance à
sept mois. Catherine Motlot ne peut as
employer cette présomption pour el e ;
et puisque l’on n’attaque point la liberty’
de son Enfant, elle n'a pas dû regarde:
comme une servitude , la nécessité de pas
ser son veuvage dans la continence.
l‘: KL
\
JANVÏER. 173;: 2;“
C’est‘sans aucune apparence de raison
‘qu'elle a recours à une fiction de Droit ,'
c’est à-dire ,à lïffet rétroactif du maria
ge, pour en conclure qu’elle est bien’
fondée à employer la présomption que
les Loix ont introduite; ce n'est pas sur
une fiction , mais sur une réalité que l’on
doit fixer 1a date d'un mariage °, ce n’est
que par une indulgence des loix qu'il a un
effet rétroactif pour la légitimation des
enfans; mais il ne peut donner lieu à la
présomptionde sa naissance dans le sep
tiéme mois , parce que ce_ n'est qu’en con
séquence d’un signe certain que l’on doit
admettre les présomptions des Loix.
Voyez Menoch. De PmsumpLliv. 1. ch. 8.
Qand un Enfant est né dans le sep
tiéme mois d’un mariage légitime , ce
mariage est le signe certain et légal qui
fait présumer le temps au uel il a-été
conçu 3 mais Catherine Moflot n’a que la.
naissance de son Enfant qui puisse déter
miner le temps’de la conception; elle
n’esr dans aucun des cas ‘prévûs par les‘
Loix , on n'en doit donc juger que selon
le cours ordinaire de la nature; et la pré:
somption lui devient contraire, puisqu'il.
n'y a rien icy de certain que son incon
tinence , dont il faut fixer Pépoque.
i Enfin Catherine Morlot prouveroit
B inu-j
‘r4 MERCURE DEVFRANCE:
inutilement que son Enfant n’a été con-î
çu qifaprês Pexpiation de son année de
Deuil; dès qu’il est le fruit d'un commer
ce illicite , elle ne peut éviter de subir les
mêmes peines quïme Veuve qui se seroit
remariée dans Pannée qui suit le décès de
son mari. Tantquïme Femme n'est point
remariée, elle ioüit de tous les avantages
que son mari lui avoit procurez, puisque
son mariage est censé subsister , elle ne
peut s'abandonner sans commrttre une
espece d’adultere; son impudicité désho
normt davantage la mémoire de son mari
qu’un mariage trop précipité; elle ne
doit pas ê.re punie moinsseverement
u'une Veuve qui se remarie dans l’an
du DeuiLCtla suffit pour établir que l’in
continence de Catherine Morlot pendant
son année de Deuil est suflisamment preu
vée,par la naissance de son Enfant, et que
uand elle ne le seroit pas, dès qu’elle est:
forcée d’avoücr son commerce criminel
avec Jacques Oudot, elle ne peut éviter
sa condamnation. .
On répliqua pour Catherine Morlot;
qu’envain voudroit-on affoiblir Pautho
tiré de la Loy , en citant Dulaurent et
' Paul Zachias;1’un qui prétend qu’I-Iip
pocrate a varié, et l’au‘tre qui s’ingere de
le censurer. Paul Zachias après avoir dit
que.
I
«ÏANVIER». 1733.‘ r;
que le terme de sept mois n’esr pas coma
mun , avoue‘ néanmoins , au nombre 63.‘
età Pendroit même qu’ont obfecté ‘les
Heritiers collateraux de Jacques Pouflier,‘
que lesepziéme mois ne laisse pas d’être
un terme légitime : Exindè concludendttm '
minimè est amnes septima mens: mua: illegiq
rima: me , si vivant. Er cela suffit pour
sauver l’Enfant , la Mere et le second
mari de Popprobre dont on veut les char
ger. Mais ce qui doit faire rejetter les sub
tilitez cle ces deux Medecins, est que s’iI
s'agissait de Fétara. d'un Enfant , il ifest
personne qui osât le lui contester dans
e septième mois , sous le prétexte ‘des
variations que Dulaurent impute à Hip
pocrare , ou des conjectures hazardées
par Zachias , dès qu’on a_ contfeux la dé—
cision de la Loi , afFermie encore par une
Jurisprudence uniforme et universelle
en faveur de Yllnfant né dans le septié-g‘
me mois. p
Alphonse de Caranza, Jurisconsulte
du dernier sieclc,dans un Traité de Pur-m,
ui est n'es-estimé , nous donne la Liste
des erreurs du hlcdecin Zachias , su:
cette matiere: Ego cartè cttm Hippocmt:
ferfictianis Jmrtûs principium- tvgttlariter
constitua, ira ut parfactus mm foetus asse in
çtjziat 146i dimidtb axttata arma particttlam
B alla:
u? MERCURE DE FÎÏANCËJ‘
"décidé' pour l’état de l’Enfant né
alterna: atrigerit , quasi evenit principio sepl
timi mensis, quo tempare, ut caeteramm Me
dicorumSchalu afirmeit , muturus jum foetus
pelliculas eulcizmtu disrumpit, et purtmh fieri
nutum cagil. M. Cujas, liv.‘ 4.. des Répon
ses de Papinien , s’explique de la même
maniere : Si querutur un is sit metturus qui
4d initia septimi mensis natus est, dimm
esse muturum , ut putu si nntus sit r82. die,
quiet 182. dits septimum mensem attingunt.
Le Brun , des Success. ch. 4.. Sect. I. n. 6.
7.8.et 9. observe qu’il suiiit que le septié
me mois lunaire soit commencé. Dunod
des Prescriptions, part. z. ch. r 5. pag. zzo.
atteste la même maxime; à quoi il faut
ajoûrer les Arrêts rapporrez par Brodeau,
lettre E. Som. 5. n. r;.par Boniface, tom.
zrpatt. z. liv. 3. tir, 8. ch. 3.dans M.May
nard , et dans Charondas. Or ce cciulian‘s eslte
septiéme mois,'doit l'être également pour
la Mere remariée, parce que Popprobre
de la Mere rejaillit sur son enfant, ct sur
son mariageâ parce que les motifs d’hu
manité sont les mêmes s parce que les
.I.oix pénales sont toujours à restraindre ,
\
jamais a présumer le crime, ou qu’en tout
cas , on présume les moindres foiblesses
les plus pardonnablesfl, les plus faciles à ré
parer; parce qu’enfin la reglc est une, inq
variable sur le septième mois.
‘ CI!
JANVIER. 173;.‘ "x71
Un n’a garde de disconvenir que la Veu-l
vc qui vit dans le désordre ne soir infini
ment plus punissable que celle qui se re
marie; aussi la punit-on , dans les Parle-Ï
lemcns même où l’on excuse le mariage
durant le deuil; mais il ne s'ensuit pas, ni
Hue la peine doive s’étendre sur ce qui se
passe après le deuil, ni qu'il failIe donner
aux faiblesses par où aura pû commencer
1e mariage, un effet rétroactif pour les
réputer commises dans l’an même du deuil,
lorsque par la décision de la Loi il reste
assez de temps après le deuil, pour que
yPEnfant soir réputé conçu hors du temps
de prohibition. _
»- Qfil y aît eu un Contrat de mariage
dans l’an du deull , c’est une circonstance
ui" excuse les foiblesses posrerieures au
deuil, sans ‘qu’on doive les reporter ä.
cette époque; il faut se renfermer dans la
présomption des Loix. Le second maria
ge a un eñiet ‘rétroactif au temps où l’on
doit présumer: la conception de PEnfanr,
pour légitimer PEnfant et itistifier la Me
re, c’est après le deuil ; dès que ce temps
suffit pour se retrouver dans le septiéme
mois , et l’on s’y trouve icy de i4. jours;
car au reste ilén’y a pas de reproches à fai
re sur ce quevle Contrat est dans l’an du
deuil , la prohibition ni les peines ne s’y_
‘ ' B v_ éreng
t8 MERCURE DE FRANCE.‘
étendirent jamais ; la Loi a même prévû‘
ce cas et a condamné l'extension des pei—
«nes qu'une rigueur outrée tentetoit d'y
appliquer : Qge virum elugwt , sponsumfuis
a‘: non noce: , no. 10.5. 1.35‘: de 19j; 7mm.
tuntur infumiii.
M‘ Genreau , Avocat General , ayant
conclu avec beaucoup de solid té et avec
son éloquence ordinaire, en faveur de
Catherine Morlot. LA COUR , par Arrêt
rendu a l’Audience publique,du r7 Juil
let 173:. confirma la donation mutuelle,
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Résumé : QUESTION NOTABLE, jugée par Arrêt du Parlement de Dijon.
Le texte relate une affaire judiciaire impliquant Catherine Morlot, veuve de Jacques Pouflier, un boulanger de Nuys. En 1728, Jacques et Catherine avaient fait une donation mutuelle de leurs biens. Jacques mourut en avril 1729 sans enfants. Catherine se remaria avec Pierre Oudot en mai 1730 et accoucha d'un enfant en octobre de la même année, soit six mois et sept jours après la fin de son deuil. Les parents collatéraux de Jacques contestèrent l'homologation de la donation mutuelle, arguant de l'incontinence de Catherine. Me De la Motte, avocat de Catherine, défendit sa cliente en se basant sur les lois qui présument la légitimité des enfants nés dans le septième mois. Il souligna que Catherine était affranchie de la servitude du deuil et de la loi pénale, ayant attendu 190 jours, soit six mois lunaires et quatorze jours, au-delà des 182 jours requis. M. Davot, avocat des héritiers collatéraux, répliqua que les donations mutuelles étaient souvent considérées comme des libéralités et que l'incontinence de Catherine constituait une injure à la mémoire de son premier mari. Il cita plusieurs auteurs juridiques pour soutenir que Catherine devait perdre les avantages de la donation. Les débats portèrent également sur la légitimité des enfants nés dans le septième mois, avec des références à Hippocrate et d'autres médecins. Les héritiers collatéraux affirmèrent que de tels accouchements étaient rares et contraires à la nature, nécessitant des preuves convaincantes pour être admis. Les arguments se concentrèrent sur la présomption de légitimité des enfants nés dans le septième mois et sur la nécessité de preuves solides pour établir l'incontinence de Catherine. Les deux parties présentèrent des arguments juridiques et médicaux pour soutenir leurs positions respectives. Le texte traite également de la légitimité d'un enfant né au septième mois après le décès du premier époux, en se basant sur des sources juridiques et historiques. Alphonse de Caranza, juriste du dernier siècle, critique les erreurs du médecin Zachias concernant la durée de la grossesse. Plusieurs auteurs, dont Cujas et Le Brun, affirment que le septième mois lunaire est crucial pour déterminer la légitimité de l'enfant. Dunod et d'autres juristes confirment cette règle, soulignant que les lois pénales doivent être interprétées de manière restrictive. Le texte aborde le cas d'une veuve remariée, précisant que les motifs d'humanité et les lois pénales doivent être appliqués de manière à ne pas présumer le crime. Il est mentionné que les faiblesses commises après le deuil ne doivent pas être rétroactivement considérées comme ayant eu lieu pendant le deuil, si suffisamment de temps s'est écoulé pour que la conception soit présumée légitime. Enfin, la Cour a confirmé une donation mutuelle en faveur de Catherine Morlot, après une conclusion solide de l'Avocat Général Genreau.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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22
p. 451-460
LETTRE de M... à Madame de ... au sujet d'une Idylle sur la Naissance de Jesus Christ, divisée en trois Entrées, mise en Musique par M. Bouvart, et chantée par les Dlles élevées dans la Communauté de l'Enfant Jesus, le 14. Février 1734. dédiée à M. le Curé de S. Sulpice, imprimée à Paris, chez Thibout, 1734. Broch. in 4. de 16 pages.
Début :
Je sçai, Madame, que vous vous interessez pour tout ce qui regarde la [...]
Mots clefs :
Idylle, Naissance de Jésus-Christ, M. Bouvart, Communauté de l'Enfant Jésus, Anges, Bergers, Dieu, Naissance, Gloire, Choeur d'anges, Démons, Univers, Jésus, Enfant, Vers, Adorer, Musique
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M... à Madame de ... au sujet d'une Idylle sur la Naissance de Jesus Christ, divisée en trois Entrées, mise en Musique par M. Bouvart, et chantée par les Dlles élevées dans la Communauté de l'Enfant Jesus, le 14. Février 1734. dédiée à M. le Curé de S. Sulpice, imprimée à Paris, chez Thibout, 1734. Broch. in 4. de 16 pages.
LETTRE de M... à Madame de ...
au sujet d'une Idylle sur la Naissance
de Jesus Christ , divisée en trois Entrées,
mise en Musique par M. Bouvart , et
chantée par les Dlles élevées dans la
Communauté de l'Enfant Jesus , le 14 .
Février 1734. dédiée à M. le Curé de
S. Sulpice , imprimée à Paris chez
Thibout , 1734. Broch. in 4. de 16 pages.
J
>
E sçai , Madame , que vous vous in
teressez pour tout ce qui regarde la
Pieté et la Religion ; j'ai crû que vous
ne seriez pas fâchée que je vous fisse
part d'une Idylle sur la Naissance de
N. S. Jesus - Christ , mise en Musique , et
que les Dlles élevées dans la Maison de
l'Enfant Jesus ont chantée ces jours passez
avec tout l'applaudissement possible ;
Vous voyez que M. le Curé de S. Sulpice,
en procurant à ces Dlles une éducation
qui lui fait tant d'honneur , ne se sert.
que de moyens dignes de sa pieté et propres
à former leur coeur et leur esprit
à la vertu et au culte de Dieu . Voici
une idée de ce petit Poëme , dont il n'a
été tiré que peu d'Exemplaires.
L'Idylle
452 MERCURE DE FRANCE
L'Idylle a trois Parties ou Entrées.
La premiere a pour objet l'Empire du
Démon dans le Monde et sur les hommes
jusqu'à la Naissance du Sauveur
qu'un Ange annonce au Démon avec
la destruction, de son Empire. La seconde
, représente les Bergers tout occuppez
à rendre leurs hommages au Sauveur
, dont un Choeur d'Anges vient de
leur apprendre la Naissance. Et la troisiéme
représente l'Adoration des Rois
Mages .
Satan ouvre la premiere Entrée , en
invitant les Démons à se réjouir de la
victoire qu'ils ont remportée sur l'hom
me , et à détruire cet Ouvrage de Dieu
qui est la cause de tous leurs maux. Il
s'exprime en ces termes.
O vous , de mes fureurs Ministres redoutables ,
Vous qui fites trembler les Cieux ,
Vous , des Mortels ennemis implacables ,
Démons , faites briller votre zele à mes yeux.
Les Démons s'unissent à lui pour chanter
leur victoire sur l'homme qu'ils ont
soumis au peché et à la mort. Satan poursuit
en déclarant que c'est pour avoir
refusé d'adorer un Mortel que toute leur
gloire a été changée en une nuit éternelle
; il continue :
Périsse
MARS 1734. 453
Périsse la Race execrable
Qui fut la source de nos maux ;
Ne nous lassons jamais de troubler son repos;
Plus que nous , rendons- la coupable.
Le Choeur des Démons répete les mêmes
Vers. Les Démons font ensuite une
énumeration des maux et des punitions
qu'ils ont attirés sur l'homme ,jusqu'à
faire repentir Dieu de l'avoir créé ; Sa- ,
tan leur ordonne ensuite de se répandre
par tout l'Univers et d'accroître encore
leur Empire et les maux du Genre humain
: en voici les paroles.
Volez de toutes parts , sortez de vos abîmes ;
Dispersez-vous dans les airs ,
Et remplissez l'Univers
De malheurs , de trouble et de crimes.
Les Démons répondent par les mêmes
Vers : Volons de toutes parts , & c, et ils
s'y disposent en effet lorsqu'un Ange ,
précede d'une Symphonie de triomphe ,
les arrête et leur annonce la Naissance
du Sauveur qui doit détruire leur Empire
, rétablir la paix dans l'Univers et
se faire adorer des Nations . Sitan se retire
en prononçant ce blasphême.
Non, non , il veut en vain détruire ma puissance;
454 MERCURE DE FRANCE
En vain il veut sauver les Humains de nos coups;
Eux -mêmes, plus ingrats, plus perfides que nous,
Signaleront bien - tôt leur desobéissance ;
Et seront les premiers à braver son courroux.
Après quoi Satan et ses Démons se
retirent , tandis que l'Ange de Paix conjure
le Liberateur des hommes , qui ne
descend que pour les sauver , de détourner
de dessus eux les malheurs dont ils
sont menacez , et de ne frapper de ses
coups que les têtes superbes de leurs jaloux
ennemis.
Un Choeur d'Anges termine cette Entrée
par ces Vers .
Le Sauveur vient de naître.
Que les Enfers , que la Terre et les Cieux ,
Que tout s'empresse à reconnoître
Cet Enfant glorieux.
La deuxième Entrée est composée de
quatre Bergers , de deux Bergeres , d'un
Choeur de Bergers et d'un Choeur d'Anges.
Les Bergers commencent et se déclarent
mutuellement la surprise où ils
sont de voir la Nature toute changée ;
la nuit éclairée , les agrémens du Printemps
et de l'Automne réunis dans la
saison de Hyver . Les quatre Bergers
s'écrient ensemble :
Comme
MARS. 1734. 455
Comme vous , chers amis , je ne sçaurois comprendre
Le prodige nouveau qui vient frapper nos yeux.
Ces effets surprenans doivent nous faire attendre
Le plus rare bienfait des Cieux.
Ils entendent en effet une Symphonie ,
suivie bien- tôt d'un Choeur d'Anges qui
rendent gloire à Dieu et qui annoncent
la Paix à la Terre , en publiant l'auguste
Naissance du Fils du Très - Haut . La Crêche
paroît en même - temps , et les Bergers
s'entredeniandent quel est cet admirable
Enfant qu'ils apperçoivent couché
dans la Crêche . Ils apprennent d'un
Ange que c'est le Fils de Dieu , le Messie
tant desiré , qui vient porter lui- même
la peine de mort que méritent les hommes.
Il les exhorte ensuite à venir lui
rendre leurs respects.
Bergers , empressez-vous , hâtez - vous d'adores
Celui qui vient vous retirer
D'un triste esclavage.
Sous ces rustiques toîts abbaissant son pouvoir,
C'est de vous qu'il veut recevoir
Le premier hommage.
Le Choeur des Anges et celui des Bergers
répetent :
Ac456
MERCURE DE FRANCE
Accourons , * accourons, hâtons- nous d'adorer
Celui qui vient nous retirer , &c .
Les Bergers et les Bergeres expriment
ensuite leur joye et leurs voeux , et ne
veulent plus chanter que ce Liberateur ,
qui fera desormais l'objet de leursChants,
&c . et ils lui offriront des Sacrifices proportionnez
à leur pouvoir . Cette Entrée
finit par ces Vers d'un Choeur d'Anges
et des Bergers .
'Animons - nous de nouvelles ardeurs
Ne cessons point de chanter la victoire
•
Du Dieu dont la bonté vient finir nos malheurs
;
Que par tout l'Univers on celebre sa gloire ,
Qu'il triomphe de tous les coeurs .
Les trois Mages marquent leur étonnement
, en ouvrant la troisiéme Entrée , de
ne plus voir l'Astre qui les avoit conduits
et qui leur avoit fait esperer de pouvoir
adorer le vrai Dieu devenu Enfant , ils
ajoûtent tous trois :
Mais ici rien ne se présente
Qui puise découvrir sa demeure brillante ;
Les Anges disent , accourez , bátez- vous.& c .
Les Anges disent , animez- vous .
Ni
MARS. 1734. 457
Ni Temple , ni Palais ne s'offrent à nos yeux ;
La pauvreté regne en tous lieux.
Un Ange leur découvre ce Mystere
par ces Vers.
Le Maître tout-puissant de la Terre et de l'Onde,
Par son humilité profonde ,
Vient confondre à jamais les Mortels orgueilleux,
Et dans l'état le plus vil à leurs yeux ,
Il est plus grand que tous les Rois duMonde,
La Crêche reparoît , et les Mages témoignent
qu'ils croyent aux paroles de
l'Ange et au Mystere qu'il leur annonce.
L'Ange leur adresse ensuite ces paroles .
Que ce Dieu si charmant de ses divine's flâmes ,
Embraze désormais vos ames ;
Qu'il regne sur vos coeurs ; qu'à l'envi les Mortels
De toutes parts lui dressent des Autels .
Les Choeurs des Anges et des Rois répetent
la même chose. Chacun des Rois
fait son présent et explique les rapports
qu'il a avec les Mysteres de l'Homme-
Dieu. Après quoi un Ange chante cette
Cantatille pour exhorter les Rois à publier
la gloire de leur Liberateur.
Que tout reconnoisse la gloire
C Du
458
MERCURE
DE
FRANCE
Du seul Maître de l'Univers
Il a remporté la victoire
Sur le Monde et sur les Enfers.
Descendez de vos Trônes ,
Kois , abbaissez vos Sceptres à ses piedss
Si devant lui vous vous humiliez
Il affermira vos Couronnes .
Que tout reconnoisse , &c .
Un autre Ange ajoûte :
Rois fortunez , dont Jesus a fait choix .
Four venir les premiers adorer sa Puissance ;
Avec nous unissez vos voix .
Allez dans l'Univers annoncer la Naissance ,
Et la gloire du Roy des Rois.
Le Choeur des Anges et des Rois finie
lá Piece en répetant ces derniers Vers :
-
Allons dans l'Univers annoncer là Naissance
Et la gloire du Roy des Rois..
Voilà , Madame une idée de cette
Idylle , dont l'Auteur est M. Morand
d'Arles , dont on a vû plusieurs Pieces
dans differens Mercures ; vous connoissez
, sans doute , M. Bouvard , qui a mis
ces Vers en Musique ; il est très - connu
* Les Anges disent , allez , &c.
par
MARS 1734.
459
par beaucoup d'Ouvrages ; l'Opera de
Meduse , de sa composition , eut un
grand succès dans sa nouveauté en 1702.
Il doit , dit- on , être repris l'Automne
prochain. Cet Auteur a cessé depuis
long-temps de travailler pour le Théatre,
et il s'est livré à des occupations plus
Religieuses. Il a fait voir dans cette Idylle
que la Musique n'est jamais plus susceptible
de force et de grandeur que
lorsqu'elle est employée à accompagner
les louanges du Seigneur ; et l'on a admiré
avec justice , que n'ayant que de jeunes
filles à faire chanter , et par consequent
que des voix presque égales , il ait pû
faire des Chours aussi beaux et aussi
travaillez que ceux dont cet Ouvrage est
rempli .
Je n'ai pas besoin , Madame , de vous
parler de l'illustre Pasteur auquel cette
Idylle est dédiée , et de vous informer
du mérite d'un homme universellement
estimé et respecté. Vous sçavez qu'entre
les beaux Etablissemens auxquels sa charité
est occupée tous les jours , celui de
l'Enfant Jesus , où trente Demoiselles de
condition sont élevées de- même qu'à
S. Cyr , tient, sans doute, le second rang,
pour ne rien dire de plus. Permettezmoi
de transcrire ici ce qu'en dit l'Epitre
Cij
Dé
460 MERCURE DE FRANCE
Dédicatoire qui est à la tête de ce petit
Ouvrage. La Maison de l'Enfant Jesus
» attire déja les voeux d'un nombre in-
>> fini de Familles , à qui la fortune n'a
» laissé pour tout bien que le souvenir
» de leur gloire passée. C'est-là , sur tout,
>> que l'on découvre toute l'étenduë de
»ce vaste Génie, qui vous faisant embras-
» ser les plus grandes choses , ne vous
» laisse pas pourtant dédaigner d'entrer
» dans les plus petites . C'est de-là que
» de jeunes Dlles , élevées suivant leur
» naissance , apprennent à préferer les
abbaissemens et l'humilité de la Reli
» gion , au vain éclat et aux fausses gran-
» deurs du Monde , et à n'employer les
» talens dont le Ciel a pû les orner , qu'à
» la gloire du souverain Maître. C'est- là
» que la Poësie et la Musique sanctifiées ,
paroissent dans le même esprit de ceux
» qui ne les ont inventez que pour mieux
celebrer la Grandeur du Très- Haut. Je
suis , Madame , avec respect , &c.
A Paris le 24. Février 1734.
au sujet d'une Idylle sur la Naissance
de Jesus Christ , divisée en trois Entrées,
mise en Musique par M. Bouvart , et
chantée par les Dlles élevées dans la
Communauté de l'Enfant Jesus , le 14 .
Février 1734. dédiée à M. le Curé de
S. Sulpice , imprimée à Paris chez
Thibout , 1734. Broch. in 4. de 16 pages.
J
>
E sçai , Madame , que vous vous in
teressez pour tout ce qui regarde la
Pieté et la Religion ; j'ai crû que vous
ne seriez pas fâchée que je vous fisse
part d'une Idylle sur la Naissance de
N. S. Jesus - Christ , mise en Musique , et
que les Dlles élevées dans la Maison de
l'Enfant Jesus ont chantée ces jours passez
avec tout l'applaudissement possible ;
Vous voyez que M. le Curé de S. Sulpice,
en procurant à ces Dlles une éducation
qui lui fait tant d'honneur , ne se sert.
que de moyens dignes de sa pieté et propres
à former leur coeur et leur esprit
à la vertu et au culte de Dieu . Voici
une idée de ce petit Poëme , dont il n'a
été tiré que peu d'Exemplaires.
L'Idylle
452 MERCURE DE FRANCE
L'Idylle a trois Parties ou Entrées.
La premiere a pour objet l'Empire du
Démon dans le Monde et sur les hommes
jusqu'à la Naissance du Sauveur
qu'un Ange annonce au Démon avec
la destruction, de son Empire. La seconde
, représente les Bergers tout occuppez
à rendre leurs hommages au Sauveur
, dont un Choeur d'Anges vient de
leur apprendre la Naissance. Et la troisiéme
représente l'Adoration des Rois
Mages .
Satan ouvre la premiere Entrée , en
invitant les Démons à se réjouir de la
victoire qu'ils ont remportée sur l'hom
me , et à détruire cet Ouvrage de Dieu
qui est la cause de tous leurs maux. Il
s'exprime en ces termes.
O vous , de mes fureurs Ministres redoutables ,
Vous qui fites trembler les Cieux ,
Vous , des Mortels ennemis implacables ,
Démons , faites briller votre zele à mes yeux.
Les Démons s'unissent à lui pour chanter
leur victoire sur l'homme qu'ils ont
soumis au peché et à la mort. Satan poursuit
en déclarant que c'est pour avoir
refusé d'adorer un Mortel que toute leur
gloire a été changée en une nuit éternelle
; il continue :
Périsse
MARS 1734. 453
Périsse la Race execrable
Qui fut la source de nos maux ;
Ne nous lassons jamais de troubler son repos;
Plus que nous , rendons- la coupable.
Le Choeur des Démons répete les mêmes
Vers. Les Démons font ensuite une
énumeration des maux et des punitions
qu'ils ont attirés sur l'homme ,jusqu'à
faire repentir Dieu de l'avoir créé ; Sa- ,
tan leur ordonne ensuite de se répandre
par tout l'Univers et d'accroître encore
leur Empire et les maux du Genre humain
: en voici les paroles.
Volez de toutes parts , sortez de vos abîmes ;
Dispersez-vous dans les airs ,
Et remplissez l'Univers
De malheurs , de trouble et de crimes.
Les Démons répondent par les mêmes
Vers : Volons de toutes parts , & c, et ils
s'y disposent en effet lorsqu'un Ange ,
précede d'une Symphonie de triomphe ,
les arrête et leur annonce la Naissance
du Sauveur qui doit détruire leur Empire
, rétablir la paix dans l'Univers et
se faire adorer des Nations . Sitan se retire
en prononçant ce blasphême.
Non, non , il veut en vain détruire ma puissance;
454 MERCURE DE FRANCE
En vain il veut sauver les Humains de nos coups;
Eux -mêmes, plus ingrats, plus perfides que nous,
Signaleront bien - tôt leur desobéissance ;
Et seront les premiers à braver son courroux.
Après quoi Satan et ses Démons se
retirent , tandis que l'Ange de Paix conjure
le Liberateur des hommes , qui ne
descend que pour les sauver , de détourner
de dessus eux les malheurs dont ils
sont menacez , et de ne frapper de ses
coups que les têtes superbes de leurs jaloux
ennemis.
Un Choeur d'Anges termine cette Entrée
par ces Vers .
Le Sauveur vient de naître.
Que les Enfers , que la Terre et les Cieux ,
Que tout s'empresse à reconnoître
Cet Enfant glorieux.
La deuxième Entrée est composée de
quatre Bergers , de deux Bergeres , d'un
Choeur de Bergers et d'un Choeur d'Anges.
Les Bergers commencent et se déclarent
mutuellement la surprise où ils
sont de voir la Nature toute changée ;
la nuit éclairée , les agrémens du Printemps
et de l'Automne réunis dans la
saison de Hyver . Les quatre Bergers
s'écrient ensemble :
Comme
MARS. 1734. 455
Comme vous , chers amis , je ne sçaurois comprendre
Le prodige nouveau qui vient frapper nos yeux.
Ces effets surprenans doivent nous faire attendre
Le plus rare bienfait des Cieux.
Ils entendent en effet une Symphonie ,
suivie bien- tôt d'un Choeur d'Anges qui
rendent gloire à Dieu et qui annoncent
la Paix à la Terre , en publiant l'auguste
Naissance du Fils du Très - Haut . La Crêche
paroît en même - temps , et les Bergers
s'entredeniandent quel est cet admirable
Enfant qu'ils apperçoivent couché
dans la Crêche . Ils apprennent d'un
Ange que c'est le Fils de Dieu , le Messie
tant desiré , qui vient porter lui- même
la peine de mort que méritent les hommes.
Il les exhorte ensuite à venir lui
rendre leurs respects.
Bergers , empressez-vous , hâtez - vous d'adores
Celui qui vient vous retirer
D'un triste esclavage.
Sous ces rustiques toîts abbaissant son pouvoir,
C'est de vous qu'il veut recevoir
Le premier hommage.
Le Choeur des Anges et celui des Bergers
répetent :
Ac456
MERCURE DE FRANCE
Accourons , * accourons, hâtons- nous d'adorer
Celui qui vient nous retirer , &c .
Les Bergers et les Bergeres expriment
ensuite leur joye et leurs voeux , et ne
veulent plus chanter que ce Liberateur ,
qui fera desormais l'objet de leursChants,
&c . et ils lui offriront des Sacrifices proportionnez
à leur pouvoir . Cette Entrée
finit par ces Vers d'un Choeur d'Anges
et des Bergers .
'Animons - nous de nouvelles ardeurs
Ne cessons point de chanter la victoire
•
Du Dieu dont la bonté vient finir nos malheurs
;
Que par tout l'Univers on celebre sa gloire ,
Qu'il triomphe de tous les coeurs .
Les trois Mages marquent leur étonnement
, en ouvrant la troisiéme Entrée , de
ne plus voir l'Astre qui les avoit conduits
et qui leur avoit fait esperer de pouvoir
adorer le vrai Dieu devenu Enfant , ils
ajoûtent tous trois :
Mais ici rien ne se présente
Qui puise découvrir sa demeure brillante ;
Les Anges disent , accourez , bátez- vous.& c .
Les Anges disent , animez- vous .
Ni
MARS. 1734. 457
Ni Temple , ni Palais ne s'offrent à nos yeux ;
La pauvreté regne en tous lieux.
Un Ange leur découvre ce Mystere
par ces Vers.
Le Maître tout-puissant de la Terre et de l'Onde,
Par son humilité profonde ,
Vient confondre à jamais les Mortels orgueilleux,
Et dans l'état le plus vil à leurs yeux ,
Il est plus grand que tous les Rois duMonde,
La Crêche reparoît , et les Mages témoignent
qu'ils croyent aux paroles de
l'Ange et au Mystere qu'il leur annonce.
L'Ange leur adresse ensuite ces paroles .
Que ce Dieu si charmant de ses divine's flâmes ,
Embraze désormais vos ames ;
Qu'il regne sur vos coeurs ; qu'à l'envi les Mortels
De toutes parts lui dressent des Autels .
Les Choeurs des Anges et des Rois répetent
la même chose. Chacun des Rois
fait son présent et explique les rapports
qu'il a avec les Mysteres de l'Homme-
Dieu. Après quoi un Ange chante cette
Cantatille pour exhorter les Rois à publier
la gloire de leur Liberateur.
Que tout reconnoisse la gloire
C Du
458
MERCURE
DE
FRANCE
Du seul Maître de l'Univers
Il a remporté la victoire
Sur le Monde et sur les Enfers.
Descendez de vos Trônes ,
Kois , abbaissez vos Sceptres à ses piedss
Si devant lui vous vous humiliez
Il affermira vos Couronnes .
Que tout reconnoisse , &c .
Un autre Ange ajoûte :
Rois fortunez , dont Jesus a fait choix .
Four venir les premiers adorer sa Puissance ;
Avec nous unissez vos voix .
Allez dans l'Univers annoncer la Naissance ,
Et la gloire du Roy des Rois.
Le Choeur des Anges et des Rois finie
lá Piece en répetant ces derniers Vers :
-
Allons dans l'Univers annoncer là Naissance
Et la gloire du Roy des Rois..
Voilà , Madame une idée de cette
Idylle , dont l'Auteur est M. Morand
d'Arles , dont on a vû plusieurs Pieces
dans differens Mercures ; vous connoissez
, sans doute , M. Bouvard , qui a mis
ces Vers en Musique ; il est très - connu
* Les Anges disent , allez , &c.
par
MARS 1734.
459
par beaucoup d'Ouvrages ; l'Opera de
Meduse , de sa composition , eut un
grand succès dans sa nouveauté en 1702.
Il doit , dit- on , être repris l'Automne
prochain. Cet Auteur a cessé depuis
long-temps de travailler pour le Théatre,
et il s'est livré à des occupations plus
Religieuses. Il a fait voir dans cette Idylle
que la Musique n'est jamais plus susceptible
de force et de grandeur que
lorsqu'elle est employée à accompagner
les louanges du Seigneur ; et l'on a admiré
avec justice , que n'ayant que de jeunes
filles à faire chanter , et par consequent
que des voix presque égales , il ait pû
faire des Chours aussi beaux et aussi
travaillez que ceux dont cet Ouvrage est
rempli .
Je n'ai pas besoin , Madame , de vous
parler de l'illustre Pasteur auquel cette
Idylle est dédiée , et de vous informer
du mérite d'un homme universellement
estimé et respecté. Vous sçavez qu'entre
les beaux Etablissemens auxquels sa charité
est occupée tous les jours , celui de
l'Enfant Jesus , où trente Demoiselles de
condition sont élevées de- même qu'à
S. Cyr , tient, sans doute, le second rang,
pour ne rien dire de plus. Permettezmoi
de transcrire ici ce qu'en dit l'Epitre
Cij
Dé
460 MERCURE DE FRANCE
Dédicatoire qui est à la tête de ce petit
Ouvrage. La Maison de l'Enfant Jesus
» attire déja les voeux d'un nombre in-
>> fini de Familles , à qui la fortune n'a
» laissé pour tout bien que le souvenir
» de leur gloire passée. C'est-là , sur tout,
>> que l'on découvre toute l'étenduë de
»ce vaste Génie, qui vous faisant embras-
» ser les plus grandes choses , ne vous
» laisse pas pourtant dédaigner d'entrer
» dans les plus petites . C'est de-là que
» de jeunes Dlles , élevées suivant leur
» naissance , apprennent à préferer les
abbaissemens et l'humilité de la Reli
» gion , au vain éclat et aux fausses gran-
» deurs du Monde , et à n'employer les
» talens dont le Ciel a pû les orner , qu'à
» la gloire du souverain Maître. C'est- là
» que la Poësie et la Musique sanctifiées ,
paroissent dans le même esprit de ceux
» qui ne les ont inventez que pour mieux
celebrer la Grandeur du Très- Haut. Je
suis , Madame , avec respect , &c.
A Paris le 24. Février 1734.
Fermer
Résumé : LETTRE de M... à Madame de ... au sujet d'une Idylle sur la Naissance de Jesus Christ, divisée en trois Entrées, mise en Musique par M. Bouvart, et chantée par les Dlles élevées dans la Communauté de l'Enfant Jesus, le 14. Février 1734. dédiée à M. le Curé de S. Sulpice, imprimée à Paris, chez Thibout, 1734. Broch. in 4. de 16 pages.
La lettre de M... à Madame de... décrit une idylle sur la Naissance de Jésus-Christ, composée en trois parties et mise en musique par M. Bouvart. Cette idylle a été interprétée par les demoiselles de la Communauté de l'Enfant Jésus le 14 février 1734 et dédiée à M. le Curé de Saint-Sulpice. L'œuvre a été imprimée à Paris chez Thibout en 1734 sous forme de brochure in-4 de 16 pages. L'idylle se structure en trois sections. La première partie relate la domination du Démon sur les hommes jusqu'à la venue du Sauveur, annoncée par un ange. La seconde partie met en scène les bergers rendant hommage au Sauveur, dont la naissance est proclamée par un chœur d'anges. La troisième partie illustre l'adoration des Rois Mages. L'auteur de l'idylle est M. Morand d'Arles, et la musique a été composée par M. Bouvart, célèbre pour son opéra 'Méduse'. L'œuvre souligne la puissance de la musique lorsqu'elle est utilisée pour louer le Seigneur. La lettre met également en lumière le mérite de M. le Curé de Saint-Sulpice et l'éducation pieuse des demoiselles de la Maison de l'Enfant Jésus.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
22
LETTRE de M... à Madame de ... au sujet d'une Idylle sur la Naissance de Jesus Christ, divisée en trois Entrées, mise en Musique par M. Bouvart, et chantée par les Dlles élevées dans la Communauté de l'Enfant Jesus, le 14. Février 1734. dédiée à M. le Curé de S. Sulpice, imprimée à Paris, chez Thibout, 1734. Broch. in 4. de 16 pages.
23
p. 706
A MLLE DE AU JOUR DE SA NAISSANCE.
Début :
Votre Naissance, Iris, est un deüil à Cythere, [...]
Mots clefs :
Naissance, Amour
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A MLLE DE AU JOUR DE SA NAISSANCE.
A MLLE DE
AU JOUR DE SA NAISSANCE.
V
Otre Naissance , Iris , est un deüil à Cythere
,
Ah ! craignez la vengeance et les traits de l'Amour
;
Vos charmes , de dépit ont fait mourir sa Mere;
Mais tant que vous vivrez , son fils verra le jour.
AU JOUR DE SA NAISSANCE.
V
Otre Naissance , Iris , est un deüil à Cythere
,
Ah ! craignez la vengeance et les traits de l'Amour
;
Vos charmes , de dépit ont fait mourir sa Mere;
Mais tant que vous vivrez , son fils verra le jour.
Fermer
24
p. 201-213
NAISSANCE, MARIAGES, & Morts.
Début :
Le 21 Mars, Angélique-Louise de la Rochefoucauld, épouse de Jean-Alexandre-Romée [...]
Mots clefs :
Comte, Seigneur, Mariages, Général, Capitaine, Duc, Marquis, Alliances, Mort, Naissance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : NAISSANCE, MARIAGES, & Morts.
NAISSANCE , MARIAGES
& Morts.
E 21 Mars , Angélique- Louife de la Rochefoncauld
, époufe de Jean- Alexandre- Romée de
Villeneuve , Vicomte de Vence , Colonel en fecond
& commandant le Régiment Royal- Corfe ,
eft accouchée à Aix d'un fils qui a été nommé
Jules-Alexandre Romée.
202 MERCURE DE FRANCE..
Le 11 de Janvier fut célebré le mariage de
Louis-Léon-Félicité , Comte de Lauraguais , fils
de Louis de Brancas , Duc de Lauraguais , & d'Elifabeth-
Pauline d'Itanguien.
La cérémonie fut faite dans la Chapelle de
l'Hôtel de Biron , par M. le Cardinal de la Rochefoucauld.
La maifon de Brancas eft affez connue par fon
ancienneté , fon illuftration & fes grandes alliances
,fans qu'il foit néceffaire ici d'en faire l'éloge.
Son hiſtoire a été imprimée par beaucoup d'Auteurs
, elle fe trouve dans celle des grands Officiers
de la Couronne , article du Duché- Pairie de
Villars , t . V. p. 277. On y voit que cette Maiſon
eft originaire de Naples , où elle a poffedé les
premieres Charges de cette Couronne , & que le
premier qui s'établit en Provence y vint avec deux
Cardinaux c'étoit Bufille de Brancas , Comte
d'Agnano , au Royaume de Naples , & Seigneur
d'Oife & de Vilofe , aux Diocèfes de Digne , & de
Sifteron , Maréchal de la Cour Romaine , vers la
fin du quatorzieme fiecle .
Le 1 Février , Louis d'Etampes , Marquis
d'Etampes , fils de Louis Roger , Marquis d'Etampes
, & de Marguerite Lidie de Becdelievres de
Cany, époufa Adélaïde- Godefroi-Julie de Fouilleufe
de Flavacourt , fille de François - Marie de
Fouilleufe , Marquis de Flavacourt , Maréchal des
Camps & armées du Roi , & Lieutenant de Roi de
Normandie , & de Hortenfe-Félicité de Mailly de
Nefle.
La maifon d'Etampes , illuftre par les premieres
dignités de l'Eglife & de l'Etat , à eu des alliances
avec les maifons de Montmorenci , de Beauvilliers
, de Gouffier , de Regnier , de Guerchy , de
la Châtre , de Brulart de Sillery , de Choifeul , de
, י
MAI. 1755- 203
Becdelievres , de Béthune , d'Ailly , de Fiennes ,
de Monchy, de Chavagnac , de Rochechouart , &
autres.
Cette maifon a formé quatre branches : la
branche de la Ferté- Imbault , celle de la Mottelez-
Ennordre , de Valençay , & celle d'Autry.
La branche de la Motte- lez-Ennordre defcend
de Jean d'Etampes , Seigneur de la Ferté- Imbault ,
lequel de fon mariage avec Blanche d'Ailly , fille
de Waleran d'Ailly , de la branche de Sains , Seigneur
de Marigny , Bailli de Senlis , & de Jacqueline
de Rouvroy-Saint- Simon, eut plufieurs enfans,
entr'autres Louis d'Etampes , Seigneur de la Ferté-
Imbault , qui a continué la branche aînée , & qui
eft le fixieme ayeul du Marquis d'Etampes qui
donne lieu à cet article , & François d'Etampes
auteur de la branche de la Motte- lez- Ennordre.
La branche de Valençay & celle d'Autry
defcendent de Robert III . d'Etampes , Seigneur
de Sallebris , d'Ardreloup & de Tillay , Maréchal
& Sénéchal du Bourbonnois , lequel eut trois garçons
de fon mariage avec Louife Levraud , fçavoir
Jean d'Etampes , Seigneur de la Ferté-Imbault
dont on a parlé plus haut ; Louis d'Etampes , Seigneur
de Valençay , & Robert d'Etampes , Seigneur
d'Autry. Voyez les Tablettes hiftoriques ,
généalogiques & chronologiques , quat. Partie ,
P. 395. & Gr. Off. tome 7. p . 543 .
La maifon de Fouilleufe de Flavacourt , une des
plus anciennes du Vexin François , a pris alliance
dans le 13 fiecle avec la maiſon de Crevecoeur ,
& depuis avec celle de Gaucourt , de Boves , du
Bec- Crefpin , de Dampont , de Suzanne de Cerny,
de Gaudechart , de Ligny , de Rouffé d'Alembon ,
de Rouxel de Médavy , de Mailly , & autres. Voyez
Tab. Généal. 4. part. p. 77.´.
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
Le 10 Mars , Milord Clare , Comte de Tho
mond , Chevalier des Ordres du Roi , Lieutenant
général de fes armées , & Infpecteur général ,
époufa Marie- Genevieve- Louife de Chiffreville ,
fille unique du Marquis de Chiffreville , Lieutenant
général des armées de Sa Majeſté , & premier
Sous-Lieutenant de la feconde Compagnie des
Moufquetaires , & de Dame Marie- Genevieve le
Tonnellier de Charmeaux .
Ce mariage a été fait dans la Chapelle de
l'Hôtel de Machault , par l'Abbé de Breteuil , ancien
Agent général du Clergé.
Le 14 Février 1755 mourut à Paris Marie-
'Anne de Gouffier de Thois , âgée de foixante-huit,
ans fept jours , veuve depuis le 14 Avril 1724 , de
Louis de Bourbon , fecond du nom , Comte de
Buffet & de Châlus , Baron de Piégut , de Vezigneux
, & de Saint - Martin du Puis , &c . qu'elle
avoit épousé par contrat du 31 Décembre 1719.
Elle étoit fille de Thimoléon de Gouffier , Marquis
de Thois , & autres lieux , Gouverneur de
Blois , & d'Henriette de Penancoët de Keroualle ,
veuve de Philippe Herbert , Comte de Pembrock
en Angleterre ; & foeur cadette de Louife-Renée
de Penancoët de Keroualle , Ducheffe de Portsmouth.
Madame la Comteffe de Bourbon- Buffet
laiffe de fon mariage trois enfans , fçavoir ,
2
1. François-Louis Antoine de Bourbon , Comte
de Buffet , dont on va parler.
2. Louife -Claude de Bourbon- Buffet , Religieufe
Bénédictine au Monaftere du Cherche -midi , Fauxbourg
faint Germain , à Paris , où elle a fait profeffion
le 17 Septembre 1740 .
3. Et Henriette- Antoinette de Bourbon-Buffet ,
yeuve fans enfans depuis le 2 Novembre 1752 , de
MA I. 1755. 205
Paul de Grivel de Groffove , Comte d'Auroy , Seigneur
de Groffove , &c. ancien Meftre de camp
du Régiment d'Anjou , Cavalerie , avec lequel
elle avoit été mariée par contrat du 22 Août 1747.
François-Louis-Antoine de Bourbon , Comte
de Buffet & de Châlus , Baron de Vezigneux & de
Saint-Martin du Puis , Seigneur des Creuziers
&c. Meftre de camp du Régiment de Bourbon-
Buffet , Cavalerie , & Chevalier de l'Ordre militaire
de faint Louis , époufa le 23 Avril 1743 ,
Magdeleine- Louife-Jeanne de Clermont - Tonnerre
, fille de Gafpard de Clermont - Tonnerre ,
Maréchal de France , Chevalier des Ordres du Roi,
Gouverneur de Béfort , Marquis de Vauvillars ,
Comte d'Efpinac & de Thoury , & de feue Antoinette
Potier de Novion . De cette alliance font
fortis les enfans qui fuivent .
1. Gafpard- Louis de Bourbon - Buffet , Comte
de Châlus , mort à Paris le 8 Décembre 1751 , âgé
de fix ans & demi.
2.
Louis-François-Jofeph de Bourbon- Buffer ,
aujourd'hui Comte de Châlus , né au Château, de
Buffet en Auvergne , le 1 Juin 1749.
I
3. Artus Charles - Thimoléon de Bourbon-
Buffet , né à Paris le 21 Septembre 1752 .
4. N.... de Bourbon- Buffet , né au Château de
Buffet , le 11 Novembre 1753 , non encore nom
mé..
S. N...de Bourbon-Buffet , née à Buffet , lé 20
Juillet 1746 , auffi non nommée.
6. Marie-Anne-Julie -Louife de Bourbon- Buf
fet , Demoifelle de Châfus , née au Château de Buffet
le 16 Septembre 1747.
7. Et N. de Bourbon- Buffet , morte au Château
de Buffet , le 23 Mars 1751 , fans avoir été nommée,
âgée de deux jours ..
206 MERCURE DE FRANCE.
Voyez ce qui eft dit de la maiſon de Gouffier ;
dans le volume V. p. 605. & fuiv . de l'Hiſtoire des
Grands Officiers de la Couronne ; & le Mercure
du mois de Juin 1754. premiere Partie , à l'occa
fion de la mort de M. le Marquis de Thois , frere
aîné de Madame la Comteffe de Bourbon - Buffet ;
& la quatrieme Partie des Tablettes hiftoriques ,
pages 114 & 115 .
François de Mailly , Comte de Mailly , mourut
le 21 de Février au château de Saint - Leger
près d'Abbeville , âgé de foixante- treize ans ;
il étoit oncle du Comte de Mailly , Lieutenant
général des armées du Roi , & de la province de
Rouffillon , Infpecteur de la Cavalerie , à qui il
a laiffé les terres de fa branche.
La Maiſon de Mailly eft trop connue pour
qu'il foit néceffaire d'entrer ici dans aucun détail
fur l'ancienneté de fon origine , & fur la
grandeur de fes alliances. Il fuffira de rappeller
qu'en 1070 Anfelme de Mailly
doit l'armée de la Comteffe de Flandre , &
gouvernoit fes Etats comme tuteur & le plus
proche parent du Comte fon fils .
* comman-
Colard de Mailly ** fut appellé au gouvernement
du Royaume fous Charles VF , & cette
illuftration a tranfmis dans cette Maifon une
Couronne perfonnelle entremêlée de fleurs de
lys , qu'elle porte depuis ce tems . L'on fçait
auffi que cette Maifon a été revêtue dans tous
* Chronique de Flandre , par Dom de Gherit , 13
91. Hiftoire des Châtelains de Lille , par Floris
Vander- Vaher. Malbrancq. dans ce qu'il a écrit
fur la Flandre.
** Monftrelet , tom. 1. p.77 130. Hift . de Charles
VI. par Le Laboureur , liv . 30. p. 755..
MA I. 1755. 207
*
les tems des Ordres & des plus grandes Charges de
la Couronne .
Le Comte de Mailly , Seigneur de Saint-
Leger , qui donne lieu à cet article , étoit de
la branche des Comtes de Mailly , Seigneurs
d'Haucourt , féparée en 1503 par le mariage
qu'Adrien de Mailly , fecond fils de Jean , Sire
de Mailly , Chambellan de Charles VIII & de
Louis XII , & d'Ifabeau d'Ailly , fille de Jean ,
Vidame d'Amiens , & d'Iolande de Bourgogne ,
fit avec Françoife de Bailleul , fille d'Adrien de
Bailleul & de Jeanne d'Haucourt , par contrat
du 18 Octobre 1503 : c'est par cette alliance
que la terre d'Haucourt eft entrée dans cette
branche de la Maifon de Mailly. L'on voit à
ce fujet un acte paffé devant le Roi François I ,
qui donne à Adrien de Mailly le titre de coufin
, & qui lui remet en faveur dudit mariage
tous les droits qui lui étoient dûs fur la Maifon
de Bailleul ; il ratifia le 3 Mai 1513
tranfaction paffée entre lui & le Comte de Vendôme
, fur les droits réciproques qu'ils avoient
fur la terre de Ravenfberg , à caufe de la Maifon
de Bailleul , dont étoit iffu par fa mere le
Comte de Vendôme.
la
Adrien de Mailly eut entr'autres enfans Edme
de Mailly , qui continua la postérité , &
Jean de Mailly , Seigneur de Belleville , Chevalier
de l'Ordre du Roi , qui n'eut d'Antoinette
de Baudeuil , Dame d'Abancourt , qu'une fille
mariée à Robert de Roncherolles , Baron de
Pont- Saint- Pierre , Chevalier de l'Ordre du Roi ,
Gentilhomme ordinaire de fa Chambre , & premier
Baron de Normandie.
Edine de Mailly , Seigneur d'Haucourt & de
Saint-Leger , étoit Gouverneur d'Ivoy , & Ca208
MERCURE DE FRANCE.
pitaine de mille hommes de pied fous les re
gnes de François I & de Henri II . Il fut l'un
des ôtages de la capitulation de Thionville en
1558. Il époufa en premieres nôces , par con
trat du 16 Avril 1536 , Marie de Boulan , dont
il laiffa François de Mailly qui fuit ; & en fecondes
nôces , par contrat du 24 Avril 1550 ,
Gabrielle d'Ougnies , Dame du Quefnoy en Flandre
elle fur mere de Louis de Mailly , auteur
de la branche du Qefnoy qui , par fes alliances ,
a l'honneur d'appartenir à plufieurs Maifons fouveraines
de l'Europe , & tient à celles de Montmorenci
, de Melun , d'Ifenghien , de Crequi ,
de Berg , d'Aremberg , de Croy , de Longueval ,
de Leide , & c. & c .
:
François de Mailly , premier du nom , Seigneur
d'Haucourt & de Saint -Leger , fut un des Seigneurs
qui fe diftinguerent le plus par leur fidélité
envers le Roi Henri III , durant les guerres
de la ligue. Il fe fignala au fiege de la Rochelle
en 1573 , au combat de Dormans , à la
prife d'Iffoire en 1577 , & fut tué d'un coup
de canon au fiege de la Fere en 1579. Le Roi
Henri III écrivit à cette occafion à la Dame
de Mailly fa veuve , que fi elle avoit perdu un
mari il avoit perdu un bon ferviteur & ami ,
& lui promit qu'il auroit foin de fes enfans.
Il avoit épousé par contrat du 6 Août 1573 ,
Marie d'Hallencourt , fille de N. d'Hallencourt ,
Marquis de Drofmefnil , Seigneur de Canteville .
Il eut de ce mariage :
François de Mailly , II du nom , Seigneur
d'Haucourt & de Saint-Leger , fait Capitaine de
cinquante hommes d'armes , des ordonnances
du Roi. Il fe . diftingua au fiege d'Amiens en
1597 , & mourut à Paris le 30 Mars 1621
.. MA I. 1755. 209
avoit époufé par contrat du 22 Janvier 1607 ,
Marie Turpin , fille de Guillaume Turpin , Seigneur
d'Aligny , & de Françoile de Pellevé ,
laquelle étoit fille de Genevieve de Montmorency
, & niece du Cardinal de Pellevé . Il naquit
de ce mariage , 10 Philippe de Mailly qui
fuit. 20 Antoine de Mailly , Chevalier de Malthe
mort en 1670. 3 ° Nicolas de Mailly , tué
au fiege de Dixnude en 1677
>
Philippe de Mailly , Seigneur d'Haucourt &
'de Saint - Leger , Capitaine d'une compagnie de
cent hommes, dits de Chevaux - Legers , qu'il com-
'mandoit à la bataille d'Avein en 1635, fe trouva à la
fanglante journée de la Marfée en 1641 , & au ſiege
de Nanci en 1633 , invité par deux lettres du Cardinal
de la Valette , commandant l'armée du fiége
, qui lui marquoit que le Roi lui fçauroit gré
d'y venir avec fa compagnie . Il avoit épousé par
contrat da 8 Janvier 1631 , Guillaine Dubié
petite fille du Maréchal de France de ce nom. I
laiffa
Antoine de Mailly , Seigneur d'Haucourt & de
Saint- Leger , marié par contrat du 6 Février 1678
à Françoife de Canutfon de Berlifontaine , dont
vinrent le Comte de Mailly , Seigneur de Saint-
Leger , qui donne lieu à cet article , & le Marquis
de Mailly, Seigneur d'Haucourt , Page du Roi
en 1694 , pere du Comte de Mailly , dont la fille
a époufé le Marquis de Voyer , & dont le fils ,
Louis-Marie de Mailly, eft Capitaine- Lieutenant,
en furvivance de fon pere , de la Compagnie des
Gendarmes Ecoffois , fixième de fon nom revêtu
de cette charge.
Cette branche appartient par fes alliances aux
Maifons de Lorraine, de Moy, de Montmorenci, de
Chaulnes, de S.Simon, d'Harcourt, d'Eſpinai- Saint210
MERCURE DE FRANCE.
Luc , de Mornai Monchevreuil , de Gouffier , d'E
trade , d'Aumont , de Boufflers , d'Auxi , de Roncherolles
, de Brulart , de Vieux- pont , de Moflé ,
de Marcatel , des Effarts , d'Hangeft , de Montmorenci-
Laval , de la Force , de Milli , Le Tellier-
Louvois , d'Ecquevilli , de Colbert , d'Efclainvilliers
, de Voyer d'Argenfon & autres.
La Maiſon de Mailly a produit un grand nombre
de branches , & elle fe trouve réduite aujourd'hui
aux cinq feules fuivantes , qualifiées felon les
titres qui leur ont été affectés.
Celle de Louis , Sire & Marquis de Mailly ' ,
chef du nom , Brigadier des armées du Roi , &
Colonel du régiment d'infanterie de fon nom .
Celle du Marquis de Nefle , Chevalier des Ordres
du Roi , féparée en 1648 , en faveur de laquelle
le Marquifat de Mailly-Moncavrel a été
érigé , & qui a produit
Celle de Louis de Mailly , auffi Chevalier des
Ordres du Roi , Lieutenant- Général de fes armées ,
& premier Ecuyer de Madame la Dauphine' , féparée
de celle de Nefle en 1687.
Celle d'Alexandre - Louis de Mailly , Seigneur
de Fecamp , né en 1744 , fils de feu Louis - Alexandre
de Mailly , & de Louife de Saint - Chamans
, féparée en 1600 .
Et celle du Comte de Mailly , Lieutenant -Général
des armées du Roi & du Rouffillon , Infpecteur
de la cavalerie , en faveur de laquelle le
Comté de Mailly a été érigé , féparée en 1503 ,
d'où eft forti celle des Marquis du Quefnoi en
Flandre , féparée de celle - ci en 1596.
Voyez fur cette maifon les grands Officiers de
la Couronne , tome VIII. & les Tablettes hiftoriques
, tom . IV & tom . V.
L'on travaille actuellement à donner une hifMAI.
1755 .
211
toire de cette grande Maiſon dans toute fon
étendue.
1
Claude-Marie , Comte de Bellegarde & d'An
tremont , Envoyé extraordinaire du Roi de Pologne
, Electeur de Saxe à la Cour de France , eft
mort à Paris le 26 Février , laiffant deux enfans de
Dame Anne Rutouska , ſon épouſe , foeur de Maurice
, Comte de Saxe , Maréchal de France . Ce
grand homme avoit par fon teftament nommé le
feu Comte de Bellegarde fon héritier univerfel.
La Maiſon de Bellegarde originaire de Flan
dres , eft depuis long-tems établie en Savoye , où
elle eft fort diftinguée par fon ancienneté & par
fes illuftrations. Jean Noël , Seigneur de Bellegarde
, Maître d'Hôtel de Charles III , Duc de
Savoye en 1304 , eut de Claudine de Saint- Trivier,
Dame de Monts , fa femine :
-
François Noël de Bellegarde , Seigneur de
Monts & des Marches , Gouverneur de Nice ,
Ambaffadeur du Duc de Savoye , près de l'Empereur
Charles-Quint , marié le 4 Octobre 1546 à
Gafparde de Menthon , dont
Jean- François de Bellegarde , Marquis d'Antre
mont & des Marches , Colonel des Gardes de
Charles- Emanuel , Duc de Savoye , marié à Florentine
de Perrache. Par fon teſtament du 3 Août
1597 , il inftitua pour héritier fon fils
Claude-André de Bellegarde , Marquis d'Antremont
& des Marches , marié à Gafparde de Doncieux
, dont il eut Jean- François , qui fuit :
Pierre de Bellegarde , Abbé de S. Sixte ; Guillaume
de Bellegarde , Comte d'Antremont , marié
à Anne-Françoife de Loche ; Claire de Bellegarde ,
mariée le 27 Août 1646 à Charles de Broffes , Baron
de Montfalcon , Seigneur de Tournay , Grand
Bailli de Gex , dont postérité.
212 MERCURE DE FRANCE.
Jean-François de Bellegarde , Marquis d'Antre
mont & des Marches , Capitaine de Cavalerie ,
marié le 13 Avril 1632 , à Magdeleine Portier de
Micudry , dont
>
Janus de Bellegarde Comte d'Antremont
>
Marquis des Marches , Chancelier de Savoye &
Miniftre d'Etat , marié les Mai 1659 , à Anne du
Prayet , Dame de Veynes , dont
Jean- François de Bellegarde , Marquis d'Antremont
& des Marches , Ambaffadeur du Roi de
Sicile , Duc de Savoye, à la Cour de France , marié
le 23 Avril 1687 à Catherine- Françoiſe de Regard
de Vars , dont Jofeph - François qui fuit
Claude-Marie qui a donné lieu à cet article , &
deux autres fils , Pun Chambellan du Roi de Pologne
, marié à Drefde , l'autre établi & marié à
Prague.
Jofeph-François de Bellegarde , Marquis des
Marches & de Curfinge , Comte d'Antremont ,
Commandeur de l'Ordre de Saint Maurice , Gentilhomme
de la Chambre du Roi de Sardaigne
marié à Françoife Charlotte Ogletorpe , dont il
a un fils Colonel au fervice d'Angleterre , & deux
filles , l'une mariée au Seigneur de Maffingy, Marquis
de la Pierre ; l'autre , Charlotte-Eléonore ,
Chanoineffe en Lorraine.
Dame Marguerite Defcreux de Sainte- Croix
époufe du Comte de Duglas , Capitaine au Régiment
royal Ecoffois , eft morte au Château de
Montréal en Bugey , le 27 de Février , âgée d'environ
30 ans ; elle étoit l'unique héritiere de la
famille Defcreux de Sainte- Croix , une des meilleures
maifons de la Breffe. Le Comte de Duglas
eft d'une branche de l'ancienne maifon de Duglas
en Ecoffe , établie en ce pays là depuis près d'un .
fiecle. Il a trois freres , l'un Capitaine dans le
MA I. 1755. 213
même Régiment que lui , l'autre Capitaine dans
celui de Languedoc infanterie , & le troifieme
Eccléfiaftique , qui eft au Séminaire de S. Sulpice.
& Morts.
E 21 Mars , Angélique- Louife de la Rochefoncauld
, époufe de Jean- Alexandre- Romée de
Villeneuve , Vicomte de Vence , Colonel en fecond
& commandant le Régiment Royal- Corfe ,
eft accouchée à Aix d'un fils qui a été nommé
Jules-Alexandre Romée.
202 MERCURE DE FRANCE..
Le 11 de Janvier fut célebré le mariage de
Louis-Léon-Félicité , Comte de Lauraguais , fils
de Louis de Brancas , Duc de Lauraguais , & d'Elifabeth-
Pauline d'Itanguien.
La cérémonie fut faite dans la Chapelle de
l'Hôtel de Biron , par M. le Cardinal de la Rochefoucauld.
La maifon de Brancas eft affez connue par fon
ancienneté , fon illuftration & fes grandes alliances
,fans qu'il foit néceffaire ici d'en faire l'éloge.
Son hiſtoire a été imprimée par beaucoup d'Auteurs
, elle fe trouve dans celle des grands Officiers
de la Couronne , article du Duché- Pairie de
Villars , t . V. p. 277. On y voit que cette Maiſon
eft originaire de Naples , où elle a poffedé les
premieres Charges de cette Couronne , & que le
premier qui s'établit en Provence y vint avec deux
Cardinaux c'étoit Bufille de Brancas , Comte
d'Agnano , au Royaume de Naples , & Seigneur
d'Oife & de Vilofe , aux Diocèfes de Digne , & de
Sifteron , Maréchal de la Cour Romaine , vers la
fin du quatorzieme fiecle .
Le 1 Février , Louis d'Etampes , Marquis
d'Etampes , fils de Louis Roger , Marquis d'Etampes
, & de Marguerite Lidie de Becdelievres de
Cany, époufa Adélaïde- Godefroi-Julie de Fouilleufe
de Flavacourt , fille de François - Marie de
Fouilleufe , Marquis de Flavacourt , Maréchal des
Camps & armées du Roi , & Lieutenant de Roi de
Normandie , & de Hortenfe-Félicité de Mailly de
Nefle.
La maifon d'Etampes , illuftre par les premieres
dignités de l'Eglife & de l'Etat , à eu des alliances
avec les maifons de Montmorenci , de Beauvilliers
, de Gouffier , de Regnier , de Guerchy , de
la Châtre , de Brulart de Sillery , de Choifeul , de
, י
MAI. 1755- 203
Becdelievres , de Béthune , d'Ailly , de Fiennes ,
de Monchy, de Chavagnac , de Rochechouart , &
autres.
Cette maifon a formé quatre branches : la
branche de la Ferté- Imbault , celle de la Mottelez-
Ennordre , de Valençay , & celle d'Autry.
La branche de la Motte- lez-Ennordre defcend
de Jean d'Etampes , Seigneur de la Ferté- Imbault ,
lequel de fon mariage avec Blanche d'Ailly , fille
de Waleran d'Ailly , de la branche de Sains , Seigneur
de Marigny , Bailli de Senlis , & de Jacqueline
de Rouvroy-Saint- Simon, eut plufieurs enfans,
entr'autres Louis d'Etampes , Seigneur de la Ferté-
Imbault , qui a continué la branche aînée , & qui
eft le fixieme ayeul du Marquis d'Etampes qui
donne lieu à cet article , & François d'Etampes
auteur de la branche de la Motte- lez- Ennordre.
La branche de Valençay & celle d'Autry
defcendent de Robert III . d'Etampes , Seigneur
de Sallebris , d'Ardreloup & de Tillay , Maréchal
& Sénéchal du Bourbonnois , lequel eut trois garçons
de fon mariage avec Louife Levraud , fçavoir
Jean d'Etampes , Seigneur de la Ferté-Imbault
dont on a parlé plus haut ; Louis d'Etampes , Seigneur
de Valençay , & Robert d'Etampes , Seigneur
d'Autry. Voyez les Tablettes hiftoriques ,
généalogiques & chronologiques , quat. Partie ,
P. 395. & Gr. Off. tome 7. p . 543 .
La maifon de Fouilleufe de Flavacourt , une des
plus anciennes du Vexin François , a pris alliance
dans le 13 fiecle avec la maiſon de Crevecoeur ,
& depuis avec celle de Gaucourt , de Boves , du
Bec- Crefpin , de Dampont , de Suzanne de Cerny,
de Gaudechart , de Ligny , de Rouffé d'Alembon ,
de Rouxel de Médavy , de Mailly , & autres. Voyez
Tab. Généal. 4. part. p. 77.´.
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
Le 10 Mars , Milord Clare , Comte de Tho
mond , Chevalier des Ordres du Roi , Lieutenant
général de fes armées , & Infpecteur général ,
époufa Marie- Genevieve- Louife de Chiffreville ,
fille unique du Marquis de Chiffreville , Lieutenant
général des armées de Sa Majeſté , & premier
Sous-Lieutenant de la feconde Compagnie des
Moufquetaires , & de Dame Marie- Genevieve le
Tonnellier de Charmeaux .
Ce mariage a été fait dans la Chapelle de
l'Hôtel de Machault , par l'Abbé de Breteuil , ancien
Agent général du Clergé.
Le 14 Février 1755 mourut à Paris Marie-
'Anne de Gouffier de Thois , âgée de foixante-huit,
ans fept jours , veuve depuis le 14 Avril 1724 , de
Louis de Bourbon , fecond du nom , Comte de
Buffet & de Châlus , Baron de Piégut , de Vezigneux
, & de Saint - Martin du Puis , &c . qu'elle
avoit épousé par contrat du 31 Décembre 1719.
Elle étoit fille de Thimoléon de Gouffier , Marquis
de Thois , & autres lieux , Gouverneur de
Blois , & d'Henriette de Penancoët de Keroualle ,
veuve de Philippe Herbert , Comte de Pembrock
en Angleterre ; & foeur cadette de Louife-Renée
de Penancoët de Keroualle , Ducheffe de Portsmouth.
Madame la Comteffe de Bourbon- Buffet
laiffe de fon mariage trois enfans , fçavoir ,
2
1. François-Louis Antoine de Bourbon , Comte
de Buffet , dont on va parler.
2. Louife -Claude de Bourbon- Buffet , Religieufe
Bénédictine au Monaftere du Cherche -midi , Fauxbourg
faint Germain , à Paris , où elle a fait profeffion
le 17 Septembre 1740 .
3. Et Henriette- Antoinette de Bourbon-Buffet ,
yeuve fans enfans depuis le 2 Novembre 1752 , de
MA I. 1755. 205
Paul de Grivel de Groffove , Comte d'Auroy , Seigneur
de Groffove , &c. ancien Meftre de camp
du Régiment d'Anjou , Cavalerie , avec lequel
elle avoit été mariée par contrat du 22 Août 1747.
François-Louis-Antoine de Bourbon , Comte
de Buffet & de Châlus , Baron de Vezigneux & de
Saint-Martin du Puis , Seigneur des Creuziers
&c. Meftre de camp du Régiment de Bourbon-
Buffet , Cavalerie , & Chevalier de l'Ordre militaire
de faint Louis , époufa le 23 Avril 1743 ,
Magdeleine- Louife-Jeanne de Clermont - Tonnerre
, fille de Gafpard de Clermont - Tonnerre ,
Maréchal de France , Chevalier des Ordres du Roi,
Gouverneur de Béfort , Marquis de Vauvillars ,
Comte d'Efpinac & de Thoury , & de feue Antoinette
Potier de Novion . De cette alliance font
fortis les enfans qui fuivent .
1. Gafpard- Louis de Bourbon - Buffet , Comte
de Châlus , mort à Paris le 8 Décembre 1751 , âgé
de fix ans & demi.
2.
Louis-François-Jofeph de Bourbon- Buffer ,
aujourd'hui Comte de Châlus , né au Château, de
Buffet en Auvergne , le 1 Juin 1749.
I
3. Artus Charles - Thimoléon de Bourbon-
Buffet , né à Paris le 21 Septembre 1752 .
4. N.... de Bourbon- Buffet , né au Château de
Buffet , le 11 Novembre 1753 , non encore nom
mé..
S. N...de Bourbon-Buffet , née à Buffet , lé 20
Juillet 1746 , auffi non nommée.
6. Marie-Anne-Julie -Louife de Bourbon- Buf
fet , Demoifelle de Châfus , née au Château de Buffet
le 16 Septembre 1747.
7. Et N. de Bourbon- Buffet , morte au Château
de Buffet , le 23 Mars 1751 , fans avoir été nommée,
âgée de deux jours ..
206 MERCURE DE FRANCE.
Voyez ce qui eft dit de la maiſon de Gouffier ;
dans le volume V. p. 605. & fuiv . de l'Hiſtoire des
Grands Officiers de la Couronne ; & le Mercure
du mois de Juin 1754. premiere Partie , à l'occa
fion de la mort de M. le Marquis de Thois , frere
aîné de Madame la Comteffe de Bourbon - Buffet ;
& la quatrieme Partie des Tablettes hiftoriques ,
pages 114 & 115 .
François de Mailly , Comte de Mailly , mourut
le 21 de Février au château de Saint - Leger
près d'Abbeville , âgé de foixante- treize ans ;
il étoit oncle du Comte de Mailly , Lieutenant
général des armées du Roi , & de la province de
Rouffillon , Infpecteur de la Cavalerie , à qui il
a laiffé les terres de fa branche.
La Maiſon de Mailly eft trop connue pour
qu'il foit néceffaire d'entrer ici dans aucun détail
fur l'ancienneté de fon origine , & fur la
grandeur de fes alliances. Il fuffira de rappeller
qu'en 1070 Anfelme de Mailly
doit l'armée de la Comteffe de Flandre , &
gouvernoit fes Etats comme tuteur & le plus
proche parent du Comte fon fils .
* comman-
Colard de Mailly ** fut appellé au gouvernement
du Royaume fous Charles VF , & cette
illuftration a tranfmis dans cette Maifon une
Couronne perfonnelle entremêlée de fleurs de
lys , qu'elle porte depuis ce tems . L'on fçait
auffi que cette Maifon a été revêtue dans tous
* Chronique de Flandre , par Dom de Gherit , 13
91. Hiftoire des Châtelains de Lille , par Floris
Vander- Vaher. Malbrancq. dans ce qu'il a écrit
fur la Flandre.
** Monftrelet , tom. 1. p.77 130. Hift . de Charles
VI. par Le Laboureur , liv . 30. p. 755..
MA I. 1755. 207
*
les tems des Ordres & des plus grandes Charges de
la Couronne .
Le Comte de Mailly , Seigneur de Saint-
Leger , qui donne lieu à cet article , étoit de
la branche des Comtes de Mailly , Seigneurs
d'Haucourt , féparée en 1503 par le mariage
qu'Adrien de Mailly , fecond fils de Jean , Sire
de Mailly , Chambellan de Charles VIII & de
Louis XII , & d'Ifabeau d'Ailly , fille de Jean ,
Vidame d'Amiens , & d'Iolande de Bourgogne ,
fit avec Françoife de Bailleul , fille d'Adrien de
Bailleul & de Jeanne d'Haucourt , par contrat
du 18 Octobre 1503 : c'est par cette alliance
que la terre d'Haucourt eft entrée dans cette
branche de la Maifon de Mailly. L'on voit à
ce fujet un acte paffé devant le Roi François I ,
qui donne à Adrien de Mailly le titre de coufin
, & qui lui remet en faveur dudit mariage
tous les droits qui lui étoient dûs fur la Maifon
de Bailleul ; il ratifia le 3 Mai 1513
tranfaction paffée entre lui & le Comte de Vendôme
, fur les droits réciproques qu'ils avoient
fur la terre de Ravenfberg , à caufe de la Maifon
de Bailleul , dont étoit iffu par fa mere le
Comte de Vendôme.
la
Adrien de Mailly eut entr'autres enfans Edme
de Mailly , qui continua la postérité , &
Jean de Mailly , Seigneur de Belleville , Chevalier
de l'Ordre du Roi , qui n'eut d'Antoinette
de Baudeuil , Dame d'Abancourt , qu'une fille
mariée à Robert de Roncherolles , Baron de
Pont- Saint- Pierre , Chevalier de l'Ordre du Roi ,
Gentilhomme ordinaire de fa Chambre , & premier
Baron de Normandie.
Edine de Mailly , Seigneur d'Haucourt & de
Saint-Leger , étoit Gouverneur d'Ivoy , & Ca208
MERCURE DE FRANCE.
pitaine de mille hommes de pied fous les re
gnes de François I & de Henri II . Il fut l'un
des ôtages de la capitulation de Thionville en
1558. Il époufa en premieres nôces , par con
trat du 16 Avril 1536 , Marie de Boulan , dont
il laiffa François de Mailly qui fuit ; & en fecondes
nôces , par contrat du 24 Avril 1550 ,
Gabrielle d'Ougnies , Dame du Quefnoy en Flandre
elle fur mere de Louis de Mailly , auteur
de la branche du Qefnoy qui , par fes alliances ,
a l'honneur d'appartenir à plufieurs Maifons fouveraines
de l'Europe , & tient à celles de Montmorenci
, de Melun , d'Ifenghien , de Crequi ,
de Berg , d'Aremberg , de Croy , de Longueval ,
de Leide , & c. & c .
:
François de Mailly , premier du nom , Seigneur
d'Haucourt & de Saint -Leger , fut un des Seigneurs
qui fe diftinguerent le plus par leur fidélité
envers le Roi Henri III , durant les guerres
de la ligue. Il fe fignala au fiege de la Rochelle
en 1573 , au combat de Dormans , à la
prife d'Iffoire en 1577 , & fut tué d'un coup
de canon au fiege de la Fere en 1579. Le Roi
Henri III écrivit à cette occafion à la Dame
de Mailly fa veuve , que fi elle avoit perdu un
mari il avoit perdu un bon ferviteur & ami ,
& lui promit qu'il auroit foin de fes enfans.
Il avoit épousé par contrat du 6 Août 1573 ,
Marie d'Hallencourt , fille de N. d'Hallencourt ,
Marquis de Drofmefnil , Seigneur de Canteville .
Il eut de ce mariage :
François de Mailly , II du nom , Seigneur
d'Haucourt & de Saint-Leger , fait Capitaine de
cinquante hommes d'armes , des ordonnances
du Roi. Il fe . diftingua au fiege d'Amiens en
1597 , & mourut à Paris le 30 Mars 1621
.. MA I. 1755. 209
avoit époufé par contrat du 22 Janvier 1607 ,
Marie Turpin , fille de Guillaume Turpin , Seigneur
d'Aligny , & de Françoile de Pellevé ,
laquelle étoit fille de Genevieve de Montmorency
, & niece du Cardinal de Pellevé . Il naquit
de ce mariage , 10 Philippe de Mailly qui
fuit. 20 Antoine de Mailly , Chevalier de Malthe
mort en 1670. 3 ° Nicolas de Mailly , tué
au fiege de Dixnude en 1677
>
Philippe de Mailly , Seigneur d'Haucourt &
'de Saint - Leger , Capitaine d'une compagnie de
cent hommes, dits de Chevaux - Legers , qu'il com-
'mandoit à la bataille d'Avein en 1635, fe trouva à la
fanglante journée de la Marfée en 1641 , & au ſiege
de Nanci en 1633 , invité par deux lettres du Cardinal
de la Valette , commandant l'armée du fiége
, qui lui marquoit que le Roi lui fçauroit gré
d'y venir avec fa compagnie . Il avoit épousé par
contrat da 8 Janvier 1631 , Guillaine Dubié
petite fille du Maréchal de France de ce nom. I
laiffa
Antoine de Mailly , Seigneur d'Haucourt & de
Saint- Leger , marié par contrat du 6 Février 1678
à Françoife de Canutfon de Berlifontaine , dont
vinrent le Comte de Mailly , Seigneur de Saint-
Leger , qui donne lieu à cet article , & le Marquis
de Mailly, Seigneur d'Haucourt , Page du Roi
en 1694 , pere du Comte de Mailly , dont la fille
a époufé le Marquis de Voyer , & dont le fils ,
Louis-Marie de Mailly, eft Capitaine- Lieutenant,
en furvivance de fon pere , de la Compagnie des
Gendarmes Ecoffois , fixième de fon nom revêtu
de cette charge.
Cette branche appartient par fes alliances aux
Maifons de Lorraine, de Moy, de Montmorenci, de
Chaulnes, de S.Simon, d'Harcourt, d'Eſpinai- Saint210
MERCURE DE FRANCE.
Luc , de Mornai Monchevreuil , de Gouffier , d'E
trade , d'Aumont , de Boufflers , d'Auxi , de Roncherolles
, de Brulart , de Vieux- pont , de Moflé ,
de Marcatel , des Effarts , d'Hangeft , de Montmorenci-
Laval , de la Force , de Milli , Le Tellier-
Louvois , d'Ecquevilli , de Colbert , d'Efclainvilliers
, de Voyer d'Argenfon & autres.
La Maiſon de Mailly a produit un grand nombre
de branches , & elle fe trouve réduite aujourd'hui
aux cinq feules fuivantes , qualifiées felon les
titres qui leur ont été affectés.
Celle de Louis , Sire & Marquis de Mailly ' ,
chef du nom , Brigadier des armées du Roi , &
Colonel du régiment d'infanterie de fon nom .
Celle du Marquis de Nefle , Chevalier des Ordres
du Roi , féparée en 1648 , en faveur de laquelle
le Marquifat de Mailly-Moncavrel a été
érigé , & qui a produit
Celle de Louis de Mailly , auffi Chevalier des
Ordres du Roi , Lieutenant- Général de fes armées ,
& premier Ecuyer de Madame la Dauphine' , féparée
de celle de Nefle en 1687.
Celle d'Alexandre - Louis de Mailly , Seigneur
de Fecamp , né en 1744 , fils de feu Louis - Alexandre
de Mailly , & de Louife de Saint - Chamans
, féparée en 1600 .
Et celle du Comte de Mailly , Lieutenant -Général
des armées du Roi & du Rouffillon , Infpecteur
de la cavalerie , en faveur de laquelle le
Comté de Mailly a été érigé , féparée en 1503 ,
d'où eft forti celle des Marquis du Quefnoi en
Flandre , féparée de celle - ci en 1596.
Voyez fur cette maifon les grands Officiers de
la Couronne , tome VIII. & les Tablettes hiftoriques
, tom . IV & tom . V.
L'on travaille actuellement à donner une hifMAI.
1755 .
211
toire de cette grande Maiſon dans toute fon
étendue.
1
Claude-Marie , Comte de Bellegarde & d'An
tremont , Envoyé extraordinaire du Roi de Pologne
, Electeur de Saxe à la Cour de France , eft
mort à Paris le 26 Février , laiffant deux enfans de
Dame Anne Rutouska , ſon épouſe , foeur de Maurice
, Comte de Saxe , Maréchal de France . Ce
grand homme avoit par fon teftament nommé le
feu Comte de Bellegarde fon héritier univerfel.
La Maiſon de Bellegarde originaire de Flan
dres , eft depuis long-tems établie en Savoye , où
elle eft fort diftinguée par fon ancienneté & par
fes illuftrations. Jean Noël , Seigneur de Bellegarde
, Maître d'Hôtel de Charles III , Duc de
Savoye en 1304 , eut de Claudine de Saint- Trivier,
Dame de Monts , fa femine :
-
François Noël de Bellegarde , Seigneur de
Monts & des Marches , Gouverneur de Nice ,
Ambaffadeur du Duc de Savoye , près de l'Empereur
Charles-Quint , marié le 4 Octobre 1546 à
Gafparde de Menthon , dont
Jean- François de Bellegarde , Marquis d'Antre
mont & des Marches , Colonel des Gardes de
Charles- Emanuel , Duc de Savoye , marié à Florentine
de Perrache. Par fon teſtament du 3 Août
1597 , il inftitua pour héritier fon fils
Claude-André de Bellegarde , Marquis d'Antremont
& des Marches , marié à Gafparde de Doncieux
, dont il eut Jean- François , qui fuit :
Pierre de Bellegarde , Abbé de S. Sixte ; Guillaume
de Bellegarde , Comte d'Antremont , marié
à Anne-Françoife de Loche ; Claire de Bellegarde ,
mariée le 27 Août 1646 à Charles de Broffes , Baron
de Montfalcon , Seigneur de Tournay , Grand
Bailli de Gex , dont postérité.
212 MERCURE DE FRANCE.
Jean-François de Bellegarde , Marquis d'Antre
mont & des Marches , Capitaine de Cavalerie ,
marié le 13 Avril 1632 , à Magdeleine Portier de
Micudry , dont
>
Janus de Bellegarde Comte d'Antremont
>
Marquis des Marches , Chancelier de Savoye &
Miniftre d'Etat , marié les Mai 1659 , à Anne du
Prayet , Dame de Veynes , dont
Jean- François de Bellegarde , Marquis d'Antremont
& des Marches , Ambaffadeur du Roi de
Sicile , Duc de Savoye, à la Cour de France , marié
le 23 Avril 1687 à Catherine- Françoiſe de Regard
de Vars , dont Jofeph - François qui fuit
Claude-Marie qui a donné lieu à cet article , &
deux autres fils , Pun Chambellan du Roi de Pologne
, marié à Drefde , l'autre établi & marié à
Prague.
Jofeph-François de Bellegarde , Marquis des
Marches & de Curfinge , Comte d'Antremont ,
Commandeur de l'Ordre de Saint Maurice , Gentilhomme
de la Chambre du Roi de Sardaigne
marié à Françoife Charlotte Ogletorpe , dont il
a un fils Colonel au fervice d'Angleterre , & deux
filles , l'une mariée au Seigneur de Maffingy, Marquis
de la Pierre ; l'autre , Charlotte-Eléonore ,
Chanoineffe en Lorraine.
Dame Marguerite Defcreux de Sainte- Croix
époufe du Comte de Duglas , Capitaine au Régiment
royal Ecoffois , eft morte au Château de
Montréal en Bugey , le 27 de Février , âgée d'environ
30 ans ; elle étoit l'unique héritiere de la
famille Defcreux de Sainte- Croix , une des meilleures
maifons de la Breffe. Le Comte de Duglas
eft d'une branche de l'ancienne maifon de Duglas
en Ecoffe , établie en ce pays là depuis près d'un .
fiecle. Il a trois freres , l'un Capitaine dans le
MA I. 1755. 213
même Régiment que lui , l'autre Capitaine dans
celui de Languedoc infanterie , & le troifieme
Eccléfiaftique , qui eft au Séminaire de S. Sulpice.
Fermer
Résumé : NAISSANCE, MARIAGES, & Morts.
En 1755, plusieurs événements familiaux et décès ont marqué l'aristocratie française. Le 21 mars, Angélique-Louise de La Rochefoucauld, épouse de Jean-Alexandre Romée de Villeneuve, Vicomte de Vence, a donné naissance à un fils nommé Jules-Alexandre Romée. Le 11 janvier, Louis-Léon-Félicité, Comte de Lauraguais, fils de Louis de Brancas, Duc de Lauraguais, et d'Élisabeth-Pauline d'Itanguien, s'est marié avec la bénédiction du Cardinal de La Rochefoucauld. La maison de Brancas, originaire de Naples et établie en Provence au XIVe siècle, est connue pour son ancienneté et ses grandes alliances. Le 1er février, Louis d'Etampes, Marquis d'Etampes, a épousé Adélaïde-Godefroi-Julie de Fouilleuse de Flavacourt. La maison d'Etampes est illustre par ses dignités ecclésiastiques et étatiques, avec des alliances prestigieuses et compte quatre branches principales. Le 10 mars, Milord Clare, Comte de Thomond, a épousé Marie-Geneviève-Louise de Chiffreville, fille unique du Marquis de Chiffreville, dans la chapelle de l'Hôtel de Machault par l'Abbé de Breteuil. Plusieurs décès ont également été enregistrés. Le 14 février, Marie-Anne de Gouffier de Thois, veuve de Louis de Bourbon, Comte de Buffet, est décédée à Paris à l'âge de soixante-huit ans, laissant trois enfants, dont François-Louis-Antoine de Bourbon, Comte de Buffet. Le 21 février, François de Mailly, Comte de Mailly, est mort au château de Saint-Leger près d'Abbeville à l'âge de soixante-treize ans. La maison de Mailly est renommée pour son ancienneté et ses alliances illustres, avec des membres ayant occupé des postes importants dans l'armée et la cour. Le texte mentionne également deux maisons nobles distinctes : la Maison de Mailly et la Maison de Bellegarde. La Maison de Mailly est liée par alliance à plusieurs familles illustres, telles que les maisons de Lorraine, de Montmorenci, d'Harcourt, de Colbert, et d'autres. Elle compte cinq branches principales, chacune ayant des titres et des fonctions spécifiques. La Maison de Bellegarde, originaire de Flandres et établie en Savoie, est distinguée par son ancienneté et ses illustrations. Claude-Marie, Comte de Bellegarde et d'Antrémont, Envoyé extraordinaire du Roi de Pologne, est décédé à Paris le 26 février, laissant deux enfants. La famille compte des membres ayant servi dans diverses fonctions militaires et diplomatiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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25
p. 9-40
LES CHARMES DU CARACTERE. HISTOIRE VRAISEMBLABLE. SUITE DE LA PROMENADE DE PROVINCE. Par Mademoiselle Plisson, de Chartres.
Début :
Montvilliers (c'est ainsi que s'appelle le Philosophe que voici) est riche [...]
Mots clefs :
Coeur, Homme, Esprit, Père, Ami, Amitié, Philosophe, Sentiment, Larmes, Âme, Tendresse, Amour, Raison, Réflexions, Naissance, Mère, Lettres, Douceur, Peine, Passion, Promenade, Promenade de province
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LES CHARMES DU CARACTERE. HISTOIRE VRAISEMBLABLE. SUITE DE LA PROMENADE DE PROVINCE. Par Mademoiselle Plisson, de Chartres.
LES CHARMES DU CARACTERE.
HISTOIRE VRAISEMBLABLE.
SUITE DE LA PROMENADE DE PROVINCE.
Par Mademoiselle Pliffon , de Chartres.
M
Ontvilliers ( c'eft ainſi que s'appelle
le Philofophe que voici ) eft un riche
Gentilhomme
du voifinage , le plus heureux
& le plus digne de l'être . Un efprit
juſte , cultivé , folide ; une raiſon fupérieure
, éclairée , un coeur noble , généreux
délicat , fenfible ; une humeur douce , bienfaifante
; un extérieur ouvert , font des
qualités naturelles qui le font adorer de
A v
to MERCURE DE FRANCE.
tous ceux qui le connoiffent. Tranquille
poffeffeur d'un bien confidérable , d'une
époufe digne de lui , d'un ami véritable ,
il fent d'autant mieux les agrémens de fa
fituation qu'elle a été précédée des plus
triftes revers.
La perte de fa mere , qui mourut peu
de tems après fa naiffance , a été la premiere
& la fource de toutes fes infortunes
. Son pere , qui fe nommoit Dorneville
, après avoir donné une année à ſa
douleur , ou plutôt à la bienféance , fe
remaria à la fille d'un de fes amis. Elle
étoit aimable , mais peu avantagée de la
fortune. L'unique fruit de ce mariage fut
un fils . Sa naiffance , qui avoit été longtems
défirée , combla de joie les deux époux.
Montvilliers , qui avoit alors quatre à cinq
ans , devint bientôt
indifférent , & peu
après incommode. Il étoit naturellement
doux & timide . Sa belle- mere qui ne cherchoit
qu'à donner à fon pete de l'éloignement
pour lui , fit pailer fa douceur pour
ftupidité. Elle découvroit dans toutes les
actions le germe d'un caractere bas , &
même dangereux. Tantôt elle avoit remarqué
un trait de méchanceté noire, tantôt un
difcours qui prouvoit un mauvais coeur.Elle
avoit un foin particulier de le renvoyer avec
les domeftiques. Un d'eux à qui il fit pitié
NOVEMBRE. 1755 . 11
lui apprit à lire & à écrire affez paffablement.
Mais le pauvre garçon fut chaffé
pour avoir ofé dire que Montvilliers n'étoit
pas fi ftupide qu'on vouloit le faire
croire , & qu'il apprenoit fort bien tout
ce qu'on vouloit lui montrer.
*
Saraifon qui fe développoit , une noble
fierté que la naiffance inſpire , lui rendirent
bientôt infupportables les mépris
des valets qui vouloient plaire à Madame
Dorneville. La maifon paternelle lui
devint odieufe. Il paffoit les jours entiers
dans les bois , livré à la mélancolie & au
découragement. Accoutumé dès fa plust
tendre jeuneffe à fe regarder comme un
objet à charge , il fe haïffoit prefqu'autant
que le faifoit fa belle-mere. Tous fes fouhaits
ſe bornoient au fimple néceffaire . 11
ne défiroit que les moyens de couler une
vie paifible dans quelque lieu folitaire , &
loin du commerce des hommes dont il fe
croyoit incapable.
Ce fut ainfi que ce malheureux jeune
homme pafla les quinze premieres années
de fa vie , lorfqu'un jour , il fut rencontré
dans le bois où il avoit coutume de fe retirer
, par un militaire refpectable , plein de
candeur , de bon fens , & de probité.
Après avoir fervi honorablement fa parrie
pendant vingt-ans , ce digne guerrier s'é
A vi
12 MERCURE DE FRANCE.
toit retiré dans une de fes terres pour vivre.
avec lui -même , & chercher le bonheur ,
qu'il n'avoit pu trouver dans le tumulte
des armes & des paffions. L'étude de fon
propre coeur , la recherche de la fageffe ,
étoient fes occupations ; la phyfique expérimentale
fes amuſemens ; & le foulagement
des misérables fes plaifirs.
M. de Madinville ( c'eft le nom du militaire
devenu philofophe ) après avoir confidéré
quelque tems Montvilliers qui pleuroit
, s'avança vers lui , & le pria avec
beaucoup de douceur de lui apprendre le
fujet de fon affliction , en l'affurant que
s'il pouvoit le foulager , il le feroit de tout
fon coeur.
Le jeune homme qui croyoit être feul
fut effrayé de voir quelqu'un fi près de lui.
Son premier mouvement fut de fuir. Mais
M. de Madinville le retint & le preffa
encore plus fort de l'inftruire de la caufe
de fes larmes. Mes malheurs font fans remede
, répondit enfin Montvilliers : je
fuis un enfant difgracié de la nature ; elle
m'a refufé ce qu'elle accorde à tous les
autres hommes . Eh ! que vous a - t- elle refufé
, reprit l'officier , d'un air plein de bonté
? loin de vous plaindre d'elle , je ne vois
en vous que des fujets de la louer . Quoi ,
Monfieur , repartit le jeune homme avec
NOVEMBRE . 1755. 13
naïveté , ne voyez - vous pas que je manque
abfolument d'efprit ? mon air ... ma
figure , mes façons ... tout en moi ne vous
l'annonce- t- il pas ? Je vous affure , répondit
le Philofophe , que votre figure n'a rien
que de fort agréable . Mais , mon ami , qui
êtes-vous , & comment avez - vous été élevé
? Montvilliers lui fit le récit que je viens
de vous faire. J'ai entendu parler de vous
& de votre prétendue imbécillité , lui dit
alors le militaire , mais vous avez de l'intelligence
, & vous me paroiffez être d'un
fort bon caractere . Je veux cultiver ces qualités
naturelles , vous confoler , en un mot
vous rendre fervice . Je ne demeure qu'à
une lieue d'ici ; fi vous ne connoiffez pas
Madinville , vous n'aurez qu'à le demander,
tout le monde vous l'enfeignera .
Il faut avoir été auffi abandonné que
l'étoit Montvilliers , pour concevoir tout le
plaifir que lui fit cette rencontre. Il fe leva
le lendemain dès que le jour parut , & ne
pouvant commander à fon impatience , il
vole vers le feul homme qu'il eût jamais
trouvé fenfible à fes maux. Il le trouva occupé
à confidérer les beautés d'un parterre
enrichi de fleurs , dont la variété & le parfum
fatisfaifoient également la vue &
l'odorat. M. de Madinville fut charmé de
l'empreffement de Montvilliers , converfa
14 MERCURE DE FRANCE.
beaucoup avec lui , fut content de fa pénétration
, & de fa docilité , & lui fit promettre
qu'il viendroit dîner chez lui deux
fois la femaine.
::
Je n'entreprendrai point , continua la
Silphide , de vous répéter tous les fages
difcours que notre philofophe tint à ce
jeune homme il lui fit connoître que
pour être heureux , trois chofes font néceffaires
; régler fon imagination , modérer
fes paffions , & cultiver fes goûts. Que
la paix de l'ame & la liberté d'efprit répandent
un vernis agréable fur tous les objets
qui nous environnent. Que la vertu
favorite du véritable philofophe , eft une
bienveillance univerfelle pour fes femblables
, un fentiment de tendreſſe & de compaffion
, qui parle continuellement en leur
faveur , & qui nous preffe de leur faire du
bien. Que cette aimable vertu eft la fource
des vrais plaifirs. Qu'on trouve en l'exerçant
, cette volupté fpirituelle , dont les
coeurs généreux & fenfibles fçavent feuls
connoître le prix . Montvilliers comprit fort
bien toutes ces vérités. Il fit plus , il les aima.
Son efprit femblable à une fleur que les
froids aquilons ont tenu longtems fermée
& qu'un rayon de foleil fait épanouir , fe
développa. Les fentimens vertueux que la
nature avoit mis dans fon coeur généreux ,
NOVEMBRE. 1755 .
promirent une abondante moiffon .
Le changement qui s'étoit fait en lui ,
vint bientôt aux oreilles de fon pere . Il
voulut en juger par lui - même. Accoutumé
à le craindre , Montvilliers répondit à
fes queſtions d'un air timide & embarraſſé.
Sa belle-mere toujours attentive à le deffervir
, fit paffer fon embarras pour aver
fion & M. Dorneville le crut d'autant plus
facilement , qu'il ne lui avoit pas donné
fujet de l'aimer. Il fe contenta de le traiter
avec un peu plus d'égards , mais fans ces
manieres ouvertes que produifent l'amitié
& la confiance . Sa belle- mere changea auffi
de conduite ; elle le combla de politeffes extérieures
, comme fi elle eût voulu réparer
par ces marques de confidération le mépris
qu'elle avoit fait de lui jufqu'alors. Mais,
au fond elle ne pouvoit penfer fans un extrême
chagrin, qu'étant l'aîné, il devoit hériter
de la plus confidérable partie des biens
de M. Dorneville , tandis que fon cher fils,
l'unique objet de fes complaifances , ne
feroit jamais qu'un gentilhomme malaiſé.
Cinq ou fix ans fe pafferent de cette forte.
Montvilliers qui recevoit tous les jours
de nouvelles preuves de la tendreffe de M.
de Madinville , ne mettoit point de bornes
àfa reconnoillance. Ce fentiment accompa
gné de l'amitié est toujours fuivi du plaifir.
Ce jeune homme n'en trouvoit point de
16 MERCURE DE FRANCE.
de plus grand que de donner des marques
fa fenfibilite à fon bienfaicteur.Tranquille
en apparence , il ne l'étoit cependant pas
dans la réalité. Son coeur , exceffivement
fenfible , ne pouvoit être rempli par l'amitié
, il lui falloit un fentiment d'une autre
efpece. Il fentoit depuis quelque tems en
lui - même un defir preffant , un vif befoin
d'aimer , qui n'eft pas la moins pénible de
toutes les fituations. L'amour lui demandoit
fon hommage
; mais trop éclairé fur
fes véritables intérêts pour fe livrer à ce
petit tyran fans réferve , il vouloit faire
fes conditions . Il comprit que les qualités
du coeur & de l'efprit , le rapport d'humeur
& de façon de penfer , étoient abfolument
néceffaires pour contracter un
attachement férieux & durable . Son imagination
vive travaillant fur cette idée
lui eut bientôt fabriqué une maîtreffe
imaginaire , qu'il chercha vainement à
réaliſer. Il étudia avec foin toutes les jeunes
perfonnes de R.... Cette étude ne fervit
qu'à lui faire connoître l'impoffibilité
de trouver une perfonne fi parfaite. Cependant
, le croiriez-vous ? il s'attacha à
cette chimere même en la reconnoiffant
pour telle : fon plus grand plaifir étoit de
s'en occuper ; il quittoit fouvent la lecture-
& les converfations les plus folides , pour
s'entretenir avec elle..
NOVEMBRE. 1755 17
Quelque confiance qu'il eût en M. de
Madinville , il n'avoit pas ofé lui faire
l'aveu de ces nouvelles difpofitions . Il connoiffoit
fa maladie ; mais en même tems il
la chériffoit , il lui trouvoit mille charmes,
& ç'auroit été le defobliger que d'en entreprendre
la guérifon . C'eft ce que fon ami
n'auroit pas manqué de faire. Un jour qu'il
fe promenoit feul , en faisant ces réflexions,
M. de Madinville vint l'aborder. J'ai fur
vous , mon cher Montvilliers , lui dit- il ,
après avoir parlé quelque tems de chofes
indifférentes, des vues que j'efpere que vous
approuverez. Rien n'eft comparable à l'a
mitié que j'ai pour vous , mais je veux que
des liens plus étroits nous uniffent. Je n'ai
qu'une niece ; j'ofe dire qu'elle eft digne
de vous par la folidité de fon efprit , la fupériorité
de fa raifon , la douceur de fon
caractere , enfin mille qualités eftimables
dont vous êtes en état de fentir tout le
A prix.
Montvilliers , qui n'avoit jamais entendu
parler que fon ami eût une niece , &
qui ne lui croyoit pas même ni de frere ni
de foeur , fut un peu furpris de ce difcours .
Sa réponſe cependant fut courte , polie &
fatisfaifante. Il lui demanda pourquoi il
ne lui avoit jamais parlé d'une perfonne
qui devoit fi fort l'intéreffer , les raifons
18
MERCURE DE
FRANCE.
qui m'en ont empêché , lui répondit fon
ami , m'obligent encore de vous cacher fon
nom & fa demeure. Mais avant que d'en
venir à
l'accompliffement de ce projet ,
ajouta-t- il , mon deffein eft de vous envoyer
paffer quelque tems à Paris. Avec
beaucoup de bon fens & d'efprit , il vous
manque une certaine politeffe de manieres,
une façon de vous préfenter qui prévient
en faveur d'un honnête homme . Parlez - en
à votre pere. Je me charge de faire la dépenfe
néceffaire pour ce voyage.
Enchanté de ce
nouveau
témoignage
d'affection & de générofité ,
Montvilliers
remercia dans les termes les plus vifs fon
bienfaicteur . Il n'étoit
pourtant pas abfolument
fatisfait de la premiere partie de fon
difcours. Ce choix qu'il
paroiffoit lui faire
d'une épouſe fans fon aveu , lui fembla
tyrannique. Il ne put fouffrir de fe voir
privé de la liberté de chercher une perfonne
qui approchât de fon idée. Il imaginoit
dans cette
recherche mille plaifirs dont il
falloit fe détacher. Son coeur
murmura de
cette
contrainte ; elle lui parut infupportable
mais la raifon prenant enfin le deffus
, condamna ces
mouvemens . Elle lui
repréſenta
combien il étoit flatteur & avantageux
pour lui d'entrer dans la famille
d'un homme à qui il devoit tout , & le fit
NOVEMBRE. 1755. 19
convenir qu'en jugeant de l'avenir par le
paffé , fon bonheur dépendoit de fa docilité
pour les confeils de fon ami.
Ces réflexions le calmerent. Il ne fongea
plus qu'à s'occuper des préparatifs de
fon voyage ; ils ne furent pas longs . Les
quinze premiers jours de fon arrivée dans
la capitale furent employés à vifiter les édifices
publics , & à voir les perfonnes à qui
il étoit recommandé . Il fut à l'Académie
pour apprendre à monter à cheval & à
faire des armes ; il fe }; fit des connoiffances
de plufieurs jeunes gens de confidération ,
qui étoient fes compagnons d'exercices ,
& s'introduifit par leur moyen dans des
cercles diftingués . Avide de tout connoî
tre , de tout voir , il eut bientôt tout épui
fé. Son efprit folide ne s'accommoda pas
de la frivolité qui regne dans ce qu'on
appelle bonne compagnie, 11 fe contenta
dans fes momens de loifir , de fréquenter
les fpectacles , les promenades , & de cultiver
la connoiffance de quelques gens de
lettres que M. de Madinville lui avoit
procurée.
La diverfité & la nouveauté de tous ces
objets n'avoient pu guérir fon coeur. Il
avoir toujours le même goût pour fa maîtreffe
imaginaire , & les promenades folitaires
étoient fon amuſement favori. Un
20 MERCURE DE FRANCE.
jour qu'il fe promenoit dans les Tuilleries
, fa rêverie ne l'empêcha pas de remar .
quer une jeune demoifelle , dont la phifionomie
étoit un agréable mêlange de
douceur , de franchife , de modeftie , &
de raifon. Quel attrait pour Montvilliers !
il ne pouvoit fe laffer de la confidérer. Sa
préfence faifoit paffer jufqu'au fond de
fon coeur une douceur fecrette & inconnue.
Elle fortit de la promenade , il la
fuivit , & la vit monter dans un carroffe
bourgeois avec toute fa compagnie. Alors
fongeant qu'elle alloit lui échapper , il eut
recours à un de ces officieux meffagers dont
le Pont- neuf fourmille : il lui donna ordre
de fuivre ce carroffe , & de venir lui redire
en quel endroit il fe feroit arrêté. Environ
une demi - heure après , le courrier revint
hors d'haleine , & lui apprit que toute cette
compagnie étoit defcendue à une maiſon
de campagne fituée à B.....
. Montvilliers , qui connoiffoit une perfonne
dans ce lieu , fe promit d'y aller dès
le lendemain , efpérant revoir cette demoifelle
, peut-être venir à bout de lui parler ,
ou du moins apprendre qui elle étoit .
Rempli de ce projet , il alloit l'exécuter ,
quand un jeune homme de fes amis entra
dans fa chambre , & lui propofa de l'accompagner
, pour aller voir une de fes paNOVEMBRE.
1755 .
rentes , chez laquelle il y avoit bonne compagnie.
Il chercha d'abord quelque prétexte
pour le défendre , mais quand il eut
appris que cette parente demeuroit à B....
il ne fit plus difficulté de fuivre fon ami.
Il ne s'en repentit pas ; car la premiere perfonne
qu'il apperçut en entrant dans une
fort beile falle , fut cette jeune demoiſelle
qu'il avoit vu la veille aux Tuilleries.
Cette rencontre qui lui parut être d'un
favorable augure , le mit dans une fitua
tion d'efprit délicieufe. On fervit le dîner,
& Montvilliers fit fi bien qu'il fe trouva
placé auprès de celle qui poffédoit déja
toutes les affections. Il n'épargna ni galanteries
, ni politeffes , ni prévenances pour
lui faire connoître la fatisfaction qu'il en
reffentoit ; & il ne tint qu'à elle de reconnoître
dans fes manieres une vivacité qui
ne va point fans paffion. Auffi ne fut- elle
pas la derniere à s'en appercevoir : elle
avoit remarqué fon attention de la veille ,
& fa figure dès ce moment ne lui avoit
déplu . Elle lui apprit qu'elle étoit alors
chez une dame de fes amies , qu'elle devoit
y refter encore quinze jours , qu'elle demeuroit
ordinairement à Paris avec fon
pas
pere & fa mere , qu'elle aimoit beaucoup
la campagne , & qu'elle étoit charmée de
ce que fon pere venoit d'acquérir une terre
22 MERCURE DE FRANCE.
affez confidérable , proche de R.... où ils
comptoient aller bientôt demeurer . Quoi ,
Mademoiſelle , lui dit- il , feroit- il bien poffible
que nous devinffions voifins ? Comment
vous êtes de R ... lui demanda - t- elle à
fon tour ? Je n'en fuis pas directement
répondit- il , mais la demeure de mon pere,
qui s'appelle Dorneville , n'en eft éloignée
que d'une lieue. Eh bien , reprit- elle ,
notre terre eft entre Dorneville & Madinville
; connoiffez - vous le Seigneur de cette
derniere paroiffe ? Grand Dieu ! Si je le
connois , répondit-il avec vivacité , c'eſt
l'homme du monde à qui j'ai le plus d'obligation.
Mademoiſelle d'Arvieux , c'eft ainfi
que s'appelloit cette jeune perfonne , contente
de cette déclaration , ne s'ouvrit
davantage . Cependant le foleil prêt à ſe
coucher , obligea les deux amis de reprendre
la route de Paris . Montvilliers n'avoit
jamais vu de journée paffer avec tant de
rapidité avant que de partir , il demanda
la permiffion de revenir , qu'on lui accorda
fort poliment.
pas
Il ne fut pas plutôt forti d'auprès de
Mlle d'Arvieux , que rentrant en lui - même
, & faiſant réflexion fur tous fes mouvemens
, il fentit qu'il aimoit. Le fouvenir
de ce qu'il avoit promis à fon bienfaicteur
, vint auffi-tôt le troubler . Il fe fit
NOVEMBRE . 1755. 23
des reproches de fon peu de courage ; mais
peut- être je m'allarme mal- à- propos , continua-
t- il en lui -même ; c'eft un caprice ,
un goût paffager que Mlle d'Arvieux m'aidera
elle - même à détruire. Si je pouvois
connoître le fond de fon coeur , fa façon
de penfer , fans doute je cefferois de l'aimer.
Il s'en feroit peut-être dit davantage,
fi fon ami n'avoit interrompu fa revêrie ,
en la lui reprochant. " Tu es furement
» amoureux , lui dit -il d'un ton badin. Je
» t'ai vu un air bien animé auprès de Mlle
» d'Arvieux ; conviens- en de bonne foi.
Il n'eft pas bien difficile d'arracher un fecret
de cette nature. Montvilliers qui connoiffoit
la difcrétion de fon ami , lui
avoua fans beaucoup de peine un fentiment
dont il étoit trop rempli , pour n'avoir
pas befoin d'un confident : mais en
convenant que les charmes de cette Demoifelle
l'avoient touché , il ajouta que
comme il craignoit que le caractere ne répondît
pas aux graces extérieures , il fongeoit
aux moyens de connoître le fond de
fon coeur. Si ce n'eft que cela qui te fait
rêver , lui dit fon ami , il eft aifé de te
fatisfaire . Je connois une perfonne qui eſt
amie particuliere de Mlle d'Arvieux ; je
fçais qu'elles s'écrivent quand elles ne
peuvent le voir , & tu n'ignores pas qu'on
24 MERCURE DE FRANCE.
•
fe peint dans fes lettres fans même le vouloir
& fans croire le faire ; il ne s'agit que
d'avoir celles de Mlle d'Arvieux , & je les
poffede ; c'eſt un larcin que j'ai fait à cette
amie , qui eft auffi la mienne. Les voici ,
je te les confie .
Montvilliers , après avoir remercié fon
ami que fes affaires appelloient ailleurs ,
fe rendit chez lui chargé de ces importan
tes pieces. Il lut plufieurs de ces lettres qui
étoient autant de preuves de la délicateffe
& de la jufteffe d'efprit de Mlle d'Arvieux.
C'étoit un agréable variété de raiſon &
de badinage . Le ftyle en étoit pur , aiſé ,
naturel , fimple , élégant , & toujours convenable
au fujet mais quel plaifir pour
Montvilliers de voir le fentiment regner
dans toutes ces lettres , & de lire dans une
d'elles , qu'un amant pour lui plaire devoit
bien moins chercher à acquerir des
graces que des vertus ; qu'elle lui deman--
doit un fond de droiture inaltérable , un
amour de l'ordre & de l'humanité , une
délicateffe de probité , une folidité du jugement
, une bonté de coeur naturelle , une
élévation de fentimens , un amour éclairé
pour la religion , un humeur douce , indulgente
, bienfaifante.
De pareilles découvertes ne fervirent
point à guérir Montvilliers de fa paflion ..
Toutes
NOVEMBRE . 1755. 23
Toutes les vertus & les qualités que Mlle
d'Arvieux exigeoit d'un amant , étoient directement
les traits qui caracterifoient fa
maîtreffe idéale . Cette conformité d'idée.
l'enchanta. Voilà donc , dit- il avec tranf
port , ce tréfor précieux que je cherchois
fans efpérance de le trouver ; cette perfonne
fi parfaite que je regardois comme une
belle chimere , ouvrage de mon imagination
. Que ne puis - je voler dès ce moment à
Les pieds , lui découvrir mes fentimens , ma
façon de penfer, lui jurer que l'ayant aimée
fans la connoître, je continuerai de l'adorer
toute ma vie avec la plus exacte fidélité .
Huit jours fe pafferent fans que Montvilliers
qui voyoit fouvent fa maîtreffe ,
pût trouver le moyen de l'entretenir en
particulier , quelque défir qu'il en eût :
mais le neuvieme lui fut plus favorable.
Difpenfe - moi , je vous prie , continua la
Silphide , de vous redire les difcours que
ces deux amans fe tinrent ; il vous fuffira
de fçavoir qu'ils furent très - contens l'un
de l'autre , & que cet entretien redoubla
une paffion qui n'étoit déja que trop vive
pour leur repos.
Un jour que Montvilliers conduit par
le plaifir & le fentiment , étoit allé voir .
Mlle d'Arvieux , il fut furpris de trouver
auprès d'elle un homme âgé qu'il ne con- :
B
62: MERCURE DE FRANCE.
noifloit point. Il comprit bientôt aux
difcours qu'on tenoit , que ce vieillard
étoit le pere de fa maîtreffe , & qu'il venoit
dans le deffein de la remmener avec
lui. Ils fe leverent un inftant après pour.
fortir , & notre amant refté feul avec la
maîtreffe du logis , apprit d'elle que M.
d'Arvieux venoit annoncer à fa fille qu'un
jeune homme fort riche , nommé Frien-.
val , l'avoit demandée en mariage ; que ce
parti paroiffoit être du goût du pere.
Montvilliers interdit à cette nouvelle , pria
celle qui la lui apprenoit , de vouloir bien
l'aider de fes confeils. Il faut vous propofer
, lui dit-elle , vous faire connoître.
Hé ! Madame , voudra - t - on m'écouter ,
répondit il? M. d'Arvieux ne m'a jamais
vu ; vous êtes amie de fa femme , rendez-
moi ce fervice . Elle y confentit , &.
lui promit que dès le lendemain elle iroit
demander à dejeûner à Mme d'Arvieux :
Au reste , ajouta- t- elle , vous pouvez être
tranquille du côté de vôtre maîtreffe ;
quand elle feroit capable de vous faire.
une infidélité , ce ne feroit point en faveur
de ce rival , elle le connoît trop bien ;
& pour vous raffurer davantage , je vais
vous rendre fon portrait tel qu'elle me le
faifoit encore hier en nous promenant.
Frienval , continua cette Dame , eft un de
NOVEMBRE 1755. 27
•
ces hommes frivoles dont Paris eft inordé.
Amateur des plaifirs , fans être voluptueux
, efclave de la mode en raillant
ceux qui la fuivent avec trop de régulari
té , il agit au hazard . Ses principes varient
fuivant les occafions , ou plutôt il
n'en a aucun. Auffi fes démarches fontelles
toujours inconféquentes. S'il eft
exempt de vices effentiels , il le doit à fon
tempérament. Futile dans fes goûts , dans
fes recherches , dans fes travaux , fon occupation
journaliere eft de courir les fpectacles
, les caffés , les promenades , & de
fe mêler quelquefois parmi des gens qui
pour mieux trouver le bon ton , ont banni
le bon fens de leurs fociétés . Ses plus
férieufes démarches n'ont d'autre but
qu'un amufement paffager , & fon état
peut s'appeller une enfance continuée . Il
y a fort long- tems qu'il connoît Mlle d'Arvieux
, & qu'il en eft amoureux , comme
tous les gens de fon efpece , c'eft-à- dire
fans fe gêner. Mais loin de le payer d'aucun
retour elle n'a pas daigné faire la
moindre attention à fes galanteries. Trop
occupé pour réfléchir , fa légereté lui a
fauvé mille conféquences peu flateufes ,
qu'il devoit naturellement tirer. Il fe croit
aimé avec la même bonne foi qu'il fe
croit aimable ; fon mérite lui femble une
Bij
28 MERCURE DE FRANCE.
chofe , démontrée , & qu'on ne peut lut
difputer raisonnablement.
Le lendemain fut un jour heureux pour
Montvilliers. Son Ambaffadrice lui rapporta
qu'on vouloit bien fufpendre la conclufion
du mariage propofé , afin de le
connoître , & qu'on lui permettoit de fe
préfenter. Il ne fe le fit pas dire deux fois:
il courut chez M. d'Arvieux qui le reçut
affez bien pour lui faire efperer de l'être
encore mieux dans la fuite. Sa maîtreffe
lui apprit qu'ils partoient dès le lendemain
pour cette terre dont elle lui avoit
parlé ; il promit qu'il les fuivroit de près :
en effet il prit la route de fa patrie deux
jours après leur départ.
Depuis trois semaines que fa paffion
avoit commencé , il en avoit été fi occupé
qu'il avoit oublié d'écrite à M. de Madinville
. Il étoit déja à moitié chemin qu'il
fe demanda comment il alloit excufer auprès
de lui ce retour précipité. Il comprit
alors qu'il lui avoit manqué effentiellement
de plufieurs façons , & que fa conduite
lui méritoit l'odieux titre d'ingrat.
Mais fi ces réflexions lui firent craindre
le moment d'aborder fon bienfaicteur , des
mouvemens de tendreffe & de reconnoiffance
rien ne pouvoit altérer , lui fique
Fr.rent défirer de l'embraffer. Ces différens
1-
NOVEMBRE. 1755. 29
fentimens lui donnerent un air confus ,
embarraffé , mêlé d'attendriffement.
M. de Madinville qui avoit pour lui
l'affection la plus fincere , n'avoit point
fupporté fon abfence fans beaucoup de
peine & d'ennui . Charmé de fon retour
dont il fut inftruit par une autre voie , s'il
avoit fuivi les mouvemens de fon coeur ,
mille careffes auroient été la punition de
la faute que Montvilliers commettoit en
revenant fans lui demander fon agrément;
mais il voulut éprouver fi l'abfence ne
l'avoit point changé, & fi comblé des bienfaits
de l'amour , il feroit fenfible aux pertes
de l'amitié : il fe propofa donc de le
recevoir avec un air férieux & mécontent.
Montvilliers arrive , defcend de cheval ,
vole à la chambre de fon ami , qui en le
voyant joua fort bien la furpriſe . Quoi !
c'est vous , Montvilliers , lui dit - il , en
reculant quelques pas : oferois je vous demander
la caufe de ce prompt retour , &
pourquoi vous ne m'en avez point averti ?
J'efperois cependant que vous me feriez
cette grace.Montvilliers déconcerté par cet- "
te réception ne put répondre une feule
parole. Mais fes yeux interpretes de fon
ame , exprimoient affez fon trouble. M. de
Madinville fans faire femblant de s'en appercevoir
, ajouta : Au refte , je ne fuis
Biij
30 MERCURE DE FRANCE.
pas fâché de vous revoir ; vous avez pré
venu mon deffein ; j'allois vous écrire pour
vous engager à revenir , l'affaire dont je
vous ai parlé avant votre départ eft fort
avancée , il ne manque pour la conclure
que votre confentement. Ma niece fur le
bon témoignage que je lui ai rendu de
votre caractere , vous aime autant & plus
que moi - même. Mais je ne penfe pas ,
continua- t- il , que vous avez beſoin de
repos & de rafraîchiffement ; allez - en
prendre , nous nous expliquerons après.
Pénétré de l'air, froid & fec dont M.
de Madinville l'avoit reçu , qui lui avoit
ôté la liberté de lui témoigner la joie qu'il
avoit de le revoir , Montvilliers avoit befoin
de folitude pour mettre quelque
ordre à fes idées . Il fortit fans trop fçavoir
où il alloit , & s'arrêtant dans ce
bois où il avoit vu fon ami pour la premiere
fois , il fe repréſenta plus vivement
que jamais les obligations qu'il lui avoit.
Son ame , fon coeur , fon efprit , fes qualités
extérieures étoient le fruit de fes
foins ; fon amitié avoit toujours fait les
charmes de fa vie , il falloit y renoncer ,
ou fe réfoudre à ne jamais pofféder Mlle
d'Arvieux quelle cruelle alternative ! Il
falloit pourtant fe décider. Un fort honnête
homme de R .... qu'il avoit vu ſous
NOVEMBRE 1755 . 31
:
vent chez M. de Madinville , interrompit
ces réflexions accablantes . Après les premiers
complimens , il lui demanda ce qui
pouvoit caufer l'agitation où il le voyoit.
Montvilliers ne fit point de difficulté de
lui confier fon embarras . Il lui raconta le
projet de fon ami qu'il lui avoit communiqué
avant fon voyage , la naiffance &
la violence d'une paffion qu'il n'avoit pas
été le maître de ne point prendre , l'impoffibilité
où il fe trouvoit de la vaincre
la crainte exceffive de perdre un ami dont
il connoiffoit tout le prix , & fans lequel
il ne pouvoit efperer d'être heureux .
Ce récit que Montvilliers ne put faire
fans répandre des larmes , attendrit celui
qui l'écoutoit . Votre fituation eft très- embarraffante
; lui dit- il. Pour moi , je nè
vois pas d'autre parti que de déclarer naïvement
à M. de Madinville ce que vous
fouffrez. Il est généreux , il vous aime , &
ne voudra point vous défefperer . Ah !
fongez- vous , répondit- il , que cette déclaration
détruit un projet qui eft devenu
l'objet de fa complaifance ? Faites - vous.
attention qu'il a parlé de moi à fa niece ,
qu'il a fait naître dans fon ame une paffion
innocente ? Non , je n'aurai jamais la
hardieffe de la lui faire moi-même. Hé
bien voulez-vous que je lui en parle ,
Biv
32 MERCURE DE FRANCE.
demanda fon confident ? Je vais paffer
l'après-midi avec lui ; nous ferons feuls ,
je tâcherai de démêler ce qu'il penſe à votre
fujet .
Montvilliers ayant fait connoître qu'il
lui rendroit un grand fervice , le quitta ,
& prit le chemin qui conduifoit à Dorneville.
Il trouva fon pere en deuil de fa
belle mere ; il le reçut affez bien , & l'engagea
à fouper avec lui , & à occuper fon
ancien appartement.
Son Ambaffadeur eut fa vifite le lendemain
de fort bon matin. Il lui dit qu'il
n'avoit pas tiré de fa commiffion tout le
fruit qu'il en efperoit : que M. de Madinville
lui avoit dit qu'il n'avoit jamais prétendu
contraindre les inclinations de perfonne
au refte , ajouta- t-il , allez- le voir ,
expliquez- vous enfemble.
Montvilliers qui vouloit s'éclaircir à
quelque prix que ce fût , partit auffi -tôt ;
mais plus il approchoit de Madinville &
plus fon courage diminuoit. Il entre cependant
; on lui dit que fon ami étoit à fe
promener. Il va pour le joindre , il l'apperçoit
au bout d'une allée , le falue profondément
, cherche dans fes yeux ce qu'il
doit craindre ou efperer ; mais M. de
Madinville qui le vit , loin de continuer
affecta de , paffer d'un autre côté
NOVEMBRE. 1755. 33
i
pour éviter de le rencontrer.
Ce mouvement étoit plus expreffif
que tous les difcours du monde . Montvilliers
qui comprit ce qu'il vouloit dire ,
fur pénétré de l'affliction la plus vive . Il
fe jetta dans un bofquet voifin où il fe mit
à verfer des larmes ameres. Alors confidérant
ce qu'il avoit perdu , il prit la réfolution
de faire tout fon poffible pour le
recouvrer . M. de Madinville qui fe douta
de l'effet que fon dedain affecté auroit
produit , & qui ne vouloit pas abandonner
long - tems Montvilliers à fon défefpoir ,
vint comme par hafard dans l'endroit où
il étoit pour lui donner occafion de s'expliquer
, & feignit encore de vouloir fe
retirer. Cette nouvelle marque d'indifférence
outrageant la tendreffe de Montvilliers
, il fe leva avec un emportement de
douleur ; arrêtez , Monfieur , lui dit - il
d'une voix altérée : il eft cruel dans l'état
où vous me voyez , de m'accabler par de
nouveaux mépris . Ma préfence vous eft
odieufe ; vous me fuyez avec foin , tandis
que préfé par le fentiment , je vous cherche
pour vous dire que je fuis prêt de tout
facrifier à l'amitié . Oui , ajouta - t- il en
rédoublant fes larmes , difpofez de ma
main , de mes fentimens , de mon coeur ,
& rendez -moi la place que j'occupois dans
le vôtre. By
34 MERCURE DE FRANCE.
M. de Madinville charmé , ceffa de fe
contraindre , & ne craignit plus de laiſſer
voir fa joie & fon attendriffement . Il embraffe
Montvilliers , l'affure qu'il n'a pas
ceffé un inftant de l'aimer ; qu'il étoit
vrai que l'indifférence qu'il fembloit avoir
pour fon alliance , lui avoit fait beaucoup
de peine , parce qu'il la regardoit comme
une marque de la diminution de fon amitié
; que la fienne n'étant point bornée
il vouloit aufli être aimé fans réferve ;
qu'au refte il n'abuferoit point du pouvoir
abfolu qu'il venoit de lui donner fur
fa perfonne ; que la feule chofe qu'il exigeoit
de fa complaifance , étoit de voir
fa niece ; que fi après cette entrevue il
continuoit à penfer de la même façon ,
il pourroit le dire avec franchife , & fuivre
fon penchant.
Il finiffoit à peine de parler , qu'on vint
lui annoncer la vifite de fa niece . Repréfentez
- vous quel fut l'étonnement & la
joie de Montvilliers , lorfqu'entrant dans
une fale où l'on avoit coutume de recevoir
la compagnie , il apperçut Mlle d'Arvieux
qui étoit elle-même la niece de M.
de Madinville.
M. d'Arvieux , frere aîné de cet aimable
Philofophe , étoit un homme haut ,
emporté , violent ; ils avoient eu quelques
NOVEMBRE. 1755 . 35
différends enfemble , & M. de Madinville
fans conferver aucun reffentiment de fes
mauvais procédés , avoit jugé qu'il étoit de
fa prudence d'éviter tout commerce avec
un homme fi peu raifonnable. Comme M.
d'Arvieux étoit forti fort jeune de la province
fans y être revenu depuis , à peine
y connoiffoit - on fon nom ; Montvilliers
n'en avoit jamais entendu parler . Mlle
d'Arvieux avoit eu occafion de voir fon
oncle dans un voyage qu'il avoit fait à Paris
, & depuis ce tems elle entretenoit
avec lui un commerce de lettres à l'infçu
de fon pere. Comme elle fe fentoit du
penchant à aimer Montvilliers , elle fut
bien-aife avant que de s'engager plus avant ,
de demander l'avis de fon oncle , & ce
qu'elle devoit penfer de fon caractere .
L'étude des hommes lui avoit appris combien
il eft difficile de les connoître , & l'étude
d'elle-même combien on doit fe défier
de fes propres lumieres . Elle écrivit
donc dès le même jour , & reçut trois
jours après une réponse qui paffoit fes
efpérances , quoiqu'elles fuffent des plus
Alatteufes. Après lui avoir peint le coeur &
l'efprit de Montvilliers des plus belles couleurs
, M. de Madinville recommanda à
fa niece de continuer à lui faire un myftere
de leur parenté & de leur liaifon , afin
B vj
36 MERCURE DE FRANCE.
de voir comment il fe comporteroit dans
une conjoncture fi délicate .
pe-
Tout le monde fut bientôt d'accord.
On badina fur la fingularité de cette aventure
, & l'on finit par conclure que Montvilliers
demanderoit l'agrément de fon
re. Il y courut auffi- tôt , & l'ayant trouvé
feul dans fon cabinet , il alloit lui déclarer
le fujet de fa vifite : mais M. Dorneville
ne lui en laiſſa pas le loifir. J'ai jugé , lui
dit-il , qu'il étoit tems de vous établir , &
j'ai pour cela jetté les yeux fur Mlle de
F... Vous allez peut- être m'alléguer pour
vous en défendre , ajouta-t - il , je ne ſçais
quelle paffion romanefque que vous avez
prife à Paris pour une certaine perfonne
que je ne connois point . Mais fi vous voulez
que nous vivions bien enſemble , ne
m'en parlez jamais. Ne pourrai -je point ,
Monfieur , dit Montvilliers , fçavoir la
raifon ? .... Je n'ai de compte à rendre
à qui que ce foit , reprit le pere avec emportement
; en un mot , je fçais ce qu'il
vous faut. Mlle d'Arvieux n'eft point votre
fait , & je ne confentirai jamais à cette alliance
faites votre plan là- deffus . Il fortit
en difant ces mots. Montvilliers confterné
refta immobile : il ne pouvoit s'imaginer
pourquoi il paroiffoit avoir tant d'éloignement
pour un mariage convenable , & mêNOVEMBRE.
1755. 37
me avantageux . Sa maîtreffe étoit fille
unique , & M. d'Arvieux du côté de la
fortune & de la nobleffe ne le cédoit point
à M. Dorneville.
Driancourt , frere de Montvilliers , dont
j'ai rapporté la naiffance au commencement
de cette hiftoire , avoit pour lors
dix-huit àdix- neuf ans. Double, artificieux ,
adroit , flateur, il penfoit que le grand art
de vivre dans le monde étoit de faire des
dupes fans jamais le devenir , & de tout
facrifier à fon utilité . Son efprit élevé audeffus
des préjugés vulgaires ne reconnoiffoit
aucunes vertus , & tout ce que les
hommes appellent ainfi n'étoit , felon
lui , que des modifications de l'amourpropre
, qui eft dans le monde moral , ce
qu'eft l'attraction dans le monde phyfique ,
c'eft-à- dire la caufe de tout. Toutes les
actions , difoit - il , font indifférentes ,
puifqu'elles partent du même principe.
Il n'y a pas plus de mal à tromper fon
ami , à nier un dépôt , à inventer une calomnie
, qu'à rendre ſervice à fon voiſin ,
à combattre pour la défenfe de fa patrie ,
à foulager un homme dans fa mifere , ou
à faire toute autre action .
Driancourt avec ce joli fyftême , ne perdoit
point de vue le projet de fe délivrer
de fon frere , dont fa mere lui avoit fait
38 MERCURE DE FRANCE.
le
fentir mille fois la néceffité. Il crut que
moment de l'exécuter étoit arrivé. C'étoit
lui qui avoit inftruit M. Dorneville de la
paffion de Montvilliers pour Mlle d'Arvieux
, & qui en même tems avoit peint
cette Demoiſelle de couleurs peu avantageufes.
Depuis ce moment il ne ceffa de
rapporter à fon pere , dont il avoit toute la
confiance & la tendreffe , mille difcours
peu refpectueux , accompagnés de menaces
qu'il faifoit tenir à Montvilliers : enfin
il tourna fi bien l'efprit de ce vieillard foi
ble & crédule , qu'il le fit déterminer au
plus étrange parti.
L'on parloit beaucoup dans ce tems là
de ces colonies que l'on envoie en Amérique
, & qui fervent à purger l'Etat . Driancourt
ayant obtenu , non pourtant fans
quelque peine , le confentement de fon
pere , part pour D ..... trouve un vaiffeau
prêt à mettre à la voile chargé de plufieurs
miférables qui , fans être affez coupables
pour mériter la mort l'étoient cependant
affez pour faire fouhaiter à la fofociété
d'en être délivrée . Il parle au Capitaine
qui lui promit de le défaire de fon
frere , pourvu qu'il pût le lui livrer dans
deux jours. Il revint en diligence , & dès
la nuit fuivante , quatre hommes entrent
dans la chambre de Montvilliers, qui avoit
NOVEMBRE. 1755 . 39
continué de coucher chez fon pere depuis
fon retour de Paris , fe faififfent de lui ,
le contraignent de fe lever , le conduifent
à une chaiſe de pofte , l'obligent d'y monter
, d'où ils ne le firent defcendre que
pour le faire entrer dans le vaiffeau qui
partit peu de tems après .
Montvilliers qui avoit pris tout ce qui
venoit de lui arriver pour un rêve , ne
douta plus alors de la vérité . Enchaîné
deavec
plufieurs autres miférables , que
vint-il quand il fe repréfenta l'indignité
& la cruauté de fon pere , ce qu'il perdoit ,
ce qu'il alloit devenir ? Ces idées agirent
avec tant de violence fur fon efprit, qu'el
les y mirent un défordre inconcevable. Il
jugea qu'il n'avoit point d'autre reffource
dans cette extrêmité que la mort , & réfo
lut de fe laiffer mourir de faim. Il avoit
déja paffé deux jours fans prendre aucune
nourriture , mais le jeune Anglois que
voici , qui étoit pour lors compagnon de
fon infortune , comprit à fon extrême abattement
qu'il étoit plus malheureux que
coupable. Il entreprit de le confoler , il
lui préfenta quelque rafraîchiffemens qui
furent d'abord refufés ; il le preffa , il le
pria. Je ne doute pas , lui dit- il , que vous
ne foyez exceffivement à plaindre ; je veux
même croire que vous l'êtes autant que
40 MERCURE DE FRANCE
moi cependant il eft des maux encore
plus rédoutables que tous ceux que nous
éprouvons dans cette vie , & dont on fe
rend digne en entreprenant d'en borner
foi-même le cours . Peut - être le ciel qui ne
veut que vous éprouver pendant que vous
vous révoltez contre fes décrets , vous
prépare des fecours qui vous font inconnus.
Acceptez , je vous en conjure , ces
alimens que vous préfente un homme qui
s'intéreffe à votre vie.
Montvilliers qui n'avoit fait aucune
attention à tout ce qui l'environnoit , examina
celui qui lui parloit ainfi , remarqua
dans fon air quelque chofe de diftingué
& de prévenant ; il trouva quelque
douceur à l'entretenir. Il fe laiffa perfuader
, il lui raconta fon hiftoire ; & quand
il cut fini fon récit , il le preffa d'imiter
fa franchiſe , ce que le jeune Anglois fic
en ces termes :
Lafuite au prochain Mercure.
HISTOIRE VRAISEMBLABLE.
SUITE DE LA PROMENADE DE PROVINCE.
Par Mademoiselle Pliffon , de Chartres.
M
Ontvilliers ( c'eft ainſi que s'appelle
le Philofophe que voici ) eft un riche
Gentilhomme
du voifinage , le plus heureux
& le plus digne de l'être . Un efprit
juſte , cultivé , folide ; une raiſon fupérieure
, éclairée , un coeur noble , généreux
délicat , fenfible ; une humeur douce , bienfaifante
; un extérieur ouvert , font des
qualités naturelles qui le font adorer de
A v
to MERCURE DE FRANCE.
tous ceux qui le connoiffent. Tranquille
poffeffeur d'un bien confidérable , d'une
époufe digne de lui , d'un ami véritable ,
il fent d'autant mieux les agrémens de fa
fituation qu'elle a été précédée des plus
triftes revers.
La perte de fa mere , qui mourut peu
de tems après fa naiffance , a été la premiere
& la fource de toutes fes infortunes
. Son pere , qui fe nommoit Dorneville
, après avoir donné une année à ſa
douleur , ou plutôt à la bienféance , fe
remaria à la fille d'un de fes amis. Elle
étoit aimable , mais peu avantagée de la
fortune. L'unique fruit de ce mariage fut
un fils . Sa naiffance , qui avoit été longtems
défirée , combla de joie les deux époux.
Montvilliers , qui avoit alors quatre à cinq
ans , devint bientôt
indifférent , & peu
après incommode. Il étoit naturellement
doux & timide . Sa belle- mere qui ne cherchoit
qu'à donner à fon pete de l'éloignement
pour lui , fit pailer fa douceur pour
ftupidité. Elle découvroit dans toutes les
actions le germe d'un caractere bas , &
même dangereux. Tantôt elle avoit remarqué
un trait de méchanceté noire, tantôt un
difcours qui prouvoit un mauvais coeur.Elle
avoit un foin particulier de le renvoyer avec
les domeftiques. Un d'eux à qui il fit pitié
NOVEMBRE. 1755 . 11
lui apprit à lire & à écrire affez paffablement.
Mais le pauvre garçon fut chaffé
pour avoir ofé dire que Montvilliers n'étoit
pas fi ftupide qu'on vouloit le faire
croire , & qu'il apprenoit fort bien tout
ce qu'on vouloit lui montrer.
*
Saraifon qui fe développoit , une noble
fierté que la naiffance inſpire , lui rendirent
bientôt infupportables les mépris
des valets qui vouloient plaire à Madame
Dorneville. La maifon paternelle lui
devint odieufe. Il paffoit les jours entiers
dans les bois , livré à la mélancolie & au
découragement. Accoutumé dès fa plust
tendre jeuneffe à fe regarder comme un
objet à charge , il fe haïffoit prefqu'autant
que le faifoit fa belle-mere. Tous fes fouhaits
ſe bornoient au fimple néceffaire . 11
ne défiroit que les moyens de couler une
vie paifible dans quelque lieu folitaire , &
loin du commerce des hommes dont il fe
croyoit incapable.
Ce fut ainfi que ce malheureux jeune
homme pafla les quinze premieres années
de fa vie , lorfqu'un jour , il fut rencontré
dans le bois où il avoit coutume de fe retirer
, par un militaire refpectable , plein de
candeur , de bon fens , & de probité.
Après avoir fervi honorablement fa parrie
pendant vingt-ans , ce digne guerrier s'é
A vi
12 MERCURE DE FRANCE.
toit retiré dans une de fes terres pour vivre.
avec lui -même , & chercher le bonheur ,
qu'il n'avoit pu trouver dans le tumulte
des armes & des paffions. L'étude de fon
propre coeur , la recherche de la fageffe ,
étoient fes occupations ; la phyfique expérimentale
fes amuſemens ; & le foulagement
des misérables fes plaifirs.
M. de Madinville ( c'eft le nom du militaire
devenu philofophe ) après avoir confidéré
quelque tems Montvilliers qui pleuroit
, s'avança vers lui , & le pria avec
beaucoup de douceur de lui apprendre le
fujet de fon affliction , en l'affurant que
s'il pouvoit le foulager , il le feroit de tout
fon coeur.
Le jeune homme qui croyoit être feul
fut effrayé de voir quelqu'un fi près de lui.
Son premier mouvement fut de fuir. Mais
M. de Madinville le retint & le preffa
encore plus fort de l'inftruire de la caufe
de fes larmes. Mes malheurs font fans remede
, répondit enfin Montvilliers : je
fuis un enfant difgracié de la nature ; elle
m'a refufé ce qu'elle accorde à tous les
autres hommes . Eh ! que vous a - t- elle refufé
, reprit l'officier , d'un air plein de bonté
? loin de vous plaindre d'elle , je ne vois
en vous que des fujets de la louer . Quoi ,
Monfieur , repartit le jeune homme avec
NOVEMBRE . 1755. 13
naïveté , ne voyez - vous pas que je manque
abfolument d'efprit ? mon air ... ma
figure , mes façons ... tout en moi ne vous
l'annonce- t- il pas ? Je vous affure , répondit
le Philofophe , que votre figure n'a rien
que de fort agréable . Mais , mon ami , qui
êtes-vous , & comment avez - vous été élevé
? Montvilliers lui fit le récit que je viens
de vous faire. J'ai entendu parler de vous
& de votre prétendue imbécillité , lui dit
alors le militaire , mais vous avez de l'intelligence
, & vous me paroiffez être d'un
fort bon caractere . Je veux cultiver ces qualités
naturelles , vous confoler , en un mot
vous rendre fervice . Je ne demeure qu'à
une lieue d'ici ; fi vous ne connoiffez pas
Madinville , vous n'aurez qu'à le demander,
tout le monde vous l'enfeignera .
Il faut avoir été auffi abandonné que
l'étoit Montvilliers , pour concevoir tout le
plaifir que lui fit cette rencontre. Il fe leva
le lendemain dès que le jour parut , & ne
pouvant commander à fon impatience , il
vole vers le feul homme qu'il eût jamais
trouvé fenfible à fes maux. Il le trouva occupé
à confidérer les beautés d'un parterre
enrichi de fleurs , dont la variété & le parfum
fatisfaifoient également la vue &
l'odorat. M. de Madinville fut charmé de
l'empreffement de Montvilliers , converfa
14 MERCURE DE FRANCE.
beaucoup avec lui , fut content de fa pénétration
, & de fa docilité , & lui fit promettre
qu'il viendroit dîner chez lui deux
fois la femaine.
::
Je n'entreprendrai point , continua la
Silphide , de vous répéter tous les fages
difcours que notre philofophe tint à ce
jeune homme il lui fit connoître que
pour être heureux , trois chofes font néceffaires
; régler fon imagination , modérer
fes paffions , & cultiver fes goûts. Que
la paix de l'ame & la liberté d'efprit répandent
un vernis agréable fur tous les objets
qui nous environnent. Que la vertu
favorite du véritable philofophe , eft une
bienveillance univerfelle pour fes femblables
, un fentiment de tendreſſe & de compaffion
, qui parle continuellement en leur
faveur , & qui nous preffe de leur faire du
bien. Que cette aimable vertu eft la fource
des vrais plaifirs. Qu'on trouve en l'exerçant
, cette volupté fpirituelle , dont les
coeurs généreux & fenfibles fçavent feuls
connoître le prix . Montvilliers comprit fort
bien toutes ces vérités. Il fit plus , il les aima.
Son efprit femblable à une fleur que les
froids aquilons ont tenu longtems fermée
& qu'un rayon de foleil fait épanouir , fe
développa. Les fentimens vertueux que la
nature avoit mis dans fon coeur généreux ,
NOVEMBRE. 1755 .
promirent une abondante moiffon .
Le changement qui s'étoit fait en lui ,
vint bientôt aux oreilles de fon pere . Il
voulut en juger par lui - même. Accoutumé
à le craindre , Montvilliers répondit à
fes queſtions d'un air timide & embarraſſé.
Sa belle-mere toujours attentive à le deffervir
, fit paffer fon embarras pour aver
fion & M. Dorneville le crut d'autant plus
facilement , qu'il ne lui avoit pas donné
fujet de l'aimer. Il fe contenta de le traiter
avec un peu plus d'égards , mais fans ces
manieres ouvertes que produifent l'amitié
& la confiance . Sa belle- mere changea auffi
de conduite ; elle le combla de politeffes extérieures
, comme fi elle eût voulu réparer
par ces marques de confidération le mépris
qu'elle avoit fait de lui jufqu'alors. Mais,
au fond elle ne pouvoit penfer fans un extrême
chagrin, qu'étant l'aîné, il devoit hériter
de la plus confidérable partie des biens
de M. Dorneville , tandis que fon cher fils,
l'unique objet de fes complaifances , ne
feroit jamais qu'un gentilhomme malaiſé.
Cinq ou fix ans fe pafferent de cette forte.
Montvilliers qui recevoit tous les jours
de nouvelles preuves de la tendreffe de M.
de Madinville , ne mettoit point de bornes
àfa reconnoillance. Ce fentiment accompa
gné de l'amitié est toujours fuivi du plaifir.
Ce jeune homme n'en trouvoit point de
16 MERCURE DE FRANCE.
de plus grand que de donner des marques
fa fenfibilite à fon bienfaicteur.Tranquille
en apparence , il ne l'étoit cependant pas
dans la réalité. Son coeur , exceffivement
fenfible , ne pouvoit être rempli par l'amitié
, il lui falloit un fentiment d'une autre
efpece. Il fentoit depuis quelque tems en
lui - même un defir preffant , un vif befoin
d'aimer , qui n'eft pas la moins pénible de
toutes les fituations. L'amour lui demandoit
fon hommage
; mais trop éclairé fur
fes véritables intérêts pour fe livrer à ce
petit tyran fans réferve , il vouloit faire
fes conditions . Il comprit que les qualités
du coeur & de l'efprit , le rapport d'humeur
& de façon de penfer , étoient abfolument
néceffaires pour contracter un
attachement férieux & durable . Son imagination
vive travaillant fur cette idée
lui eut bientôt fabriqué une maîtreffe
imaginaire , qu'il chercha vainement à
réaliſer. Il étudia avec foin toutes les jeunes
perfonnes de R.... Cette étude ne fervit
qu'à lui faire connoître l'impoffibilité
de trouver une perfonne fi parfaite. Cependant
, le croiriez-vous ? il s'attacha à
cette chimere même en la reconnoiffant
pour telle : fon plus grand plaifir étoit de
s'en occuper ; il quittoit fouvent la lecture-
& les converfations les plus folides , pour
s'entretenir avec elle..
NOVEMBRE. 1755 17
Quelque confiance qu'il eût en M. de
Madinville , il n'avoit pas ofé lui faire
l'aveu de ces nouvelles difpofitions . Il connoiffoit
fa maladie ; mais en même tems il
la chériffoit , il lui trouvoit mille charmes,
& ç'auroit été le defobliger que d'en entreprendre
la guérifon . C'eft ce que fon ami
n'auroit pas manqué de faire. Un jour qu'il
fe promenoit feul , en faisant ces réflexions,
M. de Madinville vint l'aborder. J'ai fur
vous , mon cher Montvilliers , lui dit- il ,
après avoir parlé quelque tems de chofes
indifférentes, des vues que j'efpere que vous
approuverez. Rien n'eft comparable à l'a
mitié que j'ai pour vous , mais je veux que
des liens plus étroits nous uniffent. Je n'ai
qu'une niece ; j'ofe dire qu'elle eft digne
de vous par la folidité de fon efprit , la fupériorité
de fa raifon , la douceur de fon
caractere , enfin mille qualités eftimables
dont vous êtes en état de fentir tout le
A prix.
Montvilliers , qui n'avoit jamais entendu
parler que fon ami eût une niece , &
qui ne lui croyoit pas même ni de frere ni
de foeur , fut un peu furpris de ce difcours .
Sa réponſe cependant fut courte , polie &
fatisfaifante. Il lui demanda pourquoi il
ne lui avoit jamais parlé d'une perfonne
qui devoit fi fort l'intéreffer , les raifons
18
MERCURE DE
FRANCE.
qui m'en ont empêché , lui répondit fon
ami , m'obligent encore de vous cacher fon
nom & fa demeure. Mais avant que d'en
venir à
l'accompliffement de ce projet ,
ajouta-t- il , mon deffein eft de vous envoyer
paffer quelque tems à Paris. Avec
beaucoup de bon fens & d'efprit , il vous
manque une certaine politeffe de manieres,
une façon de vous préfenter qui prévient
en faveur d'un honnête homme . Parlez - en
à votre pere. Je me charge de faire la dépenfe
néceffaire pour ce voyage.
Enchanté de ce
nouveau
témoignage
d'affection & de générofité ,
Montvilliers
remercia dans les termes les plus vifs fon
bienfaicteur . Il n'étoit
pourtant pas abfolument
fatisfait de la premiere partie de fon
difcours. Ce choix qu'il
paroiffoit lui faire
d'une épouſe fans fon aveu , lui fembla
tyrannique. Il ne put fouffrir de fe voir
privé de la liberté de chercher une perfonne
qui approchât de fon idée. Il imaginoit
dans cette
recherche mille plaifirs dont il
falloit fe détacher. Son coeur
murmura de
cette
contrainte ; elle lui parut infupportable
mais la raifon prenant enfin le deffus
, condamna ces
mouvemens . Elle lui
repréſenta
combien il étoit flatteur & avantageux
pour lui d'entrer dans la famille
d'un homme à qui il devoit tout , & le fit
NOVEMBRE. 1755. 19
convenir qu'en jugeant de l'avenir par le
paffé , fon bonheur dépendoit de fa docilité
pour les confeils de fon ami.
Ces réflexions le calmerent. Il ne fongea
plus qu'à s'occuper des préparatifs de
fon voyage ; ils ne furent pas longs . Les
quinze premiers jours de fon arrivée dans
la capitale furent employés à vifiter les édifices
publics , & à voir les perfonnes à qui
il étoit recommandé . Il fut à l'Académie
pour apprendre à monter à cheval & à
faire des armes ; il fe }; fit des connoiffances
de plufieurs jeunes gens de confidération ,
qui étoient fes compagnons d'exercices ,
& s'introduifit par leur moyen dans des
cercles diftingués . Avide de tout connoî
tre , de tout voir , il eut bientôt tout épui
fé. Son efprit folide ne s'accommoda pas
de la frivolité qui regne dans ce qu'on
appelle bonne compagnie, 11 fe contenta
dans fes momens de loifir , de fréquenter
les fpectacles , les promenades , & de cultiver
la connoiffance de quelques gens de
lettres que M. de Madinville lui avoit
procurée.
La diverfité & la nouveauté de tous ces
objets n'avoient pu guérir fon coeur. Il
avoir toujours le même goût pour fa maîtreffe
imaginaire , & les promenades folitaires
étoient fon amuſement favori. Un
20 MERCURE DE FRANCE.
jour qu'il fe promenoit dans les Tuilleries
, fa rêverie ne l'empêcha pas de remar .
quer une jeune demoifelle , dont la phifionomie
étoit un agréable mêlange de
douceur , de franchife , de modeftie , &
de raifon. Quel attrait pour Montvilliers !
il ne pouvoit fe laffer de la confidérer. Sa
préfence faifoit paffer jufqu'au fond de
fon coeur une douceur fecrette & inconnue.
Elle fortit de la promenade , il la
fuivit , & la vit monter dans un carroffe
bourgeois avec toute fa compagnie. Alors
fongeant qu'elle alloit lui échapper , il eut
recours à un de ces officieux meffagers dont
le Pont- neuf fourmille : il lui donna ordre
de fuivre ce carroffe , & de venir lui redire
en quel endroit il fe feroit arrêté. Environ
une demi - heure après , le courrier revint
hors d'haleine , & lui apprit que toute cette
compagnie étoit defcendue à une maiſon
de campagne fituée à B.....
. Montvilliers , qui connoiffoit une perfonne
dans ce lieu , fe promit d'y aller dès
le lendemain , efpérant revoir cette demoifelle
, peut-être venir à bout de lui parler ,
ou du moins apprendre qui elle étoit .
Rempli de ce projet , il alloit l'exécuter ,
quand un jeune homme de fes amis entra
dans fa chambre , & lui propofa de l'accompagner
, pour aller voir une de fes paNOVEMBRE.
1755 .
rentes , chez laquelle il y avoit bonne compagnie.
Il chercha d'abord quelque prétexte
pour le défendre , mais quand il eut
appris que cette parente demeuroit à B....
il ne fit plus difficulté de fuivre fon ami.
Il ne s'en repentit pas ; car la premiere perfonne
qu'il apperçut en entrant dans une
fort beile falle , fut cette jeune demoiſelle
qu'il avoit vu la veille aux Tuilleries.
Cette rencontre qui lui parut être d'un
favorable augure , le mit dans une fitua
tion d'efprit délicieufe. On fervit le dîner,
& Montvilliers fit fi bien qu'il fe trouva
placé auprès de celle qui poffédoit déja
toutes les affections. Il n'épargna ni galanteries
, ni politeffes , ni prévenances pour
lui faire connoître la fatisfaction qu'il en
reffentoit ; & il ne tint qu'à elle de reconnoître
dans fes manieres une vivacité qui
ne va point fans paffion. Auffi ne fut- elle
pas la derniere à s'en appercevoir : elle
avoit remarqué fon attention de la veille ,
& fa figure dès ce moment ne lui avoit
déplu . Elle lui apprit qu'elle étoit alors
chez une dame de fes amies , qu'elle devoit
y refter encore quinze jours , qu'elle demeuroit
ordinairement à Paris avec fon
pas
pere & fa mere , qu'elle aimoit beaucoup
la campagne , & qu'elle étoit charmée de
ce que fon pere venoit d'acquérir une terre
22 MERCURE DE FRANCE.
affez confidérable , proche de R.... où ils
comptoient aller bientôt demeurer . Quoi ,
Mademoiſelle , lui dit- il , feroit- il bien poffible
que nous devinffions voifins ? Comment
vous êtes de R ... lui demanda - t- elle à
fon tour ? Je n'en fuis pas directement
répondit- il , mais la demeure de mon pere,
qui s'appelle Dorneville , n'en eft éloignée
que d'une lieue. Eh bien , reprit- elle ,
notre terre eft entre Dorneville & Madinville
; connoiffez - vous le Seigneur de cette
derniere paroiffe ? Grand Dieu ! Si je le
connois , répondit-il avec vivacité , c'eſt
l'homme du monde à qui j'ai le plus d'obligation.
Mademoiſelle d'Arvieux , c'eft ainfi
que s'appelloit cette jeune perfonne , contente
de cette déclaration , ne s'ouvrit
davantage . Cependant le foleil prêt à ſe
coucher , obligea les deux amis de reprendre
la route de Paris . Montvilliers n'avoit
jamais vu de journée paffer avec tant de
rapidité avant que de partir , il demanda
la permiffion de revenir , qu'on lui accorda
fort poliment.
pas
Il ne fut pas plutôt forti d'auprès de
Mlle d'Arvieux , que rentrant en lui - même
, & faiſant réflexion fur tous fes mouvemens
, il fentit qu'il aimoit. Le fouvenir
de ce qu'il avoit promis à fon bienfaicteur
, vint auffi-tôt le troubler . Il fe fit
NOVEMBRE . 1755. 23
des reproches de fon peu de courage ; mais
peut- être je m'allarme mal- à- propos , continua-
t- il en lui -même ; c'eft un caprice ,
un goût paffager que Mlle d'Arvieux m'aidera
elle - même à détruire. Si je pouvois
connoître le fond de fon coeur , fa façon
de penfer , fans doute je cefferois de l'aimer.
Il s'en feroit peut-être dit davantage,
fi fon ami n'avoit interrompu fa revêrie ,
en la lui reprochant. " Tu es furement
» amoureux , lui dit -il d'un ton badin. Je
» t'ai vu un air bien animé auprès de Mlle
» d'Arvieux ; conviens- en de bonne foi.
Il n'eft pas bien difficile d'arracher un fecret
de cette nature. Montvilliers qui connoiffoit
la difcrétion de fon ami , lui
avoua fans beaucoup de peine un fentiment
dont il étoit trop rempli , pour n'avoir
pas befoin d'un confident : mais en
convenant que les charmes de cette Demoifelle
l'avoient touché , il ajouta que
comme il craignoit que le caractere ne répondît
pas aux graces extérieures , il fongeoit
aux moyens de connoître le fond de
fon coeur. Si ce n'eft que cela qui te fait
rêver , lui dit fon ami , il eft aifé de te
fatisfaire . Je connois une perfonne qui eſt
amie particuliere de Mlle d'Arvieux ; je
fçais qu'elles s'écrivent quand elles ne
peuvent le voir , & tu n'ignores pas qu'on
24 MERCURE DE FRANCE.
•
fe peint dans fes lettres fans même le vouloir
& fans croire le faire ; il ne s'agit que
d'avoir celles de Mlle d'Arvieux , & je les
poffede ; c'eſt un larcin que j'ai fait à cette
amie , qui eft auffi la mienne. Les voici ,
je te les confie .
Montvilliers , après avoir remercié fon
ami que fes affaires appelloient ailleurs ,
fe rendit chez lui chargé de ces importan
tes pieces. Il lut plufieurs de ces lettres qui
étoient autant de preuves de la délicateffe
& de la jufteffe d'efprit de Mlle d'Arvieux.
C'étoit un agréable variété de raiſon &
de badinage . Le ftyle en étoit pur , aiſé ,
naturel , fimple , élégant , & toujours convenable
au fujet mais quel plaifir pour
Montvilliers de voir le fentiment regner
dans toutes ces lettres , & de lire dans une
d'elles , qu'un amant pour lui plaire devoit
bien moins chercher à acquerir des
graces que des vertus ; qu'elle lui deman--
doit un fond de droiture inaltérable , un
amour de l'ordre & de l'humanité , une
délicateffe de probité , une folidité du jugement
, une bonté de coeur naturelle , une
élévation de fentimens , un amour éclairé
pour la religion , un humeur douce , indulgente
, bienfaifante.
De pareilles découvertes ne fervirent
point à guérir Montvilliers de fa paflion ..
Toutes
NOVEMBRE . 1755. 23
Toutes les vertus & les qualités que Mlle
d'Arvieux exigeoit d'un amant , étoient directement
les traits qui caracterifoient fa
maîtreffe idéale . Cette conformité d'idée.
l'enchanta. Voilà donc , dit- il avec tranf
port , ce tréfor précieux que je cherchois
fans efpérance de le trouver ; cette perfonne
fi parfaite que je regardois comme une
belle chimere , ouvrage de mon imagination
. Que ne puis - je voler dès ce moment à
Les pieds , lui découvrir mes fentimens , ma
façon de penfer, lui jurer que l'ayant aimée
fans la connoître, je continuerai de l'adorer
toute ma vie avec la plus exacte fidélité .
Huit jours fe pafferent fans que Montvilliers
qui voyoit fouvent fa maîtreffe ,
pût trouver le moyen de l'entretenir en
particulier , quelque défir qu'il en eût :
mais le neuvieme lui fut plus favorable.
Difpenfe - moi , je vous prie , continua la
Silphide , de vous redire les difcours que
ces deux amans fe tinrent ; il vous fuffira
de fçavoir qu'ils furent très - contens l'un
de l'autre , & que cet entretien redoubla
une paffion qui n'étoit déja que trop vive
pour leur repos.
Un jour que Montvilliers conduit par
le plaifir & le fentiment , étoit allé voir .
Mlle d'Arvieux , il fut furpris de trouver
auprès d'elle un homme âgé qu'il ne con- :
B
62: MERCURE DE FRANCE.
noifloit point. Il comprit bientôt aux
difcours qu'on tenoit , que ce vieillard
étoit le pere de fa maîtreffe , & qu'il venoit
dans le deffein de la remmener avec
lui. Ils fe leverent un inftant après pour.
fortir , & notre amant refté feul avec la
maîtreffe du logis , apprit d'elle que M.
d'Arvieux venoit annoncer à fa fille qu'un
jeune homme fort riche , nommé Frien-.
val , l'avoit demandée en mariage ; que ce
parti paroiffoit être du goût du pere.
Montvilliers interdit à cette nouvelle , pria
celle qui la lui apprenoit , de vouloir bien
l'aider de fes confeils. Il faut vous propofer
, lui dit-elle , vous faire connoître.
Hé ! Madame , voudra - t - on m'écouter ,
répondit il? M. d'Arvieux ne m'a jamais
vu ; vous êtes amie de fa femme , rendez-
moi ce fervice . Elle y confentit , &.
lui promit que dès le lendemain elle iroit
demander à dejeûner à Mme d'Arvieux :
Au reste , ajouta- t- elle , vous pouvez être
tranquille du côté de vôtre maîtreffe ;
quand elle feroit capable de vous faire.
une infidélité , ce ne feroit point en faveur
de ce rival , elle le connoît trop bien ;
& pour vous raffurer davantage , je vais
vous rendre fon portrait tel qu'elle me le
faifoit encore hier en nous promenant.
Frienval , continua cette Dame , eft un de
NOVEMBRE 1755. 27
•
ces hommes frivoles dont Paris eft inordé.
Amateur des plaifirs , fans être voluptueux
, efclave de la mode en raillant
ceux qui la fuivent avec trop de régulari
té , il agit au hazard . Ses principes varient
fuivant les occafions , ou plutôt il
n'en a aucun. Auffi fes démarches fontelles
toujours inconféquentes. S'il eft
exempt de vices effentiels , il le doit à fon
tempérament. Futile dans fes goûts , dans
fes recherches , dans fes travaux , fon occupation
journaliere eft de courir les fpectacles
, les caffés , les promenades , & de
fe mêler quelquefois parmi des gens qui
pour mieux trouver le bon ton , ont banni
le bon fens de leurs fociétés . Ses plus
férieufes démarches n'ont d'autre but
qu'un amufement paffager , & fon état
peut s'appeller une enfance continuée . Il
y a fort long- tems qu'il connoît Mlle d'Arvieux
, & qu'il en eft amoureux , comme
tous les gens de fon efpece , c'eft-à- dire
fans fe gêner. Mais loin de le payer d'aucun
retour elle n'a pas daigné faire la
moindre attention à fes galanteries. Trop
occupé pour réfléchir , fa légereté lui a
fauvé mille conféquences peu flateufes ,
qu'il devoit naturellement tirer. Il fe croit
aimé avec la même bonne foi qu'il fe
croit aimable ; fon mérite lui femble une
Bij
28 MERCURE DE FRANCE.
chofe , démontrée , & qu'on ne peut lut
difputer raisonnablement.
Le lendemain fut un jour heureux pour
Montvilliers. Son Ambaffadrice lui rapporta
qu'on vouloit bien fufpendre la conclufion
du mariage propofé , afin de le
connoître , & qu'on lui permettoit de fe
préfenter. Il ne fe le fit pas dire deux fois:
il courut chez M. d'Arvieux qui le reçut
affez bien pour lui faire efperer de l'être
encore mieux dans la fuite. Sa maîtreffe
lui apprit qu'ils partoient dès le lendemain
pour cette terre dont elle lui avoit
parlé ; il promit qu'il les fuivroit de près :
en effet il prit la route de fa patrie deux
jours après leur départ.
Depuis trois semaines que fa paffion
avoit commencé , il en avoit été fi occupé
qu'il avoit oublié d'écrite à M. de Madinville
. Il étoit déja à moitié chemin qu'il
fe demanda comment il alloit excufer auprès
de lui ce retour précipité. Il comprit
alors qu'il lui avoit manqué effentiellement
de plufieurs façons , & que fa conduite
lui méritoit l'odieux titre d'ingrat.
Mais fi ces réflexions lui firent craindre
le moment d'aborder fon bienfaicteur , des
mouvemens de tendreffe & de reconnoiffance
rien ne pouvoit altérer , lui fique
Fr.rent défirer de l'embraffer. Ces différens
1-
NOVEMBRE. 1755. 29
fentimens lui donnerent un air confus ,
embarraffé , mêlé d'attendriffement.
M. de Madinville qui avoit pour lui
l'affection la plus fincere , n'avoit point
fupporté fon abfence fans beaucoup de
peine & d'ennui . Charmé de fon retour
dont il fut inftruit par une autre voie , s'il
avoit fuivi les mouvemens de fon coeur ,
mille careffes auroient été la punition de
la faute que Montvilliers commettoit en
revenant fans lui demander fon agrément;
mais il voulut éprouver fi l'abfence ne
l'avoit point changé, & fi comblé des bienfaits
de l'amour , il feroit fenfible aux pertes
de l'amitié : il fe propofa donc de le
recevoir avec un air férieux & mécontent.
Montvilliers arrive , defcend de cheval ,
vole à la chambre de fon ami , qui en le
voyant joua fort bien la furpriſe . Quoi !
c'est vous , Montvilliers , lui dit - il , en
reculant quelques pas : oferois je vous demander
la caufe de ce prompt retour , &
pourquoi vous ne m'en avez point averti ?
J'efperois cependant que vous me feriez
cette grace.Montvilliers déconcerté par cet- "
te réception ne put répondre une feule
parole. Mais fes yeux interpretes de fon
ame , exprimoient affez fon trouble. M. de
Madinville fans faire femblant de s'en appercevoir
, ajouta : Au refte , je ne fuis
Biij
30 MERCURE DE FRANCE.
pas fâché de vous revoir ; vous avez pré
venu mon deffein ; j'allois vous écrire pour
vous engager à revenir , l'affaire dont je
vous ai parlé avant votre départ eft fort
avancée , il ne manque pour la conclure
que votre confentement. Ma niece fur le
bon témoignage que je lui ai rendu de
votre caractere , vous aime autant & plus
que moi - même. Mais je ne penfe pas ,
continua- t- il , que vous avez beſoin de
repos & de rafraîchiffement ; allez - en
prendre , nous nous expliquerons après.
Pénétré de l'air, froid & fec dont M.
de Madinville l'avoit reçu , qui lui avoit
ôté la liberté de lui témoigner la joie qu'il
avoit de le revoir , Montvilliers avoit befoin
de folitude pour mettre quelque
ordre à fes idées . Il fortit fans trop fçavoir
où il alloit , & s'arrêtant dans ce
bois où il avoit vu fon ami pour la premiere
fois , il fe repréſenta plus vivement
que jamais les obligations qu'il lui avoit.
Son ame , fon coeur , fon efprit , fes qualités
extérieures étoient le fruit de fes
foins ; fon amitié avoit toujours fait les
charmes de fa vie , il falloit y renoncer ,
ou fe réfoudre à ne jamais pofféder Mlle
d'Arvieux quelle cruelle alternative ! Il
falloit pourtant fe décider. Un fort honnête
homme de R .... qu'il avoit vu ſous
NOVEMBRE 1755 . 31
:
vent chez M. de Madinville , interrompit
ces réflexions accablantes . Après les premiers
complimens , il lui demanda ce qui
pouvoit caufer l'agitation où il le voyoit.
Montvilliers ne fit point de difficulté de
lui confier fon embarras . Il lui raconta le
projet de fon ami qu'il lui avoit communiqué
avant fon voyage , la naiffance &
la violence d'une paffion qu'il n'avoit pas
été le maître de ne point prendre , l'impoffibilité
où il fe trouvoit de la vaincre
la crainte exceffive de perdre un ami dont
il connoiffoit tout le prix , & fans lequel
il ne pouvoit efperer d'être heureux .
Ce récit que Montvilliers ne put faire
fans répandre des larmes , attendrit celui
qui l'écoutoit . Votre fituation eft très- embarraffante
; lui dit- il. Pour moi , je nè
vois pas d'autre parti que de déclarer naïvement
à M. de Madinville ce que vous
fouffrez. Il est généreux , il vous aime , &
ne voudra point vous défefperer . Ah !
fongez- vous , répondit- il , que cette déclaration
détruit un projet qui eft devenu
l'objet de fa complaifance ? Faites - vous.
attention qu'il a parlé de moi à fa niece ,
qu'il a fait naître dans fon ame une paffion
innocente ? Non , je n'aurai jamais la
hardieffe de la lui faire moi-même. Hé
bien voulez-vous que je lui en parle ,
Biv
32 MERCURE DE FRANCE.
demanda fon confident ? Je vais paffer
l'après-midi avec lui ; nous ferons feuls ,
je tâcherai de démêler ce qu'il penſe à votre
fujet .
Montvilliers ayant fait connoître qu'il
lui rendroit un grand fervice , le quitta ,
& prit le chemin qui conduifoit à Dorneville.
Il trouva fon pere en deuil de fa
belle mere ; il le reçut affez bien , & l'engagea
à fouper avec lui , & à occuper fon
ancien appartement.
Son Ambaffadeur eut fa vifite le lendemain
de fort bon matin. Il lui dit qu'il
n'avoit pas tiré de fa commiffion tout le
fruit qu'il en efperoit : que M. de Madinville
lui avoit dit qu'il n'avoit jamais prétendu
contraindre les inclinations de perfonne
au refte , ajouta- t-il , allez- le voir ,
expliquez- vous enfemble.
Montvilliers qui vouloit s'éclaircir à
quelque prix que ce fût , partit auffi -tôt ;
mais plus il approchoit de Madinville &
plus fon courage diminuoit. Il entre cependant
; on lui dit que fon ami étoit à fe
promener. Il va pour le joindre , il l'apperçoit
au bout d'une allée , le falue profondément
, cherche dans fes yeux ce qu'il
doit craindre ou efperer ; mais M. de
Madinville qui le vit , loin de continuer
affecta de , paffer d'un autre côté
NOVEMBRE. 1755. 33
i
pour éviter de le rencontrer.
Ce mouvement étoit plus expreffif
que tous les difcours du monde . Montvilliers
qui comprit ce qu'il vouloit dire ,
fur pénétré de l'affliction la plus vive . Il
fe jetta dans un bofquet voifin où il fe mit
à verfer des larmes ameres. Alors confidérant
ce qu'il avoit perdu , il prit la réfolution
de faire tout fon poffible pour le
recouvrer . M. de Madinville qui fe douta
de l'effet que fon dedain affecté auroit
produit , & qui ne vouloit pas abandonner
long - tems Montvilliers à fon défefpoir ,
vint comme par hafard dans l'endroit où
il étoit pour lui donner occafion de s'expliquer
, & feignit encore de vouloir fe
retirer. Cette nouvelle marque d'indifférence
outrageant la tendreffe de Montvilliers
, il fe leva avec un emportement de
douleur ; arrêtez , Monfieur , lui dit - il
d'une voix altérée : il eft cruel dans l'état
où vous me voyez , de m'accabler par de
nouveaux mépris . Ma préfence vous eft
odieufe ; vous me fuyez avec foin , tandis
que préfé par le fentiment , je vous cherche
pour vous dire que je fuis prêt de tout
facrifier à l'amitié . Oui , ajouta - t- il en
rédoublant fes larmes , difpofez de ma
main , de mes fentimens , de mon coeur ,
& rendez -moi la place que j'occupois dans
le vôtre. By
34 MERCURE DE FRANCE.
M. de Madinville charmé , ceffa de fe
contraindre , & ne craignit plus de laiſſer
voir fa joie & fon attendriffement . Il embraffe
Montvilliers , l'affure qu'il n'a pas
ceffé un inftant de l'aimer ; qu'il étoit
vrai que l'indifférence qu'il fembloit avoir
pour fon alliance , lui avoit fait beaucoup
de peine , parce qu'il la regardoit comme
une marque de la diminution de fon amitié
; que la fienne n'étant point bornée
il vouloit aufli être aimé fans réferve ;
qu'au refte il n'abuferoit point du pouvoir
abfolu qu'il venoit de lui donner fur
fa perfonne ; que la feule chofe qu'il exigeoit
de fa complaifance , étoit de voir
fa niece ; que fi après cette entrevue il
continuoit à penfer de la même façon ,
il pourroit le dire avec franchife , & fuivre
fon penchant.
Il finiffoit à peine de parler , qu'on vint
lui annoncer la vifite de fa niece . Repréfentez
- vous quel fut l'étonnement & la
joie de Montvilliers , lorfqu'entrant dans
une fale où l'on avoit coutume de recevoir
la compagnie , il apperçut Mlle d'Arvieux
qui étoit elle-même la niece de M.
de Madinville.
M. d'Arvieux , frere aîné de cet aimable
Philofophe , étoit un homme haut ,
emporté , violent ; ils avoient eu quelques
NOVEMBRE. 1755 . 35
différends enfemble , & M. de Madinville
fans conferver aucun reffentiment de fes
mauvais procédés , avoit jugé qu'il étoit de
fa prudence d'éviter tout commerce avec
un homme fi peu raifonnable. Comme M.
d'Arvieux étoit forti fort jeune de la province
fans y être revenu depuis , à peine
y connoiffoit - on fon nom ; Montvilliers
n'en avoit jamais entendu parler . Mlle
d'Arvieux avoit eu occafion de voir fon
oncle dans un voyage qu'il avoit fait à Paris
, & depuis ce tems elle entretenoit
avec lui un commerce de lettres à l'infçu
de fon pere. Comme elle fe fentoit du
penchant à aimer Montvilliers , elle fut
bien-aife avant que de s'engager plus avant ,
de demander l'avis de fon oncle , & ce
qu'elle devoit penfer de fon caractere .
L'étude des hommes lui avoit appris combien
il eft difficile de les connoître , & l'étude
d'elle-même combien on doit fe défier
de fes propres lumieres . Elle écrivit
donc dès le même jour , & reçut trois
jours après une réponse qui paffoit fes
efpérances , quoiqu'elles fuffent des plus
Alatteufes. Après lui avoir peint le coeur &
l'efprit de Montvilliers des plus belles couleurs
, M. de Madinville recommanda à
fa niece de continuer à lui faire un myftere
de leur parenté & de leur liaifon , afin
B vj
36 MERCURE DE FRANCE.
de voir comment il fe comporteroit dans
une conjoncture fi délicate .
pe-
Tout le monde fut bientôt d'accord.
On badina fur la fingularité de cette aventure
, & l'on finit par conclure que Montvilliers
demanderoit l'agrément de fon
re. Il y courut auffi- tôt , & l'ayant trouvé
feul dans fon cabinet , il alloit lui déclarer
le fujet de fa vifite : mais M. Dorneville
ne lui en laiſſa pas le loifir. J'ai jugé , lui
dit-il , qu'il étoit tems de vous établir , &
j'ai pour cela jetté les yeux fur Mlle de
F... Vous allez peut- être m'alléguer pour
vous en défendre , ajouta-t - il , je ne ſçais
quelle paffion romanefque que vous avez
prife à Paris pour une certaine perfonne
que je ne connois point . Mais fi vous voulez
que nous vivions bien enſemble , ne
m'en parlez jamais. Ne pourrai -je point ,
Monfieur , dit Montvilliers , fçavoir la
raifon ? .... Je n'ai de compte à rendre
à qui que ce foit , reprit le pere avec emportement
; en un mot , je fçais ce qu'il
vous faut. Mlle d'Arvieux n'eft point votre
fait , & je ne confentirai jamais à cette alliance
faites votre plan là- deffus . Il fortit
en difant ces mots. Montvilliers confterné
refta immobile : il ne pouvoit s'imaginer
pourquoi il paroiffoit avoir tant d'éloignement
pour un mariage convenable , & mêNOVEMBRE.
1755. 37
me avantageux . Sa maîtreffe étoit fille
unique , & M. d'Arvieux du côté de la
fortune & de la nobleffe ne le cédoit point
à M. Dorneville.
Driancourt , frere de Montvilliers , dont
j'ai rapporté la naiffance au commencement
de cette hiftoire , avoit pour lors
dix-huit àdix- neuf ans. Double, artificieux ,
adroit , flateur, il penfoit que le grand art
de vivre dans le monde étoit de faire des
dupes fans jamais le devenir , & de tout
facrifier à fon utilité . Son efprit élevé audeffus
des préjugés vulgaires ne reconnoiffoit
aucunes vertus , & tout ce que les
hommes appellent ainfi n'étoit , felon
lui , que des modifications de l'amourpropre
, qui eft dans le monde moral , ce
qu'eft l'attraction dans le monde phyfique ,
c'eft-à- dire la caufe de tout. Toutes les
actions , difoit - il , font indifférentes ,
puifqu'elles partent du même principe.
Il n'y a pas plus de mal à tromper fon
ami , à nier un dépôt , à inventer une calomnie
, qu'à rendre ſervice à fon voiſin ,
à combattre pour la défenfe de fa patrie ,
à foulager un homme dans fa mifere , ou
à faire toute autre action .
Driancourt avec ce joli fyftême , ne perdoit
point de vue le projet de fe délivrer
de fon frere , dont fa mere lui avoit fait
38 MERCURE DE FRANCE.
le
fentir mille fois la néceffité. Il crut que
moment de l'exécuter étoit arrivé. C'étoit
lui qui avoit inftruit M. Dorneville de la
paffion de Montvilliers pour Mlle d'Arvieux
, & qui en même tems avoit peint
cette Demoiſelle de couleurs peu avantageufes.
Depuis ce moment il ne ceffa de
rapporter à fon pere , dont il avoit toute la
confiance & la tendreffe , mille difcours
peu refpectueux , accompagnés de menaces
qu'il faifoit tenir à Montvilliers : enfin
il tourna fi bien l'efprit de ce vieillard foi
ble & crédule , qu'il le fit déterminer au
plus étrange parti.
L'on parloit beaucoup dans ce tems là
de ces colonies que l'on envoie en Amérique
, & qui fervent à purger l'Etat . Driancourt
ayant obtenu , non pourtant fans
quelque peine , le confentement de fon
pere , part pour D ..... trouve un vaiffeau
prêt à mettre à la voile chargé de plufieurs
miférables qui , fans être affez coupables
pour mériter la mort l'étoient cependant
affez pour faire fouhaiter à la fofociété
d'en être délivrée . Il parle au Capitaine
qui lui promit de le défaire de fon
frere , pourvu qu'il pût le lui livrer dans
deux jours. Il revint en diligence , & dès
la nuit fuivante , quatre hommes entrent
dans la chambre de Montvilliers, qui avoit
NOVEMBRE. 1755 . 39
continué de coucher chez fon pere depuis
fon retour de Paris , fe faififfent de lui ,
le contraignent de fe lever , le conduifent
à une chaiſe de pofte , l'obligent d'y monter
, d'où ils ne le firent defcendre que
pour le faire entrer dans le vaiffeau qui
partit peu de tems après .
Montvilliers qui avoit pris tout ce qui
venoit de lui arriver pour un rêve , ne
douta plus alors de la vérité . Enchaîné
deavec
plufieurs autres miférables , que
vint-il quand il fe repréfenta l'indignité
& la cruauté de fon pere , ce qu'il perdoit ,
ce qu'il alloit devenir ? Ces idées agirent
avec tant de violence fur fon efprit, qu'el
les y mirent un défordre inconcevable. Il
jugea qu'il n'avoit point d'autre reffource
dans cette extrêmité que la mort , & réfo
lut de fe laiffer mourir de faim. Il avoit
déja paffé deux jours fans prendre aucune
nourriture , mais le jeune Anglois que
voici , qui étoit pour lors compagnon de
fon infortune , comprit à fon extrême abattement
qu'il étoit plus malheureux que
coupable. Il entreprit de le confoler , il
lui préfenta quelque rafraîchiffemens qui
furent d'abord refufés ; il le preffa , il le
pria. Je ne doute pas , lui dit- il , que vous
ne foyez exceffivement à plaindre ; je veux
même croire que vous l'êtes autant que
40 MERCURE DE FRANCE
moi cependant il eft des maux encore
plus rédoutables que tous ceux que nous
éprouvons dans cette vie , & dont on fe
rend digne en entreprenant d'en borner
foi-même le cours . Peut - être le ciel qui ne
veut que vous éprouver pendant que vous
vous révoltez contre fes décrets , vous
prépare des fecours qui vous font inconnus.
Acceptez , je vous en conjure , ces
alimens que vous préfente un homme qui
s'intéreffe à votre vie.
Montvilliers qui n'avoit fait aucune
attention à tout ce qui l'environnoit , examina
celui qui lui parloit ainfi , remarqua
dans fon air quelque chofe de diftingué
& de prévenant ; il trouva quelque
douceur à l'entretenir. Il fe laiffa perfuader
, il lui raconta fon hiftoire ; & quand
il cut fini fon récit , il le preffa d'imiter
fa franchiſe , ce que le jeune Anglois fic
en ces termes :
Lafuite au prochain Mercure.
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Résumé : LES CHARMES DU CARACTERE. HISTOIRE VRAISEMBLABLE. SUITE DE LA PROMENADE DE PROVINCE. Par Mademoiselle Plisson, de Chartres.
Le texte raconte l'histoire de Montvilliers, un gentilhomme issu d'une famille aisée, connu pour son caractère noble et généreux. Après la perte de sa mère à sa naissance, son père se remarie avec une femme aimable mais peu fortunée. À l'âge de quatre ou cinq ans, Montvilliers devient indifférent et incommodant pour sa belle-mère, qui le traite avec mépris et le considère comme stupide. Il passe ses journées dans les bois, mélancolique et découragé, se sentant comme une charge. À quinze ans, Montvilliers rencontre M. de Madinville, un militaire philosophe qui le prend sous son aile. Impressionné par l'intelligence et le caractère de Montvilliers, Madinville décide de l'aider à cultiver ses qualités naturelles. Montvilliers, touché par cette rencontre, se rend régulièrement chez Madinville, qui lui enseigne les principes de la philosophie et de la vertu. Ce changement attire l'attention de son père, mais sa belle-mère continue de le mépriser secrètement. Montvilliers, malgré son bonheur apparent, ressent un besoin d'amour et d'attachement. Il imagine une maîtresse parfaite mais ne la trouve pas parmi les jeunes femmes de sa connaissance. Un jour, M. de Madinville propose à Montvilliers d'épouser sa nièce, qu'il décrit comme ayant un esprit solide et un caractère doux. Montvilliers, bien que surpris, accepte après réflexion, voyant dans cette union un moyen de renforcer son lien avec son bienfaiteur. Madinville envoie Montvilliers à Paris pour perfectionner ses manières et ses compétences. À Paris, Montvilliers fréquente des cercles distingués et cultive ses intérêts intellectuels, tout en évitant la frivolité de la bonne société. Lors d'une promenade aux Tuileries, Montvilliers remarque une jeune demoiselle, Mlle d'Arvieux, dont la physionomie est un mélange agréable de douceur, de franchise, de modestie et de raison. Intrigué, il la suit et découvre qu'elle se rend dans une maison de campagne à B. Grâce à un ami, Montvilliers se rend également à cette maison et y rencontre Mlle d'Arvieux. Ils passent une journée ensemble, et Montvilliers est charmé par ses qualités. Il apprend qu'elle réside à Paris avec ses parents et qu'ils comptent bientôt s'installer à R., près de sa propre demeure familiale à Dorneville. Montvilliers est troublé par ses sentiments et se remémore sa promesse à M. de Madinville. Un ami lui montre des lettres de Mlle d'Arvieux, révélant ses vertus et ses qualités, qui correspondent à celles de la maîtresse idéale de Montvilliers. Après plusieurs jours, Montvilliers parvient à s'entretenir en privé avec Mlle d'Arvieux, renforçant ainsi sa passion. Cependant, il apprend qu'un certain Frienval, un homme riche et frivole, a demandé la main de Mlle d'Arvieux. Avec l'aide d'une amie de la famille, Montvilliers obtient la permission de se présenter à M. d'Arvieux, le père de Mlle d'Arvieux. Il se rend chez eux et promet de les suivre à R. Montvilliers réalise alors qu'il a négligé d'écrire à M. de Madinville et craint sa réaction. Malgré ses appréhensions, Montvilliers est déterminé à embrasser son bienfaiteur. M. de Madinville, bien que peiné par l'absence de Montvilliers, décide de le recevoir avec un air sérieux et mécontent pour tester sa fidélité. Montvilliers revient chez M. de Madinville, qui lui révèle que son projet d'alliance est avancé et que sa nièce, Mlle d'Arvieux, partage ses sentiments. Cependant, Montvilliers est troublé par la perspective de renoncer à cette alliance ou de perdre l'amitié de M. de Madinville. Il confie ses dilemmes à un honnête homme de R..., qui lui conseille de se confier à M. de Madinville. Montvilliers rencontre ensuite son père, M. Dorneville, qui lui annonce un projet de mariage avec Mlle de F..., ignorant les sentiments de Montvilliers pour Mlle d'Arvieux. Le frère de Montvilliers, Driancourt, jaloux et manipulateur, convainc M. Dorneville d'envoyer Montvilliers en Amérique. Montvilliers est enlevé et embarqué de force. À bord, un jeune Anglais tente de le réconforter, lui rappelant que des maux plus grands existent et que des secours pourraient encore survenir.
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26
p. 248-250
« Le 17 Novembre, sur les trois heures du matin, Madame la Dauphine [...] »
Début :
Le 17 Novembre, sur les trois heures du matin, Madame la Dauphine [...]
Mots clefs :
Madame la Dauphine, Naissance, Comte de Provence, Comtesse de Marsan, Famille royale, Monseigneur, Duc de Gesvres, Sieur Mirabaud
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 17 Novembre, sur les trois heures du matin, Madame la Dauphine [...] »
Le 17 Novembre , fur les trois heures du ma
tin , Madame la Dauphine fentit des douleurs.
Cette Princeffe accoucha une heure après d'un
Prince , que le Roi a nommé Comte de Provence.
A cinq heures , le Cardinal de Soubize , Grand
Aumônier de France , fit la cérémonie de l'ondoyement
, en préfence du Curé de la Paroiffe
du Château. Le fieur Rouillé , Miniftre & Secrétaire
d'Etat , Grand Tréforier de l'Ordre du Saint-
Efprit , apporta le Cordon de cet Ordre , & il eut
l'honneur de le paffer au cou du Prince , qui fut
remis entre les mains de la Comteſſe de Marfan ,
Gouvernante des Enfans de France. Enfuite elle porta
Monfeigneur le Comte de Provence à l'appartement
qui lui étoit deftiné. Ce Prince y fut conduit
DECEMBRE . 1755. 249
felon l'ufage par le Capitaine des Gardes du Corps,
Entre midi & une heure , le Roi & la Reine
accompagnés de la Famille Royale , ainfi que des
Princes & des Princeffes du Sang , des Grands
Officiers de la Couronne , des Miniftres & des Seigneurs
& Dames de la Cour , & précédés des deux
Huiffiers de la Chambre , qui portoient leurs maffes
, fe rendirent à la Chapelle . Leurs Majeftés y
entendirent la Meffe , pendant laquelle le fieur
Colin de Blamont , Chevalier de l'Ordre de Saint
Michel , & Sur - Intendant de la Mufique de la
Chambre , fit exécuter le Te Deum , en mufique ,
de fa compofition . Cette Hymne fut entonnée par
l'Abbé Gergoy , Chapelain ordinaire de la Chapelle
-Mufique.
L'après-midi , le Roi & la Reine , Monseigneur
le Dauphin , Monfeigneur le Duc de Bourgogne ,
Monfeigneur le Duc de Berry , Monfeigneur le
Comte de Provence , Madame , Madame Victoire,
Madame Sophie & Madame Louife , reçurent
dans leurs appartemens les révérences des Dames
de la Cour , à l'occafion des couches de Madame
la Dauphine , & de la naiffance du Prince .
Le foir à huit heures , par les ordres du Duc de
Gefvres , Premier Gentilhomme de la Chambre ,
en exercice , & fous la direction du fieur de Fontpertuys
, Intendant des Menus- Plaiſirs , on tira
dans la Place d'Armes , vis- à- vis de l'appartement
du Roi , un très - beau bouquet d'artifice , que Sa
Majefté alluma de fon balcon , par le moyen d'une
fufée courante . L'exécution n'a laiffé rien à défirer.
Le même jour , le Roi fit partir le fieur Binet ,
Meftre de Camp de Cavalerie , un de Gentilshommes
Ordinaires de Sa Majefté , & Premier
Valet de Chambre de Monfeigneur le Dauphin ,
pour aller à Luneville donner part de la naiffance
250 MERCURE DE FRANCE.
de Monfeigneur le Comte de Provence , au Roi
de Pologne , Duc de Lorraine & de Bar.
Madame la Dauphine , ainfi que le jeune Prince
, fe portent aufli bien qu'on puiffe le défirer .
Le fieur Mirabaud , Secrétaire Perpétuel de
P'Académie Françoife , ayant donné fa démiffion ,
cette Compagnie a élu , pour le remplacer , le
fieur Duclos , Hiftoriographe de France, un des
Quarante de l'Académie , & Aflocié Vétéran de
celle des Infcriptions & Belles- Lettres.
tin , Madame la Dauphine fentit des douleurs.
Cette Princeffe accoucha une heure après d'un
Prince , que le Roi a nommé Comte de Provence.
A cinq heures , le Cardinal de Soubize , Grand
Aumônier de France , fit la cérémonie de l'ondoyement
, en préfence du Curé de la Paroiffe
du Château. Le fieur Rouillé , Miniftre & Secrétaire
d'Etat , Grand Tréforier de l'Ordre du Saint-
Efprit , apporta le Cordon de cet Ordre , & il eut
l'honneur de le paffer au cou du Prince , qui fut
remis entre les mains de la Comteſſe de Marfan ,
Gouvernante des Enfans de France. Enfuite elle porta
Monfeigneur le Comte de Provence à l'appartement
qui lui étoit deftiné. Ce Prince y fut conduit
DECEMBRE . 1755. 249
felon l'ufage par le Capitaine des Gardes du Corps,
Entre midi & une heure , le Roi & la Reine
accompagnés de la Famille Royale , ainfi que des
Princes & des Princeffes du Sang , des Grands
Officiers de la Couronne , des Miniftres & des Seigneurs
& Dames de la Cour , & précédés des deux
Huiffiers de la Chambre , qui portoient leurs maffes
, fe rendirent à la Chapelle . Leurs Majeftés y
entendirent la Meffe , pendant laquelle le fieur
Colin de Blamont , Chevalier de l'Ordre de Saint
Michel , & Sur - Intendant de la Mufique de la
Chambre , fit exécuter le Te Deum , en mufique ,
de fa compofition . Cette Hymne fut entonnée par
l'Abbé Gergoy , Chapelain ordinaire de la Chapelle
-Mufique.
L'après-midi , le Roi & la Reine , Monseigneur
le Dauphin , Monfeigneur le Duc de Bourgogne ,
Monfeigneur le Duc de Berry , Monfeigneur le
Comte de Provence , Madame , Madame Victoire,
Madame Sophie & Madame Louife , reçurent
dans leurs appartemens les révérences des Dames
de la Cour , à l'occafion des couches de Madame
la Dauphine , & de la naiffance du Prince .
Le foir à huit heures , par les ordres du Duc de
Gefvres , Premier Gentilhomme de la Chambre ,
en exercice , & fous la direction du fieur de Fontpertuys
, Intendant des Menus- Plaiſirs , on tira
dans la Place d'Armes , vis- à- vis de l'appartement
du Roi , un très - beau bouquet d'artifice , que Sa
Majefté alluma de fon balcon , par le moyen d'une
fufée courante . L'exécution n'a laiffé rien à défirer.
Le même jour , le Roi fit partir le fieur Binet ,
Meftre de Camp de Cavalerie , un de Gentilshommes
Ordinaires de Sa Majefté , & Premier
Valet de Chambre de Monfeigneur le Dauphin ,
pour aller à Luneville donner part de la naiffance
250 MERCURE DE FRANCE.
de Monfeigneur le Comte de Provence , au Roi
de Pologne , Duc de Lorraine & de Bar.
Madame la Dauphine , ainfi que le jeune Prince
, fe portent aufli bien qu'on puiffe le défirer .
Le fieur Mirabaud , Secrétaire Perpétuel de
P'Académie Françoife , ayant donné fa démiffion ,
cette Compagnie a élu , pour le remplacer , le
fieur Duclos , Hiftoriographe de France, un des
Quarante de l'Académie , & Aflocié Vétéran de
celle des Infcriptions & Belles- Lettres.
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Résumé : « Le 17 Novembre, sur les trois heures du matin, Madame la Dauphine [...] »
Le 17 novembre, Madame la Dauphine accoucha à trois heures du matin d'un prince, nommé Comte de Provence par le Roi. Le Cardinal de Soubize procéda à l'ondoyement du prince en présence du curé de la paroisse du Château. Le sieur Rouillé, Ministre et Secrétaire d'État, remit au prince le cordon de l'Ordre du Saint-Esprit, et la Comtesse de Marfan le conduisit à son appartement. Le 24 décembre, le Roi et la Reine assistèrent à une messe à la chapelle, suivie de l'exécution du Te Deum par le sieur Colin de Blamont. L'après-midi, la famille royale reçut les révérences des Dames de la Cour. Le soir, un bouquet d'artifice fut tiré dans la Place d'Armes, allumé par le Roi. Le même jour, le Roi envoya le sieur Binet à Lunéville pour annoncer la naissance du Comte de Provence au Roi de Pologne. Madame la Dauphine et le jeune prince se portaient bien. Par ailleurs, le sieur Duclos fut élu pour remplacer le sieur Mirabaud, Secrétaire Perpétuel de l'Académie Française.
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27
p. 5
SUR LA NAISSANCE de M. le Comte de Provence.
Début :
Que du plus beau sang du monde, [...]
Mots clefs :
Naissance, Comte de Provence
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texteReconnaissance textuelle : SUR LA NAISSANCE de M. le Comte de Provence.
SUR LA NAISSANCE
de M. le Comte de Provence.
Ue du plus beau fang du monde ,
Notre Dauphine féconde ,
Augmente les rejettons ;
Et nous donne autant de Princes
Que la France a de Provinces ,
Sans celles que nous prendrons.
de M. le Comte de Provence.
Ue du plus beau fang du monde ,
Notre Dauphine féconde ,
Augmente les rejettons ;
Et nous donne autant de Princes
Que la France a de Provinces ,
Sans celles que nous prendrons.
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28
p. 57-58
LA NAISSANCE de Monseigneur le Comte de Provence. MUSETTE. Par M. Thomassin de Juilly, Garde du Corps du Roi ; mise en chant par M. de Buri, Surintendant de la Musique de Sa Majesté.
Début :
Bruyans tambours, fieres trompettes, [...]
Mots clefs :
Comte de Provence, Naissance, Naissance du Comte de Provence, Amour, Voeux
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texteReconnaissance textuelle : LA NAISSANCE de Monseigneur le Comte de Provence. MUSETTE. Par M. Thomassin de Juilly, Garde du Corps du Roi ; mise en chant par M. de Buri, Surintendant de la Musique de Sa Majesté.
LA NAISSANCE
de Monfeigneur
le Comte de Provence.
MU. SET TE .
Par M. Thomafin de Juilly , Garde du
Corps du Roi, & mife en chant par M. de..
Buri , Surintendant de la Musique de San
Majefté.
BRuyans tambours , fieres trompettes ,
Faites éclater nos tranfports ;
Au fon de nos tendres mufettes ,
Mêlez pour toujours vos accords ..
Des Dieux vous ferviez la vengeance ,
Maintenant ils font fatisfaits :
N'annoncez plus que leur clémence.
Ne chantez plus que leurs bienfaits.`.
Que tout cede à la douce ivreffe
Que nous inſpire un fi beau jour !
Nous le devons à la tendrefle ,
Puifqu'il eft produit par l'amour.
Libres de foucis & de craintes ,
Livrons-nous aux plus doux loiſirs :
Cv
JS MERCURE DE FRANCE.
Baniffons le trouble & les plaintes ;
Voici le regne des plaifirs.
串
O vous , Race illuftre & féconde ,
Qui rendez l'efpoir à nos voeux !
De Héros rempliffez le Monde :
C'eſt à vous à le rendre heureux.
L'Amour pour embellir nos fêtes ,
Fait régner les Graces , les Ris ;
Mais ce Dieu ne fait des conquêtes
Que pour vous en offrir le prix.
串
Que Lucine à nos voeux propice ,
Préfide à nos jeux , à nos airs !
Que le boccage retentiffe
Du bruit de nos tendres concerts !
Confacrons , Bergers , à la gloire
Et nos chalumeaux & nos voix :
Qu'à jamais fes dons , fa mémoire ,
Soient les délices de nos bois !
A Arc en Barois , le 22 Nouembre 175.5-
de Monfeigneur
le Comte de Provence.
MU. SET TE .
Par M. Thomafin de Juilly , Garde du
Corps du Roi, & mife en chant par M. de..
Buri , Surintendant de la Musique de San
Majefté.
BRuyans tambours , fieres trompettes ,
Faites éclater nos tranfports ;
Au fon de nos tendres mufettes ,
Mêlez pour toujours vos accords ..
Des Dieux vous ferviez la vengeance ,
Maintenant ils font fatisfaits :
N'annoncez plus que leur clémence.
Ne chantez plus que leurs bienfaits.`.
Que tout cede à la douce ivreffe
Que nous inſpire un fi beau jour !
Nous le devons à la tendrefle ,
Puifqu'il eft produit par l'amour.
Libres de foucis & de craintes ,
Livrons-nous aux plus doux loiſirs :
Cv
JS MERCURE DE FRANCE.
Baniffons le trouble & les plaintes ;
Voici le regne des plaifirs.
串
O vous , Race illuftre & féconde ,
Qui rendez l'efpoir à nos voeux !
De Héros rempliffez le Monde :
C'eſt à vous à le rendre heureux.
L'Amour pour embellir nos fêtes ,
Fait régner les Graces , les Ris ;
Mais ce Dieu ne fait des conquêtes
Que pour vous en offrir le prix.
串
Que Lucine à nos voeux propice ,
Préfide à nos jeux , à nos airs !
Que le boccage retentiffe
Du bruit de nos tendres concerts !
Confacrons , Bergers , à la gloire
Et nos chalumeaux & nos voix :
Qu'à jamais fes dons , fa mémoire ,
Soient les délices de nos bois !
A Arc en Barois , le 22 Nouembre 175.5-
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Résumé : LA NAISSANCE de Monseigneur le Comte de Provence. MUSETTE. Par M. Thomassin de Juilly, Garde du Corps du Roi ; mise en chant par M. de Buri, Surintendant de la Musique de Sa Majesté.
Le poème célèbre la naissance du Comte de Provence, futur Louis XVIII, le 22 novembre 1755 à Arc-en-Barrois. Il commence par une invocation aux tambours et trompettes pour annoncer la joie et la clémence divine. Le texte exprime la gratitude pour ce jour heureux, attribué à l'amour et à la tendresse. Il appelle à bannir les soucis et les plaintes pour entrer dans un règne de plaisirs. Le poème s'adresse à une race illustre et féconde, espérant qu'elle remplisse le monde de héros pour le rendre heureux. L'amour est présenté comme le moteur des fêtes, embellissant les célébrations par les grâces et les rires. Le texte souhaite que Lucine, déesse des accouchements, préside aux jeux et aux airs musicaux. Enfin, il invite les bergers à consacrer leurs chalumeaux et leurs voix à la gloire, afin que les dons et la mémoire de cet événement soient à jamais les délices des bois.
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29
p. 225-226
ALLEMAGNE.
Début :
L'Impératrice Reine est accouchée le 2 d'une Archiduchesse, qui a été [...]
Mots clefs :
Vienne, Rendsbourg, Naissance, Marie-Antoinette-Joseph-Jeanne, Impératrice-Reine, Rivières, Crue
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texteReconnaissance textuelle : ALLEMAGNE.
ALLEMAGNE
.
DE VIENNE , le 18 Novembre.
L'Impératrice Reine eft accouchée le z d'une
Archiducheffe , qui a été batifée fous les noms de
Ky
226 MERCURE DE FRANCE.
Marie Antoinette- Jofeph - Jeanne. Pendant les
trois jours de réjouiflances qu'il y a eu à l'occafion
des heureufes couches de cette Princeffe , on
n'a perçu aucun droit fur les denrées qui font entrées
dans cette capitale.
DE RENDSBURG , le 21 Novembre.
On remarqua le premier de ce mois une agitation
extraordinaire dans quelques rivieres , particulierement
dans celles d'Eider & de Stouhr.
Un train de bois , qui étoit fur cette derniere
riviere , a été jetté à quelques toiles dans les terres.
Les eaux , même celles des étangs , en plu .
fieurs endroits , font montées fubitement à une
telle hauteur , qu'on a craint une inondation. Le
même jour , pendant une heure entiere , les trois
luftres de la principale églife de cette ville , dont
chacun pefe plus de deux mille livres, ont été dans
un mouvement continuel. A Elmshorn , à Bramftedt
, à Kellinghaufen & à Melldorf , on a fait de
femblables obfervations.
.
DE VIENNE , le 18 Novembre.
L'Impératrice Reine eft accouchée le z d'une
Archiducheffe , qui a été batifée fous les noms de
Ky
226 MERCURE DE FRANCE.
Marie Antoinette- Jofeph - Jeanne. Pendant les
trois jours de réjouiflances qu'il y a eu à l'occafion
des heureufes couches de cette Princeffe , on
n'a perçu aucun droit fur les denrées qui font entrées
dans cette capitale.
DE RENDSBURG , le 21 Novembre.
On remarqua le premier de ce mois une agitation
extraordinaire dans quelques rivieres , particulierement
dans celles d'Eider & de Stouhr.
Un train de bois , qui étoit fur cette derniere
riviere , a été jetté à quelques toiles dans les terres.
Les eaux , même celles des étangs , en plu .
fieurs endroits , font montées fubitement à une
telle hauteur , qu'on a craint une inondation. Le
même jour , pendant une heure entiere , les trois
luftres de la principale églife de cette ville , dont
chacun pefe plus de deux mille livres, ont été dans
un mouvement continuel. A Elmshorn , à Bramftedt
, à Kellinghaufen & à Melldorf , on a fait de
femblables obfervations.
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Résumé : ALLEMAGNE.
Le 18 novembre à Vienne, l'Impératrice Reine a accouché d'une archiduchesse nommée Marie Antoinette-Josephe-Joanne. Cet événement a été célébré par des réjouissances de trois jours à Vienne, durant lesquelles aucun droit n'a été perçu sur les denrées entrant dans la capitale. Le 21 novembre, à Rendsburg, une agitation inhabituelle a été observée dans plusieurs rivières, notamment l'Eider et la Stouhr. Un train de bois sur la rivière Stouhr a été poussé à terre et les eaux des rivières et des étangs ont subitement monté en hauteur, provoquant des craintes d'inondation. Le même jour, les lustres de la principale église de Rendsburg ont été en mouvement continu pendant une heure. Des phénomènes similaires ont également été signalés à Elmshorn, Bramstedt, Kellinghaufen et Melldorf.
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30
p. 199-213
Dédicace de la Statue du Roy, dans la Place Royale de Nancy.
Début :
Sa Majesté Polonoise, Duc de Lorraine & de Bar, ayant conçu en 1752 [...]
Mots clefs :
Hôtel de ville, Sa Majesté, Statue, Naissance, Cérémonies, Duc de Gesvres, Duc de Fleury, Marchands, Régiments, Loterie
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texteReconnaissance textuelle : Dédicace de la Statue du Roy, dans la Place Royale de Nancy.
Dédicace de la Statue du Roy , dans la Place
Royale de Nancy.
Sa Majesté Polonoife , Duc de Lorraine & de
Bar , ayant conçu en 1752 le deflein de faire élever
un monument de fa tendreffe à Sa Majesté
Très-Chrétienne , a dreffé elle - même le plan
d'une place , dont l'exécution confiée à M. Heré
de Corny, fon premier Architecte , répond à la
magnificence des idées de Sa Majesté & à la gran
deur du fujet . Les édifices qui environnent cette
place , font d'une fymmétrie parfaite . Celui du
fond eft deftiné à l'Hôtel de Ville . Ceux de droite
& de gauche forment quatre pavillons . La place
eft terminée par un Corps de bâtimens à un
étage , qui fait retour pour donner une rue de
communication de la Ville Neuve à la Ville
Vieille. Au fond de la rue eft un arc de triomphe
, compoféde trois portiques. Dans les quatre
angles de la place , dont l'extérieur eft décoré
I iv
200 MERCURE DE FRANCE.
d'une architecture d'ordre Corinthien en pilaftres
, on a mis quatre grands grillages fur un
plan ceintré. Les deux du fond font employés à
mafquer les baftions . Ils forment chacun un grand
portique & deux petits. Le portique du milieu
eft une cafcade , où l'on voit la figure de Neptune
fur fon char tiré par des chevaux marins ;
d'un côté , un fleuve & une Nayade ; & de l'autre
un dragon. Toutes les eaux que jettent ces différentes
figures , fe répandent en nappes dans un
vafte baffin. Les fontaines des petits portiques
font ornées de grouppes d'enfans qui jouent avec
des poiffons. Les deux autres grands grillages
font aux angles de l'Hôtel de Ville , & ils forment
deux effeces de portes Flamandes , de vingtdeux
pieds d'ouvertures , deftinés pour donner entrée
à quatre rues.
Au milieu de la place s'éleve un piedestal de
marbre blanc , fur lequel eft la ftatue pedeftre
de Louis XV habillé à la Romaine , cuiraflé &
revêtu du manteau royal . Cette figure de bronze
eft haute de onze pieds. Quatre bas reliefs auffi
de bronze décorent les quatre faces du piedeftal ,
& repréfentent , le premier le mariage du Roi
Très - Chrétien ; le fecond la paix conclue à Vienne
; le 3e la prife de poffeffion de la Lorraine ; le
quatrieme l'Academie des Sciences & Belles - Lettres
établie dans cette ville. Aux quatre angles du
piedeftal , fur le pallier des marches font quatre
figures coloffales , qui repréfentent la prudence ,
la juftice , la valeur & la clémence.
Sa Majefté Polonoiſe ayant fixé le jour de la
Dédicace de la ftatue au 26 Novembre ,vingt trois
jours auparavant à la Malgrange. La fête ne pouvoit
mieux commencer que par des actions de
graces , pour la naiffance de Monfeigneur le Com
ง
JANVIER. 1756. 201
te de Provence. Le Roi fe rendit le 25 à l'églife
primatiale , pour y aflitter à une Meffe folemnelle
, & au Te Deum. Le Primat revêtu de fes
habits pontificaux , reçut Sa Majesté à la porte de
l'églife , où les Compagnies fupérieures , les autres
Corps de Juftice , & le Clergé féculier &
régulier s'étoient rendus.
疹
Le lendemain 26 , Sa Majefté entendit dans
P'églife de Bon-Secours une Mefle célébrée par le
Primat. Vers midi , Sa Majefté arriva ici avec
toute la pompe de la Royauté. Le Régiment d'Infanterie
du Roi Très -Chrétien en garnifon dans
cette ville , bordoit en haie les rues depuis la porte
Saint Nicolas jufqu'à la place royale . Sa Majefté
Polonoife fut faluée de trois décharges de
l'artillerie des remparts. A la porte de l'Hôtel de
Ville , elle fut complimentée par M. Thibault ,
Lieutenant- Général de Police , à la tête des Magiftrats
.
Sa Majefté s'étant placée fur le balcon du grand
fallon de l'Hôtel de Ville , un Héraut d'Armes ,
précédé des Timballiers & Trompettes des plaifirs,"
& monté fur un cheval richement caparaçonné ,
fortit de deffous l'arc de triomphe , & en s'avançant
par la droite , il fit le tour de la place . Devant
chaque pavillon , il fit à haute voix la proclamation
de la Dédicace de la ftatue. La Nobleſſe
& le peuple répondirent à l'envi par des acclamations
réitérées. Alors on ôta de deffus la ftatue le
voile qui la couvroit , & de nouvelles acclamations
en couronnerent la Dédicace. Pendant la
cérémonie , l'artillerie des remparts & la moufqueterie
du Régiment du Roi Très - Chrétien firent
des falves continuelles .
Au lieu d'eau il coula du vin des Fontaines de
la place pendant le refte du jour . Quatre Confeil-
I y
202 MERCURE DE FRANCE.
lers de l'Hôtel de Ville jetterent à pleines mains
de l'argent par les fenêtres des quatre pavillons ,
& l'on diftr bua en même - tems dans toute la ville
des largeffes confidérables aux pauvres honteux .
Sa Majesté reçut les complimens de fa Cour fupérieure
, de fa Chambre des Comptes , de l'Académie
des Sciences & Belles- Lettres , & des quatre
Chapitres de Chanoineffes de Remiremont
d'Epinal , de Bouxieres & de Pouffay.
Sur les quatre heures elle fe rendit à la falle de
la Comédie , où elle entendit un prologue relatif
à la cérémonie du jour. L'Auteur des paroles eft
M. Paliffot de Montenoy , & la Mufique eft de M.
Surat . Après le fpectacle , Sa Majefté paffa à la
falle du bal paré que donnoit la Ville. Il étoit
compofé de toute la haute Nobleffe de Lorraine ,
& d'Etrangers de la plus grande diftinction , que le
défir de faire leur cour à Sa Majefté avoit attirés
de toutes parts. Le Roi y demeura une demi-heure,
& partit enfuite au bruit de l'artillerie , & au
milieu des acclamations dictées par l'allégrefle
générale.
En paffant près de la grande place de la Ville
Neuve , Sa Majefté y vit les Soldats & Sergens
des quatre Bataillons du Régiment du Roi , affis
à de longues tables , où la Ville leur avoit fait
fervir un repas dans lequel il régna autant d'ordre
que d'abondance. Les tables formoient un
quarré. Elles étoient éclairées par cinq pyramides
, dont quatre de vingt- trois pieds , & celle
du milieu de quarante , toutes furmontées de
fleurs de lys couronnées , ayant dans leurs corps
les armes de Sa Majefté Polonoife , & celles de la
Ville en feu tranfparent. Le devant & le derriere
des tables étoient ornés des faifceaux d'armes
du Régiment , fur chacun defquels il y avoit une
JANVIE R. 1756. 203
fleur de lys illuminée. Les drapeaux étoient déployés
autour des tables , fur lefquelles veillont
le Corps des Officiers , le Marquis de Guerchy ,
Colonel-Lieutenant , à la tête .
A la fuite du bal paré il y eut grand bal
mafqué à l'Hôtel de Ville.
Sa Majesté revint ici le 27. La Place royale
étoit illuminée fuivant l'ordre de l'architecture .
Après avoir confidéré l'illumination , le Roi defcendit
du grand fallon de l'Hôtel de Ville pour
fe rendre fous le periftile de l'arc de triomphe.
Avant fa fortie , M. Thibault lui préfenta fur
le feuil de la porte une médaille d'or . Eile porte
d'un côté la tête de Sa Majesté Polonoife avec cette
infcription : Stanislaus Í , Rex Polonia , Magnus
Duc Lithuania , Lotharingia & Barri . Au revers
eft la ftatue pedeſtre de Louis XV fur fon piedeftal
, avec cette légende : Uriufque immortalitati,
Et pour exergue , Civitas Nanceiana . MDCCLV.
En recevant cette médaille , qui a été gravée
par la Dame de Saint Urbain , Sa Majesté eut la
bonté de dire aux Magiftrtas : Meffieurs , fur ce médaillon
eft mon effigie , mais les vôtres font gravées
dans mon coeur.
On tira enfuite le magnifique feu d'artifice ,
qui avoit été préparé . Sa Majesté après le feu ,
retourna à la place royale , pour voir une feconde
fois l'illumination , & elle partit enfin au bruit de
nouvelles falves d'artillerie & de moufqueterie.
Pendant les trois jours qu'ont duré les réjouiffances
publiques , les habitans de Nancy ont fait
les honneurs de la Ville , en tenant table ouverte
pour les Etrangers , qui , après avoir admiré les
magnificences dont ils ont été témoins , ont remporté
la plus haute idée de l'amour fincere &
refpectueux des Lorrains pour leurs Majeftés
Très- Chrétienne & Polonoife.
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
Cette fête n'a point été particuliere à la ville
de Nancy : elle a été générale dans toutes les
villes & dans les bourgs de la Lorraine & du
Barrois.
Le 14 Décembre , les Députés de la Ville de
Nancy eurent l'honneur de préſenter au Roi les
Médailles d'or & d'argent , qui ont été frappées
à l'occafion de cette Dédicace. Le Roi pour leur
donner de fa fatisfaction une marque diftinguée ,
les reçut dans fon cabinet. Ils furent préfentés à Sa
Majefté par M. le Duc de Fleury, premier Gentilhomme
de la Chambre , Gouverneur & Lieutenant-
Général de Lorraine & du Barrois, & par M.
le Comte d'Argenfon, Miniftre & Secrétaire d'Etat.
Les Députés eurent le même honneur chez la
Reine , chez Monfeigneur le Dauphin , Madame
la Dauphine , Monfeigneur le Duc de Bourgogne
, Monfeigneur le Duc de Berry , & Monfeigneur
le Comte de Provence , ainfi que chez Madame
, & chez Mefdames Victoire , Sophie &
Louife, étant préfentés de même par M. le Duc de
Fleury , & M. le Comte d'Argenfon. La Députation
étoit compofée de M. Thibault , Lieutenant-
Général de Police , & Chef du Magiſtrat de
Nancy ; de M. Breton , Confeiller pour la Nobleffe
; de M. Puiffeur , Confeiller pour le Tiers-
Etat ; & de M. Richer , Confeiller , Tréforier de
l'Hôtel de Ville de Nancy. M. Thibault porta la
parole.
Le 12 , la rentrée de la Cour des Aides fe fit
avec les cérémonies ordinaires. Après la Meffe
célébrée , felon la coutume , dans la falle de la
Cour , les trois Chambres s'affemblerent dans la
premiere , & l'on fit la lecture des Ordonnances
& des Réglemens. Les Huifliers ayant prêté ferJANVIER
. 1756. 205
ment , M. de Lamoignon de Malesherbes , Premier
Préfident , prononça un difcours fur le choix
des Etudes. Enfuite M. Boula de Mareuil , fecond
Avocat Général , prit la parole , & haranguafur
Pemploi du Tems.
M. de Landreville , Maréchal de Camp & chef
de Brigade des Gardes du Corps , vint le 17 Novembre
, de la part du Roi , annoncer la naiffance
de Monfeigneur le Comte de Provence au Corps
de ville qui s'étoit affemblé fur la premiere nouvelle
que Madame la Dauphine avoit reffenti
quelques douleurs. M. le Marquis de Dreux , Grand
Maître des cérémonies , a remis en même tems
au Corps de ville une lettre de Sa Majeſté ſur le
même ſujet. Auffi - tôt les Prévôt des Marchands
& Echevins firent annoncer à toute la ville , par
une falve générale de l'artillerie , & par la cloche
de l'Hôtel de ville , qui a fonné jufqu'à minuit ,
la nouvelle faveur qu'il a plu à Dieu d'accorder à
la France.
A fix heures du foir on fit une feconde falve
de l'artillerie , après laquelle les Prévôt des Marchands
& Echevins allumerent , avec les cérémonies
ordinaires , le bucher qui avoit été dreſſé
dans la Place devant l'Hôtel de ville . On tira enfuite
une grande quantité de fufées volantes ; on
fit couler dans les quatre coins de la place des
fontaines de vin , & on diftribua au peuple du
pain & des viandes. Plufieurs Orcheftres remplis
de Muficiens , mêlerent le fon de leurs inftrumens
aux acclamations dictées par l'alegreffe
publique. La façade de l'Hôtel de ville fut illuminée
le foir par plufieurs filets de terrines , ainfi
que l'hôtel du Duc de Gefvres , Gouverneur de
Paris , celui du Prévôt des Marchands & les maifons
des Echevins & Officiers du Bureau de la
ville,
206 MERCURE DE FRANCE.
Le Roi ayant écrit à l'Archevêque de Paris
pour faire rendre à Dieu de folemnelles actions
de graces à l'occafion de la naiffance de Monfeigneur
le Comte de Provence , on chanta le 23
Novembre le Te Deum dans l'églife Métropolitaine
, & l'Abbé de Saint Exupery , Doyen du
Chapitre , y officia. Le Chancelier & le Garde
des Sceaux , accompagnés de plufieurs Confeillers
d'Etat & Maîtres des Requêtes , y affifterent , ainfi
que le Parlement , la Chambre des Comptes ,
la Cour des Aides , & le Corps de ville , qui y
avoient été invités de la part de Sa Majesté par
le Marquis de Dreux , Grand Maître des cérémonies.
On tira le même jour dans la place de l'Hôtel
de ville , par ordre des Prévôt des Marchands &
Echevins , un très -beau feu d'artifice . La décoration
repréfentoit un Temple de Lucine , formant
par fon plan un quarré régulier de marbre blanc.
Une ordonnance compofite , portée fur un focle
& terminée par un attique , préfentoit fur chaque
face du quarré quatre colonnes ifolées , embraffées
par des branches de lys , & grouppées
deux à deux , qui foutenoient un fronton triangulaire.
A côté des colonnes étoient des figures de
fept pieds de proportion , repréfentant des Vertus.
Le milieu des façades étoit ouvert par un portique
élevé fur des dégrés de marbre blanc , qui
conduifoient jufqu'à l'autel , fur lequel étoit placée
la Déeffe . Les colonnes , les frontons , les panneaux
du focle & de l'attique étoient de marbre
ferancolin. L'intérieur du temple étoit de bréche
violette. Les chapiteaux , la frife , les moulures ,
les bas reliefs & les figures étoient en or . Au-deffus
du fronton étoit le médaillon des armes du
Roi , fupporté par le Génie de la France , & par
JANVIER. 1756. 207
une Renommée. Des Amours , foutenus fur des
nuages , formoient différens jeux , & fervoient
de couronnement à tout l'édifice . Le temple avoit
ving- cinq pieds de largeur fur quarante de hauteur.
Il portoit fur une terraffe de quarante-huit
pieds de baſe , dont les appuis formoient autour
de l'édifice principal , une enceinte décorée dans
tous les angles par des acroteres qui foutenoient
des vafes de fleurs . On montoit fur la terrafle
par des perrons diftribués fur toutes les faces .
Après l'artifice , la façade de l'Hôtel de ville fut
illuminée avec autant de goût que de magnifi- *
cence. Toutes les colonnes dans leur pourtour
étoient garnies de lampions . Des filets de terrines
regnoient le long des entablemens. Plufieurs
Juftres formés de lanternes de verre éclairoient
les autres parties . La place vis - à- vis de l'Hôtel de
ville étoit entourée d'Ifs , portant chacun plus de
cent cinquante lumieres .
Il y eut auffi de magnifiques illuminations
aux hôtels du Duc de Gefvres & du Prévôt des
Marchands , ainfi qu'aux maifons des Echevins &
des principaux Officiers du Corps de Ville .
Des fontaines de vin coulerent dans ces différens
endroits , de même que dans la place de
l'Hôtel de ville , & dans les autres principales places
de Paris ; & l'on diftribua du pain & des viandes
au peuple. On avoit placé des orcheftres partout
où le faifoient ces diftributions.
La cloche de l'Hôtel de ville fonna en tocfin
depuis cinq heures du matin juſqu'à minuit. Pendant
la journée il y eut quatre falves d'artillerie ;
une à cinq heures du matin , une à midi , une pendant
le Te Deum , & la derniere avant le feu
d'artifice .
Le 23 , la Vicomteffe de Cambis fut préſentée
à leurs Majeftés .
208 MERCURE DE FRANCE.
Le 24 , le Corps de ville alla à l'Eglife paroiffiale
de Saint Jean en Greve , pour rendre les
actions particulieres de graces ; & il affifta à un
Te Deum qu'il fic chanter en mufique L'Hôtel
de ville , les hôtels du Duc de Gefvres & du Prévôt
des Marchands , & les maiſons des Echevins
& des principaux Officiers du Corps de Ville furent
de nouveau illuminés.
Le Marquis de Braffac , un des Chambellans du
Roi de Pologne Duc de Lorraine & de Bar , eft
venu de la part de Sa Majefté Polonoiſe pour
complimenter ieurs Majeftés & la Famille royale
fur la naiffance de Monfeigneur le Comte de Provence
; & le 24 Novembre il s'acquitta de cette
commiffion.
M. Séguier , Avocat Général du Parlement ,
ouvrit le 24 les Audiences de la Grand'Chambre ,
par une barangue fur l'Emulation. Cette harangue
fut fuivie d'un difcours de M. de Maupeou , premier
Préfident , fur le Vice de la Jalousie.
Selon les lettres de Bordeaux , on y effuya le
premier Novembre une fecouffe de tremblement
de terre qui dura quelques minutes . Elle fut accompagnée
d'une agitation extraordinaire des
eaux de la Garonne. Heureufement la ville n'a
fouffert aucun dommage.
Conformément à l'ordre que le Roi avoit donné
, le Régiment des Gardes Suiffes s'affembla
à Versailles le 29 de Novembre dans la place
d'armes vis - à-vis de la grille du château , & il
forma un bataillon quarré. A midi & demi M. le
Comte d'Eu ayant averti le Roi , que le Régiment
étoit fous les armes , Sa Majesté monta à cheval ,
accompagnée de M.le Comte d'Argenfon ,Miniftre
& Secrétaire d'Etat ayant le département de laGuerre,
ainsi que de M.le Marquis de Paulmy , Secrétaire
JANVIER. 1756. 209
d'Etat en ſurvivance de M. le Comte d'Argenſon.
Le Bataillon quarré s'ouvrit à l'arrivée du Roi ; Sa
Majefté y entra avec la fuite & avec les Officiers
des Gardes du Corps , & le Bataillon ſe referma
fur le champ , les Gardes du Corps reftant en
dehors. Les Capitaines des Gardes Suifles firent
un cercle autour de Sa Majefté ; les Lieutenans
formerent un fecond cercle , & les Sergens un
troifieme. Après que les tambours eurent battu
le ban , le Roi ordonna au Régiment de reconnoître
le Comte d'Eu pour Colonel Général des
Suiffes & Grifons , & de lui obéir en tout ce qui
concerne le fervice de Sa Majefté. Enfuite le Roi
fortit du Bataillon , & alla fe placer vis- à- vis de
la petite Ecurie , d'où Sa Majesté vit défiler le
Régiment. Le Comte d'Eu étoit à la tête. Lorfque
la premiere ligne fut paffée , ce Prince fe
plaça auprès de Sa Majeſté. Il donna le même jour
dans fon château de Clagny un fomptueux dîner
aux Officiers du Régiment , & il fit diftribuer du
pain , de la viande & du vin à tous les foldats .
Sur ce qui a été repréſenté au Roi , qu'entre les
différens moyens qui peuvent concourir avec ceux
que Sa Majefté s'elt déja procurés , pour fubvenir
aux dépenses extraordinaires auxquelles les circonftances
préfentes l'obligent , il n'en eft point
de plus facile & de plus défiré qu'une nouvelle
Loterie ; Sa Majesté s'y eſt d'autant plus volontiers
déterminée , que l'augmentation du bail de
fes Fermes la met en état d'y fatisfaire , fans rien
prendre fur fex autres revenus. En conféquence ,
par un Arrêt du Confeil d'Etat , du 11 de Novembre
, elle a établi une troiſieme Loterie royale.
Cette Loterie dont l'exécution durera douze
ans , à compter du premier Avril 1756 , & dont
le Roi a fixé le fonds à la fomme de trente mil
210 MERCURE DE FRANCE.
lions de livres , fut ouverte le 1t de Décembre au
Tréfor royal. Elle fera compofée de so mille billets
, chacun de fix cens livres. Il y aura cent mille
lots , dont cinquante mille , dits de rembourfement,
qui éteindront & amortiront le capital des
billets & cinquante mille de faveur , aufquels les
billets amortis par le remboursement qui leur
fera parvenu , participeront nonobftant ledit rem
bourfement. Les cent mille lots feront diftribués
en quatorze Tirages pendant le cours des douzé
années que durera la Loterie. Le premier tirage
du premier femeftre fe fera le 15 du mois d'Avril
prochain , & les cinq autres d'année en année au
même tems . Ces fix premiers tirages feront de
lots de rembourfement. Le feptieme qui fera de
faveur , ſe fera un mois après. Le premier des fix
tirages du deuxieme femeftre qui feront également
pour lots de remboursement , fe fera le 15
Avril 1762 , les cinq autres auffi d'année en année,
& le quatorzieme & dernier qui fera de faveur ,
un mois après le fixieme du fecond femeftre. Les
vingt-quatre mille deux ceux quarante huit billets,
qui auront obtenu les lots de rembourſement dans
les fix tirages du Ir femeftre , participeront feuls
au tirage de faveur qui les fuivra. De même les
vingt-cinq mille fept cens cinquante- deux billets.
aufquels feront échus les lots de remboursement
des fix tirages du deuxieme femeftre , auront feuls
part au quatorzieme tirage , qui formera la clôture
de la Loterie . A chacun des douze tirages
pour lots de remboursement il y aura un premier
lot de vingt mille livres , un fecond de dix mille,
un troifieme de quatre mille , deux autres de deux
mille. Dans le premier des deux tirages de faveur
le premier lot fera de cent vingt mille livies
, & le fecond de cinquante mille . Le princiJANVIE
R. 1756. 211
pal lot du quatorzieme & dernier tirage fera de
deux cens mille livres , & le fecond de quatrevingt
mille. Sa Majefté attribue pendant chacune
des deuxieme & fubfequentes années de l'exécution
de la Loterie , jufques & compris la onzieme,
vingt-quatre livres à chacun des billets qui entreront
dans la roue , pour concourir en chaque femeftre
au gain des lots de remboursement , & ce
jufqu'à ce qu'il leur en foit échu un à chacun ;
laquelle attribution fera payée , même pour l'année
révolue , au tems que lefdits lots échoiront
fans aucune réduction deſdits lots.
Il paroît une Ordonnance du Roi pour augmenter
de dix Maîtres chaque Compagnie des Régimens
de Cavalerie, tant Françoifes qu'Etrangeres,
même celles des cinq Brigades du Régiment des
Carabiniers.
Sa Majesté a accordé des lettres d'ennobliffement
à M. Daran , l'un de fes Chirurgiens , qui
s'eft acquis un nom célébre dans toute l'Europe.
Le Marquis de Soragna , Gentilhomme de la
Chambre de l'Infant Duc de Parme , & qui eft
venu de la part de ce Prince & de Madame Infante
pour complimenter leurs Majestés fur la naiffance
de Monfeigneur le Comte de Provence
s'acquitta le 16 de fa commiffion. Il fut préfenté
par Don Jaimes Mafones de Lima & Sotomayor,
Ambaffadeur Extraordinaire & Plénipotentiaire
du Roi d'Efpagne.
Six cloches de la nouvelle Eglife Paroiffiale de
Saint Louis à Verfailles furent bénites le 15. M. le
Duc de Fleury & Me. la Ducheffe de Laynes , Dame
d'honneur de la Reine , les tinrent au nom de
leurs Majeftés & de la Famille royale. Le Curé de
la Paroiffe fit la cérémonie. Il y eut mufique , illumination
, feu , & plufieurs falves de mouſqueterie,
212 MERCURE DE FRANCE.
Le 14,Mdme la Marquise de Gamaches fut préfentée
à leurs Majeftés & à la Famille royale .
Dans ces préfentations elle prit le tabouret
comme Grande d'Espagne , ayant hérité de la
Grandeffe par la mort du Maréchal de la Mothe .
Houdancourt , dont elle eft fille unique.
Madame la Marquiſe de Brehant fut préſentée le
même jour.
Le 17 M. le Marquis de Marigny, Directeur Général
des Bâtimens , Arts & Manufactures , préfenta
à Leurs Majeftés plufieurs pieces de Tapif
ferie en haute- liffe , de la Manufacture des Gobelins.
Quatre de ces pieces repréfentent : la premiere
, Jafon affoupiffant le Dragon , enlevant
la Toifon d'Or , & partant avec Medée : la
deuxieme , le mariage de Jafon & de Creüfe , fille
du Roi de Corinthe : la troisieme , Creuſe confumée
par le feu de la robe fatale , dont Medée
lui a fait préfent : la quatrieme , Medée poignar
dant les deux fils qu'elle avoit eus de Jafon , &
embrafant Corinthe. Ces morceaux ont été exécutés
fur des Tableaux de feu M. de Troy , & ils
font les trois premiers de M. Cozette , & le dernier
de M. Audran. Trois autres Pieces font de M.
Audran. Les ſujets font la Scene s du quatrieme
Acte de l'Opera de Roland : la Scene 4 du cinquieme
Acte d'Armide , d'après feu M. Coypel
& l'Entrée de Marc - Antoine à Ephefe
d'après M. Nattoire , Directeur de l'Académie
de Peinture à Rome. Une huitieme Piece de l'exécution
de M. Cozette , eft une copie d'un Tableau
de M. Parrocel , d'Avignon , repréfentant
la Sainte-Famille , & qui a trois pieds deux pouces
de haut , fur deux pieds cinq pouces de large.
Par une Ordonnance du 8 de ce mois , le Roi
a réglé que les Bataillons du Régiment Royal
JANVIER . 1756. 213
Artillerie , les Compagnies de Mineurs & d'Ouvriers
qui fervent à leur fuite , les Officiers d'Artillerie
& les Ingénieurs , ne feroient dorénavant
qu'un feul & même Corps , fous la dénomination
de Corps Royal de l'Artillerie & du Génie.
On a répandu mal -à-propos le bruit , que le
Coche d'eau d'Auxerre avoit péri. Cette Voiture
n'a pas couru le moindre danger , & celles
de cette efpece ne vont que lorfque la riviere eft
navigable.
Le 18 Décembre les Actions de la Compagnie
des Indes étoient à quatorze cens quatre-vingt livres
les Billets de la premiere Loterie Royale à
huit cens quarante quatre ; ceux de la feconde
Loterie à fept cens vingt - huit , & ceux de la
troifieme Loterie à fix cens vingt-trois.
Royale de Nancy.
Sa Majesté Polonoife , Duc de Lorraine & de
Bar , ayant conçu en 1752 le deflein de faire élever
un monument de fa tendreffe à Sa Majesté
Très-Chrétienne , a dreffé elle - même le plan
d'une place , dont l'exécution confiée à M. Heré
de Corny, fon premier Architecte , répond à la
magnificence des idées de Sa Majesté & à la gran
deur du fujet . Les édifices qui environnent cette
place , font d'une fymmétrie parfaite . Celui du
fond eft deftiné à l'Hôtel de Ville . Ceux de droite
& de gauche forment quatre pavillons . La place
eft terminée par un Corps de bâtimens à un
étage , qui fait retour pour donner une rue de
communication de la Ville Neuve à la Ville
Vieille. Au fond de la rue eft un arc de triomphe
, compoféde trois portiques. Dans les quatre
angles de la place , dont l'extérieur eft décoré
I iv
200 MERCURE DE FRANCE.
d'une architecture d'ordre Corinthien en pilaftres
, on a mis quatre grands grillages fur un
plan ceintré. Les deux du fond font employés à
mafquer les baftions . Ils forment chacun un grand
portique & deux petits. Le portique du milieu
eft une cafcade , où l'on voit la figure de Neptune
fur fon char tiré par des chevaux marins ;
d'un côté , un fleuve & une Nayade ; & de l'autre
un dragon. Toutes les eaux que jettent ces différentes
figures , fe répandent en nappes dans un
vafte baffin. Les fontaines des petits portiques
font ornées de grouppes d'enfans qui jouent avec
des poiffons. Les deux autres grands grillages
font aux angles de l'Hôtel de Ville , & ils forment
deux effeces de portes Flamandes , de vingtdeux
pieds d'ouvertures , deftinés pour donner entrée
à quatre rues.
Au milieu de la place s'éleve un piedestal de
marbre blanc , fur lequel eft la ftatue pedeftre
de Louis XV habillé à la Romaine , cuiraflé &
revêtu du manteau royal . Cette figure de bronze
eft haute de onze pieds. Quatre bas reliefs auffi
de bronze décorent les quatre faces du piedeftal ,
& repréfentent , le premier le mariage du Roi
Très - Chrétien ; le fecond la paix conclue à Vienne
; le 3e la prife de poffeffion de la Lorraine ; le
quatrieme l'Academie des Sciences & Belles - Lettres
établie dans cette ville. Aux quatre angles du
piedeftal , fur le pallier des marches font quatre
figures coloffales , qui repréfentent la prudence ,
la juftice , la valeur & la clémence.
Sa Majefté Polonoiſe ayant fixé le jour de la
Dédicace de la ftatue au 26 Novembre ,vingt trois
jours auparavant à la Malgrange. La fête ne pouvoit
mieux commencer que par des actions de
graces , pour la naiffance de Monfeigneur le Com
ง
JANVIER. 1756. 201
te de Provence. Le Roi fe rendit le 25 à l'églife
primatiale , pour y aflitter à une Meffe folemnelle
, & au Te Deum. Le Primat revêtu de fes
habits pontificaux , reçut Sa Majesté à la porte de
l'églife , où les Compagnies fupérieures , les autres
Corps de Juftice , & le Clergé féculier &
régulier s'étoient rendus.
疹
Le lendemain 26 , Sa Majefté entendit dans
P'églife de Bon-Secours une Mefle célébrée par le
Primat. Vers midi , Sa Majefté arriva ici avec
toute la pompe de la Royauté. Le Régiment d'Infanterie
du Roi Très -Chrétien en garnifon dans
cette ville , bordoit en haie les rues depuis la porte
Saint Nicolas jufqu'à la place royale . Sa Majefté
Polonoife fut faluée de trois décharges de
l'artillerie des remparts. A la porte de l'Hôtel de
Ville , elle fut complimentée par M. Thibault ,
Lieutenant- Général de Police , à la tête des Magiftrats
.
Sa Majefté s'étant placée fur le balcon du grand
fallon de l'Hôtel de Ville , un Héraut d'Armes ,
précédé des Timballiers & Trompettes des plaifirs,"
& monté fur un cheval richement caparaçonné ,
fortit de deffous l'arc de triomphe , & en s'avançant
par la droite , il fit le tour de la place . Devant
chaque pavillon , il fit à haute voix la proclamation
de la Dédicace de la ftatue. La Nobleſſe
& le peuple répondirent à l'envi par des acclamations
réitérées. Alors on ôta de deffus la ftatue le
voile qui la couvroit , & de nouvelles acclamations
en couronnerent la Dédicace. Pendant la
cérémonie , l'artillerie des remparts & la moufqueterie
du Régiment du Roi Très - Chrétien firent
des falves continuelles .
Au lieu d'eau il coula du vin des Fontaines de
la place pendant le refte du jour . Quatre Confeil-
I y
202 MERCURE DE FRANCE.
lers de l'Hôtel de Ville jetterent à pleines mains
de l'argent par les fenêtres des quatre pavillons ,
& l'on diftr bua en même - tems dans toute la ville
des largeffes confidérables aux pauvres honteux .
Sa Majesté reçut les complimens de fa Cour fupérieure
, de fa Chambre des Comptes , de l'Académie
des Sciences & Belles- Lettres , & des quatre
Chapitres de Chanoineffes de Remiremont
d'Epinal , de Bouxieres & de Pouffay.
Sur les quatre heures elle fe rendit à la falle de
la Comédie , où elle entendit un prologue relatif
à la cérémonie du jour. L'Auteur des paroles eft
M. Paliffot de Montenoy , & la Mufique eft de M.
Surat . Après le fpectacle , Sa Majefté paffa à la
falle du bal paré que donnoit la Ville. Il étoit
compofé de toute la haute Nobleffe de Lorraine ,
& d'Etrangers de la plus grande diftinction , que le
défir de faire leur cour à Sa Majefté avoit attirés
de toutes parts. Le Roi y demeura une demi-heure,
& partit enfuite au bruit de l'artillerie , & au
milieu des acclamations dictées par l'allégrefle
générale.
En paffant près de la grande place de la Ville
Neuve , Sa Majefté y vit les Soldats & Sergens
des quatre Bataillons du Régiment du Roi , affis
à de longues tables , où la Ville leur avoit fait
fervir un repas dans lequel il régna autant d'ordre
que d'abondance. Les tables formoient un
quarré. Elles étoient éclairées par cinq pyramides
, dont quatre de vingt- trois pieds , & celle
du milieu de quarante , toutes furmontées de
fleurs de lys couronnées , ayant dans leurs corps
les armes de Sa Majefté Polonoife , & celles de la
Ville en feu tranfparent. Le devant & le derriere
des tables étoient ornés des faifceaux d'armes
du Régiment , fur chacun defquels il y avoit une
JANVIE R. 1756. 203
fleur de lys illuminée. Les drapeaux étoient déployés
autour des tables , fur lefquelles veillont
le Corps des Officiers , le Marquis de Guerchy ,
Colonel-Lieutenant , à la tête .
A la fuite du bal paré il y eut grand bal
mafqué à l'Hôtel de Ville.
Sa Majesté revint ici le 27. La Place royale
étoit illuminée fuivant l'ordre de l'architecture .
Après avoir confidéré l'illumination , le Roi defcendit
du grand fallon de l'Hôtel de Ville pour
fe rendre fous le periftile de l'arc de triomphe.
Avant fa fortie , M. Thibault lui préfenta fur
le feuil de la porte une médaille d'or . Eile porte
d'un côté la tête de Sa Majesté Polonoife avec cette
infcription : Stanislaus Í , Rex Polonia , Magnus
Duc Lithuania , Lotharingia & Barri . Au revers
eft la ftatue pedeſtre de Louis XV fur fon piedeftal
, avec cette légende : Uriufque immortalitati,
Et pour exergue , Civitas Nanceiana . MDCCLV.
En recevant cette médaille , qui a été gravée
par la Dame de Saint Urbain , Sa Majesté eut la
bonté de dire aux Magiftrtas : Meffieurs , fur ce médaillon
eft mon effigie , mais les vôtres font gravées
dans mon coeur.
On tira enfuite le magnifique feu d'artifice ,
qui avoit été préparé . Sa Majesté après le feu ,
retourna à la place royale , pour voir une feconde
fois l'illumination , & elle partit enfin au bruit de
nouvelles falves d'artillerie & de moufqueterie.
Pendant les trois jours qu'ont duré les réjouiffances
publiques , les habitans de Nancy ont fait
les honneurs de la Ville , en tenant table ouverte
pour les Etrangers , qui , après avoir admiré les
magnificences dont ils ont été témoins , ont remporté
la plus haute idée de l'amour fincere &
refpectueux des Lorrains pour leurs Majeftés
Très- Chrétienne & Polonoife.
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
Cette fête n'a point été particuliere à la ville
de Nancy : elle a été générale dans toutes les
villes & dans les bourgs de la Lorraine & du
Barrois.
Le 14 Décembre , les Députés de la Ville de
Nancy eurent l'honneur de préſenter au Roi les
Médailles d'or & d'argent , qui ont été frappées
à l'occafion de cette Dédicace. Le Roi pour leur
donner de fa fatisfaction une marque diftinguée ,
les reçut dans fon cabinet. Ils furent préfentés à Sa
Majefté par M. le Duc de Fleury, premier Gentilhomme
de la Chambre , Gouverneur & Lieutenant-
Général de Lorraine & du Barrois, & par M.
le Comte d'Argenfon, Miniftre & Secrétaire d'Etat.
Les Députés eurent le même honneur chez la
Reine , chez Monfeigneur le Dauphin , Madame
la Dauphine , Monfeigneur le Duc de Bourgogne
, Monfeigneur le Duc de Berry , & Monfeigneur
le Comte de Provence , ainfi que chez Madame
, & chez Mefdames Victoire , Sophie &
Louife, étant préfentés de même par M. le Duc de
Fleury , & M. le Comte d'Argenfon. La Députation
étoit compofée de M. Thibault , Lieutenant-
Général de Police , & Chef du Magiſtrat de
Nancy ; de M. Breton , Confeiller pour la Nobleffe
; de M. Puiffeur , Confeiller pour le Tiers-
Etat ; & de M. Richer , Confeiller , Tréforier de
l'Hôtel de Ville de Nancy. M. Thibault porta la
parole.
Le 12 , la rentrée de la Cour des Aides fe fit
avec les cérémonies ordinaires. Après la Meffe
célébrée , felon la coutume , dans la falle de la
Cour , les trois Chambres s'affemblerent dans la
premiere , & l'on fit la lecture des Ordonnances
& des Réglemens. Les Huifliers ayant prêté ferJANVIER
. 1756. 205
ment , M. de Lamoignon de Malesherbes , Premier
Préfident , prononça un difcours fur le choix
des Etudes. Enfuite M. Boula de Mareuil , fecond
Avocat Général , prit la parole , & haranguafur
Pemploi du Tems.
M. de Landreville , Maréchal de Camp & chef
de Brigade des Gardes du Corps , vint le 17 Novembre
, de la part du Roi , annoncer la naiffance
de Monfeigneur le Comte de Provence au Corps
de ville qui s'étoit affemblé fur la premiere nouvelle
que Madame la Dauphine avoit reffenti
quelques douleurs. M. le Marquis de Dreux , Grand
Maître des cérémonies , a remis en même tems
au Corps de ville une lettre de Sa Majeſté ſur le
même ſujet. Auffi - tôt les Prévôt des Marchands
& Echevins firent annoncer à toute la ville , par
une falve générale de l'artillerie , & par la cloche
de l'Hôtel de ville , qui a fonné jufqu'à minuit ,
la nouvelle faveur qu'il a plu à Dieu d'accorder à
la France.
A fix heures du foir on fit une feconde falve
de l'artillerie , après laquelle les Prévôt des Marchands
& Echevins allumerent , avec les cérémonies
ordinaires , le bucher qui avoit été dreſſé
dans la Place devant l'Hôtel de ville . On tira enfuite
une grande quantité de fufées volantes ; on
fit couler dans les quatre coins de la place des
fontaines de vin , & on diftribua au peuple du
pain & des viandes. Plufieurs Orcheftres remplis
de Muficiens , mêlerent le fon de leurs inftrumens
aux acclamations dictées par l'alegreffe
publique. La façade de l'Hôtel de ville fut illuminée
le foir par plufieurs filets de terrines , ainfi
que l'hôtel du Duc de Gefvres , Gouverneur de
Paris , celui du Prévôt des Marchands & les maifons
des Echevins & Officiers du Bureau de la
ville,
206 MERCURE DE FRANCE.
Le Roi ayant écrit à l'Archevêque de Paris
pour faire rendre à Dieu de folemnelles actions
de graces à l'occafion de la naiffance de Monfeigneur
le Comte de Provence , on chanta le 23
Novembre le Te Deum dans l'églife Métropolitaine
, & l'Abbé de Saint Exupery , Doyen du
Chapitre , y officia. Le Chancelier & le Garde
des Sceaux , accompagnés de plufieurs Confeillers
d'Etat & Maîtres des Requêtes , y affifterent , ainfi
que le Parlement , la Chambre des Comptes ,
la Cour des Aides , & le Corps de ville , qui y
avoient été invités de la part de Sa Majesté par
le Marquis de Dreux , Grand Maître des cérémonies.
On tira le même jour dans la place de l'Hôtel
de ville , par ordre des Prévôt des Marchands &
Echevins , un très -beau feu d'artifice . La décoration
repréfentoit un Temple de Lucine , formant
par fon plan un quarré régulier de marbre blanc.
Une ordonnance compofite , portée fur un focle
& terminée par un attique , préfentoit fur chaque
face du quarré quatre colonnes ifolées , embraffées
par des branches de lys , & grouppées
deux à deux , qui foutenoient un fronton triangulaire.
A côté des colonnes étoient des figures de
fept pieds de proportion , repréfentant des Vertus.
Le milieu des façades étoit ouvert par un portique
élevé fur des dégrés de marbre blanc , qui
conduifoient jufqu'à l'autel , fur lequel étoit placée
la Déeffe . Les colonnes , les frontons , les panneaux
du focle & de l'attique étoient de marbre
ferancolin. L'intérieur du temple étoit de bréche
violette. Les chapiteaux , la frife , les moulures ,
les bas reliefs & les figures étoient en or . Au-deffus
du fronton étoit le médaillon des armes du
Roi , fupporté par le Génie de la France , & par
JANVIER. 1756. 207
une Renommée. Des Amours , foutenus fur des
nuages , formoient différens jeux , & fervoient
de couronnement à tout l'édifice . Le temple avoit
ving- cinq pieds de largeur fur quarante de hauteur.
Il portoit fur une terraffe de quarante-huit
pieds de baſe , dont les appuis formoient autour
de l'édifice principal , une enceinte décorée dans
tous les angles par des acroteres qui foutenoient
des vafes de fleurs . On montoit fur la terrafle
par des perrons diftribués fur toutes les faces .
Après l'artifice , la façade de l'Hôtel de ville fut
illuminée avec autant de goût que de magnifi- *
cence. Toutes les colonnes dans leur pourtour
étoient garnies de lampions . Des filets de terrines
regnoient le long des entablemens. Plufieurs
Juftres formés de lanternes de verre éclairoient
les autres parties . La place vis - à- vis de l'Hôtel de
ville étoit entourée d'Ifs , portant chacun plus de
cent cinquante lumieres .
Il y eut auffi de magnifiques illuminations
aux hôtels du Duc de Gefvres & du Prévôt des
Marchands , ainfi qu'aux maifons des Echevins &
des principaux Officiers du Corps de Ville .
Des fontaines de vin coulerent dans ces différens
endroits , de même que dans la place de
l'Hôtel de ville , & dans les autres principales places
de Paris ; & l'on diftribua du pain & des viandes
au peuple. On avoit placé des orcheftres partout
où le faifoient ces diftributions.
La cloche de l'Hôtel de ville fonna en tocfin
depuis cinq heures du matin juſqu'à minuit. Pendant
la journée il y eut quatre falves d'artillerie ;
une à cinq heures du matin , une à midi , une pendant
le Te Deum , & la derniere avant le feu
d'artifice .
Le 23 , la Vicomteffe de Cambis fut préſentée
à leurs Majeftés .
208 MERCURE DE FRANCE.
Le 24 , le Corps de ville alla à l'Eglife paroiffiale
de Saint Jean en Greve , pour rendre les
actions particulieres de graces ; & il affifta à un
Te Deum qu'il fic chanter en mufique L'Hôtel
de ville , les hôtels du Duc de Gefvres & du Prévôt
des Marchands , & les maiſons des Echevins
& des principaux Officiers du Corps de Ville furent
de nouveau illuminés.
Le Marquis de Braffac , un des Chambellans du
Roi de Pologne Duc de Lorraine & de Bar , eft
venu de la part de Sa Majefté Polonoiſe pour
complimenter ieurs Majeftés & la Famille royale
fur la naiffance de Monfeigneur le Comte de Provence
; & le 24 Novembre il s'acquitta de cette
commiffion.
M. Séguier , Avocat Général du Parlement ,
ouvrit le 24 les Audiences de la Grand'Chambre ,
par une barangue fur l'Emulation. Cette harangue
fut fuivie d'un difcours de M. de Maupeou , premier
Préfident , fur le Vice de la Jalousie.
Selon les lettres de Bordeaux , on y effuya le
premier Novembre une fecouffe de tremblement
de terre qui dura quelques minutes . Elle fut accompagnée
d'une agitation extraordinaire des
eaux de la Garonne. Heureufement la ville n'a
fouffert aucun dommage.
Conformément à l'ordre que le Roi avoit donné
, le Régiment des Gardes Suiffes s'affembla
à Versailles le 29 de Novembre dans la place
d'armes vis - à-vis de la grille du château , & il
forma un bataillon quarré. A midi & demi M. le
Comte d'Eu ayant averti le Roi , que le Régiment
étoit fous les armes , Sa Majesté monta à cheval ,
accompagnée de M.le Comte d'Argenfon ,Miniftre
& Secrétaire d'Etat ayant le département de laGuerre,
ainsi que de M.le Marquis de Paulmy , Secrétaire
JANVIER. 1756. 209
d'Etat en ſurvivance de M. le Comte d'Argenſon.
Le Bataillon quarré s'ouvrit à l'arrivée du Roi ; Sa
Majefté y entra avec la fuite & avec les Officiers
des Gardes du Corps , & le Bataillon ſe referma
fur le champ , les Gardes du Corps reftant en
dehors. Les Capitaines des Gardes Suifles firent
un cercle autour de Sa Majefté ; les Lieutenans
formerent un fecond cercle , & les Sergens un
troifieme. Après que les tambours eurent battu
le ban , le Roi ordonna au Régiment de reconnoître
le Comte d'Eu pour Colonel Général des
Suiffes & Grifons , & de lui obéir en tout ce qui
concerne le fervice de Sa Majefté. Enfuite le Roi
fortit du Bataillon , & alla fe placer vis- à- vis de
la petite Ecurie , d'où Sa Majesté vit défiler le
Régiment. Le Comte d'Eu étoit à la tête. Lorfque
la premiere ligne fut paffée , ce Prince fe
plaça auprès de Sa Majeſté. Il donna le même jour
dans fon château de Clagny un fomptueux dîner
aux Officiers du Régiment , & il fit diftribuer du
pain , de la viande & du vin à tous les foldats .
Sur ce qui a été repréſenté au Roi , qu'entre les
différens moyens qui peuvent concourir avec ceux
que Sa Majefté s'elt déja procurés , pour fubvenir
aux dépenses extraordinaires auxquelles les circonftances
préfentes l'obligent , il n'en eft point
de plus facile & de plus défiré qu'une nouvelle
Loterie ; Sa Majesté s'y eſt d'autant plus volontiers
déterminée , que l'augmentation du bail de
fes Fermes la met en état d'y fatisfaire , fans rien
prendre fur fex autres revenus. En conféquence ,
par un Arrêt du Confeil d'Etat , du 11 de Novembre
, elle a établi une troiſieme Loterie royale.
Cette Loterie dont l'exécution durera douze
ans , à compter du premier Avril 1756 , & dont
le Roi a fixé le fonds à la fomme de trente mil
210 MERCURE DE FRANCE.
lions de livres , fut ouverte le 1t de Décembre au
Tréfor royal. Elle fera compofée de so mille billets
, chacun de fix cens livres. Il y aura cent mille
lots , dont cinquante mille , dits de rembourfement,
qui éteindront & amortiront le capital des
billets & cinquante mille de faveur , aufquels les
billets amortis par le remboursement qui leur
fera parvenu , participeront nonobftant ledit rem
bourfement. Les cent mille lots feront diftribués
en quatorze Tirages pendant le cours des douzé
années que durera la Loterie. Le premier tirage
du premier femeftre fe fera le 15 du mois d'Avril
prochain , & les cinq autres d'année en année au
même tems . Ces fix premiers tirages feront de
lots de rembourfement. Le feptieme qui fera de
faveur , ſe fera un mois après. Le premier des fix
tirages du deuxieme femeftre qui feront également
pour lots de remboursement , fe fera le 15
Avril 1762 , les cinq autres auffi d'année en année,
& le quatorzieme & dernier qui fera de faveur ,
un mois après le fixieme du fecond femeftre. Les
vingt-quatre mille deux ceux quarante huit billets,
qui auront obtenu les lots de rembourſement dans
les fix tirages du Ir femeftre , participeront feuls
au tirage de faveur qui les fuivra. De même les
vingt-cinq mille fept cens cinquante- deux billets.
aufquels feront échus les lots de remboursement
des fix tirages du deuxieme femeftre , auront feuls
part au quatorzieme tirage , qui formera la clôture
de la Loterie . A chacun des douze tirages
pour lots de remboursement il y aura un premier
lot de vingt mille livres , un fecond de dix mille,
un troifieme de quatre mille , deux autres de deux
mille. Dans le premier des deux tirages de faveur
le premier lot fera de cent vingt mille livies
, & le fecond de cinquante mille . Le princiJANVIE
R. 1756. 211
pal lot du quatorzieme & dernier tirage fera de
deux cens mille livres , & le fecond de quatrevingt
mille. Sa Majefté attribue pendant chacune
des deuxieme & fubfequentes années de l'exécution
de la Loterie , jufques & compris la onzieme,
vingt-quatre livres à chacun des billets qui entreront
dans la roue , pour concourir en chaque femeftre
au gain des lots de remboursement , & ce
jufqu'à ce qu'il leur en foit échu un à chacun ;
laquelle attribution fera payée , même pour l'année
révolue , au tems que lefdits lots échoiront
fans aucune réduction deſdits lots.
Il paroît une Ordonnance du Roi pour augmenter
de dix Maîtres chaque Compagnie des Régimens
de Cavalerie, tant Françoifes qu'Etrangeres,
même celles des cinq Brigades du Régiment des
Carabiniers.
Sa Majesté a accordé des lettres d'ennobliffement
à M. Daran , l'un de fes Chirurgiens , qui
s'eft acquis un nom célébre dans toute l'Europe.
Le Marquis de Soragna , Gentilhomme de la
Chambre de l'Infant Duc de Parme , & qui eft
venu de la part de ce Prince & de Madame Infante
pour complimenter leurs Majestés fur la naiffance
de Monfeigneur le Comte de Provence
s'acquitta le 16 de fa commiffion. Il fut préfenté
par Don Jaimes Mafones de Lima & Sotomayor,
Ambaffadeur Extraordinaire & Plénipotentiaire
du Roi d'Efpagne.
Six cloches de la nouvelle Eglife Paroiffiale de
Saint Louis à Verfailles furent bénites le 15. M. le
Duc de Fleury & Me. la Ducheffe de Laynes , Dame
d'honneur de la Reine , les tinrent au nom de
leurs Majeftés & de la Famille royale. Le Curé de
la Paroiffe fit la cérémonie. Il y eut mufique , illumination
, feu , & plufieurs falves de mouſqueterie,
212 MERCURE DE FRANCE.
Le 14,Mdme la Marquise de Gamaches fut préfentée
à leurs Majeftés & à la Famille royale .
Dans ces préfentations elle prit le tabouret
comme Grande d'Espagne , ayant hérité de la
Grandeffe par la mort du Maréchal de la Mothe .
Houdancourt , dont elle eft fille unique.
Madame la Marquiſe de Brehant fut préſentée le
même jour.
Le 17 M. le Marquis de Marigny, Directeur Général
des Bâtimens , Arts & Manufactures , préfenta
à Leurs Majeftés plufieurs pieces de Tapif
ferie en haute- liffe , de la Manufacture des Gobelins.
Quatre de ces pieces repréfentent : la premiere
, Jafon affoupiffant le Dragon , enlevant
la Toifon d'Or , & partant avec Medée : la
deuxieme , le mariage de Jafon & de Creüfe , fille
du Roi de Corinthe : la troisieme , Creuſe confumée
par le feu de la robe fatale , dont Medée
lui a fait préfent : la quatrieme , Medée poignar
dant les deux fils qu'elle avoit eus de Jafon , &
embrafant Corinthe. Ces morceaux ont été exécutés
fur des Tableaux de feu M. de Troy , & ils
font les trois premiers de M. Cozette , & le dernier
de M. Audran. Trois autres Pieces font de M.
Audran. Les ſujets font la Scene s du quatrieme
Acte de l'Opera de Roland : la Scene 4 du cinquieme
Acte d'Armide , d'après feu M. Coypel
& l'Entrée de Marc - Antoine à Ephefe
d'après M. Nattoire , Directeur de l'Académie
de Peinture à Rome. Une huitieme Piece de l'exécution
de M. Cozette , eft une copie d'un Tableau
de M. Parrocel , d'Avignon , repréfentant
la Sainte-Famille , & qui a trois pieds deux pouces
de haut , fur deux pieds cinq pouces de large.
Par une Ordonnance du 8 de ce mois , le Roi
a réglé que les Bataillons du Régiment Royal
JANVIER . 1756. 213
Artillerie , les Compagnies de Mineurs & d'Ouvriers
qui fervent à leur fuite , les Officiers d'Artillerie
& les Ingénieurs , ne feroient dorénavant
qu'un feul & même Corps , fous la dénomination
de Corps Royal de l'Artillerie & du Génie.
On a répandu mal -à-propos le bruit , que le
Coche d'eau d'Auxerre avoit péri. Cette Voiture
n'a pas couru le moindre danger , & celles
de cette efpece ne vont que lorfque la riviere eft
navigable.
Le 18 Décembre les Actions de la Compagnie
des Indes étoient à quatorze cens quatre-vingt livres
les Billets de la premiere Loterie Royale à
huit cens quarante quatre ; ceux de la feconde
Loterie à fept cens vingt - huit , & ceux de la
troifieme Loterie à fix cens vingt-trois.
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Résumé : Dédicace de la Statue du Roy, dans la Place Royale de Nancy.
En 1752, Stanislas Leszczyński, Duc de Lorraine et de Bar, décida d'élever un monument en l'honneur de Louis XV à Nancy. Il conçut une place royale, confiée à l'architecte Emmanuel Héré, entourée de bâtiments symétriques, incluant un hôtel de ville, quatre pavillons et un corps de bâtiments à un étage. La place était ornée de fontaines et de sculptures, notamment une statue de Neptune et des figures allégoriques. Au centre de la place, une statue pédestre de Louis XV en bronze, haute de onze pieds, était placée sur un piédestal de marbre blanc. Ce piédestal était décoré de quatre bas-reliefs représentant le mariage de Louis XV, la paix de Vienne, la prise de possession de la Lorraine et l'Académie des Sciences et Belles-Lettres de Nancy. Quatre figures colossales symbolisant la prudence, la justice, la valeur et la clémence étaient également présentes. La dédicace de la statue eut lieu le 26 novembre 1755. Stanislas assista à une messe solennelle et au Te Deum à l'église primatiale. Le lendemain, après une autre messe, il se rendit à la place royale accompagné de troupes et d'artillerie. Un héraut d'armes proclama la dédicace, et la statue fut dévoilée sous les acclamations du peuple. Des salves d'artillerie et de mousqueterie furent tirées, et du vin coula des fontaines. Des largesses furent distribuées aux pauvres. Stanislas reçut les compliments des autorités locales et assista à une représentation théâtrale suivie d'un bal. Le soir, un grand feu d'artifice fut tiré, et la place fut illuminée. Stanislas reçut une médaille commémorative et repartit au milieu des acclamations. Les réjouissances durèrent trois jours, avec des tables ouvertes pour les étrangers et des illuminations. La fête fut célébrée dans toute la Lorraine et le Barrois. Le 14 décembre, des députés de Nancy présentèrent des médailles au roi et à la famille royale à Versailles. En parallèle, des festivités eurent lieu à Paris, avec l'Hôtel de ville comme centre des célébrations. La façade fut illuminée avec des lampions et des lustres, et des fontaines de vin furent organisées. Le 23 novembre, la vicomtesse de Cambis fut présentée aux Majestés. Le 24 novembre, le Corps de ville se rendit à l'église paroissiale de Saint-Jean-en-Grève pour des actions de grâce. Le marquis de Braffiac complimenta la famille royale pour la naissance du comte de Provence. M. Séguier ouvrit les audiences de la Grand'Chambre avec une harangue sur l'émulation. À Bordeaux, un tremblement de terre fut ressenti sans causer de dommages. Le régiment des Gardes Suisses se rassembla à Versailles pour reconnaître le comte d'Eu comme colonel général. Le roi ordonna une nouvelle loterie royale pour subvenir aux dépenses extraordinaires. Le marquis de Soragna complimenta la famille royale, et six cloches de la nouvelle église paroissiale de Saint-Louis à Versailles furent bénites. Plusieurs présentations à la cour eurent lieu, notamment celle de la marquise de Gamaches et de la marquise de Brehant. M. le marquis de Marigny présenta des pièces de tapisserie de la manufacture des Gobelins aux Majestés. Une ordonnance royale régla la fusion de plusieurs bataillons en un seul corps. Enfin, les actions de la Compagnie des Indes et des billets des loteries royales furent cotés à des valeurs spécifiques le 18 décembre.
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31
p. 218-219
ALLEMAGNE.
Début :
Le 30 du mois dernier, on rendit de solemnelles actions de graces [...]
Mots clefs :
Dresde, Hambourg, Naissance, Madame la Dauphine, Portugal, Tremblement de terre, Secours
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ALLEMAGNE.
ALLEMAGNE.
DE DRESDE , le 8 Decembre.
Le 30 du mois dernier , on rendit de folemnelles
actions de graces dans toutes les églifes de
cette ville , pour les heureufes couches de Madame
la Dauphine.
DE HAMBOURG , le 10 Decembre.
Sur la nouvelle de l'affreux déſaftre que le Por
tugal vient d'effuyer , la Régence de cette ville a
réfolu de faire partir inceffamment quatre navires
chargés de tous les fecours néceffaires dont
ce Royaume infortuné peut avoir befoin. La plú
part des Hambourgeois qui étoient établis à Lif
bonne , fe font heureufement fauvés , mais leurs
maiſons & leurs effets ont été enveloppés dans la
JANVIER. 1756. 219
difgrace commune , & ont été détruits , ou par
le tremblement , ou par le feu.
DE DRESDE , le 8 Decembre.
Le 30 du mois dernier , on rendit de folemnelles
actions de graces dans toutes les églifes de
cette ville , pour les heureufes couches de Madame
la Dauphine.
DE HAMBOURG , le 10 Decembre.
Sur la nouvelle de l'affreux déſaftre que le Por
tugal vient d'effuyer , la Régence de cette ville a
réfolu de faire partir inceffamment quatre navires
chargés de tous les fecours néceffaires dont
ce Royaume infortuné peut avoir befoin. La plú
part des Hambourgeois qui étoient établis à Lif
bonne , fe font heureufement fauvés , mais leurs
maiſons & leurs effets ont été enveloppés dans la
JANVIER. 1756. 219
difgrace commune , & ont été détruits , ou par
le tremblement , ou par le feu.
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Résumé : ALLEMAGNE.
Le 30 novembre, des actions de grâce ont été célébrées à Dresde pour les accouchements de Madame la Dauphine. Le 10 décembre, Hambourg a envoyé quatre navires de secours au Portugal après le tremblement de terre. La plupart des Hambourgeois à Lisbonne ont survécu, mais leurs biens ont été détruits.
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32
p. 200-211
Relation des Fêtes données à Aix, au College Royal-Bourbon, de la Compagnie de Jesus, à l'occaison de la naissance de Monseigneur le Comte de Provence.
Début :
Les Colleges n'étant pas moins destinés à former de bons citoyens à l'Etat, [...]
Mots clefs :
Comte de Provence, Naissance, Fêtes, Prince, Sa Majesté, Contrées de France, Bénédiction
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Relation des Fêtes données à Aix, au College Royal-Bourbon, de la Compagnie de Jesus, à l'occaison de la naissance de Monseigneur le Comte de Provence.
Relation des Fêtes données à Aix , au College
Royal- Bourbon , de la Compagnie de Jefus,
à l'occafion de la naiffance de Monfeigneur
le Comte de Provence .
LES Colleges n'étant pas moins deftinés à former
de bons citoyens à l'Etat , que des Sujets à
la République des Lettres , il n'eft pas furprenant
que ceux qui en ont la direction , dans les
événemens où nos Princes & la patrie font intéreffés
, excitent leurs jeunes Eleves à y prendre
part. La naiffance de Monfeigneur le Comte
de Provence étoit une époque trop favorable ,
pour que le College Royal - Bourbon des Jéfuites
AVRIL. 1756. 201
ne la célébrât pas . Il auroit cru négliger une
portion précieufe de l'éducation publique confiée
à fes foins , & manquer à ce qu'il doit à l'augufte
maifon des Bourbons fes fondateurs , s'il
avoit retenu captifs les tranfports de fa joie &
de fa reconnoiffance. C'eft dans ces vues qu'il
a donné quelques fêtes où la Religion & les
Beaux- Arts ont préfidé.
Le Vendredi matin , fecond jour de la nouvelle
année 1756 , elles furent annoncées par
diverfes décharges de boîtes . Vers les 11 heures ,
le P. Dufferre , l'un des Profeffeurs de Rhétorique
, prononça un Difcours François fur cet heureux
événement , en préſence de MM . les Confuls
& Affeffeurs d'Aix , Procureurs du Pays de
Provence , du Confeil de Ville , & d'une affemblée
des plus nombreufes & des plus brillantes
qu'on eût vues depuis long-temps. Ce qui fait
ehouer ces fortes de génethliaques , c'est que
pour l'ordinaire ils adoptent des idées trop vagues
, des préfages peu fondés , & qu'on y répete
ce qui a été déja dit bien des fois . Pour éviter
cet écueil , l'Orateur n'a envisagé la naiflance
du Prince dont il s'agit , que par l'intérêt qu'y
trouve la Provence . Mais il va nous tracer luimême
le plan de fon difcours , & nous en montrer
toute l'économie dans un exorde confacré en
grande partie à l'éloge des Bourbons.
Tandis que la Maifon puiffante , longtemps
rivale de nos Rois , & qui pendant tant de fiecles
a occupé le trône des Céfars , n'a pu échapper au
naufrage , ni continuer de donner des héritiers à
Charles V, Louis voit fa poftérité s'accroître , fe
perpétuer fous fes yeux , le fceptre affermi , la
fucceffion toujours plus affurée dans fon augufte
famille , le trône entouré de nouveaux foutiens ,
I v
202 MERCURE DE FRANCE.
& la tranquillité publique porter fur un plus
grand nombre d'appuis.
Ces grands objets qui ouvrent un vafte champ
à l'éloquence , & qui intéreffent tout coeur François
, je pourrois ici les peindre , & annoncer la
fplendeur que jettera fur le royaume le Prince
naiffant. J'évoquerois , j'interrogerois les mânes
des ayeux célebres , à qui il doit fon origine , &
indiquant rapidement ces grands Hommes , ces
grands Rois à qui l'antiquité payenne eût élevé
des Temples , & aufquels l'admiration , la reconnoiffance
, ont parmi nous dreffé des autels dans
les coeurs , je dirois : Peuples , mefurez la gloire
du nouveau Bourbon fur celle de fes ancêtres ;
parce qu'ils ont été , préfagez ce qu'il fera . Il eft
du fang des Héros, de ce fang fait pour donner des
Rois au monde , ou pour les protéger , de ce fang
qui affis fur les trônes de France , d'Espagne , de
Naples , de Sicile, de Parme , fait partout des heureux
, & rend le joug de la Royauté préférable à la
liberté la plus douce. Un Bourbon en naiffant ,
averti par je ne fçais quel cri du coeur , d'afpirer
à une grandeur fupérieure à celle de fon rang.
Marchant au milieu des trophées de fes ayeux ,
invefti des rayons de leur gloire , entouré des
plus beaux modeles , témoin des titres illuftres
de Saint , de Grand , de Jufte , de Bien-aimé
titres que l'adulation ne prodigua point , que la
vérité a donnés , que l'envie elle -même n'a pu
refufer , partout où il porte les yeux , il voit
des traces d'héroïfme , des ftatues élevées à leur
magnanimité. Tous les livres , tous les tableaux ,
font l'hiftoire de leurs triomphes. A peine fçaurat'il
bégayer qu'on lui parlera de Fontenoi ,
de
Lawfeld , des Provinces que le courage de fon
ayeul a conquifes , & que fa modération a tendues
; on lui dira qu'interrompant lui- même le
eft
AVRIL 1756. 203
cours de fes exploits , & pofant de plein gré fon
tonnerre , il a préféré la conquête des coeurs à
toutes les autres victoires . Avec des exemples fi
voifins , des encouragemens fi puiffans , ne ſeroit-
ce pas une espece de prodige que ce Prince
vînt à dégénérer , & que des aigles qui ont porté
hardiment leur vol dans les cieux ,
n'euffent engendré
qu'une timide colombe ?
Tels font les augures que je formerois à la
gloire de la Nation , fi je n'avois pas à célébrer
la naiffance d'un Comte de Provence. Mais cette
dénomination demande des traits moins généraux
, & plus propres à exprimer l'intérêt particulier
que vous prenez à cet événement . Bor-
"
nons-nous donc à féliciter la Provence de l'honneur
qu'elle a de donner fon nom à l'augufte
enfant qui vient de naître , & effayons de réfoudre
deux queftions qui femblent embraffer tout
ce qu'offre ce fujet. Qu'est- ce qui a procuré à la
Provence une diftinction fi glorieuſe & que
doit-elle en attendre ? Je trouve qu'elle en eft
redevable à l'amour du Roi pour cette Province
& à l'attachement de cette Province pour nos
Rois. Que doit-elle s'en promettre ? La protec
tion la plus fignalée ; diftinction , par conféquent
, la plus glorieufe dans fes caufes , la plus
avantageufe dans fes effets.
Pour vous donner une idée de cette piece d'éloquence
, citons- en quelques morceaux qui
vous feront connoître le ton & la maniere de
P'Auteur.
La faveur dont la Provence vient d'être honorée
, n'eft point une de ces démonſtrations d'eftime
& de bienveillance qu'on fçait fi bien affecter
dans les Cours , démonftrations verbales &
extérieures que la politique , que la néceflité des
I vi
204 MERCURE DE FRANCE.
conjonctures arrache fouvent & dont on fe fert
quelquefois pour payer le mérite & les fervices
. C'eft une marque non fufpecte , non équivoque
, à laquelle on ne fçauroit méconnoître
les fentimens favorables du Prince à notre égard.
Ce n'eft point une de ces graces qui tombent
uniquement fur quelques particuliers qu'on
éleve aux premieres charges , tandis que le corps
entier refte dans la pouffiere. Celle dont il s'agit
intéreffe toute la Province. Ce n'eft point un de
ces témoignages d'attachement , connus feulement
de la perfonne qui les reçoit & qui n'éclatent
point au- dehors , qu'on donne dans le fecret ,
& qu'on peut défavouer en public . Rien de fi folemnel
que le témoignage d'affection donné à
cette province . En nommant fon auguſte petitfils
Comte de Provence , le Roi dit à toute l'Europe
, dit au monde entier attentif à ſes démarches
, que la Provence eft une contrée privilé
giée & favorite , que c'est un nom qui lui eft cher,
& qu'il met dans fa famille pour avoir occafion
de l'entendre fouvent répéter .
L'Orateur prouve enfuite que l'affection du
Roi pour la Provence , eft l'unique caufe qui aic
pu lui procurer une diftinction li glorieufe ; que
ce n'étoit point une obligation qu'il eût à remplir
, ni un ufage qu'il fallut refpecter.
Le Dauphiné compte avec raifon parmi fes
plus belles prérogatives , celle de donner fon nom
à l'héritier préfomptif de la Couronne . Mais fans
prétendre dégrader fes privileges , ne peut-on pas
dire que le nom de Dauphin eft moins une preuve
de la bienveillance de nos Rois que de leur
juftice, une grace qu'ils accordent , qu'une dette
qu'ils acquittent Ici fans être déterminé par le
devoir , ou averti par la coutume , fans trouver
AVRIL. 1756. 205
dans l'espace de trois ficcles la moindre trace d'une
pareille prédilection , Louis n'écoutant que fon
amour pour cette Province , veut être le premier
à lui donner cette marque de préférence , & qu'une
fi brillante époque pour elle date de fon regne :
attention précieufe du Souverain que la Provence
doit mettre dans les faftes de fa gloire . Eh quoi !
fi le moindre figne de bonté de la part de ces maîtres
du monde eft remarqué avec foin ; fi un coup
d'oeil favorable jetté comme par hazard , fi un
éloge échappé eft recueilli avec tranfport , une
faveur auffi réfléchie , auſſi déciſive , auffi intéreffante
, trouveroit - elle des coeurs froids & diftraits
?
La diftinction que reçoit la Provence , n'eft pas
feulement la preuve de l'attachement du Roi pour
cette Province ; c'eft encore la récompenfe de
l'attachement de cette Province pour nos Rois.
Ici on met fous un feul point de vue les principaux
monumens de zele & de fidélité par lesquels
les Provençaux ont fignalé leur amour pour nos
Souverains ; leurs exploits , les fervices qu'ils ont
rendus à la Monarchie lorfque leur Pays eft devenu
le théâtre de la guerre. Chaque coup de pinceau
eft un nouveau trait glorieux à la Provence .
Trois fois l'Autriche eft venu fondre dans ces
contrées avec des forces redoutables , & trois fois
cette aigle , qui comptant fur une proie certaine ,
avoit pris fon effor vers la Provence , a été obligée
de revoler vers les lieux d'où elle étoit partie
; ces armées nombreufes qui avoient inondées
vos villes , ont été diffipées comme l'ombre , &
ceux qui ont échappé au carnage , obligés honteufement
de s'enfuir , n'ont emporté avec eux que le regret
d'avoir
ofé attaquer
une nation
f
fidèle
& fi formidable
,
206 MERCURE DE FRANCE.
L'Orateur fait une mention particuliere de la derniere
irruption des Autrichiens en 1746. Il peint
avec les plus vives couleurs les défaftres aufquels
la Provence fut alors en proie , & les efforts héroïques
qu'elle oppofa aux armées ennemies . Et
il conclut ainfi ce morceau :
Mais quelle contrée fournit à la France dans
ces temps critiques des reffources fi prodigieufes ?
Eft-ce un de ces pays riches de leur propre fonds ,
qui dans l'étendue ou la fertilité, trouvent de quoi
faire les plus grandes avances , & fubvenir aux
plus preffans befoins ? Non : c'eſt la Province la
plus ftérile du Royaume , & une des plus petites ;
où la terre eft aufli ingrate que le ciel y eft beau ,
& qui produit le fuperflu fans donner le néceffaire.
Mais que ne peut pas l'amour de la patrie , le zele
pour fon Roi ? Il multiplie , il étend les reffources ;
il fupplée à la ftérilité du fol ; il compenfe le défaut
des richeffes ; il adoucit les charges les plus
pefantes. C'eft cet amour qui foutient , qui confole
la Province malgré l'épuifement où fes derniers
efforts l'ont réduite , & dont elle n'eft
encore relevée .
pas
La protection fignalée que la Provence trouvera
dans le Prince nouveau -né , & les effets avantageux
qui en réfulteront , font la matiere de la
feconde partie.
N'eft-il pas naturel , dit le P. D. que le nom
de Comte de Provence , nom qui n'ayant point
été porté avant lui par aucun fils de nos Rois
doit l'affecter d'avantage , lui rappelle fans ceffe
les intérêts de cette Province , foit pour elle un
titre à fa protection , un gage de fes bienfaits ?
Rien ne demande d'être manié avec plus d'art
que la louange. Elle n'offre que des fadeurs aux
Héros même qui en font l'objet , fi fe préfentant
AVRIL. 1756 . 207
trop à découvert , elle ne ménage point la modeltie
de ceux dont on prétend flatter l'amour - propre.
Notre Orateur a brûlé quelques grains d'encens
en l'honneur de ce qu'il y a de plus illuftre
dans la Provence ; mais c'eft un encens léger &
qui n'eft nullement infipide. Il fuppofe que dès
que la raifon aura éclairé le Comte de Provence ,
la Province dont il tire fon nom , fera un des premiers
objets de fa curiofité ; que charmé de connoître
cette contrée , fes moeurs , fes grands
hommes , on lui vantera la magnificence de cette
ville ( d'Aix , ) le ton d'aménité & de politeffe qui
y regne , ton qui fembloit être affecté à la Ĉapitale
du Royaume , & c. Les diverſes réponſes
faites au jeune Prince pour fatisfaire fa curiofité ,
renferment les éloges des Cours fouveraines , des
chefs qu'elles ont à leur tête , de M. le Duc de
Villars , Gouverneur de la Provence , de la Nobleffe
, des Provençaux célebres dans le monde
fçavant , &c. éloges d'autant plus flatteurs qu'ils
font plus indirects , & qu'en peu de mots ils offrent
un grand fens .
Quel défir ces divers Portraits n'infpireront- ils
pas au jeune Comte d'avoir près de fa perfonne
quelques membres de cette Province ? Pourra-t'il
les connoître fans aimer l'enjouement du caractere
, la vivacité de l'efprit qui femblent être
comme un des fruits de ce terroir ? & pour combien
l'honneur de l'approcher va- t'il être l'origine
de la fortune & l'époque de l'élévation ? ( 1 )
(1 ) Un détail intéreffant préfage ici aux divers
Habitans de la Provence , au Patriote zélé , au
Guerrier courageux , à l'amateur éclairé , à l'induftrieux
Négociant des avantages relatifs à leur
état. Cette Peinture riante femble contrafter avec
208 MERCURE DE FRANCE.
.....
Ainfi le Seigneur dont le bras vient de s'appéfantir
fi fenfiblement fur une grande partie de
la Provence , veut bien lui ménager des motifs de
confolation. Tandis que les fleuves qui l'arrofent
franchiffant leurs barrieres , & s'ouvrant des routes
nouvelles , ont montré , après leur débordement
l'aviron fendant les flots , là où deux jours
auparavant la charrue ouvroit la terre ; tandis
que ce nouveau déluge offroit l'affreux fpectacle
de digues renverfées , d'édifices écroulés , de
champs inondés, de troupeaux noyés , d'hommes
enfevelis fous les eaux , de malheureux placés entre
la famine & le naufrage , & du haut de leurs
maifons appellant avec des cris plaintifs la charité
bienfaifante ; dans le temps que nos Contrées
étoient ainsi déſolées par ces fléaux que je ne fais
qu'ébaucher , & qui auroient été bien plus funef
tes fans l'active prudence des Peres de la Patrie ,
du milieu des maux , du fein des défaftres , nous
voyons fortir l'efpérance. Sur l'horizon de laFrance
brille un nouvel Aftre dont l'éclat rejaillit en
grande partie fur cette Province , & lui annonce
les plus beaux jours. Des mains de Louis , la Provence
reçoit fon petit-fils pour Génie tutélaire ,
pour Protecteur . Et quel Protecteur ! Eft - ici un
de ces foibles appuis qui manquent aux befoins
les plus preffans , de ces fragiles rofeaux que le
moindre foufe déracine , de ces favoris dont la
chûte eft fort voisine de l'élévation , que la bizarre
fortune montre tantôt au faîte de la grandeur
, tantôt rampant dans la pouffiere , aujourd'hui
excitant l'envie , demain objet de compaffion
Le fang , la qualité du Protecteur dont je
le tableau des malheurs qui ont derniérement affligé
cette Province .
AVRIL. 1756. 209
parle , le mettent à l'abri de ces étranges viciffitude
; fon rang les place néceffairement , & toujours
à la fource des graces , & nos espérances ne
fçauroient fe repofer fur un appui plus folide.,
Il feroit trop long de fuivre l'Orateur dans la
defcription brillante des Fêtes magnifiques que
M. le Duc de Villars & la Ville d'Aix ont données
à l'occafion de cette naiffance. On y rappelle les
abondantes largeffes d'un Prélat ( 1 ) refpectable,
qui font allés chercher l'indigence dans les fombres
réduits où elle fe cachoit , y ont porté la joie ,.
& en ont chaffé la faim.
Verfez , ô mon Dieu ; les plus amples bénédictions
fur cette Princeffe , dont la fécondité eft le
prix de la vertu , qui au milieu des écueils & des
naufrages , montrant la piété la plus pure, fuit de fi
près les traces de l'Efther de la France . Continuez
à combler de vos bienfaits fon augufte époux qui ,
deftiné à retracer à nos neveux les regnes les plus
fortunés , donné par fes rares qualités les plus belles
efpérances. Plus flatté d'être le premier fujet
du Roi , que l'héritier préfomptif de la Couronne ,
ce Prince n'ambitionne point de porter la main
aux rênes d'un empire qu'il gouvernera toujours
trop tôt au gré de ſes défirs ; & à l'ombre d'un trône
où il voit affife avec Louis XV, la juftice , la clémence
, la valeur , la générofité , il fe contente de
fe montrer , de fe rendre toujours plus digne de
régner. Ne ceffez point , Seigneur , de préfider aux
Confeils de ce Roi bien aimé, pour qui renaiffent
ces jours brillans de la France , ou Louis XIV
voyoit fon Fils unique pere de trois Princes , &
une nombreuſe poſtérité affermir toujours plus le
Sceptre dans fon augufte maiſon : mais dans cette
(1) Monseigneur l'Archevêque d'Aix.
210 MERCURE DE FRANCE.
:
diftribution de faveurs céleftes , réſervez en une
part abondante pour le Comte de Provence . Ce
ne font point des profpérités humaines, des couronnes
fragiles que nous ſouhaitons , que nous deman-
'dons pour ce Prince , nos voeux ont un objet plus
fublime puiffe -t'il avoir pour la Religion un
amour inaltérable ,& la maintenir dans fes droits, à
l'exemple de fes ayeux , plus touchés du nom de
très- Chrétien , de Fils aîné de l'Eglife , que des
titres fuperbes de monarque & de conquérant !
que tandis que les arts éclaireront fon efprit , les
vertus forment fon coeur ! Ecartez de fa perfonne
ces hommes dangereux qui fe font une gloire
d'être les Miniftres des paffions des Princes, d'éveil
ler la volupté , & de lui prêter de nouvelles armes
contre leur foibleffe ! Qu'il détefte la flatterie, dont
le poifon defféche les plus beaux fruits du naturel
& de l'éducation ! & que la vérité trop fouvent
captive dans les palais des Grands , à travers les
barrieres & les nuages qu'on lui oppofe , faffe retentir
à fon oreille fes divins oracles ! Pour s'exciter
à l'héroïſme qu'il jette de temps en temps les yeux
fur les Bourbons fes ancêtres ! Non ; il na pas befoin
d'encouragemens étrangers : les exemples domeftiques
fuffifent ; & fans fortir de ſa famille , il trouvera
Augufte , Titus , Antonin & Trajan.
Ce Difcours qui parut être fort goûté des connoiffeurs
, fut fuivie d'une grand'Meſſe en Mufique.
Au fortir de l'Eglife , on trouva la Cour du College
tapiffée & décorée d'emblêmes , de devifes ,
de vers en plufieurs langues , où les Muſes Grecques
, Latines , Italiennes , Françoiſes & Provençales
, payoient à l'envi un tribut poétique au
nouveau Comte de Provence.
Le 3 & le MM. les Penfionnaires S repréfenteAVRIL.
1756. 211
rent un Drame Héroïque intitulé le Génie Tutélaire
, en trois Actes en vers , mêlé de chants &
de danfes. Cette Piece de Théâtre , de la compofition
du P. de Beaumanoir , Profeffeur de Rhétorique
, fut très -bien exécutée & généralement
applaudie. Elle offroit fous le voile de l'allégorie ,
tout ce qui peut intéreffer la Provence . Le concours
de Spectateurs qu'elle attira , fut prodigieux:
MM. les Confuls , à la tête du Confeil de Ville , ont
préfidés à la premiere repréſentation. M. le Duc
de Villars , Mefdames de la Tour , premieres Préfidentes
& Intendantes , & profque tout ce qu'il y
a de perfonnes de diftinction dans cette Ville ,
ont honoré la feconde de leur préfeace . Une brillante
illumination chaque jour a terminé la fête.
Royal- Bourbon , de la Compagnie de Jefus,
à l'occafion de la naiffance de Monfeigneur
le Comte de Provence .
LES Colleges n'étant pas moins deftinés à former
de bons citoyens à l'Etat , que des Sujets à
la République des Lettres , il n'eft pas furprenant
que ceux qui en ont la direction , dans les
événemens où nos Princes & la patrie font intéreffés
, excitent leurs jeunes Eleves à y prendre
part. La naiffance de Monfeigneur le Comte
de Provence étoit une époque trop favorable ,
pour que le College Royal - Bourbon des Jéfuites
AVRIL. 1756. 201
ne la célébrât pas . Il auroit cru négliger une
portion précieufe de l'éducation publique confiée
à fes foins , & manquer à ce qu'il doit à l'augufte
maifon des Bourbons fes fondateurs , s'il
avoit retenu captifs les tranfports de fa joie &
de fa reconnoiffance. C'eft dans ces vues qu'il
a donné quelques fêtes où la Religion & les
Beaux- Arts ont préfidé.
Le Vendredi matin , fecond jour de la nouvelle
année 1756 , elles furent annoncées par
diverfes décharges de boîtes . Vers les 11 heures ,
le P. Dufferre , l'un des Profeffeurs de Rhétorique
, prononça un Difcours François fur cet heureux
événement , en préſence de MM . les Confuls
& Affeffeurs d'Aix , Procureurs du Pays de
Provence , du Confeil de Ville , & d'une affemblée
des plus nombreufes & des plus brillantes
qu'on eût vues depuis long-temps. Ce qui fait
ehouer ces fortes de génethliaques , c'est que
pour l'ordinaire ils adoptent des idées trop vagues
, des préfages peu fondés , & qu'on y répete
ce qui a été déja dit bien des fois . Pour éviter
cet écueil , l'Orateur n'a envisagé la naiflance
du Prince dont il s'agit , que par l'intérêt qu'y
trouve la Provence . Mais il va nous tracer luimême
le plan de fon difcours , & nous en montrer
toute l'économie dans un exorde confacré en
grande partie à l'éloge des Bourbons.
Tandis que la Maifon puiffante , longtemps
rivale de nos Rois , & qui pendant tant de fiecles
a occupé le trône des Céfars , n'a pu échapper au
naufrage , ni continuer de donner des héritiers à
Charles V, Louis voit fa poftérité s'accroître , fe
perpétuer fous fes yeux , le fceptre affermi , la
fucceffion toujours plus affurée dans fon augufte
famille , le trône entouré de nouveaux foutiens ,
I v
202 MERCURE DE FRANCE.
& la tranquillité publique porter fur un plus
grand nombre d'appuis.
Ces grands objets qui ouvrent un vafte champ
à l'éloquence , & qui intéreffent tout coeur François
, je pourrois ici les peindre , & annoncer la
fplendeur que jettera fur le royaume le Prince
naiffant. J'évoquerois , j'interrogerois les mânes
des ayeux célebres , à qui il doit fon origine , &
indiquant rapidement ces grands Hommes , ces
grands Rois à qui l'antiquité payenne eût élevé
des Temples , & aufquels l'admiration , la reconnoiffance
, ont parmi nous dreffé des autels dans
les coeurs , je dirois : Peuples , mefurez la gloire
du nouveau Bourbon fur celle de fes ancêtres ;
parce qu'ils ont été , préfagez ce qu'il fera . Il eft
du fang des Héros, de ce fang fait pour donner des
Rois au monde , ou pour les protéger , de ce fang
qui affis fur les trônes de France , d'Espagne , de
Naples , de Sicile, de Parme , fait partout des heureux
, & rend le joug de la Royauté préférable à la
liberté la plus douce. Un Bourbon en naiffant ,
averti par je ne fçais quel cri du coeur , d'afpirer
à une grandeur fupérieure à celle de fon rang.
Marchant au milieu des trophées de fes ayeux ,
invefti des rayons de leur gloire , entouré des
plus beaux modeles , témoin des titres illuftres
de Saint , de Grand , de Jufte , de Bien-aimé
titres que l'adulation ne prodigua point , que la
vérité a donnés , que l'envie elle -même n'a pu
refufer , partout où il porte les yeux , il voit
des traces d'héroïfme , des ftatues élevées à leur
magnanimité. Tous les livres , tous les tableaux ,
font l'hiftoire de leurs triomphes. A peine fçaurat'il
bégayer qu'on lui parlera de Fontenoi ,
de
Lawfeld , des Provinces que le courage de fon
ayeul a conquifes , & que fa modération a tendues
; on lui dira qu'interrompant lui- même le
eft
AVRIL 1756. 203
cours de fes exploits , & pofant de plein gré fon
tonnerre , il a préféré la conquête des coeurs à
toutes les autres victoires . Avec des exemples fi
voifins , des encouragemens fi puiffans , ne ſeroit-
ce pas une espece de prodige que ce Prince
vînt à dégénérer , & que des aigles qui ont porté
hardiment leur vol dans les cieux ,
n'euffent engendré
qu'une timide colombe ?
Tels font les augures que je formerois à la
gloire de la Nation , fi je n'avois pas à célébrer
la naiffance d'un Comte de Provence. Mais cette
dénomination demande des traits moins généraux
, & plus propres à exprimer l'intérêt particulier
que vous prenez à cet événement . Bor-
"
nons-nous donc à féliciter la Provence de l'honneur
qu'elle a de donner fon nom à l'augufte
enfant qui vient de naître , & effayons de réfoudre
deux queftions qui femblent embraffer tout
ce qu'offre ce fujet. Qu'est- ce qui a procuré à la
Provence une diftinction fi glorieuſe & que
doit-elle en attendre ? Je trouve qu'elle en eft
redevable à l'amour du Roi pour cette Province
& à l'attachement de cette Province pour nos
Rois. Que doit-elle s'en promettre ? La protec
tion la plus fignalée ; diftinction , par conféquent
, la plus glorieufe dans fes caufes , la plus
avantageufe dans fes effets.
Pour vous donner une idée de cette piece d'éloquence
, citons- en quelques morceaux qui
vous feront connoître le ton & la maniere de
P'Auteur.
La faveur dont la Provence vient d'être honorée
, n'eft point une de ces démonſtrations d'eftime
& de bienveillance qu'on fçait fi bien affecter
dans les Cours , démonftrations verbales &
extérieures que la politique , que la néceflité des
I vi
204 MERCURE DE FRANCE.
conjonctures arrache fouvent & dont on fe fert
quelquefois pour payer le mérite & les fervices
. C'eft une marque non fufpecte , non équivoque
, à laquelle on ne fçauroit méconnoître
les fentimens favorables du Prince à notre égard.
Ce n'eft point une de ces graces qui tombent
uniquement fur quelques particuliers qu'on
éleve aux premieres charges , tandis que le corps
entier refte dans la pouffiere. Celle dont il s'agit
intéreffe toute la Province. Ce n'eft point un de
ces témoignages d'attachement , connus feulement
de la perfonne qui les reçoit & qui n'éclatent
point au- dehors , qu'on donne dans le fecret ,
& qu'on peut défavouer en public . Rien de fi folemnel
que le témoignage d'affection donné à
cette province . En nommant fon auguſte petitfils
Comte de Provence , le Roi dit à toute l'Europe
, dit au monde entier attentif à ſes démarches
, que la Provence eft une contrée privilé
giée & favorite , que c'est un nom qui lui eft cher,
& qu'il met dans fa famille pour avoir occafion
de l'entendre fouvent répéter .
L'Orateur prouve enfuite que l'affection du
Roi pour la Provence , eft l'unique caufe qui aic
pu lui procurer une diftinction li glorieufe ; que
ce n'étoit point une obligation qu'il eût à remplir
, ni un ufage qu'il fallut refpecter.
Le Dauphiné compte avec raifon parmi fes
plus belles prérogatives , celle de donner fon nom
à l'héritier préfomptif de la Couronne . Mais fans
prétendre dégrader fes privileges , ne peut-on pas
dire que le nom de Dauphin eft moins une preuve
de la bienveillance de nos Rois que de leur
juftice, une grace qu'ils accordent , qu'une dette
qu'ils acquittent Ici fans être déterminé par le
devoir , ou averti par la coutume , fans trouver
AVRIL. 1756. 205
dans l'espace de trois ficcles la moindre trace d'une
pareille prédilection , Louis n'écoutant que fon
amour pour cette Province , veut être le premier
à lui donner cette marque de préférence , & qu'une
fi brillante époque pour elle date de fon regne :
attention précieufe du Souverain que la Provence
doit mettre dans les faftes de fa gloire . Eh quoi !
fi le moindre figne de bonté de la part de ces maîtres
du monde eft remarqué avec foin ; fi un coup
d'oeil favorable jetté comme par hazard , fi un
éloge échappé eft recueilli avec tranfport , une
faveur auffi réfléchie , auſſi déciſive , auffi intéreffante
, trouveroit - elle des coeurs froids & diftraits
?
La diftinction que reçoit la Provence , n'eft pas
feulement la preuve de l'attachement du Roi pour
cette Province ; c'eft encore la récompenfe de
l'attachement de cette Province pour nos Rois.
Ici on met fous un feul point de vue les principaux
monumens de zele & de fidélité par lesquels
les Provençaux ont fignalé leur amour pour nos
Souverains ; leurs exploits , les fervices qu'ils ont
rendus à la Monarchie lorfque leur Pays eft devenu
le théâtre de la guerre. Chaque coup de pinceau
eft un nouveau trait glorieux à la Provence .
Trois fois l'Autriche eft venu fondre dans ces
contrées avec des forces redoutables , & trois fois
cette aigle , qui comptant fur une proie certaine ,
avoit pris fon effor vers la Provence , a été obligée
de revoler vers les lieux d'où elle étoit partie
; ces armées nombreufes qui avoient inondées
vos villes , ont été diffipées comme l'ombre , &
ceux qui ont échappé au carnage , obligés honteufement
de s'enfuir , n'ont emporté avec eux que le regret
d'avoir
ofé attaquer
une nation
f
fidèle
& fi formidable
,
206 MERCURE DE FRANCE.
L'Orateur fait une mention particuliere de la derniere
irruption des Autrichiens en 1746. Il peint
avec les plus vives couleurs les défaftres aufquels
la Provence fut alors en proie , & les efforts héroïques
qu'elle oppofa aux armées ennemies . Et
il conclut ainfi ce morceau :
Mais quelle contrée fournit à la France dans
ces temps critiques des reffources fi prodigieufes ?
Eft-ce un de ces pays riches de leur propre fonds ,
qui dans l'étendue ou la fertilité, trouvent de quoi
faire les plus grandes avances , & fubvenir aux
plus preffans befoins ? Non : c'eſt la Province la
plus ftérile du Royaume , & une des plus petites ;
où la terre eft aufli ingrate que le ciel y eft beau ,
& qui produit le fuperflu fans donner le néceffaire.
Mais que ne peut pas l'amour de la patrie , le zele
pour fon Roi ? Il multiplie , il étend les reffources ;
il fupplée à la ftérilité du fol ; il compenfe le défaut
des richeffes ; il adoucit les charges les plus
pefantes. C'eft cet amour qui foutient , qui confole
la Province malgré l'épuifement où fes derniers
efforts l'ont réduite , & dont elle n'eft
encore relevée .
pas
La protection fignalée que la Provence trouvera
dans le Prince nouveau -né , & les effets avantageux
qui en réfulteront , font la matiere de la
feconde partie.
N'eft-il pas naturel , dit le P. D. que le nom
de Comte de Provence , nom qui n'ayant point
été porté avant lui par aucun fils de nos Rois
doit l'affecter d'avantage , lui rappelle fans ceffe
les intérêts de cette Province , foit pour elle un
titre à fa protection , un gage de fes bienfaits ?
Rien ne demande d'être manié avec plus d'art
que la louange. Elle n'offre que des fadeurs aux
Héros même qui en font l'objet , fi fe préfentant
AVRIL. 1756 . 207
trop à découvert , elle ne ménage point la modeltie
de ceux dont on prétend flatter l'amour - propre.
Notre Orateur a brûlé quelques grains d'encens
en l'honneur de ce qu'il y a de plus illuftre
dans la Provence ; mais c'eft un encens léger &
qui n'eft nullement infipide. Il fuppofe que dès
que la raifon aura éclairé le Comte de Provence ,
la Province dont il tire fon nom , fera un des premiers
objets de fa curiofité ; que charmé de connoître
cette contrée , fes moeurs , fes grands
hommes , on lui vantera la magnificence de cette
ville ( d'Aix , ) le ton d'aménité & de politeffe qui
y regne , ton qui fembloit être affecté à la Ĉapitale
du Royaume , & c. Les diverſes réponſes
faites au jeune Prince pour fatisfaire fa curiofité ,
renferment les éloges des Cours fouveraines , des
chefs qu'elles ont à leur tête , de M. le Duc de
Villars , Gouverneur de la Provence , de la Nobleffe
, des Provençaux célebres dans le monde
fçavant , &c. éloges d'autant plus flatteurs qu'ils
font plus indirects , & qu'en peu de mots ils offrent
un grand fens .
Quel défir ces divers Portraits n'infpireront- ils
pas au jeune Comte d'avoir près de fa perfonne
quelques membres de cette Province ? Pourra-t'il
les connoître fans aimer l'enjouement du caractere
, la vivacité de l'efprit qui femblent être
comme un des fruits de ce terroir ? & pour combien
l'honneur de l'approcher va- t'il être l'origine
de la fortune & l'époque de l'élévation ? ( 1 )
(1 ) Un détail intéreffant préfage ici aux divers
Habitans de la Provence , au Patriote zélé , au
Guerrier courageux , à l'amateur éclairé , à l'induftrieux
Négociant des avantages relatifs à leur
état. Cette Peinture riante femble contrafter avec
208 MERCURE DE FRANCE.
.....
Ainfi le Seigneur dont le bras vient de s'appéfantir
fi fenfiblement fur une grande partie de
la Provence , veut bien lui ménager des motifs de
confolation. Tandis que les fleuves qui l'arrofent
franchiffant leurs barrieres , & s'ouvrant des routes
nouvelles , ont montré , après leur débordement
l'aviron fendant les flots , là où deux jours
auparavant la charrue ouvroit la terre ; tandis
que ce nouveau déluge offroit l'affreux fpectacle
de digues renverfées , d'édifices écroulés , de
champs inondés, de troupeaux noyés , d'hommes
enfevelis fous les eaux , de malheureux placés entre
la famine & le naufrage , & du haut de leurs
maifons appellant avec des cris plaintifs la charité
bienfaifante ; dans le temps que nos Contrées
étoient ainsi déſolées par ces fléaux que je ne fais
qu'ébaucher , & qui auroient été bien plus funef
tes fans l'active prudence des Peres de la Patrie ,
du milieu des maux , du fein des défaftres , nous
voyons fortir l'efpérance. Sur l'horizon de laFrance
brille un nouvel Aftre dont l'éclat rejaillit en
grande partie fur cette Province , & lui annonce
les plus beaux jours. Des mains de Louis , la Provence
reçoit fon petit-fils pour Génie tutélaire ,
pour Protecteur . Et quel Protecteur ! Eft - ici un
de ces foibles appuis qui manquent aux befoins
les plus preffans , de ces fragiles rofeaux que le
moindre foufe déracine , de ces favoris dont la
chûte eft fort voisine de l'élévation , que la bizarre
fortune montre tantôt au faîte de la grandeur
, tantôt rampant dans la pouffiere , aujourd'hui
excitant l'envie , demain objet de compaffion
Le fang , la qualité du Protecteur dont je
le tableau des malheurs qui ont derniérement affligé
cette Province .
AVRIL. 1756. 209
parle , le mettent à l'abri de ces étranges viciffitude
; fon rang les place néceffairement , & toujours
à la fource des graces , & nos espérances ne
fçauroient fe repofer fur un appui plus folide.,
Il feroit trop long de fuivre l'Orateur dans la
defcription brillante des Fêtes magnifiques que
M. le Duc de Villars & la Ville d'Aix ont données
à l'occafion de cette naiffance. On y rappelle les
abondantes largeffes d'un Prélat ( 1 ) refpectable,
qui font allés chercher l'indigence dans les fombres
réduits où elle fe cachoit , y ont porté la joie ,.
& en ont chaffé la faim.
Verfez , ô mon Dieu ; les plus amples bénédictions
fur cette Princeffe , dont la fécondité eft le
prix de la vertu , qui au milieu des écueils & des
naufrages , montrant la piété la plus pure, fuit de fi
près les traces de l'Efther de la France . Continuez
à combler de vos bienfaits fon augufte époux qui ,
deftiné à retracer à nos neveux les regnes les plus
fortunés , donné par fes rares qualités les plus belles
efpérances. Plus flatté d'être le premier fujet
du Roi , que l'héritier préfomptif de la Couronne ,
ce Prince n'ambitionne point de porter la main
aux rênes d'un empire qu'il gouvernera toujours
trop tôt au gré de ſes défirs ; & à l'ombre d'un trône
où il voit affife avec Louis XV, la juftice , la clémence
, la valeur , la générofité , il fe contente de
fe montrer , de fe rendre toujours plus digne de
régner. Ne ceffez point , Seigneur , de préfider aux
Confeils de ce Roi bien aimé, pour qui renaiffent
ces jours brillans de la France , ou Louis XIV
voyoit fon Fils unique pere de trois Princes , &
une nombreuſe poſtérité affermir toujours plus le
Sceptre dans fon augufte maiſon : mais dans cette
(1) Monseigneur l'Archevêque d'Aix.
210 MERCURE DE FRANCE.
:
diftribution de faveurs céleftes , réſervez en une
part abondante pour le Comte de Provence . Ce
ne font point des profpérités humaines, des couronnes
fragiles que nous ſouhaitons , que nous deman-
'dons pour ce Prince , nos voeux ont un objet plus
fublime puiffe -t'il avoir pour la Religion un
amour inaltérable ,& la maintenir dans fes droits, à
l'exemple de fes ayeux , plus touchés du nom de
très- Chrétien , de Fils aîné de l'Eglife , que des
titres fuperbes de monarque & de conquérant !
que tandis que les arts éclaireront fon efprit , les
vertus forment fon coeur ! Ecartez de fa perfonne
ces hommes dangereux qui fe font une gloire
d'être les Miniftres des paffions des Princes, d'éveil
ler la volupté , & de lui prêter de nouvelles armes
contre leur foibleffe ! Qu'il détefte la flatterie, dont
le poifon defféche les plus beaux fruits du naturel
& de l'éducation ! & que la vérité trop fouvent
captive dans les palais des Grands , à travers les
barrieres & les nuages qu'on lui oppofe , faffe retentir
à fon oreille fes divins oracles ! Pour s'exciter
à l'héroïſme qu'il jette de temps en temps les yeux
fur les Bourbons fes ancêtres ! Non ; il na pas befoin
d'encouragemens étrangers : les exemples domeftiques
fuffifent ; & fans fortir de ſa famille , il trouvera
Augufte , Titus , Antonin & Trajan.
Ce Difcours qui parut être fort goûté des connoiffeurs
, fut fuivie d'une grand'Meſſe en Mufique.
Au fortir de l'Eglife , on trouva la Cour du College
tapiffée & décorée d'emblêmes , de devifes ,
de vers en plufieurs langues , où les Muſes Grecques
, Latines , Italiennes , Françoiſes & Provençales
, payoient à l'envi un tribut poétique au
nouveau Comte de Provence.
Le 3 & le MM. les Penfionnaires S repréfenteAVRIL.
1756. 211
rent un Drame Héroïque intitulé le Génie Tutélaire
, en trois Actes en vers , mêlé de chants &
de danfes. Cette Piece de Théâtre , de la compofition
du P. de Beaumanoir , Profeffeur de Rhétorique
, fut très -bien exécutée & généralement
applaudie. Elle offroit fous le voile de l'allégorie ,
tout ce qui peut intéreffer la Provence . Le concours
de Spectateurs qu'elle attira , fut prodigieux:
MM. les Confuls , à la tête du Confeil de Ville , ont
préfidés à la premiere repréſentation. M. le Duc
de Villars , Mefdames de la Tour , premieres Préfidentes
& Intendantes , & profque tout ce qu'il y
a de perfonnes de diftinction dans cette Ville ,
ont honoré la feconde de leur préfeace . Une brillante
illumination chaque jour a terminé la fête.
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Résumé : Relation des Fêtes données à Aix, au College Royal-Bourbon, de la Compagnie de Jesus, à l'occaison de la naissance de Monseigneur le Comte de Provence.
En avril 1756, le Collège Royal-Bourbon des Jésuites à Aix organisa des festivités pour célébrer la naissance du Comte de Provence. Ces événements visaient à former de bons citoyens et à honorer la maison des Bourbons, fondateurs du collège. Le 2 janvier 1756, le Père Dufferre, professeur de rhétorique, prononça un discours en présence de dignitaires locaux et d'une assemblée nombreuse. Il évita les généralités en se concentrant sur l'intérêt de la Provence pour la naissance du prince. Le discours souligna l'amour du roi pour la Provence et l'attachement de la Provence pour la monarchie, illustré par les services rendus lors des invasions autrichiennes. Le Père Dufferre mentionna également les ressources prodigieuses fournies par la Provence malgré sa stérilité, soulignant l'amour patriotique et le zèle pour le roi. Il conclut en espérant que le Comte de Provence, portant le nom de la province, en deviendrait un protecteur et un bienfaiteur. Parallèlement, le texte décrit les ravages causés par des inondations en Provence, avec des digues renversées, des édifices écroulés, des champs inondés, des troupeaux noyés et des hommes ensevelis. Malgré ces malheurs, une lueur d'espoir apparaît avec la naissance du Comte de Provence, présenté comme un appui solide et stable, contrairement aux favoris éphémères. Le Duc de Villars et la ville d'Aix organisèrent des fêtes magnifiques pour célébrer cette naissance, et un prélat respecté porta secours aux indigents. Des prières furent adressées pour la santé et la vertu du Comte de Provence, afin qu'il suive les traces de ses ancêtres illustres et gouverne avec justice et clémence. Les célébrations inclurent une grand-messe et une pièce de théâtre allégorique intitulée 'Le Génie Tutélaire', composée par le Père de Beaumanoir. Les représentations attirèrent un grand nombre de spectateurs distingués et furent marquées par des illuminations brillantes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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33
p. 227-235
« Madame la Comtesse de Noailles accoucha le 17 Avril d'un fils, [...] »
Début :
Madame la Comtesse de Noailles accoucha le 17 Avril d'un fils, [...]
Mots clefs :
Naissance, Comte de Rennel, Mariage, Comtes, Ducs, Maison de Rennel, Seigneurs, Saint-Empire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Madame la Comtesse de Noailles accoucha le 17 Avril d'un fils, [...] »
Madame la Comteffe de Noailles accoucha le
17 Avril d'un fils , qui a été tenu fur les fonts par .
le Bailly de Froulay , Ambaffadeur de Malte , &
par la Ducheffe douairiere de la Valliere , & a été
nommé Louis- Marie. Il portera le titre de Chevalier
d'Arpajon , étant deſtiné à remplir le privilege
accordé à feu Louis , Duc d'Arpajon , bifayeul
de la Comteffe de Noailles dans l'Ordre de Malte
( 1 ).
(1 ) Lorfque le Sultan Ibrahim menaçoit l'Ifle :
de Malte avec des forces formidables , le Duc
d'Arpajon alla volontairement au fecours de cette ·
Ifle. Il fut élu Chef du Conseil du Grand- Maître
Généraliffime des Armées de la Religion ,
pourvut fi bien à la sûreté de l'Ifle , que par reconnoiffance
le Grand- Maître ( Paul de Vintimille-
Lafcaris- Caftellar) , du confentement de l'Ordre, lui
accorda le 30 Mai 1645 , le privilege fingulier pour
Lui tous fes defcendans aînés , d'ajouter à leurs
Armes la Croix octogone de Malte avec les extrêmités
faillantes , comme la portent les Chevaliers
de Malte , & qu'un de fes defcendans , pour une
fois feulement au choix du pere , feroit Chevalier
en naiffant , grand Croix à l'âge de 16 ans . Ce
privilege a été reconnu certifié le 5 Mai 1715 , ..
par le Grand Maître Raimond Perellos de Rocafull. »
K vj
228 MERCURE DE FRANCE.
Dame N.... le Petit d'Avelnes , veuve de
Meffire Yves Jean - Baptifte de la Boiffiere , Comte
de Chambors , Ecuyer ordinaire du Roi , mort en
Août 1755 , eft accouchée au mois de Février ,
d'un fils qui a été tenu fur les fonts dans la Chapelle
du Château de Verfailles , par Monfeigneur
le Dauphin & Madame la Dauphine , & nommé
Louis - Jofeph-Jean-Bapt fte. L'Abbé de Raigecourt,
Aumônier du Roi , lui fuppléa les cérémonies du
Baptême en préſence du Curé de la Paroiffe de
Notre- Dame.
Jofeph-Balthafar , Comte de Rennel , de Lefcut,
& du S. Empire , Capitaine dans le Régiment
Royal- Barrois , a époufé le s Février à Méhoncourt
en Lorraine , Marguerite- Gabrielle de Rennel
fa coufine. Le contrat de mariage avoit écé
figné à Nanci le 31 Janvier précédent .
La maifon de Rennel , établie depuis trèslongtemps
en Lorraine , eft une des plus illuftres
de cette Province , tant par fon ancienneté
que par fes belles alliances. Richard de Rennel ,
Chevalier, vivoit fous le regne de Philippe de Valois
, près duquel il combattic vaillamment à la
bataille de Montcaffel en 1328 , & auquel il rendit
de grands fervices. Marguerite Stuard , qu'il
avoit épousée à la Cour du Roi d'Angleterre , le
rendit pere de Jean de Rennel , Chevalier , Capitaine
de 100 Lances , fire de Beaulieu par le don
que lui en fit le Roi Jean en 1350. Jeanne de
Hangeft , fon époufe , qui tefta en 1365 ,
fut mere
de Guillaume de Rennel , fire de Beaulieu , Chambellan
du Roi Charles VI , qui d'Yolande de Mouy,
eur pour enfans Bonaventure de Rennel , qui fuit
Jean , Chevalier de Rhodes , & Yolande , femme
de Matthieu de Riencourt , feigneur d'Orival.
;
Bonaventure de Rennel , fire de Beaulieu , Ca- '
JUI N. 1756. 229
pitaine de so hommes d'armes , époufa en 1415 ,
Alix de Soiffons , fille de Thibault , feigneur de
Moreuil , Gouverneur de Boulogne , & de Marguerite
de Poix. Il en eut Guillaume de Rennel , IF
du nom , fire de Beaulieu , Capitaine de so hommes
d'armes des ordonnances du Roi Louis XI.
marié en 1445 à Ifabeau , fille de Jean de Hangeft,
feigneur de Genlis , & de Marie de Sarrebruck ; il
en eut entr'autres enfans , Jean de Rennel , II du
nom , Capitaine d'une compagnie entretenue'
pour la garde de Boulogne , qui tefta le 10 Juin
1530 , & fut pere par fa femme Catherine d'Aumale
, fille de Jean d'Aumale , feigneur d'Efpaigni
, & de Jeanne de Soiffons-Moreuil , Vicomteffe
du Mont Notre- Dame , de Bonaventure de Rennel
, II du nom , Page du Duc de Lorraine en 1525,
puis premier Gentilhomme de la Chambre &
Principal Miniftre de Nicolas de Lorraine , Comte
de Vaudemont , pere de la Reine - Louife. H fut
auffi crée fecretaire d'Etat de Lorraine , le 11
Juillet 1552. Il mourut le 16 Mars 1584 , laiffant
de fa femme Marie de Janin de Manoncourt
morte en 1560 , qu'il avoit épousée le 3 Λούτ
1548 , Balthazar de Rennel , feigneur de Saint-
Bria , Jarville , S. Germain , S. Boin , Malzeville ,
Ecuyer d'écurie du Duc de Mercoeur , frere de la
Reine Louife , & depuis Miniftre d'Etat , & Préfident
de Lorraine , mort le 16 Novembre 1637 ,
âgé de 83 ans. Il avoit époufé le 9 Juin 1575 ,
Barbe de Lefcut . Elle etoit fille aînée de Jean de
Lefcut , Comte du S. Empire , & de Mayelle de
Beurges . C'est elle qui apporta dans la maifon de
Rennel le titre de Comte du S. Empire . Elle
mourut le 29 Mars 1637 , laiflant enti'autres enfans
Balthazar, II du nom , Comte de Rennel &
du S. Empire , Seigneur de Jarville & d'Andilly .
230 MERCURE DE FRANCE .
Confeiller d'Etat du Duc Charles IV , mort le 2
Novembre 1658. Il avoit époufé par contrat du
11 Janvier 1521 , Claude de Guérin du Montet.
Elle mourut le 3 Février 1641 , & fut mere de
François , Comte de Rennel & du S. Empire ,
qui fuit ; de Balthafar qui a fait la branche des .
Comtes de Rennel & de Lefcut , dont la poſtérité
fera rapportée après celle de fon frere aîné , & de
Charles-Jean, feigneur d'Andilly, Conſeiller d'état
du Duc Léopold , mort âgé de So ans , le 14 Avril
1716 , ne laiffant de fa femme Théreſe- Françoiſe
de Rouffelot que quatre filles. 1. Catherine Valerie
, morte en 1752 , veuve depuis 1739 de :
René de la Geard , dit le Marquis de Grefignac.
2º. Marie-Thérefe , morte en 1723 , veuve depuis
1708 de Charles- François de Serre , Confcil- :
fer d'Etat & Maître des Requêtes du Duc Léopold.
3 °. Marguerite- Reine , mariée en 1699 , à
Jean-Baptifte-André de Laugier , tué à la bataille
d'Hochftedt , étant capitaine au Régiment de
Languedoc. 4° . Marie- Antoinette , veuve du 10%
Mars 1734 , de Claude , Comte de la Rode , Baron
de Monconis , & Seigneur de Charnay en Bour
gogne.
François , Comte de Rennel & du S. Empire ,.
Seigneur de Jarville , Méhioncourt , Franconville ,
& Landecourt , fils aîné de Balthafar , II du nom
fut Confeiller d'Etat du Duc Charles IV, qui lui
donna en 1666 le commandement de Nanci , &
la Préfidence du Confeil de cette ville , & mourut
le 21 Février 1687. Il avoit épaulé 1º . par contrat
du 6 Novembre 1649 , Antoinette le Febvre ,.
Dame d'Ancy, morte le 5 Mai 1663. 2 ° . En 1664,
Antoinette le Marefchal , décédée le 2 Juin 1680.t
Il n'eut de cette feconde femme que Jeanne - Fran-*
goile de Rennel , mariée à Jofeph le Begue , C.-
JUIN. 1756. 23 .
du S. Empire & de Germiny , premier Miniftre
d'Etat de Lorraine , mort le 30 Janvier 1730 ,
onze mois après fa femme ; mais il eut de fon premier
mariage Marie -Françoiſe de Rennel , morce
le 28 Mai 1698 , femme de Charles- Henri de
Juvrecourt , commandant les Moufquetaires de la
garde du Duc Charles IV ; Balthafar- Jofeph - Dieudonné
, & Jean- Baptifte-Henri de Rennel , qui
ont laiffé postérité .
Balthafar-Jofeph-Dieudonné , Comte de Rennel
& du S. Empire , feigneur de Mehoncourt ,
d'Erbamont & de Circourt , Confeiller d'Etat du
Duc Léopold , & premier Préſident de la Chambre
des Comptes de Lorraine , né le 24 Septembre
1654 , mourut le 24 Février 1726. Il avoit
épousé par contrat du 23 Novembre 1687 , Françoife
de Huyn , niece du Comte de Huyn , Maré--
chal des Armées de l'Empereur, & Gouverneur de
Zizeth en Hongrie , décédée le premier Janvier
1723 , dont 1 °. Nicolas - François , qui fuit . 2º. Jofeph-
Ignace , Comte de Rennel & du Saint Em--
pire , Prélat-domeftique du Pape , Référendaire de
P'une & l'autre fignature , Grand- Chantre & Chanoine
de l'Eglife de S. Diez . 3 ° . Charles - François
, 'Comte de Rennel & du Saint Empire , Camé
rier d'honneur du Pape , & Chanoine de S. Diez.
4°. Jean-Baptifte-Henri-Balthafar,Comte de Rennel
& du Saint Empire , feigneur de Bouvigny ,
d'Erbamont & Circourt , ancien Capitaine aux
Gardes de l'Empereur.
Nicolas - François , Comte de Rennel & du Saint:
Empire , feigneur de Méhoncourt , a été créé Secretaire
d'Etat du Duc Léopold , le 20 Février
1721 , puis fon Miniftre Plénipotentiaire au Congrès
de Cambrai , enfin Commiffaire de l'Empereur
pour faire l'extradition de fes Duchés de
232 MERCURE DE FRANCE.
Lorraine & de Bar. Il a été maintenu avec ceux
de fon nom & de fes armes dans le titre de Comte
du Saint Empire , par Arrêt du Conſeil d'Etat ,
rendu à Luneville le 31 Août 1730 ,& tous les titres
justificatifs de fa filiation & illuftration de fa maifon
, ont été reconnus & vérifiés par Arrêt du Parlement
de Nanci dù 26 Septembre 1736. Il eft
veuf du 17 Décembre 1745 , de Magdeleine de
Pons , mariée par contrat du 20 Février 1732 , &
fille de Claude- Alexandre , Marquis de Pons de
Rennepont , Marechal des Camps & Armées du
Roi , & d'Anne- Dorothée de Bettainviller. Il a de
ce mariage , 1º . Jofeph-Ignace - Dieudonné , Comte
de Rennel & du Saint Empire , né le 20 Juin
1734 , Officier au Régiment du Roi infanterie ,
mort le 19 Novembre 1755. 2 ° . Marguerite - Ga→
brielle , née le 20 Mars 1739 , dont nous annon-
Cons le mariage. 3 ° . Anne - Marie , dite Mademoi
felle de Senlis , née le 21 Avril 1741. 4° . Jeanne-
Henriette , dite Mademoifelle de Moreuil , née le
3 Juin 1743. 5 ° . Elifabeth- Gloffinde , appellés
Mademoiſelle de Florainville , née le 17 Décembre
1745 .
I
Jean- Baptifte- Henri , Comte de Rennel & du
Saint Empire , feigneur d'Amelecourt . Colonel
d'infanterie , fecond fils de François , Comte de
Rennel & d'Antoinette le Fevre , eft mort le 3
Août 1748. Il avoit épousé par contrat du 16 Décembre
1692 , Maric- Nicole , morte les Novembre
1703 , fille de Henri- Philippe de Baillivy ,
commandant les Gendarmes de la Garde du Duc
Charles IV , & de Marie - Louife- Françoise de Voil
lot de Valleroy. De ce mariage font fortis , 1°. Charles
-Jean- Baptifte , Comte de Rennel & du Saint
Empire , Capitaine aux Gardes du Duc Léopold ,
mort le 8 Août 1724 , laiffaut de fa femme ClauJUIN.
1756. 233
de - Catherine le Febvre de S. Germain , foeur du
Comte de ce nom , une fille unique Anne- Catherine
de Rennel , née le jour de la mort de fon
pere , & mariée par contrat du 24 Février 1744, à
Jean- Baptifte -Hyacinthe- Dieudonné , Marquis
de Treftondam. 2. Antoine- Africain , dit le Chevalier
de Rennel , Officier au Régiment de Neuperg
, tué le 9 Octobre 1716 , au fiege de Temefwar.
3. Charles- François , Comte de Rennel &
du Saint Empire , né le zo Septembre 17c1 , & tué
de 12 Septembre 1719. Il avoit épousé par contrat
du 11 Octobre 1723 , Anne-Françoife- Scholaftique
de Greiche , de laquelle il a eu Anne - Catherine
de Rennel , mariée par contrat du 12 Juillet
1742, à fon oncle à la mode de Bretagne , Jean-
François , Comte de Grieche , feigneur de Jalocourt
, fils unique de Nicolas , Comte de Greiche,
Chambellan du Duc Léopold , & de Marie - Catherine
du Châtelet , foeur de René- François , Marquis
du Châtelet , Lieutenant Général des Armées
de l'Empereur.
Balthafar , III du nom , Comte de Rennel de
Lefcut & du Saint Empire , Seigneur de Jarville
fils puîné de Balthafar , II du nom , Comte de
Rennel , & de Claude de Guerin du Montet , mentionnés
ci- deffus , fut fubftitué au nom de Lefcut
par fon ayeule Barbe de Lefcut. Il mourut âgé de
quatre- vingts ans , lé 26 Octobre 1707 , ayant eu
de fon mariage , contracté le 8 Juillet 168 avec
Elizabeth , fille unique de Charles de Vitton , Seigneur
de Valfroicourt , Jean-Sigifbert , Comte
de Rennel de Lefcut & du Saint Empire , Confeil.
ler d'Etat du Duc Léopold , & fecond Préſident à
Mortier au Parlement de Nanci , décédé le 29
Juillet 1707. Il avoit épousé par Contrat du 3
Février 1687 , Catherine de Huyn , Dame de Bet234
MERCURE DE FRANCE.
toncourt, morte le Décembre 1741 , de laquelle
il cut , 1º. Thomas- Balthafar qui fuit. 2º. Jean-
Jofeph , Comte du Saint Empire , mort Chanoine
de S. Diez , le 20 Mars 1736. 3°.Charles, Comte
du Saint Empire , dit le Chevalier de Lefcut ,
ancien Capitaine aux Gardes du Duc de Lorraine.
4. Marguerite , veuve , du 4 Août 1751 , de Paul-
Melchior- Henri , Seigneur de Seichamps. 5 ° . Elifabeth
Catherine , morte le 5 Novembre 1751
femme de François de Lançon , Commandant à
Belle-ifle. 6°. Françoife , dite Mlle de Rennel , 7º.
Catherine , morte Religieufe en 1729.
Thomas - Balthafar, Comte de Rennel de Lefcut
& du Saint Empire , Seigneur de Bettoncourt , Capitaine
aux Gardes du Duc de Lorraine , mort le
17 Novembre 1749 , avoit épousé par Contrat du
26 Septembre 1722 Marie- Anne de Hoffelife , décédée
le 27 Mai 1730 , fille de Céfar de Hoffelife,
Seigneur de Burthecourt & de Chambrey , Capi
taine au Régiment de la Fere , & d'Antoinette de
Bouvet , Dame de Robert-Efpagne . De ce maria,
ge font fortis , 1 ° . Jofeph- Balthafar , Comte de
Rennel de Lefcut & du Saint Empire , Seigneur
de Bettoncourt , Burthecourt & Robert-Efpagne
né le 21 Août 1726 , qui donne lieu à cet article.
2°. Catherine- Gabrielle , mariée le 12 Avril 1746,
à Jean - Baptifte , Baron de Mahuet & du Saint
Empire , Comte de Mailly , dit le Comte de
Coyviller. 3 °. Marie- Therefe , dite Mlle de Lef
cut. 4°. Marguerite , dite Mlle de Burthecourt.
M. Conftant de Rebecque , Général au ſervice
'Hollande , Colonel d'un Régiment Suiffe de
fon nom , eft mort en Suiffe à Lauzanne , pays
de Vaux , canton de Berne , au commencement
de cette année , âgé de 79 ans . La famille de
Conftant de Rebecque eft d'une ancienne Nobleffe
JUIN. 1756. 235
originaire d'Artois , où elle a poffédé plufieurs
terres , & a eu des Charges honorables dans différentes
Cours . Elle a fourni des Chevaliers de S.
Jean de Jérufalem , & s'eft retirée en Suiffe après
les guerres de Religion.
17 Avril d'un fils , qui a été tenu fur les fonts par .
le Bailly de Froulay , Ambaffadeur de Malte , &
par la Ducheffe douairiere de la Valliere , & a été
nommé Louis- Marie. Il portera le titre de Chevalier
d'Arpajon , étant deſtiné à remplir le privilege
accordé à feu Louis , Duc d'Arpajon , bifayeul
de la Comteffe de Noailles dans l'Ordre de Malte
( 1 ).
(1 ) Lorfque le Sultan Ibrahim menaçoit l'Ifle :
de Malte avec des forces formidables , le Duc
d'Arpajon alla volontairement au fecours de cette ·
Ifle. Il fut élu Chef du Conseil du Grand- Maître
Généraliffime des Armées de la Religion ,
pourvut fi bien à la sûreté de l'Ifle , que par reconnoiffance
le Grand- Maître ( Paul de Vintimille-
Lafcaris- Caftellar) , du confentement de l'Ordre, lui
accorda le 30 Mai 1645 , le privilege fingulier pour
Lui tous fes defcendans aînés , d'ajouter à leurs
Armes la Croix octogone de Malte avec les extrêmités
faillantes , comme la portent les Chevaliers
de Malte , & qu'un de fes defcendans , pour une
fois feulement au choix du pere , feroit Chevalier
en naiffant , grand Croix à l'âge de 16 ans . Ce
privilege a été reconnu certifié le 5 Mai 1715 , ..
par le Grand Maître Raimond Perellos de Rocafull. »
K vj
228 MERCURE DE FRANCE.
Dame N.... le Petit d'Avelnes , veuve de
Meffire Yves Jean - Baptifte de la Boiffiere , Comte
de Chambors , Ecuyer ordinaire du Roi , mort en
Août 1755 , eft accouchée au mois de Février ,
d'un fils qui a été tenu fur les fonts dans la Chapelle
du Château de Verfailles , par Monfeigneur
le Dauphin & Madame la Dauphine , & nommé
Louis - Jofeph-Jean-Bapt fte. L'Abbé de Raigecourt,
Aumônier du Roi , lui fuppléa les cérémonies du
Baptême en préſence du Curé de la Paroiffe de
Notre- Dame.
Jofeph-Balthafar , Comte de Rennel , de Lefcut,
& du S. Empire , Capitaine dans le Régiment
Royal- Barrois , a époufé le s Février à Méhoncourt
en Lorraine , Marguerite- Gabrielle de Rennel
fa coufine. Le contrat de mariage avoit écé
figné à Nanci le 31 Janvier précédent .
La maifon de Rennel , établie depuis trèslongtemps
en Lorraine , eft une des plus illuftres
de cette Province , tant par fon ancienneté
que par fes belles alliances. Richard de Rennel ,
Chevalier, vivoit fous le regne de Philippe de Valois
, près duquel il combattic vaillamment à la
bataille de Montcaffel en 1328 , & auquel il rendit
de grands fervices. Marguerite Stuard , qu'il
avoit épousée à la Cour du Roi d'Angleterre , le
rendit pere de Jean de Rennel , Chevalier , Capitaine
de 100 Lances , fire de Beaulieu par le don
que lui en fit le Roi Jean en 1350. Jeanne de
Hangeft , fon époufe , qui tefta en 1365 ,
fut mere
de Guillaume de Rennel , fire de Beaulieu , Chambellan
du Roi Charles VI , qui d'Yolande de Mouy,
eur pour enfans Bonaventure de Rennel , qui fuit
Jean , Chevalier de Rhodes , & Yolande , femme
de Matthieu de Riencourt , feigneur d'Orival.
;
Bonaventure de Rennel , fire de Beaulieu , Ca- '
JUI N. 1756. 229
pitaine de so hommes d'armes , époufa en 1415 ,
Alix de Soiffons , fille de Thibault , feigneur de
Moreuil , Gouverneur de Boulogne , & de Marguerite
de Poix. Il en eut Guillaume de Rennel , IF
du nom , fire de Beaulieu , Capitaine de so hommes
d'armes des ordonnances du Roi Louis XI.
marié en 1445 à Ifabeau , fille de Jean de Hangeft,
feigneur de Genlis , & de Marie de Sarrebruck ; il
en eut entr'autres enfans , Jean de Rennel , II du
nom , Capitaine d'une compagnie entretenue'
pour la garde de Boulogne , qui tefta le 10 Juin
1530 , & fut pere par fa femme Catherine d'Aumale
, fille de Jean d'Aumale , feigneur d'Efpaigni
, & de Jeanne de Soiffons-Moreuil , Vicomteffe
du Mont Notre- Dame , de Bonaventure de Rennel
, II du nom , Page du Duc de Lorraine en 1525,
puis premier Gentilhomme de la Chambre &
Principal Miniftre de Nicolas de Lorraine , Comte
de Vaudemont , pere de la Reine - Louife. H fut
auffi crée fecretaire d'Etat de Lorraine , le 11
Juillet 1552. Il mourut le 16 Mars 1584 , laiffant
de fa femme Marie de Janin de Manoncourt
morte en 1560 , qu'il avoit épousée le 3 Λούτ
1548 , Balthazar de Rennel , feigneur de Saint-
Bria , Jarville , S. Germain , S. Boin , Malzeville ,
Ecuyer d'écurie du Duc de Mercoeur , frere de la
Reine Louife , & depuis Miniftre d'Etat , & Préfident
de Lorraine , mort le 16 Novembre 1637 ,
âgé de 83 ans. Il avoit époufé le 9 Juin 1575 ,
Barbe de Lefcut . Elle etoit fille aînée de Jean de
Lefcut , Comte du S. Empire , & de Mayelle de
Beurges . C'est elle qui apporta dans la maifon de
Rennel le titre de Comte du S. Empire . Elle
mourut le 29 Mars 1637 , laiflant enti'autres enfans
Balthazar, II du nom , Comte de Rennel &
du S. Empire , Seigneur de Jarville & d'Andilly .
230 MERCURE DE FRANCE .
Confeiller d'Etat du Duc Charles IV , mort le 2
Novembre 1658. Il avoit époufé par contrat du
11 Janvier 1521 , Claude de Guérin du Montet.
Elle mourut le 3 Février 1641 , & fut mere de
François , Comte de Rennel & du S. Empire ,
qui fuit ; de Balthafar qui a fait la branche des .
Comtes de Rennel & de Lefcut , dont la poſtérité
fera rapportée après celle de fon frere aîné , & de
Charles-Jean, feigneur d'Andilly, Conſeiller d'état
du Duc Léopold , mort âgé de So ans , le 14 Avril
1716 , ne laiffant de fa femme Théreſe- Françoiſe
de Rouffelot que quatre filles. 1. Catherine Valerie
, morte en 1752 , veuve depuis 1739 de :
René de la Geard , dit le Marquis de Grefignac.
2º. Marie-Thérefe , morte en 1723 , veuve depuis
1708 de Charles- François de Serre , Confcil- :
fer d'Etat & Maître des Requêtes du Duc Léopold.
3 °. Marguerite- Reine , mariée en 1699 , à
Jean-Baptifte-André de Laugier , tué à la bataille
d'Hochftedt , étant capitaine au Régiment de
Languedoc. 4° . Marie- Antoinette , veuve du 10%
Mars 1734 , de Claude , Comte de la Rode , Baron
de Monconis , & Seigneur de Charnay en Bour
gogne.
François , Comte de Rennel & du S. Empire ,.
Seigneur de Jarville , Méhioncourt , Franconville ,
& Landecourt , fils aîné de Balthafar , II du nom
fut Confeiller d'Etat du Duc Charles IV, qui lui
donna en 1666 le commandement de Nanci , &
la Préfidence du Confeil de cette ville , & mourut
le 21 Février 1687. Il avoit épaulé 1º . par contrat
du 6 Novembre 1649 , Antoinette le Febvre ,.
Dame d'Ancy, morte le 5 Mai 1663. 2 ° . En 1664,
Antoinette le Marefchal , décédée le 2 Juin 1680.t
Il n'eut de cette feconde femme que Jeanne - Fran-*
goile de Rennel , mariée à Jofeph le Begue , C.-
JUIN. 1756. 23 .
du S. Empire & de Germiny , premier Miniftre
d'Etat de Lorraine , mort le 30 Janvier 1730 ,
onze mois après fa femme ; mais il eut de fon premier
mariage Marie -Françoiſe de Rennel , morce
le 28 Mai 1698 , femme de Charles- Henri de
Juvrecourt , commandant les Moufquetaires de la
garde du Duc Charles IV ; Balthafar- Jofeph - Dieudonné
, & Jean- Baptifte-Henri de Rennel , qui
ont laiffé postérité .
Balthafar-Jofeph-Dieudonné , Comte de Rennel
& du S. Empire , feigneur de Mehoncourt ,
d'Erbamont & de Circourt , Confeiller d'Etat du
Duc Léopold , & premier Préſident de la Chambre
des Comptes de Lorraine , né le 24 Septembre
1654 , mourut le 24 Février 1726. Il avoit
épousé par contrat du 23 Novembre 1687 , Françoife
de Huyn , niece du Comte de Huyn , Maré--
chal des Armées de l'Empereur, & Gouverneur de
Zizeth en Hongrie , décédée le premier Janvier
1723 , dont 1 °. Nicolas - François , qui fuit . 2º. Jofeph-
Ignace , Comte de Rennel & du Saint Em--
pire , Prélat-domeftique du Pape , Référendaire de
P'une & l'autre fignature , Grand- Chantre & Chanoine
de l'Eglife de S. Diez . 3 ° . Charles - François
, 'Comte de Rennel & du Saint Empire , Camé
rier d'honneur du Pape , & Chanoine de S. Diez.
4°. Jean-Baptifte-Henri-Balthafar,Comte de Rennel
& du Saint Empire , feigneur de Bouvigny ,
d'Erbamont & Circourt , ancien Capitaine aux
Gardes de l'Empereur.
Nicolas - François , Comte de Rennel & du Saint:
Empire , feigneur de Méhoncourt , a été créé Secretaire
d'Etat du Duc Léopold , le 20 Février
1721 , puis fon Miniftre Plénipotentiaire au Congrès
de Cambrai , enfin Commiffaire de l'Empereur
pour faire l'extradition de fes Duchés de
232 MERCURE DE FRANCE.
Lorraine & de Bar. Il a été maintenu avec ceux
de fon nom & de fes armes dans le titre de Comte
du Saint Empire , par Arrêt du Conſeil d'Etat ,
rendu à Luneville le 31 Août 1730 ,& tous les titres
justificatifs de fa filiation & illuftration de fa maifon
, ont été reconnus & vérifiés par Arrêt du Parlement
de Nanci dù 26 Septembre 1736. Il eft
veuf du 17 Décembre 1745 , de Magdeleine de
Pons , mariée par contrat du 20 Février 1732 , &
fille de Claude- Alexandre , Marquis de Pons de
Rennepont , Marechal des Camps & Armées du
Roi , & d'Anne- Dorothée de Bettainviller. Il a de
ce mariage , 1º . Jofeph-Ignace - Dieudonné , Comte
de Rennel & du Saint Empire , né le 20 Juin
1734 , Officier au Régiment du Roi infanterie ,
mort le 19 Novembre 1755. 2 ° . Marguerite - Ga→
brielle , née le 20 Mars 1739 , dont nous annon-
Cons le mariage. 3 ° . Anne - Marie , dite Mademoi
felle de Senlis , née le 21 Avril 1741. 4° . Jeanne-
Henriette , dite Mademoifelle de Moreuil , née le
3 Juin 1743. 5 ° . Elifabeth- Gloffinde , appellés
Mademoiſelle de Florainville , née le 17 Décembre
1745 .
I
Jean- Baptifte- Henri , Comte de Rennel & du
Saint Empire , feigneur d'Amelecourt . Colonel
d'infanterie , fecond fils de François , Comte de
Rennel & d'Antoinette le Fevre , eft mort le 3
Août 1748. Il avoit épousé par contrat du 16 Décembre
1692 , Maric- Nicole , morte les Novembre
1703 , fille de Henri- Philippe de Baillivy ,
commandant les Gendarmes de la Garde du Duc
Charles IV , & de Marie - Louife- Françoise de Voil
lot de Valleroy. De ce mariage font fortis , 1°. Charles
-Jean- Baptifte , Comte de Rennel & du Saint
Empire , Capitaine aux Gardes du Duc Léopold ,
mort le 8 Août 1724 , laiffaut de fa femme ClauJUIN.
1756. 233
de - Catherine le Febvre de S. Germain , foeur du
Comte de ce nom , une fille unique Anne- Catherine
de Rennel , née le jour de la mort de fon
pere , & mariée par contrat du 24 Février 1744, à
Jean- Baptifte -Hyacinthe- Dieudonné , Marquis
de Treftondam. 2. Antoine- Africain , dit le Chevalier
de Rennel , Officier au Régiment de Neuperg
, tué le 9 Octobre 1716 , au fiege de Temefwar.
3. Charles- François , Comte de Rennel &
du Saint Empire , né le zo Septembre 17c1 , & tué
de 12 Septembre 1719. Il avoit épousé par contrat
du 11 Octobre 1723 , Anne-Françoife- Scholaftique
de Greiche , de laquelle il a eu Anne - Catherine
de Rennel , mariée par contrat du 12 Juillet
1742, à fon oncle à la mode de Bretagne , Jean-
François , Comte de Grieche , feigneur de Jalocourt
, fils unique de Nicolas , Comte de Greiche,
Chambellan du Duc Léopold , & de Marie - Catherine
du Châtelet , foeur de René- François , Marquis
du Châtelet , Lieutenant Général des Armées
de l'Empereur.
Balthafar , III du nom , Comte de Rennel de
Lefcut & du Saint Empire , Seigneur de Jarville
fils puîné de Balthafar , II du nom , Comte de
Rennel , & de Claude de Guerin du Montet , mentionnés
ci- deffus , fut fubftitué au nom de Lefcut
par fon ayeule Barbe de Lefcut. Il mourut âgé de
quatre- vingts ans , lé 26 Octobre 1707 , ayant eu
de fon mariage , contracté le 8 Juillet 168 avec
Elizabeth , fille unique de Charles de Vitton , Seigneur
de Valfroicourt , Jean-Sigifbert , Comte
de Rennel de Lefcut & du Saint Empire , Confeil.
ler d'Etat du Duc Léopold , & fecond Préſident à
Mortier au Parlement de Nanci , décédé le 29
Juillet 1707. Il avoit épousé par Contrat du 3
Février 1687 , Catherine de Huyn , Dame de Bet234
MERCURE DE FRANCE.
toncourt, morte le Décembre 1741 , de laquelle
il cut , 1º. Thomas- Balthafar qui fuit. 2º. Jean-
Jofeph , Comte du Saint Empire , mort Chanoine
de S. Diez , le 20 Mars 1736. 3°.Charles, Comte
du Saint Empire , dit le Chevalier de Lefcut ,
ancien Capitaine aux Gardes du Duc de Lorraine.
4. Marguerite , veuve , du 4 Août 1751 , de Paul-
Melchior- Henri , Seigneur de Seichamps. 5 ° . Elifabeth
Catherine , morte le 5 Novembre 1751
femme de François de Lançon , Commandant à
Belle-ifle. 6°. Françoife , dite Mlle de Rennel , 7º.
Catherine , morte Religieufe en 1729.
Thomas - Balthafar, Comte de Rennel de Lefcut
& du Saint Empire , Seigneur de Bettoncourt , Capitaine
aux Gardes du Duc de Lorraine , mort le
17 Novembre 1749 , avoit épousé par Contrat du
26 Septembre 1722 Marie- Anne de Hoffelife , décédée
le 27 Mai 1730 , fille de Céfar de Hoffelife,
Seigneur de Burthecourt & de Chambrey , Capi
taine au Régiment de la Fere , & d'Antoinette de
Bouvet , Dame de Robert-Efpagne . De ce maria,
ge font fortis , 1 ° . Jofeph- Balthafar , Comte de
Rennel de Lefcut & du Saint Empire , Seigneur
de Bettoncourt , Burthecourt & Robert-Efpagne
né le 21 Août 1726 , qui donne lieu à cet article.
2°. Catherine- Gabrielle , mariée le 12 Avril 1746,
à Jean - Baptifte , Baron de Mahuet & du Saint
Empire , Comte de Mailly , dit le Comte de
Coyviller. 3 °. Marie- Therefe , dite Mlle de Lef
cut. 4°. Marguerite , dite Mlle de Burthecourt.
M. Conftant de Rebecque , Général au ſervice
'Hollande , Colonel d'un Régiment Suiffe de
fon nom , eft mort en Suiffe à Lauzanne , pays
de Vaux , canton de Berne , au commencement
de cette année , âgé de 79 ans . La famille de
Conftant de Rebecque eft d'une ancienne Nobleffe
JUIN. 1756. 235
originaire d'Artois , où elle a poffédé plufieurs
terres , & a eu des Charges honorables dans différentes
Cours . Elle a fourni des Chevaliers de S.
Jean de Jérufalem , & s'eft retirée en Suiffe après
les guerres de Religion.
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Résumé : « Madame la Comtesse de Noailles accoucha le 17 Avril d'un fils, [...] »
Le texte relate plusieurs événements et généalogies au sein de la noblesse française et suisse. Le 17 avril, la Comtesse de Noailles a donné naissance à un fils, Louis-Marie, baptisé par le Bailly de Froulay et la Duchesse douairière de La Vallière. Louis-Marie portera le titre de Chevalier d'Arpajon et bénéficiera d'un privilège accordé à son arrière-grand-père, le Duc d'Arpajon, dans l'Ordre de Malte. Ce privilège permet à un descendant aîné d'ajouter la Croix octogone de Malte à ses armes et de devenir Chevalier à la naissance, grand Croix à seize ans. Le texte mentionne également le Sultan Ibrahim menaçant l'île de Malte et le Duc d'Arpajon allant à son secours. En reconnaissance, le Grand Maître de l'Ordre de Malte accorde un privilège singulier à la famille d'Arpajon. Dame N..., veuve de Messire Yves Jean-Baptiste de La Boissière, Comte de Chambors, a accouché en février d'un fils, Louis-Joseph-Jean-Baptiste, baptisé par le Dauphin et la Dauphine au château de Versailles. Joseph-Balthazar, Comte de Rennel, a épousé Marguerite-Gabrielle de Rennel, sa cousine, le 5 février à Méhoncourt en Lorraine. La maison de Rennel, établie en Lorraine, est illustre par son ancienneté et ses alliances. Richard de Rennel, Chevalier, a combattu à la bataille de Montcaffel en 1328. Plusieurs générations de la famille Rennel sont détaillées, avec leurs titres, alliances et services militaires. Le texte mentionne également des naissances, mariages et décès au sein de la famille Rennel, ainsi que leurs titres et fonctions, comme Conseiller d'État, Capitaine, et Prélat-domestique du Pape. La famille de Constant de Rebecque, originaire d'Artois, a possédé plusieurs terres et occupé des charges honorables dans diverses cours. Elle a compté parmi ses membres des Chevaliers de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Après les guerres de Religion, la famille s'est retirée en Suisse. Le décès de Charles de Constant de Rebecque est mentionné, survenu à de Vaux, dans le canton de Berne, au début de l'année 1756, à l'âge de 79 ans.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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34
p. 173-176
ALLEMAGNE.
Début :
Les nouvelles de Dresde portent que le 26 du même mois, la Princesse [...]
Mots clefs :
Hambourg, Princesse, Naissance, Armée impériale, Charles de Lorraine, Ennemis, Déplacement des troupes, Bataille, Stade, Médecine militaire, Duc de Cumberland
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ALLEMAGNE.
ALLEMAGNE.
DE HAMBOURG , le 30 Septembre.
LES nouvelles de Drefde portent que le 26
du même mois , la Princeffe épouse du Prince Electoral
de Saxe eft accouchée d'une Princeffe . Selon
les avis reçus de Poméranie , le fort de Pénamunde
a capitulé le 23. La garnifon a mieux
aimé être prifonniere de guerre , que de fe foumettre
à la condition de ne point fervir pendant
deux ans. Les Suédois ont trouvé dans le fort
vingt pieces de canon . On mande de Warfovie ,
que la diette particuliere de Szroda s'eft féparée
le 14 , fans avoir pris aucune réfolution .
Du Quartier général de l'armée Impériale à
Greibnig , le 27 Septembre 1757.
L'Armée Impériale , après avoir détaché quelques
Troupes vers Strigau , quitta le 24 du même
mois le camp de Jawer , pour venir camper
à
Nicolstadt .
Le 25 , le Prince Charles de Lorraine & le
Feld -Maréchal Comte de Daun allerent à la pointe
du jour reconnoître la fituation de l'ennemi , &
obferverent que , pour mieux s'étendre aux envi
rons de Lignitz , il ne formoit qu'une feule li
Hij
174 MERCURE DE FRANCE.
Son
gne qu'il avoit jetté beaucoup de monde dans
les Villages de Barfchdorff & de Koifchwitz fitués
devant fon front , & que ces Villages étoient
garnis de canons . D'après ces difpofitions ,
Alteffe Royale jugea à propos , pour s'approcher
de Lignitz , de faire marcher l'aile droite de l'ar
mée Impériale par Seyfersdorff , l'aile gauche fe !
porta à une lieue au-delà de Wohlftadt , & le
Quartier Général fut établi à Greibnig.
་f
C
le m
Comme les Pruffiens avoient beaucoup de monde
dans le Village de Koifchwitz & pouvoient
incommoder la premiere ligne de l'armée , le
Comte de Sprecher , Lieutenant- Général , fut | k
commandé avec les Grenadiers , pour en déloger
l'ennemi , & après une canonnade d'environ
une heure & demie , les Pruffiens furent obligés
d'abandonner ce pofte..
Le 22 de grand matin , le Prince Charles & le
Feld-Maréchal Comte de Daun , ayant remar
qué que
les tentes de l'Infanterie ennemie étoient
encore tendues , & que celles de la Cavalerie
étoient pliées , réfolurent de les déloger de Barf
chdorff , pofte qui étoit occupé par quatre
taillons & par quelques Efcadrons de Huffards
On fit pour cet effet travailler cinq cens hommes.
à des fafcines ; on tira de tous les Régimess
huit cens Volontaires , & tous les Grenadiers eurent
ordre de fe tenir prêts . Vers les trois heu
res après- midi , l'artillerie commença à tirer fur
Barfchdorff. Les ennemis qui étoient campés fur
des hauteurs derriere ce Village , fe mirent en
bataille , établirent quelques batteries pour les
oppofer aux nôtres , & firent fans fuccès un feu
très -vif. Un de nos obus fit fauter en l'air un
charriot de munitions de guerre , & deux Canonpiers
Pruffiens. On tira de part & d'autre juf
Ch
NOVEMBRE. 1757. 171
qu'à fix heures du foir , & les ennemis décam
perent , après avoir mis le feu à Barfchdorff. Ils
ont fait marcher leur artillerie , leurs pontons
& leurs bagages vers Merfchwitz , & ont enfuite
abandonné Lignitz , où l'on a trouvé beau→
coup de bleffés . Le Prince Charles a mis dans
Lignitz une garnifon de deux mille hommes d'Infanterie
& cent chevaux. Les Pruffiens y ant
laiffé quatre cens mille rations de foin , trente
tonneaux de farine , trente muids d'avoine , &
environ cent trente tonneaux de fel. Les Généraux
de Haddick & de Beck ont été chargés de
harceler l'ennemi dans fa retraite . Le dernier
avec un Corps de mille hommes d'Infanterie ,
deux cens Huffards & quelques pieces de canon ,
leur a pris foixante - douze charriots d'ordonnance
chargés d'avoine , quatre charriots remplis des
bagages de divers Officiers , & un charriot d'eaude-
vie. Il leur a fait auffi quelques prifonniers , &
il n'a perdu que huit hommes & cinq chevaux
tués ou bleffés.
DE STADE , le 8 Septembre.
Le Dac de Cumberland s'eft embarqué le 6
d'octobre fur une frégate Angloife , pour le rendre
à Londres . Il a été joint au Cuxhaven , ૩
Pembouchure de l'Elbe , par des vaiffeaux de
guerre Anglois , qui doivent l'efcorter.
Le fieur de Gevigland Docteur , & ancien
Profeffeur de Médecine en l'Univerfité de Paris ,
Médecin des Armées du Roi , eut ordre de fe
détacher de l'Hôpital ambulant de l'armée vers
la fin du mois d'août , pour fe rendre à Hanovre
à l'effet d'y prendre foin de plufieurs Officiers
qui refterent malades à la fuite du quartier gé
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE.
néral . Le zele & l'activité de ce Médecin ne k
font jamais ralentis , la méthode avec laquelle
il a adminiftré l'hypécacuana pour les dytente
ries qui régnoient alors , lui ayant toujours
parfaitement réuffi , il s'eft acquis l'eftime & la
confiance d'une grande partie des Officiers de
l'armée , autant par fon exactitude défintéreflét
que par la sûreté de la pratique.
DE HAMBOURG , le 30 Septembre.
LES nouvelles de Drefde portent que le 26
du même mois , la Princeffe épouse du Prince Electoral
de Saxe eft accouchée d'une Princeffe . Selon
les avis reçus de Poméranie , le fort de Pénamunde
a capitulé le 23. La garnifon a mieux
aimé être prifonniere de guerre , que de fe foumettre
à la condition de ne point fervir pendant
deux ans. Les Suédois ont trouvé dans le fort
vingt pieces de canon . On mande de Warfovie ,
que la diette particuliere de Szroda s'eft féparée
le 14 , fans avoir pris aucune réfolution .
Du Quartier général de l'armée Impériale à
Greibnig , le 27 Septembre 1757.
L'Armée Impériale , après avoir détaché quelques
Troupes vers Strigau , quitta le 24 du même
mois le camp de Jawer , pour venir camper
à
Nicolstadt .
Le 25 , le Prince Charles de Lorraine & le
Feld -Maréchal Comte de Daun allerent à la pointe
du jour reconnoître la fituation de l'ennemi , &
obferverent que , pour mieux s'étendre aux envi
rons de Lignitz , il ne formoit qu'une feule li
Hij
174 MERCURE DE FRANCE.
Son
gne qu'il avoit jetté beaucoup de monde dans
les Villages de Barfchdorff & de Koifchwitz fitués
devant fon front , & que ces Villages étoient
garnis de canons . D'après ces difpofitions ,
Alteffe Royale jugea à propos , pour s'approcher
de Lignitz , de faire marcher l'aile droite de l'ar
mée Impériale par Seyfersdorff , l'aile gauche fe !
porta à une lieue au-delà de Wohlftadt , & le
Quartier Général fut établi à Greibnig.
་f
C
le m
Comme les Pruffiens avoient beaucoup de monde
dans le Village de Koifchwitz & pouvoient
incommoder la premiere ligne de l'armée , le
Comte de Sprecher , Lieutenant- Général , fut | k
commandé avec les Grenadiers , pour en déloger
l'ennemi , & après une canonnade d'environ
une heure & demie , les Pruffiens furent obligés
d'abandonner ce pofte..
Le 22 de grand matin , le Prince Charles & le
Feld-Maréchal Comte de Daun , ayant remar
qué que
les tentes de l'Infanterie ennemie étoient
encore tendues , & que celles de la Cavalerie
étoient pliées , réfolurent de les déloger de Barf
chdorff , pofte qui étoit occupé par quatre
taillons & par quelques Efcadrons de Huffards
On fit pour cet effet travailler cinq cens hommes.
à des fafcines ; on tira de tous les Régimess
huit cens Volontaires , & tous les Grenadiers eurent
ordre de fe tenir prêts . Vers les trois heu
res après- midi , l'artillerie commença à tirer fur
Barfchdorff. Les ennemis qui étoient campés fur
des hauteurs derriere ce Village , fe mirent en
bataille , établirent quelques batteries pour les
oppofer aux nôtres , & firent fans fuccès un feu
très -vif. Un de nos obus fit fauter en l'air un
charriot de munitions de guerre , & deux Canonpiers
Pruffiens. On tira de part & d'autre juf
Ch
NOVEMBRE. 1757. 171
qu'à fix heures du foir , & les ennemis décam
perent , après avoir mis le feu à Barfchdorff. Ils
ont fait marcher leur artillerie , leurs pontons
& leurs bagages vers Merfchwitz , & ont enfuite
abandonné Lignitz , où l'on a trouvé beau→
coup de bleffés . Le Prince Charles a mis dans
Lignitz une garnifon de deux mille hommes d'Infanterie
& cent chevaux. Les Pruffiens y ant
laiffé quatre cens mille rations de foin , trente
tonneaux de farine , trente muids d'avoine , &
environ cent trente tonneaux de fel. Les Généraux
de Haddick & de Beck ont été chargés de
harceler l'ennemi dans fa retraite . Le dernier
avec un Corps de mille hommes d'Infanterie ,
deux cens Huffards & quelques pieces de canon ,
leur a pris foixante - douze charriots d'ordonnance
chargés d'avoine , quatre charriots remplis des
bagages de divers Officiers , & un charriot d'eaude-
vie. Il leur a fait auffi quelques prifonniers , &
il n'a perdu que huit hommes & cinq chevaux
tués ou bleffés.
DE STADE , le 8 Septembre.
Le Dac de Cumberland s'eft embarqué le 6
d'octobre fur une frégate Angloife , pour le rendre
à Londres . Il a été joint au Cuxhaven , ૩
Pembouchure de l'Elbe , par des vaiffeaux de
guerre Anglois , qui doivent l'efcorter.
Le fieur de Gevigland Docteur , & ancien
Profeffeur de Médecine en l'Univerfité de Paris ,
Médecin des Armées du Roi , eut ordre de fe
détacher de l'Hôpital ambulant de l'armée vers
la fin du mois d'août , pour fe rendre à Hanovre
à l'effet d'y prendre foin de plufieurs Officiers
qui refterent malades à la fuite du quartier gé
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE.
néral . Le zele & l'activité de ce Médecin ne k
font jamais ralentis , la méthode avec laquelle
il a adminiftré l'hypécacuana pour les dytente
ries qui régnoient alors , lui ayant toujours
parfaitement réuffi , il s'eft acquis l'eftime & la
confiance d'une grande partie des Officiers de
l'armée , autant par fon exactitude défintéreflét
que par la sûreté de la pratique.
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Résumé : ALLEMAGNE.
En septembre 1757, plusieurs événements militaires et politiques ont marqué l'Allemagne. À Dresde, la princesse épouse du Prince Électeur de Saxe a donné naissance à une princesse. En Poméranie, le fort de Pénamunde s'est rendu le 23 septembre, préférant la captivité à deux ans de service inactif. Les Suédois y ont récupéré vingt pièces de canon. À Szroda, la diète particulière s'est dissoute le 14 septembre sans prendre de décision. Du côté de l'armée impériale, après avoir quitté le camp de Jawer le 24 septembre, elle s'est dirigée vers Nicolstadt. Le Prince Charles de Lorraine et le Feld-Maréchal Comte de Daun ont évalué la position ennemie près de Lignitz. Pour se rapprocher de Lignitz, l'armée impériale a déplacé son aile droite vers Seyfersdorff et son aile gauche au-delà de Wohlstadt, établissant son quartier général à Greibnig. Les Prussiens, positionnés dans les villages de Barfchdorff et Koifchwitz, ont été chassés après une canonnade. Le 22 septembre, les troupes impériales ont attaqué Barfchdorff, occupé par les Prussiens. Après un combat intense, les Prussiens ont abandonné le village, laissant des provisions et des munitions. Le Prince Charles a installé une garnison à Lignitz. Les généraux Haddick et Beck ont harcelé les Prussiens en retraite, capturant des charriots de provisions et faisant quelques prisonniers. À Stade, le Duc de Cumberland s'est embarqué pour Londres le 6 octobre, escorté par des vaisseaux de guerre anglais. Le Docteur Gevigland, médecin des armées du Roi, a été envoyé à Hanovre pour soigner des officiers malades, gagnant la confiance des officiers par son zèle et son efficacité.
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35
p. 165-181
Description des Fêtes données en la ville d'Arras, à l'occasion de la Naissance de Monseigneur le Comte d'Artois.
Début :
La joie que cet évènement a répandue dans l'Artois, ne s'est [...]
Mots clefs :
Fêtes, Arras, Monseigneur le Comte d'Artois, Naissance, Évêque d'Arras, Te Deum, Mandement, Heureux, Prince, Royaume, Secrétaire, Lettre du roi, Bonheur, Voeux, Providence, Banquets, Conseillers, Militaires, Religieux, Peuple, Vers d'un citoyen d'Arras, Représentations, Feux d'artifice, Destruction d'édifices, Chronographes, Peinture, Médaillons, Symboles, Histoire de l'Artois, Armes, Inscriptions latines, Arts et sciences, Royauté, Bal, Comtes, Comtesses, Marquis, Cérémonies, Sentiments, Vertus, Architecture, Décors, Concert de musique, Jésuites, Capitale, Villes de France
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Description des Fêtes données en la ville d'Arras, à l'occasion de la Naissance de Monseigneur le Comte d'Artois.
Defcription des Fêtes données en la ville d'Arras ,
à l'occafion de la Naiffance de Monseigneur le
Comte d'Artois.
LA joie que cet événement a répandue dans
l'Artois , ne s'eft pas bornée aux fentimens de
refpect , d'amour & de reconnoiffance que les
Etats de cette Province ont portés jufqu'au pied
du trône , par la députation nombreufe dont le
Mercure de Novembre a fait mention . Cette joie
a encore éclaté par des fêtes qui méritent qu'on
en conferve le fouvenir ; & nous allons détailler
ce qui s'eft paffé en cette conjoncture dans la
Capitale du pays,
Dès le 11 Octobre , jour auquel un Courier du
cabinet vint apporter aux Députés ordinaires des
Etats ( 1 ) , la nouvelle de l'heureux accouchement
de Madame la Dauphine , & du nom donné par
le Roi au Prince nouveau-né , il y eut des illuminations
& autres démonftrations publiques d'alégreffe
, tant aux Etats & à l'Hôtel de Ville , qu'au
Confeil d'Artois , à l'Evêché , à l'Abbaye de Saint-
Vaaft , &c. mais elles ne furent que le prélude
des réjouiffances brillantes qui devoient les fuivre,
M. l'Evêque fixa au Dimanche 6 Novembre , lé
(1 ) Ce font trois perfonnes choifies dans les trois
Corps des Etats , qui réfident à Arras , & font
chargées de l'adminiftration , hors du temps dés
Affemblées,
166 MERCURE DE FRANCE.
"
Te Deum ordonné par le Roi , & publia à ce fujet
un Mandement conçu en ces terines :
Jean de Bonneguize , par la grace de Dien
» & du S. Siège Apoftolique , Evêque d'Arras : à
tous Abbés , Abbeffes , Chapitres , Doyens ,
Paſteurs , Supérieurs & Supérieures des Eglifes
» & Monafteres exempts & non exempts, & à tous
» fideles de notre Dioceſe , falut & bénédiction.
» Le Seigneur , Mes Très- Chers Freres , tient
dans , fes mains , & la deftinée des Maîtres de
» la terre & le fort des Empires. Heureux les Rois
» & les Peuples , quand ils ne l'apprennent qué
par les preuves qu'il leur donne de fon amour
» & de fa protection !
» Tel eft l'avantage dont nous jouiffons , Mes
Très Chers Freres, furtout depuis que l'heureuſe
fécondité de Madame la Dauphine ajoute à tant
» d'autres faveurs du ciel , les bénédictions dont
≫ il comble par elle le Roi & le Royaume . Cha-
» que année nous ramene au pied des Autels pour
» y rendre graces d'un préſent nouveau à un Dieu
» qui véille au repos & à la profpérité de l'Etar.
» Il donne encore aujourd'hui dans le Prince qui
» vient de naître un nouvel appui au trône déjà le
» mieux affermi , & à la Nation la plus heureufe
un gage de plus de la durée de fon bonheur.
i » Mais fi la naiffance de Monfeigneur le Comté
» d'Artois doit être pour toute la France un fujer
» de joié & un objet de reconnoiffance , vous le
fçavez , M. T. C. F. cet événement intéreffe
» particuliérement cette Province ; & le nom de
ce Prince doit lui feul vous rappeller tout ce que
vous devez dans cette circonftance aux bontés
du Roi , ou plutôt aux miféricordes du Seigneur
qui , après avoir mis dans l'ame du Monarque
, l'amour de tous fes Peuples , daigné
JANVIER. 1758. 167
aujourd'hui fixer finguliérement fur nous les regards
de fa tendrefle.
>> Province heureuſe & préférée , hâtons- nous
» de faire éclater notre joie , & de fignaler notre
» reconnoiffance pour un Dieu qui nous diftingue .
» Mais joignons à nos actions de graces pour ce
préfent ineftimable de fa bonté , les prieres les
plus ferventes , pour qu'il daigne nous le con-
>> ferver. Ce Prince eſt , en naiſſant , le fondement
» & l'appui de nos efpérances : qu'il foit pendant
» le cours d'une longue vie , le gage de notre fé-
» licité , & le lien qui refferre de plus en plus les
>> noeuds de cette tendreffe paternelle , dont le Roi
»> nous donne aujourd'hui dans fa perfonne , la
preuve la plus éclatante.
» Demandons au Seigneur de graver de bonne
>> heure dans fon ame les principes inaltérables de
» de bonté & d'humanité qui nous font trouver
» le meilleur des Peres dans le plus grand des
Rois qu'il lui infpire le goût de cette piété tendre
& folide qui fait de la Reine l'exemple de la
Cour & la gloire de la Religion ; qu'il mette
» dans fon coeur le germe des vertus de Monſeigneur
le Dauphin , & de Madame la Dauphine,
»fi dignes l'un & l'autre des bénédictions multipliées
que le Ciel répand fur leur union , & fi
propres à attirer fur le Royaume celles qui peuvent
en perpétuer la gloire , le répos & la
» profpérité.
Puiffe cet augufte Enfant fi précieux à cette
» Province en particulier , devenit , pour notre
bonheur, tous les jours de fa vie , plus parfait, en
fe formant fur de pareils modeles puiffent
> nos neveux avoir des raifons de renouveller fans
» ceffe au Seigneur pour fa confervation les ac-
» tions de graces que nous allons lui rendre pour
fa naiflance,
16S MERCURE DE FRANCE.
» A ces cauſes , après avoir pris l'avis de nos
» Vénérables Freres les Prévôt , Doyen , Cha-
» noines & Chapitre de notre Eglife Cathédrale ,
» nous ordonnons de faire chanter le Te Deum,
>> chacun dans vos Eglifes , avec les folemnités
>> requifes , le premier Dimanche ou jour de
Fête , après que vous aurez reçu notre préſent
>> Mandement , les Officiers , Magiftrats des
>> lieux , & tous autres qu'il appartiendra , invités
» d'y aſſiſter .
» Donné à Arras , en notre Palais Epiſcopal ,
fous notre feing & la fignature de notre Secre-
D taire , le trois Novembre mil fept cens cinquan-
» te-fept » .
JEAN , Evêque d'Arras.
Par Monfeigneur ,
PECHENA , Secrétaire.
Lettre du Roi , à M. l'Evêque d'Arras .
Monfieur l'Evêque d'Arras , la durée du bonheur
de mes fujets étant l'objet de mes voeux les plus
ardens , tous les événemens capables de le perpétuef,
excitent en moi les fentimens que mérite
un peuple toujours empreffé à me donner des
marques de fon zele , de fa fidélité & de fon
amour. Les princes dont il a plu à Dieu de combler
mes fouhaits , affurent la tranquillité dans
mes états. Celui dont matrès chere Fille la Dauphine
vient d'être heureuſement délivrée , eſt un
nouveau don de la providence , & c'eft pour lui
rendre les actions de graces qui lui font dûes , que
je vous fais cette lettre , pour vous dire que mon
intention eft que vous faffiez chanter le Te Deum
dans votre Eglife Cathédrale , & dans toutes les
autres
JANVIERL
169
. 1758.
autres de votre Dioceſe , avec la folemnité requife
, & que vous invitiez d'y affifter tous ceux qu'il
conviendra ; ce que me promettant de votre zele
je ne vous ferai la préfente plus longue , que pour
prier Dieu qu'il vous ait , Mons. l'Evêque d'Arras
, en fa fainte garde. Ecrit à Versailles le 9 Octobre
1757. Signé , LOUIS . Et plus bas , R. de
Voyer. Etfur le repli : à Mons. l'Evêque d'Arras,
Confeiller en mes Confeils .
La fête fut annoncée le au foir par toutes les
cloches de la Ville , que l'on fonna encore le 6 ,
de grand matin. En même temps des falves d'artillerie
& de boîte fe firent entendre , & recommencerent
à différentes reptiles dans le cours de
la journée. Il y eut ce même jour à l'Hôtel de
Ville un dîner fomptueux de plus de quatre-vingts
couverts , où le trouva M. de Caumartin , Intendant
de la Province . On y avoit auffi invité l'Evêque
, l'Abbé de Saint- Vaaft , le Commandant
de la Place , le premier Préfident du Confeil d'Artois
, & la Nobleffe , ainfi qu'un certain nombre
des Officiers de la garnifon , & des autres principaux
Corps , ecclefiaftiques , civils & militaires.
Pendant ce repas , on jetta de l'argent au peuple
& les Magiftrats lui firent diftribuer du pain , des
viandes & du vin. Immédiatement après que la
fanté de Monfeigneur le Comte d'Artois eût été
bue au fon des inftrumens , on préfenta à tous les
convives des exemplaires de la piece fuivante ,
compofée par M Harduin , Avocat , ancien Député
des Etats d'Artois à la Cour , & Secretaire
perpétuel de la Société Littéraire d'Arras.
L. Vol. H
170 MERCURE DE FRANCE .
Sentimens d'un Citoyen d'Arras , fur la Naiffance
de Monfeigneur le Comte d'Artois .
It fort donc aujourd'hui de fon obſcurité ,
Ce Titre qu'autrefois des Héros ont porté ( 1 ).
D'un Enfant de Louis il devient le partage :
Louis , pour couronner notre fidélité ,
Daigne de fon amour nous accorder ce gage .
Vous reprenez enfin votre antique fplendeur ,
Lieux où de Pharamond le brave Succeffeur (1 )
Jetta les fondemens du floriffant Empire
Qui commande à l'Europe , & que le monde admire.
Monarque triomphant , que le Ciel a formé
Pour les vertus & pour la gloire ,
Ton peuple réuni , d'un beau zele animé ,
T'a placé dès long-temps au Temple de mémoire ,
Sous le nom de Roi Bien - Aimé.
Mais lorfque furpaffant toute notre eſpérance ,
Tu veux nous diftinguer de tes autres Sujets ,
Lorfque tu mets pour nous le comble à tes bienfaits
,
Quel nom te donnera notre reconnoiffance !
Plaifirs , volez ici fous mille traits divers :
Que Polymnie & Terpsichore
Célebrent à l'envi le Maître qu'on adore.
(1) Robert I & Robert II, Comtes d'Artois.
(2) Clodion.2
JANVIER.
1758.
171
Qu'un bruit guerrier fe mêle aux plus tendres
concerts :
Que la fiere trompette fonne :
Sur nos murs que la foudre tonne :
Que le falpêtre éclate dans les airs.
Que mille bouche enflammées
Annoncent les tranfports de nos ames charmées
Au bout de ce vafte Univers.
Je vois juſques à
l'Empyrée
S'élevér de rapides feux :
Ainfi vers la voûte azurée
S'élance l'ardeur de nos voeux.
Tels que ces
brillantes étoiles ,
Qui de la nuit perçant les voiles ,
Retombent en foule à nos yeux ,
Sur l'Enfant fi cher à la France
Puiffent
defcendre en
abondance
Les plus riches préfens des Cieux.
Dans le
raviffement où mon ame fe livre ,
En lui déja je vois revivre
Ce Frere vertueux du plus faint de nos Rois ( 1).
A nos ayeux il fit chérir fes loix :
Des cruels
Sarrafins il
confondit la rage :
Prince , lis fes exploits , & deviens fon image ...
Mais pourquoi de l'hiftoire
emprunter le fecours ▸
(1) Robert I, frere de Saint Louis , furnommé
le Bon & le
Vaillant, ‹
Hij
172 MERCURE DE FRANCE.
Pour acquérir une gloire immortelle ,
Il ne te faut d'autre modele
Que ton augufte Ayeul , ou l'Auteur de tes jours.
Illuftre Enfant , auprès du trône
Tu feras de l'Artois le plus ferme foutien :
De Louis & du peuple à qui fa main te donne ,
Tu refferres encor le fortuné lien .
Si tu pouvois juger de notre amour extrêmê
Si tu lifois au fond de notre coeur ,
Ah ! tu t'applaudirois toi- même
Du nom qui fait notre bonheur .
.
On avoit élevé , vis- à-vis de l'Hôtel de Ville ,
un Feu d'artifice , pour lequel on n'avoit épargné
ni foins , ni dépenfe , non plus que pour les illuminations
de cet hôtel , de la haute & admirable
tour qui l'accompagne , & des autres édifices publics
. Tous les particuliers s'étoient auffi empreffés
à illuminer leurs maiſons , d'une maniere qui
répondît à la folemnité du jour ; mais une pluie
continuelle empêcha l'effet de ces préparatifs. On
ne put faire jouer qu'une petite partie de l'artifice
; & le refte fut remis au furlendemain.
L'édifice conftruit pour le feu , fur les deffeins
du fieur Beffara , Architecte de la Ville , étoit
feint de marbre blanc , & avoit s 2 pieds d'élévation
en deux étages , furmontés d'une pyramide
de 33 pieds . Le premier étage ou rez - de - chauffée
étoit un quarré d'ordre dorique , ayant 44 pieds
de face , dont le côté principal offroit un portique
, avec fronton & baluftrade , orné des Armes
du Roi , de Monfeigneur le Dauphin , & de Mon.
feigneur le Comte d'Artois , Une colonnade ioniJANVIER.
1758. 173
que formoit le fecond étage , qui étoit circulaire.
Vingt-quatre vafes à fleurs & trophées d'armes
ou de mufique , fervoient d'amortiffemens aux
deux ordres d'architecture . Cette décoration étoit
femée de chronogrammes ou chronographes
forte d'infcription fort en ufage aux Pays Bas ,
dans laquelle on trouve , en chiffre Romain , par
la réunion de toutes les lettres numérales qu'elle
contient , l'année de l'événement qui en eſt l'objet.
Voici quelques- uns de ces chronographes :
nasCItVŕ CoMes , spLenDor artesIx.
DonVM CLI aC, regIs.
PVLChra FIDel MerCes .
LætVs aMor aCCenDIt Ignes,
Entre les différentes illuminations qui avoient
été préparées , on remarquoit aux croifées de
Pappartement que la Société Littéraire occupe à
l'hôtel du Gouverneur , trois tranfparens , fur
lefquels étoient peints autant de médaillons , imaginés
par M. Camp , Avocat , Membre de cette
Société , & actuellement Député des Etats à lạ
Cour. On croit devoir donner ici la defcription
de ces morceaux de peinture.
Premier Médaillon.
L'hiftoire de l'Artois caractérisée fpécifiquement
par une femme vêtue d'une faie blanche
rayée de pourpre ( 1 ) . Elle a fur la tête une couronne
de laurier , & une plume à la main . Devant
(1 ) Cette espece d'étoffe fe fabriquoit autrefois
par les habitans d'Arras , nommés Atrebates, avec
tant de réputation que les Romains en faifoient
leurs plus magniques habillemens.
Hiij
74 MERCURE DE FRANCE.
elle eft un grand livre ouvert , fur la couverture
duquel fe voyent les Armes de la province . Elle
tient de la main gauche un médaillon portant
celles de Monfeigneur le Comte d'Artois , qu'elle
regarde avec un étonnement mêlé de joie. Une
pile de volumes imprimés & manuſcrits , fur laquelle
font les aîles & autres attributs du Temps ,
fert d'appui au livre que cette femme tient ouvert.
Elle a un pied pofé fur un débris de monument
antique , dont les reftes font épars. Auprès eft
une urne renverfée , d'où fe répand un grand
nombre de médailles .
Légende.
QUANTA FASTORUM GLORIA !
Exergue.
COMES DATUS IXA. OCT. M. DCC. LVII .
Second médaillon ,
Minerve affife , ferrant de fon bras gauche un
vafe aux Armes d'Artois , dans lequel eft planté
un rejetton de lys , qu'elle prend foin de cultiver.
A fes pieds font des trophées relatifs aux Arts &
aux Sciences.
Légende.
CURAT NOBISQUE COLIT.
Exergue.
SOC. LITT . ATR. SPES ET VOT.
Troisieme médaillon.
Les chiffres des Rois Louis VIII & Louis XV,
figurés par deux doubles IL , placés fous une
même couronne , & accompagnées refpectivement
JANVIER. 1758 . 175
des nombres VIII & XV . Un cordon bleu fort de
la couronne , entrelace les deux chiffres , & ſe
termine par un noeud , d'où pendent les Armes de
Monfeigneur le Comte d'Artois ( 1 ) .
Légende.
AB EVO IN ÆVUM.
Exergue.
DECUS FUNDATUM ET RESTITUTUM.
Le même jour 6 Novembre , vers les dix heures
du foir , il y eut dans la grande falle de l'Hôtel
de Ville , qu'on avoit fuperbement décorée , un
bal qui fut ouvert par M. l'Intendant avec Madame
la Comteffe de Houchin , épouse du Député
ordinaire de la Nobleffe des Etats . On y fervit
fur des buffets en gradins , un ambigu fuffifant
pour fatisfaire les goûts divers de deux mille perfonnes
au moins qui fe trouverent à ce bal .
Les Etats d'Artois différerent jufqu'à l'ouverture
de leur Affemblée générale , la folemnité de
leurs actions de graces & de leurs réjouiflances ,
afin que tous les Membres des trois Ordres fuflent
à portée d'y participer. Ce fut le lundi 21 Novembre
que le fit cette ouverture ; & après la
féance , qui fe tint dans la forme ordinaire fur les
dix heures du matin , on chanta dans l'Eglife des
Récollets un Te Deum en mufique , auquel M.
(1) Louis VIII , par fon Teftament du mois de
Juin 1225 , affigna l'Artois en partage à Robert
fon fecond fils , frere de S. Louis , de qui defcend la
branche de Bourbon. Depuis ce Robert , premier
Comte d'Artois , aucun fils de France n'en avoit
porté le titre.
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE .
l'Evêque d'Arras officia pontificalement. M. fe
Duc de Chaulnes , Gouverneur de la Province ;
M. l'Intendant , & M. Briois , Premier Préfident
du Confeil Provincial , Commiffaires du Roi pour
la tenue des Etats , affifterent à cette cérémonie ,
accompagnés de tous les Membres de l'Affemblée.
Il y eut enfuite un magnifique dîner de deux cens
vingt-cinq couverts, auquel tous les Corps avoient
été invités. Sur la fin du repas , on but avec appareil
les fantés du Roi , de Monfeigneur le Dauphin
& du nouveau Prince , qui furent annoncées
fucceffivement par des falves de boîtes & d'artillerie
; & les Députés ordinaires jetterent de l'argent
au peuple. Dès que la nuit fut venue , on tira
avec toute la réuffite poffible , un très- beau Feu
d'artifice au milieu de la grande place.
Ce feu avoit la forme d'un temple , dont le
premier
étage , quarré & élevé d'environ fept pieds
au deffus du pavé , fervoit de focle à tout l'édifice.
Quatre grandes rampes de dix marches occupoient
le milieu de chaque face , & conduifoient
à une galerie fermée de panneaux & d'acroteres
enrichis d'Armes du Roi , de Monfeigneur le Dauphin
, & de Monfeigneur le Comte d'Artois , ainfi
que des Chiffres de la province.
Le principal corps établi fur le premier étage
avoit huit côtés , dont quatre plus larges que les
autres , faifant faillie & avant- corps , formoient
des portiques , & répondoient aux rampes. Aux
entrées de ces portiques étoient les figures fymboliques
de la fincérité & de la fidélité , qui caractérifent
les Artéfiens , & celles de la reconnoiffance
& de l'espérance , fentimens dont ce peuple eft
particuliérement affecté dans la circonftance préfente.
Les quatre côtés enfoncés étoient ornés de
iches , avec d'autres figures qui défignoient les
JANVIER. 1758. 177
Vertus protectrices du jeune Prince ; fçavoir , la
Religion , la Bonté , la Valeur & la Prudence.
Des emblêmes relatifs à ces vertus rempliffoient
le deffus des niches. La décoration générale de
toute cette partie étoit un ordre Ionique régulier ,
dont l'entablement faillant foutenoit une baluftrade
mêlée d'acroteres , fur chacun defquels on
voyoit des grouppes d'enfans , qui fembloient , en
exprimant leur joie , difputer à qui porteroit les
Armes du Roi , & celles des autres perfonnes de
la Famille Royale.
Sur le deuxieme étage étoit pofé un attique à
quatre faces , dont trois préfentoient des tableaux
emblématiques , & l'autre contenoir cette infcription
:
NOVO ARTESIA COMITI
Il y avoit des pilaftres aux angles de ce corps
d'architecture avec un entablement en faillie ,
lequel étoit couronné de quatre vafes de ronde
bolle. Une pyramide en mofaïque évidée , s'élevoit
fur l'attique qui lui fervoit de baſe , & portoit
fur fa cime les Armes d'Artois , furmontées
d'un foleil .
Aux quatre coins du temple , & à une diſtance
convenable , étoient de grands obéliſques décorés,
de chiffres , de médaillons , &c.
Toutes les parties de l'édifice étoient peintes
en grifaille , à l'exception des tableaux & des
emblêmes , qui l'étoient en camayeu de couleur
bleue. Mais cette fimplicité étoit relevée par l'éclat
de l'or répandu fur les armoiries , les infcriptions
, les cartouches , les guirlandes ; fur la pyramide
, fur les vafes , & fur tous les ornemens
où l'on avoit pu l'employer avec goût.
Cet ouvrage fut exécuté par les foins & fur les
Hy
178 MERCURE DE FRANCE.
deffeins du fieur Linque , Architecte , natif & hæ
bitant d'Arras.
Les Commiffaires de Sa Majesté & les Etats
virent jouer l'artifice d'un amphithéâtre dreffé à
l'un des bouts de la place , qui eft une des plus
vaftes du Royaume. Des fanfares de cors , trompettes
& timbales , animerent ce fpectacle , aprèslequel
plufieurs fontaines de vin coulerent pour
le peuple.
Les deux façades de l'Hôtel des Etats furent
illuminés par une quantité immenfe de lamprons
, dont l'arrangement deffinoit , fans confufion
, toute la belle architecture de cet hôtel Dans
un grand tableau tranfparent placé au deffus de
la porte d'entrée , on voyoit Lucine defcendant
du Ciel , & tenant dans fes bras le Prince nouveau-
né. Le Roi montroit à cette Déeffe la Province
d'Artois perſonnifiée qui , d'un air empreffé
, tendoit les mains pour recevoir l'augufte Enfant.
Un rayon de lumiere partant du vifage de
ce nouveau Comte , fe répandoit fur celui de la
Province ; & on lifoit fur une banderole ce chronographe
:
novo spLenDes CIt CoMIte.
A neuf heures du foir commença un concert ,
dans lequel on exécuta plufieurs pieces de mufique
Françoife & Italienne . A ce concert fuccéda
un ambigu pour les Dames , fervi fur deux tables
de foixante perfonnes chacune . La fête fut terminée
par un grand bal , que M. le Duc de
Chaulnes ouvrit avec Madame la Comteffe de
Houchin , & qui dura jufqu'au jour. Rien n'y
fut oublié , foit pour la décoration des trois falles
où l'on danfa , foit pour la maniere dont elles
furent éclairées , foit pour la fymphonie & les
rafraîchiffemens de toute efpece.
JANVIER . 1758. 179
M. l'Evêque d'Arras donna de grands foupers
la veille de l'ouverture & le jour de la clôture
des Etats. Pendant la fête du 21 , on diftribua
abondamment dans fon palais du pain , des viandes
, de la biere , du bois & de Pargent à cinq
cens perfonnes au moins . La maison du Bon
Pafteur , qui renferme plus de cent pauvres filles ,
a éprouvé les mêmes libéralités de la part de ce
Prélat.
Le 6 & le 21 , M. de Briois , Abbé de S. Vaaſt ,
fit tirer beaucoup d'artifice. Il a pareillement
fignalé fa charité , en faisant délivrer aux pauvres
quatre mille pains , du poids de trois livres &
demie:
M. de Caumartin qui , depuis le commencement
de l'Affemblée des Etats avoit donné des
preuves de fa magnificence ordinaire , y ajouta
le Dimanche 27 Novembre un dîner de cent trente
couverts. Ce feftin ne fut que pour les hommes ;
mais environ quatre- vingts Dames fouperent le
même jour à l'intendance , où il y eut audi un
bal qui ne laiffa rien à défirer . M. le premier
Préſident du Confeil d'Artois s'étoit diftingué de
fon côté le jeudi précédent , par un dîner fuivi
d'un bal , qui fut interrompu pour voir un bouquet
d'artifice & une illumination terreftre , formée
avec goût dans le parterre du jardin de ce
Magiftrat. Il fit fervir fur les neuf heures un ambigu
; après lequel il y eut concert , & l'on reprit
le bal qui ne finit qu'avec la nuit.
Enfin le 30 Novembre , les RR. PP. Jéfuites
du College d'Arras firent chanter dans leur Eglife
le Te Deum & l'Exaudiat , par toute la mufique
de la Cathédrale . M. l'Evêque d'Arra y officia ,
& les Etats qu'on avoit invités à la cérémonie ,
affifterent en corps ; après quoi ils pafferent dans
y
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
la falle des Actes , où le R. P. Dubuiffon , Profeffeur
de Rhétorique , leur adreffa une harangue
latine , dont l'objet étoit de féliciter la province
d'Artois fur la naiffance du nouveau Comte.
L'Orateur s'attacha à prouver dans la premiere
partie de fon difcours , qu'il ne pouvoit rien arriver
de plus avantageux à la Province , que de
voir fon nom porté par un Prince de la Maifon de
Bourbon ; & dans la feconde , qu'aucune Province
n'étoit plus digne de cette grace.
Les PP. Jéfuites ont fourni ce jour là de quoi
dîner à douze pauvres familles de chacune des
onze Paroiffes de la Ville. Les écoliers , tant externes
que penfionnaires , qui font de la Congré
gation de la Vierge , ont donné le même jour à
dîner & à fouper aux malheureux détenus dans
les prifons royales , lefquels étoient au nombre
de quarante , les ont fervis eux- mêmes , & leur ont
encore diftribué des aumônes.
Les autres Villes de l'Artois n'ont pas témoi
gné moins d'ardeur que la Capitale à célébrer
une époque fi glorieufe pour la Province ; & de
fimples Bourgades ont donné en cette occafion
les marques les plus éclatantes de leur zele & de
leur alégreffe.
Le Roi a nommé le Maréchal de Tomond ,
pour commander fur les côtes de la Méditerranée .
Sa Majefté a auffi difpofé du commandement de
la Guyenne en faveur du Comte de Langeron
Lieutenant-Général de fes armées , & Elle a donné
au Comte de Gramont , Brigadier d'Infanterie,
& Menin de Monfeigneur le Dauphin , le Commandement
des troupes , dans la partie du Gouvernement
de la Guyenne , qui dépend de la Généralité
d'Aufch.
Sur la démiffion de Madame la Ducheffe d'Antin,
JANVIER. 1758.
181
de la place de Dame du Palais de la Reine , le Roi a
nommé le 25 Novembre Madame la Comteffe de
Clermont-Tonnere pour la remplacer.
Le 27, M. le Comte de Rochechouart prêta ferment
entre les mains du Roi , pour le Gouvernement
de l'Orléannois.
M. Le Duc de Chaulnes étant revenu de l'armée
du Maréchal Duc de Richelieu , pour tenir les
Etats d'Artois , en fit l'ouverture à Arras le 21
Novembre.
à l'occafion de la Naiffance de Monseigneur le
Comte d'Artois.
LA joie que cet événement a répandue dans
l'Artois , ne s'eft pas bornée aux fentimens de
refpect , d'amour & de reconnoiffance que les
Etats de cette Province ont portés jufqu'au pied
du trône , par la députation nombreufe dont le
Mercure de Novembre a fait mention . Cette joie
a encore éclaté par des fêtes qui méritent qu'on
en conferve le fouvenir ; & nous allons détailler
ce qui s'eft paffé en cette conjoncture dans la
Capitale du pays,
Dès le 11 Octobre , jour auquel un Courier du
cabinet vint apporter aux Députés ordinaires des
Etats ( 1 ) , la nouvelle de l'heureux accouchement
de Madame la Dauphine , & du nom donné par
le Roi au Prince nouveau-né , il y eut des illuminations
& autres démonftrations publiques d'alégreffe
, tant aux Etats & à l'Hôtel de Ville , qu'au
Confeil d'Artois , à l'Evêché , à l'Abbaye de Saint-
Vaaft , &c. mais elles ne furent que le prélude
des réjouiffances brillantes qui devoient les fuivre,
M. l'Evêque fixa au Dimanche 6 Novembre , lé
(1 ) Ce font trois perfonnes choifies dans les trois
Corps des Etats , qui réfident à Arras , & font
chargées de l'adminiftration , hors du temps dés
Affemblées,
166 MERCURE DE FRANCE.
"
Te Deum ordonné par le Roi , & publia à ce fujet
un Mandement conçu en ces terines :
Jean de Bonneguize , par la grace de Dien
» & du S. Siège Apoftolique , Evêque d'Arras : à
tous Abbés , Abbeffes , Chapitres , Doyens ,
Paſteurs , Supérieurs & Supérieures des Eglifes
» & Monafteres exempts & non exempts, & à tous
» fideles de notre Dioceſe , falut & bénédiction.
» Le Seigneur , Mes Très- Chers Freres , tient
dans , fes mains , & la deftinée des Maîtres de
» la terre & le fort des Empires. Heureux les Rois
» & les Peuples , quand ils ne l'apprennent qué
par les preuves qu'il leur donne de fon amour
» & de fa protection !
» Tel eft l'avantage dont nous jouiffons , Mes
Très Chers Freres, furtout depuis que l'heureuſe
fécondité de Madame la Dauphine ajoute à tant
» d'autres faveurs du ciel , les bénédictions dont
≫ il comble par elle le Roi & le Royaume . Cha-
» que année nous ramene au pied des Autels pour
» y rendre graces d'un préſent nouveau à un Dieu
» qui véille au repos & à la profpérité de l'Etar.
» Il donne encore aujourd'hui dans le Prince qui
» vient de naître un nouvel appui au trône déjà le
» mieux affermi , & à la Nation la plus heureufe
un gage de plus de la durée de fon bonheur.
i » Mais fi la naiffance de Monfeigneur le Comté
» d'Artois doit être pour toute la France un fujer
» de joié & un objet de reconnoiffance , vous le
fçavez , M. T. C. F. cet événement intéreffe
» particuliérement cette Province ; & le nom de
ce Prince doit lui feul vous rappeller tout ce que
vous devez dans cette circonftance aux bontés
du Roi , ou plutôt aux miféricordes du Seigneur
qui , après avoir mis dans l'ame du Monarque
, l'amour de tous fes Peuples , daigné
JANVIER. 1758. 167
aujourd'hui fixer finguliérement fur nous les regards
de fa tendrefle.
>> Province heureuſe & préférée , hâtons- nous
» de faire éclater notre joie , & de fignaler notre
» reconnoiffance pour un Dieu qui nous diftingue .
» Mais joignons à nos actions de graces pour ce
préfent ineftimable de fa bonté , les prieres les
plus ferventes , pour qu'il daigne nous le con-
>> ferver. Ce Prince eſt , en naiſſant , le fondement
» & l'appui de nos efpérances : qu'il foit pendant
» le cours d'une longue vie , le gage de notre fé-
» licité , & le lien qui refferre de plus en plus les
>> noeuds de cette tendreffe paternelle , dont le Roi
»> nous donne aujourd'hui dans fa perfonne , la
preuve la plus éclatante.
» Demandons au Seigneur de graver de bonne
>> heure dans fon ame les principes inaltérables de
» de bonté & d'humanité qui nous font trouver
» le meilleur des Peres dans le plus grand des
Rois qu'il lui infpire le goût de cette piété tendre
& folide qui fait de la Reine l'exemple de la
Cour & la gloire de la Religion ; qu'il mette
» dans fon coeur le germe des vertus de Monſeigneur
le Dauphin , & de Madame la Dauphine,
»fi dignes l'un & l'autre des bénédictions multipliées
que le Ciel répand fur leur union , & fi
propres à attirer fur le Royaume celles qui peuvent
en perpétuer la gloire , le répos & la
» profpérité.
Puiffe cet augufte Enfant fi précieux à cette
» Province en particulier , devenit , pour notre
bonheur, tous les jours de fa vie , plus parfait, en
fe formant fur de pareils modeles puiffent
> nos neveux avoir des raifons de renouveller fans
» ceffe au Seigneur pour fa confervation les ac-
» tions de graces que nous allons lui rendre pour
fa naiflance,
16S MERCURE DE FRANCE.
» A ces cauſes , après avoir pris l'avis de nos
» Vénérables Freres les Prévôt , Doyen , Cha-
» noines & Chapitre de notre Eglife Cathédrale ,
» nous ordonnons de faire chanter le Te Deum,
>> chacun dans vos Eglifes , avec les folemnités
>> requifes , le premier Dimanche ou jour de
Fête , après que vous aurez reçu notre préſent
>> Mandement , les Officiers , Magiftrats des
>> lieux , & tous autres qu'il appartiendra , invités
» d'y aſſiſter .
» Donné à Arras , en notre Palais Epiſcopal ,
fous notre feing & la fignature de notre Secre-
D taire , le trois Novembre mil fept cens cinquan-
» te-fept » .
JEAN , Evêque d'Arras.
Par Monfeigneur ,
PECHENA , Secrétaire.
Lettre du Roi , à M. l'Evêque d'Arras .
Monfieur l'Evêque d'Arras , la durée du bonheur
de mes fujets étant l'objet de mes voeux les plus
ardens , tous les événemens capables de le perpétuef,
excitent en moi les fentimens que mérite
un peuple toujours empreffé à me donner des
marques de fon zele , de fa fidélité & de fon
amour. Les princes dont il a plu à Dieu de combler
mes fouhaits , affurent la tranquillité dans
mes états. Celui dont matrès chere Fille la Dauphine
vient d'être heureuſement délivrée , eſt un
nouveau don de la providence , & c'eft pour lui
rendre les actions de graces qui lui font dûes , que
je vous fais cette lettre , pour vous dire que mon
intention eft que vous faffiez chanter le Te Deum
dans votre Eglife Cathédrale , & dans toutes les
autres
JANVIERL
169
. 1758.
autres de votre Dioceſe , avec la folemnité requife
, & que vous invitiez d'y affifter tous ceux qu'il
conviendra ; ce que me promettant de votre zele
je ne vous ferai la préfente plus longue , que pour
prier Dieu qu'il vous ait , Mons. l'Evêque d'Arras
, en fa fainte garde. Ecrit à Versailles le 9 Octobre
1757. Signé , LOUIS . Et plus bas , R. de
Voyer. Etfur le repli : à Mons. l'Evêque d'Arras,
Confeiller en mes Confeils .
La fête fut annoncée le au foir par toutes les
cloches de la Ville , que l'on fonna encore le 6 ,
de grand matin. En même temps des falves d'artillerie
& de boîte fe firent entendre , & recommencerent
à différentes reptiles dans le cours de
la journée. Il y eut ce même jour à l'Hôtel de
Ville un dîner fomptueux de plus de quatre-vingts
couverts , où le trouva M. de Caumartin , Intendant
de la Province . On y avoit auffi invité l'Evêque
, l'Abbé de Saint- Vaaft , le Commandant
de la Place , le premier Préfident du Confeil d'Artois
, & la Nobleffe , ainfi qu'un certain nombre
des Officiers de la garnifon , & des autres principaux
Corps , ecclefiaftiques , civils & militaires.
Pendant ce repas , on jetta de l'argent au peuple
& les Magiftrats lui firent diftribuer du pain , des
viandes & du vin. Immédiatement après que la
fanté de Monfeigneur le Comte d'Artois eût été
bue au fon des inftrumens , on préfenta à tous les
convives des exemplaires de la piece fuivante ,
compofée par M Harduin , Avocat , ancien Député
des Etats d'Artois à la Cour , & Secretaire
perpétuel de la Société Littéraire d'Arras.
L. Vol. H
170 MERCURE DE FRANCE .
Sentimens d'un Citoyen d'Arras , fur la Naiffance
de Monfeigneur le Comte d'Artois .
It fort donc aujourd'hui de fon obſcurité ,
Ce Titre qu'autrefois des Héros ont porté ( 1 ).
D'un Enfant de Louis il devient le partage :
Louis , pour couronner notre fidélité ,
Daigne de fon amour nous accorder ce gage .
Vous reprenez enfin votre antique fplendeur ,
Lieux où de Pharamond le brave Succeffeur (1 )
Jetta les fondemens du floriffant Empire
Qui commande à l'Europe , & que le monde admire.
Monarque triomphant , que le Ciel a formé
Pour les vertus & pour la gloire ,
Ton peuple réuni , d'un beau zele animé ,
T'a placé dès long-temps au Temple de mémoire ,
Sous le nom de Roi Bien - Aimé.
Mais lorfque furpaffant toute notre eſpérance ,
Tu veux nous diftinguer de tes autres Sujets ,
Lorfque tu mets pour nous le comble à tes bienfaits
,
Quel nom te donnera notre reconnoiffance !
Plaifirs , volez ici fous mille traits divers :
Que Polymnie & Terpsichore
Célebrent à l'envi le Maître qu'on adore.
(1) Robert I & Robert II, Comtes d'Artois.
(2) Clodion.2
JANVIER.
1758.
171
Qu'un bruit guerrier fe mêle aux plus tendres
concerts :
Que la fiere trompette fonne :
Sur nos murs que la foudre tonne :
Que le falpêtre éclate dans les airs.
Que mille bouche enflammées
Annoncent les tranfports de nos ames charmées
Au bout de ce vafte Univers.
Je vois juſques à
l'Empyrée
S'élevér de rapides feux :
Ainfi vers la voûte azurée
S'élance l'ardeur de nos voeux.
Tels que ces
brillantes étoiles ,
Qui de la nuit perçant les voiles ,
Retombent en foule à nos yeux ,
Sur l'Enfant fi cher à la France
Puiffent
defcendre en
abondance
Les plus riches préfens des Cieux.
Dans le
raviffement où mon ame fe livre ,
En lui déja je vois revivre
Ce Frere vertueux du plus faint de nos Rois ( 1).
A nos ayeux il fit chérir fes loix :
Des cruels
Sarrafins il
confondit la rage :
Prince , lis fes exploits , & deviens fon image ...
Mais pourquoi de l'hiftoire
emprunter le fecours ▸
(1) Robert I, frere de Saint Louis , furnommé
le Bon & le
Vaillant, ‹
Hij
172 MERCURE DE FRANCE.
Pour acquérir une gloire immortelle ,
Il ne te faut d'autre modele
Que ton augufte Ayeul , ou l'Auteur de tes jours.
Illuftre Enfant , auprès du trône
Tu feras de l'Artois le plus ferme foutien :
De Louis & du peuple à qui fa main te donne ,
Tu refferres encor le fortuné lien .
Si tu pouvois juger de notre amour extrêmê
Si tu lifois au fond de notre coeur ,
Ah ! tu t'applaudirois toi- même
Du nom qui fait notre bonheur .
.
On avoit élevé , vis- à-vis de l'Hôtel de Ville ,
un Feu d'artifice , pour lequel on n'avoit épargné
ni foins , ni dépenfe , non plus que pour les illuminations
de cet hôtel , de la haute & admirable
tour qui l'accompagne , & des autres édifices publics
. Tous les particuliers s'étoient auffi empreffés
à illuminer leurs maiſons , d'une maniere qui
répondît à la folemnité du jour ; mais une pluie
continuelle empêcha l'effet de ces préparatifs. On
ne put faire jouer qu'une petite partie de l'artifice
; & le refte fut remis au furlendemain.
L'édifice conftruit pour le feu , fur les deffeins
du fieur Beffara , Architecte de la Ville , étoit
feint de marbre blanc , & avoit s 2 pieds d'élévation
en deux étages , furmontés d'une pyramide
de 33 pieds . Le premier étage ou rez - de - chauffée
étoit un quarré d'ordre dorique , ayant 44 pieds
de face , dont le côté principal offroit un portique
, avec fronton & baluftrade , orné des Armes
du Roi , de Monfeigneur le Dauphin , & de Mon.
feigneur le Comte d'Artois , Une colonnade ioniJANVIER.
1758. 173
que formoit le fecond étage , qui étoit circulaire.
Vingt-quatre vafes à fleurs & trophées d'armes
ou de mufique , fervoient d'amortiffemens aux
deux ordres d'architecture . Cette décoration étoit
femée de chronogrammes ou chronographes
forte d'infcription fort en ufage aux Pays Bas ,
dans laquelle on trouve , en chiffre Romain , par
la réunion de toutes les lettres numérales qu'elle
contient , l'année de l'événement qui en eſt l'objet.
Voici quelques- uns de ces chronographes :
nasCItVŕ CoMes , spLenDor artesIx.
DonVM CLI aC, regIs.
PVLChra FIDel MerCes .
LætVs aMor aCCenDIt Ignes,
Entre les différentes illuminations qui avoient
été préparées , on remarquoit aux croifées de
Pappartement que la Société Littéraire occupe à
l'hôtel du Gouverneur , trois tranfparens , fur
lefquels étoient peints autant de médaillons , imaginés
par M. Camp , Avocat , Membre de cette
Société , & actuellement Député des Etats à lạ
Cour. On croit devoir donner ici la defcription
de ces morceaux de peinture.
Premier Médaillon.
L'hiftoire de l'Artois caractérisée fpécifiquement
par une femme vêtue d'une faie blanche
rayée de pourpre ( 1 ) . Elle a fur la tête une couronne
de laurier , & une plume à la main . Devant
(1 ) Cette espece d'étoffe fe fabriquoit autrefois
par les habitans d'Arras , nommés Atrebates, avec
tant de réputation que les Romains en faifoient
leurs plus magniques habillemens.
Hiij
74 MERCURE DE FRANCE.
elle eft un grand livre ouvert , fur la couverture
duquel fe voyent les Armes de la province . Elle
tient de la main gauche un médaillon portant
celles de Monfeigneur le Comte d'Artois , qu'elle
regarde avec un étonnement mêlé de joie. Une
pile de volumes imprimés & manuſcrits , fur laquelle
font les aîles & autres attributs du Temps ,
fert d'appui au livre que cette femme tient ouvert.
Elle a un pied pofé fur un débris de monument
antique , dont les reftes font épars. Auprès eft
une urne renverfée , d'où fe répand un grand
nombre de médailles .
Légende.
QUANTA FASTORUM GLORIA !
Exergue.
COMES DATUS IXA. OCT. M. DCC. LVII .
Second médaillon ,
Minerve affife , ferrant de fon bras gauche un
vafe aux Armes d'Artois , dans lequel eft planté
un rejetton de lys , qu'elle prend foin de cultiver.
A fes pieds font des trophées relatifs aux Arts &
aux Sciences.
Légende.
CURAT NOBISQUE COLIT.
Exergue.
SOC. LITT . ATR. SPES ET VOT.
Troisieme médaillon.
Les chiffres des Rois Louis VIII & Louis XV,
figurés par deux doubles IL , placés fous une
même couronne , & accompagnées refpectivement
JANVIER. 1758 . 175
des nombres VIII & XV . Un cordon bleu fort de
la couronne , entrelace les deux chiffres , & ſe
termine par un noeud , d'où pendent les Armes de
Monfeigneur le Comte d'Artois ( 1 ) .
Légende.
AB EVO IN ÆVUM.
Exergue.
DECUS FUNDATUM ET RESTITUTUM.
Le même jour 6 Novembre , vers les dix heures
du foir , il y eut dans la grande falle de l'Hôtel
de Ville , qu'on avoit fuperbement décorée , un
bal qui fut ouvert par M. l'Intendant avec Madame
la Comteffe de Houchin , épouse du Député
ordinaire de la Nobleffe des Etats . On y fervit
fur des buffets en gradins , un ambigu fuffifant
pour fatisfaire les goûts divers de deux mille perfonnes
au moins qui fe trouverent à ce bal .
Les Etats d'Artois différerent jufqu'à l'ouverture
de leur Affemblée générale , la folemnité de
leurs actions de graces & de leurs réjouiflances ,
afin que tous les Membres des trois Ordres fuflent
à portée d'y participer. Ce fut le lundi 21 Novembre
que le fit cette ouverture ; & après la
féance , qui fe tint dans la forme ordinaire fur les
dix heures du matin , on chanta dans l'Eglife des
Récollets un Te Deum en mufique , auquel M.
(1) Louis VIII , par fon Teftament du mois de
Juin 1225 , affigna l'Artois en partage à Robert
fon fecond fils , frere de S. Louis , de qui defcend la
branche de Bourbon. Depuis ce Robert , premier
Comte d'Artois , aucun fils de France n'en avoit
porté le titre.
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE .
l'Evêque d'Arras officia pontificalement. M. fe
Duc de Chaulnes , Gouverneur de la Province ;
M. l'Intendant , & M. Briois , Premier Préfident
du Confeil Provincial , Commiffaires du Roi pour
la tenue des Etats , affifterent à cette cérémonie ,
accompagnés de tous les Membres de l'Affemblée.
Il y eut enfuite un magnifique dîner de deux cens
vingt-cinq couverts, auquel tous les Corps avoient
été invités. Sur la fin du repas , on but avec appareil
les fantés du Roi , de Monfeigneur le Dauphin
& du nouveau Prince , qui furent annoncées
fucceffivement par des falves de boîtes & d'artillerie
; & les Députés ordinaires jetterent de l'argent
au peuple. Dès que la nuit fut venue , on tira
avec toute la réuffite poffible , un très- beau Feu
d'artifice au milieu de la grande place.
Ce feu avoit la forme d'un temple , dont le
premier
étage , quarré & élevé d'environ fept pieds
au deffus du pavé , fervoit de focle à tout l'édifice.
Quatre grandes rampes de dix marches occupoient
le milieu de chaque face , & conduifoient
à une galerie fermée de panneaux & d'acroteres
enrichis d'Armes du Roi , de Monfeigneur le Dauphin
, & de Monfeigneur le Comte d'Artois , ainfi
que des Chiffres de la province.
Le principal corps établi fur le premier étage
avoit huit côtés , dont quatre plus larges que les
autres , faifant faillie & avant- corps , formoient
des portiques , & répondoient aux rampes. Aux
entrées de ces portiques étoient les figures fymboliques
de la fincérité & de la fidélité , qui caractérifent
les Artéfiens , & celles de la reconnoiffance
& de l'espérance , fentimens dont ce peuple eft
particuliérement affecté dans la circonftance préfente.
Les quatre côtés enfoncés étoient ornés de
iches , avec d'autres figures qui défignoient les
JANVIER. 1758. 177
Vertus protectrices du jeune Prince ; fçavoir , la
Religion , la Bonté , la Valeur & la Prudence.
Des emblêmes relatifs à ces vertus rempliffoient
le deffus des niches. La décoration générale de
toute cette partie étoit un ordre Ionique régulier ,
dont l'entablement faillant foutenoit une baluftrade
mêlée d'acroteres , fur chacun defquels on
voyoit des grouppes d'enfans , qui fembloient , en
exprimant leur joie , difputer à qui porteroit les
Armes du Roi , & celles des autres perfonnes de
la Famille Royale.
Sur le deuxieme étage étoit pofé un attique à
quatre faces , dont trois préfentoient des tableaux
emblématiques , & l'autre contenoir cette infcription
:
NOVO ARTESIA COMITI
Il y avoit des pilaftres aux angles de ce corps
d'architecture avec un entablement en faillie ,
lequel étoit couronné de quatre vafes de ronde
bolle. Une pyramide en mofaïque évidée , s'élevoit
fur l'attique qui lui fervoit de baſe , & portoit
fur fa cime les Armes d'Artois , furmontées
d'un foleil .
Aux quatre coins du temple , & à une diſtance
convenable , étoient de grands obéliſques décorés,
de chiffres , de médaillons , &c.
Toutes les parties de l'édifice étoient peintes
en grifaille , à l'exception des tableaux & des
emblêmes , qui l'étoient en camayeu de couleur
bleue. Mais cette fimplicité étoit relevée par l'éclat
de l'or répandu fur les armoiries , les infcriptions
, les cartouches , les guirlandes ; fur la pyramide
, fur les vafes , & fur tous les ornemens
où l'on avoit pu l'employer avec goût.
Cet ouvrage fut exécuté par les foins & fur les
Hy
178 MERCURE DE FRANCE.
deffeins du fieur Linque , Architecte , natif & hæ
bitant d'Arras.
Les Commiffaires de Sa Majesté & les Etats
virent jouer l'artifice d'un amphithéâtre dreffé à
l'un des bouts de la place , qui eft une des plus
vaftes du Royaume. Des fanfares de cors , trompettes
& timbales , animerent ce fpectacle , aprèslequel
plufieurs fontaines de vin coulerent pour
le peuple.
Les deux façades de l'Hôtel des Etats furent
illuminés par une quantité immenfe de lamprons
, dont l'arrangement deffinoit , fans confufion
, toute la belle architecture de cet hôtel Dans
un grand tableau tranfparent placé au deffus de
la porte d'entrée , on voyoit Lucine defcendant
du Ciel , & tenant dans fes bras le Prince nouveau-
né. Le Roi montroit à cette Déeffe la Province
d'Artois perſonnifiée qui , d'un air empreffé
, tendoit les mains pour recevoir l'augufte Enfant.
Un rayon de lumiere partant du vifage de
ce nouveau Comte , fe répandoit fur celui de la
Province ; & on lifoit fur une banderole ce chronographe
:
novo spLenDes CIt CoMIte.
A neuf heures du foir commença un concert ,
dans lequel on exécuta plufieurs pieces de mufique
Françoife & Italienne . A ce concert fuccéda
un ambigu pour les Dames , fervi fur deux tables
de foixante perfonnes chacune . La fête fut terminée
par un grand bal , que M. le Duc de
Chaulnes ouvrit avec Madame la Comteffe de
Houchin , & qui dura jufqu'au jour. Rien n'y
fut oublié , foit pour la décoration des trois falles
où l'on danfa , foit pour la maniere dont elles
furent éclairées , foit pour la fymphonie & les
rafraîchiffemens de toute efpece.
JANVIER . 1758. 179
M. l'Evêque d'Arras donna de grands foupers
la veille de l'ouverture & le jour de la clôture
des Etats. Pendant la fête du 21 , on diftribua
abondamment dans fon palais du pain , des viandes
, de la biere , du bois & de Pargent à cinq
cens perfonnes au moins . La maison du Bon
Pafteur , qui renferme plus de cent pauvres filles ,
a éprouvé les mêmes libéralités de la part de ce
Prélat.
Le 6 & le 21 , M. de Briois , Abbé de S. Vaaſt ,
fit tirer beaucoup d'artifice. Il a pareillement
fignalé fa charité , en faisant délivrer aux pauvres
quatre mille pains , du poids de trois livres &
demie:
M. de Caumartin qui , depuis le commencement
de l'Affemblée des Etats avoit donné des
preuves de fa magnificence ordinaire , y ajouta
le Dimanche 27 Novembre un dîner de cent trente
couverts. Ce feftin ne fut que pour les hommes ;
mais environ quatre- vingts Dames fouperent le
même jour à l'intendance , où il y eut audi un
bal qui ne laiffa rien à défirer . M. le premier
Préſident du Confeil d'Artois s'étoit diftingué de
fon côté le jeudi précédent , par un dîner fuivi
d'un bal , qui fut interrompu pour voir un bouquet
d'artifice & une illumination terreftre , formée
avec goût dans le parterre du jardin de ce
Magiftrat. Il fit fervir fur les neuf heures un ambigu
; après lequel il y eut concert , & l'on reprit
le bal qui ne finit qu'avec la nuit.
Enfin le 30 Novembre , les RR. PP. Jéfuites
du College d'Arras firent chanter dans leur Eglife
le Te Deum & l'Exaudiat , par toute la mufique
de la Cathédrale . M. l'Evêque d'Arra y officia ,
& les Etats qu'on avoit invités à la cérémonie ,
affifterent en corps ; après quoi ils pafferent dans
y
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
la falle des Actes , où le R. P. Dubuiffon , Profeffeur
de Rhétorique , leur adreffa une harangue
latine , dont l'objet étoit de féliciter la province
d'Artois fur la naiffance du nouveau Comte.
L'Orateur s'attacha à prouver dans la premiere
partie de fon difcours , qu'il ne pouvoit rien arriver
de plus avantageux à la Province , que de
voir fon nom porté par un Prince de la Maifon de
Bourbon ; & dans la feconde , qu'aucune Province
n'étoit plus digne de cette grace.
Les PP. Jéfuites ont fourni ce jour là de quoi
dîner à douze pauvres familles de chacune des
onze Paroiffes de la Ville. Les écoliers , tant externes
que penfionnaires , qui font de la Congré
gation de la Vierge , ont donné le même jour à
dîner & à fouper aux malheureux détenus dans
les prifons royales , lefquels étoient au nombre
de quarante , les ont fervis eux- mêmes , & leur ont
encore diftribué des aumônes.
Les autres Villes de l'Artois n'ont pas témoi
gné moins d'ardeur que la Capitale à célébrer
une époque fi glorieufe pour la Province ; & de
fimples Bourgades ont donné en cette occafion
les marques les plus éclatantes de leur zele & de
leur alégreffe.
Le Roi a nommé le Maréchal de Tomond ,
pour commander fur les côtes de la Méditerranée .
Sa Majefté a auffi difpofé du commandement de
la Guyenne en faveur du Comte de Langeron
Lieutenant-Général de fes armées , & Elle a donné
au Comte de Gramont , Brigadier d'Infanterie,
& Menin de Monfeigneur le Dauphin , le Commandement
des troupes , dans la partie du Gouvernement
de la Guyenne , qui dépend de la Généralité
d'Aufch.
Sur la démiffion de Madame la Ducheffe d'Antin,
JANVIER. 1758.
181
de la place de Dame du Palais de la Reine , le Roi a
nommé le 25 Novembre Madame la Comteffe de
Clermont-Tonnere pour la remplacer.
Le 27, M. le Comte de Rochechouart prêta ferment
entre les mains du Roi , pour le Gouvernement
de l'Orléannois.
M. Le Duc de Chaulnes étant revenu de l'armée
du Maréchal Duc de Richelieu , pour tenir les
Etats d'Artois , en fit l'ouverture à Arras le 21
Novembre.
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Résumé : Description des Fêtes données en la ville d'Arras, à l'occasion de la Naissance de Monseigneur le Comte d'Artois.
À l'occasion de la naissance du Comte d'Artois, Arras a organisé des festivités marquantes. Dès l'annonce de la nouvelle le 11 octobre, des illuminations et des salves d'artillerie ont exprimé la joie publique. L'évêque d'Arras a ordonné un Te Deum le 6 novembre, accompagné d'un mandement célébrant la naissance du prince et appelant à la prière pour sa conservation. Le roi a demandé la célébration du Te Deum dans toutes les églises du diocèse. Le jour de la fête, des cloches ont sonné, des salves d'artillerie ont retenti, et un dîner somptueux a été organisé à l'Hôtel de Ville, avec la présence de personnalités locales. Pendant le repas, de l'argent et des vivres ont été distribués au peuple. Une pièce poétique de M. Harduin a été lue, exprimant la joie et la reconnaissance des citoyens d'Arras. Un feu d'artifice et des illuminations étaient prévus, mais la pluie a perturbé leur réalisation. L'édifice pour le feu d'artifice, conçu par l'architecte Beffara, était orné des armes royales et de chronogrammes. La Société Littéraire a exposé des transparents avec des médaillons imaginés par M. Camp, dont le premier représentait l'histoire de l'Artois symbolisée par une femme tenant un médaillon aux armes du Comte d'Artois. Le 6 novembre, un bal a été organisé à l'Hôtel de Ville, décoré somptueusement, avec un buffet pour deux mille personnes. Les États d'Artois ont reporté leurs actions de grâce pour permettre à tous les membres de participer. Le 21 novembre, après une séance solennelle, un Te Deum a été chanté à l'église des Récollets, suivi d'un dîner pour deux cent vingt-cinq personnes. Des salves d'artillerie ont annoncé les santés du Roi, du Dauphin et du nouveau prince, et des pièces d'argent ont été jetées au peuple. Un feu d'artifice en forme de temple a été tiré sur la grande place, illustrant diverses vertus et emblèmes. Les façades de l'Hôtel des États ont été illuminées, et un concert ainsi qu'un bal ont clôturé la fête. Des soupers et distributions de vivres aux pauvres ont été organisés par l'évêque d'Arras et d'autres dignitaires. Le 30 novembre, les Jésuites ont chanté un Te Deum, et une harangue latine a félicité la province pour la naissance du nouveau Comte. D'autres villes de l'Artois ont également célébré cet événement. Par ailleurs, le Roi a nommé de nouveaux commandants pour les côtes de la Méditerranée, la Guyenne, et le Gouvernement de l'Orléannois.
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36
p. 250-251
NAISSANCE.
Début :
Le 7 Octobre dernier, les cérémonies de Baptême ont été suppléées par l'Abbé [...]
Mots clefs :
Cérémonies, Baptême, Fils, Parrains et marraines, Frères, Naissance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : NAISSANCE.
NAISSANCE.
Le 7 Octobre dernier , les cérémonies de Baptême
ont été fuppléées par l'Abbé Rey- de Loupiac
, Bachelier de Sorbonne , dans l'Eglife S.
Pierre de la Ville de Gaillac au Diocèfe d'Alby ,
en préfence du Curé de la Paroifle ; à un fils de
Mellire Jean-Louis - Etienne d'Huteau de Dalmas ,
Chevalier, Seigneur d'Amours , Lieutenant de
Roi au Gouvernement de la Province de Languedoc
, & de MM les Maréchaux de France en
Albigeois , Chevalier d'honneur de la Cour des
Aides de Montauban , & de Dame Jeanne- Simone
Charlotte de B'anc- Fenayrols , Dame dudit
lieu , né le 25 Février 1755, & ondoyé le même
jour. Le parrein a été M.'Abbé de Foucaud , Albé
de l'Abbaye d'Eaulnes fon grand oncle , repréfenté
par M. l'Abbé de Laftic , Abbé de celle de
Gaillac. La marraine , Madame la Comtelle de
FEVRIER. 1760.
251
ftanges fa grande tante , repréfentée par
adame la Préfidente de Foucaud : Il a été nomé
Jean- Marie- Guy - Etienne-Pulchérie .
Jean- Louis - Etienne- Anze , & Jean - Louis- Conftance
, fes freres , nés le 26 juin 1752 , & le 14
Décembre 153. & ondoyés le jour de leur naiffance
, avoient été fuppléés aux cérémonies du
Baptême le as Décembre 1753 , en prétence du
Curé de la Paroiffe S. Pierre , par Mellire Jean-
Marie de Laftic S. Jal , Abbé de l'Abbaye lécolière
S. Michel de la Ville de Gaillac , grand
Vicaire de l'Archevêché d'Alby , à la tête de fon
Chapitre.
Les armes de la maifon d'Huteau , originaire
de Bretagne , font d'azur , à trois étoiles d'or ;
écartelées d'argent à la Croix de gueules ancrée ,
avec une couronne murale, pour timbre de l'écu ,
concédée par Charles VII.
Voyez Palliot ; le Céfar armorial ; le Promptuaire
armorial ; les Tablettes hiftoriques , Morery ,
les armoriaux de Bretagne & de Languedoc , les
Arrêts de Maintenue & c.
Le 7 Octobre dernier , les cérémonies de Baptême
ont été fuppléées par l'Abbé Rey- de Loupiac
, Bachelier de Sorbonne , dans l'Eglife S.
Pierre de la Ville de Gaillac au Diocèfe d'Alby ,
en préfence du Curé de la Paroifle ; à un fils de
Mellire Jean-Louis - Etienne d'Huteau de Dalmas ,
Chevalier, Seigneur d'Amours , Lieutenant de
Roi au Gouvernement de la Province de Languedoc
, & de MM les Maréchaux de France en
Albigeois , Chevalier d'honneur de la Cour des
Aides de Montauban , & de Dame Jeanne- Simone
Charlotte de B'anc- Fenayrols , Dame dudit
lieu , né le 25 Février 1755, & ondoyé le même
jour. Le parrein a été M.'Abbé de Foucaud , Albé
de l'Abbaye d'Eaulnes fon grand oncle , repréfenté
par M. l'Abbé de Laftic , Abbé de celle de
Gaillac. La marraine , Madame la Comtelle de
FEVRIER. 1760.
251
ftanges fa grande tante , repréfentée par
adame la Préfidente de Foucaud : Il a été nomé
Jean- Marie- Guy - Etienne-Pulchérie .
Jean- Louis - Etienne- Anze , & Jean - Louis- Conftance
, fes freres , nés le 26 juin 1752 , & le 14
Décembre 153. & ondoyés le jour de leur naiffance
, avoient été fuppléés aux cérémonies du
Baptême le as Décembre 1753 , en prétence du
Curé de la Paroiffe S. Pierre , par Mellire Jean-
Marie de Laftic S. Jal , Abbé de l'Abbaye lécolière
S. Michel de la Ville de Gaillac , grand
Vicaire de l'Archevêché d'Alby , à la tête de fon
Chapitre.
Les armes de la maifon d'Huteau , originaire
de Bretagne , font d'azur , à trois étoiles d'or ;
écartelées d'argent à la Croix de gueules ancrée ,
avec une couronne murale, pour timbre de l'écu ,
concédée par Charles VII.
Voyez Palliot ; le Céfar armorial ; le Promptuaire
armorial ; les Tablettes hiftoriques , Morery ,
les armoriaux de Bretagne & de Languedoc , les
Arrêts de Maintenue & c.
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Résumé : NAISSANCE.
Le 7 octobre, l'Abbé Rey de Loupiac a célébré le baptême d'un fils de M. Jean-Louis-Étienne d'Huteau de Dalmas, Chevalier et Lieutenant du Roi au Gouvernement de la Province de Languedoc, et de Mme Jeanne-Simone-Charlotte de Banc-Fenayrols, née le 25 février 1755. L'enfant a été nommé Jean-Marie-Guy-Étienne-Pulchérie. Le parrain était M. l'Abbé de Foucaud, représenté par M. l'Abbé de Laftic, et la marraine était Mme la Comtesse de Février, représentée par Mme la Présidente de Foucaud. Les frères de l'enfant, Jean-Louis-Étienne-Ange et Jean-Louis-Constance, nés respectivement le 26 juin 1752 et le 14 décembre 1753, avaient été baptisés le 14 décembre 1753 par M. Jean-Marie de Laftic. Les armes de la maison d'Huteau, originaire de Bretagne, sont d'azur à trois étoiles d'or, écartelées d'argent à la Croix de gueules ancrée, avec une couronne murale pour timbre de l'écu, concédée par Charles VII.
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37
p. 204-208
De PARIS, le 13 Juin 1763.
Début :
Le 26 du mois dernier, le Roi fit dans la Plaine des Sablons la revue des [...]
Mots clefs :
Revue de la garde, Régiments, Comte, Monseigneur, Parlement, Conseillers, Prince, Lit de justice, Naissance, Princesse, Nominations, Inoculation, Débat, Petite vérole, Interdiction, Loterie de l'Hôtel-de-ville, Tirage, Loterie de l'école royale militaire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De PARIS, le 13 Juin 1763.
De PARIS , le 13 Juin 1763 .
Le 26 du mois dernier , le Roi fit dans la Plai
ne des Sablons la revue des Gardes Françoiſes &
des Gardes Suifles . Sa Majeſté paſſa dans les rangs,
& les deux Régimens défilérent devant Elle après.
avoir fait l'exercice. Madame la Dauphine , Mgr
le Duc de Berry , Mgr le Comte de Provence
Madame Adélaïde , Mefdames Sophie & Louiſe
ont affifté à cette revue , ainfi que le Prince de
Condé & le Prince de Lamballe .
Le Parlement ayant reçu , le 30 du mois der◄
nier , les Ordres du Roi par le Marquis de Dreux ,
Grand - Maître des Cérémonies , s'affembla le
lendemain 31 pour le Lit de Juſtice que Sa Majefté
avoir réfolu de tenir.
Vers les onze heures & demie du matin , le
Roi arriva ayant dans fon caroffe Monſeigneur
le Dauphin , Sa Majesté étoit accompagnée d'un
nombreux détachement de fes Gardes du Corps ,
du quartier des Gendarmes de fa Garde , de
celui des Chevaux-Légers & d'un détachement
JUILLET. 1763. 205
des Moufquetaires de chacune des deux Com
pagnies. Devant le Carroffe du Roi étoit le Vol
du Cabinet. Sa Majeſté deſcendit à là Sainte Chapelle
, où le Chancelier s'étoit rendu , Elle étoit
accompagnée du nombre ordinaire de Confeillers
d'Etat & des Maîtres des Requêtes : les Maré
chaux de France y étoient pareillement affemblés
, ainfi que les Chevaliers des Ordres , les'
Gouverneurs & Lieutenans- Généraux de Province ,
nommés par Sa Majefté pour avoir l'honneur
de l'accompagner: Le Duc d'Orléans , le Duc
de Chartres , le Prince de Condé , le Comte de
Clermont , le Prince de Conti & le Comte de
la Marche y avoient auffi devancé Sa Majesté.
Le Roi précédé de fa Cour , du Roi d'Armes &
des Hérauts , monta les degrés au fon des trompettes
, Hautbois , Fifres & Tambours de l'Ecurie
& de la Chambre. Deux Huiffiers de la Chambre
portoient leurs Maffes devant Sa Majesté.
Lorfque le Roi eut entendu la Meffe , qui fut
célébrée par un de fes Chapelains , quatre Préfidens
& fix Confeillers , députés par le Parle
ment , vinrent recevoir Sa Majefté , & la conduifirent
à la Grand'Chambre. Le Roi s'étant
affis fur fon Trône , & les féances ayant été
prifes , Sa Majesté fit enregiftrer deux Edits &
une Déclaration . Le Roi fortit enfuite dans le
même ordre qu'il étoit entré.
Sa Majefté trouva , ainfi qu'à fon arrivée , les
Gardes Françoifes & Suiffes qui formoient une
double haye dans les rues , fur le Pont- Neuf
& fur les Quais , depuis le Palais jufqu'à l'extrémité
du Quai des Thuilleries .
Les Pairs qui ont affifté à ce Lit de Juftice ,
font l'Archevêque Duc de Rheims , l'Evêque Duc
de Langres , l'Evêque Comte de Noyon , les Ducs
206 MERCURE DE FRANCE .
de Sully , de Luynes , de Briffac , de Richelieu ,
de Rohan- Chabot , de Mortemart , de Trefmes
de Saint -Cloud , de Firs-James , de Chaulnes
de Rohan-Rohan , de Villars - Brancas , de Valentinois
, de Biron , de la Valliere , d'Aiguillon ,
de Fleury , de Duras . de la Vauguyon , de
Choifeul & de Praflin. Les Maréchaux de Balincourt
, Clermont - Tonnerre , d'Eftrées & de
Contades y ont eu féance
étant entrés avec
le Roi.
Le Prince de Rochefort nommé pour repréfenter
en cette occafion , le Grand Ecuyer de
France , a porté l'Epée Royale .
On a appris ici la mort de Marie- Victoire - Anne
de Savoye , titrée Mlle de Carignan , décédée
le 18 du mois dernier.
Cette Princefle née le 12 Février 1687 , étoit
fille d'Emmanuel- Philbert-Amédée de Savoye ,
Prince de Carignan en Piémont , mort le 23.
Avril 1709 , & d'Ange- Carherine d'Eft-Modene,
morte le 18 Juillet 1712 , & Soeur de Victor-
Amédée , Prince de Carignan , mort le 4 Août
1741 , Père de Louis - Victor-Amédée- Jofeph, aujourd'hui
Premier Prince du Sang de Sardaigne
& Prince de Carignan , & avoit pour Ayeul Thomas
François de Savoye , Prince de Carignan
l'un des fils de Charles- Emmanuel I. du nom ,
Duc de Savoye , furnommé le Grand , & Frère
pumé de Victor- Amédée , Duc de Savoye , Bif-
Ayeul de Sa Majefté le Roi de Sardaigne actuellement
régnant.
•
Le Lieutenant Général de Police & le Subfticus
du Procureur Général du Roi au Châteler , ayant .
repréſenté au Parlement , qu'il s'élevoit dans le
Public un murmure général , contre l'indifcrétion
de quelques-uns des partfans de l'inoculation de
JUILLET. 1763. 207
la petite vérole , contre les Inoculateurs & contreceux
qui , en attendant l'effet de l'Inoculation
qu'ils ont reçue, reftent fans précaution dans la
Société, le Parlement , d'après ces confidérations
& l'expofé des Gens du Roi fur le même fujet , la
rendu le 8 de ce mois un Arrêt qui ordonne que
la Faculté de Médecine de l'Univerfité de cette
Ville fera tenue de s'affembler pour donner
un avis précis fur l'inoculation , fes avantages ou
inconvéniens , & fur les précautions auxquelles
il conviendroit d'affujettir ceux qui pratiqueroient
l'inoculation ou qui la recevroient , fup-.
pofé qu'elle dût être permife ou tolérée ; que
cet avis feroit remis au Procureur Général du
Roi, pour être communiqué à la Faculté de Théologie
, qui s'affemblera en conféquence , & donnera
fuivant les ulages , fon avis fur le même objet ,
lequel fera de même remis au Procureur- Général,
pour être pris par la Cour , ſur ces avis ,
telles conclufions qu'il appartiendra : en attendant
, la Cour défend provifoirement à toutes
perfonnes de pratiquer l'inoculation , & de fe faire
inoculer dans les Villes & Fauxbourgs du reffort
du Parlement, & à celles qui auroient été inoculées,
de communiquer avec d'autres perfonnes que
celles qui font néceffaires à leur foulagement ,
depuis le jour qu'elles auront été inoculées jufqu'au
délai de fix femaines après leur guérifon.
Le vingt - neuviéme Tirage de la Loterie de
l'Hôtel- de-Ville , s'eft fait le 2 Mai en la maniere
accoutumée. Le Lot de cinquante mille liv.
eſt échu au Numéro 26161 , celui de vingt mille
livres au Numéro 39981 , & les deux de dix mille
livres aux Numéros 38880 & 37127 .
Le 6 Juin , on a tiré la Loterie de l'Ecole Royale
Militaire. Les numéros fortis de la roue de for208
MERCURE DE FRANCE.
tune , font , 40 , 65 , 43 , 15 , 5s . Le prochain
tirage fe fera les Juillet.
Le 26 du mois dernier , le Roi fit dans la Plai
ne des Sablons la revue des Gardes Françoiſes &
des Gardes Suifles . Sa Majeſté paſſa dans les rangs,
& les deux Régimens défilérent devant Elle après.
avoir fait l'exercice. Madame la Dauphine , Mgr
le Duc de Berry , Mgr le Comte de Provence
Madame Adélaïde , Mefdames Sophie & Louiſe
ont affifté à cette revue , ainfi que le Prince de
Condé & le Prince de Lamballe .
Le Parlement ayant reçu , le 30 du mois der◄
nier , les Ordres du Roi par le Marquis de Dreux ,
Grand - Maître des Cérémonies , s'affembla le
lendemain 31 pour le Lit de Juſtice que Sa Majefté
avoir réfolu de tenir.
Vers les onze heures & demie du matin , le
Roi arriva ayant dans fon caroffe Monſeigneur
le Dauphin , Sa Majesté étoit accompagnée d'un
nombreux détachement de fes Gardes du Corps ,
du quartier des Gendarmes de fa Garde , de
celui des Chevaux-Légers & d'un détachement
JUILLET. 1763. 205
des Moufquetaires de chacune des deux Com
pagnies. Devant le Carroffe du Roi étoit le Vol
du Cabinet. Sa Majeſté deſcendit à là Sainte Chapelle
, où le Chancelier s'étoit rendu , Elle étoit
accompagnée du nombre ordinaire de Confeillers
d'Etat & des Maîtres des Requêtes : les Maré
chaux de France y étoient pareillement affemblés
, ainfi que les Chevaliers des Ordres , les'
Gouverneurs & Lieutenans- Généraux de Province ,
nommés par Sa Majefté pour avoir l'honneur
de l'accompagner: Le Duc d'Orléans , le Duc
de Chartres , le Prince de Condé , le Comte de
Clermont , le Prince de Conti & le Comte de
la Marche y avoient auffi devancé Sa Majesté.
Le Roi précédé de fa Cour , du Roi d'Armes &
des Hérauts , monta les degrés au fon des trompettes
, Hautbois , Fifres & Tambours de l'Ecurie
& de la Chambre. Deux Huiffiers de la Chambre
portoient leurs Maffes devant Sa Majesté.
Lorfque le Roi eut entendu la Meffe , qui fut
célébrée par un de fes Chapelains , quatre Préfidens
& fix Confeillers , députés par le Parle
ment , vinrent recevoir Sa Majefté , & la conduifirent
à la Grand'Chambre. Le Roi s'étant
affis fur fon Trône , & les féances ayant été
prifes , Sa Majesté fit enregiftrer deux Edits &
une Déclaration . Le Roi fortit enfuite dans le
même ordre qu'il étoit entré.
Sa Majefté trouva , ainfi qu'à fon arrivée , les
Gardes Françoifes & Suiffes qui formoient une
double haye dans les rues , fur le Pont- Neuf
& fur les Quais , depuis le Palais jufqu'à l'extrémité
du Quai des Thuilleries .
Les Pairs qui ont affifté à ce Lit de Juftice ,
font l'Archevêque Duc de Rheims , l'Evêque Duc
de Langres , l'Evêque Comte de Noyon , les Ducs
206 MERCURE DE FRANCE .
de Sully , de Luynes , de Briffac , de Richelieu ,
de Rohan- Chabot , de Mortemart , de Trefmes
de Saint -Cloud , de Firs-James , de Chaulnes
de Rohan-Rohan , de Villars - Brancas , de Valentinois
, de Biron , de la Valliere , d'Aiguillon ,
de Fleury , de Duras . de la Vauguyon , de
Choifeul & de Praflin. Les Maréchaux de Balincourt
, Clermont - Tonnerre , d'Eftrées & de
Contades y ont eu féance
étant entrés avec
le Roi.
Le Prince de Rochefort nommé pour repréfenter
en cette occafion , le Grand Ecuyer de
France , a porté l'Epée Royale .
On a appris ici la mort de Marie- Victoire - Anne
de Savoye , titrée Mlle de Carignan , décédée
le 18 du mois dernier.
Cette Princefle née le 12 Février 1687 , étoit
fille d'Emmanuel- Philbert-Amédée de Savoye ,
Prince de Carignan en Piémont , mort le 23.
Avril 1709 , & d'Ange- Carherine d'Eft-Modene,
morte le 18 Juillet 1712 , & Soeur de Victor-
Amédée , Prince de Carignan , mort le 4 Août
1741 , Père de Louis - Victor-Amédée- Jofeph, aujourd'hui
Premier Prince du Sang de Sardaigne
& Prince de Carignan , & avoit pour Ayeul Thomas
François de Savoye , Prince de Carignan
l'un des fils de Charles- Emmanuel I. du nom ,
Duc de Savoye , furnommé le Grand , & Frère
pumé de Victor- Amédée , Duc de Savoye , Bif-
Ayeul de Sa Majefté le Roi de Sardaigne actuellement
régnant.
•
Le Lieutenant Général de Police & le Subfticus
du Procureur Général du Roi au Châteler , ayant .
repréſenté au Parlement , qu'il s'élevoit dans le
Public un murmure général , contre l'indifcrétion
de quelques-uns des partfans de l'inoculation de
JUILLET. 1763. 207
la petite vérole , contre les Inoculateurs & contreceux
qui , en attendant l'effet de l'Inoculation
qu'ils ont reçue, reftent fans précaution dans la
Société, le Parlement , d'après ces confidérations
& l'expofé des Gens du Roi fur le même fujet , la
rendu le 8 de ce mois un Arrêt qui ordonne que
la Faculté de Médecine de l'Univerfité de cette
Ville fera tenue de s'affembler pour donner
un avis précis fur l'inoculation , fes avantages ou
inconvéniens , & fur les précautions auxquelles
il conviendroit d'affujettir ceux qui pratiqueroient
l'inoculation ou qui la recevroient , fup-.
pofé qu'elle dût être permife ou tolérée ; que
cet avis feroit remis au Procureur Général du
Roi, pour être communiqué à la Faculté de Théologie
, qui s'affemblera en conféquence , & donnera
fuivant les ulages , fon avis fur le même objet ,
lequel fera de même remis au Procureur- Général,
pour être pris par la Cour , ſur ces avis ,
telles conclufions qu'il appartiendra : en attendant
, la Cour défend provifoirement à toutes
perfonnes de pratiquer l'inoculation , & de fe faire
inoculer dans les Villes & Fauxbourgs du reffort
du Parlement, & à celles qui auroient été inoculées,
de communiquer avec d'autres perfonnes que
celles qui font néceffaires à leur foulagement ,
depuis le jour qu'elles auront été inoculées jufqu'au
délai de fix femaines après leur guérifon.
Le vingt - neuviéme Tirage de la Loterie de
l'Hôtel- de-Ville , s'eft fait le 2 Mai en la maniere
accoutumée. Le Lot de cinquante mille liv.
eſt échu au Numéro 26161 , celui de vingt mille
livres au Numéro 39981 , & les deux de dix mille
livres aux Numéros 38880 & 37127 .
Le 6 Juin , on a tiré la Loterie de l'Ecole Royale
Militaire. Les numéros fortis de la roue de for208
MERCURE DE FRANCE.
tune , font , 40 , 65 , 43 , 15 , 5s . Le prochain
tirage fe fera les Juillet.
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Résumé : De PARIS, le 13 Juin 1763.
Le 26 mai 1763, le roi passa en revue les Gardes Françaises et les Gardes Suisses à la Plaine des Sablons en présence de plusieurs membres de la famille royale, dont Madame la Dauphine, Mgr le Duc de Berry, Mgr le Comte de Provence, Madame Adélaïde, Mesdames Sophie et Louise, ainsi que le Prince de Condé et le Prince de Lamballe. Le 30 mai, le Parlement reçut les ordres du roi transmis par le Marquis de Dreux et se réunit le lendemain pour un Lit de Justice. Le roi, accompagné du Dauphin et d'un détachement de ses Gardes du Corps, des Gendarmes, des Chevaux-Légers et des Mousquetaires, fut accueilli par le Chancelier et divers dignitaires à la Sainte-Chapelle. Après une messe, il se rendit à la Grand'Chambre où il fit enregistrer deux édits et une déclaration. Les Pairs présents incluaient plusieurs archevêques, évêques et ducs, ainsi que les maréchaux de Balincourt, Clermont-Tonnerre, d'Estrées et de Contades. Le Prince de Rochefort porta l'Épée Royale. On annonça également la mort de Marie-Victoire-Anne de Savoie, titrée Mlle de Carignan, décédée le 18 mai. Elle était la fille d'Emmanuel-Philibert-Amédée de Savoie et d'Ange-Catherine d'Este-Modène. Le Lieutenant Général de Police et le Substitut du Procureur Général du Roi informèrent le Parlement des murmures publics contre l'inoculation de la petite vérole. Le Parlement ordonna à la Faculté de Médecine de se réunir pour évaluer les avantages et inconvénients de l'inoculation et les précautions à prendre. En attendant, l'inoculation fut provisoirement interdite. Le 2 mai, le vingt-neuvième tirage de la Loterie de l'Hôtel-de-Ville eut lieu, attribuant les lots de 50 000, 20 000 et 10 000 livres aux numéros 26161, 39981, 38880 et 37127. Le 6 juin, la Loterie de l'École Royale Militaire fut tirée, avec les numéros 40, 65, 43, 15 et 55 sortis de la roue de fortune.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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38
p. *203-203
De LONDRES, le 16 Août 1763.
Début :
Ce matin, entre dix & onze heures, la Reine est accouchée [...]
Mots clefs :
Naissance, Reine, Prince, Angleterre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De LONDRES, le 16 Août 1763.
De LONDRES , le 16 Août 1763.
Ce matin , entre dix & onze heures , la Reine
eft accouchée fort heureuſement d'un Prince.
Ce matin , entre dix & onze heures , la Reine
eft accouchée fort heureuſement d'un Prince.
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39
p. 174
De LISBONNE, le 27 Septembre 1763.
Début :
La Princesse du Brésil est accouchée hier très-heureusement d'un Prince. [...]
Mots clefs :
Naissance, Prince, Princesse, Brésil
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texteReconnaissance textuelle : De LISBONNE, le 27 Septembre 1763.
De LISBONNE , le 27 Septembre 1763.
La Princeffe du Bréfil eft accouchée hier très
reufement d'un Prince.
La Princeffe du Bréfil eft accouchée hier très
reufement d'un Prince.
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