Résultats : 36 texte(s)
Accéder à la liste des mots clefs.
Détail
Liste
1
p. 224-253
Ce qui s'est passé en Allemagne entre l'Armée du Roy & celle de l'Empereur. [titre d'après la table]
Début :
Pendant que plus de vingt Puissances Souveraines liguées contre nous [...]
Mots clefs :
Prince Charles, Prince d'Orange, Troupes, Ennemis, Bataille, Maréchal de Créquy, Armée, Ministres, Désertion, Canon, Soldats, Cavalier, Chevaux, Allemands
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Ce qui s'est passé en Allemagne entre l'Armée du Roy & celle de l'Empereur. [titre d'après la table]
Pendant que plus de vingt Puiſſances Souveraines liguées contre nous,amaſſoient de toutes parts un nombre infiny de Troupes , celles de France qui avoient déja pris trois des plus fortes Places de l'Europe, &
O iij
162 LE MERCVRE
gagné un Bataille, eſtoient das des Quartiers de rafraîchiſſement. On les croyoit fort di- minuées par les fatigues de tant de Sieges entrepris dans une ſaiſon rigoureuſe,&toutes les Gazettes ne parloient que de Levées & de Jonctions de
Troupes ennemies qui ſe fai- foient de tous coſtez. On ne
diſoit rien des noſtres ; il n'y avoit pas mefme d'apparence que nous puſſions eſtre affez forts pour nous oppoſer au Prince Charles. Cependant on a veu tout d'un coup par enchantement , Monfieur leMaréchal deCréquy en état de luy tenir teſte , tandis que
Mõſieurde Luxembourg avoit en Flandre une Armée auſſi
nombreuſe que celle que nous avons en Allemagne. Ces Ar
comme
GALANT. 163 mées ne manquent de rien , &
l'admirable prévoyace duRoy eſt ſi bien fecondée par le zele desMiniſtres qui executentſes ordres , que tout ce qui eſt ne- ceſſaire pour les faire ſubſiſter s'y trouve toûjours en abon- dance. Voila ce qui nous facilite tantdeglorieuſes conque- ſtes , & qui nous fait arreſter ſans peine le torrent oppoſé de tant de Troupes. Voyons les mouvemens de l'Armée de
l'Empereur depuis trois mois que le Prince Charles qui la commande a fait l'ouverture
de la Campagne. Elle estoit à
trois lieuësdeMetsdésle commencement de Juin , &dés ce temps-là Monfieur le Maref- chal de Créquy commença à
la combattre & à la ruiner par ſes Partis &par ſes divers mou-
164 LE MERCVRE
vemens.Le Prince Charles qui avoit réſolu de tenter quelque choſe de grand, paſſa la Seille la nuit du dix au onze de ce
-meſme mois , & vint camper du coſté de noſtre General ,
mais ce ne fut que pour y voir fon Armée dans l'extréme neceffité de toutes choſes pendat le long ſejour qu'elle y fit , &
pour donner lieu à un nombre infiny de Partis de la détruire plus commodément.Apres que cePrince eutachevéde paffer,
Mª de la Fite arriva dés le foir
meſme aupres de Monfieur le Mareſchal de Créquy avec un Détachement des Gardes du
Corps , de Gensd'armes , & de Chevaux-Legers de la Garde.
Le Prince Charles quine ſe ſe- roit pas hazardé à paſſer la Ri- viere, s'il euſt eſté avertyde ce
GALANT. 165
ra
Pul
ect
es
&
Fant
fel
Ja R
Secours, n'en reçeut la nouvel- le qu'avec un chagrin mortel.
Il vit bien qu'il luyſeroit diffi
cile de rien entreprendre , M
de Créquy eſtant preſque auffi fort que luy; mais comme il luy auroit eſté honteuxde fai- re voir qu'il avoit de méchans Eſpions, ou plutoſt qu'il n'en avoit point , il aima mieux fai- re bonne contenance dans fon
Poſte , que de s'en retourner furſes pas. C'eſt oùſon Armée apenſé périr, c'eſt où elle a tant manqué de Fourages , & tant mangédePain poury &de mé- chans Gâteaux. La neceffité y
eſtoit fi grande,qu'on endiſtri- buoit qu'un pour quatre Sol- dats. Ileſt mefme ſouvent arrivé que le Pain manquanten- tierement , elle n'a mangé que
de la Vache. Il eſt vray que
166 LE MERCVRE
l'on y a quelquefois donné quelques Eſcalins au lieu de Pain; mais ſi cet argent a em- peſché les plus ſeditieux de crier , il n'a pas empeſché de mourir de faim ceux à qui un fi foible ſecours ne pouvoit faire trouver dequoy manger.
Tant que le Prince Charles a
demeuré dans ce Poſte,quatre choſes ont ruiné ſon Armée;
laDeſertion, nos Partis,le man- que de Pain , & les Païfans qui prenoient tous ceux qui s'e- cartoient pour en chercher.
Les Marchez &les Places pu- bliques de Mets eſtoient rem- plis de leurs Chevaux qui ſe donnoient à fort grand mar- ché. Cefutdans ce temps que M. le Marefchal de Créquy fit faire à fon Armée ce beau
mouvement qui embaraſſa tat
GALANT. 167
les Ennemis.Il fit ſi bien placer fon Canon , qu'il leur tua plus de huit ou neuf cens Hommes , avant qu'on puſt enten-- dre le leur , qui ne fut en état de tirer que plus de trois heu- res apres le noſtre. Ils firent connoiſtre qu'ils n'avoient aucun deſſein de ſe battre , puis qu'ils repaſſerent la Seille. On trouva dans leur Camp quan- tité de Soldats qu'ils avoient enterrez,afin qu'on ne s'apper- çût pas de leur perte, & ils l'a- voient fait fi fort à la haſte ,
qu'ils leur avoient laiſſé leurs
habits & leur argent , dont on trouva méme une fomme conſidérable dans les Bottes d'un
Cavalier. On les pourſuivit dans leur Retraite,où ils perdi- rent encor beaucoup de mon- de. Cette pourfuite , & leur
168 LE MERCVRE
Canon , qu'ils tirerent à noſtre
exemplequelque temps aupa- ravant , nous coûterent auffi
quelques Gens. Nous perdî- mes M de Préfonval Lieutenant Colonel de la Couronne.
Quelques Gardesdu Corps fu- rent tuez , & deux Exempts bleſſez , qui fontM² de la Fou- chardiere & Mr Darmandaris.
Depuis ce temps les Ennemis ontſouvent changé de Pofte,
&Mr le Marefchal deCréquy a toûjours profité de leurs mouvemens. Ils eſtoient vis- àvis le Village d'Arancy , lors que ce vigilant Mareſchal ap- pritqu'ils attendoientungrand Convoy.Ilfit unDétachement
commandé par Mº de la Haye Lieutenant General , pour le furprendre. On leur tua plus dequatre cens Hommes, &on
leur
GALANT. 169
leurpritdumoins cent Charettes. Ceux qui ſe ſignalerent en cette occafion , furent Meffieurs les Marquis de Genlis &
de Renty,M le Comte deMo- reüil,M de la Fite, Mt le Comte d'Aubijoux , & M Marin.
M de la Haye y fut tué d'un coup deMouſquet. NosPartis ayant continue toûjours à les inquiéter , quatre Pieces de noſtre Canon chargées à cartouches, les incommoderent
fort aupres deMaleroy. Quelques jours apres comme onfui- voitleur marche avec l'ardeur
qui eſt ordinaire aux François,
M' le Chevalierd Eſtrades qui eſtoit Chefd'unParty de deux césChevaux, apperçeût quel- ques Troupesde leur Arriere- garde; il en fit avertir M. le
Comte de Maulevrier - ColTome V. P
170 LE MERCVRE bert, qui commandoit l'Aifle gauche. Ils'avança pour exa- minerla contenance des Ennemis, &les fit attaquer. Les Re- gimensdePortia &de Souches furent défaits. On découvrit
la queuë des Bagages, on ytua plus de deux cens Perſonnes,
onyfit centPrifonniers, & l'on pilla quantité deChariots. La Femme du Tréſorier del'Armée, quipar malheur ſe trou- va là dans fon Carroffe avec
d'autres Femmes, fut tuéedans
T'ardeur du Combat,fansqu'on ſceût meſme fi elle y eftoit.
Deux de nos Efcadrons , &
&quelquesDragons,plus avides de gloire que de bittin,
poufferentplus avant,&paf- ferent un Défilé. Ils furent
chargez par unCorps d'Enne- mis beaucoup plus conſidéra-
GALANT. 171
الاس
01
ble qu'ils n'eſtoient. Ils ſe retirerent enbon ordre, &ne perdirent pas trente Hommes.Les Ennemis n'oferent les pourſui- vre, &ils aimerent mieux laiffer emporteraux François tout ce qu'ils avoient pillé, qued'a- vancer pour les combattre, &
les empeſcher de profiter de | leur butin, Depuis cetemps-là le Prince Charles ſe promene,
&il ſemble qu'il ait enviede venir voir le Prince d'Orange,
qui n'eſt pas plus avancé que luy , quoy que l'un & l'autre foit en campagne depuis pres de trois mois. Je nedoute point qu'ils n'ayent entrepris quel- que choſe quand vous rece vrez ma Lettre , puis que je la finis dans le temps où ils doi- ventdu moins faire voirqu'ils
ell
20
n'ont 1 pas aſſemblé tant de
Pij
172 LE MERCVRE Troupes dans le ſeul deſſein
de nous obſerver. Le Prince
Charles n'auroit pas attendu fi long-temps à ſe déclarer , ſi M
le Mareſchal de Créquy l'euft laiſſé plus en repos mais ſa vi- gilance a toûjours détruit ce que ce Prince s'eſtoit propoſe de faire. Quand ils ont eſte ſé- parez, ila tenudes Ponts prefts pourfaire paſſer ſes Partis ; &
dans quelque Camp que les Ennemis ayent eſté , ils en ont toûjours eſté fatiguez . Ses Or- dres s'executoient avec tant de
ponctualité ; qu'on les a veu quelquefois inquiétez enmef- me temps par les Partis de Na- cy , par ceux des Lieux les plus proches , par les Détachemens de l'Armée , & par les Païfans.
C'eſt ainſi qu'on fait périr les Troupes les plus nombreuſes,
GALANT. 173
1
G
&que ſans rien perdre on ga- gne ſouventplus que fi ondo- noit une Bataille. M² de Beaufort Mareſchal de Camp,pouf- ſa une fois leur grande Garde - juſques à leurs Tentes. Quar torze Cuiraſſiers furent pris une autre fois par un Party de
vingt-cinq contre vingt-cinq.
Un LieutenantdeFufiliers,fortifiédesPaïſansduPaïs Meſſin,
attaqua &batit quelque temps apres un Convoy de Vin &
d'Eau de vie , dont il enfonça tous les Tonneaux ; & le MajorduRegimentdeCominges,
avec tres-peu de Gens , avoit défait quelques jours aupara- vant quatre-vingt Cuiraffiers,
dont la plupart furent faits pri- fonniers.; Je pourrois vous raconter encor unnombre infiny d'actions de vigueur qui ont
Piij
174 LE MERCVRE
८
eſté faites par nosPartis ; mais je vous veux ſeulement parler dedeuxdont les circonstances
font affez curieuſes. Le Prince
Charles s'ennuyant de ne rien faire , & ne voulant pas que l'on s'aperçeut de ſon chagrin,
refolut de donner le Bal aux
principales Dames de fon Ar- mée. Cela ne doit pas vous étonner, les Allemans ne mar- chent guéres qu'en Famille.
Comme il n'eſt point de Nation qui n'imite les François en quelque choſe , les Allemans pour pour paroiſtre avec plus de galanterie, voulurent avoir de nos Habits les plus à la mo- de,&le Prince Charles en envoya demander par unTrom- pete au Lieutenant de Royde Mets , lequel par une honne- ſteté toute Françoiſe luy en-
GALANT. 175
هللا
que
A
10.1
N
DIS
arc
ne
ronoyd
nne
yen
:
voya auſſi-toſt des Tailleurs ,
avec les Etofes les plus nou- velles qu'on puſt trouver. Les Habits ſe firent, &on commeça le Bal. M de Créqui prit ce temps pour leur donner un au- tre BLIOTHEQUR
divertiſſement. Il envoya Iron quelques Troupes qui donne rent l'alarme dans l'un de leurs
Quartiers, & qui eurent ordre
de ſe retirer d'une maniere qui pût engager les Ennemis à les pour ſuivre. Ses Ordres furent ponctuellement executez ; &
comme il avoit fait placer plu- fieurs Canons chargez à car- touches dans un endroitoù les
Ennemis ne croyoient pas qu'il y en euſt , la plupart de ceux qui pourſuivirentnos Gens fu- rent tuez ou bleffez ; & l'alarmes s'eſtant répaduëdans tout le Gamp , le Bal fut tellement
LYON
176 LE MERCVRE
troublé , que les Allemans oublierent leurs Dances , &
ne ſceurent plus faire de pas que pour décamper quel- ques jours apres. Le Canon ne leur fut pas moins fatal le jour que leurs Fourageurs fu- rent enlevez. La plupart des Officiers qui avoient des Va- lets au fourage, s'attrouperent pour les venir défendre ; mais ils n'oferent avancer , & l'on
euſtditqu'ils n'eſtoient venus que pour eſtre témoins de la perte de leurs Chevaux. Ils ne
s'en retournerent pourtantpas tous , &pluſieurs furent tuez par noſtre Canon. Vous direz peut- eſtre que c'eſt n'avoir rien fait, que de n'avoir ni pris de Places, ni gagné deBatail- les ; mais apres les premiers
avantages que nous avons
GALANT. 177
1
remportez , n'est-il pas bien glorieux d'empefcher tant de Puiſſances unies d'executer
aucune dn leurs entrepriſes ?
De pareils emplois demandent le Capitaine le plus confom- mé ; ils ont dequoy exercer toute fon experience , & de- quoy le rendre vigilant, eſtant obligé de faire des mouve- mens continuels , & de pren- dre garde en meſme temps de n'en faire aucun de faux.C'eſt
par là qu'on ruine infenfible- ment les Armées ennemies
mais il ne ſuffit pas pour cela d'avoir du cœur, il faut avoir
de l'eſprit & de l'adreſſe , &
que la tefte agiffe plus que le bras. Mr de Créquy a montré depuis trois mois que toutes
ces choſes ne luy eſtoient pas inconnuës , & qu'il ſçavoit
178 LE MERCVRE joindre la conduite & la pru- dence à la haute valeur dont
il a donné des marques dans un nombre infini d'occaſions,
&dans la diverſité des mouvemens qu'il a faits. Comme il ne s'en eſt pas trouvé unde faux, on ne peut marcher plus glorieuſement qu'il fait ſur les traces de M'de Turenne. Il l'a
imité en toutes chofes,&toutes les Lettres nous affurent
qu'il ne s'eſt pas fait moins ai- mer dans toutes les Troupes qu'il commande,qu'il s'est fait craindre parmi celles qui lui font oppoſées.
'La feconde Armée d'Allemagne , compoſée des Trou- pes des Cercles , n'a pas fait plus de progrez que celle du Prince Charles. M de Monclar l'obſerve de prés, &M' le
GALANT. 179
Marquis de Bligny l'eſt allé joindre avec unDétachement de dix Eſcadrons. Il y a prés de trois mois que le Prince
dOrange aſſemble la fienne,
■ & qu'il attend celle de dix ou
douze Alliez qui marche de- puis long-temps. Ila parujuf- ques icyque toutes cesTrou- pes n'estoient en campagne que pour arrefterles courſesde delaGarnifon de Maftric ; ce
qu'elles n'ont toutefois pû fai- re. Mr de la Motte avec un
Détachement, a eſté prendre force Beſtiaux du coſtede Namur; &M le Duc de Luxembourg a fouragé long-temps juſques aux Portes de Bruxel- les.Il aenvoyéquelques Troupes aux environs d'Oudenarde ſous le commandement de
Mellieurs dela Motte &d'Au
ZB
180 LE MERCVRE
ger. Le Prince d'Orange com- mença à décamper le 15.&M²
de Luxembourg le 16. Je ne
vous en diray rien davantage dans cette Lettre, quand mef- me on entreprendroit quelque choſe avantqu'elle fut fermée,
afin de vous en parler au long dans la premiere que je vous écriray,&de ne vous enpoint faire le détailàdeux fois
O iij
162 LE MERCVRE
gagné un Bataille, eſtoient das des Quartiers de rafraîchiſſement. On les croyoit fort di- minuées par les fatigues de tant de Sieges entrepris dans une ſaiſon rigoureuſe,&toutes les Gazettes ne parloient que de Levées & de Jonctions de
Troupes ennemies qui ſe fai- foient de tous coſtez. On ne
diſoit rien des noſtres ; il n'y avoit pas mefme d'apparence que nous puſſions eſtre affez forts pour nous oppoſer au Prince Charles. Cependant on a veu tout d'un coup par enchantement , Monfieur leMaréchal deCréquy en état de luy tenir teſte , tandis que
Mõſieurde Luxembourg avoit en Flandre une Armée auſſi
nombreuſe que celle que nous avons en Allemagne. Ces Ar
comme
GALANT. 163 mées ne manquent de rien , &
l'admirable prévoyace duRoy eſt ſi bien fecondée par le zele desMiniſtres qui executentſes ordres , que tout ce qui eſt ne- ceſſaire pour les faire ſubſiſter s'y trouve toûjours en abon- dance. Voila ce qui nous facilite tantdeglorieuſes conque- ſtes , & qui nous fait arreſter ſans peine le torrent oppoſé de tant de Troupes. Voyons les mouvemens de l'Armée de
l'Empereur depuis trois mois que le Prince Charles qui la commande a fait l'ouverture
de la Campagne. Elle estoit à
trois lieuësdeMetsdésle commencement de Juin , &dés ce temps-là Monfieur le Maref- chal de Créquy commença à
la combattre & à la ruiner par ſes Partis &par ſes divers mou-
164 LE MERCVRE
vemens.Le Prince Charles qui avoit réſolu de tenter quelque choſe de grand, paſſa la Seille la nuit du dix au onze de ce
-meſme mois , & vint camper du coſté de noſtre General ,
mais ce ne fut que pour y voir fon Armée dans l'extréme neceffité de toutes choſes pendat le long ſejour qu'elle y fit , &
pour donner lieu à un nombre infiny de Partis de la détruire plus commodément.Apres que cePrince eutachevéde paffer,
Mª de la Fite arriva dés le foir
meſme aupres de Monfieur le Mareſchal de Créquy avec un Détachement des Gardes du
Corps , de Gensd'armes , & de Chevaux-Legers de la Garde.
Le Prince Charles quine ſe ſe- roit pas hazardé à paſſer la Ri- viere, s'il euſt eſté avertyde ce
GALANT. 165
ra
Pul
ect
es
&
Fant
fel
Ja R
Secours, n'en reçeut la nouvel- le qu'avec un chagrin mortel.
Il vit bien qu'il luyſeroit diffi
cile de rien entreprendre , M
de Créquy eſtant preſque auffi fort que luy; mais comme il luy auroit eſté honteuxde fai- re voir qu'il avoit de méchans Eſpions, ou plutoſt qu'il n'en avoit point , il aima mieux fai- re bonne contenance dans fon
Poſte , que de s'en retourner furſes pas. C'eſt oùſon Armée apenſé périr, c'eſt où elle a tant manqué de Fourages , & tant mangédePain poury &de mé- chans Gâteaux. La neceffité y
eſtoit fi grande,qu'on endiſtri- buoit qu'un pour quatre Sol- dats. Ileſt mefme ſouvent arrivé que le Pain manquanten- tierement , elle n'a mangé que
de la Vache. Il eſt vray que
166 LE MERCVRE
l'on y a quelquefois donné quelques Eſcalins au lieu de Pain; mais ſi cet argent a em- peſché les plus ſeditieux de crier , il n'a pas empeſché de mourir de faim ceux à qui un fi foible ſecours ne pouvoit faire trouver dequoy manger.
Tant que le Prince Charles a
demeuré dans ce Poſte,quatre choſes ont ruiné ſon Armée;
laDeſertion, nos Partis,le man- que de Pain , & les Païfans qui prenoient tous ceux qui s'e- cartoient pour en chercher.
Les Marchez &les Places pu- bliques de Mets eſtoient rem- plis de leurs Chevaux qui ſe donnoient à fort grand mar- ché. Cefutdans ce temps que M. le Marefchal de Créquy fit faire à fon Armée ce beau
mouvement qui embaraſſa tat
GALANT. 167
les Ennemis.Il fit ſi bien placer fon Canon , qu'il leur tua plus de huit ou neuf cens Hommes , avant qu'on puſt enten-- dre le leur , qui ne fut en état de tirer que plus de trois heu- res apres le noſtre. Ils firent connoiſtre qu'ils n'avoient aucun deſſein de ſe battre , puis qu'ils repaſſerent la Seille. On trouva dans leur Camp quan- tité de Soldats qu'ils avoient enterrez,afin qu'on ne s'apper- çût pas de leur perte, & ils l'a- voient fait fi fort à la haſte ,
qu'ils leur avoient laiſſé leurs
habits & leur argent , dont on trouva méme une fomme conſidérable dans les Bottes d'un
Cavalier. On les pourſuivit dans leur Retraite,où ils perdi- rent encor beaucoup de mon- de. Cette pourfuite , & leur
168 LE MERCVRE
Canon , qu'ils tirerent à noſtre
exemplequelque temps aupa- ravant , nous coûterent auffi
quelques Gens. Nous perdî- mes M de Préfonval Lieutenant Colonel de la Couronne.
Quelques Gardesdu Corps fu- rent tuez , & deux Exempts bleſſez , qui fontM² de la Fou- chardiere & Mr Darmandaris.
Depuis ce temps les Ennemis ontſouvent changé de Pofte,
&Mr le Marefchal deCréquy a toûjours profité de leurs mouvemens. Ils eſtoient vis- àvis le Village d'Arancy , lors que ce vigilant Mareſchal ap- pritqu'ils attendoientungrand Convoy.Ilfit unDétachement
commandé par Mº de la Haye Lieutenant General , pour le furprendre. On leur tua plus dequatre cens Hommes, &on
leur
GALANT. 169
leurpritdumoins cent Charettes. Ceux qui ſe ſignalerent en cette occafion , furent Meffieurs les Marquis de Genlis &
de Renty,M le Comte deMo- reüil,M de la Fite, Mt le Comte d'Aubijoux , & M Marin.
M de la Haye y fut tué d'un coup deMouſquet. NosPartis ayant continue toûjours à les inquiéter , quatre Pieces de noſtre Canon chargées à cartouches, les incommoderent
fort aupres deMaleroy. Quelques jours apres comme onfui- voitleur marche avec l'ardeur
qui eſt ordinaire aux François,
M' le Chevalierd Eſtrades qui eſtoit Chefd'unParty de deux césChevaux, apperçeût quel- ques Troupesde leur Arriere- garde; il en fit avertir M. le
Comte de Maulevrier - ColTome V. P
170 LE MERCVRE bert, qui commandoit l'Aifle gauche. Ils'avança pour exa- minerla contenance des Ennemis, &les fit attaquer. Les Re- gimensdePortia &de Souches furent défaits. On découvrit
la queuë des Bagages, on ytua plus de deux cens Perſonnes,
onyfit centPrifonniers, & l'on pilla quantité deChariots. La Femme du Tréſorier del'Armée, quipar malheur ſe trou- va là dans fon Carroffe avec
d'autres Femmes, fut tuéedans
T'ardeur du Combat,fansqu'on ſceût meſme fi elle y eftoit.
Deux de nos Efcadrons , &
&quelquesDragons,plus avides de gloire que de bittin,
poufferentplus avant,&paf- ferent un Défilé. Ils furent
chargez par unCorps d'Enne- mis beaucoup plus conſidéra-
GALANT. 171
الاس
01
ble qu'ils n'eſtoient. Ils ſe retirerent enbon ordre, &ne perdirent pas trente Hommes.Les Ennemis n'oferent les pourſui- vre, &ils aimerent mieux laiffer emporteraux François tout ce qu'ils avoient pillé, qued'a- vancer pour les combattre, &
les empeſcher de profiter de | leur butin, Depuis cetemps-là le Prince Charles ſe promene,
&il ſemble qu'il ait enviede venir voir le Prince d'Orange,
qui n'eſt pas plus avancé que luy , quoy que l'un & l'autre foit en campagne depuis pres de trois mois. Je nedoute point qu'ils n'ayent entrepris quel- que choſe quand vous rece vrez ma Lettre , puis que je la finis dans le temps où ils doi- ventdu moins faire voirqu'ils
ell
20
n'ont 1 pas aſſemblé tant de
Pij
172 LE MERCVRE Troupes dans le ſeul deſſein
de nous obſerver. Le Prince
Charles n'auroit pas attendu fi long-temps à ſe déclarer , ſi M
le Mareſchal de Créquy l'euft laiſſé plus en repos mais ſa vi- gilance a toûjours détruit ce que ce Prince s'eſtoit propoſe de faire. Quand ils ont eſte ſé- parez, ila tenudes Ponts prefts pourfaire paſſer ſes Partis ; &
dans quelque Camp que les Ennemis ayent eſté , ils en ont toûjours eſté fatiguez . Ses Or- dres s'executoient avec tant de
ponctualité ; qu'on les a veu quelquefois inquiétez enmef- me temps par les Partis de Na- cy , par ceux des Lieux les plus proches , par les Détachemens de l'Armée , & par les Païfans.
C'eſt ainſi qu'on fait périr les Troupes les plus nombreuſes,
GALANT. 173
1
G
&que ſans rien perdre on ga- gne ſouventplus que fi ondo- noit une Bataille. M² de Beaufort Mareſchal de Camp,pouf- ſa une fois leur grande Garde - juſques à leurs Tentes. Quar torze Cuiraſſiers furent pris une autre fois par un Party de
vingt-cinq contre vingt-cinq.
Un LieutenantdeFufiliers,fortifiédesPaïſansduPaïs Meſſin,
attaqua &batit quelque temps apres un Convoy de Vin &
d'Eau de vie , dont il enfonça tous les Tonneaux ; & le MajorduRegimentdeCominges,
avec tres-peu de Gens , avoit défait quelques jours aupara- vant quatre-vingt Cuiraffiers,
dont la plupart furent faits pri- fonniers.; Je pourrois vous raconter encor unnombre infiny d'actions de vigueur qui ont
Piij
174 LE MERCVRE
८
eſté faites par nosPartis ; mais je vous veux ſeulement parler dedeuxdont les circonstances
font affez curieuſes. Le Prince
Charles s'ennuyant de ne rien faire , & ne voulant pas que l'on s'aperçeut de ſon chagrin,
refolut de donner le Bal aux
principales Dames de fon Ar- mée. Cela ne doit pas vous étonner, les Allemans ne mar- chent guéres qu'en Famille.
Comme il n'eſt point de Nation qui n'imite les François en quelque choſe , les Allemans pour pour paroiſtre avec plus de galanterie, voulurent avoir de nos Habits les plus à la mo- de,&le Prince Charles en envoya demander par unTrom- pete au Lieutenant de Royde Mets , lequel par une honne- ſteté toute Françoiſe luy en-
GALANT. 175
هللا
que
A
10.1
N
DIS
arc
ne
ronoyd
nne
yen
:
voya auſſi-toſt des Tailleurs ,
avec les Etofes les plus nou- velles qu'on puſt trouver. Les Habits ſe firent, &on commeça le Bal. M de Créqui prit ce temps pour leur donner un au- tre BLIOTHEQUR
divertiſſement. Il envoya Iron quelques Troupes qui donne rent l'alarme dans l'un de leurs
Quartiers, & qui eurent ordre
de ſe retirer d'une maniere qui pût engager les Ennemis à les pour ſuivre. Ses Ordres furent ponctuellement executez ; &
comme il avoit fait placer plu- fieurs Canons chargez à car- touches dans un endroitoù les
Ennemis ne croyoient pas qu'il y en euſt , la plupart de ceux qui pourſuivirentnos Gens fu- rent tuez ou bleffez ; & l'alarmes s'eſtant répaduëdans tout le Gamp , le Bal fut tellement
LYON
176 LE MERCVRE
troublé , que les Allemans oublierent leurs Dances , &
ne ſceurent plus faire de pas que pour décamper quel- ques jours apres. Le Canon ne leur fut pas moins fatal le jour que leurs Fourageurs fu- rent enlevez. La plupart des Officiers qui avoient des Va- lets au fourage, s'attrouperent pour les venir défendre ; mais ils n'oferent avancer , & l'on
euſtditqu'ils n'eſtoient venus que pour eſtre témoins de la perte de leurs Chevaux. Ils ne
s'en retournerent pourtantpas tous , &pluſieurs furent tuez par noſtre Canon. Vous direz peut- eſtre que c'eſt n'avoir rien fait, que de n'avoir ni pris de Places, ni gagné deBatail- les ; mais apres les premiers
avantages que nous avons
GALANT. 177
1
remportez , n'est-il pas bien glorieux d'empefcher tant de Puiſſances unies d'executer
aucune dn leurs entrepriſes ?
De pareils emplois demandent le Capitaine le plus confom- mé ; ils ont dequoy exercer toute fon experience , & de- quoy le rendre vigilant, eſtant obligé de faire des mouve- mens continuels , & de pren- dre garde en meſme temps de n'en faire aucun de faux.C'eſt
par là qu'on ruine infenfible- ment les Armées ennemies
mais il ne ſuffit pas pour cela d'avoir du cœur, il faut avoir
de l'eſprit & de l'adreſſe , &
que la tefte agiffe plus que le bras. Mr de Créquy a montré depuis trois mois que toutes
ces choſes ne luy eſtoient pas inconnuës , & qu'il ſçavoit
178 LE MERCVRE joindre la conduite & la pru- dence à la haute valeur dont
il a donné des marques dans un nombre infini d'occaſions,
&dans la diverſité des mouvemens qu'il a faits. Comme il ne s'en eſt pas trouvé unde faux, on ne peut marcher plus glorieuſement qu'il fait ſur les traces de M'de Turenne. Il l'a
imité en toutes chofes,&toutes les Lettres nous affurent
qu'il ne s'eſt pas fait moins ai- mer dans toutes les Troupes qu'il commande,qu'il s'est fait craindre parmi celles qui lui font oppoſées.
'La feconde Armée d'Allemagne , compoſée des Trou- pes des Cercles , n'a pas fait plus de progrez que celle du Prince Charles. M de Monclar l'obſerve de prés, &M' le
GALANT. 179
Marquis de Bligny l'eſt allé joindre avec unDétachement de dix Eſcadrons. Il y a prés de trois mois que le Prince
dOrange aſſemble la fienne,
■ & qu'il attend celle de dix ou
douze Alliez qui marche de- puis long-temps. Ila parujuf- ques icyque toutes cesTrou- pes n'estoient en campagne que pour arrefterles courſesde delaGarnifon de Maftric ; ce
qu'elles n'ont toutefois pû fai- re. Mr de la Motte avec un
Détachement, a eſté prendre force Beſtiaux du coſtede Namur; &M le Duc de Luxembourg a fouragé long-temps juſques aux Portes de Bruxel- les.Il aenvoyéquelques Troupes aux environs d'Oudenarde ſous le commandement de
Mellieurs dela Motte &d'Au
ZB
180 LE MERCVRE
ger. Le Prince d'Orange com- mença à décamper le 15.&M²
de Luxembourg le 16. Je ne
vous en diray rien davantage dans cette Lettre, quand mef- me on entreprendroit quelque choſe avantqu'elle fut fermée,
afin de vous en parler au long dans la premiere que je vous écriray,&de ne vous enpoint faire le détailàdeux fois
Fermer
Résumé : Ce qui s'est passé en Allemagne entre l'Armée du Roy & celle de l'Empereur. [titre d'après la table]
Le texte relate les opérations militaires entre les forces françaises et une coalition de plus de vingt puissances souveraines. Malgré les difficultés et les fatigues des sièges, les armées françaises, dirigées par le maréchal de Créquy et le duc de Luxembourg, ont réussi à résister aux assauts ennemis. Les armées françaises bénéficient d'un approvisionnement efficace grâce à la prévoyance du roi et au zèle des ministres. Le prince Charles, commandant l'armée de l'Empereur, a tenté plusieurs actions, mais a été contré par les mouvements stratégiques et les partis de Créquy. Les troupes du prince Charles ont souffert de désertions, de manque de ravitaillement et de harcèlement constant par les forces françaises. Plusieurs actions notables, comme l'attaque d'un convoi et la perturbation d'un bal organisé par le prince Charles, illustrent la vigilance et l'efficacité des troupes françaises. Le maréchal de Créquy a démontré une grande expérience et une vigilance constante, affaiblissant progressivement les armées ennemies sans livrer de batailles décisives. La deuxième armée d'Allemagne, composée des troupes des Cercles, n'a pas non plus fait de progrès significatifs, étant étroitement surveillée par les forces françaises. Le prince d'Orange et ses alliés sont également en campagne, mais sans succès notable. Par ailleurs, l'auteur mentionne qu'il ne fournira pas davantage de détails dans la lettre actuelle, préférant en discuter plus en profondeur dans la prochaine lettre afin d'éviter un double récit et de traiter le sujet de manière exhaustive.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
2
p. 40-50
A L'AUTHEUR DU MERCURE GALANT, PREMIERE LETTRE Sur la Conversion de Mr Vignes, Ministre de Grenoble. A Grenoble ce 9. Decembre 1684.
Début :
Monsieur, Je viens d'apprendre que Monsieur Vignes, qui a [...]
Mots clefs :
Religion prétendue réformée, Croyance, Ennemis, Ministres, Conversion, Concile, Église, Honneur, Dogme, Salut, Prêcher, Erreur, Albigeois, Temple, Brebis égarée, Apôtres, Évangile, Cérémonies
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A L'AUTHEUR DU MERCURE GALANT, PREMIERE LETTRE Sur la Conversion de Mr Vignes, Ministre de Grenoble. A Grenoble ce 9. Decembre 1684.
Apres vous avoir parlé fore
amplement dans deux de mes
Lettres , des avantages que les
Vénitiens ont remporté fur les
Turcs cette derniere Campagne,
38
MERCURE
je vous envoye le Plan de Sainte
Maure , & de Prévefa , qui font
les deux principales Places que
leurs Armes ont foûmiſes . Vous
levez d'autant plus eftimer ce
Plan , que je l'ay reçû d'un illuftre
Commandeur de Malte , qui
l'a fait dreffer fur les Lieux mêmes
. Ainfi il eft tres- fidelle ,
ayant efté gravé fur un Original,
& non fur ces Deffeins , qui à
force de paffer de main en main ,
& d'eftre copiez par diférentes
Perfonnes, font presque toûjours
défectueux . Si je vous l'envoye
un peu tard ,fongez que ces fortes
de chofes , fur tout quand elles
viennent de loin , ne peuvent
eftre données dans le même
temps qu'on en donne le détail ;
& mefme je mefouviens de vous
en avoir envoyé quelquefois
apres une annéeentiere. J'ay acGALANT.
39
coûtumé de faire graver les Jettons
nouveaux dans ce mois . le
les remets cependant jufqu'au
mois prochain , afin d'avoir plus
de temps à m'informer des Deviles.
Je vous promis la derniere fois ,
de vous entretenir de la Converfion
de Monfieur Alexandre Vignes
, fameux Miniftre de la Religion
Prétenduë Reformée de la
Ville de Grenoble . Ie ne puis
mieux m'acquiter de ma promeffe
, qu'en vous envoyant deux
Lettres qu'on m'a fait l'honneur
de m'adreffer fur ce fujet . Ie les
ay reçues imprimées; & on ne les
auroit pas rendues publiques.
dans le Lieu meſme où cet ancien
& fçavant Miniftre a fait Abjuration
, fielles contenoient autre
choſe que des veritez. Le Parlement
& la Chambre des Comp40
MERCURE
tes , qui ont affifté en Corps à
cette Cerémonie , en font une
particularité fort remarquable.
amplement dans deux de mes
Lettres , des avantages que les
Vénitiens ont remporté fur les
Turcs cette derniere Campagne,
38
MERCURE
je vous envoye le Plan de Sainte
Maure , & de Prévefa , qui font
les deux principales Places que
leurs Armes ont foûmiſes . Vous
levez d'autant plus eftimer ce
Plan , que je l'ay reçû d'un illuftre
Commandeur de Malte , qui
l'a fait dreffer fur les Lieux mêmes
. Ainfi il eft tres- fidelle ,
ayant efté gravé fur un Original,
& non fur ces Deffeins , qui à
force de paffer de main en main ,
& d'eftre copiez par diférentes
Perfonnes, font presque toûjours
défectueux . Si je vous l'envoye
un peu tard ,fongez que ces fortes
de chofes , fur tout quand elles
viennent de loin , ne peuvent
eftre données dans le même
temps qu'on en donne le détail ;
& mefme je mefouviens de vous
en avoir envoyé quelquefois
apres une annéeentiere. J'ay acGALANT.
39
coûtumé de faire graver les Jettons
nouveaux dans ce mois . le
les remets cependant jufqu'au
mois prochain , afin d'avoir plus
de temps à m'informer des Deviles.
Je vous promis la derniere fois ,
de vous entretenir de la Converfion
de Monfieur Alexandre Vignes
, fameux Miniftre de la Religion
Prétenduë Reformée de la
Ville de Grenoble . Ie ne puis
mieux m'acquiter de ma promeffe
, qu'en vous envoyant deux
Lettres qu'on m'a fait l'honneur
de m'adreffer fur ce fujet . Ie les
ay reçues imprimées; & on ne les
auroit pas rendues publiques.
dans le Lieu meſme où cet ancien
& fçavant Miniftre a fait Abjuration
, fielles contenoient autre
choſe que des veritez. Le Parlement
& la Chambre des Comp40
MERCURE
tes , qui ont affifté en Corps à
cette Cerémonie , en font une
particularité fort remarquable.
Fermer
Résumé : A L'AUTHEUR DU MERCURE GALANT, PREMIERE LETTRE Sur la Conversion de Mr Vignes, Ministre de Grenoble. A Grenoble ce 9. Decembre 1684.
L'auteur d'une lettre relate les succès militaires des Vénitiens contre les Turcs lors d'une récente campagne. Il envoie des plans des places fortes de Sainte-Maure et de Préveza, conquises par les Vénitiens, dessinés sur place par un illustre commandeur de Malte, garantissant ainsi leur fidélité. L'auteur explique que les plans peuvent être envoyés avec retard en raison des délais de transmission des informations. Il mentionne également qu'il a l'habitude de graver les nouveaux jetons dans un certain mois, mais qu'il les retarde jusqu'au mois suivant pour obtenir plus de détails. Enfin, l'auteur promet de traiter la conversion d'Alexandre Vignes, un célèbre ministre de la religion réformée à Grenoble. Il envoie deux lettres imprimées sur ce sujet, contenant des vérités et rendues publiques avec l'appui du Parlement et de la Chambre des Comptes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
3
p. 7-14
Arrests du Conseil d'Etat, [titre d'après la table]
Début :
Il y a eu deux autres Arrests du Conseil d'Etat, l'un du [...]
Mots clefs :
Arrêt du Conseil d'État, Prétendus réformés, Ministres, Impôt, Requêtes, Députés, Consistoire, Chancelier
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Arrests du Conseil d'Etat, [titre d'après la table]
Il y a eu deux autres Arrefts
du Confeil d'Etat , l'un
du 8. Janvier , & l'autre du
17. du mefme mois. Le premier
porte , que les Prétendus
Réformez ayant fait tous
leurs efforts pour faire
faire
accorder
à leurs Miniftres l'exemption
de la Taille, telle qu'on
A iiij
8 MERCURE
l'a accordée aux Eccléfiaftiques
; & ayant réiteré leur
demande
non feulement
dans leurs Cahiers
de 1602 ,
la
1604 , 1608 , 1611 , 1619 , 1621,
& 1622 , mais encore par
Requeſte que leurs Députez
préfentérent à cet effet , Arreft
intervint le 17. Juillet 1624. par
lequel , conformément aux
Réponses faites fur ces Cahiers
, il fut ordonné que leurs
Miniftres joüiroient de l'exéption
des Tailles & autres
Impofitions pour leurs Meubles
, Penfions , & Gages feulement,
& qu'ils ne pourroient
GALANT. 9
eftre Impofez qu'à proportion
de leurs Héritages, & autres
Biens .Voila tout ce qu'ils
purent alors obtenir. Cependant
par un uſage abufif qui
ne sçauroit prévaloir fur l'Ar
reft de 1624. donné mefme fur
la Requeſte de leurs Dépu
tez , & qui n'a jamais efté révoqué
, les Miniftres qui poffedent
des Biens immeubles,
n'ont pas laiffé de jouir dans
beaucoup
de lieux de l'Exem
ption entiére de la Taille , foit
qu'on ne les ait pas diftinguez
d'avec ceux qui n'avoient
que leurs Gages &
10 MERCURE
leursMeubles ,ou qu'un nom
bre confidérable de perfonnes
de cette Religion eftant
dans ces lieux ,lors qu'ils ont
efté Collecteurs , ils les ayent
voulu favorifer , le Roy qu'on
a informé de cet abus , a crû
néceffaire d'y pourvoir , &
pour cela il a Ordonné conformément
à l'Arreft du 17
Juillet 1624. Que tous Minifires
de la Religion Prétendue
Réformée , feront compris & employez
dans les Rôles des Tailles,
à proportion des biens qu'ils pof.
fedent autres que leurs Gages,
Les Meubles quifervent à leur
GALANT. II
ufage , pour lesquels feulement
ils jouiront de l'exemption des
Tailles , nonobftant tout ce qui
pourroit eftre allegué, oppoſitions ,
autres empefchemens , aufquels
on n'aura aucun égard.
Je vous ay parlé dans mes
Lettres precédentes d'une
Déclaration du 21 Aouft dernier
, par laquelle il a efté ordonné
que ceux de la Religion
Prétendue Réformée,
ne pourront tenir Confiftoire
qu'une fois en quinze jours,
en prefence d'un Juge commis
par Sa Majefté ; & que les
deniers que ceux de cette
12 MERCURE
Religion peuvent lever fur
eux , fuivant les Edits & Dé
clarations , feront impofez
devant le Juge , le Roy efti
mant que pour l'entiére execution
de cette Déclaration ,
les Juges qui feront commis
pour affifter à ces Confiftoires,
doivent avoir connoiffan
ce de toutes les Déliberations
qui y feront prifes , & des deniers
qu'on impofera , pour
en rendre compte lors qu'il
en fera befoin , a ordonné
par fon Arreft du Confeil d'Etat
du 17. de l'autre mois ,
Que les luges qui ont efté, &
GALANT. 13
4
qui feront cy- apres commis pour
affifter à ces Confiftoires , para
pheront à la fin de chaque Affemblée
, les Déliberations qu'on
y auraprifes , les ferontfigner
par les Miniftres & Anciens,
avec défences à ceux de la Religion
Prétendue Reformée , d'en
écrire dans leurs Regiftres , ny
executer d'autres que celles qui
auront efté prifes en prefence des
Iuges commis, par eux paraphées
; comme auffi que les Rôles
des deniers que ceux de cette Religion
ont pouvoir de lever fur
eux , feront paraphez par les
mefmes luges , &fignezpar les
14 MERCURE
Miniftres Anciens , & faits
doubles , l'un defquelsfera donné
au Tuge , en prefence de qui l'Impofition
aura eftéfaite , pour l'envoyer
à M¹ le Chancelier tous
les fix mois.
du Confeil d'Etat , l'un
du 8. Janvier , & l'autre du
17. du mefme mois. Le premier
porte , que les Prétendus
Réformez ayant fait tous
leurs efforts pour faire
faire
accorder
à leurs Miniftres l'exemption
de la Taille, telle qu'on
A iiij
8 MERCURE
l'a accordée aux Eccléfiaftiques
; & ayant réiteré leur
demande
non feulement
dans leurs Cahiers
de 1602 ,
la
1604 , 1608 , 1611 , 1619 , 1621,
& 1622 , mais encore par
Requeſte que leurs Députez
préfentérent à cet effet , Arreft
intervint le 17. Juillet 1624. par
lequel , conformément aux
Réponses faites fur ces Cahiers
, il fut ordonné que leurs
Miniftres joüiroient de l'exéption
des Tailles & autres
Impofitions pour leurs Meubles
, Penfions , & Gages feulement,
& qu'ils ne pourroient
GALANT. 9
eftre Impofez qu'à proportion
de leurs Héritages, & autres
Biens .Voila tout ce qu'ils
purent alors obtenir. Cependant
par un uſage abufif qui
ne sçauroit prévaloir fur l'Ar
reft de 1624. donné mefme fur
la Requeſte de leurs Dépu
tez , & qui n'a jamais efté révoqué
, les Miniftres qui poffedent
des Biens immeubles,
n'ont pas laiffé de jouir dans
beaucoup
de lieux de l'Exem
ption entiére de la Taille , foit
qu'on ne les ait pas diftinguez
d'avec ceux qui n'avoient
que leurs Gages &
10 MERCURE
leursMeubles ,ou qu'un nom
bre confidérable de perfonnes
de cette Religion eftant
dans ces lieux ,lors qu'ils ont
efté Collecteurs , ils les ayent
voulu favorifer , le Roy qu'on
a informé de cet abus , a crû
néceffaire d'y pourvoir , &
pour cela il a Ordonné conformément
à l'Arreft du 17
Juillet 1624. Que tous Minifires
de la Religion Prétendue
Réformée , feront compris & employez
dans les Rôles des Tailles,
à proportion des biens qu'ils pof.
fedent autres que leurs Gages,
Les Meubles quifervent à leur
GALANT. II
ufage , pour lesquels feulement
ils jouiront de l'exemption des
Tailles , nonobftant tout ce qui
pourroit eftre allegué, oppoſitions ,
autres empefchemens , aufquels
on n'aura aucun égard.
Je vous ay parlé dans mes
Lettres precédentes d'une
Déclaration du 21 Aouft dernier
, par laquelle il a efté ordonné
que ceux de la Religion
Prétendue Réformée,
ne pourront tenir Confiftoire
qu'une fois en quinze jours,
en prefence d'un Juge commis
par Sa Majefté ; & que les
deniers que ceux de cette
12 MERCURE
Religion peuvent lever fur
eux , fuivant les Edits & Dé
clarations , feront impofez
devant le Juge , le Roy efti
mant que pour l'entiére execution
de cette Déclaration ,
les Juges qui feront commis
pour affifter à ces Confiftoires,
doivent avoir connoiffan
ce de toutes les Déliberations
qui y feront prifes , & des deniers
qu'on impofera , pour
en rendre compte lors qu'il
en fera befoin , a ordonné
par fon Arreft du Confeil d'Etat
du 17. de l'autre mois ,
Que les luges qui ont efté, &
GALANT. 13
4
qui feront cy- apres commis pour
affifter à ces Confiftoires , para
pheront à la fin de chaque Affemblée
, les Déliberations qu'on
y auraprifes , les ferontfigner
par les Miniftres & Anciens,
avec défences à ceux de la Religion
Prétendue Reformée , d'en
écrire dans leurs Regiftres , ny
executer d'autres que celles qui
auront efté prifes en prefence des
Iuges commis, par eux paraphées
; comme auffi que les Rôles
des deniers que ceux de cette Religion
ont pouvoir de lever fur
eux , feront paraphez par les
mefmes luges , &fignezpar les
14 MERCURE
Miniftres Anciens , & faits
doubles , l'un defquelsfera donné
au Tuge , en prefence de qui l'Impofition
aura eftéfaite , pour l'envoyer
à M¹ le Chancelier tous
les fix mois.
Fermer
Résumé : Arrests du Conseil d'Etat, [titre d'après la table]
Le texte relate deux arrêts du Conseil d'État concernant les réformés et leurs ministres. Le premier arrêt, du 8 janvier, évoque les tentatives des réformés pour obtenir l'exemption de la taille pour leurs ministres, similaire à celle accordée aux ecclésiastiques. Cette demande a été répétée dans divers cahiers entre 1602 et 1622 et par une requête en 1624. L'arrêt du 17 juillet 1624 a accordé cette exemption uniquement pour les meubles, pensions et gages des ministres, tout en les imposant proportionnellement à leurs héritages et autres biens. Un abus a permis à certains ministres de bénéficier d'une exemption totale de la taille sur leurs biens immeubles. Le roi a alors ordonné que tous les ministres réformés soient inclus dans les rôles des tailles proportionnellement à leurs biens, sauf pour leurs gages et meubles. De plus, une déclaration du 21 août a stipulé que les réformés ne peuvent tenir consistoire qu'une fois en quinze jours, en présence d'un juge royal. Les deniers levés doivent être imposés devant ce juge, et les délibérations des consistoires doivent être paraphes par les juges.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
4
p. 272-279
Ordonnance du mesme Roy, [titre d'après la table]
Début :
Le mesme jour il se fit une Ordonnance conçuë en ces / JACQUES ROY. Comme il a plû à Dieu d'appeller à soy dans ses Misericordes [...]
Mots clefs :
Sa Majesté, Gouvernement, Frère, Angleterre, Officiers, Ministres, Emplois, Magistrature, Royaume
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Ordonnance du mesme Roy, [titre d'après la table]
Le mefme jour il ſe fit une
Ordonnance conçuë en ces
termes .
JACQUES ROY.
Cpeller à foy dans fes Mife-
Omme il a plû à Dieu d'apricordes
infinies , le Tres-Haut
GALANT. 273
و
Trés- Puiffant Prince , le Roy
Charles II, de glorieuse mémoi
re , le Trés - Cher & Trés- Aymé
Frere de Sa Majefte, & que par
fa mort , l'autorité & le pouvoir
de la plupart des Charges &
des Employs , foit de la Magiftrature
, foit du Gouvernement
dans ce Royaume , dans le
Royaume d'Irlande , ont ceffé &
manqué avec la Perfonne du
Souverain , dont les uns les
autres étoient dérivés , Sa Trés-
Excellente Majefté a trouvé à
propos de déclarer expressément
felon fa prudence Royale ,
dans la veuë du bien de l'Etat,
274 MERCURE
fe refervant à l'avenir de juger,
de réformer , de redreffer les
abus du Gouvernement aprés les
avoir bien connus & examinez,
que tous ceux qui à la mort du
feu Roy fon Trés Cher Frere,
étoient deuement & legitimement
pourveus , ou en poffeffion
de quelque Employ public , ou de
quelque Office dans le Gouverne
ment , foit Civil ou Militaire,
dans les Royaumes d'Angleterre
d'Irlande, ou dans aucuns des
Etats de Sa Majefté , qui relevent
de l'un ou de l'autre ,
nommément tous les Préfidens,
Gouverneurs fous - Préfidens
GALANT 275
018
Juges Sherifs , Députés , Lieu
tenans , Commiffaires des Guer
Juges de Paix , tous autres
qui ont Charge on Employ
dans le Gouvernement , foit Superieurs
ou Subalternes, ainſi qu'il
a efté dit cy- deſſus , & tous autres
Officiers & Miniftres , dont
le pouvoir & les revenus
falaires , ont finy & ceffé par
mort fufdire , feront & fe tiendront
continuez dans leurs Charges
& Employs , ainſi qu'ils en
joüiffoient cy- devant , jusqu'à ce
que les intentions de Sa Majesté
leurfoient plus amplement figni
fiées , & que cependant pour
>
la
la
276 MERCURE
1
confervation de la Paix , &pour
la continuation des Procedures.
néceſſaires de la Juſtice , comme
auffi pour la feureté & pour
fervice de l'Etat, toutes lefdites
Perfonnes de quelque qualité &
condition qu'elles foient, ne man
le
quent pas chacune en fon particulier
,felon fa Charge ,fon Employ
, ou fon Office , de proceder
à l'exercice & execution de tout
ce qui en dépendra ainsi qu'il appartenoit
cy-devant , lors
défunt Roy étoit en vie.
que
le
De plus , Sa Majesté veut
commande par ces Preſentes , à
tous & à un chacun de fes Su
GALANT. 277
jets , de quelque qualité & condition
qu'ils foient , de préterfecours
, aide & affiftance pour
l'exercice de fes fonctions , toutes
les fois qu'ils enferont requis par
Les Sieurs Officiers & Miniftres,
à moins qu'ils ne veuillent encou
rir l'indignation de Sa Majefté,
é en répondre à leurs perils
fortunes.
Sa Majefté veut de plus , &
commande expreſſément , que tous
les ordres faits on donnez par
les Seigneurs du Confeil Privé du
feu Roy, pendant fa vie , foient
executez par tous & par un
chacun , que tout ce£ qui au
278 MERCURE
roit ou dévroit avoir efté fail,
en confequence d'iceux , foit fait
accomply de mefme , & auffi
amplement qu'il auroit efté fait
ou accomply pendant la vie du
feu Roy , le Tres- Cher & Tres-
Ayme Frere de Sa Majefté.
Donné à la Cour de Witehall,
le 6.jour du mois de Février 1684.
le premier du Regne de Sa
Majefté, fur les Royaumes d' Angleterre
, d' Ecoffe d'Irlande.
Vous ferez furprife de la
datte de cette Ordonnance,
qui eft du 6 , Février 1684.
apres que je vous ay dit que
GALANT. 279
le Roy eft mort le Vendredy
16. de ce mois. Cette Date
eft felon l'ancien ftile. On
conferve en Angleterre les
dix jours qui ont efté retran
chez du Kalendrier , & l'Année
y commence par le mois
de Mars , & non par celuy de
Janvier.
Ordonnance conçuë en ces
termes .
JACQUES ROY.
Cpeller à foy dans fes Mife-
Omme il a plû à Dieu d'apricordes
infinies , le Tres-Haut
GALANT. 273
و
Trés- Puiffant Prince , le Roy
Charles II, de glorieuse mémoi
re , le Trés - Cher & Trés- Aymé
Frere de Sa Majefte, & que par
fa mort , l'autorité & le pouvoir
de la plupart des Charges &
des Employs , foit de la Magiftrature
, foit du Gouvernement
dans ce Royaume , dans le
Royaume d'Irlande , ont ceffé &
manqué avec la Perfonne du
Souverain , dont les uns les
autres étoient dérivés , Sa Trés-
Excellente Majefté a trouvé à
propos de déclarer expressément
felon fa prudence Royale ,
dans la veuë du bien de l'Etat,
274 MERCURE
fe refervant à l'avenir de juger,
de réformer , de redreffer les
abus du Gouvernement aprés les
avoir bien connus & examinez,
que tous ceux qui à la mort du
feu Roy fon Trés Cher Frere,
étoient deuement & legitimement
pourveus , ou en poffeffion
de quelque Employ public , ou de
quelque Office dans le Gouverne
ment , foit Civil ou Militaire,
dans les Royaumes d'Angleterre
d'Irlande, ou dans aucuns des
Etats de Sa Majefté , qui relevent
de l'un ou de l'autre ,
nommément tous les Préfidens,
Gouverneurs fous - Préfidens
GALANT 275
018
Juges Sherifs , Députés , Lieu
tenans , Commiffaires des Guer
Juges de Paix , tous autres
qui ont Charge on Employ
dans le Gouvernement , foit Superieurs
ou Subalternes, ainſi qu'il
a efté dit cy- deſſus , & tous autres
Officiers & Miniftres , dont
le pouvoir & les revenus
falaires , ont finy & ceffé par
mort fufdire , feront & fe tiendront
continuez dans leurs Charges
& Employs , ainſi qu'ils en
joüiffoient cy- devant , jusqu'à ce
que les intentions de Sa Majesté
leurfoient plus amplement figni
fiées , & que cependant pour
>
la
la
276 MERCURE
1
confervation de la Paix , &pour
la continuation des Procedures.
néceſſaires de la Juſtice , comme
auffi pour la feureté & pour
fervice de l'Etat, toutes lefdites
Perfonnes de quelque qualité &
condition qu'elles foient, ne man
le
quent pas chacune en fon particulier
,felon fa Charge ,fon Employ
, ou fon Office , de proceder
à l'exercice & execution de tout
ce qui en dépendra ainsi qu'il appartenoit
cy-devant , lors
défunt Roy étoit en vie.
que
le
De plus , Sa Majesté veut
commande par ces Preſentes , à
tous & à un chacun de fes Su
GALANT. 277
jets , de quelque qualité & condition
qu'ils foient , de préterfecours
, aide & affiftance pour
l'exercice de fes fonctions , toutes
les fois qu'ils enferont requis par
Les Sieurs Officiers & Miniftres,
à moins qu'ils ne veuillent encou
rir l'indignation de Sa Majefté,
é en répondre à leurs perils
fortunes.
Sa Majefté veut de plus , &
commande expreſſément , que tous
les ordres faits on donnez par
les Seigneurs du Confeil Privé du
feu Roy, pendant fa vie , foient
executez par tous & par un
chacun , que tout ce£ qui au
278 MERCURE
roit ou dévroit avoir efté fail,
en confequence d'iceux , foit fait
accomply de mefme , & auffi
amplement qu'il auroit efté fait
ou accomply pendant la vie du
feu Roy , le Tres- Cher & Tres-
Ayme Frere de Sa Majefté.
Donné à la Cour de Witehall,
le 6.jour du mois de Février 1684.
le premier du Regne de Sa
Majefté, fur les Royaumes d' Angleterre
, d' Ecoffe d'Irlande.
Vous ferez furprife de la
datte de cette Ordonnance,
qui eft du 6 , Février 1684.
apres que je vous ay dit que
GALANT. 279
le Roy eft mort le Vendredy
16. de ce mois. Cette Date
eft felon l'ancien ftile. On
conferve en Angleterre les
dix jours qui ont efté retran
chez du Kalendrier , & l'Année
y commence par le mois
de Mars , & non par celuy de
Janvier.
Fermer
5
p. 171-177
Regalle donné à leurs Altesses Royales de Savoye, [titre d'après la table]
Début :
S. A. R. de Savoye, ayant agreé que Mr le Président Truchy, [...]
Mots clefs :
Ministres, Palais, Cour, Vestibule, Chambres, Appartements, Président Truchy, Compliments
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Regalle donné à leurs Altesses Royales de Savoye, [titre d'après la table]
S. A. R. de Savoye , ayant
Pij
172 MERCURE
,
agreé que M le Préſident
Truchy , l'un de fes Miniftres
d'Etat , luy offriſt un Bal , &
à Mefdames
Royales
ce
Miniftre fit préparer fon Palais
, qui eft un des plus magnifiques
de Turin , pour la
nuit du 28. de Fevrier paffé ,
& ſe diſpoſa à recevoir les
Perſonnes Royales qui devoient
y venir , fuivies de toute
la Cour, de la maniere qu'il
fait , & a toûjours fait toutes
chofes , c'eſt à dire en grand
Homme , qui entend auffi
finement à ordonner une
Fefte , qu'à foûtenir les plus
GALANT. 173.
importantes affaires. L'entrée
de ce Palais , qui eft un Veftibule
appuyé fur plufieurs
grandes Colonnes de Marbre
, étoit éclairée , ainfi que
la Court , & le grand Degré,,
d'un nombre prodigieux
de
Luftres, de Plaques , & de Bras
qui foûtenoient plufieurs .
Flambeaux
, fi bien rangez
que la lumiere qu'ils rendoient
, paroiffoit infiniment
plus agréable que celle du
jour. Leurs AA. RR . étant
entrées dans le vafte Salon
de ce Palais , qui n'eft pas
moins beau par fa forme
Piij.
174 MERCURE
octogone , que par le riche
deffein , & l'agrément des
Peintures du Plat- fonds , le
trouverent enrichy de Meubles
tres précieux , & éclairé
par trois rangs de Flambeaux ,
portez par divers Bras dorez,
& par de riches Plaques rangées
tout autour ; mais fur
tout par quinze Luftres magnifiques
, qui étoient fufpendus
au milieu . Ce Salon
Tépare deux grands Corps de
Logis , compofez tous deux
de divers Appartemens doubles
, dont les Chambresfont
fort noblement difpofées .
GALANT. 175 ·
Elles étoient toutes parées de
Meubles fuperbes , & de gran,
des piéces d'Argenterie , qui
fembloient difputer d'éclat,
avec la multitude de lumie .
res qui les faifoit briller.
Enfin tout répondoit admirablement
à la joye que ce
Miniftre reffentoit dans fon
coeur , d'avoir chez luy cette
Royale Affemblée . Leurs
AA . RR . qui vifitérent tout
avec autant d'attention que
de curiofité , témoignerent
en eftre parfaitement fatisfaites
, mais Elles ne le furent
pas moins de la magnificence:
Piiij.
176 MERCURE
de la Colation , qui fut de
quatre Services. Le premier
tout de Fleurs veritables &
choifies , telles que le Prin-
;
temps le plus doux les peut
produire , & que M ' le Préfi
dent Truchy avoit fait apporter
avec grand foin , de Nice
& de Genes ; le fecond , de
Sorbets fort delicieux le
troifiéme , de toutes fortes
d'Eaux & de Liqueurs rafraichiffantes
; & le quatrième ,
de vingt- quatre grands Baffins
, tant de Fruits frais , que
de Confitures de toutes fortes.
Leurs AA. RR . dirent là - def
GALANT. 177
fus mille chofes obligeantes à
ce Miniftre , qui reçeur auffi
des Complimens d'aplaudif
fement & d'admiration , de
tous les Seigneurs & Dames
de la Cour , qui s'y étoient
rendus en grand nombre , &
auffi galamment que fuperbement
pałez .
Pij
172 MERCURE
,
agreé que M le Préſident
Truchy , l'un de fes Miniftres
d'Etat , luy offriſt un Bal , &
à Mefdames
Royales
ce
Miniftre fit préparer fon Palais
, qui eft un des plus magnifiques
de Turin , pour la
nuit du 28. de Fevrier paffé ,
& ſe diſpoſa à recevoir les
Perſonnes Royales qui devoient
y venir , fuivies de toute
la Cour, de la maniere qu'il
fait , & a toûjours fait toutes
chofes , c'eſt à dire en grand
Homme , qui entend auffi
finement à ordonner une
Fefte , qu'à foûtenir les plus
GALANT. 173.
importantes affaires. L'entrée
de ce Palais , qui eft un Veftibule
appuyé fur plufieurs
grandes Colonnes de Marbre
, étoit éclairée , ainfi que
la Court , & le grand Degré,,
d'un nombre prodigieux
de
Luftres, de Plaques , & de Bras
qui foûtenoient plufieurs .
Flambeaux
, fi bien rangez
que la lumiere qu'ils rendoient
, paroiffoit infiniment
plus agréable que celle du
jour. Leurs AA. RR . étant
entrées dans le vafte Salon
de ce Palais , qui n'eft pas
moins beau par fa forme
Piij.
174 MERCURE
octogone , que par le riche
deffein , & l'agrément des
Peintures du Plat- fonds , le
trouverent enrichy de Meubles
tres précieux , & éclairé
par trois rangs de Flambeaux ,
portez par divers Bras dorez,
& par de riches Plaques rangées
tout autour ; mais fur
tout par quinze Luftres magnifiques
, qui étoient fufpendus
au milieu . Ce Salon
Tépare deux grands Corps de
Logis , compofez tous deux
de divers Appartemens doubles
, dont les Chambresfont
fort noblement difpofées .
GALANT. 175 ·
Elles étoient toutes parées de
Meubles fuperbes , & de gran,
des piéces d'Argenterie , qui
fembloient difputer d'éclat,
avec la multitude de lumie .
res qui les faifoit briller.
Enfin tout répondoit admirablement
à la joye que ce
Miniftre reffentoit dans fon
coeur , d'avoir chez luy cette
Royale Affemblée . Leurs
AA . RR . qui vifitérent tout
avec autant d'attention que
de curiofité , témoignerent
en eftre parfaitement fatisfaites
, mais Elles ne le furent
pas moins de la magnificence:
Piiij.
176 MERCURE
de la Colation , qui fut de
quatre Services. Le premier
tout de Fleurs veritables &
choifies , telles que le Prin-
;
temps le plus doux les peut
produire , & que M ' le Préfi
dent Truchy avoit fait apporter
avec grand foin , de Nice
& de Genes ; le fecond , de
Sorbets fort delicieux le
troifiéme , de toutes fortes
d'Eaux & de Liqueurs rafraichiffantes
; & le quatrième ,
de vingt- quatre grands Baffins
, tant de Fruits frais , que
de Confitures de toutes fortes.
Leurs AA. RR . dirent là - def
GALANT. 177
fus mille chofes obligeantes à
ce Miniftre , qui reçeur auffi
des Complimens d'aplaudif
fement & d'admiration , de
tous les Seigneurs & Dames
de la Cour , qui s'y étoient
rendus en grand nombre , &
auffi galamment que fuperbement
pałez .
Fermer
Résumé : Regalle donné à leurs Altesses Royales de Savoye, [titre d'après la table]
Le Président Truchy, ministre d'État de la Maison de Savoie, a organisé un bal en l'honneur de S.A.R. de Savoie et des Mesdames Royales au palais du ministre à Turin, le 28 février. Le palais, l'un des plus somptueux de la ville, a été magnifiquement préparé pour l'événement. L'entrée et la cour étaient illuminées par de nombreux lustres et bras de lumières, créant une ambiance lumineuse et agréable. Les invités ont été accueillis dans un vaste salon octogonal richement décoré et éclairé par trois rangs de flambeaux et quinze lustres. Ce salon séparait deux grands corps de logis composés d'appartements doubles ornés de meubles précieux et d'argenterie. La joie du ministre était palpable, et les personnes royales ont exprimé leur satisfaction face à la magnificence de la réception. La collation, servie en quatre services, comprenait des fleurs et des fruits frais de Nice et de Gênes, des sorbets, des eaux, des liqueurs, ainsi que des bassins de fruits frais et de confitures variées. Les invités royaux et les seigneurs et dames de la cour ont adressé des compliments au ministre pour l'organisation de cet événement.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
6
p. 1-70
ETAT Du Gouvernement, des Moeurs, de la Religion, & du Commerce du Royaume de Siam, dans les pays voisins, & plusieurs autres particularités.
Début :
TOUS les jours les Mandarins qui sont destinez pour rendre [...]
Mots clefs :
Roi de Siam, Royaume, Ambassadeur, Siamois, Argent, Commerce, Nation, Chine, Manière, Marchandises, Officiers, Femmes, Fille, Pays, Étrangers, Terre, Talpoins, Corps, Ville, Fruit, Mandarins, Palais, Éléphants, Pagodes, Ministres, Alexandre de Chaumont
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ETAT Du Gouvernement, des Moeurs, de la Religion, & du Commerce du Royaume de Siam, dans les pays voisins, & plusieurs autres particularités.
ETAT
Du Gouvernement , des
Moeurs, de la Religion ,
& du Commerce du
Royaume de Siam, dans
les pays voisins , &plufieurs
autres particularités.
OUS les jours les
Mandarins qui font
deſtinez pour rendre
la juſtice s'aſſemblent
dans une falle où ils
donnent audiance , c'eſt comme
1a Cour du Palais à Paris ,& elle
2 RELATION
eſt dans le Palais du Roy , où
ceux qui ont quelque requête à
preſenter ſe tiennent à la porte
juſqu'à ce qu'on les appellé , &
quand on le fait ils entrent leur
requête à la main & la prefentent.
Les Etrangers qui intentent
procés au ſujet des marchandiſes,
la preſentent au Barcalon , c'eſt
le premier Miniſtre du Roy ,
qui juge toutes les affaires concernant
les Marchands & les
Etrangers ; en ſon abſence , c'eſt
ſon Lieutenant , & en l'absence
des deux , une maniere d'Eſche
wins. Il y a un Officier prépoſé
pour les tailles & tributs auquel
on s'adreſſe , & ainſi des autres
Officiers. Aprés que les affaires
font difcutées on les fait ſçavoir
aux Officiers du dedans du Palais
, qui en avertiſſent le Roy
eſtant lors ſur un Trône élevé
DU VOYAGE DE SIAM . 3
de trois braffes , tous les Mandarins
ſe proſternent la face contre
terre , & le Barcalon ou autres
des premiers Oyas , rapportent
au Roy les affaires & leurs jugemens
, il les confirme , ou il les
change ſuivant ſa volonté , c'eſt
à l'égard des principaux procés ,
& tres- ſouvent il ſe fait apporter
les procés au dedans du Palais
, & leur envoye ſon jugementpar
écrit.
Le Roy eſt tres- abſolu , on diroit
quaſi qu'il eſt le Dieu des
Siamois , ils n'ofent pas l'appeller
de ſon nom. Il châtie tres-feverement
le moindre crime ; car
ſes Sujets veulent eſtre gouvernez
la verge à la main , il ſeſert même
quelquefois des Soldats de ſa
garde pour punir les coupables
quand leur crime eſt extraordinaire
& fuffisamment prouvé.
Ceux qui font ordinairement ema
ij
4 RELATION
ployez ces fortes d'executions
font 150. Soldats ou environ qui
ont les bras peints depuis l'épaule
juſqu'au poignet ; les châtimens
ordinaires ſont des coups
de rottes , trente, quarante , cinquante
& plus , ſur les épaules des
criminels , felon la grandeur du
crime , aux autres il fait piquer
la tête avec un fer pointu : à l'égard
des complices d'un crime
digne de mort , aprés avoir fait
couper la tête au veritable criminel
, il la fait attacher au col
du complice , & on la laiſſe pourir
expoſée au Soleil fans couvrir
la tête pendant trois jours
&trois nuits , ce qui cauſe à celui
qui la porteune grande puantour,
Dans ce Royaume , la peine
du talion eſt fort en uſage , le
dernier des fupplices eſtoit , il n'y
a pas long-temps, de les condamDU
VOYAGE DE SIAM. یک
ner à la Riviere , qui eſt proprement
comme nos Forçats de Galere
, & encorepis ; mais maintenant
on les punit de mort. Le
Roy fait travailler plus qu'aucun
Roy de ſes predeceffeurs, en bâ
timens , à reparer les murs des
Villes , à édifier des Pagodes , à
embellir fon Palais , à bâtir des
Maiſons pour les Etrangers , & à
conſtruire des Navires à l'Euro .
peane , il eſt fort favorable aux
Etrangers , il en a beaucoup à
fon ſervice,& en prend quand il
en trouve .
Les Roys de Siam n'avoient'
pas accoûtumé de ſe faire voir
auſſi ſouvent que celui-cy. Ils
vivoient preſque ſeuls , celuy
d'apreſent vivoit comme les autres
: mais Monfieur de Berithe
Vicaire Apoftolique , s'eſtant ſer
vi d'un certain Brame , qui faifant
le plaiſant avoit beaucoup
1
a iij
6 RELATION
de liberté de parler à ce Monarque
, trouva le moyen de faire
connoître à ce Prince , la puif
fance & la maniere de gouverner
de nôtre grand Roy , & en même
temps les coûtumes de tous
les Roys d'Europe , de ſe faire
voir à leurs Sujets & aux Etrangers
; de maniere qu'ayant un
auffi grand ſens que je l'ay déja
remarqué , il jugea à propos de
voir Monfieur de Berithe , & enfuite
pluſieurs autres ; depuis ce
temps- là il s'eſt rendu affable &
acceſſible à tous les Etrangers.
On appelle ceux qui rendent la
justice ſuivant leurs differentes
fonctions , Oyas Obrat , Oyas
Momrat , Oyas Campheng, Oyas
Ricchou , Oyas Shaynan , Opran,
Oluan ; Oeun , Omun .
Comme autrefois les Roys ne
ſe faisoient point voir , les Miniftres
faifoient ce qu'ils vouloient,
DU VOYAGE DE SIAM. 7
mais le Roy d'apreſent qui a un
tres-grand jugement , & eſt un
grand Politique,veut ſçavoir tout;
il a attaché auprés de luy le Sei
gneur Conftans dont j'ay déja
parlé diverſes fois , il eſt Grec
de nation , d'une grande penetration
, & vivacité d'eſprit
&d'une prudence toute extraordinaire
, il peut & fait tout
fous l'autorité du Roy dans le
Royaume , mais ce Miniſtre n'a
jamais voulu accepter aucune des
premieres Charges que leRoyluy
a fait offrir pluſieurs fois. Le Barcalon
qui mourut ily a deux ans ,&
qui par le droit de ſa Charge
avoit le gouvernement de toutes
les affaires del'Etat , eſtoit homme
d'un tres-grand eſprit , qui
gouvernoit fort bien , & fe faifoit
fort aimer , celuy quiluy fucce
da eſtoit Malais de nation, qui eft
un pays voiſin de Siam , il ſe fera
iiij
8 RELATION
vit de Monfieur Baron , Anglois.
de nation , pour mettre mal Monſieur
Conftans dans l'eſprit du
Roy , & le luy rendre ſuſpect ,
mais le Roy reconnut ſa malice ,
il le fit battre juſqu'à le laiſſer
pour mort , & le dépoſſeda de ſa
Charge , celui qui l'occupe preſentement
vit dans une grande
intelligence avec Monfieur Conſtans
.
Comme par les loix introduites
par les Sacrificateurs des Idoles
qu'on nomme Talapoins , il
n'eſt pas permis de tuer , on condamnoit
autrefois les grands criminels
ou à la chaîne pour leur
vie , ou à les jetter dans quelques
deferts pout y mourir de faim ;
mais le Roy d'apreſent leur fait
maintenant trancher la teſte &
les livre aux Elephans .
Le Roy a des Eſpions pour
ſcavoir ſi on luy cache quelque
DU VOYAGE DE SIAM .
choſe d'importance , il fait châtier
tres - rigoureuſement ceux qui
abuſent de leur autorité . Chaque
Nation étrangere établie dans le
Royaume de Siam a ſes Officiers
particuliers , & le Roy prend de
toutes ces Nations- là des gens
qu'il fait Officiers generaux pour
tout ſon Royaume. Il y a dans
fon Etat beaucoup de Chinois ,
& il y avoit autrefois beaucoup
de Maures ; mais les années pafſées
il découvrit de ſi noires trahiſons
, des concuffions & des
tromperies ſi grandes dans ceux
de cette nation , qu'il en a obligé
un fort grand nombre à déferter
, & à s'en aller en d'autres.
Royaumes.
Le commerce des Marchands
Etrangers y eſtoit autrefois tresbon
, on y en trouvoit de toutes
parts ; mais depuis quelques années
,les diverſes revolutions qui
ΟΙ RELATION
font arrivées à la Chine , au Japon
& dans les Indes , ont empeſché
les Marchands Etrangers
de venir en ſi grand nombre.
On eſpere neanmoins, que puif
que tousces troubles font appaiſez
, le commerce recommencera
comme auparavant , & que le
Roy de Siam par le moyen de fon
Miniſtre envoyera fes Vaiſſeaux
pour aller prendre les Marchandi
ſes les plus precieuſes , & les
plus rares de tous les Royaumes
d'Orient,&remettra toutes chofes
en leur premier & fleuriſſant état.
Ils font la guerre d'une maniere
bien differente de celle de la plûpart
des autres nations , c'eſt à
dire à pouſſer leurs ennemis hors
de leurs places ſans pourtant
leur faire d'autre mal que de les
rendre eſclaves , & s'ils portent
des armes , c'eſt ce ſemble plûtôt
pour leur faire peur en les tirant
,
DU VOYAGE DE SIAM. II
contre terre , ou en l'air, que pour
les tuër , & s'ils le font c'eſt tout
au plus pour ſe deffendre dans la
neceſſité ; mais cette neceſſité
de tuër arrive rarement parce
que prefque tous leurs ennenemis
qui en uſent comme eux,ne
tendent qu'aux mêmes fins . Il ya
des Compagnies & des Regimens
qui ſe détachentde l'arméependát
la nuit,&vont enlever tous leshabitans
des Villages ennemis , &
font marcher hommes, femmes &
enfans que l'on fait eſclaves , &
le Roy leur donne des terres&
des bufles pour les labourer , &
quand le Roy en a beſoin il s'en
fert. Ces dernieres années , le
Roi a fait la guerre contre les
Cambogiens revoltez , aidez des
Chinois & Cochinchinois , où il
a fallu ſe battre tout de bon , & il
y a eu pluſieurs Soldats tuez de
part &d'autre ; il a eu pluſieurs
21 RELATION
Chefs d'Europeans qui les inſtrui
fent àcombattre en nôtre maniere .
Ils ont une continuelle guerre
contre ceux du Royaume de
Laos , qui eſt venuë , de ce qu'un
Maure tres-riche allant en ce
Royaume- là pour le compte du
Royde Siam,y reſta avec de grandes
ſommes , le Roy de Siam , le
demanda auRoy de Laos , mais
celui-cile luy refuſa, ce qui a obligé
le Roy de Siam de luydeclarer
la guerre.
Avant cette guerre ily avoit un
grand commerce entre leurs Etats,
& celuy de Siam en tiroit de
grands profits par l'extrême
quantité d'or , de muſc , de benjoüin
, de dents d'Elephant &
autres marchandiſes qui lui venoient
de Laos , en échange des
toiles & autres marchandiſes .
Le Roy de Siam a encore guerre
contre celui de Pegu ; il y a quanDU
VOYAGE DE SIAM . 13
tité d'Eſclaves de cette Nation .
Il y a pluſieurs Nations Etrangeres
dans ſon Royaume , les
Maures y estoient , comme j'ay
dit , en tres-grand nombre , mais
maintenant il y en a pluſieurs qui
font refugiez dans le Royaume
de Colconde, ils eſtoient au ſervice
du Roy , & ils luy ont emporté
plus de vingt mille catis , chaque
catis vallant cinquante écus , le
Roy de Siam écrivit au Roy de
Colconde de luy rendre ces perſonnes
ou de les obliger à luy
payer cette ſomme , mais le Roy
de Colconden'en voulutrien faire
, ny même écouter les Ambafſadeurs
qu'il luy envoya ; ce quia
fait que le Roy de Siam luy a
declaré la guerre & luy a pris
dans le tems que j'étois à Siam ,
un Navire dont la charge valloit
plus de centmille écus . Il y a fix
Fregates commandées par des
14
RELATION
François & des Anglois qui
croiſent ſur ſes côtes .
Depuis quelque temps l'Empereur
de la Chine a donné liberté
à tous les Etrangers de venir
negocier en ſon Royaume ;
cette liberté n'eſt donnée que
pour cinq ans , mais on efpere
qu'elle durera , puiſque c'eſt un
grand avatage pour ſon Royaume .
Ce Prince a grand nombre de
Malais dans ſon Royaume , ils
font Mahometans , & bons Soldats
, mais il y a quelque difference
de leur Religion à celle
des Maures. Les Pegovans font
dans ſon Etat preſque en auſſi
grande quantité queles Siamois
originaires du pays .
Les Laos y font en tres-grande
quantité , principalement vers
le Nort.
Il y a dans cet Etat huit ou neuf
familles de Portugais veritables ,
DU VOYAGE DE SIAM.
mais de ceux que l'on nomme
Meſties , plus de mille , c'eſt à dire
de ceux qui naiſſent d'un Portugais
& d'une Siamoiſe .
Les Hollandois n'y ont qu'une
facturie.
Les Anglois de même.
Les François de même.
Les Cochinchinois ſont environ
cent familles , la plupart
Chreftiens.
Parmy les Tonquinois ily en a
ſeptou huit familles Chrétiennes .
Les Malais y font en afſez grand
nombre,qui font la plupart eſclaves,&
qui par conſequent ne font
pointde corps .
Les Macaſſars & pluſieurs des
peuples de l'Iſle de Java y font
établis, de meſme que les Maures:
ſous le nom de ces derniers ſont
compris en ce pays- là, les Turcs,
les Perfans les Mogols les
Colcondois & ceux de Bengala .
, د
16 RELATION
Les Armeniens font un corps
à part , ils font quinze ou ſeize
familles toutes Chrétiennes , Catholiques
, la plupart ſont Cavaliers
de la garde du Roy.
A l'égard des moeurs des Siamois
ils font d'une grande docilité
qui procede plûtoſt de leur
naturel amoureux du repos que
de toute autre cauſe , c'eſt pourquoi
les Talapoins qui fontprofeffion
de cette apparente vertu ,
defendentpour cela de tuër toutes
fortes d'animaux ; cependant lorfque
tout autre qu'eux tuë des
poules & des canards , ils en mangentla
chair ſans s'informer qui
les a tués , ou pourquoi on les a
tués , & ainſi des autres animaux .
Les Siamois font ordinairement
chaſtes , ils n'ont qu'une femme ,
mais les riches comme les Mandarins
ont des Concubines , qui
demeurent enfermées toute leur
vie
DU VOYAGE DE SIAM. 17
vie. Le peuple eſt aſſez fidele &
ne volle point ; mais il n'en eft
pas de même de quelques-uns des
Mandarins , les Malais qui font
en tres-grand nombre dans ce
Royaume- là font tres- méchants
&grands voleurs .
Dans ce grand Royaume il y
a beaucoup de Pegovans qui
ont eſté pris en guerre , ils font
plus remuants que les Siamois
& font d'ordinaire plus vigoureux
, il y a parmy les femmes du
libertinage , leur converſation eft
perilleuſe.
Les Laos peuplent la quatriéme
partie du Royaume de Siam",
comme ils font à demy Chinois ,
ils tiennent de leur humeur , de
leur adreſſe& de l'inclination a
voller par fineſſe; leurs femmes
font blanches & belles , tres - familieres
& par confequent dangereuſes.
Dans le Royaume de
b
18 RELATION
Laos , un homme qui rencontre
une femme pour la falüer avec
la civilité accoûtumée , la baife
publiquement ; & s'il ne le faiſoit
pas il l'offenferoit .
Les Siamois tant Officiers que
Mandarins ſont ordinairement
riches , parce qu'ils ne dépenfent
preſque rien , le Roy leur
donnant des valets pour les fervir
, ces valets font obligez de ſe
nourir à leurs dépens, eſtant com--
me efclaves,ils font en obligation
de les ſervir pour rien pendant:
la moitié de l'année : & comme
cesMeſſieurs-làen ontbeaucoup,
ils ſe ſervent d'une partie pendant
que l'autre ſe repoſe ; mais
ceux qui ne les ſervent point:
leur payent une fomme tous les
ans , leurs vivres font à bon marché
, car ce n'eſt que duris , du
poiffon , & tres -peu de viande, &
tout cela eft en abondance dans
DU VOYAGE DE SIAM . 19
leur pays ; leurs vêtemens leur
fervent long- temps , ce ne font
que des pieces d'étoffes toutes
entieres qui ne s'uſent pas fi faci
lement que nos habits &ne coutent
que tres-peu : la plupart des
Siamois font Maſſons ou Charpentiers
, & il y en a de tres habiles,
imitant parfaitement bien les
beaux ouvrages de l'Europe en
Sculpture& en dorure. Pour ce
qui eſt de la peinture ils ne ſçavent
point s'en ſervir , il y a des
ouvrages en Sculpture dans leurs
Pagodes , & dans leurs Mauſolées
fort polis & tres-beaux.
Ils en font auſſi de tres -beaux
avec de la chaux , qu'ils détrempent
dans de l'eau qu'ils tirent de
l'écorce d'un arbre qu'on trouve
dans les Forefts , quilarend ſi forte,
qu'elle dure des cent& deux
cens ans , quoi qu'ils foient expoſés
aux injures du temps ..
bij
20 RELATION
1
i
1.
i
Leur Religion n'eſt à parler proprement
qu'un grand ramas
d'Hiſtoires fabuleuſes , qui ne
tend qu'à faire rendre des hommages
& deshonneurs auxTalapoins,
qui ne recommandent tant:
aucune vertu que celle de leur
faire l'aumône , ils ont des loix
qu'ils obfervent exactement au
moins dans l'exterieur ; leur fin
dans toutes leurs bonnes oeuvres
eſt l'eſperance d'une heureuſe
tranfmigration aprés leur mort ,
dans le corps d'un homme riche ,..
d'un Roy , d'un grand Seigneur
ou d'un animal docile , comme
font les Vaches & les Moutons :
car ces peuples-là croyent la Metempſicoſe
; ils eſtiment pour cette
raiſonbeaucoup ces animaux ,
&n'ofent, comme je l'ai déja dit,
en tuër aucun , craignant de donner
la mort à leur Pere ou à leur
Mere , ou à quelqu'un de leurs
DU VOYAGE DE SIAM . 2
parens . Ils croyent un enfer où les
énormes pechez ſont ſeverement .
punis , ſeulement pour quelque
temps , ainſi qu'un Paradis , dans
lequel les vertus fublimes ſont
recompenſées dans le Ciel , où aprés
eſtre devenus des Anges
pour quelque temps , ils retournent
dans quelque corps d'hom--
me ou d'animal .
L'occupation des Talapoins .
eſt de lire , dormir, manger, chan--
ter , & demander l'aumône ; de
cette forte , ils vont tous les matins
ſe preſenter devant la porte
ou balon des perſonnes qu'ils connoiffent
,&ſe tiennent-là unmométavecunegrande
modeſtie ſans
rien dire, tenant leur évantail , de
maniere qu'il leur couvre la moitié
du viſage , s'ils voyent qu'on ſe
diſpoſe àleur donner quelque choſe
, ils attendent juſqu'à ce qu'ils
l'ayent receuë ; ils mangent de
biij
22 RELATION
د
3
tout ce qu'on leur donne même
des poulles & autres viandes
mais ils ne boiventjamais de vin ,
au moins en prefence des gens du
monde; ils ne font point d'office
ny de prieres à aucune Divinité.
Les Siamois croyent qu'il y a eu
trois grands Talapoins , qui par
leurs merites tres-fublimes acquis
dans pluſieurs milliers de tranſmigrations
ſont devenus des Dieux ,
&aprés avoir eſté faits Dieux ,
ils ont encore acquis de ſi grands
merites qu'ils ont eſté tous aneantis
, ce qui eſt le terme du plus .
grand merite & la plus grande recompenſe
qu'on puiffe acquerir ,
pour n'eſtre plus fatigué en changeant
ſi ſouventde corps dans un
autre; le dernier de ces trois Ta--
lapoins eſt le plus grand Dieu appellé
Nacodon , parce qu'il a eſté
dans cinq mille corps , dans l'une
de ces tranfmigrations , de Talapoin
il devint vache , fon frere le
DU VOYAGE DE SIAM .
23
voulut tuër pluſieurs fois ; mais il
faudroit un gros livre pour décrire
les grands miracles qu'ils difent
que la nature& non pasDieu,
fit pour le proteger : enfin ce frere
fut precipité en Enfer pour ſes
grands pechez , où Nacodon le
fit crucifier ; c'eſt pour cette raifon
qu'ils ont en horreur l'Image
de Jeſus-Chriſt crucifié , diſant
que nous adorons l'Image de ce
frere de leur grand Dieu , qui
avoit eſté crucifié pour ſes crimes ..
CeNacodon eſtant doncaneanti,
il ne leur reſte plus de Dieu à
preſent , ſaloy ſubſiſte pourtant ;
mais ſeulement parmi les Talapoins
qui diſent qu'aprés quelques
fiecles il y aura un Ange qui
viendra ſe faire Talapoin ,& enfuite
Dieu Souverain , qui par ſes
grands merites pourra être anean
ti : voilà le fondement de leur
creance ; car il ne faut pas s'imaginer
qu'ils adorent les Idoles
24 RELATION
"
1
qui font dans leurs Pagodes comme
des Divinitez , mais ils leur
rendent ſeulement des honneurs'
comme à des hommes d'un grand
merite , dont l'ame eſt à preſent
en quelque Roy , vache ou Talapoin
: voilà en quoi conſiſte leur
Religion , qui à proprement parler
ne reconnoît aucun Dieu , &
qui n'attribuë toute la recompenſede
la vertu qu'à la vertumême ,
qui a par elle le pouvoir de rendre
heureux celuy dont elle fair
paſſer l'ame dans le corps de quelque
puiſſant & riche Seigneur
ou dans celuy de quelque vache ,
levice ,diſent-ils, porte avec ſoy
ſon châtiment , en faiſant paffer
l'ame dans le corps de quelque
méchant homme , de quelque
Pourceau , de quelque Corbeau ,
Tigre ou autre animal. Ils admetrent
des Anges , qu'ils croyent
eſtre les ames des juſtes & des
bons
2
L
L
DUVOYAGE DE SIAM. 25
bons Talapoins; pour ce qui eſt des
Demons , ils eſtiment qu'ils font
les ames des méchans .
Les Talapoins font tres-refpe-
Etés de tout le peuple , & même
du Roy, ils ne ſe profternent point
lorſqu'ils luy parlent comme le
font les plusgrands du Royaume ,
& le Roy & les grands Seigneurs
les ſaluënt les premiers ; lorſque
ces Talapoins remercient quelqu'un,
ils mettentla main proche
leur front , mais pour ce qui eſt du
petit peuple, ils ne le ſalüent point ;
leurs vêtemens ſont ſemblables à
ceux des Siamois ,àla referve que
la toile eſt jaune , ils font nuds
jambes & nuds pieds fans chapeau
, ils portent ſur leur tête un
évantail fait d'une fcüille de palme
fort grande pour ſe garantir
du Soleil , qui eſt fort brûlant ;
ils ne font qu'un veritable repas
par jour, à ſçavoir le matin , & ils
G
26 RELATION
ne mangent le ſoir que quelques
bananes ou quelques figues ou
d'autres fruits ; ils peuvent quitter
quand ils veulent l'habit de
Talapoin pour ſe marier , n'ayant
aucun engagement que celuy de
porter l'habit jaune , & quand ils
le quittentils deviennent libres ;
cela fait qu'ils font en ſi grand
nombre qu'ils font preſque le tiers
du Royaume de Siam . Ce qu'ils
chantent dans les Pagodes font
quelques Hiſtoires fabuleuſes.,
entremêlées de quelques Sentences;
celles qu'ils chantent pendant
les funerailles des Morts font ,
nous devons tous mourir , nous
ſommes tous mortels ; on brûle les
corps morts au ſon des muſettes
& autres Inſtrumens , on dépenſe
beaucoup à ces funerailles , &
aprés qu'on a brûlé les corps de
ceux qui font morts , l'on met
leurs cendres ſous de grandes piramides
toutes dorées , élevées à
DU VOYAGE DE SIAM. 27
l'entour de leur Pagodes. Les
Talapoins pratiquent une eſpece
de Confeſſion ; car les Novices
vont au Soleil levantſe proſterner
ou s'affeoir fur leurs talons & marmottent
quelques paroles , aprés
quoy le vieux Talapoin leve la
main à côté deſa joie & lui donne
une forte de benediction , aprés
laquelle le Novice ſe retire.
Quand ils prêchent, ils exhortent
de donner l'aumône au Talapoin ,
& ſe creyent fort ſçavants , lorfqu'ils
citent quelques paſſages
de leurs Livres anciens en Langue
Baly , qui eft comme le Latin
chez nous; cette Langue eſt tresbelle
& emphatique , elle a ſes
conjuguaiſons comme la Latine.
Lorſqueles Siamois veulent ſe
marier , les parens de l'homme
vont premierement ſonder la volontéde
ceux de la fille, & quand
ils ont fait leur accord entr'eux
cij
28 RELATION
les parens du garçon vont preſenter
ſept boſſettes ou boiſtes de
betel & d'arest à ceux de la fille ,
& quoy qu'ils les acceptent &
qu'on les regarde déja comme
mariez le mariage ſe peut rompre
, & on ne peut encore асси-
fer devant le Juge , ny les uns ny
les autres , s'ils le ſeparent aprés
cette ceremonie .
Quelques jours aprés les parens
de l'homme le vont preſenter , &
il offre luy-même plus de boſſettes
qu'auparavant ; l'ordinaire eft
qu'il y en ait dix ou quatorze ,
& lors celuy qui ſe marie demeure
dans la maiſon de ſon beaupere,
ſans pourtant qu'il y ait conſommation
, & ce n'eſt que pour
voir la fille & pour s'accoûtumer
peu à peu à vivre avec elle durant
un ou deux mois ; aprés cela
tous les parens s'aſſemblent
avec les plus anciens de la caſte
ou nation ; ils mettent dans une
DU VOYAGE DE SIAM. 2.9
bourſe, l'un un anneau & l'autre
des bracelets , l'autre de l'argent ,
il y en a d'autres qui mettentdes
pieces d'étoffes au milieu de la table
: enſuite le plus ancien prend
une bougie allumée & la paffe
ſept fois au tour de ces prefens,
pendant que toute l'aſſemblée
crie en ſouhaitant aux Epoux un
heureux mariage , une parfaite
ſanté &une longue vie , ils mangent
& boivent enfuite , & voilà
le mariage achevé. Pour le dot
c'eſt comme en France , finon
que les parens du garçon portent
ſon argent aux parens de la fille ,
mais tout cela revient à un ; car
le dot de la fille eſt auſſi mis à
part , & tout eſt donné aux nouveaux
mariez pour le faire valoir.
Si le mary repudie ſa femme ſans
forme de Juſtice , it perd l'argent
qu'onluy a donné, s'illarepudie
par Sentence de Juge , qui
č iij
30
RELATION
ne la refuſe jamais, les parensde
la fille luy rendent ſon bien ; s'il
y a des enfans , ſi c'eſt un garçon
ou une fille , le garçon fuit la mere
, & la fille le pere , s'il y a deux
garçons & deux filles , un garçon
&une fille vont avec le pere, &
un garçon & une fille vont avec
lamere.
,
Al'égarddes monnoyes ilsn'en
ontpoint d'or , la plus groſſe d'argent
s'appelle tical , & vaut environ
quarante ſols , la ſeconde
mayon qui péſe la quatriéme partie
d'un tical , & vaux dix fols
la troiſieme eſt un foüen , qui
vaut cinq ſols , la quatriéme eſt
un fontpaye qui vaut deux fols
&demy, enfin les plus baſſes monnoyes
font les coris qui font des
coquillages que les Hollandois
leur portent des Maldives , ouυ
qui leur viennent des Malais &
des Cochinchinois ou d'autres
DU VOYAGE DE SIAM. 31
côtez , donthuit cens valent un
fouën qui eſt cinq fols .
le
Al'égard des Places fortes dur
Royaume , il ya Bancoc qui eft
environ dix lieuës dans la Riviere
de Siam , où il y a deux Forterefſes
, comme j'ay déja dit. Il y a la
Ville Capitale nommée Juthia ,
autrement nommée Siam , qu'on
fortifie de nouveau par une enceinte
de murailles de bricque ;
Corfuma frontiere contre
Royaume de Camboye eſt peu
forte; Tanaferin à l'oppoſite de la
côte de Malabar eft peu fortifiée .
Merequi n'eſt pas fortifiée, mais
ſe pouroit fortifier , & on y pouroit
faire un bon Port. Porcelut
frontiere de Laos eſt auſſi peu
fortifiée . Chenat n'a que le nom
de Ville , & il reſte quelque apparence
de barrieres , qui autrefois
faifoient fon mur. Louvo où
le Roy demeure neuf mois de
c iiij
32 RELATION
l'année , pour prendre le plaiſir
de la chaſſe del'Elephant & du
Tygre , étoit autrefois un aſſem-
Blage de Pagodes entouré de
terraffes , mais à preſent le Roy
l'arendu incomparablement plus
beau par les Edifices qu'il y fait
faire , & quant au Palais qu'il ya
it l'a extrêmement embelli par les
caux qu'il y fait venir des Montagnes.
Patang eſt un Port des plus
beaux du côté des Malais , où
l'on peut faire grand commerce.
LeRoy de Siam a refuſé aux Compagnies
Angloiſes & Hollandoiſes
de s'y établir : l'on y pourroit
faire un grand établiſſement qui
feroit plus avantageux que Siam
àcausede la ſituation du lieu ; les
Chinois y vont& pluſieurs autres
Nations , on peut s'y fortifier aifément
fur le bord de la Riviere .
CettePlace appartient àune Rey
DU VOYAGE DE SIAM. 33
nequi eſt tributaire du Roy de
Siam , qui à parler proprement en
eſt quaſi le maître .
Quant à leurs Soldats ce n'étoit
point lacoûtume de les payer;
le Roy d'apreſent ayant ouy dire
que les Roys d'Europe payoient
leurs troupes , voulut faire la ſupputationà
combien monteroit la
paye d'un foüen par jour , qui eſt
cinq fols ; mais les Controlleurs
luy firent voir qu'il falloit des
ſommes immenfes , à cauſe de la
multitude de ſes Soldats , de forte
qu'il changea cette paye en ris
qu'il leur fait diſtribuer , du depuis
, il y en a ſuffisamment pour
Ieurs nourritures, &cela lesrend
tres- contens ; car autrefois il falloit
que chaque Soldat ſe fournit
de ris , & qu'il le portât avec ſes
armes, ce qui leur peſoitbeaucoup .
A l'égard de leurs Bâteaux &
Vaiſſeaux , leurs Balons d'Etat ou
34
RELATION
Bâteaux que nous appellons font
les plus beauxdu monde; ils font
d'un ſeul arbre , &d'une longueur
prodigieuſe , il y ena qui tiennent
cinquante juſqu'à cent & cent
quatre-vingt rameurs ; les deux
pointes font tres- relevées , & celuy
qui les gouverne donnant du
pied ſur lapoupefait branler tout
le Balon , & l'on diroit que c'eſt
un Cheval qui ſaute,touty eft doré
avec des Sculptures tres- belles
, & au milieu il y a un Siege
fait en forme de Trône en piramide
, d'une Sculpture tres- belle
& toute dorée , & il y en a de
plus de cent ornemens differents,
mais tous bien dorez &tres-beaux.
Autrefois ils n'avoient que des
Navires faits comme ceux de la
Chine , qu'on nomme Somme ; il
y ena encore pour aller auJapon,
à la Chine , à Tonquin ; mais le
Roy a fait faire pluſieurs Vaif-
1
DU VOYAGE DE SIAM. 35
feaux à l'Europeenne , & en a
acheté des Anglois quelques-uns,
tous agréés & appareillés . Il y a
environ cinquante Galeres pour
garder la Riviere & la côte ; ſes
Galeres ne font pas comme ceux
de France , il n'y a qu'un homme
àchâque Rame , & font environ
quarante ou cinquante au plus fur
chacune ; les Rameurs fervent de
Soldats , le Royne ſe ſert que des
Mores , des Chinois&des Malabars
pour naviger , & s'il y met
quelque Siamois pour Matelots,
cen'eſt qu'en petit nombre,& afin
qu'ils apprennent la navigation.
LesCommandants de ſes Navires
font Anglois ou François , parce
que les autres Nations font tresméchants
navigateurs .
Il envoye tous les ans cinq ou
fix de ces Vaiſſeaux appellez
Sommes à la Chine , dont il y en
a de mille juſqu'à quinze cens
36 RELATION
Tonneaux chargés de quelques
draps , corail , de diverſes marchandiſes
de la côte de Coromandel
& de Suratte , du ſalpêtre , de
l'étain &de l'argent; il en tire des
ſoyes cruës , des étoffes de ſoye ,
des ſatin's de Thé , dumufc , de la
rubarbe , des poureelines , des
ouvrages vernis , du bois de la
Chine , de l'or , & des rubis . Ils
ſe ſervent de pluſieurs racines
pour la Medecine , entr'autres de
la couproſe , ce qui leur apporte
de grands profits .
Le Roy envoye au Japon deux
ou trois Sommes , mais plus petites
que les autres , chargées des
mêmes marchandises , & il n'eſt
pas neceſſaire d'y envoyer de
l'argent ; les marchandiſes que
L'ony porte ſont des moindres ,
&au meilleur marché , les cuirs
de toutes fortes d'animaux y font
bons , & c'eſt la meilleure marDU
VOYAGE DE SIAM. 37
chandiſe que l'on y peut porter ;
on en tire de l'or , de l'argent en
barre , du cuivre rouge , toutes
fortes d'ouvrages d'Orphevrerie ,
des paravants , des Cabinets vernis
,des porcelines , du Thé &
autres choſes ; il en envoye quelquefois
un , deux & trois au
Tonquin de deux à trois cent tonneaux
au plus , avec des draps ,
de corail , de l'Etain , de l'Ivoire ,
du poivre , du ſalpêtre , du bois
de ſapin, & quelques autres marchandiſes
des Indes & de l'argent
au moins le tiers du capital,
on en tire du muſc , des étoffes
de ſoye , de la ſoye crüe , & jaune,
des Camelots , de pluſieurs fortes
de ſatins , du velours , toutes fortes
de bois vernis , des porcelines
propres pour les Indes , & de l'ar
-en barre , à Macao , le Roy envoye
un Navire au plus chargé
de pareilles Marchandiſes qu'à la
38
RELATION
•
Chine. On y peut encore envoyer
quelque mercerie , des dentelles
d'or , d'argent & de foye & des
armes , on en tire des mêmes
marchandiſes que de la Chine ,
mais pas à ſi bon compte.
A Labs le commerce ſe fait par
terre ou par la Riviere , ayant des
bâteaux plats , on y envoye des
draps & des toiles de Surate , &
de la côte , & on en tire des rubis
, du muſc , de la gomme ,
des dents d'Elephans, du Canfre ,
des cornes de Rinocerot , des
peaux de Buffes & d'Elans , à
tres-bon marché , & il y a grand
profit à ce commerce que l'on
fait ſans riſque.
ACamboye on envoye des petites
barques avec quelques draps,
des toiles de Surate & de la côte,
des uſtenciles de cuiſine qui viennent
de la Chine , on en tire des
dents d'Elephans , du benjoüin ,
DU VOYAGE DE SIAM. 39
trois fortes de gomes gutte , des
peaux de Buffes , & d'Elans , des
nids d'oiſeaux pour la Chine dont
je parleray bien- toft & des nerfs
de Cerfs .
On envoye auſſi à la Cochinchine
, mais rarement : car de peuple
n'eſt pas bien traitable , parce
qu'ils font la plupart de méchante
foy , ce qui empéche le commerce
, on y porte de l'argent
du Japon où l'on profite confiderablement
, du laurier rouge ,
de la cire jaune, duris , du plomb,
du ſalpêtre , quelques draps rouges&
noirs , quelques toiles blanches
, de la terre rouge , du vermillon
& vif argent.
On en tire de la ſoye cruë , du
fucre candy , & de la cafſonnade
, peu de poivre , des nids
d'oiſeaux qui ſont faits comme
ceux des Irondelles qu'on trouve
fur des Rochers au bord de
J
40 RELATION
la mer , ils font de tres-bon commerce
pour la Chine & pour pluſieurs
autres endroits ; car aprés
avoir bien lavé ces nids & les
avoir bien feichés ils deviennent
durs comme de la corne , & on
les met dans des boüillons ; ils
font admirables pour les maladies
de langueur &pour les maux d'eftomach
, j'en ay apporté quelques-
uns en France , du bois d'aigle
&de Calamba , du cuivre &
autres marchandises qu'on y apporte
du Japon , de l'or de plufieurs
touches , & du bois de fapan.
Lorſqu'on ne trouve pas de
Navire à Fret , on en envoye un
à Surate , chargé avec du cuivre ,
de l'étain , du ſalpêtre , de l'alun ,
des dents d'Elephants , du bois
de ſapan , &pluſieurs autres marchandiſes
qui viennent des autres
parts des Indes , on en tire des
toiles
DU VOYAGE DE- SIAM. 41
& autres marchandifes d'Europe,
quand il n'en vient point à Siam .
On envoye à la côte de Coromandel
, Malabar , & Bengala
&de Tanaferin , des Elephans
de l'étein , du ſalpêtre , du, cuivre
du plomb , & l'on en tire des toiles
de toutes fortes ,
,
On envoye à Borneo rarement ;
c'eſt une Iſle qui eſt proche de
celle de Java , d'où l'on tire du
poivre . du ſangde Dragon , camphre
blanc , cire jaune ,bois d'aigle
, du bray , de l'or , des perles,
&desdiamans les plus beaux du
monde ; on y envoye des marchandiſes
de Surate , c'eſt à dire
des toiles , quelques pieces de
drap rouge & vert , & de l'argent
d'Eſpagne..
Le Prince qui poffede cette Ifle
ne fouffre qu'avec peine le commerce
, & il craint toûjours d'êtte
ſurpris ; il ne veut pas permetd
42
RELATION
tre à aucune Nation Europeenne
de s'établir chez luy. Il y a cu
des François qui y ont commercé
, il ſe fie plus à eux qu'à aucune
autre Nation .
On envoye encore à Timor
Ifle proche des Molucques , d'où
l'on tire de la cire jaune & blanche
, de l'or de trois touches , des
eſclaves, du gamouty noir , dont
on ſe ſett pour faire des cordages
, & on y envoye des toiles de
Surate , du plomb, des dents d'Elephans,
de la poudre, de l'eau-devie
, quelques armes , peu de drap
rouge & noir , & de l'argent. Le
peuple y eſt paiſible , & negocie
fort bien . Il y a grand nombre
de Portugais.
Al'égard des Marchandiſes du
crû de Siam , il n'y a que de l'étain
, du plomb , du bois de fapan,
de l'Ivoire , des cuirs d'Elans.
& d'Elephans ; il y aura quantité
1
1
!
DU VOYAGE DE SIAM. 43
de poivre en peu de temps , c'eſt
à dire l'année prochaine ,de larrek
, du fer en petits morceaux ,
du ris en quantité , mais l'on y
trouve des marchandises de tous
les lieux ſpecifiés ci-deſfus , & à
affez bon compte. On y apporte
quelques draps & ferges d'Angleterre,
peu de corail &d'ambre,
des toiles de la côte de Coromandel
& de Surate , de l'argent en
piaſtre que l'on trocque ; mais
comme je l'ai dit maintenant ,
que la plupart des Marchands ont
quitté depuis que le Roi a voulu
faire le commerce , les Etrangers
n'y apportent que tres-peu de
choſes ,que les Navires qui ont
accoûtumé d'yvenir n'y font pas
venus l'année derniere , &on n'y
trouve rien , & fi peu qu'il y en
a , il eſt entre les mains du Roi ,
& ſes Miniſtres les vendent au
prix qu'ils veulent.
dij
44
RELATION
Le Roïaume de Siam a prés de
trois cens lieuës de long , fans y
comprendre les Roïaumes tributaires
, à ſçavoir Camboges ,
Gelior , Patavi , Queda , &c . du
Septentrion au Midi , il eſt plus
étroit de l'Orient à l'Occident. Il
eſt borné du côté du Septentrion
par le Roïaume de Pegu & parla
Mer du Gange du côté du Couchant,
du Midi par le petit détroit
de Maláca , qui fut enlevé au Roi
de Siam par les Portugais ils l'ont
poſſedé plus de foixante ans . Les
Hollandois le leur ont pris , &
le poffedent encore ; du côté
d'Orient , il eſt borné par la Mer
& par les Montagnes qui le ſeparent
de. Camboges & de Laos ..
La fituation de ce Roïaume eſt
avantageuſe à cauſe de la grande
étenduë de ſes côtes , ſe trouvant
comme entre deux Mers qui
lui ouvrent le paſſage à tant de.
DU VOYAGE DE SIAM. 45
vaſtes Regions , ſes côtes ont
cinq cens lieuës de tour ; on y
aborde de toutes parts , du Japon
, de la Chine , des Iſles Philippines
, du Tonquin , de la Cochinchine
, de Siampa , de Camboge
, des Ifles de Java , de Sumatra
, de Colconde , de Bengala
, de toute la côte de Coromandel
, de Perſe , de Surate , de Lameque,
de l'Arabie ,& d'Europe
c'eſtpourquoi l'on y peut faire un
grand commerce , ſuppoſé que le
Roi permette à tous les MarchandsEtrangers
d'y revenir comme
ils le faifoient autrefois .
Le Roïaume ſe diviſe en onze
Provinces , ſçavoir celle de Siam ,
de Mitavin , de Tanaferin , de
Jonſalam, de Reda, de Pra, d'Ior,
de Paam, de Parana , de Ligor ,
de Siama . Ces Provinces - là
avoient autrefois la qualité de
Roïaume ; mais elles ſont aujour
46 RELATION
d'hui ſous ladomination du Roide
Siam qui leur donne des Gouverneurs
. Il y en a telles qui peuvent
retenir le nomde Principauté;mais
les Gouverneurs dépendent du
Roy& lui payent tribut. Siam eft
la principale Province de ce
Royaume , la Ville Capitale eſt ſituée
à quatorze degrez & demy
de latitude du Nort , fur le bord
d'une tres-grande & belle riviere ,
& les Vaiſſeaux tous chargés la
paſſent juſqu'aux portes de la Ville,
qui eſt éloignée de la Mer de
plus de quarante lieuës , & s'étend
àplus de deux cens lieuës dans le
pays , & parce moyen elle conduit
dans une partie des Provinces,
dontj'ai parlé ci- deſſus.Cette
Riviere eſt fort poiſſonneuſe &
fes rivages font affez bien peuplez
, quoiqu'ils demeurentinondésune
partie de l'année. Le terroir
y eſt paſſablement fertile 3
DU VOYAGE DE SIAM . 47
mais tres-mal cultivé , l'inondation
provient des grandes pluyes
qu'il y tombe durant trois ou quatre
mois de l'année ; ce qui fait
beaucoup croître leur ris ; en forte
que plus l'inondation dure ,
plus les recoltes du ris ſont en
abondance , & loin des'en plaindre
ils ne craignent que la trop
grande ſeichereſſe. Il y a beaucoup
de terre en friche ,& faute
d'habitans elles ont eſté dépeu--
plées par les guerres precedentes,
& comme ils font ennemis du
travail , ils n'aiment à faire que
les choſes aiſées. Ces plaines abandonnées
& ces épaiſſes Fo--
rets qu'on voit ſur les Montagnes
ſervent de retraite aux Elephans,
aux Tygres , aux Boeufs & Vaches
ſauvages , aux Cerfs , aux Biches,
Rinoceros & autres animaux
que l'ony trouve en quantité.
Al'égard des plantes & des
د
48 RELATION
fruits , il y en a pluſieurs dans le
païs ; mais qui ne font pas rares.
& qui ne ſe peuvent porter que,
difficilement en France , à cauſe
de lalongueur de la navigation .
Il n'y a point d'oiſeaux particuliers
qui ne foient en France , à
la referve d'un oiſeau fait comme
un merle ,qui contrefa it l'homme
à l'égard du rire , du chanter &
du fiffler , les fruits les plus eſtimés
y font les durions ;ils ont
une odeur tres- forte qui n'agrée
pas à pluſieurs, mais à l'égard du
goût il eſt tres- excellent. Ce fruit
eſt tres chaud & tres -dangereux
pour lafanté , quand on en mange
beaucoup; il ya un gros noyau,
à l'entour duquel eſt une eſpece
de creme renfermée dans une écorce
environnée de pluſieurs piquants
, & qui eft faite en pointe
de diamant ; mon goût n'a ja
mais pu s'y accommoder. La mangue
:
DU VOYAGE DE SIAM . 49
gue en ce pays-là eſt en prodigieuſe
quantité , & c'eſt le meil
leur fruit des Indes , d'un goût
exquis , n'incommodant aucunement,
àmoins que d'en manger en
trop grande quantité , alors elle
pouroit bien cauſer la fiévre ; elle
a la figure d'une amande , mais
auffi groſſe qu'une poire de Mef
fire-Jean; ſa peau eſt aſſés mince
& a la chair jaune ; le mangoûstan
eſt un fruit reſſemblant à
une noix verte , qui a dedans un
fruit blanc d'un goût aigret &
agreable , & qui approche fort
deceluide la pêche &de la prune,
il est tres- froid & reſtraintif.
LeJacques eſtun gros fruit qui
eſt bon , mais tres- chaud & indigefte
, & cauſe le flus de ventre
quand on en mange avec excés .
La nana eft preſque comme le
durion , c'eſt à dire à l'égard de
la peau ; il a au bout une courone
50
RELATION
ne de feüilles comme celle de
l'artichaud ; la chair en eſt tresbonne
& a le goût de la pêche
& de l'abricot tout enſemble ; il
eft tres-chaud & furieux ; ce qui
fait que l'on le mange ordinairement
trempé dans le vin.
La figue eſtun fruit tres -doux,
fuave&bien faiſant ; cependant
un peu flegmatique , il y en a pendant
toute l'année .
L'ate eſt un fruit doux & tresbon
, & ne fait point de mal ; il
y en a qui l'eſtiment plus que
tous les fruits des Indes. Il y a
des oranges en tres - grande
quantité de pluſieurs fortes tresbonnes
& fort douces .
La pataïe eſt un fruit tres-bon,
mais l'arbre qui le porte ne dure
que deux ans.
Il y a de toute forte d'oranges
en quantité & de tres - bon goût .
La penplemouſe eſt un fruit
tres-bon pour la ſanté à peu prés
DU VOYAGE DE SIAM . SI
comme l'orange,mais qui a un petit
goût aigret. Il y a pluſieurs
autres fruits qui ne font pas fort
bons.
On a commencé il y a quelques
années à ſemer beaucoup
de bleds dans le pays haut proche
des montagnes qui y vient
bien & eft tres - bon .
On y a planté pluſieurs fois
des vignes qui y viennent bien ,
mais qui ne peuventdurer, à cauſe
d'une eſpece de fourmy blanc
qui la mange juſqu'à la racine.
Il y a beaucoup de canes de
fucre qui rapportent extrémement
; il y a auſſi du tabac en
quantité que les Siamois mangent
avec l'arrek & la chaud .
A l'égard de l'arrek, les Siamois
eſliment ce fruit plus que tout
autre , & c'eſt leur manger ordi
naire ; il y en a une ſi grande
quantité que les marchés en
e ij
52 RELATION
font pleins , & un Siamois croiroit
faire une grande incivilité
s'il parloit à quelqu'un ſans avoir
la bouche pleine de darek , de
betel , de chaud ou de tabac .
,
Il y a grande quantité de ris
dans tout le Roïaume & à tresbon
compte ,& comme ce païs
eſt toûjours inondé , cela fait
qu'il eſt plus abondant , car le ris
ſe nourrit dans l'eau & à meſure
que l'eau croît , le ris croît pareillement
,& fil'eau croît d'un pied
en vingt-quatre heures ce qui
arrive quelquefois , le ris croît
aufli àproportion &a toûjours fa
tige au deſſus de l'eau , il ne reſte
que cinq ou fix mois au plus en
terre , il vient comme l'avoine,
Il n'y a point de ville dans l'Orient
où l'on voye plus de Nations
differentes , que dans la Ville
Capitale de Siam , & où l'on
parle de tant de langues differentes
, elle a deux lieuës de
DU VOYAGE DE SIAM .
53
tour & une demie lieuë de large,
elle eſt tres- peuplée , quoi qu'elle
ſoit preſque toûjours inondée ,
enfortequ'elle reſſemble plûtoſtà
une Ifle , il n'y a que des Maures
, des Chinois , des François
& des Anglois , qui demeurent
dans la Ville , toutes les autres
Nations eſtant logées aux environspar
camps ; c'eſt à dire chaque
nation enſemble , ſi elles estoient
affemblées elles occuperoient
autant d'eſpace que la Ville qui
eſtoit autrefois tres- marchande ,
mais les raiſons que j'ay dites cydevant
empêchent la plupartdes
Nations Etrangeres d'y venir &
d'y rien porter.
Le peuple eſt obligé de ſervir
le Roy quatre mois de l'année
regulierement , & durant toute
l'année , s'il en a beſoin ; il ne leur
donne pas un fol de paye, eſtant
obligez de ſe nourir eux-mêmes
e iij
54 RELATION
& de s'entretenir ; c'eſt ce qui
a faitque les femmes travaillent
afin de nourir leurs maris .
A l'égard des Officiers depuis
les plus grands Seigneurs de la
Cour juſqu'au plus petit du
Royaume, le Roy neleur donne
que de tres- petits appointemens,
ils font auſſi eſclaves que les autres
, & c'eſt ce qui luy épargne
beaucoup d'argent. Les Provinces
éloignées dont les habitans
ne le ſervent point actuellement,
luy payent un certain tribut par
teſte. J'arrivay dans le temps que
le pays eſtoit tout-à-fait inondé
, la Ville en paroît plus agreable,
les ruës en ſont extremement
longues , larges & fort droites,
il y a aux deux côtez des
maiſons bâties ſur des pilotis &
des arbres plantés tout à l'entour
, ce qui fait une verdeur
admirable , & on n'y peut aller
DU VOYAGE DE SIAM. 55
qu'en ballon ; en la regardant l'on
croiroit voir d'un coup d'oeil ,
une ville , une mer & une vaſte
foreſt , où l'on trouve quantité
de Pagodes qui font leurs Eglifes
, & la plupart font fort dorées,
à l'entour de ces Pagodes', il ya
comme des Cemetieres plantés
d'arbres la plupart fruitiers , les
maiſons des Talapoins font les
plus grandes& les plus belles&
font en tres-grand nombre .
Ce païs-là eſt plus ſain que les
autres des Indes ,les Siamois ſont
communément affez bien-faits ,
quoi qu'ils ayent tous le viſage
bazanné , leur taille eſt affez
grande , leurs cheveux font
noirs , ils les portent aſſez courts
àcauſe de la chaleur , ils ſe baignent
ſouvent , ce qui contribuë
àla conſervation de leur ſanté
les Europeans qui y demeurent
en font de même pour éviter les
a
e iiij
56 RELATION
maladies ; ils tiennent leurs marchés
ſur des places inondées dans
leurs balons pendant fix ou ſept
mois de l'année que l'inondation
dure.
Le Roy ſe leve du matin &
tient un grand Conſeil vers les
dix heures ,où l'on parle de toutes
fortes d'affaires, qui dure juſqu'à
midy , aprés qu'il eſt fini ſes Medecins
s'aſſemblent pour ſçavoir
l'état de ſa ſanté , & enſuite il
va dîner ; il ne fait qu'un repas
par jour , l'aprés-dînée il ſe retire
dans ſon appartement où il dort
deux ou trois heures , & l'on ne
ſçait pas à quoyil employe le reſte
dujour, n'étant permis pas même
à ſes Officiers d'entrer dans ſa
chambre . Sur les dix heures du
foir, il tient un autre Conſeil ſecret
, où il y a ſept ou huit Mandarins
de ceux qu'il favoriſe le
plus , ce Conſeil dure juſqu'à
DU VOYAGE DE SIAM . 57
minuit . Enſuite on luy lit des
hiſtoires ou des vers qui ſont faits
à leurs manieres , pour le divertir
& d'ordinaire après ce Conſeil ,
Monfieur Conſtans demeure ſeul
aveclui , auquel il parle à coeur
ouvert , comme le Roy luy trouve
un eſprit tout-à- fait vaſte , ſa
converſation luy plaît , & il luy
communique toutes ſes plus fecrettes
penſées ; il ne ſe retire
d'ordinaire qu'à trois heures aprés
minuit pour s'aller coucher , voilà
la maniere dontle Roy vît toûjours
, & de cette forte toutes les
affaires de ſon Royaume paſſent
devant luy ; dans de certains
tempsil prend plaiſir à la chaſſe ,
comme j'ay dit ; il aime fort les
bijoux même ceux d'émail & de
verre , il eſt toûjours fort proprement
vêtu , il n'a d'enfans qu'une
fille , que l'on appelle la Princef
ſeReyne , âgée d'environ vingt58
RELATION
fept ou vingt-huit ans le Roi
l'aime beaucoup , on m'a dit qu'elle
étoit bien faite ; mais jamais les
hommes ne la voyent, elle mange
dans le même lieu & à même
tems que le Roy,mais à une table
feparée ; & ce ſont des femmes
qui les ſervent qui ſont toûjours
proſternées.
Cette Princeſſe a ſa Cour compoſéedes
femmes des Mandarins
qui la voyent tous les jours , &
elletientConſeil avec ſes femmes
de toutes ſes affaires , elle rend
juſticeà ceux qui luy appartiennent
, &leRoy luy ayant donné
desProvinces dont elle tire le revenu&
en entretient fa Maiſon ,
elle a ſes châtimens & exerce la
juſtice. Il y eſt arrivé quelquefois
que lorſque quelques femmes de
ſamaiſon ont eſté convaincuës de
mediſances d'extrême confideration
, ou d'avoir revelé des ſecrets
DU VOYAGE DE SIAM. 59
de tres-grende importance , elle
leur a fait coudre la bouche .
Avant la mort de la Reyne ſa
mere, elle avoit à ce que l'on dit
du penchant à faire punir avec
plus de ſeverité , mais du depuis
qu'elle l'a perduë elle en uſe avec
beaucoup plus de douceur ; elle
va quelquefois àla chaſſe avec le
Roy , mais c'eſt dans une fort
belle chaiſe placée ſur un Elephant
& où quoy qu'on ne la
voye point elle voit neanmoins
tout ce qui s'y paſſe. Il y a des Cavaliers
qui marchent devant elle
pour faire retirer le monde , & fi
par hazard il ſe trouvoit quelque
homme ſur ſon chemin qui ne pût
pas ſe retirer,il ſe proſterne en terre
& luy tourne le dos. Elle eſt
tout le jour enfermée avec ſes
femmes ne ſe divertiſſantà faire
aucun ouvrage , ſon habillement
eſt affez ſimple & fort leger , elle
60 RELATION'
eſt nuë jambe , elle a à ſes pieds
des petites mulles ſans talons
d'un autre façon que celles de
France ; ce qui lui fertdejuppe eſt
une piece d'étoffe de ſoye ou de
coton qu'on appelle paigne , qui
l'enveloppe depuis la ceinture
en bas & s'atrache par les deux
bouts, qui n'eſt point plicée , de
la ſceinture en haut elle n'a rien
qu'une chemiſe de mouſſeline
qui luy tombe deſſus cette maniere
de juppe , & qui eſt faite
de meſme que celle des hommes,
elle a une écharpe fur la gorge
qui luy couvre le col & qui paffe
par deſſous les bras , elle eſt toûjours
nuë teſte , & n'a pas les
cheveux plus longs que de quatre
ou cinq doigts , ils lui font comme
une tête naiſſante ; elle aime
fort les odeurs , elle fe met de
P'huileà la teſte ; car il faut en ces
lieux-là que les cheveux foient
DU VOYAGE DE SIAM . 61
luifans , pour eſtre beaux , elle
ſe baigne tous les jours meſme
plus d'une fois qui eſt la coûtume
de toutes les Indes , tant à l'égard
deshommes quedes femmes ;j'ay
apris tout ceci de Madame Conſtans
qui va ſouvent luy faire ſa
Cour. Toutes les femmes qui
font dans ſa Chambre ſont toûjours
proſternées & par rang ,
c'eſt à dire les plus vieilles ſont
les plus proches d'elle , & elles
ont la liberté de regarder la Princeffe
, ce que les hommes n'ont
point avec le Roy de quelque
qualité qu'ils foient , car tant
qu'ils font devant luy , ils ſont
profternez & meſme en luy parlant.
Le Roy a deux freres , les freres
du Roy heritent de la Couronne
de Siam preferablement à
fes enfans . Quand le Roy fort
pour aller à la Chaſſe ou à la
62 RELATION
promenade, on fait avertir tous
les Européens de ne ſe point trouver
ſur ſon chemin , à moins qu'ils
ne veulent ſe profterner un moment:
avant qu'il forte de fon Palais
on entend des trompettes &
des tambours qui avertiſſent &
qui marchent devant le Roy , à
ce bruit les Soldats qui font en
haye ſe proſternent le front contre
terre & tiennent leurs moufquets
ſous eux ; ils font en cette
poſture autant de temps que
le Roy les peut voirde deſſus ſon
Elephant , où il eſt aſſis dans une
chaiſe d'or couverte , la garde à
cheval qui l'accompagne & qui
eſt compoſée de Maures eſt environ
quarante Maiſtres marchant
fur les aîles ; toute la Maiſon du
Roy eſt à pied devant , derriere
&à côté , tenant les mains jointes,&
elle le ſuit de cette maniere.
Il y a quelques Mandarins des
DUVOYAGE DE SIAM. 63
principaux qui le fuivent ſur des
Elephans , dix ou douze Officiers
qui portent de grands paraſſols
tout à l'entour du Roy , & il n'y
a que ceux- là qui ne ſe proſternent
point ; car dés le moment
que le Roy s'arreſte tous les autres
ſe proſternent , & mefme
ceux qui ſont ſur les Elephans.
Quant à la maniere que le Roy
de Siam obſerve à la reception
des Ambaſſadeurs , comme ceux
de la Cochinchine , de Tonquin,
de Colconda , des Malais , de
Java & des autres Roys , il les
reçoit dans une Salle couverte de
tapis , les grands & principaux
du Roïaume font dans une autre
ſalleun peu plus baffe , & les autres
Officiers de moindre qualité
dans une autre ſalle encore plus
baſſe, tous proſternés ſur des tapis
en attendant que le Roy pa
64 RELATION
roiſſe par une feneſtre qui eſt visà-
vis; la ſalle où doivent eſtre les
Ambaſſadeurs eſt élevée d'environ
dix ou douze pieds & diſtante
de cette falle de trente pieds ;
l'on ſçait que le Roy va paroître
par le bruit des trompettes , des
tambours & des autres Inſtrumens
; les Ambaſſadeurs font derriere
une muraille qui renferme
cette ſalle qui attendent la fortie
du Roy , & ordre des Miniſtres
que le Roy envoye appeller par
un des Officiers de ſa Chambre,
ſuivant la qualité des Ambaſſadeurs
, & fes Officiers fervent en
telles occaſions; aprés queles Miniſtres
ont la permiffion du Roy
on ouvre la porte de la ſalle &
auſſi- tôt les Ambaſſadeurs paroifſent
avec leur Interprete , &
l'Officier de la Chambre du Roi
qui ſert de Maiſtre de Ceremonies&
marchent devant eux profternez
DU VOYAGE DE SIAM. 65
ternez ſur des tapis qui ſont ſur
la terre , faiſant trois reverences
la teſte en bas à leur maniere
aprés quoy le Maiſtre des Ceremonie
marche à genoux les mains
jointes , l'Ambaſſadeur avec fes
Interprettes le ſuit en la même
poſture avec beaucoup de modeſtie
juſques au milieu de la
diſtance d'où il doit aller , & fait
trois reverences en la meſme forme
; il continue à marcher jufqu'au
coin le plus proche des falles
où les Grands font , & il recommence
à faire des reverences
où il s'arrête ; il y a une table
entre le Roy & l'Ambaſſadeur ,
diſtante de huit pieds , où ſont
les preſens que l'Ambaſſadeur apporte
au Roy , & entre cette table
& les Ambaſſadeurs il ya un
Mandarin qui reçoit les paroles
de ſa Majesté , & dans cette Salle
ſont les Miniſtres du Roy diff
66 RELATION
tants de l'Ambaſſadeur d'environ
trois pas , & le Capitaine qui
gouverne la Nation d'où eſt l'Ambaffadeur
eft entre luy & les Miniſtres
; le Roy commence à parler
le premier & non l'Ambaffadeur
, ordonnant à ſes Miniſtres
de s'informer de l'Ambaffadeur
quand il eſt party de la preſence
duRoy ſon Maiſtre , file Roy
& toute la famille Royale eſtoit
en ſanté , auquel l'Ambaſſadeur
répond ce qui en eſt par fon Interprete
, l'Interprete le dit au
Capitaine de la Nation d'où eſt
l'Ambaſſadeur , le Capitaine au
Barcalon & leBarcalon au Roy.
Aprés cela le Roy fait quelque
demande fur deux ou trois points
concernant l'Ambaſſadeur ; enfuitele
Roy ordonne à l'Officier
qui eſt proche la table de donner
du betel àl'Ambaſſadeur , ce
qui ſert de ſignal pour que l'on
DU VOYAGE DE SIAM. 67
luy preſente une veſte , & incontinent
le Roy ſe retire au bruit
des tambours, des trompettes&
des autres inſtrumens. La premiereAudiencede
l'Ambaſſadeur
ſe paſſe entreluy & le Ministre ,
qui examine la Lettre &les prefens
du Prince qui l'a envoyés
l'Ambaſſadeur ne preſente point
la Lettre au Roy , mais au Miniſtre
, aprés quelques jours du
Conſeil tenu ſur ce ſujet.
Quand ce font des Ambaſſadeurs
des Roys indépendans de
quelque Couronne , que ce ſoit
de ſes pays , commePerſe , grand
Mogol , l'Empereur de la Chine ,
de Japon , on les reçoit enlamaniere
ſuivanre.
Les Grands du premier & du
ſecond Ordre vont aupied de la
feneſtre où eſt le Roy ſe proſter-:
ner ſuivant leurs qualitez ſur des
tapis , & ceux du troiſieme , quafij
68 RELATION
triéme & cinquiéme , ſont dans
une ſalle plus baffe & attendent
la fortie du Roy qui paroiſt par
une feneſtre qui eſt enfoncée
dans la muraille , & élevée de
dix pieds ; les Ambaſſadeurs font
dans un lieuhors du Palais , en
attendant le Maiſtre des Ceremonies
qui les vient recevoir , &
l'on fait les meſmes ceremonies
dont j'ay parlé cy -deſſus : l'Ambaſſadeur
entrant dans le Palais
leve les mains ſur ſa teſte & marche
entre deux Salles qu'il ya &
monte des degrez qui font visà-
vis la feneſtre où eſtle Roy , &
quand il eſtau haut il poſe un genou
en terre , & auffi-tôt on
ouvre une porte pour qu'il puiſſe
paroître devant le Roy ; enſuite
on pratique les mêmes ceremonies
qui viennent d'eſtre marquées
cy-devant. Ily a un bandege
ou plat d'or ſur la table où
DU VOYAGE DE SIAM. 69
eſt la Lettre traduite & ouverte ,
ayant été receuë par les Miniſtres
quelques jours auparavant dans
une ſalle deſtinée à cet uſage ;
quand l'Ambaſſadeur eſt dans ſa
place le Lieutenant du Miniſtre
prend laLettre& la lit tout haut;
aprés qu'il l'a leuë , le Roy fait
faire quelque demande à l'Ambaſſadeur
par ſon Miniſtre , fon
Miniſtre par le Capitaine de la
Nation , & le Capitaine par l'Interprete
, & l'Interprete enfin
parle à l'Ambaſſadeur. Ces demandes
ſont ſile Roy ſon Maître
& la famille Royale font en ſanté
, & s'il la chargé de quelqu'au
tre choſe qui ne fût pas dans la
Lettre , à quoy l'Ambaſſadeur
répond ce qui en eſt ; leRoy luy
fait encore troisou quatre deman.
des , & donne ordre qu'on luy
donne une veſte & du betel : aprés
quoy le Roy ſe retire au bruit des
70 RELATION
tambours & des trompettes ,&
l'Ambaſſadeur reſte un peu de
temps , & ceux qui l'ont reccu
le reconduiſent juſqu'à fon logis
fans autre accompagnement ; &
comme j'appris cette manierede
recevoir les Ambaſſadeurs qui ne
me parût pas répondre à la grandeur
du Monarque de la part
de qui je venois , j'envoyay au
Roy de Siam deux Mandarins
qui estoientavec moy de ſa part ,
pour ſçavoir ce que je ſouhaitterois
, pour le prier de me faire la
mefme reception que l'on a accoûtumé
de faire en France , ce
qu'il m'accorda de la maniere
queje l'ay raconté cy-devant.
Du Gouvernement , des
Moeurs, de la Religion ,
& du Commerce du
Royaume de Siam, dans
les pays voisins , &plufieurs
autres particularités.
OUS les jours les
Mandarins qui font
deſtinez pour rendre
la juſtice s'aſſemblent
dans une falle où ils
donnent audiance , c'eſt comme
1a Cour du Palais à Paris ,& elle
2 RELATION
eſt dans le Palais du Roy , où
ceux qui ont quelque requête à
preſenter ſe tiennent à la porte
juſqu'à ce qu'on les appellé , &
quand on le fait ils entrent leur
requête à la main & la prefentent.
Les Etrangers qui intentent
procés au ſujet des marchandiſes,
la preſentent au Barcalon , c'eſt
le premier Miniſtre du Roy ,
qui juge toutes les affaires concernant
les Marchands & les
Etrangers ; en ſon abſence , c'eſt
ſon Lieutenant , & en l'absence
des deux , une maniere d'Eſche
wins. Il y a un Officier prépoſé
pour les tailles & tributs auquel
on s'adreſſe , & ainſi des autres
Officiers. Aprés que les affaires
font difcutées on les fait ſçavoir
aux Officiers du dedans du Palais
, qui en avertiſſent le Roy
eſtant lors ſur un Trône élevé
DU VOYAGE DE SIAM . 3
de trois braffes , tous les Mandarins
ſe proſternent la face contre
terre , & le Barcalon ou autres
des premiers Oyas , rapportent
au Roy les affaires & leurs jugemens
, il les confirme , ou il les
change ſuivant ſa volonté , c'eſt
à l'égard des principaux procés ,
& tres- ſouvent il ſe fait apporter
les procés au dedans du Palais
, & leur envoye ſon jugementpar
écrit.
Le Roy eſt tres- abſolu , on diroit
quaſi qu'il eſt le Dieu des
Siamois , ils n'ofent pas l'appeller
de ſon nom. Il châtie tres-feverement
le moindre crime ; car
ſes Sujets veulent eſtre gouvernez
la verge à la main , il ſeſert même
quelquefois des Soldats de ſa
garde pour punir les coupables
quand leur crime eſt extraordinaire
& fuffisamment prouvé.
Ceux qui font ordinairement ema
ij
4 RELATION
ployez ces fortes d'executions
font 150. Soldats ou environ qui
ont les bras peints depuis l'épaule
juſqu'au poignet ; les châtimens
ordinaires ſont des coups
de rottes , trente, quarante , cinquante
& plus , ſur les épaules des
criminels , felon la grandeur du
crime , aux autres il fait piquer
la tête avec un fer pointu : à l'égard
des complices d'un crime
digne de mort , aprés avoir fait
couper la tête au veritable criminel
, il la fait attacher au col
du complice , & on la laiſſe pourir
expoſée au Soleil fans couvrir
la tête pendant trois jours
&trois nuits , ce qui cauſe à celui
qui la porteune grande puantour,
Dans ce Royaume , la peine
du talion eſt fort en uſage , le
dernier des fupplices eſtoit , il n'y
a pas long-temps, de les condamDU
VOYAGE DE SIAM. یک
ner à la Riviere , qui eſt proprement
comme nos Forçats de Galere
, & encorepis ; mais maintenant
on les punit de mort. Le
Roy fait travailler plus qu'aucun
Roy de ſes predeceffeurs, en bâ
timens , à reparer les murs des
Villes , à édifier des Pagodes , à
embellir fon Palais , à bâtir des
Maiſons pour les Etrangers , & à
conſtruire des Navires à l'Euro .
peane , il eſt fort favorable aux
Etrangers , il en a beaucoup à
fon ſervice,& en prend quand il
en trouve .
Les Roys de Siam n'avoient'
pas accoûtumé de ſe faire voir
auſſi ſouvent que celui-cy. Ils
vivoient preſque ſeuls , celuy
d'apreſent vivoit comme les autres
: mais Monfieur de Berithe
Vicaire Apoftolique , s'eſtant ſer
vi d'un certain Brame , qui faifant
le plaiſant avoit beaucoup
1
a iij
6 RELATION
de liberté de parler à ce Monarque
, trouva le moyen de faire
connoître à ce Prince , la puif
fance & la maniere de gouverner
de nôtre grand Roy , & en même
temps les coûtumes de tous
les Roys d'Europe , de ſe faire
voir à leurs Sujets & aux Etrangers
; de maniere qu'ayant un
auffi grand ſens que je l'ay déja
remarqué , il jugea à propos de
voir Monfieur de Berithe , & enfuite
pluſieurs autres ; depuis ce
temps- là il s'eſt rendu affable &
acceſſible à tous les Etrangers.
On appelle ceux qui rendent la
justice ſuivant leurs differentes
fonctions , Oyas Obrat , Oyas
Momrat , Oyas Campheng, Oyas
Ricchou , Oyas Shaynan , Opran,
Oluan ; Oeun , Omun .
Comme autrefois les Roys ne
ſe faisoient point voir , les Miniftres
faifoient ce qu'ils vouloient,
DU VOYAGE DE SIAM. 7
mais le Roy d'apreſent qui a un
tres-grand jugement , & eſt un
grand Politique,veut ſçavoir tout;
il a attaché auprés de luy le Sei
gneur Conftans dont j'ay déja
parlé diverſes fois , il eſt Grec
de nation , d'une grande penetration
, & vivacité d'eſprit
&d'une prudence toute extraordinaire
, il peut & fait tout
fous l'autorité du Roy dans le
Royaume , mais ce Miniſtre n'a
jamais voulu accepter aucune des
premieres Charges que leRoyluy
a fait offrir pluſieurs fois. Le Barcalon
qui mourut ily a deux ans ,&
qui par le droit de ſa Charge
avoit le gouvernement de toutes
les affaires del'Etat , eſtoit homme
d'un tres-grand eſprit , qui
gouvernoit fort bien , & fe faifoit
fort aimer , celuy quiluy fucce
da eſtoit Malais de nation, qui eft
un pays voiſin de Siam , il ſe fera
iiij
8 RELATION
vit de Monfieur Baron , Anglois.
de nation , pour mettre mal Monſieur
Conftans dans l'eſprit du
Roy , & le luy rendre ſuſpect ,
mais le Roy reconnut ſa malice ,
il le fit battre juſqu'à le laiſſer
pour mort , & le dépoſſeda de ſa
Charge , celui qui l'occupe preſentement
vit dans une grande
intelligence avec Monfieur Conſtans
.
Comme par les loix introduites
par les Sacrificateurs des Idoles
qu'on nomme Talapoins , il
n'eſt pas permis de tuer , on condamnoit
autrefois les grands criminels
ou à la chaîne pour leur
vie , ou à les jetter dans quelques
deferts pout y mourir de faim ;
mais le Roy d'apreſent leur fait
maintenant trancher la teſte &
les livre aux Elephans .
Le Roy a des Eſpions pour
ſcavoir ſi on luy cache quelque
DU VOYAGE DE SIAM .
choſe d'importance , il fait châtier
tres - rigoureuſement ceux qui
abuſent de leur autorité . Chaque
Nation étrangere établie dans le
Royaume de Siam a ſes Officiers
particuliers , & le Roy prend de
toutes ces Nations- là des gens
qu'il fait Officiers generaux pour
tout ſon Royaume. Il y a dans
fon Etat beaucoup de Chinois ,
& il y avoit autrefois beaucoup
de Maures ; mais les années pafſées
il découvrit de ſi noires trahiſons
, des concuffions & des
tromperies ſi grandes dans ceux
de cette nation , qu'il en a obligé
un fort grand nombre à déferter
, & à s'en aller en d'autres.
Royaumes.
Le commerce des Marchands
Etrangers y eſtoit autrefois tresbon
, on y en trouvoit de toutes
parts ; mais depuis quelques années
,les diverſes revolutions qui
ΟΙ RELATION
font arrivées à la Chine , au Japon
& dans les Indes , ont empeſché
les Marchands Etrangers
de venir en ſi grand nombre.
On eſpere neanmoins, que puif
que tousces troubles font appaiſez
, le commerce recommencera
comme auparavant , & que le
Roy de Siam par le moyen de fon
Miniſtre envoyera fes Vaiſſeaux
pour aller prendre les Marchandi
ſes les plus precieuſes , & les
plus rares de tous les Royaumes
d'Orient,&remettra toutes chofes
en leur premier & fleuriſſant état.
Ils font la guerre d'une maniere
bien differente de celle de la plûpart
des autres nations , c'eſt à
dire à pouſſer leurs ennemis hors
de leurs places ſans pourtant
leur faire d'autre mal que de les
rendre eſclaves , & s'ils portent
des armes , c'eſt ce ſemble plûtôt
pour leur faire peur en les tirant
,
DU VOYAGE DE SIAM. II
contre terre , ou en l'air, que pour
les tuër , & s'ils le font c'eſt tout
au plus pour ſe deffendre dans la
neceſſité ; mais cette neceſſité
de tuër arrive rarement parce
que prefque tous leurs ennenemis
qui en uſent comme eux,ne
tendent qu'aux mêmes fins . Il ya
des Compagnies & des Regimens
qui ſe détachentde l'arméependát
la nuit,&vont enlever tous leshabitans
des Villages ennemis , &
font marcher hommes, femmes &
enfans que l'on fait eſclaves , &
le Roy leur donne des terres&
des bufles pour les labourer , &
quand le Roy en a beſoin il s'en
fert. Ces dernieres années , le
Roi a fait la guerre contre les
Cambogiens revoltez , aidez des
Chinois & Cochinchinois , où il
a fallu ſe battre tout de bon , & il
y a eu pluſieurs Soldats tuez de
part &d'autre ; il a eu pluſieurs
21 RELATION
Chefs d'Europeans qui les inſtrui
fent àcombattre en nôtre maniere .
Ils ont une continuelle guerre
contre ceux du Royaume de
Laos , qui eſt venuë , de ce qu'un
Maure tres-riche allant en ce
Royaume- là pour le compte du
Royde Siam,y reſta avec de grandes
ſommes , le Roy de Siam , le
demanda auRoy de Laos , mais
celui-cile luy refuſa, ce qui a obligé
le Roy de Siam de luydeclarer
la guerre.
Avant cette guerre ily avoit un
grand commerce entre leurs Etats,
& celuy de Siam en tiroit de
grands profits par l'extrême
quantité d'or , de muſc , de benjoüin
, de dents d'Elephant &
autres marchandiſes qui lui venoient
de Laos , en échange des
toiles & autres marchandiſes .
Le Roy de Siam a encore guerre
contre celui de Pegu ; il y a quanDU
VOYAGE DE SIAM . 13
tité d'Eſclaves de cette Nation .
Il y a pluſieurs Nations Etrangeres
dans ſon Royaume , les
Maures y estoient , comme j'ay
dit , en tres-grand nombre , mais
maintenant il y en a pluſieurs qui
font refugiez dans le Royaume
de Colconde, ils eſtoient au ſervice
du Roy , & ils luy ont emporté
plus de vingt mille catis , chaque
catis vallant cinquante écus , le
Roy de Siam écrivit au Roy de
Colconde de luy rendre ces perſonnes
ou de les obliger à luy
payer cette ſomme , mais le Roy
de Colconden'en voulutrien faire
, ny même écouter les Ambafſadeurs
qu'il luy envoya ; ce quia
fait que le Roy de Siam luy a
declaré la guerre & luy a pris
dans le tems que j'étois à Siam ,
un Navire dont la charge valloit
plus de centmille écus . Il y a fix
Fregates commandées par des
14
RELATION
François & des Anglois qui
croiſent ſur ſes côtes .
Depuis quelque temps l'Empereur
de la Chine a donné liberté
à tous les Etrangers de venir
negocier en ſon Royaume ;
cette liberté n'eſt donnée que
pour cinq ans , mais on efpere
qu'elle durera , puiſque c'eſt un
grand avatage pour ſon Royaume .
Ce Prince a grand nombre de
Malais dans ſon Royaume , ils
font Mahometans , & bons Soldats
, mais il y a quelque difference
de leur Religion à celle
des Maures. Les Pegovans font
dans ſon Etat preſque en auſſi
grande quantité queles Siamois
originaires du pays .
Les Laos y font en tres-grande
quantité , principalement vers
le Nort.
Il y a dans cet Etat huit ou neuf
familles de Portugais veritables ,
DU VOYAGE DE SIAM.
mais de ceux que l'on nomme
Meſties , plus de mille , c'eſt à dire
de ceux qui naiſſent d'un Portugais
& d'une Siamoiſe .
Les Hollandois n'y ont qu'une
facturie.
Les Anglois de même.
Les François de même.
Les Cochinchinois ſont environ
cent familles , la plupart
Chreftiens.
Parmy les Tonquinois ily en a
ſeptou huit familles Chrétiennes .
Les Malais y font en afſez grand
nombre,qui font la plupart eſclaves,&
qui par conſequent ne font
pointde corps .
Les Macaſſars & pluſieurs des
peuples de l'Iſle de Java y font
établis, de meſme que les Maures:
ſous le nom de ces derniers ſont
compris en ce pays- là, les Turcs,
les Perfans les Mogols les
Colcondois & ceux de Bengala .
, د
16 RELATION
Les Armeniens font un corps
à part , ils font quinze ou ſeize
familles toutes Chrétiennes , Catholiques
, la plupart ſont Cavaliers
de la garde du Roy.
A l'égard des moeurs des Siamois
ils font d'une grande docilité
qui procede plûtoſt de leur
naturel amoureux du repos que
de toute autre cauſe , c'eſt pourquoi
les Talapoins qui fontprofeffion
de cette apparente vertu ,
defendentpour cela de tuër toutes
fortes d'animaux ; cependant lorfque
tout autre qu'eux tuë des
poules & des canards , ils en mangentla
chair ſans s'informer qui
les a tués , ou pourquoi on les a
tués , & ainſi des autres animaux .
Les Siamois font ordinairement
chaſtes , ils n'ont qu'une femme ,
mais les riches comme les Mandarins
ont des Concubines , qui
demeurent enfermées toute leur
vie
DU VOYAGE DE SIAM. 17
vie. Le peuple eſt aſſez fidele &
ne volle point ; mais il n'en eft
pas de même de quelques-uns des
Mandarins , les Malais qui font
en tres-grand nombre dans ce
Royaume- là font tres- méchants
&grands voleurs .
Dans ce grand Royaume il y
a beaucoup de Pegovans qui
ont eſté pris en guerre , ils font
plus remuants que les Siamois
& font d'ordinaire plus vigoureux
, il y a parmy les femmes du
libertinage , leur converſation eft
perilleuſe.
Les Laos peuplent la quatriéme
partie du Royaume de Siam",
comme ils font à demy Chinois ,
ils tiennent de leur humeur , de
leur adreſſe& de l'inclination a
voller par fineſſe; leurs femmes
font blanches & belles , tres - familieres
& par confequent dangereuſes.
Dans le Royaume de
b
18 RELATION
Laos , un homme qui rencontre
une femme pour la falüer avec
la civilité accoûtumée , la baife
publiquement ; & s'il ne le faiſoit
pas il l'offenferoit .
Les Siamois tant Officiers que
Mandarins ſont ordinairement
riches , parce qu'ils ne dépenfent
preſque rien , le Roy leur
donnant des valets pour les fervir
, ces valets font obligez de ſe
nourir à leurs dépens, eſtant com--
me efclaves,ils font en obligation
de les ſervir pour rien pendant:
la moitié de l'année : & comme
cesMeſſieurs-làen ontbeaucoup,
ils ſe ſervent d'une partie pendant
que l'autre ſe repoſe ; mais
ceux qui ne les ſervent point:
leur payent une fomme tous les
ans , leurs vivres font à bon marché
, car ce n'eſt que duris , du
poiffon , & tres -peu de viande, &
tout cela eft en abondance dans
DU VOYAGE DE SIAM . 19
leur pays ; leurs vêtemens leur
fervent long- temps , ce ne font
que des pieces d'étoffes toutes
entieres qui ne s'uſent pas fi faci
lement que nos habits &ne coutent
que tres-peu : la plupart des
Siamois font Maſſons ou Charpentiers
, & il y en a de tres habiles,
imitant parfaitement bien les
beaux ouvrages de l'Europe en
Sculpture& en dorure. Pour ce
qui eſt de la peinture ils ne ſçavent
point s'en ſervir , il y a des
ouvrages en Sculpture dans leurs
Pagodes , & dans leurs Mauſolées
fort polis & tres-beaux.
Ils en font auſſi de tres -beaux
avec de la chaux , qu'ils détrempent
dans de l'eau qu'ils tirent de
l'écorce d'un arbre qu'on trouve
dans les Forefts , quilarend ſi forte,
qu'elle dure des cent& deux
cens ans , quoi qu'ils foient expoſés
aux injures du temps ..
bij
20 RELATION
1
i
1.
i
Leur Religion n'eſt à parler proprement
qu'un grand ramas
d'Hiſtoires fabuleuſes , qui ne
tend qu'à faire rendre des hommages
& deshonneurs auxTalapoins,
qui ne recommandent tant:
aucune vertu que celle de leur
faire l'aumône , ils ont des loix
qu'ils obfervent exactement au
moins dans l'exterieur ; leur fin
dans toutes leurs bonnes oeuvres
eſt l'eſperance d'une heureuſe
tranfmigration aprés leur mort ,
dans le corps d'un homme riche ,..
d'un Roy , d'un grand Seigneur
ou d'un animal docile , comme
font les Vaches & les Moutons :
car ces peuples-là croyent la Metempſicoſe
; ils eſtiment pour cette
raiſonbeaucoup ces animaux ,
&n'ofent, comme je l'ai déja dit,
en tuër aucun , craignant de donner
la mort à leur Pere ou à leur
Mere , ou à quelqu'un de leurs
DU VOYAGE DE SIAM . 2
parens . Ils croyent un enfer où les
énormes pechez ſont ſeverement .
punis , ſeulement pour quelque
temps , ainſi qu'un Paradis , dans
lequel les vertus fublimes ſont
recompenſées dans le Ciel , où aprés
eſtre devenus des Anges
pour quelque temps , ils retournent
dans quelque corps d'hom--
me ou d'animal .
L'occupation des Talapoins .
eſt de lire , dormir, manger, chan--
ter , & demander l'aumône ; de
cette forte , ils vont tous les matins
ſe preſenter devant la porte
ou balon des perſonnes qu'ils connoiffent
,&ſe tiennent-là unmométavecunegrande
modeſtie ſans
rien dire, tenant leur évantail , de
maniere qu'il leur couvre la moitié
du viſage , s'ils voyent qu'on ſe
diſpoſe àleur donner quelque choſe
, ils attendent juſqu'à ce qu'ils
l'ayent receuë ; ils mangent de
biij
22 RELATION
د
3
tout ce qu'on leur donne même
des poulles & autres viandes
mais ils ne boiventjamais de vin ,
au moins en prefence des gens du
monde; ils ne font point d'office
ny de prieres à aucune Divinité.
Les Siamois croyent qu'il y a eu
trois grands Talapoins , qui par
leurs merites tres-fublimes acquis
dans pluſieurs milliers de tranſmigrations
ſont devenus des Dieux ,
&aprés avoir eſté faits Dieux ,
ils ont encore acquis de ſi grands
merites qu'ils ont eſté tous aneantis
, ce qui eſt le terme du plus .
grand merite & la plus grande recompenſe
qu'on puiffe acquerir ,
pour n'eſtre plus fatigué en changeant
ſi ſouventde corps dans un
autre; le dernier de ces trois Ta--
lapoins eſt le plus grand Dieu appellé
Nacodon , parce qu'il a eſté
dans cinq mille corps , dans l'une
de ces tranfmigrations , de Talapoin
il devint vache , fon frere le
DU VOYAGE DE SIAM .
23
voulut tuër pluſieurs fois ; mais il
faudroit un gros livre pour décrire
les grands miracles qu'ils difent
que la nature& non pasDieu,
fit pour le proteger : enfin ce frere
fut precipité en Enfer pour ſes
grands pechez , où Nacodon le
fit crucifier ; c'eſt pour cette raifon
qu'ils ont en horreur l'Image
de Jeſus-Chriſt crucifié , diſant
que nous adorons l'Image de ce
frere de leur grand Dieu , qui
avoit eſté crucifié pour ſes crimes ..
CeNacodon eſtant doncaneanti,
il ne leur reſte plus de Dieu à
preſent , ſaloy ſubſiſte pourtant ;
mais ſeulement parmi les Talapoins
qui diſent qu'aprés quelques
fiecles il y aura un Ange qui
viendra ſe faire Talapoin ,& enfuite
Dieu Souverain , qui par ſes
grands merites pourra être anean
ti : voilà le fondement de leur
creance ; car il ne faut pas s'imaginer
qu'ils adorent les Idoles
24 RELATION
"
1
qui font dans leurs Pagodes comme
des Divinitez , mais ils leur
rendent ſeulement des honneurs'
comme à des hommes d'un grand
merite , dont l'ame eſt à preſent
en quelque Roy , vache ou Talapoin
: voilà en quoi conſiſte leur
Religion , qui à proprement parler
ne reconnoît aucun Dieu , &
qui n'attribuë toute la recompenſede
la vertu qu'à la vertumême ,
qui a par elle le pouvoir de rendre
heureux celuy dont elle fair
paſſer l'ame dans le corps de quelque
puiſſant & riche Seigneur
ou dans celuy de quelque vache ,
levice ,diſent-ils, porte avec ſoy
ſon châtiment , en faiſant paffer
l'ame dans le corps de quelque
méchant homme , de quelque
Pourceau , de quelque Corbeau ,
Tigre ou autre animal. Ils admetrent
des Anges , qu'ils croyent
eſtre les ames des juſtes & des
bons
2
L
L
DUVOYAGE DE SIAM. 25
bons Talapoins; pour ce qui eſt des
Demons , ils eſtiment qu'ils font
les ames des méchans .
Les Talapoins font tres-refpe-
Etés de tout le peuple , & même
du Roy, ils ne ſe profternent point
lorſqu'ils luy parlent comme le
font les plusgrands du Royaume ,
& le Roy & les grands Seigneurs
les ſaluënt les premiers ; lorſque
ces Talapoins remercient quelqu'un,
ils mettentla main proche
leur front , mais pour ce qui eſt du
petit peuple, ils ne le ſalüent point ;
leurs vêtemens ſont ſemblables à
ceux des Siamois ,àla referve que
la toile eſt jaune , ils font nuds
jambes & nuds pieds fans chapeau
, ils portent ſur leur tête un
évantail fait d'une fcüille de palme
fort grande pour ſe garantir
du Soleil , qui eſt fort brûlant ;
ils ne font qu'un veritable repas
par jour, à ſçavoir le matin , & ils
G
26 RELATION
ne mangent le ſoir que quelques
bananes ou quelques figues ou
d'autres fruits ; ils peuvent quitter
quand ils veulent l'habit de
Talapoin pour ſe marier , n'ayant
aucun engagement que celuy de
porter l'habit jaune , & quand ils
le quittentils deviennent libres ;
cela fait qu'ils font en ſi grand
nombre qu'ils font preſque le tiers
du Royaume de Siam . Ce qu'ils
chantent dans les Pagodes font
quelques Hiſtoires fabuleuſes.,
entremêlées de quelques Sentences;
celles qu'ils chantent pendant
les funerailles des Morts font ,
nous devons tous mourir , nous
ſommes tous mortels ; on brûle les
corps morts au ſon des muſettes
& autres Inſtrumens , on dépenſe
beaucoup à ces funerailles , &
aprés qu'on a brûlé les corps de
ceux qui font morts , l'on met
leurs cendres ſous de grandes piramides
toutes dorées , élevées à
DU VOYAGE DE SIAM. 27
l'entour de leur Pagodes. Les
Talapoins pratiquent une eſpece
de Confeſſion ; car les Novices
vont au Soleil levantſe proſterner
ou s'affeoir fur leurs talons & marmottent
quelques paroles , aprés
quoy le vieux Talapoin leve la
main à côté deſa joie & lui donne
une forte de benediction , aprés
laquelle le Novice ſe retire.
Quand ils prêchent, ils exhortent
de donner l'aumône au Talapoin ,
& ſe creyent fort ſçavants , lorfqu'ils
citent quelques paſſages
de leurs Livres anciens en Langue
Baly , qui eft comme le Latin
chez nous; cette Langue eſt tresbelle
& emphatique , elle a ſes
conjuguaiſons comme la Latine.
Lorſqueles Siamois veulent ſe
marier , les parens de l'homme
vont premierement ſonder la volontéde
ceux de la fille, & quand
ils ont fait leur accord entr'eux
cij
28 RELATION
les parens du garçon vont preſenter
ſept boſſettes ou boiſtes de
betel & d'arest à ceux de la fille ,
& quoy qu'ils les acceptent &
qu'on les regarde déja comme
mariez le mariage ſe peut rompre
, & on ne peut encore асси-
fer devant le Juge , ny les uns ny
les autres , s'ils le ſeparent aprés
cette ceremonie .
Quelques jours aprés les parens
de l'homme le vont preſenter , &
il offre luy-même plus de boſſettes
qu'auparavant ; l'ordinaire eft
qu'il y en ait dix ou quatorze ,
& lors celuy qui ſe marie demeure
dans la maiſon de ſon beaupere,
ſans pourtant qu'il y ait conſommation
, & ce n'eſt que pour
voir la fille & pour s'accoûtumer
peu à peu à vivre avec elle durant
un ou deux mois ; aprés cela
tous les parens s'aſſemblent
avec les plus anciens de la caſte
ou nation ; ils mettent dans une
DU VOYAGE DE SIAM. 2.9
bourſe, l'un un anneau & l'autre
des bracelets , l'autre de l'argent ,
il y en a d'autres qui mettentdes
pieces d'étoffes au milieu de la table
: enſuite le plus ancien prend
une bougie allumée & la paffe
ſept fois au tour de ces prefens,
pendant que toute l'aſſemblée
crie en ſouhaitant aux Epoux un
heureux mariage , une parfaite
ſanté &une longue vie , ils mangent
& boivent enfuite , & voilà
le mariage achevé. Pour le dot
c'eſt comme en France , finon
que les parens du garçon portent
ſon argent aux parens de la fille ,
mais tout cela revient à un ; car
le dot de la fille eſt auſſi mis à
part , & tout eſt donné aux nouveaux
mariez pour le faire valoir.
Si le mary repudie ſa femme ſans
forme de Juſtice , it perd l'argent
qu'onluy a donné, s'illarepudie
par Sentence de Juge , qui
č iij
30
RELATION
ne la refuſe jamais, les parensde
la fille luy rendent ſon bien ; s'il
y a des enfans , ſi c'eſt un garçon
ou une fille , le garçon fuit la mere
, & la fille le pere , s'il y a deux
garçons & deux filles , un garçon
&une fille vont avec le pere, &
un garçon & une fille vont avec
lamere.
,
Al'égarddes monnoyes ilsn'en
ontpoint d'or , la plus groſſe d'argent
s'appelle tical , & vaut environ
quarante ſols , la ſeconde
mayon qui péſe la quatriéme partie
d'un tical , & vaux dix fols
la troiſieme eſt un foüen , qui
vaut cinq ſols , la quatriéme eſt
un fontpaye qui vaut deux fols
&demy, enfin les plus baſſes monnoyes
font les coris qui font des
coquillages que les Hollandois
leur portent des Maldives , ouυ
qui leur viennent des Malais &
des Cochinchinois ou d'autres
DU VOYAGE DE SIAM. 31
côtez , donthuit cens valent un
fouën qui eſt cinq fols .
le
Al'égard des Places fortes dur
Royaume , il ya Bancoc qui eft
environ dix lieuës dans la Riviere
de Siam , où il y a deux Forterefſes
, comme j'ay déja dit. Il y a la
Ville Capitale nommée Juthia ,
autrement nommée Siam , qu'on
fortifie de nouveau par une enceinte
de murailles de bricque ;
Corfuma frontiere contre
Royaume de Camboye eſt peu
forte; Tanaferin à l'oppoſite de la
côte de Malabar eft peu fortifiée .
Merequi n'eſt pas fortifiée, mais
ſe pouroit fortifier , & on y pouroit
faire un bon Port. Porcelut
frontiere de Laos eſt auſſi peu
fortifiée . Chenat n'a que le nom
de Ville , & il reſte quelque apparence
de barrieres , qui autrefois
faifoient fon mur. Louvo où
le Roy demeure neuf mois de
c iiij
32 RELATION
l'année , pour prendre le plaiſir
de la chaſſe del'Elephant & du
Tygre , étoit autrefois un aſſem-
Blage de Pagodes entouré de
terraffes , mais à preſent le Roy
l'arendu incomparablement plus
beau par les Edifices qu'il y fait
faire , & quant au Palais qu'il ya
it l'a extrêmement embelli par les
caux qu'il y fait venir des Montagnes.
Patang eſt un Port des plus
beaux du côté des Malais , où
l'on peut faire grand commerce.
LeRoy de Siam a refuſé aux Compagnies
Angloiſes & Hollandoiſes
de s'y établir : l'on y pourroit
faire un grand établiſſement qui
feroit plus avantageux que Siam
àcausede la ſituation du lieu ; les
Chinois y vont& pluſieurs autres
Nations , on peut s'y fortifier aifément
fur le bord de la Riviere .
CettePlace appartient àune Rey
DU VOYAGE DE SIAM. 33
nequi eſt tributaire du Roy de
Siam , qui à parler proprement en
eſt quaſi le maître .
Quant à leurs Soldats ce n'étoit
point lacoûtume de les payer;
le Roy d'apreſent ayant ouy dire
que les Roys d'Europe payoient
leurs troupes , voulut faire la ſupputationà
combien monteroit la
paye d'un foüen par jour , qui eſt
cinq fols ; mais les Controlleurs
luy firent voir qu'il falloit des
ſommes immenfes , à cauſe de la
multitude de ſes Soldats , de forte
qu'il changea cette paye en ris
qu'il leur fait diſtribuer , du depuis
, il y en a ſuffisamment pour
Ieurs nourritures, &cela lesrend
tres- contens ; car autrefois il falloit
que chaque Soldat ſe fournit
de ris , & qu'il le portât avec ſes
armes, ce qui leur peſoitbeaucoup .
A l'égard de leurs Bâteaux &
Vaiſſeaux , leurs Balons d'Etat ou
34
RELATION
Bâteaux que nous appellons font
les plus beauxdu monde; ils font
d'un ſeul arbre , &d'une longueur
prodigieuſe , il y ena qui tiennent
cinquante juſqu'à cent & cent
quatre-vingt rameurs ; les deux
pointes font tres- relevées , & celuy
qui les gouverne donnant du
pied ſur lapoupefait branler tout
le Balon , & l'on diroit que c'eſt
un Cheval qui ſaute,touty eft doré
avec des Sculptures tres- belles
, & au milieu il y a un Siege
fait en forme de Trône en piramide
, d'une Sculpture tres- belle
& toute dorée , & il y en a de
plus de cent ornemens differents,
mais tous bien dorez &tres-beaux.
Autrefois ils n'avoient que des
Navires faits comme ceux de la
Chine , qu'on nomme Somme ; il
y ena encore pour aller auJapon,
à la Chine , à Tonquin ; mais le
Roy a fait faire pluſieurs Vaif-
1
DU VOYAGE DE SIAM. 35
feaux à l'Europeenne , & en a
acheté des Anglois quelques-uns,
tous agréés & appareillés . Il y a
environ cinquante Galeres pour
garder la Riviere & la côte ; ſes
Galeres ne font pas comme ceux
de France , il n'y a qu'un homme
àchâque Rame , & font environ
quarante ou cinquante au plus fur
chacune ; les Rameurs fervent de
Soldats , le Royne ſe ſert que des
Mores , des Chinois&des Malabars
pour naviger , & s'il y met
quelque Siamois pour Matelots,
cen'eſt qu'en petit nombre,& afin
qu'ils apprennent la navigation.
LesCommandants de ſes Navires
font Anglois ou François , parce
que les autres Nations font tresméchants
navigateurs .
Il envoye tous les ans cinq ou
fix de ces Vaiſſeaux appellez
Sommes à la Chine , dont il y en
a de mille juſqu'à quinze cens
36 RELATION
Tonneaux chargés de quelques
draps , corail , de diverſes marchandiſes
de la côte de Coromandel
& de Suratte , du ſalpêtre , de
l'étain &de l'argent; il en tire des
ſoyes cruës , des étoffes de ſoye ,
des ſatin's de Thé , dumufc , de la
rubarbe , des poureelines , des
ouvrages vernis , du bois de la
Chine , de l'or , & des rubis . Ils
ſe ſervent de pluſieurs racines
pour la Medecine , entr'autres de
la couproſe , ce qui leur apporte
de grands profits .
Le Roy envoye au Japon deux
ou trois Sommes , mais plus petites
que les autres , chargées des
mêmes marchandises , & il n'eſt
pas neceſſaire d'y envoyer de
l'argent ; les marchandiſes que
L'ony porte ſont des moindres ,
&au meilleur marché , les cuirs
de toutes fortes d'animaux y font
bons , & c'eſt la meilleure marDU
VOYAGE DE SIAM. 37
chandiſe que l'on y peut porter ;
on en tire de l'or , de l'argent en
barre , du cuivre rouge , toutes
fortes d'ouvrages d'Orphevrerie ,
des paravants , des Cabinets vernis
,des porcelines , du Thé &
autres choſes ; il en envoye quelquefois
un , deux & trois au
Tonquin de deux à trois cent tonneaux
au plus , avec des draps ,
de corail , de l'Etain , de l'Ivoire ,
du poivre , du ſalpêtre , du bois
de ſapin, & quelques autres marchandiſes
des Indes & de l'argent
au moins le tiers du capital,
on en tire du muſc , des étoffes
de ſoye , de la ſoye crüe , & jaune,
des Camelots , de pluſieurs fortes
de ſatins , du velours , toutes fortes
de bois vernis , des porcelines
propres pour les Indes , & de l'ar
-en barre , à Macao , le Roy envoye
un Navire au plus chargé
de pareilles Marchandiſes qu'à la
38
RELATION
•
Chine. On y peut encore envoyer
quelque mercerie , des dentelles
d'or , d'argent & de foye & des
armes , on en tire des mêmes
marchandiſes que de la Chine ,
mais pas à ſi bon compte.
A Labs le commerce ſe fait par
terre ou par la Riviere , ayant des
bâteaux plats , on y envoye des
draps & des toiles de Surate , &
de la côte , & on en tire des rubis
, du muſc , de la gomme ,
des dents d'Elephans, du Canfre ,
des cornes de Rinocerot , des
peaux de Buffes & d'Elans , à
tres-bon marché , & il y a grand
profit à ce commerce que l'on
fait ſans riſque.
ACamboye on envoye des petites
barques avec quelques draps,
des toiles de Surate & de la côte,
des uſtenciles de cuiſine qui viennent
de la Chine , on en tire des
dents d'Elephans , du benjoüin ,
DU VOYAGE DE SIAM. 39
trois fortes de gomes gutte , des
peaux de Buffes , & d'Elans , des
nids d'oiſeaux pour la Chine dont
je parleray bien- toft & des nerfs
de Cerfs .
On envoye auſſi à la Cochinchine
, mais rarement : car de peuple
n'eſt pas bien traitable , parce
qu'ils font la plupart de méchante
foy , ce qui empéche le commerce
, on y porte de l'argent
du Japon où l'on profite confiderablement
, du laurier rouge ,
de la cire jaune, duris , du plomb,
du ſalpêtre , quelques draps rouges&
noirs , quelques toiles blanches
, de la terre rouge , du vermillon
& vif argent.
On en tire de la ſoye cruë , du
fucre candy , & de la cafſonnade
, peu de poivre , des nids
d'oiſeaux qui ſont faits comme
ceux des Irondelles qu'on trouve
fur des Rochers au bord de
J
40 RELATION
la mer , ils font de tres-bon commerce
pour la Chine & pour pluſieurs
autres endroits ; car aprés
avoir bien lavé ces nids & les
avoir bien feichés ils deviennent
durs comme de la corne , & on
les met dans des boüillons ; ils
font admirables pour les maladies
de langueur &pour les maux d'eftomach
, j'en ay apporté quelques-
uns en France , du bois d'aigle
&de Calamba , du cuivre &
autres marchandises qu'on y apporte
du Japon , de l'or de plufieurs
touches , & du bois de fapan.
Lorſqu'on ne trouve pas de
Navire à Fret , on en envoye un
à Surate , chargé avec du cuivre ,
de l'étain , du ſalpêtre , de l'alun ,
des dents d'Elephants , du bois
de ſapan , &pluſieurs autres marchandiſes
qui viennent des autres
parts des Indes , on en tire des
toiles
DU VOYAGE DE- SIAM. 41
& autres marchandifes d'Europe,
quand il n'en vient point à Siam .
On envoye à la côte de Coromandel
, Malabar , & Bengala
&de Tanaferin , des Elephans
de l'étein , du ſalpêtre , du, cuivre
du plomb , & l'on en tire des toiles
de toutes fortes ,
,
On envoye à Borneo rarement ;
c'eſt une Iſle qui eſt proche de
celle de Java , d'où l'on tire du
poivre . du ſangde Dragon , camphre
blanc , cire jaune ,bois d'aigle
, du bray , de l'or , des perles,
&desdiamans les plus beaux du
monde ; on y envoye des marchandiſes
de Surate , c'eſt à dire
des toiles , quelques pieces de
drap rouge & vert , & de l'argent
d'Eſpagne..
Le Prince qui poffede cette Ifle
ne fouffre qu'avec peine le commerce
, & il craint toûjours d'êtte
ſurpris ; il ne veut pas permetd
42
RELATION
tre à aucune Nation Europeenne
de s'établir chez luy. Il y a cu
des François qui y ont commercé
, il ſe fie plus à eux qu'à aucune
autre Nation .
On envoye encore à Timor
Ifle proche des Molucques , d'où
l'on tire de la cire jaune & blanche
, de l'or de trois touches , des
eſclaves, du gamouty noir , dont
on ſe ſett pour faire des cordages
, & on y envoye des toiles de
Surate , du plomb, des dents d'Elephans,
de la poudre, de l'eau-devie
, quelques armes , peu de drap
rouge & noir , & de l'argent. Le
peuple y eſt paiſible , & negocie
fort bien . Il y a grand nombre
de Portugais.
Al'égard des Marchandiſes du
crû de Siam , il n'y a que de l'étain
, du plomb , du bois de fapan,
de l'Ivoire , des cuirs d'Elans.
& d'Elephans ; il y aura quantité
1
1
!
DU VOYAGE DE SIAM. 43
de poivre en peu de temps , c'eſt
à dire l'année prochaine ,de larrek
, du fer en petits morceaux ,
du ris en quantité , mais l'on y
trouve des marchandises de tous
les lieux ſpecifiés ci-deſfus , & à
affez bon compte. On y apporte
quelques draps & ferges d'Angleterre,
peu de corail &d'ambre,
des toiles de la côte de Coromandel
& de Surate , de l'argent en
piaſtre que l'on trocque ; mais
comme je l'ai dit maintenant ,
que la plupart des Marchands ont
quitté depuis que le Roi a voulu
faire le commerce , les Etrangers
n'y apportent que tres-peu de
choſes ,que les Navires qui ont
accoûtumé d'yvenir n'y font pas
venus l'année derniere , &on n'y
trouve rien , & fi peu qu'il y en
a , il eſt entre les mains du Roi ,
& ſes Miniſtres les vendent au
prix qu'ils veulent.
dij
44
RELATION
Le Roïaume de Siam a prés de
trois cens lieuës de long , fans y
comprendre les Roïaumes tributaires
, à ſçavoir Camboges ,
Gelior , Patavi , Queda , &c . du
Septentrion au Midi , il eſt plus
étroit de l'Orient à l'Occident. Il
eſt borné du côté du Septentrion
par le Roïaume de Pegu & parla
Mer du Gange du côté du Couchant,
du Midi par le petit détroit
de Maláca , qui fut enlevé au Roi
de Siam par les Portugais ils l'ont
poſſedé plus de foixante ans . Les
Hollandois le leur ont pris , &
le poffedent encore ; du côté
d'Orient , il eſt borné par la Mer
& par les Montagnes qui le ſeparent
de. Camboges & de Laos ..
La fituation de ce Roïaume eſt
avantageuſe à cauſe de la grande
étenduë de ſes côtes , ſe trouvant
comme entre deux Mers qui
lui ouvrent le paſſage à tant de.
DU VOYAGE DE SIAM. 45
vaſtes Regions , ſes côtes ont
cinq cens lieuës de tour ; on y
aborde de toutes parts , du Japon
, de la Chine , des Iſles Philippines
, du Tonquin , de la Cochinchine
, de Siampa , de Camboge
, des Ifles de Java , de Sumatra
, de Colconde , de Bengala
, de toute la côte de Coromandel
, de Perſe , de Surate , de Lameque,
de l'Arabie ,& d'Europe
c'eſtpourquoi l'on y peut faire un
grand commerce , ſuppoſé que le
Roi permette à tous les MarchandsEtrangers
d'y revenir comme
ils le faifoient autrefois .
Le Roïaume ſe diviſe en onze
Provinces , ſçavoir celle de Siam ,
de Mitavin , de Tanaferin , de
Jonſalam, de Reda, de Pra, d'Ior,
de Paam, de Parana , de Ligor ,
de Siama . Ces Provinces - là
avoient autrefois la qualité de
Roïaume ; mais elles ſont aujour
46 RELATION
d'hui ſous ladomination du Roide
Siam qui leur donne des Gouverneurs
. Il y en a telles qui peuvent
retenir le nomde Principauté;mais
les Gouverneurs dépendent du
Roy& lui payent tribut. Siam eft
la principale Province de ce
Royaume , la Ville Capitale eſt ſituée
à quatorze degrez & demy
de latitude du Nort , fur le bord
d'une tres-grande & belle riviere ,
& les Vaiſſeaux tous chargés la
paſſent juſqu'aux portes de la Ville,
qui eſt éloignée de la Mer de
plus de quarante lieuës , & s'étend
àplus de deux cens lieuës dans le
pays , & parce moyen elle conduit
dans une partie des Provinces,
dontj'ai parlé ci- deſſus.Cette
Riviere eſt fort poiſſonneuſe &
fes rivages font affez bien peuplez
, quoiqu'ils demeurentinondésune
partie de l'année. Le terroir
y eſt paſſablement fertile 3
DU VOYAGE DE SIAM . 47
mais tres-mal cultivé , l'inondation
provient des grandes pluyes
qu'il y tombe durant trois ou quatre
mois de l'année ; ce qui fait
beaucoup croître leur ris ; en forte
que plus l'inondation dure ,
plus les recoltes du ris ſont en
abondance , & loin des'en plaindre
ils ne craignent que la trop
grande ſeichereſſe. Il y a beaucoup
de terre en friche ,& faute
d'habitans elles ont eſté dépeu--
plées par les guerres precedentes,
& comme ils font ennemis du
travail , ils n'aiment à faire que
les choſes aiſées. Ces plaines abandonnées
& ces épaiſſes Fo--
rets qu'on voit ſur les Montagnes
ſervent de retraite aux Elephans,
aux Tygres , aux Boeufs & Vaches
ſauvages , aux Cerfs , aux Biches,
Rinoceros & autres animaux
que l'ony trouve en quantité.
Al'égard des plantes & des
د
48 RELATION
fruits , il y en a pluſieurs dans le
païs ; mais qui ne font pas rares.
& qui ne ſe peuvent porter que,
difficilement en France , à cauſe
de lalongueur de la navigation .
Il n'y a point d'oiſeaux particuliers
qui ne foient en France , à
la referve d'un oiſeau fait comme
un merle ,qui contrefa it l'homme
à l'égard du rire , du chanter &
du fiffler , les fruits les plus eſtimés
y font les durions ;ils ont
une odeur tres- forte qui n'agrée
pas à pluſieurs, mais à l'égard du
goût il eſt tres- excellent. Ce fruit
eſt tres chaud & tres -dangereux
pour lafanté , quand on en mange
beaucoup; il ya un gros noyau,
à l'entour duquel eſt une eſpece
de creme renfermée dans une écorce
environnée de pluſieurs piquants
, & qui eft faite en pointe
de diamant ; mon goût n'a ja
mais pu s'y accommoder. La mangue
:
DU VOYAGE DE SIAM . 49
gue en ce pays-là eſt en prodigieuſe
quantité , & c'eſt le meil
leur fruit des Indes , d'un goût
exquis , n'incommodant aucunement,
àmoins que d'en manger en
trop grande quantité , alors elle
pouroit bien cauſer la fiévre ; elle
a la figure d'une amande , mais
auffi groſſe qu'une poire de Mef
fire-Jean; ſa peau eſt aſſés mince
& a la chair jaune ; le mangoûstan
eſt un fruit reſſemblant à
une noix verte , qui a dedans un
fruit blanc d'un goût aigret &
agreable , & qui approche fort
deceluide la pêche &de la prune,
il est tres- froid & reſtraintif.
LeJacques eſtun gros fruit qui
eſt bon , mais tres- chaud & indigefte
, & cauſe le flus de ventre
quand on en mange avec excés .
La nana eft preſque comme le
durion , c'eſt à dire à l'égard de
la peau ; il a au bout une courone
50
RELATION
ne de feüilles comme celle de
l'artichaud ; la chair en eſt tresbonne
& a le goût de la pêche
& de l'abricot tout enſemble ; il
eft tres-chaud & furieux ; ce qui
fait que l'on le mange ordinairement
trempé dans le vin.
La figue eſtun fruit tres -doux,
fuave&bien faiſant ; cependant
un peu flegmatique , il y en a pendant
toute l'année .
L'ate eſt un fruit doux & tresbon
, & ne fait point de mal ; il
y en a qui l'eſtiment plus que
tous les fruits des Indes. Il y a
des oranges en tres - grande
quantité de pluſieurs fortes tresbonnes
& fort douces .
La pataïe eſt un fruit tres-bon,
mais l'arbre qui le porte ne dure
que deux ans.
Il y a de toute forte d'oranges
en quantité & de tres - bon goût .
La penplemouſe eſt un fruit
tres-bon pour la ſanté à peu prés
DU VOYAGE DE SIAM . SI
comme l'orange,mais qui a un petit
goût aigret. Il y a pluſieurs
autres fruits qui ne font pas fort
bons.
On a commencé il y a quelques
années à ſemer beaucoup
de bleds dans le pays haut proche
des montagnes qui y vient
bien & eft tres - bon .
On y a planté pluſieurs fois
des vignes qui y viennent bien ,
mais qui ne peuventdurer, à cauſe
d'une eſpece de fourmy blanc
qui la mange juſqu'à la racine.
Il y a beaucoup de canes de
fucre qui rapportent extrémement
; il y a auſſi du tabac en
quantité que les Siamois mangent
avec l'arrek & la chaud .
A l'égard de l'arrek, les Siamois
eſliment ce fruit plus que tout
autre , & c'eſt leur manger ordi
naire ; il y en a une ſi grande
quantité que les marchés en
e ij
52 RELATION
font pleins , & un Siamois croiroit
faire une grande incivilité
s'il parloit à quelqu'un ſans avoir
la bouche pleine de darek , de
betel , de chaud ou de tabac .
,
Il y a grande quantité de ris
dans tout le Roïaume & à tresbon
compte ,& comme ce païs
eſt toûjours inondé , cela fait
qu'il eſt plus abondant , car le ris
ſe nourrit dans l'eau & à meſure
que l'eau croît , le ris croît pareillement
,& fil'eau croît d'un pied
en vingt-quatre heures ce qui
arrive quelquefois , le ris croît
aufli àproportion &a toûjours fa
tige au deſſus de l'eau , il ne reſte
que cinq ou fix mois au plus en
terre , il vient comme l'avoine,
Il n'y a point de ville dans l'Orient
où l'on voye plus de Nations
differentes , que dans la Ville
Capitale de Siam , & où l'on
parle de tant de langues differentes
, elle a deux lieuës de
DU VOYAGE DE SIAM .
53
tour & une demie lieuë de large,
elle eſt tres- peuplée , quoi qu'elle
ſoit preſque toûjours inondée ,
enfortequ'elle reſſemble plûtoſtà
une Ifle , il n'y a que des Maures
, des Chinois , des François
& des Anglois , qui demeurent
dans la Ville , toutes les autres
Nations eſtant logées aux environspar
camps ; c'eſt à dire chaque
nation enſemble , ſi elles estoient
affemblées elles occuperoient
autant d'eſpace que la Ville qui
eſtoit autrefois tres- marchande ,
mais les raiſons que j'ay dites cydevant
empêchent la plupartdes
Nations Etrangeres d'y venir &
d'y rien porter.
Le peuple eſt obligé de ſervir
le Roy quatre mois de l'année
regulierement , & durant toute
l'année , s'il en a beſoin ; il ne leur
donne pas un fol de paye, eſtant
obligez de ſe nourir eux-mêmes
e iij
54 RELATION
& de s'entretenir ; c'eſt ce qui
a faitque les femmes travaillent
afin de nourir leurs maris .
A l'égard des Officiers depuis
les plus grands Seigneurs de la
Cour juſqu'au plus petit du
Royaume, le Roy neleur donne
que de tres- petits appointemens,
ils font auſſi eſclaves que les autres
, & c'eſt ce qui luy épargne
beaucoup d'argent. Les Provinces
éloignées dont les habitans
ne le ſervent point actuellement,
luy payent un certain tribut par
teſte. J'arrivay dans le temps que
le pays eſtoit tout-à-fait inondé
, la Ville en paroît plus agreable,
les ruës en ſont extremement
longues , larges & fort droites,
il y a aux deux côtez des
maiſons bâties ſur des pilotis &
des arbres plantés tout à l'entour
, ce qui fait une verdeur
admirable , & on n'y peut aller
DU VOYAGE DE SIAM. 55
qu'en ballon ; en la regardant l'on
croiroit voir d'un coup d'oeil ,
une ville , une mer & une vaſte
foreſt , où l'on trouve quantité
de Pagodes qui font leurs Eglifes
, & la plupart font fort dorées,
à l'entour de ces Pagodes', il ya
comme des Cemetieres plantés
d'arbres la plupart fruitiers , les
maiſons des Talapoins font les
plus grandes& les plus belles&
font en tres-grand nombre .
Ce païs-là eſt plus ſain que les
autres des Indes ,les Siamois ſont
communément affez bien-faits ,
quoi qu'ils ayent tous le viſage
bazanné , leur taille eſt affez
grande , leurs cheveux font
noirs , ils les portent aſſez courts
àcauſe de la chaleur , ils ſe baignent
ſouvent , ce qui contribuë
àla conſervation de leur ſanté
les Europeans qui y demeurent
en font de même pour éviter les
a
e iiij
56 RELATION
maladies ; ils tiennent leurs marchés
ſur des places inondées dans
leurs balons pendant fix ou ſept
mois de l'année que l'inondation
dure.
Le Roy ſe leve du matin &
tient un grand Conſeil vers les
dix heures ,où l'on parle de toutes
fortes d'affaires, qui dure juſqu'à
midy , aprés qu'il eſt fini ſes Medecins
s'aſſemblent pour ſçavoir
l'état de ſa ſanté , & enſuite il
va dîner ; il ne fait qu'un repas
par jour , l'aprés-dînée il ſe retire
dans ſon appartement où il dort
deux ou trois heures , & l'on ne
ſçait pas à quoyil employe le reſte
dujour, n'étant permis pas même
à ſes Officiers d'entrer dans ſa
chambre . Sur les dix heures du
foir, il tient un autre Conſeil ſecret
, où il y a ſept ou huit Mandarins
de ceux qu'il favoriſe le
plus , ce Conſeil dure juſqu'à
DU VOYAGE DE SIAM . 57
minuit . Enſuite on luy lit des
hiſtoires ou des vers qui ſont faits
à leurs manieres , pour le divertir
& d'ordinaire après ce Conſeil ,
Monfieur Conſtans demeure ſeul
aveclui , auquel il parle à coeur
ouvert , comme le Roy luy trouve
un eſprit tout-à- fait vaſte , ſa
converſation luy plaît , & il luy
communique toutes ſes plus fecrettes
penſées ; il ne ſe retire
d'ordinaire qu'à trois heures aprés
minuit pour s'aller coucher , voilà
la maniere dontle Roy vît toûjours
, & de cette forte toutes les
affaires de ſon Royaume paſſent
devant luy ; dans de certains
tempsil prend plaiſir à la chaſſe ,
comme j'ay dit ; il aime fort les
bijoux même ceux d'émail & de
verre , il eſt toûjours fort proprement
vêtu , il n'a d'enfans qu'une
fille , que l'on appelle la Princef
ſeReyne , âgée d'environ vingt58
RELATION
fept ou vingt-huit ans le Roi
l'aime beaucoup , on m'a dit qu'elle
étoit bien faite ; mais jamais les
hommes ne la voyent, elle mange
dans le même lieu & à même
tems que le Roy,mais à une table
feparée ; & ce ſont des femmes
qui les ſervent qui ſont toûjours
proſternées.
Cette Princeſſe a ſa Cour compoſéedes
femmes des Mandarins
qui la voyent tous les jours , &
elletientConſeil avec ſes femmes
de toutes ſes affaires , elle rend
juſticeà ceux qui luy appartiennent
, &leRoy luy ayant donné
desProvinces dont elle tire le revenu&
en entretient fa Maiſon ,
elle a ſes châtimens & exerce la
juſtice. Il y eſt arrivé quelquefois
que lorſque quelques femmes de
ſamaiſon ont eſté convaincuës de
mediſances d'extrême confideration
, ou d'avoir revelé des ſecrets
DU VOYAGE DE SIAM. 59
de tres-grende importance , elle
leur a fait coudre la bouche .
Avant la mort de la Reyne ſa
mere, elle avoit à ce que l'on dit
du penchant à faire punir avec
plus de ſeverité , mais du depuis
qu'elle l'a perduë elle en uſe avec
beaucoup plus de douceur ; elle
va quelquefois àla chaſſe avec le
Roy , mais c'eſt dans une fort
belle chaiſe placée ſur un Elephant
& où quoy qu'on ne la
voye point elle voit neanmoins
tout ce qui s'y paſſe. Il y a des Cavaliers
qui marchent devant elle
pour faire retirer le monde , & fi
par hazard il ſe trouvoit quelque
homme ſur ſon chemin qui ne pût
pas ſe retirer,il ſe proſterne en terre
& luy tourne le dos. Elle eſt
tout le jour enfermée avec ſes
femmes ne ſe divertiſſantà faire
aucun ouvrage , ſon habillement
eſt affez ſimple & fort leger , elle
60 RELATION'
eſt nuë jambe , elle a à ſes pieds
des petites mulles ſans talons
d'un autre façon que celles de
France ; ce qui lui fertdejuppe eſt
une piece d'étoffe de ſoye ou de
coton qu'on appelle paigne , qui
l'enveloppe depuis la ceinture
en bas & s'atrache par les deux
bouts, qui n'eſt point plicée , de
la ſceinture en haut elle n'a rien
qu'une chemiſe de mouſſeline
qui luy tombe deſſus cette maniere
de juppe , & qui eſt faite
de meſme que celle des hommes,
elle a une écharpe fur la gorge
qui luy couvre le col & qui paffe
par deſſous les bras , elle eſt toûjours
nuë teſte , & n'a pas les
cheveux plus longs que de quatre
ou cinq doigts , ils lui font comme
une tête naiſſante ; elle aime
fort les odeurs , elle fe met de
P'huileà la teſte ; car il faut en ces
lieux-là que les cheveux foient
DU VOYAGE DE SIAM . 61
luifans , pour eſtre beaux , elle
ſe baigne tous les jours meſme
plus d'une fois qui eſt la coûtume
de toutes les Indes , tant à l'égard
deshommes quedes femmes ;j'ay
apris tout ceci de Madame Conſtans
qui va ſouvent luy faire ſa
Cour. Toutes les femmes qui
font dans ſa Chambre ſont toûjours
proſternées & par rang ,
c'eſt à dire les plus vieilles ſont
les plus proches d'elle , & elles
ont la liberté de regarder la Princeffe
, ce que les hommes n'ont
point avec le Roy de quelque
qualité qu'ils foient , car tant
qu'ils font devant luy , ils ſont
profternez & meſme en luy parlant.
Le Roy a deux freres , les freres
du Roy heritent de la Couronne
de Siam preferablement à
fes enfans . Quand le Roy fort
pour aller à la Chaſſe ou à la
62 RELATION
promenade, on fait avertir tous
les Européens de ne ſe point trouver
ſur ſon chemin , à moins qu'ils
ne veulent ſe profterner un moment:
avant qu'il forte de fon Palais
on entend des trompettes &
des tambours qui avertiſſent &
qui marchent devant le Roy , à
ce bruit les Soldats qui font en
haye ſe proſternent le front contre
terre & tiennent leurs moufquets
ſous eux ; ils font en cette
poſture autant de temps que
le Roy les peut voirde deſſus ſon
Elephant , où il eſt aſſis dans une
chaiſe d'or couverte , la garde à
cheval qui l'accompagne & qui
eſt compoſée de Maures eſt environ
quarante Maiſtres marchant
fur les aîles ; toute la Maiſon du
Roy eſt à pied devant , derriere
&à côté , tenant les mains jointes,&
elle le ſuit de cette maniere.
Il y a quelques Mandarins des
DUVOYAGE DE SIAM. 63
principaux qui le fuivent ſur des
Elephans , dix ou douze Officiers
qui portent de grands paraſſols
tout à l'entour du Roy , & il n'y
a que ceux- là qui ne ſe proſternent
point ; car dés le moment
que le Roy s'arreſte tous les autres
ſe proſternent , & mefme
ceux qui ſont ſur les Elephans.
Quant à la maniere que le Roy
de Siam obſerve à la reception
des Ambaſſadeurs , comme ceux
de la Cochinchine , de Tonquin,
de Colconda , des Malais , de
Java & des autres Roys , il les
reçoit dans une Salle couverte de
tapis , les grands & principaux
du Roïaume font dans une autre
ſalleun peu plus baffe , & les autres
Officiers de moindre qualité
dans une autre ſalle encore plus
baſſe, tous proſternés ſur des tapis
en attendant que le Roy pa
64 RELATION
roiſſe par une feneſtre qui eſt visà-
vis; la ſalle où doivent eſtre les
Ambaſſadeurs eſt élevée d'environ
dix ou douze pieds & diſtante
de cette falle de trente pieds ;
l'on ſçait que le Roy va paroître
par le bruit des trompettes , des
tambours & des autres Inſtrumens
; les Ambaſſadeurs font derriere
une muraille qui renferme
cette ſalle qui attendent la fortie
du Roy , & ordre des Miniſtres
que le Roy envoye appeller par
un des Officiers de ſa Chambre,
ſuivant la qualité des Ambaſſadeurs
, & fes Officiers fervent en
telles occaſions; aprés queles Miniſtres
ont la permiffion du Roy
on ouvre la porte de la ſalle &
auſſi- tôt les Ambaſſadeurs paroifſent
avec leur Interprete , &
l'Officier de la Chambre du Roi
qui ſert de Maiſtre de Ceremonies&
marchent devant eux profternez
DU VOYAGE DE SIAM. 65
ternez ſur des tapis qui ſont ſur
la terre , faiſant trois reverences
la teſte en bas à leur maniere
aprés quoy le Maiſtre des Ceremonie
marche à genoux les mains
jointes , l'Ambaſſadeur avec fes
Interprettes le ſuit en la même
poſture avec beaucoup de modeſtie
juſques au milieu de la
diſtance d'où il doit aller , & fait
trois reverences en la meſme forme
; il continue à marcher jufqu'au
coin le plus proche des falles
où les Grands font , & il recommence
à faire des reverences
où il s'arrête ; il y a une table
entre le Roy & l'Ambaſſadeur ,
diſtante de huit pieds , où ſont
les preſens que l'Ambaſſadeur apporte
au Roy , & entre cette table
& les Ambaſſadeurs il ya un
Mandarin qui reçoit les paroles
de ſa Majesté , & dans cette Salle
ſont les Miniſtres du Roy diff
66 RELATION
tants de l'Ambaſſadeur d'environ
trois pas , & le Capitaine qui
gouverne la Nation d'où eſt l'Ambaffadeur
eft entre luy & les Miniſtres
; le Roy commence à parler
le premier & non l'Ambaffadeur
, ordonnant à ſes Miniſtres
de s'informer de l'Ambaffadeur
quand il eſt party de la preſence
duRoy ſon Maiſtre , file Roy
& toute la famille Royale eſtoit
en ſanté , auquel l'Ambaſſadeur
répond ce qui en eſt par fon Interprete
, l'Interprete le dit au
Capitaine de la Nation d'où eſt
l'Ambaſſadeur , le Capitaine au
Barcalon & leBarcalon au Roy.
Aprés cela le Roy fait quelque
demande fur deux ou trois points
concernant l'Ambaſſadeur ; enfuitele
Roy ordonne à l'Officier
qui eſt proche la table de donner
du betel àl'Ambaſſadeur , ce
qui ſert de ſignal pour que l'on
DU VOYAGE DE SIAM. 67
luy preſente une veſte , & incontinent
le Roy ſe retire au bruit
des tambours, des trompettes&
des autres inſtrumens. La premiereAudiencede
l'Ambaſſadeur
ſe paſſe entreluy & le Ministre ,
qui examine la Lettre &les prefens
du Prince qui l'a envoyés
l'Ambaſſadeur ne preſente point
la Lettre au Roy , mais au Miniſtre
, aprés quelques jours du
Conſeil tenu ſur ce ſujet.
Quand ce font des Ambaſſadeurs
des Roys indépendans de
quelque Couronne , que ce ſoit
de ſes pays , commePerſe , grand
Mogol , l'Empereur de la Chine ,
de Japon , on les reçoit enlamaniere
ſuivanre.
Les Grands du premier & du
ſecond Ordre vont aupied de la
feneſtre où eſt le Roy ſe proſter-:
ner ſuivant leurs qualitez ſur des
tapis , & ceux du troiſieme , quafij
68 RELATION
triéme & cinquiéme , ſont dans
une ſalle plus baffe & attendent
la fortie du Roy qui paroiſt par
une feneſtre qui eſt enfoncée
dans la muraille , & élevée de
dix pieds ; les Ambaſſadeurs font
dans un lieuhors du Palais , en
attendant le Maiſtre des Ceremonies
qui les vient recevoir , &
l'on fait les meſmes ceremonies
dont j'ay parlé cy -deſſus : l'Ambaſſadeur
entrant dans le Palais
leve les mains ſur ſa teſte & marche
entre deux Salles qu'il ya &
monte des degrez qui font visà-
vis la feneſtre où eſtle Roy , &
quand il eſtau haut il poſe un genou
en terre , & auffi-tôt on
ouvre une porte pour qu'il puiſſe
paroître devant le Roy ; enſuite
on pratique les mêmes ceremonies
qui viennent d'eſtre marquées
cy-devant. Ily a un bandege
ou plat d'or ſur la table où
DU VOYAGE DE SIAM. 69
eſt la Lettre traduite & ouverte ,
ayant été receuë par les Miniſtres
quelques jours auparavant dans
une ſalle deſtinée à cet uſage ;
quand l'Ambaſſadeur eſt dans ſa
place le Lieutenant du Miniſtre
prend laLettre& la lit tout haut;
aprés qu'il l'a leuë , le Roy fait
faire quelque demande à l'Ambaſſadeur
par ſon Miniſtre , fon
Miniſtre par le Capitaine de la
Nation , & le Capitaine par l'Interprete
, & l'Interprete enfin
parle à l'Ambaſſadeur. Ces demandes
ſont ſile Roy ſon Maître
& la famille Royale font en ſanté
, & s'il la chargé de quelqu'au
tre choſe qui ne fût pas dans la
Lettre , à quoy l'Ambaſſadeur
répond ce qui en eſt ; leRoy luy
fait encore troisou quatre deman.
des , & donne ordre qu'on luy
donne une veſte & du betel : aprés
quoy le Roy ſe retire au bruit des
70 RELATION
tambours & des trompettes ,&
l'Ambaſſadeur reſte un peu de
temps , & ceux qui l'ont reccu
le reconduiſent juſqu'à fon logis
fans autre accompagnement ; &
comme j'appris cette manierede
recevoir les Ambaſſadeurs qui ne
me parût pas répondre à la grandeur
du Monarque de la part
de qui je venois , j'envoyay au
Roy de Siam deux Mandarins
qui estoientavec moy de ſa part ,
pour ſçavoir ce que je ſouhaitterois
, pour le prier de me faire la
mefme reception que l'on a accoûtumé
de faire en France , ce
qu'il m'accorda de la maniere
queje l'ay raconté cy-devant.
Fermer
Résumé : ETAT Du Gouvernement, des Moeurs, de la Religion, & du Commerce du Royaume de Siam, dans les pays voisins, & plusieurs autres particularités.
Le texte décrit l'organisation politique, judiciaire et sociale du Royaume de Siam. Les mandarins, responsables de la justice, se réunissent au palais royal pour entendre les requêtes. Les étrangers peuvent porter des plaintes concernant les marchandises auprès du Barcalon, premier ministre du roi, ou de son lieutenant. Le roi de Siam est décrit comme absolu et sévère, châtiant sévèrement les crimes. Les peines incluent des coups de rotte, la décapitation, et des supplices publics pour les complices de crimes capitaux. Le roi travaille intensément à des projets de construction et est favorable aux étrangers, qu'il emploie dans son service. Le roi actuel de Siam se distingue par sa volonté de se montrer à ses sujets et aux étrangers, influencé par les coutumes européennes. Il est assisté par un ministre grec, Monsieur Conftans, qui exerce une grande autorité. Les lois traditionnelles, influencées par les Talapoins, interdisent le meurtre, mais le roi actuel a introduit des peines plus sévères, comme la décapitation et la livraison aux éléphants. Le royaume de Siam est peuplé de diverses nations étrangères, chacune ayant ses officiers particuliers. Le commerce étranger a diminué en raison des troubles dans les régions voisines, mais il est espéré qu'il reprendra. Le royaume est en guerre avec plusieurs voisins, notamment les Cambogiens et le Royaume de Laos, en raison de conflits et de trahisons. Les Siamois sont décrits comme dociles et chastes, bien que les riches puissent avoir des concubines. Les mœurs varient selon les groupes ethniques, avec des différences notables entre Siamois, Pegovans, Laos, et Malais. Les étrangers présents dans le royaume incluent des Portugais, Hollandais, Anglais, Français, Cochinchinois, Tonquinois, Macassars, et Arméniens, chacun ayant des rôles et des statuts variés. Les valets sont contraints de servir les Siamois sans rémunération pendant la moitié de l'année et sont nourris à bas coût, principalement avec du riz et du poisson. Les Siamois sont souvent maçons ou charpentiers, et certains sont très habiles en sculpture et dorure, mais ils ne maîtrisent pas la peinture. Leur religion est marquée par des histoires fabuleuses et la croyance en la métempsycose, où l'âme se réincarne après la mort. Les Talapoins (moines) sont respectés et vivent de l'aumône, sans prier les divinités. Ils croient en trois grands Talapoins devenus dieux et anéantis après avoir acquis des mérites. Les navires siamois, autrefois similaires aux navires chinois appelés 'Sommes', ont été modernisés avec des vaisseaux européens. Le roi de Siam possède environ cinquante galères pour protéger la rivière et la côte, avec des rameurs soldats et des navigateurs principalement mores, chinois et malabars. Les commandants des navires sont souvent anglais ou français. Le commerce de Siam est vaste et diversifié, avec des échanges réguliers avec la Chine, le Japon, le Tonquin, et d'autres régions. Le royaume s'étend sur près de trois cents lieues et est divisé en onze provinces, chacune ayant autrefois été un royaume indépendant mais maintenant sous la domination du roi de Siam. La capitale est située sur une grande rivière, permettant aux vaisseaux de naviguer jusqu'aux portes de la ville. Le territoire est fertile mais mal cultivé, avec de vastes plaines et forêts abritant divers animaux. Les fruits et plantes du Siam sont nombreux, bien que certains soient difficiles à transporter en France. Les orangers produisent en abondance des fruits de bonne qualité, mais les arbres ne durent que deux ans. La pompelmouse est également appréciée pour sa valeur nutritive. Le pays cultive du blé et du riz en grande quantité, ce dernier profitant des inondations fréquentes. Les vignes, bien que prospères, sont détruites par des fourmis blanches. Le tabac et l'arrak sont consommés en grande quantité par les Siamois. La capitale du Siam est une ville très peuplée et cosmopolite, où résident des Maures, des Chinois, des Français et des Anglais. Les habitants doivent servir le roi quatre mois par an sans rémunération, ce qui oblige les femmes à travailler pour subvenir aux besoins de la famille. Le roi tient des conseils matinaux et nocturnes pour gérer les affaires du royaume. Il a une fille, la princesse, qui exerce également des fonctions judiciaires et vit recluse avec ses femmes. Les cérémonies et les audiences avec les ambassadeurs suivent des protocoles rigoureux, incluant des prosternations et des révérences. Le roi et la princesse se baignent fréquemment pour des raisons de santé.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
7
p. 289-295
Nouvelles de Hollande.
Début :
Les Plenipotentiaires des Alliez continuent de tenir entre eux à [...]
Mots clefs :
Hollande, Plénipotentiaires, Tournay, Ministres, Garnison, Prince Eugène
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles de Hollande.
Nouvelles de Hollande.
Les Plenipotentiaires des
Septembre 1712. Bb
136 MERGURE
Alliez continuent de tenir
entre eux à la Haye & à
Utrecht des conferences generales & particulieres fur
les affaires de la guerre pre
fente fans qu'on fçache
qu'ils Dayent encore pris
2
aucune refolution unanime.
Cependant ils paroiffent
plus difpofez que jamais
à confentir àunefufpenfion
d'Armes. On ne parle
point encore de tenir de
conference generale entre
les Miniftres des deux partis qui font en guerre; on
croir meime qu'elle nd ſc
2
GALANT. 123
tiendrampas encore fistoft
qu'on l'efperoit à cauſe du
different furvenu entre le
fieur Menager & la ficus
de Recheteren, l'un des
Plenipotentiaires des Etats
Generaux au fujet de leurs
domeſtiques dans la conference que les Miniftres des
Allez tinrent les Septem
bre Le Comte de Straford
declara de la part dea
Plenipotentiaires de France
que le Roy Trés Chreftien
demandoit une fatisfaction
publiquenfure cette affaire
avant que d'entrer en aus
B bij
191 MERCURE
cune autre negociation.
L'armée des Alliez quitta
le 3. Septembre le Camp
de Seclin & fur camper la
droire à Pont -à- Treffin ,
& la gauche prés de
Tournay.
Le Major General Keppel
Gouverneur de Bethune :
partit le 2 : Septembre pour
s'y rendre avec fon Regi
mont & celuy de LidenBoom. 22931
On a augmenté de fix
bataillons , la garnifon de
Tournay & on en a détaché dix autres qui campent
ada
GALANT. 293
à Marquette prés de l'Ifle ,
afin d'eftre à portée d'y entreren cas de befoin ; on
cherchoit les moyens de
jetter des vivres dans: Bou
chain & dans le Quefnay
& de retirer la groffe Artil
lerie qui eft dans cette derniere place.
Les Lettres de l'Armée
des Alliez du 12 Septembre
portent que le Prince Eus
gene voyant qu'il ne pous
voit pas empefcher la prifa
de Douay , & voulant s'op
pofer au fiege du Quefnoy,
ou du moins retirer l'Artil
Bb iij
194 MERCURE
}
à
toga
lerie qu'il y avoit laffée
aprés la levée du Siege de
Landrecies , fit pafferilen71
HEſcauta fon armée
Tournay & au-deffus , lė
8.il vintcamper à Leufe &
àCambron
Havre fur l'Haine , & ld
10. il paffa la Troüille &
mitla droiteà Saint Ghilain,
la gauche au deca du bois
oùle donna la bataille de
Malplaquet pil fire certa
marche avec une extreme
diligence cependant il ap,
prit par le Prince de Heffe
Caffel qu'il avoit détaché
#
GALANT 121
avec quarante Escadrons
qu'ilavaitéſtéprévenu par le
Maréchal de Villars qui
s'eftoit posté au deça - du
Quefnoy, ayant l'Hone ay
dovane kiyavoc de bons
retranchens.d
Les Plenipotentiaires des
Septembre 1712. Bb
136 MERGURE
Alliez continuent de tenir
entre eux à la Haye & à
Utrecht des conferences generales & particulieres fur
les affaires de la guerre pre
fente fans qu'on fçache
qu'ils Dayent encore pris
2
aucune refolution unanime.
Cependant ils paroiffent
plus difpofez que jamais
à confentir àunefufpenfion
d'Armes. On ne parle
point encore de tenir de
conference generale entre
les Miniftres des deux partis qui font en guerre; on
croir meime qu'elle nd ſc
2
GALANT. 123
tiendrampas encore fistoft
qu'on l'efperoit à cauſe du
different furvenu entre le
fieur Menager & la ficus
de Recheteren, l'un des
Plenipotentiaires des Etats
Generaux au fujet de leurs
domeſtiques dans la conference que les Miniftres des
Allez tinrent les Septem
bre Le Comte de Straford
declara de la part dea
Plenipotentiaires de France
que le Roy Trés Chreftien
demandoit une fatisfaction
publiquenfure cette affaire
avant que d'entrer en aus
B bij
191 MERCURE
cune autre negociation.
L'armée des Alliez quitta
le 3. Septembre le Camp
de Seclin & fur camper la
droire à Pont -à- Treffin ,
& la gauche prés de
Tournay.
Le Major General Keppel
Gouverneur de Bethune :
partit le 2 : Septembre pour
s'y rendre avec fon Regi
mont & celuy de LidenBoom. 22931
On a augmenté de fix
bataillons , la garnifon de
Tournay & on en a détaché dix autres qui campent
ada
GALANT. 293
à Marquette prés de l'Ifle ,
afin d'eftre à portée d'y entreren cas de befoin ; on
cherchoit les moyens de
jetter des vivres dans: Bou
chain & dans le Quefnay
& de retirer la groffe Artil
lerie qui eft dans cette derniere place.
Les Lettres de l'Armée
des Alliez du 12 Septembre
portent que le Prince Eus
gene voyant qu'il ne pous
voit pas empefcher la prifa
de Douay , & voulant s'op
pofer au fiege du Quefnoy,
ou du moins retirer l'Artil
Bb iij
194 MERCURE
}
à
toga
lerie qu'il y avoit laffée
aprés la levée du Siege de
Landrecies , fit pafferilen71
HEſcauta fon armée
Tournay & au-deffus , lė
8.il vintcamper à Leufe &
àCambron
Havre fur l'Haine , & ld
10. il paffa la Troüille &
mitla droiteà Saint Ghilain,
la gauche au deca du bois
oùle donna la bataille de
Malplaquet pil fire certa
marche avec une extreme
diligence cependant il ap,
prit par le Prince de Heffe
Caffel qu'il avoit détaché
#
GALANT 121
avec quarante Escadrons
qu'ilavaitéſtéprévenu par le
Maréchal de Villars qui
s'eftoit posté au deça - du
Quefnoy, ayant l'Hone ay
dovane kiyavoc de bons
retranchens.d
Fermer
Résumé : Nouvelles de Hollande.
En septembre 1712, les plénipotentiaires des puissances alliées se réunissent à La Haye et Utrecht pour discuter de la guerre en cours, mais sans parvenir à une résolution unanime. Ils envisagent cependant une suspension d'armes. Les négociations sont compliquées par un différend entre Menager et le fils de Recheteren, et par la demande du roi Très Chrétien d'une satisfaction publique avant toute négociation. Sur le front militaire, l'armée des Alliés se déplace de Seclin vers Pont-à-Treffin et Tournay le 3 septembre. Le major général Keppel, gouverneur de Béthune, rejoint cette région avec ses régiments. La garnison de Tournay est renforcée de six bataillons, tandis que dix autres bataillons sont positionnés à Marquette. Des efforts sont entrepris pour ravitailler Bouchain et le Quesnoy et pour retirer l'artillerie de cette dernière place. Le prince Eugène, ne pouvant empêcher la prise de Douai, déplace son armée vers Tournay et au-delà. Le 8 septembre, il campe à Leuze et Cambron, puis traverse la Troüille, positionnant ses troupes à Saint-Ghislain et au-delà du bois de Malplaquet. Cependant, il apprend que le maréchal de Villars l'a devancé en se postant près du Quesnoy avec des retranchements solides.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
8
p. 111-118
Nouvelles d'Angleterre.
Début :
On écrit de Londres que le General Evans partit le [...]
Mots clefs :
Londres, Duc d'Aumont, Escadre, Reine, Parlement, Paix, Ministres, Médaille
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles d'Angleterre.
Nouvelles d'Angleterre.
On écrit de Londres que
le GeneralEvans partit le
20. Juillet pour aller à Douvres
casser les regimens de
Pocock, de Nevvton 8c
d'Evans, qui doivent y être
arrivez de Flandres; que
le 24. tous les artificiers avoient
été envoyez à Vvol
vvich pour charger de*
bombes, & preparer d'autres
artifices pour l'escadre
qui est vers l'embouchure
de la Tamise
,
qui devoit
partir incessamment pour
aller joindre une escadre
Hollandoise,& faire ensemble
voile vers la mer Baltique,
afin d'obliger les Puissances
du Nord à faire la
paix; quenéanmoins les
Ministres des Etats,garans
des traitez de Vvestphalie,
de Travvendal & de Raenstadt,
travailloient à engager
les parties interessées à
un
en accommodement à l'amiable,
ou à les y contraindre
par la force;quele 17.
la Reine, qui joüit d'une
parfaite santé, étoit reve.,
nuë de Kensington au Palais
de saint James, d'où
elle alla à la Chambre des
Pairs ; que les Communes
s'y étant rendues
3
elle donna
son confenremenr à
l'acte pour faire circuler
douze mille livressterlin de
billets de l'Echiquier, 6c
pour lever cinq cent mille
livres sterlin destinées à
payer les dettes de la liste
civile, & à plusieurs autres
actes ;qu'ensuite elle avoic
fait une harangue aux deux
Chambres, dans laquelle
elle avoit declaré qu'elle
étoit venuë pour terminer
cette seance
;
qu'elle les
avoit remerciez des subsides
qu'ils lui avoient cidevant
accordez,&qui lui
avoient fourni les moyens
de soûtenir la guerre & de
conclure une paix avantageuse
;
qu'elle leur avoit
recommandé de faire connoître
à toute la nation les
biens qui lui en reviennent
& de tâcher de détruire les
divisionsfomentées avec
tant d'artifice, qu'il étoit
necessaire de faire voir
l'amour qu'on avoir pour la
patrie, en se réunissant
pour prévenir la malice
des personnes mal intentionnées,
& détrompant
ceux qui étoient abuiez
j
que rien ne pouvoir maintenir
la paix, que de s'attacher
fermement au gouvernement
dans l'Eglise &
dans l'Etat; qu'on ne pouvoir
faire fond que sur ceux
qui ont ces sentimens:
qu'elle esperoit trouver
l'hyver prochain son Parlement
resolu d'agir dans
les mêmes principes. Aprés
quoy Sa Majesté Britannique
retourna en chaise au
Palais de saint James. Elle
étoit suivie par ses Dames
d'honneur dans son carosse
de parade, attelé de six des
beaux chevaux dont le Duc
d'Aumont lui a fait present.
Son Excellence, accompagnée
de plusieurs Gentilshommes
de [a. fuite ,
suivoit avec deux de ses
magnifiquescarosses. La
Reine a fait distribuer aux -
membres des deux Chambres
des medailles d'or,
qu'elle avoir fait fraper
pour la paix, du poids de
trois guinées & demie chacune.
Milord Compton,Evêque
de Londres, mourut le
18. Juillet, après quelques
jours de maladie, âgé de
quatre-vingt-un an.
La Comtesse Doüairiere
de Salisbury mourut le 19.
au soir.
• Le 25.le Duc d'Aumont
donna un grand bal aux
Seigneurs & aux Dames de
la Cour, & autres personnes
de distinction
;
il fit
distribuer pour les masques
deux mille billets, dont il
envoya cinquante à Milord
Maire pour en disposer.
On y servit des rafraîchissemens
en abondance, &
tout se passa avec beaucoup
d'ordre & de magnificence.
On écrit de Londres que
le GeneralEvans partit le
20. Juillet pour aller à Douvres
casser les regimens de
Pocock, de Nevvton 8c
d'Evans, qui doivent y être
arrivez de Flandres; que
le 24. tous les artificiers avoient
été envoyez à Vvol
vvich pour charger de*
bombes, & preparer d'autres
artifices pour l'escadre
qui est vers l'embouchure
de la Tamise
,
qui devoit
partir incessamment pour
aller joindre une escadre
Hollandoise,& faire ensemble
voile vers la mer Baltique,
afin d'obliger les Puissances
du Nord à faire la
paix; quenéanmoins les
Ministres des Etats,garans
des traitez de Vvestphalie,
de Travvendal & de Raenstadt,
travailloient à engager
les parties interessées à
un
en accommodement à l'amiable,
ou à les y contraindre
par la force;quele 17.
la Reine, qui joüit d'une
parfaite santé, étoit reve.,
nuë de Kensington au Palais
de saint James, d'où
elle alla à la Chambre des
Pairs ; que les Communes
s'y étant rendues
3
elle donna
son confenremenr à
l'acte pour faire circuler
douze mille livressterlin de
billets de l'Echiquier, 6c
pour lever cinq cent mille
livres sterlin destinées à
payer les dettes de la liste
civile, & à plusieurs autres
actes ;qu'ensuite elle avoic
fait une harangue aux deux
Chambres, dans laquelle
elle avoit declaré qu'elle
étoit venuë pour terminer
cette seance
;
qu'elle les
avoit remerciez des subsides
qu'ils lui avoient cidevant
accordez,&qui lui
avoient fourni les moyens
de soûtenir la guerre & de
conclure une paix avantageuse
;
qu'elle leur avoit
recommandé de faire connoître
à toute la nation les
biens qui lui en reviennent
& de tâcher de détruire les
divisionsfomentées avec
tant d'artifice, qu'il étoit
necessaire de faire voir
l'amour qu'on avoir pour la
patrie, en se réunissant
pour prévenir la malice
des personnes mal intentionnées,
& détrompant
ceux qui étoient abuiez
j
que rien ne pouvoir maintenir
la paix, que de s'attacher
fermement au gouvernement
dans l'Eglise &
dans l'Etat; qu'on ne pouvoir
faire fond que sur ceux
qui ont ces sentimens:
qu'elle esperoit trouver
l'hyver prochain son Parlement
resolu d'agir dans
les mêmes principes. Aprés
quoy Sa Majesté Britannique
retourna en chaise au
Palais de saint James. Elle
étoit suivie par ses Dames
d'honneur dans son carosse
de parade, attelé de six des
beaux chevaux dont le Duc
d'Aumont lui a fait present.
Son Excellence, accompagnée
de plusieurs Gentilshommes
de [a. fuite ,
suivoit avec deux de ses
magnifiquescarosses. La
Reine a fait distribuer aux -
membres des deux Chambres
des medailles d'or,
qu'elle avoir fait fraper
pour la paix, du poids de
trois guinées & demie chacune.
Milord Compton,Evêque
de Londres, mourut le
18. Juillet, après quelques
jours de maladie, âgé de
quatre-vingt-un an.
La Comtesse Doüairiere
de Salisbury mourut le 19.
au soir.
• Le 25.le Duc d'Aumont
donna un grand bal aux
Seigneurs & aux Dames de
la Cour, & autres personnes
de distinction
;
il fit
distribuer pour les masques
deux mille billets, dont il
envoya cinquante à Milord
Maire pour en disposer.
On y servit des rafraîchissemens
en abondance, &
tout se passa avec beaucoup
d'ordre & de magnificence.
Fermer
Résumé : Nouvelles d'Angleterre.
Le texte décrit des événements récents en Angleterre. Le général Evans a quitté Londres le 20 juillet pour Douvres afin de disperser les régiments de Pocock, Newton et Evans, arrivés de Flandres. Le 24 juillet, des artificiers ont été envoyés à Woolwich pour préparer des bombes et autres artifices pour une escadre près de l'embouchure de la Tamise. Cette escadre devait rejoindre une escadre hollandaise pour se diriger vers la mer Baltique et forcer les puissances du Nord à faire la paix. Cependant, les ministres des États garants des traités de Westphalie, Travendal et Raenstadt travaillent à un accommodement à l'amiable ou par la force. Le 17 juillet, la Reine, en parfaite santé, s'est rendue du palais de Kensington au palais de Saint James. Elle a donné son consentement à plusieurs actes, dont un pour émettre des billets de l'Échiquier et lever des fonds pour payer les dettes civiles. Elle a ensuite harangué les deux Chambres, les remerciant pour les subsides accordés et les encourageant à unir la nation pour maintenir la paix et soutenir le gouvernement. La Reine a distribué des médailles d'or aux membres des deux Chambres pour célébrer la paix. Milord Compton, évêque de Londres, est décédé le 18 juillet à l'âge de quatre-vingt-un ans après une courte maladie. La comtesse douairière de Salisbury est décédée le 19 juillet au soir. Le 25 juillet, le duc d'Aumont a organisé un grand bal à la cour, distribuant des billets pour les masques et offrant des rafraîchissements en abondance.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
9
p. 206-216
Suplément aux nouvelles, [titre d'après la table]
Début :
On a eu avis de Cadix du 18. Juin que les jours precedens [...]
Mots clefs :
Maréchal, Ministres, Nouvelles
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Suplément aux nouvelles, [titre d'après la table]
On aeuavisde Cadix du
18. Juin que les jours precedcns
il en estoit encore parti
vingt-deuxvaisseaux deguerre
bien équipez & chargezde
canon, de mortiers, boulets
& d'autresprovisionsde guerre,
& qu'un Vaisseau Portugais
en ayant rencontre un
Algerien, qui emmenoit un
BastimentAnglois
,
l'avait
attaqué & fait couler à fond:
On a receu de Lisbonne la
-'ê
confirmation des grandes réjoüissances
faites pour la naissance
d'un second Prince dont
la. Reine de Portugal est accouchée
le 6. &qui fera nomme
Louis au nom du Roy de
France & de la Reine d'Angleterre.
On ajouteaux Nouvelles
du Camp devant Barcelonne
du 11. Juin qui font dans la
Gazette derniere, que fuivanc
le rapport des Deserteurs fortis
de la Place depuis le 20.
il n'yavoit pas trois mille
hommes de Troupes reglées,
qui ne cherchoient que l'occasson
de deserter aussi. Depuisla
nouvelle de l'approche
du Maréchal de Berwick
,
les Barcelonnois
commençoientà paroistre
plus traitables qu'auparavant,
Lorsque le ficur de Caux fut
envoyé dans la Place pour
l'échange des Prisonniers,on
luy fit toutes sortes de bons
traitemens, & on le regala
magnifiquement en poisson,
& ensuite par des danses de
Dames &de jeunes filles;rien
n'est égal au fanatisme de ces
gens-cy qui comptent sur la
parole
parotedequelquesM~in~
qu'un Ange exterminateur va
les vanger des maux qu'on
leur fait, & de laruine donc
onles menace. Onajouteaussi aux nonvelles
de Perpignan du 17.
que le sieurde la Neuville, Intendant
du Roussillon,ayant
sçu-que-leMaréchal de Bervickvenoit
en poste sans équipagesavec
six chevaux sule-
'f :ment:.. luy enavoit fait pteparrer
vingtscinq de Selle avec
quatre-vingt- dix mulets pour
porter. les équipages qu'il
fournitàce Maréchal
,
& qui
'conMent en quatre-vingt
douzainesde serviettes &de
nappes, trente couvertsdargent,
les batteries de cuisine
nece[aires..,&huitcaiOès rctD
pliesde meilleursvins deFrance,
d'Italie & dEspagne, ~ck
jambons & d'autres provi- sions.•<
On écrit de Bade du L.A
ce mois que les Conferences
continuoient assidument entre
les Ministres deFrance &
del'Empereurle matin fcu.
lement depuis neuf heures
jusqu'à onze tous les jours,
excepté le Mercredy qui est
GcGiné. pour les depêches,
ainsi que le Dimanche. Le
secret n'y est pas moins grand
, qu'à Rastat; Cependant on
içatt que les premières COlt.
ferences ont roulé sur le rétablissement
des deux Electeurs,
dont les Ministresn'avoient
point encore paru à l'Hôtel de
Ville pour délivrer leur plcin
pouvoir, mais ils avoient de
fréquentés & secrettes confè*
- rences avec les Ministres de
1 France, ainsi que. le Marquis
Barette, Ambassadeur d'Espagne
en Suisse qui s'éroit rcrh
duà Badeincognito. On se
flatte que tout sera réglé avant
lafinde ce mois, auquel tems
le Prince Eugène & le Maré*
chal de Villars s'y rendront
pour assister aux conferences
générales, qui ne se tiendront
qu'après que les principaux
articles auront esté reglez &
pour signet le Traité avec les
autres Ministres. Ceux du
Roy & de l'Empereur se régalent
mutuellement, & font
grosse figure malgré la cherté
des vivres, particulièrement
Mr le Comte de Luques, qui
tient tous les jours deux tables
ouvertes également servies de
cinquante à soixante couverts
la sienne estant de quinzeà
dix-huit.
On a eu avis de Lyon que
le Maréchal de Villeroyaprès
avoir ôtéaux Bourgeois la garde
de laVille&,l'avoir donnée
aux Troupes qu'on y avoit
fair marcher d'un Camp qui
est sur la Saonne vers Dole, &
dont il a renvoyé la plus grande
partie depuis que la Ville
:
est tranquille, avoit fait publicr
fous derigoureuses peines
une Ordonnance du Roy
à tous les Bouchers de tuer
des Bestaux & vendre la viande
en détail,en payant les Droits
& les oaraim comme cy devant,
à quoi ils se font fournis,
On avoit d'abord arrestéquelqu'un
des plus coupables de
hi sédition, pour en faire un
chastiment exemplaire; mais
on les a relaschez aprés les a-
Vôir reprimandez. -ie,
Le 18. de ce mois, Mr le
leDuc d' Antin recalarnagni-
'Rqucmcnc Mr l'Electeur de
Bavière, quiestrevenudepuis
quelques joursde Compiegne,
eu il a tué avec une intrépidite
étonnante, un Loup Cf)-
:'ragé,
",
qm- -<kpuis qucJque
temps faisoit de grands ravages
dans tout le Pays.
Le iq; le Tonnere tomba
-
sur la Sacristie des Jacobins
dela,rueS. Dominique, entre
trois,Religieux, sans en
blesser aucun, ni causer aucundesordre.
LaLmeried'Hollande sera
tirée sans aucun délay le premier
Octobre prochaineainsi
ceux quivoudront y prendre
interest, ont encore le temps
d'y mettre.
Les Obseques de Monreigneur
le Duc Berry, furent
faites à S. Denis, le 16. de ce
mois.
Orr filè dira Péùé.;,Cftrc, que
tant de Nouvelles sans suites
Tcflèrriblent à des Pieces de
rapport,dont je devrois orner
d'une autre maniére l'assemblagequ'elles
fontdans
mon Livre;cela peut-estre;
mais doresna,va1nt .o,n.Jn,'a'ura rien à,mè reprocher 1dcffus
& jettes mettray, toutes en
forme d'Histoiredutemps,
dont je feray un Chapitre à
lafindu Mercure;
18. Juin que les jours precedcns
il en estoit encore parti
vingt-deuxvaisseaux deguerre
bien équipez & chargezde
canon, de mortiers, boulets
& d'autresprovisionsde guerre,
& qu'un Vaisseau Portugais
en ayant rencontre un
Algerien, qui emmenoit un
BastimentAnglois
,
l'avait
attaqué & fait couler à fond:
On a receu de Lisbonne la
-'ê
confirmation des grandes réjoüissances
faites pour la naissance
d'un second Prince dont
la. Reine de Portugal est accouchée
le 6. &qui fera nomme
Louis au nom du Roy de
France & de la Reine d'Angleterre.
On ajouteaux Nouvelles
du Camp devant Barcelonne
du 11. Juin qui font dans la
Gazette derniere, que fuivanc
le rapport des Deserteurs fortis
de la Place depuis le 20.
il n'yavoit pas trois mille
hommes de Troupes reglées,
qui ne cherchoient que l'occasson
de deserter aussi. Depuisla
nouvelle de l'approche
du Maréchal de Berwick
,
les Barcelonnois
commençoientà paroistre
plus traitables qu'auparavant,
Lorsque le ficur de Caux fut
envoyé dans la Place pour
l'échange des Prisonniers,on
luy fit toutes sortes de bons
traitemens, & on le regala
magnifiquement en poisson,
& ensuite par des danses de
Dames &de jeunes filles;rien
n'est égal au fanatisme de ces
gens-cy qui comptent sur la
parole
parotedequelquesM~in~
qu'un Ange exterminateur va
les vanger des maux qu'on
leur fait, & de laruine donc
onles menace. Onajouteaussi aux nonvelles
de Perpignan du 17.
que le sieurde la Neuville, Intendant
du Roussillon,ayant
sçu-que-leMaréchal de Bervickvenoit
en poste sans équipagesavec
six chevaux sule-
'f :ment:.. luy enavoit fait pteparrer
vingtscinq de Selle avec
quatre-vingt- dix mulets pour
porter. les équipages qu'il
fournitàce Maréchal
,
& qui
'conMent en quatre-vingt
douzainesde serviettes &de
nappes, trente couvertsdargent,
les batteries de cuisine
nece[aires..,&huitcaiOès rctD
pliesde meilleursvins deFrance,
d'Italie & dEspagne, ~ck
jambons & d'autres provi- sions.•<
On écrit de Bade du L.A
ce mois que les Conferences
continuoient assidument entre
les Ministres deFrance &
del'Empereurle matin fcu.
lement depuis neuf heures
jusqu'à onze tous les jours,
excepté le Mercredy qui est
GcGiné. pour les depêches,
ainsi que le Dimanche. Le
secret n'y est pas moins grand
, qu'à Rastat; Cependant on
içatt que les premières COlt.
ferences ont roulé sur le rétablissement
des deux Electeurs,
dont les Ministresn'avoient
point encore paru à l'Hôtel de
Ville pour délivrer leur plcin
pouvoir, mais ils avoient de
fréquentés & secrettes confè*
- rences avec les Ministres de
1 France, ainsi que. le Marquis
Barette, Ambassadeur d'Espagne
en Suisse qui s'éroit rcrh
duà Badeincognito. On se
flatte que tout sera réglé avant
lafinde ce mois, auquel tems
le Prince Eugène & le Maré*
chal de Villars s'y rendront
pour assister aux conferences
générales, qui ne se tiendront
qu'après que les principaux
articles auront esté reglez &
pour signet le Traité avec les
autres Ministres. Ceux du
Roy & de l'Empereur se régalent
mutuellement, & font
grosse figure malgré la cherté
des vivres, particulièrement
Mr le Comte de Luques, qui
tient tous les jours deux tables
ouvertes également servies de
cinquante à soixante couverts
la sienne estant de quinzeà
dix-huit.
On a eu avis de Lyon que
le Maréchal de Villeroyaprès
avoir ôtéaux Bourgeois la garde
de laVille&,l'avoir donnée
aux Troupes qu'on y avoit
fair marcher d'un Camp qui
est sur la Saonne vers Dole, &
dont il a renvoyé la plus grande
partie depuis que la Ville
:
est tranquille, avoit fait publicr
fous derigoureuses peines
une Ordonnance du Roy
à tous les Bouchers de tuer
des Bestaux & vendre la viande
en détail,en payant les Droits
& les oaraim comme cy devant,
à quoi ils se font fournis,
On avoit d'abord arrestéquelqu'un
des plus coupables de
hi sédition, pour en faire un
chastiment exemplaire; mais
on les a relaschez aprés les a-
Vôir reprimandez. -ie,
Le 18. de ce mois, Mr le
leDuc d' Antin recalarnagni-
'Rqucmcnc Mr l'Electeur de
Bavière, quiestrevenudepuis
quelques joursde Compiegne,
eu il a tué avec une intrépidite
étonnante, un Loup Cf)-
:'ragé,
",
qm- -<kpuis qucJque
temps faisoit de grands ravages
dans tout le Pays.
Le iq; le Tonnere tomba
-
sur la Sacristie des Jacobins
dela,rueS. Dominique, entre
trois,Religieux, sans en
blesser aucun, ni causer aucundesordre.
LaLmeried'Hollande sera
tirée sans aucun délay le premier
Octobre prochaineainsi
ceux quivoudront y prendre
interest, ont encore le temps
d'y mettre.
Les Obseques de Monreigneur
le Duc Berry, furent
faites à S. Denis, le 16. de ce
mois.
Orr filè dira Péùé.;,Cftrc, que
tant de Nouvelles sans suites
Tcflèrriblent à des Pieces de
rapport,dont je devrois orner
d'une autre maniére l'assemblagequ'elles
fontdans
mon Livre;cela peut-estre;
mais doresna,va1nt .o,n.Jn,'a'ura rien à,mè reprocher 1dcffus
& jettes mettray, toutes en
forme d'Histoiredutemps,
dont je feray un Chapitre à
lafindu Mercure;
Fermer
Résumé : Suplément aux nouvelles, [titre d'après la table]
Le 18 juin, des nouvelles de Cadix signalent le départ de vingt-deux vaisseaux de guerre bien équipés et chargés de provisions militaires. Un vaisseau portugais a attaqué et coulé un navire algérien transportant un bâtiment anglais. De Lisbonne, on confirme les réjouissances pour la naissance d'un second prince au Portugal, né le 6 juin, qui portera le nom de Louis en hommage au roi de France et à la reine d'Angleterre. À Barcelone, les déserteurs indiquent que moins de trois mille hommes de troupes régulières cherchent à déserter. Depuis l'arrivée du maréchal de Berwick, les Barcelonais semblent plus conciliants. Le sieur de Caux, envoyé pour l'échange des prisonniers, a été bien traité et magnifiquement reçu. À Perpignan, le sieur de la Neuville a fourni des chevaux et des mulets au maréchal de Berwick pour ses équipages. À Bade, les conférences entre les ministres de France et de l'Empereur se poursuivent quotidiennement, sauf le mercredi et le dimanche. Les principaux articles devraient être réglés avant la fin du mois, permettant l'arrivée du prince Eugène et du maréchal de Villars pour les conférences générales. À Lyon, le maréchal de Villeroy a publié une ordonnance royale obligeant les bouchers à vendre de la viande en détail. Le duc d'Antin a accueilli l'électeur de Bavière, qui a récemment tué un loup enragé. Un éclair est tombé sur la sacristie des Jacobins sans causer de dommages. Les obsèques du duc de Berry ont eu lieu à Saint-Denis le 16 juin.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
10
p. 124-126
Nouvelles de Constantinople du mois d'Octobre 1723.
Début :
Sur la fin du mois passé une des Sultanes a mis au monde une Princesse, [...]
Mots clefs :
Ministre, Ministres, Sultane, Moscovie, Constantinople, Grand vizir, Grand seigneur
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles de Constantinople du mois d'Octobre 1723.
Nouvelles de Constantinople du mois
d'Otfobfe 172 3.
•
S Ut la fin du mois passé une des Sul-
. canes a mis au monde une Princesse»
dont la naissance a été celebrée à l'ordi
naire par le bruit du. canon du Serrail ,
de l'Arcenal,des Vaisseaux, & des Gai»
leres qui sorit dans ce Port.
M. Gritti , nouveau Bayle, ou Am
bassadeur de Veniíë qui vient relever M.
Emo , est arrivé le 7. de ce mois en ce
Port fur deux Galeres que íà Hautessé
avoit envoyées. au Tenedore , suivant le
ceremonial ordinaire pour recevoir ce
Ministre, & le transporter. en cette Ville;
les deux Vaisseaux de la République, fur
leíquels ce Ministre étoit parti de Veniíe
iront hiverner Jl Corfou , en attendant le
départ de M. Emo. M. Gritti fera in
cessamment son entrée publique en cetta
Ville , il aura. ensuite son audience du
Grand Visir , & du Grand Seigneur. M.
Emo , ancien Bayle , a étéfuivant l'uiâge
recevoir & complimenter son íucceíîèur.
fur ies Galeres du Grand Seigneur , l'a
conduit au * Baylage de Veniíe, à Peraj
•ù il l'a regalé pendant trois jours , &
s'est retiré ensuite dans une maiíon parr.
* C'est le Balais de ces Misislres...
JANVIER. 1714.: irj
tìcutìere qu'il s'étoit fait preparer avant
l'arrivée de ce nouveau Ministre s dans
laquelle il restera juíques à son départ
pour Venise.
Il n'y a eu aucune nouvelle conferent
ce entre les Ministres de la Porte , Se le
Réíident de Moícovie au sujet des affai
res de Perse, depuis celle quiavoit été
tenue le 19. Aoust: on peut juger delà
que ces conferences auront été suspendues
jusqu'à ce que M. NepluyefF, Résident
de Moícovie, ait reçu la réponse aux Let
tres que portoit le Courier qu'il avoic
dépêché en Moícovie après cette confe
rence.
Ile 17. de ce mois il est arrivé en cette
Cour un Ambassadeur de la part de Tamas
Chah , fils du Sophi qui est toujours
à Tauris avec un corps de troupes consi
derable qu'il a raroaíîe. Ce Ministre qui
avoit été retardé près de six mois fur les
frontieres pendant que l'on déliberoit à
la Porte u on- devoit le recevoir , a
vaincu cette premiere difficulté , par leí
moyen des representations du Pacha d~e
Van. Il est venu en poste accompagné
de huit ou dix personnes, & a eu son
audience dû Grand Visir peu dé jours
après son arrivée. On écrit qu'il est déja
entré en conference avec les Ministres
de cette Cour, & que le íùjet de son
Ambaila^
ii6 MERCURE DE FRANCE.
Ambaííàde est pour demander du secours
à la Porte contre Miri-Mamouth.
Les Turcs 'n'ont encore agi que fbiblement
Gu les frontieres, on eh attri
bue la cause aux divisions qu'il y a eu
entre les Comrnandans.' Ibrahim' Pacha
qui étoit Seraskier , a été dépoíe à cette
occasion , 5e cette Charge donnée à Are-
H.Mehemet Pacha qui commande en mê
me temps dans toute la Georgie.
Il est venu depuis peu de jours quel
ques Seigneurs ou principaux des peu-
{íle^ appeliez Abafla pour se mettre sous
a protection de la Torte , Se servir en
même temps d'otage de la fidelité de leurs
Chefs*
. Les pluyes frequentes qu'il fait en ce
pays dans cette saison ont fait revenir à
Fera tous les Ministres des Paiíïances
Étrangeres qui étoient dispersez dans
des maisons de plaiíànce aux environs dè
cette Ville, pour lai sler passer le temps
de la contagion', quoiqu'elle ne soi t pas.
totalement finie.
d'Otfobfe 172 3.
•
S Ut la fin du mois passé une des Sul-
. canes a mis au monde une Princesse»
dont la naissance a été celebrée à l'ordi
naire par le bruit du. canon du Serrail ,
de l'Arcenal,des Vaisseaux, & des Gai»
leres qui sorit dans ce Port.
M. Gritti , nouveau Bayle, ou Am
bassadeur de Veniíë qui vient relever M.
Emo , est arrivé le 7. de ce mois en ce
Port fur deux Galeres que íà Hautessé
avoit envoyées. au Tenedore , suivant le
ceremonial ordinaire pour recevoir ce
Ministre, & le transporter. en cette Ville;
les deux Vaisseaux de la République, fur
leíquels ce Ministre étoit parti de Veniíe
iront hiverner Jl Corfou , en attendant le
départ de M. Emo. M. Gritti fera in
cessamment son entrée publique en cetta
Ville , il aura. ensuite son audience du
Grand Visir , & du Grand Seigneur. M.
Emo , ancien Bayle , a étéfuivant l'uiâge
recevoir & complimenter son íucceíîèur.
fur ies Galeres du Grand Seigneur , l'a
conduit au * Baylage de Veniíe, à Peraj
•ù il l'a regalé pendant trois jours , &
s'est retiré ensuite dans une maiíon parr.
* C'est le Balais de ces Misislres...
JANVIER. 1714.: irj
tìcutìere qu'il s'étoit fait preparer avant
l'arrivée de ce nouveau Ministre s dans
laquelle il restera juíques à son départ
pour Venise.
Il n'y a eu aucune nouvelle conferent
ce entre les Ministres de la Porte , Se le
Réíident de Moícovie au sujet des affai
res de Perse, depuis celle quiavoit été
tenue le 19. Aoust: on peut juger delà
que ces conferences auront été suspendues
jusqu'à ce que M. NepluyefF, Résident
de Moícovie, ait reçu la réponse aux Let
tres que portoit le Courier qu'il avoic
dépêché en Moícovie après cette confe
rence.
Ile 17. de ce mois il est arrivé en cette
Cour un Ambassadeur de la part de Tamas
Chah , fils du Sophi qui est toujours
à Tauris avec un corps de troupes consi
derable qu'il a raroaíîe. Ce Ministre qui
avoit été retardé près de six mois fur les
frontieres pendant que l'on déliberoit à
la Porte u on- devoit le recevoir , a
vaincu cette premiere difficulté , par leí
moyen des representations du Pacha d~e
Van. Il est venu en poste accompagné
de huit ou dix personnes, & a eu son
audience dû Grand Visir peu dé jours
après son arrivée. On écrit qu'il est déja
entré en conference avec les Ministres
de cette Cour, & que le íùjet de son
Ambaila^
ii6 MERCURE DE FRANCE.
Ambaííàde est pour demander du secours
à la Porte contre Miri-Mamouth.
Les Turcs 'n'ont encore agi que fbiblement
Gu les frontieres, on eh attri
bue la cause aux divisions qu'il y a eu
entre les Comrnandans.' Ibrahim' Pacha
qui étoit Seraskier , a été dépoíe à cette
occasion , 5e cette Charge donnée à Are-
H.Mehemet Pacha qui commande en mê
me temps dans toute la Georgie.
Il est venu depuis peu de jours quel
ques Seigneurs ou principaux des peu-
{íle^ appeliez Abafla pour se mettre sous
a protection de la Torte , Se servir en
même temps d'otage de la fidelité de leurs
Chefs*
. Les pluyes frequentes qu'il fait en ce
pays dans cette saison ont fait revenir à
Fera tous les Ministres des Paiíïances
Étrangeres qui étoient dispersez dans
des maisons de plaiíànce aux environs dè
cette Ville, pour lai sler passer le temps
de la contagion', quoiqu'elle ne soi t pas.
totalement finie.
Fermer
Résumé : Nouvelles de Constantinople du mois d'Octobre 1723.
En octobre 1723, une sultane a donné naissance à une princesse à Constantinople, célébré par des salves de canon. M. Gritti, nouveau bailli de Venise, est arrivé le 7 octobre à bord de deux galères. Il a été accueilli selon le cérémonial habituel et sera bientôt reçu par le Grand Visir et le Grand Seigneur. M. Emo, ancien bailli, a conduit M. Gritti au baillage de Venise à Peraj et l'a hébergé pendant trois jours avant de se retirer. Depuis août, il n'y a pas eu de nouvelles conférences entre les ministres de la Porte et le résident de Moscovie concernant les affaires de Perse. Le 17 janvier 1724, un ambassadeur de Tamas Chah, fils du Sophi, est arrivé à Constantinople après un retard de six mois. Il a été reçu par le Grand Visir pour demander du secours contre Miri-Mamouth. Les Turcs ont agi faiblement aux frontières en raison de divisions entre les commandants. Ibrahim Pacha a été déposé et remplacé par Ahmet Mehmet Pacha. Quelques seigneurs des peuples Abaza sont venus se mettre sous la protection de la Porte et servir d'otages. Les pluies fréquentes ont ramené les ministres des palais étrangers à Fera.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
11
p. 474-487
LETTRE. DE M. L'ARCHEVESQUE DE PARIS. AU ROY.
Début :
SIRE, Je crois devoir à VOTRE MAJESTÉ un compte [...]
Mots clefs :
Archevêque de Paris, Curé, Sa Majesté, Constitution, Église, Doctrine de l'Église, Ecclésiastiques, Ordonnance, Ministres
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE. DE M. L'ARCHEVESQUE DE PARIS. AU ROY.
LETTRE.
***
DE M. L'ARCHEVESQUE DE PARIS,
A U ROY
SIRE,
Je crois devoir à VOTRE MAJESTE' un compte
exact de la fituation où j'ai trouvé le Diocèle
de Paris , par rapport aux malheureuſes
conteftations qui affligent l'Eglife de France , de
la conduite que j'ai tenue jufqu'à prefent , pour
ramener les efprits & des mouvemens qui fe font
encore aujourd'hui pour empêcher le bien que
je cherche à y procurer . L'interêt de la Religion
étroitement lié avec celui de l'Etat , exige de l'Evêque
de la Capitale de votre Royaume , SIRE ,
qu'il vous inftruiſe de toutes fes démarches ; & à
qui d'ailleurs pourrois-je mieux expofer mes inquiétudes
& mes peines qu'à un Roi qui aime l'Eglife
, qui protege d'une maniere éclatante les
Miniftres de Jefus- Chrift , & qui en me faiſant
P'honneur de me nommer à la place importante
que j'occupe , m'a promis tous les fecours dont
j'aurois befoin.
Perfonne n'ignore que les Adverfaires de la
Conftitution Unigenitus , n'ont rien négligé pour
révolter les Fideles de la Ville de Paris contre ce
Jugement Apoftolique : on y a répandu des Libelles
fans nombre & de toutes efpeces pour rendre
odieuſe la puiffance dont la Bulle eft émanée,
& mêprifables ceux qui lui étoient foumis. Cet
attaMARS.
1720. 475
attachement fidele pour la Chaire de S. Pierre , ce
refpect filial pour le Vicaire de Jefus -Chrift fur
la terre , qui diftingue l'Eglife Catholique de toutes
les Sectes des Schifmatiques & des Heretiques,
s'eft infenfiblement affoibli ; le fecond Ordre s'eft .
nourri dans des principes contraires à la dépendance
& à la fubordination où il doit être ; de
fimples Fideles fe font accoûtumez à juger les
Juges de la Foi , & à oppofer leurs propres idées
aux décifions du Pape & des Evêques ; telle étoit
la difpofition d'un grand nombre de perfonnes
SIRE, lorfque je pris poffeffion de l'Archevêché
de Paris.
A la vue de ces defordres fi affligeants pour
ceux qui aiment la Religion , & dont le feul récit
coûte infiniment à mon coeur , j'ai été perſuadé ,
que la précipitation ne feroit qu'irriter le mal , &
que des préventions invéterées ne pouvoient être.
gueries que par la charité , par la patience & par,
P'inftruction
Dieu a beni mes premiers foins ; le Chapitre
de mon Eglife Métropolitaine s'eft uni d'abord à
moi , en adherant au Mandement de mon Prédeceffeur
pour l'acceptation de la Conftitution Unigenius
, ce qui me donna d'autant plus de confolation
, qu'il y avoit lieu d'efperer que l'exemple
du premier Corps Ecclefiaftique du Diocèfe
& d'un Corps eftimable par fes lumieres & par
fa capacité , infpireroit au refte du Clergé les
fentimens de foumiffion & de docilité que j'en
devois attendre ; quelques autres en effet ſuivirent
cet exemple , & je reçûs dès -lors de la part de
plufieurs Particuliers , des déclarations précifes
& formelles de leur obéiffance.
Dieu qui vouloit m'éprouver , n'a pas permis
que ma joye fut pleine & entiere , peu de jours
après la déclaration du Chapitre de mon Eglife
Ciij Mé176
MERCURE DE FRANCE.
Métropolitaine , cinq Curez de Paris mé préfens
terent une Lettre avec une Requête fignée d'eux
& de vingt de leurs Confreres , tant de la Ville
que de la Banlieue. Je remarquai d'abord dans cette
démarche une affociation d'Ecclefiaftiques qui ne
font point corps , & qui ne doivent s'affembler
qu'avec leur Archevêque & par fes ordres ; affociation
défenduë par d'anciens Arrêts
que Vo-
TRE MAJESTE' a renouvellez à l'occafion de pareils
mouvemens qui fe firent en 1728. mais
lorfque j'eus i la Lettre & la Requête , ma furprife
& mon étonnement redoublerent .
Je n'avois encore rien fait , SIRE , qui pût don
ner le moindre prétexte aux efprits inquiets d'allarmer
les Peuples ; mon Ordonnance pour l'acceptation
de la Bulle Unigenitus & mon Mandement
pour le renouvellement des Pouvoirs , n'avoient
pas même encore parû , cependant dans la
Lettre dont je viens de parler , ceux qui l'avoient
foufcrite me difoient : que fur des bruits qui fe
repandoient dans le Públic , ils craignoient que
livré aux fuggeftions importunes des personnes
prévenues, & qui ne refpirent que le trouble, je
ne retiraffe les pouvoirs de precher & de confeßer
à une multitude de dignes Miniftres qui travaillent
avec édification dans cette Ville , genera
lement estimez des Peuples qu'ils conduisent
dans la voye du Salut , & des Curez qu'ils foutagent
dans leurs fonctions .
Ils faifoient enfuite entendre quej'allois fubftituer
à ces Miniftres fideles de mauvais fujets
qui refuferoient les Sacremens aux plus faintes
ames , & qui les accorderoient aux pécheurs les
moins préparez que par cette conduite au lieu
du faint concert qui regnoit dans les Paroiffes ,
fallois y mettre le trouble & la divifion , allu
mer le feu du Schifme , & donner occafion aux
libertins
MAR S. 1730. 477
libertins & aux impies de s'affermir dans l'ir
religion.
Un Evêque , SIRE , qui feroit capable de faire
un uſage fi pernicieux de l'autorité qu'il a reçûë
de Jefus- Chrift , ne feroit pas un Paſteur , mais
un loup raviffant, qui, loin d'être occupé des befoins
de fon troupeau , ne penferoit qu'à le ravager.
Comment des Curez ont- ils pû concevoir
une idée fi defavantageufe de leur Archevêque ,
qui ne faifoit que d'entrer dans l'exercice de fon
miniftere , & que l'honneur qu'il avoit d'être
choiſi recemment par VOTRE MAJESTE' devoit
mettre à couvert de pareils foupçons ? Vouloientils
à quelque prix que ce fût, & fans vouloir gar
રે
der même les moindres bienfeances , me décre
diter , m'ôter l'eftime & la confiance des peuples
& me rendre odieux à tout mon Diocèfe ?
La Lettre des vingt-cinq Curez n'étoit pas feu
lement injurieufe à leur Archevêque , elle étoit
encore outrageante pour l'Eglife , par la maniere
dont elle s'expliquoit fur la Conftitution Unige
nitus : ils y reconnoiffoient que ces Miniftres
dont ils avoient fait l'éloge , refufent d'accepter
La Conftitution qui eft , difoient-ils , déferée &
l'Eglife ; & ils ajoûtoient : Sur ce point la canfe
de ces Ecclefiaftiques est la nôtre , ou plutôt
c'est la caufe de la Morale Chrétienne , de la
doctrine de l'Eglife , du langage des S S. Peres &
des Libertex de l'Eglife Gallicane.
Si la Conftitution eft le renversement de la
Morale Chrétienne , de la Doctrine de l'Eglife ,
du langage des Saints Peres & des Libertez de
l'Eglife Gallicane , comme le font entendre ces
vingt-cinq Curez, trois Papes confécutifs qui ont
fait éclater leur zèle pour l'obſervation de la Conftitution
; tous les Evêques de France qui à quatre
ou cinq près , l'ont unanimement acceptée ; ceux
C iiij
des
478 MERCURE DE FRANCE:
des autres Etats , qui fans en excepter un feuf,
y adherent , font donc des prévaricateurs qui
ont trahi & abandonné la verité pour embraffer
& pour foutenir un Decret favorable à l'erreur.
Dans quel état feroit l'Eglife de Jefus- Chrift fi
la verité détruite & ouvertement attaquée par le
Corps des Paſteurs unis à leur Chef , n'avoit plus
pour défenfeurs que quatre ou cinq Evêques ?
les promeffes de Jefus- Chrift , qui a fi pofitivement
déclaré qu'il feroit avec les Apôtres &
leurs fucceffeurs tous les jours jufquà la confommation
du fiecle , feroit fans effet ; les portes
de l'Enfer auroient prévalu contre l'Eglife ; l'autorité
infaillible de cette Epoufe de Jefus-Chrift ,
qui eft toute la fûreté & toute la confolation des
Fideles , fa perpetuelle vifibilité qui l'a fait reconnoître
entre les differentes Communions qui
s'en font féparées , feroient anéanties ; les premiers
Pafteurs ayant le Pape à leur tête ne feroient
plus des guides furs , il faudroit leur préferer fes
propres lumieres & fon efprit particulier ; les
peuples feroient enfin réduits à cette difcuffion
qui leur eft impoffible & qui a plongé les Proteftants
dans un grand nombre d'abſurditez &
d'égalements.
Quant à la Requête qui étoit jointe à la Lettre,
ces mêmes Curez cherchant à fe maintenir dans
la poffeffion qu'ils avoient prétendu ufurper depuis
quelques années de fervir de guides & de
conducteurs à leur Archevêque , excitoient mon
zele pour le fervice de VOTRE MAJESTE' , & me
traçoient avec hauteur la route que je devois
fuivre , avis d'autant plus mal placez que mon
zele n'aura jamais befoin d'être animé , quand il
s'agira de défendre vos droits , SIRE , & de l'indépendance
de votre Couronne ; remontrances qui
convenoient d'autant moins dans la bouche de
ceux
MAR S. 1730. 479.
ceux qui les faifoient , qu'ils contrevenoient formellement
à vos ordres , & qu'ils faifoient des
démarches expreffément condamnées par vos Déclarations
& par vos Arrêts , en même temps
qu'ils vouloient fe donner pour les défenfeurs de
votre autorité.
J'étois en droit , SIRE , de proceder juridi
quement contre ceux qui en avoient ufé avec
moi d'une maniere fi répréhenfible , fur tout
après que leur Lettre a été rendue publique ; je
pouvois regarder ce qu'ils avoient avancé contre la
Bulle comme une contravention manifefte à la Déclaration
du mois d'Août 1720. & les faire punir
fuivant la rigueur des Loix ; mais retenu par les
fentimens de modération & de charité qui font
gravez dans mon coeur , & qui font affez connus
de ceux avec lefquels j'ai vécu , je ne crus pas alors
devoir me fervir de l'autorité qui eft entre mes
mains , encore moins implorer celle de VOTRE
MAJESTE'.
Prêt à publier mon Inftruction Paſtorale fur la
Conftitution Unigenitus , pour diffiper , comme
mon Prédeceffeur l'avoit promis , les doutes &
les fcrupules de ceux qui avoient encore befoin
d'être éclairez fur une matiere fi importante ,
j'efperois que l'expofition que j'y devois faire de
la Doctrine de la Bulle , defabuferoit les efprits les
plus prévenus , & que les principes inconteftablesfur
l'autorité de la Conftitution qui y feroient
établis , détermineroient tous ceux qui refpectent
l'Eglife à fe foumettre au Decret Apoftolique.
Je me contentai donc de mander les cinq Curez
qui m'avoient apporté la Lettre & la Requête , je
leur réprefentai leur faute avec tout le ménagement
poffible; je leur fis les reproches qu'ils méritoient
fur leur affociation , contraire aux Loix de
l'Etat , & d'autant moins convenable , qu'ils fçavoient
C.v
480 MERCURE DE FRANCE :
voient que ma porte leur étoit toûjours ouverte ,
pour écouter ce que chacun d'eux en particulier
voudroit me repreſenter fur l'état de få Paroiffe ;
je leur fis fentir combien leur Lettre m'étoit injurieufe
& à l'Eglife même , je leur parlai de ma
niere à leur faire connoître que les maximes du
Royaume m'étoient auffi précieufes qu'elles le leur
pouvoient être ; je n'omis rien enfin pour les engager
à rentrer en eux-mêmes & à faire de férieufes
reflexions fur leurs fentimens & fur leur conduite.
Quelque temps après cet évenement , SIRE , jet
publiai mon Inftruction Paftorale fur la Conftitution
Unigenitus : j'eus la fatisfaction
que
plufieurs Ecclefiaftiques & differens Corps (a )
touchez & éclairez par cet ouvrage de paix & de
verité , ouvrirent les yeux & defabufez de leurspréventions,
vinrent me déclarer qu'ils obéiffoient.
avec docilité au Decret Apoftolique , quelquesuns
même des Curez , qui avoient figné la Lettre,,
ré racterent leur fignature en fe foumettant plei
nement à mon Ordonnance ; & j'ai été informé
que dans differens Diocèfes cette Inftruction avoit
eu le même fuccès.
A la fin du mois d'Octobre je donnai mon
Mandement pour le renouvellement des pouvoirs.
de prêcher & de confeffer ; je fixai le terme de:
quatre mois pour les Prêtres Séculiers & Reguliers
de la Ville & de la Banlieuë de Paris , pendant
lefquels tous les Confeffeurs feroient obligez
de fe préfenter devant les Examinateurs que je
choifis pour ce difcernement important ; & à l'égard
des Prêtres de la Campagne , afin de ne les
point obliger de venir à la Ville pendant la ri
(a) Les Dominicains, les Carmes , les Prémon
les Doctrinaires. trez
gueur
MARS . 1730. 481
gueur de l'Hyver , je remis cet examen au temps
de l'Eté. En publiant ce Mandement j'avois fuivi
ce que mon Prédeceffeur avoit fait à fon avenement
à l'Archevêché de Paris ; ce que j'avois fait
moi - même à Marſeille & à Aix , & ce que tout
Evêque obferve ordinairement pour connoître les
moeurs , les talens & la Doctrine de ceux à qui il
confie le miniftere le plus redoutable & le plus
faint que des hommes puiffent exercer ; je ne pouvois
d'ailleurs ignorer qu'il y avoit dans lesParoiffes
de Paris & dans celles de la Campagne , un certain
nombre de Prêtres étrangers renvoyez de
leurs Diocèfes, ou qui s'en étoient eux-mêmes
éloignez pour fe fouftraire à l'obéiffance qu'ils
dévoient à leur Evêque , nouveau motif qui m'obligeoit
à prendre des précautions dans le commencement
de mon Epifcopat , pour le choix de
ceux qui devoient travailler fous mes ordres.
Ces Ordonnances , quelques neceffaires , quelques
fages , quelques moderées qu'elles fuffent
n'étoient pas du gout des Adverfaires de la
Bulle : il n'en a pas fallu davantage pour qu'à
cette occafion il fe foit élevé un orage contre
moi ; on a répandu contre mon Inftruction dif
ferents libelles anonymes , dans lefquels on a attaqué
ma doctrine , & on s'eft attaché à repré→
fenter ma moderation même , comme un piege
dont il falloit fe garantir ; on s'eft appliqué à indifpofer
dans plufieurs Paroiffes & dans plufieurs
Communautez les Prédicateurs & les Confeffeurs,
on a répandu les bruits les plus faux fur la ma
niere dont fe paffoient les Examens de l'Archevêché
; on a détourné plufieurs Ecclefiaftiques d'y
venir , dans l'idée de faire manquer le Service des
Paroiffes , de m'en rendre refponfable, & de foulever
les peuples en leur perfuadant que je voulois
leur ôter les Miniftres aufquels ils avoient
Cvj con482
MERCURE DE FRANCE :
1
confiance ; & fur un fi grand nombre de Prêtres
aufquels on continuoit les pouvoirs , il s'en trouvoit
un ou deux que l'on refufàt par incapacité
ou par mauvaiſe doctrine , le bruit de ces
interdits
étoit auffi -tôt publié & exageré dans tout
Paris , les Examinateurs repréfentez comme des
hommes durs & fans lumieres , qui excluoient du
miniftere tous ceux qui étoient les plus capables
de l'exercer ; malignité d'autant plus grande,
que depuis que je fuis en place , SIRE , j'ai renouvellé
les pouvoirs à plus de mille quatre-vingt
Confeffeurs , & qu'il n'y en a que trente qui
foient interdits ; ( a ) de ces trente quelques-uns
ont fait des Sermons fi féditieux , que les Magiftrats
n'auroient pû s'empêcher de les punir , s'ils.
en avoient éû connoiffance ; il y en a d'autres
qui ne font venus aux Examens que pour y déclarer
avec arrogance , qu'ils refufoient d'obeïr à
la Conftitution & à mon Ordonnance , pour faire
eux-mêmes l'énumeration des actes de défobéïffance
qu'ils avoient fignez , & pour affurer qu'ils
y perfiftoient ; quelques autres font connus dans
le public comme des Chefs de parti , qui n'infpirent
que la défobéiffance à l'Eglife & le mépris.
des Puiffances. que Dieu a établies ; il s'en eft trouvé
enfin , qui par rapport à leur incapacité & à
leurs, moeurs ,. ne devoient pas être employez.
Si on n'avoit répandu que des Libelles anonymes
, qui par ce titre feul , portent un caractere
de réprobation , fi je n'avois eû à me plaindre
que de brigues fourdes , que de difcours vagues ,,
que de mouvements fecrets de gens fans aveu ,
j'aurois été bien éloigné d'en importuner VOTRE
(a) S'il y en a d'autres qui foient fans pou
voirs , c'est qu'ils ne fe font pas prefenté aux
Examens pour les faire renouveller.
MA
MARS. 17307 48.
MAJESTE'. Il y a trop long-temps que je fuis
dans le Miniftere Ecclefiaftique , pour ne pas fçavoir
qu'un Evêque doit méprifer ces fortes d'écarts
; mais ce que je ne vous puis cacher , SIRE ,
& ce qui m'attrifte profondément , c'eft que ces
mêmes Curez qui m'avoient écrit la Lettre dont
j'ai eu l'honneur de vous parler , & que j'avois efperé
de ramener par ma modération & par mes
exhortations charitables , n'ont pas craint de m'écrire
une feconde Lettre le 29. Décembre dernier
, & de m'envoyer un Memoire contre mon
Inftruction Paftorale.
Dans cette nouvelle Lettre on m'attaque encore
fur le nombre des Confeffeurs que j'ai interdits
on dit
que le Troupeau va être privé de tous
fes dignes Miniftres , & qu'il fera livré dé
formais à des guides aveugles & relâchez ; on
dépeint la Ville de Paris , cette Ville d'une rare
beauté & qui faifoit l'admiration de toute la
la terre, comme couverte d'afflictions & de ténebres
, & l'on fait entendre que les Peuples de
votre Capitale font dans une confternation generale.
Mais , SIRE , qu'il me foit permis de
répréfenter à VOTRE MAJESTE' quel eft le principe
de toute cette déclamation ? Il s'agit uniquement
, comme j'ai eu l'honneur de vous le faire
obferver de trente Confeffeurs interdits , encore:
même parmi les Curez qui s'en plaignent , il y
en a plufieurs qui n'y ont point d'interêts , les
uns font feuls dans leurs Paroiffes , ( a ) les autres
n'ont qu'un ou deux Ecclefiaftiques qui ne font
point du nombre de ceux aufquels on n'a pas jugé
à propos de renouveller les pouvoirs ; (b) où
( a ) Les Gurez de fainte Marine & de faint
Jean le Rond.
(b) Les Curez du Roule , de Montmartre , de
la Vilette , de la Chapelle & de Conflans.
voit484
MERCURE DE FRANCE .
Voit-on auffi cette prétendue confternation que
F'on fait tant valoir ? Elle ne fe trouve que dans
ceux qui la publient & qui cherchent à l'exciter
par des écrits & par des difcours remplis de calomnies
& d'artifices. *
En fut-il jamais un plus marqué , SIRE , que
l'attention avec laquelle les Auteurs de la Lettre
s'efforcent d'exciter la compaffion des riches en
faveur des Écclefiaftiques qui n'auront plus le
pouvoir de confeffer ? Ils les repréfentent comme
s'ils alloient être réduits à la mendicité ; le miniſtere
de la pénitence , ce miniſtere ſi faint , qui
doit être exercé avec des vûës fi pures & fi defintereffées
, peut-il donc jamais être une reffource
à l'indigence ? Mais ce qui eft de plus criminel
& ce qui pourroit devenir plus dangereux , c'eft
que dans cette même Lettre , dont les copies font
déja répanduës à Paris , & qui fera bientôt imprimée
comme la premiere , on cherche à intereffer
les pauvres en leur annonçant que
les aumônes
qui leur étoient deſtinées , vont être portées
aux Ecclefiaftiques privez de leurs fonctions;
à quoi peut tendre un pareil difcours , finon á
perfuader à ceux qui font dans le befoin , qu'ils
ne doivent plus s'attendre aux fecours qu'ils recevoient
, & que c'eft leur Archevêque qui fait:
tarir les fources fur lefquelles ils peuvent compter?
Le Memoire des Curez n'eft pas plus mefuré
leur Lettre , c'eſt une fatyre & une invective que
* Nota. Qu'avant la feconde Lettre des Curez
à M. l'Archevêque , il y avoit plusieurs
grandes Paroiffes où il n'y avoit aucun Prétre
d'interdit ,fçavoir , de S. Jean , de S. Gervais ,
de S. Roch , de S. Etienne du Mont , de S. Médard
fainte Marguerite ; à faint Germain
de l'Auxerrois un feul .
pleine
MARS. 1730. 485
pleine d'aigreur & de fauffetez contre la Conftitution
Unigenitus , contre mon Inftruction Paftorale
; je refpecte trop les momens de VOTRE
MAJESTE' , pour lui faire un long détail de cette
piece ; il me fuffit de lui remontrer qu'il n'y a
pas un article de mon Inftruction qui n'y foit
attaqué , foit par des ironies picquantes , foit par
des critiques témeraires ; toutes les expreflions de
mon Mandement pour le renouvellement des
pouvoirs , y font tournées avec malignité & condamnées
avec indécence ; les Curez ne s'y font
pas bornez à attaquer l'Ordonnance & le Mandement
que j'ai publiez depuis que je fuis Archevêque
de Paris , ils ont été rechercher une Cenfure
que je fus obligé de faire à Aix contre de
mauvaifes propofitions qu'un Profeffeur en Théologie
avoit avancées ; cenfure à laquelle le Profeffeur
fe foumit , qui ne fut contredite , ni dansle
Diocèfe d'Aix , ni dans l'Eglife de France , &
que les Curez tronquent & défigurent dans leur
Memoire pour la rendre odieufe.
Je ne crois pas, SIRE , qu'on ait jamais vu dans
P'Eglife un exemple d'une pareille révolte du fecond
ordre contre le premier , ni qu'on ait jamais
pouffé plus loin l'efprit d'indépendance & le
renversement de la fubordination la plus effentielle
..
Les Auteurs de la Lettre & du Memoire fe
déclarent mes cooperateurs dans le droit d'enſeigner
& de juger de la Doctrine ; pleins de ces
prétentions chimeriques , ils élevent autel contre
autel ; ils érigent un Tribunal fuperieur au mien ;
c'eft là où mon Ordonnance eft examinée ; ils ne
craignent point d'enſeigner ouvertement une doctrine
contraire à la mienne , & de profcrire celle que
j'ai crû devoir prefenter à mon Diocèfe ; d'autant
plus coupables que ce que j'ai dit dans mon Inf
truction
486 MERCURE DE FRANCE.
truction Paſtorale , je l'ai dit avec le Pape & avec
le Corps des Paſteurs.
Ils devroient cependant fçavoir qu'un Archevêque
en publiant dans fon Diocèſe une Décifion
de l'Eglife , remplit ce que fon Miniſtere exige
de lui ; c'eft aux Evêques à qui Jefus - Chrift a dit
en la perfonne des Apôtres : Allez, enſeignez
toutes les Nations , celui qui vous écoute m'écoute,
& celui qui vous méprise me mépriſe
moi même, c'est à eux que S.Paul dit , en parlant
à Thimothée , confervez le dépôt : les Prêtres
doivent être les premiers à donner l'exemple de
la foumiffion & de l'obéïſſance , & ils doivent
apprendre à tout le Troupeau à refpecter la voix
du premier Paſteur . ´
Après l'expofé que je viens de faire à VOTRE
MAJESTE', elle ne fçauroit douter que je ne connoiffe
toute l'énormité d'une pareille conduite ; je
prévois les fuites funeftes qu'elle peut avoir , je
fens qu'il eft dangereux de la diffimuler , je fçai
même qu'il eft quelquefois neceffaire de faire des
exemples qui puiffent , felon l'Apôtre S. Paul ,
inſpirer une terreur falutaire , je ne puis cependant
encore me réfoudre à punir les coupa→
bles ni à employer ces armes puiffantes quej'ai
en main pour renverser toute hauteur qui s'éleve
contre la fcience de Dieu ; je fupplie Vo-
TRE MAJESTE , de fufpendre les effets de fon
indignation , je veux épuifer les dernieres reffources
de la patience & de la charité ; il n'eſt
pas poffible que ces Ecclefiaftiques ne " reconnoiffent
enfin leur faute, & qu'ils ne réparent par leur
foumiffion le fcandale qu'ils ont donné : je me
flate qu'ils ouvriront les yeux à l'exemple d'un
grand nombre de leurs Confreres , qui blâmant
leur conduite , goutent dans une parfaite obéïffance
à la voix de l'Eglife , cette paix & cette confolation
MARS. 1730. 487
folation qui en font inféparables ; fi cependant
contre mon inclination & contre mon attente
ces Ecclefiaftiques me forcent d'agir en Juge ,
après leur avoir inutilement parlé en Pere , je
ferai mon devoir , SIRE , avec le zele & la fermeté
d'un Evêque , qui après avoir vieilli dane
l'Epiſcopat , n'eft pas venu dans votre Ville Capitale
pour trahir fon miniftere , ni pour le deshonorer
à la fin de fes jours , & j'aurai recours
alors avec confiance à la protection de VOTR
MAJESTE', afin que par un parfait concert des deux
Puiffances du Sacerdoce & de l'Empire , tout ce
qui trouble le bon ordre foit puni felon les voyce
Canoniques & Civiles. Je fuis avec le plus profond
reſpect ,
ȘIRE ,
DE VOTRE MAJESTE',
Le très-humble , très-obéiffant
& très-fidele ferviteur & fujet,
† CHARLES , Archevêque de Paris.
A Paris , le 8. Fevrier 1730.
***
DE M. L'ARCHEVESQUE DE PARIS,
A U ROY
SIRE,
Je crois devoir à VOTRE MAJESTE' un compte
exact de la fituation où j'ai trouvé le Diocèle
de Paris , par rapport aux malheureuſes
conteftations qui affligent l'Eglife de France , de
la conduite que j'ai tenue jufqu'à prefent , pour
ramener les efprits & des mouvemens qui fe font
encore aujourd'hui pour empêcher le bien que
je cherche à y procurer . L'interêt de la Religion
étroitement lié avec celui de l'Etat , exige de l'Evêque
de la Capitale de votre Royaume , SIRE ,
qu'il vous inftruiſe de toutes fes démarches ; & à
qui d'ailleurs pourrois-je mieux expofer mes inquiétudes
& mes peines qu'à un Roi qui aime l'Eglife
, qui protege d'une maniere éclatante les
Miniftres de Jefus- Chrift , & qui en me faiſant
P'honneur de me nommer à la place importante
que j'occupe , m'a promis tous les fecours dont
j'aurois befoin.
Perfonne n'ignore que les Adverfaires de la
Conftitution Unigenitus , n'ont rien négligé pour
révolter les Fideles de la Ville de Paris contre ce
Jugement Apoftolique : on y a répandu des Libelles
fans nombre & de toutes efpeces pour rendre
odieuſe la puiffance dont la Bulle eft émanée,
& mêprifables ceux qui lui étoient foumis. Cet
attaMARS.
1720. 475
attachement fidele pour la Chaire de S. Pierre , ce
refpect filial pour le Vicaire de Jefus -Chrift fur
la terre , qui diftingue l'Eglife Catholique de toutes
les Sectes des Schifmatiques & des Heretiques,
s'eft infenfiblement affoibli ; le fecond Ordre s'eft .
nourri dans des principes contraires à la dépendance
& à la fubordination où il doit être ; de
fimples Fideles fe font accoûtumez à juger les
Juges de la Foi , & à oppofer leurs propres idées
aux décifions du Pape & des Evêques ; telle étoit
la difpofition d'un grand nombre de perfonnes
SIRE, lorfque je pris poffeffion de l'Archevêché
de Paris.
A la vue de ces defordres fi affligeants pour
ceux qui aiment la Religion , & dont le feul récit
coûte infiniment à mon coeur , j'ai été perſuadé ,
que la précipitation ne feroit qu'irriter le mal , &
que des préventions invéterées ne pouvoient être.
gueries que par la charité , par la patience & par,
P'inftruction
Dieu a beni mes premiers foins ; le Chapitre
de mon Eglife Métropolitaine s'eft uni d'abord à
moi , en adherant au Mandement de mon Prédeceffeur
pour l'acceptation de la Conftitution Unigenius
, ce qui me donna d'autant plus de confolation
, qu'il y avoit lieu d'efperer que l'exemple
du premier Corps Ecclefiaftique du Diocèfe
& d'un Corps eftimable par fes lumieres & par
fa capacité , infpireroit au refte du Clergé les
fentimens de foumiffion & de docilité que j'en
devois attendre ; quelques autres en effet ſuivirent
cet exemple , & je reçûs dès -lors de la part de
plufieurs Particuliers , des déclarations précifes
& formelles de leur obéiffance.
Dieu qui vouloit m'éprouver , n'a pas permis
que ma joye fut pleine & entiere , peu de jours
après la déclaration du Chapitre de mon Eglife
Ciij Mé176
MERCURE DE FRANCE.
Métropolitaine , cinq Curez de Paris mé préfens
terent une Lettre avec une Requête fignée d'eux
& de vingt de leurs Confreres , tant de la Ville
que de la Banlieue. Je remarquai d'abord dans cette
démarche une affociation d'Ecclefiaftiques qui ne
font point corps , & qui ne doivent s'affembler
qu'avec leur Archevêque & par fes ordres ; affociation
défenduë par d'anciens Arrêts
que Vo-
TRE MAJESTE' a renouvellez à l'occafion de pareils
mouvemens qui fe firent en 1728. mais
lorfque j'eus i la Lettre & la Requête , ma furprife
& mon étonnement redoublerent .
Je n'avois encore rien fait , SIRE , qui pût don
ner le moindre prétexte aux efprits inquiets d'allarmer
les Peuples ; mon Ordonnance pour l'acceptation
de la Bulle Unigenitus & mon Mandement
pour le renouvellement des Pouvoirs , n'avoient
pas même encore parû , cependant dans la
Lettre dont je viens de parler , ceux qui l'avoient
foufcrite me difoient : que fur des bruits qui fe
repandoient dans le Públic , ils craignoient que
livré aux fuggeftions importunes des personnes
prévenues, & qui ne refpirent que le trouble, je
ne retiraffe les pouvoirs de precher & de confeßer
à une multitude de dignes Miniftres qui travaillent
avec édification dans cette Ville , genera
lement estimez des Peuples qu'ils conduisent
dans la voye du Salut , & des Curez qu'ils foutagent
dans leurs fonctions .
Ils faifoient enfuite entendre quej'allois fubftituer
à ces Miniftres fideles de mauvais fujets
qui refuferoient les Sacremens aux plus faintes
ames , & qui les accorderoient aux pécheurs les
moins préparez que par cette conduite au lieu
du faint concert qui regnoit dans les Paroiffes ,
fallois y mettre le trouble & la divifion , allu
mer le feu du Schifme , & donner occafion aux
libertins
MAR S. 1730. 477
libertins & aux impies de s'affermir dans l'ir
religion.
Un Evêque , SIRE , qui feroit capable de faire
un uſage fi pernicieux de l'autorité qu'il a reçûë
de Jefus- Chrift , ne feroit pas un Paſteur , mais
un loup raviffant, qui, loin d'être occupé des befoins
de fon troupeau , ne penferoit qu'à le ravager.
Comment des Curez ont- ils pû concevoir
une idée fi defavantageufe de leur Archevêque ,
qui ne faifoit que d'entrer dans l'exercice de fon
miniftere , & que l'honneur qu'il avoit d'être
choiſi recemment par VOTRE MAJESTE' devoit
mettre à couvert de pareils foupçons ? Vouloientils
à quelque prix que ce fût, & fans vouloir gar
રે
der même les moindres bienfeances , me décre
diter , m'ôter l'eftime & la confiance des peuples
& me rendre odieux à tout mon Diocèfe ?
La Lettre des vingt-cinq Curez n'étoit pas feu
lement injurieufe à leur Archevêque , elle étoit
encore outrageante pour l'Eglife , par la maniere
dont elle s'expliquoit fur la Conftitution Unige
nitus : ils y reconnoiffoient que ces Miniftres
dont ils avoient fait l'éloge , refufent d'accepter
La Conftitution qui eft , difoient-ils , déferée &
l'Eglife ; & ils ajoûtoient : Sur ce point la canfe
de ces Ecclefiaftiques est la nôtre , ou plutôt
c'est la caufe de la Morale Chrétienne , de la
doctrine de l'Eglife , du langage des S S. Peres &
des Libertex de l'Eglife Gallicane.
Si la Conftitution eft le renversement de la
Morale Chrétienne , de la Doctrine de l'Eglife ,
du langage des Saints Peres & des Libertez de
l'Eglife Gallicane , comme le font entendre ces
vingt-cinq Curez, trois Papes confécutifs qui ont
fait éclater leur zèle pour l'obſervation de la Conftitution
; tous les Evêques de France qui à quatre
ou cinq près , l'ont unanimement acceptée ; ceux
C iiij
des
478 MERCURE DE FRANCE:
des autres Etats , qui fans en excepter un feuf,
y adherent , font donc des prévaricateurs qui
ont trahi & abandonné la verité pour embraffer
& pour foutenir un Decret favorable à l'erreur.
Dans quel état feroit l'Eglife de Jefus- Chrift fi
la verité détruite & ouvertement attaquée par le
Corps des Paſteurs unis à leur Chef , n'avoit plus
pour défenfeurs que quatre ou cinq Evêques ?
les promeffes de Jefus- Chrift , qui a fi pofitivement
déclaré qu'il feroit avec les Apôtres &
leurs fucceffeurs tous les jours jufquà la confommation
du fiecle , feroit fans effet ; les portes
de l'Enfer auroient prévalu contre l'Eglife ; l'autorité
infaillible de cette Epoufe de Jefus-Chrift ,
qui eft toute la fûreté & toute la confolation des
Fideles , fa perpetuelle vifibilité qui l'a fait reconnoître
entre les differentes Communions qui
s'en font féparées , feroient anéanties ; les premiers
Pafteurs ayant le Pape à leur tête ne feroient
plus des guides furs , il faudroit leur préferer fes
propres lumieres & fon efprit particulier ; les
peuples feroient enfin réduits à cette difcuffion
qui leur eft impoffible & qui a plongé les Proteftants
dans un grand nombre d'abſurditez &
d'égalements.
Quant à la Requête qui étoit jointe à la Lettre,
ces mêmes Curez cherchant à fe maintenir dans
la poffeffion qu'ils avoient prétendu ufurper depuis
quelques années de fervir de guides & de
conducteurs à leur Archevêque , excitoient mon
zele pour le fervice de VOTRE MAJESTE' , & me
traçoient avec hauteur la route que je devois
fuivre , avis d'autant plus mal placez que mon
zele n'aura jamais befoin d'être animé , quand il
s'agira de défendre vos droits , SIRE , & de l'indépendance
de votre Couronne ; remontrances qui
convenoient d'autant moins dans la bouche de
ceux
MAR S. 1730. 479.
ceux qui les faifoient , qu'ils contrevenoient formellement
à vos ordres , & qu'ils faifoient des
démarches expreffément condamnées par vos Déclarations
& par vos Arrêts , en même temps
qu'ils vouloient fe donner pour les défenfeurs de
votre autorité.
J'étois en droit , SIRE , de proceder juridi
quement contre ceux qui en avoient ufé avec
moi d'une maniere fi répréhenfible , fur tout
après que leur Lettre a été rendue publique ; je
pouvois regarder ce qu'ils avoient avancé contre la
Bulle comme une contravention manifefte à la Déclaration
du mois d'Août 1720. & les faire punir
fuivant la rigueur des Loix ; mais retenu par les
fentimens de modération & de charité qui font
gravez dans mon coeur , & qui font affez connus
de ceux avec lefquels j'ai vécu , je ne crus pas alors
devoir me fervir de l'autorité qui eft entre mes
mains , encore moins implorer celle de VOTRE
MAJESTE'.
Prêt à publier mon Inftruction Paſtorale fur la
Conftitution Unigenitus , pour diffiper , comme
mon Prédeceffeur l'avoit promis , les doutes &
les fcrupules de ceux qui avoient encore befoin
d'être éclairez fur une matiere fi importante ,
j'efperois que l'expofition que j'y devois faire de
la Doctrine de la Bulle , defabuferoit les efprits les
plus prévenus , & que les principes inconteftablesfur
l'autorité de la Conftitution qui y feroient
établis , détermineroient tous ceux qui refpectent
l'Eglife à fe foumettre au Decret Apoftolique.
Je me contentai donc de mander les cinq Curez
qui m'avoient apporté la Lettre & la Requête , je
leur réprefentai leur faute avec tout le ménagement
poffible; je leur fis les reproches qu'ils méritoient
fur leur affociation , contraire aux Loix de
l'Etat , & d'autant moins convenable , qu'ils fçavoient
C.v
480 MERCURE DE FRANCE :
voient que ma porte leur étoit toûjours ouverte ,
pour écouter ce que chacun d'eux en particulier
voudroit me repreſenter fur l'état de få Paroiffe ;
je leur fis fentir combien leur Lettre m'étoit injurieufe
& à l'Eglife même , je leur parlai de ma
niere à leur faire connoître que les maximes du
Royaume m'étoient auffi précieufes qu'elles le leur
pouvoient être ; je n'omis rien enfin pour les engager
à rentrer en eux-mêmes & à faire de férieufes
reflexions fur leurs fentimens & fur leur conduite.
Quelque temps après cet évenement , SIRE , jet
publiai mon Inftruction Paftorale fur la Conftitution
Unigenitus : j'eus la fatisfaction
que
plufieurs Ecclefiaftiques & differens Corps (a )
touchez & éclairez par cet ouvrage de paix & de
verité , ouvrirent les yeux & defabufez de leurspréventions,
vinrent me déclarer qu'ils obéiffoient.
avec docilité au Decret Apoftolique , quelquesuns
même des Curez , qui avoient figné la Lettre,,
ré racterent leur fignature en fe foumettant plei
nement à mon Ordonnance ; & j'ai été informé
que dans differens Diocèfes cette Inftruction avoit
eu le même fuccès.
A la fin du mois d'Octobre je donnai mon
Mandement pour le renouvellement des pouvoirs.
de prêcher & de confeffer ; je fixai le terme de:
quatre mois pour les Prêtres Séculiers & Reguliers
de la Ville & de la Banlieuë de Paris , pendant
lefquels tous les Confeffeurs feroient obligez
de fe préfenter devant les Examinateurs que je
choifis pour ce difcernement important ; & à l'égard
des Prêtres de la Campagne , afin de ne les
point obliger de venir à la Ville pendant la ri
(a) Les Dominicains, les Carmes , les Prémon
les Doctrinaires. trez
gueur
MARS . 1730. 481
gueur de l'Hyver , je remis cet examen au temps
de l'Eté. En publiant ce Mandement j'avois fuivi
ce que mon Prédeceffeur avoit fait à fon avenement
à l'Archevêché de Paris ; ce que j'avois fait
moi - même à Marſeille & à Aix , & ce que tout
Evêque obferve ordinairement pour connoître les
moeurs , les talens & la Doctrine de ceux à qui il
confie le miniftere le plus redoutable & le plus
faint que des hommes puiffent exercer ; je ne pouvois
d'ailleurs ignorer qu'il y avoit dans lesParoiffes
de Paris & dans celles de la Campagne , un certain
nombre de Prêtres étrangers renvoyez de
leurs Diocèfes, ou qui s'en étoient eux-mêmes
éloignez pour fe fouftraire à l'obéiffance qu'ils
dévoient à leur Evêque , nouveau motif qui m'obligeoit
à prendre des précautions dans le commencement
de mon Epifcopat , pour le choix de
ceux qui devoient travailler fous mes ordres.
Ces Ordonnances , quelques neceffaires , quelques
fages , quelques moderées qu'elles fuffent
n'étoient pas du gout des Adverfaires de la
Bulle : il n'en a pas fallu davantage pour qu'à
cette occafion il fe foit élevé un orage contre
moi ; on a répandu contre mon Inftruction dif
ferents libelles anonymes , dans lefquels on a attaqué
ma doctrine , & on s'eft attaché à repré→
fenter ma moderation même , comme un piege
dont il falloit fe garantir ; on s'eft appliqué à indifpofer
dans plufieurs Paroiffes & dans plufieurs
Communautez les Prédicateurs & les Confeffeurs,
on a répandu les bruits les plus faux fur la ma
niere dont fe paffoient les Examens de l'Archevêché
; on a détourné plufieurs Ecclefiaftiques d'y
venir , dans l'idée de faire manquer le Service des
Paroiffes , de m'en rendre refponfable, & de foulever
les peuples en leur perfuadant que je voulois
leur ôter les Miniftres aufquels ils avoient
Cvj con482
MERCURE DE FRANCE :
1
confiance ; & fur un fi grand nombre de Prêtres
aufquels on continuoit les pouvoirs , il s'en trouvoit
un ou deux que l'on refufàt par incapacité
ou par mauvaiſe doctrine , le bruit de ces
interdits
étoit auffi -tôt publié & exageré dans tout
Paris , les Examinateurs repréfentez comme des
hommes durs & fans lumieres , qui excluoient du
miniftere tous ceux qui étoient les plus capables
de l'exercer ; malignité d'autant plus grande,
que depuis que je fuis en place , SIRE , j'ai renouvellé
les pouvoirs à plus de mille quatre-vingt
Confeffeurs , & qu'il n'y en a que trente qui
foient interdits ; ( a ) de ces trente quelques-uns
ont fait des Sermons fi féditieux , que les Magiftrats
n'auroient pû s'empêcher de les punir , s'ils.
en avoient éû connoiffance ; il y en a d'autres
qui ne font venus aux Examens que pour y déclarer
avec arrogance , qu'ils refufoient d'obeïr à
la Conftitution & à mon Ordonnance , pour faire
eux-mêmes l'énumeration des actes de défobéïffance
qu'ils avoient fignez , & pour affurer qu'ils
y perfiftoient ; quelques autres font connus dans
le public comme des Chefs de parti , qui n'infpirent
que la défobéiffance à l'Eglife & le mépris.
des Puiffances. que Dieu a établies ; il s'en eft trouvé
enfin , qui par rapport à leur incapacité & à
leurs, moeurs ,. ne devoient pas être employez.
Si on n'avoit répandu que des Libelles anonymes
, qui par ce titre feul , portent un caractere
de réprobation , fi je n'avois eû à me plaindre
que de brigues fourdes , que de difcours vagues ,,
que de mouvements fecrets de gens fans aveu ,
j'aurois été bien éloigné d'en importuner VOTRE
(a) S'il y en a d'autres qui foient fans pou
voirs , c'est qu'ils ne fe font pas prefenté aux
Examens pour les faire renouveller.
MA
MARS. 17307 48.
MAJESTE'. Il y a trop long-temps que je fuis
dans le Miniftere Ecclefiaftique , pour ne pas fçavoir
qu'un Evêque doit méprifer ces fortes d'écarts
; mais ce que je ne vous puis cacher , SIRE ,
& ce qui m'attrifte profondément , c'eft que ces
mêmes Curez qui m'avoient écrit la Lettre dont
j'ai eu l'honneur de vous parler , & que j'avois efperé
de ramener par ma modération & par mes
exhortations charitables , n'ont pas craint de m'écrire
une feconde Lettre le 29. Décembre dernier
, & de m'envoyer un Memoire contre mon
Inftruction Paftorale.
Dans cette nouvelle Lettre on m'attaque encore
fur le nombre des Confeffeurs que j'ai interdits
on dit
que le Troupeau va être privé de tous
fes dignes Miniftres , & qu'il fera livré dé
formais à des guides aveugles & relâchez ; on
dépeint la Ville de Paris , cette Ville d'une rare
beauté & qui faifoit l'admiration de toute la
la terre, comme couverte d'afflictions & de ténebres
, & l'on fait entendre que les Peuples de
votre Capitale font dans une confternation generale.
Mais , SIRE , qu'il me foit permis de
répréfenter à VOTRE MAJESTE' quel eft le principe
de toute cette déclamation ? Il s'agit uniquement
, comme j'ai eu l'honneur de vous le faire
obferver de trente Confeffeurs interdits , encore:
même parmi les Curez qui s'en plaignent , il y
en a plufieurs qui n'y ont point d'interêts , les
uns font feuls dans leurs Paroiffes , ( a ) les autres
n'ont qu'un ou deux Ecclefiaftiques qui ne font
point du nombre de ceux aufquels on n'a pas jugé
à propos de renouveller les pouvoirs ; (b) où
( a ) Les Gurez de fainte Marine & de faint
Jean le Rond.
(b) Les Curez du Roule , de Montmartre , de
la Vilette , de la Chapelle & de Conflans.
voit484
MERCURE DE FRANCE .
Voit-on auffi cette prétendue confternation que
F'on fait tant valoir ? Elle ne fe trouve que dans
ceux qui la publient & qui cherchent à l'exciter
par des écrits & par des difcours remplis de calomnies
& d'artifices. *
En fut-il jamais un plus marqué , SIRE , que
l'attention avec laquelle les Auteurs de la Lettre
s'efforcent d'exciter la compaffion des riches en
faveur des Écclefiaftiques qui n'auront plus le
pouvoir de confeffer ? Ils les repréfentent comme
s'ils alloient être réduits à la mendicité ; le miniſtere
de la pénitence , ce miniſtere ſi faint , qui
doit être exercé avec des vûës fi pures & fi defintereffées
, peut-il donc jamais être une reffource
à l'indigence ? Mais ce qui eft de plus criminel
& ce qui pourroit devenir plus dangereux , c'eft
que dans cette même Lettre , dont les copies font
déja répanduës à Paris , & qui fera bientôt imprimée
comme la premiere , on cherche à intereffer
les pauvres en leur annonçant que
les aumônes
qui leur étoient deſtinées , vont être portées
aux Ecclefiaftiques privez de leurs fonctions;
à quoi peut tendre un pareil difcours , finon á
perfuader à ceux qui font dans le befoin , qu'ils
ne doivent plus s'attendre aux fecours qu'ils recevoient
, & que c'eft leur Archevêque qui fait:
tarir les fources fur lefquelles ils peuvent compter?
Le Memoire des Curez n'eft pas plus mefuré
leur Lettre , c'eſt une fatyre & une invective que
* Nota. Qu'avant la feconde Lettre des Curez
à M. l'Archevêque , il y avoit plusieurs
grandes Paroiffes où il n'y avoit aucun Prétre
d'interdit ,fçavoir , de S. Jean , de S. Gervais ,
de S. Roch , de S. Etienne du Mont , de S. Médard
fainte Marguerite ; à faint Germain
de l'Auxerrois un feul .
pleine
MARS. 1730. 485
pleine d'aigreur & de fauffetez contre la Conftitution
Unigenitus , contre mon Inftruction Paftorale
; je refpecte trop les momens de VOTRE
MAJESTE' , pour lui faire un long détail de cette
piece ; il me fuffit de lui remontrer qu'il n'y a
pas un article de mon Inftruction qui n'y foit
attaqué , foit par des ironies picquantes , foit par
des critiques témeraires ; toutes les expreflions de
mon Mandement pour le renouvellement des
pouvoirs , y font tournées avec malignité & condamnées
avec indécence ; les Curez ne s'y font
pas bornez à attaquer l'Ordonnance & le Mandement
que j'ai publiez depuis que je fuis Archevêque
de Paris , ils ont été rechercher une Cenfure
que je fus obligé de faire à Aix contre de
mauvaifes propofitions qu'un Profeffeur en Théologie
avoit avancées ; cenfure à laquelle le Profeffeur
fe foumit , qui ne fut contredite , ni dansle
Diocèfe d'Aix , ni dans l'Eglife de France , &
que les Curez tronquent & défigurent dans leur
Memoire pour la rendre odieufe.
Je ne crois pas, SIRE , qu'on ait jamais vu dans
P'Eglife un exemple d'une pareille révolte du fecond
ordre contre le premier , ni qu'on ait jamais
pouffé plus loin l'efprit d'indépendance & le
renversement de la fubordination la plus effentielle
..
Les Auteurs de la Lettre & du Memoire fe
déclarent mes cooperateurs dans le droit d'enſeigner
& de juger de la Doctrine ; pleins de ces
prétentions chimeriques , ils élevent autel contre
autel ; ils érigent un Tribunal fuperieur au mien ;
c'eft là où mon Ordonnance eft examinée ; ils ne
craignent point d'enſeigner ouvertement une doctrine
contraire à la mienne , & de profcrire celle que
j'ai crû devoir prefenter à mon Diocèfe ; d'autant
plus coupables que ce que j'ai dit dans mon Inf
truction
486 MERCURE DE FRANCE.
truction Paſtorale , je l'ai dit avec le Pape & avec
le Corps des Paſteurs.
Ils devroient cependant fçavoir qu'un Archevêque
en publiant dans fon Diocèſe une Décifion
de l'Eglife , remplit ce que fon Miniſtere exige
de lui ; c'eft aux Evêques à qui Jefus - Chrift a dit
en la perfonne des Apôtres : Allez, enſeignez
toutes les Nations , celui qui vous écoute m'écoute,
& celui qui vous méprise me mépriſe
moi même, c'est à eux que S.Paul dit , en parlant
à Thimothée , confervez le dépôt : les Prêtres
doivent être les premiers à donner l'exemple de
la foumiffion & de l'obéïſſance , & ils doivent
apprendre à tout le Troupeau à refpecter la voix
du premier Paſteur . ´
Après l'expofé que je viens de faire à VOTRE
MAJESTE', elle ne fçauroit douter que je ne connoiffe
toute l'énormité d'une pareille conduite ; je
prévois les fuites funeftes qu'elle peut avoir , je
fens qu'il eft dangereux de la diffimuler , je fçai
même qu'il eft quelquefois neceffaire de faire des
exemples qui puiffent , felon l'Apôtre S. Paul ,
inſpirer une terreur falutaire , je ne puis cependant
encore me réfoudre à punir les coupa→
bles ni à employer ces armes puiffantes quej'ai
en main pour renverser toute hauteur qui s'éleve
contre la fcience de Dieu ; je fupplie Vo-
TRE MAJESTE , de fufpendre les effets de fon
indignation , je veux épuifer les dernieres reffources
de la patience & de la charité ; il n'eſt
pas poffible que ces Ecclefiaftiques ne " reconnoiffent
enfin leur faute, & qu'ils ne réparent par leur
foumiffion le fcandale qu'ils ont donné : je me
flate qu'ils ouvriront les yeux à l'exemple d'un
grand nombre de leurs Confreres , qui blâmant
leur conduite , goutent dans une parfaite obéïffance
à la voix de l'Eglife , cette paix & cette confolation
MARS. 1730. 487
folation qui en font inféparables ; fi cependant
contre mon inclination & contre mon attente
ces Ecclefiaftiques me forcent d'agir en Juge ,
après leur avoir inutilement parlé en Pere , je
ferai mon devoir , SIRE , avec le zele & la fermeté
d'un Evêque , qui après avoir vieilli dane
l'Epiſcopat , n'eft pas venu dans votre Ville Capitale
pour trahir fon miniftere , ni pour le deshonorer
à la fin de fes jours , & j'aurai recours
alors avec confiance à la protection de VOTR
MAJESTE', afin que par un parfait concert des deux
Puiffances du Sacerdoce & de l'Empire , tout ce
qui trouble le bon ordre foit puni felon les voyce
Canoniques & Civiles. Je fuis avec le plus profond
reſpect ,
ȘIRE ,
DE VOTRE MAJESTE',
Le très-humble , très-obéiffant
& très-fidele ferviteur & fujet,
† CHARLES , Archevêque de Paris.
A Paris , le 8. Fevrier 1730.
Fermer
Résumé : LETTRE. DE M. L'ARCHEVESQUE DE PARIS. AU ROY.
L'archevêque de Paris adresse une lettre au roi pour l'informer des tensions au sein du diocèse de Paris, liées à la Constitution Unigenitus. Il souligne l'importance de la Religion pour l'État et son devoir d'informer le roi de ses démarches. Les opposants à la Constitution Unigenitus ont diffusé des libelles pour discréditer la bulle papale et affaiblir l'autorité papale. À son arrivée, l'archevêque a trouvé un diocèse divisé, avec des fidèles et des ecclésiastiques opposés à la Constitution Unigenitus. Il a opté pour la patience et l'instruction pour apaiser les tensions. Le chapitre de son église métropolitaine a adhéré au mandement de son prédécesseur, et plusieurs particuliers ont déclaré leur obéissance. Cependant, cinq curés de Paris et vingt de leurs confrères ont critiqué les mesures de l'archevêque et exprimé des craintes infondées. L'archevêque a réagi avec modération, rappelant les curés à leurs devoirs et publiant une instruction pastorale sur la Constitution Unigenitus. Plusieurs ecclésiastiques et corps religieux ont alors accepté le décret apostolique. Il a également publié un mandement pour le renouvellement des pouvoirs de prêcher et de confesser, fixant un délai pour l'examen des prêtres. Malgré ces mesures, des libelles anonymes ont été diffusés contre son instruction. L'archevêque mentionne que sur plus de mille quatre-vingt confesseurs, seulement trente ont été interdits. Parmi ces interdits, certains ont prononcé des sermons séditieux, refusé d'obéir aux constitutions et aux ordonnances, ou sont connus pour inspirer la désobéissance et le mépris des autorités. Les curés ont exagéré ces interdictions, prétendant que Paris serait privé de ses ministres dignes et plongé dans l'affliction. L'archevêque souligne que cette opposition est motivée par des intérêts personnels et des calomnies. Il exprime son désir de résoudre ce conflit par la patience et la charité, espérant que les prêtres reconnaîtront leur faute et se soumettront. Cependant, il se tient prêt à agir en juge si nécessaire, avec le soutien du souverain pour maintenir l'ordre et la discipline dans l'Église.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
12
p. 1012-1025
RÉJOUISSANCES faites au Palais de France, & au Quartier de l'Ambassadeur du Roi à Constantinople. Extrait d'une Lettre écrite de cette Ville le 19. Mars 1730.
Début :
Sur les premiers avis qu'on eut à Constantinople que le Ciel avoit accordé un Dauphin aux [...]
Mots clefs :
Ambassadeur, Constantinople, Dauphin, Cérémonie, Fête, Ministres, Danse, Vizir, Palais, Ornements
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : RÉJOUISSANCES faites au Palais de France, & au Quartier de l'Ambassadeur du Roi à Constantinople. Extrait d'une Lettre écrite de cette Ville le 19. Mars 1730.
REJOUISSANCES faites au Pa-
:
C
lais de France , & au Quartier de l'Ambaffadeur
du Roi à Conftantinople. Extrait
d'une Lettre écrite de cette Ville le
19. Mars 1730.
Ur les premiers avis qu'on eut à Conftantinople
que le Ciel avoit accordé un Dauphin aux
voeux ardens de toute la France , M. le Marquis
de Villeneuve , Ambaffadeur du Roi à la Porte ,
fe prépara à faire éclater fa joye par une
Fête qui devoit durer trois jours. Il fit d'abord
mettre en mouvement ce qu'on pût trouver
d'Ouvriers pour l'execution du Plan qu'il avoit
formé pour celebrer cette augufte Naiffance. Il
ne reçût les ordres de la Cour que le 15. Novembre.
Le 17. au matin , M. l'Ambaffadeur envoya
fon premier Secretaire au Sérrail,pour donner part
de cette nouvelle au Grand- Vizir , & le prévenir
en même - tems fur les Réjouiflances & les lluminations
qu'il fe propofoit de faire , ce premier
Miniftre parut s'inter fler véritablement au bonheur
de la France. Delà , on alla chez le Kiaya
ou Lieutenant du Vizir & chez le Reis - Efendi , ou
Chancelier , qui reçûrent cette nouvelle avec de
grandes démonftrations de joye ; ce dernier répondit
que la Porte prenoit autant de part
évenement que s'il étoit né un fucceffeur à l'Empire
Ottoman.
à cer
L'après-diné , on alla chez les Ambaffadeurs
d'Angleterre & de Hollande pour leur annoncer
cette Naiffance , auffi -bien que chez les Réfidens
de l'Empereur & de Mofcovie , & chez M. Bartolini
, Secretaire chargé des affaires de la République
MAY. 1730. 1013
publique de Venife , depuis la mort du Bayle
Delphino. Dès le même jour tous ces Miniftre
envoyerent complimenter le Marquis de Villeneuve.
>
Le lendemain , le Grand- Seigneur lui fit faire
des complimens de félicitation par le neveu du
Prince de Valachie , accompagné d'un des principaux
Drogmans du Sérail. Quelques jours après
l'Ambaffadeur d'Angleterre alla , en cerémonie
avec toute fa Maiſon,féliciter S. E; l'Ambaffadeur
d'Hollande y alla le lendemain ; les jours fuivans
furent employés à recevoir de femblables
vifites des Réfidens d'Allemagne & de Mofcovie,
ou à les rendre à ces Miniftres. M. Bartolini fir
auffi la fienne , que le Marquis de Villeneuve lui
rendit , mais fans cerémonie.
Tout ce Cerémonial rempli ; c'eut été le veritable
tems de donner la fête projettée ; mais malgré
tous les foins du S. Vaumour , Peintre du
Roi , qui en avoit la conduite , & qui étoit chargé
d'executer lui-même le plus effentiel en matiere
de décorations & de peinture , M. l'Ambaffadeur
fut obligé de renvoyer au 9. de Janvier le
commencement des réjouiffances ; on craignoit
même qu'elles ne fuffent encore retardées par la
grande quantité de neige qui tomba le 7 & le
8. cependant par un bonheur inefperé , le 9. au
matin , le Ciel s'éclaircit , le tems devint calme
& ce qui eft encore plus remarquable , il n'y eut
précisément de beaux jours que les trois dont on
avoit befoin , la pluye & la neige ayant recom→
mencé à tomber avec abondance dès le lendemain.
On avoit conſtruit un Edifice de charpente dans
la rue de Pera , appuyé d'un côté contre les montans
de la Porte du Palais de France , & de l'autre
contre la muraille de la Maiſon oppofée , ce
H qui
>
1014 MERCURE DE FRANCE
qui formoit une espece de Pavillon quarré, élevé
fur quatre Arcades , dont deux laiffoient le paffage
de la rue libre , & une autre conduifoit au
Palais . Toute cette charpente étoit couverte de
branches de Laurier , & ornée à la Turque , c'eſt-
-à- dire , éclairée de quantité de lampes de verre ,
peint de diverfes couleurs , & enjolivée de cent
fortes de colifichets dans le goût du Païs , faits de
bois fort mince , couvert de coton , de bandes
de papier de toutes couleurs & de clinquant d'or
en lame & découpé , la plupart de ces ornemens
repréfentoient des Fleurs de Lys & des Dauphins.
Il pendoit du milieu du fommet de ce Pavillon
un Dôme à jour , appuyé fur deux grands Triangles
, qui fe coupant à Angles droits , formoient
une Etoile à fix pointes , dont le milieu étoit occupé
par une Lanterne mouvante , fort éclairée ,
d'environ trois piés de hauteur.
Pour relever par quelque morceau de goût ,
ces petits ornemens , fi agréables aux yeux des
Turcs , on avoit placé fur la frife de chacune des
deux Arcades un tableau ceintré , dans lequel étoit
peinte une Renommée de grandeur naturelle ,
fendant les airs , fonnant de la Trompette , garnie
de fa banderole fleurdelifée , & tenant l'Ecu
des Armes du Dauphin, avec ces mots autour
du ceintre :
Nunc ortus , mox gefta.
L'Allée qui conduit de cette Porte exterieure à
l'interieure du Palais , longue de plus de cent
piés , fur douze de largeur , étoit divifée de part
& d'autre en 32. Arcades de fept piés de haut
ornées comme le Pavillón ; & outre les Lampes
mêlées par compartimens, qui pendoient du haut
de chaque Arcade , il y avoit des Pots à feu fur
chacun de leur montant , & de chaque côté deux
filets de Gobelets , peints de Fleurs de Lys , de
Dauphins
MAY 1730. IOI'S
و ا
Dauphins couronnés, & des Armes de France le
premier de ces filets étoit fur la Balustrade d'apui
de l'Allée , & le fecond regnoit fur les Arcades.
Un Frontifpice d'Ordre Dorique de 26. piés de
haut cachoit entierement la Porte interieure du
Palais , & celle de la Décoration faite en ceintre
avoit les montans feints de lapis jufqu'à l'impofte;
les panneaux de chaque côté étoient de differens
marbres , ornés de Feftons & dans les angles
-du ceintre il y avoit des Dauphins auffi de lapis
fur un fond d'or. La Frife chargée de Trigliffes,
à l'ordinaire, portoit dans fes Métopes des Fleurs
de Lys & des Dauphins , & au- deffus de la Corniche
, ornée de denticules , étoit un Socle qui
portoit un tableau allegorique de fept piés de
-hauteur,& chantourné dans une proportion convenable
au tout ; on y voyoit la France qui préfentoit
à l'Europe le Dauphin en maillot , avec le
-Cordon Bleu & la Paix à côté avec divers attributs
; on lifoit au deffous Eterna pignora
pacis. Au-deffus on voyoit les Armes de France,
dans le tympan d'un Fronton circulaire.
Au delà de cette premiere Porte , tout étoit en
décorations , fur tout une infinité d'Arcades plus
ou moins élevées felon la fituation du Terrain .
La Terraffe appellée le Boulingrin de 180. piés
d'étendue , fur 55. de largeur , fe préſentoit d'abord
à la vûë ; le fond de cet efpace étoit occupé
par un autre Portail , feint de differens marbres
& du même Ordre que le premier ; il avoit 24.
piés de hauteur & 20 de largeur , fon ouverture
ceintrée étoit fermée par une toile fort claire ,
fur laquelle brilloit un Soleil , dardant fes rayons
de toutes parts ; au deffus , & à quelque diſtance
du corps du Soleil , s'élevoit un Dauphin couronné
, & au moyen de certains Fanaux du Pays
qu'on avoit mis derriere la toile , elle paroiffoit.
Hij toute
1016 MERCURE DE FRANCE
>
toute penetrée de lumière. Aux deux côtés de la
Porte du Frontifpice étoient des Pilaftres , & dans
l'Arriere-corps une niche ceintrée avec une
grande figure , peinte en camayeu. Celle de la
gauche repréfentoit Cerès , tenant une Corne
d'abondance , avec cette infcription : Redeunt
Saturnia R‹gna. Et celle de la droite , repréfentant
la Paix , tenoit d'une main un Flambeau
renverfé , & de l'autre une branche d'Olivier ;
on voyoit à côté un Olivier , du pied duquel fortoit
un rejetton , avec ces paroles : Factura nepotibus
umbram.
Au-deffus de la Corniche de ce Portail , regnoit
un Attique , furmonté d'un Fronton triangulaire,
avec les Armes de France , environné de Trophées
&c. Sur la pointe du Fronton , & aux extremités
du Bâtiment étoient de grands Vafes qui
fervoient de Pots à feu , & à chaque côté de cette
repréſentation , il y avoit une Piramide triangulaire
un peu plus élevée , peinte en rouge , qui
formoit comme un Grouppe d'échelles de Jardin
dont les échelons étoient illuminés du haut en
bas , & ayant un grand Pot à feu à ſon ſommet.
Les deux côtés de la longueur de ce Boulingrin
étoient bordés d'une continuité d'Arcades de
charpente , couvertes & ornées de la même maniere
que celles dont on a déja parlé. Vers le
milieu de ces Arcades ,à droite , il y a un Berceau,
vers le milieu duquel on avoit élevé un mât d'environ
40. piés de hauteur , terminé par une Fleur
de Lys dorée , de la pointe de ce mat tomboient
tout autour des cordes chargées de lampes , lefquelles
s'écartant circulairement les unes des
autres jufques fur le berceau où elles étoient tendues
& attachées , repréfentoient un cône lumineux.
Au deffous il y avoit en faillie fur le Jardin
june rouë à jour , de fix piés de diamettre , autour
MAY. 1730 . 1017
tour de laquelle étoient neuf boetes fufpendues ,
& percées par le fond , d'où fortoient plufieurs
lampes , & par une manivelle on faifoit tourner
cette roue , qui dans fon mouvement paroiffoit
tout en feu.
De ce Berceau , la fuite des Arcades étoit prolongée
à droite & à gauche jufqu'au Veftibule
du Palais . Mais avant que de parler de fon interieur
, il eft à propos de décrire fuccinctement
les embelliffemens qui avoient été faits dans le
Jardin.
En face de l'Escalier eft une petite Allée d'Arbres
, taillés en charmille ; on en avoit décoré
l'entrée par une Porte d'environ 20. piés de haut,
du fommet de laquelle pendoient des ornemens
dans le goût du Païs & fur l'entablement de
cette porte étoient pofées trois petites Piramides;
celles des extrémités portant une Fleur de Lys ,
& celle du milieu un Soleil , le tout doré & très
bien illuminé.
'
Dé cette Allée dont le refte étoit auffi en Arcades
, on entroit dans la grande , celle-ci bordée
comme la précedente, à droite & à gauche,par
des buis taillés à hauteur d'apui , à près de so.
roifes de longueur , fur plus de 4. de largeur , les
ornemens à la Turque qu'on y avoit mis dans
42. Arcades de chaque côté étoient à peu près
dans le même goût que les précedens. On ne
parlera que de la décoration principale , placée à
fon haut bout.
´¨ C'étoit un mur revêtu d'une espece de placage
compofé de panneaux de differens marbres , or
nés de Feftons &c. Ce mur avoit 20. piés de hauteur
,fur 24. de largeur , & à chaque extremité
s'élevoit une Piramide femblable à celles du Boufingrin.
Au milieu s'élevoit un Pavillon , formé
d'une Coupole & d'un Manteau Royal , dont les
Hiij extre
fo18 MERCURE DE FRANCE
extremités relevées & nouées en Feftons de chaque
côté , laiffoient voir un Perée qui offroit dans le
lointain le fameux Bofphore de Thrace , à l'alignement
de la pointe du Sérail.
On voyoit fortir du fein de la Mer , fur la furface
de laquelle fe jouoient plufieurs Dauphins
un Soleil levant , & dans les rayons de cet Aftre
paroiffoit une Etoile. Sur le devant du Tableau,
une Renommmée en l'air embraffoit d'une main'
l'Ecuffon de France , & de l'autre tenoit la trompette
dont la banderole étoit ornée d'un Dauphin
couronné. Au-deffus du Pavillon étoit un Fronton
triangulaire , rempli de Trophées , & audeffous
du lointain on lifoit ces paroles : Novo
colluftrat lumine Terras , faifant allufion à la
découverte des Aftronomes de l'Obfervatoire du
Roi , qui quelques jours avant la Naiffance du
Dauphin remarquerent une Etoile près du Dif→
que du Soleil qu'ils n'avoient point encore apperçûë.
En revenant ſur ſes pas , après être forti des
deux Allées , on voyoit devant l'Orangerie qui
eft au fond du Jardin une Illumination à la Turque
tout à fait finguliere ; auffi les Mufulmans
qui l'entreprirent voulurent - ils fe rendre le Ciel
propice par le facrifice d'un mouton qu'ils égorǝ
gerent fur le lieu même. Ils avoient planté en
terre deux gros Mâts de plus de cent piés de
haut , à 20. pas de diſtance l'un de l'autre , & par
moyen d'une poulie , vers la pointe de chacun
de ces Mâts , ils en élevoient un troifiéme horizontalement
, d'où pendoit une infinité de cordes
fur lefquelles ils avoient deffiné les Armes de
France avec des Lampes attachées à des noeuds
qui marquoient le trait des figures , comme on
feroit avecdes points fur du papier ; bien entendu
qu'ils attachoient & allumoient ces Lampes avant
le
>
que
MA Y. 1019 1730 .
que de guinder le Mât de traverſe.
Le dernier jour de la Fête , pour varier le fpec
tacle , ils repréfenterent un Vaiffeau avec fes
agrets, qui réuffit à merveille ; de forte que dans
Pobfcurité de la nuit , les Mâts & les cordes difparoiffant
totalement à la vûe , c'étoit un objet
auffi agréable que furprenant, de voir en l'air des
figures qui fembloient ne tenir à rien , & n'être
formées que par des Etoiles.
En fe retournant , les yeux n'étoient pas moins
éblouis par l'Illumination du Palais. Le corps
de ce Bâtiment eft un grand quarré , iſolé de
trois côtés ; à chaque angle de la Gallerie qui les
entoure , il. y avoit une roue pareille à celle du
Boulingrin , & de cette Galerie jufqu'au toit , a
la hauteur de ro. piés , tout étoit fi orné de Fleurs
de Lys,de Lozanges & d'autres figures entremêlées
de Gobelets & de Lampes diverfement colorées que
dans de certains points de vue , comme du Sérail
& de Top-hana ou de l'Arcenal , cela produifoit
un effet admirable.
Etant remonté du Jardin , ce qui s'appercevoit
d'abord étoit le Veftibule ; fur fa principale face,
longue de 32. piés étoit un Tableau de plus de
6. piés de hauteur , repréfentant un Pavillon d'ou
fortoit un Manteau Royal , relevé de part &
d'autre , & formant plufieurs Feftons ; au milieu,
fous la Coupole du Pavillon , les Armes de Fran
ce étoient en grand , avec deux Anges affis pour
Supports , & à chaque côté celles du Dauphin.
Dans la grande Salle à plain pied , qui n'eft
confiderée que comme une Anti - chambre , il n'y
avoit rien de plus qu'à l'ordinaire , finon beau
coup de bougies qui l'éclairoient tout autour
vers la moitié de cette Salle , on moste par un
petit Perron dans celle où devoit fe donner le Repas
& le Bal. Cette derniere a plus de 46. piés de
Hij lon1020
MERCURE DE FRANCE
longueur , & plus de 20. de largeur ; elle étois
ornée d'un grand nombre de Glaces , de Luftres,
de Girandoles & de Bras qui formoient un coup
d'oeil très-brillant , & les fix ou fept chambres
qui l'environnent étoient pareillement décorées
la plupart de fophas à la Turque , pour recevoir
les Dames du Pays , qui ne font pas accoutumées
à fe fervir de chaifes .
:
Toutes chofes ainfi préparées , & M. l'Ambaffadeur
ayant fait inviter les Miniftres Etrangers
, leurs Maifons & leurs Nations , S. E. pour
raffembler à fa Fête tous les plaifirs qui pouvoient
contribuer à la rendre plus agréable , fir
venir au Palais la troupe des Comédiens du Grand-
Seigneur , au nombre de 45. mais en même tems,
voulant prévenir la confufion & le défordre, qu'elle
avoit lieu de craindre , du concours de gens de
tant de Nations , elle fit demander à la Porte un
Vifir- Aga , & un Chorbagi , avec 100. Janiffaires
le Grand - Vifir les accorda de bonne
grace : il pria en même tems , qu'on ne fit point
couler de Fontaines de vin pour le Peuple , comme
cela fe pratique ailleurs : le Marquis de Villeneuve
entrant dans les vûës de ce Miniftre , fubftitua
à la place d'une liqueur fi dangereuſe dans
ce païs , & d'ailleurs interdite aux Mahometans
du Sorbet , du Café , des Pipes & du Tabac
qu'on fit largement diftribuer à la porte de la
rue , dans l'interieur du Palais * à la Chambre
où l'on avoit logé le Chorbagi & fes gens ,
fur le Boulingrin , à tous les allans & venans ,
faveur defquels on ne put même s'empêcher de
vuider quelques tonneaux de vin , mais avec de fi
grandes précautions , que cela ne produifit que
plus de gayeté , fans aucune mauvaiſe fuite.
&
*
en
"
Le 8. Janvier,le Chorbagi & fes Janiffaires , marchant
dansles rues de Conftantinople, en bon ordre,
vinrent
MAY. 173.0. 1021
vinrent s'établir au Palais : ils avoient fur la tête
leur grand bonnet de cérémonie , & portoient
leur Turban à la main : trois chevaux chargez de
leur baterie de cuifine , les précédoient , ainfi que
leur Saka ou porteur d'eau , en culotte & en
pourpoint de cuir noir , garni de boutons d'ar
gent , gros comme des bales de jeu de paume ,
de leur Cuifinier , qui avoit auffi un ample Tablier
de cuir pareil , fi couvert de chaînes , de
plaques , & d'autres ornemens d'argent maſſif ,
qu'à peine pouvoit- il marcher.
&
Le 9. dès la pointe du jour M. l'Ambaffadeur
ne crut pas pouvoir commencer plus dignement
une Fête , qui avoit pour objet principal un acte
de reconnoiffance envers Dieu , qu'en exerçant fa
charité fur environ deux mille Efclaves Chrétiens
de toutes Nations , qui gémiffent dans les fers au
Bagne ou Darce , & fur les Galeres du Grand--
Seigneur , S. E. leur fit diftribuer par ſon Au→
mônier , de la viande , du ris , & du pain ,
quoi ces pauvres infortunez furent fi fenfibles
qu'oubliant la dureté de l'Efclavage , ils adrefferent
leurs voeux au Ciel , pour la profperité du
Roi,de la Famille Royalle , & de toute la France.
Vers les huit heures du matin , cinq Bâtimens
François pavoifez & mouillez dans le Port , annoncerent
cette Fête par une décharge de tous
leurs Canons ; ils repéterent la même falve à
midi , lorfqu'on chanta le Te Deum , & un peu
avant le coucher du Soleil : & les deux jours fui
vans
ils tirerent feulement , le matin , à midiy
& avant la nuit.
L'après - dîné , la Nation Françoife , étant montée
à Pera , par ordre , M. l'Ambaffadeur , &
Madame l'Ambaffadrice allerent en grand cor-
* Pera eft le quartier de l'Ambaßadeur de
France .
1022 MERCURE DE FRANCE
tege à l'Eglife des Capucins , où l'on chanta le
Te Deum , en action de graces. Le pere Cuftode
ou Superieur General , y prononça un Diſcours.
Ces Peres fignalerent leur zele & leur pieté , en
décorant leurs Eglifes d'une infinité de devifes ,
& d'emblêmes , qui retraçoient les principaux
évenemens de l'heureux Regne de Sa Majesté.
λ
Après cette pieuſe cérémonie , Leurs Excellences
avec tous ceux qui y avoient aſſiſté ,
rentrerent au Palais , où les Miniftres fe rendirent
fucceffivement , accompagnez de leurs Maifons
& de leurs Nations. On s'amuſa juſqu'à
l'heure du fouper , les uns à jouer , & le plus
grand nombre à voir les danfes , & les farces
Turques , qui plurent infiniment aux gens du
païs..
A neuf heures , on fervit le fouper , il y avoit
cing tables principales : La premiere étoit en fera-
cheval , & de 130. Couverts ; M. l'Ambaſſadeur
& Madame l'Ambaffadrice ,, les Miniftres
Etrangers , l'Archevêque de Cartage & quel--
ques autres perfonnes de confideration , en occuperent
le haut bout : les côtés , tant en dedans
qu'en dehors , furent remplis par les Dames , &
par une partie des hommes des Nations invitées..
L'étendue & la décoration de la Sale , la magnificence
du repas , la varieté des habits , furtout
d'environ 60. femmes ; leur coëfure finguliere
chargée d'or & de pierreries , tout cela formoit
un coup d'oeil auffi fingulier qu'admirable , &
dont quelques Turcs diftinguez qui étoient venus :
incognito , furent fi frappez , qu'ils ne pouvoient
fe laffer d'en marquer leur étonnement.
L'Ambaffadeur d'Angleterre porta la fanté du
Dauphin , l'Ambaffadeur de Hollande , celle du
Roi , de la Reine , & de la Famille Royale
qui furent bues avec les cérémonies ordinaires.
M..
M A Y. 1730 . 1023
M. l'Ambaffadeur , après les en avoir remerciez ,
but, fuivant l'uſage, à la fanté de la Patronance,
enfuite l'Ambaffadeur d'Angleterre
fanté de M. le Cardinal de Fleury.
› porta la
Le premier Drogman de la Porte, & le neveu
du Prince de Valachie , que le Marquis de Ville
neuve avoit auffi conviez , ayant fouhaité de fouper
en particulier avec quelques Grecs , qu'ils
avoient amenez , on leur fervit une table , dans
une des Chambres à côté de la Sale.
à
Les trois autres tables , dreffées dans la premiere
Sale , de 30. 40. Couverts chacune , furent
remplies par des perfonnes de toutes les Nations
qui n'avoient pú trouver place à la grande ,
& par les Marchands François qui répondant aux
intentions de S. E. furent chargez d'avoir atten
tion que rien ne manquât.
On fortit de table à onze heures ; le bal commença
peu après , & dura jufqu'à cinq heures du
matin. Les Turcs ne furent pas moins étonnez de
nos danfes , mêlées d'hommes & de femmes , fi
contraires à leurs ufages . Madame l'Ambaffadrice
ouvrit le Bal avec M. l'Ambaffadeur d'Angleterre,
& danfa tour de fuite avec les autres Miniftres ,
après quoi chacun fe prit indifferemment fans cé--
rémonie de cette maniere , & par le fecours des
contre-danfes , & des danfes grecques , tout
le monde eut part à ce plaifir , fans compter
qu'on danfoit auffi , & qu'on jouoit alternativement
la Comédie dans d'autres appar--
témens.
Le lendemain , les chofes fe pafferent de la
même maniere , fi ce n'eft que n'y ayant eu que
les Miniftres , quelques perfonnes étrangeres ,
& la Nation Françoife d'invitées , on ne fervit
que la Table de 130. Couverts , avec quelques
autres moindres dans les Chambres voifines. La
H vj foirée
1024 MERCURE DE FRANCE
foirée fut encore plus calme que la précédente ,
& très-favorable àl'illumination.
Le onze , troifiéme jour des réjoüiffances , fut
fi beau , que les Comédiens donnerent fur le Boulingrin
plufieurs de leurs Scenes comiques , accompagnées
de danfes devant une grande multitude
de Turcs , de Grecs , d'Armeniens & de
Juifs.
Outre les perfonnes invitées la veille, M. l'Ambaffadeur
fit auffi convier la Nation Genevoife ,
qui eft ici fous la protection de France on lui
dreffa dans la premierė Sale , une Table de 60,
Couverts , dont quelques Secretaires de S. E. firent
les honneurs .
Cette derniere nuit feconda fi bien les nouveaux
foins , qu'on avoit pris de perfectionner l'illumination
, que non- feulement il ne s'en eft jamais
vû de fi magnifique à Conftantinople , mais
qu'elle auroit été admirée par tout ailleurs . On
le concevra fans peine , fi on fe reprefente l'effet
que devoient produire plus de vingt mille lumieres
, qui fortoient des Pots -à-feu , des Lampes
, & des Gobelets de diverfes couleurs , diftribuez
avec art fur des Tetraffes fpacieuſes , difpofées
en amphitheatre , & ornées de differentes
décorations.
Ce narré deviendroit trop long , fi on vouloir
entrer dans le détail de tous les divertiffemens qui
furent donnez à cinq ou fix mille perfonnes de
tous Etats , & de toutes Nations , qui fe trouverent
dans le Palais de France pendant trois jours ,
fans qu'il foit arrivé le moindre défordre , ce que
l'on doit attribuer à la fage conduite de l'Aga
du Grand- Vifir , auquel ce premier Miniftre pour
le recompenfer de fa vigilance , & pour donner
en même tems à M. l'Ambaffadeur une marque
particuliere de confideration, envoya le lendemain
dans
2
MAY. 1730 1025
dans le Palais même , un Brevet , par lequel , lè
Grand - Seigneur accordoit à cet Aga un Taun
-confiderable , avec ordre à cet Aga d'en remercier
M. l'Ambaffadeur.
* Territoire Fief dont le G. S. gratifie
qui il lui plait.
:
C
lais de France , & au Quartier de l'Ambaffadeur
du Roi à Conftantinople. Extrait
d'une Lettre écrite de cette Ville le
19. Mars 1730.
Ur les premiers avis qu'on eut à Conftantinople
que le Ciel avoit accordé un Dauphin aux
voeux ardens de toute la France , M. le Marquis
de Villeneuve , Ambaffadeur du Roi à la Porte ,
fe prépara à faire éclater fa joye par une
Fête qui devoit durer trois jours. Il fit d'abord
mettre en mouvement ce qu'on pût trouver
d'Ouvriers pour l'execution du Plan qu'il avoit
formé pour celebrer cette augufte Naiffance. Il
ne reçût les ordres de la Cour que le 15. Novembre.
Le 17. au matin , M. l'Ambaffadeur envoya
fon premier Secretaire au Sérrail,pour donner part
de cette nouvelle au Grand- Vizir , & le prévenir
en même - tems fur les Réjouiflances & les lluminations
qu'il fe propofoit de faire , ce premier
Miniftre parut s'inter fler véritablement au bonheur
de la France. Delà , on alla chez le Kiaya
ou Lieutenant du Vizir & chez le Reis - Efendi , ou
Chancelier , qui reçûrent cette nouvelle avec de
grandes démonftrations de joye ; ce dernier répondit
que la Porte prenoit autant de part
évenement que s'il étoit né un fucceffeur à l'Empire
Ottoman.
à cer
L'après-diné , on alla chez les Ambaffadeurs
d'Angleterre & de Hollande pour leur annoncer
cette Naiffance , auffi -bien que chez les Réfidens
de l'Empereur & de Mofcovie , & chez M. Bartolini
, Secretaire chargé des affaires de la République
MAY. 1730. 1013
publique de Venife , depuis la mort du Bayle
Delphino. Dès le même jour tous ces Miniftre
envoyerent complimenter le Marquis de Villeneuve.
>
Le lendemain , le Grand- Seigneur lui fit faire
des complimens de félicitation par le neveu du
Prince de Valachie , accompagné d'un des principaux
Drogmans du Sérail. Quelques jours après
l'Ambaffadeur d'Angleterre alla , en cerémonie
avec toute fa Maiſon,féliciter S. E; l'Ambaffadeur
d'Hollande y alla le lendemain ; les jours fuivans
furent employés à recevoir de femblables
vifites des Réfidens d'Allemagne & de Mofcovie,
ou à les rendre à ces Miniftres. M. Bartolini fir
auffi la fienne , que le Marquis de Villeneuve lui
rendit , mais fans cerémonie.
Tout ce Cerémonial rempli ; c'eut été le veritable
tems de donner la fête projettée ; mais malgré
tous les foins du S. Vaumour , Peintre du
Roi , qui en avoit la conduite , & qui étoit chargé
d'executer lui-même le plus effentiel en matiere
de décorations & de peinture , M. l'Ambaffadeur
fut obligé de renvoyer au 9. de Janvier le
commencement des réjouiffances ; on craignoit
même qu'elles ne fuffent encore retardées par la
grande quantité de neige qui tomba le 7 & le
8. cependant par un bonheur inefperé , le 9. au
matin , le Ciel s'éclaircit , le tems devint calme
& ce qui eft encore plus remarquable , il n'y eut
précisément de beaux jours que les trois dont on
avoit befoin , la pluye & la neige ayant recom→
mencé à tomber avec abondance dès le lendemain.
On avoit conſtruit un Edifice de charpente dans
la rue de Pera , appuyé d'un côté contre les montans
de la Porte du Palais de France , & de l'autre
contre la muraille de la Maiſon oppofée , ce
H qui
>
1014 MERCURE DE FRANCE
qui formoit une espece de Pavillon quarré, élevé
fur quatre Arcades , dont deux laiffoient le paffage
de la rue libre , & une autre conduifoit au
Palais . Toute cette charpente étoit couverte de
branches de Laurier , & ornée à la Turque , c'eſt-
-à- dire , éclairée de quantité de lampes de verre ,
peint de diverfes couleurs , & enjolivée de cent
fortes de colifichets dans le goût du Païs , faits de
bois fort mince , couvert de coton , de bandes
de papier de toutes couleurs & de clinquant d'or
en lame & découpé , la plupart de ces ornemens
repréfentoient des Fleurs de Lys & des Dauphins.
Il pendoit du milieu du fommet de ce Pavillon
un Dôme à jour , appuyé fur deux grands Triangles
, qui fe coupant à Angles droits , formoient
une Etoile à fix pointes , dont le milieu étoit occupé
par une Lanterne mouvante , fort éclairée ,
d'environ trois piés de hauteur.
Pour relever par quelque morceau de goût ,
ces petits ornemens , fi agréables aux yeux des
Turcs , on avoit placé fur la frife de chacune des
deux Arcades un tableau ceintré , dans lequel étoit
peinte une Renommée de grandeur naturelle ,
fendant les airs , fonnant de la Trompette , garnie
de fa banderole fleurdelifée , & tenant l'Ecu
des Armes du Dauphin, avec ces mots autour
du ceintre :
Nunc ortus , mox gefta.
L'Allée qui conduit de cette Porte exterieure à
l'interieure du Palais , longue de plus de cent
piés , fur douze de largeur , étoit divifée de part
& d'autre en 32. Arcades de fept piés de haut
ornées comme le Pavillón ; & outre les Lampes
mêlées par compartimens, qui pendoient du haut
de chaque Arcade , il y avoit des Pots à feu fur
chacun de leur montant , & de chaque côté deux
filets de Gobelets , peints de Fleurs de Lys , de
Dauphins
MAY 1730. IOI'S
و ا
Dauphins couronnés, & des Armes de France le
premier de ces filets étoit fur la Balustrade d'apui
de l'Allée , & le fecond regnoit fur les Arcades.
Un Frontifpice d'Ordre Dorique de 26. piés de
haut cachoit entierement la Porte interieure du
Palais , & celle de la Décoration faite en ceintre
avoit les montans feints de lapis jufqu'à l'impofte;
les panneaux de chaque côté étoient de differens
marbres , ornés de Feftons & dans les angles
-du ceintre il y avoit des Dauphins auffi de lapis
fur un fond d'or. La Frife chargée de Trigliffes,
à l'ordinaire, portoit dans fes Métopes des Fleurs
de Lys & des Dauphins , & au- deffus de la Corniche
, ornée de denticules , étoit un Socle qui
portoit un tableau allegorique de fept piés de
-hauteur,& chantourné dans une proportion convenable
au tout ; on y voyoit la France qui préfentoit
à l'Europe le Dauphin en maillot , avec le
-Cordon Bleu & la Paix à côté avec divers attributs
; on lifoit au deffous Eterna pignora
pacis. Au-deffus on voyoit les Armes de France,
dans le tympan d'un Fronton circulaire.
Au delà de cette premiere Porte , tout étoit en
décorations , fur tout une infinité d'Arcades plus
ou moins élevées felon la fituation du Terrain .
La Terraffe appellée le Boulingrin de 180. piés
d'étendue , fur 55. de largeur , fe préſentoit d'abord
à la vûë ; le fond de cet efpace étoit occupé
par un autre Portail , feint de differens marbres
& du même Ordre que le premier ; il avoit 24.
piés de hauteur & 20 de largeur , fon ouverture
ceintrée étoit fermée par une toile fort claire ,
fur laquelle brilloit un Soleil , dardant fes rayons
de toutes parts ; au deffus , & à quelque diſtance
du corps du Soleil , s'élevoit un Dauphin couronné
, & au moyen de certains Fanaux du Pays
qu'on avoit mis derriere la toile , elle paroiffoit.
Hij toute
1016 MERCURE DE FRANCE
>
toute penetrée de lumière. Aux deux côtés de la
Porte du Frontifpice étoient des Pilaftres , & dans
l'Arriere-corps une niche ceintrée avec une
grande figure , peinte en camayeu. Celle de la
gauche repréfentoit Cerès , tenant une Corne
d'abondance , avec cette infcription : Redeunt
Saturnia R‹gna. Et celle de la droite , repréfentant
la Paix , tenoit d'une main un Flambeau
renverfé , & de l'autre une branche d'Olivier ;
on voyoit à côté un Olivier , du pied duquel fortoit
un rejetton , avec ces paroles : Factura nepotibus
umbram.
Au-deffus de la Corniche de ce Portail , regnoit
un Attique , furmonté d'un Fronton triangulaire,
avec les Armes de France , environné de Trophées
&c. Sur la pointe du Fronton , & aux extremités
du Bâtiment étoient de grands Vafes qui
fervoient de Pots à feu , & à chaque côté de cette
repréſentation , il y avoit une Piramide triangulaire
un peu plus élevée , peinte en rouge , qui
formoit comme un Grouppe d'échelles de Jardin
dont les échelons étoient illuminés du haut en
bas , & ayant un grand Pot à feu à ſon ſommet.
Les deux côtés de la longueur de ce Boulingrin
étoient bordés d'une continuité d'Arcades de
charpente , couvertes & ornées de la même maniere
que celles dont on a déja parlé. Vers le
milieu de ces Arcades ,à droite , il y a un Berceau,
vers le milieu duquel on avoit élevé un mât d'environ
40. piés de hauteur , terminé par une Fleur
de Lys dorée , de la pointe de ce mat tomboient
tout autour des cordes chargées de lampes , lefquelles
s'écartant circulairement les unes des
autres jufques fur le berceau où elles étoient tendues
& attachées , repréfentoient un cône lumineux.
Au deffous il y avoit en faillie fur le Jardin
june rouë à jour , de fix piés de diamettre , autour
MAY. 1730 . 1017
tour de laquelle étoient neuf boetes fufpendues ,
& percées par le fond , d'où fortoient plufieurs
lampes , & par une manivelle on faifoit tourner
cette roue , qui dans fon mouvement paroiffoit
tout en feu.
De ce Berceau , la fuite des Arcades étoit prolongée
à droite & à gauche jufqu'au Veftibule
du Palais . Mais avant que de parler de fon interieur
, il eft à propos de décrire fuccinctement
les embelliffemens qui avoient été faits dans le
Jardin.
En face de l'Escalier eft une petite Allée d'Arbres
, taillés en charmille ; on en avoit décoré
l'entrée par une Porte d'environ 20. piés de haut,
du fommet de laquelle pendoient des ornemens
dans le goût du Païs & fur l'entablement de
cette porte étoient pofées trois petites Piramides;
celles des extrémités portant une Fleur de Lys ,
& celle du milieu un Soleil , le tout doré & très
bien illuminé.
'
Dé cette Allée dont le refte étoit auffi en Arcades
, on entroit dans la grande , celle-ci bordée
comme la précedente, à droite & à gauche,par
des buis taillés à hauteur d'apui , à près de so.
roifes de longueur , fur plus de 4. de largeur , les
ornemens à la Turque qu'on y avoit mis dans
42. Arcades de chaque côté étoient à peu près
dans le même goût que les précedens. On ne
parlera que de la décoration principale , placée à
fon haut bout.
´¨ C'étoit un mur revêtu d'une espece de placage
compofé de panneaux de differens marbres , or
nés de Feftons &c. Ce mur avoit 20. piés de hauteur
,fur 24. de largeur , & à chaque extremité
s'élevoit une Piramide femblable à celles du Boufingrin.
Au milieu s'élevoit un Pavillon , formé
d'une Coupole & d'un Manteau Royal , dont les
Hiij extre
fo18 MERCURE DE FRANCE
extremités relevées & nouées en Feftons de chaque
côté , laiffoient voir un Perée qui offroit dans le
lointain le fameux Bofphore de Thrace , à l'alignement
de la pointe du Sérail.
On voyoit fortir du fein de la Mer , fur la furface
de laquelle fe jouoient plufieurs Dauphins
un Soleil levant , & dans les rayons de cet Aftre
paroiffoit une Etoile. Sur le devant du Tableau,
une Renommmée en l'air embraffoit d'une main'
l'Ecuffon de France , & de l'autre tenoit la trompette
dont la banderole étoit ornée d'un Dauphin
couronné. Au-deffus du Pavillon étoit un Fronton
triangulaire , rempli de Trophées , & audeffous
du lointain on lifoit ces paroles : Novo
colluftrat lumine Terras , faifant allufion à la
découverte des Aftronomes de l'Obfervatoire du
Roi , qui quelques jours avant la Naiffance du
Dauphin remarquerent une Etoile près du Dif→
que du Soleil qu'ils n'avoient point encore apperçûë.
En revenant ſur ſes pas , après être forti des
deux Allées , on voyoit devant l'Orangerie qui
eft au fond du Jardin une Illumination à la Turque
tout à fait finguliere ; auffi les Mufulmans
qui l'entreprirent voulurent - ils fe rendre le Ciel
propice par le facrifice d'un mouton qu'ils égorǝ
gerent fur le lieu même. Ils avoient planté en
terre deux gros Mâts de plus de cent piés de
haut , à 20. pas de diſtance l'un de l'autre , & par
moyen d'une poulie , vers la pointe de chacun
de ces Mâts , ils en élevoient un troifiéme horizontalement
, d'où pendoit une infinité de cordes
fur lefquelles ils avoient deffiné les Armes de
France avec des Lampes attachées à des noeuds
qui marquoient le trait des figures , comme on
feroit avecdes points fur du papier ; bien entendu
qu'ils attachoient & allumoient ces Lampes avant
le
>
que
MA Y. 1019 1730 .
que de guinder le Mât de traverſe.
Le dernier jour de la Fête , pour varier le fpec
tacle , ils repréfenterent un Vaiffeau avec fes
agrets, qui réuffit à merveille ; de forte que dans
Pobfcurité de la nuit , les Mâts & les cordes difparoiffant
totalement à la vûe , c'étoit un objet
auffi agréable que furprenant, de voir en l'air des
figures qui fembloient ne tenir à rien , & n'être
formées que par des Etoiles.
En fe retournant , les yeux n'étoient pas moins
éblouis par l'Illumination du Palais. Le corps
de ce Bâtiment eft un grand quarré , iſolé de
trois côtés ; à chaque angle de la Gallerie qui les
entoure , il. y avoit une roue pareille à celle du
Boulingrin , & de cette Galerie jufqu'au toit , a
la hauteur de ro. piés , tout étoit fi orné de Fleurs
de Lys,de Lozanges & d'autres figures entremêlées
de Gobelets & de Lampes diverfement colorées que
dans de certains points de vue , comme du Sérail
& de Top-hana ou de l'Arcenal , cela produifoit
un effet admirable.
Etant remonté du Jardin , ce qui s'appercevoit
d'abord étoit le Veftibule ; fur fa principale face,
longue de 32. piés étoit un Tableau de plus de
6. piés de hauteur , repréfentant un Pavillon d'ou
fortoit un Manteau Royal , relevé de part &
d'autre , & formant plufieurs Feftons ; au milieu,
fous la Coupole du Pavillon , les Armes de Fran
ce étoient en grand , avec deux Anges affis pour
Supports , & à chaque côté celles du Dauphin.
Dans la grande Salle à plain pied , qui n'eft
confiderée que comme une Anti - chambre , il n'y
avoit rien de plus qu'à l'ordinaire , finon beau
coup de bougies qui l'éclairoient tout autour
vers la moitié de cette Salle , on moste par un
petit Perron dans celle où devoit fe donner le Repas
& le Bal. Cette derniere a plus de 46. piés de
Hij lon1020
MERCURE DE FRANCE
longueur , & plus de 20. de largeur ; elle étois
ornée d'un grand nombre de Glaces , de Luftres,
de Girandoles & de Bras qui formoient un coup
d'oeil très-brillant , & les fix ou fept chambres
qui l'environnent étoient pareillement décorées
la plupart de fophas à la Turque , pour recevoir
les Dames du Pays , qui ne font pas accoutumées
à fe fervir de chaifes .
:
Toutes chofes ainfi préparées , & M. l'Ambaffadeur
ayant fait inviter les Miniftres Etrangers
, leurs Maifons & leurs Nations , S. E. pour
raffembler à fa Fête tous les plaifirs qui pouvoient
contribuer à la rendre plus agréable , fir
venir au Palais la troupe des Comédiens du Grand-
Seigneur , au nombre de 45. mais en même tems,
voulant prévenir la confufion & le défordre, qu'elle
avoit lieu de craindre , du concours de gens de
tant de Nations , elle fit demander à la Porte un
Vifir- Aga , & un Chorbagi , avec 100. Janiffaires
le Grand - Vifir les accorda de bonne
grace : il pria en même tems , qu'on ne fit point
couler de Fontaines de vin pour le Peuple , comme
cela fe pratique ailleurs : le Marquis de Villeneuve
entrant dans les vûës de ce Miniftre , fubftitua
à la place d'une liqueur fi dangereuſe dans
ce païs , & d'ailleurs interdite aux Mahometans
du Sorbet , du Café , des Pipes & du Tabac
qu'on fit largement diftribuer à la porte de la
rue , dans l'interieur du Palais * à la Chambre
où l'on avoit logé le Chorbagi & fes gens ,
fur le Boulingrin , à tous les allans & venans ,
faveur defquels on ne put même s'empêcher de
vuider quelques tonneaux de vin , mais avec de fi
grandes précautions , que cela ne produifit que
plus de gayeté , fans aucune mauvaiſe fuite.
&
*
en
"
Le 8. Janvier,le Chorbagi & fes Janiffaires , marchant
dansles rues de Conftantinople, en bon ordre,
vinrent
MAY. 173.0. 1021
vinrent s'établir au Palais : ils avoient fur la tête
leur grand bonnet de cérémonie , & portoient
leur Turban à la main : trois chevaux chargez de
leur baterie de cuifine , les précédoient , ainfi que
leur Saka ou porteur d'eau , en culotte & en
pourpoint de cuir noir , garni de boutons d'ar
gent , gros comme des bales de jeu de paume ,
de leur Cuifinier , qui avoit auffi un ample Tablier
de cuir pareil , fi couvert de chaînes , de
plaques , & d'autres ornemens d'argent maſſif ,
qu'à peine pouvoit- il marcher.
&
Le 9. dès la pointe du jour M. l'Ambaffadeur
ne crut pas pouvoir commencer plus dignement
une Fête , qui avoit pour objet principal un acte
de reconnoiffance envers Dieu , qu'en exerçant fa
charité fur environ deux mille Efclaves Chrétiens
de toutes Nations , qui gémiffent dans les fers au
Bagne ou Darce , & fur les Galeres du Grand--
Seigneur , S. E. leur fit diftribuer par ſon Au→
mônier , de la viande , du ris , & du pain ,
quoi ces pauvres infortunez furent fi fenfibles
qu'oubliant la dureté de l'Efclavage , ils adrefferent
leurs voeux au Ciel , pour la profperité du
Roi,de la Famille Royalle , & de toute la France.
Vers les huit heures du matin , cinq Bâtimens
François pavoifez & mouillez dans le Port , annoncerent
cette Fête par une décharge de tous
leurs Canons ; ils repéterent la même falve à
midi , lorfqu'on chanta le Te Deum , & un peu
avant le coucher du Soleil : & les deux jours fui
vans
ils tirerent feulement , le matin , à midiy
& avant la nuit.
L'après - dîné , la Nation Françoife , étant montée
à Pera , par ordre , M. l'Ambaffadeur , &
Madame l'Ambaffadrice allerent en grand cor-
* Pera eft le quartier de l'Ambaßadeur de
France .
1022 MERCURE DE FRANCE
tege à l'Eglife des Capucins , où l'on chanta le
Te Deum , en action de graces. Le pere Cuftode
ou Superieur General , y prononça un Diſcours.
Ces Peres fignalerent leur zele & leur pieté , en
décorant leurs Eglifes d'une infinité de devifes ,
& d'emblêmes , qui retraçoient les principaux
évenemens de l'heureux Regne de Sa Majesté.
λ
Après cette pieuſe cérémonie , Leurs Excellences
avec tous ceux qui y avoient aſſiſté ,
rentrerent au Palais , où les Miniftres fe rendirent
fucceffivement , accompagnez de leurs Maifons
& de leurs Nations. On s'amuſa juſqu'à
l'heure du fouper , les uns à jouer , & le plus
grand nombre à voir les danfes , & les farces
Turques , qui plurent infiniment aux gens du
païs..
A neuf heures , on fervit le fouper , il y avoit
cing tables principales : La premiere étoit en fera-
cheval , & de 130. Couverts ; M. l'Ambaſſadeur
& Madame l'Ambaffadrice ,, les Miniftres
Etrangers , l'Archevêque de Cartage & quel--
ques autres perfonnes de confideration , en occuperent
le haut bout : les côtés , tant en dedans
qu'en dehors , furent remplis par les Dames , &
par une partie des hommes des Nations invitées..
L'étendue & la décoration de la Sale , la magnificence
du repas , la varieté des habits , furtout
d'environ 60. femmes ; leur coëfure finguliere
chargée d'or & de pierreries , tout cela formoit
un coup d'oeil auffi fingulier qu'admirable , &
dont quelques Turcs diftinguez qui étoient venus :
incognito , furent fi frappez , qu'ils ne pouvoient
fe laffer d'en marquer leur étonnement.
L'Ambaffadeur d'Angleterre porta la fanté du
Dauphin , l'Ambaffadeur de Hollande , celle du
Roi , de la Reine , & de la Famille Royale
qui furent bues avec les cérémonies ordinaires.
M..
M A Y. 1730 . 1023
M. l'Ambaffadeur , après les en avoir remerciez ,
but, fuivant l'uſage, à la fanté de la Patronance,
enfuite l'Ambaffadeur d'Angleterre
fanté de M. le Cardinal de Fleury.
› porta la
Le premier Drogman de la Porte, & le neveu
du Prince de Valachie , que le Marquis de Ville
neuve avoit auffi conviez , ayant fouhaité de fouper
en particulier avec quelques Grecs , qu'ils
avoient amenez , on leur fervit une table , dans
une des Chambres à côté de la Sale.
à
Les trois autres tables , dreffées dans la premiere
Sale , de 30. 40. Couverts chacune , furent
remplies par des perfonnes de toutes les Nations
qui n'avoient pú trouver place à la grande ,
& par les Marchands François qui répondant aux
intentions de S. E. furent chargez d'avoir atten
tion que rien ne manquât.
On fortit de table à onze heures ; le bal commença
peu après , & dura jufqu'à cinq heures du
matin. Les Turcs ne furent pas moins étonnez de
nos danfes , mêlées d'hommes & de femmes , fi
contraires à leurs ufages . Madame l'Ambaffadrice
ouvrit le Bal avec M. l'Ambaffadeur d'Angleterre,
& danfa tour de fuite avec les autres Miniftres ,
après quoi chacun fe prit indifferemment fans cé--
rémonie de cette maniere , & par le fecours des
contre-danfes , & des danfes grecques , tout
le monde eut part à ce plaifir , fans compter
qu'on danfoit auffi , & qu'on jouoit alternativement
la Comédie dans d'autres appar--
témens.
Le lendemain , les chofes fe pafferent de la
même maniere , fi ce n'eft que n'y ayant eu que
les Miniftres , quelques perfonnes étrangeres ,
& la Nation Françoife d'invitées , on ne fervit
que la Table de 130. Couverts , avec quelques
autres moindres dans les Chambres voifines. La
H vj foirée
1024 MERCURE DE FRANCE
foirée fut encore plus calme que la précédente ,
& très-favorable àl'illumination.
Le onze , troifiéme jour des réjoüiffances , fut
fi beau , que les Comédiens donnerent fur le Boulingrin
plufieurs de leurs Scenes comiques , accompagnées
de danfes devant une grande multitude
de Turcs , de Grecs , d'Armeniens & de
Juifs.
Outre les perfonnes invitées la veille, M. l'Ambaffadeur
fit auffi convier la Nation Genevoife ,
qui eft ici fous la protection de France on lui
dreffa dans la premierė Sale , une Table de 60,
Couverts , dont quelques Secretaires de S. E. firent
les honneurs .
Cette derniere nuit feconda fi bien les nouveaux
foins , qu'on avoit pris de perfectionner l'illumination
, que non- feulement il ne s'en eft jamais
vû de fi magnifique à Conftantinople , mais
qu'elle auroit été admirée par tout ailleurs . On
le concevra fans peine , fi on fe reprefente l'effet
que devoient produire plus de vingt mille lumieres
, qui fortoient des Pots -à-feu , des Lampes
, & des Gobelets de diverfes couleurs , diftribuez
avec art fur des Tetraffes fpacieuſes , difpofées
en amphitheatre , & ornées de differentes
décorations.
Ce narré deviendroit trop long , fi on vouloir
entrer dans le détail de tous les divertiffemens qui
furent donnez à cinq ou fix mille perfonnes de
tous Etats , & de toutes Nations , qui fe trouverent
dans le Palais de France pendant trois jours ,
fans qu'il foit arrivé le moindre défordre , ce que
l'on doit attribuer à la fage conduite de l'Aga
du Grand- Vifir , auquel ce premier Miniftre pour
le recompenfer de fa vigilance , & pour donner
en même tems à M. l'Ambaffadeur une marque
particuliere de confideration, envoya le lendemain
dans
2
MAY. 1730 1025
dans le Palais même , un Brevet , par lequel , lè
Grand - Seigneur accordoit à cet Aga un Taun
-confiderable , avec ordre à cet Aga d'en remercier
M. l'Ambaffadeur.
* Territoire Fief dont le G. S. gratifie
qui il lui plait.
Fermer
Résumé : RÉJOUISSANCES faites au Palais de France, & au Quartier de l'Ambassadeur du Roi à Constantinople. Extrait d'une Lettre écrite de cette Ville le 19. Mars 1730.
Le 19 mars 1730, à Constantinople, M. le Marquis de Villeneuve, ambassadeur de France, reçut la nouvelle de la naissance d'un Dauphin en France. Il organisa une fête de trois jours, initialement prévue pour le 17 novembre, mais reportée au 9 janvier en raison des conditions météorologiques. La nouvelle fut annoncée aux dignitaires turcs et aux ambassadeurs étrangers. Pour la fête, un édifice temporaire fut construit dans la rue de Pera, décoré de lauriers, de Fleurs de Lys et de Dauphins. L'allée menant au palais était ornée de lampes et de pots à feu, et un frontispice d'ordre dorique cachait la porte intérieure, avec des tableaux allégoriques et des inscriptions latines. La terrasse et le jardin étaient également décorés de manière somptueuse. La fête débuta le 8 janvier avec l'invitation de Janissaires et d'officiers turcs pour maintenir l'ordre. Le 9 janvier, l'ambassadeur fit distribuer de la nourriture aux esclaves chrétiens et des salves de canons furent tirées depuis des bâtiments français. L'après-midi, l'ambassadeur et son épouse assistèrent à un Te Deum à l'église des Capucins, suivi d'un souper avec cinq tables principales, dont une de 130 couverts pour les dignitaires. Les invités admirèrent les décorations et les danses turques, et un bal débuta à onze heures, se prolongeant jusqu'au matin. Les jours suivants, les festivités se poursuivirent avec des danses, des comédies et une illumination spectaculaire. La fête se conclut sans incident, grâce à la gestion ordonnée par l'Aga du Grand Vizir, qui reçut une récompense pour sa vigilance.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
13
p. 380-382
TURQUIE ET PERSE.
Début :
Les Lettres de Constantinople du mois de Decembre portent, que [...]
Mots clefs :
Turquie, Perse, Guerre, Ministres, Pacha , Grand vizir
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : TURQUIE ET PERSE.
NOUVELLES ETRANGERES.
TURQUIE ET PERS E.
Es. Lettres de Constantinople du mois de De- du Traité
Paix , que les Ministres du Roy de Perse ont envoyé au Pacha de Babilone , a été communiqué
par le Gr Viz. aux autres Ministres du Serrail ,
et qu'on en a fait la lecture dans un Divan general, qui s'assembla le 12 de Decembre à cette occa- sion, et le bruit courtqu'on y a fait peu de changement. On assure que suivant ce projet , le G.
S. rendra les Provinces conquises sur la Perse ,
à l'exception de la Georgie et de l'ancienne Province de Babilone , que le Daghestan sera rendu
au Prince particu ier qui en est le Souverainet
qui est à Constantinople depuis 18. mois pour
solliciter cette restitution ; que les deux Puissances réunies par la Paix , joindront leurs forces
pour obliger les Moscovites à rendre tout le Pays
qu'ils ont conquis sur la Perse, mais qu'elles n'en
viendront à cette extremité qu'après avoir emplové les voyes de la négociation ; qu'en cas de
refus de la part de la Czarine , elles ne quitteront
les Armes qu'après avoir repris tout ce Pays , et
que les conquêtes qui se feront pendant cette
guerre , resteront à celle des deux Puissances qui les aura faites.
Од
FEVRIER. 1732. 381
On assure que le G. V. a fait remettre à quel
ques Ministres Etrangers un Memoire par lequel
il fait connoître la necessité de s'opposer à l'agrandissement des Moscovites et de quelle conse
quence il est pour l'Empire Ottoman de les éloi
gner des bords de la Mer Caspienne.
On continue de travailler à la construction de
plusieurs Vaisseaux de guerre du premier et du
second rang; on fait de grands Magazins de munitions de guerre et de bouche , et S. H. a envoyé ordre aux Pachas des Provinces Maritimes de lui fournir un certain nombre de Matelots et
de Bâtimens de transport.
Le G. S. se tient très- retiré dans le Serrail depuis trois mois , et il ne se fait voir que rarement ses Troupes et au Peuple , ce qui a donné lieu
à quelques murmures.
Les dernieres Lettres de Constantinople ne con
firment pas les bruits qui s'étoient répandus qu'on
y avoit arboré la Queue de Cheval et déclaré la
guerre aux Venitiens ; ona appris que Mehemet Effendi qui avoit été cy - devant envoyé du G. S. à la Cour de Vienne avoit été étranglé
Elles portent encore , que la Paix étoit
concluë entre les Turcs et les Persans ; que
par un des articles du Traité , les Villes de
Tauris et d'Erivan devoient être rendues au
Roy de Perse " et que les Pays conquis par les Persans du côté de l'ancienne Babilone seroient remis au G. S. à la charge de payer au
Roy de Perse six millions d'Asprès pour les frais
de la guerre.
Ces Lettres ajoutent que le 30. de Decembre
dernier , le Capitan Pacha avoit éré exilé en Candie ; que le lendemain , son Drogman , ou Interprete , avoit eu la tête tranchée dans l'une des Cours
382 MERCURE DE FRANCE
Cours du Serail , et que le G. Viz. avoit menacé
d'un pareil sort tous les Drogmans qui se mêleroient à l'avenir de quelque intrigue secrette , ce
..Ministre voulant qu'on ne s'adresse qu'à lui ou à
son Reys-Effendi.
TURQUIE ET PERS E.
Es. Lettres de Constantinople du mois de De- du Traité
Paix , que les Ministres du Roy de Perse ont envoyé au Pacha de Babilone , a été communiqué
par le Gr Viz. aux autres Ministres du Serrail ,
et qu'on en a fait la lecture dans un Divan general, qui s'assembla le 12 de Decembre à cette occa- sion, et le bruit courtqu'on y a fait peu de changement. On assure que suivant ce projet , le G.
S. rendra les Provinces conquises sur la Perse ,
à l'exception de la Georgie et de l'ancienne Province de Babilone , que le Daghestan sera rendu
au Prince particu ier qui en est le Souverainet
qui est à Constantinople depuis 18. mois pour
solliciter cette restitution ; que les deux Puissances réunies par la Paix , joindront leurs forces
pour obliger les Moscovites à rendre tout le Pays
qu'ils ont conquis sur la Perse, mais qu'elles n'en
viendront à cette extremité qu'après avoir emplové les voyes de la négociation ; qu'en cas de
refus de la part de la Czarine , elles ne quitteront
les Armes qu'après avoir repris tout ce Pays , et
que les conquêtes qui se feront pendant cette
guerre , resteront à celle des deux Puissances qui les aura faites.
Од
FEVRIER. 1732. 381
On assure que le G. V. a fait remettre à quel
ques Ministres Etrangers un Memoire par lequel
il fait connoître la necessité de s'opposer à l'agrandissement des Moscovites et de quelle conse
quence il est pour l'Empire Ottoman de les éloi
gner des bords de la Mer Caspienne.
On continue de travailler à la construction de
plusieurs Vaisseaux de guerre du premier et du
second rang; on fait de grands Magazins de munitions de guerre et de bouche , et S. H. a envoyé ordre aux Pachas des Provinces Maritimes de lui fournir un certain nombre de Matelots et
de Bâtimens de transport.
Le G. S. se tient très- retiré dans le Serrail depuis trois mois , et il ne se fait voir que rarement ses Troupes et au Peuple , ce qui a donné lieu
à quelques murmures.
Les dernieres Lettres de Constantinople ne con
firment pas les bruits qui s'étoient répandus qu'on
y avoit arboré la Queue de Cheval et déclaré la
guerre aux Venitiens ; ona appris que Mehemet Effendi qui avoit été cy - devant envoyé du G. S. à la Cour de Vienne avoit été étranglé
Elles portent encore , que la Paix étoit
concluë entre les Turcs et les Persans ; que
par un des articles du Traité , les Villes de
Tauris et d'Erivan devoient être rendues au
Roy de Perse " et que les Pays conquis par les Persans du côté de l'ancienne Babilone seroient remis au G. S. à la charge de payer au
Roy de Perse six millions d'Asprès pour les frais
de la guerre.
Ces Lettres ajoutent que le 30. de Decembre
dernier , le Capitan Pacha avoit éré exilé en Candie ; que le lendemain , son Drogman , ou Interprete , avoit eu la tête tranchée dans l'une des Cours
382 MERCURE DE FRANCE
Cours du Serail , et que le G. Viz. avoit menacé
d'un pareil sort tous les Drogmans qui se mêleroient à l'avenir de quelque intrigue secrette , ce
..Ministre voulant qu'on ne s'adresse qu'à lui ou à
son Reys-Effendi.
Fermer
Résumé : TURQUIE ET PERSE.
En 1732, un traité de paix entre la Turquie et la Perse a été communiqué aux ministres du Serrail à Constantinople. Ce traité prévoit la restitution des provinces conquises par la Turquie, sauf la Géorgie et l'ancienne province de Babylone. Le Daghestan sera rendu à son souverain, alors à Constantinople. Les deux puissances s'engagent à récupérer les territoires conquis par les Moscovites en Perse, par la négociation ou la force. Les conquêtes durant cette guerre reviendront à la puissance qui les aura réalisées. Le Grand Vizir a informé les ministres étrangers de la nécessité de contrer l'expansion des Moscovites et de les éloigner de la mer Caspienne. La Turquie intensifie ses préparatifs militaires en construisant des vaisseaux de guerre et en stockant des munitions. Le Grand Sultan se tient retiré depuis trois mois, suscitant des murmures. Les dernières lettres de Constantinople confirment la paix entre les Turcs et les Persans. Le traité stipule la restitution des villes de Tauris et d'Erivan au roi de Perse et le paiement de six millions d'Asprès pour les frais de guerre. Le Capitan Pacha a été exilé en Candie, et son interprète exécuté pour intrigues secrètes. Le Grand Vizir a menacé de punir sévèrement tout interprète impliqué dans des intrigues.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
14
p. 1871-1872
« Le Prêtre qui a été arrêté pour avoir distribué plusieurs Exemplaires de l'Ecrit intitulé, [...] »
Début :
Le Prêtre qui a été arrêté pour avoir distribué plusieurs Exemplaires de l'Ecrit intitulé, [...]
Mots clefs :
Saxe, Ministre, Ministres, Comte de Wackerbarth-Salmour
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le Prêtre qui a été arrêté pour avoir distribué plusieurs Exemplaires de l'Ecrit intitulé, [...] »
Le Prêtre qui a été arrêté pour avoir distri
bué plusieurs Exemplaires de l'Ecrit intitulé ,
Lettre d'un Nonce à son Ami , ayant déposé
qu'ils lui avoient été remis par le Comte de Wackerbart-
Salmour , qui lui avoit donné de l'argent
pour l'engager à les répandre ; le Sénat et
une partie de la Noblesse , ont exigé que le Pri
mat écrivit à l'Electeur de Saxe , pour lui rendre
compte de l'accusation formée contre ce
Ministre , et pour demander justice de l'abus
qu'ils prétendent qu'il a fait de son Caractere,
L'Electeur de Saxe a répondu à la Lettre du
Primat , qu'il est également porté , et par l'honneur
1872 MERCURE DE FRANCE
neur qu'il a d'être fils d'un Roy de Pologne , et
par sa propre inclination , à faire tous ses efforts
pour maintenir la liberté et pour assurer
le repos et le bonheur des Polonois , qu'il ne
sçauroit croire que ses Ministres ayent osé faire
aucune démarche contraire à ses intentions et
à ses ordres , et qu'il est assuré en particulier
de la probité du Comte de Wackerbart- Salmour
, et du zele que ce Ministre a pour entretenir
une union sincere et durable entre la Saxe
et la Pologne ; que les plaintes faites contre ce
Ministre , ne sont fondées que sur la déposition
d'un témoin , que diverses raisons rendent suspect
; qu'il a lieu d'être surpris que sur un fondement
si leger , on air attaqué l'honneur de
ses Ministres , et qu'on se soit fait justice dans
le temps même qu'on paroissoit l'attendre de
lui ; qu'ainsi il demande une satisfaction proportionnée
à l'offense , que ses Ministres ont
reçue par une accusation qui blesse le respect
da à leur Caractere.
bué plusieurs Exemplaires de l'Ecrit intitulé ,
Lettre d'un Nonce à son Ami , ayant déposé
qu'ils lui avoient été remis par le Comte de Wackerbart-
Salmour , qui lui avoit donné de l'argent
pour l'engager à les répandre ; le Sénat et
une partie de la Noblesse , ont exigé que le Pri
mat écrivit à l'Electeur de Saxe , pour lui rendre
compte de l'accusation formée contre ce
Ministre , et pour demander justice de l'abus
qu'ils prétendent qu'il a fait de son Caractere,
L'Electeur de Saxe a répondu à la Lettre du
Primat , qu'il est également porté , et par l'honneur
1872 MERCURE DE FRANCE
neur qu'il a d'être fils d'un Roy de Pologne , et
par sa propre inclination , à faire tous ses efforts
pour maintenir la liberté et pour assurer
le repos et le bonheur des Polonois , qu'il ne
sçauroit croire que ses Ministres ayent osé faire
aucune démarche contraire à ses intentions et
à ses ordres , et qu'il est assuré en particulier
de la probité du Comte de Wackerbart- Salmour
, et du zele que ce Ministre a pour entretenir
une union sincere et durable entre la Saxe
et la Pologne ; que les plaintes faites contre ce
Ministre , ne sont fondées que sur la déposition
d'un témoin , que diverses raisons rendent suspect
; qu'il a lieu d'être surpris que sur un fondement
si leger , on air attaqué l'honneur de
ses Ministres , et qu'on se soit fait justice dans
le temps même qu'on paroissoit l'attendre de
lui ; qu'ainsi il demande une satisfaction proportionnée
à l'offense , que ses Ministres ont
reçue par une accusation qui blesse le respect
da à leur Caractere.
Fermer
Résumé : « Le Prêtre qui a été arrêté pour avoir distribué plusieurs Exemplaires de l'Ecrit intitulé, [...] »
Un prêtre a été arrêté pour avoir distribué des exemplaires de 'Lettre d'un Nonce à son Ami'. Il a affirmé avoir reçu ces exemplaires et de l'argent du Comte de Wackerbart-Salmour pour les répandre. Suite à cette arrestation, le Sénat et une partie de la Noblesse ont demandé au Primat d'informer l'Électeur de Saxe des accusations contre le ministre et de réclamer justice pour l'abus présumé de son caractère. L'Électeur de Saxe a répondu en affirmant son engagement à maintenir la liberté et le bonheur des Polonais. Il a exprimé son incrédulité face aux accusations, soulignant la probité du Comte de Wackerbart-Salmour et son zèle pour l'union entre la Saxe et la Pologne. Il a également mentionné que les plaintes étaient basées sur la déposition d'un témoin suspect et a demandé une satisfaction proportionnée à l'offense faite à l'honneur de ses ministres.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
15
p. 2469-2471
TURQUIE ET PERSE.
Début :
Selon quelques avis de Constantinople, le bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-Thamas, [...]
Mots clefs :
Thamas Kouli-Kan, Perse, Constantinople, Topal Osman Pacha, Ministres, Persans, Roi de Perse, Schach Tamas
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : TURQUIE ET PERSE.
TURQUIE ET PERSE.
Surat
Elon quelques avis de Constantinople , le
bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-
Thamas , Roy de Perse détrôné , s'étoit rendu à
Ispahan depuis la défaite de Thamas-Koulikan,
son Usurpateur, qu'il étoit remonté sur le Thrône
, et qu'il avoit écrit à Topal Osman , pour
l'assurer qu'il désiroit d'observer le dernier Traité
de Paix que ses Ministres avoient conclu avec
ceux de la Porte.
On a appris depuis de Constantinople que le
Grand Seigneur a fait part à tous les Ministres
Etrangers qui résident près S. H. de la Victoire
remportée par l'Armée Otthomane , sur celle de
Thamas
2470 MERCURE DE FRANCE
Thamas Kouli - Kan,et 300 des principaux d'entre
les Persans, qui ont été faits prisonniers dans
le combat , et que Topal Osman a fait conduire
dans cette Capitale , ont été exposez pendant
plusieurs jours dans la Grande Place , vis-à- vis
le Sérail.
Le 3 Septembre , il arriva un Courrier , par
lequel ce General mande à Sa Hautesse qu'on
n'étoit pas encore instruit du lieu où Thamas-
Kouli -Kan s'étoit retire depuis sa défaite , et
qu'Achmet , Pacha de Bagdad , avoit reçu avis
de divers endroits , que Schahp- Thamas étoit retourné
à Ispahan, et que la plus grande partie de
la principale Noblesse Persanne s'y étoit renduë
pour reconnoître son légitime Souverain.
Achmet- Pacha a écrit depuis au G. S. pour
l'informer qu'on assuroit que le Roy de Perse
faisoit tous ses efforts pour détruire l'opinion où
l'on est à Constantinople , que toutes les démar
ches de Thamas - Kouli -Kan ont été concertées
avec lui ; qu'il avoit pour cet effet éloigné
du Ministere tous les Parens et Amis de Thamas◄
Kouli-Kan qu'il avoit rappellé ceux que ce Ministre
avoit dépossédez , et qu'il devoit envoyer
des Ambassadeurs à S. H. pour la prier de ne
point faire porter ni à lui , ni à son Royaume
la peine de la perfidie d'un Sujet Rebelle , dont
al désaprouvoit la conduite , et de lui accorder
une suspension d'Armes , pendant laquelle les
Ministres de la Porte et les siens pûssent convenir
des moyens d'établir une Paix durable entre
les Turcs et les Persans. On ne croît pas que le
G. S. écoute aucune proposition d'accommodement,
à moins que Schaph Thamas ne consente de
lui livrer Thamas - Kouli - Kan .
L'Escadre que le G. S. avoit envoyée pour
escorter
NOVEM 5 K E. 1733. 2471
escorter celle d'Alger est de retour aux Darda
nelles , mais Dgianum Codgia n'est pas encore
arrivé .
Le bruit court qu'on doit faire des levées considérables
d'hommes dans tous les Païs de la ,
domination de S. H. et l'on ne dit point les rai
sons qui l'engagent à faire cette augmentation
dans ses Troupes.
Par les Lettres du 20 Septembre , on apprend
que Topal Osman s'étoit emparé de la Ville de
Tauris , après un Siége de quelques jours, et qu'il
en faisoit rafer les fortifications. On confirme que
l'Armée Persanne a été entierement dissipée , que
Thamas - Kouli -Kan s'est sauvé dans les Déserts
, et que le Roy de Perse devoit envoyer des
Ambassadeurs à la Porte, pour prier S. H.d'ou
blier des Actes d'Hostilité , ausquels il n'a e
aucune part , et pour signer une nouvelle Ratification
du dernier Traité conclu entre les Turcs
et les Persans.
Surat
Elon quelques avis de Constantinople , le
bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-
Thamas , Roy de Perse détrôné , s'étoit rendu à
Ispahan depuis la défaite de Thamas-Koulikan,
son Usurpateur, qu'il étoit remonté sur le Thrône
, et qu'il avoit écrit à Topal Osman , pour
l'assurer qu'il désiroit d'observer le dernier Traité
de Paix que ses Ministres avoient conclu avec
ceux de la Porte.
On a appris depuis de Constantinople que le
Grand Seigneur a fait part à tous les Ministres
Etrangers qui résident près S. H. de la Victoire
remportée par l'Armée Otthomane , sur celle de
Thamas
2470 MERCURE DE FRANCE
Thamas Kouli - Kan,et 300 des principaux d'entre
les Persans, qui ont été faits prisonniers dans
le combat , et que Topal Osman a fait conduire
dans cette Capitale , ont été exposez pendant
plusieurs jours dans la Grande Place , vis-à- vis
le Sérail.
Le 3 Septembre , il arriva un Courrier , par
lequel ce General mande à Sa Hautesse qu'on
n'étoit pas encore instruit du lieu où Thamas-
Kouli -Kan s'étoit retire depuis sa défaite , et
qu'Achmet , Pacha de Bagdad , avoit reçu avis
de divers endroits , que Schahp- Thamas étoit retourné
à Ispahan, et que la plus grande partie de
la principale Noblesse Persanne s'y étoit renduë
pour reconnoître son légitime Souverain.
Achmet- Pacha a écrit depuis au G. S. pour
l'informer qu'on assuroit que le Roy de Perse
faisoit tous ses efforts pour détruire l'opinion où
l'on est à Constantinople , que toutes les démar
ches de Thamas - Kouli -Kan ont été concertées
avec lui ; qu'il avoit pour cet effet éloigné
du Ministere tous les Parens et Amis de Thamas◄
Kouli-Kan qu'il avoit rappellé ceux que ce Ministre
avoit dépossédez , et qu'il devoit envoyer
des Ambassadeurs à S. H. pour la prier de ne
point faire porter ni à lui , ni à son Royaume
la peine de la perfidie d'un Sujet Rebelle , dont
al désaprouvoit la conduite , et de lui accorder
une suspension d'Armes , pendant laquelle les
Ministres de la Porte et les siens pûssent convenir
des moyens d'établir une Paix durable entre
les Turcs et les Persans. On ne croît pas que le
G. S. écoute aucune proposition d'accommodement,
à moins que Schaph Thamas ne consente de
lui livrer Thamas - Kouli - Kan .
L'Escadre que le G. S. avoit envoyée pour
escorter
NOVEM 5 K E. 1733. 2471
escorter celle d'Alger est de retour aux Darda
nelles , mais Dgianum Codgia n'est pas encore
arrivé .
Le bruit court qu'on doit faire des levées considérables
d'hommes dans tous les Païs de la ,
domination de S. H. et l'on ne dit point les rai
sons qui l'engagent à faire cette augmentation
dans ses Troupes.
Par les Lettres du 20 Septembre , on apprend
que Topal Osman s'étoit emparé de la Ville de
Tauris , après un Siége de quelques jours, et qu'il
en faisoit rafer les fortifications. On confirme que
l'Armée Persanne a été entierement dissipée , que
Thamas - Kouli -Kan s'est sauvé dans les Déserts
, et que le Roy de Perse devoit envoyer des
Ambassadeurs à la Porte, pour prier S. H.d'ou
blier des Actes d'Hostilité , ausquels il n'a e
aucune part , et pour signer une nouvelle Ratification
du dernier Traité conclu entre les Turcs
et les Persans.
Fermer
Résumé : TURQUIE ET PERSE.
À la fin août, des rumeurs à Surat indiquaient que Schah-Thamas avait repris le trône de Perse après la défaite de Thamas-Kouli-Kan. Schah-Thamas a affirmé vouloir respecter le traité de paix avec la Porte ottomane. L'armée ottomane a vaincu Thamas-Kouli-Kan, capturant ce dernier et 300 notables persans. Topal Osman a rapporté que Thamas-Kouli-Kan s'était enfui et que Schah-Thamas était retourné à Ispahan, soutenu par la noblesse persane. Achmet Pacha a informé le Grand Seigneur que Schah-Thamas cherchait à réfuter les accusations de complicité avec Thamas-Kouli-Kan et prévoyait d'envoyer des ambassadeurs pour négocier une paix durable. L'escadre ottomane revenue aux Dardanelles, des rumeurs de levées massives d'hommes circulaient. Topal Osman a pris la ville de Tauris, dispersant l'armée persane et forçant Thamas-Kouli-Kan à se réfugier dans les déserts. Schah-Thamas devait envoyer des ambassadeurs à la Porte pour demander une nouvelle ratification du traité de paix.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
16
p. 2500-2506
MANIFESTE de S. M. le Roi de Sardaigne.
Début :
Le Roi de Sardaigne étroitement uni au Roi de France, par les précieux liens du Sang et [...]
Mots clefs :
Roi de Sardaigne, Cour de Vienne, Empereur, Maison de Savoie, États, Royaume, Ministres, Occasion, Europe, Dignité
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MANIFESTE de S. M. le Roi de Sardaigne.
MANIFESTE de S. M. le Roi de
Sardaigne.
E Roi de Sardaigne étroitement uni au Roi
L de France ,par les précieux liens du Sang et
de l'amitié , a vivement partagé sa juste sensibi
lité au sujet des Déclarations injurieuses , des
odieuses Négociations et des violentes voyes de
fait , par lesquelles l'Empereur a affecté de choquer
S. M. T. C. et s'est efforcé de fermer le che
min du Trône à un Prince , au sort duquel Elle
prenoit le plus tendre interêt , et qui étoit si digne
de la Couronne , que les insinuations , les
menaces et les hostilitez employées à lui enlever
les suffrages de la Nation Polonoise , n'ont pú
traverser son unanime Election.
Quoique
NOVEMBRE . 1733. 2501
1
Quoique l'esprit dominant à la Cour de Vien
ne se fut assez manifesté en Europe , pour que
les prétentions les plus étendues de sa part ne
dussent plus surprendre , on n'a pu toutesfois y
voir sans étonnement la naissance et le progrés
d'un si injuste engagement : soit que l'on considerât
la Personne du Roi , Stanislas , contre laquelle
il étoit formé , soit la dignité du Roi de
France , qu'il offençoit , soit la constitution du
Royaume de Pologne qu'il s'appoit par les fondemens,
soit enfin la nature des moyens employés à
le soutenir,tels que ceRoyaume se fut à peine attendu
à les voir mettre en oeuvre par le plus dangereux
de ses voisins .
L'objet que présente un grand Roi insulté de
propos déliberé dans l'endroit le plus sensible , et
le spectacle d'une Nation opprimée pour n'avoir
pas voulu renoncer à sa liberté , ne sçauroient
être regardez d'un ceil tranquille par aucune
Puissance. Mais combien le Roi de Sardaigne
n'a-t'il pas lieu d'en être frappé? Lui qui ne peut
s'approprier le bonheur d'une étroite parenté
avec S. M. T. C. sans participer en même tems
à l'outrage qu'on lui a intenté , ni envisager l'usage
que l'Empereur a aspiré de faire de son autorité
dans un Royaume indépendant , sans re-
Béchir aux conséquences de l'abus qu'il fait journellement
de cette même autorité dans une region
, qui lui est déja plus qu'à moitié soumise.
En vain le Roi de Sardaigne a-t-il voulu pendant
long- tems s'aveugler sur ces tristes conséquences
; la Cour de Vienne lui a fait sentir par
ses démarches qu'elle fondoit sur sa ruine celle
de la liberté de l'Italie , dont sa Maison Royale
avoit toujours été le plus ferme soutien .
Les premieres injustices de la Cour de Vienne
H iij
ont
502 MERCURE DE FRANCE
ont pour époque et pour date les tems mêmes
auxquels la Maison de Savoye faisoit les plus gé
néreux efforts en faveur de celle d'Autriche. Le
Traité d'alliance conclu en 1703. entre le feu.
Roi de Sardaigne et l'Empereur Leopold , aussi
mal executé du côté des assistances promises ,
qu'imparfaitement accompli du côté des cessions
stipulées , les considerables avances faites en ce
tems là pour l'entretien des Troupes Imperiales
en Piémont , non encore remboursées , sont les
monumens autentiques de la reconnoissance de
la Cour de Vienne.
Tel fut le traitement que le feu Roi Victor en
reçut en qualité de fidéle et d'utile Allié ; mais à
peine la dissolution de la ligue l'eut -elle obligé
d'entrer dans les mesures pacifiques qui se prirent
à Utrecht , où la pluralité des suffrages de
l'Europe lui décerna le Royaume de Sicile , par
des considerations qui devoient en perpetuer la
possession à la posterité la plus reculée ; que la
Cour de Vienne éclatant contre lui , s'en prie
d'une maniere outrageante à ses Ministres à Vien
ne et à Ratisbonne , par des Decrets aussi violens
qu'injustes , sans épargner les expressions les
plus piquantes , et sans menager la dignité toujours
respectable d'un Souverain.
Le Congrez d'Utrecht , contre lequel les Ministres
Autrichiens se déchaînoient sans cesse
avoit pourtant abondamment pourvû à la splen
deur et à l'élevation de l'Empereur , en lui assurant
la considerable addition des Pays Bas et des
Etats situez dans le continent d'Italie , à ceux
qu'il possedoit déja en Allemagne ; lui - même par
le succès de ses Armes contre le Turc avoit reculé
bien loin les bornes de sa domination du
ôté de la Hongrie et de la Transilvanie, Tant
do
NOVEMBRE . 1733. 2508
de prosperités devoient combler les voeux de la
Cour de Vienne . Cependant la seule Sicile échuë
au Roi Victor, étoit encore un objet suffisant à la
troubler. Il falut la lui ceder par un Traité qui
laissoit néanmoins jour à une discussion avantageuse
au nouveau Roi de Sardaigne. C'est ainsi
que la Maison de Savoye étoit sans cesse desti
née à contribuer à l'agrandissement de celle d'Autriche
, tantôt par les services les plus signalez »
tantôt par les sacrifices les plus coûteux.
N'auroit-on pas cru que la Cour de Vienne
dont on assouvissoit à l'envi les desirs , se seroit
du moins portée à rendre justice au Roi de Sardaigne
sur des articles moins essentiels , que la
sage disposition des Puissances contractantes
avoit renvoyées au Congrez désigné à Cambray,
Tant de condescendances ne firent qu'augmenter
sa dureté : envain les Plénipotentiaires s'y assemblerent
, la lenteur affectée , et l'infléxibilité des
Ministres Imperiaux firent perdre tout le fruit
de cette convocation , et même tout espoir de
voir renaître une occasion favorable de reparer
les préjudices supportez.
Le Roi de Sardaigne entierement livré parla à
la Cour de Vienne , sur le point de sa légitime
satisfaction , éprouva déslors tout le poids de
son aliénation pour lui. Elle n'a cessé depuis de
lui susciter des oppositions et des contestations
de toute espece.
Elle avoit déja prétendu mettre le Roi de Sar→
daigne au rang des simples Vassaux et Feuda
taires par rapport aux contributions , et cela de
l'autorité privée de l'Empereur , et de celle de son
Conseil , sans aucune délibération de la Diette ,
et même sur des lieux qui ont été declarez indé,
pendans de l'Empire par la Paix de Munster , re,
Hij gardée
2 (04 MER CURE DE FRANCE
gardée comme Loy sacrée et fondamentale pour
tout le Corps Germanique .
Elle a permis au Conseil Aulique d'écouter et
d'encourager les Vassaux et Sujets du Roi de Sardaigne
, au préjudice de la prérogative dont il
joint par sa Dignité de Vicaire de l'Empire , et
par les Diplômes accordez par les Empereurs à
la Maison de Savoye.
" Elle lui a formé des difficultez recherchées en
toute occasion , soit dans les Aquisitions qu'il a
faites de l'Empereur à prix d'argent , soit dans
les Investitures générales de ses Etats, en lui disputant
tantôt les Titres , tantôt les Distinctions
dont sa Maison a joui autrefois , et cela même
en s'éloignant par un exemple presque inoui , de
l'avis du Conseil Aulique.
Elle a éludé par des délais infinis la demande
des Titres et autres Ecritures appartenantes au
Duché de Montferrat , dont la rémission est
expressément stipulée par les mêmes Traitez ,
qui portent la cession de cet Etat , et vingt ans
de sollicitations n'ont pû les obtenir.
Afin d'ôter au Roy de Sardaigne les moyens
de se deffendre , elle a prétendu lui limiter la liberté
absolue de fortifier ses Places , que le droit
naturel , aussi- bien que les Traitez , lui accordent
; elle a tâché de forcer par des interprétations
artificieuses le vrai sens des mêmes Traitez.
Elle a fomenté avec soin et soutenu avec hauteur
, les injustes prétentions des Terres de l'Etat
de Milan , confinantes avec les Etats du Roy
de Sardaigne , rejettant même toutes les ouvertures
d'un raisonnable accord , souvent proposées
par ce Prince , la Cour de Vienne affectant
de tenir cette voye ouverte pour l'inquiéter et
roubler sa Jurisdiction.
Enfin
NOVEMBRE. 1733. 2505
•
Enfin la Cour de Vienne attentive aux occasions
de choquer celle de Turin par les endroits
les plus sensibles, a choisi le moment que les
Plenipotentiaires du Roy de Sardaigne alloient
prêter l'hommage de cette partie de ses Etats qui
reléve de l'Empice , pour introduire par surprise
une étrange nouveauté , et une odieuse distinction
contre l'usage établi , et recemment pratitiqué
envers les Rois d'Angleterre , de Dannemarc
et de Suede : Et sur les vives protestations
qui lui ont été faites à ce sujet par les Ministres
du Roi de Sardaigne, elle a prétendu reparer l'offense
au moyen de quelques excuses privées et
échapées par occasion à un Officier de la Cour
de l'Empereur , dont il a refusé de donner Acte.
Dans ces circonstances , le Roi de France qui
de son côté avoit donné pendant long- tems à la
Cour de Vienne les exemples de la plus singuliere
moderation , et les preuves de la plus sage tolerance
, a jugé qu'une pareille conduite cesseroit
d'être louable , dés qu'elle devenoit incompatible
avec sa gloire personnelle , l'honneur de son
Royaume , et l'appui qu'il devoir à ses Alliez . 11.
s'est déterminé à déclarer la Guerre à l'Empereur,
et a invité le Roi de Sardaigne à prendre à cette
Guerre la même part qu'il prenoit aux Motifs.
qui la rendoient indispensable.
Le Roi de Sardaigne engagé par tant d'endroits:
à épouser le jufte ressentiment de S. M. T. C.
ayant de plus ses propres griefs à reparer , convaincu
par une longue experience , que les maximes
de la Cour de Vienne , invariables sur son
compte , tendoient à miner sa Souveraineté , en.
attendant l'occasion de l'opprimer sans ressour
ce. Confirmé dans cette certitude par des exem
ples capables d'allarmer les plus grandes Puis-
Hr sances,
2506 MFRCURE DE FRANCE
sances , a signé un Traité , joignant avec confiance
ses Armes à celles d'un Prince , qui dépouillé
d'ambition , n'a cherché à se distinguer
en Europe que par son amour pour la Paix et par
l'équité de ses desseins .
Le Roy de Sardaigne , en qualité de Souverain
indépendant , est dispensé d'autoriser par des
exemples , les mesures qu'il est contraint de
prendre contre l'Empereur en qualité de Princes
de l'Empire , il en a d'illustres à suivre . Il sçau
ia s'y conformer en maintenant une indissolu
ble union avec cet Auguste Corps , et une par
faite amitié avec les dignes Membres qui le
composent , du nombre desquels il fait gloire
d'être.
C'est donc pour l'honneur de ses Augustes Alliez
, pour le sien propre , pour sa sureté , pour
la tranquillité et le bonheur de ses Etats , que le
Roy de Sardaigne , après avoir marqué par tou
tes ses déterminations, un sincere désir de maintenir
la bonne intelligence avec ses voisins , et d'é
pargner ses Peuples les calamitez de la guerre ,
prend maintenant les Armes .
à
En agissant par des motifs si dignes de déterminer
un Souverain , il espere non seulement .
de trouver dans ses Sujets les mêmes ressources
de zele , de fidélité et de valeur , que ses Augustes
Prédecesseurs ont trouvées en eux , mais aussi
que le Dieu desArmées protegera sa cause et qu'il
benira par d'heureux succès la justice de ses
desseins ,
Sardaigne.
E Roi de Sardaigne étroitement uni au Roi
L de France ,par les précieux liens du Sang et
de l'amitié , a vivement partagé sa juste sensibi
lité au sujet des Déclarations injurieuses , des
odieuses Négociations et des violentes voyes de
fait , par lesquelles l'Empereur a affecté de choquer
S. M. T. C. et s'est efforcé de fermer le che
min du Trône à un Prince , au sort duquel Elle
prenoit le plus tendre interêt , et qui étoit si digne
de la Couronne , que les insinuations , les
menaces et les hostilitez employées à lui enlever
les suffrages de la Nation Polonoise , n'ont pú
traverser son unanime Election.
Quoique
NOVEMBRE . 1733. 2501
1
Quoique l'esprit dominant à la Cour de Vien
ne se fut assez manifesté en Europe , pour que
les prétentions les plus étendues de sa part ne
dussent plus surprendre , on n'a pu toutesfois y
voir sans étonnement la naissance et le progrés
d'un si injuste engagement : soit que l'on considerât
la Personne du Roi , Stanislas , contre laquelle
il étoit formé , soit la dignité du Roi de
France , qu'il offençoit , soit la constitution du
Royaume de Pologne qu'il s'appoit par les fondemens,
soit enfin la nature des moyens employés à
le soutenir,tels que ceRoyaume se fut à peine attendu
à les voir mettre en oeuvre par le plus dangereux
de ses voisins .
L'objet que présente un grand Roi insulté de
propos déliberé dans l'endroit le plus sensible , et
le spectacle d'une Nation opprimée pour n'avoir
pas voulu renoncer à sa liberté , ne sçauroient
être regardez d'un ceil tranquille par aucune
Puissance. Mais combien le Roi de Sardaigne
n'a-t'il pas lieu d'en être frappé? Lui qui ne peut
s'approprier le bonheur d'une étroite parenté
avec S. M. T. C. sans participer en même tems
à l'outrage qu'on lui a intenté , ni envisager l'usage
que l'Empereur a aspiré de faire de son autorité
dans un Royaume indépendant , sans re-
Béchir aux conséquences de l'abus qu'il fait journellement
de cette même autorité dans une region
, qui lui est déja plus qu'à moitié soumise.
En vain le Roi de Sardaigne a-t-il voulu pendant
long- tems s'aveugler sur ces tristes conséquences
; la Cour de Vienne lui a fait sentir par
ses démarches qu'elle fondoit sur sa ruine celle
de la liberté de l'Italie , dont sa Maison Royale
avoit toujours été le plus ferme soutien .
Les premieres injustices de la Cour de Vienne
H iij
ont
502 MERCURE DE FRANCE
ont pour époque et pour date les tems mêmes
auxquels la Maison de Savoye faisoit les plus gé
néreux efforts en faveur de celle d'Autriche. Le
Traité d'alliance conclu en 1703. entre le feu.
Roi de Sardaigne et l'Empereur Leopold , aussi
mal executé du côté des assistances promises ,
qu'imparfaitement accompli du côté des cessions
stipulées , les considerables avances faites en ce
tems là pour l'entretien des Troupes Imperiales
en Piémont , non encore remboursées , sont les
monumens autentiques de la reconnoissance de
la Cour de Vienne.
Tel fut le traitement que le feu Roi Victor en
reçut en qualité de fidéle et d'utile Allié ; mais à
peine la dissolution de la ligue l'eut -elle obligé
d'entrer dans les mesures pacifiques qui se prirent
à Utrecht , où la pluralité des suffrages de
l'Europe lui décerna le Royaume de Sicile , par
des considerations qui devoient en perpetuer la
possession à la posterité la plus reculée ; que la
Cour de Vienne éclatant contre lui , s'en prie
d'une maniere outrageante à ses Ministres à Vien
ne et à Ratisbonne , par des Decrets aussi violens
qu'injustes , sans épargner les expressions les
plus piquantes , et sans menager la dignité toujours
respectable d'un Souverain.
Le Congrez d'Utrecht , contre lequel les Ministres
Autrichiens se déchaînoient sans cesse
avoit pourtant abondamment pourvû à la splen
deur et à l'élevation de l'Empereur , en lui assurant
la considerable addition des Pays Bas et des
Etats situez dans le continent d'Italie , à ceux
qu'il possedoit déja en Allemagne ; lui - même par
le succès de ses Armes contre le Turc avoit reculé
bien loin les bornes de sa domination du
ôté de la Hongrie et de la Transilvanie, Tant
do
NOVEMBRE . 1733. 2508
de prosperités devoient combler les voeux de la
Cour de Vienne . Cependant la seule Sicile échuë
au Roi Victor, étoit encore un objet suffisant à la
troubler. Il falut la lui ceder par un Traité qui
laissoit néanmoins jour à une discussion avantageuse
au nouveau Roi de Sardaigne. C'est ainsi
que la Maison de Savoye étoit sans cesse desti
née à contribuer à l'agrandissement de celle d'Autriche
, tantôt par les services les plus signalez »
tantôt par les sacrifices les plus coûteux.
N'auroit-on pas cru que la Cour de Vienne
dont on assouvissoit à l'envi les desirs , se seroit
du moins portée à rendre justice au Roi de Sardaigne
sur des articles moins essentiels , que la
sage disposition des Puissances contractantes
avoit renvoyées au Congrez désigné à Cambray,
Tant de condescendances ne firent qu'augmenter
sa dureté : envain les Plénipotentiaires s'y assemblerent
, la lenteur affectée , et l'infléxibilité des
Ministres Imperiaux firent perdre tout le fruit
de cette convocation , et même tout espoir de
voir renaître une occasion favorable de reparer
les préjudices supportez.
Le Roi de Sardaigne entierement livré parla à
la Cour de Vienne , sur le point de sa légitime
satisfaction , éprouva déslors tout le poids de
son aliénation pour lui. Elle n'a cessé depuis de
lui susciter des oppositions et des contestations
de toute espece.
Elle avoit déja prétendu mettre le Roi de Sar→
daigne au rang des simples Vassaux et Feuda
taires par rapport aux contributions , et cela de
l'autorité privée de l'Empereur , et de celle de son
Conseil , sans aucune délibération de la Diette ,
et même sur des lieux qui ont été declarez indé,
pendans de l'Empire par la Paix de Munster , re,
Hij gardée
2 (04 MER CURE DE FRANCE
gardée comme Loy sacrée et fondamentale pour
tout le Corps Germanique .
Elle a permis au Conseil Aulique d'écouter et
d'encourager les Vassaux et Sujets du Roi de Sardaigne
, au préjudice de la prérogative dont il
joint par sa Dignité de Vicaire de l'Empire , et
par les Diplômes accordez par les Empereurs à
la Maison de Savoye.
" Elle lui a formé des difficultez recherchées en
toute occasion , soit dans les Aquisitions qu'il a
faites de l'Empereur à prix d'argent , soit dans
les Investitures générales de ses Etats, en lui disputant
tantôt les Titres , tantôt les Distinctions
dont sa Maison a joui autrefois , et cela même
en s'éloignant par un exemple presque inoui , de
l'avis du Conseil Aulique.
Elle a éludé par des délais infinis la demande
des Titres et autres Ecritures appartenantes au
Duché de Montferrat , dont la rémission est
expressément stipulée par les mêmes Traitez ,
qui portent la cession de cet Etat , et vingt ans
de sollicitations n'ont pû les obtenir.
Afin d'ôter au Roy de Sardaigne les moyens
de se deffendre , elle a prétendu lui limiter la liberté
absolue de fortifier ses Places , que le droit
naturel , aussi- bien que les Traitez , lui accordent
; elle a tâché de forcer par des interprétations
artificieuses le vrai sens des mêmes Traitez.
Elle a fomenté avec soin et soutenu avec hauteur
, les injustes prétentions des Terres de l'Etat
de Milan , confinantes avec les Etats du Roy
de Sardaigne , rejettant même toutes les ouvertures
d'un raisonnable accord , souvent proposées
par ce Prince , la Cour de Vienne affectant
de tenir cette voye ouverte pour l'inquiéter et
roubler sa Jurisdiction.
Enfin
NOVEMBRE. 1733. 2505
•
Enfin la Cour de Vienne attentive aux occasions
de choquer celle de Turin par les endroits
les plus sensibles, a choisi le moment que les
Plenipotentiaires du Roy de Sardaigne alloient
prêter l'hommage de cette partie de ses Etats qui
reléve de l'Empice , pour introduire par surprise
une étrange nouveauté , et une odieuse distinction
contre l'usage établi , et recemment pratitiqué
envers les Rois d'Angleterre , de Dannemarc
et de Suede : Et sur les vives protestations
qui lui ont été faites à ce sujet par les Ministres
du Roi de Sardaigne, elle a prétendu reparer l'offense
au moyen de quelques excuses privées et
échapées par occasion à un Officier de la Cour
de l'Empereur , dont il a refusé de donner Acte.
Dans ces circonstances , le Roi de France qui
de son côté avoit donné pendant long- tems à la
Cour de Vienne les exemples de la plus singuliere
moderation , et les preuves de la plus sage tolerance
, a jugé qu'une pareille conduite cesseroit
d'être louable , dés qu'elle devenoit incompatible
avec sa gloire personnelle , l'honneur de son
Royaume , et l'appui qu'il devoir à ses Alliez . 11.
s'est déterminé à déclarer la Guerre à l'Empereur,
et a invité le Roi de Sardaigne à prendre à cette
Guerre la même part qu'il prenoit aux Motifs.
qui la rendoient indispensable.
Le Roi de Sardaigne engagé par tant d'endroits:
à épouser le jufte ressentiment de S. M. T. C.
ayant de plus ses propres griefs à reparer , convaincu
par une longue experience , que les maximes
de la Cour de Vienne , invariables sur son
compte , tendoient à miner sa Souveraineté , en.
attendant l'occasion de l'opprimer sans ressour
ce. Confirmé dans cette certitude par des exem
ples capables d'allarmer les plus grandes Puis-
Hr sances,
2506 MFRCURE DE FRANCE
sances , a signé un Traité , joignant avec confiance
ses Armes à celles d'un Prince , qui dépouillé
d'ambition , n'a cherché à se distinguer
en Europe que par son amour pour la Paix et par
l'équité de ses desseins .
Le Roy de Sardaigne , en qualité de Souverain
indépendant , est dispensé d'autoriser par des
exemples , les mesures qu'il est contraint de
prendre contre l'Empereur en qualité de Princes
de l'Empire , il en a d'illustres à suivre . Il sçau
ia s'y conformer en maintenant une indissolu
ble union avec cet Auguste Corps , et une par
faite amitié avec les dignes Membres qui le
composent , du nombre desquels il fait gloire
d'être.
C'est donc pour l'honneur de ses Augustes Alliez
, pour le sien propre , pour sa sureté , pour
la tranquillité et le bonheur de ses Etats , que le
Roy de Sardaigne , après avoir marqué par tou
tes ses déterminations, un sincere désir de maintenir
la bonne intelligence avec ses voisins , et d'é
pargner ses Peuples les calamitez de la guerre ,
prend maintenant les Armes .
à
En agissant par des motifs si dignes de déterminer
un Souverain , il espere non seulement .
de trouver dans ses Sujets les mêmes ressources
de zele , de fidélité et de valeur , que ses Augustes
Prédecesseurs ont trouvées en eux , mais aussi
que le Dieu desArmées protegera sa cause et qu'il
benira par d'heureux succès la justice de ses
desseins ,
Fermer
Résumé : MANIFESTE de S. M. le Roi de Sardaigne.
En novembre 1733, le Roi de Sardaigne publie un manifeste exprimant sa solidarité avec le Roi de France contre les actions de l'Empereur. L'Empereur a tenté d'empêcher l'élection du prince polonais Stanislas, soutenu par la France, ce que le Roi de Sardaigne condamne comme une atteinte à la liberté de la Pologne. Le manifeste souligne également les injustices passées de la Cour de Vienne envers la Maison de Savoie, notamment lors du traité d'Utrecht où la Sicile a été cédée au Roi de Sardaigne malgré les contestations autrichiennes. De plus, la Cour de Vienne a cherché à limiter la souveraineté du Roi de Sardaigne en matière de fortifications et de juridiction. En réponse à ces provocations, le Roi de France a déclaré la guerre à l'Empereur et a invité le Roi de Sardaigne à se joindre à lui. Le Roi de Sardaigne, motivé par les griefs personnels et la menace à sa souveraineté, a accepté cette alliance. Il espère que ses sujets le soutiendront avec zèle et fidélité et que la justice de sa cause sera bénie par des succès militaires.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
17
p. 2704-2712
MANIFESTE du Primat de Pologne.
Début :
Les faux rapports répandus dans le Public, à l'occasion de ce qui s'est passé en Pologne [...]
Mots clefs :
Élection, Roi, République, Interrègne, Liberté, Diète de convocation, Serment, Royaume, Primat, Ministres, Nation, Stanislas Leszczynski, Ennemis, Conduite, Assemblée
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MANIFESTE du Primat de Pologne.
MANIFESTE du Primat de Pologne:
Es faux rapports répandus dans le Public , à
l'occasion de ce qui s'est passé en Pologne
pendant l'interregne , les insinuations injustes ,
et malicieuses dont les ennemis du repos de la
République ont tâché de noircir ma conduite ,
J. Vel.
DECEMBRE. 1733 2705
en m'accusant d'avoir gouverné le Royaume d'une
maniere affectée et interessé , ont arrêté la liberté
des suffrages et violé les droits sur lesquels cette
liberté est fondée , et la necessité enfin de faire
voir au Monde entier que nos ennemis par de
pareils procedez , n'ont eu et n'ont encore pour
but que de ruiner et renverser totalement les
droits , les prérogatives et la liberté de notre
chere Patrie , sont des motifs trop pressans , pour
que je differe plus long- temps à justifier ma
conduite , afin de convaincre tout l'Univers par
une narration succincte et sincere de ce qui s'est
passé avant et après l'Election , la fausseté de ce
qu'on a publié de contraire,
Mon premier soin , depuis la mort du Roy
Auguste, de glorieuse memoire , a été de concilier
et de réunir nos Freres , et j'eus le bonheur
d'y réussir . Je n'entrepris rien que
du consentement
et de l'aveu du Sénat et de la Noblesse encore
assemblée à l'occasion de la Diette extraor
dinaire, convoquée par le feu Roy; j'envoyai des
Ministres aux Cours voisines , je tins de fréquens
Conseils avec les Sénateurs et les Minis
tres des deux Nations ; je ne signai que ce qui
avoit été unanimement résolu ; je pris les mesu
res convenables avec les Régimentaires des deux
Nations pour assurer la sureté interieure et exte
rieure du Royaume et prévenir les inconvéniens
qui pourroient résulter des Assemblées particu
lieres et illicites ; en un mot , afin de n'avoir
rien à me reprocher , je communiquai tout à la
République et ne fis rien sans son approbation ,
quoiqu'en qualité de Primat j'usse pû m'en dis
penser en bien des choses.
Le jour de l'assemblée de la Diette de Convo
Cation étant yenu , je me contentai d'y represen
J. Vol.
2756 MERCURE DE FRANCE
ter le danger auquel le Royaume se trouvoit ex
posé , et je laissai à la prudence d'une Nation libre
le soin de le prévenir. Il y eut au commence
ment de cette Diette de grands débats pour l'E
Jection d'un Maréchal ; les esprits parurent fort
animez , ce qui dura quelques jours et retarda
l'expedition des affaires ; mais par mes soins et
ceux du Sénat , le calmne fut enfin rétabli ; on
élût le Maréchal , et la Noblesse se joignit ensui
te au Sénat ; en qualité de Primat j'écoutai les
avis des Nonces, et me conformai à ce qu'ils désiroient
et à ce qu'ils rejettoient. Le principal
objet de leur délibération regardoit la résolution
prise cy- devant, d'exclure du Trône tout Piaste;
ils ressenroient vivement l'injustice d'une telle
résolution ; ils voyoient , avec indignation , la
honte qui en résultoit à la Nation ; et afin de le
rendre plus efficace , on résolut de le confirmer
par un serment. Cette résolution passa aussi unanimement.
Il est vrai qu'il y a eu à ce sujet des
débats tres vifs , mais ils n'ont eu pour objet que
le formulaire du Serment , et non le Serment
même. Après qu'en qualité de Primat , j'eus
prêté ce Serment , par lequel non seulement
tout Erranger , mais aussi tous ceux qui posse
dent des Provinces Etrangeres , ou qui ont des
Troupes sur pied , qui ne sont pas nez de peres et
de meres Catholiques , sont exclus du Trône.
Les Evêques, Sénateurs et autres le prêterent après
moi , et le firent tous avec joie et sans la moindre
contrainte Les Evêques jurerent aussi qu'ils
m'empiéteroient point sur les Droits du Primat.
La République déclara ensuite ce Serment com
me une Loy fondamentale du Royaume. Oa
dressa quelques Constitutions , et on fixa le jour
pour la Diette d'Election, au lieu ordinaire, con
CI. Vol.
forDECEMBRE.
1733 2707
formément aux Droits ; c'est par là que finit la
Diette de Convocation.
En attendant ce jour important je m'abstins de
toute intrigue , préjudiciab.e à la République ,
et bien loin que je fusse porté par un amour
aveugle pour aucun particulier, l'évitai avec soin
d'entrer dans aucune faction , j'avoue cepen ant
que je souhaitois fort que le Serenissime Roy
Stanislas fut élevé au Trône; je l'en croyois tres
digne, et même plus qu'aucun autre , à cause de
ses éminentes qualitez ; mais je declare en même.
temps que quelque fussent mes souhaits , mon
obstination n'alloit pas jusqu'à le vouloir au
préjudice de la République. J'avois mis toute
ma confiance en Dieu ; c'est par son secours et
celui de la libre Nation Polonoise que j'esperois
voir finir les maux de la République par l'E
lection d'un Roy désiré.
On me fit des offres avantageuses , on me fir
même des menaces , mais je rejettai les premieres
et méprisai les autres ; je n'ai jamais voulų
donner les mains directement ni indirectement
à l'entrée de quelqu'Armée Etrangere. J'ai rejetté
constamment les Instances faites par les
Ministres des Puissances voisines, pour une exclusion
, parce que je voyois qu'elle n'avoit pour
but que leur interêt et leur utilité particuliere ,
et qu'une pareille exclusion ne pouvoit être que
deshonorable à la République et tendre à sa totale
ruine . Comme lesdites Puissances ne laissoient
pas de continuer leurs Instances à ce sujet
, je m'apperçûs bien- tôt qu'on avoit dessein
d'enfoncer le Poignard dans le sein de notre -
berté . J'écrivis pour cet effet au nom de la République
, representée par ceux que les deux Na-
Lions avoient nommés à la Diette de Convoca-
I. Vol. tion
2708 MERCURE DE FRANCE
tion , pour me servir de conseil , à toutes le
Cours de l'Europe , pour les prier de ne pas per
mettre qu'on opprimâ: la Répub ique , d'envoir
des Ministres à S. M 1. et à l'Illustrissime Czarine
pour leur representer que nout ctions une
Nution libre que nous ne dépen tions de personne
, que nous ne permettrions jamais qu'on
donna: Pexclusion , les pliant de se désister de
leurs Instances à ce sujet , et de ne pas se mêlet
de notre Election qui ne dépend que de nous
seuls .
Le jour de l'ouverture de la Diette d'Election
étant venu , je n'eus en vue que l'exacte exécution
des Loix établies dans la Diette de Convocation
, en ce qui regarde l'Election et le maintien
inviolable de la liberté de la Patrie , les commencemens
de cette Diette furent fort paisibles,
et le Maréchal fut élû en peu de jours ; mais cette
tranquilité ne , dura guere ; les esprits s'échaufferent
à la nouvelle de l'entrée des Russiens
dans le Royaume , certifiée et affirmée par le
Chancelier et Régimentaire de Lithuanie toute
l'Assemblée en fut troublée , on fut surpris de
la conduite du Régimentaire en cette occasion ,
et après plusieurs Discours qui ne pouvoient lui
être agréables , on résolut de ne rien négliger
pour découvrir ceux qui avoient appellé les Russiens
dans le Royaume .
·
La peur ayant saisi le Régimentaire , apparemment
par un remords de conscience , il quitta
le Champ Electoral, sans faire aucune protes-
Lation et se retira à Praage,
-On lui envoya des Députez pour demander la
cause de sa Retraite ; sa réponse fut que sa Retraite
ne troubleroit en aucune maniere l'Elec
tion .
I. Vol. Peu
DECEMBRE . 1733. 2709
Peu de jours après, les Etats dresserent un Manifeste
contre ceux qui avoient appellé les Kussiens
dans le Royaume. Nous résolumes là - dessus
de proceder incessament à l'Election ,
selon
la teneur de la Constitution de la Diette de Convocation
, qui porte que l'Election se feroit dans
le terme le plus court qu'il seroit possible , mais
qu'au cas qu'elle ne se pût faire si- tôt qu'on le
souhaiteroit , la Diette ne dureroit neanmoins
que six semaines.
·
Avant que de proceder à l'Acte d'Election je
parcourus , à Cheval , selon le Cérémonial , les
Palatinats , les Starosties et les Districts assemblez
, pour
leur demander quel Roy ils souhaitoient
, et pour leur notifier en même temps
que la Proclamation se feroit le lendemain . Pendant
que j'en faisois le tour , on n'entendit
crier par tout que Vive le Roy Stanislas. Je conviens
cependant qu'il paroissoit qu'il y en avoit
quelques- uns qui y étoient contraires , ceux - cy
se retirreent dans leurs Quartiers, apparemment
pour y dresser le Niepozvalam.
Le lendemain j'achevai le tour des Palatinats , *
Starosties et Districts , je fus obligé dele faire à
pied , mon Cheval étant devenu ombrageux
par les cris réiterez de Vive le Roy Stanislas . Ces
cris se redoublerent avec tant de zéle que je ne
pus m'empêcher de me conformer aux pressantes
Instances de l'Assemblée , et de proceder incessamment
à la nomination du Roy ; mais
avant que de le faire, je déclarai absens ceux qui
s'étoient rendus à Praage ; et comme il ne paroissoit
personne pour contre- dire , car les uns se
tûrent , les autres partirent pour leurs Terres .
parmi ces derniers , le Staroste Opoczynski
1. Vol. ᏗᏤ gu
H
2710 MERCURE DE FRANCE
qui m'assura par une Lettre , qu'il s'étoit retiré
sans contradiction .
Je procedai , en vertu de ma Charge , à la no
mination du Roy , mais je fus interrompu park:
S.Kamienski, Capitaine du District de Krziemit,
dans le Palatinat de Vobhinie , qui me présenta
son Niepozwalam , ce qui m'obligea à garder k
silence pendant quelque temps , jusqu'à ce que
s'étant enfin désisté de sa contradiction , je pro
clamé le Serenissime Roy Stanislas , à present
regnant , sans aucune opposition , dont Dieu ,
qui connoît ce qu'il y a de plus caché dans nos
coeurs , est le témoin , ainsi que le Peuple , con
sistant en plus de 100 Enseignes , et criant una
nimement et sans cesse ; Vive le Roy Stanislas,
Je regarde comme un bonheur particulier d'
voir proclamé pour Roy , celui que des Nation
envieuses ont voulu exclure du Trône ; car
elles avoient réussi dans leur dessein , c'éto
fait à jamais de notre liberté , on nous auro
toujours forcé à élire un Roy à leur gré.
Voilà le récit sincere et veritable de tout
qui s'est passé à l'égard de l'Election de not
Roy , cependant , quelqu'unanime et légitin
qu'ait été cette Election , il se trouve de fau
Freres qui la révoquent en doute ; ils osent avar
cer qu'elle n'a été faite qu'en violant la liberté
et par là , ainsi que par toute la conduite qu'i
ont tenue depuis leur retraite à Praage , ils for
voir évidemment qu'ils ont appellé les Russier
dans le Royaume , ce qui les rend coupables e
tant de sang innocent qui sera peut- être vers
Mais supposé qu'il se soit trouvé quelques Pa
sonnes d'un sentiment opposé , le nombre e
étoit tres- petit , et elles n'ont paru que le jo
I.Vel
.qu'o
DECEMBRE. 1732. 2711
qu'on annonçoit au Peuple la prochaine Election
fixée au lendemain , et non le jour de la nomination
du Roy , qui , selon les Loix ou l'usage
ne se fait jamais à Cheval , mais dans les Tran
chées ou Quartiers préparez pour cet effet , et
où il étoit libre encore à ceux qui vouloient contredire
, d'exhiber leur Niepozvalam.
Les Ennemis du Roy voulant exécuter les pernicieux
desseins qu'ils avoient tramez à Praage ,
allérent joindre les Russiens , et formérent entr'eux
une prétendue République, ou, pour mieux
dire ,un Complot tumultueux de gens qui s'é
tant déclarez eux - mêmes Ennemis de la Patrie ,
en conséquence du Manifeste qu'ils avoient signé
, ne cherchent qu'à renverser la liberté , en
opprimant la veritable et innocente République.
Ce qu'il y a de plus déplorable , c'est qu'il se
trouve parmi eux des Apôtres du Seigneur , des
Evêques , qui comme Judas , trahissent leur propre
Mere , c'est- à- dire , leur Patrie. Ce sont ces.
Evêques qui coupables d'un triple parjure endure
cissent encore davantage les coeurs des Seigneurs
séculiers , en autorisant leur témérité ,
en leur faisant accroire qu'elle est juste et per
mise.
Les Opposans retournerent enfin à Praage ; Ils,
s'imaginoient que pourvu qu'ils pûssent proceder
à une nouvelle Election avant l'échéance des
six semaines que la Diette pouvoit durer , cette
Election seroit légitime ; mais ce terme n'ayant
point été établi comme une Loy , mais comme
une prolongation , au cas qu'on ne pût parvenir
plutôt à une Election , ne peut être regardé que
comme une chimere , puisque l'Election avoit
Jéja été faite légitimement et selon les Loix. Ils
crurent aussi que s'ils pouvoient se rendre sur
1
No I. Vol.
le Hij
2712 MERCURE DE FRANCE
le Champ Electoral , entre Varsovie et Vvola ,
leur Election seroit plus valide ; ils firent tous les
efforts imaginables , mais inutiles , afin d'y parvenir,
employant pour cet effet le fer et le feu.
Pendant ce temps-là on découvrit que les Ministres
de Russie et de Saxe entretenoient une
correspondance avec les Opposans; le Régimentaire
résolut là - dessus de les faire sortir de Varsovie,
et de les attaquer, en cas de refus , ce qu'il
fit , les Ministres Etrangers ne doivent jouir des
prérogatives du Droit des Gens , qu'aussi long.
temps qu'ils observent eux- mêmes les Loix qui
y sont attachéts.
Enfin les Opposans voyant qu'ils ne pouvoient
passer la Vistule , se retirerent dans un Bois , y
dressérent une espece de Kolo , et élurent un
Roy , mais quel Roy ? Un Etranger , un Prince
qui possede des Provinces hors du Royaume , et
qui a des Troupes sur pied , un Prince né d'une
Mere Luthérienne , un Prince enfin qui veut employer
ses Troupes pour réduire une Nation libre
, à une obéissance aveugle. Grand Dieu , à
quoi servent les Constitutions établies dans la
Diette de Convocation ? A quoi sert le serment
qu'on y a prêté ? A quoi sert cette Confédéra¬
tion si solemnelle, pour n'élire qu'un Piaste? &c.
Fait à Dantzick , le 10 Octobre 1733 .
Es faux rapports répandus dans le Public , à
l'occasion de ce qui s'est passé en Pologne
pendant l'interregne , les insinuations injustes ,
et malicieuses dont les ennemis du repos de la
République ont tâché de noircir ma conduite ,
J. Vel.
DECEMBRE. 1733 2705
en m'accusant d'avoir gouverné le Royaume d'une
maniere affectée et interessé , ont arrêté la liberté
des suffrages et violé les droits sur lesquels cette
liberté est fondée , et la necessité enfin de faire
voir au Monde entier que nos ennemis par de
pareils procedez , n'ont eu et n'ont encore pour
but que de ruiner et renverser totalement les
droits , les prérogatives et la liberté de notre
chere Patrie , sont des motifs trop pressans , pour
que je differe plus long- temps à justifier ma
conduite , afin de convaincre tout l'Univers par
une narration succincte et sincere de ce qui s'est
passé avant et après l'Election , la fausseté de ce
qu'on a publié de contraire,
Mon premier soin , depuis la mort du Roy
Auguste, de glorieuse memoire , a été de concilier
et de réunir nos Freres , et j'eus le bonheur
d'y réussir . Je n'entrepris rien que
du consentement
et de l'aveu du Sénat et de la Noblesse encore
assemblée à l'occasion de la Diette extraor
dinaire, convoquée par le feu Roy; j'envoyai des
Ministres aux Cours voisines , je tins de fréquens
Conseils avec les Sénateurs et les Minis
tres des deux Nations ; je ne signai que ce qui
avoit été unanimement résolu ; je pris les mesu
res convenables avec les Régimentaires des deux
Nations pour assurer la sureté interieure et exte
rieure du Royaume et prévenir les inconvéniens
qui pourroient résulter des Assemblées particu
lieres et illicites ; en un mot , afin de n'avoir
rien à me reprocher , je communiquai tout à la
République et ne fis rien sans son approbation ,
quoiqu'en qualité de Primat j'usse pû m'en dis
penser en bien des choses.
Le jour de l'assemblée de la Diette de Convo
Cation étant yenu , je me contentai d'y represen
J. Vol.
2756 MERCURE DE FRANCE
ter le danger auquel le Royaume se trouvoit ex
posé , et je laissai à la prudence d'une Nation libre
le soin de le prévenir. Il y eut au commence
ment de cette Diette de grands débats pour l'E
Jection d'un Maréchal ; les esprits parurent fort
animez , ce qui dura quelques jours et retarda
l'expedition des affaires ; mais par mes soins et
ceux du Sénat , le calmne fut enfin rétabli ; on
élût le Maréchal , et la Noblesse se joignit ensui
te au Sénat ; en qualité de Primat j'écoutai les
avis des Nonces, et me conformai à ce qu'ils désiroient
et à ce qu'ils rejettoient. Le principal
objet de leur délibération regardoit la résolution
prise cy- devant, d'exclure du Trône tout Piaste;
ils ressenroient vivement l'injustice d'une telle
résolution ; ils voyoient , avec indignation , la
honte qui en résultoit à la Nation ; et afin de le
rendre plus efficace , on résolut de le confirmer
par un serment. Cette résolution passa aussi unanimement.
Il est vrai qu'il y a eu à ce sujet des
débats tres vifs , mais ils n'ont eu pour objet que
le formulaire du Serment , et non le Serment
même. Après qu'en qualité de Primat , j'eus
prêté ce Serment , par lequel non seulement
tout Erranger , mais aussi tous ceux qui posse
dent des Provinces Etrangeres , ou qui ont des
Troupes sur pied , qui ne sont pas nez de peres et
de meres Catholiques , sont exclus du Trône.
Les Evêques, Sénateurs et autres le prêterent après
moi , et le firent tous avec joie et sans la moindre
contrainte Les Evêques jurerent aussi qu'ils
m'empiéteroient point sur les Droits du Primat.
La République déclara ensuite ce Serment com
me une Loy fondamentale du Royaume. Oa
dressa quelques Constitutions , et on fixa le jour
pour la Diette d'Election, au lieu ordinaire, con
CI. Vol.
forDECEMBRE.
1733 2707
formément aux Droits ; c'est par là que finit la
Diette de Convocation.
En attendant ce jour important je m'abstins de
toute intrigue , préjudiciab.e à la République ,
et bien loin que je fusse porté par un amour
aveugle pour aucun particulier, l'évitai avec soin
d'entrer dans aucune faction , j'avoue cepen ant
que je souhaitois fort que le Serenissime Roy
Stanislas fut élevé au Trône; je l'en croyois tres
digne, et même plus qu'aucun autre , à cause de
ses éminentes qualitez ; mais je declare en même.
temps que quelque fussent mes souhaits , mon
obstination n'alloit pas jusqu'à le vouloir au
préjudice de la République. J'avois mis toute
ma confiance en Dieu ; c'est par son secours et
celui de la libre Nation Polonoise que j'esperois
voir finir les maux de la République par l'E
lection d'un Roy désiré.
On me fit des offres avantageuses , on me fir
même des menaces , mais je rejettai les premieres
et méprisai les autres ; je n'ai jamais voulų
donner les mains directement ni indirectement
à l'entrée de quelqu'Armée Etrangere. J'ai rejetté
constamment les Instances faites par les
Ministres des Puissances voisines, pour une exclusion
, parce que je voyois qu'elle n'avoit pour
but que leur interêt et leur utilité particuliere ,
et qu'une pareille exclusion ne pouvoit être que
deshonorable à la République et tendre à sa totale
ruine . Comme lesdites Puissances ne laissoient
pas de continuer leurs Instances à ce sujet
, je m'apperçûs bien- tôt qu'on avoit dessein
d'enfoncer le Poignard dans le sein de notre -
berté . J'écrivis pour cet effet au nom de la République
, representée par ceux que les deux Na-
Lions avoient nommés à la Diette de Convoca-
I. Vol. tion
2708 MERCURE DE FRANCE
tion , pour me servir de conseil , à toutes le
Cours de l'Europe , pour les prier de ne pas per
mettre qu'on opprimâ: la Répub ique , d'envoir
des Ministres à S. M 1. et à l'Illustrissime Czarine
pour leur representer que nout ctions une
Nution libre que nous ne dépen tions de personne
, que nous ne permettrions jamais qu'on
donna: Pexclusion , les pliant de se désister de
leurs Instances à ce sujet , et de ne pas se mêlet
de notre Election qui ne dépend que de nous
seuls .
Le jour de l'ouverture de la Diette d'Election
étant venu , je n'eus en vue que l'exacte exécution
des Loix établies dans la Diette de Convocation
, en ce qui regarde l'Election et le maintien
inviolable de la liberté de la Patrie , les commencemens
de cette Diette furent fort paisibles,
et le Maréchal fut élû en peu de jours ; mais cette
tranquilité ne , dura guere ; les esprits s'échaufferent
à la nouvelle de l'entrée des Russiens
dans le Royaume , certifiée et affirmée par le
Chancelier et Régimentaire de Lithuanie toute
l'Assemblée en fut troublée , on fut surpris de
la conduite du Régimentaire en cette occasion ,
et après plusieurs Discours qui ne pouvoient lui
être agréables , on résolut de ne rien négliger
pour découvrir ceux qui avoient appellé les Russiens
dans le Royaume .
·
La peur ayant saisi le Régimentaire , apparemment
par un remords de conscience , il quitta
le Champ Electoral, sans faire aucune protes-
Lation et se retira à Praage,
-On lui envoya des Députez pour demander la
cause de sa Retraite ; sa réponse fut que sa Retraite
ne troubleroit en aucune maniere l'Elec
tion .
I. Vol. Peu
DECEMBRE . 1733. 2709
Peu de jours après, les Etats dresserent un Manifeste
contre ceux qui avoient appellé les Kussiens
dans le Royaume. Nous résolumes là - dessus
de proceder incessament à l'Election ,
selon
la teneur de la Constitution de la Diette de Convocation
, qui porte que l'Election se feroit dans
le terme le plus court qu'il seroit possible , mais
qu'au cas qu'elle ne se pût faire si- tôt qu'on le
souhaiteroit , la Diette ne dureroit neanmoins
que six semaines.
·
Avant que de proceder à l'Acte d'Election je
parcourus , à Cheval , selon le Cérémonial , les
Palatinats , les Starosties et les Districts assemblez
, pour
leur demander quel Roy ils souhaitoient
, et pour leur notifier en même temps
que la Proclamation se feroit le lendemain . Pendant
que j'en faisois le tour , on n'entendit
crier par tout que Vive le Roy Stanislas. Je conviens
cependant qu'il paroissoit qu'il y en avoit
quelques- uns qui y étoient contraires , ceux - cy
se retirreent dans leurs Quartiers, apparemment
pour y dresser le Niepozvalam.
Le lendemain j'achevai le tour des Palatinats , *
Starosties et Districts , je fus obligé dele faire à
pied , mon Cheval étant devenu ombrageux
par les cris réiterez de Vive le Roy Stanislas . Ces
cris se redoublerent avec tant de zéle que je ne
pus m'empêcher de me conformer aux pressantes
Instances de l'Assemblée , et de proceder incessamment
à la nomination du Roy ; mais
avant que de le faire, je déclarai absens ceux qui
s'étoient rendus à Praage ; et comme il ne paroissoit
personne pour contre- dire , car les uns se
tûrent , les autres partirent pour leurs Terres .
parmi ces derniers , le Staroste Opoczynski
1. Vol. ᏗᏤ gu
H
2710 MERCURE DE FRANCE
qui m'assura par une Lettre , qu'il s'étoit retiré
sans contradiction .
Je procedai , en vertu de ma Charge , à la no
mination du Roy , mais je fus interrompu park:
S.Kamienski, Capitaine du District de Krziemit,
dans le Palatinat de Vobhinie , qui me présenta
son Niepozwalam , ce qui m'obligea à garder k
silence pendant quelque temps , jusqu'à ce que
s'étant enfin désisté de sa contradiction , je pro
clamé le Serenissime Roy Stanislas , à present
regnant , sans aucune opposition , dont Dieu ,
qui connoît ce qu'il y a de plus caché dans nos
coeurs , est le témoin , ainsi que le Peuple , con
sistant en plus de 100 Enseignes , et criant una
nimement et sans cesse ; Vive le Roy Stanislas,
Je regarde comme un bonheur particulier d'
voir proclamé pour Roy , celui que des Nation
envieuses ont voulu exclure du Trône ; car
elles avoient réussi dans leur dessein , c'éto
fait à jamais de notre liberté , on nous auro
toujours forcé à élire un Roy à leur gré.
Voilà le récit sincere et veritable de tout
qui s'est passé à l'égard de l'Election de not
Roy , cependant , quelqu'unanime et légitin
qu'ait été cette Election , il se trouve de fau
Freres qui la révoquent en doute ; ils osent avar
cer qu'elle n'a été faite qu'en violant la liberté
et par là , ainsi que par toute la conduite qu'i
ont tenue depuis leur retraite à Praage , ils for
voir évidemment qu'ils ont appellé les Russier
dans le Royaume , ce qui les rend coupables e
tant de sang innocent qui sera peut- être vers
Mais supposé qu'il se soit trouvé quelques Pa
sonnes d'un sentiment opposé , le nombre e
étoit tres- petit , et elles n'ont paru que le jo
I.Vel
.qu'o
DECEMBRE. 1732. 2711
qu'on annonçoit au Peuple la prochaine Election
fixée au lendemain , et non le jour de la nomination
du Roy , qui , selon les Loix ou l'usage
ne se fait jamais à Cheval , mais dans les Tran
chées ou Quartiers préparez pour cet effet , et
où il étoit libre encore à ceux qui vouloient contredire
, d'exhiber leur Niepozvalam.
Les Ennemis du Roy voulant exécuter les pernicieux
desseins qu'ils avoient tramez à Praage ,
allérent joindre les Russiens , et formérent entr'eux
une prétendue République, ou, pour mieux
dire ,un Complot tumultueux de gens qui s'é
tant déclarez eux - mêmes Ennemis de la Patrie ,
en conséquence du Manifeste qu'ils avoient signé
, ne cherchent qu'à renverser la liberté , en
opprimant la veritable et innocente République.
Ce qu'il y a de plus déplorable , c'est qu'il se
trouve parmi eux des Apôtres du Seigneur , des
Evêques , qui comme Judas , trahissent leur propre
Mere , c'est- à- dire , leur Patrie. Ce sont ces.
Evêques qui coupables d'un triple parjure endure
cissent encore davantage les coeurs des Seigneurs
séculiers , en autorisant leur témérité ,
en leur faisant accroire qu'elle est juste et per
mise.
Les Opposans retournerent enfin à Praage ; Ils,
s'imaginoient que pourvu qu'ils pûssent proceder
à une nouvelle Election avant l'échéance des
six semaines que la Diette pouvoit durer , cette
Election seroit légitime ; mais ce terme n'ayant
point été établi comme une Loy , mais comme
une prolongation , au cas qu'on ne pût parvenir
plutôt à une Election , ne peut être regardé que
comme une chimere , puisque l'Election avoit
Jéja été faite légitimement et selon les Loix. Ils
crurent aussi que s'ils pouvoient se rendre sur
1
No I. Vol.
le Hij
2712 MERCURE DE FRANCE
le Champ Electoral , entre Varsovie et Vvola ,
leur Election seroit plus valide ; ils firent tous les
efforts imaginables , mais inutiles , afin d'y parvenir,
employant pour cet effet le fer et le feu.
Pendant ce temps-là on découvrit que les Ministres
de Russie et de Saxe entretenoient une
correspondance avec les Opposans; le Régimentaire
résolut là - dessus de les faire sortir de Varsovie,
et de les attaquer, en cas de refus , ce qu'il
fit , les Ministres Etrangers ne doivent jouir des
prérogatives du Droit des Gens , qu'aussi long.
temps qu'ils observent eux- mêmes les Loix qui
y sont attachéts.
Enfin les Opposans voyant qu'ils ne pouvoient
passer la Vistule , se retirerent dans un Bois , y
dressérent une espece de Kolo , et élurent un
Roy , mais quel Roy ? Un Etranger , un Prince
qui possede des Provinces hors du Royaume , et
qui a des Troupes sur pied , un Prince né d'une
Mere Luthérienne , un Prince enfin qui veut employer
ses Troupes pour réduire une Nation libre
, à une obéissance aveugle. Grand Dieu , à
quoi servent les Constitutions établies dans la
Diette de Convocation ? A quoi sert le serment
qu'on y a prêté ? A quoi sert cette Confédéra¬
tion si solemnelle, pour n'élire qu'un Piaste? &c.
Fait à Dantzick , le 10 Octobre 1733 .
Fermer
Résumé : MANIFESTE du Primat de Pologne.
En décembre 1733, le Primat de Pologne publie un manifeste pour répondre aux accusations portées contre lui concernant sa conduite pendant l'interrègne. L'auteur, J. Vel., réfute les insinuations selon lesquelles il aurait gouverné de manière intéressée et violé les droits de la République. Il affirme avoir agi dans l'intérêt du royaume, en conciliant les frères et en prenant des mesures avec l'approbation du Sénat et de la Noblesse. Il mentionne avoir envoyé des ministres aux cours voisines et avoir pris des mesures pour assurer la sécurité intérieure et extérieure du royaume. Le Primat décrit les événements entourant l'élection du roi, soulignant les débats initiaux et les efforts pour rétablir le calme. Il précise avoir écouté les avis des nonces et s'être conformé à leurs désirs. La principale résolution prise fut l'exclusion des Piastes du trône, confirmée par un serment. Il déclare avoir souhaité l'élection de Stanislas, mais sans préjudice pour la République. Il rejette les offres et menaces des puissances étrangères visant à influencer l'élection. Le manifeste détaille les actions entreprises pour maintenir la liberté de la Pologne et la légitimité de l'élection de Stanislas. Il mentionne les tentatives des opposants de contester l'élection et leur alliance avec les Russiens. Le Primat conclut en affirmant la légitimité de l'élection de Stanislas et en dénonçant les actions des opposants, qu'il qualifie de traîtres à la patrie. Un autre document, daté du 10 octobre 1733 et rédigé à Dantzick, dénonce un prince possédant des provinces en dehors du Royaume et ayant des troupes armées. Ce prince, né d'une mère luthérienne, souhaite utiliser ses troupes pour soumettre une nation libre à une obéissance aveugle. Le texte s'interroge sur l'utilité des constitutions établies lors de la Diète de Convocation, du serment prêté et de la solennelle confédération, qui semblent n'avoir servi qu'à élire un Piaste.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
18
p. 207-210
ALLEMAGNE.
Début :
L'Impératrice de Russie a envoyé à tous ses Ministres dans les [...]
Mots clefs :
Dantzig, Impératrice de Russie, Ministres, Roi de Prusse, Attaques, Riposte, Vaisseaux, Dresde, Ordonnance, Recrues, Ordonnances du roi de Prusse, Francfort, Haut-Palatinat, Prise de la ville, Fuite des habitants, Warendorf, Maréchal d'Estrées, Camps militaires, Ennemis
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ALLEMAGNE.
ALLEMAGNE.
DE DANTZICK , le 24 Mai.
L'IMPERATRICE de Ruffie a envoyé à tous fes
Miniftres dans les Cours Etrangeres le refcrit fuivant
. « Ayant déja témoigné fuffisamment par
» plufieurs Déclarations à toutes les Cours , com-
» bien Nous fommes mécontente de la maniere
» dont le Roi de Pruffe attaque nos Alliés , & que
» Nous fommes réfolue de faire une puiffante di-
» verfion pour leur fecours ; Nous ne le répéteront
point ici. Mais comme on ne peut aider
» nofdits Alliés ni détourner de chez eux le
» fléau de la guerre , qu'en attaquant pareille-
>> ment le Roi de Pruffe dans fes poffeffions ,
» Nous avons ordonné de bloquer d'abord tous
» les Ports de fon Royaume , afin d'y empêcher
» toute entrée & fortie de provifions , & même
» tout commerce , fuivant Pufage de la guerre.
» Ainfi S. M. Imp. charge tous fes Miniftres dans
» les Cours Etrangeres , de communiquer ceci ,
» en ajoutant que nonn--ffeulement on ne permettra
» à aucun Bâtiment d'entrer dans les Ports Pruf-
» fiens ; mais que même , fi quelque Maître de
Navire fe laiffoit employer pour y tranfporter
» des troupes Pruffiennes , de l'artillerie ou des
munitions de guerre, le Bâtiment fera , felon les
208 MERCURE DE FRANCE.
» loix de la guerre , déclaré de bonne prife , fans
» autre formalité. Et l'on a donné en conféquence
>> une note à tous les Miniftres Etrangers , qui
» réfident à Petersbourg. »
Conformement à ce recit , plufieurs Vaiffaux
de l'Impératrice de Ruffie croifent depuis quelques
jours devant les Ports de Memel & de Pillau
, & dans les environs de l'Ile de Hela , fituée
à l'embouchure de la Viftule. Ils fe font emparés
de quatre Navires Pruffiens , dont deux alloient de
Konifberg à Stettin. Les équipages de quelques
Bâtimens ont rapporté qu'ils avoient rencontré
dix-huit Galeres chargées de troupes Ruffiennes ,
faifant route vers la Poméranie .
DE DRESDE , le 2 Juin.
Par une nouvelle Ordonnance , qui vient d'être
fignifiée aux différens cercles de cet Electorat ,
le Directoire Général de Torgau leur demande
une nouvelle fourniture de recrues , montant à
quatre mille deux cens hommes. Il exige que chaque
homme ait au moins cinq preds cing pouces
de hauteur , & qu'aucun ne foit au-deffous de
vingt ans , ni au-deffus de trente ; & qu'ils foient
tout- prêts à être livrés dans trois ſemaines.
On affure que la nuit du 27 au 28 du mois dernier
les troupes Autrichiennes , qui font dans
Prague , ont fait une feconde fortie. Divers avis
confirment que dans celle du 24 elles ont tué
beaucoup de monde aux Pruffiens.
Il paroît deux nouvelles Ordonnances du Roi
de Pruffe. Par la premiere , ce Prince demande
à la Nobleffe de l'Electorat de Saxe une avance de
fix cens mille écus , qu'il promet de rembourfer
après la guerre. La feconde porte que , fi léshaJUILLET.
1757. 209
bitans de Léipfick ne fourniffent pas fans délai la
fomme qui leur a été impofée , on arrêtera dix
d'entr'eux , pris en partie parmi les Magiftrats ,
en partie dans le Corps des Négocians , & que
ces dix perfonnes feront détenues en priſon jufqu'à
l'entier paiement de cette fomme.
DE FRANC FORT , les Juin .
Par les lettres reçues du haut- Palatinat , on a
appris qu'un Corps de 1500 Pruffiens s'eft emparé
de la petite ville de Scwabach , appartenante au
Margrave d'Anfpach , & qu'enfuite ce Corps s'étant
préfenté aux portes de Nuremberg , il a demandé
que les habitans de cette derniere Ville
euffent à déclarer s'ils étoient amis ou ennemis ,
& au cas qu'ils priffent le premier parti , qu'ils
remiffent toute l'artillerie de la Place , finon
qu'on agiroit hoftilement contr'eux. Les villes
de Bamberg & d'Aichfted font dans la derniere
frayeur. Prefque tous les habitans prennent la
fuite. Cependant le bruit vient de fe répandre que
ce détachement Pruffien s'étoit retiré . pour fe
porter dans la Principauté d'Anſpach.
DE WAREN DORFF , le 7 Juin.
9
Le Maréchal d'Eftrées a porté l'armée du Roi
fur l'Embs où elle eft campée en différens
Corps , dont les mouvemens ont été fucceffifs . Il
a laiffé à Tellight une réſerve de huit Bataillons de
Grenadiers Royaux , & d'un Régiment de Dragons.
L'abondance des pluies a tellement gâté les
chemins , que ce Géneral n'a pu encore être joint
par le Corps féparé , que commande le Prince de
Soubize.
Les ennemis fe font raffemblés à Brackwede . Ils
campent fur deux lignes , ayant devant leur cen210
MERCURE DE FRANCE.
tré ce village , & en avant un ruiffeau & des ma→ :
rais. Le Duc de Cumberland a laiffé douze cens
hommes dans Rittberg , dont les abords font
aufà très marécageux.
DE DANTZICK , le 24 Mai.
L'IMPERATRICE de Ruffie a envoyé à tous fes
Miniftres dans les Cours Etrangeres le refcrit fuivant
. « Ayant déja témoigné fuffisamment par
» plufieurs Déclarations à toutes les Cours , com-
» bien Nous fommes mécontente de la maniere
» dont le Roi de Pruffe attaque nos Alliés , & que
» Nous fommes réfolue de faire une puiffante di-
» verfion pour leur fecours ; Nous ne le répéteront
point ici. Mais comme on ne peut aider
» nofdits Alliés ni détourner de chez eux le
» fléau de la guerre , qu'en attaquant pareille-
>> ment le Roi de Pruffe dans fes poffeffions ,
» Nous avons ordonné de bloquer d'abord tous
» les Ports de fon Royaume , afin d'y empêcher
» toute entrée & fortie de provifions , & même
» tout commerce , fuivant Pufage de la guerre.
» Ainfi S. M. Imp. charge tous fes Miniftres dans
» les Cours Etrangeres , de communiquer ceci ,
» en ajoutant que nonn--ffeulement on ne permettra
» à aucun Bâtiment d'entrer dans les Ports Pruf-
» fiens ; mais que même , fi quelque Maître de
Navire fe laiffoit employer pour y tranfporter
» des troupes Pruffiennes , de l'artillerie ou des
munitions de guerre, le Bâtiment fera , felon les
208 MERCURE DE FRANCE.
» loix de la guerre , déclaré de bonne prife , fans
» autre formalité. Et l'on a donné en conféquence
>> une note à tous les Miniftres Etrangers , qui
» réfident à Petersbourg. »
Conformement à ce recit , plufieurs Vaiffaux
de l'Impératrice de Ruffie croifent depuis quelques
jours devant les Ports de Memel & de Pillau
, & dans les environs de l'Ile de Hela , fituée
à l'embouchure de la Viftule. Ils fe font emparés
de quatre Navires Pruffiens , dont deux alloient de
Konifberg à Stettin. Les équipages de quelques
Bâtimens ont rapporté qu'ils avoient rencontré
dix-huit Galeres chargées de troupes Ruffiennes ,
faifant route vers la Poméranie .
DE DRESDE , le 2 Juin.
Par une nouvelle Ordonnance , qui vient d'être
fignifiée aux différens cercles de cet Electorat ,
le Directoire Général de Torgau leur demande
une nouvelle fourniture de recrues , montant à
quatre mille deux cens hommes. Il exige que chaque
homme ait au moins cinq preds cing pouces
de hauteur , & qu'aucun ne foit au-deffous de
vingt ans , ni au-deffus de trente ; & qu'ils foient
tout- prêts à être livrés dans trois ſemaines.
On affure que la nuit du 27 au 28 du mois dernier
les troupes Autrichiennes , qui font dans
Prague , ont fait une feconde fortie. Divers avis
confirment que dans celle du 24 elles ont tué
beaucoup de monde aux Pruffiens.
Il paroît deux nouvelles Ordonnances du Roi
de Pruffe. Par la premiere , ce Prince demande
à la Nobleffe de l'Electorat de Saxe une avance de
fix cens mille écus , qu'il promet de rembourfer
après la guerre. La feconde porte que , fi léshaJUILLET.
1757. 209
bitans de Léipfick ne fourniffent pas fans délai la
fomme qui leur a été impofée , on arrêtera dix
d'entr'eux , pris en partie parmi les Magiftrats ,
en partie dans le Corps des Négocians , & que
ces dix perfonnes feront détenues en priſon jufqu'à
l'entier paiement de cette fomme.
DE FRANC FORT , les Juin .
Par les lettres reçues du haut- Palatinat , on a
appris qu'un Corps de 1500 Pruffiens s'eft emparé
de la petite ville de Scwabach , appartenante au
Margrave d'Anfpach , & qu'enfuite ce Corps s'étant
préfenté aux portes de Nuremberg , il a demandé
que les habitans de cette derniere Ville
euffent à déclarer s'ils étoient amis ou ennemis ,
& au cas qu'ils priffent le premier parti , qu'ils
remiffent toute l'artillerie de la Place , finon
qu'on agiroit hoftilement contr'eux. Les villes
de Bamberg & d'Aichfted font dans la derniere
frayeur. Prefque tous les habitans prennent la
fuite. Cependant le bruit vient de fe répandre que
ce détachement Pruffien s'étoit retiré . pour fe
porter dans la Principauté d'Anſpach.
DE WAREN DORFF , le 7 Juin.
9
Le Maréchal d'Eftrées a porté l'armée du Roi
fur l'Embs où elle eft campée en différens
Corps , dont les mouvemens ont été fucceffifs . Il
a laiffé à Tellight une réſerve de huit Bataillons de
Grenadiers Royaux , & d'un Régiment de Dragons.
L'abondance des pluies a tellement gâté les
chemins , que ce Géneral n'a pu encore être joint
par le Corps féparé , que commande le Prince de
Soubize.
Les ennemis fe font raffemblés à Brackwede . Ils
campent fur deux lignes , ayant devant leur cen210
MERCURE DE FRANCE.
tré ce village , & en avant un ruiffeau & des ma→ :
rais. Le Duc de Cumberland a laiffé douze cens
hommes dans Rittberg , dont les abords font
aufà très marécageux.
Fermer
Résumé : ALLEMAGNE.
En 1757, l'impératrice de Russie a exprimé son mécontentement face aux attaques du roi de Prusse contre ses alliés. Elle a ordonné le blocus des ports prussiens, empêchant toute entrée ou sortie de provisions et de commerce. Des vaisseaux russes patrouillaient devant Memel, Pillau et l'île de Hela, capturant quatre navires prussiens. Des troupes russes se dirigeaient vers la Poméranie. À Dresde, le Directoire Général de Torgau a réclamé 4 200 nouvelles recrues, âgées de 20 à 30 ans et mesurant au moins cinq pieds cinq pouces. Les troupes autrichiennes à Prague avaient lancé des sorties contre les Prussiens. Le roi de Prusse a exigé des avances financières de la noblesse saxonne et des habitants de Leipzig, menaçant d'arrestations en cas de refus. À Francfort, un corps de 1 500 Prussiens avait pris la ville de Schwabach et menacé Nuremberg, avant de se retirer vers la Principauté d'Anspach. À Waren Dorff, le maréchal d'Estrées a déplacé l'armée du roi sur l'Embs, malgré des conditions météorologiques défavorables. Les ennemis étaient rassemblés à Brackwede, et le duc de Cumberland avait laissé 1 200 hommes à Rittberg.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
19
p. 196
De Leipsick, le 6. Décembre.
Début :
On mande de Cassel que les Troupes Hanovriennes sont rentrées dans la Hesse, [...]
Mots clefs :
Troupes, Provisions, Comte, Députation royale, Roi de Prusse, Ministres
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De Leipsick, le 6. Décembre.
De Leipfick, le 6. Décembre.
On mande de Caffel que les Troupes Hanovriennes
font rentrées dans la Heffe , au mo .
ment qu'elle a été évacuée par les François ;
que ce Pays eft fi dépourvû de Vivres , qu'on eft
obligé d'y en faire tranfporter de l'Electorat
d'Hanovre , & que la difficulté des tranſports
eft fi grande , qu'on eft perfuadé que ces Trouferont
forcées d'aller hiverner ailleurs.
pes
Les Troupes que le Comte de Dohna doit commander,
continuent de paffer par cette Ville; & nos
Magiftrats ne font occupés qu'à leur faire fournir
les Rations néceffaires de Vivres & de Fourages.
Du 8.
On mande de Dreſde que le Général Borch a
fait publier un écrit que l'on dit être émané de
la grande Députation Royale. Il y eft dit que
la
Saxe ne doit plus être regardée comme un fimple
dépôt remis entre les mains du Roi de Pruffe , &
que ce Prince eſt fondé à traiter déformais cet
Electorat comme un Pays conquis , l'ayant pris
für fes Ennemis par la force des armes.
Le Roi de Pruffe a donné ordre , que l'on mit
en féqueftre tous les biens des Miniftres d'Etat du
Roi de Pologne , Electeur de Saxe , pour dédom
mager les Comtes de Podewils & de Dohna ,
des pertes qu'ils ont fouffertes de la part des
Ruffes & des Suédois.
On mande de Caffel que les Troupes Hanovriennes
font rentrées dans la Heffe , au mo .
ment qu'elle a été évacuée par les François ;
que ce Pays eft fi dépourvû de Vivres , qu'on eft
obligé d'y en faire tranfporter de l'Electorat
d'Hanovre , & que la difficulté des tranſports
eft fi grande , qu'on eft perfuadé que ces Trouferont
forcées d'aller hiverner ailleurs.
pes
Les Troupes que le Comte de Dohna doit commander,
continuent de paffer par cette Ville; & nos
Magiftrats ne font occupés qu'à leur faire fournir
les Rations néceffaires de Vivres & de Fourages.
Du 8.
On mande de Dreſde que le Général Borch a
fait publier un écrit que l'on dit être émané de
la grande Députation Royale. Il y eft dit que
la
Saxe ne doit plus être regardée comme un fimple
dépôt remis entre les mains du Roi de Pruffe , &
que ce Prince eſt fondé à traiter déformais cet
Electorat comme un Pays conquis , l'ayant pris
für fes Ennemis par la force des armes.
Le Roi de Pruffe a donné ordre , que l'on mit
en féqueftre tous les biens des Miniftres d'Etat du
Roi de Pologne , Electeur de Saxe , pour dédom
mager les Comtes de Podewils & de Dohna ,
des pertes qu'ils ont fouffertes de la part des
Ruffes & des Suédois.
Fermer
Résumé : De Leipsick, le 6. Décembre.
Le 6 décembre, les troupes hanovriennes ont occupé la rivière Heffe, abandonnée par les Français. La région souffre d'un manque de vivres, obligeant les troupes à se ravitailler depuis l'Électorat d'Hanovre. Les problèmes de transport pourraient forcer les troupes à passer l'hiver ailleurs. Parallèlement, les troupes du Comte de Dohna traversent Leipfick, où les autorités locales leur fournissent les rations nécessaires. Le 8 décembre, des nouvelles de Dresde rapportent que le Général Borch a publié un document de la grande Députation Royale. Ce texte déclare que la Saxe n'est plus un simple dépôt aux mains du Roi de Prusse, mais un pays conquis. Le Roi de Prusse a ordonné la confiscation des biens des ministres d'État du Roi de Pologne, Électeur de Saxe, pour compenser les pertes subies par les Comtes de Podewils et de Dohna face aux Russes et aux Suédois.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
20
p. 204-207
DE LONDRES, le 14 Janvier.
Début :
L'Escadre qui doit partir pour les Indes Orientales, escortera les Vaisseaux [...]
Mots clefs :
Indes orientales, Escadre, Vaisseaux, Sénégal, Détachement des troupes, New York, Armateur français, Port, Gouvernement, Ministres, Bengale, Lettres, Compagnie des Indes, Attaques, Amiral, Général Forbes, Combats, Fortifications, Résistance, Prisonniers de guerre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE LONDRES, le 14 Janvier.
DE LONDRES , le 14 Janvier.
L'Efcadre qui doit partir pour les Indes Orientales
, eſcortera les Vaiffeaux de la Compagnie. On
arme à Portsmouth quinze Vaifieaux de ligne , &
plufieurs autres Bâtimens fur lefquels on fait embarquer
des vivres pour huit mois. Un gros détachement
du corps de l'artillerie , qui a eu ordre
de partir de Wolwich le 8 de ce mois fera employé
fur cette flotte commandée par le Général
Bofcawen. On affure que ce grand armement a
pour objet uue expédition fecrette & étrangere au
plan d'opérations qui a été annoncé.
On a reçu des Lettres du Sénégal fur les côtes
MARS. 1759. 205
d'Afrique ces Lettres portent qu'un détache
ment de nos troupes ayant eu ordre de marcher
contre une Nation du Pays , qui eft fort attachée
aux François , avoit été battu , contraint de prendre
la fuite avec précipitation , après avoir eu
vingt- quatre hommes tués & vingt- fept bleffés ,
& que le Commandant en fecond a été du nombre
des morts.
Nous avons appris par des Lettres de la Nouvelle
York , qu'un Armateur François nommé
Chatileau , a établi fa croiſière le long des côtes
de cette Province , & qu'il s'y eft rendu fi redou
table , que tous les bâtimens fe tiennent renfermés
dans les Ports , par l'impoffibilité d'éviter la
rencontre. En deux mois de temps il a fait vingttrois
prifes confidérables . Le dernier navire dont
i s'eft emparé tranfportoit à Bofton cinquante
foldats avec leurs femmes. Ce Corfaire , après
l'avoir pillé a contraint le Capitaine de lui payer
deux cens livres fterlings de rançon .
Du 19
La Cour reçut dernierement des lettres de la
Haye , dans lesquelles le Général York rend compte.
des conférences qu'il a eues avec quelques Membres
du Gouvernement des Provinces Unies. II
paroît que les conteftations qui fe font élevées
au fujet de l'enlévement des Navires Hollandois
par nos Armateurs , s'aigriffent de plus en plus.
Notre Ministère voudroit bien terminer ce différend
a l'amiable ; mais il perlévére a exiger pour
condition , que les Etats- Généraux interdiront à
leurs Sujets un comm rce auquel il n'eft pas
à
préfumer qu'ils veuillent renoncer.
Les lettres écrites de Bengale en date du mois
de Mars 1758 , nous ont appris que dix vaiffeaux.
François arriverent à la rade de Pondicheri au
mois de Septembre 1757 , & y débarquerent le
206 MERCURE DE FRANCE.
Régiment de Lorraine , & qu'enfuite ces vaiffeaux
retournerent à l'Ile Maurice pour y prendre
d'autres troupes qu'ils y avoient laiffées. On
ajoute dans cette lettre que la fupériorité des
troupes Françoifes dans l'Inde donne beaucoup
à craindre pour nos établiffemens ; qu'on eſt
perfuadé que les François méditent quelque
grande entreprise , d'autant plus qu'à l'arrivée
des vaiffeaux de leur Compagnie des Indes , leur
marine ne fera point inférieure à la nôtre.
Nous avons été informés par des Lettres venues
de Guinée , qu'un Corfaire François avoit
foutenu un combat de quatre heures contre un
de nos vaiffeaux de guerre de 64 canons & une
de nos frégates de 28. Ce bâtiment nommé le
Comte de Saint Florentin , croifoit depuis quelque
temps le long de la Côte de Guinée , à deffein
d'enlever les navires Anglois employés à la traite
des Négres.
L'Amiral Saunders commandera la flotte qui
doit partir incellamment pour l'Amérique Sepsentrionnale.
Cette flotte eft compofée de qua
torze vaiffeaux de ligne & de deux frégates.
Le 20
>
Du 29.
an Courrier arrivé de la Haye apporta
la nouvelle de la mort de la Princelle
Anne , Fille aînée du Roi & Gouvernante des
Provinces- Unies.
Le 20 Décembre dernier on a appris par les
Lettres du Général Forbes , en date du 30 Novembre
1758 , que le
24
du même mois les Indiens
qui faifoient partie de la Garnifon Françoiſe
du Fort du Quefne , avoient pris querelle avec
les autres troupes de cette garnifon , & que leur
mécontentement avoit été fi grand , qu'ils étoient
fortis du Fort pour fe retirer bien avant dans les
terres ; qu'alors les François affoiblis par cette
MARS 1759.
207
déſertion , avoient pris le parti de faire fauter les
ouvrages , d'emmener l'artillerie & les munitions
, & de s'embarquer fur l'Ohio pour ſe rapprocher
des établiffemens qu'ils ont fur le Miffiffipi.
Ces Lettres ajoutent que le Général Forbes
averti de leur retraite , s'avança auffitốt pour
prendre poffeffion de la Place , qu'il en trouva
toutes les fortifications détruites & tous les effets
enlevés ; qu'il détacha quelque cavalerie légère
pour aller à la pourfuite des ennemis ; mais qu'on
ne put jamais les atteindre. Ainfi les François ont
perdu un Fort , & nos troupes n'ont gagné que
des ruines .
Du 3 Février.
Une chaloupe de guerre arrivée le 26. à Portf
mouth , nous a appris le fuccès de l'expédition
du fieur Keppel , Chef d'Eſcadre , fur les côtes
d'Afrique. Dans la route il effuya une tempête
violente qui difperfa fon efcadre , & trois des
navires qui la compofoient firent naufrage fur
les côtes de Barbarie ; mais cet accident ne l'empêcha
point de fuivre fon objet . Il arriva le 28
Décembre avec le refte de fon efcadre à la hauteur
de l'Ile de Gorée . Dès le jour fuiyant il attaqua
les forts occupés dans cette Ille par les
François. La réfiftance fut d'abord affez vive ;
mais l'attaque ayant continué avec ardeur , les
trois cens hommes qui étoient dans l'Ifle furent
contraints de fe rendre prifonniers de guerre.
L'Efcadre qui doit partir pour les Indes Orientales
, eſcortera les Vaiffeaux de la Compagnie. On
arme à Portsmouth quinze Vaifieaux de ligne , &
plufieurs autres Bâtimens fur lefquels on fait embarquer
des vivres pour huit mois. Un gros détachement
du corps de l'artillerie , qui a eu ordre
de partir de Wolwich le 8 de ce mois fera employé
fur cette flotte commandée par le Général
Bofcawen. On affure que ce grand armement a
pour objet uue expédition fecrette & étrangere au
plan d'opérations qui a été annoncé.
On a reçu des Lettres du Sénégal fur les côtes
MARS. 1759. 205
d'Afrique ces Lettres portent qu'un détache
ment de nos troupes ayant eu ordre de marcher
contre une Nation du Pays , qui eft fort attachée
aux François , avoit été battu , contraint de prendre
la fuite avec précipitation , après avoir eu
vingt- quatre hommes tués & vingt- fept bleffés ,
& que le Commandant en fecond a été du nombre
des morts.
Nous avons appris par des Lettres de la Nouvelle
York , qu'un Armateur François nommé
Chatileau , a établi fa croiſière le long des côtes
de cette Province , & qu'il s'y eft rendu fi redou
table , que tous les bâtimens fe tiennent renfermés
dans les Ports , par l'impoffibilité d'éviter la
rencontre. En deux mois de temps il a fait vingttrois
prifes confidérables . Le dernier navire dont
i s'eft emparé tranfportoit à Bofton cinquante
foldats avec leurs femmes. Ce Corfaire , après
l'avoir pillé a contraint le Capitaine de lui payer
deux cens livres fterlings de rançon .
Du 19
La Cour reçut dernierement des lettres de la
Haye , dans lesquelles le Général York rend compte.
des conférences qu'il a eues avec quelques Membres
du Gouvernement des Provinces Unies. II
paroît que les conteftations qui fe font élevées
au fujet de l'enlévement des Navires Hollandois
par nos Armateurs , s'aigriffent de plus en plus.
Notre Ministère voudroit bien terminer ce différend
a l'amiable ; mais il perlévére a exiger pour
condition , que les Etats- Généraux interdiront à
leurs Sujets un comm rce auquel il n'eft pas
à
préfumer qu'ils veuillent renoncer.
Les lettres écrites de Bengale en date du mois
de Mars 1758 , nous ont appris que dix vaiffeaux.
François arriverent à la rade de Pondicheri au
mois de Septembre 1757 , & y débarquerent le
206 MERCURE DE FRANCE.
Régiment de Lorraine , & qu'enfuite ces vaiffeaux
retournerent à l'Ile Maurice pour y prendre
d'autres troupes qu'ils y avoient laiffées. On
ajoute dans cette lettre que la fupériorité des
troupes Françoifes dans l'Inde donne beaucoup
à craindre pour nos établiffemens ; qu'on eſt
perfuadé que les François méditent quelque
grande entreprise , d'autant plus qu'à l'arrivée
des vaiffeaux de leur Compagnie des Indes , leur
marine ne fera point inférieure à la nôtre.
Nous avons été informés par des Lettres venues
de Guinée , qu'un Corfaire François avoit
foutenu un combat de quatre heures contre un
de nos vaiffeaux de guerre de 64 canons & une
de nos frégates de 28. Ce bâtiment nommé le
Comte de Saint Florentin , croifoit depuis quelque
temps le long de la Côte de Guinée , à deffein
d'enlever les navires Anglois employés à la traite
des Négres.
L'Amiral Saunders commandera la flotte qui
doit partir incellamment pour l'Amérique Sepsentrionnale.
Cette flotte eft compofée de qua
torze vaiffeaux de ligne & de deux frégates.
Le 20
>
Du 29.
an Courrier arrivé de la Haye apporta
la nouvelle de la mort de la Princelle
Anne , Fille aînée du Roi & Gouvernante des
Provinces- Unies.
Le 20 Décembre dernier on a appris par les
Lettres du Général Forbes , en date du 30 Novembre
1758 , que le
24
du même mois les Indiens
qui faifoient partie de la Garnifon Françoiſe
du Fort du Quefne , avoient pris querelle avec
les autres troupes de cette garnifon , & que leur
mécontentement avoit été fi grand , qu'ils étoient
fortis du Fort pour fe retirer bien avant dans les
terres ; qu'alors les François affoiblis par cette
MARS 1759.
207
déſertion , avoient pris le parti de faire fauter les
ouvrages , d'emmener l'artillerie & les munitions
, & de s'embarquer fur l'Ohio pour ſe rapprocher
des établiffemens qu'ils ont fur le Miffiffipi.
Ces Lettres ajoutent que le Général Forbes
averti de leur retraite , s'avança auffitốt pour
prendre poffeffion de la Place , qu'il en trouva
toutes les fortifications détruites & tous les effets
enlevés ; qu'il détacha quelque cavalerie légère
pour aller à la pourfuite des ennemis ; mais qu'on
ne put jamais les atteindre. Ainfi les François ont
perdu un Fort , & nos troupes n'ont gagné que
des ruines .
Du 3 Février.
Une chaloupe de guerre arrivée le 26. à Portf
mouth , nous a appris le fuccès de l'expédition
du fieur Keppel , Chef d'Eſcadre , fur les côtes
d'Afrique. Dans la route il effuya une tempête
violente qui difperfa fon efcadre , & trois des
navires qui la compofoient firent naufrage fur
les côtes de Barbarie ; mais cet accident ne l'empêcha
point de fuivre fon objet . Il arriva le 28
Décembre avec le refte de fon efcadre à la hauteur
de l'Ile de Gorée . Dès le jour fuiyant il attaqua
les forts occupés dans cette Ille par les
François. La réfiftance fut d'abord affez vive ;
mais l'attaque ayant continué avec ardeur , les
trois cens hommes qui étoient dans l'Ifle furent
contraints de fe rendre prifonniers de guerre.
Fermer
Résumé : DE LONDRES, le 14 Janvier.
Le 14 janvier, une flotte doit partir de Portsmouth pour escorter les vaisseaux de la Compagnie des Indes vers les Indes Orientales. Cette flotte, composée de quinze vaisseaux de ligne et plusieurs autres bâtiments, est armée pour une durée de huit mois. Elle est commandée par le Général Boscawen et rejoint par un détachement de l'artillerie parti de Woolwich le 8 janvier. Cette expédition semble cacher des intentions secrètes. Au Sénégal, un détachement de troupes françaises a été battu lors d'une opération contre une nation alliée des Français, subissant 24 morts et 27 blessés, dont le commandant en second. À New York, le corsaire français Chatileau terrorise les côtes en capturant 23 navires en deux mois, dont un transportant 50 soldats et leurs femmes vers Boston. Des tensions existent entre la France et les Provinces Unies concernant la capture de navires hollandais par des armateurs français. La France souhaite une résolution amiable mais exige que les États-Généraux interdisent ce commerce. En Inde, des lettres de Bengale signalent l'arrivée de dix vaisseaux français à Pondichéry en septembre 1757, débarquant le Régiment de Lorraine. Cette présence française est perçue comme une menace. En Guinée, un corsaire français a combattu pendant quatre heures contre un vaisseau de guerre britannique de 64 canons et une frégate de 28 canons. L'Amiral Saunders doit commander une flotte de 14 vaisseaux de ligne et 2 frégates pour l'Amérique du Nord. Le 29 décembre, un courrier de La Haye annonce la mort de la Princesse Anne, fille aînée du Roi et gouvernante des Provinces-Unies. Le 20 décembre, des lettres du Général Forbes rapportent qu'une mutinerie d'Indiens a forcé les Français à abandonner le Fort Duquesne. Le Général Forbes a pris possession des ruines mais n'a pas pu capturer les fugitifs. Le 3 février, une chaloupe de guerre rapporte le succès de l'expédition du Sieur Keppel en Afrique. Malgré une tempête ayant causé la perte de trois navires, Keppel a capturé l'île de Gorée, prenant 300 prisonniers français.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
21
p. 209-211
De Londres le 18 Avril.
Début :
L'escadre de l'Amiral Cornish, composée de quatre vaisseaux de guerre & de sept [...]
Mots clefs :
Escadre, Amiral, Vaisseaux, Guadeloupe, Port, Équipages, Recrutement, Violences, Députés, Ministres, Corsaires , Armements, Envoyé extraordinaire, Invasion, Général, Parlement, Emprunt
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De Londres le 18 Avril.
DE LONDRES le 18 Avril.
L'efcadre de l'Amiral Cornish , compofée de
quatre vaiffeaux de guerre & de fept vaiffeaux de
la Compagnie des Indes , partit le 14 du port de
Sainte-Helene. Nous ignorons abfolument le
fuccès de l'entrepriſe fur la Guadeloupe.
L'Amiral Bofcawen eft parti de Portsmouth
avec fix vaiffeaux de guerre pour le rendre à Plymouth
, où fon efcadre doit fe renforcer de quelques
autres bâtimens. Enfuite il mettra à la voile
& ira établir fa croifiere à la hauteur de Breft ,
pour obferver les mouvemens de la flote nombreufe
que les François arment dans ce port , &
qu'on affure devoir inceffamment mettre en
mer.
Du 20,
La néceffité de completter promptement les équi
pages de nos efcadres , continue de rencontrer de
grandes difficultés , & donne lieu à des violences
anouies. Comme on ne trouve plus perfonne à
enlever fur terre , on a pris le parti de fe jetter fur
tous les navires qui arrivent , pour en prendre de
force les matelots. Cette conduite a déja occafioné
du tumulte en divers endroits...
210 MERCURE DE FRANCE.
Du 4 Mai.
Lés Députés extraordinaires des Etats Généraux
ont de fréquentes conférences avec nos Miniftres.
Ils preffent vivement la reftitution des prifes. Elle
a été promife ; mais elle ne s'effectue point. Il s'eft
formé ici un parti confidérable pour foutenir les
intérêts des Corfaires Anglois , contre les plaintes
& les follicitations des propriétaires des navires,
enlevés à la Hollande.
La fâcheufe nouvelle de la bataille de Berghen ,
nous fut apportée le 24. Elle a répandu ici une
vraie confternation .
On continue à Portsmouth l'armement de la
flotte qui doit agir fur les côtes de France , & dont
l'Amiral Anfon prendra le commandement. C'eſt
fur le Royal-Georges que cet Amiral doit arborer,
fon pavilion . Ce vaiffeau de cent canons n'eft pas
encore tout-à-fait équipé , non - plus que quelques
autres qui feront partie de cette flotte . On efpere
cependant qu'elle fera en état de mettre à la voile
le 20 de ce mois.
Le Baron de Kniphaufen , Envoyé extraordinaire
du Roi de Pruffe , propofa dernierement
aux Miniftres du Roi de faire paffer en Allemagne
douze bataillons de nos troupes pour renforcer
l'armée des Alliés. Mais cette propofition fut rejettée
d'une maniere affez vive , par la raison que
l'Angleterre a befoin de toutes les forces pour les
oppofer aux projets d'invaſion dont elle eft me-
!
nacée.
On mande d'Edimbourg , qu'on y a reçu avis
que le Général Hopfon , après avoir détruit les
fortifications de Baffeterre dans l'Ifle de la Guadeloupe
, avoit fait rembarquer les troupes , & qu'il
fe difpofoit à les ramener en Angleterre.
On affure que le Parlement fera obligé de re
voquer la foufcription qui a été ouverte pour un
JUIN 1759 :
21 f
emprunt de fix millions fix cent mille livres fterlings.
On fe propofe de lui fubftituer un emprunt
રે quatre pour cent d'intérêt.
L'efcadre de l'Amiral Cornish , compofée de
quatre vaiffeaux de guerre & de fept vaiffeaux de
la Compagnie des Indes , partit le 14 du port de
Sainte-Helene. Nous ignorons abfolument le
fuccès de l'entrepriſe fur la Guadeloupe.
L'Amiral Bofcawen eft parti de Portsmouth
avec fix vaiffeaux de guerre pour le rendre à Plymouth
, où fon efcadre doit fe renforcer de quelques
autres bâtimens. Enfuite il mettra à la voile
& ira établir fa croifiere à la hauteur de Breft ,
pour obferver les mouvemens de la flote nombreufe
que les François arment dans ce port , &
qu'on affure devoir inceffamment mettre en
mer.
Du 20,
La néceffité de completter promptement les équi
pages de nos efcadres , continue de rencontrer de
grandes difficultés , & donne lieu à des violences
anouies. Comme on ne trouve plus perfonne à
enlever fur terre , on a pris le parti de fe jetter fur
tous les navires qui arrivent , pour en prendre de
force les matelots. Cette conduite a déja occafioné
du tumulte en divers endroits...
210 MERCURE DE FRANCE.
Du 4 Mai.
Lés Députés extraordinaires des Etats Généraux
ont de fréquentes conférences avec nos Miniftres.
Ils preffent vivement la reftitution des prifes. Elle
a été promife ; mais elle ne s'effectue point. Il s'eft
formé ici un parti confidérable pour foutenir les
intérêts des Corfaires Anglois , contre les plaintes
& les follicitations des propriétaires des navires,
enlevés à la Hollande.
La fâcheufe nouvelle de la bataille de Berghen ,
nous fut apportée le 24. Elle a répandu ici une
vraie confternation .
On continue à Portsmouth l'armement de la
flotte qui doit agir fur les côtes de France , & dont
l'Amiral Anfon prendra le commandement. C'eſt
fur le Royal-Georges que cet Amiral doit arborer,
fon pavilion . Ce vaiffeau de cent canons n'eft pas
encore tout-à-fait équipé , non - plus que quelques
autres qui feront partie de cette flotte . On efpere
cependant qu'elle fera en état de mettre à la voile
le 20 de ce mois.
Le Baron de Kniphaufen , Envoyé extraordinaire
du Roi de Pruffe , propofa dernierement
aux Miniftres du Roi de faire paffer en Allemagne
douze bataillons de nos troupes pour renforcer
l'armée des Alliés. Mais cette propofition fut rejettée
d'une maniere affez vive , par la raison que
l'Angleterre a befoin de toutes les forces pour les
oppofer aux projets d'invaſion dont elle eft me-
!
nacée.
On mande d'Edimbourg , qu'on y a reçu avis
que le Général Hopfon , après avoir détruit les
fortifications de Baffeterre dans l'Ifle de la Guadeloupe
, avoit fait rembarquer les troupes , & qu'il
fe difpofoit à les ramener en Angleterre.
On affure que le Parlement fera obligé de re
voquer la foufcription qui a été ouverte pour un
JUIN 1759 :
21 f
emprunt de fix millions fix cent mille livres fterlings.
On fe propofe de lui fubftituer un emprunt
રે quatre pour cent d'intérêt.
Fermer
Résumé : De Londres le 18 Avril.
Le 18 avril, l'escadre de l'Amiral Cornish a quitté Sainte-Hélène pour la Guadeloupe, tandis que l'Amiral Boscawen s'est dirigé vers Plymouth pour renforcer son escadre et surveiller la flotte française au large de Brest. Le 20 avril, des difficultés ont surgi pour compléter les équipages, entraînant des violences et des enlèvements forcés de matelots. Le 4 mai, les députés des États Généraux ont pressé la restitution des prises promises mais non effectuées, et la nouvelle de la bataille de Berghen a causé une consternation générale. À Portsmouth, l'armement de la flotte pour agir sur les côtes de France continue, sous le commandement de l'Amiral Anson à bord du Royal-Georges, avec une date de départ prévue le 20 mai. Le Baron de Kniphausen a proposé de transférer des troupes anglaises en Allemagne, mais cette proposition a été rejetée en raison des besoins de défense nationale. Le Général Hopkins a détruit les fortifications de Basse-Terre en Guadeloupe et se prépare à ramener ses troupes en Angleterre. Enfin, le Parlement envisage de révoquer un emprunt de six millions six cent mille livres sterling pour un emprunt à quatre pour cent d'intérêt.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
22
p. 180-186
DÉTAIL de tout ce qui s'est passé depuis l'arrivée de M. le Prince de LICHTENSTEIN jusqu'au 4.
Début :
M. le Prince de Lichtenstein arriva à Parme le 1 Septembre ; [...]
Mots clefs :
Prince du Lichtenstein, Infant, Audience, Palais, Prince Ferdinand , Ministres, Officiers, Audience publique, Comte, Marquis, Valets, Honneurs, Carosse, Bataillons, Armes, Pages, Dames, Noblesse, Empereur, Gentilshommes, Opéra, Infante
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DÉTAIL de tout ce qui s'est passé depuis l'arrivée de M. le Prince de LICHTENSTEIN jusqu'au 4.
DETAIL de tout ce qui s'eft paffé depuis l'arrivée
de M. le Prince de LICHTENSTEIN jufqu'au 4 .
M. le Prince de Lichtenſtein arriva à Parme le
1 Septembre ; auflitôt après , il fit informer M.
Dutillot , par un de fes Gentilshommes.
M. Dutillot fe tranfporta chez lui , & lui donna
l'heure que l'Infant avoit fixé pour fon audience
particuliere.
Cette audience fut le lendemain à midi & demi;
M.Dutillot alla prendre M. le Prince de Lichtenftein
au Palais Palavicini où il eſt logé , & l'amena
chez l'Infant , il le conduifit enfuite chez le Prince
Ferdinand , de là à l'appartement de Madame
Infante Ifabelle , où le trouva auffi Madame Louiſe ..
M.le Prince de Lichtenſtein, fut au fortir du Palais
, rendre la vifire à M. Dutillot ; fortit de chez
Ge Miniftre , & y revint dîner avec les Miniftres de
France , d'Espagne , de Turin , de Gènes & de
Malte ; M. le Comte de Neuilly , M le Bailli de
Breteuil , M. l'Abbé de Canillac & M. le Comte
de Mercy . Il amena avec lui les huit Chambellans
qui l'ont accompagné , & deux Officiers Majors..
OCTOBRE. 1760. 185
M. Dutillot avoit invité le Capitaine & le Major
des Gardes du Corps , le grand Ecuyer & le premier
Ecuyer de l'Infant , le Gouverneur du Frince
Ferdinand , des Gentilshommes de la Chambre ,
des Majordomes , des Dames du Palais , M. l'Evêque
de Plaifance , frere du feu Chancelier Criftiani
chargé par l'Infant , à caufe de la mort de
l'Evêque de Parme , de la cérémonie du mariage )
& quelques Perfonnes de la premiere Nobleffe du
Pays.
Après le dîner , M. de Lichtenftein retourna à
fon Hôtel , où il reçut des vifites .
Le troifiéme jour fixé pour l'Audience publique,
M. le Comte Peroli , Introducteur, partit du
Palais à onze heures & demie , dans un caroffe
de l'Infant attelé à huit chevaux ; ce caroffe étoit
précédé par un autre à fix chevaux ( vuide ) , &
fuivi par trois autres attelés à huit chevaux ; dans
chacun de ces caroffes , étoit un Majordome.
Un Officier de l'Ecurie étoit à cheval à la tête
de ce Cortége ; douze Valets de pied étoient fur
deux files aux deux côtés de la voiture de l'Infant
, où étoit M. l'Introducteur , trois derriere ce
carofie , & deux derriere chacun des autres .
Deux Palfreniers à cheval ſuivoient l'Officier
de l'Ecurie
M. le Comte Peroli fut dans cet ordre prendre
chez lui M. le Marquis Palavicini , premier Gentilhomme
de la Chambre , que l'Infant avoir
chargé de faire les honneurs à M. le Prince de
Lichtenſtein .
M. de Palavicini monta dans le même caroffe ,
dans lequel étoit venu M. le Comte Peroli ; ce
dernier lui donna la droite.
Ils furent dans le même ordre chez M. le Prin
ce de Lichtenſtein.
Ils monterent l'efcalier , fuivis des trois Majordomes
qui les avoient accompagnés : les
182 MERCURE DE FRANCE. 1
douze valets de pieds fuivoient fur deux files.
M. le Prince de Lichtenſtein étoit venu au-devant
d'eux, & avoit defcendu deux marches; il les conduifitjufques
à la chambre. MM . les Majordomest
refterent à la piéce la plus voisine de cette chambre
, où ils entrerent un moment après M. de
Palavicini & M. Peroli , à qui M. le Prince de
Lichtenſtein avoit fait partout les honneurs des
Portes.
On defcendit de chez M. le Prince , qui fit
toujours les honneurs à M. de Palavicini jufques
au bas de fon efcalier ; où étant arrivé , M. de
Palavicini lui fit les honneurs du caroffe , il y
monta , fe plaça feul dans le fond , M. de Pałavicini
fur le devant à droite , M. Peroli à gauche.
MM. les Majordomes firent également les
bonneurs des caroffes de l'Infant dans lesquels
ils étoient venus , aux huit Chambellans .
On fe mit en marche dans l'ordre fuivant :
Un Officier de l'Ecurie de l'Infant , & deur
Palfreniers à cheval.
Le caroffe de M. l'Introducteur , à fix chevaux ,
vuide.
Deux Suiffes , de M. le Prince de Lichtenſtein ,
à cheval.
24 Valets de pied.
6 Coureurs.
6 Heyducs.
12 Palfreniers , tenant chacun un cheval par la
bride.
9 Officiers , de la Maifon de M. le Prince , à
cheval.
Son Ecuyer.
& Pages, dont deux Hongrois, & fix Allemands
Quatre Gentilshommes.
Le caroffe de l'Infant , où étoit M. le Prince de
Lichtenſtein , M. de Palavicini & M. Peroli , 1 %
Valets de pied de l'Infant aux deux côtés.
OCTOBRE . 1760 . 184
Un grand caroffe d'entrée , à M. le Prince,
attelé à 8 chevaux.
Les trois caroffes de l'Infant , dont les Majordomes
faifoient les honneurs.
A une diſtance de 30 ou 40 pas , trois autres
carolles , à M. le Prince de Lichtenſtein , attelés à
huit chevaux .
Les rues étoient bordées , depuis l'Hôtel Palavicini
jufques au Palais , par les deux Bataillons du
Régiment de Parme habillés de neuf, à-peu-près
comme le Corps des Grenadiers de France
douze Compagnies de Grenadiers.
> &
Les Troupes préfentoient les armes , les tambours
rappelloient , & les Officiers ont falué du
chapeau .
La Garde du Palais étoit formée devant la
porte; elle préfentoit les armes ; les tambours rappelloient
, & les Officiers ont falué du chapeau.
12 Suifles des Portes étoient fous la voute de
l'entrée du Palais.
80 Hallebardiers de la Garde de S. A. R. bordoient
l'escalier fur deux files, depuis la premiere
marche juſques au pallier d'en- haut ; & les deux
portes qui donnent de ce pallier à l'appartement
de l'Infant & à celui de Madame Ifabelle , étoient
gardées par quatre de ces mêmes Hallebardiers ,
la hallebarde fur l'épaule.
M. Le Comte Rimbaldefi, Maître des Cérémonies,
vint recevoir M. le Prince au bas de l'efcalier
& marcha devant lui.
La Livrée de l'Infant précédoit fur deux files ;
celle de M. le Prince fuivoit ce Seigneur , qui mar
choit entre M. le Marquis Palavicini & l'Introducteur.
La Livrée de M. le Prince s'arrêta dans deur
anti-falles avec celle de l'Infant ; deux Suiffes de la
porte empêchoient celle des particuliers d'y entrer,
184 MERCURE DE FRANCE.
M. le Prince de Lichtenstein , toujours précédé
par le Maître des Cérémonies , & ayant M. de Pala
vicini à fa droite & l'Introducteur à ſa gauche, traverfa
la Salle des Gardes : les Gardes du Corps
étoient fous les armes. Le Capitaine des Gardes le
reçut à la porte de la Salle en dedans, prit la place
de M. l'Introducteur à côté de lui , & marcha
ainfi à toutes les Audiences. L'Introducteur s'étoit
avancé d'un pas , & marchoit à côté du Maître
des Cérémonies . M. le Prince étoit précédé par
les Officiers de fa Maiſon qui s'arrêterent dans la
prémiere antichambre après la Salle des Gardes ,
par les Pages qui s'arrêterent dans l'antichambre
après celle où étoient reftés les Officiers de fa
Maifon , & avant celle où étoient les Pages de
S. A. R. par fes quatre Gentilshommes qui entrerentjufques
dans la piéce du Sallon de l'Audience
de l'Infant ; & par les huit Chambellans de l'Empereur
qui les précédérent jufques aux pieds , da
Throne .
Toutes les Dames de la Nobleffe du Pays &
Etrangeres , s'étoient rendues le matin chez Madame
Ifabelle .
La Nobleffe de l'Etat , les Seigneurs les plus
diftingués d'Italie , & l'Infant , étoient placés autour
de fon thrône , & rempliffoient douze Piéces
que traverfa M. le Prince de Lichtenftein , depuis
celle où s'étoient arrêtés fes Pages juſques à la
porte de la Salle de l'Audience.
Certe Salle eft , très-vaffe , & avoit été richement
& galamment ornée ; le dais de l'Infant étoit au
fond , vis-à-vis de la porte , par où entra M. le
Prince de Lichtenftein .
Au moment où ce Seigneur parut dans la Salle,
S. A. R. fe leva du fauteuil , ou il étoit affis , falua
M. le Prince de Lichtenftein & remit fon chapeau.
M.le Prince fe couvrit , & expola l'objet de fa
million..
OCTOBRE. 1760. r&'s
M. le Comte de S. Vital fut envoyé , avec deux
Gentilshommes de la Chambre , & deux Majordomes
prendre Madame Infante Ifabelle dans fon
appartement. Elle entra dans la Salle d'audience
par une porte pratiquée à côté du dais, précédée des
perfonnes qui avoient été envoyées pour la chercher
, & fuivie par Madame de Gonzales , Madame
la Comteffe de Siffa , & cing Dames du Palais.
M. le Prince de Lichtenſtein s'adreſſant à Madame
Infante Ifabelle , lui répéta la demande qu'il
avoit faite à S. A. R. Madame fe tourna du côté de
l'Infant , comme pour lui demander fon approbation
; après quoi elle répondit à M. le Prince de
Lichtenſtein , & reçut de lui une Lettre de la main
de l'Archiduc , & le portrait de ce Prince ; enfuite
elle fe retira dans fon appartement.
L'Infant & M. le Prince de Lichtenstein resterent
découverts , tout le tems que Madame Infante
Ifabelle refta dans la Salle .
M. le Prince de Lichtenftein préfenta à l'Infant
Les huit Chambellans de l'Empereur.
M. le Prince de Lichtenſtein forrit de l'audience
de l'Infant dans le même ordre qu'il yétoit entré ,
& marcha dans ce même ordre à celle du Prince
Ferdinand ; le cérémonial y fut obfervé comme à
celle de l'Infant.
M. le Prince de Lichtenstein paffa de cette audience
à celle de Madame Infante Ifabelle. Tour y
fut obfervé comme aux précédentes, excepté que M.
le Prince ne fe couvrit qu'un moment , ôta fon chapeau
, & refta découvert julques à ce qu'il fortît.
Il paffa à l'Audience de Madame Louife où tout
fut exactement obfervé comme à celle de Madame
Infante Iíabelle.
Il fut conduit enfuite dans l'appartement qui
lui avoit été préparé à la Cour , par M. de Palavicini,
M. l'Introducteur & le Maître des Cérémo186
MERCURE DE FRANCE.
nies.Il y fut fuivi par quantité de Nobleſſe .
M. de Lichtenſtein arrivé dans cet appartement
, y fut vifité par un Gentilhomme de la
Chambre de la part dé l'Infant.
Un moment après , M. le Comte de S. Vital ,
fur auffi lui annoncer que S. A. R. le faifoit
traiter. Il lui préſenta en même- tems le Majordome
, le Comte de S. Vital , le Capitaine des
Gardes , le Gouverneur du Prince Ferdinand ,
des Gentilshommes de la Chambre , le Maître
des Cérémonies , l'Introducteur , quatre Chambellans
de l'Empereur , M. le Marquis Canoffa , &
quelques autres perfonnes de la Nobleſſe du Pays ,
& Allemande.
M. Le Prince fut fervi par les Officiers de l'Infant
, propofés pour fervir S. A. R. à table :
toutes les autres perfonnes furent fervies par la
livrée de S. A. R.
On ne s'étoit mis à table qu'après que l'Infant
eut dîné.
Après le repas , M. de Lichtenſtein paſſa chez
l'Infant lui faire une vifite , & en fortit un moment
après pour retourner dans ſon appartement,
où il reçut des vifites.
Afept heures & demie , on paffa au Théâtre
pour voir l'Opéra. L'Infant & Madame Ifabelle
furent , avec leur Cour , dans la grande loge du
milieu , appellée la loge de la Couronne. M. le
Prince de Lichtenſtein étoit , avec quelques Scigneurs
de fa fuite , dans celle qui eft la plus près
du Théâtre à droite.
Trois Majordomes avoient été chargés par
l'Infant , de faire les honneurs du Théâtre où
tout fe paffa dans le plus grand ordre.
Le parterre & les loges étoient remplis de
toute la Nobleffe du Pays , & Etrangeres , qui
avoient pu y contenir.
de M. le Prince de LICHTENSTEIN jufqu'au 4 .
M. le Prince de Lichtenſtein arriva à Parme le
1 Septembre ; auflitôt après , il fit informer M.
Dutillot , par un de fes Gentilshommes.
M. Dutillot fe tranfporta chez lui , & lui donna
l'heure que l'Infant avoit fixé pour fon audience
particuliere.
Cette audience fut le lendemain à midi & demi;
M.Dutillot alla prendre M. le Prince de Lichtenftein
au Palais Palavicini où il eſt logé , & l'amena
chez l'Infant , il le conduifit enfuite chez le Prince
Ferdinand , de là à l'appartement de Madame
Infante Ifabelle , où le trouva auffi Madame Louiſe ..
M.le Prince de Lichtenſtein, fut au fortir du Palais
, rendre la vifire à M. Dutillot ; fortit de chez
Ge Miniftre , & y revint dîner avec les Miniftres de
France , d'Espagne , de Turin , de Gènes & de
Malte ; M. le Comte de Neuilly , M le Bailli de
Breteuil , M. l'Abbé de Canillac & M. le Comte
de Mercy . Il amena avec lui les huit Chambellans
qui l'ont accompagné , & deux Officiers Majors..
OCTOBRE. 1760. 185
M. Dutillot avoit invité le Capitaine & le Major
des Gardes du Corps , le grand Ecuyer & le premier
Ecuyer de l'Infant , le Gouverneur du Frince
Ferdinand , des Gentilshommes de la Chambre ,
des Majordomes , des Dames du Palais , M. l'Evêque
de Plaifance , frere du feu Chancelier Criftiani
chargé par l'Infant , à caufe de la mort de
l'Evêque de Parme , de la cérémonie du mariage )
& quelques Perfonnes de la premiere Nobleffe du
Pays.
Après le dîner , M. de Lichtenftein retourna à
fon Hôtel , où il reçut des vifites .
Le troifiéme jour fixé pour l'Audience publique,
M. le Comte Peroli , Introducteur, partit du
Palais à onze heures & demie , dans un caroffe
de l'Infant attelé à huit chevaux ; ce caroffe étoit
précédé par un autre à fix chevaux ( vuide ) , &
fuivi par trois autres attelés à huit chevaux ; dans
chacun de ces caroffes , étoit un Majordome.
Un Officier de l'Ecurie étoit à cheval à la tête
de ce Cortége ; douze Valets de pied étoient fur
deux files aux deux côtés de la voiture de l'Infant
, où étoit M. l'Introducteur , trois derriere ce
carofie , & deux derriere chacun des autres .
Deux Palfreniers à cheval ſuivoient l'Officier
de l'Ecurie
M. le Comte Peroli fut dans cet ordre prendre
chez lui M. le Marquis Palavicini , premier Gentilhomme
de la Chambre , que l'Infant avoir
chargé de faire les honneurs à M. le Prince de
Lichtenſtein .
M. de Palavicini monta dans le même caroffe ,
dans lequel étoit venu M. le Comte Peroli ; ce
dernier lui donna la droite.
Ils furent dans le même ordre chez M. le Prin
ce de Lichtenſtein.
Ils monterent l'efcalier , fuivis des trois Majordomes
qui les avoient accompagnés : les
182 MERCURE DE FRANCE. 1
douze valets de pieds fuivoient fur deux files.
M. le Prince de Lichtenſtein étoit venu au-devant
d'eux, & avoit defcendu deux marches; il les conduifitjufques
à la chambre. MM . les Majordomest
refterent à la piéce la plus voisine de cette chambre
, où ils entrerent un moment après M. de
Palavicini & M. Peroli , à qui M. le Prince de
Lichtenſtein avoit fait partout les honneurs des
Portes.
On defcendit de chez M. le Prince , qui fit
toujours les honneurs à M. de Palavicini jufques
au bas de fon efcalier ; où étant arrivé , M. de
Palavicini lui fit les honneurs du caroffe , il y
monta , fe plaça feul dans le fond , M. de Pałavicini
fur le devant à droite , M. Peroli à gauche.
MM. les Majordomes firent également les
bonneurs des caroffes de l'Infant dans lesquels
ils étoient venus , aux huit Chambellans .
On fe mit en marche dans l'ordre fuivant :
Un Officier de l'Ecurie de l'Infant , & deur
Palfreniers à cheval.
Le caroffe de M. l'Introducteur , à fix chevaux ,
vuide.
Deux Suiffes , de M. le Prince de Lichtenſtein ,
à cheval.
24 Valets de pied.
6 Coureurs.
6 Heyducs.
12 Palfreniers , tenant chacun un cheval par la
bride.
9 Officiers , de la Maifon de M. le Prince , à
cheval.
Son Ecuyer.
& Pages, dont deux Hongrois, & fix Allemands
Quatre Gentilshommes.
Le caroffe de l'Infant , où étoit M. le Prince de
Lichtenſtein , M. de Palavicini & M. Peroli , 1 %
Valets de pied de l'Infant aux deux côtés.
OCTOBRE . 1760 . 184
Un grand caroffe d'entrée , à M. le Prince,
attelé à 8 chevaux.
Les trois caroffes de l'Infant , dont les Majordomes
faifoient les honneurs.
A une diſtance de 30 ou 40 pas , trois autres
carolles , à M. le Prince de Lichtenſtein , attelés à
huit chevaux .
Les rues étoient bordées , depuis l'Hôtel Palavicini
jufques au Palais , par les deux Bataillons du
Régiment de Parme habillés de neuf, à-peu-près
comme le Corps des Grenadiers de France
douze Compagnies de Grenadiers.
> &
Les Troupes préfentoient les armes , les tambours
rappelloient , & les Officiers ont falué du
chapeau .
La Garde du Palais étoit formée devant la
porte; elle préfentoit les armes ; les tambours rappelloient
, & les Officiers ont falué du chapeau.
12 Suifles des Portes étoient fous la voute de
l'entrée du Palais.
80 Hallebardiers de la Garde de S. A. R. bordoient
l'escalier fur deux files, depuis la premiere
marche juſques au pallier d'en- haut ; & les deux
portes qui donnent de ce pallier à l'appartement
de l'Infant & à celui de Madame Ifabelle , étoient
gardées par quatre de ces mêmes Hallebardiers ,
la hallebarde fur l'épaule.
M. Le Comte Rimbaldefi, Maître des Cérémonies,
vint recevoir M. le Prince au bas de l'efcalier
& marcha devant lui.
La Livrée de l'Infant précédoit fur deux files ;
celle de M. le Prince fuivoit ce Seigneur , qui mar
choit entre M. le Marquis Palavicini & l'Introducteur.
La Livrée de M. le Prince s'arrêta dans deur
anti-falles avec celle de l'Infant ; deux Suiffes de la
porte empêchoient celle des particuliers d'y entrer,
184 MERCURE DE FRANCE.
M. le Prince de Lichtenstein , toujours précédé
par le Maître des Cérémonies , & ayant M. de Pala
vicini à fa droite & l'Introducteur à ſa gauche, traverfa
la Salle des Gardes : les Gardes du Corps
étoient fous les armes. Le Capitaine des Gardes le
reçut à la porte de la Salle en dedans, prit la place
de M. l'Introducteur à côté de lui , & marcha
ainfi à toutes les Audiences. L'Introducteur s'étoit
avancé d'un pas , & marchoit à côté du Maître
des Cérémonies . M. le Prince étoit précédé par
les Officiers de fa Maiſon qui s'arrêterent dans la
prémiere antichambre après la Salle des Gardes ,
par les Pages qui s'arrêterent dans l'antichambre
après celle où étoient reftés les Officiers de fa
Maifon , & avant celle où étoient les Pages de
S. A. R. par fes quatre Gentilshommes qui entrerentjufques
dans la piéce du Sallon de l'Audience
de l'Infant ; & par les huit Chambellans de l'Empereur
qui les précédérent jufques aux pieds , da
Throne .
Toutes les Dames de la Nobleffe du Pays &
Etrangeres , s'étoient rendues le matin chez Madame
Ifabelle .
La Nobleffe de l'Etat , les Seigneurs les plus
diftingués d'Italie , & l'Infant , étoient placés autour
de fon thrône , & rempliffoient douze Piéces
que traverfa M. le Prince de Lichtenftein , depuis
celle où s'étoient arrêtés fes Pages juſques à la
porte de la Salle de l'Audience.
Certe Salle eft , très-vaffe , & avoit été richement
& galamment ornée ; le dais de l'Infant étoit au
fond , vis-à-vis de la porte , par où entra M. le
Prince de Lichtenftein .
Au moment où ce Seigneur parut dans la Salle,
S. A. R. fe leva du fauteuil , ou il étoit affis , falua
M. le Prince de Lichtenftein & remit fon chapeau.
M.le Prince fe couvrit , & expola l'objet de fa
million..
OCTOBRE. 1760. r&'s
M. le Comte de S. Vital fut envoyé , avec deux
Gentilshommes de la Chambre , & deux Majordomes
prendre Madame Infante Ifabelle dans fon
appartement. Elle entra dans la Salle d'audience
par une porte pratiquée à côté du dais, précédée des
perfonnes qui avoient été envoyées pour la chercher
, & fuivie par Madame de Gonzales , Madame
la Comteffe de Siffa , & cing Dames du Palais.
M. le Prince de Lichtenſtein s'adreſſant à Madame
Infante Ifabelle , lui répéta la demande qu'il
avoit faite à S. A. R. Madame fe tourna du côté de
l'Infant , comme pour lui demander fon approbation
; après quoi elle répondit à M. le Prince de
Lichtenſtein , & reçut de lui une Lettre de la main
de l'Archiduc , & le portrait de ce Prince ; enfuite
elle fe retira dans fon appartement.
L'Infant & M. le Prince de Lichtenstein resterent
découverts , tout le tems que Madame Infante
Ifabelle refta dans la Salle .
M. le Prince de Lichtenftein préfenta à l'Infant
Les huit Chambellans de l'Empereur.
M. le Prince de Lichtenſtein forrit de l'audience
de l'Infant dans le même ordre qu'il yétoit entré ,
& marcha dans ce même ordre à celle du Prince
Ferdinand ; le cérémonial y fut obfervé comme à
celle de l'Infant.
M. le Prince de Lichtenstein paffa de cette audience
à celle de Madame Infante Ifabelle. Tour y
fut obfervé comme aux précédentes, excepté que M.
le Prince ne fe couvrit qu'un moment , ôta fon chapeau
, & refta découvert julques à ce qu'il fortît.
Il paffa à l'Audience de Madame Louife où tout
fut exactement obfervé comme à celle de Madame
Infante Iíabelle.
Il fut conduit enfuite dans l'appartement qui
lui avoit été préparé à la Cour , par M. de Palavicini,
M. l'Introducteur & le Maître des Cérémo186
MERCURE DE FRANCE.
nies.Il y fut fuivi par quantité de Nobleſſe .
M. de Lichtenſtein arrivé dans cet appartement
, y fut vifité par un Gentilhomme de la
Chambre de la part dé l'Infant.
Un moment après , M. le Comte de S. Vital ,
fur auffi lui annoncer que S. A. R. le faifoit
traiter. Il lui préſenta en même- tems le Majordome
, le Comte de S. Vital , le Capitaine des
Gardes , le Gouverneur du Prince Ferdinand ,
des Gentilshommes de la Chambre , le Maître
des Cérémonies , l'Introducteur , quatre Chambellans
de l'Empereur , M. le Marquis Canoffa , &
quelques autres perfonnes de la Nobleſſe du Pays ,
& Allemande.
M. Le Prince fut fervi par les Officiers de l'Infant
, propofés pour fervir S. A. R. à table :
toutes les autres perfonnes furent fervies par la
livrée de S. A. R.
On ne s'étoit mis à table qu'après que l'Infant
eut dîné.
Après le repas , M. de Lichtenſtein paſſa chez
l'Infant lui faire une vifite , & en fortit un moment
après pour retourner dans ſon appartement,
où il reçut des vifites.
Afept heures & demie , on paffa au Théâtre
pour voir l'Opéra. L'Infant & Madame Ifabelle
furent , avec leur Cour , dans la grande loge du
milieu , appellée la loge de la Couronne. M. le
Prince de Lichtenſtein étoit , avec quelques Scigneurs
de fa fuite , dans celle qui eft la plus près
du Théâtre à droite.
Trois Majordomes avoient été chargés par
l'Infant , de faire les honneurs du Théâtre où
tout fe paffa dans le plus grand ordre.
Le parterre & les loges étoient remplis de
toute la Nobleffe du Pays , & Etrangeres , qui
avoient pu y contenir.
Fermer
Résumé : DÉTAIL de tout ce qui s'est passé depuis l'arrivée de M. le Prince de LICHTENSTEIN jusqu'au 4.
Le 1er septembre 1760, le Prince de Lichtenstein arriva à Parme et fut informé par M. Dutillot de l'heure de son audience privée avec l'Infant, fixée au lendemain à midi et demi. L'audience débuta au Palais Palavicini, où M. Dutillot accompagna le Prince de Lichtenstein chez l'Infant, puis chez le Prince Ferdinand, et enfin chez l'Infante Isabelle, en présence de Madame Louise. Après l'audience, le Prince de Lichtenstein rendit visite à M. Dutillot et dîna avec divers ministres, dont ceux de France, d'Espagne, de Turin, de Gênes et de Malte. Le troisième jour, pour l'audience publique, un cortège composé de plusieurs carrosses et de nombreux valets se rendit chez le Marquis Palavicini, premier Gentilhomme de la Chambre, qui fut chargé de faire les honneurs au Prince de Lichtenstein. Le cortège se dirigea ensuite vers l'hôtel du Prince de Lichtenstein, où il fut accueilli et conduit à l'intérieur. Le cortège, incluant le Prince de Lichtenstein, le Marquis Palavicini et l'Introducteur, se rendit au Palais de l'Infant. Les rues étaient bordées par des troupes en uniforme, et la garde du Palais était formée. À l'intérieur, le Prince de Lichtenstein traversa plusieurs salles ornées, où étaient présents la noblesse du pays et des étrangers. L'Infant se leva et salua le Prince, qui exposa l'objet de sa mission. Madame Infante Isabelle fut ensuite amenée dans la salle d'audience et reçut une lettre et un portrait de l'Archiduc. Le Prince de Lichtenstein présenta les Chambellans de l'Empereur à l'Infant et passa aux audiences du Prince Ferdinand et de Madame Infante Isabelle, suivant le même cérémonial. Il fut ensuite conduit dans son appartement à la Cour, où il reçut diverses visites de la noblesse. Après le dîner, le Prince de Lichtenstein rendit visite à l'Infant et retourna dans son appartement. En soirée, il se rendit au théâtre pour assister à l'opéra, où l'Infant et Madame Isabelle occupaient la loge royale, tandis que le Prince de Lichtenstein était dans une loge voisine.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
23
p. 200-201
Remédes.
Début :
M. De Clairon, Président à la Chambre des Comptes & Cour des Aides [...]
Mots clefs :
Famille royale, Roi, Ministres, Mémoire, Plantes, Fièvre, Pleurésie, Guérison, Dysenterie, Hémorroïdes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Remédes.
Remédes.
M. DE CLAIRON , Préfident à la Chambre des
Comptes & Cour des Aides de Franche - Comté , a
prefenté au Roi , à la Reine , a la Famille Royale
, à tous les Miniftres , à M. le Maréchal de
Belleifle , à M. le Maréchal de Broglie , à M. de
Senac , premier Médecin du Roi , & à Meffieurs
de la Facultéde Médecine de Paris , un Mémoire
par lequel il leur expofe la découverte qu'il a
DECEMBRE. 1760. 201
faite de plufieurs Plantes fpécifiques pour la guérifon
des fiévres de toute espéce , des pleurélies &
au plus tard au cinquiéme accès , des obftructions
du foye & de la rate , de l'hydropifie , de la
rétention d'urine caufée par la pierre dans un
mois , de la dyfenterie même jufqu'au fang
dans huit jours , des fleurs blanches dans la révolution
de deux mois à n'en prendre que fix jours
defuite par mois, & des hémorroïdes en vingt - quatre
heures. Il a fait un Traité qui enfeigne la maniè
re de fe les procurer & de s'en fervir , qui a mérité
l'approbation de MM . les Cenfeurs de la Faculté
de Médecine de Paris , de M. de Senac , & de plufeurs
autres Médecins , & en attendant que ce
Traité parvienne à la connoillance du Public ,
i en offre à MM. les Médecins , Chirurgiens &
Apoticaires , & à quiconque en voudra faire ufage
, parce qu'il en garantit l'éthcacité & une
prompte guérifon . Il eft logé à la rue du Plâtre ,
près la rue S. Jacques , chez un Marchand Herborifte.
M. DE CLAIRON , Préfident à la Chambre des
Comptes & Cour des Aides de Franche - Comté , a
prefenté au Roi , à la Reine , a la Famille Royale
, à tous les Miniftres , à M. le Maréchal de
Belleifle , à M. le Maréchal de Broglie , à M. de
Senac , premier Médecin du Roi , & à Meffieurs
de la Facultéde Médecine de Paris , un Mémoire
par lequel il leur expofe la découverte qu'il a
DECEMBRE. 1760. 201
faite de plufieurs Plantes fpécifiques pour la guérifon
des fiévres de toute espéce , des pleurélies &
au plus tard au cinquiéme accès , des obftructions
du foye & de la rate , de l'hydropifie , de la
rétention d'urine caufée par la pierre dans un
mois , de la dyfenterie même jufqu'au fang
dans huit jours , des fleurs blanches dans la révolution
de deux mois à n'en prendre que fix jours
defuite par mois, & des hémorroïdes en vingt - quatre
heures. Il a fait un Traité qui enfeigne la maniè
re de fe les procurer & de s'en fervir , qui a mérité
l'approbation de MM . les Cenfeurs de la Faculté
de Médecine de Paris , de M. de Senac , & de plufeurs
autres Médecins , & en attendant que ce
Traité parvienne à la connoillance du Public ,
i en offre à MM. les Médecins , Chirurgiens &
Apoticaires , & à quiconque en voudra faire ufage
, parce qu'il en garantit l'éthcacité & une
prompte guérifon . Il eft logé à la rue du Plâtre ,
près la rue S. Jacques , chez un Marchand Herborifte.
Fermer
Résumé : Remédes.
M. de Clairon, Président à la Chambre des Comptes et Cour des Aides de Franche-Comté, a soumis un mémoire au Roi, à la Reine, à la Famille Royale, aux ministres, aux maréchaux de Belleisle et de Broglie, à M. de Senac, premier Médecin du Roi, et aux membres de la Faculté de Médecine de Paris. Ce mémoire décrit la découverte de plusieurs plantes spécifiques pour traiter diverses maladies, telles que les fièvres, les pleurésies, les obstructions du foie et de la rate, l'hydropisie, la rétention d'urine causée par des calculs rénaux, la dysenterie, les flux blancs et les hémorroïdes. M. de Clairon a rédigé un traité sur l'utilisation de ces plantes, approuvé par les censeurs de la Faculté de Médecine de Paris, M. de Senac et d'autres médecins. En attendant la publication de ce traité, il met ces remèdes à disposition des médecins, chirurgiens, apothicaires et toute personne intéressée, garantissant leur efficacité et une guérison rapide. M. de Clairon réside rue du Plâtre, près de la rue Saint-Jacques, chez un marchand herboriste.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
24
p. 183
DE RATISBONNE, le 24 Janvier 1763.
Début :
Les Ministres de Bamberg, Wurtzbourg & Eule, viennent d'accéder aux suffrages de ceux qui [...]
Mots clefs :
Ministres, Suffrages, Prince, Neutralité, Margrave, Tranquilité, Empire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE RATISBONNE, le 24 Janvier 1763.
DE RATISBONNE , le 24 Janvier 1763..
Les Miniftres de Bamberg , Wurtzbourg &
Eudle , viennent d'accéder aux fuffrages de ceux
qui dans le Collége des Princes , ont voté pour
le parti de la neutralité. Celui de Brandebourg-
Culmbach a auſſi déclaré que le Margrave , fon
Maître , étoit prêt de concourir aux mefures propres
à rétablir la tranquillité de l'Empire.
Les Miniftres de Bamberg , Wurtzbourg &
Eudle , viennent d'accéder aux fuffrages de ceux
qui dans le Collége des Princes , ont voté pour
le parti de la neutralité. Celui de Brandebourg-
Culmbach a auſſi déclaré que le Margrave , fon
Maître , étoit prêt de concourir aux mefures propres
à rétablir la tranquillité de l'Empire.
Fermer
25
p. 201-202
D'UTRECHT, le 11 Mars 1763.
Début :
Le Prince de Nassau est entré le 8 de ce mois dans sa seiziéme année, [...]
Mots clefs :
Prince de Nassau, Ministres, Anniversaire, Assemblée, États, Président, Serment, Stathouder, Alger, Esclaves chrétiens, Soulèvement
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : D'UTRECHT, le 11 Mars 1763.
D'UTRECHT, le 11 Mars 1763.
Le Prince de Naflau eft entré le 8 de ce mois
dans ſa ſeizième année , & à reçu à cette occafion
les complimens des Miniftres Etrangers , des
Membres du Gouvernement & de toutes les autres
perfonnes de diftinction . Le lendemain , il a été
introduit à l'affemblée des Etats- Généraux & au
Confeil d'Etat, fuivant le cérémonial établi . Deux
Députés , l'un de la Province de Zélande , l'autre
de la Province d'Utrecht , font allés prendre le
Prince , & l'ont conduit de l'appartement du Stathouder
dans la falle où s'affemblent les Etats- Généraux
. Le Préfident dès Etats lui a adreffé un
diſcours de félicitation , & lui a demandé s'il étoit
dilpolé à prêter ferment du fecret. Le Prince lui
répondit qu'il y étoit difpofé , & ayant prêté ce
ferment en mettant la main dans celle du Préfident
, il a été conduit par les deux Députés vers
le fiége deftiné pour les Stathouders , & fur le
quel il s'eft placé . Il a été enfuite introduit aue
Confeil d'Etat par trois autres députés qui , en
préfentant le Prince , ont déclaré qu'il avoit prêté
le ferment du fecret fuivant la forme ordinaire.
On mande d'Alger que les eíclaves Chrétiens ,
au nombre de plus de quatre mille , réduits au défefpoir
par les mauvais traitemens qu'on leur fait …..
éprouver , fe font foulevés le 13 Janvier , & on
Ly.
202 MERCURE DE FRANCE.
maffacrés ceux qui les gardoient : l'allarme s'eft
répandue dans la Ville , dont on a fait fermer les
portes , toutes les troupes ont pris les armes &
ont remis les esclaves à la chaîne. Il y a eu beaucoup
de fang répandu dans ce tumulte dont on
ignore les fuites.
Le Prince de Naflau eft entré le 8 de ce mois
dans ſa ſeizième année , & à reçu à cette occafion
les complimens des Miniftres Etrangers , des
Membres du Gouvernement & de toutes les autres
perfonnes de diftinction . Le lendemain , il a été
introduit à l'affemblée des Etats- Généraux & au
Confeil d'Etat, fuivant le cérémonial établi . Deux
Députés , l'un de la Province de Zélande , l'autre
de la Province d'Utrecht , font allés prendre le
Prince , & l'ont conduit de l'appartement du Stathouder
dans la falle où s'affemblent les Etats- Généraux
. Le Préfident dès Etats lui a adreffé un
diſcours de félicitation , & lui a demandé s'il étoit
dilpolé à prêter ferment du fecret. Le Prince lui
répondit qu'il y étoit difpofé , & ayant prêté ce
ferment en mettant la main dans celle du Préfident
, il a été conduit par les deux Députés vers
le fiége deftiné pour les Stathouders , & fur le
quel il s'eft placé . Il a été enfuite introduit aue
Confeil d'Etat par trois autres députés qui , en
préfentant le Prince , ont déclaré qu'il avoit prêté
le ferment du fecret fuivant la forme ordinaire.
On mande d'Alger que les eíclaves Chrétiens ,
au nombre de plus de quatre mille , réduits au défefpoir
par les mauvais traitemens qu'on leur fait …..
éprouver , fe font foulevés le 13 Janvier , & on
Ly.
202 MERCURE DE FRANCE.
maffacrés ceux qui les gardoient : l'allarme s'eft
répandue dans la Ville , dont on a fait fermer les
portes , toutes les troupes ont pris les armes &
ont remis les esclaves à la chaîne. Il y a eu beaucoup
de fang répandu dans ce tumulte dont on
ignore les fuites.
Fermer
Résumé : D'UTRECHT, le 11 Mars 1763.
Le 11 mars 1763, à Utrecht, le Prince de Naflau a fêté ses seize ans. Il a reçu les félicitations des ministres étrangers, des membres du gouvernement et des personnalités distinguées. Le lendemain, il a été introduit à l'assemblée des États-Généraux et au Conseil d'État selon le protocole. Deux députés, l'un de Zélande et l'autre d'Utrecht, l'ont conduit à la salle des États-Généraux, où le Président lui a adressé un discours de félicitation et lui a demandé de prêter serment de secret, ce qu'il a fait en mettant la main dans celle du Président. Ensuite, trois autres députés l'ont introduit au Conseil d'État, confirmant qu'il avait prêté serment. Par ailleurs, des nouvelles d'Alger rapportent qu'environ quatre mille esclaves chrétiens se sont révoltés le 13 janvier, massacrant leurs gardiens et provoquant une alarme dans la ville. Les autorités ont fermé les portes et mobilisé les troupes pour réprimer la révolte, causant de nombreux morts. Les causes de cette révolte restent inconnues.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
26
p. 181-184
De VERSAILLES, le 11 Mai 1763.
Début :
Le Duc de Nivernois ayant rempli l'objet de sa mission à Londres, [...]
Mots clefs :
Duc, Comte, Lieutenant général des armées, Ministres, Frontières, Famille royale, Contrat de mariage, Nominations, Demoiselle, Marquise , Capitaine, Charge, Roi, Officiers, Honneur, Académie royale des sciences, Machine, Récompense
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De VERSAILLES, le 11 Mai 1763.
De VERSAILLES , le 11 Mai 1763.
Le Duc de Nivernois ayant rempli l'objet de
E
fa miffion à Londres , & fa fanté fe trouvant fort
dérangée , le Roi a bien voulu lui acc order fon
182 MERCURE DE FRANCE.
rappel . Sa Majesté a nommé pour le remplacer
le Comte de Guerchy , Lieutenant - Général de fes
Armées , Colonel de fon Régiment , Chevalier de
fes Ordres & Gouverneur d'Huningue. Le 17 du
mois dernier , ce nouvel Ambaſſadeur a remercié
le Roi dans fon Cabinet. Il a été préſenté par le
Duc de Praflin , Miniftre & Secrétaire d'Etat au
Département des Affaires Etrangeres.
Le Duc de Choiſeul a préſenté au Roi deux
Cartes qui comprennent la frontière du Dauphiné
& le Comté de Nice. Le Duc de Praflin a préſenté
à Sa Majesté les Cartes de nouvelle limitation
réglée entre Sa Majefté & le Roi de Sardaigne ,
par le Traité du 24 Mars 1760 , par rapport aux
frontieres refpectives des deux Etats. Ces Cartes ont
été levées géométriquement fous la direction du
fieur de Bourcet , Lieutenant- Général des Armées
du Roi , & dreffées par le fieur Villaret , Capitaine-
Ingénieur , Géographe de Sa Majefté .
Le 17 du mois dernier , leurs Majeſtés & la Famille
Royale ont figné le contrat de mariage du
Duc de Beauvilliers avec Demoiſelle de Fleury.
Le même jour , la Comteffe de Montboiffier a été
préſentée à Leurs Majeftés & à la Famille Royale ,
par la Vicomteffe de Montboiffier.
Dame d'Elparbés de Luffan , Religieufe du Monaftère
de Paradis dans le Diocète de Condom •
a été nommée par le Roi au Prieuré de Prouillan ,
Ordre de Saint Dominique , dans le même Diocèſe
, vacant par la mort de la Dame du Bouzer
de Poudenas.
Sa Majefté ayant jugé à propos de rappeller le
* fieur Durand , fon Miniftre près le Roi & la Ré---
publique de Pologne , pour lui confier le Dépôt
des Affaires Etrangères , a nommé pour le remplacer
, en qualité de Réfident , le fieur Henin ,
t
JUILLET. 1763 . 183
Secrétaire d'Ambaffade du Marquis de Paulmy.
Le ro du mois dernier, Leurs Majeftés & la Famille
Royale ont figné le contrat de mariage de
Paul- Charles Marie, Marquis de Lomenie , ci-devant
Capitaine au Régiment de la Reine , Dragons
, avec Marie Therefe Poupardin- d'Amanly.
Le 23 , celui du Marquis de la Rochefoucault-
Maumont de Magnat avec Demoiselle de Fougeu
; le 24 , celui du Marquis de Sablé , fils dur
Marquis de Croify , avec Demoiſelle de la Roche
-de- Rambure ; celui du Comte de Luppé avec
Denroifelle de Butler ; & celui du Comte de
Mellet avec Demoiſelle le Daulfeur. Le premier
de ce mois , celui du Comte de Vogué avec Demoiſelle
Jeanne- Magdeleine- Thereſe de Sourches
; & celui du Marquis de Sade avec Demoifelle
Cordier de Montreuil.
Le Marquis de Sablé a obtenu la furvivance de
la Charge de Capitaine des Gardes de la Porte ,
dont le Marquis de Croiffy fon père eft pourvu.
Le 25 du mois dernier , la Comteffe de Gramont
fut préfentée à Leurs Majeftés , ainſi qu'à la
Famille Royale , par la Ducheffe de Gramont.
Le 30 la Marquise de Sablé fut préſentée à
Leurs Majeftés & à la Famille Royale ,par la Marquife
de Croiffy , fa belle-mère.
Le 4 de ce mois , la Comteffe de Luppé fut
préfentée à Leurs Majeftés & à la Famille Royale ,
par la Marquife de Melmes .
Le Roi a érigé , en faveur du fieur de Villette
la Terre du Pleffis- Longeau , &c . , en Marquifat'
avec le nom de Villette .
Le Roi a nominé fon Miniftre Plénipotentiaire
auprès du Roi de Portugal le Chevalier de Saint-
Prieft , Exempt d'une Compagnie des Gardes - du-
Corps de Sa Majeſté.
184 MERCURE DE FRANCE .
Le 8 , les Officiers de la Compagnie des Secré
taires du Roi , eurent l'honneur de préſenter une
bourſe au Roi dans le Cabinet de Sa Majeſté le
fieur Lévêque , Syndic de la Compagnie , porta
la parole.
Le fieur Camus , de l'Académie Royale des
Sciences , ayant été nommé conjointement avec
le fieur Bertoud , habile Horloger de Paris ,
pour afſiſter au rapport que la Société Royale de
Londres doit faire de la Machine d'Horlogerie da
fieur Harriſon , cet Académicien a eu l'honneur ,
en cette qualité , de prendre congé de Sa Majesté
le 24 du mois dernier. La Machine du fieur Harrifon
a pour objet de faciliter la détermination des
longitudes en mer: les épreuves qui en ont été
faites ont eu beaucoup de fuccès , & ont engagé le
Parlement d'Angleterre à accorder une récompenfe
confidérable à l'Inventeur.
Le Duc de Nivernois ayant rempli l'objet de
E
fa miffion à Londres , & fa fanté fe trouvant fort
dérangée , le Roi a bien voulu lui acc order fon
182 MERCURE DE FRANCE.
rappel . Sa Majesté a nommé pour le remplacer
le Comte de Guerchy , Lieutenant - Général de fes
Armées , Colonel de fon Régiment , Chevalier de
fes Ordres & Gouverneur d'Huningue. Le 17 du
mois dernier , ce nouvel Ambaſſadeur a remercié
le Roi dans fon Cabinet. Il a été préſenté par le
Duc de Praflin , Miniftre & Secrétaire d'Etat au
Département des Affaires Etrangeres.
Le Duc de Choiſeul a préſenté au Roi deux
Cartes qui comprennent la frontière du Dauphiné
& le Comté de Nice. Le Duc de Praflin a préſenté
à Sa Majesté les Cartes de nouvelle limitation
réglée entre Sa Majefté & le Roi de Sardaigne ,
par le Traité du 24 Mars 1760 , par rapport aux
frontieres refpectives des deux Etats. Ces Cartes ont
été levées géométriquement fous la direction du
fieur de Bourcet , Lieutenant- Général des Armées
du Roi , & dreffées par le fieur Villaret , Capitaine-
Ingénieur , Géographe de Sa Majefté .
Le 17 du mois dernier , leurs Majeſtés & la Famille
Royale ont figné le contrat de mariage du
Duc de Beauvilliers avec Demoiſelle de Fleury.
Le même jour , la Comteffe de Montboiffier a été
préſentée à Leurs Majeftés & à la Famille Royale ,
par la Vicomteffe de Montboiffier.
Dame d'Elparbés de Luffan , Religieufe du Monaftère
de Paradis dans le Diocète de Condom •
a été nommée par le Roi au Prieuré de Prouillan ,
Ordre de Saint Dominique , dans le même Diocèſe
, vacant par la mort de la Dame du Bouzer
de Poudenas.
Sa Majefté ayant jugé à propos de rappeller le
* fieur Durand , fon Miniftre près le Roi & la Ré---
publique de Pologne , pour lui confier le Dépôt
des Affaires Etrangères , a nommé pour le remplacer
, en qualité de Réfident , le fieur Henin ,
t
JUILLET. 1763 . 183
Secrétaire d'Ambaffade du Marquis de Paulmy.
Le ro du mois dernier, Leurs Majeftés & la Famille
Royale ont figné le contrat de mariage de
Paul- Charles Marie, Marquis de Lomenie , ci-devant
Capitaine au Régiment de la Reine , Dragons
, avec Marie Therefe Poupardin- d'Amanly.
Le 23 , celui du Marquis de la Rochefoucault-
Maumont de Magnat avec Demoiselle de Fougeu
; le 24 , celui du Marquis de Sablé , fils dur
Marquis de Croify , avec Demoiſelle de la Roche
-de- Rambure ; celui du Comte de Luppé avec
Denroifelle de Butler ; & celui du Comte de
Mellet avec Demoiſelle le Daulfeur. Le premier
de ce mois , celui du Comte de Vogué avec Demoiſelle
Jeanne- Magdeleine- Thereſe de Sourches
; & celui du Marquis de Sade avec Demoifelle
Cordier de Montreuil.
Le Marquis de Sablé a obtenu la furvivance de
la Charge de Capitaine des Gardes de la Porte ,
dont le Marquis de Croiffy fon père eft pourvu.
Le 25 du mois dernier , la Comteffe de Gramont
fut préfentée à Leurs Majeftés , ainſi qu'à la
Famille Royale , par la Ducheffe de Gramont.
Le 30 la Marquise de Sablé fut préſentée à
Leurs Majeftés & à la Famille Royale ,par la Marquife
de Croiffy , fa belle-mère.
Le 4 de ce mois , la Comteffe de Luppé fut
préfentée à Leurs Majeftés & à la Famille Royale ,
par la Marquife de Melmes .
Le Roi a érigé , en faveur du fieur de Villette
la Terre du Pleffis- Longeau , &c . , en Marquifat'
avec le nom de Villette .
Le Roi a nominé fon Miniftre Plénipotentiaire
auprès du Roi de Portugal le Chevalier de Saint-
Prieft , Exempt d'une Compagnie des Gardes - du-
Corps de Sa Majeſté.
184 MERCURE DE FRANCE .
Le 8 , les Officiers de la Compagnie des Secré
taires du Roi , eurent l'honneur de préſenter une
bourſe au Roi dans le Cabinet de Sa Majeſté le
fieur Lévêque , Syndic de la Compagnie , porta
la parole.
Le fieur Camus , de l'Académie Royale des
Sciences , ayant été nommé conjointement avec
le fieur Bertoud , habile Horloger de Paris ,
pour afſiſter au rapport que la Société Royale de
Londres doit faire de la Machine d'Horlogerie da
fieur Harriſon , cet Académicien a eu l'honneur ,
en cette qualité , de prendre congé de Sa Majesté
le 24 du mois dernier. La Machine du fieur Harrifon
a pour objet de faciliter la détermination des
longitudes en mer: les épreuves qui en ont été
faites ont eu beaucoup de fuccès , & ont engagé le
Parlement d'Angleterre à accorder une récompenfe
confidérable à l'Inventeur.
Fermer
Résumé : De VERSAILLES, le 11 Mai 1763.
Le 11 mai 1763, depuis Versailles, le Duc de Nivernois, en raison de sa santé altérée, a été rappelé de sa mission à Londres. Le Roi a nommé le Comte de Guerchy, Lieutenant-Général des Armées et Colonel de son Régiment, pour le remplacer. Le 17 avril précédent, le Comte de Guerchy a remercié le Roi dans son Cabinet, présenté par le Duc de Praslin, Ministre et Secrétaire d'État aux Affaires Étrangères. Le Duc de Choiseul a présenté au Roi des cartes de la frontière du Dauphiné et du Comté de Nice. Le Duc de Praslin a montré à Sa Majesté les cartes de la nouvelle limitation des frontières entre la France et le Royaume de Sardaigne, régie par le Traité du 24 mars 1760. Ces cartes ont été réalisées sous la direction du Sieur de Bourcet et dressées par le Sieur Villaret. Le 17 avril précédent, plusieurs contrats de mariage ont été signés par Leurs Majestés et la Famille Royale, notamment celui du Duc de Beauvilliers avec Demoiselle de Fleury. La Comtesse de Montboissier a été présentée à Leurs Majestés par la Vicomtesse de Montboissier. Dame d'Elparbès de Luffan a été nommée par le Roi au Prieuré de Prouillan. Le Sieur Durand, Ministre près le Roi et la République de Pologne, a été rappelé pour diriger les Affaires Étrangères, remplacé par le Sieur Henin. Le Roi a signé plusieurs contrats de mariage, notamment celui du Marquis de Lomenie avec Marie Thérèse Poupardin d'Amanly, et d'autres nobles. Le Marquis de Sablé a obtenu la survivance de la charge de Capitaine des Gardes de la Porte. Le Roi a érigé la Terre du Pleffis-Longeau en Marquisat en faveur du Sieur de Villette. Il a également nommé le Chevalier de Saint-Prieft comme Ministre Plénipotentiaire auprès du Roi de Portugal. Le Sieur Camus, de l'Académie Royale des Sciences, a pris congé du Roi pour assister à un rapport sur la Machine d'Horlogerie du Sieur Harrison, destinée à déterminer les longitudes en mer.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
27
p. 193-194
De COMPIEGNE, le 20 Juillet 1763.
Début :
Le Sieur Tiepolo, Ambassadeur de Venise, eut le 10 de ce mois, [...]
Mots clefs :
Ambassadeurs, République de Venise, Audience, Département des affaires étrangères, Ministres, Famille royale, Contrat de mariage, Comtesse, Marquis, Serment
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De COMPIEGNE, le 20 Juillet 1763.
De COMPIEGNE , le 20 Juillet 1763 .
"
Le Sieur Tiepolo , Amballadeur de Venife ,
' eut le ro de ce mois une audience particu
liere du Roi , dans laquelle il préfenta le Chevalier
de Morofini & le Sieur de Quirini , cidevant
Ambaffadeur de cette République à la
Cour de Londres , qui prirent congé de Sa
Majefté. Ces Ambaffadeurs furent conduits à
cette audience , ainfi qu'à celles de la Reine &
de la Famille Royale , par le Sieur de la Live ,.
Introducteur des Ambaſſadeurs.
Le Baron de Breteuil , qui revient de Ruffie ,
a eu l'honneur d'être préfenté le 14 , par le
Duc de Praflin , Miniftre & Secrétaire d'Etat au
département des Affaires étrangères . Sa Majefté
l'a nommé fon Ambaſſadeur en Suede.
Le 17 , Leurs Majeftés & la Famille Royale
fgnerent le Contrat de Mariage du Comte de
Canizy , Exempt des Gardes du Corps , & de
Demoiselle de Vally.
I
194 MERCURE DE FRANCE.
La Comteffe de Butturin fut préfentée le même
jour à Leurs Majeftés & à la Famille Royale ,
par la Ducheffe de Praflin .
Le 19 , le Marquis de la Rochejaquelin , Capitaine
de Dragons reforme , prêta ferment en
tre les mains de Sa Majefté , pour la Lieute
nance de Roi du Poitou .
"
Le Sieur Tiepolo , Amballadeur de Venife ,
' eut le ro de ce mois une audience particu
liere du Roi , dans laquelle il préfenta le Chevalier
de Morofini & le Sieur de Quirini , cidevant
Ambaffadeur de cette République à la
Cour de Londres , qui prirent congé de Sa
Majefté. Ces Ambaffadeurs furent conduits à
cette audience , ainfi qu'à celles de la Reine &
de la Famille Royale , par le Sieur de la Live ,.
Introducteur des Ambaſſadeurs.
Le Baron de Breteuil , qui revient de Ruffie ,
a eu l'honneur d'être préfenté le 14 , par le
Duc de Praflin , Miniftre & Secrétaire d'Etat au
département des Affaires étrangères . Sa Majefté
l'a nommé fon Ambaſſadeur en Suede.
Le 17 , Leurs Majeftés & la Famille Royale
fgnerent le Contrat de Mariage du Comte de
Canizy , Exempt des Gardes du Corps , & de
Demoiselle de Vally.
I
194 MERCURE DE FRANCE.
La Comteffe de Butturin fut préfentée le même
jour à Leurs Majeftés & à la Famille Royale ,
par la Ducheffe de Praflin .
Le 19 , le Marquis de la Rochejaquelin , Capitaine
de Dragons reforme , prêta ferment en
tre les mains de Sa Majefté , pour la Lieute
nance de Roi du Poitou .
Fermer
Résumé : De COMPIEGNE, le 20 Juillet 1763.
Le 20 juillet 1763, à Compiègne, le Sieur Tiepolo, ambassadeur de Venise, a obtenu une audience avec le Roi. Il a présenté le Chevalier de Morofini et le Sieur de Quirini, ancien ambassadeur de Venise à Londres, qui ont pris congé de Sa Majesté. Ils ont été accompagnés par le Sieur de la Live, Introducteur des Ambassadeurs, lors des audiences avec la Reine et la Famille Royale. Le Baron de Breteuil, de retour de Russie, a été présenté le 14 juillet par le Duc de Praslin, Ministre et Secrétaire d'État aux Affaires étrangères. Le Roi l'a nommé ambassadeur en Suède. Le 17 juillet, Leurs Majestés et la Famille Royale ont signé le contrat de mariage entre le Comte de Canizy, Exempt des Gardes du Corps, et Mademoiselle de Vally. La Comtesse de Butturin a été présentée le même jour à Leurs Majestés et à la Famille Royale par la Duchesse de Praslin. Le 19 juillet, le Marquis de la Rochejaquelin, Capitaine de Dragons réformé, a prêté serment entre les mains du Roi pour la Lieutenance de Roi du Poitou.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
28
p. 203-205
De COMPIEGNE, le 20 Août 1763.
Début :
Le 24 du mois dernier, la Duchesse de Richmond fut présentée à Leurs Majestés, [...]
Mots clefs :
Duchesse, Famille royale, Marquise , Contrat de mariage, Comte, Discours sur la paix, Honneur, Audience, Ministres, Régiment, Fête de l'Assomption, Procession, Chapitre, Église, Colonel, Religieux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De COMPIEGNE, le 20 Août 1763.
De COMPIEGNE , le 20 Août 1763 .
LE 24 du mois dernier , la Ducheſſe de Richmond
fut préfentée à Leurs Majeſtés , ainſi qu'à
la Famille Royale , par la Ducheffe de Fitz- James ,
& prit le tabouret chez la Reine. La Marquise de
Montmirel fut auffi préfentée par la Ducheffe de
Villequier.
Leurs Majeftés & la Famille Royale fignerent
le même jour , le contrat de Mariage du Comte
de Montchenu , Exempt des Gardes-du - Corps du
Roi , avec Demoiſelle de Bully , fille du fieur de
Buffy , Premier Préfident du Bureau des Finances
de la Généralité de Bourges.
Le Comte de Maillebois , a obtenu du Roi la
permiffion d'aller en Espagne pour les affaires particulieres
, & Sa Majefté a trouvé bon qu'il vînt
prendre congé d'elle avant que de partir.
Le 24 le fieur Fourneau , Recteur de l'Univerfité
, accompagné du fieur Mathieu , Principal du
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
College de Compiegne & de plufieurs Profeffeurs ,
eut l'honneur de préfenter au Roi , à Monſeigneur
le Dauphin , à Monfeigneur le Duc de Berry , &
AMonfeigneur le Comte de Provence , un Difcours
latin fur la Paix , qui a été prononcé par le fieur le
Beau le cadet, de l'Academie des Infcriptions &
Belles Lettres.
Dom Etienne , Religieux de S. Hubert , eur
auffi l'honneur de préfenter au Roi les Oiseaux &
les Chiens qu'il eft d'ufage d'envoyer de S. Hubert
en préfent a Sa Majefté.
Sa Majesté vient d'accorder les entrées de fa
Chambre au Marquis d'Armentieres. Le 2 de ce
mois , le fieur Neville - Neville eut une Audience
particuliere du Roi , dans laquelle il remit , en fa
qualité de Miniftre Plénipotentiaire de la Cour
d'Angleterre , fes Lettres de créance à Sa Majefté.
Le Comte de Wedelfriz , Envoyé extraordinaire de
Danemark , eut auffi le 4 une Audience particuliere,
dans laquelle il préfenta au Roi fes lettres
de rappel. Ces deux Miniftres furent conduits à
ces Audiences , ainfi qu'à celles de la Reine & de
Ja Famille Royale , par le fieur de la Live , Introducteur
des Ambaffadeurs .
1 Le 7 de ce mois , Leurs
Majeftés
ainsi que la
Famille
Royale
, fignerent
le Contrat
de Mariage
du feur Bourgeois
de Boynes
, Confeiller
d'Etat ,
avec Demoiſelle
Desgolz
.
Le Régiment de Salis , Grifon , faifant routepar
cette Ville pour fe rendre à fa deſtination , a paffé
en revue , le 8 de ce mois , devant le Roi qui étoit
accompagné de Monfeigneur le Dauphin , de
Madame la Dauphine , de Monfeigneur le Duc de
Berry , de Monfeigneur le Comte de Provence , de
Madame Adélaïde , de Meldames Victoires , Sophie
& Louife, du Duc de Chartres, du Prince de
7
OCTOBRE . 1763. 205
Condé , du Duc de Penthiévre & du Prince de
Lamballe. Ce Régiment a fait plufieurs évolutions
dont Sa Majesté a paru fort fatisfaite .
Le is , fête de l'Alfomption de la Sainte Vierge,
le Roi & la Reine accompagnés de Monfeigneur
le Dauphin , de Madame la Dauphine , de Ma
dame Adélaïde & des Mefdames Victoire , Sophie
& Louiſe , fe rendirent à l'Eglife de l'Abbaye
Royale de S. Corneille . Leurs Majeftés y affifiérent
aux Vêpres , & enfuite à la Proffeffion folemnelle
qui fe fait chaque année le même jour dans
tout le Royaume pour l'accompliffement du voeu
de Louis XIII. Dom Goudar , Grand Prieur de
l'Abbaye y Officia ; le Chapitre de S. Clément , le
Clergé des deux Paroitles , & tout le Clergé Régualier
s'y trouverent , ainfi que le Bailliage & le
Corps de Ville , qui eurent leur place dans le
Choeur le Chapitre de S. Clément & le Clergé des
deux Paroilles furent placés dans le Sanctuaire;
les deux Huifliers de la Chambre portoient leurs
Maffes devant le Roi. Après la Proceffion , Leurs
Majeftés entendirent le Salut dans la même Eglife.
Elles furent reçues & reconduites , avec les
cérémonies ordinaires , par le Grand - Prieur de
T'Abbaye , accompagné de fes Religieux.
Le 4 de ce mois , 'Leurs Majeftés , ainfi que la
Famille Royale fignerent le Contrat de Mariage
du Marquis de Crenolle & de Demo felle Mégrer
d'Etigny & le 17 celui du Marquis de Caraman,
Meftre-de-Camp du Régiment du Colonel-
Général Dragons , avec Demoiſelle de Monteffus
de Rully.
LE 24 du mois dernier , la Ducheſſe de Richmond
fut préfentée à Leurs Majeſtés , ainſi qu'à
la Famille Royale , par la Ducheffe de Fitz- James ,
& prit le tabouret chez la Reine. La Marquise de
Montmirel fut auffi préfentée par la Ducheffe de
Villequier.
Leurs Majeftés & la Famille Royale fignerent
le même jour , le contrat de Mariage du Comte
de Montchenu , Exempt des Gardes-du - Corps du
Roi , avec Demoiſelle de Bully , fille du fieur de
Buffy , Premier Préfident du Bureau des Finances
de la Généralité de Bourges.
Le Comte de Maillebois , a obtenu du Roi la
permiffion d'aller en Espagne pour les affaires particulieres
, & Sa Majefté a trouvé bon qu'il vînt
prendre congé d'elle avant que de partir.
Le 24 le fieur Fourneau , Recteur de l'Univerfité
, accompagné du fieur Mathieu , Principal du
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
College de Compiegne & de plufieurs Profeffeurs ,
eut l'honneur de préfenter au Roi , à Monſeigneur
le Dauphin , à Monfeigneur le Duc de Berry , &
AMonfeigneur le Comte de Provence , un Difcours
latin fur la Paix , qui a été prononcé par le fieur le
Beau le cadet, de l'Academie des Infcriptions &
Belles Lettres.
Dom Etienne , Religieux de S. Hubert , eur
auffi l'honneur de préfenter au Roi les Oiseaux &
les Chiens qu'il eft d'ufage d'envoyer de S. Hubert
en préfent a Sa Majefté.
Sa Majesté vient d'accorder les entrées de fa
Chambre au Marquis d'Armentieres. Le 2 de ce
mois , le fieur Neville - Neville eut une Audience
particuliere du Roi , dans laquelle il remit , en fa
qualité de Miniftre Plénipotentiaire de la Cour
d'Angleterre , fes Lettres de créance à Sa Majefté.
Le Comte de Wedelfriz , Envoyé extraordinaire de
Danemark , eut auffi le 4 une Audience particuliere,
dans laquelle il préfenta au Roi fes lettres
de rappel. Ces deux Miniftres furent conduits à
ces Audiences , ainfi qu'à celles de la Reine & de
Ja Famille Royale , par le fieur de la Live , Introducteur
des Ambaffadeurs .
1 Le 7 de ce mois , Leurs
Majeftés
ainsi que la
Famille
Royale
, fignerent
le Contrat
de Mariage
du feur Bourgeois
de Boynes
, Confeiller
d'Etat ,
avec Demoiſelle
Desgolz
.
Le Régiment de Salis , Grifon , faifant routepar
cette Ville pour fe rendre à fa deſtination , a paffé
en revue , le 8 de ce mois , devant le Roi qui étoit
accompagné de Monfeigneur le Dauphin , de
Madame la Dauphine , de Monfeigneur le Duc de
Berry , de Monfeigneur le Comte de Provence , de
Madame Adélaïde , de Meldames Victoires , Sophie
& Louife, du Duc de Chartres, du Prince de
7
OCTOBRE . 1763. 205
Condé , du Duc de Penthiévre & du Prince de
Lamballe. Ce Régiment a fait plufieurs évolutions
dont Sa Majesté a paru fort fatisfaite .
Le is , fête de l'Alfomption de la Sainte Vierge,
le Roi & la Reine accompagnés de Monfeigneur
le Dauphin , de Madame la Dauphine , de Ma
dame Adélaïde & des Mefdames Victoire , Sophie
& Louiſe , fe rendirent à l'Eglife de l'Abbaye
Royale de S. Corneille . Leurs Majeftés y affifiérent
aux Vêpres , & enfuite à la Proffeffion folemnelle
qui fe fait chaque année le même jour dans
tout le Royaume pour l'accompliffement du voeu
de Louis XIII. Dom Goudar , Grand Prieur de
l'Abbaye y Officia ; le Chapitre de S. Clément , le
Clergé des deux Paroitles , & tout le Clergé Régualier
s'y trouverent , ainfi que le Bailliage & le
Corps de Ville , qui eurent leur place dans le
Choeur le Chapitre de S. Clément & le Clergé des
deux Paroilles furent placés dans le Sanctuaire;
les deux Huifliers de la Chambre portoient leurs
Maffes devant le Roi. Après la Proceffion , Leurs
Majeftés entendirent le Salut dans la même Eglife.
Elles furent reçues & reconduites , avec les
cérémonies ordinaires , par le Grand - Prieur de
T'Abbaye , accompagné de fes Religieux.
Le 4 de ce mois , 'Leurs Majeftés , ainfi que la
Famille Royale fignerent le Contrat de Mariage
du Marquis de Crenolle & de Demo felle Mégrer
d'Etigny & le 17 celui du Marquis de Caraman,
Meftre-de-Camp du Régiment du Colonel-
Général Dragons , avec Demoiſelle de Monteffus
de Rully.
Fermer
Résumé : De COMPIEGNE, le 20 Août 1763.
En juillet et août 1763, plusieurs événements marquants eurent lieu à la cour royale. Le 24 juillet, la Duchesse de Richmond et la Marquise de Montmirel furent présentées à Leurs Majestés et à la Famille Royale par les Duchesses de Fitz-James et de Villequier, respectivement. Le même jour, le contrat de mariage du Comte de Montchenu avec Mademoiselle de Bully fut signé, et le Comte de Maillebois obtint la permission du Roi pour se rendre en Espagne. Le 24 août, le sieur Fourneau, Recteur de l'Université, accompagné de plusieurs professeurs, présenta un discours latin sur la paix au Roi, au Dauphin, au Duc de Berry et au Comte de Provence. Dom Étienne, Religieux de Saint-Hubert, offrit des oiseaux et des chiens au Roi. Le Marquis d'Armentières reçut les entrées de la Chambre du Roi, et le sieur Neville-Neville, Ministre Plénipotentiaire de la Cour d'Angleterre, remit ses lettres de créance au Roi. Le Comte de Wedelfriz, Envoyé extraordinaire du Danemark, présenta ses lettres de rappel. Le 7 août, le contrat de mariage du sieur Bourgeois de Boynes avec Mademoiselle Desgolz fut signé. Le 8 août, le Régiment de Salis-Salis passa en revue devant le Roi et la Famille Royale. Le 11 août, à l'occasion de la fête de l'Assomption de la Sainte Vierge, le Roi et la Reine assistèrent aux vêpres et à la procession solennelle à l'Abbaye Royale de Saint-Corneille. Le 4 août, le contrat de mariage du Marquis de Crenolle avec Demoiselle Méger d'Etigny fut signé. Le 17 août, ce fut au tour du Marquis de Caraman et de Demoiselle de Montessus de Rully.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
29
p. 205-206
De VERSAILLES, le 24 Août 1763.
Début :
Le Corps de Ville, ayant à sa tête le Duc de Chevreuse, Gouverneur de Paris, [...]
Mots clefs :
Corps de ville, Duc, Audience du roi, Cérémonies, Ministres, Marquis, Serment de fidélité
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De VERSAILLES, le 24 Août 1763.
DeVERSAILLES , le 24 Août 1763.
Le Corps de Ville , ayant à fa tête le Duc de
Chevreufe , Gouverneur de Paris, s'eft rendu au
206 MERCURE DE FRANCE.
>
jourd'hui à Versailles , & a été admis à l'Audience
du Roi avec les cérémonies accoutumées . Il a
été préfenté à Sa Majefté par le Comte de Saint-
Florentin , Miniftre & Sécrétaire d'Etat , & conduit
par le Marquis de Dreux , Grand-Maître des
Cérémonies. Les fieurs Pouletier & Phelippes de
la Marnierre , nouveaux Echevins , prêterent entre
les mains du Roi le ferment de fidélité dont le
Comte de Saint - Florentin fit la lecture , ainfi que
du fcrutin qui fut préfenté à Sa Majefté par le fieur
Anjorrant , Confeiller au Parlement.
Le Corps de Ville , ayant à fa tête le Duc de
Chevreufe , Gouverneur de Paris, s'eft rendu au
206 MERCURE DE FRANCE.
>
jourd'hui à Versailles , & a été admis à l'Audience
du Roi avec les cérémonies accoutumées . Il a
été préfenté à Sa Majefté par le Comte de Saint-
Florentin , Miniftre & Sécrétaire d'Etat , & conduit
par le Marquis de Dreux , Grand-Maître des
Cérémonies. Les fieurs Pouletier & Phelippes de
la Marnierre , nouveaux Echevins , prêterent entre
les mains du Roi le ferment de fidélité dont le
Comte de Saint - Florentin fit la lecture , ainfi que
du fcrutin qui fut préfenté à Sa Majefté par le fieur
Anjorrant , Confeiller au Parlement.
Fermer
Résumé : De VERSAILLES, le 24 Août 1763.
Le 24 août 1763, à Versailles, le Corps de Ville de Paris, dirigé par le Duc de Chevreuse, a été reçu par le Roi. Présenté par le Comte de Saint-Florentin, la délégation était conduite par le Marquis de Dreux. Les échevins Pouletier et Phelippes de la Marnierre ont prêté serment de fidélité au Roi, lu par le Comte de Saint-Florentin. Le scrutin a été présenté par Monsieur Anjorrant.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
30
p. 190
DE DRESDE, le 28 Août 1763.
Début :
La Princesse Électorale vient de donner au Roi son Beau-père [...]
Mots clefs :
Princesse, Spectacle, Acteurs, Musique, Ministres, Roi de Pologne, Opéra, Cavaliers
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE DRESDE, le 28 Août 1763.
DE DRESDE , le 28 Août 1763 .
La Princeſle Électorale vient de donner au Roi
ſon Beau-père un Spectacle auſſi intéreſſant par
la qualité des Acteurs que par le mérite de la
compofition. Elle a fait repréſenter ſur un Théâzre
dreſſé dans le manége de la Cour un Opéra
Italien , intitulé Talestris , Reine des Amazones.
La Muſique & les paroles ſont de Son Alteſſe
Royale : ce n'eſt pas le premier eſſai que ce
Prince a fait de ſes talens pour ce genred'Ou
vrage. Tous les Miniſtres étrangers ont aſſiſté
à ce Spectacle ; le peu d'étendue de la Salle n'a
pas permis de diſtribuer plus de cinquante
billets.Le rôle de Taleſtris a été rempli par la Prin
cefle Électorale ; ceux de Tomiris & d'Antiope ,
par les Princeſſes Elifabeth & Cunegonde , celui
d'Oronte par la Comteſſe Miniſzech , fille du
Comtede Bruhl , & celui de Learque par le ſieur
Reichemberg , Gentilhomme de la Chambre de
Sa Majesté Polonoiſe. Les perſonnages muets
d'Amazones , de Prêtreſſes & de Scythes étoient
repréſentés par des Dames , des Demoiſeiles &
des Cavaliers de la Cour. Il n'y a point eu de ballet.
Les Princes Charles & Albert jouoient dans
l'orcheſtre. Cet Opéra a eu le plus grand ſuccès ;
on en a ſurtout admiré la Muſique , où l'on trouve
, en effet , des morceaux de la plus grande
force. Sa Majefté a paru d'autant plus fatisfaite
de ce Spectacle qu'Elle n'avoit pas été prévenue ;
Elle a defiré le revoir , & vraiſemblablement on
le répétera plus d'une fois.
La Princeſle Électorale vient de donner au Roi
ſon Beau-père un Spectacle auſſi intéreſſant par
la qualité des Acteurs que par le mérite de la
compofition. Elle a fait repréſenter ſur un Théâzre
dreſſé dans le manége de la Cour un Opéra
Italien , intitulé Talestris , Reine des Amazones.
La Muſique & les paroles ſont de Son Alteſſe
Royale : ce n'eſt pas le premier eſſai que ce
Prince a fait de ſes talens pour ce genred'Ou
vrage. Tous les Miniſtres étrangers ont aſſiſté
à ce Spectacle ; le peu d'étendue de la Salle n'a
pas permis de diſtribuer plus de cinquante
billets.Le rôle de Taleſtris a été rempli par la Prin
cefle Électorale ; ceux de Tomiris & d'Antiope ,
par les Princeſſes Elifabeth & Cunegonde , celui
d'Oronte par la Comteſſe Miniſzech , fille du
Comtede Bruhl , & celui de Learque par le ſieur
Reichemberg , Gentilhomme de la Chambre de
Sa Majesté Polonoiſe. Les perſonnages muets
d'Amazones , de Prêtreſſes & de Scythes étoient
repréſentés par des Dames , des Demoiſeiles &
des Cavaliers de la Cour. Il n'y a point eu de ballet.
Les Princes Charles & Albert jouoient dans
l'orcheſtre. Cet Opéra a eu le plus grand ſuccès ;
on en a ſurtout admiré la Muſique , où l'on trouve
, en effet , des morceaux de la plus grande
force. Sa Majefté a paru d'autant plus fatisfaite
de ce Spectacle qu'Elle n'avoit pas été prévenue ;
Elle a defiré le revoir , & vraiſemblablement on
le répétera plus d'une fois.
Fermer
Résumé : DE DRESDE, le 28 Août 1763.
Le 28 août 1763 à Dresde, la Princesse Électorale a présenté un opéra italien intitulé 'Talestris, Reine des Amazones' au Roi, son beau-père. Elle en a composé la musique et les paroles. La représentation s'est déroulée dans un théâtre installé dans le manège de la cour, en présence de ministres étrangers. La Princesse Électorale a interprété le rôle principal de Talestris, tandis que les Princesses Élisabeth et Cunégonde ont joué les rôles de Tomiris et d'Antiope. D'autres rôles ont été attribués à la Comtesse Miniszech et au sieur Reichemberg. Les personnages muets, comme les Amazones, les Prêtresses et les Scythes, étaient incarnés par des membres de la cour. Les Princes Charles et Albert jouaient dans l'orchestre. L'opéra a connu un grand succès, notamment pour la qualité de sa musique, et le Roi a exprimé son désir de le revoir.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
31
p. 178-181
De FONTAINEBLEAU, le 29 Octobre 1763.
Début :
Le Roi est arrivé ici le 5 de ce mois ; & la Reine, ainsi que Madame Adélaïde, [...]
Mots clefs :
Famille royale, Serment, Roi de Pologne, Décès, Toux, Léthargie, Autopsie, Démission, Ministres, Ambassadeur, Conseil royal, Comte, Duc, Gouvernement, Prince, Contrat de mariage
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De FONTAINEBLEAU, le 29 Octobre 1763.
De FONTAINEBLEAU , le 29 Octobre 1763.
Le Roi eft arrivé ici les de ce mois ; & la
Reine , ainsi que Madame Adélaïde , Meldames
Victoires , Sophie & Louife , y font arrivées le len
demain.
Le 9 , le fieur de Maupeou a prêté ferment entre
les mains de Sa Majefté , en qualité de Garde
des Sceaux & de Vice-Chancelier .
On a appris , le 24 , par des Lettres de Dresde,
que Frédéric- Augufte III , Roi de Pologne , Electeur
de Saxe , étoit mort le s de ce mois , il étoit
né le 7 Octobre 1696 Depuis environ trois ſemaines
, ce Monarque éprouvoit un affoupiffe .
ment prefque continuel auquel s'étoit jointe une
toux fréquente il s'étonnoit quelquefois luimême
de l'elpèce de léthargie dans laquelle il
fe trouvoit plongé. Le jour de fa mort , il avoit
entendu la Meffe dans fon appartement fans qu'on
eût remarqué aucune altération fenfible dans fon
état en rentrant dans fa Chambre à coucher , il
s'eft trouvé très - mal & il a eu une intermittence
de poulx fi longue qu'on a été obligé de le faigner
du pied & de lui appliquer les véficatoires aux
jambes ; mais ces remédes n'ayant pu prévenir le
retour des étouffemens & des foibleffes qui fe
fuccédoient préfque à chaque inftant , Sa Majefté
a fuccombé à la violence du mal vers les cinq heures
du foir. Les Médecins & Chirurgiens qui ont
affifté à l'ouverture du Corps y ont remarqué , 19
plufieurs pierres dans le fiel. 2 °. quelques coma
JANVIER . 1764. 179
mencemens de polypes au coeur. 3º. une aſſez
grande quantité d'eau épanchée entre le crâne &
le cerveau. On a qualifié d'apopléxie ſéreuſe l'accident
qui a terminé la vie de ce Monarque . Ea
effet , il y a apparence que c'eft cette eau épanchée
qui produifoit l'affection foporifique dans laquelle
il retomboit fi fréquemment depuis quelques jours
& qui enfin a caufé fa mort. Le Roi a pris le
deuil à cette occafion le 18 de ce mois , & le portera
trois semaines.
Le fieur Molé , premier Péfi lent du Parlement
de Paris , ayant donné la démillion de fa charge ,
le Roi y a nommé le fieur de Maupeou , Préfident
à Mortier du même Parlement.
Le fieur O- Dunne , Miniftre Plénipotentiaire
du Roi auprès de l'Electeur Palatin prit congé
le 9 de Leurs Majeftés & de la Famille Royale.
Le Comte de Starhemberg Amballa deur de
Leurs Majeftés Impériales & Royale , eut , le 11
une Audience particulière du Roi , dans laquelle il
préfenta à Sa Majefté le Comte de Seilern , Miniftre
de la Cour de Vienne près de Sa Majeſté Britannique.
Il fut conduit à cette Audience , ainfi
qu'à celles de la Reine , de Madame A lélaïde , &
de Meſdames Victoire , Sophie & Louife , par e
Sieur de la Live , Introducteur des Ambaffadeurs .
Le Roi a bien voulu promettre la première
place qui viendra à vaquer , foit au Confeil Royal
des Finances , foit au Confeil des Dépêches , au
Sieur Feydeau de Marville , Confeiller d'Erat Ordinaire
, qui a remercié , le 14, Sa Majesté à cette
occafion.
Le 18 , le Roi , accompagné de Madame Adé
laide & Madame Sophie , eft parti pour aller voir
Madame la Dauphine à Verfailles, d'où Sa Majeft
eft revenu ici le lendemain.
H vj
180 MERCURE DE FRANCE .
Le Comte de Cantillana , Ambaſſadeur de Na
ples , a eu une Audience particuliere du Roi , dans
laquelle il a préfenté à Sa Majefté le Comte d'Almodovar
, Ambaffadeur de la Cour d'Espagne à
celle de Portugal . Le Comte de Rochford , Ambaffadeur
Extraordinaire d'Angleterre auprès de
Sa Majefté Catholique , a auffi été préſenté au Roi.
Le 16 , le Sieur de Maupeou prêta ferment entre
les mains du Roi , en qualité de Premier Préſident
du Parlement de Paris .
W Le 17 , le Duc & la Ducheffe de Richmont ont
pris congé de la Cour pour retourner en Angleterre.
Sa Majesté a diſpoſé du Gouvernement de Toul
& du Toulois , vacant par la mort du Marquis de
Crecy , en faveur du Marquis de Lugeac , Lieutenant
Général des Armées du Roi , & Commandant
des Grenadiers à Cheval , qui prêta ferment
entre les mains de Sa Majefté , le 28.
Le Sieur de Souza , Miniftre Plénipotentiaire de
la Cour de Portugal , notifia , le 23 de ce mois ,
à Sa Majefté , l'accouchement de la Princeffe du
Bréfil . Le Lord Hertford , Ambaffadeur de Sa Majefté
Britannique , eur , le même jour , une audience
particulière du Roi , à qui il préfenta fes
Lettres de créance ; & le 25 , le fieur de Neville ,
Miniftre Plénipotentiaire de la Grande-Bretagne ,
en eut une femblable , dans laquelle il remit à Sa
Majefté les Lettres de rappel . Ces Miniftres furent
conduits à ces audiences , ainſi qu'à celles de la
Reine , de Madame Adélaïde , & de Mefdames
Sophie & Louife , par le Sieur de la Live , Introducteur
des Ambaffadeurs .
Le Prince de Mafferano préfenta au Roi , le 23 ,
le premier Volume du Catalogue des Manufcrits
Arabes qui fe trouvent dans la Bibliothèque Royale
JANVIER. 1764. 181
de l'Efcurial , & que Sa Majeſté Catholique a fair
traduire en Latin ..
Leurs Majeftés , ainfi que Madame Adélaide , &
Meldames Victoire , Sophie & Louife , fignerent ,
le même jour , le Contrat de mariage du Marquis
d'Argenteuil , Aide - Major des Gardes du Corps ,
& de Demoiſelle du Ban de la Feuillée.
Le Marquis d'Aubeterre , Lieutenant Général
des Armées du Roi , Chevalier de ſes Ordres , &
fon Ambaffadeur Extraordinaire à Rome , prit
congé de la Cour ces jours derniers , pour ſe rendre
à fa deſtination .
Le Roi eft arrivé ici les de ce mois ; & la
Reine , ainsi que Madame Adélaïde , Meldames
Victoires , Sophie & Louife , y font arrivées le len
demain.
Le 9 , le fieur de Maupeou a prêté ferment entre
les mains de Sa Majefté , en qualité de Garde
des Sceaux & de Vice-Chancelier .
On a appris , le 24 , par des Lettres de Dresde,
que Frédéric- Augufte III , Roi de Pologne , Electeur
de Saxe , étoit mort le s de ce mois , il étoit
né le 7 Octobre 1696 Depuis environ trois ſemaines
, ce Monarque éprouvoit un affoupiffe .
ment prefque continuel auquel s'étoit jointe une
toux fréquente il s'étonnoit quelquefois luimême
de l'elpèce de léthargie dans laquelle il
fe trouvoit plongé. Le jour de fa mort , il avoit
entendu la Meffe dans fon appartement fans qu'on
eût remarqué aucune altération fenfible dans fon
état en rentrant dans fa Chambre à coucher , il
s'eft trouvé très - mal & il a eu une intermittence
de poulx fi longue qu'on a été obligé de le faigner
du pied & de lui appliquer les véficatoires aux
jambes ; mais ces remédes n'ayant pu prévenir le
retour des étouffemens & des foibleffes qui fe
fuccédoient préfque à chaque inftant , Sa Majefté
a fuccombé à la violence du mal vers les cinq heures
du foir. Les Médecins & Chirurgiens qui ont
affifté à l'ouverture du Corps y ont remarqué , 19
plufieurs pierres dans le fiel. 2 °. quelques coma
JANVIER . 1764. 179
mencemens de polypes au coeur. 3º. une aſſez
grande quantité d'eau épanchée entre le crâne &
le cerveau. On a qualifié d'apopléxie ſéreuſe l'accident
qui a terminé la vie de ce Monarque . Ea
effet , il y a apparence que c'eft cette eau épanchée
qui produifoit l'affection foporifique dans laquelle
il retomboit fi fréquemment depuis quelques jours
& qui enfin a caufé fa mort. Le Roi a pris le
deuil à cette occafion le 18 de ce mois , & le portera
trois semaines.
Le fieur Molé , premier Péfi lent du Parlement
de Paris , ayant donné la démillion de fa charge ,
le Roi y a nommé le fieur de Maupeou , Préfident
à Mortier du même Parlement.
Le fieur O- Dunne , Miniftre Plénipotentiaire
du Roi auprès de l'Electeur Palatin prit congé
le 9 de Leurs Majeftés & de la Famille Royale.
Le Comte de Starhemberg Amballa deur de
Leurs Majeftés Impériales & Royale , eut , le 11
une Audience particulière du Roi , dans laquelle il
préfenta à Sa Majefté le Comte de Seilern , Miniftre
de la Cour de Vienne près de Sa Majeſté Britannique.
Il fut conduit à cette Audience , ainfi
qu'à celles de la Reine , de Madame A lélaïde , &
de Meſdames Victoire , Sophie & Louife , par e
Sieur de la Live , Introducteur des Ambaffadeurs .
Le Roi a bien voulu promettre la première
place qui viendra à vaquer , foit au Confeil Royal
des Finances , foit au Confeil des Dépêches , au
Sieur Feydeau de Marville , Confeiller d'Erat Ordinaire
, qui a remercié , le 14, Sa Majesté à cette
occafion.
Le 18 , le Roi , accompagné de Madame Adé
laide & Madame Sophie , eft parti pour aller voir
Madame la Dauphine à Verfailles, d'où Sa Majeft
eft revenu ici le lendemain.
H vj
180 MERCURE DE FRANCE .
Le Comte de Cantillana , Ambaſſadeur de Na
ples , a eu une Audience particuliere du Roi , dans
laquelle il a préfenté à Sa Majefté le Comte d'Almodovar
, Ambaffadeur de la Cour d'Espagne à
celle de Portugal . Le Comte de Rochford , Ambaffadeur
Extraordinaire d'Angleterre auprès de
Sa Majefté Catholique , a auffi été préſenté au Roi.
Le 16 , le Sieur de Maupeou prêta ferment entre
les mains du Roi , en qualité de Premier Préſident
du Parlement de Paris .
W Le 17 , le Duc & la Ducheffe de Richmont ont
pris congé de la Cour pour retourner en Angleterre.
Sa Majesté a diſpoſé du Gouvernement de Toul
& du Toulois , vacant par la mort du Marquis de
Crecy , en faveur du Marquis de Lugeac , Lieutenant
Général des Armées du Roi , & Commandant
des Grenadiers à Cheval , qui prêta ferment
entre les mains de Sa Majefté , le 28.
Le Sieur de Souza , Miniftre Plénipotentiaire de
la Cour de Portugal , notifia , le 23 de ce mois ,
à Sa Majefté , l'accouchement de la Princeffe du
Bréfil . Le Lord Hertford , Ambaffadeur de Sa Majefté
Britannique , eur , le même jour , une audience
particulière du Roi , à qui il préfenta fes
Lettres de créance ; & le 25 , le fieur de Neville ,
Miniftre Plénipotentiaire de la Grande-Bretagne ,
en eut une femblable , dans laquelle il remit à Sa
Majefté les Lettres de rappel . Ces Miniftres furent
conduits à ces audiences , ainſi qu'à celles de la
Reine , de Madame Adélaïde , & de Mefdames
Sophie & Louife , par le Sieur de la Live , Introducteur
des Ambaffadeurs .
Le Prince de Mafferano préfenta au Roi , le 23 ,
le premier Volume du Catalogue des Manufcrits
Arabes qui fe trouvent dans la Bibliothèque Royale
JANVIER. 1764. 181
de l'Efcurial , & que Sa Majeſté Catholique a fair
traduire en Latin ..
Leurs Majeftés , ainfi que Madame Adélaide , &
Meldames Victoire , Sophie & Louife , fignerent ,
le même jour , le Contrat de mariage du Marquis
d'Argenteuil , Aide - Major des Gardes du Corps ,
& de Demoiſelle du Ban de la Feuillée.
Le Marquis d'Aubeterre , Lieutenant Général
des Armées du Roi , Chevalier de ſes Ordres , &
fon Ambaffadeur Extraordinaire à Rome , prit
congé de la Cour ces jours derniers , pour ſe rendre
à fa deſtination .
Fermer
Résumé : De FONTAINEBLEAU, le 29 Octobre 1763.
En octobre 1763, plusieurs événements marquants se déroulèrent à la cour française. Le 29 octobre, le Roi arriva à Fontainebleau, suivi par la Reine et Madame Adélaïde le même jour, et par Mesdames Victoire, Sophie et Louise le lendemain. Le 9 octobre, René Nicolas de Maupeou prêta serment en tant que Garde des Sceaux et Vice-Chancelier. Le 24 octobre, des lettres de Dresde annoncèrent la mort de Frédéric-Auguste III, Roi de Pologne et Électeur de Saxe, survenue le 5 octobre. Le monarque souffrait depuis trois semaines d'étouffements et de toux fréquents. Les médecins diagnostiquèrent la présence de calculs biliaires, des polypes au cœur et une accumulation de liquide entre le crâne et le cerveau, causant une apoplexie séreuse. En janvier 1764, le Roi porta le deuil pendant trois semaines à partir du 18 janvier. René Nicolas de Maupeou fut nommé Premier Président du Parlement de Paris le 16 janvier. Plusieurs ambassadeurs et ministres présentèrent leurs lettres de créance ou prirent congé, notamment le Comte de Starhemberg, le Comte de Cantillana, le Comte de Rochford et le Lord Hertford. Le Marquis de Lugeac fut nommé Gouverneur de Toul et du Toulois. Le Sieur de Souza annonça l'accouchement de la Princesse du Brésil. Le Prince de Masserano présenta un catalogue de manuscrits arabes à la Bibliothèque Royale. Enfin, le contrat de mariage du Marquis d'Argenteuil fut signé par les membres de la famille royale.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
32
p. 196-197
De la HAYE, le 23 Décembre 1763.
Début :
Le Comte de Wartensleben, Ministre des Seigneurs Etats-Généraux auprès des trois [...]
Mots clefs :
Comte, Ministres, Landgrave de Hesle-Cassel, Arrestation, Mémoire, Résumé des faits, États généraux , Détention, Motifs, Testament, Mauvaises intentions, Injures
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De la HAYE, le 23 Décembre 1763.
De la HAYE , le 23 Décembre 1763 .
Le Comte de Wartenfleben , Miniftre des Seigneurs
Etats-Généraux auprès des trois Electeurs
Eccléfiaftiques & des Cercles du Haut & Bas-
Rhin , s'étant rendu à Caffel pour les affaires parculieres
, le Landgrave de Heffe l'a fait arrêter
par un bas- Officier & huit fufiliers qui , après
lui avoir ôté ſon épée , l'ont étroitement enfermé
dans une chambre où il eſt gardé à vue. Leurs
Hautes Puiffances , étonnées d'un acte de violence
fi contraire aux droits des gens , ont dépêché au
Landgrave de Heffe un Courier qui eft revenu
fans apporter réponſe , mais depuis le Langdgrave
a répondu à la Lettre des Etats-Généraux. Cette
réponse fut accompagnée d'un mémoire contenant
l'expofé des motifs juftificatifs de la conduite
du Landgrave en cette occafion. Le Comte de
Wartenfleben a envoyé , de fon côté , à les maîtres
un mémoire contenant le détail des faits. Les mo
tifs du Landgrave n'ayant pas paru fuffifans pour,
autorifer la violence commife envers le Comte
Leurs Hautes Puiffances ont envoyé hier à Caffel
une Eftafette chargée de la réplique qu'Elles ont
jugé à propos de faire à la réponſe du Landgrave
, & par laquelle Elles infiftent avec force fur
la demande d'une fatisfaction éclatante & proportionnée
à l'injure faite à la République dans
la perfonne de fon Miniftre. Les Etats Généraux
témoignent dans cette réplique le defir qu'ils
ant de ne devoir cette fatisfaction qu'à l'équité de
ji I.
JANVIER. 1764. 197
ce Prince fans être obligés de recourir à des
moyens dont ils ne feroient ufage qu'à regret.
Le Landgrave a fait publier le mémoire dans
lequel il expofe fes motifs . Voici le précis des faits
qui ont donné lieu à la détention du Comte.
>
La Baronne de Gorz'avoit quitté la Heffe pour
éviter les troubles de la guerre & s'étoit retirée
à Francfort fur le Mein , où elle mourut en 1762 .
Elle légua par fon Teftament tous les biens pour
établir un Chapitre de Dames à fon Château de
Homberg dans la Heffe & elle nomma - le
.Comte de Wartenfleben fon éxécuteur Teftamentaire
& Directeur de cet établiffement. On
accufe ce Miniftre d'avoir eu des vues contraires
-aux intérêts de la Nobleffe du Pays , & aux difpolitions
da Teftament de la Baronne de Goerz ,
en prétendant fonder hors de la Heffe le Chapitre
dont l'établiffement lui étoit confié. Le Landgrave
: lui fit déclarer qu'il ne permettroit pas que l'on
s'écartât des difpofitions du Teftament & enjoignit
à la Régence de pourvoit a la fûreté de l'héritage,
En conféquence , la Régence demanda au Comte
la reftitution des deniers & effets dont il avoit été
mis en poffeffion ; mais ce Miniftre , au lieu de les
rendre , les fit fortir hors de la Heffe. Ces procédés
ayant paru auffi injurieux à la dignité du
Landgrave & de la Régence , que contraires aux
intentions de la Baronne de Goerz , le Comte de
Wartenfleben n'étant pas d'ailleurs accrédité à
la Cour de Caffel , le Landgrave a cru devoir
le faire arrêter pour l'obliger à fe foumettre aux
clauſes du Teftament dont il eft l'Exécuteur.
Le Comte de Wartenfleben , Miniftre des Seigneurs
Etats-Généraux auprès des trois Electeurs
Eccléfiaftiques & des Cercles du Haut & Bas-
Rhin , s'étant rendu à Caffel pour les affaires parculieres
, le Landgrave de Heffe l'a fait arrêter
par un bas- Officier & huit fufiliers qui , après
lui avoir ôté ſon épée , l'ont étroitement enfermé
dans une chambre où il eſt gardé à vue. Leurs
Hautes Puiffances , étonnées d'un acte de violence
fi contraire aux droits des gens , ont dépêché au
Landgrave de Heffe un Courier qui eft revenu
fans apporter réponſe , mais depuis le Langdgrave
a répondu à la Lettre des Etats-Généraux. Cette
réponse fut accompagnée d'un mémoire contenant
l'expofé des motifs juftificatifs de la conduite
du Landgrave en cette occafion. Le Comte de
Wartenfleben a envoyé , de fon côté , à les maîtres
un mémoire contenant le détail des faits. Les mo
tifs du Landgrave n'ayant pas paru fuffifans pour,
autorifer la violence commife envers le Comte
Leurs Hautes Puiffances ont envoyé hier à Caffel
une Eftafette chargée de la réplique qu'Elles ont
jugé à propos de faire à la réponſe du Landgrave
, & par laquelle Elles infiftent avec force fur
la demande d'une fatisfaction éclatante & proportionnée
à l'injure faite à la République dans
la perfonne de fon Miniftre. Les Etats Généraux
témoignent dans cette réplique le defir qu'ils
ant de ne devoir cette fatisfaction qu'à l'équité de
ji I.
JANVIER. 1764. 197
ce Prince fans être obligés de recourir à des
moyens dont ils ne feroient ufage qu'à regret.
Le Landgrave a fait publier le mémoire dans
lequel il expofe fes motifs . Voici le précis des faits
qui ont donné lieu à la détention du Comte.
>
La Baronne de Gorz'avoit quitté la Heffe pour
éviter les troubles de la guerre & s'étoit retirée
à Francfort fur le Mein , où elle mourut en 1762 .
Elle légua par fon Teftament tous les biens pour
établir un Chapitre de Dames à fon Château de
Homberg dans la Heffe & elle nomma - le
.Comte de Wartenfleben fon éxécuteur Teftamentaire
& Directeur de cet établiffement. On
accufe ce Miniftre d'avoir eu des vues contraires
-aux intérêts de la Nobleffe du Pays , & aux difpolitions
da Teftament de la Baronne de Goerz ,
en prétendant fonder hors de la Heffe le Chapitre
dont l'établiffement lui étoit confié. Le Landgrave
: lui fit déclarer qu'il ne permettroit pas que l'on
s'écartât des difpofitions du Teftament & enjoignit
à la Régence de pourvoit a la fûreté de l'héritage,
En conféquence , la Régence demanda au Comte
la reftitution des deniers & effets dont il avoit été
mis en poffeffion ; mais ce Miniftre , au lieu de les
rendre , les fit fortir hors de la Heffe. Ces procédés
ayant paru auffi injurieux à la dignité du
Landgrave & de la Régence , que contraires aux
intentions de la Baronne de Goerz , le Comte de
Wartenfleben n'étant pas d'ailleurs accrédité à
la Cour de Caffel , le Landgrave a cru devoir
le faire arrêter pour l'obliger à fe foumettre aux
clauſes du Teftament dont il eft l'Exécuteur.
Fermer
Résumé : De la HAYE, le 23 Décembre 1763.
Le 23 décembre 1763, le Comte de Wartenfleben, ministre des États-Généraux, a été arrêté à Cassel par le Landgrave de Hesse. Cet acte a provoqué l'indignation des Hautes Puissances, qui ont demandé des explications au Landgrave. Ce dernier a justifié son action par un mémoire, tout comme le Comte de Wartenfleben. Les motifs du Landgrave n'ont pas été jugés suffisants, et les États-Généraux ont exigé une satisfaction proportionnée à l'injure faite à la République. Ils ont souhaité résoudre l'affaire par l'équité du Prince, évitant des moyens plus radicaux. L'arrestation est liée à un conflit concernant l'exécution du testament de la Baronne de Gorz, qui avait légué ses biens pour établir un Chapitre de Dames à Homberg. Le Landgrave accuse le Comte de vouloir établir ce Chapitre hors de la Hesse, contraignant ainsi l'arrestation du Comte pour le forcer à se conformer aux clauses testamentaires.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
33
p. 198-206
De VERSAILLES, le 31 Décembre 1763.
Début :
Le Roi a nommé l'Evêque de Vence à l'Evêché de Mâcon ; & à l'Evêché [...]
Mots clefs :
Abbaye, Ordre, Diocèse, Évêché, Abbé, Honneur, Famille royale, Comte, Marquis, Monseigneur, Académie, Chevalier, Parlement, Ministres, Commandeur, Princesse, Ministre plénipotentiaire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De VERSAILLES, le 31 Décembre 1763.
De VERSAILLES , le 31 Décembre 1763.
La Roi a nommé l'Evêque de Vence à l'Evêché.
de Mâcon ; & à l'Evêché de Vence l'Abbé de
Lorry , Vicaire-Général du Diocèfe de Rouen :
à l'Abbaye de Vallemont , Ordre de Saint Be
noît , Diocèle de Rouen , l'Abbé Desforges ,
Vicaire Général du Diocèfe du Mans ; à l'Ab- .
baye de Previlly , Ordre de Citeaux , Diocèle
de Sens , l'Abbé de Trudaine , Vicaire- Général du
Diocèſe de Senlis ; à l'Abbaye de Saint Manfuy ,
Ordre de Saint Benoît , Diocèfe de Toul , l'Abbé
Bertin , Confeiller d'Etat ; à l'Abbaye de Saint
Sauveur de Blaye , Ordre de Saint Benoît , Diocèfe
de Bourdeaux , l'Abbé de Pingon , Comte de
Lyon , Vicaire Général du Diocèle de Vienne ; à
l'Abbaye de la Prée , Ordre de Citeaux , Diocèfe
de Bourges , l'Evêque d'Apollonie ; à l'Abbaye
de Saint Georges des Bois , Ordre de Saint Au
guftin , Diocèfe du Mans , l'Abbé de Pujols ,
Vicaire-Général du Diocèfe de Blois ; à l'Abbaye
Saint Vincent du Mans , Ordre de Saint Benoît
l'Evêque d'Orléans à l'Abbaye de Saint Alire ,
même Ordre , Diocèfe de Clermont , l'Archevêque
de Lyon , à l'Abbaye de Saint Auguftin de
Limoges , même Ordre de Saint Benoît , l'Abbé
de Veri , Auditeur de Rote; à l'Abbaye de Saint-
Sulpice de Bourges , même Ordre , l'Abbé le
Noir , Confeiller Clerc au Parlement de Paris
-
:
JANVLER . 1764. 1.99
à l'Abbaye de Chezal , même Ordre , l'Abbé
Gougenot , Confeiller - Clerc au Grand- Confeil
& à l'Abbaye de Saint Martin de Séez , même
Ordre , l'Abbé de Foy ; à l'Abbaye de Laval-
Brefliere , Ordre de Citeaux , Diocèle de Vienne
la Dame de Boiffac ,,Religieufe du Monaftere de
Montfleury , Diocèle de Grenoble ; & à l'Abbaye
de la Scauve , Ordre de Citeaux , Diocèle du ,
Puy, la Dame de Montmorin , Abbeffe de l'Abbaye,
de Clavas , du même Ordre & du même Diocèle :
Cette derniere Abbaye éteinte & demeurera
Ter
unie à celle de la Scauve.
Sa Majesté a nommé Aumônier de la Reine`
l'Abbé de Chilleau , Grand- Vicaire du Diocèſe,
de Metz .
La Ducheffe de Beauvilliers fut préfentée le 27
du mois dernier , à Leurs Majeftés & à la Famille.
Royale par la Ducheffe de Saint Aignan , & prit
enfuite le tabouret chez la Reine.
Le 29 du même mois , le Baron de Gleicken
Envoyé Extraordinaire de la Cour de Dannemarck
, a préfenté à Sa Majefté , de la part du
Roi fon Maître , cinquante- huit faucons d'Iflande.
Le Roi a nommé au Gouvernement de Belle-
Ifle , vacant par la mort du Vicomte de Belfunce
, le Marquis de Vibraye , Lieutenant- Général
de fes Armées , & a bien voulu , en confidération
des fervices de cet Officier , lui accorder la
première Place de Commandeur qui vaquera
dans l'Ordre de Saint Louis. En conféquence , le
Marquis de Vibraye a eu l'honneur de remercier
Sa Majefté le 24 du même mois , & a prêté ferment
le 30 entre les mains du fieur de Maupeou,
Garde des Sceaux , Vice- Chancelier.
Le même jour , la Comtelfe de Holderneff fut
I iv
200 MERCURE DE FRANCE.
préfentée à Leurs Majeftés & à la Famille Royale
par la Maréchale de Mirepoix ; & le Chevalier du
Buat , Miniftre du Roi auprès de la Diéte Générale
de l'Empire , prit congé de Sa Majefté pour
retourner à Ratisbonne.
Le i de ce mois , le Marquis de Villeroy prêta
ferment entre les mains de Sa Majefté , pour le
Gouvernement du Lyonnois , du Forez & du
Beaujollois.
Le 4 , la Comteffe de Gacé , préfentée par la
Princeffe de Monaco , fit ſes révérences à Leurs
Majeftés & à la Famille Royale.
Le même jour , le Baron de Zuckmantel, Maréchal
de Camp , l'un des Directeurs de la Nobleffe
immatriculée de la Baffe - Alface , & nommé
Miniftre Plénipotentiaire du Roi auprès de
l'Electeur de Saxe , prit congé de Sa Majesté à.
qui il fut préfenté par le Duc de Praflin , Miniftre
& Secrétaire d'Etat ayant le Département
des Affaires Etrangères .
Le 6 , on a célébré dans l'Eglife Paroiffiale de
Notre-Dame , un Service pour le repos de l'ame.
de Louife-Elifabeth de France , Ducheffe de Parme.
La Reine y a affifté , ainſi que Mgr le Dauphin
, Madame Adélaïde , & Mefdames Sophie
& Louife.
Le 8 , la Marquise de Pons fut préſentée à
Leurs Majeftés , ainſi qu'à la Famille Royale ,
par la Comtelle de Pons- Saint- Maurice.
Le 11 , la Marquife de Chalmazel , accompagnée
de la Marquife de Tallara & de la Marquife
de Caftries , fit fes révérences à Leurs Majeftés
& à la Famille Royale.
Le fieur Bertin , Contrôleur-Général des Fid
nances , ayant demandé au Roi la permiſſion dé
fe démettre de fa Place , Sa Majefté y a nommé le
JANVIER. 1764. 201
Sieur de L'Averdy, Conſeiller au Parlement de Paris
, & a rétabli en faveur du Sr Bertin , une Charge
de Secrétaire d'Etat qui avoit été fupprimée.
Le 13 , le Comte de Stharemberg , Ambaſſadeur
de la Cour de Vienne , eut une audience
particulière du Roi , à qui il notifia , de la part
de Leurs Majeftés Impériales & Royale , la mort
de l'Archiducheffe Infante . Il fut conduit , en
long manteau de deuil , à cette audience , ainfi
qu'à celles de la Reine & de la Famille Royale ,
par le fieur de la Live , Introducteur des Ambaf
fadeurs. Le 15 , la Cour a pris le deuil , à cette
occafion , pour trois ſemaines.
La Marqnife de Pons , ayant été nommée par
Sa Majefté Dame pour accompagner Madame la
Dauphine , a eu l'honneur d'être préfentée au
Roi en cette qualité.
Le 18 , le fieur Bertin prêta ferment , entre les
mains de Sa Majefté , en qualité de Secrétaire
d'Etat. Le même jour , le Marquis de Bauffer ,
Miniftre Plénipotentiaire du Roi auprès de l'Impératrice
de Ruffie , prit congé de Sa Majesté pour
fe rendre à fa deſtination .
Le 21 , la Comteffe de Virieu fut préſentée à
Leurs Majeftés & à la Famille Royale , par la Marquife
de Sourches.
Le 27 , la Comteffe de Sparre de Cronneberge
fut préfentée à Leurs Majeftés & à la Famille
Royale , par la Comteffe de Sparre , fa belle-
Soeur.
On a appris que , le 17 , l'Electeur de Saxe étoit
mort à Drefde , le troifiémejour d'une petite vérole
qu'on avoit prife d'abord pour une ébulli
tion peu dangereufe. Ce Prince s'appelloit Fréderic
- Chrétien - Léopold ; il étoit né le s Septem
bre 1722 & avoit été marié le 20 Juin 1747 à la
5
I-v
202 MERCURE DE FRANCE.
Soeur de l'Electeur de Baviere Frederic Augufte ,
Prince Electoral de Saxe , âgé de treize ans , fucèède
aux Etats du feu Electeur fon pere.
Le Marquis de Roux , de Marfeille , qui , en plafieurs
occafions , a donné des preuves de fon zèle
pour le bien de l'Etat , ayant demandé au Roi la
permiffion d'employer à la culture de fes terres
deux cens des familles étrangeres qui traverſent
le Royaume pour fe rendre à Cayenne , Sa Majefté
la lui a accordée & a donné ſes ordres en
conféquence.
Leurs Majeftés & la Famille Royale ont figné
Tes Contrats de mariage du Marquis de Beaucaire
avec Demoiselle de Hornbourg , fille du Comte
dé ce nom ; le 27 du mois dernier ) du Comte
de Sparre avec la Demoifelle Hardouin de Beaumois
, fille du Tréforier Général du Marc d'Or des
Ordres du Roi; du Marquis de Gauville avec la Demoifelle
Filleu , Dame & Patrone de S.Martin - le-
Viel des-Chenets : ( le 11'de ce mois ) da Comte
de Rouault avec la Dame de Brou , veuve du Sr
de Brou,Intendant de Rouen ; ( le 21 ) du Marquis
du Terrail avec Demoiſelle de Cruffol de Montauzier
; ( le 27 ) & du Baron de Boeil avec De
moifelle Saget , fille du fieur Saget , Confeiller
au Parlement de Paris. ľ le 28. )
Le Pere Bertier , Prêtre de l'Oratoire , a eur
T'honneur de préfenter à Sa Majesté trois volumes
de fa compofition , intitulés : Principes Phyfiques ,
"pour fervir de fuite aux Principes Mathématiques
d. Newton.
Le Baron de Zur- Lauben , Maréchal de Camp ,
commandant un bataillon de régiment des Gardes
Striffes & Honoraire Etranger de l'Académie
Royale des Infcriptons & Belles - Lettres , eut
Phonneur de préfenter le 13 de ce mois , fes Ou
A
JANVIER. 1764. 203
vrages à Monfeigneur le Duc de Berty & à Monfeigneur
le Comte de Provence : fçavoir , L'HISTOIRE
MILITAIRE des Suifes au fervice de la
France ; LES MÉMOIRES & LETTRES de Henry
Duc de Rohan ,fur la guerre de la Valteline , publiés
pour la premiere fois , & accompagnées de notes
Géographiques , Hiftoriques & Généalogiques ;
LE GÉNÉRAL D'ARMÉ E par Onofander , Ouvra➡
ge traduitdu Grec & dédié à Monfeigneur le Dauphin
; & les trois volumes de LA BIBLIOTHE
QUE Militaire , Politique & Hiftorique.
19,
Le fieur Clabault a eu l'honneur de préſenter,
fe
à Monfeigneur le Comte d'Artois un Tableau
Généalogique & Chronologique de la Maifon
Royale de France , dédié à ce Prince. Le len
demain , il a eu l'honneur de préfenter le même
Ouvrage à Monfeigneur le Dauphin , à Madame
la Dauphine , à Monseigneur le Duc de Berry & à
Monſeigneur le Comte de Provence.
Le fieur de Saint Geniès Chevalier de Sains
Louis , & Commandant de Bataillon , a eu l'honi
neur de préfenter au Roi un Ouvrage de la com→
pofition, intitulé , l'Officier Partifan.
Le 26 , le fieur Marmontel eut l'honneur de
préfenter à Leurs Majestés & à la Famille Royale
Je Difcours qu'il a prononcé pour la réception à
P'Académie Françoife.
Du 4 Janvier 1764.
Le premier de ce mois , les Princes & Princeffes ,
ainfi que les Seigneurs & Dames de la Cour , ren
dirent leurs refpects au Roi à l'occaſion de la nouvelle
année. Le Corps de Ville de Paris eut le mê
me honneur. Les Hautbois de la Chambre exécu
terent différens morceaux de Mufique pendant le
lever de Sa Majesté.
I vj
204 MERCURE DE FRANCE .
1
Les Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
l'Ordre du Saint-Elprit , s'étant allemblés dans <
le Cabinet du Roi vers les onze heures du matin ,
Sa Majesté tint un Chapitre dans lequel Elle nomma
Chevaliers dudit Ordre , le Comte de Saulx
Tavannes, Lieutenant-Général & Chevalier d'Honneur
de la Reine , le Chevalier de Muy , Lieutenant-
Général & Menin de Monfeigneur le Dauphin ,.
le Comte du Châtelet-Lomont , Maréchal de Camp
& Ambaffadeur du Roi à la Cour de Vienne ,
& le Comte d'Eftaing , Maréchal de Camp.
Après le Chapitre , le Roi fe rendit à la Chapelle ,
précédé de Monfeigneur le Dauphin , du Duc
d'Orléans , du Duc de Chartres , du Prince de
Gondé , du Comte de Clermont , du Prince de
Conty , du Comte la Marche , du Comte d'Eu ,
du Duc de Penthievre & du Prince de Lamballe ?
& des Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
l'Ordre. Les deux Huiffiers portoient leurs maſſes
devant Sa Majesté qui étoit revêtue du manteau :
Royal , ayant par - deffus , le Collier de l'Ordre &
celui de la Toifon d'Or. L'Evêque Duc de Langres
, Prélat Commandeur , célébra la Grand'
Meffe , à laquelle la Reine , Madame la Dauphine
, Madame Adelaide, & Meſdames Victoire ,
Sophie & Louiſe affifterent dans la Tribune. La
quête fut faite par la Princeffe de Monaco . Après
la Meffe , le Roi fut reconduit à fon appartement
en la maniere accoutumée. Il y eut le même jour
grand couvert pendant lequel les Muficiens du
Roi exécuterent plufieurs fymphonies.
•
Les Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
l'Ordre affifterent , le 2 , au Service anniverſaire
qu'on célébre pour les Chevaliers défunts , & au- -
quel officia l'Evêque d'Orléans , Commandeur de
l'Ordre.
JANVIER 1764. 205
Le même jour , la Cour prit le deuil pour quatorze
jours , à l'occafion de la mort de l'Electeur
de Saxe.
Le 3 , le Parlement de Paris fe rendit à la Cour
pour rendre les reſpects au Roi à l'occafion de la
nouvelle année .
L'Académie Royale des Sciences a eu l'honneur
de préſenter au Roi le Volume de ſes Mémoires
pour l'année 17 ; 8. C'eft le fecond des quatre
volumes dont les fieurs le Roi , de la Lande ,
Tillet & Befout avoient été chargés par Sa Majesté
de compofer la Parrie Hiftorique & de procurer
la publication.
Les fieurs de Caffini , Camus & de Montigny ,
Membres de l'Académie Royale des Sciences , ont
préfenté au Roi une fuite de leur Carte Géographique
, c'eft -à - dire la foixante- neuviéme
Feuille N ° .175 , comprenant les Villes de Sierck,
Luxembourg & Treyes , le cours de la Mozelle
depuis Berg jufqu'à Treves , & celui de la Saxe
depuis Fremerdorfjufqu'à Conds où elle fe joint à
la Mozelle; & la foixante-dixiéme Feuille N° .165 ,-
qui comprend les Villes de Bafle, Huningue , Porrentru
, une partie du cours du Rhin & les lignes
qui féparent la France de la Suiffe .
Le fieur de la Lande , de l'Académie Royale des
Sciences , chargé par le Roi de compoſer chaque
année le Livre de la Connoiffance des Mouvemens
Céleftes , a eu l'honneur de préfenter à Sa Majesté
le Volume de cet Ouvrage , deſtiné pour l'année
prochaine 1765. Indépendamment des calculs
ordinaires faits pour l'ufage des Aftronomes & des
Navigateurs , ce Volume contient de nouvelles
Tables pour l'Aftronomie , une nouvelle théorie
fur la conftruction des Barometres , un détail cus
rieux des expériences faites depuis peu pour la dés
206 MERCURE DE FRANCE .
couverte des longitudes , & plufieurs articles inté
reffans.
L'Abbé de de Burle de Curban a eu l'honneur
de préfenter à Leurs Majeftés , à Monseigneur le
Dauphin & à Madame Adélaide la cinquiéme
Partie de la Science du Gouvernement , Ouvrage
compofé par le feu fieur de Réal. Cette cinquiéme
Partie , qui contient le Droit des Gens , eft dédiée
au Roi. Le fieur le Rouge , ancien Ingénieur--
Géographe du Roi , a préfenté auffi à Sa Majefté &
à Monfeigneur le Dauphin les premiers Exem
plaires des Plans , Profils & Elévation de la nouvelle
Paroifle de la Magdelaine , gravés d'après
les deffeins du fieur Content , Architecte du Roi.
Cet Edifice , qu'on doit conſtruire à l'extrémité
Septentrionale de la nouvelle rue Royale , fervira
de point de vue à la Place de Louis XV.
La fuite des Nouvelles Politiques au Mereure
prochain.
La Roi a nommé l'Evêque de Vence à l'Evêché.
de Mâcon ; & à l'Evêché de Vence l'Abbé de
Lorry , Vicaire-Général du Diocèfe de Rouen :
à l'Abbaye de Vallemont , Ordre de Saint Be
noît , Diocèle de Rouen , l'Abbé Desforges ,
Vicaire Général du Diocèfe du Mans ; à l'Ab- .
baye de Previlly , Ordre de Citeaux , Diocèle
de Sens , l'Abbé de Trudaine , Vicaire- Général du
Diocèſe de Senlis ; à l'Abbaye de Saint Manfuy ,
Ordre de Saint Benoît , Diocèfe de Toul , l'Abbé
Bertin , Confeiller d'Etat ; à l'Abbaye de Saint
Sauveur de Blaye , Ordre de Saint Benoît , Diocèfe
de Bourdeaux , l'Abbé de Pingon , Comte de
Lyon , Vicaire Général du Diocèle de Vienne ; à
l'Abbaye de la Prée , Ordre de Citeaux , Diocèfe
de Bourges , l'Evêque d'Apollonie ; à l'Abbaye
de Saint Georges des Bois , Ordre de Saint Au
guftin , Diocèfe du Mans , l'Abbé de Pujols ,
Vicaire-Général du Diocèfe de Blois ; à l'Abbaye
Saint Vincent du Mans , Ordre de Saint Benoît
l'Evêque d'Orléans à l'Abbaye de Saint Alire ,
même Ordre , Diocèfe de Clermont , l'Archevêque
de Lyon , à l'Abbaye de Saint Auguftin de
Limoges , même Ordre de Saint Benoît , l'Abbé
de Veri , Auditeur de Rote; à l'Abbaye de Saint-
Sulpice de Bourges , même Ordre , l'Abbé le
Noir , Confeiller Clerc au Parlement de Paris
-
:
JANVLER . 1764. 1.99
à l'Abbaye de Chezal , même Ordre , l'Abbé
Gougenot , Confeiller - Clerc au Grand- Confeil
& à l'Abbaye de Saint Martin de Séez , même
Ordre , l'Abbé de Foy ; à l'Abbaye de Laval-
Brefliere , Ordre de Citeaux , Diocèle de Vienne
la Dame de Boiffac ,,Religieufe du Monaftere de
Montfleury , Diocèle de Grenoble ; & à l'Abbaye
de la Scauve , Ordre de Citeaux , Diocèle du ,
Puy, la Dame de Montmorin , Abbeffe de l'Abbaye,
de Clavas , du même Ordre & du même Diocèle :
Cette derniere Abbaye éteinte & demeurera
Ter
unie à celle de la Scauve.
Sa Majesté a nommé Aumônier de la Reine`
l'Abbé de Chilleau , Grand- Vicaire du Diocèſe,
de Metz .
La Ducheffe de Beauvilliers fut préfentée le 27
du mois dernier , à Leurs Majeftés & à la Famille.
Royale par la Ducheffe de Saint Aignan , & prit
enfuite le tabouret chez la Reine.
Le 29 du même mois , le Baron de Gleicken
Envoyé Extraordinaire de la Cour de Dannemarck
, a préfenté à Sa Majefté , de la part du
Roi fon Maître , cinquante- huit faucons d'Iflande.
Le Roi a nommé au Gouvernement de Belle-
Ifle , vacant par la mort du Vicomte de Belfunce
, le Marquis de Vibraye , Lieutenant- Général
de fes Armées , & a bien voulu , en confidération
des fervices de cet Officier , lui accorder la
première Place de Commandeur qui vaquera
dans l'Ordre de Saint Louis. En conféquence , le
Marquis de Vibraye a eu l'honneur de remercier
Sa Majefté le 24 du même mois , & a prêté ferment
le 30 entre les mains du fieur de Maupeou,
Garde des Sceaux , Vice- Chancelier.
Le même jour , la Comtelfe de Holderneff fut
I iv
200 MERCURE DE FRANCE.
préfentée à Leurs Majeftés & à la Famille Royale
par la Maréchale de Mirepoix ; & le Chevalier du
Buat , Miniftre du Roi auprès de la Diéte Générale
de l'Empire , prit congé de Sa Majefté pour
retourner à Ratisbonne.
Le i de ce mois , le Marquis de Villeroy prêta
ferment entre les mains de Sa Majefté , pour le
Gouvernement du Lyonnois , du Forez & du
Beaujollois.
Le 4 , la Comteffe de Gacé , préfentée par la
Princeffe de Monaco , fit ſes révérences à Leurs
Majeftés & à la Famille Royale.
Le même jour , le Baron de Zuckmantel, Maréchal
de Camp , l'un des Directeurs de la Nobleffe
immatriculée de la Baffe - Alface , & nommé
Miniftre Plénipotentiaire du Roi auprès de
l'Electeur de Saxe , prit congé de Sa Majesté à.
qui il fut préfenté par le Duc de Praflin , Miniftre
& Secrétaire d'Etat ayant le Département
des Affaires Etrangères .
Le 6 , on a célébré dans l'Eglife Paroiffiale de
Notre-Dame , un Service pour le repos de l'ame.
de Louife-Elifabeth de France , Ducheffe de Parme.
La Reine y a affifté , ainſi que Mgr le Dauphin
, Madame Adélaïde , & Mefdames Sophie
& Louife.
Le 8 , la Marquise de Pons fut préſentée à
Leurs Majeftés , ainſi qu'à la Famille Royale ,
par la Comtelle de Pons- Saint- Maurice.
Le 11 , la Marquife de Chalmazel , accompagnée
de la Marquife de Tallara & de la Marquife
de Caftries , fit fes révérences à Leurs Majeftés
& à la Famille Royale.
Le fieur Bertin , Contrôleur-Général des Fid
nances , ayant demandé au Roi la permiſſion dé
fe démettre de fa Place , Sa Majefté y a nommé le
JANVIER. 1764. 201
Sieur de L'Averdy, Conſeiller au Parlement de Paris
, & a rétabli en faveur du Sr Bertin , une Charge
de Secrétaire d'Etat qui avoit été fupprimée.
Le 13 , le Comte de Stharemberg , Ambaſſadeur
de la Cour de Vienne , eut une audience
particulière du Roi , à qui il notifia , de la part
de Leurs Majeftés Impériales & Royale , la mort
de l'Archiducheffe Infante . Il fut conduit , en
long manteau de deuil , à cette audience , ainfi
qu'à celles de la Reine & de la Famille Royale ,
par le fieur de la Live , Introducteur des Ambaf
fadeurs. Le 15 , la Cour a pris le deuil , à cette
occafion , pour trois ſemaines.
La Marqnife de Pons , ayant été nommée par
Sa Majefté Dame pour accompagner Madame la
Dauphine , a eu l'honneur d'être préfentée au
Roi en cette qualité.
Le 18 , le fieur Bertin prêta ferment , entre les
mains de Sa Majefté , en qualité de Secrétaire
d'Etat. Le même jour , le Marquis de Bauffer ,
Miniftre Plénipotentiaire du Roi auprès de l'Impératrice
de Ruffie , prit congé de Sa Majesté pour
fe rendre à fa deſtination .
Le 21 , la Comteffe de Virieu fut préſentée à
Leurs Majeftés & à la Famille Royale , par la Marquife
de Sourches.
Le 27 , la Comteffe de Sparre de Cronneberge
fut préfentée à Leurs Majeftés & à la Famille
Royale , par la Comteffe de Sparre , fa belle-
Soeur.
On a appris que , le 17 , l'Electeur de Saxe étoit
mort à Drefde , le troifiémejour d'une petite vérole
qu'on avoit prife d'abord pour une ébulli
tion peu dangereufe. Ce Prince s'appelloit Fréderic
- Chrétien - Léopold ; il étoit né le s Septem
bre 1722 & avoit été marié le 20 Juin 1747 à la
5
I-v
202 MERCURE DE FRANCE.
Soeur de l'Electeur de Baviere Frederic Augufte ,
Prince Electoral de Saxe , âgé de treize ans , fucèède
aux Etats du feu Electeur fon pere.
Le Marquis de Roux , de Marfeille , qui , en plafieurs
occafions , a donné des preuves de fon zèle
pour le bien de l'Etat , ayant demandé au Roi la
permiffion d'employer à la culture de fes terres
deux cens des familles étrangeres qui traverſent
le Royaume pour fe rendre à Cayenne , Sa Majefté
la lui a accordée & a donné ſes ordres en
conféquence.
Leurs Majeftés & la Famille Royale ont figné
Tes Contrats de mariage du Marquis de Beaucaire
avec Demoiselle de Hornbourg , fille du Comte
dé ce nom ; le 27 du mois dernier ) du Comte
de Sparre avec la Demoifelle Hardouin de Beaumois
, fille du Tréforier Général du Marc d'Or des
Ordres du Roi; du Marquis de Gauville avec la Demoifelle
Filleu , Dame & Patrone de S.Martin - le-
Viel des-Chenets : ( le 11'de ce mois ) da Comte
de Rouault avec la Dame de Brou , veuve du Sr
de Brou,Intendant de Rouen ; ( le 21 ) du Marquis
du Terrail avec Demoiſelle de Cruffol de Montauzier
; ( le 27 ) & du Baron de Boeil avec De
moifelle Saget , fille du fieur Saget , Confeiller
au Parlement de Paris. ľ le 28. )
Le Pere Bertier , Prêtre de l'Oratoire , a eur
T'honneur de préfenter à Sa Majesté trois volumes
de fa compofition , intitulés : Principes Phyfiques ,
"pour fervir de fuite aux Principes Mathématiques
d. Newton.
Le Baron de Zur- Lauben , Maréchal de Camp ,
commandant un bataillon de régiment des Gardes
Striffes & Honoraire Etranger de l'Académie
Royale des Infcriptons & Belles - Lettres , eut
Phonneur de préfenter le 13 de ce mois , fes Ou
A
JANVIER. 1764. 203
vrages à Monfeigneur le Duc de Berty & à Monfeigneur
le Comte de Provence : fçavoir , L'HISTOIRE
MILITAIRE des Suifes au fervice de la
France ; LES MÉMOIRES & LETTRES de Henry
Duc de Rohan ,fur la guerre de la Valteline , publiés
pour la premiere fois , & accompagnées de notes
Géographiques , Hiftoriques & Généalogiques ;
LE GÉNÉRAL D'ARMÉ E par Onofander , Ouvra➡
ge traduitdu Grec & dédié à Monfeigneur le Dauphin
; & les trois volumes de LA BIBLIOTHE
QUE Militaire , Politique & Hiftorique.
19,
Le fieur Clabault a eu l'honneur de préſenter,
fe
à Monfeigneur le Comte d'Artois un Tableau
Généalogique & Chronologique de la Maifon
Royale de France , dédié à ce Prince. Le len
demain , il a eu l'honneur de préfenter le même
Ouvrage à Monfeigneur le Dauphin , à Madame
la Dauphine , à Monseigneur le Duc de Berry & à
Monſeigneur le Comte de Provence.
Le fieur de Saint Geniès Chevalier de Sains
Louis , & Commandant de Bataillon , a eu l'honi
neur de préfenter au Roi un Ouvrage de la com→
pofition, intitulé , l'Officier Partifan.
Le 26 , le fieur Marmontel eut l'honneur de
préfenter à Leurs Majestés & à la Famille Royale
Je Difcours qu'il a prononcé pour la réception à
P'Académie Françoife.
Du 4 Janvier 1764.
Le premier de ce mois , les Princes & Princeffes ,
ainfi que les Seigneurs & Dames de la Cour , ren
dirent leurs refpects au Roi à l'occaſion de la nouvelle
année. Le Corps de Ville de Paris eut le mê
me honneur. Les Hautbois de la Chambre exécu
terent différens morceaux de Mufique pendant le
lever de Sa Majesté.
I vj
204 MERCURE DE FRANCE .
1
Les Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
l'Ordre du Saint-Elprit , s'étant allemblés dans <
le Cabinet du Roi vers les onze heures du matin ,
Sa Majesté tint un Chapitre dans lequel Elle nomma
Chevaliers dudit Ordre , le Comte de Saulx
Tavannes, Lieutenant-Général & Chevalier d'Honneur
de la Reine , le Chevalier de Muy , Lieutenant-
Général & Menin de Monfeigneur le Dauphin ,.
le Comte du Châtelet-Lomont , Maréchal de Camp
& Ambaffadeur du Roi à la Cour de Vienne ,
& le Comte d'Eftaing , Maréchal de Camp.
Après le Chapitre , le Roi fe rendit à la Chapelle ,
précédé de Monfeigneur le Dauphin , du Duc
d'Orléans , du Duc de Chartres , du Prince de
Gondé , du Comte de Clermont , du Prince de
Conty , du Comte la Marche , du Comte d'Eu ,
du Duc de Penthievre & du Prince de Lamballe ?
& des Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
l'Ordre. Les deux Huiffiers portoient leurs maſſes
devant Sa Majesté qui étoit revêtue du manteau :
Royal , ayant par - deffus , le Collier de l'Ordre &
celui de la Toifon d'Or. L'Evêque Duc de Langres
, Prélat Commandeur , célébra la Grand'
Meffe , à laquelle la Reine , Madame la Dauphine
, Madame Adelaide, & Meſdames Victoire ,
Sophie & Louiſe affifterent dans la Tribune. La
quête fut faite par la Princeffe de Monaco . Après
la Meffe , le Roi fut reconduit à fon appartement
en la maniere accoutumée. Il y eut le même jour
grand couvert pendant lequel les Muficiens du
Roi exécuterent plufieurs fymphonies.
•
Les Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
l'Ordre affifterent , le 2 , au Service anniverſaire
qu'on célébre pour les Chevaliers défunts , & au- -
quel officia l'Evêque d'Orléans , Commandeur de
l'Ordre.
JANVIER 1764. 205
Le même jour , la Cour prit le deuil pour quatorze
jours , à l'occafion de la mort de l'Electeur
de Saxe.
Le 3 , le Parlement de Paris fe rendit à la Cour
pour rendre les reſpects au Roi à l'occafion de la
nouvelle année .
L'Académie Royale des Sciences a eu l'honneur
de préſenter au Roi le Volume de ſes Mémoires
pour l'année 17 ; 8. C'eft le fecond des quatre
volumes dont les fieurs le Roi , de la Lande ,
Tillet & Befout avoient été chargés par Sa Majesté
de compofer la Parrie Hiftorique & de procurer
la publication.
Les fieurs de Caffini , Camus & de Montigny ,
Membres de l'Académie Royale des Sciences , ont
préfenté au Roi une fuite de leur Carte Géographique
, c'eft -à - dire la foixante- neuviéme
Feuille N ° .175 , comprenant les Villes de Sierck,
Luxembourg & Treyes , le cours de la Mozelle
depuis Berg jufqu'à Treves , & celui de la Saxe
depuis Fremerdorfjufqu'à Conds où elle fe joint à
la Mozelle; & la foixante-dixiéme Feuille N° .165 ,-
qui comprend les Villes de Bafle, Huningue , Porrentru
, une partie du cours du Rhin & les lignes
qui féparent la France de la Suiffe .
Le fieur de la Lande , de l'Académie Royale des
Sciences , chargé par le Roi de compoſer chaque
année le Livre de la Connoiffance des Mouvemens
Céleftes , a eu l'honneur de préfenter à Sa Majesté
le Volume de cet Ouvrage , deſtiné pour l'année
prochaine 1765. Indépendamment des calculs
ordinaires faits pour l'ufage des Aftronomes & des
Navigateurs , ce Volume contient de nouvelles
Tables pour l'Aftronomie , une nouvelle théorie
fur la conftruction des Barometres , un détail cus
rieux des expériences faites depuis peu pour la dés
206 MERCURE DE FRANCE .
couverte des longitudes , & plufieurs articles inté
reffans.
L'Abbé de de Burle de Curban a eu l'honneur
de préfenter à Leurs Majeftés , à Monseigneur le
Dauphin & à Madame Adélaide la cinquiéme
Partie de la Science du Gouvernement , Ouvrage
compofé par le feu fieur de Réal. Cette cinquiéme
Partie , qui contient le Droit des Gens , eft dédiée
au Roi. Le fieur le Rouge , ancien Ingénieur--
Géographe du Roi , a préfenté auffi à Sa Majefté &
à Monfeigneur le Dauphin les premiers Exem
plaires des Plans , Profils & Elévation de la nouvelle
Paroifle de la Magdelaine , gravés d'après
les deffeins du fieur Content , Architecte du Roi.
Cet Edifice , qu'on doit conſtruire à l'extrémité
Septentrionale de la nouvelle rue Royale , fervira
de point de vue à la Place de Louis XV.
La fuite des Nouvelles Politiques au Mereure
prochain.
Fermer
Résumé : De VERSAILLES, le 31 Décembre 1763.
Le document détaille les nominations et événements à la cour de France à la fin de l'année 1763 et au début de l'année 1764. Le roi a procédé à plusieurs nominations ecclésiastiques, notamment celle de l'évêque de Vence à l'évêché de Mâcon et de l'abbé de Lorry à l'évêché de Vence. D'autres nominations concernent diverses abbayes et diocèses à travers la France. Le marquis de Vibraye a été nommé gouverneur de Belle-Île. Plusieurs présentations et congés de diplomates et de nobles ont eu lieu, incluant le baron de Gleicken, envoyé extraordinaire de la cour de Danemark, et le chevalier du Buat, ministre du roi auprès de la Diète générale de l'Empire. Des événements marquants incluent un service pour le repos de l'âme de Louise-Élisabeth de France, duchesse de Parme, et la prise de deuil à la cour suite à la mort de l'archiduchesse infante. Le document mentionne également des présentations de livres et d'ouvrages par divers auteurs et membres de l'Académie Royale des Sciences. Le 1er janvier 1764, les princes, princesses, seigneurs et dames de la cour ont rendu leurs respects au roi à l'occasion de la nouvelle année. Par ailleurs, les premiers exemplaires des plans, profils et élévations de la nouvelle paroisse de la Madeleine, gravés d'après les dessins de l'architecte du roi, le sieur Content, ont été présentés. Cet édifice est prévu pour être construit à l'extrémité septentrionale de la nouvelle rue Royale et servira de point de vue à la Place de Louis XV. Enfin, la publication des nouvelles politiques est annoncée pour le prochain Mercure.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
34
p. 207-208
De WARSOVIE, le 18 Janvier 1764.
Début :
Le Primat & les Sénateurs ayant consenti à donner à l'Impératrice [...]
Mots clefs :
Primat, Sénateur, Impératrice de Russie, Note, Roi de Pologne, Décès, Ministres, Ambassadeur, République
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De WARSOVIE, le 18 Janvier 1764.
De WARSOVIE , le 18 Janvier 1764.
Le Primat & les Sénateurs ayant conſentià
donner à l'Impératrice de Ruſſie le titre Impérial
dont ils ne s'étoient point encore ſervis , & craignant
de compromettre les droits de la République
ſur la Ruſſie Polonoife , ont remis à ce ſujet
auComte de Keyſerling la Note ſuivante : .
>> A l'occaſion de la notification qu'on va faire
>> à Sa Majesté l'Impératrice de Ruſſie du décès,
>> du Roi de Pologne , le Primat , les Sénateurs
» & les Miniſtres de la République de Pologne
> ont fait connoître à l'Ambaſſadeur Extraordi-
>> naire& Plénipotentiaire de Ruffre , qu'en con-
>>>ſéquence des égards très-diftingués qu'ils ont
*pour une Puiſſance auſſi reſpectable que celle
>>> de Ruffie , ils étoient fort éloignés de lui con
>>teſter le titre d'Impériale qui convient ſi bien à
>>> l'étendue & aux forces de ſes vaſtes Etats ;
>> mais que , comme dans l'application on y
>> joint ces mots : de toutes les Ruffies , le Primat,
>>>les Sénateurs & les Miniſtres de la République
>>>ne pouvoient s'empêcher de repréſenter que
>>>l'Ordre Equeſtre & la Nation en général pour-
>> roient concevoir quelque inquiétude ſur la généralité
de cette dénomination de toutes les
>>> Ruffies , ayant à craindre que la Cour Impé-
>> riale de Ruſſie n'en tirât peut-être un jour des
>> conféquences ſur la poſſeſſion des Provinces
>> connues ſous la même dénomination & ap-
>> partenantes à la République tant en Pologne
** qu'en Lithuanie.
Sur cette Note, l'Ambaſſadeur Extraordinaire
& Plénipotentiaire de Ruſſie a déclaré que le titre
de Majesté Impériale de toutes les Ruffies étant
donné a l'Impératrice ſa très-gracieuſe Souverai
1
208 MERCURE DE FRANCE.
ne par toutes les autres Puiſſances , il ne ſeroit
pas convenable de vouloir rien changer à cet
égard , mais qu'il aſſuroit la ſéréniſſime République
de la manière la plus poſitive que Sa
Majesté l'Impératrice étoit ſi éloignée de ſe prévaloir
jamais de ce titre de toutes les Ruffies
pour former des prétentions quelconques ſur la
Ruſſie Polonoiſe , qu'elle eſt au contraire fermement
réſolue d'obſerver religieuſement le Traité
de Paix de 1686 au point qu'en cas de démembrement
, elle aſſiſteroit la République de toutes
ſes forces pour la maintenir dans l'état actuel de
fes poffeffions.
Le Primat & les Sénateurs ayant conſentià
donner à l'Impératrice de Ruſſie le titre Impérial
dont ils ne s'étoient point encore ſervis , & craignant
de compromettre les droits de la République
ſur la Ruſſie Polonoife , ont remis à ce ſujet
auComte de Keyſerling la Note ſuivante : .
>> A l'occaſion de la notification qu'on va faire
>> à Sa Majesté l'Impératrice de Ruſſie du décès,
>> du Roi de Pologne , le Primat , les Sénateurs
» & les Miniſtres de la République de Pologne
> ont fait connoître à l'Ambaſſadeur Extraordi-
>> naire& Plénipotentiaire de Ruffre , qu'en con-
>>>ſéquence des égards très-diftingués qu'ils ont
*pour une Puiſſance auſſi reſpectable que celle
>>> de Ruffie , ils étoient fort éloignés de lui con
>>teſter le titre d'Impériale qui convient ſi bien à
>>> l'étendue & aux forces de ſes vaſtes Etats ;
>> mais que , comme dans l'application on y
>> joint ces mots : de toutes les Ruffies , le Primat,
>>>les Sénateurs & les Miniſtres de la République
>>>ne pouvoient s'empêcher de repréſenter que
>>>l'Ordre Equeſtre & la Nation en général pour-
>> roient concevoir quelque inquiétude ſur la généralité
de cette dénomination de toutes les
>>> Ruffies , ayant à craindre que la Cour Impé-
>> riale de Ruſſie n'en tirât peut-être un jour des
>> conféquences ſur la poſſeſſion des Provinces
>> connues ſous la même dénomination & ap-
>> partenantes à la République tant en Pologne
** qu'en Lithuanie.
Sur cette Note, l'Ambaſſadeur Extraordinaire
& Plénipotentiaire de Ruſſie a déclaré que le titre
de Majesté Impériale de toutes les Ruffies étant
donné a l'Impératrice ſa très-gracieuſe Souverai
1
208 MERCURE DE FRANCE.
ne par toutes les autres Puiſſances , il ne ſeroit
pas convenable de vouloir rien changer à cet
égard , mais qu'il aſſuroit la ſéréniſſime République
de la manière la plus poſitive que Sa
Majesté l'Impératrice étoit ſi éloignée de ſe prévaloir
jamais de ce titre de toutes les Ruffies
pour former des prétentions quelconques ſur la
Ruſſie Polonoiſe , qu'elle eſt au contraire fermement
réſolue d'obſerver religieuſement le Traité
de Paix de 1686 au point qu'en cas de démembrement
, elle aſſiſteroit la République de toutes
ſes forces pour la maintenir dans l'état actuel de
fes poffeffions.
Fermer
Résumé : De WARSOVIE, le 18 Janvier 1764.
Le 18 janvier 1764, à Varsovie, le Primat et les Sénateurs de la République de Pologne ont accordé à l'Impératrice de Russie le titre impérial, tout en exprimant des réserves sur l'utilisation des mots 'de toutes les Russies'. Ils ont transmis ces préoccupations au Comte de Keyserling, Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire de Russie. Les Polonais craignaient que ce titre ne compromette les droits de la République sur la Russie Polonoise, redoutant des conséquences sur la possession des provinces polonaises et lituaniennes. En réponse, l'Ambassadeur russe a affirmé que le titre était reconnu par toutes les autres Puissances et ne pouvait être modifié. Il a assuré la République de Pologne que l'Impératrice n'utiliserait pas ce titre pour formuler des prétentions sur la Russie Polonoise. Il a également garanti que la Russie respecterait le Traité de Paix de 1686 et assisterait la République pour maintenir ses possessions en cas de démembrement.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
35
p. 157
De COPPENHAGUE, le 14 Avril 1764.
Début :
L'Eclipse de Soleil du premier de ce mois a été observé ici [...]
Mots clefs :
Éclipses de soleil, Ministres, Conseil, Observation
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De COPPENHAGUE, le 14 Avril 1764.
DE COPPENHAGUE , le 14 Avril 1764.
L'Eclipfe de Soleil du premier de ce mois a
été observée ici en préfence des Miniftres du
Confeil & autres perfonnes de diftinction : elle a
commencé a 10 heures 14 minutes 30 fecondes :
elle a été dans fa plus grande force à 11 heures
39 minutes 43 fecondes , & alors la partie éclipfée
du Soleil étoit de dix doigts . l'éclipfe a fini à une
heure 9 minutes 45 fecondes. Les Tables , des
Sieurs Clairaut & Mayer fe font trouvées entiérement
d'accord avec l'obfervation .
L'Eclipfe de Soleil du premier de ce mois a
été observée ici en préfence des Miniftres du
Confeil & autres perfonnes de diftinction : elle a
commencé a 10 heures 14 minutes 30 fecondes :
elle a été dans fa plus grande force à 11 heures
39 minutes 43 fecondes , & alors la partie éclipfée
du Soleil étoit de dix doigts . l'éclipfe a fini à une
heure 9 minutes 45 fecondes. Les Tables , des
Sieurs Clairaut & Mayer fe font trouvées entiérement
d'accord avec l'obfervation .
Fermer
Résumé : De COPPENHAGUE, le 14 Avril 1764.
Le 14 avril 1764, à Copenhague, une éclipse solaire a été observée par des ministres et des personnalités. Elle a débuté à 10h14 et s'est terminée à 13h09, atteignant son maximum à 11h39. La partie éclipsée du Soleil représentait dix doigts. Les observations ont validé les tables astronomiques de Clairaut et Mayer.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
36
p. 147-148
De FRANCFORT, le 2 Septembre 1764.
Début :
Le différend qui étoit survenu entre les Etats-Généraux & le Landgrave [...]
Mots clefs :
États-généraux, Landgrave, Dispute, Régence, Cassel, Comte, Ministres, Conseillers, Estime, Amitié, Déclaration, Envoyé , Satisfaction, Pouvoir, Mémoire, Hautes Puissances
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De FRANCFORT, le 2 Septembre 1764.
De FRANCFORT , le 2 Septembre 1764.
Le différend qui étoit furvenu entre les Etats-
Généraux & le Landgrave de Heffe - Caffel au
fujet de la conduite tenue par la Régence de
-Caffel à l'égard du Comte de Warſtenſleben , Miniftre
de Leurs Hautes Puiffances auprès du
Cercle du- Haut - Rhin . vient d'être terminé . Le
Sieur de Mofer , Confeiller Privé , que le Landgrave
avoit envoyé pour cet effet en qualité de
fon Miniftre à la Haye , fut introduit , le 30 du
mois dernier , dans la Chambre de Treves ; il
y fit en François aux Députés des Etats - Généraux
la Déclaration fuivante qu'il leur remit enfuite
par écrit en Langue Allemande.
20
39
» Son Altele Séréniflime Mgr le Landgrave
Régnant de Heffe- Caffel , en conféquence de
l'eftime & de l'amitié qu'il a vouées de tout
temps aux Seigneurs les Etats - Généraux , a appris
» avec fenfibilité le mécontentement que Leurs
Hautes Puiffances,contre toute attente , fe croyent
» autorifées à prendre de la conduite tenue par
» la Régence de Caffel , pour des raifons con-
» nues , à l'égard du Comte de Wartenfleben.
Comme Son Alteffe Séréniffime eft très- éloignée
de conniver en aucune manière , avec au-
>> cun de fes Collégues de juftice , en ce qui
» pourroit léfer les droits & les dignités d'un
Etat voifin & ami , Elle m'a envoyé expreſſément
ici , par confidération particulière d'amitié
, pour témoigner & réitérer qu'en tout
Son Altele Séréniffime n'a jamais eu la vo-
» lonté ni l'intention d'offenfer la République
» ou de porter la moindre atteinte à les droits
» & prérogatives.
» Son Altele Séréniffime effére & fe flatte
Gij
148 MERCURE DE FRANCE.
que Leurs Hautes Puiffances trouveront cette
>> Déclaration conforme au defir fincère avec
»lequel Mgr le Landgrave demande l'amitié
& la bienveillance de l'Etat , tant pour le préfent
que pour l'avenir.
Les Etats -Généraux ont fait répondre au Sieur
Mofer par leurs Députés , qu'ils étoient contens
de cette Déclaration , & que c'étoit avec bien
de la fatisfaction qu'ils voyoient terminer par là
les différends furvenus entre eux & le Landgrave
de Heffe- Caffel , & rétablir la bonne intelligence
& l'amitié qui de tout temps ont fubfifté
entre la République & la Maiſon de Heffe ,
& au maintien defquelles Leurs Hautes Puiflances
Le propofent de concourir de tout leur pouvoir.
Le 4 du même mois , le feur de Mofer eut une
nouvelle conférence avec les Députés des Etats-
Généraux , & leur remit un Mémoire concernant
les Griefs de Landgrave de Heffe contre le Comte
de Wartenfleben qui , de fon côté , a envoyé à
Leurs Hautes Puiffances un autre Mémoire , par
jequel il juftifié la conduite .
Le différend qui étoit furvenu entre les Etats-
Généraux & le Landgrave de Heffe - Caffel au
fujet de la conduite tenue par la Régence de
-Caffel à l'égard du Comte de Warſtenſleben , Miniftre
de Leurs Hautes Puiffances auprès du
Cercle du- Haut - Rhin . vient d'être terminé . Le
Sieur de Mofer , Confeiller Privé , que le Landgrave
avoit envoyé pour cet effet en qualité de
fon Miniftre à la Haye , fut introduit , le 30 du
mois dernier , dans la Chambre de Treves ; il
y fit en François aux Députés des Etats - Généraux
la Déclaration fuivante qu'il leur remit enfuite
par écrit en Langue Allemande.
20
39
» Son Altele Séréniflime Mgr le Landgrave
Régnant de Heffe- Caffel , en conféquence de
l'eftime & de l'amitié qu'il a vouées de tout
temps aux Seigneurs les Etats - Généraux , a appris
» avec fenfibilité le mécontentement que Leurs
Hautes Puiffances,contre toute attente , fe croyent
» autorifées à prendre de la conduite tenue par
» la Régence de Caffel , pour des raifons con-
» nues , à l'égard du Comte de Wartenfleben.
Comme Son Alteffe Séréniffime eft très- éloignée
de conniver en aucune manière , avec au-
>> cun de fes Collégues de juftice , en ce qui
» pourroit léfer les droits & les dignités d'un
Etat voifin & ami , Elle m'a envoyé expreſſément
ici , par confidération particulière d'amitié
, pour témoigner & réitérer qu'en tout
Son Altele Séréniffime n'a jamais eu la vo-
» lonté ni l'intention d'offenfer la République
» ou de porter la moindre atteinte à les droits
» & prérogatives.
» Son Altele Séréniffime effére & fe flatte
Gij
148 MERCURE DE FRANCE.
que Leurs Hautes Puiffances trouveront cette
>> Déclaration conforme au defir fincère avec
»lequel Mgr le Landgrave demande l'amitié
& la bienveillance de l'Etat , tant pour le préfent
que pour l'avenir.
Les Etats -Généraux ont fait répondre au Sieur
Mofer par leurs Députés , qu'ils étoient contens
de cette Déclaration , & que c'étoit avec bien
de la fatisfaction qu'ils voyoient terminer par là
les différends furvenus entre eux & le Landgrave
de Heffe- Caffel , & rétablir la bonne intelligence
& l'amitié qui de tout temps ont fubfifté
entre la République & la Maiſon de Heffe ,
& au maintien defquelles Leurs Hautes Puiflances
Le propofent de concourir de tout leur pouvoir.
Le 4 du même mois , le feur de Mofer eut une
nouvelle conférence avec les Députés des Etats-
Généraux , & leur remit un Mémoire concernant
les Griefs de Landgrave de Heffe contre le Comte
de Wartenfleben qui , de fon côté , a envoyé à
Leurs Hautes Puiffances un autre Mémoire , par
jequel il juftifié la conduite .
Fermer
Résumé : De FRANCFORT, le 2 Septembre 1764.
Le 2 septembre 1764, un différend entre les États-Généraux et le Landgrave de Hesse-Cassel concernant la conduite de la Régence de Cassel à l'égard du Comte de Warstensleben, ministre des Hautes Puissances auprès du Cercle du Haut-Rhin, a été résolu. Le Sieur de Moser, conseiller privé et ministre du Landgrave, a été envoyé à La Haye pour cette mission. Le 30 août, il a présenté une déclaration en français aux députés des États-Généraux, qu'il leur a ensuite remise par écrit en langue allemande. Le Landgrave a exprimé son mécontentement face à la conduite de la Régence de Cassel et a affirmé son intention de ne jamais offenser la République ou porter atteinte à ses droits et prérogatives. Il a également réitéré son désir de maintenir l'amitié et la bienveillance avec les États-Généraux. Les États-Généraux ont accepté cette déclaration et ont exprimé leur satisfaction de voir les différends terminés, rétablissant ainsi la bonne intelligence et l'amitié entre la République et la Maison de Hesse. Le 4 septembre, le Sieur de Moser a eu une nouvelle conférence avec les députés des États-Généraux pour discuter des griefs du Landgrave contre le Comte de Warstensleben, qui a également envoyé un mémoire pour justifier sa conduite.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer