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51
p. 1422-1423
TURQUIE, ET PERSE, &c.
Début :
On mande de Constantinople que le Grand-Seigneur avoit fait [...]
Mots clefs :
Constantinople, Traité de paix
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texteReconnaissance textuelle : TURQUIE, ET PERSE, &c.
TURQUIE , ET PERSE , &c.
Nmande de Constantinople que le GrandSeigneur avoit fait changer la Garde et les
Officiers qui étoient dans le vieux Serrail auprès
du Sultan son Oncle , déposé l'année derniere
que Sa Hautesse avoit reçû d'Ispaham la ratifi- cation du Traité de Paix conclu avec le Roi de
Perse , et qu'elle avoit envoyé au Gouverneur de
Tauris un ordre particulier signé de sa main de remettre cette Place aux Perfans.
Les Lettres de Barbarie portent qu'on étoit à
II. Vol.
Alger
JUIN. 17320 1423
Alger dans une grande consternation au sujet de l'armement qui s'est fait en Espagne ; que les
Algériens avoient envoyé leurs femmes , leurs
enfans et leurs meilleurs effets dans les Montagnes , et que la Régence avoit député à Cons-.
tantinople pour demander du secours au GrandSeigneur.
Nmande de Constantinople que le GrandSeigneur avoit fait changer la Garde et les
Officiers qui étoient dans le vieux Serrail auprès
du Sultan son Oncle , déposé l'année derniere
que Sa Hautesse avoit reçû d'Ispaham la ratifi- cation du Traité de Paix conclu avec le Roi de
Perse , et qu'elle avoit envoyé au Gouverneur de
Tauris un ordre particulier signé de sa main de remettre cette Place aux Perfans.
Les Lettres de Barbarie portent qu'on étoit à
II. Vol.
Alger
JUIN. 17320 1423
Alger dans une grande consternation au sujet de l'armement qui s'est fait en Espagne ; que les
Algériens avoient envoyé leurs femmes , leurs
enfans et leurs meilleurs effets dans les Montagnes , et que la Régence avoit député à Cons-.
tantinople pour demander du secours au GrandSeigneur.
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Résumé : TURQUIE, ET PERSE, &c.
À Constantinople, le Grand-Seigneur a remplacé la garde du sultan et ratifié un traité de paix avec la Perse, ordonnant la remise de Tauris aux Persans. En Algérie, l'armement espagnol provoque la consternation. Les Algériens ont évacué leurs familles et biens, et la Régence d'Alger a demandé de l'aide à Constantinople.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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52
p. 1620-1621
DE TURQUIE.
Début :
On écrit de Constantinople, du 3. Avril, que l'Affaire [...]
Mots clefs :
Constantinople, Affaire des Anglais, Traité de paix, Vienne
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texteReconnaissance textuelle : DE TURQUIE.
NOUVELLES ETRANGERES
DE TURQUIE.
N écrit de Constantinople , du. 3. Avril
que l'Affaire des Anglois , dont on parle
cy-devant , avoit été heureusement accommo- dée par l'entremise du Kislar-Aga , ou Chef des
Eunuques noirs , qui a aussi la Sur- Intendance
des Mosquées Royales. D'abord après l'accom,
modement , le Grand- Seigneur envoya dire à
M. l'Ambassadeur qu'il pardonnoit la faute da
Capitaine qui avoit fait tirer le Canon du Vaisseau Anglois à heure induë , quoiqu'il méritât
d'être séverement puni pour une pareille contra
vention aux usages , &c. et que Sa Hautesse con- tinuoit de le reconnoître comme Ambassadeur
et Ministre du Roy de la Grande- Bretagne à la
Porte Othomane. En même-temps les ordres fu- rent donnez pour faire élargir les sieurs Hanguer et Gesnit , Négocians Anglois , qui avoient
étearrêtez dès le lendemain des coups de Canon. La
prudence et la douceur naturelle du G. Vizir Osman Pacha , qui étoit alors en place , a été fort
louée , en empêchant d'abord que cette affaire ne
fût poussée suivant le reffentiment de S. H. et en gagnant du temps pout l'accommoder.
On apprend en dernier lieu d'Allemagne , par
un Courrier arrivé de Constantinople à Vienne
le 8, de ce mois , que le Roy de Perse , à la persuasion d'un des principaux Seigneurs de sa Courqui a beaucoup contribué à le remettre sur le
Trône , avoit pris la résolution de ne point observer
JUILLET. 173.2. 1621
erver le dernier Traité de Paix conclu avec le
r. Seigneur ; qu'une partie de son Armée avoit
ttaqué avec avantage le reste de l'Armée de Sa
Hautesse et l'avoit défaite , et que les Persans
narchoient vers les Provinces qui avoienr été
bandonnées au G. S. par ce Traité ; que cette
ouvelle avoit causé une grande consternation
lans Constantinoble , et qu'on avoit tenu à ce
sujet un Divan general
DE TURQUIE.
N écrit de Constantinople , du. 3. Avril
que l'Affaire des Anglois , dont on parle
cy-devant , avoit été heureusement accommo- dée par l'entremise du Kislar-Aga , ou Chef des
Eunuques noirs , qui a aussi la Sur- Intendance
des Mosquées Royales. D'abord après l'accom,
modement , le Grand- Seigneur envoya dire à
M. l'Ambassadeur qu'il pardonnoit la faute da
Capitaine qui avoit fait tirer le Canon du Vaisseau Anglois à heure induë , quoiqu'il méritât
d'être séverement puni pour une pareille contra
vention aux usages , &c. et que Sa Hautesse con- tinuoit de le reconnoître comme Ambassadeur
et Ministre du Roy de la Grande- Bretagne à la
Porte Othomane. En même-temps les ordres fu- rent donnez pour faire élargir les sieurs Hanguer et Gesnit , Négocians Anglois , qui avoient
étearrêtez dès le lendemain des coups de Canon. La
prudence et la douceur naturelle du G. Vizir Osman Pacha , qui étoit alors en place , a été fort
louée , en empêchant d'abord que cette affaire ne
fût poussée suivant le reffentiment de S. H. et en gagnant du temps pout l'accommoder.
On apprend en dernier lieu d'Allemagne , par
un Courrier arrivé de Constantinople à Vienne
le 8, de ce mois , que le Roy de Perse , à la persuasion d'un des principaux Seigneurs de sa Courqui a beaucoup contribué à le remettre sur le
Trône , avoit pris la résolution de ne point observer
JUILLET. 173.2. 1621
erver le dernier Traité de Paix conclu avec le
r. Seigneur ; qu'une partie de son Armée avoit
ttaqué avec avantage le reste de l'Armée de Sa
Hautesse et l'avoit défaite , et que les Persans
narchoient vers les Provinces qui avoienr été
bandonnées au G. S. par ce Traité ; que cette
ouvelle avoit causé une grande consternation
lans Constantinoble , et qu'on avoit tenu à ce
sujet un Divan general
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Résumé : DE TURQUIE.
En Turquie, une affaire diplomatique impliquant des Britanniques a été résolue grâce à l'intervention du Kislar-Aga, chef des eunuques noirs et surintendant des mosquées royales. Le sultan a pardonné au capitaine britannique d'avoir tiré un canon à une heure inappropriée et a confirmé la reconnaissance de l'ambassadeur britannique. Les négociants anglais arrêtés après l'incident, M. Hanguer et M. Gesnit, ont été libérés. La prudence et la douceur du Grand Vizir Osman Pacha ont été saluées pour leur rôle dans la résolution pacifique de l'affaire. En Perse, le roi a décidé de ne pas respecter le dernier traité de paix conclu avec le sultan ottoman, influencé par un seigneur de sa cour. Une partie de l'armée perse a attaqué et vaincu les forces ottomanes, marchant vers les provinces cédées par le traité. Cette nouvelle a provoqué une grande consternation à Constantinople, où un divan général a été convoqué pour discuter de la situation.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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53
p. 1621-1627
LETTRE écrite de Constantinople, le 8. Juin 1732.
Début :
Quoique vous soyez déjà, sans doute, informé, Monsieur, de la [...]
Mots clefs :
Grand vizir, Chef des Eunuques noirs, Kaïkman, Sultan, Canon, Constantinople, Topal Osman Pacha
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Constantinople, le 8. Juin 1732.
LETTRE écrite de Constantinople ,
le 8. Juin 1732.
Qué,Monsieur , de la déposition duGrandUoique vous soyez déja , sans doute , infor-
•
Vizir Topal Osman Pacha , arrivée le 12 Mars
lernier , je ne laisse pas de vous la rappeller ici ,
our vous mander quelques particularitez sur ce
ujet, que vous ignorez peut- être, et qui méritent
Votre curiosité.
Le Kislar- Aga ou Chef des Eunuques noirs, qui
ossede toûjours toute la confiance du G.S.lui dit,
nlui redemandant le SceauImperial de la part de
, H. qu'il ne devoit par regarder ce qui lui arivoit comme une disgrace ; que le Sultan l'ainoit toûjours et étoit très-satisfait de ses services,
t qu'en lui ôtant la Charge de Premier Ministre,
avoit eu moins en vûë de l'en dépouiller , que de
soulager du fardeau qui l'accompagnoit, et qui ar rapport à son âge , à ses infirmitez et aux connctures où se trouvoit l'Empire , étoit devenué
un poids à l'acabler. Qu'il n'avoit non-seulement
rien à craindre ni pour lui ni pour les siens , mais
que l'intention du G.S. étoit que le Bey , son cher
fils unique, qui est Capigi Bachi , restat à la Cour
pour lui faire du bien , et que lui-même KislarAga
1622 MERCURE DE FRANCE
Aga, l'assuroit qu'il en prendroit autant de soin que s'il étoit son propre enfant.
Topal-Osman , qui reçût cette nouvelle avec
ne fermeté admirable , répondit , après l'avoir
remercié de ses sentimens , que sa conscience
ne fui reprochant rien , et que connoissant l'équité du G. S. qu'il avoit servi avec zele , il étoit
en repos sur ses jours , et que d'ailleurs n'ayant
jamais craint de les perdre dans tant de périls
qu'il avoit courus à la guerre pendant toute sa
vie, il étoit trop vieux à present pour s'en- inquieter.
Il fut ensuite conduit à Calcedoine pour y attendre sa destination , et dans le même temps,
c'est-à- dire entre zo. et 11 heures du matin
Ali-Pacha Defterdar , nommé Kaïmakan , pour
exercer les fonctions du Viziriat pendant l'interim , alla tenir le Divan en sa place.
D
Apeine Topal-Osman fut- il arrivé à Calcedoi.
ne , que ses Amis et ses Domestiques s'y rendirent et se présenterent devant lui , la plupart les
yeux baignez de larmes. Pourquoi pleurez- vous
leur dit- il avec un air de satisfaction peint sur le
visage , de me voir délivré d'un Emploi , que
comme vous le sçavez bien , je n'étois venu remplir qu'avec répugnance ? Il s'entretint ensuite
avec eux le plus tranquillement du monde , entrant même dans de grands détails sur des affaires particulieres , et pour mieux marquer la sincerité de la joye que lui causoit son changement
de fortune ; il fit égorger une douzaine de Moutons en action de grace , comme c'est la coûtume chez les Mahométans , de faire de ces sortes de
Sacrifices , pour remercier Dieu des bons évenemens qui leur arrivent , ou pour lui demander un heureux succès dans leurs entreprises.
JUILLET
. 173.2. 1523
H fut nommé le même jour Pacha de Trébizonde , et partit le lendemain de Calcédoine pour
Smit
, autrefois Nicomédie
, où il demeura jusqu'après le Beiram ou la Pâque des Turcs. Le Tchaoux- Bachi , qui étoit son neveu , fut aussi
déposé et devint son Kiaya ou Lieutenant
, par
ordre de la Porte
, qui en cette derniere qualité le
chargea d'assembler les Equipages et toute la
Maison de son Oncle
à Calcedoine
, et de l'aller
joindre ensuite
à Nicomédie
.
L'amour que Topal Osman conservoit toujours pour le bien public , ne lui permettant pas
de le négliger et de rester oisif pendant environ
15. jours qu'il demeura dans cette Ville
, il s'appliqua à remedier aux desordres qui s'y commertoient dans la Police , et ayant appris qu'entr'autres abus nouvellement introdus , il y avoit des
gens qui achetoient tous les œufs du Pays
, dont ils faisoient des réserves et qu'ils n'en envoyoient
qu'en petite quantité
à la fois
à Constantinople
,
où par ce moyen ils étoient devenus fort chers . Il
fit pendre ces Monopoleurs
, et saisir tous leurs
œufs
, qui furent portez par son ordre
à cette
Capitale où ils devinrent
à très
- grand marché
.
Il partit de Smit les premiers jours d'Avril
,
avec une Maison magnifique
, composée de plus
de 600. Domestiques
, car le G. S. lui ayant laissé
generalement tous ses biens
, il est
, malgré ses
liberalitez continuelles
, un dés plus riches Particuliers de l'Empire ; et plus de 6000. personnes
le conduisirent bien loin hors de la Ville
.
Je ne puis
, Monsieur
, me dispenser de vous
rapporter ici un trait de Topal
- Osman
, qui suffiroit seul pour vous donner une juste idée de la
grandeur de son ame
. Quelques jours avant celui auquel on le déposa , qui fut le 15. de la Lu-ne
L
1624 MERCURE DE FRANCE
de Ramasan ou du Jeûne , il avoit déja fait préparer tous les Présens que les Grands Visirs sont en
usage de faire au Serrail à la fin de ce Carême des
Mahometans , et il se trouvoit parmi ceux qu'il
vouloit donner au G. S. un Harnois de Cheval ,
garni de Pierreries , qui lui coûtoit seul près de
170. mille livres. Quoique ces, Présens n'eussent
point été consignez et qu'il les eût encore entre
ses mains au moment de sa déposition , il ne
laissa pas moins ses ordres en partant de Calcedoine , pour qu'ils fussent distribuez à la tête du
Beiram , à ceux à qui il les avoit destinez , comme s'il eût encore été en place. Il est vrai que le
Sultan , de son côté , pour lui marquer qu'il n'avoit point perdu les bonnes graces de S. H. lui envoya aussi à Nicomédie les mêmes Présens
qu'elle fait toujours dans ces Fêtes au G. Visir.
A l'égard du nouveau G. V. Ali- Pacha , outre
ce nom , on lui donne encore par un usage fort ordinaire chez les Turcs , celui de Ekim-Oglou,
c'est- à- dire , fils de Medecin. Son pere , à ce
qu'on assure , étoit Venitien et s'appelloit Cornero ; il fut fait Esclave en Candie , étant encore
jeune, mais professant déja la Medecine, et desesperant de pouvoir jamais recouvrer sa liberté , il
embrassa le Mahometisme , et se maria avec une
Turque. La réputation qu'il acquit dans son Art
ayant été portée jusqu'au Serrail , il y fut appellé et devint Ekim- Bachi , ou Premier Medecin du
dernier Sultan déposé , au service duquel il est
mort dans un âge fort avancé. Entre plusieurs
enfans qu'il avoit eus de sa femme , il introduisit
deux de ses fils auprès de ce Sultan , par la faveur
du Kislar Aga , qui avoit été autrefois son Esclave ; l'aîné en qualité de Gerrah-Bachi , ou
Premier Chirurgien , qui remplit encore le même
Poste
JUILLET. 1732. 1625
poste auprès du G. S. regnant ; le second qui fut
d'abord fait Capigi- Bachi ; et qui après avoir essuyé bien des revers sous le Regne precedent ,
parvint il y a quelques années au Generalat de Arme Othomane .sur les Frontieres , et vient
d'être élevé à l'éminente Charge de Grand Visir.
C'est un homme d'environ 45. ans, d'assez bonne
mine, qui passe pour aimer la magnificence, et qui
est liberal jusqu'à la prodigalité. Il arriva à Scu- tary de Perse , le 10. May au matin , où tous les
Grands de l'Empire l'attendoient sous des Tentes
dans la campagne. 11 s'y trouva un concours de plus de 6000. femmes ou filles , attirées par la
Curiosité que leur donna le renom qu'a ce Visir
d'être aussi galant que feu Ibrahim Pacha , et en
nême-temps pour se dédommager un peu de la
retraite rigoureuse que son Prédecesseur Topal- Osman faisoit observer au beau Sexe. Après avoir fîné là , il remonta à cheval et traversa Scutary
avec un magnifique et nombreux cortege , jusqu'à la Marine , jettant de temps en temps des
poignées de Sequins au Peuple.
Il se mit ensuite dans le Caïc ou la Gondole à
Tendelet des G. Visirs ; le Vaisseau Contre- Amiral bien pavoisé , et qu'on avoit fait avancer à
son occasion près de la Tour de Leandre , le salua de 15. coups de Canon à son passage , et cette
Tour de cinq ; il vint débarquer au Kiosc ou Pavillon du Serrail qui est au bord de la Mer , ou
la Maison du G. S. étoir rangée en haye pour le
recevoir ; il eut sur le champ audience de S. H.
avec laquelle il demeura plus de deux heures ; le
G. S. après lui avoir confié le Sceau Imperial et
= l'avoir fait revêtir des autres marques de dignité
attachées à sa Charge , le fit conduire par ses prog
pres Officiers au Palais des G. V. où il se rendit,
marchans
1626 MERCURE DE FRANCE
où
marchant à la droite du Mufti , et répandant
toujours à pleines mains les Sequins sur sa route.
Le même jour Ismaël- Pacha , Janissaire- Aga ,
fut fait Pacha à trois Queues en plein Divan ,
le G. V. lui fit donner une Pelisse de Samour ,
couverte d'un drap d'or du Pays. Le Kiaya ou
Lieutenant de Topal Osman , qui étoit resté en
fonction jusqu'alors , fut déposé , et celui d'AliPacha prit sa place.
Ce Premier Ministre fit rouvrir tous les Caffez publics , qui depuis la grande Révolution de 1730. avoient presque toûjours été fermez , et sur
les plaintes qu'on lui porta des fraudes qui s'étoient renouvellées dans le débit des Vivres et des
Denrées depuis la déposition de Topal- Osman ,
quoique dans l'interim le Kaimakan eût fait pendre plusieurs prévaricateurs en ce genre , il alla
faire une tournée dans Constantinople chez les
Bouchers et les Boulangers ; il fixa le prix de la
viande, qui se vendoit fort cher , et dont on manquoit même souvent , fit augmenter le poids du
pain , envoya aux Galeres ceux des Boulangers
qu'il trouva en contravention , et donna dix Sequins à chacun de ceux qui étoient en regle , ce
qui lui attira de grandes louanges.
Le 22. du même mois de May , ayant mandé
le Defterdar ou Trésorier Ali- Pacha , cy-devant
Kaimakan, il le fit revêtir d'une Pelisse de Samour, en lui disant que le G. S. l'avoit nommé
Pacha de Cutaya , (' en Asie , près de Brousse ,
qui est une espece d'exil ) et qu'il se préparât à
partir dans deux jours. L'ancien Reis Effendi du
temps d'Achmet III. qui étoit devenu TefterEmini, ou Garde des Rôles de la Milice , sous le
G. S d'apresent , et que ce Ministre avoit aussi
mandé, reçut le Caftan ou Robe d'honneur ,-
avec
JUILLET. 1732. 1627
avec la Charge de Defterdar , et ceda la sienne de
Tefter- Emini à SerdensiEffendi , qui avoit été Se- cretaire de la Porte aux Conferences de Passarowitz. Le Tchaoux- Bachi et le Bostandgi- Bachi ,
furent pareillement déposez : le poste du premier fut donné à l'ancien General de la Cavalerie, resté
depuis quelque temps sans emploi, et celui du second , a l'Asseki- Aga, qui fut relevé dans le sien
par l'Oda-Bachi. Voilà, Monsieur , en quoi consistent jusqu'à present les principaux changemens survenus à la Porte , depuis l'arrivée du nouveau
G. Visir. Je suis , &c.
L
E -25
P. V. D.
le 8. Juin 1732.
Qué,Monsieur , de la déposition duGrandUoique vous soyez déja , sans doute , infor-
•
Vizir Topal Osman Pacha , arrivée le 12 Mars
lernier , je ne laisse pas de vous la rappeller ici ,
our vous mander quelques particularitez sur ce
ujet, que vous ignorez peut- être, et qui méritent
Votre curiosité.
Le Kislar- Aga ou Chef des Eunuques noirs, qui
ossede toûjours toute la confiance du G.S.lui dit,
nlui redemandant le SceauImperial de la part de
, H. qu'il ne devoit par regarder ce qui lui arivoit comme une disgrace ; que le Sultan l'ainoit toûjours et étoit très-satisfait de ses services,
t qu'en lui ôtant la Charge de Premier Ministre,
avoit eu moins en vûë de l'en dépouiller , que de
soulager du fardeau qui l'accompagnoit, et qui ar rapport à son âge , à ses infirmitez et aux connctures où se trouvoit l'Empire , étoit devenué
un poids à l'acabler. Qu'il n'avoit non-seulement
rien à craindre ni pour lui ni pour les siens , mais
que l'intention du G.S. étoit que le Bey , son cher
fils unique, qui est Capigi Bachi , restat à la Cour
pour lui faire du bien , et que lui-même KislarAga
1622 MERCURE DE FRANCE
Aga, l'assuroit qu'il en prendroit autant de soin que s'il étoit son propre enfant.
Topal-Osman , qui reçût cette nouvelle avec
ne fermeté admirable , répondit , après l'avoir
remercié de ses sentimens , que sa conscience
ne fui reprochant rien , et que connoissant l'équité du G. S. qu'il avoit servi avec zele , il étoit
en repos sur ses jours , et que d'ailleurs n'ayant
jamais craint de les perdre dans tant de périls
qu'il avoit courus à la guerre pendant toute sa
vie, il étoit trop vieux à present pour s'en- inquieter.
Il fut ensuite conduit à Calcedoine pour y attendre sa destination , et dans le même temps,
c'est-à- dire entre zo. et 11 heures du matin
Ali-Pacha Defterdar , nommé Kaïmakan , pour
exercer les fonctions du Viziriat pendant l'interim , alla tenir le Divan en sa place.
D
Apeine Topal-Osman fut- il arrivé à Calcedoi.
ne , que ses Amis et ses Domestiques s'y rendirent et se présenterent devant lui , la plupart les
yeux baignez de larmes. Pourquoi pleurez- vous
leur dit- il avec un air de satisfaction peint sur le
visage , de me voir délivré d'un Emploi , que
comme vous le sçavez bien , je n'étois venu remplir qu'avec répugnance ? Il s'entretint ensuite
avec eux le plus tranquillement du monde , entrant même dans de grands détails sur des affaires particulieres , et pour mieux marquer la sincerité de la joye que lui causoit son changement
de fortune ; il fit égorger une douzaine de Moutons en action de grace , comme c'est la coûtume chez les Mahométans , de faire de ces sortes de
Sacrifices , pour remercier Dieu des bons évenemens qui leur arrivent , ou pour lui demander un heureux succès dans leurs entreprises.
JUILLET
. 173.2. 1523
H fut nommé le même jour Pacha de Trébizonde , et partit le lendemain de Calcédoine pour
Smit
, autrefois Nicomédie
, où il demeura jusqu'après le Beiram ou la Pâque des Turcs. Le Tchaoux- Bachi , qui étoit son neveu , fut aussi
déposé et devint son Kiaya ou Lieutenant
, par
ordre de la Porte
, qui en cette derniere qualité le
chargea d'assembler les Equipages et toute la
Maison de son Oncle
à Calcedoine
, et de l'aller
joindre ensuite
à Nicomédie
.
L'amour que Topal Osman conservoit toujours pour le bien public , ne lui permettant pas
de le négliger et de rester oisif pendant environ
15. jours qu'il demeura dans cette Ville
, il s'appliqua à remedier aux desordres qui s'y commertoient dans la Police , et ayant appris qu'entr'autres abus nouvellement introdus , il y avoit des
gens qui achetoient tous les œufs du Pays
, dont ils faisoient des réserves et qu'ils n'en envoyoient
qu'en petite quantité
à la fois
à Constantinople
,
où par ce moyen ils étoient devenus fort chers . Il
fit pendre ces Monopoleurs
, et saisir tous leurs
œufs
, qui furent portez par son ordre
à cette
Capitale où ils devinrent
à très
- grand marché
.
Il partit de Smit les premiers jours d'Avril
,
avec une Maison magnifique
, composée de plus
de 600. Domestiques
, car le G. S. lui ayant laissé
generalement tous ses biens
, il est
, malgré ses
liberalitez continuelles
, un dés plus riches Particuliers de l'Empire ; et plus de 6000. personnes
le conduisirent bien loin hors de la Ville
.
Je ne puis
, Monsieur
, me dispenser de vous
rapporter ici un trait de Topal
- Osman
, qui suffiroit seul pour vous donner une juste idée de la
grandeur de son ame
. Quelques jours avant celui auquel on le déposa , qui fut le 15. de la Lu-ne
L
1624 MERCURE DE FRANCE
de Ramasan ou du Jeûne , il avoit déja fait préparer tous les Présens que les Grands Visirs sont en
usage de faire au Serrail à la fin de ce Carême des
Mahometans , et il se trouvoit parmi ceux qu'il
vouloit donner au G. S. un Harnois de Cheval ,
garni de Pierreries , qui lui coûtoit seul près de
170. mille livres. Quoique ces, Présens n'eussent
point été consignez et qu'il les eût encore entre
ses mains au moment de sa déposition , il ne
laissa pas moins ses ordres en partant de Calcedoine , pour qu'ils fussent distribuez à la tête du
Beiram , à ceux à qui il les avoit destinez , comme s'il eût encore été en place. Il est vrai que le
Sultan , de son côté , pour lui marquer qu'il n'avoit point perdu les bonnes graces de S. H. lui envoya aussi à Nicomédie les mêmes Présens
qu'elle fait toujours dans ces Fêtes au G. Visir.
A l'égard du nouveau G. V. Ali- Pacha , outre
ce nom , on lui donne encore par un usage fort ordinaire chez les Turcs , celui de Ekim-Oglou,
c'est- à- dire , fils de Medecin. Son pere , à ce
qu'on assure , étoit Venitien et s'appelloit Cornero ; il fut fait Esclave en Candie , étant encore
jeune, mais professant déja la Medecine, et desesperant de pouvoir jamais recouvrer sa liberté , il
embrassa le Mahometisme , et se maria avec une
Turque. La réputation qu'il acquit dans son Art
ayant été portée jusqu'au Serrail , il y fut appellé et devint Ekim- Bachi , ou Premier Medecin du
dernier Sultan déposé , au service duquel il est
mort dans un âge fort avancé. Entre plusieurs
enfans qu'il avoit eus de sa femme , il introduisit
deux de ses fils auprès de ce Sultan , par la faveur
du Kislar Aga , qui avoit été autrefois son Esclave ; l'aîné en qualité de Gerrah-Bachi , ou
Premier Chirurgien , qui remplit encore le même
Poste
JUILLET. 1732. 1625
poste auprès du G. S. regnant ; le second qui fut
d'abord fait Capigi- Bachi ; et qui après avoir essuyé bien des revers sous le Regne precedent ,
parvint il y a quelques années au Generalat de Arme Othomane .sur les Frontieres , et vient
d'être élevé à l'éminente Charge de Grand Visir.
C'est un homme d'environ 45. ans, d'assez bonne
mine, qui passe pour aimer la magnificence, et qui
est liberal jusqu'à la prodigalité. Il arriva à Scu- tary de Perse , le 10. May au matin , où tous les
Grands de l'Empire l'attendoient sous des Tentes
dans la campagne. 11 s'y trouva un concours de plus de 6000. femmes ou filles , attirées par la
Curiosité que leur donna le renom qu'a ce Visir
d'être aussi galant que feu Ibrahim Pacha , et en
nême-temps pour se dédommager un peu de la
retraite rigoureuse que son Prédecesseur Topal- Osman faisoit observer au beau Sexe. Après avoir fîné là , il remonta à cheval et traversa Scutary
avec un magnifique et nombreux cortege , jusqu'à la Marine , jettant de temps en temps des
poignées de Sequins au Peuple.
Il se mit ensuite dans le Caïc ou la Gondole à
Tendelet des G. Visirs ; le Vaisseau Contre- Amiral bien pavoisé , et qu'on avoit fait avancer à
son occasion près de la Tour de Leandre , le salua de 15. coups de Canon à son passage , et cette
Tour de cinq ; il vint débarquer au Kiosc ou Pavillon du Serrail qui est au bord de la Mer , ou
la Maison du G. S. étoir rangée en haye pour le
recevoir ; il eut sur le champ audience de S. H.
avec laquelle il demeura plus de deux heures ; le
G. S. après lui avoir confié le Sceau Imperial et
= l'avoir fait revêtir des autres marques de dignité
attachées à sa Charge , le fit conduire par ses prog
pres Officiers au Palais des G. V. où il se rendit,
marchans
1626 MERCURE DE FRANCE
où
marchant à la droite du Mufti , et répandant
toujours à pleines mains les Sequins sur sa route.
Le même jour Ismaël- Pacha , Janissaire- Aga ,
fut fait Pacha à trois Queues en plein Divan ,
le G. V. lui fit donner une Pelisse de Samour ,
couverte d'un drap d'or du Pays. Le Kiaya ou
Lieutenant de Topal Osman , qui étoit resté en
fonction jusqu'alors , fut déposé , et celui d'AliPacha prit sa place.
Ce Premier Ministre fit rouvrir tous les Caffez publics , qui depuis la grande Révolution de 1730. avoient presque toûjours été fermez , et sur
les plaintes qu'on lui porta des fraudes qui s'étoient renouvellées dans le débit des Vivres et des
Denrées depuis la déposition de Topal- Osman ,
quoique dans l'interim le Kaimakan eût fait pendre plusieurs prévaricateurs en ce genre , il alla
faire une tournée dans Constantinople chez les
Bouchers et les Boulangers ; il fixa le prix de la
viande, qui se vendoit fort cher , et dont on manquoit même souvent , fit augmenter le poids du
pain , envoya aux Galeres ceux des Boulangers
qu'il trouva en contravention , et donna dix Sequins à chacun de ceux qui étoient en regle , ce
qui lui attira de grandes louanges.
Le 22. du même mois de May , ayant mandé
le Defterdar ou Trésorier Ali- Pacha , cy-devant
Kaimakan, il le fit revêtir d'une Pelisse de Samour, en lui disant que le G. S. l'avoit nommé
Pacha de Cutaya , (' en Asie , près de Brousse ,
qui est une espece d'exil ) et qu'il se préparât à
partir dans deux jours. L'ancien Reis Effendi du
temps d'Achmet III. qui étoit devenu TefterEmini, ou Garde des Rôles de la Milice , sous le
G. S d'apresent , et que ce Ministre avoit aussi
mandé, reçut le Caftan ou Robe d'honneur ,-
avec
JUILLET. 1732. 1627
avec la Charge de Defterdar , et ceda la sienne de
Tefter- Emini à SerdensiEffendi , qui avoit été Se- cretaire de la Porte aux Conferences de Passarowitz. Le Tchaoux- Bachi et le Bostandgi- Bachi ,
furent pareillement déposez : le poste du premier fut donné à l'ancien General de la Cavalerie, resté
depuis quelque temps sans emploi, et celui du second , a l'Asseki- Aga, qui fut relevé dans le sien
par l'Oda-Bachi. Voilà, Monsieur , en quoi consistent jusqu'à present les principaux changemens survenus à la Porte , depuis l'arrivée du nouveau
G. Visir. Je suis , &c.
L
E -25
P. V. D.
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Résumé : LETTRE écrite de Constantinople, le 8. Juin 1732.
Le 8 juin 1732, une lettre rapporta la déposition de Topal Osman Pacha, Grand Vizir de l'Empire ottoman, survenue le 12 mars 1732. Le Kislar Aga, chef des eunuques noirs, rassura Topal Osman en expliquant que cette déposition visait à soulager le vizir de ses responsabilités en raison de son âge et de ses infirmités. Topal Osman accepta cette décision avec sérénité, affirmant n'avoir rien à se reprocher et avoir toujours servi avec zèle. Après sa déposition, Topal Osman fut conduit à Calcédoine, où il reçut la visite de ses amis et domestiques. Il exprima sa satisfaction de se voir délivré d'un emploi qu'il remplissait avec répugnance. Il organisa un sacrifice pour remercier Dieu et partit ensuite pour Trébizonde, où il fut nommé pacha. Pendant son séjour à Nicomédie, il s'occupa de remédier aux désordres dans la police locale, notamment en faisant pendre des monopoleurs d'œufs. Ali Pacha, également connu sous le nom d'Ekim-Oglou, fut nommé Kaïmakan pour exercer les fonctions du vizirat pendant l'interim. Il rouvrit les cafés publics et s'occupa des fraudes dans le débit des vivres et des denrées. Ali Pacha arriva à Scutari de Perse le 10 mai, accueilli par les grands de l'Empire et une foule curieuse. Il fut reçu par le sultan, qui lui confia le sceau impérial et les marques de sa dignité. Ismaël Pacha fut nommé pacha à trois queues en plein Divan, et plusieurs autres nominations et démissions eurent lieu parmi les hauts fonctionnaires. Ali Pacha fit également une tournée à Constantinople pour réguler les prix des vivres et punir les contrevenants.
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54
p. 1846-1849
DE TURQUIE ET PERSE.
Début :
Les Lettres de Constantinoples, de la fin du mois de Juin; portent qu'il avoit été résolu [...]
Mots clefs :
Turquie, Perse, Divan, Constantinople, Topal
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE TURQUIE ET PERSE.
DE TURQUIE ET PERSE.
Es Lettres de Constantinople , de la fin du
mois de Juin , portent qu'il avoit été résolu
dans le dernier Divan , de renvoyer en Perse un
Corps considérable de Janissaires et de Spahis ,
pour s'opposer au progrès de l'Armée du Roy
de Perse , qui a déja attaqué plusieurs Places ,
cedées à Sa Hautesse par le dernier Traité ;
faire équiper sur la Mer Noire 200 Navires pour transporter des Munitions de Guerre et des Provisions à Trébisonde , et de dresser un Rôle de
de
tous
A OUST. 17320 1847
tous les habitans de Constantinople, et des au
ores principales Villes de l'Empire Ottoman, qui
sont en état de porter les Armes , pour s'en servir en cas de besoin.
Ces Lettres ajoutent que le G. Viz. avoit fait
disgracier le Caïmacan, qui faisoit aussi les fonctions de Tefterdar, et que le G.S.lui avoit donné,
en Pexilant , le Gouvernement de Kintaïa , l'une
des plus considérables Places de l'Asie ; que la
Charge de Tefterdar avoit été donnée à Mehemet Effendi, qui a été Grand- Trésorier de l'Empire , sous le Regne du Sultan Achmet ; que,
Marabout , Capitan Pacha , ou grand Amiral
avoit été déposé le 11 Juin, et qu'on avoit nommé Bekir Pacha , pour exercer cette Charge
en sa place ; que le 12 , le nouveau Capitan Pacha avoit épousé la sœur du G S. qui étoit veuve du Vizir Numan Pacha Kuperli , et que le
Capitan, Pacha disgracié , avoit été fait Pacha
de Nicomédie.
On a appris en dernier lieu de Constantinople ,
que le 6. Juillet on avoit arboré la Queue de
Cheval à la porte du Serrail, et déclaré publiquement la guerre au Roy de Perse , qu'il étoit parti par la Mer Noire plus de 80000. hommes de
Troupes d'Europe ; qu'on en rassembloit encore
de tous côtez dans l'Asie , et que dans deux mois
au plus tard le G. S. auroit en Perse une Armée
de plus de 300. mille hommes
On apprend par les Lettres d'Ispahan , reçûës par la voye de Smirne , que la nouvelle de la Paix conclue avec les Turcs, n'avoit pas été bien
reçue des, Peuples ; qu'il y avoit eu à Ispahan , à
- Tauris et dans d'autres Villes plusieurs émotions
populaires à cette occasion ; que le Roy de Perse:
avoit tâché d'abord d'appaiser ses Peuples , en Hij leur
1848 MERCURE DE FRANCE
3.
leur faisant voir que le Traité étoit plus avantageux à la Nation qu'ils ne le croyoient , qu'il
avoit été contraint de prendre le parti de cette
Paix , pour sauver le reste de son Royaume , et
que les Villes qu'il avoit cedées au G. S. n'étoient
-pas d'aussi graude conséquence qu'on se l'imaginoit ; enfin qu'il exhortoit ses Peuples à ne point rompre une Paix , signée et ratifiée solemnellement , conformément à la Loy.
Ces remontrances n'ayant rien opéré sur l'esprit des Mécontens , le premier General des Persans fut contraint de déchirer en presence du
Muphti , tous les Traitez et Ecrits particuliers ,
qui avoient quelque relation à cette Paix , com- me contraires aux Constitutions fondamentales
du Royaume, et de déclarer la Guerre aux Turcs.
Quelques jours après , le Roy de Perse ayant
rassemblé ses Troupes , en forma deux Armées ,
avec l'une desquelles il se proposa de passer en
Géorgie, pour en faire la conquête ; pendant que
l'autre s'empareroit des Provinces d'Erivan et de Babilone.
Un Courier dêpêché par le Gouverneur de
Bagdad , et qui arriva le 16 Juin à Constantinople, a confirmé cette nouvelle, en apprenant aussi celle de la prise d'Erivan par les Persans.
Le 18 Juillet, le G. S. fit publier que tous ceux
de ses Sujets , qui sont en état de porter les Armes , eussent à se présenter aux Commissaires
qu'il avoit nommés , sous peine de la vie. Par
cet ordre , Sa Hautesse compte de rassembler en peu de temps une Armée de 20000 hommes , et
d'être en état de l'envoyer en Perse , à la fin du mois de Juillet.
En attendant , les vieilles Troupes qui sont en
quartiers , dans les Provinces voisines de Perse
ant ordre de joindre le Séraskier , qui comman-dc
>
AOUST. 1732 1849
•
de dans ce Païs -là , et elles seront remplacées par
des Milices. Sa Hautesse a fait dépêcher depuis ,
plusieurs Courriers , dans differentes Cours de
I'Europe , pour avertir les Princes Chrétiens , ses
voisins , de ne point prendre d'ombrage des
grands Armemens qu'elle fait faire dans toute P'étendue de son Empire ; parce qu'ils n'ont pour
objet , que de vanger la Porte de la perfidie des Persans.
On a appris depuis ces Lettres , que le G. S.
avoit nommé Topal , Osman-Bacha , cy- devant
G. V. et qui depuis sa déposition avoit été envoyé à Trébisonde , pour commander son Ar- mêe en Perse.
Es Lettres de Constantinople , de la fin du
mois de Juin , portent qu'il avoit été résolu
dans le dernier Divan , de renvoyer en Perse un
Corps considérable de Janissaires et de Spahis ,
pour s'opposer au progrès de l'Armée du Roy
de Perse , qui a déja attaqué plusieurs Places ,
cedées à Sa Hautesse par le dernier Traité ;
faire équiper sur la Mer Noire 200 Navires pour transporter des Munitions de Guerre et des Provisions à Trébisonde , et de dresser un Rôle de
de
tous
A OUST. 17320 1847
tous les habitans de Constantinople, et des au
ores principales Villes de l'Empire Ottoman, qui
sont en état de porter les Armes , pour s'en servir en cas de besoin.
Ces Lettres ajoutent que le G. Viz. avoit fait
disgracier le Caïmacan, qui faisoit aussi les fonctions de Tefterdar, et que le G.S.lui avoit donné,
en Pexilant , le Gouvernement de Kintaïa , l'une
des plus considérables Places de l'Asie ; que la
Charge de Tefterdar avoit été donnée à Mehemet Effendi, qui a été Grand- Trésorier de l'Empire , sous le Regne du Sultan Achmet ; que,
Marabout , Capitan Pacha , ou grand Amiral
avoit été déposé le 11 Juin, et qu'on avoit nommé Bekir Pacha , pour exercer cette Charge
en sa place ; que le 12 , le nouveau Capitan Pacha avoit épousé la sœur du G S. qui étoit veuve du Vizir Numan Pacha Kuperli , et que le
Capitan, Pacha disgracié , avoit été fait Pacha
de Nicomédie.
On a appris en dernier lieu de Constantinople ,
que le 6. Juillet on avoit arboré la Queue de
Cheval à la porte du Serrail, et déclaré publiquement la guerre au Roy de Perse , qu'il étoit parti par la Mer Noire plus de 80000. hommes de
Troupes d'Europe ; qu'on en rassembloit encore
de tous côtez dans l'Asie , et que dans deux mois
au plus tard le G. S. auroit en Perse une Armée
de plus de 300. mille hommes
On apprend par les Lettres d'Ispahan , reçûës par la voye de Smirne , que la nouvelle de la Paix conclue avec les Turcs, n'avoit pas été bien
reçue des, Peuples ; qu'il y avoit eu à Ispahan , à
- Tauris et dans d'autres Villes plusieurs émotions
populaires à cette occasion ; que le Roy de Perse:
avoit tâché d'abord d'appaiser ses Peuples , en Hij leur
1848 MERCURE DE FRANCE
3.
leur faisant voir que le Traité étoit plus avantageux à la Nation qu'ils ne le croyoient , qu'il
avoit été contraint de prendre le parti de cette
Paix , pour sauver le reste de son Royaume , et
que les Villes qu'il avoit cedées au G. S. n'étoient
-pas d'aussi graude conséquence qu'on se l'imaginoit ; enfin qu'il exhortoit ses Peuples à ne point rompre une Paix , signée et ratifiée solemnellement , conformément à la Loy.
Ces remontrances n'ayant rien opéré sur l'esprit des Mécontens , le premier General des Persans fut contraint de déchirer en presence du
Muphti , tous les Traitez et Ecrits particuliers ,
qui avoient quelque relation à cette Paix , com- me contraires aux Constitutions fondamentales
du Royaume, et de déclarer la Guerre aux Turcs.
Quelques jours après , le Roy de Perse ayant
rassemblé ses Troupes , en forma deux Armées ,
avec l'une desquelles il se proposa de passer en
Géorgie, pour en faire la conquête ; pendant que
l'autre s'empareroit des Provinces d'Erivan et de Babilone.
Un Courier dêpêché par le Gouverneur de
Bagdad , et qui arriva le 16 Juin à Constantinople, a confirmé cette nouvelle, en apprenant aussi celle de la prise d'Erivan par les Persans.
Le 18 Juillet, le G. S. fit publier que tous ceux
de ses Sujets , qui sont en état de porter les Armes , eussent à se présenter aux Commissaires
qu'il avoit nommés , sous peine de la vie. Par
cet ordre , Sa Hautesse compte de rassembler en peu de temps une Armée de 20000 hommes , et
d'être en état de l'envoyer en Perse , à la fin du mois de Juillet.
En attendant , les vieilles Troupes qui sont en
quartiers , dans les Provinces voisines de Perse
ant ordre de joindre le Séraskier , qui comman-dc
>
AOUST. 1732 1849
•
de dans ce Païs -là , et elles seront remplacées par
des Milices. Sa Hautesse a fait dépêcher depuis ,
plusieurs Courriers , dans differentes Cours de
I'Europe , pour avertir les Princes Chrétiens , ses
voisins , de ne point prendre d'ombrage des
grands Armemens qu'elle fait faire dans toute P'étendue de son Empire ; parce qu'ils n'ont pour
objet , que de vanger la Porte de la perfidie des Persans.
On a appris depuis ces Lettres , que le G. S.
avoit nommé Topal , Osman-Bacha , cy- devant
G. V. et qui depuis sa déposition avoit été envoyé à Trébisonde , pour commander son Ar- mêe en Perse.
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Résumé : DE TURQUIE ET PERSE.
En juin 1732, l'Empire Ottoman a pris des mesures pour renforcer ses troupes en Perse afin de contrer les attaques perses sur des places cédées par le dernier traité. Les préparatifs incluaient l'équipement de 200 navires sur la Mer Noire pour transporter des munitions et des provisions à Trébisonde, ainsi que la mobilisation des habitants capables de porter les armes. Le Grand Vizir a démis le Caïmacan, également Tefterdar, et l'a exilé à Kintaïa. Mehmet Effendi a été nommé nouveau Tefterdar, et Bekir Pacha a remplacé le Capitain Pacha déposé le 11 juin. Le 6 juillet, la guerre contre le roi de Perse a été déclarée publiquement, avec plus de 80 000 hommes de troupes européennes partis par la Mer Noire et des rassemblements continus en Asie. À Ispahan, la nouvelle de la paix avec les Turcs a suscité des émotions populaires. Le roi de Perse a tenté d'apaiser ses sujets en expliquant les avantages du traité, mais les mécontents ont forcé le général perse à déclarer la guerre aux Turcs. Les Perses ont formé deux armées, l'une pour la Géorgie et l'autre pour les provinces d'Erivan et de Babilone. La prise d'Erivan par les Perses a été confirmée par un courrier de Bagdad. Le sultan ottoman a ordonné à tous ses sujets capables de porter les armes de se présenter aux commissaires sous peine de la vie, visant à rassembler 20 000 hommes pour la fin juillet. Des courriers ont été envoyés en Europe pour rassurer les princes chrétiens sur les intentions ottomanes, qui visent à venger la perfidie perse. Topal Osman-Bacha a été nommé pour commander l'armée ottomane en Perse.
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55
p. 2037-2045
LETTRE écrite de Constantinople le 12. Juillet 1732. Suite des affaires de Perse et de Turquie.
Début :
Précisément le même jour, Monsieur, c'est-à-dire, le huit du mois passé, que je vous [...]
Mots clefs :
Pacha , Constantinople, Perse, Turquie, Lettre, Sérasker
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Constantinople le 12. Juillet 1732. Suite des affaires de Perse et de Turquie.
LETTRE écrite de Constantinople le 12 .
Juillet 1732. Suite des affaires
de Perse et de Turquie.
Récisément le même jour , Monsieur , c'estPadise,etle du mois passé ,que je vous envoyai la Relation desConferences tenues àAmadan , au mois de Janvier dernier , entre les Plénipotentiaires de Perse et de Turquie , et dont le GV Résul-
2038 MERCURE DE FRANCE
Résultat servit de base au Traité de Paix qu'ils
signerent quelque- tems après , un Chokadar
d'Achmet , Pacha de Babilonne , arriva ici en
douze jours seulement , diligence extrême , qui
répondoit à l'importance des dépêches dont son
Maître l'avoit chargé , et par lesquelles ce Pacha
informoit la Porte , que Thamas Kouli- Khan
Eatemad- Doulet , ou premier Ministre du Roi
de Perse , après avoir remporté plusieurs victoires sur les Efghans ou Aghuans , qu'il avoit rencognez dans leurs Montagnes du Candahar, étoit
revenu en triomphe à Ispaham , qu'enflé de ses heureux succès , et se prévalant de ce qu'il a mis
en quelque façon Chah- Thamas sur le Trône de
ses Ancêtres , il avoit déclaré avec hauteur on arrivant , qu'il ne vouloit absolument point ratifier Traité honteux qu'on venoit de faire avec
les Turcs sans sa participation , prétendant qu'il
étoit en état d'en obtenir un plus honorable et
plus avantageux à la Perse , et qu'en conséquence ce Ministre lui avoit écrit , à lui Achmet , une
Lettre conçue à peu près en ces termes :
Vous qui êtes Pacha de Babilonné , nous vous
faisons sçavoir en premier lieu , que nous voulons
et prétendons être les maîtres d'aller en pleine liberté
et toutes les fois qu'il nous plaira , visiter les Tom- beaux de ⋆ l'Imam- Ali , de Gherbelai-Mahaladé,
de Mousa et d'Hussein. Secondement , que pour
faire nos pélerinages à ces faints Lieux avec la déAli , Gendre de Mahomet , Gherbelaï , fils de la fille de ce dernier ; Mousa et Hussein , fils
d'Ali , ont chacun leur Sépulture aux environs
de Babilonne , et tous ces Tombeaux font l'objet
de la plus profonde véneration des Persans.
cence
SEPTEMBRE. 1732. 2039
il tence , et les dispositions que notre Loi demande ,
faut auparavant que tous les Persans , qui ont été
pris dans la derniere guerre soient délivrez de leur
esclavage , et que comme le sang de nos autres freres, qui y ont peri fume encore , et crie vangeance
à leur Souverain , il faut aussi qu'il y en ait autant
de répandu des Sujets du G. S. que ceux-ci en ont
fait couler des Sujets du Roi de Perse. Nous sommes
bien-aises de vous faire part de nos sentimens , afin
que vous ne puissiez pas nous accuser de vous avoir
surpris,et que vous vous teniez sur vos gardes, Quant
à nous,nous nous préparons à aller bien- tôt à la tête de uotre Armée goûter la douceur de l'air que l'on respire dans les belles plaines de Bagdat , etfaire repaser nos Troupes fatiguées à l'ombre de ses murs.
A cette extraordinaire Lettre du premier Ministre de Perse , Achmet-Pacha en avoit joint
une autre de Baki- Pacha , Gouverneur de Kirman-cha , par laquelle ce dernier se plaignoit que contre la foi du Traité on avoit voulu le dépoüiller de son Gouvernement. Il faut sçavoir
pour entendre ceci , que depuis longues années ce Gouvernement est dans la famille de BakiPacha , et qu'à la sollicitation d'Achmet- Pacha
son Protecteur , on étoit convenu par un article
du dernier Traité de Paix , qu'il resteroit en place , quoiqu'il fut Turc et Sujet du G. S. et quoi
que Kirmancha rentrât sous la domination Per- mais que l'Edatemad- Donlet s'étant recrié
avec quelque raison contre cet article , dont l'exécution pourroit être pernicieuse à la Perse , et
ne voulant point garder de mesures avec les´
Turcs , avoit déposé de son autorité ce Gouver- neur , et lui avoit fait ordonner de remettre le
Commandement à un Persan qu'il envoyoit pour G vi
sane ,
le
2040 MERCURE DE FRANCE
le relever. Baki- Pacha écrivoit donc tout cela au
Seraskier- Achmet , et ajoûtoit , que non- seule- ment il avoit refusé l'entrée de la Ville au Successeur qu'on lui avoit envoyé , mais qu'il en
avoit fait fermer les portes , et qu'il étoit résolu
de s'y deffendre jusqu'à la derniere extrémité
avant que de ceder son poste à personne , que
d'ailleurs il pouvoit l'assurer qu'il y avoit plus
de 20000. hommes dans le Kirman , qui lui
étoient entierement dévoüez , et qu'il attendoit
ses ordres pour sçavoir de quelle maniere il devoit se comporter ; surquoi Acmet- Pacha lui *
avoit répondu , qu'il ne pouvoit lui en donner
aucun qu'il n'en eut reçû lui-même de la Porte
où il alloit mander tout ce qui se passoit.
La Porte aussi surprise qu'indignée des faux
prétextes et de l'air de fierté que prenoit ThamasKouli- Khan pour rompre une paix recente , que
les Persans avoient demandée , pour ainsi - dire à
genoux , et cela dans le tems qu'elle venoit de licencier une partie de ses Troupes , et de retirer
l'autre des Frontieres , la Porte , dis-je , se trouva comme elle se trouve encore dans un grand
embarras Cependant le Grand-Visir ayant convoqué pendant plusieurs jours des Assemblées
générales au Serrail pour décider sur le partî
qu'il y avoit à prendre dans une conjoncture si
délicate , et celui de la guerre ayant parû d'une
nécessité inévitable , l'opinion génerale fut de la
recommencer avec plus de . vigueur que jamais
et de ne la finir que pour la destruction des Persans , de la part desquels il ne falloit plus écouter aucune proposition.
On expédia en même- tems des Courriers à Topal- Osman , Pacha de Trebisonde , ci-devant Grand
>
SEPTEMBRE. 1732. 2041
Grand Vizir , et a d'autres Pachas pour leur
porter des ordres d'assembler à la hâte le plus
de Troupes qu'ils pourroient , et de passer en
toute diligence en Géorgie , afin de mettre à
couvert , s'il étoit possible , Ghendge , Tiflis
Erivan , &c. des entreprises du premier Minis- tre Persan ; et le G. S. donna le Commandement
de la nouvelle Armée à ce même Topal - Osman ,
comme le plus capable de faire tête à l'en- nemi.
En effet , tout le monde convient que le Sultan
ne pouvoit en cette occasion honorer personne
de sa confiance qui en fut plus digne que TopalOsman : outre que ce Pacha est d'une bravoure
et d'une expérience éprouvée par un grand nombre de campagnes et de belles actions , il doit
être animé de la plus terrible vangeance contre
les violateurs de la derniere paix , proprement
son ouvrage , et pour la conclusion de laquelle
on peut dire , qu'il s'étoit comme sacrifié luimême ; sans compter que , s'il y a jour à la renoüer , il sera encore plus propre que personne
à profiter des moyens que les circonstances pour- ront lui en offrir.
-La Porte appréhendant d'un autre côté , que
Thamas Kouli Khan ne tombe sur Bagdad avec
son Armée , que l'on dit être de 60000. hommes , et qu'il ne sempare de cette importante
Place , quoiqu'Achmet- Pacha ait mandé en s'y
renfermant , qu'il étoit en état de tenir trois
mois , des ordres ont été expédiez par tout l'Empire , pour envoyer à ce Gouverneur des secours
d'hommes et de munitions ; et afin de vaincre la
répugnance que les Soldats témoignent de retourner en Perse , on leur a augmenté à tous.
leur paye de quelques aspres.
Од
2042 MERCURE DE FRANCE
On ne peut pas encore sçavoir de quel succès
aura été suivi ce renouvellement de guerre ,
soit
pour les Turcs , soit pour les Persans ; mais un
bruit se répandit ici le même jour qu'on y
apprit la rupture de la paix , sçavoir que ChahThamas n'y avoit aucune part , ce bruit vient
de se confirmer par les dernieres dépêches
d'Achmet- Pacha , qu'un Tartare a remises à la Porte le 4. de ce mois.
Ce Seraskier en envoyant une Lettre que le
Roi de Perse lui avoit adressée pour le G. S.
mande que ce Prince lui en avoit aussi écrit une
par laquelle il l'assuroit qu'il étoit dans la ferme
intention d'éxécuter de sa part tous les articles
du Traité conclu depuis peu ; qu'il désavoüoit
en tout son premier Ministre , et que le regar- dant comme un Sajet qui s'étoit soustrait à l'obéissance de son Roi , il alloit non- seulement le
poursuivre , mais que dans l'incertitude , si le
sort favoriseroit ses armes , il prioit le G. S. de
se joindre à lui , pour employer leurs forces de
concert à réduire ce rebelle , et à faire rentrer
dans leur devoir les Troupes qu'il commande ;
ajoutant que l'histoire fournissoit assez d'éxemples que des Pachas avoient désolé l'Empire Ottoman par des révoltes contre leurs Empereurs que l'Eatemad- Doulet les imitoit aujourd'hui
mais qu'il esperoit que Sa Hautesse ayant égard à la malheureuse situation des affaires de Perse
maintiendroit dans son entier le dernier Traité
de Paix qu'ils avoient conclu ensemble par leurs
Plénipotentia.res respectifs , et duquel il protes- toit de nouveauqu'il ne vouloit s'écarter en rien.
Malgré ces belles assûrances , et quoique d'autres avis portent , qu'effectivement Thamas-
>
Koali
SEPTEMBRE. 1732 2043 Kouli-Khan enorgueilli d'avoir subjugué le Candahar , fait mourir Acheraf , et extermine jusqu'au dernier de la race de ce fameux usurpateur,
abusoit du crédit qu'il s'étoit acquis en Perse , et
donnoit lieu de soupçonner par son humeur al- tiere et ambitieuse , qu'il songeoit à usurper la
Couronne de son Maître ; inalgré tout cela , dis-je , la bonne-foi des Persans est si fort
décriée , que bien des gens pensent ici , que c'est
un nouvel artifice , et que ce Prince d'intelligence avec son premier Ministre et avec quelques
Puissances voisines , ne cherche qu'à amuser les
Turcs , au moins à ralentir l'activite des mouvemens qu'ils se donnent , afin d'avoir le tems de
reprendre sur eux les pays qu'il leur a cedez par
la derniere paix , avant qu'ils ayent assemblé des forces suffisantes pour s'y opposer , ou pour se
préparer des voyes de raccommodement avec la
Porte , supposé qu'il échoue dans ses desseins
en rejettant sur l'Eatemaddoullet toute l'iniquité
de l'infraction du Traité. Je passe sous silence
beaucoup d'autres raisonnemens qui se font ici
sur les causes de cette infraction , en attendanţ
que le tems nous en ait dévoilé le mistere.
Bekir- Pacha , qui étoit Gouverneur de Cutaya,
ayant été nommé Capitan - Pacha , arriva ici
le 13 du mois passé , et fut instalé dans cette dignité avec les cérémonies ordinaires , Marabou ·
son Prédécesseur fut renvoyé chez lui. Le lendemain , ce nouveau Général de la Mer , épousa une
Sultane , sœur du G. S. régnant , et veuve du
G. V. Numan. Pacha , de la Famille des Cuperlis.
Les nouveaux mariez furent un peu troublez la
premiere nuit de leurs nôces par un incendie qui
arriva au Fauxbourg de Cassum-Pacha , et qui étant
2041 MERCURE DE FRANCE
étant dans le voisinage de l'Arcenal , obligea le
Pacha-Bekir , à quitter la couche nuptiale pour
aller donner du secours ; mais sa présence , ni
celle du G. V. ni même le G. S. qui vint jus
qu'au bord de la Mer , ne pûrent empêcher que
le feu ne consummât en peu de tems une centaine de maisons ou de boutiques , dont la plupart
étoient à peine rebâties depuis l'embrasement qui
détruisit une partie de ce Fauxbourg l'année
passée.
La nuit du 19 au 16. il y eut encore un autre
incendie aux environs : le feu prit dans l'Arcenal
même , chez le Tersana-Emini , ou Intendant
de la Marine ; son vaste Palais fut réduit en cendres avec tous ses meubles ; les Archives ; les
Registres , et les autres papiers de la Marine
dont on ne pût rien sauver du tout encore ce fut un grand bonheur que l'air se trouva calme: pour peu qu'il eut fait de vent , il auroit été
presqu'impossible de garantir des flammes tour
P'Arsenal , et les Vaisseaux du G. S. qui sont auprès.
Quoique Marabou , Capitan-Pacha déposé ,
soit généralement reconnu pour un bon homme,
ces deux incendies arrivez coup sur coup , firent
soupçonner que pour se vanger de sa déposition ,
il étoit complice des incendiaires ; car on trouva,
dit on , des matieres combustibles en plusieurs
endroits , mais on n'a pû découvrir aucun incendiaire. Quoiqu'il en soit , la Porte l'avoit éxilé
à Lemnos , et il y fut embarqué pour cet effer
sur une Galere ; cependant ses amis ayant intercedé fortement pour lui , et prouvé son innocence, on le renvoya dans sa maison pour la seconde fois , au bout de huit ou dix jours.
La
SEPTEMBRE. 1732. 2045
La peste , qui a fait beaucoup de ravages en
Sirie cette année- ci , s'est manifestée à Constantinople depuis le commencement de ce mois ,
d'où elle s'est répanduë à Galata , à Pera , et dans
les autres Fauxbourgs , et s'il en faut juger par
la Saison où elle commence , il est à craindre
qu'elle ne fasse de terribles progrès. Je suis , &c.
L
P. V. D.
Juillet 1732. Suite des affaires
de Perse et de Turquie.
Récisément le même jour , Monsieur , c'estPadise,etle du mois passé ,que je vous envoyai la Relation desConferences tenues àAmadan , au mois de Janvier dernier , entre les Plénipotentiaires de Perse et de Turquie , et dont le GV Résul-
2038 MERCURE DE FRANCE
Résultat servit de base au Traité de Paix qu'ils
signerent quelque- tems après , un Chokadar
d'Achmet , Pacha de Babilonne , arriva ici en
douze jours seulement , diligence extrême , qui
répondoit à l'importance des dépêches dont son
Maître l'avoit chargé , et par lesquelles ce Pacha
informoit la Porte , que Thamas Kouli- Khan
Eatemad- Doulet , ou premier Ministre du Roi
de Perse , après avoir remporté plusieurs victoires sur les Efghans ou Aghuans , qu'il avoit rencognez dans leurs Montagnes du Candahar, étoit
revenu en triomphe à Ispaham , qu'enflé de ses heureux succès , et se prévalant de ce qu'il a mis
en quelque façon Chah- Thamas sur le Trône de
ses Ancêtres , il avoit déclaré avec hauteur on arrivant , qu'il ne vouloit absolument point ratifier Traité honteux qu'on venoit de faire avec
les Turcs sans sa participation , prétendant qu'il
étoit en état d'en obtenir un plus honorable et
plus avantageux à la Perse , et qu'en conséquence ce Ministre lui avoit écrit , à lui Achmet , une
Lettre conçue à peu près en ces termes :
Vous qui êtes Pacha de Babilonné , nous vous
faisons sçavoir en premier lieu , que nous voulons
et prétendons être les maîtres d'aller en pleine liberté
et toutes les fois qu'il nous plaira , visiter les Tom- beaux de ⋆ l'Imam- Ali , de Gherbelai-Mahaladé,
de Mousa et d'Hussein. Secondement , que pour
faire nos pélerinages à ces faints Lieux avec la déAli , Gendre de Mahomet , Gherbelaï , fils de la fille de ce dernier ; Mousa et Hussein , fils
d'Ali , ont chacun leur Sépulture aux environs
de Babilonne , et tous ces Tombeaux font l'objet
de la plus profonde véneration des Persans.
cence
SEPTEMBRE. 1732. 2039
il tence , et les dispositions que notre Loi demande ,
faut auparavant que tous les Persans , qui ont été
pris dans la derniere guerre soient délivrez de leur
esclavage , et que comme le sang de nos autres freres, qui y ont peri fume encore , et crie vangeance
à leur Souverain , il faut aussi qu'il y en ait autant
de répandu des Sujets du G. S. que ceux-ci en ont
fait couler des Sujets du Roi de Perse. Nous sommes
bien-aises de vous faire part de nos sentimens , afin
que vous ne puissiez pas nous accuser de vous avoir
surpris,et que vous vous teniez sur vos gardes, Quant
à nous,nous nous préparons à aller bien- tôt à la tête de uotre Armée goûter la douceur de l'air que l'on respire dans les belles plaines de Bagdat , etfaire repaser nos Troupes fatiguées à l'ombre de ses murs.
A cette extraordinaire Lettre du premier Ministre de Perse , Achmet-Pacha en avoit joint
une autre de Baki- Pacha , Gouverneur de Kirman-cha , par laquelle ce dernier se plaignoit que contre la foi du Traité on avoit voulu le dépoüiller de son Gouvernement. Il faut sçavoir
pour entendre ceci , que depuis longues années ce Gouvernement est dans la famille de BakiPacha , et qu'à la sollicitation d'Achmet- Pacha
son Protecteur , on étoit convenu par un article
du dernier Traité de Paix , qu'il resteroit en place , quoiqu'il fut Turc et Sujet du G. S. et quoi
que Kirmancha rentrât sous la domination Per- mais que l'Edatemad- Donlet s'étant recrié
avec quelque raison contre cet article , dont l'exécution pourroit être pernicieuse à la Perse , et
ne voulant point garder de mesures avec les´
Turcs , avoit déposé de son autorité ce Gouver- neur , et lui avoit fait ordonner de remettre le
Commandement à un Persan qu'il envoyoit pour G vi
sane ,
le
2040 MERCURE DE FRANCE
le relever. Baki- Pacha écrivoit donc tout cela au
Seraskier- Achmet , et ajoûtoit , que non- seule- ment il avoit refusé l'entrée de la Ville au Successeur qu'on lui avoit envoyé , mais qu'il en
avoit fait fermer les portes , et qu'il étoit résolu
de s'y deffendre jusqu'à la derniere extrémité
avant que de ceder son poste à personne , que
d'ailleurs il pouvoit l'assurer qu'il y avoit plus
de 20000. hommes dans le Kirman , qui lui
étoient entierement dévoüez , et qu'il attendoit
ses ordres pour sçavoir de quelle maniere il devoit se comporter ; surquoi Acmet- Pacha lui *
avoit répondu , qu'il ne pouvoit lui en donner
aucun qu'il n'en eut reçû lui-même de la Porte
où il alloit mander tout ce qui se passoit.
La Porte aussi surprise qu'indignée des faux
prétextes et de l'air de fierté que prenoit ThamasKouli- Khan pour rompre une paix recente , que
les Persans avoient demandée , pour ainsi - dire à
genoux , et cela dans le tems qu'elle venoit de licencier une partie de ses Troupes , et de retirer
l'autre des Frontieres , la Porte , dis-je , se trouva comme elle se trouve encore dans un grand
embarras Cependant le Grand-Visir ayant convoqué pendant plusieurs jours des Assemblées
générales au Serrail pour décider sur le partî
qu'il y avoit à prendre dans une conjoncture si
délicate , et celui de la guerre ayant parû d'une
nécessité inévitable , l'opinion génerale fut de la
recommencer avec plus de . vigueur que jamais
et de ne la finir que pour la destruction des Persans , de la part desquels il ne falloit plus écouter aucune proposition.
On expédia en même- tems des Courriers à Topal- Osman , Pacha de Trebisonde , ci-devant Grand
>
SEPTEMBRE. 1732. 2041
Grand Vizir , et a d'autres Pachas pour leur
porter des ordres d'assembler à la hâte le plus
de Troupes qu'ils pourroient , et de passer en
toute diligence en Géorgie , afin de mettre à
couvert , s'il étoit possible , Ghendge , Tiflis
Erivan , &c. des entreprises du premier Minis- tre Persan ; et le G. S. donna le Commandement
de la nouvelle Armée à ce même Topal - Osman ,
comme le plus capable de faire tête à l'en- nemi.
En effet , tout le monde convient que le Sultan
ne pouvoit en cette occasion honorer personne
de sa confiance qui en fut plus digne que TopalOsman : outre que ce Pacha est d'une bravoure
et d'une expérience éprouvée par un grand nombre de campagnes et de belles actions , il doit
être animé de la plus terrible vangeance contre
les violateurs de la derniere paix , proprement
son ouvrage , et pour la conclusion de laquelle
on peut dire , qu'il s'étoit comme sacrifié luimême ; sans compter que , s'il y a jour à la renoüer , il sera encore plus propre que personne
à profiter des moyens que les circonstances pour- ront lui en offrir.
-La Porte appréhendant d'un autre côté , que
Thamas Kouli Khan ne tombe sur Bagdad avec
son Armée , que l'on dit être de 60000. hommes , et qu'il ne sempare de cette importante
Place , quoiqu'Achmet- Pacha ait mandé en s'y
renfermant , qu'il étoit en état de tenir trois
mois , des ordres ont été expédiez par tout l'Empire , pour envoyer à ce Gouverneur des secours
d'hommes et de munitions ; et afin de vaincre la
répugnance que les Soldats témoignent de retourner en Perse , on leur a augmenté à tous.
leur paye de quelques aspres.
Од
2042 MERCURE DE FRANCE
On ne peut pas encore sçavoir de quel succès
aura été suivi ce renouvellement de guerre ,
soit
pour les Turcs , soit pour les Persans ; mais un
bruit se répandit ici le même jour qu'on y
apprit la rupture de la paix , sçavoir que ChahThamas n'y avoit aucune part , ce bruit vient
de se confirmer par les dernieres dépêches
d'Achmet- Pacha , qu'un Tartare a remises à la Porte le 4. de ce mois.
Ce Seraskier en envoyant une Lettre que le
Roi de Perse lui avoit adressée pour le G. S.
mande que ce Prince lui en avoit aussi écrit une
par laquelle il l'assuroit qu'il étoit dans la ferme
intention d'éxécuter de sa part tous les articles
du Traité conclu depuis peu ; qu'il désavoüoit
en tout son premier Ministre , et que le regar- dant comme un Sajet qui s'étoit soustrait à l'obéissance de son Roi , il alloit non- seulement le
poursuivre , mais que dans l'incertitude , si le
sort favoriseroit ses armes , il prioit le G. S. de
se joindre à lui , pour employer leurs forces de
concert à réduire ce rebelle , et à faire rentrer
dans leur devoir les Troupes qu'il commande ;
ajoutant que l'histoire fournissoit assez d'éxemples que des Pachas avoient désolé l'Empire Ottoman par des révoltes contre leurs Empereurs que l'Eatemad- Doulet les imitoit aujourd'hui
mais qu'il esperoit que Sa Hautesse ayant égard à la malheureuse situation des affaires de Perse
maintiendroit dans son entier le dernier Traité
de Paix qu'ils avoient conclu ensemble par leurs
Plénipotentia.res respectifs , et duquel il protes- toit de nouveauqu'il ne vouloit s'écarter en rien.
Malgré ces belles assûrances , et quoique d'autres avis portent , qu'effectivement Thamas-
>
Koali
SEPTEMBRE. 1732 2043 Kouli-Khan enorgueilli d'avoir subjugué le Candahar , fait mourir Acheraf , et extermine jusqu'au dernier de la race de ce fameux usurpateur,
abusoit du crédit qu'il s'étoit acquis en Perse , et
donnoit lieu de soupçonner par son humeur al- tiere et ambitieuse , qu'il songeoit à usurper la
Couronne de son Maître ; inalgré tout cela , dis-je , la bonne-foi des Persans est si fort
décriée , que bien des gens pensent ici , que c'est
un nouvel artifice , et que ce Prince d'intelligence avec son premier Ministre et avec quelques
Puissances voisines , ne cherche qu'à amuser les
Turcs , au moins à ralentir l'activite des mouvemens qu'ils se donnent , afin d'avoir le tems de
reprendre sur eux les pays qu'il leur a cedez par
la derniere paix , avant qu'ils ayent assemblé des forces suffisantes pour s'y opposer , ou pour se
préparer des voyes de raccommodement avec la
Porte , supposé qu'il échoue dans ses desseins
en rejettant sur l'Eatemaddoullet toute l'iniquité
de l'infraction du Traité. Je passe sous silence
beaucoup d'autres raisonnemens qui se font ici
sur les causes de cette infraction , en attendanţ
que le tems nous en ait dévoilé le mistere.
Bekir- Pacha , qui étoit Gouverneur de Cutaya,
ayant été nommé Capitan - Pacha , arriva ici
le 13 du mois passé , et fut instalé dans cette dignité avec les cérémonies ordinaires , Marabou ·
son Prédécesseur fut renvoyé chez lui. Le lendemain , ce nouveau Général de la Mer , épousa une
Sultane , sœur du G. S. régnant , et veuve du
G. V. Numan. Pacha , de la Famille des Cuperlis.
Les nouveaux mariez furent un peu troublez la
premiere nuit de leurs nôces par un incendie qui
arriva au Fauxbourg de Cassum-Pacha , et qui étant
2041 MERCURE DE FRANCE
étant dans le voisinage de l'Arcenal , obligea le
Pacha-Bekir , à quitter la couche nuptiale pour
aller donner du secours ; mais sa présence , ni
celle du G. V. ni même le G. S. qui vint jus
qu'au bord de la Mer , ne pûrent empêcher que
le feu ne consummât en peu de tems une centaine de maisons ou de boutiques , dont la plupart
étoient à peine rebâties depuis l'embrasement qui
détruisit une partie de ce Fauxbourg l'année
passée.
La nuit du 19 au 16. il y eut encore un autre
incendie aux environs : le feu prit dans l'Arcenal
même , chez le Tersana-Emini , ou Intendant
de la Marine ; son vaste Palais fut réduit en cendres avec tous ses meubles ; les Archives ; les
Registres , et les autres papiers de la Marine
dont on ne pût rien sauver du tout encore ce fut un grand bonheur que l'air se trouva calme: pour peu qu'il eut fait de vent , il auroit été
presqu'impossible de garantir des flammes tour
P'Arsenal , et les Vaisseaux du G. S. qui sont auprès.
Quoique Marabou , Capitan-Pacha déposé ,
soit généralement reconnu pour un bon homme,
ces deux incendies arrivez coup sur coup , firent
soupçonner que pour se vanger de sa déposition ,
il étoit complice des incendiaires ; car on trouva,
dit on , des matieres combustibles en plusieurs
endroits , mais on n'a pû découvrir aucun incendiaire. Quoiqu'il en soit , la Porte l'avoit éxilé
à Lemnos , et il y fut embarqué pour cet effer
sur une Galere ; cependant ses amis ayant intercedé fortement pour lui , et prouvé son innocence, on le renvoya dans sa maison pour la seconde fois , au bout de huit ou dix jours.
La
SEPTEMBRE. 1732. 2045
La peste , qui a fait beaucoup de ravages en
Sirie cette année- ci , s'est manifestée à Constantinople depuis le commencement de ce mois ,
d'où elle s'est répanduë à Galata , à Pera , et dans
les autres Fauxbourgs , et s'il en faut juger par
la Saison où elle commence , il est à craindre
qu'elle ne fasse de terribles progrès. Je suis , &c.
L
P. V. D.
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Résumé : LETTRE écrite de Constantinople le 12. Juillet 1732. Suite des affaires de Perse et de Turquie.
En juillet 1732, des tensions émergent entre la Perse et la Turquie. Le 12 juillet, un messager informe la Porte ottomane que Thamas Kouli Khan, premier ministre du roi de Perse, refuse de ratifier le traité de paix récemment signé avec les Turcs après avoir vaincu les Efghans. Il exige la liberté de visite des tombeaux sacrés des imams Ali, Gherbelai, Mousa et Hussein, la libération des Persans capturés, et des représailles pour les pertes subies. Parallèlement, Baki Pacha, gouverneur de Kirmancha, se plaint d'avoir été déposé malgré les accords de paix. La Porte ottomane, surprise et indignée, décide de reprendre les hostilités. Topal Osman est nommé commandant de la nouvelle armée pour défendre les territoires menacés. Des renforts sont envoyés à Bagdad pour contrer une éventuelle attaque perse. Cependant, des rumeurs circulent que le roi de Perse désavoue son ministre et souhaite maintenir le traité de paix, bien que la bonne foi des Persans soit mise en doute. Par ailleurs, Bekir Pacha est nommé Capitan Pacha et épouse une sultane. Deux incendies surviennent à Constantinople, mais les responsables ne sont pas identifiés. La peste, qui a ravagé la Syrie, apparaît à Constantinople et menace de se propager.
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56
p. 2196-2198
« INSTRUCTIONS CHRÉTIENNES sur les huit Béatitudes, par Demandes et par [...] »
Début :
INSTRUCTIONS CHRÉTIENNES sur les huit Béatitudes, par Demandes et par [...]
Mots clefs :
Instructions chrétienes, Coutumes, Constantinople, Sermons choisis, Imitation de Jésus-Christ, Oeuvres de Rabelais, Cardinal d'Ossat
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « INSTRUCTIONS CHRÉTIENNES sur les huit Béatitudes, par Demandes et par [...] »
NSTRUCTIONS CHRETIENNES sur les
huit Béatitudes , par Demandes et par
Réponses , tirées des SS. P P. et en particulier de S. Augustin ; avec des Prieres et
Aspirations sur chaque Instruction. AParis , rue S. Jacques , chez Witte et Henry !
in 12. avec fig. en Taille- douce.
COUTUMES GENERALES , LOCALES , du
Duché de Bourbonnois; avec un Commentaite , dans lequel ces Coûtumes sont expliquées suivant les Observations manuscrites et les sentimens des plus Sçavans
Magistrats , et des plus habiles Avocats
de la Province qui ont vécu depuis la réduction de ces Coutumes , jusqu'à present , &c. Par M.Math- Auroux des Pommiers , Prêtre , Docteur en Théologie
Conseiller- Clerc en la . Sénéchaussée de
Bourbonnois et Siége de Moulins. Chez le
Breton , fils , Quai des Augustins , 2. vol.
in fol.
>
VOYAGE
OCTOBRE. 17327 2197
VOYAGE DE CONSTANTINOPLE , pour
Rachapt des Captifs. Par le R.P.Jehannot,
Docteur en Théologie de la Faculté de
Paris , Ministre et Supérieur de la Maison
de Beauvoir sur Mer , de l'Ordre de la
Sainte Trinité. Chez de Lormel , ruë du
Foin , et René Josse , au coin du Marché
Neuf, 1732. in 12.
SERMONS CHOISIS , sur les Mysteres , la
Vérité de la Religion et sur differens fujets
de la Morale Chrétienne.Tom. 12. conte
nant l'Octave du S. Sacrement et autres
Sermons et Discours. 1732. in 12. Chez
Herissant , et Lottin , rues Neuve Notre
Dame et S. Jacques.
L'IMITATION DE JESUS-CHRIST , traduite et revûë par M. du Fresnoi , D. de S.
sur l'ancien Original François , d'où l'on
a tiré un Chapitre qui manque dans les
autres Editions. Avec l'Ordinaire de la
Sainte Messe ; in 8 °. 1731. Chez P. Gans
douin , Quai des Augustins.
OEUVRES de Maître François Rabelais ;
publiées sous le Titre de Faits et Dits du
Géant Gargantua , et de son fils Pantagruel ; avec la Pronostication Pantagrue
line , l'Epître du Limosin , la Crême PhiE iij loso
198 MERCURE DE FRANCE
losophale , deux Epîtres à deux Vieilles
de mœurs et d'humeurs differentes , et
des Pemarques Historiques et Critiques
de M. le Duchat, sur tout l'Ouvrage.
Nouvelle Edition , augmentée de quelques Remarques nouvelles. 1732. in 8°.
6 vol. Par la Compagnie des Libraires.
LETTRES du Cardinal d'Ossat , avec des
Notes Historiques et Politiques , de M.
Amelot de la Houssaye. Nouvelle Edition ,
corrigée sur le Manuscrit original , considérablement augmentée et enrichie de
nouvelles Notes de M. Amelot de la .
Houssaye , qui ne se trouvent point dans
la derniere Edition de Paris de 1697. §
vol. in 12. Par la Compagnie des Libraires.
huit Béatitudes , par Demandes et par
Réponses , tirées des SS. P P. et en particulier de S. Augustin ; avec des Prieres et
Aspirations sur chaque Instruction. AParis , rue S. Jacques , chez Witte et Henry !
in 12. avec fig. en Taille- douce.
COUTUMES GENERALES , LOCALES , du
Duché de Bourbonnois; avec un Commentaite , dans lequel ces Coûtumes sont expliquées suivant les Observations manuscrites et les sentimens des plus Sçavans
Magistrats , et des plus habiles Avocats
de la Province qui ont vécu depuis la réduction de ces Coutumes , jusqu'à present , &c. Par M.Math- Auroux des Pommiers , Prêtre , Docteur en Théologie
Conseiller- Clerc en la . Sénéchaussée de
Bourbonnois et Siége de Moulins. Chez le
Breton , fils , Quai des Augustins , 2. vol.
in fol.
>
VOYAGE
OCTOBRE. 17327 2197
VOYAGE DE CONSTANTINOPLE , pour
Rachapt des Captifs. Par le R.P.Jehannot,
Docteur en Théologie de la Faculté de
Paris , Ministre et Supérieur de la Maison
de Beauvoir sur Mer , de l'Ordre de la
Sainte Trinité. Chez de Lormel , ruë du
Foin , et René Josse , au coin du Marché
Neuf, 1732. in 12.
SERMONS CHOISIS , sur les Mysteres , la
Vérité de la Religion et sur differens fujets
de la Morale Chrétienne.Tom. 12. conte
nant l'Octave du S. Sacrement et autres
Sermons et Discours. 1732. in 12. Chez
Herissant , et Lottin , rues Neuve Notre
Dame et S. Jacques.
L'IMITATION DE JESUS-CHRIST , traduite et revûë par M. du Fresnoi , D. de S.
sur l'ancien Original François , d'où l'on
a tiré un Chapitre qui manque dans les
autres Editions. Avec l'Ordinaire de la
Sainte Messe ; in 8 °. 1731. Chez P. Gans
douin , Quai des Augustins.
OEUVRES de Maître François Rabelais ;
publiées sous le Titre de Faits et Dits du
Géant Gargantua , et de son fils Pantagruel ; avec la Pronostication Pantagrue
line , l'Epître du Limosin , la Crême PhiE iij loso
198 MERCURE DE FRANCE
losophale , deux Epîtres à deux Vieilles
de mœurs et d'humeurs differentes , et
des Pemarques Historiques et Critiques
de M. le Duchat, sur tout l'Ouvrage.
Nouvelle Edition , augmentée de quelques Remarques nouvelles. 1732. in 8°.
6 vol. Par la Compagnie des Libraires.
LETTRES du Cardinal d'Ossat , avec des
Notes Historiques et Politiques , de M.
Amelot de la Houssaye. Nouvelle Edition ,
corrigée sur le Manuscrit original , considérablement augmentée et enrichie de
nouvelles Notes de M. Amelot de la .
Houssaye , qui ne se trouvent point dans
la derniere Edition de Paris de 1697. §
vol. in 12. Par la Compagnie des Libraires.
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Résumé : « INSTRUCTIONS CHRÉTIENNES sur les huit Béatitudes, par Demandes et par [...] »
Le document répertorie diverses publications. Parmi elles, des ouvrages religieux comme les 'Instructions Chrétiennes sur les huit Béatitudes', basées sur les écrits des saints Pères et de saint Augustin, incluant des prières. Les 'Coutumes Générales et Locales du Duché de Bourbonnois' sont expliquées par M. Math-Auroux des Pommiers, prêtre et docteur en théologie. Le 'Voyage de Constantinople, pour Rachapt des Captifs' est rédigé par le R.P. Jehannot, docteur en théologie et supérieur de la Maison de Beauvoir sur Mer. Les 'Sermons Choisis' sur divers sujets de la morale chrétienne sont compilés par un auteur non nommé. L''Imitation de Jésus-Christ' est traduite et révisée par M. du Fresnoi, avec un chapitre supplémentaire. Les 'Œuvres de Maître François Rabelais' sont publiées sous le titre 'Faits et Dits du Géant Gargantua et de son fils Pantagruel', avec des remarques historiques et critiques de M. le Duchat. Enfin, les 'Lettres du Cardinal d'Ossat' sont accompagnées de notes historiques et politiques de M. Amelot de la Houssaye.
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57
p. 2253
DE TURQUIE ET DE PERSE.
Début :
On a appris que les Troupes du Roi de Perse avoient taillé en piéces un détachement [...]
Mots clefs :
Turquie, Perse, Constantinople, Chameaux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE TURQUIE ET DE PERSE.
NOUVELLES ETRANGERES
DE TURQUIE ET DE PERSE.
O
Na appris que les Troupes du Roi de
Perse avoient taillé en piéces un détache--
ment de 4000. Turcs , servant d'escorte à un
Convoy de coo Chameaux qui portoient des .
vivres et des munitions de Guerre à Bagdat.
On apprend par les nouvelles de Constantinople qu'on voyoit dans cette Capitale une grande
disposition à une nouvelle révolte , que le peuple
étoit dans une grande consternation par rapport aux mouvemens séditieux des Janissaires ; que le
Grand Seigneur pour sa propre sûreté faisoit as- ·
sembler aux portes de la Ville une Armée de 30.
mille hommes , dans laquelle il n'y auroit aucun -
Janissaire.
Les dernieres Lettres confirment les premiers
avis , et ajoutent que le G. S. et le G. Viz. pour
prévenir l'effet du mécontentement général des Janissaires et de leurs menaces , avoient fait ,
étrangler en une nuit plus de 60. de ces sédi tieux.
DE TURQUIE ET DE PERSE.
O
Na appris que les Troupes du Roi de
Perse avoient taillé en piéces un détache--
ment de 4000. Turcs , servant d'escorte à un
Convoy de coo Chameaux qui portoient des .
vivres et des munitions de Guerre à Bagdat.
On apprend par les nouvelles de Constantinople qu'on voyoit dans cette Capitale une grande
disposition à une nouvelle révolte , que le peuple
étoit dans une grande consternation par rapport aux mouvemens séditieux des Janissaires ; que le
Grand Seigneur pour sa propre sûreté faisoit as- ·
sembler aux portes de la Ville une Armée de 30.
mille hommes , dans laquelle il n'y auroit aucun -
Janissaire.
Les dernieres Lettres confirment les premiers
avis , et ajoutent que le G. S. et le G. Viz. pour
prévenir l'effet du mécontentement général des Janissaires et de leurs menaces , avoient fait ,
étrangler en une nuit plus de 60. de ces sédi tieux.
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Résumé : DE TURQUIE ET DE PERSE.
En Perse, les troupes du roi ont vaincu 4 000 Turcs escortant 600 chameaux vers Bagdad. À Constantinople, une révolte menace, menée par les Janissaires. Le Grand Seigneur a rassemblé 30 000 hommes, excluant les Janissaires, et a fait exécuter plus de 60 d'entre eux pour prévenir les troubles.
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58
p. 2898-2900
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople, au commencement du mois dernier.
Début :
Après avoir été fort long-tems dans l'incertitude sur les affiares de Perse et sur les bruits [...]
Mots clefs :
Thamas, Constantinople, Royaume, Guerre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople, au commencement du mois dernier.
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople , an commencement du mois
dernier.
Près avoir été fort long-tems dans l'incertis
Arudesurlesaffaires de Perseet sur les bruits
confus et incertains qui couroient ici d'une nouvelle révolution arrivée dans ce Royaume , voici
enfin les dernieres nouvelles que l'on en a euës
par la voye de Bagdad , et qui ont été envoyées
à la Porte par Achmet- Pacha , Gouverneur de la
même Ville.
Lors du Traité de Paix qui fût fait entre le
Grand- Seigneur , et Chah- Thamas , ce dernier
Prince en donna connoissance à Thamas-KoulyKan , son premier Ministre , qui dans ce tems- là
étoit à la tête de ses Armées contre les Aghuans,
On dit qu'alors Thamas- Kouly Kan , soit parce
qu'il étoit bien aise de se préparer un prétexte
pour parvenir au projet qu'il méditoit , feignit
d'approuver ce Traité ; mais dans la suite , s'étant rapproché d'Ispaham à la tête de son ArII. Vol. méc ,
DECEMBRE. 1732. 2899 LYON
DE
née , il blâma publiquement Chah- Thamas , en 1893
l'accusant d'avoir fait une paix honteuse , et dit
ouvertement qu'il ne consentiroit jamais qu'E
rivan Tiflis , le reste de la Georgie , et les autres Places qui avoient été cédées aux Turcs , demeurassent entre leurs mains ; ces plaintes de la
part du premier Ministre , produisirent d'abord
entre le Souverain et lui quelque division , mais
les ménagemens que Schah Thamas étoit obligé
de garder avec un Sujet puissant et maître des
Troupes , le firent consentir à une réconciliation,
sous prétexte de laquelle Thamas Kouly- Kan
fut appellé à la Cour. Il s'y rendit avec plusieurs Officiers de son Armée ; mais la premiere
démarche qu'il fit en y arrivant , soutenu par les
Partisans qu'il avoit en grand nombre auprès de
Schah Thamas , fut de se saisir de la personne
de ce Prince. On ne sçait pas bien encore s'il l'a fait mourir , ou s'il s'est contenté de le faire
enfermer dans une prison , mais on assûre qu'il
a fait reconnoître pour Roi un jeune Enfant , fils
de Schah Thamas , et qu'il s'est fait nommer
lui- même Regent du Royaume , et Generalissime des Armées de Perse ; on ajoûte que c'est un
homme extrêmement belliqueux , d'un caractere
fort violent , qui paroît être dans le dessein d'enlever aux Turcs géneralement toutes les Conquêtes qu'ils ont faites sur les Persans, et qu'Achmet Pacha a écrit à la Porte , que le G. S. n'avoit point d'autre parti à prendre que de se préparer à cette Guerre , et se mettre lui- mêmeàla
tête de ses Troupes pour aller combattre en personne un si puissant ennemi.
Ces nouvelles ont donné lieu à un Conseil ;
auquel ont assisté tous les Ministres et les princi
paux Officiers de la Porte , et dans lequel il a été
II. Vol.
H dé
290 MERCURE DE FRANCE
déliberé que le G. S. écriroit des Lettres à tous
les Gouverneurs des Provinces de Perse , pour les
exciter à prendre les armes pour vanger leur Souverain légitime contre les entreprises de ce nouvel usurpateur , avec promesse de la part de
S, H. de les soutenir de toutes les forces de son
Empire dans une Guerre si juste.
dernier.
Près avoir été fort long-tems dans l'incertis
Arudesurlesaffaires de Perseet sur les bruits
confus et incertains qui couroient ici d'une nouvelle révolution arrivée dans ce Royaume , voici
enfin les dernieres nouvelles que l'on en a euës
par la voye de Bagdad , et qui ont été envoyées
à la Porte par Achmet- Pacha , Gouverneur de la
même Ville.
Lors du Traité de Paix qui fût fait entre le
Grand- Seigneur , et Chah- Thamas , ce dernier
Prince en donna connoissance à Thamas-KoulyKan , son premier Ministre , qui dans ce tems- là
étoit à la tête de ses Armées contre les Aghuans,
On dit qu'alors Thamas- Kouly Kan , soit parce
qu'il étoit bien aise de se préparer un prétexte
pour parvenir au projet qu'il méditoit , feignit
d'approuver ce Traité ; mais dans la suite , s'étant rapproché d'Ispaham à la tête de son ArII. Vol. méc ,
DECEMBRE. 1732. 2899 LYON
DE
née , il blâma publiquement Chah- Thamas , en 1893
l'accusant d'avoir fait une paix honteuse , et dit
ouvertement qu'il ne consentiroit jamais qu'E
rivan Tiflis , le reste de la Georgie , et les autres Places qui avoient été cédées aux Turcs , demeurassent entre leurs mains ; ces plaintes de la
part du premier Ministre , produisirent d'abord
entre le Souverain et lui quelque division , mais
les ménagemens que Schah Thamas étoit obligé
de garder avec un Sujet puissant et maître des
Troupes , le firent consentir à une réconciliation,
sous prétexte de laquelle Thamas Kouly- Kan
fut appellé à la Cour. Il s'y rendit avec plusieurs Officiers de son Armée ; mais la premiere
démarche qu'il fit en y arrivant , soutenu par les
Partisans qu'il avoit en grand nombre auprès de
Schah Thamas , fut de se saisir de la personne
de ce Prince. On ne sçait pas bien encore s'il l'a fait mourir , ou s'il s'est contenté de le faire
enfermer dans une prison , mais on assûre qu'il
a fait reconnoître pour Roi un jeune Enfant , fils
de Schah Thamas , et qu'il s'est fait nommer
lui- même Regent du Royaume , et Generalissime des Armées de Perse ; on ajoûte que c'est un
homme extrêmement belliqueux , d'un caractere
fort violent , qui paroît être dans le dessein d'enlever aux Turcs géneralement toutes les Conquêtes qu'ils ont faites sur les Persans, et qu'Achmet Pacha a écrit à la Porte , que le G. S. n'avoit point d'autre parti à prendre que de se préparer à cette Guerre , et se mettre lui- mêmeàla
tête de ses Troupes pour aller combattre en personne un si puissant ennemi.
Ces nouvelles ont donné lieu à un Conseil ;
auquel ont assisté tous les Ministres et les princi
paux Officiers de la Porte , et dans lequel il a été
II. Vol.
H dé
290 MERCURE DE FRANCE
déliberé que le G. S. écriroit des Lettres à tous
les Gouverneurs des Provinces de Perse , pour les
exciter à prendre les armes pour vanger leur Souverain légitime contre les entreprises de ce nouvel usurpateur , avec promesse de la part de
S, H. de les soutenir de toutes les forces de son
Empire dans une Guerre si juste.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople, au commencement du mois dernier.
La lettre de Constantinople décrit une révolution en Perse. Après une période d'incertitude, Achmet Pacha, Gouverneur de Bagdad, a confirmé ces événements. Lors du traité de paix entre le Grand Seigneur et Chah Thamas, ce dernier en informa Thamas-Kouly-Kan, son premier ministre. Thamas-Kouly-Kan feignit d'approuver le traité mais le critiqua ensuite, accusant Chah Thamas d'avoir fait une paix honteuse. Une réconciliation temporaire eut lieu, mais Thamas-Kouly-Kan emprisonna Chah Thamas à son arrivée à la cour. Il est incertain si Chah Thamas a été tué ou emprisonné. Thamas-Kouly-Kan a fait reconnaître un jeune fils de Chah Thamas comme roi et s'est proclamé régent et généralissime des armées de Perse. Connu pour son caractère belliqueux, il semble vouloir reconquérir les territoires perdus face aux Turcs. Achmet Pacha a informé la Porte de la nécessité de se préparer à la guerre. Un conseil à la Porte a décidé d'écrire aux gouverneurs des provinces persanes pour les inciter à se révolter contre l'usurpateur, avec le soutien de l'Empire ottoman.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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59
p. 149-150
DE TURQUIE ET DE PERSE.
Début :
Les Lettres de Constantinople, portent que le Grand-Seigneur avoit fait remettre 3000. [...]
Mots clefs :
Constantinople, Pacha , Perse
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DE TURQUIE ET DE PERSE.
D_B T 1711041115 121‘ ne Pense, r
. l
Es Lettres de Constantinople, portent que le
LGrand- Seigneur avoiffait remettre gooo.
Bourses au Pacha de Bagdad qui commande son
Armée en Perse , et qu’on se préparait à faire
partir incessamment tous les secours dont ce Ge
neral peut avoir besoin pour sïopposcr aÏux de;
seins ambitieux de Thamas Kouli-Kart.
Par dïautres Lettres particulieres de la même
,Ville , on pprend que la Maladie contagieuse
rfétoit p; encore entrerement eesséc , malgré le _
froid dela saison ; qu’il y avoir eu âjanocoviclr,
petite Ville Maritime du Canal de la Met Noire,
_|m Incendie qui avoir çonsumé r5_o. Maisons ,
et que toute la Vlllt auroir été réduite en cendres,
si le Grand-vizir ne s’y fût pas rendu avec de;
OEroupes pour la secourir. ' i ‘
On apprend par les dernieres Lettres de Perse;
que Tiiamaslliouli-Kan, dontéPautoriË auâ
rnentoit tous es "ours avoir crit au an e
Gcorgie de lui fotirnir aiu plutôt soeo. homme‘.
de Cavalerie; que ce premier Ministre ne v<l>u_-,-,_
‘ ‘ ' ‘ .035
l
uo- MERCURE DE FRANCE
loir entendre parler d'aucun accommodations
avec la Porte , et qu’il avoir rejette’ avec beau
coup de hauteur des propositions que le Pacha
de Bagdarl lui avoir fait faire pour parvenir ai un
nouveau Traité de Paix entre les deux Puissances.
. l
Es Lettres de Constantinople, portent que le
LGrand- Seigneur avoiffait remettre gooo.
Bourses au Pacha de Bagdad qui commande son
Armée en Perse , et qu’on se préparait à faire
partir incessamment tous les secours dont ce Ge
neral peut avoir besoin pour sïopposcr aÏux de;
seins ambitieux de Thamas Kouli-Kart.
Par dïautres Lettres particulieres de la même
,Ville , on pprend que la Maladie contagieuse
rfétoit p; encore entrerement eesséc , malgré le _
froid dela saison ; qu’il y avoir eu âjanocoviclr,
petite Ville Maritime du Canal de la Met Noire,
_|m Incendie qui avoir çonsumé r5_o. Maisons ,
et que toute la Vlllt auroir été réduite en cendres,
si le Grand-vizir ne s’y fût pas rendu avec de;
OEroupes pour la secourir. ' i ‘
On apprend par les dernieres Lettres de Perse;
que Tiiamaslliouli-Kan, dontéPautoriË auâ
rnentoit tous es "ours avoir crit au an e
Gcorgie de lui fotirnir aiu plutôt soeo. homme‘.
de Cavalerie; que ce premier Ministre ne v<l>u_-,-,_
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uo- MERCURE DE FRANCE
loir entendre parler d'aucun accommodations
avec la Porte , et qu’il avoir rejette’ avec beau
coup de hauteur des propositions que le Pacha
de Bagdarl lui avoir fait faire pour parvenir ai un
nouveau Traité de Paix entre les deux Puissances.
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Résumé : DE TURQUIE ET DE PERSE.
Le Grand Seigneur a décidé d'accorder des bourses au Pacha de Bagdad pour renforcer sa résistance contre Thamas Kouli-Kan en Perse. Malgré le froid, une maladie contagieuse persiste. Un incendie a détruit 150 maisons à Janovic, une ville maritime du canal de la mer Noire, et le Grand-vizir a envoyé des troupes pour secourir la population. En Perse, Thamas Kouli-Kan a exigé des renforts de cavalerie de la Géorgie. Le premier ministre persan a refusé toute négociation avec la Porte et rejeté les propositions de paix du Pacha de Bagdad.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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60
p. 185-190
LETTRE écrite de Constantinople le 22. Novembre 1732. au sujet de la derniere contagion, et de la nouvelle Révolution de Perse.
Début :
Depuis le 12 de Juillet, Monsieur, que je ne vous ai donné des nouvelles [...]
Mots clefs :
Thamas Kouli-Kan, Roi de Perse, Ministre, Turcs, Constantinople, Révolution, Paix, Ispahan, Chah, Contagion, Peste
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Constantinople le 22. Novembre 1732. au sujet de la derniere contagion, et de la nouvelle Révolution de Perse.
LETTRE écrite de Constantinople le 22.
Novembre 1732. au sujet de la derniere
contagion , et de la nouvelle Révolution
de Perse.
D
Epuis le 12 de Juillet , Monsieur ,
que je ne vous ai donné des nouvelles
de ce pays- ci , il n'y a presque été
question que de la Peste . Voilà près de
cinq mois qu'on ne parle d'autre chose
que de ses ravages à Constantinople , et
quoique les Turcs ayent coûtume de se
mocquer de ceux qui la craignent , on a
I v remar
186 MERCURE DE FRANCE
remarqué cette année , au grand deshonneur
de la prédestination absoluë, qui est ,
comme vous sçavez , le Dogme favori des
Mahometans , qu'en general , ce ter ible
fleau leur a causé autant d'effroi qu'au :
autres ; mais comme par respect pour
leurs préjugez , la plupart n'en ont pas
pris plus de précautions qu'à l'ordinaire
on assûre qu'il a péri dans cette Ville et
dans ses environs 150 mille personnes .
Je ne sçai si ce calcul est bien fidele ; ce qu'il
y a de vraí , c'est que la contagion se répandant
comme un torrent , n'a pas plus
épargné les grands que les petits : elle
s'est introduite jusques dans le Serrail du
Grand Seigneur , dont elle a emporté
beaucoup d'Officiers , et sur- tout d'Eunu
ques noirs , entr'autres le Kasnadar ou
Trésorier de Sa Hautesse. L'Eski - Serai ,
c'est-à-dire , le vieux Serrail , où sont
renfermées aussi sévérement que dans un
Monastere , les Sultanes du G. S. après
sa mort ou sa déposition , n'en a pas été
éxempt non plus : trois ou quatre Sultanes
y sont mortes , du nombre desquelles.
a été la Sultane favorite du dernier Sultan
Achmet III . et Mere de la Sultane veuvedu
fameux G. V. Ibraim Pacha , qui fut
étranglé il y a deux ans. Celle- ci avoit
été pareillement attaquée du même mal ,
mais
JANVIER. 1733 137
mais elle a eu le bonheur d'en réchaper.
Enfin , pour ne vous point ennuyer par
un plus long détail sur cette triste matiere
, j'ajoûterai seulement que le G. Viz.
d'aujourd'hui a eu la douleur et la cons →
tance d'en voir mourir dans son propre
Palais un de ses freres , un de ses neveux ,
sa fille , celui à qui elle étoit promise en
mariage , et plus de deux cent de ses domestiques.
Dieu merci cette cruelle maladie
tire à sa fin , et la communication
commence à se rétablir par tout.
Je reviens , Monsieur , à ma Lettre du
2 Juillet ; je vous y marquois , si vous
Vous en souvenez , que le 4 du même
mois , la Porte avoit reçû des dépêches
d'Achmet , Pacha de Babilonne , qui envoyoit
au G. S. une Lettre de Chah -Tahmas
, pour Sa Hautesse , par laquelle ce
Prince rejettoit entierement l'infraction
du dernier Traité de Paix sur Tahmas-
-Couli- Kan , son Itimadil-Deulet, ou Grand
Visir , qui paroissoit vouloir usurper son
Trône , mais que les Turcs se défiant de
la bonne- foy du Roy de Perse , et apprehendant
que pour les mieux trompet ,
n'eut concerté avec son premier Ministre
la rebellion dont il l'accusoit , la Portene
sçavoit à quoi s'en tenir , ni à qui elledevoit
effectivement attribuer la rupture'
Lvj d'une
il
188 MERCURE DE FRANCE
1
d'une Paix recherchée avec tant d'ém
pressement par la Perse , et si fraîchement
concluë.
Ce Mystere impénétrable alors , s'est
enfin éclairci ; on a reçû depuis quelques
jours des nouvelles , dont quant à present
, je ne puis vous rapporter- qu'un
précis ; me réservant à vous les détailler ,
lorsqu'on m'aura remis une Piece qu'on
m'a promise. Ces nouvelles disent donc
en substance , que d'un côté Tahmas-
Couli Khan , après avoir déclaré en termes
formels , par ses Lettres , au Roy
son Maître , qu'il ne ratifieroit jamais ce
Traité honteux , que Sa Majesté venoit
de faire avec les Turcs. Il étoit parti du
Corassan , et avoit pris la route d'Ispahan
à la tête d'une Armée , composée
de Montagnads féroces et déterminez
comme lui ; que d'un autre côté Chah-
'Tahmas , persistant à vouloir que la derniere
Paix eut son entiere exécution
cette contrariété de sentimens avoit jetté
la division entre le Souverain , le premier
Ministre , et leurs Partisans respectifs
; que cependant le Prince voyant approcher
Tahmas- Couli- Kan , homme ambitieux
, capable de tout entreprendre , et
dont les Explois lui avoient faits un grand
nombre d'amis , jusques dans sa propre
Cour
JANVIER 1733. 189
Cour , avoit cru devoir ceder au temps ,
et se reconcilier avec lui ; que le perfide
Ministre cachant son noir dessein sous les
dehors affectez d'un zéle , d'une fidélité ,
et d'un attachement à toute épreuve ,
pour l'honneur de son Souverain, et pour
le bien du Royaume , avoit reçu avec
une soumission toute respectueuse en
apparence , les propositions qu'on étoit
alle lui faire , de la part de Chah - Tahmas.
Qu'en conséquence il s'étoit rendu
avec peu de suite à Ispahan , après avoir
cependant distribué ses Troupes dans différens
quartiers , aux environs de cette
Capitale, que par ce moyen il tenoit comme
bloquée,et qu'y étant arrivé, la premicre
chose qu'il avoit faite,avec le secours de
ses Partisans , dont le Roy étoit environ
né , même dans son Palais , avoit été de se
saisir de ce malheureux Prince qu'il avoit
fait mettre sur le champ dans un Carosse
fermé , et fait conduire avec une grosse
Escorte , vers le Corassan , où l'on ignoroit
encore ce qu'il étoit devenu ; qu'ensuite
il avoit forcé le Harem ou apparte
ment des Femmes , ce lieu si sacré , sur
tout en Perse ; qu'il y avoit d'abord violé
la soeur du Roy , qu'on dit êrre une fort
bille Princesse ; qu'ensuite il avoit tiré de
ce Harem un enfant au Berceau , fils de
ChahTo
MERCURE DE FRANCE
Chah-Tahmas ; qu'il l'avoit fait proclamer
Roy de Perse , publiant que son Pere
étoit incapable de regner ; qu'il s'étoit fait
déclarer Regent du Royaume , pendant
la minorité de ce nouveau Monarque .
Qu'en cette qualité , il s'étoit revêtu des
Habits Royaux , et des autres marques
de Souverain, et avoit paru en public avec
un faste extraordinaire ; qu'il faisoit journellement
massacrer ce qui restoit de
grands Seigneurs à la Cour , attachez à
Chah-Tahmas , ou qui pouvoient lui faire
ombrage ; qu'il enrichissoit de leurs dépouilles
les compagnons de ses désordres
et de sa fortune , et qu'il commandoit si
despotiquement dans Ispahan , que tout
y trembloit sous lui , d'une maniere qui
tenoit du prodige. Je suis , &c.
P. V. D.
Novembre 1732. au sujet de la derniere
contagion , et de la nouvelle Révolution
de Perse.
D
Epuis le 12 de Juillet , Monsieur ,
que je ne vous ai donné des nouvelles
de ce pays- ci , il n'y a presque été
question que de la Peste . Voilà près de
cinq mois qu'on ne parle d'autre chose
que de ses ravages à Constantinople , et
quoique les Turcs ayent coûtume de se
mocquer de ceux qui la craignent , on a
I v remar
186 MERCURE DE FRANCE
remarqué cette année , au grand deshonneur
de la prédestination absoluë, qui est ,
comme vous sçavez , le Dogme favori des
Mahometans , qu'en general , ce ter ible
fleau leur a causé autant d'effroi qu'au :
autres ; mais comme par respect pour
leurs préjugez , la plupart n'en ont pas
pris plus de précautions qu'à l'ordinaire
on assûre qu'il a péri dans cette Ville et
dans ses environs 150 mille personnes .
Je ne sçai si ce calcul est bien fidele ; ce qu'il
y a de vraí , c'est que la contagion se répandant
comme un torrent , n'a pas plus
épargné les grands que les petits : elle
s'est introduite jusques dans le Serrail du
Grand Seigneur , dont elle a emporté
beaucoup d'Officiers , et sur- tout d'Eunu
ques noirs , entr'autres le Kasnadar ou
Trésorier de Sa Hautesse. L'Eski - Serai ,
c'est-à-dire , le vieux Serrail , où sont
renfermées aussi sévérement que dans un
Monastere , les Sultanes du G. S. après
sa mort ou sa déposition , n'en a pas été
éxempt non plus : trois ou quatre Sultanes
y sont mortes , du nombre desquelles.
a été la Sultane favorite du dernier Sultan
Achmet III . et Mere de la Sultane veuvedu
fameux G. V. Ibraim Pacha , qui fut
étranglé il y a deux ans. Celle- ci avoit
été pareillement attaquée du même mal ,
mais
JANVIER. 1733 137
mais elle a eu le bonheur d'en réchaper.
Enfin , pour ne vous point ennuyer par
un plus long détail sur cette triste matiere
, j'ajoûterai seulement que le G. Viz.
d'aujourd'hui a eu la douleur et la cons →
tance d'en voir mourir dans son propre
Palais un de ses freres , un de ses neveux ,
sa fille , celui à qui elle étoit promise en
mariage , et plus de deux cent de ses domestiques.
Dieu merci cette cruelle maladie
tire à sa fin , et la communication
commence à se rétablir par tout.
Je reviens , Monsieur , à ma Lettre du
2 Juillet ; je vous y marquois , si vous
Vous en souvenez , que le 4 du même
mois , la Porte avoit reçû des dépêches
d'Achmet , Pacha de Babilonne , qui envoyoit
au G. S. une Lettre de Chah -Tahmas
, pour Sa Hautesse , par laquelle ce
Prince rejettoit entierement l'infraction
du dernier Traité de Paix sur Tahmas-
-Couli- Kan , son Itimadil-Deulet, ou Grand
Visir , qui paroissoit vouloir usurper son
Trône , mais que les Turcs se défiant de
la bonne- foy du Roy de Perse , et apprehendant
que pour les mieux trompet ,
n'eut concerté avec son premier Ministre
la rebellion dont il l'accusoit , la Portene
sçavoit à quoi s'en tenir , ni à qui elledevoit
effectivement attribuer la rupture'
Lvj d'une
il
188 MERCURE DE FRANCE
1
d'une Paix recherchée avec tant d'ém
pressement par la Perse , et si fraîchement
concluë.
Ce Mystere impénétrable alors , s'est
enfin éclairci ; on a reçû depuis quelques
jours des nouvelles , dont quant à present
, je ne puis vous rapporter- qu'un
précis ; me réservant à vous les détailler ,
lorsqu'on m'aura remis une Piece qu'on
m'a promise. Ces nouvelles disent donc
en substance , que d'un côté Tahmas-
Couli Khan , après avoir déclaré en termes
formels , par ses Lettres , au Roy
son Maître , qu'il ne ratifieroit jamais ce
Traité honteux , que Sa Majesté venoit
de faire avec les Turcs. Il étoit parti du
Corassan , et avoit pris la route d'Ispahan
à la tête d'une Armée , composée
de Montagnads féroces et déterminez
comme lui ; que d'un autre côté Chah-
'Tahmas , persistant à vouloir que la derniere
Paix eut son entiere exécution
cette contrariété de sentimens avoit jetté
la division entre le Souverain , le premier
Ministre , et leurs Partisans respectifs
; que cependant le Prince voyant approcher
Tahmas- Couli- Kan , homme ambitieux
, capable de tout entreprendre , et
dont les Explois lui avoient faits un grand
nombre d'amis , jusques dans sa propre
Cour
JANVIER 1733. 189
Cour , avoit cru devoir ceder au temps ,
et se reconcilier avec lui ; que le perfide
Ministre cachant son noir dessein sous les
dehors affectez d'un zéle , d'une fidélité ,
et d'un attachement à toute épreuve ,
pour l'honneur de son Souverain, et pour
le bien du Royaume , avoit reçu avec
une soumission toute respectueuse en
apparence , les propositions qu'on étoit
alle lui faire , de la part de Chah - Tahmas.
Qu'en conséquence il s'étoit rendu
avec peu de suite à Ispahan , après avoir
cependant distribué ses Troupes dans différens
quartiers , aux environs de cette
Capitale, que par ce moyen il tenoit comme
bloquée,et qu'y étant arrivé, la premicre
chose qu'il avoit faite,avec le secours de
ses Partisans , dont le Roy étoit environ
né , même dans son Palais , avoit été de se
saisir de ce malheureux Prince qu'il avoit
fait mettre sur le champ dans un Carosse
fermé , et fait conduire avec une grosse
Escorte , vers le Corassan , où l'on ignoroit
encore ce qu'il étoit devenu ; qu'ensuite
il avoit forcé le Harem ou apparte
ment des Femmes , ce lieu si sacré , sur
tout en Perse ; qu'il y avoit d'abord violé
la soeur du Roy , qu'on dit êrre une fort
bille Princesse ; qu'ensuite il avoit tiré de
ce Harem un enfant au Berceau , fils de
ChahTo
MERCURE DE FRANCE
Chah-Tahmas ; qu'il l'avoit fait proclamer
Roy de Perse , publiant que son Pere
étoit incapable de regner ; qu'il s'étoit fait
déclarer Regent du Royaume , pendant
la minorité de ce nouveau Monarque .
Qu'en cette qualité , il s'étoit revêtu des
Habits Royaux , et des autres marques
de Souverain, et avoit paru en public avec
un faste extraordinaire ; qu'il faisoit journellement
massacrer ce qui restoit de
grands Seigneurs à la Cour , attachez à
Chah-Tahmas , ou qui pouvoient lui faire
ombrage ; qu'il enrichissoit de leurs dépouilles
les compagnons de ses désordres
et de sa fortune , et qu'il commandoit si
despotiquement dans Ispahan , que tout
y trembloit sous lui , d'une maniere qui
tenoit du prodige. Je suis , &c.
P. V. D.
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Résumé : LETTRE écrite de Constantinople le 22. Novembre 1732. au sujet de la derniere contagion, et de la nouvelle Révolution de Perse.
La lettre du 22 novembre 1732 décrit les récents événements à Constantinople et en Perse. À Constantinople, la peste a sévi depuis le 12 juillet, causant la mort de 150 000 personnes, y compris des membres de la cour impériale et des eunuques. La maladie a également frappé le harem, entraînant le décès de plusieurs sultanes, dont la favorite du sultan Achmet III. Le grand vizir a également perdu des membres de sa famille et des domestiques. Actuellement, la peste semble en rémission. En Perse, une crise politique majeure est en cours. Le chah Tahmas a rejeté le dernier traité de paix avec les Turcs, accusant son grand vizir, Tahmas-Couli Khan, de vouloir usurper le trône. Tahmas-Couli Khan, à la tête d'une armée, a marché sur Ispahan, forçant le chah à se réconcilier avec lui. Profitant de cette situation, Tahmas-Couli Khan a ensuite emprisonné le chah, violé sa sœur et proclamé un enfant roi, se déclarant régent. Il a instauré un règne de terreur, éliminant les opposants et s'enrichissant de leurs biens.
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61
p. 366-375
LETTRE écrite de Constantinople le 10. Novembre 1732. au sujet de la derniere Révolution de Perse.
Début :
Après avoir été fort long-temps ici dans l'incertitude sur les affaires de Perse, on a reçu enfin [...]
Mots clefs :
Perse, Constantinople, Thamas Kouli-Kan, Roi, Prince, Armée, Ispahan, Chah, Troupes, Général, Officiers, Ministre, Cour, Couronne, Empire, Ambition, Révolution
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Constantinople le 10. Novembre 1732. au sujet de la derniere Révolution de Perse.
LETTRE écrite de Constantinople le
10. Novembre 1732. au sujet de la der
niere Révolution de Perse.
Près avoir été fort long - temps ici dans l'in-
Acertitude sur les affaires de Perse, on a reçû enfin
à la Porte des nouvelles d'Achmet - Pacha,Gouwerneur
de Bagdat ; et voici la traduction d'une
Lettre que ce Pacha a envoyée au G. S, et qui
lui avoit été écrite d'Ispaham le 26. Septembre
dernier par Abdilbaki Kan de Kirmanchah , qui
se trouvoit alors à la Cour de Perse
Les nouvelles que j'ai écrites à Votre Excellence,
très -Honoré et très- Magnifique Seigneur , vous
surprendront moins qu'un autre, parce que l'arrogance
et l'ambition sans bornes de Thamas Kouli-
Kan vous sont connues depuis long- temps ; voici
ce que j'ai à vous apprendre d'interessant qui
regarde la situation présente de cet Empire.
Thamas Kouli- Kan , après avoir subjugué la
Province de Yerak , s'étoit livré à des idées ambitieuses
, qui lui avoient fait concevoir le dessein
de s'emparer de la Couronne de Perse ; et
comme il lui falloit un prétexte pour s'approcher
d'Ispaham , il publia qu'il vouloit faire la
guerre à l'Empire Ottoman , et sans attendre
d'ordres formels de Schah - Thamas , il parut disposer
son Armée à se mettre en marche.
Le Roy de Perse , à qui la conduite de son
Premier Ministre étoit devenuë suspecte , comme
V ,
FEVRIER . 1733. 367
V. E. en a été déja informée , et qui avoit connoissance
de ses projets ambitieux , lui écrivit
de ne pas s'avancer avec l'Armée et d'attendre
ses ordres dans le Khorassan . Thamas Kouli- Kan,
qui avoit ses vûes , obéit et se contenta de supplier
le Roy par des Lettres très - soumises , en
apparence , de lui envoyer ceux de ses Officiers
ou Ministres en qui il auroit le plus de confiance
, pour qu'il pût conferer avec eux sur les interêts
de l'Etat, et leur communiquer ses desseins et
ses vûës.
>
Thamas- Schah ne se refusa pas à cette proposition
, il nomma plusieurs Députez qu'il choisit
parmi les Seigneurs les plus qualifiez de sa Cour,
et qui lui étoient le plus affidez. Ceux - cy se rendirent
à l'Armée de Kouli - Kan et ce General
pour les engager à ajoûter plus de foi à ses paroles,
destina pour le Lieu de la Conference , l'enceinte
du Tombeau de l'Iman * Riza , Personnage
tenu pour Saint et extrêmement réveré parmi
les Persans. Il commença la Conférence par donner
aux Députez des assurances de la sincerité de
de ses sentimens , qu'il accompagna des sermens
les plus terribles , leur disant qu'il n'avoit rien
tant coeur que d'en donner des preuves à son
Souverain ; que les soupçons du Roy , dont il
avoit lieu de s'appercevoir , le mettoient au désespoir
, qu'il les prioit de les effacer de l'esprit
de ce Prince , et enfin qu'il n'avoit point d'autre
vûë , en voulant conduire P'Armée dans la Province
d'Ispaham , que de la faire passer vers les
Il faut lire Ali - Ridha , le VIII. des 12 .
fameux Imans , ou Chefs de la Religion Musulmane
, descendans d'Ali et reconnus tels par les
Persans , &c.
Hij Fron368
MERCURE DE FRANCE
6
Frontieres de Turquie pour vanger l'Empire de
toutes les cruautez que les Turcs avoient exercées
dans les differentes Provinces de Perse .
Les Députez se laisserent tromper à ces apparences
de sincerité et de bonne foi , et Thamas
Kouli- Kan les renvoya en les chargeant d'une
Lettre pour le Roy , par laquelle il marquoit à
ce Prince qu'il ne se regardoit que comme le der
nier de ses Esclaves , qu'il n'avoit d'autre ambition
que celle de travailler pour son service et
pour sa gloire , que cependant lorsqu'il se seroit
approché d'Ispaham avcc l'Armée , il ne feroit
aucune démarche sans son ordre.
Le Roy ayant reçû cette Lettre , bien loin d'a
joûter foi aux protestations de son General , sortit
d'Ispaham avec ses femmes et tous ses Effets
les plus précieux , et alla camper à cinq journées
delà dans un lieu appellé Serchemé , dans l'ancienne
Bactriane , à dessein de ramasser autant
de Troupes qu'il lui seroit possible, et d'en for-
- mer un Corps d'Armée capable , en cas de besoin
, de résister aux forces de Kouli - Kan , résolu
à tout évenement , et dans le cas d'une
grande extrémité , de se réfugier dans les Etats
du G. S.
Cependant ce Prince , qui au péril de sa vie ,
vouloit maintenir le dernier Traité conclu avec
la Porte , écrivit à son Géneral les raisons les
plus fortes pour le détourner de faire la guerre
aux Turcs au préjudice de ce Traité , ajoutant
que s'il aimoit tant la gloire et la prosperité de
la Perse , il pouvoit signaler sa valeur en portant
la guerre dans le Pays des Tartares Usbecs , dans
celui des Aghuans et jusques dans les Indes , qui
lui offroient des Pays assez vastes pour contenter
son ambition ; qu'en un mot il lui deffendoit
trèss
FEVRIER. 1733. 369
très - expressément et sous peine de desobeïssance
, de faire avancer son armée dans la Province
d'Ispaham .
Sur des ordres si précis , Kouli- Kan prit le
parti de feindre , dit qu'il étoit disposé d'obéir ,
et il en écrivit en ces termes au Roy son Maître ,
ajoutant seulement qu'il étoit d'avis d'envoyer un
Ambassadeur à la Porte pour demander la restitution
des Provinces dont le G. S. avoit conservé
la possession par le dernier Traité , et qu'en attendant
le retour de l'Ambassadeur , il resteroit
campé avec l'Armée à Serahanende. Mais dans
le même- temps qu'il paroissoit si soumis , il
écrivit à tous les amis qu'il avoit à la Cour , οὐ
son crédit et son autorité lui en avoient fait
un grand nombre , de mettre tout en usage pour
effacer les soupçons du Roy , et de l'engager ,
force de prieres , à quitter son Camp et à rentrer
dans sa Capitale.
Les Partisans de Kouli- Kan s'employerent ave
tant de zele et parlerent si efficacement en faveur
de sa prétendue fidelité , qu'ils dissiperent en
partie les soupçons de Schah- Thamas , mettant
en oeuvre toute sorte d'artifice pour le rassurer,
ensorte que ce malheureux Prince se laissant enfin
entierement persuader , quitta son Camp et
rentra dans Ispaham .
A peine le General en eut reçu l'avis , qu'il
quitta Serahanende et sa premiere démarche fut
d'envoyer ses Officiers les plus affidez avec de petits
corps de Troupes occuper les postes les plus
importans des environs d'Ispaham ; desorte qu'en
peu de temps il se vit maître de tous les passages
par où le Roy auroit pû sortir de cette Ville
qu'il tint , pour ainsi dire , bloquée , prenant en
même-temps des précautions pour que l'on ob-
H iij
servât
?
370 MERCURE DE FRANCE
servât tous les mouvemens de ce Prince , er pour
qu'il ne lui fût pas possible de prendre la fuite.
Après avoir ainsi disposé les choses il écrivit
à ses amis qui étoient auprès de Schah- Thamas ,
d'engager ce Prince à l'inviter de se rendre auprès
de sa Personne. Le Roy s'apperçut trop
tard de la facilité avec laquelle il avoit ajoûté foi
aux paroles de son General ; mais se voyant environné
de ses Ennemis , sans secours et hors
d'état de rien entreprendre , il fut contraint de
suivre les mouvemens qu'on lui inspiroit et de
concourir lui- même à sa perte .
Il écrivit de sa propre main à Thamas Kouli-
Kan , pour l'inviter à venir recevoir des marques
de sa satisfaction et de sa bienveillance . Ce perfide
Ministre n'eut pas plutôt reçû la Lettre du
Roy qu'il s'avança vers Ispaham , suivi de son
Armée , Schah - Thamas en étant averti , donna
des ordres pour qu'on lui fit une Entrée magni- '
fique , il vouloit aller lui-même à sa rencontre
pour l'honorer davantage ; mais le General craignant
que dans une cérémonie qui alloit donner
lieu à un si grand concours de Peuple , on n'attentât
à sa vie , refusa , sous les apparences d'une
feinte modestie , les honneurs qu'on lui offroit ,
et fit dire au Roy qu'il se rendroit dans son
Quartier suivi de peu de monde.
Il arriva le cinq de la Lune de Rebiulakhir à
une Maison Royale qui n'est éloignée d'Ispaham
que d'une lieue. Il fit camper son Armée aux environs
, et après y avoir séjourné deux jours , il
fit demander au Roy une Audiance , en exigeant
dé ce Prince qu'il seroit seul dans la Sale où il le
recevroit , ce qui lui ayant été accordé , il entra
dans Ispaham avec quelques Troupes et les principaux
Officiers de son Armée. Il fut introduit devant
FEVRIER: 1733. 371
vant le Roy, et au lieu de se présenter dans l'état
respectueux qui convient à un Sujet , il s'assit en
la présence du Roy, sans en avoir obtenu la permission
; mais quoique par cette démarche il eûg
laissé appercevoir son orgueil , il ne laissa pas
d'employer encore la feinte.
Il s'approcha du Trône où Schah- Thamas étoit
assis , et dit à ce Prince qu'il étoit son premier
Ministre , et qu'en cette qualité le soin des affai
res de l'Etat et de la Famille Royale le regardoit,
que S. M. devoit être persuadée de sa fidelité par
les services importans qu'il lui avoit rendus , mais
que si elle avoit encore quelques soupçons sur sa
fidelité , il la supplioit par tout ce qu'il y a de
plus saint et de plus sacré , de concevoir des idées
plus favorables , et d'être persuadée qu'elle n'avoit
point d'Esclave qui exposât plus volontiers
sa vie que lui pour son service.
Le Roy réduit à la triste necessité de ménager
ce Traitre , répondit qu'il étoit persuadé de sa fidelité
, que c'étoit à lui , comme Premier Ministre
, de remédier aux désordres de l'Etat , et que
c'étoit dans ce dessein qu'il le faisoit dépositaire
de toute son autorité.
Après un assez long entretien avec le Roy,
Kouli-Kan sortit de la Sale d'Audiance environné
de tous les Courtisans ; et commençant de
faire usage de l'autorité qui venoit de lui être
confirmée , il fit arrêter deux des principaux Officiers
de la Couronne qui étoient les plus affectionnez
au Roy ; ils fuient par son ordre dépouillez
de tous leurs biens , releguez dans le Korassan
et leurs maisons abandonnées au pillage .
Ensuite , sous prétexte que Schah -Thamas vouloit
voir passer ses Troupes en revûë , il envoya
des ordres à son Aimée pour se rendre à Ispa
Hiiij
ham
372 MERCURE DE FRANCE
ham ; et feignant toujours qu'il agissoit par les
ordres du Roy , ce perfide Ministre réforma
tous les Officiers qu'il connoissoit attachez à leur
Souverain , et enrichit de leurs dépouilles ses
Creatures et les Soldats dont il avoit gagné l'affection
par ses liberalitez .
•
Les choses ainsi disposées , il proposa au Roy
de venir dans son Quartier , où il vouloit , disoitil
, le régaler splendidement , et cela pour faire
connoître au Peuple que S. M. lui avoit rendu
toute sa confiance , ce qui produiroit , disoit- il
un grand avantage pour son service. Schah- Thamas
se voyant en quelque maniere forcé de se
prêter aux insinuations de son Ministre , se rendit
le 9. de la Lune de Rebiuleuvel au Camp ,
éloigné , comme je l'ai dit , d'une lieüe de la
Ville , il y fut reçû avec tout l'honneur et tout
le respect qui lui étoit dû , Kouli - Kan l'engagea
d'y passer la nuit.
Mais le lendemain , ce Rebelle ayant fait assembler
les principaux Officiers de son Armée ,
de concert avec les Courtisans qu'il avoit engagés
dans son parti , il leur représenta le Roy comme
un Prince imbécile et absolument incapable
de gouverner l'Etat , il ne veut point , ajoûta - t'il ,
donner son consentement pour faire la guerre aux
Turcs ; c'est un Prince sans courage , il faut le
détrôner et établir en sa place Mirza - Abbas son
fils, il est,à la verité, encore au berceau , et n'a que
40. jours , mais je gouvernerai le Royaume en
qualité de Régent , toute la Terre s'appercevra
bien- tôt de ce changement.
Ce discours fut applaudi par les Partisans du
General, et les plus fideles serviteurs du Roy furent
contraints de dissimuler ; on se saisit en
même-temps de la personne du Prince , qui fut
d'abord
FEVRIER. 1733 373
d'abord mis en prison, et deux jours après il fut
conduit dans le Korassan , avec une escorte qui
eut ordre de passer par les Deserts et d'éviter
avec soin les lieux habitez , crainte que le Roy
ne fût enlevé par les Peuples. On n'a laissé à ce
malheureux Prince que deux Eunuques et quelques
Esclaves.
Le 17. du même mois , Kouli Kan se rendit à
Ispaham avec une pompe et une magnificence
Royale , et étant descendu au Palais des Rois , il
fir publier la déposition de Schah- Thamas et
l'avenement à la Couronne de Mirza - Abbas. En
même-temps ce Prince dans son berceau fut placé
sur un Trône où tous les Grands vinrent lui
rendre hommage ; cet Evenement fut annoncé
dans toutes les Mosquées , et l'on frappa de la
Monnoye au coin du nouveau Souverain.
Après cette cérémonie , le Rebelle Kouli - Kan ,
vêtu d'une Robbe Royale , portant une Couronne
sur sa tête , et placé sur le Trône , reçut
en qualité de Régent du Royaume , les compli- ,
mens de tous les Officiers de la Cour , il entra
ensuite dans la Harem de Thamas- Schah , y viola
la Soeur du Roy , fille de Schah- Hussein
Princesse d'une extrême beauté , et dont là vertu
étoit généralement révérée de toute la Perse , il
se saisit aussi du Trésor Royal et generalement
de tout ce qui appartenoit à la Couronne.
>
Je vous dirai , très- Honoré Seigneur , que cette
action est détestée de tous les Peuples , qui jusqu'alors
avoient consideré ce General comme le
Restaurateur de la Patrie , et le Ministre le plus
zelé que le Roy pût trouver. Cette opinion a dégeneré
en haine publique ; mais il ne se trouve
personne qui ait assez de résolution pour faire
paroître ses sentimens. La timidité des Peuples
Hv donne
174 MERCURE DE FRANCE
donne le temps à ce Rebelle de grossir son parti,
de se faire des créatures et d'écraser tous ceux
qui pourroient lui donner de l'ombrage . Les
cruautez , les rapines , les vexations sont inoüies ,
les Grands - Seigneurs passent tout d'un coup de
l'Etat le plus opulent à une extrême indigence ,
les Musulmans sont immolez dans les Mosquées ,
enfin je ne finirois point ma Lettre si j'entrois
dans le détail des abominations , des excès et de
tous les crimes qui se commettent ; toutes les richesses
qui sont abandonnées au pillage des Rebelles
, sont partagées entre les Troupes venues
du Korassan, dont Kouli - Kan se ménage l'affection
, et dont je vous envoye l'Etat détaillé avec
ma Lettre.
Ces Troupes lui sont si affectionnées qu'elles
répandroient tout leur sang pour son service , et
indépendemment de cette Arinée , qui est d'environ
25000 hommes , Cavalerie et Infanterie
il peut avec beaucoup de facilité mettre sur pied
encore 25000. hommes de Troupes d'élite .
Au reste , comme il est persuadé que Artille
rie Persanne n'est pas à comparer à celle des
Turcs , il a résolu d'attaquer le Turquestan par
trois differens endroits , afin d'occuper les Habitans
du Pays de façon qu'ils ne puissent donner
aucun secours au Séraskier , ne voulant risquer
aucun Evenement qui puisse dépendre de
Peffort de l'Artillerie Et si V. Ex , se renferme
avec ses Troupes dans Bagdat , Kouli- Kan se propose
de bloquer cette Place avec une partie de
son Armée , et d'employer l'autre partie à ravager
la campagne pour affamer la Place . L'orgueil
de ce Rebelle est si outré et son ambition si démesurée
, qu'il regarde tout le reste du Monde
Comine sa proye et sa conquête . Voilà , Seigneur,
la
FEVRIER. 1733- 375
la véritable situation des affaires de Perse. Au
reste , l'ordre et le commandement dépendent de
celui qui peut tout.
Ces nouvelles ayant été reçûës à la Porte , elles
ont donné lieu à un Conseil , auquel ont assisté
tous les Ministres et les Principaux de la Cour.
y a été déliberé que le G. S. écriroit des Let-
Il
tses à tous les Gouverneurs des Provinces de Perse
, pour les exciter à prendre les Armes , pour
vanger leur légitime Souverain , contre les entreprises
de ce nouvel Usurpateur ; avec promesse ,
de la part de Sa Hautesse , de les soûtenir de
toutes les forces de son Empire , dans une Guerre
si juste.
10. Novembre 1732. au sujet de la der
niere Révolution de Perse.
Près avoir été fort long - temps ici dans l'in-
Acertitude sur les affaires de Perse, on a reçû enfin
à la Porte des nouvelles d'Achmet - Pacha,Gouwerneur
de Bagdat ; et voici la traduction d'une
Lettre que ce Pacha a envoyée au G. S, et qui
lui avoit été écrite d'Ispaham le 26. Septembre
dernier par Abdilbaki Kan de Kirmanchah , qui
se trouvoit alors à la Cour de Perse
Les nouvelles que j'ai écrites à Votre Excellence,
très -Honoré et très- Magnifique Seigneur , vous
surprendront moins qu'un autre, parce que l'arrogance
et l'ambition sans bornes de Thamas Kouli-
Kan vous sont connues depuis long- temps ; voici
ce que j'ai à vous apprendre d'interessant qui
regarde la situation présente de cet Empire.
Thamas Kouli- Kan , après avoir subjugué la
Province de Yerak , s'étoit livré à des idées ambitieuses
, qui lui avoient fait concevoir le dessein
de s'emparer de la Couronne de Perse ; et
comme il lui falloit un prétexte pour s'approcher
d'Ispaham , il publia qu'il vouloit faire la
guerre à l'Empire Ottoman , et sans attendre
d'ordres formels de Schah - Thamas , il parut disposer
son Armée à se mettre en marche.
Le Roy de Perse , à qui la conduite de son
Premier Ministre étoit devenuë suspecte , comme
V ,
FEVRIER . 1733. 367
V. E. en a été déja informée , et qui avoit connoissance
de ses projets ambitieux , lui écrivit
de ne pas s'avancer avec l'Armée et d'attendre
ses ordres dans le Khorassan . Thamas Kouli- Kan,
qui avoit ses vûes , obéit et se contenta de supplier
le Roy par des Lettres très - soumises , en
apparence , de lui envoyer ceux de ses Officiers
ou Ministres en qui il auroit le plus de confiance
, pour qu'il pût conferer avec eux sur les interêts
de l'Etat, et leur communiquer ses desseins et
ses vûës.
>
Thamas- Schah ne se refusa pas à cette proposition
, il nomma plusieurs Députez qu'il choisit
parmi les Seigneurs les plus qualifiez de sa Cour,
et qui lui étoient le plus affidez. Ceux - cy se rendirent
à l'Armée de Kouli - Kan et ce General
pour les engager à ajoûter plus de foi à ses paroles,
destina pour le Lieu de la Conference , l'enceinte
du Tombeau de l'Iman * Riza , Personnage
tenu pour Saint et extrêmement réveré parmi
les Persans. Il commença la Conférence par donner
aux Députez des assurances de la sincerité de
de ses sentimens , qu'il accompagna des sermens
les plus terribles , leur disant qu'il n'avoit rien
tant coeur que d'en donner des preuves à son
Souverain ; que les soupçons du Roy , dont il
avoit lieu de s'appercevoir , le mettoient au désespoir
, qu'il les prioit de les effacer de l'esprit
de ce Prince , et enfin qu'il n'avoit point d'autre
vûë , en voulant conduire P'Armée dans la Province
d'Ispaham , que de la faire passer vers les
Il faut lire Ali - Ridha , le VIII. des 12 .
fameux Imans , ou Chefs de la Religion Musulmane
, descendans d'Ali et reconnus tels par les
Persans , &c.
Hij Fron368
MERCURE DE FRANCE
6
Frontieres de Turquie pour vanger l'Empire de
toutes les cruautez que les Turcs avoient exercées
dans les differentes Provinces de Perse .
Les Députez se laisserent tromper à ces apparences
de sincerité et de bonne foi , et Thamas
Kouli- Kan les renvoya en les chargeant d'une
Lettre pour le Roy , par laquelle il marquoit à
ce Prince qu'il ne se regardoit que comme le der
nier de ses Esclaves , qu'il n'avoit d'autre ambition
que celle de travailler pour son service et
pour sa gloire , que cependant lorsqu'il se seroit
approché d'Ispaham avcc l'Armée , il ne feroit
aucune démarche sans son ordre.
Le Roy ayant reçû cette Lettre , bien loin d'a
joûter foi aux protestations de son General , sortit
d'Ispaham avec ses femmes et tous ses Effets
les plus précieux , et alla camper à cinq journées
delà dans un lieu appellé Serchemé , dans l'ancienne
Bactriane , à dessein de ramasser autant
de Troupes qu'il lui seroit possible, et d'en for-
- mer un Corps d'Armée capable , en cas de besoin
, de résister aux forces de Kouli - Kan , résolu
à tout évenement , et dans le cas d'une
grande extrémité , de se réfugier dans les Etats
du G. S.
Cependant ce Prince , qui au péril de sa vie ,
vouloit maintenir le dernier Traité conclu avec
la Porte , écrivit à son Géneral les raisons les
plus fortes pour le détourner de faire la guerre
aux Turcs au préjudice de ce Traité , ajoutant
que s'il aimoit tant la gloire et la prosperité de
la Perse , il pouvoit signaler sa valeur en portant
la guerre dans le Pays des Tartares Usbecs , dans
celui des Aghuans et jusques dans les Indes , qui
lui offroient des Pays assez vastes pour contenter
son ambition ; qu'en un mot il lui deffendoit
trèss
FEVRIER. 1733. 369
très - expressément et sous peine de desobeïssance
, de faire avancer son armée dans la Province
d'Ispaham .
Sur des ordres si précis , Kouli- Kan prit le
parti de feindre , dit qu'il étoit disposé d'obéir ,
et il en écrivit en ces termes au Roy son Maître ,
ajoutant seulement qu'il étoit d'avis d'envoyer un
Ambassadeur à la Porte pour demander la restitution
des Provinces dont le G. S. avoit conservé
la possession par le dernier Traité , et qu'en attendant
le retour de l'Ambassadeur , il resteroit
campé avec l'Armée à Serahanende. Mais dans
le même- temps qu'il paroissoit si soumis , il
écrivit à tous les amis qu'il avoit à la Cour , οὐ
son crédit et son autorité lui en avoient fait
un grand nombre , de mettre tout en usage pour
effacer les soupçons du Roy , et de l'engager ,
force de prieres , à quitter son Camp et à rentrer
dans sa Capitale.
Les Partisans de Kouli- Kan s'employerent ave
tant de zele et parlerent si efficacement en faveur
de sa prétendue fidelité , qu'ils dissiperent en
partie les soupçons de Schah- Thamas , mettant
en oeuvre toute sorte d'artifice pour le rassurer,
ensorte que ce malheureux Prince se laissant enfin
entierement persuader , quitta son Camp et
rentra dans Ispaham .
A peine le General en eut reçu l'avis , qu'il
quitta Serahanende et sa premiere démarche fut
d'envoyer ses Officiers les plus affidez avec de petits
corps de Troupes occuper les postes les plus
importans des environs d'Ispaham ; desorte qu'en
peu de temps il se vit maître de tous les passages
par où le Roy auroit pû sortir de cette Ville
qu'il tint , pour ainsi dire , bloquée , prenant en
même-temps des précautions pour que l'on ob-
H iij
servât
?
370 MERCURE DE FRANCE
servât tous les mouvemens de ce Prince , er pour
qu'il ne lui fût pas possible de prendre la fuite.
Après avoir ainsi disposé les choses il écrivit
à ses amis qui étoient auprès de Schah- Thamas ,
d'engager ce Prince à l'inviter de se rendre auprès
de sa Personne. Le Roy s'apperçut trop
tard de la facilité avec laquelle il avoit ajoûté foi
aux paroles de son General ; mais se voyant environné
de ses Ennemis , sans secours et hors
d'état de rien entreprendre , il fut contraint de
suivre les mouvemens qu'on lui inspiroit et de
concourir lui- même à sa perte .
Il écrivit de sa propre main à Thamas Kouli-
Kan , pour l'inviter à venir recevoir des marques
de sa satisfaction et de sa bienveillance . Ce perfide
Ministre n'eut pas plutôt reçû la Lettre du
Roy qu'il s'avança vers Ispaham , suivi de son
Armée , Schah - Thamas en étant averti , donna
des ordres pour qu'on lui fit une Entrée magni- '
fique , il vouloit aller lui-même à sa rencontre
pour l'honorer davantage ; mais le General craignant
que dans une cérémonie qui alloit donner
lieu à un si grand concours de Peuple , on n'attentât
à sa vie , refusa , sous les apparences d'une
feinte modestie , les honneurs qu'on lui offroit ,
et fit dire au Roy qu'il se rendroit dans son
Quartier suivi de peu de monde.
Il arriva le cinq de la Lune de Rebiulakhir à
une Maison Royale qui n'est éloignée d'Ispaham
que d'une lieue. Il fit camper son Armée aux environs
, et après y avoir séjourné deux jours , il
fit demander au Roy une Audiance , en exigeant
dé ce Prince qu'il seroit seul dans la Sale où il le
recevroit , ce qui lui ayant été accordé , il entra
dans Ispaham avec quelques Troupes et les principaux
Officiers de son Armée. Il fut introduit devant
FEVRIER: 1733. 371
vant le Roy, et au lieu de se présenter dans l'état
respectueux qui convient à un Sujet , il s'assit en
la présence du Roy, sans en avoir obtenu la permission
; mais quoique par cette démarche il eûg
laissé appercevoir son orgueil , il ne laissa pas
d'employer encore la feinte.
Il s'approcha du Trône où Schah- Thamas étoit
assis , et dit à ce Prince qu'il étoit son premier
Ministre , et qu'en cette qualité le soin des affai
res de l'Etat et de la Famille Royale le regardoit,
que S. M. devoit être persuadée de sa fidelité par
les services importans qu'il lui avoit rendus , mais
que si elle avoit encore quelques soupçons sur sa
fidelité , il la supplioit par tout ce qu'il y a de
plus saint et de plus sacré , de concevoir des idées
plus favorables , et d'être persuadée qu'elle n'avoit
point d'Esclave qui exposât plus volontiers
sa vie que lui pour son service.
Le Roy réduit à la triste necessité de ménager
ce Traitre , répondit qu'il étoit persuadé de sa fidelité
, que c'étoit à lui , comme Premier Ministre
, de remédier aux désordres de l'Etat , et que
c'étoit dans ce dessein qu'il le faisoit dépositaire
de toute son autorité.
Après un assez long entretien avec le Roy,
Kouli-Kan sortit de la Sale d'Audiance environné
de tous les Courtisans ; et commençant de
faire usage de l'autorité qui venoit de lui être
confirmée , il fit arrêter deux des principaux Officiers
de la Couronne qui étoient les plus affectionnez
au Roy ; ils fuient par son ordre dépouillez
de tous leurs biens , releguez dans le Korassan
et leurs maisons abandonnées au pillage .
Ensuite , sous prétexte que Schah -Thamas vouloit
voir passer ses Troupes en revûë , il envoya
des ordres à son Aimée pour se rendre à Ispa
Hiiij
ham
372 MERCURE DE FRANCE
ham ; et feignant toujours qu'il agissoit par les
ordres du Roy , ce perfide Ministre réforma
tous les Officiers qu'il connoissoit attachez à leur
Souverain , et enrichit de leurs dépouilles ses
Creatures et les Soldats dont il avoit gagné l'affection
par ses liberalitez .
•
Les choses ainsi disposées , il proposa au Roy
de venir dans son Quartier , où il vouloit , disoitil
, le régaler splendidement , et cela pour faire
connoître au Peuple que S. M. lui avoit rendu
toute sa confiance , ce qui produiroit , disoit- il
un grand avantage pour son service. Schah- Thamas
se voyant en quelque maniere forcé de se
prêter aux insinuations de son Ministre , se rendit
le 9. de la Lune de Rebiuleuvel au Camp ,
éloigné , comme je l'ai dit , d'une lieüe de la
Ville , il y fut reçû avec tout l'honneur et tout
le respect qui lui étoit dû , Kouli - Kan l'engagea
d'y passer la nuit.
Mais le lendemain , ce Rebelle ayant fait assembler
les principaux Officiers de son Armée ,
de concert avec les Courtisans qu'il avoit engagés
dans son parti , il leur représenta le Roy comme
un Prince imbécile et absolument incapable
de gouverner l'Etat , il ne veut point , ajoûta - t'il ,
donner son consentement pour faire la guerre aux
Turcs ; c'est un Prince sans courage , il faut le
détrôner et établir en sa place Mirza - Abbas son
fils, il est,à la verité, encore au berceau , et n'a que
40. jours , mais je gouvernerai le Royaume en
qualité de Régent , toute la Terre s'appercevra
bien- tôt de ce changement.
Ce discours fut applaudi par les Partisans du
General, et les plus fideles serviteurs du Roy furent
contraints de dissimuler ; on se saisit en
même-temps de la personne du Prince , qui fut
d'abord
FEVRIER. 1733 373
d'abord mis en prison, et deux jours après il fut
conduit dans le Korassan , avec une escorte qui
eut ordre de passer par les Deserts et d'éviter
avec soin les lieux habitez , crainte que le Roy
ne fût enlevé par les Peuples. On n'a laissé à ce
malheureux Prince que deux Eunuques et quelques
Esclaves.
Le 17. du même mois , Kouli Kan se rendit à
Ispaham avec une pompe et une magnificence
Royale , et étant descendu au Palais des Rois , il
fir publier la déposition de Schah- Thamas et
l'avenement à la Couronne de Mirza - Abbas. En
même-temps ce Prince dans son berceau fut placé
sur un Trône où tous les Grands vinrent lui
rendre hommage ; cet Evenement fut annoncé
dans toutes les Mosquées , et l'on frappa de la
Monnoye au coin du nouveau Souverain.
Après cette cérémonie , le Rebelle Kouli - Kan ,
vêtu d'une Robbe Royale , portant une Couronne
sur sa tête , et placé sur le Trône , reçut
en qualité de Régent du Royaume , les compli- ,
mens de tous les Officiers de la Cour , il entra
ensuite dans la Harem de Thamas- Schah , y viola
la Soeur du Roy , fille de Schah- Hussein
Princesse d'une extrême beauté , et dont là vertu
étoit généralement révérée de toute la Perse , il
se saisit aussi du Trésor Royal et generalement
de tout ce qui appartenoit à la Couronne.
>
Je vous dirai , très- Honoré Seigneur , que cette
action est détestée de tous les Peuples , qui jusqu'alors
avoient consideré ce General comme le
Restaurateur de la Patrie , et le Ministre le plus
zelé que le Roy pût trouver. Cette opinion a dégeneré
en haine publique ; mais il ne se trouve
personne qui ait assez de résolution pour faire
paroître ses sentimens. La timidité des Peuples
Hv donne
174 MERCURE DE FRANCE
donne le temps à ce Rebelle de grossir son parti,
de se faire des créatures et d'écraser tous ceux
qui pourroient lui donner de l'ombrage . Les
cruautez , les rapines , les vexations sont inoüies ,
les Grands - Seigneurs passent tout d'un coup de
l'Etat le plus opulent à une extrême indigence ,
les Musulmans sont immolez dans les Mosquées ,
enfin je ne finirois point ma Lettre si j'entrois
dans le détail des abominations , des excès et de
tous les crimes qui se commettent ; toutes les richesses
qui sont abandonnées au pillage des Rebelles
, sont partagées entre les Troupes venues
du Korassan, dont Kouli - Kan se ménage l'affection
, et dont je vous envoye l'Etat détaillé avec
ma Lettre.
Ces Troupes lui sont si affectionnées qu'elles
répandroient tout leur sang pour son service , et
indépendemment de cette Arinée , qui est d'environ
25000 hommes , Cavalerie et Infanterie
il peut avec beaucoup de facilité mettre sur pied
encore 25000. hommes de Troupes d'élite .
Au reste , comme il est persuadé que Artille
rie Persanne n'est pas à comparer à celle des
Turcs , il a résolu d'attaquer le Turquestan par
trois differens endroits , afin d'occuper les Habitans
du Pays de façon qu'ils ne puissent donner
aucun secours au Séraskier , ne voulant risquer
aucun Evenement qui puisse dépendre de
Peffort de l'Artillerie Et si V. Ex , se renferme
avec ses Troupes dans Bagdat , Kouli- Kan se propose
de bloquer cette Place avec une partie de
son Armée , et d'employer l'autre partie à ravager
la campagne pour affamer la Place . L'orgueil
de ce Rebelle est si outré et son ambition si démesurée
, qu'il regarde tout le reste du Monde
Comine sa proye et sa conquête . Voilà , Seigneur,
la
FEVRIER. 1733- 375
la véritable situation des affaires de Perse. Au
reste , l'ordre et le commandement dépendent de
celui qui peut tout.
Ces nouvelles ayant été reçûës à la Porte , elles
ont donné lieu à un Conseil , auquel ont assisté
tous les Ministres et les Principaux de la Cour.
y a été déliberé que le G. S. écriroit des Let-
Il
tses à tous les Gouverneurs des Provinces de Perse
, pour les exciter à prendre les Armes , pour
vanger leur légitime Souverain , contre les entreprises
de ce nouvel Usurpateur ; avec promesse ,
de la part de Sa Hautesse , de les soûtenir de
toutes les forces de son Empire , dans une Guerre
si juste.
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Résumé : LETTRE écrite de Constantinople le 10. Novembre 1732. au sujet de la derniere Révolution de Perse.
En novembre 1732, des informations provenant de Perse atteignent Constantinople, révélant les ambitions de Thamas Kouli-Kan, gouverneur de Bagdad. Kouli-Kan, après avoir soumis la province de Yerak, aspire à la couronne perse et justifie son avancée vers Ispahan par une prétendue guerre contre l'Empire Ottoman. Le roi de Perse, Thamas Schah, méfiant, ordonne à son ministre de rester au Khorassan. Kouli-Kan, feignant la soumission, demande des députés pour discuter des intérêts de l'État. Le roi envoie des représentants, trompés par les assurances de Kouli-Kan, qui les renvoie avec une lettre affirmant sa loyauté. Cependant, le roi, toujours méfiant, quitte Ispahan pour rassembler des troupes. Kouli-Kan, tout en feignant l'obéissance, consolide son pouvoir et bloque Ispahan. Il invite ensuite le roi à une audience où il se comporte de manière insolente. Forcé par les circonstances, le roi confirme son autorité. Kouli-Kan arrête des officiers loyaux, réforme l'armée en enrichissant ses partisans, et organise une fête où il destitue le roi, le fait emprisonner et l'exile au Khorassan. Il proclame Mirza Abbas, fils du roi, comme nouveau souverain et se proclame régent. Kouli-Kan s'empare du trésor royal et viole la sœur du roi, une action détestée par le peuple perse. En 1733, Kouli-Kan, perçu comme un restaurateur de la Patrie et un ministre zélé, a suscité une haine publique sans que personne ose s'opposer à lui. Profitant de la timidité du peuple, il a renforcé son pouvoir, commis des atrocités et pillé les richesses du pays. Ses troupes, principalement venues du Khorassan, lui sont loyales et nombreuses, totalisant environ 50 000 hommes. Kouli-Kan prévoit d'attaquer le Turquestan par trois points différents pour empêcher les habitants de secourir le Séraskier, évitant ainsi de dépendre de l'artillerie. Il envisage également de bloquer Bagdad et de ravager la campagne pour affamer la ville. Son ambition démesurée le pousse à considérer le monde entier comme sa proie. À la suite de ces nouvelles, un conseil à la Porte ottomane a décidé d'écrire aux gouverneurs des provinces persanes pour les inciter à prendre les armes contre Kouli-Kan, promettant le soutien de l'Empire ottoman.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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62
p. 435-441
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople le 12 Novembre 1732. sur quelques sujets de Litterature.
Début :
J'ai été ravi d'apprendre par votre Lettre du 11 Août arrivée ici depuis [...]
Mots clefs :
Constantinople, Évêché de Troade, Patriarches d'Alexandrie, Patriarche, Ouvrage, Prélats, Voltaire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople le 12 Novembre 1732. sur quelques sujets de Litterature.
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople
le 12 Novembre 1732. sur
quelques sujets de Litterature.
JA
' Ai été ravi d'apprendre par votre
Lettre du 11 Août arrivée ici depuis
peu de jours , que parmi les Piéces qui
composoient mon Paquet du 6 Juin vous
en ayez trouvé qui vous ont fait plaisir.
J'ai toujours dessein de vous en procurer
quand je vous écris , et jose présumer
que j'y réussirois plus souvent , s'il m'étoit
permis de vous mander tout ce qui
vient à ma connoissance.
Je vous remercie des discours prononcez
à l'Académie Françoise contenus dans
votre derniere dépêche. Quand il me
vient de ces morceaux de main de Maître,
je les dévore , et je me rappelle avec un
vrai plaisir le goût de l'Eloquence et de
la belle diction , dont j'ai presque perdu
l'idée , à force d'entendre jargonner et
baragouiner ici le François , depuis plu
sieurs années que j'ai quitté Paris.
Quand j'aurai vû dans le Mercure que
vous m'envoyez , l'explication que vous
avez donnée de la Porte Othomane , terme
Bij usité
436 MERCURE DE FRANCE
usité pour signifier la Cour , ou le Palais
du Grand - Seigneur , je vous dirai si cette
explication s'accorde avec ce qu'on pense
ici sur le même sujet , que nul Voyageur
n'a encore traité .
Vous trouverez dans ce Paquet une
Liste , la moins imparfaite qu'on ait pû
dresser , des Patriarches d'Alexandrie, que
M. l'Ambassadeur a reçue du Caire depuis
15 jours , pour le grand Ouvrage
qui s'imprime au Louvre , et auquel vous
vous interessez . J'ai écrit fortement par
ses ordres à la personne qui a envoyé cette
Liste de redoubler ses soins pour remplir
les Lacunes , où les noms qu'on n'a
pû encore découvrir , et à une autre personne
qui est à Alexandrie , de mettre
tout en usage pour parvenir à nous dresser
des Catalogues complets , tant des
Patriarches de cette Ville , que de ceux
des Coptes , & c,
Vous avez très - bien fait de ne rien dire
de positif sur l'Etat présent de la Ville et
de l'Evêché de Troade à la fin de la Dissertation
, que vous avez publiée au sujet
d'une Médaille rare de cette ancienne Vil
le ; car le Mémoire que je vous ai envoyé
d'abord là-dessus n'est rien moins qu'éxact.
Vous en jugerez par cet article de
la Lettre que m'écrit le R, P. N, Jésuite
MARS. 1733. 437
suite , à qui je m'étois addressé pour
cela.
>>
و ر
» Je vous dirai , Monsieur , que les in
» formations que je vous donnai il y a
quelques mois sur l'Evêché de Troade
» me paroissent fausses aujourd'hui . Un
» habile Grec avec qui j'ai fait connois-
» sance depuis six semaines , m'en a don-
» né d'autres , auxquelles je crois devoir
» ajoûter plus de foi : c'est un Prêtre des
» plus sçavans de Constantinople ; il a
» surtout une grande connoissance des
» Evêchez , il étudie beaucoup , et espere ,
>> devenir lui - même Métropolitain au
» premier jour. Il m'a donc assuré , tant
» pour les informations qu'il a prises du
» Patriarche d'ici , que par l'autorité d'un
» Livre que le défunt Patriarche de Jeru-
» salem avoit fait imprimer quelques an-
» nées avant sa mort , que c'est le Métropolitain
de Cyzique , dont le Siege a
» été transferé au Bourg d'Arta- Queui
» et non pas celui de l'Evêque de Troade ,
» comme je vous l'avois marqué ; que ce
» Métropolitain de Cysique n'avoit pas
>> présentement un seul Suffragant sous
lui , et que depuis bien du tems il n'y
» avoit plus d'Evêché de Troade ni en
» état , ni de nom.
>>
Je pancherois fort à préférer cette der-
Bij niere
438 MERCURE DE FRANCE
niere Notice , que je viens de recevoir
de mon obligeant Jésuite , à celle qu'il
m'avoit ci -devant envoyée , et dont heureusement
vous n'avez fait aucun usage ;
ma raison est que le défunt Patriarche de
Jerusalem , dont il me parle , étoit un
Prélat fort éclairé , et qu'à moins de vouloir
douter de tout , on ne sçauroit penser
qu'il n'ait dit vrai sur ce qu'il a écrit
de l'Evêché de Troade.
Son Livre , au reste , petit in -fol. imprimé
à Terzovvitz en Valaquie , est en
Grec Vulgaire , mais si pur et si élégant ,
que plus des deux tiers sont du Grec Litteral.
J'ai déja fait quelques tentatives
pour l'acquerir , persuadé qu'il pourroit
être de quelque utilité à votre illustre
ami pour la perfection de l'Ouvrage dont
j'ai parlé ci - dessus : mais il est fort rare ;
l'Auteur , qui l'avoit fait imprimer à ses
frais , en ayant retiré tous les Exemplaires
pour en faire des présens à ses amis . Je ne
désespere pourtant pas d'avoir le plaisir
de vous l'envoyer.
J'ai écrit depuis peu et au R. P. Jesui
te et à d'autres personnes capables , au
sujet des noms des Patriarches de Constantinople
, et des Evêques , &c. que
vous me demandez , et je vous envoyerai
par la premiere occasion le fruit de leurs
ReMARS.
1733. 439
Recherches j'ai cependant une remarque
à vous faire à l'égard des Prélats , qui
sont actuellement en place , et dont vous
souhaitez avoir les noms , par rapport
à l'Ouvrage en question . C'est que les
Prélatures grecques étant sujettes à des
changemens fréquens et subits , par la
simonie , si fort en usage parmi les Moines
Schismatiques , qui vivent sous la
domination des Mahometans , vous pou
vez presque vous assurer qu'une bonne
partie des Prélats , dont je vous enverrai
les noms ne seront plus en place ,
non seulement quand vous recevrez ma
Lettre , où je vous aurai marqué ces
noms ; mais que peut être même ils au
ront déja eur plusieurs Successeurs , sans
que j'en aye pu avoir connoissance avant
que cette même Lettre parte d'ici . Inconvenient
dont nous avons un exemple récent
en la personne de Jéremie , qui vient
de remonter sur le Siége Patriarchal de
Constantinople , et qui est à la veille d'en
descendre pour la seconde fois , par les
intrigues de celui qu'il a supplanté . Inconvenient
, dis je , auquel on ne peut
guére remédier que par la Chronologie ,
et en fixant les Epoques de l'Installation ,
& c. ce qui encore n'est pas sans difficulté.
J'ai lû depuis quelques- tems la belle
B iiij
His440
MERCURE DE FRANCE
Histoire , ou plutôt , à mon avis , le bel
Abregé de l'Histoire de Charles XII . par
M. de Voltaire . Je ne sçai , et je vous
prie de m'en dire votre sentiment , si les
Gens de Lettres en sont aussi satisfaits que
les Gens de Cour , et ce qu'on appelle le
beau monde , à qui les charmes du stile
suffisent. Pour moi qui cherche à m'instiuire
à fond , et qui aime un peu le détail
, je trouve que M. de V. coule souvent
avec un peu trop de rapidité sur des
faits et sur des Evenemens , dont les particularitez
interessantes n'auroient pas , ce
me semble, moins bien figuré, que le reste
dans l'Histoire de son Heros . Je trouve
encore , et j'en suis même fâché , que ce
charmant Historien n'a pas toujours été
également bien servi en Mémoires. Il en
auroit pû trouver aisément de plus instructifs
et de plus fideles que beaucoup de
ceux qu'il a mis en oeuvre, surtout pour
ce qui regarde ce Pays-ci , dont il ne paroît
pas avoir des Notions fort éxactes .
Qui ne riroit , en effet , quand on lit
entr'autres choses que les femmes y conservent
plus long- tems leur fraicheur et
leur beauté qu'ailleurs ? tandis que ce fait
est entierement opposé à la verité , n'y
ayant peut être pas de Pays où , la fleur de
la Jeunesse s'efface plutôt chez le beau
Sexe
MARS. 1733
44
Sexe que dans celui- ci . Au surplus, M. de
V. n'a vraisemblablement erré sur cet article
que pour avoir adopté , peut - être
avec trop de confiance , les rapports de
certains esprits aussi superficiels que décisifs
, qui parlent de tout affirmativement
, quoique fort à la legere , et qui
n'ayant pas acquis à Constantinople , où
l'on se ressouvient fort bien d'eux , la réputation
de gens sur lesquels on peut fai
re fond , n'auroient pas dû trouver une
crédulité si facile dans un génie superieur
comme cet admirable Ecri
vain.
Au reste , Monsieur , je ne prétends
pas confondre ici avec les personnes dont
je viens de parler le Voyageur la Mo.
traye , qui , à peu de choses près , est fort
veridique dans ce qu'il rapporte du Rof
de Suede , et dont pour l'honneur de la
verité et de l'éxactitude , il auroit été au
contraire à souhaiter que notre Historien
eut préferé plus souvent les connoissances
à celles d'autres personnes , qui quoique
plus lumineuses , en apparence , n'
toient pas des guides si sûrs.
le 12 Novembre 1732. sur
quelques sujets de Litterature.
JA
' Ai été ravi d'apprendre par votre
Lettre du 11 Août arrivée ici depuis
peu de jours , que parmi les Piéces qui
composoient mon Paquet du 6 Juin vous
en ayez trouvé qui vous ont fait plaisir.
J'ai toujours dessein de vous en procurer
quand je vous écris , et jose présumer
que j'y réussirois plus souvent , s'il m'étoit
permis de vous mander tout ce qui
vient à ma connoissance.
Je vous remercie des discours prononcez
à l'Académie Françoise contenus dans
votre derniere dépêche. Quand il me
vient de ces morceaux de main de Maître,
je les dévore , et je me rappelle avec un
vrai plaisir le goût de l'Eloquence et de
la belle diction , dont j'ai presque perdu
l'idée , à force d'entendre jargonner et
baragouiner ici le François , depuis plu
sieurs années que j'ai quitté Paris.
Quand j'aurai vû dans le Mercure que
vous m'envoyez , l'explication que vous
avez donnée de la Porte Othomane , terme
Bij usité
436 MERCURE DE FRANCE
usité pour signifier la Cour , ou le Palais
du Grand - Seigneur , je vous dirai si cette
explication s'accorde avec ce qu'on pense
ici sur le même sujet , que nul Voyageur
n'a encore traité .
Vous trouverez dans ce Paquet une
Liste , la moins imparfaite qu'on ait pû
dresser , des Patriarches d'Alexandrie, que
M. l'Ambassadeur a reçue du Caire depuis
15 jours , pour le grand Ouvrage
qui s'imprime au Louvre , et auquel vous
vous interessez . J'ai écrit fortement par
ses ordres à la personne qui a envoyé cette
Liste de redoubler ses soins pour remplir
les Lacunes , où les noms qu'on n'a
pû encore découvrir , et à une autre personne
qui est à Alexandrie , de mettre
tout en usage pour parvenir à nous dresser
des Catalogues complets , tant des
Patriarches de cette Ville , que de ceux
des Coptes , & c,
Vous avez très - bien fait de ne rien dire
de positif sur l'Etat présent de la Ville et
de l'Evêché de Troade à la fin de la Dissertation
, que vous avez publiée au sujet
d'une Médaille rare de cette ancienne Vil
le ; car le Mémoire que je vous ai envoyé
d'abord là-dessus n'est rien moins qu'éxact.
Vous en jugerez par cet article de
la Lettre que m'écrit le R, P. N, Jésuite
MARS. 1733. 437
suite , à qui je m'étois addressé pour
cela.
>>
و ر
» Je vous dirai , Monsieur , que les in
» formations que je vous donnai il y a
quelques mois sur l'Evêché de Troade
» me paroissent fausses aujourd'hui . Un
» habile Grec avec qui j'ai fait connois-
» sance depuis six semaines , m'en a don-
» né d'autres , auxquelles je crois devoir
» ajoûter plus de foi : c'est un Prêtre des
» plus sçavans de Constantinople ; il a
» surtout une grande connoissance des
» Evêchez , il étudie beaucoup , et espere ,
>> devenir lui - même Métropolitain au
» premier jour. Il m'a donc assuré , tant
» pour les informations qu'il a prises du
» Patriarche d'ici , que par l'autorité d'un
» Livre que le défunt Patriarche de Jeru-
» salem avoit fait imprimer quelques an-
» nées avant sa mort , que c'est le Métropolitain
de Cyzique , dont le Siege a
» été transferé au Bourg d'Arta- Queui
» et non pas celui de l'Evêque de Troade ,
» comme je vous l'avois marqué ; que ce
» Métropolitain de Cysique n'avoit pas
>> présentement un seul Suffragant sous
lui , et que depuis bien du tems il n'y
» avoit plus d'Evêché de Troade ni en
» état , ni de nom.
>>
Je pancherois fort à préférer cette der-
Bij niere
438 MERCURE DE FRANCE
niere Notice , que je viens de recevoir
de mon obligeant Jésuite , à celle qu'il
m'avoit ci -devant envoyée , et dont heureusement
vous n'avez fait aucun usage ;
ma raison est que le défunt Patriarche de
Jerusalem , dont il me parle , étoit un
Prélat fort éclairé , et qu'à moins de vouloir
douter de tout , on ne sçauroit penser
qu'il n'ait dit vrai sur ce qu'il a écrit
de l'Evêché de Troade.
Son Livre , au reste , petit in -fol. imprimé
à Terzovvitz en Valaquie , est en
Grec Vulgaire , mais si pur et si élégant ,
que plus des deux tiers sont du Grec Litteral.
J'ai déja fait quelques tentatives
pour l'acquerir , persuadé qu'il pourroit
être de quelque utilité à votre illustre
ami pour la perfection de l'Ouvrage dont
j'ai parlé ci - dessus : mais il est fort rare ;
l'Auteur , qui l'avoit fait imprimer à ses
frais , en ayant retiré tous les Exemplaires
pour en faire des présens à ses amis . Je ne
désespere pourtant pas d'avoir le plaisir
de vous l'envoyer.
J'ai écrit depuis peu et au R. P. Jesui
te et à d'autres personnes capables , au
sujet des noms des Patriarches de Constantinople
, et des Evêques , &c. que
vous me demandez , et je vous envoyerai
par la premiere occasion le fruit de leurs
ReMARS.
1733. 439
Recherches j'ai cependant une remarque
à vous faire à l'égard des Prélats , qui
sont actuellement en place , et dont vous
souhaitez avoir les noms , par rapport
à l'Ouvrage en question . C'est que les
Prélatures grecques étant sujettes à des
changemens fréquens et subits , par la
simonie , si fort en usage parmi les Moines
Schismatiques , qui vivent sous la
domination des Mahometans , vous pou
vez presque vous assurer qu'une bonne
partie des Prélats , dont je vous enverrai
les noms ne seront plus en place ,
non seulement quand vous recevrez ma
Lettre , où je vous aurai marqué ces
noms ; mais que peut être même ils au
ront déja eur plusieurs Successeurs , sans
que j'en aye pu avoir connoissance avant
que cette même Lettre parte d'ici . Inconvenient
dont nous avons un exemple récent
en la personne de Jéremie , qui vient
de remonter sur le Siége Patriarchal de
Constantinople , et qui est à la veille d'en
descendre pour la seconde fois , par les
intrigues de celui qu'il a supplanté . Inconvenient
, dis je , auquel on ne peut
guére remédier que par la Chronologie ,
et en fixant les Epoques de l'Installation ,
& c. ce qui encore n'est pas sans difficulté.
J'ai lû depuis quelques- tems la belle
B iiij
His440
MERCURE DE FRANCE
Histoire , ou plutôt , à mon avis , le bel
Abregé de l'Histoire de Charles XII . par
M. de Voltaire . Je ne sçai , et je vous
prie de m'en dire votre sentiment , si les
Gens de Lettres en sont aussi satisfaits que
les Gens de Cour , et ce qu'on appelle le
beau monde , à qui les charmes du stile
suffisent. Pour moi qui cherche à m'instiuire
à fond , et qui aime un peu le détail
, je trouve que M. de V. coule souvent
avec un peu trop de rapidité sur des
faits et sur des Evenemens , dont les particularitez
interessantes n'auroient pas , ce
me semble, moins bien figuré, que le reste
dans l'Histoire de son Heros . Je trouve
encore , et j'en suis même fâché , que ce
charmant Historien n'a pas toujours été
également bien servi en Mémoires. Il en
auroit pû trouver aisément de plus instructifs
et de plus fideles que beaucoup de
ceux qu'il a mis en oeuvre, surtout pour
ce qui regarde ce Pays-ci , dont il ne paroît
pas avoir des Notions fort éxactes .
Qui ne riroit , en effet , quand on lit
entr'autres choses que les femmes y conservent
plus long- tems leur fraicheur et
leur beauté qu'ailleurs ? tandis que ce fait
est entierement opposé à la verité , n'y
ayant peut être pas de Pays où , la fleur de
la Jeunesse s'efface plutôt chez le beau
Sexe
MARS. 1733
44
Sexe que dans celui- ci . Au surplus, M. de
V. n'a vraisemblablement erré sur cet article
que pour avoir adopté , peut - être
avec trop de confiance , les rapports de
certains esprits aussi superficiels que décisifs
, qui parlent de tout affirmativement
, quoique fort à la legere , et qui
n'ayant pas acquis à Constantinople , où
l'on se ressouvient fort bien d'eux , la réputation
de gens sur lesquels on peut fai
re fond , n'auroient pas dû trouver une
crédulité si facile dans un génie superieur
comme cet admirable Ecri
vain.
Au reste , Monsieur , je ne prétends
pas confondre ici avec les personnes dont
je viens de parler le Voyageur la Mo.
traye , qui , à peu de choses près , est fort
veridique dans ce qu'il rapporte du Rof
de Suede , et dont pour l'honneur de la
verité et de l'éxactitude , il auroit été au
contraire à souhaiter que notre Historien
eut préferé plus souvent les connoissances
à celles d'autres personnes , qui quoique
plus lumineuses , en apparence , n'
toient pas des guides si sûrs.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople le 12 Novembre 1732. sur quelques sujets de Litterature.
L'auteur d'une lettre datée du 12 novembre 1732 à Constantinople exprime sa satisfaction de savoir que certaines pièces envoyées ont été appréciées par le destinataire. Il souhaite poursuivre l'envoi d'informations intéressantes. Il remercie également pour les discours prononcés à l'Académie Française, qu'il trouve particulièrement agréables après avoir entendu des versions déformées du français à Constantinople. L'auteur mentionne avoir reçu une liste des Patriarches d'Alexandrie par l'intermédiaire de l'ambassadeur au Caire, destinée à un grand ouvrage imprimé au Louvre. Il a demandé à des personnes de compléter cette liste et d'en dresser d'autres pour les Patriarches d'Alexandrie et des Coptes. Concernant l'état de la ville et de l'évêché de Troade, l'auteur déconseille de faire des déclarations définitives, car les informations précédentes se sont avérées inexactes. Un Jésuite a fourni de nouvelles informations, affirmant que le Métropolitain de Cyzique, dont le siège a été transféré à Arta-Queui, est le véritable titulaire, et non l'évêque de Troade. L'auteur préfère cette nouvelle notice et espère acquérir un livre rare du défunt Patriarche de Jérusalem pour compléter l'ouvrage en question. Il a également écrit à des personnes compétentes pour obtenir les noms des Patriarches de Constantinople et des évêques, notant que les changements fréquents parmi les prélats grecs rendent ces informations rapidement obsolètes. Enfin, l'auteur commente l'ouvrage de Voltaire sur Charles XII, trouvant que Voltaire passe trop rapidement sur certains détails intéressants et qu'il n'a pas toujours été bien informé, notamment sur les femmes de Constantinople. Il apprécie cependant le style de Voltaire et regrette qu'il n'ait pas utilisé des mémoires plus fiables.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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63
p. 580-583
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople le 24. Janvier 1733. sur les affaires de Perse, &c.
Début :
Les Nouvelles qu'on a reçûës ici de Perse, il y a 15. jours, portent que Thamas Kouli-Kan [...]
Mots clefs :
Thamas Kouli-Kan, Constantinople, Prince, Pacha , Siège, Troupes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople le 24. Janvier 1733. sur les affaires de Perse, &c.
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Cons
tantinople le 24. Janvier 1733. sur les
affaires de Perse , &c.
L
Es Nouvelles qu'on a reçûës ici de Perse , il y
a 15.jours, portent que Thamas Kouli-Kan
étant subitement arrivé à Kirmancha , avec une
Armée de 60. mille hommes , avoit fait couper,
la tête à Abdi- Baki , Pacha de cette Place , qu'il
sçavoit être attaché aux intérêts du G. S. et qui
n'avoit été conservé dans ce poste que par un
Article du dernier Traité de Paix , à la sollicitation
d'Achmet- Pacha de Babilonne , son Protecteur.
On ajoute que Kouli- Kan , après avoir mis
dans cette Place un Gouverneur sur la fidelité
Juquel il pût compter , s'étoit avancé à grandes
journées vers Bagdad , dont on appréhendoit
qu'il ne voulût former le Siege , et dont il ravageoir
MARS: 1733. 581
"
geoit toutes les Campagnes voisines , aussi bien
que celles de Mossoul et du Diarbekir , ou ik
avoit envoyé de gros Détachemens .
La Porte a parû d'autant plus sensible à ces
nouvelles , que peu de temps avant qu'elles arri
vassent , le G. V. avoit reçu des Lettres d'Achmes
Pacha , par lesquelles celui- cy lui marquoit que
și Thamas -Kouli -Kan approchoit de Bagdad”, il
seroit obligé de s'y renfermer , ne pouvant en
aucune façon tenir la Campagne devant l'Armée
Persane , et n'ayant précisément que ce qu'il lui
falloit de Troupes pour soutenir le Siege.
Ces nouvelles , qui ont causé ici beaucoup d'al
tération dans les esprits , ont donné lieu à la
tenue d'un grand Conseil , composé de tous les
Ministres de la Porte et de beaucoup des plus
distinguez parmi les Gens de Loy.
Il y fut résolu d'envoyer incessamment trois
ou quatre mille Bourses aux Pachas qui com
mandent differens Corps de Troupes Ottomanes
en Perse , et des ordres plus pressans pour faire
marcher du côté de Bagdad , non seulement
tout ce qui se trouvoit de Gens de guerre en Asie,
mais encore une bonne partie de ceux qui étoient
en Europe.
·
Le Khan des Tartares a pareillement reçû des
ordres pour aller penetrer avec le plus de dili
gence qu'il lui seroit possible jusques dans le
eceur de la Perse , à la tête de 30. mille hommes
tandis que le Khan qui commande les Lesguis
Peuple du Degestan , doit y entrer d'un autre
côté avec tout ce qu'il pourra rassembler de for
ces ; moyennant tout cela les Turcs esperent faire
une assez puissante diversion , pour obliger
Chaque Bourse est de s00. Piastres.
H iij Kouli
82 MERCURE DE FRANCE
Kouli -Kan d'abandonner le projet d'assieger
Bagdad , et de courir à la deffense des propres
Etats de Perse , dont il a la Régence.
2. Malgré tous ces mouvemens , qui semblent
n'annoncer que la continuacion d'une guerre opiniâtre
, bien des gens prétendent qu'il y a des
propositions de Paix sur le tapis , et que la Czarine
pourroit bien en être la Médiatrice. ~
On n'entend plus parler de l'infortuné Schah-
Thamas ; on présume seulement qu'il est toujours
en vie et renfermé dans quelque Forteresse
au fond du Corassan. On ne dit rien non plus du
jeune Priuce son fils , que Thamas Kouli -Kan
avoit fait proclamer Roy de Perse.
Le Sultan déposé Achmet III . a perdu depuis
quelques mois quatre de ses Enfans ; deux Princes
et deux princesses ; la plus jeune de ces der
nieres étoit encore fille et mourut cet Eté au
vieux Serrail , les uns disent de la petite verole ,
les autres de la peste . L'autre Sultane étoit femme
d'Ali-Pacha , cy devant Nichandgi , sous le
Regne précedent . On l'appelloit la Sçavante et la
Sainte ; elle étoit si prévenue en faveur de sa Rcligion
, qu'elle avoit coûtume de dire qu'une
bonne Musulmane ne pouvoit parler avec des
Chrétiens ni même les regarder , sans commertre
un grand peché. Elle est morte de langueur
après une longue maladie.
Des deux Princes qui sont aussi morts, mais
dont le Public ignore la cause , l'un étoit Sultan
Suleiman âgé d'environ 25 ans , et l'Aîné de
tous les Enfans mâles d'Achmet. Il fut inhumé
le 12. Décembre dernier à la Mosquée dite la
Validé , ou de la Reine Mere, avec toute la pompe
due à sa naissance. L'autre Prince , qui étoit
le cinquième , et avoit 12, ou 13. ans , mourut
le
MARS. 1733- 583
le 27. du même mois et fut porté le lendemain
à la même Mosquée.
Du 16. Janvier.
P. V. D.
Il vient d'arriver deux Courriers de Perse ;.
qui ont apporté pour nouvelle que le Pacha de
Ghendgé avoit défait un Corps de trois mille
Persans , et que Thamas - Kouli -Kan , s'étoit retiré
des environs de Bagdad.
tantinople le 24. Janvier 1733. sur les
affaires de Perse , &c.
L
Es Nouvelles qu'on a reçûës ici de Perse , il y
a 15.jours, portent que Thamas Kouli-Kan
étant subitement arrivé à Kirmancha , avec une
Armée de 60. mille hommes , avoit fait couper,
la tête à Abdi- Baki , Pacha de cette Place , qu'il
sçavoit être attaché aux intérêts du G. S. et qui
n'avoit été conservé dans ce poste que par un
Article du dernier Traité de Paix , à la sollicitation
d'Achmet- Pacha de Babilonne , son Protecteur.
On ajoute que Kouli- Kan , après avoir mis
dans cette Place un Gouverneur sur la fidelité
Juquel il pût compter , s'étoit avancé à grandes
journées vers Bagdad , dont on appréhendoit
qu'il ne voulût former le Siege , et dont il ravageoir
MARS: 1733. 581
"
geoit toutes les Campagnes voisines , aussi bien
que celles de Mossoul et du Diarbekir , ou ik
avoit envoyé de gros Détachemens .
La Porte a parû d'autant plus sensible à ces
nouvelles , que peu de temps avant qu'elles arri
vassent , le G. V. avoit reçu des Lettres d'Achmes
Pacha , par lesquelles celui- cy lui marquoit que
și Thamas -Kouli -Kan approchoit de Bagdad”, il
seroit obligé de s'y renfermer , ne pouvant en
aucune façon tenir la Campagne devant l'Armée
Persane , et n'ayant précisément que ce qu'il lui
falloit de Troupes pour soutenir le Siege.
Ces nouvelles , qui ont causé ici beaucoup d'al
tération dans les esprits , ont donné lieu à la
tenue d'un grand Conseil , composé de tous les
Ministres de la Porte et de beaucoup des plus
distinguez parmi les Gens de Loy.
Il y fut résolu d'envoyer incessamment trois
ou quatre mille Bourses aux Pachas qui com
mandent differens Corps de Troupes Ottomanes
en Perse , et des ordres plus pressans pour faire
marcher du côté de Bagdad , non seulement
tout ce qui se trouvoit de Gens de guerre en Asie,
mais encore une bonne partie de ceux qui étoient
en Europe.
·
Le Khan des Tartares a pareillement reçû des
ordres pour aller penetrer avec le plus de dili
gence qu'il lui seroit possible jusques dans le
eceur de la Perse , à la tête de 30. mille hommes
tandis que le Khan qui commande les Lesguis
Peuple du Degestan , doit y entrer d'un autre
côté avec tout ce qu'il pourra rassembler de for
ces ; moyennant tout cela les Turcs esperent faire
une assez puissante diversion , pour obliger
Chaque Bourse est de s00. Piastres.
H iij Kouli
82 MERCURE DE FRANCE
Kouli -Kan d'abandonner le projet d'assieger
Bagdad , et de courir à la deffense des propres
Etats de Perse , dont il a la Régence.
2. Malgré tous ces mouvemens , qui semblent
n'annoncer que la continuacion d'une guerre opiniâtre
, bien des gens prétendent qu'il y a des
propositions de Paix sur le tapis , et que la Czarine
pourroit bien en être la Médiatrice. ~
On n'entend plus parler de l'infortuné Schah-
Thamas ; on présume seulement qu'il est toujours
en vie et renfermé dans quelque Forteresse
au fond du Corassan. On ne dit rien non plus du
jeune Priuce son fils , que Thamas Kouli -Kan
avoit fait proclamer Roy de Perse.
Le Sultan déposé Achmet III . a perdu depuis
quelques mois quatre de ses Enfans ; deux Princes
et deux princesses ; la plus jeune de ces der
nieres étoit encore fille et mourut cet Eté au
vieux Serrail , les uns disent de la petite verole ,
les autres de la peste . L'autre Sultane étoit femme
d'Ali-Pacha , cy devant Nichandgi , sous le
Regne précedent . On l'appelloit la Sçavante et la
Sainte ; elle étoit si prévenue en faveur de sa Rcligion
, qu'elle avoit coûtume de dire qu'une
bonne Musulmane ne pouvoit parler avec des
Chrétiens ni même les regarder , sans commertre
un grand peché. Elle est morte de langueur
après une longue maladie.
Des deux Princes qui sont aussi morts, mais
dont le Public ignore la cause , l'un étoit Sultan
Suleiman âgé d'environ 25 ans , et l'Aîné de
tous les Enfans mâles d'Achmet. Il fut inhumé
le 12. Décembre dernier à la Mosquée dite la
Validé , ou de la Reine Mere, avec toute la pompe
due à sa naissance. L'autre Prince , qui étoit
le cinquième , et avoit 12, ou 13. ans , mourut
le
MARS. 1733- 583
le 27. du même mois et fut porté le lendemain
à la même Mosquée.
Du 16. Janvier.
P. V. D.
Il vient d'arriver deux Courriers de Perse ;.
qui ont apporté pour nouvelle que le Pacha de
Ghendgé avoit défait un Corps de trois mille
Persans , et que Thamas - Kouli -Kan , s'étoit retiré
des environs de Bagdad.
Fermer
Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Constantinople le 24. Janvier 1733. sur les affaires de Perse, &c.
En janvier 1733, Thamas Kouli-Kan, à la tête d'une armée de 60 000 hommes, a exécuté Abdi-Baki, Pacha de Kirmancha, et nommé un nouveau gouverneur. Il a ensuite avancé vers Bagdad, ravageant les campagnes voisines et envoyant des détachements à Mossoul et Diarbekir. La Porte ottomane, informée par Achmet-Pacha de Babilonne, a réagi en convoquant un grand conseil. Il a été décidé d'envoyer des subsides aux Pachas commandants des troupes ottomanes en Perse et d'ordonner le déplacement de troupes vers Bagdad, tant en Asie qu'en Europe. Les Tartares et les Lesguis devaient également pénétrer en Perse pour créer une diversion et obliger Kouli-Kan à abandonner son projet de siège de Bagdad. Malgré ces préparatifs militaires, des rumeurs évoquaient des propositions de paix, avec la Czarine comme possible médiatrice. L'ancien Shah Thamas était présumé toujours en vie, mais son fils, proclamé roi de Perse par Kouli-Kan, n'était plus mentionné. Par ailleurs, le sultan déposé Achmet III avait perdu quatre de ses enfants au cours des derniers mois, dont deux princes et deux princesses. Les causes de leurs décès variaient, allant de la variole à la peste.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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64
p. 1013-1017
A Constantinople, le 30. Mars 1733.
Début :
Les nouvelles de Perse sont toujours fort incertaines, et souvent celles qui se débitent le [...]
Mots clefs :
Constantinople, Pacha , Khan, Topal Osman Pacha, Perse, Ville, Armée, Thamas Kouli-Kan
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A Constantinople, le 30. Mars 1733.
A Constantinople , le 30. Mars 1733 .
LE
Es nouvelles de Perse sont toujours fort in
certaines , et souvent celles qui se débitent le
matią sont contredites par d'autres qu'on répand'
le
TO14 MERCURE DE FRANCE
le soir. On assure depuis quelques jours , que
Mossoul n'a point été été saccagé par Thamas-
Kouli Kan , comme on l'avoit cy- devant publié.
On dit que sur les premiers bruits qu'il s'en approchoit
, les habitans les plus accommodez de
cette grande Ville avoient d'abord voulu s'enfuir
avec leurs meilleurs effets ; mais que d'un côté ,
Pincertitude de sçavoir où se mettre en sureté
dans un Pays ouvert et inondé de Soldats , et
de l'autre , les représentations , les cris et même
les menaces du peuple , au desespoir de se voir
abandonné, leur avoit fait changer d'avis ; qu'étant
dailleurs informez que le General Persan
n'avoit point de gros Canon à sa suite , ils avoient
tous pris le genereux parti , tant les riches , que
les pauvres , de se renfermer dans leur Ville et
d'en rétablir à la hâte la Forteresse et l'enceinte
presqu'entierement ruinées , à quoi tout le monde
, de tout âge , de tout sexe et de toute condition
avoit travaillé avec tant de zele et de diligence
, que Thamas- Kouli - Kan venant à paroître,
il avoit jugé cette Ville hors d'insulte et avoit
passé outre.
*
>
On ajoute que continuant ses courses rapides ,
dans lesquelles il ravage tout le pays par où il
passe, il étoit tombé tout à coup sur Kouch-Kalessi
, Fauxbourg de Bagdad , séparé de la Ville
par le Tigre , qu'il y avoit fait beaucoup de butin
et y avoit même trouvé un Canon d'une
grosseur prodigieuse , qu'Achmet - Pacha , Gouverneur
de Bagdad , n'avoit pas eu le temps de
retirer ; que comme cependant Thamas - Kouli-
Kouch- Kalessi , signifie en Arabe la Tour des
Oiseaux. C'étoit une Tour qu'il y avoit autrefois ,
dans ce Faubourg, d'où il a pris son nom.
Kan
MAY. 1733. 1015
Kan n'avoit d'autre Artillerie avec lui que quel-..
ques petites Pieces de campagne , portées sur des
chameaux, on présamoit que quant à présent il se
borneroit à tourner en blocus le siege qu'il avoit
paru vouloir former de cette Place , et qu'au surplus
quelque parti qu'il prît , Achmet- Pacha l'avoit
si bien pourvûë de tout , qu'elle étoit en état
de se soutenir long- temps.
Les Turcs ont eu quelques avantages depuis peu
du côté de Tauris , où ils se sont emparez de
deux petites Villes , à la deffense desquelles il a
péri quelques Persans ; et le G. S. résolu de faire
tous ses efforts cette année pour terminer par
quelque Evenement décisif , une guerre si longue
et si ruineuse , a ordonné à tous les Pachas qui
sont sur les Frontieres de Perse , d'y marcher en
diligence avec le plus de Troupes qu'ils pourront
rassembler. De pareils ordres ont été donnez
le 26. de ce mois à 12000 hommes qui partent
d'ici journellement par mer et par terre ; sçavoir,
8000. Jannissaires , commandez par le
Koul-Kiayasei , ou Lieutenans General de cette
Milice , et le reste Topgis et Dgebedgis , aussi
commandez par les Kiayas ou Lieutenant Generaux
de leurs Corps . Mais ce qui releve plus que
toute autre chose le courage des Turcs , c'est que
Topal Osman , Pacha , a été fait Seraskier et
avec une grande autorité , et que les gens de guerre
qui ont une entiere confiance en sa capacité et
en sa bravoure , marchent en Perse avec autant
de bonne volonté qu'ils montroient cy- devant de
* Il est remarquer
que le Jannissaire
Aga , le
Topgi
- Bachi
et le Dgebedgi
-Bachi
, qui sont les
Chefs
de ces trois Corps
, ne marchent
point à l'Armée,
que lorsque
le G.V. la commande
en personne
,
1016 MERCURE DE FRANCE
*
Y
tépugnance à y aller. Ainsi l'Armée Otomane devant
être de plus de 200 mille hommes bien
payez , au moyen des grandes sommes que Sa
Hautesse a fait tenir à Topal - Osman , on se flatte
que la Campagne qui va s'ouvrir sera féconde
en heureux succès . On compte même que cet
actif Séraskier doit avoir déja penetré dans le
Diarbekir.
Le Grand-Seigneur avoit pareillement ordonné
au Kan des Tartares de Crimée , d'envoyer
20 mille hommes de ses Troupes en Perse ; mais
comme, pour abreger considerablement leur rou
te , on étoit convenu de les faire passer sur les
Terres de la Czarine , M. Nepluef, Résident de
cette Princesse à Constantinople , en ayant eu
avis , s'y est formellement opposé , et a signifié
au Reis - Effendi , au nom de sa Souveraine , qu'el
le ne pourroit consentir à ce passage , et que si
l'on persistoit à le vouloir tenter , elle regarderoit
cette entreprise comme une déclaration de
guerre. On ne sçait pas encore la détermination
de la Porte sur ce refus , ni quel chemin prendront
les Tartares.
Outre le Commandement de l'Armée que le
G. S. a donné à Topal - Osman , avec un pouvoir
si absolu , qu'il est le Maitre de tous les Emplois
Militaires , et de distribuer des récompenses er
des pensions à qui il jugera à propos , S. H. l'a
fait Beylerbey d'Anatolie , et en même temps Pa
cha de Cutaya, ces deux dernieres Dignitez étant
toujours unies ; et pour lui marquer encore mieux
sa bienveillance , elle a fait aussi de nouveau le
gendre de ce General , Beylerbey de Romelie et
Pacha de Nisse , Dignitez qui vont pareillement
ensemble , et dont ce dernier avoit déja été revêtu
ey-devant sous le Visiriat de son beaupere.
M.
MAY. 1733. 1017
M. le Comte Sierakousky , envoyé Extraordi
naire de Pologne à la Cour Ottomane ,pour complimenter
le G. S. sur son avenement au Trône ,
et qui arriva à Constantinople le 6.de Novembre
dernier , en est parti le 14. du present mois de
Mars , sur la nouvelle qu'il y reçut le 28. Février .
de la mort du Roy Auguste. M. le Comte Staninsky
, neveu de ce Ministre , est resté ici en
qualité d'Agent , avec l'agrément de la Porte ,
qui lui a donné une Maison à Pera , et un Train
pour sa subsistance journaliere.
"
Djanum- Codja , auquel peu après sa derniere
déposition de la Charge de Capitan-Pacha , il y
a deux ans , on avoit donné le Pachalik de Le
pante , qui ne rapporte qu'environ 20. Bourses ,
a été nommé aujourd'hui à celui de Negrepont
qui produit 60. Bourses , et qui est toujours rempli
par un Visir à trois Queues. Il releve Abdoulla
Cuperly , cy - devant Pacha du Caire , que le
G. V. envoye servir en Perse sous les ordres de
Topal- Osman.
P. V. D.
LE
Es nouvelles de Perse sont toujours fort in
certaines , et souvent celles qui se débitent le
matią sont contredites par d'autres qu'on répand'
le
TO14 MERCURE DE FRANCE
le soir. On assure depuis quelques jours , que
Mossoul n'a point été été saccagé par Thamas-
Kouli Kan , comme on l'avoit cy- devant publié.
On dit que sur les premiers bruits qu'il s'en approchoit
, les habitans les plus accommodez de
cette grande Ville avoient d'abord voulu s'enfuir
avec leurs meilleurs effets ; mais que d'un côté ,
Pincertitude de sçavoir où se mettre en sureté
dans un Pays ouvert et inondé de Soldats , et
de l'autre , les représentations , les cris et même
les menaces du peuple , au desespoir de se voir
abandonné, leur avoit fait changer d'avis ; qu'étant
dailleurs informez que le General Persan
n'avoit point de gros Canon à sa suite , ils avoient
tous pris le genereux parti , tant les riches , que
les pauvres , de se renfermer dans leur Ville et
d'en rétablir à la hâte la Forteresse et l'enceinte
presqu'entierement ruinées , à quoi tout le monde
, de tout âge , de tout sexe et de toute condition
avoit travaillé avec tant de zele et de diligence
, que Thamas- Kouli - Kan venant à paroître,
il avoit jugé cette Ville hors d'insulte et avoit
passé outre.
*
>
On ajoute que continuant ses courses rapides ,
dans lesquelles il ravage tout le pays par où il
passe, il étoit tombé tout à coup sur Kouch-Kalessi
, Fauxbourg de Bagdad , séparé de la Ville
par le Tigre , qu'il y avoit fait beaucoup de butin
et y avoit même trouvé un Canon d'une
grosseur prodigieuse , qu'Achmet - Pacha , Gouverneur
de Bagdad , n'avoit pas eu le temps de
retirer ; que comme cependant Thamas - Kouli-
Kouch- Kalessi , signifie en Arabe la Tour des
Oiseaux. C'étoit une Tour qu'il y avoit autrefois ,
dans ce Faubourg, d'où il a pris son nom.
Kan
MAY. 1733. 1015
Kan n'avoit d'autre Artillerie avec lui que quel-..
ques petites Pieces de campagne , portées sur des
chameaux, on présamoit que quant à présent il se
borneroit à tourner en blocus le siege qu'il avoit
paru vouloir former de cette Place , et qu'au surplus
quelque parti qu'il prît , Achmet- Pacha l'avoit
si bien pourvûë de tout , qu'elle étoit en état
de se soutenir long- temps.
Les Turcs ont eu quelques avantages depuis peu
du côté de Tauris , où ils se sont emparez de
deux petites Villes , à la deffense desquelles il a
péri quelques Persans ; et le G. S. résolu de faire
tous ses efforts cette année pour terminer par
quelque Evenement décisif , une guerre si longue
et si ruineuse , a ordonné à tous les Pachas qui
sont sur les Frontieres de Perse , d'y marcher en
diligence avec le plus de Troupes qu'ils pourront
rassembler. De pareils ordres ont été donnez
le 26. de ce mois à 12000 hommes qui partent
d'ici journellement par mer et par terre ; sçavoir,
8000. Jannissaires , commandez par le
Koul-Kiayasei , ou Lieutenans General de cette
Milice , et le reste Topgis et Dgebedgis , aussi
commandez par les Kiayas ou Lieutenant Generaux
de leurs Corps . Mais ce qui releve plus que
toute autre chose le courage des Turcs , c'est que
Topal Osman , Pacha , a été fait Seraskier et
avec une grande autorité , et que les gens de guerre
qui ont une entiere confiance en sa capacité et
en sa bravoure , marchent en Perse avec autant
de bonne volonté qu'ils montroient cy- devant de
* Il est remarquer
que le Jannissaire
Aga , le
Topgi
- Bachi
et le Dgebedgi
-Bachi
, qui sont les
Chefs
de ces trois Corps
, ne marchent
point à l'Armée,
que lorsque
le G.V. la commande
en personne
,
1016 MERCURE DE FRANCE
*
Y
tépugnance à y aller. Ainsi l'Armée Otomane devant
être de plus de 200 mille hommes bien
payez , au moyen des grandes sommes que Sa
Hautesse a fait tenir à Topal - Osman , on se flatte
que la Campagne qui va s'ouvrir sera féconde
en heureux succès . On compte même que cet
actif Séraskier doit avoir déja penetré dans le
Diarbekir.
Le Grand-Seigneur avoit pareillement ordonné
au Kan des Tartares de Crimée , d'envoyer
20 mille hommes de ses Troupes en Perse ; mais
comme, pour abreger considerablement leur rou
te , on étoit convenu de les faire passer sur les
Terres de la Czarine , M. Nepluef, Résident de
cette Princesse à Constantinople , en ayant eu
avis , s'y est formellement opposé , et a signifié
au Reis - Effendi , au nom de sa Souveraine , qu'el
le ne pourroit consentir à ce passage , et que si
l'on persistoit à le vouloir tenter , elle regarderoit
cette entreprise comme une déclaration de
guerre. On ne sçait pas encore la détermination
de la Porte sur ce refus , ni quel chemin prendront
les Tartares.
Outre le Commandement de l'Armée que le
G. S. a donné à Topal - Osman , avec un pouvoir
si absolu , qu'il est le Maitre de tous les Emplois
Militaires , et de distribuer des récompenses er
des pensions à qui il jugera à propos , S. H. l'a
fait Beylerbey d'Anatolie , et en même temps Pa
cha de Cutaya, ces deux dernieres Dignitez étant
toujours unies ; et pour lui marquer encore mieux
sa bienveillance , elle a fait aussi de nouveau le
gendre de ce General , Beylerbey de Romelie et
Pacha de Nisse , Dignitez qui vont pareillement
ensemble , et dont ce dernier avoit déja été revêtu
ey-devant sous le Visiriat de son beaupere.
M.
MAY. 1733. 1017
M. le Comte Sierakousky , envoyé Extraordi
naire de Pologne à la Cour Ottomane ,pour complimenter
le G. S. sur son avenement au Trône ,
et qui arriva à Constantinople le 6.de Novembre
dernier , en est parti le 14. du present mois de
Mars , sur la nouvelle qu'il y reçut le 28. Février .
de la mort du Roy Auguste. M. le Comte Staninsky
, neveu de ce Ministre , est resté ici en
qualité d'Agent , avec l'agrément de la Porte ,
qui lui a donné une Maison à Pera , et un Train
pour sa subsistance journaliere.
"
Djanum- Codja , auquel peu après sa derniere
déposition de la Charge de Capitan-Pacha , il y
a deux ans , on avoit donné le Pachalik de Le
pante , qui ne rapporte qu'environ 20. Bourses ,
a été nommé aujourd'hui à celui de Negrepont
qui produit 60. Bourses , et qui est toujours rempli
par un Visir à trois Queues. Il releve Abdoulla
Cuperly , cy - devant Pacha du Caire , que le
G. V. envoye servir en Perse sous les ordres de
Topal- Osman.
P. V. D.
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Résumé : A Constantinople, le 30. Mars 1733.
Le 30 mars 1733, à Constantinople, les informations concernant la Perse restent floues. Contrairement à des rumeurs précédentes, Mossoul n'a pas été saccagée par Thamas-Kouli Kan. Les habitants de Mossoul, initialement prêts à fuir, ont choisi de rester et de renforcer les défenses de la ville après avoir appris que le général persan ne disposait pas d'artillerie lourde. Thamas-Kouli Kan, n'ayant pas pu prendre Mossoul, a poursuivi sa marche et a attaqué Kouch-Kalessi, un faubourg de Bagdad, où il a fait du butin et trouvé un canon. Les Turcs ont récemment pris deux petites villes près de Tauris et préparent une offensive majeure contre la Perse. Le Grand Seigneur a ordonné à tous les pachas des frontières persanes de rassembler leurs troupes. Une armée de plus de 200 000 hommes, commandée par Topal Osman Pacha, est en route vers la Perse. Le Grand Seigneur a également nommé Topal Osman Pacha Seraskier avec des pouvoirs étendus et l'a promu à plusieurs hautes dignités. Le comte Sierakousky, envoyé extraordinaire de Pologne, a quitté Constantinople après avoir appris la mort du roi Auguste. Djanum-Codja a été nommé pacha de Negrepont, remplaçant Abdoulla Cuperly, envoyé en Perse sous les ordres de Topal Osman Pacha.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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65
p. 1213-1220
A Constantinople, le 22 Avril 1733.
Début :
Les nouvelles venuës de Perse, par plusieurs Couriers, arrivez icy, portent que parmi [...]
Mots clefs :
Constantinople, Bagdad, Thamas Kouli-Kan, Topal Osman Pacha, Prince, Canons, Vaisseaux, Troupes, Côte, Nouvelles
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A Constantinople, le 22 Avril 1733.
A Constantinople , le 22 Avril 1733 .
LE
Es nouvelles venues de Perse , par plusieurs
Couriers , arrivez icy , portent que parmi
les Persans , qui sont en tres- grand nombre dans
Bagdad , il s'étoit formé un complot pour li
rer cette Place à l'Usurpateur Thamas - Kouli-
I. Vol.
Hij Kham
1214 MERCURE DE FRANCE
Kham , lequel faute de Canon pour en entreprendre
le Siége , et comptant sur ce qui s'y
tramoit en sa faveur, s'étoit borné jusqu'alors à
la bloquer du côté de la terre ; mais qu'Achmet
Pacha , Commandant Turc, avoit heureusement
découvert la conspiration peu de jours avant
qu'elle dût éclater : Sur quoi Kouli -Kham voïant
son coup manqué , avoit laissé la plus grande
partie de son armée aux environs de Bagdad ,
pour en continuer le Blocus , et avoit passé le
Tigre avec 25000 de ses meilleurs Soldats , la
pluspart Aghuans , qu'Achinet Pacha , comme
Ges Troupes passaient , avoit fait faire à propos
une sortie sur leur arriere-garde , dont environ
2000 hommes avoient été tuez ou noyez , que
Kouli Kham, après son passage étoit tombé sur
Kouch- Kalessi , Faux - Bourg de Bagdad , dont il
ost séparé par le Tigre , qu'il avoit pillé e
Fauxboug , et s'étoit ensuite campé le long du
Fleuve pour ôter toute communication entre
cette Ville , et l'armée Otomane , qui étoit dans
le Diarbekir , sous les ordres de Topal - Osman
Pacha , nouveau Genenal.
*
- Cependant le Tigre s'étant enflé tout d'un
coup considérablement, par la premiere fonte des
Néges , la rapidité de son cours avoit emporté
tous les Batteaux et Radeaux dont les Persans s'étoient
servis pour le passer ; de sorte que leur
General fort intrigué de ne pouvoir plus communiquer
avec ses Troupes restées de l'autre
côté du Fleuve , soit pour en tirer du secours
soit pour leur en donner , suivant les conjonc
tures , avoit pourtant trouvé moyen de leur faire
Nation barbare et rebelle , qui a donné lieu à la
grande Révolution de Perse,
>
I, Vol.
dire
JUIN. 1733.
1215
dire de filer le long de ce Fleuve , jusques vis-àvis
de Mesie , où, quand les eaux seroient écou
lées , elles pourroient le passer à gué ; qu'en attendant
, ce Général , pour se dédommager d'avoir
échoué à Bagdad , avoit formé le dessein
de surprendre Mosul ; et comme il sçavoit que
les habitans de cette derniere Ville en avoient
eux -mêmes réparé depuis peu l'Enceinte et la
Forteresse, qu'ils y avoient fait venir beaucoup de
provisions du Diarbekir , et que leur Garnison:
étoit renforcée , il avoit voulu joindre la ruse à
la force.
Pour cet effet , il leur avoit envoyé trois
Exprès , en differens temps pour les amuser , les
faisant assurer qu'il étoit venu dans leur voisinage
comme ami , et qu'ils n'avoient à craindre
aucun acte d'hostilité de sa part ; cependant au
moment même qu'il leur avoit dépêché son premier
Emissaire , il avoit fait marcher un Corps
de 10 à 12000 homines vers Mosul , qui y arriva
peu après son troisiéme Courier ; mais les
habitans ne prirent pas le change ; et loin de
prêter l'oreille à ses protestations d'amitié , réïtérées
avec tant d'affectation , ils se tinrent sibien
sur leurs gardes , que lorsque les Troupes
Persannes furent à la portée du Canon , ils firent
tirer dessus toute l'Artillerie de la Place ;
nonobstant le désorde que causa cette décharge,
les Persans ayant continué d'avancer , et étant
même entrez en partie dans la Ville , dont on
avoit exprès laissé une porte ouverte , la Garnison
et le Peuple les reçurent avec tant de bra
youre qu'ils les chasserent et les poursuivirent
* Ville moderne , peu éloignée des ruines de Nimive.
I. Vol. H iij long1216
MERCURE DE FRANCE
long - temps , ensorte qu'après en avoir tué
beaucoup , le reste s'étoit dissipé et avoit pris la
fuite à travers les Déserts .
En conséquence de ces deux Evenemens , qui
sont tres-avantageux aux Turcs dans un commencement
de Campagne , Achmet Pacha avoit ·
mandé au nouveau Séraskier Topal - Osman , de
ne se plus inquiéter pour Bagdad , qui étoit à
present en sûreté et bien pourvû de tout, et qu'il
ne songeât point à se mettre en mouvement
qu'auparavant tous les renforts de Troupes et
les munitions qu'il attendoit ne l'eussent joint.
Ce Seraskier avoit déja rassemblé 60000 hommes
dans ce Diarbekir , et reçu une bonne partie
des provisions qu'on lui avoit envoyées de
Constantinople par Aléxandrete. On ajoute
qu'ayant été obligé d'user de sévérité , pour
maintenir en vigueur la subordination dans son
armée , et pour tenir le monde dans son devoir ,
il avoit fait couper la tête à un Pacha , qui refusoit
d'obéir à ses Ordres , s'il ne montroit
ceux du G. S. et qu'il avoit fait subir le même
supplice à quelques Officiers , dont les Compagnies
n'étoient pas completes. Achmet Pacha
de son côté a exterminé tous ceux qui avoient
trempé dans la conspiration dont on a parlé au
commencement de ces nouvelles , et a fait passer
au fil de l'Epée les habitans d'un gros Village
près de Bagdad , nommé Gherbelai- Mahaladé” ,
pour avoir favorisé Thamis Kouli Kham.
Enfin , que les Troupes de ce dernier , qui
pour la plus grande partie sont composées de
toute sorte de gens ramassez , mal vétus , mal
armez , et propres seulement à faire du ravage
où ils ne trouvent point de résistance , avoient
fait un si grand dégat dans les Plaines de Bad-
1. Vol. dad,
JUIN. 1733. 1217
dad , pendant le Blocus de cette Place , que tous
son territoire est ruiné, de maniere à ne pouvoir
se rétablir de 20 ou 30 ans.
Les mêmes nouvelles portent que , sans avoir
égard au refus que fit dernierement M. Nepluck
au nom de la Czarine , d'accorder le passage sur
les Terres de sa Souveraine aux Tartares , le
Kham de la Crimée avoit ordre de faire`marcher
en Perse , il en étoit d'abord passé un Corps
d'environ 10 mille , qui sont à la solde du G. S.
et que depuis , plus de 20 mille volontaires de
cette même Nation , avoient pris journellement
la même route.
Mikal Voda , qui a été deux fois Prince de
Moldavie , et qui du temps de la Révolution
avoit obtenu la Principauté de Valaquie , dont il
fût déposé il y a plus d'un an , avoit fait depuis
peu quelques tentatives pour rentrer dans cette
derniere Principauté. Ses amis représenterent à
la Porte , qu'il paroissoit que le fils du feu Prince
Nicolas Mauro - Cordato , qui gouverne à
present la Valaquie , se trouvant trop jeune , et
n'ayant pas assez d'expérience , il seroit d'une
extrême conséquence pour cet Empire , de ne la
confier qu'à un Prince qui fut capable de la bien
gouverner , tel qu'étoit Mikal , qui avoit cydevant
donné des preuves de sa bonne conduite;
mais ces représentations n'ont rien produit en
sa faveur , et la Porte pour marquer cependant
qu'elle y avoit fait attention , s'est contentée do
donner la Principauté de Valaquie au Prince de
Moldavie , qui est un homme fait , et celle - ci
au jeune Prince de Valaquie . Les Ordres pour
faire cet échange , qui jettera ces Princes dans
d'aussi grandes dépenses que s'ils succedoient à
d'autres , ont été signifiez le 16 de ce mois à
Hij
•
+
I. Vol. leurs
1218 MERCURE DE FRANCE
leurs Kapi-Kiayar , ou Agens à la Porte , ausquels
on a donné le Caftan d'honneur , suivant
l'usage .
Les Algériens , qui étoient à Smirne depuis
às mois pour y faire des Recrues , et recevoir
celles qu'on faisoit icy pour eux , ayant mis à
la voile de Fogeri , dans les derniers jours du
mois de Mars , au nombre de neuf Vaisseaux ,
furent surpris , le premier d'Avril , vers les 9
heures du soir , d'un vent de Sud- Est si violent ,
que ne pouvant plus tenir la Mer sans un péri
évident , ils voulurent gagner la Rade de Mosconisy
pour s'y mettre à l'abri ; mais soit que
l'obscurité trompât les Pilotes , ou qu'ils ne connussent
pas bien ces Parages , au lieu de prendre
la grande Passe , qui est sure , et au Nord de
l'Ise de Metelin , ils prirent la petite , au Nord-
Ouest de cette Isie , qui est fort dangereuse la
Duit , parce qu'elle n'a qu'environ deux Cables
de l'argeur , dix pieds d'eau en quelques endroits,
et qu'elle a un Banc de Rochers du côté de l'Est ;
de sorte , que la nouvelle Patrone d'Alger , fort
beau Vaisseau de 70 Pieces de Canons de Fonte ,
construit depuis un an , échoua en entrant dans
ce mauvais passage , et que celui qui le commandoit
n'ayant pas eu l'attention d'éteindre
son Fanal de Poupe , ni de faire aucun signal ,
deux autres Vaisseaux qui le crurent mouillé ,
le suivirent , et écoüerent de même ; sçavoir, un
des deux Vaisseaux , dont le G. S. avoit fait
présent depuis peu à la République d'Alger, aussi
de 70 Canons , & l'ancienne Patrone de cette
Régence , percée pour un pareil nombre de Canons
, mais qui n'en avoit que 40 .
Des autres 6 Vaisseaux de cette Escadre, 3 qui
étoient les plus proches , et qui prenoient la mê-
I. Val me
JUIN.
1219 17337
même sort ;
me route , auroient eu vrai- semblablement le
mais une Chaloupe qu'on leur en
voya , les ayant informez du malheur qui venoit
d'arriver , ils gagnerent la grande Passe , et allerent
donner fond dans la Rade de Mosconisy.
A l'égard des trois derniers , ils étoient dispersez
et si fort au large qu'il ne fut pas possible
d'en joindre aucun , et qu'on a été même
plusieurs jours sans en avoir de nouvelles .
On a appris depuis , que l'un d'eux étoit venu
moüiller à Mosconisy avec ceux qui y étoient
déja , et qu'un autre ayant voulu regagner Foye
ri , avoit péri en rentrant dans ce Port , qu'à la.
vérité tout l'Equipage avoit eu le temps de se
sauver , mais que peu après ce Bâtiment , qui
étoit de 40 Canons , avoit coulé bas et disparu
totalement. Quant au troisiéme Vaisseau , on ne
sçait point encore ce qu'il est devenu .
les
Quoiqu'il ne se soit noyé que aix personnes
dans tous ces naufrages , et que les Aigériens se
fatent de relever leur ancienne Patrone , à quot
on doute pourtant qu'ils puissent parvenir ; il
est certain que la perte qu'ils ont faite en cette
occasion sera toujours fort considérable ; outre
qu'ils ne pourront rien retirer des deux premiers
gros Vaisseaux naufragez ;; que les Canons ,
Ancres et ce qu'il y avoit sur le premier et le
second Pont , toute la Mâture de ces Bâtimens
étant tombée tout à la fois , un quart d'heure
après qu'ils eurent échoué , on assure que 3 à
hommes en ont été écrașez ou estropiez, et
que la plupart de leurs Recruès , effrayées de tant
de désastres , ont deserté et pris la fuite de côté
400
et d'autre en Asie .
Jérémie , qui avoit été fait Patriarche de
Constantinople pour la seconde fois , au mois
I Vol Hv d'Oc1220
MERCURE DE FRANCE
d'Octobre de l'année derniere , a été déposé aujourd'hui
et exilé suivant la coûtume ; et Sera
phin , Archevêque de Nicomédie , a été mis à sa
place.
LE
Es nouvelles venues de Perse , par plusieurs
Couriers , arrivez icy , portent que parmi
les Persans , qui sont en tres- grand nombre dans
Bagdad , il s'étoit formé un complot pour li
rer cette Place à l'Usurpateur Thamas - Kouli-
I. Vol.
Hij Kham
1214 MERCURE DE FRANCE
Kham , lequel faute de Canon pour en entreprendre
le Siége , et comptant sur ce qui s'y
tramoit en sa faveur, s'étoit borné jusqu'alors à
la bloquer du côté de la terre ; mais qu'Achmet
Pacha , Commandant Turc, avoit heureusement
découvert la conspiration peu de jours avant
qu'elle dût éclater : Sur quoi Kouli -Kham voïant
son coup manqué , avoit laissé la plus grande
partie de son armée aux environs de Bagdad ,
pour en continuer le Blocus , et avoit passé le
Tigre avec 25000 de ses meilleurs Soldats , la
pluspart Aghuans , qu'Achinet Pacha , comme
Ges Troupes passaient , avoit fait faire à propos
une sortie sur leur arriere-garde , dont environ
2000 hommes avoient été tuez ou noyez , que
Kouli Kham, après son passage étoit tombé sur
Kouch- Kalessi , Faux - Bourg de Bagdad , dont il
ost séparé par le Tigre , qu'il avoit pillé e
Fauxboug , et s'étoit ensuite campé le long du
Fleuve pour ôter toute communication entre
cette Ville , et l'armée Otomane , qui étoit dans
le Diarbekir , sous les ordres de Topal - Osman
Pacha , nouveau Genenal.
*
- Cependant le Tigre s'étant enflé tout d'un
coup considérablement, par la premiere fonte des
Néges , la rapidité de son cours avoit emporté
tous les Batteaux et Radeaux dont les Persans s'étoient
servis pour le passer ; de sorte que leur
General fort intrigué de ne pouvoir plus communiquer
avec ses Troupes restées de l'autre
côté du Fleuve , soit pour en tirer du secours
soit pour leur en donner , suivant les conjonc
tures , avoit pourtant trouvé moyen de leur faire
Nation barbare et rebelle , qui a donné lieu à la
grande Révolution de Perse,
>
I, Vol.
dire
JUIN. 1733.
1215
dire de filer le long de ce Fleuve , jusques vis-àvis
de Mesie , où, quand les eaux seroient écou
lées , elles pourroient le passer à gué ; qu'en attendant
, ce Général , pour se dédommager d'avoir
échoué à Bagdad , avoit formé le dessein
de surprendre Mosul ; et comme il sçavoit que
les habitans de cette derniere Ville en avoient
eux -mêmes réparé depuis peu l'Enceinte et la
Forteresse, qu'ils y avoient fait venir beaucoup de
provisions du Diarbekir , et que leur Garnison:
étoit renforcée , il avoit voulu joindre la ruse à
la force.
Pour cet effet , il leur avoit envoyé trois
Exprès , en differens temps pour les amuser , les
faisant assurer qu'il étoit venu dans leur voisinage
comme ami , et qu'ils n'avoient à craindre
aucun acte d'hostilité de sa part ; cependant au
moment même qu'il leur avoit dépêché son premier
Emissaire , il avoit fait marcher un Corps
de 10 à 12000 homines vers Mosul , qui y arriva
peu après son troisiéme Courier ; mais les
habitans ne prirent pas le change ; et loin de
prêter l'oreille à ses protestations d'amitié , réïtérées
avec tant d'affectation , ils se tinrent sibien
sur leurs gardes , que lorsque les Troupes
Persannes furent à la portée du Canon , ils firent
tirer dessus toute l'Artillerie de la Place ;
nonobstant le désorde que causa cette décharge,
les Persans ayant continué d'avancer , et étant
même entrez en partie dans la Ville , dont on
avoit exprès laissé une porte ouverte , la Garnison
et le Peuple les reçurent avec tant de bra
youre qu'ils les chasserent et les poursuivirent
* Ville moderne , peu éloignée des ruines de Nimive.
I. Vol. H iij long1216
MERCURE DE FRANCE
long - temps , ensorte qu'après en avoir tué
beaucoup , le reste s'étoit dissipé et avoit pris la
fuite à travers les Déserts .
En conséquence de ces deux Evenemens , qui
sont tres-avantageux aux Turcs dans un commencement
de Campagne , Achmet Pacha avoit ·
mandé au nouveau Séraskier Topal - Osman , de
ne se plus inquiéter pour Bagdad , qui étoit à
present en sûreté et bien pourvû de tout, et qu'il
ne songeât point à se mettre en mouvement
qu'auparavant tous les renforts de Troupes et
les munitions qu'il attendoit ne l'eussent joint.
Ce Seraskier avoit déja rassemblé 60000 hommes
dans ce Diarbekir , et reçu une bonne partie
des provisions qu'on lui avoit envoyées de
Constantinople par Aléxandrete. On ajoute
qu'ayant été obligé d'user de sévérité , pour
maintenir en vigueur la subordination dans son
armée , et pour tenir le monde dans son devoir ,
il avoit fait couper la tête à un Pacha , qui refusoit
d'obéir à ses Ordres , s'il ne montroit
ceux du G. S. et qu'il avoit fait subir le même
supplice à quelques Officiers , dont les Compagnies
n'étoient pas completes. Achmet Pacha
de son côté a exterminé tous ceux qui avoient
trempé dans la conspiration dont on a parlé au
commencement de ces nouvelles , et a fait passer
au fil de l'Epée les habitans d'un gros Village
près de Bagdad , nommé Gherbelai- Mahaladé” ,
pour avoir favorisé Thamis Kouli Kham.
Enfin , que les Troupes de ce dernier , qui
pour la plus grande partie sont composées de
toute sorte de gens ramassez , mal vétus , mal
armez , et propres seulement à faire du ravage
où ils ne trouvent point de résistance , avoient
fait un si grand dégat dans les Plaines de Bad-
1. Vol. dad,
JUIN. 1733. 1217
dad , pendant le Blocus de cette Place , que tous
son territoire est ruiné, de maniere à ne pouvoir
se rétablir de 20 ou 30 ans.
Les mêmes nouvelles portent que , sans avoir
égard au refus que fit dernierement M. Nepluck
au nom de la Czarine , d'accorder le passage sur
les Terres de sa Souveraine aux Tartares , le
Kham de la Crimée avoit ordre de faire`marcher
en Perse , il en étoit d'abord passé un Corps
d'environ 10 mille , qui sont à la solde du G. S.
et que depuis , plus de 20 mille volontaires de
cette même Nation , avoient pris journellement
la même route.
Mikal Voda , qui a été deux fois Prince de
Moldavie , et qui du temps de la Révolution
avoit obtenu la Principauté de Valaquie , dont il
fût déposé il y a plus d'un an , avoit fait depuis
peu quelques tentatives pour rentrer dans cette
derniere Principauté. Ses amis représenterent à
la Porte , qu'il paroissoit que le fils du feu Prince
Nicolas Mauro - Cordato , qui gouverne à
present la Valaquie , se trouvant trop jeune , et
n'ayant pas assez d'expérience , il seroit d'une
extrême conséquence pour cet Empire , de ne la
confier qu'à un Prince qui fut capable de la bien
gouverner , tel qu'étoit Mikal , qui avoit cydevant
donné des preuves de sa bonne conduite;
mais ces représentations n'ont rien produit en
sa faveur , et la Porte pour marquer cependant
qu'elle y avoit fait attention , s'est contentée do
donner la Principauté de Valaquie au Prince de
Moldavie , qui est un homme fait , et celle - ci
au jeune Prince de Valaquie . Les Ordres pour
faire cet échange , qui jettera ces Princes dans
d'aussi grandes dépenses que s'ils succedoient à
d'autres , ont été signifiez le 16 de ce mois à
Hij
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I. Vol. leurs
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leurs Kapi-Kiayar , ou Agens à la Porte , ausquels
on a donné le Caftan d'honneur , suivant
l'usage .
Les Algériens , qui étoient à Smirne depuis
às mois pour y faire des Recrues , et recevoir
celles qu'on faisoit icy pour eux , ayant mis à
la voile de Fogeri , dans les derniers jours du
mois de Mars , au nombre de neuf Vaisseaux ,
furent surpris , le premier d'Avril , vers les 9
heures du soir , d'un vent de Sud- Est si violent ,
que ne pouvant plus tenir la Mer sans un péri
évident , ils voulurent gagner la Rade de Mosconisy
pour s'y mettre à l'abri ; mais soit que
l'obscurité trompât les Pilotes , ou qu'ils ne connussent
pas bien ces Parages , au lieu de prendre
la grande Passe , qui est sure , et au Nord de
l'Ise de Metelin , ils prirent la petite , au Nord-
Ouest de cette Isie , qui est fort dangereuse la
Duit , parce qu'elle n'a qu'environ deux Cables
de l'argeur , dix pieds d'eau en quelques endroits,
et qu'elle a un Banc de Rochers du côté de l'Est ;
de sorte , que la nouvelle Patrone d'Alger , fort
beau Vaisseau de 70 Pieces de Canons de Fonte ,
construit depuis un an , échoua en entrant dans
ce mauvais passage , et que celui qui le commandoit
n'ayant pas eu l'attention d'éteindre
son Fanal de Poupe , ni de faire aucun signal ,
deux autres Vaisseaux qui le crurent mouillé ,
le suivirent , et écoüerent de même ; sçavoir, un
des deux Vaisseaux , dont le G. S. avoit fait
présent depuis peu à la République d'Alger, aussi
de 70 Canons , & l'ancienne Patrone de cette
Régence , percée pour un pareil nombre de Canons
, mais qui n'en avoit que 40 .
Des autres 6 Vaisseaux de cette Escadre, 3 qui
étoient les plus proches , et qui prenoient la mê-
I. Val me
JUIN.
1219 17337
même sort ;
me route , auroient eu vrai- semblablement le
mais une Chaloupe qu'on leur en
voya , les ayant informez du malheur qui venoit
d'arriver , ils gagnerent la grande Passe , et allerent
donner fond dans la Rade de Mosconisy.
A l'égard des trois derniers , ils étoient dispersez
et si fort au large qu'il ne fut pas possible
d'en joindre aucun , et qu'on a été même
plusieurs jours sans en avoir de nouvelles .
On a appris depuis , que l'un d'eux étoit venu
moüiller à Mosconisy avec ceux qui y étoient
déja , et qu'un autre ayant voulu regagner Foye
ri , avoit péri en rentrant dans ce Port , qu'à la.
vérité tout l'Equipage avoit eu le temps de se
sauver , mais que peu après ce Bâtiment , qui
étoit de 40 Canons , avoit coulé bas et disparu
totalement. Quant au troisiéme Vaisseau , on ne
sçait point encore ce qu'il est devenu .
les
Quoiqu'il ne se soit noyé que aix personnes
dans tous ces naufrages , et que les Aigériens se
fatent de relever leur ancienne Patrone , à quot
on doute pourtant qu'ils puissent parvenir ; il
est certain que la perte qu'ils ont faite en cette
occasion sera toujours fort considérable ; outre
qu'ils ne pourront rien retirer des deux premiers
gros Vaisseaux naufragez ;; que les Canons ,
Ancres et ce qu'il y avoit sur le premier et le
second Pont , toute la Mâture de ces Bâtimens
étant tombée tout à la fois , un quart d'heure
après qu'ils eurent échoué , on assure que 3 à
hommes en ont été écrașez ou estropiez, et
que la plupart de leurs Recruès , effrayées de tant
de désastres , ont deserté et pris la fuite de côté
400
et d'autre en Asie .
Jérémie , qui avoit été fait Patriarche de
Constantinople pour la seconde fois , au mois
I Vol Hv d'Oc1220
MERCURE DE FRANCE
d'Octobre de l'année derniere , a été déposé aujourd'hui
et exilé suivant la coûtume ; et Sera
phin , Archevêque de Nicomédie , a été mis à sa
place.
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Résumé : A Constantinople, le 22 Avril 1733.
En avril 1733, des informations provenant de Perse signalent un complot à Bagdad visant à libérer la ville de l'usurpateur Thamas-Kouli-Kham. Ce dernier, manquant de canons, avait bloqué la ville par terre. Achmet Pacha, commandant turc, avait découvert la conspiration et lancé une sortie contre les forces persanes, tuant ou noyant environ 2000 hommes. Kouli-Kham, après avoir traversé le Tigre, avait pillé un faubourg de Bagdad et s'était campé le long du fleuve pour couper les communications entre Bagdad et l'armée ottomane. Le Tigre en crue avait emporté les bateaux et radeaux des Persans, empêchant leur général de communiquer avec ses troupes. Ce général avait alors ordonné à ses troupes de longer le fleuve jusqu'à Mesie pour le traverser à gué une fois les eaux écoulées. En attendant, il avait tenté de surprendre Mosul, mais les habitants, bien préparés, avaient repoussé l'attaque avec succès. Ces événements avaient rassuré Achmet Pacha concernant la sécurité de Bagdad. Topal-Osman Pacha, nouveau général ottoman, avait rassemblé 60 000 hommes à Diarbekir et reçu des provisions de Constantinople. Achmet Pacha avait également réprimé la conspiration à Bagdad et puni les habitants complices. Les troupes de Kouli-Kham, composées de gens mal armés, avaient ravagé les plaines de Bagdad, ruinant la région pour plusieurs décennies. Par ailleurs, malgré le refus de la Russie de laisser passer les Tartares, le khan de Crimée avait envoyé des troupes en Perse. En Moldavie, Mikal Voda avait tenté de récupérer la principauté de Valachie, mais la Porte avait préféré échanger les princes des deux principautés. Enfin, une escadre algérienne avait subi des naufrages près de Mosconisy en avril 1733, perdant plusieurs vaisseaux et canons. Les Algériens tentaient de relever leur ancienne patrone, mais la perte était considérable. À Constantinople, Jérémie avait été déposé de sa fonction de patriarche et remplacé par Séraphin, archevêque de Nicomédie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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66
p. 1442-1443
De Constantinople, le 14 Mai 1733.
Début :
Les nouvelles de Perse varient toûjours ; les unes portent que le Blocus de Bagdad est [...]
Mots clefs :
Constantinople, Thamas Kouli-Kan, Pacha , Khan, Khans, Troupes, Armée, Perse
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De Constantinople, le 14 Mai 1733.
D: Constantinople , le 14 Mai 1733-
Es nouvelles de Perse varient toûjours ; les
Lunes portent que le Blocus de Bagdad est
levé ; les autres , qu'il continue encore ; ce qui
se dit de plus generalement , c'est que la mésintelligence
s'est glissée dans l'Armée de Talimas-
Kouli Khan , les Khans et autres principaux
Officiers , ayant fort murmuré contre ce Génétal
, de ce qu'il s'obstinoit à perdre le temps
devant une Place , dont il n'étoit pas en état de
former le Siége , tandis que les Turcs ravagcoient
plusieurs Provinces de Perse,massacroient
Ieurs Sujets , et emmenoient leurs Femmes er
kurs Enfans en esclavage ; que sur les avis que
Achmet Pacha avoit eus de ces divisions , et que
Parmee Persanne devoit décamper , il avoit détaché
plusieurs Partis de sa Garnison , qui s'étant
joints à quelques Troupes d'un Prince Arabe
, son beau pere , avoient harcelé cette Armée
dans sa marche , par de continuelles Escarmouches
, dans lesquelles Tahmas-Kouli-Khan avoit
perdu beaucoup de monde ; enfin que Topal
Osman , Pacha , étoit parti depuis 25 jours du
Diarbekir, pour s'approcher de Bagdad, et combatre
les Persans , s'il en trouvoit l'occasion favorable
, et qu'il n'avoit pris avec lui que 40000
hommes , ayant laissé le reste de son Armée au
Camp , pour y recevoir les Troupes et les Munitions
qui devoient lui venir encore.
Curde-Demir, Pacha , qui commande du côté
II. Vol.
de
JUIN . 1733 1443
de Tiflis, et plusieurs autres Pachas qui l'avoient
joint avec leurs Troupes, ont fait des Incursions
dans les Campagnes de Tauris et d'Erivan , où ils
ont passé au fil de l'Epée beaucoup de Petits-
Corps de Persans, qui étoient postez en differens ·
endroits pour la garde du Pais. Tauris , Erivan ,
Roumié et plusieurs autres Villes ont été entiement
saccagés.
Les Sultans Fetih ou le Conquerant , et Islam
* Ghuirai , fils de Deulet Ghuirai , Khan de
Crimée , déposé , sont les Chefs des Tartares ,
qui ont été commandez pour pénétrer dans le
coeur de la Perse. Fetih , Sultan , l'aîné de ces
deux Princes , mande au Khan régnant , son
oncle , par sa Lettre , dattée du Mont - Caucase ,
et arrivée à Bacché - Saraï le 24 Avril , qu'ils se
sont frayez une route dans cette Montagne , qui
aboutit proche de Tiflis , et qui est éloignée de 6
lieuës de Kabarta , canton de la Circassie , que
les Moscovites prétendent leur appartenir ; que
ses Troupes et celles de son frere , au nombre de
30 à 40 mille hommes , marchent sur deux colonnes
, et se tiennent fort sur leur garde dans
la crainte d'être attaquées par des peuples inconnus
, habitans du Caucase , qu'elles trouvent
souvent dans leur
passage.
Djanum-Codja , qui avoit été nommé depuis
peu Pacha de Négrépont, vient d'être fait Pacha
de Candie, et Inspecteur Général des Armemens
du G. S. Les Commandans des Vaisseaux et les
Beys des Galeres , qui seront en Mer, iront prendre
ses ordres , et n'entreprendront rien que sur
ses avis.
* Islam, l'Ortodoxe.
Es nouvelles de Perse varient toûjours ; les
Lunes portent que le Blocus de Bagdad est
levé ; les autres , qu'il continue encore ; ce qui
se dit de plus generalement , c'est que la mésintelligence
s'est glissée dans l'Armée de Talimas-
Kouli Khan , les Khans et autres principaux
Officiers , ayant fort murmuré contre ce Génétal
, de ce qu'il s'obstinoit à perdre le temps
devant une Place , dont il n'étoit pas en état de
former le Siége , tandis que les Turcs ravagcoient
plusieurs Provinces de Perse,massacroient
Ieurs Sujets , et emmenoient leurs Femmes er
kurs Enfans en esclavage ; que sur les avis que
Achmet Pacha avoit eus de ces divisions , et que
Parmee Persanne devoit décamper , il avoit détaché
plusieurs Partis de sa Garnison , qui s'étant
joints à quelques Troupes d'un Prince Arabe
, son beau pere , avoient harcelé cette Armée
dans sa marche , par de continuelles Escarmouches
, dans lesquelles Tahmas-Kouli-Khan avoit
perdu beaucoup de monde ; enfin que Topal
Osman , Pacha , étoit parti depuis 25 jours du
Diarbekir, pour s'approcher de Bagdad, et combatre
les Persans , s'il en trouvoit l'occasion favorable
, et qu'il n'avoit pris avec lui que 40000
hommes , ayant laissé le reste de son Armée au
Camp , pour y recevoir les Troupes et les Munitions
qui devoient lui venir encore.
Curde-Demir, Pacha , qui commande du côté
II. Vol.
de
JUIN . 1733 1443
de Tiflis, et plusieurs autres Pachas qui l'avoient
joint avec leurs Troupes, ont fait des Incursions
dans les Campagnes de Tauris et d'Erivan , où ils
ont passé au fil de l'Epée beaucoup de Petits-
Corps de Persans, qui étoient postez en differens ·
endroits pour la garde du Pais. Tauris , Erivan ,
Roumié et plusieurs autres Villes ont été entiement
saccagés.
Les Sultans Fetih ou le Conquerant , et Islam
* Ghuirai , fils de Deulet Ghuirai , Khan de
Crimée , déposé , sont les Chefs des Tartares ,
qui ont été commandez pour pénétrer dans le
coeur de la Perse. Fetih , Sultan , l'aîné de ces
deux Princes , mande au Khan régnant , son
oncle , par sa Lettre , dattée du Mont - Caucase ,
et arrivée à Bacché - Saraï le 24 Avril , qu'ils se
sont frayez une route dans cette Montagne , qui
aboutit proche de Tiflis , et qui est éloignée de 6
lieuës de Kabarta , canton de la Circassie , que
les Moscovites prétendent leur appartenir ; que
ses Troupes et celles de son frere , au nombre de
30 à 40 mille hommes , marchent sur deux colonnes
, et se tiennent fort sur leur garde dans
la crainte d'être attaquées par des peuples inconnus
, habitans du Caucase , qu'elles trouvent
souvent dans leur
passage.
Djanum-Codja , qui avoit été nommé depuis
peu Pacha de Négrépont, vient d'être fait Pacha
de Candie, et Inspecteur Général des Armemens
du G. S. Les Commandans des Vaisseaux et les
Beys des Galeres , qui seront en Mer, iront prendre
ses ordres , et n'entreprendront rien que sur
ses avis.
* Islam, l'Ortodoxe.
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Résumé : De Constantinople, le 14 Mai 1733.
Le 14 mai 1733, les informations sur la situation en Perse sont contradictoires. Certaines sources affirment que le blocus de Bagdad est levé, tandis que d'autres indiquent qu'il persiste. Une discordance règne au sein de l'armée de Tahmas-Kouli Khan, critiqué pour avoir perdu du temps devant une place forte, permettant aux Turcs de ravager plusieurs provinces persanes et d'enlever des habitants. Achmet Pacha a envoyé des troupes harceler les Persans, causant des pertes à Tahmas-Kouli Khan. De plus, Topal Osman Pacha a quitté le Diarbekir avec 40 000 hommes pour se diriger vers Bagdad. Du côté de Tiflis, Curde-Demir Pacha et d'autres pachas ont mené des incursions en Tauris et Erivan, massacrant des Persans et saccageant plusieurs villes. Les sultans Fetih et Islam Ghuirai, fils de Deulet Ghuirai, khan de Crimée, ont été désignés pour pénétrer en Perse avec 30 à 40 000 hommes. Enfin, Djanum-Codja, nommé pacha de Candie, est devenu inspecteur général des armements du Grand Sultan, avec autorité sur les commandants des vaisseaux et les beys des galères.
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Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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67
p. 1577-1578
AUTRE.
Début :
Je suis dans un Païs, peu favorable aux Dames ; [...]
Mots clefs :
Constantinople
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE.
AUTR E.
E suis dans un Païs , peu favorable aux
Dames ; JE
Cependant mon aspect n'en est pas moins charmant.
Si tu veux , cher Lecteur , faire mes Anagra
mes
Combine bien mes pieds , tu verras à l'instant ,
Ce que certaines gens mettent dessus leur tête.
Tourne encor d'un autre côté ,
En moi tu trouveras une celebre fête ;
Un
1578 MERCURE DE FRANCE
Un Patriarche révéré
Ce qui fait rire et qu'on méprise ;
Un homme par tout recherché
Ce qui garantit de la Bize.
Un Empereur Romain , du Ciel favorisé.
Ce qui n'a point d'appuy , mais qui pourtant en
donne ,
Un terme dénigrant , ce qui guimpe une None."
Un sage de l'Antiquité,
Exemple de sévérité .
Ce que l'on met au feu , qui sert en tout ménage
;
Un Oyseau que l'on met en Cage ; }
Ce qui vient d'un Païs lointain
Et fait manchettes à Catin.
Poisson tres- estimé , ce qui sert à la table ,
Supplice destiné pour Roturier coupable.
Courage , ami Lecteur , travaille de nouveau ;
Allons , tourne , Combine , et cherche en tom
cerveau ;
.
Un terme de blazon à tes yeux se présente
Et ce qui répeté sert à grossir ta rente .
Une Ville fameuse un Fleuve tres connu ,
Un meuble aux mortels necessaire ;
Un fils cruel qui déchire sa meré ;
Et remede à la toux , quand on en a bien bu.
E suis dans un Païs , peu favorable aux
Dames ; JE
Cependant mon aspect n'en est pas moins charmant.
Si tu veux , cher Lecteur , faire mes Anagra
mes
Combine bien mes pieds , tu verras à l'instant ,
Ce que certaines gens mettent dessus leur tête.
Tourne encor d'un autre côté ,
En moi tu trouveras une celebre fête ;
Un
1578 MERCURE DE FRANCE
Un Patriarche révéré
Ce qui fait rire et qu'on méprise ;
Un homme par tout recherché
Ce qui garantit de la Bize.
Un Empereur Romain , du Ciel favorisé.
Ce qui n'a point d'appuy , mais qui pourtant en
donne ,
Un terme dénigrant , ce qui guimpe une None."
Un sage de l'Antiquité,
Exemple de sévérité .
Ce que l'on met au feu , qui sert en tout ménage
;
Un Oyseau que l'on met en Cage ; }
Ce qui vient d'un Païs lointain
Et fait manchettes à Catin.
Poisson tres- estimé , ce qui sert à la table ,
Supplice destiné pour Roturier coupable.
Courage , ami Lecteur , travaille de nouveau ;
Allons , tourne , Combine , et cherche en tom
cerveau ;
.
Un terme de blazon à tes yeux se présente
Et ce qui répeté sert à grossir ta rente .
Une Ville fameuse un Fleuve tres connu ,
Un meuble aux mortels necessaire ;
Un fils cruel qui déchire sa meré ;
Et remede à la toux , quand on en a bien bu.
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68
p. 1797
« La Premiere Enigme du mois de Juillet, a été faite sur les pieds ; et la seconde, sur [...] »
Début :
La Premiere Enigme du mois de Juillet, a été faite sur les pieds ; et la seconde, sur [...]
Mots clefs :
Pieds, Vent, Liard, Meaux, Constantinople, Épingle
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texteReconnaissance textuelle : « La Premiere Enigme du mois de Juillet, a été faite sur les pieds ; et la seconde, sur [...] »
La Premiere Enigme du mois de Juillet,
a été faite sur les pieds ; et la second , sur
le vent. Les Logogryphes ont é é faits sur
Liard , Meaux , Constantinople , Epingle.
a été faite sur les pieds ; et la second , sur
le vent. Les Logogryphes ont é é faits sur
Liard , Meaux , Constantinople , Epingle.
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69
p. 1865-1868
De Constantinople le 8. Juillet 1733.
Début :
Depuis la Lettre, Monsieur, que je vous écrivis le 14. du mois de May dernier, où [...]
Mots clefs :
Pacha , Perse, Djanum-Codja, Topal Osman Pacha, Capitan pacha, Constantinople, Galères, Tartares
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texteReconnaissance textuelle : De Constantinople le 8. Juillet 1733.
De Constantinople le 8. Juillet 1733.
Depuisle Le du mois de May dernier ,
Epuis la Lettre , Monsieur , que je vous
ou
je vous mandois que plus de 30000. Tartares
s'acheminoient vers la Perse par une nouvelle
route qu'ils s'étoient faite à travers les Rochers
du Mont Caucase , on a eu plusieurs avis qui
portent que leur nombre s'étoit acru de moitié
en chemin , et qu'ils étoient arrivez dans le Daguestan
; qu'ils s'y étoient joints aux Lesghis,Sujets
du G.S. qui habitent une partie des Montagnes
dont toute cette Province est composée;que
ces deux Peuples devoient aller incessamment
savager ensemble les Frontieres de Perse de ce
côté-là , et que les Lesghis , de l'autre partie du
Daguestan , qui est sous la domination des Moscovites
s'étoient la plupart révoltez pour se
mettre sous celle de l'Empire Ottoman. On dou
te cependant encore ici de la certitude de ces
nouvelles , parce que l'Aga , qui est allé par
ordre de la Porte, accompagner les Tartares dans
leur marche , et qui est chargé d'en venir rendre
compte , ainsi que de leur arrivée en Perse , n'est
pas encore de retour à Constantinople.
J'ajouterai à l'occasion des Tartares , que de
puis quelques jours il en vient par troupes aux
"
H vj
environs
1866 MERCURE DE FRANCE
environs de cette Ville , où ils campent avec
leurs chevaux , dont chaque Tartare en a amené ,
cinq ou six avec lui , pour charger son butin . Ce
sont des Volontaires du Budgiak dans la Bessarabie
, commandez par des Mirzas , ou petits
Princes du Pays , qui sans ordre du Khan de la
Crimée ni de la Porte , se sont déterminez de
leur propre mouvement à aller chercher fortune
en Perse. On compte qu'ils seront sept ou huit
mille ; on les expedie ici à mesure qu'ils arrivent
après un séjour fort court , en leur donnant des
Lettres de recommandation et des ordres pour
les Pachas et autres Officiers du G. S. qui doivent
les secourir dans leur passage par terre en
Asie , et les employer où ils jugeront à propos.
On attend tous les jours de Perse , des nouvelles
d'une grande importance ; quant à present
il ne se peut rien dire de positif sur l'état où sont
les affaires des Turcs en ce Pays - là . On assure
seulement que Topal - Osman- Pacha , a dû partir
de Mossul avec une grosse Armée , munie de toute
sorte de provisions en abondance , le 19. de la
Lune de Muharem , ce qui revient au 3c . de Juin;
qu'il marchoit dans le dessein d'aller faire lever
le blocus de Bagdad , et de combattre Thamas
Kouli Khan , qui commande une Armée Persanne
, à la verité , fort superieure par le nombre
à celle des Turcs , mais fort inferieure pour
la bonté des Troupes.
Quoique Djanum- Codja ait été fait Capitan-
Pacha pour la troisième fois dès le · ƒ . May , il
n'arriva cependant ici que le 8. Juin , parce que
quelques jours avant qu'on lui rendît cette dignité
et qu'on le retirât de Lepante , dont il étoit
Pacha depuis sa derniere disgrace , il y a deux
ans , on l'avoit nommé Pacha de l'Isle de Negrepont
A O UST . 1733. 1867
grepont , et ensuite de celle de Candie , de sorte
qu'à peine fut-il arrivé à cette premiere Isle
qu'il eut ordre de passer en Candie , où deux
jours après son débarquement , il reçut de nouveaux
ordres pour venir incessamment à Constantinople
reprendre la Charge de Capitan-
Pacha.
Abdi-Capoudan est mort le 12. Juin ; c'étoit
un homme doux et fort raisonnable . De Capitaine
du Port qu'il étoit , quand la Révolution
de Constantinople arriva le 28. Septembre 1730.
le G. S. Achmet III . avant que d'être détrôné ,
le fit Capitan - Pacha , mais il ne resta en place
qu'environ un mois , et il fut envoyé Pacha à
Napoli de Romanie , d'où on l'avoit fait venirpour
exercer , par interim , les fonctions de Capitan-
Pacha , ce qu'il a fait quoiqu'accablé d'infirmitez
, depuis le 16. May jusqu'au jour que
Djanum -Codja est revenu en dernier lieu remplir
cette importante Charge.
Le 28. Juin , ce nouveau Capitan - Pacha fit ce
qu'on appelle ici sa Sortie , c'est - à- dire , qu'il
alla avec toutes les Galeres , saluer le G. S. qui .
étoit dans un Kiose ou Pavillon du Serrail , au
rez - de -chaussée , sur le bord de la Mer. Sa
Hautesse le fit revêtir , suivant la coûtume
d'une Félisse de Samour , et fit donner un Caftan
à chacun des Beys ou Capitaine des douze
Galeres qui avoient accompagné la Bastarde ,
que Djanum- Codja montoit , et qui est pour le
rang comme la Reale ou la Patrone en France.
Après quoi toutes ces Galeres ayant fait chacune
une décharge de son Artillerie en passant devant
le Kiosc du Sultan , elles allerent moüiller
le long du Canal de la Mer Noire , du côté
d'Europe , depuis l'entrée du Port jusqu'à Bechik-
Tach. Le
1868 MERCURE DE FRANCE
Le 2. de ce mois , Djanum - Codja est parti
avec 10. Galeres seulement , les trois autres qui
rentrerent dans le Port
ayant apparemment
une autre destination. On dit qu'il va visiter
les principales Isles de l'Archipel , et de - là pren
dre le commandement des Vaisseaux du G. S.
qui ont pris les devans en differens temps an
nombre de douze , qui doivent être joints par
les cinq Vaisseaux que les Algeriens ont sauvés
de leur nauffrage aux Isles de Mosconisy , et
par deux ou trois autres qu'on acheve d'armer
ici , et dont un a déja fait voile depuis le départ
de Djanum- Codja.
Le Sultan Hassan , fils du feu G. S. Mustapha
, frere du G. S. d'aujourd'hui , mourut le
3. de Juin dernier , jour de la Fête du petit Bairam
, d'une maladie , dont , comme il arrive
d'ordinaire à la mort de ses pareils, le Public n'a
pas été bien informé. On dit que ce Prince , qui
avoit environ 34. ans , étoit beau , grand et bien
fait. C'étoit le cadet de S. H. et l'aîné du Sultan
Soliman,qu'on dit être aussi fort aimable, et qui
est le dernier des Enfans de Mustapha détrôné
en 1703. Je suis , &c .
P. V. D.
Depuisle Le du mois de May dernier ,
Epuis la Lettre , Monsieur , que je vous
ou
je vous mandois que plus de 30000. Tartares
s'acheminoient vers la Perse par une nouvelle
route qu'ils s'étoient faite à travers les Rochers
du Mont Caucase , on a eu plusieurs avis qui
portent que leur nombre s'étoit acru de moitié
en chemin , et qu'ils étoient arrivez dans le Daguestan
; qu'ils s'y étoient joints aux Lesghis,Sujets
du G.S. qui habitent une partie des Montagnes
dont toute cette Province est composée;que
ces deux Peuples devoient aller incessamment
savager ensemble les Frontieres de Perse de ce
côté-là , et que les Lesghis , de l'autre partie du
Daguestan , qui est sous la domination des Moscovites
s'étoient la plupart révoltez pour se
mettre sous celle de l'Empire Ottoman. On dou
te cependant encore ici de la certitude de ces
nouvelles , parce que l'Aga , qui est allé par
ordre de la Porte, accompagner les Tartares dans
leur marche , et qui est chargé d'en venir rendre
compte , ainsi que de leur arrivée en Perse , n'est
pas encore de retour à Constantinople.
J'ajouterai à l'occasion des Tartares , que de
puis quelques jours il en vient par troupes aux
"
H vj
environs
1866 MERCURE DE FRANCE
environs de cette Ville , où ils campent avec
leurs chevaux , dont chaque Tartare en a amené ,
cinq ou six avec lui , pour charger son butin . Ce
sont des Volontaires du Budgiak dans la Bessarabie
, commandez par des Mirzas , ou petits
Princes du Pays , qui sans ordre du Khan de la
Crimée ni de la Porte , se sont déterminez de
leur propre mouvement à aller chercher fortune
en Perse. On compte qu'ils seront sept ou huit
mille ; on les expedie ici à mesure qu'ils arrivent
après un séjour fort court , en leur donnant des
Lettres de recommandation et des ordres pour
les Pachas et autres Officiers du G. S. qui doivent
les secourir dans leur passage par terre en
Asie , et les employer où ils jugeront à propos.
On attend tous les jours de Perse , des nouvelles
d'une grande importance ; quant à present
il ne se peut rien dire de positif sur l'état où sont
les affaires des Turcs en ce Pays - là . On assure
seulement que Topal - Osman- Pacha , a dû partir
de Mossul avec une grosse Armée , munie de toute
sorte de provisions en abondance , le 19. de la
Lune de Muharem , ce qui revient au 3c . de Juin;
qu'il marchoit dans le dessein d'aller faire lever
le blocus de Bagdad , et de combattre Thamas
Kouli Khan , qui commande une Armée Persanne
, à la verité , fort superieure par le nombre
à celle des Turcs , mais fort inferieure pour
la bonté des Troupes.
Quoique Djanum- Codja ait été fait Capitan-
Pacha pour la troisième fois dès le · ƒ . May , il
n'arriva cependant ici que le 8. Juin , parce que
quelques jours avant qu'on lui rendît cette dignité
et qu'on le retirât de Lepante , dont il étoit
Pacha depuis sa derniere disgrace , il y a deux
ans , on l'avoit nommé Pacha de l'Isle de Negrepont
A O UST . 1733. 1867
grepont , et ensuite de celle de Candie , de sorte
qu'à peine fut-il arrivé à cette premiere Isle
qu'il eut ordre de passer en Candie , où deux
jours après son débarquement , il reçut de nouveaux
ordres pour venir incessamment à Constantinople
reprendre la Charge de Capitan-
Pacha.
Abdi-Capoudan est mort le 12. Juin ; c'étoit
un homme doux et fort raisonnable . De Capitaine
du Port qu'il étoit , quand la Révolution
de Constantinople arriva le 28. Septembre 1730.
le G. S. Achmet III . avant que d'être détrôné ,
le fit Capitan - Pacha , mais il ne resta en place
qu'environ un mois , et il fut envoyé Pacha à
Napoli de Romanie , d'où on l'avoit fait venirpour
exercer , par interim , les fonctions de Capitan-
Pacha , ce qu'il a fait quoiqu'accablé d'infirmitez
, depuis le 16. May jusqu'au jour que
Djanum -Codja est revenu en dernier lieu remplir
cette importante Charge.
Le 28. Juin , ce nouveau Capitan - Pacha fit ce
qu'on appelle ici sa Sortie , c'est - à- dire , qu'il
alla avec toutes les Galeres , saluer le G. S. qui .
étoit dans un Kiose ou Pavillon du Serrail , au
rez - de -chaussée , sur le bord de la Mer. Sa
Hautesse le fit revêtir , suivant la coûtume
d'une Félisse de Samour , et fit donner un Caftan
à chacun des Beys ou Capitaine des douze
Galeres qui avoient accompagné la Bastarde ,
que Djanum- Codja montoit , et qui est pour le
rang comme la Reale ou la Patrone en France.
Après quoi toutes ces Galeres ayant fait chacune
une décharge de son Artillerie en passant devant
le Kiosc du Sultan , elles allerent moüiller
le long du Canal de la Mer Noire , du côté
d'Europe , depuis l'entrée du Port jusqu'à Bechik-
Tach. Le
1868 MERCURE DE FRANCE
Le 2. de ce mois , Djanum - Codja est parti
avec 10. Galeres seulement , les trois autres qui
rentrerent dans le Port
ayant apparemment
une autre destination. On dit qu'il va visiter
les principales Isles de l'Archipel , et de - là pren
dre le commandement des Vaisseaux du G. S.
qui ont pris les devans en differens temps an
nombre de douze , qui doivent être joints par
les cinq Vaisseaux que les Algeriens ont sauvés
de leur nauffrage aux Isles de Mosconisy , et
par deux ou trois autres qu'on acheve d'armer
ici , et dont un a déja fait voile depuis le départ
de Djanum- Codja.
Le Sultan Hassan , fils du feu G. S. Mustapha
, frere du G. S. d'aujourd'hui , mourut le
3. de Juin dernier , jour de la Fête du petit Bairam
, d'une maladie , dont , comme il arrive
d'ordinaire à la mort de ses pareils, le Public n'a
pas été bien informé. On dit que ce Prince , qui
avoit environ 34. ans , étoit beau , grand et bien
fait. C'étoit le cadet de S. H. et l'aîné du Sultan
Soliman,qu'on dit être aussi fort aimable, et qui
est le dernier des Enfans de Mustapha détrôné
en 1703. Je suis , &c .
P. V. D.
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Résumé : De Constantinople le 8. Juillet 1733.
Le 8 juillet 1733, des rapports indiquent que plus de 30 000 Tartares se dirigeaient vers la Perse en empruntant une nouvelle route à travers les rochers du Mont Caucase. Leur nombre aurait doublé en chemin, atteignant environ 60 000. Ils se sont alliés aux Lesghis du Daguestan, sujets du Sultan, pour attaquer les frontières persanes. Parallèlement, les Lesghis sous domination moscovite se sont révoltés pour se placer sous l'Empire Ottoman. Cependant, ces informations restent incertaines, car l'Aga envoyé pour accompagner les Tartares n'est pas encore revenu. Des Tartares volontaires du Budgiak en Bessarabie, commandés par des Mirzas, sont également arrivés à Constantinople. Ils sont environ 7 000 à 8 000 et ont été envoyés vers la Perse avec des lettres de recommandation et des ordres pour les Pachas. En Perse, Topal Osman Pacha a quitté Mossul avec une armée pour lever le blocus de Bagdad et combattre Thamas Kouli Khan, dont l'armée persane est plus nombreuse mais moins qualifiée. Djanum Codja a été nommé Capitain-Pacha pour la troisième fois le 1er mai et est arrivé à Constantinople le 8 juin. Abdi-Capoudan, ancien Capitain-Pacha, est décédé le 12 juin. Le 28 juin, Djanum Codja a effectué sa 'Sortie' avec les galères pour saluer le Sultan. Le Sultan Hassan, fils du défunt Mustapha et frère du Sultan actuel, est mort le 3 juin à l'âge de 34 ans. Djanum Codja est parti le 2 juillet avec 10 galères pour visiter les principales îles de l'Archipel et prendre le commandement des vaisseaux du Sultan.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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70
p. 1939-1948
PROBLÊME, Proposé aux Métaphysiciens Géometres, sur l'essence de la matiere.
Début :
On a beaucoup philosophé sur l'essence de la matiere ; par malheur [...]
Mots clefs :
Essence de la matière, Mouvement, Infini, Matière, Homme, Constantinople, Essence, Question, Étendue, Puissance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : PROBLÊME, Proposé aux Métaphysiciens Géometres, sur l'essence de la matiere.
PROBLEME ,
Proposé aux Métaphysiciens Géometres ;
sur l'essence de la matiere.
O
Na beaucoup philosophé sur l'essence
de la matiere ; par malheur
nous n'en connoissons guéres que les accidens.
On convient assez que la pesanteur
et la légéreté , la chaleur et le froid ,
la sécheresse et l'humidité , la dureté et
la liquidité , la couleur et l'invisibilité , le
mouvement même et le repos , et bien
d'autres qualitez de la matiere ne lui sont
qu'accidentelles. De sorte que la question
se réduit communément parmi les Philosophes
à prendre son parti entre ces
trois ou quatre propriétez , et à décider
laquelle est la principale et comme la racine
ou la base des autres.
Le sentiment Cartésien a comme prévalu
, et l'étendue passe pour constituer
l'essence de la matiere. Il y a eu bien des
disputes à ce sujet parmi les Métaphysiciens
qui n'ont été que Métaphysiciens ;
comme l'étenduë est toute du ressort de
la Géométrie , qui n'a proprement point
d'autre objet , j'ai crû pouvoir l'employer
pour
1940 MERCURE DE FRANCE
pour décider la question ; ceux à qui je la
propose, jugeront si j'y ai réüssi : J'entre
en matiere :
Il est possible que le même corps , supposons
celui d'un homme ; il est possible
que cet homme se trouve la même année
à Paris et à Constantinople. Il est trespossible
même qu'il s'y trouve dans l'espace
de six mois , et même de trois et
peut-être de deux.
Le mouvement de sa nature est susceptible
de plus et ,de moins à l'infini .
La nature est pleine de mouvemens tresrapides
; témoin un Boulet de Canon ,
les Planétes , le son , la lumiere. Cette lumiere
en particulier peut parcourir des
milliers de lieuës en une minute , en une
seconde; et à cette égard Dieu peut transporter
le corps d'un homme en un clin
d'oeil , d'un bout du monde à l'autre ; le
plus ou le moins de mouvement n'a rien
qui passe sa toute - puissance , et la matiere
n'a rien qui s'y refuse.
Reprenons donc , et en supposant un
mouvement toujours croissant par le
pouvoir de Dieu; il est vrai de dire qu'on
peut voir le même homme à Constantinople
et à Paris ; non - seulement dans la
même année, et dans le même mois , mais
dans la même semaine , dans le même
jour,
SEPTEMBRE. 1733. 1941
jour , dans la même heure , dans la même
minute , dans la même seconde , tierce
quarte , sixte , dixième , centiéme ,
milliéme , millioniéme , billioniéme, trillioniéme
, &c. cela va loin , et rien ne
l'arrête,
Or un Charbon enflammé qu'on remue
tres- vîte , paroît occuper tout un
grand espace ; la plupart des choses même
dont nous jouissons , que nous voyons,
que nous sentons , que nous touchons ,
nous n'en jouissons que par un mouvement
semé de mille interruptions , pareilles
à celle que nous concevons dans
l'étenduë qu'occupe sensiblement ou que
paroît occuper ce Charbon .
La vûe des corps en particulier se fait
par un mouvement intercalaire de vibration
, qui nous dérobe et nous rend
alternativement les objets.Comme les rerours
des
rayons sont tres- promts et que
les impressions durent toujours un peu ,
nous croyons voir ces objets d'une vûë
continue , sans aucune interruption.
Suivant cela , et supposant que Dieu
transporte sans cesse notre homme de
Paris à Constantinople , et de Constanti
nople à Paris ; quelqu'un qui seroit à
Constantinople , pourroit écrire à quelqu'un
qui seroit à Paris ; j'ai vû un tel , je
le
1942 MERCURE DE FRANCE
·
le vois tous les jours , il séjourne icy , il
loge avec moi , je mange avec lui, &c . et
celui de Paris pourroit en même temps
écrire dans les mêmes termes à celui de
Constantinople. On peut imaginer le jo
li Roman qui naîtroit de- là : Tout ce que
j'en remarque pour mon sujet présent ,
c'est que la chose est possible à Dieu ; ce
qui dit quelque chose à quiconque entend
bien ; mais la Géométrie va plus
loin dans la recherche de la vérité.
·
Plus ce mouvement de transport augmentera
par la toute puissante volonté
de Dieu , plus il sera exactement vrai .
de dire que l'homme en question est à
Constantinople et à Paris dans un mêmetems
, indivisible et continu . Or selon
les Elemens de la Géométrie de l'infini ,
de l'ingénieux M. de Fontenelle ( page
36. sect. 2. ) les Propriétez qui vont toujours
croissant dans le fini doivent dans
l'infini recevoir tout l'accroissement dont
elles sont capables ; donc le mouvement
en question croissant à l'infini , l'homme
susdit se trouvera exactement au même
instant indivisible à Constantinople ,
à Paris, dans tout l'entre deux , et en mille
autres Villes et Lieux de l'Univers ,
dans l'Univers même , tout entier si on
veut ce qu'il falloit démontrer.
Maïs
SEPTEMBRE. 1733. 1943
Mais , quoique le mouvement puisse
augmenter à l'infini , on va me nier, malgré
la certitude incontestable de ma conclusion
, qu'on puisse jamais supposer ce
mouvement infini. Les Géometres infinitaires
ne le nieront point. Et j'ai encore
pour garant la même section du même
ingénieux ouvrage , page 29. où il est dit
que toute la grandeur capable d'augmentation
à l'infini peut - être supposée au-
_gmentée à l'infini .
Ce principe est fort , j'en conviens ,
mais il est vrai , et même vrai- semblable,
c'est à dire , tout- à- fait plausible par un
autre principe du P. Castel , qui fait voir
dans sa Mathématique Universelle , que
l'infini Géométrique n'a rien que de naturel
et de facile , étant infini dans un
point de vûë , et tres-fini dans un autre
point de vûë ; que la ligne infinie n'est
qu'une surface finie , que la surface infinie
, n'est qu'un corps fini, qu'un nombre
infini n'est qu'une étendue finie , et qu'en
un mot , le du fini à l'infini ne
passage
se fait pas , comme l'insinue M. de Fontenelle
, et comme le prétend tour ouvertement
M. Cheyne , Anglois , par une
addition d'unitez , mais par une espece
d'exaltation d'une nature inférieure à
une nature superieure , comme de la ligne
à la surface , &c. De
1944 MERCURE DE FRANCE
De sorte que le mouvement infini n'est
plus un mouvement , mais la perfection
du mouvement ; et comme la racine , le
principe , la puissance du mouvement , le
mouvement en puissance , et l'étenduë
même ou l'espace avec un repos parfait de
parties. En effet ME : T. et plus T,
diminuë plus M. augmente , sans que E ,
varie. De sorte que T , étant o , alors
M∞ , et E = MOR , confor
mément aux principes de la Mathématique
universelle citée.
Le passage en question du fini à l'infini
n'a icy rien de plus extraordinaire que
ce raisonnement , où il est incontestable.
Je prends un écu , puis un demi écu , puis
un quart , un demi quart , un demi de
mi quart , & c. cela fait un mouvement
croissant , et qui peut toujours croître à
l'infini , ou bien par un mouvement instantanée
et infini , je prends d'un seul
deux écus ; cela va au même ; et que
sçait on même si ce n'est pas plutôt le
premier, que le second de ces mouvemens
qui est infini, au moins le premier ne finit
pas , et le second finit aussi -tôt.
coup
Que Dieu porte notre homme de Paris
à Constantinople , et de Constantinople
à Paris par un mouvement qui croisse
toujours ; c'est celui-là qui ne finit pas :
que
SEPTEMBRE. 1733. 1945
que ce mouvement porté tout d'un coup
à sa perfection, place cet homme dans les
deux Villes au même instant , il n'y a là
qu'un mouvement fini.
Quoiqu'il en soit , il est donc faux que
l'étenduë de la matiere soit déterminée
et qu'elle en soit l'essence immuable ; or
ce raisonnement Géométrique va à tout,
et en particulier à prouver qu'un même
corps peut être en deux, et en mille lieux
différens , sans être dans l'entre - deux ,
qu'il peut passer d'une extrêmité à l'au-
Tre sans passer par le milieu , qu'il peut
être dans un état de pénétrabilité , dans
un état d'indivisibilité , et qu'ainsi son
essence n'est pas non plus d'avoir des
parties ; qu'il peut être tout dans le tout,
et tout dans chaque partie. Encore une
fois , cela va loin , er tres- loin.
Mais si je dépouille ainsi la matiere de
ses propriétez les plus inhérentes , quelle
sera donc son essence ? Ce n'est pas moi
qui le dirai ; j'avoue bonnement que je
n'en sçais rien ; et c'est- là le Problême
que je propose aux Métaphysiciens Géomêtres.
En attendant cependant leur réponse ;
je ne laisse pas au milieu de tout ce dépouillement
de propriétez , de m'attacher
à une , à laquelle on n'a pas fait assez
1948 MERCURE DE FRANCE
sez d'attention dans la question présente;
c'est que la matiere est une substance passive
et tout-à- fait inactive ; ce qui la distingue
tout d'un coup de l'esprit, qui est
une substance active et libre. J'applique
ici un distinction insinuée dans l'Ouvrage
cité du P. Castel , et je dis que la matiere
est une possibilité , et l'esprit une puissance
; puissance participée dans les créatures
, absoluë , indépendante , infinie
incréée dans le Créateur.
Proposé aux Métaphysiciens Géometres ;
sur l'essence de la matiere.
O
Na beaucoup philosophé sur l'essence
de la matiere ; par malheur
nous n'en connoissons guéres que les accidens.
On convient assez que la pesanteur
et la légéreté , la chaleur et le froid ,
la sécheresse et l'humidité , la dureté et
la liquidité , la couleur et l'invisibilité , le
mouvement même et le repos , et bien
d'autres qualitez de la matiere ne lui sont
qu'accidentelles. De sorte que la question
se réduit communément parmi les Philosophes
à prendre son parti entre ces
trois ou quatre propriétez , et à décider
laquelle est la principale et comme la racine
ou la base des autres.
Le sentiment Cartésien a comme prévalu
, et l'étendue passe pour constituer
l'essence de la matiere. Il y a eu bien des
disputes à ce sujet parmi les Métaphysiciens
qui n'ont été que Métaphysiciens ;
comme l'étenduë est toute du ressort de
la Géométrie , qui n'a proprement point
d'autre objet , j'ai crû pouvoir l'employer
pour
1940 MERCURE DE FRANCE
pour décider la question ; ceux à qui je la
propose, jugeront si j'y ai réüssi : J'entre
en matiere :
Il est possible que le même corps , supposons
celui d'un homme ; il est possible
que cet homme se trouve la même année
à Paris et à Constantinople. Il est trespossible
même qu'il s'y trouve dans l'espace
de six mois , et même de trois et
peut-être de deux.
Le mouvement de sa nature est susceptible
de plus et ,de moins à l'infini .
La nature est pleine de mouvemens tresrapides
; témoin un Boulet de Canon ,
les Planétes , le son , la lumiere. Cette lumiere
en particulier peut parcourir des
milliers de lieuës en une minute , en une
seconde; et à cette égard Dieu peut transporter
le corps d'un homme en un clin
d'oeil , d'un bout du monde à l'autre ; le
plus ou le moins de mouvement n'a rien
qui passe sa toute - puissance , et la matiere
n'a rien qui s'y refuse.
Reprenons donc , et en supposant un
mouvement toujours croissant par le
pouvoir de Dieu; il est vrai de dire qu'on
peut voir le même homme à Constantinople
et à Paris ; non - seulement dans la
même année, et dans le même mois , mais
dans la même semaine , dans le même
jour,
SEPTEMBRE. 1733. 1941
jour , dans la même heure , dans la même
minute , dans la même seconde , tierce
quarte , sixte , dixième , centiéme ,
milliéme , millioniéme , billioniéme, trillioniéme
, &c. cela va loin , et rien ne
l'arrête,
Or un Charbon enflammé qu'on remue
tres- vîte , paroît occuper tout un
grand espace ; la plupart des choses même
dont nous jouissons , que nous voyons,
que nous sentons , que nous touchons ,
nous n'en jouissons que par un mouvement
semé de mille interruptions , pareilles
à celle que nous concevons dans
l'étenduë qu'occupe sensiblement ou que
paroît occuper ce Charbon .
La vûe des corps en particulier se fait
par un mouvement intercalaire de vibration
, qui nous dérobe et nous rend
alternativement les objets.Comme les rerours
des
rayons sont tres- promts et que
les impressions durent toujours un peu ,
nous croyons voir ces objets d'une vûë
continue , sans aucune interruption.
Suivant cela , et supposant que Dieu
transporte sans cesse notre homme de
Paris à Constantinople , et de Constanti
nople à Paris ; quelqu'un qui seroit à
Constantinople , pourroit écrire à quelqu'un
qui seroit à Paris ; j'ai vû un tel , je
le
1942 MERCURE DE FRANCE
·
le vois tous les jours , il séjourne icy , il
loge avec moi , je mange avec lui, &c . et
celui de Paris pourroit en même temps
écrire dans les mêmes termes à celui de
Constantinople. On peut imaginer le jo
li Roman qui naîtroit de- là : Tout ce que
j'en remarque pour mon sujet présent ,
c'est que la chose est possible à Dieu ; ce
qui dit quelque chose à quiconque entend
bien ; mais la Géométrie va plus
loin dans la recherche de la vérité.
·
Plus ce mouvement de transport augmentera
par la toute puissante volonté
de Dieu , plus il sera exactement vrai .
de dire que l'homme en question est à
Constantinople et à Paris dans un mêmetems
, indivisible et continu . Or selon
les Elemens de la Géométrie de l'infini ,
de l'ingénieux M. de Fontenelle ( page
36. sect. 2. ) les Propriétez qui vont toujours
croissant dans le fini doivent dans
l'infini recevoir tout l'accroissement dont
elles sont capables ; donc le mouvement
en question croissant à l'infini , l'homme
susdit se trouvera exactement au même
instant indivisible à Constantinople ,
à Paris, dans tout l'entre deux , et en mille
autres Villes et Lieux de l'Univers ,
dans l'Univers même , tout entier si on
veut ce qu'il falloit démontrer.
Maïs
SEPTEMBRE. 1733. 1943
Mais , quoique le mouvement puisse
augmenter à l'infini , on va me nier, malgré
la certitude incontestable de ma conclusion
, qu'on puisse jamais supposer ce
mouvement infini. Les Géometres infinitaires
ne le nieront point. Et j'ai encore
pour garant la même section du même
ingénieux ouvrage , page 29. où il est dit
que toute la grandeur capable d'augmentation
à l'infini peut - être supposée au-
_gmentée à l'infini .
Ce principe est fort , j'en conviens ,
mais il est vrai , et même vrai- semblable,
c'est à dire , tout- à- fait plausible par un
autre principe du P. Castel , qui fait voir
dans sa Mathématique Universelle , que
l'infini Géométrique n'a rien que de naturel
et de facile , étant infini dans un
point de vûë , et tres-fini dans un autre
point de vûë ; que la ligne infinie n'est
qu'une surface finie , que la surface infinie
, n'est qu'un corps fini, qu'un nombre
infini n'est qu'une étendue finie , et qu'en
un mot , le du fini à l'infini ne
passage
se fait pas , comme l'insinue M. de Fontenelle
, et comme le prétend tour ouvertement
M. Cheyne , Anglois , par une
addition d'unitez , mais par une espece
d'exaltation d'une nature inférieure à
une nature superieure , comme de la ligne
à la surface , &c. De
1944 MERCURE DE FRANCE
De sorte que le mouvement infini n'est
plus un mouvement , mais la perfection
du mouvement ; et comme la racine , le
principe , la puissance du mouvement , le
mouvement en puissance , et l'étenduë
même ou l'espace avec un repos parfait de
parties. En effet ME : T. et plus T,
diminuë plus M. augmente , sans que E ,
varie. De sorte que T , étant o , alors
M∞ , et E = MOR , confor
mément aux principes de la Mathématique
universelle citée.
Le passage en question du fini à l'infini
n'a icy rien de plus extraordinaire que
ce raisonnement , où il est incontestable.
Je prends un écu , puis un demi écu , puis
un quart , un demi quart , un demi de
mi quart , & c. cela fait un mouvement
croissant , et qui peut toujours croître à
l'infini , ou bien par un mouvement instantanée
et infini , je prends d'un seul
deux écus ; cela va au même ; et que
sçait on même si ce n'est pas plutôt le
premier, que le second de ces mouvemens
qui est infini, au moins le premier ne finit
pas , et le second finit aussi -tôt.
coup
Que Dieu porte notre homme de Paris
à Constantinople , et de Constantinople
à Paris par un mouvement qui croisse
toujours ; c'est celui-là qui ne finit pas :
que
SEPTEMBRE. 1733. 1945
que ce mouvement porté tout d'un coup
à sa perfection, place cet homme dans les
deux Villes au même instant , il n'y a là
qu'un mouvement fini.
Quoiqu'il en soit , il est donc faux que
l'étenduë de la matiere soit déterminée
et qu'elle en soit l'essence immuable ; or
ce raisonnement Géométrique va à tout,
et en particulier à prouver qu'un même
corps peut être en deux, et en mille lieux
différens , sans être dans l'entre - deux ,
qu'il peut passer d'une extrêmité à l'au-
Tre sans passer par le milieu , qu'il peut
être dans un état de pénétrabilité , dans
un état d'indivisibilité , et qu'ainsi son
essence n'est pas non plus d'avoir des
parties ; qu'il peut être tout dans le tout,
et tout dans chaque partie. Encore une
fois , cela va loin , er tres- loin.
Mais si je dépouille ainsi la matiere de
ses propriétez les plus inhérentes , quelle
sera donc son essence ? Ce n'est pas moi
qui le dirai ; j'avoue bonnement que je
n'en sçais rien ; et c'est- là le Problême
que je propose aux Métaphysiciens Géomêtres.
En attendant cependant leur réponse ;
je ne laisse pas au milieu de tout ce dépouillement
de propriétez , de m'attacher
à une , à laquelle on n'a pas fait assez
1948 MERCURE DE FRANCE
sez d'attention dans la question présente;
c'est que la matiere est une substance passive
et tout-à- fait inactive ; ce qui la distingue
tout d'un coup de l'esprit, qui est
une substance active et libre. J'applique
ici un distinction insinuée dans l'Ouvrage
cité du P. Castel , et je dis que la matiere
est une possibilité , et l'esprit une puissance
; puissance participée dans les créatures
, absoluë , indépendante , infinie
incréée dans le Créateur.
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Résumé : PROBLÊME, Proposé aux Métaphysiciens Géometres, sur l'essence de la matiere.
Le texte aborde un problème philosophique concernant l'essence de la matière, en se concentrant sur les propriétés accidentelles telles que la pesanteur, la chaleur, la dureté et le mouvement. Les philosophes discutent de quelle propriété est la principale. La théorie cartésienne, qui considère l'étendue comme l'essence de la matière, a été dominante. L'auteur propose d'utiliser la géométrie pour résoudre cette question. Pour illustrer son argument, l'auteur imagine un homme se déplaçant rapidement entre Paris et Constantinople, démontrant que le mouvement peut augmenter à l'infini. Il soutient que, grâce à la toute-puissance de Dieu, un corps peut être simultanément en plusieurs lieux. En se basant sur les principes géométriques de l'infini, il conclut que la matière peut être en plusieurs endroits à la fois, remettant ainsi en question l'idée que l'étendue est l'essence immuable de la matière. L'auteur affirme que la matière peut être pénétrable, indivisible et présente partout à la fois. Il conclut en posant la question de l'essence de la matière, soulignant que la matière est une substance passive et inactive, contrairement à l'esprit, qui est actif et libre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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71
p. 2469-2471
TURQUIE ET PERSE.
Début :
Selon quelques avis de Constantinople, le bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-Thamas, [...]
Mots clefs :
Thamas Kouli-Kan, Perse, Constantinople, Topal Osman Pacha, Ministres, Persans, Roi de Perse, Schach Tamas
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texteReconnaissance textuelle : TURQUIE ET PERSE.
TURQUIE ET PERSE.
Surat
Elon quelques avis de Constantinople , le
bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-
Thamas , Roy de Perse détrôné , s'étoit rendu à
Ispahan depuis la défaite de Thamas-Koulikan,
son Usurpateur, qu'il étoit remonté sur le Thrône
, et qu'il avoit écrit à Topal Osman , pour
l'assurer qu'il désiroit d'observer le dernier Traité
de Paix que ses Ministres avoient conclu avec
ceux de la Porte.
On a appris depuis de Constantinople que le
Grand Seigneur a fait part à tous les Ministres
Etrangers qui résident près S. H. de la Victoire
remportée par l'Armée Otthomane , sur celle de
Thamas
2470 MERCURE DE FRANCE
Thamas Kouli - Kan,et 300 des principaux d'entre
les Persans, qui ont été faits prisonniers dans
le combat , et que Topal Osman a fait conduire
dans cette Capitale , ont été exposez pendant
plusieurs jours dans la Grande Place , vis-à- vis
le Sérail.
Le 3 Septembre , il arriva un Courrier , par
lequel ce General mande à Sa Hautesse qu'on
n'étoit pas encore instruit du lieu où Thamas-
Kouli -Kan s'étoit retire depuis sa défaite , et
qu'Achmet , Pacha de Bagdad , avoit reçu avis
de divers endroits , que Schahp- Thamas étoit retourné
à Ispahan, et que la plus grande partie de
la principale Noblesse Persanne s'y étoit renduë
pour reconnoître son légitime Souverain.
Achmet- Pacha a écrit depuis au G. S. pour
l'informer qu'on assuroit que le Roy de Perse
faisoit tous ses efforts pour détruire l'opinion où
l'on est à Constantinople , que toutes les démar
ches de Thamas - Kouli -Kan ont été concertées
avec lui ; qu'il avoit pour cet effet éloigné
du Ministere tous les Parens et Amis de Thamas◄
Kouli-Kan qu'il avoit rappellé ceux que ce Ministre
avoit dépossédez , et qu'il devoit envoyer
des Ambassadeurs à S. H. pour la prier de ne
point faire porter ni à lui , ni à son Royaume
la peine de la perfidie d'un Sujet Rebelle , dont
al désaprouvoit la conduite , et de lui accorder
une suspension d'Armes , pendant laquelle les
Ministres de la Porte et les siens pûssent convenir
des moyens d'établir une Paix durable entre
les Turcs et les Persans. On ne croît pas que le
G. S. écoute aucune proposition d'accommodement,
à moins que Schaph Thamas ne consente de
lui livrer Thamas - Kouli - Kan .
L'Escadre que le G. S. avoit envoyée pour
escorter
NOVEM 5 K E. 1733. 2471
escorter celle d'Alger est de retour aux Darda
nelles , mais Dgianum Codgia n'est pas encore
arrivé .
Le bruit court qu'on doit faire des levées considérables
d'hommes dans tous les Païs de la ,
domination de S. H. et l'on ne dit point les rai
sons qui l'engagent à faire cette augmentation
dans ses Troupes.
Par les Lettres du 20 Septembre , on apprend
que Topal Osman s'étoit emparé de la Ville de
Tauris , après un Siége de quelques jours, et qu'il
en faisoit rafer les fortifications. On confirme que
l'Armée Persanne a été entierement dissipée , que
Thamas - Kouli -Kan s'est sauvé dans les Déserts
, et que le Roy de Perse devoit envoyer des
Ambassadeurs à la Porte, pour prier S. H.d'ou
blier des Actes d'Hostilité , ausquels il n'a e
aucune part , et pour signer une nouvelle Ratification
du dernier Traité conclu entre les Turcs
et les Persans.
Surat
Elon quelques avis de Constantinople , le
bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-
Thamas , Roy de Perse détrôné , s'étoit rendu à
Ispahan depuis la défaite de Thamas-Koulikan,
son Usurpateur, qu'il étoit remonté sur le Thrône
, et qu'il avoit écrit à Topal Osman , pour
l'assurer qu'il désiroit d'observer le dernier Traité
de Paix que ses Ministres avoient conclu avec
ceux de la Porte.
On a appris depuis de Constantinople que le
Grand Seigneur a fait part à tous les Ministres
Etrangers qui résident près S. H. de la Victoire
remportée par l'Armée Otthomane , sur celle de
Thamas
2470 MERCURE DE FRANCE
Thamas Kouli - Kan,et 300 des principaux d'entre
les Persans, qui ont été faits prisonniers dans
le combat , et que Topal Osman a fait conduire
dans cette Capitale , ont été exposez pendant
plusieurs jours dans la Grande Place , vis-à- vis
le Sérail.
Le 3 Septembre , il arriva un Courrier , par
lequel ce General mande à Sa Hautesse qu'on
n'étoit pas encore instruit du lieu où Thamas-
Kouli -Kan s'étoit retire depuis sa défaite , et
qu'Achmet , Pacha de Bagdad , avoit reçu avis
de divers endroits , que Schahp- Thamas étoit retourné
à Ispahan, et que la plus grande partie de
la principale Noblesse Persanne s'y étoit renduë
pour reconnoître son légitime Souverain.
Achmet- Pacha a écrit depuis au G. S. pour
l'informer qu'on assuroit que le Roy de Perse
faisoit tous ses efforts pour détruire l'opinion où
l'on est à Constantinople , que toutes les démar
ches de Thamas - Kouli -Kan ont été concertées
avec lui ; qu'il avoit pour cet effet éloigné
du Ministere tous les Parens et Amis de Thamas◄
Kouli-Kan qu'il avoit rappellé ceux que ce Ministre
avoit dépossédez , et qu'il devoit envoyer
des Ambassadeurs à S. H. pour la prier de ne
point faire porter ni à lui , ni à son Royaume
la peine de la perfidie d'un Sujet Rebelle , dont
al désaprouvoit la conduite , et de lui accorder
une suspension d'Armes , pendant laquelle les
Ministres de la Porte et les siens pûssent convenir
des moyens d'établir une Paix durable entre
les Turcs et les Persans. On ne croît pas que le
G. S. écoute aucune proposition d'accommodement,
à moins que Schaph Thamas ne consente de
lui livrer Thamas - Kouli - Kan .
L'Escadre que le G. S. avoit envoyée pour
escorter
NOVEM 5 K E. 1733. 2471
escorter celle d'Alger est de retour aux Darda
nelles , mais Dgianum Codgia n'est pas encore
arrivé .
Le bruit court qu'on doit faire des levées considérables
d'hommes dans tous les Païs de la ,
domination de S. H. et l'on ne dit point les rai
sons qui l'engagent à faire cette augmentation
dans ses Troupes.
Par les Lettres du 20 Septembre , on apprend
que Topal Osman s'étoit emparé de la Ville de
Tauris , après un Siége de quelques jours, et qu'il
en faisoit rafer les fortifications. On confirme que
l'Armée Persanne a été entierement dissipée , que
Thamas - Kouli -Kan s'est sauvé dans les Déserts
, et que le Roy de Perse devoit envoyer des
Ambassadeurs à la Porte, pour prier S. H.d'ou
blier des Actes d'Hostilité , ausquels il n'a e
aucune part , et pour signer une nouvelle Ratification
du dernier Traité conclu entre les Turcs
et les Persans.
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Résumé : TURQUIE ET PERSE.
À la fin août, des rumeurs à Surat indiquaient que Schah-Thamas avait repris le trône de Perse après la défaite de Thamas-Kouli-Kan. Schah-Thamas a affirmé vouloir respecter le traité de paix avec la Porte ottomane. L'armée ottomane a vaincu Thamas-Kouli-Kan, capturant ce dernier et 300 notables persans. Topal Osman a rapporté que Thamas-Kouli-Kan s'était enfui et que Schah-Thamas était retourné à Ispahan, soutenu par la noblesse persane. Achmet Pacha a informé le Grand Seigneur que Schah-Thamas cherchait à réfuter les accusations de complicité avec Thamas-Kouli-Kan et prévoyait d'envoyer des ambassadeurs pour négocier une paix durable. L'escadre ottomane revenue aux Dardanelles, des rumeurs de levées massives d'hommes circulaient. Topal Osman a pris la ville de Tauris, dispersant l'armée persane et forçant Thamas-Kouli-Kan à se réfugier dans les déserts. Schah-Thamas devait envoyer des ambassadeurs à la Porte pour demander une nouvelle ratification du traité de paix.
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72
p. 2819-2834
SECONDE Lettre de M. D. L. R. sur la Litterature des Mahometans, et sur celle des Turcs en particulier.
Début :
Je réponds, Monsieur, le plutôt qu'il m'est possible à la derniere Lettre que [...]
Mots clefs :
Littérature des mahométans, Turcs, Constantinople, Bibliothèque, Histoire, Ignorance, Sciences, Roi, Vérité, Paris, Levant, Lettres, Mosquée, Préjugé, Langues
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SECONDE Lettre de M. D. L. R. sur la Litterature des Mahometans, et sur celle des Turcs en particulier.
SECONDE Lettre de M. D. L. R.
sur la Litterature des Mahometans , et
sur celle des Turcs en particulier.
J
E réponds , Monsieur , le plutôt qu'il
m'est possible à la derniere Lettre que
vous m'avez fait l'honneur de m'écrire
de Constantinople le 30 Mars dernier ,
et je commence par l'Article le plus es
sentiel et que vous me recommandez
particulierement. Vous me demandez si
j'ai prétendu parler bien sérieusement ,
II. Vol.
2820 MERCURE DE FRANCE
du moins s'il n'y a rien d'exagéré dans
la Lettre qui concerne la Litterature des
Mahometans et celle des Turcs en particulier
, que vous avez lue dans le Mercure
de Septembre 1732. ajoûtant que
vous attendez ma réponse pour me développer
les Reflexions que vous avez
faites là-dessus et que dès à présent, c'està-
dire , sans attendre ma Réponse , vous
êtes dans le Préjugé general que les Turcs
sont d'une ignorance crasse ,
très- peu
curieux d'en sortir , &c.
Je vous dirai d'abord , Monsieur , que
j'ai écrit très sérieusement sur le sujet en
question , que je ne crois pas avoir rien
exageré et que je n'ai rien avancé sans
autorité , sur quoi je vous renvoye à ma
Lettre même du Mercure , sans préjudice
des autres autoritez que je puis encore
vous alleguer.
J'ajoûterai à cette affirmation que ce
n'est pas mon Voyage du Levant seul
qui m'a détrompé sur la prétendue ignorance
des Turcs ; je suis allé dans l'Orient
presque avec le même Préjugé où
vous êtes aujourd'hui , et que plusieurs
années de séjour n'ont pas encore détruit
chez vous , Préjugé , pour le dire
en passant , qui empêche , qui ôte l'envie
de s'instruire et de parvenir à la découverte
de la verité.
DECEMBRE . 1733. 2827
Mon voyage ne m'a donné là - dessus
qu'une premiere lueur , mais cette lueur
est devenue lumiere et certitude par les
lectures que j'ai faites depuis mon retour
des ouvrages des Mahometans Anciens et
Modernes , qui fe trouvent dans la Bibliotheque
du Roy et ailleurs , et par le
long commerce que j'ai eû avec plusieurs
sçavans d'élite en érudition orientale ,
qui ont passé une partie de leur vie dans
le Levant et qui sont morts à Paris dans
une haute réputation de vertu , et d'amour
pour la verité. Je n'en nommerai
ici que deux , sçavoir.
François Peris de la Croix Parisien
Sécretaire , Interprete du Roy pour les
Langues Orientales , Professeur en Arabe
au Collège Royal , mort sur la fin de
l'année 1713. M. Colbert le fit passer
dans fa jeunesse et séjourner fuccessivement
à Alep , à Hispaham , à Constantinople
, pour apprendre en perfection les
trois principales Langues , l'Histoire , les
Coutumes & c . des Nations du Levant.
Dans son instruction , dont j'ai une copie,
cette habile Ministre lui ordonne de
s'instruire particulierement à l'égard des
Sciences et des Arts cultivez dans ces differens
Pays. M. Petis en rapporta beaucoup
de doctrine Orientale , dequoi il a
?
11, Vol. donné
822 MERCURE DE FRANCE
·
donné des preuves toute sa vie , et plusieurs
Manuscrits utiles , dont il a tra
duit une bonne partie , entre lesquels est
la curieuse Bibliotheque de Hadgi Calfa,
Turc moderne de Constantinople , * qui
feule est capable de détruire le Préjugé
commun de la prétendue ignorance des
Mahometans & c .
Et Antoine Galland de Noyon , de
PAcadémie Royale des Inscriptions et
des Belles Lettres associé à celle des
Ricovrati de Padoue , Antiquaire du Roy,
Professeur en Arabe au Collège Royal ,
mort au mois de Février 1715 Il suivie
le Marquis de Nointel dans fon Ambassade
de Constantinople , dans son voyage
de la Palestine,et dans sa visite des Echelles
du Levant. De retour en France il fit
encore dux voyages à Constantinople
et au Levant par les ordres de M M. Col
* Ce seul Ouvrage peut détromper bien des gens,
et même quelques Sçavans , qui croyent que les
Turcs et autres Mahometans négligent les Sciences ,
trompez par des Voyageurs , qui ne sçackant pas les
Langues , n'ont pas på conferer avec les Sçavans
des l'ays qu'ils ont parcourus . Cette Bibliotheque
est une veritable Encyclopedie de toutes les Sciences
et de tous les Arts chez les Orientaux . Préface de
P'Histoire de Tamerlan , traduite du Persan pat
M. Peus de la Croix, et donnée au Public après
sa mort. 4. vol. 1 12. Paris 1722.
11. Vol. bert
DECEMBRE . 1733. 2823
1
bert er de Louvois , pour la recherche
des Medalles et des Manuscrits . ce qui
acheva de le perf.ctionner dans l'intelligence
des Langues , et dans la connoissance
de l'Histoire et de tout ce qui concerne
les Orientaux . Il étoit d'ailleurs bon
Critique , excellent Antiquaire et naturellement
Philofophe. Il a composé plusieurs
Ouvrages , dont quelques uns ont
été imprimez. De ses Manuscrits ceux
qui regardent l'Orient ont passé dans la
Bibliotheque du Roy. On lui doit l'Edition
de la Bibliotheque Crientale de
M. d'He belot , faite à Paris en 1697 ,
grand in fol.de 106 pag. et la belle Préface
qui est à la tête . a Preface dont la
(a) On fait quelque grace aux Arabes , et ils
passent pour avoir autrefois cult vé les Sciences aves
grande application. On attribue de la politesse aux
Per ans et on leur rend justice .Mais , par leur nom
seul , les Turcs sont tellement décriez , qu'il suffit
ordinairement de les nommer pour signifier une
Nation grossiere , barbare et d'une ignorance achevée
, et sous leur nom on entend parler de ceux qui
sont sous la domination de l'Empire Ottoman . Cependant
on leur fait injustice ; car sans s'arréter à
Les justifier ici de barbarie et de grossiereté , ce qui
demanderoit un détail .... On peut dire à l'égard
de l'ignorance , qu'ils ne cedent ni aux Arabės ni
aux Iersans dans les Sciences et dans les Belles- Lettrer
, communes à ces trois at.ons , et qu'ils les
cultivent presque dès le commencement de lcur Em-
II. Vol.
scule
2824 ME RCURE DE FRANCE
seule lecture est capable de détruire l'erreur
des Européens qui excluent la cul
ture des Sciences et des beaux Arts de
tout le Mahométisme.
Je pourrois , Monsieur , m'en tenir à
ces autoritez , persuadé qu'elles sont plus
que suffisantes pour confirmer tout ce
que j'ai avancé dans ma premiere Lettres
mais je ne puis omettre un troisiéme Témoin
qui se presente icy bien naturelle.
ment ; Témoin illustre et des plus recevables
sur le sujet qui est en question ;
c'est le fameux Comte de Marsigli, dort
on vient de publier un bel Ouvrage sur
l'Etat (a ) Militaire de l'Empire Ottoman ,
& c.
Ce Seigneur vint à Constantinople avec
pire. La Bibliotheque Orientale en fait foi, et observe
dans leur Histoire une suite continuelle de Docteurs
de leur Religion et de leur Loy , très fameux et
très estimez parmi eux , tant pa . leur Doctrine que
par leurs Ecrits. Ils ont aussi des Historiens trèscelebres
e: très - exacts des Actions de leurs Sultans ,
et on peut compter comme une marque de la délicatesse
de leur esprit le nombre considerable de leurs
Poëtes , qui montoit à 590. vers la fin du siecle
passé , & c. A. Galland , dans son Discours pour
servir de Préface à la Bibliotheque Orientale de
B. d'Herbelot.
(a ) STATO MILITARE dell' Imperio Ottomano
, &c. 1. vol . fol. A la Haye et à Amsterdam
1732.
11. Vol.
DECEM DK E. 1733. 2825
an Ambassadeur de la République de
Venise , n'étant encore âgé que de vingt
ans , dans le dessein de s'instruire à fond,
principalement sur le sujet que je viens
que
de dire , rempli auparavant des préjugez
ordinaires , & c . Il servit ensuite l'Empereur
dans les Guerres de Hongrie . Pris
par les Tartares,qui le vendirent au Pacha
de Témiswar , &c. il sçut mettre à profit
son infortune , pour acquerir toutes les
connoissances qui lui manquoient. Après
avoir recouvré sa liberté , il reprit ses
Emplois dans l'Armée Impériale , et il les
conserva jusqu'à la Paix de Carlowits
à laquelle il servit même utilement ; et ,
après la Paix il fut établi Commissaire
Général pour le Reglement des Limites.
Dans l'Ouvrage qui vient de paroître ,
où il ne s'agit rien moins que de Science
et de Litterature , l'Auteur n'a pû
s'empêcher de rendre là - dessus un témoignage
à la verité. Après avoir dépeint
les Turcs , qu'il dégrade tant qu'il
peut , indolens , mous , oisifs , sur tout
les Asiatiques , n'agissant que par nécessité
, &c. il se récrie contre nos préjugez
sur le point de leurs Etudes. Il par
fe de Constantinople et des autres grandes
Villes , » comme étant remplies de
Personnes instruites dans le Mahome-
II. Vol. Ꭰ tisme
2020 TRANCE
» tisme , qui sçavent au moins les trois
» Langues , le Turc , le Persan et l'A-
» rabe : Esprits cultivez en plus d'un gen-
» re de Litterature , Poëtes délicats , His-
» toriens polis , mais d'une exactitude ,
» scrupuleuse , et par là un peu ennuyeuxs
Dialecticiens subtils , Moralistes pro-
» fonds , Géomêtres , Astronomes , Géographes
, et par dessus tout grands Alchymistes
; ce qu'il a été en état , de :
» prouver par un Catalogue de plus de
» 86000 Ecrivains du dernier siécle , re
>> cueillis dans sa Bibliotheque de Boulogne
, et dont il à fourni une Copie:
» pour celle du Vatican . Si les Turcs
n'impriment pas , ce n'est pas , dit il ,
» qu'il ne leur soit libre de le faire ; leur
» motif est de ne pas empêcher une mul-
>> titude innombrable de Copistes de ga
» gner leur vie. On en comptoit 90009
>> pendant son séjour à Constantinople..
» Une autre sorte d'Etude , selon le mê
» me Auteur , c'est que nul Gouverne,
ment au monde n'est plus appliqué et
plus ponctuel que le Gouvernement
Turc , pour conserver des Registres
A
* Le Comte de Marsigli est de Boulogne , et y a
fondé une Académie . Il est des Académies Royales
des Sciences de Paris et de Montpellier , et de la
Societé Royale de Londres,
II. Vol exacts
DECEM DN E. 1733• 2027
exacts en tout ce qui regarde les Trai-,
a tez avec les Puissances Etrangeres , le..
» Domaine , le Cérémonial , l'Expédi
tion des Ordres , celles des Arrêts ou
Ordonnances et Commandemens ; l'E-
>> tat des Officiers en service , et singulie
☐rement les Finances.
Au reste , Monsieur , je vous connois
un si bon esprit , tant d'amour et de vénération
pour la vérité , pour me servir
de vos termes sur ce sujet , que je ne désespere
pas de vous voir changer un jour
de sentiment , sur tout si vous voulez
vous donner la peine d'apprendre seulement
le Turc , qui n'est pas une Langue
fort difficile, et dans laquelle je vous crois
déja initié;cela vous mettroit en état d'entrer
plus souvent dans cette grande Ville,
de laquelle vous êtes peut - être autant separé
par le préjugé , que par un petit bras
de Mer , et de vous instruire par vousmême
, en conferant avec les Gens de Lettres
, & c. Je ne doute pas que vous
in'ayez trouvé des Turcs d'une ignorance
crasse , et comme vous dites , tres- peu
curieux d'en sortir ; mais ce n'est pas
assez pour affirmet la même chose de
toute la Nation . Où ne trouve- t-on pas
dans l'Europe même , de la rusticité et de
l'ignorance ? On trouve aussi du goûr
II. Vol. Dij de
2808 MENCURE
de la Politesse , et de l'Erudition , quand
rien n'empêche d'en chercher. Mais en
voilà asez sur ce sujet.
Rien n'est plus sensé et plus dans le
vrai que ce que vous me dites , Monsieur,
sur l'impropriété du mot de Sophi , par
lequel les Ecrivains Européens , suivis en
dernier lieu par le a P. du Cerceau , désignent
le Roy de Perse. Vous convenez
qu'à ne consulter que la raison , cette
expression est tout- à fait vicieuse , comme
je l'ai prouvé dans un article de mes
Lettres , auquel votre politesse donne le
nom de Dissertation. La verité est qu'on
n'a point encore décidé dans les formes
que ce terme doive être proscrit parmi
ceux qui se piquent de parler correcte
ment mais en attendant cette décision ,
et malgré la continuation du mauvais
usage par des Ecrivains mal instruits , ou
entêtez , ibn'est pas moins certain qu'on
-he prescrit jamais contre la vérité et contre
la raison , et qu'il est toujours temps
de reclamer en leur faveur. L'usage ,j'en
-conviens ; décide le plus souvent en fait
de langue , au préjudice du bon sens et
des régles, mais c'est quand il ne s'agit
précisément que de la Grammaire. Icy il
( a ) Hissoire de la derniere Révolution de Perse
2 vol . in 12. Paris. 1728,
M. Vel.
s'agie
DECEMBRE . 1733. 2829
s'agit d'un point d'Histoire et de Critique.
J'espere m'étendre davantage sur
ce sujet dans un Ecrit que je prépare , et
qui soutiendra peut- être le titre que vous
voulez bien lui donner par avance .
J'ai enfin reçu depuis peu le beau Jusdam
, ou le Porte Lettres de fabrique
Turque , que vous m'aviez annoncé, orné
d'une broderie parlante ; et si cela se
peut dire , bien obligeante de la part de
ceux qui me font l'honneur de me l'envoyer.
Ils devoient en envoyer aussi l'interprétation
; car je ne sçai si nous aurons
bien réussi à expliquer les deux Vers Persans
qui sont si artistement brodez dessus.
C'est ce que vous pourrez faire examiner
par vos Experts . Voici comment
on a lû et interpreté icy cette galanterie
orientale.
Djah toй hemtchou ni i met ferdaous bi zevăl ,
Felicitas tua sicut gratia Paradisi sine defectu
Umr toй hemtchou middet eflāk bi chumăr,
Atas tua sicut spatium sæculorum sine numero.
On s'est servi de la Langue latine pour
mieux rendre l'original Persan , auquel
les Vers suivans , ajoutez par l'Autheur
ême de la Traduction , pourront servir
de Paraphrase :
II. Vol. Djij N...
2830 MERCURE DE FRANCE
N... qu'un bonheur durable
Soit compagnon de tes travaux ,
Qu'il soit exempt de tous les maux ,
Qu'aux biens du ciel il soit semblable.
Que des jours longs et gracieux
Rendenr ton sort digne d'envie ,
Que le terme du cours des Cieux
Soit aussi celui de ta vie.
J'ai reçu presque en même- tems et da
-même Païs , une très- belle Cornaline ,
qui à, sans doute, servi de Cachet à quelque
dévot Musulman de distinction , car
on y lit ces mots Arabes , tres-bien gravez
en caracteres Persans : Mazhar ila
faiz Aichay , c'est- à-dire , protegé par les
faveurs d'Aichay.
Aichay ou Aischah est une Personne
des plus respectables du Mahométisme
en qualité de troisiéme Femme de Mahomet
, et de Fille d'Abdallah , surnommé
depuis a Abubekre ou Pere de la Pudelle
, parce qu'à son exception , ce faux
Prophete n'a épousé que des Veuves . S'il
y a jamais eu des Héroïnes et des Femmes
sçavantes chez les Musulmans , cel
(a ) Abubckre , successeur immédiat de Mabomet
, et le premier des Califes.
11. Kola
k.
DECEMBRÉ . 1933 . 2831
le-cy doit être considérée comme la plus
celebre et la plus ancienne. Son autorité
dans la Religion fut grande de tout tems
parmi les Sunnites , ou les Orthodoxes
pour avoir retenu et transmis ce grand.
nombre de Paroles prétendues Remarquables
de Mahomet , et de Traditions ,
qui ont fait depuis un corps de Doctrine
appellé la Sunna. Aischah par cette raison
est souvent qualifiée de Nabiah ơs
de Prophétesse , et de Seddika , ou de témoin
fidele et authentique. Ils l'appel
lent aussi la Mere des Fidelles .
Sa renommée n'est gueres moins grande
dans l'Histoire du côté de la Politique
et du Gouvernement , et par la valeur
qu'elle fit enfin paroître à la fatale journée
du (a ) Chameau, dans la Bataille qu'elle
donna contre l'Armée d'Ali , pour vanger
la mort du Kalife - Othman , donnant
par sa présence et par son exemple le
mouvement et le courage à ses Troupes.
Bataille sanglante dans laquelle il y eut
près de zo mille Arabes de tuez sur la
place ; qu'elle perdit cependant avec sa
: ( a ) Ainsi nommée par les Historiens , à cause
du Chameau que montoit Aischah , lequel on ne
put jamais arrêter dans la mêlée , qu'en lui coupant
les Jarrets , ce qui donna lieu à la prise de la
Princesse , et à la déroute de son armée , c. )
II. Vol. D iiij.li2832
MERCURE DE FRANCE
liberté. Ali la lui rendit depuis , en la
renvoyant à Médine, où elle mourut l'an
58 de l'Hégire (a) , c'est à.dire fort âgée,
et fut inhumée auprès de Mahomet son
Epoux.
Je vous envoye avec plaisir, le Plan de
la Principale Face de la Mosquée de sainte
Sophie de Constantinople , gravé icy
par le Sr Surugue , Graveur du Roy , à
l'occasion duquel on a fait en peu de
mots la Description et l'Histoire de ce
fameux Temple, dans le II.Vol.du Mercure
de Juin 1732. Cette Description a
donné lieu à une Critique . M. A .. . de
Marseille , qui a séjourné à Constantinople
, soutient que l'eau de la Mer entre
dans les voutes souterraines , sur les
quelles tout l'Edifice est bâti , et qu'on
peut y aller en Batteau ; circonstance
qu'il ne falloit pas , dit-il , omettre dans
cette Description ; promettant de don
ner là-dessus un Ecrit , qu'il ne donne ce
pendant point.
J'admire , Monsieur , votre complaisance
, laquelle , quoique persuadé du
contraire , par la haute situation où se
trouve cette Mosquée , et par son grand
éloignement du Niveau de la Mer , vous
a porté à vouloir éclaircir ce fait extraor
(a ) 677 de JESUS -CHRIS T.
1x 11. Vol.
diDECEMBRE.
1733. 2833
'dinaire. Cet article de votre Lettre est
réjouissant ; il me semble vor ce vieux
Officier de la Mosquée , chargé du soin
de conduire par tout les Etrangers de
distinction , que vous avez consulté,douter
d'abord , si on lui parloit sérieusement
, puis hausser les épaules , éclater
de rire , et enfin après avoir repris son
sérieux , et bien promené sa main sur sa
barbe , vous assurer gravement qu'il n'y
avoit point d'autre Eau sous Sainte Sophie
, que celle d'une Citerne tres - spacieuse
, d'où on la tire pour l'usage des
Gens attachez au service de la Mosquée ,
par un Puits , dont l'ouverture est dans
le Temple même , et que le reste de ces
Voutes souterraines est divisé en plusieurs
Magazins remplis de Munitions de
Guerre , &c. Cet article mérite d'être
communiqué à M. A... si ses autres Mémoires
sur Constantinople ne sont pas
plus exacts , on ne lui conseille pas de les
mettre au jour.
Au reste j'ai été ravi de voir confirmer
par votre Officier de Sainte Sophie , tout
ce que Guillaume-Joseph Grelor, fameux
Ingénieur François , avoit déja dit de
Eaux souterraines de cette Mosquée
presque dans les mêmes termes , en mar
quant dans ses Plans , la Place précise
II. Vol Dv P
2834 MERCURE DE FRANCE
Puits , de la Citerne , des dégrez pour
descendre aux différens Robiners , & c,
Ce qui marque la grande exactitude de
ce Voyageur , envoyé exprès dans le Levant
par le feu Roy , et dont nous avons
un excellent Ouvrage sur Constantino
ple. Je suis , Monsieur , & c.
A Paris , ce fuillet 1733 .
sur la Litterature des Mahometans , et
sur celle des Turcs en particulier.
J
E réponds , Monsieur , le plutôt qu'il
m'est possible à la derniere Lettre que
vous m'avez fait l'honneur de m'écrire
de Constantinople le 30 Mars dernier ,
et je commence par l'Article le plus es
sentiel et que vous me recommandez
particulierement. Vous me demandez si
j'ai prétendu parler bien sérieusement ,
II. Vol.
2820 MERCURE DE FRANCE
du moins s'il n'y a rien d'exagéré dans
la Lettre qui concerne la Litterature des
Mahometans et celle des Turcs en particulier
, que vous avez lue dans le Mercure
de Septembre 1732. ajoûtant que
vous attendez ma réponse pour me développer
les Reflexions que vous avez
faites là-dessus et que dès à présent, c'està-
dire , sans attendre ma Réponse , vous
êtes dans le Préjugé general que les Turcs
sont d'une ignorance crasse ,
très- peu
curieux d'en sortir , &c.
Je vous dirai d'abord , Monsieur , que
j'ai écrit très sérieusement sur le sujet en
question , que je ne crois pas avoir rien
exageré et que je n'ai rien avancé sans
autorité , sur quoi je vous renvoye à ma
Lettre même du Mercure , sans préjudice
des autres autoritez que je puis encore
vous alleguer.
J'ajoûterai à cette affirmation que ce
n'est pas mon Voyage du Levant seul
qui m'a détrompé sur la prétendue ignorance
des Turcs ; je suis allé dans l'Orient
presque avec le même Préjugé où
vous êtes aujourd'hui , et que plusieurs
années de séjour n'ont pas encore détruit
chez vous , Préjugé , pour le dire
en passant , qui empêche , qui ôte l'envie
de s'instruire et de parvenir à la découverte
de la verité.
DECEMBRE . 1733. 2827
Mon voyage ne m'a donné là - dessus
qu'une premiere lueur , mais cette lueur
est devenue lumiere et certitude par les
lectures que j'ai faites depuis mon retour
des ouvrages des Mahometans Anciens et
Modernes , qui fe trouvent dans la Bibliotheque
du Roy et ailleurs , et par le
long commerce que j'ai eû avec plusieurs
sçavans d'élite en érudition orientale ,
qui ont passé une partie de leur vie dans
le Levant et qui sont morts à Paris dans
une haute réputation de vertu , et d'amour
pour la verité. Je n'en nommerai
ici que deux , sçavoir.
François Peris de la Croix Parisien
Sécretaire , Interprete du Roy pour les
Langues Orientales , Professeur en Arabe
au Collège Royal , mort sur la fin de
l'année 1713. M. Colbert le fit passer
dans fa jeunesse et séjourner fuccessivement
à Alep , à Hispaham , à Constantinople
, pour apprendre en perfection les
trois principales Langues , l'Histoire , les
Coutumes & c . des Nations du Levant.
Dans son instruction , dont j'ai une copie,
cette habile Ministre lui ordonne de
s'instruire particulierement à l'égard des
Sciences et des Arts cultivez dans ces differens
Pays. M. Petis en rapporta beaucoup
de doctrine Orientale , dequoi il a
?
11, Vol. donné
822 MERCURE DE FRANCE
·
donné des preuves toute sa vie , et plusieurs
Manuscrits utiles , dont il a tra
duit une bonne partie , entre lesquels est
la curieuse Bibliotheque de Hadgi Calfa,
Turc moderne de Constantinople , * qui
feule est capable de détruire le Préjugé
commun de la prétendue ignorance des
Mahometans & c .
Et Antoine Galland de Noyon , de
PAcadémie Royale des Inscriptions et
des Belles Lettres associé à celle des
Ricovrati de Padoue , Antiquaire du Roy,
Professeur en Arabe au Collège Royal ,
mort au mois de Février 1715 Il suivie
le Marquis de Nointel dans fon Ambassade
de Constantinople , dans son voyage
de la Palestine,et dans sa visite des Echelles
du Levant. De retour en France il fit
encore dux voyages à Constantinople
et au Levant par les ordres de M M. Col
* Ce seul Ouvrage peut détromper bien des gens,
et même quelques Sçavans , qui croyent que les
Turcs et autres Mahometans négligent les Sciences ,
trompez par des Voyageurs , qui ne sçackant pas les
Langues , n'ont pas på conferer avec les Sçavans
des l'ays qu'ils ont parcourus . Cette Bibliotheque
est une veritable Encyclopedie de toutes les Sciences
et de tous les Arts chez les Orientaux . Préface de
P'Histoire de Tamerlan , traduite du Persan pat
M. Peus de la Croix, et donnée au Public après
sa mort. 4. vol. 1 12. Paris 1722.
11. Vol. bert
DECEMBRE . 1733. 2823
1
bert er de Louvois , pour la recherche
des Medalles et des Manuscrits . ce qui
acheva de le perf.ctionner dans l'intelligence
des Langues , et dans la connoissance
de l'Histoire et de tout ce qui concerne
les Orientaux . Il étoit d'ailleurs bon
Critique , excellent Antiquaire et naturellement
Philofophe. Il a composé plusieurs
Ouvrages , dont quelques uns ont
été imprimez. De ses Manuscrits ceux
qui regardent l'Orient ont passé dans la
Bibliotheque du Roy. On lui doit l'Edition
de la Bibliotheque Crientale de
M. d'He belot , faite à Paris en 1697 ,
grand in fol.de 106 pag. et la belle Préface
qui est à la tête . a Preface dont la
(a) On fait quelque grace aux Arabes , et ils
passent pour avoir autrefois cult vé les Sciences aves
grande application. On attribue de la politesse aux
Per ans et on leur rend justice .Mais , par leur nom
seul , les Turcs sont tellement décriez , qu'il suffit
ordinairement de les nommer pour signifier une
Nation grossiere , barbare et d'une ignorance achevée
, et sous leur nom on entend parler de ceux qui
sont sous la domination de l'Empire Ottoman . Cependant
on leur fait injustice ; car sans s'arréter à
Les justifier ici de barbarie et de grossiereté , ce qui
demanderoit un détail .... On peut dire à l'égard
de l'ignorance , qu'ils ne cedent ni aux Arabės ni
aux Iersans dans les Sciences et dans les Belles- Lettrer
, communes à ces trois at.ons , et qu'ils les
cultivent presque dès le commencement de lcur Em-
II. Vol.
scule
2824 ME RCURE DE FRANCE
seule lecture est capable de détruire l'erreur
des Européens qui excluent la cul
ture des Sciences et des beaux Arts de
tout le Mahométisme.
Je pourrois , Monsieur , m'en tenir à
ces autoritez , persuadé qu'elles sont plus
que suffisantes pour confirmer tout ce
que j'ai avancé dans ma premiere Lettres
mais je ne puis omettre un troisiéme Témoin
qui se presente icy bien naturelle.
ment ; Témoin illustre et des plus recevables
sur le sujet qui est en question ;
c'est le fameux Comte de Marsigli, dort
on vient de publier un bel Ouvrage sur
l'Etat (a ) Militaire de l'Empire Ottoman ,
& c.
Ce Seigneur vint à Constantinople avec
pire. La Bibliotheque Orientale en fait foi, et observe
dans leur Histoire une suite continuelle de Docteurs
de leur Religion et de leur Loy , très fameux et
très estimez parmi eux , tant pa . leur Doctrine que
par leurs Ecrits. Ils ont aussi des Historiens trèscelebres
e: très - exacts des Actions de leurs Sultans ,
et on peut compter comme une marque de la délicatesse
de leur esprit le nombre considerable de leurs
Poëtes , qui montoit à 590. vers la fin du siecle
passé , & c. A. Galland , dans son Discours pour
servir de Préface à la Bibliotheque Orientale de
B. d'Herbelot.
(a ) STATO MILITARE dell' Imperio Ottomano
, &c. 1. vol . fol. A la Haye et à Amsterdam
1732.
11. Vol.
DECEM DK E. 1733. 2825
an Ambassadeur de la République de
Venise , n'étant encore âgé que de vingt
ans , dans le dessein de s'instruire à fond,
principalement sur le sujet que je viens
que
de dire , rempli auparavant des préjugez
ordinaires , & c . Il servit ensuite l'Empereur
dans les Guerres de Hongrie . Pris
par les Tartares,qui le vendirent au Pacha
de Témiswar , &c. il sçut mettre à profit
son infortune , pour acquerir toutes les
connoissances qui lui manquoient. Après
avoir recouvré sa liberté , il reprit ses
Emplois dans l'Armée Impériale , et il les
conserva jusqu'à la Paix de Carlowits
à laquelle il servit même utilement ; et ,
après la Paix il fut établi Commissaire
Général pour le Reglement des Limites.
Dans l'Ouvrage qui vient de paroître ,
où il ne s'agit rien moins que de Science
et de Litterature , l'Auteur n'a pû
s'empêcher de rendre là - dessus un témoignage
à la verité. Après avoir dépeint
les Turcs , qu'il dégrade tant qu'il
peut , indolens , mous , oisifs , sur tout
les Asiatiques , n'agissant que par nécessité
, &c. il se récrie contre nos préjugez
sur le point de leurs Etudes. Il par
fe de Constantinople et des autres grandes
Villes , » comme étant remplies de
Personnes instruites dans le Mahome-
II. Vol. Ꭰ tisme
2020 TRANCE
» tisme , qui sçavent au moins les trois
» Langues , le Turc , le Persan et l'A-
» rabe : Esprits cultivez en plus d'un gen-
» re de Litterature , Poëtes délicats , His-
» toriens polis , mais d'une exactitude ,
» scrupuleuse , et par là un peu ennuyeuxs
Dialecticiens subtils , Moralistes pro-
» fonds , Géomêtres , Astronomes , Géographes
, et par dessus tout grands Alchymistes
; ce qu'il a été en état , de :
» prouver par un Catalogue de plus de
» 86000 Ecrivains du dernier siécle , re
>> cueillis dans sa Bibliotheque de Boulogne
, et dont il à fourni une Copie:
» pour celle du Vatican . Si les Turcs
n'impriment pas , ce n'est pas , dit il ,
» qu'il ne leur soit libre de le faire ; leur
» motif est de ne pas empêcher une mul-
>> titude innombrable de Copistes de ga
» gner leur vie. On en comptoit 90009
>> pendant son séjour à Constantinople..
» Une autre sorte d'Etude , selon le mê
» me Auteur , c'est que nul Gouverne,
ment au monde n'est plus appliqué et
plus ponctuel que le Gouvernement
Turc , pour conserver des Registres
A
* Le Comte de Marsigli est de Boulogne , et y a
fondé une Académie . Il est des Académies Royales
des Sciences de Paris et de Montpellier , et de la
Societé Royale de Londres,
II. Vol exacts
DECEM DN E. 1733• 2027
exacts en tout ce qui regarde les Trai-,
a tez avec les Puissances Etrangeres , le..
» Domaine , le Cérémonial , l'Expédi
tion des Ordres , celles des Arrêts ou
Ordonnances et Commandemens ; l'E-
>> tat des Officiers en service , et singulie
☐rement les Finances.
Au reste , Monsieur , je vous connois
un si bon esprit , tant d'amour et de vénération
pour la vérité , pour me servir
de vos termes sur ce sujet , que je ne désespere
pas de vous voir changer un jour
de sentiment , sur tout si vous voulez
vous donner la peine d'apprendre seulement
le Turc , qui n'est pas une Langue
fort difficile, et dans laquelle je vous crois
déja initié;cela vous mettroit en état d'entrer
plus souvent dans cette grande Ville,
de laquelle vous êtes peut - être autant separé
par le préjugé , que par un petit bras
de Mer , et de vous instruire par vousmême
, en conferant avec les Gens de Lettres
, & c. Je ne doute pas que vous
in'ayez trouvé des Turcs d'une ignorance
crasse , et comme vous dites , tres- peu
curieux d'en sortir ; mais ce n'est pas
assez pour affirmet la même chose de
toute la Nation . Où ne trouve- t-on pas
dans l'Europe même , de la rusticité et de
l'ignorance ? On trouve aussi du goûr
II. Vol. Dij de
2808 MENCURE
de la Politesse , et de l'Erudition , quand
rien n'empêche d'en chercher. Mais en
voilà asez sur ce sujet.
Rien n'est plus sensé et plus dans le
vrai que ce que vous me dites , Monsieur,
sur l'impropriété du mot de Sophi , par
lequel les Ecrivains Européens , suivis en
dernier lieu par le a P. du Cerceau , désignent
le Roy de Perse. Vous convenez
qu'à ne consulter que la raison , cette
expression est tout- à fait vicieuse , comme
je l'ai prouvé dans un article de mes
Lettres , auquel votre politesse donne le
nom de Dissertation. La verité est qu'on
n'a point encore décidé dans les formes
que ce terme doive être proscrit parmi
ceux qui se piquent de parler correcte
ment mais en attendant cette décision ,
et malgré la continuation du mauvais
usage par des Ecrivains mal instruits , ou
entêtez , ibn'est pas moins certain qu'on
-he prescrit jamais contre la vérité et contre
la raison , et qu'il est toujours temps
de reclamer en leur faveur. L'usage ,j'en
-conviens ; décide le plus souvent en fait
de langue , au préjudice du bon sens et
des régles, mais c'est quand il ne s'agit
précisément que de la Grammaire. Icy il
( a ) Hissoire de la derniere Révolution de Perse
2 vol . in 12. Paris. 1728,
M. Vel.
s'agie
DECEMBRE . 1733. 2829
s'agit d'un point d'Histoire et de Critique.
J'espere m'étendre davantage sur
ce sujet dans un Ecrit que je prépare , et
qui soutiendra peut- être le titre que vous
voulez bien lui donner par avance .
J'ai enfin reçu depuis peu le beau Jusdam
, ou le Porte Lettres de fabrique
Turque , que vous m'aviez annoncé, orné
d'une broderie parlante ; et si cela se
peut dire , bien obligeante de la part de
ceux qui me font l'honneur de me l'envoyer.
Ils devoient en envoyer aussi l'interprétation
; car je ne sçai si nous aurons
bien réussi à expliquer les deux Vers Persans
qui sont si artistement brodez dessus.
C'est ce que vous pourrez faire examiner
par vos Experts . Voici comment
on a lû et interpreté icy cette galanterie
orientale.
Djah toй hemtchou ni i met ferdaous bi zevăl ,
Felicitas tua sicut gratia Paradisi sine defectu
Umr toй hemtchou middet eflāk bi chumăr,
Atas tua sicut spatium sæculorum sine numero.
On s'est servi de la Langue latine pour
mieux rendre l'original Persan , auquel
les Vers suivans , ajoutez par l'Autheur
ême de la Traduction , pourront servir
de Paraphrase :
II. Vol. Djij N...
2830 MERCURE DE FRANCE
N... qu'un bonheur durable
Soit compagnon de tes travaux ,
Qu'il soit exempt de tous les maux ,
Qu'aux biens du ciel il soit semblable.
Que des jours longs et gracieux
Rendenr ton sort digne d'envie ,
Que le terme du cours des Cieux
Soit aussi celui de ta vie.
J'ai reçu presque en même- tems et da
-même Païs , une très- belle Cornaline ,
qui à, sans doute, servi de Cachet à quelque
dévot Musulman de distinction , car
on y lit ces mots Arabes , tres-bien gravez
en caracteres Persans : Mazhar ila
faiz Aichay , c'est- à-dire , protegé par les
faveurs d'Aichay.
Aichay ou Aischah est une Personne
des plus respectables du Mahométisme
en qualité de troisiéme Femme de Mahomet
, et de Fille d'Abdallah , surnommé
depuis a Abubekre ou Pere de la Pudelle
, parce qu'à son exception , ce faux
Prophete n'a épousé que des Veuves . S'il
y a jamais eu des Héroïnes et des Femmes
sçavantes chez les Musulmans , cel
(a ) Abubckre , successeur immédiat de Mabomet
, et le premier des Califes.
11. Kola
k.
DECEMBRÉ . 1933 . 2831
le-cy doit être considérée comme la plus
celebre et la plus ancienne. Son autorité
dans la Religion fut grande de tout tems
parmi les Sunnites , ou les Orthodoxes
pour avoir retenu et transmis ce grand.
nombre de Paroles prétendues Remarquables
de Mahomet , et de Traditions ,
qui ont fait depuis un corps de Doctrine
appellé la Sunna. Aischah par cette raison
est souvent qualifiée de Nabiah ơs
de Prophétesse , et de Seddika , ou de témoin
fidele et authentique. Ils l'appel
lent aussi la Mere des Fidelles .
Sa renommée n'est gueres moins grande
dans l'Histoire du côté de la Politique
et du Gouvernement , et par la valeur
qu'elle fit enfin paroître à la fatale journée
du (a ) Chameau, dans la Bataille qu'elle
donna contre l'Armée d'Ali , pour vanger
la mort du Kalife - Othman , donnant
par sa présence et par son exemple le
mouvement et le courage à ses Troupes.
Bataille sanglante dans laquelle il y eut
près de zo mille Arabes de tuez sur la
place ; qu'elle perdit cependant avec sa
: ( a ) Ainsi nommée par les Historiens , à cause
du Chameau que montoit Aischah , lequel on ne
put jamais arrêter dans la mêlée , qu'en lui coupant
les Jarrets , ce qui donna lieu à la prise de la
Princesse , et à la déroute de son armée , c. )
II. Vol. D iiij.li2832
MERCURE DE FRANCE
liberté. Ali la lui rendit depuis , en la
renvoyant à Médine, où elle mourut l'an
58 de l'Hégire (a) , c'est à.dire fort âgée,
et fut inhumée auprès de Mahomet son
Epoux.
Je vous envoye avec plaisir, le Plan de
la Principale Face de la Mosquée de sainte
Sophie de Constantinople , gravé icy
par le Sr Surugue , Graveur du Roy , à
l'occasion duquel on a fait en peu de
mots la Description et l'Histoire de ce
fameux Temple, dans le II.Vol.du Mercure
de Juin 1732. Cette Description a
donné lieu à une Critique . M. A .. . de
Marseille , qui a séjourné à Constantinople
, soutient que l'eau de la Mer entre
dans les voutes souterraines , sur les
quelles tout l'Edifice est bâti , et qu'on
peut y aller en Batteau ; circonstance
qu'il ne falloit pas , dit-il , omettre dans
cette Description ; promettant de don
ner là-dessus un Ecrit , qu'il ne donne ce
pendant point.
J'admire , Monsieur , votre complaisance
, laquelle , quoique persuadé du
contraire , par la haute situation où se
trouve cette Mosquée , et par son grand
éloignement du Niveau de la Mer , vous
a porté à vouloir éclaircir ce fait extraor
(a ) 677 de JESUS -CHRIS T.
1x 11. Vol.
diDECEMBRE.
1733. 2833
'dinaire. Cet article de votre Lettre est
réjouissant ; il me semble vor ce vieux
Officier de la Mosquée , chargé du soin
de conduire par tout les Etrangers de
distinction , que vous avez consulté,douter
d'abord , si on lui parloit sérieusement
, puis hausser les épaules , éclater
de rire , et enfin après avoir repris son
sérieux , et bien promené sa main sur sa
barbe , vous assurer gravement qu'il n'y
avoit point d'autre Eau sous Sainte Sophie
, que celle d'une Citerne tres - spacieuse
, d'où on la tire pour l'usage des
Gens attachez au service de la Mosquée ,
par un Puits , dont l'ouverture est dans
le Temple même , et que le reste de ces
Voutes souterraines est divisé en plusieurs
Magazins remplis de Munitions de
Guerre , &c. Cet article mérite d'être
communiqué à M. A... si ses autres Mémoires
sur Constantinople ne sont pas
plus exacts , on ne lui conseille pas de les
mettre au jour.
Au reste j'ai été ravi de voir confirmer
par votre Officier de Sainte Sophie , tout
ce que Guillaume-Joseph Grelor, fameux
Ingénieur François , avoit déja dit de
Eaux souterraines de cette Mosquée
presque dans les mêmes termes , en mar
quant dans ses Plans , la Place précise
II. Vol Dv P
2834 MERCURE DE FRANCE
Puits , de la Citerne , des dégrez pour
descendre aux différens Robiners , & c,
Ce qui marque la grande exactitude de
ce Voyageur , envoyé exprès dans le Levant
par le feu Roy , et dont nous avons
un excellent Ouvrage sur Constantino
ple. Je suis , Monsieur , & c.
A Paris , ce fuillet 1733 .
Fermer
Résumé : SECONDE Lettre de M. D. L. R. sur la Litterature des Mahometans, et sur celle des Turcs en particulier.
La lettre de M. D. L. R., datée de 1732, répond à une missive reçue de Constantinople le 30 mars 1732, qui interrogeait la véracité de ses propos sur la littérature des Mahometans et des Turcs, publiés dans le Mercure de Septembre 1732. L'auteur affirme avoir écrit sérieusement et sans exagération, s'appuyant sur des autorités et ses propres lectures. Il mentionne que son voyage au Levant et ses lectures des ouvrages orientaux, ainsi que ses échanges avec des savants comme François Pétis de la Croix et Antoine Galland, l'ont détrompé sur l'ignorance supposée des Turcs. Ces savants ont rapporté des connaissances orientales et des manuscrits précieux, comme la Bibliothèque de Hadji Calfa, qui démontre la culture scientifique et artistique des Orientaux. L'auteur cite également le Comte de Marsigli, dont l'ouvrage sur l'État militaire de l'Empire Ottoman atteste de la culture et des études des Turcs. Il encourage son correspondant à apprendre le turc pour se rendre compte par lui-même de la richesse littéraire et scientifique de cette nation. La lettre se termine par une discussion sur l'impropriété du terme 'Sophi' pour désigner le roi de Perse et l'annonce de la réception d'un porte-lettres turc brodé. Le texte traite également de divers sujets historiques et culturels. Il commence par une traduction en vers français d'un texte persan souhaitant un bonheur durable et exempt de maux. Il mentionne une cornaline gravée en caractères persans, appartenant à un dévot musulman, avec l'inscription 'Mazhar ila faiz Aichay', signifiant 'protégé par les faveurs d'Aichay'. Aichay, ou Aïcha, est identifiée comme la troisième femme de Mahomet et la fille d'Abdallah, surnommé Abou Bakr. Elle est respectée pour son savoir et son rôle dans la transmission des paroles de Mahomet, ce qui lui vaut le titre de 'Mère des Fidèles'. Aïcha est également célèbre pour son intervention dans la bataille du Chameau contre l'armée d'Ali, après l'assassinat du calife Othman. Elle fut capturée et plus tard libérée par Ali, retournant à Médine où elle mourut à un âge avancé. Le texte aborde également la mosquée Sainte-Sophie à Constantinople, en mentionnant une critique de M. A... de Marseille, qui affirme que l'eau de la mer pénètre dans les voûtes souterraines de la mosquée. Cette affirmation est contestée par un officier de la mosquée et confirmée par les observations de Guillaume-Joseph Grelot, un ingénieur français. Le texte se termine par une confirmation de l'exactitude des descriptions de Grelot concernant les eaux souterraines et les installations de la mosquée.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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73
p. 2892-2900
AUTRE LETTRE de Constantinople du 18 Novembre 1733. Défaite de Thamas Kouli-Kan par Topal-Osman.
Début :
Plusieurs Tartares arrivez ici dans la nuit du 8. au 9. de ce mois, ont apporté la nouvelle [...]
Mots clefs :
Thamas Kouli-Kan, Topal Osman Pacha, Armée, Sérasker, Général, Hommes, Bagdad, Kerkout, Perse, Aghuans, Persans, Porte, Constantinople
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texteReconnaissance textuelle : AUTRE LETTRE de Constantinople du 18 Novembre 1733. Défaite de Thamas Kouli-Kan par Topal-Osman.
AUTRE LETTRE de Constantinople
du 18 Novembre 1733. Défaute de
Thamas Kouli - Kan par Topal Osman.
Plusieurs Tartares arrivez ici dans la nuit du
8. au 9. de ce mois , ont apporté la nouvelle .
d'une seconde victoire que Topal - Osman Pacha
Seraskier a remportée le 22. du mois passé.
Mais avant que d'en faire le récit , il est à propos
de reprendre les choses de plus loin et
de rapporter quelques faits qui ont precedé cer
Evenement, dont on a été d'autant plus surpris
qu'on n'avoit pas lieu de s'y attendre.
Depuis la défaite de Thamas- Kouli Kan , du
19. Juillet , et la levée du Blocus de Bagdad ,
qui deux jours après en fut le premier fruit , ce
General Persan, quoique dangereusement blessé ,
ayant gagné Amadan avec les debris de son Armée,
paroissoit y vouloir demeurer sur la deffensive,
soit par les soins qu'il prenoit de fortifier cette
Place et quelques autres aux environs , soit par
II. Vel - Je
DECEMBRE. 1733. 2893
le peu de monde qui lui restoit en état de servir.
Il est vrai que quelque temps après sa retraite
à Amadan il écrivit à Acmet - Pacha, Gouverneur
de, Bagdad , que malgré les désavantages qu'il
avoit eus cette année , il ne se tenoit pas pour
tout-à- fait vaincu , qu'il reconnoissoit les fautes
qu'il avoit commises , et qu'il n'y retomberoit
plus ; mais que comme il vouloit faire la guerre
noblement , il le prévenoit d'avance qu'au Printemps
prochain il se remettroit en campagne
avec une Armée plus nombreuse que celle qu'il
avoit perdue , et qu'il l'iroit trouver à Bagdad.
Ces menaces pouvant être regardées comme
des rodomontades , sur tout de la part d'un homme
aussi va n que l'est Kouli - Kan , et ne devant
pas d'ailleurs s'executer si - tôt , on n'avoit
pas sujet d'en craindre des effets prochains.
Achmet-Pacha cependant ne laissa pas de redoubler
son attention pour ravitailler sa Place
et la mettre en état de soutenir un second Siege,
autant que le Pais des environs qui est entiererement
ruiné à plus de 20. lieues à la ronde , et
les autres circonstances où il se trouvoit , pouvoient
le lui permettre ; et Topal Osman , qui
de son côté ne pouvoit , faute de munitions ,
tenter de nouvelles conquêtes , se borna à envoyer
Poulac Pacha avec 6000. hommes s'emparer
de Takaya ou Tayon , suivant la Carte de
M. de Lisle , Défilé dans des Montagnes , par où
il faut absolument passer pour venir d'Amadan
sur les Terres de Turquie. Ensuite divisant son
Armée en plusieurs corps pour la faire plus aisément
subsister, il se retira à Kerkout,à cinq journées
de ce passage, avec environ trente mille hommes
seulement , qu'il disposa dans les lieux cir-
Convoisins , n'en gardant avec lui qu'un petit
II. Vol. nombre
2894 MERCURE DE FRANCE
nombre pour servir de garnison à cette Forteresse.
Les choses étoient dans cet état quand le Seraskier
eut avis que le fils de Thamas Kouli-Kan
amenoit au Candahar quarante mille Aghuans à
son pere , il en informa aussi-tôt la Porte par
un Courier qu'il dépêcha , et representa , comme
il l'avoit déja fait plusieurs fois , la necessité
qu'il y avoit d'envoyer en Perse de prompts secours
d'hommes , d'argent et de vivres , et il demanda
en même - temps qu'en consideration de
sa vieillesse et de ses infirmitez , on lui permit
de se démettre de la Charge de Séraskier, en faveur
d'Achinet Pacha , qui étoit plus en état que
lui de la remplir dignement.
Le G. S. deferant à ses prieres , et ne voulant
pourtant pas qu'is se retirat entierement du service
, l'avoit nonmé Pacha de Cutaya'; Ville
d'Asie , à trois journées de Constantinople , et
Beyglerbey de Natolie ; l'expedition des ordres
pour ces nouveaux arrangemens , étoit même
déja prête à partir , lorsque la Porte reçut de
nouvelles Lettres de Topal- Osman , par lesquel
les il mandoit que les Persans avoient forcé le
passage de Takaya , et que leur General s'avançoit
vers lui avec une nombreuse Armee de Cavalerie
, sur quoi il renouvelloit ses instances
pour l'envoi des secours qu'il avoit demandez.
On tint sur ce sujet un Grand- Conseil au Sérail
le premier de ce mois , mais les résolutions
qu'on y prit furent tenues si secrettes , que le
Public ne fut pas même informé alors de la nouvelle
pour laquelle ce Conseil avoit été assemblé.
On scut seulement qu'on y avoit décidé de sus
pendre l'execution des ordres dont j'ai parlé cy
dessus et que Topal -Osman continueroit à com
nander l'Armée Ottomane en Perse.
DECEMBRE . 1733. 2895
>
Venons à Kouli - Kan ; les Aghuans que conduisoit
son fils , l'ayant joint à Amadan , il en
partit peu de jours après avec so. à 60. mille
hommes de Cavalerie , dont il fit prendre les devans
20. mille pour se saisir du défilé de Takaya.
Poulac Pacha , à qui , comme on l'a dit ,
la garde en avoit été confiée soit qu'il cut
négligé de s'y fortifier , ou qu'il eût été surpris
all'improviste , soit qu'il ne lui parût pas possible
de résister à l'Armée Persane , que de faux avis
lui avoient fait monter à 200. milie Combatans ;
Poulac- Pacha , dis je , à la vue des 20. mille
Aghuans qui venoient l'attaquer , prit la fuite et
se sauva , à la verité , avec presque tout son
monde , mais sans pouvoir rien emporter de son
Camp , qu'il abandonna.
Dès que Topal - Osman le vit arriver en
fuyard à Kerkout , il fut si indigné contre lui ,
et sur tout de ce qu'il n'avoit pas eu le soin de
prendre de plus exactes informations sur le veritable
nombre des ennemis, qu'il vouloit lui taire
couper la tête. Cependant tant de gens de cousidération
se jetterent à ses pieds , pour lui demander
la grace de cet infortuué Pacha , en lui
rappellant les marques éclatantes , qu'il avoit
données de sa bravoure dans la Bataille du 19 Juil.
let qu'enfin le Seraskier se laissa fléchir; mais prévoyant
bien qu'il alloit se trouver dans de grands
embarras , que le danger étoit pressant , et qu'il
ne devoit pas compter sur les secours qu'il avoit
si souvent sollicitez à la Porte , il se tourna du
côté des Arabes du voisinage dont il demanda
l'assistance et dont plusieurs Cheiks , ou Commandants
lui ammenerent sept à huit mille
hommes. Il rapella en même tems le plus de
Troupes Ottomanes qu'il put rassembler , sor-
I. Vol.
2896 MERCURE DE FRANCE
氧
tit de Kerkout , mit son Armée en Bataille devant
cette place ; et fit faire de bons retranchemens
, boracz de 60 piéces de Canons.
Il étoit encore occupé à fortifier son Camp ,
lorsqu'un exprès du General de Perse lui en apporta
une Lettre , par laquelle cet orgueilleux
ennemi marquoit qu'il marchoit à lui , et que
non -seulemene il enleveroit sa petite Armée ,
mais qu'il l'enleveroit lui même comme un enfant
avec son Bechik. Pour entendre la mauvaise
plaisanterie que ce mot Persan renferme , il faut
sçavoir qu'il signifie tout à la fois , Berceau et
Litiere , et que Topal Osman à cause de ses infirmitez
est obligé depuis long- tems à se servir
de cette voiture.
Le Seraskier ne répondit autre chose à cette
Lettre insultante , sinon qu'il étoit boiteux ,
vieux , et malade qu'il ne pouvoit aller au devant
de Kouli- Kan, mais qu'il l'attendoit et que
/ Dieu décideroit de tout.
Ce dernier continuant sa route passa près de
Bagdad sans s'arrêter , comptant toujours que
cette place ne pouroit manquer de tomber entre
ses mains , dès qu'il auroit battu les Turcs ,
comme il s'en flatoit : mais on dit qu'il surprit
tine fort grosse Caravane qui sortoit de cette
Ville , et qui étant destinée pour Alep , Smirne,
et Constantinople , étoit d'autant plus riche que
ceux qui l'avoient formée , croyant leurs effets
en sureté sur la route , depuis la défaite et la
retraite des Persans , ils avoient fait des envoys
considerables de Marchandises précieuses pour
se dédommager de la longue interruption de leur
commerce.
Enfin Kouli- Kan venant à paroître à la veuë
de Kerkout , le 22 Octobre Topal - Osman le
II. Vol. laissa
DECEMBRE . 1733. 2897
laissa approcher de ses retranchemens jusqu'à la
portée du fusil : il fit faire alors une décharge
de toute son Artillerie chargée à mitraille , et de
toute sa Mousqueterie , ce qui commença à
jetter un grand désordre dans l'Armée Persane , )
il dit à ses Soldats qu'il n'avoit rien à leur commander
; qu'ils étoient bien retranchez et qu'ils
pouvoient se tenir sur la deffensive ; mais qu'il
permettroit volontiers de sortir du Camp à tous
ceux qui auroient assez de valeur pour aller atta
quer l'ennemi . A ce discours , les Jannissaires
du Caire , et quelques Corps de Romelie qui ne
s'étoient point trouvez à l'Action du 19 Juillet
se piquerent d'honneur ; et secondez par quelques
autres Troupes et par les Arabes , ils fondirent
avec furie sur les Persans . Il faisoit beaucoup
de poussiere , un gros brouillard et un
vent qui soufloit la poudre aux yeux de ceux ci,
dont les Turcs tirerent un grand avantage.
›
Après quatre heures d'un combat opiniâtre ,
le Seraskier s'appercevant que ses Troupes prenoient
le dessus , il fit ordonner à tout ce qui
lui en restoit dans le Camp , de venir partager
le péril et la gloire de cette journée. Ce renfort
redoubla le courage des Turcs et acheva d'abbattre
celui des Persans : ils prirent enfin la fuite,
laissant 6000 des leurs sur la Place , dont on apporta
les têtes aux pieds de Topal - Osman , ct
trois mille Prisonniers , parmi lesquels on dit ,
que sont le Beau- pere et le neveu de Kouli - Kan
avec plusieurs Seigneurs de marque.
> Le Seraskier les ayant fait venir devant lui
leur demanda comment leur General après avoir
été si bien battu auprès de Bagdat, étoit revenu
le chercher avec tant de diligence ? Seigneur
lui répondirent- ils , Thamas Kouli - Kan n'a d'a-
II. Vol. G bord .
288 MERCURE DE FRANCE
,
bord fait cette démarches que sur les assurances
qu'on lui avoit données de plusieurs endroits que
vous étiez mort et dans la persuasion où il étoit
qu'un Chef tel que vous manquant à l'Armée Ottomane
, il en triompheroit aisément , et qu'ensuite il
ne trouveroit que de foibles obstacles à s'emparer de
Bagdad. Il a bien reconnu depuis , qu'on lui en
avoit imposé , mais il n'a pú se résoudre à reculer,
et il s'est d'ailleurs fié en son courage et à celui des
Aghuans , avec lesquels il a ci- devant remporté
beaucoup de Victoires ,
Il est à remarquer qu'aussi - tôt qu'Achmet Pacha
eût apris que Polac Pacha avoit abandonné le defilé
de Taxaya , il se pressa de faire entrer dans sa
Place tout ce qu'il put ramasser d'utile , et de faire
fermer les Portes , ne doutant pas que Kouli - Kan
ne vint en renouveler le blocus . Il régaloit même
dans ce moment le Buyuk Imbrohor , ou grand
Ecuyer du G.S.qui étoit sur le point de partir pour
revenir à Constantinople ; et iui ayant represen
té le risque qu'il y auroit pour lui sur le chemin
de Bagdad à Kerkout , qui devoit être alors infesté
de partis Ennemis , il lui fit prendre la route
de Mossul par le desert. Topal - Osman en
ayant été informé , envoya à ce Grand - Ecuyer
une Relation de l'Affaire qu'on vient de raconter ,
avec ordre de la faire passer incessamment à la
Porte , et d'attendre encore de ses nouvelles à
Mossul.
On présume de - là , qu'apparemment le Seraskier
veut lui faire remettre avec sureté le Beaupere
et le neveu de Kouli- Kan , avec les autres
Prisonniers de distinction , pour qu'il les conduise
et les présente lui - même au G. S.
Comme suivant quelques avis Kouli-Kan
après cette derniere déroute . s'étoit arrêté à
II. Vol. Leilan
DFCEMBRE. 1733. 2899
>
Leilan qui n'est qu'à cinq lieues de Kerkout
et qu'on craint avec raison qu'il ne veuille encore
tenter le sort des Armes , la Porte a dépêché un
Courier à Demir Pacha qui commiande 40
mille hommes aux environs de Tauris , avec ordre
de marcher en diligence avec les Tartares
qui sont passez en Perse , lesquels l'auront joint
vers les lieux où l'Armée de Kouli - Kan sera
campée.
Quoique cette nouvelle Victoire de Topal-
Osman soit encore plus glorieuse pour lui que la
premiere , on n'a cependant point tiré le Canon
ici , comme il est d'usage en pareil cas , parce
qu'on attend, dit - on , l'arrivée du Buyuk Imbrohor,
ou celle de quelque personne qui vienne directement
de la part du Seraskier.
Du 18 Novembre 1733.
P. V. D.
Comme j'allois fermer mon paquet , Monsieur,
on m'est venu dire une nouvelle de la derniere
importance pour cet Empire ; sçavoir , que Topal-
Osman Pacha étant allé attaquer Thamas
Kouli- Kan à Leilan , où je vous ai marqué qu'il
s'étoit arrêté , après sa dérouté du 22 Octobre ,
les Aghuans qui composoient la meilleure partie
de l'Armée Persane, avoient ployé leurs Etendarts
et s'étoient venus rendre à Topal - Osman , que
Kouli-Kan trop affoibli par cette désertion
pour pouvoir resister aux Turcs , avoit pris la
fuite vers la Perse avec environ 10000 hommes
qui lui restoient , que Topal - Osman l'avoit fait
suivre par Menis Pacha à la tête d'un gros
Corps de Troupes , et avoit donné ordre en
même tems aux Curdes de s'emparer d'un defilé
par où il falloit necessairement que les Persans
II. Vol.
Gij
passassent
2000 MERCURE DE FRANCE
>
passassent; que leur General se voyant prêt d'être
assailli par devant et par derriere , sans espérance
de pouvoir échapper , avoit écrit une Lettre
à Topal- Osman , par laquelle il se confessoit
vaincu et lui demandoit la Paix à telles conditions
qu'il voudroit lui imposer , mais que le
Seraskier lui avoit répondu que le regardant
comme un Rebelle , il ne vouloit traiter en aucune
façon avec lui ; enfin que suivant l'extre
mité ou Kouli- Kan étoit réduit au depart des
trois Couriers qui ont apporté cette nouvelle
ce matin , ce General Persan doit avoir été pris
depuis avec le reste de son Armée.
On a tenu ici sur le champ un Conseil general
au Serail , dans lequel il a été résolu d'envoyer
sans délai des pleins pouvoirs à Topal - Osman ,
pour traiter de la Paix avec des Ministres du léitime
Souverain de Perse , que l'on dit être un
jeune Fils de Schah - Thamas , ce dernier étant
à ce que l'on ajoute , et avec ordre de
n'écouter aucune proposition de la part de Thamas
Kouli- Kan,
mort ,
P. V. D.
du 18 Novembre 1733. Défaute de
Thamas Kouli - Kan par Topal Osman.
Plusieurs Tartares arrivez ici dans la nuit du
8. au 9. de ce mois , ont apporté la nouvelle .
d'une seconde victoire que Topal - Osman Pacha
Seraskier a remportée le 22. du mois passé.
Mais avant que d'en faire le récit , il est à propos
de reprendre les choses de plus loin et
de rapporter quelques faits qui ont precedé cer
Evenement, dont on a été d'autant plus surpris
qu'on n'avoit pas lieu de s'y attendre.
Depuis la défaite de Thamas- Kouli Kan , du
19. Juillet , et la levée du Blocus de Bagdad ,
qui deux jours après en fut le premier fruit , ce
General Persan, quoique dangereusement blessé ,
ayant gagné Amadan avec les debris de son Armée,
paroissoit y vouloir demeurer sur la deffensive,
soit par les soins qu'il prenoit de fortifier cette
Place et quelques autres aux environs , soit par
II. Vel - Je
DECEMBRE. 1733. 2893
le peu de monde qui lui restoit en état de servir.
Il est vrai que quelque temps après sa retraite
à Amadan il écrivit à Acmet - Pacha, Gouverneur
de, Bagdad , que malgré les désavantages qu'il
avoit eus cette année , il ne se tenoit pas pour
tout-à- fait vaincu , qu'il reconnoissoit les fautes
qu'il avoit commises , et qu'il n'y retomberoit
plus ; mais que comme il vouloit faire la guerre
noblement , il le prévenoit d'avance qu'au Printemps
prochain il se remettroit en campagne
avec une Armée plus nombreuse que celle qu'il
avoit perdue , et qu'il l'iroit trouver à Bagdad.
Ces menaces pouvant être regardées comme
des rodomontades , sur tout de la part d'un homme
aussi va n que l'est Kouli - Kan , et ne devant
pas d'ailleurs s'executer si - tôt , on n'avoit
pas sujet d'en craindre des effets prochains.
Achmet-Pacha cependant ne laissa pas de redoubler
son attention pour ravitailler sa Place
et la mettre en état de soutenir un second Siege,
autant que le Pais des environs qui est entiererement
ruiné à plus de 20. lieues à la ronde , et
les autres circonstances où il se trouvoit , pouvoient
le lui permettre ; et Topal Osman , qui
de son côté ne pouvoit , faute de munitions ,
tenter de nouvelles conquêtes , se borna à envoyer
Poulac Pacha avec 6000. hommes s'emparer
de Takaya ou Tayon , suivant la Carte de
M. de Lisle , Défilé dans des Montagnes , par où
il faut absolument passer pour venir d'Amadan
sur les Terres de Turquie. Ensuite divisant son
Armée en plusieurs corps pour la faire plus aisément
subsister, il se retira à Kerkout,à cinq journées
de ce passage, avec environ trente mille hommes
seulement , qu'il disposa dans les lieux cir-
Convoisins , n'en gardant avec lui qu'un petit
II. Vol. nombre
2894 MERCURE DE FRANCE
nombre pour servir de garnison à cette Forteresse.
Les choses étoient dans cet état quand le Seraskier
eut avis que le fils de Thamas Kouli-Kan
amenoit au Candahar quarante mille Aghuans à
son pere , il en informa aussi-tôt la Porte par
un Courier qu'il dépêcha , et representa , comme
il l'avoit déja fait plusieurs fois , la necessité
qu'il y avoit d'envoyer en Perse de prompts secours
d'hommes , d'argent et de vivres , et il demanda
en même - temps qu'en consideration de
sa vieillesse et de ses infirmitez , on lui permit
de se démettre de la Charge de Séraskier, en faveur
d'Achinet Pacha , qui étoit plus en état que
lui de la remplir dignement.
Le G. S. deferant à ses prieres , et ne voulant
pourtant pas qu'is se retirat entierement du service
, l'avoit nonmé Pacha de Cutaya'; Ville
d'Asie , à trois journées de Constantinople , et
Beyglerbey de Natolie ; l'expedition des ordres
pour ces nouveaux arrangemens , étoit même
déja prête à partir , lorsque la Porte reçut de
nouvelles Lettres de Topal- Osman , par lesquel
les il mandoit que les Persans avoient forcé le
passage de Takaya , et que leur General s'avançoit
vers lui avec une nombreuse Armee de Cavalerie
, sur quoi il renouvelloit ses instances
pour l'envoi des secours qu'il avoit demandez.
On tint sur ce sujet un Grand- Conseil au Sérail
le premier de ce mois , mais les résolutions
qu'on y prit furent tenues si secrettes , que le
Public ne fut pas même informé alors de la nouvelle
pour laquelle ce Conseil avoit été assemblé.
On scut seulement qu'on y avoit décidé de sus
pendre l'execution des ordres dont j'ai parlé cy
dessus et que Topal -Osman continueroit à com
nander l'Armée Ottomane en Perse.
DECEMBRE . 1733. 2895
>
Venons à Kouli - Kan ; les Aghuans que conduisoit
son fils , l'ayant joint à Amadan , il en
partit peu de jours après avec so. à 60. mille
hommes de Cavalerie , dont il fit prendre les devans
20. mille pour se saisir du défilé de Takaya.
Poulac Pacha , à qui , comme on l'a dit ,
la garde en avoit été confiée soit qu'il cut
négligé de s'y fortifier , ou qu'il eût été surpris
all'improviste , soit qu'il ne lui parût pas possible
de résister à l'Armée Persane , que de faux avis
lui avoient fait monter à 200. milie Combatans ;
Poulac- Pacha , dis je , à la vue des 20. mille
Aghuans qui venoient l'attaquer , prit la fuite et
se sauva , à la verité , avec presque tout son
monde , mais sans pouvoir rien emporter de son
Camp , qu'il abandonna.
Dès que Topal - Osman le vit arriver en
fuyard à Kerkout , il fut si indigné contre lui ,
et sur tout de ce qu'il n'avoit pas eu le soin de
prendre de plus exactes informations sur le veritable
nombre des ennemis, qu'il vouloit lui taire
couper la tête. Cependant tant de gens de cousidération
se jetterent à ses pieds , pour lui demander
la grace de cet infortuué Pacha , en lui
rappellant les marques éclatantes , qu'il avoit
données de sa bravoure dans la Bataille du 19 Juil.
let qu'enfin le Seraskier se laissa fléchir; mais prévoyant
bien qu'il alloit se trouver dans de grands
embarras , que le danger étoit pressant , et qu'il
ne devoit pas compter sur les secours qu'il avoit
si souvent sollicitez à la Porte , il se tourna du
côté des Arabes du voisinage dont il demanda
l'assistance et dont plusieurs Cheiks , ou Commandants
lui ammenerent sept à huit mille
hommes. Il rapella en même tems le plus de
Troupes Ottomanes qu'il put rassembler , sor-
I. Vol.
2896 MERCURE DE FRANCE
氧
tit de Kerkout , mit son Armée en Bataille devant
cette place ; et fit faire de bons retranchemens
, boracz de 60 piéces de Canons.
Il étoit encore occupé à fortifier son Camp ,
lorsqu'un exprès du General de Perse lui en apporta
une Lettre , par laquelle cet orgueilleux
ennemi marquoit qu'il marchoit à lui , et que
non -seulemene il enleveroit sa petite Armée ,
mais qu'il l'enleveroit lui même comme un enfant
avec son Bechik. Pour entendre la mauvaise
plaisanterie que ce mot Persan renferme , il faut
sçavoir qu'il signifie tout à la fois , Berceau et
Litiere , et que Topal Osman à cause de ses infirmitez
est obligé depuis long- tems à se servir
de cette voiture.
Le Seraskier ne répondit autre chose à cette
Lettre insultante , sinon qu'il étoit boiteux ,
vieux , et malade qu'il ne pouvoit aller au devant
de Kouli- Kan, mais qu'il l'attendoit et que
/ Dieu décideroit de tout.
Ce dernier continuant sa route passa près de
Bagdad sans s'arrêter , comptant toujours que
cette place ne pouroit manquer de tomber entre
ses mains , dès qu'il auroit battu les Turcs ,
comme il s'en flatoit : mais on dit qu'il surprit
tine fort grosse Caravane qui sortoit de cette
Ville , et qui étant destinée pour Alep , Smirne,
et Constantinople , étoit d'autant plus riche que
ceux qui l'avoient formée , croyant leurs effets
en sureté sur la route , depuis la défaite et la
retraite des Persans , ils avoient fait des envoys
considerables de Marchandises précieuses pour
se dédommager de la longue interruption de leur
commerce.
Enfin Kouli- Kan venant à paroître à la veuë
de Kerkout , le 22 Octobre Topal - Osman le
II. Vol. laissa
DECEMBRE . 1733. 2897
laissa approcher de ses retranchemens jusqu'à la
portée du fusil : il fit faire alors une décharge
de toute son Artillerie chargée à mitraille , et de
toute sa Mousqueterie , ce qui commença à
jetter un grand désordre dans l'Armée Persane , )
il dit à ses Soldats qu'il n'avoit rien à leur commander
; qu'ils étoient bien retranchez et qu'ils
pouvoient se tenir sur la deffensive ; mais qu'il
permettroit volontiers de sortir du Camp à tous
ceux qui auroient assez de valeur pour aller atta
quer l'ennemi . A ce discours , les Jannissaires
du Caire , et quelques Corps de Romelie qui ne
s'étoient point trouvez à l'Action du 19 Juillet
se piquerent d'honneur ; et secondez par quelques
autres Troupes et par les Arabes , ils fondirent
avec furie sur les Persans . Il faisoit beaucoup
de poussiere , un gros brouillard et un
vent qui soufloit la poudre aux yeux de ceux ci,
dont les Turcs tirerent un grand avantage.
›
Après quatre heures d'un combat opiniâtre ,
le Seraskier s'appercevant que ses Troupes prenoient
le dessus , il fit ordonner à tout ce qui
lui en restoit dans le Camp , de venir partager
le péril et la gloire de cette journée. Ce renfort
redoubla le courage des Turcs et acheva d'abbattre
celui des Persans : ils prirent enfin la fuite,
laissant 6000 des leurs sur la Place , dont on apporta
les têtes aux pieds de Topal - Osman , ct
trois mille Prisonniers , parmi lesquels on dit ,
que sont le Beau- pere et le neveu de Kouli - Kan
avec plusieurs Seigneurs de marque.
> Le Seraskier les ayant fait venir devant lui
leur demanda comment leur General après avoir
été si bien battu auprès de Bagdat, étoit revenu
le chercher avec tant de diligence ? Seigneur
lui répondirent- ils , Thamas Kouli - Kan n'a d'a-
II. Vol. G bord .
288 MERCURE DE FRANCE
,
bord fait cette démarches que sur les assurances
qu'on lui avoit données de plusieurs endroits que
vous étiez mort et dans la persuasion où il étoit
qu'un Chef tel que vous manquant à l'Armée Ottomane
, il en triompheroit aisément , et qu'ensuite il
ne trouveroit que de foibles obstacles à s'emparer de
Bagdad. Il a bien reconnu depuis , qu'on lui en
avoit imposé , mais il n'a pú se résoudre à reculer,
et il s'est d'ailleurs fié en son courage et à celui des
Aghuans , avec lesquels il a ci- devant remporté
beaucoup de Victoires ,
Il est à remarquer qu'aussi - tôt qu'Achmet Pacha
eût apris que Polac Pacha avoit abandonné le defilé
de Taxaya , il se pressa de faire entrer dans sa
Place tout ce qu'il put ramasser d'utile , et de faire
fermer les Portes , ne doutant pas que Kouli - Kan
ne vint en renouveler le blocus . Il régaloit même
dans ce moment le Buyuk Imbrohor , ou grand
Ecuyer du G.S.qui étoit sur le point de partir pour
revenir à Constantinople ; et iui ayant represen
té le risque qu'il y auroit pour lui sur le chemin
de Bagdad à Kerkout , qui devoit être alors infesté
de partis Ennemis , il lui fit prendre la route
de Mossul par le desert. Topal - Osman en
ayant été informé , envoya à ce Grand - Ecuyer
une Relation de l'Affaire qu'on vient de raconter ,
avec ordre de la faire passer incessamment à la
Porte , et d'attendre encore de ses nouvelles à
Mossul.
On présume de - là , qu'apparemment le Seraskier
veut lui faire remettre avec sureté le Beaupere
et le neveu de Kouli- Kan , avec les autres
Prisonniers de distinction , pour qu'il les conduise
et les présente lui - même au G. S.
Comme suivant quelques avis Kouli-Kan
après cette derniere déroute . s'étoit arrêté à
II. Vol. Leilan
DFCEMBRE. 1733. 2899
>
Leilan qui n'est qu'à cinq lieues de Kerkout
et qu'on craint avec raison qu'il ne veuille encore
tenter le sort des Armes , la Porte a dépêché un
Courier à Demir Pacha qui commiande 40
mille hommes aux environs de Tauris , avec ordre
de marcher en diligence avec les Tartares
qui sont passez en Perse , lesquels l'auront joint
vers les lieux où l'Armée de Kouli - Kan sera
campée.
Quoique cette nouvelle Victoire de Topal-
Osman soit encore plus glorieuse pour lui que la
premiere , on n'a cependant point tiré le Canon
ici , comme il est d'usage en pareil cas , parce
qu'on attend, dit - on , l'arrivée du Buyuk Imbrohor,
ou celle de quelque personne qui vienne directement
de la part du Seraskier.
Du 18 Novembre 1733.
P. V. D.
Comme j'allois fermer mon paquet , Monsieur,
on m'est venu dire une nouvelle de la derniere
importance pour cet Empire ; sçavoir , que Topal-
Osman Pacha étant allé attaquer Thamas
Kouli- Kan à Leilan , où je vous ai marqué qu'il
s'étoit arrêté , après sa dérouté du 22 Octobre ,
les Aghuans qui composoient la meilleure partie
de l'Armée Persane, avoient ployé leurs Etendarts
et s'étoient venus rendre à Topal - Osman , que
Kouli-Kan trop affoibli par cette désertion
pour pouvoir resister aux Turcs , avoit pris la
fuite vers la Perse avec environ 10000 hommes
qui lui restoient , que Topal - Osman l'avoit fait
suivre par Menis Pacha à la tête d'un gros
Corps de Troupes , et avoit donné ordre en
même tems aux Curdes de s'emparer d'un defilé
par où il falloit necessairement que les Persans
II. Vol.
Gij
passassent
2000 MERCURE DE FRANCE
>
passassent; que leur General se voyant prêt d'être
assailli par devant et par derriere , sans espérance
de pouvoir échapper , avoit écrit une Lettre
à Topal- Osman , par laquelle il se confessoit
vaincu et lui demandoit la Paix à telles conditions
qu'il voudroit lui imposer , mais que le
Seraskier lui avoit répondu que le regardant
comme un Rebelle , il ne vouloit traiter en aucune
façon avec lui ; enfin que suivant l'extre
mité ou Kouli- Kan étoit réduit au depart des
trois Couriers qui ont apporté cette nouvelle
ce matin , ce General Persan doit avoir été pris
depuis avec le reste de son Armée.
On a tenu ici sur le champ un Conseil general
au Serail , dans lequel il a été résolu d'envoyer
sans délai des pleins pouvoirs à Topal - Osman ,
pour traiter de la Paix avec des Ministres du léitime
Souverain de Perse , que l'on dit être un
jeune Fils de Schah - Thamas , ce dernier étant
à ce que l'on ajoute , et avec ordre de
n'écouter aucune proposition de la part de Thamas
Kouli- Kan,
mort ,
P. V. D.
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Résumé : AUTRE LETTRE de Constantinople du 18 Novembre 1733. Défaite de Thamas Kouli-Kan par Topal-Osman.
En novembre 1733, une lettre de Constantinople annonce la victoire de Topal Osman Pacha, Seraskier, sur Thamas Kouli-Kan. Après sa défaite du 19 juillet, Kouli-Kan s'était retranché à Amadan et menaçait de revenir au printemps avec une armée renforcée. Achmet Pacha, gouverneur de Bagdad, avait renforcé les défenses, tandis que Topal Osman, manquant de munitions, avait envoyé Poulac Pacha sécuriser le défilé de Takaya. Kouli-Kan, soutenu par des Aghuans amenés par son fils, a forcé ce passage et vaincu Poulac Pacha. Informé, Topal Osman a rassemblé des troupes et des Arabes, et préparé sa défense à Kerkout. Le 22 octobre, il a repoussé Kouli-Kan, infligeant de lourdes pertes aux Persans. Après cette victoire, Kouli-Kan s'est retiré à Leilan. Topal Osman a poursuivi les Persans, et les Aghuans ont déserté, permettant à Topal Osman de vaincre définitivement Kouli-Kan, qui a fui vers la Perse avec quelques milliers d'hommes. Parallèlement, Thamas Kouli-Kan avait demandé la paix à Topal Osman, mais ce dernier l'avait rejetée, considérant Kouli-Kan comme un rebelle. Des informations récentes suggèrent que Kouli-Kan et son armée ont probablement été capturés. En réponse, un conseil général a été tenu au Serail, décidant d'envoyer des pleins pouvoirs à Topal Osman pour négocier la paix avec les ministres du légitime souverain de Perse, identifié comme un jeune fils de Schah-Thamas. Les instructions étaient de ne pas écouter les propositions de Thamas Kouli-Kan, désormais décédé.
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74
p. 2937-2940
ADDITION AUX NOUVELLES Etrangeres.
Début :
On a appris en dernier lieu de Constantinople, que comme Thamas [...]
Mots clefs :
Comte, Troupes, Thamas Kouli-Kan, Constantinople, Hommes, Cracovie, Électeur, Varsovie, Palatins
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ADDITION AUX NOUVELLES Etrangeres.
ADDITION AUX NOUVELLES
Etrangeres.
O
Na appris en dernier lieu de Cons
tantinople , que comme Thamas
Kouli- Kan n'est qu'à une petite distance
de Kerkoud, et qu'on craint qu'il ne fasse
un dernier effort pour venir attaquer les
Turcs , la Porte a dépêché un Courier à
Demir Pacha , qui commande un Corps
de quarante mille hommes aux environs
de Tauris , et elle lui a envoyé ordre de
marcher en diligence avec les Tartares
qui sont passez en Perse , pour s'opposer
de concert avec Topal- Osman aux desseins
des Ennemis.
>
Les derniere Lettres de Pologne matquent
que le Palatinat de Sandomir et la
plupart des Gentilshommes de celui de
II. Vol.
Cracovie
2938 MERCURE DE FRANCE
Cracovie , sont entrez dans la conféderation
faite en faveur du Roy , qu'elle a
été signée non- seulement par toute la
Noblesse des sept Palatinats de la Grande
Pologne , mais encore par la plus grande
partie des autres Habitans de ces Provinees
, et que tous ceux qui sont en état de
porter les Armes les ont prises .
On a apris en même tems que le Comte
Potocky étoit campé entre Sandomir er
Saradie , mais qu'il devoit marcher incessamment
avec son Armée composée ac
tuellement de près de 20000 hommes
pour occuper un poste important entre
les Rivieres de Wuart et de Pilckza pendant
que le Palatin de Lustin et le Genes
ral de Curdziewzki observeroit avec
leurs Troupes les mouvemens de celles de
P'Electeur de Saxe.
Ces Lettres ajoutent que presque toure
la Noblesse de Lithuanie étoit resoluë de
deffendre jusqu'à la derniere extremité
les intêrets du Roy , et la liberté de la
Nation , qu'elle n'attendoit pour s'assem
bler que les derniers ordres de S. M. que
le Comte Pocci après avoir fait diverses
courses en Curlande , où il a fait beaucoup
ravages , s'étoit retiré par la Samogithie
en Lithuanie , et qu'il y avoit
attaqué les Troupes du Palatin de Nowo-
11. Vol groot
de
DECEMBRE. 1733. 2939
root , lesquelles après un assez long coinat
, avoient été contraintes de prendre la
aite , le Comte de Poniatow ki , le Prince
ean Czatorinski les Palatins de Cujavie
t de Livonie et le Sr Ozarowky , ont levé
hacun un Regiment. Celui du Roy est
ctuellement complet.
On aprend de Dantzick , que deux
Vaisseaux Hollandois y ont apporté une
grande quantité de Munition de Guerre.
Les deux Regiments d'Infanterie et les
deux de Cavalerie que le General Lesci
a fait avancer vers la Prusse Polonoise
se sont arrêtez à quelque distance des
Frontieres de cette Province ; ils n'ont
point été suivis d'autres Troupes , et on
croit que l'Armée Moscovite qui est toujours
à Lowitz et dans les environs n'en
décampera que pour tenter de se joindre
aux Troupes Saxones .
•
Quelques avis reçûs de Warsovie, por
tent que la Députation envoyée par le
General Moscovite et par les Opposans à
P'Electeur de Saxe , est composée du
Prince Wienowieski , ci - devant Régis
mentaire de Lithuanie , du Prince Lubomirzky
, Palatin de Cracovie , des Palatins
de Pollachie , de Culm et de Czernichov
, du Comre de Cetner , et de
quelques Cattellans.
II. Vol. On
2940 MERCURE DE FRANCE
On mande de Vienne que le Comte de
Mercy , Feldt Maréchal , à qui l'Empe
reur a donné depuis peu le Gouverne .
men du Milanois , et le Comte de Sallaburg
, Commissaire Général des Guerres,
partiront le 7
le 7 Janvier pour le Tirol.
Le bruit qui a couru que l'Electeur de
Baviere faisoit lever pour le service de
l'Empereur, 8000 hommes , qui devoient
remplacer les Régimens que S.M.I. a tiré
de Hongrie , n'est pas confirmé.
Etrangeres.
O
Na appris en dernier lieu de Cons
tantinople , que comme Thamas
Kouli- Kan n'est qu'à une petite distance
de Kerkoud, et qu'on craint qu'il ne fasse
un dernier effort pour venir attaquer les
Turcs , la Porte a dépêché un Courier à
Demir Pacha , qui commande un Corps
de quarante mille hommes aux environs
de Tauris , et elle lui a envoyé ordre de
marcher en diligence avec les Tartares
qui sont passez en Perse , pour s'opposer
de concert avec Topal- Osman aux desseins
des Ennemis.
>
Les derniere Lettres de Pologne matquent
que le Palatinat de Sandomir et la
plupart des Gentilshommes de celui de
II. Vol.
Cracovie
2938 MERCURE DE FRANCE
Cracovie , sont entrez dans la conféderation
faite en faveur du Roy , qu'elle a
été signée non- seulement par toute la
Noblesse des sept Palatinats de la Grande
Pologne , mais encore par la plus grande
partie des autres Habitans de ces Provinees
, et que tous ceux qui sont en état de
porter les Armes les ont prises .
On a apris en même tems que le Comte
Potocky étoit campé entre Sandomir er
Saradie , mais qu'il devoit marcher incessamment
avec son Armée composée ac
tuellement de près de 20000 hommes
pour occuper un poste important entre
les Rivieres de Wuart et de Pilckza pendant
que le Palatin de Lustin et le Genes
ral de Curdziewzki observeroit avec
leurs Troupes les mouvemens de celles de
P'Electeur de Saxe.
Ces Lettres ajoutent que presque toure
la Noblesse de Lithuanie étoit resoluë de
deffendre jusqu'à la derniere extremité
les intêrets du Roy , et la liberté de la
Nation , qu'elle n'attendoit pour s'assem
bler que les derniers ordres de S. M. que
le Comte Pocci après avoir fait diverses
courses en Curlande , où il a fait beaucoup
ravages , s'étoit retiré par la Samogithie
en Lithuanie , et qu'il y avoit
attaqué les Troupes du Palatin de Nowo-
11. Vol groot
de
DECEMBRE. 1733. 2939
root , lesquelles après un assez long coinat
, avoient été contraintes de prendre la
aite , le Comte de Poniatow ki , le Prince
ean Czatorinski les Palatins de Cujavie
t de Livonie et le Sr Ozarowky , ont levé
hacun un Regiment. Celui du Roy est
ctuellement complet.
On aprend de Dantzick , que deux
Vaisseaux Hollandois y ont apporté une
grande quantité de Munition de Guerre.
Les deux Regiments d'Infanterie et les
deux de Cavalerie que le General Lesci
a fait avancer vers la Prusse Polonoise
se sont arrêtez à quelque distance des
Frontieres de cette Province ; ils n'ont
point été suivis d'autres Troupes , et on
croit que l'Armée Moscovite qui est toujours
à Lowitz et dans les environs n'en
décampera que pour tenter de se joindre
aux Troupes Saxones .
•
Quelques avis reçûs de Warsovie, por
tent que la Députation envoyée par le
General Moscovite et par les Opposans à
P'Electeur de Saxe , est composée du
Prince Wienowieski , ci - devant Régis
mentaire de Lithuanie , du Prince Lubomirzky
, Palatin de Cracovie , des Palatins
de Pollachie , de Culm et de Czernichov
, du Comre de Cetner , et de
quelques Cattellans.
II. Vol. On
2940 MERCURE DE FRANCE
On mande de Vienne que le Comte de
Mercy , Feldt Maréchal , à qui l'Empe
reur a donné depuis peu le Gouverne .
men du Milanois , et le Comte de Sallaburg
, Commissaire Général des Guerres,
partiront le 7
le 7 Janvier pour le Tirol.
Le bruit qui a couru que l'Electeur de
Baviere faisoit lever pour le service de
l'Empereur, 8000 hommes , qui devoient
remplacer les Régimens que S.M.I. a tiré
de Hongrie , n'est pas confirmé.
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Résumé : ADDITION AUX NOUVELLES Etrangeres.
Le texte décrit des événements militaires et politiques en Turquie et en Pologne. À Constantinople, la Porte a ordonné à Demir Pacha, commandant une armée de quarante mille hommes près de Tauris, de marcher avec les Tartares en Perse pour contrer Thamas Kouli-Kan. En Pologne, les Palatinats de Sandomir et Cracovie, ainsi que la noblesse de la Grande Pologne, ont soutenu le roi. Le Comte Potocky, à la tête de vingt mille hommes, se prépare à occuper une position stratégique entre les rivières Wart et Pilckza. La noblesse lituanienne est également déterminée à défendre les intérêts du roi. Le Comte Potocky a mené des raids en Curlande et s'est retiré en Lituanie. Plusieurs nobles, dont le Comte Poniatowski et le Prince Jean Czartoryski, ont levé des régiments. À Dantzick, deux vaisseaux hollandais ont apporté des munitions. Les troupes du Général Leszczyński sont stationnées près des frontières de la Prusse polonaise, tandis que l'armée moscovite reste à Lowitz. Une députation, incluant le Prince Wienowieski et le Prince Lubomirzky, a été envoyée à l'Électeur de Saxe. À Vienne, le Comte de Mercy et le Comte de Sallaburg doivent partir pour le Tyrol.
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75
p. 73-96
LETTRE de M. D. L. C. à M. D. L. R. sur quelques particulartiez de la vie de Topal Osman Pacha, cy-devant Grand Visir de l'Empire Ottoman, et aujourd'hui Séraskier de l'Armée Turque en Perse. A Paris, ce 18 Janvier 1734.
Début :
Vous avez jugé, Monsieur, que dans les circonstances présentes où [...]
Mots clefs :
Topal Osman Pacha, Grand vizir, Arniaud, Pacha , Constantinople, Turcs, Malte, Capitaine, Empire, Fortune, Armée, Patron, Présents, Ordre, Esclavage, Sequins, Rançon, Esclave, Maître
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. D. L. C. à M. D. L. R. sur quelques particulartiez de la vie de Topal Osman Pacha, cy-devant Grand Visir de l'Empire Ottoman, et aujourd'hui Séraskier de l'Armée Turque en Perse. A Paris, ce 18 Janvier 1734.
LETTRE de M. D.L.C. à M. D.L.R.
sur quelques particularitez de la vie de
Topal Osman Pacha , cy-devant Grand
Visir de l'Empire Ottoman , et aujour
d'hui Séraskier de l'Armée Turque en
Perse . A Paris , ce 18 Janvier 1734.
V
Ous avez jugé , Monsieur , que
dans les circonstances présentes où
les affaires d'Asie ont plus de liaison que
jamais avec celles d'Europe , ce seroit
un objet interessant pour le Public , que
la
74 MERCURE DE FRANCE
la vie et les avantures de Topal Osman
qui jouë aujourd'hui un si grand rôle .
Je crois que l'Auteur de la Rela .
tion de la Révolution arrivée en 1730. à
Constantinople n'a pas abandonné le
dessein où je l'ai vu, d'écrire cette vie, véritablement
digne de la curiosité du Public
. Personne n'est plus capable que lui
de bien exécuter ce projet; et s'il est aussi
bien servi par ceux qui sont à portée de
lui procurer des Mémoires , que je le
connois exact et ami de la verité ; nous
verrons dans un même Ouvrage la singularité
du Roman , unie à la plus scru
puleuse fidelité dans les faits historiques.
En attendant , je me fais un vrai plaisir
, Monsieur , de vous faire part de
quelques traits de la vie du Général
Turc dont je suis exactement informé . Le
Sr Arniaud , celui-la même qui racheta
Topal Osman d'esclavage à Malte , il y
a environ trente- cinq ans , vint en 1732 .
à Constantinople avec son fils ,saluer son
ancien Esclave , devenu Grand Visir.J'ai
entendu plus d'une fois raconter au pete
et au Fils ce qu'ils sçavoient de son histoire.
Le Fils a même bien voulu , à ma
priere , mettre par écrit ce qu'il a pû s'en
rappeller, et m'en laisser le Mémoire que
je
JANVIER. 1734. 75
je conserve , écrit de sa main. Ce qui suit
est tiré de ce Mémoire. J'y ai joint
quelques circonstances que je lui ai entendu
conter , ou à son Pere, et j'ai ajouté
les faits dont j'ai eu connoissance
pendant mon séjour à Constantinople ,
concernant l'arrivée du Sr Arniaud , son
Audiance du Visir , la déposition de ce
Ministre , &c. tous faits qui se sont passez
presque sous mes yeux ; mais dont
je ne garantis cependant pas la verité
quelque attention que j'aye eu à consulter
les témoins oculaires autant que je
l'ai pû , et à ne rapporter icy que ce que
je trouve sur un Journal , écrit dans le
temps.
Osman avoit reçu dans le Sérail du
Grand Seigneur l'éducation qui n'étoit
autrefois destinée qu'aux Enfans de Tribut
, ( a ) Chrétiens de naissance . Les
Turcs ont depuis brigué ces Places pour
leurs propres Enfans , ensorte qu'aujour
d'hui presque tous les Eleves du Sérail
sont de race Turque .
En 1698 ou 99. à l'âge de 25 ans ou
environ, Osman Aga sortit du Sérail, où il
exerçoit l'emploi de (b) Martolos Bachi.
( a ) Voyez Ricaut, Etat présent de l'Empire Ot
toman.
(b ) Intendant des Voitures.
7
N
6 MERCURE DE FRANCE
Il étoit porteur d'un Ordre du Grand Sergneur
, et chargé d'une commission pour
aller remettre quelques Beys du Čaire
dans la possession de leurs biens , dont
ils avoient été destituez pendant ces troubles
qui sont si fréquents en Egypte. I
prit sa route par terre jusqu'à Seyde , où
pour éviter la rencontre des Arabes qui
infestoient le Païs , il fut obligé de s'embarquer
sur une ( a ) Saïque , qui passoit
à Damiette . Dans ce, court trajet la Saïque
fut malheureusement rencontrée par
une Barque Espagnole , armée en course
à Maïorque. Quoique la partie ne fut pas
égale , le désir de conserver leurs biens
et leur liberté , fit faire les derniers ef
fort aux Passagers et à l'équipage ; ils se
deffendirent en désesperez ; l'abordage
fut sanglant. Osman s'y signala par cette
intrépidité dont il a depuis donné des
preuves en tant de rencontres ; si la valeur
de tous eut été égale à la sienne
peut-être eussent ils évité l'esclavage . Enfin
il fallut céder au nombre . Osman
Aga , percé de coups , blessé dangereusement
au bras et à la cuisse , fut pris les
armes à la main . Le Corsaire , dont le Bâtiment
avoit souffert dans le combat
( a ) Sorte de Bâtiment de Levant , propre an
ransport des Marchandises,
soit
JANVIER . 1734.
77
soit qu'il eut besoin de se raccommoder ,
ou pour quelque autre raison , relâcha à
Malte .
-
Les marques de valeur qu'Osman avoit
données dans l'action, ou plutôt la déposition
que firent sans doute les autres Passagers
,qu'il étoit chargé d'une commission
secrete du Grand Seigneur , et l'espérance
d'en tirer une grosse rançon , le firent distinguer
parmi ses compagnons d'infortune;
cependant il n'étoit pas hors de danger
de ses blessures quand il arriva à Malte ;
celle de la Cuisse étoit la plus considérable
; il en est resté estropié ; et c'est delà
que lui est demeuré le nom ou le Sobriquet
de ( a ) Topal , suivant l'usage commun
des Turcs .
*
>
Aussi- tôt que le Corsaire fut entré dans
le Port , le Sr Vincent Arniaud dit
' Hardy , natif de Marseille , qui étoit
alors Capitaine de Port à Malte , se transporta
à bord du Bâtiment , suivant le devoir
de sa Charge. Il y vit le malheureux
Aga enchaîné , qui lui fit une proposision
bien singuliere,
Fais une belle action , lui dit Topal ,
rachette - moi , tu n'y perdras rien. Arniaud
surpris de la proposition , deman .
da au Capitaine Corsaire ce qu'il pré-
( a ) Boiteux,
ten8
MERCURE DE FRANCE
tendoit pour la rançon de cet Esclave. Il:
me faut mille Sequins ( a ) , répondit le
Corsaire . Arniaud se retournant vers
Osman , lui dit : Je te vois pour la premiere
fois de ma vie , je ne te connois
point , et tu me proposes de donner sur ,
ta parole mille Sequins pour ta rançon .
Nous faisons l'un et l'autre ce qu'il nous
convient de faire, reprit Osman . Quant à
moi je suis dans les fers , il est naturel
que je mette tout en usage pour obtenir
ma liberté ; pour toi , tu es en droit de te
défier de ma bonne foy ; je n'ai aucune
sureté à te donner que ma parole , et tu.
n'as aucune raison d'y conter ; cependant
si tu veux en courir les risques , je te le
répete encore , tu ne t'en repentiras pas.
Soit que l'air d'assurance , ou que la
Phisionomie du jeune Turc prévint Arniaud
en sa faveur, soit que la singularité
de l'avanture éloignât les soupçons qu'il.
auroit pû concevoir , le Capitaine de
Port sortit avec des dispositions favora
bles pour Topal Osman , et , ce qui est
peut être encore plus extraordinaire , la
réfléxion ne les détruisit pas.
Arniaud alla rendre compte au grand
( a ) Ily a plusieurs sortes de Sequins en Levant,
qui valent depuis six jusqu'à onze francs de notre
Monnoye.
MaîJANVIER.
1734. 79
Maître Perellos de ce qui concernoit son
ministere , revint à bord et convint de
600(a )Sequins Vénitiens avec le Corsaire,
pour le prix de la rançon de son Esclave ;
son nouveau Maître le fit aussi - tôt transporter
sur une Barque Françoise, à lui ар-
partenante,où il lui envoya un Médecin ,
un Chirurgien et tous les secours neces
saires.Osman se vit bien tôt hors de danger.
Il proposa alors à son bienfaicteur
d'écrire en Levant pour se faire rembourser
de ce qu'il lui devoit. Mais comblé
des bienfaits de son nouveau Patron , il
ne crut pas abuser de sa générosité en lui
demandant une nouvelle grace . C'étoit de
le renvoyer sur sa parole et de s'en remettre
pour le tout entierement à sa
bonne foy.
Arniaud ne fut pas genereux à demi
et rencherit encore sur la demande de son
Esclave ; après lui avoir fait toutes sortes
de bons traitemens , il lui donna cette
même Barque , sur laquelle il l'avoit fait
transporter, pour en disposer à sa volonté,
et se faire conduire où bon lui sembleroit.
Osman arrivé à Malte Esclave , et racheté
le jour même , en partit huit jours
après sur un Bâtiment à ses ordres . Le
(a ) Le Sequin Vénitien vaut aujourd'hui environ
11 liv. quelques sols, Monnoye de France.
Pa80
MERCURE DE FRANCE
Pavillon François le mettoit à l'abri
des Corsaires . Il arriva heureusement
à Damiette d'où il remonta le Nil jusqu'au
Caire . Le lendemain de son arrivée
il fit compter mille Sequins au Capitaine
au
de la Barque pour être remis à son libérateur,
il y joignit deux Pelisses ( a) dè la valeur
de soo piastres , ( b ) dont il fit présent
au Capitaine . Il exécuta la commission
du Grand Seigneur , repartit pour
en aller rendre compte, arriva à Constantinople
et fut lui - même le porteur de la
nouvelle de son Esclavage.
pas
à
La reconnoissance d'Osman ne se borna
ses premiers mouvements : pendant
plusieurs années de séjour qu'il fit du
côré de Larta en Albanie où ses emplois
l'appellerent, il continua d'en donner des
preuves à son bienfaicteur , et entretint
avec lui un commerce non interrompu
de lettres et de présents.
On peut même dire que sa reconnoissance
s'étendit sur toute la Nation Françoise
; puisque depuis son avanture il n'a
laissé échaper aucune rencontre où il n'ait
donné à tous les François , qui ont eu affaire
à lui, des marques d'une bienveillance
particuliere .
( a ) Robes Fourrées .
( b ) La Piastre courante du Levant , vaut aujourd'hui
3 livres quelques sols Monnoye de France.
Les
JANVIER 1734 81
Les occasions avoient manqué jusqu'a
lors à Osman de se faire connoître et de
pousser sa fortune . La Guerre s'étant depuis
declarée entre les Venitiens et les
Turcs , le Grand Visir Aly Pacha , qui
méditoit l'invasion de la Morée , assembla
son Armée dans le voisinage de
l'Isthme de Corinthe , qui joint la Morée
au continent et le seul passage qui
puisse donner entrée par terre dans cette
presqu'Isle.
>
Tous les differents corps de Troupes
qui devoient composer l'Armée Ottomane
, se rendirent de toutes les Provinces
de l'Empire au lieu et au jour marqués
le seul Cara Mustapha Pacha ,. qui commandoit
un Corps de trois mille hommes
, arriva trois jours trop tard au rendez-
vous de l'Armée : il lui en couta la
vie , le Visir lui ayant fait trancher la
tête.
Sur ces entrefaites , Topal-Osman brulant
du désir de se signaler , vint se présenter
au Visir à la tête de mille hommes
qu'il avoit levez et pris à sa solde sans
avoir reçu aucun ordre; et le jour destiné
à l'attaque du défilé du Pas de Corinthe ,
il s'offrit de marcher le premier, et se
chargea de forcer le passage avec sa troupe
; son offre fut acceptée. Peut être la
E terreur
82 MERCURE DE FRANCE
terreur et la consternation generale qui
s'étoient répandues à l'approche d'une
Armée formidable , ne laisserent- t'elle pas à
Topal-Osman tout le merite d'une victoi
re achetée cherement ; quoiqu'il en soit,il
força le défilé , et emporta d'emblée la
Ville de Corinthe. Il reçut du Grand
Visir pour récompense les deux queues
de Pacha , et tous les Equipages de l'infortuné
Cara Mustapha.
Osman ne resta pas en si beau chemin,
et les occasions ne manquant plus à son
courage , il se distingua par
de nouveaux
exploits dont le détail nous meneroit
trop loin. L'année suivante , au Siége de
Corfou il servit en second, et fit les fonctions
de Licutenant General.
Ce fut alors qu'il fit voir que sa prudence
égaloit sa valeur ; le Siége ayant
été abandonné , Osman demeura trois
jours devant la Place depuis le départ du
General , pour favoriser la retraite des
Troupes Ottomanes ; il donna les ordres
necessaires avec toute la présence d'esprit
possible , et ne se retira qu'après avoir mis
l'Armée en sûreté.
Il étoit tems qu'un homme de cette
trempe commandât à son tour ; adoré
des troupes , la voix publique l'appelloit
au Generalat ; mais plus il se distinguoit
entre
JANVIER 89 173 4.
entre ses pareils , plus il faisoit de jaloux ,
qui bientôt étoient autant d'ennemis.
Tel est , à la honte de l'humanité et en
tout Pays , l'effet ordinaire d'un merite
superieur , mais dont les conséquences ne
sont nulle part si dangereuses qu'en Turquic.
C'est à ce tems vrai-semblablement que
doit se raporter un évenement de la vie
d'Osman qui pensa le perdre , et dont
je ne retrouve qu'une note ; je l'ai entendu
raconter au Sr Arniaud fils , avec plusieurs
circonstances qui me sont échapées
; mais il est obmis dans le Mémoire
qu'il m'a laissé qui fut fait avec précipitation
et presque au moment de son départ.
,
se
Topal - Osman par des raisons qui ne
pouvoient que lui faire honneur
broüilla avec un Pacha plus puissant que
lui , peut-être avec ce même General
qu'il avoit si utilement remplacé au Siége
de Corfou . Sa tête fut proscrite et ses
biens confisquez : il fallut céder à l'orage,
il se déroba par la fuite à la fureur de son
ennemi ; déguisé et inconnu , abandonné
des siens , il se rendit à Salonique , où il
demeura caché quelque tems . Delà sous
l'habit et l'apparence d'un simple ( a ).
( a ) Soldat de Marine Turc.
E ij
Léventi
84 MERCURE DE FRANCE
Léventi , Il s'embarqua sur une Galere et
passa à Constantinople. Pendant qu'il
agissoit sous main , sans oser paroître , es
qu'il employoit ses amis pour obtenir sa
grace , son ennemi fut déposé. C'étoit le
plus grand obstacle à la justification
d'Osman : elle fut éclatante et solemnelle.
Il fut renvoyé dans la possession de tous
ses biens , et ce fut à peu près dans ce
tems qu'il fut nommé Seraskier ου
Generalissime en Morée.
›
Tous les Consuls étant venus le saluer
en cette qualité , il donna à la Nation
Françoise les témoignages les plus marquez
de bienvaillance et de protection .
chargea les Consuls François d'écrire à
Malte au Capitaine Arniaud , pour lui
faire part de sa nouvelle dignité , et le
prier de lui envoyer un de ses fils , dont
il se voyoit en état de faire la fortune.
Un des fils d'Arniaud , celui - la même
qui a fourni ces Mémoires , se rendit
effectivement en Morée ; et pendant deux
ou trois ans qu'il demeura auprès du
Seraskier, celui - ci, tant par les dons qu'il
lui fit , que par les facilitez et les avanta
ges qu'il lui procura pour son commerce,
le mit effectivement à portée de faire des
gains considérables dont les occasions furent
négligées par le jeune homme , alors
plus
JANVIER.
1734 83
plus occupé de ses plaisirs que du soin de
sa fortune.
Topal-Osman croissant en dignitez à
mesure que son mérite devenoit plus
connu , fut fait Pacha à trois queües , et
nommé Beglier-Bey de Romelie , un des
deux plus grands Gouvernements de
l'Empire , lequel par sa proximité de la
Frontiere de Hongrie est un poste encore
plus important.
་
En 1727. le Capitaine Arniaud , âgé
de soixante et sept ans , passa avec son
fils à Salonique , et alla voir le Beglier
Bey à Nysse où il faisoit sa résidence . Ils
en reçurent l'accueil le plus favorable et
le plus tendre ; il déposa en leur présen ,
ce le faste de sa dignité , les embrassa
leur fit servir le Sorbet et le Parfum , et
les fit asseoir sur le Sopha , faveur singuliere
de la part d'un Pacha du premier
ordre , sur tout quand elle est accordée à
un Chrétien. Il les combla d'honneurs et
de présents , et leur voyage leur valut
plus de 15000 livres. En prenant congé
du Pacha , son ancien Patron lui dit qu'il
esperoit bien avant que de mourir l'aller
saluer à Constantinople en qualité de
Grand Visir ; c'étoit plutôt alors un
souhait qu'une espérance , l'évenement
en a fait une prédiction.
E iij
Le
36 MERCURE DE FRANCE
Le Grand Visir Ibrahim Pacha après
avoir joüi douze ou treize ans tranquillement
d'une dignité jusques - là si orageuse,
périt cruellement comme tout le monde
sçait dans la Révolution de 1730. ( a )
En moins d'un an il eut trois successeurs.
Au mois de Septembre 1731 , Topal-
Osman fut appellé pour remplir à son
tour un poste dangereux par lui- même ,
et devenu plus délicat dans les circonstances
présentes . Il ignoroit encore quelle
place lui étoit destinée ; lorsqu'étant
en chemin pour se rendre à Constantinople
, il fit écrire à Malte par le Consul
Francois de Salonique et mander au Capitaine
Arniaud qu'il pouvoit lui et ses
enfans venir trouver Topal-Osman en
quelque lieu du monde que la fortune
l'appellât. Après son arrivée à Constantinople
il fit prier l'Ambassadeur de
France d'écrire de nouveau et d'inviter
son ancien Patron à le venir voir ; lui
recommandant de ne point perdre de
tems, parce qu'un Grand Visir pour l'ordinaire
ne demeuroit pas long- tems en
place.
Arniaud profita de l'avis ; il vint à
Constantinople avec son fils au mois de
( a ) Voyez le Supplement du Mercure d'Avri
1731
JanJANVIER.
1734 87
Janvier 1732. Aussi - tôt que le Visir fut
informé de leur arrivée , il leur envoya
un Officier de confiance , leur dire qu'il
leur donneroit Audiance le lendemain.
après midi. On pensoit qu'il les recevroit
en particulier , pour ne point commettre
sa dignité en faisant à des Chrétiens
un accueil qui pourroit indisposer les
Grands de la Porte , sur tout dans un
tems où la fermentation des esprits se
ressentoit encore des troubles de la derniere
Révolution. Les deux François se
rendirent le lendemain au Palais du Grand
Visir, à l'heure marquée, avec les présents
qu'ils lui avoient aportés de Malte, consistant
en plusieurs Caisses d'Oranges ,
Citrons , Bergamotes , &c. diverses sor
tes de Confitures , des Orangers chargez
de feuilles et de fleurs , des Serins dé
Canarie dont les Turcs sont fort curieux ,
et ce qui l'emportoit sur tout le reste ,
en douze Turcs rachetez de l'esclavage à
Malte.
Tous ces présents , par ordre du Visir ,
furent rangez et exposez à la vûë. Le
vieux Arniaud âgé de soixante et douze
ans , accompagné de son fils , fut introduit
devant le Grand Visir. Il les reçût
en présence des plus grands Officiers de
l'Empire , avec les témoignages de la plus
E iiij
tendre
38 MERCURE DE FRANCE
tendre affection . Vous voyez , dit - il , en
adressant la parole aux Turcs qui l'environnoient
, et leur montrant les Esclaves
rachetez, vous voyez vos freres qui jouissent
de la liberté après avoir langui dans
l'esclavage : ce François est leur libérareur
. J'ai été esclave comme eux
ajouta-t'il , j'étois chargé de chaînes
percé de coups , couvert de blessures ,
voilà celui qui m'a racheté , qui m'a sauvé
; voilà mon Patron : liberté , vie
fortune , je lui dois tout. Il a payé sans
e connoître mille Sequins pour ma rançon.
Il m'a renvoyé sur ma parole ; il m'a
donné un Vaisseau pour me conduire ou
je voudrois :où est,même le Musulman ,capable
d'une pareille action de génerosité?
Tous les assistants avoient les yeux tournez
sur le vieillard qui tenoit les mains
du Grand Visir embrassées .Tous les Officiers
de ce Ministre , tous les gens de sa
maison se disoient les uns aux autres
voilà l'Aga ( a ) le Patron du Visir; voilà
celui qui a racheté notre Maître.
Cinq ans auparavant Osman étant Pacha
de Nysse , n'avoit pas voulu permettre
que son ancien Patron lui baisât
la main. Devenu Grand- Visir , il souf-
( a ) Les Esclavos Tures appellens leur Maître
tum Aga.
frit
JANVIER 1734 89
frit cette marque de respect et de soumission
, et crut devoir en agir ainsi
sur tout en présence des Grands de l'Empire
, pour qui c'eût été une faveur ,
eux qui se trouvent honorez de baiser
le bas de la veste d'un Grand Visir , et
dont plusieurs même murmuroient en
secret de l'honneur que celui- cy faisoit
à de vils Ghiaours . (a)
,
Le Visir fit ensuite au Pere et au Fils
diverses questions sur l'état présent de leur
fortune et sur les pertes qu'ils avoien
essuyées dans leur commerce. Après avoir
écouté leurs réponses avec bonté , il répliqua
par une Sentence Arabe Allah-
Kerim , qui signifie à la lettre , Dleu est
liberal , et dans un sens plus étendu , la
Providence de Dieu est grande ; elle m'a
mis en état , ajoûta - t'il , d'adoucir votre
situation. Il fit ensuite devant eux la
destination de leurs présents , dont il
envoya sur le champ la plus grande partie
au Grand- Seigneur , à la Validé ¯ ( b)
et au Kislar- Agă, ( c)
Les deux François , comblez des cares-
(a) Ghiaours est un terme de mépris dont les
Tures se servent pour désigner ceux qui ne sont pas
Musulmans.
(b) Sultane Mere.
(c) Chef des Eunuques noirs.
E v se
90 MERCURE DE FRANCE
•
ses du Grand-Visir , prirent congé de lui.
Il avoit donné ordre de leur préparer
un Appartement dans son Palais ; il leur
fit quelques reproches en apprenant qu'ils
retournoient au Palais de France ; il chargea
l'Interprete de les recommander de
sa part à M. l'Ambassadeur , en le faisant
assurer qu'il lui auroit obligation
de tout ce qu'il feroit pour eux.
Il y a assurément de la grandeur d'ame
dans la peinture que Topal- Osman fit
de son Esclavage et dans l'aveu public
de son humiliation et des obligations
qu'il avoit à son Libérateur ; mais il faudroit
connoître le profond mépris et le
fond d'éloignement que les préjugez de
la Religion et de l'éducation inspirent
aux Turcs pour tout ce qui n'est point
Musulman , et en particulier pour les
Chrétiens , pour sentir toute la beauté
et la noblesse de cette action , qui se passa
aux yeux de toute sa Cour.
Le Fils du Visir reçut ensuite le Pere et le
Fils en particulier dans son Appartement,
où il ne garda aucunes mesures. Il les
embrassa l'un et l'autre, les traita avec la
même familiarité qu'avoit fait son Pere
étant Pacha de Nysse , et leur fit promettre
de le venir voir souvent.
Ils eurent peu de temps avant leur départ
JANVIER. 1734- 91
part une autre Audiance particuliere du
Visir , où ce Ministre n'ayant plus de
bienséance à observer , oublia son rang
pour ne plus se souvenir que de ce qu'il
devoit à son Bienfaicteur. Il lui avoit
déja fait rembourser liberalement la rançon
des douze Esclaves , et procuré le
payement d'une ancienne dette regardée
comme perdue. Il y ajoûta de nouveaux
présents en argent , et un Commandement
ou permission expresse pour faire
gratis à Salonique , un chargement de
bled , sur lequel il y avoit un profit à
faire d'autant plus considerable que ce
commerce étoit interdit aux Etrangers
depuis plusieurs années. Cette gratifica
tion montoit à plus de dix mille écus .
Le Visir , qui eût voulu mesurer sa libé
ralité sur sa reconnoissance , qui étoit'sans
bornes, leur fit entendre qu'il ne pouvoit
pas faire tout ce qu'il vouloit, et peut - être
n'en faisoit- il déja que trop aux yeux de
ceux qui ne jugent des actions d'un Ministre
que par leur interêt particulier.
Il fit ressouvenir Arniaud le fils de son
voyage en Morée , et du temps où il n'avoit
tenu qu'à lui de faire une grande
fortune par les occasions qu'il lui avoit
procurées. Il finit par leur dire qu'un
Pacha étoit le Maître dans son Gouverne
E vi
ment
92 MERCURE DE FRANCE
ment , mais qu'un Visir à Constantinople
avoit un plus grand Maître que lui .
Topal- Osman , par sa vigilance et sæ
fermeté, avoit remis l'abondance , le bon
ordre et la Police dans Constantinople ,
où depuis la Révolution jusqu'à son Ministere
, la licence et le desordre n'avoient
pû être réprimez , et où la disette
et la cherté des vivres étoient excessives.
Quoiqu'on lui ait reproché une trop
grande séverité, il est de fait qu'il n'a condamné
à mort même les plus vils et les plus
séditieux des mutins , que sur le Fetfa (a)
du Mufti. Peut-être dans les conjonctures
présentes un homme de ce caractére étoitil
nécessaire pour prévenir une nouvelle
révolte et rétablir la tranquillité publique;
ce qu'il y a de certain , et qui est bien à
son honneur , c'est qu'il fut regretté de
tous les gens de bien et des bons Citoyens,
lorsqu'il fut ôté de place au mois de
Mars 1732.
On ne sçut pas bien , du moins alors ,
les véritables motifs de sa déposition .
Un mois auparavant les bruits publics
l'avoient annoncée pour le temps précis
où elle arriva : elle avoit été précedée de
quelques jours par celle du Mufti , qui
(a) Sorte de consultation du Mufti , qui décide
suivant la Loy , de la peine duë au coupable.
avoit
JANVIER. 1734. 93
avoit opiné pour la Paix , ainsi que le
Visir dans le Conseil extraordinaire, tenu
depuis peu au sujet des affaires de Perse ;
l'un et l'autre avoient insisté fortement sur
la nécessité de ratifier le Traité conclu par
Achmet-Pacha , Gouverneur de Bagdad,
en vertu de son plein pouvoir. La déposition
de ces deux Ministres fut regardée
, avec raison , comme un mistere de
politique ; car il faut avouer que tout
ce qu'on en dit dans le temps ne passoit
pas la conjecture.
Topal - Osman , qui avoit dès longtemps
prévû ce revers , le soutint avec
la plus parfaite tranquillité. En sortant
du Serrail , après avoir remis le Sceau de
l'Empire , il trouva toutes ses Créatures
et tous les Gens de sa Maison abatus et
consternez : de quoi vous affligez - vous ,
leur dit - il , ne vous ai-je pas dit qu'un
Visir ne restoit pas long- temps en place ?
Toute mon inquiétude étoit de sçavoir
comment j'en sortirois ; grace à Dieu on
n'a rien à me reprocher ; le Sultan est satisfait
de mes services ; je pars tranquille.
et content.
Il donna ensuite ses ordres pour un
Sacrifice (a) d'actions de graces , distri-
(a) Cette coûtume est pratiquée parmi les Turcs
en certaines occasions , comme pour obtenir un heureux
succès , &c.
94 MERCURE DE FRANCE
bua de l'argent à ses Domestiques et leur
ordonna de se réjouir . Il se ressouvint
aussi dans ce moment de son Bienfaicteur
, en prévoyant le chagrin que cet
évenement lui causeroit. Qu'on lui dise
qu'il se console , ajoûta- t'il , je ne désespere
pas de le revoir encore , dites lui
qu'il me retrouvera toujours; qu'on écrive
à Salonique, que l'on soit exact à lui donner
la quantité de bled que j'ai ordonné ;
si j'apprends qu'il en manque une mesure
, je ferai voir que je ne suis pas mort. Il
donna quelques autres ordres concernant
ses affaires domestiques et partit pour Trébisonde
, dont il avoit été nommé Pacha.
Si la reconnoissance , toute naturelle
qu'elle est aux coeurs genereux, passe pour
une vertu rare sur tout chez les Grands , il
faut convenir qu'elle reçoit ici un nouvel
éclat par la circonstance et le moment
où Topal - Osman rappella le souvenir de
son Bienfaicteur.
Jamais déposition de Visir n'eut moins
Fair d'une disgrace ; il n'y a point d'exemple
qu'un Ministre disgracié ait été
traité avec autant d'égards et de distinction.
Le Grand- Seigneur lui fit dire de
laisser son fils à Constantinople et qu'il
en prendroit soin ; et quatre jours après
ce même fils eut l'honneur de présenter
JANVIER 1734 99
à Sa Hautesse le présent qui lui avoit été
destiné par son Pere , pour le jour de Bayram.
(a) Il consistoit en un Harnois de
Cheval, enrichi de Pierreries , estimé 50000
Piastres ; c'est ce que Topal Osman avoit
en partant expressément recommandé à
son fils ; quoique , n'étant plus en place ,
il eût pû se dispenser de faire le présent
qu'il avoit fait préparer en qualité
de Grand- Visir.
•
Peu de jours après il reçut sur sa route
de nouveaux ordres pour aller commander
en Perse , à la Place d'Ali Pacha´, qui
venoit d'être nommé Grand- Visir à la
sienne. Osman alla tranquillement relever
son Successeur au Visiriat , dans
le poste de Séraskier , où il a rendu depuis
deux ans à sa Patrie des services
peut- être plus importants qu'il n'auroit
pû faire , s'il fût demeuré Grand - Visir ,
puisque non-seulement il a trouvé le secret
de soutenir une guerre difficile dans
un Pays désert et ruiné , à quatre cent
lieues de la Capitale , le plus souvent dénué
des secours d'argent , d'hommes , de
vivres et de munitions ; mais encore qu'il
a remporté une victoire complette (b)
(a ) Fête solemnelle des Turcs , pendant laquelle
ils se font des présens .
(b) Le 19. Juillet 1733 •
en
96 MERCURE DE FRANCE
en bataille rangée sur un Ennemi ( a) digne
de lui , battu les Persans en trois rencontres
, (b) et humilié l'orgueil de leur
fier General .
sur quelques particularitez de la vie de
Topal Osman Pacha , cy-devant Grand
Visir de l'Empire Ottoman , et aujour
d'hui Séraskier de l'Armée Turque en
Perse . A Paris , ce 18 Janvier 1734.
V
Ous avez jugé , Monsieur , que
dans les circonstances présentes où
les affaires d'Asie ont plus de liaison que
jamais avec celles d'Europe , ce seroit
un objet interessant pour le Public , que
la
74 MERCURE DE FRANCE
la vie et les avantures de Topal Osman
qui jouë aujourd'hui un si grand rôle .
Je crois que l'Auteur de la Rela .
tion de la Révolution arrivée en 1730. à
Constantinople n'a pas abandonné le
dessein où je l'ai vu, d'écrire cette vie, véritablement
digne de la curiosité du Public
. Personne n'est plus capable que lui
de bien exécuter ce projet; et s'il est aussi
bien servi par ceux qui sont à portée de
lui procurer des Mémoires , que je le
connois exact et ami de la verité ; nous
verrons dans un même Ouvrage la singularité
du Roman , unie à la plus scru
puleuse fidelité dans les faits historiques.
En attendant , je me fais un vrai plaisir
, Monsieur , de vous faire part de
quelques traits de la vie du Général
Turc dont je suis exactement informé . Le
Sr Arniaud , celui-la même qui racheta
Topal Osman d'esclavage à Malte , il y
a environ trente- cinq ans , vint en 1732 .
à Constantinople avec son fils ,saluer son
ancien Esclave , devenu Grand Visir.J'ai
entendu plus d'une fois raconter au pete
et au Fils ce qu'ils sçavoient de son histoire.
Le Fils a même bien voulu , à ma
priere , mettre par écrit ce qu'il a pû s'en
rappeller, et m'en laisser le Mémoire que
je
JANVIER. 1734. 75
je conserve , écrit de sa main. Ce qui suit
est tiré de ce Mémoire. J'y ai joint
quelques circonstances que je lui ai entendu
conter , ou à son Pere, et j'ai ajouté
les faits dont j'ai eu connoissance
pendant mon séjour à Constantinople ,
concernant l'arrivée du Sr Arniaud , son
Audiance du Visir , la déposition de ce
Ministre , &c. tous faits qui se sont passez
presque sous mes yeux ; mais dont
je ne garantis cependant pas la verité
quelque attention que j'aye eu à consulter
les témoins oculaires autant que je
l'ai pû , et à ne rapporter icy que ce que
je trouve sur un Journal , écrit dans le
temps.
Osman avoit reçu dans le Sérail du
Grand Seigneur l'éducation qui n'étoit
autrefois destinée qu'aux Enfans de Tribut
, ( a ) Chrétiens de naissance . Les
Turcs ont depuis brigué ces Places pour
leurs propres Enfans , ensorte qu'aujour
d'hui presque tous les Eleves du Sérail
sont de race Turque .
En 1698 ou 99. à l'âge de 25 ans ou
environ, Osman Aga sortit du Sérail, où il
exerçoit l'emploi de (b) Martolos Bachi.
( a ) Voyez Ricaut, Etat présent de l'Empire Ot
toman.
(b ) Intendant des Voitures.
7
N
6 MERCURE DE FRANCE
Il étoit porteur d'un Ordre du Grand Sergneur
, et chargé d'une commission pour
aller remettre quelques Beys du Čaire
dans la possession de leurs biens , dont
ils avoient été destituez pendant ces troubles
qui sont si fréquents en Egypte. I
prit sa route par terre jusqu'à Seyde , où
pour éviter la rencontre des Arabes qui
infestoient le Païs , il fut obligé de s'embarquer
sur une ( a ) Saïque , qui passoit
à Damiette . Dans ce, court trajet la Saïque
fut malheureusement rencontrée par
une Barque Espagnole , armée en course
à Maïorque. Quoique la partie ne fut pas
égale , le désir de conserver leurs biens
et leur liberté , fit faire les derniers ef
fort aux Passagers et à l'équipage ; ils se
deffendirent en désesperez ; l'abordage
fut sanglant. Osman s'y signala par cette
intrépidité dont il a depuis donné des
preuves en tant de rencontres ; si la valeur
de tous eut été égale à la sienne
peut-être eussent ils évité l'esclavage . Enfin
il fallut céder au nombre . Osman
Aga , percé de coups , blessé dangereusement
au bras et à la cuisse , fut pris les
armes à la main . Le Corsaire , dont le Bâtiment
avoit souffert dans le combat
( a ) Sorte de Bâtiment de Levant , propre an
ransport des Marchandises,
soit
JANVIER . 1734.
77
soit qu'il eut besoin de se raccommoder ,
ou pour quelque autre raison , relâcha à
Malte .
-
Les marques de valeur qu'Osman avoit
données dans l'action, ou plutôt la déposition
que firent sans doute les autres Passagers
,qu'il étoit chargé d'une commission
secrete du Grand Seigneur , et l'espérance
d'en tirer une grosse rançon , le firent distinguer
parmi ses compagnons d'infortune;
cependant il n'étoit pas hors de danger
de ses blessures quand il arriva à Malte ;
celle de la Cuisse étoit la plus considérable
; il en est resté estropié ; et c'est delà
que lui est demeuré le nom ou le Sobriquet
de ( a ) Topal , suivant l'usage commun
des Turcs .
*
>
Aussi- tôt que le Corsaire fut entré dans
le Port , le Sr Vincent Arniaud dit
' Hardy , natif de Marseille , qui étoit
alors Capitaine de Port à Malte , se transporta
à bord du Bâtiment , suivant le devoir
de sa Charge. Il y vit le malheureux
Aga enchaîné , qui lui fit une proposision
bien singuliere,
Fais une belle action , lui dit Topal ,
rachette - moi , tu n'y perdras rien. Arniaud
surpris de la proposition , deman .
da au Capitaine Corsaire ce qu'il pré-
( a ) Boiteux,
ten8
MERCURE DE FRANCE
tendoit pour la rançon de cet Esclave. Il:
me faut mille Sequins ( a ) , répondit le
Corsaire . Arniaud se retournant vers
Osman , lui dit : Je te vois pour la premiere
fois de ma vie , je ne te connois
point , et tu me proposes de donner sur ,
ta parole mille Sequins pour ta rançon .
Nous faisons l'un et l'autre ce qu'il nous
convient de faire, reprit Osman . Quant à
moi je suis dans les fers , il est naturel
que je mette tout en usage pour obtenir
ma liberté ; pour toi , tu es en droit de te
défier de ma bonne foy ; je n'ai aucune
sureté à te donner que ma parole , et tu.
n'as aucune raison d'y conter ; cependant
si tu veux en courir les risques , je te le
répete encore , tu ne t'en repentiras pas.
Soit que l'air d'assurance , ou que la
Phisionomie du jeune Turc prévint Arniaud
en sa faveur, soit que la singularité
de l'avanture éloignât les soupçons qu'il.
auroit pû concevoir , le Capitaine de
Port sortit avec des dispositions favora
bles pour Topal Osman , et , ce qui est
peut être encore plus extraordinaire , la
réfléxion ne les détruisit pas.
Arniaud alla rendre compte au grand
( a ) Ily a plusieurs sortes de Sequins en Levant,
qui valent depuis six jusqu'à onze francs de notre
Monnoye.
MaîJANVIER.
1734. 79
Maître Perellos de ce qui concernoit son
ministere , revint à bord et convint de
600(a )Sequins Vénitiens avec le Corsaire,
pour le prix de la rançon de son Esclave ;
son nouveau Maître le fit aussi - tôt transporter
sur une Barque Françoise, à lui ар-
partenante,où il lui envoya un Médecin ,
un Chirurgien et tous les secours neces
saires.Osman se vit bien tôt hors de danger.
Il proposa alors à son bienfaicteur
d'écrire en Levant pour se faire rembourser
de ce qu'il lui devoit. Mais comblé
des bienfaits de son nouveau Patron , il
ne crut pas abuser de sa générosité en lui
demandant une nouvelle grace . C'étoit de
le renvoyer sur sa parole et de s'en remettre
pour le tout entierement à sa
bonne foy.
Arniaud ne fut pas genereux à demi
et rencherit encore sur la demande de son
Esclave ; après lui avoir fait toutes sortes
de bons traitemens , il lui donna cette
même Barque , sur laquelle il l'avoit fait
transporter, pour en disposer à sa volonté,
et se faire conduire où bon lui sembleroit.
Osman arrivé à Malte Esclave , et racheté
le jour même , en partit huit jours
après sur un Bâtiment à ses ordres . Le
(a ) Le Sequin Vénitien vaut aujourd'hui environ
11 liv. quelques sols, Monnoye de France.
Pa80
MERCURE DE FRANCE
Pavillon François le mettoit à l'abri
des Corsaires . Il arriva heureusement
à Damiette d'où il remonta le Nil jusqu'au
Caire . Le lendemain de son arrivée
il fit compter mille Sequins au Capitaine
au
de la Barque pour être remis à son libérateur,
il y joignit deux Pelisses ( a) dè la valeur
de soo piastres , ( b ) dont il fit présent
au Capitaine . Il exécuta la commission
du Grand Seigneur , repartit pour
en aller rendre compte, arriva à Constantinople
et fut lui - même le porteur de la
nouvelle de son Esclavage.
pas
à
La reconnoissance d'Osman ne se borna
ses premiers mouvements : pendant
plusieurs années de séjour qu'il fit du
côré de Larta en Albanie où ses emplois
l'appellerent, il continua d'en donner des
preuves à son bienfaicteur , et entretint
avec lui un commerce non interrompu
de lettres et de présents.
On peut même dire que sa reconnoissance
s'étendit sur toute la Nation Françoise
; puisque depuis son avanture il n'a
laissé échaper aucune rencontre où il n'ait
donné à tous les François , qui ont eu affaire
à lui, des marques d'une bienveillance
particuliere .
( a ) Robes Fourrées .
( b ) La Piastre courante du Levant , vaut aujourd'hui
3 livres quelques sols Monnoye de France.
Les
JANVIER 1734 81
Les occasions avoient manqué jusqu'a
lors à Osman de se faire connoître et de
pousser sa fortune . La Guerre s'étant depuis
declarée entre les Venitiens et les
Turcs , le Grand Visir Aly Pacha , qui
méditoit l'invasion de la Morée , assembla
son Armée dans le voisinage de
l'Isthme de Corinthe , qui joint la Morée
au continent et le seul passage qui
puisse donner entrée par terre dans cette
presqu'Isle.
>
Tous les differents corps de Troupes
qui devoient composer l'Armée Ottomane
, se rendirent de toutes les Provinces
de l'Empire au lieu et au jour marqués
le seul Cara Mustapha Pacha ,. qui commandoit
un Corps de trois mille hommes
, arriva trois jours trop tard au rendez-
vous de l'Armée : il lui en couta la
vie , le Visir lui ayant fait trancher la
tête.
Sur ces entrefaites , Topal-Osman brulant
du désir de se signaler , vint se présenter
au Visir à la tête de mille hommes
qu'il avoit levez et pris à sa solde sans
avoir reçu aucun ordre; et le jour destiné
à l'attaque du défilé du Pas de Corinthe ,
il s'offrit de marcher le premier, et se
chargea de forcer le passage avec sa troupe
; son offre fut acceptée. Peut être la
E terreur
82 MERCURE DE FRANCE
terreur et la consternation generale qui
s'étoient répandues à l'approche d'une
Armée formidable , ne laisserent- t'elle pas à
Topal-Osman tout le merite d'une victoi
re achetée cherement ; quoiqu'il en soit,il
força le défilé , et emporta d'emblée la
Ville de Corinthe. Il reçut du Grand
Visir pour récompense les deux queues
de Pacha , et tous les Equipages de l'infortuné
Cara Mustapha.
Osman ne resta pas en si beau chemin,
et les occasions ne manquant plus à son
courage , il se distingua par
de nouveaux
exploits dont le détail nous meneroit
trop loin. L'année suivante , au Siége de
Corfou il servit en second, et fit les fonctions
de Licutenant General.
Ce fut alors qu'il fit voir que sa prudence
égaloit sa valeur ; le Siége ayant
été abandonné , Osman demeura trois
jours devant la Place depuis le départ du
General , pour favoriser la retraite des
Troupes Ottomanes ; il donna les ordres
necessaires avec toute la présence d'esprit
possible , et ne se retira qu'après avoir mis
l'Armée en sûreté.
Il étoit tems qu'un homme de cette
trempe commandât à son tour ; adoré
des troupes , la voix publique l'appelloit
au Generalat ; mais plus il se distinguoit
entre
JANVIER 89 173 4.
entre ses pareils , plus il faisoit de jaloux ,
qui bientôt étoient autant d'ennemis.
Tel est , à la honte de l'humanité et en
tout Pays , l'effet ordinaire d'un merite
superieur , mais dont les conséquences ne
sont nulle part si dangereuses qu'en Turquic.
C'est à ce tems vrai-semblablement que
doit se raporter un évenement de la vie
d'Osman qui pensa le perdre , et dont
je ne retrouve qu'une note ; je l'ai entendu
raconter au Sr Arniaud fils , avec plusieurs
circonstances qui me sont échapées
; mais il est obmis dans le Mémoire
qu'il m'a laissé qui fut fait avec précipitation
et presque au moment de son départ.
,
se
Topal - Osman par des raisons qui ne
pouvoient que lui faire honneur
broüilla avec un Pacha plus puissant que
lui , peut-être avec ce même General
qu'il avoit si utilement remplacé au Siége
de Corfou . Sa tête fut proscrite et ses
biens confisquez : il fallut céder à l'orage,
il se déroba par la fuite à la fureur de son
ennemi ; déguisé et inconnu , abandonné
des siens , il se rendit à Salonique , où il
demeura caché quelque tems . Delà sous
l'habit et l'apparence d'un simple ( a ).
( a ) Soldat de Marine Turc.
E ij
Léventi
84 MERCURE DE FRANCE
Léventi , Il s'embarqua sur une Galere et
passa à Constantinople. Pendant qu'il
agissoit sous main , sans oser paroître , es
qu'il employoit ses amis pour obtenir sa
grace , son ennemi fut déposé. C'étoit le
plus grand obstacle à la justification
d'Osman : elle fut éclatante et solemnelle.
Il fut renvoyé dans la possession de tous
ses biens , et ce fut à peu près dans ce
tems qu'il fut nommé Seraskier ου
Generalissime en Morée.
›
Tous les Consuls étant venus le saluer
en cette qualité , il donna à la Nation
Françoise les témoignages les plus marquez
de bienvaillance et de protection .
chargea les Consuls François d'écrire à
Malte au Capitaine Arniaud , pour lui
faire part de sa nouvelle dignité , et le
prier de lui envoyer un de ses fils , dont
il se voyoit en état de faire la fortune.
Un des fils d'Arniaud , celui - la même
qui a fourni ces Mémoires , se rendit
effectivement en Morée ; et pendant deux
ou trois ans qu'il demeura auprès du
Seraskier, celui - ci, tant par les dons qu'il
lui fit , que par les facilitez et les avanta
ges qu'il lui procura pour son commerce,
le mit effectivement à portée de faire des
gains considérables dont les occasions furent
négligées par le jeune homme , alors
plus
JANVIER.
1734 83
plus occupé de ses plaisirs que du soin de
sa fortune.
Topal-Osman croissant en dignitez à
mesure que son mérite devenoit plus
connu , fut fait Pacha à trois queües , et
nommé Beglier-Bey de Romelie , un des
deux plus grands Gouvernements de
l'Empire , lequel par sa proximité de la
Frontiere de Hongrie est un poste encore
plus important.
་
En 1727. le Capitaine Arniaud , âgé
de soixante et sept ans , passa avec son
fils à Salonique , et alla voir le Beglier
Bey à Nysse où il faisoit sa résidence . Ils
en reçurent l'accueil le plus favorable et
le plus tendre ; il déposa en leur présen ,
ce le faste de sa dignité , les embrassa
leur fit servir le Sorbet et le Parfum , et
les fit asseoir sur le Sopha , faveur singuliere
de la part d'un Pacha du premier
ordre , sur tout quand elle est accordée à
un Chrétien. Il les combla d'honneurs et
de présents , et leur voyage leur valut
plus de 15000 livres. En prenant congé
du Pacha , son ancien Patron lui dit qu'il
esperoit bien avant que de mourir l'aller
saluer à Constantinople en qualité de
Grand Visir ; c'étoit plutôt alors un
souhait qu'une espérance , l'évenement
en a fait une prédiction.
E iij
Le
36 MERCURE DE FRANCE
Le Grand Visir Ibrahim Pacha après
avoir joüi douze ou treize ans tranquillement
d'une dignité jusques - là si orageuse,
périt cruellement comme tout le monde
sçait dans la Révolution de 1730. ( a )
En moins d'un an il eut trois successeurs.
Au mois de Septembre 1731 , Topal-
Osman fut appellé pour remplir à son
tour un poste dangereux par lui- même ,
et devenu plus délicat dans les circonstances
présentes . Il ignoroit encore quelle
place lui étoit destinée ; lorsqu'étant
en chemin pour se rendre à Constantinople
, il fit écrire à Malte par le Consul
Francois de Salonique et mander au Capitaine
Arniaud qu'il pouvoit lui et ses
enfans venir trouver Topal-Osman en
quelque lieu du monde que la fortune
l'appellât. Après son arrivée à Constantinople
il fit prier l'Ambassadeur de
France d'écrire de nouveau et d'inviter
son ancien Patron à le venir voir ; lui
recommandant de ne point perdre de
tems, parce qu'un Grand Visir pour l'ordinaire
ne demeuroit pas long- tems en
place.
Arniaud profita de l'avis ; il vint à
Constantinople avec son fils au mois de
( a ) Voyez le Supplement du Mercure d'Avri
1731
JanJANVIER.
1734 87
Janvier 1732. Aussi - tôt que le Visir fut
informé de leur arrivée , il leur envoya
un Officier de confiance , leur dire qu'il
leur donneroit Audiance le lendemain.
après midi. On pensoit qu'il les recevroit
en particulier , pour ne point commettre
sa dignité en faisant à des Chrétiens
un accueil qui pourroit indisposer les
Grands de la Porte , sur tout dans un
tems où la fermentation des esprits se
ressentoit encore des troubles de la derniere
Révolution. Les deux François se
rendirent le lendemain au Palais du Grand
Visir, à l'heure marquée, avec les présents
qu'ils lui avoient aportés de Malte, consistant
en plusieurs Caisses d'Oranges ,
Citrons , Bergamotes , &c. diverses sor
tes de Confitures , des Orangers chargez
de feuilles et de fleurs , des Serins dé
Canarie dont les Turcs sont fort curieux ,
et ce qui l'emportoit sur tout le reste ,
en douze Turcs rachetez de l'esclavage à
Malte.
Tous ces présents , par ordre du Visir ,
furent rangez et exposez à la vûë. Le
vieux Arniaud âgé de soixante et douze
ans , accompagné de son fils , fut introduit
devant le Grand Visir. Il les reçût
en présence des plus grands Officiers de
l'Empire , avec les témoignages de la plus
E iiij
tendre
38 MERCURE DE FRANCE
tendre affection . Vous voyez , dit - il , en
adressant la parole aux Turcs qui l'environnoient
, et leur montrant les Esclaves
rachetez, vous voyez vos freres qui jouissent
de la liberté après avoir langui dans
l'esclavage : ce François est leur libérareur
. J'ai été esclave comme eux
ajouta-t'il , j'étois chargé de chaînes
percé de coups , couvert de blessures ,
voilà celui qui m'a racheté , qui m'a sauvé
; voilà mon Patron : liberté , vie
fortune , je lui dois tout. Il a payé sans
e connoître mille Sequins pour ma rançon.
Il m'a renvoyé sur ma parole ; il m'a
donné un Vaisseau pour me conduire ou
je voudrois :où est,même le Musulman ,capable
d'une pareille action de génerosité?
Tous les assistants avoient les yeux tournez
sur le vieillard qui tenoit les mains
du Grand Visir embrassées .Tous les Officiers
de ce Ministre , tous les gens de sa
maison se disoient les uns aux autres
voilà l'Aga ( a ) le Patron du Visir; voilà
celui qui a racheté notre Maître.
Cinq ans auparavant Osman étant Pacha
de Nysse , n'avoit pas voulu permettre
que son ancien Patron lui baisât
la main. Devenu Grand- Visir , il souf-
( a ) Les Esclavos Tures appellens leur Maître
tum Aga.
frit
JANVIER 1734 89
frit cette marque de respect et de soumission
, et crut devoir en agir ainsi
sur tout en présence des Grands de l'Empire
, pour qui c'eût été une faveur ,
eux qui se trouvent honorez de baiser
le bas de la veste d'un Grand Visir , et
dont plusieurs même murmuroient en
secret de l'honneur que celui- cy faisoit
à de vils Ghiaours . (a)
,
Le Visir fit ensuite au Pere et au Fils
diverses questions sur l'état présent de leur
fortune et sur les pertes qu'ils avoien
essuyées dans leur commerce. Après avoir
écouté leurs réponses avec bonté , il répliqua
par une Sentence Arabe Allah-
Kerim , qui signifie à la lettre , Dleu est
liberal , et dans un sens plus étendu , la
Providence de Dieu est grande ; elle m'a
mis en état , ajoûta - t'il , d'adoucir votre
situation. Il fit ensuite devant eux la
destination de leurs présents , dont il
envoya sur le champ la plus grande partie
au Grand- Seigneur , à la Validé ¯ ( b)
et au Kislar- Agă, ( c)
Les deux François , comblez des cares-
(a) Ghiaours est un terme de mépris dont les
Tures se servent pour désigner ceux qui ne sont pas
Musulmans.
(b) Sultane Mere.
(c) Chef des Eunuques noirs.
E v se
90 MERCURE DE FRANCE
•
ses du Grand-Visir , prirent congé de lui.
Il avoit donné ordre de leur préparer
un Appartement dans son Palais ; il leur
fit quelques reproches en apprenant qu'ils
retournoient au Palais de France ; il chargea
l'Interprete de les recommander de
sa part à M. l'Ambassadeur , en le faisant
assurer qu'il lui auroit obligation
de tout ce qu'il feroit pour eux.
Il y a assurément de la grandeur d'ame
dans la peinture que Topal- Osman fit
de son Esclavage et dans l'aveu public
de son humiliation et des obligations
qu'il avoit à son Libérateur ; mais il faudroit
connoître le profond mépris et le
fond d'éloignement que les préjugez de
la Religion et de l'éducation inspirent
aux Turcs pour tout ce qui n'est point
Musulman , et en particulier pour les
Chrétiens , pour sentir toute la beauté
et la noblesse de cette action , qui se passa
aux yeux de toute sa Cour.
Le Fils du Visir reçut ensuite le Pere et le
Fils en particulier dans son Appartement,
où il ne garda aucunes mesures. Il les
embrassa l'un et l'autre, les traita avec la
même familiarité qu'avoit fait son Pere
étant Pacha de Nysse , et leur fit promettre
de le venir voir souvent.
Ils eurent peu de temps avant leur départ
JANVIER. 1734- 91
part une autre Audiance particuliere du
Visir , où ce Ministre n'ayant plus de
bienséance à observer , oublia son rang
pour ne plus se souvenir que de ce qu'il
devoit à son Bienfaicteur. Il lui avoit
déja fait rembourser liberalement la rançon
des douze Esclaves , et procuré le
payement d'une ancienne dette regardée
comme perdue. Il y ajoûta de nouveaux
présents en argent , et un Commandement
ou permission expresse pour faire
gratis à Salonique , un chargement de
bled , sur lequel il y avoit un profit à
faire d'autant plus considerable que ce
commerce étoit interdit aux Etrangers
depuis plusieurs années. Cette gratifica
tion montoit à plus de dix mille écus .
Le Visir , qui eût voulu mesurer sa libé
ralité sur sa reconnoissance , qui étoit'sans
bornes, leur fit entendre qu'il ne pouvoit
pas faire tout ce qu'il vouloit, et peut - être
n'en faisoit- il déja que trop aux yeux de
ceux qui ne jugent des actions d'un Ministre
que par leur interêt particulier.
Il fit ressouvenir Arniaud le fils de son
voyage en Morée , et du temps où il n'avoit
tenu qu'à lui de faire une grande
fortune par les occasions qu'il lui avoit
procurées. Il finit par leur dire qu'un
Pacha étoit le Maître dans son Gouverne
E vi
ment
92 MERCURE DE FRANCE
ment , mais qu'un Visir à Constantinople
avoit un plus grand Maître que lui .
Topal- Osman , par sa vigilance et sæ
fermeté, avoit remis l'abondance , le bon
ordre et la Police dans Constantinople ,
où depuis la Révolution jusqu'à son Ministere
, la licence et le desordre n'avoient
pû être réprimez , et où la disette
et la cherté des vivres étoient excessives.
Quoiqu'on lui ait reproché une trop
grande séverité, il est de fait qu'il n'a condamné
à mort même les plus vils et les plus
séditieux des mutins , que sur le Fetfa (a)
du Mufti. Peut-être dans les conjonctures
présentes un homme de ce caractére étoitil
nécessaire pour prévenir une nouvelle
révolte et rétablir la tranquillité publique;
ce qu'il y a de certain , et qui est bien à
son honneur , c'est qu'il fut regretté de
tous les gens de bien et des bons Citoyens,
lorsqu'il fut ôté de place au mois de
Mars 1732.
On ne sçut pas bien , du moins alors ,
les véritables motifs de sa déposition .
Un mois auparavant les bruits publics
l'avoient annoncée pour le temps précis
où elle arriva : elle avoit été précedée de
quelques jours par celle du Mufti , qui
(a) Sorte de consultation du Mufti , qui décide
suivant la Loy , de la peine duë au coupable.
avoit
JANVIER. 1734. 93
avoit opiné pour la Paix , ainsi que le
Visir dans le Conseil extraordinaire, tenu
depuis peu au sujet des affaires de Perse ;
l'un et l'autre avoient insisté fortement sur
la nécessité de ratifier le Traité conclu par
Achmet-Pacha , Gouverneur de Bagdad,
en vertu de son plein pouvoir. La déposition
de ces deux Ministres fut regardée
, avec raison , comme un mistere de
politique ; car il faut avouer que tout
ce qu'on en dit dans le temps ne passoit
pas la conjecture.
Topal - Osman , qui avoit dès longtemps
prévû ce revers , le soutint avec
la plus parfaite tranquillité. En sortant
du Serrail , après avoir remis le Sceau de
l'Empire , il trouva toutes ses Créatures
et tous les Gens de sa Maison abatus et
consternez : de quoi vous affligez - vous ,
leur dit - il , ne vous ai-je pas dit qu'un
Visir ne restoit pas long- temps en place ?
Toute mon inquiétude étoit de sçavoir
comment j'en sortirois ; grace à Dieu on
n'a rien à me reprocher ; le Sultan est satisfait
de mes services ; je pars tranquille.
et content.
Il donna ensuite ses ordres pour un
Sacrifice (a) d'actions de graces , distri-
(a) Cette coûtume est pratiquée parmi les Turcs
en certaines occasions , comme pour obtenir un heureux
succès , &c.
94 MERCURE DE FRANCE
bua de l'argent à ses Domestiques et leur
ordonna de se réjouir . Il se ressouvint
aussi dans ce moment de son Bienfaicteur
, en prévoyant le chagrin que cet
évenement lui causeroit. Qu'on lui dise
qu'il se console , ajoûta- t'il , je ne désespere
pas de le revoir encore , dites lui
qu'il me retrouvera toujours; qu'on écrive
à Salonique, que l'on soit exact à lui donner
la quantité de bled que j'ai ordonné ;
si j'apprends qu'il en manque une mesure
, je ferai voir que je ne suis pas mort. Il
donna quelques autres ordres concernant
ses affaires domestiques et partit pour Trébisonde
, dont il avoit été nommé Pacha.
Si la reconnoissance , toute naturelle
qu'elle est aux coeurs genereux, passe pour
une vertu rare sur tout chez les Grands , il
faut convenir qu'elle reçoit ici un nouvel
éclat par la circonstance et le moment
où Topal - Osman rappella le souvenir de
son Bienfaicteur.
Jamais déposition de Visir n'eut moins
Fair d'une disgrace ; il n'y a point d'exemple
qu'un Ministre disgracié ait été
traité avec autant d'égards et de distinction.
Le Grand- Seigneur lui fit dire de
laisser son fils à Constantinople et qu'il
en prendroit soin ; et quatre jours après
ce même fils eut l'honneur de présenter
JANVIER 1734 99
à Sa Hautesse le présent qui lui avoit été
destiné par son Pere , pour le jour de Bayram.
(a) Il consistoit en un Harnois de
Cheval, enrichi de Pierreries , estimé 50000
Piastres ; c'est ce que Topal Osman avoit
en partant expressément recommandé à
son fils ; quoique , n'étant plus en place ,
il eût pû se dispenser de faire le présent
qu'il avoit fait préparer en qualité
de Grand- Visir.
•
Peu de jours après il reçut sur sa route
de nouveaux ordres pour aller commander
en Perse , à la Place d'Ali Pacha´, qui
venoit d'être nommé Grand- Visir à la
sienne. Osman alla tranquillement relever
son Successeur au Visiriat , dans
le poste de Séraskier , où il a rendu depuis
deux ans à sa Patrie des services
peut- être plus importants qu'il n'auroit
pû faire , s'il fût demeuré Grand - Visir ,
puisque non-seulement il a trouvé le secret
de soutenir une guerre difficile dans
un Pays désert et ruiné , à quatre cent
lieues de la Capitale , le plus souvent dénué
des secours d'argent , d'hommes , de
vivres et de munitions ; mais encore qu'il
a remporté une victoire complette (b)
(a ) Fête solemnelle des Turcs , pendant laquelle
ils se font des présens .
(b) Le 19. Juillet 1733 •
en
96 MERCURE DE FRANCE
en bataille rangée sur un Ennemi ( a) digne
de lui , battu les Persans en trois rencontres
, (b) et humilié l'orgueil de leur
fier General .
Fermer
Résumé : LETTRE de M. D. L. C. à M. D. L. R. sur quelques particulartiez de la vie de Topal Osman Pacha, cy-devant Grand Visir de l'Empire Ottoman, et aujourd'hui Séraskier de l'Armée Turque en Perse. A Paris, ce 18 Janvier 1734.
La lettre de M. D.L.C. à M. D.L.R., datée du 18 janvier 1734, décrit la vie de Topal Osman Pacha, ancien Grand Visir de l'Empire Ottoman et alors Séraskier de l'Armée Turque en Perse. L'auteur souligne l'importance de partager les aventures de Topal Osman en raison des liens croissants entre les affaires d'Asie et d'Europe. Il mentionne un projet de biographie qui allierait la singularité du roman à la fidélité historique. Topal Osman avait été racheté de l'esclavage à Malte par M. Arniaud environ trente-cinq ans auparavant. En 1732, Arniaud et son fils rencontrèrent Topal Osman à Constantinople. Le fils d'Arniaud avait rédigé un mémoire sur l'histoire de Topal Osman, que l'auteur conserve. Topal Osman avait reçu une éducation au Sérail du Grand Seigneur, destinée aux enfants chrétiens. En 1698 ou 1699, à l'âge de 25 ans, il exerçait la fonction de Martolos Bachi et fut chargé d'une mission en Égypte. Lors de son retour, il fut capturé par des corsaires espagnols et blessé. Racheté par Arniaud, il fut soigné et renvoyé en Égypte, où il remboursa sa rançon et offrit des présents à son bienfaiteur. Topal Osman se distingua lors de la guerre contre les Vénitiens, notamment en forçant le passage du défilé de Corinthe et en participant au siège de Corfou. Ses succès lui valurent des récompenses et le respect des troupes, mais aussi des jaloux et des ennemis, menant à une proscription temporaire. Il dut se cacher et fut finalement réhabilité, devenant Séraskier en Morée. En 1727, Arniaud et son fils se rendirent à Salonique et furent reçus favorablement par Topal Osman, alors Pacha de Nysse. En 1731, Topal Osman devint Grand Visir et invita Arniaud et son fils à Constantinople. Ils furent accueillis avec honneur et générosité, Topal Osman exprimant publiquement sa gratitude envers Arniaud. Malgré sa déposition en mars 1732, Topal Osman continua de montrer sa reconnaissance envers Arniaud. Avant de quitter son poste de Grand Visir, Topal Osman avait préparé un cheval orné de pierreries, estimé à 50 000 piastres, qu'il recommanda à son fils. Il reçut ensuite de nouveaux ordres pour commander en Perse, succédant à Ali Pacha. Durant ses deux années à ce poste, il rendit des services significatifs à sa patrie, notamment en soutenant une guerre difficile dans une région désertique et ruinée. Il remporta une victoire complète le 19 juillet 1733, battant les Persans en trois rencontres et humiliant leur général.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
76
p. 586-593
A Constantinople le 15. Janvier 1734.
Début :
La derniere Lettre que je vous écrivis, Monsieur, en datte des 12. et 20. Novembre, [...]
Mots clefs :
Topal Osman Pacha, Thamas Kouli-Kan, Turcs, Troupes, Kerkout, Bagdad, Perse, Memis Pacha, Achmet Pacha, Constantinople
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A Constantinople le 15. Janvier 1734.
A Constantinople le 15. Janvier 1734-
L
A derniere Lettre que je vous écrivis , Monsieur
, en datte des 12. et 20. Novembre
ne vous parloit que des triomphes de Topal - Osman
Pacha ; je me préparois même alors avec
plaisir à vous en annoncer bien- tôt un autre
qui auroit mis le comble à sa gloire , et qui suivant
la situation où l'on assuroit que les affaires
des Turcs étoient en Perse , ne pouvoit lui manquer
, mais la Providence en a ordonné autrement
, et ce grand homme a trouvé sa défaite
où tout sembloit lui promettre celle de son Ennemi.
Quoique je ne doute pas que vous ne
soyez déja informé de cet Evenement, je ne laisse
pas de vous faire part de ce que j'en ai appris ,
parce que les premieres Relations qui en coururent
d'abord ont été démenties dans plusieurs
points par de plus fidelles qui sont venuës après.
Memis- Pacha , qui , comme je vous l'ai déja
mandé , avoit été détaché avec un Corps de
Troupes , chargé de poursuivre Thamas Kouli-
Kan ; après la déroute de celui-cy à Leilan , ne
se sentant pas assez fort pour l'attaquer dans le
Défilé , où l'on prétendoit qu'il avoit été contraint
de se renfermer , envoya demander du
secours à Topal - Osman. Ce Seraskier impatient
de terminer par quelque coup décisif une guerre
que le desespoir plutôt que les forces du General
Persan pouvoit encore prolonger , s'il le l'aissoit
MARS. 1734.
587
rage
soit échapper du mauvais pas, où il le croyoit engagé,
se flata que sa présence redoubleroit le coudes
Turcs, comme il l'avoit éprouvé tant de
fois, et lui faciliteroit la victoire sur son Ennemi .
Il marcha donc avec le peu de Troupes qui lui restoient,
mais à peine cut- il joint Memis-Pacha, sur
lequel Thamas Kouli- Kan vint fondre avec fureur
, que par des raisons qui n'ont pas été bien
éclaircies , ce Pacha , dont jusqu'alors la bravoure,
n'avoit point parû équivoque , prit la fuite
avec toutes ses Troupes sans faire la moindre
résistance.
Topal- Osman outré de s'en voir si lâchement
abandonné , mais incapable de suivre son exemple
, s'abandonna lui - même à son intrépidité ,
et malgré la supériorité du nombre des Persans ,
il soutint leurs attaques pendant quelques heures
, secondé du peu de monde qu'il avoit ame
né ; il combattoit même avec avantage et leur
faisoit déja perdre du terrain , lorsque deux
coups de fusil qu'il reçut à la fois , le firent tomber
mort de cheval . Ce funeste spectacle jetta un
si grand et si subit dérangement parmi ses Soldats
, qu'ils se débanderent aussi- tôt et prirent
à toutes jambes la route de Kerkout , dans laquelle
Memis-Pacha les avoit devancez.
Kouli Kan , qui depuis qu'il a' pris les armes
ne s'étoit fait connoître que par un orgueil insupportable
et un courage qui tenoit plus de la
férocité qu'on respire sur les Montagnes où il a
reçû le jour , que de cette valeur genereuse qui
n'est pas moins souvent le fruit d'une belle édu
cation , qu'un présent de la Nature , donna ce
pendant en cette occasion une marque de gran
deur d'ame à laquelle on ne s'attendoit
part,et qu'il y auroit de l'injustice à passer sous
H vj silence
pas
de sa
$ 88 MERCURE DE FRANCE
silence. Ayant sçû que l'épouvante et la retraite.
précipitee du reste des Troupes Ottomanes n'avoient
eu d'autre cause que la mort de leur Chef,
il se servit de leur Ordou- Cadi , qui avoit été
pris auprès de lui lorsqu'il fut tué , pour retrouver
et reconnoître son corps , et après l'avoir.
consideré avec une espece de veneration , il le
fit porter à la Littiere dans laquelle le Deffunt
étoit venu et le renvoya à Kerkout , pour que,
les Turcs lui fissent eux -mêmes des Obseques
convenables. Il est vrai qu'on dit qu'il n'en usa
si noblement qu'en reconnoissance de ce que
Topal - Osman lui avoit renvoyé depuis quelques
jours son beau-pere et son neveu , qui avoient
été faits prisonniers à l'affaire de Kerkout ; mais
quelqu'ait été le motif qui l'a fait agir , ce trait
de magnanimité n'en est pas moins digne de
loüange.
La nouvelle de cette mort , qu'on reçut à Constantinople
la nuit du 4. auf. Décembre , remplit
cette Ville de consternation , et le Peuple
effrayé par des faux bruits que des mal ingens
tentionnez pour cet Empire , prirent soin de semer
les jours suivans , s'imagina que tout étoit
perdu ; heureusement des avis posterieurs et plus
vrais , ont fort rassuré les esprits , et l'on sçait,
à présent que tout le dommage que les Turcs
ont souffert dans ce dernier combat, se réduit à
un très - petit nombre de morts et de prisonniers
et à la perte de Topal - Osman ; perte , à la verité
, irréparable dans un sens , quand on refléchit
sur lesgrandes qualitez de ce General et sur le
point avantageux où il avoit conduit les choses ,
mais perte , après tout , qui n'entraîne pas celle
*L'Intendant de l'Armée.
de
MARS. 1724. 589
de l'Etat , comme ceux qui voudroient le voir
anéanti , affectoient de le répandre sourdement .
En premier lieu , bien loin que Thamas Kouli
-Kan ait tiré quelque fruit de cette victoire en
poursuivant les Turcs à Kerkout et en s'emparant
de cette Forteresse , comme on avoit d'abord
publié qu'il l'avoit fait , il a été obligé de
s'en éloigner encore plus qu'il ne l'étoit et de
tenir la Campagne , tantôt d'un côté , tantôt
d'un autre pour trouver à subsister , sans même
emporter le Canon que les Turcs lui abandonnerent
avec le Champ de bataille . Secondement,
il est certain qu'il continue ses instances
pour obtenir la Paix qu'il avoit demandée aux
Turcs depuis long- temps et que leur Ordon-
Cadi , qu'il avoit renvoyé ici sur sa parole pour
cette négociation , s'en est retourné sans qu'on
ait seulement voulu écouter les propositions
que cè General l'avoit chargé de faire de sa part
Ja Porte.
est
Il y a bien plus que cela , s'il en faut croire
certaines nouvelles , que je tiens de fort bon lieu:
elles portent que Kouli - Kan , n'ayant plus un
assez gros parti pour soutenir sa rebellion en
Perse , n'ose pas y retourner , parce qu'il y
regardé comme le fleau et l'unique auteur des
dernieres calamitez dont ce malheureux Royaume
est désolé ; qu'aussi - tôt qu'il eut perdu la
Bataille du 19 Juillet , un Seigneur Persan fort
acredité , qu'on appelle le vieux Khan , & qu'il
avoit laissé devant Bagdad pour y continuer le
blocus , l'abandonna , partit en poste et s'en alla
droit à Hispahan soulever les esprits contre lui ;
que delà il passa dans le Corassan , où il tira
Schaph- Thamas de sa prison ; qu'il ramena ce
Prince dans sa Capitale et le rétablit sur son
Tiêu
$90 MERCURE DE FRANCE
Trône aux acclamations de tout le peuple ; qu'en
suite le Roy de Perse avoit de nouveau déclaré
qu'il condamnoit en tout la conduite de Kouli-
Kan depuis qu'il avoit violé la derniere Paix
qu'il persistoit à le proscrire comme rebelle à
son Souverain , et traître à sa patrie ; qu'il levoit
des Troupes pour marcher contre lui le prendre
vif ou mort, s'il étoit possible , et le livrer à
la vengeance des Turcs , et qu'il renouvelloit
sans restrition la ratification qu'il avoit faite
du Traité d'Amadan.
Je ne vous dissimulerai point , Monsieur , que
je ne voudrois pas vous garantir la verité de ces
nouvelles en leur entier , parce que je sçais qu'on
soupçonne toujours ici , que Schah- Thamas et
son premier Ministre s'entendent ensemble ; mais
je ne vous garantirai pas davantage non plus les
Nouvelles suivantes , arrivées ici depuis peu de
jours.
Les unes disent que Kouli-Kan ayant voulu
risquer une tentative sur Kerkout, Memis Pacha
étoit sorti de cette Place , et l'avoit défait à plate
Couture. Les autres portent au contraire , qu'Achmet
Pacha de Bagdad , sur l'avis qu'on lui
avoit donné , que Thamas- Kouli - Kan avoit dé
taché 4000 hommes pour aller s'emparer de
Khillet * il étoit sorti de Bagdad avec la meilleure
partie de sa Garnison dans le dessein d'enlever
ce Détachement ennemi ; mais qu'ayant
appris en route que Kouli- Kan étoit lui - même à
›
* C'est un gros Bourg avec une petite forteresse
sur le chemin de Bagdad à Bassora , lequel étant
situé au bord de l'Euphrate , sert de Magasin et
d'entrepôts aux provisions pour cette premiere
Place.
KhilMARS
1734.
591
"
Khillet avec 30 à 40 mille hommes , il avoit rebroussé
chemin en dilligence , & qu'étant rentré
dans Bagdad , où il y aa fort peu de vivres , il en
avoit fait sortir les vieillards , les femmes , les
enfans ; en un mot , toutes les bouches inutiles
dans l'aprehension que le General Persan , après
avoir établi ses Magazins à Khillet , ne revint
encore former le blocus de Bagdad ; qu'avant
que d'y être de retour , un autre Achmet , qui
est Capidgi-Bachi , et son Divan- Effendi ** , se
ressouvenant de tout ce qu'il avoit souffert l'année
passée dans cette Place , et craignant de s'y
voir renfermé de nouveau pour long- tems , avoit
débauché 6000 hommes des Troupes qui étoient
sorties avec Achmet Pacha , et que s'étant mis à
leur tête , il les avoit conduit à Kerkout , od
Memis Pacha indigné de sa désertion l'avoit fait
mettre aux fers , et se tenoit sur ses gardes avec
ce renfort contre les entreprises que Kouli-Kam
pourroit faire sur Kerkout.
Vous voyez , Monsieur , par toutes ces nonvelles
, qui se contredisent et qui se débitent
pourtant à Constantinople aussi affirmativement
les unes que les autres , combien il est difficile
pour ne rien dire de plus , de sçavoir positive.
ment ce qui se passe dans ces Contrées éloignées,
où les Etrangers qui sont ici , n'ayant point de
correspondance , ne peuvent que rarement être
instruits du véritable état des choses.
Mais ce dont je puis vous parler avec certitu
de , c'est que depuis la mort de Topal - Osman
on fait de tous côtez dans cet Empire , des préparatifs
extraordinaires contre la Pers . Tous les
** Secretaire du Conseil , ou son premier Secttaire.
7
Pachas
192 MERCURE DE FRANCE
>
Pachas d'Asie ont eu ordre de marcher sans
délai avec le plus de Milices qu'ils pourront rassembler,
chacun dans l'étendue de son Gouvernement
il doit partir d'ici vingt chambrées de
Jannissaires qui composeront environ 8000
hommes. On compte que quand toutes ces
Troupes seront arrivées au lieu du rendez.vous ,
elles se monteront à 90 mille combattans , qui
joints à ce qu'il y en a déja en Perse formeront
une armée formidable ; et l'on s'en promet d'antant
plus de succès , que le G. S. pour encouràger
les gens de Guerre , a considérablement augmenté
la paye , ou les apointemens de tous ceux
qui serviroient dans cette armée pendant la campagne
prochaine. D'ailleurs trois Bâtimens François
frettez par sa hautesse ont déja fait voile
ces jours- ci , chargez de Canons , de Poudre ,
de Boulets , & c . qu'ils doivent débarquer à Alexandrete.
:
Abdoulla Cuperli , ci -devant Pacha du Caire ,
et à présent de Cogni , a été nommé pour remplacer
Topal - Osman , et le G. V. a déclaré en
public , qu'il marcheroit lui - même , pour exterminer
les Persans cette année , ou les forcer du
moins à faire une Paix solide , et honorable à la
Porte.
Au reste , Monsieur , pour finir ma Lettre ,
par quelque chose de consolant sur la mort de
Topal - Osman Pacha , je vous dirai que le G. S.
voulant donner des marques éclatantes du cas
qu'il faisoit de cet illustre et fidele sujet à récompensé
dans la personne de son fils Achmet , les
services que le Pere rendoit depuis si longtems à
cet Empire ; quoique ce jeune Seigneur n'aitt pas
encore 24 ans sa hautesse l'a fait tout d'un
coup et de son propre mouvement Pacha à trois
queües ,
>
MARS 1734.
593
*
queues , et Beylerbey de Romelie ; il est parti
d'ici dernierement avec un Equipage aussi nombreux
que superbe , pour se rendre à Nissa , ré..
sidence affectée au Pacha qui est revêtu de ce
Beylerbeylik .
Ce bienfait tout grand qu'il est en lui - même ,
a été cependant accompagné d'une circonstance,
qui à notre maniere de penser semble en dimi
nuer beaucoup le prix , et que ceux qui ne sont
pas au fait des maximes de l'Empire Ottoman ',
trouveront sans - doute fort extraordinaire , c'est
que dans le même tems que le G. S. a temoigné
avec tant de distinction sa reconnoissance envers
Topal - Osman , en élevant son fils si jeune encore
aux premieres dignitez de l'Etat , Sa Hautesse a
dépêché un Capidgi -Bachi en Perse , pour confisquer
au profit du Trésor Imperial tous les
effets mobiliers du deffunt : de sorte qu'il ne reste
à Achmet Pacha , de la grande succession de son
pere , qui passoit pour extrémement riche , que
les immeubles consistant en Maisons &c. parcè
que Topal Osman avoit eu la précaution de rendre
tous ces bens - là Vacoufs : c'est - à - dire de les
donner en proprieté à des Mosquées et de s'en
réserver l'usufruit pour lui , et pour ses descendans
jusqu'à l'extinction de sa race. Cette précaution
fort en usage dans ce Païs - ci , est le seul
moyen , par lequel ceux qui ont eu quelque part
aux affaires publiques peuvent assurer leur héritage
à leurs enfans : car les biens devenus Vacoufs
sont sacrez : pour quelque cause que ce soit ,
personne ne peut s'en emparer ; et ils ne sont dévolus
aux Mosquées pour la jouissance effective
qu'après le décès du dernier usufruitier .Je suis & c .
P. V. D.
L
A derniere Lettre que je vous écrivis , Monsieur
, en datte des 12. et 20. Novembre
ne vous parloit que des triomphes de Topal - Osman
Pacha ; je me préparois même alors avec
plaisir à vous en annoncer bien- tôt un autre
qui auroit mis le comble à sa gloire , et qui suivant
la situation où l'on assuroit que les affaires
des Turcs étoient en Perse , ne pouvoit lui manquer
, mais la Providence en a ordonné autrement
, et ce grand homme a trouvé sa défaite
où tout sembloit lui promettre celle de son Ennemi.
Quoique je ne doute pas que vous ne
soyez déja informé de cet Evenement, je ne laisse
pas de vous faire part de ce que j'en ai appris ,
parce que les premieres Relations qui en coururent
d'abord ont été démenties dans plusieurs
points par de plus fidelles qui sont venuës après.
Memis- Pacha , qui , comme je vous l'ai déja
mandé , avoit été détaché avec un Corps de
Troupes , chargé de poursuivre Thamas Kouli-
Kan ; après la déroute de celui-cy à Leilan , ne
se sentant pas assez fort pour l'attaquer dans le
Défilé , où l'on prétendoit qu'il avoit été contraint
de se renfermer , envoya demander du
secours à Topal - Osman. Ce Seraskier impatient
de terminer par quelque coup décisif une guerre
que le desespoir plutôt que les forces du General
Persan pouvoit encore prolonger , s'il le l'aissoit
MARS. 1734.
587
rage
soit échapper du mauvais pas, où il le croyoit engagé,
se flata que sa présence redoubleroit le coudes
Turcs, comme il l'avoit éprouvé tant de
fois, et lui faciliteroit la victoire sur son Ennemi .
Il marcha donc avec le peu de Troupes qui lui restoient,
mais à peine cut- il joint Memis-Pacha, sur
lequel Thamas Kouli- Kan vint fondre avec fureur
, que par des raisons qui n'ont pas été bien
éclaircies , ce Pacha , dont jusqu'alors la bravoure,
n'avoit point parû équivoque , prit la fuite
avec toutes ses Troupes sans faire la moindre
résistance.
Topal- Osman outré de s'en voir si lâchement
abandonné , mais incapable de suivre son exemple
, s'abandonna lui - même à son intrépidité ,
et malgré la supériorité du nombre des Persans ,
il soutint leurs attaques pendant quelques heures
, secondé du peu de monde qu'il avoit ame
né ; il combattoit même avec avantage et leur
faisoit déja perdre du terrain , lorsque deux
coups de fusil qu'il reçut à la fois , le firent tomber
mort de cheval . Ce funeste spectacle jetta un
si grand et si subit dérangement parmi ses Soldats
, qu'ils se débanderent aussi- tôt et prirent
à toutes jambes la route de Kerkout , dans laquelle
Memis-Pacha les avoit devancez.
Kouli Kan , qui depuis qu'il a' pris les armes
ne s'étoit fait connoître que par un orgueil insupportable
et un courage qui tenoit plus de la
férocité qu'on respire sur les Montagnes où il a
reçû le jour , que de cette valeur genereuse qui
n'est pas moins souvent le fruit d'une belle édu
cation , qu'un présent de la Nature , donna ce
pendant en cette occasion une marque de gran
deur d'ame à laquelle on ne s'attendoit
part,et qu'il y auroit de l'injustice à passer sous
H vj silence
pas
de sa
$ 88 MERCURE DE FRANCE
silence. Ayant sçû que l'épouvante et la retraite.
précipitee du reste des Troupes Ottomanes n'avoient
eu d'autre cause que la mort de leur Chef,
il se servit de leur Ordou- Cadi , qui avoit été
pris auprès de lui lorsqu'il fut tué , pour retrouver
et reconnoître son corps , et après l'avoir.
consideré avec une espece de veneration , il le
fit porter à la Littiere dans laquelle le Deffunt
étoit venu et le renvoya à Kerkout , pour que,
les Turcs lui fissent eux -mêmes des Obseques
convenables. Il est vrai qu'on dit qu'il n'en usa
si noblement qu'en reconnoissance de ce que
Topal - Osman lui avoit renvoyé depuis quelques
jours son beau-pere et son neveu , qui avoient
été faits prisonniers à l'affaire de Kerkout ; mais
quelqu'ait été le motif qui l'a fait agir , ce trait
de magnanimité n'en est pas moins digne de
loüange.
La nouvelle de cette mort , qu'on reçut à Constantinople
la nuit du 4. auf. Décembre , remplit
cette Ville de consternation , et le Peuple
effrayé par des faux bruits que des mal ingens
tentionnez pour cet Empire , prirent soin de semer
les jours suivans , s'imagina que tout étoit
perdu ; heureusement des avis posterieurs et plus
vrais , ont fort rassuré les esprits , et l'on sçait,
à présent que tout le dommage que les Turcs
ont souffert dans ce dernier combat, se réduit à
un très - petit nombre de morts et de prisonniers
et à la perte de Topal - Osman ; perte , à la verité
, irréparable dans un sens , quand on refléchit
sur lesgrandes qualitez de ce General et sur le
point avantageux où il avoit conduit les choses ,
mais perte , après tout , qui n'entraîne pas celle
*L'Intendant de l'Armée.
de
MARS. 1724. 589
de l'Etat , comme ceux qui voudroient le voir
anéanti , affectoient de le répandre sourdement .
En premier lieu , bien loin que Thamas Kouli
-Kan ait tiré quelque fruit de cette victoire en
poursuivant les Turcs à Kerkout et en s'emparant
de cette Forteresse , comme on avoit d'abord
publié qu'il l'avoit fait , il a été obligé de
s'en éloigner encore plus qu'il ne l'étoit et de
tenir la Campagne , tantôt d'un côté , tantôt
d'un autre pour trouver à subsister , sans même
emporter le Canon que les Turcs lui abandonnerent
avec le Champ de bataille . Secondement,
il est certain qu'il continue ses instances
pour obtenir la Paix qu'il avoit demandée aux
Turcs depuis long- temps et que leur Ordon-
Cadi , qu'il avoit renvoyé ici sur sa parole pour
cette négociation , s'en est retourné sans qu'on
ait seulement voulu écouter les propositions
que cè General l'avoit chargé de faire de sa part
Ja Porte.
est
Il y a bien plus que cela , s'il en faut croire
certaines nouvelles , que je tiens de fort bon lieu:
elles portent que Kouli - Kan , n'ayant plus un
assez gros parti pour soutenir sa rebellion en
Perse , n'ose pas y retourner , parce qu'il y
regardé comme le fleau et l'unique auteur des
dernieres calamitez dont ce malheureux Royaume
est désolé ; qu'aussi - tôt qu'il eut perdu la
Bataille du 19 Juillet , un Seigneur Persan fort
acredité , qu'on appelle le vieux Khan , & qu'il
avoit laissé devant Bagdad pour y continuer le
blocus , l'abandonna , partit en poste et s'en alla
droit à Hispahan soulever les esprits contre lui ;
que delà il passa dans le Corassan , où il tira
Schaph- Thamas de sa prison ; qu'il ramena ce
Prince dans sa Capitale et le rétablit sur son
Tiêu
$90 MERCURE DE FRANCE
Trône aux acclamations de tout le peuple ; qu'en
suite le Roy de Perse avoit de nouveau déclaré
qu'il condamnoit en tout la conduite de Kouli-
Kan depuis qu'il avoit violé la derniere Paix
qu'il persistoit à le proscrire comme rebelle à
son Souverain , et traître à sa patrie ; qu'il levoit
des Troupes pour marcher contre lui le prendre
vif ou mort, s'il étoit possible , et le livrer à
la vengeance des Turcs , et qu'il renouvelloit
sans restrition la ratification qu'il avoit faite
du Traité d'Amadan.
Je ne vous dissimulerai point , Monsieur , que
je ne voudrois pas vous garantir la verité de ces
nouvelles en leur entier , parce que je sçais qu'on
soupçonne toujours ici , que Schah- Thamas et
son premier Ministre s'entendent ensemble ; mais
je ne vous garantirai pas davantage non plus les
Nouvelles suivantes , arrivées ici depuis peu de
jours.
Les unes disent que Kouli-Kan ayant voulu
risquer une tentative sur Kerkout, Memis Pacha
étoit sorti de cette Place , et l'avoit défait à plate
Couture. Les autres portent au contraire , qu'Achmet
Pacha de Bagdad , sur l'avis qu'on lui
avoit donné , que Thamas- Kouli - Kan avoit dé
taché 4000 hommes pour aller s'emparer de
Khillet * il étoit sorti de Bagdad avec la meilleure
partie de sa Garnison dans le dessein d'enlever
ce Détachement ennemi ; mais qu'ayant
appris en route que Kouli- Kan étoit lui - même à
›
* C'est un gros Bourg avec une petite forteresse
sur le chemin de Bagdad à Bassora , lequel étant
situé au bord de l'Euphrate , sert de Magasin et
d'entrepôts aux provisions pour cette premiere
Place.
KhilMARS
1734.
591
"
Khillet avec 30 à 40 mille hommes , il avoit rebroussé
chemin en dilligence , & qu'étant rentré
dans Bagdad , où il y aa fort peu de vivres , il en
avoit fait sortir les vieillards , les femmes , les
enfans ; en un mot , toutes les bouches inutiles
dans l'aprehension que le General Persan , après
avoir établi ses Magazins à Khillet , ne revint
encore former le blocus de Bagdad ; qu'avant
que d'y être de retour , un autre Achmet , qui
est Capidgi-Bachi , et son Divan- Effendi ** , se
ressouvenant de tout ce qu'il avoit souffert l'année
passée dans cette Place , et craignant de s'y
voir renfermé de nouveau pour long- tems , avoit
débauché 6000 hommes des Troupes qui étoient
sorties avec Achmet Pacha , et que s'étant mis à
leur tête , il les avoit conduit à Kerkout , od
Memis Pacha indigné de sa désertion l'avoit fait
mettre aux fers , et se tenoit sur ses gardes avec
ce renfort contre les entreprises que Kouli-Kam
pourroit faire sur Kerkout.
Vous voyez , Monsieur , par toutes ces nonvelles
, qui se contredisent et qui se débitent
pourtant à Constantinople aussi affirmativement
les unes que les autres , combien il est difficile
pour ne rien dire de plus , de sçavoir positive.
ment ce qui se passe dans ces Contrées éloignées,
où les Etrangers qui sont ici , n'ayant point de
correspondance , ne peuvent que rarement être
instruits du véritable état des choses.
Mais ce dont je puis vous parler avec certitu
de , c'est que depuis la mort de Topal - Osman
on fait de tous côtez dans cet Empire , des préparatifs
extraordinaires contre la Pers . Tous les
** Secretaire du Conseil , ou son premier Secttaire.
7
Pachas
192 MERCURE DE FRANCE
>
Pachas d'Asie ont eu ordre de marcher sans
délai avec le plus de Milices qu'ils pourront rassembler,
chacun dans l'étendue de son Gouvernement
il doit partir d'ici vingt chambrées de
Jannissaires qui composeront environ 8000
hommes. On compte que quand toutes ces
Troupes seront arrivées au lieu du rendez.vous ,
elles se monteront à 90 mille combattans , qui
joints à ce qu'il y en a déja en Perse formeront
une armée formidable ; et l'on s'en promet d'antant
plus de succès , que le G. S. pour encouràger
les gens de Guerre , a considérablement augmenté
la paye , ou les apointemens de tous ceux
qui serviroient dans cette armée pendant la campagne
prochaine. D'ailleurs trois Bâtimens François
frettez par sa hautesse ont déja fait voile
ces jours- ci , chargez de Canons , de Poudre ,
de Boulets , & c . qu'ils doivent débarquer à Alexandrete.
:
Abdoulla Cuperli , ci -devant Pacha du Caire ,
et à présent de Cogni , a été nommé pour remplacer
Topal - Osman , et le G. V. a déclaré en
public , qu'il marcheroit lui - même , pour exterminer
les Persans cette année , ou les forcer du
moins à faire une Paix solide , et honorable à la
Porte.
Au reste , Monsieur , pour finir ma Lettre ,
par quelque chose de consolant sur la mort de
Topal - Osman Pacha , je vous dirai que le G. S.
voulant donner des marques éclatantes du cas
qu'il faisoit de cet illustre et fidele sujet à récompensé
dans la personne de son fils Achmet , les
services que le Pere rendoit depuis si longtems à
cet Empire ; quoique ce jeune Seigneur n'aitt pas
encore 24 ans sa hautesse l'a fait tout d'un
coup et de son propre mouvement Pacha à trois
queües ,
>
MARS 1734.
593
*
queues , et Beylerbey de Romelie ; il est parti
d'ici dernierement avec un Equipage aussi nombreux
que superbe , pour se rendre à Nissa , ré..
sidence affectée au Pacha qui est revêtu de ce
Beylerbeylik .
Ce bienfait tout grand qu'il est en lui - même ,
a été cependant accompagné d'une circonstance,
qui à notre maniere de penser semble en dimi
nuer beaucoup le prix , et que ceux qui ne sont
pas au fait des maximes de l'Empire Ottoman ',
trouveront sans - doute fort extraordinaire , c'est
que dans le même tems que le G. S. a temoigné
avec tant de distinction sa reconnoissance envers
Topal - Osman , en élevant son fils si jeune encore
aux premieres dignitez de l'Etat , Sa Hautesse a
dépêché un Capidgi -Bachi en Perse , pour confisquer
au profit du Trésor Imperial tous les
effets mobiliers du deffunt : de sorte qu'il ne reste
à Achmet Pacha , de la grande succession de son
pere , qui passoit pour extrémement riche , que
les immeubles consistant en Maisons &c. parcè
que Topal Osman avoit eu la précaution de rendre
tous ces bens - là Vacoufs : c'est - à - dire de les
donner en proprieté à des Mosquées et de s'en
réserver l'usufruit pour lui , et pour ses descendans
jusqu'à l'extinction de sa race. Cette précaution
fort en usage dans ce Païs - ci , est le seul
moyen , par lequel ceux qui ont eu quelque part
aux affaires publiques peuvent assurer leur héritage
à leurs enfans : car les biens devenus Vacoufs
sont sacrez : pour quelque cause que ce soit ,
personne ne peut s'en emparer ; et ils ne sont dévolus
aux Mosquées pour la jouissance effective
qu'après le décès du dernier usufruitier .Je suis & c .
P. V. D.
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Résumé : A Constantinople le 15. Janvier 1734.
Le 15 janvier 1734, à Constantinople, un auteur rapporte la défaite et la mort de Topal Osman Pacha, un général ottoman, lors d'une bataille contre Thamas Kouli-Kan en Perse. Initialement, Topal Osman semblait en position de victoire, mais des événements imprévus ont conduit à sa défaite. Memis Pacha, envoyé pour poursuivre Thamas Kouli-Kan, a fui sans combattre, laissant Topal Osman seul face à l'ennemi. Malgré une résistance héroïque, Topal Osman a été tué, provoquant la débandade de ses troupes. Thamas Kouli-Kan, connu pour son orgueil et sa férocité, a montré une marque de grandeur en renvoyant le corps de Topal Osman à Constantinople pour des funérailles dignes. Cette action a été interprétée comme une reconnaissance de la noblesse de Topal Osman, qui avait récemment libéré des prisonniers persans. La nouvelle de la mort de Topal Osman a semé la consternation à Constantinople, mais des informations ultérieures ont rassuré la population sur l'état des forces ottomanes. Thamas Kouli-Kan, malgré sa victoire, n'a pas pu exploiter pleinement son avantage et a dû se retirer. De plus, des nouvelles indiquent que Kouli-Kan est isolé et que le roi de Perse le considère comme un rebelle. En réponse à cette situation, l'Empire ottoman prépare une grande offensive contre la Perse. Des troupes sont mobilisées et des renforts sont envoyés. Abdoulla Cuperli a été nommé pour remplacer Topal Osman, et le sultan a déclaré qu'il mènerait personnellement la campagne pour vaincre les Persans ou les forcer à faire la paix. Enfin, le sultan a honoré la mémoire de Topal Osman en nommant son fils Achmet Pacha à un haut poste, malgré la confiscation des biens mobiliers du défunt au profit du trésor impérial. Cette pratique est courante dans l'Empire ottoman pour protéger les héritages des familles impliquées dans les affaires publiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
77
p. 729-741
LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
Début :
Les Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la [...]
Mots clefs :
Jean-François Niceron, Lettres, Ogier Ghislain de Busbecq, Empereur, Constantinople, Ambassade , Affaires, Lettre, Roi, Turquie, Mort, Pierandrea Mattioli, Flandres, Voyage, Autriche, Mémoires
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
LETTRE de M.... sur la Continuation
des Memoires du R. P. Niceron.
L
Es Memoires pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres dans la
Képublique des Lettres , &c. continuent ,
Monsieur , d'être publiez ici avec succès
, et c'est toujours le sieur Briasson ,
Libraire , rue S. Jacques , qui les imprime.
J'ai à vous parler ici du XXII. votume
, vous ayant rendu compte de tous
les précedens.
C'est toûjours le même plan et le même
ordre , ainsi il me suffira de vous
dire que ce Tome , de 410. pages sans
les Tables , contient la Vie et le Catalogue
de 45. Sçavans , entre lesquels j'ai
choisi Auger Gislen de Busbeg , comme
un sujet qui , je m'assure , sera de votre
goût , et qui conviendra d'ailleurs pour
ne point trop exceder les bornes d'une
Lettre. Voici comment en parle notre
Auteur , page 350. de son Livre.
AUGER Gislen de Busbeq , naquit Fan
15220
730 MERCURE DE FRANCE
1522. à Comines en Flandres sur la Lys,
et fut fils naturel de Gilles Gislen , Seigneur
de Busbeq , Château sur la Lys
entre Comines et Menin , qui l'eut d'une
fille de basse condition .
Les heureuses dispositions qu'il fit voir
dès sa premiere jeunesse pour les Sciences
, engagerent son pere , qui l'élevoit
dans sa maison , à ne rien oublier pour
son instruction , et à le faire légitimer
par un Rescrit de l'Empereur Charles
Quint.
Il l'envoya étudier dans les plus celebres
Universitez , à Louvain , à Paris ,
à Venise , à Boulogne et à Padoüe , et
le jeune Busbeq fit de grands progrès
dans toutes ces Villes sous les fameux
Professeurs qu'il y suivit.
>
En 1554 il fut en Angleterre à la suite
de Pierre Lasso , que Ferdinand , Roy des
Romains , y envoyoit en Ambassade
pour assister aux Nôces de la Reine Marie
avec Philippe , fils de l'Empereur
Charles-Quint , qui se celebrerent le 5 .
Juillet 1554.
De retour en Flandres , il reçut à Lille
le 3. Novembre suivant , une Lettre de
Ferdinand par laquelle ce Prince lui
marquoit de se rendre à Vienne , pour
aller en Ambassade à Constantinople.
"
II
AVRIL 1734 731
Il ne differa de partir qu'autant de
temps qu'il lui en fallut pour aller dire
adieu à son Pere , que Valere André
peu exact sur son chapitre , a supposé
mal à propos , mort en ce temps - là ;
aussi bien qu'à ses amis.
Arrivé àVienne , il en partit aussi - tôt
pour Constantinople , où il arriva le
20. Janvier 1555. Soliman II . étoit alors
à Amasie à la tête de son Armée , et ayant
sçû son arrivée , il lui fit dire de le venir
trouver.
Il sortit de Constantinople le 5. Mars
et arriva auprès du Grand Seigneur le
7. Avril ; mais il n'eut pas grande satisfaction
de lui .
Il avoit été envoyé à la Porte pour
y demeurer en qualité d'Ambassadeur
ordinaire ; cependant il y fit très peu
de séjour. Il ne put obtenir de Soliman
qu'une Tréve de six mois ; et on jugea
à propos qu'il retournât promptement
vers Ferdinand , pour lui porter la Lettre
de l'Empereur Turc.
Il partit donc d'Amasie le 2. Juin , et
eut presque toujours la fievre jusqu'au 24.
qu'il arriva à Constantinople , d'où après
quatorze jours de repos , il reprit le chemin
de Vienne.
Le Roy des Romains le renvoya au
mois
732 MERCURE DE FRANCE
mois de Novembre à Constantinople ,
où il arriva en Janvier 1556.
Cette seconde Ambassade fut plus longue
et plus heureuse que la premiere ;
car elle dura sept ans , et finit par un
Traité contenant une Tréve de huit ans:
Busbeq , quoiqu'appliqué aux affaires
de son Ambassade , ne laissa pas de travailler
pendant son séjour en Turquie
pour la République des Lettres . Il ramassoit
des Inscriptions , acheptoit des
Manuscrits , recherchoit les Plantes rares
, et s'informoit de la nature des Animaux.
A ce second voyage il avoit mené
avec lui un Peintre , pour dessiner les
Plantes et les Animaux qui nous sont
inconnus ; et il communiqua dans la suite
ces Desseins à Pierre- André Mathiole',
qui en fit qui en fit usage dans les Livres qu'il
donna au Public.
Quelques- uns se sont imaginez que
Mathiole avoit été à son service , fondez
sur la quatriéme Lettre de Busbeq ,
écrite en 1562. où il est dit : Nihil pene
stirpium neque herbarum retuli , nisi depictarum,
quas Mathiolo servo mandaram,
et alia pleraque , & c. mais il est visible
que la ponctuation est vicieuse dans cet
endroit , et qu'il faut lire : quas Mathiolo
servo, Mandaram et alia pleraque, & c.
Fest
AVRIL. 1734:
733
c'est-à - dire qu'il gardoit ces Desseins
pour Mathiole. Ajoûtez à cela que Mathiole
dit dans l'Epitre Décicatoire de
son Commentaire sur Dioscoride , écrite
l'an 1568. qu'il y avoit 17. ans de suite
qu'il étoit Medecin de Ferdinand d'Autriche
, second fils de Maximilien I. II
a donc commencé à l'être en 1551. et
n'a pû durant ce temps servir Busbeq .
Busbeq eut pendant son séjour en Turquie
un Medecin , dont il est bon do
dire quelque chose. Il s'appelloit Guillaume
Quacquelben , et étoit natif de
Courtray en Flandres. Il fut appellé en
1548. de Louvain pour professer la Medecine
à Vienne en Autriche . Il passa
de-là à Constantinople en 1552. et y
mourut en 1561. C'étoit un homme de
Lettres , et curieux en Médailles , et Busbeq
assure dans ses Lettres , que la République
des Lettres perdit par sa mort
quantité de Remarques curieuses qu'il
vouloit mettre au jour. Mathiole , dans
ses Observations sur Dioscoride , reconnoît
qu'il lui en avoit envoyé plusieurs
qu'il avoit inserées dans son Ouvrage.
Ce Medecin avoit pour principe qu'il ne
falloit pas craindre la Peste , parce que
la crainte seule pouvoit la donner ; cependant
il la gagna et en mourut sans
vouloir
734 MERCURE DE FRANCE
vouloir presque démordre de son prémier
sentiment. Busbeq le croyoit capable
de tenir sa place à Constantinople
, quand il en seroit parti .
Busbeq ayant terminé les affaires qui
l'avoient amené en Turquie , partit de
Constantinople à la fin du mois d'Août
de l'an 1562. avec Ebrahim Strotschen ,
Polonois , que Soliman II. envoyoit à
l'Empereur Ferdinand II . et arriva en
Autriche au commencement d'Octobre;
mais comme l'Empereur étoit alors à la
Diette de Francfort , il s'y transporta par
ses ordres pour lui rendre compte de
ses Négociations . Son dessein étoit de
passer après cela le reste de ses jours dans
une vie privée ; mais il fallut qu'il se
rembarquât plus que jamais à la Cour.
On lui confia le gouvernement des
jeunes Princes , fils de Maximilien II .
que ce Prince , devenu Empereur par la
mort de Ferdinand I. son Pere , arrivée
le 25. Juillet 1564. envoya en Espagne
auprès de Philippe II. leur Oncle , sous
sa conduite .
Lorsque la Princesse Elisabeth d'Autriche
, fille du même Empereur Maximilien
, fut mariée en 1570. avec Char
les IX. Roy de France , il fut chargé
de la conduire dans ce Royaume , et demeura
AVRIL 1734 735
meura auprès d'elle , avec l'Intendance
de sa Maison et de ses affaires ; et quand
cette Princesse sortit de France après la
mort de son Mary , arrivée le 30. May
1574. elle l'y laissa pour y avoir soin de
ses affaires.
·
L'Empereur Rodolphe II . le choisit
aussi pour être son Ambassadeur à la
Cour de France ; et l'on a les Lettres qu'il
lui écrivit en cette qualité depuis le 25.
Mars 1582. jusqu'à la fin de 1585.
En 1592. il obtint de l'Empereur un
Congé de six mois pour faire un voyage
en Flandres , où sa presence étoit nécessaire
par rapport à ses affaires domestiques.
Mais quoiqu'il eût pris pour faire
ce voyage plus sûrement , des passeports
du Roy et de la Ligue , il fut volé et
maltraité dans le Village de Cailly à quatre
lieues de Rouen , par un Parti de
Ligueurs , qui cependant , sur les représentations
qu'il leur fit par rapport à son
caractere , le laisserent libre et lui rendirent
tout ce qu'ils lui avoient pris.
Le Gouverneur de Rouen ayant sçû
cette avanture , lui en fit des excuses et
lui promit de punir ceux qui l'avoient
insulté , mais Busbeq lui répondit qu'il
songeoit plutôt à se tranquiliser l'esprit
qu'à se venger de l'injure qu'on avoit
faite à sa qualité.
736 MERCURE DE FRANCE
Il ne continua pas cependant son voyage
; car se sentant incommodé , il se fit
porter au Château de Mailloc , dans le
voisinage de Cailly.
Il y mourut onze jours après , le 28.
Octobre 1592. âgé d'environ 70. ans.Son
corps fut enterré honorablement dans
l'Eglise du Lieu , et son coeur fut porté
aux Bays - Bas , pour y être mis dans le
Tombeau de ses Ancêtres.
Le bruit courut alors qu'il avoit été
tué dans un bois par des voleurs , et c'est
conformément à ce bruit qu'en ont parlé
Philippe Camérarius dans ses Méditations
historiques, Scaliger, dans le Scaligeriana,
et Juste Lipse , dans l'Epitaphe qu'il lui
a faite.
L'Archiduc Albert , Gouverneur et
puis Souverain des Pays - Bas Epagnols ,
érigea en Baronie la Terre de Busbeq ,
pour honorer la mémoire de son Gouverneur
et lui témoigner sa reconnoissance.
Maximilien , Pere de ce Prince ,
lui avoit conferé l'Ordre de Chevalerie ,
et les Lettres Patentes qu'il lui accorda
pour cela , le 3. Avril 1554. lui sont très .
honorables .
Il avoit eu dessein de se fixer en Fran
ce , dont le séjour lui plaisoit extréme
ment , et il y avoit dans ce dessein acheté
quelques Terres.
AVRIL. 1734. 737
On dit qu'il parloit sept Langues en
perfection , la Latine l'Italienne , la
Françoise , l'Espagnole , l'Allemande , la
Flamande et la Sclavone.
>
Catalogue de ses Ouvrages.
1. Itinera II. Constantinopolitanum , et
Amasianum. Antuerpia , 1581. in 8. Ces
Voyages sont contenus en deux Lettres
que Busbeq adressa à NicolasMicaut , Sieur
d'Indevel , avec qui il avoit autrefois
étudié en Italie. Louis Carrion , qui en
fit faire cette premiere Edition , la dédia
au même Micaut.
2. Legationis Turcice Epistola quatuor,
quarum priores due prodierunt sub titulo
itinerum Constantinopolitani et Amasiani.
Paris. 1595. in 8. Il y a plusieurs autres
Editions de ces Lettres. Dans celle de
Francfort de l'an 1605. in 8. on a ajoûté
l'Ambassade d'Ebrahim Strotschen , dont
j'ai parlé cy-dessus. Ces Lettres qui sont
très-curieuses et très - instructives ont
été traduites en François sous ce titre :
Ambassades et Voyages en Turquie et Amasie
, de M. Busbequius , depuis l'an 1554.
jusqu'en 1562. traduit du Latin par le
S. Gaudon. Paris 1646. in 8. On en a
aussi une Traduction Allemande , imprimée
à Francfort en 1596. in 8.
3.
738 MERCURE DE FRANCE
3. De re Militari contra Turcam instituenda
Consilium A la suite des Lettres
sur son Ambassade de Turquie , tant
dans la premiere Edition de 1681. que
dans les suivantes. Item. à la page 18 .
du quatrième volume du Recueil de Nicolas
Reusner , intitulé : De Bello Turcico
selectissima Orationes et Consultationes.
Leipsia , 1596. in 4. Busbeq avoit examiné
avec beaucoup de soin l'état de la
Monarchie Ottomane et les veritables
moyens de l'attaquer avec succès
c'est ce qui fait la matiere de ce petit
Discours.
›
3
4. Augerii Gislenii Busbequii , Casaris
apud Regem Gallorum Legati , Epistola ad
Rudolphum. II. Imperatorem. è Bibliotheca
Joannis Bapt. Houvart J. C. Patricii
Bruxellensis. Louvanii , 1630. in 8.
Ces Lettres , qui sont au nombre de 53 .
s'étendent depuis le 25. Mars 1582. jusqu'à
la fin de 1585. elles ont été tradui .
tes en François par M. l'Abbé Bechet ;
Chanoine d'Usez , natif de Clermont en
Auvergne , Auteur de la Vie du Cardinal
Martinuzius , mort en 1722. âgé de
73. ans , et cette Traduction a été inserée
dans le II . Tome des Memoires de
Litterature du P. Desmolets , pag. 249 .
» Ces Lettres , dit Vigneul de Marville ,
Tom .
AVRIL. 1734. 739
❤
>
» Tom. I. de ses Melanges , pag. 52. sont
>> mieux remplies et plus utiles que celles
de Bongars . C'est un Portrait au
>> naturel des affaires de France sous le
» Regne de Henry III . Il raconte les cho-
» ses avec une naïveté si grande qu'elies
semblent se passer sous nos yeux . On ne
» trouve point ailleurs tant de faits his-
» toriques on si peu de discours . Les
» grands mouvemens comme la conspiration
d'Anvers et les petites intri-
» gues de la Cour y sont également bien.
marqués. Les attitudes , pour ainsi dire ,
» dans lesquelles il met Henry III , la .
» Reine Mere , le Duc d'Alençon , le Roy
» de Navarre , la Reine Marguerite , le
>> Duc de Guise , le Duc d'Epernon , et
» les autres Courtisans et Favoris de ce
» temps - là,nous les montrent du côté qui
» nous en découvre , à coup sûr , le fort
» et le foible , le bon et le mauvais. En
un mot , les Lettres de Busbeq sont un
modele de bien écrire pour les Ambassadeurs
qui rendent compte à leurs
Maîtres de ce qui se passe dans les
Cours où ils résident .
>>
5. Omnia quæ extant , seu Epistola ipsius
Legationum et alii Tractatus historici , et
Politici. Lugd. Bat. Elzevir , 1633. in 24.
Item . Amstelodami. Elzevir , 1660. in 24.
Voyez
740 MERCURE DE FRANCE
Voyez ses Lettres . C'est- là qu'on trouve
un détail exact de ce qui le regarde.
Bayle , Dictionnaire , son article est fait
avec beaucoup de soin. Tous les autres
Auteurs qui ont parlé de lui, sont tombez
dans des fautes grossieres et ont donné
une Relation de sa Vie , qui contredit
souvent ce qu'on trouve dans ses Let
tres. Tels sont les suivants. Valere André
, Bibliotheca Belgica : l'Auteur de sa
Vie qui est à la tête de ses Lettres à l'Empereur
Rodolphe , et que M. l'Abbé Bechet
a traduite de même que les Lettres.
Melchioris Adami vita Jurisconsultorum
Germanorum. p. 145. Freheri Theatrum Virorum
Doctorum , p. 931. Bullart , Académie
des Sciences , Tom. I. p. 80. Les
Eloges de M. de Thou , et les Additions
de Teissier.
Les autres Sçavans qui remplissent ce Volume
sont, Barthelemi Aneau, Elie Ashmole
,Jean d'Aubry, Guillaume de Baillou, Jacques
de Billy,Geoffroy et Jean de Billy, Adam
Blacvod , Edouard Brereword,RobertBurhill,
Louis Cappel, Louis Cappel lejeune,Jacques
Cappel, Scipion Carteromaco , Jacques Cassagne
, Antoine de Chandien, Nicolas Cisner,
Gaspard Contarini, Martin Antoine Delrio,
Antoine Densingius, Jeremie Drexelius,Jean
Drusius,Varino Favorino,Jean Gelida, Gilbert
AVRIL. 1734. 741
"
bert Genebrard, François Godwin , Laurent
Humphrey , Jean Marsham , Nicolas Hugues
Menard , Isaac Newton , François
Pinsson Arnaud de Pontac , Antoine
Possevin , Pierre du Ryer , François Sansovino,
J.Théodore Schenkius , Joseph Marie
Suarez , Paul et François Tallemant ,
J. F. Foy Vaillant , N. Durand de Villegagnon
, Burcher de Volder , Adolphe et
Everard Vorstius.
des Memoires du R. P. Niceron.
L
Es Memoires pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres dans la
Képublique des Lettres , &c. continuent ,
Monsieur , d'être publiez ici avec succès
, et c'est toujours le sieur Briasson ,
Libraire , rue S. Jacques , qui les imprime.
J'ai à vous parler ici du XXII. votume
, vous ayant rendu compte de tous
les précedens.
C'est toûjours le même plan et le même
ordre , ainsi il me suffira de vous
dire que ce Tome , de 410. pages sans
les Tables , contient la Vie et le Catalogue
de 45. Sçavans , entre lesquels j'ai
choisi Auger Gislen de Busbeg , comme
un sujet qui , je m'assure , sera de votre
goût , et qui conviendra d'ailleurs pour
ne point trop exceder les bornes d'une
Lettre. Voici comment en parle notre
Auteur , page 350. de son Livre.
AUGER Gislen de Busbeq , naquit Fan
15220
730 MERCURE DE FRANCE
1522. à Comines en Flandres sur la Lys,
et fut fils naturel de Gilles Gislen , Seigneur
de Busbeq , Château sur la Lys
entre Comines et Menin , qui l'eut d'une
fille de basse condition .
Les heureuses dispositions qu'il fit voir
dès sa premiere jeunesse pour les Sciences
, engagerent son pere , qui l'élevoit
dans sa maison , à ne rien oublier pour
son instruction , et à le faire légitimer
par un Rescrit de l'Empereur Charles
Quint.
Il l'envoya étudier dans les plus celebres
Universitez , à Louvain , à Paris ,
à Venise , à Boulogne et à Padoüe , et
le jeune Busbeq fit de grands progrès
dans toutes ces Villes sous les fameux
Professeurs qu'il y suivit.
>
En 1554 il fut en Angleterre à la suite
de Pierre Lasso , que Ferdinand , Roy des
Romains , y envoyoit en Ambassade
pour assister aux Nôces de la Reine Marie
avec Philippe , fils de l'Empereur
Charles-Quint , qui se celebrerent le 5 .
Juillet 1554.
De retour en Flandres , il reçut à Lille
le 3. Novembre suivant , une Lettre de
Ferdinand par laquelle ce Prince lui
marquoit de se rendre à Vienne , pour
aller en Ambassade à Constantinople.
"
II
AVRIL 1734 731
Il ne differa de partir qu'autant de
temps qu'il lui en fallut pour aller dire
adieu à son Pere , que Valere André
peu exact sur son chapitre , a supposé
mal à propos , mort en ce temps - là ;
aussi bien qu'à ses amis.
Arrivé àVienne , il en partit aussi - tôt
pour Constantinople , où il arriva le
20. Janvier 1555. Soliman II . étoit alors
à Amasie à la tête de son Armée , et ayant
sçû son arrivée , il lui fit dire de le venir
trouver.
Il sortit de Constantinople le 5. Mars
et arriva auprès du Grand Seigneur le
7. Avril ; mais il n'eut pas grande satisfaction
de lui .
Il avoit été envoyé à la Porte pour
y demeurer en qualité d'Ambassadeur
ordinaire ; cependant il y fit très peu
de séjour. Il ne put obtenir de Soliman
qu'une Tréve de six mois ; et on jugea
à propos qu'il retournât promptement
vers Ferdinand , pour lui porter la Lettre
de l'Empereur Turc.
Il partit donc d'Amasie le 2. Juin , et
eut presque toujours la fievre jusqu'au 24.
qu'il arriva à Constantinople , d'où après
quatorze jours de repos , il reprit le chemin
de Vienne.
Le Roy des Romains le renvoya au
mois
732 MERCURE DE FRANCE
mois de Novembre à Constantinople ,
où il arriva en Janvier 1556.
Cette seconde Ambassade fut plus longue
et plus heureuse que la premiere ;
car elle dura sept ans , et finit par un
Traité contenant une Tréve de huit ans:
Busbeq , quoiqu'appliqué aux affaires
de son Ambassade , ne laissa pas de travailler
pendant son séjour en Turquie
pour la République des Lettres . Il ramassoit
des Inscriptions , acheptoit des
Manuscrits , recherchoit les Plantes rares
, et s'informoit de la nature des Animaux.
A ce second voyage il avoit mené
avec lui un Peintre , pour dessiner les
Plantes et les Animaux qui nous sont
inconnus ; et il communiqua dans la suite
ces Desseins à Pierre- André Mathiole',
qui en fit qui en fit usage dans les Livres qu'il
donna au Public.
Quelques- uns se sont imaginez que
Mathiole avoit été à son service , fondez
sur la quatriéme Lettre de Busbeq ,
écrite en 1562. où il est dit : Nihil pene
stirpium neque herbarum retuli , nisi depictarum,
quas Mathiolo servo mandaram,
et alia pleraque , & c. mais il est visible
que la ponctuation est vicieuse dans cet
endroit , et qu'il faut lire : quas Mathiolo
servo, Mandaram et alia pleraque, & c.
Fest
AVRIL. 1734:
733
c'est-à - dire qu'il gardoit ces Desseins
pour Mathiole. Ajoûtez à cela que Mathiole
dit dans l'Epitre Décicatoire de
son Commentaire sur Dioscoride , écrite
l'an 1568. qu'il y avoit 17. ans de suite
qu'il étoit Medecin de Ferdinand d'Autriche
, second fils de Maximilien I. II
a donc commencé à l'être en 1551. et
n'a pû durant ce temps servir Busbeq .
Busbeq eut pendant son séjour en Turquie
un Medecin , dont il est bon do
dire quelque chose. Il s'appelloit Guillaume
Quacquelben , et étoit natif de
Courtray en Flandres. Il fut appellé en
1548. de Louvain pour professer la Medecine
à Vienne en Autriche . Il passa
de-là à Constantinople en 1552. et y
mourut en 1561. C'étoit un homme de
Lettres , et curieux en Médailles , et Busbeq
assure dans ses Lettres , que la République
des Lettres perdit par sa mort
quantité de Remarques curieuses qu'il
vouloit mettre au jour. Mathiole , dans
ses Observations sur Dioscoride , reconnoît
qu'il lui en avoit envoyé plusieurs
qu'il avoit inserées dans son Ouvrage.
Ce Medecin avoit pour principe qu'il ne
falloit pas craindre la Peste , parce que
la crainte seule pouvoit la donner ; cependant
il la gagna et en mourut sans
vouloir
734 MERCURE DE FRANCE
vouloir presque démordre de son prémier
sentiment. Busbeq le croyoit capable
de tenir sa place à Constantinople
, quand il en seroit parti .
Busbeq ayant terminé les affaires qui
l'avoient amené en Turquie , partit de
Constantinople à la fin du mois d'Août
de l'an 1562. avec Ebrahim Strotschen ,
Polonois , que Soliman II. envoyoit à
l'Empereur Ferdinand II . et arriva en
Autriche au commencement d'Octobre;
mais comme l'Empereur étoit alors à la
Diette de Francfort , il s'y transporta par
ses ordres pour lui rendre compte de
ses Négociations . Son dessein étoit de
passer après cela le reste de ses jours dans
une vie privée ; mais il fallut qu'il se
rembarquât plus que jamais à la Cour.
On lui confia le gouvernement des
jeunes Princes , fils de Maximilien II .
que ce Prince , devenu Empereur par la
mort de Ferdinand I. son Pere , arrivée
le 25. Juillet 1564. envoya en Espagne
auprès de Philippe II. leur Oncle , sous
sa conduite .
Lorsque la Princesse Elisabeth d'Autriche
, fille du même Empereur Maximilien
, fut mariée en 1570. avec Char
les IX. Roy de France , il fut chargé
de la conduire dans ce Royaume , et demeura
AVRIL 1734 735
meura auprès d'elle , avec l'Intendance
de sa Maison et de ses affaires ; et quand
cette Princesse sortit de France après la
mort de son Mary , arrivée le 30. May
1574. elle l'y laissa pour y avoir soin de
ses affaires.
·
L'Empereur Rodolphe II . le choisit
aussi pour être son Ambassadeur à la
Cour de France ; et l'on a les Lettres qu'il
lui écrivit en cette qualité depuis le 25.
Mars 1582. jusqu'à la fin de 1585.
En 1592. il obtint de l'Empereur un
Congé de six mois pour faire un voyage
en Flandres , où sa presence étoit nécessaire
par rapport à ses affaires domestiques.
Mais quoiqu'il eût pris pour faire
ce voyage plus sûrement , des passeports
du Roy et de la Ligue , il fut volé et
maltraité dans le Village de Cailly à quatre
lieues de Rouen , par un Parti de
Ligueurs , qui cependant , sur les représentations
qu'il leur fit par rapport à son
caractere , le laisserent libre et lui rendirent
tout ce qu'ils lui avoient pris.
Le Gouverneur de Rouen ayant sçû
cette avanture , lui en fit des excuses et
lui promit de punir ceux qui l'avoient
insulté , mais Busbeq lui répondit qu'il
songeoit plutôt à se tranquiliser l'esprit
qu'à se venger de l'injure qu'on avoit
faite à sa qualité.
736 MERCURE DE FRANCE
Il ne continua pas cependant son voyage
; car se sentant incommodé , il se fit
porter au Château de Mailloc , dans le
voisinage de Cailly.
Il y mourut onze jours après , le 28.
Octobre 1592. âgé d'environ 70. ans.Son
corps fut enterré honorablement dans
l'Eglise du Lieu , et son coeur fut porté
aux Bays - Bas , pour y être mis dans le
Tombeau de ses Ancêtres.
Le bruit courut alors qu'il avoit été
tué dans un bois par des voleurs , et c'est
conformément à ce bruit qu'en ont parlé
Philippe Camérarius dans ses Méditations
historiques, Scaliger, dans le Scaligeriana,
et Juste Lipse , dans l'Epitaphe qu'il lui
a faite.
L'Archiduc Albert , Gouverneur et
puis Souverain des Pays - Bas Epagnols ,
érigea en Baronie la Terre de Busbeq ,
pour honorer la mémoire de son Gouverneur
et lui témoigner sa reconnoissance.
Maximilien , Pere de ce Prince ,
lui avoit conferé l'Ordre de Chevalerie ,
et les Lettres Patentes qu'il lui accorda
pour cela , le 3. Avril 1554. lui sont très .
honorables .
Il avoit eu dessein de se fixer en Fran
ce , dont le séjour lui plaisoit extréme
ment , et il y avoit dans ce dessein acheté
quelques Terres.
AVRIL. 1734. 737
On dit qu'il parloit sept Langues en
perfection , la Latine l'Italienne , la
Françoise , l'Espagnole , l'Allemande , la
Flamande et la Sclavone.
>
Catalogue de ses Ouvrages.
1. Itinera II. Constantinopolitanum , et
Amasianum. Antuerpia , 1581. in 8. Ces
Voyages sont contenus en deux Lettres
que Busbeq adressa à NicolasMicaut , Sieur
d'Indevel , avec qui il avoit autrefois
étudié en Italie. Louis Carrion , qui en
fit faire cette premiere Edition , la dédia
au même Micaut.
2. Legationis Turcice Epistola quatuor,
quarum priores due prodierunt sub titulo
itinerum Constantinopolitani et Amasiani.
Paris. 1595. in 8. Il y a plusieurs autres
Editions de ces Lettres. Dans celle de
Francfort de l'an 1605. in 8. on a ajoûté
l'Ambassade d'Ebrahim Strotschen , dont
j'ai parlé cy-dessus. Ces Lettres qui sont
très-curieuses et très - instructives ont
été traduites en François sous ce titre :
Ambassades et Voyages en Turquie et Amasie
, de M. Busbequius , depuis l'an 1554.
jusqu'en 1562. traduit du Latin par le
S. Gaudon. Paris 1646. in 8. On en a
aussi une Traduction Allemande , imprimée
à Francfort en 1596. in 8.
3.
738 MERCURE DE FRANCE
3. De re Militari contra Turcam instituenda
Consilium A la suite des Lettres
sur son Ambassade de Turquie , tant
dans la premiere Edition de 1681. que
dans les suivantes. Item. à la page 18 .
du quatrième volume du Recueil de Nicolas
Reusner , intitulé : De Bello Turcico
selectissima Orationes et Consultationes.
Leipsia , 1596. in 4. Busbeq avoit examiné
avec beaucoup de soin l'état de la
Monarchie Ottomane et les veritables
moyens de l'attaquer avec succès
c'est ce qui fait la matiere de ce petit
Discours.
›
3
4. Augerii Gislenii Busbequii , Casaris
apud Regem Gallorum Legati , Epistola ad
Rudolphum. II. Imperatorem. è Bibliotheca
Joannis Bapt. Houvart J. C. Patricii
Bruxellensis. Louvanii , 1630. in 8.
Ces Lettres , qui sont au nombre de 53 .
s'étendent depuis le 25. Mars 1582. jusqu'à
la fin de 1585. elles ont été tradui .
tes en François par M. l'Abbé Bechet ;
Chanoine d'Usez , natif de Clermont en
Auvergne , Auteur de la Vie du Cardinal
Martinuzius , mort en 1722. âgé de
73. ans , et cette Traduction a été inserée
dans le II . Tome des Memoires de
Litterature du P. Desmolets , pag. 249 .
» Ces Lettres , dit Vigneul de Marville ,
Tom .
AVRIL. 1734. 739
❤
>
» Tom. I. de ses Melanges , pag. 52. sont
>> mieux remplies et plus utiles que celles
de Bongars . C'est un Portrait au
>> naturel des affaires de France sous le
» Regne de Henry III . Il raconte les cho-
» ses avec une naïveté si grande qu'elies
semblent se passer sous nos yeux . On ne
» trouve point ailleurs tant de faits his-
» toriques on si peu de discours . Les
» grands mouvemens comme la conspiration
d'Anvers et les petites intri-
» gues de la Cour y sont également bien.
marqués. Les attitudes , pour ainsi dire ,
» dans lesquelles il met Henry III , la .
» Reine Mere , le Duc d'Alençon , le Roy
» de Navarre , la Reine Marguerite , le
>> Duc de Guise , le Duc d'Epernon , et
» les autres Courtisans et Favoris de ce
» temps - là,nous les montrent du côté qui
» nous en découvre , à coup sûr , le fort
» et le foible , le bon et le mauvais. En
un mot , les Lettres de Busbeq sont un
modele de bien écrire pour les Ambassadeurs
qui rendent compte à leurs
Maîtres de ce qui se passe dans les
Cours où ils résident .
>>
5. Omnia quæ extant , seu Epistola ipsius
Legationum et alii Tractatus historici , et
Politici. Lugd. Bat. Elzevir , 1633. in 24.
Item . Amstelodami. Elzevir , 1660. in 24.
Voyez
740 MERCURE DE FRANCE
Voyez ses Lettres . C'est- là qu'on trouve
un détail exact de ce qui le regarde.
Bayle , Dictionnaire , son article est fait
avec beaucoup de soin. Tous les autres
Auteurs qui ont parlé de lui, sont tombez
dans des fautes grossieres et ont donné
une Relation de sa Vie , qui contredit
souvent ce qu'on trouve dans ses Let
tres. Tels sont les suivants. Valere André
, Bibliotheca Belgica : l'Auteur de sa
Vie qui est à la tête de ses Lettres à l'Empereur
Rodolphe , et que M. l'Abbé Bechet
a traduite de même que les Lettres.
Melchioris Adami vita Jurisconsultorum
Germanorum. p. 145. Freheri Theatrum Virorum
Doctorum , p. 931. Bullart , Académie
des Sciences , Tom. I. p. 80. Les
Eloges de M. de Thou , et les Additions
de Teissier.
Les autres Sçavans qui remplissent ce Volume
sont, Barthelemi Aneau, Elie Ashmole
,Jean d'Aubry, Guillaume de Baillou, Jacques
de Billy,Geoffroy et Jean de Billy, Adam
Blacvod , Edouard Brereword,RobertBurhill,
Louis Cappel, Louis Cappel lejeune,Jacques
Cappel, Scipion Carteromaco , Jacques Cassagne
, Antoine de Chandien, Nicolas Cisner,
Gaspard Contarini, Martin Antoine Delrio,
Antoine Densingius, Jeremie Drexelius,Jean
Drusius,Varino Favorino,Jean Gelida, Gilbert
AVRIL. 1734. 741
"
bert Genebrard, François Godwin , Laurent
Humphrey , Jean Marsham , Nicolas Hugues
Menard , Isaac Newton , François
Pinsson Arnaud de Pontac , Antoine
Possevin , Pierre du Ryer , François Sansovino,
J.Théodore Schenkius , Joseph Marie
Suarez , Paul et François Tallemant ,
J. F. Foy Vaillant , N. Durand de Villegagnon
, Burcher de Volder , Adolphe et
Everard Vorstius.
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Résumé : LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
La lettre traite de la publication continue des 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres', imprimés par le sieur Briasson à Paris. Le vingt-deuxième volume contient la vie et le catalogue de 45 savants, parmi lesquels Auger Gislen de Busbeq. Né en 1522 à Comines en Flandres, Busbeq est le fils naturel de Gilles Gislen, seigneur de Busbeq. Grâce à ses dispositions pour les sciences, son père l'envoya étudier dans plusieurs universités célèbres, telles que Louvain, Paris, Venise, Boulogne et Padoue. En 1554, Busbeq se rendit en Angleterre à la suite de Pierre Lasso pour assister aux noces de la reine Marie avec Philippe, fils de l'empereur Charles Quint. De retour en Flandres, il reçut une lettre de Ferdinand, roi des Romains, l'envoyant en ambassade à Constantinople. Il arriva à Constantinople en janvier 1555 et rencontra Soliman II à Amasie. Sa première ambassade fut brève, obtenant seulement une trêve de six mois. Il retourna à Vienne et fut renvoyé à Constantinople en novembre 1555, où il resta sept ans et négocia une trêve de huit ans. Pendant son séjour en Turquie, Busbeq collecta des inscriptions, acheta des manuscrits, rechercha des plantes rares et s'informa sur la nature des animaux. Il ramena des dessins de plantes et d'animaux inconnus en Europe, qu'il communiqua à Pierre-André Matthiole pour ses ouvrages. Il eut également un médecin, Guillaume Quacquelben, qui mourut à Constantinople en 1561. Après avoir terminé ses affaires en Turquie, Busbeq retourna en Autriche en 1562. Il fut ensuite chargé de diverses missions diplomatiques, notamment la conduite des jeunes princes fils de Maximilien II en Espagne et l'escorte de la princesse Élisabeth d'Autriche en France. Il fut également ambassadeur à la cour de France pour Rodolphe II. En 1592, Busbeq obtint un congé pour se rendre en Flandres, mais fut attaqué et volé par des ligueurs près de Rouen. Il mourut peu après, le 28 octobre 1592, à l'âge d'environ 70 ans. Son corps fut enterré honorablement et son cœur porté aux Pays-Bas pour être placé dans le tombeau de ses ancêtres. Busbeq parlait sept langues et laissa plusieurs ouvrages, dont des lettres sur ses voyages et ambassades en Turquie, traduites en français et en allemand. Ses lettres sont considérées comme un modèle de rapport diplomatique. Le volume mentionne également une série de savants, parmi lesquels figurent Valère André, auteur de la 'Bibliotheca Belgica' et de lettres adressées à l'empereur Rodolphe, traduites par l'abbé Bechet. D'autres ouvrages cités incluent 'Melchioris Adami vita Jurisconsultorum Germanorum' et 'Freheri Theatrum Virorum Doctorum'. Le texte fait référence aux éloges de M. de Thou et aux additions de Teissier. La liste des savants inclut Barthelemi Aneau, Elie Ashmole, Jean d'Aubry, Guillaume de Baillou, Jacques de Billy, Geoffroy et Jean de Billy, Adam Blacvod, Edouard Brereword, Robert Burhill, Louis Cappel, Louis Cappel le jeune, Jacques Cappel, Scipion Carteromaco, Jacques Cassagne, Antoine de Chandien, Nicolas Cisner, Gaspard Contarini, Martin Antoine Delrio, Antoine Densingius, Jerémie Drexelius, Jean Drusius, Varino Favorino, Jean Gelida, Gilbert Genebrard, François Godwin, Laurent Humphrey, Jean Marsham, Nicolas Hugues Menard, Isaac Newton, François Pinsson, Arnaud de Pontac, Antoine Possevin, Pierre du Ryer, François Sansovino, J. Théodore Schenkius, Joseph Marie Suarez, Paul et François Tallemant, J. F. Foy Vaillant, N. Durand de Villegagnon, Burcher de Volder, Adolphe et Everard Vorstius. Le texte est daté d'avril 1734.
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79
p. 94-95
LOGOGRIPHE.
Début :
Ote-moi quatre pieds : cela fait, cher Lecteur, [...]
Mots clefs :
Constantinople
81
p. 186
DU LEVANT.
Début :
Les diverses secousses de tremblement de terre qu'on a essuyées ici pendant quatorze jours, ont [...]
Mots clefs :
Constantinople, Tremblement de terre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 19 Septembre.
LESEs diverfes fecouffes de tremblement de terre
qu'on a effuyées ici pendant quatorze jours , one
fait de grands ravages dans cette ville. Il y a des
rues dans lesquelles il ne fubfifte plus aucune maifon.
Prefque tous les bâtimens du Serail ont confidérablement
fouffert , & deux pavillons , fitués à
l'extrêmité des jardins , font totalement renversés.
Par la fecouffe du 3 , plufieurs Mofquées , entre
autres celle de Sainte Sophie , ont été fort endommagées
, ainfi qu'un grand nombre d'autres édi
fices publics . Le tremblement du 14 a ruiné la
moitié du quartier des Janiffaires . En quelques endroits
la terre s'eft entr'ouverte , & des Palais entiers
ont été abîmés. On compte que par ces différens
accidens il a péri deux mille perfonnes. La
crainte d'un femblable fort a fait fuir la plupart des
habitans , & le Grand Seigneur fuivi du grand
Vifir & des principaux Officiers de la Porte , partit
le 16 , pour fe retirer dans une de les maifons fur
le bord du grand canal.
DE CONSTANTINOPLE , le 19 Septembre.
LESEs diverfes fecouffes de tremblement de terre
qu'on a effuyées ici pendant quatorze jours , one
fait de grands ravages dans cette ville. Il y a des
rues dans lesquelles il ne fubfifte plus aucune maifon.
Prefque tous les bâtimens du Serail ont confidérablement
fouffert , & deux pavillons , fitués à
l'extrêmité des jardins , font totalement renversés.
Par la fecouffe du 3 , plufieurs Mofquées , entre
autres celle de Sainte Sophie , ont été fort endommagées
, ainfi qu'un grand nombre d'autres édi
fices publics . Le tremblement du 14 a ruiné la
moitié du quartier des Janiffaires . En quelques endroits
la terre s'eft entr'ouverte , & des Palais entiers
ont été abîmés. On compte que par ces différens
accidens il a péri deux mille perfonnes. La
crainte d'un femblable fort a fait fuir la plupart des
habitans , & le Grand Seigneur fuivi du grand
Vifir & des principaux Officiers de la Porte , partit
le 16 , pour fe retirer dans une de les maifons fur
le bord du grand canal.
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Résumé : DU LEVANT.
Entre le 3 et le 14 septembre, Constantinople a été frappée par des tremblements de terre sur une période de quatorze jours, causant des destructions massives. Plusieurs rues ont été entièrement ravagées, et de nombreux bâtiments, y compris ceux du Serail, ont été gravement endommagés. Deux pavillons des jardins du Serail ont été renversés. Le 3 septembre, des mosquées, dont Sainte Sophie, et divers édifices publics ont subi des dommages. Le 14 septembre, la moitié du quartier des Janissaires a été détruite. En certains lieux, la terre s'est ouverte, entraînant la ruine de palais entiers. On estime que deux mille personnes ont péri. La peur d'une nouvelle secousse a poussé la plupart des habitants à fuir. Le Grand Seigneur, accompagné du grand vizir et des principaux officiers, a quitté la ville le 16 septembre pour se réfugier dans une maison sur le bord du grand canal.
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82
p. 201-202
DU NORD.
Début :
Le Comte Desalleurs, Ambassadeur de France, mourut ici le 23 Novembre, après une [...]
Mots clefs :
Stockholm, Copenhague, Saint-Petersbourg, Constantinople
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU NORD.
DU NOR D.
DE CONSTANTINOPLE , le 1 Décembre.
L
E Comte Defalleurs , Ambaffadeur de France
, mourut ici le 23 Novembre , après une
maladie d'environ ſept femaines. Il avoit été cidevant
Envoyé extraordinaire & Miniftre Plénipotentiaire
auprès du Roi & de la République de
Pologne. Le pere du Comte Defalleurs avoit été
auffi Ambaffadeur à la Porte.
Mahomet V. du nom , mourut le 13 Decembre
en cette ville , âgé de cinquante- huit ans deux
mois & vingt-cinq jours. Depuis quelque tems ,
ce Prince étoit fort incommodé d'un rhume. Le
2 de ce mois il fut attaqué de la fievre & d'une
toux féche & violente , qui firent craindre une
fluxion de poitrine . A ces accidens fe joignit un
flux de fang : cependant Sa Hauteffe en peu de
jours, moyennant les remedes qu'on employa pour
fa guérifon , fe trouva confidérablement
foulagée.
Defirant de calmer les inquiétudes du peuple &
des Janiffaires , elle alla le 13 Décembre à cheval
à la grande Mofquée ; mais à fon retour au Sérail
elle fe fentit fuffoquée , & en un inftant elle expira.
Auffi- tôt qu'elle eut rendu le dernier ſoupir ,
fon frere Ofman troifieme du nom , fut procla
mé Empereur. Le nouveau Sultan eft âgé de cin-
I v
202 MERCURE DE FRANCE.
quante- fix ans. Celui qu'on vient de perdre , eft
univerfellement regretté . Les Janiffaires l'avoient
mis fur le throne le 20 Octobre 1730 , à la place
d'Achmet III fon oncle , qui avoit été élevé en
1703 à l'Empire , après la dépofition de Muſtapha
II , pere de Mahomet V & d'Oſman III , açtuellement
regnant.
DE PETERSBOURG , le 3 Décembre.
Selon les lettres de Mofcou , l'on y a célébré
d'une façon éclatante la naiffance du grand Prince
de Ruffic. Illuminations , feux d'artifice , fpectacles
, bals publics , rien n'a été épargné. Le Clergé
, les principaux Seigneurs , les Tribunaux , &
chaque corps de la bourgeoifie , le font empreffés
à l'envi de fignaler leur zele par des fêtes fomptueufes.
La charité s'eft jointe à la magnificence ,
pour que les indigens partageaffent plus vivement
l'allégreffe commune , & l'on a répandu dans leur
fein d'abondantes aumônes .
DE STOCKHOLM , le 12 Décembre.
On a découvert l'auteur des faux billets de banque
répandus dans ce Royaume. C'eſt un Orfévre
de Salhberg , ville de la Weftmanie. Il a été
arrêté , & l'on inftruit fan procès.
DE COPPENHAGUE , le 14 Décembre.
Quelques douleurs que la Reine fentit ces jours.
derniers , firent croire que cette Princeffe touchoit
au terme de fa groffeffe , mais elles n'ont
point eu de fuite ; & Sa Majefté continue de tenix
appartement une fois la ſemaine.
DE CONSTANTINOPLE , le 1 Décembre.
L
E Comte Defalleurs , Ambaffadeur de France
, mourut ici le 23 Novembre , après une
maladie d'environ ſept femaines. Il avoit été cidevant
Envoyé extraordinaire & Miniftre Plénipotentiaire
auprès du Roi & de la République de
Pologne. Le pere du Comte Defalleurs avoit été
auffi Ambaffadeur à la Porte.
Mahomet V. du nom , mourut le 13 Decembre
en cette ville , âgé de cinquante- huit ans deux
mois & vingt-cinq jours. Depuis quelque tems ,
ce Prince étoit fort incommodé d'un rhume. Le
2 de ce mois il fut attaqué de la fievre & d'une
toux féche & violente , qui firent craindre une
fluxion de poitrine . A ces accidens fe joignit un
flux de fang : cependant Sa Hauteffe en peu de
jours, moyennant les remedes qu'on employa pour
fa guérifon , fe trouva confidérablement
foulagée.
Defirant de calmer les inquiétudes du peuple &
des Janiffaires , elle alla le 13 Décembre à cheval
à la grande Mofquée ; mais à fon retour au Sérail
elle fe fentit fuffoquée , & en un inftant elle expira.
Auffi- tôt qu'elle eut rendu le dernier ſoupir ,
fon frere Ofman troifieme du nom , fut procla
mé Empereur. Le nouveau Sultan eft âgé de cin-
I v
202 MERCURE DE FRANCE.
quante- fix ans. Celui qu'on vient de perdre , eft
univerfellement regretté . Les Janiffaires l'avoient
mis fur le throne le 20 Octobre 1730 , à la place
d'Achmet III fon oncle , qui avoit été élevé en
1703 à l'Empire , après la dépofition de Muſtapha
II , pere de Mahomet V & d'Oſman III , açtuellement
regnant.
DE PETERSBOURG , le 3 Décembre.
Selon les lettres de Mofcou , l'on y a célébré
d'une façon éclatante la naiffance du grand Prince
de Ruffic. Illuminations , feux d'artifice , fpectacles
, bals publics , rien n'a été épargné. Le Clergé
, les principaux Seigneurs , les Tribunaux , &
chaque corps de la bourgeoifie , le font empreffés
à l'envi de fignaler leur zele par des fêtes fomptueufes.
La charité s'eft jointe à la magnificence ,
pour que les indigens partageaffent plus vivement
l'allégreffe commune , & l'on a répandu dans leur
fein d'abondantes aumônes .
DE STOCKHOLM , le 12 Décembre.
On a découvert l'auteur des faux billets de banque
répandus dans ce Royaume. C'eſt un Orfévre
de Salhberg , ville de la Weftmanie. Il a été
arrêté , & l'on inftruit fan procès.
DE COPPENHAGUE , le 14 Décembre.
Quelques douleurs que la Reine fentit ces jours.
derniers , firent croire que cette Princeffe touchoit
au terme de fa groffeffe , mais elles n'ont
point eu de fuite ; & Sa Majefté continue de tenix
appartement une fois la ſemaine.
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Résumé : DU NORD.
Le 23 novembre à Constantinople, le Comte Defalleurs, ambassadeur de France, est décédé après une maladie de sept semaines. Il avait précédemment servi en tant qu'Envoyé extraordinaire et Ministre Plénipotentiaire auprès du Roi et de la République de Pologne. Son père avait également été ambassadeur à la Porte. Le 13 décembre, Mahomet V est mort à Constantinople à l'âge de cinquante-huit ans, deux mois et vingt-cinq jours. Il souffrait d'un rhume et a été atteint de fièvre et d'une toux violente le 2 décembre. Bien qu'il ait montré des signes d'amélioration grâce aux remèdes, il est décédé d'une suffocation en rentrant au Sérail après une visite à la grande Mosquée. Son frère Osman III lui a succédé sur le trône. Mahomet V était monté sur le trône le 20 octobre 1730, succédant à son oncle Achmet III, qui avait été déposé en 1703. À Pétersbourg, la naissance du grand Prince de Russie a été célébrée avec des illuminations, des feux d'artifice, des spectacles et des bals publics. Le clergé, les seigneurs et la bourgeoisie ont organisé des fêtes somptueuses et des aumônes ont été distribuées aux indigents. À Stockholm, un orfèvre de Salhberg, en Westmanie, a été arrêté pour avoir fabriqué de faux billets de banque. À Copenhague, la Reine a ressenti des douleurs, mais celles-ci n'ont pas abouti à une grossesse. Elle continue de tenir son appartement une fois par semaine.
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83
p. 165-166
DU LEVANT.
Début :
Le 22 Décembre, jour fixé pour l'inauguration d'Osman III, ce Prince, accompagné [...]
Mots clefs :
Seigneur, Sultan, Constantinople
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 4 Janvier.
L
E 22 Décembre , jour fixé pour l'inauguration
d'Ofman III , ce Prince , accompagné
de toute fa Cour , fe rendit à la Mofquée d'Ejoub.
Après que le Grand Seigneur eut fait fa priere ,
le Mufti s'avança vers la Hauteffe , & lui dit :
Puiffant Empereur , glorieux monarque , Dieu l'a
établi Sultan pour regnerfur les véritables croyans ;
fois fidele à la loi , & ton regne fera heureux. Il
ajouta enfuite en fe tournant vers le peuple
voilà celui que Dieu , dans l'éternité de fes decrets ,
a destinépour vous gouverner ; il obfervera la loi ;
foyez lui foumis. Puis il ceignit le cimeterre de
Mahomet au Sultan , qu'il exhorta de ne le tirer
que pour la défense de la religion & de la justice.
Lorfque cette cérémonie fut finie , la mufique
des Janiffaires fe fit entendre , & l'air retentit
d'acclamations . Le Grand Seigneur étant retourné
àu Sérail , on diftribua quinze cens bourſes aux
troupes. Au milieu des réjouiflances , quelques
Leventi , ou gens de mer , infulterent un Janiffaire
. Celui -ci n'en eut pas plutot informé les foldats
de fa compagnie , qu'ils fe répandirent dans
les rues voifines du port , & fondirent le fabre à la
main fur les Leventi. Heureufement l'Aga des
1
166 MERCURE DE FRANCE.
•
Janiffaires & le Capitan Pacha impoferent par leur
préfence aux uns & aux autres , & en peu de tems
le defordre fut appaifé . On empala fur le champ
fans autre forme de procès , les Leventi qui y
avoient donné lieu.
1
Sa Hauteffe étant inftruite que la plupart des
Mufulmans regardent la défenfe de boire du via
comme un réglement fait pour le fimple vulgaire ,
a ftatué de rigoureufes peines contre ceux qui ,
fans refpect pour l'Alcoran , feront ufage de cette
liqueur,
DE CONSTANTINOPLE , le 4 Janvier.
L
E 22 Décembre , jour fixé pour l'inauguration
d'Ofman III , ce Prince , accompagné
de toute fa Cour , fe rendit à la Mofquée d'Ejoub.
Après que le Grand Seigneur eut fait fa priere ,
le Mufti s'avança vers la Hauteffe , & lui dit :
Puiffant Empereur , glorieux monarque , Dieu l'a
établi Sultan pour regnerfur les véritables croyans ;
fois fidele à la loi , & ton regne fera heureux. Il
ajouta enfuite en fe tournant vers le peuple
voilà celui que Dieu , dans l'éternité de fes decrets ,
a destinépour vous gouverner ; il obfervera la loi ;
foyez lui foumis. Puis il ceignit le cimeterre de
Mahomet au Sultan , qu'il exhorta de ne le tirer
que pour la défense de la religion & de la justice.
Lorfque cette cérémonie fut finie , la mufique
des Janiffaires fe fit entendre , & l'air retentit
d'acclamations . Le Grand Seigneur étant retourné
àu Sérail , on diftribua quinze cens bourſes aux
troupes. Au milieu des réjouiflances , quelques
Leventi , ou gens de mer , infulterent un Janiffaire
. Celui -ci n'en eut pas plutot informé les foldats
de fa compagnie , qu'ils fe répandirent dans
les rues voifines du port , & fondirent le fabre à la
main fur les Leventi. Heureufement l'Aga des
1
166 MERCURE DE FRANCE.
•
Janiffaires & le Capitan Pacha impoferent par leur
préfence aux uns & aux autres , & en peu de tems
le defordre fut appaifé . On empala fur le champ
fans autre forme de procès , les Leventi qui y
avoient donné lieu.
1
Sa Hauteffe étant inftruite que la plupart des
Mufulmans regardent la défenfe de boire du via
comme un réglement fait pour le fimple vulgaire ,
a ftatué de rigoureufes peines contre ceux qui ,
fans refpect pour l'Alcoran , feront ufage de cette
liqueur,
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Résumé : DU LEVANT.
Le 22 décembre, le sultan Ofman III a été inauguré à Constantinople. Accompagné de sa cour, il s'est rendu à la mosquée d'Ejoub où, après la prière, le Mufti l'a proclamé sultan et a exhorté le peuple à lui obéir et à respecter la loi. Le Mufti a ceint le cimeterre de Mahomet au sultan, l'encourageant à défendre la religion et la justice. Après la cérémonie, la musique des Janissaires a retenti, et des acclamations ont résonné. De retour au Sérail, 1500 bourses ont été distribuées aux troupes. Des troubles ont éclaté lorsque des Leventi ont insulté un Janissaire, provoquant une bagarre. L'Aga des Janissaires et le Capitan Pacha ont rapidement restauré l'ordre, et les Leventi responsables ont été empalés sans procès. Par ailleurs, le sultan a décrété des peines sévères contre ceux qui consomment du vin, malgré l'opinion de certains musulmans qui voient cette interdiction comme destinée au vulgaire.
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84
p. 185
DU LEVANT.
Début :
Mustapha Effendi est nommé pour aller notifier à l'Impératrice de Russie [...]
Mots clefs :
Constantinople, Grand vizir, Osman III, Avènement au trône
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 3 Février.
Am
USTAPHA EFFENDI eft nommé pour aller
notifier à l'Impératrice de Ruffie l'avènement
d'Ofman III au trône , & Chalil Aga , Capigi
Bachi , eft chargé de s'acquitter de la même
commiffion auprès du Roi & de la République de
Pologne. Lorfque le Baron de Hochepied ,
baffadeur des Etats Généraux des Provinces -Unies,
eut le du mois dernier fon audience publique
du Grand Vifir , il harangua ce premier Miniftre
en françois , & le Grand Vifir lui répondit en la
même langue.
Tout fembloit promettre au Grand Vilir
qu'il conferveroit fa dignité. Cependant Sa Hau→
teffe lui envoya redemander les Sceaux le IS Février.
C'eft à Metelin qu'il eft relegué. Son Succeffeur
n'eft pas encore déclaré ; l'Aga des Janiſfaires
exerce les fonctions de premier Miniftre.
Près de quatre-vingt mille ouvriers font employés
actuellement à réparer les dommages
caufés par les derniers tremblemens de terre. La
partie du Sérail , qui avoit été renversée , a été
rebâtie fur les deffeins du fieur Eſpinelluzzi , Arę
chitecte Italien.
DE CONSTANTINOPLE , le 3 Février.
Am
USTAPHA EFFENDI eft nommé pour aller
notifier à l'Impératrice de Ruffie l'avènement
d'Ofman III au trône , & Chalil Aga , Capigi
Bachi , eft chargé de s'acquitter de la même
commiffion auprès du Roi & de la République de
Pologne. Lorfque le Baron de Hochepied ,
baffadeur des Etats Généraux des Provinces -Unies,
eut le du mois dernier fon audience publique
du Grand Vifir , il harangua ce premier Miniftre
en françois , & le Grand Vifir lui répondit en la
même langue.
Tout fembloit promettre au Grand Vilir
qu'il conferveroit fa dignité. Cependant Sa Hau→
teffe lui envoya redemander les Sceaux le IS Février.
C'eft à Metelin qu'il eft relegué. Son Succeffeur
n'eft pas encore déclaré ; l'Aga des Janiſfaires
exerce les fonctions de premier Miniftre.
Près de quatre-vingt mille ouvriers font employés
actuellement à réparer les dommages
caufés par les derniers tremblemens de terre. La
partie du Sérail , qui avoit été renversée , a été
rebâtie fur les deffeins du fieur Eſpinelluzzi , Arę
chitecte Italien.
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Résumé : DU LEVANT.
Le texte décrit des événements politiques et administratifs à Constantinople. Usapha Effendi est chargé d'informer l'Impératrice de Russie de l'accession d'Osman III au trône, tandis que Chalil Aga, Capigi Bachi, doit en informer le Roi et la République de Pologne. Le Baron de Hochepied, représentant des Provinces-Unies, a eu une audience publique avec le Grand Vizir, lors de laquelle ils ont communiqué en français. Le Grand Vizir, bien que prometteur de conserver sa dignité, a été démis de ses fonctions le 11 février et relégué à Metelin. Son successeur n'est pas encore nommé, et l'Aga des Janissaires assure l'intérim. Par ailleurs, près de quatre-vingt mille ouvriers sont mobilisés pour réparer les dégâts causés par les récents tremblements de terre, notamment au Sérail, reconstruit selon les plans de l'architecte italien Espinelluzzi.
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85
p. 217-218
DU LEVANT.
Début :
L'Aga des Janissaires qui exerçoit par interim les fonctions de [...]
Mots clefs :
Constantinople, Député, Grand vizir, Ali Pacha Ekim Oglou, Alger, Dey, Aga des Janissaires, Sultane Validé, Osman III
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
1
DE CONSTANTINOPLE , le 12 Mars.
Miniltreavant l'ar
'Aga des Janiflaires qui exerçoit par interim
L'Ag²
rivée d'Ali Pacha Ekim Oglou , nouveau Grand
Vifir , a donné audience au Député de la Régence
d'Alger. Cet Envoyé ayant remis de la part du
Dey divers préfens pour le Grand Seigneur , Sa
Hautefle a ordonné d'envoyer au Dey plufieurs
pieces de canon & une certaine quantité de
munitions de guerre. Sa Hauteffe a fait en même
tems témoigner au Député par l'Aga des Janiffai
res , qu'elle apprenoit avec plaifir que les factieux
d'Alger euffent été domptés , & qu'elle defiroit,
que les Algériens , autant qu'il feroit poffible ,
entretinffent la paix avec les Puiffances Chrétiennes.
Il paroit que la Sultane Validé a une grande
influence dans les affaires. Auffi remarque-t-on
feulement dans les Miniftres de la Porte ,,
mais dans ceux des Cours étrangeres , beaucoup
d'empreffement à fe concilier la bienveillance de
cette Princeffe, Elle fe montre favorable aux,
Chrétiens , & depuis l'avènement d'Ofman III au
I:Vol.
218 MERCURE DE FRANCE.
trône , elle a fait d'abondantes largeſſes aux diffé
rens hofpices qu'ils ont dans cette Capitale .
Une indifpofition oblige le fieur Porter , Ambaffeur
du Roi de la Grande -Bretagne , de gardes
fon appartement.
1
DE CONSTANTINOPLE , le 12 Mars.
Miniltreavant l'ar
'Aga des Janiflaires qui exerçoit par interim
L'Ag²
rivée d'Ali Pacha Ekim Oglou , nouveau Grand
Vifir , a donné audience au Député de la Régence
d'Alger. Cet Envoyé ayant remis de la part du
Dey divers préfens pour le Grand Seigneur , Sa
Hautefle a ordonné d'envoyer au Dey plufieurs
pieces de canon & une certaine quantité de
munitions de guerre. Sa Hauteffe a fait en même
tems témoigner au Député par l'Aga des Janiffai
res , qu'elle apprenoit avec plaifir que les factieux
d'Alger euffent été domptés , & qu'elle defiroit,
que les Algériens , autant qu'il feroit poffible ,
entretinffent la paix avec les Puiffances Chrétiennes.
Il paroit que la Sultane Validé a une grande
influence dans les affaires. Auffi remarque-t-on
feulement dans les Miniftres de la Porte ,,
mais dans ceux des Cours étrangeres , beaucoup
d'empreffement à fe concilier la bienveillance de
cette Princeffe, Elle fe montre favorable aux,
Chrétiens , & depuis l'avènement d'Ofman III au
I:Vol.
218 MERCURE DE FRANCE.
trône , elle a fait d'abondantes largeſſes aux diffé
rens hofpices qu'ils ont dans cette Capitale .
Une indifpofition oblige le fieur Porter , Ambaffeur
du Roi de la Grande -Bretagne , de gardes
fon appartement.
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Résumé : DU LEVANT.
Le 12 mars à Constantinople, l'Aga des Janissaires, ministre par intérim, a reçu l'envoyé du Dey d'Alger, qui a remis divers présents pour le Grand Seigneur. En réponse, le ministre a ordonné l'envoi de pièces de canon et de munitions au Dey. Il a également exprimé sa satisfaction concernant la répression des troubles à Alger et a souhaité que les Algériens maintiennent la paix avec les puissances chrétiennes. La Sultane Validé exerce une grande influence sur les affaires de l'État, et les ministres cherchent à obtenir sa bienveillance. Elle se montre favorable aux chrétiens et a fait des dons généreux aux hôpitaux chrétiens de la capitale depuis l'avènement d'Osman III. Par ailleurs, l'ambassadeur du Roi de Grande-Bretagne, le sieur Porter, est alité.
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86
p. 205
DU LEVANT.
Début :
On continue de travailler avec toute la diligence possible, à réparer [...]
Mots clefs :
Constantinople, Grand vizir, Tremblement de terre, Sultane Validé, Grand seigneur
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texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 10 Avril.
ONcontinue de travailler avec toute la dili- gence poffible , à réparer les dommages caufés
par les derniers tremblemens de terre. La
partie du château des Sept Tours qui avoit été
ruinée , eft entierement rebâtie , ainfi que le mur
qui fert d'enceinte à la ville depuis l'Arfenal jufqu'à
la porte d'Andrinople . Ces jours derniers , le
Grand Seigneur alla vifiter les ouvrages qu'on
fait à l'Eglife de fainte Sophie.
Le dernier Grand Vifir , fur la recommendation
de la Sultane Validé , a obtenu une penfion de
cinq mille Sultanins .
Le Kiaïa Bey fut dépofé le 10 de ce mois. Il a
pour fucceffeur le Secrétaire du Grand Vifir .
DE CONSTANTINOPLE , le 10 Avril.
ONcontinue de travailler avec toute la dili- gence poffible , à réparer les dommages caufés
par les derniers tremblemens de terre. La
partie du château des Sept Tours qui avoit été
ruinée , eft entierement rebâtie , ainfi que le mur
qui fert d'enceinte à la ville depuis l'Arfenal jufqu'à
la porte d'Andrinople . Ces jours derniers , le
Grand Seigneur alla vifiter les ouvrages qu'on
fait à l'Eglife de fainte Sophie.
Le dernier Grand Vifir , fur la recommendation
de la Sultane Validé , a obtenu une penfion de
cinq mille Sultanins .
Le Kiaïa Bey fut dépofé le 10 de ce mois. Il a
pour fucceffeur le Secrétaire du Grand Vifir .
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Résumé : DU LEVANT.
Les réparations des dommages causés par les tremblements de terre à Constantinople avancent. Le château des Sept Tours et le mur d'enceinte ont été reconstruits. Le Grand Seigneur a visité les travaux à Sainte-Sophie. Le dernier Grand Vizir reçoit une pension de cinq mille Sultanins. Le Kiaïa Bey a été remplacé le 10 avril.
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87
p. 69
LOGOGRYPHE.
Début :
Quatorze pieds, Lecteurs, forment mon existence ; [...]
Mots clefs :
Constantinople
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texteReconnaissance textuelle : LOGOGRYPHE.
LOGOGRYPHE.
Uatorze pieds , Lecteur , forment mon exiftence
;
Je fuis depuis long- tems fameux & d'importance.
De villes dans mon fein je renferme un Etat :
Des mortels dont la taille eft peu propre au combat
,
D'autres qui fe peignoient le corps & le vifage ;
Le Dieu qui le premier mit la flûte en ufage ;
Le champs fatal qui vit périr tant de Romains ;
Un feuve dans l'Egypte , un faint Evangéliſte ;
La femme de Jacob , un grand naturaliſte :
Le roi des animaux , l'adjoint de Marius ;
Ce qui fit expirer la femme de Brutus;
Un nom propre à la mer , une vierge voilée ;
Un arbre peu commun pour border une allée,
Ce fyftême fondé fur bien des accidens ,
Qui procure du pain quand on n'a plus de dents.
Un fort qu'on eût furpris fans le bruit que fit
l'oye
Un vin rouge excellent que d'Efpagne on envoyé
La mere d'Apollon , du Pape un Député ;
Un ami de Dion , Philoſophe vanté.
Le pere de Jafon , un fameux Aftronome ,
Et l'auftere Cenfeur qui fut l'appui de Rome,
Uatorze pieds , Lecteur , forment mon exiftence
;
Je fuis depuis long- tems fameux & d'importance.
De villes dans mon fein je renferme un Etat :
Des mortels dont la taille eft peu propre au combat
,
D'autres qui fe peignoient le corps & le vifage ;
Le Dieu qui le premier mit la flûte en ufage ;
Le champs fatal qui vit périr tant de Romains ;
Un feuve dans l'Egypte , un faint Evangéliſte ;
La femme de Jacob , un grand naturaliſte :
Le roi des animaux , l'adjoint de Marius ;
Ce qui fit expirer la femme de Brutus;
Un nom propre à la mer , une vierge voilée ;
Un arbre peu commun pour border une allée,
Ce fyftême fondé fur bien des accidens ,
Qui procure du pain quand on n'a plus de dents.
Un fort qu'on eût furpris fans le bruit que fit
l'oye
Un vin rouge excellent que d'Efpagne on envoyé
La mere d'Apollon , du Pape un Député ;
Un ami de Dion , Philoſophe vanté.
Le pere de Jafon , un fameux Aftronome ,
Et l'auftere Cenfeur qui fut l'appui de Rome,
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88
p. 88
Mots de l'Enigme & du Logogryphe du Mercure de Juillet, [titre d'après la table]
Début :
Le mot de l'Enigme du Mercure de Juillet est Oiseau. Celui du Logogryphe est [...]
Mots clefs :
Oiseau, Constantinople
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texteReconnaissance textuelle : Mots de l'Enigme & du Logogryphe du Mercure de Juillet, [titre d'après la table]
LEE mot de l'Enigme du Mercure de Juillet
eft Oifean . Celui du Logogryphe eſt
Conftantinople , dans lequel on trouve Nanres,
Naples , Nole , Pife , nains , Pictes , Pan,
canon , cannes , Nil , S. Jean , Lia , Pline ,
lion , Cinna , tifon , océan , none , plane, ton-
`tine , capitole ; Tinto , Latone , Nonce , Platon
, Efon , Conon , Caton.
eft Oifean . Celui du Logogryphe eſt
Conftantinople , dans lequel on trouve Nanres,
Naples , Nole , Pife , nains , Pictes , Pan,
canon , cannes , Nil , S. Jean , Lia , Pline ,
lion , Cinna , tifon , océan , none , plane, ton-
`tine , capitole ; Tinto , Latone , Nonce , Platon
, Efon , Conon , Caton.
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89
p. 237-238
DU LEVANT.
Début :
Ali Pacha Ekim Oglou ayant été appellé le 20 Mai au [...]
Mots clefs :
Constantinople, Grand vizir, Chypre, Incendies, Envoyé extraordinaire de Sa Majesté très-chrétienne, Exil
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texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 3 Juin.
A
LI Pacha Ekim Oglou ayant été appellé le
20 Mai au Serail , le Grand Seigneur lui
redemanda les fceaux de l'Empire , & lui ordonna
de fe retirer dans l'ifle de Chypre. Sa Hauteffe
a déclaré Grand Vifir Saïd Mehemet Pacha ,
Tefterdar. Le Kiaia du Miniftre diſgracié a été
dépofé & relegué en Morée. Il a Jegben Effendi
pour fucceffeur. La charge de Nitfcanchi Pacha
vient d'être donnée au Selictar Aga. Le 12 , le
feu prit à Ejus , fitué à quelques lieues de cette
Capitale. Deux mofquées , & plus de trois cens
maiſons ont été confumées par les flammes.
Le 19 , le feu prit fur les dix heures du foir
au quartier des Juifs dans le fauxbourg de Galata.
Près de quatre cens maiſons ont été réduites
en cendres .
: Le Chevalier de Vergennes , Envoyé extraordinaire
de Sa Majefté très-chrétienne , arriva ici
le 21. Il eut le 28 fa premiere audience du Grand
Vifir , & ce matin il doit être admis à celle de
Sa Hauteffe. Le Grand Vifir a reçu les complimeas
de tous les Miniftres étrangers ſur fa nou-
1
238 MERCURE DE FRANCE.
velle dignité. Quoiqu'il foit dans un âge avan
cé , il n'en montre pas moins d'activité dans
l'expédition des affaires . Sa charge de Tefterdar a
été donnée à Azem Oglou . Ali Pacha Ekım , le
jour qu'il fut dépofé , fut conduit à la Tour de
Leandre fur le Bofphore , d'où il partit le lende
main pour l'ifle de Chypre , lieu de fon exil
DE CONSTANTINOPLE , le 3 Juin.
A
LI Pacha Ekim Oglou ayant été appellé le
20 Mai au Serail , le Grand Seigneur lui
redemanda les fceaux de l'Empire , & lui ordonna
de fe retirer dans l'ifle de Chypre. Sa Hauteffe
a déclaré Grand Vifir Saïd Mehemet Pacha ,
Tefterdar. Le Kiaia du Miniftre diſgracié a été
dépofé & relegué en Morée. Il a Jegben Effendi
pour fucceffeur. La charge de Nitfcanchi Pacha
vient d'être donnée au Selictar Aga. Le 12 , le
feu prit à Ejus , fitué à quelques lieues de cette
Capitale. Deux mofquées , & plus de trois cens
maiſons ont été confumées par les flammes.
Le 19 , le feu prit fur les dix heures du foir
au quartier des Juifs dans le fauxbourg de Galata.
Près de quatre cens maiſons ont été réduites
en cendres .
: Le Chevalier de Vergennes , Envoyé extraordinaire
de Sa Majefté très-chrétienne , arriva ici
le 21. Il eut le 28 fa premiere audience du Grand
Vifir , & ce matin il doit être admis à celle de
Sa Hauteffe. Le Grand Vifir a reçu les complimeas
de tous les Miniftres étrangers ſur fa nou-
1
238 MERCURE DE FRANCE.
velle dignité. Quoiqu'il foit dans un âge avan
cé , il n'en montre pas moins d'activité dans
l'expédition des affaires . Sa charge de Tefterdar a
été donnée à Azem Oglou . Ali Pacha Ekım , le
jour qu'il fut dépofé , fut conduit à la Tour de
Leandre fur le Bofphore , d'où il partit le lende
main pour l'ifle de Chypre , lieu de fon exil
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Résumé : DU LEVANT.
Le 20 mai, Ali Pacha Ekim Oglou fut destitué de ses fonctions et exilé à Chypre. Saïd Mehemet Pacha lui succéda en tant que Grand Vizir. Le Kiaia du ministre déchu fut démis de ses fonctions et relégué en Morée, remplacé par Segben Effendi. La charge de Nişancı Pacha fut attribuée au Selictar Aga. Le 12 juin, un incendie à Ejus, près de Constantinople, détruisit deux mosquées et plus de trois cents maisons. Le 19 juin, un autre incendie ravagea le quartier des Juifs dans le faubourg de Galata, réduisant près de quatre cents maisons en cendres. Le Chevalier de Vergennes, envoyé extraordinaire du roi de France, arriva le 21 juin et eut sa première audience avec le Grand Vizir le 28 juin. Malgré son âge avancé, Saïd Mehemet Pacha reçut les félicitations des ministres étrangers pour son activité dans la gestion des affaires. La charge de Tefterdar fut confiée à Azem Oglou. Ali Pacha fut conduit à la Tour de Léandre sur le Bosphore avant son départ pour Chypre.
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90
p. 229-230
DU LEVANT.
Début :
Ali Pacha Ekim Oglou étant parti pour l'isle de Chypre, [...]
Mots clefs :
Constantinople, Ali Pacha Ekim Oglou, Exil, Envoyé extraordinaire, Sa Majesté de Sicile, Église grecque, Querelle
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texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 6 Juillet.
A
LI Pacha Ekim Oglou étant parti pour l'ifle de
Chypre, lieu de fon exil , la galere fur laquelle
il s'eft embarqué , a été obligée de relâcher à l'ifle
de Scio. Il à demandé la permiffion d'y paffer le
tems du Ramazan ou Carême des Mahométans ,
& le Grand Seigneur la lui a accordée . Sa Hauteffe
a difpofé du Gouvernement de la Morée en
faveur de Muftapha Pacha , qui rempliffoit avant
Ali Pacha la dignité de Grand Vifir. M. de Ludolf
, chargé ici des affaires du Roi des Deux Siciles
, vient d'apprendre que Sa Majesté Sicilienne
l'a nommé fon Envoyé extraordinaire , pour
complimenter le Grand Seigneur fur fon avénement
au trône. Il est arrivé un courier du Miniftre
, qui eft allé de la part de Sa Hauteffe à Peterbourg.
Un vailleau de guerre Vénitien , qui
étoit ici depuis quelque tems , a remis à la voile
pour retourner en Italie . Conféquemment aux
ordres de l'Ambaffadeur de Venife , il a pris fous
fon convoi tous les navires Hollandois qui ont
voulu profiter de fon eſcorte .
Il s'eft élevé daus l'Eglife Grecque un grand
différend . Un Prêtre ayant foutenu que le feul
Baptême par immerfion étoit valide , une partie
du Clergé attaque cette propofition comme hé
Kétique , & l'autre partie en embraffe la défenſe.
230 MERCURE DE FRANCE.
Les fuites de cette oppofition de fentimens font
allées fi loin, qu'on a craint que la tranquillité de
cetre capitale n'en fût troublée . Pour prévenir cet
inconvénient , le Grand Seigneur a ordonné , que
tous les Evêques qui ne penfoient pas comme le
Patriarche de Conftantinople fur l'objet de la difpute
, fe retiraffent dans leurs fièges repectifs.
DE CONSTANTINOPLE , le 6 Juillet.
A
LI Pacha Ekim Oglou étant parti pour l'ifle de
Chypre, lieu de fon exil , la galere fur laquelle
il s'eft embarqué , a été obligée de relâcher à l'ifle
de Scio. Il à demandé la permiffion d'y paffer le
tems du Ramazan ou Carême des Mahométans ,
& le Grand Seigneur la lui a accordée . Sa Hauteffe
a difpofé du Gouvernement de la Morée en
faveur de Muftapha Pacha , qui rempliffoit avant
Ali Pacha la dignité de Grand Vifir. M. de Ludolf
, chargé ici des affaires du Roi des Deux Siciles
, vient d'apprendre que Sa Majesté Sicilienne
l'a nommé fon Envoyé extraordinaire , pour
complimenter le Grand Seigneur fur fon avénement
au trône. Il est arrivé un courier du Miniftre
, qui eft allé de la part de Sa Hauteffe à Peterbourg.
Un vailleau de guerre Vénitien , qui
étoit ici depuis quelque tems , a remis à la voile
pour retourner en Italie . Conféquemment aux
ordres de l'Ambaffadeur de Venife , il a pris fous
fon convoi tous les navires Hollandois qui ont
voulu profiter de fon eſcorte .
Il s'eft élevé daus l'Eglife Grecque un grand
différend . Un Prêtre ayant foutenu que le feul
Baptême par immerfion étoit valide , une partie
du Clergé attaque cette propofition comme hé
Kétique , & l'autre partie en embraffe la défenſe.
230 MERCURE DE FRANCE.
Les fuites de cette oppofition de fentimens font
allées fi loin, qu'on a craint que la tranquillité de
cetre capitale n'en fût troublée . Pour prévenir cet
inconvénient , le Grand Seigneur a ordonné , que
tous les Evêques qui ne penfoient pas comme le
Patriarche de Conftantinople fur l'objet de la difpute
, fe retiraffent dans leurs fièges repectifs.
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Résumé : DU LEVANT.
Le 6 juillet, depuis Constantinople, il est rapporté qu'Ali Pacha Ekim Oglou, en exil à Chypre, a dû s'arrêter à l'île de Scio pour observer le Ramazan, avec la permission du Grand Seigneur. Muftapha Pacha a été nommé gouverneur de la Morée et succédé à Ali Pacha en tant que Grand Vizier. M. de Ludolf, représentant du Roi des Deux Siciles, a été nommé Envoyé extraordinaire pour féliciter le Grand Seigneur. Un courrier du ministre est arrivé de Saint-Pétersbourg. Un vaisseau de guerre vénitien, escortant des navires hollandais, a quitté Constantinople pour l'Italie. Un différend au sein de l'Église Grecque, concernant la validité du baptême par immersion, a menacé la tranquillité de Constantinople. Le Grand Seigneur a ordonné aux évêques dissidents de se retirer dans leurs sièges respectifs pour prévenir les troubles.
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91
p. 221
DU LEVANT.
Début :
Le 10 de ce mois, le feu prit dans le quartier de Cumpi Capi, [...]
Mots clefs :
Constantinople, Incendie, Gouvernement, Licenciements , Célébration du Baïram
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 30 Juillet.
E ro de ce mois , le feu prit dans le quartier
LdeCumpi
en cendres. Près de deux cens perfonnes ont eu
le malheur de périr dans les flammes.
Iahia Pacha , Beglerbey de Romelie , vient
d'être rappellé de fon Gouvernement . Le Selictar
Aga , ou Porte- Epée du Grand Seigneur , & le
Spahilar Kiaiafi , (Commandant des Spahis , ) ont
été privés auffi de leurs emplois , ainſi que le
Chiaoux Bachi , le Janiffar Effendi , ou Secrétaire
des Janiffaires , le Jerfana Emini , ou premier
Commiffaire de l'artillerie , & le Cadilesker de
Romelie. Sady Aga , grand Ecuyer de Sa Hauteffe
, a été nommé Commandant des Spahis .
Sous le dernier regne on avoit coutume de
donner des fêtes & des fpectacles au peuple pendant
la célébration du Baïram. Le nouveau Sultan
a jugé à propos de fupprimer cet uſage,
DE CONSTANTINOPLE , le 30 Juillet.
E ro de ce mois , le feu prit dans le quartier
LdeCumpi
en cendres. Près de deux cens perfonnes ont eu
le malheur de périr dans les flammes.
Iahia Pacha , Beglerbey de Romelie , vient
d'être rappellé de fon Gouvernement . Le Selictar
Aga , ou Porte- Epée du Grand Seigneur , & le
Spahilar Kiaiafi , (Commandant des Spahis , ) ont
été privés auffi de leurs emplois , ainſi que le
Chiaoux Bachi , le Janiffar Effendi , ou Secrétaire
des Janiffaires , le Jerfana Emini , ou premier
Commiffaire de l'artillerie , & le Cadilesker de
Romelie. Sady Aga , grand Ecuyer de Sa Hauteffe
, a été nommé Commandant des Spahis .
Sous le dernier regne on avoit coutume de
donner des fêtes & des fpectacles au peuple pendant
la célébration du Baïram. Le nouveau Sultan
a jugé à propos de fupprimer cet uſage,
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Résumé : DU LEVANT.
Le 30 juillet, un incendie à Constantinople a causé la mort de deux cents personnes dans le quartier de Cumpi. Plusieurs hauts fonctionnaires ont été démis de leurs fonctions, dont Iahia Pacha et le Cadilesker de Romélie. Sady Aga a été nommé Commandant des Spahis. Le nouveau Sultan a supprimé les fêtes et spectacles du Baïram.
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92
p. 217
DU LEVANT.
Début :
Le Kiaïa Bey, ou Lieutenant de l'Aga des Janissaires, a [...]
Mots clefs :
Constantinople, Destitutions
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 2 Septembre.
E Kiaïa Bey , ou Lieutenant de l'Aga des Ja-
LE BeYoudele, & relegué à Brouffa.
"
Le Grand Vifir & le Reis Effendi furent auſſi
dépofés le 24 Août. Ils ont le choix du lieu de
leur exil , pourvu qu'ils fe tiennent à cinquante
lieues de cette capitale . Sa Hauteffe a nommé
premier Miniftre Ali Pacha , ci - devant Selictar
Aga. Elle a conferé à Hekim Oglou le gouvernes
ment de Romelic,
DE CONSTANTINOPLE , le 2 Septembre.
E Kiaïa Bey , ou Lieutenant de l'Aga des Ja-
LE BeYoudele, & relegué à Brouffa.
"
Le Grand Vifir & le Reis Effendi furent auſſi
dépofés le 24 Août. Ils ont le choix du lieu de
leur exil , pourvu qu'ils fe tiennent à cinquante
lieues de cette capitale . Sa Hauteffe a nommé
premier Miniftre Ali Pacha , ci - devant Selictar
Aga. Elle a conferé à Hekim Oglou le gouvernes
ment de Romelic,
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93
p. 224-225
DU LEVANT.
Début :
Il paroit que le nouveau Grand Visir, qui se nomme Nisandgi Pacha, se rend de plus [...]
Mots clefs :
Constantinople, Grand vizir, Perse, Tremblement de terre, Incendies
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVAN T.
DE CONSTANTINOPLE , le 2 Olobre.
IL paroît que le nouveau Grand Vifir , qui fe
nomme Nifandgi Pacha , fe rend de plus en
plus agréable au Sultan , & l'on a lieu de croire
que le Miniftere va prendre une fituation fixe.
Le Kiflar Aga , ou Chefdes Eunuques noirs, vient
d'être privé de fon emploi , & envoyé en exil au
Grand Caire.
Selon les nouvelles de Perfe , il y a eu le 7 de
Juin à Cachan un affreux tremblement de terre,
Six cens maiſons ont été renverfées , & plus de
douze cens perfonnes ont été enfevelies fous les
ruines des bâtimens. Le Caravanfera de la ville ,
qui eft un des plus beaux de la Perfe , & qui eft
tout de marbre , eft confidérablement endommagé.
Conftantinople vient d'effuyer un nouveau défaftre.
La nuit du 27 au 28 du mois dernier, le feu prit
en même tems à trois ou quatre endroits dans les
environs du Kiofc d'Ali. Quelque diligence qu'on
ait employée pour arrêter le progrès des Aammes
, on n'a pu y réuffir que le 29 fur les onze
heures du matin. Près de fix cens perſonnes ont
péri dans cet embraſement . Il a confumé huit
mille maifons , du nombre defquelles font celles
du Grand Vifir , du Tefterdar & du Reys Effendi ;
DECEMBRE. 1755. 225
& la perte qu'il a caufée , monte à plufieurs millions.
Si le vent eût rourné au fud , le Sérail auroit
couru un très -grand rifque, ainfi que les Mofquées
de Sainte Sophie & du Sultan Mahmoud.
On a reçu la nouvelle de deux autres incendies
arrivés à Scutari , l'un le 16 , & l'autre le 21.
DE CONSTANTINOPLE , le 2 Olobre.
IL paroît que le nouveau Grand Vifir , qui fe
nomme Nifandgi Pacha , fe rend de plus en
plus agréable au Sultan , & l'on a lieu de croire
que le Miniftere va prendre une fituation fixe.
Le Kiflar Aga , ou Chefdes Eunuques noirs, vient
d'être privé de fon emploi , & envoyé en exil au
Grand Caire.
Selon les nouvelles de Perfe , il y a eu le 7 de
Juin à Cachan un affreux tremblement de terre,
Six cens maiſons ont été renverfées , & plus de
douze cens perfonnes ont été enfevelies fous les
ruines des bâtimens. Le Caravanfera de la ville ,
qui eft un des plus beaux de la Perfe , & qui eft
tout de marbre , eft confidérablement endommagé.
Conftantinople vient d'effuyer un nouveau défaftre.
La nuit du 27 au 28 du mois dernier, le feu prit
en même tems à trois ou quatre endroits dans les
environs du Kiofc d'Ali. Quelque diligence qu'on
ait employée pour arrêter le progrès des Aammes
, on n'a pu y réuffir que le 29 fur les onze
heures du matin. Près de fix cens perſonnes ont
péri dans cet embraſement . Il a confumé huit
mille maifons , du nombre defquelles font celles
du Grand Vifir , du Tefterdar & du Reys Effendi ;
DECEMBRE. 1755. 225
& la perte qu'il a caufée , monte à plufieurs millions.
Si le vent eût rourné au fud , le Sérail auroit
couru un très -grand rifque, ainfi que les Mofquées
de Sainte Sophie & du Sultan Mahmoud.
On a reçu la nouvelle de deux autres incendies
arrivés à Scutari , l'un le 16 , & l'autre le 21.
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Résumé : DU LEVANT.
Le texte décrit plusieurs événements récents à Constantinople et en Perse. À Constantinople, le nouveau Grand Vizir, Nifandgi Pacha, a gagné en faveur auprès du Sultan, indiquant une stabilisation du ministère. Le Kizlar Aga, chef des eunuques noirs, a été démis de ses fonctions et exilé au Caire. La ville a également subi un incendie la nuit du 27 au 28 du mois précédent, détruisant près de huit mille maisons, dont celles du Grand Vizir, du Tefterdar et du Reys Effendi, et causant la mort de cinq cents personnes. La perte financière est évaluée à plusieurs millions. Le feu a menacé le Sérail ainsi que les mosquées de Sainte Sophie et de Sultan Mahmoud. Deux autres incendies ont été signalés à Scutari, les 16 et 21 du mois. En Perse, un tremblement de terre a frappé Cachan le 7 juin, détruisant six cents maisons et ensevelissant plus de douze cents personnes. Le caravansérail de la ville, un bâtiment en marbre, a été gravement endommagé.
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94
p. 175
DU LEVANT.
Début :
Le 25 du mois dernier, Nischangi Pacha, Grand Visir, fut mandé [...]
Mots clefs :
Constantinople, Nischangi Pacha, Grand vizir, Exécution, Trahison, Saïd Effendi
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
D U L E V" A A7 7 .
DE CoNsTANTINoPLE, le 2 Novembre.
LE 2 5 du mois dernier, Niſchangi Tacha ;
Grand Viſir , fut mandé par le Grand Seigneur,
qui ſur le champ lui ôta les Sceaux de l'Empire,
& le fit conduire entre les deux portes intérieures
du Palais. Il y demeura juſqu'au lendemain après
midi, qu'on lui apporta le fatal cordon. Ce Grand
Viſir n'étoit âgé que de trente-quatre ans.Son
corps a été expoſé à la vue du peuple avec un
écriteau conçu en ces termes : Voilà le corps du
fervers Niſchangi, qui a trahi la confiance du
Sultan ſon maître, & qui a mérité l'indignation
de Sa Hauteſſe par les forfaits dont il s'eſt rendu
coupable. Que chacun profite de cet exemple. Saïd
Effendi, dont le mérite & la probité ſont géné
ralement reconnus, a été déclaré Grand Vifir ;
& la place de Kiaya qu'il occupoit, a été donnée
au Reis Effendi.
DE CoNsTANTINoPLE, le 2 Novembre.
LE 2 5 du mois dernier, Niſchangi Tacha ;
Grand Viſir , fut mandé par le Grand Seigneur,
qui ſur le champ lui ôta les Sceaux de l'Empire,
& le fit conduire entre les deux portes intérieures
du Palais. Il y demeura juſqu'au lendemain après
midi, qu'on lui apporta le fatal cordon. Ce Grand
Viſir n'étoit âgé que de trente-quatre ans.Son
corps a été expoſé à la vue du peuple avec un
écriteau conçu en ces termes : Voilà le corps du
fervers Niſchangi, qui a trahi la confiance du
Sultan ſon maître, & qui a mérité l'indignation
de Sa Hauteſſe par les forfaits dont il s'eſt rendu
coupable. Que chacun profite de cet exemple. Saïd
Effendi, dont le mérite & la probité ſont géné
ralement reconnus, a été déclaré Grand Vifir ;
& la place de Kiaya qu'il occupoit, a été donnée
au Reis Effendi.
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Résumé : DU LEVANT.
Le 25 octobre, Nischangi Tacha, Grand Visir âgé de 34 ans, fut destitué et exécuté sur ordre du Grand Seigneur. Son corps fut exposé avec un écriteau dénonçant sa trahison. Saïd Effendi, connu pour son mérite, le remplaça. La fonction de Kiaya fut attribuée au Reis Effendi.
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95
p. 225-226
DU LEVANT.
Début :
Selon les avis reçus de Perse, Azad Kan ayant marché à [...]
Mots clefs :
Constantinople, Azad Kan, Révolte perse, Incendie, Grand Caire, Acte criminel
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU
LEVANT.
DE
CONSTANTINOPLE , le 20 Décembre.
Selon les avis reçus de Perfe , Azad Kan ayant
marché à Cafbin , pour en réduire les Habitans
qui s'étoient révoltés , Karum Kan s'eft avancé
vers Ifpahan. A fon approche , la Garnifon qu'Azad
Kan y avoit laiffée,a abandonné la Ville après
l'avoir pillée. Les mêmes nouvelles ajoutent
qu'Achmet , Souverain des Aghuaus , eft entré
en Perfe avec une armée de cent mille hommes ;
qu'il s'y eft emparé de quelques places , & qu'il
pourfuit vivement les conquêtes.
Après la mort du Grand Vifir Nidfchangi Pacha
, on a trouvé dans fes coffres trois millions
d'écus , quoiqu'il n'ait été guere plus de deux
mois & demi à la tête des affaires de l'Empire.
Il y a eu le 2 de ce mois un áffreux incendie
au Grand Caire. Dix mille maiſons ont été réduites
en cendres , & le feu ayant pris pendant la
nuit , lorfque tous les habitans étoient livrés au
fommeil , plus de trois mille perfonnes ont été la
proie des fammes . On attribue ce malheur à la
fureur d'une des femmes du Beglerbey . Jaloufe de
la préférence donnée à une de fes rivales par ce
Pacha , elle a mis le feu au Sérail , contente de
perdre la vie , pourvu que les deux objets de fon
reffentiment euffent le même fort . Ses projets de
KY
226 MERCURE DE FRANCE.
vengeance n'ont point été remplis. Elle a péri
mais la rivale dont elle vouloit la mort , s'eft fauvée
ainsi que le Pacha. La perte causée par cet
embrafement , monte à douze millions de piaftres
.
Selon les dernieres nouvelles reçues de Perfe ,
Achmet , Souverain des Aghuans , après avoir
laiffé des Garnifons dans les places qu'il a foumifes,
eft retourné précipitamment dans les Etats,
fur l'avis que des mécontens y avoient excité quelques
troubles. Sédar Mahomet Chalan Kan , Ġouverneur
du Mafanderan , a quitté le parti d'Azad
Kan , pour ſe joindre à Karum Kam.
LEVANT.
DE
CONSTANTINOPLE , le 20 Décembre.
Selon les avis reçus de Perfe , Azad Kan ayant
marché à Cafbin , pour en réduire les Habitans
qui s'étoient révoltés , Karum Kan s'eft avancé
vers Ifpahan. A fon approche , la Garnifon qu'Azad
Kan y avoit laiffée,a abandonné la Ville après
l'avoir pillée. Les mêmes nouvelles ajoutent
qu'Achmet , Souverain des Aghuaus , eft entré
en Perfe avec une armée de cent mille hommes ;
qu'il s'y eft emparé de quelques places , & qu'il
pourfuit vivement les conquêtes.
Après la mort du Grand Vifir Nidfchangi Pacha
, on a trouvé dans fes coffres trois millions
d'écus , quoiqu'il n'ait été guere plus de deux
mois & demi à la tête des affaires de l'Empire.
Il y a eu le 2 de ce mois un áffreux incendie
au Grand Caire. Dix mille maiſons ont été réduites
en cendres , & le feu ayant pris pendant la
nuit , lorfque tous les habitans étoient livrés au
fommeil , plus de trois mille perfonnes ont été la
proie des fammes . On attribue ce malheur à la
fureur d'une des femmes du Beglerbey . Jaloufe de
la préférence donnée à une de fes rivales par ce
Pacha , elle a mis le feu au Sérail , contente de
perdre la vie , pourvu que les deux objets de fon
reffentiment euffent le même fort . Ses projets de
KY
226 MERCURE DE FRANCE.
vengeance n'ont point été remplis. Elle a péri
mais la rivale dont elle vouloit la mort , s'eft fauvée
ainsi que le Pacha. La perte causée par cet
embrafement , monte à douze millions de piaftres
.
Selon les dernieres nouvelles reçues de Perfe ,
Achmet , Souverain des Aghuans , après avoir
laiffé des Garnifons dans les places qu'il a foumifes,
eft retourné précipitamment dans les Etats,
fur l'avis que des mécontens y avoient excité quelques
troubles. Sédar Mahomet Chalan Kan , Ġouverneur
du Mafanderan , a quitté le parti d'Azad
Kan , pour ſe joindre à Karum Kam.
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Résumé : DU LEVANT.
Le texte décrit des événements politiques et militaires dans le Levant et à Constantinople. À Cafbin, Azad Kan a réprimé une révolte. À Ifpahan, la garnison d'Azad Kan a pillé et abandonné la ville face à l'avancée de Karum Kan. En Perse, Achmet, souverain des Aghuans, a envahi le pays avec une armée de cent mille hommes, conquérant plusieurs places fortes. Après la mort du Grand Vizir Nidfchangi Pacha, trois millions d'écus ont été trouvés dans ses coffres. Le 2 décembre, un incendie au Grand Caire a détruit dix mille maisons et causé plus de trois mille morts. Cet incendie est attribué à la vengeance d'une femme du Beglerbey, qui a mis le feu au Sérail. Les pertes matérielles sont estimées à douze millions de piastres. Récemment, Achmet est retourné dans ses États pour réprimer des troubles, et Sédar Mahomet Chalan Kan, gouverneur du Mafanderan, a changé d'allégeance en faveur de Karum Kan.
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96
p. 195
DU LEVANT.
Début :
Le 9 de ce mois, le Chevalier de Vergennes, que le Roi de France [...]
Mots clefs :
Constantinople, Chevalier de Vergennes, Roi de France, Audience, Grand vizir, Sultane, Grossesse
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texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
le DE
CONSTANTINOPLE
14 , Février.
LE , de ce mois , le Chevalier de Vergennes ,
que le Roi de France a revêtu du caractere de fon
Ambaffadeur à la Porte eut en cette qualité fa
premiere audience du Grand Vifir. Il fut conduir
le lendemain à celle du Grand Seigneur , & il préfenta
la Lettre que Sa Majesté Très - Chrétienne a
écrite à Sa Hauteffe , pour la féliciter fur fon avénement
au Trône. On affure généralement qu'une
des Sultanes eft enceinte ; du moins il eft certain
que le Grand Seigneur a affigné un appartement
particulier à cette Favorite , & qu'elle eft traitée
avec des diftinctions , qui paroiffent confirmer le
bruit public.
le DE
CONSTANTINOPLE
14 , Février.
LE , de ce mois , le Chevalier de Vergennes ,
que le Roi de France a revêtu du caractere de fon
Ambaffadeur à la Porte eut en cette qualité fa
premiere audience du Grand Vifir. Il fut conduir
le lendemain à celle du Grand Seigneur , & il préfenta
la Lettre que Sa Majesté Très - Chrétienne a
écrite à Sa Hauteffe , pour la féliciter fur fon avénement
au Trône. On affure généralement qu'une
des Sultanes eft enceinte ; du moins il eft certain
que le Grand Seigneur a affigné un appartement
particulier à cette Favorite , & qu'elle eft traitée
avec des diftinctions , qui paroiffent confirmer le
bruit public.
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Résumé : DU LEVANT.
Le 14 février, le Chevalier de Vergennes, nouvel ambassadeur de France, a été reçu par le Grand Vizir et le Sultan. Il a remis une lettre du Roi de France félicitant le Sultan pour son avènement. Des rumeurs évoquent une grossesse d'une sultane, non confirmée, mais elle a reçu un appartement particulier et des distinctions.
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97
p. 245
DU LEVANT.
Début :
Il y eut hier en cette Ville un nouvel incendie : [...]
Mots clefs :
Constantinople, Incendie, Secours
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texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 1 Mars.
IL y eut hier en cette ville un nouvel incendie
huit cens maifons ont été réduites en cendres.
Pendant tout le tems qu'a duré l'embraſement
le Grand Vifir a été à cheval , pour faire
fecours partout où il étoit néceffaire.
DE CONSTANTINOPLE , le 1 Mars.
IL y eut hier en cette ville un nouvel incendie
huit cens maifons ont été réduites en cendres.
Pendant tout le tems qu'a duré l'embraſement
le Grand Vifir a été à cheval , pour faire
fecours partout où il étoit néceffaire.
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98
p. 189
DU LEVANT.
Début :
La peste continue de faire beaucoup de ravages dans cette Capitale. [...]
Mots clefs :
Constantinople, Peste, Incendie, Victimes innombrables, Dégâts, Scélérats, Exécutions
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texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 12 Juillet.
LA pefte continue de faire beaucoup de rava
ges dans cette Capitale. Un accident des plus funeftes
a augmenté la déſolation que cauſe ce féau .
Le feu ayant pris les de ce moïs chez un Teinturier
, le progrès des flammes fut fi rapide ,
qu'en trente-fix heures douze mille maifons ont
été réduites en cendres. Plus de mille perfonnes
ont péri dans cet incendie. Le défaftre auroit été
encore plus confidérable , fi l'on ne s'étoit apperçu
qu'un grand nombre de fcélérats , fous prétexte
de travailler à arrêter Fembraſement , ne
cherchoient qu'à le faire durer. Malgré la confufion
générale , le Grand Vifir eft parvenu à découvrir
environ trois cens de ces malheureux. Ils
ont été étranglés & jettés dans la mer. On në
peut encore évaluer la perte que cette Ville
foufferte.
DE CONSTANTINOPLE , le 12 Juillet.
LA pefte continue de faire beaucoup de rava
ges dans cette Capitale. Un accident des plus funeftes
a augmenté la déſolation que cauſe ce féau .
Le feu ayant pris les de ce moïs chez un Teinturier
, le progrès des flammes fut fi rapide ,
qu'en trente-fix heures douze mille maifons ont
été réduites en cendres. Plus de mille perfonnes
ont péri dans cet incendie. Le défaftre auroit été
encore plus confidérable , fi l'on ne s'étoit apperçu
qu'un grand nombre de fcélérats , fous prétexte
de travailler à arrêter Fembraſement , ne
cherchoient qu'à le faire durer. Malgré la confufion
générale , le Grand Vifir eft parvenu à découvrir
environ trois cens de ces malheureux. Ils
ont été étranglés & jettés dans la mer. On në
peut encore évaluer la perte que cette Ville
foufferte.
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Résumé : DU LEVANT.
Le 12 juillet, un incendie à Constantinople a détruit douze mille maisons et tué plus de mille personnes en trente-six heures. Le feu, parti chez un teinturier, a été alimenté par des malfaiteurs. Le Grand Vizir a fait exécuter environ trois cents d'entre eux. La perte totale reste à évaluer.
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99
p. 207-208
DU NORD.
Début :
Un grand nombre de Seigneur se sont empressés de venir ici, [...]
Mots clefs :
Varsovie, Stockholm, Seigneurs, Impératrice Reine de Hongrie et Bohême, Roi de Prusse, Constantinople, Peste, Marche des soldats, Ordonnance, Marchandises
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texteReconnaissance textuelle : DU NORD.
DU NOR D.
DE WARSOVIE , le 15 Novembre.
Un grand nombre de Seigneurs N fe font empref+
fés de venir ici , pour rendre leurs reſpects au Roi.-
Sur l'avis que les troupes Ruffiennes , qui mar
chent au fecours de l'Impératrice Reine de Hongrie
& de Boheme , paroiffoient vouloir prendre
leur route par la Pologne , le Roi de Pruffe a requis
la République de ne point leur accorder le
paffage . Sa Majefté Pruffienne , informée qu'on
lai fuppofe des vues préjudiciables aux intérêts des
habitans de Dantzick , les a fait affurer qu'Elle
étoit fort éloignée de penfer à leur donner aucun
fujet d'inquiétude.
On apprend de Conftantinople , que cette Capitale
de la Turquie eft prefque entiérement délivrée
de la pefte , mais que le mal contagieux fait
encore beaucoup de ravages dans quelques parties
de la Grece. Les mêmes lettres marquent que
dans le mois de Septembre il y a eu plufieurs fecouffes
de tremblement de terre en divers endroits
des Etats du Grand Seigneur.
por-
Les avis recus de Courlande & de Livonie
tent que les troupes Ruffiennes , deſtinées à agir
contre le Roi de Pruffe , ont été obligées par la
208 MERCURE DE FRANCE.
rigueur de la faifon , de fufpendre leur marche.
Ces avis ajoutent que le 7 de ce mois le Feld-
Maréchal Apraxin n'étoit pas encore arrivé à Riga.
DE STOCKOLM , le 17 Novembre.
Par une Ordonnance du 4 de ce mois , il eft
défendu de faire entrer en Suede toutes marchandifes
& denrées étrangeres , dont le Royaume,
peut abfolument fe paffer.
4
DE WARSOVIE , le 15 Novembre.
Un grand nombre de Seigneurs N fe font empref+
fés de venir ici , pour rendre leurs reſpects au Roi.-
Sur l'avis que les troupes Ruffiennes , qui mar
chent au fecours de l'Impératrice Reine de Hongrie
& de Boheme , paroiffoient vouloir prendre
leur route par la Pologne , le Roi de Pruffe a requis
la République de ne point leur accorder le
paffage . Sa Majefté Pruffienne , informée qu'on
lai fuppofe des vues préjudiciables aux intérêts des
habitans de Dantzick , les a fait affurer qu'Elle
étoit fort éloignée de penfer à leur donner aucun
fujet d'inquiétude.
On apprend de Conftantinople , que cette Capitale
de la Turquie eft prefque entiérement délivrée
de la pefte , mais que le mal contagieux fait
encore beaucoup de ravages dans quelques parties
de la Grece. Les mêmes lettres marquent que
dans le mois de Septembre il y a eu plufieurs fecouffes
de tremblement de terre en divers endroits
des Etats du Grand Seigneur.
por-
Les avis recus de Courlande & de Livonie
tent que les troupes Ruffiennes , deſtinées à agir
contre le Roi de Pruffe , ont été obligées par la
208 MERCURE DE FRANCE.
rigueur de la faifon , de fufpendre leur marche.
Ces avis ajoutent que le 7 de ce mois le Feld-
Maréchal Apraxin n'étoit pas encore arrivé à Riga.
DE STOCKOLM , le 17 Novembre.
Par une Ordonnance du 4 de ce mois , il eft
défendu de faire entrer en Suede toutes marchandifes
& denrées étrangeres , dont le Royaume,
peut abfolument fe paffer.
4
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Résumé : DU NORD.
Le 15 novembre, plusieurs seigneurs se sont rendus à Varsovie pour rendre hommage au roi. Le roi de Prusse a demandé à la République de ne pas permettre le passage des troupes russes, qui se dirigeaient vers l'impératrice reine de Hongrie et de Bohême. Il a également rassuré les habitants de Dantzick sur ses intentions pacifiques. À Constantinople, la peste a presque disparu, mais elle continue de sévir en Grèce. En septembre, des secousses sismiques ont été enregistrées dans divers endroits des États turcs. En Courlande et en Livonie, les troupes russes destinées à combattre le roi de Prusse ont suspendu leur marche en raison de l'hiver rigoureux. Le feld-maréchal Apraxin n'était pas encore arrivé à Riga le 7 novembre. Le 17 novembre, une ordonnance suédoise a interdit l'importation de marchandises et denrées étrangères dont la Suède peut se passer.
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100
p. 161
DU LEVANT.
Début :
Le 29 Octobre à quatre heures du matin, la mort du Sultan Osman III, [...]
Mots clefs :
Constantinople, Mort, Sultan, Empereur, Proclamation, Prince, Succession
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 30 Octobre.
LE 29 E 29 Octobre à quatre heures du matin , la
mort du Sultan Ofman III , arrivéc la nuit du 28
au 29 , après une maladie qui a duré environ trois
femaines , fut annoncée par le canon du Port ,
& bientôt répandue par toute la Ville. Les Grands
furent fur le champ mandés au Serrail , & le Sultan
Muftapha fut déclaré Empereur. Tout s'eft
paffé jufqu'ici fort tranquillement , & après la
proclamation du nouveau Sultan , on procédera
aux obfeques du Grand Seigneur. Le Sultan Muf
tapha ; qui eft le premier Prince de la Maiſon
Ottomane , a quarante - un ans ; on affure qu'il
eft d'un caractere auffi pacifique que fon prédé- ,
ceffeur.
DE CONSTANTINOPLE , le 30 Octobre.
LE 29 E 29 Octobre à quatre heures du matin , la
mort du Sultan Ofman III , arrivéc la nuit du 28
au 29 , après une maladie qui a duré environ trois
femaines , fut annoncée par le canon du Port ,
& bientôt répandue par toute la Ville. Les Grands
furent fur le champ mandés au Serrail , & le Sultan
Muftapha fut déclaré Empereur. Tout s'eft
paffé jufqu'ici fort tranquillement , & après la
proclamation du nouveau Sultan , on procédera
aux obfeques du Grand Seigneur. Le Sultan Muf
tapha ; qui eft le premier Prince de la Maiſon
Ottomane , a quarante - un ans ; on affure qu'il
eft d'un caractere auffi pacifique que fon prédé- ,
ceffeur.
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Résumé : DU LEVANT.
Le 29 octobre, la mort d'Osman III est annoncée. Mustafa IV, 41 ans, est proclamé sultan. La transition est paisible. Les funérailles d'Osman III auront lieu après la proclamation. Mustafa IV est décrit comme pacifique, comme son prédécesseur.
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