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1
p. 1800-1804
TURQUIE ET PERSE.
Début :
Des Lettres de Constantinople confirment la Bataille donnée dans la Grande Armenie, [...]
Mots clefs :
Constantinople, Bataille, Arménie, Janissaires, Pacha , Persans
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texteReconnaissance textuelle : TURQUIE ET PERSE.
TURQUIE ET PERSE.
Es Lettres de Constantinople confirment
la Bataille donnée dans la Grande Armenie ,
entre les Persans et les Turcs , les premiers
avoient une armée plus nombreuse que les derniers
, mais ceux - cy ayant appris que leurs ennemis
venoient de recevoir plusieurs pieces d'Artillerie
, et qu'ils se preparoient à les venir atta
quer jugerent à propos de les prévenir : ce qu'ils
rent , si à l'improviste et avec tant de succès
qu'ils n'eurent pas beaucoup de peine à les renverser
JUILLET. 173г. 18ot
Werser , et à les obliger de passer la Riviere
d'Erach , où un nombre de Persans ont été noyés, -
cependant on ajoûte que ces derniers se rassembloient
de l'autre côté de cette Riviere pour tenter
une seconde Bataille : ce qui fait juger que
leur perte n'est pas aussi grande que les Turcs
l'ont publiée.
Ces Lettres ajoûtent qu'il y avoit souvent des
querelles entre les Janissaires et les Soldats de la
Marine que la charge de Capitan Pacha done
Cianum - Coggia avoit été revêtu par le nouveau
Sultan , avoit aussi été donnée depuis peur
au Pacha de Rettimo , et que le Mufti avoit été
deposé ; que le Pacha qui a gagné la derniere
Bataille en Perse , avoit renvoyé plusieurs Persans
prisonniers de guerre aprés leur avoir fait
couper le nez et les oreilles en représailles d'un
pareil traitement que le Roy de Perse fit l'année
derniere à quelques Tures qui étoient tombés.
entre ses mains Ces Lettres ne confirment point
que le Roy de Perse ait été noyé ; on assure
au contraire que ce Prince avoit rassemblé leg
restes de son Armée , et qu'il attendoit un renfort
considerable de troupes que le Grand Mogol
devoit lui envoyer.
On a appris par d'autres Lettres , que le Patriarche
des Grecs avoit été déposé pour avoir
voulu introduire des nouveautés dans les Eglises
de sa Communion.
Des Lettres d'Italie portent qu'on avoit veu ,
au commencement du mois dernier , la Flotte
du Grand Seigneur , à l'entrée du Golfe Adriatique.
Les dernieres Nouvelles venues par l'Italie ,
portent que depuis la révolution qui a mis le
nouveau Sultan sur le Tròne , on avoit fait perir
Hv tant
1802 MERCURE DE FRANCE
tant dans Constantinople qu'à Andrinople er
dans d'autres Villes , plus de 20000. personnes
coupçonnées de pouvoir exciter une nouvelle revolte
; qu'on avoit publié dans la Ville une Relation
de la victoire remportée contre les Persans
, mais qu'on commençoit à douter qu'elle
fut aussi complette qu'on la croyoit d'abord ,
parcequ'on continuoit de prendre des mesures
pour faire la paix avec le Roy de Perse.
t
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Smirne
le 30. May 1731..
aprenons par
des Lettres de Constan
Ntinople que nous avons reçues depuis deux
jours , comme le G. S. s'est porté à déposer CianumGoggia
de la Commission de Capitan Pacha,.
et à l'exiler à Retrin dans l'Isle de Candie ,.
malgré tous les services qu'il avoit rendus à Sa.
Hautesse depuis qu'il étoit en place ; on dit que
la disgrace de cet Amiral procede d'une part de:
la jalousie du Grand Visir, et de l'autre du Corps :
des Jannissaires , qui ne voyoient qu'avec peine
les services importans que les Leventis avoit rendus
au nouveau G.Ş. sous les ordres de Cianum .
Coggia.
;
Les Turcs ont publié en dernier lieu qu'ils .
avoient remporté une grande victoire en Perse
cependant bien des Lettres qui sont entre les
mains des Arméniens assurent le contraire , et.
marquent que les Persans continuent à repren
dre toutes les Places que les Turcs leur avoient
enlevées. Quoy-qu'll en soit , le G. S. fait lever
des Troupes par tout , pour les faire passer , à.
ce qu'on dit , en Perse ; mais les politiques pen
2 :
sent
JUILLET.
1731 1803
sent que la Cour Ottomane est d'accord avec
les Persans , et que l'Armée du G. S. pourroit
bien marcher ou contre les Moscovites , ou
contre les Imperiaux.
NOUVELLES DE PERSE , venuër
à Constantinople le 7. May 1731. Lettre
écrite de cette Ville le 15. du même
mois.
E Grand Vizir a reçu des Lettres de Perse
Lpar lesquelles onlui marque que Schah Tha
93
mas , qui avoit entrepris le Siege de Tauris
avoit été défait devant cette Place par les Trou
pes du G. S. Les particularitez que l'on rappor
te de cet événement sont , qu'Ali Pacha , Gou
verneur de Tauris , se voyant pressé par les
Assiegeants , avoit si bien ranimé le courage
des Assiegez par ses exhortations , à se retirer .
de l'espece de Prison où les ennemis les retenoient
dans l'enceinte de cette Ville , qu'étant
sorti à la tête de toute sa garnison , il étoit tombé
avec tant de furie sur les Persans , tandis que
d'un autre côté Rustan-Pacha , qui tenoit la
Campagne avec 4. ou sooo . hommes , étoit
aussi venu fondre sur eux , que l'armée Persa --~
ne avoit été mise en déroute ; que les Turcs
avoient fait un grand carnage ; et beaucoup de Prisonniers,
parmi lesquels il s'étoit trouvé quinze
Kans , ou Seigneurs , qu'on amenoit enchaînez al
Constantinople , et que cet echec avoit si fort dé !
rangé les affaires du Roy de Perse , qu'il s'étoit
déterminé à envoyer un Ambassadeur au Sul--
tan pour traiter d'une paix solide avec sa Hay--
H vj On
tesse.
1804
MERCURE
DE FRANCE
On ajoûte une circonstance au sujet de Rustan-
Pacha qui merite d'autant plus d'être ra
portée , qu'elle paroît n'avoir pas peu contribué
à la victoire que les Turcs viennent de
remporter.
Lorsque Patrona Mousloub , et les autres
Chefs de la grande Révolution , étoient tout
Puissans à Constantinople , ils y firent venir de
Bosnie ce même Rustan-Pacha, ils obtinrent qu'il
fut fait Visir à trois queues , et envoyé Seraskier
de l'Armée en Perse ; mais quelque tems
´aprés le massacre de ces Rebelles , la Porte envoya
un Capigi - Bachi à Rustan , pour lui demander
sa tête : ce Pacha au lieu d'obeir fit
arrêter le Capigi Bachi , et lui dit qu'à la vérité
le G. S. étoit le Maître de disposer de sa tête
mais que jugeant qu'il seroit plus utile et plus
honorable sa Hautesse , qu'il la perdit à son
service , il alloit chercher les occasions de la lui
sacrifier glorieusement , en combattant contre
les ennemis de l'Empire , ce qui a heureusement
reussi.
Es Lettres de Constantinople confirment
la Bataille donnée dans la Grande Armenie ,
entre les Persans et les Turcs , les premiers
avoient une armée plus nombreuse que les derniers
, mais ceux - cy ayant appris que leurs ennemis
venoient de recevoir plusieurs pieces d'Artillerie
, et qu'ils se preparoient à les venir atta
quer jugerent à propos de les prévenir : ce qu'ils
rent , si à l'improviste et avec tant de succès
qu'ils n'eurent pas beaucoup de peine à les renverser
JUILLET. 173г. 18ot
Werser , et à les obliger de passer la Riviere
d'Erach , où un nombre de Persans ont été noyés, -
cependant on ajoûte que ces derniers se rassembloient
de l'autre côté de cette Riviere pour tenter
une seconde Bataille : ce qui fait juger que
leur perte n'est pas aussi grande que les Turcs
l'ont publiée.
Ces Lettres ajoûtent qu'il y avoit souvent des
querelles entre les Janissaires et les Soldats de la
Marine que la charge de Capitan Pacha done
Cianum - Coggia avoit été revêtu par le nouveau
Sultan , avoit aussi été donnée depuis peur
au Pacha de Rettimo , et que le Mufti avoit été
deposé ; que le Pacha qui a gagné la derniere
Bataille en Perse , avoit renvoyé plusieurs Persans
prisonniers de guerre aprés leur avoir fait
couper le nez et les oreilles en représailles d'un
pareil traitement que le Roy de Perse fit l'année
derniere à quelques Tures qui étoient tombés.
entre ses mains Ces Lettres ne confirment point
que le Roy de Perse ait été noyé ; on assure
au contraire que ce Prince avoit rassemblé leg
restes de son Armée , et qu'il attendoit un renfort
considerable de troupes que le Grand Mogol
devoit lui envoyer.
On a appris par d'autres Lettres , que le Patriarche
des Grecs avoit été déposé pour avoir
voulu introduire des nouveautés dans les Eglises
de sa Communion.
Des Lettres d'Italie portent qu'on avoit veu ,
au commencement du mois dernier , la Flotte
du Grand Seigneur , à l'entrée du Golfe Adriatique.
Les dernieres Nouvelles venues par l'Italie ,
portent que depuis la révolution qui a mis le
nouveau Sultan sur le Tròne , on avoit fait perir
Hv tant
1802 MERCURE DE FRANCE
tant dans Constantinople qu'à Andrinople er
dans d'autres Villes , plus de 20000. personnes
coupçonnées de pouvoir exciter une nouvelle revolte
; qu'on avoit publié dans la Ville une Relation
de la victoire remportée contre les Persans
, mais qu'on commençoit à douter qu'elle
fut aussi complette qu'on la croyoit d'abord ,
parcequ'on continuoit de prendre des mesures
pour faire la paix avec le Roy de Perse.
t
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Smirne
le 30. May 1731..
aprenons par
des Lettres de Constan
Ntinople que nous avons reçues depuis deux
jours , comme le G. S. s'est porté à déposer CianumGoggia
de la Commission de Capitan Pacha,.
et à l'exiler à Retrin dans l'Isle de Candie ,.
malgré tous les services qu'il avoit rendus à Sa.
Hautesse depuis qu'il étoit en place ; on dit que
la disgrace de cet Amiral procede d'une part de:
la jalousie du Grand Visir, et de l'autre du Corps :
des Jannissaires , qui ne voyoient qu'avec peine
les services importans que les Leventis avoit rendus
au nouveau G.Ş. sous les ordres de Cianum .
Coggia.
;
Les Turcs ont publié en dernier lieu qu'ils .
avoient remporté une grande victoire en Perse
cependant bien des Lettres qui sont entre les
mains des Arméniens assurent le contraire , et.
marquent que les Persans continuent à repren
dre toutes les Places que les Turcs leur avoient
enlevées. Quoy-qu'll en soit , le G. S. fait lever
des Troupes par tout , pour les faire passer , à.
ce qu'on dit , en Perse ; mais les politiques pen
2 :
sent
JUILLET.
1731 1803
sent que la Cour Ottomane est d'accord avec
les Persans , et que l'Armée du G. S. pourroit
bien marcher ou contre les Moscovites , ou
contre les Imperiaux.
NOUVELLES DE PERSE , venuër
à Constantinople le 7. May 1731. Lettre
écrite de cette Ville le 15. du même
mois.
E Grand Vizir a reçu des Lettres de Perse
Lpar lesquelles onlui marque que Schah Tha
93
mas , qui avoit entrepris le Siege de Tauris
avoit été défait devant cette Place par les Trou
pes du G. S. Les particularitez que l'on rappor
te de cet événement sont , qu'Ali Pacha , Gou
verneur de Tauris , se voyant pressé par les
Assiegeants , avoit si bien ranimé le courage
des Assiegez par ses exhortations , à se retirer .
de l'espece de Prison où les ennemis les retenoient
dans l'enceinte de cette Ville , qu'étant
sorti à la tête de toute sa garnison , il étoit tombé
avec tant de furie sur les Persans , tandis que
d'un autre côté Rustan-Pacha , qui tenoit la
Campagne avec 4. ou sooo . hommes , étoit
aussi venu fondre sur eux , que l'armée Persa --~
ne avoit été mise en déroute ; que les Turcs
avoient fait un grand carnage ; et beaucoup de Prisonniers,
parmi lesquels il s'étoit trouvé quinze
Kans , ou Seigneurs , qu'on amenoit enchaînez al
Constantinople , et que cet echec avoit si fort dé !
rangé les affaires du Roy de Perse , qu'il s'étoit
déterminé à envoyer un Ambassadeur au Sul--
tan pour traiter d'une paix solide avec sa Hay--
H vj On
tesse.
1804
MERCURE
DE FRANCE
On ajoûte une circonstance au sujet de Rustan-
Pacha qui merite d'autant plus d'être ra
portée , qu'elle paroît n'avoir pas peu contribué
à la victoire que les Turcs viennent de
remporter.
Lorsque Patrona Mousloub , et les autres
Chefs de la grande Révolution , étoient tout
Puissans à Constantinople , ils y firent venir de
Bosnie ce même Rustan-Pacha, ils obtinrent qu'il
fut fait Visir à trois queues , et envoyé Seraskier
de l'Armée en Perse ; mais quelque tems
´aprés le massacre de ces Rebelles , la Porte envoya
un Capigi - Bachi à Rustan , pour lui demander
sa tête : ce Pacha au lieu d'obeir fit
arrêter le Capigi Bachi , et lui dit qu'à la vérité
le G. S. étoit le Maître de disposer de sa tête
mais que jugeant qu'il seroit plus utile et plus
honorable sa Hautesse , qu'il la perdit à son
service , il alloit chercher les occasions de la lui
sacrifier glorieusement , en combattant contre
les ennemis de l'Empire , ce qui a heureusement
reussi.
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Résumé : TURQUIE ET PERSE.
Au début du XVIIIe siècle, des conflits militaires et politiques ont opposé la Turquie et la Perse. En juillet 1730, une bataille en Grande Arménie a vu les Turcs, bien que moins nombreux, surprendre les Persans et les repousser au-delà de la rivière d'Erach, causant de lourdes pertes parmi les Persans. Cependant, ces derniers se préparaient à une contre-attaque, indiquant que leurs pertes n'étaient pas aussi sévères que les Turcs l'avaient annoncé. Des tensions internes au sein de l'armée turque ont été rapportées, notamment entre les Janissaires et les soldats de la marine. Le Capitain Pacha Cianum-Coggia a été démis de ses fonctions et exilé, et le Mufti a également été déposé. Les Turcs ont libéré des prisonniers persans après les avoir mutilés en représailles de traitements similaires subis par des Turcs l'année précédente. Le texte dément la rumeur selon laquelle le roi de Perse aurait été noyé et rapporte qu'il rassemble ses forces pour une nouvelle offensive, attendant des renforts du Grand Mogol. En Turquie, le patriarche des Grecs a été déposé pour avoir introduit des innovations dans les églises de sa communion. En Italie, la flotte ottomane a été signalée dans le golfe Adriatique. À Constantinople et Andrinople, des purges massives ont suivi l'accession au trône du nouveau sultan, avec plus de 20 000 personnes exécutées pour prévenir une rébellion. En Perse, le Grand Vizir a appris la défaite du Shah Tahmasp devant Tauris, grâce à l'intervention d'Ali Pacha et de Rustan-Pacha. Cette victoire a conduit à l'envoi d'un ambassadeur persan pour négocier la paix avec le sultan ottoman. Rustan-Pacha, qui avait refusé de se soumettre à un ordre d'exécution, a joué un rôle crucial dans cette victoire.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 2648-2653
RELATION de la conspiration découverte à Constantinople, le 1 Septembre 1731.
Début :
Depuis l'incendie du 21 Juillet dernier, où les Janissaires donnerent encore des marques [...]
Mots clefs :
Aga des Janissaires, Incendie, Révolte, Pacha , Persans
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : RELATION de la conspiration découverte à Constantinople, le 1 Septembre 1731.
2648 MERCURE DE FRANCE
RELATION de la conspiration découverte
à Constantinople , le 1 Septembre 1731.
Epuis l'incendie du 21 Juillet dernier, où les
Janissaires donnerent encore des marques
de leur disposition à la révolte , on n'avoit eu aucun
indice qu'il se tramât rien contre le Gouvernement
cependant le 1 Septembre le ( 1 )
Dgebedgi Bachi vint avertir le G. V. qu'il s'étoit
formé une nouvelle conspiration à Constantinople,
et qu'elle devoit éclater le lendemain à la
pointe du jour.
·
1
Sur cet avis ce Ministre , qui ne put être informé
alors du nombre ni de la qualité des Rebelles
, se contenta de renforcer les Patrouilles pour
la nuit suivante , et d'augmenter considerablement
la garde , tant au Sérail , que chez lui , et
chez le Janissaice Aga. Celui- ci étant allé faire
sa ronde à l'ordinaire , rencontra à deux heures
de nuit, deux Dgebedgis bien armez , il les fit arrêter
, et sur leur air embarrassé et les réponses
qu'ils lui firent , îl les envoya chez le G. V.
Ce premier Ministre les ayant interrogez à son
tour , ils furent encore plus déconcertez , et jugeant
bien eux-mêmes , qu'après les défenses séveres
qui avoient été faites de marcher la nuit
avec des armes , il ne leur restoit aucun espoir
de se sauver , ils lui dirent franchement : Nous
sçavons bien , Seigneur , que c'est fait de notre
vie , mais avant que de mourir , nous voulons
vous déclarer tour. Nous sommes 1500 hommes
qui devions demain matin exciter une troisiéme
(1) C'est le Chef d'un Corps de Milice par.
ticuliere.
séditioni
NOVEMBRE. 1731. 2649
sédition , Nous avons vingt Etendarts , qui fuivis
chacun d'une bonne Troupe , se seroient répandus
par tous les quartiers de la Ville , et en
auroient fait soulever le Peuple . Le G. V. leur
ayant demandé , par quel motif ils avoient formé
un si noir dessein : Notre but , répondirentils
, étoit de nous faire une réputation dans le
monde , de nous enrichir et d'obliger notre Empereur
àfaire la paix avec nos freres les Persans,
et à faire la guerre aux Chrétiens . Quels
sont vos Chefs ? reprit le G. V. Ils repliquerent
qu'ils n'en connoissoient que six , qu'ils lui désignerent,
et qui leur avoient dit de ne s'embarrasser
de rien et de suivre seulement leurs ordres .
On envoya aussi-tôt du monde pour se saisir de
ces six Chefs. Ils n'étoient point alors chez eux ,
mais on y trouva beaucoup d'armes et plusieurs
Drapeaux , dont on s'empara. Ils furent ensuite
prix eux- mêmes , ainsi qu'un grand nombre de
jeurs complices avant la fin de la nuit . On alla en
même- tems prendre tous ceux qui furent accusez
ou soupçonnez , lesquels furent étranglez ou eurent
la tête coupée. On jetta les cadavres à la
Mer , et il y en eût quelques- uns exposez dans
les endroits les plus frequentez de Constantinople.
On dit que de ces 1500 Révoltez
, tous gens de
la lie du peuple , sans une seule personne
de marque, il y en avoit soo du Corps des Dgebed- gis , que la plus grande partie des autres étoit des Albanois
, et d'autres Gens , connus icy sous le nom general d'Arnautes
, qui avoient été chas- sez de Constantinople
après la seconde sédition , et qui y étoient rentrez successivement
, dégui- sez sous differens habits , et avec de grandes barbes
qu'ils s'étoient laissé croître pour être moins
H faci2650
MERCURE DE FRANCE
facilement reconnus ; le reste étoient des Janissaires
du Caire , dont il en est arrivé environ
4000 depuis peu , pour aller en Perse par la
Mer noire , et dont quelques- uns s'étoient débarquez
malgré les ordres prècis qu'on avoit
donnez , d'empêcher qu'aucun d'eux ne mit pied à
terre.
Comme ces derniers sont la plupart des déterminez
qui ne reconnoissent point de subordination
, qu'il y en avoit d'ailleurs cinq ou six
cent d'embarquez sur trois Bâtimens François ,
frétez à Aléxandrie, pour les transporter jusqu'ici
seulement , et qu'il est arrivé d'ailleurs d'autres
incidens inutiles à rapporter ; il n'a pas été possible
d'éviter qu'il ne s'en échapât journellement
plusieurs. Il y en eut même dix , qui la veille du
jour que la sédition devoit éclater, vinrent s'enyvrer
à Bey-Oglou , à l'extrémité de Péra. La Garde
qui est établie dans ce quartier , étant accourue
pour les saisir , ils se deffendirent si bien ,
qu'ils ne furent pris qu'après avoir blessé 1s
hommes, de plus de 150 , dont cette Garde étoit
composée.
Bien des gens assurent que les deux Dgebedgis
qui furent trouvez la nuit du 1 de ce mois
par le Janissaire Aga , lui ayant dit qu'ils avoient
quelque chose de conséquence à communiquer au
G. S. on les conduisit sur le champ au Serail ,
où ils déclarerent à S H. que tant qu'elle laisseroit
en place le G. V. et le Janissaire Aga , elle ne
devoit pas se flater d'être jamais tranquille sur le
Trône; que quant à eux , ils sçavoient bien qu'ils
n'avoient point de grace à esperer et qu'ils
étoient tout résignez à la mort , mais que ce seroit
sans cesse recommencer et que pour deux
hommes que l'on feroit mourir , il en renaîtroit
cinquante.
à
QuoiNOVEMBRE.
1731. 265!
"
Quoiqu'il en soit de ces differens rapports , il
est toujours certain que cette derniere conjuration
été découverte assez à temps pour la ayant
faire avorter il est à présumer que le G. V. l'a
entierement dissipée, par les promptes exécutions
qu'il a fait faire de tous ceux qu'on a pû surprendre,
qui y ont eu quelque part. Cela ne l'empûche
pas pourtant de prendre toutes les précautions
imaginables , pour prévenir de pareils complots
, et il a entr'autres donné de nouveaux ordres
d'arrêter généralement tous ceux qu'on trouveroit
la nuit dans les rues , en conséquence de
quoi le Topgi-Bachi , ou Chef des Canoniers ,
envoya lea de ce mois prier les Ministres qui
demeurent à Pera , d'ordonner aux Gens de leurs
Palais , à leurs Nationaux et à leurs Protegez
de se retirer de bonne - heure , et de ne sortir la
nuit , en cas de nécessité , qu'avec de la lumiere
et en compagnie d'un Janissaire.
Les Lettres de Constantinople , du ; et du 18
Septembre , portent qu'on continue toujours la
recherche et les exécutions des derniers Rebelles.
On avoit cru d'abord , comme il a été dit cidessus
, qu'il n'y avoit que de la Canaille parmi
cux ; mais on a découvert par les dépositions de
ceux qu'on a pris depuis , que cette conspiration
étoit d'une bien plus grande conséquence,puisque
beaucoup de gens de Loy en étoient les véritables
Chefs ; qu'ils s'étoient même distribuez dans
les différens quartiers de la Ville d'où devoient
partir les Etendarts , et qu'ils avoient si fort compté
sur le succès de leur entreprise , qu'ils étoient
déja convenu du partage, qu'ils se proposoient de
faire entr'eux , des principales Charges de l'Empire
Hij EX
2652 MERCURE DE FRANCE
EXTRAIT d'une Lettre de Constantinople
, écrite le 15 Septembre 1731 .
L s'est formé depuis pen un nouveau com-
Iplot de soulevement , dont les Chefs étoient
un Vizir , un Aga Albanois et quelques gens
de Loy ; ils avoient projetté de commencer la révolte
par le massacre du premier Vizir , universellement
abhorré à cause de sa cruauté et de
son avarice, Mais ce Ministre ayant pénétré leur
secret , donna des ordres avec tant de promptitude
que les Conjurez avant que d'avoir pu s'assembler
, furent partie taillez en pieces , et partie
traînez dans les Prisons ; tout le reste est en
fuite et entierement dissipé,
Le G. V. voyant cependant que cette tempête
menaçoit principalement sa tête , et voulant prévenir
ses ennemis cachez , presenta d'abord au
Sultan une liste d'environ 30 personnes , qui ,
comme créatures du gouvernement précédent
étoient censées être les Auteurs de la Rebellion
, prètendant de les faire transporter sur deux
Caleres , dans un exil éloigné , et d'en obtenir
Pordre du G. S.
Dans cette Liste il y avoit entr'autres noms
celui du Kislar-Agassi , lequel voyant le danger
qui le menaçoit , songea à le prévenir en perdant
son ennemi. Pour cet effet il gagna d'abord l'esprit
du G. S. par le moyen de la Sultane Validéş
il gagna aussi les Janissaires ; et par le conseil du
grand Trésorier et du Mufti , on demanda le rétablissement
de l'ancienne Coûtume , de tenir
deux Divans par semaine enfin à force d'intrigues
, la nuit du 10 du courant , le G. V. fut luimeme
embarqué sur la Galere qu'il avoit desti
néc
NOVEMBRE
1731. 2653-
1
Lee pour le transport de ses principaux ennemis ,
pour être conduit à Négrépont , en qualité de
Pacha de cette Province . Grace particuliere qu'il
doit à quelque reste de faveur auprès de la Reine
Mere , et du Sultan.
1 Le grand Sceau de l'Empire ôté au G. V. fut
donné le même temps à l'Aga des Janissaires, dé
claré par provision Caïmaran , jusqu'à l'arrivée
1 du sujet destiné à remplacer le Vizir déposé. On
parle fort de Issouf , Pacha de Silistrie , homme
septuagenaire , qui a été fort cher à Mustapha ,
Père du Sultan regnant.
Les Lettres d'Achmet , Pacha de Babilone, portent
qu'on s'est rendu maître de Chirmansach.
Cette nouvelle a été célébrée icy pendant trois
jours , au bruit du Canon ; mais on sçait que ce
poste avoit été abandonné par les Persans ; er on
est informé d'ailleurs que du côté d'Erivan , où
estle fort de la guerre , l'Armée d'Ali Pacha est
fort délabrée , tant par la désertion , que par les
maladies ; pendant que celle de Schach Thamas
est , dit- on , forte de 150000 combattans, qui se
trouvent campez sous le Canon de Tauris , dans
une situation avantageuse , et fortifiée d'une nom❤❤
breuse Artillerie.
D'autres Lettres marquent que deux Pachas
Turcs se sont jettez du côté des Persans , avec un
Corps de plus de 20000 hommes.La Porte ayant
été informée qu'ils entretenoient une secrete correspondance
avec les Ennemis , dépêcha des Capigis
pour apporter leurs têtes ; de quoi ayant
été avertis , ils ont pris le parti de se retirer tout
à-fait chez les Persans.
RELATION de la conspiration découverte
à Constantinople , le 1 Septembre 1731.
Epuis l'incendie du 21 Juillet dernier, où les
Janissaires donnerent encore des marques
de leur disposition à la révolte , on n'avoit eu aucun
indice qu'il se tramât rien contre le Gouvernement
cependant le 1 Septembre le ( 1 )
Dgebedgi Bachi vint avertir le G. V. qu'il s'étoit
formé une nouvelle conspiration à Constantinople,
et qu'elle devoit éclater le lendemain à la
pointe du jour.
·
1
Sur cet avis ce Ministre , qui ne put être informé
alors du nombre ni de la qualité des Rebelles
, se contenta de renforcer les Patrouilles pour
la nuit suivante , et d'augmenter considerablement
la garde , tant au Sérail , que chez lui , et
chez le Janissaice Aga. Celui- ci étant allé faire
sa ronde à l'ordinaire , rencontra à deux heures
de nuit, deux Dgebedgis bien armez , il les fit arrêter
, et sur leur air embarrassé et les réponses
qu'ils lui firent , îl les envoya chez le G. V.
Ce premier Ministre les ayant interrogez à son
tour , ils furent encore plus déconcertez , et jugeant
bien eux-mêmes , qu'après les défenses séveres
qui avoient été faites de marcher la nuit
avec des armes , il ne leur restoit aucun espoir
de se sauver , ils lui dirent franchement : Nous
sçavons bien , Seigneur , que c'est fait de notre
vie , mais avant que de mourir , nous voulons
vous déclarer tour. Nous sommes 1500 hommes
qui devions demain matin exciter une troisiéme
(1) C'est le Chef d'un Corps de Milice par.
ticuliere.
séditioni
NOVEMBRE. 1731. 2649
sédition , Nous avons vingt Etendarts , qui fuivis
chacun d'une bonne Troupe , se seroient répandus
par tous les quartiers de la Ville , et en
auroient fait soulever le Peuple . Le G. V. leur
ayant demandé , par quel motif ils avoient formé
un si noir dessein : Notre but , répondirentils
, étoit de nous faire une réputation dans le
monde , de nous enrichir et d'obliger notre Empereur
àfaire la paix avec nos freres les Persans,
et à faire la guerre aux Chrétiens . Quels
sont vos Chefs ? reprit le G. V. Ils repliquerent
qu'ils n'en connoissoient que six , qu'ils lui désignerent,
et qui leur avoient dit de ne s'embarrasser
de rien et de suivre seulement leurs ordres .
On envoya aussi-tôt du monde pour se saisir de
ces six Chefs. Ils n'étoient point alors chez eux ,
mais on y trouva beaucoup d'armes et plusieurs
Drapeaux , dont on s'empara. Ils furent ensuite
prix eux- mêmes , ainsi qu'un grand nombre de
jeurs complices avant la fin de la nuit . On alla en
même- tems prendre tous ceux qui furent accusez
ou soupçonnez , lesquels furent étranglez ou eurent
la tête coupée. On jetta les cadavres à la
Mer , et il y en eût quelques- uns exposez dans
les endroits les plus frequentez de Constantinople.
On dit que de ces 1500 Révoltez
, tous gens de
la lie du peuple , sans une seule personne
de marque, il y en avoit soo du Corps des Dgebed- gis , que la plus grande partie des autres étoit des Albanois
, et d'autres Gens , connus icy sous le nom general d'Arnautes
, qui avoient été chas- sez de Constantinople
après la seconde sédition , et qui y étoient rentrez successivement
, dégui- sez sous differens habits , et avec de grandes barbes
qu'ils s'étoient laissé croître pour être moins
H faci2650
MERCURE DE FRANCE
facilement reconnus ; le reste étoient des Janissaires
du Caire , dont il en est arrivé environ
4000 depuis peu , pour aller en Perse par la
Mer noire , et dont quelques- uns s'étoient débarquez
malgré les ordres prècis qu'on avoit
donnez , d'empêcher qu'aucun d'eux ne mit pied à
terre.
Comme ces derniers sont la plupart des déterminez
qui ne reconnoissent point de subordination
, qu'il y en avoit d'ailleurs cinq ou six
cent d'embarquez sur trois Bâtimens François ,
frétez à Aléxandrie, pour les transporter jusqu'ici
seulement , et qu'il est arrivé d'ailleurs d'autres
incidens inutiles à rapporter ; il n'a pas été possible
d'éviter qu'il ne s'en échapât journellement
plusieurs. Il y en eut même dix , qui la veille du
jour que la sédition devoit éclater, vinrent s'enyvrer
à Bey-Oglou , à l'extrémité de Péra. La Garde
qui est établie dans ce quartier , étant accourue
pour les saisir , ils se deffendirent si bien ,
qu'ils ne furent pris qu'après avoir blessé 1s
hommes, de plus de 150 , dont cette Garde étoit
composée.
Bien des gens assurent que les deux Dgebedgis
qui furent trouvez la nuit du 1 de ce mois
par le Janissaire Aga , lui ayant dit qu'ils avoient
quelque chose de conséquence à communiquer au
G. S. on les conduisit sur le champ au Serail ,
où ils déclarerent à S H. que tant qu'elle laisseroit
en place le G. V. et le Janissaire Aga , elle ne
devoit pas se flater d'être jamais tranquille sur le
Trône; que quant à eux , ils sçavoient bien qu'ils
n'avoient point de grace à esperer et qu'ils
étoient tout résignez à la mort , mais que ce seroit
sans cesse recommencer et que pour deux
hommes que l'on feroit mourir , il en renaîtroit
cinquante.
à
QuoiNOVEMBRE.
1731. 265!
"
Quoiqu'il en soit de ces differens rapports , il
est toujours certain que cette derniere conjuration
été découverte assez à temps pour la ayant
faire avorter il est à présumer que le G. V. l'a
entierement dissipée, par les promptes exécutions
qu'il a fait faire de tous ceux qu'on a pû surprendre,
qui y ont eu quelque part. Cela ne l'empûche
pas pourtant de prendre toutes les précautions
imaginables , pour prévenir de pareils complots
, et il a entr'autres donné de nouveaux ordres
d'arrêter généralement tous ceux qu'on trouveroit
la nuit dans les rues , en conséquence de
quoi le Topgi-Bachi , ou Chef des Canoniers ,
envoya lea de ce mois prier les Ministres qui
demeurent à Pera , d'ordonner aux Gens de leurs
Palais , à leurs Nationaux et à leurs Protegez
de se retirer de bonne - heure , et de ne sortir la
nuit , en cas de nécessité , qu'avec de la lumiere
et en compagnie d'un Janissaire.
Les Lettres de Constantinople , du ; et du 18
Septembre , portent qu'on continue toujours la
recherche et les exécutions des derniers Rebelles.
On avoit cru d'abord , comme il a été dit cidessus
, qu'il n'y avoit que de la Canaille parmi
cux ; mais on a découvert par les dépositions de
ceux qu'on a pris depuis , que cette conspiration
étoit d'une bien plus grande conséquence,puisque
beaucoup de gens de Loy en étoient les véritables
Chefs ; qu'ils s'étoient même distribuez dans
les différens quartiers de la Ville d'où devoient
partir les Etendarts , et qu'ils avoient si fort compté
sur le succès de leur entreprise , qu'ils étoient
déja convenu du partage, qu'ils se proposoient de
faire entr'eux , des principales Charges de l'Empire
Hij EX
2652 MERCURE DE FRANCE
EXTRAIT d'une Lettre de Constantinople
, écrite le 15 Septembre 1731 .
L s'est formé depuis pen un nouveau com-
Iplot de soulevement , dont les Chefs étoient
un Vizir , un Aga Albanois et quelques gens
de Loy ; ils avoient projetté de commencer la révolte
par le massacre du premier Vizir , universellement
abhorré à cause de sa cruauté et de
son avarice, Mais ce Ministre ayant pénétré leur
secret , donna des ordres avec tant de promptitude
que les Conjurez avant que d'avoir pu s'assembler
, furent partie taillez en pieces , et partie
traînez dans les Prisons ; tout le reste est en
fuite et entierement dissipé,
Le G. V. voyant cependant que cette tempête
menaçoit principalement sa tête , et voulant prévenir
ses ennemis cachez , presenta d'abord au
Sultan une liste d'environ 30 personnes , qui ,
comme créatures du gouvernement précédent
étoient censées être les Auteurs de la Rebellion
, prètendant de les faire transporter sur deux
Caleres , dans un exil éloigné , et d'en obtenir
Pordre du G. S.
Dans cette Liste il y avoit entr'autres noms
celui du Kislar-Agassi , lequel voyant le danger
qui le menaçoit , songea à le prévenir en perdant
son ennemi. Pour cet effet il gagna d'abord l'esprit
du G. S. par le moyen de la Sultane Validéş
il gagna aussi les Janissaires ; et par le conseil du
grand Trésorier et du Mufti , on demanda le rétablissement
de l'ancienne Coûtume , de tenir
deux Divans par semaine enfin à force d'intrigues
, la nuit du 10 du courant , le G. V. fut luimeme
embarqué sur la Galere qu'il avoit desti
néc
NOVEMBRE
1731. 2653-
1
Lee pour le transport de ses principaux ennemis ,
pour être conduit à Négrépont , en qualité de
Pacha de cette Province . Grace particuliere qu'il
doit à quelque reste de faveur auprès de la Reine
Mere , et du Sultan.
1 Le grand Sceau de l'Empire ôté au G. V. fut
donné le même temps à l'Aga des Janissaires, dé
claré par provision Caïmaran , jusqu'à l'arrivée
1 du sujet destiné à remplacer le Vizir déposé. On
parle fort de Issouf , Pacha de Silistrie , homme
septuagenaire , qui a été fort cher à Mustapha ,
Père du Sultan regnant.
Les Lettres d'Achmet , Pacha de Babilone, portent
qu'on s'est rendu maître de Chirmansach.
Cette nouvelle a été célébrée icy pendant trois
jours , au bruit du Canon ; mais on sçait que ce
poste avoit été abandonné par les Persans ; er on
est informé d'ailleurs que du côté d'Erivan , où
estle fort de la guerre , l'Armée d'Ali Pacha est
fort délabrée , tant par la désertion , que par les
maladies ; pendant que celle de Schach Thamas
est , dit- on , forte de 150000 combattans, qui se
trouvent campez sous le Canon de Tauris , dans
une situation avantageuse , et fortifiée d'une nom❤❤
breuse Artillerie.
D'autres Lettres marquent que deux Pachas
Turcs se sont jettez du côté des Persans , avec un
Corps de plus de 20000 hommes.La Porte ayant
été informée qu'ils entretenoient une secrete correspondance
avec les Ennemis , dépêcha des Capigis
pour apporter leurs têtes ; de quoi ayant
été avertis , ils ont pris le parti de se retirer tout
à-fait chez les Persans.
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Résumé : RELATION de la conspiration découverte à Constantinople, le 1 Septembre 1731.
En juillet 1731, un incendie à Constantinople révéla la disposition des Janissaires à la révolte. Le 1er septembre, le Dgebedgi Bachi informa le Grand Vizir d'une nouvelle conspiration prévue pour le lendemain. Le Grand Vizir, ignorant le nombre et la qualité des rebelles, renforça les patrouilles et la garde. Deux Dgebedgis armés furent arrêtés et avouèrent faire partie d'une conspiration impliquant 1500 hommes, 20 étendards, et un plan pour soulever le peuple. Leur objectif était de se faire une réputation, s'enrichir, et forcer l'Empereur à faire la paix avec les Persans et la guerre aux Chrétiens. Six chefs et de nombreux complices furent identifiés et arrêtés. Les rebelles étaient principalement des Janissaires du Caire et des Albanais récemment revenus à Constantinople. Des exécutions massives suivirent, et les cadavres furent jetés à la mer ou exposés. Malgré ces mesures, des incidents continuèrent, et le Grand Vizir prit des précautions supplémentaires pour prévenir de futurs complots. Une nouvelle conspiration impliquant un Vizir et des gens de loi fut également découverte et réprimée. Le Grand Vizir fut finalement exilé, et le Grand Sceau de l'Empire fut donné à l'Aga des Janissaires. Parallèlement, des nouvelles de la guerre contre les Persans mentionnaient des désertions et des maladies dans l'armée turque, ainsi que des défections de deux Pachas turcs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 2878-2880
ADDITION.
Début :
On a eû avis par la voye de Russie, que le grand secours attendu par les Tures, croit [...]
Mots clefs :
Lettres, Vienne, Persans, Constantinople, Armée ottomane
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ADDITION.
ADDITION.
Na cu avis par la voye de Russie , que fè
grand secours attendu par les Tures , croit
arrivé à 30 lieuës de Bagdad , et que le Roy de
Perse ayant rassemblé toutes ses Troupes qui
étoient dispersées en differens endroits , étoit
allé au-devant de ce secours pour le combattre
Les dernieres Lettres de Vienne portent , que
le bruit y étoit répandu que les Turcs ont rem²
porté une Victoire complette sur les Persans ;
que le Roi de Perse a perdu près de 40000 hommes
dans le combat ; que les Tures lui ont pris
cent pieces de canon , et tour son bagage , et
& Volo
qu'on
DECEMBRE. 1731. 2879
qu'on ne croyoit pas que ce Prince fût en état -
de continuer la guerre.
وت
Des Lettres de Constantinople portent , que
le 22 Septembre dernier , Topal Osman Pacha ,
nouveau Grand Vizir fie en cetre qualité son
Entrée publique dans cette Capitale. Elle fut des
plus superbes et des plus nombreuses : non- seulement
tous les Grands de l'Empire y assisterent
, mais aussi PAga des Janissaires , quoique
ce dernier ne paroisse ordinairement dans ces
sortes de cérémonies qu'à la suite du Grand Seigneur.
On a observé que lorsque ce premier
Ministre fut arrivé à PHôtel ordinaire des
Grands Vizirs , il en monta l'Escalier , appuyé.
sur l'Aga des Janissaires, et sur le Cafmacan , ou
Gouverneur de Constantinople , ce qu'on remarque
comme une distinction particuliere done
on n'a gueres vû d'exemples , et qui prouve l'estime
qu'on fait de ce premier Ministre , lequel ,
par sa douceur et par son affabilité , a sçu se
faire aimer de toute la Nation.
>
lui
Après que le G. V. se fut reposé quelque tems
dans son appartement › il se rendit au Serrail
où le G. S. le réçut fort gracieusement
remit les Sceaux de l'Empire , lui déclara en
même temps , à ce qu'on assure » qu'il le laissoit
le maître d'agir comme il le jugeroit à pro
pos dans la conjoncture presente. Il alla ensuite
au Divan , où il fur revêtu du Caftan d'hon
en presence des principaux Officiers de
l'Empire , qui le complimenterent sur sa nou
velle dignité , en lui baisant le bas de sa Robe.
neur ›
Le lendemain le G. V. alla à l'Audience du
G. S , avec lequel il fut long-temps en conféfence.
A son retour dans son Hôtel , il donna
I. Vol. Audience
2880 MERCURE DE FRANCE
Audience aux Interpretes des Ambassadeurs et
Ministres Etrangers , qui s'y étoient rendus pours
le complimenter au nom de leurs Maîtres : il
les reçut tous fort gracieusement.
Ces Lettres ajoûtent qu'on avoit reçu avis de
Perse , qu'il s'étoit donné deux sanglantes Batailles
près d'Erivan , Ville assiegée par les Persans
; que dans la premiere , ceux - cy avoient été
les Vainqueurs , mais que dans la seconde ils
avoient éré battus par les Turcs. Cette Victoire,
a causé à Constantinople une joye generale , et ,
on a fait à ce sujet de grandes réjouissances
cependant on assure que le Divan a pris la ré◄
solution de faire de nouvelles offres fort avantageuses
au Roi de Perse pour l'engager à faire,
la Paix avec la Porte ; ce qui fait craindre que
cette Victoire , ne soit pas si complette qu'on le
publi . Quoiqu'il en soit cette nouvelle , jointe
au doux Gouvernement du nouveau G. V , et a
l'Amnistie generale accordée par S. H. à tous
ceux qui ont eû part aux dernieres révoltes , a
beaucoup contribué à rétablir la tranquillité dans
Constantinople.
,
ة ي ر
Ces Lettres ajoûtent encore que la derniere,
Bataille qui s'étoit donnée en Perse avoit été
très-sanglante , ayant duré plus de sept heures
que les Turcs commandez par le Pacha de Babilone
, avoient perdu plus de 12000 hommes
de leurs meilleures Troupes , et quantité d'Offi
ciers de distinction ; mais qu'enfin l'Armée Ot
tomane avoit remporté la Victoire après avoir
entierement défait l'Infanterie Persane ; que les
Turcs avoient fait un butin considerable , tout
le précieux: Bagage du Roi de Perse étant resté :
aux Vainqueurs , &C..
Na cu avis par la voye de Russie , que fè
grand secours attendu par les Tures , croit
arrivé à 30 lieuës de Bagdad , et que le Roy de
Perse ayant rassemblé toutes ses Troupes qui
étoient dispersées en differens endroits , étoit
allé au-devant de ce secours pour le combattre
Les dernieres Lettres de Vienne portent , que
le bruit y étoit répandu que les Turcs ont rem²
porté une Victoire complette sur les Persans ;
que le Roi de Perse a perdu près de 40000 hommes
dans le combat ; que les Tures lui ont pris
cent pieces de canon , et tour son bagage , et
& Volo
qu'on
DECEMBRE. 1731. 2879
qu'on ne croyoit pas que ce Prince fût en état -
de continuer la guerre.
وت
Des Lettres de Constantinople portent , que
le 22 Septembre dernier , Topal Osman Pacha ,
nouveau Grand Vizir fie en cetre qualité son
Entrée publique dans cette Capitale. Elle fut des
plus superbes et des plus nombreuses : non- seulement
tous les Grands de l'Empire y assisterent
, mais aussi PAga des Janissaires , quoique
ce dernier ne paroisse ordinairement dans ces
sortes de cérémonies qu'à la suite du Grand Seigneur.
On a observé que lorsque ce premier
Ministre fut arrivé à PHôtel ordinaire des
Grands Vizirs , il en monta l'Escalier , appuyé.
sur l'Aga des Janissaires, et sur le Cafmacan , ou
Gouverneur de Constantinople , ce qu'on remarque
comme une distinction particuliere done
on n'a gueres vû d'exemples , et qui prouve l'estime
qu'on fait de ce premier Ministre , lequel ,
par sa douceur et par son affabilité , a sçu se
faire aimer de toute la Nation.
>
lui
Après que le G. V. se fut reposé quelque tems
dans son appartement › il se rendit au Serrail
où le G. S. le réçut fort gracieusement
remit les Sceaux de l'Empire , lui déclara en
même temps , à ce qu'on assure » qu'il le laissoit
le maître d'agir comme il le jugeroit à pro
pos dans la conjoncture presente. Il alla ensuite
au Divan , où il fur revêtu du Caftan d'hon
en presence des principaux Officiers de
l'Empire , qui le complimenterent sur sa nou
velle dignité , en lui baisant le bas de sa Robe.
neur ›
Le lendemain le G. V. alla à l'Audience du
G. S , avec lequel il fut long-temps en conféfence.
A son retour dans son Hôtel , il donna
I. Vol. Audience
2880 MERCURE DE FRANCE
Audience aux Interpretes des Ambassadeurs et
Ministres Etrangers , qui s'y étoient rendus pours
le complimenter au nom de leurs Maîtres : il
les reçut tous fort gracieusement.
Ces Lettres ajoûtent qu'on avoit reçu avis de
Perse , qu'il s'étoit donné deux sanglantes Batailles
près d'Erivan , Ville assiegée par les Persans
; que dans la premiere , ceux - cy avoient été
les Vainqueurs , mais que dans la seconde ils
avoient éré battus par les Turcs. Cette Victoire,
a causé à Constantinople une joye generale , et ,
on a fait à ce sujet de grandes réjouissances
cependant on assure que le Divan a pris la ré◄
solution de faire de nouvelles offres fort avantageuses
au Roi de Perse pour l'engager à faire,
la Paix avec la Porte ; ce qui fait craindre que
cette Victoire , ne soit pas si complette qu'on le
publi . Quoiqu'il en soit cette nouvelle , jointe
au doux Gouvernement du nouveau G. V , et a
l'Amnistie generale accordée par S. H. à tous
ceux qui ont eû part aux dernieres révoltes , a
beaucoup contribué à rétablir la tranquillité dans
Constantinople.
,
ة ي ر
Ces Lettres ajoûtent encore que la derniere,
Bataille qui s'étoit donnée en Perse avoit été
très-sanglante , ayant duré plus de sept heures
que les Turcs commandez par le Pacha de Babilone
, avoient perdu plus de 12000 hommes
de leurs meilleures Troupes , et quantité d'Offi
ciers de distinction ; mais qu'enfin l'Armée Ot
tomane avoit remporté la Victoire après avoir
entierement défait l'Infanterie Persane ; que les
Turcs avoient fait un butin considerable , tout
le précieux: Bagage du Roi de Perse étant resté :
aux Vainqueurs , &C..
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Résumé : ADDITION.
En 1731, des événements militaires et politiques impliquent l'Empire ottoman et la Perse. Des nouvelles de Russie signalent l'arrivée de renforts turcs près de Bagdad et la mobilisation des troupes persanes. Des lettres de Vienne rapportent une victoire ottomane à Bagdad, avec des pertes lourdes pour les Persans, incluant 40 000 hommes et cent pièces de canon, remettant en question la capacité du roi de Perse à poursuivre la guerre. À Constantinople, Topal Osman Pacha est nommé Grand Vizir et reçoit les sceaux de l'Empire, marquant son entrée publique par une cérémonie grandiose. En Perse, deux batailles près d'Erivan voient d'abord une défaite turque, suivie d'une victoire. Cette victoire est célébrée à Constantinople, mais le Divan envisage des offres de paix au roi de Perse. La dernière bataille, très sanglante, dure plus de sept heures et se solde par une victoire ottomane. La tranquillité est rétablie à Constantinople grâce à cette victoire et à une amnistie générale accordée par le sultan.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 1736-1755
TRADUCTION d'une Relation Turque, sur ce qui s'est passé dans les Conferences teuuës pour la Paix entre les Turcs et les Persans, à l'Armée du Grand-Seigneur, près d'Hamadan, par les Plénipotentiaires de Sa Hautesse, et ceux de Chah Thamas, Roy de Perse.
Début :
Achmet-Pacha, Seraskier ou General de l'Armée Otomane, et [...]
Mots clefs :
Traduction, Achmet Pacha, Sérasker, Province de Babylone, Conférences, Paix, Turques, Persans, Plénipotentiaires, Empires, Royaume de Perse, Moscovites, Cours, Gratitude, Dieu
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : TRADUCTION d'une Relation Turque, sur ce qui s'est passé dans les Conferences teuuës pour la Paix entre les Turcs et les Persans, à l'Armée du Grand-Seigneur, près d'Hamadan, par les Plénipotentiaires de Sa Hautesse, et ceux de Chah Thamas, Roy de Perse.
TRADUCTION d'une Relation Turque,
sur ce qui s'est passé dans les Conferences tennës pour la Paix entre les Turcs et les
Persans , à l'Armée du Grand- Seigneur,
près d' Hamadan, par les Plénipotentiaires de Sa Hautesse , et ceux de ChabThamas , Roy de Perse.
Chmer- Pacha, Seraskier ou General
Adel'armée Otomane, et BeylerBey,
( c'est-à- dire Gouverneur ) de la Province de Babylone , en vertu des pleins
pouvoirs que le G. S. lui envoit envoyez pour faire la paix avec les Persans,
ayant nommé Achmet- Pacha , Beylerbey
de Rika, (1) Abdi- Pacha-Zadé- Ali- Bey,
Salahor ( 2 ) de S. H. Kassim- Effendi ,
Defterdar ( 3 ) de l'Armée , et Raghib
Effendi , Defterdar de Bagdat , pour PleB
( 1) Rika , est un des 17. Beylerbeys ou
Grand - Gouvernemens d'Asie , qu'on appelle
Hassilez. Voyez Ricaut , et le 3. du Diarbekir ,
consideré seulement comme l'ancienne Mesopotamie , renfermée entre le Tygre et l'Euphrate.
(2) Salahor, Ecuyer Cavalcadour , qui exerceet travaille les Chevaux du G. S. il y en a″12.
( 3 ) Defterdar , Intendant des Finances et Trésorier. 1
nipo
A O UST. 1732. 1737
nipotentiaires de la Poste > et ChahThamas , ayant choisi pour les siens ,
Mehemet-Riza-Khan , ( 1 ) _ Kouroudgi
Bachi, et Mustapha Khan. Tous ces Ministres se rendirent au quartier du Beylerbey de Rika , où ils s'assemblerent
sous sa Tente , le premier de Janvier de
la présente année 1732.
PREMIERE CONFERENCE.
Après que les Plenipotentiaires respectifs se furent fait les complimens et les
politesses d'usage en pareille occasion .
ceux de la Porte ouvrant la Conférence
dirent à ceux du Roy de Perse.
7
Le Seraskier Achmet-Pacha , nous. a
donné pouvoir d'entrer avec vos Excellences , dans une négociation dont le
succès ne peut être que très- avantageux
à la Perse. Nous sommes disposez de notre part à travailler si éfficacement a la
paix qu'il ne dependra certainement pas
de ncs foins que nous n'en voyions bientôt une heureuse conclusion. Ainsi c'est
à vos Excellences à nous faire connoître
jusqu'à quel point elles sont autorisées de
(1 ) Khan , est la même chose en Perse qu'un Pacha ou un Gouverneur de Province en Turquie, et Kouroudgi Bachi , y fait l'équivalent da
Janissaire Aga chez les Turcs.
leur
1738 MERCURE DE FRANCE
leur Maître , et quelles sont leurs pré- tentions.
Les Plenipotentiaires de Perse, prenant
alors la parole , répondirent que de tout
temps l'illustre Maison des Rois de Perse
avoit été liée d'amitié avec l'illustreMaison
Otomane , et que cette amitié n'avoit jamais été interrompuë que par la fatalité
du destin , qui avoit quelquefois produit
des évenemens surnaturels , suivis de la
discorde , et contre toute attente. Mais
ajoûterent- ils , nous desirons aujourd'hui
avec ardeur de faire revivre entre nous une
union si intime, qu'elle puisse rétablir
une tranquillité inalterable entre ces deux
Empires.
C'est aussi le même motif qui nous
anime, répliquerent les Ministres Turcs ;
mais pour parvenir au but que nous nous
proposons tous, il faut commencer par
convenir de certains points fondamentaux
qui puissent servir de base au Traité qui
nous assemble , et il est necessaire pour
cela que vous nous découvriez d'abord
sans détour, vos véritables intentions, afin
qu'après en avoir informé le très heureux
Seraskier , nous puissions , sur les ordres
que nous en recevrons , donner quelque
forme à la Négociation que nous enta
mons aujourd'hui.
Puisque
1
A O UST. 1732. 1739
Puisque vos Excellences souhaitent
que nous nous expliquions nettement ,
reprirent les Ministres de Perse , nous
demandons que generalement tous les
Pays que vous nous avez prís nous soient
restituez , et que la Paix et nos Frontieres avec l'EmpireOtoman soient reglées
sur le même pied qu'elles le furent sous
le Regne du Sultan Soliman , ( 1 ) de
glorieuse memoire.
Ce discours a de quoi nous surprendre,
répartirent les Turcs , et vous nous faiteslà une proposition des plus nouvelles. Il
a toûjours été d'usage , lorsque des Princes ennemis font la paix ensemble , que
non-seulement le vainqueur conserve les
conquêtes dont il est en possession , mais
que le vaincu lui fasse encore des avantages. C'est le cours ordinaire ; les Histoires , tant anciennes que modernes ,
en fournissent mille exemples , et nous
nedoutons pas que vous ne sçachiez tout
cela comme nous. D'ailleurs dans la Paix
que vous nous citez , qui fut concluë entre nos devanciers et les vôtres sous l'Emperéur Soliman , on y convint pour Préliminaires , que les Provinces de Tchildir , ( 2 ) de Cars , ( 3 ) de Van , ( 4 ) et
(1) Soliman II. prit et pilla Tauris en 1535
( 2 ) Tchildir est le ye Gouvernement d'Asie ,
plu-
1740 MERCURE DE FRANCE
plusieurs autres lieux resteroient à la Porte ; et vous , bien loin de nous offrir au
moins quelques Places au- delà des Pays
que le sort des armes a mis entre nos mains , vous demandez que nous vous
rendions ces mêmes Pays , qui subis
sent nos Loix depuis long - temps et
dont la conquête nous a coûté des trésors immenses et des torrens de notre
sang.
Vous avez raison , dirent les Persans ;
` nous convenons de la justesse de vos rai
sonnemens, mais un Empire aussi puissant et d'une aussi prodigieuse érenduë
que le vôtre , ne doit pas s'attacher , ni
même daigner faire attention à quelques
coins de terre si ruinez , qu'ils sont devenus plus propres à servir de retraite à
de tristes Hiboux , que de demeure à
de valeureux Soldats comme les- Otomans. Neanmoins quoique ces contrées
désolées ne puissent êtte considerées
1
que
de ceux qu'on appelle Hasilé. Il est sur les Frontieres de la Georgie.
(3) Cars , Ville de la grande Armenie , dans
cette partie qu'on appelle aujourd'hui Iran , ou
Carabag , entre l'Araxe et le Cyrus.
(4) Van , Ville de la même contrée que Cars,
et située sur un Lac du même nom , que l'on
appelle la Mer de Van ou d'Armenie , à cause
de son extréme grandeur... comme
A O UST. 1732. 1740
.
comme un rien pour votre Empire il est
pourtant vrai qu'elles sont un objet fort
considerable pour le nôtre , et que nous
en regarderons la restitution comme une
grace singuliere , purement émanée de
la clémence du G. S. que nous osons implorer aujourd'hui ; au surplus vous êtes
les Maîtres et nous nous en remettons
à vous avec une entiere confiance.
II. CONFERENCE, tenu le lendemais
entre les mêmes Ministres et au même
endroit.
Les Plénipotentiaires Turcs adressant
la parole à ceux de Perse , leur dirent :
si vous êtes effectivement dans le dessein
de finir la guerre , ( 1 ) ne vous amusez pas,
comme vous fites hier , à battre le fer
froid. Mais au lieu de vous entretenir
dans la vaine idée de la pouvoir terminer sur le même plan que nos Ancêtres
suivirent sous Soliman , songez plutôt à
joindre à nos conquêtes quelques Pro
vinces qui puissent nous convenir , ainsi
que les vaincus en ont toûjours agi envers leurs vainqueurs.
Et que nous reste-t'il , pour vous don
ner de nouvelles Provinces , se récrierent
(1 )Proverbe Arabe , qui revient au nôtre , il
faut battre le fer tandis qu'il est chaud,
les
1742 MERCURE DE FRANCE
les Persans ? Nous venons humblement
vous demander grace ; nous reclamons
la misericorde de la Porte ; notre intention n'est pas de marchander ni de chicaner avec vous ; nous connoissons.trop
l'état d'humiliation où l'enchainement de
nos malheurs nous a réduits , pour avoir
la présomption de vous rien contester
mais si la décadence de nos affaires , arrivée par le concours de mille fâcheux évenemens , a été cause que vous nous avez
traitez de la maniere la plus cruelle, pourriez vous laisser échapper la belle occasion que le Ciel vous offre aujourd'hui de
réparer nos maux , en faisant autant de
bien à notre Monarque , que vous lui
-avez porté de préjudice ? non , au lieu
de lui rien demander davantage , réta
blissez-le sur son Trône , avec autant de
puissance et de splendeur qu'y brillerent
autrefois ses illustres Ayeux , et persua
dez- vous que la gloire de votre Empire.
et de votre Empereur y est interessée. Du
reste, à notre égard, nous serons toujours
satisfaits de tout ce que feront vos Excellences.
Nous voulons bien le croire ainsi , répondirent les Plénipotentiaires de la
Porte , et votre modestie nous confirme
dans l'opinion que nous avions déja conçuë
A O UST. 1732. 1743
çue de votre prudence et ' de votre capacité. C'est pourquoi nous vous déclarons de la part de l'Empereur notre Maî
tre, que par un excès de bonté pour vous,
il veut bien , non- seulement vous accorder la Paix et se désister des justes prétentions qu'il auroit comme victorieux
d'exiger de nouveaux Païs qui seroient
à sa bienseance , outre ceux qu'il a conquis sur vous , il veut encore faire plus
en votre faveur , et pour vous marquer
jusqu'où va son extrême generosité , il
vous donne le choix entre les derniers
Pays que ses Armes lui ont acquis en
deçà de l'Araxe , et à l'exception de la
Province de Tauris , ( ) vous n'avez qu'à
demander , tout vous sera accordé.
Nous vous avons exposé ce que nous
desirions , répliquerent les Persans , et
sans varier dans l'unique point- de- vûë
qu'il nous est permis d'avoir , nous continuons à vous prier de rétablir notre Roy
dans tous ses Etats. Faites cependant ce
que vous jugerez de plus digne de vous
et de la gloire de votre Empire. Mais
comme nous nous app rcevons que nos
instances les plus vives ne produisent pas
(1) Tauris ou Tebris , grande Ville et Provin- ce enclavée dans l'Airbeitzan ou Edzerbaijan
qui fait partie de l'ancienne Médie,
sur
1744 MERCURE DE FRANCE
sur vos Excellences l'effet que nous avions
crû pouvoir nous en promettre , qu'elles
nous donnent , s'il leur plaît le reste du
jour pour consulter entre nous , et demain matin Mustapha Khan (. ) viendra
vous rendre compte de la résolution que
nous aurons prise.
III. CONFERENCE , où il n'y ent
que Mustapha - Khan , de la part de Chah-Thamas.
Le lendemain , ainsi que les Plénipotentiaires Persans l'avoient promis , Mustapha- Kan se rendit au lieu de l'Assemblée et dit aux Ministres Turcs qui l'y
attendoient. A la verité jusqu'à present
nous avions été obligez , Mehemet RizaKhan et moi , de nous en tenir , conformement à nos instructions , à vous
prier de restituer generalement à notre
Souverain tous les Pays que la Porte lui
a enlevez , mais ayant reconnu combien
vos Excellences étoient éloignées de remplir nos souhaits à cet égard , nous hous
sommes retranchez à les supplier d'agréer
une des deux propositions que je vais
avoir l'honneur de leur faire. La premie-
*
(1) N. B. c'étoir Mehemet Riza Khan , qui
tomme Premier Plénipotentiaire , portoit la parolc.
A O UST. 17327 1745
re, que la Perse payera annuellement à
la sublime Porte une certaine somme
dont on conviendra , moyennant quoi
les limites des deux Empires seront bor :
nées par les Rivieres d'Arpatchaï ( 1 ) et :
de Karct-Kalkan , et vous nous restituerez tous les Etats que vous avez conquis .
sur nous. La seconde , qui vous sera peutêtre plus agréable , que les Provinces de
Tiflis ( 2 ) d'Herdelan, resteront sous votre
domination , et que vous nous ferez la
grace de laisser rentrer le reste sous celle
de notre Roy.
Ni l'une ni l'autre de ces propositions
n'est acceptable , répondirent les Plenipotentiaires de Turquie , et il nous paroît si hors de propos , que vous fassiez
la moindre ouverture sur les Pays audelà del'Araxe qu'il ne nous convient ›
même pas d'ouvrir la bouche pour vous
répondre sur cet article. En verité , continua le Pacha de Rika , qui comme le
premier entre ses Collegues parloit pour
tous , il est bien étrange , que dans le
temps même qu'également touchez de
11) Ces deux Rivieres sont en Géorgie.
(2) Tiflis , ou Téffis , Capitaine du Gurgistan,
qui est la Géorgie , proprement dite. Elle est si- tuée sur le bord du Kur , anciennement le Cyrus.
Herdelan est dans le même Pays.
D YOS
1746 MERCURE DE FRANCE
vos malheurs et de vos prieres , nous
consentons , non- seulement à renoncer
en faveur de la Paix aux Provinces que
nous serions en droit d'exiger par- dessusnos conquêtes , mais que notre complaisance pour vous s'étend jusqu'à vous of→
frir de vous en rendre de celles que nous
venons d'acquerir ; il est bien étrange ,
dis-je , que vous nous fassiez sérieusement
des propositions si éloignées de toute raison. Vous voulez ceci , vous ne vou
lez pas cela , et vous prétendez disposer
des Pays qui sont entre nos mains, comme
si vous en étiez encore les paisibles possesseurs.N'avez vous donc pas de honte d'ê
tre si peu judicieux ? Le Pacha s'emporta
en proferant ces dernieres paroles , ou
du moins fit semblant de s'emporter ,
car il se radoucit bien- tôt , quand Mustapha l'interrompant d'un air humble et
flateur , s'exprima en ces termes : Nous
sommes venus implorer la générosité de
la sublime Porte , à laquelle nous nous
abandonnons sans réserve , et dont la
puissance s'étend d'un bout du Pole à l'au
tre; vous nous voyez accablez de revers,
sans appui , sans secours; nous ne possedons plus rien qui mérite de porter le
nom de Païs et de Provinces ; il n'est pas
étonnant que dans des circonstances si
affligeantes,
A O UST. 1732. 1747
affligeantes , nous vous fassions des demandes qui vous paroissent inconsiderées , mais vous ne devez pas nous en
sçavoir mauvais gré , et quelque extraordinaires que vous semblent nos prétentions , l'état violent où nous sommes,
doit les excuser auprès de vos Excellences.
Pourquoi , reprirent les Turcs , faites-vous tant les miserables ? Est- ce que
le Royaume de Perse est renfermé seulement dans les conquêtes que nous y
avons faites ? et peut-on appeller pauvre
un Souverain qui possede Ispaham , le
Guilhan , ( 1 ) Chiras , ( 2 ) le Korassan , (3)
et tant d'autres Contrées , qui forment
encore un vaste Empire ?
De tous les Etats , dont vous venez de
faire l'énumération , repartit Mustapha ,
en soupirant , une partie a passé sous les
Loix des Infideles Moscovites , et l'autre
est , pour ainsi dire , totalement boule-
(i) Le Guilhan ou Kilan , est le long de la
Mer Caspienne , et compose avec le Mazandran ,
l'ancienne Hyrcanie.
(2 ) Chiras ou Schiras , Ville sur le Kur, dans
le Farsistan ou la Perse proprement dite.
(3) Le Korassan , Corasan , ou Chorasan ,
comprend l'anciene Ariane , partie de la Bactriane , et du Païs des Parthes , c'est une des plus
Considerables Contrées de la Perse.
Dij versée
1748 MERCURE DE FRANCE
1
versée par les ravages et les désordres
qu'y ont faits , ou qu'y ont attirez les
cruels ( 1 ) Esghans. De sorte qu'à proprement parler , nous n'avons plus frien
de quelque conséquence que Coni ( 2 ) ,
Kiachan ( 3 ), et ( 4 ) Ispaham.
Mais si votre situation , repliquerent
les Turcs , est aussi déplorable que vous
nous la dépeignez ; si outre cela vous affectez dans toutes les occasions de vous
dire , nos Freres , de vous vanter d'être
avec nous dans la même unité de Religion, et si vous avez d'ailleurs tant d'embarras et d'ennemis sur les bras, d'où vient
ne vous pas appliquer à vous en délivrer?
Pourquoi vous acharner particulierement
contre nous , comme vous faites ? Car s'il
en faut juger par toutes vos démarches ,
il n'y a que nous seuls qui vous occu-
( 1 ) Esghans , Eughans , ou Aguans , Peuples
du Candahar , qui fait partie du Sablustan , autrefois le Paropamisus.
(2 ) Com , ou Kom , Ville dans l'Hierak ou
Yerak- Agemi , partie de l'ancien Royaume des
Parthes.
( 3 ) Kiachan ou Cachan, grande Ville du même Pais.
( 4 ) Ispaham , Spahan , ou Spahon , comme prononcent les Persans , est aussi dans le même
Païs. Les uns croient que cette Capitale de toute
la Perse , a été bârie sur les ruines d'HécatomPylos , et d'autres sur celles d'Aspa.
pions ;
AOUST. 1732. 1749
}
pions ; vos divisions , vos disputes , vos
guerres,votre empressement pour la Paix,
tout semble en vous n'avoir que Nous
pour unique objet.
C'est aussi , dit Mustapha , l'affaire qui
nous interesse le plus , et que nous prenons le plus à cœur. Vous êtes l'ennemi
le plus redoutable que nous ayions en tête;
si nous pouvons parvenir à cimenter avec
vous une Paix solide , nous nous démêlerons facilement de nos autres ennemis ;
et s'il plaît à Dieu, nous vérifierons bientôt le Proverbe Arabe, qui dit que l'hommese releve où il est tombé.
Mais enfin , continua- t-il , si les Otomans nous ont fait éprouver la fureur de
leurs armes , et s'ils nous ont maltraitez
au delà de ce que nous pouvions jamais
prévoir , nous esperons qu'à tant de calamitez qu'ils nous ont fait souffrir , ils feront succeder des dédommagemens qui
Ies égaleront. C'est uniquement dans cet
esprit, que nous venons négocier avec
vous, et non pour disputer sur le plus ou
le moins de Pais à prétendre et à ceder.
Nous vous retraçons au naturel l'image
de nos infortunes ; nos prieres y sont relatives ; c'est à vos Excellences , comme
nous leur avons déja dit, de prendre une
détermination à notre égard , qui distinDiij gue
1750 MERCURE DE FRANCE
gue d'une façon glorieuse , la grandeur et
la dignité de votre Empire.
Tout cela est excellent , répondirent les
Ministres Turcs , et vous avez raison de
vous attendre à recevoir des faveurs de la
Porte ; mais votre attente, pour être bien
fondée , ne doit pas être sans mesure , et
nous voyons avec peine , qu'au lieu de
resserrer vos désirs dans de justes bornes,
vous n'avez fait , jusqu'icy , que vous répandre en demandes indiscretes , qui
loin de nous approcher du but , nous en
écartent. Ainsi comme vous n'avancerez
jamais rien avec nous , si vous ne prenez
une autre route , nous voulons bien encore vous donner le loisir de réfléchir de
nouveau plus murement , sur vos véri
tables intérêts, et nous les discuterons vo
lontiers plus en détail dans la Conféren
ce que nous tiendrons demain.
IV. CONFERENCE , où tous les Ple
nipotentiaires des deux Cours assisterent.
Le 4 dudit mois de Janvier , les Ministres de la Porte , parlant toujours les
premiers , dirent à ceux de Perse : Nous
nous étions persuadez , qu'en agitant une
affaire d'aussi grande importance que celle.
de la Paix , nous ne devions rien négliger
pour la porter à son point de perfectionle
AOUST. 1732. 1791 8
le plutôt qu'il se pourroit ; et nous nous
étions flatez de trouver dans vos Excellences , des dispositions conformes aux
nôtres en cela. Mais nous reconnoissons ,
à regret , que nous avions mal pénétré
leurs intentions , puisqu'il paroît clairement , qu'elles ne cherchent qu'à éluder
les nôtres, et qu'à gagner du temps, pour
faire échouer la négociation à force de la
tirer en longueur. En effet , si ce n'étoit
pas là votre vûë, pourriez- vous vous opiniatrer , comme vous faites , à former des
prétentions , ausqu'elles vous sçavez bien
vous-même qu'il ne nous est pas possible
de souscrire ?
Nous sommes pleinement convaincus
de notre impuissance, répondirent les Persans, et que nous ne pourrons secoüer le
joug qu'il vous plaira de nous imposer.
Vous possedez tout, nous sommes privez
de tout ; c'est à vous d'ordonner,èt à nous
d'obéïr.
S'il étoit vrai , comme vous le dites, reprirent les Turcs , qu'il ne dépendit que
de nous d'achever heureusement cette
négociation , vous ne nous feriez pas des
demandes si peu mesurées , et toutes nos
prétentions réciproques seroient reglées
dans un moment. Il faut être équitable,
et que vos Excellences se restraignent à ce
Diiij qu'on
1752 MERCURE DE FRANCE
qu'on peut raisonnablement leur accorder. Ainsi, sans perdre davantage le temps
en discours specieux , qui ne conduisent
à rien de décisif, parlez- nous une bonne
fois positivement ; nous vous réïterons ,
que vous nous trouverez toujours disposez à nous prêter à tout ce que vous nous
proposerez de faisable. Mais nous devons
vous prévenir auparavant , qu'il ne faut
plus nous contester la possession des Païs
au-delà de l'Araxe , ni que vous insistiez
de nouveau sur la restitution de Tauris ,
qui est en deçà de ce Fleuve. Hors ces
deux articles , vous pouvez tout esperer
du désir sincere que nous avons de faire
tenaître entre les deux Empires une harmonie inalterable.
qui
Vous êtes les maîtres , encore un coup,
repliquerent les Persans ; nous continuons d'avouer que tout vous appartient chez nous ; mais dès que vous rejetteż la priere que nous vous faisons , de
-nous rendre nos Etats au delà de l'Araxe,
set la Province de Tauris en deçà ; surquoi
voulez-vous que roulent nos Conféren-
´ces, puisque tout ce qui nous reste de notre Monarchie , ne vaut pas seulement la
peine qu'on en fasse mention ?
Comment , s'écrierent les Plénipotentiaires de la Porte; n'y at- il pas encore
( 1)
A OUST. 1732. 1753
(1 ) Amadan , avec son vaste territoire ?
et si nous vous le rendons , ne devez- vous
pas être satisfaits ?
-
Nous avions toujours esperé , repartirent ceux de Perse , que vous fériez rentrer Chah Tahmas dans les Païs d'audelà de l'Araxe , et toute la faveur que
vous voulez lui faire , consiste à lui rendre Amadan , qui est en deçà. Dès que
vous montrez si peu d'égard à nos humbles et constantes supplications , nous ne
sçavons plus que vous proposer , et votre infléxibilité nous rend muets.
Que nous dites- vous-là , reprirent les
Turcs; avez- vous oublié , que lors même
que votre Maître se vantoit de nous avoir
battus , il envoïa à la Porte (2) Riza Kouli Khan et Méhémet-Veli - Khan, qui dans
leurs conférences, avec nos Ministres , cederent tous ces Païs Surquoi , s'il vous
plaît , aujourd'hui que vous vous confessez vaincus, pouvez appuïer votre obs
tination à les répéter ?
>
Nous convenons de ce fait , replique-
( 1 ) Hamadan , Ville des plus considérables de
Perse. Elle est dans l'Yerax - Agemi , qui est l'ancienne region des Parthes.
( 2 )Ils firent leur entrée à Constantinople le
18 Juin 1730. Riza- Kouli-Khan , qui étoit le
chef de l'ambassade , eut la tête tranchée peu
après son retour en Perse.
D v rent
1754 MERCURE DE FRANCE
rent les Persans ; mais peut-être feignezvous d'ignorer , que ce fut par l'habileté
et les adroites insinuations de vos négociateurs , que les nôtres consentirent im
prudemmentàce que ces Païs vous restassent ,en quoi ayant excedé leur pouvoir,
ils furent fort désaprouvez de notre Souverain. Aussi pouvons- nous dire , que ce
fut la source de tous les malheurs qui nous
ont accablez depuis ! Mais ne nous rapellez plus des temps funestes , que nous
voudrions pouvoir ensevelir dans un éternel oubli ; rappellez vous seulement que
l'infortuné Chah Tahmas a recours à la
clémence de la sublime Porte , et qu'il remet entierementson sort entre vos mains.
C'est sur ce principe que vous devez raisonner , et vous résoudre ensuite au parti
qui vous paroîtra le plus glorieux à votre
Empire.
>
N'est ce donc pas une grande grace de
notre part , dirent les Ministres Turcs
que tout ce que nous vous offrons ? Il est
vtai , répondirent ceux de Perse , qu'à ne
considerer , que la ruine presqu'universelle où notre Royaume est tombé , ce qué
vous voulez bien nous rendre , peut passer pour une faveur signalée , mais cette
faveur,toute rare qu'elle est , ne répond
pas encore ni à notre état , ni à nos prieres
AOUST. 17320 1755
res ; daignez - y faire plus d'attention , et
vous conviendrez que la Porte qui nous a
tant fait de maux , depuis l'inondation
des Esghans sur nos terres , est en quelque façon obligée pour son honneur de
réparer, autant qu'il est en elle, les dommages infinis qu'elle nous a causez , et que
la compassion qu'elle aura pour nous,doit
être au moins proportionnée à la reconnoissance que nous en conserverons éternellement. Nous osons même ajouter ,
que si votre tres-magnifique Empereur
reconnoit ,comme il le doit , que ses Vic.
toires et le bonheur de ses armes,sont des
bien faits qu'il a reçus de la Providence s
il est de sa piété d'en témoigner à Dieu
sa gratitude d'une maniere extraordinaire. Hé! comment peut-il mieux s'en acquitter , qu'en nous faisant ressentir de si
grands effets de sa magnanimité, que tous
les Monarques de la terre, surpris, soient
forcez deconvenir qu'ils n'ont jamais rien
vû , ni entendu parler de semblable ?
On donnera la suite dans le prochain
Mercure.
sur ce qui s'est passé dans les Conferences tennës pour la Paix entre les Turcs et les
Persans , à l'Armée du Grand- Seigneur,
près d' Hamadan, par les Plénipotentiaires de Sa Hautesse , et ceux de ChabThamas , Roy de Perse.
Chmer- Pacha, Seraskier ou General
Adel'armée Otomane, et BeylerBey,
( c'est-à- dire Gouverneur ) de la Province de Babylone , en vertu des pleins
pouvoirs que le G. S. lui envoit envoyez pour faire la paix avec les Persans,
ayant nommé Achmet- Pacha , Beylerbey
de Rika, (1) Abdi- Pacha-Zadé- Ali- Bey,
Salahor ( 2 ) de S. H. Kassim- Effendi ,
Defterdar ( 3 ) de l'Armée , et Raghib
Effendi , Defterdar de Bagdat , pour PleB
( 1) Rika , est un des 17. Beylerbeys ou
Grand - Gouvernemens d'Asie , qu'on appelle
Hassilez. Voyez Ricaut , et le 3. du Diarbekir ,
consideré seulement comme l'ancienne Mesopotamie , renfermée entre le Tygre et l'Euphrate.
(2) Salahor, Ecuyer Cavalcadour , qui exerceet travaille les Chevaux du G. S. il y en a″12.
( 3 ) Defterdar , Intendant des Finances et Trésorier. 1
nipo
A O UST. 1732. 1737
nipotentiaires de la Poste > et ChahThamas , ayant choisi pour les siens ,
Mehemet-Riza-Khan , ( 1 ) _ Kouroudgi
Bachi, et Mustapha Khan. Tous ces Ministres se rendirent au quartier du Beylerbey de Rika , où ils s'assemblerent
sous sa Tente , le premier de Janvier de
la présente année 1732.
PREMIERE CONFERENCE.
Après que les Plenipotentiaires respectifs se furent fait les complimens et les
politesses d'usage en pareille occasion .
ceux de la Porte ouvrant la Conférence
dirent à ceux du Roy de Perse.
7
Le Seraskier Achmet-Pacha , nous. a
donné pouvoir d'entrer avec vos Excellences , dans une négociation dont le
succès ne peut être que très- avantageux
à la Perse. Nous sommes disposez de notre part à travailler si éfficacement a la
paix qu'il ne dependra certainement pas
de ncs foins que nous n'en voyions bientôt une heureuse conclusion. Ainsi c'est
à vos Excellences à nous faire connoître
jusqu'à quel point elles sont autorisées de
(1 ) Khan , est la même chose en Perse qu'un Pacha ou un Gouverneur de Province en Turquie, et Kouroudgi Bachi , y fait l'équivalent da
Janissaire Aga chez les Turcs.
leur
1738 MERCURE DE FRANCE
leur Maître , et quelles sont leurs pré- tentions.
Les Plenipotentiaires de Perse, prenant
alors la parole , répondirent que de tout
temps l'illustre Maison des Rois de Perse
avoit été liée d'amitié avec l'illustreMaison
Otomane , et que cette amitié n'avoit jamais été interrompuë que par la fatalité
du destin , qui avoit quelquefois produit
des évenemens surnaturels , suivis de la
discorde , et contre toute attente. Mais
ajoûterent- ils , nous desirons aujourd'hui
avec ardeur de faire revivre entre nous une
union si intime, qu'elle puisse rétablir
une tranquillité inalterable entre ces deux
Empires.
C'est aussi le même motif qui nous
anime, répliquerent les Ministres Turcs ;
mais pour parvenir au but que nous nous
proposons tous, il faut commencer par
convenir de certains points fondamentaux
qui puissent servir de base au Traité qui
nous assemble , et il est necessaire pour
cela que vous nous découvriez d'abord
sans détour, vos véritables intentions, afin
qu'après en avoir informé le très heureux
Seraskier , nous puissions , sur les ordres
que nous en recevrons , donner quelque
forme à la Négociation que nous enta
mons aujourd'hui.
Puisque
1
A O UST. 1732. 1739
Puisque vos Excellences souhaitent
que nous nous expliquions nettement ,
reprirent les Ministres de Perse , nous
demandons que generalement tous les
Pays que vous nous avez prís nous soient
restituez , et que la Paix et nos Frontieres avec l'EmpireOtoman soient reglées
sur le même pied qu'elles le furent sous
le Regne du Sultan Soliman , ( 1 ) de
glorieuse memoire.
Ce discours a de quoi nous surprendre,
répartirent les Turcs , et vous nous faiteslà une proposition des plus nouvelles. Il
a toûjours été d'usage , lorsque des Princes ennemis font la paix ensemble , que
non-seulement le vainqueur conserve les
conquêtes dont il est en possession , mais
que le vaincu lui fasse encore des avantages. C'est le cours ordinaire ; les Histoires , tant anciennes que modernes ,
en fournissent mille exemples , et nous
nedoutons pas que vous ne sçachiez tout
cela comme nous. D'ailleurs dans la Paix
que vous nous citez , qui fut concluë entre nos devanciers et les vôtres sous l'Emperéur Soliman , on y convint pour Préliminaires , que les Provinces de Tchildir , ( 2 ) de Cars , ( 3 ) de Van , ( 4 ) et
(1) Soliman II. prit et pilla Tauris en 1535
( 2 ) Tchildir est le ye Gouvernement d'Asie ,
plu-
1740 MERCURE DE FRANCE
plusieurs autres lieux resteroient à la Porte ; et vous , bien loin de nous offrir au
moins quelques Places au- delà des Pays
que le sort des armes a mis entre nos mains , vous demandez que nous vous
rendions ces mêmes Pays , qui subis
sent nos Loix depuis long - temps et
dont la conquête nous a coûté des trésors immenses et des torrens de notre
sang.
Vous avez raison , dirent les Persans ;
` nous convenons de la justesse de vos rai
sonnemens, mais un Empire aussi puissant et d'une aussi prodigieuse érenduë
que le vôtre , ne doit pas s'attacher , ni
même daigner faire attention à quelques
coins de terre si ruinez , qu'ils sont devenus plus propres à servir de retraite à
de tristes Hiboux , que de demeure à
de valeureux Soldats comme les- Otomans. Neanmoins quoique ces contrées
désolées ne puissent êtte considerées
1
que
de ceux qu'on appelle Hasilé. Il est sur les Frontieres de la Georgie.
(3) Cars , Ville de la grande Armenie , dans
cette partie qu'on appelle aujourd'hui Iran , ou
Carabag , entre l'Araxe et le Cyrus.
(4) Van , Ville de la même contrée que Cars,
et située sur un Lac du même nom , que l'on
appelle la Mer de Van ou d'Armenie , à cause
de son extréme grandeur... comme
A O UST. 1732. 1740
.
comme un rien pour votre Empire il est
pourtant vrai qu'elles sont un objet fort
considerable pour le nôtre , et que nous
en regarderons la restitution comme une
grace singuliere , purement émanée de
la clémence du G. S. que nous osons implorer aujourd'hui ; au surplus vous êtes
les Maîtres et nous nous en remettons
à vous avec une entiere confiance.
II. CONFERENCE, tenu le lendemais
entre les mêmes Ministres et au même
endroit.
Les Plénipotentiaires Turcs adressant
la parole à ceux de Perse , leur dirent :
si vous êtes effectivement dans le dessein
de finir la guerre , ( 1 ) ne vous amusez pas,
comme vous fites hier , à battre le fer
froid. Mais au lieu de vous entretenir
dans la vaine idée de la pouvoir terminer sur le même plan que nos Ancêtres
suivirent sous Soliman , songez plutôt à
joindre à nos conquêtes quelques Pro
vinces qui puissent nous convenir , ainsi
que les vaincus en ont toûjours agi envers leurs vainqueurs.
Et que nous reste-t'il , pour vous don
ner de nouvelles Provinces , se récrierent
(1 )Proverbe Arabe , qui revient au nôtre , il
faut battre le fer tandis qu'il est chaud,
les
1742 MERCURE DE FRANCE
les Persans ? Nous venons humblement
vous demander grace ; nous reclamons
la misericorde de la Porte ; notre intention n'est pas de marchander ni de chicaner avec vous ; nous connoissons.trop
l'état d'humiliation où l'enchainement de
nos malheurs nous a réduits , pour avoir
la présomption de vous rien contester
mais si la décadence de nos affaires , arrivée par le concours de mille fâcheux évenemens , a été cause que vous nous avez
traitez de la maniere la plus cruelle, pourriez vous laisser échapper la belle occasion que le Ciel vous offre aujourd'hui de
réparer nos maux , en faisant autant de
bien à notre Monarque , que vous lui
-avez porté de préjudice ? non , au lieu
de lui rien demander davantage , réta
blissez-le sur son Trône , avec autant de
puissance et de splendeur qu'y brillerent
autrefois ses illustres Ayeux , et persua
dez- vous que la gloire de votre Empire.
et de votre Empereur y est interessée. Du
reste, à notre égard, nous serons toujours
satisfaits de tout ce que feront vos Excellences.
Nous voulons bien le croire ainsi , répondirent les Plénipotentiaires de la
Porte , et votre modestie nous confirme
dans l'opinion que nous avions déja conçuë
A O UST. 1732. 1743
çue de votre prudence et ' de votre capacité. C'est pourquoi nous vous déclarons de la part de l'Empereur notre Maî
tre, que par un excès de bonté pour vous,
il veut bien , non- seulement vous accorder la Paix et se désister des justes prétentions qu'il auroit comme victorieux
d'exiger de nouveaux Païs qui seroient
à sa bienseance , outre ceux qu'il a conquis sur vous , il veut encore faire plus
en votre faveur , et pour vous marquer
jusqu'où va son extrême generosité , il
vous donne le choix entre les derniers
Pays que ses Armes lui ont acquis en
deçà de l'Araxe , et à l'exception de la
Province de Tauris , ( ) vous n'avez qu'à
demander , tout vous sera accordé.
Nous vous avons exposé ce que nous
desirions , répliquerent les Persans , et
sans varier dans l'unique point- de- vûë
qu'il nous est permis d'avoir , nous continuons à vous prier de rétablir notre Roy
dans tous ses Etats. Faites cependant ce
que vous jugerez de plus digne de vous
et de la gloire de votre Empire. Mais
comme nous nous app rcevons que nos
instances les plus vives ne produisent pas
(1) Tauris ou Tebris , grande Ville et Provin- ce enclavée dans l'Airbeitzan ou Edzerbaijan
qui fait partie de l'ancienne Médie,
sur
1744 MERCURE DE FRANCE
sur vos Excellences l'effet que nous avions
crû pouvoir nous en promettre , qu'elles
nous donnent , s'il leur plaît le reste du
jour pour consulter entre nous , et demain matin Mustapha Khan (. ) viendra
vous rendre compte de la résolution que
nous aurons prise.
III. CONFERENCE , où il n'y ent
que Mustapha - Khan , de la part de Chah-Thamas.
Le lendemain , ainsi que les Plénipotentiaires Persans l'avoient promis , Mustapha- Kan se rendit au lieu de l'Assemblée et dit aux Ministres Turcs qui l'y
attendoient. A la verité jusqu'à present
nous avions été obligez , Mehemet RizaKhan et moi , de nous en tenir , conformement à nos instructions , à vous
prier de restituer generalement à notre
Souverain tous les Pays que la Porte lui
a enlevez , mais ayant reconnu combien
vos Excellences étoient éloignées de remplir nos souhaits à cet égard , nous hous
sommes retranchez à les supplier d'agréer
une des deux propositions que je vais
avoir l'honneur de leur faire. La premie-
*
(1) N. B. c'étoir Mehemet Riza Khan , qui
tomme Premier Plénipotentiaire , portoit la parolc.
A O UST. 17327 1745
re, que la Perse payera annuellement à
la sublime Porte une certaine somme
dont on conviendra , moyennant quoi
les limites des deux Empires seront bor :
nées par les Rivieres d'Arpatchaï ( 1 ) et :
de Karct-Kalkan , et vous nous restituerez tous les Etats que vous avez conquis .
sur nous. La seconde , qui vous sera peutêtre plus agréable , que les Provinces de
Tiflis ( 2 ) d'Herdelan, resteront sous votre
domination , et que vous nous ferez la
grace de laisser rentrer le reste sous celle
de notre Roy.
Ni l'une ni l'autre de ces propositions
n'est acceptable , répondirent les Plenipotentiaires de Turquie , et il nous paroît si hors de propos , que vous fassiez
la moindre ouverture sur les Pays audelà del'Araxe qu'il ne nous convient ›
même pas d'ouvrir la bouche pour vous
répondre sur cet article. En verité , continua le Pacha de Rika , qui comme le
premier entre ses Collegues parloit pour
tous , il est bien étrange , que dans le
temps même qu'également touchez de
11) Ces deux Rivieres sont en Géorgie.
(2) Tiflis , ou Téffis , Capitaine du Gurgistan,
qui est la Géorgie , proprement dite. Elle est si- tuée sur le bord du Kur , anciennement le Cyrus.
Herdelan est dans le même Pays.
D YOS
1746 MERCURE DE FRANCE
vos malheurs et de vos prieres , nous
consentons , non- seulement à renoncer
en faveur de la Paix aux Provinces que
nous serions en droit d'exiger par- dessusnos conquêtes , mais que notre complaisance pour vous s'étend jusqu'à vous of→
frir de vous en rendre de celles que nous
venons d'acquerir ; il est bien étrange ,
dis-je , que vous nous fassiez sérieusement
des propositions si éloignées de toute raison. Vous voulez ceci , vous ne vou
lez pas cela , et vous prétendez disposer
des Pays qui sont entre nos mains, comme
si vous en étiez encore les paisibles possesseurs.N'avez vous donc pas de honte d'ê
tre si peu judicieux ? Le Pacha s'emporta
en proferant ces dernieres paroles , ou
du moins fit semblant de s'emporter ,
car il se radoucit bien- tôt , quand Mustapha l'interrompant d'un air humble et
flateur , s'exprima en ces termes : Nous
sommes venus implorer la générosité de
la sublime Porte , à laquelle nous nous
abandonnons sans réserve , et dont la
puissance s'étend d'un bout du Pole à l'au
tre; vous nous voyez accablez de revers,
sans appui , sans secours; nous ne possedons plus rien qui mérite de porter le
nom de Païs et de Provinces ; il n'est pas
étonnant que dans des circonstances si
affligeantes,
A O UST. 1732. 1747
affligeantes , nous vous fassions des demandes qui vous paroissent inconsiderées , mais vous ne devez pas nous en
sçavoir mauvais gré , et quelque extraordinaires que vous semblent nos prétentions , l'état violent où nous sommes,
doit les excuser auprès de vos Excellences.
Pourquoi , reprirent les Turcs , faites-vous tant les miserables ? Est- ce que
le Royaume de Perse est renfermé seulement dans les conquêtes que nous y
avons faites ? et peut-on appeller pauvre
un Souverain qui possede Ispaham , le
Guilhan , ( 1 ) Chiras , ( 2 ) le Korassan , (3)
et tant d'autres Contrées , qui forment
encore un vaste Empire ?
De tous les Etats , dont vous venez de
faire l'énumération , repartit Mustapha ,
en soupirant , une partie a passé sous les
Loix des Infideles Moscovites , et l'autre
est , pour ainsi dire , totalement boule-
(i) Le Guilhan ou Kilan , est le long de la
Mer Caspienne , et compose avec le Mazandran ,
l'ancienne Hyrcanie.
(2 ) Chiras ou Schiras , Ville sur le Kur, dans
le Farsistan ou la Perse proprement dite.
(3) Le Korassan , Corasan , ou Chorasan ,
comprend l'anciene Ariane , partie de la Bactriane , et du Païs des Parthes , c'est une des plus
Considerables Contrées de la Perse.
Dij versée
1748 MERCURE DE FRANCE
1
versée par les ravages et les désordres
qu'y ont faits , ou qu'y ont attirez les
cruels ( 1 ) Esghans. De sorte qu'à proprement parler , nous n'avons plus frien
de quelque conséquence que Coni ( 2 ) ,
Kiachan ( 3 ), et ( 4 ) Ispaham.
Mais si votre situation , repliquerent
les Turcs , est aussi déplorable que vous
nous la dépeignez ; si outre cela vous affectez dans toutes les occasions de vous
dire , nos Freres , de vous vanter d'être
avec nous dans la même unité de Religion, et si vous avez d'ailleurs tant d'embarras et d'ennemis sur les bras, d'où vient
ne vous pas appliquer à vous en délivrer?
Pourquoi vous acharner particulierement
contre nous , comme vous faites ? Car s'il
en faut juger par toutes vos démarches ,
il n'y a que nous seuls qui vous occu-
( 1 ) Esghans , Eughans , ou Aguans , Peuples
du Candahar , qui fait partie du Sablustan , autrefois le Paropamisus.
(2 ) Com , ou Kom , Ville dans l'Hierak ou
Yerak- Agemi , partie de l'ancien Royaume des
Parthes.
( 3 ) Kiachan ou Cachan, grande Ville du même Pais.
( 4 ) Ispaham , Spahan , ou Spahon , comme prononcent les Persans , est aussi dans le même
Païs. Les uns croient que cette Capitale de toute
la Perse , a été bârie sur les ruines d'HécatomPylos , et d'autres sur celles d'Aspa.
pions ;
AOUST. 1732. 1749
}
pions ; vos divisions , vos disputes , vos
guerres,votre empressement pour la Paix,
tout semble en vous n'avoir que Nous
pour unique objet.
C'est aussi , dit Mustapha , l'affaire qui
nous interesse le plus , et que nous prenons le plus à cœur. Vous êtes l'ennemi
le plus redoutable que nous ayions en tête;
si nous pouvons parvenir à cimenter avec
vous une Paix solide , nous nous démêlerons facilement de nos autres ennemis ;
et s'il plaît à Dieu, nous vérifierons bientôt le Proverbe Arabe, qui dit que l'hommese releve où il est tombé.
Mais enfin , continua- t-il , si les Otomans nous ont fait éprouver la fureur de
leurs armes , et s'ils nous ont maltraitez
au delà de ce que nous pouvions jamais
prévoir , nous esperons qu'à tant de calamitez qu'ils nous ont fait souffrir , ils feront succeder des dédommagemens qui
Ies égaleront. C'est uniquement dans cet
esprit, que nous venons négocier avec
vous, et non pour disputer sur le plus ou
le moins de Pais à prétendre et à ceder.
Nous vous retraçons au naturel l'image
de nos infortunes ; nos prieres y sont relatives ; c'est à vos Excellences , comme
nous leur avons déja dit, de prendre une
détermination à notre égard , qui distinDiij gue
1750 MERCURE DE FRANCE
gue d'une façon glorieuse , la grandeur et
la dignité de votre Empire.
Tout cela est excellent , répondirent les
Ministres Turcs , et vous avez raison de
vous attendre à recevoir des faveurs de la
Porte ; mais votre attente, pour être bien
fondée , ne doit pas être sans mesure , et
nous voyons avec peine , qu'au lieu de
resserrer vos désirs dans de justes bornes,
vous n'avez fait , jusqu'icy , que vous répandre en demandes indiscretes , qui
loin de nous approcher du but , nous en
écartent. Ainsi comme vous n'avancerez
jamais rien avec nous , si vous ne prenez
une autre route , nous voulons bien encore vous donner le loisir de réfléchir de
nouveau plus murement , sur vos véri
tables intérêts, et nous les discuterons vo
lontiers plus en détail dans la Conféren
ce que nous tiendrons demain.
IV. CONFERENCE , où tous les Ple
nipotentiaires des deux Cours assisterent.
Le 4 dudit mois de Janvier , les Ministres de la Porte , parlant toujours les
premiers , dirent à ceux de Perse : Nous
nous étions persuadez , qu'en agitant une
affaire d'aussi grande importance que celle.
de la Paix , nous ne devions rien négliger
pour la porter à son point de perfectionle
AOUST. 1732. 1791 8
le plutôt qu'il se pourroit ; et nous nous
étions flatez de trouver dans vos Excellences , des dispositions conformes aux
nôtres en cela. Mais nous reconnoissons ,
à regret , que nous avions mal pénétré
leurs intentions , puisqu'il paroît clairement , qu'elles ne cherchent qu'à éluder
les nôtres, et qu'à gagner du temps, pour
faire échouer la négociation à force de la
tirer en longueur. En effet , si ce n'étoit
pas là votre vûë, pourriez- vous vous opiniatrer , comme vous faites , à former des
prétentions , ausqu'elles vous sçavez bien
vous-même qu'il ne nous est pas possible
de souscrire ?
Nous sommes pleinement convaincus
de notre impuissance, répondirent les Persans, et que nous ne pourrons secoüer le
joug qu'il vous plaira de nous imposer.
Vous possedez tout, nous sommes privez
de tout ; c'est à vous d'ordonner,èt à nous
d'obéïr.
S'il étoit vrai , comme vous le dites, reprirent les Turcs , qu'il ne dépendit que
de nous d'achever heureusement cette
négociation , vous ne nous feriez pas des
demandes si peu mesurées , et toutes nos
prétentions réciproques seroient reglées
dans un moment. Il faut être équitable,
et que vos Excellences se restraignent à ce
Diiij qu'on
1752 MERCURE DE FRANCE
qu'on peut raisonnablement leur accorder. Ainsi, sans perdre davantage le temps
en discours specieux , qui ne conduisent
à rien de décisif, parlez- nous une bonne
fois positivement ; nous vous réïterons ,
que vous nous trouverez toujours disposez à nous prêter à tout ce que vous nous
proposerez de faisable. Mais nous devons
vous prévenir auparavant , qu'il ne faut
plus nous contester la possession des Païs
au-delà de l'Araxe , ni que vous insistiez
de nouveau sur la restitution de Tauris ,
qui est en deçà de ce Fleuve. Hors ces
deux articles , vous pouvez tout esperer
du désir sincere que nous avons de faire
tenaître entre les deux Empires une harmonie inalterable.
qui
Vous êtes les maîtres , encore un coup,
repliquerent les Persans ; nous continuons d'avouer que tout vous appartient chez nous ; mais dès que vous rejetteż la priere que nous vous faisons , de
-nous rendre nos Etats au delà de l'Araxe,
set la Province de Tauris en deçà ; surquoi
voulez-vous que roulent nos Conféren-
´ces, puisque tout ce qui nous reste de notre Monarchie , ne vaut pas seulement la
peine qu'on en fasse mention ?
Comment , s'écrierent les Plénipotentiaires de la Porte; n'y at- il pas encore
( 1)
A OUST. 1732. 1753
(1 ) Amadan , avec son vaste territoire ?
et si nous vous le rendons , ne devez- vous
pas être satisfaits ?
-
Nous avions toujours esperé , repartirent ceux de Perse , que vous fériez rentrer Chah Tahmas dans les Païs d'audelà de l'Araxe , et toute la faveur que
vous voulez lui faire , consiste à lui rendre Amadan , qui est en deçà. Dès que
vous montrez si peu d'égard à nos humbles et constantes supplications , nous ne
sçavons plus que vous proposer , et votre infléxibilité nous rend muets.
Que nous dites- vous-là , reprirent les
Turcs; avez- vous oublié , que lors même
que votre Maître se vantoit de nous avoir
battus , il envoïa à la Porte (2) Riza Kouli Khan et Méhémet-Veli - Khan, qui dans
leurs conférences, avec nos Ministres , cederent tous ces Païs Surquoi , s'il vous
plaît , aujourd'hui que vous vous confessez vaincus, pouvez appuïer votre obs
tination à les répéter ?
>
Nous convenons de ce fait , replique-
( 1 ) Hamadan , Ville des plus considérables de
Perse. Elle est dans l'Yerax - Agemi , qui est l'ancienne region des Parthes.
( 2 )Ils firent leur entrée à Constantinople le
18 Juin 1730. Riza- Kouli-Khan , qui étoit le
chef de l'ambassade , eut la tête tranchée peu
après son retour en Perse.
D v rent
1754 MERCURE DE FRANCE
rent les Persans ; mais peut-être feignezvous d'ignorer , que ce fut par l'habileté
et les adroites insinuations de vos négociateurs , que les nôtres consentirent im
prudemmentàce que ces Païs vous restassent ,en quoi ayant excedé leur pouvoir,
ils furent fort désaprouvez de notre Souverain. Aussi pouvons- nous dire , que ce
fut la source de tous les malheurs qui nous
ont accablez depuis ! Mais ne nous rapellez plus des temps funestes , que nous
voudrions pouvoir ensevelir dans un éternel oubli ; rappellez vous seulement que
l'infortuné Chah Tahmas a recours à la
clémence de la sublime Porte , et qu'il remet entierementson sort entre vos mains.
C'est sur ce principe que vous devez raisonner , et vous résoudre ensuite au parti
qui vous paroîtra le plus glorieux à votre
Empire.
>
N'est ce donc pas une grande grace de
notre part , dirent les Ministres Turcs
que tout ce que nous vous offrons ? Il est
vtai , répondirent ceux de Perse , qu'à ne
considerer , que la ruine presqu'universelle où notre Royaume est tombé , ce qué
vous voulez bien nous rendre , peut passer pour une faveur signalée , mais cette
faveur,toute rare qu'elle est , ne répond
pas encore ni à notre état , ni à nos prieres
AOUST. 17320 1755
res ; daignez - y faire plus d'attention , et
vous conviendrez que la Porte qui nous a
tant fait de maux , depuis l'inondation
des Esghans sur nos terres , est en quelque façon obligée pour son honneur de
réparer, autant qu'il est en elle, les dommages infinis qu'elle nous a causez , et que
la compassion qu'elle aura pour nous,doit
être au moins proportionnée à la reconnoissance que nous en conserverons éternellement. Nous osons même ajouter ,
que si votre tres-magnifique Empereur
reconnoit ,comme il le doit , que ses Vic.
toires et le bonheur de ses armes,sont des
bien faits qu'il a reçus de la Providence s
il est de sa piété d'en témoigner à Dieu
sa gratitude d'une maniere extraordinaire. Hé! comment peut-il mieux s'en acquitter , qu'en nous faisant ressentir de si
grands effets de sa magnanimité, que tous
les Monarques de la terre, surpris, soient
forcez deconvenir qu'ils n'ont jamais rien
vû , ni entendu parler de semblable ?
On donnera la suite dans le prochain
Mercure.
Fermer
Résumé : TRADUCTION d'une Relation Turque, sur ce qui s'est passé dans les Conferences teuuës pour la Paix entre les Turcs et les Persans, à l'Armée du Grand-Seigneur, près d'Hamadan, par les Plénipotentiaires de Sa Hautesse, et ceux de Chah Thamas, Roy de Perse.
En 1732, des conférences de paix entre les Turcs et les Persans se tinrent près d'Hamadan. Du côté ottoman, Chmer-Pacha, gouverneur de Babylone, nomma plusieurs plénipotentiaires, dont Achmet-Pacha et Salahor. Du côté persan, Chah-Thamas choisit Mehemet-Riza-Khan et Mustapha Khan. Lors de la première conférence, les Turcs exprimèrent leur volonté de paix, tandis que les Persans souhaitaient rétablir une union intime entre les deux empires. Les Persans demandèrent la restitution des territoires conquis par les Turcs et la régulation des frontières comme sous le règne de Soliman II, ce que les Turcs refusèrent, arguant que les vainqueurs conservent généralement leurs conquêtes. Lors de la deuxième conférence, les Turcs insistèrent sur la nécessité de conclure la paix sans revenir aux conditions de Soliman II. Les Persans, reconnaissant leur état d'humiliation, demandèrent miséricorde et la restauration de leur roi sur son trône. Les Turcs offrirent aux Persans de choisir entre les derniers pays conquis, à l'exception de la province de Tauris. Lors de la troisième conférence, Mustapha Khan proposa deux solutions : un paiement annuel à la Porte ottomane ou la rétention des provinces de Tiflis et d'Herdelan par les Turcs. Les Turcs rejetèrent ces propositions, trouvant inappropriées les demandes persanes concernant les territoires au-delà de l'Araxe. En août 1732, les Persans demandèrent aux Turcs de considérer leurs prétentions malgré des circonstances affligeantes. Les Turcs rappelèrent que le Royaume de Perse possédait encore des territoires importants, mais Mustapha Khan expliqua que ces territoires étaient soit sous contrôle des Moscovites, soit ravagés par les Esghans. Les Turcs, sceptiques, interrogèrent la stratégie perse de les considérer comme frères tout en étant en conflit. Lors de la conférence du 4 janvier, les Turcs accusèrent les Perses de vouloir gagner du temps. Les Perses, reconnaissant leur impuissance, acceptèrent de se soumettre aux décisions turques. Les Turcs proposèrent de ne plus contester la possession des territoires au-delà de l'Araxe et la restitution de Tauris. Les Persans insistèrent sur la restitution de leurs États et se dirent prêts à accepter toute décision turque. Les Turcs rappelèrent la cession des territoires lors des négociations précédentes et la désapprobation du souverain perse. Les Persans demandèrent clémence et remirent leur sort entre les mains des Turcs, mais les Turcs trouvèrent les Persans ingrats et insistèrent sur la réparation des dommages causés.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 1891-1906
SUITE DE LA TRADUCTION de la Relation Turque, sur les Conferences pour la Paix entre les Turcs et les Persans.
Début :
V. CONFERENCE, Tenuë le 9. Janvier, entre Raghib-Effendi et les Ministres de Chah Thamas. [...]
Mots clefs :
Traduction, Conférences pour la paix, Turcs, Persans, Négociation, Sérasker, Raghib Effendi, Janvier, Desterdar, Conseils généraux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUITE DE LA TRADUCTION de la Relation Turque, sur les Conferences pour la Paix entre les Turcs et les Persans.
SUITE DE LA TRADUCTION
de la Relation Turque , sur les Conferences pour la Paix entre les Turcs
et les Persans.
V. CONFERENCE , tenue le 9. Janvier,
entre Raghib- Effendi et les Ministres
de Chah- Thamas.
A négociation n'avançant point , les Plénipotentiaires de la Porte , pour
intriguer les Persans , laisserent couler
quelques jours sans les faire inviter à
continuer les Conférences ; mais ceux- cy
paroissant rester tranquilles chez eux ,
A iiij les
1892 MERCURE DE FRANCE
4
les Turcs se déterminerent à leur envoyer
Raghib-Effendi. Ce Defterdar , conformément aux instructións que ses Collegues lui avoient données , signifia en termes formels aux Ministres de Perse ,
qu'il n'étoit pas possible de déferer aux
prieres qu'ils avoient faites jusqu'alors ,
et que tant qu'ils s'aheurteroient à la restitution des Pays conquis au- delà de l'Araxe , il étoit inutile qu'ils se flatassent
de réussir dans leur Mission. Nous connoissons votre état mieux que vous- mêmes , leur dit-il , à quoi bon vous fixer
à rebattre continuellement les mêmes instances , puisque vous ne pouvez vous
promettre aucun fruit de cette conduite ?
Pour moi je vous parle à cœur ouvert ;
si vous voulez travailler avec succès à
la réunion de nos Souverains , croyezmoi , ne réclamez plus rien de tout ce
que nous avons au- delà de l'Araxe ; car
en faisant la paix et gardant chacun ce
que nous possedons , il se trouvera que
l'avantage sera encore de votre côté.
2
Raghib- Effendi ayant sondé le terrain.
de cette maniere , et s'étant tourné et retourné de tous les sens pour découvrir
les plus secrets sentimens des Ministres
de Perse , et les désabuser de leurs esperances , Mehemet Riza-Khan , répondità
SEPTEMBRE. 1732. 1893
à ce Defterdar. Je vous jure sur la tête
de Mourteza-Ali , * qu'absolument je
n'ai pas le pouvoir de me desister en entier des Pays que vous nous avez enlevez
au-delà de l'Araxe ; cependant en consideration de la Paix , et pour mettre la
derniere main à un ouvrage si salutaire ,
je veux bien risquer de m'attirer tout le
courroux de notre Roy par mon trop de
condescendance , et je vous abandonne
contre ses deffenses précises , tout ce qui
est au- delà de ce Fleuve ; mais que leurs
Excellences , le Seraskier Achmet , ne
prétende plus garder rien des Pays endeçà , car je suis résolu de tout hazarder
plutôt que de me relâcher de la moindre chose sur cet article. Voilà tout ce
que nous avons à vous dire.
VI. CONFERENCE , tenue sous les Pavillons
du Seraskier Achmet- Pacha , où assisterent , outre les Ministres ordinaires , tous
les Visirs qui se trouverent à l'Armée et
les principaux Chefs des Troupes..
Le 11. Janvier , deux jours après la
Ali , Gendre de Mahomet , dont les Persans
suivent la Secte.
** N. B. C'est une politesse de la Langue
Turque, de parler en plurier, quoiqu'on ne patle
qu'à une ou que d'une personne.
Av derniere
1894 MERCURE DE FRANCE
derniere Conference , les Plénipotentiaires de Turquie et de Perse , les Visirs:
et les principaux Officiers de l'Armée
Ottomane s'étant assemblez sous la Tente
du Seraskier Achmet , ce Pacha prit la
parole et dit : Suivant le rapport qu'on
m'a fait jusqu'à present , presque toutes
les Conferences précedentes se sont passées en discours infructueux de part et
d'autres ; mais , graces à Dieu , continuat'il, en regardant les Ministres du Roy de
Perse , vous venez d'augmenter la haute
idée que je m'étois déja faite de votre
sagesse , puisqu'ayant reconnu avant hier
dans votre entretien avec Raghib Effendi , que les propositions que vous nous
aviez faites cy-devant n'étoient pas recevables , vous convintes avec lui de
renoncer à la restitution des Pays que
nous avons conquis au- delà de l'Araxe ; desorte que nous pouvons dire que
ce n'est proprement que de ce jour que
notre négociation a commencé , tâchons.
de la continuer er de la finir même aujourd'hui , à la satisfaction commune ;
il ne s'agit plus maintenant que de disputér sur les Pays qui sont en- deçà de
ce Fleuve ; examinons cette matiere
l'amiable.
Dès que nous avons cedé les Pays au
à
dela
SEPTEMBRE. 1732. 1895
delà , interrompirent les Persans , nous
ne voyons pas qu'il y ait plus rien à regler entre nous , car pour ceux de deçà
ils ne méritent pas , dans la désolation
où vous les avez mis , que nous tenions
une seule Conference à leur sujet.
Nous ne pensons pas de même, reprirent les Turcs , et nous jugeons , au
contraire , que parmi ces Contrées il y a
beaucoup de Lieux et de Places qui de
route necessité , et surtout par rapport
à la convenance doivent être annexez à notre Empire , comme , par exemple , les Ville et Province de Tauris , que
des raisons tres- essentielles nous empê
chent absolument de vous restituer.
>
Nous ne pouvons que vous repeter
roûjours ce que nous vous avons déja
dit tant de fois , répartirent les Persans ;
nous ne sommes pas ici pour disputer
d'égal à égal , sur ce qu'il convient que
vous nous donniez et que nous vous
donnions ; et nous en revenons , à l'ordinaire , à vous supplier de prendre en
consideration notre état , et sur tout
Phonneur de la Porte. Hé ! ne le faisons
nous pas , répliquerent les Turcs ; comment ! quand nous vous rendons la Pro
vince d'Hamadan , qui est si belle et si
grande, cette grace n'est- elle pas assez
A vj Con
1896 MERCURE DE FRANCE
considerable pour vous inspirer plus de
retenue dans vos demandes ?
Nous conviendrons bien , dirent les
Persans , que la restitution de cette Province seroit effectivement une faveur ,
si le Suppliant pour lequel nous parlons ,
n'étoit pas un Roy qui se jette entre les
bras du plus grand Monarque du monde,
son unique réfuge et l'azile de la Foy
Ortodoxe; mais lorsque nous envisageons
votre Empereur sous cette idée sublime ,
il nous paroît qu'il est de sa grandeur de
nous traiter plus favorablement. Enfin ,
c'est de vous que sont partis les coups
qui nous ont terrassez ; nos playes sont
encore toute sanglantes , vous seuls pouvez y appliquer les remedes les plus propres à les guérir promptement ; nous ne
pouvons vous dire rien de plus.
Le Ministre de Chah-Thamas s'en tenant toûjours à renouveller leurs prieres
aux Turcs , et à leur remettre continuellement devant les yeux l'honneur de la
Porte , et le malheureux Etat de la Perse;
ceux- cy leur dirent encore , comme ils
avoient déja fait dans d'autres Conferences , de réfléchir de nouveau sur les prétentions qu'ils formoient , et c'est par- là
que finit cette Séance.
VI
SEPTEMBRE. 1732. 1897
VII. CONFERENCE , qui fut generale.
comme la précedente , et se tint de même.
chez le Seraskier, le 13. de Janvier.
Très-honorez Plénipotentiaires , dirent les Turcs aux Persans , dans la derniere Conference que nous eûmes ensemble , nous vous priâmes de faire de
plus mures refléxions sur l'état de vos
affaires et sur la nature de vos prétentions . Dites-nous donc aujourd'hui à quoi
vous êtes résolus; car enfin si vous pensez
tour de bon à pacifier les troubles qui
agitent votre Monarchie , pourquoi n'agissez-vous pas consequemment , et le
plutôt que vous pourrez , puisque ce ne
peut être que le plus avantageux pour
vous ? la décision de l'affaire est toute entiere entre vos mains ; il ne tient qu'à
vous que nous ne finissions dans un
instant.
Vos Excellences ont vû , répondirent
les Ministres de Perse , qu'en renonçant
pour notre Roy aux Etats que Vous possedez au- delà de l'Araxe , nous vous
avons accordé , pour accelerer l'ouvrage
de la Paix , beaucoup plus que Sa Majesté
ne nous avoit permis de le faire. C'est
à votre tour à suivre notre exemple.
Hé bien ! répartirent les Turcs , quoique
1898 MERCURE DE FRANCE
y
que notre pouvoir ne s'étende pas aussi
à vous restituer rien au delà d'Amadan,
nous voulons bien , pour que vous ayez
lieu d'être tout-à- fait contens de nous , y
ajoûter encore Kirmancha ( 1 ) et le Pays d'Herdelan , au risque des reproches que
notre Empereur pourra nous en faire ,
mais il faut que de votre côté vous vous
désistiez de vos vûës sur la Province/de
Tauris , qu'il nous est impossible de vous:
rendre.
Sur cette derniere proposition , les Ministres de Perse repliquerent : Nous n'avons cessé de vous prier , et de vous supplier de rétablir notre Souverain dans
rous ses Etats, et de faire revivre en lui l'éclat de la gloire de ses Ancêtres; nous vous
avons démontré que cela ne se pouvoit
faire qu'en lui remettant tous les Païs que
vous avez subjuguez dans son Royaume ;
et nous vous avons fait voir qu'en prenant une voïe si honorable , l'Empereur,
votre Maître , s'immortaliseroit , er que
toutes les Puissances de la Terre, témoinsd'un procédé si noble , ne pourroient se
lasser d'admirer et de publier sa clémen-
( 1) Kirmancha , ou Kerman , Ville d'une
Province du même nom , autrefois la Caramanic.
ce
SEPTEMBRE. 1732. 1899
ee et sa générosité. Surpris de trouver vos
Excellences peu sensibles à cette gloire
suprême , qu'il leur étoit si facile d'aquerir , nous avions du moins esperé de les
fléchir , en leur cédant de notre bon gré
1 ) Ghendge , Tiflis , ( 2 ) Erivan , Kiat
Kiartil , le ( 3 ) Daguestan , Chamakić
et d'autresContrées si considérables, qu'elles formeroient chacune un grand Etat ; }
et cependant la sublime Porte, sans avoir
égard à nos miséres , à nos humiliatious ,
et aux efforts que nous faisons , malgré
notre abbatement , pour applanir toutes
les difficultez qui s'opposent à notre ré
conciliation avec elle , s'amuse encore à
vouloir se conserver quelques Cantons
ruinez et des Déserts qu'elle vient de nous
( 1 ) Ghendgé, ou Ghendgea , Ville considérable de la Géorgie , ainsi que Tiflis ou Téflis , qui
en est la Capitale.
(2 ) Erivan ou Irvam, Capitale d'une Provin
ce du même nom , qui fait partie de la grande Armenie. Kiat , et Kiartil sont dans la même:
Contrée.
( 3 ) Le Daguestan, dont Chamakié est la Capitale , est un Païs de Montagnes , comme son
nom le signifie,qui fait partie de la Médie-Atropaterre. Il est habité par les Lesquis , qui dans le
commencement des Troubles , se mirent d'euxmêmes sous la protection des Turcs, pour se ga
rantir des invasions des Moscovites..
prendre
630175
1900 MERCURE DE FRANCE
14
H
prendre en deçà de l'Araxe. Que vos Excellences y pensent-bien , et qu'elles jugent elles mêmes , si tant d'attachement
à des bagatelles , répond dignement à l'élevation du Trône que remplit avec tant
de Majesté, votre auguste Empereur ? Les
Ministres Persans prononcerent ce Discours avec toute la véhémence imaginable , et ajouterent gen se levant , avec un
air plein d'altération , que vos Excellences nous envoient , s'il leur plaît , Raghib- Effendi , nous leur ferons sçavoir, par
són Canal , nos dernieres intentions.
CONTINUATION DE LA VII CONFERENCE
entre le Defterdar Raghib- Effendi , seulement,et les Ministres de Chab-Thamas.
CeDefterdar s'étant rendu chez les Plénipotentiaires Persans , ils lui dirent : De
la même maniere que le Seraskier Achmet Pacha a ordre de votre Maître de
ne pas restituer à la Perse aucun des Païs
au-delà de l'Araxe , nous vous jurons ,
par le Dieu Tout- puissant , que nous
avons aussi ordre du nôtre , de ne pas
ceder à la Porte , un pouce de terre en
deçà. Ainsi , dites à leurs Excellences
ajouterent- ils, que nous leur sommes bien
obligez des soins qu'elles ont pris pour
mettre fin à nos principales disputes, puisque
SEPTEMBRE. 1732. 1955
que tout ce qui nous en reste à vuider ,
ne regarde plus que la possession de Tauris ; mais suppliez - les de notre part , comme nous vous en supplions vous- même,
de lever encore ce leger obstacle , en
nous restituant cette Province, qui n'of◄
fre plus aux yeux que des dégâts et des
mazures ; et si la chose est aussi impossi
ble que le Seraskier nous l'a assuré , engagez du moins cet illustre Pacha à trouver bon que nous congédions la plupart
de nos domestiques , et que nous puissions nous retirer avec ce qui reste de nos
gens à ( 1 ) Gherbelaï - Mahaladé , pour y
passer le reste de nos jours.
Raghib-Effendi ayant rendu compte àses
Collégues de ce que venoient de lui dire
les Ministres de Perse ; ceux de Turquie
laisserent passer deux jours sans leur donner de leurs nouvelles , comme s'ils n'avoient pas daigné faire attention au rapport de ce Defterdar.
La négociation cependant se renoua le
(1) C'est un lieu situé près de Bagdat, où le fils
d'une des filles de Mahomet est inhumé ; sa mémoire est en si grande vénération parmi les Persans , qu'entr'autres superstitions du culte religieux qu'ils lui rendent , ils se font une dévotion de porter des Chapelets d'une espece de
Terre glaise , qui se trouve à l'endroit où est son Tombeau.
163
点
1902 MERCURE DE FRANCE
16 , que se tint la derniere Conférence
avec la même assemblée , et chez le Seraskier.
VIII ET DERNIERE CONFERENCE.
Si vos Excellences , dirent les Plénipotentiaires Turcs , souhaitent véritablement la Paix ; au nom de Dieu , ne perdons plus le temps en Discours superflus,
et cessez de nous faire des propositionsque nous ne puissions pas recevoir ; mais
au contraire finissons tout - à - l'heure ,
comme rien n'est plus facile , si vous en
avez bien envie ?
Nous n'aspirons à autre chose , répon
dirent les Persans , qu'à nous trouver parfaitement d'accord avec vos Excellences
ordonnez, prescrivez - nous ce qu'il faut
que nous fissions ; nous sommes prêts de
concourir de tout notre pouvoir avec
vous , à la conclusion d'un accommodement ferme et durable entre nos deux
Nations.
Vous nous avez priez de vous traiter
favorablement, reprirent les Turcs, et nous
y.avons acquiesce avec plaisir. Premierement , en vous rendant la Province d'Amadan , et ensuite sur de nouvelles instances de votre part , le Païs d'Herdelan ,
et Kirmancha.Contentez - vous de ces graces
SEPTEMBRE. 1732. 1903
ces que nous vous faisons gratuitement ,
sans qu'aucune Loy divine ni humaine
nous y oblige , et ne pensez plus à répéter Tauris sur nous.
Avant que de répondre à vos Excellenecs,reprirent les Ministres de Perse,qu'elles nous permettent de leur faire une
question et une comparaison tout ensemble.Supposons un homme opulent et liberal, à qui un pauvre ayant demandé douze
mille ( 1 )Tomans , les lui auroit donnés
de bonne grace ; dites nous , si l'indigent
avoit encore besoin d'un seul Toman; seroit-il vrai - semblable , et croyez vous ,
que cet homme si généreux le lui refusât?
Votre parallele seroit juste , repartirent les Turcs , si nous pouvions disposer
des Païs que vous nous demandez , comme cet homme le pourroit de son bien
et que nous n'eussions pas de plus for--
tes raisons de retenir Tauris , qu'il en
auroit d'épargner un Toman ; mais nous
ne sommes pas dans le même cas, et quoiqu'il soit vrai , comme nous en convenons , que nous vous ayions cedé des
Provinces d'assez grande conséquence ,
( 1 ) Le Toman vaut environ 45 liv . de notre
monnoye , et n'est pas une espece, mais une ma- niere de compter comme nous disons une Pistole , pour signifier 10 francs.
"
pour
1904 MERCURE DE FRANCE
pour y joindre encore celle- ci qui est ruinée, sans nous faire tant prier , c'est précisément notre résistance inébranlable à
vous satisfaire sur cette restitution , qui
doit vous convaincre qn'elle passe absolument notre pouvoir. Mais il faut sans
doute qu'il y ait quelque chose de surna
turel , caché derriere le rideau de la prédestination , et qui doive bien-tôt se manifester , puisque nous ne saurions parvenir à vaincre l'entêtement avec lequel
vous persistez dans vos demandes ; surquoi
nous ne pouvons vous dissimuler , qu'à
la fin il sera peut-être cause de la rupture
de notre négociation , dont la consommation étoit si prochaine.
L'Empire Ottoman est si puissant, et sa
grandeur si relevée , dirent alors les Ministres Persans , que toutes les adversitez
qui pourront encore nous venir de sa
part , nous seront plus supportables que
les reproches et les mépris que nous aurions à essuyer , non seulement du Roy ,
notre Maître , mais de nos Compatriotes
de tous Etats , jusqu'à la plus vile popu
lace , si nous faisions la Paix aux conditions que vous voulez nous imposer.
Ce n'est pas notre obstination , comme
vous en accusez , c'est l'honneur , mille
fois plus cher pour nous que la vie , qui
nous
SEPTEMBRE. 1732. 1905
nous force à les rejetter ; et nous aimons
encore mieux nous exposer aux maux les
plus terribles , qu'à nous voir flétris pour jamais par le désaveu et l'indignation de
toute la Perse. Du reste , si après nous
avoir tant accordé , vous croyez qu'il y
aille de votre gloire de nous refuser si peu
de chose , et à nous renvoyer , sans avoir
pû rien conclure , nous n'en murmurerons point contre vous , et nous ne nous
plaindrons que du destin ; mais souffrez
qu'avant que de finir cette Conférence ,
nous vous rappellions pour la derniere
fois que Chah-Thamas s'est remis sans restriction , à la clémence et à la générosité
de votre Empereur, et permettez- nous du
moins d'implorer votre intercession auprès de Sa Hautesse. Nous osons encore
nous flater , que si des personnes de votre
rang , et d'un mérite aussi distingué que
le vôtre, veulent bien s'intéresser pour no
tre Roy , et faire à la Porte quelques representations en sa faveur , elles n'auront
pas de peine à lui procurer la triste consolation de recouvrer une Ville et une
Province si ravagées, qu'on ne peut pres
que plus les reconnoître que par le lieu
qu'elles occupent sur la terre.
Immédiatement après la tenue de cette
derniere Conference, qui se termina de la
sorte ,
1906 MERCURE DE. FRANCE
›
sorte , Mustapha-Khan alla rendre visite
à chacun en particulier des Plénipotentiaires Turcs , des Visirs , et autres principaux. Chefs de l'Armée Ottomane. Il
les pressa , les sollicita , les carressa tant
et leur fit de nouveau des Instances si
fortes, d'écrire et d'interceder même pour
leur Maître , qu'à la fin les Ministres du
G. S. persuadez que ceux de Chah- Thamas n'avoient pas le pouvoir de se relâcher sur Tauris , et que n'étant pas non
plus autorisez de leur côté à s'en dessaisir , dresserent un Mémoire détaillé de
tout ce qui s'étoit dit et passé depuis l'ouverture des Conférences, et l'envoyerent
à la Porte.
Il se tint à ce sujet consécutivement
plusieurs Conseils Généraux au Sérail , en
présence de S. H. où la matiere vivement
agitée , partagea souvent les opinions , et
dont le dernier résultat, fut cependant de
rendre Tauris à la Perse , avec tous les autres Païs conquis en deçà de l'Araxe ; au
moyen de quoi la Paix , également désirée des deux Peuples ennemis , fut conclue et signée quelque temps après.
P. V. D.
de la Relation Turque , sur les Conferences pour la Paix entre les Turcs
et les Persans.
V. CONFERENCE , tenue le 9. Janvier,
entre Raghib- Effendi et les Ministres
de Chah- Thamas.
A négociation n'avançant point , les Plénipotentiaires de la Porte , pour
intriguer les Persans , laisserent couler
quelques jours sans les faire inviter à
continuer les Conférences ; mais ceux- cy
paroissant rester tranquilles chez eux ,
A iiij les
1892 MERCURE DE FRANCE
4
les Turcs se déterminerent à leur envoyer
Raghib-Effendi. Ce Defterdar , conformément aux instructións que ses Collegues lui avoient données , signifia en termes formels aux Ministres de Perse ,
qu'il n'étoit pas possible de déferer aux
prieres qu'ils avoient faites jusqu'alors ,
et que tant qu'ils s'aheurteroient à la restitution des Pays conquis au- delà de l'Araxe , il étoit inutile qu'ils se flatassent
de réussir dans leur Mission. Nous connoissons votre état mieux que vous- mêmes , leur dit-il , à quoi bon vous fixer
à rebattre continuellement les mêmes instances , puisque vous ne pouvez vous
promettre aucun fruit de cette conduite ?
Pour moi je vous parle à cœur ouvert ;
si vous voulez travailler avec succès à
la réunion de nos Souverains , croyezmoi , ne réclamez plus rien de tout ce
que nous avons au- delà de l'Araxe ; car
en faisant la paix et gardant chacun ce
que nous possedons , il se trouvera que
l'avantage sera encore de votre côté.
2
Raghib- Effendi ayant sondé le terrain.
de cette maniere , et s'étant tourné et retourné de tous les sens pour découvrir
les plus secrets sentimens des Ministres
de Perse , et les désabuser de leurs esperances , Mehemet Riza-Khan , répondità
SEPTEMBRE. 1732. 1893
à ce Defterdar. Je vous jure sur la tête
de Mourteza-Ali , * qu'absolument je
n'ai pas le pouvoir de me desister en entier des Pays que vous nous avez enlevez
au-delà de l'Araxe ; cependant en consideration de la Paix , et pour mettre la
derniere main à un ouvrage si salutaire ,
je veux bien risquer de m'attirer tout le
courroux de notre Roy par mon trop de
condescendance , et je vous abandonne
contre ses deffenses précises , tout ce qui
est au- delà de ce Fleuve ; mais que leurs
Excellences , le Seraskier Achmet , ne
prétende plus garder rien des Pays endeçà , car je suis résolu de tout hazarder
plutôt que de me relâcher de la moindre chose sur cet article. Voilà tout ce
que nous avons à vous dire.
VI. CONFERENCE , tenue sous les Pavillons
du Seraskier Achmet- Pacha , où assisterent , outre les Ministres ordinaires , tous
les Visirs qui se trouverent à l'Armée et
les principaux Chefs des Troupes..
Le 11. Janvier , deux jours après la
Ali , Gendre de Mahomet , dont les Persans
suivent la Secte.
** N. B. C'est une politesse de la Langue
Turque, de parler en plurier, quoiqu'on ne patle
qu'à une ou que d'une personne.
Av derniere
1894 MERCURE DE FRANCE
derniere Conference , les Plénipotentiaires de Turquie et de Perse , les Visirs:
et les principaux Officiers de l'Armée
Ottomane s'étant assemblez sous la Tente
du Seraskier Achmet , ce Pacha prit la
parole et dit : Suivant le rapport qu'on
m'a fait jusqu'à present , presque toutes
les Conferences précedentes se sont passées en discours infructueux de part et
d'autres ; mais , graces à Dieu , continuat'il, en regardant les Ministres du Roy de
Perse , vous venez d'augmenter la haute
idée que je m'étois déja faite de votre
sagesse , puisqu'ayant reconnu avant hier
dans votre entretien avec Raghib Effendi , que les propositions que vous nous
aviez faites cy-devant n'étoient pas recevables , vous convintes avec lui de
renoncer à la restitution des Pays que
nous avons conquis au- delà de l'Araxe ; desorte que nous pouvons dire que
ce n'est proprement que de ce jour que
notre négociation a commencé , tâchons.
de la continuer er de la finir même aujourd'hui , à la satisfaction commune ;
il ne s'agit plus maintenant que de disputér sur les Pays qui sont en- deçà de
ce Fleuve ; examinons cette matiere
l'amiable.
Dès que nous avons cedé les Pays au
à
dela
SEPTEMBRE. 1732. 1895
delà , interrompirent les Persans , nous
ne voyons pas qu'il y ait plus rien à regler entre nous , car pour ceux de deçà
ils ne méritent pas , dans la désolation
où vous les avez mis , que nous tenions
une seule Conference à leur sujet.
Nous ne pensons pas de même, reprirent les Turcs , et nous jugeons , au
contraire , que parmi ces Contrées il y a
beaucoup de Lieux et de Places qui de
route necessité , et surtout par rapport
à la convenance doivent être annexez à notre Empire , comme , par exemple , les Ville et Province de Tauris , que
des raisons tres- essentielles nous empê
chent absolument de vous restituer.
>
Nous ne pouvons que vous repeter
roûjours ce que nous vous avons déja
dit tant de fois , répartirent les Persans ;
nous ne sommes pas ici pour disputer
d'égal à égal , sur ce qu'il convient que
vous nous donniez et que nous vous
donnions ; et nous en revenons , à l'ordinaire , à vous supplier de prendre en
consideration notre état , et sur tout
Phonneur de la Porte. Hé ! ne le faisons
nous pas , répliquerent les Turcs ; comment ! quand nous vous rendons la Pro
vince d'Hamadan , qui est si belle et si
grande, cette grace n'est- elle pas assez
A vj Con
1896 MERCURE DE FRANCE
considerable pour vous inspirer plus de
retenue dans vos demandes ?
Nous conviendrons bien , dirent les
Persans , que la restitution de cette Province seroit effectivement une faveur ,
si le Suppliant pour lequel nous parlons ,
n'étoit pas un Roy qui se jette entre les
bras du plus grand Monarque du monde,
son unique réfuge et l'azile de la Foy
Ortodoxe; mais lorsque nous envisageons
votre Empereur sous cette idée sublime ,
il nous paroît qu'il est de sa grandeur de
nous traiter plus favorablement. Enfin ,
c'est de vous que sont partis les coups
qui nous ont terrassez ; nos playes sont
encore toute sanglantes , vous seuls pouvez y appliquer les remedes les plus propres à les guérir promptement ; nous ne
pouvons vous dire rien de plus.
Le Ministre de Chah-Thamas s'en tenant toûjours à renouveller leurs prieres
aux Turcs , et à leur remettre continuellement devant les yeux l'honneur de la
Porte , et le malheureux Etat de la Perse;
ceux- cy leur dirent encore , comme ils
avoient déja fait dans d'autres Conferences , de réfléchir de nouveau sur les prétentions qu'ils formoient , et c'est par- là
que finit cette Séance.
VI
SEPTEMBRE. 1732. 1897
VII. CONFERENCE , qui fut generale.
comme la précedente , et se tint de même.
chez le Seraskier, le 13. de Janvier.
Très-honorez Plénipotentiaires , dirent les Turcs aux Persans , dans la derniere Conference que nous eûmes ensemble , nous vous priâmes de faire de
plus mures refléxions sur l'état de vos
affaires et sur la nature de vos prétentions . Dites-nous donc aujourd'hui à quoi
vous êtes résolus; car enfin si vous pensez
tour de bon à pacifier les troubles qui
agitent votre Monarchie , pourquoi n'agissez-vous pas consequemment , et le
plutôt que vous pourrez , puisque ce ne
peut être que le plus avantageux pour
vous ? la décision de l'affaire est toute entiere entre vos mains ; il ne tient qu'à
vous que nous ne finissions dans un
instant.
Vos Excellences ont vû , répondirent
les Ministres de Perse , qu'en renonçant
pour notre Roy aux Etats que Vous possedez au- delà de l'Araxe , nous vous
avons accordé , pour accelerer l'ouvrage
de la Paix , beaucoup plus que Sa Majesté
ne nous avoit permis de le faire. C'est
à votre tour à suivre notre exemple.
Hé bien ! répartirent les Turcs , quoique
1898 MERCURE DE FRANCE
y
que notre pouvoir ne s'étende pas aussi
à vous restituer rien au delà d'Amadan,
nous voulons bien , pour que vous ayez
lieu d'être tout-à- fait contens de nous , y
ajoûter encore Kirmancha ( 1 ) et le Pays d'Herdelan , au risque des reproches que
notre Empereur pourra nous en faire ,
mais il faut que de votre côté vous vous
désistiez de vos vûës sur la Province/de
Tauris , qu'il nous est impossible de vous:
rendre.
Sur cette derniere proposition , les Ministres de Perse repliquerent : Nous n'avons cessé de vous prier , et de vous supplier de rétablir notre Souverain dans
rous ses Etats, et de faire revivre en lui l'éclat de la gloire de ses Ancêtres; nous vous
avons démontré que cela ne se pouvoit
faire qu'en lui remettant tous les Païs que
vous avez subjuguez dans son Royaume ;
et nous vous avons fait voir qu'en prenant une voïe si honorable , l'Empereur,
votre Maître , s'immortaliseroit , er que
toutes les Puissances de la Terre, témoinsd'un procédé si noble , ne pourroient se
lasser d'admirer et de publier sa clémen-
( 1) Kirmancha , ou Kerman , Ville d'une
Province du même nom , autrefois la Caramanic.
ce
SEPTEMBRE. 1732. 1899
ee et sa générosité. Surpris de trouver vos
Excellences peu sensibles à cette gloire
suprême , qu'il leur étoit si facile d'aquerir , nous avions du moins esperé de les
fléchir , en leur cédant de notre bon gré
1 ) Ghendge , Tiflis , ( 2 ) Erivan , Kiat
Kiartil , le ( 3 ) Daguestan , Chamakić
et d'autresContrées si considérables, qu'elles formeroient chacune un grand Etat ; }
et cependant la sublime Porte, sans avoir
égard à nos miséres , à nos humiliatious ,
et aux efforts que nous faisons , malgré
notre abbatement , pour applanir toutes
les difficultez qui s'opposent à notre ré
conciliation avec elle , s'amuse encore à
vouloir se conserver quelques Cantons
ruinez et des Déserts qu'elle vient de nous
( 1 ) Ghendgé, ou Ghendgea , Ville considérable de la Géorgie , ainsi que Tiflis ou Téflis , qui
en est la Capitale.
(2 ) Erivan ou Irvam, Capitale d'une Provin
ce du même nom , qui fait partie de la grande Armenie. Kiat , et Kiartil sont dans la même:
Contrée.
( 3 ) Le Daguestan, dont Chamakié est la Capitale , est un Païs de Montagnes , comme son
nom le signifie,qui fait partie de la Médie-Atropaterre. Il est habité par les Lesquis , qui dans le
commencement des Troubles , se mirent d'euxmêmes sous la protection des Turcs, pour se ga
rantir des invasions des Moscovites..
prendre
630175
1900 MERCURE DE FRANCE
14
H
prendre en deçà de l'Araxe. Que vos Excellences y pensent-bien , et qu'elles jugent elles mêmes , si tant d'attachement
à des bagatelles , répond dignement à l'élevation du Trône que remplit avec tant
de Majesté, votre auguste Empereur ? Les
Ministres Persans prononcerent ce Discours avec toute la véhémence imaginable , et ajouterent gen se levant , avec un
air plein d'altération , que vos Excellences nous envoient , s'il leur plaît , Raghib- Effendi , nous leur ferons sçavoir, par
són Canal , nos dernieres intentions.
CONTINUATION DE LA VII CONFERENCE
entre le Defterdar Raghib- Effendi , seulement,et les Ministres de Chab-Thamas.
CeDefterdar s'étant rendu chez les Plénipotentiaires Persans , ils lui dirent : De
la même maniere que le Seraskier Achmet Pacha a ordre de votre Maître de
ne pas restituer à la Perse aucun des Païs
au-delà de l'Araxe , nous vous jurons ,
par le Dieu Tout- puissant , que nous
avons aussi ordre du nôtre , de ne pas
ceder à la Porte , un pouce de terre en
deçà. Ainsi , dites à leurs Excellences
ajouterent- ils, que nous leur sommes bien
obligez des soins qu'elles ont pris pour
mettre fin à nos principales disputes, puisque
SEPTEMBRE. 1732. 1955
que tout ce qui nous en reste à vuider ,
ne regarde plus que la possession de Tauris ; mais suppliez - les de notre part , comme nous vous en supplions vous- même,
de lever encore ce leger obstacle , en
nous restituant cette Province, qui n'of◄
fre plus aux yeux que des dégâts et des
mazures ; et si la chose est aussi impossi
ble que le Seraskier nous l'a assuré , engagez du moins cet illustre Pacha à trouver bon que nous congédions la plupart
de nos domestiques , et que nous puissions nous retirer avec ce qui reste de nos
gens à ( 1 ) Gherbelaï - Mahaladé , pour y
passer le reste de nos jours.
Raghib-Effendi ayant rendu compte àses
Collégues de ce que venoient de lui dire
les Ministres de Perse ; ceux de Turquie
laisserent passer deux jours sans leur donner de leurs nouvelles , comme s'ils n'avoient pas daigné faire attention au rapport de ce Defterdar.
La négociation cependant se renoua le
(1) C'est un lieu situé près de Bagdat, où le fils
d'une des filles de Mahomet est inhumé ; sa mémoire est en si grande vénération parmi les Persans , qu'entr'autres superstitions du culte religieux qu'ils lui rendent , ils se font une dévotion de porter des Chapelets d'une espece de
Terre glaise , qui se trouve à l'endroit où est son Tombeau.
163
点
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16 , que se tint la derniere Conférence
avec la même assemblée , et chez le Seraskier.
VIII ET DERNIERE CONFERENCE.
Si vos Excellences , dirent les Plénipotentiaires Turcs , souhaitent véritablement la Paix ; au nom de Dieu , ne perdons plus le temps en Discours superflus,
et cessez de nous faire des propositionsque nous ne puissions pas recevoir ; mais
au contraire finissons tout - à - l'heure ,
comme rien n'est plus facile , si vous en
avez bien envie ?
Nous n'aspirons à autre chose , répon
dirent les Persans , qu'à nous trouver parfaitement d'accord avec vos Excellences
ordonnez, prescrivez - nous ce qu'il faut
que nous fissions ; nous sommes prêts de
concourir de tout notre pouvoir avec
vous , à la conclusion d'un accommodement ferme et durable entre nos deux
Nations.
Vous nous avez priez de vous traiter
favorablement, reprirent les Turcs, et nous
y.avons acquiesce avec plaisir. Premierement , en vous rendant la Province d'Amadan , et ensuite sur de nouvelles instances de votre part , le Païs d'Herdelan ,
et Kirmancha.Contentez - vous de ces graces
SEPTEMBRE. 1732. 1903
ces que nous vous faisons gratuitement ,
sans qu'aucune Loy divine ni humaine
nous y oblige , et ne pensez plus à répéter Tauris sur nous.
Avant que de répondre à vos Excellenecs,reprirent les Ministres de Perse,qu'elles nous permettent de leur faire une
question et une comparaison tout ensemble.Supposons un homme opulent et liberal, à qui un pauvre ayant demandé douze
mille ( 1 )Tomans , les lui auroit donnés
de bonne grace ; dites nous , si l'indigent
avoit encore besoin d'un seul Toman; seroit-il vrai - semblable , et croyez vous ,
que cet homme si généreux le lui refusât?
Votre parallele seroit juste , repartirent les Turcs , si nous pouvions disposer
des Païs que vous nous demandez , comme cet homme le pourroit de son bien
et que nous n'eussions pas de plus for--
tes raisons de retenir Tauris , qu'il en
auroit d'épargner un Toman ; mais nous
ne sommes pas dans le même cas, et quoiqu'il soit vrai , comme nous en convenons , que nous vous ayions cedé des
Provinces d'assez grande conséquence ,
( 1 ) Le Toman vaut environ 45 liv . de notre
monnoye , et n'est pas une espece, mais une ma- niere de compter comme nous disons une Pistole , pour signifier 10 francs.
"
pour
1904 MERCURE DE FRANCE
pour y joindre encore celle- ci qui est ruinée, sans nous faire tant prier , c'est précisément notre résistance inébranlable à
vous satisfaire sur cette restitution , qui
doit vous convaincre qn'elle passe absolument notre pouvoir. Mais il faut sans
doute qu'il y ait quelque chose de surna
turel , caché derriere le rideau de la prédestination , et qui doive bien-tôt se manifester , puisque nous ne saurions parvenir à vaincre l'entêtement avec lequel
vous persistez dans vos demandes ; surquoi
nous ne pouvons vous dissimuler , qu'à
la fin il sera peut-être cause de la rupture
de notre négociation , dont la consommation étoit si prochaine.
L'Empire Ottoman est si puissant, et sa
grandeur si relevée , dirent alors les Ministres Persans , que toutes les adversitez
qui pourront encore nous venir de sa
part , nous seront plus supportables que
les reproches et les mépris que nous aurions à essuyer , non seulement du Roy ,
notre Maître , mais de nos Compatriotes
de tous Etats , jusqu'à la plus vile popu
lace , si nous faisions la Paix aux conditions que vous voulez nous imposer.
Ce n'est pas notre obstination , comme
vous en accusez , c'est l'honneur , mille
fois plus cher pour nous que la vie , qui
nous
SEPTEMBRE. 1732. 1905
nous force à les rejetter ; et nous aimons
encore mieux nous exposer aux maux les
plus terribles , qu'à nous voir flétris pour jamais par le désaveu et l'indignation de
toute la Perse. Du reste , si après nous
avoir tant accordé , vous croyez qu'il y
aille de votre gloire de nous refuser si peu
de chose , et à nous renvoyer , sans avoir
pû rien conclure , nous n'en murmurerons point contre vous , et nous ne nous
plaindrons que du destin ; mais souffrez
qu'avant que de finir cette Conférence ,
nous vous rappellions pour la derniere
fois que Chah-Thamas s'est remis sans restriction , à la clémence et à la générosité
de votre Empereur, et permettez- nous du
moins d'implorer votre intercession auprès de Sa Hautesse. Nous osons encore
nous flater , que si des personnes de votre
rang , et d'un mérite aussi distingué que
le vôtre, veulent bien s'intéresser pour no
tre Roy , et faire à la Porte quelques representations en sa faveur , elles n'auront
pas de peine à lui procurer la triste consolation de recouvrer une Ville et une
Province si ravagées, qu'on ne peut pres
que plus les reconnoître que par le lieu
qu'elles occupent sur la terre.
Immédiatement après la tenue de cette
derniere Conference, qui se termina de la
sorte ,
1906 MERCURE DE. FRANCE
›
sorte , Mustapha-Khan alla rendre visite
à chacun en particulier des Plénipotentiaires Turcs , des Visirs , et autres principaux. Chefs de l'Armée Ottomane. Il
les pressa , les sollicita , les carressa tant
et leur fit de nouveau des Instances si
fortes, d'écrire et d'interceder même pour
leur Maître , qu'à la fin les Ministres du
G. S. persuadez que ceux de Chah- Thamas n'avoient pas le pouvoir de se relâcher sur Tauris , et que n'étant pas non
plus autorisez de leur côté à s'en dessaisir , dresserent un Mémoire détaillé de
tout ce qui s'étoit dit et passé depuis l'ouverture des Conférences, et l'envoyerent
à la Porte.
Il se tint à ce sujet consécutivement
plusieurs Conseils Généraux au Sérail , en
présence de S. H. où la matiere vivement
agitée , partagea souvent les opinions , et
dont le dernier résultat, fut cependant de
rendre Tauris à la Perse , avec tous les autres Païs conquis en deçà de l'Araxe ; au
moyen de quoi la Paix , également désirée des deux Peuples ennemis , fut conclue et signée quelque temps après.
P. V. D.
Fermer
Résumé : SUITE DE LA TRADUCTION de la Relation Turque, sur les Conferences pour la Paix entre les Turcs et les Persans.
Entre janvier et septembre 1732, des conférences de paix eurent lieu entre les Turcs et les Persans pour résoudre des conflits territoriaux. Lors de la cinquième conférence, les Turcs, représentés par Raghib-Effendi, refusèrent de restituer les territoires conquis au-delà de l'Araxe, estimant que les Persans ne pouvaient espérer réussir sans cette concession. Mehemet Riza-Khan, ministre persan, accepta de céder les territoires au-delà de l'Araxe mais exigea la restitution des territoires en deçà de l'Araxe, notamment la province de Tauris. Lors des conférences suivantes, les Turcs reconnurent les concessions persanes mais insistèrent sur la nécessité de conserver certains territoires en deçà de l'Araxe, comme Tauris. Les Persans maintinrent leur demande pour Tauris, soulignant les souffrances de leur royaume et l'honneur de la Porte ottomane. Les Turcs proposèrent de restituer les provinces de Kirmancha et d'Herdelan, à condition que les Persans renoncent à Tauris. Les Persans insistèrent sur la restitution de tous les territoires conquis et sur la gloire que cela apporterait à l'empereur ottoman. Lors de la huitième et dernière conférence, les Persans réitérèrent leur refus de céder des territoires en deçà de l'Araxe. Les Turcs renouvèlèrent les négociations mais sans aboutir à un accord. Les Persans exprimèrent leur volonté de se retirer à Gherbelaï-Mahaladé si Tauris ne leur était pas restituée. La négociation resta en suspens. En septembre 1732, les Persans exprimèrent leur volonté de coopérer et de conclure un accord ferme, tout en demandant la restitution de la province de Tauris. Les Turcs, après avoir rendu les provinces d'Amadan, d'Herdelan et de Kirmancha, refusèrent de céder Tauris. Les Persans insistèrent sur l'honneur et la dignité, préférant affronter des adversités plutôt que d'accepter des conditions humiliantes. Après plusieurs conseils au Sérail, les Turcs décidèrent de rendre Tauris à la Perse, ainsi que les autres provinces conquises. Cette décision permit la conclusion et la signature de la paix entre les deux nations.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
6
p. 811
TURQUIE ET PERSE.
Début :
On a eu avis d'Ispaham, que Thamas-Kouli Kan avoit fait mourir plusieurs Seigneurs [...]
Mots clefs :
Persans, Armée, Thamas Kouli-Kan
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texteReconnaissance textuelle : TURQUIE ET PERSE.
TURQUIE ET PERSE.
Na cu avis d'Ispaham , que Thamas-
Kouli -Kan avoit fait mourir plusieurs Seigneurs
Persans qui avoient formé une conspiration
pour se saisir de sa personne et de celle du
jeune Roy , et pour remettre Schah- Thamas sur
le Trône; que ce Ministre tenoit l'Armée des
Turcs bloquée dans Babylone, et que le Pacha de
cette Place attendoit des secours
considérables de
Constantinople. Que Topal Osman-Pacha avoit
été choisi par le G. S. pour
commander en Chef
l'Armée contre les Persans.
Na cu avis d'Ispaham , que Thamas-
Kouli -Kan avoit fait mourir plusieurs Seigneurs
Persans qui avoient formé une conspiration
pour se saisir de sa personne et de celle du
jeune Roy , et pour remettre Schah- Thamas sur
le Trône; que ce Ministre tenoit l'Armée des
Turcs bloquée dans Babylone, et que le Pacha de
cette Place attendoit des secours
considérables de
Constantinople. Que Topal Osman-Pacha avoit
été choisi par le G. S. pour
commander en Chef
l'Armée contre les Persans.
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Résumé : TURQUIE ET PERSE.
Le texte relate une conspiration persane contre Thamas-Kouli-Kan et le jeune roi, visant à rétablir Schah-Thamas. Ispaham mentionne que l'armée turque est bloquée à Babylone, attendant des renforts de Constantinople. Topal Osman-Pacha est nommé par le Grand Sultan pour diriger l'armée contre les Persans.
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7
p. 1864-1865
TURQUIE ET PERSE.
Début :
Les bruits qui ont couru d'une grande victoire remportée par l'Armée Ottomane sur [...]
Mots clefs :
Persans, Archipel, Escadre, Ordres
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texteReconnaissance textuelle : TURQUIE ET PERSE.
TURQUIE ET PERSE.
L
2
Es bruits qui ont couru d'une grande vic- !
toire remportée par l'Armée Ottomane sur
celle des Persans , non plus que la prise de Babilone
, ne se confirment point ; ils n'avoient
sans doute , d'autre fondement que la défaite
d'un corps de Troupes qui escortoient un Convoi
destiné à cette Place .
Des Lettres de Constantinople du 22. Juin ,
portent qu'Achmet- Pacha avoit écrit au Grand-
Vizir , que si les Persans entreprenoient de former
un nouveau Siege , il étoit en état de faire
une longue résistance ; que la Ville de Bagdat
étoit abondamment pourvûë de toutes les munitions
nécessaires , et que la Garnison étoit réso
lue à se deffendre jusqu'à la derniere extrémité.
On a appris par un Courier de Topal Osman,
que le Corps de 40000.- Tartares qui s'avancent
en Georgie , sous les ordres des Kans Islan et
Fetih , n'étoit qu'à deux journées de la Fronti
re.
Suivant les ordres qui ont été signifiez il y a
quelque temps aux Agens des Princes Mikal et
Mauro-Cordato , le premier a pris possession
de la Principauté de Valachie , et il a abandonné
au second celle de Moldavie.
A QUST . 1733. 1865
Les Habitans des Isles de l'Archipel , qui sont
sous la domination du G. S. s'étant plaints que
les Officiers de l'Escadre Algerienne , qui est à
Mosconisi , avoient enrôlé de force plusieurs Insulaires
, la Porte a fait déclarer au Commandant
de cette Escadre , que si tous les Vaisseaux
Algeriens ne se retiroient pas incessamment de
la Mer de l'Archipel , on les feroit traiter com,
me ennemis .
L
2
Es bruits qui ont couru d'une grande vic- !
toire remportée par l'Armée Ottomane sur
celle des Persans , non plus que la prise de Babilone
, ne se confirment point ; ils n'avoient
sans doute , d'autre fondement que la défaite
d'un corps de Troupes qui escortoient un Convoi
destiné à cette Place .
Des Lettres de Constantinople du 22. Juin ,
portent qu'Achmet- Pacha avoit écrit au Grand-
Vizir , que si les Persans entreprenoient de former
un nouveau Siege , il étoit en état de faire
une longue résistance ; que la Ville de Bagdat
étoit abondamment pourvûë de toutes les munitions
nécessaires , et que la Garnison étoit réso
lue à se deffendre jusqu'à la derniere extrémité.
On a appris par un Courier de Topal Osman,
que le Corps de 40000.- Tartares qui s'avancent
en Georgie , sous les ordres des Kans Islan et
Fetih , n'étoit qu'à deux journées de la Fronti
re.
Suivant les ordres qui ont été signifiez il y a
quelque temps aux Agens des Princes Mikal et
Mauro-Cordato , le premier a pris possession
de la Principauté de Valachie , et il a abandonné
au second celle de Moldavie.
A QUST . 1733. 1865
Les Habitans des Isles de l'Archipel , qui sont
sous la domination du G. S. s'étant plaints que
les Officiers de l'Escadre Algerienne , qui est à
Mosconisi , avoient enrôlé de force plusieurs Insulaires
, la Porte a fait déclarer au Commandant
de cette Escadre , que si tous les Vaisseaux
Algeriens ne se retiroient pas incessamment de
la Mer de l'Archipel , on les feroit traiter com,
me ennemis .
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Résumé : TURQUIE ET PERSE.
En 1733, des rumeurs de victoire ottomane sur les Persans et de prise de Babylone se sont révélées infondées. Elles étaient probablement basées sur la défaite d'un convoi persan. Des lettres de Constantinople du 22 juin indiquent qu'Achmet Pacha a assuré au Grand-Vizir que Bagdad était prête à résister à un siège persan, avec des munitions suffisantes et une garnison déterminée. Un courrier de Topal Osman signale l'approche de 40 000 Tartares en Géorgie, dirigés par les Kans Islan et Fetih, à deux journées de la frontière. Par ailleurs, les agents des princes Mikal et Mauro-Cordato ont pris possession des principautés de Valachie et de Moldavie. Enfin, les habitants des îles de l'Archipel, sous domination ottomane, se sont plaints de l'enrôlement forcé par les officiers de l'escadre algérienne à Mosconisi. La Porte a menacé de traiter les vaisseaux algériens comme ennemis s'ils ne se retiraient pas de la mer de l'Archipel.
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8
p. 2055-2059
A Constantinople le 14. Août 1733.
Début :
La nouvelle qu'on reçut ici le 7. Août au soir, de la grande victoire remportée par l'Armée [...]
Mots clefs :
Topal Osman Pacha, Thamas Kouli-Kan, Général, Bagdad, Armée, Troupes, Bataille, Victoire, Persans
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texteReconnaissance textuelle : A Constantinople le 14. Août 1733.
Constantinople le 14. Août 1733 .
A nouvelle qu'on reçut ici le 7. Août au soir,
de Lie la grande victoire remportée par l'Armée
Turque sur les Persans , et dont on espere que
les suites seront aussi avantageuses à l'Empire
Ottoman , que glorieuses à Topal Osman , fut
annoncée au Public entre neuf et dix heures par
une salve de plus de cent. Pieces de Canon du
Serrail de Top- Hana , de l'Arsenal , des Vaisseaux
et des Galeres du Grand Seigneur, ce qui a
été repeté chacun des trois jours suivans . Voici
ce qu'on a pû recueillir de diverses Lettres , surtout
de celles du General Topal Osman Pacha.
>
*
Quelques jours avant l'arrivée de ce Pacha à
Kerkoud , Thamas Kouli- Kan , dont la valeur
est ternie par une présomption insupportable ,
écrivit au Pacha de cette Ville , que regardant
Bagdad comme une Place qui étoit déja en son
pouvoir, il comptoit de finir la Campagne par la
prise d'Alep , après s'être emparé en chemin
faisant de Kerkoud , de Mossul , de Diabékir
&c.que cependant ayant appris qu'un certain Gé.
néral Turc , dont la lenteur ne lui donnoit pas
une grande idée de son courage , étoit en marche
depuis long- temps , pour venir s'opposer à
ses conquêtes , il le prioit de mander à ce Général
de se hâter un peu plus , parce qu'il étoit
pressé, et que pour lui abreger le chemin , il
iroit bien- tôt à sa rencontre avec une partie de
son Armée , qui suffiroit de reste pour le faire:
repentir de sa témérité.
Le Pacha de Kerkoud , ayant communiqué
cette insolente Lettre à Topal -Osman , ce der
nier se chargea de répondre à Thamas Kouli
Kan , et le fit à peu près dans ces termes.
Ge vj Quoi
2056 MERCURE DE FRANCE
*
Quoique le G. S. mon Maitre , ait des Soldats
en aussi grand nombre que le sable de la Mer , er
qu'indépendamment de son G. V. il pourroit choi
sir parmi ses Pachas des Chefs pour les commander,
dont la réputation seule seroit capable de t'anéantir,
cependant Sa Hautesse a crû que ce seroit assez.
pour réprimer ton orgueil , que de t'opposer quelques-
unes de ses Troupes , et de mettre à leur tête
un pauvre Boiteux , chargé d'ans et d'infirmitez,
tel que je le suis , et j'espere qu'avec le secours die
Tout-Puissant , en qui je me confie , et qui se sert
souvent des instrumens les plus méprisables pour
confondre les superbes comme toy , il te fera
éprouver par mon moyen un sort pareil à celui
qu'eut autrefois Nimbrout ** lequel voulant s'égater
à Dieu, fut puni de sa vanité impie , en péris
sant dans les douleurs que lui causa une simple
Moucke qui lui étoit entrée par le nez et avoit pénetré
jusques dans le cerveau.
Kouli- Kan s'étant effectivement mis en moùvement
, partit des environs de Bagdad avec l'é-
Lite de ses Troupes , au nombre de 80000. hommes
, dont toute la Cavalerie étoit armée de
maille; et Topal Osman continuant sa route le
long du Tigre , avec plus de cent mille Combattans
; les deux Amées se trouverent en présence
à la pointe du jour le 19. Juillet dans la Plaine
Udjoum qui est à la moitié chemin de Ker
koud à Bagdad , environ à 10. à 12. lieuës de
l'une à l'autre Place.
Le Général Persan faisoit marcher la sienne
dans un ordre de Bataille , à peu près semblable
à celui qui s'observe en Europe , et celle de Topal-
Osman fut rangée sur les bords du Fleuve.
** Topal' en Turc , signifie Boiteux.
** C'est une des Traditions Mabométanes .
Ca
SEPTEMBRE. 17 : 3 2057
Ce Bacha se posta dans le centre avec les Trou
pes de Romelie , sur lesquelles il comptoit le
plus , et mit aux premiers rangs les Curdes , de
la bravoure desquels il se méfioit , et sur qui il
ordonna aux autres Troupes de tirer , dès qu'ils
feroient mine de s'enfuir . Les Persans commencerent
le Combat par une décharge de toute leur
Artillerie et par celle d'un Coips d'Arquebusiers
montez sur des Chameaux , selon l'usage de cette
Nation . Les Curdes ne tarderent pas à lâcher pied,
comme le Général l'avoit prévû ; mais on tira
sur eux , et se voyant entre deux feux , ils furent
contraints de combattre comme les autres , encouragez
d'ailleurs par l'activité infatigable du
Général , qui volant du centre aux aîles , et de
rang en rang , ranimoit tout par sa présence ,
par son exemple et par ses largesses .
Cependant quelque bien secondé qu'il fût pens
dant le cours de cette sanglante action , qui commença
vers les six heures du matin et dura jusqu'à
trois heures après midi , la victoire incertaine
fut si vivement disputée , qu'elle changea
plusieurs fois de parti ; mais enfin les Persans
ayant perdu plus de 20000 hommes de leur In
fanterie , plus de 10000. de Cavalerie , et Kouli
Kan ayant reçu trois coups de lance , ils prirent
l'épouvante , abandonnerent le Champ de
Bataille , l'Artillerie et les Munitions , et s'enfuirent
la plupart à travers les Déserts , évitant les
chemins pratiquez ; une partie de l'Armée Ottomane
les poursuivit pendant . heures , et leur
Général , tout blessé qu'il étoit , se sauva come
me il
put avec quelques Cavaliers qui ne l'abandonnerent
point . Quant aux Turcs , à qui ce
triomphe n'a pas laissé de coûter , ils ont eu.
ooo. hommes de tuez , 7000. de blessez , et
*
parmis
2018 MERCURE DE FRANCE
parmi les morts , il s'est trouvé beaucoup de
Beys , qui sont comme des Chefs dans chaque
Province.
Le Seraskier Topal - Osman , donna aussi- tôt
avis de cette victoire à Achmet - Pacha , Gouverneur
de Bagdad , et lui manda en même-temps
que le Vendredy suivant 24. il comptoit d'entrer
dans cette Place , et qu'après avoir rendu graces
à Dieu sur le Tombeau de l'Iman Mahassem ,
ils conféreroient ensemble sur les opérations du
reste de la Campagne . Il coucha sur le Champ
de bataille , y séjourna le lendemain pour laisser
*
reposer son Armée , et se remit en marche le 21 .
Juillet,
Il est remarquer que Kouli- Kan , outre ses
propres Troupes , avoit été suivi d'un gros Corps
d'Arabes , sur l'assistance duquel il avoit beaucoup
compté , et que ces Arabes , au lieu de
prendre part au combat , en resterent les tranquilles
Spectateurs , leur inaction fut d'autant
plus favorable au Général Turc , qu'il n'avoit
point encore été joint par toutes les Troupes de
Romelie et par celles d'Egypte , qu'il attendoit
et sur lesquelles il comptoit beaucoup , mais dès
que l'affaire fut décidéee en sa faveur , tous ces
Arabes repasserent à la nâge de l'autre côté du
Tigre , et de- là ils députerent vers lui pour ob .
tenir une capitulation honorable , réprésentant
qu'ils avoient toujours été amis des Turcs, qu'ils
n'avoient embrassé le parti de Kouli - Kan , en
apparence , que parce qu'il s'étoit rendu le maître
chez eux , et qu'ils venoient de prouver de
* Cet Iman est un des plus respectables parmi
Tes Musulmans , et l'un des plus celebres Commentateurs
de l'Alcoran. Son Tombeau est auprès de
Bagdad.
reste
SEPTEMBRE. 1733. 2059
reste, combien ils lui étoient peu attachez , puisqu'ils
l'avoient laissé batere sans lui donner aucun
secours
Le Seraskier , qui d'un côté avoit ses raisons
pour les ménager , et qui de l'autre étoit bien
aise de leur faire sentir qu'il n'étoit pas tout- àfait
content de leur conduite et de leurs excuses
les remit pour regler toutes choses avec eux à
son arivée à Bagdad ; il fit donner aux Députez
quelques Caftans ou Robbes d'honneur , éxigea
d'eux qu'ils poursuivroient Kouli Kan et qu'ils
feroient tout leur possible pour le lui amener
mort ou vif, et que dès à présent ils envoye
roient des provisions pour quatre jours
dans Bagdad , afin que son Armée pût les y
trouver en arrivant , moyennant quoi , il leur
promit que jusqu'à - ce qu'il eût pû traiter avec
eux , il ne leur seroit fait aucun tort de la par
de ses Troupes.
On attend tous les jours Hamzé- Aga- Capigi-
Bachi , qui apporte des détails plus circonstanciez
de cette mémorable journée. Celui qui en a
apporté la premiere nouvelle , est venu en 17 .
jours. C'est un Officier Tartare , attaché à Topal-
Osman , et qui s'est fort distingué par des
actions de valeur le jour de la Bataille.
Le Seraskier lui donna , en le dépêchant , une
espece d'Aigrette d'or à trois pointes , avec laquelle
il a été présenté au G. S. qui lui en fic
donner une autre beaucoup plus riche , et le
gratifia d'un Apanage de quatre Bourses ou de
2000. écus de revenu ; on assure d'ailleurs que
ce Courier étant allé visiter tous les Ministres et
Tous les Grands de la Porte , en a reçû la valeur
de près de cent Bourses en differens présens.
A nouvelle qu'on reçut ici le 7. Août au soir,
de Lie la grande victoire remportée par l'Armée
Turque sur les Persans , et dont on espere que
les suites seront aussi avantageuses à l'Empire
Ottoman , que glorieuses à Topal Osman , fut
annoncée au Public entre neuf et dix heures par
une salve de plus de cent. Pieces de Canon du
Serrail de Top- Hana , de l'Arsenal , des Vaisseaux
et des Galeres du Grand Seigneur, ce qui a
été repeté chacun des trois jours suivans . Voici
ce qu'on a pû recueillir de diverses Lettres , surtout
de celles du General Topal Osman Pacha.
>
*
Quelques jours avant l'arrivée de ce Pacha à
Kerkoud , Thamas Kouli- Kan , dont la valeur
est ternie par une présomption insupportable ,
écrivit au Pacha de cette Ville , que regardant
Bagdad comme une Place qui étoit déja en son
pouvoir, il comptoit de finir la Campagne par la
prise d'Alep , après s'être emparé en chemin
faisant de Kerkoud , de Mossul , de Diabékir
&c.que cependant ayant appris qu'un certain Gé.
néral Turc , dont la lenteur ne lui donnoit pas
une grande idée de son courage , étoit en marche
depuis long- temps , pour venir s'opposer à
ses conquêtes , il le prioit de mander à ce Général
de se hâter un peu plus , parce qu'il étoit
pressé, et que pour lui abreger le chemin , il
iroit bien- tôt à sa rencontre avec une partie de
son Armée , qui suffiroit de reste pour le faire:
repentir de sa témérité.
Le Pacha de Kerkoud , ayant communiqué
cette insolente Lettre à Topal -Osman , ce der
nier se chargea de répondre à Thamas Kouli
Kan , et le fit à peu près dans ces termes.
Ge vj Quoi
2056 MERCURE DE FRANCE
*
Quoique le G. S. mon Maitre , ait des Soldats
en aussi grand nombre que le sable de la Mer , er
qu'indépendamment de son G. V. il pourroit choi
sir parmi ses Pachas des Chefs pour les commander,
dont la réputation seule seroit capable de t'anéantir,
cependant Sa Hautesse a crû que ce seroit assez.
pour réprimer ton orgueil , que de t'opposer quelques-
unes de ses Troupes , et de mettre à leur tête
un pauvre Boiteux , chargé d'ans et d'infirmitez,
tel que je le suis , et j'espere qu'avec le secours die
Tout-Puissant , en qui je me confie , et qui se sert
souvent des instrumens les plus méprisables pour
confondre les superbes comme toy , il te fera
éprouver par mon moyen un sort pareil à celui
qu'eut autrefois Nimbrout ** lequel voulant s'égater
à Dieu, fut puni de sa vanité impie , en péris
sant dans les douleurs que lui causa une simple
Moucke qui lui étoit entrée par le nez et avoit pénetré
jusques dans le cerveau.
Kouli- Kan s'étant effectivement mis en moùvement
, partit des environs de Bagdad avec l'é-
Lite de ses Troupes , au nombre de 80000. hommes
, dont toute la Cavalerie étoit armée de
maille; et Topal Osman continuant sa route le
long du Tigre , avec plus de cent mille Combattans
; les deux Amées se trouverent en présence
à la pointe du jour le 19. Juillet dans la Plaine
Udjoum qui est à la moitié chemin de Ker
koud à Bagdad , environ à 10. à 12. lieuës de
l'une à l'autre Place.
Le Général Persan faisoit marcher la sienne
dans un ordre de Bataille , à peu près semblable
à celui qui s'observe en Europe , et celle de Topal-
Osman fut rangée sur les bords du Fleuve.
** Topal' en Turc , signifie Boiteux.
** C'est une des Traditions Mabométanes .
Ca
SEPTEMBRE. 17 : 3 2057
Ce Bacha se posta dans le centre avec les Trou
pes de Romelie , sur lesquelles il comptoit le
plus , et mit aux premiers rangs les Curdes , de
la bravoure desquels il se méfioit , et sur qui il
ordonna aux autres Troupes de tirer , dès qu'ils
feroient mine de s'enfuir . Les Persans commencerent
le Combat par une décharge de toute leur
Artillerie et par celle d'un Coips d'Arquebusiers
montez sur des Chameaux , selon l'usage de cette
Nation . Les Curdes ne tarderent pas à lâcher pied,
comme le Général l'avoit prévû ; mais on tira
sur eux , et se voyant entre deux feux , ils furent
contraints de combattre comme les autres , encouragez
d'ailleurs par l'activité infatigable du
Général , qui volant du centre aux aîles , et de
rang en rang , ranimoit tout par sa présence ,
par son exemple et par ses largesses .
Cependant quelque bien secondé qu'il fût pens
dant le cours de cette sanglante action , qui commença
vers les six heures du matin et dura jusqu'à
trois heures après midi , la victoire incertaine
fut si vivement disputée , qu'elle changea
plusieurs fois de parti ; mais enfin les Persans
ayant perdu plus de 20000 hommes de leur In
fanterie , plus de 10000. de Cavalerie , et Kouli
Kan ayant reçu trois coups de lance , ils prirent
l'épouvante , abandonnerent le Champ de
Bataille , l'Artillerie et les Munitions , et s'enfuirent
la plupart à travers les Déserts , évitant les
chemins pratiquez ; une partie de l'Armée Ottomane
les poursuivit pendant . heures , et leur
Général , tout blessé qu'il étoit , se sauva come
me il
put avec quelques Cavaliers qui ne l'abandonnerent
point . Quant aux Turcs , à qui ce
triomphe n'a pas laissé de coûter , ils ont eu.
ooo. hommes de tuez , 7000. de blessez , et
*
parmis
2018 MERCURE DE FRANCE
parmi les morts , il s'est trouvé beaucoup de
Beys , qui sont comme des Chefs dans chaque
Province.
Le Seraskier Topal - Osman , donna aussi- tôt
avis de cette victoire à Achmet - Pacha , Gouverneur
de Bagdad , et lui manda en même-temps
que le Vendredy suivant 24. il comptoit d'entrer
dans cette Place , et qu'après avoir rendu graces
à Dieu sur le Tombeau de l'Iman Mahassem ,
ils conféreroient ensemble sur les opérations du
reste de la Campagne . Il coucha sur le Champ
de bataille , y séjourna le lendemain pour laisser
*
reposer son Armée , et se remit en marche le 21 .
Juillet,
Il est remarquer que Kouli- Kan , outre ses
propres Troupes , avoit été suivi d'un gros Corps
d'Arabes , sur l'assistance duquel il avoit beaucoup
compté , et que ces Arabes , au lieu de
prendre part au combat , en resterent les tranquilles
Spectateurs , leur inaction fut d'autant
plus favorable au Général Turc , qu'il n'avoit
point encore été joint par toutes les Troupes de
Romelie et par celles d'Egypte , qu'il attendoit
et sur lesquelles il comptoit beaucoup , mais dès
que l'affaire fut décidéee en sa faveur , tous ces
Arabes repasserent à la nâge de l'autre côté du
Tigre , et de- là ils députerent vers lui pour ob .
tenir une capitulation honorable , réprésentant
qu'ils avoient toujours été amis des Turcs, qu'ils
n'avoient embrassé le parti de Kouli - Kan , en
apparence , que parce qu'il s'étoit rendu le maître
chez eux , et qu'ils venoient de prouver de
* Cet Iman est un des plus respectables parmi
Tes Musulmans , et l'un des plus celebres Commentateurs
de l'Alcoran. Son Tombeau est auprès de
Bagdad.
reste
SEPTEMBRE. 1733. 2059
reste, combien ils lui étoient peu attachez , puisqu'ils
l'avoient laissé batere sans lui donner aucun
secours
Le Seraskier , qui d'un côté avoit ses raisons
pour les ménager , et qui de l'autre étoit bien
aise de leur faire sentir qu'il n'étoit pas tout- àfait
content de leur conduite et de leurs excuses
les remit pour regler toutes choses avec eux à
son arivée à Bagdad ; il fit donner aux Députez
quelques Caftans ou Robbes d'honneur , éxigea
d'eux qu'ils poursuivroient Kouli Kan et qu'ils
feroient tout leur possible pour le lui amener
mort ou vif, et que dès à présent ils envoye
roient des provisions pour quatre jours
dans Bagdad , afin que son Armée pût les y
trouver en arrivant , moyennant quoi , il leur
promit que jusqu'à - ce qu'il eût pû traiter avec
eux , il ne leur seroit fait aucun tort de la par
de ses Troupes.
On attend tous les jours Hamzé- Aga- Capigi-
Bachi , qui apporte des détails plus circonstanciez
de cette mémorable journée. Celui qui en a
apporté la premiere nouvelle , est venu en 17 .
jours. C'est un Officier Tartare , attaché à Topal-
Osman , et qui s'est fort distingué par des
actions de valeur le jour de la Bataille.
Le Seraskier lui donna , en le dépêchant , une
espece d'Aigrette d'or à trois pointes , avec laquelle
il a été présenté au G. S. qui lui en fic
donner une autre beaucoup plus riche , et le
gratifia d'un Apanage de quatre Bourses ou de
2000. écus de revenu ; on assure d'ailleurs que
ce Courier étant allé visiter tous les Ministres et
Tous les Grands de la Porte , en a reçû la valeur
de près de cent Bourses en differens présens.
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Résumé : A Constantinople le 14. Août 1733.
Le 14 août 1733, Constantinople apprend la victoire de l'armée turque sur les Persans à Kerkoud. La nouvelle, reçue le 7 août, est annoncée par une salve de canons et répétée les trois jours suivants. Les informations proviennent des lettres du général Topal Osman Pacha. Quelques jours avant la bataille, Thamas Kouli-Kan, général persan, avait écrit au pacha de Kerkoud, se vantant de ses conquêtes et pressant le général turc de se hâter. Topal Osman Pacha répondit en soulignant l'humilité et la confiance en Dieu, malgré ses infirmités. Le 19 juillet, les deux armées se rencontrent dans la plaine d'Udjoum. Les Persans, commandés par Kouli-Kan, commencent le combat par une décharge d'artillerie et d'arquebusiers montés sur des chameaux. La bataille, très disputée, dure de six heures du matin à trois heures de l'après-midi. Les Persans, ayant perdu environ 30 000 hommes, prennent la fuite, abandonnant leur artillerie et munitions. Les Turcs, bien que victorieux, subissent également des pertes importantes, avec 6 000 hommes tués et 7 000 blessés. Topal Osman Pacha informe Achmet Pacha, gouverneur de Bagdad, de sa victoire et de son intention d'entrer dans la ville le 24 juillet. Il séjourne sur le champ de bataille pour reposer son armée avant de se remettre en marche le 21 juillet. Les Arabes, initialement spectateurs, demandent une capitulation honorable après la défaite de Kouli-Kan. Topal Osman Pacha les remet à plus tard, exigeant leur aide pour capturer Kouli-Kan et fournir des provisions à Bagdad. Un officier tartare, distingué lors de la bataille, apporte la nouvelle à Constantinople en 17 jours. Il est récompensé par le sultan et les grands de la Porte.
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9
p. 2066-2068
De Turquie et Perse, [titre d'après la table]
Début :
On a appris en dernier lieu de Constantinople, que la victoire remportée par Topal-Osman, [...]
Mots clefs :
Achmet Pacha, Topal Osman Pacha, Bagdad, Troupes, Persans, Thamas Kouli-Kan
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De Turquie et Perse, [titre d'après la table]
Na appris en dernier lieu de Constantino-
Ople ,que la victoire remportée par Topal-
Osman , sur l'Armée de Thamas Kouli-Kan ,
avoit été suivie de la défaite des Troupes Persannes
qui formoient le Blocus de la Ville de Bagdad.
Achmet Pacha , Gouverneur de cette Place,
qui étoit réduit à la derniere extremité par la
disette de vivres , reçut le 20. du mois dernier à
six heures du matin , la premiere nouvelle de la
bataille donnee la veille dans la Place d'Udjoum
et de la déroute des Persans ; il résolut de profiter
de cette circonstance pour faire lever le Blocus
et le lendemain avant le jour il sortit de Bagdad
avec 2500c. hommes des meilleures Troupes de
la Garnison , pour attaquer les Persans dans leurs
retranchemens , qu'ils avoient fortifiez de deux
Forts. L'Action commença à la pointe du jour
et les Troupes qui gardoient l'un de ces Forts ,
l'ayant abandonné sans aucune résistance , se retirerent
dans le second. Les Persans , malgré le
découragement qu'avoit jetté dans leur Camp la
défaite de Thamas Kouli- Kan , s'y deffendirent
avec tant de valeur , qu'Achmet- Pacha fut obligé
, pour s'en rendre maître de faire mettre en
Batterie l'Artillerie qu'il avoit fait venir de Bagdad.
Les Troupes qui étoient dans ce fort , furent
passées au fil de l'épée et les autres prirent la
fuite avec beaucoup de desordre.
Achmet- Pacha , après cette action rentra dans
Bagdad , où il fit amener toutes les provisions
3
qu'il
SEPTEMBRE . 1733 . 2067
qu'il avoit trouvées en grande abondance dans
le Camp des Ennemis .
Le Courier qui a apporté cette nouvelle , est
l'Ecuyer du Kislar- Aga , lequel étoit auprès de
Topal- Osman , et que ce Général avoit dépêché
à Achmet-Pacha , pour lui porter la nouvelle de
sa victoire. Comme il avoit été obligé , pour
éviter les partis ennemis , de prendre un grand
détour , il n'arriva à Bagdad que le 22. Juillet
au soir. Achmet - Pacha le renvoya auss- tôt à
Topal-Osman , avec le détail de l'Action du 2 r.
et le 23. au matin , il partit avec une partie des
Troupes de sa Garnison , pour aller au-devant
de ce Général , qu'il rencontra à 3. lieues de
Bagdad , avec toute son Aimée. Topal- Osman ,
qui dans sa marche avoit reçu le Courier d'Achmet-
Pacha , le dépêcha aussi- tôt à Constantinople
, avec les Lettres de ce Gouverneur ; et
ayant ensuite continué sa route pour se rendre à
Bagdad , il y entra avec Achmet-Pacha le 24.
qui étoit le jour auquel il avoit marqué devoir
entrer dans cette Ville .
Les Lettres du Gouverneur de Bagdad ne mar.
quent rien de bien positif sur le sort de Thamas
Kouli- Kan ; mais on prétend qu'après la déroute
du reste de ses Troupes , il avoit été obligé de
se réfugier avec 1000. hommes seulement chez
les Arabes qui s'étoient déclarez pour lui , et
qu'un Chef d'un Corps de ces Arabes , qui est
beau- perc d'Achmet- Pacha , a promis , pour obtenir
son pardon, de s'être liguez avec les Persans
, de découvrir où Thamas Kouli - Kan s'est
caché et de le livrer aux Turcs.
Le Grand- Seigneur a envoyé à Topal- Osman
et à Achmet- Pacha , des Pélisses et des Sabres
magnifiques , et le même Courier porte à Topal
Osman
0
205 MERCURE DE FRANCE
Osman , des pleins pouvoirs pour continuer la
guerre contre, les Persans , ou pour signer un
Traité de Paix , ainsi qu'il le Jugera à Fropos,
et aux conditions qui lui paroîtront les plus
convenables aux interêts et à la gloire de l'am
pire.
Ople ,que la victoire remportée par Topal-
Osman , sur l'Armée de Thamas Kouli-Kan ,
avoit été suivie de la défaite des Troupes Persannes
qui formoient le Blocus de la Ville de Bagdad.
Achmet Pacha , Gouverneur de cette Place,
qui étoit réduit à la derniere extremité par la
disette de vivres , reçut le 20. du mois dernier à
six heures du matin , la premiere nouvelle de la
bataille donnee la veille dans la Place d'Udjoum
et de la déroute des Persans ; il résolut de profiter
de cette circonstance pour faire lever le Blocus
et le lendemain avant le jour il sortit de Bagdad
avec 2500c. hommes des meilleures Troupes de
la Garnison , pour attaquer les Persans dans leurs
retranchemens , qu'ils avoient fortifiez de deux
Forts. L'Action commença à la pointe du jour
et les Troupes qui gardoient l'un de ces Forts ,
l'ayant abandonné sans aucune résistance , se retirerent
dans le second. Les Persans , malgré le
découragement qu'avoit jetté dans leur Camp la
défaite de Thamas Kouli- Kan , s'y deffendirent
avec tant de valeur , qu'Achmet- Pacha fut obligé
, pour s'en rendre maître de faire mettre en
Batterie l'Artillerie qu'il avoit fait venir de Bagdad.
Les Troupes qui étoient dans ce fort , furent
passées au fil de l'épée et les autres prirent la
fuite avec beaucoup de desordre.
Achmet- Pacha , après cette action rentra dans
Bagdad , où il fit amener toutes les provisions
3
qu'il
SEPTEMBRE . 1733 . 2067
qu'il avoit trouvées en grande abondance dans
le Camp des Ennemis .
Le Courier qui a apporté cette nouvelle , est
l'Ecuyer du Kislar- Aga , lequel étoit auprès de
Topal- Osman , et que ce Général avoit dépêché
à Achmet-Pacha , pour lui porter la nouvelle de
sa victoire. Comme il avoit été obligé , pour
éviter les partis ennemis , de prendre un grand
détour , il n'arriva à Bagdad que le 22. Juillet
au soir. Achmet - Pacha le renvoya auss- tôt à
Topal-Osman , avec le détail de l'Action du 2 r.
et le 23. au matin , il partit avec une partie des
Troupes de sa Garnison , pour aller au-devant
de ce Général , qu'il rencontra à 3. lieues de
Bagdad , avec toute son Aimée. Topal- Osman ,
qui dans sa marche avoit reçu le Courier d'Achmet-
Pacha , le dépêcha aussi- tôt à Constantinople
, avec les Lettres de ce Gouverneur ; et
ayant ensuite continué sa route pour se rendre à
Bagdad , il y entra avec Achmet-Pacha le 24.
qui étoit le jour auquel il avoit marqué devoir
entrer dans cette Ville .
Les Lettres du Gouverneur de Bagdad ne mar.
quent rien de bien positif sur le sort de Thamas
Kouli- Kan ; mais on prétend qu'après la déroute
du reste de ses Troupes , il avoit été obligé de
se réfugier avec 1000. hommes seulement chez
les Arabes qui s'étoient déclarez pour lui , et
qu'un Chef d'un Corps de ces Arabes , qui est
beau- perc d'Achmet- Pacha , a promis , pour obtenir
son pardon, de s'être liguez avec les Persans
, de découvrir où Thamas Kouli - Kan s'est
caché et de le livrer aux Turcs.
Le Grand- Seigneur a envoyé à Topal- Osman
et à Achmet- Pacha , des Pélisses et des Sabres
magnifiques , et le même Courier porte à Topal
Osman
0
205 MERCURE DE FRANCE
Osman , des pleins pouvoirs pour continuer la
guerre contre, les Persans , ou pour signer un
Traité de Paix , ainsi qu'il le Jugera à Fropos,
et aux conditions qui lui paroîtront les plus
convenables aux interêts et à la gloire de l'am
pire.
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Résumé : De Turquie et Perse, [titre d'après la table]
Le texte décrit des affrontements militaires entre les forces ottomanes et persanes. Topal Osman a vaincu l'armée de Thamas Kouli-Kan et a repoussé les troupes persanes assiégeant Bagdad. Achmet Pacha, gouverneur de Bagdad, a profité de cette victoire pour lever le blocus. Le 21 juillet, il a attaqué les Persans avec 2500 hommes, utilisant l'artillerie ottomane de manière décisive, et a forcé leur retraite. Achmet Pacha est ensuite rentré à Bagdad avec des provisions capturées. Le 22 juillet, un courrier a informé Achmet Pacha de la victoire de Topal Osman. Achmet Pacha a rencontré Topal Osman le 23 juillet et ils sont entrés ensemble à Bagdad le 24 juillet. Après sa défaite, Thamas Kouli-Kan s'est réfugié chez des Arabes avec 1000 hommes. Le Grand Seigneur a récompensé Topal Osman et Achmet Pacha et a donné à Topal Osman l'autorité de poursuivre la guerre ou de signer un traité de paix selon les intérêts de l'empire.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
p. 2469-2471
TURQUIE ET PERSE.
Début :
Selon quelques avis de Constantinople, le bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-Thamas, [...]
Mots clefs :
Thamas Kouli-Kan, Perse, Constantinople, Topal Osman Pacha, Ministres, Persans, Roi de Perse, Schach Tamas
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : TURQUIE ET PERSE.
TURQUIE ET PERSE.
Surat
Elon quelques avis de Constantinople , le
bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-
Thamas , Roy de Perse détrôné , s'étoit rendu à
Ispahan depuis la défaite de Thamas-Koulikan,
son Usurpateur, qu'il étoit remonté sur le Thrône
, et qu'il avoit écrit à Topal Osman , pour
l'assurer qu'il désiroit d'observer le dernier Traité
de Paix que ses Ministres avoient conclu avec
ceux de la Porte.
On a appris depuis de Constantinople que le
Grand Seigneur a fait part à tous les Ministres
Etrangers qui résident près S. H. de la Victoire
remportée par l'Armée Otthomane , sur celle de
Thamas
2470 MERCURE DE FRANCE
Thamas Kouli - Kan,et 300 des principaux d'entre
les Persans, qui ont été faits prisonniers dans
le combat , et que Topal Osman a fait conduire
dans cette Capitale , ont été exposez pendant
plusieurs jours dans la Grande Place , vis-à- vis
le Sérail.
Le 3 Septembre , il arriva un Courrier , par
lequel ce General mande à Sa Hautesse qu'on
n'étoit pas encore instruit du lieu où Thamas-
Kouli -Kan s'étoit retire depuis sa défaite , et
qu'Achmet , Pacha de Bagdad , avoit reçu avis
de divers endroits , que Schahp- Thamas étoit retourné
à Ispahan, et que la plus grande partie de
la principale Noblesse Persanne s'y étoit renduë
pour reconnoître son légitime Souverain.
Achmet- Pacha a écrit depuis au G. S. pour
l'informer qu'on assuroit que le Roy de Perse
faisoit tous ses efforts pour détruire l'opinion où
l'on est à Constantinople , que toutes les démar
ches de Thamas - Kouli -Kan ont été concertées
avec lui ; qu'il avoit pour cet effet éloigné
du Ministere tous les Parens et Amis de Thamas◄
Kouli-Kan qu'il avoit rappellé ceux que ce Ministre
avoit dépossédez , et qu'il devoit envoyer
des Ambassadeurs à S. H. pour la prier de ne
point faire porter ni à lui , ni à son Royaume
la peine de la perfidie d'un Sujet Rebelle , dont
al désaprouvoit la conduite , et de lui accorder
une suspension d'Armes , pendant laquelle les
Ministres de la Porte et les siens pûssent convenir
des moyens d'établir une Paix durable entre
les Turcs et les Persans. On ne croît pas que le
G. S. écoute aucune proposition d'accommodement,
à moins que Schaph Thamas ne consente de
lui livrer Thamas - Kouli - Kan .
L'Escadre que le G. S. avoit envoyée pour
escorter
NOVEM 5 K E. 1733. 2471
escorter celle d'Alger est de retour aux Darda
nelles , mais Dgianum Codgia n'est pas encore
arrivé .
Le bruit court qu'on doit faire des levées considérables
d'hommes dans tous les Païs de la ,
domination de S. H. et l'on ne dit point les rai
sons qui l'engagent à faire cette augmentation
dans ses Troupes.
Par les Lettres du 20 Septembre , on apprend
que Topal Osman s'étoit emparé de la Ville de
Tauris , après un Siége de quelques jours, et qu'il
en faisoit rafer les fortifications. On confirme que
l'Armée Persanne a été entierement dissipée , que
Thamas - Kouli -Kan s'est sauvé dans les Déserts
, et que le Roy de Perse devoit envoyer des
Ambassadeurs à la Porte, pour prier S. H.d'ou
blier des Actes d'Hostilité , ausquels il n'a e
aucune part , et pour signer une nouvelle Ratification
du dernier Traité conclu entre les Turcs
et les Persans.
Surat
Elon quelques avis de Constantinople , le
bruit y courroit vers la fin d'Août que Schaph-
Thamas , Roy de Perse détrôné , s'étoit rendu à
Ispahan depuis la défaite de Thamas-Koulikan,
son Usurpateur, qu'il étoit remonté sur le Thrône
, et qu'il avoit écrit à Topal Osman , pour
l'assurer qu'il désiroit d'observer le dernier Traité
de Paix que ses Ministres avoient conclu avec
ceux de la Porte.
On a appris depuis de Constantinople que le
Grand Seigneur a fait part à tous les Ministres
Etrangers qui résident près S. H. de la Victoire
remportée par l'Armée Otthomane , sur celle de
Thamas
2470 MERCURE DE FRANCE
Thamas Kouli - Kan,et 300 des principaux d'entre
les Persans, qui ont été faits prisonniers dans
le combat , et que Topal Osman a fait conduire
dans cette Capitale , ont été exposez pendant
plusieurs jours dans la Grande Place , vis-à- vis
le Sérail.
Le 3 Septembre , il arriva un Courrier , par
lequel ce General mande à Sa Hautesse qu'on
n'étoit pas encore instruit du lieu où Thamas-
Kouli -Kan s'étoit retire depuis sa défaite , et
qu'Achmet , Pacha de Bagdad , avoit reçu avis
de divers endroits , que Schahp- Thamas étoit retourné
à Ispahan, et que la plus grande partie de
la principale Noblesse Persanne s'y étoit renduë
pour reconnoître son légitime Souverain.
Achmet- Pacha a écrit depuis au G. S. pour
l'informer qu'on assuroit que le Roy de Perse
faisoit tous ses efforts pour détruire l'opinion où
l'on est à Constantinople , que toutes les démar
ches de Thamas - Kouli -Kan ont été concertées
avec lui ; qu'il avoit pour cet effet éloigné
du Ministere tous les Parens et Amis de Thamas◄
Kouli-Kan qu'il avoit rappellé ceux que ce Ministre
avoit dépossédez , et qu'il devoit envoyer
des Ambassadeurs à S. H. pour la prier de ne
point faire porter ni à lui , ni à son Royaume
la peine de la perfidie d'un Sujet Rebelle , dont
al désaprouvoit la conduite , et de lui accorder
une suspension d'Armes , pendant laquelle les
Ministres de la Porte et les siens pûssent convenir
des moyens d'établir une Paix durable entre
les Turcs et les Persans. On ne croît pas que le
G. S. écoute aucune proposition d'accommodement,
à moins que Schaph Thamas ne consente de
lui livrer Thamas - Kouli - Kan .
L'Escadre que le G. S. avoit envoyée pour
escorter
NOVEM 5 K E. 1733. 2471
escorter celle d'Alger est de retour aux Darda
nelles , mais Dgianum Codgia n'est pas encore
arrivé .
Le bruit court qu'on doit faire des levées considérables
d'hommes dans tous les Païs de la ,
domination de S. H. et l'on ne dit point les rai
sons qui l'engagent à faire cette augmentation
dans ses Troupes.
Par les Lettres du 20 Septembre , on apprend
que Topal Osman s'étoit emparé de la Ville de
Tauris , après un Siége de quelques jours, et qu'il
en faisoit rafer les fortifications. On confirme que
l'Armée Persanne a été entierement dissipée , que
Thamas - Kouli -Kan s'est sauvé dans les Déserts
, et que le Roy de Perse devoit envoyer des
Ambassadeurs à la Porte, pour prier S. H.d'ou
blier des Actes d'Hostilité , ausquels il n'a e
aucune part , et pour signer une nouvelle Ratification
du dernier Traité conclu entre les Turcs
et les Persans.
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Résumé : TURQUIE ET PERSE.
À la fin août, des rumeurs à Surat indiquaient que Schah-Thamas avait repris le trône de Perse après la défaite de Thamas-Kouli-Kan. Schah-Thamas a affirmé vouloir respecter le traité de paix avec la Porte ottomane. L'armée ottomane a vaincu Thamas-Kouli-Kan, capturant ce dernier et 300 notables persans. Topal Osman a rapporté que Thamas-Kouli-Kan s'était enfui et que Schah-Thamas était retourné à Ispahan, soutenu par la noblesse persane. Achmet Pacha a informé le Grand Seigneur que Schah-Thamas cherchait à réfuter les accusations de complicité avec Thamas-Kouli-Kan et prévoyait d'envoyer des ambassadeurs pour négocier une paix durable. L'escadre ottomane revenue aux Dardanelles, des rumeurs de levées massives d'hommes circulaient. Topal Osman a pris la ville de Tauris, dispersant l'armée persane et forçant Thamas-Kouli-Kan à se réfugier dans les déserts. Schah-Thamas devait envoyer des ambassadeurs à la Porte pour demander une nouvelle ratification du traité de paix.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 2892-2900
AUTRE LETTRE de Constantinople du 18 Novembre 1733. Défaite de Thamas Kouli-Kan par Topal-Osman.
Début :
Plusieurs Tartares arrivez ici dans la nuit du 8. au 9. de ce mois, ont apporté la nouvelle [...]
Mots clefs :
Thamas Kouli-Kan, Topal Osman Pacha, Armée, Sérasker, Général, Hommes, Bagdad, Kerkout, Perse, Aghuans, Persans, Porte, Constantinople
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE LETTRE de Constantinople du 18 Novembre 1733. Défaite de Thamas Kouli-Kan par Topal-Osman.
AUTRE LETTRE de Constantinople
du 18 Novembre 1733. Défaute de
Thamas Kouli - Kan par Topal Osman.
Plusieurs Tartares arrivez ici dans la nuit du
8. au 9. de ce mois , ont apporté la nouvelle .
d'une seconde victoire que Topal - Osman Pacha
Seraskier a remportée le 22. du mois passé.
Mais avant que d'en faire le récit , il est à propos
de reprendre les choses de plus loin et
de rapporter quelques faits qui ont precedé cer
Evenement, dont on a été d'autant plus surpris
qu'on n'avoit pas lieu de s'y attendre.
Depuis la défaite de Thamas- Kouli Kan , du
19. Juillet , et la levée du Blocus de Bagdad ,
qui deux jours après en fut le premier fruit , ce
General Persan, quoique dangereusement blessé ,
ayant gagné Amadan avec les debris de son Armée,
paroissoit y vouloir demeurer sur la deffensive,
soit par les soins qu'il prenoit de fortifier cette
Place et quelques autres aux environs , soit par
II. Vel - Je
DECEMBRE. 1733. 2893
le peu de monde qui lui restoit en état de servir.
Il est vrai que quelque temps après sa retraite
à Amadan il écrivit à Acmet - Pacha, Gouverneur
de, Bagdad , que malgré les désavantages qu'il
avoit eus cette année , il ne se tenoit pas pour
tout-à- fait vaincu , qu'il reconnoissoit les fautes
qu'il avoit commises , et qu'il n'y retomberoit
plus ; mais que comme il vouloit faire la guerre
noblement , il le prévenoit d'avance qu'au Printemps
prochain il se remettroit en campagne
avec une Armée plus nombreuse que celle qu'il
avoit perdue , et qu'il l'iroit trouver à Bagdad.
Ces menaces pouvant être regardées comme
des rodomontades , sur tout de la part d'un homme
aussi va n que l'est Kouli - Kan , et ne devant
pas d'ailleurs s'executer si - tôt , on n'avoit
pas sujet d'en craindre des effets prochains.
Achmet-Pacha cependant ne laissa pas de redoubler
son attention pour ravitailler sa Place
et la mettre en état de soutenir un second Siege,
autant que le Pais des environs qui est entiererement
ruiné à plus de 20. lieues à la ronde , et
les autres circonstances où il se trouvoit , pouvoient
le lui permettre ; et Topal Osman , qui
de son côté ne pouvoit , faute de munitions ,
tenter de nouvelles conquêtes , se borna à envoyer
Poulac Pacha avec 6000. hommes s'emparer
de Takaya ou Tayon , suivant la Carte de
M. de Lisle , Défilé dans des Montagnes , par où
il faut absolument passer pour venir d'Amadan
sur les Terres de Turquie. Ensuite divisant son
Armée en plusieurs corps pour la faire plus aisément
subsister, il se retira à Kerkout,à cinq journées
de ce passage, avec environ trente mille hommes
seulement , qu'il disposa dans les lieux cir-
Convoisins , n'en gardant avec lui qu'un petit
II. Vol. nombre
2894 MERCURE DE FRANCE
nombre pour servir de garnison à cette Forteresse.
Les choses étoient dans cet état quand le Seraskier
eut avis que le fils de Thamas Kouli-Kan
amenoit au Candahar quarante mille Aghuans à
son pere , il en informa aussi-tôt la Porte par
un Courier qu'il dépêcha , et representa , comme
il l'avoit déja fait plusieurs fois , la necessité
qu'il y avoit d'envoyer en Perse de prompts secours
d'hommes , d'argent et de vivres , et il demanda
en même - temps qu'en consideration de
sa vieillesse et de ses infirmitez , on lui permit
de se démettre de la Charge de Séraskier, en faveur
d'Achinet Pacha , qui étoit plus en état que
lui de la remplir dignement.
Le G. S. deferant à ses prieres , et ne voulant
pourtant pas qu'is se retirat entierement du service
, l'avoit nonmé Pacha de Cutaya'; Ville
d'Asie , à trois journées de Constantinople , et
Beyglerbey de Natolie ; l'expedition des ordres
pour ces nouveaux arrangemens , étoit même
déja prête à partir , lorsque la Porte reçut de
nouvelles Lettres de Topal- Osman , par lesquel
les il mandoit que les Persans avoient forcé le
passage de Takaya , et que leur General s'avançoit
vers lui avec une nombreuse Armee de Cavalerie
, sur quoi il renouvelloit ses instances
pour l'envoi des secours qu'il avoit demandez.
On tint sur ce sujet un Grand- Conseil au Sérail
le premier de ce mois , mais les résolutions
qu'on y prit furent tenues si secrettes , que le
Public ne fut pas même informé alors de la nouvelle
pour laquelle ce Conseil avoit été assemblé.
On scut seulement qu'on y avoit décidé de sus
pendre l'execution des ordres dont j'ai parlé cy
dessus et que Topal -Osman continueroit à com
nander l'Armée Ottomane en Perse.
DECEMBRE . 1733. 2895
>
Venons à Kouli - Kan ; les Aghuans que conduisoit
son fils , l'ayant joint à Amadan , il en
partit peu de jours après avec so. à 60. mille
hommes de Cavalerie , dont il fit prendre les devans
20. mille pour se saisir du défilé de Takaya.
Poulac Pacha , à qui , comme on l'a dit ,
la garde en avoit été confiée soit qu'il cut
négligé de s'y fortifier , ou qu'il eût été surpris
all'improviste , soit qu'il ne lui parût pas possible
de résister à l'Armée Persane , que de faux avis
lui avoient fait monter à 200. milie Combatans ;
Poulac- Pacha , dis je , à la vue des 20. mille
Aghuans qui venoient l'attaquer , prit la fuite et
se sauva , à la verité , avec presque tout son
monde , mais sans pouvoir rien emporter de son
Camp , qu'il abandonna.
Dès que Topal - Osman le vit arriver en
fuyard à Kerkout , il fut si indigné contre lui ,
et sur tout de ce qu'il n'avoit pas eu le soin de
prendre de plus exactes informations sur le veritable
nombre des ennemis, qu'il vouloit lui taire
couper la tête. Cependant tant de gens de cousidération
se jetterent à ses pieds , pour lui demander
la grace de cet infortuué Pacha , en lui
rappellant les marques éclatantes , qu'il avoit
données de sa bravoure dans la Bataille du 19 Juil.
let qu'enfin le Seraskier se laissa fléchir; mais prévoyant
bien qu'il alloit se trouver dans de grands
embarras , que le danger étoit pressant , et qu'il
ne devoit pas compter sur les secours qu'il avoit
si souvent sollicitez à la Porte , il se tourna du
côté des Arabes du voisinage dont il demanda
l'assistance et dont plusieurs Cheiks , ou Commandants
lui ammenerent sept à huit mille
hommes. Il rapella en même tems le plus de
Troupes Ottomanes qu'il put rassembler , sor-
I. Vol.
2896 MERCURE DE FRANCE
氧
tit de Kerkout , mit son Armée en Bataille devant
cette place ; et fit faire de bons retranchemens
, boracz de 60 piéces de Canons.
Il étoit encore occupé à fortifier son Camp ,
lorsqu'un exprès du General de Perse lui en apporta
une Lettre , par laquelle cet orgueilleux
ennemi marquoit qu'il marchoit à lui , et que
non -seulemene il enleveroit sa petite Armée ,
mais qu'il l'enleveroit lui même comme un enfant
avec son Bechik. Pour entendre la mauvaise
plaisanterie que ce mot Persan renferme , il faut
sçavoir qu'il signifie tout à la fois , Berceau et
Litiere , et que Topal Osman à cause de ses infirmitez
est obligé depuis long- tems à se servir
de cette voiture.
Le Seraskier ne répondit autre chose à cette
Lettre insultante , sinon qu'il étoit boiteux ,
vieux , et malade qu'il ne pouvoit aller au devant
de Kouli- Kan, mais qu'il l'attendoit et que
/ Dieu décideroit de tout.
Ce dernier continuant sa route passa près de
Bagdad sans s'arrêter , comptant toujours que
cette place ne pouroit manquer de tomber entre
ses mains , dès qu'il auroit battu les Turcs ,
comme il s'en flatoit : mais on dit qu'il surprit
tine fort grosse Caravane qui sortoit de cette
Ville , et qui étant destinée pour Alep , Smirne,
et Constantinople , étoit d'autant plus riche que
ceux qui l'avoient formée , croyant leurs effets
en sureté sur la route , depuis la défaite et la
retraite des Persans , ils avoient fait des envoys
considerables de Marchandises précieuses pour
se dédommager de la longue interruption de leur
commerce.
Enfin Kouli- Kan venant à paroître à la veuë
de Kerkout , le 22 Octobre Topal - Osman le
II. Vol. laissa
DECEMBRE . 1733. 2897
laissa approcher de ses retranchemens jusqu'à la
portée du fusil : il fit faire alors une décharge
de toute son Artillerie chargée à mitraille , et de
toute sa Mousqueterie , ce qui commença à
jetter un grand désordre dans l'Armée Persane , )
il dit à ses Soldats qu'il n'avoit rien à leur commander
; qu'ils étoient bien retranchez et qu'ils
pouvoient se tenir sur la deffensive ; mais qu'il
permettroit volontiers de sortir du Camp à tous
ceux qui auroient assez de valeur pour aller atta
quer l'ennemi . A ce discours , les Jannissaires
du Caire , et quelques Corps de Romelie qui ne
s'étoient point trouvez à l'Action du 19 Juillet
se piquerent d'honneur ; et secondez par quelques
autres Troupes et par les Arabes , ils fondirent
avec furie sur les Persans . Il faisoit beaucoup
de poussiere , un gros brouillard et un
vent qui soufloit la poudre aux yeux de ceux ci,
dont les Turcs tirerent un grand avantage.
›
Après quatre heures d'un combat opiniâtre ,
le Seraskier s'appercevant que ses Troupes prenoient
le dessus , il fit ordonner à tout ce qui
lui en restoit dans le Camp , de venir partager
le péril et la gloire de cette journée. Ce renfort
redoubla le courage des Turcs et acheva d'abbattre
celui des Persans : ils prirent enfin la fuite,
laissant 6000 des leurs sur la Place , dont on apporta
les têtes aux pieds de Topal - Osman , ct
trois mille Prisonniers , parmi lesquels on dit ,
que sont le Beau- pere et le neveu de Kouli - Kan
avec plusieurs Seigneurs de marque.
> Le Seraskier les ayant fait venir devant lui
leur demanda comment leur General après avoir
été si bien battu auprès de Bagdat, étoit revenu
le chercher avec tant de diligence ? Seigneur
lui répondirent- ils , Thamas Kouli - Kan n'a d'a-
II. Vol. G bord .
288 MERCURE DE FRANCE
,
bord fait cette démarches que sur les assurances
qu'on lui avoit données de plusieurs endroits que
vous étiez mort et dans la persuasion où il étoit
qu'un Chef tel que vous manquant à l'Armée Ottomane
, il en triompheroit aisément , et qu'ensuite il
ne trouveroit que de foibles obstacles à s'emparer de
Bagdad. Il a bien reconnu depuis , qu'on lui en
avoit imposé , mais il n'a pú se résoudre à reculer,
et il s'est d'ailleurs fié en son courage et à celui des
Aghuans , avec lesquels il a ci- devant remporté
beaucoup de Victoires ,
Il est à remarquer qu'aussi - tôt qu'Achmet Pacha
eût apris que Polac Pacha avoit abandonné le defilé
de Taxaya , il se pressa de faire entrer dans sa
Place tout ce qu'il put ramasser d'utile , et de faire
fermer les Portes , ne doutant pas que Kouli - Kan
ne vint en renouveler le blocus . Il régaloit même
dans ce moment le Buyuk Imbrohor , ou grand
Ecuyer du G.S.qui étoit sur le point de partir pour
revenir à Constantinople ; et iui ayant represen
té le risque qu'il y auroit pour lui sur le chemin
de Bagdad à Kerkout , qui devoit être alors infesté
de partis Ennemis , il lui fit prendre la route
de Mossul par le desert. Topal - Osman en
ayant été informé , envoya à ce Grand - Ecuyer
une Relation de l'Affaire qu'on vient de raconter ,
avec ordre de la faire passer incessamment à la
Porte , et d'attendre encore de ses nouvelles à
Mossul.
On présume de - là , qu'apparemment le Seraskier
veut lui faire remettre avec sureté le Beaupere
et le neveu de Kouli- Kan , avec les autres
Prisonniers de distinction , pour qu'il les conduise
et les présente lui - même au G. S.
Comme suivant quelques avis Kouli-Kan
après cette derniere déroute . s'étoit arrêté à
II. Vol. Leilan
DFCEMBRE. 1733. 2899
>
Leilan qui n'est qu'à cinq lieues de Kerkout
et qu'on craint avec raison qu'il ne veuille encore
tenter le sort des Armes , la Porte a dépêché un
Courier à Demir Pacha qui commiande 40
mille hommes aux environs de Tauris , avec ordre
de marcher en diligence avec les Tartares
qui sont passez en Perse , lesquels l'auront joint
vers les lieux où l'Armée de Kouli - Kan sera
campée.
Quoique cette nouvelle Victoire de Topal-
Osman soit encore plus glorieuse pour lui que la
premiere , on n'a cependant point tiré le Canon
ici , comme il est d'usage en pareil cas , parce
qu'on attend, dit - on , l'arrivée du Buyuk Imbrohor,
ou celle de quelque personne qui vienne directement
de la part du Seraskier.
Du 18 Novembre 1733.
P. V. D.
Comme j'allois fermer mon paquet , Monsieur,
on m'est venu dire une nouvelle de la derniere
importance pour cet Empire ; sçavoir , que Topal-
Osman Pacha étant allé attaquer Thamas
Kouli- Kan à Leilan , où je vous ai marqué qu'il
s'étoit arrêté , après sa dérouté du 22 Octobre ,
les Aghuans qui composoient la meilleure partie
de l'Armée Persane, avoient ployé leurs Etendarts
et s'étoient venus rendre à Topal - Osman , que
Kouli-Kan trop affoibli par cette désertion
pour pouvoir resister aux Turcs , avoit pris la
fuite vers la Perse avec environ 10000 hommes
qui lui restoient , que Topal - Osman l'avoit fait
suivre par Menis Pacha à la tête d'un gros
Corps de Troupes , et avoit donné ordre en
même tems aux Curdes de s'emparer d'un defilé
par où il falloit necessairement que les Persans
II. Vol.
Gij
passassent
2000 MERCURE DE FRANCE
>
passassent; que leur General se voyant prêt d'être
assailli par devant et par derriere , sans espérance
de pouvoir échapper , avoit écrit une Lettre
à Topal- Osman , par laquelle il se confessoit
vaincu et lui demandoit la Paix à telles conditions
qu'il voudroit lui imposer , mais que le
Seraskier lui avoit répondu que le regardant
comme un Rebelle , il ne vouloit traiter en aucune
façon avec lui ; enfin que suivant l'extre
mité ou Kouli- Kan étoit réduit au depart des
trois Couriers qui ont apporté cette nouvelle
ce matin , ce General Persan doit avoir été pris
depuis avec le reste de son Armée.
On a tenu ici sur le champ un Conseil general
au Serail , dans lequel il a été résolu d'envoyer
sans délai des pleins pouvoirs à Topal - Osman ,
pour traiter de la Paix avec des Ministres du léitime
Souverain de Perse , que l'on dit être un
jeune Fils de Schah - Thamas , ce dernier étant
à ce que l'on ajoute , et avec ordre de
n'écouter aucune proposition de la part de Thamas
Kouli- Kan,
mort ,
P. V. D.
du 18 Novembre 1733. Défaute de
Thamas Kouli - Kan par Topal Osman.
Plusieurs Tartares arrivez ici dans la nuit du
8. au 9. de ce mois , ont apporté la nouvelle .
d'une seconde victoire que Topal - Osman Pacha
Seraskier a remportée le 22. du mois passé.
Mais avant que d'en faire le récit , il est à propos
de reprendre les choses de plus loin et
de rapporter quelques faits qui ont precedé cer
Evenement, dont on a été d'autant plus surpris
qu'on n'avoit pas lieu de s'y attendre.
Depuis la défaite de Thamas- Kouli Kan , du
19. Juillet , et la levée du Blocus de Bagdad ,
qui deux jours après en fut le premier fruit , ce
General Persan, quoique dangereusement blessé ,
ayant gagné Amadan avec les debris de son Armée,
paroissoit y vouloir demeurer sur la deffensive,
soit par les soins qu'il prenoit de fortifier cette
Place et quelques autres aux environs , soit par
II. Vel - Je
DECEMBRE. 1733. 2893
le peu de monde qui lui restoit en état de servir.
Il est vrai que quelque temps après sa retraite
à Amadan il écrivit à Acmet - Pacha, Gouverneur
de, Bagdad , que malgré les désavantages qu'il
avoit eus cette année , il ne se tenoit pas pour
tout-à- fait vaincu , qu'il reconnoissoit les fautes
qu'il avoit commises , et qu'il n'y retomberoit
plus ; mais que comme il vouloit faire la guerre
noblement , il le prévenoit d'avance qu'au Printemps
prochain il se remettroit en campagne
avec une Armée plus nombreuse que celle qu'il
avoit perdue , et qu'il l'iroit trouver à Bagdad.
Ces menaces pouvant être regardées comme
des rodomontades , sur tout de la part d'un homme
aussi va n que l'est Kouli - Kan , et ne devant
pas d'ailleurs s'executer si - tôt , on n'avoit
pas sujet d'en craindre des effets prochains.
Achmet-Pacha cependant ne laissa pas de redoubler
son attention pour ravitailler sa Place
et la mettre en état de soutenir un second Siege,
autant que le Pais des environs qui est entiererement
ruiné à plus de 20. lieues à la ronde , et
les autres circonstances où il se trouvoit , pouvoient
le lui permettre ; et Topal Osman , qui
de son côté ne pouvoit , faute de munitions ,
tenter de nouvelles conquêtes , se borna à envoyer
Poulac Pacha avec 6000. hommes s'emparer
de Takaya ou Tayon , suivant la Carte de
M. de Lisle , Défilé dans des Montagnes , par où
il faut absolument passer pour venir d'Amadan
sur les Terres de Turquie. Ensuite divisant son
Armée en plusieurs corps pour la faire plus aisément
subsister, il se retira à Kerkout,à cinq journées
de ce passage, avec environ trente mille hommes
seulement , qu'il disposa dans les lieux cir-
Convoisins , n'en gardant avec lui qu'un petit
II. Vol. nombre
2894 MERCURE DE FRANCE
nombre pour servir de garnison à cette Forteresse.
Les choses étoient dans cet état quand le Seraskier
eut avis que le fils de Thamas Kouli-Kan
amenoit au Candahar quarante mille Aghuans à
son pere , il en informa aussi-tôt la Porte par
un Courier qu'il dépêcha , et representa , comme
il l'avoit déja fait plusieurs fois , la necessité
qu'il y avoit d'envoyer en Perse de prompts secours
d'hommes , d'argent et de vivres , et il demanda
en même - temps qu'en consideration de
sa vieillesse et de ses infirmitez , on lui permit
de se démettre de la Charge de Séraskier, en faveur
d'Achinet Pacha , qui étoit plus en état que
lui de la remplir dignement.
Le G. S. deferant à ses prieres , et ne voulant
pourtant pas qu'is se retirat entierement du service
, l'avoit nonmé Pacha de Cutaya'; Ville
d'Asie , à trois journées de Constantinople , et
Beyglerbey de Natolie ; l'expedition des ordres
pour ces nouveaux arrangemens , étoit même
déja prête à partir , lorsque la Porte reçut de
nouvelles Lettres de Topal- Osman , par lesquel
les il mandoit que les Persans avoient forcé le
passage de Takaya , et que leur General s'avançoit
vers lui avec une nombreuse Armee de Cavalerie
, sur quoi il renouvelloit ses instances
pour l'envoi des secours qu'il avoit demandez.
On tint sur ce sujet un Grand- Conseil au Sérail
le premier de ce mois , mais les résolutions
qu'on y prit furent tenues si secrettes , que le
Public ne fut pas même informé alors de la nouvelle
pour laquelle ce Conseil avoit été assemblé.
On scut seulement qu'on y avoit décidé de sus
pendre l'execution des ordres dont j'ai parlé cy
dessus et que Topal -Osman continueroit à com
nander l'Armée Ottomane en Perse.
DECEMBRE . 1733. 2895
>
Venons à Kouli - Kan ; les Aghuans que conduisoit
son fils , l'ayant joint à Amadan , il en
partit peu de jours après avec so. à 60. mille
hommes de Cavalerie , dont il fit prendre les devans
20. mille pour se saisir du défilé de Takaya.
Poulac Pacha , à qui , comme on l'a dit ,
la garde en avoit été confiée soit qu'il cut
négligé de s'y fortifier , ou qu'il eût été surpris
all'improviste , soit qu'il ne lui parût pas possible
de résister à l'Armée Persane , que de faux avis
lui avoient fait monter à 200. milie Combatans ;
Poulac- Pacha , dis je , à la vue des 20. mille
Aghuans qui venoient l'attaquer , prit la fuite et
se sauva , à la verité , avec presque tout son
monde , mais sans pouvoir rien emporter de son
Camp , qu'il abandonna.
Dès que Topal - Osman le vit arriver en
fuyard à Kerkout , il fut si indigné contre lui ,
et sur tout de ce qu'il n'avoit pas eu le soin de
prendre de plus exactes informations sur le veritable
nombre des ennemis, qu'il vouloit lui taire
couper la tête. Cependant tant de gens de cousidération
se jetterent à ses pieds , pour lui demander
la grace de cet infortuué Pacha , en lui
rappellant les marques éclatantes , qu'il avoit
données de sa bravoure dans la Bataille du 19 Juil.
let qu'enfin le Seraskier se laissa fléchir; mais prévoyant
bien qu'il alloit se trouver dans de grands
embarras , que le danger étoit pressant , et qu'il
ne devoit pas compter sur les secours qu'il avoit
si souvent sollicitez à la Porte , il se tourna du
côté des Arabes du voisinage dont il demanda
l'assistance et dont plusieurs Cheiks , ou Commandants
lui ammenerent sept à huit mille
hommes. Il rapella en même tems le plus de
Troupes Ottomanes qu'il put rassembler , sor-
I. Vol.
2896 MERCURE DE FRANCE
氧
tit de Kerkout , mit son Armée en Bataille devant
cette place ; et fit faire de bons retranchemens
, boracz de 60 piéces de Canons.
Il étoit encore occupé à fortifier son Camp ,
lorsqu'un exprès du General de Perse lui en apporta
une Lettre , par laquelle cet orgueilleux
ennemi marquoit qu'il marchoit à lui , et que
non -seulemene il enleveroit sa petite Armée ,
mais qu'il l'enleveroit lui même comme un enfant
avec son Bechik. Pour entendre la mauvaise
plaisanterie que ce mot Persan renferme , il faut
sçavoir qu'il signifie tout à la fois , Berceau et
Litiere , et que Topal Osman à cause de ses infirmitez
est obligé depuis long- tems à se servir
de cette voiture.
Le Seraskier ne répondit autre chose à cette
Lettre insultante , sinon qu'il étoit boiteux ,
vieux , et malade qu'il ne pouvoit aller au devant
de Kouli- Kan, mais qu'il l'attendoit et que
/ Dieu décideroit de tout.
Ce dernier continuant sa route passa près de
Bagdad sans s'arrêter , comptant toujours que
cette place ne pouroit manquer de tomber entre
ses mains , dès qu'il auroit battu les Turcs ,
comme il s'en flatoit : mais on dit qu'il surprit
tine fort grosse Caravane qui sortoit de cette
Ville , et qui étant destinée pour Alep , Smirne,
et Constantinople , étoit d'autant plus riche que
ceux qui l'avoient formée , croyant leurs effets
en sureté sur la route , depuis la défaite et la
retraite des Persans , ils avoient fait des envoys
considerables de Marchandises précieuses pour
se dédommager de la longue interruption de leur
commerce.
Enfin Kouli- Kan venant à paroître à la veuë
de Kerkout , le 22 Octobre Topal - Osman le
II. Vol. laissa
DECEMBRE . 1733. 2897
laissa approcher de ses retranchemens jusqu'à la
portée du fusil : il fit faire alors une décharge
de toute son Artillerie chargée à mitraille , et de
toute sa Mousqueterie , ce qui commença à
jetter un grand désordre dans l'Armée Persane , )
il dit à ses Soldats qu'il n'avoit rien à leur commander
; qu'ils étoient bien retranchez et qu'ils
pouvoient se tenir sur la deffensive ; mais qu'il
permettroit volontiers de sortir du Camp à tous
ceux qui auroient assez de valeur pour aller atta
quer l'ennemi . A ce discours , les Jannissaires
du Caire , et quelques Corps de Romelie qui ne
s'étoient point trouvez à l'Action du 19 Juillet
se piquerent d'honneur ; et secondez par quelques
autres Troupes et par les Arabes , ils fondirent
avec furie sur les Persans . Il faisoit beaucoup
de poussiere , un gros brouillard et un
vent qui soufloit la poudre aux yeux de ceux ci,
dont les Turcs tirerent un grand avantage.
›
Après quatre heures d'un combat opiniâtre ,
le Seraskier s'appercevant que ses Troupes prenoient
le dessus , il fit ordonner à tout ce qui
lui en restoit dans le Camp , de venir partager
le péril et la gloire de cette journée. Ce renfort
redoubla le courage des Turcs et acheva d'abbattre
celui des Persans : ils prirent enfin la fuite,
laissant 6000 des leurs sur la Place , dont on apporta
les têtes aux pieds de Topal - Osman , ct
trois mille Prisonniers , parmi lesquels on dit ,
que sont le Beau- pere et le neveu de Kouli - Kan
avec plusieurs Seigneurs de marque.
> Le Seraskier les ayant fait venir devant lui
leur demanda comment leur General après avoir
été si bien battu auprès de Bagdat, étoit revenu
le chercher avec tant de diligence ? Seigneur
lui répondirent- ils , Thamas Kouli - Kan n'a d'a-
II. Vol. G bord .
288 MERCURE DE FRANCE
,
bord fait cette démarches que sur les assurances
qu'on lui avoit données de plusieurs endroits que
vous étiez mort et dans la persuasion où il étoit
qu'un Chef tel que vous manquant à l'Armée Ottomane
, il en triompheroit aisément , et qu'ensuite il
ne trouveroit que de foibles obstacles à s'emparer de
Bagdad. Il a bien reconnu depuis , qu'on lui en
avoit imposé , mais il n'a pú se résoudre à reculer,
et il s'est d'ailleurs fié en son courage et à celui des
Aghuans , avec lesquels il a ci- devant remporté
beaucoup de Victoires ,
Il est à remarquer qu'aussi - tôt qu'Achmet Pacha
eût apris que Polac Pacha avoit abandonné le defilé
de Taxaya , il se pressa de faire entrer dans sa
Place tout ce qu'il put ramasser d'utile , et de faire
fermer les Portes , ne doutant pas que Kouli - Kan
ne vint en renouveler le blocus . Il régaloit même
dans ce moment le Buyuk Imbrohor , ou grand
Ecuyer du G.S.qui étoit sur le point de partir pour
revenir à Constantinople ; et iui ayant represen
té le risque qu'il y auroit pour lui sur le chemin
de Bagdad à Kerkout , qui devoit être alors infesté
de partis Ennemis , il lui fit prendre la route
de Mossul par le desert. Topal - Osman en
ayant été informé , envoya à ce Grand - Ecuyer
une Relation de l'Affaire qu'on vient de raconter ,
avec ordre de la faire passer incessamment à la
Porte , et d'attendre encore de ses nouvelles à
Mossul.
On présume de - là , qu'apparemment le Seraskier
veut lui faire remettre avec sureté le Beaupere
et le neveu de Kouli- Kan , avec les autres
Prisonniers de distinction , pour qu'il les conduise
et les présente lui - même au G. S.
Comme suivant quelques avis Kouli-Kan
après cette derniere déroute . s'étoit arrêté à
II. Vol. Leilan
DFCEMBRE. 1733. 2899
>
Leilan qui n'est qu'à cinq lieues de Kerkout
et qu'on craint avec raison qu'il ne veuille encore
tenter le sort des Armes , la Porte a dépêché un
Courier à Demir Pacha qui commiande 40
mille hommes aux environs de Tauris , avec ordre
de marcher en diligence avec les Tartares
qui sont passez en Perse , lesquels l'auront joint
vers les lieux où l'Armée de Kouli - Kan sera
campée.
Quoique cette nouvelle Victoire de Topal-
Osman soit encore plus glorieuse pour lui que la
premiere , on n'a cependant point tiré le Canon
ici , comme il est d'usage en pareil cas , parce
qu'on attend, dit - on , l'arrivée du Buyuk Imbrohor,
ou celle de quelque personne qui vienne directement
de la part du Seraskier.
Du 18 Novembre 1733.
P. V. D.
Comme j'allois fermer mon paquet , Monsieur,
on m'est venu dire une nouvelle de la derniere
importance pour cet Empire ; sçavoir , que Topal-
Osman Pacha étant allé attaquer Thamas
Kouli- Kan à Leilan , où je vous ai marqué qu'il
s'étoit arrêté , après sa dérouté du 22 Octobre ,
les Aghuans qui composoient la meilleure partie
de l'Armée Persane, avoient ployé leurs Etendarts
et s'étoient venus rendre à Topal - Osman , que
Kouli-Kan trop affoibli par cette désertion
pour pouvoir resister aux Turcs , avoit pris la
fuite vers la Perse avec environ 10000 hommes
qui lui restoient , que Topal - Osman l'avoit fait
suivre par Menis Pacha à la tête d'un gros
Corps de Troupes , et avoit donné ordre en
même tems aux Curdes de s'emparer d'un defilé
par où il falloit necessairement que les Persans
II. Vol.
Gij
passassent
2000 MERCURE DE FRANCE
>
passassent; que leur General se voyant prêt d'être
assailli par devant et par derriere , sans espérance
de pouvoir échapper , avoit écrit une Lettre
à Topal- Osman , par laquelle il se confessoit
vaincu et lui demandoit la Paix à telles conditions
qu'il voudroit lui imposer , mais que le
Seraskier lui avoit répondu que le regardant
comme un Rebelle , il ne vouloit traiter en aucune
façon avec lui ; enfin que suivant l'extre
mité ou Kouli- Kan étoit réduit au depart des
trois Couriers qui ont apporté cette nouvelle
ce matin , ce General Persan doit avoir été pris
depuis avec le reste de son Armée.
On a tenu ici sur le champ un Conseil general
au Serail , dans lequel il a été résolu d'envoyer
sans délai des pleins pouvoirs à Topal - Osman ,
pour traiter de la Paix avec des Ministres du léitime
Souverain de Perse , que l'on dit être un
jeune Fils de Schah - Thamas , ce dernier étant
à ce que l'on ajoute , et avec ordre de
n'écouter aucune proposition de la part de Thamas
Kouli- Kan,
mort ,
P. V. D.
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Résumé : AUTRE LETTRE de Constantinople du 18 Novembre 1733. Défaite de Thamas Kouli-Kan par Topal-Osman.
En novembre 1733, une lettre de Constantinople annonce la victoire de Topal Osman Pacha, Seraskier, sur Thamas Kouli-Kan. Après sa défaite du 19 juillet, Kouli-Kan s'était retranché à Amadan et menaçait de revenir au printemps avec une armée renforcée. Achmet Pacha, gouverneur de Bagdad, avait renforcé les défenses, tandis que Topal Osman, manquant de munitions, avait envoyé Poulac Pacha sécuriser le défilé de Takaya. Kouli-Kan, soutenu par des Aghuans amenés par son fils, a forcé ce passage et vaincu Poulac Pacha. Informé, Topal Osman a rassemblé des troupes et des Arabes, et préparé sa défense à Kerkout. Le 22 octobre, il a repoussé Kouli-Kan, infligeant de lourdes pertes aux Persans. Après cette victoire, Kouli-Kan s'est retiré à Leilan. Topal Osman a poursuivi les Persans, et les Aghuans ont déserté, permettant à Topal Osman de vaincre définitivement Kouli-Kan, qui a fui vers la Perse avec quelques milliers d'hommes. Parallèlement, Thamas Kouli-Kan avait demandé la paix à Topal Osman, mais ce dernier l'avait rejetée, considérant Kouli-Kan comme un rebelle. Des informations récentes suggèrent que Kouli-Kan et son armée ont probablement été capturés. En réponse, un conseil général a été tenu au Serail, décidant d'envoyer des pleins pouvoirs à Topal Osman pour négocier la paix avec les ministres du légitime souverain de Perse, identifié comme un jeune fils de Schah-Thamas. Les instructions étaient de ne pas écouter les propositions de Thamas Kouli-Kan, désormais décédé.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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