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Détail
Liste
1901
p. 216-232
Suite de ce qu'on a déjà rapporté de l'Oraison Funebre de Me de Valençay, Abbesse des Clairets. [titre d'après la table]
Début :
Rien ne devoit estre plus beau, & plus brillant que cette Pompe [...]
Mots clefs :
Pompe funèbre, Abbesse des Cloirets, Ordre de Cîteaux, Oraison funèbre, Mr Gontier, Discours
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texteReconnaissance textuelle : Suite de ce qu'on a déjà rapporté de l'Oraison Funebre de Me de Valençay, Abbesse des Clairets. [titre d'après la table]
Rien ne devoit eftre plus
beau , & plus brillant que
cette Pompe Funebre &
l'efprit & l'invention y brilloient tellement qu'il n'apartient qu'aux Jefuites d'orner
avec tant d'efprit tout ce
qu'ils donnent en Spectacles.
Je vous parlay dans ma
Lettre du mois de Decembre
de la mort de M° d'Ecampes
de Vallençay , Abbeffe des
Clairets de l'Ordre de Citeaux,
& vous rapportay beaucoup
d'endroits
CALANT 217
d'endroits de l'Oraifon funebre , qui en a efté faite par
Mr Gontier , Docteur de Sorbonne , Chanoine & Theologal de l'Eglife de Chatres.
Et comme ce que je vous en
ay mandé vous a paru fi beau
que vous avez dit qu'il meritoit d'eftre fçû de toute la
terre , j'en ay ramaffé encore
quelques morceaux que je
crois quevous trouverez d'une
grande beauté ; & particulicrement la peinture de la vic
Religieufe qui a paffé pour
un chef- d'œuvre. Cet Abbé
avoit pris pour Texte ces
Fanvier 1710.
T
2.8 MERCURE
*
paroles de la Sageffe : eft in
illa fpiritus intelligentia fanctus
unicus , multiplex , c'eft- à dire,
Ily a en elle un efprit d'intelli .
gence ,faint , unique , multiplié.
Et il en tira la divifion de fon
Difcours. Ily avoit en elle , ditil , un efprit d'intelligence ; unique , voilàfafimplicité : multiplié , voilà fon étendue , faint ;
voilà fon excellence &Sa perfection . Il commença enfuite
fon premier Point , en difant
queparle mot de fimplicité , il
fautpas fe figurer une vertu
foible , tranquile , indolente ,
incapable des grandes choſes ; &
ne
GALANT 219
que
indigne des grands hommes , ainfi
ue felon le Pape Saint Gregoire
on l'a prend ordinairement dans le
monde; & queJulien l'Apoftat ,
le reprochoit aux Chreftiens ;
mais entendre une vertu reglée
par la Foy, accompagnée de droitures & de modeftie ; & infeparable de la douceur &de l'humilité; vertu oppoſée à cette efprit
de duplicité que Dieu ne regarde
qu'avec horreur dans l'Ecriture;
àcet efprit de fuperbe qu'ilyfrape
par tout de fes maledictions &
defes anathemes. Ce qui donna
lieu à l'Orateur de parler de
l'origine de fon Heroine chrê-
"
Tij
220 MERCURE
36
tienne. Je remarque , dit - il ,
du cofté paternel dans la Maifon
d'Estampes , fi ancienne dans le
Royaume , les alliances les plus
honorables , les plus celebres , les
plus éminentes dignitez de l'Eglife & de l'Etat j'apperçois
du cofté maternel dans celle de
Montmorency , déja conſiderable
en France dés les premiers fiecles
de la Monarchie , fes ancêtres
diftinguez par tous ces honneurs
quife diftinguent encore da
vantage dans l'Eglife par le titre
de premiers Barons Chreftiens ,
qui leur eft hereditaire ( la mere
de cette Abbeffe eftoit de la Mai-
GALANT 120
ce
fon de Montmorency ) j'y vois
efangqui l'anime , s'élever dans
perfonne des Princeffes ,foutenir en tout temps la gloire de
cet Empire , dans celle des Generaux d'Arméeprefquefans nombre , triompher dans celle des
Conquerans , & regner dans
celle des Monarques par fes glorieufes alliances avec toutes les
Couronnes Chreftiennes. L'Orateur s'arrefta en cet endroit &
pourfuivit en difant ; mais
viendrois je en Partifan du
monde relever la pieté par la
Nobleffe , au lieu de relever en
Minifiredu Seigneur la Nobleffe
-
Tiij
222 MERCURE
que
par la pieté , pendant que des
Payens c'est de Juvenal qu'il
parle ) déclarent la feule
l'unique Nobleffe à le bien
prendre eft la feule & unique
vertu ; à Dieu ne plaiſe , Mi
mais comme les enfans du fiecle
n'eftiment que trop ces dangereux
avantages , je veux feulement
leur faire juger de la grandeur
de fon facrifice par la grandeur .
de fon extraction. Il jetta enfuite encore quelques fleurs
fur le tombeaude l'ayeule maternelle , & de la tante de cette
Abbeffe , dont la fagefimplicité,
dit-il , lapictéfolide; & l'amour
GALANT 223
tendre pour les pauvres feront
jamais en benediction ; & depuis
fous la conduite d'une tante plus
élevée par elle-même que parfa
naiſſance , qui avoit caché la
grandeur , d'une illuftre Ducheffe
fousle Voile d'une humble Religieufe. Mr Gontier fit enfuite
un portrait de la vie Religieufe qui fut délicatement touché :formez- vous , dit- il , dans
voftre efprit l'idée de la vie Religieufe : figurez- vous un estat où
l'on fe traite comme un genre de
perfonnes deftinées à la mort ( inft
que Tertulien le difoit des premiers fidelles ) où l'on facrific le
Tiiij.
224 MERCURE
temps à l'Eternité; où malgré l'amourproprefi naturel à tous les
hommes , on renonce àfa liberté ,
pour n'agir que par la volonté
d'autruy ; & où c'est une espece
decrime de ne fe pas quitter foymême après avoir tout quittés
dans ces afiles de la pieté Chreftiennetous les momensfont reglez
parlafageffe; toutes les actions
lesparolesfontpefées au poids du
Sanctuaire ; les infidélitez les plus
legeresy paffentpourdes monftres ;
les divertiffemens permis dans le
fiecle yfont interdits , les confeils
y deviennent des preceptes. Là
enferveli dans les bornes eftroites
GALANT 225
d'un
, on
Monaftere comme dans un
tombeau au milieu des nourritures fpirituelles dont on eft uniquement occupé , on jeûne avec
courage , on gémit avec amour
non-feulement pour fes pechez ;
mais encore pour ceux des autres ;
on fouffre avec plaisir , onymeurt
àfoy - même auffi - bien qu'au
monde avecjoye. Enfin onyfait
confifterfon trefor àne rien poffeder , fa grandeur à s'aneantir ;
fon bonheur à executer les ordres
du Ciel ; fa gloire à ſe regarder
comme un ferviteur ou unefervante inutile aprés les avoir executez. Reprefentez- vous main-
226 MERCURE
tenant tous ces devoirs de la vie
Religieufe accomplis dans la
droiture e lafimplicité du cœur
afin de plaire à Dieu feul; vous
vous reprefenterezla vie de Me
de Vallançay , car voilà le terme
unique où about foient tous fes
deffeins , c. En parlant de
fes ornemens exterieurs voicy
un trait que l'on ne doit pas
oublier : une Croffe de la matiere
laplus fimple, eftoit la marque la
plus éclatante defa dignité ; pauure , maisprecieux prefent qu'elle
avoit receu du faint Reformateur.
de la Trappe , & qu'elle portoit
avec autant de veneration que le
GALANT 227
grand faint Antoine fe revestoit
de la Robbe du premier des
Solitaires dans les jours Solemnels. Cet Abbé dans le détail
qu'il fit des mouvemens que
cette fainte fille fe donna pour
reformer fon Abbaye dit ce
qui fuit de feu Mr l'Abbé de
la Trappe ; mais à qui s'adreffeta- t-elle pour réuſſie dans une "entreprife fi délicate ; & fi difficile
au fidelle œconome de la Maifon
du Seigneur , je veux dire , à un
homme qui ayant fait revivre
dans fa perfonne les Antoines
les Machaires, les Pachômes , les
·Benoifts , les Bernards , & les
228 MERCURE
plus fameux Anacorettes , les a
fait renaître jufques dans fes
Difciples , qui fe répandent tous
les jours avec tant d'honneur
de fuccés dans le monde
appellez depuis par le Souverain
Pontife dans la Capitale du
qui
Chriftianifme vont édifier plus
heureusement que jamais l'Eglife
par l'aufterité de leur vie ; à un
homme qui ayant rendu à l'Ordre
de Cifteaux la gloire du Liban
la beauté du Carmel & de
Saron afait parler toute la terre
defa merveillenfe Reforme , &
luy a fait garder le filence pourl'admirer ; a unhomme qui n'eftoit
GALANT 229
defcendu de la Chaire Abbatiale
que pour cacherla propre gloire ,
comme il n'y eftoit monté que
pour travailler à celle du Seigneur,
n'a paslaiffé de voir la calomnie
fufcitée par le pere du menfonge ,
attaquer les vertus pour arrêter
lesprogrés étonnans de fon zele
& qui toutefois pour uſer de
L'éloquente expreffion de Saint
Ambroife , en a glorieusement .
triomphéparfon filence , à l'exemple
qui plus heureux que Salomon ,
Już du Sauveur ; à un homme
qui anonfeulement attirédes Prelats , des Rois des Reines (il
parle icy duRoy de la Reine
230 MERCURE
d'Angleterre toutce que l'Eglife
le fiecle ontdeplus élevé jufques dans fon Defert ; & les
ayant charmez par fa fageffe
leura montréle cheminde la veritablegloire ; mais auffi des efclaves
du démon dont il a fait parfon
Zele & par ſes exemples des
Preftres , des Rois éternels
felon la parole des Saints de
l'Apocalypfe , FECISTI ÆTERNE REGNUM ET SACERDOTES.
Si je pouvois joindre icy le
portrait que M.l'Abbé Gontier fit de la nouvelle Abbeffe
qui eft de la mêmeMaiſon que
GALANT 231
le faint Abbé de la Trape , &
qui eft fœur de Mr l'Evêque de
Troyes , on y admireroit unc
éloquence également foute.
nue & unefineffe d'expreffions,
qu'on a déja remarquée dans
les morceaux que j'ay raportez
de ce Difcours ; je n'aurois pas
dû non plus oublier fi je
n'eus craint de donner trop
d'étendue à cet extrait , le détail que cet Abbé fit d'un
prodige arrivé dans l'Abbaye
des Clairets dans un temps
de fterilité ; prodige qu'on a
toûjours attribué aux prieres
de l'Abbeſſe : & qui confiftoit
232 MERCURE
1
en ce qu'on trouva dans le
grenier des pauvres 300. minots de bled plus qu'on y en
avoit mis , prodigè femblable à celuy que le faint Auteur
de la vie de Sainte Macrine
raporte parmi les merveilles de
la vie de cette Sainte , & que
M' Gontier cita en parlant de
celuy qui arriva aux Clairets ,
il y a quelques temps.
beau , & plus brillant que
cette Pompe Funebre &
l'efprit & l'invention y brilloient tellement qu'il n'apartient qu'aux Jefuites d'orner
avec tant d'efprit tout ce
qu'ils donnent en Spectacles.
Je vous parlay dans ma
Lettre du mois de Decembre
de la mort de M° d'Ecampes
de Vallençay , Abbeffe des
Clairets de l'Ordre de Citeaux,
& vous rapportay beaucoup
d'endroits
CALANT 217
d'endroits de l'Oraifon funebre , qui en a efté faite par
Mr Gontier , Docteur de Sorbonne , Chanoine & Theologal de l'Eglife de Chatres.
Et comme ce que je vous en
ay mandé vous a paru fi beau
que vous avez dit qu'il meritoit d'eftre fçû de toute la
terre , j'en ay ramaffé encore
quelques morceaux que je
crois quevous trouverez d'une
grande beauté ; & particulicrement la peinture de la vic
Religieufe qui a paffé pour
un chef- d'œuvre. Cet Abbé
avoit pris pour Texte ces
Fanvier 1710.
T
2.8 MERCURE
*
paroles de la Sageffe : eft in
illa fpiritus intelligentia fanctus
unicus , multiplex , c'eft- à dire,
Ily a en elle un efprit d'intelli .
gence ,faint , unique , multiplié.
Et il en tira la divifion de fon
Difcours. Ily avoit en elle , ditil , un efprit d'intelligence ; unique , voilàfafimplicité : multiplié , voilà fon étendue , faint ;
voilà fon excellence &Sa perfection . Il commença enfuite
fon premier Point , en difant
queparle mot de fimplicité , il
fautpas fe figurer une vertu
foible , tranquile , indolente ,
incapable des grandes choſes ; &
ne
GALANT 219
que
indigne des grands hommes , ainfi
ue felon le Pape Saint Gregoire
on l'a prend ordinairement dans le
monde; & queJulien l'Apoftat ,
le reprochoit aux Chreftiens ;
mais entendre une vertu reglée
par la Foy, accompagnée de droitures & de modeftie ; & infeparable de la douceur &de l'humilité; vertu oppoſée à cette efprit
de duplicité que Dieu ne regarde
qu'avec horreur dans l'Ecriture;
àcet efprit de fuperbe qu'ilyfrape
par tout de fes maledictions &
defes anathemes. Ce qui donna
lieu à l'Orateur de parler de
l'origine de fon Heroine chrê-
"
Tij
220 MERCURE
36
tienne. Je remarque , dit - il ,
du cofté paternel dans la Maifon
d'Estampes , fi ancienne dans le
Royaume , les alliances les plus
honorables , les plus celebres , les
plus éminentes dignitez de l'Eglife & de l'Etat j'apperçois
du cofté maternel dans celle de
Montmorency , déja conſiderable
en France dés les premiers fiecles
de la Monarchie , fes ancêtres
diftinguez par tous ces honneurs
quife diftinguent encore da
vantage dans l'Eglife par le titre
de premiers Barons Chreftiens ,
qui leur eft hereditaire ( la mere
de cette Abbeffe eftoit de la Mai-
GALANT 120
ce
fon de Montmorency ) j'y vois
efangqui l'anime , s'élever dans
perfonne des Princeffes ,foutenir en tout temps la gloire de
cet Empire , dans celle des Generaux d'Arméeprefquefans nombre , triompher dans celle des
Conquerans , & regner dans
celle des Monarques par fes glorieufes alliances avec toutes les
Couronnes Chreftiennes. L'Orateur s'arrefta en cet endroit &
pourfuivit en difant ; mais
viendrois je en Partifan du
monde relever la pieté par la
Nobleffe , au lieu de relever en
Minifiredu Seigneur la Nobleffe
-
Tiij
222 MERCURE
que
par la pieté , pendant que des
Payens c'est de Juvenal qu'il
parle ) déclarent la feule
l'unique Nobleffe à le bien
prendre eft la feule & unique
vertu ; à Dieu ne plaiſe , Mi
mais comme les enfans du fiecle
n'eftiment que trop ces dangereux
avantages , je veux feulement
leur faire juger de la grandeur
de fon facrifice par la grandeur .
de fon extraction. Il jetta enfuite encore quelques fleurs
fur le tombeaude l'ayeule maternelle , & de la tante de cette
Abbeffe , dont la fagefimplicité,
dit-il , lapictéfolide; & l'amour
GALANT 223
tendre pour les pauvres feront
jamais en benediction ; & depuis
fous la conduite d'une tante plus
élevée par elle-même que parfa
naiſſance , qui avoit caché la
grandeur , d'une illuftre Ducheffe
fousle Voile d'une humble Religieufe. Mr Gontier fit enfuite
un portrait de la vie Religieufe qui fut délicatement touché :formez- vous , dit- il , dans
voftre efprit l'idée de la vie Religieufe : figurez- vous un estat où
l'on fe traite comme un genre de
perfonnes deftinées à la mort ( inft
que Tertulien le difoit des premiers fidelles ) où l'on facrific le
Tiiij.
224 MERCURE
temps à l'Eternité; où malgré l'amourproprefi naturel à tous les
hommes , on renonce àfa liberté ,
pour n'agir que par la volonté
d'autruy ; & où c'est une espece
decrime de ne fe pas quitter foymême après avoir tout quittés
dans ces afiles de la pieté Chreftiennetous les momensfont reglez
parlafageffe; toutes les actions
lesparolesfontpefées au poids du
Sanctuaire ; les infidélitez les plus
legeresy paffentpourdes monftres ;
les divertiffemens permis dans le
fiecle yfont interdits , les confeils
y deviennent des preceptes. Là
enferveli dans les bornes eftroites
GALANT 225
d'un
, on
Monaftere comme dans un
tombeau au milieu des nourritures fpirituelles dont on eft uniquement occupé , on jeûne avec
courage , on gémit avec amour
non-feulement pour fes pechez ;
mais encore pour ceux des autres ;
on fouffre avec plaisir , onymeurt
àfoy - même auffi - bien qu'au
monde avecjoye. Enfin onyfait
confifterfon trefor àne rien poffeder , fa grandeur à s'aneantir ;
fon bonheur à executer les ordres
du Ciel ; fa gloire à ſe regarder
comme un ferviteur ou unefervante inutile aprés les avoir executez. Reprefentez- vous main-
226 MERCURE
tenant tous ces devoirs de la vie
Religieufe accomplis dans la
droiture e lafimplicité du cœur
afin de plaire à Dieu feul; vous
vous reprefenterezla vie de Me
de Vallançay , car voilà le terme
unique où about foient tous fes
deffeins , c. En parlant de
fes ornemens exterieurs voicy
un trait que l'on ne doit pas
oublier : une Croffe de la matiere
laplus fimple, eftoit la marque la
plus éclatante defa dignité ; pauure , maisprecieux prefent qu'elle
avoit receu du faint Reformateur.
de la Trappe , & qu'elle portoit
avec autant de veneration que le
GALANT 227
grand faint Antoine fe revestoit
de la Robbe du premier des
Solitaires dans les jours Solemnels. Cet Abbé dans le détail
qu'il fit des mouvemens que
cette fainte fille fe donna pour
reformer fon Abbaye dit ce
qui fuit de feu Mr l'Abbé de
la Trappe ; mais à qui s'adreffeta- t-elle pour réuſſie dans une "entreprife fi délicate ; & fi difficile
au fidelle œconome de la Maifon
du Seigneur , je veux dire , à un
homme qui ayant fait revivre
dans fa perfonne les Antoines
les Machaires, les Pachômes , les
·Benoifts , les Bernards , & les
228 MERCURE
plus fameux Anacorettes , les a
fait renaître jufques dans fes
Difciples , qui fe répandent tous
les jours avec tant d'honneur
de fuccés dans le monde
appellez depuis par le Souverain
Pontife dans la Capitale du
qui
Chriftianifme vont édifier plus
heureusement que jamais l'Eglife
par l'aufterité de leur vie ; à un
homme qui ayant rendu à l'Ordre
de Cifteaux la gloire du Liban
la beauté du Carmel & de
Saron afait parler toute la terre
defa merveillenfe Reforme , &
luy a fait garder le filence pourl'admirer ; a unhomme qui n'eftoit
GALANT 229
defcendu de la Chaire Abbatiale
que pour cacherla propre gloire ,
comme il n'y eftoit monté que
pour travailler à celle du Seigneur,
n'a paslaiffé de voir la calomnie
fufcitée par le pere du menfonge ,
attaquer les vertus pour arrêter
lesprogrés étonnans de fon zele
& qui toutefois pour uſer de
L'éloquente expreffion de Saint
Ambroife , en a glorieusement .
triomphéparfon filence , à l'exemple
qui plus heureux que Salomon ,
Już du Sauveur ; à un homme
qui anonfeulement attirédes Prelats , des Rois des Reines (il
parle icy duRoy de la Reine
230 MERCURE
d'Angleterre toutce que l'Eglife
le fiecle ontdeplus élevé jufques dans fon Defert ; & les
ayant charmez par fa fageffe
leura montréle cheminde la veritablegloire ; mais auffi des efclaves
du démon dont il a fait parfon
Zele & par ſes exemples des
Preftres , des Rois éternels
felon la parole des Saints de
l'Apocalypfe , FECISTI ÆTERNE REGNUM ET SACERDOTES.
Si je pouvois joindre icy le
portrait que M.l'Abbé Gontier fit de la nouvelle Abbeffe
qui eft de la mêmeMaiſon que
GALANT 231
le faint Abbé de la Trape , &
qui eft fœur de Mr l'Evêque de
Troyes , on y admireroit unc
éloquence également foute.
nue & unefineffe d'expreffions,
qu'on a déja remarquée dans
les morceaux que j'ay raportez
de ce Difcours ; je n'aurois pas
dû non plus oublier fi je
n'eus craint de donner trop
d'étendue à cet extrait , le détail que cet Abbé fit d'un
prodige arrivé dans l'Abbaye
des Clairets dans un temps
de fterilité ; prodige qu'on a
toûjours attribué aux prieres
de l'Abbeſſe : & qui confiftoit
232 MERCURE
1
en ce qu'on trouva dans le
grenier des pauvres 300. minots de bled plus qu'on y en
avoit mis , prodigè femblable à celuy que le faint Auteur
de la vie de Sainte Macrine
raporte parmi les merveilles de
la vie de cette Sainte , & que
M' Gontier cita en parlant de
celuy qui arriva aux Clairets ,
il y a quelques temps.
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Résumé : Suite de ce qu'on a déjà rapporté de l'Oraison Funebre de Me de Valençay, Abbesse des Clairets. [titre d'après la table]
Le texte relate la pompe funèbre de l'abbé d'Ecampes de Vallençay, abbesse des Clairets de l'Ordre de Citeaux, décédée en janvier 1710. L'oraison funèbre, prononcée par Mr Gontier, docteur de Sorbonne et chanoine de l'église de Chartres, fut particulièrement remarquée pour son esprit et son invention. L'orateur choisit comme texte les paroles de la Sagesse : 'est in illa spiritus intelligentia sanctus, unicus, multiplex', qu'il développa en soulignant la simplicité, l'étendue et l'excellence de l'intelligence de l'abbé. L'oraison funèbre mettait en avant la noblesse des origines de l'abbé, tant du côté paternel (maison d'Estampes) que maternel (maison de Montmorency), et soulignait ses vertus chrétiennes. L'orateur décrivit la vie religieuse comme un état de sacrifice et de dévotion, où chaque moment est réglé par la sagesse et où les actions sont pesées au poids du sanctuaire. Il évoqua également la simplicité et la piété de l'abbé, illustrées par des anecdotes sur sa vie et ses actions. Mr Gontier fit également un portrait élogieux de la vie religieuse, soulignant les devoirs et les sacrifices des religieuses, et mentionna un prodige survenu dans l'abbaye des Clairets, attribué aux prières de l'abbesse. Le texte se termine par une mention de l'éloquence et de la finesse d'expression de l'abbé Gontier.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1902
p. 232-238
Mariages. [titre d'après la table]
Début :
Comme tous les hommes meurent & que la pluspart avant que de finir leur vie [...]
Mots clefs :
Mariages, Marquis de Maubec et de Brancas, Marquis de Pons
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mariages. [titre d'après la table]
Comme tous les hommes.
meurent & que la plufpart.
avant que de finir leur vie
prennent le parti du Mariage ,
fans quoy le genre humain ne
fubfifteroit pas, on ne doit pas
GALANT 233
eftre furpris fi la plupart de
mes Lettres font remplies de
Morts & de Mariages.
Mre Louis - Antoine de
Brancas , Marquis de Maubec
& de Brancas , a époufé Dlle
N... de Moras , fille de Mr de
Moras , Prefident à Mortier
au Parlement de Metz. Ce
Marquis eft fils aîné de Mre
Louis de Brancas Duc de Villars & de Brancas , Pair de
France , Gomte de Maubec ,
Baron d'Oife , Seigneur de
Chantercier & de l'ine , & de'
Dame Marie de Brancas , Dame d'Honneur de S. A. R. MaV
Janvier 1710.
234 MERCURE
dame , & fœur de Me la Princeffed Harcourt , & fille de feu
Mre Charles Comte de Brancas, Chevalier d'Honneur de la
Reine Anne d'Autriche , & de
DameSuzanne de Garnier. Mr
le Duc de Brancas eft petit fils.
du feu Duc de Villars , Georges de Brancas Pair de France
& de Julienne Hippolite d'Eftrées , fœur de la belle Gabrielle , Ducheffe de Beaufort , &
fille d'Antoine d'Eftrées, Marquis de Cœuvres , Chevalier
des Ordres du Roy , GrandMailtre de l'Artillerie , & il eft
fils de feu Mre Louis de Bran-
GALANT 235
cas Duc de Villars , Pair, de
France , Marquis de Graville
& de Grandchamp , Comte de
Maubec , & de fa feconde femme Madelaine Girard fille de
Louis Girard , Seigneur de Villetaneufe , Procureur General
de la Chambre des Comptes.
Mr le Duc de Villars cut auffi
de cette Dame , Louis Eftienne Jofeph de Brancas , Bachelier de Sorbonne , Abbé de
Noftre Dame des Alleurs en
Poitou , & Marie Madelaine
de Brancas épouse de LouisGabriel Henry de Beauveau.
Feu Mr. le Duc de Villars cut
V ij
236. MERCURE
4.
de Louiſe Catherine de Faute
teau de Meinieres fa troifiéme
femme , Elifabeth- Charlotte
Candide de Brancas , mariées
avec Louis- Henry de Brancas 33
Marquis de Cerefte dans lef
Comtat Venaiffin. Mrle Marquis de Brancas qui vient de fe
marier eft Colonel d'Infanterie ; & Me fa femme eft d'une
ancienne famille originaire de
Languedoc. Me de Moras fat
mere avoit efté fort attachée.
àfeuë S. A. R. Mademoiselle.
Mr le Marquis de Pons ,
chef du nom & des Armes de
l'illuftre Maiſon de Pons ori-
GALANT 237
ginaire de Saintonge , a épousé
Me la Marquife de la Baume ,
belle fille de Mr le Maréchal
de Tallard , fille de Mr le Com
te de Verdun , & de Dame
N... d'Albon defcendue des
Dauphins de Viennois. Mrle
Comte de Verdun & Mr de
Tallard portent le nom d'Hof
tun ; mais Mr le Comte de
Verdun ajoûte au fien le nom
de Gadagne , par une fubftitutution. Ils font originaires
d'une tres- noble & tres- ancienne Maiſon du Dauphiné.
Comme tous les hommes
prenent un party dans le mon
238 MERCURE
de;& que ceux qui ne fe marient pas embraffent le celibat
& que ces deux partis font
fuceptibles de tous les emplois
où les hommes peuvent eftre
employez , fçavoir de toutes
les dignitez du monde & de
toutes celles de l'Eglife, jeviens
à la derniere Promotion des
Benefices donnez par le Roy.
meurent & que la plufpart.
avant que de finir leur vie
prennent le parti du Mariage ,
fans quoy le genre humain ne
fubfifteroit pas, on ne doit pas
GALANT 233
eftre furpris fi la plupart de
mes Lettres font remplies de
Morts & de Mariages.
Mre Louis - Antoine de
Brancas , Marquis de Maubec
& de Brancas , a époufé Dlle
N... de Moras , fille de Mr de
Moras , Prefident à Mortier
au Parlement de Metz. Ce
Marquis eft fils aîné de Mre
Louis de Brancas Duc de Villars & de Brancas , Pair de
France , Gomte de Maubec ,
Baron d'Oife , Seigneur de
Chantercier & de l'ine , & de'
Dame Marie de Brancas , Dame d'Honneur de S. A. R. MaV
Janvier 1710.
234 MERCURE
dame , & fœur de Me la Princeffed Harcourt , & fille de feu
Mre Charles Comte de Brancas, Chevalier d'Honneur de la
Reine Anne d'Autriche , & de
DameSuzanne de Garnier. Mr
le Duc de Brancas eft petit fils.
du feu Duc de Villars , Georges de Brancas Pair de France
& de Julienne Hippolite d'Eftrées , fœur de la belle Gabrielle , Ducheffe de Beaufort , &
fille d'Antoine d'Eftrées, Marquis de Cœuvres , Chevalier
des Ordres du Roy , GrandMailtre de l'Artillerie , & il eft
fils de feu Mre Louis de Bran-
GALANT 235
cas Duc de Villars , Pair, de
France , Marquis de Graville
& de Grandchamp , Comte de
Maubec , & de fa feconde femme Madelaine Girard fille de
Louis Girard , Seigneur de Villetaneufe , Procureur General
de la Chambre des Comptes.
Mr le Duc de Villars cut auffi
de cette Dame , Louis Eftienne Jofeph de Brancas , Bachelier de Sorbonne , Abbé de
Noftre Dame des Alleurs en
Poitou , & Marie Madelaine
de Brancas épouse de LouisGabriel Henry de Beauveau.
Feu Mr. le Duc de Villars cut
V ij
236. MERCURE
4.
de Louiſe Catherine de Faute
teau de Meinieres fa troifiéme
femme , Elifabeth- Charlotte
Candide de Brancas , mariées
avec Louis- Henry de Brancas 33
Marquis de Cerefte dans lef
Comtat Venaiffin. Mrle Marquis de Brancas qui vient de fe
marier eft Colonel d'Infanterie ; & Me fa femme eft d'une
ancienne famille originaire de
Languedoc. Me de Moras fat
mere avoit efté fort attachée.
àfeuë S. A. R. Mademoiselle.
Mr le Marquis de Pons ,
chef du nom & des Armes de
l'illuftre Maiſon de Pons ori-
GALANT 237
ginaire de Saintonge , a épousé
Me la Marquife de la Baume ,
belle fille de Mr le Maréchal
de Tallard , fille de Mr le Com
te de Verdun , & de Dame
N... d'Albon defcendue des
Dauphins de Viennois. Mrle
Comte de Verdun & Mr de
Tallard portent le nom d'Hof
tun ; mais Mr le Comte de
Verdun ajoûte au fien le nom
de Gadagne , par une fubftitutution. Ils font originaires
d'une tres- noble & tres- ancienne Maiſon du Dauphiné.
Comme tous les hommes
prenent un party dans le mon
238 MERCURE
de;& que ceux qui ne fe marient pas embraffent le celibat
& que ces deux partis font
fuceptibles de tous les emplois
où les hommes peuvent eftre
employez , fçavoir de toutes
les dignitez du monde & de
toutes celles de l'Eglife, jeviens
à la derniere Promotion des
Benefices donnez par le Roy.
Fermer
Résumé : Mariages. [titre d'après la table]
Le texte aborde la fréquence des mariages et des décès dans les lettres, illustrée par plusieurs exemples. En janvier 1710, Louis-Antoine de Brancas, Marquis de Maubec et de Brancas, a épousé Mademoiselle N... de Moras, fille de Monsieur de Moras, Président à Mortier au Parlement de Metz. Louis-Antoine est le fils aîné de Louis de Brancas, Duc de Villars et Pair de France, et de Marie de Brancas, Dame d'Honneur de Son Altesse Royale. Le Duc de Brancas est le petit-fils de Georges de Brancas, Duc de Villars, et de Julienne Hippolyte d'Estrées, ainsi que le fils de Louis de Brancas et de Madeleine Girard. Le Duc de Villars a eu plusieurs enfants, dont Louis-Étienne-Joseph de Brancas, Abbé de Notre-Dame des Alleurs, et Marie-Madelaine de Brancas, épouse de Louis-Gabriel Henry de Beauveau. Le texte mentionne également Élisabeth-Charlotte-Candide de Brancas, mariée à Louis-Henry de Brancas, Marquis de Céreste, Colonel d'Infanterie. La mère de Madame de Moras était proche de Son Altesse Royale Mademoiselle. De plus, le Marquis de Pons, chef de la Maison de Pons, a épousé la Marquise de la Baume, petite-fille du Maréchal de Tallard. Le Comte de Verdun et Monsieur de Tallard portent le nom d'Hostun, avec une substitution du nom de Gadagne pour le Comte de Verdun. Ils sont issus d'une noble et ancienne Maison du Dauphiné. Le texte conclut en soulignant que les hommes choisissent entre le mariage et le célibat, permettant l'accès à divers emplois et dignités, tant laïques que religieuses, et mentionne la dernière promotion des bénéfices accordés par le Roi.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1903
p. 238-252
Benefices donnez par le Roy dans la derniere Promotion. [titre d'après la table]
Début :
Sa Majesté a donn l'Abbaye de Toussaints d'Angers [...]
Mots clefs :
Roi, Promotion, Abbayes, Coadjutorerie, Bénéfices
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Benefices donnez par le Roy dans la derniere Promotion. [titre d'après la table]
a Majesté a donné l'Ab
baye de Touffaints d'Angers
à Mrl'Abbé de Bruffi GrandVicaire d'Angers. Il a beaucoup de fçavoir , & il a paffé
une partie de fa vie dans les
Seminaires , où il s'eft inftruit
•
GALANT 239
} ་
de fes devoirs. L'Abbaye
dont il vient d'eftre pourvû
a produit des Religieux d'une
grande reputarion , & fur
tout dans le 15° ficcle ; & dans
le temps du Concile de Conftance. J'aurois beaucoup de
chofes àvous dire de Mrl'Abbé de Bruffi , fi j'entrois dans
ces fortes d'Articles dans ce
qui regarde les familles de
tous ceux qui font nommez à
quelques Benefices ; mais commedans toutes les Promotions
que fait Sa Majefté , elle n'a
égard qu'au merite perfonnel.
de ceux qu'elle pourvoit de
240 MERCURE
quelques Benefices & aux vertus Ecclefiaftiques , s'il m'eſt
permis de parler ainfi , & qu'elle ne donne rien à la naiffance
& à la faveur , je pafferay fous
filence beaucoup de chofes
que je pourois dire à l'avantade leurs Maifons. ge
*
Sa Majesté donna dans la
même Promotion l'Abbaye
de Mureau à Mr l'Abbé de
Laigle Grand Vicaire de Toul.
Cette Abbaye eft de l'Ordre
de Premontré & dans le
Dioceſe de Toul. Mr l'Abbé
de Laigle eft Chanoine de la
Cathedrale de la même Ville ,
>
&
GALANT 241.
& il en a efté Grand Vicaire
fous trois Evêques confecutifs.
Ainfi l'on peut juger qu'il a
acquis une grande experience
dans le Gouvernement Ecclefiaftique ; il a la reputation
d'eftre un des plus habiles
hommes qu'il y ait dans l'Eglife de France pour la Difcipline. Il eft confulté des Provinces les plus éloignées cù
l'on fouhaite d'avoir fouvent
defes décifions ; elle font refpectables , & appuyées fur les
maximes les plus juftes & les
mieux fondées du Droit Canon. Cet Abbé eft d'une
X
Fanvier 1710.
#
242 MERCURE.
Maifon fort ancienne & origi
naire de Lorraine où elle étoit
connue dés le 14. fiecle.
L'Abbaye de la Buffiere , fut
donnée enmême temps à Mr
l'Abbé Morey , cy-devant
Chapelain de Sa Majeſté. Certe Abbaye eft de l'Ordre de
Cifteaux , & dans le Dioceſe
d'Autun. Mr l'Abbé Morey
pendant fon féjour à la Cour
& le fervice qu'il y a rendu
dans la Chapelle de Sa Majefté,
s'y eft fait generalement eftimer. Ileft fort verfé dans les
antiquitez Ecclefiaftiques &
fur tout dans la partie qui
GALANT 243
regarde les Ceremonies >. &
s'il n'eut efté prevenu par Mr
l'Abbé Archon , il auroit donné une Hiſtoirede la Chapelle
de nos Rois.
Mrl'Abbé de Viffat la Fayette , fur pourvû le même jour
de l'Abbaye de faint Seine.
Cette Abbaye eft dans le
Dioceſe de Langres , &de l'Ordre de faint Benoift Mrl'Abbé de Viffat eft Docteur- de
Sorbonne , & Comtede faint
Julien de Brioude. Je vous
diray feulement pour vous
faire connoiftre fa Maiſon
qu'il eft de celle du Maréchal
X ij
244 MERCURE
de la Fayette , qui vivoit en
1449. Mr l'Abbé Viffat , eft
fort eftimé à caufe de fa
droiture & d'une grande
bonté de cœur qui luy ont
attiré la bien-veillance & l'amitié de toute la Nobleffe d'Auvergne fa Patrie.
>
Mr l'Abbé de Lée , a cu
dans la même Promotion
l'Abbaye de Villeloin , qui
eft dans le Diocefe de Tours
& de l'Ordre de faint Benoift.
Le merite de cet Abbé eſt
connu , & quoyqu'il meritaſt
par luy mêmel'Abbaye que le
Royvient de luy donner , je
GALANT 245
me trouve neanmoins obligé
de dire qu'il eft proche parent
de Mr de Lée , Lieutenant
General des Armées du Roy;
qu'ils font tous deux Irlandois & alliez àl'illuftre Maiſon
de Drummont & à celle de
Mahony , pour vous faire
connoiftre que le Roy ne
reconnoift pas moins le merite
des Etrangers que celuy de les
fujers.
Mr l'Abbé le Roy de Chauvigny a eu auffi l'Abbaye de
Belle fontaine. Les qualitez
de fon cœur & de fon efprit
ne le rendent par moins cftiX
iij
246 MERCURE
mable fa conduite qui a
que
toujours paru fage à ceux qui
le connoiffent. Il a toûjours
mené une vie unie & digne
d'un Ecclefiaftique , & fa Religion , ainfi quefa grandepieté ,
ont toûjours édifié tout le
monde. Je ne vous dis rien icy
de ſa Maiſon , dont je vous ay
amplement parlé en d'autres
occafions. L'Abbaye de Bellefontaine , eft fous le vocable
de Noftre-Dame de l'Abfie , de
l'Ordre de Saint Benoist & du
Diocefe de la Rochelle.
Mrl'Abbé de Vifnich, grand
Vicaire d'Auxerre , a efté en
GALANT 247
mefme temps nommé à l'Abbaye des Roches , Dioceſe
d'Auxerre & de l'Ordre de
Cifteaux. Mr l'Evêque d'Auxerre , qui connoift le merite
de cet Abbé , qui travaille depuis quelques années fous fes
ordres , a demandé pour luy
cette Abbaye qu'il a obtenue
avec beaucoup d'agrément, le
Roy fe faifant un plaifir de
recompenfer les Ouvriers de
l'Evangile, & de déferer en ces
occafions au témoignage des
Evêques qui peuvent mieux
connoiftre que qui que ce foit
ceux qui travaillent fous leurs
X iiij
248 MERCURE
ordres. Mr l'Abbé de Vifnich
a beaucoup de talent pour la
Predication , & il l'a exercé
avec fuccés dans les meilleures
Chaires de la Province où il
cft employé , & dans celles de
Paris. Il s'eft fort appliqué depuis que fes études font finies,
à celles du droit Canon , & il
y a fait de grands progrés. Il
a fur tout beaucoup travaillé
fur les matieres qui regardent
les Libertez de l'Eglife Galli- :
cane ; & il eſt peu de perſonnes
qui entendent mieux que luy
ce qui appartient à cette
importante matiere, & à celles
GALANT 249
de la difcipline de l'Eglife. Ce
nouvel Abbé cft parent de Mr
l'Evêque d'Auxerre , & d'une
ancienne Maiſon fortie du
Roüergue , où elle eftoit déja
connue dans le 13 ° fiecle.
Mr l'Abbé du Vignau , frere de Mr du Vignau , Maréchal des Logis de l'une des
Compagnies des Moufquetaires , a eu l'Abbaye de Turpenay. Cette Abbaye eft de l'Ordre de S. Benoift , & du Diocefe de Tours. Mr l'Abbé du
Vignau a beaucoup de merite..
Il a fait de grands progrés.
250 MERCURE
dans les Sciences , & fur tout
dans l'étude de la Jurifprudence Canonique. Mr l'Archevêque de Tours , qui le
confidere beaucoup , l'a fouvent employé dans fon Diocefe pour les affaires qui regardent la difcipline Ecclefiaftique.
La Coadjutorerie de l'Abbaye de S. Pierre du Puy , a
efté donnée à Me de la Fare.
On doit diftinguer cette Ab.
baye d'une autre qui porte
mefme nom ; mais qui eft une
Abbaye d'hommes , & qui eft
le
7
GALANT 251
l'une des plus anciennes du
Royaume, & dont l'Abbé eft
membre du Chapitre de la
Cathedrale; celle de S. Pierre,
qui donne lieu à cet article,
cft auffi tres ancienne , puifqu'elle eftoit déja celebre du
temps de Durand de S. Portien , de Pierre d'Ailly qui fut
enfuite Cardinal & Evêque de
Cambray , & du celebre Raymond Deagiles Chanoine du
Puy , qui a écrit une Hiftoire
de la guerre Sainte. Me de la
Fare a beaucoup de merite, &
s'eſt diſtinguée par la pratique
252 MERCURE
*
de toutes les vertus qui conviennent à fon eftat ; & elle a
fait voir dans tous les emplois
qu'elle a exercez , une habileté
& des lumieres fur tout ce qui
regarde le gouvernement Ec
clefiaftique , qui luy ont acquis unegrande reputation. La
Maifon de la Fare a donné de
grands fujets à l'Eglife, & particulierement dans le 15. &
dans le 16 fiecle. Elle eft fi
illuftre , qu'il n'eft pas neceffaire que je vous en dife rien
pour vous la faire connoitre.
baye de Touffaints d'Angers
à Mrl'Abbé de Bruffi GrandVicaire d'Angers. Il a beaucoup de fçavoir , & il a paffé
une partie de fa vie dans les
Seminaires , où il s'eft inftruit
•
GALANT 239
} ་
de fes devoirs. L'Abbaye
dont il vient d'eftre pourvû
a produit des Religieux d'une
grande reputarion , & fur
tout dans le 15° ficcle ; & dans
le temps du Concile de Conftance. J'aurois beaucoup de
chofes àvous dire de Mrl'Abbé de Bruffi , fi j'entrois dans
ces fortes d'Articles dans ce
qui regarde les familles de
tous ceux qui font nommez à
quelques Benefices ; mais commedans toutes les Promotions
que fait Sa Majefté , elle n'a
égard qu'au merite perfonnel.
de ceux qu'elle pourvoit de
240 MERCURE
quelques Benefices & aux vertus Ecclefiaftiques , s'il m'eſt
permis de parler ainfi , & qu'elle ne donne rien à la naiffance
& à la faveur , je pafferay fous
filence beaucoup de chofes
que je pourois dire à l'avantade leurs Maifons. ge
*
Sa Majesté donna dans la
même Promotion l'Abbaye
de Mureau à Mr l'Abbé de
Laigle Grand Vicaire de Toul.
Cette Abbaye eft de l'Ordre
de Premontré & dans le
Dioceſe de Toul. Mr l'Abbé
de Laigle eft Chanoine de la
Cathedrale de la même Ville ,
>
&
GALANT 241.
& il en a efté Grand Vicaire
fous trois Evêques confecutifs.
Ainfi l'on peut juger qu'il a
acquis une grande experience
dans le Gouvernement Ecclefiaftique ; il a la reputation
d'eftre un des plus habiles
hommes qu'il y ait dans l'Eglife de France pour la Difcipline. Il eft confulté des Provinces les plus éloignées cù
l'on fouhaite d'avoir fouvent
defes décifions ; elle font refpectables , & appuyées fur les
maximes les plus juftes & les
mieux fondées du Droit Canon. Cet Abbé eft d'une
X
Fanvier 1710.
#
242 MERCURE.
Maifon fort ancienne & origi
naire de Lorraine où elle étoit
connue dés le 14. fiecle.
L'Abbaye de la Buffiere , fut
donnée enmême temps à Mr
l'Abbé Morey , cy-devant
Chapelain de Sa Majeſté. Certe Abbaye eft de l'Ordre de
Cifteaux , & dans le Dioceſe
d'Autun. Mr l'Abbé Morey
pendant fon féjour à la Cour
& le fervice qu'il y a rendu
dans la Chapelle de Sa Majefté,
s'y eft fait generalement eftimer. Ileft fort verfé dans les
antiquitez Ecclefiaftiques &
fur tout dans la partie qui
GALANT 243
regarde les Ceremonies >. &
s'il n'eut efté prevenu par Mr
l'Abbé Archon , il auroit donné une Hiſtoirede la Chapelle
de nos Rois.
Mrl'Abbé de Viffat la Fayette , fur pourvû le même jour
de l'Abbaye de faint Seine.
Cette Abbaye eft dans le
Dioceſe de Langres , &de l'Ordre de faint Benoift Mrl'Abbé de Viffat eft Docteur- de
Sorbonne , & Comtede faint
Julien de Brioude. Je vous
diray feulement pour vous
faire connoiftre fa Maiſon
qu'il eft de celle du Maréchal
X ij
244 MERCURE
de la Fayette , qui vivoit en
1449. Mr l'Abbé Viffat , eft
fort eftimé à caufe de fa
droiture & d'une grande
bonté de cœur qui luy ont
attiré la bien-veillance & l'amitié de toute la Nobleffe d'Auvergne fa Patrie.
>
Mr l'Abbé de Lée , a cu
dans la même Promotion
l'Abbaye de Villeloin , qui
eft dans le Diocefe de Tours
& de l'Ordre de faint Benoift.
Le merite de cet Abbé eſt
connu , & quoyqu'il meritaſt
par luy mêmel'Abbaye que le
Royvient de luy donner , je
GALANT 245
me trouve neanmoins obligé
de dire qu'il eft proche parent
de Mr de Lée , Lieutenant
General des Armées du Roy;
qu'ils font tous deux Irlandois & alliez àl'illuftre Maiſon
de Drummont & à celle de
Mahony , pour vous faire
connoiftre que le Roy ne
reconnoift pas moins le merite
des Etrangers que celuy de les
fujers.
Mr l'Abbé le Roy de Chauvigny a eu auffi l'Abbaye de
Belle fontaine. Les qualitez
de fon cœur & de fon efprit
ne le rendent par moins cftiX
iij
246 MERCURE
mable fa conduite qui a
que
toujours paru fage à ceux qui
le connoiffent. Il a toûjours
mené une vie unie & digne
d'un Ecclefiaftique , & fa Religion , ainfi quefa grandepieté ,
ont toûjours édifié tout le
monde. Je ne vous dis rien icy
de ſa Maiſon , dont je vous ay
amplement parlé en d'autres
occafions. L'Abbaye de Bellefontaine , eft fous le vocable
de Noftre-Dame de l'Abfie , de
l'Ordre de Saint Benoist & du
Diocefe de la Rochelle.
Mrl'Abbé de Vifnich, grand
Vicaire d'Auxerre , a efté en
GALANT 247
mefme temps nommé à l'Abbaye des Roches , Dioceſe
d'Auxerre & de l'Ordre de
Cifteaux. Mr l'Evêque d'Auxerre , qui connoift le merite
de cet Abbé , qui travaille depuis quelques années fous fes
ordres , a demandé pour luy
cette Abbaye qu'il a obtenue
avec beaucoup d'agrément, le
Roy fe faifant un plaifir de
recompenfer les Ouvriers de
l'Evangile, & de déferer en ces
occafions au témoignage des
Evêques qui peuvent mieux
connoiftre que qui que ce foit
ceux qui travaillent fous leurs
X iiij
248 MERCURE
ordres. Mr l'Abbé de Vifnich
a beaucoup de talent pour la
Predication , & il l'a exercé
avec fuccés dans les meilleures
Chaires de la Province où il
cft employé , & dans celles de
Paris. Il s'eft fort appliqué depuis que fes études font finies,
à celles du droit Canon , & il
y a fait de grands progrés. Il
a fur tout beaucoup travaillé
fur les matieres qui regardent
les Libertez de l'Eglife Galli- :
cane ; & il eſt peu de perſonnes
qui entendent mieux que luy
ce qui appartient à cette
importante matiere, & à celles
GALANT 249
de la difcipline de l'Eglife. Ce
nouvel Abbé cft parent de Mr
l'Evêque d'Auxerre , & d'une
ancienne Maiſon fortie du
Roüergue , où elle eftoit déja
connue dans le 13 ° fiecle.
Mr l'Abbé du Vignau , frere de Mr du Vignau , Maréchal des Logis de l'une des
Compagnies des Moufquetaires , a eu l'Abbaye de Turpenay. Cette Abbaye eft de l'Ordre de S. Benoift , & du Diocefe de Tours. Mr l'Abbé du
Vignau a beaucoup de merite..
Il a fait de grands progrés.
250 MERCURE
dans les Sciences , & fur tout
dans l'étude de la Jurifprudence Canonique. Mr l'Archevêque de Tours , qui le
confidere beaucoup , l'a fouvent employé dans fon Diocefe pour les affaires qui regardent la difcipline Ecclefiaftique.
La Coadjutorerie de l'Abbaye de S. Pierre du Puy , a
efté donnée à Me de la Fare.
On doit diftinguer cette Ab.
baye d'une autre qui porte
mefme nom ; mais qui eft une
Abbaye d'hommes , & qui eft
le
7
GALANT 251
l'une des plus anciennes du
Royaume, & dont l'Abbé eft
membre du Chapitre de la
Cathedrale; celle de S. Pierre,
qui donne lieu à cet article,
cft auffi tres ancienne , puifqu'elle eftoit déja celebre du
temps de Durand de S. Portien , de Pierre d'Ailly qui fut
enfuite Cardinal & Evêque de
Cambray , & du celebre Raymond Deagiles Chanoine du
Puy , qui a écrit une Hiftoire
de la guerre Sainte. Me de la
Fare a beaucoup de merite, &
s'eſt diſtinguée par la pratique
252 MERCURE
*
de toutes les vertus qui conviennent à fon eftat ; & elle a
fait voir dans tous les emplois
qu'elle a exercez , une habileté
& des lumieres fur tout ce qui
regarde le gouvernement Ec
clefiaftique , qui luy ont acquis unegrande reputation. La
Maifon de la Fare a donné de
grands fujets à l'Eglife, & particulierement dans le 15. &
dans le 16 fiecle. Elle eft fi
illuftre , qu'il n'eft pas neceffaire que je vous en dife rien
pour vous la faire connoitre.
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Résumé : Benefices donnez par le Roy dans la derniere Promotion. [titre d'après la table]
En janvier 1710, Sa Majesté a procédé à plusieurs nominations d'abbayes. L'Abbaye de Touffaints d'Angers a été attribuée à l'Abbé de Bruffi, Grand Vicaire d'Angers, distingué pour ses connaissances et son expérience dans les séminaires. L'Abbaye de Mureau, située dans le Diocèse de Toul et appartenant à l'Ordre de Prémontré, a été donnée à l'Abbé de Laigle, Grand Vicaire de Toul, reconnu pour son expertise en discipline ecclésiastique. L'Abbaye de la Buffière, de l'Ordre de Cîteaux et dans le Diocèse d'Autun, a été attribuée à l'Abbé Morey, ancien Chapelain de Sa Majesté, connu pour ses compétences en antiquités ecclésiastiques. L'Abbé de Viffat la Fayette a reçu l'Abbaye de Saint-Seine, dans le Diocèse de Langres, et est apprécié pour sa droiture et sa bonté. L'Abbé de Lée a obtenu l'Abbaye de Villeloin, dans le Diocèse de Tours, et est proche parent du Lieutenant Général des Armées du Roy. L'Abbé le Roy de Chauvigny a été nommé à l'Abbaye de Bellefontaine, dans le Diocèse de la Rochelle, et est reconnu pour sa conduite sage et sa piété. L'Abbé de Vifnich, Grand Vicaire d'Auxerre, a été nommé à l'Abbaye des Roches, dans le Diocèse d'Auxerre, et est apprécié pour ses talents en prédication et en droit canon. L'Abbé du Vignau a reçu l'Abbaye de Turpenay, dans le Diocèse de Tours, et est reconnu pour ses compétences en jurisprudence canonique. Enfin, la Coadjutorerie de l'Abbaye de Saint-Pierre du Puy a été attribuée à Me de la Fare, distinguée pour ses vertus et son habileté en gouvernement ecclésiastique.
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1904
p. 253-270
Dons faits par le Roy, tant à Mr de Barillon qu'à Mr d'Albaret, & à Mr le Chevalier de S. Olon. [titre d'après la table]
Début :
Comme le Roy fait tous les jours des dons de toutes manieres, [...]
Mots clefs :
Dons, Roi, Mr de Barillon, Mr d'Albaret, Chevalier de S. Olon, Ambassadeur, Commissions
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Dons faits par le Roy, tant à Mr de Barillon qu'à Mr d'Albaret, & à Mr le Chevalier de S. Olon. [titre d'après la table]
Comme le Roy fait tous
les jours des dons de toutes
manieres , Sa Majefté a donné
à Mr de Barillon, M° des Requeftes, l'Intendance de la Province de Rouffillon, & de l'Armée que commande Mr le
Duc de Noailles. Mr d'Albaret
Piemontois , & d'une Maifon
confiderable , cy devant
mier Prefident à
voit cet employ avec la
preapremiere Prefidence du Confeil
Souverain du Rouffillon. Mais
comme chacun de ces deux
emplois demande un homme
254 MERCURE
tout entier , S. M. a laiffé à
Mr d'Albaret la place de Pre-`
mier Preſident , &luy a donné
une penfion de 2000. écus
pour marquer la fatisfaction
qu'Elle a de fes fervices. Mr
de Barillon eft d'une des meilleures familles de la Robe. Je
vous en ay parlé tant de fois,
qu'il eft inutile que je repete
ce que je vous en ay dit. Il eft
fils de Mr de Barillon Confeiller d'Eftat ordinaire, qui avoit
efté pendant 12. ans Ambaffadeur en Angleterre , Plenipotentiaire au Congrez de Colo.
GALANT 255
gne , & fucceffivement Intendant de Paris , de Picardie , &
des Armées du Roy , & Commiffaire pour les limites , en
execution du Traité d'Aix-laChapelle. Ce dernier eftoit fils
de Mr le Prefident Barillon,
Magiftrat d'une vertuſi diſtinguée , que fa memoire eft encore honorée dans le Parlement , & neveu de Mr de Morangis , qui avoit cfté Directeur des Finances , & qui eft
mort tres - ancien Confeiller
d'Eftat , avec une reputation
auffi grande dans le Confeil,
8
256 MERCURE
que
celle
Mr fon frere a- que
voit dans le Parlement. Mr
de Barillon l'Ambaffadeur , avoit épousé Marie Magdeleine
Mangot , petite fille du Garde
des Sceaux Mangot , &fille de
Mr Mangot, grand Doyen de
Mrs les Maiftres des Requeſtes,
& de Marie Phelipeaux fa femme, fœur de Mr le Preſident
Pontchartrain , pere de Mr
le Chancelier. On ne doit pas
s'eftonner fi Mr de Barillon,
forty de tels parens paternels
& maternels , & aprés avoir
fervy avecdiftinction pendant
de
GALANT 257
huit années , en qualité de
Confeiller, tant aux Requeſtes
du Palais, qu'au Parlement , &
pendant dix autres au Confeil,
a efté choisi pour un employ
d'autant plus beau que la victoire a toûjours paru attachéc
à cette Armée, ou plûtoſt enchaînée par la capacité du General auquel le Roy en confic
la conduite.
Le Roy a donné au fils de
Mr le Chevalier de Saint Olon,
la furvivance de la Charge qu'il
poffede de Gentilhomme ordinaire de fa Maifon. Ceux
qui font pourvûs de ces CharFanvier 1710.
Y
258 MERCURE
ges doivent avoir un efprit
univerfel , beaucoup de politeffe , fçavoir s'énoncer agreablement , & fur tout fçavoir
le monde , fans quoy ils ne
pouroient remplir dignement
Ies Commiffions dont le Roy
les honore tous les jours. Ils
font deſtinez à une infinité de
differens emplois, &Sa Majeſté
en doit toûjours avoir quelqu'un auprés de fa Perfonne,
afin que felon les évenemens
qu'Elle apprend , Elle les envoye, felon qu'Elle le juge à
propos , faire des complimens
de congratulation fur la naif-
GALANT
259
&
fance des Princes & autres perfonnes d'une grande diftinction , ainfi que fur leur mariage , & fur quantité d'incidens
qui leur peuvent arriver ,
des complimens de condoleance fur les morts qui arrivent
dans leurs familles . Ils vont
auffi recevoir des Princes étrangers, qui paffent dans le Royaume , ou qui viennent pour y
demeurer ; & quand le Roy a
connu qu'ils fe font bien acquittez de toutes ces chofes,
& qu'ils ont un genie élevé,
penetrant & propre aux
affaires il les employe à
Y ij
260 MERCURE
des chofes plus importantes ;
à des negociations épineu
fes , & leur donne quelquefois le titre d'Envoyez Extraordinaires , & mefme d'Ambaffadeurs.
Je ne puis mieux vous faire
voir à quoy ces Meffieurs font
employez , qu'en vous faifant
un détail de la plus grande
partie des Commiffions dont
Mr. de S. Olon a etté honoré,
puifqu'il paroift conftant que
jamais Gentilhomme ordinaire
n'a eu le bonheur d'en avoir
un fi grand nombre.
Aprés avoir fait connoiſtre
GALANT 261
}
par fes premieres Commiffions
dequoy il eftoit capable, & les
fervices qu'il pouvoit rendre
au Roy & à l'Etat ; & aprés
avoir accompagné S. M. dans
plufieurs de fes Campagnes ,
pendant lefquelles il s'acquitta
toûjours au gré de S. M. des
Commiffions dont il fut honoré, il eut en 1673. celle de
conduire Mr le Comte de Molina Ambaffadeur d'Espagne,
jufqu'à la frontiere, & de faire
à l'Ile de la Conference l'échange de ce Comte avec Mr
de Villars Ambaffadeur , de
France en Espagne.
262 MERCURE
En 1681. il fut envoyé à
Genes , & il n'en revint qu'en
1684.
En 1688. il fut mis par le
Roy auprés de Mr le Cardinal
Ranuzzi Nonce du Pape, & il
demeura neuf mois avec luy
dans S. Lazare , où il avoit jugé à propos de ſe retirer .
Il fut chargé en 1690. de
la conduite de Mr le Marquis
de Dogliani Ambaffadeur de
Savoye jufqu'à Antibes , & de
l'échanger fur le Var avec Mr
le Comte deRebenac, Ambaffadeur de France en Savoye.
Il fut nommé en 1692.
GALANT 263
2
Ambaffadeur auprés du Roy
de Maroc , d'où il ne revint
qu'à la fin de 1693. & il donna auPublic à fon retour , un
Volume tres curieux , & qui
contenoit la Relation de cette
Ambaſſade.
En 1698. il fut envoyé à
Breft avec un plein pouvoir du
Roypour y conclure unTraité de Paix & de Commerce avec le General Ben- Arſche
Ambaffadeur du Roy de Maroc & conjointement avec
Mr le Comte de Chafteau Renault , qui à eſté fait depuis
Vice-Amiral & Maréchal de
264 MERCURE
France. Mais à peine fut- il arrivé à Breſt , qu'il y reçut l'ordre d'amener cet Ambaffadeur
à la Cour , de l'accompagner
par tout , & de demeurer auprés de luy jufqu'à fon retour.
Le Roy le miten 1703. auprés de Mr le Comte de Valdftein Ambaffadeur de l'Empereur en Portugal , & pris fur
Mer par
le conduifit de Vincennes à
Bourges , où il demeura dix
mois avec luy , à la fin defquels S. M. luy ayant accordé
fa liberté , Elle luy ordonna
de le mener jufqu'à Geneve.
Mr de Coëtlogon. Il
Il
GALANT 265
Il fut envoyé à Bayonne
fur la fin de 1709. pour faire
au nom du Roy le compliment de condoleance à la Reine Doüairiere d'Eſpagne , ſur
la mort de l'Electrice Douairiere Palatine fa Mere.
Il a eu quantité d'autres
Commiffions auprés de rous
les Princes , Princeffes , & Seigneurs & Dames de la Cour ;
auprés du Roy & de la Reine
d'Angleterre ; auprés de Mr
de Strafbourg ; de M° de Mekelbourg ; de Mr le Cardinal
de Coiflin , & de Mes les Princeffes de Baden , de Carignan,
Fanvier 1710.
Ꮓ
266 MERCURE
& de Soubize. Il reçut pour
le Roy , les dernieres paroles
du Grand Condé agonifant à
Fontainebleau , & celles de Mr
de Montaufier à Paris.
Il alla vifieer trois fois par
ordre du Roy en 1675. &
1676. feu Mr de Longueville
à Chezal Benoift & à Bourgueil , à l'occafion des differens que ce Prince avoit avec
Mes de Longueville & de Nemours.
En 1672. il fut chargé des
Ordres du Roy pour Mr le
Chevalier de Rohan , au fujet
du démêlé qu'il y eût pour
GALANT 267
lors entre luy & Mr le Chevalier de Lorraine.
En 1664. le Roy ayant permis à Mr le Prince d'enyoyer
Mr de S. Olon en Espagne
pour des interefts particuliers
qu'il avoit à y traiter , la Reine le chargea à cette occafion
de faire des complimens de la
part de Monfeigneur le Dauphin , à l'Infant d'Espagne,
qui a efté depuis Charles II.
Il fut admis à fon Audiance
avec tout le ceremonial qu'on
a coûtume d'obſerver dans ces
fortes de fonctions , & il
fe glorifier d'avoir efté le prepeut
Z ij
268 MERCURE
mier des Envoyez que Monfei
gneur le Dauphin a cus
pourra avoir. Il demeura fix
mois à la Cour d'Espagne , &
il
y
&
eut trois Audiances de
Philippes IV.
*
Je n'ay pas tout- à fait fuivy
l'ordre des temps , en vous
parlant de la plus grande partie des Commiffions attachées
à fa Charge , dont il a efté
honoré , lors qu'il ne s'eft
point agy de negociations
dont je vous ay marqué exactement les temps. Mr de S.
Olon fils , qui a eſté reçu en
furvivance , a fait quatre cam-
GALANT 269
pagnes dans les Moufquetaires , & cinq en qualité d Officier aux Gardes. Il a efté d'abord Enſeigne , &depuis quatre mois , le Roy l'a fait SousLieutenant. Il a efté eftropié
de la main droite, à l'affaire de
Ramillies. Il ya lieu de croire
que le Roy luy a donné la furvivance que S. M. luy vienr
d'accorder › parce qu'eftant
inftruit par l'exemple & par
les Memoires d'un pere qui
s'eft fi bien acquitté de toutes
les fonctions d'une Charge
dont l'exercice n'eft pas facile,
ayant les mefmes lumieres que
Z iij
270 MERCURE
fon pere, y fervira de mefme,
& avec autant de zele & de
fidelité , le Roy & l'Etat
les jours des dons de toutes
manieres , Sa Majefté a donné
à Mr de Barillon, M° des Requeftes, l'Intendance de la Province de Rouffillon, & de l'Armée que commande Mr le
Duc de Noailles. Mr d'Albaret
Piemontois , & d'une Maifon
confiderable , cy devant
mier Prefident à
voit cet employ avec la
preapremiere Prefidence du Confeil
Souverain du Rouffillon. Mais
comme chacun de ces deux
emplois demande un homme
254 MERCURE
tout entier , S. M. a laiffé à
Mr d'Albaret la place de Pre-`
mier Preſident , &luy a donné
une penfion de 2000. écus
pour marquer la fatisfaction
qu'Elle a de fes fervices. Mr
de Barillon eft d'une des meilleures familles de la Robe. Je
vous en ay parlé tant de fois,
qu'il eft inutile que je repete
ce que je vous en ay dit. Il eft
fils de Mr de Barillon Confeiller d'Eftat ordinaire, qui avoit
efté pendant 12. ans Ambaffadeur en Angleterre , Plenipotentiaire au Congrez de Colo.
GALANT 255
gne , & fucceffivement Intendant de Paris , de Picardie , &
des Armées du Roy , & Commiffaire pour les limites , en
execution du Traité d'Aix-laChapelle. Ce dernier eftoit fils
de Mr le Prefident Barillon,
Magiftrat d'une vertuſi diſtinguée , que fa memoire eft encore honorée dans le Parlement , & neveu de Mr de Morangis , qui avoit cfté Directeur des Finances , & qui eft
mort tres - ancien Confeiller
d'Eftat , avec une reputation
auffi grande dans le Confeil,
8
256 MERCURE
que
celle
Mr fon frere a- que
voit dans le Parlement. Mr
de Barillon l'Ambaffadeur , avoit épousé Marie Magdeleine
Mangot , petite fille du Garde
des Sceaux Mangot , &fille de
Mr Mangot, grand Doyen de
Mrs les Maiftres des Requeſtes,
& de Marie Phelipeaux fa femme, fœur de Mr le Preſident
Pontchartrain , pere de Mr
le Chancelier. On ne doit pas
s'eftonner fi Mr de Barillon,
forty de tels parens paternels
& maternels , & aprés avoir
fervy avecdiftinction pendant
de
GALANT 257
huit années , en qualité de
Confeiller, tant aux Requeſtes
du Palais, qu'au Parlement , &
pendant dix autres au Confeil,
a efté choisi pour un employ
d'autant plus beau que la victoire a toûjours paru attachéc
à cette Armée, ou plûtoſt enchaînée par la capacité du General auquel le Roy en confic
la conduite.
Le Roy a donné au fils de
Mr le Chevalier de Saint Olon,
la furvivance de la Charge qu'il
poffede de Gentilhomme ordinaire de fa Maifon. Ceux
qui font pourvûs de ces CharFanvier 1710.
Y
258 MERCURE
ges doivent avoir un efprit
univerfel , beaucoup de politeffe , fçavoir s'énoncer agreablement , & fur tout fçavoir
le monde , fans quoy ils ne
pouroient remplir dignement
Ies Commiffions dont le Roy
les honore tous les jours. Ils
font deſtinez à une infinité de
differens emplois, &Sa Majeſté
en doit toûjours avoir quelqu'un auprés de fa Perfonne,
afin que felon les évenemens
qu'Elle apprend , Elle les envoye, felon qu'Elle le juge à
propos , faire des complimens
de congratulation fur la naif-
GALANT
259
&
fance des Princes & autres perfonnes d'une grande diftinction , ainfi que fur leur mariage , & fur quantité d'incidens
qui leur peuvent arriver ,
des complimens de condoleance fur les morts qui arrivent
dans leurs familles . Ils vont
auffi recevoir des Princes étrangers, qui paffent dans le Royaume , ou qui viennent pour y
demeurer ; & quand le Roy a
connu qu'ils fe font bien acquittez de toutes ces chofes,
& qu'ils ont un genie élevé,
penetrant & propre aux
affaires il les employe à
Y ij
260 MERCURE
des chofes plus importantes ;
à des negociations épineu
fes , & leur donne quelquefois le titre d'Envoyez Extraordinaires , & mefme d'Ambaffadeurs.
Je ne puis mieux vous faire
voir à quoy ces Meffieurs font
employez , qu'en vous faifant
un détail de la plus grande
partie des Commiffions dont
Mr. de S. Olon a etté honoré,
puifqu'il paroift conftant que
jamais Gentilhomme ordinaire
n'a eu le bonheur d'en avoir
un fi grand nombre.
Aprés avoir fait connoiſtre
GALANT 261
}
par fes premieres Commiffions
dequoy il eftoit capable, & les
fervices qu'il pouvoit rendre
au Roy & à l'Etat ; & aprés
avoir accompagné S. M. dans
plufieurs de fes Campagnes ,
pendant lefquelles il s'acquitta
toûjours au gré de S. M. des
Commiffions dont il fut honoré, il eut en 1673. celle de
conduire Mr le Comte de Molina Ambaffadeur d'Espagne,
jufqu'à la frontiere, & de faire
à l'Ile de la Conference l'échange de ce Comte avec Mr
de Villars Ambaffadeur , de
France en Espagne.
262 MERCURE
En 1681. il fut envoyé à
Genes , & il n'en revint qu'en
1684.
En 1688. il fut mis par le
Roy auprés de Mr le Cardinal
Ranuzzi Nonce du Pape, & il
demeura neuf mois avec luy
dans S. Lazare , où il avoit jugé à propos de ſe retirer .
Il fut chargé en 1690. de
la conduite de Mr le Marquis
de Dogliani Ambaffadeur de
Savoye jufqu'à Antibes , & de
l'échanger fur le Var avec Mr
le Comte deRebenac, Ambaffadeur de France en Savoye.
Il fut nommé en 1692.
GALANT 263
2
Ambaffadeur auprés du Roy
de Maroc , d'où il ne revint
qu'à la fin de 1693. & il donna auPublic à fon retour , un
Volume tres curieux , & qui
contenoit la Relation de cette
Ambaſſade.
En 1698. il fut envoyé à
Breft avec un plein pouvoir du
Roypour y conclure unTraité de Paix & de Commerce avec le General Ben- Arſche
Ambaffadeur du Roy de Maroc & conjointement avec
Mr le Comte de Chafteau Renault , qui à eſté fait depuis
Vice-Amiral & Maréchal de
264 MERCURE
France. Mais à peine fut- il arrivé à Breſt , qu'il y reçut l'ordre d'amener cet Ambaffadeur
à la Cour , de l'accompagner
par tout , & de demeurer auprés de luy jufqu'à fon retour.
Le Roy le miten 1703. auprés de Mr le Comte de Valdftein Ambaffadeur de l'Empereur en Portugal , & pris fur
Mer par
le conduifit de Vincennes à
Bourges , où il demeura dix
mois avec luy , à la fin defquels S. M. luy ayant accordé
fa liberté , Elle luy ordonna
de le mener jufqu'à Geneve.
Mr de Coëtlogon. Il
Il
GALANT 265
Il fut envoyé à Bayonne
fur la fin de 1709. pour faire
au nom du Roy le compliment de condoleance à la Reine Doüairiere d'Eſpagne , ſur
la mort de l'Electrice Douairiere Palatine fa Mere.
Il a eu quantité d'autres
Commiffions auprés de rous
les Princes , Princeffes , & Seigneurs & Dames de la Cour ;
auprés du Roy & de la Reine
d'Angleterre ; auprés de Mr
de Strafbourg ; de M° de Mekelbourg ; de Mr le Cardinal
de Coiflin , & de Mes les Princeffes de Baden , de Carignan,
Fanvier 1710.
Ꮓ
266 MERCURE
& de Soubize. Il reçut pour
le Roy , les dernieres paroles
du Grand Condé agonifant à
Fontainebleau , & celles de Mr
de Montaufier à Paris.
Il alla vifieer trois fois par
ordre du Roy en 1675. &
1676. feu Mr de Longueville
à Chezal Benoift & à Bourgueil , à l'occafion des differens que ce Prince avoit avec
Mes de Longueville & de Nemours.
En 1672. il fut chargé des
Ordres du Roy pour Mr le
Chevalier de Rohan , au fujet
du démêlé qu'il y eût pour
GALANT 267
lors entre luy & Mr le Chevalier de Lorraine.
En 1664. le Roy ayant permis à Mr le Prince d'enyoyer
Mr de S. Olon en Espagne
pour des interefts particuliers
qu'il avoit à y traiter , la Reine le chargea à cette occafion
de faire des complimens de la
part de Monfeigneur le Dauphin , à l'Infant d'Espagne,
qui a efté depuis Charles II.
Il fut admis à fon Audiance
avec tout le ceremonial qu'on
a coûtume d'obſerver dans ces
fortes de fonctions , & il
fe glorifier d'avoir efté le prepeut
Z ij
268 MERCURE
mier des Envoyez que Monfei
gneur le Dauphin a cus
pourra avoir. Il demeura fix
mois à la Cour d'Espagne , &
il
y
&
eut trois Audiances de
Philippes IV.
*
Je n'ay pas tout- à fait fuivy
l'ordre des temps , en vous
parlant de la plus grande partie des Commiffions attachées
à fa Charge , dont il a efté
honoré , lors qu'il ne s'eft
point agy de negociations
dont je vous ay marqué exactement les temps. Mr de S.
Olon fils , qui a eſté reçu en
furvivance , a fait quatre cam-
GALANT 269
pagnes dans les Moufquetaires , & cinq en qualité d Officier aux Gardes. Il a efté d'abord Enſeigne , &depuis quatre mois , le Roy l'a fait SousLieutenant. Il a efté eftropié
de la main droite, à l'affaire de
Ramillies. Il ya lieu de croire
que le Roy luy a donné la furvivance que S. M. luy vienr
d'accorder › parce qu'eftant
inftruit par l'exemple & par
les Memoires d'un pere qui
s'eft fi bien acquitté de toutes
les fonctions d'une Charge
dont l'exercice n'eft pas facile,
ayant les mefmes lumieres que
Z iij
270 MERCURE
fon pere, y fervira de mefme,
& avec autant de zele & de
fidelité , le Roy & l'Etat
Fermer
Résumé : Dons faits par le Roy, tant à Mr de Barillon qu'à Mr d'Albaret, & à Mr le Chevalier de S. Olon. [titre d'après la table]
Le texte relate plusieurs nominations et distinctions accordées par le roi. Monsieur de Barillon, Maître des Requêtes, a été nommé Intendant de la Province de Roussillon et de l'armée dirigée par le Duc de Noailles. Monsieur d'Albaret, ancien Premier Président, a conservé sa charge avec une pension de 2000 écus en reconnaissance de ses services. Monsieur de Barillon provient d'une famille distinguée de la robe, son père ayant été ambassadeur en Angleterre et intendant de plusieurs régions et armées. Le roi a également accordé la survivance de la charge de Gentilhomme ordinaire de sa maison au fils du Chevalier de Saint Olon. Cette charge exige un esprit universel, beaucoup de politesse et une connaissance approfondie du monde. Les titulaires de cette charge sont souvent envoyés en missions diplomatiques, pour des compliments de congratulation ou de condoléances, et peuvent être promus à des rôles plus importants comme envoyés extraordinaires ou ambassadeurs. Le Chevalier de Saint Olon a effectué de nombreuses missions diplomatiques, incluant des échanges d'ambassadeurs, des négociations de traités et des missions auprès de diverses cours européennes et non européennes. Son fils, également nommé Gentilhomme ordinaire, a servi dans les Mousquetaires et les Gardes et a été blessé à la bataille de Ramillies.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
1905
p. 270-299
Eloge de feu Mr de Corneille. [titre d'après la table]
Début :
Je vous tiens parole, & je m'acquitte de ce que je vous ay promis [...]
Mots clefs :
Éloge, Corneille, Académie française, Public, Comédies, Tragédies, Opéra, Troupe, Comédien, Éditions
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Eloge de feu Mr de Corneille. [titre d'après la table]
Je vous tiens parole , &je
m'acquitte de ce que je vous
ay promis en vous envoyant
l'Eloge de feu Mr de Corneille, Ecuyer, mort à l'âge de 84.
ans. Il a porté le nom de
Jeune , dans un âge fort avancé , à caufe qu'il avoit un frere
plus âgé que luy , connu fous
le nom du grand Corneille , &
qui s'eftoit acquis ce furnom
a jufte titre. On avoit encore
donné au cadet le furnom
d'honneste homme , à caufe de la
GALANT 271-
droiture de fon cœur generalement connue. Il eftoit univerfellement aimé , & il n'a
pas paru qu'il ait jamais eu
aucun ennemy ni qu'il fe foit
brouillé avec perfonne. Il étoit
obligeant, d'une humeur douce, & fe faifoit un plaifir d'en
faire à tous ceux qui en fouhaitoient de luy.
Comme l'efprit eftoit hereditaire dans fa famille , il ne
faut pas s'eftonner s'il prit le
party des Lettres. Il eftoit univerfel , & la Poëſie n'a pas fait
fon unique occupation. Il a
donné cinq gros Volumes in
Z iiij
272 MERCURE
F
Folio au Public , dont je vous
parleray dans la fuite , ainfi
que d'autres ouvrages de Profe. Ses premiers ont efté des
preuves du talent qu'il avoit
pour la Poësie , & c'eft ordinairement par où les jeunes
gens commencent à exercet
leur efprit. Iltraduifit les Methamorphofes d'Ovide, &p'ufieurs autres Ouvrages de ce
galant Auteur en Vers François , dont on a fait un grand
nombre d'Editions. Ses Ouvrages de Theatre ont diverty
la Cour pendant tout le temps
de la Regence , & long- temps.
ป
GALANI 273
aptés , &parmy fes Comedies
& fes Tragedies , dont je ne
vous nommeray que quelquesunes , puifque le Recueil de
fes Pieces eft imprimé , il y en
a eu dont les fuccés ont furpaffe ceux des Pieces des plus
fameux Auteurs ; & entre fes
Comedies , Dom Bertrand de
Sigaralle , a cfté fi eftimé & fi
fuivy, que l'on a remarqué que
pendant un certain nombre
d'années , il a efté joué plus de
vingt fois à la Cour , fans les
reprefentations qui en ont efté
données au Public. Mr de
Corneille n'eftoit encore que
274 MERCURE
dans un âge tres-peu avancé,
lors qu'ilfit jouer fur le Theatre du Marais , le Tymocrate.
Nous n'avons point yû d'Ouvrage de nos jours qui ait efté
reprefenté fi long- temps de
fuite , puifque les reprefentations en furent continuées pendant un hyver entier ; & cette
Piece fit tant de bruit , que le
Roy l'alla voir fur le Theatre
du Marais. Le fujet de cette
Piece fut fi heureux , & cette
Tragedie fut fi intereſſante,
qu'on vit paroiftre auffi toſt
plufieurs Pieces, dont les Heros eftoient haïs fous un nom
GALANT 275
& aimez fous un autre. Comme la Troupe des Comediens
du Marais ne paffoit pas pour
eftre la meilleure de Paris , &
que celle de l'Hoſtel de Bourgogne la furpaffoit infiniment,
& qu'elle avoit toutes les voix,
cetteTroupe entreprit de jouer
cette Piece , à caufe de la reputation extraordinaire qu'el
le avoit euë ; mais comme
tout Paris la fçavoit par cœur,
cette Troupe n'eût pas tous
les applaudiffemens qu'elle at.
tendoit , & le grand nombre
de Reprefentations qu'en avoient donné les Comediens
+
276 MERCURE
du Marais , avoient fait qu'ils
poffedoient fi bien cette Piece , qu'il fut impoffible aux
Copies d'atteindre jufqu'à la
perfection des Originaux ; de
maniere que lors qu'il eftoit
queftion de la voir reprefenter on preferoit les Comediens du Marais à ceux del'Hôtel de Bourgogne.
Mr de Corneille fit jouer
quelque temps aprés la mort
de l'Empereur Comode fur le
mefine Theatre des Coinediens du Marais , où le Roy
& toute la Cour , fur le bruit
qui fe répandit des grands ap
GALANT 277
plaudiffemens que cette Piece
recevoit , allerent en voir la
reprefentation & quelque
temps aprés elle fut jouée fur
le Theatre du Louvre , où l'on
en donna encore enſuite plufieurs reprefentations.
Les Comediens de l'Hoftel
de Bourgogne , chagrins des
avantages que recevoient les
Comediens du Marais , mirent
tout en ufage pour s'acquerir
M'de Corneille , & il fe trouva obligé de travailler pour
eux , parce qu'ils avoient fait
entrer dans leur Troupe quelques Comediens du Marais ,
278 MERCURE
fans lefquels fes Pieces auroient
eſté mal jouées. Il fit donc reprefenter le Stilicon fur le
Theatre de l'Hoftel de Bourgogne. Je ne vous dis rien de
cette Piece. Perfonne n'ignore
qu'elle fut le charme de tout
Paris. M' de Corneille donna
enfuite Camma , Reine de Galatie , & la Cour & la Ville ſc
trouverent en fi grand nombre aux Repreſentions de cette Piece , que les Comediens
ne trouvoient pas de place fur
le Theatre pour pouvoir jouer
avec tranquilité , & il arriva
une chofe en ce temps- là qui
GALANT 279
n'avoit point encore eſté faite
par aucune Troupe. Les Comediensjufqu'à cette Piece n'avoient joué la Comedie que
les Dimanches , les Mardis , &
les Vendredis ; mais ils commencerent à caufe de la foule ,
à jouer les Jeudis , ce qui leur
arriva dans la fuite , lors que
les Pieces eftoient fort fuivies ,
ce qu'ils ont toûjours fait depuis, & ce qui leur a vallu beaucoup d'argent.
Parmi fes Tragedies on en
trouve une qui a paffé pour un
Chef-d'œuvre. Jamais Piece.
n'a efté plus touchante & plus
-
280 MERCURE
fuivie. C'eft de l'Ariane dont
je veux parler , & ce qui doit
furprendre tout le monde , eft
que M' de Corneille eftant retiré à la Campagne avoit fait
cette Piece en quarante jours.
Il n'avoit pas moins de facilité
à travailler à fes ouvrages de
Theatre, que de memoire pour
les retenir , & tous ceux qui
l'ont connu particulierement.
ont efté témoins que lors qu'il
eftoit prié delire fes Pieces dans
quelques Compagnies , ce qui
cftoit autrefois fort en ufage ,
il les recitoit mieux qu'aucun
Comedien n'auroit pû faire ,
GALANT 281
fans rien lire ; il eftoit fi fûr de
fa memoire , quefouvent il ne
portoit point fes Pieces avec
luy.
Les Comediens m'ayant
preffé avec de fortes inftances ,
de mettre aprés la mort de M
Voifin tout ce qui s'eftoit paf
fé chez elle pendant fa vie à
l'occafion du mêtier dont elle
s'eitoit mêlée , je fis un grand
nombre de Scenes qui auroient
pû fournir de la matiere pour
trois ou quatre Pieces ; mais
qui ne pouvoient former un
fujet parce qu'il eftoit trop uniforme, & qu'il nes'agiffoit que
Fanvier 1710. Aa
282 MERCURE
de gens qui alloient demander
leur bonne - avanture , & faire
des propofitions qui la regardoient ; mais toutes ces Scenes.
ne pouvant former le neud
d'une Comedie , parce que
toutes ces perfonnes ſe fuyant
& évitant de fe parler , il eftoit
impoffible de faire une liaifon
de Scenes , & que la Piece puſt
avoir unnœud ; je luy donnay
mes Scenes , & il en choifit un
nombre avec lefquelles il compofa un fujet dont le noud
parut des plus agreable , &qui
a efté regardé comme un Chefd'œuvre. Le fuccés de cette
GALANT 283
Piece qui a efté un des plus prodigieux du fiecle , en fait foy.
Le fuccés de la Comedie de
'Inconnu a efté auffi des plus
grands. Il y avoit des raifons
pour donner promptement
cette Piece au Public ; de maniere que pour avancer , je fis
toute la Piece en Profe , &
pendant que je faifois la Profe
du fecond Acte , il mettoit
celle du premier Acte en Vers ;
& comme la Profe eft plus facile que les Vers , j'eus le temps
de faire ceux des Divertiffemens , & fur tout du Dialogue
Aa ij
284 MERCURE
de l'Amour & de l'Amitié qui
n'a pas déplu au Public. Nous
avons fait encore enfemble la
fuperbe Piece de Machines de
Circé , de laquelle je n'ay fait
que les Divertiffemens. Les
Comediens avoient traité du
Theatre des Opera de feu M
le Marquis de Sourdeac ; &
comme tous les mouvemens
des Opera y eftoient reftez ,
je crus qu'en fe fervantedes
mefines mouvemens qui a
voient fervi aux Machines de
ces Opera , on pourroit faire
une Piece qui feroit recitées
GALANT 285
& non chantée , & nous
cherchâmes un fujet favora
ble à mettre ces Machines
dans leur jour. De maniere
que lorsque la Piece parut elle
ne reffembloit en rien aux Opera qui avoient eſté chantez
fur le même Theatre. Le fuccés de cette Piece fut fi prodigieux qu'elle fut jouée fans
interruption depuis le commencement du Carefme jufqu'au mois de Septembre ,
& les Reprefentations en auroient encore duré plus longtemps fi les intereſts d'un Par
ticulier n'en euffent point fait
286 MERCURE
retrancher les voix. Il eft à remarquer que pendant les fix
premieres femaines , la Salle de
la Comedie fe trouva toute
remplie dés midi ; & que com
me l'on n'y pouvoit trouver
de place on donnoit un demi
Louis d'or à la porte , feulement pour y avoir entrée , &
que l'on eftoit content quand
pour la même fomme que l'on
donnoit aux premieres Loges ,
on eftoit placé au troisième
rang. Je n'avance rien dontles
Regitres des Comediens ne
faffent foy.
Comme feu Mr de Cor-
GALANT 287
neille , avoit le bonheur de
réüffir dans tout ce qu'il entreprenoit & que l'Opera cût
efté étably au Palais Royal ,
il fut follicité d'y travailler ,
& il fit l'Opera de Bellerophon,
quifut auffi joué pendant prés
d'une année entiere. Outre
la beauté des Vers & de la
Mufique on remarqua dans
cette Piece ce qui ne s'eftoit
pas encore vu dans aucun Opera ; c'eft à- dire , un fujet auffi
plein & auffi intrigué qui fi la
Piece avoit eu quinze cens
Vers , quoyqu'à caufe de l'étenduëque donne la Mufique,
288 MERCURE
les Opera n'en contiennent
ordinairement que quatre 3
cinq cens. Son genie parut
encore dans l'Opera de Pfiché ;
ce fujet avoit efté mis en Comedie pour le Roy , avec des
Intermedes fi remplis & fi
fuperbes pour tout ce qui en
regardoit les ornemens , que
la France n'a rien vû de plus
beau que ce Spectacle qui avoit
eſté donné dans la fuperbe
Salle des Machines qui fe voit
dans le Palais des Thuileries.
-
Les Comediens voulurent
donner cette Piece au Public ,
en y laiffant les Intermedes , &
fans
GALANT 289
fans que le Corps de la Piece
fuft mife en Opera ; mais la
dificulté parut grande à tous
les Auteurs , car la Piece qui
avoit cité recitée avoit autant
de Vers que les Tragedies ordinaires , & il n'en falloit pas
le quart pour eftre chantée ,
& que cependant tout le fujet
yentraft ; c'eft de quoy Mr de
Corneille vint à bout , & il
fçut la reduire en Opera fans
rien changer du fujer de la'
Piece ; demaniere qu'en n'employant que quatre cens Vers ,
le Public vit les mêmes incidens qu'il avoit trouvez dans
Fanvier 1710.
Bb
290 MERCURE
la Piece de dix huit cens , ce
qui furprit tous les Auditeurs ,
& luy attira beaucoup de
loüanges.
Je nefinirois point cet Elogefi je voulois faire l'Hiftoire
de tous les Ouvrages de Theatre de Mr de Corneille , &
j'aurois quelque chofe de fingulier à vous dire fur chacune
de fes Pieces. La Poëfie cftoit
le moindre de les talens , &
on enjugera par Les Ouvrages
de Profe que je vais vous
raporter. Il fçavoit parfaitement la Langue. Rien ne luy
eftoit caché dans les Arts , &
GALANT 291
toute la terre luy eftoit connuë. Voicy des preuves ' parlantes & inconteftables de ces
trois chofes.
Les remarques que cet
homme univerfel a fait fur
Vaugelas font une preuve
fans replique qu'il connoiffoit
la Langue dans toutela pureté,
&l'on peut en lifant ce Livre
s'éclaircir des doutes que l'on
peut avoir lorfque l'on veut
écrire & parler jufte. Auffi
ce Livre eft il fort recherché
& confulté de ceux qui yeulent acquerirle nom de Puriftes,
.que feu Mr de Corneille , a
Bb ij
292 MERCURE
mieux merité que beaucoup
d'autres , & j'ay fouvent oui
dire à Mr l'Abbé de Dangcau ,
qui comme vous fçavez eft de
l'Academie Françoiſe , & qui
fe plaifoit à luy rendre juſtice ,
qu'il eftoit leur Maître.
Les deux Volumes in fulio
qu'il a donnez au Public fous .
le nom de Dictionnaire des
Arts, doivent faire connoiſtre,
fans qu'il foit befoin d'en dire
davantage, que tout ce qui les
regarde , luy eftoit parfaitementconnu. Il me faudroit faireun Volume, fi je voulois par-,
de tout ce qu'ils contien- jer
GALANT 293
nent ,& de tous les Intrumens
qui regardent les Arts. J'ajouteray feulement que que ces deux .
Volumes ont efté trouvez fi
beaux & fi utiles , que l'impreffion en a efté entierement
enlevée prefque dans le temps
qu'elle a paru , quoy qu'elle
fe foit vendue dans le temps
que l'Academic Françoiſe a
donné fon Dictionnaire au
Public. Il avoit beaucoup travaillé avant la mort, pour en
donner une feconde, Edition ;
& il eftoit ſi laborieux , qu'il
travailloit en mefme temps aux
trois gros Volumes in folio
Bb jij
294 MERCURE
qu'il a donnez au Public un
peu avant fa mort, & qui font
• connoiftre qu'il eftoit univerfel, & qu'il connoiffoit la Terre entiere. 曹 Ces Volumes ont
pour titre , Dictionnaire univerfel , Geographique & Hiftorique , contenant la Defcription
des Royaumes, Empires , Eftats,
Provinces , Pays, Contrées, Dea
ferts , Villes , Bourgs , Abbayes;
Chafteaux , Fortereffes , Mers,
Rivieres , Lacs , Bayes ; Golphes , Détroits , Caps , Ifles,
Prefqu'Ifles, Montagnes , Vallées ; lafituation , l'étendue , les
limites , les diftances de chaque
GALANT 295
Pays ; la Religion , les Mœurs,
les Coûtumes , le Commerce , lesCeremonies particulieres des Peuples , ce que l'Hiftoire fournit
de plus curieux touchant les chofes qui s'y font passées. Le tout
recueilly des meilleures Livres de
Voyages , autres qui agent
paru jusqu'à prefent , par
Corneille de l'Academie Frangoife , & de celle des Infcriptions
des Medailles. موع
Mr
Le Public eftoit tellement
perfuadé de la bonté de fes
Ouvrages , quedés qu'il apprenoit qu'il en avoit quelqu'un
fous la Preffe , il en retenoit &
Bb iiij
296 MERCURE
en payoit d'avance des Exemplaires , chacun témoignant
par cet empreffement le defir
qu'il avoit d'en avoir des premicrs ; de maniere que l'Edition de ce Dictionnaire s'eft
trouvée vendue prefque auffitoft qu'elle a efté achevée , &
Mr de Corneille, dans le temps
qu'il eft mort , avoit déja fait
beaucoup de remarques fur
fonOuvrage, & ramaffe beaucoup de chofes curieuſes pour
en compoſer une feconde Edition .
Je dois avoüer icy que je
tiens de luy tour ce que je
GALANT 297
fçay de la Langue Françoife,
& que pendant un affez grand
nombre d'années, j'ay foûmis
mes Ouvrages à fa correction;
ce qui a fait croire davantage,
& ce qui eftoit ceffé depuis
douze années , ce grand homme eftant affez occupé d'ail .
leurs , & beaucoup détourné
par des incommoditez que
années & un travail immenſe
& continuel luy avoienr attirées.ople
र
fes
Il avoit un grand fond de
probité , de droitute , de fageffe , de bonté , de modeftie,
de charité , & de vertu. Enne-
298 MERCURE
mi de la médifance , il ne pouvoitfouffrir les perfonnes dont
l'unique converfation eft de
faire inventaire des actions
d'autruy. Jamais homme n'a
eu plus de Religion , & n'eft
mort avec plus de refignation
aux volontez de Dieu , & il
voyoit tous les jours approcher la mort avec une fermeté
incroyable , fans ceffer neanmoins fon travail qui luy cftoit
neceffaire , parce que les gens
de Lettres ne font pas ordinairement les plus favorifez de
la fortune , & que l'Ecriture
dit , QUI LABORAT ORAT,
qui travaille prie.
THEQUE
GALANT
20
BIBLIO
ge VILLE
Ce grand homme efton res
commandable par tant d'endroits differens, que je ne doute point que celuy qui aura
le bonheur de remplir la place
qu'il occupoit dans l'Academie Françoife , ne trouve encore de nouveaux fujets d'en
faire un bel Eloge. Perfonne
n'ignore qu'il eftoit auffi de
l'Academie Royale des Medailles & Infcriptions.
Je crois pouvoir placer une
Chanfon aprés l'Eloge d'un
homme qui en a fait de fi belles ; elle eft du Solitaire du
Bois du Val- Dieu.
m'acquitte de ce que je vous
ay promis en vous envoyant
l'Eloge de feu Mr de Corneille, Ecuyer, mort à l'âge de 84.
ans. Il a porté le nom de
Jeune , dans un âge fort avancé , à caufe qu'il avoit un frere
plus âgé que luy , connu fous
le nom du grand Corneille , &
qui s'eftoit acquis ce furnom
a jufte titre. On avoit encore
donné au cadet le furnom
d'honneste homme , à caufe de la
GALANT 271-
droiture de fon cœur generalement connue. Il eftoit univerfellement aimé , & il n'a
pas paru qu'il ait jamais eu
aucun ennemy ni qu'il fe foit
brouillé avec perfonne. Il étoit
obligeant, d'une humeur douce, & fe faifoit un plaifir d'en
faire à tous ceux qui en fouhaitoient de luy.
Comme l'efprit eftoit hereditaire dans fa famille , il ne
faut pas s'eftonner s'il prit le
party des Lettres. Il eftoit univerfel , & la Poëſie n'a pas fait
fon unique occupation. Il a
donné cinq gros Volumes in
Z iiij
272 MERCURE
F
Folio au Public , dont je vous
parleray dans la fuite , ainfi
que d'autres ouvrages de Profe. Ses premiers ont efté des
preuves du talent qu'il avoit
pour la Poësie , & c'eft ordinairement par où les jeunes
gens commencent à exercet
leur efprit. Iltraduifit les Methamorphofes d'Ovide, &p'ufieurs autres Ouvrages de ce
galant Auteur en Vers François , dont on a fait un grand
nombre d'Editions. Ses Ouvrages de Theatre ont diverty
la Cour pendant tout le temps
de la Regence , & long- temps.
ป
GALANI 273
aptés , &parmy fes Comedies
& fes Tragedies , dont je ne
vous nommeray que quelquesunes , puifque le Recueil de
fes Pieces eft imprimé , il y en
a eu dont les fuccés ont furpaffe ceux des Pieces des plus
fameux Auteurs ; & entre fes
Comedies , Dom Bertrand de
Sigaralle , a cfté fi eftimé & fi
fuivy, que l'on a remarqué que
pendant un certain nombre
d'années , il a efté joué plus de
vingt fois à la Cour , fans les
reprefentations qui en ont efté
données au Public. Mr de
Corneille n'eftoit encore que
274 MERCURE
dans un âge tres-peu avancé,
lors qu'ilfit jouer fur le Theatre du Marais , le Tymocrate.
Nous n'avons point yû d'Ouvrage de nos jours qui ait efté
reprefenté fi long- temps de
fuite , puifque les reprefentations en furent continuées pendant un hyver entier ; & cette
Piece fit tant de bruit , que le
Roy l'alla voir fur le Theatre
du Marais. Le fujet de cette
Piece fut fi heureux , & cette
Tragedie fut fi intereſſante,
qu'on vit paroiftre auffi toſt
plufieurs Pieces, dont les Heros eftoient haïs fous un nom
GALANT 275
& aimez fous un autre. Comme la Troupe des Comediens
du Marais ne paffoit pas pour
eftre la meilleure de Paris , &
que celle de l'Hoſtel de Bourgogne la furpaffoit infiniment,
& qu'elle avoit toutes les voix,
cetteTroupe entreprit de jouer
cette Piece , à caufe de la reputation extraordinaire qu'el
le avoit euë ; mais comme
tout Paris la fçavoit par cœur,
cette Troupe n'eût pas tous
les applaudiffemens qu'elle at.
tendoit , & le grand nombre
de Reprefentations qu'en avoient donné les Comediens
+
276 MERCURE
du Marais , avoient fait qu'ils
poffedoient fi bien cette Piece , qu'il fut impoffible aux
Copies d'atteindre jufqu'à la
perfection des Originaux ; de
maniere que lors qu'il eftoit
queftion de la voir reprefenter on preferoit les Comediens du Marais à ceux del'Hôtel de Bourgogne.
Mr de Corneille fit jouer
quelque temps aprés la mort
de l'Empereur Comode fur le
mefine Theatre des Coinediens du Marais , où le Roy
& toute la Cour , fur le bruit
qui fe répandit des grands ap
GALANT 277
plaudiffemens que cette Piece
recevoit , allerent en voir la
reprefentation & quelque
temps aprés elle fut jouée fur
le Theatre du Louvre , où l'on
en donna encore enſuite plufieurs reprefentations.
Les Comediens de l'Hoftel
de Bourgogne , chagrins des
avantages que recevoient les
Comediens du Marais , mirent
tout en ufage pour s'acquerir
M'de Corneille , & il fe trouva obligé de travailler pour
eux , parce qu'ils avoient fait
entrer dans leur Troupe quelques Comediens du Marais ,
278 MERCURE
fans lefquels fes Pieces auroient
eſté mal jouées. Il fit donc reprefenter le Stilicon fur le
Theatre de l'Hoftel de Bourgogne. Je ne vous dis rien de
cette Piece. Perfonne n'ignore
qu'elle fut le charme de tout
Paris. M' de Corneille donna
enfuite Camma , Reine de Galatie , & la Cour & la Ville ſc
trouverent en fi grand nombre aux Repreſentions de cette Piece , que les Comediens
ne trouvoient pas de place fur
le Theatre pour pouvoir jouer
avec tranquilité , & il arriva
une chofe en ce temps- là qui
GALANT 279
n'avoit point encore eſté faite
par aucune Troupe. Les Comediensjufqu'à cette Piece n'avoient joué la Comedie que
les Dimanches , les Mardis , &
les Vendredis ; mais ils commencerent à caufe de la foule ,
à jouer les Jeudis , ce qui leur
arriva dans la fuite , lors que
les Pieces eftoient fort fuivies ,
ce qu'ils ont toûjours fait depuis, & ce qui leur a vallu beaucoup d'argent.
Parmi fes Tragedies on en
trouve une qui a paffé pour un
Chef-d'œuvre. Jamais Piece.
n'a efté plus touchante & plus
-
280 MERCURE
fuivie. C'eft de l'Ariane dont
je veux parler , & ce qui doit
furprendre tout le monde , eft
que M' de Corneille eftant retiré à la Campagne avoit fait
cette Piece en quarante jours.
Il n'avoit pas moins de facilité
à travailler à fes ouvrages de
Theatre, que de memoire pour
les retenir , & tous ceux qui
l'ont connu particulierement.
ont efté témoins que lors qu'il
eftoit prié delire fes Pieces dans
quelques Compagnies , ce qui
cftoit autrefois fort en ufage ,
il les recitoit mieux qu'aucun
Comedien n'auroit pû faire ,
GALANT 281
fans rien lire ; il eftoit fi fûr de
fa memoire , quefouvent il ne
portoit point fes Pieces avec
luy.
Les Comediens m'ayant
preffé avec de fortes inftances ,
de mettre aprés la mort de M
Voifin tout ce qui s'eftoit paf
fé chez elle pendant fa vie à
l'occafion du mêtier dont elle
s'eitoit mêlée , je fis un grand
nombre de Scenes qui auroient
pû fournir de la matiere pour
trois ou quatre Pieces ; mais
qui ne pouvoient former un
fujet parce qu'il eftoit trop uniforme, & qu'il nes'agiffoit que
Fanvier 1710. Aa
282 MERCURE
de gens qui alloient demander
leur bonne - avanture , & faire
des propofitions qui la regardoient ; mais toutes ces Scenes.
ne pouvant former le neud
d'une Comedie , parce que
toutes ces perfonnes ſe fuyant
& évitant de fe parler , il eftoit
impoffible de faire une liaifon
de Scenes , & que la Piece puſt
avoir unnœud ; je luy donnay
mes Scenes , & il en choifit un
nombre avec lefquelles il compofa un fujet dont le noud
parut des plus agreable , &qui
a efté regardé comme un Chefd'œuvre. Le fuccés de cette
GALANT 283
Piece qui a efté un des plus prodigieux du fiecle , en fait foy.
Le fuccés de la Comedie de
'Inconnu a efté auffi des plus
grands. Il y avoit des raifons
pour donner promptement
cette Piece au Public ; de maniere que pour avancer , je fis
toute la Piece en Profe , &
pendant que je faifois la Profe
du fecond Acte , il mettoit
celle du premier Acte en Vers ;
& comme la Profe eft plus facile que les Vers , j'eus le temps
de faire ceux des Divertiffemens , & fur tout du Dialogue
Aa ij
284 MERCURE
de l'Amour & de l'Amitié qui
n'a pas déplu au Public. Nous
avons fait encore enfemble la
fuperbe Piece de Machines de
Circé , de laquelle je n'ay fait
que les Divertiffemens. Les
Comediens avoient traité du
Theatre des Opera de feu M
le Marquis de Sourdeac ; &
comme tous les mouvemens
des Opera y eftoient reftez ,
je crus qu'en fe fervantedes
mefines mouvemens qui a
voient fervi aux Machines de
ces Opera , on pourroit faire
une Piece qui feroit recitées
GALANT 285
& non chantée , & nous
cherchâmes un fujet favora
ble à mettre ces Machines
dans leur jour. De maniere
que lorsque la Piece parut elle
ne reffembloit en rien aux Opera qui avoient eſté chantez
fur le même Theatre. Le fuccés de cette Piece fut fi prodigieux qu'elle fut jouée fans
interruption depuis le commencement du Carefme jufqu'au mois de Septembre ,
& les Reprefentations en auroient encore duré plus longtemps fi les intereſts d'un Par
ticulier n'en euffent point fait
286 MERCURE
retrancher les voix. Il eft à remarquer que pendant les fix
premieres femaines , la Salle de
la Comedie fe trouva toute
remplie dés midi ; & que com
me l'on n'y pouvoit trouver
de place on donnoit un demi
Louis d'or à la porte , feulement pour y avoir entrée , &
que l'on eftoit content quand
pour la même fomme que l'on
donnoit aux premieres Loges ,
on eftoit placé au troisième
rang. Je n'avance rien dontles
Regitres des Comediens ne
faffent foy.
Comme feu Mr de Cor-
GALANT 287
neille , avoit le bonheur de
réüffir dans tout ce qu'il entreprenoit & que l'Opera cût
efté étably au Palais Royal ,
il fut follicité d'y travailler ,
& il fit l'Opera de Bellerophon,
quifut auffi joué pendant prés
d'une année entiere. Outre
la beauté des Vers & de la
Mufique on remarqua dans
cette Piece ce qui ne s'eftoit
pas encore vu dans aucun Opera ; c'eft à- dire , un fujet auffi
plein & auffi intrigué qui fi la
Piece avoit eu quinze cens
Vers , quoyqu'à caufe de l'étenduëque donne la Mufique,
288 MERCURE
les Opera n'en contiennent
ordinairement que quatre 3
cinq cens. Son genie parut
encore dans l'Opera de Pfiché ;
ce fujet avoit efté mis en Comedie pour le Roy , avec des
Intermedes fi remplis & fi
fuperbes pour tout ce qui en
regardoit les ornemens , que
la France n'a rien vû de plus
beau que ce Spectacle qui avoit
eſté donné dans la fuperbe
Salle des Machines qui fe voit
dans le Palais des Thuileries.
-
Les Comediens voulurent
donner cette Piece au Public ,
en y laiffant les Intermedes , &
fans
GALANT 289
fans que le Corps de la Piece
fuft mife en Opera ; mais la
dificulté parut grande à tous
les Auteurs , car la Piece qui
avoit cité recitée avoit autant
de Vers que les Tragedies ordinaires , & il n'en falloit pas
le quart pour eftre chantée ,
& que cependant tout le fujet
yentraft ; c'eft de quoy Mr de
Corneille vint à bout , & il
fçut la reduire en Opera fans
rien changer du fujer de la'
Piece ; demaniere qu'en n'employant que quatre cens Vers ,
le Public vit les mêmes incidens qu'il avoit trouvez dans
Fanvier 1710.
Bb
290 MERCURE
la Piece de dix huit cens , ce
qui furprit tous les Auditeurs ,
& luy attira beaucoup de
loüanges.
Je nefinirois point cet Elogefi je voulois faire l'Hiftoire
de tous les Ouvrages de Theatre de Mr de Corneille , &
j'aurois quelque chofe de fingulier à vous dire fur chacune
de fes Pieces. La Poëfie cftoit
le moindre de les talens , &
on enjugera par Les Ouvrages
de Profe que je vais vous
raporter. Il fçavoit parfaitement la Langue. Rien ne luy
eftoit caché dans les Arts , &
GALANT 291
toute la terre luy eftoit connuë. Voicy des preuves ' parlantes & inconteftables de ces
trois chofes.
Les remarques que cet
homme univerfel a fait fur
Vaugelas font une preuve
fans replique qu'il connoiffoit
la Langue dans toutela pureté,
&l'on peut en lifant ce Livre
s'éclaircir des doutes que l'on
peut avoir lorfque l'on veut
écrire & parler jufte. Auffi
ce Livre eft il fort recherché
& confulté de ceux qui yeulent acquerirle nom de Puriftes,
.que feu Mr de Corneille , a
Bb ij
292 MERCURE
mieux merité que beaucoup
d'autres , & j'ay fouvent oui
dire à Mr l'Abbé de Dangcau ,
qui comme vous fçavez eft de
l'Academie Françoiſe , & qui
fe plaifoit à luy rendre juſtice ,
qu'il eftoit leur Maître.
Les deux Volumes in fulio
qu'il a donnez au Public fous .
le nom de Dictionnaire des
Arts, doivent faire connoiſtre,
fans qu'il foit befoin d'en dire
davantage, que tout ce qui les
regarde , luy eftoit parfaitementconnu. Il me faudroit faireun Volume, fi je voulois par-,
de tout ce qu'ils contien- jer
GALANT 293
nent ,& de tous les Intrumens
qui regardent les Arts. J'ajouteray feulement que que ces deux .
Volumes ont efté trouvez fi
beaux & fi utiles , que l'impreffion en a efté entierement
enlevée prefque dans le temps
qu'elle a paru , quoy qu'elle
fe foit vendue dans le temps
que l'Academic Françoiſe a
donné fon Dictionnaire au
Public. Il avoit beaucoup travaillé avant la mort, pour en
donner une feconde, Edition ;
& il eftoit ſi laborieux , qu'il
travailloit en mefme temps aux
trois gros Volumes in folio
Bb jij
294 MERCURE
qu'il a donnez au Public un
peu avant fa mort, & qui font
• connoiftre qu'il eftoit univerfel, & qu'il connoiffoit la Terre entiere. 曹 Ces Volumes ont
pour titre , Dictionnaire univerfel , Geographique & Hiftorique , contenant la Defcription
des Royaumes, Empires , Eftats,
Provinces , Pays, Contrées, Dea
ferts , Villes , Bourgs , Abbayes;
Chafteaux , Fortereffes , Mers,
Rivieres , Lacs , Bayes ; Golphes , Détroits , Caps , Ifles,
Prefqu'Ifles, Montagnes , Vallées ; lafituation , l'étendue , les
limites , les diftances de chaque
GALANT 295
Pays ; la Religion , les Mœurs,
les Coûtumes , le Commerce , lesCeremonies particulieres des Peuples , ce que l'Hiftoire fournit
de plus curieux touchant les chofes qui s'y font passées. Le tout
recueilly des meilleures Livres de
Voyages , autres qui agent
paru jusqu'à prefent , par
Corneille de l'Academie Frangoife , & de celle des Infcriptions
des Medailles. موع
Mr
Le Public eftoit tellement
perfuadé de la bonté de fes
Ouvrages , quedés qu'il apprenoit qu'il en avoit quelqu'un
fous la Preffe , il en retenoit &
Bb iiij
296 MERCURE
en payoit d'avance des Exemplaires , chacun témoignant
par cet empreffement le defir
qu'il avoit d'en avoir des premicrs ; de maniere que l'Edition de ce Dictionnaire s'eft
trouvée vendue prefque auffitoft qu'elle a efté achevée , &
Mr de Corneille, dans le temps
qu'il eft mort , avoit déja fait
beaucoup de remarques fur
fonOuvrage, & ramaffe beaucoup de chofes curieuſes pour
en compoſer une feconde Edition .
Je dois avoüer icy que je
tiens de luy tour ce que je
GALANT 297
fçay de la Langue Françoife,
& que pendant un affez grand
nombre d'années, j'ay foûmis
mes Ouvrages à fa correction;
ce qui a fait croire davantage,
& ce qui eftoit ceffé depuis
douze années , ce grand homme eftant affez occupé d'ail .
leurs , & beaucoup détourné
par des incommoditez que
années & un travail immenſe
& continuel luy avoienr attirées.ople
र
fes
Il avoit un grand fond de
probité , de droitute , de fageffe , de bonté , de modeftie,
de charité , & de vertu. Enne-
298 MERCURE
mi de la médifance , il ne pouvoitfouffrir les perfonnes dont
l'unique converfation eft de
faire inventaire des actions
d'autruy. Jamais homme n'a
eu plus de Religion , & n'eft
mort avec plus de refignation
aux volontez de Dieu , & il
voyoit tous les jours approcher la mort avec une fermeté
incroyable , fans ceffer neanmoins fon travail qui luy cftoit
neceffaire , parce que les gens
de Lettres ne font pas ordinairement les plus favorifez de
la fortune , & que l'Ecriture
dit , QUI LABORAT ORAT,
qui travaille prie.
THEQUE
GALANT
20
BIBLIO
ge VILLE
Ce grand homme efton res
commandable par tant d'endroits differens, que je ne doute point que celuy qui aura
le bonheur de remplir la place
qu'il occupoit dans l'Academie Françoife , ne trouve encore de nouveaux fujets d'en
faire un bel Eloge. Perfonne
n'ignore qu'il eftoit auffi de
l'Academie Royale des Medailles & Infcriptions.
Je crois pouvoir placer une
Chanfon aprés l'Eloge d'un
homme qui en a fait de fi belles ; elle eft du Solitaire du
Bois du Val- Dieu.
Fermer
Résumé : Eloge de feu Mr de Corneille. [titre d'après la table]
Le texte rend hommage à Thomas Corneille, frère cadet de Pierre Corneille, décédé à l'âge de 84 ans. Connu sous le surnom de 'Jeune' en raison de son frère aîné, Thomas Corneille était également surnommé 'honnête homme' pour sa droiture. Universellement aimé, il était obligeant et doux, toujours prêt à aider autrui. Héritier de l'esprit familial, il s'est distingué dans les lettres en publiant cinq volumes in-folio et plusieurs ouvrages de prose. Ses premières œuvres étaient des traductions, notamment les 'Métamorphoses' d'Ovide, qui ont connu de nombreuses éditions. Thomas Corneille a également écrit des pièces de théâtre qui ont diverti la cour pendant la Régence et longtemps après. Sa comédie 'Dom Bertrand de Sigaralle' a été particulièrement estimée et jouée plus de vingt fois à la cour. Ses tragédies, comme 'Le Tyrannicide', 'La Mort de l'Empereur Commode' et 'Stilicien', ont également connu un grand succès. Il a collaboré avec les comédiens de l'Hôtel de Bourgogne et du Marais, et ses œuvres ont souvent surpassé celles des auteurs les plus célèbres. En plus de ses œuvres théâtrales, Thomas Corneille a écrit des remarques sur Vaugelas, prouvant sa maîtrise de la langue. Il a également publié un 'Dictionnaire des Arts' et un 'Dictionnaire universel, géographique et historique', démontrant ses connaissances étendues et sa laboriosité. Ces ouvrages ont été très appréciés et rapidement épuisés. Le texte mentionne également que Corneille était membre de l'Académie Française et de l'Académie des Inscriptions et Médailles. Son dictionnaire, compilé à partir des meilleures sources de voyages, a été très attendu par le public. Corneille était décrit comme un homme de grande probité, droiture, sagesse, bonté, modestie, charité et vertu. Il était intolérant à la médisance et ne supportait pas les personnes qui critiquaient les actions des autres. Sa foi religieuse était profonde, et il a accepté la mort avec résignation, continuant son travail malgré sa santé déclinante. L'auteur exprime l'espoir que celui qui prendra sa place à l'Académie Française trouvera encore des sujets pour louer ses mérites.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
1906
p. 299-300
AIR NOUVEAU.
Début :
Je crois pouvoir placer une Chanson aprés l'Eloge d'un homme / Fiers Aquilons, quittez nos Plaines, [...]
Mots clefs :
Aquilons, Poètes, Astre, Philis
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AIR NOUVEAU.
Je crois pouvoir placer une
Chanfon aprés l'Eloge d'un
homme qui en a fait de fi bel-
les ; elle eft du Solitaire du
Bois du Val- Dieu..
AIR NOUVEAU.
Fiers Aquilons , quittez nos
Plaines ,
Laiffez regnerun ventplus doux.
Poëtes ,faites couler vos veines ;
Brouillards épais diffipez- vous.
Charmans Hoftes de ces Bocages ,
Oiseaux , reprenez vos ramages :
Plus belle que l'Aftre dujour
Philis revient faire icy fon fejour
Chanfon aprés l'Eloge d'un
homme qui en a fait de fi bel-
les ; elle eft du Solitaire du
Bois du Val- Dieu..
AIR NOUVEAU.
Fiers Aquilons , quittez nos
Plaines ,
Laiffez regnerun ventplus doux.
Poëtes ,faites couler vos veines ;
Brouillards épais diffipez- vous.
Charmans Hoftes de ces Bocages ,
Oiseaux , reprenez vos ramages :
Plus belle que l'Aftre dujour
Philis revient faire icy fon fejour
Fermer
1907
p. 300-305
Mort d'un homme âgé de cent dix-neufs ans, avec des particularités singulieres. [titre d'après la table]
Début :
Quoique l'on se soit récrié sur le grand nombre d'années [...]
Mots clefs :
Mort, Âge, François Maille, Vivre longtemps
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mort d'un homme âgé de cent dix-neufs ans, avec des particularités singulieres. [titre d'après la table]
Quoique l'on se soit récrié sur le grand nombre d'années de
Mr de Corneille mort âgé de
84 ans, on peut dire neapmoins
qu'il eft mort jeune , puifqu'il
avoit trente cinq ans moins
qu'un homme qui vient de
mourir à Chateau- neuf, àune
lieuë de Graffe , qui avoit 1 19.
ans. Il fe nommoit François
Maille , & il eftoit né à Pontevez , petit Village de Provence. Ila efté impoffible de trouver fon Baptiftaire, parce qu'en
ce temps-là on ne gardoit pas.
foigneufement, les Regiftres
des Paroiffes ; mais on a des
preuves certaines de cet âge. Il
cftoit en 1607. Aide de Cuift-
302 MERCURE
ne chez Mr le Duc de Lefdiguieres , & il en eut fon Congé en 1610. Ce Congé a efté
vû dans le Pays par un grand
nombre de perfonnes . M' le
Baron de Chasteau- neufa trouvé dans un Regiftre de ſa Maifon , que fongrand- pere avoit
pris Maille pour fon Cuifinier
le 16. de Mars 16 22. Il fe maria à Chafteau - neuf, où il a
toûjours efté au fervice du
Seigneur du même lieu. A
l'âge de centans il eut unegalanterie avec une fille du même Village , & il en eut un
enfant. A cent dix ans eftant
GALANT 303
à la chaffe il tomba d'une muraille & fe caffa une jambe. Il
guerit , & il vécut encore neuf
années aprés cet accident, étant
frais & vigoureux , &joüiffant
de fon bon fens & de fa memoire. Il n'a commencé à garder le lit qu'environ deux
moistsavant fa mort fans avoir
d'autre incommodité que fon
grand âge , mangeant bien &
buvant pour le moins un pot
de vin à chaque repas. Il n'avoit jamais efté malade , & il
n'eft mort que parce qu'il faut
mourir.
On avoit crû jufqu'à pre-
304 MERCURE
fent que la diette contribuoit
beaucoup à faire vivre longtemps , & l'on foûtenoit que
les gens de qualité accoûtumez à manger beaucoup , &
ſur tout une grande quantité
de viandes differentes , & beaucoup de ragoufts mouroient
beaucoup plutoft que les Payfans ou autres gens que la neceffité obligeoit à vivre fobrement & à boire de même : mais
la mort de François Maille ,
qui pouvoit paffer pour le
Doyen du Genre humainprouve bien le contraire , puifque
non-feulement il buvoit un
a
Sela
GALANT 305
pot de vin à chacun de fes repas ; mais qu'il eftoit impoffible qu'eftant attaché à la cuifine , l'alteration que cauſe le
feu ne l'obligeaft pas à boire
fouvent , & à tâter aux differens ragoufts aufquels il travailloit , & ainfi il n'eftoit occupé qu'à tout ce qui pouvoit
abreger fes jours , ce qui confond les raifonnemens des
hommes
Mr de Corneille mort âgé de
84 ans, on peut dire neapmoins
qu'il eft mort jeune , puifqu'il
avoit trente cinq ans moins
qu'un homme qui vient de
mourir à Chateau- neuf, àune
lieuë de Graffe , qui avoit 1 19.
ans. Il fe nommoit François
Maille , & il eftoit né à Pontevez , petit Village de Provence. Ila efté impoffible de trouver fon Baptiftaire, parce qu'en
ce temps-là on ne gardoit pas.
foigneufement, les Regiftres
des Paroiffes ; mais on a des
preuves certaines de cet âge. Il
cftoit en 1607. Aide de Cuift-
302 MERCURE
ne chez Mr le Duc de Lefdiguieres , & il en eut fon Congé en 1610. Ce Congé a efté
vû dans le Pays par un grand
nombre de perfonnes . M' le
Baron de Chasteau- neufa trouvé dans un Regiftre de ſa Maifon , que fongrand- pere avoit
pris Maille pour fon Cuifinier
le 16. de Mars 16 22. Il fe maria à Chafteau - neuf, où il a
toûjours efté au fervice du
Seigneur du même lieu. A
l'âge de centans il eut unegalanterie avec une fille du même Village , & il en eut un
enfant. A cent dix ans eftant
GALANT 303
à la chaffe il tomba d'une muraille & fe caffa une jambe. Il
guerit , & il vécut encore neuf
années aprés cet accident, étant
frais & vigoureux , &joüiffant
de fon bon fens & de fa memoire. Il n'a commencé à garder le lit qu'environ deux
moistsavant fa mort fans avoir
d'autre incommodité que fon
grand âge , mangeant bien &
buvant pour le moins un pot
de vin à chaque repas. Il n'avoit jamais efté malade , & il
n'eft mort que parce qu'il faut
mourir.
On avoit crû jufqu'à pre-
304 MERCURE
fent que la diette contribuoit
beaucoup à faire vivre longtemps , & l'on foûtenoit que
les gens de qualité accoûtumez à manger beaucoup , &
ſur tout une grande quantité
de viandes differentes , & beaucoup de ragoufts mouroient
beaucoup plutoft que les Payfans ou autres gens que la neceffité obligeoit à vivre fobrement & à boire de même : mais
la mort de François Maille ,
qui pouvoit paffer pour le
Doyen du Genre humainprouve bien le contraire , puifque
non-feulement il buvoit un
a
Sela
GALANT 305
pot de vin à chacun de fes repas ; mais qu'il eftoit impoffible qu'eftant attaché à la cuifine , l'alteration que cauſe le
feu ne l'obligeaft pas à boire
fouvent , & à tâter aux differens ragoufts aufquels il travailloit , & ainfi il n'eftoit occupé qu'à tout ce qui pouvoit
abreger fes jours , ce qui confond les raifonnemens des
hommes
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Résumé : Mort d'un homme âgé de cent dix-neufs ans, avec des particularités singulieres. [titre d'après la table]
François Maille, né à Pontevez en Provence, est décédé à Château-Neuf à l'âge de 119 ans, devenant ainsi le doyen de l'humanité. Son âge a été confirmé par divers documents et témoignages, notamment son service auprès du Duc de Lesdiguières et son embauche comme cuisinier en 1622. Maille s'est marié à Château-Neuf et a servi le seigneur local. À 100 ans, il a eu un enfant avec une jeune femme du village. À 110 ans, il a survécu à une chute et a continué à vivre en bonne santé pendant neuf années supplémentaires. Il est décédé à 119 ans sans autre inconvénient que son grand âge. Maille avait une alimentation variée et buvait du vin à chaque repas, contredisant les croyances de l'époque sur la sobriété nécessaire pour une longue vie.
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1908
p. 305-307
Livre intitulé, Dissertation sur les Caracteres de Corneille et de Racine, contre le sentiment de la Bruyere. [titre d'après la table]
Début :
Tous leurs emplois sont bien differens. Les uns ne sont [...]
Mots clefs :
Livre, Ouvrages, Dissertation
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Livre intitulé, Dissertation sur les Caracteres de Corneille et de Racine, contre le sentiment de la Bruyere. [titre d'après la table]
Tous leurs emplois font
bien differens. Les uns ne
font occupez que du travail du corps & les autres
de celuy de l'efprit qui ne
·Janvier 1710.
Cc
306 MERCURE
Laiffe
pas d'avoir
fes
peines
d'occuper
beaucoup
, &
de
donner
plus
de
chagrins
à
ceux
qui
en
font
profeffion
qu'à
ceux
qui
ne
font
leurs
.
Ouvrages
qu'en
chantant
&
en
fongeant
moins
à la gloire
qu'aux
moyens
d'avoir
de
quoy
vivre
. Un
Auteur
qui
eft
encore
dans
un
âge
trespeu
avancé
, vient
de
mettre
au
jour
un
petit
Livre
intitulé
Differtation
fur
les
Caracteres
de
Corneille
de
Racine
, contre
le fentiment
de
la
Bruyere
, &
quoy
que
les
Auteurs
dont
il
eft
parlé
dans
cet
Ouvrage
GALANY 307
ayent efté mis pendant qu'ils
ont vêcu au nombre des Auteurs du premier rang , & qu'ils
foient fort loüez dans ce
Livre , je ne feny s'ils eftoient
encore vivans , s'ils n'y trouveroient rien qui les chagrinaft.
a
Ilfe vend chez François de
Laulne , Place Sorbonne at-.
tenant le College de Cluny à
Image Saint François ; &
chez Jean Mufier , à la defcente du Pont Neufà l'Olivier.
bien differens. Les uns ne
font occupez que du travail du corps & les autres
de celuy de l'efprit qui ne
·Janvier 1710.
Cc
306 MERCURE
Laiffe
pas d'avoir
fes
peines
d'occuper
beaucoup
, &
de
donner
plus
de
chagrins
à
ceux
qui
en
font
profeffion
qu'à
ceux
qui
ne
font
leurs
.
Ouvrages
qu'en
chantant
&
en
fongeant
moins
à la gloire
qu'aux
moyens
d'avoir
de
quoy
vivre
. Un
Auteur
qui
eft
encore
dans
un
âge
trespeu
avancé
, vient
de
mettre
au
jour
un
petit
Livre
intitulé
Differtation
fur
les
Caracteres
de
Corneille
de
Racine
, contre
le fentiment
de
la
Bruyere
, &
quoy
que
les
Auteurs
dont
il
eft
parlé
dans
cet
Ouvrage
GALANY 307
ayent efté mis pendant qu'ils
ont vêcu au nombre des Auteurs du premier rang , & qu'ils
foient fort loüez dans ce
Livre , je ne feny s'ils eftoient
encore vivans , s'ils n'y trouveroient rien qui les chagrinaft.
a
Ilfe vend chez François de
Laulne , Place Sorbonne at-.
tenant le College de Cluny à
Image Saint François ; &
chez Jean Mufier , à la defcente du Pont Neufà l'Olivier.
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Résumé : Livre intitulé, Dissertation sur les Caracteres de Corneille et de Racine, contre le sentiment de la Bruyere. [titre d'après la table]
En janvier 1710, un texte distingue les occupations manuelles des activités intellectuelles, notant que ces dernières peuvent causer plus de tracas à ceux qui les exercent professionnellement qu'à ceux qui se contentent de rêver et de chanter. Un jeune auteur a publié un livre intitulé 'Dissertation sur les Caractères de Corneille et de Racine, contre le sentiment de La Bruyère', qui éloge Corneille et Racine mais pourrait les chagriner s'ils étaient encore en vie. Le livre est disponible chez François de Laulne, Place Sorbonne près du Collège de Cluny à l'Image Saint-François, et chez Jean Musier, à la descente du Pont Neuf à l'Olivier.
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1909
p. 307-312
Benefice donné par le Roy. [titre d'après la table]
Début :
Comme la variété des Articles de mes Lettres doit faire [...]
Mots clefs :
Bénéfice, Roi, Claude Franchet de Ran
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Benefice donné par le Roy. [titre d'après la table]
Comme la varieté des Articles des mes Lettres doit faire
un agrément , il ne faut pas
Ccij
308 MERCURE
s'étonner fi je paffe fouvent
d'une matiere à une autre qui
ne peut avoir de liaiſon avec
la precedente , & cela donne
même lieu de fe repofer l'ef
prit en ceffant la lecture de
mes Lettres , ce que l'on a de
la peine à faire pour ne point
interomprela lecture de tout
ce qui regarde à peu prés la
même matiere , & c'est pourquoy je fais fuivre icy un Article bien diferent de celuy
quevous venez de lire, & quoy
qu'il s'agiffe dans cet Article
d'un Benefice donné par le
Roy , & que dans ces fortes
GALANT 309
d'Articles je parle moins de
ceux à qui Sa Majefté les donne que de leurs vertus , & de
ce qu'ils ont fait pour le fervice
de l'Eglife en confideration
duquel le Roy donne feulement des dignitez Ecclefiaftiques comme cet Article regarde une Province dont plufieurs des familles de ceux qui
l'habitent ne font pas connues
icy , je crois vous devoir en
voyer cet Article de la maniere
que je l'ayreçu .
Le Roy a donné le Prieuré
de Vaux , Ordre du Val- desChoux, Dioceſe de Langres ,
310 MERCURE
à M Claude Francher de Ran,
Docteur en Theologie , d'une
famille ancienne de FrancheComté, & dont le quatrième
aycul fut annobli par l'Empereur Charlequint en 1550. Il
cft fils de Jean Claude Franchet
Seigneur de Cendrey, Confeiller au Parlement, de la même
Province , & de Dame AnneIgnace de Chaillot , frere de
Charles - Ignace Elprit Franchet de Ran , auffi Confeiller
au même Parlement , qui s'y
diftinguent par leur fçavoir ;
& neveu de Charles - François
Franchet Chanoine de la Me-
GALANT 311
tropolitaine de Befançon , Ar
chidiacre de Luxeul , Prieur
Commendataire de Fontaine,.
& ci- devant Confeiller au même Parlement. Ceux de cette
famille ont l'avantage d'eftre
reçus & Jurez dans les Corps
de Nobleffe , ainfi que dans les
Maiſons & Monafteres de l'un
& de l'autre fexe , où l'on n'eft
point admis fans preuve. Elle
a produit des fujets confidera
bles par leurs Emplois ; un
ayeul paternel de ce Prieur ,
ainfi que fon bifaycul & fon
trifayeul , ayant efté du nom.
bredes Gouverneurs de Befan-
312 MERCURE
çon , lorfque cette Ville eftoit
du Corps de l'Empire ; & elle
eft alliée à plufieurs familles
principales de la Province ; fçavoir à celles de Petremand , de
Chaillor d'Athume , d'Elpoutot , Champd hyver , de Pra ,
de Rincourt , de Malpas , & à
celle de Varax en Savoye.
un agrément , il ne faut pas
Ccij
308 MERCURE
s'étonner fi je paffe fouvent
d'une matiere à une autre qui
ne peut avoir de liaiſon avec
la precedente , & cela donne
même lieu de fe repofer l'ef
prit en ceffant la lecture de
mes Lettres , ce que l'on a de
la peine à faire pour ne point
interomprela lecture de tout
ce qui regarde à peu prés la
même matiere , & c'est pourquoy je fais fuivre icy un Article bien diferent de celuy
quevous venez de lire, & quoy
qu'il s'agiffe dans cet Article
d'un Benefice donné par le
Roy , & que dans ces fortes
GALANT 309
d'Articles je parle moins de
ceux à qui Sa Majefté les donne que de leurs vertus , & de
ce qu'ils ont fait pour le fervice
de l'Eglife en confideration
duquel le Roy donne feulement des dignitez Ecclefiaftiques comme cet Article regarde une Province dont plufieurs des familles de ceux qui
l'habitent ne font pas connues
icy , je crois vous devoir en
voyer cet Article de la maniere
que je l'ayreçu .
Le Roy a donné le Prieuré
de Vaux , Ordre du Val- desChoux, Dioceſe de Langres ,
310 MERCURE
à M Claude Francher de Ran,
Docteur en Theologie , d'une
famille ancienne de FrancheComté, & dont le quatrième
aycul fut annobli par l'Empereur Charlequint en 1550. Il
cft fils de Jean Claude Franchet
Seigneur de Cendrey, Confeiller au Parlement, de la même
Province , & de Dame AnneIgnace de Chaillot , frere de
Charles - Ignace Elprit Franchet de Ran , auffi Confeiller
au même Parlement , qui s'y
diftinguent par leur fçavoir ;
& neveu de Charles - François
Franchet Chanoine de la Me-
GALANT 311
tropolitaine de Befançon , Ar
chidiacre de Luxeul , Prieur
Commendataire de Fontaine,.
& ci- devant Confeiller au même Parlement. Ceux de cette
famille ont l'avantage d'eftre
reçus & Jurez dans les Corps
de Nobleffe , ainfi que dans les
Maiſons & Monafteres de l'un
& de l'autre fexe , où l'on n'eft
point admis fans preuve. Elle
a produit des fujets confidera
bles par leurs Emplois ; un
ayeul paternel de ce Prieur ,
ainfi que fon bifaycul & fon
trifayeul , ayant efté du nom.
bredes Gouverneurs de Befan-
312 MERCURE
çon , lorfque cette Ville eftoit
du Corps de l'Empire ; & elle
eft alliée à plufieurs familles
principales de la Province ; fçavoir à celles de Petremand , de
Chaillor d'Athume , d'Elpoutot , Champd hyver , de Pra ,
de Rincourt , de Malpas , & à
celle de Varax en Savoye.
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Résumé : Benefice donné par le Roy. [titre d'après la table]
Le texte examine la diversité des sujets traités dans les lettres de l'auteur, notant que les changements fréquents de thème sont délibérés pour captiver le lecteur. Il présente ensuite un article distinct concernant un bénéfice ecclésiastique accordé par le roi. Cet article concerne le Prieuré de Vaux, dans l'Ordre du Val-des-Choux, diocèse de Langres, attribué à Claude Francher de Ran, Docteur en Théologie. La famille de Ran, originaire de Franche-Comté, a été anoblie par l'Empereur Charles Quint en 1550. Claude Francher de Ran est le fils de Jean Claude Franchet, Seigneur de Cendrey et Conseiller au Parlement, et de Dame Anne-Ignace de Chaillot. Il est également le frère de Charles-Ignace Esprit Franchet de Ran, Conseiller au Parlement, et le neveu de Charles-François Franchet, Chanoine de la Métropolitaine de Besançon. La famille Franchet est bien intégrée dans la noblesse et compte plusieurs membres distingués par leurs fonctions. Elle est alliée à diverses familles principales de la province, notamment les Petremand, Chaillot d'Athume, Elpoutot, Champdhyver, Pra, Rincourt, Malpas, et Varax en Savoie.
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1910
p. 312-336
Article tres-curieux qui regarde ce qui s'est passé à la Seance publique de la Societé Royale de Montpellier, qui s'est faite pendant la tenuë des Etats de Languedoc. [titre d'après la table]
Début :
Je passe à un Article que vous n'attendiez pas sans doute [...]
Mots clefs :
Société royale des sciences de Montpellier, Assemblée des États de Languedoc, Sciences, Mr. de Basville, Gouttes puantes, Confrères, Académiciens, Aiguille, Aimant, Pôles, Satellites, Discours
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article tres-curieux qui regarde ce qui s'est passé à la Seance publique de la Societé Royale de Montpellier, qui s'est faite pendant la tenuë des Etats de Languedoc. [titre d'après la table]
e paffe à un Article que
vous n'attendiez pas fans doute
ce mois-cy ; mais fçachant
voftre curiofité fur ce qui regarde la Societé Royale des
Sciences de Montpellier , j'ay
fi bien pris mes mefures que
je vous en envoye un Article
digne
GALANT 313
digne de voftre curiofité &
de celle de tout le Public. Cette Societé a tenu fa Seance publique pendant l'Affemblée
des Etats de Languedoc , qui
l'ont honorée de leur prefence.
Mr de Bafville Confeiller d'Etat &Intendant de Languedoc
y prefida comme Academicien
Honoraire; & il en fit l'ouverture par un Difcours qui reçûr de grands aplaudiffemens.
Il parla des Sciences en general
& de l'utilité que les hommes
recevoient à s'y attacher ; il
s'apliqua fur tout à prouver
le bien que fit l'étude de la
Fanvier 1710.
Dd
314 MERCURE
Philofophie. Dans les premiers
fiecles du Paganifme , dit-il ,
cette étude faifoit les délices des
grands hommes de ces temps éloignez e même dans la naiffance
du Chriftianifme l'estime fut fi
prodigieufe pour Platon qu'on
regardoit alors comme l'Oracle de
la Philofophie , qu'on le mettoit
prefque enparallele avec les Prophetes,& qu'on pritfe:Ouvrages
pour des Commentaires de l'E
criture , puifqu'on conçut longtemps la nature du Verbe, comme
il l'avoit conçue. Il remarqua
enfuite que rien ne pouvoit .
tant contribuer au progrés
GALANT 315
des Sciences que les Affemblées des gens de Lettres ; il
parcourut tous les ficcles où
l'on en avoit vû ; & il dit qu'il
y avoit du temps des Empereurs
Romains diverfes Chapelles de
Minerve à Rome qui fervoient à
fortes d'Affemblées , & où
les Orateurs recitoient leurspieces,
& c'eſt ce que le Scholiafte d'Horace nomme Athenæa , felon la
coûtume defon temps , auquel ce
mot fignifioit un Auditoire.
L'Empereur Adrien dans le
deuxième fiecle fit bâtir un Auditoire qu'on nomma auſſi. Athenæum , & il continua d'avoir
Ddij
316 MERCURE
foin des Ecoles publiques à l'imi
·tation & Augufte le fecond des
Cefars qui avoit fait bâtir l'Ecole d'Octavie jointe à unportique ainsi que le R. P. Ardouin
Jefuite nous l'aprend dans fes
Stavantes notes fur Pline
avantluy le celebre GerardJean
Voffius , dansfon Lirure de l'Imitation. En parlant enfuite des.
travaux de la Societé Royale,
il dit qu'elle ne prononce point de
decifions , & qu'elle ne forme
point de fyfteme ; mais qu'elle
propofe des experiences & des
obfervations, laiffant aupublic le
foin de les rectifier , & la liberté
GALANT 317
de les contre-dire pour aller plus
loin dans le Pays des découvertes.
Rien en effect, ajouta- t - il n'eſt
pluspropre à contribuerau progrés
des Sciences , que des experiences
repetées réiterées. Par là on
avance par degrez ; l'on marche
àpas lents , il eft vray ; mais
auffi ils fontplus furs
Mr de Bafville après avoir
fait un détail des travaux de la
Societé Royale pendant l'année derniere , & de ceux auf
quels elle s'attacheroit dans le
cours de celle cy , finit par
l'Eloge du Roy à qui cette
Compagnie doit fon établiſſeDd iij
318 MERCURE
ment & le nom qu'elle s'eft
déja faite parmi tous les Sçavans de l'Europe. Ce Monarque , dit-il , parmi les foins &
lesfatigues d'une guerre onereuſe
& dans laquelle la plus grande
partie de l'Europe eft conjurée contre luy, n'a pas perdu pour cela
le defir qu'il a eu depuis les premieres années de fonregne defaire
fleurirles Sciences dans fes États.
On a sú fe former fous ce regne
glorieux , àjamais memorable
un grand nombre d'Academies
oùſe forment tous les jours lés
jeunes nourriffons des Mules
quis'y exercent pour immortali-
GALANT 319
fer le nom François. Ce grand
Monarque ne fe contente pas ,
ajouta t -il , d'accorder des Privileges , & des établiſſemens confiderables aux Compagnies dont
la culture des Sciences fait tout
L'objet, il les anime encore au travail par fes bienfaits & parſa
Royale liberalité. Le titre de Sçavant en eft un legitime auprés de
ce grandPrince , pour avoir part
àfesgraces & àfes faveurs. On
fe contentoit dans les fiecles precedens d'admirer ces grands genies
pour qui la nature ſembloit s'eſtre
épuisée , mais comme fi on eut
craint qu'une honnefte abondance
320 MERCURE
eut fait perdre la moitié de leur
merite , on les laiffoit dans une
honteuse indigence ; des paroles
des paroles flattenfes eftoient tout
le prixde leurs travaux ; on n'alloitpasplus loin, on auroit crû
en leur faifant du bien les expofer à la tentation de ne plus rien
faire de tomber dans un repos
oifife plein de molleffe . Mais
aujourd'buy graces au grand
Prince qui gouverne la France,les
chofes font bien changées. La récompenfe fuit toujours à prefent
le travail , elle eft accordée fi
à propos & avec tant de prudence
que bien loin de former une ten-
GALANT 321
tation délicate pour celuy qui l'ob
tient , elle ne luyfert que d'aiguil
lon pour avancer dans le progrés
des Sciences. Piquez d'une noble
émulation par les bienfaits du
Prince , ceux qui en font l'objet
ne s'appliquent qu'à les meriter
encore davantage.
Mr Bon le fils , premier
Prefident, en furvivance de Mr
fon pere, de la Cour des Aydes
de Montpellier , parla enfuite;
& aprés avoir loué en peu de
mots Mrde Bafville , qui venoit de parler fi fçavamment
de l'utilité des Sciences , il entretint l'auguſte Aſſemblée qui
322 MERCURE
l'entendoit , d'une découverte
qu'il avoit faite , & dont il
rapporta plufieurs experiences.
Ce fut fur les araignées qu'il
parla long- temps. Ces petits
animaux , dit cet habile Magiſtrat , & ſçavant Academicien , filent une foye qui eft propre aux mefmes usages que celle
des vers , vulgairement appellez
vers à foye ; & il prouva fenfiblement que la føye des araignées eft beaucoup plus abondante celle des vers , pufqu'outre que ceux- cy , dit-il , ne
font que so. œufs , qu'on appelle
vulgairement cocons , les arail
que
GALANT 323
gnées en font 400. Il est vray
qu'à l'égard des araignées , la
moitié franche de leurs œufs fe
perd à caufe de leur petiteffe , &
qu'elles n'achevent leurfoye qu'en
2. ans ; mais enfin quand on reduiroit , à cause de la diminution
causée par la perte ou inutilité de
ces œufs , les 400. à la moitié,
il en refteroit toujours 200.
qu'à cause de la longueur du
temps que les araignées mettent à
filer leurføye , on reduiſe encore
ces 200. œufs à 100. pour faire
quelque comparaison avec ceux
des vers , il fuivra toûjours toutes chofes égaless il en concludque
324 MERCURE
par
les versfaifant so. œufs les araignées 100. celles - cy produisent le
double des vers. Que d'ailleurs
l'avantage que la foye des araignées a pardeffus celle des vers ,
eft qu'elle eft plus fine ,
confequent incomparablement plus
belle. On en a filé par ordre de
Mr le Duc de Noailles pour
faire une paire de bas de foye ,
qui ont efté faits en Languedoc,
&que ce Ducaprefentez à Madame la Ducheffe de Bourgogne.
Cette Princeffe, ainfi que toute la
Cour,les ont trouvez d'une grande beauté &on a avoué qu'on
ne pouvoit rien ajoûter à la fr
GALANT 325
neffe de cet Ouvrage. D'ailleurs
il faut remarquer qu'il n'eft icy
queftion quedes araignées des jardins de celles qui travaillent
en pleine campagne , & les plus
groffes font les meilleures. Mais
la foye n'est pas la feule richeffe
qu'on tire de ces petits animaux,
& MrBon n'apas borné là fes
recherches. On a fait une Analyfe
exacte de ces petits animaux , &
on en a voulu découurir toutes les
proprietez , & ce n'a pas eftéfans
une grande ſurpriſe mêlée de
beaucoup de joye qu'on a éprouvéaprès une Analyfe faite avec
tous les foins imaginables qu'on
土
326 MERCURE
peut tirer des araignées une cau
qui a des vertus admirables , &
dont on peutfaire des gouttes qui
pafferont mefme en bonté celles
d'Angleterre, qui font fi vantées,
dont onfait unfi grand nombre d'ufages. Ce feront des
gouttes aromatiques , reprit ce
fçavant Magiftrat , qui feront
admirables pour la gravelle &
pour les retentions d'urine
faifant vuider le fable. Elles
feront auffi admirables pour fortifier les poulmons foibles ; & ce
feront d'excellentes eaux pulmonaires on pretend , & ce
n'eft pas fans l'avoir éprouvé,
. ,
en
GALANT 327
qu'elles feront auffi bonnes pour
tapoplexie que l'eau des Carmes
fi vantéejufqu'icy. On a décou
vert à l'égard de deux Paralytiques & d'un Epileptique , qu'elLes font tres-propres à ces maladies dangereufes , & contre lef
quelles il y afi peu de remedes.
Tous ceux qui font fujets aux
coliques & aux maux qui les
caufent,ferontfoulagez en ufant
de ces gouttes , avecquelqué methode un certain regime que
la Societe Royale preferira dans
une petite Differtation qu'un habile Medecin de fon Corps fera
fur ce fujet. A l'égard des per-
328 MERCURE
fonnes qui jouiffent d'une fanté
parfaite , elles en peuvent auffi
ufer; elles purifient le fang, &
Le font circuler ; elles fortifient
l'eftomach , elles facilitent la
digeftion. Ceux qui font fujets
à la migraine en peuvent user,
& ils peuvent compter d'eftre
foulagezfur le champ, en obfervant cependant le regime qui fera
marqué dans la Differtation qui
paroiftra au premier jour. Enfin
pour marquer les effets merveilleux de ces gouttes , il n'y a qu'à
dire qu'elles operent & avec autant de fuccés & avec autant de
promptitude que les gouttes d'An-
GALANT 329
gleterre,qu'on nomme les Gouttes
puantes, dont on nefefert cependant que dans les maux defefperez. Mr Bon a donné à ces
gouttes le nom de Gouttes de
Montpellier, & diverfes experiences qu'on a faites de leurs
vertus & de leurs qualitez, leur
ont déja attiré ce nom. Mr
Bon finit fon Difcours en applaudiffant tous les Academiciens fes Confreres , d'avoir
fait une fi belle découverte
dans la naiffance de leur Societé; & il dit qu'un fecret fifalutaire luy faifoit bien augurer
des travaux de tant de fçavans
Janvier 1710. E e
330 MERCURE
hommes qui compofent cette ilLuftre Compagnie. Ce difcours
fut generalement applaudi.
Le P. Vanier Jefuite , habile Poëte, & qui fait imprimer à Lyon un Dictionnaire
Poëtique , a fait une Eglogue
adreffée à Mr Bon , dont je
viens de parler ; dans laquelle
il le felicite fur la belle découverte qu'il vient de faire.
Cette Eglogue eft Latine , ce
qui m'empefche de vous l'envoyer. Elle eft parfaitement
belle.
La declinaifon de l'Aiguille
aimantée fit la matiere d'un
GALANT 331
Difcours qui fuivit celuy de
Mr Bon; & qui fut prononcé
par Mr Clopinel. Cette Declinaiſon eſt un Phenomene des
plus étonnans & dont la connoiffance est en même temps
tres neceffaire pour la Navigation , puifque fi elle varie felon les lieux & felon les temps ,
les Pilotes peuvent fe tromper confiderablement dans le
coursd'une Navigation &dans
la route, qu'ils font tenir aux
Vaiffeaux. On n'embraffa pas
tout-à-fait dans ce Difcours le
Systême de Mr Defcartes , qui
prétend qu'il fort des Poles de
Ecij
33²´MERCURE
la terre une matiere fubtile ime
palpable & inviſible qui circulant autour d'elle fur le plan
des Meridiens y rentre par les
Pole oppofé à celuy d'où elle
eft fortie. La matiere canelée
trouvant dans la ficuation
des pores de l'Aiman un paf
fage pour le traverler , fait
que l'Aiman a deux Poles auffi bien que la Terre ; ainfi
cette matiere rentrant par un
Pole attire le fer. Mais elle
peut changer fon cours felon
la difpofition des parties à travers lefquelles elle s'ouvre un
paffage , & elle en peut eſtre
GALANI 333
détournée felon la figure & la
difpofition de l'Aiguille qui ent
eft touchée. D'ailleurs on a re
marqué que les Obfervations
qu'on peut faire de la variation de l'Aiguille dans les Vaifſeaux font fujettes à beaucoup
d'erreurs à cauſe du fer qui y
eft en grande quantité. Ce Dif
cours fut trouvé plein de recherches & d'érudition.
Le Difcours fuivant & qui
termina l'Aſſemblée , regarda
les Satellites de Saturne , & fut
prononcé par Mr Aftruc. Les
Anciens , dit-il , ne comptoient
que fept Planettes dans noſtre
334 MERCURE
a
Tourbillon , & nous en avons
neuf, quatre Satellites de Fupiter
& cingde Saturne. Galileé à dé
couvert ceux deJupiter, MrCaſ
fini quatre & Mr Huiguens at
taché aufeu Roy Guillaume , un.
Ce dernier foupçonnoit qu'ily
avoit unfixiéme entre la quatriéme e la cinquième , parce que
diftance entre ces Satellites eft trop
grande à proportion des autres.
C'est par les Satellites de Jupiter
que les Aftronomes ont eu le bonheur de trouver les Longitudes
par leurs emerfions & leurs immerfions. L'ufage qu'on tirera de
ceux de Saturne ne fera pas moins
la
1
GALANT 335
confiderable , parce quefiJupiter
n'eſt pas fur l'horiſon pendant la
nuit Saturne y pourra eftre , & en
ce cas les Satellites fuperieurs feront trouver les Longitudes , les
deux premiers eftant fi proches de
la Planette qu'ilsfont prefque im
perceptibles. D'ailleurs leurs revolutions fontficourtes &leurs ċerclesſipreſſez qu'à noftre égard , il
eft rare qu'ilsfortent des rayons de
Saturne étant de plus dans unéloignement du Soleil double de ceux
de Jupiter. Ce Difcours renfermoit plufieurs autres Remarques d'Aftronomie qui plurent
fort à l'illuftre Affemblée. Mi
336 MERCURE
de Bafville refuma à la fin de
chaque Difcours tout ce qui
avoit eſté dit de plus curieux &
de plus intereffant , & il fit admirer en cette occafion la netteté de fon efprit
vous n'attendiez pas fans doute
ce mois-cy ; mais fçachant
voftre curiofité fur ce qui regarde la Societé Royale des
Sciences de Montpellier , j'ay
fi bien pris mes mefures que
je vous en envoye un Article
digne
GALANT 313
digne de voftre curiofité &
de celle de tout le Public. Cette Societé a tenu fa Seance publique pendant l'Affemblée
des Etats de Languedoc , qui
l'ont honorée de leur prefence.
Mr de Bafville Confeiller d'Etat &Intendant de Languedoc
y prefida comme Academicien
Honoraire; & il en fit l'ouverture par un Difcours qui reçûr de grands aplaudiffemens.
Il parla des Sciences en general
& de l'utilité que les hommes
recevoient à s'y attacher ; il
s'apliqua fur tout à prouver
le bien que fit l'étude de la
Fanvier 1710.
Dd
314 MERCURE
Philofophie. Dans les premiers
fiecles du Paganifme , dit-il ,
cette étude faifoit les délices des
grands hommes de ces temps éloignez e même dans la naiffance
du Chriftianifme l'estime fut fi
prodigieufe pour Platon qu'on
regardoit alors comme l'Oracle de
la Philofophie , qu'on le mettoit
prefque enparallele avec les Prophetes,& qu'on pritfe:Ouvrages
pour des Commentaires de l'E
criture , puifqu'on conçut longtemps la nature du Verbe, comme
il l'avoit conçue. Il remarqua
enfuite que rien ne pouvoit .
tant contribuer au progrés
GALANT 315
des Sciences que les Affemblées des gens de Lettres ; il
parcourut tous les ficcles où
l'on en avoit vû ; & il dit qu'il
y avoit du temps des Empereurs
Romains diverfes Chapelles de
Minerve à Rome qui fervoient à
fortes d'Affemblées , & où
les Orateurs recitoient leurspieces,
& c'eſt ce que le Scholiafte d'Horace nomme Athenæa , felon la
coûtume defon temps , auquel ce
mot fignifioit un Auditoire.
L'Empereur Adrien dans le
deuxième fiecle fit bâtir un Auditoire qu'on nomma auſſi. Athenæum , & il continua d'avoir
Ddij
316 MERCURE
foin des Ecoles publiques à l'imi
·tation & Augufte le fecond des
Cefars qui avoit fait bâtir l'Ecole d'Octavie jointe à unportique ainsi que le R. P. Ardouin
Jefuite nous l'aprend dans fes
Stavantes notes fur Pline
avantluy le celebre GerardJean
Voffius , dansfon Lirure de l'Imitation. En parlant enfuite des.
travaux de la Societé Royale,
il dit qu'elle ne prononce point de
decifions , & qu'elle ne forme
point de fyfteme ; mais qu'elle
propofe des experiences & des
obfervations, laiffant aupublic le
foin de les rectifier , & la liberté
GALANT 317
de les contre-dire pour aller plus
loin dans le Pays des découvertes.
Rien en effect, ajouta- t - il n'eſt
pluspropre à contribuerau progrés
des Sciences , que des experiences
repetées réiterées. Par là on
avance par degrez ; l'on marche
àpas lents , il eft vray ; mais
auffi ils fontplus furs
Mr de Bafville après avoir
fait un détail des travaux de la
Societé Royale pendant l'année derniere , & de ceux auf
quels elle s'attacheroit dans le
cours de celle cy , finit par
l'Eloge du Roy à qui cette
Compagnie doit fon établiſſeDd iij
318 MERCURE
ment & le nom qu'elle s'eft
déja faite parmi tous les Sçavans de l'Europe. Ce Monarque , dit-il , parmi les foins &
lesfatigues d'une guerre onereuſe
& dans laquelle la plus grande
partie de l'Europe eft conjurée contre luy, n'a pas perdu pour cela
le defir qu'il a eu depuis les premieres années de fonregne defaire
fleurirles Sciences dans fes États.
On a sú fe former fous ce regne
glorieux , àjamais memorable
un grand nombre d'Academies
oùſe forment tous les jours lés
jeunes nourriffons des Mules
quis'y exercent pour immortali-
GALANT 319
fer le nom François. Ce grand
Monarque ne fe contente pas ,
ajouta t -il , d'accorder des Privileges , & des établiſſemens confiderables aux Compagnies dont
la culture des Sciences fait tout
L'objet, il les anime encore au travail par fes bienfaits & parſa
Royale liberalité. Le titre de Sçavant en eft un legitime auprés de
ce grandPrince , pour avoir part
àfesgraces & àfes faveurs. On
fe contentoit dans les fiecles precedens d'admirer ces grands genies
pour qui la nature ſembloit s'eſtre
épuisée , mais comme fi on eut
craint qu'une honnefte abondance
320 MERCURE
eut fait perdre la moitié de leur
merite , on les laiffoit dans une
honteuse indigence ; des paroles
des paroles flattenfes eftoient tout
le prixde leurs travaux ; on n'alloitpasplus loin, on auroit crû
en leur faifant du bien les expofer à la tentation de ne plus rien
faire de tomber dans un repos
oifife plein de molleffe . Mais
aujourd'buy graces au grand
Prince qui gouverne la France,les
chofes font bien changées. La récompenfe fuit toujours à prefent
le travail , elle eft accordée fi
à propos & avec tant de prudence
que bien loin de former une ten-
GALANT 321
tation délicate pour celuy qui l'ob
tient , elle ne luyfert que d'aiguil
lon pour avancer dans le progrés
des Sciences. Piquez d'une noble
émulation par les bienfaits du
Prince , ceux qui en font l'objet
ne s'appliquent qu'à les meriter
encore davantage.
Mr Bon le fils , premier
Prefident, en furvivance de Mr
fon pere, de la Cour des Aydes
de Montpellier , parla enfuite;
& aprés avoir loué en peu de
mots Mrde Bafville , qui venoit de parler fi fçavamment
de l'utilité des Sciences , il entretint l'auguſte Aſſemblée qui
322 MERCURE
l'entendoit , d'une découverte
qu'il avoit faite , & dont il
rapporta plufieurs experiences.
Ce fut fur les araignées qu'il
parla long- temps. Ces petits
animaux , dit cet habile Magiſtrat , & ſçavant Academicien , filent une foye qui eft propre aux mefmes usages que celle
des vers , vulgairement appellez
vers à foye ; & il prouva fenfiblement que la føye des araignées eft beaucoup plus abondante celle des vers , pufqu'outre que ceux- cy , dit-il , ne
font que so. œufs , qu'on appelle
vulgairement cocons , les arail
que
GALANT 323
gnées en font 400. Il est vray
qu'à l'égard des araignées , la
moitié franche de leurs œufs fe
perd à caufe de leur petiteffe , &
qu'elles n'achevent leurfoye qu'en
2. ans ; mais enfin quand on reduiroit , à cause de la diminution
causée par la perte ou inutilité de
ces œufs , les 400. à la moitié,
il en refteroit toujours 200.
qu'à cause de la longueur du
temps que les araignées mettent à
filer leurføye , on reduiſe encore
ces 200. œufs à 100. pour faire
quelque comparaison avec ceux
des vers , il fuivra toûjours toutes chofes égaless il en concludque
324 MERCURE
par
les versfaifant so. œufs les araignées 100. celles - cy produisent le
double des vers. Que d'ailleurs
l'avantage que la foye des araignées a pardeffus celle des vers ,
eft qu'elle eft plus fine ,
confequent incomparablement plus
belle. On en a filé par ordre de
Mr le Duc de Noailles pour
faire une paire de bas de foye ,
qui ont efté faits en Languedoc,
&que ce Ducaprefentez à Madame la Ducheffe de Bourgogne.
Cette Princeffe, ainfi que toute la
Cour,les ont trouvez d'une grande beauté &on a avoué qu'on
ne pouvoit rien ajoûter à la fr
GALANT 325
neffe de cet Ouvrage. D'ailleurs
il faut remarquer qu'il n'eft icy
queftion quedes araignées des jardins de celles qui travaillent
en pleine campagne , & les plus
groffes font les meilleures. Mais
la foye n'est pas la feule richeffe
qu'on tire de ces petits animaux,
& MrBon n'apas borné là fes
recherches. On a fait une Analyfe
exacte de ces petits animaux , &
on en a voulu découurir toutes les
proprietez , & ce n'a pas eftéfans
une grande ſurpriſe mêlée de
beaucoup de joye qu'on a éprouvéaprès une Analyfe faite avec
tous les foins imaginables qu'on
土
326 MERCURE
peut tirer des araignées une cau
qui a des vertus admirables , &
dont on peutfaire des gouttes qui
pafferont mefme en bonté celles
d'Angleterre, qui font fi vantées,
dont onfait unfi grand nombre d'ufages. Ce feront des
gouttes aromatiques , reprit ce
fçavant Magiftrat , qui feront
admirables pour la gravelle &
pour les retentions d'urine
faifant vuider le fable. Elles
feront auffi admirables pour fortifier les poulmons foibles ; & ce
feront d'excellentes eaux pulmonaires on pretend , & ce
n'eft pas fans l'avoir éprouvé,
. ,
en
GALANT 327
qu'elles feront auffi bonnes pour
tapoplexie que l'eau des Carmes
fi vantéejufqu'icy. On a décou
vert à l'égard de deux Paralytiques & d'un Epileptique , qu'elLes font tres-propres à ces maladies dangereufes , & contre lef
quelles il y afi peu de remedes.
Tous ceux qui font fujets aux
coliques & aux maux qui les
caufent,ferontfoulagez en ufant
de ces gouttes , avecquelqué methode un certain regime que
la Societe Royale preferira dans
une petite Differtation qu'un habile Medecin de fon Corps fera
fur ce fujet. A l'égard des per-
328 MERCURE
fonnes qui jouiffent d'une fanté
parfaite , elles en peuvent auffi
ufer; elles purifient le fang, &
Le font circuler ; elles fortifient
l'eftomach , elles facilitent la
digeftion. Ceux qui font fujets
à la migraine en peuvent user,
& ils peuvent compter d'eftre
foulagezfur le champ, en obfervant cependant le regime qui fera
marqué dans la Differtation qui
paroiftra au premier jour. Enfin
pour marquer les effets merveilleux de ces gouttes , il n'y a qu'à
dire qu'elles operent & avec autant de fuccés & avec autant de
promptitude que les gouttes d'An-
GALANT 329
gleterre,qu'on nomme les Gouttes
puantes, dont on nefefert cependant que dans les maux defefperez. Mr Bon a donné à ces
gouttes le nom de Gouttes de
Montpellier, & diverfes experiences qu'on a faites de leurs
vertus & de leurs qualitez, leur
ont déja attiré ce nom. Mr
Bon finit fon Difcours en applaudiffant tous les Academiciens fes Confreres , d'avoir
fait une fi belle découverte
dans la naiffance de leur Societé; & il dit qu'un fecret fifalutaire luy faifoit bien augurer
des travaux de tant de fçavans
Janvier 1710. E e
330 MERCURE
hommes qui compofent cette ilLuftre Compagnie. Ce difcours
fut generalement applaudi.
Le P. Vanier Jefuite , habile Poëte, & qui fait imprimer à Lyon un Dictionnaire
Poëtique , a fait une Eglogue
adreffée à Mr Bon , dont je
viens de parler ; dans laquelle
il le felicite fur la belle découverte qu'il vient de faire.
Cette Eglogue eft Latine , ce
qui m'empefche de vous l'envoyer. Elle eft parfaitement
belle.
La declinaifon de l'Aiguille
aimantée fit la matiere d'un
GALANT 331
Difcours qui fuivit celuy de
Mr Bon; & qui fut prononcé
par Mr Clopinel. Cette Declinaiſon eſt un Phenomene des
plus étonnans & dont la connoiffance est en même temps
tres neceffaire pour la Navigation , puifque fi elle varie felon les lieux & felon les temps ,
les Pilotes peuvent fe tromper confiderablement dans le
coursd'une Navigation &dans
la route, qu'ils font tenir aux
Vaiffeaux. On n'embraffa pas
tout-à-fait dans ce Difcours le
Systême de Mr Defcartes , qui
prétend qu'il fort des Poles de
Ecij
33²´MERCURE
la terre une matiere fubtile ime
palpable & inviſible qui circulant autour d'elle fur le plan
des Meridiens y rentre par les
Pole oppofé à celuy d'où elle
eft fortie. La matiere canelée
trouvant dans la ficuation
des pores de l'Aiman un paf
fage pour le traverler , fait
que l'Aiman a deux Poles auffi bien que la Terre ; ainfi
cette matiere rentrant par un
Pole attire le fer. Mais elle
peut changer fon cours felon
la difpofition des parties à travers lefquelles elle s'ouvre un
paffage , & elle en peut eſtre
GALANI 333
détournée felon la figure & la
difpofition de l'Aiguille qui ent
eft touchée. D'ailleurs on a re
marqué que les Obfervations
qu'on peut faire de la variation de l'Aiguille dans les Vaifſeaux font fujettes à beaucoup
d'erreurs à cauſe du fer qui y
eft en grande quantité. Ce Dif
cours fut trouvé plein de recherches & d'érudition.
Le Difcours fuivant & qui
termina l'Aſſemblée , regarda
les Satellites de Saturne , & fut
prononcé par Mr Aftruc. Les
Anciens , dit-il , ne comptoient
que fept Planettes dans noſtre
334 MERCURE
a
Tourbillon , & nous en avons
neuf, quatre Satellites de Fupiter
& cingde Saturne. Galileé à dé
couvert ceux deJupiter, MrCaſ
fini quatre & Mr Huiguens at
taché aufeu Roy Guillaume , un.
Ce dernier foupçonnoit qu'ily
avoit unfixiéme entre la quatriéme e la cinquième , parce que
diftance entre ces Satellites eft trop
grande à proportion des autres.
C'est par les Satellites de Jupiter
que les Aftronomes ont eu le bonheur de trouver les Longitudes
par leurs emerfions & leurs immerfions. L'ufage qu'on tirera de
ceux de Saturne ne fera pas moins
la
1
GALANT 335
confiderable , parce quefiJupiter
n'eſt pas fur l'horiſon pendant la
nuit Saturne y pourra eftre , & en
ce cas les Satellites fuperieurs feront trouver les Longitudes , les
deux premiers eftant fi proches de
la Planette qu'ilsfont prefque im
perceptibles. D'ailleurs leurs revolutions fontficourtes &leurs ċerclesſipreſſez qu'à noftre égard , il
eft rare qu'ilsfortent des rayons de
Saturne étant de plus dans unéloignement du Soleil double de ceux
de Jupiter. Ce Difcours renfermoit plufieurs autres Remarques d'Aftronomie qui plurent
fort à l'illuftre Affemblée. Mi
336 MERCURE
de Bafville refuma à la fin de
chaque Difcours tout ce qui
avoit eſté dit de plus curieux &
de plus intereffant , & il fit admirer en cette occafion la netteté de fon efprit
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Résumé : Article tres-curieux qui regarde ce qui s'est passé à la Seance publique de la Societé Royale de Montpellier, qui s'est faite pendant la tenuë des Etats de Languedoc. [titre d'après la table]
Lors d'une séance publique de la Société Royale des Sciences de Montpellier, tenue pendant l'Assemblée des États de Languedoc, Monsieur de Basville, Conseiller d'État et Intendant de Languedoc, présida la séance en tant qu'Académicien Honoraire. Il prononça un discours sur l'utilité des sciences, soulignant l'importance des assemblées de gens de lettres pour le progrès scientifique. Il cita des exemples historiques comme les chapelles de Minerve à Rome et l'Athénée construit par l'empereur Adrien. Monsieur de Basville évoqua également les travaux de la Société Royale, qui se concentrent sur des expériences et des observations, laissant au public le soin de les rectifier. Il loua le roi pour son soutien aux sciences et aux académies, ainsi que pour les privilèges accordés aux savants. Monsieur Bon, fils du premier président de la Cour des Aides de Montpellier, présenta ensuite ses découvertes sur les araignées. Il démontra que la soie des araignées est plus abondante et fine que celle des vers à soie, et rapporta des expériences menées sur ordre du duc de Noailles. Il mentionna également une huile extraite des araignées, utilisée pour fabriquer des gouttes médicinales efficaces contre diverses maladies. Le Père Vanier, jésuite et poète, composa une églogue en latin pour féliciter Monsieur Bon. La séance se poursuivit avec des discours de Monsieur Clopinel sur la déclinaison de l'aiguille aimantée et de Monsieur Astruc sur les satellites de Saturne. Ces discours apportèrent des connaissances essentielles pour la navigation et l'astronomie. À la fin de chaque discours, une personne nommée Bafville résumait les points les plus intéressants et marquants abordés, mettant en évidence la clarté et la vivacité de son esprit.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1911
p. 336-343
Coûtume de Bretagne en deux Volumes in quarto, Ouvrage tres-utile & tres-curieux [titre d'après la table]
Début :
Rien n'est plus important & d'une plus grande utilité que les [...]
Mots clefs :
Coutumes, Bretagne, Ouvrages, Lois, Jacques Mareschal, Coutume de Bretagne, Volumes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Coûtume de Bretagne en deux Volumes in quarto, Ouvrage tres-utile & tres-curieux [titre d'après la table]
Rien n'est plus important &
d'uneplus grandeutilité qué les
Ouvrages qui regardent les
Loix & les Coutumes , & l'on
peut affurer qu'il fe trouve
beaucoup de perfonnes aufquelles ils font abfolument neceffaires, & que c'eft un Trefor
pour les Provinces qu'ils regardent. Celuy dont je vais vous
parler eft de ce nombre.
Jacques
GALANT 337
Jacques Marefchal , Imprimeur du Roy à Nantes , a imprimé la Coûtume de Bretagne endeuxVolumes in quarto,
avec les Commentaires & les
Obfervations pour l'intelligence & l'ufage des Articles
obfcurs , abolis & à reformer,
fuivant les Edits , Ordonnances & Arrefts de Reglemens
rendus depuis la derniere Re
formation de la Coûtume, par
Maître Michel Sauvageau celebre Avocat au Parlement de
Bretagne , & Procureur du
Roy au Prefidial de Vennes ;
avec un Traité particulier des
Ff Fanvier 1710.
338 MERCURE
Marches qui feparent des Provinces deBretagne , Poitou &
Anjou ; un Traité du Droit
d'Indult des Officiers du Par→
lement de Paris , & des Gra
duez , & de fa Pratique fur les
Benefices de Bretagne, avecune
recherche & fçavante difcution des fentimens que Mr
d'Argentré a cus fur plufieurs
Articles de ladite Coûtume,
contré le fentiment de plu
fieurs Auteurs, avec une Table Alphabetique des Matic
res tres ample & tres- exacte
Cet Ouvrage doit eftre fa
vorablement reçu du Public,
GALANT 339
étant non feulement pour l'in
telligence des Textes obfcurs
ou diverſement pratiquez de
la Coûtume de Bretagne , mais
encores pourclés: Affaites &
Queſtions d'Uſage & de Prati→
que d'autres Provinces , l'Auteur eftant plein d'érudition,
& marquant avoir eu une
perience confommée au mat
niement des Affaires. Quoy
que fon deffein n'ait efté que
de compofer des Mémoires
pour parvenir àune Reforma
tion qui n'a pas encore efté
faite , il a fi profondément é
tably par raiſon juridique &
F f ij
340 MERCURE
par autorité d'Ordonnances &
Arrefts de Reglemens , les decifions qu'il y a rapportées,
que les avis & le témoignage
de ce fçavant homme doivent
eftre d'un grand poids quand
il s'agira de prendre party
dans les Jugemens : Et quoy
qu'ordinairement la lecture &
l'étude d'un Commentateur
d'une Coûtumé particuliere ne
foient faites quepourl'intelligence de ce qui concerne cette Coûtume , il y a infiniment
à profiter de la lecture de la
Coûtume de Sauvageau , non
feulement en ce qui la touche;
GALANT 341
६
mais encore pour la Pratique
generale , & les Memoires pas
roiffent devoir produire tant
de fruit en répondant au deffein pour lequel ils ont efté
compofez, qu'ils doivent donner de l'envie & de l'émulation à tous ceux qui aimene
les Sciences , de faire une étu
de particuliere de la Coûtume
de Bretagne. Le Rapport fommaire qu'a fait Mr Sauvageau
des Avis finguliers de Mr d'Ar
gentré , combatus par les autres Docteurs fur foixante
Points differens où l'Auteur a
traité des Queſtions par de fo
Ffiij .
342 MERCURE
lides raifons ; & par autorité,
eft un Ouvrage tres- utile au
Public, & qui doit eftre agreable à tout homme qui aime
la Science, & qui eft dans le
maniement des Affaires.
Le fecondVolumecontient
la plus ancienne Coûtume de
Bretagne , les Annotations de
Anonimies les anciennes ConAitutions, Ordonnances , Arrefts , Reglemens des Rois &
Ducs de Bretagne , avec la
Conference des Coûtumes &
des nouvelles Ordonnances à
la marge , par le meſme Auteur,
GALANT 343
Le prix de ces deux Volu
mes eft de quinze livres.
Je doisajoûter à ceque vous.
venez de lire , que j'ay oüy
parler icy de ce Livre à nos
plus fameuxJurifconfultes ; &
que de la maniere dont ils en
parlent , ils le croyent audeffus de tous les Eloges
d'uneplus grandeutilité qué les
Ouvrages qui regardent les
Loix & les Coutumes , & l'on
peut affurer qu'il fe trouve
beaucoup de perfonnes aufquelles ils font abfolument neceffaires, & que c'eft un Trefor
pour les Provinces qu'ils regardent. Celuy dont je vais vous
parler eft de ce nombre.
Jacques
GALANT 337
Jacques Marefchal , Imprimeur du Roy à Nantes , a imprimé la Coûtume de Bretagne endeuxVolumes in quarto,
avec les Commentaires & les
Obfervations pour l'intelligence & l'ufage des Articles
obfcurs , abolis & à reformer,
fuivant les Edits , Ordonnances & Arrefts de Reglemens
rendus depuis la derniere Re
formation de la Coûtume, par
Maître Michel Sauvageau celebre Avocat au Parlement de
Bretagne , & Procureur du
Roy au Prefidial de Vennes ;
avec un Traité particulier des
Ff Fanvier 1710.
338 MERCURE
Marches qui feparent des Provinces deBretagne , Poitou &
Anjou ; un Traité du Droit
d'Indult des Officiers du Par→
lement de Paris , & des Gra
duez , & de fa Pratique fur les
Benefices de Bretagne, avecune
recherche & fçavante difcution des fentimens que Mr
d'Argentré a cus fur plufieurs
Articles de ladite Coûtume,
contré le fentiment de plu
fieurs Auteurs, avec une Table Alphabetique des Matic
res tres ample & tres- exacte
Cet Ouvrage doit eftre fa
vorablement reçu du Public,
GALANT 339
étant non feulement pour l'in
telligence des Textes obfcurs
ou diverſement pratiquez de
la Coûtume de Bretagne , mais
encores pourclés: Affaites &
Queſtions d'Uſage & de Prati→
que d'autres Provinces , l'Auteur eftant plein d'érudition,
& marquant avoir eu une
perience confommée au mat
niement des Affaires. Quoy
que fon deffein n'ait efté que
de compofer des Mémoires
pour parvenir àune Reforma
tion qui n'a pas encore efté
faite , il a fi profondément é
tably par raiſon juridique &
F f ij
340 MERCURE
par autorité d'Ordonnances &
Arrefts de Reglemens , les decifions qu'il y a rapportées,
que les avis & le témoignage
de ce fçavant homme doivent
eftre d'un grand poids quand
il s'agira de prendre party
dans les Jugemens : Et quoy
qu'ordinairement la lecture &
l'étude d'un Commentateur
d'une Coûtumé particuliere ne
foient faites quepourl'intelligence de ce qui concerne cette Coûtume , il y a infiniment
à profiter de la lecture de la
Coûtume de Sauvageau , non
feulement en ce qui la touche;
GALANT 341
६
mais encore pour la Pratique
generale , & les Memoires pas
roiffent devoir produire tant
de fruit en répondant au deffein pour lequel ils ont efté
compofez, qu'ils doivent donner de l'envie & de l'émulation à tous ceux qui aimene
les Sciences , de faire une étu
de particuliere de la Coûtume
de Bretagne. Le Rapport fommaire qu'a fait Mr Sauvageau
des Avis finguliers de Mr d'Ar
gentré , combatus par les autres Docteurs fur foixante
Points differens où l'Auteur a
traité des Queſtions par de fo
Ffiij .
342 MERCURE
lides raifons ; & par autorité,
eft un Ouvrage tres- utile au
Public, & qui doit eftre agreable à tout homme qui aime
la Science, & qui eft dans le
maniement des Affaires.
Le fecondVolumecontient
la plus ancienne Coûtume de
Bretagne , les Annotations de
Anonimies les anciennes ConAitutions, Ordonnances , Arrefts , Reglemens des Rois &
Ducs de Bretagne , avec la
Conference des Coûtumes &
des nouvelles Ordonnances à
la marge , par le meſme Auteur,
GALANT 343
Le prix de ces deux Volu
mes eft de quinze livres.
Je doisajoûter à ceque vous.
venez de lire , que j'ay oüy
parler icy de ce Livre à nos
plus fameuxJurifconfultes ; &
que de la maniere dont ils en
parlent , ils le croyent audeffus de tous les Eloges
Fermer
Résumé : Coûtume de Bretagne en deux Volumes in quarto, Ouvrage tres-utile & tres-curieux [titre d'après la table]
Le texte met en lumière l'importance des ouvrages relatifs aux lois et coutumes pour les provinces concernées. Il présente un ouvrage spécifique sur la coutume de Bretagne, imprimé par Jacques Marefchal à Nantes en deux volumes in-quarto. Rédigé par Maître Michel Sauvageau, avocat au Parlement de Bretagne, cet ouvrage inclut des commentaires et observations pour éclaircir les articles obscurs, abolis ou à réformer, conformément aux édits et ordonnances récents. Il traite également des marches séparant les provinces de Bretagne, Poitou et Anjou, ainsi que du droit d'indult des officiers du Parlement de Paris et des grands seigneurs. L'auteur discute des bénéfices en Bretagne et contredit les opinions de Monsieur d'Argentré sur plusieurs articles de la coutume. L'ouvrage est apprécié pour son érudition et l'expérience de son auteur. Il est utile pour la compréhension de la coutume de Bretagne et pour la pratique juridique générale. Le second volume contient la plus ancienne coutume de Bretagne, des annotations anonymes et des conférences entre les anciennes constitutions et les nouvelles ordonnances. Le prix des deux volumes est de quinze livres. Les juristes consultés louent cet ouvrage au-delà de tous les éloges.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1912
p. 343-347
Article des Enigmes. [titre d'après la table]
Début :
Je passe à l'Article des Enigmes qui ont fait autrefois [...]
Mots clefs :
Énigmes, Prix, Explications, Deviner, Cloche
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article des Enigmes. [titre d'après la table]
Je paffe à l'Article des Enigmes qui ont fait autrefois
l'occupation des plus grands
Princes de la Grece , & dans
les Cours defquels on donnoit
des prix à ceux qui les expliquoient. La derniere Enigme
a efté devinée par Mr Olivier,
Ff iiij.
•
344 MERCURE
de la Ville de Graffe voicy
l'explication qu'il en a donnée
en Vers; &il a juſtement trouvé la raifon qui m'a obligé
de vous envoyer deux fois de
fuite des Enigmes qui ayant
le mefme mot , font neanmoins entierement differentes ;
ce qui marque la diverfité du
genie des hommes , qui en
travaillant fur la mefme matiere ne rencontrent en rien.
En vain vouliez - vous nous
Steroli Surprendre
Et nous faire long-temps chercher,
GALANT 345
La Cloche ne peut fe cacher;
Elle fonne fi haut qu'elle fe fait
entendre
Lors qu'on voudroit s'en empê
cher.
Ceux qui ont deviné le mor
font , Mrs le Chevalier de
Boiffieux , âgé de douze ans,
& qui n'en manque pas unes
le Chevalier , le Chevalier
d'Ellis, de S. Germain en Laye;
Ridel ; des Crenaux ; Robinet;
le Petit Bruner , de la ruë S.
Honoré ; du Frefne , demeurant chez Me la Maréchale de
la Ferté ; Roger le Blazonneur,
9
346 MERCURE
Organiſte du Roy Jacques ; le
Solitaire de la rue aux Fêves ;
de la M....pere du Petit Jacob , Cloiftre Noftre- Dame;
le Solitaire des Angloux, &fon
Amy Darius ; le Berger Tircis
de la Bergere Climene ; l'Anagramatifte ; l'Amant trop cu
rieux , & le beau Nouvellifte.
Mela Marquife , & fon aimable fille la bonne amie ; Mlles
Percheron & du Buiffon , du
Marais d'Aftruc , du Fauxbourg S. Germain ; de la Coliniere ; de Rezé , proche les
Comediens , que l'on affure
avoir des Remedes qui gue-
GALANY 347
riffent tous les maux des Dents;
Marie Anne du Cloiſtre S.
Nicolas du Louvre , My Lady,
Angloife ; la Jeune Muſe renaiſſante , G. O. la Brune &
Blanche , de la rue des Bernardins ; la Charmante Therefe qui ne veut pas jouer à
l'hombre ; la BelleBrune, de la
rue Neuve des Petits Champs?
l'aimable Mufe du Palais d'Orphée, de Rouen ; & la Groffe
Gouvernante de Mr le Prince
de Tarente , qui l'a expliquée
en Vers.
Je vous envoye une Enigme
nouvelle. Elle eft de Mr d'Aubicourt.
l'occupation des plus grands
Princes de la Grece , & dans
les Cours defquels on donnoit
des prix à ceux qui les expliquoient. La derniere Enigme
a efté devinée par Mr Olivier,
Ff iiij.
•
344 MERCURE
de la Ville de Graffe voicy
l'explication qu'il en a donnée
en Vers; &il a juſtement trouvé la raifon qui m'a obligé
de vous envoyer deux fois de
fuite des Enigmes qui ayant
le mefme mot , font neanmoins entierement differentes ;
ce qui marque la diverfité du
genie des hommes , qui en
travaillant fur la mefme matiere ne rencontrent en rien.
En vain vouliez - vous nous
Steroli Surprendre
Et nous faire long-temps chercher,
GALANT 345
La Cloche ne peut fe cacher;
Elle fonne fi haut qu'elle fe fait
entendre
Lors qu'on voudroit s'en empê
cher.
Ceux qui ont deviné le mor
font , Mrs le Chevalier de
Boiffieux , âgé de douze ans,
& qui n'en manque pas unes
le Chevalier , le Chevalier
d'Ellis, de S. Germain en Laye;
Ridel ; des Crenaux ; Robinet;
le Petit Bruner , de la ruë S.
Honoré ; du Frefne , demeurant chez Me la Maréchale de
la Ferté ; Roger le Blazonneur,
9
346 MERCURE
Organiſte du Roy Jacques ; le
Solitaire de la rue aux Fêves ;
de la M....pere du Petit Jacob , Cloiftre Noftre- Dame;
le Solitaire des Angloux, &fon
Amy Darius ; le Berger Tircis
de la Bergere Climene ; l'Anagramatifte ; l'Amant trop cu
rieux , & le beau Nouvellifte.
Mela Marquife , & fon aimable fille la bonne amie ; Mlles
Percheron & du Buiffon , du
Marais d'Aftruc , du Fauxbourg S. Germain ; de la Coliniere ; de Rezé , proche les
Comediens , que l'on affure
avoir des Remedes qui gue-
GALANY 347
riffent tous les maux des Dents;
Marie Anne du Cloiſtre S.
Nicolas du Louvre , My Lady,
Angloife ; la Jeune Muſe renaiſſante , G. O. la Brune &
Blanche , de la rue des Bernardins ; la Charmante Therefe qui ne veut pas jouer à
l'hombre ; la BelleBrune, de la
rue Neuve des Petits Champs?
l'aimable Mufe du Palais d'Orphée, de Rouen ; & la Groffe
Gouvernante de Mr le Prince
de Tarente , qui l'a expliquée
en Vers.
Je vous envoye une Enigme
nouvelle. Elle eft de Mr d'Aubicourt.
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Résumé : Article des Enigmes. [titre d'après la table]
Le texte évoque la résolution d'énigmes, une activité prisée des princes grecs et récompensée dans les cours. La dernière énigme a été résolue par Monsieur Olivier, qui a présenté sa solution en vers. Cette énigme, bien que partageant un mot clé commun, diffère d'une autre, soulignant la diversité des talents humains. L'énigme en question est : 'En vain vouliez-vous nous surprendre Et nous faire long-temps chercher, La Cloche ne peut se cacher; Elle sonne si haut qu'elle se fait entendre Lors qu'on voudrait s'en empêcher.' Plusieurs personnes ont deviné le mot, dont le Chevalier de Boiffieux, âgé de douze ans, ainsi que le Chevalier d'Ellis, Ridel, Robinet, et d'autres résidents. Parmi les femmes ayant résolu l'énigme figurent Mademoiselle Percheron, Mademoiselle du Buisson, et la Grosse Gouvernante de Monsieur le Prince de Tarente, qui a également expliqué sa solution en vers. Enfin, une nouvelle énigme de Monsieur d'Aubicourt est annoncée.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1913
p. 348-349
SONET ENIGMATIQUE.
Début :
Mon nom pris chez les Grecs se soûtient noblement, [...]
Mots clefs :
Orthographe
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SONET ENIGMATIQUE.
SONET ENIGMATIQUE.
Mon nom pris chez les Grecs fe
foutient noblement ,
Quoy que defiecle en fiecle on me
faffe renaître;
En Franfe come ailleurs je ne conois pourMaître
Q'un ufage établifur le raifonenement.
Si les Grandsde la Cour, qui parlent poliment,
Ecrivoient come on parle en me
faifantparaître,
DuelMortelneferoit gloire de me
conaître ?
GALANT 349
L'on s'énonceroit mieux & plus
facilement.
Ainfi dans le Difcours on abrege
Carefme,
Tout le monde le dit , fans l'écrire
de même ,
Les Savans peu d'acor , ainfi me
font errer:
Quand fur de tels abus on confulte le Sage,
Il les condane tous &tolere un
ufage
Qu'aucun Franfais nepeutfuivre
fanss'égarer.
Mon nom pris chez les Grecs fe
foutient noblement ,
Quoy que defiecle en fiecle on me
faffe renaître;
En Franfe come ailleurs je ne conois pourMaître
Q'un ufage établifur le raifonenement.
Si les Grandsde la Cour, qui parlent poliment,
Ecrivoient come on parle en me
faifantparaître,
DuelMortelneferoit gloire de me
conaître ?
GALANT 349
L'on s'énonceroit mieux & plus
facilement.
Ainfi dans le Difcours on abrege
Carefme,
Tout le monde le dit , fans l'écrire
de même ,
Les Savans peu d'acor , ainfi me
font errer:
Quand fur de tels abus on confulte le Sage,
Il les condane tous &tolere un
ufage
Qu'aucun Franfais nepeutfuivre
fanss'égarer.
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1914
p. 350
Estampe des Jettons de cette année, remise au mois prochain. [titre d'après la table]
Début :
Je me suis trouvé obligé de remettre au mois prochain l'Estampe [...]
Mots clefs :
Jetons, Estampes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Estampe des Jettons de cette année, remise au mois prochain. [titre d'après la table]
Je me fuis trouvé obligé de
remettre au mois prochain
Eftampe des Jettons que je
vous envoye tous les ans au
mois de Janvier.
remettre au mois prochain
Eftampe des Jettons que je
vous envoye tous les ans au
mois de Janvier.
Fermer
1915
p. 350
AIR NOUVEAU.
Début :
Je vous envoye une Chanson nouvelle ; elle est de Mr. / Le Vin est necessaire [...]
Mots clefs :
Vin, Bacchus, Amour, Pots
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AIR NOUVEAU.
Je vous envoye une Chanfon nouvelle ; elle eft de M
Charles.
AIR NOUVEAU.
LeVin eft neceffaire
Quandon veut vivre en repos ,
Si le Dieu d'Amour altere
ne plaire
Bachus vientfort à propos ; ~
Tous les deuxfçavent me
J'aimel'Amour & les Pots.
Charles.
AIR NOUVEAU.
LeVin eft neceffaire
Quandon veut vivre en repos ,
Si le Dieu d'Amour altere
ne plaire
Bachus vientfort à propos ; ~
Tous les deuxfçavent me
J'aimel'Amour & les Pots.
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1916
p. 351-376
Article qui regarde les Affaires du temps. Cet Article a esté fait avant que l'on sçut la situation des Affaires presentes. [titre d'après la table]
Début :
Enfin l'on ne doit plus avoir d'inquietude touchant la playe [...]
Mots clefs :
Maréchal de Villars, Ennemis, Flandre, Troupes, Campagne, Argent, Hollande, Nations, Guerre, Vaisseaux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article qui regarde les Affaires du temps. Cet Article a esté fait avant que l'on sçut la situation des Affaires presentes. [titre d'après la table]
Enfin l'on ne doit plus avoir
d'inquietude couchant la playe
de Mr le Maréchal de Villars ,
devant eſtre à prefent reputée
comme guerie, puifqu'un pois
pourroit à peine y entrer prefentement , & qu'il pourroit fc
mettre en Campagne fi la neceffité le demandoit ; & comme ce Maréchal netefpire que,
la guerre & qu'il veut eftre en
cftat de bonne heure de fe
fignaler & de faire voir aux
Alliez qu'il n'apprehende pas
leurs menaces, il a tres certainementdonnéordre qu'on travaillaft à tous les équipages
352 MERCURE
& qu'on luy fift venir quantité de vin de Bourgogne.
Il fembloit que les Ennemis
le preparoient à faire quelques
mouvemens en Flandre , & Mr
le Maréchal de Barwick avoir
eſté nommé pour y faire une
tournée & pour les obferver ;
mais comme l'on a cfté informé qu'ils eftoient tranquiles
&quefa prefencen y eftoit pas
neceffaire , ce Maréchal n'eft
pas parti.
Mrle Maréchal d'Harcourt
eftant retombé en paralyfie ,
Mr Fagon l'a fait faigner , &
luy a fait prendre l'Emerique ,
GALANT 353
prétendant que cette paralyfie
ne vient point du dedans , &
qu'elle n'eſt qu'exterieure , &
par confequent point dangereufe. Ce Maréchal partit le
28. pour aller aux caux de
Bourbon & fon, deffein eft
de faire encore la Campagne
fur le Rhin ou nos Troupes
fontnombreufes, en boneftat,
& ne manquent de rien , ſuivant que les Ennemis le publient eux - mêmes tous les
jours , & il y a lieu de croire
qu'ils ne feront pas en eftat de
leur refifter , ny d'envoyer des
Troupes en Flandres & fur le
Fanvier 1710. Gg
354 MERCURE
Rhin , les Princes d'Allemagne
n'eftant pas payez des fubfides
que l'Angleterre & la Hollande font convenus de leur donner , & que ſelon toutes les apparences , ils ne pourront leur
payer encore de long- temps ,
l'argent manquant abfolument à ces deux Nations.
Je fçay de certitude par un
homme revenu depuis peu
d'Angleterre , qu'il a efté furpris en y arrivant , d'y trouver
le pain plus cher qu'à Paris , &
la rareté de l'argent encore
plus grande , & l'on ne doit pas
s'en étonner , les fubfides que
GALANT 355
l'Angleterre a payez depuis le
commencement de la guerre ,
toutes les Nations quiluy donne des Troupes ou qui font diverfion en la faveur , l'ayant
entierement épuifée , joint que
l'argent que luy coûte fes
Troupes pendant chaque cam
pagne , eft dépenſé hors du
Royaume, & que depuis plufieurs années l'argent en fort
fans qu'il y entre d'efpeces, tou
tes les Marchandifes que fes
Flotes luy apportent n'cftant
que pour l'ufage de fes Habitans.
A l'égard de la Holande,
Ggij
356 MERCURE
y a déja plufieurs années
que je vous ay marqué que
quelques Provinces avoient declaré qu'elles n'eftoient pas en
eftat de fournir aux frais de la
Guerre; ce que vient encore
de declarer la Province d'Utrecht . Je vous ay marqué auffi
y a long-temps , que la plufpart de ceux qui poffedoient
des Terres à la Campagne, les
ont abandonnées , les Taxes
qu'elles payoient eftant beau
coup plus fortes que les revenus qu'ils en tiroient ; & prefentement encore les Etats Genetaux viennent d'impofer
GALANT 357
quatre fois pour cette année
le deux centiéme denier fur
les Terres , les Obligations, les
Actions des deux Compagnies , les Rentes viageres , &
generalement fur tous les
biens qui y font fujers. Et
comme ce fond , quand mefme il feroit entierement rem
ply , ne fuffiroit qu'à peine
pour fubvenir à la moitié des
dépenses ordinaires &extraordinaires de la Guerre, il faudra
avoir recours à de nouveaux
emprunts ; mais le credit des
Etats ayant déja ſouffert quelques atteintes , tant par leur
358 MERCURE
derniere Lotterie qui n'a pû
eftre remplie que par la neceflité où ils le font trouvez
de donner leurs Obligations
en payement des avances confiderables qui devoient eftre
remboursées en argent comptant , il eft à prefent queſtion
de fçavoir s'ils pourront par
le moyen defdits nouveaux
emprunts qui font leur unique reffource , fuppléer à l'autre moitié defdites dépenfes.
Il eft à remarquer queceux
qui ont des Obligations de
l'Etat , auront de la peine à
trouver de l'argent fur ces
GALANT 359
•
Obligations, & qu'ils n'enpouront trouver qu'avec beaucoup de perte.
D'ailleurs , vous avez déja
fçû le pitoyable cftat où fe
trouve aujourd'huy la Marine
d'Holande ; qu'il eft dû beaucoup aux Capitaines qui ont
avancé , fuivant l'ufage du
Pays , tout ce qui a regardé
depuis long- temps l'équipement de leurs Vaiffeaux, & qui
n'ayant plus dequoy y fournir,
demandent ce qui leur eſt dû,
& que l'on paye toutes les
fommes qui font neceffaires
pour mettre en Mer cette an
360 MERCURE
née , moyennantquoy ils s'offrent de fervir , l'impoffibilité
eftant entiere qu'ils puiffent
fervir autrement.
Au reste , les dernieres nouvelles d'Amfterdam portent
que la plupart des Negocians
voyant chaquejour leur Commerce déperir , & le rifque
qu'ils courent d'eftre entierement ruïnez fi la Guerre continue , n'ont plus la mefme
opiniaftreté qu'ils avoient à la
continuer.
Il eft aifé de juger par tou
tes ces chofes de l'eftat our fe
trouve la Holande , & qu'elle
ne
GALANT 361
ne peutabfolument continuer
la guerre beaucoup de temps.
Je reviens encore à l'Angleterre , qui par les fonds accordez par le Parlement pour
la Campagne prochaine , pretend éblouir tout le monde;
& en effet rien n'eft plus ébloüiffant que les calculs de
toutes les fommes que le Parlement accorde ; mais fans
entrer dans les détails & dans
l'impoffibilité qui fe trouve de
les lever tous , quand mefine.
l'Angleterre feroit dans l'opulence , il eft certain que quand
tous les Anglois feroient por
Fanvier 1710. Hh
36 MERCURE
tez à fournir ces fommes , la
rareté de l'argent qui eft au
jourd'huy plus grande en Angleterre qu'en aucun autre lieu
de l'Europa, en empefcheroit,
& que le Proverbe , qui dic,
Perfonne nedonne ce qu'il n'apas,
eft veritable. Elle doit des
fommes immenfes à Monfieur
le Duc de Savoye , qui n'eft
pas un Prince à attendre longtemps , craignant que le boul
verfement des Affaires ne luy!
fift perdre ce qui luy ´eft dû ;!
ce qui n'embaraffe pas peu les
Anglois.
Quant à ce qui regarde la.
GALANT 363
France , elle renferme des
fommes immenfes qui font
cachéos , & l'abondance y fera grande lors que l'on aura
trouvé les moyens de les faire
fortir des mains de ceux qui
les gardent avec tant de foin ;
& pour n'en pas dourerazil
n'y a qu'à fe fouvenir que da
derniere reforme eftoit de fix
cens millions ; ce qui eft un
fait inconteftable , & qu'on a
reconnu lors qu'on a donné
coursà toutes les efpeces reformées & non reformées,
qu'il y avoit un tiers de l'argent du Royaume qui n'avort
Hhij
364 MERCURE
point efté porté à la Monnoye pour eftre reformé ; &
ce qui obligea de leur donner
cours , fut que l'on trouvoit
tous les jours des fommes
tres confiderables fous les
fcellez faits chez les perfonInes qui mouroient , & j'en
pourrois rapporter pour plu
fieurs millions , fi je voulois
nommer ceux qui n'avoient
pas fait reformer leur argent.
Il eft auffi entré en France
plufieurs millions depuis que
Monfeigneur le Duc d'Anjou
a pris poffeffion de la Cou
ronne d'Espagne , tant parce
2
GALANT 365
qu'elle lui appartenoit , que
parce que Charles II. l'avoir
reconnu pour fon Succeffeur.
Tout cet argent n'y est pas entré par le Commerce que les
François ont fait au Perou ;
mais par les grandes depenfes
queles Eſpagnols ont faites en
Francepour foutenir la Guerre
las France leur ayant foutny
des Armes , des Draps &
quantité d'autres choſes neceffaires à la Guerre. NosModes
font auffi caufe que les Efpagnols ont acheté beaucoup
de chofes en France & plu
ficurs qui ont eu des Emplois
34
Hhij
366 MERCURE
dans le Perou , d'où ils ont
raporté de grandes fommes ,
& qui ont demeuré affez longtemps en France , &fur tout à
Paris , y ont fait de grandes
dépenfes , enforte que lorsque
tout l'argent caché commencera à voir le jour , on verra
plus dedouze cens millions circuler au lieu qu'il n'y a pas aujourd'huy dans le Commerce,
200. millions de nouvelles ef-
< peces qui font tout l'argent qui
circule dans le Royaume. 1
A l'égard des bleds , il fufit
qu'il ait commencé à entrer
dans le Royaume pour que
GALANT 367
Fabondance s'y trouve bien
toft , & pour engager les Ufuriers à mettre en vente ceux
qu'ils tiennent cachez , &d'ailleurs comme il paroift que la
srecolter doit cftre des plus
abondantes , on ne manquera
bien- toft plus dans le Royaume ni d'argent ni de bleds.
Mrs de l'Academie Françoi
fe s'eftant affemblez felon l'ufage , quarante jours aprés la
mort de Mr.de Corneille , &
de Mr le Comte de Crecy pour
nommerceuxquidoivent remplir leurs places , ont choifi Mr
le Prefident de Melmes & Mr
368 MERCURE
l'Abbé Oudart de la Mothe,
connu par plusieurs ouvrages
de Theatre & par le beau Ree
cueil d'Odes qu'il a donné zau
public , & qui a reçu un aps
plaudiffementgeneral . Il a rem
porté ſept ou huit Prix del'Academie de Toulouſe , & deux
ou trois de l'Academie Françoife , oùilaleu l'avantage de
parler plufieurs fois & de faire
des Remerciemens à ce fçavant
& illuftre: Corps.
Mrle President de Melines,
diftingué pár fon nom, par ſon
efpriti & par fes dignitez elt
entré par detteb nomination
CALANT 369
dans un Corps ou l'on atoujours vû des Cardinaux , des
Evêques , des Ducs & Pairs &
des Miniftres d'Etat. Ainfi l'on
peut dire qu'il n'eft pas déplacé.
Je dois ajoûtericy ce que j'ay
oublié de vous dire dans 1 E.
loge que j'ay fait de Mr de
Corneille ; fçavoir , que fon
grand travail , & fur tout le
grand nombre de Livres & de
Memoires qu'il a cfté obligé
de lire pour compofer les cinq
Volumes infolio qu'il a donnez
au Public , luy avoient fait perdre la vûë quelques années
370 MERCURE
avant,fa mort; que fon Eloge
aefté fait par un Aveugle, &
que fa place a efté remplie par
unautre Aveugle qui doit faire
auffi fon Eloge le jour de fa res
ception.
Avant que d'entrer dans
Article de la Marine dont
j'ay beaucoup à vous entrete
nit , je dois vous dire que ce
Corps qui a toujours fait honneur à la France , & qui dans
les temps les plus difficiles a
toujours tenu tefte en mefme
temps aux deux Nations qui
pretendent à l'Empire de la
Mer, & qui ne font riches &
GALANT 37£
celebres que par leur Com
merce ; je dois , dis-je , vous
dire que ce Corps , qui tous
les mois fe rend fameux par
un grand nombre de Prifes,
d'actions éclatantes , & de
Vaiffeaux Ennemis pris on
coulez à fond , va malgré la
rareté d'argent qui ſe trouve
aujourd'huy prefque chez tous
les Princes de l'Europe , recevoir une fomme confiderable,
MrleComte de Pontchartrain?
ayant trouvé des expediens
de luy en faire toucher fans
qu'il en coûte rien au Roy.
Je paffe à la fuite des Expe
372 MERCURE
ditions dont je vous envoye
unJournal tous les mois beaucoup plus circonftancié que
celuy que l'on trouve dans plu .
fieurs nouvelles publiques.
De Cartagenne du Détroit
le 25. Decembre.
Mrle Chevalier de Norey,
Commandant les Vaiffeaux du
Roy le Rubis & le Trident, fic
rencontre le 19. Decembre,
eftant Nord & Sud d'Alborand, à 5 ou 6. licues de.
la Cofte d'Espagne , de deux
Vaiffeaux de guerre Anglois,
l'un
GALANT 373
l'un de 70. Canons , & l'autre
de cinquante - quatre fous le
vent Mr le Chevalier de
Norey, quoy qu'avec des for.
ces inégales , attaqua ces deux
Vaiffeaux à demy portée du
moufquet. Le Combat dura
depuis dix heures du matin juſqu'à deux heures aprés midy,
•fans qu'il pût les aborder , &
il en fut feparé par les Courans en forte qu'ils furent
obligez de faire route à Gibraltar , n'ayant que la Mizaine & le Petit Hunier, & la
plufpart de leurs Equipages
eftant tuez ou bleffez. Mr de
Janvier 1710.
I i
374 MERCURE
Norey n'a eu que 29. hommes hors de combat. Mr du
Vigné , Lieutenant de Vaifſeau , y aa efté tué ,,
ainfi que
Mr le Chevalier de Caftelanne
Enfeigne , qui fervoit fur le
Trident.
Mr Robert Leguillon, Commandant la Barque Longue la
Revanche , armée à Calais , y
conduifit le 4. Janvier un Bâtiment Anglois , chargé de
5oo. barils de beurre , & de
200. barils de boeuf fallé.
Lemefme Capitaine a auffi
débarqué une rançon de 100.
livres sterlin.
GALANT · 375
Le Capitaine Louvet qui
monte la Barque la Toifon , a
pris un Navire Anglois , chargé de 136. Caiffes d'oranges
aigres , & de 8. Caiffes de citrons.
Le Capitaine François Polu,
Commandant la Triumphante,
& Jacques du Pleffis qui monte la Revanche , ont pris un
Dogre Hollandois.
Le Capitaine Marc- Tefte,
Commandant la Barque le
Comte de Brionne , a apporté
pour 2000. livres de rançons
Angloifes en efpeces.
François Bachelier , ComIi ij
376 MERCURE
4
ATM
mandant le Dogre le Prompt,
a amené une rançon Hollandoife de 1600. florins
d'inquietude couchant la playe
de Mr le Maréchal de Villars ,
devant eſtre à prefent reputée
comme guerie, puifqu'un pois
pourroit à peine y entrer prefentement , & qu'il pourroit fc
mettre en Campagne fi la neceffité le demandoit ; & comme ce Maréchal netefpire que,
la guerre & qu'il veut eftre en
cftat de bonne heure de fe
fignaler & de faire voir aux
Alliez qu'il n'apprehende pas
leurs menaces, il a tres certainementdonnéordre qu'on travaillaft à tous les équipages
352 MERCURE
& qu'on luy fift venir quantité de vin de Bourgogne.
Il fembloit que les Ennemis
le preparoient à faire quelques
mouvemens en Flandre , & Mr
le Maréchal de Barwick avoir
eſté nommé pour y faire une
tournée & pour les obferver ;
mais comme l'on a cfté informé qu'ils eftoient tranquiles
&quefa prefencen y eftoit pas
neceffaire , ce Maréchal n'eft
pas parti.
Mrle Maréchal d'Harcourt
eftant retombé en paralyfie ,
Mr Fagon l'a fait faigner , &
luy a fait prendre l'Emerique ,
GALANT 353
prétendant que cette paralyfie
ne vient point du dedans , &
qu'elle n'eſt qu'exterieure , &
par confequent point dangereufe. Ce Maréchal partit le
28. pour aller aux caux de
Bourbon & fon, deffein eft
de faire encore la Campagne
fur le Rhin ou nos Troupes
fontnombreufes, en boneftat,
& ne manquent de rien , ſuivant que les Ennemis le publient eux - mêmes tous les
jours , & il y a lieu de croire
qu'ils ne feront pas en eftat de
leur refifter , ny d'envoyer des
Troupes en Flandres & fur le
Fanvier 1710. Gg
354 MERCURE
Rhin , les Princes d'Allemagne
n'eftant pas payez des fubfides
que l'Angleterre & la Hollande font convenus de leur donner , & que ſelon toutes les apparences , ils ne pourront leur
payer encore de long- temps ,
l'argent manquant abfolument à ces deux Nations.
Je fçay de certitude par un
homme revenu depuis peu
d'Angleterre , qu'il a efté furpris en y arrivant , d'y trouver
le pain plus cher qu'à Paris , &
la rareté de l'argent encore
plus grande , & l'on ne doit pas
s'en étonner , les fubfides que
GALANT 355
l'Angleterre a payez depuis le
commencement de la guerre ,
toutes les Nations quiluy donne des Troupes ou qui font diverfion en la faveur , l'ayant
entierement épuifée , joint que
l'argent que luy coûte fes
Troupes pendant chaque cam
pagne , eft dépenſé hors du
Royaume, & que depuis plufieurs années l'argent en fort
fans qu'il y entre d'efpeces, tou
tes les Marchandifes que fes
Flotes luy apportent n'cftant
que pour l'ufage de fes Habitans.
A l'égard de la Holande,
Ggij
356 MERCURE
y a déja plufieurs années
que je vous ay marqué que
quelques Provinces avoient declaré qu'elles n'eftoient pas en
eftat de fournir aux frais de la
Guerre; ce que vient encore
de declarer la Province d'Utrecht . Je vous ay marqué auffi
y a long-temps , que la plufpart de ceux qui poffedoient
des Terres à la Campagne, les
ont abandonnées , les Taxes
qu'elles payoient eftant beau
coup plus fortes que les revenus qu'ils en tiroient ; & prefentement encore les Etats Genetaux viennent d'impofer
GALANT 357
quatre fois pour cette année
le deux centiéme denier fur
les Terres , les Obligations, les
Actions des deux Compagnies , les Rentes viageres , &
generalement fur tous les
biens qui y font fujers. Et
comme ce fond , quand mefme il feroit entierement rem
ply , ne fuffiroit qu'à peine
pour fubvenir à la moitié des
dépenses ordinaires &extraordinaires de la Guerre, il faudra
avoir recours à de nouveaux
emprunts ; mais le credit des
Etats ayant déja ſouffert quelques atteintes , tant par leur
358 MERCURE
derniere Lotterie qui n'a pû
eftre remplie que par la neceflité où ils le font trouvez
de donner leurs Obligations
en payement des avances confiderables qui devoient eftre
remboursées en argent comptant , il eft à prefent queſtion
de fçavoir s'ils pourront par
le moyen defdits nouveaux
emprunts qui font leur unique reffource , fuppléer à l'autre moitié defdites dépenfes.
Il eft à remarquer queceux
qui ont des Obligations de
l'Etat , auront de la peine à
trouver de l'argent fur ces
GALANT 359
•
Obligations, & qu'ils n'enpouront trouver qu'avec beaucoup de perte.
D'ailleurs , vous avez déja
fçû le pitoyable cftat où fe
trouve aujourd'huy la Marine
d'Holande ; qu'il eft dû beaucoup aux Capitaines qui ont
avancé , fuivant l'ufage du
Pays , tout ce qui a regardé
depuis long- temps l'équipement de leurs Vaiffeaux, & qui
n'ayant plus dequoy y fournir,
demandent ce qui leur eſt dû,
& que l'on paye toutes les
fommes qui font neceffaires
pour mettre en Mer cette an
360 MERCURE
née , moyennantquoy ils s'offrent de fervir , l'impoffibilité
eftant entiere qu'ils puiffent
fervir autrement.
Au reste , les dernieres nouvelles d'Amfterdam portent
que la plupart des Negocians
voyant chaquejour leur Commerce déperir , & le rifque
qu'ils courent d'eftre entierement ruïnez fi la Guerre continue , n'ont plus la mefme
opiniaftreté qu'ils avoient à la
continuer.
Il eft aifé de juger par tou
tes ces chofes de l'eftat our fe
trouve la Holande , & qu'elle
ne
GALANT 361
ne peutabfolument continuer
la guerre beaucoup de temps.
Je reviens encore à l'Angleterre , qui par les fonds accordez par le Parlement pour
la Campagne prochaine , pretend éblouir tout le monde;
& en effet rien n'eft plus ébloüiffant que les calculs de
toutes les fommes que le Parlement accorde ; mais fans
entrer dans les détails & dans
l'impoffibilité qui fe trouve de
les lever tous , quand mefine.
l'Angleterre feroit dans l'opulence , il eft certain que quand
tous les Anglois feroient por
Fanvier 1710. Hh
36 MERCURE
tez à fournir ces fommes , la
rareté de l'argent qui eft au
jourd'huy plus grande en Angleterre qu'en aucun autre lieu
de l'Europa, en empefcheroit,
& que le Proverbe , qui dic,
Perfonne nedonne ce qu'il n'apas,
eft veritable. Elle doit des
fommes immenfes à Monfieur
le Duc de Savoye , qui n'eft
pas un Prince à attendre longtemps , craignant que le boul
verfement des Affaires ne luy!
fift perdre ce qui luy ´eft dû ;!
ce qui n'embaraffe pas peu les
Anglois.
Quant à ce qui regarde la.
GALANT 363
France , elle renferme des
fommes immenfes qui font
cachéos , & l'abondance y fera grande lors que l'on aura
trouvé les moyens de les faire
fortir des mains de ceux qui
les gardent avec tant de foin ;
& pour n'en pas dourerazil
n'y a qu'à fe fouvenir que da
derniere reforme eftoit de fix
cens millions ; ce qui eft un
fait inconteftable , & qu'on a
reconnu lors qu'on a donné
coursà toutes les efpeces reformées & non reformées,
qu'il y avoit un tiers de l'argent du Royaume qui n'avort
Hhij
364 MERCURE
point efté porté à la Monnoye pour eftre reformé ; &
ce qui obligea de leur donner
cours , fut que l'on trouvoit
tous les jours des fommes
tres confiderables fous les
fcellez faits chez les perfonInes qui mouroient , & j'en
pourrois rapporter pour plu
fieurs millions , fi je voulois
nommer ceux qui n'avoient
pas fait reformer leur argent.
Il eft auffi entré en France
plufieurs millions depuis que
Monfeigneur le Duc d'Anjou
a pris poffeffion de la Cou
ronne d'Espagne , tant parce
2
GALANT 365
qu'elle lui appartenoit , que
parce que Charles II. l'avoir
reconnu pour fon Succeffeur.
Tout cet argent n'y est pas entré par le Commerce que les
François ont fait au Perou ;
mais par les grandes depenfes
queles Eſpagnols ont faites en
Francepour foutenir la Guerre
las France leur ayant foutny
des Armes , des Draps &
quantité d'autres choſes neceffaires à la Guerre. NosModes
font auffi caufe que les Efpagnols ont acheté beaucoup
de chofes en France & plu
ficurs qui ont eu des Emplois
34
Hhij
366 MERCURE
dans le Perou , d'où ils ont
raporté de grandes fommes ,
& qui ont demeuré affez longtemps en France , &fur tout à
Paris , y ont fait de grandes
dépenfes , enforte que lorsque
tout l'argent caché commencera à voir le jour , on verra
plus dedouze cens millions circuler au lieu qu'il n'y a pas aujourd'huy dans le Commerce,
200. millions de nouvelles ef-
< peces qui font tout l'argent qui
circule dans le Royaume. 1
A l'égard des bleds , il fufit
qu'il ait commencé à entrer
dans le Royaume pour que
GALANT 367
Fabondance s'y trouve bien
toft , & pour engager les Ufuriers à mettre en vente ceux
qu'ils tiennent cachez , &d'ailleurs comme il paroift que la
srecolter doit cftre des plus
abondantes , on ne manquera
bien- toft plus dans le Royaume ni d'argent ni de bleds.
Mrs de l'Academie Françoi
fe s'eftant affemblez felon l'ufage , quarante jours aprés la
mort de Mr.de Corneille , &
de Mr le Comte de Crecy pour
nommerceuxquidoivent remplir leurs places , ont choifi Mr
le Prefident de Melmes & Mr
368 MERCURE
l'Abbé Oudart de la Mothe,
connu par plusieurs ouvrages
de Theatre & par le beau Ree
cueil d'Odes qu'il a donné zau
public , & qui a reçu un aps
plaudiffementgeneral . Il a rem
porté ſept ou huit Prix del'Academie de Toulouſe , & deux
ou trois de l'Academie Françoife , oùilaleu l'avantage de
parler plufieurs fois & de faire
des Remerciemens à ce fçavant
& illuftre: Corps.
Mrle President de Melines,
diftingué pár fon nom, par ſon
efpriti & par fes dignitez elt
entré par detteb nomination
CALANT 369
dans un Corps ou l'on atoujours vû des Cardinaux , des
Evêques , des Ducs & Pairs &
des Miniftres d'Etat. Ainfi l'on
peut dire qu'il n'eft pas déplacé.
Je dois ajoûtericy ce que j'ay
oublié de vous dire dans 1 E.
loge que j'ay fait de Mr de
Corneille ; fçavoir , que fon
grand travail , & fur tout le
grand nombre de Livres & de
Memoires qu'il a cfté obligé
de lire pour compofer les cinq
Volumes infolio qu'il a donnez
au Public , luy avoient fait perdre la vûë quelques années
370 MERCURE
avant,fa mort; que fon Eloge
aefté fait par un Aveugle, &
que fa place a efté remplie par
unautre Aveugle qui doit faire
auffi fon Eloge le jour de fa res
ception.
Avant que d'entrer dans
Article de la Marine dont
j'ay beaucoup à vous entrete
nit , je dois vous dire que ce
Corps qui a toujours fait honneur à la France , & qui dans
les temps les plus difficiles a
toujours tenu tefte en mefme
temps aux deux Nations qui
pretendent à l'Empire de la
Mer, & qui ne font riches &
GALANT 37£
celebres que par leur Com
merce ; je dois , dis-je , vous
dire que ce Corps , qui tous
les mois fe rend fameux par
un grand nombre de Prifes,
d'actions éclatantes , & de
Vaiffeaux Ennemis pris on
coulez à fond , va malgré la
rareté d'argent qui ſe trouve
aujourd'huy prefque chez tous
les Princes de l'Europe , recevoir une fomme confiderable,
MrleComte de Pontchartrain?
ayant trouvé des expediens
de luy en faire toucher fans
qu'il en coûte rien au Roy.
Je paffe à la fuite des Expe
372 MERCURE
ditions dont je vous envoye
unJournal tous les mois beaucoup plus circonftancié que
celuy que l'on trouve dans plu .
fieurs nouvelles publiques.
De Cartagenne du Détroit
le 25. Decembre.
Mrle Chevalier de Norey,
Commandant les Vaiffeaux du
Roy le Rubis & le Trident, fic
rencontre le 19. Decembre,
eftant Nord & Sud d'Alborand, à 5 ou 6. licues de.
la Cofte d'Espagne , de deux
Vaiffeaux de guerre Anglois,
l'un
GALANT 373
l'un de 70. Canons , & l'autre
de cinquante - quatre fous le
vent Mr le Chevalier de
Norey, quoy qu'avec des for.
ces inégales , attaqua ces deux
Vaiffeaux à demy portée du
moufquet. Le Combat dura
depuis dix heures du matin juſqu'à deux heures aprés midy,
•fans qu'il pût les aborder , &
il en fut feparé par les Courans en forte qu'ils furent
obligez de faire route à Gibraltar , n'ayant que la Mizaine & le Petit Hunier, & la
plufpart de leurs Equipages
eftant tuez ou bleffez. Mr de
Janvier 1710.
I i
374 MERCURE
Norey n'a eu que 29. hommes hors de combat. Mr du
Vigné , Lieutenant de Vaifſeau , y aa efté tué ,,
ainfi que
Mr le Chevalier de Caftelanne
Enfeigne , qui fervoit fur le
Trident.
Mr Robert Leguillon, Commandant la Barque Longue la
Revanche , armée à Calais , y
conduifit le 4. Janvier un Bâtiment Anglois , chargé de
5oo. barils de beurre , & de
200. barils de boeuf fallé.
Lemefme Capitaine a auffi
débarqué une rançon de 100.
livres sterlin.
GALANT · 375
Le Capitaine Louvet qui
monte la Barque la Toifon , a
pris un Navire Anglois , chargé de 136. Caiffes d'oranges
aigres , & de 8. Caiffes de citrons.
Le Capitaine François Polu,
Commandant la Triumphante,
& Jacques du Pleffis qui monte la Revanche , ont pris un
Dogre Hollandois.
Le Capitaine Marc- Tefte,
Commandant la Barque le
Comte de Brionne , a apporté
pour 2000. livres de rançons
Angloifes en efpeces.
François Bachelier , ComIi ij
376 MERCURE
4
ATM
mandant le Dogre le Prompt,
a amené une rançon Hollandoife de 1600. florins
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Résumé : Article qui regarde les Affaires du temps. Cet Article a esté fait avant que l'on sçut la situation des Affaires presentes. [titre d'après la table]
En début d'année 1710, plusieurs événements militaires et politiques marquent l'Europe. Le maréchal de Villars, guéri de sa blessure, est prêt à reprendre le combat. Le maréchal de Barwick est nommé pour surveiller les mouvements ennemis en Flandre, mais cette mission est annulée en raison de la tranquillité des ennemis. Le maréchal d'Harcourt, souffrant de paralysie, est soigné par Mr Fagon et se prépare à rejoindre les troupes sur le Rhin. Les ennemis, notamment les princes d'Allemagne, manquent de fonds en raison des retards de paiement des subsides par l'Angleterre et la Hollande. La Hollande, confrontée à des difficultés financières, impose de nouvelles taxes et peine à trouver des crédits. L'Angleterre, malgré ses efforts pour lever des fonds, souffre d'une grande rareté d'argent. En revanche, la France possède des réserves d'argent cachées et bénéficie de l'afflux de fonds liés à la succession espagnole. Sur le plan maritime, la marine française continue de se distinguer par ses prises et ses actions éclatantes. Plusieurs capitaines français ont récemment capturé des navires ennemis et des rançons. Par ailleurs, l'Académie française a élu deux nouveaux membres pour remplacer Corneille et le comte de Crecy.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
1917
p. 376-393
Article contenant un grand nombre de Particularitez de l'arrivée en France, du Convoy qui a apporté des Bleds du Levant, avec beaucoup d'autres Marchandises. [titre d'après la table]
Début :
Vous sçavez que Mr de Ferriol, Ambassadeur du Roy à [...]
Mots clefs :
Vaisseaux, Frégates, Constantinople, Relations, Convoi, Ennemis, Equipage, Combat, Officiers
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article contenant un grand nombre de Particularitez de l'arrivée en France, du Convoy qui a apporté des Bleds du Levant, avec beaucoup d'autres Marchandises. [titre d'après la table]
Vous fçavez que Mr de
Ferriol , Ambaffadeur du Roy
àConftantinople , avoit obte
nu de fa Hauteffe de faire
charger des Bleds à Conftantinople & dans les Echelles du
Levant. Il s'eft heureufement
acquitté de fa Commiſſion. Il
y a plufieurs Relations qui
peuvent toutes paffer pour des
Originaux , eftant écrites par
des Officiers de confideration,
& qui font tous dans des poftès à pouvoir fçavoir ce qu'ils.
GALANY 377
mandent , qui neanmoins ne
s'accordent pas , particulierement à l'égard des dates ; tel
eft le fort des Relations que
´l'on reçoit des Affaires les plus
importantes. Perfonne ne le
connoift mieux que moy qui
ay toûjours ramaffé toutes celles qui ont efté répanduës dans
le monde des actions les plus
remarquables , & j'ay trouvé
une fois une circonſtance aſſez
confiderable , toute differente
dans neuf Relations de la même Affaire , fans qu'il m'ait
efté poffible de découvrir celle qui parloit le plus jufte.
Li iij
378 MERCURE
ގ
%%
cmAinfi en fait de nouvelles , la
premiere qu'on lit fait plaifir,
& l'on croit d'abord eftre
bien inftruit. La feconde Relation , dans laquelle on trouve
des faits differens embaraffe un
peu ; & lors qu'on en a lû
beaucoup, on fe trouve fi
baraffé qu'on eft contraint de
parler au hazard , ou de donner au Public les Extraits de
PArticle qui embaraffe afin de
fe difculper , & qu'il en juge
par luy- mefme. J'ay trouvé le
mefme embaras pour des da
tes , dans la Relation que vous
allez lire , qui d'ailleurs vous
GALANT 379
paroiftra tres- curieufe. Entre
fept ou huit Relations dont
j'ay formé celle que vous allez
lire , il y en a une feule qui
-prend l'affaire de plus haut,
par laquelle je vais commencer, & qui n'eft contredite en
rien parce qu'elle eft feule.
Mr de Feuquieres eftoit allé
àu Levant pour amener un
Convoy de bled. Tous les autres Vaiffeaux tant du Roy que
des Marchands qui eftoient allez pour le mefme ſujet s'affemblerent à Smirne fous les
ordres de Mrde Feuquieres au
nombre de 84. Baftimens tant
380 MERCURE
Vaiffeaux, Barques , Pinques ,
ou Tartanes , parmy lefquels
cftoit compris le Temeraire , de
60. canons , monté par Mr de
Feuquieres ; le Toulouſe de mêmeforce; l'Etendart & le Flenron de 50; l'Hirondelle & la Vef
tale de 36. tous Vaiffeaux de
Roy, & une trentaine d'autres
Vaiffeaux particuliers ; le refte
eftoit de petits Baftimens".
Ils partirent dans le mois d'Octobre, & quoy que la faifon
fût la plus rude de toute l'année, à caufe des divers coups
de vents qui regnent en ce
temps- là &que l'on fut obligé
GALANT 281
de paffer dans toutes les Croifieres ordinaires nonobitant
25. ou 30. gros Vaifféaux Ennemis qui font dans ces Mers ;
ce Convoy franchit tout fans
voir aucun Vaiffeau ennemy,
& fans qu'il ſe foit écarté aucun Baftiment pendant untrajet de plus de 6oo. licuês.
Comme on avoit apprisque
le Convoy eftoit parti , & que
l'on voyoit tous les jours aux
Coftes de Provence une Efcadre ennemie de huit Vaiffeaux
qui fe relevoient les uns aprés
les autres , on eftoit à Toulon
& à Marſeille dans une grande
382 MERCURE
confternation , parce qu'on découvroit tous les jours les Ennemis aux avenues , & que nos
Vaiffeaux n'eftoient pas en état
de s'oppofer à cette Efcadre ,
eftant tous chargez de bled.
Mais par un effet de la Providence , dans le temps que l'Avant-garde de ce Convoyavoit
découvert les Illes d'Hieres defquelles il s'approchoit , que les
Ennemis n'auroient pas manqué d'appercevoir , & d'en
prendre finon tout , au moins
la plus grande partie , un gros
coup de vent de Nord Oüeft
s'éleva fi fort qu'il obligea les
GALANT 383
Ennemis de pouffer au large
& le Convoy d'arriver au
Gourjan.
Dans le moment que l'on
cut appris àToulon l'arrivée de
ce Convoy au Gourjan par un
fecond effet , & tout particulier de la même Providence,qui
l'avoit ainfi reglé, Mr Caffart ,
qui monte le Parfait de 70.
canons , fe trouva enrade avec
le Serieux , de 60. & Mr Laigle avec le Phoenix , de 52. canons.
Il eſt à remarquer que le
Vaiffeau le Toulouze , de so.
canons monté par Mr Lam-
384 MERCURE
bert , & qui faifoit partie du
Convoy, s'eftant trouvé à por
tée d'entrer à Toulon le 6 informa Mr Daligre de Saint Lié
qui y commande la Marine , de
la fituation oùil avoit laiffé Mr
de Feuquieres , avec le Convoy. On ne perdit pas un moment pour décharger en partie ce Vaiffeau qui eftoir char
gé debled, afinde le foulager,
& on augmenta confiderablement fon équipage , afin de le
mettre en eftat de fortir & d'aller rejoindre Mr de Feuquieresavec les 3. autres Vaiffeaux
dont on augmenta auffi confiderablement
GALANT 385
de
fiderablement les Equipages ;
ce qui fut fait en tres - peu
temps , en forte qu'ils mirent
à la voile le 8 à 10, heures
du matin , avec un Brulot , &
un autre petit Baltiment , qui
tous enſemble avoient deux
mille hommes d'Equipage.
Quoy que je vous aye dit
dans le Prelude de cet Article,
que de plufieurs Relations j'en
formois une feule , j'en ay
trouvé deux qui regardent le
Combat qui m'ont paru dignes de vous cftre envoyées
toutes deux.
Fanvier 1710.
Кк
386 MERCURE
a
Premiere Relation duCombat.
Le 9º eftant à la vûë er de
vant le Gourjan , ils virent paroiftre deux Vaiffeaux qui faifoient route fur eux ; & lors
qu'ils furent à demy lieuë , le
Parfait les chaſſa à toutes voiles,
les joignit fe mit en travers
de ces deux Vaiffeaux , & les
canonna jufqu'à ce que
rieux le Phoenix y fuffent
arrivez le premier attaqua le
Faucon Anglois de 44. Canons
qu'il démata & qu'il prit. Mr
Caffard tomba enfuite fur le
Pembrok de 70. Canons
Mr Laigle avoit déja démâté,
dont il avoit tué le Capi-
:
le Serque
GALANT 387
taine ,
plus de hommes 70.
de l'Equipage ; ce Vaiffean fe
-rendit , & il a esté amené à
Toulon avec le Faucon. Cette
action a efté tres-vive , &n'a
pas duré plus d'une heure ; ces
deux Vaiffeaux venoient de ca
renner au Port Mahon pour fortifier l'Escadre Angloife qui croifait depuis long-temps fur les
Coftes de Provence , en attendant
Mrde Feuquieres & fon Convoy , dont aucun Baſtiment n'a
efté pris ny perdu depuis fon départ de Levant.
Seconde Relation du Combat.
Le 9ºeftant prés du moüillage
KK
388 MERCURE
•
>
où le Toulouze , avoit déja jetté
l'Ancre , on aperçut deux Vaif
feaux qui s'aprochoient de terre.
Mr de Feuquieres fit fignal au
Parfait , au Serieux & au
Phoenix , de les aller reconnoiftre ,
ce qu'ils firent. Comme nos Vaiffeauxfortoient defiprés de terre
ces deux Vaiffeaux Ennemis l'un
de 66.canons , & l'autre de 40.
crurent que c'eftoient des Vaiffeaux chargez de bleds. Ils allerent deffus ; mais ayant reconnu
aprés la force de nos Vaiſſeaux
ils tâcherent defe fauver ; mais
Mr Caffart avec le Parfait
donna une bordée à la flute qui
la mit hort d'état. En effet, elle
GALANT 389
aculafur le Parfait , &luy emporta fa Gallerie , l'ayant remife , le Serieux y alla , & la
prit. Pendant ce temps Mr de
Laigle alla augros , & l'ayant approché de prés il le combatit pendant une große heure & demie
avec unfeu extraordinaire , &il
luy emportafon Maft d'Artimon.
Le Capitainey fut tué le Capitaine en fecond voyant que
Parfait venoit à luy fe voyant
beaucoup de monde tué parle gros
feu du Canon& de la moufqueterie de MrLaigle ,ferendit à luy
nevoulutpoint connoiftrel'Of
ficier queMrCaffart luy, envoya
le
Kij
390 MERCURE
le premier; de maniere que ces 2 •
Angloisfont àToulonprefentement
avec tout le Convoy dont chaque
Baftiment va à fa deftination.
Au refte ce Convoy eft des
plus confiderables & l'on peut
affurer qu'il vaut bien huit millions , puifqu'il y a de compte
fait pour le Languedoc &pour
la Provence cent mille charges
de bled, la charge pefant à peu
prés 300. livres poids de Paris ;
à 36. livres ce font déja trois
millions fix cens mille livres :
il y en a du moins pour autant
en Marchandifes fines , & ce
qu'un grand nombre de particuliers a de provifions de
GALANT 391
bled fur ces Vaiffeaux va encore fort loin. Il faut ajoûter
à tout cela quantité de farines ,
huit mille quintaux de Legumes , fept mille quintaux de
Ris , & beaucoup de viandes.
Les Officiers qui fe font diftinguez dans le Combat , n'ont
pas attendu long- temps leur
recompenfe , puifqu'en même
temps quenous avons appris la
maniere dont ils fe font diftinguez , nousavons fçu que S. M.
a nommé Mr Caffart , Capitai
ne de Fregate ; Mr des Hayes,
Lieutenantde Vaiffeau , & Mr.
Laigle , Capitaine de Brulot .
Le Vaiffeau l'Entreprenant
392 MERCURE
1
arriva auffi de Barbarie le 12, avec cinq
mille charges de bled.
Je vous diray peu de chofes ce moiscy de l'Espagne. Elle fe trouve aujourd'huy dans une fituation tres-avantageufe par raport à celle de tous les Sou
verains de l'Europe. Elle eft tranquile
chez elle , où rien ne manque: elle tra
vaille à mettre 80. mille hommes fur
pied, avec lefquels elle ne peut faire
qu'avantageufement la paix ou la guerre,ce qui provient de la grande union
qui fe trouve entre Sa Majefté Catholique & tous fes Sujets . Ce Monarque
apour eux tout l'amour qu'un Souverain peut avoir pour fes Sujets , & depuis qu'il eft fur le Trône , il a fait plufieurs Campagnes , dans lefquelles il a
expoféfon fang pour leur défenfe , ce
que les Espagnols reconnoiffent par un
amour & une fidelité à l'épreuve de
toutes choſes. Aufli trouve-t-il abondamment de l'argent & des hommes
dans tous les Etats , & c'eft dequoy fai
re de bonnes & degrandes Armées ; car
pourpeu que les Efpagnols foient inf
GALANT 393
truits du métier de la guerre , jamais on
n'a vû de Peuple plus intrepide. Il ne
fçait ce que c'eft que de fuir, & l'Hiftoire nous fournit une infinité d'exemples
éclatans de cette intrepidité , & toute la
terre fe fouvient encore de celle du
Comte des Fontaines , dont tout le Bataillon perit dans le mefme terrain où il
eftoit en bataille , ce Comte affis au milieu du Bataillon animant tous fes Soldats.
#
Je devrois en finiffant vous parler de
l'heureufe face qu'il paroît que l'Europe
doit prendre dans peu ; mais ce font des
Affaires delquelles la prudence ne veut
pas que l'on parle trop , de crainte de
n'en pas parler jufte. Je fuis , Madame,
voftre , &c.
APariscedernierJanvier 1710.
Ferriol , Ambaffadeur du Roy
àConftantinople , avoit obte
nu de fa Hauteffe de faire
charger des Bleds à Conftantinople & dans les Echelles du
Levant. Il s'eft heureufement
acquitté de fa Commiſſion. Il
y a plufieurs Relations qui
peuvent toutes paffer pour des
Originaux , eftant écrites par
des Officiers de confideration,
& qui font tous dans des poftès à pouvoir fçavoir ce qu'ils.
GALANY 377
mandent , qui neanmoins ne
s'accordent pas , particulierement à l'égard des dates ; tel
eft le fort des Relations que
´l'on reçoit des Affaires les plus
importantes. Perfonne ne le
connoift mieux que moy qui
ay toûjours ramaffé toutes celles qui ont efté répanduës dans
le monde des actions les plus
remarquables , & j'ay trouvé
une fois une circonſtance aſſez
confiderable , toute differente
dans neuf Relations de la même Affaire , fans qu'il m'ait
efté poffible de découvrir celle qui parloit le plus jufte.
Li iij
378 MERCURE
ގ
%%
cmAinfi en fait de nouvelles , la
premiere qu'on lit fait plaifir,
& l'on croit d'abord eftre
bien inftruit. La feconde Relation , dans laquelle on trouve
des faits differens embaraffe un
peu ; & lors qu'on en a lû
beaucoup, on fe trouve fi
baraffé qu'on eft contraint de
parler au hazard , ou de donner au Public les Extraits de
PArticle qui embaraffe afin de
fe difculper , & qu'il en juge
par luy- mefme. J'ay trouvé le
mefme embaras pour des da
tes , dans la Relation que vous
allez lire , qui d'ailleurs vous
GALANT 379
paroiftra tres- curieufe. Entre
fept ou huit Relations dont
j'ay formé celle que vous allez
lire , il y en a une feule qui
-prend l'affaire de plus haut,
par laquelle je vais commencer, & qui n'eft contredite en
rien parce qu'elle eft feule.
Mr de Feuquieres eftoit allé
àu Levant pour amener un
Convoy de bled. Tous les autres Vaiffeaux tant du Roy que
des Marchands qui eftoient allez pour le mefme ſujet s'affemblerent à Smirne fous les
ordres de Mrde Feuquieres au
nombre de 84. Baftimens tant
380 MERCURE
Vaiffeaux, Barques , Pinques ,
ou Tartanes , parmy lefquels
cftoit compris le Temeraire , de
60. canons , monté par Mr de
Feuquieres ; le Toulouſe de mêmeforce; l'Etendart & le Flenron de 50; l'Hirondelle & la Vef
tale de 36. tous Vaiffeaux de
Roy, & une trentaine d'autres
Vaiffeaux particuliers ; le refte
eftoit de petits Baftimens".
Ils partirent dans le mois d'Octobre, & quoy que la faifon
fût la plus rude de toute l'année, à caufe des divers coups
de vents qui regnent en ce
temps- là &que l'on fut obligé
GALANT 281
de paffer dans toutes les Croifieres ordinaires nonobitant
25. ou 30. gros Vaifféaux Ennemis qui font dans ces Mers ;
ce Convoy franchit tout fans
voir aucun Vaiffeau ennemy,
& fans qu'il ſe foit écarté aucun Baftiment pendant untrajet de plus de 6oo. licuês.
Comme on avoit apprisque
le Convoy eftoit parti , & que
l'on voyoit tous les jours aux
Coftes de Provence une Efcadre ennemie de huit Vaiffeaux
qui fe relevoient les uns aprés
les autres , on eftoit à Toulon
& à Marſeille dans une grande
382 MERCURE
confternation , parce qu'on découvroit tous les jours les Ennemis aux avenues , & que nos
Vaiffeaux n'eftoient pas en état
de s'oppofer à cette Efcadre ,
eftant tous chargez de bled.
Mais par un effet de la Providence , dans le temps que l'Avant-garde de ce Convoyavoit
découvert les Illes d'Hieres defquelles il s'approchoit , que les
Ennemis n'auroient pas manqué d'appercevoir , & d'en
prendre finon tout , au moins
la plus grande partie , un gros
coup de vent de Nord Oüeft
s'éleva fi fort qu'il obligea les
GALANT 383
Ennemis de pouffer au large
& le Convoy d'arriver au
Gourjan.
Dans le moment que l'on
cut appris àToulon l'arrivée de
ce Convoy au Gourjan par un
fecond effet , & tout particulier de la même Providence,qui
l'avoit ainfi reglé, Mr Caffart ,
qui monte le Parfait de 70.
canons , fe trouva enrade avec
le Serieux , de 60. & Mr Laigle avec le Phoenix , de 52. canons.
Il eſt à remarquer que le
Vaiffeau le Toulouze , de so.
canons monté par Mr Lam-
384 MERCURE
bert , & qui faifoit partie du
Convoy, s'eftant trouvé à por
tée d'entrer à Toulon le 6 informa Mr Daligre de Saint Lié
qui y commande la Marine , de
la fituation oùil avoit laiffé Mr
de Feuquieres , avec le Convoy. On ne perdit pas un moment pour décharger en partie ce Vaiffeau qui eftoir char
gé debled, afinde le foulager,
& on augmenta confiderablement fon équipage , afin de le
mettre en eftat de fortir & d'aller rejoindre Mr de Feuquieresavec les 3. autres Vaiffeaux
dont on augmenta auffi confiderablement
GALANT 385
de
fiderablement les Equipages ;
ce qui fut fait en tres - peu
temps , en forte qu'ils mirent
à la voile le 8 à 10, heures
du matin , avec un Brulot , &
un autre petit Baltiment , qui
tous enſemble avoient deux
mille hommes d'Equipage.
Quoy que je vous aye dit
dans le Prelude de cet Article,
que de plufieurs Relations j'en
formois une feule , j'en ay
trouvé deux qui regardent le
Combat qui m'ont paru dignes de vous cftre envoyées
toutes deux.
Fanvier 1710.
Кк
386 MERCURE
a
Premiere Relation duCombat.
Le 9º eftant à la vûë er de
vant le Gourjan , ils virent paroiftre deux Vaiffeaux qui faifoient route fur eux ; & lors
qu'ils furent à demy lieuë , le
Parfait les chaſſa à toutes voiles,
les joignit fe mit en travers
de ces deux Vaiffeaux , & les
canonna jufqu'à ce que
rieux le Phoenix y fuffent
arrivez le premier attaqua le
Faucon Anglois de 44. Canons
qu'il démata & qu'il prit. Mr
Caffard tomba enfuite fur le
Pembrok de 70. Canons
Mr Laigle avoit déja démâté,
dont il avoit tué le Capi-
:
le Serque
GALANT 387
taine ,
plus de hommes 70.
de l'Equipage ; ce Vaiffean fe
-rendit , & il a esté amené à
Toulon avec le Faucon. Cette
action a efté tres-vive , &n'a
pas duré plus d'une heure ; ces
deux Vaiffeaux venoient de ca
renner au Port Mahon pour fortifier l'Escadre Angloife qui croifait depuis long-temps fur les
Coftes de Provence , en attendant
Mrde Feuquieres & fon Convoy , dont aucun Baſtiment n'a
efté pris ny perdu depuis fon départ de Levant.
Seconde Relation du Combat.
Le 9ºeftant prés du moüillage
KK
388 MERCURE
•
>
où le Toulouze , avoit déja jetté
l'Ancre , on aperçut deux Vaif
feaux qui s'aprochoient de terre.
Mr de Feuquieres fit fignal au
Parfait , au Serieux & au
Phoenix , de les aller reconnoiftre ,
ce qu'ils firent. Comme nos Vaiffeauxfortoient defiprés de terre
ces deux Vaiffeaux Ennemis l'un
de 66.canons , & l'autre de 40.
crurent que c'eftoient des Vaiffeaux chargez de bleds. Ils allerent deffus ; mais ayant reconnu
aprés la force de nos Vaiſſeaux
ils tâcherent defe fauver ; mais
Mr Caffart avec le Parfait
donna une bordée à la flute qui
la mit hort d'état. En effet, elle
GALANT 389
aculafur le Parfait , &luy emporta fa Gallerie , l'ayant remife , le Serieux y alla , & la
prit. Pendant ce temps Mr de
Laigle alla augros , & l'ayant approché de prés il le combatit pendant une große heure & demie
avec unfeu extraordinaire , &il
luy emportafon Maft d'Artimon.
Le Capitainey fut tué le Capitaine en fecond voyant que
Parfait venoit à luy fe voyant
beaucoup de monde tué parle gros
feu du Canon& de la moufqueterie de MrLaigle ,ferendit à luy
nevoulutpoint connoiftrel'Of
ficier queMrCaffart luy, envoya
le
Kij
390 MERCURE
le premier; de maniere que ces 2 •
Angloisfont àToulonprefentement
avec tout le Convoy dont chaque
Baftiment va à fa deftination.
Au refte ce Convoy eft des
plus confiderables & l'on peut
affurer qu'il vaut bien huit millions , puifqu'il y a de compte
fait pour le Languedoc &pour
la Provence cent mille charges
de bled, la charge pefant à peu
prés 300. livres poids de Paris ;
à 36. livres ce font déja trois
millions fix cens mille livres :
il y en a du moins pour autant
en Marchandifes fines , & ce
qu'un grand nombre de particuliers a de provifions de
GALANT 391
bled fur ces Vaiffeaux va encore fort loin. Il faut ajoûter
à tout cela quantité de farines ,
huit mille quintaux de Legumes , fept mille quintaux de
Ris , & beaucoup de viandes.
Les Officiers qui fe font diftinguez dans le Combat , n'ont
pas attendu long- temps leur
recompenfe , puifqu'en même
temps quenous avons appris la
maniere dont ils fe font diftinguez , nousavons fçu que S. M.
a nommé Mr Caffart , Capitai
ne de Fregate ; Mr des Hayes,
Lieutenantde Vaiffeau , & Mr.
Laigle , Capitaine de Brulot .
Le Vaiffeau l'Entreprenant
392 MERCURE
1
arriva auffi de Barbarie le 12, avec cinq
mille charges de bled.
Je vous diray peu de chofes ce moiscy de l'Espagne. Elle fe trouve aujourd'huy dans une fituation tres-avantageufe par raport à celle de tous les Sou
verains de l'Europe. Elle eft tranquile
chez elle , où rien ne manque: elle tra
vaille à mettre 80. mille hommes fur
pied, avec lefquels elle ne peut faire
qu'avantageufement la paix ou la guerre,ce qui provient de la grande union
qui fe trouve entre Sa Majefté Catholique & tous fes Sujets . Ce Monarque
apour eux tout l'amour qu'un Souverain peut avoir pour fes Sujets , & depuis qu'il eft fur le Trône , il a fait plufieurs Campagnes , dans lefquelles il a
expoféfon fang pour leur défenfe , ce
que les Espagnols reconnoiffent par un
amour & une fidelité à l'épreuve de
toutes choſes. Aufli trouve-t-il abondamment de l'argent & des hommes
dans tous les Etats , & c'eft dequoy fai
re de bonnes & degrandes Armées ; car
pourpeu que les Efpagnols foient inf
GALANT 393
truits du métier de la guerre , jamais on
n'a vû de Peuple plus intrepide. Il ne
fçait ce que c'eft que de fuir, & l'Hiftoire nous fournit une infinité d'exemples
éclatans de cette intrepidité , & toute la
terre fe fouvient encore de celle du
Comte des Fontaines , dont tout le Bataillon perit dans le mefme terrain où il
eftoit en bataille , ce Comte affis au milieu du Bataillon animant tous fes Soldats.
#
Je devrois en finiffant vous parler de
l'heureufe face qu'il paroît que l'Europe
doit prendre dans peu ; mais ce font des
Affaires delquelles la prudence ne veut
pas que l'on parle trop , de crainte de
n'en pas parler jufte. Je fuis , Madame,
voftre , &c.
APariscedernierJanvier 1710.
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Résumé : Article contenant un grand nombre de Particularitez de l'arrivée en France, du Convoy qui a apporté des Bleds du Levant, avec beaucoup d'autres Marchandises. [titre d'après la table]
Le texte décrit une mission diplomatique et militaire impliquant M. de Ferriol, ambassadeur du roi à Constantinople, qui a organisé le chargement de blé dans cette ville et dans les Échelles du Levant. Plusieurs rapports, rédigés par des officiers de confiance, divergent sur les détails, notamment les dates, soulignant la complexité de la vérification des informations. M. de Feuquières a été envoyé au Levant pour escorter un convoi de blé composé de 84 bâtiments, incluant des navires de guerre et des vaisseaux marchands. Malgré des conditions météorologiques difficiles et la présence d'une escadre ennemie, le convoi a quitté Smirne en octobre et a évité les ennemis grâce à un coup de vent, arrivant ainsi au Goujan. À Toulon, l'arrivée du convoi a été accueillie avec soulagement. Le vaisseau Toulouse a informé de la situation de M. de Feuquières. Les vaisseaux Parfait, Sérieux, et Phoenix, sous les ordres de M. Caffart, M. Laigle, et M. Daligre, ont été préparés pour rejoindre le convoi. Deux rapports différents relatent un combat naval le 9 janvier 1710, où les vaisseaux français ont capturé deux vaisseaux ennemis près du Goujan. Le convoi, d'une valeur estimée à huit millions de livres, comprenait cent mille charges de blé et diverses marchandises. Les officiers distingués lors du combat ont été récompensés par le roi. De plus, le vaisseau Entreprenant est arrivé de Barbarie avec cinq mille charges de blé. Le texte se conclut par une description de la situation en Espagne, soulignant sa stabilité et sa préparation militaire, ainsi que la loyauté de ses sujets envers le monarque.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1918
p. 393
AVIS
Début :
Le Mercure de Fevrier ne se debitera que le premier Jeudy de Carême, à cause [...]
Mots clefs :
Avis, Mercure
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AVIS
Le Mercure de Fevrier ne fe debitera
que le premier Jeudy de Carême, à cau
fe des Jours Gras & du Mercredy des
Cendres qui occupent tout le monde.
que le premier Jeudy de Carême, à cau
fe des Jours Gras & du Mercredy des
Cendres qui occupent tout le monde.
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1919
s. p.
TABLE.
Début :
Prelude qui renferme un abregé de tout ce que le Roy a fait de [...]
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texteReconnaissance textuelle : TABLE.
TABLE.
Prelude qui renferme un abregé
5.
de tout ce que le Roy a fait de
grandpendant fa vie.
Extrait de l'Oraifon Funebre de
Madame de Maubuiffon , non
pas de la maniere ordinaire
mais dont la lecture ne doit pas
moins attacher&
Faire deplaifir que feroit celle de l'Hiftoire
la plus curieufe.
29
Mr Dom Jofeph Antonio de Ame
zaga , eft fait Chevalier d'Alcantara , dans legrand Convent
des Auguftins.
Portrait d'unhonnefte homme.
homme ; mais en Vers.
73
77
82
Autre Portrait auffi d'an honnefte
Premier Article de Marine. 89
Premier Article des Morts. 97
Differtation fur la Goutte &fur le
Rhumatifme.
Eloge Funebre de feuë S. A. S.
Monfieur le Prince , prononcé à
153
TABLE.
Bourges , avec un appareil qui
fert à faire voir toutes les vertus & toutes les grandes qualitez de ce Prince.
175
Suite de ce qu'on a déja rapporté de
Oraifon Funebre de Me deVa232
lençay, Abbeffe des Clairets , 216
Mariages.
Benefices donnez par le Roy dans
la derniere Promotion. 238
Donsfaitspar le Roy, tant à Mrde
Barillon qu'à MrďAlbaret, &
àMrle Chevalier de S.Olon. 253
Eloge de feu Mr de Corneille. 270
Mort d'un homme âgé de cent dixneufans , avec des particularitez fingulieres.
Livre intitulé , Differtation fur
les Caracteres de Corneille
& de Racine , contre le fentiment de la Bruyere,
Benefice donné par le Roy.
300
305.
307
Article tres-curieux qui régarde ce
TABLE.
qui s'eft paßé à la Seance publique de la Societe Royale de Montpellier, qui s'eft faite pendant la
tenuë des Etats deLanguedoc. 312
Coutume de Bretagne en deux Vo.
lumes in quarto, Ouvrage tresutile & tres-curieux
Article des Enigmes,
336
343
Eftampe des Jettons de cette année,
remife au mois prochain. 350
Article qui regarde les Affaires du
temps. Cet Article a esté fait
avant que l'on fçut lafituation
des Affaires prefentes.
Article contenant un grand nombre
de Particularitez de l'arrivée en
France , du Convoy qui a ap351
porté des Bleds du Levant, avec
beauconp d'autres,Marchandifes.
376
Conclufion
LYOR 393
Prelude qui renferme un abregé
5.
de tout ce que le Roy a fait de
grandpendant fa vie.
Extrait de l'Oraifon Funebre de
Madame de Maubuiffon , non
pas de la maniere ordinaire
mais dont la lecture ne doit pas
moins attacher&
Faire deplaifir que feroit celle de l'Hiftoire
la plus curieufe.
29
Mr Dom Jofeph Antonio de Ame
zaga , eft fait Chevalier d'Alcantara , dans legrand Convent
des Auguftins.
Portrait d'unhonnefte homme.
homme ; mais en Vers.
73
77
82
Autre Portrait auffi d'an honnefte
Premier Article de Marine. 89
Premier Article des Morts. 97
Differtation fur la Goutte &fur le
Rhumatifme.
Eloge Funebre de feuë S. A. S.
Monfieur le Prince , prononcé à
153
TABLE.
Bourges , avec un appareil qui
fert à faire voir toutes les vertus & toutes les grandes qualitez de ce Prince.
175
Suite de ce qu'on a déja rapporté de
Oraifon Funebre de Me deVa232
lençay, Abbeffe des Clairets , 216
Mariages.
Benefices donnez par le Roy dans
la derniere Promotion. 238
Donsfaitspar le Roy, tant à Mrde
Barillon qu'à MrďAlbaret, &
àMrle Chevalier de S.Olon. 253
Eloge de feu Mr de Corneille. 270
Mort d'un homme âgé de cent dixneufans , avec des particularitez fingulieres.
Livre intitulé , Differtation fur
les Caracteres de Corneille
& de Racine , contre le fentiment de la Bruyere,
Benefice donné par le Roy.
300
305.
307
Article tres-curieux qui régarde ce
TABLE.
qui s'eft paßé à la Seance publique de la Societe Royale de Montpellier, qui s'eft faite pendant la
tenuë des Etats deLanguedoc. 312
Coutume de Bretagne en deux Vo.
lumes in quarto, Ouvrage tresutile & tres-curieux
Article des Enigmes,
336
343
Eftampe des Jettons de cette année,
remife au mois prochain. 350
Article qui regarde les Affaires du
temps. Cet Article a esté fait
avant que l'on fçut lafituation
des Affaires prefentes.
Article contenant un grand nombre
de Particularitez de l'arrivée en
France , du Convoy qui a ap351
porté des Bleds du Levant, avec
beauconp d'autres,Marchandifes.
376
Conclufion
LYOR 393
Fermer
Résumé : TABLE.
Le document est une table des matières d'un ouvrage funèbre et historique. Il commence par un prélude résumant les actions marquantes du roi au cours de sa vie, suivi d'un extrait de l'oraison funèbre de Madame de Maubuisson. Le texte mentionne la nomination de Monsieur Dom Joseph Antonio de Amezaga comme Chevalier d'Alcantara et des portraits en vers d'hommes honnêtes. Il inclut des articles sur la marine, les morts, et une dissertation sur la goutte et le rhumatisme. Un éloge funèbre du Prince est prononcé à Bourges, soulignant ses vertus et qualités. Le document relate également des mariages, des bénéfices royaux, et des dons faits par le roi à divers individus. Il comprend des éloges funèbres, notamment celui de Monsieur de Corneille, et mentionne la mort d'un homme âgé de cent dix-neuf ans. Des ouvrages sur les caractères de Corneille et Racine, ainsi que des articles sur des événements récents, comme l'arrivée en France d'un convoi de blé du Levant, sont également présents. Le texte se conclut par des articles sur les affaires du temps et des coutumes de Bretagne.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1920
s. p.
« L'Air, Fiers Aquilons 300 Le Vin, &c. [...] »
Début :
L'Air, Fiers Aquilons 300 Le Vin, &c. [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « L'Air, Fiers Aquilons 300 Le Vin, &c. [...] »
L'Air, Fiers Aquilons 300 Le Vin, &c.
Fermer
1921
s. p.
« Comme il est impossible dans la conjoncture presente de ne pas grossir [...] »
Début :
Comme il est impossible dans la conjoncture presente de ne pas grossir [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Comme il est impossible dans la conjoncture presente de ne pas grossir [...] »
Com
Ommeil eft impoffible dans la conjoncture prefente de ne pas groffir
le Mercure, ce qui en augmente confiderablement les frais , on nepeutfe difpenfer d'en augmenter auffi le prix . Ainfi les
volumes qui feront reliez en veaufe vendront dorefnavant 38. fols. Quant
aux volumes qui feront reliez enparche
min , on n'en payera que trente-cinq.
Les Relations fe vendront autant que
Ies Mercures.
Chez MICHEL BRUNET, grande
Salle du Palais , au Mercure
Galant.
M. DCCX.
Avec Privilege du Roy.
Ommeil eft impoffible dans la conjoncture prefente de ne pas groffir
le Mercure, ce qui en augmente confiderablement les frais , on nepeutfe difpenfer d'en augmenter auffi le prix . Ainfi les
volumes qui feront reliez en veaufe vendront dorefnavant 38. fols. Quant
aux volumes qui feront reliez enparche
min , on n'en payera que trente-cinq.
Les Relations fe vendront autant que
Ies Mercures.
Chez MICHEL BRUNET, grande
Salle du Palais , au Mercure
Galant.
M. DCCX.
Avec Privilege du Roy.
Fermer
Résumé : « Comme il est impossible dans la conjoncture presente de ne pas grossir [...] »
En 1709, les prix des publications 'Mercure' et 'Relations' augmentent en raison des coûts de production. Les volumes en veau coûtent 38 sols, ceux en parchemin minium 35 sols. Les 'Relations' sont au même prix que les 'Mercures'. Les publications sont disponibles chez Michel Brunet au Mercure Galant. Un privilège royal est mentionné.
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1922
s. p.
AU LECTEUR.
Début :
Il y a lieu de croire qu'on ne lit plus l'Avis qui a [...]
Mots clefs :
Lisible, Deviner, Envoyer, Port
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AU LECTEUR.
AULECTEUR.
ILya lieu de croire qu'on
ne lit plus l'Avis qui a
efté mis depuis tantd'années
aucommencement dechaque
Volume du Mercure , puif
que malgré les prieres réiterées qu'onafaites d'écrire en
caracteres lifibles les Noms
propres quife trouvent dans
le's Memoires qu'on envoye
pour eftre employez , on néglige de le faire , ce qui eft
cause qu'ily en a quantité
1
A ij
AU LECTEUR
dedéfigurez, étant impoffible
de devinerle nom d'une Terre , ou d'une Famille , s'il
n'eft bien écrit. On prie de
nouveau ceux qui en envoyent d'y prendre garde ,
s'ils veulent que les noms
propres foient corrects. On
avertitencore qu'onneprend
aucun argent pour ces Memoires,& quel'onemployera
tous les bons Ouvrages aleur
tour , pourvu qu'ils ne def
obligent perfonne, & que
ceux qui les envoyeront en
affranchiffent le port
ILya lieu de croire qu'on
ne lit plus l'Avis qui a
efté mis depuis tantd'années
aucommencement dechaque
Volume du Mercure , puif
que malgré les prieres réiterées qu'onafaites d'écrire en
caracteres lifibles les Noms
propres quife trouvent dans
le's Memoires qu'on envoye
pour eftre employez , on néglige de le faire , ce qui eft
cause qu'ily en a quantité
1
A ij
AU LECTEUR
dedéfigurez, étant impoffible
de devinerle nom d'une Terre , ou d'une Famille , s'il
n'eft bien écrit. On prie de
nouveau ceux qui en envoyent d'y prendre garde ,
s'ils veulent que les noms
propres foient corrects. On
avertitencore qu'onneprend
aucun argent pour ces Memoires,& quel'onemployera
tous les bons Ouvrages aleur
tour , pourvu qu'ils ne def
obligent perfonne, & que
ceux qui les envoyeront en
affranchiffent le port
Fermer
Résumé : AU LECTEUR.
Le Mercure demande aux contributeurs d'écrire les noms propres de manière lisible et orthographiée correctement pour éviter les erreurs d'identification. La publication refuse tout paiement pour les mémoires soumis et les affranchit elle-même. Les contributions doivent être exemptes de contraintes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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Fermer
1923
p. 5-56
Article dont on ne peut donner dans cette Table une idée qui puisse répondre à son sujet, & qui renferme un Eloge du Roy, & de Monseigneur le Dauphin d'une maniere toute singuliere, [titre d'après la table]
Début :
On prononce tout les ans à l'Hostel de Ville de Lyon, [...]
Mots clefs :
Éloge, Seigneur de Jonage, Assemblée, Louis le Grand, Alliés, Ennemis, Ardeur militaire, Combats, Hôtel de ville de Lyon, Discours
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article dont on ne peut donner dans cette Table une idée qui puisse répondre à son sujet, & qui renferme un Eloge du Roy, & de Monseigneur le Dauphin d'une maniere toute singuliere, [titre d'après la table]
Nprononce tous les ans
à l'Hoſtel de Ville de
Lyon , le jour de la Fefte de
Saint Thomas , un Difcours
en prefence de M' l'Archevêque , de M' l'Intendant , de
A iij
6 MERCURD IS
M's les Comtes de Saint Jean,
& de toutes les Compagnies
de la Ville. Ce Difcours a efté
fait cette année par le fils
de Mr Yon , Seigneur de
Jonage qui fut nommé l'année
derniere premier Echevin ,
quoy que revêtu d'une Charge de Secretaire du Roy. Il a
beaucoup de merite , & il eft
fort eftimé. Le Difcours que
fon fils prononça le jour de S.
Thomas , reçut de grands applaudiffemens. Vous en jugerez par ce que je vais vous en
rapporter. Ce qu'il dit du Roy
plutinfiniment , & aprés avoir
GALANT
fini l'Eloge de Sa Majeſté , lors
quel'on croyoitqu'il n'en duft
plus rien dire , il l'apoftropha
comme fi Elle cut efté prefente, & il s'attira des applaudiffemens nouveaux. Voici le
commencement de fon Difcours.
བར
:
Tout eft grand , tout eft auguf
te , Meffieurs , dans le deffein que
j'entreprens rien n'y pourroit
eftre mediocre que la foibleffe du
file ; mais dans l'obligation que je
mefuis impofée de traiter une de
cesglorieufes matieres que d'autres
avant moy ont peut - eftre negligées ,j'ofe meflatter que la NoA iiij
8 MERCURE
bleffe de monfujer donnera du relief à mespenfées , & de l'éclat
à mes paroles ; & ma temerité
trouve fon pretexte dans l'impor
tance du difcours , & dans l'injuftice du filence.
C'est une ancienne &commune erreur , que de relever avecexcés le merite desperfonnes celebres ,
qui ont vécu avant nous , pour
diminuer lagloire de ceux dans les
temps defquels nous vivons ; cette
erreur eft , tantoft un aveuglement groffier dans l'efprit des peuples , qui croyent que la fuite des
temps a le même fort que le déclin
de leur age ; & que la nature
-GALANT 9
ffant comme l'homme , elle vieilliffant
degenere defiecle enfiecle dans fes
productions , àproportion de ce que
d'année en année il s'affoiblit dans
fes travaux ? c'est ce que le
plus fameux de tous les Poëtes a
voulu nous exprimer par ces deux
Vers traduits en noftre langue ?
O fi Dieu me rendoit mes
premieres années ,
dit- il en cet endroit en un
autre:
Les illuftres Heros nâquirent
autrefois :
Tantoft c'est une illisfion defubtiles mais vaines idées , telles
que celles de ces Philofophes ,
.
10 MERCURE
qui s'imaginoient , que les pre
miershommes formez d'uneplus
riche matiere nez fous
deplusfavorables étoiles , avoient
bien pû laiffer d'heureux fuccef
feurs deleurs noms , mais nonpas
de purs heritiers de leur gloiree ?
comme fi pour trouver ce qu'il y
a de plus grand dans le monde , il
falloit remonterjufqu'au regnefabuleux de Saturne : tantofi c'est
une enviefecrette entre des perfon
nes que la fortune ou la naiffance
a mis au niveau les uns des autres,
dans le même rang & àportée des
mêmes honneurs ; chacun pour dé
crierfon concurrent transportepour
GALANT I
ainfi dire fon eftime au fiecle de
ceux qui nepeuvent plus concourir avec perfonne : pour épargner
fon encens au merite des vivans ,
on le prodigue à la memoire des
morts , pour tout difputer à
ceux qui ne nous peuvent plus
rien difputer ? Reproche que le
Sage a peut - eſtre prétendu nous
faire par cesparoles ? J'ay donné.
aux morts les louanges que j'ay
refufées auxvivans.
Il est donc vray , Meffieurs
que foit aveuglément , foit illu
fion , foit envie , la gloire de nos
Contemporains ne va jamais
felon nous de pair avec celle de
12 MERCURE
nos predeceffeurs , par une injuftice de tous les temps" , le merite
qui refpire & qui vit encore , eft
toujours contredit , il faut que,
les fecles éloignez nous le rappelle
pour qu'il foit confacré, je veux
dire veritablement reconnu ; ainfi
parla au grand Conquerant de
, dans le temps que les
Heros paffoient pour des Dieux ,
le Philofophe Califthene : Pour
paroiftre Dieu , luy dit-il , au
jugement des hommes, il faut
avoir long- temps difparu à
leurs yeux ; les honneurs divins fuivent quelques fois les
morts , mais ils n'accompa-
GALANT 13
gnent jamais les vivants.
Je viens tâcher , Meffieurs
de rendre à tous les temps &
tous les merites , la justice qui
leur eſt deuë ; je viens louer les
grands hommes , qui excellent à
prefent , auffs bien que ceux qui
ont excellé autrefois , &proportionnant les louanges au merite ,
les Modernes y auront peut- eſtre
plus de part que les Anciens.
Icy , Meffieurs , mon deffein
cmmne à fe développer
vous vousappercevezfans doute ,
queje voudrois vous donner une
idée des Herospar des comparatfens des uns aux autres ; mais
US
14 MERCURE
que ce deffein feroit vaſte , &
qu'il feroit étendu ; il m'engageroit à rappeller dans vos efprits
tous les Heros qui ont brillé , &
qui brillent encore dans tous les
Arts & dans toutes les Sciences :
ce ne feroit que charger ma
memoirepourlaffer vos patiences :
le refpectqueje dois à voftre attentionprefcrit à monfujet des bornes
plus étroittes il m
; m'oblige nonfeulement à me fixer au plus
glorieux de tous les Arts , je
veux dire à l'Art Militaire ;
mais encore pour éviter l'ennuy
d'un trop long récit , à ne choifir
parmi les Herosde la Guerre les
SGALANT
15
plus renommez que quelques- uns
de ceux à qui leurs fameux exploits ontmeritéle nom de Grand:
mais dans les loüanges que je
leur donneray ,
j'efpere que de
vous-même vous trouverez dequoy remplir àproportion l'Eloge,
de tous les autres , &c'eſt là le
Plan de ce Difcours dans lequel ,
aprés avois tracé l'idée des Grands
Heros de l'antiquité, je tâcheray
de vous donnercelle du plus grand
de tous dans lefiecle prefent.
Voicyce qu'il dit dans fa
premiere partie.
Une des plus fortes paffions
& qui a le plus occupé le cœur
16 MERCURE .
des Grands de l'antiquité, &même de tous les temps ; c'eſtoir le
defir de fe diftinguerpar les Armes , & deſefaire par leur Epée
plus grand que un nom encore
la
celuy qu'ils avoient déja par leur
naiffance ; ils laiffoient pour la
plupart aux Orateurs l'Art du
Difcours , aux Philofophes l'étudedes Sciences , aux Politiques
Ladminiftration des Etats
gloire de tous ces Heros de Litterature de Miniftere , n'excitoit guerre leur noble émulation
quelquecharme même qu'elle eut
pour quelques uns ce n'étoit
qu'un amusement de Paix & de
·
יך
GARANT 17
repos ;toutt cédoit au premierpref=
fentiment de Guerre qui les raviffoit , ilsfe fentoient comme d'euxmême transportez dans le champ
glorieux des Combats , & ils
voloient pour l'arrofer quelques
fois de leur fang, & y cueillir
furun tas de morts
من
de bleſſez
les Lauriers & les bonneurs du
triomphe.
Cette ardeur Militaire qui
dans le cœur des Potentats , à
prefque toujours efté une envie
prodigieufe de dominere de
s'étendre , une ambition démesurée.
de s'élever au deffus de la condition humaine , a toujours efté une
Février 1710.
B
18 MERCURE
fuitefatale de l'orgueil du premier
des mortels ; mais elle ne laiffe
pas auffi deftre dans les deffens
de la fageffe éternelle , qui doit
tout raporter à fa gloire : elle ne
laiffe pas , dis-je , d'eftre comme
un caractere de divinité , imprimée dans l'ame des Souverains ;
caractere dont les traitsfe repandansfurla gloire de leurs actions ,
comme fur la majesté de leurs
perfonnes , nous porte à les respecter tous , non-feulement comme les
images éclatantes de l'Etre fuprémequilesfoutient fur le Trône:
mais encore comme les fujets les
plus nobles les plus dignes
GALANT 19
une
deftreparreprefentation en qualité
de demi- Dieux de la terre
partie de ce qu'eftpar luy même le
grand Souverain de l'Univers
en qualité de Dieu des Armées.
La gloire desgrands Conquerans , ayant donc toujours en deux
faces , qu'on pouvoit envisager,
l'une humaine , l'autre divine ;
l'une qui a des taches , l'autre qui
les couvre , mais qui ne les leve
les pas ; ayant à commencer par
Heros de l'antiquité , ne nous ar
reftons point icy à blâmer ou à
louer trop leurs Conqueftes ; tachons feulement de relever leurs
perfonnes , &fans examiner d'a
Bij
20 MERCURE
A
bord, fi l'ardeur qui les animois
eftoit injufte ou legitime ; parmy
quelques- uns de ceux qui ont paſſé
pour les plus grands donnons la
preference àdeuxfeulement ; mais
choififfons-les bien , afin qu'en étalant leur gloire on ne puiffe rien
penfer de grand de celle des autres
qui nefe trouve dans la leur , &
qui ne juftifie noftre deffein de ne
parler que
"
d'eux.
Il parla enfuite d'Alexandre
& deCefar, & dit tout ce que
l'on en pouvoit dire. Il fit voir
qu'ils avoient eu toutes les
grandes qualitez qui ont fait
le merite des plus grands He-
GALANT! 21
{
ros des ficcles paffez , & aprés
enavoir fait un portrait , &de
la reffemblance de leurs acstions , il dit : It me femble
quevous balancez & que vous
attendez que je decide ? Hé!
qu'importe Meffieurs , lequel des
deux Heros d'Alexandre ou de
Cefarfut le plus grand dans les
fiecles paffez , fi le fiecle prefent
nous en offre un plus grand que
tous les deux enfemble , &
par confequent le plus grand de
tous le Heros ; quel eft il donc ce
Heros; vous l'allez bien- toft voir
paroiftre dans toutefa gloire.
Il entra enfuite dans fa feمن
22 MERCURE
conde partie , & dits
combats par
Au-deffus de cette haute va
leur qui parcourt le monde pour
combatre pour vaincre ; je place
celle d'un Heros qui commence fes
la justice , & qui
terminefes victoires par la moderation ; qui protegefes Alliez par
La puiffance , & qui fe foutient
luy-méme parfa grandeur : Elevez icy vos efprits , Meffieurs ,
j'ay de grands évenemens à vous
reprefenter, je n'ayplus à vous
cacher de grands défauts en vous
montrant de grands courages.
Je ne parleray plus icy de ces
Heros impetueux , quiportantpar
GALANT 23
tout les armes de l'injustice & les
faifant marcher fous les Enfeignes de la Valeur & de la Generofité, raviffoient noſtre admiration avec autant de rapidité qu'ils
ravageoient les Campagnes ; c'e
toient des foudres terribles qui ne
fondoientfurla terre avec vûteffe,
que par l'impuiffance de s'arrefter ;
c'eftoient des tourbillons qui ramaffant tout ce qu'ils trouvoient à
leurrencontre ,fe groffiffoient euxmêmes , &ferendoient plus violens? Je parle d'un Heros digne de
toute loüange, & je commence d'a
bord par vous dire qu'armé de
juftes prétentions contre d'injuftes
24 MERCURE
refus , il entreprend la guerre en
Roy & nonpas en Ufurpatenr ; il
affemble fes Magiftrats avant que
de lever fes Troupes , ne met
LesArmées en Campagne , qu'aprés les avoir mifes fous la protection des Loix.
a
Aces mots , Meffieurs , vous
reconnoiffez Louis le Grand ;
ehpourriez- vous penfer à quelqu'autres cePrincegenereuxjouiffoit àpeine de la Paix par un heureux mariageavecl'Infante d'Ef
pagne , que porté à la guerre par
l'inftinct pour ainfi dire defa valeur , il regardoit avec inquietude
fes armes dans le repos ; mais il
aimoit
GALANT 25
aimoit mieux les laiffer languir,
que de lesfairefervir à l'injuftice.
à l'ambition ; c'eſt ainſi qu'il
retenoit dans une amere tranquillité , les premiers feux de fa jeuneffe ; lorfque le Roy d'Espagne
avec une ame moins guerriere
mais plus intereffée luy difpute les
droits inconteftables de la Reine
fon Epoufe: quefera- t- il ?Se prefentera-t- il d'abord avec l'épée ?
Non, il commandera àfa valeur
d'attendre ladecifion des Loix, &
les Loix confultées ordonnent àfa
valeur attentive à leurs ordres ,
defoutenirfa caufepar les armes?
Le ciel n'ayantpermis cette injufFévrier 1710.
C
26 MERCURE
tice dela part de l'Espagne , qu'a
fin que les Peuples de divers
Royaumes appriffent combien ce
fage & puillant Heros fçavoit
joindre à la force de reprimer fes
ennemis , le pouvoir de retenirfon
indignation : le voila donc qui remet à la Fuftice la direction defon
courage : allez , Prince , allez où
cette Reine des Loix portera voftre
Bouclier ; allez lancer vos foudres fur une Nationfuperbe , tant
qu'elle ne prendra confeil que de
l'obftination defes armes : ce ne
fera de fa part que Troupes affoiblies ,
que Soldats tombez aux
pieds des voftres ; mais dés qu'elle
GALANT 27
ferangera fous les loix de l'équi
té pourfe reconnoiftre , ce nefera
de vostre part qu'excés de generofité ? en vain la Fortune vous
ouvrira-t-elle le paffage à la conqueſte de l'Univers , voftre courage nefera pas las de vaincre ;
mais voftre grandeur d'ame vous
fera croire que vous avez affez
vaincus vous arrefterez vos cour
fes rapides au milieu des combats ,
par untrop grand respect pour
les Loix, vous rendrez unepartie
de vos conqueftes de peur qu'elles
n'ayent à vous reprocher que vous
vouliez trop étendre vos prétentions ? ô Prince , ô Heros valeuC ij
28 MERCURE
reux moderé tout enſemble 3
qui aime mieux ceder les droits de
la guerre que d'eftre foupçonné
d'avoirfailli contre les regles de
la Fuftice ? Loy , Meffieurs je
cherche Alexandre & Cefar , je
les trouve , peut - eftre , Grand
Roy, dans les Combats à vos côtez, poury voir des Villes mais
des plus fortes prifes dans deux
jours , des Provinces entieres reduites en deuxfemaines ; mais je
les perds &je les vois fe retirer
faifis d'étonnement à la vuede cet
excés pour ainfi dire de moderation , qui limite fi promptement la
portée de voftre valeur ? qu'il ne
GALANT 29
paroiffe donc ici , mais pour cette
fois feulement , que lefeulRoyde
Lacedemone , qui ne vouloit d'autre avantagefurfes Sujets , fi ce
n'est qu'il luyfut permis d'efre
plus vaillant , & de faire moins
qu'eux de faute contre les Loix.
Quej'aimerais à vous repreſenter ce grand Monarque , dans
d'autres Campagnes à la tefte d'une nombreuse Armée , preffant la
Fortunefans luy donner du relashe , paffant en Maiftre du monde par les Etats de plufieurs Souverains fans prefque s'enquerir fi
l'on veutfouffrirfon paffage ,
portantpar tout le flambeau de la
C
iij
30 MERCURE
guerre fans laiffer languir le feu
de faprofperité je vous compterois plus de trente Villes munies
&fortifiées , renduës à l'aspect
du Vainqueur, & prefque toutes
fans mursabatus & fans combats
donnez , effrayées feulement de
• fon grand nom, & tachant avec
les Peuples voisins , d'apaifer fa
・jufte colére en foumetant leurs
teftes à fa puiffance , & leur
cœur àfa bonté; je vous montrerois des Villes forcées malgré leurs
vigoureuses refiftances ? hé commentn'auroient-ellespas enfin cedé
à des Armes fi feures de leurs
coups , je rappellerois encore icy
GALANT zi
1
les élements forcez , les faifons
bravées , &la nature foumife en
quelque forte à fon épée , mais
Alexandre , & Céfar , ſe pouroient peut-être reconnoistre à fes
traits ; je ne veux plus loüer
en Louis le Grand , rien de ce qui
peut aprocher de luy les autres
Heros ? difons donc quelque chofe
de plus.
Unde ces efprits qui tiennent
leur fiecle en de perpetuelles agitations , & qui excitent les orages
dans la ferenité des plus beaux
jours un de ces efprits capables
de remuer de grandes machines
d'ébranler les Etats ; un de
C iiij
32 MERCURE
ces efprits qui ont toujours att
milieu de la Paix le cœur armé
la volonté ambitieuſe un
Prince heretique , car enfin fi
nous ne voulons pas le nommer ,
il faut du moins le défigner ; un
Prince , dis-je , inquiet de vivre
comme un autre Efau par fon
épée ,fe mer en tefte de vivre
parle Sceptre: il trame des deffeins
prodigieux que nul n'auroit pu
croire , parce que nul autre n'auroitpu les imaginer , il les communique aux Puiffances confederées
il les conduit fifourdement à
fesfins qu'à la tefte d'une Armée
Navale il entreprefque invifible
GALANT 33
en Angleterre ; d'abord il fe fait
jour dans les vaftes appartemens
du Roy , prendfierementſaplace
vis- à- vis de fon Trône , &partage avecluy lefuprême honneur;
dans peu l'Anglois , grand amateur des nouveautez , retire fon
obéiffance du Monarque , &la
transporte à l'Ufurpateur , &
tout d'un coup l'injuſte & aveugle Fortune , féparant les bons
fuccésde la bonnecaufe , le Prince Proteftantfe faifit de la Couronne du Prince Catholique.
› Grandeur de la gloire magranime de mon Roy , où cftes- vous
àprefent ? la voila , Meffieurs
34 MERCURE
quifort defon Palais , pour tendrela main àce Potentat defcendu
de fon Trône ; c'eſt une Majeſté
puiſſante , qui va au-devantd'une
Majefté opprimée; c'est un Prince
qui entouré de fa Cour, & revêtu defapropre Grandeur , s'arvance pour relever un Prince infortuné, poufféfur nos bordsfeulement par quelques flots officieux
de la mer; il neperdpointdetemps
pourfoulagerfa douleur , il effuye
fes larmes par des marquesfenfi
bles de l'affection de fon cœur ;
il
le reveft de tous les ornemens de la
Royauté; il luy donne un Trône
dans un defes Palais , &arraآن
GALANT 35
chepour ainfi dire d'entre les mains
du Deftinfa Royale Famille : refolu jufques à la fin de fes jours
de leurfaire part defes trefors &
defa fortune.
Je voudrois bien vous faire
voir icy tous deux grands defolateurs des Rois & des Royaumes ; vous Alexandre , qui venez
de nous faire compter pour beaucoup les honneurs que vous avez
rendus à une Reine captive fous
lejougde vos armes tandis qu'elles
eftoient injustement tournées contre le Roy fon Epoux ; & vous
Céfar , dont un des plus grands
traitsfut; de rendrele Trône d'un
36 MERCURE
frere àunefœur, pour la rendre
elle-même par cette espece de
generofité l'objet de vos amours.
&de vos profufions ; mais li je
ne puis vous voir icy en perfonne
j'y vois du moins vos ombres gémiffantes de douleur d'apprendre
qu'il y afur la terre dans l'ame
d'un plus grand Conquerant que
vous , une plus grande generofité
que la voftre.
Reduirons- nous à cette action
genereufe la Magnanimité de
noftre Heros ? non , Meffieurs
quifçait réfugier un Roy en peut
bien foutenir un autre , l'entreprife eft difficile mais elle eft
GALANT 37
jafte l'execution eft prompte mais
elle eft de Louis le Grand, un Roy
mourant nommefon Succeffeur il
faut le luy donner.
1
url
Les paroles d'un Souverain
au lit de la mortfont des Sentences depolitique, & les Peuples y
font attentifs , comme àdes Arrefts
prononcez gloire de l'Etai?
le Roy d'Espagne meurt fans
enfants , il déclare Heritierde
fes Royaumes un Fils de France?
tes Espagnols empreffez le demandent à Louis le Grand , &
Louis le Grand , comment le leur
envoit-il , avec une portion de
cettefageffe dont il fait des leçons
38 MERCURE
à toute l'Europe , aveclesconfeils
de cette prudence , qui rend l'obéiffance affectionnéepar la douceur du commandement, avec cette
grandeur d'ame qui le rend fuperieur à tous les Heros , ce n'eft
pas affez avec cette grandeur
d'ame qui le rend Louis le Grand,
Philippe V. enrichi de tous ces
J
nobles prefens du grand Royfon
ayeul , entre en Triomphe dans
toutes les Villes d'Espagne , &
toutes les vertus l'yfuivent ; mais
fes Ennemis , Ennemis de la
juftice , & de la veritable
deur, l'y attaquent.
gran
*Et que font-ils , ils entretien-
CALANT 39
nent des intelligences avec quelquesfactieux , qui affemblent des
nuagesfurfa tefte, ils s'emparent
foit par rufe foit parfureur foit
par irreligion , toujours par
injustice , de quelques Royaumes
éloignez du Siege defon Empire:
mais que n'auront ils pas à craindre , grandPrince , lorsqu'ils verront voftre Majesté s'aprocher de
vos Troupes , pour ranimer leur
valeurpar voftre prefence : autrefois dans une Guerre contre les
Gaulois , il nereftoit auxRomains
d'autre efperance , qu'an Capitole
affiegé, & en Camille banni , &
neanmoins ils repoufferent ces
40 MERCURE
fiers Ennemis , vous voftre
efperance est encore toute entiere ,
dans la poffeffion de vos plus
grand Royaumes , dans le cœur
de vos meilleurs Sujets , dans
l'affection de vos Troupes , dans
la force de voftre bras , dans la
confiance en des Victoires remportées , dans la protection de Louis
le Grand: vous diffiperez à lafin
les Germains & leurs Confederez.
Vous foupirez cependant ,
Peuples foumis , à la puiſſance
de ce jeune Roy , & nous peuteftre auffi avec vous : car enfin
que voyons nous depuis quelques
GALANT 41
années , le glaive du Tout- Puiffant eft entre les mains de fes
Ennemis , la Victoire s'égare , &
il luy eft permis de fe ranger fous
des Drapeauxprefque tous Heretiques , de prendre parti contre
les Armes défenfives même de la
Religion : mais ne nous laiffons
pasicy abattrefous les coups d'une
legere infortune ? en vain nes
Ennemis veulent-ilsfe perſuadër,
queces revers nous arrivent pour
enorgueillir leurs Armes nous
fommes comme convaincus ,
c'eft pour montrer à tous les Rois
à tous les Peuples, la grandeur
de Louis le Grand dans tous fes
Février 1710. D
que
42 MERCURE
points de veuë on ne l'avoit
ven jufques alors ce Monarque
que dans la profperité , &ilne
luy manquoit rien pour paroître
plus grand que les autres : mais
il luy manquoit un changement.
de fortune pour paroître en un
fens plus grandqu'il n'avoit encoreparu : nous l'avions veu Victorieux defes Ennemis , vaincre
fonpropre bonheur mais nous ne
L'avions pas encore affez ven ſe
vaincre foy - même , nous fçavions ce qu'ilfçavoitfaire , mais
nous nefçavions pas ce qu'ilfçavoitfuporter; il avoitparu peutêtre trop beureux, maisfans per-
GALANT 43
dre la moderation ilfaloit qu'il
parut moins heureux : mais fans
perdre laconftance.
Qu'il eft peu de ces ames égales,
faites à l'épreuve de toutes les revolutions de cette grande rouë fur
laquelle tourne toutce qu'on appelle
grands évenemens ; mais lafageffe
active e vigilante de Louis le
Grand voit changer de face à la
Fortune , fans permettre à fon
cœur de changer defituation , comme s'il n'avoit jufques alors mé
nagéles bons fuccés que pourexercer fa prefence d'efprit à foûtenir
les mauvais ; bé que feait - on ?
peut - eftre même qu'il craignoit
Dij
44 MERCURE
pour fon ame la durée defes prof
peritez & qu'il avoit demandé
quelquefois de n'eftre pas toujours.
vainqueur de fes ennemis , pour
s'exercer dans cet Art fi difficile de
vaincre l'adverſité ; ainfi lagrandeurdefoname foûtenant nos efperances , ranime la fermeté de nos
fameuxGuerriers qui commencent
déja à regarder le glorieux avan
tageremportéfur un nombre affez
grand de nos ennemis en Alface ,
la glorienfe retraite de noftre
Armée en Flandres , comme des
prefages prefque infaillibles d'un
nombre prefque infini de Victoires.
GALANT 45
+
Je finis , Meffieurs mais n'al
lez point me reprocher , que
pour faire unplus grand éloge de
Louis le Grand , il falloit le
prendre de plus haut , remonter
jufques auTrône des Clovis , des
Saint Louis , des Charlemagne ,
comparer même ces grands Rois ,
avec les Conftantin &les Theodofe , & chercher jufques dans
leurs Tombeaux , les femences de
la valeur &de lagrandeurd'ame
de Louis le Grand : Il est uray ,
Meffieurs , que fa gloire com
mençoit a fe produire à fe
mais comme il former
en
n'y en apoint excepté S. Louis ,
46 MERCURE
en qui la fortune ait affemblé
tant d'événemens divers , il eftoit
important dans les conjonctures
prefentes , de mettre fes actions a
part, &de ne pas confondre dans
la concurrence de leurs grands
noms , celuy dont la gloire remonte
juſques à eux , avec autant d'éclat qu'elle en eft defcendue : c'eft
donc fans rien diminuer de leur
gloire , que Louis le Grand eft
plus Grand que tous les autres
Heros ; plus grand par rapport
la vaillance, parce qu'il a triomphé
même defon bonheur, dans laprofperité de fes armes plus grand
par rapport à la generofité & à
à
GALANT 47
la grandeur d'ame non -feulement parce qu'il a donné azile à
unRoidépouillé de fes Etats ; nonfeulement parce qu'il a maintenu
un Prince de fa famille fur un
Trôneétranger,mais encore parce
que dans une interruption debonheur,fon cœur s'eft mis au- deffus
des injuftices de la Fortune.
AU ROY..
! Oui , SIRE, *
Vous eftes leplusgrand de tous
les Heros , pour dire encore
48 MERCURE
vous quelque chofe de grand que
nous n'avons pû dire , le nom de
LOUIS LE GRAND renfermant
toutes les qualitez d'unfouverain
Heros , trouvera quelque chofe
de foy dans les noms particuliers
quepourront prendre dans lecours
des temps , pour caracterifer leur
propregrandeur , quelques- uns des
Rois qui fuivront VÔTRE MAJESTE' fur le Trône ; il fe trouvera ce grand nom , mais comme
divifé , dans ceux qui par leur
valeur porteront le nom de Magnanime, dans ceux qui par leur
demence feront reconnus pourPcse des Peuples ; dans ceux qui
par
GALANT 49
par leur zeleferont appellez Deffenfeurs de la Religion ; dans
ceux qui par leur vertu feront
avouez pour Princes Pieux ; &
dans ceux qui dans les temps infortunezferont qualifiez d'İntrepides ; ainfi voftre grand Nom,
allant pompeufement de fiecle en
fiecle , vivra avec éclat tant qu'il
yaura , comme ily en aura toujours , de grandes vertus affifes
fur le Trone ; & tandis que l'Antiquitéfera occupée dans les Hiftoires de fes Conquerans , àplaindre le trifte fort d'Alexandre
de Cefar , tous deux fatalement.
arrachez à la vie , la Pofterité
Février 1710.
E
50 MERCURE
fera retentir lagrandeur de vostre
Ame, dans tous les grands énjenemens de voftre Regne , ne cefferajamais d'admirer unefi belle
vie, dont la Parque filera encore
refpectueufement les jours gloricux, & au de- là de ceux de
David , jufqu'à l'extremité d'une
longue carriere.
"
A MONSEIGNEUR.
MONSEIGNEUR,
Digne Fils du plus grand des
"Heros qui fe reproduit en Vous
vous avezla même valeur , vous
GALANT SI
joignez la même prudence , &
Les Peuples reffentent pour vous
le même amour qu'ils ont pourfa
Sacrée Perfonne.
pronsVous avez , MONS EIGNEUR, la même valeur; quelle
femente pour ainfi dire de triomphes , n'a- t-elle pasjetté dans vos
premieres Campagnes , quel trophée Philifbourg, monument éternel d'une vaine refiftance à vos
forces ; quel trophée , dis-je , n'at- il pas érigé à l'honneur de vôtre
gloire, quelle vive ardeur n'a pas
animée vos courſes conquerantes
du Palatinat ; & quel torrent de
réputation auroit jamais púfuiE ij
52 MERCURE
vrelarapiditéde vosVictoiresfila
fageffe du Roy n'avoit agi comme
de concert avec la Providence ,
pour retirer du peril une vie fi
neceffaire àfes Sujets , &pourne
plus expofer au Champ de Mars
un Heros qui doit à coté defon
Trônefoutenirle poids defa Cou
ronne.
Ala même valeur vous joignez la même prudence ; & où
Monfeigneur , vous auroit- elle
manqué cette prudence ; feroit-ce
dans les Armées où vostre bras
agiffoit autant par voftre efprit
que par voftre cœur , où les Soldatsfuivoient vos ordres avec vos
GALANT 53
exemples , & où vous ne laiffiez
rien prévenir par la Fortune , de
tout ce quipouvoit eftreprévúpar
voftre attention :feroit- ce au Confeil , où quelquesfois les plus éclairez ne verroient peut- eftre que de
loin les chofes les plus importantes
fi vous ne les mettiez vous- même
dans leur point de vue, pour les
leur montrer de plus prés.
Les Peuples ont pour vous ,
Monfeigneur , le même amour
que pour Sa Majesté : ils cherchentfur voftre vifage les preſages de leur bonheur à venir ; ils
croyent appercevoir dans vos yeux
dans vos regards , le fondeD iij
54 MERCURE
ment des efperancespubliques , &
l'air affable & plein de bonté,
fous l'appas duquel vousprévenz ceux qui ont l'honneur de
ous approcher, devient le charme attrayant qui gagne nos cœurs
&forme les douces chaînes qui
nous lient avec paffion à vostre
Augufte Perfonne.
Ainfi , Monfeigneur , Heros
par voftre Augufte Pere , Heros
par vous - même , Heros encore
dans vos Defcendans ; voftregloireferafans fin dans la Pofterité
comme elle eft à prefent fans mefure.
GALANT 55
Dés qu'il ' eut fini il s'éleva
dans l'Affemblée un concert
de es a
fit voir que
l'Orateur est heureux lorfqu'il
a pour objet ces merites éminents , univerfellement reconnus , & aplaudis de tous.
Il fit enfuite , felon la coutume , les Eloges de Mr l'Archevêque de Lyon ; de Mr le
Maréchal de Villeroy Gouverneur de la mêmeVille ; de Mr
le Duc de Villeroy fon fils ;
& ceux de Mr l'Intendant ;
de Mrs les Comtes de Lyon;
de Mrs de la Cour des Monnoyes ; de Mrs les Treforiers.
E
iij
56 MERCURE
9
de France ; de Mrs les Elûs ;
de Mr le Prevôt des Mar
chands ; de Mrs les Echevins ;
& de Mrs les Confuls.
Vousdevezjuger que l'Affemblée eftoit des plus nom- .
breuſes , & que l'Orateur futs
long , ayanteu à parler de tant
d'Auguftes Perfonnes , & de
tant d'Illuftres Magiftrats , &
ce qu'il y eut de furprenant fut
qu'il n'ennuya pasunmoment,
& que dans tout ce qu'il dit
le caractere de toutes les perfonnes dont il parla , fut no
blement , & ingenieuſement
mis dans fon jour.
à l'Hoſtel de Ville de
Lyon , le jour de la Fefte de
Saint Thomas , un Difcours
en prefence de M' l'Archevêque , de M' l'Intendant , de
A iij
6 MERCURD IS
M's les Comtes de Saint Jean,
& de toutes les Compagnies
de la Ville. Ce Difcours a efté
fait cette année par le fils
de Mr Yon , Seigneur de
Jonage qui fut nommé l'année
derniere premier Echevin ,
quoy que revêtu d'une Charge de Secretaire du Roy. Il a
beaucoup de merite , & il eft
fort eftimé. Le Difcours que
fon fils prononça le jour de S.
Thomas , reçut de grands applaudiffemens. Vous en jugerez par ce que je vais vous en
rapporter. Ce qu'il dit du Roy
plutinfiniment , & aprés avoir
GALANT
fini l'Eloge de Sa Majeſté , lors
quel'on croyoitqu'il n'en duft
plus rien dire , il l'apoftropha
comme fi Elle cut efté prefente, & il s'attira des applaudiffemens nouveaux. Voici le
commencement de fon Difcours.
བར
:
Tout eft grand , tout eft auguf
te , Meffieurs , dans le deffein que
j'entreprens rien n'y pourroit
eftre mediocre que la foibleffe du
file ; mais dans l'obligation que je
mefuis impofée de traiter une de
cesglorieufes matieres que d'autres
avant moy ont peut - eftre negligées ,j'ofe meflatter que la NoA iiij
8 MERCURE
bleffe de monfujer donnera du relief à mespenfées , & de l'éclat
à mes paroles ; & ma temerité
trouve fon pretexte dans l'impor
tance du difcours , & dans l'injuftice du filence.
C'est une ancienne &commune erreur , que de relever avecexcés le merite desperfonnes celebres ,
qui ont vécu avant nous , pour
diminuer lagloire de ceux dans les
temps defquels nous vivons ; cette
erreur eft , tantoft un aveuglement groffier dans l'efprit des peuples , qui croyent que la fuite des
temps a le même fort que le déclin
de leur age ; & que la nature
-GALANT 9
ffant comme l'homme , elle vieilliffant
degenere defiecle enfiecle dans fes
productions , àproportion de ce que
d'année en année il s'affoiblit dans
fes travaux ? c'est ce que le
plus fameux de tous les Poëtes a
voulu nous exprimer par ces deux
Vers traduits en noftre langue ?
O fi Dieu me rendoit mes
premieres années ,
dit- il en cet endroit en un
autre:
Les illuftres Heros nâquirent
autrefois :
Tantoft c'est une illisfion defubtiles mais vaines idées , telles
que celles de ces Philofophes ,
.
10 MERCURE
qui s'imaginoient , que les pre
miershommes formez d'uneplus
riche matiere nez fous
deplusfavorables étoiles , avoient
bien pû laiffer d'heureux fuccef
feurs deleurs noms , mais nonpas
de purs heritiers de leur gloiree ?
comme fi pour trouver ce qu'il y
a de plus grand dans le monde , il
falloit remonterjufqu'au regnefabuleux de Saturne : tantofi c'est
une enviefecrette entre des perfon
nes que la fortune ou la naiffance
a mis au niveau les uns des autres,
dans le même rang & àportée des
mêmes honneurs ; chacun pour dé
crierfon concurrent transportepour
GALANT I
ainfi dire fon eftime au fiecle de
ceux qui nepeuvent plus concourir avec perfonne : pour épargner
fon encens au merite des vivans ,
on le prodigue à la memoire des
morts , pour tout difputer à
ceux qui ne nous peuvent plus
rien difputer ? Reproche que le
Sage a peut - eſtre prétendu nous
faire par cesparoles ? J'ay donné.
aux morts les louanges que j'ay
refufées auxvivans.
Il est donc vray , Meffieurs
que foit aveuglément , foit illu
fion , foit envie , la gloire de nos
Contemporains ne va jamais
felon nous de pair avec celle de
12 MERCURE
nos predeceffeurs , par une injuftice de tous les temps" , le merite
qui refpire & qui vit encore , eft
toujours contredit , il faut que,
les fecles éloignez nous le rappelle
pour qu'il foit confacré, je veux
dire veritablement reconnu ; ainfi
parla au grand Conquerant de
, dans le temps que les
Heros paffoient pour des Dieux ,
le Philofophe Califthene : Pour
paroiftre Dieu , luy dit-il , au
jugement des hommes, il faut
avoir long- temps difparu à
leurs yeux ; les honneurs divins fuivent quelques fois les
morts , mais ils n'accompa-
GALANT 13
gnent jamais les vivants.
Je viens tâcher , Meffieurs
de rendre à tous les temps &
tous les merites , la justice qui
leur eſt deuë ; je viens louer les
grands hommes , qui excellent à
prefent , auffs bien que ceux qui
ont excellé autrefois , &proportionnant les louanges au merite ,
les Modernes y auront peut- eſtre
plus de part que les Anciens.
Icy , Meffieurs , mon deffein
cmmne à fe développer
vous vousappercevezfans doute ,
queje voudrois vous donner une
idée des Herospar des comparatfens des uns aux autres ; mais
US
14 MERCURE
que ce deffein feroit vaſte , &
qu'il feroit étendu ; il m'engageroit à rappeller dans vos efprits
tous les Heros qui ont brillé , &
qui brillent encore dans tous les
Arts & dans toutes les Sciences :
ce ne feroit que charger ma
memoirepourlaffer vos patiences :
le refpectqueje dois à voftre attentionprefcrit à monfujet des bornes
plus étroittes il m
; m'oblige nonfeulement à me fixer au plus
glorieux de tous les Arts , je
veux dire à l'Art Militaire ;
mais encore pour éviter l'ennuy
d'un trop long récit , à ne choifir
parmi les Herosde la Guerre les
SGALANT
15
plus renommez que quelques- uns
de ceux à qui leurs fameux exploits ontmeritéle nom de Grand:
mais dans les loüanges que je
leur donneray ,
j'efpere que de
vous-même vous trouverez dequoy remplir àproportion l'Eloge,
de tous les autres , &c'eſt là le
Plan de ce Difcours dans lequel ,
aprés avois tracé l'idée des Grands
Heros de l'antiquité, je tâcheray
de vous donnercelle du plus grand
de tous dans lefiecle prefent.
Voicyce qu'il dit dans fa
premiere partie.
Une des plus fortes paffions
& qui a le plus occupé le cœur
16 MERCURE .
des Grands de l'antiquité, &même de tous les temps ; c'eſtoir le
defir de fe diftinguerpar les Armes , & deſefaire par leur Epée
plus grand que un nom encore
la
celuy qu'ils avoient déja par leur
naiffance ; ils laiffoient pour la
plupart aux Orateurs l'Art du
Difcours , aux Philofophes l'étudedes Sciences , aux Politiques
Ladminiftration des Etats
gloire de tous ces Heros de Litterature de Miniftere , n'excitoit guerre leur noble émulation
quelquecharme même qu'elle eut
pour quelques uns ce n'étoit
qu'un amusement de Paix & de
·
יך
GARANT 17
repos ;toutt cédoit au premierpref=
fentiment de Guerre qui les raviffoit , ilsfe fentoient comme d'euxmême transportez dans le champ
glorieux des Combats , & ils
voloient pour l'arrofer quelques
fois de leur fang, & y cueillir
furun tas de morts
من
de bleſſez
les Lauriers & les bonneurs du
triomphe.
Cette ardeur Militaire qui
dans le cœur des Potentats , à
prefque toujours efté une envie
prodigieufe de dominere de
s'étendre , une ambition démesurée.
de s'élever au deffus de la condition humaine , a toujours efté une
Février 1710.
B
18 MERCURE
fuitefatale de l'orgueil du premier
des mortels ; mais elle ne laiffe
pas auffi deftre dans les deffens
de la fageffe éternelle , qui doit
tout raporter à fa gloire : elle ne
laiffe pas , dis-je , d'eftre comme
un caractere de divinité , imprimée dans l'ame des Souverains ;
caractere dont les traitsfe repandansfurla gloire de leurs actions ,
comme fur la majesté de leurs
perfonnes , nous porte à les respecter tous , non-feulement comme les
images éclatantes de l'Etre fuprémequilesfoutient fur le Trône:
mais encore comme les fujets les
plus nobles les plus dignes
GALANT 19
une
deftreparreprefentation en qualité
de demi- Dieux de la terre
partie de ce qu'eftpar luy même le
grand Souverain de l'Univers
en qualité de Dieu des Armées.
La gloire desgrands Conquerans , ayant donc toujours en deux
faces , qu'on pouvoit envisager,
l'une humaine , l'autre divine ;
l'une qui a des taches , l'autre qui
les couvre , mais qui ne les leve
les pas ; ayant à commencer par
Heros de l'antiquité , ne nous ar
reftons point icy à blâmer ou à
louer trop leurs Conqueftes ; tachons feulement de relever leurs
perfonnes , &fans examiner d'a
Bij
20 MERCURE
A
bord, fi l'ardeur qui les animois
eftoit injufte ou legitime ; parmy
quelques- uns de ceux qui ont paſſé
pour les plus grands donnons la
preference àdeuxfeulement ; mais
choififfons-les bien , afin qu'en étalant leur gloire on ne puiffe rien
penfer de grand de celle des autres
qui nefe trouve dans la leur , &
qui ne juftifie noftre deffein de ne
parler que
"
d'eux.
Il parla enfuite d'Alexandre
& deCefar, & dit tout ce que
l'on en pouvoit dire. Il fit voir
qu'ils avoient eu toutes les
grandes qualitez qui ont fait
le merite des plus grands He-
GALANT! 21
{
ros des ficcles paffez , & aprés
enavoir fait un portrait , &de
la reffemblance de leurs acstions , il dit : It me femble
quevous balancez & que vous
attendez que je decide ? Hé!
qu'importe Meffieurs , lequel des
deux Heros d'Alexandre ou de
Cefarfut le plus grand dans les
fiecles paffez , fi le fiecle prefent
nous en offre un plus grand que
tous les deux enfemble , &
par confequent le plus grand de
tous le Heros ; quel eft il donc ce
Heros; vous l'allez bien- toft voir
paroiftre dans toutefa gloire.
Il entra enfuite dans fa feمن
22 MERCURE
conde partie , & dits
combats par
Au-deffus de cette haute va
leur qui parcourt le monde pour
combatre pour vaincre ; je place
celle d'un Heros qui commence fes
la justice , & qui
terminefes victoires par la moderation ; qui protegefes Alliez par
La puiffance , & qui fe foutient
luy-méme parfa grandeur : Elevez icy vos efprits , Meffieurs ,
j'ay de grands évenemens à vous
reprefenter, je n'ayplus à vous
cacher de grands défauts en vous
montrant de grands courages.
Je ne parleray plus icy de ces
Heros impetueux , quiportantpar
GALANT 23
tout les armes de l'injustice & les
faifant marcher fous les Enfeignes de la Valeur & de la Generofité, raviffoient noſtre admiration avec autant de rapidité qu'ils
ravageoient les Campagnes ; c'e
toient des foudres terribles qui ne
fondoientfurla terre avec vûteffe,
que par l'impuiffance de s'arrefter ;
c'eftoient des tourbillons qui ramaffant tout ce qu'ils trouvoient à
leurrencontre ,fe groffiffoient euxmêmes , &ferendoient plus violens? Je parle d'un Heros digne de
toute loüange, & je commence d'a
bord par vous dire qu'armé de
juftes prétentions contre d'injuftes
24 MERCURE
refus , il entreprend la guerre en
Roy & nonpas en Ufurpatenr ; il
affemble fes Magiftrats avant que
de lever fes Troupes , ne met
LesArmées en Campagne , qu'aprés les avoir mifes fous la protection des Loix.
a
Aces mots , Meffieurs , vous
reconnoiffez Louis le Grand ;
ehpourriez- vous penfer à quelqu'autres cePrincegenereuxjouiffoit àpeine de la Paix par un heureux mariageavecl'Infante d'Ef
pagne , que porté à la guerre par
l'inftinct pour ainfi dire defa valeur , il regardoit avec inquietude
fes armes dans le repos ; mais il
aimoit
GALANT 25
aimoit mieux les laiffer languir,
que de lesfairefervir à l'injuftice.
à l'ambition ; c'eſt ainſi qu'il
retenoit dans une amere tranquillité , les premiers feux de fa jeuneffe ; lorfque le Roy d'Espagne
avec une ame moins guerriere
mais plus intereffée luy difpute les
droits inconteftables de la Reine
fon Epoufe: quefera- t- il ?Se prefentera-t- il d'abord avec l'épée ?
Non, il commandera àfa valeur
d'attendre ladecifion des Loix, &
les Loix confultées ordonnent àfa
valeur attentive à leurs ordres ,
defoutenirfa caufepar les armes?
Le ciel n'ayantpermis cette injufFévrier 1710.
C
26 MERCURE
tice dela part de l'Espagne , qu'a
fin que les Peuples de divers
Royaumes appriffent combien ce
fage & puillant Heros fçavoit
joindre à la force de reprimer fes
ennemis , le pouvoir de retenirfon
indignation : le voila donc qui remet à la Fuftice la direction defon
courage : allez , Prince , allez où
cette Reine des Loix portera voftre
Bouclier ; allez lancer vos foudres fur une Nationfuperbe , tant
qu'elle ne prendra confeil que de
l'obftination defes armes : ce ne
fera de fa part que Troupes affoiblies ,
que Soldats tombez aux
pieds des voftres ; mais dés qu'elle
GALANT 27
ferangera fous les loix de l'équi
té pourfe reconnoiftre , ce nefera
de vostre part qu'excés de generofité ? en vain la Fortune vous
ouvrira-t-elle le paffage à la conqueſte de l'Univers , voftre courage nefera pas las de vaincre ;
mais voftre grandeur d'ame vous
fera croire que vous avez affez
vaincus vous arrefterez vos cour
fes rapides au milieu des combats ,
par untrop grand respect pour
les Loix, vous rendrez unepartie
de vos conqueftes de peur qu'elles
n'ayent à vous reprocher que vous
vouliez trop étendre vos prétentions ? ô Prince , ô Heros valeuC ij
28 MERCURE
reux moderé tout enſemble 3
qui aime mieux ceder les droits de
la guerre que d'eftre foupçonné
d'avoirfailli contre les regles de
la Fuftice ? Loy , Meffieurs je
cherche Alexandre & Cefar , je
les trouve , peut - eftre , Grand
Roy, dans les Combats à vos côtez, poury voir des Villes mais
des plus fortes prifes dans deux
jours , des Provinces entieres reduites en deuxfemaines ; mais je
les perds &je les vois fe retirer
faifis d'étonnement à la vuede cet
excés pour ainfi dire de moderation , qui limite fi promptement la
portée de voftre valeur ? qu'il ne
GALANT 29
paroiffe donc ici , mais pour cette
fois feulement , que lefeulRoyde
Lacedemone , qui ne vouloit d'autre avantagefurfes Sujets , fi ce
n'est qu'il luyfut permis d'efre
plus vaillant , & de faire moins
qu'eux de faute contre les Loix.
Quej'aimerais à vous repreſenter ce grand Monarque , dans
d'autres Campagnes à la tefte d'une nombreuse Armée , preffant la
Fortunefans luy donner du relashe , paffant en Maiftre du monde par les Etats de plufieurs Souverains fans prefque s'enquerir fi
l'on veutfouffrirfon paffage ,
portantpar tout le flambeau de la
C
iij
30 MERCURE
guerre fans laiffer languir le feu
de faprofperité je vous compterois plus de trente Villes munies
&fortifiées , renduës à l'aspect
du Vainqueur, & prefque toutes
fans mursabatus & fans combats
donnez , effrayées feulement de
• fon grand nom, & tachant avec
les Peuples voisins , d'apaifer fa
・jufte colére en foumetant leurs
teftes à fa puiffance , & leur
cœur àfa bonté; je vous montrerois des Villes forcées malgré leurs
vigoureuses refiftances ? hé commentn'auroient-ellespas enfin cedé
à des Armes fi feures de leurs
coups , je rappellerois encore icy
GALANT zi
1
les élements forcez , les faifons
bravées , &la nature foumife en
quelque forte à fon épée , mais
Alexandre , & Céfar , ſe pouroient peut-être reconnoistre à fes
traits ; je ne veux plus loüer
en Louis le Grand , rien de ce qui
peut aprocher de luy les autres
Heros ? difons donc quelque chofe
de plus.
Unde ces efprits qui tiennent
leur fiecle en de perpetuelles agitations , & qui excitent les orages
dans la ferenité des plus beaux
jours un de ces efprits capables
de remuer de grandes machines
d'ébranler les Etats ; un de
C iiij
32 MERCURE
ces efprits qui ont toujours att
milieu de la Paix le cœur armé
la volonté ambitieuſe un
Prince heretique , car enfin fi
nous ne voulons pas le nommer ,
il faut du moins le défigner ; un
Prince , dis-je , inquiet de vivre
comme un autre Efau par fon
épée ,fe mer en tefte de vivre
parle Sceptre: il trame des deffeins
prodigieux que nul n'auroit pu
croire , parce que nul autre n'auroitpu les imaginer , il les communique aux Puiffances confederées
il les conduit fifourdement à
fesfins qu'à la tefte d'une Armée
Navale il entreprefque invifible
GALANT 33
en Angleterre ; d'abord il fe fait
jour dans les vaftes appartemens
du Roy , prendfierementſaplace
vis- à- vis de fon Trône , &partage avecluy lefuprême honneur;
dans peu l'Anglois , grand amateur des nouveautez , retire fon
obéiffance du Monarque , &la
transporte à l'Ufurpateur , &
tout d'un coup l'injuſte & aveugle Fortune , féparant les bons
fuccésde la bonnecaufe , le Prince Proteftantfe faifit de la Couronne du Prince Catholique.
› Grandeur de la gloire magranime de mon Roy , où cftes- vous
àprefent ? la voila , Meffieurs
34 MERCURE
quifort defon Palais , pour tendrela main àce Potentat defcendu
de fon Trône ; c'eſt une Majeſté
puiſſante , qui va au-devantd'une
Majefté opprimée; c'est un Prince
qui entouré de fa Cour, & revêtu defapropre Grandeur , s'arvance pour relever un Prince infortuné, poufféfur nos bordsfeulement par quelques flots officieux
de la mer; il neperdpointdetemps
pourfoulagerfa douleur , il effuye
fes larmes par des marquesfenfi
bles de l'affection de fon cœur ;
il
le reveft de tous les ornemens de la
Royauté; il luy donne un Trône
dans un defes Palais , &arraآن
GALANT 35
chepour ainfi dire d'entre les mains
du Deftinfa Royale Famille : refolu jufques à la fin de fes jours
de leurfaire part defes trefors &
defa fortune.
Je voudrois bien vous faire
voir icy tous deux grands defolateurs des Rois & des Royaumes ; vous Alexandre , qui venez
de nous faire compter pour beaucoup les honneurs que vous avez
rendus à une Reine captive fous
lejougde vos armes tandis qu'elles
eftoient injustement tournées contre le Roy fon Epoux ; & vous
Céfar , dont un des plus grands
traitsfut; de rendrele Trône d'un
36 MERCURE
frere àunefœur, pour la rendre
elle-même par cette espece de
generofité l'objet de vos amours.
&de vos profufions ; mais li je
ne puis vous voir icy en perfonne
j'y vois du moins vos ombres gémiffantes de douleur d'apprendre
qu'il y afur la terre dans l'ame
d'un plus grand Conquerant que
vous , une plus grande generofité
que la voftre.
Reduirons- nous à cette action
genereufe la Magnanimité de
noftre Heros ? non , Meffieurs
quifçait réfugier un Roy en peut
bien foutenir un autre , l'entreprife eft difficile mais elle eft
GALANT 37
jafte l'execution eft prompte mais
elle eft de Louis le Grand, un Roy
mourant nommefon Succeffeur il
faut le luy donner.
1
url
Les paroles d'un Souverain
au lit de la mortfont des Sentences depolitique, & les Peuples y
font attentifs , comme àdes Arrefts
prononcez gloire de l'Etai?
le Roy d'Espagne meurt fans
enfants , il déclare Heritierde
fes Royaumes un Fils de France?
tes Espagnols empreffez le demandent à Louis le Grand , &
Louis le Grand , comment le leur
envoit-il , avec une portion de
cettefageffe dont il fait des leçons
38 MERCURE
à toute l'Europe , aveclesconfeils
de cette prudence , qui rend l'obéiffance affectionnéepar la douceur du commandement, avec cette
grandeur d'ame qui le rend fuperieur à tous les Heros , ce n'eft
pas affez avec cette grandeur
d'ame qui le rend Louis le Grand,
Philippe V. enrichi de tous ces
J
nobles prefens du grand Royfon
ayeul , entre en Triomphe dans
toutes les Villes d'Espagne , &
toutes les vertus l'yfuivent ; mais
fes Ennemis , Ennemis de la
juftice , & de la veritable
deur, l'y attaquent.
gran
*Et que font-ils , ils entretien-
CALANT 39
nent des intelligences avec quelquesfactieux , qui affemblent des
nuagesfurfa tefte, ils s'emparent
foit par rufe foit parfureur foit
par irreligion , toujours par
injustice , de quelques Royaumes
éloignez du Siege defon Empire:
mais que n'auront ils pas à craindre , grandPrince , lorsqu'ils verront voftre Majesté s'aprocher de
vos Troupes , pour ranimer leur
valeurpar voftre prefence : autrefois dans une Guerre contre les
Gaulois , il nereftoit auxRomains
d'autre efperance , qu'an Capitole
affiegé, & en Camille banni , &
neanmoins ils repoufferent ces
40 MERCURE
fiers Ennemis , vous voftre
efperance est encore toute entiere ,
dans la poffeffion de vos plus
grand Royaumes , dans le cœur
de vos meilleurs Sujets , dans
l'affection de vos Troupes , dans
la force de voftre bras , dans la
confiance en des Victoires remportées , dans la protection de Louis
le Grand: vous diffiperez à lafin
les Germains & leurs Confederez.
Vous foupirez cependant ,
Peuples foumis , à la puiſſance
de ce jeune Roy , & nous peuteftre auffi avec vous : car enfin
que voyons nous depuis quelques
GALANT 41
années , le glaive du Tout- Puiffant eft entre les mains de fes
Ennemis , la Victoire s'égare , &
il luy eft permis de fe ranger fous
des Drapeauxprefque tous Heretiques , de prendre parti contre
les Armes défenfives même de la
Religion : mais ne nous laiffons
pasicy abattrefous les coups d'une
legere infortune ? en vain nes
Ennemis veulent-ilsfe perſuadër,
queces revers nous arrivent pour
enorgueillir leurs Armes nous
fommes comme convaincus ,
c'eft pour montrer à tous les Rois
à tous les Peuples, la grandeur
de Louis le Grand dans tous fes
Février 1710. D
que
42 MERCURE
points de veuë on ne l'avoit
ven jufques alors ce Monarque
que dans la profperité , &ilne
luy manquoit rien pour paroître
plus grand que les autres : mais
il luy manquoit un changement.
de fortune pour paroître en un
fens plus grandqu'il n'avoit encoreparu : nous l'avions veu Victorieux defes Ennemis , vaincre
fonpropre bonheur mais nous ne
L'avions pas encore affez ven ſe
vaincre foy - même , nous fçavions ce qu'ilfçavoitfaire , mais
nous nefçavions pas ce qu'ilfçavoitfuporter; il avoitparu peutêtre trop beureux, maisfans per-
GALANT 43
dre la moderation ilfaloit qu'il
parut moins heureux : mais fans
perdre laconftance.
Qu'il eft peu de ces ames égales,
faites à l'épreuve de toutes les revolutions de cette grande rouë fur
laquelle tourne toutce qu'on appelle
grands évenemens ; mais lafageffe
active e vigilante de Louis le
Grand voit changer de face à la
Fortune , fans permettre à fon
cœur de changer defituation , comme s'il n'avoit jufques alors mé
nagéles bons fuccés que pourexercer fa prefence d'efprit à foûtenir
les mauvais ; bé que feait - on ?
peut - eftre même qu'il craignoit
Dij
44 MERCURE
pour fon ame la durée defes prof
peritez & qu'il avoit demandé
quelquefois de n'eftre pas toujours.
vainqueur de fes ennemis , pour
s'exercer dans cet Art fi difficile de
vaincre l'adverſité ; ainfi lagrandeurdefoname foûtenant nos efperances , ranime la fermeté de nos
fameuxGuerriers qui commencent
déja à regarder le glorieux avan
tageremportéfur un nombre affez
grand de nos ennemis en Alface ,
la glorienfe retraite de noftre
Armée en Flandres , comme des
prefages prefque infaillibles d'un
nombre prefque infini de Victoires.
GALANT 45
+
Je finis , Meffieurs mais n'al
lez point me reprocher , que
pour faire unplus grand éloge de
Louis le Grand , il falloit le
prendre de plus haut , remonter
jufques auTrône des Clovis , des
Saint Louis , des Charlemagne ,
comparer même ces grands Rois ,
avec les Conftantin &les Theodofe , & chercher jufques dans
leurs Tombeaux , les femences de
la valeur &de lagrandeurd'ame
de Louis le Grand : Il est uray ,
Meffieurs , que fa gloire com
mençoit a fe produire à fe
mais comme il former
en
n'y en apoint excepté S. Louis ,
46 MERCURE
en qui la fortune ait affemblé
tant d'événemens divers , il eftoit
important dans les conjonctures
prefentes , de mettre fes actions a
part, &de ne pas confondre dans
la concurrence de leurs grands
noms , celuy dont la gloire remonte
juſques à eux , avec autant d'éclat qu'elle en eft defcendue : c'eft
donc fans rien diminuer de leur
gloire , que Louis le Grand eft
plus Grand que tous les autres
Heros ; plus grand par rapport
la vaillance, parce qu'il a triomphé
même defon bonheur, dans laprofperité de fes armes plus grand
par rapport à la generofité & à
à
GALANT 47
la grandeur d'ame non -feulement parce qu'il a donné azile à
unRoidépouillé de fes Etats ; nonfeulement parce qu'il a maintenu
un Prince de fa famille fur un
Trôneétranger,mais encore parce
que dans une interruption debonheur,fon cœur s'eft mis au- deffus
des injuftices de la Fortune.
AU ROY..
! Oui , SIRE, *
Vous eftes leplusgrand de tous
les Heros , pour dire encore
48 MERCURE
vous quelque chofe de grand que
nous n'avons pû dire , le nom de
LOUIS LE GRAND renfermant
toutes les qualitez d'unfouverain
Heros , trouvera quelque chofe
de foy dans les noms particuliers
quepourront prendre dans lecours
des temps , pour caracterifer leur
propregrandeur , quelques- uns des
Rois qui fuivront VÔTRE MAJESTE' fur le Trône ; il fe trouvera ce grand nom , mais comme
divifé , dans ceux qui par leur
valeur porteront le nom de Magnanime, dans ceux qui par leur
demence feront reconnus pourPcse des Peuples ; dans ceux qui
par
GALANT 49
par leur zeleferont appellez Deffenfeurs de la Religion ; dans
ceux qui par leur vertu feront
avouez pour Princes Pieux ; &
dans ceux qui dans les temps infortunezferont qualifiez d'İntrepides ; ainfi voftre grand Nom,
allant pompeufement de fiecle en
fiecle , vivra avec éclat tant qu'il
yaura , comme ily en aura toujours , de grandes vertus affifes
fur le Trone ; & tandis que l'Antiquitéfera occupée dans les Hiftoires de fes Conquerans , àplaindre le trifte fort d'Alexandre
de Cefar , tous deux fatalement.
arrachez à la vie , la Pofterité
Février 1710.
E
50 MERCURE
fera retentir lagrandeur de vostre
Ame, dans tous les grands énjenemens de voftre Regne , ne cefferajamais d'admirer unefi belle
vie, dont la Parque filera encore
refpectueufement les jours gloricux, & au de- là de ceux de
David , jufqu'à l'extremité d'une
longue carriere.
"
A MONSEIGNEUR.
MONSEIGNEUR,
Digne Fils du plus grand des
"Heros qui fe reproduit en Vous
vous avezla même valeur , vous
GALANT SI
joignez la même prudence , &
Les Peuples reffentent pour vous
le même amour qu'ils ont pourfa
Sacrée Perfonne.
pronsVous avez , MONS EIGNEUR, la même valeur; quelle
femente pour ainfi dire de triomphes , n'a- t-elle pasjetté dans vos
premieres Campagnes , quel trophée Philifbourg, monument éternel d'une vaine refiftance à vos
forces ; quel trophée , dis-je , n'at- il pas érigé à l'honneur de vôtre
gloire, quelle vive ardeur n'a pas
animée vos courſes conquerantes
du Palatinat ; & quel torrent de
réputation auroit jamais púfuiE ij
52 MERCURE
vrelarapiditéde vosVictoiresfila
fageffe du Roy n'avoit agi comme
de concert avec la Providence ,
pour retirer du peril une vie fi
neceffaire àfes Sujets , &pourne
plus expofer au Champ de Mars
un Heros qui doit à coté defon
Trônefoutenirle poids defa Cou
ronne.
Ala même valeur vous joignez la même prudence ; & où
Monfeigneur , vous auroit- elle
manqué cette prudence ; feroit-ce
dans les Armées où vostre bras
agiffoit autant par voftre efprit
que par voftre cœur , où les Soldatsfuivoient vos ordres avec vos
GALANT 53
exemples , & où vous ne laiffiez
rien prévenir par la Fortune , de
tout ce quipouvoit eftreprévúpar
voftre attention :feroit- ce au Confeil , où quelquesfois les plus éclairez ne verroient peut- eftre que de
loin les chofes les plus importantes
fi vous ne les mettiez vous- même
dans leur point de vue, pour les
leur montrer de plus prés.
Les Peuples ont pour vous ,
Monfeigneur , le même amour
que pour Sa Majesté : ils cherchentfur voftre vifage les preſages de leur bonheur à venir ; ils
croyent appercevoir dans vos yeux
dans vos regards , le fondeD iij
54 MERCURE
ment des efperancespubliques , &
l'air affable & plein de bonté,
fous l'appas duquel vousprévenz ceux qui ont l'honneur de
ous approcher, devient le charme attrayant qui gagne nos cœurs
&forme les douces chaînes qui
nous lient avec paffion à vostre
Augufte Perfonne.
Ainfi , Monfeigneur , Heros
par voftre Augufte Pere , Heros
par vous - même , Heros encore
dans vos Defcendans ; voftregloireferafans fin dans la Pofterité
comme elle eft à prefent fans mefure.
GALANT 55
Dés qu'il ' eut fini il s'éleva
dans l'Affemblée un concert
de es a
fit voir que
l'Orateur est heureux lorfqu'il
a pour objet ces merites éminents , univerfellement reconnus , & aplaudis de tous.
Il fit enfuite , felon la coutume , les Eloges de Mr l'Archevêque de Lyon ; de Mr le
Maréchal de Villeroy Gouverneur de la mêmeVille ; de Mr
le Duc de Villeroy fon fils ;
& ceux de Mr l'Intendant ;
de Mrs les Comtes de Lyon;
de Mrs de la Cour des Monnoyes ; de Mrs les Treforiers.
E
iij
56 MERCURE
9
de France ; de Mrs les Elûs ;
de Mr le Prevôt des Mar
chands ; de Mrs les Echevins ;
& de Mrs les Confuls.
Vousdevezjuger que l'Affemblée eftoit des plus nom- .
breuſes , & que l'Orateur futs
long , ayanteu à parler de tant
d'Auguftes Perfonnes , & de
tant d'Illuftres Magiftrats , &
ce qu'il y eut de furprenant fut
qu'il n'ennuya pasunmoment,
& que dans tout ce qu'il dit
le caractere de toutes les perfonnes dont il parla , fut no
blement , & ingenieuſement
mis dans fon jour.
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Résumé : Article dont on ne peut donner dans cette Table une idée qui puisse répondre à son sujet, & qui renferme un Eloge du Roy, & de Monseigneur le Dauphin d'une maniere toute singuliere, [titre d'après la table]
Le texte relate la prononciation annuelle d'un discours à l'Hôtel de Ville de Lyon, le jour de la fête de Saint Thomas, en présence de l'archevêque, de l'intendant, des comtes de Saint Jean et des compagnies de la ville. Cette année, le discours a été prononcé par le fils de Monsieur Yon, seigneur de Jonage, récemment nommé premier échevin malgré ses fonctions de secrétaire du roi. Le discours a reçu de grands applaudissements. L'orateur commence par une réflexion sur la grandeur de la tâche entreprise, reconnaissant la faiblesse humaine mais espérant que la noblesse du sujet donnera du relief aux paroles. Il critique l'erreur commune de surévaluer les mérites des personnes célèbres du passé pour diminuer la gloire des contemporains. Il cite des poètes et des philosophes pour illustrer cette erreur et affirme que la gloire des contemporains est souvent méconnue. L'orateur se propose de rendre justice à tous les mérites, anciens et modernes, en louant les grands hommes actuels autant que ceux du passé. Il se concentre sur l'art militaire et choisit de parler des héros les plus renommés, en particulier Alexandre et César, dont il vante les grandes qualités. Cependant, il introduit la figure d'un héros contemporain, Louis le Grand, qui incarne la justice, la modération et la grandeur d'âme. Louis est décrit comme un roi qui entreprend la guerre avec justice, respecte les lois et fait preuve de générosité même dans la victoire. Le texte célèbre la grandeur et la magnanimité de Louis le Grand, roi de France. Il le compare à des figures historiques comme Alexandre le Grand et Jules César, mais souligne que Louis dépasse ces héros par sa modération et sa générosité. Le texte décrit plusieurs exploits de Louis, notamment son refus de tirer avantage de ses sujets et sa capacité à inspirer la peur et le respect sans combat. Il mentionne également des campagnes militaires où Louis a conquis de nombreuses villes par sa seule réputation. Le texte évoque ensuite une menace potentielle d'un prince hérétique qui trame des plans ambitieux pour s'emparer du trône d'Angleterre. Louis est présenté comme un défenseur des rois opprimés, prêt à soutenir un monarque déchu et à lui offrir refuge et soutien. Le texte souligne également la sagesse politique de Louis, qui a su gérer les revers de fortune avec constance et sagesse. Il mentionne la mort du roi d'Espagne sans héritier et la nomination de Philippe V, fils de Louis, comme successeur. Malgré les attaques des ennemis de la justice, Louis reste un modèle de grandeur et de prudence. Enfin, le texte conclut en exaltant la grandeur de Louis, comparée à celle des plus grands rois de l'histoire. Il prédit que le nom de Louis le Grand sera synonyme de toutes les vertus royales et que sa mémoire sera célébrée pour sa vie exemplaire et ses actions héroïques. Le discours s'adresse également à un haut dignitaire, louant ses qualités et ses actions. L'orateur souligne la prudence et l'esprit stratégique du destinataire sur le champ de bataille, où ses soldats suivent ses ordres et ses exemples, et où il anticipe les événements grâce à son attention. Il mentionne également son rôle au conseil, où il éclaire les décisions importantes. Les peuples éprouvent pour lui un amour similaire à celui qu'ils portent à leur souverain, voyant en lui les signes de leur bonheur futur et étant charmés par sa bonté et son affabilité. Le discours célèbre également la lignée héroïque du destinataire, soulignant qu'il est un héros par son père, par lui-même et par ses descendants, et que sa gloire perdurera dans la postérité.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1924
p. 57-61
Autre Article qui renferme aussi un Eloge de Sa Majesté, [titre d'après la table]
Début :
Je ne dois pas diferer plus long-temps à vous envoyer [...]
Mots clefs :
Éloge du roi, Amour
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Autre Article qui renferme aussi un Eloge de Sa Majesté, [titre d'après la table]
Je ne dois pas diferer plus
long- temps à vous envoyer
l'Eloge du Roy que vous allez
lire , puifqu'il eft tiré de la fin
d'une Lettre Circulaire du
Pere Epiphane , Recolet , qui
asparu au commencement de
cette année. Aprés avoir parlé
de plufieurs chofes qui regardent,fon Ordre, il dit :
Demandez à Dieu les graces
quifont neceffaires augrand Monarquedes François , à ce Roy qui
fera àjamais le modelle des Rois
juftes clemens , qui dans tous
les tempsd'un regne finon toûjours
heureux du moins toûjours
a
te
$8 MERCURE
tous les
glorieuxpar raport à l'usage qu'il
afait de la profperité & de l'adverfité; qui a toujours marqué un
amour conftant &fincere pourfon
Peuple ; amour auquel il afouvent facrifié fagloire
avantages qu'ilpouvoit tirer dé
fes exploits militaires ; amour enfin dont il vient de donner des
marques refcentes àfon cher Peuple dans ces temps de fterilité, par
les foins & les moyens que fa
tendreffe paternelle luy fuggere
pour le ſecourir à propos & diligemmentdansfes befoins . Elevez
donc vos mains vers le Ciel pour
ce Prince le plus grand de tous les
GALANT 59
Heros , le meilleur de tous
les peres, & dont le glorieux nom
de Louis lele Grand ,, renferme
toutes les qualitez d'un Souverain accomply ; fouvenez vous
dans vos prieres d'un Monarque
qui vivrajuſqu'à la fin desficcles
dans ceux quipar leur valeur porteront le nom de Magnanimes ;
dans ceux qui par leur clemençe
Seront appellez Peres des Peuples; dans ceux qui par leur zele
feront appellez Defenfeurs de la
Religion ; dans ceux qui par leur
vertus feront appellez Princes
Pieux enfin dans ceux qui
par les infidelitez de la fortune
•
60 MERCURE
feront appellez Intrepides ', en
les foutenant avec conftance ,
implorezfans ceffe le fecours de
Dieu pour ce bon Princep
Jamais les François n'ont
temoigné plus d'amour pour
leurs Souverains qu'il en ont
montré, & qu'ils en font voir
encore tous les jours pour
Louis le Grand. Rien ne leur
échape de tout ce qui l'a rendu
digne de ce furnom , & ils ont
toujours fait des Eloges de ce
Prince dans toutes leurs actions
publiques convenablés au
temps & à la grandeur & aux
vertus d'un Monarque qui a
GALANT 61
toujours triomphé de toutes
manieres , & remporté autant
de Victoires fur luy même
que fur les Ennemis
long- temps à vous envoyer
l'Eloge du Roy que vous allez
lire , puifqu'il eft tiré de la fin
d'une Lettre Circulaire du
Pere Epiphane , Recolet , qui
asparu au commencement de
cette année. Aprés avoir parlé
de plufieurs chofes qui regardent,fon Ordre, il dit :
Demandez à Dieu les graces
quifont neceffaires augrand Monarquedes François , à ce Roy qui
fera àjamais le modelle des Rois
juftes clemens , qui dans tous
les tempsd'un regne finon toûjours
heureux du moins toûjours
a
te
$8 MERCURE
tous les
glorieuxpar raport à l'usage qu'il
afait de la profperité & de l'adverfité; qui a toujours marqué un
amour conftant &fincere pourfon
Peuple ; amour auquel il afouvent facrifié fagloire
avantages qu'ilpouvoit tirer dé
fes exploits militaires ; amour enfin dont il vient de donner des
marques refcentes àfon cher Peuple dans ces temps de fterilité, par
les foins & les moyens que fa
tendreffe paternelle luy fuggere
pour le ſecourir à propos & diligemmentdansfes befoins . Elevez
donc vos mains vers le Ciel pour
ce Prince le plus grand de tous les
GALANT 59
Heros , le meilleur de tous
les peres, & dont le glorieux nom
de Louis lele Grand ,, renferme
toutes les qualitez d'un Souverain accomply ; fouvenez vous
dans vos prieres d'un Monarque
qui vivrajuſqu'à la fin desficcles
dans ceux quipar leur valeur porteront le nom de Magnanimes ;
dans ceux qui par leur clemençe
Seront appellez Peres des Peuples; dans ceux qui par leur zele
feront appellez Defenfeurs de la
Religion ; dans ceux qui par leur
vertus feront appellez Princes
Pieux enfin dans ceux qui
par les infidelitez de la fortune
•
60 MERCURE
feront appellez Intrepides ', en
les foutenant avec conftance ,
implorezfans ceffe le fecours de
Dieu pour ce bon Princep
Jamais les François n'ont
temoigné plus d'amour pour
leurs Souverains qu'il en ont
montré, & qu'ils en font voir
encore tous les jours pour
Louis le Grand. Rien ne leur
échape de tout ce qui l'a rendu
digne de ce furnom , & ils ont
toujours fait des Eloges de ce
Prince dans toutes leurs actions
publiques convenablés au
temps & à la grandeur & aux
vertus d'un Monarque qui a
GALANT 61
toujours triomphé de toutes
manieres , & remporté autant
de Victoires fur luy même
que fur les Ennemis
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Résumé : Autre Article qui renferme aussi un Eloge de Sa Majesté, [titre d'après la table]
Le texte est une lettre annonçant l'envoi d'un éloge du roi Louis XIV, extrait d'une lettre circulaire du Père Épiphane, Recolet, publiée au début de l'année. Le Père Épiphane prie pour les grâces nécessaires au roi, qu'il décrit comme un modèle de justice et de clémence. Louis XIV est loué pour son amour constant et sincère pour son peuple, même au détriment de sa gloire personnelle et des avantages militaires. Le texte mentionne les efforts du roi pour secourir son peuple durant les périodes de stérilité. Il appelle à prier pour ce monarque, qualifié de 'Louis le Grand', dont le nom englobe toutes les qualités d'un souverain accompli. Les Français sont décrits comme ayant toujours témoigné un grand amour pour leurs souverains, et particulièrement pour Louis XIV, dont ils célèbrent les vertus et les victoires dans leurs actions publiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1925
p. 61-80
Mort de la Soeur Anne de sainte Cecile, Religieuse de l'Abbaye de Port Royal des Champs, decedée dans le Monastere de Saint Julien d'Amiens. Cet Article est des plus touchants, & doit faire un extreme plaisir à ceux qui aiment la pureté de la Foy, [titre d'après la table]
Début :
Je passe à un Article qui vous doit faire un extrême plaisir, [...]
Mots clefs :
Confesseur, Soeur Anne de sainte Cécile, Port Royal, Mort, Crucifix, Cardinal de Noailles
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texteReconnaissance textuelle : Mort de la Soeur Anne de sainte Cecile, Religieuse de l'Abbaye de Port Royal des Champs, decedée dans le Monastere de Saint Julien d'Amiens. Cet Article est des plus touchants, & doit faire un extreme plaisir à ceux qui aiment la pureté de la Foy, [titre d'après la table]
Je paffe à un Article quivous
doit faire un extrême plaifir ,
& quevous ne pourez lire fans
cftre attendrie , & fans verfer
de's larmes. Je vous l'envoye
de la maniere queje l'ay reçu.
Cet Article doit faire auffi
plaifir à tous ceux qui s'en font
de voir conferver la Foy dans
toute sa pureté.
La Sour Anne de Sainte Cecile Religieufe de l'Abbaye de
Port-Royal des Champs , eft morte
62 MERCURE
âgée de quatre- vingtfix ans dans
la Monaftere de S. Julien d'Amiens, duTiers-Ordre de S. François , où elle avoit efté releguéepar
ordre du Roy. Je crois que vous
ferez bien aife de fçavoir les circonftances de cette mort , qui a efté
édifiante confolante pour l'Eglife. Cette bonne Religieufe arriva à Amiens le 2. Novembre
dans un Caroffe, accompagnée d'unefemme qu'on avoit choisie pour
la fervir avec fa Compagne qui
a efté envoyée dans le Monaftere·
des Filles de la Vifitation de la
même Ville , où elle eftencore. Elle
defcendit à la grille dù Convent
CALANT 63
de Saint Julien , où elle reſta juf
qu'à ce que Mr l'Evêque d'Amiens eut envoyéfes ordres pour
lafaire entrer. LaReverende Mere ayant affemblé fes Diferetes
elle fut reçue , avec beaucoup de
cordialité ; elle fe jetta en entrant
auxpiedsde la Superieure , en luy
difant Voicy le lieu de mon
repos dans le fiecle des ficcles.
La Superieure l'ayant relevée
l'embraffa , ce que firent auffi les
autres Religieufes. Ayant demandé d'eftre conduite à l'Oratoire
elle s'y profterna la face contre terre, &adora le Saint Sacrement
dans cette pofture ; on la conduifit
64 MERCURE
enfuite dans la Cellule qui luy
avoit efté deftinée. Elle eftoit arrivée à midy & Mrl'Evêque qui
avoit efté voirfa Compagne l'aprefdinée , la vint voirfur lefoir,
Il la trouva occupée à rangerfa
petite Cellule & aprés l'avoirfait
affeoir auprés de luy , il luy parla
fort cordialement durant une de
mi-heure ,
manda, fi elle eftoit bien aife
de vivre privée des Sacremens
qu'elle ne recevoit plus depuis
deux années & de mourir dans
cer eftat , elle répondit que cette privation l'affligeoit beaucoup lorfqu'elle y penfoit. La
fur ce qu'il luy de-
"
GALANT 65
chofe ne fut pas plus loin alors.
Pendant les trois jours qu'elle a
efté en fanté dans cette Maifon les
Religieufes témoignent que tous
fes difcours eftoient tres- édifians
ne refpiroient que lapietés que
toutes fes actions eftoientfi regu-.
lieres accompagnées d'une fi
a
grande modeftie de tant dedouceur qu'elles infpiroient de la devotion ; fon exactitude àgarderfa
Regle animoit les autres Religieufes à garder la leur avec plus de
fidelite, fa religion dans l'Eglife , où ellepaffoit à fon age les
heures entieres à genoux devant
le faint Sacrement , l'auroit fait
•
Février 1710. F
66 MERCURE
regarder comme un Ange fi elley
avoit ajouté l'exemple d'une humble foumiffion aux Decifions de
l'Eglife . Trois jours aprésfon arrivée unefiévre violente avecune
flucion fur la poitrine l'attaqua
on en donna avis à Mrl'Evêque
parce qu'onjugea que cette maladieferoit mortelle. Illa vint voir
dans le moment & demeura un
quart d'heure auec elle. Le Confeffeur de la Maifon vint auffi
la vifiter le même jour par ordre
de ce Prelat, & pour la difpofer
à rendre à l'Eglife l'obeiffance
2 qu'elle luy devoir , il luy fit la
lecture d'un Livre que Mr l'EA
GALANT 67
vêque luy avoit remis fur ce fujet , dont elle parut fort ébranlée,fans pourtant vouloir encore
fe declarer , ce qui obligea le Confeffeurdefe retirer. Comme le mal
augmentoit que le temps preffoit , la Religienfe qui lagardoit,
dont la Lettre qu'elle a écrite
fur cela à Me l'Abbeffe de Port
Royal de Paris , nous a inftruit
de toutes ces circonftances. Cette
Religieufe , dis-je , infpirée d'enhaut l'a preffefurles deux heures
aprésmidydujourdevantfa mort,
de luy découvrir fes veritables
fentimens , en luy difant : Sera- til poffible, ma tres chere MeFij
68 MERCURE
re , que vous ne nous donniez
pas la confolation de vous voir
mourir fille obcillante de l'E
glife ; helas , répondit - elle , ma
chere Sœur, c'eft tout ce queje
defire, & fera- t-il dit qu'on me
laiffe fans Sacremens dans l'état où je fuis. La Religieufe luy
répondit que Mr l'Evêque n'avoit rien tant à cœur que de
luy accorder cette grace ,
qu'il ne le pouvoit faire que
lorfqu'elle auroit fatisfait à ce
que Mr le Cardinal de Noailles avoit demandé , qui eftoits
d'acquiefcer à la derniere Cons
ftitution du Papefur le fait de
mais
GALANT 69
Janfenius. Sur cela ellepria qu'on
avertit Mrl'Evêque de venir la
voirau plutoft . La Superieure informée de la difpofition de la Ma
lade envoyafur le champ en donner avis à ce Prelat , qui ne fe
trouvant pas alors chez luy
donna lieu à quelques reflections
douloureufes de la malade fur
fon retardement enfin Mr l'Evêque eftant arrivé , & l'ayant
trouvée dans une difpofitionfavo
rable , il appella la Communauté
&ayant écrit quelques lignes "
qui contenoient le temoignage de
fon obéiffance , il luyfit.figner cet
écrit ce qu'ellefit avecjoye avec
70 MERCURE
facilité , en ajoutant àfon nom
"de Religion celuy de fa famille
aprés quoy Mr l'Evêque luy
donna fa benediction & luypermit de recevoir les Sacremens , en
lui laiffant le choixdu Confeffeur:
elle choifit celuy de la Communauté qui l'ayant confeffée , luy
adminiftra le Saint Viatique qu'-
elle reçût avec de grands fentimens de pieté , aprés avoir demandé felon la coutume pardon
à toutes les Religieufes ; enfinfe
fentant affaiblir elle demanda
l'Extrême - Onction qu'elle reçût avec tant de pieté & unefi
grande prefence d'efprit qu'elle
GALANT 71
repondoit elle- même auxprieres ,
& qu'elle fe difpofa elle feule
pour recevoir les Onctions Saintes
avec la decence qu'exige ce Sacrement ; onla laiffa enfuite quelque
temps en repos pour s'entretenir
interieurement avecJ. C. qu'elle
venoit de recevoir, &comme on
la felicitoit enfuite de ce qu'elle
venoit de faire'; il eft vray , repondit-elle, que voilà bien des
chofes faites en peu de temps,
touchée d'un vif repentir d'avoir
tant differé à les faire. Sur les
buit heures , elle demanda le
Confeffeur & elle luy expofa
une petite tentation de respecthu-
72 MERCURE
main qui luy faifoit un peu de
peine ; c'eftoit fur ce que diroit fa
Compagne qui eftoit à la Vifi
tation de tout ce qui fe venoit de
paffer, le Confeffeur la calma en
luy difant que fi fa Compagne
eftoit bien fage ell en feroit
autant qu'il nene faut pas
s'arréter au jugement des
hommes quand il s'agit d'obéir à Dieu. Il refta une heure
auprés d'elle la quitta trescontent des difpofitions où il la
laiffoit : il eftoit environ dix heures dufoir lorfque les Infirmieres
remarquantqu'elle avoit les mains
froides voulurent les rechauffer:
elle
GALANT 73
una
elle leur répondit que cela n'eftoit
pas neceffaire parce que c'eftoit
lafueur & le froid de la mors ;
de-là elle prit occafion de leur
expliquer dans grand détail & avec une grande prefence
d'efprit , comment il la faloit l'accommoder dans fa biere quand elle
feroit morte ,de quelle maniere
il faloit la fituer & ranger fes
mains fes habits, qu'elle pria
de changeravecceux defa compagne s'ils eftoient plus ufez que les
fiens. Les Religieufes qui estoient
autour d'elle l'ayant priée de fe
reffouvenird'elles lorfqu'elleferoit
dans le Ciel , ah , leur réponditFévrier 1710.
74 MERCURE
elle ,je ne crois pas que ce foit
fitoft car j'ay bien des fautes
à expier ; & ayant demandéfon
Crucifix & le tenant entre fes
mains , elle fit de nouveau une
confeffion publique de tous fes
pechez depuis l'enfancejufqu'à ce
moment- là. Elie demanda pardon
àDieu avec de grands fentimens
de douleur , ànoftre faint Pere le
Pape , à Mr le Cardinal de
Noailles , à tous fes Superieurs
& à toute l'Eglife , déteftant le
Scandale qu'elle avoit cauſe par
fon obftination. Onrecita alors les
Prieres des Agonifans aufquelles
elle s'unit avec une vive dévotion.
JOIN
GALANT 75
Sur les trois heures elle demanda
quelle heure il eftoit , & commefi
elle avoitfeu quefon beure n'eftoit
pas encore arrivée , elle prit encore
fon Crucifix qu'elle embraſſa en
difant que puis qu'elle ne pouvoit plus entendre les paroles
d'exhortation , elle s'exhorteroit elle-même , & s'entretiendroit interieurement avec
Dieu , ce qu'elle fit juſqu'à trois
beures &
trois quarts. Enfin
cet heureux moment arriva ; elle
demanda une feconde fois quelle
heureil eftoit, & lors qu'on luyeut
dit qu'il étoit prés de quatre heures,
elle fit unfigne de tefte agreable 7
Gij
76 MERCURE
tenantfon Crucifix à la main
lesyeux élevez vers le Ciel
ele tira le rideau defons for litven
difant d'un air tranquile & d'une
voix diftincte que voftrefainte
volonté , ô mon Dieu , s'ac
:
compliffe en moy , ceftlà
ma derniere volonté ; alors
・ elle expira fans aucun effort fans
agonie & commefi elle eftoit entrée dans un doux fommeil ou
qu'elle eut efté ravic en extafe.
Peude temps aprés cette mort Mr
l'Evêque d'Amiens écrivit à un
defes amis que la converfion de
cette Religieufe avoit tantfait de
bruit , &tant de plaifir an Roy
•
GALANT 77
quinefoupire que pour la réunion
des brebis égarées d'Ifraël , qu'il
croyoit qu'on nepouvoit trop informerlepublic de cet évenement, &
cePrelat ajoutaqu'il appritpar une
Lettre de Mr le Comte de Pontchartrain qu'une de ces Religienfes
qui eftoit à Mante a auffi figné le
Formulaire qu'on luy en a envoyé le procés verbal. Ildit enfin
qu'a la place de la Religieufe
morte on luy a envoyé une Sœur
Converse de la même Maiſon, &
dont le Confeffeur luy a dit qu'il
eftoit fort content qu'il efpere
qu'elle donnnera bien- toft lafatisfaction qu'on peur defirer. Enfin
G iij
78 MERCURE
Me l'Abbeffe de Port-Royal de
Paris ayant apris la mort de cette
Religieufe , écrivit cette Lettre à
la Superieure defaint Julien d'As
miens. Madame , permettez
moy de vous faire mes remerciemens de la charité que vous
avez cüe pour ma foeur Anne
de fainte Cecile pendant le
peu de féjour qu'elle a fait dans
voftre fainte Maiſon ; je ne
doute pas que les vertus & les
regularitez que vous y pratiquez , n'ayent attiré les graces
que Dieu luy a faites de reconnoiftre fon égarement & ſa
défobéiffance & qu'elle ne
GALANT 79
vous doive & à Monseigneur
d'Amiens la mifericorde qu'elle à reçeuë du Seigneur , &c.
Jefais , Madame , voftre , &cL'Affaire du Port Royal des
Champs a fait tant de bruit
qu'il n'y a point à douter
le Public ne foit bien aife d'en
apprendre les fuites , & ce qui
vient d'arriver à cet égard , ne
kiyplaira fans doute pas moins
qu'à Sa Majefté , qui n'a rien
oublié depuis qu'Elle eft fur le
Trône ,de tout ce qui peut faire maintenir dans fon RoyauGiiij
80 MERCURE
me, la Religion dans toute fa
pureté.
doit faire un extrême plaifir ,
& quevous ne pourez lire fans
cftre attendrie , & fans verfer
de's larmes. Je vous l'envoye
de la maniere queje l'ay reçu.
Cet Article doit faire auffi
plaifir à tous ceux qui s'en font
de voir conferver la Foy dans
toute sa pureté.
La Sour Anne de Sainte Cecile Religieufe de l'Abbaye de
Port-Royal des Champs , eft morte
62 MERCURE
âgée de quatre- vingtfix ans dans
la Monaftere de S. Julien d'Amiens, duTiers-Ordre de S. François , où elle avoit efté releguéepar
ordre du Roy. Je crois que vous
ferez bien aife de fçavoir les circonftances de cette mort , qui a efté
édifiante confolante pour l'Eglife. Cette bonne Religieufe arriva à Amiens le 2. Novembre
dans un Caroffe, accompagnée d'unefemme qu'on avoit choisie pour
la fervir avec fa Compagne qui
a efté envoyée dans le Monaftere·
des Filles de la Vifitation de la
même Ville , où elle eftencore. Elle
defcendit à la grille dù Convent
CALANT 63
de Saint Julien , où elle reſta juf
qu'à ce que Mr l'Evêque d'Amiens eut envoyéfes ordres pour
lafaire entrer. LaReverende Mere ayant affemblé fes Diferetes
elle fut reçue , avec beaucoup de
cordialité ; elle fe jetta en entrant
auxpiedsde la Superieure , en luy
difant Voicy le lieu de mon
repos dans le fiecle des ficcles.
La Superieure l'ayant relevée
l'embraffa , ce que firent auffi les
autres Religieufes. Ayant demandé d'eftre conduite à l'Oratoire
elle s'y profterna la face contre terre, &adora le Saint Sacrement
dans cette pofture ; on la conduifit
64 MERCURE
enfuite dans la Cellule qui luy
avoit efté deftinée. Elle eftoit arrivée à midy & Mrl'Evêque qui
avoit efté voirfa Compagne l'aprefdinée , la vint voirfur lefoir,
Il la trouva occupée à rangerfa
petite Cellule & aprés l'avoirfait
affeoir auprés de luy , il luy parla
fort cordialement durant une de
mi-heure ,
manda, fi elle eftoit bien aife
de vivre privée des Sacremens
qu'elle ne recevoit plus depuis
deux années & de mourir dans
cer eftat , elle répondit que cette privation l'affligeoit beaucoup lorfqu'elle y penfoit. La
fur ce qu'il luy de-
"
GALANT 65
chofe ne fut pas plus loin alors.
Pendant les trois jours qu'elle a
efté en fanté dans cette Maifon les
Religieufes témoignent que tous
fes difcours eftoient tres- édifians
ne refpiroient que lapietés que
toutes fes actions eftoientfi regu-.
lieres accompagnées d'une fi
a
grande modeftie de tant dedouceur qu'elles infpiroient de la devotion ; fon exactitude àgarderfa
Regle animoit les autres Religieufes à garder la leur avec plus de
fidelite, fa religion dans l'Eglife , où ellepaffoit à fon age les
heures entieres à genoux devant
le faint Sacrement , l'auroit fait
•
Février 1710. F
66 MERCURE
regarder comme un Ange fi elley
avoit ajouté l'exemple d'une humble foumiffion aux Decifions de
l'Eglife . Trois jours aprésfon arrivée unefiévre violente avecune
flucion fur la poitrine l'attaqua
on en donna avis à Mrl'Evêque
parce qu'onjugea que cette maladieferoit mortelle. Illa vint voir
dans le moment & demeura un
quart d'heure auec elle. Le Confeffeur de la Maifon vint auffi
la vifiter le même jour par ordre
de ce Prelat, & pour la difpofer
à rendre à l'Eglife l'obeiffance
2 qu'elle luy devoir , il luy fit la
lecture d'un Livre que Mr l'EA
GALANT 67
vêque luy avoit remis fur ce fujet , dont elle parut fort ébranlée,fans pourtant vouloir encore
fe declarer , ce qui obligea le Confeffeurdefe retirer. Comme le mal
augmentoit que le temps preffoit , la Religienfe qui lagardoit,
dont la Lettre qu'elle a écrite
fur cela à Me l'Abbeffe de Port
Royal de Paris , nous a inftruit
de toutes ces circonftances. Cette
Religieufe , dis-je , infpirée d'enhaut l'a preffefurles deux heures
aprésmidydujourdevantfa mort,
de luy découvrir fes veritables
fentimens , en luy difant : Sera- til poffible, ma tres chere MeFij
68 MERCURE
re , que vous ne nous donniez
pas la confolation de vous voir
mourir fille obcillante de l'E
glife ; helas , répondit - elle , ma
chere Sœur, c'eft tout ce queje
defire, & fera- t-il dit qu'on me
laiffe fans Sacremens dans l'état où je fuis. La Religieufe luy
répondit que Mr l'Evêque n'avoit rien tant à cœur que de
luy accorder cette grace ,
qu'il ne le pouvoit faire que
lorfqu'elle auroit fatisfait à ce
que Mr le Cardinal de Noailles avoit demandé , qui eftoits
d'acquiefcer à la derniere Cons
ftitution du Papefur le fait de
mais
GALANT 69
Janfenius. Sur cela ellepria qu'on
avertit Mrl'Evêque de venir la
voirau plutoft . La Superieure informée de la difpofition de la Ma
lade envoyafur le champ en donner avis à ce Prelat , qui ne fe
trouvant pas alors chez luy
donna lieu à quelques reflections
douloureufes de la malade fur
fon retardement enfin Mr l'Evêque eftant arrivé , & l'ayant
trouvée dans une difpofitionfavo
rable , il appella la Communauté
&ayant écrit quelques lignes "
qui contenoient le temoignage de
fon obéiffance , il luyfit.figner cet
écrit ce qu'ellefit avecjoye avec
70 MERCURE
facilité , en ajoutant àfon nom
"de Religion celuy de fa famille
aprés quoy Mr l'Evêque luy
donna fa benediction & luypermit de recevoir les Sacremens , en
lui laiffant le choixdu Confeffeur:
elle choifit celuy de la Communauté qui l'ayant confeffée , luy
adminiftra le Saint Viatique qu'-
elle reçût avec de grands fentimens de pieté , aprés avoir demandé felon la coutume pardon
à toutes les Religieufes ; enfinfe
fentant affaiblir elle demanda
l'Extrême - Onction qu'elle reçût avec tant de pieté & unefi
grande prefence d'efprit qu'elle
GALANT 71
repondoit elle- même auxprieres ,
& qu'elle fe difpofa elle feule
pour recevoir les Onctions Saintes
avec la decence qu'exige ce Sacrement ; onla laiffa enfuite quelque
temps en repos pour s'entretenir
interieurement avecJ. C. qu'elle
venoit de recevoir, &comme on
la felicitoit enfuite de ce qu'elle
venoit de faire'; il eft vray , repondit-elle, que voilà bien des
chofes faites en peu de temps,
touchée d'un vif repentir d'avoir
tant differé à les faire. Sur les
buit heures , elle demanda le
Confeffeur & elle luy expofa
une petite tentation de respecthu-
72 MERCURE
main qui luy faifoit un peu de
peine ; c'eftoit fur ce que diroit fa
Compagne qui eftoit à la Vifi
tation de tout ce qui fe venoit de
paffer, le Confeffeur la calma en
luy difant que fi fa Compagne
eftoit bien fage ell en feroit
autant qu'il nene faut pas
s'arréter au jugement des
hommes quand il s'agit d'obéir à Dieu. Il refta une heure
auprés d'elle la quitta trescontent des difpofitions où il la
laiffoit : il eftoit environ dix heures dufoir lorfque les Infirmieres
remarquantqu'elle avoit les mains
froides voulurent les rechauffer:
elle
GALANT 73
una
elle leur répondit que cela n'eftoit
pas neceffaire parce que c'eftoit
lafueur & le froid de la mors ;
de-là elle prit occafion de leur
expliquer dans grand détail & avec une grande prefence
d'efprit , comment il la faloit l'accommoder dans fa biere quand elle
feroit morte ,de quelle maniere
il faloit la fituer & ranger fes
mains fes habits, qu'elle pria
de changeravecceux defa compagne s'ils eftoient plus ufez que les
fiens. Les Religieufes qui estoient
autour d'elle l'ayant priée de fe
reffouvenird'elles lorfqu'elleferoit
dans le Ciel , ah , leur réponditFévrier 1710.
74 MERCURE
elle ,je ne crois pas que ce foit
fitoft car j'ay bien des fautes
à expier ; & ayant demandéfon
Crucifix & le tenant entre fes
mains , elle fit de nouveau une
confeffion publique de tous fes
pechez depuis l'enfancejufqu'à ce
moment- là. Elie demanda pardon
àDieu avec de grands fentimens
de douleur , ànoftre faint Pere le
Pape , à Mr le Cardinal de
Noailles , à tous fes Superieurs
& à toute l'Eglife , déteftant le
Scandale qu'elle avoit cauſe par
fon obftination. Onrecita alors les
Prieres des Agonifans aufquelles
elle s'unit avec une vive dévotion.
JOIN
GALANT 75
Sur les trois heures elle demanda
quelle heure il eftoit , & commefi
elle avoitfeu quefon beure n'eftoit
pas encore arrivée , elle prit encore
fon Crucifix qu'elle embraſſa en
difant que puis qu'elle ne pouvoit plus entendre les paroles
d'exhortation , elle s'exhorteroit elle-même , & s'entretiendroit interieurement avec
Dieu , ce qu'elle fit juſqu'à trois
beures &
trois quarts. Enfin
cet heureux moment arriva ; elle
demanda une feconde fois quelle
heureil eftoit, & lors qu'on luyeut
dit qu'il étoit prés de quatre heures,
elle fit unfigne de tefte agreable 7
Gij
76 MERCURE
tenantfon Crucifix à la main
lesyeux élevez vers le Ciel
ele tira le rideau defons for litven
difant d'un air tranquile & d'une
voix diftincte que voftrefainte
volonté , ô mon Dieu , s'ac
:
compliffe en moy , ceftlà
ma derniere volonté ; alors
・ elle expira fans aucun effort fans
agonie & commefi elle eftoit entrée dans un doux fommeil ou
qu'elle eut efté ravic en extafe.
Peude temps aprés cette mort Mr
l'Evêque d'Amiens écrivit à un
defes amis que la converfion de
cette Religieufe avoit tantfait de
bruit , &tant de plaifir an Roy
•
GALANT 77
quinefoupire que pour la réunion
des brebis égarées d'Ifraël , qu'il
croyoit qu'on nepouvoit trop informerlepublic de cet évenement, &
cePrelat ajoutaqu'il appritpar une
Lettre de Mr le Comte de Pontchartrain qu'une de ces Religienfes
qui eftoit à Mante a auffi figné le
Formulaire qu'on luy en a envoyé le procés verbal. Ildit enfin
qu'a la place de la Religieufe
morte on luy a envoyé une Sœur
Converse de la même Maiſon, &
dont le Confeffeur luy a dit qu'il
eftoit fort content qu'il efpere
qu'elle donnnera bien- toft lafatisfaction qu'on peur defirer. Enfin
G iij
78 MERCURE
Me l'Abbeffe de Port-Royal de
Paris ayant apris la mort de cette
Religieufe , écrivit cette Lettre à
la Superieure defaint Julien d'As
miens. Madame , permettez
moy de vous faire mes remerciemens de la charité que vous
avez cüe pour ma foeur Anne
de fainte Cecile pendant le
peu de féjour qu'elle a fait dans
voftre fainte Maiſon ; je ne
doute pas que les vertus & les
regularitez que vous y pratiquez , n'ayent attiré les graces
que Dieu luy a faites de reconnoiftre fon égarement & ſa
défobéiffance & qu'elle ne
GALANT 79
vous doive & à Monseigneur
d'Amiens la mifericorde qu'elle à reçeuë du Seigneur , &c.
Jefais , Madame , voftre , &cL'Affaire du Port Royal des
Champs a fait tant de bruit
qu'il n'y a point à douter
le Public ne foit bien aife d'en
apprendre les fuites , & ce qui
vient d'arriver à cet égard , ne
kiyplaira fans doute pas moins
qu'à Sa Majefté , qui n'a rien
oublié depuis qu'Elle eft fur le
Trône ,de tout ce qui peut faire maintenir dans fon RoyauGiiij
80 MERCURE
me, la Religion dans toute fa
pureté.
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Résumé : Mort de la Soeur Anne de sainte Cecile, Religieuse de l'Abbaye de Port Royal des Champs, decedée dans le Monastere de Saint Julien d'Amiens. Cet Article est des plus touchants, & doit faire un extreme plaisir à ceux qui aiment la pureté de la Foy, [titre d'après la table]
Le texte relate la mort de la Sœur Anne de Sainte-Cécile, une religieuse de l'Abbaye de Port-Royal des Champs, âgée de quatre-vingt-six ans. Elle est décédée au monastère de Saint-Julien d'Amiens, où elle avait été envoyée par ordre du roi. Arrivée à Amiens le 2 novembre, elle a été accueillie chaleureusement par la communauté religieuse et a exprimé son désir de mourir en bonne fille de l'Église. L'évêque d'Amiens lui a rendu visite pour la réconforter. Durant les trois jours passés au monastère, la Sœur Anne a été admirée pour sa piété et son exemple de vie religieuse. Elle a contracté une fièvre violente et a demandé à recevoir les sacrements. Après une période de réflexion et de prières, elle a signé un écrit témoignant de son obéissance à l'Église. Elle a ensuite reçu le Saint Viatique et l'Extrême-Onction avec grande dévotion. Avant de mourir, elle a exprimé son repentir et demandé pardon pour ses fautes. Elle est décédée paisiblement, tenant son crucifix, vers quatre heures du matin. L'évêque d'Amiens a informé les amis de la Sœur Anne de sa conversion, soulignant l'importance de cet événement pour le roi et le public. La supérieure de Port-Royal de Paris a exprimé sa gratitude pour les soins apportés à la Sœur Anne. L'affaire de Port-Royal des Champs a suscité beaucoup d'intérêt, et le roi a manifesté son soutien pour maintenir la religion dans toute sa pureté.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1926
p. 80-124
A Quebec le 12e. Novembre 1709.
Début :
Il y a déja plusieurs années que je vous envoye une Relation / MONSIEUR, La Description étonnante que vous me faites de l'Hyver [...]
Mots clefs :
Québec, Relation, Hiver, Froid, Nouvelle France, Colonie, Capitaine, Pierriers, New Yorck, Manhate, Espions, Canada, Troupes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A Quebec le 12e. Novembre 1709.
Il y a déja plufieurs années
que je vous envoye une Relation de ce qui s'eft paffé en
Canada pendant le cours de
chaque année ; mais quelques
incidens font caufe que je vous
envoye celle que vous allez lire , quelques mois plus tard
quevous n'avez accoûtumé de
la recevoir tous les ans. Elled
vient d'un Officier François quis
eft dans l'Armée Canadienne.
"
GALANTNY 81
$ srpos ench notede af M
A Quebec le 12°. Novembre
299NING 27731709. riba vit
MONSIEUR,
La Defcription étonnante que
vous mefaites de l'Hyver qui a
ravagé l'Europe cette année , m’a
fait faire les reflexions ordinaires
fur le froid que l'on fent en ce
pays - cy. Et effectivement j'ay
admiré plus d'une fois.comment
les racines des Plantes , les Bois,
లో les Animaux, fans parler des
Habitans , refiftoient non-feulement a de tels froids , mais encore
82 MERCURE
à celuy que nous avons éprouvé
icy , vers la fin de l'année 1708 .
peu prés vers le temps que je
finiffois les dernieres Lettres queje
vous ay adreffées ; car il a eftéfi
pénetrant & fi vif, que s'il avoit
continué de la mêmeforce , je crois
quenous aurions tous peri & que
nous ferions tous morts dans les
commencemens d'un Hyverfi affreux. Mais le Seigneur n'a point
permis que nous avons fouffert au
deffus de nos forces.
Ainfi quelque rude qu'ait éfté
Hyver dans vos climats temperez d'ailleurs , il l'a efté incompa
rablement davantage en Canada,
GALANT 83
où la gelée commença vers la fin
de Novembre & perfevera fi
fortement, que dans les derniers
jours de Decembre ( 1708. ) le
Fleuve de S. Laurent , fe trouvaglacéjusqu'à laprofondeur de
dix pieds , & qu'il y avoit déja
quatre pieds de nége fur terre. Je
le repete encore , Monfieur , jepenfe que la Colonie auroit peryſi la
gelée avoit continué de cette violence. Et certes les Anglois fiirritez contre nous auroient eu alors
bon marché du Canada.
Ce froid exceffif nous quitta
fans doute pour vous aller rendre
vifte, puifque vous me marquez
84. MERCURE
que le premierjour de la grande
gelée commença le 6. ou 7. deFanvier de l'année fuivante ( 1709)
ce que je puis vous dire , c'est que
toutes ces horreurs de la nature ,
n'ontpoint efté un obftacle à la terre dela Nouvelle France , de nous
donnerd'affez bonsfruits, &aux
hommes de vivre ; au contraire
nous remarquons que ce froid
tribue à la fanté, & que la nége
qui regnefi longtemps dans l'AmeriqueSeptentrionale , l'engraifmerveilleufement , la moiffon
ayant efté abondante cette année-ci
en bled & enfruits; quoy qu'on
ne féme qu'à lafin d'Avril , le
fe
con-
GALANT 85
blé eft preft à couper au mois
( Je ne commenceray points
Monfieur, les Nouvelles que j'ay
à vous mander de ce pays-cy, par
ce qui s'eft paffé en l'Ile de Terre
Neuve au Fort S. Jean que nous
avons pris aux Anglois , parce
queje connois par vos Lettres que
vous en avez eftéinftruit en France , même d'aſſez bonne heure ;
à quoy je vous prie de faire
attention icy , eft que cette entreprife qui a estéexecutée avecbeaucoupde vigueur où entr'autres,
le fieur de la Ronde , d'une ancien="
ciennefamille de Canada s'eft dif-
86 MERCURE
tingué parfa bravoure intrigue
fort, non - feulement les Anglois
nos voiſins , mais encore ceux que
nous appellons icy les Anglois de
la Vieille- Angleterre, qui au
retour de ce qu'ils poffedent aux
Ifles - Antilles & ailleurs dans
l'Amerique, venoientfe relâcher,
ou radouber en ce Port , qui par
confequent leur eftoit fort commode.
Plufieurs des noftres difent icy
que la prife de ce Pofle & le ravage qu'on afait aux environs ,
va àfix millions. On dit que
Pefche que l'on faifoit proche la
Rade de S.Jean & aux Bancs
la
GALANT 87
voifins , valloit quatre millions de
rente à la Reine Anne. Nous
avons icy le Commandant ( le
Colonel Lloyd ) de ce Fort , prifonnieravecplufieurs Officiers, &
Soldats on Habitans de fon Gouvernement. Ila , àce qu'onpublie
dans Quebec , cent mille livres de
bien, & il veut fe marier icy &
époufer la veuve de Mr de Maricourt mort en 1704. Il eftoit
Capitaine dans cette Colonie &
freredu fameux Mr d'Yberville
qui s'eft fi fort diftingué fur mer
par fa valeur. Un Ecclefiaftique
tres-zelé, du Seminaire de Saint
Sulpice de Ville - Marie en l'Ifle
88 MERCURE
de Montreal, qui fait parfaite
ment l'Anglois , eft defcendu icy
pour travailler à la converfion de
ce Gouverneur Anglois , car
prétend, & il a témoigné librementfon deffein là-deffus , renoncer à la Religion Proteftante &
fe faire Catholique.
L'affaire de l'habitation de S.
Jean en Terre-Neuve futfuivie
d'une autre entrepriſe dans laBaye
d'Hudson , au lieu appellé le petit
Nord.
Mr Capitai- de Mantet
ne dans la Colonie enfut le Chef;
ce fut au mois d'Avril de cette
année 1709. Le Partife trouva
compofé de centhommes tous Ha.
GALANT 89
bitans & mariez pour la pluspart , mais alertes & entrepre P
nans ; Mr de la Nouě Lieutenant commandoit en ſecond ; à ces
deux Officiers s'en joignirent quel.
ques autres Subalternes ; la marche dura un peu plus de deux
mois , au bout duquel temps , nos
gens arrivez au but , déterminerent lejour de l'attaque au fixiémejour de Juillet. On choifit la
nuitpourcela: les Enfans perdus ,
je veux dire ceux qui marcherent
les premiers , donnerent brufquement & tefte baiffée fur un des
Fortsflanqué de quatre Baſtions ,
Février 1710. H
90 MERCURE
munisfelon le rapport de quelquesuns de ceux qui enfont revenus
de foixantepieces de Canon & de
plufieurs Pierriers. Des Boucaniers a qui le gardoient firent une
decharge terrible & du canon &
de leurs longs fufils qui cependant n'empêcha point ces premiers
des noftres , de pouffer leur pointe
avec une ardeur étonnante , de
rompre la paliẞade faite de gros ·
a Gens déterminez, Chaffeurs , propres
à la découverte , foit dans les terres
foit en mer; on pourroit les appeller
Flibuftiers de terre , auffi bien quede
mer. Les Boucaniers vivent fans façon de chair rôtic plus à la fumé
qu'au feu..
GALANT 91
un
pieux de traverſer un foffe
plein d'eau , large de quinzepieds,
qui estoit au de- là ; comme le feu
de l'Ennemy eftoit violent & continuel , & que le canonfaifoit
fracas horrible , & qu'avec cela
le nombre des Soldats oppofez aux
moftres eftoit tout-à-faitfuperieur,
il fallut fe retirer.
Mrde Mantet qui s'eft particulierement fignalé dans cette action , une des plus vives qui fe
foit faite en Amerique , y a efté
tues MrdeMartigny & douze
on quinze Canadiens ont eu le
mêmefort.
Hij
92 MERCURE
Les Anglois de la Vieille er de
la Nouvelle Angleterre ont efté
cette année dans de grands mouvemens pour s'emparer , fuivant
leur deffein , des trois Gouvernemens de la Colonie ; il neferoit
pas facile de vous expliquer combien ilsfe font remuez pour celae
voicy à peu prés la manœuvre
qu'ils ontfaite pourl'execution
ce projet.
uer.comDés que les Anglois de la Nouvelle Angleterre , & furtout ceux
de Bafton qui en eft la Capitale ,
eurentfçu certainement laprife de
leur Habitation du Port S.Jean ,
une des plus confiderables , ſans
GALANT 93
contredit , qu'ils euffent en TerreNeavepour la Pefche & lafureté de leurs Vaiffeaux qui paſſent
ouquireviennent d'Amerique , its
en donnerent avis à la Reine Anne par de petits Baftimens qu'ils
firent partir en diligence ; de forte
que vers la fin de May, un de
nos PartisSauvages ayantpris un
Officier Anglois du cofté de Bafton,
nous apprimes de luy qu'il leur
eftoit arriué des ordres de leur
Reine , par le Capitaine V'éché ,
dont voicy le contenu , autant que
jay pû m'en reſſouvenir: Que
tous les paysde fa domination
voifins de la Nouvelle - Angle-
$
94 MERCURE
terre ; fçavoir b la NouvelleYorck , le New-Jersey , bla
Penſylvanie , Mariland ( qui
veut dire terre de Marie ) la Vir
ginie & la Caroline ( quifemble
eftre une partie de la Floride ) feroient inceffamment proviſion
de vivres & de munitions de
guerre ; Qu'il feroit levé mille
hommes bien équipez & armez , qui fe joindroient à huit
mille Ecoffois prefts à s'embarquer au premier vent favora
ble & former une Efcadre de
dix Vaiffeaux de ligne , fans
Tous ces Pays font entre les 45. & 30.
degrez de Latitude Nord.
GALANT 95
compter les Baftimens de char
ge pour les munitions & les
vivres dont on pouvoit avoir
befoin , & cela pour venir
moüiller devant Bafton à la fin
du mois de Juin. Ces Ecoffois
aidez des Anglois de la Nouvelle
Angleterre devoient , felon leur
intention , affieger Quebec &fe
rendre maiftres detoutes les Coftes
d'en bas , jufqu'à la mer;
pays devoit , dans la pensée de la
Reine, leur demeurer , pour récom
penfe de la dépense & des avan
ces faites par ces Ecoffois les
mêmes ordres de la Reine Anne
marquoient : Que les Habitans
o
7
ce
96 MERCURE
du Gouvernement d'Orange
dans New-Yorck avecceux de
Manhate & les Sauvages leurs
Alliez ou Amis , s'uniroient
enfemble pour faire un Corps
d'Armée de trois mille hommes , qui iroit tomber fur le
Montreal , & feroit ainfi diverfion des forces des François.
d'arMrle Marquis de Vaudreüil,
Gouverneur general de la Nonvelle-France ne faifoit que
river à Ville-Marie , la feule
Ville quifoitdans l'Ile de Montreal éloignée foixante lieues de
Quebec ,lors qu'il apprit les deffeins
GALANT 97
feins des Anglois nos voisins, il
affembla le Confeil de Guerre
pour déliberer fur les mesures
qu'onavoit à prendre , &on fut
d'avis d'aller au devant des Ennemis & de les prévenir. Mr de
Ramezay Gouverneur de Mont
real fut destiné pour né pour commander
les Troupes ou Milices defon Gouvernement , &l'on convint d'y
joindre les Sauvages Iroquois
Algonkins , Abnakis , les autres qui font dans le voisinage.
Tout eftant preft ne vous attendez point icy , Monfieur , à des
Arméesdecent mille hommes comme en Europe , mais à des Partis
Février 1710. I
98 MERCURE.
pluteft qu'à des Armées , proportionnez aux Habitans de ces Regions froides ) la petite Armée , ou
le Partifi vous l'aimez mieux ,
commença à fe mettre en marche
vers le 15. deFuillet, & elle fe
* trouva cftre de treize àquatorze
cens hommes ; compofée des Habitans du Gouvernement de lIfle
de Montreal & de Sauvages de
plufieurs Nations. Onfut juf
qu'au c Lac Champlain , ainfi
eCe Lac s'etend depuis le 44. environ,
jufqu'au 45. degré de latitude Septentrionale. On en diftingue deux à
fes extremitez ; c'eft-à dire au Nord
& au Sud, le Lac de S. François au
Nord, & le Lac, dit du S. Sacrement,
au Sud.
QUA
LYON
GALANT 99
DE
appellé d'un ancien Gour
de Canada de ce nom ; Mrle
Marquis de Vaudreuil qui eft
fage & tres vigilantfaifoit pendantce temps- la fortifier de nouveau Quebec & Ville Marie ,
vulgairement dite Montreal ,
l'Habitation la plus importante
de l'Ifle de ce nom. Les Forts des
environs de l'Ile de Montrealfurent vifitez &reparez où ilfalloit on s'attacha beaucoup à d
celuy de Mrle Baron de Longüeil
Major de Montreal qui eft de
d Le Fort de Longueil eft à peu prés au
Sud de l'Ile de Montreal, fur le bord
du Fleuve S. Laurent.
I ij
100 MERCURE
pierre & un desplus confiderables
dela Colonie; celuy de la Prairie,
dité de la Madeleine , au Sudde
de l'Ifle de Montrealfut auffifortifié de nouveau en même temps
que celuy de e Chambly qui eftoit
Le plus expofe aux infultes de
l'Ennemi ; on en conftruifit un de
pierres à Lorette , Miffionfauvage au Nord de Ville -Marie ,
gouvernée par Mrsde S. Sulpice.
Les Découvreurs marchant devant noftre Arméejufques à trois
ou quatre licuës , rencontrerent un
eCe Fott cft au Nord du Lac Champlain , & à environ dix lieues de la
Rivierb de S. Laurent.
GALANT 101
Parti ennemi au lieu dit la Poinre , fà la chevelure de cent vingt
hommes ou environ ; Mr de Ra
mezay le Commandantfut auſſitoft averti , ilfit rangerfes gens en
ordrede Bataille le fignal donné,
on marcha droit aux Anglois , les
noftres donnerent avec vigueurfur
l'Ennemi en tuerent on firent
Prifonniers une bonne partie
mirent le refte en fuite ; quatre
de nos Sauvages qui s'eftoient un
f Ce lieu est éloigné de Quebec d'environ 6o. lieuës , & il n'eft aing nommé qu'à l'occafion de quelques chevelares levées par des Sauvages; mes
Lettres vous ont déja dit comment
cela fe faifoit.
I iij
102 MERCURE
25.
peu trop avancez ,yfurent tuez.
Les Prifonniers nous apprirent que
les Anglois s'eftoient retranchez à
lieues en deça d'Orange , le
long d'une petite riviere , appellée
la Riviere au Chicot , g qu'ils
faifoient conftruire en cet endroit
de grands Batteaux & des Pirogues &un bon nombre de Canots pour venir ravager le Canada, à lafaveur de la Riviere de
Saint Laurent , dans laquelle ils
feroient entrez par le moyen du
Lac Champlain les Anglois
g
s
Du cofté du Lac du S. Sacrement &
vers l'entrie du Lac Champlain, dans
le voisinage de la Nouvelle- Angleterre & de New-Yorck.
GALANT 103.
avoient en effet élevé trois Forts
avec de gros & grands pieux de
bois de cedre blanc qui eft commun
dans l'Amerique Septentrionale,
dans l'un defquels on diſoit qu'ily
avoit fix ou buitpieces de canon ,
des bombes , quantitédegrenades ,
environ quinze ou dix - huit
cens hommespour les garder.
Sur le rapport de ces Prifonniers Anglois , Mr de Ramezay
affembla tous les Officiers de fa
petite Armée, le Confeil trouvantque ceferoit , cefemble , une
temerité quede s'expofer en avançant contre des Ennemis & plus
nombreux, avec cela tres - bien
I iiij)
104 MERCURE
retranchez , on prit le parti de les
attendre de pied ferme , s'ils en
vouloient venir aux mains ; cer
pendant les Efpions des Anglois
ayant rapporté àleur Camp que
noftre Armée eftoitformidable
que le Lac Champlain eftoit tout
couvert de canots , l'allarme fe mit
parmi eux , & aucun des- leurs
neparoiffant , aprésplufieursjours
d'attente , le Chefdu Parti Canadien confiderant que la recolte
dans l'Ile de Montreal & aux
contrées adjacentespreffait, &mêmé qu'elle eftoit déja commencées
renvoya la Milice & les Habitans de Montreal & des Coftes
+
GALANT 105
cela n'empêchapoint qu'on ne laiffaft des Découvreurs aux environs du Pofte que l'on quittoit ,
c'eft à dire vers les Lacs S. François , de Champlain & du S. Sacrement , celuy - cy cftant le plus.
proche des Ennemis , pour avertir
de tout en cas de befoin. La moiffonfefit pendant ce temps- là &a
efté abondante , non-feulement en
blé , mais encore en legumes & en
fruits tels qu'on les peut conferver
en Canada.
On ramaffoittranquilement les
biens que le Ciel nous avoit don
nez de fa main toute liberale , lors
que vers le 15.du mois de Septem-
106 MERCURE
bre tout à coup un Sauvage qui
avoitdefertédu Camp des ennemis».
vintdire au Montreal queles En
nemis eftoient enmarche du cofté du
LacChamplain. MrdeRamezay
envoya en diligence ce Sauvage à
Mr le Marquis de Vaudreuil
qui eftoit defcendu à Quebecpour .
j bien recevoir les Ennemis , qui
felon le bruit qui couroit, prétendoient l'affieger avec des forces
nombreuſes &par mer &parterre. Les Officiers s'eftant affemblez
chez Mrle Gouverneur general ,
onconclutque le Montrealfe trouvant endanger, ilfalloit lefecou
courir, les Découvreurs que Mr
GALANY 107.
deVaudreuilavoit envoyez àplus
de foixante lieuës au - deffous de
Quebec , ne voyant rien fur le
Fleuve nyfur les Coftes ; l'ordre
ayant donc efté donnépour monter
le Fleuve de S. Laurent , il fe
trouva mille hommes du Gouver
ment de Quebec , preſts à marchers
Mr le Marquis deVaudreuil General de toute la Colonie , fe mit
à la tefte & fut droit au Fort
Chambly, vers l'entrée du Lac
Champlain tous les Sauvages
d'enbas premierement ceux des
environs de Quebec & des trois
Rivieres , fejoignirent à la Milice de la Cpitaledu Canada. Ace
108 MERCURE
Corps de Troupes fe joignit celuy
du Gouverneur de Montreal Mr
de Ramezay , ce qui forma une
Armée d'environ trois mille hom
mes. Le lieu du Campfut affigné
auLac & Fort de Chambly affez
prés du LacS. François quife communique à celuy de Champlain
mais comme aprés trois semaines
ou environ , l'Ennemi ne faifoir
aucun mouvement , on commença
à fe défier du Sauvage deferteur
de fon rapport: ce futen cette
fituation que Mr le Gouverneur
general reçut avis de Quebec , au
commencement d'Octobre , que la
Bellone Fregatte Françoise venois
GALANT 109
"de mouiller devant cette Ville , &
que l'Efcadre Ecoffoife deftinée
pourfaire le Siege de la Capitale
du Canada & favorifer l'attaque
des Anglois par en haut , c'est- àdire du cofté de Montreal , avoit
eu ordre de la Reine Anne de faire
voile vers le Portugal , à caufe
que MrleMarquis de Bay Commandant en Eftramadoure pour
PhilippeV. Roy d'Espagne, avoit
battue défait les Portugais &
les Anglois leurs Alliez. Mr le
General les Officiers de l'Armée Canadiennejugeantdoncqu'il
n'y avoit plus rien à craindre , la
faifon d'ailleurs eftant fort avan
براج
110 MERCURE
cée , on congedia la plupart des
Troupes. Neanmoins MrdeVaudreüil permit à Mr de Montigny
Capitaine tres-brave defaperfonne , que vous avez pu voir à la
Courily a quelques années , accompagné d'un ChefdesSauvages de la nation des Abnakis , de
fe mettre à la tefte d'un petit Parti, compofé de Canadiens experimentez &de Sauvages aguèrris,
pour tacher defaire quelques Prifonniers. Quelques- uns de ce petit
Parti , s'avancerent fi prés des
Forts des Anglois , qu'ils en fçûrent aisément & le nombre
forme. Fuſques à prefent , nous
la
*
GALANT III
n'avons perdu aucun des noftres ,
fice n'eft quatre Sauvages qui s'étoient engagez trop avant , dans
-le combat fous Mrde Ramezay.
Les Ennemis, fi on en croit un
Anglois amené depuis peu par un
Sauvage Abnaki , appellé Carnaret , efperent executer l'année
prochaine ce qu'ils n'ont pas fait
・
celle-cy.
La conclufion de toute la manœuvre des Anglois nos voisins &
de tout ce qu'avoit projetté leur
Reine , eft qu'il leur en coûte environfix millionspour le tout. On
compte cinq millions cinq ou fix
recent mille livres pour la Flotte
112 MERCURE
d'Ecoffe , fur lefquels cinq mil
lions , la Reine avoit fourni la
fomme de cinq ou fix cens mille
Livres , pour encourager les Ecoffois à fe rendre maiftres de toute
la Nouvelle- France , &environ
un million , tant au Baftonnois
qu'à ceuxde la Ménade on Manhate e d'Orange à qui la Reine
Anne donnoit en recompenfe tout
le Pays de Canada qui eft depuis
l'Ile de Montreal jufqu'à Quebec.
Lefuccés n'ayant point répondu à l'atente des Peuples de la
Nouvelle- Angleterre , de NewYork , & autres Pays fujets àla
CALANT 113
Reine Anne en Amerique , fur
lefquels on avoit levé de rudes
impôts & tiré d'exceffives contributions , ils commencent déja à
temoigner hautement leur mécontentementfur tout contre Pitref
culle , Major d'Orange , le principalboute-feu de la Guerre alumée contre nous qui jufqu'à .
prefent les à leurré de vaines
promeffes , leur faifant entendre
qu'il attireroit dans le parti de
l'Angleterre toutes les Nations
Iroquoifes par de magnifiques &
de riches prefens ; fur de fi belles
paroles les Habitans d'Orange,
d'Efope , & de Corlard , abanFévrier 1710.
K
114 MERCURE
#
donent leurs habitations &leurs
biens , courent aux armes.
Ceux de Manhate qui eft da
principale Place de la NouvelleYork , avec leur Gouverneur fe
·laiffent auffi éblouir par les difcours qu'on a foinde femer parmy.
eux , les Habitans de Bafton les
entrainent comme , malgré eux
dans cet expedition ; ils fe mettent
en marche , charient quantité
de provifions de bouche , bâtiffent
des Forts , pour leur fervir de
refuge en cas de défavantage , ils
fontde grandes dépenfes pour des
Convoys & des Munitons prodigieufes en Bombes , Canons ,
GALANT
Grenades , Pierriers . Toutes
ces démarches fembloient devoir
porter la terrear non feulement à
ta nouvelle France ; mais encore à
toute l'Amerique Septentrionalle ,
attirer tous les Sauvages dans
leur parti , neanmoins les Iroquois les plus aguerris d'entr'eux
nebranlentpoint , & les Sonontboüans demeurent neutres. Les
François loin de craindre les Anglois , vont au - devant d'eux ,
battent un de leur parti , font des
Prifonniers & les provoquent
de nouveau au Combat fans que
ces mêmes François ayant perdu
ancun des leurs. Tout nouvelleKij
116 MERCURE
ment nous venons de leur prendre
un Lieutenant qu'on a amené icy
Prifonnier. Une Flutte GardeCôtede Baftonavoit eſtépriſe par
nos gens avec buit Barques chargées de munitions qui alloient audevant de la Flote d'Ecoffe , qui
avoit ordre de la Reine Anne de
Se rendre maistre du Canada.
Ajoutez à cela tous nos petits
partis , difperfez çà , & là, qui
nous ont aporté plufieurs cheve
lures d'Anglois , ce qui a furieufement inquieté nos Ennemis
comptant laplupartdes Sauvages
dans leur parti,
pran
Nous avons vu icy au mois
GALANT 117
de Juillet un Phénomene qui a
fait parler diferemment bien des
fortes de ge
moyenne région de l'Air & avoit
à peu prés le difque apparent de
la Lune. Il yen eut à qui ilne
Sembla eftre qu'à la hauteur des
Arbres àdeuxcents pas d'eux,
tout Montreal l'a vu auffi- bien
que Quebec. Comme tout eft extrême en ce Pays- cy, & quepar
opofition au grandfroid , ilyfait
une chaleur exceffive en Esté
cette exhalaifon s'eft aparamment
formée d'une matiere déja toute
prefte:mais laiffons à Meffieurs
les Philofophes deviner ces effets
gens. Il parut dans la
118 MERCURE
de la nature , racontons quel
que chose qui vous touchera
peut- êtredavantage.
Les Iroquois quoyque battus
deux ou troisfois parles Outaouacs
depuis la Paix , n'ont pas encore remué , quoyque dans l'ame ,
ils ayent , à ce que quelques gens
croyent , bien envie defe vanger.
Les Aniés une des cinq Nations ,
la bonne amie des Anglois la
plus voifine de New York
incitez par nos Ennemis ,fe font
hazardez de venir , par une
lâchefurprife , lever la chevelure
à trois on quatre de nos Iroquois,
du Sant Saint Louis , à une lieuë
GALANT 119
&demie du Montreal,
Nous ménageons les Sauvages & ce n'eft pas peu de les
conferver dans la neutralité
contre lesfollicitations importunes
tres artificieufes de PeterSchuyler , vulgairement appellé
Pitre-Schulle , Major d'Elbanie où Orange en New York, fin
Renard , quipar des prefens réïterez e des difcours adroits
tâche de les metre ( au moins quelques Nations ) dans le parti des
Anglois. Mr de Jonquiere
réuffi merveilleufement auprés des
Sononthouans des Goyogouens
durant plufieurs années qu'il
120 MERCURE
efté auprés d'eux , pour les tenir
affectionnez à la Colonie , ce qui
luy a fait effuyer bien des fatigues. Mr le Baron de Longüeil
Major de Montreal , cheri de
pere en fils de ces Nations , eft allé
chez eux en Ambaffade pour Ne
gotier au moins une neutralité qui
foit ferme & pour les tenir en
refpect. La Nation des Sononthoüans femble être toute entiere.
pournous , & celle des Goyogoüins
enpartie ; ceux - cy quoyque gouvernezpar les premiers , je veux
dire par les Sononthoüans , une
des cinq Nations laplus nombreuSe,font partagez ce qu'ily a
de
GALANT 121
les
de remarquable c'est que les Iro
quois appellent les François ( en
la perfonne de leur Gouverneur
General ) leur Pere , & que
Anglois ne font confiderez chez
eux (fi peut-être on n'en excepte
les Aniez qui depuis du temps
paroiffent leurs grands amis ) que
comme leur Frere.
Voicy les morts les plus confiderables dans la Colonie , de cette
année. Mrle Marquis de Chryfaphi Gouverneur de la Ville des
Trois Rivieres , je ne vous apren
dray point icy , comme une chofe
nouvelle que cette Place eft égale
ment éloignée de Quebec , & de
Février 1710. L
122 MERCURE
Montreal , c'est ce que vous avez
pú connoître par mes precedentes
auffi-bien que beaucoup d'autres
éclairciffemens ou explications
que je ne repeteray pas dans cette
Lettre- ci, depeurde vous ennuyer.
Nous avons auffiperdu Mr de
Linetot MajordesTrois Rivieres.
Mrde Lorimier Capitaine. Mr
de Lor Biniere Doyen des Confeillers du Confeil Souverain de
Quebec un Chanoine de la
Cathedrale , ( Mr Petit ) jou
bliois le Pere ChauffetierJefuite ,
ce bon Pere-ci prétendoit il y a
quelques années avoir trouvé
le fecret de faire du pain avec
د
*
GALANT 123
certaine racine , qui auroit pû
fupléer au pain ordinaire dans un
befoin.
Je finis ma Lettre , que vous
recevez par la Bellone , petite
Fregate defeize Canons , en vous
marquant les perfonnes les plus
confiderables quipaffent en France dans ce Vaiffeau. Me la
Marquife de Vaudreuil femme
de Mrle Gouverneur General ,
s'y embarqua avec Me du Mefnil femme du Major des Troupes
de la Colonie. Mrle Vallet Chanoine de cette Ville & Secretaire
de Monfeigneurde Saint Vallier
noftre Evêque , Mr le Vaſſeur
Lij
124 MERCURE
Ingenieur envoyépar le Roy , c.
C'est avec les mêmes fentimens d'eftime & de wespect que
j'auray toujours pour vous , que
je fuis tres-parfaitement.
·
MONSIEUR,
Voftre tres- humble tresobéiffant ferviteur,
N.D.D
que je vous envoye une Relation de ce qui s'eft paffé en
Canada pendant le cours de
chaque année ; mais quelques
incidens font caufe que je vous
envoye celle que vous allez lire , quelques mois plus tard
quevous n'avez accoûtumé de
la recevoir tous les ans. Elled
vient d'un Officier François quis
eft dans l'Armée Canadienne.
"
GALANTNY 81
$ srpos ench notede af M
A Quebec le 12°. Novembre
299NING 27731709. riba vit
MONSIEUR,
La Defcription étonnante que
vous mefaites de l'Hyver qui a
ravagé l'Europe cette année , m’a
fait faire les reflexions ordinaires
fur le froid que l'on fent en ce
pays - cy. Et effectivement j'ay
admiré plus d'une fois.comment
les racines des Plantes , les Bois,
లో les Animaux, fans parler des
Habitans , refiftoient non-feulement a de tels froids , mais encore
82 MERCURE
à celuy que nous avons éprouvé
icy , vers la fin de l'année 1708 .
peu prés vers le temps que je
finiffois les dernieres Lettres queje
vous ay adreffées ; car il a eftéfi
pénetrant & fi vif, que s'il avoit
continué de la mêmeforce , je crois
quenous aurions tous peri & que
nous ferions tous morts dans les
commencemens d'un Hyverfi affreux. Mais le Seigneur n'a point
permis que nous avons fouffert au
deffus de nos forces.
Ainfi quelque rude qu'ait éfté
Hyver dans vos climats temperez d'ailleurs , il l'a efté incompa
rablement davantage en Canada,
GALANT 83
où la gelée commença vers la fin
de Novembre & perfevera fi
fortement, que dans les derniers
jours de Decembre ( 1708. ) le
Fleuve de S. Laurent , fe trouvaglacéjusqu'à laprofondeur de
dix pieds , & qu'il y avoit déja
quatre pieds de nége fur terre. Je
le repete encore , Monfieur , jepenfe que la Colonie auroit peryſi la
gelée avoit continué de cette violence. Et certes les Anglois fiirritez contre nous auroient eu alors
bon marché du Canada.
Ce froid exceffif nous quitta
fans doute pour vous aller rendre
vifte, puifque vous me marquez
84. MERCURE
que le premierjour de la grande
gelée commença le 6. ou 7. deFanvier de l'année fuivante ( 1709)
ce que je puis vous dire , c'est que
toutes ces horreurs de la nature ,
n'ontpoint efté un obftacle à la terre dela Nouvelle France , de nous
donnerd'affez bonsfruits, &aux
hommes de vivre ; au contraire
nous remarquons que ce froid
tribue à la fanté, & que la nége
qui regnefi longtemps dans l'AmeriqueSeptentrionale , l'engraifmerveilleufement , la moiffon
ayant efté abondante cette année-ci
en bled & enfruits; quoy qu'on
ne féme qu'à lafin d'Avril , le
fe
con-
GALANT 85
blé eft preft à couper au mois
( Je ne commenceray points
Monfieur, les Nouvelles que j'ay
à vous mander de ce pays-cy, par
ce qui s'eft paffé en l'Ile de Terre
Neuve au Fort S. Jean que nous
avons pris aux Anglois , parce
queje connois par vos Lettres que
vous en avez eftéinftruit en France , même d'aſſez bonne heure ;
à quoy je vous prie de faire
attention icy , eft que cette entreprife qui a estéexecutée avecbeaucoupde vigueur où entr'autres,
le fieur de la Ronde , d'une ancien="
ciennefamille de Canada s'eft dif-
86 MERCURE
tingué parfa bravoure intrigue
fort, non - feulement les Anglois
nos voiſins , mais encore ceux que
nous appellons icy les Anglois de
la Vieille- Angleterre, qui au
retour de ce qu'ils poffedent aux
Ifles - Antilles & ailleurs dans
l'Amerique, venoientfe relâcher,
ou radouber en ce Port , qui par
confequent leur eftoit fort commode.
Plufieurs des noftres difent icy
que la prife de ce Pofle & le ravage qu'on afait aux environs ,
va àfix millions. On dit que
Pefche que l'on faifoit proche la
Rade de S.Jean & aux Bancs
la
GALANT 87
voifins , valloit quatre millions de
rente à la Reine Anne. Nous
avons icy le Commandant ( le
Colonel Lloyd ) de ce Fort , prifonnieravecplufieurs Officiers, &
Soldats on Habitans de fon Gouvernement. Ila , àce qu'onpublie
dans Quebec , cent mille livres de
bien, & il veut fe marier icy &
époufer la veuve de Mr de Maricourt mort en 1704. Il eftoit
Capitaine dans cette Colonie &
freredu fameux Mr d'Yberville
qui s'eft fi fort diftingué fur mer
par fa valeur. Un Ecclefiaftique
tres-zelé, du Seminaire de Saint
Sulpice de Ville - Marie en l'Ifle
88 MERCURE
de Montreal, qui fait parfaite
ment l'Anglois , eft defcendu icy
pour travailler à la converfion de
ce Gouverneur Anglois , car
prétend, & il a témoigné librementfon deffein là-deffus , renoncer à la Religion Proteftante &
fe faire Catholique.
L'affaire de l'habitation de S.
Jean en Terre-Neuve futfuivie
d'une autre entrepriſe dans laBaye
d'Hudson , au lieu appellé le petit
Nord.
Mr Capitai- de Mantet
ne dans la Colonie enfut le Chef;
ce fut au mois d'Avril de cette
année 1709. Le Partife trouva
compofé de centhommes tous Ha.
GALANT 89
bitans & mariez pour la pluspart , mais alertes & entrepre P
nans ; Mr de la Nouě Lieutenant commandoit en ſecond ; à ces
deux Officiers s'en joignirent quel.
ques autres Subalternes ; la marche dura un peu plus de deux
mois , au bout duquel temps , nos
gens arrivez au but , déterminerent lejour de l'attaque au fixiémejour de Juillet. On choifit la
nuitpourcela: les Enfans perdus ,
je veux dire ceux qui marcherent
les premiers , donnerent brufquement & tefte baiffée fur un des
Fortsflanqué de quatre Baſtions ,
Février 1710. H
90 MERCURE
munisfelon le rapport de quelquesuns de ceux qui enfont revenus
de foixantepieces de Canon & de
plufieurs Pierriers. Des Boucaniers a qui le gardoient firent une
decharge terrible & du canon &
de leurs longs fufils qui cependant n'empêcha point ces premiers
des noftres , de pouffer leur pointe
avec une ardeur étonnante , de
rompre la paliẞade faite de gros ·
a Gens déterminez, Chaffeurs , propres
à la découverte , foit dans les terres
foit en mer; on pourroit les appeller
Flibuftiers de terre , auffi bien quede
mer. Les Boucaniers vivent fans façon de chair rôtic plus à la fumé
qu'au feu..
GALANT 91
un
pieux de traverſer un foffe
plein d'eau , large de quinzepieds,
qui estoit au de- là ; comme le feu
de l'Ennemy eftoit violent & continuel , & que le canonfaifoit
fracas horrible , & qu'avec cela
le nombre des Soldats oppofez aux
moftres eftoit tout-à-faitfuperieur,
il fallut fe retirer.
Mrde Mantet qui s'eft particulierement fignalé dans cette action , une des plus vives qui fe
foit faite en Amerique , y a efté
tues MrdeMartigny & douze
on quinze Canadiens ont eu le
mêmefort.
Hij
92 MERCURE
Les Anglois de la Vieille er de
la Nouvelle Angleterre ont efté
cette année dans de grands mouvemens pour s'emparer , fuivant
leur deffein , des trois Gouvernemens de la Colonie ; il neferoit
pas facile de vous expliquer combien ilsfe font remuez pour celae
voicy à peu prés la manœuvre
qu'ils ontfaite pourl'execution
ce projet.
uer.comDés que les Anglois de la Nouvelle Angleterre , & furtout ceux
de Bafton qui en eft la Capitale ,
eurentfçu certainement laprife de
leur Habitation du Port S.Jean ,
une des plus confiderables , ſans
GALANT 93
contredit , qu'ils euffent en TerreNeavepour la Pefche & lafureté de leurs Vaiffeaux qui paſſent
ouquireviennent d'Amerique , its
en donnerent avis à la Reine Anne par de petits Baftimens qu'ils
firent partir en diligence ; de forte
que vers la fin de May, un de
nos PartisSauvages ayantpris un
Officier Anglois du cofté de Bafton,
nous apprimes de luy qu'il leur
eftoit arriué des ordres de leur
Reine , par le Capitaine V'éché ,
dont voicy le contenu , autant que
jay pû m'en reſſouvenir: Que
tous les paysde fa domination
voifins de la Nouvelle - Angle-
$
94 MERCURE
terre ; fçavoir b la NouvelleYorck , le New-Jersey , bla
Penſylvanie , Mariland ( qui
veut dire terre de Marie ) la Vir
ginie & la Caroline ( quifemble
eftre une partie de la Floride ) feroient inceffamment proviſion
de vivres & de munitions de
guerre ; Qu'il feroit levé mille
hommes bien équipez & armez , qui fe joindroient à huit
mille Ecoffois prefts à s'embarquer au premier vent favora
ble & former une Efcadre de
dix Vaiffeaux de ligne , fans
Tous ces Pays font entre les 45. & 30.
degrez de Latitude Nord.
GALANT 95
compter les Baftimens de char
ge pour les munitions & les
vivres dont on pouvoit avoir
befoin , & cela pour venir
moüiller devant Bafton à la fin
du mois de Juin. Ces Ecoffois
aidez des Anglois de la Nouvelle
Angleterre devoient , felon leur
intention , affieger Quebec &fe
rendre maiftres detoutes les Coftes
d'en bas , jufqu'à la mer;
pays devoit , dans la pensée de la
Reine, leur demeurer , pour récom
penfe de la dépense & des avan
ces faites par ces Ecoffois les
mêmes ordres de la Reine Anne
marquoient : Que les Habitans
o
7
ce
96 MERCURE
du Gouvernement d'Orange
dans New-Yorck avecceux de
Manhate & les Sauvages leurs
Alliez ou Amis , s'uniroient
enfemble pour faire un Corps
d'Armée de trois mille hommes , qui iroit tomber fur le
Montreal , & feroit ainfi diverfion des forces des François.
d'arMrle Marquis de Vaudreüil,
Gouverneur general de la Nonvelle-France ne faifoit que
river à Ville-Marie , la feule
Ville quifoitdans l'Ile de Montreal éloignée foixante lieues de
Quebec ,lors qu'il apprit les deffeins
GALANT 97
feins des Anglois nos voisins, il
affembla le Confeil de Guerre
pour déliberer fur les mesures
qu'onavoit à prendre , &on fut
d'avis d'aller au devant des Ennemis & de les prévenir. Mr de
Ramezay Gouverneur de Mont
real fut destiné pour né pour commander
les Troupes ou Milices defon Gouvernement , &l'on convint d'y
joindre les Sauvages Iroquois
Algonkins , Abnakis , les autres qui font dans le voisinage.
Tout eftant preft ne vous attendez point icy , Monfieur , à des
Arméesdecent mille hommes comme en Europe , mais à des Partis
Février 1710. I
98 MERCURE.
pluteft qu'à des Armées , proportionnez aux Habitans de ces Regions froides ) la petite Armée , ou
le Partifi vous l'aimez mieux ,
commença à fe mettre en marche
vers le 15. deFuillet, & elle fe
* trouva cftre de treize àquatorze
cens hommes ; compofée des Habitans du Gouvernement de lIfle
de Montreal & de Sauvages de
plufieurs Nations. Onfut juf
qu'au c Lac Champlain , ainfi
eCe Lac s'etend depuis le 44. environ,
jufqu'au 45. degré de latitude Septentrionale. On en diftingue deux à
fes extremitez ; c'eft-à dire au Nord
& au Sud, le Lac de S. François au
Nord, & le Lac, dit du S. Sacrement,
au Sud.
QUA
LYON
GALANT 99
DE
appellé d'un ancien Gour
de Canada de ce nom ; Mrle
Marquis de Vaudreuil qui eft
fage & tres vigilantfaifoit pendantce temps- la fortifier de nouveau Quebec & Ville Marie ,
vulgairement dite Montreal ,
l'Habitation la plus importante
de l'Ifle de ce nom. Les Forts des
environs de l'Ile de Montrealfurent vifitez &reparez où ilfalloit on s'attacha beaucoup à d
celuy de Mrle Baron de Longüeil
Major de Montreal qui eft de
d Le Fort de Longueil eft à peu prés au
Sud de l'Ile de Montreal, fur le bord
du Fleuve S. Laurent.
I ij
100 MERCURE
pierre & un desplus confiderables
dela Colonie; celuy de la Prairie,
dité de la Madeleine , au Sudde
de l'Ifle de Montrealfut auffifortifié de nouveau en même temps
que celuy de e Chambly qui eftoit
Le plus expofe aux infultes de
l'Ennemi ; on en conftruifit un de
pierres à Lorette , Miffionfauvage au Nord de Ville -Marie ,
gouvernée par Mrsde S. Sulpice.
Les Découvreurs marchant devant noftre Arméejufques à trois
ou quatre licuës , rencontrerent un
eCe Fott cft au Nord du Lac Champlain , & à environ dix lieues de la
Rivierb de S. Laurent.
GALANT 101
Parti ennemi au lieu dit la Poinre , fà la chevelure de cent vingt
hommes ou environ ; Mr de Ra
mezay le Commandantfut auſſitoft averti , ilfit rangerfes gens en
ordrede Bataille le fignal donné,
on marcha droit aux Anglois , les
noftres donnerent avec vigueurfur
l'Ennemi en tuerent on firent
Prifonniers une bonne partie
mirent le refte en fuite ; quatre
de nos Sauvages qui s'eftoient un
f Ce lieu est éloigné de Quebec d'environ 6o. lieuës , & il n'eft aing nommé qu'à l'occafion de quelques chevelares levées par des Sauvages; mes
Lettres vous ont déja dit comment
cela fe faifoit.
I iij
102 MERCURE
25.
peu trop avancez ,yfurent tuez.
Les Prifonniers nous apprirent que
les Anglois s'eftoient retranchez à
lieues en deça d'Orange , le
long d'une petite riviere , appellée
la Riviere au Chicot , g qu'ils
faifoient conftruire en cet endroit
de grands Batteaux & des Pirogues &un bon nombre de Canots pour venir ravager le Canada, à lafaveur de la Riviere de
Saint Laurent , dans laquelle ils
feroient entrez par le moyen du
Lac Champlain les Anglois
g
s
Du cofté du Lac du S. Sacrement &
vers l'entrie du Lac Champlain, dans
le voisinage de la Nouvelle- Angleterre & de New-Yorck.
GALANT 103.
avoient en effet élevé trois Forts
avec de gros & grands pieux de
bois de cedre blanc qui eft commun
dans l'Amerique Septentrionale,
dans l'un defquels on diſoit qu'ily
avoit fix ou buitpieces de canon ,
des bombes , quantitédegrenades ,
environ quinze ou dix - huit
cens hommespour les garder.
Sur le rapport de ces Prifonniers Anglois , Mr de Ramezay
affembla tous les Officiers de fa
petite Armée, le Confeil trouvantque ceferoit , cefemble , une
temerité quede s'expofer en avançant contre des Ennemis & plus
nombreux, avec cela tres - bien
I iiij)
104 MERCURE
retranchez , on prit le parti de les
attendre de pied ferme , s'ils en
vouloient venir aux mains ; cer
pendant les Efpions des Anglois
ayant rapporté àleur Camp que
noftre Armée eftoitformidable
que le Lac Champlain eftoit tout
couvert de canots , l'allarme fe mit
parmi eux , & aucun des- leurs
neparoiffant , aprésplufieursjours
d'attente , le Chefdu Parti Canadien confiderant que la recolte
dans l'Ile de Montreal & aux
contrées adjacentespreffait, &mêmé qu'elle eftoit déja commencées
renvoya la Milice & les Habitans de Montreal & des Coftes
+
GALANT 105
cela n'empêchapoint qu'on ne laiffaft des Découvreurs aux environs du Pofte que l'on quittoit ,
c'eft à dire vers les Lacs S. François , de Champlain & du S. Sacrement , celuy - cy cftant le plus.
proche des Ennemis , pour avertir
de tout en cas de befoin. La moiffonfefit pendant ce temps- là &a
efté abondante , non-feulement en
blé , mais encore en legumes & en
fruits tels qu'on les peut conferver
en Canada.
On ramaffoittranquilement les
biens que le Ciel nous avoit don
nez de fa main toute liberale , lors
que vers le 15.du mois de Septem-
106 MERCURE
bre tout à coup un Sauvage qui
avoitdefertédu Camp des ennemis».
vintdire au Montreal queles En
nemis eftoient enmarche du cofté du
LacChamplain. MrdeRamezay
envoya en diligence ce Sauvage à
Mr le Marquis de Vaudreuil
qui eftoit defcendu à Quebecpour .
j bien recevoir les Ennemis , qui
felon le bruit qui couroit, prétendoient l'affieger avec des forces
nombreuſes &par mer &parterre. Les Officiers s'eftant affemblez
chez Mrle Gouverneur general ,
onconclutque le Montrealfe trouvant endanger, ilfalloit lefecou
courir, les Découvreurs que Mr
GALANY 107.
deVaudreuilavoit envoyez àplus
de foixante lieuës au - deffous de
Quebec , ne voyant rien fur le
Fleuve nyfur les Coftes ; l'ordre
ayant donc efté donnépour monter
le Fleuve de S. Laurent , il fe
trouva mille hommes du Gouver
ment de Quebec , preſts à marchers
Mr le Marquis deVaudreuil General de toute la Colonie , fe mit
à la tefte & fut droit au Fort
Chambly, vers l'entrée du Lac
Champlain tous les Sauvages
d'enbas premierement ceux des
environs de Quebec & des trois
Rivieres , fejoignirent à la Milice de la Cpitaledu Canada. Ace
108 MERCURE
Corps de Troupes fe joignit celuy
du Gouverneur de Montreal Mr
de Ramezay , ce qui forma une
Armée d'environ trois mille hom
mes. Le lieu du Campfut affigné
auLac & Fort de Chambly affez
prés du LacS. François quife communique à celuy de Champlain
mais comme aprés trois semaines
ou environ , l'Ennemi ne faifoir
aucun mouvement , on commença
à fe défier du Sauvage deferteur
de fon rapport: ce futen cette
fituation que Mr le Gouverneur
general reçut avis de Quebec , au
commencement d'Octobre , que la
Bellone Fregatte Françoise venois
GALANT 109
"de mouiller devant cette Ville , &
que l'Efcadre Ecoffoife deftinée
pourfaire le Siege de la Capitale
du Canada & favorifer l'attaque
des Anglois par en haut , c'est- àdire du cofté de Montreal , avoit
eu ordre de la Reine Anne de faire
voile vers le Portugal , à caufe
que MrleMarquis de Bay Commandant en Eftramadoure pour
PhilippeV. Roy d'Espagne, avoit
battue défait les Portugais &
les Anglois leurs Alliez. Mr le
General les Officiers de l'Armée Canadiennejugeantdoncqu'il
n'y avoit plus rien à craindre , la
faifon d'ailleurs eftant fort avan
براج
110 MERCURE
cée , on congedia la plupart des
Troupes. Neanmoins MrdeVaudreüil permit à Mr de Montigny
Capitaine tres-brave defaperfonne , que vous avez pu voir à la
Courily a quelques années , accompagné d'un ChefdesSauvages de la nation des Abnakis , de
fe mettre à la tefte d'un petit Parti, compofé de Canadiens experimentez &de Sauvages aguèrris,
pour tacher defaire quelques Prifonniers. Quelques- uns de ce petit
Parti , s'avancerent fi prés des
Forts des Anglois , qu'ils en fçûrent aisément & le nombre
forme. Fuſques à prefent , nous
la
*
GALANT III
n'avons perdu aucun des noftres ,
fice n'eft quatre Sauvages qui s'étoient engagez trop avant , dans
-le combat fous Mrde Ramezay.
Les Ennemis, fi on en croit un
Anglois amené depuis peu par un
Sauvage Abnaki , appellé Carnaret , efperent executer l'année
prochaine ce qu'ils n'ont pas fait
・
celle-cy.
La conclufion de toute la manœuvre des Anglois nos voisins &
de tout ce qu'avoit projetté leur
Reine , eft qu'il leur en coûte environfix millionspour le tout. On
compte cinq millions cinq ou fix
recent mille livres pour la Flotte
112 MERCURE
d'Ecoffe , fur lefquels cinq mil
lions , la Reine avoit fourni la
fomme de cinq ou fix cens mille
Livres , pour encourager les Ecoffois à fe rendre maiftres de toute
la Nouvelle- France , &environ
un million , tant au Baftonnois
qu'à ceuxde la Ménade on Manhate e d'Orange à qui la Reine
Anne donnoit en recompenfe tout
le Pays de Canada qui eft depuis
l'Ile de Montreal jufqu'à Quebec.
Lefuccés n'ayant point répondu à l'atente des Peuples de la
Nouvelle- Angleterre , de NewYork , & autres Pays fujets àla
CALANT 113
Reine Anne en Amerique , fur
lefquels on avoit levé de rudes
impôts & tiré d'exceffives contributions , ils commencent déja à
temoigner hautement leur mécontentementfur tout contre Pitref
culle , Major d'Orange , le principalboute-feu de la Guerre alumée contre nous qui jufqu'à .
prefent les à leurré de vaines
promeffes , leur faifant entendre
qu'il attireroit dans le parti de
l'Angleterre toutes les Nations
Iroquoifes par de magnifiques &
de riches prefens ; fur de fi belles
paroles les Habitans d'Orange,
d'Efope , & de Corlard , abanFévrier 1710.
K
114 MERCURE
#
donent leurs habitations &leurs
biens , courent aux armes.
Ceux de Manhate qui eft da
principale Place de la NouvelleYork , avec leur Gouverneur fe
·laiffent auffi éblouir par les difcours qu'on a foinde femer parmy.
eux , les Habitans de Bafton les
entrainent comme , malgré eux
dans cet expedition ; ils fe mettent
en marche , charient quantité
de provifions de bouche , bâtiffent
des Forts , pour leur fervir de
refuge en cas de défavantage , ils
fontde grandes dépenfes pour des
Convoys & des Munitons prodigieufes en Bombes , Canons ,
GALANT
Grenades , Pierriers . Toutes
ces démarches fembloient devoir
porter la terrear non feulement à
ta nouvelle France ; mais encore à
toute l'Amerique Septentrionalle ,
attirer tous les Sauvages dans
leur parti , neanmoins les Iroquois les plus aguerris d'entr'eux
nebranlentpoint , & les Sonontboüans demeurent neutres. Les
François loin de craindre les Anglois , vont au - devant d'eux ,
battent un de leur parti , font des
Prifonniers & les provoquent
de nouveau au Combat fans que
ces mêmes François ayant perdu
ancun des leurs. Tout nouvelleKij
116 MERCURE
ment nous venons de leur prendre
un Lieutenant qu'on a amené icy
Prifonnier. Une Flutte GardeCôtede Baftonavoit eſtépriſe par
nos gens avec buit Barques chargées de munitions qui alloient audevant de la Flote d'Ecoffe , qui
avoit ordre de la Reine Anne de
Se rendre maistre du Canada.
Ajoutez à cela tous nos petits
partis , difperfez çà , & là, qui
nous ont aporté plufieurs cheve
lures d'Anglois , ce qui a furieufement inquieté nos Ennemis
comptant laplupartdes Sauvages
dans leur parti,
pran
Nous avons vu icy au mois
GALANT 117
de Juillet un Phénomene qui a
fait parler diferemment bien des
fortes de ge
moyenne région de l'Air & avoit
à peu prés le difque apparent de
la Lune. Il yen eut à qui ilne
Sembla eftre qu'à la hauteur des
Arbres àdeuxcents pas d'eux,
tout Montreal l'a vu auffi- bien
que Quebec. Comme tout eft extrême en ce Pays- cy, & quepar
opofition au grandfroid , ilyfait
une chaleur exceffive en Esté
cette exhalaifon s'eft aparamment
formée d'une matiere déja toute
prefte:mais laiffons à Meffieurs
les Philofophes deviner ces effets
gens. Il parut dans la
118 MERCURE
de la nature , racontons quel
que chose qui vous touchera
peut- êtredavantage.
Les Iroquois quoyque battus
deux ou troisfois parles Outaouacs
depuis la Paix , n'ont pas encore remué , quoyque dans l'ame ,
ils ayent , à ce que quelques gens
croyent , bien envie defe vanger.
Les Aniés une des cinq Nations ,
la bonne amie des Anglois la
plus voifine de New York
incitez par nos Ennemis ,fe font
hazardez de venir , par une
lâchefurprife , lever la chevelure
à trois on quatre de nos Iroquois,
du Sant Saint Louis , à une lieuë
GALANT 119
&demie du Montreal,
Nous ménageons les Sauvages & ce n'eft pas peu de les
conferver dans la neutralité
contre lesfollicitations importunes
tres artificieufes de PeterSchuyler , vulgairement appellé
Pitre-Schulle , Major d'Elbanie où Orange en New York, fin
Renard , quipar des prefens réïterez e des difcours adroits
tâche de les metre ( au moins quelques Nations ) dans le parti des
Anglois. Mr de Jonquiere
réuffi merveilleufement auprés des
Sononthouans des Goyogouens
durant plufieurs années qu'il
120 MERCURE
efté auprés d'eux , pour les tenir
affectionnez à la Colonie , ce qui
luy a fait effuyer bien des fatigues. Mr le Baron de Longüeil
Major de Montreal , cheri de
pere en fils de ces Nations , eft allé
chez eux en Ambaffade pour Ne
gotier au moins une neutralité qui
foit ferme & pour les tenir en
refpect. La Nation des Sononthoüans femble être toute entiere.
pournous , & celle des Goyogoüins
enpartie ; ceux - cy quoyque gouvernezpar les premiers , je veux
dire par les Sononthoüans , une
des cinq Nations laplus nombreuSe,font partagez ce qu'ily a
de
GALANT 121
les
de remarquable c'est que les Iro
quois appellent les François ( en
la perfonne de leur Gouverneur
General ) leur Pere , & que
Anglois ne font confiderez chez
eux (fi peut-être on n'en excepte
les Aniez qui depuis du temps
paroiffent leurs grands amis ) que
comme leur Frere.
Voicy les morts les plus confiderables dans la Colonie , de cette
année. Mrle Marquis de Chryfaphi Gouverneur de la Ville des
Trois Rivieres , je ne vous apren
dray point icy , comme une chofe
nouvelle que cette Place eft égale
ment éloignée de Quebec , & de
Février 1710. L
122 MERCURE
Montreal , c'est ce que vous avez
pú connoître par mes precedentes
auffi-bien que beaucoup d'autres
éclairciffemens ou explications
que je ne repeteray pas dans cette
Lettre- ci, depeurde vous ennuyer.
Nous avons auffiperdu Mr de
Linetot MajordesTrois Rivieres.
Mrde Lorimier Capitaine. Mr
de Lor Biniere Doyen des Confeillers du Confeil Souverain de
Quebec un Chanoine de la
Cathedrale , ( Mr Petit ) jou
bliois le Pere ChauffetierJefuite ,
ce bon Pere-ci prétendoit il y a
quelques années avoir trouvé
le fecret de faire du pain avec
د
*
GALANT 123
certaine racine , qui auroit pû
fupléer au pain ordinaire dans un
befoin.
Je finis ma Lettre , que vous
recevez par la Bellone , petite
Fregate defeize Canons , en vous
marquant les perfonnes les plus
confiderables quipaffent en France dans ce Vaiffeau. Me la
Marquife de Vaudreuil femme
de Mrle Gouverneur General ,
s'y embarqua avec Me du Mefnil femme du Major des Troupes
de la Colonie. Mrle Vallet Chanoine de cette Ville & Secretaire
de Monfeigneurde Saint Vallier
noftre Evêque , Mr le Vaſſeur
Lij
124 MERCURE
Ingenieur envoyépar le Roy , c.
C'est avec les mêmes fentimens d'eftime & de wespect que
j'auray toujours pour vous , que
je fuis tres-parfaitement.
·
MONSIEUR,
Voftre tres- humble tresobéiffant ferviteur,
N.D.D
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Résumé : A Quebec le 12e. Novembre 1709.
En novembre 1709, une lettre décrit divers événements survenus au Canada. L'hiver 1708-1709 a été particulièrement rigoureux, avec des températures extrêmement basses et une épaisse couche de neige. Malgré ces conditions, la colonie a produit de bons fruits et la neige a fertilisé les terres. La lettre relate également des victoires militaires françaises. Les Français ont pris le Fort Saint-Jean à Terre-Neuve, dirigé par le sieur de la Ronde, causant des pertes financières significatives aux Anglais. Une autre expédition française a attaqué un fort anglais dans la baie d'Hudson. Les Anglais préparaient une grande offensive pour s'emparer des gouvernements de la colonie française, mais les Français ont renforcé leurs positions et organisé des patrouilles. Une confrontation à la Pointe à la Chevelure a vu la victoire des Français, qui ont capturé des prisonniers révélant les plans anglais de construire des bateaux pour envahir le Canada. Sur le plan militaire, les officiers français, sous le commandement de Monsieur de Ramezay, ont décidé de ne pas avancer contre les ennemis plus nombreux et bien retranchés, préférant les attendre. Les espions anglais ont rapporté que l'armée française était formidable, provoquant une alarme parmi les Anglais. Monsieur de Vaudreuil, gouverneur général, a rassemblé une armée de trois mille hommes près du lac Champlain. Après trois semaines sans mouvement ennemi, les Français ont appris que la flotte écossaise destinée à attaquer Québec avait été redirigée vers le Portugal. Les Français ont alors congédié la plupart des troupes. Monsieur de Montigny a mené une petite expédition contre les prisonniers anglais. Malgré leurs efforts et dépenses, les Anglais n'ont pas réussi à attirer les nations iroquoises dans leur camp. Les Français ont capturé des prisonniers et des munitions, et les Iroquois sont restés neutres. Le texte mentionne également des phénomènes naturels et des décès notables dans la colonie.
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1927
p. 124-129
Changement fait dans la Marine, de laquelle l'Intendance generale est donnée à Mr de Beauharnois, [titre d'après la table]
Début :
Je devois vous avoir envoyé dés le mois dernier l'Article que [...]
Mots clefs :
Intendance Générale, Intendant des Galères, Marine, Navigation
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Changement fait dans la Marine, de laquelle l'Intendance generale est donnée à Mr de Beauharnois, [titre d'après la table]
Jedevois vous avoir envoyé
dés le mois dernier l'Article que
vous allezlire ; mais je n'eftois
pas encore affez bien informé
de tout ce qui le regarde.
GALANT 125
LeRoya donné l'Intendance Generale de la Marine à Mr
de Beauharnois , qui avoit celle
des Armées Navalles , dont
Sa Majefté a pourveu Mr de
Montmor Maiſtre des Requef
tes & Intendant des Galeres à
Marſeille ; le choix de S. M.
en faveur de ces deux Mrs qui
vous font connus par leurs
fervices , a efté generalement
applaudy dans la Marine, dont
Mr de Beauharnois remplit
aujourd'huy la premiere Intendance & qui l'a toujours
efté par des perfonnes de diftinction , quand la Charge
Liij
126 MERCURE
d'Amiral fut fuprimée par
Louis XIII. & celle de Grand
Maiftre Chef & Surintendant'
de la Navigation & Commerce de France crée en faveur du
Cardinal de Richelieu , qui
le premier commença à former
unCorps confiderable de Marine pour faire connoiſtre fur,
la Mer l'autorité du Royfon
Maiftre ; le Commandeur de
la Porte oncle de ce Cardinal
cut fous ce Miniftre l'Intendance Generale de la Navigation & Commerce de France
avec une Infpection fur les
affaires de la Marine. Le Roy
GALANT 127
ayant en 1681. ordonné que
tous les Matelots du Royaume
fuffent enrôllez & diftribuez.
par claffes , S. M. attribua à
cette Intendance dont fût
pourveu Mr de Bonrepos , qui
depuis a efté Ambaffadeur Extraordinaire en Dannemarck ,
& en Hollande & Plenipotentiaire auprés des Princes d'Allemagne, uneautorité fur tous
les Officiers Mariniers & Matelots des Provinces maritimes.
du Royaume avec pouvoir de
juger en dernier reffort avec le
plus prochain Prefidial , où le
nombre de Graduez porté par
Liiij
128 MERCURE
l'Ordonnance de toutes les
contraventions aux Ordonnances &
Reglemens du Roy
fur l'enrôllement des Matelots
& le fait des Claffes; d'en ordon
ner des fonds , d'en faire rendrecompte aux Commiffaires
de la Marine & aux Claffes &
de tout ce qui regarde leurs
fonctions &
d'avoir entrée
&
fceance dans, les Confeils
qui fe tiennent pour les entreprifes dela Guerre &
pour tout
ce qui concerne l'action des
forces maritimes.
Lorfque Mr
de Beauharnois remercia le
Royde l'avoir nommé à cette
GALANT 129
Intendance , Sa Majesté luy
dit avec l'air de bonté dont
elle accompagne toujours les
graces qu'elle fait qu'Elle eftoit
perfuadée qu'il la rempliroit auffi
dignement qu'il avoit fait les
autres emplois qu'Elle luy avoit
jufqu'à prefent confiez pourfon
Service.
dés le mois dernier l'Article que
vous allezlire ; mais je n'eftois
pas encore affez bien informé
de tout ce qui le regarde.
GALANT 125
LeRoya donné l'Intendance Generale de la Marine à Mr
de Beauharnois , qui avoit celle
des Armées Navalles , dont
Sa Majefté a pourveu Mr de
Montmor Maiſtre des Requef
tes & Intendant des Galeres à
Marſeille ; le choix de S. M.
en faveur de ces deux Mrs qui
vous font connus par leurs
fervices , a efté generalement
applaudy dans la Marine, dont
Mr de Beauharnois remplit
aujourd'huy la premiere Intendance & qui l'a toujours
efté par des perfonnes de diftinction , quand la Charge
Liij
126 MERCURE
d'Amiral fut fuprimée par
Louis XIII. & celle de Grand
Maiftre Chef & Surintendant'
de la Navigation & Commerce de France crée en faveur du
Cardinal de Richelieu , qui
le premier commença à former
unCorps confiderable de Marine pour faire connoiſtre fur,
la Mer l'autorité du Royfon
Maiftre ; le Commandeur de
la Porte oncle de ce Cardinal
cut fous ce Miniftre l'Intendance Generale de la Navigation & Commerce de France
avec une Infpection fur les
affaires de la Marine. Le Roy
GALANT 127
ayant en 1681. ordonné que
tous les Matelots du Royaume
fuffent enrôllez & diftribuez.
par claffes , S. M. attribua à
cette Intendance dont fût
pourveu Mr de Bonrepos , qui
depuis a efté Ambaffadeur Extraordinaire en Dannemarck ,
& en Hollande & Plenipotentiaire auprés des Princes d'Allemagne, uneautorité fur tous
les Officiers Mariniers & Matelots des Provinces maritimes.
du Royaume avec pouvoir de
juger en dernier reffort avec le
plus prochain Prefidial , où le
nombre de Graduez porté par
Liiij
128 MERCURE
l'Ordonnance de toutes les
contraventions aux Ordonnances &
Reglemens du Roy
fur l'enrôllement des Matelots
& le fait des Claffes; d'en ordon
ner des fonds , d'en faire rendrecompte aux Commiffaires
de la Marine & aux Claffes &
de tout ce qui regarde leurs
fonctions &
d'avoir entrée
&
fceance dans, les Confeils
qui fe tiennent pour les entreprifes dela Guerre &
pour tout
ce qui concerne l'action des
forces maritimes.
Lorfque Mr
de Beauharnois remercia le
Royde l'avoir nommé à cette
GALANT 129
Intendance , Sa Majesté luy
dit avec l'air de bonté dont
elle accompagne toujours les
graces qu'elle fait qu'Elle eftoit
perfuadée qu'il la rempliroit auffi
dignement qu'il avoit fait les
autres emplois qu'Elle luy avoit
jufqu'à prefent confiez pourfon
Service.
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Résumé : Changement fait dans la Marine, de laquelle l'Intendance generale est donnée à Mr de Beauharnois, [titre d'après la table]
Le texte évoque les récentes nominations au sein de la Marine française. Monsieur de Beauharnais a été nommé Intendant Général de la Marine, succédant à son rôle précédent aux Armées Navales. Monsieur de Montmor a été désigné Maître des Requêtes et Intendant des Galères à Marseille. Ces nominations ont été favorablement accueillies en raison de la reconnaissance des services de ces individus. Le texte retrace également l'histoire des hautes fonctions de la Marine. Sous Louis XIII, la charge d'Amiral fut abolie et remplacée par celle de Grand Maître et Surintendant de la Navigation et du Commerce de France, attribuée au Cardinal de Richelieu. Ce dernier constitua une marine importante pour renforcer l'autorité royale en mer. Le Commandeur de la Porte, oncle du Cardinal, supervisa l'Intendance Générale de la Navigation et du Commerce, ainsi que les affaires maritimes. En 1681, le Roi institua l'enrôlement et la distribution des matelots par classes. Monsieur de Bonrepos, Intendant, obtint une autorité sur tous les officiers mariniers et matelots des provinces maritimes. Il pouvait juger les infractions aux ordonnances royales, gérer les fonds, et participer aux conseils concernant les opérations militaires et les actions navales. Lors de sa nomination, Monsieur de Beauharnais a exprimé sa gratitude au Roi, qui lui a renouvelé sa confiance.
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1928
p. 129-136
Prises d'Habits, par Mlles de Druy, [titre d'après la table]
Début :
Je vous envoye un Article que je n'ay pû vous envoyer [...]
Mots clefs :
Habit, Chanoinesse, Mlles de Druy
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Prises d'Habits, par Mlles de Druy, [titre d'après la table]
Je vous envoye un Article
que je n'ay pû vous envoyer
plutoft , parce que je ne viens
que d'eftre informé de ce qui le
regarde.
Le 13. Decembre Miles de
Druy ,prirent l'Habit de Chanoineffes dans l'Abbaye de
130 MERCURE
Poulangy en Champagne ,
Diocefe de Langres. Elles font
filles de feu Mr le Marquis de
Druy, & de Dame Henriette
de Saulx de Tavanes. It eftoit
Major de la Gendarmerie
Charge qu'il avoit plû au Roy
de créer en fa faveur. Il fut tué
à la Bataille de la Marſaille en
Piémont. C'eftoit un homme
d'un merite au- deffus du comfoit pour ce qui regarde mun ,
la Profeffion des Armes , l'ufage du monde & les Sciences.
Le Roy même le traitoit avec
diftinction , & le confideroit
beaucoup. Il eftoit frere de Mr
1
GALANT 131
le Comte de Druy, Leutenant
de la premiere Compagnie des
Gardes du Corps , Lieutenant
general des Armées de Sa Majefté , &Commandant aujour
d'huy les Troupes qui font à
Luxembourg & dans le Pays
de Treves. Je ne vous diray'
rien de la Maifon de ces deux
Chanoineffes qui eft affez connue. LaCeremonic fut faitepar
Mrl'Evêque Duc de Langres ,
&par Me l'Abbeffe , fœur de
Mr le Maréchal de Choifeul.
L'Affemblée fut tres nombreufe & tres illuftre , plufieurs
perfonnes de la Nobleffe de
-
132 MERCURE
IS
Lorraine , de Bourgogne &
de Champagne , s'eftant trouvées à cette Ceremonie , du
nombre defquelles étoient M'S
&Mes de Vaudemont , de Levy , de Pezeux , de Chaſtellux ,
de Rennepont , de Salles , de
Briaille , & de Montendre. Les
perfonnes de la famille de ces
deux jeunes Dames qui y affiffterent , furent M° la Marquife
de Druy leur mere , Mr l'Abbé de Druy Elû des Etats de
Bourgogne , leur oncle , M'le
Comte du Montal frere deleur
mere , Mlle du Montal auffi
fœur uterine , & Mlle de Druy
GALANT 133.
de Courcelle autre fœur. Il y
avoit foixante couverts dans la
grande Salle de l'Abbaye , tant
pour les Dames Chanoineffes ,
que pour toutes les perfonnes
de qualité qui fe trouverent
cette Ceremonie. Toute cette
Illuftre Affemblée alla dans
l'Eglife par ordre. Mr le Comte du Montal donnoit la main
à Mlle de Druy l'aînée , fa
foeur Mr l'Abbé de Druy
leur oncle , la donnoit à la cadette , nominée Mlle de Vitry,
pour la diftinguer de fon aînée.
LeR. P. Gonin Preftre de l'Oratoire & Superieur du Semi-
134 MERCURE
›
naire de Dijon , fit un fort
beau Sermon. Cette Ceremonie fe fait felon l'ancien uſage
de la Maiſon. Les Chanoineffes qui fe font recevoir , quittent les habits du fiecle , &
tefte nuë avec un cierge à la
main, elles viennent demander
de l'eau à M' l'Evêque & àM°
l'Abbeffe , qui eft à coté de ce
Prelat. Onleur couppe unpeu
de cheveux, & enfuite on les
coëffe comme les autres Dames , à la referve que le petit
voile nommé le Mari , eft
blanc. Mr de Langres leur fit
une Exhortation des plus élo-
*
GALANT 135
quentes. Ces jeunes Demoifelfelles fe firent admirer par leur
modeftie & par leur bonne grace. Elles font belles & ont beaucoup d'efprit. Elles ont eſté
bien élevées foit chez M° leur
mere , foir dans la celebre Abbaye de Farmoutier.
On nereçoit dans l'Abbaye
de Poulangy que des Filles de
qualité ; elles font des vœux
commé les autres Religieufes ;
elles font habillées de nair , &
elles ont chacune leur Prebende , & leurs appartemens feparez dans l'enceinte de la Maifon qui eft affez connuë par la
136 MERCURE
quantité de Filles de diſtinction
qu'elle renferme & par ſon antiquité , & plus encore par la
fageffe.
que je n'ay pû vous envoyer
plutoft , parce que je ne viens
que d'eftre informé de ce qui le
regarde.
Le 13. Decembre Miles de
Druy ,prirent l'Habit de Chanoineffes dans l'Abbaye de
130 MERCURE
Poulangy en Champagne ,
Diocefe de Langres. Elles font
filles de feu Mr le Marquis de
Druy, & de Dame Henriette
de Saulx de Tavanes. It eftoit
Major de la Gendarmerie
Charge qu'il avoit plû au Roy
de créer en fa faveur. Il fut tué
à la Bataille de la Marſaille en
Piémont. C'eftoit un homme
d'un merite au- deffus du comfoit pour ce qui regarde mun ,
la Profeffion des Armes , l'ufage du monde & les Sciences.
Le Roy même le traitoit avec
diftinction , & le confideroit
beaucoup. Il eftoit frere de Mr
1
GALANT 131
le Comte de Druy, Leutenant
de la premiere Compagnie des
Gardes du Corps , Lieutenant
general des Armées de Sa Majefté , &Commandant aujour
d'huy les Troupes qui font à
Luxembourg & dans le Pays
de Treves. Je ne vous diray'
rien de la Maifon de ces deux
Chanoineffes qui eft affez connue. LaCeremonic fut faitepar
Mrl'Evêque Duc de Langres ,
&par Me l'Abbeffe , fœur de
Mr le Maréchal de Choifeul.
L'Affemblée fut tres nombreufe & tres illuftre , plufieurs
perfonnes de la Nobleffe de
-
132 MERCURE
IS
Lorraine , de Bourgogne &
de Champagne , s'eftant trouvées à cette Ceremonie , du
nombre defquelles étoient M'S
&Mes de Vaudemont , de Levy , de Pezeux , de Chaſtellux ,
de Rennepont , de Salles , de
Briaille , & de Montendre. Les
perfonnes de la famille de ces
deux jeunes Dames qui y affiffterent , furent M° la Marquife
de Druy leur mere , Mr l'Abbé de Druy Elû des Etats de
Bourgogne , leur oncle , M'le
Comte du Montal frere deleur
mere , Mlle du Montal auffi
fœur uterine , & Mlle de Druy
GALANT 133.
de Courcelle autre fœur. Il y
avoit foixante couverts dans la
grande Salle de l'Abbaye , tant
pour les Dames Chanoineffes ,
que pour toutes les perfonnes
de qualité qui fe trouverent
cette Ceremonie. Toute cette
Illuftre Affemblée alla dans
l'Eglife par ordre. Mr le Comte du Montal donnoit la main
à Mlle de Druy l'aînée , fa
foeur Mr l'Abbé de Druy
leur oncle , la donnoit à la cadette , nominée Mlle de Vitry,
pour la diftinguer de fon aînée.
LeR. P. Gonin Preftre de l'Oratoire & Superieur du Semi-
134 MERCURE
›
naire de Dijon , fit un fort
beau Sermon. Cette Ceremonie fe fait felon l'ancien uſage
de la Maiſon. Les Chanoineffes qui fe font recevoir , quittent les habits du fiecle , &
tefte nuë avec un cierge à la
main, elles viennent demander
de l'eau à M' l'Evêque & àM°
l'Abbeffe , qui eft à coté de ce
Prelat. Onleur couppe unpeu
de cheveux, & enfuite on les
coëffe comme les autres Dames , à la referve que le petit
voile nommé le Mari , eft
blanc. Mr de Langres leur fit
une Exhortation des plus élo-
*
GALANT 135
quentes. Ces jeunes Demoifelfelles fe firent admirer par leur
modeftie & par leur bonne grace. Elles font belles & ont beaucoup d'efprit. Elles ont eſté
bien élevées foit chez M° leur
mere , foir dans la celebre Abbaye de Farmoutier.
On nereçoit dans l'Abbaye
de Poulangy que des Filles de
qualité ; elles font des vœux
commé les autres Religieufes ;
elles font habillées de nair , &
elles ont chacune leur Prebende , & leurs appartemens feparez dans l'enceinte de la Maifon qui eft affez connuë par la
136 MERCURE
quantité de Filles de diſtinction
qu'elle renferme & par ſon antiquité , & plus encore par la
fageffe.
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Résumé : Prises d'Habits, par Mlles de Druy, [titre d'après la table]
Le 13 décembre, deux sœurs, filles du défunt Marquis de Druy et de Dame Henriette de Saulx de Tavanes, entrèrent dans l'abbaye de Poulangy en Champagne, diocèse de Langres. Leur père, Miles de Druy, Major de la Gendarmerie, fut tué à la bataille de la Marsaille en Piémont. Reconnu pour son mérite, il était consulté par le roi et était frère du Comte de Druy, Lieutenant général des Armées du Roi. La cérémonie, présidée par l'Évêque Duc de Langres et l'Abbesse, sœur du Maréchal de Choiseul, rassembla de nombreux nobles de Lorraine, Bourgogne et Champagne. Les familles présentes incluaient les Vaudemont, de Lévy, de Péseux, et autres. La famille des jeunes femmes comprenait la Marquise de Druy, l'Abbé de Druy, le Comte du Montal, Mlle du Montal et Mlle de Druy de Courcelle. La cérémonie suivit l'ancien usage de la maison, où les nouvelles chanoinesses quittent les habits du siècle et demandent de l'eau à l'Évêque et à l'Abbesse. Elles furent ensuite coiffées d'un petit voile blanc. L'Évêque de Langres leur adressa une exhortation. Les jeunes femmes, admirées pour leur modestie et leur grâce, reçurent une éducation soignée auprès de leur mère et à l'abbaye de Faremoutiers. L'abbaye de Poulangy accepte uniquement des filles de qualité, qui prononcent des vœux et portent des habits noirs avec des prébendes et des appartements séparés.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1929
p. 136-141
EXTRAIT Des Registres de l'Academie Royale des Sciences.
Début :
Tout ce qui regarde les choses necessaires à la vie & à la / Le Pere Sebastien, Mrs Homberg, Varignon, & des Billetes [...]
Mots clefs :
Surdité, Machines, Académie royale des sciences, Son
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT Des Registres de l'Academie Royale des Sciences.
Tout ce qui regarde les chofes neceffaires à la vie & à la
fanté , ne pouvant eftre trop
connuës ; je dois vous entretenir encore de deux Articles
dont je vous ay déja parlé , afin
de vous faire voir le progrés
des chofes dont ces Articles
traitent ; le premier regarde la
furdité.
GALANT 137
EXTRAIT
Des Regiſtres de l'Academic
Royale des Sciences.
Le PereSebaftien , Mrs Homberg, Varignon , &des Billetes
qui avoient efté nomméz pour
examiner des Machines de Mr
du Guet qui augmente le fon qui
s'apliquent fous la Perruque des
Hommes , fous la Coiffure
des Femmes , à des Sieges , &
dont l'effet augmente à proportion de leur volume en ayant
fait leur raport , la Compagnie à
jugé qu'elles eftoient nouvelles
Février 1710. M
138 MERCURE
ingenieufes & utiles à ceux qui
entendent difficilement ou pour
entendrede plusloin. Fait à Paris
ce 6 ° May 1709.fignéFontenelle
Secretaire perpetuel de l'Academie Royale des Sciences.
Le Roy , eh confideration
de l'invention particuliere de
ces Machines qui fervent tresutilement à ceux qui ont l'ouye
dure , & intereffent ceux qui
font obligez de leur parler , le
Roy a accordé un Privilege
exclufifà Mr du Guet , &pour
vous marquer le progrés de
fes Machines , je vous envoye
GALANT 139
une Lettre qui a cfté adreffée
audit Sieur du Guet.
COPIE DE LA LETTRE
du Pere Damien , Capucin ,
Confeffeur des Capucines ,
écrite à M' du Guet,
Novembre 1709.
Le 10.
Il eft jufte Monfieur , que
pour vostre fatisfaction & pour
procurer au Public l'utilité du
Secret que vous avez pour foulager aux perfonnes fourdes la
difficulté qu'elles ont d'entendre ,
je vous rende compte du fuccés
que vous avez eu dans le MoMij
140 MERCURE
naftere de nos Meres Capucines
enlaperfonne de Sœur Marie de
Saint Louis de Boulainvilliers
qui fe trouve parfaitementfoulagée de fa Surdité par l'ufage de voftre Machine. Toute
la Communauté qui s'aperçoit
bien de ce fuccés fe loüe fort de ce
fecret & Madame de Boulainvilliers mere de cette Religieufe , fut furprife de ce que fa
fille entendoit beaucoup mieux
depuis quelques mois qu'elle ne
l'avoit veuë , elle approuva fort
cette Machine dont fa fille fe
trouvoitfibien; fi ce temoignage
que je rends à la verité vous
GALANT 141
peut eftre utile , fervez vous- en
j'en auray autant de plaifir
que vous à quije voudrois de tout
moncœurrendre d'autresfervices
eftant , Monfieur, voftre , & c
fanté , ne pouvant eftre trop
connuës ; je dois vous entretenir encore de deux Articles
dont je vous ay déja parlé , afin
de vous faire voir le progrés
des chofes dont ces Articles
traitent ; le premier regarde la
furdité.
GALANT 137
EXTRAIT
Des Regiſtres de l'Academic
Royale des Sciences.
Le PereSebaftien , Mrs Homberg, Varignon , &des Billetes
qui avoient efté nomméz pour
examiner des Machines de Mr
du Guet qui augmente le fon qui
s'apliquent fous la Perruque des
Hommes , fous la Coiffure
des Femmes , à des Sieges , &
dont l'effet augmente à proportion de leur volume en ayant
fait leur raport , la Compagnie à
jugé qu'elles eftoient nouvelles
Février 1710. M
138 MERCURE
ingenieufes & utiles à ceux qui
entendent difficilement ou pour
entendrede plusloin. Fait à Paris
ce 6 ° May 1709.fignéFontenelle
Secretaire perpetuel de l'Academie Royale des Sciences.
Le Roy , eh confideration
de l'invention particuliere de
ces Machines qui fervent tresutilement à ceux qui ont l'ouye
dure , & intereffent ceux qui
font obligez de leur parler , le
Roy a accordé un Privilege
exclufifà Mr du Guet , &pour
vous marquer le progrés de
fes Machines , je vous envoye
GALANT 139
une Lettre qui a cfté adreffée
audit Sieur du Guet.
COPIE DE LA LETTRE
du Pere Damien , Capucin ,
Confeffeur des Capucines ,
écrite à M' du Guet,
Novembre 1709.
Le 10.
Il eft jufte Monfieur , que
pour vostre fatisfaction & pour
procurer au Public l'utilité du
Secret que vous avez pour foulager aux perfonnes fourdes la
difficulté qu'elles ont d'entendre ,
je vous rende compte du fuccés
que vous avez eu dans le MoMij
140 MERCURE
naftere de nos Meres Capucines
enlaperfonne de Sœur Marie de
Saint Louis de Boulainvilliers
qui fe trouve parfaitementfoulagée de fa Surdité par l'ufage de voftre Machine. Toute
la Communauté qui s'aperçoit
bien de ce fuccés fe loüe fort de ce
fecret & Madame de Boulainvilliers mere de cette Religieufe , fut furprife de ce que fa
fille entendoit beaucoup mieux
depuis quelques mois qu'elle ne
l'avoit veuë , elle approuva fort
cette Machine dont fa fille fe
trouvoitfibien; fi ce temoignage
que je rends à la verité vous
GALANT 141
peut eftre utile , fervez vous- en
j'en auray autant de plaifir
que vous à quije voudrois de tout
moncœurrendre d'autresfervices
eftant , Monfieur, voftre , & c
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Résumé : EXTRAIT Des Registres de l'Academie Royale des Sciences.
En février 1710, l'Académie Royale des Sciences a examiné des inventions de Monsieur du Guet visant à améliorer l'audition. Ces machines étaient conçues pour amplifier le son sous les perruques masculines et les coiffures féminines, ainsi que sur les sièges. Elles ont été jugées nouvelles, ingénieuses et utiles pour les personnes ayant des difficultés auditives. Le roi a accordé à Monsieur du Guet un privilège exclusif pour ces inventions. Une lettre du Père Damien, datée de novembre 1709, atteste du succès de ces machines, notamment auprès de la sœur Marie de Saint Louis de Boulainvilliers, dont la surdité a été soulagée. La communauté des Capucines et la mère de la religieuse ont également approuvé cette invention.
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1930
p. 141-143
Article touchant les Gouttes Aromatiques d'Angleterre, [titre d'après la table]
Début :
Je passe à l'Article qui regarde la santé. Je [...]
Mots clefs :
Santé, Gouttes aromatiques, Angleterre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article touchant les Gouttes Aromatiques d'Angleterre, [titre d'après la table]
e paffe à l'Article qui regarde la fanté.
•
Je vous ay parlé dans ma
Lettre du mois de Juillet , des
Gouttes Aromatiques d'Angleterre, & je vous ay même
envoyé une Traduction de
l'Anglois qui vous a fait connoiftre toutes les vertus & toutes les qualitez de ce remede ,
&à quelles maladies il eft pro-
142 MERCURE
dir que ces
pre. Et comme l'Apoplexie eft
plus en regne qu'elle n'a efté
depuis longtemps , l'ufage en
eft prefentement plus neceffaire qu'il n'a jamais efté. J'ay ou
blié , lorfque je vous en ay par
lé , & que je vous ay
Gouttes fe vendoient au Palais
Royal chez M Dumont Chirurgien orninaire de S. A. R.
Monfieur le Duc d'Orleans ;
de vous dire que ce Prince.
dont l'efprit eft penetrant &
univerfel , & qui fçait à fond
tout ce qui regarde les beaux
Arts & la Medecine , n'a donné
à Mr Dumont la permiſſion
>
GALANT 143
d'afficher qu'il vend ces Gouttes Aromatiques d'Angleterre.
au Palais Royal , qu'après avoir
efté convaincu par des Experiences bien avérées , & avoir
mêine fçu par ce qui s'eft paffé
fous fes yeux , l'excellence de
ce Remede , & les bons effets
qu'il produit. Ainfi vous ne
fçauriez trop faire voir à vos
Amis tout ce que je vous ay
envoyé là- deffus.
•
Je vous ay parlé dans ma
Lettre du mois de Juillet , des
Gouttes Aromatiques d'Angleterre, & je vous ay même
envoyé une Traduction de
l'Anglois qui vous a fait connoiftre toutes les vertus & toutes les qualitez de ce remede ,
&à quelles maladies il eft pro-
142 MERCURE
dir que ces
pre. Et comme l'Apoplexie eft
plus en regne qu'elle n'a efté
depuis longtemps , l'ufage en
eft prefentement plus neceffaire qu'il n'a jamais efté. J'ay ou
blié , lorfque je vous en ay par
lé , & que je vous ay
Gouttes fe vendoient au Palais
Royal chez M Dumont Chirurgien orninaire de S. A. R.
Monfieur le Duc d'Orleans ;
de vous dire que ce Prince.
dont l'efprit eft penetrant &
univerfel , & qui fçait à fond
tout ce qui regarde les beaux
Arts & la Medecine , n'a donné
à Mr Dumont la permiſſion
>
GALANT 143
d'afficher qu'il vend ces Gouttes Aromatiques d'Angleterre.
au Palais Royal , qu'après avoir
efté convaincu par des Experiences bien avérées , & avoir
mêine fçu par ce qui s'eft paffé
fous fes yeux , l'excellence de
ce Remede , & les bons effets
qu'il produit. Ainfi vous ne
fçauriez trop faire voir à vos
Amis tout ce que je vous ay
envoyé là- deffus.
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Résumé : Article touchant les Gouttes Aromatiques d'Angleterre, [titre d'après la table]
Le texte présente les Gouttes Aromatiques d'Angleterre, un remède dont les bienfaits ont été décrits dans une lettre de juillet. L'auteur souligne leur importance croissante face à la prévalence accrue de l'apoplexie. Ces gouttes sont disponibles au Palais Royal, vendues par M. Dumont, chirurgien du Duc d'Orléans. Le Duc, reconnu pour son esprit pénétrant et ses connaissances en beaux-arts et en médecine, a autorisé leur vente après avoir été convaincu de leur efficacité par des expériences et des observations personnelles. L'auteur invite à diffuser ces informations parmi les amis.
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1931
p. 143-147
Ceremonie faite par la Compagnie des Penitens Bleus de Toulouse, [titre d'après la table]
Début :
La Compagnie des Penitens Bleus de Touluse a jusqu'icy [...]
Mots clefs :
Compagnie des Pénitents bleus de Toulouse, Confrérie, Maréchal de Noailles
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texteReconnaissance textuelle : Ceremonie faite par la Compagnie des Penitens Bleus de Toulouse, [titre d'après la table]
La Compagnie des Penitens
Bleus ue Toulouſe a jufqu'icy
fait trop de bruit pour n'eftre
pas generalement connuë , &
elle a cu un figrand nombre
144 MERCURE
d'illuftres Confreres, que l'on
peut dire qu'il n'y en a point
de plus illuftre en Europe.
Vous fçavez que le Roy eft
de cette Confrairie , & que
lorfque Meffeigneurs les Princes pafferent par Touloufe
ils s'y firent recevoir à l'exemple de S. M. Ce fut dans ce
même temps que Mr le Maréchal de Noailles qui les accompagnoit , s'yfit recevoir. Cette Confrairie a tous les ans un
Prieur nouveau , & Mr le Maréchal de Noailles eftant mort
dans l'année qu'il en eftoit
Prieur , les Confreres ordonnerent
GALANY 145
nerent qu'on luy feroit un
Service folemnel , & qu'on
feroit une Oraifon funebre à
la gloire de ce Maréchal; elle
fut prononcée par Mr de Malauberc Archipreftre de Grenade. Cet Eloge funebre fut
trouvé fi beauque l'on fouhaita de le voir imprimé , mais la
modeftie de l'Orateur l'empêcha de le donner au Public.
Cependant s'eftant laiſſé vaincredepuis ce temps-là aux preffantes follicitations de fes
Confreres , & des principales
perfonnes de Toulouſe , il
confentit de le faire imprimer.
Février 1710. N
146 MERCURE
Il fe vend à Toulouſe chez la
veuve Boude , Claude Gilles le
Camus , & Jacques Loyau.
Pour vous marquer combien la Compagnie des Penitens bleus eft illuftre , je dois
vous dire feulement les noms
des Confreres qui ont eu foin
de la Pompe funebre dont je
viens de vous parler. Ce font
Mrs les Comtes de Fimarcon
& d'Efclignac , Maîtres de
Chapelle ; le Comte de Pibrac;
Mauriac ; Nolet ; l'Abbé de
Chalvel de Caulet - Grandmond ; de Lopes ; le Chevalier de Clary ; Pujols , Con-
GALANT 147
feiller au Parlement ; Epigat
Sindic , de la Compagnie , &
de Nupces, Prefident à Mortier , à quifeu Mr le Maréchal
deNoailles avoit confié la direction de la Compagnie dans
l'année de fa Charge de Prieur.
Bleus ue Toulouſe a jufqu'icy
fait trop de bruit pour n'eftre
pas generalement connuë , &
elle a cu un figrand nombre
144 MERCURE
d'illuftres Confreres, que l'on
peut dire qu'il n'y en a point
de plus illuftre en Europe.
Vous fçavez que le Roy eft
de cette Confrairie , & que
lorfque Meffeigneurs les Princes pafferent par Touloufe
ils s'y firent recevoir à l'exemple de S. M. Ce fut dans ce
même temps que Mr le Maréchal de Noailles qui les accompagnoit , s'yfit recevoir. Cette Confrairie a tous les ans un
Prieur nouveau , & Mr le Maréchal de Noailles eftant mort
dans l'année qu'il en eftoit
Prieur , les Confreres ordonnerent
GALANY 145
nerent qu'on luy feroit un
Service folemnel , & qu'on
feroit une Oraifon funebre à
la gloire de ce Maréchal; elle
fut prononcée par Mr de Malauberc Archipreftre de Grenade. Cet Eloge funebre fut
trouvé fi beauque l'on fouhaita de le voir imprimé , mais la
modeftie de l'Orateur l'empêcha de le donner au Public.
Cependant s'eftant laiſſé vaincredepuis ce temps-là aux preffantes follicitations de fes
Confreres , & des principales
perfonnes de Toulouſe , il
confentit de le faire imprimer.
Février 1710. N
146 MERCURE
Il fe vend à Toulouſe chez la
veuve Boude , Claude Gilles le
Camus , & Jacques Loyau.
Pour vous marquer combien la Compagnie des Penitens bleus eft illuftre , je dois
vous dire feulement les noms
des Confreres qui ont eu foin
de la Pompe funebre dont je
viens de vous parler. Ce font
Mrs les Comtes de Fimarcon
& d'Efclignac , Maîtres de
Chapelle ; le Comte de Pibrac;
Mauriac ; Nolet ; l'Abbé de
Chalvel de Caulet - Grandmond ; de Lopes ; le Chevalier de Clary ; Pujols , Con-
GALANT 147
feiller au Parlement ; Epigat
Sindic , de la Compagnie , &
de Nupces, Prefident à Mortier , à quifeu Mr le Maréchal
deNoailles avoit confié la direction de la Compagnie dans
l'année de fa Charge de Prieur.
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Résumé : Ceremonie faite par la Compagnie des Penitens Bleus de Toulouse, [titre d'après la table]
Le texte évoque la Compagnie des Pénitents Bleus de Toulouse, une confrérie prestigieuse en Europe. Des personnalités telles que le roi, les princes et le maréchal de Noailles y étaient reçues. Chaque année, la confrérie élisait un nouveau prieur. En 1710, le maréchal de Noailles, alors prieur, décéda. Les confrères organisèrent un service solennel et une oraison funèbre, prononcée par M. de Maulaber, archiprêtre de Grenade. Bien que modeste, M. de Maulaber accepta finalement de publier l'oraison après des sollicitations. L'oraison fut vendue à Toulouse chez plusieurs libraires. La renommée de la confrérie est illustrée par la participation de notables, incluant des comtes, des maîtres de chapelle, des conseillers au Parlement et des présidents à mortier.
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1932
p. 147-150
Gouvernement de Gravelines donné par le Roy, [titre d'après la table]
Début :
Il y a déja quelques, mois que le Roy a donné le Gouvernement [...]
Mots clefs :
Gouvernement de Gravelines, Maréchal de Villars, Maison de Villars
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Gouvernement de Gravelines donné par le Roy, [titre d'après la table]
Il y a déja quelques , mois
que le Roya donnéle Gouver
nement de Gravelines à Mr le
ComtedeVillars Maréchal de
Camp & frere de Mr le Maréchalde Villars. Ce Comte eft
d'une Maifon où la valeur
eft hereditaire.. Il eft fils de
feu Mr le Marquis de Villars
Chevalier des Ordres du Roy,
Nij
148 MERCURE
Lieutenant General de fes Armées & qui avoit cfté Ambaſ
fadeur en Espagne , & neveu
de feu Mr de Villars Archevêt
que de Vienne & qui avoit
fuccedé à quatre de fes oncles
qui avoient occupé fucceffivement le même Siege. La Maifan de Villars eft alliée aux
plus illuftres de Dauphiné , &
des Provinces voifines , à celle
de Seve & de Montmartin
Alleman par le Mariage d'Helene de Villars avec Pierre de
Seve , d'où vint Marguerite de
Sevealliée avec Claude Alleman forti des Souverains de
GALANT 149
Foucigni , felon que le remarque Me le Laboureur ; la Maifonde Villars eft auffi alliée à
lavnoble & ancienne Maiſon
de Chapponney , par le Mariage de Françoife de Villars
avec Philibert de Chapponney , vers le milieu du quinziémefiecle. Cette alliance fe
fortifia encore long- temps
aprés par le mariage de Dame
Claire de Villars , avecArthus
de Loras du Pré Seigneur de
Chamaignieu d'une des plus
grandes Maifons de ces Payslà , & d'oùfortit Loüife de Loras épouse de Haut &Puiflang
Niij
150 MERCURE
1
Seigneur Octavien de Chapponney , Seigneur d'Eybeins.
Loüife de Villars , fille de
Haut & Puiffant Seigneur
Philibert de Villars , & petite
fille de Pierre de Villars , que
la Ville de Lyon mit huit fois
confecutives à fa tefte , épousa
Jean Henry Seigneur de Troi
feul & de Mionney , dans le
feiziéme fiecle.
que le Roya donnéle Gouver
nement de Gravelines à Mr le
ComtedeVillars Maréchal de
Camp & frere de Mr le Maréchalde Villars. Ce Comte eft
d'une Maifon où la valeur
eft hereditaire.. Il eft fils de
feu Mr le Marquis de Villars
Chevalier des Ordres du Roy,
Nij
148 MERCURE
Lieutenant General de fes Armées & qui avoit cfté Ambaſ
fadeur en Espagne , & neveu
de feu Mr de Villars Archevêt
que de Vienne & qui avoit
fuccedé à quatre de fes oncles
qui avoient occupé fucceffivement le même Siege. La Maifan de Villars eft alliée aux
plus illuftres de Dauphiné , &
des Provinces voifines , à celle
de Seve & de Montmartin
Alleman par le Mariage d'Helene de Villars avec Pierre de
Seve , d'où vint Marguerite de
Sevealliée avec Claude Alleman forti des Souverains de
GALANT 149
Foucigni , felon que le remarque Me le Laboureur ; la Maifonde Villars eft auffi alliée à
lavnoble & ancienne Maiſon
de Chapponney , par le Mariage de Françoife de Villars
avec Philibert de Chapponney , vers le milieu du quinziémefiecle. Cette alliance fe
fortifia encore long- temps
aprés par le mariage de Dame
Claire de Villars , avecArthus
de Loras du Pré Seigneur de
Chamaignieu d'une des plus
grandes Maifons de ces Payslà , & d'oùfortit Loüife de Loras épouse de Haut &Puiflang
Niij
150 MERCURE
1
Seigneur Octavien de Chapponney , Seigneur d'Eybeins.
Loüife de Villars , fille de
Haut & Puiffant Seigneur
Philibert de Villars , & petite
fille de Pierre de Villars , que
la Ville de Lyon mit huit fois
confecutives à fa tefte , épousa
Jean Henry Seigneur de Troi
feul & de Mionney , dans le
feiziéme fiecle.
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Résumé : Gouvernement de Gravelines donné par le Roy, [titre d'après la table]
Le roi a récemment confié le gouvernement de Gravelines à Monsieur le Comte de Villars, Maréchal de camp et frère du Maréchal de Villars. Ce comte appartient à une famille où la valeur est héréditaire. Il est le fils du défunt Monsieur le Marquis de Villars, Chevalier des Ordres du Roi, Lieutenant Général des Armées et ancien Ambassadeur en Espagne. Il est également le neveu de l'ancien Archevêque de Vienne, Monsieur de Villars, qui avait succédé à quatre de ses oncles dans cette fonction. La maison de Villars est alliée à plusieurs familles illustres du Dauphiné et des provinces voisines, notamment les Seve et les Montmartin Alleman. Cette alliance est renforcée par le mariage d'Hélène de Villars avec Pierre de Seve, dont la fille Marguerite de Seve épousa Claude Alleman, seigneur de Foucigni. La maison de Villars est également alliée à la noble et ancienne maison de Chapponney par le mariage de Françoise de Villars avec Philibert de Chapponney au milieu du quinzième siècle. Cette alliance fut renforcée par les mariages de Claire de Villars avec Arthus de Loras du Pré, seigneur de Chamaignieu, et de Louise de Loras avec Octavien de Chapponney, seigneur d'Eybeins. Louise de Villars, fille de Philibert de Villars, seigneur de Haut et Puissant, et petite-fille de Pierre de Villars, qui fut huit fois consécutivement à la tête de la ville de Lyon, épousa Jean Henry, seigneur de Troisfeul et de Mionney, au seizième siècle.
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1933
p. 150-157
Article curieux, touchant l'élection de Mr le Comte de Schonborn, à la Coadjuterie de l'Evêché de Bamberg, [titre d'après la table]
Début :
Il y a quelques mois que j'aurois dû vous envoyer l'Article [...]
Mots clefs :
Comte de Schomborn, Evêché de Bamberg, Bavière, Élection
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article curieux, touchant l'élection de Mr le Comte de Schonborn, à la Coadjuterie de l'Evêché de Bamberg, [titre d'après la table]
Il y a quelques mois quej'aurois dû vous envoyer l'Article
fuivant , & fi je vous en fais
part aujourd'huy ce n'eft pas
à caufe de l Election dont il y
cft parlé ; mais pour vous faire
GALANT 151
voir que les intereſts particuliers font fouvent trahir ceux
que le repos
infpirer.
de la Patric doit
-
M' le Comte de Schomborn , Vice Chancelier de
l'Empire , & neveu de M' l'Electeur de Mayence , a efté élû
Coadjuteur de l'Evêché de
Bamberg , afin de fucceder à
fon oncle , & peut- eftre enfuite à l'Electorat de Mayence.
Cette élection eft le fruit de
l'attachement que cet Electeur
a toûjours marqué pour les inrerefts de la Maifon d'Autriche, & fouvent même au préNiiij
152 MERCURE
judice de l'Empire ; ce fut en
effet cet Electeur qui rompitiles
mefures que plufieurs Princes
d'Allemagne prenoient pour
conferver l'Empire dans la
Neutralité au commencement
de la guerre qui occupe aujourd huy toute l'Europe , &
que la fucceffion d'Espagne où
le Corps Germanique n'avoit
aucune part , alluma entre les
Maifons de France & d'Autriche. Si tous les Princes d'Allemagne n'avoient point manqué de parole à Monfieur l'Electeur de Baviere , & ne s'étoient point mêlez de foûtenir
>
GALANT 153
des interefts qui ne les regardoient en aucune maniere , ils
ne feroient pas plongez dans
une guerre qui les a prefque
tous entierement ruinez , commel'on peut voir par les Me
moires qu'ils prefentent tous
les jours , des millions que cette guerre leur a coûté à chacun en particulier , & dont ils
ne feront jamais dédommagez.
Auffi l'Empereur n'eft irrité
contre Monfieur l'Electeur de
Baviere qu'à caufe que ce Prince a travaillé pour le bien de
l'Empire , dont les Membres
ne feroient pas prefentement
154 MERCURE
dans l'état où ils fe trouvent ,
& jouiroient d'une pleine tranquilité fi les interefts particu
liers de quelques-uns , & l'alliance des autres à la Maiſon
d'Autriche, ne les avoient obligez de facrifier le repos de
Empire à ce qu'ils croyoient
les toucher de plus prés.
Je paffe à ce qui regarde la
Maifon de Schomborn. Elle
eft originaire du Cercle de
Weftphalic , & elle poffede
des Charges confiderables de
l'Empire depuis prés de trois
fiecles. Elle eft alliée à toutes les plus grandes Maiſons
GALANT 155
d'Allemagne la Ville de
Bambergeft du Cercle de Franconic. Elle ne fut bâtie que
dans le dixiéme fiecle , & l'Empereur Henry II. dit le Saint
& le Boiteux , y fonda un Evêché du confentement du Pape
Jean XIX. & dans le fiecle fuivant le Pape Clement II. qui
avoit efté Evêque de Bamberg,
foûmit cette Eglife immediatement au Saint Siege. Elle
eftoit auparavant dans la dépendance de celle de Mayence.
1 Evêque de Bamberg eft le premier Evêque Souverain aprés
les Electeurs: il precede même
156 MERCURE
celuy de Wirtzbourg , & dans
l'étendue de fes Etats , fe trou
vent enfermez quelques portions de ceux des quatre premiers Electeurs , qui par confequent relevent de luy. Il ya
quelques ficcles qu'on tint un
Concile de quarante fix Evêques à Bamberg , où Theodoric Evêque de Mets , de la Maifon de Luxembourg , & frere
de l'Imperatrice Cunegonde ,
femme d'Henry II. fut obligé
de fe juftifier de plufieurs crimes atroces qu'on luy impu
toir. Cet évenement arriva au
milicu du onzième fiecle ; en
GALANT 157
1653.on y fonda une Univerfité.
* J
fuivant , & fi je vous en fais
part aujourd'huy ce n'eft pas
à caufe de l Election dont il y
cft parlé ; mais pour vous faire
GALANT 151
voir que les intereſts particuliers font fouvent trahir ceux
que le repos
infpirer.
de la Patric doit
-
M' le Comte de Schomborn , Vice Chancelier de
l'Empire , & neveu de M' l'Electeur de Mayence , a efté élû
Coadjuteur de l'Evêché de
Bamberg , afin de fucceder à
fon oncle , & peut- eftre enfuite à l'Electorat de Mayence.
Cette élection eft le fruit de
l'attachement que cet Electeur
a toûjours marqué pour les inrerefts de la Maifon d'Autriche, & fouvent même au préNiiij
152 MERCURE
judice de l'Empire ; ce fut en
effet cet Electeur qui rompitiles
mefures que plufieurs Princes
d'Allemagne prenoient pour
conferver l'Empire dans la
Neutralité au commencement
de la guerre qui occupe aujourd huy toute l'Europe , &
que la fucceffion d'Espagne où
le Corps Germanique n'avoit
aucune part , alluma entre les
Maifons de France & d'Autriche. Si tous les Princes d'Allemagne n'avoient point manqué de parole à Monfieur l'Electeur de Baviere , & ne s'étoient point mêlez de foûtenir
>
GALANT 153
des interefts qui ne les regardoient en aucune maniere , ils
ne feroient pas plongez dans
une guerre qui les a prefque
tous entierement ruinez , commel'on peut voir par les Me
moires qu'ils prefentent tous
les jours , des millions que cette guerre leur a coûté à chacun en particulier , & dont ils
ne feront jamais dédommagez.
Auffi l'Empereur n'eft irrité
contre Monfieur l'Electeur de
Baviere qu'à caufe que ce Prince a travaillé pour le bien de
l'Empire , dont les Membres
ne feroient pas prefentement
154 MERCURE
dans l'état où ils fe trouvent ,
& jouiroient d'une pleine tranquilité fi les interefts particu
liers de quelques-uns , & l'alliance des autres à la Maiſon
d'Autriche, ne les avoient obligez de facrifier le repos de
Empire à ce qu'ils croyoient
les toucher de plus prés.
Je paffe à ce qui regarde la
Maifon de Schomborn. Elle
eft originaire du Cercle de
Weftphalic , & elle poffede
des Charges confiderables de
l'Empire depuis prés de trois
fiecles. Elle eft alliée à toutes les plus grandes Maiſons
GALANT 155
d'Allemagne la Ville de
Bambergeft du Cercle de Franconic. Elle ne fut bâtie que
dans le dixiéme fiecle , & l'Empereur Henry II. dit le Saint
& le Boiteux , y fonda un Evêché du confentement du Pape
Jean XIX. & dans le fiecle fuivant le Pape Clement II. qui
avoit efté Evêque de Bamberg,
foûmit cette Eglife immediatement au Saint Siege. Elle
eftoit auparavant dans la dépendance de celle de Mayence.
1 Evêque de Bamberg eft le premier Evêque Souverain aprés
les Electeurs: il precede même
156 MERCURE
celuy de Wirtzbourg , & dans
l'étendue de fes Etats , fe trou
vent enfermez quelques portions de ceux des quatre premiers Electeurs , qui par confequent relevent de luy. Il ya
quelques ficcles qu'on tint un
Concile de quarante fix Evêques à Bamberg , où Theodoric Evêque de Mets , de la Maifon de Luxembourg , & frere
de l'Imperatrice Cunegonde ,
femme d'Henry II. fut obligé
de fe juftifier de plufieurs crimes atroces qu'on luy impu
toir. Cet évenement arriva au
milicu du onzième fiecle ; en
GALANT 157
1653.on y fonda une Univerfité.
* J
Fermer
Résumé : Article curieux, touchant l'élection de Mr le Comte de Schonborn, à la Coadjuterie de l'Evêché de Bamberg, [titre d'après la table]
Le texte évoque l'élection du Comte de Schomborn comme Coadjuteur de l'Évêché de Bamberg, influencée par les intérêts de la Maison d'Autriche. Cette décision est vue comme un acte de loyauté envers l'Autriche, au détriment de l'Empire. L'Électeur de Mayence, oncle de Schomborn, a rompu la neutralité observée par plusieurs princes allemands au début de la guerre en Europe, en s'alignant avec l'Autriche. Cette action a entraîné une guerre ruineuse pour les princes allemands, qui avaient promis leur soutien à l'Électeur de Bavière. L'Empereur est mécontent de l'Électeur de Bavière, dont les efforts pour l'Empire ont été sabotés par les intérêts particuliers et les alliances avec l'Autriche. La Maison de Schomborn, originaire de Westphalie, occupe des charges importantes dans l'Empire depuis trois siècles et est alliée aux grandes maisons d'Allemagne. La ville de Bamberg, fondée au dixième siècle en Franconie, possède un évêché créé par l'Empereur Henry II et soumis au Saint-Siège. L'Évêque de Bamberg est un souverain influent, précédant même l'Évêque de Wurtzbourg. En 1653, une université a été fondée à Bamberg.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
1934
p. 157-197
Article des Morts, parmi lesquelles il s'en trouve de tres-edifiantes. [titre d'après la table]
Début :
Je passe à quelques Articles de Morts, parmi lesquels vous [...]
Mots clefs :
Morts, Baron de Mean, Soeur Thérèse des Anges Carmélites, Jugements de Dieu, Louis de Bats, Louis Pujet
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article des Morts, parmi lesquelles il s'en trouve de tres-edifiantes. [titre d'après la table]
Je paffe à quelques Articles
de Morts , parmi lesquels vous
en trouverez de fort curieux
& de tres - édifians , & je ne
doute point que la lecture de
ces Articles ne vous faffent
plaifir.
M' le Baron de Mean , grand
Doyen du Chapitre de la Cathedrale de Liege eft mort dans
une de fes Terres , & Mr le
Baron de Selis a efté élû à fa
place ; ce Baron eftoit auparavant Prevoft de Saint Paul. II
eft d'une des meilleures Mai
158 MERCURE
fons duPays de Liege ; elle eft
originaire d'Alface , & elle y
a tenu un rang tres diftingué
dés le temps que cette Province avoit fes Souverains particuliers. Ce nouveau Grand
Doyen eft proche parent de
M'le Comtede Poitiers Chancelier de la même Eglife , & il
même l'honneur d'avoir du
cofté maternel une alliance
avec la Maiſon Electorale de
Baviere. Mr le Baron de Mean
avoit eſté échangé depuis peu
avec Mr deSaint Vallier Evê
que de Quebec, qui avoit eſté
pris par un Armateur Anglois
GALANT 159
г
dans fon trajet de France en
Amerique , & qui a efté plus de
deux ans prifonnier en Angleterre. M le Baron de Mean
qui avoit auffi efté arrefté par
ordre du Roy lors que nous
eftions encore maiſtres de Liege à caufe de l'intelligence qu'il
avoit avec les ennemis de l'Etát , a marqué peu de temps
avant fa mort un vif repentir
des troubles où il avoit jetté
fa Patrie , &il faifoit inceffamment des fouhaits pour le retour de Mr l'Electeur de Cologne, Evêque de Liege fon Souverain. Ce Baron eftoit d'une
160 MERCURE
grande naiffance & allié au feu
Evêque de Munſter Bernard
de Galen. Sa Maiſon eftoit originaire de l'Etat de Mayence.
L'élection de l'Evêque caufa.
de grands defordres dans la
Ville de Liege au quinziéme
fiecle. Jean de Baviere gouver
noit alors cette Eglife. Les Liegeois luy firent la guerre. L'E
vêché eftoit à Tongres anciennement; il fut enfuite à Maf
trick , & enfin transferé à Liege.
La Soeur Therefe des Anges
Carmelite du Monaftere de la
Sainte Mere de Dieu de Riom
GALANT 161
en Auvergne , y mourut le 2
jour de cette année d'une maladie qui commença le jour
de Saint Etienne à cinq heures du foir , mais qui n'eftoit
qu'une fuite des infirmitez qu'-
elle avoit foufferte depuis 15.
ans avec une patience édifiante. Elle eftoit âgée de 69. ans ;
elle en avoit 46. de Religion ,
& elle eft morte dans unegrande opinion de fainteté. Elle
avoit quitté fes parens dans un
âgefort tendre , & qui estoient
fort éloignez de Riom pour
s'y aller renfermer dans le Convent des Carmelites , & depuis.
Février 1710.
162 MERCURE
pour है
ce temps - là on peut affurer
qu'elle y a mené une vie toutà fait angelique. Son ardeur
le Saint Sacrement de
I'Autel l'avoit obligée de paffer tous les Jeudis de fa vie en
retraite , ce qu'elle a toujours
obfervé avecbeaucoup d'exactitude , & elle a eu la confolationde mourirun Jeudy. Dans:
· les douleurs d'une longue &
cruelle maladie qui l'a fait fouffrir durant quinze années entieres , elle ne s'eft jamais voulu relâcher des pratiques de fa
Regle , & on luy entendoit
dire fouvent queplus la mort eft
GALANT 163
proche , plus ilfaut travaillerpour
sy difpofer; & qu'il faut oublier
Le corps & penser à affurer du bien
àfon ame. L'avant - veille de
Noël elle demanda à fa Superieure de jeûner au pain & à
l'eau , comme fi elle cût îçû que
ce feroit le dernier exercice de
fa penitence; & comme la Superieure s'y oppofoit , elle luy
repliqua : Au nom de Dieu , ma
Mere , ne vous opposezpas à mon
defir ; vous devezaimermonames
je fuis peut - eftre bien prés de la
mort,je la veux attendre comme
un bon Soldat , les armes à la
main. Enfin les bas fentimens
Oij
164 MERCURE
quecette fainteFille avoit d'elle- même , donne le prix à fa
penitence. On enjugera parun
billet écrit de fa main & trouvé
aprés fa mort : il eftoit conçu
en ces termes : Je vousſupplie ,
ma Mere , de me procurer toutes
les Prieres que vous pourrez , j'en
auray ungrand befoin eftant veritablement une tres-grande Pechereffe :ce n'est pas par humilité ,
mais tres-fincerement queje ·ledis ,
vous ayant toutes trompées par
quelques foibles defirs exterieurs
defairepenitence, quoy que jamais
n'enfois venue aux effets comme il faut : c'est pourquoys, ma
je
GALANT 165
chere Mere , je vous fupplie de
mettre dans ma Lettre circulaire
que je demande un Miferere ,
pour reparer mon impenitence des
vant Dieu , & s'il me fait mifericorde , je vous promets d'en eftre
bien reconnoiffante ; mais aidezmoy àfortir du Purgatoire pour
l'amour de Dieu , s'il me fait la
grace d'y aller ; s'il mm'eftoitpermis
de dire lespechez quej'ay commis
&qui medonnent cette crainte , je
le ferois tres- volontiers. Ce Billet contient le triomphe de
l'humilité chreftienne ; on n'en
peut voir une plus profonde
avecunevertu plus épurée. On
166 MERCURE
écrit de Riom que Mr l'Abbé
Faydit l'eftant allé voir quelquesmois avant qu'il mourut,
elle luy prédit fa mort ; & qu'el
le a donné d'autres marques
de la connoiffance qu'elle avoit
de l'avenir.
Si des perfonnes qui ont
mené une vie auffi reguliere ,
ou pour mieux dire auffi fainte
craignent fi fort les Jugemens
de Dieu , que ne doivent point
aprehender ceux qui vivent
dans le monde. Tentens ceux
qui y menent la vie la plus
reguliere , puifqu'ils ne laiffent
pas d'eftre expofez tous les
GALANT 167
jours à une infinité de chofes
qui les font infenfiblement ,
& fans qu'ils ayent le temps
d'y refléchir , tomber dans le
peché , & par confequent
ceux qui font dans le tumulte
des affaires ; & qui ne refuſent
rien à leurs paffions. Enfin les
hommes ne peuvent eftre
tropattentifs à ce qui regarde
leur falut puifque l'Ecriture
die leplusfagepêche fept fois par
jour.
L'Article qui fuit doit auffi faire voir qu'il ya beaucoup
de plaifir à mourir de la mort
des Juftes , & doit faire trem1
768 MERCURE
bler en mêmetemps tous ceux
qui font répandus dans le
monde , qui font bien éloignez d'atteindre à cette per
fection , & qui au lieu de fonger pendant leur vie à acquerir les Trefors neceffaires
pour bien mourir , ne fongent à en amaffer que pour
vivre ,comme s'ils ne devoient
jamais quitter ce monde.
Il court dans le monde.
une Lettre de Dom Alexis
Mauroy Celerier de l'Abbaye
de Sept- fonds adreffée à Mr
Bouillet ami de cette Maifon
fur la mort du dernier Abbés
n'ayant
GALANT 169
n'ayant pu l'avoir entiere , je
vousen envoye un extrait fidéle. Il commence fa Lettre en
difant que commela mort eft
l'echo de la vie , on a vû àla
mort de Mr l'Abbé de Septfonds le même efprit de charité, de recueillement & de penitence , qui a caracterifé toutes.
fes actions. Il eftoit infirme depuis plufieurs années. Mais
ayant eſté faifi tout d'un
coup le 17. du mois de Sep.
tembre au matin d'une fiévre
ardente & d'une inflammation
de poitrine , le Medecin jugea
que la maladie feroit mortelle.
Février 1710. Р
170 MERCURE
Mr l'Abbéayant donc demandé les Sacremens , il fe confeffa
& dés qu'il cut reçû ce premier
Sacrement il tomba dans une
lethargie accompagnée de convulfions qui fit craindre qu'il
ne pût recevoir les autres Sacremens. Il reſta long- temps
dans cet eftat & même fans
mouvement ; mais en eſtant
revenu & ayant demandé avec
de vives inſtances ' Euchariftie,
on laluyapporta & il la reçût
avec les fentimens les plus vifs
& les plus ardens de l'amour
de Dieu ; toujours penetré du
fentiment de l'infuffifance de
GALANT. 171
遭
fa penitence, quoyqu'il en ait
fait une des plus longues &
des plus éclatantes , il fit divers
Actes de Charité mêlez du
fentiment de la plus parfaite
abjection de foy- même. Il
demanda pardon plufieurs
fois à toutela Communauté
qui fondoit en larmes , des
mauvais exemples qu'il avoit
donné & fe recommandant
humblement à fes Prieres ; &
fur ce que le Prieur luy dit
qu'aprés la vie penitente qu'il
avoit menée & aprés avoir
confommé le grand ouvrage
de la Reforme de cette Maifon,
Pij
172 MERCURE
il avoit lieu de tout efperer
de la Mifericorde de Dieu ; il
répondit qu'il n'avoit rienfait,
que tout venoit de Dieu , &
qu'il n'eftoit qu'un ouvrier indigne. Le Prieur au nom de la
Communauté le pria de demander à Dieu , quand il
feroit devant luy unSucceffeur
qui maintint fon ouvrage ;
il répondit qu'il leur en fouhaitoit unqui reparát tous ſes manquemens & toutes lesfautes aufquelles il avoit donné lieu ou par
luy même oupar fa condefcendance ( il faut remarquer , que
c'eft le même Prieur que le
*
GALANT 173
Roy avoit nommé depuis
Abbé de Sept - fonds , & qui
eft fils de Mr d'Oppede premier Prefident du Parlement
de Provence ) enfin le Prieur
luy demanda fa benediction
paternelle au nom de la Communauté. Cefaint & humble
Abbé fe fit long- temps preffer
avant que de la vouloir donner ; mais ne pouvant plus
refifter aux inftances de fes
Religieux qui fondoient tous
en larmes , il fe fit mettre à
fon feant , & aprés avoir fait
le figne de la Croix fur luymême , dit à haute voix ces
*
Piij
174 MERCURE
paroles enfaifant fur luy ſeul
un fecond figne de Croix , &
ne voulant pas benir les autres
par humilité benedicat nos
Deus ( ce qu'il repeta trois fois )
Ømetuent cumomnes fines terra.
Enfin il mourut le zo du
mois , jour de faint Euſtache
fon Patron , aprés une douce
agonie & fans la moindre
grimace.
Louis de Bats de Caftelmore , cy- devant Lieutenant au
Regiment des Gardes Françoifes , connu dans le monde fous
le nom de Mr le Comte d'Artaignan , fils aîné de Charles de
GALANT 175
Bats de Caftelmore , connu
auffi fous le nom de Mr le
Comte d'Artaignan , Capitaine Lieutenant de la premiere
Compagnie des Moufquetaires , tué au Siege de Maftrick
en 1673. mourut fur la fin
de l'année derniere dans fon
Chafteau de Caftelmore en Armagnaç ; nom que le Roy
Louis XIII. avoit ordonné à
fon pere de prendre n'eftant
encore que Mousquetaire
aprés la mort d'un des fes oncles du cofté maternel , tué au
Siege de la Rochelle : Bats de
Caftelmore fon pere ayant
,
éPiiij
176 MERCURE
poufé Françoife de Montef
quiou d'Arraignan en 1608.
lequel a porté toute fa vie le
nom d'Arraignan avec beaucoup de gloire; le deffunt ayant
cu l'honneur de meriter l'eftimede Sa Majesté par fon zele ,
fa fidelité & fon attachement
pour fonfervice.
Mlle de Fortia , fille de feu
Mr de Fortia , Doyendes Maî
tres des Requeftes & Confeiller d'Etat , eft morte il y a déja
quelque temps. La famille de
Mrs de Fortia eft tres-ancienne. Mr le Marquis de Fortia
Durban eft l'aîné de cette Mai-
•
GALANT 177
fon. Mr de Fortia , connu fous
le nom de Forville eft Licutenant de Roy en Provence
Capitaine de Galere , & Gouverneur de la Ville de Marfeille. Mr le Marquis de Monreal ,
qui fait fon fejour ordinaire à
Avignon , &qui a époufé Mlle
de Saffenage , fœur de Mr le
Comtede Saffenage , ci- devant
Premier Gentilhomme de la
Chambre de S. A. R. Mr le
Duc d'Orleans , eft auffi de
cette Mailon. En 1100. Sybille de Fortia époufa Pierre
d'Arragon. Ainfi vous pouvez
juger de la grandeur & de l'il-
178 MERCURE
luftration de cette Maiſon.
Mre N.... Duc d'Aquaviva
eft mort à Lyon , où il paſſoir
en revenant de la Cour pour
fe retirer en Italie. Il n'eftoit
âgé que de 25. ans. Mr le Maréchal de Villeroy qui fçavoit
qu'il devoit paffer dans fon
Gouvernement , avoit eu ſoin
de le recommander' , mais malgré tous les foins qu'on en a
pris une fiévre pourprée l'a em
porté aprés quelques jours de
maladie , & qu'il a reçû les Sacremens avec beaucoup d'édification des Vicaires de la Paroiffe de Saint Paul. Son corps
GALANT 179
par fon ordre a efté embaumé
& déposé dans l'Eglife du
grand Convent des Capucins ,
jufqu'à ce qu'on le tranſportaft
dans le Duché d'Aquaviva au
tombeau de ſes Anceftres, dans
la Province de Barri , une des
principales du Royaume de
Naples; ce jeune Seigneur étoit
frere du Cardinal Aquaviva, &
neveu d'un autre Cardinal du
côrématernel. Il a fait quantité
de legs , & il a donné 10000. écus à une Dame de fon Pays. Je
vous ay parlé de fa Maiſon en
vous apprenant le mariage de
M la Comteffe d'Angeville ,
1180 MERCURE
fa niece. Sa mere eft de la MaiMaifon de Sevignon. LeBourg
d'Aquaviva a donné le nom à
cette illuftre famille, qui donna
un Cardinal au Sacré College
dans le feiziéme fiecle. Octavio
Aquaviva fut un dés ornemens
du Clergé de Rome. Il eftoit .
fils de Jean- Jerôme Aquaviva
( ou Aqua- via ) Duc d'Atri ,
dont le Duc de qui je vous apprens la mort, defcendoit auffi.
Il fut dans une grande confideration à la Cour de Romefous quatre ou cinq Papes:
Sixte V. fur tout , luy donna
divers grands Emplois , & il
GALANT 181
l'honora de la Pourpre Romaine. LePape Leon X I. luy avoit
deftiné l'Archevêché de Naples , mais la mort l'ayant prévenu le Pape Paul V. executa
fes intentions. Claude Aquaviva , de la Compagnie de Jefus , eftoit fils du Duc d'Atri ;
il avoit déja cu des Emplois
importans àla Cour de Rome,
& il pouvoit tout efperer de
fon merite & de fa naiffance ,
lorfqu'il embraffa l'Inftitut des
Jefuites. Il fucceda au P. Everard Mercurieu , troifiéme General de la Compagnie , qu'il
gouverna durant 34. ans avec
182 MERCURE
beaucoup de douceur. Il mourut au commencement du 17°
ficcle.
M' l'Abbé de Laubefpin ,
Comte de S. Jean de Lyon , eft
auffi decedé à la fleur de fon
âge. Il eftoit frere de Mr le
Chevalier de Laubefpin Capitaine de Fregate legere , dont
fouvent parlé pen- je vous ay
dant la derniere guerre d'Italie.
Quoy que l'Article qui fuit
ne regarde qu'une mort, vous
e trouverez fort curieux.
La Republique des Lettres ,
vient de faire une perte confi-
GALANT 183
derable par la mort de M
Louis Pujet , d'une des plus
anciennes familles de Lyon ;
mais beaucoup plus recommandable par fon merite
fes lumieres , & fa vertu. Il
eftoit fils defeu M' Pujet Procureur du Roy au Siege Prefidial de Lyon , qui eſt une
Charge des plus importantes ,
& de Dame N.... d'Avefnesaux-petits neveux , de laquelle
ila laiffé tous les biens , ce Gentilhomme ayant voulu paffer
fa vie dans le celibat , comme
un eftar plus parfait & plus
propre pour s'attacher aux
184 MERCURÉ
Sciences , & pour faire des progrés plus fenfibles dans la vertu ; perfuadé d'ailleurs que le
chemin qu'une ame fait dans
de Dieu eft plus rapide
*
la
la voye
lorfqu'elle a moins d'occafions
de s'entretenir avec le monde,
& de ne juger par les fens de
ce qui ne le goûte que par
foy. Mr Pujer eftant encore
tour jeune s'attacha à la nouvelle Philofophie , & il s'y perfectionna fi fort qu'il a paffé durant tout le cours de la vie pour
un tres-bon & tres-folide Philofophe. Il s'eftoit fort attaché
à la Phyfique , fur tout à l'Ex-
GALANT 185
perimentale ; & il avoit fait de
grandes découvertes fur les
Matieres Magnetiques. Son
Cabinet eftoit pour les Pierres d'Ayman , ce qu'il y avoit
de plus curieux dans toutes les
Provinces voisines , & il ne paffoit point d'Etranger à Lyon
qui n'allaft voir toutes les beautez qu'il y avoit raſſemblées
& les Experiences qu'il faifoit
fur l'Ayman. Il avoit eu fur
cette matiere une diſpute avec
Mr Jobelot de l'Academie des
Sciences ; ce qui avoit produit
de part & d'autre quelques
Lettres pleines d'érudition . Mr
Février 1710. е
186 MERCURE
Pujet avoit perfectionné l'ufage du Microſcope , & il avoit
fait avec cet Inftrument des découvertes fur le corps des plus
petits Infectes, & il publia deux
Lettres il y a quelques années
adreffées au P.LamyBenedictin
fon amy particulier , où il rendoit compte à ce Sçavant Religieux de toutes les Obferva
tions qu'il avoit faites fur le
corps de certaines Mouches
d'uneespece particuliere & fur
leur cornée ; ce qu'il dit fur la
trompe des Papillons , & ce
qu'il en faifoit voir à l'aide de
ces Microſcopes eftoit en
GALANT 187
1
effect fingulier : & il difoit
ordinairement & d'une manie→
re fort ingenieufe , que nous
avions obligation au Microf
cope , de la découverte d'un
petit monde auparavant rout
à fait inconnu. Tous les Journaux ont parlé de ces deux
Lettres avec beaucoup d'éloges : & la premiere avoit mêma paru toute entiere dans un
Journal des Sçavans il y a déja
quelques années. Ce que Me
Pujet a écrit fur l'Ayman n'a
pas moins efté recherché des
Sçavans ; nous avons cafin de
luyune Differtation qu'il
Qij
188 MERCURE
翳
publia lors que la Baguette
dont on a tant parlé faifoit le
plus grand bruit ; & dans cet
Ouvrage ainfi que dans les
autres , il parle en grand Philofophe & en Maître de fa
matiere. Il n'ignoroit aucun
des anciens & nouveaux fiftemes de Philofophie , & il parloit de tous en homme qui les
poffedoit parfaitement
joignoit à ces talens la connoiffance des belles Lettres. Jamais
perfonne n'a mieux fçu les
Poëtes que luy. Tant de talens ne luy donnoient point
de vaine gloire , l'humilité fuc
3
il
GALANT 189
軍
toujours fa vertu la plus cherie,
& il feroit difficile de trouver
dans un même homme un
cette vertu
$
fçavoir fi profond & fi étendu
avecune fi grande humilité ;
il joignoit à cette
Chreftienne le principe de
toutes les autres , un amour
pour les pauvres qui a principalement caracterifé toutes
fes actions. Dans l'année 1694
où ils fouffrirent beaucoup il
vendit toute fa vaiffelle d'argent & la plus grande partic
de fon linge pour les foulager ,
& il s'eft auffi furpaffé l'année
derniere dans l'exercice de fa
}
190 MERCURE
charité. Il a donné fa Bibliotheque à la Maifon des Jeſuites de S. Jofeph de Lyon , &
toutes fes Pierres d'Ayman &
autres curiofitez à Mr de la
Vallette Treforier de France ,
fonancien ami, & celuy de tous
les gens de Lettres . Il eft mort
âgé de prés de 80. ans.
Il y a peu de temps que je
vous ay parlé de la nomination de Mr l'Abbé d'Heudicourt, dont jevous apprens au
jourd'huy la mort , àl'Evêché
d'Evreux. Havoit travaillé pendant toute fa vie à fe rendre
digne du Siege Epifcopal , &
GALANT 191
il y eftoit arrivé par tous les
degrez qui peuvent y faire
monter. Il ne doit point rendre
de compte à Dieu de fes momens perdus , puifqu'il n'eftoit
encore âgé que de trente- deux
ans , lorfque la mort l'a furpris , & il avoit fi utilement
employé ce peude temps pour
le bien de l'Eglife , qu'il y alieu
de croire que s'il eftoit demeuré longtemps fur le Siege Epifcopal , l'Eglife en auroit tiré
de grands fecours. Je ne vous
endis rien davantage , vous en
ayant déja parlé dans le temps
qu'il a efté nomméà l'Evêché
d'Evreux.
192 MERCURE
La mort a auffi enlevé Mr
le Chevalier de Chaumont ,
Major general de l'Armée Navale du Levant. Il eftoit âgé de
79. ans , & il avoit eſté Ambaffadeur à Siam. J'aurois dû
ajoûter cette qualité à celles
que je viens de marquer , dans
lefquelles j'ay peut eftre oublié
quelque chofe ; mais fes Billets
d'Enterrément n'ont pû l'apprendre , puifqu'il n'a point
voulu que l'on en filt , & qu'il
、 a cfté enterré à Saint Severin
fans aucun éclat , n'ayant pref
que eu que des Pauvres pour
affiftans àfon Convoy, & qui
luy
GALANT 193
luy ont donné mille benedic
tions. Rien n'a efté plus éclatant que fon Ambaffade au
prés du Roy de Siam. Ilamena en France trois Ambaffadeurs de ce Monarque , & il
leur fit rendre depuis Breft jufqu'à Paris , tous les honneurs
dûs à leur caractere. Il eftoit
coufin germain de Mr le
Marquis de Guitry , GrandMaistre de la Garderobbe ,
qui fut tué près du Fort de
Tolwis avec Mr le Duc de
Longueville. La Maiſon de
Guitry eft fort ancienne , &
fous Charles VII. N. Sire
Février 1710.
*.
· R
194 MERCURE
-
de Guitry , Gouverneur de
Montereau faut - Yonne ,
fecourut Harfleur contre les
Anglois , & il perdit la vie à
la Journée de Verneuil. Cette
Maiſon avoit auffi brillébeaucoup pendant le regne de
Charles VI.
Je dois vous apprendre la
mortde Mr de Maupeou, premier Prefident de la premiere
Chambre des Enqueftes ; mais
comme je vous ay parlé plufieurs fois de la Maifon de
Maupeou, de fa Nobleffe , &
de fes Alliances ; du rare merite & des Emplois éclatans de
GALANT 195
plufieurs grands Hommes de
ce nom qui fe font diftinguez
dans les trois Ordres de l'Etat ,
& en dernier lieu à l'occafion
de Mr l'Archevêque d'Auch ,
auparavant Evêque de Caftres ,
je mecontenteray de vous dire
aujourd'huy que Mr fon frere
qui vient de mourir avoit eſté
reçu fort jeune Chevalier de
Malthe ; que preft d'y faire fes
vœux,il fut engagé par fes parens à revenir en France pour
foûtenir fon nom , à cauſe de
la mort de fon frere qui eftoit
Avocat general du grand Confeil ; qu'il eft mort dans fa cinRij
196 MERCURE
quante-quatrième année , premier Prefident de la premiere
Chambre des Enqueftes , où
il s'eftoit acquis la réputation
d'un Juge tres- integre , & que
de fon mariage avec Mlle le
Noir fille unique de Me la Prefidente le Bailleul , il n'a laiffé
qu'un fils âgé de 21. an , qui
cft Avocat du Royau Chaftelet ; jeune Magiftrat qui eft
tres gracieux & tres bien fait
qui a beaucoup d'efprit , &fur
lequel il y a d'autant plus de
fujet de fonder de hautes efperances , que la nature &la
fortune agiffant pour luy com
DE
LYON
TILLE
الاشياء
i
GALANT 197
me de concert , ont pris foin
de joindre en fa perfonne de
grands biens à de grands talens.
de Morts , parmi lesquels vous
en trouverez de fort curieux
& de tres - édifians , & je ne
doute point que la lecture de
ces Articles ne vous faffent
plaifir.
M' le Baron de Mean , grand
Doyen du Chapitre de la Cathedrale de Liege eft mort dans
une de fes Terres , & Mr le
Baron de Selis a efté élû à fa
place ; ce Baron eftoit auparavant Prevoft de Saint Paul. II
eft d'une des meilleures Mai
158 MERCURE
fons duPays de Liege ; elle eft
originaire d'Alface , & elle y
a tenu un rang tres diftingué
dés le temps que cette Province avoit fes Souverains particuliers. Ce nouveau Grand
Doyen eft proche parent de
M'le Comtede Poitiers Chancelier de la même Eglife , & il
même l'honneur d'avoir du
cofté maternel une alliance
avec la Maiſon Electorale de
Baviere. Mr le Baron de Mean
avoit eſté échangé depuis peu
avec Mr deSaint Vallier Evê
que de Quebec, qui avoit eſté
pris par un Armateur Anglois
GALANT 159
г
dans fon trajet de France en
Amerique , & qui a efté plus de
deux ans prifonnier en Angleterre. M le Baron de Mean
qui avoit auffi efté arrefté par
ordre du Roy lors que nous
eftions encore maiſtres de Liege à caufe de l'intelligence qu'il
avoit avec les ennemis de l'Etát , a marqué peu de temps
avant fa mort un vif repentir
des troubles où il avoit jetté
fa Patrie , &il faifoit inceffamment des fouhaits pour le retour de Mr l'Electeur de Cologne, Evêque de Liege fon Souverain. Ce Baron eftoit d'une
160 MERCURE
grande naiffance & allié au feu
Evêque de Munſter Bernard
de Galen. Sa Maiſon eftoit originaire de l'Etat de Mayence.
L'élection de l'Evêque caufa.
de grands defordres dans la
Ville de Liege au quinziéme
fiecle. Jean de Baviere gouver
noit alors cette Eglife. Les Liegeois luy firent la guerre. L'E
vêché eftoit à Tongres anciennement; il fut enfuite à Maf
trick , & enfin transferé à Liege.
La Soeur Therefe des Anges
Carmelite du Monaftere de la
Sainte Mere de Dieu de Riom
GALANT 161
en Auvergne , y mourut le 2
jour de cette année d'une maladie qui commença le jour
de Saint Etienne à cinq heures du foir , mais qui n'eftoit
qu'une fuite des infirmitez qu'-
elle avoit foufferte depuis 15.
ans avec une patience édifiante. Elle eftoit âgée de 69. ans ;
elle en avoit 46. de Religion ,
& elle eft morte dans unegrande opinion de fainteté. Elle
avoit quitté fes parens dans un
âgefort tendre , & qui estoient
fort éloignez de Riom pour
s'y aller renfermer dans le Convent des Carmelites , & depuis.
Février 1710.
162 MERCURE
pour है
ce temps - là on peut affurer
qu'elle y a mené une vie toutà fait angelique. Son ardeur
le Saint Sacrement de
I'Autel l'avoit obligée de paffer tous les Jeudis de fa vie en
retraite , ce qu'elle a toujours
obfervé avecbeaucoup d'exactitude , & elle a eu la confolationde mourirun Jeudy. Dans:
· les douleurs d'une longue &
cruelle maladie qui l'a fait fouffrir durant quinze années entieres , elle ne s'eft jamais voulu relâcher des pratiques de fa
Regle , & on luy entendoit
dire fouvent queplus la mort eft
GALANT 163
proche , plus ilfaut travaillerpour
sy difpofer; & qu'il faut oublier
Le corps & penser à affurer du bien
àfon ame. L'avant - veille de
Noël elle demanda à fa Superieure de jeûner au pain & à
l'eau , comme fi elle cût îçû que
ce feroit le dernier exercice de
fa penitence; & comme la Superieure s'y oppofoit , elle luy
repliqua : Au nom de Dieu , ma
Mere , ne vous opposezpas à mon
defir ; vous devezaimermonames
je fuis peut - eftre bien prés de la
mort,je la veux attendre comme
un bon Soldat , les armes à la
main. Enfin les bas fentimens
Oij
164 MERCURE
quecette fainteFille avoit d'elle- même , donne le prix à fa
penitence. On enjugera parun
billet écrit de fa main & trouvé
aprés fa mort : il eftoit conçu
en ces termes : Je vousſupplie ,
ma Mere , de me procurer toutes
les Prieres que vous pourrez , j'en
auray ungrand befoin eftant veritablement une tres-grande Pechereffe :ce n'est pas par humilité ,
mais tres-fincerement queje ·ledis ,
vous ayant toutes trompées par
quelques foibles defirs exterieurs
defairepenitence, quoy que jamais
n'enfois venue aux effets comme il faut : c'est pourquoys, ma
je
GALANT 165
chere Mere , je vous fupplie de
mettre dans ma Lettre circulaire
que je demande un Miferere ,
pour reparer mon impenitence des
vant Dieu , & s'il me fait mifericorde , je vous promets d'en eftre
bien reconnoiffante ; mais aidezmoy àfortir du Purgatoire pour
l'amour de Dieu , s'il me fait la
grace d'y aller ; s'il mm'eftoitpermis
de dire lespechez quej'ay commis
&qui medonnent cette crainte , je
le ferois tres- volontiers. Ce Billet contient le triomphe de
l'humilité chreftienne ; on n'en
peut voir une plus profonde
avecunevertu plus épurée. On
166 MERCURE
écrit de Riom que Mr l'Abbé
Faydit l'eftant allé voir quelquesmois avant qu'il mourut,
elle luy prédit fa mort ; & qu'el
le a donné d'autres marques
de la connoiffance qu'elle avoit
de l'avenir.
Si des perfonnes qui ont
mené une vie auffi reguliere ,
ou pour mieux dire auffi fainte
craignent fi fort les Jugemens
de Dieu , que ne doivent point
aprehender ceux qui vivent
dans le monde. Tentens ceux
qui y menent la vie la plus
reguliere , puifqu'ils ne laiffent
pas d'eftre expofez tous les
GALANT 167
jours à une infinité de chofes
qui les font infenfiblement ,
& fans qu'ils ayent le temps
d'y refléchir , tomber dans le
peché , & par confequent
ceux qui font dans le tumulte
des affaires ; & qui ne refuſent
rien à leurs paffions. Enfin les
hommes ne peuvent eftre
tropattentifs à ce qui regarde
leur falut puifque l'Ecriture
die leplusfagepêche fept fois par
jour.
L'Article qui fuit doit auffi faire voir qu'il ya beaucoup
de plaifir à mourir de la mort
des Juftes , & doit faire trem1
768 MERCURE
bler en mêmetemps tous ceux
qui font répandus dans le
monde , qui font bien éloignez d'atteindre à cette per
fection , & qui au lieu de fonger pendant leur vie à acquerir les Trefors neceffaires
pour bien mourir , ne fongent à en amaffer que pour
vivre ,comme s'ils ne devoient
jamais quitter ce monde.
Il court dans le monde.
une Lettre de Dom Alexis
Mauroy Celerier de l'Abbaye
de Sept- fonds adreffée à Mr
Bouillet ami de cette Maifon
fur la mort du dernier Abbés
n'ayant
GALANT 169
n'ayant pu l'avoir entiere , je
vousen envoye un extrait fidéle. Il commence fa Lettre en
difant que commela mort eft
l'echo de la vie , on a vû àla
mort de Mr l'Abbé de Septfonds le même efprit de charité, de recueillement & de penitence , qui a caracterifé toutes.
fes actions. Il eftoit infirme depuis plufieurs années. Mais
ayant eſté faifi tout d'un
coup le 17. du mois de Sep.
tembre au matin d'une fiévre
ardente & d'une inflammation
de poitrine , le Medecin jugea
que la maladie feroit mortelle.
Février 1710. Р
170 MERCURE
Mr l'Abbéayant donc demandé les Sacremens , il fe confeffa
& dés qu'il cut reçû ce premier
Sacrement il tomba dans une
lethargie accompagnée de convulfions qui fit craindre qu'il
ne pût recevoir les autres Sacremens. Il reſta long- temps
dans cet eftat & même fans
mouvement ; mais en eſtant
revenu & ayant demandé avec
de vives inſtances ' Euchariftie,
on laluyapporta & il la reçût
avec les fentimens les plus vifs
& les plus ardens de l'amour
de Dieu ; toujours penetré du
fentiment de l'infuffifance de
GALANT. 171
遭
fa penitence, quoyqu'il en ait
fait une des plus longues &
des plus éclatantes , il fit divers
Actes de Charité mêlez du
fentiment de la plus parfaite
abjection de foy- même. Il
demanda pardon plufieurs
fois à toutela Communauté
qui fondoit en larmes , des
mauvais exemples qu'il avoit
donné & fe recommandant
humblement à fes Prieres ; &
fur ce que le Prieur luy dit
qu'aprés la vie penitente qu'il
avoit menée & aprés avoir
confommé le grand ouvrage
de la Reforme de cette Maifon,
Pij
172 MERCURE
il avoit lieu de tout efperer
de la Mifericorde de Dieu ; il
répondit qu'il n'avoit rienfait,
que tout venoit de Dieu , &
qu'il n'eftoit qu'un ouvrier indigne. Le Prieur au nom de la
Communauté le pria de demander à Dieu , quand il
feroit devant luy unSucceffeur
qui maintint fon ouvrage ;
il répondit qu'il leur en fouhaitoit unqui reparát tous ſes manquemens & toutes lesfautes aufquelles il avoit donné lieu ou par
luy même oupar fa condefcendance ( il faut remarquer , que
c'eft le même Prieur que le
*
GALANT 173
Roy avoit nommé depuis
Abbé de Sept - fonds , & qui
eft fils de Mr d'Oppede premier Prefident du Parlement
de Provence ) enfin le Prieur
luy demanda fa benediction
paternelle au nom de la Communauté. Cefaint & humble
Abbé fe fit long- temps preffer
avant que de la vouloir donner ; mais ne pouvant plus
refifter aux inftances de fes
Religieux qui fondoient tous
en larmes , il fe fit mettre à
fon feant , & aprés avoir fait
le figne de la Croix fur luymême , dit à haute voix ces
*
Piij
174 MERCURE
paroles enfaifant fur luy ſeul
un fecond figne de Croix , &
ne voulant pas benir les autres
par humilité benedicat nos
Deus ( ce qu'il repeta trois fois )
Ømetuent cumomnes fines terra.
Enfin il mourut le zo du
mois , jour de faint Euſtache
fon Patron , aprés une douce
agonie & fans la moindre
grimace.
Louis de Bats de Caftelmore , cy- devant Lieutenant au
Regiment des Gardes Françoifes , connu dans le monde fous
le nom de Mr le Comte d'Artaignan , fils aîné de Charles de
GALANT 175
Bats de Caftelmore , connu
auffi fous le nom de Mr le
Comte d'Artaignan , Capitaine Lieutenant de la premiere
Compagnie des Moufquetaires , tué au Siege de Maftrick
en 1673. mourut fur la fin
de l'année derniere dans fon
Chafteau de Caftelmore en Armagnaç ; nom que le Roy
Louis XIII. avoit ordonné à
fon pere de prendre n'eftant
encore que Mousquetaire
aprés la mort d'un des fes oncles du cofté maternel , tué au
Siege de la Rochelle : Bats de
Caftelmore fon pere ayant
,
éPiiij
176 MERCURE
poufé Françoife de Montef
quiou d'Arraignan en 1608.
lequel a porté toute fa vie le
nom d'Arraignan avec beaucoup de gloire; le deffunt ayant
cu l'honneur de meriter l'eftimede Sa Majesté par fon zele ,
fa fidelité & fon attachement
pour fonfervice.
Mlle de Fortia , fille de feu
Mr de Fortia , Doyendes Maî
tres des Requeftes & Confeiller d'Etat , eft morte il y a déja
quelque temps. La famille de
Mrs de Fortia eft tres-ancienne. Mr le Marquis de Fortia
Durban eft l'aîné de cette Mai-
•
GALANT 177
fon. Mr de Fortia , connu fous
le nom de Forville eft Licutenant de Roy en Provence
Capitaine de Galere , & Gouverneur de la Ville de Marfeille. Mr le Marquis de Monreal ,
qui fait fon fejour ordinaire à
Avignon , &qui a époufé Mlle
de Saffenage , fœur de Mr le
Comtede Saffenage , ci- devant
Premier Gentilhomme de la
Chambre de S. A. R. Mr le
Duc d'Orleans , eft auffi de
cette Mailon. En 1100. Sybille de Fortia époufa Pierre
d'Arragon. Ainfi vous pouvez
juger de la grandeur & de l'il-
178 MERCURE
luftration de cette Maiſon.
Mre N.... Duc d'Aquaviva
eft mort à Lyon , où il paſſoir
en revenant de la Cour pour
fe retirer en Italie. Il n'eftoit
âgé que de 25. ans. Mr le Maréchal de Villeroy qui fçavoit
qu'il devoit paffer dans fon
Gouvernement , avoit eu ſoin
de le recommander' , mais malgré tous les foins qu'on en a
pris une fiévre pourprée l'a em
porté aprés quelques jours de
maladie , & qu'il a reçû les Sacremens avec beaucoup d'édification des Vicaires de la Paroiffe de Saint Paul. Son corps
GALANT 179
par fon ordre a efté embaumé
& déposé dans l'Eglife du
grand Convent des Capucins ,
jufqu'à ce qu'on le tranſportaft
dans le Duché d'Aquaviva au
tombeau de ſes Anceftres, dans
la Province de Barri , une des
principales du Royaume de
Naples; ce jeune Seigneur étoit
frere du Cardinal Aquaviva, &
neveu d'un autre Cardinal du
côrématernel. Il a fait quantité
de legs , & il a donné 10000. écus à une Dame de fon Pays. Je
vous ay parlé de fa Maiſon en
vous apprenant le mariage de
M la Comteffe d'Angeville ,
1180 MERCURE
fa niece. Sa mere eft de la MaiMaifon de Sevignon. LeBourg
d'Aquaviva a donné le nom à
cette illuftre famille, qui donna
un Cardinal au Sacré College
dans le feiziéme fiecle. Octavio
Aquaviva fut un dés ornemens
du Clergé de Rome. Il eftoit .
fils de Jean- Jerôme Aquaviva
( ou Aqua- via ) Duc d'Atri ,
dont le Duc de qui je vous apprens la mort, defcendoit auffi.
Il fut dans une grande confideration à la Cour de Romefous quatre ou cinq Papes:
Sixte V. fur tout , luy donna
divers grands Emplois , & il
GALANT 181
l'honora de la Pourpre Romaine. LePape Leon X I. luy avoit
deftiné l'Archevêché de Naples , mais la mort l'ayant prévenu le Pape Paul V. executa
fes intentions. Claude Aquaviva , de la Compagnie de Jefus , eftoit fils du Duc d'Atri ;
il avoit déja cu des Emplois
importans àla Cour de Rome,
& il pouvoit tout efperer de
fon merite & de fa naiffance ,
lorfqu'il embraffa l'Inftitut des
Jefuites. Il fucceda au P. Everard Mercurieu , troifiéme General de la Compagnie , qu'il
gouverna durant 34. ans avec
182 MERCURE
beaucoup de douceur. Il mourut au commencement du 17°
ficcle.
M' l'Abbé de Laubefpin ,
Comte de S. Jean de Lyon , eft
auffi decedé à la fleur de fon
âge. Il eftoit frere de Mr le
Chevalier de Laubefpin Capitaine de Fregate legere , dont
fouvent parlé pen- je vous ay
dant la derniere guerre d'Italie.
Quoy que l'Article qui fuit
ne regarde qu'une mort, vous
e trouverez fort curieux.
La Republique des Lettres ,
vient de faire une perte confi-
GALANT 183
derable par la mort de M
Louis Pujet , d'une des plus
anciennes familles de Lyon ;
mais beaucoup plus recommandable par fon merite
fes lumieres , & fa vertu. Il
eftoit fils defeu M' Pujet Procureur du Roy au Siege Prefidial de Lyon , qui eſt une
Charge des plus importantes ,
& de Dame N.... d'Avefnesaux-petits neveux , de laquelle
ila laiffé tous les biens , ce Gentilhomme ayant voulu paffer
fa vie dans le celibat , comme
un eftar plus parfait & plus
propre pour s'attacher aux
184 MERCURÉ
Sciences , & pour faire des progrés plus fenfibles dans la vertu ; perfuadé d'ailleurs que le
chemin qu'une ame fait dans
de Dieu eft plus rapide
*
la
la voye
lorfqu'elle a moins d'occafions
de s'entretenir avec le monde,
& de ne juger par les fens de
ce qui ne le goûte que par
foy. Mr Pujer eftant encore
tour jeune s'attacha à la nouvelle Philofophie , & il s'y perfectionna fi fort qu'il a paffé durant tout le cours de la vie pour
un tres-bon & tres-folide Philofophe. Il s'eftoit fort attaché
à la Phyfique , fur tout à l'Ex-
GALANT 185
perimentale ; & il avoit fait de
grandes découvertes fur les
Matieres Magnetiques. Son
Cabinet eftoit pour les Pierres d'Ayman , ce qu'il y avoit
de plus curieux dans toutes les
Provinces voisines , & il ne paffoit point d'Etranger à Lyon
qui n'allaft voir toutes les beautez qu'il y avoit raſſemblées
& les Experiences qu'il faifoit
fur l'Ayman. Il avoit eu fur
cette matiere une diſpute avec
Mr Jobelot de l'Academie des
Sciences ; ce qui avoit produit
de part & d'autre quelques
Lettres pleines d'érudition . Mr
Février 1710. е
186 MERCURE
Pujet avoit perfectionné l'ufage du Microſcope , & il avoit
fait avec cet Inftrument des découvertes fur le corps des plus
petits Infectes, & il publia deux
Lettres il y a quelques années
adreffées au P.LamyBenedictin
fon amy particulier , où il rendoit compte à ce Sçavant Religieux de toutes les Obferva
tions qu'il avoit faites fur le
corps de certaines Mouches
d'uneespece particuliere & fur
leur cornée ; ce qu'il dit fur la
trompe des Papillons , & ce
qu'il en faifoit voir à l'aide de
ces Microſcopes eftoit en
GALANT 187
1
effect fingulier : & il difoit
ordinairement & d'une manie→
re fort ingenieufe , que nous
avions obligation au Microf
cope , de la découverte d'un
petit monde auparavant rout
à fait inconnu. Tous les Journaux ont parlé de ces deux
Lettres avec beaucoup d'éloges : & la premiere avoit mêma paru toute entiere dans un
Journal des Sçavans il y a déja
quelques années. Ce que Me
Pujet a écrit fur l'Ayman n'a
pas moins efté recherché des
Sçavans ; nous avons cafin de
luyune Differtation qu'il
Qij
188 MERCURE
翳
publia lors que la Baguette
dont on a tant parlé faifoit le
plus grand bruit ; & dans cet
Ouvrage ainfi que dans les
autres , il parle en grand Philofophe & en Maître de fa
matiere. Il n'ignoroit aucun
des anciens & nouveaux fiftemes de Philofophie , & il parloit de tous en homme qui les
poffedoit parfaitement
joignoit à ces talens la connoiffance des belles Lettres. Jamais
perfonne n'a mieux fçu les
Poëtes que luy. Tant de talens ne luy donnoient point
de vaine gloire , l'humilité fuc
3
il
GALANT 189
軍
toujours fa vertu la plus cherie,
& il feroit difficile de trouver
dans un même homme un
cette vertu
$
fçavoir fi profond & fi étendu
avecune fi grande humilité ;
il joignoit à cette
Chreftienne le principe de
toutes les autres , un amour
pour les pauvres qui a principalement caracterifé toutes
fes actions. Dans l'année 1694
où ils fouffrirent beaucoup il
vendit toute fa vaiffelle d'argent & la plus grande partic
de fon linge pour les foulager ,
& il s'eft auffi furpaffé l'année
derniere dans l'exercice de fa
}
190 MERCURE
charité. Il a donné fa Bibliotheque à la Maifon des Jeſuites de S. Jofeph de Lyon , &
toutes fes Pierres d'Ayman &
autres curiofitez à Mr de la
Vallette Treforier de France ,
fonancien ami, & celuy de tous
les gens de Lettres . Il eft mort
âgé de prés de 80. ans.
Il y a peu de temps que je
vous ay parlé de la nomination de Mr l'Abbé d'Heudicourt, dont jevous apprens au
jourd'huy la mort , àl'Evêché
d'Evreux. Havoit travaillé pendant toute fa vie à fe rendre
digne du Siege Epifcopal , &
GALANT 191
il y eftoit arrivé par tous les
degrez qui peuvent y faire
monter. Il ne doit point rendre
de compte à Dieu de fes momens perdus , puifqu'il n'eftoit
encore âgé que de trente- deux
ans , lorfque la mort l'a furpris , & il avoit fi utilement
employé ce peude temps pour
le bien de l'Eglife , qu'il y alieu
de croire que s'il eftoit demeuré longtemps fur le Siege Epifcopal , l'Eglife en auroit tiré
de grands fecours. Je ne vous
endis rien davantage , vous en
ayant déja parlé dans le temps
qu'il a efté nomméà l'Evêché
d'Evreux.
192 MERCURE
La mort a auffi enlevé Mr
le Chevalier de Chaumont ,
Major general de l'Armée Navale du Levant. Il eftoit âgé de
79. ans , & il avoit eſté Ambaffadeur à Siam. J'aurois dû
ajoûter cette qualité à celles
que je viens de marquer , dans
lefquelles j'ay peut eftre oublié
quelque chofe ; mais fes Billets
d'Enterrément n'ont pû l'apprendre , puifqu'il n'a point
voulu que l'on en filt , & qu'il
、 a cfté enterré à Saint Severin
fans aucun éclat , n'ayant pref
que eu que des Pauvres pour
affiftans àfon Convoy, & qui
luy
GALANT 193
luy ont donné mille benedic
tions. Rien n'a efté plus éclatant que fon Ambaffade au
prés du Roy de Siam. Ilamena en France trois Ambaffadeurs de ce Monarque , & il
leur fit rendre depuis Breft jufqu'à Paris , tous les honneurs
dûs à leur caractere. Il eftoit
coufin germain de Mr le
Marquis de Guitry , GrandMaistre de la Garderobbe ,
qui fut tué près du Fort de
Tolwis avec Mr le Duc de
Longueville. La Maiſon de
Guitry eft fort ancienne , &
fous Charles VII. N. Sire
Février 1710.
*.
· R
194 MERCURE
-
de Guitry , Gouverneur de
Montereau faut - Yonne ,
fecourut Harfleur contre les
Anglois , & il perdit la vie à
la Journée de Verneuil. Cette
Maiſon avoit auffi brillébeaucoup pendant le regne de
Charles VI.
Je dois vous apprendre la
mortde Mr de Maupeou, premier Prefident de la premiere
Chambre des Enqueftes ; mais
comme je vous ay parlé plufieurs fois de la Maifon de
Maupeou, de fa Nobleffe , &
de fes Alliances ; du rare merite & des Emplois éclatans de
GALANT 195
plufieurs grands Hommes de
ce nom qui fe font diftinguez
dans les trois Ordres de l'Etat ,
& en dernier lieu à l'occafion
de Mr l'Archevêque d'Auch ,
auparavant Evêque de Caftres ,
je mecontenteray de vous dire
aujourd'huy que Mr fon frere
qui vient de mourir avoit eſté
reçu fort jeune Chevalier de
Malthe ; que preft d'y faire fes
vœux,il fut engagé par fes parens à revenir en France pour
foûtenir fon nom , à cauſe de
la mort de fon frere qui eftoit
Avocat general du grand Confeil ; qu'il eft mort dans fa cinRij
196 MERCURE
quante-quatrième année , premier Prefident de la premiere
Chambre des Enqueftes , où
il s'eftoit acquis la réputation
d'un Juge tres- integre , & que
de fon mariage avec Mlle le
Noir fille unique de Me la Prefidente le Bailleul , il n'a laiffé
qu'un fils âgé de 21. an , qui
cft Avocat du Royau Chaftelet ; jeune Magiftrat qui eft
tres gracieux & tres bien fait
qui a beaucoup d'efprit , &fur
lequel il y a d'autant plus de
fujet de fonder de hautes efperances , que la nature &la
fortune agiffant pour luy com
DE
LYON
TILLE
الاشياء
i
GALANT 197
me de concert , ont pris foin
de joindre en fa perfonne de
grands biens à de grands talens.
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Résumé : Article des Morts, parmi lesquelles il s'en trouve de tres-edifiantes. [titre d'après la table]
Le texte relate plusieurs décès notables et les circonstances qui les entourent. Le Baron de Mean, grand doyen du Chapitre de la Cathédrale de Liège, est décédé. Il avait été échangé avec l'évêque de Québec, Saint Vallier, capturé par des Anglais. Le Baron de Mean avait exprimé des regrets pour les troubles causés à sa patrie et souhaitait le retour de l'Électeur de Cologne, souverain de Liège. Le Baron de Selis, ancien prévôt de Saint Paul, a été élu pour lui succéder. Issu d'une famille distinguée du Pays de Liège, originaire d'Alsace, il est proche parent du Comte de Poitiers, chancelier de la même église. La sœur Thérèse des Anges, carmélite du monastère de la Sainte Mère de Dieu à Riom en Auvergne, est décédée à l'âge de 69 ans après une longue maladie. Elle avait mené une vie exemplaire, marquée par une grande dévotion et une humilité profonde, quittant sa famille jeune pour entrer au couvent et observant rigoureusement les pratiques de sa règle. L'abbé de Sept-Fonds est également décédé, montrant un esprit de charité et de pénitence jusqu'à la fin. Il avait demandé pardon pour les mauvais exemples donnés et exprimé son humilité en se considérant comme un ouvrier indigne. Louis de Bats de Castelmore, connu sous le nom de Comte d'Artagnan, est décédé dans son château de Castelmore en Armagnac. Lieutenant au régiment des Gardes Françaises, il avait été tué au siège de Maastricht en 1673. Son père, également Comte d'Artagnan, avait été mousquetaire et avait épousé Françoise de Montèsquiou d'Artagnan en 1608. Mlle de Fortia, fille de feu Monsieur de Fortia, doyen des Maîtres des Requêtes et conseiller d'État, est décédée. La famille de Fortia est très ancienne et distinguée, avec plusieurs membres occupant des postes importants. Le Duc d'Aquaviva est mort à Lyon à l'âge de 25 ans. Frère du Cardinal Aquaviva et neveu d'un autre cardinal, il avait fait plusieurs legs et donné 10 000 écus à une dame de son pays. Sa famille, originaire du bourg d'Aquaviva, a produit plusieurs personnages illustres, dont des cardinaux et des membres éminents du clergé romain. Un gouverneur anonyme a régné avec douceur durant 34 ans et est décédé au début du 17ème siècle. L'Abbé de Laubespin, Comte de Saint-Jean-de-Lyon, est également décédé jeune. Il était le frère du Chevalier de Laubespin, capitaine de frégate légère, connu pour ses actions durant la dernière guerre d'Italie. La République des Lettres a subi une perte significative avec la mort de Louis Pujet, issu d'une ancienne famille lyonnaise. Pujet, fils du procureur du roi au siège présidial de Lyon, a choisi de vivre célibataire pour se consacrer aux sciences et à la vertu. Il s'est distingué en philosophie, particulièrement en physique expérimentale, et a fait des découvertes sur les matières magnétiques. Son cabinet de pierres d'aimant était renommé. Pujet a perfectionné l'usage du microscope et a publié des lettres sur ses observations. Il a également écrit sur la baguette divinatoire et maîtrisait les anciens et nouveaux systèmes de philosophie. Humble et charitable, il a vendu ses biens pour aider les pauvres et a légué sa bibliothèque aux Jésuites de Lyon. Il est mort à près de 80 ans. L'Abbé d'Heudicourt, évêque d'Évreux, est décédé à l'âge de 32 ans après avoir travaillé toute sa vie pour se rendre digne de son siège épiscopal. Le Chevalier de Chaumont, major général de l'armée navale du Levant et ancien ambassadeur à Siam, est mort à 79 ans. Il a préféré une cérémonie funéraire discrète, assisté uniquement par des pauvres. Monsieur de Maupeou, premier président de la première Chambre des Enquêtes, est décédé à 54 ans, laissant un fils avocat au Châtelet, promis à un grand avenir.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1935
p. 197-200
« Je vous envoye l'Estampe des Jettons de cette année que [...] »
Début :
Je vous envoye l'Estampe des Jettons de cette année que [...]
Mots clefs :
Jetons, Académie royale des médailles et inscriptions
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Je vous envoye l'Estampe des Jettons de cette année que [...] »
Je vous envoye l'Eftampe
des Jettons de cette année
vous auriez trouvée dans ma
Lettre du mois de Janvier fi
la maladie de mon Graveur ne
m'euft point empêché de vous
l'envoyer. Les Devilés font
prefque toutes de Meffieurs de
Academic Royale des Medailles & Infcriptions , & meritent l'attention de ceux qui
les verront. Ces Jettons ont
efté frappez à l'ordinaire à la
Riij
198 MERCURE
Monnoye des Medailles. Vous
aurez dû remarquer que touse
les Corps qui ont accoûtumé
d'en donner tous les ans , n'ontpas ceffé d'en faire frapper cette année , malgré la calamité
publique caufée par la forte &
longue gelée de l'année derniere , que la France feule a éprouvée , parce que dans les climats
plus froids la nége n'ayant
point fondu , en avoit confervé les bleds , au lieu que le froid
ayant repris en France avant
que l'eau de cette nége cuft
penetré dans la terre , la glace
avoit coupé tous les grains.
GALANT
LIOTHE
C'eſt un avantage que no
nemis ont eu , & que l'on ne
doit attribuer ny à leurs forces
ny à leur valeur ; qu'ils n'auront pas toûjours , & dont ils
doivent fe tenir heureux fans
s'en glorifier ; c'eſt un avantahe felon toutes les appa- ge , que
rences , ils n'auront pas cette
année.
Vous aurez peut - eftre remarqué que la Ville n'a point
fait frapper de Jettons cette
année ; mais comme elle s'eft
fort appliquée au foulagement
des Pauvres , le Roy a trouvé
bon qu'elle employaſt à cer
Riiij
200 MERCURE
ufage le fond qu'elle auroit
employé à faire frapper des
Jettons.
des Jettons de cette année
vous auriez trouvée dans ma
Lettre du mois de Janvier fi
la maladie de mon Graveur ne
m'euft point empêché de vous
l'envoyer. Les Devilés font
prefque toutes de Meffieurs de
Academic Royale des Medailles & Infcriptions , & meritent l'attention de ceux qui
les verront. Ces Jettons ont
efté frappez à l'ordinaire à la
Riij
198 MERCURE
Monnoye des Medailles. Vous
aurez dû remarquer que touse
les Corps qui ont accoûtumé
d'en donner tous les ans , n'ontpas ceffé d'en faire frapper cette année , malgré la calamité
publique caufée par la forte &
longue gelée de l'année derniere , que la France feule a éprouvée , parce que dans les climats
plus froids la nége n'ayant
point fondu , en avoit confervé les bleds , au lieu que le froid
ayant repris en France avant
que l'eau de cette nége cuft
penetré dans la terre , la glace
avoit coupé tous les grains.
GALANT
LIOTHE
C'eſt un avantage que no
nemis ont eu , & que l'on ne
doit attribuer ny à leurs forces
ny à leur valeur ; qu'ils n'auront pas toûjours , & dont ils
doivent fe tenir heureux fans
s'en glorifier ; c'eſt un avantahe felon toutes les appa- ge , que
rences , ils n'auront pas cette
année.
Vous aurez peut - eftre remarqué que la Ville n'a point
fait frapper de Jettons cette
année ; mais comme elle s'eft
fort appliquée au foulagement
des Pauvres , le Roy a trouvé
bon qu'elle employaſt à cer
Riiij
200 MERCURE
ufage le fond qu'elle auroit
employé à faire frapper des
Jettons.
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Résumé : « Je vous envoye l'Estampe des Jettons de cette année que [...] »
Le texte annonce l'envoi de jetons commémoratifs pour l'année en cours, malgré la maladie du graveur. Ces jetons sont destinés principalement aux membres de l'Académie Royale des Médailles et Inscriptions et ont été frappés à la Monnoye des Médailles. L'année précédente, une forte et longue gelée a causé des calamités publiques en France, détruisant les récoltes. Contrairement à la France, les climats plus froids ont bénéficié de la neige pour préserver les blés. Cette situation avantageuse pour les ennemis de la France est considérée comme temporaire. De plus, la ville n'a pas fait frapper de jetons cette année, préférant utiliser ses fonds pour aider les pauvres, une décision approuvée par le roi.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1936
p. 200-216
Naissance de Monseigneur le Duc d'Anjou, [titre d'après la table]
Début :
Quoy qu'il me reste à vous parler d'une infinité de choses [...]
Mots clefs :
Couches, Accouchement, Duchesse de Bourgogne, Naissance du duc d'Anjou
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Naissance de Monseigneur le Duc d'Anjou, [titre d'après la table]
Quoy qu'il me reste à vous
parler d'une infinité de chofes
qui felon l'ordre d'ancienneté,
devroient preceder l'Article
qui fuit , il eft ncanmoins de
ceux dont on doit parler fans
attendrel'ordre des dattes que
je n'obferve pas mefme en
beaucoup de chofes , vous envoyant fouvent plufieurs Articles plutoft dans le temps que
je fuis informé à fond de ce.
qui les regarde , que dans le
temps qu'ils ſe ſont paffez , &
GALANT 201
il meferoit impoffible de vous
écrire fi j'en ufois autrement.
Il fuffit commeje vous ay marqué fouvent, que dans les Articles que je vous envoye ,
quelque temps qu'il y ait que
ce qu'ils contiennent foit paffe ;
il y ait toûjours quelque chofe qui vous foit nouveau dans
ce que je vous mande , & même que je vous envoye fouvent des chofes que vous ne
fçavez pas encore , quoy qu'il
y ait déja longtemps qu'elles fe
foient paffées.
Quant à ce que vous allez
lire , ce font des chofes que la
202 MERCURE
Renommée rend également
publiques en même temps
dans les lieux où elles fe pafu
fent , & qu'elle ne tarde pas a
faire fçavoir dans les lieux les
plus éloignez. Mais comme il
s'agit de faits hiftoriques du
premier rang , il eft à propos
de les donner par ordre , &
d'en faire un Corps qui en
puiffe donner uneidée parfaite
dans les lieux les plus éloignez ;
l'apprendre enfuite aux Etrangers , & laiffer à la Pofterité.
dequoy s'en inſtruire & d'ap
prendre des particularitez qu'l
Tuy eft quelquesfois important
CALANT 203
de fçavoir. Vous jugez bien
que je vais vous parler d'un
morceau d'Histoire qui doit
tenir place dans l'Hiftoire genevale du monde , & je m'imagine qu'en lifant ce Prelude,
vous devinerez d'abord que je
vous vais parler des Couches
de Madame la Ducheffe de:
Bourgogne , & vous ne vous
tromperez pas.
On eftoit attentif fur le
temps que cette Princeffe
accoucheroit, tant parce qu'on
eftoit perfuadé qu'elle eftoit
à terme , qu'à caufe qu'il y
avoit déja du temps qu'elle
204 MERCURE .
avoit fenty quelques douleurs
qui avoient donné lieu de
croire qu'elle accoucheroit
plutoft que l'on n'avoit cru, &
qu'elle avoitfenty ces douleurs
à diverfes reprifes , ce qui cftoit
caufe qu'on attendoit inceffamment le moment de fon
acouchement, que les Princes ,
qui pour leurs interefts particuliers doivent eftre prefens à
de pareils accouchemens ou
du moins dans des lieux d'où ils
puiffent fçavoir ce qui fe paffe
-fans pouvoir eftre trompez,
ne quittoient point Verfailles,
&les habits du Roy demeu
GALANT 205
C
roient toutes les nuits dans la
Chambre de Sa Majefté , afin
de gagner le temps qu'il auroit
fallu perdre pour aller chercher fa Garderobbe.
Enfin le Samedy 15 de ce
mois , fur les fept heures du
matin , cette Princeffe commença à fentir les premieres
douleurs de l'accouchement ,
& comme l'enfant fe trouva
mal tourné , on crut d'abord
quele travail pouroit eſtre rude, & que cette Princeffe n'accoucheroit qu'avec beaucoup
de peine ; mais M' Clement
qui a déja accouché plufieurs
>
206 MERCURE
fois cette Princeffe , qui eft
depuis peu de retour d'Efpagne où il a accouché la Reine ,
& dont le fçavoir eft grand
auffi - bien que l'experience ,
remit auffi toft l'enfant dans
la fituation qu'il devoit eftre :
de maniere que cette Princeffe
accoucha fur les huit heures
demi-quart ; ce que les faifeurs
d'horofcopes feront bien- aife
d'aprendre. Je vous diray
cependant , fans me vouloir
meler d'en faire , qu'il a de
tout temps paffé pour conftant
que les enfans qui naiffoient
le jour eftoient plus heureux
है
GALANT 207
que ceux qui venoient au
monde pendant la nuit. Comme ce Prince eft arriere petit
fils du Roy , rien ne marque
mieux que le Ciel benit la
pofterité de ce Monarque ; &
d'ailleurs il eft tresavantageux
à un Etat d'ayoir beaucoup
de Princes d'une même race
d'autant que lors qu'il paffe
d'une race à unautre , il arrive
fouventdes demeflez qui caufent de grands defordres.
Le bruit de l'accouchement
de Madame la Ducheffe de
Bourgogne , s'eftant auffi-toft
répandu dans toute la Cour
208 MERCURE
T
ycaufa lajoye qu'il eft aifé de
s'imaginer. Le Roy donna au
Prince nouveau né , le nom
de Duc d'Anjou , & il fut ondoyé par M le Cardinal de
Janfon , Grand-Aumônier de
France.
La Renommée , avec la
precipitation qui luy eft ordinaire , lorfqu'il s'agit d'auffi
grandes nouvelles , porta auffitoft à Paris , celle de cette heureufe naiffance , qui prefqu'en
même temps fut fçue de tout
Paris , & annoncée au Public
par la Cloche du Palais qui fe
fait toûjours entendre en de
GALANT 209.
&
par
pareilles occafions ,
le
carillon de la Samaritaine , qui
ne manque jamais de fe faire
entendre auffi ; & dés le jour
même onvit paroiftre les Vers
fuivans, faits par Mr d'Aubicourt.
Sur l'Heureufe Naiffance
de Monſeigneur
LE DUC D'ANJOU.
Le Duc d'Anjou qui regne eft fi
bien établi
SurleTrône où le Cielpermetqu'il
fe maintienne ,
Qu'un Angeſousfon nom nous anFévrier 1710. S
210 MERCURED
4
nonce aujourd'huy,
Qu'il vient tenir un rang que ce
Prince a remply y bonin
Afin qu'on n'ait pas lieu de crain
dre qu'il revienne.
Onvit auffi paroiſtre la Devife fuivante , fur cet accouchement , faite par Mr le Chevalier de Vertron.
Le Corps eft la fleur de Gre
nade, avec ces paroles:
SERVATQUE MIHI NATURA
CORONAM.
Le 16. le Royfit chanter le
GALANT 211
Te Deum dans la Chapelle de
Verfailles , & ayant refolu de
faire chanter dans la Metropolitaine de Paris un Te Deum folemnel , auquel devoient affilter le Parlement & tous , les
Corps qui ont accoûtumé de
l'accompagner dans de parcilles Ceremonies , il écrivit à Mr
le Cardinal de Noailles , Archevêque de Paris , qu'il regar
doit comme une nouvelle & trop
confiderable benediction du Ciel,
la naiſſance de fonfecond Arrierepetit- Fils le Duc d'Anjou , dont
fa Petite - Fille la Ducheffe de
Bourgogne eftoit accouchée ; pour
Sij
212 MERCURE
ne pasfatisfaire à la jufte obligation où il eftoit d'en rendre àDieu
les Actions de graces qui luy
eftoient dûës; & il luy marquoit
de faire chanter le Te Deum
dans l'Eglife Metropolitaine
de fa bonne Ville de Paris , au
jour & à l'heure que le grandMaitre ou Maiftre des Ceremonies luy diroit de fa part.
Commeon chante toûjours.
unTe Deum folemnel pour de
parcilles Naiffances , &que les
jours que ce Te Deum fe chante , on tire un Feu d'artifice
devant l'Hoſtel de Ville , on
n'avoit pas attendu d'ordre
GALANT 213
preparer , & dés que pour le
M's les Prevoft des Marchands
& Echevins curent appris la
Naiffance de Monfeigneur le
Duc d'Anjou , ils y firent travailler.
Le deffein du Feu , dont
je ne vous fais point de Difcription , marquoit par des
figures fimbolifées , que le
Prince que le Ciel vient de
donner à la France , eftant un
prefage certain de fa benediction fur tout le Royaume ,
& de la continuation de cette
fenfible protection dont il a
fouvent reçu de pareilles mar-
214 MERCURB
ques , les Peuples ne pouvoient
en faire voir leur reconnoif
fance avec trop d'éclat , &
marquer auffi les vœux que
ces mêmes Peuples font pour
demander au Tout- puiffant
la confervation d'un fi precieux gage de fa bonté , en
fouhaitant au nouveau Prince
les vertus qui font fi naturelles au fang illuftre d'où il eft
forty. On voyoit dans les
Emblêmes de ce Feu , les fouhaits que les Peuples faifoient
de voir un jour en ce jeune
Prince les vertus & qui font
hereditaires à fonte augufte
GALANT 215
C
fang. lley avoit auffi trois
Emblèmes par lesquelles on
pretendoit faire voir trois des
principales Vertus neceffaires
à un Prince, fçavoir , la Sageffe,
la Grandeur d'ame , & la
Science. Je ne vous dis point
que la Renommée eftoit au
milieu de la Machine , qui
reprefentoit ce Feu , avec fes
deux Trompettes , & dans une
attitude quifaifoit voir qu'elle
eftoit prefte d'aller par toute
la terre annoncer l'heureufer
naiffance qui caufoit tant de
joye à toute la France.
Il y eut le même foir un
216 MERCURE
grandfoupé à l'Hôtel de Ville ,
auquel fe trouverent Monfieur
le Gouverneur de Paris , &
plufieurs perfonnes d'une
qualité diftinguée , & plufieurs
décharges du Canon qu'on
avoit placé le long du Port
de la Grève , & des feux furent
allumez dans toutes les rues
de Paris
parler d'une infinité de chofes
qui felon l'ordre d'ancienneté,
devroient preceder l'Article
qui fuit , il eft ncanmoins de
ceux dont on doit parler fans
attendrel'ordre des dattes que
je n'obferve pas mefme en
beaucoup de chofes , vous envoyant fouvent plufieurs Articles plutoft dans le temps que
je fuis informé à fond de ce.
qui les regarde , que dans le
temps qu'ils ſe ſont paffez , &
GALANT 201
il meferoit impoffible de vous
écrire fi j'en ufois autrement.
Il fuffit commeje vous ay marqué fouvent, que dans les Articles que je vous envoye ,
quelque temps qu'il y ait que
ce qu'ils contiennent foit paffe ;
il y ait toûjours quelque chofe qui vous foit nouveau dans
ce que je vous mande , & même que je vous envoye fouvent des chofes que vous ne
fçavez pas encore , quoy qu'il
y ait déja longtemps qu'elles fe
foient paffées.
Quant à ce que vous allez
lire , ce font des chofes que la
202 MERCURE
Renommée rend également
publiques en même temps
dans les lieux où elles fe pafu
fent , & qu'elle ne tarde pas a
faire fçavoir dans les lieux les
plus éloignez. Mais comme il
s'agit de faits hiftoriques du
premier rang , il eft à propos
de les donner par ordre , &
d'en faire un Corps qui en
puiffe donner uneidée parfaite
dans les lieux les plus éloignez ;
l'apprendre enfuite aux Etrangers , & laiffer à la Pofterité.
dequoy s'en inſtruire & d'ap
prendre des particularitez qu'l
Tuy eft quelquesfois important
CALANT 203
de fçavoir. Vous jugez bien
que je vais vous parler d'un
morceau d'Histoire qui doit
tenir place dans l'Hiftoire genevale du monde , & je m'imagine qu'en lifant ce Prelude,
vous devinerez d'abord que je
vous vais parler des Couches
de Madame la Ducheffe de:
Bourgogne , & vous ne vous
tromperez pas.
On eftoit attentif fur le
temps que cette Princeffe
accoucheroit, tant parce qu'on
eftoit perfuadé qu'elle eftoit
à terme , qu'à caufe qu'il y
avoit déja du temps qu'elle
204 MERCURE .
avoit fenty quelques douleurs
qui avoient donné lieu de
croire qu'elle accoucheroit
plutoft que l'on n'avoit cru, &
qu'elle avoitfenty ces douleurs
à diverfes reprifes , ce qui cftoit
caufe qu'on attendoit inceffamment le moment de fon
acouchement, que les Princes ,
qui pour leurs interefts particuliers doivent eftre prefens à
de pareils accouchemens ou
du moins dans des lieux d'où ils
puiffent fçavoir ce qui fe paffe
-fans pouvoir eftre trompez,
ne quittoient point Verfailles,
&les habits du Roy demeu
GALANT 205
C
roient toutes les nuits dans la
Chambre de Sa Majefté , afin
de gagner le temps qu'il auroit
fallu perdre pour aller chercher fa Garderobbe.
Enfin le Samedy 15 de ce
mois , fur les fept heures du
matin , cette Princeffe commença à fentir les premieres
douleurs de l'accouchement ,
& comme l'enfant fe trouva
mal tourné , on crut d'abord
quele travail pouroit eſtre rude, & que cette Princeffe n'accoucheroit qu'avec beaucoup
de peine ; mais M' Clement
qui a déja accouché plufieurs
>
206 MERCURE
fois cette Princeffe , qui eft
depuis peu de retour d'Efpagne où il a accouché la Reine ,
& dont le fçavoir eft grand
auffi - bien que l'experience ,
remit auffi toft l'enfant dans
la fituation qu'il devoit eftre :
de maniere que cette Princeffe
accoucha fur les huit heures
demi-quart ; ce que les faifeurs
d'horofcopes feront bien- aife
d'aprendre. Je vous diray
cependant , fans me vouloir
meler d'en faire , qu'il a de
tout temps paffé pour conftant
que les enfans qui naiffoient
le jour eftoient plus heureux
है
GALANT 207
que ceux qui venoient au
monde pendant la nuit. Comme ce Prince eft arriere petit
fils du Roy , rien ne marque
mieux que le Ciel benit la
pofterité de ce Monarque ; &
d'ailleurs il eft tresavantageux
à un Etat d'ayoir beaucoup
de Princes d'une même race
d'autant que lors qu'il paffe
d'une race à unautre , il arrive
fouventdes demeflez qui caufent de grands defordres.
Le bruit de l'accouchement
de Madame la Ducheffe de
Bourgogne , s'eftant auffi-toft
répandu dans toute la Cour
208 MERCURE
T
ycaufa lajoye qu'il eft aifé de
s'imaginer. Le Roy donna au
Prince nouveau né , le nom
de Duc d'Anjou , & il fut ondoyé par M le Cardinal de
Janfon , Grand-Aumônier de
France.
La Renommée , avec la
precipitation qui luy eft ordinaire , lorfqu'il s'agit d'auffi
grandes nouvelles , porta auffitoft à Paris , celle de cette heureufe naiffance , qui prefqu'en
même temps fut fçue de tout
Paris , & annoncée au Public
par la Cloche du Palais qui fe
fait toûjours entendre en de
GALANT 209.
&
par
pareilles occafions ,
le
carillon de la Samaritaine , qui
ne manque jamais de fe faire
entendre auffi ; & dés le jour
même onvit paroiftre les Vers
fuivans, faits par Mr d'Aubicourt.
Sur l'Heureufe Naiffance
de Monſeigneur
LE DUC D'ANJOU.
Le Duc d'Anjou qui regne eft fi
bien établi
SurleTrône où le Cielpermetqu'il
fe maintienne ,
Qu'un Angeſousfon nom nous anFévrier 1710. S
210 MERCURED
4
nonce aujourd'huy,
Qu'il vient tenir un rang que ce
Prince a remply y bonin
Afin qu'on n'ait pas lieu de crain
dre qu'il revienne.
Onvit auffi paroiſtre la Devife fuivante , fur cet accouchement , faite par Mr le Chevalier de Vertron.
Le Corps eft la fleur de Gre
nade, avec ces paroles:
SERVATQUE MIHI NATURA
CORONAM.
Le 16. le Royfit chanter le
GALANT 211
Te Deum dans la Chapelle de
Verfailles , & ayant refolu de
faire chanter dans la Metropolitaine de Paris un Te Deum folemnel , auquel devoient affilter le Parlement & tous , les
Corps qui ont accoûtumé de
l'accompagner dans de parcilles Ceremonies , il écrivit à Mr
le Cardinal de Noailles , Archevêque de Paris , qu'il regar
doit comme une nouvelle & trop
confiderable benediction du Ciel,
la naiſſance de fonfecond Arrierepetit- Fils le Duc d'Anjou , dont
fa Petite - Fille la Ducheffe de
Bourgogne eftoit accouchée ; pour
Sij
212 MERCURE
ne pasfatisfaire à la jufte obligation où il eftoit d'en rendre àDieu
les Actions de graces qui luy
eftoient dûës; & il luy marquoit
de faire chanter le Te Deum
dans l'Eglife Metropolitaine
de fa bonne Ville de Paris , au
jour & à l'heure que le grandMaitre ou Maiftre des Ceremonies luy diroit de fa part.
Commeon chante toûjours.
unTe Deum folemnel pour de
parcilles Naiffances , &que les
jours que ce Te Deum fe chante , on tire un Feu d'artifice
devant l'Hoſtel de Ville , on
n'avoit pas attendu d'ordre
GALANT 213
preparer , & dés que pour le
M's les Prevoft des Marchands
& Echevins curent appris la
Naiffance de Monfeigneur le
Duc d'Anjou , ils y firent travailler.
Le deffein du Feu , dont
je ne vous fais point de Difcription , marquoit par des
figures fimbolifées , que le
Prince que le Ciel vient de
donner à la France , eftant un
prefage certain de fa benediction fur tout le Royaume ,
& de la continuation de cette
fenfible protection dont il a
fouvent reçu de pareilles mar-
214 MERCURB
ques , les Peuples ne pouvoient
en faire voir leur reconnoif
fance avec trop d'éclat , &
marquer auffi les vœux que
ces mêmes Peuples font pour
demander au Tout- puiffant
la confervation d'un fi precieux gage de fa bonté , en
fouhaitant au nouveau Prince
les vertus qui font fi naturelles au fang illuftre d'où il eft
forty. On voyoit dans les
Emblêmes de ce Feu , les fouhaits que les Peuples faifoient
de voir un jour en ce jeune
Prince les vertus & qui font
hereditaires à fonte augufte
GALANT 215
C
fang. lley avoit auffi trois
Emblèmes par lesquelles on
pretendoit faire voir trois des
principales Vertus neceffaires
à un Prince, fçavoir , la Sageffe,
la Grandeur d'ame , & la
Science. Je ne vous dis point
que la Renommée eftoit au
milieu de la Machine , qui
reprefentoit ce Feu , avec fes
deux Trompettes , & dans une
attitude quifaifoit voir qu'elle
eftoit prefte d'aller par toute
la terre annoncer l'heureufer
naiffance qui caufoit tant de
joye à toute la France.
Il y eut le même foir un
216 MERCURE
grandfoupé à l'Hôtel de Ville ,
auquel fe trouverent Monfieur
le Gouverneur de Paris , &
plufieurs perfonnes d'une
qualité diftinguée , & plufieurs
décharges du Canon qu'on
avoit placé le long du Port
de la Grève , & des feux furent
allumez dans toutes les rues
de Paris
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Résumé : Naissance de Monseigneur le Duc d'Anjou, [titre d'après la table]
Le texte traite de la naissance du Duc d'Anjou, fils de la Duchesse de Bourgogne, un événement d'une importance historique majeure. L'auteur précise qu'il ne suit pas toujours un ordre chronologique strict pour relater les faits, préférant parfois envoyer des articles dès qu'il en a connaissance, même s'ils concernent des événements passés. Il souligne que les informations qu'il fournit sont souvent nouvelles pour les destinataires, même si les événements sont anciens. L'auteur mentionne que les faits relatés sont déjà connus par la rumeur publique, mais il est important de les organiser et de les transmettre pour en donner une idée précise, notamment aux étrangers et aux générations futures. Il annonce ensuite la naissance du Duc d'Anjou, soulignant l'attente et l'importance de cet événement. La Duchesse de Bourgogne a accouché le 15 janvier à 8 heures et demie du matin, après des douleurs ressenties depuis plusieurs jours. L'accouchement a été facilité par M. Clément, un médecin expérimenté. La nouvelle de la naissance s'est rapidement répandue à la cour et à Paris, où des célébrations ont eu lieu, y compris des Te Deum et des feux d'artifice. Le Roi a nommé le nouveau-né Duc d'Anjou et a ordonné des cérémonies de remerciement. La population a exprimé sa joie et ses vœux pour l'avenir du prince, symbolisés par des emblèmes et des figures allégoriques lors des festivités.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1937
p. 216-252
Reception de Mr Houdart de la Motte à l'Academie Françoise, [titre d'après la table]
Début :
Vous attendez sans doute que je vous parle de la reception [...]
Mots clefs :
Antoine Houdard de la Motte, Abbé Tallement, Discours, Ouvrages, Réception, Académie française, Éloge, Messieurs, Esprit, Directeur de l'Académie
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texteReconnaissance textuelle : Reception de Mr Houdart de la Motte à l'Academie Françoise, [titre d'après la table]
ous attendez fans doute
que je vous parle de la reception de Mr Houdart de la
Motte à l'Academie Françoiſe,
à la place de feu Mr. de Corneille , mort le 8. de Decem
bre de l'année derniere , &
voftre
GALANT 117
voftre impatience redouble
lorfque vous croyez qu'un
homme qui n'a point diſputé
de Prix qu'il n'ait emportez ,
qui a fouvent travaillé pour
meriter cette gloire , & qui
s'eft diftingué par un grand
nombred'Ouvrages de toutes
fortes de caracteres , & qui
ont attiré l'attention & les applaudiffemens de tout le Public, doit s'eftre furpaffé dans
le remerciement qu'il a fait à
l'Academic , en le nommant
pour remplir la place de Mr
de Corneille. Vous ne vous
trompez pas ; mais quoy qu'il
Février 1710. T
218 MERCURE
foit fort connupar tous les ou
vrages qu'il a donnez au Public , l'admiration que vous
avéz pour luy s'augmenteroit
encore fi vous fçaviez le fond
de la galanterie de fon efprit ,
& vous avouëriez que Voiture
n'a jamais badiné plus agreablement & plus noblement
dans une infinité de pieces que
nousavons de cet homme tout
fingulier , &qui a fait l'un des
principaux ornemens de fon
fiecle , ce que perfonne ne luy
difpute. Mrde la Motte a fait
quantité d'ouvrages de certe
nature, fous les noms de plu-
GALANT 219
fieurs perfonnes de fes Amis ,
tant hommes que femmes , &
qui ont efté admirez , fans
qu'on fçut dans le monde qu'ils
venoient de luy , & peut- eftre
en avez-vous vû beaucoup que
vous avez fort applaudis fans
enfçavoir le veritable Auteur.
Je n'avance rien contre la verité , ayant vû moy - même.
beaucoup de ces ouvrages que
ceux qui les produifoient fous
leur nom , m'ont avoüé eſtre
de luy. Enfin c'eſt un genie
univerfel , & quiferoit capable
de remporter toûjours les Prix
fur tous les fujets quel'on proTij
220 MERCURE
poferoit , de quelque nature
qu'ils puffent eftre. La grande
-idée que le Public a de luy fut
caufe que le jour de fa reception , l'Affemblée fut des plus
nombreuſes ; ce fut le 8. de
Fevrier , & tous ceux qui s'y
trouverent curent lieu d'eftre
contens de tout ce qu'il dit . Il
faut neceffairement que tous
ceux qui font reçus faffent l'éloge du Roy ; celuy de Mr le
Cardinal de Richelieu , & ceux
de Mr le Chancelier Seguier &
de l'Academicien decedé, dont
ils rempliffent la place , ce qui
eft d'autant plus difficile , que
GALANT 221
depuis un fort grand nombre
d'années tous ceux qui font reçus à l'Academie yfont indif
penfablement obligez : de maniere qu'il faut avoir beaucoup
de genie pour donner differens
tours à leurs difcours , & faire
paroiftre nouveaux des fujets
épuifez depuis long- temps , &
cependant ce font par ces endroits que doivent briller le
plus tous les Academiciens qui
fontreçus , & c'eft en quoy Mr
de la Motte fe fit admirer le
jour de fa reception.
Il eft temps de vous parler
duDifcours qu'il prononça &
Tiij
222 MERCURE
qui luy attira tant d'applaudif
femens , & c'eft ce qui m'embaraffe extrêmement. Je ne
dois vous enenvoyer qu'un extrait , & vous devez deviner les
raifons qui m'empêchent de
vous l'envoyer entier. Si ce
Difcours eftoit mediocre je
pourrois faire une peinture des
moindres endroits que je ne
rapporterois pas entiers, & en
donner fans parler contre la
verité , une idée qui les feroit
croire plus beaux qu'ils ne feroient ; mais lors qu'un Dif
cours eft parfait en toutes fes
parties , de quels termes puis- je
GALANT 223
me fervir pour parler des endroits que je ne rapporteray
pas entiers , & en pourray - je
donner une idée qui en puiffe
faire affez bien concevoir la
beauté : & quel choix feray je
de ceux que je vous rapporteray entiers ? puis que ce Difcours a paru également beau
à tous ceux qui l'ont entendu.
Ainfi ne comptez pas que je
vous en puifle faire concevoir
les beautez dans tout ce que
vous allez lire. Vous connoiffez l'efprit de Mr de la Motte,
&fon genie : vous fçavez dequoy il eft capable , & cela doir
Tiiij
224 'MERCURE
vous donner lieu de fuppléer
à tout ce queje vous rappor
teray de ce Difcours. huomis .
Il commença par une peinture qu'il fit de l'embarras où
il fe trouvoit d'eftre obligé de
trouver untour nouveau pour
parler fur une matiere rebatuë par tous ceux qui avoient
efté reçus à l'Academie avant
luy, &fit voir la difficulté qu'il
y avoit de s'en bien acquitters
il demanda pourquoy il falloit
des expreffions differentes pour
des fentimens femblables , & il
dir beaucoup de chofes ingenieufes là deffus. Ce qu'il dit
GALANT 225
enfuite fit paroître fa modeftie,
&aprés avoir dit que cet uſage
auroit dû eftre changé , il dit en
s'adreffant à fes Confreres ; Je
metrompe, Meffieurs, mon infuffifance merend injufte , maintenez
un usage qui n'humiliera que
moy ; fadmireray avec plaisir
dans ceux qui me fuivront , les
reffources qui m'ont manqué. Il
parla enfuite de la haute idée
qu'il avoit de la place où il
eftoit élevé , & fit connoiftre
que le defir qu'il avoit eu de fe
voir reçu parmi eux avoit eſté
fi vif en naiffant , que tout chimerique qu'il l'avoit cru , il luy
?
226 MERCURE
avoit tenu licu de genie , & il
ajoûta que ce defir luy avoit
dicté ces EffaisLyriques dontils
avoient agreé l'hommage , &
qui fous leurs aufpices avoient
trouvé grace devant le Public ;
que ce defir qui induſtrieux à
fe fervir luy même, l'avoit fait
tantoft Orateur , & tantoft
Poëte , pour meriter tous leurs
Lauriers ; qu'il l'avoit même
enhardi plus d'une fois à les
remercier d'un fuffrage unanime qu'il ofoir regarder alors
comme un préfage de celuy
dont il leur rendoit graces en
ce moment ; ce defir enfin ,
GALANT 227
qui du moindre de leurs Eleves , le faifoit devenir un de
leurs Confreres. Il ajoûta qu'il
prononçoit ce mot avec tranfport, & qu'il oublioit un moment ce qu'il eftoit pour ne
voir que le merite de ceux à
qui ils daignoient l'affocier.
Il fit voir enfuite que la
naiſſance &les dignitez qui dif
tinguoient la plupart des Academiciens , ne l'ébloüiffoient
pas, & qu'on ne regardoit parmi cux qu'un éclat plus réel &
plus indépendant ; qu'on n'honoroit à l'Academie que les
talens & la vertu , & qu'on n'y
228 MERCURE
rendoit que ces refpects finceres , d'autant plus flateurs pour
ceux qui les recevoient , qu'ils
faifoientle plaifir mêmedeceux
qui les rendoient , & il pourfuivit par ces paroles. Je fens ce
plaifir , Meffieurs , dans toute fon
étendue: iln'y en apas un de vous,
carj'ay brigué l'honneur de vous
approcher de vous étudier
avant le temps ; il n'y en apas un
de vous en qui je n'ayefenti cette
fuperiorité d'efpritfifüre dansfon
Empire ; mais dont la politeffe
fçait rendrela domination fidouce.
Ouy,j'ofe le dire , les Titres font
icy de trop ; le meriteperfonnel ar
Aliasun
GALANT 229
de
tire àluy toute l'attention. On remarque àpeine que vous réuniffez
dans voftre Corps ce qu'il y a
plus refpectable dans les differens
Ordres de l'Etat ; on fonge feulement , & c'est - là voftre Eloge,
que vous y raffemblez le fçavoir ,
la delicateffe , les talens , le genie
fur tout lafaine critique , plus
rare encore que les talens , auffi
neceffaire à l'avancement des Lettres que le Genie même. Mais à
ne regarder que vos ouvrages ,
Meffieurs , quelle fource d'admiration ! Peut- eftre enfommes- nous
encore trop prés pour en jugerfainement ; on n'estjamais affez tou-
230 MERCURE
ché de ce qu'on voit naifire & de
ce qu'on poffede ; onfe familiarife avec le merite defes contemporains ; l'Antiquitéfeuley met le
fceau de la veneration & de l'eftime publique. Plaçons donc l'Academie dansfon veritable point de
vûë, &voyons- la , s'il.fe peut ,
avec lesyeux de la Pofterité. Il
pourfuivit la peinture de Meffeurs de l'Academic , & parla
des divers talens de ceux qui la
compofent , &finit en diſant : -
Voila l'Academie, Meffieurs, telle
qu'elleparoiflra aujugement de l'avenir. Il parla enfuite des deffauts de tous ceux qui bril-
GALANT 231
loient le plus par leurs ouvragres avant l'établiſſement de
l'Academie , & il fit remarquer
en quoy avoient confifté ces
deffauts , & il finit ce qu'il en
rapporta en difant : Il falloit
une Compagnie , qui par le concours des lumieres , établift des
principes certains , rendift le gouft
plus fixe , difciplinaft le genie même, & en affujettit les fougues à
la raifon
Il parla enfuite de ce que
le Cardinal de Richelieu , &
le Chancelier Seguier , avoient
fait pour l'Academie , & en
finiffant de parler du Chance-
232 MERCURE
lier Seguier , il dit ens'adreſſant
à Meffieurs de l'Academie ;
ce qui fait voftre gloire & la
fienne , Louis , luy- même n'a pas
dédaigné de luyfucceder. Ceft
de ce jour, Mrs, que voftre fortune eut toutfonéclat ; les Mufes
vinrent s'affeoir aupied du Trône,
& le Palais des Rois devint
l'azile des Sçavans. Vous ne
fongeates alors qu'à immortalifer
vostre reconnoiffance
tribut que vous exigeâtes de
vos nouveaux Confreres , fut
l'Eloge du Prince dont ils alloient
partager la protection. Ainfi par
autant de plumes immortelles fuو
Ele
GALANT 233
rent écrites les Annales de fon
regne Monument precieux
d'équité , de valeur , de moderation , & de conftance , modelle
dans les divers évenements de
cet Heroïfme éclairé où le fage
feulpeut ateindre. Mais quelque grand que Loüis paroiſſe àla
pofterité parfes actions , & par
Les vertus ne craignons point
de le dire. Il luy fera encore plus
cher par la protection qu'il vous
a donnée. Tout ce qu'il a fait
d'ailleurs n'alloit qu'à procurer
fes Peuples ,à fes Voifins , & à
fes Ennemis même, un bonheur
fajet aux viciffitudes humaines ;
V
,
Février 1710.
à
you 234 MERCURE
par la protection des Lettres , il
s'eft rendu à jamais le Bienfaicteur du Monde. Il a preparé
des plaifirs utiles à l'avenir le plus
reculé , & les Ouvrages de noftre
fiecle , qui feront alors l'éducation du genre humain , feront
mis au rang de fes plus folides
bien faits. Multipliez- donc vos
Ouvrages , Mrs , par reconnoiffance pour vostre augufte Protecteur ; quelque fujet que vous
traitiez vous travaillerez toujourspourſa gloire , & l'on ne
poura lire nos Philofophes , nos
Hiftoriens , nos Orateurs
mos Poëtes ,fans benir le nom
GALANT 235
*
de l'Augufte qui les a fait naître.
Fe brule déja de contribuerfelon
mes forces aux obligations que
luy aura l'Univers ; heureuxfi
mon genie pouvoit croître jusqu'à
·égaler mon zele.
Avant que d'entrer enfuite
dans l'Elogede feu Mr de Corneille dont il rempliffoit la
place , il parla de quelques uns
des Academiciens qui l'avoient
precedé ; aprés quoy il en fic
un portrait qui reffembloit
parfaitement à l'Original. Il
fit voir qu'il connoiffoit les
beautez de l'une & de l'autre
Scene, & que la France le com-
*
a
*
V ij
236 MERCURE
pteroit toujours entre fes Sophocles & fes Menandres. Il
s'étendit enfuite fur les merveilleux effets que produifoient
encoretousles jours ces fortes
d'Ouvrages , aprés quoy il
parla des autres Ouvrages que
l'on devoit à fon heureufe
fecondité ; de fes Traductions; ·
de fes remarques fur la Langue;
de fes Dictionnaires , travaux
immenfes , qui demandoient
d'autant plus de courage dans
ceux qui les entreprenoient ,
qu'ils ne pouvoient s'en promettre unfuccés bien éclatant
& quele Public qui prodigue
GALANY 237
toujours fes aclamations à l'agreable jouiffoit d'ordinaire
zavec indiference de ce qui n'étoit qu'utile. Et aprés avoir
parlé de fes talents , il fit une
peinture de fes vertus , & dit.
qu'elles eftoient l'objet indifpenfable de fon émulation. Le
portrait qu'il fit des vertus de
cegrand homme fut tres- beau
& tres- reffemblant. Il ajoûta
enparlant de la perte de la
vue de Mr de Corneille , que
ce que l'âge avoit ravi à fon
Predeceffeur , il l'avoit perdu
dés fa jeuneffe , que cette malheureufe conformité qu'il
238 MERCURE
avoit avec luy , leur en rapelleroit fouvent le fouvenir , &
qu'il ne ferviroit d'ailleurs qu'à
leur faire fentir fa perte. Il dit
enfuite. Il faut l'avouer cependant , cette privation dont je
plains , ne fera plus deformais
pour moy un pretexte d'ignorance. Vous m'avez rendu la vuë,
vous m'avez ouvert tous les
Livres en m'affociant à voftre
Compagnie. Aurai - je beſoin de
faits ? je trouveray icy des Scavans à quiil n'en eft point écha
pé. Mefaudra-t -ildes preceptes ?
je m'adrefferay aux Maiftres de
l'Art. Chercheray- je des exem-
GALANT 239
ples ? j'apprendray les beautezdes
Anciensde la bouche même de leurs
Rivaux. Faydroit enfin à toutce
que vous fçavez ; puifque jepuis
vous entendre , je n'envie plus le
bonheur de ceux qui peuvent lire.
Jugez, Meffieurs , de ma reconnoiffance par l'idée juſte & vive
que je me forme de vos bienfaits.
Mr Houdart de la Motte ,
ayant ceffé de parler , Mr de
Callieres prit la parole , en qualité de Directeur de l'Academie , & dit que fi l'uſage de
faire l'Eloge de chaque Academicien que l'on perdoit , n'és
240 MERCURE
fa toit déja introduit dans
Compagnie , Mr de Corneille
auroit merité qu'on eut commencé par luy à faire un
loüable établiſſement , & que
le nom qu'il portoit s'eftoit
rendu fi celebre qu'il avoit fait
honneur non- feulement àl'Academie Françoife; mais même
à toute la Nation : & aprés
avoir fait un Eloge de feu Mr
de Corneille , frere du dernier
mort , & du paralelle qu'on en
pouvoit faire , il parla des Pieces de Theatre de ce dernier
dont il fit en general une pein- 3
ture fort avantageufe. Il paffa
de là
~
GALANT 241
delà à fon Dictionaire des Arts,
&à fon Dictionnaire Geographique & Hiftorique, & dit que
Fon pourroit regarder ces deux
grands ouvrages comme des
trefors toûjours ouverts à la
Nation Françoife, & à tous les
Etrangers qui fçavent noftre
langue, oùils pouvoient puifer
une infinité de connoiffances
utiles & agreables , fans avoir
la peine de les chercher dans
les diverfes fources d'où il les
avoit tirées. Il parla enfuite de
toutes les qualitez de l'honnefte. homme qui avoient fait
admirer Mr de Corneille pen.
Février 1710.
X
242 MERCURE
1
dant fa vie , puis adreffant la
parole à Mrdela Motte, il dit :
Vous avez merité , Monfieur ,
par la beauté de vos ouvrages de
remplir la place d'un ſi excellent
homme , ce fontces heureufes productions de vostre efprit qui vous
ontfaitjour au travers delafoule des Auteurs mediocres , & qui
ont brillé aux yeux - mêmes de
vas Juges. Ils ont couronné plu
feurs de vos excellentes Pieces de
Poefie , endernier lieu celle de
Profe où vous avez égalé les
grands Maiftres de l'Eloquence:
dans l'Art de traiter les matieres
les plus faintes les plus rele-
GALANT 243
vées. Ceftfur ces titres incontestables que vos mêmesJuges vous
ont trouvé digne de leur eftre Af
focié pour partager avec eux
l'honneur des fonctions & des
exercices Academiques. Loind'étre obligez dejuftifier leur choix ,
vous leur avez donné une ample
matiere de le faireciterpour exem
ple de leur équité , de leur bon
gouft , de la jufteffe de leur dif
cernement. Voftre élection faite
le concours unanime de tous par
les fuffrages , fervira de preuve
convaincante que l'Academie ne
peut errer dans fes jugemens ,
lorfqu'elle fe conduit par fes proXij
244 MERCURE
pres lumieres ,fanségard à la brigue & auxfollicitations ,fuivant
l'ordre exprés qu'elle en a defon
augufte Protecteur. Nousfommes
perfuadez , Monfieur , que vous
allez redoubler vos efforts pour
celebrer avec nous cette longue
fuite d'actions glorieufes dont la
vie eft un tiffu continuel , &
pour le reprefenter à la pofterité
auffi grand qu'il l'eft ànosyeux ;
Clement & modere dans les
profperitez les plus brillantes
intrepide dans les plus grands
dangers ; toujours égal dans l'une
dans l'autre fortune , d'une
fermeté inébranlable & d'une
GALANT 245
tranquillité qui nepeut eftre troubice blé par aucun évenement.
N'ayant
point de plus chers interefts que ceux dela raye Reli
gion , dont il est l'infatigable
appuy , preferant toujours à
la gloire de fes juftes conquêtes
celle d'eftre l'auteur du bonheur
public ,fifouventtroublé par les
jaloufes terreurs de fes voifins
ftfouvent rétably par les grands
facrifices qu'il leur a faits , &
qu'il eft encorepreft de leur faire
pour affurerlerepos defes Peuples
celuy même de fes ennemis s
dignes objets des foins, paternels
d'un Roy , grand ,fage , jufte
X iij
246MERCURE
bien faifant , & veritablement
tres- Chreftien. Voilà, Monfieur,
unepartie des riches & preticufes
matieres que vous avez à mettre
en œuvre ; c'eſt le tribut que nous
impofons à votre reconnoiffance
pour l'honneur que vousrecevez
aujourd'huy. Honneur brillant
parluy-même, plus brillant encore
par les temoignages unanimes que
nous rendons au Public , que
vous en eftes veritablement digne.
Mr l'Abbé Tallemant , prit
enfuite la parole , & en s'adreffant à Mr de la Morte
recita Epigramme qui fuit.
GALANT 247
qu'il avoit faite à la gloire de
ce nouvel Academicien , &
qui reçut beaucoup d'applaudiffements.
La Motte par l'effort de ton vafte
genie
Tu répares du fort l'injuſte tirannie
»
Ce n'est point par les yeux que
l'efprit vient àbout,
De bienconnoiftre la nature,
Argus avec centyeux ne connut
point Mercure,
Homere fans yeux voyoit
tout..
Xiij
248 MERCURE
pas
Comme le temps auquel
doivent finir les Affemblées
de l'Academie , chaque jour
qu'elles tiennent , n'eftoir
encore remply ; & que cing!
heures n'eftoient pas fonnées ,
on lut , felon l'ufage , l'Ouvrage d'un Academicien , &
l'on avoit choisi pour ce jourlà , en cas qu'il reftaft du
temps , un Ouvrage de Mr
de Callieres qui fut lû par Mr
l'Abbé Tallemant. Il confiftoit en des Eloges fort courts
&en Vers , de quatorze Homi
mes Illuftres , & de fept Fem- &
mes Sçavantes. Les Hommes.
GALANT 249
dont on lut les Eloges font
MCorneille l'aîné ; Racine
Moliere; la Fontaine ; Voitu
re ; Sarrafin ; la Chapelle
Defpreaux; Pavillon ; Peliffon;
Benferade ; Quinault ; Segrais ; le Duc de Nevers. Et
les Dames qui furent loüées
enfuite , font Mlle de Scudery , fous le nom de Sapho ; la
Fayette ; la Suze ; la Sabliere ;
Deshoulieres ; Villedieu ; Dacier.
Toute l'Affemblée donna
les louanges qui eftoient duës
à ces Portraits , & ils en regurent beaucoup.
250 MERCURE
Je crois devoir ajoûter icy
les noms des Opera qui ont efté
Laits par Mr de la Motte ; ce
font ,
L'Europe galante ,
Iffé ,.
Oinphale ,
Amadis de Grece
Ceyx & Alcione ,
Canente,3
Les Arts , Ballet.
Jupiter & Semelé.
Les fuccés que ces Opera ont
eu dans leur temps vous font
connus , & fur tout celuy de
l'Europe galante quia efté fou
vent remis au Theatre , & que
GALANT 250
le Public ne s'eft jamais laffe
de voir, bab
Le même Auteur a fait auffi
quelques Pieces de Theatre
& plufieurs ouvrages auffi ingenieux que galans qui n'ont
pas paru fous fon nom .
Je ne vous dis rien du grand
nombre de Prix qu'il a remportez par tout où on luy a
permis d'en difputer , en forte
que pour laiffer lieu aux autres.
de meriter à leur tour de ces
Couronnes de Lauriers , il ne
loy a plus efté permis d'entrer
dans la Carriere pour en cücillir de nouveaux.
252 MERCURE
ig
Vous avez vû le Recueil de
fes Odes. Cet Ouvrage eft ge
neralement applaudi , & l'on
vient d'en donner une nouvelle Edition. Tant d'ouvrages
differens luy ont fait meriter la
place que tout le Public , & les
Academiciens même luy fouhaitoient depuis long temps.
Il y alieu de croire qu'eftanc
encore jeune il pourra la remplir auffi dignement que fon
Predeceffeur , & faire autant
d'honneur à cet illuftre Corps.
que je vous parle de la reception de Mr Houdart de la
Motte à l'Academie Françoiſe,
à la place de feu Mr. de Corneille , mort le 8. de Decem
bre de l'année derniere , &
voftre
GALANT 117
voftre impatience redouble
lorfque vous croyez qu'un
homme qui n'a point diſputé
de Prix qu'il n'ait emportez ,
qui a fouvent travaillé pour
meriter cette gloire , & qui
s'eft diftingué par un grand
nombred'Ouvrages de toutes
fortes de caracteres , & qui
ont attiré l'attention & les applaudiffemens de tout le Public, doit s'eftre furpaffé dans
le remerciement qu'il a fait à
l'Academic , en le nommant
pour remplir la place de Mr
de Corneille. Vous ne vous
trompez pas ; mais quoy qu'il
Février 1710. T
218 MERCURE
foit fort connupar tous les ou
vrages qu'il a donnez au Public , l'admiration que vous
avéz pour luy s'augmenteroit
encore fi vous fçaviez le fond
de la galanterie de fon efprit ,
& vous avouëriez que Voiture
n'a jamais badiné plus agreablement & plus noblement
dans une infinité de pieces que
nousavons de cet homme tout
fingulier , &qui a fait l'un des
principaux ornemens de fon
fiecle , ce que perfonne ne luy
difpute. Mrde la Motte a fait
quantité d'ouvrages de certe
nature, fous les noms de plu-
GALANT 219
fieurs perfonnes de fes Amis ,
tant hommes que femmes , &
qui ont efté admirez , fans
qu'on fçut dans le monde qu'ils
venoient de luy , & peut- eftre
en avez-vous vû beaucoup que
vous avez fort applaudis fans
enfçavoir le veritable Auteur.
Je n'avance rien contre la verité , ayant vû moy - même.
beaucoup de ces ouvrages que
ceux qui les produifoient fous
leur nom , m'ont avoüé eſtre
de luy. Enfin c'eſt un genie
univerfel , & quiferoit capable
de remporter toûjours les Prix
fur tous les fujets quel'on proTij
220 MERCURE
poferoit , de quelque nature
qu'ils puffent eftre. La grande
-idée que le Public a de luy fut
caufe que le jour de fa reception , l'Affemblée fut des plus
nombreuſes ; ce fut le 8. de
Fevrier , & tous ceux qui s'y
trouverent curent lieu d'eftre
contens de tout ce qu'il dit . Il
faut neceffairement que tous
ceux qui font reçus faffent l'éloge du Roy ; celuy de Mr le
Cardinal de Richelieu , & ceux
de Mr le Chancelier Seguier &
de l'Academicien decedé, dont
ils rempliffent la place , ce qui
eft d'autant plus difficile , que
GALANT 221
depuis un fort grand nombre
d'années tous ceux qui font reçus à l'Academie yfont indif
penfablement obligez : de maniere qu'il faut avoir beaucoup
de genie pour donner differens
tours à leurs difcours , & faire
paroiftre nouveaux des fujets
épuifez depuis long- temps , &
cependant ce font par ces endroits que doivent briller le
plus tous les Academiciens qui
fontreçus , & c'eft en quoy Mr
de la Motte fe fit admirer le
jour de fa reception.
Il eft temps de vous parler
duDifcours qu'il prononça &
Tiij
222 MERCURE
qui luy attira tant d'applaudif
femens , & c'eft ce qui m'embaraffe extrêmement. Je ne
dois vous enenvoyer qu'un extrait , & vous devez deviner les
raifons qui m'empêchent de
vous l'envoyer entier. Si ce
Difcours eftoit mediocre je
pourrois faire une peinture des
moindres endroits que je ne
rapporterois pas entiers, & en
donner fans parler contre la
verité , une idée qui les feroit
croire plus beaux qu'ils ne feroient ; mais lors qu'un Dif
cours eft parfait en toutes fes
parties , de quels termes puis- je
GALANT 223
me fervir pour parler des endroits que je ne rapporteray
pas entiers , & en pourray - je
donner une idée qui en puiffe
faire affez bien concevoir la
beauté : & quel choix feray je
de ceux que je vous rapporteray entiers ? puis que ce Difcours a paru également beau
à tous ceux qui l'ont entendu.
Ainfi ne comptez pas que je
vous en puifle faire concevoir
les beautez dans tout ce que
vous allez lire. Vous connoiffez l'efprit de Mr de la Motte,
&fon genie : vous fçavez dequoy il eft capable , & cela doir
Tiiij
224 'MERCURE
vous donner lieu de fuppléer
à tout ce queje vous rappor
teray de ce Difcours. huomis .
Il commença par une peinture qu'il fit de l'embarras où
il fe trouvoit d'eftre obligé de
trouver untour nouveau pour
parler fur une matiere rebatuë par tous ceux qui avoient
efté reçus à l'Academie avant
luy, &fit voir la difficulté qu'il
y avoit de s'en bien acquitters
il demanda pourquoy il falloit
des expreffions differentes pour
des fentimens femblables , & il
dir beaucoup de chofes ingenieufes là deffus. Ce qu'il dit
GALANT 225
enfuite fit paroître fa modeftie,
&aprés avoir dit que cet uſage
auroit dû eftre changé , il dit en
s'adreffant à fes Confreres ; Je
metrompe, Meffieurs, mon infuffifance merend injufte , maintenez
un usage qui n'humiliera que
moy ; fadmireray avec plaisir
dans ceux qui me fuivront , les
reffources qui m'ont manqué. Il
parla enfuite de la haute idée
qu'il avoit de la place où il
eftoit élevé , & fit connoiftre
que le defir qu'il avoit eu de fe
voir reçu parmi eux avoit eſté
fi vif en naiffant , que tout chimerique qu'il l'avoit cru , il luy
?
226 MERCURE
avoit tenu licu de genie , & il
ajoûta que ce defir luy avoit
dicté ces EffaisLyriques dontils
avoient agreé l'hommage , &
qui fous leurs aufpices avoient
trouvé grace devant le Public ;
que ce defir qui induſtrieux à
fe fervir luy même, l'avoit fait
tantoft Orateur , & tantoft
Poëte , pour meriter tous leurs
Lauriers ; qu'il l'avoit même
enhardi plus d'une fois à les
remercier d'un fuffrage unanime qu'il ofoir regarder alors
comme un préfage de celuy
dont il leur rendoit graces en
ce moment ; ce defir enfin ,
GALANT 227
qui du moindre de leurs Eleves , le faifoit devenir un de
leurs Confreres. Il ajoûta qu'il
prononçoit ce mot avec tranfport, & qu'il oublioit un moment ce qu'il eftoit pour ne
voir que le merite de ceux à
qui ils daignoient l'affocier.
Il fit voir enfuite que la
naiſſance &les dignitez qui dif
tinguoient la plupart des Academiciens , ne l'ébloüiffoient
pas, & qu'on ne regardoit parmi cux qu'un éclat plus réel &
plus indépendant ; qu'on n'honoroit à l'Academie que les
talens & la vertu , & qu'on n'y
228 MERCURE
rendoit que ces refpects finceres , d'autant plus flateurs pour
ceux qui les recevoient , qu'ils
faifoientle plaifir mêmedeceux
qui les rendoient , & il pourfuivit par ces paroles. Je fens ce
plaifir , Meffieurs , dans toute fon
étendue: iln'y en apas un de vous,
carj'ay brigué l'honneur de vous
approcher de vous étudier
avant le temps ; il n'y en apas un
de vous en qui je n'ayefenti cette
fuperiorité d'efpritfifüre dansfon
Empire ; mais dont la politeffe
fçait rendrela domination fidouce.
Ouy,j'ofe le dire , les Titres font
icy de trop ; le meriteperfonnel ar
Aliasun
GALANT 229
de
tire àluy toute l'attention. On remarque àpeine que vous réuniffez
dans voftre Corps ce qu'il y a
plus refpectable dans les differens
Ordres de l'Etat ; on fonge feulement , & c'est - là voftre Eloge,
que vous y raffemblez le fçavoir ,
la delicateffe , les talens , le genie
fur tout lafaine critique , plus
rare encore que les talens , auffi
neceffaire à l'avancement des Lettres que le Genie même. Mais à
ne regarder que vos ouvrages ,
Meffieurs , quelle fource d'admiration ! Peut- eftre enfommes- nous
encore trop prés pour en jugerfainement ; on n'estjamais affez tou-
230 MERCURE
ché de ce qu'on voit naifire & de
ce qu'on poffede ; onfe familiarife avec le merite defes contemporains ; l'Antiquitéfeuley met le
fceau de la veneration & de l'eftime publique. Plaçons donc l'Academie dansfon veritable point de
vûë, &voyons- la , s'il.fe peut ,
avec lesyeux de la Pofterité. Il
pourfuivit la peinture de Meffeurs de l'Academic , & parla
des divers talens de ceux qui la
compofent , &finit en diſant : -
Voila l'Academie, Meffieurs, telle
qu'elleparoiflra aujugement de l'avenir. Il parla enfuite des deffauts de tous ceux qui bril-
GALANT 231
loient le plus par leurs ouvragres avant l'établiſſement de
l'Academie , & il fit remarquer
en quoy avoient confifté ces
deffauts , & il finit ce qu'il en
rapporta en difant : Il falloit
une Compagnie , qui par le concours des lumieres , établift des
principes certains , rendift le gouft
plus fixe , difciplinaft le genie même, & en affujettit les fougues à
la raifon
Il parla enfuite de ce que
le Cardinal de Richelieu , &
le Chancelier Seguier , avoient
fait pour l'Academie , & en
finiffant de parler du Chance-
232 MERCURE
lier Seguier , il dit ens'adreſſant
à Meffieurs de l'Academie ;
ce qui fait voftre gloire & la
fienne , Louis , luy- même n'a pas
dédaigné de luyfucceder. Ceft
de ce jour, Mrs, que voftre fortune eut toutfonéclat ; les Mufes
vinrent s'affeoir aupied du Trône,
& le Palais des Rois devint
l'azile des Sçavans. Vous ne
fongeates alors qu'à immortalifer
vostre reconnoiffance
tribut que vous exigeâtes de
vos nouveaux Confreres , fut
l'Eloge du Prince dont ils alloient
partager la protection. Ainfi par
autant de plumes immortelles fuو
Ele
GALANT 233
rent écrites les Annales de fon
regne Monument precieux
d'équité , de valeur , de moderation , & de conftance , modelle
dans les divers évenements de
cet Heroïfme éclairé où le fage
feulpeut ateindre. Mais quelque grand que Loüis paroiſſe àla
pofterité parfes actions , & par
Les vertus ne craignons point
de le dire. Il luy fera encore plus
cher par la protection qu'il vous
a donnée. Tout ce qu'il a fait
d'ailleurs n'alloit qu'à procurer
fes Peuples ,à fes Voifins , & à
fes Ennemis même, un bonheur
fajet aux viciffitudes humaines ;
V
,
Février 1710.
à
you 234 MERCURE
par la protection des Lettres , il
s'eft rendu à jamais le Bienfaicteur du Monde. Il a preparé
des plaifirs utiles à l'avenir le plus
reculé , & les Ouvrages de noftre
fiecle , qui feront alors l'éducation du genre humain , feront
mis au rang de fes plus folides
bien faits. Multipliez- donc vos
Ouvrages , Mrs , par reconnoiffance pour vostre augufte Protecteur ; quelque fujet que vous
traitiez vous travaillerez toujourspourſa gloire , & l'on ne
poura lire nos Philofophes , nos
Hiftoriens , nos Orateurs
mos Poëtes ,fans benir le nom
GALANT 235
*
de l'Augufte qui les a fait naître.
Fe brule déja de contribuerfelon
mes forces aux obligations que
luy aura l'Univers ; heureuxfi
mon genie pouvoit croître jusqu'à
·égaler mon zele.
Avant que d'entrer enfuite
dans l'Elogede feu Mr de Corneille dont il rempliffoit la
place , il parla de quelques uns
des Academiciens qui l'avoient
precedé ; aprés quoy il en fic
un portrait qui reffembloit
parfaitement à l'Original. Il
fit voir qu'il connoiffoit les
beautez de l'une & de l'autre
Scene, & que la France le com-
*
a
*
V ij
236 MERCURE
pteroit toujours entre fes Sophocles & fes Menandres. Il
s'étendit enfuite fur les merveilleux effets que produifoient
encoretousles jours ces fortes
d'Ouvrages , aprés quoy il
parla des autres Ouvrages que
l'on devoit à fon heureufe
fecondité ; de fes Traductions; ·
de fes remarques fur la Langue;
de fes Dictionnaires , travaux
immenfes , qui demandoient
d'autant plus de courage dans
ceux qui les entreprenoient ,
qu'ils ne pouvoient s'en promettre unfuccés bien éclatant
& quele Public qui prodigue
GALANY 237
toujours fes aclamations à l'agreable jouiffoit d'ordinaire
zavec indiference de ce qui n'étoit qu'utile. Et aprés avoir
parlé de fes talents , il fit une
peinture de fes vertus , & dit.
qu'elles eftoient l'objet indifpenfable de fon émulation. Le
portrait qu'il fit des vertus de
cegrand homme fut tres- beau
& tres- reffemblant. Il ajoûta
enparlant de la perte de la
vue de Mr de Corneille , que
ce que l'âge avoit ravi à fon
Predeceffeur , il l'avoit perdu
dés fa jeuneffe , que cette malheureufe conformité qu'il
238 MERCURE
avoit avec luy , leur en rapelleroit fouvent le fouvenir , &
qu'il ne ferviroit d'ailleurs qu'à
leur faire fentir fa perte. Il dit
enfuite. Il faut l'avouer cependant , cette privation dont je
plains , ne fera plus deformais
pour moy un pretexte d'ignorance. Vous m'avez rendu la vuë,
vous m'avez ouvert tous les
Livres en m'affociant à voftre
Compagnie. Aurai - je beſoin de
faits ? je trouveray icy des Scavans à quiil n'en eft point écha
pé. Mefaudra-t -ildes preceptes ?
je m'adrefferay aux Maiftres de
l'Art. Chercheray- je des exem-
GALANT 239
ples ? j'apprendray les beautezdes
Anciensde la bouche même de leurs
Rivaux. Faydroit enfin à toutce
que vous fçavez ; puifque jepuis
vous entendre , je n'envie plus le
bonheur de ceux qui peuvent lire.
Jugez, Meffieurs , de ma reconnoiffance par l'idée juſte & vive
que je me forme de vos bienfaits.
Mr Houdart de la Motte ,
ayant ceffé de parler , Mr de
Callieres prit la parole , en qualité de Directeur de l'Academie , & dit que fi l'uſage de
faire l'Eloge de chaque Academicien que l'on perdoit , n'és
240 MERCURE
fa toit déja introduit dans
Compagnie , Mr de Corneille
auroit merité qu'on eut commencé par luy à faire un
loüable établiſſement , & que
le nom qu'il portoit s'eftoit
rendu fi celebre qu'il avoit fait
honneur non- feulement àl'Academie Françoife; mais même
à toute la Nation : & aprés
avoir fait un Eloge de feu Mr
de Corneille , frere du dernier
mort , & du paralelle qu'on en
pouvoit faire , il parla des Pieces de Theatre de ce dernier
dont il fit en general une pein- 3
ture fort avantageufe. Il paffa
de là
~
GALANT 241
delà à fon Dictionaire des Arts,
&à fon Dictionnaire Geographique & Hiftorique, & dit que
Fon pourroit regarder ces deux
grands ouvrages comme des
trefors toûjours ouverts à la
Nation Françoife, & à tous les
Etrangers qui fçavent noftre
langue, oùils pouvoient puifer
une infinité de connoiffances
utiles & agreables , fans avoir
la peine de les chercher dans
les diverfes fources d'où il les
avoit tirées. Il parla enfuite de
toutes les qualitez de l'honnefte. homme qui avoient fait
admirer Mr de Corneille pen.
Février 1710.
X
242 MERCURE
1
dant fa vie , puis adreffant la
parole à Mrdela Motte, il dit :
Vous avez merité , Monfieur ,
par la beauté de vos ouvrages de
remplir la place d'un ſi excellent
homme , ce fontces heureufes productions de vostre efprit qui vous
ontfaitjour au travers delafoule des Auteurs mediocres , & qui
ont brillé aux yeux - mêmes de
vas Juges. Ils ont couronné plu
feurs de vos excellentes Pieces de
Poefie , endernier lieu celle de
Profe où vous avez égalé les
grands Maiftres de l'Eloquence:
dans l'Art de traiter les matieres
les plus faintes les plus rele-
GALANT 243
vées. Ceftfur ces titres incontestables que vos mêmesJuges vous
ont trouvé digne de leur eftre Af
focié pour partager avec eux
l'honneur des fonctions & des
exercices Academiques. Loind'étre obligez dejuftifier leur choix ,
vous leur avez donné une ample
matiere de le faireciterpour exem
ple de leur équité , de leur bon
gouft , de la jufteffe de leur dif
cernement. Voftre élection faite
le concours unanime de tous par
les fuffrages , fervira de preuve
convaincante que l'Academie ne
peut errer dans fes jugemens ,
lorfqu'elle fe conduit par fes proXij
244 MERCURE
pres lumieres ,fanségard à la brigue & auxfollicitations ,fuivant
l'ordre exprés qu'elle en a defon
augufte Protecteur. Nousfommes
perfuadez , Monfieur , que vous
allez redoubler vos efforts pour
celebrer avec nous cette longue
fuite d'actions glorieufes dont la
vie eft un tiffu continuel , &
pour le reprefenter à la pofterité
auffi grand qu'il l'eft ànosyeux ;
Clement & modere dans les
profperitez les plus brillantes
intrepide dans les plus grands
dangers ; toujours égal dans l'une
dans l'autre fortune , d'une
fermeté inébranlable & d'une
GALANT 245
tranquillité qui nepeut eftre troubice blé par aucun évenement.
N'ayant
point de plus chers interefts que ceux dela raye Reli
gion , dont il est l'infatigable
appuy , preferant toujours à
la gloire de fes juftes conquêtes
celle d'eftre l'auteur du bonheur
public ,fifouventtroublé par les
jaloufes terreurs de fes voifins
ftfouvent rétably par les grands
facrifices qu'il leur a faits , &
qu'il eft encorepreft de leur faire
pour affurerlerepos defes Peuples
celuy même de fes ennemis s
dignes objets des foins, paternels
d'un Roy , grand ,fage , jufte
X iij
246MERCURE
bien faifant , & veritablement
tres- Chreftien. Voilà, Monfieur,
unepartie des riches & preticufes
matieres que vous avez à mettre
en œuvre ; c'eſt le tribut que nous
impofons à votre reconnoiffance
pour l'honneur que vousrecevez
aujourd'huy. Honneur brillant
parluy-même, plus brillant encore
par les temoignages unanimes que
nous rendons au Public , que
vous en eftes veritablement digne.
Mr l'Abbé Tallemant , prit
enfuite la parole , & en s'adreffant à Mr de la Morte
recita Epigramme qui fuit.
GALANT 247
qu'il avoit faite à la gloire de
ce nouvel Academicien , &
qui reçut beaucoup d'applaudiffements.
La Motte par l'effort de ton vafte
genie
Tu répares du fort l'injuſte tirannie
»
Ce n'est point par les yeux que
l'efprit vient àbout,
De bienconnoiftre la nature,
Argus avec centyeux ne connut
point Mercure,
Homere fans yeux voyoit
tout..
Xiij
248 MERCURE
pas
Comme le temps auquel
doivent finir les Affemblées
de l'Academie , chaque jour
qu'elles tiennent , n'eftoir
encore remply ; & que cing!
heures n'eftoient pas fonnées ,
on lut , felon l'ufage , l'Ouvrage d'un Academicien , &
l'on avoit choisi pour ce jourlà , en cas qu'il reftaft du
temps , un Ouvrage de Mr
de Callieres qui fut lû par Mr
l'Abbé Tallemant. Il confiftoit en des Eloges fort courts
&en Vers , de quatorze Homi
mes Illuftres , & de fept Fem- &
mes Sçavantes. Les Hommes.
GALANT 249
dont on lut les Eloges font
MCorneille l'aîné ; Racine
Moliere; la Fontaine ; Voitu
re ; Sarrafin ; la Chapelle
Defpreaux; Pavillon ; Peliffon;
Benferade ; Quinault ; Segrais ; le Duc de Nevers. Et
les Dames qui furent loüées
enfuite , font Mlle de Scudery , fous le nom de Sapho ; la
Fayette ; la Suze ; la Sabliere ;
Deshoulieres ; Villedieu ; Dacier.
Toute l'Affemblée donna
les louanges qui eftoient duës
à ces Portraits , & ils en regurent beaucoup.
250 MERCURE
Je crois devoir ajoûter icy
les noms des Opera qui ont efté
Laits par Mr de la Motte ; ce
font ,
L'Europe galante ,
Iffé ,.
Oinphale ,
Amadis de Grece
Ceyx & Alcione ,
Canente,3
Les Arts , Ballet.
Jupiter & Semelé.
Les fuccés que ces Opera ont
eu dans leur temps vous font
connus , & fur tout celuy de
l'Europe galante quia efté fou
vent remis au Theatre , & que
GALANT 250
le Public ne s'eft jamais laffe
de voir, bab
Le même Auteur a fait auffi
quelques Pieces de Theatre
& plufieurs ouvrages auffi ingenieux que galans qui n'ont
pas paru fous fon nom .
Je ne vous dis rien du grand
nombre de Prix qu'il a remportez par tout où on luy a
permis d'en difputer , en forte
que pour laiffer lieu aux autres.
de meriter à leur tour de ces
Couronnes de Lauriers , il ne
loy a plus efté permis d'entrer
dans la Carriere pour en cücillir de nouveaux.
252 MERCURE
ig
Vous avez vû le Recueil de
fes Odes. Cet Ouvrage eft ge
neralement applaudi , & l'on
vient d'en donner une nouvelle Edition. Tant d'ouvrages
differens luy ont fait meriter la
place que tout le Public , & les
Academiciens même luy fouhaitoient depuis long temps.
Il y alieu de croire qu'eftanc
encore jeune il pourra la remplir auffi dignement que fon
Predeceffeur , & faire autant
d'honneur à cet illuftre Corps.
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Résumé : Reception de Mr Houdart de la Motte à l'Academie Françoise, [titre d'après la table]
Le 8 février 1710, Houdart de la Motte est reçu à l'Académie Française pour succéder à Pierre Corneille, décédé le 8 décembre précédent. La Motte est reconnu pour ses nombreux ouvrages et son esprit galant, souvent admirés sans que leur véritable auteur soit connu. Son discours de réception est très apprécié, malgré la difficulté de traiter des sujets déjà abordés par ses prédécesseurs. Il exprime sa modestie et son admiration pour l'Académie, soulignant que seul le mérite personnel compte parmi les académiciens. La Motte rend également hommage au roi Louis XIV pour sa protection des lettres et des savants. Avant de prononcer l'éloge de Corneille, La Motte parle des talents et des vertus de plusieurs académiciens, incluant Corneille, et exprime sa reconnaissance pour l'honneur de faire partie de l'Académie. Le texte mentionne également une séance de l'Académie française où un éloge est rendu à Pierre Corneille, frère du célèbre dramaturge. L'orateur vante les pièces de théâtre de Corneille et ses dictionnaires des Arts et Géographique et Historique, qualifiés de trésors pour la Nation française et les étrangers connaissant la langue française. Il loue ensuite les qualités de Corneille, soulignant sa fermeté, sa tranquillité et son dévouement à la religion et au bonheur public. L'orateur s'adresse ensuite à Antoine de La Motte, nouvellement élu à l'Académie, en reconnaissant la beauté de ses œuvres qui l'ont distingué parmi les auteurs médiocres. Il mentionne notamment son succès dans la poésie et l'éloquence, et salue son élection unanime. La Motte est encouragé à continuer ses efforts pour célébrer les actions glorieuses et à représenter dignement la postérité. L'Abbé Tallemant récite une épigramme en l'honneur de La Motte, qui est applaudie. La séance se poursuit avec la lecture d'un ouvrage de Callières, contenant des éloges de quatorze hommes illustres et sept femmes savantes, parmi lesquels Corneille l'aîné, Racine, Molière, et La Fontaine. Le texte mentionne également les succès des opéras de La Motte, tels que 'L'Europe galante' et 'Iphigénie', ainsi que ses pièces de théâtre et autres ouvrages ingénieux. Il conclut en soulignant les nombreux prix remportés par La Motte et l'attente du public et des académiciens pour qu'il remplisse dignement sa nouvelle fonction.
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1938
p. 252-253
Mr le Duc de Beauvilier ,obtient la survivance de sa Charge de premier Gentilhomme de la Chambre, pour Mr le Duc de Mortemart, [titre d'après la table]
Début :
Mr le Duc de Beauvilier, ayant le malheur de n'avoir [...]
Mots clefs :
Duc de Beauvillier, Charge, Premier gentilhomme de la Chambre, Duc de Mortemart
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mr le Duc de Beauvilier ,obtient la survivance de sa Charge de premier Gentilhomme de la Chambre, pour Mr le Duc de Mortemart, [titre d'après la table]
Mr le Duc de Beauvillier ,
ayant le malheur de n'avoir
point d'enfans pour remplic
GALANT 253
aprés luy fa Chargede premier
Gentilhomme de la Chambre ,
a fupplié le Roy de luy en accorder la furvivance pour Mr
le Duc de Mortemart , fon
gendre , ce qui luy a attiré de
grands applaudiffemens de route la Cour, & Sa Majesté pour
marquer combien elle a efté
contente de ce choix, ya ajoûté un Brevet de retenue de cinq
cens mille livres. Mais on ne
doit pas s'en étonner , Sa Majefté ne faifant point degraces
à demi , & charmant autant
par les manieres que par les
graces prévenantes qu'elle fair
ayant le malheur de n'avoir
point d'enfans pour remplic
GALANT 253
aprés luy fa Chargede premier
Gentilhomme de la Chambre ,
a fupplié le Roy de luy en accorder la furvivance pour Mr
le Duc de Mortemart , fon
gendre , ce qui luy a attiré de
grands applaudiffemens de route la Cour, & Sa Majesté pour
marquer combien elle a efté
contente de ce choix, ya ajoûté un Brevet de retenue de cinq
cens mille livres. Mais on ne
doit pas s'en étonner , Sa Majefté ne faifant point degraces
à demi , & charmant autant
par les manieres que par les
graces prévenantes qu'elle fair
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Résumé : Mr le Duc de Beauvilier ,obtient la survivance de sa Charge de premier Gentilhomme de la Chambre, pour Mr le Duc de Mortemart, [titre d'après la table]
Le Duc de Beauvillier, sans héritier, a demandé au roi la survivance de sa charge de premier Gentilhomme de la Chambre pour son gendre, le Duc de Mortemart. La Cour a acclamé cette décision. Le roi a ajouté un brevet de retenue de cinq cents mille livres, montrant sa générosité et ses manières charmantes.
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1939
p. 254-255
Mariage avec Mr le Dux de Luynes, avec Me la Princesse de Neufchastel, [titre d'après la table]
Début :
Mc la Princesse de Neufchastel, fille de Louis-Henry de [...]
Mots clefs :
Mariage, Cérémonie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mariage avec Mr le Dux de Luynes, avec Me la Princesse de Neufchastel, [titre d'après la table]
54 MERCURE
M la Princeffe de Neufchaftel , fille de Louis - Henry
de Soiffons , ci - devant Abbé
de la Couture , fils naturel de
Louis Comte de Soiffons , qui
fut tué à la Marfée prés de Sedan l'an 1641. lequel Henry
Louis fut legitimé par Lettres
du Roy en 1643. Il eftoit neveu de Madame la Ducheffe de
Nemours , & Prince de Neufchaftel, & il avoit époufé Cunegonde de Luxembourg , fœur
de Mr le Duc de Luxembourg
aujourd'huy Gouverneur de
Normandie. Il eft forti de ce
mariage une fille qui porte le
GALANT 255
A
nom de Princeffe de Neuf.
chaftel , qui vient d'époufer
Mrle Duc de Luynes fils de
Mrle Ducde Montfort , & petit fils de Mr le Duc de Chcvreuſe. S'il eſt vraycommel'on
affure que Mr le Duc de Luynes n'ait que quinze ans , &
Me la Princefle de Neuf- chaf
tel treize , ils ont lieu d'efperer
une longue Pofterité . Le Roy
avoit figné leur Contrat de
Mariage prés de trois ſemaines
avant la Ceremonie de leurs
époufailles.
M la Princeffe de Neufchaftel , fille de Louis - Henry
de Soiffons , ci - devant Abbé
de la Couture , fils naturel de
Louis Comte de Soiffons , qui
fut tué à la Marfée prés de Sedan l'an 1641. lequel Henry
Louis fut legitimé par Lettres
du Roy en 1643. Il eftoit neveu de Madame la Ducheffe de
Nemours , & Prince de Neufchaftel, & il avoit époufé Cunegonde de Luxembourg , fœur
de Mr le Duc de Luxembourg
aujourd'huy Gouverneur de
Normandie. Il eft forti de ce
mariage une fille qui porte le
GALANT 255
A
nom de Princeffe de Neuf.
chaftel , qui vient d'époufer
Mrle Duc de Luynes fils de
Mrle Ducde Montfort , & petit fils de Mr le Duc de Chcvreuſe. S'il eſt vraycommel'on
affure que Mr le Duc de Luynes n'ait que quinze ans , &
Me la Princefle de Neuf- chaf
tel treize , ils ont lieu d'efperer
une longue Pofterité . Le Roy
avoit figné leur Contrat de
Mariage prés de trois ſemaines
avant la Ceremonie de leurs
époufailles.
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Résumé : Mariage avec Mr le Dux de Luynes, avec Me la Princesse de Neufchastel, [titre d'après la table]
La Princesse de Neufchâtel est la fille de Louis-Henry de Soiffons, légitimé en 1643, et de Cunégonde de Luxembourg. Louis-Henry était neveu de la Duchesse de Nemours et Prince de Neufchâtel. La princesse a épousé le Duc de Luynes, âgé de 15 ans, trois semaines après la signature du contrat de mariage par le Roi. La princesse avait 13 ans.
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1940
p. 255-259
Theses soutenuës en Sorbonne, [titre d'après la table]
Début :
On vient de soûtenir en Sorbonne deux Theses appellées Tentatives, [...]
Mots clefs :
Sorbonne, Soutenance de thèse, Éclat
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Theses soutenuës en Sorbonne, [titre d'après la table]
On vient de foûtenir en Sorbonne deux Thefes appellées
2 56MERCURE
Tentatives , ce qui s'est fait avec
beaucoup des Allemblées d'éclat , & devant
avant
que nombreuſes.
illuftres
La premiere a efté foutenue
parMr deCotte, Chanoine de
N. Dame, &fils de M' de Corte
premier Architecte du Roy ;
& cet Abbé , quoy que fort
jeune encore , a autant brillé
dans cette action que s'il avoit
efté dans un âge plus avancé.
Mr Dreux, Preftre, Sous-Chan
tre & Chanoine de la même
Eglife ; Docteur de Sorbonne
& Confeiller au grand Confeil,
prefidoit à certe Thefe , qui
A
GALANT 257
2 S
fut honorée de la prefence de
S. E. Monfieur le Cardinal de
Noailles.
Mr Molé, frerede Mr Molé
de Champlaftreux, Prefident à
Mortier, & Abbéde S. Riquier
en Picardie , a auffi foûtenu
une Tentative, à laquelle a prefidé Mr le Prince de Rohan ,
Evêque & Prince de Strafbourg ; Landgrave d'Alface ;
Prince du S. Empire ; Docteur
en Theologie de la Faculté de
Paris , & de la Societé de Sorbonne. La grandeur de la naiffance & du merite du Prefident , & les qualitez ; le merite
Février 1710. Y
158 MERCURE
& la naiffance du Soutenant
furent caufeque l'Affemblée fe
trouva fi nombreuſe , qu'il fut
prefque impoffible d'approcher du lieu où elle fe tenoit
& de bien remarquer tout ce
qui s'y paffa. Comme l'Affemblée qui eftoit auffi illuſtre que
nombreuſe dura encore longtemps aprés la nuit fermée
on avoit allumé beaucoup de
Luftres qui donnerent un nouvel éclat à cette Affemblée
compofée des premieres perfonnes de la Cour & de la Ville , & deprefque tout le Parlement. Son Eminence Mon-
GALANT 259
fieur le Cardinal de Noailles ,
Archevêquede Paris , & quantité d'autres Archevêques &
Evêques s'y trouverent auffi
de maniere qu'il eftoit impoffible que l'on putvoir une Affemblée plus illuftre , & mieux
templie. Le Soutenant feffit
admirer dans cette action publique , qui fut regardée com
me une des plus complettes &
des plus éclatantes qui fe foient
faites depuis long- temps.
2 56MERCURE
Tentatives , ce qui s'est fait avec
beaucoup des Allemblées d'éclat , & devant
avant
que nombreuſes.
illuftres
La premiere a efté foutenue
parMr deCotte, Chanoine de
N. Dame, &fils de M' de Corte
premier Architecte du Roy ;
& cet Abbé , quoy que fort
jeune encore , a autant brillé
dans cette action que s'il avoit
efté dans un âge plus avancé.
Mr Dreux, Preftre, Sous-Chan
tre & Chanoine de la même
Eglife ; Docteur de Sorbonne
& Confeiller au grand Confeil,
prefidoit à certe Thefe , qui
A
GALANT 257
2 S
fut honorée de la prefence de
S. E. Monfieur le Cardinal de
Noailles.
Mr Molé, frerede Mr Molé
de Champlaftreux, Prefident à
Mortier, & Abbéde S. Riquier
en Picardie , a auffi foûtenu
une Tentative, à laquelle a prefidé Mr le Prince de Rohan ,
Evêque & Prince de Strafbourg ; Landgrave d'Alface ;
Prince du S. Empire ; Docteur
en Theologie de la Faculté de
Paris , & de la Societé de Sorbonne. La grandeur de la naiffance & du merite du Prefident , & les qualitez ; le merite
Février 1710. Y
158 MERCURE
& la naiffance du Soutenant
furent caufeque l'Affemblée fe
trouva fi nombreuſe , qu'il fut
prefque impoffible d'approcher du lieu où elle fe tenoit
& de bien remarquer tout ce
qui s'y paffa. Comme l'Affemblée qui eftoit auffi illuſtre que
nombreuſe dura encore longtemps aprés la nuit fermée
on avoit allumé beaucoup de
Luftres qui donnerent un nouvel éclat à cette Affemblée
compofée des premieres perfonnes de la Cour & de la Ville , & deprefque tout le Parlement. Son Eminence Mon-
GALANT 259
fieur le Cardinal de Noailles ,
Archevêquede Paris , & quantité d'autres Archevêques &
Evêques s'y trouverent auffi
de maniere qu'il eftoit impoffible que l'on putvoir une Affemblée plus illuftre , & mieux
templie. Le Soutenant feffit
admirer dans cette action publique , qui fut regardée com
me une des plus complettes &
des plus éclatantes qui fe foient
faites depuis long- temps.
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Résumé : Theses soutenuës en Sorbonne, [titre d'après la table]
En février 1710, deux thèses ont été soutenues à la Sorbonne avec un grand éclat et en présence de nombreuses personnalités. La première thèse a été présentée par Monsieur de Cotte, chanoine de Notre-Dame et fils de l'architecte du roi, sous la présidence de Monsieur Dreux, prêtre, sous-chantre et chanoine de la même église, docteur de Sorbonne et conseiller au grand conseil, en présence du Cardinal de Noailles. La seconde thèse a été soutenue par Monsieur Molé, frère de Monsieur Molé de Champlâtreux et abbé de Saint-Riquier, sous la présidence de Monsieur le Prince de Rohan, évêque et prince de Strasbourg, landgrave d'Alsace, prince du Saint-Empire et docteur en théologie. La grandeur des présidents et les qualités des soutenants ont attiré une assemblée nombreuse et illustre, incluant des membres de la cour, de la ville et du parlement. La soutenance a duré longtemps après la tombée de la nuit, éclairée par de nombreux lustres.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1941
p. 259-269
Mort de Mr l'Archevêque de Reims, [titre d'après la table]
Début :
Il me reste à vous parler de tant de personnes decedées [...]
Mots clefs :
Mort, Archevêque de Reims, Charles Maurice le Tellier, Apoplexie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mort de Mr l'Archevêque de Reims, [titre d'après la table]
Il me reste à vous parler de
tant de perfonnes decedées
dont je ne vous ay encore rien.
dics que je n'aurois pas dû
Y ij
260 MERCURE
vous entretenir encore cen
mois - cy de la mort de Mrb
l'Archevêque de Reims. Auffi
ne vous en parleray- je pas
àfond ; mais il eft des morts
fi éclatantes tant par les circonftances qui les accompa
gnent que par la qualité des
défunts , qu'il eft impoffible.
de n'enrien dire dans le temps
que tout le monde en parle.
Perfonne n'ignore que cer
Archevêque eft mort d'apo
plexie , & cette maladie eft fi
ordinaire depuis quelque 55
temps , que je pourois encore
vous parler de plufieus per - w
GALANT 261
fonnes qui en font mortes
dés qu'elles en ont efté attaquées. Mr l'Archevêque de
Reims n'avoit cu jufqu'à fa
mort aucun indice qui marquaft qu'il en duft eftre attaqué ,fi ce n'eft qu'il eftoit du
nombre de ceux que le Public
condamne toujours à mourir
d'apoplexie , à caufe de leur
repletion. Cependant ce mal
n'attaque pas moins les perfonnes maigres que les autre
& nous en avons tous les jours
de nouvelles preuves.
Mr l'Archevêque de Reims,
venoit de travailler avec Mr
262 MERCURE
9
Pilon , ce fameux Procureur
fi generalement eftimérisa
une Tranfaction pour un de
fes amis qu'il eftimoit beaucoup , & qu'il honoroit de
fon amitié , & ce Prelat, avoit
ápoftillé de fa main , tous les
Articles de cette Tranfaction ,.
à laquelle il avoit efté longtemps fort appliqué. Il dit
enfuite qu'il avoit mal à la tête,
&peu de temps aprés que fon
mal augmentoit beaucoup.
On luy dit de fe mettre fur
fon lit pour fe repoſer , &à
peine y cut il efté un moment
qu'on luy tafta le pouls . &
CALANT 263.
* T
que l'on connut que le poulx
remontoit , & que ce Prelat
commençoit à perdre connoiffance. On courut à Saint
Gervais , & le Vicaire de cette
Paroiffe accourut auffi- toft:
avec les Saintes Huiles ; mais à
peine eut il fait la premiere
Onction , qu'on remarqua
qu'il n'avoit plus du tour de
connoiffance & il mourut
auffi toft aprés.
t
Comme on fçavoir qu'il
avoit fait un Teftament on le
chercha , & il fut bien- toft
trouvé , ce qui marque qu'il
avoit penfé à la mort pen-
>
264 MERCURE
dant fa vie , puifqu'il avoit
fongé à difpofer de fes biens.
On trouva qu'il avoit laiffé à
Mr l'Abbé de Louvois , tous
fes Ornemens d'Eglife , l'Argenterie de fa Chapelle , fa
Maifon de Versailles qui eft
tres- belle, & quelques tentures
de Tapifferies. Il auroit pûlaiffer auffi à Mr l'Abbé de Louvois fa Biblioteque qui eft une
des plus curieufes de Paris
& qui luy revenoit à plus de
quarante mille écus ; mais il
marquoit que Mr l'Abbé de
Louvois n'en avoit pas befoin,
parce qu'il eftoit Maître de la
Biblio-
GALANT 265
Biblioteque du Roy , & qu'ainfi il laiffoit la fienne à Mrs de
Sainte Geneviève.
Tous fes Domeftiques
depuis le premier jufqu'au
dernier , font récompenfez
dans ce Teftament , chacun
felon les Emplois qu'ils avoient
& ces récompenfes font , diton , fort confiderables.
Ce Teftament eft auffi
remply d'un grand nombre
de legs pieux , & de beaucoup
de Prieres que ce Prelat a ordonnées pour le repos de fon
ame.
Je ne parle point de la perFévrier 1710. Z..
266 MERCURE
fonne qu'il a nommée fa Legatrice univerfelle ; c'eft un
Article qui fait raisonner tout
le monde tant ceux qui yfont
intereffez que ceux qui ne le
font pas. Onpouroit, dire que
tous ceux qui font leurs Teftamens ne font rien qu'ils ne
croyent juſte , puis qu'ils contiennent leurs dernieres volon
tez , dont ils doivent rendre
compte à Dieu , & que tout
ce qu'ils font eft autorifé par
des raifons que perfonne ne
peut penetrer ; mais comme
tous les hommes ont leurs
enteftemens qu'ils croyent
GALANT 267
de
juftes , quoyqu'ils ne le foient
fouvent pas , ils ne font pas
toujours bien en croyant bien
faire. Ainfi il eft difficile
condamner ou d'aprouver les
Teftamens les Teftateurs
ayant toujours fait à bonne
intention ce qu'ils n'auroient
pas dû faire , & quoy qu'ils
ayent fait mal devant les hom
mes , ils n'ont point fait mal
devant Dieu , qui ne juge que
felon les intentions. Ce qu'il
y a de furprenant , eft que
prefque dans tous les Teftamens , on trouve des chofes fi
extraordinaires que les homZij
268 MERCURE
mes n'auroient jamais crû les y
devoirtrouver.'
re
Le défunt qui cft mort
âgé de 69. ans fe nommoit
Mr Charles Maurice le Tellier.
Il eftoit Archevêque Duc de
Reims , premier Pair de France , Legat né du S. Siege Apoftolique , Commandeur de
l'Ordre du S. Efprit , Doyen
du. Confeil d'Etat , Provifeur
de Sorbonne , Maître de la
Chapelle du Roy , Abbé de
S. Eftienne de Caen , de S.
Benigne de Dijon , de Bretcüil , &c. Il a efté inhumé le
24. de ce mois à S. Gervais ,
GALANT 269
dans la Cave de feu M' le
Chancelier le Tellier , fon pere
tant de perfonnes decedées
dont je ne vous ay encore rien.
dics que je n'aurois pas dû
Y ij
260 MERCURE
vous entretenir encore cen
mois - cy de la mort de Mrb
l'Archevêque de Reims. Auffi
ne vous en parleray- je pas
àfond ; mais il eft des morts
fi éclatantes tant par les circonftances qui les accompa
gnent que par la qualité des
défunts , qu'il eft impoffible.
de n'enrien dire dans le temps
que tout le monde en parle.
Perfonne n'ignore que cer
Archevêque eft mort d'apo
plexie , & cette maladie eft fi
ordinaire depuis quelque 55
temps , que je pourois encore
vous parler de plufieus per - w
GALANT 261
fonnes qui en font mortes
dés qu'elles en ont efté attaquées. Mr l'Archevêque de
Reims n'avoit cu jufqu'à fa
mort aucun indice qui marquaft qu'il en duft eftre attaqué ,fi ce n'eft qu'il eftoit du
nombre de ceux que le Public
condamne toujours à mourir
d'apoplexie , à caufe de leur
repletion. Cependant ce mal
n'attaque pas moins les perfonnes maigres que les autre
& nous en avons tous les jours
de nouvelles preuves.
Mr l'Archevêque de Reims,
venoit de travailler avec Mr
262 MERCURE
9
Pilon , ce fameux Procureur
fi generalement eftimérisa
une Tranfaction pour un de
fes amis qu'il eftimoit beaucoup , & qu'il honoroit de
fon amitié , & ce Prelat, avoit
ápoftillé de fa main , tous les
Articles de cette Tranfaction ,.
à laquelle il avoit efté longtemps fort appliqué. Il dit
enfuite qu'il avoit mal à la tête,
&peu de temps aprés que fon
mal augmentoit beaucoup.
On luy dit de fe mettre fur
fon lit pour fe repoſer , &à
peine y cut il efté un moment
qu'on luy tafta le pouls . &
CALANT 263.
* T
que l'on connut que le poulx
remontoit , & que ce Prelat
commençoit à perdre connoiffance. On courut à Saint
Gervais , & le Vicaire de cette
Paroiffe accourut auffi- toft:
avec les Saintes Huiles ; mais à
peine eut il fait la premiere
Onction , qu'on remarqua
qu'il n'avoit plus du tour de
connoiffance & il mourut
auffi toft aprés.
t
Comme on fçavoir qu'il
avoit fait un Teftament on le
chercha , & il fut bien- toft
trouvé , ce qui marque qu'il
avoit penfé à la mort pen-
>
264 MERCURE
dant fa vie , puifqu'il avoit
fongé à difpofer de fes biens.
On trouva qu'il avoit laiffé à
Mr l'Abbé de Louvois , tous
fes Ornemens d'Eglife , l'Argenterie de fa Chapelle , fa
Maifon de Versailles qui eft
tres- belle, & quelques tentures
de Tapifferies. Il auroit pûlaiffer auffi à Mr l'Abbé de Louvois fa Biblioteque qui eft une
des plus curieufes de Paris
& qui luy revenoit à plus de
quarante mille écus ; mais il
marquoit que Mr l'Abbé de
Louvois n'en avoit pas befoin,
parce qu'il eftoit Maître de la
Biblio-
GALANT 265
Biblioteque du Roy , & qu'ainfi il laiffoit la fienne à Mrs de
Sainte Geneviève.
Tous fes Domeftiques
depuis le premier jufqu'au
dernier , font récompenfez
dans ce Teftament , chacun
felon les Emplois qu'ils avoient
& ces récompenfes font , diton , fort confiderables.
Ce Teftament eft auffi
remply d'un grand nombre
de legs pieux , & de beaucoup
de Prieres que ce Prelat a ordonnées pour le repos de fon
ame.
Je ne parle point de la perFévrier 1710. Z..
266 MERCURE
fonne qu'il a nommée fa Legatrice univerfelle ; c'eft un
Article qui fait raisonner tout
le monde tant ceux qui yfont
intereffez que ceux qui ne le
font pas. Onpouroit, dire que
tous ceux qui font leurs Teftamens ne font rien qu'ils ne
croyent juſte , puis qu'ils contiennent leurs dernieres volon
tez , dont ils doivent rendre
compte à Dieu , & que tout
ce qu'ils font eft autorifé par
des raifons que perfonne ne
peut penetrer ; mais comme
tous les hommes ont leurs
enteftemens qu'ils croyent
GALANT 267
de
juftes , quoyqu'ils ne le foient
fouvent pas , ils ne font pas
toujours bien en croyant bien
faire. Ainfi il eft difficile
condamner ou d'aprouver les
Teftamens les Teftateurs
ayant toujours fait à bonne
intention ce qu'ils n'auroient
pas dû faire , & quoy qu'ils
ayent fait mal devant les hom
mes , ils n'ont point fait mal
devant Dieu , qui ne juge que
felon les intentions. Ce qu'il
y a de furprenant , eft que
prefque dans tous les Teftamens , on trouve des chofes fi
extraordinaires que les homZij
268 MERCURE
mes n'auroient jamais crû les y
devoirtrouver.'
re
Le défunt qui cft mort
âgé de 69. ans fe nommoit
Mr Charles Maurice le Tellier.
Il eftoit Archevêque Duc de
Reims , premier Pair de France , Legat né du S. Siege Apoftolique , Commandeur de
l'Ordre du S. Efprit , Doyen
du. Confeil d'Etat , Provifeur
de Sorbonne , Maître de la
Chapelle du Roy , Abbé de
S. Eftienne de Caen , de S.
Benigne de Dijon , de Bretcüil , &c. Il a efté inhumé le
24. de ce mois à S. Gervais ,
GALANT 269
dans la Cave de feu M' le
Chancelier le Tellier , fon pere
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Résumé : Mort de Mr l'Archevêque de Reims, [titre d'après la table]
En février 1710, Charles Maurice Le Tellier, Archevêque de Reims, est décédé subitement d'une apoplexie. Il n'avait montré aucun signe avant-coureur de la maladie. Au moment de son décès, il travaillait sur une transaction juridique avec le Procureur Général Pilon. Il a rapidement perdu connaissance et est décédé peu après avoir reçu les derniers sacrements. Son testament, retrouvé promptement, révèle plusieurs legs. Il a légué ses ornements d'église, son argenterie, sa maison de Versailles et des tapisseries à l'Abbé de Louvois. Sa bibliothèque, l'une des plus prestigieuses de Paris, a été laissée à l'abbaye de Sainte-Geneviève. Tous ses domestiques ont été récompensés en fonction de leurs rôles. Le testament comprend également de nombreux legs pieux et prières pour le repos de son âme. Le texte mentionne une légataire universelle dont la nomination a suscité des discussions. Charles Maurice Le Tellier, âgé de 69 ans, occupait plusieurs fonctions prestigieuses, notamment celles de Duc de Reims, premier Pair de France, et Commandeur de l'Ordre du Saint-Esprit. Il a été inhumé le 24 février à Saint-Gervais, dans la cave de son père, le feu Chancelier Le Tellier.
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1942
p. 269-275
De Calais.
Début :
Je vous envoye la suite des Affaires de Mer qui se sont [...]
Mots clefs :
Affaires de Mer, Vaisseaux, Corsaire, Equipage, Calais, Dunkerque, Toulon, Saint-Malo
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : De Calais.
Je vous envoye la fuite des
Affaires de Mer qui fe font
paffées depuis ma derniere
Lettre.
DeCalais
François Bachelier comman
dant le Corfaire le Prompt, a
pris un Baftiment Hollandois
chargé de chanvres & de toilles.
François Polet comman
dant la Triomphante , a enlevé
un Brigantin Anglois de huit
Z iij .
250 MERCURE
canons , fur lequel il avoit fait
paffer neuf hommes de fon
équipage ; mais les Anglois
ayant mis le feu aux poudres ,
la pluſpart ont efté brûlez , &
l'on a fauvé feulement huit
François.
Les Capitaines Gouvel &
Duchoncommandans les Barques en courfe la Pucelle & la
Pauline , ont auffi amené à Calais un Baſtiment Anglois de
cent trente tonneaux , chargé
d'oranges & de citrons , allant
à Londres.
Trois autres Corfaires ont
pris unVaiffeau Irlandois char-
GALANT 271
gé de beurre , de fuif&de cuirs
verts.
Mrs Saus & Battement commandans les Vaiffeaux du Roy
l'Augufte & le Blackwal , ont
pris & conduit à Dunkerque
un Vaiffeau Anglois fortant
des Dunes pour aller à la Jamaïque.
Les Fregattes du Roy l'Amazone & l'Argonaute , commandées par Mrs de la Jaille
& du Bois de la Morte , font
entrées à Breft avec 4. prifes
qui alloient à Madere & à la
Virginie.
དྷུ་
Un Armateur de Calais a
Z iiij
272 MERCURE
•
auffi amené à Breft un Bâtiment chargé de poudres , de
cordages & d'autres marchan
difes venant d'Hollande.
DeDunkerquele 18. Février.
Mrs de Saus & Battement
commandans les Vaiffeaux du
Roy l'Augufle & le Blakwal ,
ont amené à Dunkerque deux
prifes Angloifes , l'une venant
de Ligourne , chargée de vin
Florence , de fouffre & de marbre ; & l'autre allant d'Yarmouth dans le Détroit , chargée d harengs fors & de fardines.
GALANT 273
Mr Combrug commandant la Fregate la Fidelle, a con
duità Cherbourgune prifeAngloiſe allant à la Nouvelle Angleterre, chargée de balors de
draps eftimée cent mille livres.
De S. Malo le 12. Février.
La Couronne Corfaire de S.
Malo y a conduit une rançon
Angloife de 650. livres fterlin.
Le Marquis de Roye , autre
Corfaire , y a amené une prife
Angloife de cent tonneaux
allant de Dublin à Liſbonne,
274 MERCURE
avec une cargaison de bœuf,
debeurre & de farine.
LeVictorieux ,autre Corfaire, a auffi amené une prife Angloife venant de Barcelone
chargée de vin du cru du Pays
& de raifins.
DeToulon
Mr Laigle eft rentré avec
fon Vaiffeau armé en courfe
dans les Rades de Toulon
d'où il eftoit forti depuis quinze jours , & il y a amené deux
prifes ;l'une d'un Corfaire Fleffinguois de trente - fix canons
GALANT 275
& de deuxcent cinquante hommes d'équipage , ayant pour
fon left deux cent cinquante
faumons de plomb ; & l'autre
d'un Vaiffeau MarchandHollandois chargé de 1400. charges de bled. Mr Laigle n'a
perduperfonne de fon équipage , le Vaiffeau Fleffinguois luy
tira une bordée de canon , Mr
Laigle luy tira enfuite la fienne ; l'Equipage Fleffinguois
ayant reconnu à qui il avoit à
faire fe mità crier c'eft Laigle ,
il nous abîmera , & ils mirent les
armes bas
Affaires de Mer qui fe font
paffées depuis ma derniere
Lettre.
DeCalais
François Bachelier comman
dant le Corfaire le Prompt, a
pris un Baftiment Hollandois
chargé de chanvres & de toilles.
François Polet comman
dant la Triomphante , a enlevé
un Brigantin Anglois de huit
Z iij .
250 MERCURE
canons , fur lequel il avoit fait
paffer neuf hommes de fon
équipage ; mais les Anglois
ayant mis le feu aux poudres ,
la pluſpart ont efté brûlez , &
l'on a fauvé feulement huit
François.
Les Capitaines Gouvel &
Duchoncommandans les Barques en courfe la Pucelle & la
Pauline , ont auffi amené à Calais un Baſtiment Anglois de
cent trente tonneaux , chargé
d'oranges & de citrons , allant
à Londres.
Trois autres Corfaires ont
pris unVaiffeau Irlandois char-
GALANT 271
gé de beurre , de fuif&de cuirs
verts.
Mrs Saus & Battement commandans les Vaiffeaux du Roy
l'Augufte & le Blackwal , ont
pris & conduit à Dunkerque
un Vaiffeau Anglois fortant
des Dunes pour aller à la Jamaïque.
Les Fregattes du Roy l'Amazone & l'Argonaute , commandées par Mrs de la Jaille
& du Bois de la Morte , font
entrées à Breft avec 4. prifes
qui alloient à Madere & à la
Virginie.
དྷུ་
Un Armateur de Calais a
Z iiij
272 MERCURE
•
auffi amené à Breft un Bâtiment chargé de poudres , de
cordages & d'autres marchan
difes venant d'Hollande.
DeDunkerquele 18. Février.
Mrs de Saus & Battement
commandans les Vaiffeaux du
Roy l'Augufle & le Blakwal ,
ont amené à Dunkerque deux
prifes Angloifes , l'une venant
de Ligourne , chargée de vin
Florence , de fouffre & de marbre ; & l'autre allant d'Yarmouth dans le Détroit , chargée d harengs fors & de fardines.
GALANT 273
Mr Combrug commandant la Fregate la Fidelle, a con
duità Cherbourgune prifeAngloiſe allant à la Nouvelle Angleterre, chargée de balors de
draps eftimée cent mille livres.
De S. Malo le 12. Février.
La Couronne Corfaire de S.
Malo y a conduit une rançon
Angloife de 650. livres fterlin.
Le Marquis de Roye , autre
Corfaire , y a amené une prife
Angloife de cent tonneaux
allant de Dublin à Liſbonne,
274 MERCURE
avec une cargaison de bœuf,
debeurre & de farine.
LeVictorieux ,autre Corfaire, a auffi amené une prife Angloife venant de Barcelone
chargée de vin du cru du Pays
& de raifins.
DeToulon
Mr Laigle eft rentré avec
fon Vaiffeau armé en courfe
dans les Rades de Toulon
d'où il eftoit forti depuis quinze jours , & il y a amené deux
prifes ;l'une d'un Corfaire Fleffinguois de trente - fix canons
GALANT 275
& de deuxcent cinquante hommes d'équipage , ayant pour
fon left deux cent cinquante
faumons de plomb ; & l'autre
d'un Vaiffeau MarchandHollandois chargé de 1400. charges de bled. Mr Laigle n'a
perduperfonne de fon équipage , le Vaiffeau Fleffinguois luy
tira une bordée de canon , Mr
Laigle luy tira enfuite la fienne ; l'Equipage Fleffinguois
ayant reconnu à qui il avoit à
faire fe mità crier c'eft Laigle ,
il nous abîmera , & ils mirent les
armes bas
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Résumé : De Calais.
Le document décrit plusieurs actions navales françaises contre des navires étrangers. À Calais, François Bachelier a capturé un bâtiment hollandais chargé de chanvre et de toiles. François Polet a pris un brigantin anglais de huit canons, mais une explosion a blessé la plupart de son équipage. Les capitaines Gouvel et Duchon ont ramené un bâtiment anglais chargé de fruits. Trois corvettes ont capturé un vaisseau irlandais transportant du beurre, du suif et des cuirs verts. À Dunkerque, les capitaines de Saus et Battement ont conduit un vaisseau anglais destiné à la Jamaïque. Les frégates royales l'Amazone et l'Argonaute ont ramené à Brest quatre prises destinées à Madère et à la Virginie. Un armateur de Calais a également amené à Brest un bâtiment chargé de poudres, de cordages et d'autres marchandises venant de Hollande. À Dunkerque, les mêmes capitaines ont ramené deux prises anglaises, l'une chargée de vin, de soufre et de marbre, l'autre de harengs et de farines. Le commandant Combrug a conduit à Cherbourg une prise anglaise chargée de draps. À Saint-Malo, une corvette a ramené une rançon anglaise de 650 livres sterling. Le Marquis de Roye a amené une prise anglaise de cent tonneaux chargée de bœuf, de beurre et de farine. Le Victorieux a capturé une prise anglaise venant de Barcelone chargée de vin et de raisins. À Toulon, Monsieur Laigle est rentré avec deux prises : un corsaire flessinguois de trente-six canons et un vaisseau marchand hollandais chargé de blé.
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1943
p. 275-278
Dons faits par le Roy, [titre d'après la table]
Début :
Je vous ay déja dit que feu Mr l'Archevêque de Reims a [...]
Mots clefs :
Charge, Testament, Roi
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Dons faits par le Roy, [titre d'après la table]
Je vous ay déja dit quefeu
276 MERCURE
Mr l'Archevêque de Reims a
donné par fon Teftament Choute
fa
Maifon de Verſailles
meublée à Mr l'Abbé de Louvois ; mais vous ignorez peuteftre que l'Appartement qu'il
avoit dans le Chasteau , a efté
donné par Sa Majesté à S. A,
S. Monfieur le Duc du Maine
pour Les Enfans.
Le Roy a auffi donné à Mt
de Chanlay , dont vous fçavez
les long & affidus fervices , un
Brevet de retenuë fort confiderable fur fa Charge de Maréchal general des Camps &
Armées de Sa Majesté.
GALANT 277
Mr Bourdelin , ci - devant
Secretaire de l'Ambaffade , lors
que Mr de Bonrepos alla Ambaffadeur en Dannemarck , a
a efté reçu Ordinaire du Roy.
Il a efté Confeiller au Chaftelet. Il fçait parfaitement les
Langues étrangeres , & Mr le
Comte de Pontchartrain le
mit auprés de luy pour traduire
les Lettres particulieres qui luy
venoient de divers Pays étrangers , & qui demandoient un
homme de confiance. Il a l'efprit univerfel , & quoy que
fort jeune encore , il eft Veterant de l'Academic Royale des
278 MERCURE
Medailles & Infcriptions. Il a
beaucoup d'efprit ; l'air fort
gracieux , & toutes les qualitez neceſſaires pour bien s'acquitter de la Charge dont Sa
Majefté luy a donné l'agréement avec plaifir , & il est déja
entré en exercice.
276 MERCURE
Mr l'Archevêque de Reims a
donné par fon Teftament Choute
fa
Maifon de Verſailles
meublée à Mr l'Abbé de Louvois ; mais vous ignorez peuteftre que l'Appartement qu'il
avoit dans le Chasteau , a efté
donné par Sa Majesté à S. A,
S. Monfieur le Duc du Maine
pour Les Enfans.
Le Roy a auffi donné à Mt
de Chanlay , dont vous fçavez
les long & affidus fervices , un
Brevet de retenuë fort confiderable fur fa Charge de Maréchal general des Camps &
Armées de Sa Majesté.
GALANT 277
Mr Bourdelin , ci - devant
Secretaire de l'Ambaffade , lors
que Mr de Bonrepos alla Ambaffadeur en Dannemarck , a
a efté reçu Ordinaire du Roy.
Il a efté Confeiller au Chaftelet. Il fçait parfaitement les
Langues étrangeres , & Mr le
Comte de Pontchartrain le
mit auprés de luy pour traduire
les Lettres particulieres qui luy
venoient de divers Pays étrangers , & qui demandoient un
homme de confiance. Il a l'efprit univerfel , & quoy que
fort jeune encore , il eft Veterant de l'Academic Royale des
278 MERCURE
Medailles & Infcriptions. Il a
beaucoup d'efprit ; l'air fort
gracieux , & toutes les qualitez neceſſaires pour bien s'acquitter de la Charge dont Sa
Majefté luy a donné l'agréement avec plaifir , & il est déja
entré en exercice.
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Résumé : Dons faits par le Roy, [titre d'après la table]
Le texte mentionne plusieurs événements et nominations. L'Archevêque de Reims a légué sa maison de Versailles, meublée, à l'Abbé de Louvois par testament. Le roi a attribué l'appartement de l'archevêque au Duc du Maine pour ses enfants. Monsieur de Chanlay a reçu un brevet de retenue substantiel en reconnaissance de ses loyaux et assidus services en tant que Maréchal général des camps et armées du roi. Monsieur Bourdelin, ancien secrétaire de l'ambassade en Danemark, a été nommé Ordinaire du roi et conseiller au Châtelet. Il maîtrise les langues étrangères et a été chargé par le Comte de Pontchartrain de traduire des lettres provenant de divers pays étrangers. Bourdelin, jeune mais expérimenté, est membre de l'Académie Royale des Médailles et Inscriptions. Il possède un esprit universel et les qualités nécessaires pour bien exercer sa charge, pour laquelle il a reçu l'agrément du roi avec plaisir et a déjà commencé à exercer ses fonctions.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1944
p. 278-285
Rapel de Mr le Comte de Cornbury, de son Gouvernement de la nouvelle Yorck, [titre d'après la table]
Début :
Mr le Comte de Cornbury, cousin germain de la Reine [...]
Mots clefs :
Comte de Cornbury, Rappel, Nouvelle-Yorck, Angleterre, Maison des Hides
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Rapel de Mr le Comte de Cornbury, de son Gouvernement de la nouvelle Yorck, [titre d'après la table]
Mr le Comte de Cornbury,
coufin germain de la Reine
Anne ,
ayant l'honneur
d'eftre neveu de la Ducheffe
d'Yorck , premiere femme du
Roy d'Angleterre dernier
mort vient d'eftre rappellé
de fon Gouvernement de la
Nouvelle-Yorck , dans l'Ame-
GALANT 279
tique , quoy qu'il ait remply
certe fonction au gré & à la
fatisfaction des peuples qu'il
gouvernoit ; & l'on écrit d'Angleterre que les liaifons de fang
qu'il y a entre la Reine & ce
Seigneur , & l'ancienne amitié
dont il eft uni avec Milord
Marlborough , n'ont pûlegarentir de la chute qu'il vient
de faire , ny le mettre à couvert de quelques foupçons que
la Reine a cuë de fa conduite.
Ce Comte eft petit- fils du fameux Chancelier Hyde dont
on a tant parlé fous le regne
des deux Rois d'Angleterre
280 MERCURE
Charles II & Jacques II. Ce
dernier époufa en premieres
nôces la fille de ce Chancelier ,
& il en eut la feuë Princeffe
d'Orange & la Reine Anne.
Mylord Hyde , outre Me la
Ducheffe d'Yorck laiffa Mylord Clarendon fon fils aîné ,
qu'il rendit par fes foins un des
plus grands Politiques que
l'Angleterre ait eus . C'eſt ce
Comte de Clarendon qui a
laiffé un Recueil de Memoires
des guerres civiles d'Angleterre , qui finirent par la mort funefte du RoyCharles I. ouvrage digne des plus grands Mat-
GALANT 281
tres de l'Art , & qui peut eftre
comparé aux Annales de Titelive , & à l'Histoire de la Tacite & les Reflexions qu'il
fait fur chaque évenement
prouve affez qu'il connoiſt tous
les principes & toutes les maximes de cette Science difficile.
Il y infinuë que le celebre Jacques Duc d'Hamilton , grand
Commiffaire du Roy Charles
1. en Ecoffe fut foupçonné du
deffein de monter fur le Trône de cette Monarchie , pendant les troubles qui l'agitoient. On prétend qu'il fondoit fes droits fur une de fes
Février 1710.
Aa
282 MERCURE
aycules, fœur du Roy d'Ecoffe
Jacques III. Mr le Comte
de Cornbury fils de cet habile
Hiftorien , a porté le nom de
Comte de Clarendon fous le
regne du Roy Jacques II. dont
il avoit l'honneur d'eftre neveu
à caufe de la feue Ducheffe
d'Yorck ; il eftoit fort attaché
au parti de ce Prince , &il avoit
unRegiment ainfi que Mylord
Churchill , connu à prefent
fous le nom de Duc de Marlborough , mais ces deux Colonels abandonnerent leur Roi
& menerent leurs Regimens au
Prince d'Orange , lorſqu'il eut
GALANT 283
débarqué à Torbay dans le
temps de fon invaſion en Angleterre. Ce Prince les reçut
d'abord affez bien ; mais lors
qu'il fut monté fur le Trône,
il parut peu empreffé à récompenfer ces deux Colonels , &
on fçait qu'il n'approuva pas
leur conduite , & qu'il parla d'eux avec Mylord Portland dans des termes qui marquoient le mépris qu'il en faifoit. Ainfi on peut dire qu'ils
n'ont rien perdu à la mort de
ce Prince , puifque la Princeffe
qui luy a fuccedé les a comblez
de bienfaits , & fur tout le
Aaij
284 MERCURE
Mylord Churchill ; à l'égard
du Comte de Cornbury , on
parle à Londres affez diverfement des raifons que la Reine a
euës de le rappeller; ce que l'on
affure eft que cette Princeffe en
paroift tres mécontente. La
Maifon des Hides eft fort an-
·
cienne en Angleterre. Une tra
dition domestique la fait venir de l'Hide , partie d'une
region dans l'Eptarchie des
Saxons. L'Eptarchie contenoit,
fept Royaumes , & chaque
Royaume eftoit divifé en regions. On trouve de beaux
traits du Chancelier Hide dans
GALANT 285
la vie du Comte de Schaffs-"
bury.
coufin germain de la Reine
Anne ,
ayant l'honneur
d'eftre neveu de la Ducheffe
d'Yorck , premiere femme du
Roy d'Angleterre dernier
mort vient d'eftre rappellé
de fon Gouvernement de la
Nouvelle-Yorck , dans l'Ame-
GALANT 279
tique , quoy qu'il ait remply
certe fonction au gré & à la
fatisfaction des peuples qu'il
gouvernoit ; & l'on écrit d'Angleterre que les liaifons de fang
qu'il y a entre la Reine & ce
Seigneur , & l'ancienne amitié
dont il eft uni avec Milord
Marlborough , n'ont pûlegarentir de la chute qu'il vient
de faire , ny le mettre à couvert de quelques foupçons que
la Reine a cuë de fa conduite.
Ce Comte eft petit- fils du fameux Chancelier Hyde dont
on a tant parlé fous le regne
des deux Rois d'Angleterre
280 MERCURE
Charles II & Jacques II. Ce
dernier époufa en premieres
nôces la fille de ce Chancelier ,
& il en eut la feuë Princeffe
d'Orange & la Reine Anne.
Mylord Hyde , outre Me la
Ducheffe d'Yorck laiffa Mylord Clarendon fon fils aîné ,
qu'il rendit par fes foins un des
plus grands Politiques que
l'Angleterre ait eus . C'eſt ce
Comte de Clarendon qui a
laiffé un Recueil de Memoires
des guerres civiles d'Angleterre , qui finirent par la mort funefte du RoyCharles I. ouvrage digne des plus grands Mat-
GALANT 281
tres de l'Art , & qui peut eftre
comparé aux Annales de Titelive , & à l'Histoire de la Tacite & les Reflexions qu'il
fait fur chaque évenement
prouve affez qu'il connoiſt tous
les principes & toutes les maximes de cette Science difficile.
Il y infinuë que le celebre Jacques Duc d'Hamilton , grand
Commiffaire du Roy Charles
1. en Ecoffe fut foupçonné du
deffein de monter fur le Trône de cette Monarchie , pendant les troubles qui l'agitoient. On prétend qu'il fondoit fes droits fur une de fes
Février 1710.
Aa
282 MERCURE
aycules, fœur du Roy d'Ecoffe
Jacques III. Mr le Comte
de Cornbury fils de cet habile
Hiftorien , a porté le nom de
Comte de Clarendon fous le
regne du Roy Jacques II. dont
il avoit l'honneur d'eftre neveu
à caufe de la feue Ducheffe
d'Yorck ; il eftoit fort attaché
au parti de ce Prince , &il avoit
unRegiment ainfi que Mylord
Churchill , connu à prefent
fous le nom de Duc de Marlborough , mais ces deux Colonels abandonnerent leur Roi
& menerent leurs Regimens au
Prince d'Orange , lorſqu'il eut
GALANT 283
débarqué à Torbay dans le
temps de fon invaſion en Angleterre. Ce Prince les reçut
d'abord affez bien ; mais lors
qu'il fut monté fur le Trône,
il parut peu empreffé à récompenfer ces deux Colonels , &
on fçait qu'il n'approuva pas
leur conduite , & qu'il parla d'eux avec Mylord Portland dans des termes qui marquoient le mépris qu'il en faifoit. Ainfi on peut dire qu'ils
n'ont rien perdu à la mort de
ce Prince , puifque la Princeffe
qui luy a fuccedé les a comblez
de bienfaits , & fur tout le
Aaij
284 MERCURE
Mylord Churchill ; à l'égard
du Comte de Cornbury , on
parle à Londres affez diverfement des raifons que la Reine a
euës de le rappeller; ce que l'on
affure eft que cette Princeffe en
paroift tres mécontente. La
Maifon des Hides eft fort an-
·
cienne en Angleterre. Une tra
dition domestique la fait venir de l'Hide , partie d'une
region dans l'Eptarchie des
Saxons. L'Eptarchie contenoit,
fept Royaumes , & chaque
Royaume eftoit divifé en regions. On trouve de beaux
traits du Chancelier Hide dans
GALANT 285
la vie du Comte de Schaffs-"
bury.
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Résumé : Rapel de Mr le Comte de Cornbury, de son Gouvernement de la nouvelle Yorck, [titre d'après la table]
Le texte traite de la situation du Comte de Cornbury, cousin germain de la Reine Anne et neveu de la Duchesse d'York. Récemment démis de son poste de gouverneur de la Nouvelle-York, il est suspecté par la Reine en raison de sa conduite, bien que sa gestion ait été appréciée localement. Le Comte est le petit-fils du célèbre Chancelier Hyde, qui servit sous Charles II et Jacques II. Le père du Comte, le Comte de Clarendon, est connu pour ses mémoires sur les guerres civiles anglaises. Le Comte de Cornbury, initialement loyal à Jacques II, changea d'allégeance pour le Prince d'Orange lors de son invasion. La Reine Anne, contrairement au Prince d'Orange, combla la famille de bienfaits. Les raisons du rappel du Comte restent floues, mais la Reine semble mécontente de sa conduite. La famille Hyde est une ancienne lignée anglaise, remontant à l'Éptarchie saxonne.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1945
p. 285-287
Morts Etrangeres, [titre d'après la table]
Début :
Je crois devoir vous apprendre la mort du Comte de Clarendon [...]
Mots clefs :
Comte Clarendon, Mort, Colonel Seymour, Colonie de Maryland
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Morts Etrangeres, [titre d'après la table]
Je crois devoir vous apprendre la mort du Comte de Clarendon dont je vous viens de
parler ; c'est pourquoy je n'ajouteray rien à ce que je viens
de vous en dire , finon que fes
ouvrages confiftent enfix Tomes que l'on vient d'imprimer
à la Haye, & qu'ils ont pour
titre L'Hiftoire des Rebellions
&des Guerres Civiles d'Angletérre.
Mr le Colonel Seymour ,
Gouverneur de la Colonie de
Mariland en Amerique eftauffi
286 MERCURE
decedé. Il eftoit d'une ancienne famille d'Angleterre , qui a
eu l'honneur de donner une
Reine à cette Couronne. Jeanne Seymour troifiéme femme
d'Henry VIII. Royd'Angleterre , & mere d'Edouard V I.
qui regna aprés Henry , & qui
établit le Calvinifme en Angleterre. La Reine Jeanne Seymour qui avoit fuccedé à la fameufe Anne de Boulen , eftoit
foeur d'Edouard Seymour ,
Duc de Sommerfet , & tuteur
du jeune Roy fon neveu , &
Protecteur du Royaume , &
de Thomas Seymour Amiral
GALANT 287.
d'Angleterre. Ces deux freres
perirent miferablement. L'Amiralfuccomba fous la violence de la haine duProtecteur fon
frere contre luy ; il avoit époufé la Reine Catherine Parre fin
xiémefemme d'Henry VIII.&
le Protecteur luy-même perit
en 1549. Jean Dudley Comte de Warwick ayant accufé le
Protecteur d'ufer de fon autorité au préjudice de l'Etat ,
& formé un gros parti contre
luy , le fit arrefter & luy fit
trancher la tefte. Le Colonel
Seymour eftoit iffu de ces Sei
gneursinfortunez
parler ; c'est pourquoy je n'ajouteray rien à ce que je viens
de vous en dire , finon que fes
ouvrages confiftent enfix Tomes que l'on vient d'imprimer
à la Haye, & qu'ils ont pour
titre L'Hiftoire des Rebellions
&des Guerres Civiles d'Angletérre.
Mr le Colonel Seymour ,
Gouverneur de la Colonie de
Mariland en Amerique eftauffi
286 MERCURE
decedé. Il eftoit d'une ancienne famille d'Angleterre , qui a
eu l'honneur de donner une
Reine à cette Couronne. Jeanne Seymour troifiéme femme
d'Henry VIII. Royd'Angleterre , & mere d'Edouard V I.
qui regna aprés Henry , & qui
établit le Calvinifme en Angleterre. La Reine Jeanne Seymour qui avoit fuccedé à la fameufe Anne de Boulen , eftoit
foeur d'Edouard Seymour ,
Duc de Sommerfet , & tuteur
du jeune Roy fon neveu , &
Protecteur du Royaume , &
de Thomas Seymour Amiral
GALANT 287.
d'Angleterre. Ces deux freres
perirent miferablement. L'Amiralfuccomba fous la violence de la haine duProtecteur fon
frere contre luy ; il avoit époufé la Reine Catherine Parre fin
xiémefemme d'Henry VIII.&
le Protecteur luy-même perit
en 1549. Jean Dudley Comte de Warwick ayant accufé le
Protecteur d'ufer de fon autorité au préjudice de l'Etat ,
& formé un gros parti contre
luy , le fit arrefter & luy fit
trancher la tefte. Le Colonel
Seymour eftoit iffu de ces Sei
gneursinfortunez
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Résumé : Morts Etrangeres, [titre d'après la table]
Le texte annonce la mort du Comte de Clarendon et la publication de ses œuvres, 'L'Histoire des Rébellions et des Guerres Civiles d'Angleterre', à La Haye. Il mentionne également le décès du Colonel Seymour, gouverneur de la colonie de Mariland en Amérique. Seymour appartenait à une ancienne famille anglaise illustre, ayant donné une reine à la Couronne : Jeanne Seymour, troisième épouse d'Henry VIII et mère d'Édouard VI. Jeanne Seymour était la sœur d'Édouard Seymour, Duc de Somerset, et de Thomas Seymour, Amiral d'Angleterre. Les deux frères connurent des fins tragiques : Thomas Seymour fut victime de la haine de son frère le Protecteur, et Édouard Seymour fut exécuté en 1549 après avoir été accusé par Jean Dudley, Comte de Warwick, d'abuser de son autorité au détriment de l'État. Le Colonel Seymour était issu de cette lignée malheureuse.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1946
p. 288
Mort de Mr l'Evêque de Nismes, [titre d'après la table]
Début :
A peine les personnes d'une aussi grande distinction & aussi [...]
Mots clefs :
Mort, Evêque de Nîmes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mort de Mr l'Evêque de Nismes, [titre d'après la table]
88 MERCURE
A peine les perfonnes d'une
auffi grande diftinction & auffi
utiles à la Religion que Mr Fléchier , Evêque de Nifmes
font-elles decedées , que la Renommée apprend par tout leur
mort ; mais il n'eft pas aifé
d'en rapporter dans le même
moment toutes les grandes
chofes qui leur ont fait meriter une approbation generale.
Je ne puis donc aujourd'huy
vous apprendre que fa mort ,
& je me trouve obligé de remettre au mois prochain à
vous en parler
A peine les perfonnes d'une
auffi grande diftinction & auffi
utiles à la Religion que Mr Fléchier , Evêque de Nifmes
font-elles decedées , que la Renommée apprend par tout leur
mort ; mais il n'eft pas aifé
d'en rapporter dans le même
moment toutes les grandes
chofes qui leur ont fait meriter une approbation generale.
Je ne puis donc aujourd'huy
vous apprendre que fa mort ,
& je me trouve obligé de remettre au mois prochain à
vous en parler
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1947
p. 2883-292
Funerailles faites à Mr le Prince Pamphile, [titre d'après la table]
Début :
On a fait à Rome des funerailles magnifiques à Mr le [...]
Mots clefs :
Cardinal, Prince Pamphile, Funérailles, Rome
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Funerailles faites à Mr le Prince Pamphile, [titre d'après la table]
On a fait à Romé des funerailles
GALANT 289
railles magnifiques à Mr le
Prince Pamphile , dans l'Eglife
de fainte Agnés de la Place
Navone , fondée & bâtie par
les Princes de fa Maiſon , & à
laquelle il avoit fait lui - même
de grands biens. Ce Prince
dont la pieté eftoit connuë
dans toute l'Italie a laiffe 8o.
mille écus en legs pieux & autres œuvres de picté qu'il a ordonnées , &la plus grande partie de ce fond eft deftiné au foulagement des pauvres qui l'ont
generalement regretté à cauſe
des grands biens qu'il leur faifoit , & qui alloient ordinaireFévrier 1710. Bb
290 MERCURE
ment à vingt mille écus cha
que année , & qui augmen
toient lorfque les neceffitez pu
bliques devenoient plus grandes , puis qu'on a remarqué que
dans l'année du grand Jubilé
elles monterent à plus de cin
quante mille écus. Quelques
jours aprés la mort de ce Prince
Mr le Cardinal Pamphile fon
frere prefenta au Pape le Prince de Valmontone fon neveu ,
& fils du deffunt , & petit - fils
du Prince Pamphile neveu du
Pape Innocent X. qui quitta
le Chapeau de Cardinal pour
époufer la Princeffe de Roffa-
GALANT 291
no , grand' - mere de ce jeune
Prince & mere de celuy qui
vient de mourir. Le Prince
Pamphile eftoit Cardinal Patron & premier Miniftre du
Pape fon oncle , & ce Pontife
n'ayant plus de neveu ſur qui
répandre fes graces , adopta le
Cardinal Aftalli qui tomba enfuite dans la difgrace de Sa
Sainteté , & alla mourir de chagrin dans fon Evêché de Catagne en Sicile. Le Cardinal
Azolin qui a eu tant de part
1
à
la confiance de la Reine de
Suede , s'éleva fur les ruines
de fa fortune. Le Prince de
Bb ij
292 MERCURE
Valmontone eft à prefent Chef
de la Maiſon Pamphile. C'eft
un jeune Seigneur de la Cour
de Rome, qui a porté les armes
en Hongrie il y a quelques années avec beaucoup de répu
tation.
GALANT 289
railles magnifiques à Mr le
Prince Pamphile , dans l'Eglife
de fainte Agnés de la Place
Navone , fondée & bâtie par
les Princes de fa Maiſon , & à
laquelle il avoit fait lui - même
de grands biens. Ce Prince
dont la pieté eftoit connuë
dans toute l'Italie a laiffe 8o.
mille écus en legs pieux & autres œuvres de picté qu'il a ordonnées , &la plus grande partie de ce fond eft deftiné au foulagement des pauvres qui l'ont
generalement regretté à cauſe
des grands biens qu'il leur faifoit , & qui alloient ordinaireFévrier 1710. Bb
290 MERCURE
ment à vingt mille écus cha
que année , & qui augmen
toient lorfque les neceffitez pu
bliques devenoient plus grandes , puis qu'on a remarqué que
dans l'année du grand Jubilé
elles monterent à plus de cin
quante mille écus. Quelques
jours aprés la mort de ce Prince
Mr le Cardinal Pamphile fon
frere prefenta au Pape le Prince de Valmontone fon neveu ,
& fils du deffunt , & petit - fils
du Prince Pamphile neveu du
Pape Innocent X. qui quitta
le Chapeau de Cardinal pour
époufer la Princeffe de Roffa-
GALANT 291
no , grand' - mere de ce jeune
Prince & mere de celuy qui
vient de mourir. Le Prince
Pamphile eftoit Cardinal Patron & premier Miniftre du
Pape fon oncle , & ce Pontife
n'ayant plus de neveu ſur qui
répandre fes graces , adopta le
Cardinal Aftalli qui tomba enfuite dans la difgrace de Sa
Sainteté , & alla mourir de chagrin dans fon Evêché de Catagne en Sicile. Le Cardinal
Azolin qui a eu tant de part
1
à
la confiance de la Reine de
Suede , s'éleva fur les ruines
de fa fortune. Le Prince de
Bb ij
292 MERCURE
Valmontone eft à prefent Chef
de la Maiſon Pamphile. C'eft
un jeune Seigneur de la Cour
de Rome, qui a porté les armes
en Hongrie il y a quelques années avec beaucoup de répu
tation.
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Résumé : Funerailles faites à Mr le Prince Pamphile, [titre d'après la table]
Le texte décrit les funérailles du Prince Pamphile à Rome, célébrées dans l'église Sainte-Agnès de la Place Navone, fondée par sa famille. Connu pour sa piété, le Prince a laissé un legs de 80 000 écus pour des œuvres de charité, principalement destiné à aider les pauvres, qui recevaient annuellement environ 20 000 écus, montant à 50 000 écus lors du grand Jubilé. Après sa mort, son frère, le Cardinal Pamphile, a présenté au Pape son neveu, le Prince de Valmontone, fils du défunt et petit-fils du Prince Pamphile, neveu du Pape Innocent X. Le Prince Pamphile était Cardinal Patron et premier ministre du Pape, qui, n'ayant plus de neveu, adopta le Cardinal Astalli, tombé en disgrâce et mort de chagrin. Le Cardinal Azolin, ayant gagné la confiance de la Reine de Suède, a pris sa place. Actuellement, le Prince de Valmontone, un jeune seigneur de la cour romaine, dirige la Maison Pamphile et a servi en Hongrie avec distinction.
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1948
p. 292-332
Paradoxes aux moins intelligens; mais veritez tres-certaines aux plus clairs-voyans.
Début :
Comme vous recevrez cette Lettre dans le commencement [...]
Mots clefs :
Paradoxes, Savants, Temps, Années, Jugement, Éternité, Soleil, Dieu, Proposition, Maux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Paradoxes aux moins intelligens; mais veritez tres-certaines aux plus clairs-voyans.
Comme vous recevrez cette
Lettre dans le commencement
du Carefine , vous ferez peutcftre ravie d'y trouver des Articles capables d'entretenir vôtre devotion , & je crois même
que ceux que vous y avez déja
Jûs eftant tres- curieux & tresattachans vous auront fait >
plus de plaifir que ceux qui re-
GALANT 293
gardent les affaires du monde;
& en effet , ils font fi beaux ,
& d'une nouveauté fi fingulicre , qu'il eft difficile de les lire
fans verfer des larmes de joye ,
ou pour mieux dire de ces fortes de larmes qui font trouver
du plaifir à pleurer. L'Article
qui fuit n'eft pas tout à fait de
cette nature. Il frappera les
cœurs d'une autre maniere , &
il faudra le lire plus d'une fois
pourle bien concevoir. Ce n'eft
pas que les Sçavans ne le puiffent comprendre d'abord
eltant fait dans toutes les regles ; mais de quelque caractere
2
Bb iij
294 MERCURE
qu'on foit , & de quelque nature que foit l'efprit de ceux
qui le liront , ils ne le verront
pasfans uneespece d'effroy qui
leur fera faire une ferme refolution de fe corriger , & de tâ
cher de meriter d'eftre un jour
dans le Ciel , & de fe tenir tellement en garde contre euxmêmes qu'ils puiffent éviter de
fe voir un jour au nombre des
damnez. Enfin jamais Article
nevous auradonnélieu de faire
plus de refléxions &de plus férieufes , & fi la diverfité plaiſt
beaucoup dans mes Lettres &
eft caufe que les plus medio-
GALANT 295
cres n'ennuyent pas à cauſe de
la diverfité des matieres qui attachent tour à tour , je puis
dire que cette Lettre vous fera
beaucoup de plaifir, eftant remplie d'une infinité de chofes
differentes. Je dois vous avertir de vous mettre bien dans
l'efprit que ce n'eft pas moy
qui parle dans ce que vous allez lire. C'eſt un difcours fait
dans les formes par un Maiftre
de l'Art , & dans lequel d'au
tres perfonnes parlent auffi.
Vous devez faire attention à
toutes ces chofes en le lifant ,
& vous fouvenir fouvent penBb iiij
295 MERCURE
dant cette lecture , que ce n'eft
pas moy qui parle , ainfi que je
viens de vous le marquer. C'eft
un hommetout rempli de zele
pour le falut des ames , & qui
a bien approfondi fa matière
avant que de la traiter.
Paradoxes aux moins intelligens; mais veritez tres- certaines aux plus clairs- voyans.
Premiere verité fous l'apparence
deparadoxe.
Le temps qui doit couler
d'icy jufqu'au jour du Juge
GALANT 297
ment paroît tres- court à ceux
qui font à prefent dans les Enfers , & paroîtra tel à tous ceux
qui auront le malheur d'y entrer avant la fin du monde.
Deuxième verité fous la mefme
apparence deparadoxe.
Par un principe bien different , aprés le jour du Jugement , les centaines de millions
d'années , & tel autre temps
qu'il nous plaira, fi long qu'on
fe le puiffe imaginer , pourvû
que ce foit un veritable temps,
ne paroîtra pas long aux damnez.
298: MERCURE
"
Troifiéme veritéfous l'apparence
deparadoxe.
Par un autre principe different des premiers , aprés le
jour du Jugement , les mefmes
centaines de millions d'années,
dans les joyes ineffables du Paradis , ne paroîtront aux Bienheureux , ny plus courtes , ny
plus longues qu'elles font en
elles mefmes ; c'est- à- dire, qu'il
ne leur femblera pas qu'elles
s'écoulent avec trop de vitelle,
ny qu'elles paffent trop lentement.
GALANT 299
DELA
La crainte du mal &
titude ou l'affeurance du b
l'efperance d'eftre delivré de
fes maux, & le defeſpoir d'en
eftre jamais delivré , ou la certitude d'en eftre éternellement
accablé ; la difference infinie &
effentielle qui eft entre le temps
& l'éternité, font tout le dénouëment & la preuve de ces
propofitions , comme on le va
voir en peu de mots.
Celuy qui les a avancées dans
une nombreuſe Compagniede
gens doctes & fpirituels , ne
s'étonna pas que d'abord , &
fans autre explication elles fu-
300 MERCURE
rent prifes pour dés paradoxes ;
mais comme il avoit lû autrefois le principe & le folide fondement des deux premieres ,
dans l'Auteur inconnu fur les
Pfeaumes , il les foûtint fortement en leur prefence ; & commeil les croit tres dignes d'être
meurement pefées pour nous
entretenir dans la crainte des.
jugemens de Dieu , il s'eft cncore appliqué à les prouveren
trois autres Affemblées confiderables.
Or comme le fujet paroît
curieux , & d'une affez grande.
importance pour trouver pla-
GALANT 301
ce dans cette Lettre, j'ay crû
que vous ne feriez pas fâchée
d'y voir les preuves de l'Auteur , que je vais raporter en
abregé.
la
Lesdeux premierespropofitions,
dit-il , qui à les confidererfuperficiellementfemblent revolter l'ef
pritdes Fideles , l'affermiffent dans
croyance de l'Eglife , touchant
le déplorable état des damnez
quand on les approfondit ; car loin
d'adoucir les peines effroyables de
l'Enfer, elles en font connoître.
davantage la grieveté, en donnent plus d'horreur que celle qu'on
en croyoit ordinairement, & eftant
302 MERCURE
attentivement confiderées dans
leurs caufes , elles font capables de
ramener les plus égarez dans la
voye dufalut.
Quoy qu'onfoit accablé de
tres grands maux , fi l'on en
craint encore de plus grands
qu'on ne fçauroit éviter , le
temps qui doit couler juſqu'à
ce que ces derniers viennent
fondre fur ceux qui les craignent leur paroît tres court :
or ceux qui font à preſent dans
les Enfers , & tous ceux qui auront le malheur d'y entrer avant la fin du monde , font à
la verité accablez de tres-
GALANT 303
grands maux, & tels qu'il n'eft
pas au pouvoir de l'éloquence
humaine de les exprimer ; mais
ils en craignent encore de plus
grands au jour du Jugement:
tirez-en la confequence.
La premiere propoſition eſt
tres- certaine , & peut eftre
prouvée par mille exemples. Je
n'en raporte qu'un feul qui me
vient dans l'efprit , &qui fuffira : ce n'eft pas celuy du commun proverbe , qui dit : Ayez
une dette à payer à Paſques &
vous trouverez le Carefme
court , ny l'exemple de ceux
qui cftant fort pauvres ont des
304 MERCURE
W
termes de loyer à payer à la
faint Jean ou à la faint Remy,
aufquels le temps femble paffer avec grande viteffe ; mais
c'eſt celuy d'un homme qui
feroit jetté dans un obfcur cachot , lié & garotté de groffes
chaînes , rongé des Rats & des
Souris , accablé de miferes ;
mais quifçauroit certainement
dans un an il doit fortit que
de ce cachot pour eltre brûlé
tout vif à petit feu devant une
grande foule de monde , auquel cette année qu'il a à refter
dans ce cachot en un fi pitoyable état , loin de luy paroître
GALANT 305
longue , luy paroît au contraire tres courte , par l'apprehenfion terrible qu'il a d'eſtre brûlé tout vif à petit feu devant
un grand monde, quand il for
tira de fa prifon.
La mineure de l'argument ,
à fçavoir que ceux qui font à
prefent dans les Enfers craignent de bien plus grands
maux au jour du Jugement que
ceux qu'ils endurent avant qu'il
arrive , eft inconteftable par
plufieurs raifons , du nombre
defquelles je choifis feulement
deuxprincipales, qu'on ne fçauroit nier. Lapremiere, qu'aprés
Fevrier 1710.
Cc
306 MERCURE
le jour du Jugement ils fouffriront en corps & en ame, au
lieu qu'à prefent ils ne fouffrent que dans leur ame , &
que les demons mefmes feront
plus tourmentez, paifqu'ils feront enchaînez dans les Enfers
à n'en jamais fortir. Mais une
feconde raifon tres effentielle
qui fait paroître aux damnez
que le temps qu'ils ont à eſtre
dans les Enfers jufqu'au jour du
Jugement paffe avec une extrême vîteffe , eft qu'ils fçavent
tres certainement qu'à ce jour
fi terrible pour eux, ils verront malgré qu'ils en ayent .
GALANT 307
1
celuy qui les doit juger , terriblement irrité contr'eux , & en
une fi grande colere , qu'ils ne
pourront en fupporter la vûë,
& que la confufion qu'ils auront de paroître en fa preſence , & en celle de tout l'Univers , où toutes leurs actions
feront manifeftées , les mettra
dans des tranſes effroyables ,
que la fureur & l'indignation
de cet Homme Dieu , fa Sentence foudroyante fur leurs
têtes leur paroît un poids qui
les accablera ; d'où vient que
pour l'éviter ils voudroient
pouvoir fe tenir cachez au plus
Cc ij
308 MERCURE
profond des Enfers ; & c'eft
cette terreur épouvantable qui
Leur fera prononcer à ce grand
jour ce que nous lifons dans.
faint Luc, qu'ils diront aux
montagnes de tomber ſur eux
pour les écrafer , & aux collines de les couvrir par leur chûte , pour les fouftraire à la vûë
de ce Juge irrité ; & quandmêmecette confufion & cette terreur ne devroit durer qu'autant de temps que Noftre Seigneur en mettra pour exercer
fon Jugement fur tous les
hommes , la crainte que les
damnez en ont eft fi terrible ,
1
GALANT 309
qu'il n'y a nul fujet de s'étonner que le temps qui doit couler jufqu'à ce qu'il arrive leur
paroiffe fi court. Mais il y a
tour lieu de croire que cette
confuſion fera éternelle ; que
par un effet admirable de la
toute- puiffance & de la juftice
de Dieu , tous les crimes de
chaque damné , non feulement
au dernier jour , mais durant
toute l'éternité , feront imprimez dans l'efprit des Bienheureux & des Hommes damnez,
des Anges & des Demons , &
qu'il fera au pouvoir des uns
& des autres de voir quand ils
310 MERCURE
le voudront le fujet de la damnation de chaque homme en
particulier , & de dire celuy cy
eft damné pour tels & tels cri
més , celuy là par d'autres ; de
forte que la confufion qu'ils
recevront au jour du Juge
ment , fera pour eux une confufion éternelle.
Preuves de la feconde propofition.
Si ceux qui font à preſent
dans l'Enfer ne trouvent pas
long le temps qu'ils ont à Y
eftre jufqu'au jour du Jugement, aprés ce mefmejour ces
GALANT 311
miferables ne trouveront pas
. non plus les jours , les mois
& les années longues ; mais à
leur plus grande damnation ,
par un principe bien different,
& qui loin de diminuer leurs
maux les accroîtra comme à
l'infiny.
Il n'y aura plus de temps
aprés ce jour terrible , ce qui
nous doit porter à bien employer celuy qui nous reſte à
faire penitence de nos pechez,
& à ne les plus commettre.
L'Ange que faint Jean vid en
fon Apocalypfe , qui eftoit debout fur la mer & fur la terre,
312 MERCURE
jura par celuy qui vit dans tous
les fiecles qu'il n'y auroit plus
de temps : Et juravit per viventem fæcula fæculorum......
Quia non erit tempus. ( Apoc.
chap. 10. La raiſon eſt que
ny le premier mobile, qui eft
la regle de tous les temps par
fon mouvement le plus égal
& le plus regulier de tous , ny
le Soleil ne feront plus leur
courſe , & n'auront plus de
mouvement , qui ne fera plus
neceffaire pour la generation
des Elûs , dont le nombrefera
accompli ; & ce que nous appellons Temps , n'elt autre chofe
GALANT 3T3
fe que la mefure & la durée du
mouvement du premier Mobile ou du Soleil ; fi ce n'eft que
nous difions que le temps eftant
auffi la mesure ou la durée des actions & despaffions , en un certain
fens ily auraun temps dans le Paradis dans l'Enfer , parce que
dans le Paradis les Bienheureux
pafferontfucceffivement d'unejoye
à une autre , & les damnez dans
l'Enfer d'un tourment à un autre
tourment ; comme il eft dit dans
Job, que d'un tres grandfroid ils
pafferont à une chaleur exc ffive :
AD NIMIUM CALOREM
TRANSIBUNT AB AQUIS
Février 1710. Dd
314 MERCURE
NIMIUM ; ( cap. 24. ) ce qui a
fait dire au Prophete Royal ,
qu'ils auront leur temps dans
tous les ficcles : Et erit tempus
eorum infæcula. ( PL. 80. ) Ce
temps neanmoins n'eft pas fi
proprement dit que celuy que
nous comptons par le mouvement du premier Mobile ou
du Soleil mais fi aprés le Jugement univerfel il n'y a plus
de temps en ce dernier fens par
le mouvement du premier Mobile , il pourroit y en avoir , fi
Dieu le vouloit ; ce qui feroit
fort indifferent à ceux qui auront paffé du Temps à l'Eter
GALANT 315
>
nité ; car que le Soleil ou le
premier Mobile tourne ου
qu'il ne tourne pas , ceux du
Ciel n'en feront ny moins heureux , ny ceux de l'Enfer moins
malheureux; & aprés que nous
ferons dans l'Eternité il arrivera enfuite , non une feule fois ,
mais un grand nombre de fois,
il arrivera que nous aurons eſté
les premiers dans les plaiſirs, les
autres dans les peines , autant
que le premier mobile auroit
pû faire de circulations pour
faire un auffi long temps que
le feroit d'enlever autant de
fables qu'il en pourroit conteDdij
316 MERCURE
nir dans tout l'Univers , quand
feulement on n'en enleveroit
qu'un feul grain à chaque centaine de millions d'années.
Or cette grandeur fi demefurée qu'elle nous femble
paroiftre , ne paroiftra pas
longue aux damnez , & fuppofé qu'aprés le Jugement
univerfel le Soleil ou le premier Mobile dût encore fe
mouvoir, & qu'il y eut confequemmentdesjours, des mois ,
& des années , comme nous les
comptons à prefent ; ces jours ,
ces mois & ces années , ne leur
paroiftroient pas longues non
1
GALANT 317-
plus. Mais vous remarquerez,
s'il vous plaift, que je parle d'un
temps fini & limité , qui eft la
mefure des chofes qui ont leur
commencement & leur fin, qui
eft la propre notion du temps ,
& qui en ce fens eft diftingué ,
ou plutòft oppofé à l'Eternité ,
& que je ne parle point d'un
tems infini qui correfpondroit
àl'Erernité;car ce ne feroit plus
untemps , mais ce feroitla même chofe que l'Eternité. Ainfi
je dis qu'un temps fini & limité
d'un an , de deux ans , de mille
ans , decent millions d'années ,
ne paroiftront pas long à ces
Dd iij
318 MERCURE
miferables. Une raifon à la portée des moins intelligens , eft
qu'une chofe à laquelle on ne
penſe point du tout ne paroiſt
ne courte ny longue : les damnez ne penfent point du tout
à ce temps fini , comme vous
le verrez mais une autre raifon auffi évidente que la premiere , &encore plus fpirituel
le , eft que quand on n'a aucune efperance d'eftre jamais délivré d'un mal dont on eft op
primé , & qu'on fçait tres certainement que ce mal n'aura
jamais de fin , un an ,
deux
ans mille ans de fouffran- >
GALANT 319
ces , quoy que tres-es- penibles ,
ne paroiffent pas longues.
Qu'est ce donc qui eft long
aux damnez? Et pourquoy demander cela ? Ce feroit des
millions d'années qui leur feroient tres - longs , fi leurs
maux devoient finir , mais ces
millions d'années ne leur font
rien , parce que leurs maux ne
doivent pas finir !
C'est l'Eternité qui leur
paroift infiniment longue , &
qui eft telle en effet ; c'est
ce qui fait le comble & le
plus grand de tous leurs maux,
ce qui les accable épouvanDd iiij
320 MERCURE
tablement >
, & de telle maniere qu'ils ne fçauroient penfer à autre chofe ; & c'eft
ce qui les jette dans une horrible defefpoir, dans une rage
& une furcur forcenée au- def
fusde tout ce que nous en pouvons penfer. D'où vient que
les damnez ne s'amufent point.
à nombrer ce temps fini & limité , qui s'eft déja écoulé depuis qu'ils font dans les feux ,
& celuy qui s'écoulera dans la
fuite, parce que cela leur feroit
tout à fait inutile , puis qu'aprés y avoir efté cent millions
d'années , ils ne feront pas
GALANT 321
plus avancez qu'au commencement , & qu'ils auront auffi
long temps à fouffrir que s'ils
ne faifoient que d'y entrer.
Et voicy qu'elle eft l'horrible penfée d'un damné , il luy
eft prefque impoffible d'en avoir aucune autre , ou s'il en a,
celle cy eft la dominante : donnons- y toute l'attention poffible pour nous empêcher de
tomber dans une damnation
pareille à la fienne.
Un damné ne penſe à autre
chofe qu'à fe dire à luy même:
Me voilà au comble de tous
les maux, & ces maux ne fini
322 MERCURE
ront jamais : autant que Dieu
fera Dieu , je feray l'objet de
de fes vengeances : tout auffi
long temps je feray dans les
feux, & dans des feux dont
ceux de la terre ne font que la
fumée: j'auray toûjours les demons pour bourreaux : tous les
autres damnez me donneront
mille maledictions : cette horrible & épouvantable Sentence: Allez maudits au feu éternel, fera éternellement imprimée dans mon efprit , dans ma
memoire , dans mon imagination , & dans tous mes fens , &
me fera fouffrir prefque tout à
GALANT 323
la fois , & en un feul inftant ,
ce que j'auray à fouffrir continuellement durant toute l'éternité. Un damné, dis je , ne
penfe à autre chofe , & non à
nombrer les jours & les moisqu'il a déja paffé dans les feux;
& cette penfée le confterne ,
l'abat , le jette dans le defefpoir , la rage &la furie que j'ay
dit , & luy fait proferer de fi
énormes blafphêmes contreDieu principalement, & contre
les Saints , & tant d'imprecations contre fes bourreaux:
& contre luy-mefme , qu'on
mourroit de frayeur à les en-
224 MARCURE
tertendre fortir de fa bouche.
Ceuxqui font à prefent dans
l'Enfer ne trouvent pas long
le temps qu'ils ontà y eftre juf
qu'au jour du Jugement , par
la crainte & l'apprehenfion
rible qu'ils ont de ce jour ; &
aprés ce jour paffé , ils ne trouveront pas long un temps finy & limité de cent ans , de
mille ans , de cent millions
d'années , par un autre principe, par unhorrible defefpoir,
le plus grand de tous leurs
maux, le comble de tous ceux
dont ils font accablez , par la
durée immenfe & infinie de
GALANT 325
l'éternité , durant toute laquelle ils fçavent tres certainement qu'ils feront les victimes des feux , & les efclaves
des demons.
Mais d'une chofe fi veritable , ne tirez pas cette fauffe
confequence , untemps limité
de cent millions d'années ne
paroit pas long aux damnez ,
donc ils ne s'ennuyent point
dans l'Enfer.
Ce feroit tres mal raiſonner
de puifer les tenebres dans la
plus éclatante lumiere , parce
que l'éternité qui abforbe tous
les temps , leur caufe un en-
326 MERCURE
nuy qui ne fe peut exprimer,
qui eft au deffus de toute conception angelique & humaine;
&fi un temps finy ne leur
roît pas long , c'eſt le defefpoir qui en eft caufe , & qui
rend leur condition bien plus
miferable.
paCar en effet , fi ces malheureux avoient l'efperance de for
tir de ces feux aprés cent millions d'années , pour lors ce
temps finy &limité feroit l'unique occupation de leur efprit ; & tout au contraire de
ceux , remarquez bien s'il vous
plaift , & tout au contraire de
GALANT 327
ceux aufquels le defeſpoir ne
fait pas trouver longun cemps
limité , cette efperance feroit
qu'une feule heure dans ces
tourmens leur paroiftroit des
millions d'années , comme un
malade qui fouffre de grands
maux, dont il a efperance d'être délivré , trouve qu'une
nuit dans les fouffrances eft
auffi longue queplufieurs nuits
le paroiftroient à un homme
fain & difpos. On nous trompe (diroient ceux qui auroient
efperance de fortir de l'Enfer aprés des millions de fiecles , fi le defefpoir n'eftoit
328 MERCURE
le pas partage de tous ceux
qui entrent dans ce lieu d'horreur) on nous trompe de vouloir nous perfuader qu'il n'y
a qu'une heure que nous fommes dans les tourmens , pendant qu'ils nous femble qu'il
y a des millions d'années que
nous brûlons dans ces horribles feux.
Cependant celuy quiauroit
efperance de fortir des enfers
feroit fans doute de meilleure
condition que celuy qui deſeſpere d'en fortir , quoy qu'au
premier une heure dans les
feux paruft des millions d'an-
GALANT 329
nées , & que le fecond qui defd'en fortir ne penfe ny pere
B
à
la longueur ny à la brieveté de
cette même heure , voyant
bien , & il le voit malgré qu'il
en ait à fa tres grande damnation , qu'il luy est tout- à fait
inutile d'y penfer , puiſqu'aprés cette penfée il ne fera pas
plus avancé qu'au commencement , & qu'il reftera encore
une éternité toute entiere à
fouffrir.
Preuves de la troifiémepropofition.
Qu'il ne doive pas paroistre
Février 1
1710.
Ec
330 MERCURE
aux Bien- heureux que les centaines de millions d'années
dans les joyes du Paradis s'écoulent avec trop de vîteffe ,
cela eſt tout évident ; parceque
l'unique chofe qui pourroit
leur faire paroître qu'elles vont
à pas degeant, ce feroit la crainte qu'aprés que ce grand nom
bre d'années feroit écoulé ils fe--
roient privezde ces plaifirs inéfables ;car dans la fuppofition
que cela duft arriver , pour lors
des milliers d'années dans ces
delices ne leur paroîtroient pas
avoir duré plus d'un jour ; mais
comme ils fçavent tres- certai-
GALANT 331
nement qu'ils n'en feront jamais privez , qu'aprés qu'un
fi grand nombre de fiecles
fera pafle ils ne feront encore qu'au commencement de
leur bonheur , ils ne peuvent
avoir aucun fujet de fe perfuader que ces fiecles paffent
avec trop de précipitation.
Qu'il ne leur doive pas paroiltre non plus que ces centaines de milliers d'années s'écoulent trop lentement ,
eft encore tout évident ; car ce
qui fait qu'une choſe ſemble
longue à paffer ou à parcourir ;
cela
Ee ij
332 MERCURE
c'eft le dégouft , la peine , ou la
difficulté qui s'y trouve les
Bien heureux n'ont nul dégouft , nulle peine , & nulle difficulté à parcourir ce grand
nombre d'années , mais au contraire en les parcourant ils font
dans l'affluence de toutes fortes de plaifirs & de delices , &
par confequent il ne femblera
pas aux Bienheureux que cette
longueur , fi demefuréé qu'elle
nous paroiffe , fe paffe trop lentement.
Lettre dans le commencement
du Carefine , vous ferez peutcftre ravie d'y trouver des Articles capables d'entretenir vôtre devotion , & je crois même
que ceux que vous y avez déja
Jûs eftant tres- curieux & tresattachans vous auront fait >
plus de plaifir que ceux qui re-
GALANT 293
gardent les affaires du monde;
& en effet , ils font fi beaux ,
& d'une nouveauté fi fingulicre , qu'il eft difficile de les lire
fans verfer des larmes de joye ,
ou pour mieux dire de ces fortes de larmes qui font trouver
du plaifir à pleurer. L'Article
qui fuit n'eft pas tout à fait de
cette nature. Il frappera les
cœurs d'une autre maniere , &
il faudra le lire plus d'une fois
pourle bien concevoir. Ce n'eft
pas que les Sçavans ne le puiffent comprendre d'abord
eltant fait dans toutes les regles ; mais de quelque caractere
2
Bb iij
294 MERCURE
qu'on foit , & de quelque nature que foit l'efprit de ceux
qui le liront , ils ne le verront
pasfans uneespece d'effroy qui
leur fera faire une ferme refolution de fe corriger , & de tâ
cher de meriter d'eftre un jour
dans le Ciel , & de fe tenir tellement en garde contre euxmêmes qu'ils puiffent éviter de
fe voir un jour au nombre des
damnez. Enfin jamais Article
nevous auradonnélieu de faire
plus de refléxions &de plus férieufes , & fi la diverfité plaiſt
beaucoup dans mes Lettres &
eft caufe que les plus medio-
GALANT 295
cres n'ennuyent pas à cauſe de
la diverfité des matieres qui attachent tour à tour , je puis
dire que cette Lettre vous fera
beaucoup de plaifir, eftant remplie d'une infinité de chofes
differentes. Je dois vous avertir de vous mettre bien dans
l'efprit que ce n'eft pas moy
qui parle dans ce que vous allez lire. C'eſt un difcours fait
dans les formes par un Maiftre
de l'Art , & dans lequel d'au
tres perfonnes parlent auffi.
Vous devez faire attention à
toutes ces chofes en le lifant ,
& vous fouvenir fouvent penBb iiij
295 MERCURE
dant cette lecture , que ce n'eft
pas moy qui parle , ainfi que je
viens de vous le marquer. C'eft
un hommetout rempli de zele
pour le falut des ames , & qui
a bien approfondi fa matière
avant que de la traiter.
Paradoxes aux moins intelligens; mais veritez tres- certaines aux plus clairs- voyans.
Premiere verité fous l'apparence
deparadoxe.
Le temps qui doit couler
d'icy jufqu'au jour du Juge
GALANT 297
ment paroît tres- court à ceux
qui font à prefent dans les Enfers , & paroîtra tel à tous ceux
qui auront le malheur d'y entrer avant la fin du monde.
Deuxième verité fous la mefme
apparence deparadoxe.
Par un principe bien different , aprés le jour du Jugement , les centaines de millions
d'années , & tel autre temps
qu'il nous plaira, fi long qu'on
fe le puiffe imaginer , pourvû
que ce foit un veritable temps,
ne paroîtra pas long aux damnez.
298: MERCURE
"
Troifiéme veritéfous l'apparence
deparadoxe.
Par un autre principe different des premiers , aprés le
jour du Jugement , les mefmes
centaines de millions d'années,
dans les joyes ineffables du Paradis , ne paroîtront aux Bienheureux , ny plus courtes , ny
plus longues qu'elles font en
elles mefmes ; c'est- à- dire, qu'il
ne leur femblera pas qu'elles
s'écoulent avec trop de vitelle,
ny qu'elles paffent trop lentement.
GALANT 299
DELA
La crainte du mal &
titude ou l'affeurance du b
l'efperance d'eftre delivré de
fes maux, & le defeſpoir d'en
eftre jamais delivré , ou la certitude d'en eftre éternellement
accablé ; la difference infinie &
effentielle qui eft entre le temps
& l'éternité, font tout le dénouëment & la preuve de ces
propofitions , comme on le va
voir en peu de mots.
Celuy qui les a avancées dans
une nombreuſe Compagniede
gens doctes & fpirituels , ne
s'étonna pas que d'abord , &
fans autre explication elles fu-
300 MERCURE
rent prifes pour dés paradoxes ;
mais comme il avoit lû autrefois le principe & le folide fondement des deux premieres ,
dans l'Auteur inconnu fur les
Pfeaumes , il les foûtint fortement en leur prefence ; & commeil les croit tres dignes d'être
meurement pefées pour nous
entretenir dans la crainte des.
jugemens de Dieu , il s'eft cncore appliqué à les prouveren
trois autres Affemblées confiderables.
Or comme le fujet paroît
curieux , & d'une affez grande.
importance pour trouver pla-
GALANT 301
ce dans cette Lettre, j'ay crû
que vous ne feriez pas fâchée
d'y voir les preuves de l'Auteur , que je vais raporter en
abregé.
la
Lesdeux premierespropofitions,
dit-il , qui à les confidererfuperficiellementfemblent revolter l'ef
pritdes Fideles , l'affermiffent dans
croyance de l'Eglife , touchant
le déplorable état des damnez
quand on les approfondit ; car loin
d'adoucir les peines effroyables de
l'Enfer, elles en font connoître.
davantage la grieveté, en donnent plus d'horreur que celle qu'on
en croyoit ordinairement, & eftant
302 MERCURE
attentivement confiderées dans
leurs caufes , elles font capables de
ramener les plus égarez dans la
voye dufalut.
Quoy qu'onfoit accablé de
tres grands maux , fi l'on en
craint encore de plus grands
qu'on ne fçauroit éviter , le
temps qui doit couler juſqu'à
ce que ces derniers viennent
fondre fur ceux qui les craignent leur paroît tres court :
or ceux qui font à preſent dans
les Enfers , & tous ceux qui auront le malheur d'y entrer avant la fin du monde , font à
la verité accablez de tres-
GALANT 303
grands maux, & tels qu'il n'eft
pas au pouvoir de l'éloquence
humaine de les exprimer ; mais
ils en craignent encore de plus
grands au jour du Jugement:
tirez-en la confequence.
La premiere propoſition eſt
tres- certaine , & peut eftre
prouvée par mille exemples. Je
n'en raporte qu'un feul qui me
vient dans l'efprit , &qui fuffira : ce n'eft pas celuy du commun proverbe , qui dit : Ayez
une dette à payer à Paſques &
vous trouverez le Carefme
court , ny l'exemple de ceux
qui cftant fort pauvres ont des
304 MERCURE
W
termes de loyer à payer à la
faint Jean ou à la faint Remy,
aufquels le temps femble paffer avec grande viteffe ; mais
c'eſt celuy d'un homme qui
feroit jetté dans un obfcur cachot , lié & garotté de groffes
chaînes , rongé des Rats & des
Souris , accablé de miferes ;
mais quifçauroit certainement
dans un an il doit fortit que
de ce cachot pour eltre brûlé
tout vif à petit feu devant une
grande foule de monde , auquel cette année qu'il a à refter
dans ce cachot en un fi pitoyable état , loin de luy paroître
GALANT 305
longue , luy paroît au contraire tres courte , par l'apprehenfion terrible qu'il a d'eſtre brûlé tout vif à petit feu devant
un grand monde, quand il for
tira de fa prifon.
La mineure de l'argument ,
à fçavoir que ceux qui font à
prefent dans les Enfers craignent de bien plus grands
maux au jour du Jugement que
ceux qu'ils endurent avant qu'il
arrive , eft inconteftable par
plufieurs raifons , du nombre
defquelles je choifis feulement
deuxprincipales, qu'on ne fçauroit nier. Lapremiere, qu'aprés
Fevrier 1710.
Cc
306 MERCURE
le jour du Jugement ils fouffriront en corps & en ame, au
lieu qu'à prefent ils ne fouffrent que dans leur ame , &
que les demons mefmes feront
plus tourmentez, paifqu'ils feront enchaînez dans les Enfers
à n'en jamais fortir. Mais une
feconde raifon tres effentielle
qui fait paroître aux damnez
que le temps qu'ils ont à eſtre
dans les Enfers jufqu'au jour du
Jugement paffe avec une extrême vîteffe , eft qu'ils fçavent
tres certainement qu'à ce jour
fi terrible pour eux, ils verront malgré qu'ils en ayent .
GALANT 307
1
celuy qui les doit juger , terriblement irrité contr'eux , & en
une fi grande colere , qu'ils ne
pourront en fupporter la vûë,
& que la confufion qu'ils auront de paroître en fa preſence , & en celle de tout l'Univers , où toutes leurs actions
feront manifeftées , les mettra
dans des tranſes effroyables ,
que la fureur & l'indignation
de cet Homme Dieu , fa Sentence foudroyante fur leurs
têtes leur paroît un poids qui
les accablera ; d'où vient que
pour l'éviter ils voudroient
pouvoir fe tenir cachez au plus
Cc ij
308 MERCURE
profond des Enfers ; & c'eft
cette terreur épouvantable qui
Leur fera prononcer à ce grand
jour ce que nous lifons dans.
faint Luc, qu'ils diront aux
montagnes de tomber ſur eux
pour les écrafer , & aux collines de les couvrir par leur chûte , pour les fouftraire à la vûë
de ce Juge irrité ; & quandmêmecette confufion & cette terreur ne devroit durer qu'autant de temps que Noftre Seigneur en mettra pour exercer
fon Jugement fur tous les
hommes , la crainte que les
damnez en ont eft fi terrible ,
1
GALANT 309
qu'il n'y a nul fujet de s'étonner que le temps qui doit couler jufqu'à ce qu'il arrive leur
paroiffe fi court. Mais il y a
tour lieu de croire que cette
confuſion fera éternelle ; que
par un effet admirable de la
toute- puiffance & de la juftice
de Dieu , tous les crimes de
chaque damné , non feulement
au dernier jour , mais durant
toute l'éternité , feront imprimez dans l'efprit des Bienheureux & des Hommes damnez,
des Anges & des Demons , &
qu'il fera au pouvoir des uns
& des autres de voir quand ils
310 MERCURE
le voudront le fujet de la damnation de chaque homme en
particulier , & de dire celuy cy
eft damné pour tels & tels cri
més , celuy là par d'autres ; de
forte que la confufion qu'ils
recevront au jour du Juge
ment , fera pour eux une confufion éternelle.
Preuves de la feconde propofition.
Si ceux qui font à preſent
dans l'Enfer ne trouvent pas
long le temps qu'ils ont à Y
eftre jufqu'au jour du Jugement, aprés ce mefmejour ces
GALANT 311
miferables ne trouveront pas
. non plus les jours , les mois
& les années longues ; mais à
leur plus grande damnation ,
par un principe bien different,
& qui loin de diminuer leurs
maux les accroîtra comme à
l'infiny.
Il n'y aura plus de temps
aprés ce jour terrible , ce qui
nous doit porter à bien employer celuy qui nous reſte à
faire penitence de nos pechez,
& à ne les plus commettre.
L'Ange que faint Jean vid en
fon Apocalypfe , qui eftoit debout fur la mer & fur la terre,
312 MERCURE
jura par celuy qui vit dans tous
les fiecles qu'il n'y auroit plus
de temps : Et juravit per viventem fæcula fæculorum......
Quia non erit tempus. ( Apoc.
chap. 10. La raiſon eſt que
ny le premier mobile, qui eft
la regle de tous les temps par
fon mouvement le plus égal
& le plus regulier de tous , ny
le Soleil ne feront plus leur
courſe , & n'auront plus de
mouvement , qui ne fera plus
neceffaire pour la generation
des Elûs , dont le nombrefera
accompli ; & ce que nous appellons Temps , n'elt autre chofe
GALANT 3T3
fe que la mefure & la durée du
mouvement du premier Mobile ou du Soleil ; fi ce n'eft que
nous difions que le temps eftant
auffi la mesure ou la durée des actions & despaffions , en un certain
fens ily auraun temps dans le Paradis dans l'Enfer , parce que
dans le Paradis les Bienheureux
pafferontfucceffivement d'unejoye
à une autre , & les damnez dans
l'Enfer d'un tourment à un autre
tourment ; comme il eft dit dans
Job, que d'un tres grandfroid ils
pafferont à une chaleur exc ffive :
AD NIMIUM CALOREM
TRANSIBUNT AB AQUIS
Février 1710. Dd
314 MERCURE
NIMIUM ; ( cap. 24. ) ce qui a
fait dire au Prophete Royal ,
qu'ils auront leur temps dans
tous les ficcles : Et erit tempus
eorum infæcula. ( PL. 80. ) Ce
temps neanmoins n'eft pas fi
proprement dit que celuy que
nous comptons par le mouvement du premier Mobile ou
du Soleil mais fi aprés le Jugement univerfel il n'y a plus
de temps en ce dernier fens par
le mouvement du premier Mobile , il pourroit y en avoir , fi
Dieu le vouloit ; ce qui feroit
fort indifferent à ceux qui auront paffé du Temps à l'Eter
GALANT 315
>
nité ; car que le Soleil ou le
premier Mobile tourne ου
qu'il ne tourne pas , ceux du
Ciel n'en feront ny moins heureux , ny ceux de l'Enfer moins
malheureux; & aprés que nous
ferons dans l'Eternité il arrivera enfuite , non une feule fois ,
mais un grand nombre de fois,
il arrivera que nous aurons eſté
les premiers dans les plaiſirs, les
autres dans les peines , autant
que le premier mobile auroit
pû faire de circulations pour
faire un auffi long temps que
le feroit d'enlever autant de
fables qu'il en pourroit conteDdij
316 MERCURE
nir dans tout l'Univers , quand
feulement on n'en enleveroit
qu'un feul grain à chaque centaine de millions d'années.
Or cette grandeur fi demefurée qu'elle nous femble
paroiftre , ne paroiftra pas
longue aux damnez , & fuppofé qu'aprés le Jugement
univerfel le Soleil ou le premier Mobile dût encore fe
mouvoir, & qu'il y eut confequemmentdesjours, des mois ,
& des années , comme nous les
comptons à prefent ; ces jours ,
ces mois & ces années , ne leur
paroiftroient pas longues non
1
GALANT 317-
plus. Mais vous remarquerez,
s'il vous plaift, que je parle d'un
temps fini & limité , qui eft la
mefure des chofes qui ont leur
commencement & leur fin, qui
eft la propre notion du temps ,
& qui en ce fens eft diftingué ,
ou plutòft oppofé à l'Eternité ,
& que je ne parle point d'un
tems infini qui correfpondroit
àl'Erernité;car ce ne feroit plus
untemps , mais ce feroitla même chofe que l'Eternité. Ainfi
je dis qu'un temps fini & limité
d'un an , de deux ans , de mille
ans , decent millions d'années ,
ne paroiftront pas long à ces
Dd iij
318 MERCURE
miferables. Une raifon à la portée des moins intelligens , eft
qu'une chofe à laquelle on ne
penſe point du tout ne paroiſt
ne courte ny longue : les damnez ne penfent point du tout
à ce temps fini , comme vous
le verrez mais une autre raifon auffi évidente que la premiere , &encore plus fpirituel
le , eft que quand on n'a aucune efperance d'eftre jamais délivré d'un mal dont on eft op
primé , & qu'on fçait tres certainement que ce mal n'aura
jamais de fin , un an ,
deux
ans mille ans de fouffran- >
GALANT 319
ces , quoy que tres-es- penibles ,
ne paroiffent pas longues.
Qu'est ce donc qui eft long
aux damnez? Et pourquoy demander cela ? Ce feroit des
millions d'années qui leur feroient tres - longs , fi leurs
maux devoient finir , mais ces
millions d'années ne leur font
rien , parce que leurs maux ne
doivent pas finir !
C'est l'Eternité qui leur
paroift infiniment longue , &
qui eft telle en effet ; c'est
ce qui fait le comble & le
plus grand de tous leurs maux,
ce qui les accable épouvanDd iiij
320 MERCURE
tablement >
, & de telle maniere qu'ils ne fçauroient penfer à autre chofe ; & c'eft
ce qui les jette dans une horrible defefpoir, dans une rage
& une furcur forcenée au- def
fusde tout ce que nous en pouvons penfer. D'où vient que
les damnez ne s'amufent point.
à nombrer ce temps fini & limité , qui s'eft déja écoulé depuis qu'ils font dans les feux ,
& celuy qui s'écoulera dans la
fuite, parce que cela leur feroit
tout à fait inutile , puis qu'aprés y avoir efté cent millions
d'années , ils ne feront pas
GALANT 321
plus avancez qu'au commencement , & qu'ils auront auffi
long temps à fouffrir que s'ils
ne faifoient que d'y entrer.
Et voicy qu'elle eft l'horrible penfée d'un damné , il luy
eft prefque impoffible d'en avoir aucune autre , ou s'il en a,
celle cy eft la dominante : donnons- y toute l'attention poffible pour nous empêcher de
tomber dans une damnation
pareille à la fienne.
Un damné ne penſe à autre
chofe qu'à fe dire à luy même:
Me voilà au comble de tous
les maux, & ces maux ne fini
322 MERCURE
ront jamais : autant que Dieu
fera Dieu , je feray l'objet de
de fes vengeances : tout auffi
long temps je feray dans les
feux, & dans des feux dont
ceux de la terre ne font que la
fumée: j'auray toûjours les demons pour bourreaux : tous les
autres damnez me donneront
mille maledictions : cette horrible & épouvantable Sentence: Allez maudits au feu éternel, fera éternellement imprimée dans mon efprit , dans ma
memoire , dans mon imagination , & dans tous mes fens , &
me fera fouffrir prefque tout à
GALANT 323
la fois , & en un feul inftant ,
ce que j'auray à fouffrir continuellement durant toute l'éternité. Un damné, dis je , ne
penfe à autre chofe , & non à
nombrer les jours & les moisqu'il a déja paffé dans les feux;
& cette penfée le confterne ,
l'abat , le jette dans le defefpoir , la rage &la furie que j'ay
dit , & luy fait proferer de fi
énormes blafphêmes contreDieu principalement, & contre
les Saints , & tant d'imprecations contre fes bourreaux:
& contre luy-mefme , qu'on
mourroit de frayeur à les en-
224 MARCURE
tertendre fortir de fa bouche.
Ceuxqui font à prefent dans
l'Enfer ne trouvent pas long
le temps qu'ils ontà y eftre juf
qu'au jour du Jugement , par
la crainte & l'apprehenfion
rible qu'ils ont de ce jour ; &
aprés ce jour paffé , ils ne trouveront pas long un temps finy & limité de cent ans , de
mille ans , de cent millions
d'années , par un autre principe, par unhorrible defefpoir,
le plus grand de tous leurs
maux, le comble de tous ceux
dont ils font accablez , par la
durée immenfe & infinie de
GALANT 325
l'éternité , durant toute laquelle ils fçavent tres certainement qu'ils feront les victimes des feux , & les efclaves
des demons.
Mais d'une chofe fi veritable , ne tirez pas cette fauffe
confequence , untemps limité
de cent millions d'années ne
paroit pas long aux damnez ,
donc ils ne s'ennuyent point
dans l'Enfer.
Ce feroit tres mal raiſonner
de puifer les tenebres dans la
plus éclatante lumiere , parce
que l'éternité qui abforbe tous
les temps , leur caufe un en-
326 MERCURE
nuy qui ne fe peut exprimer,
qui eft au deffus de toute conception angelique & humaine;
&fi un temps finy ne leur
roît pas long , c'eſt le defefpoir qui en eft caufe , & qui
rend leur condition bien plus
miferable.
paCar en effet , fi ces malheureux avoient l'efperance de for
tir de ces feux aprés cent millions d'années , pour lors ce
temps finy &limité feroit l'unique occupation de leur efprit ; & tout au contraire de
ceux , remarquez bien s'il vous
plaift , & tout au contraire de
GALANT 327
ceux aufquels le defeſpoir ne
fait pas trouver longun cemps
limité , cette efperance feroit
qu'une feule heure dans ces
tourmens leur paroiftroit des
millions d'années , comme un
malade qui fouffre de grands
maux, dont il a efperance d'être délivré , trouve qu'une
nuit dans les fouffrances eft
auffi longue queplufieurs nuits
le paroiftroient à un homme
fain & difpos. On nous trompe (diroient ceux qui auroient
efperance de fortir de l'Enfer aprés des millions de fiecles , fi le defefpoir n'eftoit
328 MERCURE
le pas partage de tous ceux
qui entrent dans ce lieu d'horreur) on nous trompe de vouloir nous perfuader qu'il n'y
a qu'une heure que nous fommes dans les tourmens , pendant qu'ils nous femble qu'il
y a des millions d'années que
nous brûlons dans ces horribles feux.
Cependant celuy quiauroit
efperance de fortir des enfers
feroit fans doute de meilleure
condition que celuy qui deſeſpere d'en fortir , quoy qu'au
premier une heure dans les
feux paruft des millions d'an-
GALANT 329
nées , & que le fecond qui defd'en fortir ne penfe ny pere
B
à
la longueur ny à la brieveté de
cette même heure , voyant
bien , & il le voit malgré qu'il
en ait à fa tres grande damnation , qu'il luy est tout- à fait
inutile d'y penfer , puiſqu'aprés cette penfée il ne fera pas
plus avancé qu'au commencement , & qu'il reftera encore
une éternité toute entiere à
fouffrir.
Preuves de la troifiémepropofition.
Qu'il ne doive pas paroistre
Février 1
1710.
Ec
330 MERCURE
aux Bien- heureux que les centaines de millions d'années
dans les joyes du Paradis s'écoulent avec trop de vîteffe ,
cela eſt tout évident ; parceque
l'unique chofe qui pourroit
leur faire paroître qu'elles vont
à pas degeant, ce feroit la crainte qu'aprés que ce grand nom
bre d'années feroit écoulé ils fe--
roient privezde ces plaifirs inéfables ;car dans la fuppofition
que cela duft arriver , pour lors
des milliers d'années dans ces
delices ne leur paroîtroient pas
avoir duré plus d'un jour ; mais
comme ils fçavent tres- certai-
GALANT 331
nement qu'ils n'en feront jamais privez , qu'aprés qu'un
fi grand nombre de fiecles
fera pafle ils ne feront encore qu'au commencement de
leur bonheur , ils ne peuvent
avoir aucun fujet de fe perfuader que ces fiecles paffent
avec trop de précipitation.
Qu'il ne leur doive pas paroiltre non plus que ces centaines de milliers d'années s'écoulent trop lentement ,
eft encore tout évident ; car ce
qui fait qu'une choſe ſemble
longue à paffer ou à parcourir ;
cela
Ee ij
332 MERCURE
c'eft le dégouft , la peine , ou la
difficulté qui s'y trouve les
Bien heureux n'ont nul dégouft , nulle peine , & nulle difficulté à parcourir ce grand
nombre d'années , mais au contraire en les parcourant ils font
dans l'affluence de toutes fortes de plaifirs & de delices , &
par confequent il ne femblera
pas aux Bienheureux que cette
longueur , fi demefuréé qu'elle
nous paroiffe , fe paffe trop lentement.
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Résumé : Paradoxes aux moins intelligens; mais veritez tres-certaines aux plus clairs-voyans.
La lettre traite de la dévotion et des articles spirituels, soulignant que les articles précédents étaient émouvants et capables de susciter des larmes de joie. L'article actuel, en revanche, vise à provoquer une réflexion sérieuse et à inciter les lecteurs à se corriger pour mériter le Ciel. L'auteur présente trois vérités sous forme de paradoxes, mais qui sont des certitudes pour les esprits éclairés. Premièrement, le temps jusqu'au Jugement dernier semble court aux damnés actuels et à ceux qui le seront avant la fin du monde. Deuxièmement, après le Jugement, les damnés ne trouveront pas le temps long, malgré sa durée. Troisièmement, dans le Paradis, les Bienheureux ne percevront pas le temps comme long ou court. L'auteur explique que ces propositions, bien que paradoxales en apparence, renforcent la croyance en l'état déplorable des damnés et leur font connaître l'horreur de l'Enfer. Il illustre cela par l'exemple d'un homme dans un cachot, accablé de maux et craignant des souffrances futures, pour montrer comment le temps peut sembler court face à une peur intense. Pour les damnés, un temps fini, même de plusieurs millions d'années, ne semble pas long car ils sont accablés par le désespoir de souffrances éternelles. L'éternité leur apparaît infiniment longue et est la source de leur plus grand malheur. Ils ne s'amusent pas à compter le temps écoulé ou à venir, car cela leur semble inutile. Leur pensée dominante est la souffrance éternelle et la rage contre Dieu et leurs bourreaux. En revanche, les bienheureux au paradis ne trouvent pas que les siècles passent trop vite ou trop lentement. Ils savent qu'ils ne seront jamais privés de leurs plaisirs ineffables, ce qui rend leur bonheur constant et sans crainte. Ils ne ressentent ni peine ni difficulté dans leur état de béatitude, ce qui fait que le temps leur semble passer de manière appropriée. La lettre se conclut par une réflexion sur l'importance de bien employer le temps présent pour faire pénitence et éviter les péchés, car après le Jugement, il n'y aura plus de temps tel que nous le connaissons.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1949
p. 332-335
Article des Enigmes, [titre d'après la table]
Début :
Je passe d'un Article qui a dû vous attacher bien serieusement [...]
Mots clefs :
Énigme, Explication, Orthographe
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Article des Enigmes, [titre d'après la table]
Je paffe d'un Article qui a
dû vous attacher bien ferieu-
GALANT 333
fement , & vous faire penfer à
l'éternité , à un autre qui ne
vous a attaché que pour vous
divertir. Je parle de l'Article
des Enigmes ; celle du mois
dernier eftoit l'Ortographe , de
la maniere dont plufieurs perfonnes tâchent aujourd'huy
d'introduire l'ufage , ce qui
a embaraffé particulierement
ceux qui ne fe font pas attachez avec affez de foin à remarquer commentcette Enigme eftoit écrite , ce qui fait
que plufieurs fe font trompez
dans l'explication qu'ils luy
ont donnée. Ainfi dans le
334 MERCURE
grand nombre d'explications
que j'ay reçues , peu de perfonnes ont frapé droit au but.
Ceux qui en ont trouvé le
veritable fens font le Pere
Agatange, des grands Auguftins ; Mrs de la Giraudiere ;
d'Argeny d'Algrande ; du
Frefne D. B: le petit Brunet ,
de la rue Saint Honoré : Tamirifte le folitaire des Angloux & fon amy Darius.
Mlles de Rezé , prés la Come
die , à qui le Public eft fi redevable de fes beaux Secrers ;
Marie Annedu Cloiftre Saint
Nicolas du Louvre : la jeune
GALANT 335
Mufe renaiffante la groffe
Gouvernante de M' le Prince de Tarente : la Blanche &
BruneYvoire de la rue des Bernardins : la Solitaire de la rue
aux Féves : la Brillante Brune
& fon. ....
Je vous envoye une Enigme
nouvelle , faite par M' Regnault , du Diocefe de Reim
dû vous attacher bien ferieu-
GALANT 333
fement , & vous faire penfer à
l'éternité , à un autre qui ne
vous a attaché que pour vous
divertir. Je parle de l'Article
des Enigmes ; celle du mois
dernier eftoit l'Ortographe , de
la maniere dont plufieurs perfonnes tâchent aujourd'huy
d'introduire l'ufage , ce qui
a embaraffé particulierement
ceux qui ne fe font pas attachez avec affez de foin à remarquer commentcette Enigme eftoit écrite , ce qui fait
que plufieurs fe font trompez
dans l'explication qu'ils luy
ont donnée. Ainfi dans le
334 MERCURE
grand nombre d'explications
que j'ay reçues , peu de perfonnes ont frapé droit au but.
Ceux qui en ont trouvé le
veritable fens font le Pere
Agatange, des grands Auguftins ; Mrs de la Giraudiere ;
d'Argeny d'Algrande ; du
Frefne D. B: le petit Brunet ,
de la rue Saint Honoré : Tamirifte le folitaire des Angloux & fon amy Darius.
Mlles de Rezé , prés la Come
die , à qui le Public eft fi redevable de fes beaux Secrers ;
Marie Annedu Cloiftre Saint
Nicolas du Louvre : la jeune
GALANT 335
Mufe renaiffante la groffe
Gouvernante de M' le Prince de Tarente : la Blanche &
BruneYvoire de la rue des Bernardins : la Solitaire de la rue
aux Féves : la Brillante Brune
& fon. ....
Je vous envoye une Enigme
nouvelle , faite par M' Regnault , du Diocefe de Reim
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Résumé : Article des Enigmes, [titre d'après la table]
Le texte discute d'une énigme du mois précédent portant sur l'orthographe, qui a semé la confusion parmi les participants en raison de son écriture. Cela a conduit à de nombreuses explications incorrectes. Sur les nombreuses réponses reçues, seules quelques-unes ont correctement résolu l'énigme. Les personnes ayant trouvé la solution incluent le Père Agatange des Grands Augustins, Mme de la Giraudière, d'Argeny d'Algrande, le Frère D. B., le petit Brunet de la rue Saint Honoré, Tamiriste le solitaire des Anglais et son ami Darius, Mlles de Rezé près la Comédie, Marie Anne du Cloître Saint Nicolas du Louvre, la jeune Muse renaissante, la grosse gouvernante de M. le Prince de Tarente, la Blanche et Brune Yvoire de la rue des Bernardins, la Solitaire de la rue aux Fèves, et la Brillante Brune. Le texte mentionne également l'envoi d'une nouvelle énigme créée par M. Regnault du Diocèse de Reims.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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1950
p. 335-336
ENIGME.
Début :
A la Ville, aux Champs, au Village, [...]
Mots clefs :
Soufflet
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGME.
A la Ville , aux Champs , an
Village
Jefais neceffaire aux humains ;
Pour peu qu'on me mette en
ufage ;
the
236 MERCURE
Je mefais tenir à deux mains.
Quoy que fort fujet à l'enflure ,
Je neprends nul medicament ;
On voit quelquesfois la dorure ,
Faire monplus bel ornement.
Parma deftinéefatale ,
Je rends ce que je prends avec de
grands efforts
Je ne produits nulle action vitale :
Fay cependant une Ame avec
unCorps
A la Ville , aux Champs , an
Village
Jefais neceffaire aux humains ;
Pour peu qu'on me mette en
ufage ;
the
236 MERCURE
Je mefais tenir à deux mains.
Quoy que fort fujet à l'enflure ,
Je neprends nul medicament ;
On voit quelquesfois la dorure ,
Faire monplus bel ornement.
Parma deftinéefatale ,
Je rends ce que je prends avec de
grands efforts
Je ne produits nulle action vitale :
Fay cependant une Ame avec
unCorps
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