Auteur du texte (12)
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Destinataire du texte (20)
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Détail
Liste
Résultats : 12 texte(s)
1
s. p.
AU ROY,
Début :
SIRE. Le Mercure de France, qui contient l'Histoire journaliere [...]
Mots clefs :
Mercure, Histoire journalière
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AU ROY,
Le Mercure de France , qui contient
histoire journaliere <te la Nation , ne
ut paroître plus heureusement pour le
blic , . Se pour ses Auteurs , que fous
Ai) Se
les glorieux auspices de VOTRE MAr
JESTE' ; la bonté que vous avez, S I RE,
de nous Je permettre , & d'agréer que
nous venions tous les mois vous offrir.,
comme un juste tribut , le fruit de nôtre
travail , nous animera de plus en plus f
& nous engagera particulierement à ne
rien presenter à VQTRE MAJESTE*
qui jjie puisse lui plaire , ou s'amuíer
agréablement. C'est , SIRE , par ces dis
positions que nous nous flatons de pou
voir meriter la grace de vôtre Royale
Protection , & que nous osons nous dire
Avec le plus profond respect.
S I RE,
DE VOTRE MAJESTE',
Les plus humbles , les plus
obéiísans . &les plus fideles.
serviteurs & sujets ,
Les Auteurs du Mercure,
A Paris , U fremit*
l*nvier 17»^.
histoire journaliere <te la Nation , ne
ut paroître plus heureusement pour le
blic , . Se pour ses Auteurs , que fous
Ai) Se
les glorieux auspices de VOTRE MAr
JESTE' ; la bonté que vous avez, S I RE,
de nous Je permettre , & d'agréer que
nous venions tous les mois vous offrir.,
comme un juste tribut , le fruit de nôtre
travail , nous animera de plus en plus f
& nous engagera particulierement à ne
rien presenter à VQTRE MAJESTE*
qui jjie puisse lui plaire , ou s'amuíer
agréablement. C'est , SIRE , par ces dis
positions que nous nous flatons de pou
voir meriter la grace de vôtre Royale
Protection , & que nous osons nous dire
Avec le plus profond respect.
S I RE,
DE VOTRE MAJESTE',
Les plus humbles , les plus
obéiísans . &les plus fideles.
serviteurs & sujets ,
Les Auteurs du Mercure,
A Paris , U fremit*
l*nvier 17»^.
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Résumé : AU ROY,
Les auteurs du Mercure de France remercient leur souverain pour la permission de publier mensuellement. Ils s'engagent à offrir des contenus agréables au roi et à mériter sa protection. Ils se déclarent ses humbles et fidèles serviteurs. La lettre est datée de Paris, le premier janvier 17XX.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
s. p.
AVERTISSEMENT.
Début :
Le Titre de Mercure de France que nous donnons aujourd'hui à nôtre [...]
Mots clefs :
Mercure
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AVERTISSEMENT.
AVERTISSEMENT.
LE Titre de Mercure de France que
nous donnons aujourd'hui a notre
Journal , au lieu de celui qu'il avoïi
orté depuis son' institution, ne doit pas?
tire craindre que nous voulions en re-
.ancher ces matieres agréables qui font
int de plaisir au monde galant & poli.
e rìefi point la nôtre dejfán ; nous' cher
rons a ajouter des beautez. a notre ou.
rage , plutôt . que d'en retrancher \ mais
our mettre nôtre Mercure a la portée de
mies sones de personnes , nous renonçons
un titre qui sembloit le consacrer aux
'.unes gens , & aux Dames exclusive-
\ent k tous autres Lefteurs. Les plus fileux
, & les plus enjouez. y trouveront
râlement de quoi s'occuper , & de quoi
amuser. Rien de trop libre n entrera dans
ôtre ouvrage , mais nous n'en exclurons
Un de ce qui nous paroîtra fin & déli
ts, nous .y infererons même un nouvel
rticle de bons mots , dont nous allons
'onner un essai pour Etrennes dans ce
ommencement d'année. Nous prions tous
eux qui prendront quelque interest au
Mercure , de vouloir bien nous faire part
.es choses qui viendront à leur connois
artee fur ces matieres : bons mots , repar.
A iij tie*
AVERTISSEMENT.
tììs vives & pic/nantes , contes facetieux'?
n.tivetez, plaisantes 3 Pafquinades inge
nieuses , fans aucune maligne application
pensées choisies , questions curieuses , traits
d'histoire intereffans & de morale instruc
tive J jeux de mats ,. Griphes Logogriphes
, &c. Ce nouvel article ne fera peut
être pas le moins lu de notre Journal y tous
les hommes de quelque condition , & de
quelque âge qu 'ils soient , se portent na
turellement a ce qui les réjo'icit ; Erasme
aimoit fi fort les bons mots & les bons
contes , qu'il rioìt de ceux mêmes qu ort
faifoit, & qu'on disoit de lui. Tantaiïï
yim , difoit.il , habet lepos & jucunditas
íèrmonis , uc etiam in nos aptè toitis die.*
teriis dekctemuf. Toujours bien entendit
que nous n employerons rien de licentieux 0
& qui puijje blesser les moeurs.
jiu reste , comme les sentiment , & les
inclinations du Roy font au dessus de son
âge r & qu'il n'y a point de mois que le
Aíercurc ne puise rapporter quelque action*.
ou quelque discours remarquables de Sa
^Majesté y nous redoublerons nos fins pour
ne rien oublier qui puijs servir un jour'
k l'histoire de ce jeune Monarque. La
posterité nous fçaura gré de lui av if tranf
mis jusqu'aux moin 1res par ic Uarit z.
s d'une vie que chaque jour distingue par\
quelque irait de vertu. £hte!le gloire pour
AVERTI S SÈMENT.;
\e ÂÁercure d'en être le premier Héraut.
Obligez. d'écrire rapidement ; & for la
foi de Aíemoires y souvent peu corretìs ,
nous sommes , de tous les Auteurs , les plus
exposez. a ne ire pas aussi exails que nous
le souhaiterions ; c'est pourquoi nous de
clarons ici q%e nous recevrons toujours
avec beaucoup de docilité les observations
critiques qu'on fera fur notre ouvrage £
nous ferons plus , nous les mettrons à pro
fit dès quelles nous paraîtrons raisonna
bles \ dr nous n'épargnerons pas même
tes retractations &. les reparations conve
nables. Le public y gagnera , & nous n 'y
perdrons rien.
Nous finissons cet avertissement par une
nouvelle protestation de nous éloigner toAj$
urs également de la satyre t Ô' de la fia"
terie a.i fujet des personnes , & des ouvra
ges dont nous aurons a parler ; nous espe
rons pourtant qu'on voudra bien nous per
mettre un peu de critique. Q^tand elle est
juste & msnagée , loin de faire du tort ,
elle instruit même ceux fur qui elle porte ,
& ne leur fait fintir quelques défauts que
pour renlre leurs ouvrages plus parfaits.
Il y a un genre de louanges qui produit
un efet tout contraire ; l'experience nous
l'apprend tous les jours. Nous tâcherons
de tenir un juste milieu entre ces deux
tXtrtmittZ. ,mais s'il faut pancher dequel-
A iíij que
avertissement»:
que coté , nous proposons d'être pluY
retenus fur les Eloges que fur la Critique..
La-fade adulation efi h» défaut contre le
quel tout Autiur d'un ouvrage tel que le
nôtre, ne fçattroit être assez. en garde.
L' adresse generale pour toutes choses ejì h'
A4. Morem , Commis au' Mercure > chez.
Ai. le Commissaire le Comte , vis-k.vis la
Comedie Françoise, a-Paris. Ceux qui pour
leur commodité voudront remettre leurs
Paquets cachete^aux Libraires qui ven
dent le Mercure y a Paris,. peuvent se
servir de cette voye pour les faire tenir..
On prie tris . instamment , quand on
adresse des Lettres ou Paquets par la Pof
te , a"avoir foin d'en affranchir le port t
comme cela s'est toujours pratiquée , afin
d'épargner , a mus le déplaisir de les re
buter ,& a ceux qui les envoyent , celai,
non.feulement de ne pas voir paraître leurs
ouvrages , mais même de les perdre , s'ils
n'en ont pas gardé de copie.
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les particuliers qui sou
haiteront avoir le Mercure de France de
la premiere main , & plus promptement ,
n'auront qu'a donner leurs adresses a M.
Aioreau , qui aura foin de faire leurs pa
quets fans perte de temps , & de les faire
porter fur l'heure a la Poste , ou aux Mes
sageries qu'on lui indiquera.
LE Titre de Mercure de France que
nous donnons aujourd'hui a notre
Journal , au lieu de celui qu'il avoïi
orté depuis son' institution, ne doit pas?
tire craindre que nous voulions en re-
.ancher ces matieres agréables qui font
int de plaisir au monde galant & poli.
e rìefi point la nôtre dejfán ; nous' cher
rons a ajouter des beautez. a notre ou.
rage , plutôt . que d'en retrancher \ mais
our mettre nôtre Mercure a la portée de
mies sones de personnes , nous renonçons
un titre qui sembloit le consacrer aux
'.unes gens , & aux Dames exclusive-
\ent k tous autres Lefteurs. Les plus fileux
, & les plus enjouez. y trouveront
râlement de quoi s'occuper , & de quoi
amuser. Rien de trop libre n entrera dans
ôtre ouvrage , mais nous n'en exclurons
Un de ce qui nous paroîtra fin & déli
ts, nous .y infererons même un nouvel
rticle de bons mots , dont nous allons
'onner un essai pour Etrennes dans ce
ommencement d'année. Nous prions tous
eux qui prendront quelque interest au
Mercure , de vouloir bien nous faire part
.es choses qui viendront à leur connois
artee fur ces matieres : bons mots , repar.
A iij tie*
AVERTISSEMENT.
tììs vives & pic/nantes , contes facetieux'?
n.tivetez, plaisantes 3 Pafquinades inge
nieuses , fans aucune maligne application
pensées choisies , questions curieuses , traits
d'histoire intereffans & de morale instruc
tive J jeux de mats ,. Griphes Logogriphes
, &c. Ce nouvel article ne fera peut
être pas le moins lu de notre Journal y tous
les hommes de quelque condition , & de
quelque âge qu 'ils soient , se portent na
turellement a ce qui les réjo'icit ; Erasme
aimoit fi fort les bons mots & les bons
contes , qu'il rioìt de ceux mêmes qu ort
faifoit, & qu'on disoit de lui. Tantaiïï
yim , difoit.il , habet lepos & jucunditas
íèrmonis , uc etiam in nos aptè toitis die.*
teriis dekctemuf. Toujours bien entendit
que nous n employerons rien de licentieux 0
& qui puijje blesser les moeurs.
jiu reste , comme les sentiment , & les
inclinations du Roy font au dessus de son
âge r & qu'il n'y a point de mois que le
Aíercurc ne puise rapporter quelque action*.
ou quelque discours remarquables de Sa
^Majesté y nous redoublerons nos fins pour
ne rien oublier qui puijs servir un jour'
k l'histoire de ce jeune Monarque. La
posterité nous fçaura gré de lui av if tranf
mis jusqu'aux moin 1res par ic Uarit z.
s d'une vie que chaque jour distingue par\
quelque irait de vertu. £hte!le gloire pour
AVERTI S SÈMENT.;
\e ÂÁercure d'en être le premier Héraut.
Obligez. d'écrire rapidement ; & for la
foi de Aíemoires y souvent peu corretìs ,
nous sommes , de tous les Auteurs , les plus
exposez. a ne ire pas aussi exails que nous
le souhaiterions ; c'est pourquoi nous de
clarons ici q%e nous recevrons toujours
avec beaucoup de docilité les observations
critiques qu'on fera fur notre ouvrage £
nous ferons plus , nous les mettrons à pro
fit dès quelles nous paraîtrons raisonna
bles \ dr nous n'épargnerons pas même
tes retractations &. les reparations conve
nables. Le public y gagnera , & nous n 'y
perdrons rien.
Nous finissons cet avertissement par une
nouvelle protestation de nous éloigner toAj$
urs également de la satyre t Ô' de la fia"
terie a.i fujet des personnes , & des ouvra
ges dont nous aurons a parler ; nous espe
rons pourtant qu'on voudra bien nous per
mettre un peu de critique. Q^tand elle est
juste & msnagée , loin de faire du tort ,
elle instruit même ceux fur qui elle porte ,
& ne leur fait fintir quelques défauts que
pour renlre leurs ouvrages plus parfaits.
Il y a un genre de louanges qui produit
un efet tout contraire ; l'experience nous
l'apprend tous les jours. Nous tâcherons
de tenir un juste milieu entre ces deux
tXtrtmittZ. ,mais s'il faut pancher dequel-
A iíij que
avertissement»:
que coté , nous proposons d'être pluY
retenus fur les Eloges que fur la Critique..
La-fade adulation efi h» défaut contre le
quel tout Autiur d'un ouvrage tel que le
nôtre, ne fçattroit être assez. en garde.
L' adresse generale pour toutes choses ejì h'
A4. Morem , Commis au' Mercure > chez.
Ai. le Commissaire le Comte , vis-k.vis la
Comedie Françoise, a-Paris. Ceux qui pour
leur commodité voudront remettre leurs
Paquets cachete^aux Libraires qui ven
dent le Mercure y a Paris,. peuvent se
servir de cette voye pour les faire tenir..
On prie tris . instamment , quand on
adresse des Lettres ou Paquets par la Pof
te , a"avoir foin d'en affranchir le port t
comme cela s'est toujours pratiquée , afin
d'épargner , a mus le déplaisir de les re
buter ,& a ceux qui les envoyent , celai,
non.feulement de ne pas voir paraître leurs
ouvrages , mais même de les perdre , s'ils
n'en ont pas gardé de copie.
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les particuliers qui sou
haiteront avoir le Mercure de France de
la premiere main , & plus promptement ,
n'auront qu'a donner leurs adresses a M.
Aioreau , qui aura foin de faire leurs pa
quets fans perte de temps , & de les faire
porter fur l'heure a la Poste , ou aux Mes
sageries qu'on lui indiquera.
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Résumé : AVERTISSEMENT.
Le document est un avertissement concernant le changement de titre du journal 'Mercure de France'. Ce changement ne doit pas alarmer les lecteurs, car le journal continuera à publier des contenus adaptés à un public raffiné et distingué. L'objectif est de rendre le journal accessible à un plus large public sans exclure les lecteurs les plus exigeants. Le journal s'engage à éviter les contenus trop libres et à inclure des éléments fins et délicats, tels que des bons mots, des contes amusants, des pensées choisies et des jeux de mots. Un nouvel article dédié aux bons mots sera introduit, accompagné d'un essai pour les étrennes de l'année. Les lecteurs sont invités à soumettre des contributions sur ces sujets. Le journal s'engage également à rapporter les actions et discours remarquables du roi, contribuant ainsi à l'histoire de ce jeune monarque. Les auteurs acceptent les observations critiques et s'engagent à les prendre en compte pour améliorer leur ouvrage. Ils promettent de maintenir un équilibre entre la critique et la flatterie, en étant plus modérés dans les éloges que dans les critiques. Des instructions sont fournies pour soumettre des contributions, avec des adresses spécifiques pour éviter les frais de port non affranchis. Les libraires et particuliers des provinces et pays étrangers peuvent également recevoir le journal en donnant leurs adresses à M. Aioreau.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 248
« Voici une Piece de Vers qui nous a été envoyée trop tard [...] »
Début :
Voici une Piece de Vers qui nous a été envoyée trop tard [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Voici une Piece de Vers qui nous a été envoyée trop tard [...] »
Voici une Piece de Vers qui nous a été envoyée
trop tard pour être inférée à la Partie Fugitive ,
& que nous plaçons ici par addition .......
trop tard pour être inférée à la Partie Fugitive ,
& que nous plaçons ici par addition .......
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4
p. 250
« Nous annonçons aussi par Supplément six Trio, & une piece intitulée le [...] »
Début :
Nous annonçons aussi par Supplément six Trio, & une piece intitulée le [...]
Mots clefs :
Musique, Violoncelle, M. Lanzetti
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Nous annonçons aussi par Supplément six Trio, & une piece intitulée le [...] »
Nous annonçons auffi par Supplémentfix
Trio, & une piece intitulée le Port- Mahon,
dont la compofition a paru aux Connoiffeurs
auffi piquante que finguliere. M. Lanzetti
, ce Muficien célébre , & qu'on peut
appeller l'Orphée du violoncelle , en eft
l'Auteur.
Trio, & une piece intitulée le Port- Mahon,
dont la compofition a paru aux Connoiffeurs
auffi piquante que finguliere. M. Lanzetti
, ce Muficien célébre , & qu'on peut
appeller l'Orphée du violoncelle , en eft
l'Auteur.
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5
p. 230
AVIS.
Début :
On prie M. Tribout, Marchand de Draps près la poste aux lettres, [...]
Mots clefs :
M. Tribout, Adresse, Mercure, Réception du journal
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AVIS.
AVIS.
N prieM. Tribout, Marchand de Draps
près la poſte aux lettres , de faire ſçavoir
à l'adreſſe du Mercure de quel endroit il
eſt , afin de pouvoir lui donner les éclairciſſemens
qu'il a demandés ſur l'envoi du
Mercure par une lettre ſans date , dans
laquelle il a obmis de mettre l'endroit d'où
il l'a écrit , & le lieu où il defire de recevoir
le Mercure , ou le particulier pour lequel
il s'intéreſſe.
N prieM. Tribout, Marchand de Draps
près la poſte aux lettres , de faire ſçavoir
à l'adreſſe du Mercure de quel endroit il
eſt , afin de pouvoir lui donner les éclairciſſemens
qu'il a demandés ſur l'envoi du
Mercure par une lettre ſans date , dans
laquelle il a obmis de mettre l'endroit d'où
il l'a écrit , & le lieu où il defire de recevoir
le Mercure , ou le particulier pour lequel
il s'intéreſſe.
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6
p. 234
« Nous donnerons dans le Mercure d'Avril l'article de Monsieur de Fontenelle, [...] »
Début :
Nous donnerons dans le Mercure d'Avril l'article de Monsieur de Fontenelle, [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Nous donnerons dans le Mercure d'Avril l'article de Monsieur de Fontenelle, [...] »
Nous donnerons dans le Mercure d'Avril
l'article de Monfieur de Fontenelle ,
M. de Voltaire ; nous aurons foin de
le tirer du Catalogue des Ecrivains François
du fiecle de Louis XIV , pour en décorer
notre partie fugitive. Il fera accompagné
de notes par M. l'Abbé Trublet.
Perfonne n'en peut donner de plus fûres
ni de plus dignes du texte . C'eft l'hommage
le plus convenable que nous puiffions
rendre à la mémoire de ce grand homme
& ce font les plus belles fleurs
puiffions jetter fur fon Tombeau.
l'article de Monfieur de Fontenelle ,
M. de Voltaire ; nous aurons foin de
le tirer du Catalogue des Ecrivains François
du fiecle de Louis XIV , pour en décorer
notre partie fugitive. Il fera accompagné
de notes par M. l'Abbé Trublet.
Perfonne n'en peut donner de plus fûres
ni de plus dignes du texte . C'eft l'hommage
le plus convenable que nous puiffions
rendre à la mémoire de ce grand homme
& ce font les plus belles fleurs
puiffions jetter fur fon Tombeau.
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Résumé : « Nous donnerons dans le Mercure d'Avril l'article de Monsieur de Fontenelle, [...] »
Le Mercure d'Avril publie un article de Voltaire extrait du Catalogue des Écrivains Français du siècle de Louis XIV. L'article est accompagné de notes de l'Abbé Trublet. Cette publication rend hommage à Fontenelle, présenté comme un grand homme.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 214
« Le peu d'espace qui nous reste nous force à remettre au prochain Mercure [...] »
Début :
Le peu d'espace qui nous reste nous force à remettre au prochain Mercure [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le peu d'espace qui nous reste nous force à remettre au prochain Mercure [...] »
Le peu d'espace qui nous refte nous force de
remettre au prochain Mercure le reste des Nouvelles,
l'article de l'Hôpital de M. le Maréchal-Duc de
Biron.
remettre au prochain Mercure le reste des Nouvelles,
l'article de l'Hôpital de M. le Maréchal-Duc de
Biron.
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8
p. 209
« Le peu d'espace qui nous reste nous oblige de remettre [...] »
Début :
Le peu d'espace qui nous reste nous oblige de remettre [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le peu d'espace qui nous reste nous oblige de remettre [...] »
Le peu d'efpace qui nous refte nous
oblige de remettre au prochain Mercure
l'article de l'Hôpital de M. le Maréchal-
Duc de Biron . Ce n'est qu'un retard de
quinze jours.
oblige de remettre au prochain Mercure
l'article de l'Hôpital de M. le Maréchal-
Duc de Biron . Ce n'est qu'un retard de
quinze jours.
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9
p. 204
« L'abondance des matieres nous oblige de remettre au prochain Mercure [...] »
Début :
L'abondance des matieres nous oblige de remettre au prochain Mercure [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « L'abondance des matieres nous oblige de remettre au prochain Mercure [...] »
L'abondance des matieres nous oblige
de remettre au prochain Mercure l'article
de l'Hôpital de M. le Maréchal- Duc de
Biron , ainfi que le Mémoire Généalogique
de la branche des Caumont de Picardie.
de remettre au prochain Mercure l'article
de l'Hôpital de M. le Maréchal- Duc de
Biron , ainfi que le Mémoire Généalogique
de la branche des Caumont de Picardie.
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10
p. 214
« Le Frere Côme nous a écrit pour désavouer l'envoi qui nous [...] »
Début :
Le Frere Côme nous a écrit pour désavouer l'envoi qui nous [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le Frere Côme nous a écrit pour désavouer l'envoi qui nous [...] »
Le Frere Côme nous a écrit pour défavouer
l'envoi qui nous a été fait de fa part , de la lettre
du fieur Cambon. Comme on s'eft fervi à faux de
fon nom , nous avons cru devoir en inftruire le
Public.
l'envoi qui nous a été fait de fa part , de la lettre
du fieur Cambon. Comme on s'eft fervi à faux de
fon nom , nous avons cru devoir en inftruire le
Public.
Fermer
11
p. 212
Avis très - important.
Début :
L'Auteur de la Lettre insérée dans ce volume, page 149, s'est trop [...]
Mots clefs :
Erreur, Maladie, Lettre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Avis très - important.
Avis très important.
·
L'Auteur de la Lettre inférée dans ce volume ,
page 149 , s'eft trop hâté d'annoncer un fait qui
fe trouve faux. Le jeune M. de Latour n'a ni la
petite- vérole , ni la petite - vérole volante , quoiqu'il
ait eu quelques boutons au corps . Je donnerai
le mois prochain la Lettre qui m'a été
écrite à ce sujet.
·
L'Auteur de la Lettre inférée dans ce volume ,
page 149 , s'eft trop hâté d'annoncer un fait qui
fe trouve faux. Le jeune M. de Latour n'a ni la
petite- vérole , ni la petite - vérole volante , quoiqu'il
ait eu quelques boutons au corps . Je donnerai
le mois prochain la Lettre qui m'a été
écrite à ce sujet.
Fermer
12
p. 282
[A]VIS à Messieurs les Abonnés du Mercure.
Début :
Messieurs les Abonnés sont priés instamment de croire que ce n'est point par [...]
Mots clefs :
Abonnés, Retard, Livraison, Volume
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : [A]VIS à Messieurs les Abonnés du Mercure.
VIS à Meffieurs les Abonnés du
M..S
Mercure.
ESIEURS les Abonnés font priés
inftamment de croire que ce n'eft point
par négligence dans l'expédition qu'ils
reçoivent quelquefois le Mercure plus
tard qu'ils ne devroient ; le retard, quand
il
y en a , et toujours forcé. Une impreffion
extraordinaire , fans d'autres caufes ,
a retardé le premier Volume de ce mois.
M..S
Mercure.
ESIEURS les Abonnés font priés
inftamment de croire que ce n'eft point
par négligence dans l'expédition qu'ils
reçoivent quelquefois le Mercure plus
tard qu'ils ne devroient ; le retard, quand
il
y en a , et toujours forcé. Une impreffion
extraordinaire , fans d'autres caufes ,
a retardé le premier Volume de ce mois.
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Pas de résultat.
Résultats : 20 texte(s)
1
p. 24-34
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure pour servir de réponse aux Remarques sur les figures du Portail de l'Eglise de l'Abbaye S. Germain
Début :
Vous avez inseré, Messieurs, dans vôtre Journal du mois de May de [...]
Mots clefs :
Clotaire, Saint-Germain, Abbaye, Église, Portail, Figures, Dom Bouillart, Couronnes de gloire, Patron, Tombeau
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure pour servir de réponse aux Remarques sur les figures du Portail de l'Eglise de l'Abbaye S. Germain
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure
four servir de réponse aux Remarques
fur les figures du Portail de CEglist
de CAbbaye S. Germain.
VOus avez iníèré, Messieurs ., dans
vôtre Journal du mois de May de
l'année derniere , les Remarques d'un'
Auteur Anonyme, fur les figuras du
grand Portail de VEglise Saint Germain
des Pre^, par leíquelles il prétend dé
truire le sentiment du R. P. Dòm Jean'
Mabillon', qui' dit dàns ses Anrtales (a);
que l'£glise de S. Germain a été bâtie
Se fondée par Cliildebert L. & que les'
figures qui íònt au Portail de la même.
Eglise dix coté gauche en entrant , font
S. Germain , Clovis , Sainte Clotilde Se
Clodomir , & au côté opposé , Chilperic,
Childebert , Ultrogothe ,. íà femmes &
Clotaire î.
L'Auteur dés Remarques refute ausii
Dom Thierry Riíinard , qui prétend à
la fin de son Edition de S. Gregoire (b)
de Tours / que les figures qui font à
gauche en entrant representent Saint
(a) Annal. Ben. tom; i. pag. 169.
{í) Gieg. Turpn.
Remv>
JANVIER 1714. ; 2;
Remy , Clovis , Sainte Clotilde & Clo.
domir , Se que celles qui sont à droite ,
sont Thierry , Chlldebert , Ultrogoche
8e Clotaire.
Ces deujr sentimens ne sont pas du
goût de l'Auteur , parce qu'il prétend
l p que c'est Clotaire , & non pas ChHdebert
, qui a achevé de bâtir l'Egliíe,.
& il cite pour ses garants l'Auteur de
la vie de S. Droctovée, (a) Se l'Histoire
interpolée d'Aimoin ^ í. . 2 < cv 29. Se. 3 6 .
& 1. 3. c }1.
2° Il ajoute que ce Portail étant bien
Í>osterieur à la construction de l'Eglise , .
es figures qui y sont repreíentées ne
sont point celles que Dom Mabillon &
Dom Ruinard ont prétendu ; mais cel
les de S. Germain, de Pepin, de Bertrade
, íâ femme ., de Charlemagne Se
Carloman leurs fils , de Childebert , &
d'Ultrogothe , fa femme , & de Clotaire.
Voici les raisons qui confirment l'Au-.
teur dans cette idée. 1 * La donation du.!
Domaine de Palaiíëau , Se de ses dépen
dances faites à' l'Eglise de l'Abbaye par
Pepin , le jour de la Translation de Saints.
Germain y Se confirmée par Charlema
gne en 77 9' Cette Eglise , selon lui ,
eut un nouveau Patron en même temps:-
que la France eut des Rois d'une nou-
(4) Si. OrA. S. Btned. tMt. r.
Bt rell#
ié MERCURE DE FRANCE.
velle race , & les Moines de l'Abbaye J.
pour éterniíèr la memoire d'un si grand
changement , firent construire un Por
tail, où ils placerent les figures de ces
Princes , en conservant toujours la mé
moire de leurs premiers Fondateurs. 2*'
Le peu de vrai.semblance que l'on ait
mis à la porte d'une Eglise les Statues du
pere , de la mere & des freres du Fon
dateur. Et a quelle porte £'Eglise , dit-il
a..t'qn representé ainft des genealogies ?
3° Les Couronnes de gloire qui font
derriere la tête des sept figures , ne íê
mettoient qu'à ceux qui étroient décedezs .
& que l'on croyoit dans la beatitude t
par consequent celui qui n'en a point ne.
peut être que Charlemagne qui vivoit
alors. 4° La difficulté de trouver des^
Couronnes du sixième siecle semblables ;
à celles' que portent les figures du Por-'
tail de Saint Germain.. Enfin le peu de'
eertitude que le tombeau deFredegonde^
qui a une semblable Couronne , soit veri- :
tablement d'elle.. .
Ce íônt là Meísieurs les principaux.^
argumens que l'Auteur des Remarques.
propose dans vôtre Journa.l contre les :
ientimens de Dom Mabillon , & de Dom 1
Huinart au íujet de ces figures. Il seroit?
k- íouhaiter qu'il eut apporté des autorir'
ter tirées de bons Auteurs , au lieu de
Ï'AN VÌ E R 1724. 27
íèá íimples. conjectures qui ne peuvent
fSrvir de preuves dans les difficultez
dont il est ici question.
Dom Jacques Bouillart , qui vient de
mettre au jour l'Histoire de l'Abbaye de
Saint Germain des Prez a répondu dans
íon ouvrage aux objections que l'on
Vient deráporter. Il prouve d'abord que
l'Auteur des Remarques s'est trompé
considerablement , en citant la vie de
Saint Droctovée , & l'Histoire interpo
lée d'Aimoin , & qu'il n'y a pas un seul
mot dans les endroits par lui citez où il
soit marqué que l'Egliíê fut achevée par-
Clotaire. Dom Bouillart prouve au con
traire par les mêmes Auteurs , que Chil.
debert acheva cet Edifice avant ía mort,
& que Saint Germain la dédia , à la sol
licitation de Clotaire , le jour même des
funerailles de Childebert.
Pour ce qui est du Portail , lé même'
Auteur soutient qu'il est aufli ancien que
l'Eglise : fa si uation sous la grosse tour,
faiíant corps avec elle , le goût du temps , .
le jugement qu'en ont porté juíqu'à.
present les personnes /ça vantes dans la
connoissance des anciens monumens , sont
des autoritez plus que suffisantes pour'
prouver ce qu'il avance..
L'Historien dë Saint Germain répond5
aussi à l'Aùteu.X- des Remarques , sor ce
B vj qu'il
2 8 MERCURE DE FRANCE:
qu'il avance que l'Egliíe de l'Abbaye
eut uh nouveau Patron , après la Trans
lation de Saint Germain. Il avouè que
Pepin donna alors le Domaine de Palaiseau,
& ses dépendances avec une en
tiere franchise de tous peages , Se que
cette donation fut confirmée par Charle.
magne en 779. mais. il nie que l'Eglise
ait eu dans cette occasion un nouveau.
Patron, & que les Moines de S. Ger
main ayent fait construire un Portail pour
y placer les Statues de S. Germain , des
Pepin , dç Bertrade , &c. pour éterniser
la memoire. du;. grand changement arrivé
en France. Il prouve d'une maniere so
lide & convaincante que l'Eglise, quoi
que dédiée en l'honneur de Sainte Croix,,
& de Saint Vincent, a eu aussi: le nom
de Saint Germain dès la mort du même
Saint, à cause des frequens. miracles que
Dieu operoit à son tombeau ,.nom qui lui
est resté dans les siecles^suivans. II cite
pour ce sujet le testament de Bertrant ,
í ou Bertieram Evêque du Mans , S. Gre
goire de Tours , Saint Ouen , Archevêque
de Rouen qui a écrit la -vie de Saint
Eloy, l'Auteur de la vie dé Sainte Batilde
, & plusieurs Chartes.très.ancien
nes , qu'il a mises parmi les preuves à
la fin de son Histoire. Ilisoutient de plus
que l'Eglise dc.S. Germain n'a eu que
deux
JANVIER
deux dédicaces , la premiere faite par
Saint Germain , & la seconde par le
Pape Alexandre III. en ii6}, Se que.
dans ces deux dédicaces il n'est fait men
tion que de. Sainte Croix & de Saint Vin
cent. Or comme l'on ne donne un Patron
aux Eglises que dans cétte ceremonie y
Dom Bouillart demande à l'Auteur de*
Remarques qu'il lui faste voir. une autre
dédicace faite en 7f4-. ou. environ ,
dans laquelle l'on ait changé le nom de
Saint Vincent , ou ajpûté celui de Saint'
Germain-
Quant à. la íècoside objection , qu'il .
n'est pas vrai-íèmblable que l'on ait pJa--
oé à la porte d'une Eglise les. Statues du
pere -, de la m ere & des freres du Fon-.
dateur1. Dom Bouillart répond que cet
n'est pas une chose inusitée, puisque l'on.
en voit dé íemblables au Portail de Nô
tre.Dame la Répostetdènt l'Auteur mê
me des Remarques fait mention , Se dont
ilparoît reconnoître l'antiquité,
Enfin l' Auteur. de l'Histoire de Saint'
Germain dit que l'Auteur des Remar
ques fait une question inutile, loríqu'il.
demande à' quelle porte d'Eglise a-t'om
representé ainsi des genealogies ? puis
qu'il les admet lui-même dans le Por
tail de S: Germaini en disant qu'il s'ima*
fifre ». voir Pepin , Bertrade tjâ femme ,
Jfe* MERCURE DE FRANCS.
Charlemagne & Carloman ses fils. N'estce
pas là en eiíèt une genealogie à íà
maniere, & suivant ces propres idées.
Un des principaux argumensde l'Au
teur des Remarques est comme ori
IV déja dit, que ces Statues du Por
tail de Saint Germain ont des Cou
ronnes de gloire , qui ne se mettoient
qu'aux' personnes décedées , que l'on
croyoit dans la beatitude , d'où il conclut
que la huitième Statue, qui n'en a point,
represente Charlemagne qui vivoit en
core alors , & par coníequent que le Por
tail de Saint Germain n'a été construit
que de son temps.
Dom Bouillart lui répond que les
Couronnes de gloire se mettoient aux vi-
Vans aussi bien qu'aux morts. , d'où il
conclut que ceux qui font representez .
au Portail de Saint Germain , pou voient
être vivans dans le temps de là construc
tion. Il donne plusieurs exemples de cetusage.
fa) L'Empereur Trajan est repre
senté deux fois dans l'Arc de Constantin,.
2ui est à Rome , comme vivant avec une'
louronne de gloire derriere fa tête.'
(i) Dans les siecles suivans l'Empereur'
(a) V. l'Antiquité expliquée, &c' tòm. ti.
$ 186. & tom. 3. pagg. 31J. 330. & tom. v
p. 167.
{b) iiidt Supplement.
y-alen
t
y á n v nr r ry.»^ f*
Valentinien II. paróît avec une Couron
ne de gloire faiíant des largeíses au peu
ple. On voit auflì des Medailles (#)fra*
pées du vivant des Empereurs Justin , <
Justin le jeune , Maurice , Phocas , & de
quelques Imperatrices , où ils font re
presenter de même. Il ajoute après M. le
Blanc dans son Traité des Monnoyes,
que, les Gaulois ayant été' íubjuguez par
les premiers Rois de la Monarchie Fran
çoise , ont gardé pendant quelque temps'
les usages des Romains leurs derniers
maîtres. Les Rois même de lá premiere
race les ont auflì conservez, principale
ment dans leurs Monnoyes. Ainsi il ne
faut pas s'étònnersi dans ks' temps de la
premiere race l'on mettait des Courons
ries de gloire dérriere la tête dés Rois,
Si même des Evêques qui étoient encore
en vie. L'on en trouve une preuve dans
le premier tome des Annales de Dom
Mabillon , f b) où il est: fait mention de'
S. Armand , Evêque dé Mastric , lequel.
fft son testament en presence de Rieul,^
Archevêque de Rheims , de Mommolen,'
Evê qùe deNoyon, de Vendicien de Cam.
bray ', de Bertin ; Abbé de Sithiu , Se des
Prêtres Jéán & Baudemond. Ils ont tous
des Couronnes de Gloire derriere leurs
f» Numism. Imp. Rom. ulhselm.Sfiwiuri 2-.
>z. MERCURE DE FRANCE.
têtes , comme on le peut voir dans It
planche que Dom Mabíllon' a Fait gras
ver , laquelle a été tirée des anciens. monumens
de l'Abbaye de & Amand.' Ce
íçavant homme fait là - dessus la mê
me obíervation que l'Auteur des Re
marques r5c il s'étonne que ces figu
res portent des couronnes de gloire , quoi
que ceux qu'elles representent fussent en
core vivans. L'on doit donc conclure ne-.
cessairement de ces exemples , que l'on
mettoit íouvent des couronnes de gloire
aux personnes vivantes , & que ce n'est.
pas une preuve que ceux qui íònt repre
sentez au Portail de S. Germain , fus
sent decedez.
Dom Bouillait ajoute: Y a ) l'Auteur
des Remarques admet , fans y penser , k;
même chose ; car en mettant la construc
tion du portail dans le huitième siecle ,.
il dit que les Religieux. de S. Germain le
firent faire pour éterniser la mémoire du
grand changement arrivé en France, en'
754. lorsque le corps de S. Germain fut
transferé, què l'Eglise eut un nouveau
Patron , Se que Pepitvla combla de biens.-
Or s'il est vrai que les figures du Por
tail representent Pepin, fa femme & ses
Énfans , l'Auteur des Remarques doit
convenir que l'on donnoit des couronnes
( * ) Híst. de S. Gertiwpag, 30*.
1
Janvier 17I4." :W
3è gloire aux Rois & auxpersonnes illus
tres, lorsqu'elles vivoient.j puiíque Pepin
& les Princes qu'il íoutient être re1.
preíentez par ces- figures ,- vivoient en
754. 8c que cependant ils ont des' cousonnes
de gloire , ou des nimbes derriere
leurs têtes. Il. est inutile de dire que Gharlemagnen'en
a point , parce qu'il étoit
encore vivant, ^& que les autres étoient
morts. Il en avdit auslì ; mais celui qu'il
avoit est tombe dans la fuite, ou pour
n'avoir pas. bien été attaché,' ou pour
avoir été rompu >. en eífet on voit encore
derriere íà tête un crampon de fer qui le
íetenoit t & il estcouché horiíôntalemerjt
contre la muraille.
Il ne s'agit p.lt»s que de la difficulté que
iorrrîe lf Auteur des Remarques /qui est
defaire voir des couronnes du íixième
siecle íemblables à celles que portent les.
figures' du Portail de S. Germain , & que'
le tombeau de Fredegondc qui Jt une
semblable couronne y soit Veritablement
d'elle. C'est ce que Dom Boùillart déve-
Ibpe avec solidité , en diíànt d'abord que
les anciens Historiens ont fait mention de
la íépulture de Fredegende dans l'Eglise
de S. Vincent, maintenant de S. Germain
des Prez. Il lë prouse ensuite par la situa
tion 8c la distinction des tombeaux des.
Rois 8c des Reines de la premiere race »
f4 MERCURE DE FRANCE;
inhumez dans la' même Egliie,tlonc les
.inícriptions , quoique moins anciennes T
.(ont restées julqu'en 1656. par la tra
dition des Religieux de l'Abbaye , & par
le jugement des períônnes les plus éciar*.
rées dans l'Antiquicé , qui ont regardé
le tombeau de Fredcgondë , comme uQ
monument aussi ancien qu'elle. il répond
enfin aux objections que l'on pourroit fai
re au sujet des Fleurs.de.lys qui font à la
couronne 8c au Iccprre de cette Reine ',
&c rapporte quelques exemples qui font
voir que les fleurs de lys étoient en usage
íòus les Rois de la premiere race s d'où il
Conclut que le tombeau & la couronne de
Frédegoncle «'tant aussi ancien qu'elle, les
couronnesdes statues du Portail de S. Ger
main sont aussi anciennes que & construc^
tion & du sixième siecle.
Je fuis , Messieurs , Sec1
A Paris le 13. Janvier 1714»'
four servir de réponse aux Remarques
fur les figures du Portail de CEglist
de CAbbaye S. Germain.
VOus avez iníèré, Messieurs ., dans
vôtre Journal du mois de May de
l'année derniere , les Remarques d'un'
Auteur Anonyme, fur les figuras du
grand Portail de VEglise Saint Germain
des Pre^, par leíquelles il prétend dé
truire le sentiment du R. P. Dòm Jean'
Mabillon', qui' dit dàns ses Anrtales (a);
que l'£glise de S. Germain a été bâtie
Se fondée par Cliildebert L. & que les'
figures qui íònt au Portail de la même.
Eglise dix coté gauche en entrant , font
S. Germain , Clovis , Sainte Clotilde Se
Clodomir , & au côté opposé , Chilperic,
Childebert , Ultrogothe ,. íà femmes &
Clotaire î.
L'Auteur dés Remarques refute ausii
Dom Thierry Riíinard , qui prétend à
la fin de son Edition de S. Gregoire (b)
de Tours / que les figures qui font à
gauche en entrant representent Saint
(a) Annal. Ben. tom; i. pag. 169.
{í) Gieg. Turpn.
Remv>
JANVIER 1714. ; 2;
Remy , Clovis , Sainte Clotilde & Clo.
domir , Se que celles qui sont à droite ,
sont Thierry , Chlldebert , Ultrogoche
8e Clotaire.
Ces deujr sentimens ne sont pas du
goût de l'Auteur , parce qu'il prétend
l p que c'est Clotaire , & non pas ChHdebert
, qui a achevé de bâtir l'Egliíe,.
& il cite pour ses garants l'Auteur de
la vie de S. Droctovée, (a) Se l'Histoire
interpolée d'Aimoin ^ í. . 2 < cv 29. Se. 3 6 .
& 1. 3. c }1.
2° Il ajoute que ce Portail étant bien
Í>osterieur à la construction de l'Eglise , .
es figures qui y sont repreíentées ne
sont point celles que Dom Mabillon &
Dom Ruinard ont prétendu ; mais cel
les de S. Germain, de Pepin, de Bertrade
, íâ femme ., de Charlemagne Se
Carloman leurs fils , de Childebert , &
d'Ultrogothe , fa femme , & de Clotaire.
Voici les raisons qui confirment l'Au-.
teur dans cette idée. 1 * La donation du.!
Domaine de Palaiíëau , Se de ses dépen
dances faites à' l'Eglise de l'Abbaye par
Pepin , le jour de la Translation de Saints.
Germain y Se confirmée par Charlema
gne en 77 9' Cette Eglise , selon lui ,
eut un nouveau Patron en même temps:-
que la France eut des Rois d'une nou-
(4) Si. OrA. S. Btned. tMt. r.
Bt rell#
ié MERCURE DE FRANCE.
velle race , & les Moines de l'Abbaye J.
pour éterniíèr la memoire d'un si grand
changement , firent construire un Por
tail, où ils placerent les figures de ces
Princes , en conservant toujours la mé
moire de leurs premiers Fondateurs. 2*'
Le peu de vrai.semblance que l'on ait
mis à la porte d'une Eglise les Statues du
pere , de la mere & des freres du Fon
dateur. Et a quelle porte £'Eglise , dit-il
a..t'qn representé ainft des genealogies ?
3° Les Couronnes de gloire qui font
derriere la tête des sept figures , ne íê
mettoient qu'à ceux qui étroient décedezs .
& que l'on croyoit dans la beatitude t
par consequent celui qui n'en a point ne.
peut être que Charlemagne qui vivoit
alors. 4° La difficulté de trouver des^
Couronnes du sixième siecle semblables ;
à celles' que portent les figures du Por-'
tail de Saint Germain.. Enfin le peu de'
eertitude que le tombeau deFredegonde^
qui a une semblable Couronne , soit veri- :
tablement d'elle.. .
Ce íônt là Meísieurs les principaux.^
argumens que l'Auteur des Remarques.
propose dans vôtre Journa.l contre les :
ientimens de Dom Mabillon , & de Dom 1
Huinart au íujet de ces figures. Il seroit?
k- íouhaiter qu'il eut apporté des autorir'
ter tirées de bons Auteurs , au lieu de
Ï'AN VÌ E R 1724. 27
íèá íimples. conjectures qui ne peuvent
fSrvir de preuves dans les difficultez
dont il est ici question.
Dom Jacques Bouillart , qui vient de
mettre au jour l'Histoire de l'Abbaye de
Saint Germain des Prez a répondu dans
íon ouvrage aux objections que l'on
Vient deráporter. Il prouve d'abord que
l'Auteur des Remarques s'est trompé
considerablement , en citant la vie de
Saint Droctovée , & l'Histoire interpo
lée d'Aimoin , & qu'il n'y a pas un seul
mot dans les endroits par lui citez où il
soit marqué que l'Egliíê fut achevée par-
Clotaire. Dom Bouillart prouve au con
traire par les mêmes Auteurs , que Chil.
debert acheva cet Edifice avant ía mort,
& que Saint Germain la dédia , à la sol
licitation de Clotaire , le jour même des
funerailles de Childebert.
Pour ce qui est du Portail , lé même'
Auteur soutient qu'il est aufli ancien que
l'Eglise : fa si uation sous la grosse tour,
faiíant corps avec elle , le goût du temps , .
le jugement qu'en ont porté juíqu'à.
present les personnes /ça vantes dans la
connoissance des anciens monumens , sont
des autoritez plus que suffisantes pour'
prouver ce qu'il avance..
L'Historien dë Saint Germain répond5
aussi à l'Aùteu.X- des Remarques , sor ce
B vj qu'il
2 8 MERCURE DE FRANCE:
qu'il avance que l'Egliíe de l'Abbaye
eut uh nouveau Patron , après la Trans
lation de Saint Germain. Il avouè que
Pepin donna alors le Domaine de Palaiseau,
& ses dépendances avec une en
tiere franchise de tous peages , Se que
cette donation fut confirmée par Charle.
magne en 779. mais. il nie que l'Eglise
ait eu dans cette occasion un nouveau.
Patron, & que les Moines de S. Ger
main ayent fait construire un Portail pour
y placer les Statues de S. Germain , des
Pepin , dç Bertrade , &c. pour éterniser
la memoire. du;. grand changement arrivé
en France. Il prouve d'une maniere so
lide & convaincante que l'Eglise, quoi
que dédiée en l'honneur de Sainte Croix,,
& de Saint Vincent, a eu aussi: le nom
de Saint Germain dès la mort du même
Saint, à cause des frequens. miracles que
Dieu operoit à son tombeau ,.nom qui lui
est resté dans les siecles^suivans. II cite
pour ce sujet le testament de Bertrant ,
í ou Bertieram Evêque du Mans , S. Gre
goire de Tours , Saint Ouen , Archevêque
de Rouen qui a écrit la -vie de Saint
Eloy, l'Auteur de la vie dé Sainte Batilde
, & plusieurs Chartes.très.ancien
nes , qu'il a mises parmi les preuves à
la fin de son Histoire. Ilisoutient de plus
que l'Eglise dc.S. Germain n'a eu que
deux
JANVIER
deux dédicaces , la premiere faite par
Saint Germain , & la seconde par le
Pape Alexandre III. en ii6}, Se que.
dans ces deux dédicaces il n'est fait men
tion que de. Sainte Croix & de Saint Vin
cent. Or comme l'on ne donne un Patron
aux Eglises que dans cétte ceremonie y
Dom Bouillart demande à l'Auteur de*
Remarques qu'il lui faste voir. une autre
dédicace faite en 7f4-. ou. environ ,
dans laquelle l'on ait changé le nom de
Saint Vincent , ou ajpûté celui de Saint'
Germain-
Quant à. la íècoside objection , qu'il .
n'est pas vrai-íèmblable que l'on ait pJa--
oé à la porte d'une Eglise les. Statues du
pere -, de la m ere & des freres du Fon-.
dateur1. Dom Bouillart répond que cet
n'est pas une chose inusitée, puisque l'on.
en voit dé íemblables au Portail de Nô
tre.Dame la Répostetdènt l'Auteur mê
me des Remarques fait mention , Se dont
ilparoît reconnoître l'antiquité,
Enfin l' Auteur. de l'Histoire de Saint'
Germain dit que l'Auteur des Remar
ques fait une question inutile, loríqu'il.
demande à' quelle porte d'Eglise a-t'om
representé ainsi des genealogies ? puis
qu'il les admet lui-même dans le Por
tail de S: Germaini en disant qu'il s'ima*
fifre ». voir Pepin , Bertrade tjâ femme ,
Jfe* MERCURE DE FRANCS.
Charlemagne & Carloman ses fils. N'estce
pas là en eiíèt une genealogie à íà
maniere, & suivant ces propres idées.
Un des principaux argumensde l'Au
teur des Remarques est comme ori
IV déja dit, que ces Statues du Por
tail de Saint Germain ont des Cou
ronnes de gloire , qui ne se mettoient
qu'aux' personnes décedées , que l'on
croyoit dans la beatitude , d'où il conclut
que la huitième Statue, qui n'en a point,
represente Charlemagne qui vivoit en
core alors , & par coníequent que le Por
tail de Saint Germain n'a été construit
que de son temps.
Dom Bouillart lui répond que les
Couronnes de gloire se mettoient aux vi-
Vans aussi bien qu'aux morts. , d'où il
conclut que ceux qui font representez .
au Portail de Saint Germain , pou voient
être vivans dans le temps de là construc
tion. Il donne plusieurs exemples de cetusage.
fa) L'Empereur Trajan est repre
senté deux fois dans l'Arc de Constantin,.
2ui est à Rome , comme vivant avec une'
louronne de gloire derriere fa tête.'
(i) Dans les siecles suivans l'Empereur'
(a) V. l'Antiquité expliquée, &c' tòm. ti.
$ 186. & tom. 3. pagg. 31J. 330. & tom. v
p. 167.
{b) iiidt Supplement.
y-alen
t
y á n v nr r ry.»^ f*
Valentinien II. paróît avec une Couron
ne de gloire faiíant des largeíses au peu
ple. On voit auflì des Medailles (#)fra*
pées du vivant des Empereurs Justin , <
Justin le jeune , Maurice , Phocas , & de
quelques Imperatrices , où ils font re
presenter de même. Il ajoute après M. le
Blanc dans son Traité des Monnoyes,
que, les Gaulois ayant été' íubjuguez par
les premiers Rois de la Monarchie Fran
çoise , ont gardé pendant quelque temps'
les usages des Romains leurs derniers
maîtres. Les Rois même de lá premiere
race les ont auflì conservez, principale
ment dans leurs Monnoyes. Ainsi il ne
faut pas s'étònnersi dans ks' temps de la
premiere race l'on mettait des Courons
ries de gloire dérriere la tête dés Rois,
Si même des Evêques qui étoient encore
en vie. L'on en trouve une preuve dans
le premier tome des Annales de Dom
Mabillon , f b) où il est: fait mention de'
S. Armand , Evêque dé Mastric , lequel.
fft son testament en presence de Rieul,^
Archevêque de Rheims , de Mommolen,'
Evê qùe deNoyon, de Vendicien de Cam.
bray ', de Bertin ; Abbé de Sithiu , Se des
Prêtres Jéán & Baudemond. Ils ont tous
des Couronnes de Gloire derriere leurs
f» Numism. Imp. Rom. ulhselm.Sfiwiuri 2-.
>z. MERCURE DE FRANCE.
têtes , comme on le peut voir dans It
planche que Dom Mabíllon' a Fait gras
ver , laquelle a été tirée des anciens. monumens
de l'Abbaye de & Amand.' Ce
íçavant homme fait là - dessus la mê
me obíervation que l'Auteur des Re
marques r5c il s'étonne que ces figu
res portent des couronnes de gloire , quoi
que ceux qu'elles representent fussent en
core vivans. L'on doit donc conclure ne-.
cessairement de ces exemples , que l'on
mettoit íouvent des couronnes de gloire
aux personnes vivantes , & que ce n'est.
pas une preuve que ceux qui íònt repre
sentez au Portail de S. Germain , fus
sent decedez.
Dom Bouillait ajoute: Y a ) l'Auteur
des Remarques admet , fans y penser , k;
même chose ; car en mettant la construc
tion du portail dans le huitième siecle ,.
il dit que les Religieux. de S. Germain le
firent faire pour éterniser la mémoire du
grand changement arrivé en France, en'
754. lorsque le corps de S. Germain fut
transferé, què l'Eglise eut un nouveau
Patron , Se que Pepitvla combla de biens.-
Or s'il est vrai que les figures du Por
tail representent Pepin, fa femme & ses
Énfans , l'Auteur des Remarques doit
convenir que l'on donnoit des couronnes
( * ) Híst. de S. Gertiwpag, 30*.
1
Janvier 17I4." :W
3è gloire aux Rois & auxpersonnes illus
tres, lorsqu'elles vivoient.j puiíque Pepin
& les Princes qu'il íoutient être re1.
preíentez par ces- figures ,- vivoient en
754. 8c que cependant ils ont des' cousonnes
de gloire , ou des nimbes derriere
leurs têtes. Il. est inutile de dire que Gharlemagnen'en
a point , parce qu'il étoit
encore vivant, ^& que les autres étoient
morts. Il en avdit auslì ; mais celui qu'il
avoit est tombe dans la fuite, ou pour
n'avoir pas. bien été attaché,' ou pour
avoir été rompu >. en eífet on voit encore
derriere íà tête un crampon de fer qui le
íetenoit t & il estcouché horiíôntalemerjt
contre la muraille.
Il ne s'agit p.lt»s que de la difficulté que
iorrrîe lf Auteur des Remarques /qui est
defaire voir des couronnes du íixième
siecle íemblables à celles que portent les.
figures' du Portail de S. Germain , & que'
le tombeau de Fredegondc qui Jt une
semblable couronne y soit Veritablement
d'elle. C'est ce que Dom Boùillart déve-
Ibpe avec solidité , en diíànt d'abord que
les anciens Historiens ont fait mention de
la íépulture de Fredegende dans l'Eglise
de S. Vincent, maintenant de S. Germain
des Prez. Il lë prouse ensuite par la situa
tion 8c la distinction des tombeaux des.
Rois 8c des Reines de la premiere race »
f4 MERCURE DE FRANCE;
inhumez dans la' même Egliie,tlonc les
.inícriptions , quoique moins anciennes T
.(ont restées julqu'en 1656. par la tra
dition des Religieux de l'Abbaye , & par
le jugement des períônnes les plus éciar*.
rées dans l'Antiquicé , qui ont regardé
le tombeau de Fredcgondë , comme uQ
monument aussi ancien qu'elle. il répond
enfin aux objections que l'on pourroit fai
re au sujet des Fleurs.de.lys qui font à la
couronne 8c au Iccprre de cette Reine ',
&c rapporte quelques exemples qui font
voir que les fleurs de lys étoient en usage
íòus les Rois de la premiere race s d'où il
Conclut que le tombeau & la couronne de
Frédegoncle «'tant aussi ancien qu'elle, les
couronnesdes statues du Portail de S. Ger
main sont aussi anciennes que & construc^
tion & du sixième siecle.
Je fuis , Messieurs , Sec1
A Paris le 13. Janvier 1714»'
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Résumé : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure pour servir de réponse aux Remarques sur les figures du Portail de l'Eglise de l'Abbaye S. Germain
La lettre répond aux critiques d'un auteur anonyme publiées dans le Mercure de mai précédent, concernant les figures du portail de l'église Saint-Germain-des-Prés. L'auteur anonyme remet en question les interprétations du Père Jean Mabillon et de Dom Thierry Ruinard, qui attribuent les figures du portail à des personnages spécifiques de la dynastie mérovingienne. Selon l'auteur anonyme, le portail est postérieur à la construction de l'église et représente des personnages comme Pépin, Bertrade, Charlemagne, et leurs descendants. Il soutient que Clotaire, et non Childebert, a achevé la construction de l'église, citant des sources comme la vie de Saint Droctovée et l'histoire interpolée d'Aimoin. Il argue également que les couronnes de gloire sur les statues indiquent que Charlemagne, qui n'en porte pas, était vivant lors de la construction du portail. Dom Jacques Bouillart, dans son histoire de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, réfute ces remarques. Il prouve que Childebert a achevé l'église avant sa mort et que Saint Germain l'a dédiée. Bouillart soutient que le portail est aussi ancien que l'église et que les figures représentent bien des personnages mérovingiens. Il démontre également que les couronnes de gloire pouvaient être attribuées à des personnes vivantes, citant des exemples historiques pour appuyer cette affirmation. Enfin, Bouillart confirme l'ancienneté du tombeau de Frédégonde et des couronnes des statues du portail, les datant du sixième siècle.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 81-82
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, par M. l'Abbé de Vienne, Chanoine de la Cathedrale de Châlons en Champagne, le 22. Decembre 1723.
Début :
J'ay l'honneur de vous informer, Messieurs, d'un évenement qui a eu [...]
Mots clefs :
Corps
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, par M. l'Abbé de Vienne, Chanoine de la Cathedrale de Châlons en Champagne, le 22. Decembre 1723.
£ JT7*^ AIT d'une Lettre écrits au»
Auteurs' du Mercure , par Ai. l'Abbé
de sienne , Chanoine de la Cathedrale'
de Châlons en Champagne , le 2 z.'
Decembre 1723.
J'Ay l'honneur dé vous informer ,
Messieurs , d'un évenement qui a eu
pour témoins. tous les habitans de cette
Ville, &c que j'ai vu moi.même dans
toutes les circonstances que je vais vous
détailler.
On trouva le 14V du present mois da
decembre 1725. en l'Eglise Paroissiale
de S. Alpin , un corps sain & entier'
après vingt. trois ans, & quelque mois
de sepulture ; les yeu* 8c lèvres qui íònt
les parties les plus délicates 3 & par con-
Itquent les plus sujettes à corruption',
n'avoient aucune apparence de pourririture',
se visage étoit si peu changé ,
que l'on reconnut sans peine les traits de;
M. Braux du Locton , vivant" Ecuyer ,
President du Bureau des Trésoriers do
France en Champagne. On raisonna dif
feremment fur un fait aussi singulier m
les uns le regardent comme la récom^
pense du merite & de la vertu du dé
font ?
#2 MERCURE DE FRAN
funt, qui en effet a vécu en bon""Chrérien
, & en honnête homme , d'autre»
l'attribuent à une veine de terre ; mais
ce dernierjfentiment me paroît peu plau.<
íible attendu que le terrain de cette
Eglise est très.humide , & que d'ailleurs
l'on n'a jamais trouvé fous la tombe de
la Famille des Braux de corps sain dans
aucune de lès parties , peu de temps mê
me après avoir été inhumé. Au reste.
Messieurs , quelque cause que puiJïe avoir
un' effet aussi extraordinaire , je l'ai crû
digne de l'attention des curieux. Je fuis,
&c.
Auteurs' du Mercure , par Ai. l'Abbé
de sienne , Chanoine de la Cathedrale'
de Châlons en Champagne , le 2 z.'
Decembre 1723.
J'Ay l'honneur dé vous informer ,
Messieurs , d'un évenement qui a eu
pour témoins. tous les habitans de cette
Ville, &c que j'ai vu moi.même dans
toutes les circonstances que je vais vous
détailler.
On trouva le 14V du present mois da
decembre 1725. en l'Eglise Paroissiale
de S. Alpin , un corps sain & entier'
après vingt. trois ans, & quelque mois
de sepulture ; les yeu* 8c lèvres qui íònt
les parties les plus délicates 3 & par con-
Itquent les plus sujettes à corruption',
n'avoient aucune apparence de pourririture',
se visage étoit si peu changé ,
que l'on reconnut sans peine les traits de;
M. Braux du Locton , vivant" Ecuyer ,
President du Bureau des Trésoriers do
France en Champagne. On raisonna dif
feremment fur un fait aussi singulier m
les uns le regardent comme la récom^
pense du merite & de la vertu du dé
font ?
#2 MERCURE DE FRAN
funt, qui en effet a vécu en bon""Chrérien
, & en honnête homme , d'autre»
l'attribuent à une veine de terre ; mais
ce dernierjfentiment me paroît peu plau.<
íible attendu que le terrain de cette
Eglise est très.humide , & que d'ailleurs
l'on n'a jamais trouvé fous la tombe de
la Famille des Braux de corps sain dans
aucune de lès parties , peu de temps mê
me après avoir été inhumé. Au reste.
Messieurs , quelque cause que puiJïe avoir
un' effet aussi extraordinaire , je l'ai crû
digne de l'attention des curieux. Je fuis,
&c.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, par M. l'Abbé de Vienne, Chanoine de la Cathedrale de Châlons en Champagne, le 22. Decembre 1723.
Le 14 décembre 1725, à Châlons en Champagne, un corps intact a été découvert dans l'église paroissiale de Saint-Alpin après vingt-trois ans de sépulture. Le visage de M. Braux du Locton, écuyer et président du Bureau des Trésoriers de France en Champagne, était parfaitement reconnaissable, sans trace de décomposition. Les habitants ont réagi différemment : certains ont vu cela comme une récompense pour sa vertu et sa foi chrétienne, tandis que d'autres ont évoqué une particularité du terrain, bien que cette explication soit moins convaincante. Le terrain de l'église est humide, et aucune autre tombe de la famille Braux n'a montré de signes similaires de conservation. L'Abbé Chanoine de la Cathédrale de Châlons a jugé cet événement digne d'intérêt et a décidé de le relater dans le Mercure de France.
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3
p. 88-92
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure.
Début :
J'eus le plaisir il y a quelques jours, Messieurs, de souper avec des personnes [...]
Mots clefs :
Bons mots, Italien, Auditeurs
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure.
LETTRE écrite aux Auteurs du
Mercure.
J 'Eus le plaisir il y a quelques jours ,
Meilleurs , de íòuper avec des per
sonnes d'esprit & de merite , qui s'eatretinrent
long .temps fur le Mercure.
On en dit du bien & du mal , comme
vous fçayez que l'on en dit des meilleurs
ouvrages quand on en parie en pleine
liberté.
L'un des convives dit qu'il manquait
un. article essentiel au Mercure, c'est
l'Article dei bons motu Nôtre nation ,
jdit.il , est naturellement yive, & se
conde en reparties plaiíantes , & íëníëes,
qui
JANVIER 1714»
^ui mericeroient d'être exactement re
cueillies. Mais par malheur ce font des
fleurs qui meurent d'abord qu'elles font
écloses. Le Mercure devroit les faire vi
vre éternellement. Il arriveroït même ,
continua.t'il , que s'il y avoit tous les
mois un ReciieH judicieux de cinq ou
íìx bons mots , on pourroit au bout ' de
quelques années extraire des Mercures
un juste volume , qui en ce genre auroit
son prix.
Cet avis fut generalement applaudi ,
Se je fus chargé , Meilleurs , de vous le
communiquer , &c de vous prier d'invi
ter le Public, & -surtout les habitans des
pays qui font au.delà de la Loire de vous
envoyer les bons mots qui échapent en
tout genre dans les converlâtions , dans
les plaidoyers , dans les lettres , Sec.
Je vais , Meilleurs , en attendant vous
en communiquer quelques-uns qui ne
lônt pas dans les Recueils publiez.
Un Seigneur d'Angleterre haï d'un
Ministre , fut injustement accusé d'avoir
tíempé dans une conípiration contre le
Roy. En coníéquence de cette accuíation
H fut injustement puni de mort. Pendant
le procès fa femme ne fit aucune démar
che pour travailler à fa justification.
Quelque temps après ses enfans trama.
rcnt^une veritable conípiration contre le
E Mi
5>o MERCURE DE FRANCE.
Ministre , & résolurent de l'assaslinër..
Ils furent découverts , & pendant qu'on
leur faisoit leur procès la mere sollicitpit
vivement pour eux. Le Ministre
lui dit un jour: D'où vient, Mada
me, que vous sollicitez. fi vivement pour
vos enfans , & qu'on ne vous a p oint
vue ici pendant l'affaire de vôtre mari,
C'est que mon mari n étoit point coupable ,
répondit elle.
Une Dame de Provence disoit qu'elle
n'aimoit pas les hommes de belle taille,
qu'elle auroit plus de goût pour un hom
me d'une taille un peu au.dessous de la
mediocre. Un homme fort grand qui étok
present à ce Diícours en fut piqué , &
s'en vengea en rendant des lôins à cette
Dame. Les mêmes Diícours continue
rent long.temps de la part de la Dame ,
& les soins furent redoublez de la parc
du Cavalier. Un jour qu'il la trouva sou
le, apfès quelques discours generaux , la
conversation tomba , & la Dame parut
rêveuse , le Cavalier lui demanda poli
ment à quoi elso réyoit , songi , lui ditelle
en Provençal , qué vous fi tous
les jours plus picbon ; c'est-à.dire , je
songe que vous devenez. tous les jours plus
petit.
Un Bourgeois de Paris voyoit rire un
Savetier qui demeuroit auprès de chez:
JANVIER 1714. íi
lui presque toutes les fois qu'il pasioic
jUn jour que cela l'impatienta plus qu'à
l'ordinaire : d'où vient , lui dit.il , que
tu ris toutes les fois que je passe ? Se
d'où vient, lui répondit brusquement le
Savetier., que vous passez toutes les fois
que je ris.
Un Prédicateur qui prêchoit avec
beaucoup de feu , faisoit des grimaces à
ses Auditeurs. Ce défaut lui fut reproché
confidemment par un autre Prédicateur
xoncurrent. Le premier lui repartit d'un
.ton doux: Mon pere , vous voyez les
grimaces que je fais à mes Auditeurs
jnais vous ne voyez pas celles que vos
Auditeurs vous font.
Un Gentilhomme de Caen avoit un
-procès considerable au Parlement. Son
^Rapporteur aimoit paílìonnéilfent la Muiìque.
11 avoit beau le solliciter , il le
.trouvoit toujours à son Clavecin , un
livre de Muíique devant lui , & son pro
cès ne se raportoit point. Enfin las de
dtòlliciter , & las des promesses fans effet
xlu Rapporteur, il le pria de lui rendre
ion íâc, íôus quelque prétexte ; le Rap
porteur n'en voulut rien faire, & pro
mit de nouveau de raporter l'affaire. Le
client revient à la charge, & trouvant
encore M. le Conseiller avec un livre
Ae Musique, le pressa plus vivement ds
Eij ' 1««
92 MERCURE DE FRANCE.
lui remettre le sac du procès , mais qu'en
voulez.vous faire , dit le Rapporteur ?
je veux le faire .noter , repartit le Nor
mand , 8c le faire mettre en partition par
un habile Musicien que je connois. '
M. de S. H. Capitaine de Galere per
dit cent Louis à Gènes contre un Italien
avec qui il avpit joiié au Trente &.Qua
rante. Un de ses amis l'avertit qu'il avoir.
été friponné , & que ion joueur ne manr
quoit pas d'arranger quatre Cartes qui
faiíòieht justement quarante , & quand il
donnoit à couper , il mettoit fort habile
ment la coupe'delfus. M. de S. H. bien
instruit, se munit d'une quantité d'as dans
une de ses poches, &c va demander fa
revanche à son fripon , qui croyant avoir
trouvé sa dupe ne íè fait pas prier. On
joue, l'Italien fait fa manoeuvre , & nô
tre Marin fait la sienne, qui étoit en
coupant de glisser finement un as audessus
des Caftes. Il regagna ces cent
Louis, plus de cent pistolles au.delà , 8c
quitta. L'Italien outré de colere & de
dépit , en voulut sçavoir la raison , c'est
que je n'ai plus d'as , lui répondit froi
dement M. de S. H.
Mercure.
J 'Eus le plaisir il y a quelques jours ,
Meilleurs , de íòuper avec des per
sonnes d'esprit & de merite , qui s'eatretinrent
long .temps fur le Mercure.
On en dit du bien & du mal , comme
vous fçayez que l'on en dit des meilleurs
ouvrages quand on en parie en pleine
liberté.
L'un des convives dit qu'il manquait
un. article essentiel au Mercure, c'est
l'Article dei bons motu Nôtre nation ,
jdit.il , est naturellement yive, & se
conde en reparties plaiíantes , & íëníëes,
qui
JANVIER 1714»
^ui mericeroient d'être exactement re
cueillies. Mais par malheur ce font des
fleurs qui meurent d'abord qu'elles font
écloses. Le Mercure devroit les faire vi
vre éternellement. Il arriveroït même ,
continua.t'il , que s'il y avoit tous les
mois un ReciieH judicieux de cinq ou
íìx bons mots , on pourroit au bout ' de
quelques années extraire des Mercures
un juste volume , qui en ce genre auroit
son prix.
Cet avis fut generalement applaudi ,
Se je fus chargé , Meilleurs , de vous le
communiquer , &c de vous prier d'invi
ter le Public, & -surtout les habitans des
pays qui font au.delà de la Loire de vous
envoyer les bons mots qui échapent en
tout genre dans les converlâtions , dans
les plaidoyers , dans les lettres , Sec.
Je vais , Meilleurs , en attendant vous
en communiquer quelques-uns qui ne
lônt pas dans les Recueils publiez.
Un Seigneur d'Angleterre haï d'un
Ministre , fut injustement accusé d'avoir
tíempé dans une conípiration contre le
Roy. En coníéquence de cette accuíation
H fut injustement puni de mort. Pendant
le procès fa femme ne fit aucune démar
che pour travailler à fa justification.
Quelque temps après ses enfans trama.
rcnt^une veritable conípiration contre le
E Mi
5>o MERCURE DE FRANCE.
Ministre , & résolurent de l'assaslinër..
Ils furent découverts , & pendant qu'on
leur faisoit leur procès la mere sollicitpit
vivement pour eux. Le Ministre
lui dit un jour: D'où vient, Mada
me, que vous sollicitez. fi vivement pour
vos enfans , & qu'on ne vous a p oint
vue ici pendant l'affaire de vôtre mari,
C'est que mon mari n étoit point coupable ,
répondit elle.
Une Dame de Provence disoit qu'elle
n'aimoit pas les hommes de belle taille,
qu'elle auroit plus de goût pour un hom
me d'une taille un peu au.dessous de la
mediocre. Un homme fort grand qui étok
present à ce Diícours en fut piqué , &
s'en vengea en rendant des lôins à cette
Dame. Les mêmes Diícours continue
rent long.temps de la part de la Dame ,
& les soins furent redoublez de la parc
du Cavalier. Un jour qu'il la trouva sou
le, apfès quelques discours generaux , la
conversation tomba , & la Dame parut
rêveuse , le Cavalier lui demanda poli
ment à quoi elso réyoit , songi , lui ditelle
en Provençal , qué vous fi tous
les jours plus picbon ; c'est-à.dire , je
songe que vous devenez. tous les jours plus
petit.
Un Bourgeois de Paris voyoit rire un
Savetier qui demeuroit auprès de chez:
JANVIER 1714. íi
lui presque toutes les fois qu'il pasioic
jUn jour que cela l'impatienta plus qu'à
l'ordinaire : d'où vient , lui dit.il , que
tu ris toutes les fois que je passe ? Se
d'où vient, lui répondit brusquement le
Savetier., que vous passez toutes les fois
que je ris.
Un Prédicateur qui prêchoit avec
beaucoup de feu , faisoit des grimaces à
ses Auditeurs. Ce défaut lui fut reproché
confidemment par un autre Prédicateur
xoncurrent. Le premier lui repartit d'un
.ton doux: Mon pere , vous voyez les
grimaces que je fais à mes Auditeurs
jnais vous ne voyez pas celles que vos
Auditeurs vous font.
Un Gentilhomme de Caen avoit un
-procès considerable au Parlement. Son
^Rapporteur aimoit paílìonnéilfent la Muiìque.
11 avoit beau le solliciter , il le
.trouvoit toujours à son Clavecin , un
livre de Muíique devant lui , & son pro
cès ne se raportoit point. Enfin las de
dtòlliciter , & las des promesses fans effet
xlu Rapporteur, il le pria de lui rendre
ion íâc, íôus quelque prétexte ; le Rap
porteur n'en voulut rien faire, & pro
mit de nouveau de raporter l'affaire. Le
client revient à la charge, & trouvant
encore M. le Conseiller avec un livre
Ae Musique, le pressa plus vivement ds
Eij ' 1««
92 MERCURE DE FRANCE.
lui remettre le sac du procès , mais qu'en
voulez.vous faire , dit le Rapporteur ?
je veux le faire .noter , repartit le Nor
mand , 8c le faire mettre en partition par
un habile Musicien que je connois. '
M. de S. H. Capitaine de Galere per
dit cent Louis à Gènes contre un Italien
avec qui il avpit joiié au Trente &.Qua
rante. Un de ses amis l'avertit qu'il avoir.
été friponné , & que ion joueur ne manr
quoit pas d'arranger quatre Cartes qui
faiíòieht justement quarante , & quand il
donnoit à couper , il mettoit fort habile
ment la coupe'delfus. M. de S. H. bien
instruit, se munit d'une quantité d'as dans
une de ses poches, &c va demander fa
revanche à son fripon , qui croyant avoir
trouvé sa dupe ne íè fait pas prier. On
joue, l'Italien fait fa manoeuvre , & nô
tre Marin fait la sienne, qui étoit en
coupant de glisser finement un as audessus
des Caftes. Il regagna ces cent
Louis, plus de cent pistolles au.delà , 8c
quitta. L'Italien outré de colere & de
dépit , en voulut sçavoir la raison , c'est
que je n'ai plus d'as , lui répondit froi
dement M. de S. H.
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Résumé : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure.
La lettre adressée aux auteurs du Mercure rapporte une conversation récente entre des personnes de mérite concernant cette publication. Un convive a souligné l'absence d'un article sur les bons mots, notant la richesse de la nation française en reparties plaisantes et fines. Il a proposé que le Mercure recueille ces bons mots pour les préserver éternellement, suggérant un recueil annuel. Cette idée a été bien accueillie, et l'auteur de la lettre a été chargé de la communiquer aux auteurs du Mercure, les invitant à recueillir des bons mots auprès du public, notamment ceux des régions au-delà de la Loire. L'auteur partage ensuite plusieurs exemples de bons mots. Un premier exemple concerne une femme dont le mari a été injustement condamné. Plus tard, lorsqu'elle plaide pour ses enfants impliqués dans une conspiration, elle explique qu'elle n'avait pas défendu son mari car il était innocent. Un autre exemple provient d'une dame de Provence qui préférait les hommes de petite taille, ce qui a conduit à une réplique humoristique d'un homme grand. Un bourgeois parisien a également échangé des répliques amusantes avec un savetier. Un prédicateur a riposté à une critique sur ses grimaces en soulignant celles de ses auditeurs. Un gentilhomme de Caen a utilisé une métaphore musicale pour presser un rapporteur de traiter son dossier. Enfin, un capitaine de galère a regagné de l'argent perdu au jeu en utilisant une ruse similaire à celle de son adversaire.
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4
p. 175-176
AUX AUTEURS du Mercure sur les premiers Bouts-rimez qu'ils ont donnez au Public sous le nom d'Argasile. SONNET. Par une jeune Demoiselle de Provence, fort jolie & fort spirituelle, qui n'a jamais fait de Vers.
Début :
Vous allez voir bien-tôt votre Mercure à cu [...]
Mots clefs :
Mercure
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texteReconnaissance textuelle : AUX AUTEURS du Mercure sur les premiers Bouts-rimez qu'ils ont donnez au Public sous le nom d'Argasile. SONNET. Par une jeune Demoiselle de Provence, fort jolie & fort spirituelle, qui n'a jamais fait de Vers.
Í4V X A VTE U R S du Merçurefur
les premiers Bouts-rimez. qu'ils ont don-'
nez. au Public fous le nom d! Argo.-
file.
SONNE T.
Par une jeune Demoiselle de Provence y
fort jolie & sort ípirituelle, qui n'a
jamais fait de Vers.
"fr Ous allez voirbien.tôt votre Mercure à eu
1 " Ce Livre qui chez. vous fait bouillir la
marmite }
. . Pes
'lys MERCURE DÉ FRANCE.
í>es Bouts rimez , grands Dieux ! tòut le
monde * . t' irrités
Et se plaint qu'à Buchet vous.ayez survécu,
Síarrasin est défait , Ergafile a vaiwu ,
A remplir Bouts rimez tout pedant U invite j
Chez le Commis Moreau les Sonnets courent
vite »
Et pour les inferer , on lui donne un le».
Ergaíile charmé tous caresse , vous taise ,
Et de se voir moulé ce bouffon ravi d'aise ,
Promet en Bouts rimez de faire une thansen,
Qu'avec plaisir pair vous elle fèra chantée ;
Car dans votre Mercure , oeuvre si fort vanti*
Vous aimez à mêler la farine & le
les premiers Bouts-rimez. qu'ils ont don-'
nez. au Public fous le nom d! Argo.-
file.
SONNE T.
Par une jeune Demoiselle de Provence y
fort jolie & sort ípirituelle, qui n'a
jamais fait de Vers.
"fr Ous allez voirbien.tôt votre Mercure à eu
1 " Ce Livre qui chez. vous fait bouillir la
marmite }
. . Pes
'lys MERCURE DÉ FRANCE.
í>es Bouts rimez , grands Dieux ! tòut le
monde * . t' irrités
Et se plaint qu'à Buchet vous.ayez survécu,
Síarrasin est défait , Ergafile a vaiwu ,
A remplir Bouts rimez tout pedant U invite j
Chez le Commis Moreau les Sonnets courent
vite »
Et pour les inferer , on lui donne un le».
Ergaíile charmé tous caresse , vous taise ,
Et de se voir moulé ce bouffon ravi d'aise ,
Promet en Bouts rimez de faire une thansen,
Qu'avec plaisir pair vous elle fèra chantée ;
Car dans votre Mercure , oeuvre si fort vanti*
Vous aimez à mêler la farine & le
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Résumé : AUX AUTEURS du Mercure sur les premiers Bouts-rimez qu'ils ont donnez au Public sous le nom d'Argasile. SONNET. Par une jeune Demoiselle de Provence, fort jolie & fort spirituelle, qui n'a jamais fait de Vers.
Le texte discute des 'Bouts-rimez', des poèmes rimés publiés sous le nom d'Argofile. Il mentionne une jeune demoiselle de Provence, décrite comme jolie et spirituelle. Le 'Mercure de France' et des personnages comme Pesly, Buchet, Sarrasin et Ergafile sont impliqués dans des échanges littéraires. Ergafile, charmé, promet de composer une chanson en Bouts-rimez. Les poèmes suscitent divers intérêts dans le milieu littéraire.
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5
p. 1063-1073
MEMOIRE adressé aux Auteurs du Mercure de France, sur les Antiquitez de Northumberland en Angleterre.
Début :
Comme je sçai, Messieurs, qu'on voit votre Journal en Angleterre, [...]
Mots clefs :
Angleterre, York, Église, Antiquités, Évêques, Histoire, Diocèse, Northumberland
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texteReconnaissance textuelle : MEMOIRE adressé aux Auteurs du Mercure de France, sur les Antiquitez de Northumberland en Angleterre.
EMOIRE adreffe aux Auteurs du
Mercure de France , fur les Antiquitez
de Northumberland en Angleterre.
C
Omme je fçai , Meffieurs , qu'on
voit votre Journal en Angleterre ,
trouvez bon que je vous prie d'y inferer
I. Vol. la
A iiij
1064 MERCURE DE FRANCE
la demande de quelques éclairciffemens
que je ferois bien aiſe d'avoir ſur une des
Eglifes de ce Royaume , qui a été illuftre
dans fon temps . Il m'eft tombé entre les
mains un Manufcrit du milieu du treiziéme
fiecle , qui contient entre autres
chofes un Catalogue des Evêques de cette
Ifle. Pour en verifier quelque choſe fur
les Collections Benedictines de Dom Mabillon
, j'ai choifi les derniers Sieges dont
il eft parlé , c'est-à- dire les plus Septentrionnaux
& du Pays que les Anglois appellent
Northumberland , ou l'ancienne
Province Ecclefiaftique d'York , & je me
fuis apperçu de quelques difficultez qui
reftent à lever fur les origines de l'Eglife
d'Hauguftald , par rapport à ce qu'en a
dit le P. Mabillon en differens endroits
de fes Ouvrages .
On trouve dans la premiere Partie du
troifiéme fiecle Benedictin , p. 208. l'Ecrit
d'un Chanoine Régulier de cette Eglife ,
rédigé au XII. fiecle , par lequel il paroît
, Num. 24. que ce fut le Roi Egfrid,
à qui S. Wilfrid , placé dès l'an 664. fur
le Siege d'York , avoit le malheur de déplaire
, lequel conjointement avec Theodore
, Archevêque de Cantorbery , pour
diminuer l'étendue du Diocèfe d'York ,
érigea un Evêché à Hauguftald , & que
le premier Evêque placé fur ce nouveau
I. Vol. Siege
JUIN. 1730. 1065
Siege s'appelloit Eata ou Aata. Quoique
le Catalogue manuſcrit que j'ai vŷ , paroiffe
s'accorder avec cet Imprimé , j'en
tranfcrirai cependant ici le commencement
, afin qu'on puiffe juger s'il eſt ſuffifamment
conforme à l'Hiftoire de Bede ,
qui ne pouvoit ignorer l'Hiftoire d'un
Diocèfe dont il étoit.
1
Paulinus primus fuit Archiepifcopus Eboracenfis.
Quo expulfo Scotti videlicet Aidenus,
Finianus, Colemannus fuccefferunt ; qui
nec pallio nec Urbis nobilitate volentes at
tolli , in infula Lindisfarnenfi delituerunt.
Succeffit wilfridus. Quo ultra mare caufa
confecrationis moras nectente , Ceadda contra
regulas ob Ofwio rege inthronizatur :
fed ipfo ab Archiepifcopo Theodoro extrufo ,"
wilfridus , iterum Epifcopus conftituitur. Quo
iterum expulfo duo pro eo conftitui funt ; in
Eboraco Bofa ; in Auguftaldo Eata. Illo
autem defuncto Johannes pro eo ordinatur
tempore Alfridi Regis.. Iterum in totum Epif
copatum wilfridus expulfis Johanne de Auguftaldo
& Bofa de Eboraco receptus eft per
annos quinque. Expulfo iterum wilfrido , illi
fedibus fuis reftituti funt. Defuncto Rege Al
frido , iterum in concordiam wilfridus receptus
fedem apud Auguftaldum habuit , Johanne
in Eboraco migrante , quia jam Bofa
defunctus erat. Succeffit in Eboraco Wilfridus
Presbiter fuus. Ifto defuncto fubftituitur·
1
Egbertus , &c. is
Et A v
1066 MERCURE DE FRANCE
Et dans l'Article fuivant intitulé
Dunhelmenfes Epifcopi , le Catalogue commence
ainfi Lindefarne eft Infula exigua
que nomine à Provincialibus Haligeland
vocatur, in qua Aidanus primus fedit Epif
eopus : Succeffores ejus fuerunt Finianus ,
Colemannus , Tudda , Eata , Cuthbertus ,
Adbertus, Edbertus , Adelwoldus , Kinewlfus
, Higebaldus. Hujus temporibus dani
depopulati funt Infulam , & c.
La liaifon qui a parû à plufieurs Ecrivains
être entre le Siege de Lindisfarne.
& celui d'Auguftald , m'a engagé a rapporter
auffi les dix dernieres lignes que
vous venez de lire . On ne fçauroit produire
trop de Catalogues , lorsqu'on veut
être parfaitement éclaifci fur des points
d'antiquité fi reculez . Il faut auffi avouer
que les variations arrivées dans l'Eglife
d'York , & celles qui ont été formées de
fes démembremens furent fi frequentes:
en peu d'années , que le Pere Mabillonparoit
même s'y être trompé. Il le mar
que au bas de la vie de S. Wilfrid par
Éddi , qu'il a publiée à la fin du premier
Tome du quatriéme fiecle Benedictin
mais d'une maniere qui fe contredit , puifqu'à
la page 689. il dit que lorfque Théodofe
divifa en trois l'Evêché d'York , ce
fut à Haguftald ou Lindisfarne que fur
mis Bofa , & que celui qui s'appelloit Eate
I. Vol. fut
JUIN. 1730. 1067
fut placé à York , & à la page 712. il
place ces deux Evêques tout au contraire,
& neanmoins par la main de Théodore
Bofa à York , & Eate à Haguſtald : qui
eft le fentiment qu'il a fuivi depuis dans
fes Annales , & qui eft conforme à Bede
& aux autres qui ont écrit depuis lui.
Mais cette faute échappée au Pere Mabillon
, eft pour faire voir en paffant que
l'arrangement des Evêques portionnaires
du Diocèfe d'York eft un vrai caffe - tête ,
que les plus habiles peuvent s'y tromper
, jufqu'à ce que les Anglois ayent écrit
à fond fur cette matiere.
&
L'Anonyme Chanoine Régulier d'Hauguftald
au XII fiecle, dont l'écrit paroît
avoir déterminé le P. Mabillon à admettre
Eate pour premier Evêque d'Hauguf
tald , avoit fait des recherches dans les
Chroniques & les Hiftoires du Pays , ainfi
qu'il le dit lui-même , Num. 24. & voici
le rang qu'il femble qu'on doit donner
aux Evêques de ce Siege , fuivant les Memoires
qu'il en a laiffés. Saint Eate auroit
été le premier Evêque d'Hauguftald ; fon
Epifcopat auroit été interrompu par quelques
années de la prélature d'un nommé
Jumbert ou Trumbertht , & cependant
Ş. Eate feroit mort Evêque d'Hauguftald .
Il auroit eu pour fucceffeur S. Jean , puis
S. Wilfrid d'York, lorfque Jean eut choifi
I. Vol.
York
1068 MERCURE DE FRANCE
Yorc , au lieu d'Hauguftald , enfuite faint
Acca , puis les Evêques qui fuivent , fçavoir
, S. Fredbert , S. Alchmond , & un
autre nommé Tilbert. Richard , Prieur
de la même Eglife d'Hauguftald , qui a
auffi étrit au XII . fiecle , fur les origines
de cette Eglife , marque (a) que ce fut
fainte Ethelrede , Reine , Epoufe du Roi
Egfrid , qui fit prefent à S. Wilfrid en
674. de la petite Ville d'Hauguftald , pour
y établir un Evêché. Ut eam Epifcopali
Cathedra fublimaret , cui ipfe primus ac poft
eum alii jure Ecclefiaftico federent , & en
effet ce faint Evêque d'York y bâtit à ce
deffein une Eglife en l'honneur de faint-
André , felon Eddi , Cap. 21.- Auteur de
fa Vie , plus ancien que Bede : mais il n'eut
pas le loifir d'accomplir lui- même la condition
que lui avoit demandée la fainte
Reine. On a vû plus haut que ce fut
Théodore de Cantorbery qui fit cette
érection dans la perfonne d'Eate. Où donc
placer un nommé Oftfore , que Dom Mabillon
met parmi les Evêques du Siege
d'Hauguftald , qui ont été de la connoiffance
du venerable Bede ? Ce feroit un
embarras difficile à lever , s'il étoit certain'
que ce fçavant Benedictin ne fe fût pas
trompé dans cet endroit de ſes Annales ,(b)
. (a) Sac. iij. Bened. P. 1. pag. 228
(b), Annal. Bened. P. 1. pag. 474.
L..Vol.
Mais
JUIN. 1730. 1069
Mais en comparant avec ce qu'il dit ,
l'endroit du quatriéme Livre de Bede
qu'il cite , Num. 23 on reconnoît que-
F'Evêque d'Hauguftald , dont Bede fait là
mention , eft S. Jean , qui le fut après la
mort de S. Eate , & qu'Oftfore , que Bede
nomme le troifiéme des Prélats formez
dans leur jeuneffe par les Ecclefiaftiques :
ou Moines deflervans le Monaftere de
fainte Hilde , & non perfonnellement par
cette fainte Abbeffe , comme le dit Dom
Mabillon , fut Evêque dans la contrée dés
Wicciens , & non d'Hauguftald . Il eft inu
tile de faire remarquer que c'eft encore
par une espece d'inadvertance que les mê
mes Annales Benedictines , page 595. attribuent
à Aetla ou Elda , Evêque de
Dorceſter , tous les voyages & les actions
que Bede , au même endroit , attribue às
cet Oftfore , Evêque des Wicciens . Cela
ne fait rien à P'Hiftoire des Origines
d'Hauguftald..
Mais ce qu'il ne feroit pas indifferent
de fçavoir eft , touchant la maniere ,d'e
crire le nom de la Ville dont je parle ,,
& s'il n'eft pas de l'exactitude de le com--
mencer par une aſpiration & non pas fimplement
par la voyelle A , comme fait le:
Manufcrit que j'ai rapporté cy- deffus &
d'autres Auteurs pofterieurs. N'y ayant:
point d'apparence que les Villes d'An-
Lt.Voll gleterre
FOTO MERCURE DE FRANCE
gleterre ayent tiré leur nom du Latin ,
puifque l'afpiration y eft ufitée jufques
dans les noms qui commencent par une
confonne , tel que Hripis , qui fignifie
l'Abbaye de Ripon; il eft , ce femble, plus
conforme à l'origine des chofes , d'employer
l'afpiration à tous les endroits où
les Anciens l'employoient dans ces noms
propres. On dira peut-être que le nom
d'Auguftald vient de quelque Empereur
Romain, par exemple, d'Hadrien , lequel
fit bâtir peu loin delà le fameux mur qui
féparoit les Bretons Romains d'avec les
Barbares ; mais c'eft deviner que d'avancer
un tel fait fans aucun garant. Richard,
Prieur de cette Eglife , donna , ce femble,
il y a fix cens ans , le dénouement de cette
difficulté Géographique . Parlant des Origines
de cette Ville : Hac autem , dit- il ,
arivulo ibi de currente & quandoque ad
modum torrentis exuberante Heftild nomine
Heftoldeldam quafi prædium Heftild vocatur,
& ailleurs il l'appelle Heftoldesham. Selon
cette étimologie , le nom d'Hauguftald
n'appartient à la Langue Latine , que par
les terminaifons des cas qu'on y ajuste , à
la maniere ordinaire , comme a fait Bede
& les autres depuis lui ; car Eddi , plus
ancien que lui écrit toûjours Haguftaldefe,
fans aucune influxion de cas. Le Chanoine
Regulier anonyme du XII . fiecle qui
Ꮧ. Vol . emJUIN.
1730. 1071
·
employe plufieurs fois l'expreffion de
Sandla Hanguftaldenfis Ecclefia , s'eſt ſervi
auffi une fois du terme d'Haguftaldunum :
& delà vient , fans doute, que dans les
fiecles fuivans cette terminaifon a été ufitée.
Pierre de Natalibus rapportant toute
la vie de S. Jean d'Hauguftald , tirée de
Bede , donne à cet Evêché d'Angleterre
le nom d'Auguftodunum. Ce changement
ou adouciffement de nom s'étant introduit
peu à peu , Maurolycus , Abbé de
Mefane & Baronius depuis lui , s'y font
conformez dans leurs Martyrologes . C'eft
pourquoi j'excuferois volontiers le Cardinal
Baronius , d'avoir annoncé ainfi dans.
le fien au 29. Octobre l'une des Fêtes de
S. Jean d'Hauguftald ; Auguftoduni S. Johannis
Epifcopi & Confefforis. On voit
fuffisamment par la Note , où il fait mention
d'un Wilfrid , fucceffeur de ce faint
Jean , que ce Cardinal n'a nullement cu
en vûe l'Eglife d'Autun en France . Mais
fi ce qu'on me mande du Calendrier du
nouveau Breviare d'Autun eft veritable .
fçavoir que les Editeurs ont fait de ce
faint Evêque d'Angleterre un Evêque
Bourguignon & affis fur le Siege d'Autun ;
la méprife mérite d'être remarquée dans
le fiecle où nous fommes . C'eft comme fi
les Poitevins s'avifoient de mettre au rang
de leurs Evêques un S. Victorin , Evêque
I. Vol.
de
1072 MERCURE DE FRANCE
de Pettau en Stirie , duquel a parlé faine
Jérôme , & qu'ils fe laiffaffent féduire par
le mauvais Latin de Baronius , qui a mis
Pictavienfis au lieu de Pictabionenfis . Je
ne doute pas que les Anglois ne revendiquent
bien vîte le S. Prélat Jean d'Hau ▲ -
guftald,, qquuee M. Robert , dans fa Gaule
Chrétienne , & M. Chaſtelain depuis lui ,
dans fon Martyrologe univerfel , ont
reconnu leur appartenir , & nullement à
l'Eglife d'Autun.
Quoique excufe en quelque maniere
Baronius , fur l'annonce qu'il a faite au
29. Octobre , je dirai cependant qu'il ſeroit
à fouhaiter qu'il s'en fût abftenu ;-
parce que la regle n'eft pas de marquer
un même Saint à deux jours differens
à moins qu'on ne dife que l'un des deux
jours eft celui d'une Tranflation ou autre
Fête , fans quoi on induit les Lecteurs
dans l'erreur . Peut être eft- ce cette duplication
d'annonce qui a porté ceux qui
ont dreffé la Table Topographique de fon
Martyrologe , à ranger ce S. Jean parmi
les Evêques d'Autun , à caufe du mot
´d'Auguftodunum , qu'ils ne fçavoient pas
être le même qu'Auguftaldunum d'Angleterre.
Quoiqu'il en foit , Baronius avoit
déja mis au 7. May le faint Jean Evêque ·
d'Haguftald , fous le nom de Jean de Beverley
, Archevêque d'York. On a vit cy
L. vol. deffus
JUIN
1730. 1073
deffus par les Hiftoriens que j'ai rapportez,
qu'en effet il paffa au Siege d'York après
avoir été affis fur celui d'Hauguftald . Mais
fon grand âge l'obligeant de quitter , il
fe retira à Beverley , qui étoit une Terre
qu'il avoit acquife , & il y mourut. Delà
fui vint ce fur- nom de Beverley , fous lequel
il eft connu plus communément.
L'experience journaliere des Taureaux indomptez
qui devenoient doux comme des
Moutons , dès qu'on les avoit fait entrer
dans le Cimetiere de l'Eglife où il avoit
été inhumé , eft une chofe finguliere à lire
dans Guillaume de Malmesbury . On trouve
auffi que Rever- Ley tire fon étymologie
de Petuaria- Parifiorum. 11 eft affez
fenfible comment Bever vient de Petuaria :
mais on ne voit pas bien d'où a été formée
cette dénomination de Parifiorum. La Capitale
de notre Royaume auroit- elle
vigné jufques- là ? Y auroit- elle envoyé
une Colonie ? Voilà des doutes à réfoudre
, auffi-bien que l'étymologie veritable
d'Hauguftald , l'Egifcopat d'Oftfore & le
nom du premier Prélat qui occupa le
nouveau Siege d'Hauguſtald
Mercure de France , fur les Antiquitez
de Northumberland en Angleterre.
C
Omme je fçai , Meffieurs , qu'on
voit votre Journal en Angleterre ,
trouvez bon que je vous prie d'y inferer
I. Vol. la
A iiij
1064 MERCURE DE FRANCE
la demande de quelques éclairciffemens
que je ferois bien aiſe d'avoir ſur une des
Eglifes de ce Royaume , qui a été illuftre
dans fon temps . Il m'eft tombé entre les
mains un Manufcrit du milieu du treiziéme
fiecle , qui contient entre autres
chofes un Catalogue des Evêques de cette
Ifle. Pour en verifier quelque choſe fur
les Collections Benedictines de Dom Mabillon
, j'ai choifi les derniers Sieges dont
il eft parlé , c'est-à- dire les plus Septentrionnaux
& du Pays que les Anglois appellent
Northumberland , ou l'ancienne
Province Ecclefiaftique d'York , & je me
fuis apperçu de quelques difficultez qui
reftent à lever fur les origines de l'Eglife
d'Hauguftald , par rapport à ce qu'en a
dit le P. Mabillon en differens endroits
de fes Ouvrages .
On trouve dans la premiere Partie du
troifiéme fiecle Benedictin , p. 208. l'Ecrit
d'un Chanoine Régulier de cette Eglife ,
rédigé au XII. fiecle , par lequel il paroît
, Num. 24. que ce fut le Roi Egfrid,
à qui S. Wilfrid , placé dès l'an 664. fur
le Siege d'York , avoit le malheur de déplaire
, lequel conjointement avec Theodore
, Archevêque de Cantorbery , pour
diminuer l'étendue du Diocèfe d'York ,
érigea un Evêché à Hauguftald , & que
le premier Evêque placé fur ce nouveau
I. Vol. Siege
JUIN. 1730. 1065
Siege s'appelloit Eata ou Aata. Quoique
le Catalogue manuſcrit que j'ai vŷ , paroiffe
s'accorder avec cet Imprimé , j'en
tranfcrirai cependant ici le commencement
, afin qu'on puiffe juger s'il eſt ſuffifamment
conforme à l'Hiftoire de Bede ,
qui ne pouvoit ignorer l'Hiftoire d'un
Diocèfe dont il étoit.
1
Paulinus primus fuit Archiepifcopus Eboracenfis.
Quo expulfo Scotti videlicet Aidenus,
Finianus, Colemannus fuccefferunt ; qui
nec pallio nec Urbis nobilitate volentes at
tolli , in infula Lindisfarnenfi delituerunt.
Succeffit wilfridus. Quo ultra mare caufa
confecrationis moras nectente , Ceadda contra
regulas ob Ofwio rege inthronizatur :
fed ipfo ab Archiepifcopo Theodoro extrufo ,"
wilfridus , iterum Epifcopus conftituitur. Quo
iterum expulfo duo pro eo conftitui funt ; in
Eboraco Bofa ; in Auguftaldo Eata. Illo
autem defuncto Johannes pro eo ordinatur
tempore Alfridi Regis.. Iterum in totum Epif
copatum wilfridus expulfis Johanne de Auguftaldo
& Bofa de Eboraco receptus eft per
annos quinque. Expulfo iterum wilfrido , illi
fedibus fuis reftituti funt. Defuncto Rege Al
frido , iterum in concordiam wilfridus receptus
fedem apud Auguftaldum habuit , Johanne
in Eboraco migrante , quia jam Bofa
defunctus erat. Succeffit in Eboraco Wilfridus
Presbiter fuus. Ifto defuncto fubftituitur·
1
Egbertus , &c. is
Et A v
1066 MERCURE DE FRANCE
Et dans l'Article fuivant intitulé
Dunhelmenfes Epifcopi , le Catalogue commence
ainfi Lindefarne eft Infula exigua
que nomine à Provincialibus Haligeland
vocatur, in qua Aidanus primus fedit Epif
eopus : Succeffores ejus fuerunt Finianus ,
Colemannus , Tudda , Eata , Cuthbertus ,
Adbertus, Edbertus , Adelwoldus , Kinewlfus
, Higebaldus. Hujus temporibus dani
depopulati funt Infulam , & c.
La liaifon qui a parû à plufieurs Ecrivains
être entre le Siege de Lindisfarne.
& celui d'Auguftald , m'a engagé a rapporter
auffi les dix dernieres lignes que
vous venez de lire . On ne fçauroit produire
trop de Catalogues , lorsqu'on veut
être parfaitement éclaifci fur des points
d'antiquité fi reculez . Il faut auffi avouer
que les variations arrivées dans l'Eglife
d'York , & celles qui ont été formées de
fes démembremens furent fi frequentes:
en peu d'années , que le Pere Mabillonparoit
même s'y être trompé. Il le mar
que au bas de la vie de S. Wilfrid par
Éddi , qu'il a publiée à la fin du premier
Tome du quatriéme fiecle Benedictin
mais d'une maniere qui fe contredit , puifqu'à
la page 689. il dit que lorfque Théodofe
divifa en trois l'Evêché d'York , ce
fut à Haguftald ou Lindisfarne que fur
mis Bofa , & que celui qui s'appelloit Eate
I. Vol. fut
JUIN. 1730. 1067
fut placé à York , & à la page 712. il
place ces deux Evêques tout au contraire,
& neanmoins par la main de Théodore
Bofa à York , & Eate à Haguſtald : qui
eft le fentiment qu'il a fuivi depuis dans
fes Annales , & qui eft conforme à Bede
& aux autres qui ont écrit depuis lui.
Mais cette faute échappée au Pere Mabillon
, eft pour faire voir en paffant que
l'arrangement des Evêques portionnaires
du Diocèfe d'York eft un vrai caffe - tête ,
que les plus habiles peuvent s'y tromper
, jufqu'à ce que les Anglois ayent écrit
à fond fur cette matiere.
&
L'Anonyme Chanoine Régulier d'Hauguftald
au XII fiecle, dont l'écrit paroît
avoir déterminé le P. Mabillon à admettre
Eate pour premier Evêque d'Hauguf
tald , avoit fait des recherches dans les
Chroniques & les Hiftoires du Pays , ainfi
qu'il le dit lui-même , Num. 24. & voici
le rang qu'il femble qu'on doit donner
aux Evêques de ce Siege , fuivant les Memoires
qu'il en a laiffés. Saint Eate auroit
été le premier Evêque d'Hauguftald ; fon
Epifcopat auroit été interrompu par quelques
années de la prélature d'un nommé
Jumbert ou Trumbertht , & cependant
Ş. Eate feroit mort Evêque d'Hauguftald .
Il auroit eu pour fucceffeur S. Jean , puis
S. Wilfrid d'York, lorfque Jean eut choifi
I. Vol.
York
1068 MERCURE DE FRANCE
Yorc , au lieu d'Hauguftald , enfuite faint
Acca , puis les Evêques qui fuivent , fçavoir
, S. Fredbert , S. Alchmond , & un
autre nommé Tilbert. Richard , Prieur
de la même Eglife d'Hauguftald , qui a
auffi étrit au XII . fiecle , fur les origines
de cette Eglife , marque (a) que ce fut
fainte Ethelrede , Reine , Epoufe du Roi
Egfrid , qui fit prefent à S. Wilfrid en
674. de la petite Ville d'Hauguftald , pour
y établir un Evêché. Ut eam Epifcopali
Cathedra fublimaret , cui ipfe primus ac poft
eum alii jure Ecclefiaftico federent , & en
effet ce faint Evêque d'York y bâtit à ce
deffein une Eglife en l'honneur de faint-
André , felon Eddi , Cap. 21.- Auteur de
fa Vie , plus ancien que Bede : mais il n'eut
pas le loifir d'accomplir lui- même la condition
que lui avoit demandée la fainte
Reine. On a vû plus haut que ce fut
Théodore de Cantorbery qui fit cette
érection dans la perfonne d'Eate. Où donc
placer un nommé Oftfore , que Dom Mabillon
met parmi les Evêques du Siege
d'Hauguftald , qui ont été de la connoiffance
du venerable Bede ? Ce feroit un
embarras difficile à lever , s'il étoit certain'
que ce fçavant Benedictin ne fe fût pas
trompé dans cet endroit de ſes Annales ,(b)
. (a) Sac. iij. Bened. P. 1. pag. 228
(b), Annal. Bened. P. 1. pag. 474.
L..Vol.
Mais
JUIN. 1730. 1069
Mais en comparant avec ce qu'il dit ,
l'endroit du quatriéme Livre de Bede
qu'il cite , Num. 23 on reconnoît que-
F'Evêque d'Hauguftald , dont Bede fait là
mention , eft S. Jean , qui le fut après la
mort de S. Eate , & qu'Oftfore , que Bede
nomme le troifiéme des Prélats formez
dans leur jeuneffe par les Ecclefiaftiques :
ou Moines deflervans le Monaftere de
fainte Hilde , & non perfonnellement par
cette fainte Abbeffe , comme le dit Dom
Mabillon , fut Evêque dans la contrée dés
Wicciens , & non d'Hauguftald . Il eft inu
tile de faire remarquer que c'eft encore
par une espece d'inadvertance que les mê
mes Annales Benedictines , page 595. attribuent
à Aetla ou Elda , Evêque de
Dorceſter , tous les voyages & les actions
que Bede , au même endroit , attribue às
cet Oftfore , Evêque des Wicciens . Cela
ne fait rien à P'Hiftoire des Origines
d'Hauguftald..
Mais ce qu'il ne feroit pas indifferent
de fçavoir eft , touchant la maniere ,d'e
crire le nom de la Ville dont je parle ,,
& s'il n'eft pas de l'exactitude de le com--
mencer par une aſpiration & non pas fimplement
par la voyelle A , comme fait le:
Manufcrit que j'ai rapporté cy- deffus &
d'autres Auteurs pofterieurs. N'y ayant:
point d'apparence que les Villes d'An-
Lt.Voll gleterre
FOTO MERCURE DE FRANCE
gleterre ayent tiré leur nom du Latin ,
puifque l'afpiration y eft ufitée jufques
dans les noms qui commencent par une
confonne , tel que Hripis , qui fignifie
l'Abbaye de Ripon; il eft , ce femble, plus
conforme à l'origine des chofes , d'employer
l'afpiration à tous les endroits où
les Anciens l'employoient dans ces noms
propres. On dira peut-être que le nom
d'Auguftald vient de quelque Empereur
Romain, par exemple, d'Hadrien , lequel
fit bâtir peu loin delà le fameux mur qui
féparoit les Bretons Romains d'avec les
Barbares ; mais c'eft deviner que d'avancer
un tel fait fans aucun garant. Richard,
Prieur de cette Eglife , donna , ce femble,
il y a fix cens ans , le dénouement de cette
difficulté Géographique . Parlant des Origines
de cette Ville : Hac autem , dit- il ,
arivulo ibi de currente & quandoque ad
modum torrentis exuberante Heftild nomine
Heftoldeldam quafi prædium Heftild vocatur,
& ailleurs il l'appelle Heftoldesham. Selon
cette étimologie , le nom d'Hauguftald
n'appartient à la Langue Latine , que par
les terminaifons des cas qu'on y ajuste , à
la maniere ordinaire , comme a fait Bede
& les autres depuis lui ; car Eddi , plus
ancien que lui écrit toûjours Haguftaldefe,
fans aucune influxion de cas. Le Chanoine
Regulier anonyme du XII . fiecle qui
Ꮧ. Vol . emJUIN.
1730. 1071
·
employe plufieurs fois l'expreffion de
Sandla Hanguftaldenfis Ecclefia , s'eſt ſervi
auffi une fois du terme d'Haguftaldunum :
& delà vient , fans doute, que dans les
fiecles fuivans cette terminaifon a été ufitée.
Pierre de Natalibus rapportant toute
la vie de S. Jean d'Hauguftald , tirée de
Bede , donne à cet Evêché d'Angleterre
le nom d'Auguftodunum. Ce changement
ou adouciffement de nom s'étant introduit
peu à peu , Maurolycus , Abbé de
Mefane & Baronius depuis lui , s'y font
conformez dans leurs Martyrologes . C'eft
pourquoi j'excuferois volontiers le Cardinal
Baronius , d'avoir annoncé ainfi dans.
le fien au 29. Octobre l'une des Fêtes de
S. Jean d'Hauguftald ; Auguftoduni S. Johannis
Epifcopi & Confefforis. On voit
fuffisamment par la Note , où il fait mention
d'un Wilfrid , fucceffeur de ce faint
Jean , que ce Cardinal n'a nullement cu
en vûe l'Eglife d'Autun en France . Mais
fi ce qu'on me mande du Calendrier du
nouveau Breviare d'Autun eft veritable .
fçavoir que les Editeurs ont fait de ce
faint Evêque d'Angleterre un Evêque
Bourguignon & affis fur le Siege d'Autun ;
la méprife mérite d'être remarquée dans
le fiecle où nous fommes . C'eft comme fi
les Poitevins s'avifoient de mettre au rang
de leurs Evêques un S. Victorin , Evêque
I. Vol.
de
1072 MERCURE DE FRANCE
de Pettau en Stirie , duquel a parlé faine
Jérôme , & qu'ils fe laiffaffent féduire par
le mauvais Latin de Baronius , qui a mis
Pictavienfis au lieu de Pictabionenfis . Je
ne doute pas que les Anglois ne revendiquent
bien vîte le S. Prélat Jean d'Hau ▲ -
guftald,, qquuee M. Robert , dans fa Gaule
Chrétienne , & M. Chaſtelain depuis lui ,
dans fon Martyrologe univerfel , ont
reconnu leur appartenir , & nullement à
l'Eglife d'Autun.
Quoique excufe en quelque maniere
Baronius , fur l'annonce qu'il a faite au
29. Octobre , je dirai cependant qu'il ſeroit
à fouhaiter qu'il s'en fût abftenu ;-
parce que la regle n'eft pas de marquer
un même Saint à deux jours differens
à moins qu'on ne dife que l'un des deux
jours eft celui d'une Tranflation ou autre
Fête , fans quoi on induit les Lecteurs
dans l'erreur . Peut être eft- ce cette duplication
d'annonce qui a porté ceux qui
ont dreffé la Table Topographique de fon
Martyrologe , à ranger ce S. Jean parmi
les Evêques d'Autun , à caufe du mot
´d'Auguftodunum , qu'ils ne fçavoient pas
être le même qu'Auguftaldunum d'Angleterre.
Quoiqu'il en foit , Baronius avoit
déja mis au 7. May le faint Jean Evêque ·
d'Haguftald , fous le nom de Jean de Beverley
, Archevêque d'York. On a vit cy
L. vol. deffus
JUIN
1730. 1073
deffus par les Hiftoriens que j'ai rapportez,
qu'en effet il paffa au Siege d'York après
avoir été affis fur celui d'Hauguftald . Mais
fon grand âge l'obligeant de quitter , il
fe retira à Beverley , qui étoit une Terre
qu'il avoit acquife , & il y mourut. Delà
fui vint ce fur- nom de Beverley , fous lequel
il eft connu plus communément.
L'experience journaliere des Taureaux indomptez
qui devenoient doux comme des
Moutons , dès qu'on les avoit fait entrer
dans le Cimetiere de l'Eglife où il avoit
été inhumé , eft une chofe finguliere à lire
dans Guillaume de Malmesbury . On trouve
auffi que Rever- Ley tire fon étymologie
de Petuaria- Parifiorum. 11 eft affez
fenfible comment Bever vient de Petuaria :
mais on ne voit pas bien d'où a été formée
cette dénomination de Parifiorum. La Capitale
de notre Royaume auroit- elle
vigné jufques- là ? Y auroit- elle envoyé
une Colonie ? Voilà des doutes à réfoudre
, auffi-bien que l'étymologie veritable
d'Hauguftald , l'Egifcopat d'Oftfore & le
nom du premier Prélat qui occupa le
nouveau Siege d'Hauguſtald
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Résumé : MEMOIRE adressé aux Auteurs du Mercure de France, sur les Antiquitez de Northumberland en Angleterre.
L'auteur sollicite des éclaircissements auprès des rédacteurs du Mercure de France concernant une église anglaise illustre. Il possède un manuscrit du XIIIe siècle listant les évêques de cette île et se concentre sur les sièges épiscopaux du Northumberland, ancienne province ecclésiastique d'York. Il rencontre des difficultés concernant les origines de l'église d'Hauguftald, mentionnée par le Père Mabillon. Le manuscrit et les écrits de Bède le Vénérable, historien anglais du VIIIe siècle, indiquent que le roi Egfrid et l'archevêque Théodore de Cantorbéry ont fondé un évêché à Hauguftald. Le premier évêque de ce siège était Eata ou Aata. Le catalogue manuscrit de l'auteur confirme cette information mais inclut également des extraits pour comparaison. L'auteur examine les variations et erreurs possibles dans les écrits de Mabillon concernant les démembrements du diocèse d'York. Il mentionne un chanoine régulier du XIIe siècle et un prieur de l'église d'Hauguftald, qui ont écrit sur les origines de cette église. Ils indiquent que la reine Sainte Ethelrede a fait don de la ville d'Hauguftald à Saint Wilfrid pour y établir un évêché. L'auteur aborde également des questions d'étymologie et d'orthographe concernant le nom de la ville d'Hauguftald. Il examine les différentes formes du nom utilisées par divers auteurs et conclut que l'utilisation de l'aspiration est plus conforme à l'origine des choses. Il mentionne également des erreurs dans les martyrologes et les calendriers, notamment celle de confondre Saint Jean d'Hauguftald avec un évêque d'Autun en France. Enfin, l'auteur évoque des légendes locales et des étymologies incertaines concernant des lieux comme Beverley, où Saint Jean d'Hauguftald s'est retiré à la fin de sa vie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 1969-1971
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure le 14. Août 1730. sur l'éloge des Grands Hommes.
Début :
On est très satisfait de l'éloge de Mignard, dont vous nous apprenez [...]
Mots clefs :
Pierre Mignard, Grands hommes
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure le 14. Août 1730. sur l'éloge des Grands Hommes.
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Au
teurs du Mercure le 14. Août 1730. fur
Péloge des Grands Hommes.
O
pre-
N eft très fatisfait de l'éloge de Mignard
, dont vous nous apprenez
qu'on a compofé la vie. Celui qui en eft
l'Auteur a raifon de dire qu'il eft le
mier qui fe foit avifé d'écrire la vie d'un
grand Peintre en notre Langue , & qu'il
a fuivi l'exemple des Italiens qui depuis
long- tems en ont donné de femblables.
il eft vrai cependant que dans la Vie des
Hommes Illuftres de M. Perrault on y
voit
*།
1970 MERCURE DE FRANCE
voit l'éloge de Mignard ; mais cet éloge
eft trop court , & on peut dire la même
chofe des autres Vies que M. Perrault a
compofées ; n'eft- il pas évident que la
plupart des Grands hommes dont il a parlé
, pouvoient lui fournir beaucoup plus
de matiere & de traits remarquables qu'il
n'en a employé dans fon Ouvrage Il
feroit donc à fouhaiter qu'il fe trouvât
quelqu'un affez zelé pour donner à ces
differentes Vies plus d'étendue. M. Perrault
n'a écrit fur chacune que deux ou
trois pages feulement , & quelle proportion
y a-t'il entre le mérite de ces Grands
hommes & le petit Difcours qu'il a renfermé
dans un efpace fi étroit ? Il eſt certain
que l'on pourroit , fi on le vouloit ,
remplir plufieurs Volumes de plufieurs
chofes curieuſes , en racontant les vertus ,
les talens , les actions & les paroles mêmes
de ces illuftres perfonnages en tout
genre , qui ont fait tant d'honneur à la
France & à notre fiecle. Il eft de l'interêt
de notre Nation & du Public qu'on ne
laiffe rien perdre de tout ce qui peut
faire connoître & à notre fiecle & à la pofterité
le caractere de chacun de ces Grands
hommes , n'étant pas raifonnable que l'on
foit obligé d'aller chercher dans d'autres
Ouvrages ce qui devroit être renfermé
dans un feul , ni d'avoir recours à l'avenig
SEPTEMBRE. 1730. 1971
nir à des Mémoires particuliers qui auront
été confervés dans les familles. Ce foin
regarde principalement notre fiecle , &
faute d'y faire attention , on rifque de n'y
être plus à tems quand on voudra l'entreprendre.
La nouvelle Vie de Mignard
fait juger que l'Auteur a voulu fuppléer
à ce qui manque dans celle de M. Perrault
; & fi cela eft vrai à cet égard , il
doit bien l'être davantage à l'égard des
Condés , des Turennes , des Luxem
bourgs & de tant d'autres qui font compris
dans le même Ouvrage. Il faut convenir
pourtant que M. Perrault mérite
d'être loüé du deffein qu'il a eu de recueillir
les noms de ces Grands Hommes ; mais
qu'il n'a point eu affez de loifir pour don
ner à chacun toute l'attention qui étoit
neceffaire. Il feroit donc jufte que quelqu'un
de nos Auteurs qui écrivent fibien
voulut bien l'entreprendre , & s'immortalifer
lui même en immortalifant les autres.
Vous pouvez , Meffieurs , fi vous le
jugez à propos , inferer cette Lettre dans
votre Journal ; comme je n'ai en vûë que
le bien & la fatisfaction du Public , je ne
crois pas avoir befoin de me faire connoî
tre particulierement &c.
teurs du Mercure le 14. Août 1730. fur
Péloge des Grands Hommes.
O
pre-
N eft très fatisfait de l'éloge de Mignard
, dont vous nous apprenez
qu'on a compofé la vie. Celui qui en eft
l'Auteur a raifon de dire qu'il eft le
mier qui fe foit avifé d'écrire la vie d'un
grand Peintre en notre Langue , & qu'il
a fuivi l'exemple des Italiens qui depuis
long- tems en ont donné de femblables.
il eft vrai cependant que dans la Vie des
Hommes Illuftres de M. Perrault on y
voit
*།
1970 MERCURE DE FRANCE
voit l'éloge de Mignard ; mais cet éloge
eft trop court , & on peut dire la même
chofe des autres Vies que M. Perrault a
compofées ; n'eft- il pas évident que la
plupart des Grands hommes dont il a parlé
, pouvoient lui fournir beaucoup plus
de matiere & de traits remarquables qu'il
n'en a employé dans fon Ouvrage Il
feroit donc à fouhaiter qu'il fe trouvât
quelqu'un affez zelé pour donner à ces
differentes Vies plus d'étendue. M. Perrault
n'a écrit fur chacune que deux ou
trois pages feulement , & quelle proportion
y a-t'il entre le mérite de ces Grands
hommes & le petit Difcours qu'il a renfermé
dans un efpace fi étroit ? Il eſt certain
que l'on pourroit , fi on le vouloit ,
remplir plufieurs Volumes de plufieurs
chofes curieuſes , en racontant les vertus ,
les talens , les actions & les paroles mêmes
de ces illuftres perfonnages en tout
genre , qui ont fait tant d'honneur à la
France & à notre fiecle. Il eft de l'interêt
de notre Nation & du Public qu'on ne
laiffe rien perdre de tout ce qui peut
faire connoître & à notre fiecle & à la pofterité
le caractere de chacun de ces Grands
hommes , n'étant pas raifonnable que l'on
foit obligé d'aller chercher dans d'autres
Ouvrages ce qui devroit être renfermé
dans un feul , ni d'avoir recours à l'avenig
SEPTEMBRE. 1730. 1971
nir à des Mémoires particuliers qui auront
été confervés dans les familles. Ce foin
regarde principalement notre fiecle , &
faute d'y faire attention , on rifque de n'y
être plus à tems quand on voudra l'entreprendre.
La nouvelle Vie de Mignard
fait juger que l'Auteur a voulu fuppléer
à ce qui manque dans celle de M. Perrault
; & fi cela eft vrai à cet égard , il
doit bien l'être davantage à l'égard des
Condés , des Turennes , des Luxem
bourgs & de tant d'autres qui font compris
dans le même Ouvrage. Il faut convenir
pourtant que M. Perrault mérite
d'être loüé du deffein qu'il a eu de recueillir
les noms de ces Grands Hommes ; mais
qu'il n'a point eu affez de loifir pour don
ner à chacun toute l'attention qui étoit
neceffaire. Il feroit donc jufte que quelqu'un
de nos Auteurs qui écrivent fibien
voulut bien l'entreprendre , & s'immortalifer
lui même en immortalifant les autres.
Vous pouvez , Meffieurs , fi vous le
jugez à propos , inferer cette Lettre dans
votre Journal ; comme je n'ai en vûë que
le bien & la fatisfaction du Public , je ne
crois pas avoir befoin de me faire connoî
tre particulierement &c.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure le 14. Août 1730. sur l'éloge des Grands Hommes.
Dans une lettre datée du 14 août 1730, l'auteur exprime sa satisfaction concernant la récente biographie de Pierre Mignard, soulignant qu'elle est la première en langue française à être dédiée à un grand peintre, suivant l'exemple italien. Cependant, il critique la brièveté de l'éloge de Mignard dans les 'Vies des Hommes Illustres' de Charles Perrault, ainsi que celle des autres biographies de cet ouvrage. L'auteur regrette que Perrault n'ait pas exploité pleinement les informations disponibles sur ces grands hommes, se contentant de quelques pages par vie. Il suggère de rédiger des biographies plus étendues, riches en détails sur les vertus, talents, actions et paroles de ces personnages, afin de préserver leur mémoire pour les générations futures. La nouvelle vie de Mignard semble combler les lacunes de celle de Perrault, de même que les biographies d'autres figures notables comme les Condés, Turenne et Luxembourg. Bien que Perrault soit loué pour avoir recueilli les noms de ces grands hommes, il manque de temps pour leur consacrer l'attention nécessaire. L'auteur espère qu'un autre auteur prendra le relais pour immortaliser ces figures historiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 2624-2628
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, au sujet des anciens Réglemens sur les habits & sur la dépense de bouche, dont il est fait mention dans le Mercure de Septembre 1730.
Début :
Le Public doit vous sçavoir gré, Messieurs, de ce qu'à l'occasion des [...]
Mots clefs :
Règlement, Henri II, Charles IX, Luxe, Habits, Roi
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, au sujet des anciens Réglemens sur les habits & sur la dépense de bouche, dont il est fait mention dans le Mercure de Septembre 1730.
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure
, au fujet des anciens Réglemens fur
les habits & fur la dépense de bouche
dont il eft fait mention dans le Mercure
de Septembre 1730,
E Public doit vous fçavoir gré
Meffieurs , de ce qu'à l'occafion des
modes actuellement en ufage dans les
habillemens , vous lui faites part des Reglemens
quefirent autrefois les Rois Henri
II. & Charles IX. pour reprimer le
luxe qui regnoit de leur tems , & pour
empêcher que les conditions & differens
I. Vol,
Etats
DECEMBRE. 1736. 2623
Etats ne fuflent confondus ; ce font des
Ordonnances qui ne fçauroient être trop
connues dans notre fiecle. En paffant
yous déclarez affez votre fentiment fur
les paniers des Dames , & vous l'aviez
déja fait en 1728. mais le petit coup que
vous leur donnez ne fera jamais capable
de les faire tomber . Il en fera comme de
ces eaux qui s'enflent à mesure qu'on les
frappe peut-être auffi qu'à force de s'enfler
il leur arrivera la même choſe qu'à
la Grenouille de la Fable ; il n'en faut
pas tout à fait defefperer.
On voit une infinité d'anciennes repréfentations
de Dames & de Demoiselles
aux vitrages des Eglifes & dans les Tapifferies
gothiques de deux à trois censt
ans ; mais je ne crois pas qu'il s'y en tronve
aucune habillée de la maniere dont eft
celle que vous avez fait graver . Une chofe
qui doit embaraffer ceux qui écrivent
en Latin l'Hiftoire des François & de
leurs ufages , eft le terme qu'ils employeront
pour fignifier cette forte d'habillement.
En vain le chercheroient- ils dans
les Ecrivains du fiecle d'Augufte. Je le
leur donne même à choisir parmi les quatre
cent mots ou environ que le Gloffaire
de la moyenne & bafle Latinité
rapporte à l'article de re veftiaria ; on
croit quelquefois avoir trouvé le mot
D iij fpe- 1. Vol
2626 MERCURE DE FRANCE
Specifique , & lorfque l'on a recours au
paffage d'où il eft tiré , on découvre que
ce qu'on prenoit pour un habit de femme
eft un habit d'homme . C'est ce que
j'ai reconnu au mot jupa qui m'avoit
frappé. En effet plufieurs perfonnes foutiennent
que les habits des hommes ont
été autrefois bien plus variés , plus amples
& plus fuperbes qu'ils ne font communément
, & que le luxe n'eft refté que
dans ceux des femmes. Permettez encore
M M. qu'à l'occafion de ce Catalogue
des anciens habits je vous dife ce qui m'eft
venu en penſée ; il ne feroit peut - être
pas inutile qu'à mesure que vous ferez
préfent au Public d'une nouvelle Eftampe
des modes courantes , quelqu'un d'entre
vous y ajoutât,pour la fatisfaction de ceux
qui font plus curieux des chofes paffées
que des prefentes , un petit éclairciffement
fur ces anciens habillemens ; la matiere
pourroit quelquefois réjouir les efprits
les plus mélancoliques . Pour moi ,
qui ne fuis pas moins curieux de connoître
les Reglemens qui ont été faits
pour moderer la dépenfe de la table que
ceux qui répriment le luxe des habits ou
qui en aboliffent certaines formes , je
fouhaiterois auffi très fort en voir une
compilation imprimée au bout de notre
Apicius François , ce feroit là fa place
I. Vol. naturelle
DECEMBRE . 1730. 2627
naturelle ; vous comprenez de quel Livre
je veux parler. Ce qui a irrité ma curio
fité fur cet article c'eft la lecture que je
viens de faire par hazard d'une Ordonnance
du Roi Philippe le Hardi de l'an
279. émanée à Paris dans fon Lit de
Juſtice , & rapportée en ces termes par
la Chronique de Rouen donnée par le
Pere Labbe : Statutum fuit in Parlamento
Parifiis à Domino Rege Philippo , & ejus
Baronibus , quod nullus poffit dare in fuo
convivio cum potagio præter duo fercula cum
quodam interferculo : & fuit poena appofita
contra omnes fuper hoc delinquentes. Voilà
un Reglement pour tous les Sujets du
Roi , défenſe d'avoir avec le potage au
delà de deux plats , avec un plat d'entremets.
La même défenſe fut réïterée
aux Gens d'Eglife dans un Concile de
Rheims au bout de quelques années ,
encore n'y eft il point fait mention d'entremets
: Statuimus , dit le Canon 5. de
ce Concile tenu en 1304. ut omnes &fingala
perfona Ecclefiaftica Remenfis Provin
cia in fingulis conviviis fint contente potagio
& duobus ferculis , nifi magnitudo perfonarumfupervenientium
aliud requirat. J'ai
traduit le mot ferculum par celui de plat ,
& je ne crois pas qu'on puiffe l'entendre
autrement , parceque s'il falloit rendre
mot par celui de fervice , le Roi ni le
I. Vol. D iiij Conr
2628 MERCURE DE FRANCE
Concile n'auroient pas impofé une grande
mortification en ordonnant de fe contenter
de trois fervices dans chaque repas,
puifqu'à chacun des trois fervices on peut
mettre cinq , fix , dix , douze , quinze
& vingt plats differens. Je fuis & c.
**
V
LA
Ce 13. Novembre 1730.
, au fujet des anciens Réglemens fur
les habits & fur la dépense de bouche
dont il eft fait mention dans le Mercure
de Septembre 1730,
E Public doit vous fçavoir gré
Meffieurs , de ce qu'à l'occafion des
modes actuellement en ufage dans les
habillemens , vous lui faites part des Reglemens
quefirent autrefois les Rois Henri
II. & Charles IX. pour reprimer le
luxe qui regnoit de leur tems , & pour
empêcher que les conditions & differens
I. Vol,
Etats
DECEMBRE. 1736. 2623
Etats ne fuflent confondus ; ce font des
Ordonnances qui ne fçauroient être trop
connues dans notre fiecle. En paffant
yous déclarez affez votre fentiment fur
les paniers des Dames , & vous l'aviez
déja fait en 1728. mais le petit coup que
vous leur donnez ne fera jamais capable
de les faire tomber . Il en fera comme de
ces eaux qui s'enflent à mesure qu'on les
frappe peut-être auffi qu'à force de s'enfler
il leur arrivera la même choſe qu'à
la Grenouille de la Fable ; il n'en faut
pas tout à fait defefperer.
On voit une infinité d'anciennes repréfentations
de Dames & de Demoiselles
aux vitrages des Eglifes & dans les Tapifferies
gothiques de deux à trois censt
ans ; mais je ne crois pas qu'il s'y en tronve
aucune habillée de la maniere dont eft
celle que vous avez fait graver . Une chofe
qui doit embaraffer ceux qui écrivent
en Latin l'Hiftoire des François & de
leurs ufages , eft le terme qu'ils employeront
pour fignifier cette forte d'habillement.
En vain le chercheroient- ils dans
les Ecrivains du fiecle d'Augufte. Je le
leur donne même à choisir parmi les quatre
cent mots ou environ que le Gloffaire
de la moyenne & bafle Latinité
rapporte à l'article de re veftiaria ; on
croit quelquefois avoir trouvé le mot
D iij fpe- 1. Vol
2626 MERCURE DE FRANCE
Specifique , & lorfque l'on a recours au
paffage d'où il eft tiré , on découvre que
ce qu'on prenoit pour un habit de femme
eft un habit d'homme . C'est ce que
j'ai reconnu au mot jupa qui m'avoit
frappé. En effet plufieurs perfonnes foutiennent
que les habits des hommes ont
été autrefois bien plus variés , plus amples
& plus fuperbes qu'ils ne font communément
, & que le luxe n'eft refté que
dans ceux des femmes. Permettez encore
M M. qu'à l'occafion de ce Catalogue
des anciens habits je vous dife ce qui m'eft
venu en penſée ; il ne feroit peut - être
pas inutile qu'à mesure que vous ferez
préfent au Public d'une nouvelle Eftampe
des modes courantes , quelqu'un d'entre
vous y ajoutât,pour la fatisfaction de ceux
qui font plus curieux des chofes paffées
que des prefentes , un petit éclairciffement
fur ces anciens habillemens ; la matiere
pourroit quelquefois réjouir les efprits
les plus mélancoliques . Pour moi ,
qui ne fuis pas moins curieux de connoître
les Reglemens qui ont été faits
pour moderer la dépenfe de la table que
ceux qui répriment le luxe des habits ou
qui en aboliffent certaines formes , je
fouhaiterois auffi très fort en voir une
compilation imprimée au bout de notre
Apicius François , ce feroit là fa place
I. Vol. naturelle
DECEMBRE . 1730. 2627
naturelle ; vous comprenez de quel Livre
je veux parler. Ce qui a irrité ma curio
fité fur cet article c'eft la lecture que je
viens de faire par hazard d'une Ordonnance
du Roi Philippe le Hardi de l'an
279. émanée à Paris dans fon Lit de
Juſtice , & rapportée en ces termes par
la Chronique de Rouen donnée par le
Pere Labbe : Statutum fuit in Parlamento
Parifiis à Domino Rege Philippo , & ejus
Baronibus , quod nullus poffit dare in fuo
convivio cum potagio præter duo fercula cum
quodam interferculo : & fuit poena appofita
contra omnes fuper hoc delinquentes. Voilà
un Reglement pour tous les Sujets du
Roi , défenſe d'avoir avec le potage au
delà de deux plats , avec un plat d'entremets.
La même défenſe fut réïterée
aux Gens d'Eglife dans un Concile de
Rheims au bout de quelques années ,
encore n'y eft il point fait mention d'entremets
: Statuimus , dit le Canon 5. de
ce Concile tenu en 1304. ut omnes &fingala
perfona Ecclefiaftica Remenfis Provin
cia in fingulis conviviis fint contente potagio
& duobus ferculis , nifi magnitudo perfonarumfupervenientium
aliud requirat. J'ai
traduit le mot ferculum par celui de plat ,
& je ne crois pas qu'on puiffe l'entendre
autrement , parceque s'il falloit rendre
mot par celui de fervice , le Roi ni le
I. Vol. D iiij Conr
2628 MERCURE DE FRANCE
Concile n'auroient pas impofé une grande
mortification en ordonnant de fe contenter
de trois fervices dans chaque repas,
puifqu'à chacun des trois fervices on peut
mettre cinq , fix , dix , douze , quinze
& vingt plats differens. Je fuis & c.
**
V
LA
Ce 13. Novembre 1730.
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Résumé : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, au sujet des anciens Réglemens sur les habits & sur la dépense de bouche, dont il est fait mention dans le Mercure de Septembre 1730.
Dans une lettre datée de décembre 1736, adressée aux auteurs du Mercure, l'auteur exprime sa gratitude pour la publication des anciens règlements des rois Henri II et Charles IX, visant à réprimer le luxe vestimentaire et à maintenir la distinction entre les classes sociales. L'auteur commente les paniers portés par les dames, estimant que les critiques ne suffiront pas à les faire disparaître. Il mentionne des représentations anciennes de femmes dans les vitraux et les tapisseries, soulignant la difficulté de trouver un terme latin approprié pour décrire les habits modernes des femmes. L'auteur observe que les habits masculins étaient autrefois plus variés et luxueux. Il suggère aux auteurs du Mercure d'enrichir leurs publications en ajoutant des éclaircissements sur les anciens habits. Il manifeste également un intérêt pour les règlements concernant la dépense de bouche, citant une ordonnance de Philippe le Hardi en 1279 qui limitait les plats servis lors des repas. Une défense similaire fut réitérée lors d'un concile de Reims en 1304 pour les personnes ecclésiastiques. L'auteur traduit le terme 'ferculum' par 'plat' et estime que cette restriction n'imposait pas une grande mortification.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 271-282
LETTRE de M. le Beuf, Capitaine de Milice Bourgeoise de la Ville de Joigny, écrite aux Auteurs du mercure sur la bonté des vins de Joigny.
Début :
Ce n'est pas la premiere fois, Messieurs, que le mérite des vins Bourguignons [...]
Mots clefs :
Joigny, Vins, Bourguignons, Libéralité, Vignobles d'Auxerre, Vignerons, Causes physiques, Vignes, Soleil levant
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. le Beuf, Capitaine de Milice Bourgeoise de la Ville de Joigny, écrite aux Auteurs du mercure sur la bonté des vins de Joigny.
LETTRE de M. le Beuf, Capitaine
de Milice Bourgeoise de la Ville de Joiécrite
aux Auteurs du Mercure sur
gny ,
la bonté des vins de Joigny.
E n'est pas la premiere fois , Mes-
Csieurs ,que le mérite des vins Bourguignons
a occupé votre Journal. On a
lu avec plaisir ce qui parut sur ce sujet
dans les Mercures de Novembre et Decembre
1723. et dans celui de Septembre
1724. on y vit célebrer les vins d'Auxerre
avec tous les ornemens Historiques et
Poëtiques dont on pût s'aviser. L'Auteur
de ces éloges se laissa peut-être un peu
trop prévenir par l'amour de la Pattie ;
dequoi cet amour n'est-il pas capable ?
Pour nous , Messieurs , en vous priant
de rendre public ce que nous prenons la
liberté de vous écrire sur la bonté de nos
vins , nous n'employerons point tant
d'emphase , nous ne prodiguerons pas
l'érudition.
Ornari res ipsa , negat contenta deceri, Hor,'
Notre principal but est de publier
notre reconnoissance envers le Ciel , qui
nous
272 MERCURE DE FRANCE .
nous a donné cette derniere année une
vendange des plus abondantes ; et quelle
vendange encore ! des vins d'une excellente
qualité , des vins qui , pour parler
le langage du Pays , ont eu le bouquet
sur tous les vins des environs , ensorte
que
ceux d'Auxerre même si vantés , comme
on l'a dit , n'en approchent pas ; aussi
Le débit en est si grand , et il s'en fait un
tel transport , qu'à peine en restera - t'il
pour la boisson de nos Habitans.
C'est cette liberalité du Ciel qui m'a
engagé à mettre sur le papier quelques
Remarques que j'ai faites au sujet de la
qualité de nos vins , qui ordinairement
Re cedent en rien à ceux de nos voisins ,
et peuvent aller de pair avec les meilleurs
d'Auxerre , soit qu'on en regarde la force
ou la vigueur , ce qu'on appelle communément
vin , soit qu'on en considere la délicatesse
, étant bons , délicieux , et mousseux
, sans être sujets à tirer sur la graisse,
toutes qualités inséparables d'un vin parfait
, et qui ne se trouvent pas toujours
rassemblées dans les meilleurs vins. Une
autre vertu particuliere aux nôtres , c'est
de pouvoir se marier avec toute sorte de
vins , en les augmentant en force et en
bonté ; en un mot , notre vin est le veritable
vinum generosim et lene de Pline ; on
ne peut pas mieux ni plus brièvement
en
FEVRIER. 1731. 273
en exprimer le mérite et la qualité . Il est
du goût de tout le monde , et nos Emules
même lui ont rendu justice , et l'ont
exalté plus d'une fois .
Par cette expression j'entens , Messieurs
, particulierement les Citoyens
d'Auxerre ; les vignobles de cette Ville
et ceux de Joigny se ressemblent en
plusieurs manieres ; aussi produisent- ils
les uns et les autres de bons et d'excellens
vins . Cette ressemblance et cette production
ont donné lieu à de fréquens paris
entre des personnes de l'une et de l'autre
Ville, et plus d'une fois des Arbitres
désinteressés et sinceres ont adjugé le prix
aux vins de Joigny.
و
le
nom
C'est dommage que Pline qui a
parlé de tant de choses , en donnant ,
comme on vient de l'observer ,
de generosum &c. à un vin parfait , n'ait
pas ajouté que cette grande qualité est capable
d'influer sur la géneration ; j'aurois
par là une autorité pour alleguer ici
notre Proverbe , qui dit que le bon vin
fait faire des Enfans mâles ; je vous prie
cependant de me le passer ,
cela pourra
réjouir les Lecteurs. Si nous manquons
d'autorité , nous avons pour nous l'experience
, qui confirme par son suffrage la
superiorité de nos vins. Nous avons en
effet à Joigny la moitié plus de garçons
Ꭰ
que
274 MERCURE DE FRANCE.
que de filles , et toutes proportions gasdées
, on y compte plus d'Enfans mâles
que dans toute autre Ville de la Province.
Mais revenons à mes Remarques qui
doivent établir les causes Physiques de la
bonté de nos vins.
Le terroir de nos vignes est extrémement
leger , et le sol si délicat , que les
seps ne peuvent supporter la perche, comme
aux autres endroits où la terre est
plus grasse et plus compacte , aussi nos
seps ne se plaisent pas à être disposés en
treille , comme aux vignobles d'Auxerre,
où l'on voit les seps s'étendre de la longueur
d'une toise ; ici chaque sep est
attaché à son échalas , et s'il s'étend , ce
n'est jamais au delà de deux ou trois piés
de sa souche . Ce terrain leger et délicat
au reste , tel que celui de nos vignes , est
le même que Virgile conseille de choisir
pour cette plante .
>
Nunc quoquamque modo possis cognoscere
dicam .
Rara sit , an supra morem si densa requiras :
( Altera frumentis quoniam favet , altera Baccho
;
Densa magis Cereri , rarissimaquaque Lyao . ')
Georg. II.
Il ne faut pas être Vigneron pour convenir
de l'avantage que le fruit d'une vigne
FEVRIER. 1731 275
1
conségne
taillée comme les nôtres à 3. à 4.
piés de terre, a sur le raisin d'une treille ;
le premier meurit sans doute mieux , et
est incomparablement plus doux que
l'autre ; le premier , si cela se peut dire ,
est plus delié , plus leger , et
et par
quent le meilleur. A la verité , nos Vignes
ne sont pas si abondantes qu'ailleurs
dans des terres basses où le bled croîtroit
beaucoup mieux que sur nos côtes extrê
mement élevées ; mais si nos seps en sont
plus courts , les raisins , comme je l'ai
déja dit , en sont plus délicats et plus
doux , les grains en étant moins gros et
moins serrés.
Enfin l'experience apprend que de deux
arbres , l'un extrémement chargé de fruit,
l'autre n'en portant que médiocrement" ,
le fruit de celui- ci se trouve toujours le
meilleur ; l'application est aisée à faire.
Je ne dois pas oublier ici , à l'avantage
de nos vignes , que ce n'est pas le fumier
qui les rend fécondes ; nous ne suivons
point en cela l'exemple de nos voisins
n'ignorant pas que ce secours utile d'un
côté , est pernicieux de l'autre , en ôtant
au vin sa principale vertu , je veux dire
sa qualité. Nous ne fumons que certaines
vignes en certains cantons , dont le vin
est destiné aux Ouvriers et aux Domestiques
; nous nous souvenons trop bien
Dij du
276 MERCURE DE FRANCE .
du fatal exemple des Vignobles de Sillery
: les Proprietaires charmés de la bonté
, de la réputation et du débit de leurs
vins , voulurent , pour ainsi dire , forcer
la nature à augmenter ses dons ; le fumier
leur parut propre à produire cet effet ,
mais l'issue en fut triste , cet excellent
vin a si fort degeneré depuis , qu'il ne
peut plus être comparé avec les bons de
la même Paroisse .
: nous
L
Un autre avantage , qui ne peut
être contesté c'est l'heureuse
exposition des Vignobles de Joigny qui
regardent tous le Soleil Levant ou le Midi
, ce qu'on ne peut pas dire de tous
ceux d'Auxerre. Cette exposition jointe à
la bonté et à l'Analogie du fonds , ne peut
que produire d'excellens vins . En un mot,
les vignes aiment particulierement le
grand Soleil et les hauteurs , le grand
Maître que j'ai déja cité l'a expressément
dit.
•
Denique apertos
Bacchus amat colles &c.
Et un excellent Poëte moderne , * dont
les Géorgiques approchent fort de l'Ouvrage
de Virgile , le confirme en ces termes
:
* Jacobi Vanierii , è Societate Jesu , Prædium
Rusticum L. VII , et VIII.
Optima
FEVRIER.
1731. 277
Optima jejuni colles , largissima campi ·
Vina dabunt .. ·
·
Tu selige collem
Vitis ubi tepidos spectet generosior Austros.
Et ailleurs.
•
Vinum fert nobile collis ad Austros
Editus , invalidum dant aquora plana liquo¬
rem.
Ce grand Poëte s'étoit auparavant expliqué
sur la nature du terroir qui convient
le mieux à la vigne , et son choix ,
conforme à celui de Virgile , confirme ce
que j'ai dit sur la bonté de notre fonds."
Qua levis est tellus , Austrisque obverſa ,
nec ullo ,
Si liceat , lacerum pectus violata ligone ,
Optimus ille ager est ;
Il confirme aussi ce que j'ai observé
de la maniere d'élever nos vignes , dont
les seps ne s'étendent point trop &c.
Melior de vite jugatâ ,
Quò propriore solo fruitur , vindemia pendet.
Caudice qua brevior , terra vicina reflexi ,
Auxilio folis feliciùs excoquit uvas .
Il faut avouer ici que la Providence
nous a bien favorisés , en nous environ
Diij nant
278. MERCURE DE FRANCE .
nant de collines , dont la hauteur et l'exposition
nous répondent de la bonté et
de la fecondité de nos vignobles. Quel
ques unes de ces collines , ou plutôt de
ces heureuses montagnes , sont si roides
et si escarpées , que lors de la vendange
les charois n'y peuvent arriver qu'en farsant
de longs circuits ; au lieu que la plus
élevée colline d'Auxerre , qui n'a pas à
beaucoup près cette pente , est traversée
par le grand chemin dans toute sa largeur.
C'est cependant là que sont situées
ces côtes de Migraine et de Clerion , st
vantées dans le Mercure. A notre égard,
c'est tout le contraire , le plus haut de
nos collines est occupé par les Vignobles
qui s'en trouvent bien mieux , et
les grands chemins sont au pied des collines
.
On ne peut , au reste , passer par là
sans admirer la situation merveilleuse de
ces Vignobles , qui continuent l'espace
de deux grandes lieuës ; on diroit qu'on
en a affecté l'alignement avec beaucoup
d'art , et on a peine à comprendre comment
le Vigneron peut grimper et tiavailler
sur des lieux ainsi situés .
que Je vous ai déja dit , Messieurs ,
l'érudition ne sera pas prodiguée dans cet
Ecrit , ainsi je me dispense de vous dire
que l'origine des Vignes de Joigny est
aussi
FEVRIER. 1731. 279
aussi ancienne que le retour des Gaulois
du pillage de Clusium , en Italie , nous
avons autant de droit de le prétendre que
Mrs d'Auxerre. Nos Emules n'ont rien pû
dire de l'ancienneté de leurs vignobles
que nous ne puissions nous attribuer
nous sommes , en effet , trop voisins pour
que nos Ancêtres n'ayent pas bû leur
bonne part du vin qu'Arunte fit passer
dans les Gaules pour se venger de sa Patrie
, afin d'en attirer les Colons ; ce Peuple
passa bientôt les Alpes , amorcé par
cette précieuse liqueur.. >
Il est , dis-je , fort croyable que nos
Ancêtres et les Sénonois eurent leur part
de ce vin et des dépouüilles de Clusiums
mais aussi est- il à présumer qu'ils partagerent
quelque tems après l'infortune qui
leur arriva , lorsque les Sénonois furent.
taillés en pieces , selon les Historiens.
Je pourrois encore adopter ici en faveur
de nos vins la prétendue étimologie
de Migraine
, nom d'une côte celebre
près d'Auxerre ; le Panegyriste des vins
Auxerrois l'a tiré de Mithra , nom que
les Perses ont donné au Soleil , lequel ,
dit-il , a passé chez les Latins , et par leur
moyen chez les Gaulois &c. nom enfin
qui après bien des variations et des métamorphoses,
a composé celui deMidrana,
puis Migrana et Migraine.
D iiij
Er
280 MERCURE DE FRANCE
En admettant cette étimologie , c'est
encore un sujet d'éloge pour nos meilleurs
vins ; car nous avons aussi nos Migraines,
c'est-à- dire , des côtes qui portent ce même
nom , dérivé , selon le Panegyriste
d'Auxerre , du nom Oriental de l'Astre ,
dont les vignobles en question reçoivent
tous les jours de si benignes influances.
.
Mais en laissant cette conjecture étimologique
et autres semblables , alleguées
dans le Mercure par nos Emules , en fa-.
veur de leurs vins , pour ce qu'elles peuvent
valoir , je ne puis m'empêcher d'en
proposer ici une qui me paroît d'autant
plus vrai semblable qu'elle est plus simple.
Oui , Messieurs , je suis persuadé avecplusieurs
bons esprits que notre Canton
de Balerne dont les vins sont si exquis ,
tire son nom original de Falerne , Mon- .
tagne , comme tout le monde sçait , de la
Campanie , près de Pouzol , à 2. lieues de
Naples , renommée par ses excellens vins,
dont Pline a parlé , et que les meilleurs
Poëtes Latins ont celébrés . Je suis , dis- .
* Le Canton de Baierne est près la Seigneurie
de Looze , où est un Village de méme nom
et un Château de distinction qui appartientavec
la Seigneurie à Madame de Vaiange , Dame
aussi illustre par sa naissance que par son
esprit et par son inclination pour les Belles-
Lettres.
je ,
FEVRIER. 1731. 281
je , persuadé que d'abord , par raison de
convenance , on a nommé ce Canton ou
cette côte une autre Falerne , nom dont
le changement d'une seule lettre a depuis
fait celui de Balerne , qu'on lui donne
aujourd'hui ; on a cent exemples de pareils
changemens
.
na-
Quoiqu'il en soit , je ne crois pas ,
qu'après les observations toutes
turelles que je viens de faire , M" d'Auxerre
soyent fondés à nous rien contester
sur la qualité et sur l'excellence de
nos vins , qui n'ont jamais été inférieurs
aux leurs , et qui souvent les ont surpassés
; nous pourrons leur ceder en autre
chose , quand la raison et la justice
le demanderont : nous n'avons pas trouvé
mauvais qu'ils ayent fait imprimer dans
un Mercure l'avantage prétendu que
leurs joueurs de longue paume remporterent
, selon eux , sur les nôtres , il y a
quelque tems , quoique le narré soit un
peu hyperbolique . Une seule chose auroit
pû nous déplaire ( mais nous l'avons méprisée
comme elle a choqué quantité
d'honnêtes gens , qui en lisant le Couplet
qui termine le Narré dont je viens de
parler , ont été surpris que le bon vin
d'Auxerre n'ait pû produire parmi tant
de gens qui se mêlent de rimer dans cette
Ville , qu'un miserable rapsodie , un vrai
D v Pont
1
282 MERCURE DE FRANCE
Pont-Neuf, je vous en laisse les Juges.
Je ne sçai si , toute rancune à part , on
ne pourroit pas risposter presque sur les
mêmes rimes et sur le même Air des Folies
d'Espagne ou des Folies d'Auxerre , le
Couplet que voici :
Chers Auxerrois, si vous voulez m'en croire
Contre Joigny ne lancez plus vos traits ;
Occupez-vous du noble soin de boire ,
Ou rimez mieux , ou ne rimez jamais.
Je suis , &c.
A Joigny , le 15. Janvier 173 .
de Milice Bourgeoise de la Ville de Joiécrite
aux Auteurs du Mercure sur
gny ,
la bonté des vins de Joigny.
E n'est pas la premiere fois , Mes-
Csieurs ,que le mérite des vins Bourguignons
a occupé votre Journal. On a
lu avec plaisir ce qui parut sur ce sujet
dans les Mercures de Novembre et Decembre
1723. et dans celui de Septembre
1724. on y vit célebrer les vins d'Auxerre
avec tous les ornemens Historiques et
Poëtiques dont on pût s'aviser. L'Auteur
de ces éloges se laissa peut-être un peu
trop prévenir par l'amour de la Pattie ;
dequoi cet amour n'est-il pas capable ?
Pour nous , Messieurs , en vous priant
de rendre public ce que nous prenons la
liberté de vous écrire sur la bonté de nos
vins , nous n'employerons point tant
d'emphase , nous ne prodiguerons pas
l'érudition.
Ornari res ipsa , negat contenta deceri, Hor,'
Notre principal but est de publier
notre reconnoissance envers le Ciel , qui
nous
272 MERCURE DE FRANCE .
nous a donné cette derniere année une
vendange des plus abondantes ; et quelle
vendange encore ! des vins d'une excellente
qualité , des vins qui , pour parler
le langage du Pays , ont eu le bouquet
sur tous les vins des environs , ensorte
que
ceux d'Auxerre même si vantés , comme
on l'a dit , n'en approchent pas ; aussi
Le débit en est si grand , et il s'en fait un
tel transport , qu'à peine en restera - t'il
pour la boisson de nos Habitans.
C'est cette liberalité du Ciel qui m'a
engagé à mettre sur le papier quelques
Remarques que j'ai faites au sujet de la
qualité de nos vins , qui ordinairement
Re cedent en rien à ceux de nos voisins ,
et peuvent aller de pair avec les meilleurs
d'Auxerre , soit qu'on en regarde la force
ou la vigueur , ce qu'on appelle communément
vin , soit qu'on en considere la délicatesse
, étant bons , délicieux , et mousseux
, sans être sujets à tirer sur la graisse,
toutes qualités inséparables d'un vin parfait
, et qui ne se trouvent pas toujours
rassemblées dans les meilleurs vins. Une
autre vertu particuliere aux nôtres , c'est
de pouvoir se marier avec toute sorte de
vins , en les augmentant en force et en
bonté ; en un mot , notre vin est le veritable
vinum generosim et lene de Pline ; on
ne peut pas mieux ni plus brièvement
en
FEVRIER. 1731. 273
en exprimer le mérite et la qualité . Il est
du goût de tout le monde , et nos Emules
même lui ont rendu justice , et l'ont
exalté plus d'une fois .
Par cette expression j'entens , Messieurs
, particulierement les Citoyens
d'Auxerre ; les vignobles de cette Ville
et ceux de Joigny se ressemblent en
plusieurs manieres ; aussi produisent- ils
les uns et les autres de bons et d'excellens
vins . Cette ressemblance et cette production
ont donné lieu à de fréquens paris
entre des personnes de l'une et de l'autre
Ville, et plus d'une fois des Arbitres
désinteressés et sinceres ont adjugé le prix
aux vins de Joigny.
و
le
nom
C'est dommage que Pline qui a
parlé de tant de choses , en donnant ,
comme on vient de l'observer ,
de generosum &c. à un vin parfait , n'ait
pas ajouté que cette grande qualité est capable
d'influer sur la géneration ; j'aurois
par là une autorité pour alleguer ici
notre Proverbe , qui dit que le bon vin
fait faire des Enfans mâles ; je vous prie
cependant de me le passer ,
cela pourra
réjouir les Lecteurs. Si nous manquons
d'autorité , nous avons pour nous l'experience
, qui confirme par son suffrage la
superiorité de nos vins. Nous avons en
effet à Joigny la moitié plus de garçons
Ꭰ
que
274 MERCURE DE FRANCE.
que de filles , et toutes proportions gasdées
, on y compte plus d'Enfans mâles
que dans toute autre Ville de la Province.
Mais revenons à mes Remarques qui
doivent établir les causes Physiques de la
bonté de nos vins.
Le terroir de nos vignes est extrémement
leger , et le sol si délicat , que les
seps ne peuvent supporter la perche, comme
aux autres endroits où la terre est
plus grasse et plus compacte , aussi nos
seps ne se plaisent pas à être disposés en
treille , comme aux vignobles d'Auxerre,
où l'on voit les seps s'étendre de la longueur
d'une toise ; ici chaque sep est
attaché à son échalas , et s'il s'étend , ce
n'est jamais au delà de deux ou trois piés
de sa souche . Ce terrain leger et délicat
au reste , tel que celui de nos vignes , est
le même que Virgile conseille de choisir
pour cette plante .
>
Nunc quoquamque modo possis cognoscere
dicam .
Rara sit , an supra morem si densa requiras :
( Altera frumentis quoniam favet , altera Baccho
;
Densa magis Cereri , rarissimaquaque Lyao . ')
Georg. II.
Il ne faut pas être Vigneron pour convenir
de l'avantage que le fruit d'une vigne
FEVRIER. 1731 275
1
conségne
taillée comme les nôtres à 3. à 4.
piés de terre, a sur le raisin d'une treille ;
le premier meurit sans doute mieux , et
est incomparablement plus doux que
l'autre ; le premier , si cela se peut dire ,
est plus delié , plus leger , et
et par
quent le meilleur. A la verité , nos Vignes
ne sont pas si abondantes qu'ailleurs
dans des terres basses où le bled croîtroit
beaucoup mieux que sur nos côtes extrê
mement élevées ; mais si nos seps en sont
plus courts , les raisins , comme je l'ai
déja dit , en sont plus délicats et plus
doux , les grains en étant moins gros et
moins serrés.
Enfin l'experience apprend que de deux
arbres , l'un extrémement chargé de fruit,
l'autre n'en portant que médiocrement" ,
le fruit de celui- ci se trouve toujours le
meilleur ; l'application est aisée à faire.
Je ne dois pas oublier ici , à l'avantage
de nos vignes , que ce n'est pas le fumier
qui les rend fécondes ; nous ne suivons
point en cela l'exemple de nos voisins
n'ignorant pas que ce secours utile d'un
côté , est pernicieux de l'autre , en ôtant
au vin sa principale vertu , je veux dire
sa qualité. Nous ne fumons que certaines
vignes en certains cantons , dont le vin
est destiné aux Ouvriers et aux Domestiques
; nous nous souvenons trop bien
Dij du
276 MERCURE DE FRANCE .
du fatal exemple des Vignobles de Sillery
: les Proprietaires charmés de la bonté
, de la réputation et du débit de leurs
vins , voulurent , pour ainsi dire , forcer
la nature à augmenter ses dons ; le fumier
leur parut propre à produire cet effet ,
mais l'issue en fut triste , cet excellent
vin a si fort degeneré depuis , qu'il ne
peut plus être comparé avec les bons de
la même Paroisse .
: nous
L
Un autre avantage , qui ne peut
être contesté c'est l'heureuse
exposition des Vignobles de Joigny qui
regardent tous le Soleil Levant ou le Midi
, ce qu'on ne peut pas dire de tous
ceux d'Auxerre. Cette exposition jointe à
la bonté et à l'Analogie du fonds , ne peut
que produire d'excellens vins . En un mot,
les vignes aiment particulierement le
grand Soleil et les hauteurs , le grand
Maître que j'ai déja cité l'a expressément
dit.
•
Denique apertos
Bacchus amat colles &c.
Et un excellent Poëte moderne , * dont
les Géorgiques approchent fort de l'Ouvrage
de Virgile , le confirme en ces termes
:
* Jacobi Vanierii , è Societate Jesu , Prædium
Rusticum L. VII , et VIII.
Optima
FEVRIER.
1731. 277
Optima jejuni colles , largissima campi ·
Vina dabunt .. ·
·
Tu selige collem
Vitis ubi tepidos spectet generosior Austros.
Et ailleurs.
•
Vinum fert nobile collis ad Austros
Editus , invalidum dant aquora plana liquo¬
rem.
Ce grand Poëte s'étoit auparavant expliqué
sur la nature du terroir qui convient
le mieux à la vigne , et son choix ,
conforme à celui de Virgile , confirme ce
que j'ai dit sur la bonté de notre fonds."
Qua levis est tellus , Austrisque obverſa ,
nec ullo ,
Si liceat , lacerum pectus violata ligone ,
Optimus ille ager est ;
Il confirme aussi ce que j'ai observé
de la maniere d'élever nos vignes , dont
les seps ne s'étendent point trop &c.
Melior de vite jugatâ ,
Quò propriore solo fruitur , vindemia pendet.
Caudice qua brevior , terra vicina reflexi ,
Auxilio folis feliciùs excoquit uvas .
Il faut avouer ici que la Providence
nous a bien favorisés , en nous environ
Diij nant
278. MERCURE DE FRANCE .
nant de collines , dont la hauteur et l'exposition
nous répondent de la bonté et
de la fecondité de nos vignobles. Quel
ques unes de ces collines , ou plutôt de
ces heureuses montagnes , sont si roides
et si escarpées , que lors de la vendange
les charois n'y peuvent arriver qu'en farsant
de longs circuits ; au lieu que la plus
élevée colline d'Auxerre , qui n'a pas à
beaucoup près cette pente , est traversée
par le grand chemin dans toute sa largeur.
C'est cependant là que sont situées
ces côtes de Migraine et de Clerion , st
vantées dans le Mercure. A notre égard,
c'est tout le contraire , le plus haut de
nos collines est occupé par les Vignobles
qui s'en trouvent bien mieux , et
les grands chemins sont au pied des collines
.
On ne peut , au reste , passer par là
sans admirer la situation merveilleuse de
ces Vignobles , qui continuent l'espace
de deux grandes lieuës ; on diroit qu'on
en a affecté l'alignement avec beaucoup
d'art , et on a peine à comprendre comment
le Vigneron peut grimper et tiavailler
sur des lieux ainsi situés .
que Je vous ai déja dit , Messieurs ,
l'érudition ne sera pas prodiguée dans cet
Ecrit , ainsi je me dispense de vous dire
que l'origine des Vignes de Joigny est
aussi
FEVRIER. 1731. 279
aussi ancienne que le retour des Gaulois
du pillage de Clusium , en Italie , nous
avons autant de droit de le prétendre que
Mrs d'Auxerre. Nos Emules n'ont rien pû
dire de l'ancienneté de leurs vignobles
que nous ne puissions nous attribuer
nous sommes , en effet , trop voisins pour
que nos Ancêtres n'ayent pas bû leur
bonne part du vin qu'Arunte fit passer
dans les Gaules pour se venger de sa Patrie
, afin d'en attirer les Colons ; ce Peuple
passa bientôt les Alpes , amorcé par
cette précieuse liqueur.. >
Il est , dis-je , fort croyable que nos
Ancêtres et les Sénonois eurent leur part
de ce vin et des dépouüilles de Clusiums
mais aussi est- il à présumer qu'ils partagerent
quelque tems après l'infortune qui
leur arriva , lorsque les Sénonois furent.
taillés en pieces , selon les Historiens.
Je pourrois encore adopter ici en faveur
de nos vins la prétendue étimologie
de Migraine
, nom d'une côte celebre
près d'Auxerre ; le Panegyriste des vins
Auxerrois l'a tiré de Mithra , nom que
les Perses ont donné au Soleil , lequel ,
dit-il , a passé chez les Latins , et par leur
moyen chez les Gaulois &c. nom enfin
qui après bien des variations et des métamorphoses,
a composé celui deMidrana,
puis Migrana et Migraine.
D iiij
Er
280 MERCURE DE FRANCE
En admettant cette étimologie , c'est
encore un sujet d'éloge pour nos meilleurs
vins ; car nous avons aussi nos Migraines,
c'est-à- dire , des côtes qui portent ce même
nom , dérivé , selon le Panegyriste
d'Auxerre , du nom Oriental de l'Astre ,
dont les vignobles en question reçoivent
tous les jours de si benignes influances.
.
Mais en laissant cette conjecture étimologique
et autres semblables , alleguées
dans le Mercure par nos Emules , en fa-.
veur de leurs vins , pour ce qu'elles peuvent
valoir , je ne puis m'empêcher d'en
proposer ici une qui me paroît d'autant
plus vrai semblable qu'elle est plus simple.
Oui , Messieurs , je suis persuadé avecplusieurs
bons esprits que notre Canton
de Balerne dont les vins sont si exquis ,
tire son nom original de Falerne , Mon- .
tagne , comme tout le monde sçait , de la
Campanie , près de Pouzol , à 2. lieues de
Naples , renommée par ses excellens vins,
dont Pline a parlé , et que les meilleurs
Poëtes Latins ont celébrés . Je suis , dis- .
* Le Canton de Baierne est près la Seigneurie
de Looze , où est un Village de méme nom
et un Château de distinction qui appartientavec
la Seigneurie à Madame de Vaiange , Dame
aussi illustre par sa naissance que par son
esprit et par son inclination pour les Belles-
Lettres.
je ,
FEVRIER. 1731. 281
je , persuadé que d'abord , par raison de
convenance , on a nommé ce Canton ou
cette côte une autre Falerne , nom dont
le changement d'une seule lettre a depuis
fait celui de Balerne , qu'on lui donne
aujourd'hui ; on a cent exemples de pareils
changemens
.
na-
Quoiqu'il en soit , je ne crois pas ,
qu'après les observations toutes
turelles que je viens de faire , M" d'Auxerre
soyent fondés à nous rien contester
sur la qualité et sur l'excellence de
nos vins , qui n'ont jamais été inférieurs
aux leurs , et qui souvent les ont surpassés
; nous pourrons leur ceder en autre
chose , quand la raison et la justice
le demanderont : nous n'avons pas trouvé
mauvais qu'ils ayent fait imprimer dans
un Mercure l'avantage prétendu que
leurs joueurs de longue paume remporterent
, selon eux , sur les nôtres , il y a
quelque tems , quoique le narré soit un
peu hyperbolique . Une seule chose auroit
pû nous déplaire ( mais nous l'avons méprisée
comme elle a choqué quantité
d'honnêtes gens , qui en lisant le Couplet
qui termine le Narré dont je viens de
parler , ont été surpris que le bon vin
d'Auxerre n'ait pû produire parmi tant
de gens qui se mêlent de rimer dans cette
Ville , qu'un miserable rapsodie , un vrai
D v Pont
1
282 MERCURE DE FRANCE
Pont-Neuf, je vous en laisse les Juges.
Je ne sçai si , toute rancune à part , on
ne pourroit pas risposter presque sur les
mêmes rimes et sur le même Air des Folies
d'Espagne ou des Folies d'Auxerre , le
Couplet que voici :
Chers Auxerrois, si vous voulez m'en croire
Contre Joigny ne lancez plus vos traits ;
Occupez-vous du noble soin de boire ,
Ou rimez mieux , ou ne rimez jamais.
Je suis , &c.
A Joigny , le 15. Janvier 173 .
Fermer
Résumé : LETTRE de M. le Beuf, Capitaine de Milice Bourgeoise de la Ville de Joigny, écrite aux Auteurs du mercure sur la bonté des vins de Joigny.
La lettre de M. le Beuf, capitaine de la milice bourgeoise de Joigny, adressée aux auteurs du Mercure de France, vise à célébrer la qualité des vins de Joigny. L'auteur reconnaît les éloges précédents sur les vins bourguignons et d'Auxerre, mais souhaite mettre en avant les mérites des vins de Joigny. Il souligne une vendange abondante et de grande qualité en 1730, avec des vins ayant un bouquet supérieur à ceux des environs, y compris ceux d'Auxerre. M. le Beuf décrit les caractéristiques des vins de Joigny, qui sont forts, délicieux et mousseux, sans être gras. Ils se marient bien avec d'autres vins, augmentant leur force et leur bonté. Il compare ces vins au 'vinum generosum et lene' de Pline. Les vins de Joigny sont appréciés par tous, y compris les habitants d'Auxerre, qui les ont souvent préférés lors de concours. L'auteur attribue la qualité des vins de Joigny à plusieurs facteurs naturels : un terroir léger et délicat, une exposition favorable au soleil levant ou au midi, et une méthode de culture spécifique. Les vignes sont taillées court et ne sont pas fumées, contrairement à certaines pratiques voisines. Il mentionne également l'ancienneté des vignobles de Joigny, remontant au retour des Gaulois du pillage de Clusium. Enfin, M. le Beuf affirme que les vins de Joigny n'ont jamais été inférieurs à ceux d'Auxerre et les ont souvent surpassés. Il conclut en soulignant que, bien que les habitants d'Auxerre aient pu exagérer leurs succès dans d'autres domaines, les vins de Joigny restent supérieurs. Le texte est une correspondance datée du 15 janvier 1733, provenant de Joigny. L'auteur y mentionne une dispute impliquant des habitants d'Auxerre et de Joigny, probablement liée à des joutes poétiques ou satiriques. Il conseille aux Auxerrois de ne plus attaquer Joigny et de se concentrer sur des activités plus nobles, comme boire ou rimer mieux. L'auteur exprime également son souhait que les Auxerrois cessent de rimer s'ils ne peuvent pas le faire correctement. Le texte fait référence à des juges et à des airs musicaux connus, tels que les Folies d'Espagne ou les Folies d'Auxerre, pour illustrer son propos.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
9
p. 1912-1916
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure le 28. du mois de Juillet 1731. sur le Couvreur du Village de Baron.
Début :
Vous ne désapprouverez point, Messieurs, qu'on vous avertisse de ce [...]
Mots clefs :
Couvreur, Village de Baron, Narrations, Lieux, Équivoque
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure le 28. du mois de Juillet 1731. sur le Couvreur du Village de Baron.
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs
du Mercure le 28. du mois de Juillet
1731. sur le Couvreurdu Village de Baron.
Ous ne désaprouverez point , Mes-
Vsieurs,quan point,de se sieurs , qu'on vous avertisse de ce
qui paroît de défectueux dans les Narrations
qui sont imprimées dans vôtre
Journal . Comme je fais profession
de dire la verité , je vais vous faire
une observation , qui quoyque bagatelle
A OUST. 1731. 1913
telle ou minutie , peut avoir cependant
son utilité. C'est que souvent lorsque
vous rapportés quelque Evenement extraordinaire
arrivé en certains Lieux ,
d'aprés les Lettres qu'on vous écrit , on
ne met point les Lecteurs au fait de ces
Hieux-là . On ne sçait quelquefois où ils
sont situés , ni où les prendre. Ce seront
des Bourgs ou des Villages d'un nom
fort commun , et en ce cas où les chercher
si la Province ou le Diocèse n'est pas
nommé ?
Ce qui m'a déterminé à vous écrire
là- dessus , est l'équivoque qui se trouve
au commencement de la Relation du fait
singulier arrivé à Senlis dans le 2º. Volume
du Mercure de Juin. Un Couvreur
de Baron est un langage qu'on ne peut
pas entendre dans tout le Royaume ,
comme on feroit aux environs de Senlis :
aussi ne l'avez - vous pas peut-être bien
compris vous mêmes , et c'est pour cela
que vous l'avés imprimé en Italique.
Quand le Senlisien qui vous écrit se seroit
exprimé ainsi un Couvreur du Village
de Baron , proche Senlis ; il n'en auroit
été que plus exact et plus intelligible Pour
moy qui suis éloigné de Senlis de plus de
quarante lieües , jjee nn''yy aaii point été trompé
, parce que je connois un peu le voisi-
D iij nage
1914 MERCURE DE FRANCE
nage de cette Ville , et je sçai que Ba❤
ron est un Village situé vis- à- vis et tout
proche la celebre Abbaye de Chaalis ou
j'ai été quelquefois ; le tout à deux lieües
de Senlis.
pas
ry
Le Couvreur en question est un homme
tel qu'il l'auroit fallu à Bourges il y
a quarante ans , lorsque le feu prit au
Coq du Clocher de la Sainte Chapelle.
De l'humeur dont il se montre , il ne se
seroit pas fait tirer l'oreille , et n'auroit
marchandé pour aller l'éteindre , et
par là il auroit empêché la charpante de
PEglise , et le Chateau des Ducs de Berd'être
brûlés. Si ce Couvreur Senlisien
eût été informé de ce que les anciens
faisoient placer sous les Cocqs des Clothers
, un homme intrépide comme lui
auroit peut- être en la curiosité d'y regarder
, et sans beaucoup de ceremonies ,
il auroit peut être fait une Ttanslation
de Reliques de haut en bas. Je sçai des
gens de sa profession qui ont des Reliques
dans leur famille , lesquelles procedent
de pareilles trouvailles faites au milieu
des airs , et même avec les Procèsverbaux.
Qu'une autre fois donc le Sonneur
de Senlis se garde bien de confier
à un tel grimpeur la clef de ses Clochers.
On lit dans la vie de S. Dunstan
Archevêque
A O UST. 1731. 1915
'Archevêque de Cantorbery, qu'étant jeune
écolier il fut atteint d'une fiévre dont
la chaleur, excessive le porta à grimper
રે peu prés de même sur les couvertures
de l'Eglise , et qu'il en descendit sans se
blesser aucunement,de même qu'il y étoit
monté. Mais le cas semble ici fort different.
Si vous voulez qu'à l'occasion du Cou
vreur de Baron , proche Senlis , je vous
renvoye à un texte qui doit rendre ce
Village fameux , je vous citerai le second
volume de la grande Collection des Peres
Martene et Durand , Benedictins , page
1389. Vous y lirez qu'il y avoit au XV.
Siecle , sous les Regnes de Charles VI . et
Charles VII. tout proche de ce Village ,
un clos de vigne, dont Jean de Montreuil ,
Prevôt de l'Isle , parle dans la Description
qu'il fit alors de l'Abbaye de Chaalis
et de son Voisinage. Il dit qu'à un
trait de ce Monastere étoit une vigne
qui produisoit un vin auquel il n'auroit
pas préferé celui de Beaune : Ad tractum
balista vinea situatur vinum ferens cui non
præferrem merum Sancti - Gengulfi ant Belnense.
Preuve mémorable que ce n'est
pas la roideur d'une côte qui fait d'ellemême
le bon vin , comme le croyent
ceux qui aiment à se tromper , et à trom-
D iiij per
1916 MERCURE DE FRANCE
per les autres. Cette Vigne étoit en Pays
out plat , et si bien Pays plat , qu'on en
a fait un Pré au Siécle dernier , parce que
la Vigne étoit trop souvent afligée du
froid dans les mois d'Avril et de May.
Je suis & c .
du Mercure le 28. du mois de Juillet
1731. sur le Couvreurdu Village de Baron.
Ous ne désaprouverez point , Mes-
Vsieurs,quan point,de se sieurs , qu'on vous avertisse de ce
qui paroît de défectueux dans les Narrations
qui sont imprimées dans vôtre
Journal . Comme je fais profession
de dire la verité , je vais vous faire
une observation , qui quoyque bagatelle
A OUST. 1731. 1913
telle ou minutie , peut avoir cependant
son utilité. C'est que souvent lorsque
vous rapportés quelque Evenement extraordinaire
arrivé en certains Lieux ,
d'aprés les Lettres qu'on vous écrit , on
ne met point les Lecteurs au fait de ces
Hieux-là . On ne sçait quelquefois où ils
sont situés , ni où les prendre. Ce seront
des Bourgs ou des Villages d'un nom
fort commun , et en ce cas où les chercher
si la Province ou le Diocèse n'est pas
nommé ?
Ce qui m'a déterminé à vous écrire
là- dessus , est l'équivoque qui se trouve
au commencement de la Relation du fait
singulier arrivé à Senlis dans le 2º. Volume
du Mercure de Juin. Un Couvreur
de Baron est un langage qu'on ne peut
pas entendre dans tout le Royaume ,
comme on feroit aux environs de Senlis :
aussi ne l'avez - vous pas peut-être bien
compris vous mêmes , et c'est pour cela
que vous l'avés imprimé en Italique.
Quand le Senlisien qui vous écrit se seroit
exprimé ainsi un Couvreur du Village
de Baron , proche Senlis ; il n'en auroit
été que plus exact et plus intelligible Pour
moy qui suis éloigné de Senlis de plus de
quarante lieües , jjee nn''yy aaii point été trompé
, parce que je connois un peu le voisi-
D iij nage
1914 MERCURE DE FRANCE
nage de cette Ville , et je sçai que Ba❤
ron est un Village situé vis- à- vis et tout
proche la celebre Abbaye de Chaalis ou
j'ai été quelquefois ; le tout à deux lieües
de Senlis.
pas
ry
Le Couvreur en question est un homme
tel qu'il l'auroit fallu à Bourges il y
a quarante ans , lorsque le feu prit au
Coq du Clocher de la Sainte Chapelle.
De l'humeur dont il se montre , il ne se
seroit pas fait tirer l'oreille , et n'auroit
marchandé pour aller l'éteindre , et
par là il auroit empêché la charpante de
PEglise , et le Chateau des Ducs de Berd'être
brûlés. Si ce Couvreur Senlisien
eût été informé de ce que les anciens
faisoient placer sous les Cocqs des Clothers
, un homme intrépide comme lui
auroit peut- être en la curiosité d'y regarder
, et sans beaucoup de ceremonies ,
il auroit peut être fait une Ttanslation
de Reliques de haut en bas. Je sçai des
gens de sa profession qui ont des Reliques
dans leur famille , lesquelles procedent
de pareilles trouvailles faites au milieu
des airs , et même avec les Procèsverbaux.
Qu'une autre fois donc le Sonneur
de Senlis se garde bien de confier
à un tel grimpeur la clef de ses Clochers.
On lit dans la vie de S. Dunstan
Archevêque
A O UST. 1731. 1915
'Archevêque de Cantorbery, qu'étant jeune
écolier il fut atteint d'une fiévre dont
la chaleur, excessive le porta à grimper
રે peu prés de même sur les couvertures
de l'Eglise , et qu'il en descendit sans se
blesser aucunement,de même qu'il y étoit
monté. Mais le cas semble ici fort different.
Si vous voulez qu'à l'occasion du Cou
vreur de Baron , proche Senlis , je vous
renvoye à un texte qui doit rendre ce
Village fameux , je vous citerai le second
volume de la grande Collection des Peres
Martene et Durand , Benedictins , page
1389. Vous y lirez qu'il y avoit au XV.
Siecle , sous les Regnes de Charles VI . et
Charles VII. tout proche de ce Village ,
un clos de vigne, dont Jean de Montreuil ,
Prevôt de l'Isle , parle dans la Description
qu'il fit alors de l'Abbaye de Chaalis
et de son Voisinage. Il dit qu'à un
trait de ce Monastere étoit une vigne
qui produisoit un vin auquel il n'auroit
pas préferé celui de Beaune : Ad tractum
balista vinea situatur vinum ferens cui non
præferrem merum Sancti - Gengulfi ant Belnense.
Preuve mémorable que ce n'est
pas la roideur d'une côte qui fait d'ellemême
le bon vin , comme le croyent
ceux qui aiment à se tromper , et à trom-
D iiij per
1916 MERCURE DE FRANCE
per les autres. Cette Vigne étoit en Pays
out plat , et si bien Pays plat , qu'on en
a fait un Pré au Siécle dernier , parce que
la Vigne étoit trop souvent afligée du
froid dans les mois d'Avril et de May.
Je suis & c .
Fermer
Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure le 28. du mois de Juillet 1731. sur le Couvreur du Village de Baron.
En juillet 1731, un auteur écrit au Mercure pour signaler une imprécision dans une narration publiée dans le journal. Il insiste sur l'importance d'inclure des informations précises sur les lieux mentionnés, notamment les provinces ou diocèses, afin d'éviter toute confusion. L'auteur prend l'exemple d'un couvreur du village de Baron, près de Senlis, mentionné dans le volume de juin du Mercure. Il explique que cette localisation n'est pas claire pour les lecteurs éloignés de Senlis et propose d'ajouter des précisions géographiques pour plus de clarté. L'auteur compare également le couvreur de Baron à un homme qui aurait pu empêcher un incendie à Bourges quarante ans plus tôt. Il mentionne des anecdotes sur des couvreurs ayant trouvé des reliques et des récits historiques, comme celui de Saint Dunstan. Enfin, il cite une description du XVe siècle d'une vigne près de Baron, mentionnée par Jean de Montreuil, prévôt de l'Isle, pour illustrer la qualité du vin produit dans cette région.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
10
p. 2106-2123
VOYAGE dans les Etats de Bacchus. Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
Début :
J'ay fait depuis peu, Messieurs, un voyage assez subit et singulier. J'ay visité [...]
Mots clefs :
Voyage, Ordonnance, Registres, Recueil des déclarations du dieu Bacchus, Empire, Vin, Rivage de l'Yonne, Auxerre, Joigny, Vignes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : VOYAGE dans les Etats de Bacchus. Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
VOYAGE dans les Etats de Bacchus..
Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
J4y fait depuis peu , Messieurs
, un
voyage assezsubit et singulier.Fay visité
sans le secours d'aucun guide ni d'aucune
voiture, les Châteaux et les Palais des Dieuxdu
Paganisme. A ce langage , vous vous·
imaginez que mon voyage a dû être de longue
durée , et vous ne vous tromperiez pas,
SZ
SEPTEMBRE. 1731. 2107
si je l'eusse fait physiquement ; mais la verité
est que je n'ay voyagé qu'en esprit. Fe
n'ai point marqué sur mes Tablettes le jour
de mon départ ; je sçai seulement que je
commençai à parcourir tous ces Palais et
ces Châteaux un certain soir du mois de
Fevrier dernier, auquel les fumées du repas
ne m'incommodoient pas beaucoup , et j'ai
idée que le Soleil étoit déja pour lors dans
le Signe des Poissons . Quel qu'ait été mon
voyage , et qu'elle qu'en ait été la cause , me
voila heureusement de retour ; j'ai rapporté
avec moi certaines Ordonnancės assez curieuses
, que les Bibliothequaires de ces Palais,
plus complaisans et moins formalistes
que certains d'Italie , m'ont permis de transcrire
de dessus les Registres dont ils ont la
garde.
En parcourant le Recueil des Déclarations
du Dieu Bacchus , qui est écrit en belles
lettres d'or sur un Velin couleur de Pourpre,
grand in folio , j'en ai apperçû une qui m'a
frappé plus que toutes les autres. Je pense que
c'est l'avant derniere du volume. Sur le champ
j'en ai tiré une copie , avec la résolution de
m'en servir dans l'occasion. Cette occasion
s'est presentée , Messieurs , plutôt que je ne
Faurois crû ; car à peine étois-je un pew
remis de mon vryage spirituel vers le milieu
du mois de Mars , quun de mes amis m'en..
Cvj tendant
1108 MERCURE DE FRANCE
tendant plaindre à table d'un certain vin
clairet et leger que l'on m'avoit servi , tira
de sa poche le Mercure de Fevrier 1731-
et my fit voir à la page 271. un Ecrit que
j'ai reconnu à l'instant être celui que le Dieu
Bacchus a eù en vue de faire supprimer par
son Ordonnanoe. Je vous laisse à juger du
rapport que ces deux Pieces ont l'une avec
l'autre. J'en retranche une partie du préambule
qui est dans le style ordinaire des Sonverains
, et qui ne vous apprendroit autre
chose que les Provinces et les Seigneuries qui
composent le vaste Empire de cette Divinité.
ORDONNANCE du Dieu Bacchus,
donnée dans le Printemps dernier.
fils de Jupiter dit ......
Biber , Lycus , Lenæus , Osyris ,
Dionysus , &c. Jadis la Déesse de la Paix
accorda les differends qui s'étoient élevez
entre la Bourgogne et la Champagne , sur
la primauté du Fruit qui nous est consacré
dans l'étendue de ces deux Provinces
des Gaules ; il y avoit eû force procedures
écrites , mainte Poësie signifiée de part
et d'autre , Pourchot et Grenan , plaidans
pour la Bourgogne , et Coffin pour la
Champagne. (4) Cette bonne Déesse en-
(a) Voyez le Procès Poëtique , imprimé à Paris
an 1712. chez la veuve de Claude Thiboust .
fin
SEPTEMBRE 1731. 2109
in trouva le secret de les mettre tous
d'accord ; elle fit verser dans une grande
Couppe une quantité égale de vin de
Bourgogne et de Champagne , et soudain
ayant fait gouter de ce mêlange aux deux
Partis , ils mirent les armes bas , la Champagne
cedant l'honneur à la Bourgogne ,
dont le vin avoit dominé dans la Couppe
, en gout , en couleur et en force.
Aujourd'hui un Ecrivain récemment
formé sur le Rivage de l'Yonne , réveille
en quelque sorte ce Procès , qui avoit
été jugé définitivement. Il semble avoir
pour but dans son raisonnement de donner
gain de cause à la Champagne , essayant
de faire comprendre que des vins
tendres , peu colorez , de peu de durée ,
et qui de plus ont un goût de terroir ,
doivent aller de pair avec des vins qui
ent du corps , une couleur bien rosée ,
qui sont francs , bien - faisans , amis de
l'estomach , et dont la séve est fine en
même-temps qu'elle est mâle et vigoureuse.
Et ce qu'il y a encore de plus sur
prenant dans son procedé, c'est qu'il prétend
être bon Bourguignon , en écrivant,
comme il fait , en faveur de ces vins tendres
et délicats .
Ce trop zelé Partisan fait paroître sur
les rangs Joigny , petite Ville , qu'il lui
plaît
110 MERCURE DE FRANCE
plaît de placer dans notre Province de
Bourgogne , quoiqu'elle n'y soit point
comprise , suivant l'exacte Géographie de
notre Empire ; et après avoir égalé ses
vins à ceux de notre bonne et ancienne
Ville d'Auxerre , de tout temps renfermée
dans notre Cercle de Bourgogne ,
il pousse la prévention et l'audace jusqu'à
leur donner le dessus. Oubliant lui - même
d'où il est natif , et faisant semblant
de ne pas appercevoir que c'est l'amour
aveugle de sa Patrie qui le rend Auteur,
il va jusqu'à reprocher à notre zelé Analiste
d'Auxerre , duquel Mercure nous
a fait voir les Ecrits , de s'être trop étendu
par l'effet du même amour , à rapporter
les avantages de son Pays. Nous DECLARONS
que nous aimons tous nos fideles
Sujets ; mais nous devons aussi rendre.
justice à qui elle appartient , et réfuter
ce qui mérite de l'être. Sans nous arrê
ter à remarquer que l'Avocat des vins
de joigny pourroit avoir besoin de passer
quelques mois , tant sur le Parnasse
que
dans l'une de nos Universitez , pour
y apprendre à discerner les vins par la fréquentation
des personnages versez en cette
Scienće , et à ne pas prodiguer , comme
il fait , les Citations des Poëtes Latins
dont il abuse quelquefois. Nous disons.
>
qu'il
SEPTEMBRE. 1731. 21FT
qu'il paroît par son langage qu'il n'a jamais
vû de ses yeux ces Vignobles qui
sont si renommez dans nos Etats , qu'à
l'entendre raisonner il semble que jamais:
il n'est sorti des limites de son petit Ter--
ritoire , si ce n'est peut-être pour venir à
Auxerre considerer superficiellement la
situation des Côteaux .
Si ce jeune Ecrivain avoit voulu se détromper
serieusement et de bonne foi ,
ainsi que font tous ceux qui sont étroitement
attachez à notre service , il auroit
pû recourir à nos Papiers - Terriers de
Coulanges - les - Vineuses , à ceux de nos:
Vignobles d'autour de Beaune et des environs,
de Nuys , Volnay , Pomar , Chase
sagne , à ceux des climats du clos de Vougeot
, ( a ) Champbertin , Savigny , la
Romance les Serrieres proche Dijon
et les côtes de Chenove auprès de la
même Ville. Il y auroit appris par les
Declarations circonstanciées de nos féaux
et amez sujets qui peuplent ces cantons ,
que les Vignes qu'ils appellent des meilleurs
endroits et du produit le plus ex-
,
3-
( a ) Vougeot est un Village entre Dijon &
Nuys , où M. l'Abbé de Citeaux a un. Clos de
Vignes très- vaste et presque tout plat , lequel
cependant produit un Vin très- excellent , contre
la Maxime de l'Avocat des Vins de Joigny.
cellent
2111 MERCURE DE FRANCE
cellent , ne sont pas situées dans un territoire
dont l'extension soit comme perpendiculaire
du Ciel vers la Terre , ainsi
qu'il se figure par une idée bizarre , que
doivent être plantées les Vignes d'une
qualité superieure. Pour peu qu'il eût
jetté la vue sur les Cartes Topographiques
qui décorent les murs de nos sallons ,
il y eût appris que dans les côteaux de
Vignes , il y a la Region suprême , la
moyenne et l'inferieure ; que comme ce
n'est pas dans la region la plus basse , la
plus applanie ou la plus inondée que croît
le meilleur vin , ce n'est pas non plus
dans la Region la plus échauffée ou la
plus chauve , et pour parler humainement
, que ce n'est pas dans le plus roide
de la côte qu'on recueille ce Vin supe ♣
rieur et transcendant , mais que c'est dans
la naissance du plis des côteaux , parce
que c'est comme le lieu de concentration ,
tant des sucs choisis de la Terre , que de
la refléxion des rayons solaires . De- là
vient que dans la Capitale de Bourgogne ,
on appelle cet endroit Le Rognon de la Côte.
L'un de nos Geographes qui connoît jusqu'aux
moindres cantons de nos Etats ,
se donna autrefois la peine d'enluminer
de couleur rouge les endroits de ces Cartes
Topographiques , dont les Vignes
sont
SEPTEMBRE. 1731. 2113
•
sont dans la situation la plus heureuse
et dont le grain de terre est en même
temps le plus favorable.
Après l'exhibition qui nous a été faite
de ces Cartes , nous déclarons n'avoir apperçû
que quelques legers coups de pinceau
sur les côtes de Joigny , au lieu que
les climats des environs d'Auxerre sont
presque tous chargez de riches et nombreux
traits de ce pinceau décisif , qui
marquent que ce qui constituë radicalement
le bon vin , y est commun et ordinaire
, c'est-à - dire › que generalement
parlant , les Vignes d'autour notre bienaimée
Ville d'Auxerre sont dans une
و
bonne exposition et qu'elles naissent
dans un grain de terre qui n'est vitié ni
par des veines nitreuses ni par une superficie
sulfureuse. Ces coups de pinceau se
trouvent abondamment
marquez entre
autres Climats , sur ceux de la Chainette,
Migraine , Boivin , Clerion , qui sont au
Septentrion
et à l'Occident de la Ville ,
et sur plus de vingt autres qui sont au
levant et au midi de la même Ville , à
une demi - lieue , ou un peu plus de distance
, dont les productions
par une
licence que jusqu'ici nous avons tolerée ,
quoique contraire à la sincerité de notre
caractere , ne sont point distribuées dans
,
>
la
2114 MERCURE DE FRANCE
la Capitale des Gaules et plus loin , sous
d'autre nom que sous celui de Vin de
Coulanges .
En vain le zelateur des Vins de Joigny,
mal instruit du prix des Vins de notre
illustre Ville d'Auxerre , voudroit - il les
abaisser jusqu'à les mettre de Niveau avec
ceux de sa Patrie. Les Historiens de nos
Etats marquent dans leurs Annales Latines
, qu'en tout temps les Vins d'Autricum
Senonum se sont vendus le double ou
environ des Vins de Joviniacum : Et même
notre Controlleur General nous ayant
representé le Registre de l'Année courante
, nous y avons vû que le Vin de la
derniere récolte , que le Partisan vante
tant , a été débité à Auxerre , à un prix
une fois plus haut que celui du cru de
Joigny. ( a ) Nous ne croyons point qu'il
y ait mortel assez téméraire pour oser
s'inscrire en faux contre un témoignage
si authentique. On sçait que nous sommes
disposez à punir de peines très- séveres
les faussaires ou les faux témoins s'il
( a ) Les Vins du plus haut prix à Joigny
n'ont pas êté à 80. livres le Muid , au lieu qu'à
Auxerre ils ont été vendus 130. et 140. livres
quoique les Tonneaux ne soient pas plus grands ,
et qu'il y ait un plus grand éloignement de la
Ville de Paris.
s'en
SEPTEMBRE. 1731. 2215
s'en trouvoit sur nos Terres , et que nous
les condamnerions à user le reste de leurs
jours d'une boisson , qui n'est ni rare ni
délicieuse.
Si après le temps de l'Hyver il reste
peu de Vins dans notre Vignoble de Joigny
, il n'est pas besoin que nous en rapportions
ici la cause ; elle est connuë du
Bourgeois comme du Vigneron ; ils
avouent franchement l'un et l'autre que
leur liqueur est de peu de garde. Qui
pourroit après cela les blâmer de ce qu'ils
s'en défont promptement ? Deplus , leur
territoire n'est point de l'étenduë dont
est celui de notre bonne Ville d'Auxerre
ni fertile au même point. Il est notoire
par la simple confrontation des Inventaires
dressez par nos Inquisiteurs modernes
, ( a ) que les reservoirs soûterrains de
Joigny n'ont jamais eû l'honneur de contenir
dans leur capacité une quantité égale
à celle de nos reservoirs d'Auxerre.
Cette Ville qui est la clef de notre incomparable
Province de Bourgogne ,
jouit d'un Territoire si avantagé des bénignes
influences des autres Divinitez qui
nous sont amies , qu'avec la qualité du
( a ) On entend sous ce nom les Tabeliers qui
wont depuis peu dans les Caves , pour prendre
le nombre des Tonneaux pleins.
Raisin J
2118 MERCURE DE FRANCE
Raisin , il y en a toujours une quantité
qui excede celle du produit de Joigny.
Phoebus et Cybele semblent s'être accordez
à le combler de leurs bienfaits . Auxerre
a mille et mille côteaux renfermez
dans des sinuositez tortueuses qui regnent
en differens vallons ; et le Vignoble de
Joigny n'est, pour ainsi dire, qu'un simple
revers d'une ou de deux Montagnes , sur
lequel est arboré celui des Domaines du
Dieu Sylvain , que l'antiquité appelle
La Forêt d'Othe. Outre cela , par une justice
qui étoit dûë au Territoire d'Auxerre,
ancienne Cité Romaine , nous l'avons
aggrandi de diverses Colonies celebres
qui lui sont soumises à trois et quatre
lieuës vers la Region Australe , et qui le
regardent comme le chef- lieu .
د
Telles sont ces Colonies , dites Vineufes
par excellence ; tel est Irancy , Jussy
Ecouleves , la Palote &c. Joigny au contraire
, au rapport des Enquêteurs nos
Commissaires en cette Partie , n'est qu'un
simple Château qui sert de Rempart au
Territoire du Dieu Sylvain ci - dessus
nommé , autour duquel Château , l'on a
fait disparoître depuis fort peu de siécles ,
l'Arbre Favori des Druides Gaulois , pour
y planter de notre Bois tortu . Mais pour
çe faire , il a bien fallu de nécessité prendre
SEPTEMBRE . 1731 . 2117
dre le terrain tel qu'il s'est presenté , terrain
caustique , rempli de craye , de cailloux
enflâmez et petillans , terrain que
nous regardons comme une écume recuite
de la Bourbe qu'engendra sur plusieurs
Côtes de l'Univers le mêlange des Fleuves
et des Mers au siécle de Deucalion. C'est
ce qui fait que dans les années les plus favorisées
par Phoebus notre frere pour les
bons Vins , ceux de Joigny ont un goût
que les Mortels appellent fort à propos
goût de Terroir ; ne sont point francs ,
sentent le Tufou le Crayon ; et plus les
rayons de Phoebus ont été violemment
lancés , plus il est besoin de faire sur les
Cuves une salutaire injection d'une lymphe
benigne et temperative.
et
Le Vin de Joigny au rapport des mêmes
Enquêteurs , est non - seulement de
peu de durée
de durée , mais encore de difficile
transport dans les Pays éloignez ; ainsi
qu'il nous a paru par certaines Querimonies
inserées dans des Placets que les Députez
de ces Pays lointains nous ont presentez.
Ce Vin est tel , presque universellement
parlant , qu'il a de la peine à se
bien comporter jusqu'au signe de la Vierge
et de la Balance dans les années qu'il
est bon. Il a si peu de corps , au dire des
mêmes Commissaires , que la moindre
cau
2118 MERCURE DE FRANCE
eau suffit pour l'éteindre et l'amortir ; et
c'est mal à propos qu'on lui donneroit
l'épitette de Generofum. Quiconque veut
le garder chaste et sans alteration doit
>
و
mettre en pratique une espece de Paradoxe
, c'est-à- dire , qu'il faut nécessairement
qu'il le marie avec d'autre Vin ,
sinon sa propre vertu fait voir combien
d'elle-même elle est fragile et caduque.
Il est Capiteux , ajoutent- ils , à raison du
terrain brûlant qui le produit. C'est ce
qui fait que les Seps en sont si courts et
si petits qu'un simple fétu les soutient.
Deplus la Déesse Cybele et le Dieu Sylvain
ont certifié à nos Secretaires par plusieurs
de leurs Vassaux , qu'il est faux que
les habitans de la Colline Jovinienne ne
mettent rien dans leurs Vignes . Ils tirent
adroitement du Domaine voisin
appartenant au dieu Sylvain , une certaine
terre jaune qu'ils appellent du Lateux
dont ils sçavent imprégner leur
terrain blanchâtre pour en corriger le défaut,
si faire se pouvoit ; au lieu qu'Auxerre
n'a besoin ni de Lateux ni de Fumier :
Aussi n'avons nous permis d'y mettre du
Fumier dans certaines Vignes basses , qu'à
ceux de nos Vassaux , qui ont déclaré à
notre Chancelier,que ces héritages étoient
destinés à abreuver abondamment le Pay-
›
san
SEPTEMBRE 1731. 2119
-san apporteur de provisions , et à humecter
journellement le gosier du Laboureur
Artisan et de l'infatigable Vigneron : em
ploi qui est conforme à nos anciennes
Ordonnances , Registre premier.
Quant à la proposition par laquelle le
Panegyriste attribue à la vente du jus dont
nous daignons favoriser la côte de Joigny,
le nombre de mâles qu'il dit y surpasser
considerablement celui des femeles ; supposant
pour un moment la verité de son
calcul , nous disons que sa conclusion est
fausse , comme se trouvant absolument
détruite par l'experience dont les disciples
d'Hippocrate nous sont garants. Et
en nous servant de leur langage clair et
précis , nous ajoûtons qu'il prend pour
cause ce qui ne l'est pas. Ces habiles Scrutateurs
de l'origine du genre humain
admis dans notre Conseil , nous assurent
que communément, c'est en tous pays que
le nombre des mâles excede d'un peu celui
des femmes ; en quoi ils font remarquer la
sagesse du Conseil des Dieux , qui a prohibé
la Polygamie. Mais ce qu'ils observent
de plus , c'est que ce n'est pas
dans
quelques Villes de pays de Vignobles seulement
qu'on trouve le nombre de mâles
excéder notablement celui de l'autre sexe ;
ils ajoûtent que cela se rencontre aussi
dans
2120 MERCURE DE FRANCE
›
dans des Villes où le mauvais usage est
resté de ne dissoudre les Alimens et de
n'éteindre la soif qu'avec dujus de pomme,
ou avec une certaine eau bouillie , et même
dans des Pays , où par un effet de notre
colere , les Animaux raisonnables et
les irraisonnables usent d'une seule et même
boisson. Les Habitans des Ifles Britanniques
, bons connoisseurs, de notre Vin
de Bourgogne se sont donné la peine
de faire là - dessus des supputations qui
sont restées sans replique. ( a )
و
Toutes ces raisons pesées et murement
examinées , dans notre Conseil , les Hippocrates
et les Galiens de toutes les Nations,
duement appellez , et entendus, ensemble
les Echansons de tous les Dieux
nos Freres ; NOUS DECLARONS les Vins
de notre bonne Ville d'Auxerre à perpetuité
superieurs en qualité à ceux de
Joigny , ainsi qu'ils l'étoient par le passé
et qu'ils le sont actuellement . Voulons
en outre que l'on mette dans le même
rang de superiorité tous Vignobles dont
les Vins supportent la limphe , ct qui au
lieu de se laisser vaincre par ce foible
Element , le parfument du goût de la
celeste ambrosie , que les Mortels appel-
( a ) Lifez les Transactions Philosophiques ,
Du Journaux de l'Académie des Sciences de`
Londres.
lent
SEPTEMBRE . 1731. 272T
lent du nom de Pinot , (i) et donnent
réellement à ceux qui en usent , des forces
perseverantes et fermement inhérentes
. Accordons de grace speciale aux Vins
de Joigny d'être d'usage aux déj ûnez de
nos Courtisans, qui les ont reconnus suffisamment
apéritifs et proportionnez à
l'exercice qu'ils prennent. Permettons pareillement
à notre Grand Bouteillier de
nous en servir au même repas , avec deffenses
, sous peine de leze- Majesté , de
nous en présenter en d'autres temps , et
sur tout à l'heure du coucher de Phébus,
et lorsque Morphée vient nous inviter
au repos. Deffendons d'usurper le titre
de superiorité , à tous Vignobles dont les
Vins ne donnent que de ces forces passageres
, qu'on ne voit briller que durant
quelques jours , lesquels n'étant point éta-
Blis sur celui de notre Jus qui a le plus
de solidité , disparoissent aisément , s'évanoüissent
à la longueur du travail , et
font succomber les Champions qui en
usoient habituellement , par un aveu forcé
de leur foiblesse et de leur insuffisance.
(a) Le Pinot est une espece de Raisin noir,
qui fait le meilleur Vin. Les Comptes de la
Ville d'Auxerre pariant des Présens de Vin ,
faits aux Princes , specifient ordinairement
qu'ils sont de Vin de Pinet,
D Faisons
2122 MERCURE DE FRANCE
Faisons les mêmes deffenses et prohibitions
à tous Vignobles quelconques , dont
les Vins contiennent trop de ce Nitre fatal
aux intestins des Buveurs , comme
étant sujets à y causer une relaxation qui
devient sensible et deshonnorante , lorsqu'elle
concourt avec certains exercices du
corps au milieu des chaleurs de la Canicule.
(a)
Er sera notre presente Déclaration affichée
ès Carrefours de la Ville de Joigny
, à ce que nul n'en ignore , et publiée
chaque année esdits lieux aux jours
suivans , par Nous spécialement choisis ,
pour raisons à Nous connues ; sçavoir
en. Août le jour de la Consecration, des,
Autels de la Déesse Ops et de Cérès . (b)
Item. En Septembre , le jour de la Dé-
(a) Il est clair que Bacchus veut parler ici
de l'antiperistase qui éclatta à Auxerre les premiersjours
d'Août de l'an 1723. lorsque le Vin
de cette Ville commença à combattre la bile
formée delongue main dans le corps des Joueurs
de Paulme de Joigny..
(b) Bacchus parle ici suivant le Calendrier
des anciens Romains ; Les quatre jours qu'il
indique répondent au 10. Août , 14. Septembre
1. Octobre et 1. janvier , jours des quatre For-
RES deJoigny et par consequent de grand concours.
C'est celle du 10. Août qui est la cause
du choix qu'a fait Bacchus.
dicace
SEPTEMBRE. 1731. 2823
dicace du Temple de Jupiter Capitolin.
De plus , aux Calendes d'Octobre et de
Janvier. SI MANDONS à nos Baillifs.
et Sénechaux , &c.
Il n'est
pas
nécessaire , Messieurs , de
vous prier de rendre publique une Ordonnance
si juste et si équitable , et à laquelle
#outes les Langues les plus fines de Paris et
des Pays- Bas ne manqueront pas d'applandir.
J'aurois souhaité d'en trouver un plus
grand nombre de pareille nature dans ce
précieux in Folio , qui me fût communiqué
fort poliment par l' Archiviste du Dieu Bac
chus. Mais je me souviens que cette Ordonnance
étoit la seule dans son genre , et qu'après
elle le Volume n'en contenoit qu'une à
baquelle le Sceau venoit d'être mis tout recem
ment après la tenue des Etats Generaux. C'est
celle qui défend de planter de la Vigne dans
des endroits qui ne conviennent point à ce
Bois. Cette derniere Ordonnance vient d'être
heureusement notifiée dans le Royaume de
France par les Publications et Placards ordinaires
; et il faut esperer que l'on tiendra la
main à son observation.
Je suis & c. ce 12. Juillet 1731.
Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
J4y fait depuis peu , Messieurs
, un
voyage assezsubit et singulier.Fay visité
sans le secours d'aucun guide ni d'aucune
voiture, les Châteaux et les Palais des Dieuxdu
Paganisme. A ce langage , vous vous·
imaginez que mon voyage a dû être de longue
durée , et vous ne vous tromperiez pas,
SZ
SEPTEMBRE. 1731. 2107
si je l'eusse fait physiquement ; mais la verité
est que je n'ay voyagé qu'en esprit. Fe
n'ai point marqué sur mes Tablettes le jour
de mon départ ; je sçai seulement que je
commençai à parcourir tous ces Palais et
ces Châteaux un certain soir du mois de
Fevrier dernier, auquel les fumées du repas
ne m'incommodoient pas beaucoup , et j'ai
idée que le Soleil étoit déja pour lors dans
le Signe des Poissons . Quel qu'ait été mon
voyage , et qu'elle qu'en ait été la cause , me
voila heureusement de retour ; j'ai rapporté
avec moi certaines Ordonnancės assez curieuses
, que les Bibliothequaires de ces Palais,
plus complaisans et moins formalistes
que certains d'Italie , m'ont permis de transcrire
de dessus les Registres dont ils ont la
garde.
En parcourant le Recueil des Déclarations
du Dieu Bacchus , qui est écrit en belles
lettres d'or sur un Velin couleur de Pourpre,
grand in folio , j'en ai apperçû une qui m'a
frappé plus que toutes les autres. Je pense que
c'est l'avant derniere du volume. Sur le champ
j'en ai tiré une copie , avec la résolution de
m'en servir dans l'occasion. Cette occasion
s'est presentée , Messieurs , plutôt que je ne
Faurois crû ; car à peine étois-je un pew
remis de mon vryage spirituel vers le milieu
du mois de Mars , quun de mes amis m'en..
Cvj tendant
1108 MERCURE DE FRANCE
tendant plaindre à table d'un certain vin
clairet et leger que l'on m'avoit servi , tira
de sa poche le Mercure de Fevrier 1731-
et my fit voir à la page 271. un Ecrit que
j'ai reconnu à l'instant être celui que le Dieu
Bacchus a eù en vue de faire supprimer par
son Ordonnanoe. Je vous laisse à juger du
rapport que ces deux Pieces ont l'une avec
l'autre. J'en retranche une partie du préambule
qui est dans le style ordinaire des Sonverains
, et qui ne vous apprendroit autre
chose que les Provinces et les Seigneuries qui
composent le vaste Empire de cette Divinité.
ORDONNANCE du Dieu Bacchus,
donnée dans le Printemps dernier.
fils de Jupiter dit ......
Biber , Lycus , Lenæus , Osyris ,
Dionysus , &c. Jadis la Déesse de la Paix
accorda les differends qui s'étoient élevez
entre la Bourgogne et la Champagne , sur
la primauté du Fruit qui nous est consacré
dans l'étendue de ces deux Provinces
des Gaules ; il y avoit eû force procedures
écrites , mainte Poësie signifiée de part
et d'autre , Pourchot et Grenan , plaidans
pour la Bourgogne , et Coffin pour la
Champagne. (4) Cette bonne Déesse en-
(a) Voyez le Procès Poëtique , imprimé à Paris
an 1712. chez la veuve de Claude Thiboust .
fin
SEPTEMBRE 1731. 2109
in trouva le secret de les mettre tous
d'accord ; elle fit verser dans une grande
Couppe une quantité égale de vin de
Bourgogne et de Champagne , et soudain
ayant fait gouter de ce mêlange aux deux
Partis , ils mirent les armes bas , la Champagne
cedant l'honneur à la Bourgogne ,
dont le vin avoit dominé dans la Couppe
, en gout , en couleur et en force.
Aujourd'hui un Ecrivain récemment
formé sur le Rivage de l'Yonne , réveille
en quelque sorte ce Procès , qui avoit
été jugé définitivement. Il semble avoir
pour but dans son raisonnement de donner
gain de cause à la Champagne , essayant
de faire comprendre que des vins
tendres , peu colorez , de peu de durée ,
et qui de plus ont un goût de terroir ,
doivent aller de pair avec des vins qui
ent du corps , une couleur bien rosée ,
qui sont francs , bien - faisans , amis de
l'estomach , et dont la séve est fine en
même-temps qu'elle est mâle et vigoureuse.
Et ce qu'il y a encore de plus sur
prenant dans son procedé, c'est qu'il prétend
être bon Bourguignon , en écrivant,
comme il fait , en faveur de ces vins tendres
et délicats .
Ce trop zelé Partisan fait paroître sur
les rangs Joigny , petite Ville , qu'il lui
plaît
110 MERCURE DE FRANCE
plaît de placer dans notre Province de
Bourgogne , quoiqu'elle n'y soit point
comprise , suivant l'exacte Géographie de
notre Empire ; et après avoir égalé ses
vins à ceux de notre bonne et ancienne
Ville d'Auxerre , de tout temps renfermée
dans notre Cercle de Bourgogne ,
il pousse la prévention et l'audace jusqu'à
leur donner le dessus. Oubliant lui - même
d'où il est natif , et faisant semblant
de ne pas appercevoir que c'est l'amour
aveugle de sa Patrie qui le rend Auteur,
il va jusqu'à reprocher à notre zelé Analiste
d'Auxerre , duquel Mercure nous
a fait voir les Ecrits , de s'être trop étendu
par l'effet du même amour , à rapporter
les avantages de son Pays. Nous DECLARONS
que nous aimons tous nos fideles
Sujets ; mais nous devons aussi rendre.
justice à qui elle appartient , et réfuter
ce qui mérite de l'être. Sans nous arrê
ter à remarquer que l'Avocat des vins
de joigny pourroit avoir besoin de passer
quelques mois , tant sur le Parnasse
que
dans l'une de nos Universitez , pour
y apprendre à discerner les vins par la fréquentation
des personnages versez en cette
Scienće , et à ne pas prodiguer , comme
il fait , les Citations des Poëtes Latins
dont il abuse quelquefois. Nous disons.
>
qu'il
SEPTEMBRE. 1731. 21FT
qu'il paroît par son langage qu'il n'a jamais
vû de ses yeux ces Vignobles qui
sont si renommez dans nos Etats , qu'à
l'entendre raisonner il semble que jamais:
il n'est sorti des limites de son petit Ter--
ritoire , si ce n'est peut-être pour venir à
Auxerre considerer superficiellement la
situation des Côteaux .
Si ce jeune Ecrivain avoit voulu se détromper
serieusement et de bonne foi ,
ainsi que font tous ceux qui sont étroitement
attachez à notre service , il auroit
pû recourir à nos Papiers - Terriers de
Coulanges - les - Vineuses , à ceux de nos:
Vignobles d'autour de Beaune et des environs,
de Nuys , Volnay , Pomar , Chase
sagne , à ceux des climats du clos de Vougeot
, ( a ) Champbertin , Savigny , la
Romance les Serrieres proche Dijon
et les côtes de Chenove auprès de la
même Ville. Il y auroit appris par les
Declarations circonstanciées de nos féaux
et amez sujets qui peuplent ces cantons ,
que les Vignes qu'ils appellent des meilleurs
endroits et du produit le plus ex-
,
3-
( a ) Vougeot est un Village entre Dijon &
Nuys , où M. l'Abbé de Citeaux a un. Clos de
Vignes très- vaste et presque tout plat , lequel
cependant produit un Vin très- excellent , contre
la Maxime de l'Avocat des Vins de Joigny.
cellent
2111 MERCURE DE FRANCE
cellent , ne sont pas situées dans un territoire
dont l'extension soit comme perpendiculaire
du Ciel vers la Terre , ainsi
qu'il se figure par une idée bizarre , que
doivent être plantées les Vignes d'une
qualité superieure. Pour peu qu'il eût
jetté la vue sur les Cartes Topographiques
qui décorent les murs de nos sallons ,
il y eût appris que dans les côteaux de
Vignes , il y a la Region suprême , la
moyenne et l'inferieure ; que comme ce
n'est pas dans la region la plus basse , la
plus applanie ou la plus inondée que croît
le meilleur vin , ce n'est pas non plus
dans la Region la plus échauffée ou la
plus chauve , et pour parler humainement
, que ce n'est pas dans le plus roide
de la côte qu'on recueille ce Vin supe ♣
rieur et transcendant , mais que c'est dans
la naissance du plis des côteaux , parce
que c'est comme le lieu de concentration ,
tant des sucs choisis de la Terre , que de
la refléxion des rayons solaires . De- là
vient que dans la Capitale de Bourgogne ,
on appelle cet endroit Le Rognon de la Côte.
L'un de nos Geographes qui connoît jusqu'aux
moindres cantons de nos Etats ,
se donna autrefois la peine d'enluminer
de couleur rouge les endroits de ces Cartes
Topographiques , dont les Vignes
sont
SEPTEMBRE. 1731. 2113
•
sont dans la situation la plus heureuse
et dont le grain de terre est en même
temps le plus favorable.
Après l'exhibition qui nous a été faite
de ces Cartes , nous déclarons n'avoir apperçû
que quelques legers coups de pinceau
sur les côtes de Joigny , au lieu que
les climats des environs d'Auxerre sont
presque tous chargez de riches et nombreux
traits de ce pinceau décisif , qui
marquent que ce qui constituë radicalement
le bon vin , y est commun et ordinaire
, c'est-à - dire › que generalement
parlant , les Vignes d'autour notre bienaimée
Ville d'Auxerre sont dans une
و
bonne exposition et qu'elles naissent
dans un grain de terre qui n'est vitié ni
par des veines nitreuses ni par une superficie
sulfureuse. Ces coups de pinceau se
trouvent abondamment
marquez entre
autres Climats , sur ceux de la Chainette,
Migraine , Boivin , Clerion , qui sont au
Septentrion
et à l'Occident de la Ville ,
et sur plus de vingt autres qui sont au
levant et au midi de la même Ville , à
une demi - lieue , ou un peu plus de distance
, dont les productions
par une
licence que jusqu'ici nous avons tolerée ,
quoique contraire à la sincerité de notre
caractere , ne sont point distribuées dans
,
>
la
2114 MERCURE DE FRANCE
la Capitale des Gaules et plus loin , sous
d'autre nom que sous celui de Vin de
Coulanges .
En vain le zelateur des Vins de Joigny,
mal instruit du prix des Vins de notre
illustre Ville d'Auxerre , voudroit - il les
abaisser jusqu'à les mettre de Niveau avec
ceux de sa Patrie. Les Historiens de nos
Etats marquent dans leurs Annales Latines
, qu'en tout temps les Vins d'Autricum
Senonum se sont vendus le double ou
environ des Vins de Joviniacum : Et même
notre Controlleur General nous ayant
representé le Registre de l'Année courante
, nous y avons vû que le Vin de la
derniere récolte , que le Partisan vante
tant , a été débité à Auxerre , à un prix
une fois plus haut que celui du cru de
Joigny. ( a ) Nous ne croyons point qu'il
y ait mortel assez téméraire pour oser
s'inscrire en faux contre un témoignage
si authentique. On sçait que nous sommes
disposez à punir de peines très- séveres
les faussaires ou les faux témoins s'il
( a ) Les Vins du plus haut prix à Joigny
n'ont pas êté à 80. livres le Muid , au lieu qu'à
Auxerre ils ont été vendus 130. et 140. livres
quoique les Tonneaux ne soient pas plus grands ,
et qu'il y ait un plus grand éloignement de la
Ville de Paris.
s'en
SEPTEMBRE. 1731. 2215
s'en trouvoit sur nos Terres , et que nous
les condamnerions à user le reste de leurs
jours d'une boisson , qui n'est ni rare ni
délicieuse.
Si après le temps de l'Hyver il reste
peu de Vins dans notre Vignoble de Joigny
, il n'est pas besoin que nous en rapportions
ici la cause ; elle est connuë du
Bourgeois comme du Vigneron ; ils
avouent franchement l'un et l'autre que
leur liqueur est de peu de garde. Qui
pourroit après cela les blâmer de ce qu'ils
s'en défont promptement ? Deplus , leur
territoire n'est point de l'étenduë dont
est celui de notre bonne Ville d'Auxerre
ni fertile au même point. Il est notoire
par la simple confrontation des Inventaires
dressez par nos Inquisiteurs modernes
, ( a ) que les reservoirs soûterrains de
Joigny n'ont jamais eû l'honneur de contenir
dans leur capacité une quantité égale
à celle de nos reservoirs d'Auxerre.
Cette Ville qui est la clef de notre incomparable
Province de Bourgogne ,
jouit d'un Territoire si avantagé des bénignes
influences des autres Divinitez qui
nous sont amies , qu'avec la qualité du
( a ) On entend sous ce nom les Tabeliers qui
wont depuis peu dans les Caves , pour prendre
le nombre des Tonneaux pleins.
Raisin J
2118 MERCURE DE FRANCE
Raisin , il y en a toujours une quantité
qui excede celle du produit de Joigny.
Phoebus et Cybele semblent s'être accordez
à le combler de leurs bienfaits . Auxerre
a mille et mille côteaux renfermez
dans des sinuositez tortueuses qui regnent
en differens vallons ; et le Vignoble de
Joigny n'est, pour ainsi dire, qu'un simple
revers d'une ou de deux Montagnes , sur
lequel est arboré celui des Domaines du
Dieu Sylvain , que l'antiquité appelle
La Forêt d'Othe. Outre cela , par une justice
qui étoit dûë au Territoire d'Auxerre,
ancienne Cité Romaine , nous l'avons
aggrandi de diverses Colonies celebres
qui lui sont soumises à trois et quatre
lieuës vers la Region Australe , et qui le
regardent comme le chef- lieu .
د
Telles sont ces Colonies , dites Vineufes
par excellence ; tel est Irancy , Jussy
Ecouleves , la Palote &c. Joigny au contraire
, au rapport des Enquêteurs nos
Commissaires en cette Partie , n'est qu'un
simple Château qui sert de Rempart au
Territoire du Dieu Sylvain ci - dessus
nommé , autour duquel Château , l'on a
fait disparoître depuis fort peu de siécles ,
l'Arbre Favori des Druides Gaulois , pour
y planter de notre Bois tortu . Mais pour
çe faire , il a bien fallu de nécessité prendre
SEPTEMBRE . 1731 . 2117
dre le terrain tel qu'il s'est presenté , terrain
caustique , rempli de craye , de cailloux
enflâmez et petillans , terrain que
nous regardons comme une écume recuite
de la Bourbe qu'engendra sur plusieurs
Côtes de l'Univers le mêlange des Fleuves
et des Mers au siécle de Deucalion. C'est
ce qui fait que dans les années les plus favorisées
par Phoebus notre frere pour les
bons Vins , ceux de Joigny ont un goût
que les Mortels appellent fort à propos
goût de Terroir ; ne sont point francs ,
sentent le Tufou le Crayon ; et plus les
rayons de Phoebus ont été violemment
lancés , plus il est besoin de faire sur les
Cuves une salutaire injection d'une lymphe
benigne et temperative.
et
Le Vin de Joigny au rapport des mêmes
Enquêteurs , est non - seulement de
peu de durée
de durée , mais encore de difficile
transport dans les Pays éloignez ; ainsi
qu'il nous a paru par certaines Querimonies
inserées dans des Placets que les Députez
de ces Pays lointains nous ont presentez.
Ce Vin est tel , presque universellement
parlant , qu'il a de la peine à se
bien comporter jusqu'au signe de la Vierge
et de la Balance dans les années qu'il
est bon. Il a si peu de corps , au dire des
mêmes Commissaires , que la moindre
cau
2118 MERCURE DE FRANCE
eau suffit pour l'éteindre et l'amortir ; et
c'est mal à propos qu'on lui donneroit
l'épitette de Generofum. Quiconque veut
le garder chaste et sans alteration doit
>
و
mettre en pratique une espece de Paradoxe
, c'est-à- dire , qu'il faut nécessairement
qu'il le marie avec d'autre Vin ,
sinon sa propre vertu fait voir combien
d'elle-même elle est fragile et caduque.
Il est Capiteux , ajoutent- ils , à raison du
terrain brûlant qui le produit. C'est ce
qui fait que les Seps en sont si courts et
si petits qu'un simple fétu les soutient.
Deplus la Déesse Cybele et le Dieu Sylvain
ont certifié à nos Secretaires par plusieurs
de leurs Vassaux , qu'il est faux que
les habitans de la Colline Jovinienne ne
mettent rien dans leurs Vignes . Ils tirent
adroitement du Domaine voisin
appartenant au dieu Sylvain , une certaine
terre jaune qu'ils appellent du Lateux
dont ils sçavent imprégner leur
terrain blanchâtre pour en corriger le défaut,
si faire se pouvoit ; au lieu qu'Auxerre
n'a besoin ni de Lateux ni de Fumier :
Aussi n'avons nous permis d'y mettre du
Fumier dans certaines Vignes basses , qu'à
ceux de nos Vassaux , qui ont déclaré à
notre Chancelier,que ces héritages étoient
destinés à abreuver abondamment le Pay-
›
san
SEPTEMBRE 1731. 2119
-san apporteur de provisions , et à humecter
journellement le gosier du Laboureur
Artisan et de l'infatigable Vigneron : em
ploi qui est conforme à nos anciennes
Ordonnances , Registre premier.
Quant à la proposition par laquelle le
Panegyriste attribue à la vente du jus dont
nous daignons favoriser la côte de Joigny,
le nombre de mâles qu'il dit y surpasser
considerablement celui des femeles ; supposant
pour un moment la verité de son
calcul , nous disons que sa conclusion est
fausse , comme se trouvant absolument
détruite par l'experience dont les disciples
d'Hippocrate nous sont garants. Et
en nous servant de leur langage clair et
précis , nous ajoûtons qu'il prend pour
cause ce qui ne l'est pas. Ces habiles Scrutateurs
de l'origine du genre humain
admis dans notre Conseil , nous assurent
que communément, c'est en tous pays que
le nombre des mâles excede d'un peu celui
des femmes ; en quoi ils font remarquer la
sagesse du Conseil des Dieux , qui a prohibé
la Polygamie. Mais ce qu'ils observent
de plus , c'est que ce n'est pas
dans
quelques Villes de pays de Vignobles seulement
qu'on trouve le nombre de mâles
excéder notablement celui de l'autre sexe ;
ils ajoûtent que cela se rencontre aussi
dans
2120 MERCURE DE FRANCE
›
dans des Villes où le mauvais usage est
resté de ne dissoudre les Alimens et de
n'éteindre la soif qu'avec dujus de pomme,
ou avec une certaine eau bouillie , et même
dans des Pays , où par un effet de notre
colere , les Animaux raisonnables et
les irraisonnables usent d'une seule et même
boisson. Les Habitans des Ifles Britanniques
, bons connoisseurs, de notre Vin
de Bourgogne se sont donné la peine
de faire là - dessus des supputations qui
sont restées sans replique. ( a )
و
Toutes ces raisons pesées et murement
examinées , dans notre Conseil , les Hippocrates
et les Galiens de toutes les Nations,
duement appellez , et entendus, ensemble
les Echansons de tous les Dieux
nos Freres ; NOUS DECLARONS les Vins
de notre bonne Ville d'Auxerre à perpetuité
superieurs en qualité à ceux de
Joigny , ainsi qu'ils l'étoient par le passé
et qu'ils le sont actuellement . Voulons
en outre que l'on mette dans le même
rang de superiorité tous Vignobles dont
les Vins supportent la limphe , ct qui au
lieu de se laisser vaincre par ce foible
Element , le parfument du goût de la
celeste ambrosie , que les Mortels appel-
( a ) Lifez les Transactions Philosophiques ,
Du Journaux de l'Académie des Sciences de`
Londres.
lent
SEPTEMBRE . 1731. 272T
lent du nom de Pinot , (i) et donnent
réellement à ceux qui en usent , des forces
perseverantes et fermement inhérentes
. Accordons de grace speciale aux Vins
de Joigny d'être d'usage aux déj ûnez de
nos Courtisans, qui les ont reconnus suffisamment
apéritifs et proportionnez à
l'exercice qu'ils prennent. Permettons pareillement
à notre Grand Bouteillier de
nous en servir au même repas , avec deffenses
, sous peine de leze- Majesté , de
nous en présenter en d'autres temps , et
sur tout à l'heure du coucher de Phébus,
et lorsque Morphée vient nous inviter
au repos. Deffendons d'usurper le titre
de superiorité , à tous Vignobles dont les
Vins ne donnent que de ces forces passageres
, qu'on ne voit briller que durant
quelques jours , lesquels n'étant point éta-
Blis sur celui de notre Jus qui a le plus
de solidité , disparoissent aisément , s'évanoüissent
à la longueur du travail , et
font succomber les Champions qui en
usoient habituellement , par un aveu forcé
de leur foiblesse et de leur insuffisance.
(a) Le Pinot est une espece de Raisin noir,
qui fait le meilleur Vin. Les Comptes de la
Ville d'Auxerre pariant des Présens de Vin ,
faits aux Princes , specifient ordinairement
qu'ils sont de Vin de Pinet,
D Faisons
2122 MERCURE DE FRANCE
Faisons les mêmes deffenses et prohibitions
à tous Vignobles quelconques , dont
les Vins contiennent trop de ce Nitre fatal
aux intestins des Buveurs , comme
étant sujets à y causer une relaxation qui
devient sensible et deshonnorante , lorsqu'elle
concourt avec certains exercices du
corps au milieu des chaleurs de la Canicule.
(a)
Er sera notre presente Déclaration affichée
ès Carrefours de la Ville de Joigny
, à ce que nul n'en ignore , et publiée
chaque année esdits lieux aux jours
suivans , par Nous spécialement choisis ,
pour raisons à Nous connues ; sçavoir
en. Août le jour de la Consecration, des,
Autels de la Déesse Ops et de Cérès . (b)
Item. En Septembre , le jour de la Dé-
(a) Il est clair que Bacchus veut parler ici
de l'antiperistase qui éclatta à Auxerre les premiersjours
d'Août de l'an 1723. lorsque le Vin
de cette Ville commença à combattre la bile
formée delongue main dans le corps des Joueurs
de Paulme de Joigny..
(b) Bacchus parle ici suivant le Calendrier
des anciens Romains ; Les quatre jours qu'il
indique répondent au 10. Août , 14. Septembre
1. Octobre et 1. janvier , jours des quatre For-
RES deJoigny et par consequent de grand concours.
C'est celle du 10. Août qui est la cause
du choix qu'a fait Bacchus.
dicace
SEPTEMBRE. 1731. 2823
dicace du Temple de Jupiter Capitolin.
De plus , aux Calendes d'Octobre et de
Janvier. SI MANDONS à nos Baillifs.
et Sénechaux , &c.
Il n'est
pas
nécessaire , Messieurs , de
vous prier de rendre publique une Ordonnance
si juste et si équitable , et à laquelle
#outes les Langues les plus fines de Paris et
des Pays- Bas ne manqueront pas d'applandir.
J'aurois souhaité d'en trouver un plus
grand nombre de pareille nature dans ce
précieux in Folio , qui me fût communiqué
fort poliment par l' Archiviste du Dieu Bac
chus. Mais je me souviens que cette Ordonnance
étoit la seule dans son genre , et qu'après
elle le Volume n'en contenoit qu'une à
baquelle le Sceau venoit d'être mis tout recem
ment après la tenue des Etats Generaux. C'est
celle qui défend de planter de la Vigne dans
des endroits qui ne conviennent point à ce
Bois. Cette derniere Ordonnance vient d'être
heureusement notifiée dans le Royaume de
France par les Publications et Placards ordinaires
; et il faut esperer que l'on tiendra la
main à son observation.
Je suis & c. ce 12. Juillet 1731.
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Résumé : VOYAGE dans les Etats de Bacchus. Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
La lettre adressée aux auteurs du Mercure relate un voyage spirituel effectué par l'auteur dans les États de Bacchus en février 1731. Ce périple a permis à l'auteur de visiter les châteaux et palais des dieux du paganisme et de transcrire des ordonnances trouvées dans leurs bibliothèques. L'une de ces ordonnances, datée du printemps précédent, traite d'un ancien différend entre la Bourgogne et la Champagne concernant la primauté du vin. La déesse de la Paix avait tranché en faveur de la Bourgogne, dont le vin avait dominé dans un mélange testé par les deux parties. Un écrivain récent de l'Yonne a relancé ce débat en faveur des vins de Champagne, qualifiés de tendres et délicats, contrairement aux vins bourguignons, décrits comme ayant du corps et une couleur bien rosée. L'ordonnance de Bacchus réfute ces arguments, soulignant que les vins de Bourgogne proviennent de terroirs exceptionnels et sont reconnus pour leur qualité supérieure. Elle critique l'écrivain pour son manque de connaissance des vignobles bourguignons et son utilisation abusive des citations poétiques. L'ordonnance met en avant la supériorité des vins d'Auxerre et des environs, soutenue par des documents historiques et des inventaires modernes. Les vins de Joigny sont décrits comme de faible garde et produits dans des terroirs moins favorables. Ils ont un goût de terroir, sentent le tuf et le crayon, et sont de courte durée, s'altérant facilement même avant la fin de l'été. Leur faible corps les rend sensibles à l'eau, nécessitant souvent d'être mélangés avec d'autres vins pour éviter l'altération. Les vignerons de Joigny utilisent du 'lateux', une terre jaune tirée du domaine voisin, pour améliorer leur terroir. En revanche, les vins d'Auxerre n'ont pas besoin de tels amendements et sont jugés supérieurs en qualité. Ils sont reconnus pour leur solidité et leur capacité à résister à l'eau. Les vins de Joigny sont autorisés pour les déjeuners des courtisans mais interdits à d'autres moments. Le texte se conclut par des instructions pour afficher et publier ces déclarations à Joigny à des dates spécifiques.
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11
p. 2207-2209
MEMOIRE envoyé aux Auteurs du Mercure, à l'occasion de la Retraite de M. de Woolhouse.
Début :
Monsieur de Voolhouse, celebre Medecin Oculiste est retiré depuis peu à cause [...]
Mots clefs :
Retraite, Oculiste , Art ophtalmique, Maladie des yeux, Cicatrices, Restes d'ulcères et d'abcès
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MEMOIRE envoyé aux Auteurs du Mercure, à l'occasion de la Retraite de M. de Woolhouse.
MEMOIRE envoyé aux Auteurs du
Mercure , à l'occasion de la Retraite de
M. de Woolhouse.
de Voolhouse celebre Medecina
MOculiste est retiré depuis peu à cause
>
de
2208 MERCURE DE FRANCE
2
de son grand âge : mais pour répondre à la con
fiance du Public , et pour continuer de lui être
utile , il a mis en possession de sa pratique et de
tous ses secrets concernant l'Art Ophthalmique
le Sieur Babelin , comme celui de tous ses Eleves
le plus en état de lui succeder pour la dexterité
de ses operations , et par la parfaite connoissance
qu'il a de tout ce qui concerne la maladie
des Yeux et des Remedes, convenables "
dequoi il a donné des marques par une pratique
de dix années consécutives avec tout le succès
possible , sous le même M. de Voolhouse.
>
>
>
>
Affermi dans les Principes , et en suivant la
méthode d'un si excellent Maître , le Sieur Babelin
ne craint point. d'assurer le Public , qu'il
emporte toutes les Taches , Nuages. Tayes ,
Mailles , Cicatrices , Unglets , restes d'Ul- .
ceres et d'Abscès mauvaises empreintes de la.
petite Verole , de la Rougeole et d'Inflammations
inveterées ou des Ecroüelles , des coups
de feu , et des Corps étrangers qui ont blessé la
Visiere . Ces guérisons se font en quinze jours
de temps , pourvû que la partie n'ait pas été
abbreuvée et imbue de quelque liqueur étrangere
d'une vertu.caustique et brûlante , et qu'on n'y.
ait pas touché avec le feu potentiel ; ce qui rend.
ces maux incurables en cauterisant la transparance
du miroir ;. ce qui n'arrive que trop souvent
à des Personnes qui ont le malheur d'être
mal adresées .
2
Sa méthode est de déclarer d'abord la Nature .
du mal en question ; et s'il est guérissable ,, en
combien de temps à peu près , par quels remedes
et operations. Il a été heureux jusqu'à present
dans les plus subtiles et les plus délicates de
es . Operations. Il guérit particulierement et radica
SEPTEMBRE. 1731. 2209
dicalement la Cataracte vraye en huit jours , de
quoy il peut fournir un grand nombre d'és
xemples .
Le Sieur Babelin est sur le point de publier une
Dissertation de sa façon , qu'il a faite sous les
yeux de M. Voolhouse , sur les Collyres Aqueux,
ou Eaux Ophthalmiques qui se débitent à Paris ,
pour toutes sortes de maladies des yeux .
On le trouve constamment tous les jours ,
depuis huit heures du matin jusqu'à deux heures
après midi à l'Hôpital Royal des Quinzevingts ,
à la Porte cochere de la grande Aumônerie ,
Cour de la Pompe. Il recevrà les Pauvres gratis ,
le Lundy et le Samedy jusqu'à midi.
Mercure , à l'occasion de la Retraite de
M. de Woolhouse.
de Voolhouse celebre Medecina
MOculiste est retiré depuis peu à cause
>
de
2208 MERCURE DE FRANCE
2
de son grand âge : mais pour répondre à la con
fiance du Public , et pour continuer de lui être
utile , il a mis en possession de sa pratique et de
tous ses secrets concernant l'Art Ophthalmique
le Sieur Babelin , comme celui de tous ses Eleves
le plus en état de lui succeder pour la dexterité
de ses operations , et par la parfaite connoissance
qu'il a de tout ce qui concerne la maladie
des Yeux et des Remedes, convenables "
dequoi il a donné des marques par une pratique
de dix années consécutives avec tout le succès
possible , sous le même M. de Voolhouse.
>
>
>
>
Affermi dans les Principes , et en suivant la
méthode d'un si excellent Maître , le Sieur Babelin
ne craint point. d'assurer le Public , qu'il
emporte toutes les Taches , Nuages. Tayes ,
Mailles , Cicatrices , Unglets , restes d'Ul- .
ceres et d'Abscès mauvaises empreintes de la.
petite Verole , de la Rougeole et d'Inflammations
inveterées ou des Ecroüelles , des coups
de feu , et des Corps étrangers qui ont blessé la
Visiere . Ces guérisons se font en quinze jours
de temps , pourvû que la partie n'ait pas été
abbreuvée et imbue de quelque liqueur étrangere
d'une vertu.caustique et brûlante , et qu'on n'y.
ait pas touché avec le feu potentiel ; ce qui rend.
ces maux incurables en cauterisant la transparance
du miroir ;. ce qui n'arrive que trop souvent
à des Personnes qui ont le malheur d'être
mal adresées .
2
Sa méthode est de déclarer d'abord la Nature .
du mal en question ; et s'il est guérissable ,, en
combien de temps à peu près , par quels remedes
et operations. Il a été heureux jusqu'à present
dans les plus subtiles et les plus délicates de
es . Operations. Il guérit particulierement et radica
SEPTEMBRE. 1731. 2209
dicalement la Cataracte vraye en huit jours , de
quoy il peut fournir un grand nombre d'és
xemples .
Le Sieur Babelin est sur le point de publier une
Dissertation de sa façon , qu'il a faite sous les
yeux de M. Voolhouse , sur les Collyres Aqueux,
ou Eaux Ophthalmiques qui se débitent à Paris ,
pour toutes sortes de maladies des yeux .
On le trouve constamment tous les jours ,
depuis huit heures du matin jusqu'à deux heures
après midi à l'Hôpital Royal des Quinzevingts ,
à la Porte cochere de la grande Aumônerie ,
Cour de la Pompe. Il recevrà les Pauvres gratis ,
le Lundy et le Samedy jusqu'à midi.
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Résumé : MEMOIRE envoyé aux Auteurs du Mercure, à l'occasion de la Retraite de M. de Woolhouse.
Le mémoire informe les auteurs du Mercure de la retraite de M. de Woolhouse, un oculiste renommé. Woolhouse a transmis sa pratique et ses secrets à M. Babelin, son élève le plus compétent. Après dix années de succès sous Woolhouse, Babelin annonce sa capacité à traiter divers maux des yeux, tels que les taches, nuages, cicatrices, et les séquelles de maladies comme la variole ou la rougeole. Il garantit des guérisons en quinze jours, sauf si la zone affectée a été traitée avec des substances caustiques ou par cautérisation. Babelin affirme également pouvoir guérir radicalement la cataracte en huit jours. Il prévoit de publier une dissertation sur les collyres aqueux utilisés à Paris pour les maladies des yeux. Babelin est disponible quotidiennement à l'Hôpital Royal des Quinze-Vingts et offre des consultations gratuites aux pauvres les lundis et samedis jusqu'à midi.
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12
p. 1081-1088
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, à l'occasion de l'Ecrit sur sainte Cecile, imprimé dans le Mercure de Janvier dernier.
Début :
Il m'est revenu, Messieurs, qu'une personne étoit d'avis [...]
Mots clefs :
Sainte Cécile, Musique, Clavier, Patrone des musiciens, Orgue, Église
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, à l'occasion de l'Ecrit sur sainte Cecile, imprimé dans le Mercure de Janvier dernier.
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure ,
à l'occasion de l'Ecrit sur fainte Cecile
imprimé dans le Mercure de Fanvier
dernier.
I'
L m'est revenu , Messieurs , qu'une
personne étoit d'avis que la datte que
je donne au culte de sainte Cécile par les
Musiciens , n'est pas assez ancienne , et
que la preuve s'en tire du Tableau de Raphaël où cette Sainte est représentée avec
des Instrumens de Musique. Cette remarque ne m'étonne aucunement ; et là ré
ponse que j'ai à y faire sera courte. Iln'y
a qu'à lire ma proposition telle qu'elf
I.Vol. B vj es t
IOS2 MERCURE DE FRANCE
-
est à la page 26. de votre Journal de
Janvier. La voici : Ce n'est que depuis un
siécle , ou un peu plus , que les Musiciens
se sont réunis à choisir Ste Cecile pour leur
Patrone. Je ne dis pas que ce n'est que depuis un siécle ou un peu plus qu'on a
commencé àvoir dés vestiges de ce choix
fait par les Musiciens de quelque Eglise
particuliere ou de quelque Province; mais je dis que c'est seulement depuis un siécle , ou un peu plus , que la réunion s'est
faite généralement sur sainte Cécile. A la
page 28. je laisse entre voir que mons
sentiment est, que ç'a été d'abord en Italie qu'on a commencé à regarder sainte
Cécile comme Patrone de la Musique. Je
le dis , à la vérité , sans citer ma preuve ;
mais cette preuve en elle- même , n'a jamais été autre que le Tableau de Ra--
phaël , sur lequel j'ai fondé ma conjecture. Tableau qui a deux cens ans d'antiquité , comme tout le monde sçait. Je ne
fixe donc point d'époque pour le commencement de ce choix , mais seulement.
pour la réunion du Corps des Musiciens ,
répandus dans les Eglises Cathedrales d'Occident. C'est un choix qui a eu ses
progrès peu à peu, et qui n'a été parfai- tement consommé que depuis cent ans ou
environ. Au reste , si l'idée de Raphaël
I.Vol est
JUIN 173 2. 1083
est de lui , il faut avoiier qu'il a donné
occasion aux Graveurs d'encherir dans ce
genre d'imagination..
On commence de nos jours à ne plus
voir Ste Cécile simplement ravie en admiration devant le Clavier d'un Jeu d'Orgues on s'avise de la représenter encore
jouant de la Basse de Violon. C'est dans :
cette attitude que je l'ai vûë dans une
Estampe , gravée par Chiquet, qui étoit
exposée icy en vente ces jours derniers , à
la Boutique de ces Imagers de Basse-Normandie qui parcourent tout le Royaume.
Qui doute , après cela , qu'on ne la voye
bien-tôt representée joüant du Basson ou
même du Serpent ? S'il est vrai qu'en Ita---
lie les Religieuses d'un certain Monaster
re chantent du Contre- point et un Fauxbourdon complet dans leur Choeur ; rien
n'empêche de croire qu'on y joue aussi
du Serpent : et cela peut servir à rendre
probable l'opinion que Ste Cécile en aura
joué de son temps. Mais sans trop m'ar
rêter aux imaginations des Peintres,à qui
tout est permis , et pour vous marquer
je suis de bonne foy, et que je ne
demande qu'à être instruit , je vous prie ,
Messieurs de vouloir bien vous faire informer si à Albi , dont l'Eglise Cathér
drale est du Titre de Ste Cécile , il n'y
que
تو
1.Fol. auroit
1084 MERCURE DE FRANCE
auroit point de preuves du choix en question qui fussent antérieures au siécle de
Raphaël ; auquel cas ce seroit la France
qui auroit donné l'origine à cette dévotion , comme à certaines autres.
Quoique les Italiens passent pour ai-
´mer passionnement la Musique , il y en
a qu'il faut excepter ; témoin ce qu'on lit
de Dominique Capranica , qui étoit Cardinal sous Nicolas V. c'est- à- dire, au miiieu du quinziéme siécle. Les Musiciens
d'Italie pouvoient être sujets alors à des
imperfections , que n'avoient pas ceux de
France. Mais je veux que l'abus ait été général en ce temps- là ; il ne doit pas en résulter qu'il ait dû toujours durer. Ainsi l'on peut trouver du bon dans ce que le
CardinalCapranica désaprouvoit, et dont
il fit au Pape une raillerie si piquante.
Outre que l'articulation et la prononciation se rendent intelligibles de leur côté ,
autant qu'il dépend d'eux ; j'ai trouvé
plusieurs Musiciens assez sensez et assez
traitables , pour tomber d'accord , que le
choix de Ste Cécile , en qualité de Patro
ne de la Musique , n'est pas le plus heureux du monde , et que l'on s'est servi là- dedans comme les Moutons se servent les
uns aux autres : Sicut ovis over. J'en ai
(a ) Baluz. Tom. III. Miscellan. pag. 290.
I. Vol.
vû.
JUIN. 17320 1085
vû quelques- uns de la Ville de Tours qui
m'ont avoué que leur vûë avoit été sur
S. Odon de Cluny ; et cela avant qu'ils
eussent lû l'Ecrit que j'ai publié à ce su
jet. Je ne me flattois pas de trouver tant
de docilité ni de bon goût dans des Musiciens de Province.
La déclaration que j'ai faite de l'attachement que j'ai pour la Musique,à l'exemple du Cardinal Bona , ne préjudicie en.
rien aux interêts que j'ai de dire la vérité.
J'ai laissé à comprendre que la Musique
est une science dont on peut abuser ; er
on en abuse souvent que trop. Il ne me
convient pas de faire icy un Traité sur
cette matiere ; on pourra voir quelque
jour ce que j'en ai dit dans mon Commentaire sur la Constitution de Jean
XXII. Docta Sanctorum Patrum , où je me
suis fort étendu ; et sans m'expliquer plus.
au fond sur ce que Dom Mabillon en
pense touchant la difference qui est entre
les François et les Allemans , en fait de
chant difference qu'il met en ce que ces
derniers font consister la dévotion dans
un grand fracas de Musique et d'Instru
mens; ce qu'en France on regarde comme
un obstacle à la dévotion; que nos Galli ,
dit-il , pietatis impedimenta reputamus (a).
( a ) Mabill. Iter Germanic. pag. 21 et 22.
1. Vol.
Je
108 MERCURE DE FRANCE
je me contente pour le présent d'un seul '
exemple : c'est l'application de la Musique à récits et à répetitions sur le Sym
bole de Nicée. Je connois une Eglise illustre où l'on a réformé très - sagement
cet usage , et où l'on a remis la récitation de cette Partie de la Liturgie en
pur Plain chant. On est persuadé dans
cette Eglise , sans faire tort à la Musi
que , qu'elle n'est venuë qu'après coup
et que , pour ainsi parler , elle n'est que
la cadette ; qu'au contraire le Plain - chant
est le plus ancien en datte , et qu'il doit
jouir du droit d'aînesse.
On l'a donc rétabli dans ses droits sur
cet article ; et l'Eglise qui en a agi ainsi
est dautant plus loüable en cela , que
presque toutes les fois que la récitation
du Symbole s'y fait , l'usage est de tems
immémorial d'y présenter pendant ce
tems là le Texte de l'Evangile à baiser à
tout le Clergé, en sorte que les paroles
et l'action sont parfaitement d'accord en
cette occasion. On y voit , ou plutôt on
y entend le Chanoine comme le Semiprébendé, l'homme simple commel'hom
me lettré , le vieillard comme le jeune
le foible comme le fort , le laïque comme
L'Ecclésiastique , le peuple aussi-bien que
les-Musiciens , tous généralement mêler
I. Vol. leur
'JUIN. 17325 1087™
leur voix en commun pour l'acquit de la
Profession de foy , et l'on ne voit se séparer de ce Concert admirable et digne
des premiers temps , que ceux qui gouteroient davantage que cette Profession da
foy se fit par commission ou par procu
ration , ou bien ceux qui ne peuvent pas
s'accoutumer à une prononciation distincte de ce qu'ils chantent ; et ceux - là
sont en très- petit nombre
à
Si les Eglises où il y a. Musique quoti
dienne peuvent l'abolir entièrement ,
comme celle de Sens l'a fait autrefois ;
soit par le manque de sujets ,, soit par
la difficulté d'en trouver de tels que les
Canons les demandent ; elles peuvent
plus forte raison la supprimer à l'égard
de quelques parties seulement de l'Office
où elle convenoit moins , pour la transporter sur d'autre où elle sera mieux. placée.Les Musiciens dépouillez de tout préjugé n'ont pû se refuser à l'équité de ce
transport , ils sont tombez d'accord que,
par exemple , la Musique et le Fauxbourdon conviennent mieux au Cantique Te
Deum , qu'au Credo ; et je ne doute pas ,
Messieurs, que vous qui en connoissez
de très-celebres à Paris et ailleurs, ne leur
fassiez avoüer facilement la même chose.
Il semble que les personnes qui sont du
I. Vol. senti
1088 MERCURE DE FRANCE
sentiment contraire , peuvent être regar
dées comme du nombre de celles que
l'Ombre de M. Thiers combat si vivement dans le Mercure de Juin 1731.
second Volume , aux pages 1441. et 1442.
Je vous en fais les Juges , et je suis , &c
Ce 25. Avril 1732.
à l'occasion de l'Ecrit sur fainte Cecile
imprimé dans le Mercure de Fanvier
dernier.
I'
L m'est revenu , Messieurs , qu'une
personne étoit d'avis que la datte que
je donne au culte de sainte Cécile par les
Musiciens , n'est pas assez ancienne , et
que la preuve s'en tire du Tableau de Raphaël où cette Sainte est représentée avec
des Instrumens de Musique. Cette remarque ne m'étonne aucunement ; et là ré
ponse que j'ai à y faire sera courte. Iln'y
a qu'à lire ma proposition telle qu'elf
I.Vol. B vj es t
IOS2 MERCURE DE FRANCE
-
est à la page 26. de votre Journal de
Janvier. La voici : Ce n'est que depuis un
siécle , ou un peu plus , que les Musiciens
se sont réunis à choisir Ste Cecile pour leur
Patrone. Je ne dis pas que ce n'est que depuis un siécle ou un peu plus qu'on a
commencé àvoir dés vestiges de ce choix
fait par les Musiciens de quelque Eglise
particuliere ou de quelque Province; mais je dis que c'est seulement depuis un siécle , ou un peu plus , que la réunion s'est
faite généralement sur sainte Cécile. A la
page 28. je laisse entre voir que mons
sentiment est, que ç'a été d'abord en Italie qu'on a commencé à regarder sainte
Cécile comme Patrone de la Musique. Je
le dis , à la vérité , sans citer ma preuve ;
mais cette preuve en elle- même , n'a jamais été autre que le Tableau de Ra--
phaël , sur lequel j'ai fondé ma conjecture. Tableau qui a deux cens ans d'antiquité , comme tout le monde sçait. Je ne
fixe donc point d'époque pour le commencement de ce choix , mais seulement.
pour la réunion du Corps des Musiciens ,
répandus dans les Eglises Cathedrales d'Occident. C'est un choix qui a eu ses
progrès peu à peu, et qui n'a été parfai- tement consommé que depuis cent ans ou
environ. Au reste , si l'idée de Raphaël
I.Vol est
JUIN 173 2. 1083
est de lui , il faut avoiier qu'il a donné
occasion aux Graveurs d'encherir dans ce
genre d'imagination..
On commence de nos jours à ne plus
voir Ste Cécile simplement ravie en admiration devant le Clavier d'un Jeu d'Orgues on s'avise de la représenter encore
jouant de la Basse de Violon. C'est dans :
cette attitude que je l'ai vûë dans une
Estampe , gravée par Chiquet, qui étoit
exposée icy en vente ces jours derniers , à
la Boutique de ces Imagers de Basse-Normandie qui parcourent tout le Royaume.
Qui doute , après cela , qu'on ne la voye
bien-tôt representée joüant du Basson ou
même du Serpent ? S'il est vrai qu'en Ita---
lie les Religieuses d'un certain Monaster
re chantent du Contre- point et un Fauxbourdon complet dans leur Choeur ; rien
n'empêche de croire qu'on y joue aussi
du Serpent : et cela peut servir à rendre
probable l'opinion que Ste Cécile en aura
joué de son temps. Mais sans trop m'ar
rêter aux imaginations des Peintres,à qui
tout est permis , et pour vous marquer
je suis de bonne foy, et que je ne
demande qu'à être instruit , je vous prie ,
Messieurs de vouloir bien vous faire informer si à Albi , dont l'Eglise Cathér
drale est du Titre de Ste Cécile , il n'y
que
تو
1.Fol. auroit
1084 MERCURE DE FRANCE
auroit point de preuves du choix en question qui fussent antérieures au siécle de
Raphaël ; auquel cas ce seroit la France
qui auroit donné l'origine à cette dévotion , comme à certaines autres.
Quoique les Italiens passent pour ai-
´mer passionnement la Musique , il y en
a qu'il faut excepter ; témoin ce qu'on lit
de Dominique Capranica , qui étoit Cardinal sous Nicolas V. c'est- à- dire, au miiieu du quinziéme siécle. Les Musiciens
d'Italie pouvoient être sujets alors à des
imperfections , que n'avoient pas ceux de
France. Mais je veux que l'abus ait été général en ce temps- là ; il ne doit pas en résulter qu'il ait dû toujours durer. Ainsi l'on peut trouver du bon dans ce que le
CardinalCapranica désaprouvoit, et dont
il fit au Pape une raillerie si piquante.
Outre que l'articulation et la prononciation se rendent intelligibles de leur côté ,
autant qu'il dépend d'eux ; j'ai trouvé
plusieurs Musiciens assez sensez et assez
traitables , pour tomber d'accord , que le
choix de Ste Cécile , en qualité de Patro
ne de la Musique , n'est pas le plus heureux du monde , et que l'on s'est servi là- dedans comme les Moutons se servent les
uns aux autres : Sicut ovis over. J'en ai
(a ) Baluz. Tom. III. Miscellan. pag. 290.
I. Vol.
vû.
JUIN. 17320 1085
vû quelques- uns de la Ville de Tours qui
m'ont avoué que leur vûë avoit été sur
S. Odon de Cluny ; et cela avant qu'ils
eussent lû l'Ecrit que j'ai publié à ce su
jet. Je ne me flattois pas de trouver tant
de docilité ni de bon goût dans des Musiciens de Province.
La déclaration que j'ai faite de l'attachement que j'ai pour la Musique,à l'exemple du Cardinal Bona , ne préjudicie en.
rien aux interêts que j'ai de dire la vérité.
J'ai laissé à comprendre que la Musique
est une science dont on peut abuser ; er
on en abuse souvent que trop. Il ne me
convient pas de faire icy un Traité sur
cette matiere ; on pourra voir quelque
jour ce que j'en ai dit dans mon Commentaire sur la Constitution de Jean
XXII. Docta Sanctorum Patrum , où je me
suis fort étendu ; et sans m'expliquer plus.
au fond sur ce que Dom Mabillon en
pense touchant la difference qui est entre
les François et les Allemans , en fait de
chant difference qu'il met en ce que ces
derniers font consister la dévotion dans
un grand fracas de Musique et d'Instru
mens; ce qu'en France on regarde comme
un obstacle à la dévotion; que nos Galli ,
dit-il , pietatis impedimenta reputamus (a).
( a ) Mabill. Iter Germanic. pag. 21 et 22.
1. Vol.
Je
108 MERCURE DE FRANCE
je me contente pour le présent d'un seul '
exemple : c'est l'application de la Musique à récits et à répetitions sur le Sym
bole de Nicée. Je connois une Eglise illustre où l'on a réformé très - sagement
cet usage , et où l'on a remis la récitation de cette Partie de la Liturgie en
pur Plain chant. On est persuadé dans
cette Eglise , sans faire tort à la Musi
que , qu'elle n'est venuë qu'après coup
et que , pour ainsi parler , elle n'est que
la cadette ; qu'au contraire le Plain - chant
est le plus ancien en datte , et qu'il doit
jouir du droit d'aînesse.
On l'a donc rétabli dans ses droits sur
cet article ; et l'Eglise qui en a agi ainsi
est dautant plus loüable en cela , que
presque toutes les fois que la récitation
du Symbole s'y fait , l'usage est de tems
immémorial d'y présenter pendant ce
tems là le Texte de l'Evangile à baiser à
tout le Clergé, en sorte que les paroles
et l'action sont parfaitement d'accord en
cette occasion. On y voit , ou plutôt on
y entend le Chanoine comme le Semiprébendé, l'homme simple commel'hom
me lettré , le vieillard comme le jeune
le foible comme le fort , le laïque comme
L'Ecclésiastique , le peuple aussi-bien que
les-Musiciens , tous généralement mêler
I. Vol. leur
'JUIN. 17325 1087™
leur voix en commun pour l'acquit de la
Profession de foy , et l'on ne voit se séparer de ce Concert admirable et digne
des premiers temps , que ceux qui gouteroient davantage que cette Profession da
foy se fit par commission ou par procu
ration , ou bien ceux qui ne peuvent pas
s'accoutumer à une prononciation distincte de ce qu'ils chantent ; et ceux - là
sont en très- petit nombre
à
Si les Eglises où il y a. Musique quoti
dienne peuvent l'abolir entièrement ,
comme celle de Sens l'a fait autrefois ;
soit par le manque de sujets ,, soit par
la difficulté d'en trouver de tels que les
Canons les demandent ; elles peuvent
plus forte raison la supprimer à l'égard
de quelques parties seulement de l'Office
où elle convenoit moins , pour la transporter sur d'autre où elle sera mieux. placée.Les Musiciens dépouillez de tout préjugé n'ont pû se refuser à l'équité de ce
transport , ils sont tombez d'accord que,
par exemple , la Musique et le Fauxbourdon conviennent mieux au Cantique Te
Deum , qu'au Credo ; et je ne doute pas ,
Messieurs, que vous qui en connoissez
de très-celebres à Paris et ailleurs, ne leur
fassiez avoüer facilement la même chose.
Il semble que les personnes qui sont du
I. Vol. senti
1088 MERCURE DE FRANCE
sentiment contraire , peuvent être regar
dées comme du nombre de celles que
l'Ombre de M. Thiers combat si vivement dans le Mercure de Juin 1731.
second Volume , aux pages 1441. et 1442.
Je vous en fais les Juges , et je suis , &c
Ce 25. Avril 1732.
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Résumé : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, à l'occasion de l'Ecrit sur sainte Cecile, imprimé dans le Mercure de Janvier dernier.
L'auteur répond à une critique concernant la datation du culte de sainte Cécile par les musiciens. Il affirme que ce culte s'est généralisé il y a environ un siècle, bien que des vestiges plus anciens puissent exister. Cette dévotion aurait probablement commencé en Italie, comme le suggère un tableau de Raphaël datant de deux cents ans. L'auteur ne fixe pas d'époque précise pour l'origine de ce culte, mais souligne que la réunion des musiciens autour de sainte Cécile s'est faite progressivement et s'est généralisée depuis un siècle. L'auteur observe des représentations modernes de sainte Cécile jouant divers instruments, comme la basse de violon, et s'interroge sur la possibilité qu'elle ait joué d'autres instruments comme le basson ou le serpent. Il demande aux rédacteurs du Mercure de France de vérifier s'il existe des preuves antérieures au siècle de Raphaël à Albi, ce qui pourrait indiquer que la dévotion est d'origine française. L'auteur discute également des imperfections des musiciens italiens au quinzième siècle et de l'avis de certains musiciens français qui trouvent le choix de sainte Cécile comme patronne de la musique peu heureux. Il mentionne sa propre déclaration d'attachement à la musique et son abus potentiel, citant des exemples de réformes dans certaines églises où la musique a été supprimée ou modifiée pour des raisons de dévotion. Enfin, il compare les pratiques musicales entre les Français et les Allemands, notant que les Français considèrent un grand fracas de musique comme un obstacle à la dévotion, contrairement aux Allemands. Il conclut en soulignant l'importance de la prononciation distincte et de la participation collective lors de la récitation du Symbole de Nicée.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 1912-1929
LETTRE aux Auteurs du Mercure, sur la Réponse insérée dans le Mercure du mois de Mars dernier, à l'Ordonnance de Bacchus.
Début :
Je trouve, Messieurs, une grande inadvertance, presqu'au commencement [...]
Mots clefs :
Ordonnance de Bacchus, Inadvertance, Joigny, Vigne, Soleil, Collines, Vins, Bourgogne, Tribunal bacchique
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE aux Auteurs du Mercure, sur la Réponse insérée dans le Mercure du mois de Mars dernier, à l'Ordonnance de Bacchus.
LETTRE aux Auteurs du Mercure , sur
la Réponse insérée dans le Mercure du
mois de Mars dernier , à l'Ordonnance
de Bacchus.
J
E trouve, Messieurs, une grande inadvertance , presqu'au commencement
de la Réponse en question. Elle paroît
dès la fin de la seconde Période , c'est-àdire , à la page 488 , lig. 6. du Mercure.
Le raisonnement est si louche , que je serois plus volontiers porté à croire , que
celui qui a composé cette Piéce , étoit
moinsattentif à ce qu'il écrivoit , qu'à ce
qu'il avoit envie d'écrire.
Il a , au reste , fort mauvaise grace de
reprocher aux Gens tenans le Conseil du
Dieu
SEPTEMBRE. 1732. 1973
Dieu Bacchus , de n'avoir pas répondu à
ce que Virgile a écrit. Ce Conseil recon-.
noit , avec ce Poëte , que les lieux où il
y a une grande profondeur de terre, sont
meilleurs pour le bled , que les endroits
qui ont peu de fond , et que les superficies moins épaisses , que celles - là , conviennent au vin par préférence. Mais il
ajoute , que c'est abuser du texte Poëtique , que d'en inférer qu'il n'y a que
Joigny qui soit dans le cas d'avoir un territoire propre à la Vigne , ou que son exposition a cette propriété par excellence.
Chacun sçait que c'est un avantage commun à tous les lieux qui ont été les premiers cultivez en Vignes. Ce qui fait le
Vin délicat , c'est que les racines s'étendent plutôt en longueur qu'en profondeur ; mais ce n'est pas toujours ce qui le
fait bon et irreprochable. Il ne mérite pas
cette qualité , dès que cette petite épaisseur de terre est couchée et appliquée sur
des Bancs de craye et de tuf, comme est
le territoire de Joigny , au vû et au sçu
de tout le monde. Loin donc d'ici le prétendu Privilege singulier de cette Ville ;
Privilege exclusif, si on en croit le Député
qui parle pour elle ; mais dont ses habitans ne peuvent se glorifier sans une vaine présomption.
B iij Ce
1914 MERCURE DE FRANCE
Ce Député veut que nous marquions d'un
grand sérieux , ce que nous avons lû des
Poësies du P. Vaniere. Quoique l'Ordonnance de Bacchus l'insinue assez, et qu'il y
soit dit en termes formels, autant qu'une
Ordonnance en style burles quepeut le permettre, que la proposition du Poëte, prise trop généralement est fausse et démen.
tie par l'expérience , on ne laissera pas de
faire encore icy quelques réfléxions. C'est
être en effet scrupuleux jusqu'au ridicule, que de prétendre qu'on doit laisser sans
Vignes , des Côtes qui ne regardent pas
géométriquement le point de Midy en
face,quoique le grain de terre en soit bon;
comme s'il étoit besoin de tirer un allignement , et avoir son quart de cercle en
main lorsqu'on plante une Vigne , de
même que lorsqu'on dresse un Cadran.
Ce même Ecrivain convient qu'il ne faut
pas disputer des faits Or c'est un fait certain et prouvé par l'expérience de quinze
cens ans au moins , que des Côtes qui ne
sont point obverses directement au Midy , mais qui regardent un peu l'Orient ,
ou qui sont tournées vers le déclin du
Soleil , produisent du Vin aussi excellent
et même souvent meilleur que des Coteaux qui font face , en droite ligne , au
point méridional.
II
*
SEPTEMBRE. 1732. 1915.
Il est vrai qu'entre les Vignes situées
obversement au Midy ; il y en a quelquefois qui produisent un vin brulant: Mais si
ce Vin est bon, ce n'est pas toujours à cause
de leur exposition géométrique. C'est le
grain de terre qui fournit la substance
que les ardeurs du Soleil ne font que perfectionner. Un bon fond produit de ses
entrailles un bon raisin ; et c'est la chaleur
de la nuit, aussi bien que celle du jour qui
opere le dégré de maturité qui convient.Il
faut donc éviter de tirer une conclusion
trop generale en matiere de Physique
d'une proposition avancée par un Poëte
qui s'attache plus à rendre son Vers bien
harmonieux , qu'à approfondir les secrets
de la Nature; sans quoy l'on court risque
de tomber dans le Sophisme , qui prend
pour cause , ce qui n'est point cause. Une
preuve de cela , est que si c'étoit la plus
grande chaleur , tombant à plomb, qui
fait le meilleur raisin , il s'ensuivroit qu'il
seroit à propos d'ôter les feuilles de dessus le raisin pour le rendre meilleur ; ce
qu'on n'a garde de faire, parce que l'expe
rience fait connoître qu'une chaleur refléchie ou de réverbération , rend le fruit
plus sain et plus propre à faire de bon Vin,
qu'une chaleur directe.
Mais l'Ecrivain de Joigny est admiraBiiij ble
1916 MERCURE DE FRANCE
ble,lorsqu'il nous dit que le P.Vaniere fait
l'éloge de l'exposition de tout le Vignoble
de Joigny , en marquant le regard vers le
Midy , comme le plus favorable. La Providence, disoit- il au mois de Février 1731 .
nous a bienfavorisez , en nous environnant
de Collines , dont l'exposition nous répond
de la bonté de nos Vignobles. Il semble
que dès qu'une Ville est environnée de
Collines , il est impossible que toutes ces
Collines soient tournées vers le Midy
ou il faut s'abstenir de dire que la Ville
en est environnée , ou bien il faut avouer
qu'il y a de ces Collines qui sont tournées
vers l'Orient , d'autres vers l'Occident, et
d'autres encore autrement. Ce raisonnement louche me persuade que l'Auteur
n'y pensoit pas lorsqu'il a fait l'exclamation , qui contient ce que je viens d'allé
guer, et qu'alors il croyoit être à Auxerre,
qui véritablement est environné de tous les
côtez de Collines , qui produisent un Vin
de soutien, un Vin agréable et salutaire,au
lieu que je suis moralement assuré que les
habitans de Joigny , renieront presque
tout ce qui est au delà de leur Pont , ce
qui certainement comprend plus de la
moitié de l'Hémisphere, par rapport à
leur Ville.
Non seulement l'Ecrivain est refractaire
SEPTEMBRE. 1732. 1917
que
taire à l'Ordonnance de Bacchus , mais
encore il ose lui donner de fausses interprétations. Lorsque Bacchus , par exemple , nomme les Régions basses, moyenne
et supérieure il s'imagine que ce Dieu entend parler de celles de l'air ; et cela pour
avoir le plaisir de dire que cette Divinité
tient un langage qui sent le Copernic , et
qu'elle s'est répandue en propos vagues.
Peut on se figurer , sans être enlevé, comme Gyrano de Bergerac, dans les Régions sublunaires , que les Vignes soient plantées
dans une matiere aussi fluide et légere l'air ;et que la basse Région , dont
Bacchus parle , ne soit pas celle qui est de
niveau avec les Champs et les Prairies ?
Cette Divinité a déclaré , sans ambiguité,
que la moyenne Région d'un côteau , est
cet endroit où se rassemble la portion
la plus nourrissante du sol , après les pluyes,
et que la Région supérieure est celle du
terrain qui reste la plus dénuée de substance nutritive , et qui n'a , pour ainsi
dire , que les os. Le Conseil du Dieu
Bacchus n'a pû être si mal avisé , que de
confondre un Element avec l'autre , et de
prendre l'air pour la terre. Ainsi la remarque , que son langage conviendroit
mieux à un Traité d'Astronomie , qu'à
une déclaration sur la primauté des TerB v ritoires
1918 MERCURE DE FRANCE
ritoires, est mal placée et hors de son lieu.
Mais peut-on pardonner ce qui se lit
dans la page 490 ? Il faut être sujet à des
inattentions extrêmes , pour attribuer au
vulgaire de notre Ville une expresion qui
y est absolument inconnuë, que ni homme, ni femme , ni enfant , n'y ont jamais
employée. L'on s'y sert pour exprimer
l'ustancile en question , du même nom
qu'à Paris. Le Critique a pris , sans doute,
le Dictionnaire des environs de Montbar et de Sainte- Reine , pour le Dictionnaire d'Auxerre. Ce sont deux volumes
si differens , que je puis vous assurer que Benatron n'est pas un terme plus usité
dans le langage de notre Ville , que l'herbe de la Saingeon l'est dans les assaisonnemens, et que l'on n'y entend pas plus parler de l'un que de l'autre.
La Géographie du Défenseur des vins
de Joigny , me paroît aussi être un peu
embroüillée. On voit par ce qu'il dit au
bas de la même page 490. que ce n'est qu'à
regret qu'il avoue que Joigny appartient
au Pays Senonois , et qu'il aimeroit mieux
qu'il fût compris dans l'Auxerrois , afin
d'être de la Bourgogne. Il fait tout ce
qu'il peut pour accrocher sa Ville à cette
Province. Mais les Cartes citées dans l'Ordonnance de Bacchus , y sont contraires ;
et
SEPTEMBRE 1732. 1919
et contre cela point d'Appel. Ceux qui
sçavent l'origine des Impositions , n'ignorent point que le Pont de Joigny a
été regardé comme le premier sur la Riviere d'Yonne,qui soit situé dans la France , et que la formalité que ce Pont occasionne , vient de cette diversité de Territoire. Ainsi c'est encore une faute qui
s'est glissée dans le Memoire inseré dans
le Mercure du mois de Mars dernier ,
lorsqu'on y lit à la page 550. au sujet du
sieur Ferrand , celebre Peintre , qu'il naquit à Joigny en Bourgogne : les deux der
niers mots sont de trop.
'
Lorsque l'Ecrivain de cette Ville dit que
l'on a hazardé une Note sur l'Ordonnance de Bacchus , touchant le prix du
vin d'Auxerre , il a quelque espece de
raison. On lui avoue que la Note n'est
pas tout-a-fait exacte , en ce qu'elle ne
met pas le prix des vins d'Auxerre encore
assez au dessus de ceux de Joigny. L'Auteur Auxerrois apprehendant d'encourir
les peines portées par l'Ordonnance contre ceux qui ne disent pas la pure verité,
acouru promptement chez l'Imprimeur ,
et a fait mettre la chose dans toute son
exactitude ; sçavoir , que les vins d'Auxerre ont été vendus en 1730 , non 130.
et 140. livres au plus haut prix , mais
140. et 150, livres, B vj L'A
1920 MERCURE DE FRANCE
L'Apologiste de Joigny devoit avant que
d'écrire , se donner la peine de consulter
l'Errataimprimé à la fin du Mercure d'Octobre dernier , et il y auroit lû , que le
prix de 150. livres le muid fut celui du
vin de M. d'Orchy, alors digne Prieur de
Saint-Marien. C'est ce qu'il déclara 15 .
jours avant son décès , lorsqu'il eut pris
communication de l'Ordonnance. On ne
peut se dispenser de vanger la memoire
de ce Religieux , à qui on voit bien que
le Citoyen de Joigny en veut , lorsqu'on
fait attention à un petit mot qui lui est
échappé au haut de la page 49. Mais
pour suivre pas- à- pas ses Observations
Apologetiques , il est bon de lui faire remarquer qu'il a encouru la même peine
de l'Ordonnance , parce qu'il a allegué
faux en matiere grave , et de la compétence du Tribunal Bacchique , usant outre cola d'une réticence , dont les suites
pourroient tirer à grande consequence.
S'il s'est vendu à Auxerre du vin à pot
ou en détail à un prix plus modique qu'on
n'a fait à Joigny, ce n'étoit pas le meil leur vin , comme il a la hardiesse de le
dire; puisque sa bonne qualité le fait enlever encore tout chaud , et le fait conduire à Paris , en Normandie , en Picardie , en Flandres , en Artois et encore
plus
SEPTEMBRE. 1732. 1921
plus loin , mais c'étoit du vin de quelques Villages de la Vallée d'Aillant , qui
sont de l'Election de Joigny , que les
Habitans de ces lieux font voiturer à
Auxerre , pour y en trouver le débit
à la faveur du grand passage et de la modicité des droits , sans quoi , ils leur resteroient infalliblement ; et ces vins servent à la boisson des Paysans et des Artisans qui y affluent en bien plus grand
nombre qu'à Joigny.
Et quand même il y auroit eu du vin du
cru d'Auxerre , vendu à pot sur le pied
du prix de Joigny , cela ne viendroit que
de cette modicité des Droits d'Aydes
fondée sur les Privileges de la Bourgo- confirmez les Rois gne et autres , par
Louis XI. et Henry IV. comme aussi de
ce que la mesure est plus petite à Auxerre qu'à Joigny. L'Avocat de nos Adversaires , qui n'allegue que l'excedent
des Droits , nous prend apparamment
pour ces bons Limousins , à qui un Pape
de leur Nation promit , dit-on , de faire
avoir double récolte par an , à condition,
cependant, qu'au lieu que par tout ailleurs
on ne compte que douze mois par chacune année > on en compteroit vingtquatre dans leur Pays. Des que la pinte
est plus grande à Joigny qu'à Auxerre ,
il
1922 MERCURE DE FRANCE
il est juste qu'il y ait de l'augmentation
à proportion dans le prix de la vente qui se fait en détail.
Cet Ecrivain devient plus hardi à mesure qu'il approche de l'endroit où il veut
tirer son coup de pistolet. Sans sentir la
fausseté de son raisonnement , toute palpable qu'elle est , il dit qu'il suffit que
les vins de Joigny se trouvent bons pendant deux ou trois ans , pour qu'on puisse les transporter par tout où l'on voudra.
Mais où est la preuve que ces vins se trouvent bons pendant deux ou trois ans ?
C'est ce qu'il suppose et ce qu'il falloit
prouver. Il se peut faire que quelques
bouteillles tirées à propos d'un tonneau
se soient conservées sur le lieu , c'està- dire à Joigny même jusqu'à deux et
trois ans dans le fond d'une cave très profonde , ou dans un autre souterrain bien
frais. Mais il n'en suit pas de-là que ce
vin étant conduit bien loin , sur tout par
les voitures de terre , n'essuie pas de ces
revers de fortune dont l'Ordonnance à
parlé , qui seront tels que la fraicheur des
lieux les plus bas ne pourra le racommoder , et qu'on sera alors forcé pour le soutenir , de le couper avec du vin qui ait
du corps et de la moëlle. Bacchus à donc
décidé juste , parce qu'il étoit fondé sur
a
l'expe
SEPTEMBRE. 1732. 1923
l'experience. De sorte qu'il ne reste point
d'autre conseil à donner aux gens de Joigny , pour remedier à cet inconvenient ,
que de trouver un secret de transporter leurs caves toutes entieres et sans fracture , jusques dans les Pays où ils veulent
leur vin arive sain et sauf; encore
yconservera- t'il toujours son goût de terroir , c'est-à dire , de Craye et de Tuf,
qu'il a apporté en venant au monde.
que
La tournure des premieres lignes de
la page 492. fait voir que l'Ecrivain de
Joigny est accoûtumé à croire les choses legerement , et surtout celles qui renferment des suppositions sans preuve.
Peut-être auroit- il été plus réservé au
mois de Décembre 1731. si celui qu'il
attaque eut été encore vivant. Mais ayant
appris son décès , arrivé vers la S. Martin
précedente,il a crû que ce qu'il avanceroit
contre lui resteroit sans replique. Bien
plus , il se flatte peut-être que cette mort
fera que les vins d'Auxerre ne soutiendront plus leur réputation . Mais il se trompe encore ; la mort d'un seul homme n'a rien changé dans le Pays. Les
Vignes sont restées dans le même état ,
même sol , même exposition , même plan
de Pinot noir , clair et délié , même situation et même grain de terre ; nous ne
voyons
1924 MERCURE DE FRANCE
voyons pas qu'aucun tremblement ait
donné au Territoire une autre superficie
que celle qu'il avoit , et on ne peut lui
reprocher d'être fondé sur la craye ni impregné de pierres à fusil. Le Ciel , de son
côté, favorisera des mêmes benignes influences et des mêmes regards un terrain si bien composé : Les mêmes grapes
paroîtront chaque année aux mois accoûtumez. On continuera d'apporter la mêmeexactitude à tenir les Vignes exemptes
d'herbes et de toutes plantes étrangeres.
On aura la même attention à se servir de
perches transversales , pour ne pas laisser
ramper les grapes sur la terre , et afin que
la reverberation qui en résulte soit plus
forte et plus salutaire , à ne point prévenir la maturité pour les jours de la
récolte ; à mettre à part pour la boisson populaire les plus communs , s'il s'en
trouve à ne permettre l'entrée de la
Cuve à aucun de ces rameaux nerveux
et acres , qui supportent le grain et que
le Peuple appelle la Ralle. On aura la
même vigilance sur le grain du Raisin,
pendant qu'il baignera dans le mol de
la Cuve , ensorte que le degré de chaleur
qui s'y forme , contribuë à la délicatesse
comme à la couleur.
,
De tout cela il résulte un composé d'at tention
SEPTEMBRE. 1732. 1925
tention , de prudence et de connoissance
experimentale , qui est la seule drogue
que l'on puisse imputer à feu M.le Prieur
de Saint- Marien et à ceux qui ont pris
la peine de l'imiter ; ( a) drogue , comme
l'on voit , bien innocente , et dont les
grains ou les dragmes , qu'elle qu'en soit
la dose , ne peuvent produire qu'un bon
effet. Ces attentions coûtent des soins
et une dépense plus grande qu'on ne
croit ; mais ce sont des avances qui servent à faire travailler le petit Peuple ,
et dont l'achepteur dédommage bien vo
lontiers le vendeur. Au reste , quelque
forte que soit la dose d'attention et de
vigilance que M de Joigny puissent employer à la culture de leurs Vignes et à
la façon de leur vin , nous posons pour
certain , que jamais le vin de leur cru n'aura la bonté de celui d'Auxerre , parce
que la cause productive peche in radice.
Aussi est- il vrai de dire qu'on voit bien
des Commissionnaires de Joigny remonter jusqu'à Auxerre pour y acheter du
vin , dont ils accommodent leurs Correspondans ; mais on ne voit jamais ceux
(a) Celui qui s'en glorifie le plus ouvertement est son plus proche voisin , M. du Pile , dont les
Cuvées de vin sont toûjours d'une très-grande
réputation.
d'Auxerre
1926 MERCURE DE FRANCE
d'Auxerre aller acheter du vin de Joigny,
et la raison en est qu'on peut bien jetter du vin d'Auxerre sur celui de Joigny
pour l'améliorer , mais non pas du vin
de Joigny sur celui d'Auxerre. C'est ainsi
qu'en agissent les bons Connoisseurs ; et
si le commun des Habitans de Joigny ,
au lieu de s'accoûtumer à faire une infusion de quelques pintes de vin d'Orleans ou de Blois sur chacun de leurs
tonneaux , lorsque leur vin commence à
jaunir , prenoient la loüable coûtume d'y
mettre de bonne heure un broc de vin
d'Auxerre , ils verroient leurs vins augmenter de prix comme ils auroient augmenté en vigueur.
Autre supposition erronée de l'Ecrivain Champenois , qui mérite que Bacchus en fasse un exemple: c'est lorsqu'en
finissant il dit que l'Auteur de l'Ordonnance s'approprie sans scrupule les Pays
voisins , qu'il comprend dans le Territoire
d'Auxerre tous les Vignobles de dix lieuës
à la ronde , et qu'il s'égare même jusques
dans les Vignes de Dijon. C'est en imposer au public, sans faire attention que
c'est lui-même qui s'égare , et qu'il a
avoué que Joigny n'est qu'à six lieuës
d'Auxerre. Comment donc Bacchus auroit- il pûcomprendre dans le Pays Auxerrois
SEPTEMBRE. 1732. 1927
rois tout ce qui est à dix lieuës de cette
Ville à la ronde, et en même- temps en exclure joigny par un article formel de son
Ordonnance? Il y auroit une contradiction
manifeste.Très- constamment cette Topograpie est des plus mal en ordre. Il est
visible que d'une licue l'Ecrivain en fait
trois et même davantage. Il s'en faut donc
bien que le Territoire d'Auxerre ait ou
tant d'étenduë qu'il veut nous le faire
dire.Loin dele faire aller jusqu'à dix lieuës,
nous n'y comprenons pas même Chablies,
qui n'en est éloigné que de quatre. Mais
nous avons seulement donné à entendre
que ce Territoire commence à une lieuë
ou environ d'Auxerre vers le Septentrion ,
et qu'il remonte jusqu'à six lieuës ou environ le long des rivages de l'Yonne et de
la Cure , en y comprenant ce qui est éloigné d'une lieuë ou à peu près , du bord
de ces Rivieres.
En effet , il ya dans tous ces Pays- là ,
même superficie , même fond de terre, et
même culture de Vignes ; au lieu qu'à
Chablies , qui est à l'Orient et dans la
Champagne , tout change , Territoire
plan et façon de Vignes; il en est de même à
Joigny,qui est vers le Septentrion ou plutôt au Nord- Ouest , changement total
en genre de Terrain et de culture, et jus-
>
ques
1928 MERCURE DE FRANCE
ques dans le langage du métier. On n'y
connoît point , par exemple , le nom de
Pinot , si reveré à la Cour de Bacchus ;
mais on y parle de Houche , de Houchean ,
comme de Raisins du premier ordre.
Admirons donc à notre tour le Partisan des vins de Joigny , qui entousiasmé de son Pere Vaniere , d'ailleurs Poëte
naturel et Auteur d'un bon Livre , croit
qu'il faut toujours planter la Vigne sur
des Côteaux les plus approchans du perpendiculaire que faire se pourra. Bacchus
l'a renvoyé à des exemples de differens
climats de Bourgogne , dont le vin est
délicieux , quoiqu'en Pays presque plat ;
mais comme il n'est pas fait au langage
d'une Ordonnance qui combat ses prétentions , il dit que c'est s'égarer en pro-
-pos vagues , que d'apporter exemple sur
exemple du contraire de ce qu'il s'est
imaginé. C'est donc temps perdu que
d'alleguer tous les differens autres Vignobles du Royaume , pour confondre ces
prétentions , dès qu'on traite d'égarement les preuves des Adversaires
les exemples qui pulverisent le systême
opposé; c'est une affaire enfin dont il faut
laisser la décision au Public et demeurer
ensuite dans le silence , en se reposant
sur la fidelité et la vigilance des Offiet
ciers
SEPTEMBRE. 1732. 1929
ciers de Bacchus , qui en pareil cas ne
peuvent manquer de faire leur devoir.
Je suis , &c.
la Réponse insérée dans le Mercure du
mois de Mars dernier , à l'Ordonnance
de Bacchus.
J
E trouve, Messieurs, une grande inadvertance , presqu'au commencement
de la Réponse en question. Elle paroît
dès la fin de la seconde Période , c'est-àdire , à la page 488 , lig. 6. du Mercure.
Le raisonnement est si louche , que je serois plus volontiers porté à croire , que
celui qui a composé cette Piéce , étoit
moinsattentif à ce qu'il écrivoit , qu'à ce
qu'il avoit envie d'écrire.
Il a , au reste , fort mauvaise grace de
reprocher aux Gens tenans le Conseil du
Dieu
SEPTEMBRE. 1732. 1973
Dieu Bacchus , de n'avoir pas répondu à
ce que Virgile a écrit. Ce Conseil recon-.
noit , avec ce Poëte , que les lieux où il
y a une grande profondeur de terre, sont
meilleurs pour le bled , que les endroits
qui ont peu de fond , et que les superficies moins épaisses , que celles - là , conviennent au vin par préférence. Mais il
ajoute , que c'est abuser du texte Poëtique , que d'en inférer qu'il n'y a que
Joigny qui soit dans le cas d'avoir un territoire propre à la Vigne , ou que son exposition a cette propriété par excellence.
Chacun sçait que c'est un avantage commun à tous les lieux qui ont été les premiers cultivez en Vignes. Ce qui fait le
Vin délicat , c'est que les racines s'étendent plutôt en longueur qu'en profondeur ; mais ce n'est pas toujours ce qui le
fait bon et irreprochable. Il ne mérite pas
cette qualité , dès que cette petite épaisseur de terre est couchée et appliquée sur
des Bancs de craye et de tuf, comme est
le territoire de Joigny , au vû et au sçu
de tout le monde. Loin donc d'ici le prétendu Privilege singulier de cette Ville ;
Privilege exclusif, si on en croit le Député
qui parle pour elle ; mais dont ses habitans ne peuvent se glorifier sans une vaine présomption.
B iij Ce
1914 MERCURE DE FRANCE
Ce Député veut que nous marquions d'un
grand sérieux , ce que nous avons lû des
Poësies du P. Vaniere. Quoique l'Ordonnance de Bacchus l'insinue assez, et qu'il y
soit dit en termes formels, autant qu'une
Ordonnance en style burles quepeut le permettre, que la proposition du Poëte, prise trop généralement est fausse et démen.
tie par l'expérience , on ne laissera pas de
faire encore icy quelques réfléxions. C'est
être en effet scrupuleux jusqu'au ridicule, que de prétendre qu'on doit laisser sans
Vignes , des Côtes qui ne regardent pas
géométriquement le point de Midy en
face,quoique le grain de terre en soit bon;
comme s'il étoit besoin de tirer un allignement , et avoir son quart de cercle en
main lorsqu'on plante une Vigne , de
même que lorsqu'on dresse un Cadran.
Ce même Ecrivain convient qu'il ne faut
pas disputer des faits Or c'est un fait certain et prouvé par l'expérience de quinze
cens ans au moins , que des Côtes qui ne
sont point obverses directement au Midy , mais qui regardent un peu l'Orient ,
ou qui sont tournées vers le déclin du
Soleil , produisent du Vin aussi excellent
et même souvent meilleur que des Coteaux qui font face , en droite ligne , au
point méridional.
II
*
SEPTEMBRE. 1732. 1915.
Il est vrai qu'entre les Vignes situées
obversement au Midy ; il y en a quelquefois qui produisent un vin brulant: Mais si
ce Vin est bon, ce n'est pas toujours à cause
de leur exposition géométrique. C'est le
grain de terre qui fournit la substance
que les ardeurs du Soleil ne font que perfectionner. Un bon fond produit de ses
entrailles un bon raisin ; et c'est la chaleur
de la nuit, aussi bien que celle du jour qui
opere le dégré de maturité qui convient.Il
faut donc éviter de tirer une conclusion
trop generale en matiere de Physique
d'une proposition avancée par un Poëte
qui s'attache plus à rendre son Vers bien
harmonieux , qu'à approfondir les secrets
de la Nature; sans quoy l'on court risque
de tomber dans le Sophisme , qui prend
pour cause , ce qui n'est point cause. Une
preuve de cela , est que si c'étoit la plus
grande chaleur , tombant à plomb, qui
fait le meilleur raisin , il s'ensuivroit qu'il
seroit à propos d'ôter les feuilles de dessus le raisin pour le rendre meilleur ; ce
qu'on n'a garde de faire, parce que l'expe
rience fait connoître qu'une chaleur refléchie ou de réverbération , rend le fruit
plus sain et plus propre à faire de bon Vin,
qu'une chaleur directe.
Mais l'Ecrivain de Joigny est admiraBiiij ble
1916 MERCURE DE FRANCE
ble,lorsqu'il nous dit que le P.Vaniere fait
l'éloge de l'exposition de tout le Vignoble
de Joigny , en marquant le regard vers le
Midy , comme le plus favorable. La Providence, disoit- il au mois de Février 1731 .
nous a bienfavorisez , en nous environnant
de Collines , dont l'exposition nous répond
de la bonté de nos Vignobles. Il semble
que dès qu'une Ville est environnée de
Collines , il est impossible que toutes ces
Collines soient tournées vers le Midy
ou il faut s'abstenir de dire que la Ville
en est environnée , ou bien il faut avouer
qu'il y a de ces Collines qui sont tournées
vers l'Orient , d'autres vers l'Occident, et
d'autres encore autrement. Ce raisonnement louche me persuade que l'Auteur
n'y pensoit pas lorsqu'il a fait l'exclamation , qui contient ce que je viens d'allé
guer, et qu'alors il croyoit être à Auxerre,
qui véritablement est environné de tous les
côtez de Collines , qui produisent un Vin
de soutien, un Vin agréable et salutaire,au
lieu que je suis moralement assuré que les
habitans de Joigny , renieront presque
tout ce qui est au delà de leur Pont , ce
qui certainement comprend plus de la
moitié de l'Hémisphere, par rapport à
leur Ville.
Non seulement l'Ecrivain est refractaire
SEPTEMBRE. 1732. 1917
que
taire à l'Ordonnance de Bacchus , mais
encore il ose lui donner de fausses interprétations. Lorsque Bacchus , par exemple , nomme les Régions basses, moyenne
et supérieure il s'imagine que ce Dieu entend parler de celles de l'air ; et cela pour
avoir le plaisir de dire que cette Divinité
tient un langage qui sent le Copernic , et
qu'elle s'est répandue en propos vagues.
Peut on se figurer , sans être enlevé, comme Gyrano de Bergerac, dans les Régions sublunaires , que les Vignes soient plantées
dans une matiere aussi fluide et légere l'air ;et que la basse Région , dont
Bacchus parle , ne soit pas celle qui est de
niveau avec les Champs et les Prairies ?
Cette Divinité a déclaré , sans ambiguité,
que la moyenne Région d'un côteau , est
cet endroit où se rassemble la portion
la plus nourrissante du sol , après les pluyes,
et que la Région supérieure est celle du
terrain qui reste la plus dénuée de substance nutritive , et qui n'a , pour ainsi
dire , que les os. Le Conseil du Dieu
Bacchus n'a pû être si mal avisé , que de
confondre un Element avec l'autre , et de
prendre l'air pour la terre. Ainsi la remarque , que son langage conviendroit
mieux à un Traité d'Astronomie , qu'à
une déclaration sur la primauté des TerB v ritoires
1918 MERCURE DE FRANCE
ritoires, est mal placée et hors de son lieu.
Mais peut-on pardonner ce qui se lit
dans la page 490 ? Il faut être sujet à des
inattentions extrêmes , pour attribuer au
vulgaire de notre Ville une expresion qui
y est absolument inconnuë, que ni homme, ni femme , ni enfant , n'y ont jamais
employée. L'on s'y sert pour exprimer
l'ustancile en question , du même nom
qu'à Paris. Le Critique a pris , sans doute,
le Dictionnaire des environs de Montbar et de Sainte- Reine , pour le Dictionnaire d'Auxerre. Ce sont deux volumes
si differens , que je puis vous assurer que Benatron n'est pas un terme plus usité
dans le langage de notre Ville , que l'herbe de la Saingeon l'est dans les assaisonnemens, et que l'on n'y entend pas plus parler de l'un que de l'autre.
La Géographie du Défenseur des vins
de Joigny , me paroît aussi être un peu
embroüillée. On voit par ce qu'il dit au
bas de la même page 490. que ce n'est qu'à
regret qu'il avoue que Joigny appartient
au Pays Senonois , et qu'il aimeroit mieux
qu'il fût compris dans l'Auxerrois , afin
d'être de la Bourgogne. Il fait tout ce
qu'il peut pour accrocher sa Ville à cette
Province. Mais les Cartes citées dans l'Ordonnance de Bacchus , y sont contraires ;
et
SEPTEMBRE 1732. 1919
et contre cela point d'Appel. Ceux qui
sçavent l'origine des Impositions , n'ignorent point que le Pont de Joigny a
été regardé comme le premier sur la Riviere d'Yonne,qui soit situé dans la France , et que la formalité que ce Pont occasionne , vient de cette diversité de Territoire. Ainsi c'est encore une faute qui
s'est glissée dans le Memoire inseré dans
le Mercure du mois de Mars dernier ,
lorsqu'on y lit à la page 550. au sujet du
sieur Ferrand , celebre Peintre , qu'il naquit à Joigny en Bourgogne : les deux der
niers mots sont de trop.
'
Lorsque l'Ecrivain de cette Ville dit que
l'on a hazardé une Note sur l'Ordonnance de Bacchus , touchant le prix du
vin d'Auxerre , il a quelque espece de
raison. On lui avoue que la Note n'est
pas tout-a-fait exacte , en ce qu'elle ne
met pas le prix des vins d'Auxerre encore
assez au dessus de ceux de Joigny. L'Auteur Auxerrois apprehendant d'encourir
les peines portées par l'Ordonnance contre ceux qui ne disent pas la pure verité,
acouru promptement chez l'Imprimeur ,
et a fait mettre la chose dans toute son
exactitude ; sçavoir , que les vins d'Auxerre ont été vendus en 1730 , non 130.
et 140. livres au plus haut prix , mais
140. et 150, livres, B vj L'A
1920 MERCURE DE FRANCE
L'Apologiste de Joigny devoit avant que
d'écrire , se donner la peine de consulter
l'Errataimprimé à la fin du Mercure d'Octobre dernier , et il y auroit lû , que le
prix de 150. livres le muid fut celui du
vin de M. d'Orchy, alors digne Prieur de
Saint-Marien. C'est ce qu'il déclara 15 .
jours avant son décès , lorsqu'il eut pris
communication de l'Ordonnance. On ne
peut se dispenser de vanger la memoire
de ce Religieux , à qui on voit bien que
le Citoyen de Joigny en veut , lorsqu'on
fait attention à un petit mot qui lui est
échappé au haut de la page 49. Mais
pour suivre pas- à- pas ses Observations
Apologetiques , il est bon de lui faire remarquer qu'il a encouru la même peine
de l'Ordonnance , parce qu'il a allegué
faux en matiere grave , et de la compétence du Tribunal Bacchique , usant outre cola d'une réticence , dont les suites
pourroient tirer à grande consequence.
S'il s'est vendu à Auxerre du vin à pot
ou en détail à un prix plus modique qu'on
n'a fait à Joigny, ce n'étoit pas le meil leur vin , comme il a la hardiesse de le
dire; puisque sa bonne qualité le fait enlever encore tout chaud , et le fait conduire à Paris , en Normandie , en Picardie , en Flandres , en Artois et encore
plus
SEPTEMBRE. 1732. 1921
plus loin , mais c'étoit du vin de quelques Villages de la Vallée d'Aillant , qui
sont de l'Election de Joigny , que les
Habitans de ces lieux font voiturer à
Auxerre , pour y en trouver le débit
à la faveur du grand passage et de la modicité des droits , sans quoi , ils leur resteroient infalliblement ; et ces vins servent à la boisson des Paysans et des Artisans qui y affluent en bien plus grand
nombre qu'à Joigny.
Et quand même il y auroit eu du vin du
cru d'Auxerre , vendu à pot sur le pied
du prix de Joigny , cela ne viendroit que
de cette modicité des Droits d'Aydes
fondée sur les Privileges de la Bourgo- confirmez les Rois gne et autres , par
Louis XI. et Henry IV. comme aussi de
ce que la mesure est plus petite à Auxerre qu'à Joigny. L'Avocat de nos Adversaires , qui n'allegue que l'excedent
des Droits , nous prend apparamment
pour ces bons Limousins , à qui un Pape
de leur Nation promit , dit-on , de faire
avoir double récolte par an , à condition,
cependant, qu'au lieu que par tout ailleurs
on ne compte que douze mois par chacune année > on en compteroit vingtquatre dans leur Pays. Des que la pinte
est plus grande à Joigny qu'à Auxerre ,
il
1922 MERCURE DE FRANCE
il est juste qu'il y ait de l'augmentation
à proportion dans le prix de la vente qui se fait en détail.
Cet Ecrivain devient plus hardi à mesure qu'il approche de l'endroit où il veut
tirer son coup de pistolet. Sans sentir la
fausseté de son raisonnement , toute palpable qu'elle est , il dit qu'il suffit que
les vins de Joigny se trouvent bons pendant deux ou trois ans , pour qu'on puisse les transporter par tout où l'on voudra.
Mais où est la preuve que ces vins se trouvent bons pendant deux ou trois ans ?
C'est ce qu'il suppose et ce qu'il falloit
prouver. Il se peut faire que quelques
bouteillles tirées à propos d'un tonneau
se soient conservées sur le lieu , c'està- dire à Joigny même jusqu'à deux et
trois ans dans le fond d'une cave très profonde , ou dans un autre souterrain bien
frais. Mais il n'en suit pas de-là que ce
vin étant conduit bien loin , sur tout par
les voitures de terre , n'essuie pas de ces
revers de fortune dont l'Ordonnance à
parlé , qui seront tels que la fraicheur des
lieux les plus bas ne pourra le racommoder , et qu'on sera alors forcé pour le soutenir , de le couper avec du vin qui ait
du corps et de la moëlle. Bacchus à donc
décidé juste , parce qu'il étoit fondé sur
a
l'expe
SEPTEMBRE. 1732. 1923
l'experience. De sorte qu'il ne reste point
d'autre conseil à donner aux gens de Joigny , pour remedier à cet inconvenient ,
que de trouver un secret de transporter leurs caves toutes entieres et sans fracture , jusques dans les Pays où ils veulent
leur vin arive sain et sauf; encore
yconservera- t'il toujours son goût de terroir , c'est-à dire , de Craye et de Tuf,
qu'il a apporté en venant au monde.
que
La tournure des premieres lignes de
la page 492. fait voir que l'Ecrivain de
Joigny est accoûtumé à croire les choses legerement , et surtout celles qui renferment des suppositions sans preuve.
Peut-être auroit- il été plus réservé au
mois de Décembre 1731. si celui qu'il
attaque eut été encore vivant. Mais ayant
appris son décès , arrivé vers la S. Martin
précedente,il a crû que ce qu'il avanceroit
contre lui resteroit sans replique. Bien
plus , il se flatte peut-être que cette mort
fera que les vins d'Auxerre ne soutiendront plus leur réputation . Mais il se trompe encore ; la mort d'un seul homme n'a rien changé dans le Pays. Les
Vignes sont restées dans le même état ,
même sol , même exposition , même plan
de Pinot noir , clair et délié , même situation et même grain de terre ; nous ne
voyons
1924 MERCURE DE FRANCE
voyons pas qu'aucun tremblement ait
donné au Territoire une autre superficie
que celle qu'il avoit , et on ne peut lui
reprocher d'être fondé sur la craye ni impregné de pierres à fusil. Le Ciel , de son
côté, favorisera des mêmes benignes influences et des mêmes regards un terrain si bien composé : Les mêmes grapes
paroîtront chaque année aux mois accoûtumez. On continuera d'apporter la mêmeexactitude à tenir les Vignes exemptes
d'herbes et de toutes plantes étrangeres.
On aura la même attention à se servir de
perches transversales , pour ne pas laisser
ramper les grapes sur la terre , et afin que
la reverberation qui en résulte soit plus
forte et plus salutaire , à ne point prévenir la maturité pour les jours de la
récolte ; à mettre à part pour la boisson populaire les plus communs , s'il s'en
trouve à ne permettre l'entrée de la
Cuve à aucun de ces rameaux nerveux
et acres , qui supportent le grain et que
le Peuple appelle la Ralle. On aura la
même vigilance sur le grain du Raisin,
pendant qu'il baignera dans le mol de
la Cuve , ensorte que le degré de chaleur
qui s'y forme , contribuë à la délicatesse
comme à la couleur.
,
De tout cela il résulte un composé d'at tention
SEPTEMBRE. 1732. 1925
tention , de prudence et de connoissance
experimentale , qui est la seule drogue
que l'on puisse imputer à feu M.le Prieur
de Saint- Marien et à ceux qui ont pris
la peine de l'imiter ; ( a) drogue , comme
l'on voit , bien innocente , et dont les
grains ou les dragmes , qu'elle qu'en soit
la dose , ne peuvent produire qu'un bon
effet. Ces attentions coûtent des soins
et une dépense plus grande qu'on ne
croit ; mais ce sont des avances qui servent à faire travailler le petit Peuple ,
et dont l'achepteur dédommage bien vo
lontiers le vendeur. Au reste , quelque
forte que soit la dose d'attention et de
vigilance que M de Joigny puissent employer à la culture de leurs Vignes et à
la façon de leur vin , nous posons pour
certain , que jamais le vin de leur cru n'aura la bonté de celui d'Auxerre , parce
que la cause productive peche in radice.
Aussi est- il vrai de dire qu'on voit bien
des Commissionnaires de Joigny remonter jusqu'à Auxerre pour y acheter du
vin , dont ils accommodent leurs Correspondans ; mais on ne voit jamais ceux
(a) Celui qui s'en glorifie le plus ouvertement est son plus proche voisin , M. du Pile , dont les
Cuvées de vin sont toûjours d'une très-grande
réputation.
d'Auxerre
1926 MERCURE DE FRANCE
d'Auxerre aller acheter du vin de Joigny,
et la raison en est qu'on peut bien jetter du vin d'Auxerre sur celui de Joigny
pour l'améliorer , mais non pas du vin
de Joigny sur celui d'Auxerre. C'est ainsi
qu'en agissent les bons Connoisseurs ; et
si le commun des Habitans de Joigny ,
au lieu de s'accoûtumer à faire une infusion de quelques pintes de vin d'Orleans ou de Blois sur chacun de leurs
tonneaux , lorsque leur vin commence à
jaunir , prenoient la loüable coûtume d'y
mettre de bonne heure un broc de vin
d'Auxerre , ils verroient leurs vins augmenter de prix comme ils auroient augmenté en vigueur.
Autre supposition erronée de l'Ecrivain Champenois , qui mérite que Bacchus en fasse un exemple: c'est lorsqu'en
finissant il dit que l'Auteur de l'Ordonnance s'approprie sans scrupule les Pays
voisins , qu'il comprend dans le Territoire
d'Auxerre tous les Vignobles de dix lieuës
à la ronde , et qu'il s'égare même jusques
dans les Vignes de Dijon. C'est en imposer au public, sans faire attention que
c'est lui-même qui s'égare , et qu'il a
avoué que Joigny n'est qu'à six lieuës
d'Auxerre. Comment donc Bacchus auroit- il pûcomprendre dans le Pays Auxerrois
SEPTEMBRE. 1732. 1927
rois tout ce qui est à dix lieuës de cette
Ville à la ronde, et en même- temps en exclure joigny par un article formel de son
Ordonnance? Il y auroit une contradiction
manifeste.Très- constamment cette Topograpie est des plus mal en ordre. Il est
visible que d'une licue l'Ecrivain en fait
trois et même davantage. Il s'en faut donc
bien que le Territoire d'Auxerre ait ou
tant d'étenduë qu'il veut nous le faire
dire.Loin dele faire aller jusqu'à dix lieuës,
nous n'y comprenons pas même Chablies,
qui n'en est éloigné que de quatre. Mais
nous avons seulement donné à entendre
que ce Territoire commence à une lieuë
ou environ d'Auxerre vers le Septentrion ,
et qu'il remonte jusqu'à six lieuës ou environ le long des rivages de l'Yonne et de
la Cure , en y comprenant ce qui est éloigné d'une lieuë ou à peu près , du bord
de ces Rivieres.
En effet , il ya dans tous ces Pays- là ,
même superficie , même fond de terre, et
même culture de Vignes ; au lieu qu'à
Chablies , qui est à l'Orient et dans la
Champagne , tout change , Territoire
plan et façon de Vignes; il en est de même à
Joigny,qui est vers le Septentrion ou plutôt au Nord- Ouest , changement total
en genre de Terrain et de culture, et jus-
>
ques
1928 MERCURE DE FRANCE
ques dans le langage du métier. On n'y
connoît point , par exemple , le nom de
Pinot , si reveré à la Cour de Bacchus ;
mais on y parle de Houche , de Houchean ,
comme de Raisins du premier ordre.
Admirons donc à notre tour le Partisan des vins de Joigny , qui entousiasmé de son Pere Vaniere , d'ailleurs Poëte
naturel et Auteur d'un bon Livre , croit
qu'il faut toujours planter la Vigne sur
des Côteaux les plus approchans du perpendiculaire que faire se pourra. Bacchus
l'a renvoyé à des exemples de differens
climats de Bourgogne , dont le vin est
délicieux , quoiqu'en Pays presque plat ;
mais comme il n'est pas fait au langage
d'une Ordonnance qui combat ses prétentions , il dit que c'est s'égarer en pro-
-pos vagues , que d'apporter exemple sur
exemple du contraire de ce qu'il s'est
imaginé. C'est donc temps perdu que
d'alleguer tous les differens autres Vignobles du Royaume , pour confondre ces
prétentions , dès qu'on traite d'égarement les preuves des Adversaires
les exemples qui pulverisent le systême
opposé; c'est une affaire enfin dont il faut
laisser la décision au Public et demeurer
ensuite dans le silence , en se reposant
sur la fidelité et la vigilance des Offiet
ciers
SEPTEMBRE. 1732. 1929
ciers de Bacchus , qui en pareil cas ne
peuvent manquer de faire leur devoir.
Je suis , &c.
Fermer
Résumé : LETTRE aux Auteurs du Mercure, sur la Réponse insérée dans le Mercure du mois de Mars dernier, à l'Ordonnance de Bacchus.
L'auteur adresse une lettre aux rédacteurs du Mercure pour rectifier des erreurs contenues dans une réponse publiée en mars précédent, qui critiquait l'ordonnance de Bacchus. Il reproche à l'auteur de la réponse de mal interpréter le texte original et de critiquer le conseil de Bacchus pour ne pas avoir répondu à Virgile, tout en reconnaissant que les sols profonds sont favorables aux cultures. L'auteur conteste l'idée que Joigny possède un privilège exclusif pour la viticulture, affirmant que cette qualité est partagée par tous les lieux anciennement cultivés en vignes. Il critique également la prétention de l'auteur de la réponse de vouloir marquer un grand sérieux à propos des poèmes du Père Vaniere, soulignant que des coteaux non exposés directement au midi peuvent produire du vin excellent. L'auteur dénonce les interprétations erronées de l'ordonnance de Bacchus par l'écrivain de Joigny, notamment en confondant les régions de l'air avec celles du sol. Il corrige également des erreurs géographiques et linguistiques, affirmant que Joigny appartient au Pays Senonois et non à la Bourgogne. L'auteur conteste les affirmations sur le prix du vin d'Auxerre, soulignant que les vins de cette région sont vendus à des prix plus élevés et sont transportés dans diverses régions. Il critique également la supposition que les vins de Joigny se conservent bien pendant deux ou trois ans, sans preuve à l'appui. Le texte, daté de septembre 1732, discute des qualités comparées des vins de Joigny et d'Auxerre. L'auteur critique un écrivain de Joigny pour ses suppositions sans preuve concernant la supériorité des vins de Joigny. Il souligne que la mort d'un individu n'affecte pas la qualité des vignobles d'Auxerre, qui restent dans le même état et bénéficient des mêmes influences climatiques. Les méthodes de culture et de vinification à Auxerre sont détaillées, mettant en avant une attention particulière à la qualité du raisin et à la gestion des vignes. L'auteur affirme que le vin de Joigny ne pourra jamais égaler celui d'Auxerre en qualité. Il note que des commissionnaires de Joigny achètent du vin d'Auxerre pour l'améliorer, mais l'inverse ne se produit jamais. L'auteur critique également les erreurs topographiques de l'écrivain de Joigny, qui exagère l'étendue du territoire d'Auxerre. Il conclut en laissant la décision sur la qualité des vins au public et aux officiers de Bacchus.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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14
p. 2105-2111
REMARQUES sur la nouvelle publication de l'Inscription qu'on voyoit cy devant au Portail de sainte Croix d'Orleans, adressées aux Auteurs du Mercure.
Début :
Ayant appris, Messieurs, de ceux qui ont vû le Mercure de Juin avant [...]
Mots clefs :
Inscription, Portail de Sainte-Croix d'Orléans, Polluche, Quadratus orbis
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texteReconnaissance textuelle : REMARQUES sur la nouvelle publication de l'Inscription qu'on voyoit cy devant au Portail de sainte Croix d'Orleans, adressées aux Auteurs du Mercure.
du monde. Si le monde est rond comme
un globe , et quarré en même-tems , voilà tout d'un coup la quadrature du cercle qu'on se fatigue tant à chercher. Pasquier s'est diverti à la faire remarquer dans un bonnet de forme quarrée , qui
coëffe une tête ronde. Si par quadratus or
bis on doit entendre les quatre parties.
du monde on peut demander s'il est
donc vrai que celle qu'on appelle l'Amérique fut dès-lors connue. Mais je finis
car je m'appe çois qu'insensiblement je
m'éloigne du sujet qui ma engagé à vous
écrire. Je suis , &c.
>
A Auxerre , ce is. 15.
Juillet 1732.
un globe , et quarré en même-tems , voilà tout d'un coup la quadrature du cercle qu'on se fatigue tant à chercher. Pasquier s'est diverti à la faire remarquer dans un bonnet de forme quarrée , qui
coëffe une tête ronde. Si par quadratus or
bis on doit entendre les quatre parties.
du monde on peut demander s'il est
donc vrai que celle qu'on appelle l'Amérique fut dès-lors connue. Mais je finis
car je m'appe çois qu'insensiblement je
m'éloigne du sujet qui ma engagé à vous
écrire. Je suis , &c.
>
A Auxerre , ce is. 15.
Juillet 1732.
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Résumé : REMARQUES sur la nouvelle publication de l'Inscription qu'on voyoit cy devant au Portail de sainte Croix d'Orleans, adressées aux Auteurs du Mercure.
Le texte de 1732 discute de la forme du monde, à la fois ronde et carrée, illustrée par un bonnet carré sur une tête ronde. Il aborde la quadrature du cercle et les 'quatre parties du monde', se demandant si l'Amérique était connue. L'auteur s'excuse de s'être éloigné du sujet initial de sa lettre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 454-458
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, au mois de Décembre 1732. sur l'état de la Religion en Moscovie.
Début :
On a imprimé dans la Gazette d'Amsterdam, du 25. Novembre dernier, [...]
Mots clefs :
Russie, Religion, Ribera, Clergé, Église, Luthériens, Libelle, Moscovie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, au mois de Décembre 1732. sur l'état de la Religion en Moscovie.
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux
Auteurs du Mercure , au mois de Décembre
1732. sur l'état de la Religion
en Moscovie.
O
Na imprimé dans la Gazette
d'Amsterdam , du 25. Novembre
dernier , une nouvelle qui fait le principal
sujet de cette Lettre. Cette Nouvelle
est ainsi énoncée. On écrit de Pesersbourg,
qu'on y avoit arrêté plusieurs personnes
à l'occasion d'un Libelle rempli d'in-
Vectives
MARS. 1733. 455
vectives contre les Protestans , et adressé an
Clergé de Russie.
La Moscovie fait aujourd'hui une figure
trop considerable dans l'Europe , et
la Religion Catholique est trop interessée
dans ce qui se passe au sujet du prétendu
Libelle , pour qu'on ne soit pas bien aise
de trouver dans votre Journal un petit
Commentaire , sur les paroles qui viennent
d'être rapportées .
Tout ce qu'il y a de veritables et de
zelez Moscovites , est aussi éloigné des
erreurs des Luthériens , qu'attaché au
Schisme qui les divise de l'Eglise Romaine
; mais la multitude des Luthériens
et des Calvinistes , qui depuis le Regne
de Pierre I. a commencé d'inonder la
Russie , a fait craindre au Clergé de cet
Empire , que leurs erreurs ne s'y introduisent
avec eux ; et 1Evenement n'a
que trop justifié cette crainte . Pour prévenir
ce malheur , le dernier Archevêque
de Resan , qui sous le titre d'Exarque
, étoit l'Administrateur du Patriar
chat , que le Czar a enfin aboli , et qui
étoit un Prélat également cher et rèspectable
à tous les Russes , composa un
Ouvrage en sa Langue , qu'il intitula :
Petra Fidei , et qui devoit être un préservatif
contre l'entrée et le progrès du
Lu
456 MERCURE DE FRANCE
Lutheranisme dans l'Eglise Grecque .
Cet Ouvrage allarma les Luthériens ,
qui y firent faire une Réponse par François
Buddée , l'un de leurs plus habiles
Professeurs ; c'est du moins sous son nom.
que l'Ouvrage a parû. Cette prétenduë
Apologie étant tombée entre les mains
du R. P. Ribera , Dominiquain , Docteur
en Théologie , qui avoit accompàgné
M. le Duc de Liria , Ambassadeur
de S. M. C. à la Cour de Russie , en
qualité d'Aumônier , avec le titre de
Missionnaire Apostolique ; le zele de ce
Pere s'enflamma à la vûe d'un Ouvrage
où la Religion Catholique , n'est , à la
verité , que foiblement attaquée , mais
où la passion prodiguoit les plus grossieres
calomnies , et n'épargnoit aucune
de ces expressions odieuses , dont les honnêtes
gens dans le Parti Luthérien ont
toûjours rougi.
L. P. Ribera répondit donc à cette
'Apologie ; il communiqua sa Réponse ,
avant que de la publier à des Personnes
du premier Rang dans le Clergé de
Russie , et l'Approbation unanime qu'ils
y donnerent le détermina à la dédier à
l'Imperatrice de Russie même.
La Cour de Moscovie n'auroit jamais
fait des affaires aux Partisans de cet Ouvrage
MARS. 17336
457
vrage , et n'en auroit pas même porté
ses plaintes dans des Cours Etrangeres
,
si le Ministere n'étoit composé que de
Membres
de l'Eglise Grecque ; voilà ce
que c'est que le prétendu Libelle dont
il est parlé dans la Gazette citée cy -dessus ."
Si vous voulez , avant que d'imprimer
ma Lettre , avoir une plus ample connoissance
de l'Ouvrage du P. Ribera ,.
vous en trouverez un Exemplaire chez
le R. P. le Quien , sçavant et celebre Do
miniquain du Convent de la Ruë S. Ho-'
noré , il se fera , sans doute , un plaisir
de vous le communiquer
. Je crois que
Pinterêt de la Religion doit engager les
Auteurs de differens Journaux Litteraires
d'en donner un Extrait.
Quoique ce ne soit pas le P. Ribera
qui vous écrit cette Lettre , si vous avez
besoin de quelques éclaircissemens sur
son contenu , vous pouvez vous adresser
à lui en droiture dans son Convent
à Vienne en Autriche , d'où je vous écris
ce 20 , Décembre 1732.
Je vous envoye en même-temps une
Traduction ou Imitation des fameux Vers
de Seneque. Stet quicumque volet , &c.
Elle a été faite pour le fameux Maréchal
Guy' de Staremberg , qui répetoit continuellement
et s'étoit appliqué ces Vers ;
Ç c'est
458 MERCURE DE FRANCE
que
c'est lui
le Traducteur
fait parler.
Avant que de publier la Lettre dont
on vient de lire l'Extrait , nous avons
cr devoir la communiquer
au R. P le
Quien, qui a bien voulu nous envoyer les
Observations
suivantes ,
Auteurs du Mercure , au mois de Décembre
1732. sur l'état de la Religion
en Moscovie.
O
Na imprimé dans la Gazette
d'Amsterdam , du 25. Novembre
dernier , une nouvelle qui fait le principal
sujet de cette Lettre. Cette Nouvelle
est ainsi énoncée. On écrit de Pesersbourg,
qu'on y avoit arrêté plusieurs personnes
à l'occasion d'un Libelle rempli d'in-
Vectives
MARS. 1733. 455
vectives contre les Protestans , et adressé an
Clergé de Russie.
La Moscovie fait aujourd'hui une figure
trop considerable dans l'Europe , et
la Religion Catholique est trop interessée
dans ce qui se passe au sujet du prétendu
Libelle , pour qu'on ne soit pas bien aise
de trouver dans votre Journal un petit
Commentaire , sur les paroles qui viennent
d'être rapportées .
Tout ce qu'il y a de veritables et de
zelez Moscovites , est aussi éloigné des
erreurs des Luthériens , qu'attaché au
Schisme qui les divise de l'Eglise Romaine
; mais la multitude des Luthériens
et des Calvinistes , qui depuis le Regne
de Pierre I. a commencé d'inonder la
Russie , a fait craindre au Clergé de cet
Empire , que leurs erreurs ne s'y introduisent
avec eux ; et 1Evenement n'a
que trop justifié cette crainte . Pour prévenir
ce malheur , le dernier Archevêque
de Resan , qui sous le titre d'Exarque
, étoit l'Administrateur du Patriar
chat , que le Czar a enfin aboli , et qui
étoit un Prélat également cher et rèspectable
à tous les Russes , composa un
Ouvrage en sa Langue , qu'il intitula :
Petra Fidei , et qui devoit être un préservatif
contre l'entrée et le progrès du
Lu
456 MERCURE DE FRANCE
Lutheranisme dans l'Eglise Grecque .
Cet Ouvrage allarma les Luthériens ,
qui y firent faire une Réponse par François
Buddée , l'un de leurs plus habiles
Professeurs ; c'est du moins sous son nom.
que l'Ouvrage a parû. Cette prétenduë
Apologie étant tombée entre les mains
du R. P. Ribera , Dominiquain , Docteur
en Théologie , qui avoit accompàgné
M. le Duc de Liria , Ambassadeur
de S. M. C. à la Cour de Russie , en
qualité d'Aumônier , avec le titre de
Missionnaire Apostolique ; le zele de ce
Pere s'enflamma à la vûe d'un Ouvrage
où la Religion Catholique , n'est , à la
verité , que foiblement attaquée , mais
où la passion prodiguoit les plus grossieres
calomnies , et n'épargnoit aucune
de ces expressions odieuses , dont les honnêtes
gens dans le Parti Luthérien ont
toûjours rougi.
L. P. Ribera répondit donc à cette
'Apologie ; il communiqua sa Réponse ,
avant que de la publier à des Personnes
du premier Rang dans le Clergé de
Russie , et l'Approbation unanime qu'ils
y donnerent le détermina à la dédier à
l'Imperatrice de Russie même.
La Cour de Moscovie n'auroit jamais
fait des affaires aux Partisans de cet Ouvrage
MARS. 17336
457
vrage , et n'en auroit pas même porté
ses plaintes dans des Cours Etrangeres
,
si le Ministere n'étoit composé que de
Membres
de l'Eglise Grecque ; voilà ce
que c'est que le prétendu Libelle dont
il est parlé dans la Gazette citée cy -dessus ."
Si vous voulez , avant que d'imprimer
ma Lettre , avoir une plus ample connoissance
de l'Ouvrage du P. Ribera ,.
vous en trouverez un Exemplaire chez
le R. P. le Quien , sçavant et celebre Do
miniquain du Convent de la Ruë S. Ho-'
noré , il se fera , sans doute , un plaisir
de vous le communiquer
. Je crois que
Pinterêt de la Religion doit engager les
Auteurs de differens Journaux Litteraires
d'en donner un Extrait.
Quoique ce ne soit pas le P. Ribera
qui vous écrit cette Lettre , si vous avez
besoin de quelques éclaircissemens sur
son contenu , vous pouvez vous adresser
à lui en droiture dans son Convent
à Vienne en Autriche , d'où je vous écris
ce 20 , Décembre 1732.
Je vous envoye en même-temps une
Traduction ou Imitation des fameux Vers
de Seneque. Stet quicumque volet , &c.
Elle a été faite pour le fameux Maréchal
Guy' de Staremberg , qui répetoit continuellement
et s'étoit appliqué ces Vers ;
Ç c'est
458 MERCURE DE FRANCE
que
c'est lui
le Traducteur
fait parler.
Avant que de publier la Lettre dont
on vient de lire l'Extrait , nous avons
cr devoir la communiquer
au R. P le
Quien, qui a bien voulu nous envoyer les
Observations
suivantes ,
Fermer
Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, au mois de Décembre 1732. sur l'état de la Religion en Moscovie.
En décembre 1732, une lettre adressée aux auteurs du Mercure traite de la situation religieuse en Moscovie. Elle fait référence à une nouvelle de la Gazette d'Amsterdam, rapportant l'arrestation de plusieurs personnes à Pesersbourg pour un libelle contenant des attaques contre les protestants, destiné au clergé russe. La Moscovie, en raison de son importance en Europe et des intérêts de la religion catholique, attire une attention particulière concernant ce libelle. Les Moscovites sont décrits comme éloignés des erreurs luthériennes et attachés au schisme qui les sépare de l'Église romaine. Cependant, l'afflux de luthériens et de calvinistes en Russie depuis le règne de Pierre I a inquiété le clergé local, craignant l'introduction de leurs doctrines. Pour contrer cette menace, le dernier archevêque de Resan a composé un ouvrage intitulé 'Petra Fidei' pour protéger l'Église grecque contre le luthéranisme. Cet ouvrage a suscité une réponse de François Budde, un professeur luthérien. La réponse est tombée entre les mains du père Ribera, un dominicain et docteur en théologie, qui a rédigé une réfutation. Cette réfutation a été approuvée par des membres éminents du clergé russe et dédiée à l'impératrice de Russie. La lettre suggère que la cour de Moscovie n'aurait pas réagi si le ministère était composé uniquement de membres de l'Église grecque. L'auteur de la lettre propose aux auteurs du Mercure de consulter le père le Quien pour obtenir un exemplaire de l'ouvrage du père Ribera et en donner un extrait. La lettre se conclut par une traduction des vers de Sénèque, faite pour le maréchal Guy de Starhemberg.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
16
p. 1488-1502
LETTRE aux Auteurs du Mercure de France, pour servir de Réponse à la Réplique de M. P** d'Orléans, imprimée dans le Mercure de Février dernier et pour appuyer l'autorité de l'Historien Lampride, au sujet d'Alexandre Severe.
Début :
Je ne cherche point, MM. à renouveller la dispute litteraire qui paroît [...]
Mots clefs :
Sévère Alexandre, Lampride, Historien, Historiens, Empereur, Tillemont, Sénat, Soldats, Caracalla, Manuscrits
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE aux Auteurs du Mercure de France, pour servir de Réponse à la Réplique de M. P** d'Orléans, imprimée dans le Mercure de Février dernier et pour appuyer l'autorité de l'Historien Lampride, au sujet d'Alexandre Severe.
LETTRE aux Auteurs du Mercure
de France , pour servir de Réponse à la
Réplique de M. P ** d'Orleans , imprimée
dans le Mercure de Février dernier -
et pour appuyer l'autorité de l'Historien
Lampride , au sujet d'Alexandre Severe.
J
20383*
21
E ne cherche point , MM. à renouveller
la dispute litteraire qui paroît
avoir été autrefois entre M. de Tillemont
et le P. Pagi , au sujet de l'Epoque des
guerres de l'Empereur Alexandre- Severe.
Qui auroit- il d'interessant pour le Public
de voir repeter par M. P. d'Orleans - les
raisonnemens du P. Pagi ĝeett par moi ceux
de
JUILLET. 1733. 1489
de M. de Tillemont ? Ce seroit abuser
de sa patience , que de toujours écrire et
ne, rien donner de nouveau . Au moins si
l'on n'est pas en état de produire dans une
cause obscure des argumens métaphysiques,
il n'y a point de mal d'avancer modestement
ses conjectures. Je me suis servi
de cette voye permise en fait d'Histoire
profane , pour essayer de fixer , autant
qu'il est possible , ce que je crois
devoir manquer de quelques degrez de
certitude physique , jusqu'à ce que les
Médailles soient venues au secours des
Historiens. Mais mon Adversaire trouve
des impossibilitez dans tout ce que je
propose. Les Saumaises, les Tillemonts et
les anciens Historiens sont bons pour lui,
et ils ne valent rien pour moi.
Selon M. P. Lampride est plein de fautes
, et Hérodien n'en a aucune , c'est
un Ecrivain presque infaillible . Quelqu'un
cependant pourroit dire le contraire
après M. de Tillemont , avec
grand fondement , et prouver que
c'est plutôt Hérodien qui avance plusieurs
faits insoutenables. Mais il suffit
de renvoyer là-dessus aux excellentes Notes
qu'il a faites sur la Vie d'Alexandre.
Les meilleurs Historiens sont sujets à
commettre quelques fautes ; ce n'est pas
"
B unc
1490 MERCURE DE FRANCE
une raison suffisante pour rejetter ce qu'ils
ont écrit. Quoique Dion Cassius soit un
des plus éxacts , Dodwel fait voir quan
tité d'erreurs dans lesquelles il est tombé
à l'égard du seul Trajan. Perizonius a
fait un Livre exprès intitulé : Animadversiones
Historica , où il montre la même
chose à l'égard des Historiens les plus
estimez , comme Polybe , Tite - Live, &c.
Doit- on dire qu'à cause de cela le témoignage
de ces Auteurs doit être rejetté ,
s'il n'est soutenu par d'autres ? Le même
Critique a prouvé dans ce même Ouvrage
une infinité d'anachronismes et d'autres
erreurs monstrueuses dans Valere-
Maxime. N'osera - t'on donc plus citer cet
Historien ? j'en laisse le jugement au Public.
M. P. a mauvaise grace de m'accuser
d'avoir tronqué sa proposition . J'ai bien
remarqué quelle est la conclusion du
raisonnement qu'il a employé dans le
Mercure du mois d'Avril dernier , page
679. immédiatement après s'y être servi
de l'autorité de Casaubon , de Saumaise
et de M. de Tillemont ; je n'ai point confondu
cette conclusion avec la proposition
qui finit l'article précédent de sa
Lettre ; et c'est parce qu'elle m'a paru
extraordinaire que je l'ai mise telle qu'elle
est
JUILLET . 1733. 1491
est; la voici encore une fois : A moins
que les faits qu'on trouve dans cette compilation
( de l'Histoire Auguste ) ne se rencontrent
ailleurs , on est toujours bien reçû
à ne les point recevoir comme véritables . (a)
Sans sarrêter davantage à montrer le
faux de cette proposition , le moindre de
ses deffauts seroit en ce qu'elle peche contre
une Regle de Logique qui dit : Conclusio
non debet esse latior præmissis. Il
faut voir l'Ecrit même.
Mais pour revenir à Lampride , qui est
l'Auteur pour lequel
pour lequel il témoigne le plus
d'aversion , et pour le laver des reproches
qu'il lui fait , il me paroît que si
M. P. ne peut presque rien souffrir
dans cet Historien , c'est qu'il ne veut
pas se donner la peine de l'entendre .
Si une proposition de cet Ecrivain peut
avoir deux sens , M. P. prend toujours
celui qui lui paroît condamné par les
Ecrits des autres Historiens , ou par d'au
tres Monumens , afin de le décrier de
plus en plus.
A commencer par le premier endroit
qu'il articule , c'est une injustice que de
reprocher à Lampride d'avoir ignoré jusqu'au
nom de la mere d'Alexandre. C'est
(a) Merc. d'Avril 1732. p. 679. lignes 24 .
25. 26, et p. 680. lignes 1. ct 2 .
Bij plutôt
1492 MERCURE DE FRANCE
plutôt le Censeur de cet Historien qui
est répréhensible , en ce qu'il n'a pas entendu
son Texte . Mon Edition le porte
ainsi : Alexander igitur cui Mammea mater
fuit , nam et ita dicitur à plerisque ,
à prima pueritia artibus bonis indutus tam
civilibus quàm militaribus , & c. Ces mots
nam et ita dicitur à plerisque , ne se rapportent
point à Mammée , mais à son
fils , que les Grecs appelloient ordinairement
Alexandrum Mammea , et sur l'usage
du sur - nom , suivant la judicieuse
remarque de Casaubon en cet endroits
c'est comme si Lampride eût dit , Alexander
igitur Mammea filius , nam et ita
cognominatur à plerisque. Il ne faut donc
point traduire cet endroit de Lampride
de cette sorte. Alexandre donc qui avoit
pour mere Mammée , car plusieurs croyent
qu'elle a été sa mere ; mais il faut rendre
ainsi son Texte dans notre Langue : Alexandre
donc fils de Mammée , car c'est ainsi
qu'il est surnommé par plusieurs. Mais
quand le Texte de Lampride ne seroit pas
aussi clair qu'il l'est , M. P. devoit faire
attention à tant d'autres Endroits , où cet
Auteur suppose comme une chose certaine
et connue de tout le Peuple , que
la mere d'Alexandre s'appelloit Mammée.
Puellas et pueros , quemadmodum Antonius
1
Faus
JUILLET. 17337 1493
Faustinianas instituerat , Mammeanas et
Mammeanos instituit . Et plus loin ; In
matrem Mammeam unicè pius fuit : ita ut
Roma in Palatio faceret dietas nominis
Mammea quas imperitum vulgus hodie ad
Mammam vocat ; et in Baiano Palatium
cum stagno quod Mammea nomine hodieque
censetur.
Quelque grand que soit le nombre
d'exemples d'Empereurs Romains qui
ont cassé des Legions , on ne peut pas
dire qu'aucun de ceux- là en eût cassé
plus d'une sous son regne , ou au moins
si souvent qu'Alexandre ; il falloit cependant
en produire d'anterieurs à cet Êmpereur
, qui en eussent cassé souvent ,
pour pouvoir mettre Lampride dans son
tort. C'est ce que ne fait pas M. P. Si
Lampride dit qu'Alexandre fut le seul
jusqu'alors qu'on eût vû casser plusieurs
Légions pour les punir de leurs séditions,
il soutient ailleurs le même langage et
en donne l'explication : Severitatis autem
tanta fuit in milites ut SÆPE Legiones integras
exauctoraverit . Et c'est par cet endroit
que Casaubon explique l'autre. Il
est vrai que Lampride n'entre point dans
le détail de chacune des Légions qui su
bit cette punition , se contentant de parler
de celle qu'il cassa à Antioche ; mais
B iij un
1494 MERCURE DE FRANCE
un Historien n'est pas tenu de tout dire,
et il n'est pas obligé de prévoir qu'après
quatorze siecles il se trouvera quelqu'un
qui essayera de le faire passer pour ce
qu'il n'est pas.
Il n'y a rien d'incompatible dans ce
que Tibere a eu envie de faire au sujet
de Jesus Christ , selon Tertullien , et ce
que Lampride dit qu'Hadrien pensa faire
selon quelques - uns . Ce sont deux desseins
aussi differents que les deux Princes .
L'un n'exclud pas l'autre ; et loin de révoquer
en doute ce que dit Lampride ,
on doit lui avoir obligation de ce qu'il
nous apprend l'origine qu'on attribuoit
de son temps à ces Temples vuides d'idoles
et de Statues , qu'on appelloit les
Temples d'Hadrien , dans les lieux où il
y en avoit , et tel qu'est peut - être celui
qui reste à Nîmes , qu'on dit bâti par
cet Empereurs si Tertullien n'a parlé que
de Tibere , c'est qu'il a pû ignorer le fait
rapporté par notre Historien , qui d'ailleurs
n'en parle que comme d'un bruit
qui couroit et qu'il ne garantit pas : Quod
et Hadrianus cogitasse fertur.
A l'égard du discours où M. P. trouve
mauvais qu'Alexandre dise que le nom
d'Antonin avoit été affecté par Bassien
c'est une piece que Lampride déclare qu'il
JUILLET. 1733. 1495
•
8
a tirée des Registres de la Ville de Rome
au VI. de Mars , telle qu'elle avoit été
prononcée par Alexandre avec les acclamations
du Sénat . Comment peut- il s'inscrire
en faux contre une piece si authentique?
J'aime mieux croire qu'Alexandre
jugea à propos de parler ainsi en présence
du Sénat , que de penser que ces
Actes publics eussent été falsifièz , et
qu'au bout de cent ans Lampride ait été
trompé par de faux Registres. C'est mon
sentiment , qui ne doit gêner en rien celui
de M. P. Au reste , quand il seroit
vrai qu'Alexandre auroit voulu prendre
la qualité de fils de Caracalle dans la suite
de son regne , à cause de l'affection des
Soldats pour le nom des Antonins , il ne
suit pas de- là qu'il ait dû avoir la même
pensée dans les premiers temps de
son élevation à l'Empire , et lorsqu'il fit
ses remerciemens au Sénat . Autrement ,
il n'auroit pas refusé alors le nom d'Antonin
, d'autant plus qu'il étoit en effet reconnu
pour parent de Caracalle. N'ayant
donc eu dans les commencemens aucun
dessein de prendre le nom d'Antonin
il n'est pas surprenant qu'il ait en quelque
maniere blâmé ce dernier d'avoir pris
ce nom , quoiqu'on ne puisse disconvenir
qu'il ne l'ait fait avec grand ména-
B iiij gement
>
1496 MERCURE DE FRANCE
gement , s'étant contenté de dire que Caracalle
avoit affecté ce nom ; affectatum
in Bassiano ; expression des plus moderées
, quoiqu'en veuille dire M. P. D'ailleurs
il n'y a pas d'apparence qu'en cette
occasion , avec sa modestie ordinaire , et
dans un âge aussi tendre , il eût eu l'effronterie
de vouloir faire croire au Sénat
qu'il
étoit vraiment fils de Caracalle .
Que M. P. trouve donc tant qu'il voudra
dans Alexandre une opposition de
conduite ; elle ne paroîtra qu'à lui seul ,
qui n'est pas disposé à recevoir la justification
de Lampride avec bienveillance ,
aimant mieux croire que les Fastes publics
d'une Ville telle que Rome , l'ont induit
en erreur , que de convenir qu'Alexandre
ait pû parler comme il a fait.
Il reste à lui répondre sur ce qu'il trouve
de si plaisant dans notre Historien .
Rien en effet ne seroit plus plaisant que
d'avoir mis les Jurisconsultes Pomponius
, Alphenus , &c. parmi les Conseillers
d'Alexandre ; puisqu'on convient
que ces hommes n'existoient point alors .
Mais le plaisant est que M. P. cite l'Historien
selon les Editions publiées sans
aucun examen critique des manuscrits
et sans faire semblant qu'il connoisse les
Notes queCasaubon et Saumaise ont données
JUILLET. 1733. 1497
nées sur cet endroit. Car s'il avoit voulu
y
faire attention , il auroit reconnu que
les noms de ces Jurisconsultes ne se trouvent
point dans les anciens manuscrits de
cette Histoire , de laquelle ils doivent être
entierement rejettez . C'est une circonstance
qui a été ignorée par Cujas , lequel
étoit anterieur aux Commentaires de
Casaubon et de Saumaise : et ce Jurisconsulte
est plus excusable avec sa mauvaise
Critique, que ne l'est le Censeur de Lampride.
Je vous ai déja averti, MM . que je regar
dois comme inutile d'étaler les raisons qu'à
eues M..de Tillemont , de ne se pas trouver
d'accord avec le P. Pagi , sur l'année
de la guerre de Perse . Je persiste à la placer
avec lui quatre ou cinq ans plus tard
que le P. Pagi. De deux Sçavans qui ont
discuté un point historique , chacun est
libre de suivre la Chronologie qui lui
plait. Ce qu'il est bon de remarquer ici
c'estque ce fut sous l'Empire d'Alexandre
que l'on commença à se servir du nom.
de Perse , pour signifier le Pays que les
Parthes occupoient auparavant. Ainsi lorsque
cet Empereur étant à Antioche quelques
années après dit dans sa Harangue
aux Soldats , qu'on leur a appris à
élever leur voix contre les Perses , il n'a
By pû
1500 MERCURE DE FRANCE
nius à aller à cette expedition , mais encore
à l'accompagner dans ce voyage.
M. P. finit les Remarques critiques
qu'il avoit à faire contre moy en particulier
, par une énumération que je
ne lui demandois pas du nom d'Ovinius
, tirée des Inscriptions. J'aurois
souhaité qu'il l'eut puisée dans les Historiens
ou dans d'autres Ecrivains dont
les Ouvrages sont parvenus jusqu'à nous
par la voye des Manuscrits . C'est ce qu'il
n'a pas fait. Au lieu de cela, il entreprend
de prouver au Public que c'est une er
reur de dire Alexandre Severe , et il prétend
qu'on doit dire Severe Alexandre.
Quoique la chose ne soit pas d'une assez
grande importance pour être discutée ,
je ne puis pas me dispenser de dire que
c'est- là une mauvaise chicane qu'il fait
sur les surnoms de cet Empereur, et toujours
pour revenir contre Lampride, qu'il
ne veut pas se donner la peine d'entendre.
Lampride dit bien que les Soldats
l'appellerent Severe , à cause de la séverité
dont il étoit à leur égard , et il infere
que cette manierè d'entendre ce nom
leur étoit propre et speciale ; mais il a
été bien éloigné de croire en son particulier
que ç'ait été une épithete ; , il n'en
dit rien qui ne s'accorde avec lidée de
sa véritable origine.
P
JUILLET. 1733. 1501
Ce nom de Severe , fut celui qu'il prit
quand il fut parvenu à l'Empire , pour
marquer apparemment qu'il étoit lié de
parenté avec Septime- Severe. Alors par
respect pour ce Prince , il mit ce surnom
nouveau avant l'ancien , et cela fut
suivi dans tous les Monumens publics ..
Les Soldats qui ressentoient la séverité
de cet Empereur plus que personne , furent
frappez de ce nom , et s'en servoient
plus communément entre eux dans le
sens adjectif qu'il peut avoir. Mais tout
le monde , et les Historiens mêmes , continuerent
de l'appeller Alexandre simplement
, ou d'y ajouter le nom de Severe ,
pour le distinguer d'Alexandre Emilien
et d'un autre Alexandre , Tyran d'Afrique.
C'est cet usage qui a passé jusqu'à
nous. Il est fondé sur ce que le nom
d'Alexandre a été sûrement le premier
surnom de cet Empereur , selon l'ordre
des. temps : Salutabatur autem nomine hoč
sive Alexander , dit Lampride ; et dans
les premieres Médailles de ce Prince
frappées sous Héliogabale , il est appellé
seulement M. Aurelius Alexander Casar.
Aussi ce nom d'Alexandre se trouve t'il
au moins douze fois dans les Acclamations
que fit le Sénat le jour que le jeune
Empereur y fit sa premiere Entrée , et
celui
1502 MERCURE DE FRANCE
celui de Severe ne s'y trouve pas une
seule fois , quoique le nom d'Aurelius
n'y manque point. Le nom de Severe
étant ainsi reconnu comme le plus rarement
usité du vivant d'Alexandre , il
n'est devenu que distinctif dans les
temps suivants. Or il est constant que
les noms qui sont les plus distinctifs ,
ne se mettent point les premiers dans
l'usage , mais à la suite du plus commun.
En avoüant donc que le nom de
Severus est dans ce cas , il doit ne se
trouver dans le langage ordinaire que
comme accessoire au nom plus commun.
Je suis , & c.
A Auxerre le 31 .
Mars
1733.
de France , pour servir de Réponse à la
Réplique de M. P ** d'Orleans , imprimée
dans le Mercure de Février dernier -
et pour appuyer l'autorité de l'Historien
Lampride , au sujet d'Alexandre Severe.
J
20383*
21
E ne cherche point , MM. à renouveller
la dispute litteraire qui paroît
avoir été autrefois entre M. de Tillemont
et le P. Pagi , au sujet de l'Epoque des
guerres de l'Empereur Alexandre- Severe.
Qui auroit- il d'interessant pour le Public
de voir repeter par M. P. d'Orleans - les
raisonnemens du P. Pagi ĝeett par moi ceux
de
JUILLET. 1733. 1489
de M. de Tillemont ? Ce seroit abuser
de sa patience , que de toujours écrire et
ne, rien donner de nouveau . Au moins si
l'on n'est pas en état de produire dans une
cause obscure des argumens métaphysiques,
il n'y a point de mal d'avancer modestement
ses conjectures. Je me suis servi
de cette voye permise en fait d'Histoire
profane , pour essayer de fixer , autant
qu'il est possible , ce que je crois
devoir manquer de quelques degrez de
certitude physique , jusqu'à ce que les
Médailles soient venues au secours des
Historiens. Mais mon Adversaire trouve
des impossibilitez dans tout ce que je
propose. Les Saumaises, les Tillemonts et
les anciens Historiens sont bons pour lui,
et ils ne valent rien pour moi.
Selon M. P. Lampride est plein de fautes
, et Hérodien n'en a aucune , c'est
un Ecrivain presque infaillible . Quelqu'un
cependant pourroit dire le contraire
après M. de Tillemont , avec
grand fondement , et prouver que
c'est plutôt Hérodien qui avance plusieurs
faits insoutenables. Mais il suffit
de renvoyer là-dessus aux excellentes Notes
qu'il a faites sur la Vie d'Alexandre.
Les meilleurs Historiens sont sujets à
commettre quelques fautes ; ce n'est pas
"
B unc
1490 MERCURE DE FRANCE
une raison suffisante pour rejetter ce qu'ils
ont écrit. Quoique Dion Cassius soit un
des plus éxacts , Dodwel fait voir quan
tité d'erreurs dans lesquelles il est tombé
à l'égard du seul Trajan. Perizonius a
fait un Livre exprès intitulé : Animadversiones
Historica , où il montre la même
chose à l'égard des Historiens les plus
estimez , comme Polybe , Tite - Live, &c.
Doit- on dire qu'à cause de cela le témoignage
de ces Auteurs doit être rejetté ,
s'il n'est soutenu par d'autres ? Le même
Critique a prouvé dans ce même Ouvrage
une infinité d'anachronismes et d'autres
erreurs monstrueuses dans Valere-
Maxime. N'osera - t'on donc plus citer cet
Historien ? j'en laisse le jugement au Public.
M. P. a mauvaise grace de m'accuser
d'avoir tronqué sa proposition . J'ai bien
remarqué quelle est la conclusion du
raisonnement qu'il a employé dans le
Mercure du mois d'Avril dernier , page
679. immédiatement après s'y être servi
de l'autorité de Casaubon , de Saumaise
et de M. de Tillemont ; je n'ai point confondu
cette conclusion avec la proposition
qui finit l'article précédent de sa
Lettre ; et c'est parce qu'elle m'a paru
extraordinaire que je l'ai mise telle qu'elle
est
JUILLET . 1733. 1491
est; la voici encore une fois : A moins
que les faits qu'on trouve dans cette compilation
( de l'Histoire Auguste ) ne se rencontrent
ailleurs , on est toujours bien reçû
à ne les point recevoir comme véritables . (a)
Sans sarrêter davantage à montrer le
faux de cette proposition , le moindre de
ses deffauts seroit en ce qu'elle peche contre
une Regle de Logique qui dit : Conclusio
non debet esse latior præmissis. Il
faut voir l'Ecrit même.
Mais pour revenir à Lampride , qui est
l'Auteur pour lequel
pour lequel il témoigne le plus
d'aversion , et pour le laver des reproches
qu'il lui fait , il me paroît que si
M. P. ne peut presque rien souffrir
dans cet Historien , c'est qu'il ne veut
pas se donner la peine de l'entendre .
Si une proposition de cet Ecrivain peut
avoir deux sens , M. P. prend toujours
celui qui lui paroît condamné par les
Ecrits des autres Historiens , ou par d'au
tres Monumens , afin de le décrier de
plus en plus.
A commencer par le premier endroit
qu'il articule , c'est une injustice que de
reprocher à Lampride d'avoir ignoré jusqu'au
nom de la mere d'Alexandre. C'est
(a) Merc. d'Avril 1732. p. 679. lignes 24 .
25. 26, et p. 680. lignes 1. ct 2 .
Bij plutôt
1492 MERCURE DE FRANCE
plutôt le Censeur de cet Historien qui
est répréhensible , en ce qu'il n'a pas entendu
son Texte . Mon Edition le porte
ainsi : Alexander igitur cui Mammea mater
fuit , nam et ita dicitur à plerisque ,
à prima pueritia artibus bonis indutus tam
civilibus quàm militaribus , & c. Ces mots
nam et ita dicitur à plerisque , ne se rapportent
point à Mammée , mais à son
fils , que les Grecs appelloient ordinairement
Alexandrum Mammea , et sur l'usage
du sur - nom , suivant la judicieuse
remarque de Casaubon en cet endroits
c'est comme si Lampride eût dit , Alexander
igitur Mammea filius , nam et ita
cognominatur à plerisque. Il ne faut donc
point traduire cet endroit de Lampride
de cette sorte. Alexandre donc qui avoit
pour mere Mammée , car plusieurs croyent
qu'elle a été sa mere ; mais il faut rendre
ainsi son Texte dans notre Langue : Alexandre
donc fils de Mammée , car c'est ainsi
qu'il est surnommé par plusieurs. Mais
quand le Texte de Lampride ne seroit pas
aussi clair qu'il l'est , M. P. devoit faire
attention à tant d'autres Endroits , où cet
Auteur suppose comme une chose certaine
et connue de tout le Peuple , que
la mere d'Alexandre s'appelloit Mammée.
Puellas et pueros , quemadmodum Antonius
1
Faus
JUILLET. 17337 1493
Faustinianas instituerat , Mammeanas et
Mammeanos instituit . Et plus loin ; In
matrem Mammeam unicè pius fuit : ita ut
Roma in Palatio faceret dietas nominis
Mammea quas imperitum vulgus hodie ad
Mammam vocat ; et in Baiano Palatium
cum stagno quod Mammea nomine hodieque
censetur.
Quelque grand que soit le nombre
d'exemples d'Empereurs Romains qui
ont cassé des Legions , on ne peut pas
dire qu'aucun de ceux- là en eût cassé
plus d'une sous son regne , ou au moins
si souvent qu'Alexandre ; il falloit cependant
en produire d'anterieurs à cet Êmpereur
, qui en eussent cassé souvent ,
pour pouvoir mettre Lampride dans son
tort. C'est ce que ne fait pas M. P. Si
Lampride dit qu'Alexandre fut le seul
jusqu'alors qu'on eût vû casser plusieurs
Légions pour les punir de leurs séditions,
il soutient ailleurs le même langage et
en donne l'explication : Severitatis autem
tanta fuit in milites ut SÆPE Legiones integras
exauctoraverit . Et c'est par cet endroit
que Casaubon explique l'autre. Il
est vrai que Lampride n'entre point dans
le détail de chacune des Légions qui su
bit cette punition , se contentant de parler
de celle qu'il cassa à Antioche ; mais
B iij un
1494 MERCURE DE FRANCE
un Historien n'est pas tenu de tout dire,
et il n'est pas obligé de prévoir qu'après
quatorze siecles il se trouvera quelqu'un
qui essayera de le faire passer pour ce
qu'il n'est pas.
Il n'y a rien d'incompatible dans ce
que Tibere a eu envie de faire au sujet
de Jesus Christ , selon Tertullien , et ce
que Lampride dit qu'Hadrien pensa faire
selon quelques - uns . Ce sont deux desseins
aussi differents que les deux Princes .
L'un n'exclud pas l'autre ; et loin de révoquer
en doute ce que dit Lampride ,
on doit lui avoir obligation de ce qu'il
nous apprend l'origine qu'on attribuoit
de son temps à ces Temples vuides d'idoles
et de Statues , qu'on appelloit les
Temples d'Hadrien , dans les lieux où il
y en avoit , et tel qu'est peut - être celui
qui reste à Nîmes , qu'on dit bâti par
cet Empereurs si Tertullien n'a parlé que
de Tibere , c'est qu'il a pû ignorer le fait
rapporté par notre Historien , qui d'ailleurs
n'en parle que comme d'un bruit
qui couroit et qu'il ne garantit pas : Quod
et Hadrianus cogitasse fertur.
A l'égard du discours où M. P. trouve
mauvais qu'Alexandre dise que le nom
d'Antonin avoit été affecté par Bassien
c'est une piece que Lampride déclare qu'il
JUILLET. 1733. 1495
•
8
a tirée des Registres de la Ville de Rome
au VI. de Mars , telle qu'elle avoit été
prononcée par Alexandre avec les acclamations
du Sénat . Comment peut- il s'inscrire
en faux contre une piece si authentique?
J'aime mieux croire qu'Alexandre
jugea à propos de parler ainsi en présence
du Sénat , que de penser que ces
Actes publics eussent été falsifièz , et
qu'au bout de cent ans Lampride ait été
trompé par de faux Registres. C'est mon
sentiment , qui ne doit gêner en rien celui
de M. P. Au reste , quand il seroit
vrai qu'Alexandre auroit voulu prendre
la qualité de fils de Caracalle dans la suite
de son regne , à cause de l'affection des
Soldats pour le nom des Antonins , il ne
suit pas de- là qu'il ait dû avoir la même
pensée dans les premiers temps de
son élevation à l'Empire , et lorsqu'il fit
ses remerciemens au Sénat . Autrement ,
il n'auroit pas refusé alors le nom d'Antonin
, d'autant plus qu'il étoit en effet reconnu
pour parent de Caracalle. N'ayant
donc eu dans les commencemens aucun
dessein de prendre le nom d'Antonin
il n'est pas surprenant qu'il ait en quelque
maniere blâmé ce dernier d'avoir pris
ce nom , quoiqu'on ne puisse disconvenir
qu'il ne l'ait fait avec grand ména-
B iiij gement
>
1496 MERCURE DE FRANCE
gement , s'étant contenté de dire que Caracalle
avoit affecté ce nom ; affectatum
in Bassiano ; expression des plus moderées
, quoiqu'en veuille dire M. P. D'ailleurs
il n'y a pas d'apparence qu'en cette
occasion , avec sa modestie ordinaire , et
dans un âge aussi tendre , il eût eu l'effronterie
de vouloir faire croire au Sénat
qu'il
étoit vraiment fils de Caracalle .
Que M. P. trouve donc tant qu'il voudra
dans Alexandre une opposition de
conduite ; elle ne paroîtra qu'à lui seul ,
qui n'est pas disposé à recevoir la justification
de Lampride avec bienveillance ,
aimant mieux croire que les Fastes publics
d'une Ville telle que Rome , l'ont induit
en erreur , que de convenir qu'Alexandre
ait pû parler comme il a fait.
Il reste à lui répondre sur ce qu'il trouve
de si plaisant dans notre Historien .
Rien en effet ne seroit plus plaisant que
d'avoir mis les Jurisconsultes Pomponius
, Alphenus , &c. parmi les Conseillers
d'Alexandre ; puisqu'on convient
que ces hommes n'existoient point alors .
Mais le plaisant est que M. P. cite l'Historien
selon les Editions publiées sans
aucun examen critique des manuscrits
et sans faire semblant qu'il connoisse les
Notes queCasaubon et Saumaise ont données
JUILLET. 1733. 1497
nées sur cet endroit. Car s'il avoit voulu
y
faire attention , il auroit reconnu que
les noms de ces Jurisconsultes ne se trouvent
point dans les anciens manuscrits de
cette Histoire , de laquelle ils doivent être
entierement rejettez . C'est une circonstance
qui a été ignorée par Cujas , lequel
étoit anterieur aux Commentaires de
Casaubon et de Saumaise : et ce Jurisconsulte
est plus excusable avec sa mauvaise
Critique, que ne l'est le Censeur de Lampride.
Je vous ai déja averti, MM . que je regar
dois comme inutile d'étaler les raisons qu'à
eues M..de Tillemont , de ne se pas trouver
d'accord avec le P. Pagi , sur l'année
de la guerre de Perse . Je persiste à la placer
avec lui quatre ou cinq ans plus tard
que le P. Pagi. De deux Sçavans qui ont
discuté un point historique , chacun est
libre de suivre la Chronologie qui lui
plait. Ce qu'il est bon de remarquer ici
c'estque ce fut sous l'Empire d'Alexandre
que l'on commença à se servir du nom.
de Perse , pour signifier le Pays que les
Parthes occupoient auparavant. Ainsi lorsque
cet Empereur étant à Antioche quelques
années après dit dans sa Harangue
aux Soldats , qu'on leur a appris à
élever leur voix contre les Perses , il n'a
By pû
1500 MERCURE DE FRANCE
nius à aller à cette expedition , mais encore
à l'accompagner dans ce voyage.
M. P. finit les Remarques critiques
qu'il avoit à faire contre moy en particulier
, par une énumération que je
ne lui demandois pas du nom d'Ovinius
, tirée des Inscriptions. J'aurois
souhaité qu'il l'eut puisée dans les Historiens
ou dans d'autres Ecrivains dont
les Ouvrages sont parvenus jusqu'à nous
par la voye des Manuscrits . C'est ce qu'il
n'a pas fait. Au lieu de cela, il entreprend
de prouver au Public que c'est une er
reur de dire Alexandre Severe , et il prétend
qu'on doit dire Severe Alexandre.
Quoique la chose ne soit pas d'une assez
grande importance pour être discutée ,
je ne puis pas me dispenser de dire que
c'est- là une mauvaise chicane qu'il fait
sur les surnoms de cet Empereur, et toujours
pour revenir contre Lampride, qu'il
ne veut pas se donner la peine d'entendre.
Lampride dit bien que les Soldats
l'appellerent Severe , à cause de la séverité
dont il étoit à leur égard , et il infere
que cette manierè d'entendre ce nom
leur étoit propre et speciale ; mais il a
été bien éloigné de croire en son particulier
que ç'ait été une épithete ; , il n'en
dit rien qui ne s'accorde avec lidée de
sa véritable origine.
P
JUILLET. 1733. 1501
Ce nom de Severe , fut celui qu'il prit
quand il fut parvenu à l'Empire , pour
marquer apparemment qu'il étoit lié de
parenté avec Septime- Severe. Alors par
respect pour ce Prince , il mit ce surnom
nouveau avant l'ancien , et cela fut
suivi dans tous les Monumens publics ..
Les Soldats qui ressentoient la séverité
de cet Empereur plus que personne , furent
frappez de ce nom , et s'en servoient
plus communément entre eux dans le
sens adjectif qu'il peut avoir. Mais tout
le monde , et les Historiens mêmes , continuerent
de l'appeller Alexandre simplement
, ou d'y ajouter le nom de Severe ,
pour le distinguer d'Alexandre Emilien
et d'un autre Alexandre , Tyran d'Afrique.
C'est cet usage qui a passé jusqu'à
nous. Il est fondé sur ce que le nom
d'Alexandre a été sûrement le premier
surnom de cet Empereur , selon l'ordre
des. temps : Salutabatur autem nomine hoč
sive Alexander , dit Lampride ; et dans
les premieres Médailles de ce Prince
frappées sous Héliogabale , il est appellé
seulement M. Aurelius Alexander Casar.
Aussi ce nom d'Alexandre se trouve t'il
au moins douze fois dans les Acclamations
que fit le Sénat le jour que le jeune
Empereur y fit sa premiere Entrée , et
celui
1502 MERCURE DE FRANCE
celui de Severe ne s'y trouve pas une
seule fois , quoique le nom d'Aurelius
n'y manque point. Le nom de Severe
étant ainsi reconnu comme le plus rarement
usité du vivant d'Alexandre , il
n'est devenu que distinctif dans les
temps suivants. Or il est constant que
les noms qui sont les plus distinctifs ,
ne se mettent point les premiers dans
l'usage , mais à la suite du plus commun.
En avoüant donc que le nom de
Severus est dans ce cas , il doit ne se
trouver dans le langage ordinaire que
comme accessoire au nom plus commun.
Je suis , & c.
A Auxerre le 31 .
Mars
1733.
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Résumé : LETTRE aux Auteurs du Mercure de France, pour servir de Réponse à la Réplique de M. P** d'Orléans, imprimée dans le Mercure de Février dernier et pour appuyer l'autorité de l'Historien Lampride, au sujet d'Alexandre Severe.
L'auteur de la lettre répond à M. P d'Orléans, qui avait critiqué ses propos sur l'empereur Alexandre Sévère dans le Mercure de France. L'auteur refuse de relancer une dispute littéraire passée entre M. de Tillemont et le P. Pagi concernant l'époque des guerres d'Alexandre Sévère. Il reconnaît que ses conjectures sur l'histoire profane manquent de certitude physique, mais il les justifie en attendant des preuves plus solides, comme les médailles. L'auteur critique M. P d'Orléans pour sa partialité envers les historiens Saumaise, Tillemont et Hérodien, qu'il considère comme infaillibles, tout en rejetant Lampride, qu'il accuse de fautes. L'auteur rappelle que même les meilleurs historiens commettent des erreurs et que cela ne justifie pas de rejeter leurs témoignages. Il accuse M. P d'Orléans d'avoir tronqué sa proposition et de mal interpréter le texte de Lampride. Il défend Lampride en montrant que M. P d'Orléans prend systématiquement le sens le plus défavorable à cet historien. L'auteur cite plusieurs passages de Lampride pour prouver que cet historien ne commet pas les erreurs que lui reproche M. P d'Orléans. L'auteur conclut en affirmant que la dispute sur le nom d'Alexandre Sévère (Alexandre Sévère ou Sévère Alexandre) est sans importance et qu'elle relève d'une mauvaise chicane de la part de M. P d'Orléans. Il rappelle que Lampride explique l'origine du nom Sévère donné à l'empereur par les soldats. L'empereur romain Alexandre Sévère, lié par parenté à Septime Sévère, adopta le surnom 'Alexandre' par respect pour ce dernier. Ce nom fut utilisé dans tous les monuments publics. Les soldats, ressentant la sévérité de l'empereur, utilisaient ce nom de manière plus courante entre eux. Cependant, le monde entier, y compris les historiens, continuaient de l'appeler simplement 'Alexandre' ou d'ajouter 'Sévère' pour le distinguer d'autres personnages portant le même prénom. Cet usage persista jusqu'à nos jours. Le nom 'Alexandre' fut le premier surnom de cet empereur, comme le mentionne Lampride et les premières médailles frappées sous Héliogabale. Les acclamations du Sénat lors de la première entrée de l'empereur mentionnent 'Alexandre' au moins douze fois, mais jamais 'Sévère', bien que le nom 'Aurelius' soit présent. Le nom 'Sévère' étant le moins utilisé de son vivant, il devint distinctif par la suite. Les noms distinctifs s'ajoutent après le nom plus commun, confirmant que 'Severus' est accessoire au nom plus courant 'Alexander'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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17
p. 1975-1978
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, touchant un ancien Vocabulaire des Villes de France.
Début :
Ce que j'ai lû, Messieurs, dans le Mercure de Mars dernier, touchant les [...]
Mots clefs :
Villes, Picard, Picards, Vocabulaire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, touchant un ancien Vocabulaire des Villes de France.
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure,
touchant un ancien Vocabulaire des Villes
de France.
E que j'ai lu,Messieurs,dans le Mer-
CEcure de Mars dernier , touchant les
différens noms des Académies d'Italie , et
ce qu'on y ajoute , tiré d'un Jurisconsulte
, touchant certains noms populaires et
triviaux , attribuez à quelques Villes de
France , m'a engagé de consulter mes
Recueils , et de vous proposer une Liste
de Proverbes qui m'a paru beaucoup
plus curieuse , et par le nom des Villes
qui y sont distinguées , et par son antiquité.
Elle a été tirée d'un Manuscrit de la
Bibliotheque de M. Seguier ou de Coaslin
, cotté lors . Il en contient trente - six ,
mais pour cette fois - ci je me propose de
ne vous en envoyer que la moitié , et je
Dij vous
1976 MERCURE DE FRANCE
vous prie de les faire imprimer en colonne
, tels que je les représente icy , afin
que le Lecteur soit moins fatigué les
lire. Le langage vulgaire de cette Liste
me paroît de 4 à 500 ans ; si j'avois vû
l'original , j'en jugerois plus affirmativement
par le caractere de l'Ecriture ; au
cas que la Coppie dont je me suis servi
soit fautive , vous êtes plus à portée que
moi de la rectifier , en consultant l'ori
ginal : En voici les termes ;
Personnes de Rains.
Seignor de Laon.
Cervoice de Cambrai.
Buriers de Tornai.
Li prive de S. Denise.
Li esgare de Teroane .
Li garsilleor de Roan .'
Li Doneor de Lisisies.
Lijureor de Baiex.
Li Sorcuidie de Coutances.
Li Cloistrier de Canz.
Li poure orgueillox de Tors;
Li enfrun de Tol.
Li Damoisel d'Amiens.
La Bachelerie de Beauvèz.
Li Bordeor d'Arraz.
La Nience de Chaalons.
Li Chanteor de Sens,
Voil
SEPTEMBRE. 1733 1977
Voilà dequoi exercer l'esprit de ceux
qui connoissent les anciennes Coutumes
et les génies des peuples. J'entrevois que
quelquefois il peut y avoir de la badinerie
dans le nom adjectif ou substantif
qui
qui est joint a celui de ces Villes ; mais
sera toujours bon d'en avoir le dénouement.
Je ne croi pas qu'on puisse se fâcher
de cette recherche , puisque les
moeurs sont bien changées depuis ce
temps-là , et que souvent ce qui fait désigner
telle Ville , par telle ou telle dénomination
, peut ne venir que d'un petit
nombré de ses habitans , et d'une société
particuliere qui s'y distinguoit , ou
de quelque histoire qui sera arrivée une
fois. Dailleurs un particulier auroit grand
tort de prendre pour lui ce qui ne se die
qu'en général. Voit-on les Normands se
fâcher de l'Epithete qu'on attribue communément
à leur Nation ? Et les Picards
se mettre en colere quand on leur dit
qu'ils ont la tête caude ? M. du Cange
qui étoit Picard , n'a pas même dédaigné
de fournir quelques preuves , que ce mot
de Picard n'a pas une origine des plus
honorables ; quoiqu'un peu plus bas il se
mocque de celle que M. de Valois lui attribue
dans sa Notice des Gaules . Un bon
Curé Champenois , du quatorziéme sié-
D, iij cle
1978 MERCURE DE FRANCE
cle , inséra autrefois dans son Livre d'Eglise
, ces deux Vers Léonins , sur les
Picards :
Isti Picardi non sunt ad pralia tardi :
Primò sunt hardi , sed sunt in fine åardi.
Ces deux Vers étoient apparemment
dans la bouche des Nouvellistes . Le dernier
mot y étant par abrégé , n'est pas
tout à - fait clair ; cependant il est sûr que
la quantité du Vers exige un terme de
trois syllabes ainsi il faut lire , Conardi
ou Conardi, et plus probablement Coйardi
, qui aura été dit par opposition à
Hardi , puisque Conar signifie , en vieux.
langage , Timide , Fuyard.
Au reste , Messieurs , faites en sorte , je
vous prie , que le distique de ce bon
Prêtre Champenois ne soit point cause
que la Nation Picarde intente à la Champenoise
un Procès pareil à celui que les
habitans de Dreux lui intenterent il y a
quelques années ; Procès que avez eu bien
de la peine à assoupir. Je suis , &c.
touchant un ancien Vocabulaire des Villes
de France.
E que j'ai lu,Messieurs,dans le Mer-
CEcure de Mars dernier , touchant les
différens noms des Académies d'Italie , et
ce qu'on y ajoute , tiré d'un Jurisconsulte
, touchant certains noms populaires et
triviaux , attribuez à quelques Villes de
France , m'a engagé de consulter mes
Recueils , et de vous proposer une Liste
de Proverbes qui m'a paru beaucoup
plus curieuse , et par le nom des Villes
qui y sont distinguées , et par son antiquité.
Elle a été tirée d'un Manuscrit de la
Bibliotheque de M. Seguier ou de Coaslin
, cotté lors . Il en contient trente - six ,
mais pour cette fois - ci je me propose de
ne vous en envoyer que la moitié , et je
Dij vous
1976 MERCURE DE FRANCE
vous prie de les faire imprimer en colonne
, tels que je les représente icy , afin
que le Lecteur soit moins fatigué les
lire. Le langage vulgaire de cette Liste
me paroît de 4 à 500 ans ; si j'avois vû
l'original , j'en jugerois plus affirmativement
par le caractere de l'Ecriture ; au
cas que la Coppie dont je me suis servi
soit fautive , vous êtes plus à portée que
moi de la rectifier , en consultant l'ori
ginal : En voici les termes ;
Personnes de Rains.
Seignor de Laon.
Cervoice de Cambrai.
Buriers de Tornai.
Li prive de S. Denise.
Li esgare de Teroane .
Li garsilleor de Roan .'
Li Doneor de Lisisies.
Lijureor de Baiex.
Li Sorcuidie de Coutances.
Li Cloistrier de Canz.
Li poure orgueillox de Tors;
Li enfrun de Tol.
Li Damoisel d'Amiens.
La Bachelerie de Beauvèz.
Li Bordeor d'Arraz.
La Nience de Chaalons.
Li Chanteor de Sens,
Voil
SEPTEMBRE. 1733 1977
Voilà dequoi exercer l'esprit de ceux
qui connoissent les anciennes Coutumes
et les génies des peuples. J'entrevois que
quelquefois il peut y avoir de la badinerie
dans le nom adjectif ou substantif
qui
qui est joint a celui de ces Villes ; mais
sera toujours bon d'en avoir le dénouement.
Je ne croi pas qu'on puisse se fâcher
de cette recherche , puisque les
moeurs sont bien changées depuis ce
temps-là , et que souvent ce qui fait désigner
telle Ville , par telle ou telle dénomination
, peut ne venir que d'un petit
nombré de ses habitans , et d'une société
particuliere qui s'y distinguoit , ou
de quelque histoire qui sera arrivée une
fois. Dailleurs un particulier auroit grand
tort de prendre pour lui ce qui ne se die
qu'en général. Voit-on les Normands se
fâcher de l'Epithete qu'on attribue communément
à leur Nation ? Et les Picards
se mettre en colere quand on leur dit
qu'ils ont la tête caude ? M. du Cange
qui étoit Picard , n'a pas même dédaigné
de fournir quelques preuves , que ce mot
de Picard n'a pas une origine des plus
honorables ; quoiqu'un peu plus bas il se
mocque de celle que M. de Valois lui attribue
dans sa Notice des Gaules . Un bon
Curé Champenois , du quatorziéme sié-
D, iij cle
1978 MERCURE DE FRANCE
cle , inséra autrefois dans son Livre d'Eglise
, ces deux Vers Léonins , sur les
Picards :
Isti Picardi non sunt ad pralia tardi :
Primò sunt hardi , sed sunt in fine åardi.
Ces deux Vers étoient apparemment
dans la bouche des Nouvellistes . Le dernier
mot y étant par abrégé , n'est pas
tout à - fait clair ; cependant il est sûr que
la quantité du Vers exige un terme de
trois syllabes ainsi il faut lire , Conardi
ou Conardi, et plus probablement Coйardi
, qui aura été dit par opposition à
Hardi , puisque Conar signifie , en vieux.
langage , Timide , Fuyard.
Au reste , Messieurs , faites en sorte , je
vous prie , que le distique de ce bon
Prêtre Champenois ne soit point cause
que la Nation Picarde intente à la Champenoise
un Procès pareil à celui que les
habitans de Dreux lui intenterent il y a
quelques années ; Procès que avez eu bien
de la peine à assoupir. Je suis , &c.
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Résumé : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure, touchant un ancien Vocabulaire des Villes de France.
L'auteur répond à un article du Mercure sur les noms des académies d'Italie et les noms populaires des villes françaises en proposant une liste de proverbes anciens liés à diverses villes françaises. Ces proverbes, tirés d'un manuscrit de la bibliothèque de M. Seguier ou de Coaslin, datent de 4 à 500 ans. L'auteur en envoie seulement la moitié, soit dix-huit sur trente-six. Il souligne que le langage de cette liste est ancien et invite les rédacteurs à consulter l'original pour rectifier toute erreur. La liste inclut des expressions comme 'Personnes de Rains', 'Seignor de Laon' et 'Cervoice de Cambrai'. L'auteur suggère que ces proverbes peuvent enrichir la connaissance des anciennes coutumes et des génies des peuples. Il mentionne des moqueries régionales, comme celles des Normands ou des Picards, et cite un distique léonin du quatorzième siècle. Il conclut en demandant la publication des proverbes sans provoquer de conflits entre les régions.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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18
p. 29-30
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, suivie d'un Memoire qui répond à la question proposée dans celui du mois de Juin dernier, au sujet du Plainchant &c.
Début :
Je vous prie d'agréer le Memoire que je vous addresse, fidelement transcrit [...]
Mots clefs :
Mémoire, Plain-chant, Question, Goût, Musique, Composition
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, suivie d'un Memoire qui répond à la question proposée dans celui du mois de Juin dernier, au sujet du Plainchant &c.
EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs
du Mercure , suivie d'un Memoire
qui répond à la question proposée dans
celui du mois de Juin dernier , au sujet
du Plainchant & c.
E vous prie d'agréer le Memoire que
je vous addresse vous , fidelement transcrit
sur l'original , qui me fut communiqué
l'année passée à Auxerre , où Mrs du
Clergé de Langres m'avoient envoyé
pour y déposer les Préjugez de la Musique
, et mettre en leur place le gout du
Plainchant , et la belle varieté qui doit
regner là - dessus dans une Eglise Cathedrale.
Il m'a parû que ce Memoire répond
décisivement au fond de la question
qui a été proposée , laquelle tend à prescrire
de justes limites aux Musiciens , et
à détromper le Public de la
trop bonne
opinion qu'il a d'eux. Je ne vous cellerai
point qu'avant mon voyage à Auxerre
, ( quoique Musicien et élevé dans
une célébre Maîtrise pendant plus de 12
ans , ) j'étois dans le Préjugé commun ,
mais
ཐབ MERCURE DE FRANCE
mais j'en suis entierement revenu , et je
reconnois aujourd'hui que le gout de la
Musique , et le gout du Plainchant sont
deux gouts bien differens ; que pour être
habile dans la composition de l'une on ne
l'est pas pour cela dans la composition
de l'autre , qu'il y a certains enchaînemens,
certaines manieres de traitter, certaine
tournure , en un mot une Mechanique
particuliere dans l'Art du Plainchant
, qui n'est reconnoissable que par
ceux qui ont étudié les Ecrits des anciens
Compilateurs comme de Guy
Aretin , ou par ceux qui ont conversé
quelque temps avec ceux qui les ont bien
lus ; laquelle mécanique n'est pas même
fort aisée à attraper après qu'on a reconnu
qu'elle existe.
Il est vrai que le Memoire cy joint ne
répond pas à tous les membres de la
question proposée dans le second volume
du Mercure de Juin 1733. parce qu'il y
a déja quatre ans qu'il est composé; mais
je ne doute pas que l'Auteur à qui on
renvoye l'affaire ne donne bientôt un
supplement , et ne rende aussi à chacun
ce qui lui appartient. Je suis &c.
du Mercure , suivie d'un Memoire
qui répond à la question proposée dans
celui du mois de Juin dernier , au sujet
du Plainchant & c.
E vous prie d'agréer le Memoire que
je vous addresse vous , fidelement transcrit
sur l'original , qui me fut communiqué
l'année passée à Auxerre , où Mrs du
Clergé de Langres m'avoient envoyé
pour y déposer les Préjugez de la Musique
, et mettre en leur place le gout du
Plainchant , et la belle varieté qui doit
regner là - dessus dans une Eglise Cathedrale.
Il m'a parû que ce Memoire répond
décisivement au fond de la question
qui a été proposée , laquelle tend à prescrire
de justes limites aux Musiciens , et
à détromper le Public de la
trop bonne
opinion qu'il a d'eux. Je ne vous cellerai
point qu'avant mon voyage à Auxerre
, ( quoique Musicien et élevé dans
une célébre Maîtrise pendant plus de 12
ans , ) j'étois dans le Préjugé commun ,
mais
ཐབ MERCURE DE FRANCE
mais j'en suis entierement revenu , et je
reconnois aujourd'hui que le gout de la
Musique , et le gout du Plainchant sont
deux gouts bien differens ; que pour être
habile dans la composition de l'une on ne
l'est pas pour cela dans la composition
de l'autre , qu'il y a certains enchaînemens,
certaines manieres de traitter, certaine
tournure , en un mot une Mechanique
particuliere dans l'Art du Plainchant
, qui n'est reconnoissable que par
ceux qui ont étudié les Ecrits des anciens
Compilateurs comme de Guy
Aretin , ou par ceux qui ont conversé
quelque temps avec ceux qui les ont bien
lus ; laquelle mécanique n'est pas même
fort aisée à attraper après qu'on a reconnu
qu'elle existe.
Il est vrai que le Memoire cy joint ne
répond pas à tous les membres de la
question proposée dans le second volume
du Mercure de Juin 1733. parce qu'il y
a déja quatre ans qu'il est composé; mais
je ne doute pas que l'Auteur à qui on
renvoye l'affaire ne donne bientôt un
supplement , et ne rende aussi à chacun
ce qui lui appartient. Je suis &c.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite aux Auteurs du Mercure, suivie d'un Memoire qui répond à la question proposée dans celui du mois de Juin dernier, au sujet du Plainchant &c.
L'auteur transmet un mémoire aux rédacteurs du Mercure, reçu à Auxerre, rédigé par le clergé de Langres. Ce mémoire vise à remplacer les préjugés sur la musique par une appréciation du plain-chant et de sa variété dans une église cathédrale. Il répond à une question posée dans le Mercure de juin précédent, qui cherchait à définir les limites des musiciens et à corriger l'opinion publique à leur sujet. Avant son voyage à Auxerre, l'auteur, musicien formé pendant plus de douze ans dans une maîtrise célèbre, partageait les préjugés communs. Cependant, il a depuis changé d'avis, reconnaissant que le goût pour la musique et celui pour le plain-chant sont distincts. Il souligne que la composition du plain-chant nécessite une mécanique particulière, accessible seulement à ceux ayant étudié les anciens compilateurs comme Guy Aretin. Le mémoire ne répond pas entièrement à la question posée dans le Mercure de juin 1733, car il a été écrit quatre ans auparavant. L'auteur espère que l'auteur du mémoire fournira bientôt un supplément.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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19
p. 838-849
LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
Début :
Il y a, Messieurs, plus de trente ans qu'un sçavant Ecclesiastique d'Orleans, [...]
Mots clefs :
Saint Aignan, Sépulture, Orléans, Évêque, Église, Saint Laurent, Nom, Translation, Saint Pierre, Saints, Églises, Roi Robert
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
LETTRE de M. L *** Ch . et S.
d'Auxerre , aux Auteurs du Mercure de
France , touchant la Sépulture de saint
Agnan , Evêque d'Orleans.
Lya , Messieurs , plus de trente ans
leans , nommé M. le Brun , avoit composé
une ample Dissertation sur la Sépulture
de S. Agnan , dont on vous a envoyé
un Extrait , que vous avez publié
dans
MAY
839
་
1734
dans le Mercure de Septembre dernier .
Ainsi je ne croi pas que celui de qui vous
tenez cet Extrair , se fasse honneur de
la Dissertation. Je la conserve écrite de
la main de l'Auteur , avec la copie d'une
Lettre que M. Baillet lui écrivit en conséquence
de la communication qu'il lui
en donna. Certe Piece servit aussi à Orleans
à détromper tous ceux qui voulurent
en prendre communication . Je
suis bien aise que vous en ayez publié
l'essentiel.
C'est en effet une erreur grossiere de
croire que S. Agnan ait été inhumé dans
l'Eglise de S Laurent , qui est située à
l'Occident de la Ville d'Orleans . Outre
Is témoignages tirez du Testament de
eodebode , de la Vie de S. Mémin , de
celle de S. Euspice , que M. le Brun a
fait valoir , il s'en présente encore un
plus formel , qui n'est pas venu à sa
connoissance , et dont on ne peut éluder
la force , quelque antiquité qu'on s'avise
de donner à la Tranflation prétenduë
du Saint Corps d'une Eglise de S Laurent
, bâtie à l'Occident d'Orleans , en
celle de S. Pierre , bâtie à l'Orient. Cette
Tranflation doit passer pour chimerique,
dès-là qu'on lit dans une Vie authentique
de S. Agnan , qu'après son décès
A iiij un
842 MERCURE DE FRANCE
de S. Laurent à l'Occid.nt d'Orleans ,
laquelle est appellée S. Laurent des Orge
rils ,mais je me croi assez fondé pour soutenir
qu'il y en a eu une autre du nom
du même Saint , du côté Oriental. Si
dans Orleans il a existé jusqu'à cinq ou
six Eglises du nom de Saint Pierre ,
deux sous le titre de Saint Jean , et deux
sous celui de S. Germain d'Auxerre ;
quelle impossibilité y a-t'il qu'il n'y ait
aussi existé deux Eglises du nom de saint
Laurent N'y a- t'il pas eû de- même à
Paris deux Eglises du nom de S. Vincent,
Martyr d'Espagne ? Combien de Villes
où il y a plus d'une Eglise du titre de
S. Martin ou de quelqu'autre Saint célebre
?
Une preuve qu'il y a eu pendant quelques
siecles une Eglise ou Oratoire de
S. Laurent dans le Champ de Tétrade à
l'Orient d'Orleans et sur le Territoire de
l'Eglise qui a porté depuis le nom de
S. Agnan , est , que la memoire de ce saint
Martyr est distinguée de temps immémorial
de celle des autres Saints étrangers
, dans l'Eglise de S. Agnan même.
Dans le Catalogue des dix- neuf Autels
que l'on y érigea lorsque le Roy Robert
fit rebâtir à neuf cette Eglise , on voit
qu'après l'Autel principal sous l'invoca
tion
MAY. 1734.
843
tion de S. Pierre et S. Paul , celui de
S. Benoît et celui de S. Euverte , c'est
celui de S. Laurent qui suit immédiate
ment , par distinction au dessus de ceux
qui portoient le nom de S. Sauveur , de
Notre- Dame , de S. Jean , de S. Michel,
qui ne sont nommez qu'après. Je ne
prétens point qu'il y ait eu dans l'étenduë
du Champ de Tétrade , ni autour
de l'Eglise de S. Pierre , dite depuis saint
Agnan , autant d'Eglises qu'on érigea
d'Autels dans le nouvel Edifice achevé
l'an 1029. mais au moins y en avoit- il
eu d'érigez sous l'invocation de ceux qui
y sont nommez les premiers avant Notre
-Seigneur et la Sainte Vierge .
Helgaud , Moine de Fleury , ne parlet'il
pas d'une Eglise de S. Martin comme
existante sous le Roy Robert , laquelle
étoit une Chapelle à l'extremité du Cloftre
de S. Agnan , et qui n'existe plus ? Il
ne faut donc pasjuger des siecles passez par
les choses qui subsistent de nos jours , ni
croire qu'il n'y a jamais eu à Orleans
qu'une seule Eglise de S. Laurent , parce
qu'on n'en voit qu'une aujourd'hui . Il
doit y en avoir existé une autre à l'Orient
de la Cité ; et c'est cette Eglise aujourd'ui
inconnue et dans l'oubli , qui
sert de fondement à la Tradition d'Or-
A vj leans
844 MERCURE DE FRANCE
leans , que le Corps de S. Agnan a été
transferé de l'Eglise de S. Laurent en celle
qui a depuis porté son nom.
Lorsque le Corps de ce saint Evêque furt
remué pour la premiere fois , il a pû se
faire qu'il reposoit alors dans un Oratoire
ou petite Eglise de S. Laurent , bâtie
dans le Champ de Tétrade , et que
de- là , vû le peu d'éloignement , le Tombeau
tel qu'il étoit , ait été transporté dans
l'Eglise de S. Pierre , qui étoit le principal
Edifice entre ceux de ce Champ . La
petite Eglise de S. Laurent ayant ensuite
été détruite comme inutile , ou étant tombée
de vétusté , il sera arrivé depuis , lorsqu'on
parloit de la Tranflation du Corps.
de S. Agnan , que le Peuple aura attribué
à l'Eglise de S. Laurent des Orgerils ,
ce qui ne convenoit , dans la verité , qu'à
P'Oratoire de S. Laurent , qui avoit été
situé dans la partie toute opposée . Ainsi
se forment souvent les Traditions populaires.
On attribuë à l'objet existant , ce
qui n'avoit été dit ou écrit que de l'objet
détruit ou anéanti ; et pendant que personne
ne produit des preuves de la méprise
, l'erreur prend racine , elle s'autorise
ensuite de son antiquité , trouve
des Protecteurs dans les Habitans du Lieu
qu le nom se conserve , et il faur user
après
MAY. 1734 845
après cela de mille ménagemens pour les
faire revenir de la bévûe où la simplicité
de leurs prédécesseurs les avoit jettez.
M. Baillet n'a pas voulu adopter la nouvelle
Tradition de S. Laurent au Fauxbourg
Occidental d'Orleans . Le Pere de
Longueval , Jesuite , ne déterminant
point la situation de l'Eglise de S. Laurent
, a évité de la favoriser ouvertement.
Quoique la Tranflation du Corps de
S. Agnan du premier lieu de sa Sépulture
dans le lieu qui portoit le nom de
Basilique de S. Pierre , n'eût pas été d'un
grand trajet , et qu'elle n'ait peut- être
été que d'un jet de pierre , elle a cependant
été écrite dans les anciens Martyrologes
et Calendriers , parce qu'elle a été
assez remarquable pour ces temps - là où
les remuemens des Corps des Saints ne
se faisoient gueres que lorsqu'une Eglise
menaçoit ruine ou qu'elle étoit trop petite
pour le concours qui se faisoit à leurs
Tombeaux. On la croit du commencement
du septiéme siecle. L'Ombre de
M. Thiers auroit pû l'ajouter aux exemples
de Tranflations de Saints Confesseurs
qui autorisent sa rétractation * sur celle
de S. Firmin le Confès d'Amiens , outre
1
Cette rétractation est imprimée dans le Mersure:
de Juin x7.3.1 IĮ. volume.
celles
846 MERCURE DE FRANCE
celles de S. Vaast d'Arras , qui fut faite
dans le même siecle par S. Aubert , l'un
de ses Successeurs , et celle de S. Maximin
, Evêque de Tréves , faite aussi alors
par S. Hidulfe , Corevêque de ce Siege.
Je ne parle pas de quelques autres plus
anciennes , telle que celle des Saints Evêques
de Verdun , prédecesseurs de S. Airy
, faite par lui -même au sixiéme siecle ,
ni de celle de S. Gatien , premier Evêque
de Tours , faite par S. Martin.
On doit compter parmi les Martyrologes
où la premiere Tranfiation du Corps
de S. Agnan se trouve , outre celui de
Bede , deux autres qui ont été publiez
par Dom Martene , l'un au troisiéme vofume
de ses Anecdotes , page 1556. où
on lit Aurelianis Translatio S. Aniani ;
l'autre au sixième tome de son ample Col
lection , page 708. où se lit ce qui suit :
In civitate Aurelianis Tranflatio Corporis
S. Aniani Episcopi , et liberatio civitatis
ipsius à Hunnis. Les deux premiers sont
anterieurs au Roy Robert. Le troisiéme
a été écrit de son temps ; mais il copie
le fait de la premiére Transflation , et
non pas celle qui fut faite sous son Regne
l'an 1029. M. de Tillemont s'étonnoit
en 1697. que dans le Breviaire d'Orleans
, publié en 1693 , par M. de Coiſlin ,
l'on
MAY. 1734. 847
l'on ne parlât au XIV. Juin , que de la
Tranflation faite sous le Roy Robert :
et sa surprise étoit bien fondée . Il auroit
fallu en effet parler en ce jour d'abord
de la délivrance de la Ville d'Orleans
des mains des Huns , qui est le premier
Evenement remarquable , par rapport à
ce qui regarde S. Agnan . Puisque la Tradition
étoit il y a neuf cent ans ou mille
ans , que cette délivrance étoit arrivée
le 14. Juin , il étoit bon d'en conserver
la memoire à ce jour et de ne la pas porter
au 17. de Novembre , jour de la mort
du saint Evêque , comme on m'a assuré
qu'elle y a été portée avec son ancien
nom de Fête du Miracle. Secondement ,
il étoit à propos d'y inserer le souvenir
de la premiere Tranflation , au moins
d'une maniere generale ; puisque c'est
elle probablement qui a été la cause pour
laquelle on choisit en 1029. le 14 , et le
Is. Juin faire la seconde et pour
pour
proceder à la Dédicace de la nouvelle
Basilique , dont il ne reste plus aujourd'hui
que les Souterrains.
Ce sont autant de corrections qu'on
auroit pû faire dans la nouvelle Edition
du Breviaire d'Orleans de l'an 1731. mais
au lieu de cela , les Réviseurs ont mieux
aimé rétablir dans la Legende de S. Agnan
l'expres
848 MERCURE DE FRANCE
l'expression , qui avoit fait naître ancien
nement l'erreur populaire , que M. le
Brun des Marettes a combattuë et queje
combats après lui par un texte dont
on aura de la peine à éluder la force.
Ce deffaut d'exactitude dans les Légendes
locales , se trouve aussi accompagné
du retranchement de l'Office de plusieurs
Saints Locaux . Je me contenterai pour
le présent de nommer S. Aunaire , fameux
Evêque , né au VI . siecle dans la
Ville d'Orleans , mort le 25. Septembre ,
et d'y ajoûter une Fête que les Auteurs
du IX. siecle qualifioient de celebre dans
toutes les Eglises des Gaules au 1. Octobre,
laquelle étoit en memoire d'un Saint ,
qui en passant par Orleans au V.- siecle ,
y avoit operé deux Miracles rapportez
dans les Manuscrits de la Cathédrale
même. Tant que les Calendriers des nouveaux
Breviaires particuliers , ne seront
pas fondez sur les Histoires locales , les
imperfections y seront inévitables .
Il est temps maintenant de vous donner
la Lettre que M. Baillet écrivoit
le 16. Décembre 1703. à M. le Brun ,
duquel je vous ai parlé ; les plus petites
Productions de la plume des grands
Hommes , sont toujours bonnes à recueillir..
»Ja
MAY. 1734. 849
t
it
es
To
33
» Je suis fâché , M. que le mois de
» Novembre soit achevé pour la réim-
» pression , car je me serois fait un plai-
» sir et un devoir de profiter de ce que
» vous remarquez au sujet du lieu de la
Sépulture de S. Agnan , et de l'emploi
qu'il eut à S. Laurent avant son Epis-
» copat ; et je n'aurois point fait difficul-
» té de changer le titre équivoque d'A-
» bé , quoique l'on pût l'entendre d'un
» Superieur ou Pasteur de Paroisse , sans
prétendre qu'il y eût des Moines. Il
>> me paroît que les autres endroits sur
»quoi tombent vos Remarques , peuvent
» s'expliquer favorablement et subsister
»comme je les ai mis sans préjudice de
la verité des faits , autant qu'on peut
» faire foy sur l'autorité humaine. Je
n suis , &c .
と
2
Ce 17. Novembre 1733 .
d'Auxerre , aux Auteurs du Mercure de
France , touchant la Sépulture de saint
Agnan , Evêque d'Orleans.
Lya , Messieurs , plus de trente ans
leans , nommé M. le Brun , avoit composé
une ample Dissertation sur la Sépulture
de S. Agnan , dont on vous a envoyé
un Extrait , que vous avez publié
dans
MAY
839
་
1734
dans le Mercure de Septembre dernier .
Ainsi je ne croi pas que celui de qui vous
tenez cet Extrair , se fasse honneur de
la Dissertation. Je la conserve écrite de
la main de l'Auteur , avec la copie d'une
Lettre que M. Baillet lui écrivit en conséquence
de la communication qu'il lui
en donna. Certe Piece servit aussi à Orleans
à détromper tous ceux qui voulurent
en prendre communication . Je
suis bien aise que vous en ayez publié
l'essentiel.
C'est en effet une erreur grossiere de
croire que S. Agnan ait été inhumé dans
l'Eglise de S Laurent , qui est située à
l'Occident de la Ville d'Orleans . Outre
Is témoignages tirez du Testament de
eodebode , de la Vie de S. Mémin , de
celle de S. Euspice , que M. le Brun a
fait valoir , il s'en présente encore un
plus formel , qui n'est pas venu à sa
connoissance , et dont on ne peut éluder
la force , quelque antiquité qu'on s'avise
de donner à la Tranflation prétenduë
du Saint Corps d'une Eglise de S Laurent
, bâtie à l'Occident d'Orleans , en
celle de S. Pierre , bâtie à l'Orient. Cette
Tranflation doit passer pour chimerique,
dès-là qu'on lit dans une Vie authentique
de S. Agnan , qu'après son décès
A iiij un
842 MERCURE DE FRANCE
de S. Laurent à l'Occid.nt d'Orleans ,
laquelle est appellée S. Laurent des Orge
rils ,mais je me croi assez fondé pour soutenir
qu'il y en a eu une autre du nom
du même Saint , du côté Oriental. Si
dans Orleans il a existé jusqu'à cinq ou
six Eglises du nom de Saint Pierre ,
deux sous le titre de Saint Jean , et deux
sous celui de S. Germain d'Auxerre ;
quelle impossibilité y a-t'il qu'il n'y ait
aussi existé deux Eglises du nom de saint
Laurent N'y a- t'il pas eû de- même à
Paris deux Eglises du nom de S. Vincent,
Martyr d'Espagne ? Combien de Villes
où il y a plus d'une Eglise du titre de
S. Martin ou de quelqu'autre Saint célebre
?
Une preuve qu'il y a eu pendant quelques
siecles une Eglise ou Oratoire de
S. Laurent dans le Champ de Tétrade à
l'Orient d'Orleans et sur le Territoire de
l'Eglise qui a porté depuis le nom de
S. Agnan , est , que la memoire de ce saint
Martyr est distinguée de temps immémorial
de celle des autres Saints étrangers
, dans l'Eglise de S. Agnan même.
Dans le Catalogue des dix- neuf Autels
que l'on y érigea lorsque le Roy Robert
fit rebâtir à neuf cette Eglise , on voit
qu'après l'Autel principal sous l'invoca
tion
MAY. 1734.
843
tion de S. Pierre et S. Paul , celui de
S. Benoît et celui de S. Euverte , c'est
celui de S. Laurent qui suit immédiate
ment , par distinction au dessus de ceux
qui portoient le nom de S. Sauveur , de
Notre- Dame , de S. Jean , de S. Michel,
qui ne sont nommez qu'après. Je ne
prétens point qu'il y ait eu dans l'étenduë
du Champ de Tétrade , ni autour
de l'Eglise de S. Pierre , dite depuis saint
Agnan , autant d'Eglises qu'on érigea
d'Autels dans le nouvel Edifice achevé
l'an 1029. mais au moins y en avoit- il
eu d'érigez sous l'invocation de ceux qui
y sont nommez les premiers avant Notre
-Seigneur et la Sainte Vierge .
Helgaud , Moine de Fleury , ne parlet'il
pas d'une Eglise de S. Martin comme
existante sous le Roy Robert , laquelle
étoit une Chapelle à l'extremité du Cloftre
de S. Agnan , et qui n'existe plus ? Il
ne faut donc pasjuger des siecles passez par
les choses qui subsistent de nos jours , ni
croire qu'il n'y a jamais eu à Orleans
qu'une seule Eglise de S. Laurent , parce
qu'on n'en voit qu'une aujourd'hui . Il
doit y en avoir existé une autre à l'Orient
de la Cité ; et c'est cette Eglise aujourd'ui
inconnue et dans l'oubli , qui
sert de fondement à la Tradition d'Or-
A vj leans
844 MERCURE DE FRANCE
leans , que le Corps de S. Agnan a été
transferé de l'Eglise de S. Laurent en celle
qui a depuis porté son nom.
Lorsque le Corps de ce saint Evêque furt
remué pour la premiere fois , il a pû se
faire qu'il reposoit alors dans un Oratoire
ou petite Eglise de S. Laurent , bâtie
dans le Champ de Tétrade , et que
de- là , vû le peu d'éloignement , le Tombeau
tel qu'il étoit , ait été transporté dans
l'Eglise de S. Pierre , qui étoit le principal
Edifice entre ceux de ce Champ . La
petite Eglise de S. Laurent ayant ensuite
été détruite comme inutile , ou étant tombée
de vétusté , il sera arrivé depuis , lorsqu'on
parloit de la Tranflation du Corps.
de S. Agnan , que le Peuple aura attribué
à l'Eglise de S. Laurent des Orgerils ,
ce qui ne convenoit , dans la verité , qu'à
P'Oratoire de S. Laurent , qui avoit été
situé dans la partie toute opposée . Ainsi
se forment souvent les Traditions populaires.
On attribuë à l'objet existant , ce
qui n'avoit été dit ou écrit que de l'objet
détruit ou anéanti ; et pendant que personne
ne produit des preuves de la méprise
, l'erreur prend racine , elle s'autorise
ensuite de son antiquité , trouve
des Protecteurs dans les Habitans du Lieu
qu le nom se conserve , et il faur user
après
MAY. 1734 845
après cela de mille ménagemens pour les
faire revenir de la bévûe où la simplicité
de leurs prédécesseurs les avoit jettez.
M. Baillet n'a pas voulu adopter la nouvelle
Tradition de S. Laurent au Fauxbourg
Occidental d'Orleans . Le Pere de
Longueval , Jesuite , ne déterminant
point la situation de l'Eglise de S. Laurent
, a évité de la favoriser ouvertement.
Quoique la Tranflation du Corps de
S. Agnan du premier lieu de sa Sépulture
dans le lieu qui portoit le nom de
Basilique de S. Pierre , n'eût pas été d'un
grand trajet , et qu'elle n'ait peut- être
été que d'un jet de pierre , elle a cependant
été écrite dans les anciens Martyrologes
et Calendriers , parce qu'elle a été
assez remarquable pour ces temps - là où
les remuemens des Corps des Saints ne
se faisoient gueres que lorsqu'une Eglise
menaçoit ruine ou qu'elle étoit trop petite
pour le concours qui se faisoit à leurs
Tombeaux. On la croit du commencement
du septiéme siecle. L'Ombre de
M. Thiers auroit pû l'ajouter aux exemples
de Tranflations de Saints Confesseurs
qui autorisent sa rétractation * sur celle
de S. Firmin le Confès d'Amiens , outre
1
Cette rétractation est imprimée dans le Mersure:
de Juin x7.3.1 IĮ. volume.
celles
846 MERCURE DE FRANCE
celles de S. Vaast d'Arras , qui fut faite
dans le même siecle par S. Aubert , l'un
de ses Successeurs , et celle de S. Maximin
, Evêque de Tréves , faite aussi alors
par S. Hidulfe , Corevêque de ce Siege.
Je ne parle pas de quelques autres plus
anciennes , telle que celle des Saints Evêques
de Verdun , prédecesseurs de S. Airy
, faite par lui -même au sixiéme siecle ,
ni de celle de S. Gatien , premier Evêque
de Tours , faite par S. Martin.
On doit compter parmi les Martyrologes
où la premiere Tranfiation du Corps
de S. Agnan se trouve , outre celui de
Bede , deux autres qui ont été publiez
par Dom Martene , l'un au troisiéme vofume
de ses Anecdotes , page 1556. où
on lit Aurelianis Translatio S. Aniani ;
l'autre au sixième tome de son ample Col
lection , page 708. où se lit ce qui suit :
In civitate Aurelianis Tranflatio Corporis
S. Aniani Episcopi , et liberatio civitatis
ipsius à Hunnis. Les deux premiers sont
anterieurs au Roy Robert. Le troisiéme
a été écrit de son temps ; mais il copie
le fait de la premiére Transflation , et
non pas celle qui fut faite sous son Regne
l'an 1029. M. de Tillemont s'étonnoit
en 1697. que dans le Breviaire d'Orleans
, publié en 1693 , par M. de Coiſlin ,
l'on
MAY. 1734. 847
l'on ne parlât au XIV. Juin , que de la
Tranflation faite sous le Roy Robert :
et sa surprise étoit bien fondée . Il auroit
fallu en effet parler en ce jour d'abord
de la délivrance de la Ville d'Orleans
des mains des Huns , qui est le premier
Evenement remarquable , par rapport à
ce qui regarde S. Agnan . Puisque la Tradition
étoit il y a neuf cent ans ou mille
ans , que cette délivrance étoit arrivée
le 14. Juin , il étoit bon d'en conserver
la memoire à ce jour et de ne la pas porter
au 17. de Novembre , jour de la mort
du saint Evêque , comme on m'a assuré
qu'elle y a été portée avec son ancien
nom de Fête du Miracle. Secondement ,
il étoit à propos d'y inserer le souvenir
de la premiere Tranflation , au moins
d'une maniere generale ; puisque c'est
elle probablement qui a été la cause pour
laquelle on choisit en 1029. le 14 , et le
Is. Juin faire la seconde et pour
pour
proceder à la Dédicace de la nouvelle
Basilique , dont il ne reste plus aujourd'hui
que les Souterrains.
Ce sont autant de corrections qu'on
auroit pû faire dans la nouvelle Edition
du Breviaire d'Orleans de l'an 1731. mais
au lieu de cela , les Réviseurs ont mieux
aimé rétablir dans la Legende de S. Agnan
l'expres
848 MERCURE DE FRANCE
l'expression , qui avoit fait naître ancien
nement l'erreur populaire , que M. le
Brun des Marettes a combattuë et queje
combats après lui par un texte dont
on aura de la peine à éluder la force.
Ce deffaut d'exactitude dans les Légendes
locales , se trouve aussi accompagné
du retranchement de l'Office de plusieurs
Saints Locaux . Je me contenterai pour
le présent de nommer S. Aunaire , fameux
Evêque , né au VI . siecle dans la
Ville d'Orleans , mort le 25. Septembre ,
et d'y ajoûter une Fête que les Auteurs
du IX. siecle qualifioient de celebre dans
toutes les Eglises des Gaules au 1. Octobre,
laquelle étoit en memoire d'un Saint ,
qui en passant par Orleans au V.- siecle ,
y avoit operé deux Miracles rapportez
dans les Manuscrits de la Cathédrale
même. Tant que les Calendriers des nouveaux
Breviaires particuliers , ne seront
pas fondez sur les Histoires locales , les
imperfections y seront inévitables .
Il est temps maintenant de vous donner
la Lettre que M. Baillet écrivoit
le 16. Décembre 1703. à M. le Brun ,
duquel je vous ai parlé ; les plus petites
Productions de la plume des grands
Hommes , sont toujours bonnes à recueillir..
»Ja
MAY. 1734. 849
t
it
es
To
33
» Je suis fâché , M. que le mois de
» Novembre soit achevé pour la réim-
» pression , car je me serois fait un plai-
» sir et un devoir de profiter de ce que
» vous remarquez au sujet du lieu de la
Sépulture de S. Agnan , et de l'emploi
qu'il eut à S. Laurent avant son Epis-
» copat ; et je n'aurois point fait difficul-
» té de changer le titre équivoque d'A-
» bé , quoique l'on pût l'entendre d'un
» Superieur ou Pasteur de Paroisse , sans
prétendre qu'il y eût des Moines. Il
>> me paroît que les autres endroits sur
»quoi tombent vos Remarques , peuvent
» s'expliquer favorablement et subsister
»comme je les ai mis sans préjudice de
la verité des faits , autant qu'on peut
» faire foy sur l'autorité humaine. Je
n suis , &c .
と
2
Ce 17. Novembre 1733 .
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Résumé : LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
M. L*** répond à une publication du Mercure de France concernant la sépulture de saint Agnan, évêque d'Orléans. Il mentionne que M. le Brun avait rédigé une dissertation sur ce sujet, dont un extrait avait été publié dans le Mercure de Septembre 1734. M. L*** possède cette dissertation manuscrite ainsi qu'une lettre de M. Baillet à ce sujet. La lettre rectifie une erreur selon laquelle saint Agnan aurait été inhumé dans l'église de Saint-Laurent à l'ouest d'Orléans. Plusieurs témoignages, dont ceux du testament de Chrodebode, de la vie de saint Mémin et de saint Euspice, ainsi qu'une vie authentique de saint Agnan, démontrent que cette croyance est erronée. Une église de Saint-Laurent existait également à l'est d'Orléans, et il était courant qu'une ville possède plusieurs églises portant le même nom. L'auteur soutient que le corps de saint Agnan a été transféré d'un oratoire de Saint-Laurent situé dans le champ de Tétrade à l'église de Saint-Pierre, qui est devenue par la suite l'église Saint-Agnan. Cette translation est attestée par des martyrologes et calendriers anciens, et elle est datée du début du septième siècle. La confusion populaire a attribué cette translation à l'église de Saint-Laurent des Orgerils, située à l'ouest, alors qu'elle concernait un oratoire à l'est. M. Baillet et le père de Longueval n'ont pas adopté la tradition erronée de la translation du corps de saint Agnan. L'auteur critique également le Breviaire d'Orléans de 1731 pour avoir omis de mentionner la première translation et la délivrance de la ville d'Orléans des Huns, événements liés à saint Agnan. Il conclut en mentionnant une lettre de M. Baillet à M. le Brun, datée du 16 décembre 1703, qui reconnaît les remarques de M. le Brun sur la sépulture de saint Agnan.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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20
s. p.
LETTRE AUX AUTEURS DU MERCURE DE FRANCE SUR LE COMTE DE WARVICK TRAGÉDIE NOUVELLE EN CINQ ACTES ET EN VERS Représentée, pour la première fois, le lundi 7 Novembre 1763.
Début :
Voici, Messieurs, une nouvelle preuve de cette vérité que Corneille a devinée [...]
Mots clefs :
Warvick, Comte, Roi, Gloire, Coeur, Scène, Théâtre, Vengeance, Angleterre, Ingratitude, Destin, Espoir, Tragédie, Amour, Victoire
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE AUX AUTEURS DU MERCURE DE FRANCE SUR LE COMTE DE WARVICK TRAGÉDIE NOUVELLE EN CINQ ACTES ET EN VERS Représentée, pour la première fois, le lundi 7 Novembre 1763.
LETTRE
AUX AUTEURS
DU MERCURE
DE FRANCE ,
SUR LE
COMTE DE WARVICK,
TRAGÉDIE NOUVELLE ,
EN CINQ ACTES ET EN VERS
Repréſentée , pour la première fois , le Lundi
2 Novembre 1763.
M. DCC . LXIII.
TELEEH
LETTRE
AUX AUTEURS
DU
MERCURE DE FRANCE.
VOICI , Meſſieurs , une nouvelle preuve
de cette vérité que Corneille a devinée
parſentiment &qu'il a fi bien placée dans
ſaTragédie duCid : e'eſt le Cid qui parle :
«Mes pareils à deux fois ne ſe font point connoître;
»Et pour leurs coups d'eſſai veulent des coups de
Maître. >>>
C'eſt ainſi que les Racine & les Voltaires'annonçoient
ſur laScène Françoiſe.
Monfieur de la Harpe paroît avoir bien
étudié la manière de ces grands Peintres
del'ame, & ſe voit, comme eux, couronné
A iij
dès le premier pas qu'il a fait dans la car
rière du Théatre .
La Tragédie de Warvick, dont je vais
faire l'analyſe exacte , eſt un Ouvrage
qu'on ne devoit pas attendre d'un Ecolier
àpeine forti des Univerſités. Il est vrai
que ſes premiers Maîtres n'avoient pas
méconnu fon génie , & que M. de la
Harpe , avant l'âge de vingt ans , avoit
rendu fon nom celebre & intéreſſant dans
les faſtes de cette Ecole de goût & de
moeurs , qui compte plus d'un Rollin parmi
ſes Chefs .
Tout le monde paroît demeurer d'ac
cord que le plan de cette Tragédie eft
heureuſement conçu , que les caractères
en font nobles , & auffi - bien foutenus
que contraſtés , les ſentimens vrais
& grands fans enfure , le ſtyle élégant
& la verſification facile , mais toujours
harmonieuſe . Ceux qui s'intéreſſent à la
gloire de notre Theatre voient avec plaifir
s'élever un jeune Poëte , qui a le courage
de ſacrifier à la préciſion de ſes
dialogues ces maximes & ces ſentences
tant rebattues & toujours applaudies .
Ils lui ſçauront gré ſans doute d'avoir
composé dans un genre preſque oublié de
nos jours , & qui a fait place aux monf
trueuſes &burleſques Pantomimes qu'on
nous apporte d'Angleterre ou d'Italie .
Mais outre le mérite réel de cette Tragé
die , il en eſt un qui appartient plus aux
moeurs qu'au génie ; l'Auteur ſemble ne
s'être écarté de l'hiſtoire que pour donner
à Warvick toute la grandeurdont une
ame eft capable. Auguſte qui pardonne a
Cinna , n'eſt pas plus généreux que Warvick
empriſonné par Edouard , & qui ne
fort de ſa priſon que pour le couronner
une ſeconde fois . Les acclamations univerfelles
données au Comte de Warvick
dans ce moment , font un témoignage
irrécuſable contre les détracteurs
de la Scène Françoiſe . Ce n'eſtpoint affez
qu'un beau diſcours devenu preſque une
action par la véhémente éloquence de
l'Orateur , nous imprime des leçons de
vertu , ce ſont des exemples de générofité
qui nous frappent au Théatre , qui rappellent
l'homme à ſa première dignité :
ce font peut - être ces applaudiſſemens
unanimes & forcés que nous donnons à
la vertu qui nous emportent juſqu'à elle ,
qui nous rendent capables d'y atteindre ,
& font du Théatre même une école de
moeurs , que rien ne peut remplacer.
A iiij
NOMS DES ACTEURS.
YORCK , Roi d'Angleterre , ſous le nom
d'Edouard.
MARGUERITE D'AN JOU , femme de
Lancaftre , Roi d'Angleterre, ſous le nom
de HENRY.
LE COMTE DE WARVICK.
SUFFOLK , Confident d'Edouard.
SUMMER , Ami de Warvick.
ELISABETH , Amante de Warwick.
NEVILLE , Confidente de Margueritean
GARDES.
?
A
C
Ho La Scène est à Londres.
?
1612
ACTE PREMIER
MARGUERITE ouvre la ſcèneavecNéville
ſa confidente , & lui découvre les
ſecrets motifs de ſa joie &de ſes nouvelles
eſpérances : Edouard vainqueur de
Henri VI , & placé ſur ſon Trône par la
valeur & l'amitié de Warvick , va dans
l'absence de ce guerrier lui ravir ſa Maîtreffe
, & doit ce jour même épouſer Elifabeth
de Gray. Marguerite ſe flatte que
Warvick , irrité d'un affront fi peu attendu
, va travailler avec elle à rétablir
fon mari ſur le Trône d'Angleterre :
c'eſt pourquoi elle ſe propoſe d'obtenir
d'Edouard la liberté de paſſer en France
pour y joindre le Comte de Warvick ,
& l'inſtruire des amours & de l'ingratitude
du Maître qu'il s'eſt donné.
Edouard , ſans lui refuſer ni lui accorder
ſa demande , lui fait entendre que
le moment de la paix ſera celui de ſa liberté.
Le Roi ouvre à Suffolck les replis
de ſon coeur , il lui confie ſes projets , ſes
craintes , ſes combats, la violence de fon
amour . C'eſt ſurtout l'amitié de Warvick
qui lui peſe ; c'eſt Warvick , c'eſt un ami
Av
A
qu'il craint d'offenſer ; mais il eſpere le
fléchir & ordonne à Suffolck de ſe rendre
à la Cour de France , &c. &c. Alors
on apprend que le Comte vient d'arriver
dans Londres aux acclamations de tout le
Peuple , & le Roi ſe retire dans le plus
grand trouble .
Telle eſt la marche du premier Acte ,
nous n'en citerons qu'un trait rendu ſublime
par Mademoiselle Dumeſnil , &
qui le paroîtra peut - être encore ſans
elle.
Cet MARGUERITE qui parle.
Demomens en momens j'attendois le trépas ;
Unbrigand ſe préſente ,& fon avide joie
Brille dans ſes regards à l'aſpect de ſa proie.
Il eſt prêt à frapper : je reſtai ſans frayeur ,
Un eſpoir imprévu vint ranimer mon coeur.
Sans guide , fans ſecours ,dans ce lieu folitaire,
J'oſai dans ce brigand voir un Dieu tutélaire.
« Tiens , approche , ( lui dis-je, en lui montrant
mon fils , 1
Qu'à peine ſoutenoient mes bras appeſantis,)
Ofe fauver ton Prince , oſe ſauver ſamere.>>>>
J'étonnai , j'attendris ce mortel ſanguinaire ,
Mon inttépidité le rendit généreux. alloy
LeCiel veilloit alors fur mon fils malheureux,
Oubien le front des Rois , que le deſtin accable ;
Sous les traits du malheur ſemble plus refpectable,
a Suivez-moi , me dit-il , &le fer à la main ,
Portant mon fils de Pautre, il nous fraye un ches
9039
2
2
Et ce mortel abject , tout fier de ouvrage ,
fon
Sembloit , en me ſauvant , égaler mon courage.
apne me ACTE II
WARVICK commence à s'applaudir
C
avec Summer d'avoir rétabli la paix entre
deux Nations rivales & hautaines , d'avoir
obtenu pour fon Maître la Soeur de Louis
XI , & de ſe voir à la fois l'arbitre , la
zerreur & le foutien des Rois. C'eſt dans
cet eſprit qu'il rend compte enſuite au Roi
du ſuccès de ſa négociation , & qu'il ſe
félicite de l'avoir ſervi dans la Cour des
Rois comme dans les combats. Edouard
loue ſon zèle , & conſent à ratifier la paix,
mais non à épouſer la Soeur de Louis XI .
Le Comte de Warvick inſiſte ſur la né
ceffité de fatisfaire au traité dont il fut
garant lui-même ; & le Roi , fans lui devoiler
tout-à-fait le myſtère de ſes nouvelles
amours , ſe retire en lui laiſſant
voir autantde trouble que d'amitié : War
vick reſte dans l'étonnement. Marguerite
vient l'en tirer , & s'exprime ainfier
MARGUERITE. ( Elle continue àparler
d'Edouard.)
Onditque ſur ſon coeur l'amour leplus ardent
Prend, depuis quelques jours, un ſuprême afcen
dant....
1.
On dit plus , & peut- être allez-vous en douter :
Ondit que cet objet, qu'il eût dû reſpecter,
Avoit promis ſa main , gage d'unfeufincère,
Auplus grand des Guerriers qu'ait produit l'Angle
terre ,
A qui même Edouard doit toute fa grandeur :
Qu'Edouard lâchement trahit ſon bienfaiteur :
Que pour prix de ſon zèle , & d'une foi conſtantel
Il lui ravit enfin ſa femme& ſon amante!
Ce ſont-là ſes projets , ſes voeux & ſon eſpoir,
Et c'eſt Elifabeth qu'il époufe ce ſoir.
•
: • • :
Pourquoi trouveriez -vous ce récit incroyable?
Lorſque l'on a trahi ſon Prince & ſon devoir ,
Voilà, voilà le prix qu'on en doit recevoir.
Si Warvick eût ſuivi de plusjuſtes maximes ,
S'il eût cherché pour moi des exploits légitimes,
४
Il me connoît aſſez , pour croire quemon cosur
D'unplus digne retour eût payé ſa valeur.
Adieu. Dans peu d'inftans vous pourrez reconnoî
tre
Cequ'a produit pour vous le choix d'un nouveau
Maître;
Vous apprendrez bien-tôt qui vous deviez ſervir.
Vous apprendrez du moins qui vous devez hair .
Je rends grace au deſtin. Oui , ſa faveur commence
Amefaireaujourd'hui goûter quelque vengeance ;
Et j'ai vû l'ennemi qui combattit ſon Roi,
Puni parun ingrat qu'il ſervît contre moi.
Warvick veut encore douter des dif
cours de Marguerite , & de l'ingratitude
de fon ami ; mais Summer & enſuite Eli
ſabeth viennent confirmer tout ce qu'il
a appris . Warvick jure d'en tirer ven
geance. Elifabeth s'efforce en vain de le19
calmer , & Warvick fort en menaçant.
Cof
3????? ?????????????
MA
ACTE III
ARGUERITE s'applaudit d'avoir irrite
Warvick , & peint ainſi le génie des
Anglois dont il eſt l'idole .
MARGUERITE, a Néville.
:
おす
)
Ne crois pas qu'Edouard triomphe impunément,
Mets-toi devant les yeux ce long enchaînement
De meurtres , de forfaits , dont la guerre civile
A, depuis fi long-tems , épouvanté cette Iſle.
Songe au ſang dont nos yeux ont vû couler des
flots ,
по
3
53
A
Sous le fer des foldats , ſous le fer des bourreaux ;
Ou d'un père ou d'un fils chacun pleure la perte ,
Et d'un deuil éternel l'Angleterre eſt couverte.
De vingt mille proſcrits les malheureux enfans
Brûlent tous en ſecret de venger leurs parens ;
Ils ont tous entendu , le jour de leur naiſſance ,
Autour de leur berceau le cri de la vengeance :
Tous ont été , depuis , nourris dans cet eſpoir ,
Et pour eux , en naiſſant , le meurtre eſt un devoirs
Je te dirai bien plus , le ſang & le ravage
Ont endurci ce Peuple , ont irrité ſa rage;
Et depuis ſi long-tems au carnage exercé;
II conferve la foifdu ſang qu'il a verſé.
Mais elle craint que ce Guerrier trop
ſuperbe n'éclate en menaces inſultantes
devant fon maître , & que le Roi ne le
faffe arrêter , elle fort : ( ce qui laiſſe le
Théatre vuide afſfez inutilement. C'eſt un
défaut dont les plus grands Maîtres ont
donné l'exemple , mais que leurs éleves ne
doivent jamais imiter. )Edouard cependant
qui vient d'apprendre de Suffolck
que Warvick ne lui a répondu que par
des emportemens , commande qu'on l'éloigne
Mais Warvick paroît , &
lui fait une longue énumération de ſes
ſervices , il lui rappelle ſes propres difcours
fur le champ de bataille où fon
pere venoit d'expirer , & ſe plaint de
fon ingratitude . Edouard lui fait une
réponſe très-moderée , quoique noble , &
qu'on ſera peut-être bien aiſe de trouver
ici.
?
...
Ceft EDOUARD qui parle.
Moderez devant moi ce tranſportqui m'offenfe.
Vantez moins vos exploits, j'en connois l'impor
tance;
Mais ſçachez qu'Edouard , arbitre de ſon fort,
Auroit trouvé ſans vous la victoire ou llaamort;
Vous n'enpouvezdouter, vous devez me connol
tre.
Eh! quels ſont donc enfin les torts de votre Mai-
; tre?
Je vous promis beaucoup: vous ai-je donnémoins ?
Lerang, où pres de moi vous ontplacé mes ſoins,
L'éclat de vos honneurs, vosbiens, votre puiſlance,
Sont-ils de vains effets de ma reconnoiſſance ?
Il eſt vrai, j'ai cherché l'Hymen d'Elifabeth.
N'ai-je pû faire au moins ce qu'a fait mon Sujet ,
Etm'est- il défendu d'écouter ma tendreſſe ,
De brûler pour l'objet où votre eſpoir s'adreſſe ?
Queme reprochez-vous? Suis-je injuſte ou cruel ?
L'ai-je, comme unTyran , fait traîner à l'autel ??
Je me fuis , comme vous , efforcé de lui plaire ,
Je me ſuis appuyé de l'aveu de ſon pere ;
J'ai demandé le ſien; & s'il faut dire plus ,
Elle n'a point encor expliqué ſes refus.
Laiſſez-moi juſques-là me flatter que ma flamme
Quemes foins , mes reſpects , n'offenſent point fon
ame;
Etqu'un coeur qui du vôtre a mérité les voeux,
Peut être , malgré vous, ſenſible à d'autres feux.
•
WARVICK & EDOUARD.
Jamais Elifabeth ne me ſera ravie ,
Onvous ne l'obtiendrez qu'aux dépen de maviej
Jamais impunémentje ne fus offenfé
יצ
Y
EDOUARD.
Jamais impunément je ne fus menacé ;
Et fi d'une amitié , qui me fut long-tems chère?
Le ſouvenir encor n'arrêtoit ma colère ,
Vous en auriez déjà reſſenti les effets ....
Peut-être cet effort vaut ſeul tous vos bienfaits.
Nepouſſez pas plus loinma bonté qui ſe laſſe
Et ne me forcez pas à punir votre audace.
Edouard peut d'un mot venger ſes droits bleſſés,
Etfût-il votre ouvrage ; il eſt Roi, frémiſſez.
Le Comte de Warvick lui répond
par des reproches encore plus amers ;
Edouard fait entrer ſesGardes ; Elifabeth
arrive avec eux : le Comte lui exagere
les torts de l'ingrat Yorck , & la quitte
pour courir à la vengeance. Edouard or
donne qu'on arrête le Comte de Warvick .
Elifabeth demeure avec le Roi pour l'appaifer
, & l'on vient leur annoncer que
Warvick s'eſt laiſſe conduire à la tour ,
mais que le peuple s'émeut en fa faveur :
le Roi fort pour aller le contenir.
SOIVAAT
0
C
ACTE IV.
WARVICK feul & dans la prifon , fe
retrace ainſi le fort de ſon premier maître :
.. C'eſt dans ces lieux, dans cette tour horrible
Qu'à vivre dans les fers par moi ſeul condamné
Lemalheureux Henri languit abandonné ,
L'Oppreſſeur , l'Opprimé n'ont plus qu'un même
afyle.
Hélas ! dans ſon malheur il eſt calme& tranquille,
Il eſt loin de penſer qu'un revers plein d'horreur
Enchaîne auprès de lui ſon ſuperbe vainqueur.
Summer vient lui apprendre que le parti
de Marguerite doit bientôt le délivrer.
Warvick le conjure par les pleurs qu'il
verſe encore devant lui , de hâter le moment
de ſa liberté. Summer lui promet
tout , & fort pour lui obéir.
Plus calme après ces eſpérances , Warwick
réfléchit ſur l'illuſion qui l'a confolé
; Elifabeth arrive,
L'objet de cette Scène n'eſt ni précis ,
ni déterminé ; mais l'art de l'Auteur , la
figure aimable & la voix touchante de MademoiſelleDubois,
fur-tout les talens ſupérieurs
de M. Le Kain , qu'on peut appellerleGarrickFrançois
, concourent àpal
lier ce léger défaut .
Enfin des Gardes viennent chercher
Elifabeth pour la conduire auprès du
Roi ; Warvick retombe dans ſes incertitudes
, & dans l'agitation . Alors
des Gardes enfoncent la prifon , & Summer
à leur tête parle ainfi.
SCENE VII.
SUMMER..
J'apporte la vengeance ,
Ami , prenez ce fer ; foyez libre & vainqueur .
WARVICK.
Tout estdonc réparé ? .. Cherami , quel bonheut !
SUMMER.
Votre nom, votre gloire, & la Reine & moi-même ,
Tout range ſous vos loix un peuple qui vous aime
Marguerite , échappée aux Gardes du Palais ,
D'abord, à votre nom , raſſemble les Anglois ,
Jemejoins à ſes cris : tout s'émeut, tout s'emprefle,
Tous veulent vous offrir une main vengereſſe.
On attaque , on aſſiége Edouard allarmé
Avec Elifabeth au Palais renfermé.
Paroiſſez ; c'eſt à vous d'achever la victoire.
mivenez chercher la vengeance & la gloire.
WARVICK.
Voilàdonc où ſa faute & le fort l'ont réduit :
De ſon ingratitude il voît enfin le fruit.
Il l'a trop mérité. Marchons ... Warvick, arrête.
Tu vas donc d'une femme achever la conquête
Ecrafer fans effort un rival abbatu?
20 Sont-ce làdes exploits dignes de ta vertu ?
Eft-ce un ſi beautriomphe offert à ta vaillance ;
D'immoler Edouard, quand il eſt ſans défenſe ?
Ah!j'embraffe unprojetplus grand,plus généreux.
Voici de mes inftans l'inſtant le plus heureux.
Ce jour de mes malheurs eſt le jour de ma gloire.
C'eſt moiqui vais fixer le fort & la victoire.
Le deſtin d'Edouard ne dépend que de moi.
J'ai guidé ſa jeuneſſe & mon bras l'a fait Roi ;
J'al conſervé ſes jours & je vais les défendre .
Je luidonnai le ſceptre , &je vais le lui rendre
Detous les ennemis confondre les projets,
Et je veux le punit à force de bienfaitsig
Il connoîtra mon coeur autant que mon courage W
Une ſeconde fois il ſera monouvrage, Do
Qu'il va ſe repentir de m'avoir outrage
Combien it va rougir ! ... Amis , je ſuis venge.
Allons, braves Anglois , c'eſt Warvick qui vous
guide,
Ne déſavouez point votre Chef intrépide.
Sivous aimez l'honneur, venez tous avec mo
Et combattre Lançaſtre, & fauver votre Roi
Fin du quatrième Alte
uby
ACTE V
ELISABETH qui ne connoîtdeWarvick
que fa fureur &fes projets de vengeance ,
tremble également pour les jours de fon
amant , &pour ceux de fon Roi. Suffolck
vient la raſſurer par le récit de ce qui
s'eſt paffé ſous les yeux, Warvick a
diffipe le parti de Marguerite qui affiés
geoit Edouard dans ſon palais , & l'a
couronné pour la feconde fois. Elifabeth
ſe livre à la joie. Edouard l'augmente
encore en lui déclarant qu'il eſt prêt à
épouſer la foeur de Louis XI , & à
l'unir au Comte de Warvick. Marguerite
priſonniere , mais triomphante , leur apprend
qu'elle s'eſt vengée du Comte de
Warvick , & qu'il eſt expirant,
Voici les vers qui ſont dans la bouche
du Comte de Warvick qu'on amene ſur
le Théatre , & qui terminent la piece :
... Ecoutez moins de vains reſſentimens.
Renvoyez à Louis cette femme cruelle ,
Il pourroit la venger , ne craignez plus riend'elle.
Cepeuplequi m'aima ,la déteſte aujourd'hui
Quim'adonné la mort ne peut régner ſur lui,
Pleurez moinsmon trépas. Macarriere eſt finic
Aumoment leplus beaudont s'illuſtrama vie.
Mavoix a fait encor le deſtin des Anglois :
Etj'emporte au tombeau ma gloire & vos regrets
Π
WARVICK continueens'adreſſant à EDOUARD.
N'accuſons de vos maux que yous & que moi
même.
Votre amour fut aveugle &mon orgueil extrême,
Vous aviez oublié mes ſervices : &moi
J'oubliai trop , hélas ! que vous étiez monRei,
J'ai l'honneur d'être ,
MESSIEURS,
Votre très-humble & très
obéiſſant Serviteur ,
JOUBERT.
AUX AUTEURS
DU MERCURE
DE FRANCE ,
SUR LE
COMTE DE WARVICK,
TRAGÉDIE NOUVELLE ,
EN CINQ ACTES ET EN VERS
Repréſentée , pour la première fois , le Lundi
2 Novembre 1763.
M. DCC . LXIII.
TELEEH
LETTRE
AUX AUTEURS
DU
MERCURE DE FRANCE.
VOICI , Meſſieurs , une nouvelle preuve
de cette vérité que Corneille a devinée
parſentiment &qu'il a fi bien placée dans
ſaTragédie duCid : e'eſt le Cid qui parle :
«Mes pareils à deux fois ne ſe font point connoître;
»Et pour leurs coups d'eſſai veulent des coups de
Maître. >>>
C'eſt ainſi que les Racine & les Voltaires'annonçoient
ſur laScène Françoiſe.
Monfieur de la Harpe paroît avoir bien
étudié la manière de ces grands Peintres
del'ame, & ſe voit, comme eux, couronné
A iij
dès le premier pas qu'il a fait dans la car
rière du Théatre .
La Tragédie de Warvick, dont je vais
faire l'analyſe exacte , eſt un Ouvrage
qu'on ne devoit pas attendre d'un Ecolier
àpeine forti des Univerſités. Il est vrai
que ſes premiers Maîtres n'avoient pas
méconnu fon génie , & que M. de la
Harpe , avant l'âge de vingt ans , avoit
rendu fon nom celebre & intéreſſant dans
les faſtes de cette Ecole de goût & de
moeurs , qui compte plus d'un Rollin parmi
ſes Chefs .
Tout le monde paroît demeurer d'ac
cord que le plan de cette Tragédie eft
heureuſement conçu , que les caractères
en font nobles , & auffi - bien foutenus
que contraſtés , les ſentimens vrais
& grands fans enfure , le ſtyle élégant
& la verſification facile , mais toujours
harmonieuſe . Ceux qui s'intéreſſent à la
gloire de notre Theatre voient avec plaifir
s'élever un jeune Poëte , qui a le courage
de ſacrifier à la préciſion de ſes
dialogues ces maximes & ces ſentences
tant rebattues & toujours applaudies .
Ils lui ſçauront gré ſans doute d'avoir
composé dans un genre preſque oublié de
nos jours , & qui a fait place aux monf
trueuſes &burleſques Pantomimes qu'on
nous apporte d'Angleterre ou d'Italie .
Mais outre le mérite réel de cette Tragé
die , il en eſt un qui appartient plus aux
moeurs qu'au génie ; l'Auteur ſemble ne
s'être écarté de l'hiſtoire que pour donner
à Warvick toute la grandeurdont une
ame eft capable. Auguſte qui pardonne a
Cinna , n'eſt pas plus généreux que Warvick
empriſonné par Edouard , & qui ne
fort de ſa priſon que pour le couronner
une ſeconde fois . Les acclamations univerfelles
données au Comte de Warvick
dans ce moment , font un témoignage
irrécuſable contre les détracteurs
de la Scène Françoiſe . Ce n'eſtpoint affez
qu'un beau diſcours devenu preſque une
action par la véhémente éloquence de
l'Orateur , nous imprime des leçons de
vertu , ce ſont des exemples de générofité
qui nous frappent au Théatre , qui rappellent
l'homme à ſa première dignité :
ce font peut - être ces applaudiſſemens
unanimes & forcés que nous donnons à
la vertu qui nous emportent juſqu'à elle ,
qui nous rendent capables d'y atteindre ,
& font du Théatre même une école de
moeurs , que rien ne peut remplacer.
A iiij
NOMS DES ACTEURS.
YORCK , Roi d'Angleterre , ſous le nom
d'Edouard.
MARGUERITE D'AN JOU , femme de
Lancaftre , Roi d'Angleterre, ſous le nom
de HENRY.
LE COMTE DE WARVICK.
SUFFOLK , Confident d'Edouard.
SUMMER , Ami de Warvick.
ELISABETH , Amante de Warwick.
NEVILLE , Confidente de Margueritean
GARDES.
?
A
C
Ho La Scène est à Londres.
?
1612
ACTE PREMIER
MARGUERITE ouvre la ſcèneavecNéville
ſa confidente , & lui découvre les
ſecrets motifs de ſa joie &de ſes nouvelles
eſpérances : Edouard vainqueur de
Henri VI , & placé ſur ſon Trône par la
valeur & l'amitié de Warvick , va dans
l'absence de ce guerrier lui ravir ſa Maîtreffe
, & doit ce jour même épouſer Elifabeth
de Gray. Marguerite ſe flatte que
Warvick , irrité d'un affront fi peu attendu
, va travailler avec elle à rétablir
fon mari ſur le Trône d'Angleterre :
c'eſt pourquoi elle ſe propoſe d'obtenir
d'Edouard la liberté de paſſer en France
pour y joindre le Comte de Warvick ,
& l'inſtruire des amours & de l'ingratitude
du Maître qu'il s'eſt donné.
Edouard , ſans lui refuſer ni lui accorder
ſa demande , lui fait entendre que
le moment de la paix ſera celui de ſa liberté.
Le Roi ouvre à Suffolck les replis
de ſon coeur , il lui confie ſes projets , ſes
craintes , ſes combats, la violence de fon
amour . C'eſt ſurtout l'amitié de Warvick
qui lui peſe ; c'eſt Warvick , c'eſt un ami
Av
A
qu'il craint d'offenſer ; mais il eſpere le
fléchir & ordonne à Suffolck de ſe rendre
à la Cour de France , &c. &c. Alors
on apprend que le Comte vient d'arriver
dans Londres aux acclamations de tout le
Peuple , & le Roi ſe retire dans le plus
grand trouble .
Telle eſt la marche du premier Acte ,
nous n'en citerons qu'un trait rendu ſublime
par Mademoiselle Dumeſnil , &
qui le paroîtra peut - être encore ſans
elle.
Cet MARGUERITE qui parle.
Demomens en momens j'attendois le trépas ;
Unbrigand ſe préſente ,& fon avide joie
Brille dans ſes regards à l'aſpect de ſa proie.
Il eſt prêt à frapper : je reſtai ſans frayeur ,
Un eſpoir imprévu vint ranimer mon coeur.
Sans guide , fans ſecours ,dans ce lieu folitaire,
J'oſai dans ce brigand voir un Dieu tutélaire.
« Tiens , approche , ( lui dis-je, en lui montrant
mon fils , 1
Qu'à peine ſoutenoient mes bras appeſantis,)
Ofe fauver ton Prince , oſe ſauver ſamere.>>>>
J'étonnai , j'attendris ce mortel ſanguinaire ,
Mon inttépidité le rendit généreux. alloy
LeCiel veilloit alors fur mon fils malheureux,
Oubien le front des Rois , que le deſtin accable ;
Sous les traits du malheur ſemble plus refpectable,
a Suivez-moi , me dit-il , &le fer à la main ,
Portant mon fils de Pautre, il nous fraye un ches
9039
2
2
Et ce mortel abject , tout fier de ouvrage ,
fon
Sembloit , en me ſauvant , égaler mon courage.
apne me ACTE II
WARVICK commence à s'applaudir
C
avec Summer d'avoir rétabli la paix entre
deux Nations rivales & hautaines , d'avoir
obtenu pour fon Maître la Soeur de Louis
XI , & de ſe voir à la fois l'arbitre , la
zerreur & le foutien des Rois. C'eſt dans
cet eſprit qu'il rend compte enſuite au Roi
du ſuccès de ſa négociation , & qu'il ſe
félicite de l'avoir ſervi dans la Cour des
Rois comme dans les combats. Edouard
loue ſon zèle , & conſent à ratifier la paix,
mais non à épouſer la Soeur de Louis XI .
Le Comte de Warvick inſiſte ſur la né
ceffité de fatisfaire au traité dont il fut
garant lui-même ; & le Roi , fans lui devoiler
tout-à-fait le myſtère de ſes nouvelles
amours , ſe retire en lui laiſſant
voir autantde trouble que d'amitié : War
vick reſte dans l'étonnement. Marguerite
vient l'en tirer , & s'exprime ainfier
MARGUERITE. ( Elle continue àparler
d'Edouard.)
Onditque ſur ſon coeur l'amour leplus ardent
Prend, depuis quelques jours, un ſuprême afcen
dant....
1.
On dit plus , & peut- être allez-vous en douter :
Ondit que cet objet, qu'il eût dû reſpecter,
Avoit promis ſa main , gage d'unfeufincère,
Auplus grand des Guerriers qu'ait produit l'Angle
terre ,
A qui même Edouard doit toute fa grandeur :
Qu'Edouard lâchement trahit ſon bienfaiteur :
Que pour prix de ſon zèle , & d'une foi conſtantel
Il lui ravit enfin ſa femme& ſon amante!
Ce ſont-là ſes projets , ſes voeux & ſon eſpoir,
Et c'eſt Elifabeth qu'il époufe ce ſoir.
•
: • • :
Pourquoi trouveriez -vous ce récit incroyable?
Lorſque l'on a trahi ſon Prince & ſon devoir ,
Voilà, voilà le prix qu'on en doit recevoir.
Si Warvick eût ſuivi de plusjuſtes maximes ,
S'il eût cherché pour moi des exploits légitimes,
४
Il me connoît aſſez , pour croire quemon cosur
D'unplus digne retour eût payé ſa valeur.
Adieu. Dans peu d'inftans vous pourrez reconnoî
tre
Cequ'a produit pour vous le choix d'un nouveau
Maître;
Vous apprendrez bien-tôt qui vous deviez ſervir.
Vous apprendrez du moins qui vous devez hair .
Je rends grace au deſtin. Oui , ſa faveur commence
Amefaireaujourd'hui goûter quelque vengeance ;
Et j'ai vû l'ennemi qui combattit ſon Roi,
Puni parun ingrat qu'il ſervît contre moi.
Warvick veut encore douter des dif
cours de Marguerite , & de l'ingratitude
de fon ami ; mais Summer & enſuite Eli
ſabeth viennent confirmer tout ce qu'il
a appris . Warvick jure d'en tirer ven
geance. Elifabeth s'efforce en vain de le19
calmer , & Warvick fort en menaçant.
Cof
3????? ?????????????
MA
ACTE III
ARGUERITE s'applaudit d'avoir irrite
Warvick , & peint ainſi le génie des
Anglois dont il eſt l'idole .
MARGUERITE, a Néville.
:
おす
)
Ne crois pas qu'Edouard triomphe impunément,
Mets-toi devant les yeux ce long enchaînement
De meurtres , de forfaits , dont la guerre civile
A, depuis fi long-tems , épouvanté cette Iſle.
Songe au ſang dont nos yeux ont vû couler des
flots ,
по
3
53
A
Sous le fer des foldats , ſous le fer des bourreaux ;
Ou d'un père ou d'un fils chacun pleure la perte ,
Et d'un deuil éternel l'Angleterre eſt couverte.
De vingt mille proſcrits les malheureux enfans
Brûlent tous en ſecret de venger leurs parens ;
Ils ont tous entendu , le jour de leur naiſſance ,
Autour de leur berceau le cri de la vengeance :
Tous ont été , depuis , nourris dans cet eſpoir ,
Et pour eux , en naiſſant , le meurtre eſt un devoirs
Je te dirai bien plus , le ſang & le ravage
Ont endurci ce Peuple , ont irrité ſa rage;
Et depuis ſi long-tems au carnage exercé;
II conferve la foifdu ſang qu'il a verſé.
Mais elle craint que ce Guerrier trop
ſuperbe n'éclate en menaces inſultantes
devant fon maître , & que le Roi ne le
faffe arrêter , elle fort : ( ce qui laiſſe le
Théatre vuide afſfez inutilement. C'eſt un
défaut dont les plus grands Maîtres ont
donné l'exemple , mais que leurs éleves ne
doivent jamais imiter. )Edouard cependant
qui vient d'apprendre de Suffolck
que Warvick ne lui a répondu que par
des emportemens , commande qu'on l'éloigne
Mais Warvick paroît , &
lui fait une longue énumération de ſes
ſervices , il lui rappelle ſes propres difcours
fur le champ de bataille où fon
pere venoit d'expirer , & ſe plaint de
fon ingratitude . Edouard lui fait une
réponſe très-moderée , quoique noble , &
qu'on ſera peut-être bien aiſe de trouver
ici.
?
...
Ceft EDOUARD qui parle.
Moderez devant moi ce tranſportqui m'offenfe.
Vantez moins vos exploits, j'en connois l'impor
tance;
Mais ſçachez qu'Edouard , arbitre de ſon fort,
Auroit trouvé ſans vous la victoire ou llaamort;
Vous n'enpouvezdouter, vous devez me connol
tre.
Eh! quels ſont donc enfin les torts de votre Mai-
; tre?
Je vous promis beaucoup: vous ai-je donnémoins ?
Lerang, où pres de moi vous ontplacé mes ſoins,
L'éclat de vos honneurs, vosbiens, votre puiſlance,
Sont-ils de vains effets de ma reconnoiſſance ?
Il eſt vrai, j'ai cherché l'Hymen d'Elifabeth.
N'ai-je pû faire au moins ce qu'a fait mon Sujet ,
Etm'est- il défendu d'écouter ma tendreſſe ,
De brûler pour l'objet où votre eſpoir s'adreſſe ?
Queme reprochez-vous? Suis-je injuſte ou cruel ?
L'ai-je, comme unTyran , fait traîner à l'autel ??
Je me fuis , comme vous , efforcé de lui plaire ,
Je me ſuis appuyé de l'aveu de ſon pere ;
J'ai demandé le ſien; & s'il faut dire plus ,
Elle n'a point encor expliqué ſes refus.
Laiſſez-moi juſques-là me flatter que ma flamme
Quemes foins , mes reſpects , n'offenſent point fon
ame;
Etqu'un coeur qui du vôtre a mérité les voeux,
Peut être , malgré vous, ſenſible à d'autres feux.
•
WARVICK & EDOUARD.
Jamais Elifabeth ne me ſera ravie ,
Onvous ne l'obtiendrez qu'aux dépen de maviej
Jamais impunémentje ne fus offenfé
יצ
Y
EDOUARD.
Jamais impunément je ne fus menacé ;
Et fi d'une amitié , qui me fut long-tems chère?
Le ſouvenir encor n'arrêtoit ma colère ,
Vous en auriez déjà reſſenti les effets ....
Peut-être cet effort vaut ſeul tous vos bienfaits.
Nepouſſez pas plus loinma bonté qui ſe laſſe
Et ne me forcez pas à punir votre audace.
Edouard peut d'un mot venger ſes droits bleſſés,
Etfût-il votre ouvrage ; il eſt Roi, frémiſſez.
Le Comte de Warvick lui répond
par des reproches encore plus amers ;
Edouard fait entrer ſesGardes ; Elifabeth
arrive avec eux : le Comte lui exagere
les torts de l'ingrat Yorck , & la quitte
pour courir à la vengeance. Edouard or
donne qu'on arrête le Comte de Warvick .
Elifabeth demeure avec le Roi pour l'appaifer
, & l'on vient leur annoncer que
Warvick s'eſt laiſſe conduire à la tour ,
mais que le peuple s'émeut en fa faveur :
le Roi fort pour aller le contenir.
SOIVAAT
0
C
ACTE IV.
WARVICK feul & dans la prifon , fe
retrace ainſi le fort de ſon premier maître :
.. C'eſt dans ces lieux, dans cette tour horrible
Qu'à vivre dans les fers par moi ſeul condamné
Lemalheureux Henri languit abandonné ,
L'Oppreſſeur , l'Opprimé n'ont plus qu'un même
afyle.
Hélas ! dans ſon malheur il eſt calme& tranquille,
Il eſt loin de penſer qu'un revers plein d'horreur
Enchaîne auprès de lui ſon ſuperbe vainqueur.
Summer vient lui apprendre que le parti
de Marguerite doit bientôt le délivrer.
Warvick le conjure par les pleurs qu'il
verſe encore devant lui , de hâter le moment
de ſa liberté. Summer lui promet
tout , & fort pour lui obéir.
Plus calme après ces eſpérances , Warwick
réfléchit ſur l'illuſion qui l'a confolé
; Elifabeth arrive,
L'objet de cette Scène n'eſt ni précis ,
ni déterminé ; mais l'art de l'Auteur , la
figure aimable & la voix touchante de MademoiſelleDubois,
fur-tout les talens ſupérieurs
de M. Le Kain , qu'on peut appellerleGarrickFrançois
, concourent àpal
lier ce léger défaut .
Enfin des Gardes viennent chercher
Elifabeth pour la conduire auprès du
Roi ; Warvick retombe dans ſes incertitudes
, & dans l'agitation . Alors
des Gardes enfoncent la prifon , & Summer
à leur tête parle ainfi.
SCENE VII.
SUMMER..
J'apporte la vengeance ,
Ami , prenez ce fer ; foyez libre & vainqueur .
WARVICK.
Tout estdonc réparé ? .. Cherami , quel bonheut !
SUMMER.
Votre nom, votre gloire, & la Reine & moi-même ,
Tout range ſous vos loix un peuple qui vous aime
Marguerite , échappée aux Gardes du Palais ,
D'abord, à votre nom , raſſemble les Anglois ,
Jemejoins à ſes cris : tout s'émeut, tout s'emprefle,
Tous veulent vous offrir une main vengereſſe.
On attaque , on aſſiége Edouard allarmé
Avec Elifabeth au Palais renfermé.
Paroiſſez ; c'eſt à vous d'achever la victoire.
mivenez chercher la vengeance & la gloire.
WARVICK.
Voilàdonc où ſa faute & le fort l'ont réduit :
De ſon ingratitude il voît enfin le fruit.
Il l'a trop mérité. Marchons ... Warvick, arrête.
Tu vas donc d'une femme achever la conquête
Ecrafer fans effort un rival abbatu?
20 Sont-ce làdes exploits dignes de ta vertu ?
Eft-ce un ſi beautriomphe offert à ta vaillance ;
D'immoler Edouard, quand il eſt ſans défenſe ?
Ah!j'embraffe unprojetplus grand,plus généreux.
Voici de mes inftans l'inſtant le plus heureux.
Ce jour de mes malheurs eſt le jour de ma gloire.
C'eſt moiqui vais fixer le fort & la victoire.
Le deſtin d'Edouard ne dépend que de moi.
J'ai guidé ſa jeuneſſe & mon bras l'a fait Roi ;
J'al conſervé ſes jours & je vais les défendre .
Je luidonnai le ſceptre , &je vais le lui rendre
Detous les ennemis confondre les projets,
Et je veux le punit à force de bienfaitsig
Il connoîtra mon coeur autant que mon courage W
Une ſeconde fois il ſera monouvrage, Do
Qu'il va ſe repentir de m'avoir outrage
Combien it va rougir ! ... Amis , je ſuis venge.
Allons, braves Anglois , c'eſt Warvick qui vous
guide,
Ne déſavouez point votre Chef intrépide.
Sivous aimez l'honneur, venez tous avec mo
Et combattre Lançaſtre, & fauver votre Roi
Fin du quatrième Alte
uby
ACTE V
ELISABETH qui ne connoîtdeWarvick
que fa fureur &fes projets de vengeance ,
tremble également pour les jours de fon
amant , &pour ceux de fon Roi. Suffolck
vient la raſſurer par le récit de ce qui
s'eſt paffé ſous les yeux, Warvick a
diffipe le parti de Marguerite qui affiés
geoit Edouard dans ſon palais , & l'a
couronné pour la feconde fois. Elifabeth
ſe livre à la joie. Edouard l'augmente
encore en lui déclarant qu'il eſt prêt à
épouſer la foeur de Louis XI , & à
l'unir au Comte de Warvick. Marguerite
priſonniere , mais triomphante , leur apprend
qu'elle s'eſt vengée du Comte de
Warvick , & qu'il eſt expirant,
Voici les vers qui ſont dans la bouche
du Comte de Warvick qu'on amene ſur
le Théatre , & qui terminent la piece :
... Ecoutez moins de vains reſſentimens.
Renvoyez à Louis cette femme cruelle ,
Il pourroit la venger , ne craignez plus riend'elle.
Cepeuplequi m'aima ,la déteſte aujourd'hui
Quim'adonné la mort ne peut régner ſur lui,
Pleurez moinsmon trépas. Macarriere eſt finic
Aumoment leplus beaudont s'illuſtrama vie.
Mavoix a fait encor le deſtin des Anglois :
Etj'emporte au tombeau ma gloire & vos regrets
Π
WARVICK continueens'adreſſant à EDOUARD.
N'accuſons de vos maux que yous & que moi
même.
Votre amour fut aveugle &mon orgueil extrême,
Vous aviez oublié mes ſervices : &moi
J'oubliai trop , hélas ! que vous étiez monRei,
J'ai l'honneur d'être ,
MESSIEURS,
Votre très-humble & très
obéiſſant Serviteur ,
JOUBERT.
Fermer
Résumé : LETTRE AUX AUTEURS DU MERCURE DE FRANCE SUR LE COMTE DE WARVICK TRAGÉDIE NOUVELLE EN CINQ ACTES ET EN VERS Représentée, pour la première fois, le lundi 7 Novembre 1763.
La lettre aux auteurs du Mercure de France présente la tragédie 'Le Comte de Warwick', représentée pour la première fois le 2 novembre 1763. L'auteur de la pièce, Jean-François de La Harpe, est comparé à Corneille, Racine et Voltaire, soulignant son talent précoce et prometteur. La tragédie est appréciée pour son plan bien conçu, ses personnages nobles et contrastés, ainsi que pour son style élégant et sa versification harmonieuse. Elle se distingue par des dialogues précis et l'absence de maximes rebattues. L'intrigue se déroule à Londres en 1612 et met en scène des personnages historiques tels que le roi Édouard, Marguerite d'Anjou, le comte de Warwick, et Élisabeth. Marguerite, épouse de Henri VI, espère que Warwick, irrité par l'infidélité d'Édouard, l'aidera à restaurer son mari sur le trône. Édouard est partagé entre son amour pour Élisabeth et son amitié pour Warwick. La pièce explore les thèmes de la loyauté, de l'ingratitude et de la générosité, avec Warwick incarnant une grandeur d'âme comparable à celle d'Auguste pardonnant Cinna. Les actes suivants développent les tensions entre Warwick et Édouard, avec Marguerite manipulant les événements pour provoquer une rébellion. Warwick, après avoir été emprisonné, est libéré par le peuple et retourne sur le trône. La pièce illustre la capacité du théâtre à inspirer des leçons de vertu et de générosité. Warwick, confronté à des dilemmes moraux et politiques, hésite à se venger d'Édouard mais décide de le protéger et de restaurer son trône. Il rappelle son rôle crucial dans l'ascension d'Édouard et rallie les Anglais pour combattre les ennemis du roi. Élisabeth, amoureuse de Warwick, est rassurée par Suffolk qui lui raconte les actions héroïques de Warwick. Édouard, reconnaissant, accepte d'épouser la sœur de Louis XI et de l'unir à Warwick. Marguerite, prisonnière, révèle que Warwick est mortellement blessé. Sur son lit de mort, Warwick conseille Édouard de renvoyer la femme cruelle à Louis XI et exprime son regret pour les erreurs passées. Il meurt en héros, laissant derrière lui une nation reconnaissante.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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