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1
p. 103-110
Sujet de deux Opera mis en Musique par le mesme. [titre d'après la table]
Début :
En verité, Madame, j'ay peine à vous pardonner vostre [...]
Mots clefs :
Opéra, Saint-Germain, Molière, Lully, Ballets, Musique française, Science des italiens, Abbé Tallement, Mademoiselle Jacquier
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texteReconnaissance textuelle : Sujet de deux Opera mis en Musique par le mesme. [titre d'après la table]
En verité Madame , jay
peine àvous pardonner voſtre attachementpour la Province,
puis, qu'il vous a privée du
,
1
G3
78 LE MERCVRE
-
plaiſir que vous auriez reçen de deux Opéra de ſa compofi- tionqui ont eſté chantez depuis deux ou trois ans dans
une Maiſon particuliere , &
dans la fienne. Le concours y
a eſté grand, & ils ont fait tant debruit , que le Roy les a voulu entendre àSaint Germain.
Ilsyont eſté repreſentez plus d'une fois , &Sa Majesté les a
toûjours écoutez avec une at- tention qui marquoit mieux que toute autre choſe la fatis- faction qu'elle en recevoit.
Auſſi faut-ilavoüerque le petit Moliere donne des agrémens bienparticuliers à tout ce qu'il fait. Il exprime admirablement les paffions , & it trouve des tons qui fuffiroientſeuls àfaire
connoiſtre ce que les Acteurs reprefentent. C'eſt ce qu'on
GALANT. 79 eftimoit en luy dans le temps qu'il travailloit aux Balets du Roy( ce qu'il afait longtemps ſeul,&depuis avecM² deLul- ly , juſqu'à ce que ce dernier aiteſte Surintendant de la Mufique. )Il a toûjours pris foin de meſler ce que la MufiqueFra çoiſe a de plus doux , avec le profondde la Science des Ita- liens ; & ce qui a eſté un fort grand avantage pourluy, il n'a preſque jamais travaillé que furde belles Paroles. Cellesde
ces deux derniers Opéra qui ont eu pourſujet les Amoursde Cephale &de I Aurore , &les
Avantures d'Andromede , font
de M l'Abbé Tallemant le
jeune. Il me feroit inutile de vous parlerde fon merite &de fon eſprit , l'un & l'autre vous eft connu. Je vous diray ſeule-
80 LE MERCVRE
ment que ſi vous aviez entendu les Vers de ces deux Ouvrages de Theatre , vous con- noiſtriez qu'ils répondent par- faitement aux belles chofes
que vous avez déja veuës de luy. Ony a remarqué un art merveillleux ; & ce qui a fort contribué à les rendre auſſi
agreables qu'ils font, c'eſt qu'il a trouvé moyen d'en retran- cher les Perſonnages , qui n'e- ftant point intereſſez dans le fujet de la Piece , ne peuvent jamais eftre qu'ennuyeux. Je reviens aux Paroles de Made
Frontiniere. Elles ont eſté
chantées devantle Roy par la petite Mademoiſelle Jaquier.
C'eſtunProdigequi aparûicy depuis quatre ans. Elle chante,
àLivre ouvert, la Muſique la plus difficile. Elle l'accompa
GALANT. 81
gne, &accompagne les autres qui veulent chanter , avec le
Claveſſin dont ellejouë dune maniere qui ne peut eftre imi- tée. Elle compoſe des Pieces ,
&les jouë fur tous les tons qu'on luy propoſe. Je vous ay dit , Madame ,qu'il y a quatre ans qu'elle paroift avec des qualitez fi extraordinaires , &
cependat elle n'en a encor que dix. Je ne ſçay ſi en la voyant,
vous ne diriez point ce qu'on a
entendu dire à un des plus beauxEfprits que nous ayõs. II la regardoit, ſurprisde tous ces miracles , il dit agreablement,
qu'il voyoit bien que c'estoit elle,
mais qu'avec toutcela iln'envoudroit pas jurer. Si nous eftions
au tempsoù l'on croyoit les Sil- phes&les Gnomes , on pour- roit douter que ce n'en fuſt
82 LE MERCVRE
une production. Toutes celles qui touchent le Claveffin , &
dont le nombre eft grand , ont fait ce qu'elles ont pûpour la furprendre , &ont eſté enſuite contraintes de l'admirer comme les autres , ou d'attribuer à
la Magie ce qu'elles ne peu- ventfaire comme elle...
peine àvous pardonner voſtre attachementpour la Province,
puis, qu'il vous a privée du
,
1
G3
78 LE MERCVRE
-
plaiſir que vous auriez reçen de deux Opéra de ſa compofi- tionqui ont eſté chantez depuis deux ou trois ans dans
une Maiſon particuliere , &
dans la fienne. Le concours y
a eſté grand, & ils ont fait tant debruit , que le Roy les a voulu entendre àSaint Germain.
Ilsyont eſté repreſentez plus d'une fois , &Sa Majesté les a
toûjours écoutez avec une at- tention qui marquoit mieux que toute autre choſe la fatis- faction qu'elle en recevoit.
Auſſi faut-ilavoüerque le petit Moliere donne des agrémens bienparticuliers à tout ce qu'il fait. Il exprime admirablement les paffions , & it trouve des tons qui fuffiroientſeuls àfaire
connoiſtre ce que les Acteurs reprefentent. C'eſt ce qu'on
GALANT. 79 eftimoit en luy dans le temps qu'il travailloit aux Balets du Roy( ce qu'il afait longtemps ſeul,&depuis avecM² deLul- ly , juſqu'à ce que ce dernier aiteſte Surintendant de la Mufique. )Il a toûjours pris foin de meſler ce que la MufiqueFra çoiſe a de plus doux , avec le profondde la Science des Ita- liens ; & ce qui a eſté un fort grand avantage pourluy, il n'a preſque jamais travaillé que furde belles Paroles. Cellesde
ces deux derniers Opéra qui ont eu pourſujet les Amoursde Cephale &de I Aurore , &les
Avantures d'Andromede , font
de M l'Abbé Tallemant le
jeune. Il me feroit inutile de vous parlerde fon merite &de fon eſprit , l'un & l'autre vous eft connu. Je vous diray ſeule-
80 LE MERCVRE
ment que ſi vous aviez entendu les Vers de ces deux Ouvrages de Theatre , vous con- noiſtriez qu'ils répondent par- faitement aux belles chofes
que vous avez déja veuës de luy. Ony a remarqué un art merveillleux ; & ce qui a fort contribué à les rendre auſſi
agreables qu'ils font, c'eſt qu'il a trouvé moyen d'en retran- cher les Perſonnages , qui n'e- ftant point intereſſez dans le fujet de la Piece , ne peuvent jamais eftre qu'ennuyeux. Je reviens aux Paroles de Made
Frontiniere. Elles ont eſté
chantées devantle Roy par la petite Mademoiſelle Jaquier.
C'eſtunProdigequi aparûicy depuis quatre ans. Elle chante,
àLivre ouvert, la Muſique la plus difficile. Elle l'accompa
GALANT. 81
gne, &accompagne les autres qui veulent chanter , avec le
Claveſſin dont ellejouë dune maniere qui ne peut eftre imi- tée. Elle compoſe des Pieces ,
&les jouë fur tous les tons qu'on luy propoſe. Je vous ay dit , Madame ,qu'il y a quatre ans qu'elle paroift avec des qualitez fi extraordinaires , &
cependat elle n'en a encor que dix. Je ne ſçay ſi en la voyant,
vous ne diriez point ce qu'on a
entendu dire à un des plus beauxEfprits que nous ayõs. II la regardoit, ſurprisde tous ces miracles , il dit agreablement,
qu'il voyoit bien que c'estoit elle,
mais qu'avec toutcela iln'envoudroit pas jurer. Si nous eftions
au tempsoù l'on croyoit les Sil- phes&les Gnomes , on pour- roit douter que ce n'en fuſt
82 LE MERCVRE
une production. Toutes celles qui touchent le Claveffin , &
dont le nombre eft grand , ont fait ce qu'elles ont pûpour la furprendre , &ont eſté enſuite contraintes de l'admirer comme les autres , ou d'attribuer à
la Magie ce qu'elles ne peu- ventfaire comme elle...
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Résumé : Sujet de deux Opera mis en Musique par le mesme. [titre d'après la table]
La lettre exprime des regrets que la destinataire n'ait pas pu assister à deux opéras de Molière : 'Les Amours de Céphale et d'Aurore' et 'Les Aventures d'Andromède'. Ces œuvres ont été jouées dans une maison particulière et au château de Saint-Germain, où elles ont été appréciées par le roi. Molière est félicité pour son talent à exprimer les passions et à mélanger la musique française et italienne. Les paroles de ces opéras sont de l'abbé Tallemant le jeune, dont le mérite est souligné. La lettre mentionne également Mademoiselle Jaquier, une jeune prodige de dix ans, qui chante, compose et joue du clavecin de manière exceptionnelle, surprenant et impressionnant les autres musiciens.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 1-18
REMARQUES sur la Réponse qui a paru dans le Mercure du mois de Novembre dernier à la question : Si les Chartes qui ne sont point dattées, mais munies de Sceaux de personnes illustres, dont le temps n'est pas douteux, peuvent passer pour certaines & autentiques.
Début :
RÉPONSE. L'On est d'avis que l'on y doit [...]
Mots clefs :
Chartes, Abbaye, Règne, Roi, Histoire, Saint-Germain, Incarnation, Charte, Date
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texteReconnaissance textuelle : REMARQUES sur la Réponse qui a paru dans le Mercure du mois de Novembre dernier à la question : Si les Chartes qui ne sont point dattées, mais munies de Sceaux de personnes illustres, dont le temps n'est pas douteux, peuvent passer pour certaines & autentiques.
REMARQUES' sur la Réponse qui a .
paru dans le Mercure du mois de No»
vemb're dernier à la question : Si les
Chartes qui ». font point dattées , mais
munies de Sceaux dé personnes illustres,
dont le temps n est pas douteux , pe «-
vent pajfcr pour certaines & autcntiquest
RE'PONS E.
JSppS^jl.'O» est d'avis que l'on y doit
P Ijjifj "lQ"Kr T°y , ©- qu'elles peuvent
|Éjg|gg| [ preuve qu'une choje est an.
Ay Cet
i MERCURE DE FRANCE
Cet avis , quoique bon en lui-même
est cependant trop vague , & trop gene
rai , les raisons fur leíquelles il est fondé
supposent le faux , &c l'on ne croit pas
qu'elles soient jamais admises par ceux
qui font un peu versez dans la connoisfance
des Chartes.
Il y a un certain milieu à garder en tou
tes choses. C'est un excès causé par l'igno
rance de l'Histoire Diplomatique , & des
coutumes des siecle? paslèz , de rejetter
abíolument toutes les Chartes qui manq
ent de dattes , de signatures ou de
sceaux ; & c'en est un autre de les admet
tre trop facilement- L'Auteur de la Ré
ponse > est tombé dans celui.ci , qui est
bien le moindre ; 8c M s de la Justice
tombent tous les jours dans l'autre , Se
en même temps condamnent' de faux des .
pieces , lesquelles avec les conditions
Îiu'ils exigent seroient entierement fauses
aux yeux des connoisteurs. Cette
erreur vient de ce qu'ils croyent que les
anciennes Chartes ne peuvent être bon
nes fans les formalitez des Actes d'au
jourd'hui , & qu'elles dévoient être dres
sées dans les siecles paísez comme elles
le fuit depuis un certain temps.
Il falloit donc distinguer les lieux, les.
temps, &: les personnes ; car íuivant ces. i
trois différents rapports il y a des Char
tes
JANVIER 1724. 3
tes fans dacte , auxquelles on peut, &
(on doic ajouter foy , & d'autres qui n'en
meritent aucune. Or l'on peut connoître
à peu près le temps d'une Charte
fins datte , par l'écriture , & par les per
sonnes qui y sont nommées. Pour les
lieux ils y sont presque toujours mar
quez.
Chez les Romains tout Acte étoit nul
lorsqu'il n'étoit point datté du jour &
du Coníulat , abfine die & Consule , &
par les Loix des Àllemans , {a) il étoit
défendu d'avoir égard à aucune Charte
qui n'étoit pas dattée du jour & de l'an.
C'est ce qui fait qu'on ne trouve qu'une
feule de leurs Chartes qui n'ait point de
datte : c'est la 55 .- dans Goldast. Ainsi
les Chartes faites dans les lieux où les
Loix Romaines , &ç celles des Allemans
étoient observées doivent être dattées ,
autrement il y a grande apparence qu'el
les sont fau fies.
Il n'en est pas de même de celles des
François & des Germains , on en trou
ve beaucoup fans aucune datte. (b) Ferard
en a raporté un grand nombre des
Ducs de Bourgogne , & même de quel
ques Evêques , 8c l'on env voit beaucoup
(a) Leges Aìamann. cap. 42. .
b) Pcrard , pag. r?*. tu, ait. *M. &
vantes.
A vj de
4 MERCURE DE FRANCE.
de pareilles dans les traditions de l'Ab
baye de Fulde.
Mais il faut faire attention que cet
uíàge ne s'est introduit que vers le 10e
siecle , & qu'il a fini dans le 13e & cela
principalement dans les Chartes: des
Seigneurs & des autres particuliers; car
pour celles des Rois il est très.rare (a)
d'en trouver íàns datte , au moins dans
les siecles dont nous venons de parler ,
excepté celles qui étoient de peu de con
sequence, & qui devoient être execu
tées fur le champ. Encore y marquoit.on
le plus souvent le mois , & même le
jour du mois. Il est vrai que les Char
tes des Rois de la premiere race n'ont
quelquefois pour toute datte que leur
nom , où les années de leur Regne. Il y
en a deux de cette premiere sorte dans le
supplement de la Diplom. p. 92. L'une
est de Clothaire IL & l'autre de Dagobert
I. & deux autres dans la nouvelle
Histoire de l'Abbaye de S. Germain ; (b)
sçavoir le Testament de Dagobert qui
n'a. ni datte, ni signature, &.une Charte
de Thierry IL
Au reste , il est aisé de distinguer les
Chartes des Rois Merovingiens de celles
(«.! Mabillon. Diplom. p. in.
(í) Histoire de l'Abbaye de S.. Germain , .
pieces juuir. p. 4, & suivantes.
des
JANVIER 1714/ f
des autres qui les ont suivis , & même
celles des particuliers de leur temps, de
celles des temps posterieurs ; car on ob
serva preíque toujours de leur temps
cette formule , datum qnod fecit menfìs
N. dies N_4»#o N. Regis nostri , cowïendio
in dei nomine feliciter. Ou bien
iatum fub die v. Kal. &c. ou enfin fait*
.ejjio fub die &c. Mais la premiere sornule
étoit plus commune aux Rois , &
a derniere aux particuliers. Cette soriule
varia dès les commencemens de la
euxiéme race ,. & du Regne même de
'epin. Au lieu de. regni nostri , on mit
°gni Domini , Sec. k la troisième persons
, Se au datum ou data ,.. &c On ajouta
1nm, &c. Il y eut ensuite bien d'autres
îangemens juiqu'à Charles le Gros qui
ajouta l'année de l'Incarnation. Os
:rroit peut.être ici avec plaisir toutes
s differentes formules des dattes & des
nelusions des Chartes des Rois, & des
rtkuliers juíqu'à nos jours ; mais ce
oit trop s'écarter, & ce peut être le
et d'une Diísertation particuliere , en
endant on renvoye à la Diplomatie
e , où l'on trouvera íuffisamment de
ai se satisfaire.
Il n'y a donc presque eu que les par.
jliers , quelques Comtes , Ducs , &
êques qui ayent manqué de mettre
une
4 MERCURE DE FRANCE.
line datce à leurs Chartes.' Il s'en voit
tìn grand nombre dans le Yrésor. des
Anecd. dans la nouvelle édition des Di
plômes d'Aub. le Mire, &fen particu
lier parmi les pieces justificatives de
l'Histoire de l'Abbaye de S. Germain,
entre autres une de la Comtesse Eve fans
datte, ni signature, laquelle a été don
née vers l'an 849. Cependant ce non
usage n'étoit pas absolument universel ,
même dans l'onzième &c douzième siecle,
puiíque l'on en voit plusieurs avec le
mois 8e le regne du Roy, d'autres avec
l'année du regne fans mois ni jour, &
d'autres enfin avec, regnante DominoNpomifiâante
NV Comite N. fans en mar
quer les années.
Il y a une chose qui peut servir à
donner quelque ordre à cette diversité si
confuse. C'est qu'il ne paroît dans ces
deux siecles prelqu'aucun Acte fans datte
que ceux que l'on appelle notices , &
qui commencent par ces mots , noti
fia , notum fit , noveritis notifico , 8c
les Statuts Sc decrets des Abbez, des
Evêques , ou de leurs Chapitrest On en
trouve beaucoup dans l'Histoire de Saint
Germain, & pas une n'est dattée avant
l'an 1191. peut.être que ceci n'étoit
particulier qu'à la France , puisque pa-
«eils Actes faits dans la Belgique (ont
presque
JANVIER 1714. 7
preíque tous dattez , au moins ceux qui'
font raportez dans la nouvelle -édition/
d'Aubert le Mire*
Quant aux Diplômes de nos Rois il.
y en a plusieurs, principalement depuis'
le commencement de l'xi. siecle juíqu'à
la fin du 13e qui font dattez de l'année
de l'Incarnation , íâns mois , ni jour ; Se
d'autres avec le mois íans lejour. Tels.
íònt entre autres deux de Philippe Au
guste, raportez dans Perard , page 340..
mais l'on n'en trouve aucun fans quel
que marque chronologique.
Devant le regne de Charles le Gros
les Chartes des particuliers íe dattoient eiv
Italie du regne de l'Empereur, du Roy,
du Comte , Se en même temps de l'indiction.
Sous íon regne on commença à y
ajouter l'année de l'Incarnation , princi
palement en Allemagne ; (a) ainsi qu'il
paroît dans lesTrad. de Fulde, page 509..
où il y a une Charte dattée de l'an
783/ & deux autres de 800. & 802..
Mais ce ne íònt pas encore les premieres
que l'on ait dattées de l'an de i'Jncarna.
tion, puisque le continuateur du Reciieil/
des Diplômes d'Aubert Ie Mire raporte s.
page 1 1 2Ó. deux Chartes de Pépin le
Gros dit d'Heristel , dattées de l'an 687.
(a) Mabìl. Diplom. p..
S MERCURE DE FRANCE:
Se <?$> i. de l'Incarnation indict, 4e Le 5;
de sa Principauté , &c.
Il y a cependant beaucoup lieu de ne
íè pas trop fier à ces deux .Chartes pour
plusieurs raisons qui ne sont pas de nôtre
ïùjet , du. moins pour les dattes qui pourroient
y; avoir été ajoutées après coup.
En voilà aílez pour donner une idée
des Chartes .dattées , & non dattées, &
de celles qui ne le font , pour ainsi dire ,
qu'à demi. On voit par là quand elles
peuvent faire foy , étant íàns datte , &
qui étoient les personnes qui negligeoient
de les marquer, Examinons à present les.
raisons fur leíquelles l'Auteur de la Ré^.
ponse fonde sa décision-
Suite de la Réponse. .
Car la Charte , quoique faite pour la. '
même fin , n'approchoit cependant pas de
ce que nous nommons aujourd'hui un ASte,
en ne s'en est servi que tant qu'il n'y
Ai/oit point , ou très .peu de Notaires , &c.
Premierement tout ceci ne dit rien , &
ne regarde pas la question proposée , il
s'agit des Chartes non dattées , & non
pas de celles qui n'a voient ppint de si
gnature.
Secondement, on ne voit pas pour
quelle raison l' Auteur de la Réponse
met
J A N VIE t' Vit f
met la Charte tout au.dessous de l'Acte
de Notaire. U est vrai qu'on n'y obfèr-
Voit' pas les formalitez d'aujourd'hui ;
mais celles dont on se servoit ne la
rendoient pas moins , pour ne pas dire
plus authentique que les Actes de No
taires. S'il s'agit des Chartes de nos Rois>
c'étaient leurs Referendaires ou Chan
celiers qui en étaient les Notaires j fous
la premiere race les Princes les lìgnoient
preíque toujours., £c on y appofoit le
cachet de leurs anneaux , & eníuite leur«
sceaux ; lôus ceux de la deuxième. Le
Prince les íìgnoit de son Monogramme ,
& en generai on peut dire qu'ils n'accordoient
, Se ne faiioient presque point ex
pedier des privileges que lorsqu'ils
tenoient leurs cours plenieres, ou ea
presence des Grands Officiers de la Cou
ronne, leíquels sont toujours nommez ,
Sc signent dans les Chartes des Rois de'
la troisième race , depuis Louis le Gros.
(a) D'où vient cette formule observée'
dans. la fuite , Aílum Parifiis , &c. astan~
tïbus in Palatio nostr'o quorum nominafubtitulata
futit & signa. Signum N. Da.
piferi S. N. Const-abulariï Baftculario
nullo S. N. Camerarii data per manum
lí. Cancellarii , ou vacante cancellaria.
S'il s'agit des Chartes des particuliers,'
(«) Mabil. Diplom..p. 104..
outíe.'
lé MERCURE DÉ fRANCÊ.-
Outre qu'elles étoient preíque toujours
écrites par des Notaires , leíquels quoique
íàns privilege exclusif étoient veriblement,'
8c pas leúf profeísion hommes3
publics elles étoient ordinairement don*
nées , relues 8c signées dans des assem
blées publiques , In mallo publico. In gtr
nerali placito. In convensu Nobiliwn, &C
(a) Le Seigneur les faiseít publier de
vant íes pairs , Se devant ses Vassaux quï
étoient obligez d'être fa caution y il étoit'-
reciproquement la leur ; mais d'une au
tre maniere , ne s'engageanc seulement
qu'à les contraindre d'executer leurs
conventions , 8c les autres- , obligeant
pour leur ^Seigneur , 8c leurs corps &
leurs biens. Ç'est.là cette servitude dont
il est. parlé dans íes Chartes.
Troisièmement y les Notaires publics
étoient bien plus anciens & bien plus.
communs que l'Auteur ne l'a crû ; car
outre qu'il en est parlé dans les Loix des
Ripuaires fous le nom de Chanceliers^
dans les Chartes de Childebert , & de
S. Germain., Evêque de Paris (c) pour
l'Abbaye de son nom; Charlemagne dans
le j. Capitulaire de l'an 8oj. ordonne,
(») Bouilíard , Histoire de l'Abbaye de Saint
Germain , pieces justificatives , page 7. ' .
(b) Ad fidejujfores tollendos.
\c) Histoire de S. Germain, pages i. & *.
ut
"I A N V í Ê tí tfn. fi
.Ht mijfì nostri scabînios Advocatos yNotariosperfîngiila
loca éligant s tkc. Depuis
ce temps ilj y en a toujours eu,& en
aísez grand nombre y les Evêqtìes, les
Abbez 8c ks Seigneurs avoient ordinai
rement leurs Notaires , ou Chanceliers
qui servoient pour tous leurs Vaslàux ,
car il ne leur étoit pas permis de faire
des Chartes , c'est ce qui fait qde celles
áusquelles ils sont interessez soit pour
vente ou donation aux Eglises , sont tou.*
jfours au nom du Seigneur y qui donne ?
ou qui vend comme proprietaire , après.
avoir marqué qu'un tel ion Vassal, refîgnavit
in manus suas , &c.
Ainsi les Chartes ne se faisoient point
par le premier venu > comme l'Auteut
l'insinuë , mais par des Chanceliers oit
Notaires qui étoient publics. Et ces Offi
ces étoient exercez communément paf
des Clercs , ou des Moines q»i étoient
les moins ignorans de ces temps.là , Si
qui servoient en même temps de Cha
pelains à ces Seigneurs.
Il étoit si necessaire pour k validité
des Chartes qu'elles fuisent écrites par'
des personnes , dont le nom & l'écris
ture fu/sent si connues , qu'elles fuisent
Censées personnes publiques que le Pape
' Innocent II í. (a) regarde comme nut
1*1 Innoc.III. liw í. Epist- 3 f
a Mercure de francs.
«n privilege de l'Empereur Henry , quia
nec erat publica manu conseílmn j nef
figillum habzbat ambenticum.
Suite de la Réponse.'
Lu negligence avoit tellement pris le
dessus , que les personnes de la. premiere
difiinclion ne /pavoient pas assez, bien
écrire poursigner leur nom , ce qui a dvn*
né lieu aux sceaux , &c'
Ce n'est point à l'ignorance d'écrire
oU de signer que l'on doit l'usage d'ap
poser des sceaux, Se des cachets fur les
titres. Cet uíage est de l'antiquité la plus
íçculée; Lorsque Pharaon donna à Jo
seph le Gouvernement dé l?Egypte , (a)
tulit a-nnulum de- manu- sua & dedit eum
in manu cjus.. Les Lettres d'Assuerus ,.
Roy des Perses & des Medes , accordées'
à Esther en faveur des Juifs, (bj; anftulo
ipfius obsignata funt & mijst per
veredarios ,-Sc.c. Lefc Romains s'en fer-'
voient aussi , ainsi que les Historiens, &
les cabinets des curieux qui en íorit rem
plis en font foy. Et nos premiers Rois',
dont il s'agit ici plus particulierement
ont eu des cachets , aufquels les sceaux
ont succedé. On garde encore dans le
(a) Genes. 41.
(*} E/lhexé c l' "
cabinet^
î A.NViER 1714. 13
cabinet du Roy l'Aneau de Childeric,
pexc du grand Clo.vis. Mais .ce qui fait
voir que ce n'est point pour íuppléer à
la íignature (a) qu'on s'est mis a ícelei
les titres ; c'est que les Chartes ictus la
premiere race de nos Rois , sont preíque
toutes ignées &c sce.léçs. -Et non.íèuler
ment .celles de nos Rois , mais encore
çelles des Evêques & des Seigneurs par*;
ticuliers.
Il est vrai qu'il y a un temps & de»
lieux toìi les sceaux suppleoient aux si
gnatures i mais l'uíàge de signer & d?
sceller en même temps était bien plu?
ancien. C'est ce qui paroît certain parle
témoignage de Gregoire .de Tours qui
dit {&) que Mummole envoyé par le
Roy Theodebert vers l'Empereur Justir
nien , étant à l'extrémité fit faire son
(a) Von peut ajouter que les sceaux supfleoient
encore moins aux dattes, & que
Auteur de la Lettre écrite d Evreux dans le
Mercure d'XDcìpbre 1713. quoique bien mieux
au fait des Chartes que celui.ci , n'y a pas fait
allez d'attention , lorsqu'il a avance que dans
l'onzième & douzième siecles , il n'y avoït sas
une Charte qui n'eut son sceau , &c. il est
pourra voir un grand nombre fans dattes &
fans sceau dans les Recueils des Chartes ; 8ç
en particulier dans les pieces justificatives dé
la nouvelle Histoire de l'Abbaye de Saint
î.Germain. '
(b) Greg. Tftrpn. de Gltr.MarU lib. 1. cxti
teftar.
f 4 MERCURE DE FRANCE,
íestament., & le fit munir de signatures
.& de íceaux- Fecit testamentum fuum sertht
, munitum fubfcriptionibus ac figillis ,
&Cz. Dans le siecle suivant Berthramn ,
Evêque du Mans fit mettre siir son testa
ment les signatures., 8c les sceaux de íépt
personnes illustres. Septem virorum honestorum
fubscriptionibus & figillis.
Charlemagne signe & scelle la Charte
{a) pour l'Abbaye de S. Germain , manu
nostra fubfcriptionis fabter decrevimus robarare
, & de amuio nofiro fubter figillare.
Chez les Anglois même les íèeaux , quoi
que communs à tout le monde, au moins
depuis Guillaume le Conquerant , ne tenoient
pas lieu de signatures , mais bien
de Tabellions qui n'y étoient pas en usa
ge loríque ce Prince conquit l'Angle
terre ; cfKoHiam Tabellionum ttfus ( dit
(b) Matthieu Paris ) in eo regno non httbebamr.
Cependant il faut convenir que
depuis Gregoire de Tours jusqu'à l'oneiéme
siecle , il se trouve bien des Char
tes des Rois , d'Evêques & de Seigneurs
qui n'ont aucunes marques de cachets ,
ni de sceaux. Or la veritable marque
qu'une Charte ait été scellée , n'est pas
qu'il y ait des trous, par lefquelj leî
(a) Boiiillard. Hist. de l'Abbaye de S. Ger
main, p. u,
(i) Math. ïarìs. ad an, 1237.
lac»
JANVIER 1714. ts
|acs ou cordons du sceau auroient été
pastez , ou quelques restes de cire appli
quée dessus ; mais c'est loríqu'il est énon.
jcé dans l'Acte qu'elle* été ícellée. Car
sans cela les sceaux íèroienc une preuyg
de fausseté.
Suite de la Réponse.
L'on se servoit dans le même temps des
ghartes parties ou coupées , c'est.à.dire
qu'après avoir fait une Charte , on la
fioupoit en pieces , dont chaque contrac
tant en prenoit une pour la representer lors
de l'execution des conventions , Sec.
Ceci est dit d'une maniere si décisive,
-qu'on croiroit que tout cela est vrai , &
que l'Auteur a vu de ces Cljarces parties ;
jnais il permettra que l'on assure qu'il
n'en connoît que le nom , & qu'on n'a
jamais coupé en pieces Jes Chartes com
me il s'imagine.'
Les Chartes parties ou coupées tirent
leur origine des Chartes appellées dans
les formules (a) de Marculfe Chant pa~
rida & paricuU , parce que c'étoient des
doubles copies d'un même acte fait entre
deujç parties égales inter pares , ou plutft
parce qu'elles étoient de pareille for
me, grandeur & écriture. A ces Char-
(a) Marculfi formuis. , lib* z.
tes
itf MERCURE DE FRANCE.
tes succederent les Chartes parties ow
.coupées , autrement Chartes endentées,
Charte indentatA , ou idetitat* , que l'on
appella dans les H. 11. Se 1.3 e. siecles
Chkographes ou CirographeS. C!étpient
auflì deux copies d'un même acte écrites
fur une même peau , & de même ma
niere, entre lesquels on .écrjvoit en
grands caracteres une ligne , qui ne contenoit
Jbuvent qu'une partie des Lettres
de l'Alphabet , quelquefois une Sentent
ce, 6c quelquefois le .nom du principal
des contractons $ & l'on separoitees deux
copies, en coupant la peau par le mi
lieu Se .le long de ces caracteres. A peu
pïès de la même maniere que l'on faiíòit
les premiers billets de banque , ait.
tpur desquels, on voyoit une partie de
pluíieurs traits entrelacez.
' Ces fortes de Chartes n'etoient gneres
;cn usage que pour les échanges , transac
tions Se accords entre deux ou plusieurs
Í>arties , Se l'on y marquoit la datte .de
a maniere qu'on avoit coutume de la
marquer dans le temps , Se les lieux où
elles éto.ient dressées. Lorsqu'il y avoit
plus que deux parties interessées au mê
me Acte , ôc que l'on étoit obligé d'en
faire trois ou quatre copies , on les écr re
voit en même temps fur la même peau ,
6c l'on écriyoitfcendeflture fur les lignes,
par
des jugemjenst aes iianrdcriox
B
.par lesquelles on les devoit separer.
i'Auteur de la Réponse , qui íâns
doute n'en a jamais vu íera bien aiíê d'en
voir ici une., & il y a lieu d'eiperer
qu'elle fera plaisir au.public., parce qu'el
les font aflez rares ; on l'a réduite de
grande en petite , & l'on n'en a fait co
pier que le commencement 8c la fin, ce
qui suffira pour en donner une idée , &
pour faire voir à 1J Auteur que. l'on dattoit
ces Chartes , .& que chaque partie
étoit une copie entiere du même Acte.
Cette piece dont l'original est dans les
Archives de l'Abbaye de Saint Bertin, a
pour endenture , ces mots DROGO
TARWANENSIS EPS. & c'est un
accord fait entre cet Evêque & l'Abbé
4e S. Bertin en l'année 1040.
.Suite de la Réponse.
D'ailleurs le sujet dont on composé ît la
Charte ne rouloit pour l'ordinaire que fur
des conventions qui n a voient sas besoin
d'un temps fixé , &c.
On íçait quels sent les íujets des
Chartes, c'étoientdes privileges accor
dez aux Villes, aux Eglises, &aux par
ticuliers par les Souverains, des dona
tions faites paf eux, ou par les Seigneurs,
des jugemens, des transactions , des
B baux
tt MERCURE DE FRANCE.
baux à ferme , &c. Voilà le sujet dont on
oompoíoit les Chartes. Or )e demaïde
/il ne rouloit c/ue Jur dus conventions cjui
n'avaient pas b"foin d'un temps fivé} La
chose est si claire qu' .1 íuffit d'y faire
faire attention. Nqus en avons dit aslez
pour faire voir que l'on .ne doit pas
ajouter foy indifferemment aux Chartes
non dattées , pour marquer en quel
temps , & quels lieux on les dattoit,
Se on ne les dattoit pas pour mon
trer l'antiquité desjsigriatjures., des sceaux
& des Notaires , Se pour .expliquer ce
que c'étoit que les Chartes parties. Nous
esperons que l'Auteur ne trouvera pas
mauvais que l'on ait un peu éclairci cette
matiere , & que l'on ne se íôit pas ren
contré de iòn sentiment.
Nous croyons que le public éclairé pen
sera comme nom furie merite de cette pier
Ce, il seroit a souhaiter cjjipn nous en
envoyât souvent de semblables : la Repu
blique des Lettres , & nôtre Journal en
particulier y gagneroient infiniment?
paru dans le Mercure du mois de No»
vemb're dernier à la question : Si les
Chartes qui ». font point dattées , mais
munies de Sceaux dé personnes illustres,
dont le temps n est pas douteux , pe «-
vent pajfcr pour certaines & autcntiquest
RE'PONS E.
JSppS^jl.'O» est d'avis que l'on y doit
P Ijjifj "lQ"Kr T°y , ©- qu'elles peuvent
|Éjg|gg| [ preuve qu'une choje est an.
Ay Cet
i MERCURE DE FRANCE
Cet avis , quoique bon en lui-même
est cependant trop vague , & trop gene
rai , les raisons fur leíquelles il est fondé
supposent le faux , &c l'on ne croit pas
qu'elles soient jamais admises par ceux
qui font un peu versez dans la connoisfance
des Chartes.
Il y a un certain milieu à garder en tou
tes choses. C'est un excès causé par l'igno
rance de l'Histoire Diplomatique , & des
coutumes des siecle? paslèz , de rejetter
abíolument toutes les Chartes qui manq
ent de dattes , de signatures ou de
sceaux ; & c'en est un autre de les admet
tre trop facilement- L'Auteur de la Ré
ponse > est tombé dans celui.ci , qui est
bien le moindre ; 8c M s de la Justice
tombent tous les jours dans l'autre , Se
en même temps condamnent' de faux des .
pieces , lesquelles avec les conditions
Îiu'ils exigent seroient entierement fauses
aux yeux des connoisteurs. Cette
erreur vient de ce qu'ils croyent que les
anciennes Chartes ne peuvent être bon
nes fans les formalitez des Actes d'au
jourd'hui , & qu'elles dévoient être dres
sées dans les siecles paísez comme elles
le fuit depuis un certain temps.
Il falloit donc distinguer les lieux, les.
temps, &: les personnes ; car íuivant ces. i
trois différents rapports il y a des Char
tes
JANVIER 1724. 3
tes fans dacte , auxquelles on peut, &
(on doic ajouter foy , & d'autres qui n'en
meritent aucune. Or l'on peut connoître
à peu près le temps d'une Charte
fins datte , par l'écriture , & par les per
sonnes qui y sont nommées. Pour les
lieux ils y sont presque toujours mar
quez.
Chez les Romains tout Acte étoit nul
lorsqu'il n'étoit point datté du jour &
du Coníulat , abfine die & Consule , &
par les Loix des Àllemans , {a) il étoit
défendu d'avoir égard à aucune Charte
qui n'étoit pas dattée du jour & de l'an.
C'est ce qui fait qu'on ne trouve qu'une
feule de leurs Chartes qui n'ait point de
datte : c'est la 55 .- dans Goldast. Ainsi
les Chartes faites dans les lieux où les
Loix Romaines , &ç celles des Allemans
étoient observées doivent être dattées ,
autrement il y a grande apparence qu'el
les sont fau fies.
Il n'en est pas de même de celles des
François & des Germains , on en trou
ve beaucoup fans aucune datte. (b) Ferard
en a raporté un grand nombre des
Ducs de Bourgogne , & même de quel
ques Evêques , 8c l'on env voit beaucoup
(a) Leges Aìamann. cap. 42. .
b) Pcrard , pag. r?*. tu, ait. *M. &
vantes.
A vj de
4 MERCURE DE FRANCE.
de pareilles dans les traditions de l'Ab
baye de Fulde.
Mais il faut faire attention que cet
uíàge ne s'est introduit que vers le 10e
siecle , & qu'il a fini dans le 13e & cela
principalement dans les Chartes: des
Seigneurs & des autres particuliers; car
pour celles des Rois il est très.rare (a)
d'en trouver íàns datte , au moins dans
les siecles dont nous venons de parler ,
excepté celles qui étoient de peu de con
sequence, & qui devoient être execu
tées fur le champ. Encore y marquoit.on
le plus souvent le mois , & même le
jour du mois. Il est vrai que les Char
tes des Rois de la premiere race n'ont
quelquefois pour toute datte que leur
nom , où les années de leur Regne. Il y
en a deux de cette premiere sorte dans le
supplement de la Diplom. p. 92. L'une
est de Clothaire IL & l'autre de Dagobert
I. & deux autres dans la nouvelle
Histoire de l'Abbaye de S. Germain ; (b)
sçavoir le Testament de Dagobert qui
n'a. ni datte, ni signature, &.une Charte
de Thierry IL
Au reste , il est aisé de distinguer les
Chartes des Rois Merovingiens de celles
(«.! Mabillon. Diplom. p. in.
(í) Histoire de l'Abbaye de S.. Germain , .
pieces juuir. p. 4, & suivantes.
des
JANVIER 1714/ f
des autres qui les ont suivis , & même
celles des particuliers de leur temps, de
celles des temps posterieurs ; car on ob
serva preíque toujours de leur temps
cette formule , datum qnod fecit menfìs
N. dies N_4»#o N. Regis nostri , cowïendio
in dei nomine feliciter. Ou bien
iatum fub die v. Kal. &c. ou enfin fait*
.ejjio fub die &c. Mais la premiere sornule
étoit plus commune aux Rois , &
a derniere aux particuliers. Cette soriule
varia dès les commencemens de la
euxiéme race ,. & du Regne même de
'epin. Au lieu de. regni nostri , on mit
°gni Domini , Sec. k la troisième persons
, Se au datum ou data ,.. &c On ajouta
1nm, &c. Il y eut ensuite bien d'autres
îangemens juiqu'à Charles le Gros qui
ajouta l'année de l'Incarnation. Os
:rroit peut.être ici avec plaisir toutes
s differentes formules des dattes & des
nelusions des Chartes des Rois, & des
rtkuliers juíqu'à nos jours ; mais ce
oit trop s'écarter, & ce peut être le
et d'une Diísertation particuliere , en
endant on renvoye à la Diplomatie
e , où l'on trouvera íuffisamment de
ai se satisfaire.
Il n'y a donc presque eu que les par.
jliers , quelques Comtes , Ducs , &
êques qui ayent manqué de mettre
une
4 MERCURE DE FRANCE.
line datce à leurs Chartes.' Il s'en voit
tìn grand nombre dans le Yrésor. des
Anecd. dans la nouvelle édition des Di
plômes d'Aub. le Mire, &fen particu
lier parmi les pieces justificatives de
l'Histoire de l'Abbaye de S. Germain,
entre autres une de la Comtesse Eve fans
datte, ni signature, laquelle a été don
née vers l'an 849. Cependant ce non
usage n'étoit pas absolument universel ,
même dans l'onzième &c douzième siecle,
puiíque l'on en voit plusieurs avec le
mois 8e le regne du Roy, d'autres avec
l'année du regne fans mois ni jour, &
d'autres enfin avec, regnante DominoNpomifiâante
NV Comite N. fans en mar
quer les années.
Il y a une chose qui peut servir à
donner quelque ordre à cette diversité si
confuse. C'est qu'il ne paroît dans ces
deux siecles prelqu'aucun Acte fans datte
que ceux que l'on appelle notices , &
qui commencent par ces mots , noti
fia , notum fit , noveritis notifico , 8c
les Statuts Sc decrets des Abbez, des
Evêques , ou de leurs Chapitrest On en
trouve beaucoup dans l'Histoire de Saint
Germain, & pas une n'est dattée avant
l'an 1191. peut.être que ceci n'étoit
particulier qu'à la France , puisque pa-
«eils Actes faits dans la Belgique (ont
presque
JANVIER 1714. 7
preíque tous dattez , au moins ceux qui'
font raportez dans la nouvelle -édition/
d'Aubert le Mire*
Quant aux Diplômes de nos Rois il.
y en a plusieurs, principalement depuis'
le commencement de l'xi. siecle juíqu'à
la fin du 13e qui font dattez de l'année
de l'Incarnation , íâns mois , ni jour ; Se
d'autres avec le mois íans lejour. Tels.
íònt entre autres deux de Philippe Au
guste, raportez dans Perard , page 340..
mais l'on n'en trouve aucun fans quel
que marque chronologique.
Devant le regne de Charles le Gros
les Chartes des particuliers íe dattoient eiv
Italie du regne de l'Empereur, du Roy,
du Comte , Se en même temps de l'indiction.
Sous íon regne on commença à y
ajouter l'année de l'Incarnation , princi
palement en Allemagne ; (a) ainsi qu'il
paroît dans lesTrad. de Fulde, page 509..
où il y a une Charte dattée de l'an
783/ & deux autres de 800. & 802..
Mais ce ne íònt pas encore les premieres
que l'on ait dattées de l'an de i'Jncarna.
tion, puisque le continuateur du Reciieil/
des Diplômes d'Aubert Ie Mire raporte s.
page 1 1 2Ó. deux Chartes de Pépin le
Gros dit d'Heristel , dattées de l'an 687.
(a) Mabìl. Diplom. p..
S MERCURE DE FRANCE:
Se <?$> i. de l'Incarnation indict, 4e Le 5;
de sa Principauté , &c.
Il y a cependant beaucoup lieu de ne
íè pas trop fier à ces deux .Chartes pour
plusieurs raisons qui ne sont pas de nôtre
ïùjet , du. moins pour les dattes qui pourroient
y; avoir été ajoutées après coup.
En voilà aílez pour donner une idée
des Chartes .dattées , & non dattées, &
de celles qui ne le font , pour ainsi dire ,
qu'à demi. On voit par là quand elles
peuvent faire foy , étant íàns datte , &
qui étoient les personnes qui negligeoient
de les marquer, Examinons à present les.
raisons fur leíquelles l'Auteur de la Ré^.
ponse fonde sa décision-
Suite de la Réponse. .
Car la Charte , quoique faite pour la. '
même fin , n'approchoit cependant pas de
ce que nous nommons aujourd'hui un ASte,
en ne s'en est servi que tant qu'il n'y
Ai/oit point , ou très .peu de Notaires , &c.
Premierement tout ceci ne dit rien , &
ne regarde pas la question proposée , il
s'agit des Chartes non dattées , & non
pas de celles qui n'a voient ppint de si
gnature.
Secondement, on ne voit pas pour
quelle raison l' Auteur de la Réponse
met
J A N VIE t' Vit f
met la Charte tout au.dessous de l'Acte
de Notaire. U est vrai qu'on n'y obfèr-
Voit' pas les formalitez d'aujourd'hui ;
mais celles dont on se servoit ne la
rendoient pas moins , pour ne pas dire
plus authentique que les Actes de No
taires. S'il s'agit des Chartes de nos Rois>
c'étaient leurs Referendaires ou Chan
celiers qui en étaient les Notaires j fous
la premiere race les Princes les lìgnoient
preíque toujours., £c on y appofoit le
cachet de leurs anneaux , & eníuite leur«
sceaux ; lôus ceux de la deuxième. Le
Prince les íìgnoit de son Monogramme ,
& en generai on peut dire qu'ils n'accordoient
, Se ne faiioient presque point ex
pedier des privileges que lorsqu'ils
tenoient leurs cours plenieres, ou ea
presence des Grands Officiers de la Cou
ronne, leíquels sont toujours nommez ,
Sc signent dans les Chartes des Rois de'
la troisième race , depuis Louis le Gros.
(a) D'où vient cette formule observée'
dans. la fuite , Aílum Parifiis , &c. astan~
tïbus in Palatio nostr'o quorum nominafubtitulata
futit & signa. Signum N. Da.
piferi S. N. Const-abulariï Baftculario
nullo S. N. Camerarii data per manum
lí. Cancellarii , ou vacante cancellaria.
S'il s'agit des Chartes des particuliers,'
(«) Mabil. Diplom..p. 104..
outíe.'
lé MERCURE DÉ fRANCÊ.-
Outre qu'elles étoient preíque toujours
écrites par des Notaires , leíquels quoique
íàns privilege exclusif étoient veriblement,'
8c pas leúf profeísion hommes3
publics elles étoient ordinairement don*
nées , relues 8c signées dans des assem
blées publiques , In mallo publico. In gtr
nerali placito. In convensu Nobiliwn, &C
(a) Le Seigneur les faiseít publier de
vant íes pairs , Se devant ses Vassaux quï
étoient obligez d'être fa caution y il étoit'-
reciproquement la leur ; mais d'une au
tre maniere , ne s'engageanc seulement
qu'à les contraindre d'executer leurs
conventions , 8c les autres- , obligeant
pour leur ^Seigneur , 8c leurs corps &
leurs biens. Ç'est.là cette servitude dont
il est. parlé dans íes Chartes.
Troisièmement y les Notaires publics
étoient bien plus anciens & bien plus.
communs que l'Auteur ne l'a crû ; car
outre qu'il en est parlé dans les Loix des
Ripuaires fous le nom de Chanceliers^
dans les Chartes de Childebert , & de
S. Germain., Evêque de Paris (c) pour
l'Abbaye de son nom; Charlemagne dans
le j. Capitulaire de l'an 8oj. ordonne,
(») Bouilíard , Histoire de l'Abbaye de Saint
Germain , pieces justificatives , page 7. ' .
(b) Ad fidejujfores tollendos.
\c) Histoire de S. Germain, pages i. & *.
ut
"I A N V í Ê tí tfn. fi
.Ht mijfì nostri scabînios Advocatos yNotariosperfîngiila
loca éligant s tkc. Depuis
ce temps ilj y en a toujours eu,& en
aísez grand nombre y les Evêqtìes, les
Abbez 8c ks Seigneurs avoient ordinai
rement leurs Notaires , ou Chanceliers
qui servoient pour tous leurs Vaslàux ,
car il ne leur étoit pas permis de faire
des Chartes , c'est ce qui fait qde celles
áusquelles ils sont interessez soit pour
vente ou donation aux Eglises , sont tou.*
jfours au nom du Seigneur y qui donne ?
ou qui vend comme proprietaire , après.
avoir marqué qu'un tel ion Vassal, refîgnavit
in manus suas , &c.
Ainsi les Chartes ne se faisoient point
par le premier venu > comme l'Auteut
l'insinuë , mais par des Chanceliers oit
Notaires qui étoient publics. Et ces Offi
ces étoient exercez communément paf
des Clercs , ou des Moines q»i étoient
les moins ignorans de ces temps.là , Si
qui servoient en même temps de Cha
pelains à ces Seigneurs.
Il étoit si necessaire pour k validité
des Chartes qu'elles fuisent écrites par'
des personnes , dont le nom & l'écris
ture fu/sent si connues , qu'elles fuisent
Censées personnes publiques que le Pape
' Innocent II í. (a) regarde comme nut
1*1 Innoc.III. liw í. Epist- 3 f
a Mercure de francs.
«n privilege de l'Empereur Henry , quia
nec erat publica manu conseílmn j nef
figillum habzbat ambenticum.
Suite de la Réponse.'
Lu negligence avoit tellement pris le
dessus , que les personnes de la. premiere
difiinclion ne /pavoient pas assez, bien
écrire poursigner leur nom , ce qui a dvn*
né lieu aux sceaux , &c'
Ce n'est point à l'ignorance d'écrire
oU de signer que l'on doit l'usage d'ap
poser des sceaux, Se des cachets fur les
titres. Cet uíage est de l'antiquité la plus
íçculée; Lorsque Pharaon donna à Jo
seph le Gouvernement dé l?Egypte , (a)
tulit a-nnulum de- manu- sua & dedit eum
in manu cjus.. Les Lettres d'Assuerus ,.
Roy des Perses & des Medes , accordées'
à Esther en faveur des Juifs, (bj; anftulo
ipfius obsignata funt & mijst per
veredarios ,-Sc.c. Lefc Romains s'en fer-'
voient aussi , ainsi que les Historiens, &
les cabinets des curieux qui en íorit rem
plis en font foy. Et nos premiers Rois',
dont il s'agit ici plus particulierement
ont eu des cachets , aufquels les sceaux
ont succedé. On garde encore dans le
(a) Genes. 41.
(*} E/lhexé c l' "
cabinet^
î A.NViER 1714. 13
cabinet du Roy l'Aneau de Childeric,
pexc du grand Clo.vis. Mais .ce qui fait
voir que ce n'est point pour íuppléer à
la íignature (a) qu'on s'est mis a ícelei
les titres ; c'est que les Chartes ictus la
premiere race de nos Rois , sont preíque
toutes ignées &c sce.léçs. -Et non.íèuler
ment .celles de nos Rois , mais encore
çelles des Evêques & des Seigneurs par*;
ticuliers.
Il est vrai qu'il y a un temps & de»
lieux toìi les sceaux suppleoient aux si
gnatures i mais l'uíàge de signer & d?
sceller en même temps était bien plu?
ancien. C'est ce qui paroît certain parle
témoignage de Gregoire .de Tours qui
dit {&) que Mummole envoyé par le
Roy Theodebert vers l'Empereur Justir
nien , étant à l'extrémité fit faire son
(a) Von peut ajouter que les sceaux supfleoient
encore moins aux dattes, & que
Auteur de la Lettre écrite d Evreux dans le
Mercure d'XDcìpbre 1713. quoique bien mieux
au fait des Chartes que celui.ci , n'y a pas fait
allez d'attention , lorsqu'il a avance que dans
l'onzième & douzième siecles , il n'y avoït sas
une Charte qui n'eut son sceau , &c. il est
pourra voir un grand nombre fans dattes &
fans sceau dans les Recueils des Chartes ; 8ç
en particulier dans les pieces justificatives dé
la nouvelle Histoire de l'Abbaye de Saint
î.Germain. '
(b) Greg. Tftrpn. de Gltr.MarU lib. 1. cxti
teftar.
f 4 MERCURE DE FRANCE,
íestament., & le fit munir de signatures
.& de íceaux- Fecit testamentum fuum sertht
, munitum fubfcriptionibus ac figillis ,
&Cz. Dans le siecle suivant Berthramn ,
Evêque du Mans fit mettre siir son testa
ment les signatures., 8c les sceaux de íépt
personnes illustres. Septem virorum honestorum
fubscriptionibus & figillis.
Charlemagne signe & scelle la Charte
{a) pour l'Abbaye de S. Germain , manu
nostra fubfcriptionis fabter decrevimus robarare
, & de amuio nofiro fubter figillare.
Chez les Anglois même les íèeaux , quoi
que communs à tout le monde, au moins
depuis Guillaume le Conquerant , ne tenoient
pas lieu de signatures , mais bien
de Tabellions qui n'y étoient pas en usa
ge loríque ce Prince conquit l'Angle
terre ; cfKoHiam Tabellionum ttfus ( dit
(b) Matthieu Paris ) in eo regno non httbebamr.
Cependant il faut convenir que
depuis Gregoire de Tours jusqu'à l'oneiéme
siecle , il se trouve bien des Char
tes des Rois , d'Evêques & de Seigneurs
qui n'ont aucunes marques de cachets ,
ni de sceaux. Or la veritable marque
qu'une Charte ait été scellée , n'est pas
qu'il y ait des trous, par lefquelj leî
(a) Boiiillard. Hist. de l'Abbaye de S. Ger
main, p. u,
(i) Math. ïarìs. ad an, 1237.
lac»
JANVIER 1714. ts
|acs ou cordons du sceau auroient été
pastez , ou quelques restes de cire appli
quée dessus ; mais c'est loríqu'il est énon.
jcé dans l'Acte qu'elle* été ícellée. Car
sans cela les sceaux íèroienc une preuyg
de fausseté.
Suite de la Réponse.
L'on se servoit dans le même temps des
ghartes parties ou coupées , c'est.à.dire
qu'après avoir fait une Charte , on la
fioupoit en pieces , dont chaque contrac
tant en prenoit une pour la representer lors
de l'execution des conventions , Sec.
Ceci est dit d'une maniere si décisive,
-qu'on croiroit que tout cela est vrai , &
que l'Auteur a vu de ces Cljarces parties ;
jnais il permettra que l'on assure qu'il
n'en connoît que le nom , & qu'on n'a
jamais coupé en pieces Jes Chartes com
me il s'imagine.'
Les Chartes parties ou coupées tirent
leur origine des Chartes appellées dans
les formules (a) de Marculfe Chant pa~
rida & paricuU , parce que c'étoient des
doubles copies d'un même acte fait entre
deujç parties égales inter pares , ou plutft
parce qu'elles étoient de pareille for
me, grandeur & écriture. A ces Char-
(a) Marculfi formuis. , lib* z.
tes
itf MERCURE DE FRANCE.
tes succederent les Chartes parties ow
.coupées , autrement Chartes endentées,
Charte indentatA , ou idetitat* , que l'on
appella dans les H. 11. Se 1.3 e. siecles
Chkographes ou CirographeS. C!étpient
auflì deux copies d'un même acte écrites
fur une même peau , & de même ma
niere, entre lesquels on .écrjvoit en
grands caracteres une ligne , qui ne contenoit
Jbuvent qu'une partie des Lettres
de l'Alphabet , quelquefois une Sentent
ce, 6c quelquefois le .nom du principal
des contractons $ & l'on separoitees deux
copies, en coupant la peau par le mi
lieu Se .le long de ces caracteres. A peu
pïès de la même maniere que l'on faiíòit
les premiers billets de banque , ait.
tpur desquels, on voyoit une partie de
pluíieurs traits entrelacez.
' Ces fortes de Chartes n'etoient gneres
;cn usage que pour les échanges , transac
tions Se accords entre deux ou plusieurs
Í>arties , Se l'on y marquoit la datte .de
a maniere qu'on avoit coutume de la
marquer dans le temps , Se les lieux où
elles éto.ient dressées. Lorsqu'il y avoit
plus que deux parties interessées au mê
me Acte , ôc que l'on étoit obligé d'en
faire trois ou quatre copies , on les écr re
voit en même temps fur la même peau ,
6c l'on écriyoitfcendeflture fur les lignes,
par
des jugemjenst aes iianrdcriox
B
.par lesquelles on les devoit separer.
i'Auteur de la Réponse , qui íâns
doute n'en a jamais vu íera bien aiíê d'en
voir ici une., & il y a lieu d'eiperer
qu'elle fera plaisir au.public., parce qu'el
les font aflez rares ; on l'a réduite de
grande en petite , & l'on n'en a fait co
pier que le commencement 8c la fin, ce
qui suffira pour en donner une idée , &
pour faire voir à 1J Auteur que. l'on dattoit
ces Chartes , .& que chaque partie
étoit une copie entiere du même Acte.
Cette piece dont l'original est dans les
Archives de l'Abbaye de Saint Bertin, a
pour endenture , ces mots DROGO
TARWANENSIS EPS. & c'est un
accord fait entre cet Evêque & l'Abbé
4e S. Bertin en l'année 1040.
.Suite de la Réponse.
D'ailleurs le sujet dont on composé ît la
Charte ne rouloit pour l'ordinaire que fur
des conventions qui n a voient sas besoin
d'un temps fixé , &c.
On íçait quels sent les íujets des
Chartes, c'étoientdes privileges accor
dez aux Villes, aux Eglises, &aux par
ticuliers par les Souverains, des dona
tions faites paf eux, ou par les Seigneurs,
des jugemens, des transactions , des
B baux
tt MERCURE DE FRANCE.
baux à ferme , &c. Voilà le sujet dont on
oompoíoit les Chartes. Or )e demaïde
/il ne rouloit c/ue Jur dus conventions cjui
n'avaient pas b"foin d'un temps fivé} La
chose est si claire qu' .1 íuffit d'y faire
faire attention. Nqus en avons dit aslez
pour faire voir que l'on .ne doit pas
ajouter foy indifferemment aux Chartes
non dattées , pour marquer en quel
temps , & quels lieux on les dattoit,
Se on ne les dattoit pas pour mon
trer l'antiquité desjsigriatjures., des sceaux
& des Notaires , Se pour .expliquer ce
que c'étoit que les Chartes parties. Nous
esperons que l'Auteur ne trouvera pas
mauvais que l'on ait un peu éclairci cette
matiere , & que l'on ne se íôit pas ren
contré de iòn sentiment.
Nous croyons que le public éclairé pen
sera comme nom furie merite de cette pier
Ce, il seroit a souhaiter cjjipn nous en
envoyât souvent de semblables : la Repu
blique des Lettres , & nôtre Journal en
particulier y gagneroient infiniment?
Fermer
Résumé : REMARQUES sur la Réponse qui a paru dans le Mercure du mois de Novembre dernier à la question : Si les Chartes qui ne sont point dattées, mais munies de Sceaux de personnes illustres, dont le temps n'est pas douteux, peuvent passer pour certaines & autentiques.
Le texte examine la validité des chartes historiques non datées mais portant des sceaux de personnes illustres. L'auteur du Mercure de France critique l'avis selon lequel ces chartes peuvent servir de preuve authentique, le jugeant trop vague et général. Il dénonce l'ignorance historique qui conduit soit à rejeter toutes les chartes sans dates, signatures ou sceaux, soit à les accepter trop facilement. Le texte insiste sur l'importance de distinguer les lieux, les temps et les personnes pour évaluer la validité des chartes. Chez les Romains et les Allemans, les actes devaient être datés, tandis que chez les Francs et les Germains, nombreuses étaient les chartes sans date. Les chartes royales étaient généralement datées, sauf celles de peu d'importance ou exécutées immédiatement. En revanche, les chartes des particuliers, des comtes, des ducs et des évêques étaient souvent sans date. Le texte mentionne les différentes formules de datation utilisées par les rois mérovingiens et leurs successeurs. Les chartes sans date étaient souvent des notices ou des statuts d'abbayes et d'évêques. À partir du XIe siècle, les diplômes royaux étaient souvent datés de l'année de l'Incarnation, sans mois ni jour. Le texte critique également l'auteur d'une réponse pour avoir sous-estimé l'authenticité des chartes, souvent rédigées par des notaires ou des chanceliers publics et signées en assemblées publiques. Les chartes étaient considérées comme valides si elles étaient écrites par des personnes reconnues, dont le nom et l'écriture étaient connus. Par ailleurs, le texte souligne que les sceaux et les signatures étaient utilisés conjointement pour authentifier les actes. Des exemples historiques, comme ceux de Grégoire de Tours et de Charlemagne, illustrent cette pratique. Les chartes parties ou coupées, utilisées pour les transactions entre plusieurs parties, étaient écrites sur une même peau et séparées par une ligne de caractères ou une sentence. Le texte conclut en affirmant que les chartes non datées ne doivent pas être utilisées pour déterminer l'antiquité des signatures, des sceaux ou des notaires, et qu'il est important de comprendre le contexte des chartes parties.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 24-34
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure pour servir de réponse aux Remarques sur les figures du Portail de l'Eglise de l'Abbaye S. Germain
Début :
Vous avez inseré, Messieurs, dans vôtre Journal du mois de May de [...]
Mots clefs :
Clotaire, Saint-Germain, Abbaye, Église, Portail, Figures, Dom Bouillart, Couronnes de gloire, Patron, Tombeau
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure pour servir de réponse aux Remarques sur les figures du Portail de l'Eglise de l'Abbaye S. Germain
LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure
four servir de réponse aux Remarques
fur les figures du Portail de CEglist
de CAbbaye S. Germain.
VOus avez iníèré, Messieurs ., dans
vôtre Journal du mois de May de
l'année derniere , les Remarques d'un'
Auteur Anonyme, fur les figuras du
grand Portail de VEglise Saint Germain
des Pre^, par leíquelles il prétend dé
truire le sentiment du R. P. Dòm Jean'
Mabillon', qui' dit dàns ses Anrtales (a);
que l'£glise de S. Germain a été bâtie
Se fondée par Cliildebert L. & que les'
figures qui íònt au Portail de la même.
Eglise dix coté gauche en entrant , font
S. Germain , Clovis , Sainte Clotilde Se
Clodomir , & au côté opposé , Chilperic,
Childebert , Ultrogothe ,. íà femmes &
Clotaire î.
L'Auteur dés Remarques refute ausii
Dom Thierry Riíinard , qui prétend à
la fin de son Edition de S. Gregoire (b)
de Tours / que les figures qui font à
gauche en entrant representent Saint
(a) Annal. Ben. tom; i. pag. 169.
{í) Gieg. Turpn.
Remv>
JANVIER 1714. ; 2;
Remy , Clovis , Sainte Clotilde & Clo.
domir , Se que celles qui sont à droite ,
sont Thierry , Chlldebert , Ultrogoche
8e Clotaire.
Ces deujr sentimens ne sont pas du
goût de l'Auteur , parce qu'il prétend
l p que c'est Clotaire , & non pas ChHdebert
, qui a achevé de bâtir l'Egliíe,.
& il cite pour ses garants l'Auteur de
la vie de S. Droctovée, (a) Se l'Histoire
interpolée d'Aimoin ^ í. . 2 < cv 29. Se. 3 6 .
& 1. 3. c }1.
2° Il ajoute que ce Portail étant bien
Í>osterieur à la construction de l'Eglise , .
es figures qui y sont repreíentées ne
sont point celles que Dom Mabillon &
Dom Ruinard ont prétendu ; mais cel
les de S. Germain, de Pepin, de Bertrade
, íâ femme ., de Charlemagne Se
Carloman leurs fils , de Childebert , &
d'Ultrogothe , fa femme , & de Clotaire.
Voici les raisons qui confirment l'Au-.
teur dans cette idée. 1 * La donation du.!
Domaine de Palaiíëau , Se de ses dépen
dances faites à' l'Eglise de l'Abbaye par
Pepin , le jour de la Translation de Saints.
Germain y Se confirmée par Charlema
gne en 77 9' Cette Eglise , selon lui ,
eut un nouveau Patron en même temps:-
que la France eut des Rois d'une nou-
(4) Si. OrA. S. Btned. tMt. r.
Bt rell#
ié MERCURE DE FRANCE.
velle race , & les Moines de l'Abbaye J.
pour éterniíèr la memoire d'un si grand
changement , firent construire un Por
tail, où ils placerent les figures de ces
Princes , en conservant toujours la mé
moire de leurs premiers Fondateurs. 2*'
Le peu de vrai.semblance que l'on ait
mis à la porte d'une Eglise les Statues du
pere , de la mere & des freres du Fon
dateur. Et a quelle porte £'Eglise , dit-il
a..t'qn representé ainft des genealogies ?
3° Les Couronnes de gloire qui font
derriere la tête des sept figures , ne íê
mettoient qu'à ceux qui étroient décedezs .
& que l'on croyoit dans la beatitude t
par consequent celui qui n'en a point ne.
peut être que Charlemagne qui vivoit
alors. 4° La difficulté de trouver des^
Couronnes du sixième siecle semblables ;
à celles' que portent les figures du Por-'
tail de Saint Germain.. Enfin le peu de'
eertitude que le tombeau deFredegonde^
qui a une semblable Couronne , soit veri- :
tablement d'elle.. .
Ce íônt là Meísieurs les principaux.^
argumens que l'Auteur des Remarques.
propose dans vôtre Journa.l contre les :
ientimens de Dom Mabillon , & de Dom 1
Huinart au íujet de ces figures. Il seroit?
k- íouhaiter qu'il eut apporté des autorir'
ter tirées de bons Auteurs , au lieu de
Ï'AN VÌ E R 1724. 27
íèá íimples. conjectures qui ne peuvent
fSrvir de preuves dans les difficultez
dont il est ici question.
Dom Jacques Bouillart , qui vient de
mettre au jour l'Histoire de l'Abbaye de
Saint Germain des Prez a répondu dans
íon ouvrage aux objections que l'on
Vient deráporter. Il prouve d'abord que
l'Auteur des Remarques s'est trompé
considerablement , en citant la vie de
Saint Droctovée , & l'Histoire interpo
lée d'Aimoin , & qu'il n'y a pas un seul
mot dans les endroits par lui citez où il
soit marqué que l'Egliíê fut achevée par-
Clotaire. Dom Bouillart prouve au con
traire par les mêmes Auteurs , que Chil.
debert acheva cet Edifice avant ía mort,
& que Saint Germain la dédia , à la sol
licitation de Clotaire , le jour même des
funerailles de Childebert.
Pour ce qui est du Portail , lé même'
Auteur soutient qu'il est aufli ancien que
l'Eglise : fa si uation sous la grosse tour,
faiíant corps avec elle , le goût du temps , .
le jugement qu'en ont porté juíqu'à.
present les personnes /ça vantes dans la
connoissance des anciens monumens , sont
des autoritez plus que suffisantes pour'
prouver ce qu'il avance..
L'Historien dë Saint Germain répond5
aussi à l'Aùteu.X- des Remarques , sor ce
B vj qu'il
2 8 MERCURE DE FRANCE:
qu'il avance que l'Egliíe de l'Abbaye
eut uh nouveau Patron , après la Trans
lation de Saint Germain. Il avouè que
Pepin donna alors le Domaine de Palaiseau,
& ses dépendances avec une en
tiere franchise de tous peages , Se que
cette donation fut confirmée par Charle.
magne en 779. mais. il nie que l'Eglise
ait eu dans cette occasion un nouveau.
Patron, & que les Moines de S. Ger
main ayent fait construire un Portail pour
y placer les Statues de S. Germain , des
Pepin , dç Bertrade , &c. pour éterniser
la memoire. du;. grand changement arrivé
en France. Il prouve d'une maniere so
lide & convaincante que l'Eglise, quoi
que dédiée en l'honneur de Sainte Croix,,
& de Saint Vincent, a eu aussi: le nom
de Saint Germain dès la mort du même
Saint, à cause des frequens. miracles que
Dieu operoit à son tombeau ,.nom qui lui
est resté dans les siecles^suivans. II cite
pour ce sujet le testament de Bertrant ,
í ou Bertieram Evêque du Mans , S. Gre
goire de Tours , Saint Ouen , Archevêque
de Rouen qui a écrit la -vie de Saint
Eloy, l'Auteur de la vie dé Sainte Batilde
, & plusieurs Chartes.très.ancien
nes , qu'il a mises parmi les preuves à
la fin de son Histoire. Ilisoutient de plus
que l'Eglise dc.S. Germain n'a eu que
deux
JANVIER
deux dédicaces , la premiere faite par
Saint Germain , & la seconde par le
Pape Alexandre III. en ii6}, Se que.
dans ces deux dédicaces il n'est fait men
tion que de. Sainte Croix & de Saint Vin
cent. Or comme l'on ne donne un Patron
aux Eglises que dans cétte ceremonie y
Dom Bouillart demande à l'Auteur de*
Remarques qu'il lui faste voir. une autre
dédicace faite en 7f4-. ou. environ ,
dans laquelle l'on ait changé le nom de
Saint Vincent , ou ajpûté celui de Saint'
Germain-
Quant à. la íècoside objection , qu'il .
n'est pas vrai-íèmblable que l'on ait pJa--
oé à la porte d'une Eglise les. Statues du
pere -, de la m ere & des freres du Fon-.
dateur1. Dom Bouillart répond que cet
n'est pas une chose inusitée, puisque l'on.
en voit dé íemblables au Portail de Nô
tre.Dame la Répostetdènt l'Auteur mê
me des Remarques fait mention , Se dont
ilparoît reconnoître l'antiquité,
Enfin l' Auteur. de l'Histoire de Saint'
Germain dit que l'Auteur des Remar
ques fait une question inutile, loríqu'il.
demande à' quelle porte d'Eglise a-t'om
representé ainsi des genealogies ? puis
qu'il les admet lui-même dans le Por
tail de S: Germaini en disant qu'il s'ima*
fifre ». voir Pepin , Bertrade tjâ femme ,
Jfe* MERCURE DE FRANCS.
Charlemagne & Carloman ses fils. N'estce
pas là en eiíèt une genealogie à íà
maniere, & suivant ces propres idées.
Un des principaux argumensde l'Au
teur des Remarques est comme ori
IV déja dit, que ces Statues du Por
tail de Saint Germain ont des Cou
ronnes de gloire , qui ne se mettoient
qu'aux' personnes décedées , que l'on
croyoit dans la beatitude , d'où il conclut
que la huitième Statue, qui n'en a point,
represente Charlemagne qui vivoit en
core alors , & par coníequent que le Por
tail de Saint Germain n'a été construit
que de son temps.
Dom Bouillart lui répond que les
Couronnes de gloire se mettoient aux vi-
Vans aussi bien qu'aux morts. , d'où il
conclut que ceux qui font representez .
au Portail de Saint Germain , pou voient
être vivans dans le temps de là construc
tion. Il donne plusieurs exemples de cetusage.
fa) L'Empereur Trajan est repre
senté deux fois dans l'Arc de Constantin,.
2ui est à Rome , comme vivant avec une'
louronne de gloire derriere fa tête.'
(i) Dans les siecles suivans l'Empereur'
(a) V. l'Antiquité expliquée, &c' tòm. ti.
$ 186. & tom. 3. pagg. 31J. 330. & tom. v
p. 167.
{b) iiidt Supplement.
y-alen
t
y á n v nr r ry.»^ f*
Valentinien II. paróît avec une Couron
ne de gloire faiíant des largeíses au peu
ple. On voit auflì des Medailles (#)fra*
pées du vivant des Empereurs Justin , <
Justin le jeune , Maurice , Phocas , & de
quelques Imperatrices , où ils font re
presenter de même. Il ajoute après M. le
Blanc dans son Traité des Monnoyes,
que, les Gaulois ayant été' íubjuguez par
les premiers Rois de la Monarchie Fran
çoise , ont gardé pendant quelque temps'
les usages des Romains leurs derniers
maîtres. Les Rois même de lá premiere
race les ont auflì conservez, principale
ment dans leurs Monnoyes. Ainsi il ne
faut pas s'étònnersi dans ks' temps de la
premiere race l'on mettait des Courons
ries de gloire dérriere la tête dés Rois,
Si même des Evêques qui étoient encore
en vie. L'on en trouve une preuve dans
le premier tome des Annales de Dom
Mabillon , f b) où il est: fait mention de'
S. Armand , Evêque dé Mastric , lequel.
fft son testament en presence de Rieul,^
Archevêque de Rheims , de Mommolen,'
Evê qùe deNoyon, de Vendicien de Cam.
bray ', de Bertin ; Abbé de Sithiu , Se des
Prêtres Jéán & Baudemond. Ils ont tous
des Couronnes de Gloire derriere leurs
f» Numism. Imp. Rom. ulhselm.Sfiwiuri 2-.
>z. MERCURE DE FRANCE.
têtes , comme on le peut voir dans It
planche que Dom Mabíllon' a Fait gras
ver , laquelle a été tirée des anciens. monumens
de l'Abbaye de & Amand.' Ce
íçavant homme fait là - dessus la mê
me obíervation que l'Auteur des Re
marques r5c il s'étonne que ces figu
res portent des couronnes de gloire , quoi
que ceux qu'elles representent fussent en
core vivans. L'on doit donc conclure ne-.
cessairement de ces exemples , que l'on
mettoit íouvent des couronnes de gloire
aux personnes vivantes , & que ce n'est.
pas une preuve que ceux qui íònt repre
sentez au Portail de S. Germain , fus
sent decedez.
Dom Bouillait ajoute: Y a ) l'Auteur
des Remarques admet , fans y penser , k;
même chose ; car en mettant la construc
tion du portail dans le huitième siecle ,.
il dit que les Religieux. de S. Germain le
firent faire pour éterniser la mémoire du
grand changement arrivé en France, en'
754. lorsque le corps de S. Germain fut
transferé, què l'Eglise eut un nouveau
Patron , Se que Pepitvla combla de biens.-
Or s'il est vrai que les figures du Por
tail representent Pepin, fa femme & ses
Énfans , l'Auteur des Remarques doit
convenir que l'on donnoit des couronnes
( * ) Híst. de S. Gertiwpag, 30*.
1
Janvier 17I4." :W
3è gloire aux Rois & auxpersonnes illus
tres, lorsqu'elles vivoient.j puiíque Pepin
& les Princes qu'il íoutient être re1.
preíentez par ces- figures ,- vivoient en
754. 8c que cependant ils ont des' cousonnes
de gloire , ou des nimbes derriere
leurs têtes. Il. est inutile de dire que Gharlemagnen'en
a point , parce qu'il étoit
encore vivant, ^& que les autres étoient
morts. Il en avdit auslì ; mais celui qu'il
avoit est tombe dans la fuite, ou pour
n'avoir pas. bien été attaché,' ou pour
avoir été rompu >. en eífet on voit encore
derriere íà tête un crampon de fer qui le
íetenoit t & il estcouché horiíôntalemerjt
contre la muraille.
Il ne s'agit p.lt»s que de la difficulté que
iorrrîe lf Auteur des Remarques /qui est
defaire voir des couronnes du íixième
siecle íemblables à celles que portent les.
figures' du Portail de S. Germain , & que'
le tombeau de Fredegondc qui Jt une
semblable couronne y soit Veritablement
d'elle. C'est ce que Dom Boùillart déve-
Ibpe avec solidité , en diíànt d'abord que
les anciens Historiens ont fait mention de
la íépulture de Fredegende dans l'Eglise
de S. Vincent, maintenant de S. Germain
des Prez. Il lë prouse ensuite par la situa
tion 8c la distinction des tombeaux des.
Rois 8c des Reines de la premiere race »
f4 MERCURE DE FRANCE;
inhumez dans la' même Egliie,tlonc les
.inícriptions , quoique moins anciennes T
.(ont restées julqu'en 1656. par la tra
dition des Religieux de l'Abbaye , & par
le jugement des períônnes les plus éciar*.
rées dans l'Antiquicé , qui ont regardé
le tombeau de Fredcgondë , comme uQ
monument aussi ancien qu'elle. il répond
enfin aux objections que l'on pourroit fai
re au sujet des Fleurs.de.lys qui font à la
couronne 8c au Iccprre de cette Reine ',
&c rapporte quelques exemples qui font
voir que les fleurs de lys étoient en usage
íòus les Rois de la premiere race s d'où il
Conclut que le tombeau & la couronne de
Frédegoncle «'tant aussi ancien qu'elle, les
couronnesdes statues du Portail de S. Ger
main sont aussi anciennes que & construc^
tion & du sixième siecle.
Je fuis , Messieurs , Sec1
A Paris le 13. Janvier 1714»'
four servir de réponse aux Remarques
fur les figures du Portail de CEglist
de CAbbaye S. Germain.
VOus avez iníèré, Messieurs ., dans
vôtre Journal du mois de May de
l'année derniere , les Remarques d'un'
Auteur Anonyme, fur les figuras du
grand Portail de VEglise Saint Germain
des Pre^, par leíquelles il prétend dé
truire le sentiment du R. P. Dòm Jean'
Mabillon', qui' dit dàns ses Anrtales (a);
que l'£glise de S. Germain a été bâtie
Se fondée par Cliildebert L. & que les'
figures qui íònt au Portail de la même.
Eglise dix coté gauche en entrant , font
S. Germain , Clovis , Sainte Clotilde Se
Clodomir , & au côté opposé , Chilperic,
Childebert , Ultrogothe ,. íà femmes &
Clotaire î.
L'Auteur dés Remarques refute ausii
Dom Thierry Riíinard , qui prétend à
la fin de son Edition de S. Gregoire (b)
de Tours / que les figures qui font à
gauche en entrant representent Saint
(a) Annal. Ben. tom; i. pag. 169.
{í) Gieg. Turpn.
Remv>
JANVIER 1714. ; 2;
Remy , Clovis , Sainte Clotilde & Clo.
domir , Se que celles qui sont à droite ,
sont Thierry , Chlldebert , Ultrogoche
8e Clotaire.
Ces deujr sentimens ne sont pas du
goût de l'Auteur , parce qu'il prétend
l p que c'est Clotaire , & non pas ChHdebert
, qui a achevé de bâtir l'Egliíe,.
& il cite pour ses garants l'Auteur de
la vie de S. Droctovée, (a) Se l'Histoire
interpolée d'Aimoin ^ í. . 2 < cv 29. Se. 3 6 .
& 1. 3. c }1.
2° Il ajoute que ce Portail étant bien
Í>osterieur à la construction de l'Eglise , .
es figures qui y sont repreíentées ne
sont point celles que Dom Mabillon &
Dom Ruinard ont prétendu ; mais cel
les de S. Germain, de Pepin, de Bertrade
, íâ femme ., de Charlemagne Se
Carloman leurs fils , de Childebert , &
d'Ultrogothe , fa femme , & de Clotaire.
Voici les raisons qui confirment l'Au-.
teur dans cette idée. 1 * La donation du.!
Domaine de Palaiíëau , Se de ses dépen
dances faites à' l'Eglise de l'Abbaye par
Pepin , le jour de la Translation de Saints.
Germain y Se confirmée par Charlema
gne en 77 9' Cette Eglise , selon lui ,
eut un nouveau Patron en même temps:-
que la France eut des Rois d'une nou-
(4) Si. OrA. S. Btned. tMt. r.
Bt rell#
ié MERCURE DE FRANCE.
velle race , & les Moines de l'Abbaye J.
pour éterniíèr la memoire d'un si grand
changement , firent construire un Por
tail, où ils placerent les figures de ces
Princes , en conservant toujours la mé
moire de leurs premiers Fondateurs. 2*'
Le peu de vrai.semblance que l'on ait
mis à la porte d'une Eglise les Statues du
pere , de la mere & des freres du Fon
dateur. Et a quelle porte £'Eglise , dit-il
a..t'qn representé ainft des genealogies ?
3° Les Couronnes de gloire qui font
derriere la tête des sept figures , ne íê
mettoient qu'à ceux qui étroient décedezs .
& que l'on croyoit dans la beatitude t
par consequent celui qui n'en a point ne.
peut être que Charlemagne qui vivoit
alors. 4° La difficulté de trouver des^
Couronnes du sixième siecle semblables ;
à celles' que portent les figures du Por-'
tail de Saint Germain.. Enfin le peu de'
eertitude que le tombeau deFredegonde^
qui a une semblable Couronne , soit veri- :
tablement d'elle.. .
Ce íônt là Meísieurs les principaux.^
argumens que l'Auteur des Remarques.
propose dans vôtre Journa.l contre les :
ientimens de Dom Mabillon , & de Dom 1
Huinart au íujet de ces figures. Il seroit?
k- íouhaiter qu'il eut apporté des autorir'
ter tirées de bons Auteurs , au lieu de
Ï'AN VÌ E R 1724. 27
íèá íimples. conjectures qui ne peuvent
fSrvir de preuves dans les difficultez
dont il est ici question.
Dom Jacques Bouillart , qui vient de
mettre au jour l'Histoire de l'Abbaye de
Saint Germain des Prez a répondu dans
íon ouvrage aux objections que l'on
Vient deráporter. Il prouve d'abord que
l'Auteur des Remarques s'est trompé
considerablement , en citant la vie de
Saint Droctovée , & l'Histoire interpo
lée d'Aimoin , & qu'il n'y a pas un seul
mot dans les endroits par lui citez où il
soit marqué que l'Egliíê fut achevée par-
Clotaire. Dom Bouillart prouve au con
traire par les mêmes Auteurs , que Chil.
debert acheva cet Edifice avant ía mort,
& que Saint Germain la dédia , à la sol
licitation de Clotaire , le jour même des
funerailles de Childebert.
Pour ce qui est du Portail , lé même'
Auteur soutient qu'il est aufli ancien que
l'Eglise : fa si uation sous la grosse tour,
faiíant corps avec elle , le goût du temps , .
le jugement qu'en ont porté juíqu'à.
present les personnes /ça vantes dans la
connoissance des anciens monumens , sont
des autoritez plus que suffisantes pour'
prouver ce qu'il avance..
L'Historien dë Saint Germain répond5
aussi à l'Aùteu.X- des Remarques , sor ce
B vj qu'il
2 8 MERCURE DE FRANCE:
qu'il avance que l'Egliíe de l'Abbaye
eut uh nouveau Patron , après la Trans
lation de Saint Germain. Il avouè que
Pepin donna alors le Domaine de Palaiseau,
& ses dépendances avec une en
tiere franchise de tous peages , Se que
cette donation fut confirmée par Charle.
magne en 779. mais. il nie que l'Eglise
ait eu dans cette occasion un nouveau.
Patron, & que les Moines de S. Ger
main ayent fait construire un Portail pour
y placer les Statues de S. Germain , des
Pepin , dç Bertrade , &c. pour éterniser
la memoire. du;. grand changement arrivé
en France. Il prouve d'une maniere so
lide & convaincante que l'Eglise, quoi
que dédiée en l'honneur de Sainte Croix,,
& de Saint Vincent, a eu aussi: le nom
de Saint Germain dès la mort du même
Saint, à cause des frequens. miracles que
Dieu operoit à son tombeau ,.nom qui lui
est resté dans les siecles^suivans. II cite
pour ce sujet le testament de Bertrant ,
í ou Bertieram Evêque du Mans , S. Gre
goire de Tours , Saint Ouen , Archevêque
de Rouen qui a écrit la -vie de Saint
Eloy, l'Auteur de la vie dé Sainte Batilde
, & plusieurs Chartes.très.ancien
nes , qu'il a mises parmi les preuves à
la fin de son Histoire. Ilisoutient de plus
que l'Eglise dc.S. Germain n'a eu que
deux
JANVIER
deux dédicaces , la premiere faite par
Saint Germain , & la seconde par le
Pape Alexandre III. en ii6}, Se que.
dans ces deux dédicaces il n'est fait men
tion que de. Sainte Croix & de Saint Vin
cent. Or comme l'on ne donne un Patron
aux Eglises que dans cétte ceremonie y
Dom Bouillart demande à l'Auteur de*
Remarques qu'il lui faste voir. une autre
dédicace faite en 7f4-. ou. environ ,
dans laquelle l'on ait changé le nom de
Saint Vincent , ou ajpûté celui de Saint'
Germain-
Quant à. la íècoside objection , qu'il .
n'est pas vrai-íèmblable que l'on ait pJa--
oé à la porte d'une Eglise les. Statues du
pere -, de la m ere & des freres du Fon-.
dateur1. Dom Bouillart répond que cet
n'est pas une chose inusitée, puisque l'on.
en voit dé íemblables au Portail de Nô
tre.Dame la Répostetdènt l'Auteur mê
me des Remarques fait mention , Se dont
ilparoît reconnoître l'antiquité,
Enfin l' Auteur. de l'Histoire de Saint'
Germain dit que l'Auteur des Remar
ques fait une question inutile, loríqu'il.
demande à' quelle porte d'Eglise a-t'om
representé ainsi des genealogies ? puis
qu'il les admet lui-même dans le Por
tail de S: Germaini en disant qu'il s'ima*
fifre ». voir Pepin , Bertrade tjâ femme ,
Jfe* MERCURE DE FRANCS.
Charlemagne & Carloman ses fils. N'estce
pas là en eiíèt une genealogie à íà
maniere, & suivant ces propres idées.
Un des principaux argumensde l'Au
teur des Remarques est comme ori
IV déja dit, que ces Statues du Por
tail de Saint Germain ont des Cou
ronnes de gloire , qui ne se mettoient
qu'aux' personnes décedées , que l'on
croyoit dans la beatitude , d'où il conclut
que la huitième Statue, qui n'en a point,
represente Charlemagne qui vivoit en
core alors , & par coníequent que le Por
tail de Saint Germain n'a été construit
que de son temps.
Dom Bouillart lui répond que les
Couronnes de gloire se mettoient aux vi-
Vans aussi bien qu'aux morts. , d'où il
conclut que ceux qui font representez .
au Portail de Saint Germain , pou voient
être vivans dans le temps de là construc
tion. Il donne plusieurs exemples de cetusage.
fa) L'Empereur Trajan est repre
senté deux fois dans l'Arc de Constantin,.
2ui est à Rome , comme vivant avec une'
louronne de gloire derriere fa tête.'
(i) Dans les siecles suivans l'Empereur'
(a) V. l'Antiquité expliquée, &c' tòm. ti.
$ 186. & tom. 3. pagg. 31J. 330. & tom. v
p. 167.
{b) iiidt Supplement.
y-alen
t
y á n v nr r ry.»^ f*
Valentinien II. paróît avec une Couron
ne de gloire faiíant des largeíses au peu
ple. On voit auflì des Medailles (#)fra*
pées du vivant des Empereurs Justin , <
Justin le jeune , Maurice , Phocas , & de
quelques Imperatrices , où ils font re
presenter de même. Il ajoute après M. le
Blanc dans son Traité des Monnoyes,
que, les Gaulois ayant été' íubjuguez par
les premiers Rois de la Monarchie Fran
çoise , ont gardé pendant quelque temps'
les usages des Romains leurs derniers
maîtres. Les Rois même de lá premiere
race les ont auflì conservez, principale
ment dans leurs Monnoyes. Ainsi il ne
faut pas s'étònnersi dans ks' temps de la
premiere race l'on mettait des Courons
ries de gloire dérriere la tête dés Rois,
Si même des Evêques qui étoient encore
en vie. L'on en trouve une preuve dans
le premier tome des Annales de Dom
Mabillon , f b) où il est: fait mention de'
S. Armand , Evêque dé Mastric , lequel.
fft son testament en presence de Rieul,^
Archevêque de Rheims , de Mommolen,'
Evê qùe deNoyon, de Vendicien de Cam.
bray ', de Bertin ; Abbé de Sithiu , Se des
Prêtres Jéán & Baudemond. Ils ont tous
des Couronnes de Gloire derriere leurs
f» Numism. Imp. Rom. ulhselm.Sfiwiuri 2-.
>z. MERCURE DE FRANCE.
têtes , comme on le peut voir dans It
planche que Dom Mabíllon' a Fait gras
ver , laquelle a été tirée des anciens. monumens
de l'Abbaye de & Amand.' Ce
íçavant homme fait là - dessus la mê
me obíervation que l'Auteur des Re
marques r5c il s'étonne que ces figu
res portent des couronnes de gloire , quoi
que ceux qu'elles representent fussent en
core vivans. L'on doit donc conclure ne-.
cessairement de ces exemples , que l'on
mettoit íouvent des couronnes de gloire
aux personnes vivantes , & que ce n'est.
pas une preuve que ceux qui íònt repre
sentez au Portail de S. Germain , fus
sent decedez.
Dom Bouillait ajoute: Y a ) l'Auteur
des Remarques admet , fans y penser , k;
même chose ; car en mettant la construc
tion du portail dans le huitième siecle ,.
il dit que les Religieux. de S. Germain le
firent faire pour éterniser la mémoire du
grand changement arrivé en France, en'
754. lorsque le corps de S. Germain fut
transferé, què l'Eglise eut un nouveau
Patron , Se que Pepitvla combla de biens.-
Or s'il est vrai que les figures du Por
tail representent Pepin, fa femme & ses
Énfans , l'Auteur des Remarques doit
convenir que l'on donnoit des couronnes
( * ) Híst. de S. Gertiwpag, 30*.
1
Janvier 17I4." :W
3è gloire aux Rois & auxpersonnes illus
tres, lorsqu'elles vivoient.j puiíque Pepin
& les Princes qu'il íoutient être re1.
preíentez par ces- figures ,- vivoient en
754. 8c que cependant ils ont des' cousonnes
de gloire , ou des nimbes derriere
leurs têtes. Il. est inutile de dire que Gharlemagnen'en
a point , parce qu'il étoit
encore vivant, ^& que les autres étoient
morts. Il en avdit auslì ; mais celui qu'il
avoit est tombe dans la fuite, ou pour
n'avoir pas. bien été attaché,' ou pour
avoir été rompu >. en eífet on voit encore
derriere íà tête un crampon de fer qui le
íetenoit t & il estcouché horiíôntalemerjt
contre la muraille.
Il ne s'agit p.lt»s que de la difficulté que
iorrrîe lf Auteur des Remarques /qui est
defaire voir des couronnes du íixième
siecle íemblables à celles que portent les.
figures' du Portail de S. Germain , & que'
le tombeau de Fredegondc qui Jt une
semblable couronne y soit Veritablement
d'elle. C'est ce que Dom Boùillart déve-
Ibpe avec solidité , en diíànt d'abord que
les anciens Historiens ont fait mention de
la íépulture de Fredegende dans l'Eglise
de S. Vincent, maintenant de S. Germain
des Prez. Il lë prouse ensuite par la situa
tion 8c la distinction des tombeaux des.
Rois 8c des Reines de la premiere race »
f4 MERCURE DE FRANCE;
inhumez dans la' même Egliie,tlonc les
.inícriptions , quoique moins anciennes T
.(ont restées julqu'en 1656. par la tra
dition des Religieux de l'Abbaye , & par
le jugement des períônnes les plus éciar*.
rées dans l'Antiquicé , qui ont regardé
le tombeau de Fredcgondë , comme uQ
monument aussi ancien qu'elle. il répond
enfin aux objections que l'on pourroit fai
re au sujet des Fleurs.de.lys qui font à la
couronne 8c au Iccprre de cette Reine ',
&c rapporte quelques exemples qui font
voir que les fleurs de lys étoient en usage
íòus les Rois de la premiere race s d'où il
Conclut que le tombeau & la couronne de
Frédegoncle «'tant aussi ancien qu'elle, les
couronnesdes statues du Portail de S. Ger
main sont aussi anciennes que & construc^
tion & du sixième siecle.
Je fuis , Messieurs , Sec1
A Paris le 13. Janvier 1714»'
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Résumé : LETTRE écrite aux Auteurs du Mercure pour servir de réponse aux Remarques sur les figures du Portail de l'Eglise de l'Abbaye S. Germain
La lettre répond aux critiques d'un auteur anonyme publiées dans le Mercure de mai précédent, concernant les figures du portail de l'église Saint-Germain-des-Prés. L'auteur anonyme remet en question les interprétations du Père Jean Mabillon et de Dom Thierry Ruinard, qui attribuent les figures du portail à des personnages spécifiques de la dynastie mérovingienne. Selon l'auteur anonyme, le portail est postérieur à la construction de l'église et représente des personnages comme Pépin, Bertrade, Charlemagne, et leurs descendants. Il soutient que Clotaire, et non Childebert, a achevé la construction de l'église, citant des sources comme la vie de Saint Droctovée et l'histoire interpolée d'Aimoin. Il argue également que les couronnes de gloire sur les statues indiquent que Charlemagne, qui n'en porte pas, était vivant lors de la construction du portail. Dom Jacques Bouillart, dans son histoire de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, réfute ces remarques. Il prouve que Childebert a achevé l'église avant sa mort et que Saint Germain l'a dédiée. Bouillart soutient que le portail est aussi ancien que l'église et que les figures représentent bien des personnages mérovingiens. Il démontre également que les couronnes de gloire pouvaient être attribuées à des personnes vivantes, citant des exemples historiques pour appuyer cette affirmation. Enfin, Bouillart confirme l'ancienneté du tombeau de Frédégonde et des couronnes des statues du portail, les datant du sixième siècle.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 2136-2140
EXTRAIT d'une Lettre écrite d'Auxerre à l'occasion des conjectures de M. Clérot, Avocat du Parlement de Roüen, sur l'ancien Palais Royal, appellé Vetera-Domus, inserées dans le Mercure de Juillet 1733.
Début :
Une commodité particuliere qui se trouve dans vos Journaux, est que [...]
Mots clefs :
Saint-Germain, Vetera domus, Palais royal, Invocation, Évêque d'Auxerre, Rouen, Église, Diocèse, Découverte, Conjectures
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite d'Auxerre à l'occasion des conjectures de M. Clérot, Avocat du Parlement de Roüen, sur l'ancien Palais Royal, appellé Vetera-Domus, inserées dans le Mercure de Juillet 1733.
EXTRAIT d'une Lettre écrite d'Auxerre
à l'occasion des conjectures de
M.. Clérot , Avocat du Parlement de
Rožen , sur l'ancien Palais Royal , appellé
Vetera-Domus , inserées dans le
Mercure de Fuillet 1733.
U
Ne commodité particuliere qui se
trouve dans vos Journaux , est que
des personnes qui ne se sont jamais vûës,
et qui ne se connoissent aucunement ,
peuvent se transmettre l'une à l'autre
leurs pensées dans quelque situation et
éloignement qu'elles soient. J'ai lû les
conjectures que M. Clérot , Avocat de
Rouen, a proposées à l'occasion d'un des
Palais de nos Rois,appellé Vetera Domus,
dans un Auteur du neuvième siècle.Comme
c'est moi-même qui , par le moyen
de votre Journal de Mars , ai invité.
l'Historien de l'Eglise et du Diocèse de
Rouen à travailler à la découverte de ce
Palais Royal , je ne puis regarder avec indifférence,
ce qui sera produit à ce sujet,
de quelque part qu'il vienne.
M. Clérot est le premier qui ait pris la
plume pour communiquer au Public ses
conjectures; il faut esperer que s'il n'a
pas
OCTOBRE. 1733 2137
pas réussi , comme il n'ose lui - même
s'en fatter, son exemple pourra au moins
exciter quelque Géographe , ou quelque
Critique , à pousser les recherches encore
plus loin. Il a produit de sçavantes Remarques
sur Rodomus , Vetus - Rodomus
& c.cependant je ne croi pas qu'elles conduisent
sûrement à faire trouver ce que
je cherche , et que je juge digne de la curiosité
de tous les Antiquaires François.
Si Héric, Moine d'Auxerre , Précepteur
'd'un des Fils de Charles - le - Chauve , est
digne de croïance ; le Palais en question
portoit en Latin un nom formé de deux
autres noms Latins ; loin de trouver dans
cet Ecrivain Vetera - Domus , qui induit à
imaginer une conjonction de Vet avec
Radomus , on y lit Veterem Domum , tresformellement
. In pago Rothomagensi , dit- il,
Regius fixus est , quem incola ob Palatii antiquitatem
Veterem- Domum nuncupant. Ce
qui suit est encore plus digne d'attention
, parce qu'il est plus décisif : Capella
Palatio contigua , beati Germani famosa
nomine , illustris et merito et signorum dote.
C'est dans le chap. 45. du premier Livre
des Miracles de S. Germain d'Auxerre
qu'Héric s'exprime ainsi : Tout cela sert
de préambule au récit d'une gué.ison miraculeuse
qui y arriva , et dont toute la
B Cour
2138 MERCURE DE FRANCE
Cour et les Principaux de tout le Royau
me , farent témoins, Heric n'auroit pas
inséré dans un Livre où il ne convient de
parler que de son Saint , les Miracles d'un
autre S. Germain . Ainsi l'Eglise ou Cha ~
pelle voisine du Palais de Normandic
étoit certainement sous l'invocation de
S. Germain , Evêque d'Auxerre. Or il se
trouve que PEglise de S. Germain , voisine
du vieux Rouen , sur la Riviere de
Bresle , n'est point et n'a jamais été sous
l'invocation de Saint Germain , Evêque
d'Auxerre , mais sous celle d'un autre
S. Germain , Evêque Régionnaire , Dif
ciple , à la verité , mais bien different du
grand Evêque d'Auxerre. Outre cela elle
est du Diocèse d'Amiens , parce qu'elle
est séparée du vieux Rouen par la Riviére
de Bresle .
Ceux qui souhaitent éclaircir ce fait
peuvent prendre la peine de lire la vie de
S. Germain , dit de Senard - Pont. Elle
fut imprimée in 12 en 1645. à Amiens,
où il y a une Paroisse de son nom , et des
puis elle l'a été dans le Recueil des Bollandistes
au 2 de May. L'Auteur parlanc
des courses Apostoliques de ce S. Evêque
, Ecossois d'origine , dit ce qui suit:
Crepidinem montis transgressus quod dicitur
Vetus-Rothomagum inter Aumaleum et Senardi
OCTOBRE. 1733 2139
mardi-Pontem , circa quem locum manebat
Hubadus idololatria cultor& c Ensuite il le
fait martirifer tout auprès de celieu - là , et
c'est là qu'en effet on retrouve encore son
tombeau Comme donc l'Eglise de S.Germain-
sur- Brêle , ne peut servir à la découverte
du Vetera-Domus , je pense qu'il
faut porter ses vûës d'un autre côté , et je
croi infiniment plus probable que ce seroit
le Vieux Manoir , ou Cailly , autres
Lieux qui sont du Diocèse de Rouen.
M.Clérot pourra nous informer si l'une
ou l'autre des deux Eglises , voisines du
titre de S.Germain , est sous l'invocation
de l'Evêque d'Auxerre ; et en ce cas la
découverte acquerra un nouveau dégré de
probabilité. J'avoue qu'il n'est pas necessaire
d'entendre par ces mots : Pagus Rothomagensis
, uniquement ce qu'on appelle
aujourd'hui le Païs Roumois Le Païs de
Caux étant du Diocèse de Roüen , peut
être compris sous cette signification . Tel
est l'usage que l'on faisoit souvent anciennement
du terme de Pagus. Mais il ne faut
pas non plus que M. Clérot se contente
de jetter la vue sur les Cartes de Normandie
, ou sur le Dictionnaire Universel
de la France ? Il pourroit également
trouver dans le Païs Roumois ou dans
celui qui est à gauche de la Seine, ce qu'il
Bij cher2140
MERCURE DE FRANCE
cherche à droite , et il n'est pas necessaire
que le Village s'appelle S.German , mais
il suffit que l'Eglise soit ou ait été sous
l'invocation de l'Evêque d'Auxerre , qui
a porté ce nom, Je juge qu'il ne lui sera
pas difficile d'en trouver de ce côté - là ,
puisque le seul Diocèse d'Evreux , qui est
contigu, en contient prés d'une vingtaine
sous le titre du même Saint, S'il en rencontre
dans une Terre Royale , la position
du Vetera, Domus sera d'autant plus
probable qu'il est plus vrai - semblable que
Charles- le-Chauve étoit très proche du
Diocèse de Lisieux , où reposoit le Corps
de S. Renobert , lorsqu'il marqua sa dévotion
envers ce Saint , et qu'il fit un
Traité avec Hérispoy , Prince de Breta
gne.
à l'occasion des conjectures de
M.. Clérot , Avocat du Parlement de
Rožen , sur l'ancien Palais Royal , appellé
Vetera-Domus , inserées dans le
Mercure de Fuillet 1733.
U
Ne commodité particuliere qui se
trouve dans vos Journaux , est que
des personnes qui ne se sont jamais vûës,
et qui ne se connoissent aucunement ,
peuvent se transmettre l'une à l'autre
leurs pensées dans quelque situation et
éloignement qu'elles soient. J'ai lû les
conjectures que M. Clérot , Avocat de
Rouen, a proposées à l'occasion d'un des
Palais de nos Rois,appellé Vetera Domus,
dans un Auteur du neuvième siècle.Comme
c'est moi-même qui , par le moyen
de votre Journal de Mars , ai invité.
l'Historien de l'Eglise et du Diocèse de
Rouen à travailler à la découverte de ce
Palais Royal , je ne puis regarder avec indifférence,
ce qui sera produit à ce sujet,
de quelque part qu'il vienne.
M. Clérot est le premier qui ait pris la
plume pour communiquer au Public ses
conjectures; il faut esperer que s'il n'a
pas
OCTOBRE. 1733 2137
pas réussi , comme il n'ose lui - même
s'en fatter, son exemple pourra au moins
exciter quelque Géographe , ou quelque
Critique , à pousser les recherches encore
plus loin. Il a produit de sçavantes Remarques
sur Rodomus , Vetus - Rodomus
& c.cependant je ne croi pas qu'elles conduisent
sûrement à faire trouver ce que
je cherche , et que je juge digne de la curiosité
de tous les Antiquaires François.
Si Héric, Moine d'Auxerre , Précepteur
'd'un des Fils de Charles - le - Chauve , est
digne de croïance ; le Palais en question
portoit en Latin un nom formé de deux
autres noms Latins ; loin de trouver dans
cet Ecrivain Vetera - Domus , qui induit à
imaginer une conjonction de Vet avec
Radomus , on y lit Veterem Domum , tresformellement
. In pago Rothomagensi , dit- il,
Regius fixus est , quem incola ob Palatii antiquitatem
Veterem- Domum nuncupant. Ce
qui suit est encore plus digne d'attention
, parce qu'il est plus décisif : Capella
Palatio contigua , beati Germani famosa
nomine , illustris et merito et signorum dote.
C'est dans le chap. 45. du premier Livre
des Miracles de S. Germain d'Auxerre
qu'Héric s'exprime ainsi : Tout cela sert
de préambule au récit d'une gué.ison miraculeuse
qui y arriva , et dont toute la
B Cour
2138 MERCURE DE FRANCE
Cour et les Principaux de tout le Royau
me , farent témoins, Heric n'auroit pas
inséré dans un Livre où il ne convient de
parler que de son Saint , les Miracles d'un
autre S. Germain . Ainsi l'Eglise ou Cha ~
pelle voisine du Palais de Normandic
étoit certainement sous l'invocation de
S. Germain , Evêque d'Auxerre. Or il se
trouve que PEglise de S. Germain , voisine
du vieux Rouen , sur la Riviere de
Bresle , n'est point et n'a jamais été sous
l'invocation de Saint Germain , Evêque
d'Auxerre , mais sous celle d'un autre
S. Germain , Evêque Régionnaire , Dif
ciple , à la verité , mais bien different du
grand Evêque d'Auxerre. Outre cela elle
est du Diocèse d'Amiens , parce qu'elle
est séparée du vieux Rouen par la Riviére
de Bresle .
Ceux qui souhaitent éclaircir ce fait
peuvent prendre la peine de lire la vie de
S. Germain , dit de Senard - Pont. Elle
fut imprimée in 12 en 1645. à Amiens,
où il y a une Paroisse de son nom , et des
puis elle l'a été dans le Recueil des Bollandistes
au 2 de May. L'Auteur parlanc
des courses Apostoliques de ce S. Evêque
, Ecossois d'origine , dit ce qui suit:
Crepidinem montis transgressus quod dicitur
Vetus-Rothomagum inter Aumaleum et Senardi
OCTOBRE. 1733 2139
mardi-Pontem , circa quem locum manebat
Hubadus idololatria cultor& c Ensuite il le
fait martirifer tout auprès de celieu - là , et
c'est là qu'en effet on retrouve encore son
tombeau Comme donc l'Eglise de S.Germain-
sur- Brêle , ne peut servir à la découverte
du Vetera-Domus , je pense qu'il
faut porter ses vûës d'un autre côté , et je
croi infiniment plus probable que ce seroit
le Vieux Manoir , ou Cailly , autres
Lieux qui sont du Diocèse de Rouen.
M.Clérot pourra nous informer si l'une
ou l'autre des deux Eglises , voisines du
titre de S.Germain , est sous l'invocation
de l'Evêque d'Auxerre ; et en ce cas la
découverte acquerra un nouveau dégré de
probabilité. J'avoue qu'il n'est pas necessaire
d'entendre par ces mots : Pagus Rothomagensis
, uniquement ce qu'on appelle
aujourd'hui le Païs Roumois Le Païs de
Caux étant du Diocèse de Roüen , peut
être compris sous cette signification . Tel
est l'usage que l'on faisoit souvent anciennement
du terme de Pagus. Mais il ne faut
pas non plus que M. Clérot se contente
de jetter la vue sur les Cartes de Normandie
, ou sur le Dictionnaire Universel
de la France ? Il pourroit également
trouver dans le Païs Roumois ou dans
celui qui est à gauche de la Seine, ce qu'il
Bij cher2140
MERCURE DE FRANCE
cherche à droite , et il n'est pas necessaire
que le Village s'appelle S.German , mais
il suffit que l'Eglise soit ou ait été sous
l'invocation de l'Evêque d'Auxerre , qui
a porté ce nom, Je juge qu'il ne lui sera
pas difficile d'en trouver de ce côté - là ,
puisque le seul Diocèse d'Evreux , qui est
contigu, en contient prés d'une vingtaine
sous le titre du même Saint, S'il en rencontre
dans une Terre Royale , la position
du Vetera, Domus sera d'autant plus
probable qu'il est plus vrai - semblable que
Charles- le-Chauve étoit très proche du
Diocèse de Lisieux , où reposoit le Corps
de S. Renobert , lorsqu'il marqua sa dévotion
envers ce Saint , et qu'il fit un
Traité avec Hérispoy , Prince de Breta
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite d'Auxerre à l'occasion des conjectures de M. Clérot, Avocat du Parlement de Roüen, sur l'ancien Palais Royal, appellé Vetera-Domus, inserées dans le Mercure de Juillet 1733.
L'auteur d'une lettre écrite à Auxerre commente les conjectures de M. Clérot, avocat au Parlement de Rouen, publiées dans le Mercure de France de 1733. Ces conjectures concernent l'ancien Palais Royal appelé Vetera-Domus. L'auteur apprécie la commodité des journaux qui permettent aux personnes éloignées de partager leurs pensées et a lui-même encouragé un historien à rechercher ce Palais Royal. Il ne peut rester indifférent aux conjectures de M. Clérot, bien qu'il estime que les remarques de ce dernier sur Rodomus et Vetus-Rodomus, bien que savantes, ne mènent pas à la découverte du Palais. Selon le moine Héric d'Auxerre, le Palais portait le nom de Veterem Domum, et non Vetera-Domus. L'auteur mentionne également une chapelle dédiée à Saint Germain, évêque d'Auxerre, adjacente au Palais. Cependant, l'église de Saint Germain sur Bresle est dédiée à un autre Saint Germain, évêque régionnaire. L'auteur suggère donc de chercher le Vetera-Domus ailleurs, peut-être à Cailly ou dans d'autres lieux du Diocèse de Rouen. Il invite M. Clérot à vérifier si une des églises voisines est dédiée à l'évêque d'Auxerre, ce qui renforcerait la probabilité de la découverte. L'auteur conclut en indiquant que le terme Pagus Rothomagensi peut inclure le Pays de Caux et que M. Clérot devrait explorer les diocèses voisins, comme celui d'Évreux, où plusieurs églises portent le nom de Saint Germain.
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