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1
p. 69-72
Divertissemens donnez au Public par Monsieur Olier-Verneüil, Conseiller au mesme Corps. [titre d'après la table]
Début :
Si tous ces Divertissemens ont fait du bruit; ceux que [...]
Mots clefs :
Monsieur de Verneüil, Divertissement, Musique, Magnificence
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texteReconnaissance textuelle : Divertissemens donnez au Public par Monsieur Olier-Verneüil, Conseiller au mesme Corps. [titre d'après la table]
Si tous ces Divertifie-
. mens ont fait du bruit; I
ceux que Moniteur de
Verneüil Confedler au Parlement, a donnez libéralement au Public pendant
tout le Carnaval, n’ont pas
70 LE MERCURE
moins fait d’éclat. Tout
Paris a parlé de fa magnificence & de fa genéro fi té. >
On reprefentoit chez luy
deux ou trois fois la Semaine, une Comédie dont
les Intermèdes eftoient
remplis de Balexs & de
Chanfons. Les Entrées eftoient admirables, & cornpofées par M. des Broffes,
c’eft tout dire. Les Paroles
qu’on chantoit, partoient
de la veine de M. de Verneiiil, & plufieurs les <
croyoient de M. Quinaut
ou de M. de Frontiniere,
G A L A N T . 71
qui font les deux plus fameux Autheurs que nous
ayons pour ces forces
d’Ouvrages. Elles eftoient
mifes en Mufique par le
Sieur l’Aloüetre, qui batoic la Mefure à l’Opéra.
Comme il eftoit à M. de
Lully, & qu’ii a copié fes
Airs pendant plufïeurs années, ceux qu’il compote
onc tant de raporc avec
ceux de ce grand Maiftre,
qu’on voit bien qu’il a écudié fous luy. L’Ecole eft s
bonne, mais il n ’eft pas
temps de faire voir tout
7 i LE MERCURE
ce qu’on y a appris
. mens ont fait du bruit; I
ceux que Moniteur de
Verneüil Confedler au Parlement, a donnez libéralement au Public pendant
tout le Carnaval, n’ont pas
70 LE MERCURE
moins fait d’éclat. Tout
Paris a parlé de fa magnificence & de fa genéro fi té. >
On reprefentoit chez luy
deux ou trois fois la Semaine, une Comédie dont
les Intermèdes eftoient
remplis de Balexs & de
Chanfons. Les Entrées eftoient admirables, & cornpofées par M. des Broffes,
c’eft tout dire. Les Paroles
qu’on chantoit, partoient
de la veine de M. de Verneiiil, & plufieurs les <
croyoient de M. Quinaut
ou de M. de Frontiniere,
G A L A N T . 71
qui font les deux plus fameux Autheurs que nous
ayons pour ces forces
d’Ouvrages. Elles eftoient
mifes en Mufique par le
Sieur l’Aloüetre, qui batoic la Mefure à l’Opéra.
Comme il eftoit à M. de
Lully, & qu’ii a copié fes
Airs pendant plufïeurs années, ceux qu’il compote
onc tant de raporc avec
ceux de ce grand Maiftre,
qu’on voit bien qu’il a écudié fous luy. L’Ecole eft s
bonne, mais il n ’eft pas
temps de faire voir tout
7 i LE MERCURE
ce qu’on y a appris
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Résumé : Divertissemens donnez au Public par Monsieur Olier-Verneüil, Conseiller au mesme Corps. [titre d'après la table]
Pendant le Carnaval, Monsieur de Verneüil organisait des divertissements au Parlement de Paris, suscitant une grande admiration. Ces événements incluaient des représentations de comédies deux à trois fois par semaine, entrecoupées de bals et de chants. Les entrées étaient remarquables et composées par Monsieur des Broffes. Les paroles des chants étaient attribuées à Monsieur de Verneüil, certaines étant comparées à celles de Monsieur Quinault ou de Monsieur de Frontinière. La musique était composée par le Sieur l'Aloüetre, ancien élève de Monsieur Lully, dont il avait copié les airs pendant plusieurs années, ce qui se reflète dans la qualité de ses compositions.
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2
p. 79-80
Bal chez M. Ranchain. [titre d'après la table]
Début :
Jamais la propreté, le bon ordre, & la magnificence, n'ont [...]
Mots clefs :
Bal, Monsieur Ranchain, Magnificence
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texteReconnaissance textuelle : Bal chez M. Ranchain. [titre d'après la table]
Jamais la propreté, le
bon ordre, & la maçnificence, n’ont plus paru en-'
femble, qu’ils firent au Bal
qui a cfté donné chez
Monfieur Ranchain -, La
Compagnie e Croit belle
bien choifie, rien n’y manquoit, on n ’y fouhaitoit G . • • • 111J
8o LE MERCURE
rien, & l’on peut dire que
c ’eftoic un Bal de bon goût.
bon ordre, & la maçnificence, n’ont plus paru en-'
femble, qu’ils firent au Bal
qui a cfté donné chez
Monfieur Ranchain -, La
Compagnie e Croit belle
bien choifie, rien n’y manquoit, on n ’y fouhaitoit G . • • • 111J
8o LE MERCURE
rien, & l’on peut dire que
c ’eftoic un Bal de bon goût.
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3
p. 64-74
Description de tout ce qui a paru à Versailles aux Processions solemnelles qui s'y sont faites, avec les Noms de toutes les Tapisseries de la Couronne, & des grands Peintres qui en ont fait les Desseins. [titre d'après la table]
Début :
Songeons au retour, Madame. Quoy que le trajet soit long, [...]
Mots clefs :
Versailles, Teintures, Tapisseries, Célébrer, Processions, Pompe, Magnificence, Caisses d'orangers
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texteReconnaissance textuelle : Description de tout ce qui a paru à Versailles aux Processions solemnelles qui s'y sont faites, avec les Noms de toutes les Tapisseries de la Couronne, & des grands Peintres qui en ont fait les Desseins. [titre d'après la table]
Songeons au retour , Mada- me. Quoy que le trajet ſoit long , vous n'en devez point craindre la fatigue ; &fi vous eſtes bleſsée de l'Image de la Mer, vous n'aurez pour ladif- ſiper par quelque agreable Objet,qu'àfaire untour àVer- failles. Onya celebré cette an- née avec une extraordinaire
magnificence les deux jours ,
deſtinez par tout où regne la veritable Religion , aux Pro- ceſſions les plus folemnelles.
C'eſt un effet de la pieté du
Roy, qui ne ſe fait pasmoins degloirede foûtenir dignemet le Titre qu'il a de Fils aiſné de l'Eglife , que le Nomde Loürs LE GRAND que tant de Vi- toires ſurprenantes luy ont acquis depuis une fi longue fuite
GALANT. 49
le
don-
'
YON
ſuite d'années. Mr Bontemps Gouverneur de Verſailles, dõt
chacun connoit le zele pour le
ſervice de Sa Majeſté , reçeut l'ordre pour tout ce qui re-- gardoit la pompede ces deux grandes Journées, & il
na en ſuite pour l'execution à Mr Berrin,DeſignateurduCa- *
1893*
binet duRoy. Le Genie de ce
dernier vous eft connu,&vous
ſçavez , Madame , qu'il ſeroit
difficile d'en trouver un plus inventif.Je ne vous feray point le détail de tout ce qui ornoit
le plus fuperbe&le plus riche
Repoſoir qu'on ait jamais veu.
Tout lemonde est informé de
la grande quantité de Pieces rares , curieuſes , & fans prix,
que le Roy avoit avat la guerre ; le nombre en eft encor
Tome V. Er
50 LE MERCVRE
augmenté deptris ce temps-là,
&il n'y a peut eſtre rien qui marque plus lagrandeur de la France,&la merveilleuſe conduite de fon Prince , rien qui ſoit plus àla gloire de ceux qui ontſous lity les premiers em- plois de l'Etat ,que de voir un fi grand amas de richeſſes non ſeulement conſervé, mais ac
crû malgré les exceſſives dé penſesoù l'on est tous les jours engagé pour la ſubſiſtance de nos Armées. Parmy tant de raretez , on admira ſur tout
une Courõne de Pierreries de
deuxpiedsde diametre, qui ne pût eſtre regardée qu'avecun etonnement inconcevable.
Toutes les Courts dans lefquelles paſſa la proceffion, fu- rent ornées d'une partie des
plus belles Tapiſſeriesdu Roy.
GALANT. 51 Mrdu Mets , Sur-Intendantde tous les Meubles , ordonna à
M² Coquino , qui garde ceux - de la Couronne , de les faire
tranſporter à Verſailles. Voicy celles qui y furent tenduës.
Les Actes des Apoftres de Raphaël. La Pſyché de Raphaël.
Les Croteſques deRaphaël.
Le Grand Scipion de Jules Romain.
Le Fructus Belli , qui eſtoit au Royd'Eſpagne.
Le Grand Conſtantin de
Rubens , & les douze Moisde
l'Année, qui estoient autrefois àMonfieurde Quife.
Toutes ces Tentures ſont
rehauffées d'or. Elles eſtoient
accompagnées de la Chaffe d'Olbeins , fameux Peintre Allemand. E 2
52 LE MERCVRE
4
Les Tapiſſeries modernes qui parurent le mefme jour, &
onteſté faites ſur les Deſſeins
de M'le Brun , & fabriquées.
aux Gobelins , repreſentant toutes enſemble l'Histoire du
Roy, furent Le Sacrede Sa Majeſté.
La Conférence , ou l'Entreveuë duRoy avec le Roy d'Efpagne.
Le Mariage du Roy.
L'Audiance que Sa Majesté donna à Fontainebleau àM le
Cardinal Legat.
L'Alliance faite avec les
Suiffes.
Toutes les Conqueſtes du Roy en diferentes Pieces, dans leſquelles Sa Majesté eſt re- preſentée au naturel, avec tous
ceuxqui ſe ſont trouvez dans toutes les Cerémonies , Sieges
GALANT.
53 &Combats,qu'on admire dans ces Tentures.Elles font toutes
rehauffées d'or , auffi bien que cellesquiſuivent.
LesBatailles d'Alexandre.
Les Veuës des Maiſons
Royales.
Les Muſes.
Les Saifons.
Et les cinq Sens de Nature.
Ces dernieres ont encor
eſté faites fur les Deſſeins de
Mr le Brun , Premier Peintre
du Roy , & elles ſont travail- léesavec tantd'art &de délicateſſe , que la Peinture n'a
riendeplus vif.
Les magnificences qui pa- rurent huit jours aprés, ne fu- rent pas moins conſidérables.
Jamais on n'a rien veu de fi
agreable , ny de mieux enten- E 3
34 LE MERCVRE du. Toutle Chaſteau ſe trouva
ſuperbement décoré,toutes les Feneſtres estoient ornées de
riches Tapis , & tous les Bal- cons revétus de Tapis de Per- ſe à fonds d'or , & remplis de Caiſſes d'Orangers. Il y en avoit auffi de poſées à plomb fur les Colomnes, environnées
de Feſtons de Fleurs , & entre
chaque Colomne on voyoit d'autres Caiſſes d'Orangers.
Les mêmes ornemens regnoient autour de la Court, &
le tout enſemble produiſoit un effet ſi merveilleux , que la veuë en eſtoit charmé
magnificence les deux jours ,
deſtinez par tout où regne la veritable Religion , aux Pro- ceſſions les plus folemnelles.
C'eſt un effet de la pieté du
Roy, qui ne ſe fait pasmoins degloirede foûtenir dignemet le Titre qu'il a de Fils aiſné de l'Eglife , que le Nomde Loürs LE GRAND que tant de Vi- toires ſurprenantes luy ont acquis depuis une fi longue fuite
GALANT. 49
le
don-
'
YON
ſuite d'années. Mr Bontemps Gouverneur de Verſailles, dõt
chacun connoit le zele pour le
ſervice de Sa Majeſté , reçeut l'ordre pour tout ce qui re-- gardoit la pompede ces deux grandes Journées, & il
na en ſuite pour l'execution à Mr Berrin,DeſignateurduCa- *
1893*
binet duRoy. Le Genie de ce
dernier vous eft connu,&vous
ſçavez , Madame , qu'il ſeroit
difficile d'en trouver un plus inventif.Je ne vous feray point le détail de tout ce qui ornoit
le plus fuperbe&le plus riche
Repoſoir qu'on ait jamais veu.
Tout lemonde est informé de
la grande quantité de Pieces rares , curieuſes , & fans prix,
que le Roy avoit avat la guerre ; le nombre en eft encor
Tome V. Er
50 LE MERCVRE
augmenté deptris ce temps-là,
&il n'y a peut eſtre rien qui marque plus lagrandeur de la France,&la merveilleuſe conduite de fon Prince , rien qui ſoit plus àla gloire de ceux qui ontſous lity les premiers em- plois de l'Etat ,que de voir un fi grand amas de richeſſes non ſeulement conſervé, mais ac
crû malgré les exceſſives dé penſesoù l'on est tous les jours engagé pour la ſubſiſtance de nos Armées. Parmy tant de raretez , on admira ſur tout
une Courõne de Pierreries de
deuxpiedsde diametre, qui ne pût eſtre regardée qu'avecun etonnement inconcevable.
Toutes les Courts dans lefquelles paſſa la proceffion, fu- rent ornées d'une partie des
plus belles Tapiſſeriesdu Roy.
GALANT. 51 Mrdu Mets , Sur-Intendantde tous les Meubles , ordonna à
M² Coquino , qui garde ceux - de la Couronne , de les faire
tranſporter à Verſailles. Voicy celles qui y furent tenduës.
Les Actes des Apoftres de Raphaël. La Pſyché de Raphaël.
Les Croteſques deRaphaël.
Le Grand Scipion de Jules Romain.
Le Fructus Belli , qui eſtoit au Royd'Eſpagne.
Le Grand Conſtantin de
Rubens , & les douze Moisde
l'Année, qui estoient autrefois àMonfieurde Quife.
Toutes ces Tentures ſont
rehauffées d'or. Elles eſtoient
accompagnées de la Chaffe d'Olbeins , fameux Peintre Allemand. E 2
52 LE MERCVRE
4
Les Tapiſſeries modernes qui parurent le mefme jour, &
onteſté faites ſur les Deſſeins
de M'le Brun , & fabriquées.
aux Gobelins , repreſentant toutes enſemble l'Histoire du
Roy, furent Le Sacrede Sa Majeſté.
La Conférence , ou l'Entreveuë duRoy avec le Roy d'Efpagne.
Le Mariage du Roy.
L'Audiance que Sa Majesté donna à Fontainebleau àM le
Cardinal Legat.
L'Alliance faite avec les
Suiffes.
Toutes les Conqueſtes du Roy en diferentes Pieces, dans leſquelles Sa Majesté eſt re- preſentée au naturel, avec tous
ceuxqui ſe ſont trouvez dans toutes les Cerémonies , Sieges
GALANT.
53 &Combats,qu'on admire dans ces Tentures.Elles font toutes
rehauffées d'or , auffi bien que cellesquiſuivent.
LesBatailles d'Alexandre.
Les Veuës des Maiſons
Royales.
Les Muſes.
Les Saifons.
Et les cinq Sens de Nature.
Ces dernieres ont encor
eſté faites fur les Deſſeins de
Mr le Brun , Premier Peintre
du Roy , & elles ſont travail- léesavec tantd'art &de délicateſſe , que la Peinture n'a
riendeplus vif.
Les magnificences qui pa- rurent huit jours aprés, ne fu- rent pas moins conſidérables.
Jamais on n'a rien veu de fi
agreable , ny de mieux enten- E 3
34 LE MERCVRE du. Toutle Chaſteau ſe trouva
ſuperbement décoré,toutes les Feneſtres estoient ornées de
riches Tapis , & tous les Bal- cons revétus de Tapis de Per- ſe à fonds d'or , & remplis de Caiſſes d'Orangers. Il y en avoit auffi de poſées à plomb fur les Colomnes, environnées
de Feſtons de Fleurs , & entre
chaque Colomne on voyoit d'autres Caiſſes d'Orangers.
Les mêmes ornemens regnoient autour de la Court, &
le tout enſemble produiſoit un effet ſi merveilleux , que la veuë en eſtoit charmé
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Résumé : Description de tout ce qui a paru à Versailles aux Processions solemnelles qui s'y sont faites, avec les Noms de toutes les Tapisseries de la Couronne, & des grands Peintres qui en ont fait les Desseins. [titre d'après la table]
Le texte décrit les préparatifs et la magnificence des célébrations religieuses à Versailles. Le trajet de retour, bien que long, est présenté comme agréable, avec des distractions pour ceux qui pourraient être incommodés par la vue de la mer. Les festivités, organisées avec une grande splendeur, incluent des processions solennelles célébrant la véritable religion. La piété du roi et ses nombreuses victoires sont mises en avant, ainsi que son titre de Fils aîné de l'Église et son nom de Louis le Grand. Monsieur Bontemps, gouverneur de Versailles, et Monsieur Berrin, designer du cabinet du roi, sont chargés de l'organisation de ces journées. Le génie inventif de Monsieur Berrin est souligné. Les célébrations incluent un reposoir somptueux orné de pièces rares et précieuses, accumulées malgré les dépenses militaires. Une couronne de pierreries de deux pieds de diamètre est particulièrement admirée. Les cours traversées par la procession sont ornées de tapisseries royales, transportées par Monsieur Coquino sous la direction de Monsieur du Mets. Parmi ces tapisseries figurent des œuvres de Raphaël, Jules Romain, Rubens, et des tapisseries modernes représentant l'histoire du roi, ses alliances et ses conquêtes. Ces tapisseries, ainsi que d'autres modernes, sont rehaussées d'or et exécutées avec une grande délicatesse. Huit jours après, de nouvelles magnificences sont déployées, avec le château décoré de riches tapis, de balcons revêtus de perse à fonds d'or, et de caisses d'orangers. Les ornements autour de la cour produisent un effet merveilleux, charmant la vue.
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4
p. 1-6
Prélude, [titre d'après la table]
Début :
Le Roy qui n'est destiné qu'à de grandes choses, [...]
Mots clefs :
César, Chef-d'oeuvres, Magnificence, Art, Ouvrages, Louis le Grand, Versailles, Grandeur, Royaume de France
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Prélude, [titre d'après la table]
E Roy qui n'eft def
tiné qu'à de grandes
chofes, vient de faire
uneEntrepriſe vrayment Romaine
, & je ne croy pas
qu'aucun des Céfars en ait
jamais réfolu une pareille..
Ce n'eft pas , Madame , que
Mars
1685.
A
2 MERCURE
1 parmy tant de Chef- d'oeuvres
qui ont rendu l'ancienne
Rome fi celebre , il n'y en
ait eu de trés -importans
, &
dans lefquels laMagnificence
.
a efte jointe à tout ce que
l'Art a de plus ingénieux
;
mais ces Ouvrages que l'on
avoit commencez fans avoir
examiné toute leur grandeur
, & fans en avoir prévû
la dépenfe , eftoient devenus
des Ouvrages de plufieurs
Régnés , au lieu que Louis
LE GRAND voit en mefme
temps , & tout ce qu'il entreprend
, & tout ce qu'il
GALANT.
faut qu'il luy en coufte . Ainfi
l'on peut affurer , que fi depuis
qu'il y a des Hommes
fur la terre , il s'eft fait une
dépenfe plus forte que celle
de conduire la Riviere d'Eure
à Verſailles , il ne s'eft jamais
conclu un Marché de tant
de millions tout à la fois, ny
mefme qui en ait approché.
Cette Riviere dont la fource
eft dans le Perche , paffe à
Chartres , à Nogent-le- Roy,
à Ivry , à Louviers , & va fe
joindre à la Seine au- deffus
du Pont de l'Arche , apres
avoir receu la Drouete , la
A ij
4 MERCURE
Blaie , l'Aure , la Vegre ,
I'Hon , l'Andelle , & divers
autres Ruiffeaux . On va commencer
à Maintenon le mer
veilleux Aqueduc qui luy
fera perdre fon cours ordinaire
, & comme la pente
qu'il faut qu'on luy donne
oblige à prendre un grand
tour, on peut juger combien
ce travail eft confidérable.
Vous ne devez point douter
qu'on ne m'envoye bientoft
la fin , puis que c'eft un
deffein du Roy, que l'on exécute.
L'utilité qu'en peut recevoir
Verfailles , & l'orne_
GALANT.
5
ment que fes fuperbes Jar
dins en tireront , n'eft pas ce
qui a le plus excité le Roy
à entreprendre un Ouvrage
fi digne de la grandeur Françoife,
telle qu'elle eft aujour
d'huy. Ce Prince a eu des
veuës plus dignes d'admiration
, & qui font connoiſtre
la bonté qu'il a pour fes Sujets.
Il a préveu que la plû
part de ceux à qui la Guerre
donnoit dequoy vivre , demeureroient
fans employ ; &
par cette grande entrepriſe il a
voulu leur fournir les moyens
de fubfifter, Il rend par là fon
A iij
6 MERCURE
Nom immortel , & la France
redoutable. Il fait connoiftre
aux Etrangers que fes Finances
ne font point épuiſées,
& que puis que fans rien diminuer
de fes autres dépen
fes , il en entreprend d'extraordinaires
prefque dans
F'instant qu'on voit la Guerre
finie , il feroit preft à la ſoûtenir
tout de nouveau , fren
troublant le repos qu'il vient .
de donner à l'Europe , on
le contraignoit de fe remettre
en Campagne .
tiné qu'à de grandes
chofes, vient de faire
uneEntrepriſe vrayment Romaine
, & je ne croy pas
qu'aucun des Céfars en ait
jamais réfolu une pareille..
Ce n'eft pas , Madame , que
Mars
1685.
A
2 MERCURE
1 parmy tant de Chef- d'oeuvres
qui ont rendu l'ancienne
Rome fi celebre , il n'y en
ait eu de trés -importans
, &
dans lefquels laMagnificence
.
a efte jointe à tout ce que
l'Art a de plus ingénieux
;
mais ces Ouvrages que l'on
avoit commencez fans avoir
examiné toute leur grandeur
, & fans en avoir prévû
la dépenfe , eftoient devenus
des Ouvrages de plufieurs
Régnés , au lieu que Louis
LE GRAND voit en mefme
temps , & tout ce qu'il entreprend
, & tout ce qu'il
GALANT.
faut qu'il luy en coufte . Ainfi
l'on peut affurer , que fi depuis
qu'il y a des Hommes
fur la terre , il s'eft fait une
dépenfe plus forte que celle
de conduire la Riviere d'Eure
à Verſailles , il ne s'eft jamais
conclu un Marché de tant
de millions tout à la fois, ny
mefme qui en ait approché.
Cette Riviere dont la fource
eft dans le Perche , paffe à
Chartres , à Nogent-le- Roy,
à Ivry , à Louviers , & va fe
joindre à la Seine au- deffus
du Pont de l'Arche , apres
avoir receu la Drouete , la
A ij
4 MERCURE
Blaie , l'Aure , la Vegre ,
I'Hon , l'Andelle , & divers
autres Ruiffeaux . On va commencer
à Maintenon le mer
veilleux Aqueduc qui luy
fera perdre fon cours ordinaire
, & comme la pente
qu'il faut qu'on luy donne
oblige à prendre un grand
tour, on peut juger combien
ce travail eft confidérable.
Vous ne devez point douter
qu'on ne m'envoye bientoft
la fin , puis que c'eft un
deffein du Roy, que l'on exécute.
L'utilité qu'en peut recevoir
Verfailles , & l'orne_
GALANT.
5
ment que fes fuperbes Jar
dins en tireront , n'eft pas ce
qui a le plus excité le Roy
à entreprendre un Ouvrage
fi digne de la grandeur Françoife,
telle qu'elle eft aujour
d'huy. Ce Prince a eu des
veuës plus dignes d'admiration
, & qui font connoiſtre
la bonté qu'il a pour fes Sujets.
Il a préveu que la plû
part de ceux à qui la Guerre
donnoit dequoy vivre , demeureroient
fans employ ; &
par cette grande entrepriſe il a
voulu leur fournir les moyens
de fubfifter, Il rend par là fon
A iij
6 MERCURE
Nom immortel , & la France
redoutable. Il fait connoiftre
aux Etrangers que fes Finances
ne font point épuiſées,
& que puis que fans rien diminuer
de fes autres dépen
fes , il en entreprend d'extraordinaires
prefque dans
F'instant qu'on voit la Guerre
finie , il feroit preft à la ſoûtenir
tout de nouveau , fren
troublant le repos qu'il vient .
de donner à l'Europe , on
le contraignoit de fe remettre
en Campagne .
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Résumé : Prélude, [titre d'après la table]
Louis XIV entreprend un projet ambitieux consistant à dévier la rivière Eure vers Versailles, comparable par son ampleur à des entreprises romaines. Contrairement aux projets antiques souvent réalisés sur plusieurs règnes, Louis XIV finance et voit immédiatement ses projets. La rivière Eure, prenant sa source dans le Perche, traverse plusieurs localités avant de se jeter dans la Seine. Un aqueduc sera construit à Maintenon pour modifier son cours, nécessitant un tracé complexe et coûteux. La principale motivation du roi n'est pas l'utilité de ce projet pour Versailles et ses jardins, mais de fournir du travail aux sujets affectés par la fin des guerres, démontrant ainsi sa bonté et sa prévision. Ce projet montre également la solidité des finances françaises, capables de soutenir de nouvelles dépenses extraordinaires malgré la fin récente des conflits.
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5
p. 136-185
Arras [titre d'après la table]
Début :
Le 19. ils disnerent à Sarbret, & ce qu'il y a de surprenant, [...]
Mots clefs :
Arras, Ville, Roi, Ambassadeurs, Comté, France, Dames, Ambassadeur, L'Arbret, Aix-Noulette, Temps, Église cathédrale, Place, Officiers, Actions, Armes, Magnificence, Fortifications, Régiment, Villeneuve, Gloire, Guerre, Prince, Citadelle, Mains, Lieutenant, Honneurs, Capitaine, Monarque, Merveilles
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Arras [titre d'après la table]
Le 19. ils difnerent à Sarbret
, & ce qu'il y a de furprenant
, c'eſt qu'encore qu'il
n'y euſt en cet endroit qu'une
ſeule maiſon , deſtinée ſeulement
pour la Poſte , & dans
laquelle il n'y a que des chevaux
, les Ambaſſadeurs y
furent ſervis avec la meſme
magnificence qu'à Paris , ce
qur
qui dans un petit lieu , où
l'on ne peut rien trouver
ſembla tenir de l'enchante-
2
des Amb. de Siam. 137
ment. Les Services paroiffoient
preſque auffi grands que la
Maiſon , ce qui fit dire au
premier Ambaſſadeur que tout
contribuoit à faire voir la magnificence
du Roy. Ils partirent
enfuite pour Arras , Capitale
de l'Artois fur la riviere de
Scarpe. C'eſt une Ville dont
les Fortifications font tresregulieres.
Elle est fort ancienne
, & eftoit la premiere
du Comté de Flandre, quand
Charles leChauvé ladonna en
dotàJudith ſa fille , que Baudoüin
ditBras de fer,Comte de
Flandre épouſa en 863. Elle fut
M
138 III. P. dùVoyage
réunie à la France avec tout
l'Artois en 1180. par le mariage
de Philippe Augufte , avec
Iſabelle de Hainaut , Fille de
Baudoüin V. Le Chapitre de
l'Eglife Cathedrale de Nôtre-
Dame eſt compoſé de 40.
Chanoines , & de 52. Chapelains.
L'Evêque d'Arras eft
Suffragant de Cambray. Il y
a encore d'autres belles Eglifes
, la celebre Abaye de S.
Vaft , & unCollege de Jefuites.
Cette Ville fut livrée à
Maximilien I. en 1493. & enfin
ſoûmiſe aux François en
1640.
des Amb. de Siam. 139.
Les Ambaſſadeurs arriverent
fur les trois heures àune
demie licuë de cette Place . La
Cavalerie qui estoit allée au
devant d'eux , lesy attendoit.
Elle estoit compofée de douze
Compagnies du Regiment
de Conigſmark de 40.Maîtres
chacune. M' Mullor premier
Major du Regiment les commandoit.
Lorſque les Ambaffadeurs
approcherent , il les
fit ſaluer de l'épée par toute
cette Cavalerie , qui preceda
enfuite leur Caroffe. Ils trouverent
à la Bariere de la Contreſcarpe
, Male Comte de
Mij
140 III . P. du Voyage
1
Villeneuve Lieutenant de
Roy d'Aras , & qui commande
en l'abſence deM leComte
de Nancré qui en eſtGouverneur.
Il eſtoit accompagné
de tous les Officiers Majors. Il
leur témoigna la joye qu'il
avoit de pouvoir leur rendre
tous les honneurs que Sa Majeſté
luy avoit ordonné de
leur faire. Ils répondirent à ce
compliment de la maniere la
plus honneſte , & qui pouvoit
mieux marquer leur reconnoiſſance
Ils entrerent enfuite
dans la Ville au bruit
du Canon, & au travers d'une
des Amb. de Siam , 14
double haye d'Infanterie.Elle
eſtoit compoſée du Regiment
de Phiffer , qui avoit la droite,
& de 4 Compagnies du Regiment
de Stoup le jeune ,
qui estoit à gauche , à la tête
deſquelles eſtoit M. Lifler Capitaine
du Regiment. Les
Ambaſſadeurs faluerent toutes
les Dames qui estoient aux
feneftres pour les voir paffer.
Toute l'Infanterie les ſalua
de la pique. Pendant cetems
le carillon de la Ville ſe faifoit
entendre , & l'on fonna
une Cloche appellée Ioyeuse ,
parce qu'on ne la ſonne ja
142 III. P. du Voyage
mais que pour des ſujets de
réjoüiſlance. Quand la tête
de la Cavalerie eût atteint la
queuë de la Garde , à la teſte
de laquelle estoit M Courteft
Capitaine de Phiffer , elle
s'ouvrit , & forma deux hayes
pour laiſſer paffer leurs Caroffes
. M le Comte de Villeneuve
les reçut à la porte de
leur logis , & les conduifit
dans leur chambre , où il
entra feul avec M Torf , &
les Officiers Majors. On lia
converfation en attendant
Mrs les Magiſtrats. Les Ambaſſadeurs
ſe ſervirent de ce
desAmb. de Siam. 143
temps pour demander combien
il y avoit de feux &
d'Habitans dans Arras , & de
quelle grandeur eſtoit la Ville,
dont ils marquerent ſouhaiter
le Plan. Le Pere Recteur
des Jefuites vint pendant ce
temps- là , & leur témoigna ſa
reconnoiſſance que toute la
Compagnie avoit du bon
accüeil que le Roy de Siam
faiſoit aux Jeſuites dans fon
Royaume. L'Ambaſſadeur
luy répondit que le Roy fon
Maître les estimoit beaucoup ,
qu'ils n'en pouvoiët douter, puis
qu'il en demandoit encore. Mrs
144 III. P. du Voyage
du Magiſtrat eftant enſuite
arrivez , les Ambaſſadeurs ſe
leverent de leurs fauteüils , &
apres qu'ils les eurent ſaluez
à leur maniere pour repondre
à leur falut , Mª Palifor
d'Incourt Confeiller de Ville ,
& Deputé General & ordinaire
des Etats d'Artois pour
te tiers Etat , leur parla de cetle
forte .
MESSEIGNEVRS,
Cette Ville d' Arras a toûjours esté
Si jalouſe d'exécuter les ordres du
Roy , qu'elle les a toûjours receus
avec autant d'empreffement que de
Soumiffion. Ceux que Sa Majesté
nous
des Amb.de Siam. 145
nous donne aujourd'huy de vous
honorer avec une distinction toute
finguliere, font fi precis &fi pofitifs
, que nous avons juſte ſujet de
craindre que nos efforts ne soient
auſſi vains là deſſus, que nos volontezfont
finceres & toutes remplies
de ce zéle qui a toûjours fait toute
l'ame&tout l'esprit de nostre obéiffance.
En effet, Meſſeigneurs , ce
grand Roy ne pouvoit pas publier
avec plus d'éclat l'estime qu'il fait
de vostre Monarque & de vos Per-
Sonnes, qui charmez de la gloire
qu'il s'est acquiſe dans les expeditions
de la Guerre , &de laſageſſe
de ſa conduite dans la Paix, avez
bien voulu traverſer tant de mers
&fuivre, pour ainsi dire, le cours
du Soleil , pour voir un Prince quż
par la rapidité defes Victoires Sçait
N
146 III. P. du Voyage
le mieux imiter le mouvement de
ce bel Astre , qu'il prend pour fa
Deviſe. Vous reſſemblez en cela à
l'excellente Princeffe Nicaulis Reine
d'Egypte & d'Ethiopie, laquelle
ayant entendu parler de la vertu &
de la sagesse de Salomon, defira de
voir de ses propres yeux ,fi ce que
la Renommée publivit de luy estoit
veritable ; elle ne craignit point
pour cet effet d'entreprendre un long
voyage ; & aprés avoir esté remplie
d'étonnement de voir dans ce Prince
une capacitéfi extraordinaire, &
tant de merveilles dansfon Royau
me , elle ne pût s'empêcher de s'écrier,
Probavi quod media pars
mihi nuntiata non fuerit , major
eft fapientia tua & opera tua ,
quam rumor quem audivi. Ainsi,
Meßeigneurs , nous ne doutons pas
3
1
des Amb. de Siam. 147
qu'aprés que vous aurez admiré
l'esprit de Loüis le Grand , qui est
le Salomon de nostre fiecle, dans la
grandeur & la magnificence deſes
Bâtimens , dans l'oeconomie de sa
Maison, dans le bel ordre de fes
Troupes nombreuſes tant sur mer
quesur terre , dans le nombre infiny
deſesſurprenantes Conquestes , dans
la regularité des Fortifications de
fes Places, & en un mot, dans tout
le reste deſa conduite, vous ne rapportiezfidellement
à voſtre Souverain
Seigneur , que le bonheur de
nostre augusteMonarquefurpaſſede
beaucoup tout ce que vous vous en
estiezimaginé, &qu'il faut l'avoir
vû pour le pouvoir croire. Au reſte,
Meſſeigneurs , nous ne pouvons
mieux répondre aux commandemens
de Sa Majesté , qu'en vous
Nij
148 III . P. du Voyage
Suppliant trés-humblement de nous
honorer des vostres , & d'agréer ces
petits Prefens que nous vous apportons
pour marque qu'il n'y a rien
dans la Ville qui ne foit entierement
à voſtre diſpoſition , & que
nous sommes avec tout le respect
dont nous sommes capables,
MESSEIGNEVRS,
Vos tres humbles &
tres- obéïffans Serviteurs ,
Les Mayeur & Eſchevins
de la Ville d'Arras ..
1
L'Ambaſſadeur répondit,
Que le Roy fon Maistre estoit
un grand Monarque , qui ayant
entendu parler de la grandeur
desAmb de Siam. 149
du Roy de France , defes Conquestes,
&deſes manieres toutes
genereuſes , avoit envoyé il y a
quelques années des Ambaſſadeurs
pour luy demander fon
amitié ; mais que ces Ambaſſadeurs
ayant vray-femblablement
pery, puiſqu'on n'en avoit point
entendu parler, Sa Majesté Siamoiſe
impatiente de voirfon defir
accomply, les avoit de nouveau
envoyezenFrance, non pour aucun
interest ny pour traiterd'affaires
, puisque l'on doit estre
affez perfuadé que ces deux
grands Rois n'en ont point à
démefler enſemble ; mais uni-
Niij
150 III . P. du Voyage
quement pour l'honorer & pour
luy marquer avec quel empreffement
le Roy de Siam recherche
fon amitié. Ils adjoûterent,
qu'ils avoient beaucoup d'obligation
au Roy de la reception
qu'il avoit ordonné qu'on leur
fift dans toutes les Villes où ils
avoient paßé , & qu'ils remer
cioient en particulierMrs d'Arras
, de l'honneur & des Prefens
qu'ils leur faisoient. Cette réponſe
fit connoiſtre qu'ils
avoient compris le ſens de la
Harangue, puiſque l'Hiſtoire
nous apprend que la Reine de
Saba n'eſtoit venuë voir Sa-
1
des Amb. de Siam. 151
lomon que pouffée du defir
de reconnoiſtre en luy toutes
les merveilles que la Renommée
en publioit, & non pour
traiter avec luy d'aucunes
affaires . M de Ville eftant
fortis , M le Comte de Villeneuve
leur demanda l'ordre
, & ils donnerent pour
mot , qui m'attaque fe pert. Il
eſt à propos de marquer icy
une choſe qui vous fera connoiſtre
les raiſons qu'ils ont
cuës de donner par tout les
mots qui ont eſte ſi approuvez
, & qui leur ont fait meriter
tant de loüanges. En
Niiij
152 III. P. du Voyage
approchant de chaque Ville,
ils s'informoient de l'hiſtoire
de la Ville où ils alloient , de
l'état de la Place , des Sieges
qu'elle avoit ſoûtenus, & du
merite , de la qualité & des
actions du Gouverneur ; & de
toutes ces chofes , ainſi que
de ce qui leur arrivoit , &
de ce qu'ils voyoient dans la
Place, ils formoient les mots
que pour leur faire plus
d'honneur & marquer plus
de déference , les Commandans
leur demandoient. C'eſt
pourquoy ils donnerent celuy
de qui m'attaque se pert,
des Amb. de Siam. 153
ayant appris que de nombreuſes
Armées remplies de
Troupes de differentes Na--
tions,&commandées par des
Chefs d'une grande experience
, & d'une haute reputation
, avoient eſté contraints
de lever le Siege de devant
Arras. Le concours du peuple
fut grand pour les voir
ſouper ; mais comme ils auroient
eſté trop incommodez
, on ne laiſſa entrer que
les premieres perſonnes de la
Ville , & les principales Dames,
auſquelles ils firent tout
le bon accüeil imaginable.
154 III . P. du Voyage
Ils donnerent à la plus confiderable
ce que leur Deffert
avoit de plus beau , pour le
diftribuer aux autres ; ce
qu'ils ont fait fort ſouvent
en de pareilles occaſions .
Ils ne fortirent point le
lendemain matin , mais ils
reçûrent les viſites de M. le
Comte de Villeneuve Lieutenant
de Roy , de M² Bifſetz
Major de la Place , des
principaux Officiers de la
Garnifon , & de quelques
Mrs du Confeil. La plupart
de la Nobleſſe des environs
d'Arras vint auſſi les falier.i
des Amb. de Siam. iss
Onleur propoſa de leur faire
entendre l'aprés- dînée ce qui
fut chanté à Sceaux devant
le Roy , lorſque Sa Majefté
fit l'honneur àMª de Seignelay
d'aller voir cette belle
Maiſon , à quoy ils confentirent.
On ne laiſſa entrer
que les Dames pour les voir
dîner. Sur les deux heures
Me le Comte de Villeneuve
les vint prendre dans quatre
Carroffes , pour les mener à
la Citadelle , où Mª de la
Pleigniere qui en eſt Gouverneur
, les fit recevoir au
bruit du Canon. Ils paffer
156 III. P. du Voyage
rent au travers de deux hayes
d'Infanterie , & les Officiers
les falüerent de la Pique. II
leur fit voir les Fortifications
de la Place ; ils les examinerent
toutes , & demanderent
le nom de chaque piece. Ils
virent auſſi faire l'Exercice à
un Bataillon de Picardie qui
eftoit ſous les Armes , à quoy
ils prirent beaucoup de plaifir
. On leur fit voir enſuite
l'Arcenal , & tout ce qu'il y
a de remarquable dans cette
Citadelle ; aprés quoy on leur
fervit une magnifiqueCollation
, où l'on bût de quandesAnb.
de Siam. 157
zité de differentes Liqueurs.
Les Dames les plus diftinguées
de la Ville s'eſtoient
renduës dans la Citadelle ,
pour les voir plus commodément.
Ils les regalerent
de Confitures , & trouverent
qu'Arras ne manquoit pas de
beautez . La Santé du Roy
ne fut pas oubliée , & quelques
Dames la bûrent auffi.
Cette Affemblée n'eſtoitcompoſée
que de Gens de marque
, puiſqu'outre les Dames
il n'y avoit d'Hommes que
les Officiers de la Garniſon,
tant de la Ville , que de
158 IHI. P. du Voyage
la Citadelle . L'Ambaſſadeur
ayant apperçu un Plan qui
eſtoit attaché à la Tapiſſerie,
demanda quel Plan c'eſtoit.
On luy répondit , que s'eftoit
celuy de la Citadelle ; &
il le demanda à Mª de la
Pleigniere, qui le luy donna.
Comme ils avoient encore
beaucoup de choſes à
voir pendant le reſte de l'aprés-
dînée , ils ſortirent aufſi
- tôt que la Collation fut
finie , aprés avoir remercié
Mª de la Pleigniere en termes
fort obligeans, & le Canonſe
fit entendre à leur for
des Amb . de Siam. 159
tie de la même maniere qu'il
avoit fait lorſqu'ils eftoient
entrez. Ils allerent de là à
F'Eglife Cathedrale , où tout
le Peuple eſtoit accouru en
foule ; ils furent reçûs au
grand Portail par tout leChapitre
en corps , ce qui marquoit
quelque choſe de venerable
& d'augufte. Il avoit
à ſa tête M. le Févre
Prevoſt , Chanoine & Theologal
de cette Cathedrale ,
que nous avons veu Aumônier
& Predicateur de la Reine.
Voicy en quels termes
it parla aux Ambaſſadeurs .
160 III. P. du Voyage
MESSEIGNEURS ,
Puisque Sa Majesté vous envoye
furfes Frontieres pour vous rendre
Spectateurs de ſes Conquestes , que
la Renommée a portées jusqu'au
bout du Monde , ce qui vous afait
traverſer tant de Mers pour venir
admirer ce Salomon de nôtre Siecle
, nous ofons vous afſeurer que
la Ville d'Arras est un des plus
beaux &un des plus anciens Fleurons
de sa Couronne , & qu'il n'a
point dans tous ſes Estats de Province
plus memorable que celle
d'Artois , puisqu'elle a toûjours esté
regardée comme l'oeil & la clefde
toute la Flandre. En effet , Cefar
même n'a point balancé de paſſer
les Alpes , & de faire voir l'Aigle
Romaine aux Portes de cette CapidesAmb.
de Siam. 161
tale , dont le Siege luy cousta si
cher, qu'il avoue dansſes Commentaires
, que dans toutes les autres
attaques il avoit combattu pour la
gloire , mais qu'il avoit dans cellecy
deffendu fa propre vie , tant il
avoit trouvé de courage & de reſiſtance
dans lesPeuples qui la deffendoient.
On en voit encore les
glorieux restes , dans ce fameux
Camp * qui nous environne , où
ce grand Capitaine fut obligé de
demeurer fort long-temps , ne pou
vant vaincre cette genereuse opiniaſtreté
des Artefiens , qui arresta
le cours de ſes Victoires , &qui luy
fit acheter fi cherement la gloire
qu'il en remporta.
Cette Comté fameuse ayant par la
viciffitude des Temps & la revo-
*Le Camp de Cefar prés de l'Abbaye d'Eſtrun
162 III . P. duVoyage
lution des Guerres changé deMaitre
, & passé des mains des Ro
mains , dans celles des François,نم
de Payenne estant devenue Chrétienne,
fut l'Appanage de nos Princes
du Sang. Le grand faint Louys
enfit un Present à Robertfon Frere
; luy laiſſant pour partage les
Fleurs-de-Lys fans nombre , * it
luy fit comprendre qu'il ne devoit
point donner de bornes àson courage
sous un si glorieux Eftendart.
C'est ce Robert d'Artois qui paffantfur
le ventre à tant d'Infideles,
dont il achevoit la deffaiteà la
Mazoure dans l'Egypte , en devint
enfin la Victime , se croyant trop
heureux de verſertoutsonfangpour
la querelle du Sauveur du Monde ,
dont il vouloit arracher le facré
* Qui font les Armes encore aujourd'huy de
cetteProvince,
des Amb. de Siam. 163
Sepulchre des mains des Ottomans,
àla pointe deson épée.
Maissi cette Ville d'Arras s'est
distinguéepar les actions heroïques
qui se sont paßées au pied deses
murailles, &parses Princes qui se
font transportez chez les Nations
tesplus reculées pourysignaler leur
valeur , elle n'est pas moins recommandable
par ce fameux Traité de
Paix d'Arras en 1435.qui mit fin
à tant de differens, &à unesifanglante
guerre qui s'estoit allumée
dans toute l'Europe , ou le Duc de
Bourgogne fut en perſonne avec la
Ducheffefon Epouse Infante de Por
tugal. Ce Traitéy attira tout ce qu'il
yavoit de gens plus confiderables &
plus nobles fur la terre , les Legats
du Pape Eugene IV. ceux du Concile
de Bafle,&de l'Anti-Pape Fe
O ij
164 III. P. du Voyage
lix. L'EmpereurSigismond, lesRois
de Caſtille, d'Arragon, de Navarre,
de Naple , de Sicile & de Chypre,
de Dannemark & de Pologne, yenu.
voyerent leurs Ambaſſadeurs , qui .
jaloux de la gloire de leurs Nations
, affectoient une magnificence
extraordinaire . Ceux de France &
d'Angleterre encherirentfur les au
tres par la pompe de leurs Equipages
, les Ducs de Bourbon & de
Vendofme, avec les Conneſtable &
Chancelier, les Marcſchaux deRieux.
& de la Fayette, Adam de Cambray
Premier President au Parlement de
Paris,tous accompagnez d'une infinité
de Nobleffe de la Nation, qui
par leur politeffe & leur lustre don
nerent une haute idée de la leur.
Ce fut dans cetteAſſemblée que le..
Roy de France &le Duc de BourdesAmb.
de Siam. 165
gogne jetterent les fondemens d'une
Paix fincere, dont les fuites ont
esté trés- avantageuses à toute l'Europe
, qui fut jurée folemnellement
dans cette Eglise Cathedrale.
Voilà, Meffſeigneurs , l'éclat que
ba Ville d'Arras a tiré de la Paix
comme de la Guerre ; & cette Capitale
ayant depuis tombé tantôt.
dans les mains de Lauys XI. tantôt
dans celles de l'Empereur Maximilien
, qui faisoient à l'envy
leurs efforts pout s'en rendre les
Maistres , elle fut ensuite la dépofitaire
des cendres des Heros les.
plus distinguez dans la Guerre ;
puisque le Duc de Parme &le Maréchal
de Gaffion fant ensevelis.
dans l'enceinte de ses murailles,
comme si c'estoit le deftin à cette
Ville martiale de garder les précieux.
166 III. P. du Voyage
reftes de la bravoure& de la ge
nerosité qui fut le partage de ces
deux grands Capitaines.
Enfin Louys le lufte fut le dernier
Prince qui s'en afſeura la conqueste
par ses Armes victorieuses .
Elle ne balança pas d'ouvrir fis
Portes à un Roy qui devoit finir
fes miferes auffi- tôt qu'elle deviendroit
sasujette ; &pour en écarter
àjamais la tempeste qui la me
naçoit , LOVIS LE GRAND
en a reculé si loin la Frontiere de
fes Estats , qu'elte en est aujour
d'huy le centre , au lieu qu'elle en
estoit autrefois l'extremité : fi bien
que comme le grand Pompée fe
vantoit d'avoir fait parsa victoire
de l'Asie mineure , le milieu de
l'Empire Romain , qu'elle bornoiz
auparavant ; auffi l'on peut dire
des Amb. de Siam. 167
que la fameuse Ville d'Arras doit
aux Armesde LOVIS LE GRAND
l'avantage d'estre aujour'dbuy le
coeur de la France , dont elle estoit
cy - devant la teste.
Mais il manquoit àfagloire d'avoir
pour témoins deses antiquitez,
deses Fortifications , &defes
fertiles Campagnes , les Peuples les
plus reculez , quipour admirer toutes
ces merveilles ont traversé
toute la distance qui ſeparele Gange
d'avec la Mer Occidentale ,
qui vivant dans des Climats où
le Soleil commence sa course , font
venus jusqu'à ceux où ce grand
Aftre la finit ; en forte que l'on
peut dire de chacun de vous, Mef-
Seigneurs, ce que nous liſons dans
LeRoyProphete, quand il nous veut
donner une idée de fon mouve168
III . P. du Voyage
ment : * Exultavit ut gigas ad
currendam viam à ſummo Cælo
egreffio ejus , & occurfus ejus,
uſque ad fummum ejus.
Heureuſe Province , d'avoir receu
des Ambassadeurs Estrangers,
également venerables par le Prince
qu'ils reprefentent , &par l'importance
de leur ministere , qui n'ont
point apprehendé de faire un Voyage
de fix mille lieües pour ſe ménager
une Alliance avec LOVIS
LE GRAND. Ils pourront apprendre
au Roy de Siam toutes les
chofes quise font paßées sous fon
Regne , les grandes & fameuses
Victoires qu'il a remportées , les
Provinces qu'il a conquiſes , les
Citadelles qu'il a fait élever au
milien des Eaux , les Marais qu'il
*Pfal.. 44
desAmb de Siam. 169
deſſechez, le fecret qu'il a trouvé
de faire une Digue à la Mer,
pour arreſter l'impetuosité de ses ondes
qui n'avoient point encore più
trouver d'obstacle à leur rapidité.
Sans doute , Meſſeigneurs , le Roy
de Siam furpris de tant de merveilles
, se fera de LOVIS LE
GRAND une idée bien au deſſus
de celle que sa reputation luy avoit
donnée. Vôtre Roy que vous nommez
chez vous le Seigneur des Seigneurs
, & la seule cause du bon
heur deses Peuples , fera bien aiſe
d'apprendre de vous que vom avez
trouvé les François pleins de refpect
& de foimiſſion pour leur
Prince. Puiſſi z vous l'affeurer qu'il
n'est pas moins l'exemple , que le
Souverain de fes Sujets , &qu'il les
gouverne encore plus parses vertus,
P
1
170 III. P. du Voyage
que parses Loix. Peut- estre qu'en
luy representant l'Architecture &م
la beauté de cette Cathedrale , ore
reposent les cendres de Monfieur le
Comte de Vermandois , qui marchant
fur les traces de fon auguste Pere ,
aujourd'huy le plus grand des Rois ,
commençoit à ſe ſignaler déja dans la
Guerre ( C'est le précieux dépost que
Sa Majesté nous a confié depuis trois
ans dans ce Temple , où les ceremonies
de l'Eglife Chrétienne se celebrent
avec tant d'exactitude, & qui
depuis plus de treize Siecles a toujours
efté deffervie par tant de Saints
Evêques par tant de Chanoines,
d'un merite fi diftingué ) Peut- estre,
dis - je , que par un miracle qui n'a
point encore paru dans nosjours , le
Ciclouvrira fon coeur , & le faisant
fortir avec ses sujets des tenebres
des Amb. de Siam. 171
qui les aveuglent , il luy donnera
l'envie d'imiter LOVIS LE
GRAND dans sa Religion , comme
dans sa Domination : fi bienque
faisant tous deux une Alliance de
picté , comme de commerce ilsferont
tous deux également heureux
dans ce Monde , &pourront ajous.
ter à la Couronne qu'ils poſſedent
déjafur la Terre , celle de l'Eternité.
,
CetteHarangue ayant eſté
interpretée , l'Ambaſſadeur
répondit , Voftre Harangue ,
Monfieur , roule fur deux chefs,
fur la gloire de Loüis XIV. &
fur le defir que vous avez ainſi
que Sa Majesté , de noftre con-
Pij
172 III. P. du Voyage
version. A l'égard du premier,
on ne peut estre mieux perfuadé
que nous leſommes, des grandes
actions de ce Monarque , dont
la reputation nous a fait venir
de fi loin. Nous ne doutons pas
non plus defa magnificence &
de fa grandeur, puisque nous en
avons fait une experience ſenſible
à ſa Cour &furfes Frontieres.
A l'égard du ſecond point
qui regarde nostre converſion à
la Foy Catholique Romaine, nous
avons des Evesques en noftre
Royaume , qui pourront nous en
inftruire. Il remercia enfuite
tout le Corps du Chapitre,
des Amb. de Siam. 173
de l'honneur qu'il leur faifoit
; aprés quoy ils regarderent
l'Egliſe tant par dehors
que par dedans. Ils entrerent
dans le Choeur , dont ils admirerent
l'Architecture , &
particulierement les petits pilliers
qui ſoûtiennent un auffi
grand Vaiſſeau. On les conduifit
vers la Tombe de M
le Comte de Vermandois , &
on leur dit , qu'il eſtoit grand
Admiral, legitimé de France, &
Frere de Madame la Princeffe de
Conty. L'on s'apperceut alors
qu'ils ſe mirent tous trois fur
ce Tombeau, qu'ils porterent
Piij
174 III . P. du Voyage
leurs mains à leurs yeux , &
qu'ils les frotterent ; & l'on
apprit que c'eſt une maniere
uſitée chez eux pour témoigner
leur deüil. Ils prirent
beaucoup de plaisir à entendre
les Orgues de cette Cathedrale
, qui font fort bonnes
; & fortirent de cette
Egliſe aprés avoir fait de
nouveaux remercîmens au
Prevoſt & aux Chanoines .
Apres cela ils allerent au
Magaſin d'Armes, qu'ils trouverent
en trés-bon état. C'eſt
l'effet des ſoins du Miniſtre
qui s'en meſle. Ils virent auffi
desAmb . de Siam , 175
la celebre Abbaye de Saint-
Vaaſt , & furent receus à la
Porte par le Grand Prieur ,
qui eſtoit à la teſte de fa
Communauté , & qui leur fit
un compliment affez court.
Il le finit en diſant , qu'ils les
recevoient avec tous les honneurs
qu'il eſtoit en leur pouvoir de
leurfaire, puiſque la haute eftime
que Sa Majesté faisoit du
Monarque qui les luy avoit envoyez,
&la confideration particuliere
qu'Elle avoit pour leurs
Excellences , estoit la régle du
profond respect avec lequel ils
ſe preſentoient à eux, en leur
Piiij
176 III. P. du Voyage
offrant très-humblement leMonastere
& tout ce qui en dépendoit.
Ils répondirent qu'ils eftoient
bien perfuadez que les
honneurs que ces Religieux leur
rendoient, estoient une continiation
des effets de la bonté du
Roy à leur égard , & que c'eftoit
à Sa Majesté à qui ils en
avoient toute l'obligation ; mais
qu'ils vouloient pourtant leur en
avoir aufſi. Enfuite ils les
remercierent de la maniere
honneſte dont ils en uſoient;
aprés quoy ils entrerent dans
l'Eglife , & s'arreſterent dans
la Nef pour en confiderer la
des Amb. de Siam. 177
ſtructure ; ce qu'ils firent fort
attentivement. Puis ils entrerent
au Choeur , & s'attacherent
à regarder la ſculpture
des Chaiſes, qui eſt trés-belle
&fort eſtimée . On leur montra
leTombeau du RoyThierry
de la premiere Race , & Fondateur
de ce Convent ; & on
leur dit qu'il ne s'en faloit que
8 années qu'il ne fuft mort ily
a mille ans. L'Ambaſſadeur
demanda comment il eſtoit poffible
qu'ily eust un Roy de France
enterré dans cette Abbaye depuis
fi longtemps , &qu'ily en
cust fi peu , que ce Pays ap
178 III. P. du Voyage
partenoit à la France , Arras
ayant esté pris par le feu Roy.
Le Grand Prieur leur expliqua
en peu de mots , comment
tout le Pays-bas eſtoit
une partie du Royaume de
France ; qu'il n'en avoit eſté
ſeparé que trés-peu de temps,
ſçavoir depuis l'an 1525. jufques
en l'an 1640. & qu'à
l'exception de ce temps-là,
les Rois de France en avoient
toûjours eſté reconnus pour
legitimes Souverains . On les
mena au fortir de l'Eglife ,
dans les Cloiftres, & dans un
Refectoire. De là ils repaffe
des Amb. de Siam. 179
rent par l'Eglife , & eftant à
la porte , l'Ambaſſadeur fit
tout ce qu'il pût pour empeſcher
le Grand Prieur de le
conduire juſqu'à fon carroffe
; mais il crut eſtre obligé
de l'y voir monter. Je ne
vous parleray point des complimens
de remercîment que
firent les Ambaſſadeurs , & je
les retrancheray meſme en
beaucoup d'endroits, puiſque
leur civilité eſt aſſez connuë
pour ne pas douter qu'ils n'en
ayent donné des marques à
toutes les perſonnes qui ont
pris la peine de leur montrer
quelque choſe.
180 III. P. du Voyage
Au fortir de l'Abbaye de
Saint Vaaft , ils allerent au
Concert dont on leur avoit
parlé le matin , & dont Madame
de Préfontaine, femme
du Prefident du Confeil d'Artois
, faifoit les honneurs
Elle les reçût accompagnée
des principales Dames de la
Ville. Les Muficiens estoient
dans une fort grande Salle,
dans laquelle il ſe trouva une
grande affluence de monde,
quelque ordre qu'on cût apporté
pour empêcher la foule.
Ils furent fort fatisfaits
de ce Concert , & le témoides
Amb . de Siam. 181
gnerent à Madame de Préfontaine
, en luy faiſant leurs
remerciemens . Ils retournerent
enſuite chez eux , où ils
trouverent leur Garde ſous
les Armes ; car on avoit mis
à la porte de leur Logement
une Compagnie Suiſſe , avec
un Capitaine & un Lieutenant.
Elle fortoit du Corps
de garde pour ſe mettre en
hayequand les Ambaſſadeurs
devoient fortir , & battoit
lorſqu'ils fortoient & qu'ils
rentroient. Aufli - tôt qu'ils
furent arrivez chez eux , Mr
Biſſetz leur porta le Plan de
182 III. P.du Voyage
la Ville que le premier Am
baffadeur luy avoit deman-
-dé , & qu'il examina d'une
maniere qui marquoit qu'il
commençoit à devenir ſçavant
dans nos Fortifications .
Ce même Major leur demanda
le mot , & ils donnerent
Actions éclatantes , par
rapport à ce ce qu'on leur
avoit dit, qu'aux deux Sieges
d'Arras il y avoit eu beaucoup
d'actions remarquables,
& particulierement au ſecond
, où les Afliegeans avoient
ſouvent eſté repouffez.
On leur avoit même
4
des Amb. de Siam. 183
montré les endroits où les
actions de vigueur s'eftoient
-faites . Le premier Ambaffadeur
demanda à M Biffetz
, s'il estoit François ; &
comme on luy eut répondu ,
que oüy , &qu'il estoit Major
de la Place , il luy dit , qu'en
fon Pays on avoit la barbe &
les cheveux comme luy. M
Biſſetz luy répondit , que s'il
n'eſtoit point François , il voudroit
estre Siamois . Comme
il y avoit beaucoup de Dames
à Arras qui n'avoient
encore pû les voir , il s'en
trouva beaucoup ce foir-là à
r
184 III. P.du Voyage
leur ſoûpé , où tout ſe paſſa
à lordinaire .
Le lendemain 21. M le
Lieutenant de Roy & Ms les
Officiers Majors , ſe rendirent
à leur lever ; & les Ambaſſadeurs
aprés les avoir remerciez
avec des expreffions
pleines de reconnoiffance ,
monterent en Carroſſe à huit
heures préciſes du matin ; &
toutes les Troupes eſtant
fous les Armes comme à leur
arrivée , ils fortirent au bruit
du Canon & du Carillon de
la Ville. Mes du Magiſtrat
le firent joüer trois fois le
desAmb. de Siam. 185
jour pendant tout le temps
que ces Ambaſſadeurs féjournerent
à Arras , ſçavoir une
heure au matin , une hcure à
midy , & une heure. le ſoir,
ainſi qu'à leur entrée & à leur
fortie . Ils allerent ce jour-là
21. dîner à Aiffe , qui eſt un
petit Village entre Arras &
Bethune.
, & ce qu'il y a de furprenant
, c'eſt qu'encore qu'il
n'y euſt en cet endroit qu'une
ſeule maiſon , deſtinée ſeulement
pour la Poſte , & dans
laquelle il n'y a que des chevaux
, les Ambaſſadeurs y
furent ſervis avec la meſme
magnificence qu'à Paris , ce
qur
qui dans un petit lieu , où
l'on ne peut rien trouver
ſembla tenir de l'enchante-
2
des Amb. de Siam. 137
ment. Les Services paroiffoient
preſque auffi grands que la
Maiſon , ce qui fit dire au
premier Ambaſſadeur que tout
contribuoit à faire voir la magnificence
du Roy. Ils partirent
enfuite pour Arras , Capitale
de l'Artois fur la riviere de
Scarpe. C'eſt une Ville dont
les Fortifications font tresregulieres.
Elle est fort ancienne
, & eftoit la premiere
du Comté de Flandre, quand
Charles leChauvé ladonna en
dotàJudith ſa fille , que Baudoüin
ditBras de fer,Comte de
Flandre épouſa en 863. Elle fut
M
138 III. P. dùVoyage
réunie à la France avec tout
l'Artois en 1180. par le mariage
de Philippe Augufte , avec
Iſabelle de Hainaut , Fille de
Baudoüin V. Le Chapitre de
l'Eglife Cathedrale de Nôtre-
Dame eſt compoſé de 40.
Chanoines , & de 52. Chapelains.
L'Evêque d'Arras eft
Suffragant de Cambray. Il y
a encore d'autres belles Eglifes
, la celebre Abaye de S.
Vaft , & unCollege de Jefuites.
Cette Ville fut livrée à
Maximilien I. en 1493. & enfin
ſoûmiſe aux François en
1640.
des Amb. de Siam. 139.
Les Ambaſſadeurs arriverent
fur les trois heures àune
demie licuë de cette Place . La
Cavalerie qui estoit allée au
devant d'eux , lesy attendoit.
Elle estoit compofée de douze
Compagnies du Regiment
de Conigſmark de 40.Maîtres
chacune. M' Mullor premier
Major du Regiment les commandoit.
Lorſque les Ambaffadeurs
approcherent , il les
fit ſaluer de l'épée par toute
cette Cavalerie , qui preceda
enfuite leur Caroffe. Ils trouverent
à la Bariere de la Contreſcarpe
, Male Comte de
Mij
140 III . P. du Voyage
1
Villeneuve Lieutenant de
Roy d'Aras , & qui commande
en l'abſence deM leComte
de Nancré qui en eſtGouverneur.
Il eſtoit accompagné
de tous les Officiers Majors. Il
leur témoigna la joye qu'il
avoit de pouvoir leur rendre
tous les honneurs que Sa Majeſté
luy avoit ordonné de
leur faire. Ils répondirent à ce
compliment de la maniere la
plus honneſte , & qui pouvoit
mieux marquer leur reconnoiſſance
Ils entrerent enfuite
dans la Ville au bruit
du Canon, & au travers d'une
des Amb. de Siam , 14
double haye d'Infanterie.Elle
eſtoit compoſée du Regiment
de Phiffer , qui avoit la droite,
& de 4 Compagnies du Regiment
de Stoup le jeune ,
qui estoit à gauche , à la tête
deſquelles eſtoit M. Lifler Capitaine
du Regiment. Les
Ambaſſadeurs faluerent toutes
les Dames qui estoient aux
feneftres pour les voir paffer.
Toute l'Infanterie les ſalua
de la pique. Pendant cetems
le carillon de la Ville ſe faifoit
entendre , & l'on fonna
une Cloche appellée Ioyeuse ,
parce qu'on ne la ſonne ja
142 III. P. du Voyage
mais que pour des ſujets de
réjoüiſlance. Quand la tête
de la Cavalerie eût atteint la
queuë de la Garde , à la teſte
de laquelle estoit M Courteft
Capitaine de Phiffer , elle
s'ouvrit , & forma deux hayes
pour laiſſer paffer leurs Caroffes
. M le Comte de Villeneuve
les reçut à la porte de
leur logis , & les conduifit
dans leur chambre , où il
entra feul avec M Torf , &
les Officiers Majors. On lia
converfation en attendant
Mrs les Magiſtrats. Les Ambaſſadeurs
ſe ſervirent de ce
desAmb. de Siam. 143
temps pour demander combien
il y avoit de feux &
d'Habitans dans Arras , & de
quelle grandeur eſtoit la Ville,
dont ils marquerent ſouhaiter
le Plan. Le Pere Recteur
des Jefuites vint pendant ce
temps- là , & leur témoigna ſa
reconnoiſſance que toute la
Compagnie avoit du bon
accüeil que le Roy de Siam
faiſoit aux Jeſuites dans fon
Royaume. L'Ambaſſadeur
luy répondit que le Roy fon
Maître les estimoit beaucoup ,
qu'ils n'en pouvoiët douter, puis
qu'il en demandoit encore. Mrs
144 III. P. du Voyage
du Magiſtrat eftant enſuite
arrivez , les Ambaſſadeurs ſe
leverent de leurs fauteüils , &
apres qu'ils les eurent ſaluez
à leur maniere pour repondre
à leur falut , Mª Palifor
d'Incourt Confeiller de Ville ,
& Deputé General & ordinaire
des Etats d'Artois pour
te tiers Etat , leur parla de cetle
forte .
MESSEIGNEVRS,
Cette Ville d' Arras a toûjours esté
Si jalouſe d'exécuter les ordres du
Roy , qu'elle les a toûjours receus
avec autant d'empreffement que de
Soumiffion. Ceux que Sa Majesté
nous
des Amb.de Siam. 145
nous donne aujourd'huy de vous
honorer avec une distinction toute
finguliere, font fi precis &fi pofitifs
, que nous avons juſte ſujet de
craindre que nos efforts ne soient
auſſi vains là deſſus, que nos volontezfont
finceres & toutes remplies
de ce zéle qui a toûjours fait toute
l'ame&tout l'esprit de nostre obéiffance.
En effet, Meſſeigneurs , ce
grand Roy ne pouvoit pas publier
avec plus d'éclat l'estime qu'il fait
de vostre Monarque & de vos Per-
Sonnes, qui charmez de la gloire
qu'il s'est acquiſe dans les expeditions
de la Guerre , &de laſageſſe
de ſa conduite dans la Paix, avez
bien voulu traverſer tant de mers
&fuivre, pour ainsi dire, le cours
du Soleil , pour voir un Prince quż
par la rapidité defes Victoires Sçait
N
146 III. P. du Voyage
le mieux imiter le mouvement de
ce bel Astre , qu'il prend pour fa
Deviſe. Vous reſſemblez en cela à
l'excellente Princeffe Nicaulis Reine
d'Egypte & d'Ethiopie, laquelle
ayant entendu parler de la vertu &
de la sagesse de Salomon, defira de
voir de ses propres yeux ,fi ce que
la Renommée publivit de luy estoit
veritable ; elle ne craignit point
pour cet effet d'entreprendre un long
voyage ; & aprés avoir esté remplie
d'étonnement de voir dans ce Prince
une capacitéfi extraordinaire, &
tant de merveilles dansfon Royau
me , elle ne pût s'empêcher de s'écrier,
Probavi quod media pars
mihi nuntiata non fuerit , major
eft fapientia tua & opera tua ,
quam rumor quem audivi. Ainsi,
Meßeigneurs , nous ne doutons pas
3
1
des Amb. de Siam. 147
qu'aprés que vous aurez admiré
l'esprit de Loüis le Grand , qui est
le Salomon de nostre fiecle, dans la
grandeur & la magnificence deſes
Bâtimens , dans l'oeconomie de sa
Maison, dans le bel ordre de fes
Troupes nombreuſes tant sur mer
quesur terre , dans le nombre infiny
deſesſurprenantes Conquestes , dans
la regularité des Fortifications de
fes Places, & en un mot, dans tout
le reste deſa conduite, vous ne rapportiezfidellement
à voſtre Souverain
Seigneur , que le bonheur de
nostre augusteMonarquefurpaſſede
beaucoup tout ce que vous vous en
estiezimaginé, &qu'il faut l'avoir
vû pour le pouvoir croire. Au reſte,
Meſſeigneurs , nous ne pouvons
mieux répondre aux commandemens
de Sa Majesté , qu'en vous
Nij
148 III . P. du Voyage
Suppliant trés-humblement de nous
honorer des vostres , & d'agréer ces
petits Prefens que nous vous apportons
pour marque qu'il n'y a rien
dans la Ville qui ne foit entierement
à voſtre diſpoſition , & que
nous sommes avec tout le respect
dont nous sommes capables,
MESSEIGNEVRS,
Vos tres humbles &
tres- obéïffans Serviteurs ,
Les Mayeur & Eſchevins
de la Ville d'Arras ..
1
L'Ambaſſadeur répondit,
Que le Roy fon Maistre estoit
un grand Monarque , qui ayant
entendu parler de la grandeur
desAmb de Siam. 149
du Roy de France , defes Conquestes,
&deſes manieres toutes
genereuſes , avoit envoyé il y a
quelques années des Ambaſſadeurs
pour luy demander fon
amitié ; mais que ces Ambaſſadeurs
ayant vray-femblablement
pery, puiſqu'on n'en avoit point
entendu parler, Sa Majesté Siamoiſe
impatiente de voirfon defir
accomply, les avoit de nouveau
envoyezenFrance, non pour aucun
interest ny pour traiterd'affaires
, puisque l'on doit estre
affez perfuadé que ces deux
grands Rois n'en ont point à
démefler enſemble ; mais uni-
Niij
150 III . P. du Voyage
quement pour l'honorer & pour
luy marquer avec quel empreffement
le Roy de Siam recherche
fon amitié. Ils adjoûterent,
qu'ils avoient beaucoup d'obligation
au Roy de la reception
qu'il avoit ordonné qu'on leur
fift dans toutes les Villes où ils
avoient paßé , & qu'ils remer
cioient en particulierMrs d'Arras
, de l'honneur & des Prefens
qu'ils leur faisoient. Cette réponſe
fit connoiſtre qu'ils
avoient compris le ſens de la
Harangue, puiſque l'Hiſtoire
nous apprend que la Reine de
Saba n'eſtoit venuë voir Sa-
1
des Amb. de Siam. 151
lomon que pouffée du defir
de reconnoiſtre en luy toutes
les merveilles que la Renommée
en publioit, & non pour
traiter avec luy d'aucunes
affaires . M de Ville eftant
fortis , M le Comte de Villeneuve
leur demanda l'ordre
, & ils donnerent pour
mot , qui m'attaque fe pert. Il
eſt à propos de marquer icy
une choſe qui vous fera connoiſtre
les raiſons qu'ils ont
cuës de donner par tout les
mots qui ont eſte ſi approuvez
, & qui leur ont fait meriter
tant de loüanges. En
Niiij
152 III. P. du Voyage
approchant de chaque Ville,
ils s'informoient de l'hiſtoire
de la Ville où ils alloient , de
l'état de la Place , des Sieges
qu'elle avoit ſoûtenus, & du
merite , de la qualité & des
actions du Gouverneur ; & de
toutes ces chofes , ainſi que
de ce qui leur arrivoit , &
de ce qu'ils voyoient dans la
Place, ils formoient les mots
que pour leur faire plus
d'honneur & marquer plus
de déference , les Commandans
leur demandoient. C'eſt
pourquoy ils donnerent celuy
de qui m'attaque se pert,
des Amb. de Siam. 153
ayant appris que de nombreuſes
Armées remplies de
Troupes de differentes Na--
tions,&commandées par des
Chefs d'une grande experience
, & d'une haute reputation
, avoient eſté contraints
de lever le Siege de devant
Arras. Le concours du peuple
fut grand pour les voir
ſouper ; mais comme ils auroient
eſté trop incommodez
, on ne laiſſa entrer que
les premieres perſonnes de la
Ville , & les principales Dames,
auſquelles ils firent tout
le bon accüeil imaginable.
154 III . P. du Voyage
Ils donnerent à la plus confiderable
ce que leur Deffert
avoit de plus beau , pour le
diftribuer aux autres ; ce
qu'ils ont fait fort ſouvent
en de pareilles occaſions .
Ils ne fortirent point le
lendemain matin , mais ils
reçûrent les viſites de M. le
Comte de Villeneuve Lieutenant
de Roy , de M² Bifſetz
Major de la Place , des
principaux Officiers de la
Garnifon , & de quelques
Mrs du Confeil. La plupart
de la Nobleſſe des environs
d'Arras vint auſſi les falier.i
des Amb. de Siam. iss
Onleur propoſa de leur faire
entendre l'aprés- dînée ce qui
fut chanté à Sceaux devant
le Roy , lorſque Sa Majefté
fit l'honneur àMª de Seignelay
d'aller voir cette belle
Maiſon , à quoy ils confentirent.
On ne laiſſa entrer
que les Dames pour les voir
dîner. Sur les deux heures
Me le Comte de Villeneuve
les vint prendre dans quatre
Carroffes , pour les mener à
la Citadelle , où Mª de la
Pleigniere qui en eſt Gouverneur
, les fit recevoir au
bruit du Canon. Ils paffer
156 III. P. du Voyage
rent au travers de deux hayes
d'Infanterie , & les Officiers
les falüerent de la Pique. II
leur fit voir les Fortifications
de la Place ; ils les examinerent
toutes , & demanderent
le nom de chaque piece. Ils
virent auſſi faire l'Exercice à
un Bataillon de Picardie qui
eftoit ſous les Armes , à quoy
ils prirent beaucoup de plaifir
. On leur fit voir enſuite
l'Arcenal , & tout ce qu'il y
a de remarquable dans cette
Citadelle ; aprés quoy on leur
fervit une magnifiqueCollation
, où l'on bût de quandesAnb.
de Siam. 157
zité de differentes Liqueurs.
Les Dames les plus diftinguées
de la Ville s'eſtoient
renduës dans la Citadelle ,
pour les voir plus commodément.
Ils les regalerent
de Confitures , & trouverent
qu'Arras ne manquoit pas de
beautez . La Santé du Roy
ne fut pas oubliée , & quelques
Dames la bûrent auffi.
Cette Affemblée n'eſtoitcompoſée
que de Gens de marque
, puiſqu'outre les Dames
il n'y avoit d'Hommes que
les Officiers de la Garniſon,
tant de la Ville , que de
158 IHI. P. du Voyage
la Citadelle . L'Ambaſſadeur
ayant apperçu un Plan qui
eſtoit attaché à la Tapiſſerie,
demanda quel Plan c'eſtoit.
On luy répondit , que s'eftoit
celuy de la Citadelle ; &
il le demanda à Mª de la
Pleigniere, qui le luy donna.
Comme ils avoient encore
beaucoup de choſes à
voir pendant le reſte de l'aprés-
dînée , ils ſortirent aufſi
- tôt que la Collation fut
finie , aprés avoir remercié
Mª de la Pleigniere en termes
fort obligeans, & le Canonſe
fit entendre à leur for
des Amb . de Siam. 159
tie de la même maniere qu'il
avoit fait lorſqu'ils eftoient
entrez. Ils allerent de là à
F'Eglife Cathedrale , où tout
le Peuple eſtoit accouru en
foule ; ils furent reçûs au
grand Portail par tout leChapitre
en corps , ce qui marquoit
quelque choſe de venerable
& d'augufte. Il avoit
à ſa tête M. le Févre
Prevoſt , Chanoine & Theologal
de cette Cathedrale ,
que nous avons veu Aumônier
& Predicateur de la Reine.
Voicy en quels termes
it parla aux Ambaſſadeurs .
160 III. P. du Voyage
MESSEIGNEURS ,
Puisque Sa Majesté vous envoye
furfes Frontieres pour vous rendre
Spectateurs de ſes Conquestes , que
la Renommée a portées jusqu'au
bout du Monde , ce qui vous afait
traverſer tant de Mers pour venir
admirer ce Salomon de nôtre Siecle
, nous ofons vous afſeurer que
la Ville d'Arras est un des plus
beaux &un des plus anciens Fleurons
de sa Couronne , & qu'il n'a
point dans tous ſes Estats de Province
plus memorable que celle
d'Artois , puisqu'elle a toûjours esté
regardée comme l'oeil & la clefde
toute la Flandre. En effet , Cefar
même n'a point balancé de paſſer
les Alpes , & de faire voir l'Aigle
Romaine aux Portes de cette CapidesAmb.
de Siam. 161
tale , dont le Siege luy cousta si
cher, qu'il avoue dansſes Commentaires
, que dans toutes les autres
attaques il avoit combattu pour la
gloire , mais qu'il avoit dans cellecy
deffendu fa propre vie , tant il
avoit trouvé de courage & de reſiſtance
dans lesPeuples qui la deffendoient.
On en voit encore les
glorieux restes , dans ce fameux
Camp * qui nous environne , où
ce grand Capitaine fut obligé de
demeurer fort long-temps , ne pou
vant vaincre cette genereuse opiniaſtreté
des Artefiens , qui arresta
le cours de ſes Victoires , &qui luy
fit acheter fi cherement la gloire
qu'il en remporta.
Cette Comté fameuse ayant par la
viciffitude des Temps & la revo-
*Le Camp de Cefar prés de l'Abbaye d'Eſtrun
162 III . P. duVoyage
lution des Guerres changé deMaitre
, & passé des mains des Ro
mains , dans celles des François,نم
de Payenne estant devenue Chrétienne,
fut l'Appanage de nos Princes
du Sang. Le grand faint Louys
enfit un Present à Robertfon Frere
; luy laiſſant pour partage les
Fleurs-de-Lys fans nombre , * it
luy fit comprendre qu'il ne devoit
point donner de bornes àson courage
sous un si glorieux Eftendart.
C'est ce Robert d'Artois qui paffantfur
le ventre à tant d'Infideles,
dont il achevoit la deffaiteà la
Mazoure dans l'Egypte , en devint
enfin la Victime , se croyant trop
heureux de verſertoutsonfangpour
la querelle du Sauveur du Monde ,
dont il vouloit arracher le facré
* Qui font les Armes encore aujourd'huy de
cetteProvince,
des Amb. de Siam. 163
Sepulchre des mains des Ottomans,
àla pointe deson épée.
Maissi cette Ville d'Arras s'est
distinguéepar les actions heroïques
qui se sont paßées au pied deses
murailles, &parses Princes qui se
font transportez chez les Nations
tesplus reculées pourysignaler leur
valeur , elle n'est pas moins recommandable
par ce fameux Traité de
Paix d'Arras en 1435.qui mit fin
à tant de differens, &à unesifanglante
guerre qui s'estoit allumée
dans toute l'Europe , ou le Duc de
Bourgogne fut en perſonne avec la
Ducheffefon Epouse Infante de Por
tugal. Ce Traitéy attira tout ce qu'il
yavoit de gens plus confiderables &
plus nobles fur la terre , les Legats
du Pape Eugene IV. ceux du Concile
de Bafle,&de l'Anti-Pape Fe
O ij
164 III. P. du Voyage
lix. L'EmpereurSigismond, lesRois
de Caſtille, d'Arragon, de Navarre,
de Naple , de Sicile & de Chypre,
de Dannemark & de Pologne, yenu.
voyerent leurs Ambaſſadeurs , qui .
jaloux de la gloire de leurs Nations
, affectoient une magnificence
extraordinaire . Ceux de France &
d'Angleterre encherirentfur les au
tres par la pompe de leurs Equipages
, les Ducs de Bourbon & de
Vendofme, avec les Conneſtable &
Chancelier, les Marcſchaux deRieux.
& de la Fayette, Adam de Cambray
Premier President au Parlement de
Paris,tous accompagnez d'une infinité
de Nobleffe de la Nation, qui
par leur politeffe & leur lustre don
nerent une haute idée de la leur.
Ce fut dans cetteAſſemblée que le..
Roy de France &le Duc de BourdesAmb.
de Siam. 165
gogne jetterent les fondemens d'une
Paix fincere, dont les fuites ont
esté trés- avantageuses à toute l'Europe
, qui fut jurée folemnellement
dans cette Eglise Cathedrale.
Voilà, Meffſeigneurs , l'éclat que
ba Ville d'Arras a tiré de la Paix
comme de la Guerre ; & cette Capitale
ayant depuis tombé tantôt.
dans les mains de Lauys XI. tantôt
dans celles de l'Empereur Maximilien
, qui faisoient à l'envy
leurs efforts pout s'en rendre les
Maistres , elle fut ensuite la dépofitaire
des cendres des Heros les.
plus distinguez dans la Guerre ;
puisque le Duc de Parme &le Maréchal
de Gaffion fant ensevelis.
dans l'enceinte de ses murailles,
comme si c'estoit le deftin à cette
Ville martiale de garder les précieux.
166 III. P. du Voyage
reftes de la bravoure& de la ge
nerosité qui fut le partage de ces
deux grands Capitaines.
Enfin Louys le lufte fut le dernier
Prince qui s'en afſeura la conqueste
par ses Armes victorieuses .
Elle ne balança pas d'ouvrir fis
Portes à un Roy qui devoit finir
fes miferes auffi- tôt qu'elle deviendroit
sasujette ; &pour en écarter
àjamais la tempeste qui la me
naçoit , LOVIS LE GRAND
en a reculé si loin la Frontiere de
fes Estats , qu'elte en est aujour
d'huy le centre , au lieu qu'elle en
estoit autrefois l'extremité : fi bien
que comme le grand Pompée fe
vantoit d'avoir fait parsa victoire
de l'Asie mineure , le milieu de
l'Empire Romain , qu'elle bornoiz
auparavant ; auffi l'on peut dire
des Amb. de Siam. 167
que la fameuse Ville d'Arras doit
aux Armesde LOVIS LE GRAND
l'avantage d'estre aujour'dbuy le
coeur de la France , dont elle estoit
cy - devant la teste.
Mais il manquoit àfagloire d'avoir
pour témoins deses antiquitez,
deses Fortifications , &defes
fertiles Campagnes , les Peuples les
plus reculez , quipour admirer toutes
ces merveilles ont traversé
toute la distance qui ſeparele Gange
d'avec la Mer Occidentale ,
qui vivant dans des Climats où
le Soleil commence sa course , font
venus jusqu'à ceux où ce grand
Aftre la finit ; en forte que l'on
peut dire de chacun de vous, Mef-
Seigneurs, ce que nous liſons dans
LeRoyProphete, quand il nous veut
donner une idée de fon mouve168
III . P. du Voyage
ment : * Exultavit ut gigas ad
currendam viam à ſummo Cælo
egreffio ejus , & occurfus ejus,
uſque ad fummum ejus.
Heureuſe Province , d'avoir receu
des Ambassadeurs Estrangers,
également venerables par le Prince
qu'ils reprefentent , &par l'importance
de leur ministere , qui n'ont
point apprehendé de faire un Voyage
de fix mille lieües pour ſe ménager
une Alliance avec LOVIS
LE GRAND. Ils pourront apprendre
au Roy de Siam toutes les
chofes quise font paßées sous fon
Regne , les grandes & fameuses
Victoires qu'il a remportées , les
Provinces qu'il a conquiſes , les
Citadelles qu'il a fait élever au
milien des Eaux , les Marais qu'il
*Pfal.. 44
desAmb de Siam. 169
deſſechez, le fecret qu'il a trouvé
de faire une Digue à la Mer,
pour arreſter l'impetuosité de ses ondes
qui n'avoient point encore più
trouver d'obstacle à leur rapidité.
Sans doute , Meſſeigneurs , le Roy
de Siam furpris de tant de merveilles
, se fera de LOVIS LE
GRAND une idée bien au deſſus
de celle que sa reputation luy avoit
donnée. Vôtre Roy que vous nommez
chez vous le Seigneur des Seigneurs
, & la seule cause du bon
heur deses Peuples , fera bien aiſe
d'apprendre de vous que vom avez
trouvé les François pleins de refpect
& de foimiſſion pour leur
Prince. Puiſſi z vous l'affeurer qu'il
n'est pas moins l'exemple , que le
Souverain de fes Sujets , &qu'il les
gouverne encore plus parses vertus,
P
1
170 III. P. du Voyage
que parses Loix. Peut- estre qu'en
luy representant l'Architecture &م
la beauté de cette Cathedrale , ore
reposent les cendres de Monfieur le
Comte de Vermandois , qui marchant
fur les traces de fon auguste Pere ,
aujourd'huy le plus grand des Rois ,
commençoit à ſe ſignaler déja dans la
Guerre ( C'est le précieux dépost que
Sa Majesté nous a confié depuis trois
ans dans ce Temple , où les ceremonies
de l'Eglife Chrétienne se celebrent
avec tant d'exactitude, & qui
depuis plus de treize Siecles a toujours
efté deffervie par tant de Saints
Evêques par tant de Chanoines,
d'un merite fi diftingué ) Peut- estre,
dis - je , que par un miracle qui n'a
point encore paru dans nosjours , le
Ciclouvrira fon coeur , & le faisant
fortir avec ses sujets des tenebres
des Amb. de Siam. 171
qui les aveuglent , il luy donnera
l'envie d'imiter LOVIS LE
GRAND dans sa Religion , comme
dans sa Domination : fi bienque
faisant tous deux une Alliance de
picté , comme de commerce ilsferont
tous deux également heureux
dans ce Monde , &pourront ajous.
ter à la Couronne qu'ils poſſedent
déjafur la Terre , celle de l'Eternité.
,
CetteHarangue ayant eſté
interpretée , l'Ambaſſadeur
répondit , Voftre Harangue ,
Monfieur , roule fur deux chefs,
fur la gloire de Loüis XIV. &
fur le defir que vous avez ainſi
que Sa Majesté , de noftre con-
Pij
172 III. P. du Voyage
version. A l'égard du premier,
on ne peut estre mieux perfuadé
que nous leſommes, des grandes
actions de ce Monarque , dont
la reputation nous a fait venir
de fi loin. Nous ne doutons pas
non plus defa magnificence &
de fa grandeur, puisque nous en
avons fait une experience ſenſible
à ſa Cour &furfes Frontieres.
A l'égard du ſecond point
qui regarde nostre converſion à
la Foy Catholique Romaine, nous
avons des Evesques en noftre
Royaume , qui pourront nous en
inftruire. Il remercia enfuite
tout le Corps du Chapitre,
des Amb. de Siam. 173
de l'honneur qu'il leur faifoit
; aprés quoy ils regarderent
l'Egliſe tant par dehors
que par dedans. Ils entrerent
dans le Choeur , dont ils admirerent
l'Architecture , &
particulierement les petits pilliers
qui ſoûtiennent un auffi
grand Vaiſſeau. On les conduifit
vers la Tombe de M
le Comte de Vermandois , &
on leur dit , qu'il eſtoit grand
Admiral, legitimé de France, &
Frere de Madame la Princeffe de
Conty. L'on s'apperceut alors
qu'ils ſe mirent tous trois fur
ce Tombeau, qu'ils porterent
Piij
174 III . P. du Voyage
leurs mains à leurs yeux , &
qu'ils les frotterent ; & l'on
apprit que c'eſt une maniere
uſitée chez eux pour témoigner
leur deüil. Ils prirent
beaucoup de plaisir à entendre
les Orgues de cette Cathedrale
, qui font fort bonnes
; & fortirent de cette
Egliſe aprés avoir fait de
nouveaux remercîmens au
Prevoſt & aux Chanoines .
Apres cela ils allerent au
Magaſin d'Armes, qu'ils trouverent
en trés-bon état. C'eſt
l'effet des ſoins du Miniſtre
qui s'en meſle. Ils virent auffi
desAmb . de Siam , 175
la celebre Abbaye de Saint-
Vaaſt , & furent receus à la
Porte par le Grand Prieur ,
qui eſtoit à la teſte de fa
Communauté , & qui leur fit
un compliment affez court.
Il le finit en diſant , qu'ils les
recevoient avec tous les honneurs
qu'il eſtoit en leur pouvoir de
leurfaire, puiſque la haute eftime
que Sa Majesté faisoit du
Monarque qui les luy avoit envoyez,
&la confideration particuliere
qu'Elle avoit pour leurs
Excellences , estoit la régle du
profond respect avec lequel ils
ſe preſentoient à eux, en leur
Piiij
176 III. P. du Voyage
offrant très-humblement leMonastere
& tout ce qui en dépendoit.
Ils répondirent qu'ils eftoient
bien perfuadez que les
honneurs que ces Religieux leur
rendoient, estoient une continiation
des effets de la bonté du
Roy à leur égard , & que c'eftoit
à Sa Majesté à qui ils en
avoient toute l'obligation ; mais
qu'ils vouloient pourtant leur en
avoir aufſi. Enfuite ils les
remercierent de la maniere
honneſte dont ils en uſoient;
aprés quoy ils entrerent dans
l'Eglife , & s'arreſterent dans
la Nef pour en confiderer la
des Amb. de Siam. 177
ſtructure ; ce qu'ils firent fort
attentivement. Puis ils entrerent
au Choeur , & s'attacherent
à regarder la ſculpture
des Chaiſes, qui eſt trés-belle
&fort eſtimée . On leur montra
leTombeau du RoyThierry
de la premiere Race , & Fondateur
de ce Convent ; & on
leur dit qu'il ne s'en faloit que
8 années qu'il ne fuft mort ily
a mille ans. L'Ambaſſadeur
demanda comment il eſtoit poffible
qu'ily eust un Roy de France
enterré dans cette Abbaye depuis
fi longtemps , &qu'ily en
cust fi peu , que ce Pays ap
178 III. P. du Voyage
partenoit à la France , Arras
ayant esté pris par le feu Roy.
Le Grand Prieur leur expliqua
en peu de mots , comment
tout le Pays-bas eſtoit
une partie du Royaume de
France ; qu'il n'en avoit eſté
ſeparé que trés-peu de temps,
ſçavoir depuis l'an 1525. jufques
en l'an 1640. & qu'à
l'exception de ce temps-là,
les Rois de France en avoient
toûjours eſté reconnus pour
legitimes Souverains . On les
mena au fortir de l'Eglife ,
dans les Cloiftres, & dans un
Refectoire. De là ils repaffe
des Amb. de Siam. 179
rent par l'Eglife , & eftant à
la porte , l'Ambaſſadeur fit
tout ce qu'il pût pour empeſcher
le Grand Prieur de le
conduire juſqu'à fon carroffe
; mais il crut eſtre obligé
de l'y voir monter. Je ne
vous parleray point des complimens
de remercîment que
firent les Ambaſſadeurs , & je
les retrancheray meſme en
beaucoup d'endroits, puiſque
leur civilité eſt aſſez connuë
pour ne pas douter qu'ils n'en
ayent donné des marques à
toutes les perſonnes qui ont
pris la peine de leur montrer
quelque choſe.
180 III. P. du Voyage
Au fortir de l'Abbaye de
Saint Vaaft , ils allerent au
Concert dont on leur avoit
parlé le matin , & dont Madame
de Préfontaine, femme
du Prefident du Confeil d'Artois
, faifoit les honneurs
Elle les reçût accompagnée
des principales Dames de la
Ville. Les Muficiens estoient
dans une fort grande Salle,
dans laquelle il ſe trouva une
grande affluence de monde,
quelque ordre qu'on cût apporté
pour empêcher la foule.
Ils furent fort fatisfaits
de ce Concert , & le témoides
Amb . de Siam. 181
gnerent à Madame de Préfontaine
, en luy faiſant leurs
remerciemens . Ils retournerent
enſuite chez eux , où ils
trouverent leur Garde ſous
les Armes ; car on avoit mis
à la porte de leur Logement
une Compagnie Suiſſe , avec
un Capitaine & un Lieutenant.
Elle fortoit du Corps
de garde pour ſe mettre en
hayequand les Ambaſſadeurs
devoient fortir , & battoit
lorſqu'ils fortoient & qu'ils
rentroient. Aufli - tôt qu'ils
furent arrivez chez eux , Mr
Biſſetz leur porta le Plan de
182 III. P.du Voyage
la Ville que le premier Am
baffadeur luy avoit deman-
-dé , & qu'il examina d'une
maniere qui marquoit qu'il
commençoit à devenir ſçavant
dans nos Fortifications .
Ce même Major leur demanda
le mot , & ils donnerent
Actions éclatantes , par
rapport à ce ce qu'on leur
avoit dit, qu'aux deux Sieges
d'Arras il y avoit eu beaucoup
d'actions remarquables,
& particulierement au ſecond
, où les Afliegeans avoient
ſouvent eſté repouffez.
On leur avoit même
4
des Amb. de Siam. 183
montré les endroits où les
actions de vigueur s'eftoient
-faites . Le premier Ambaffadeur
demanda à M Biffetz
, s'il estoit François ; &
comme on luy eut répondu ,
que oüy , &qu'il estoit Major
de la Place , il luy dit , qu'en
fon Pays on avoit la barbe &
les cheveux comme luy. M
Biſſetz luy répondit , que s'il
n'eſtoit point François , il voudroit
estre Siamois . Comme
il y avoit beaucoup de Dames
à Arras qui n'avoient
encore pû les voir , il s'en
trouva beaucoup ce foir-là à
r
184 III. P.du Voyage
leur ſoûpé , où tout ſe paſſa
à lordinaire .
Le lendemain 21. M le
Lieutenant de Roy & Ms les
Officiers Majors , ſe rendirent
à leur lever ; & les Ambaſſadeurs
aprés les avoir remerciez
avec des expreffions
pleines de reconnoiffance ,
monterent en Carroſſe à huit
heures préciſes du matin ; &
toutes les Troupes eſtant
fous les Armes comme à leur
arrivée , ils fortirent au bruit
du Canon & du Carillon de
la Ville. Mes du Magiſtrat
le firent joüer trois fois le
desAmb. de Siam. 185
jour pendant tout le temps
que ces Ambaſſadeurs féjournerent
à Arras , ſçavoir une
heure au matin , une hcure à
midy , & une heure. le ſoir,
ainſi qu'à leur entrée & à leur
fortie . Ils allerent ce jour-là
21. dîner à Aiffe , qui eſt un
petit Village entre Arras &
Bethune.
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Résumé : Arras [titre d'après la table]
Le 19, les ambassadeurs de Siam arrivèrent à Sarbret, où ils furent reçus avec magnificence malgré l'absence de commodités. Ils se dirigèrent ensuite vers Arras, capitale de l'Artois, située sur la rivière de Scarpe. Arras est une ville ancienne, ayant été donnée en dot par Charles le Chauve à Judith, épouse de Baudouin Bras de Fer en 863, et réunie à la France en 1180 par le mariage de Philippe Auguste avec Isabelle de Hainaut. La ville possède des fortifications régulières et plusieurs édifices religieux notables, dont la cathédrale Notre-Dame et l'abbaye de Saint-Vaast. Les ambassadeurs furent accueillis par une cavalerie composée de douze compagnies du régiment de Conigsmark et reçus par le comte de Villeneuve, lieutenant du roi d'Arras. Ils entrèrent dans la ville au bruit du canon et au travers d'une haie d'infanterie. Les magistrats de la ville leur adressèrent un discours, soulignant la loyauté d'Arras envers le roi de France et l'estime portée aux ambassadeurs. Ces derniers répondirent en exprimant leur gratitude et en soulignant que leur visite n'avait pas de but diplomatique, mais visait à honorer le roi de France. Les ambassadeurs visitèrent la citadelle d'Arras, où ils assistèrent à un exercice militaire et reçurent une collation. Ils se rendirent également à la cathédrale Notre-Dame, où ils furent accueillis par le chapitre. Leur séjour à Arras fut marqué par des réceptions et des visites officielles, témoignant de l'importance accordée à leur mission. Les ambassadeurs assistèrent à un concert à Arras, accueillis par Madame de Préfontaine, épouse du Président du Conseil d'Artois, et les principales dames de la ville. Malgré les mesures pour éviter la foule, une grande affluence se rassembla dans la salle. Les ambassadeurs apprécièrent le concert et exprimèrent leur satisfaction à Madame de Préfontaine. De retour chez eux, ils trouvèrent une compagnie suisse en garde à leur porte. Le Major Bissetz leur apporta un plan de la ville, que le premier ambassadeur examina avec intérêt, démontrant ses connaissances en fortifications. Bissetz demanda le mot de passe, et les ambassadeurs mentionnèrent les actions militaires remarquables lors des sièges d'Arras. Le lendemain, les ambassadeurs furent salués par le Lieutenant du Roi et les officiers majors avant de quitter Arras en carrosse, escortés par les troupes et accompagnés par le canon et le carillon de la ville. Ils se rendirent à Aisse pour dîner.
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6
p. 104-125
Soissons. [titre d'après la table]
Début :
Cette Ville est en Picardie sur la riviere d'Aisne, qui la [...]
Mots clefs :
Soissons, Ville, Porte, Intendant, Ambassadeurs, Compagnies, Personnes, Armes, Maire, Palais, Heures, Compagnie, Gouverneurs, Roi, Magnificence, Officiers, Qualité, Canon, Palais épiscopal, Bourgeoisie
7
p. 271-274
Ce qui s'est passé au Val-de-Grace le jour qu'ils y ont esté. [titre d'après la table]
Début :
Le Val-de-Grace estant un Ouvrage digne de la magnificence [...]
Mots clefs :
Abbaye du Val-de-Grâce, Duchesse d'Épernon, Marie du Cambout, Magnificence, Reine, Monastère, Beauté, Religieuses
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Ce qui s'est passé au Val-de-Grace le jour qu'ils y ont esté. [titre d'après la table]
Le Val-de-Grace eftant
un Ouvrage digne de la magnificence
de la grande
Reine qui l'a fait bâtir , &
Ziij
272 IV . P. du Voyage
les Amhafſadeurs ayant mar
qué beaucoup d'empreffement
pour le voir , on n'a
pas manqué de fatisfaire leur
curiofité. Ils y firent compliment
à Madame la Duchefſe
d'Epernon, cette illuftre
Veuve , qui s'eſt retirée
dans ce Monaftere , pour y
vivre en retraite . Ils admirerent
la beauté de l'Eglife , &
celle de tout le Bâtiment, &
dirent qu'ils n'avoient rien vû
de plus beau en France. Ils examinerent
l'Autel, qu'ils trouverent
d'une grande magnificence,&
monterent auxOr
des Amb. de Siam. 273
gues. Le Coeur de la Reine
Mere , & ceux de tous les
Enfans du Roy qui font
morts, eſtant dans ce monaftere
, les Religieuſes montrerent
aux Ambaſſadeurs les
Couronnes qui les couvrent;
elles leur firent beaucoup de
plaifir , rien ne leur ayant
donné plus de joye que lors
qu'ils ont vû en quelque en--
droit, des chofes qui regardoient
les perſonnes Royales .
Ces Religieufes chanterent
devant eux le Domine falvum
fac Regem. Ils furent furpris
de la beauté&de la douceur
274 IV. P. du Voyage
de leurs voix , & demanderent
à les voir , mais elles ne
voulurent point lever leurs
voîles , ce qui plut fort aux
Ambaſfadeurs , qui marquerent
eucore plus d'eſtime
pour elles. Madame d'Epernon
fit des Preſens de devotion
aux Catholiques.
un Ouvrage digne de la magnificence
de la grande
Reine qui l'a fait bâtir , &
Ziij
272 IV . P. du Voyage
les Amhafſadeurs ayant mar
qué beaucoup d'empreffement
pour le voir , on n'a
pas manqué de fatisfaire leur
curiofité. Ils y firent compliment
à Madame la Duchefſe
d'Epernon, cette illuftre
Veuve , qui s'eſt retirée
dans ce Monaftere , pour y
vivre en retraite . Ils admirerent
la beauté de l'Eglife , &
celle de tout le Bâtiment, &
dirent qu'ils n'avoient rien vû
de plus beau en France. Ils examinerent
l'Autel, qu'ils trouverent
d'une grande magnificence,&
monterent auxOr
des Amb. de Siam. 273
gues. Le Coeur de la Reine
Mere , & ceux de tous les
Enfans du Roy qui font
morts, eſtant dans ce monaftere
, les Religieuſes montrerent
aux Ambaſſadeurs les
Couronnes qui les couvrent;
elles leur firent beaucoup de
plaifir , rien ne leur ayant
donné plus de joye que lors
qu'ils ont vû en quelque en--
droit, des chofes qui regardoient
les perſonnes Royales .
Ces Religieufes chanterent
devant eux le Domine falvum
fac Regem. Ils furent furpris
de la beauté&de la douceur
274 IV. P. du Voyage
de leurs voix , & demanderent
à les voir , mais elles ne
voulurent point lever leurs
voîles , ce qui plut fort aux
Ambaſfadeurs , qui marquerent
eucore plus d'eſtime
pour elles. Madame d'Epernon
fit des Preſens de devotion
aux Catholiques.
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Résumé : Ce qui s'est passé au Val-de-Grace le jour qu'ils y ont esté. [titre d'après la table]
Les ambassadeurs visitèrent le Val-de-Grâce, un édifice construit par une reine. Ils furent satisfaits de découvrir ce lieu et rendirent hommage à la Duchesse d'Epernon, une veuve illustre résidant dans ce monastère. Ils admirèrent la beauté de l'église et du bâtiment, les jugeant les plus beaux de France. Ils examinèrent l'autel, qu'ils trouvèrent magnifique, et montèrent aux orgues. Les religieuses leur montrèrent les couronnes couvrant les cœurs de la Reine Mère et des enfants du roi décédés, ce qui les réjouit. Les religieuses chantèrent le 'Domine salvum fac Regem', les surprenant par la beauté de leurs voix. Les ambassadeurs demandèrent à voir les religieuses, mais celles-ci refusèrent de lever leurs voiles, augmentant ainsi l'estime des ambassadeurs à leur égard. Madame d'Epernon offrit des présents de dévotion aux catholiques.
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8
p. 73-106
Relation de l'entrée de M. le Duc d'Aumont, Ambassadeur extraordinaire de France, à Londres le 20. Juillet 1713.
Début :
LETTRE DE LONDRES. J'ai reçû, Monsieur, vos deux lettres [...]
Mots clefs :
Duc d'Aumont, Londres, Reine, Ambassadeur, Honneurs, Réception, Magnificence, Festivités, Protocole , Couronnement, Voitures
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Relation de l'entrée de M. le Duc d'Aumont, Ambassadeur extraordinaire de France, à Londres le 20. Juillet 1713.
Comme on n'avoit
pas dans le Mercure precedent
une relation exacte
ni étenduë de cctte
if , A cntree, on n'en a pu
dire que deux mots en
attendant celle-ci.
Relation de fentréede M. le
Ducd'Aamont, /fmbdfiach ur
extraordinaire de Francey à
Londres lelO. JuilLt 1713.
LETTRE DE LONDRES.
J'ai reçu, Monsieur,vos
deux lettres du 2. & du 9.
Juillet; & pour satisfaire
avant toutes choses à vôtre
curiosité sur l'entrée publique
de Monsieur le Duc
d'Aumont ,
j'aurail'honneur
de vous dire que ce
fut Mercredi IL. de ce mois,
& le premier du vieux stile.
Nous nous étions tous rendus
à Grenwich
,
dans la
maison de MonsieurRobinfon,
Capitaine du yacth
qui nous a amenez de France.
Monsieur le Duc y avoit
envoyé dés la veille
tous ses Officiers pour y
preparer un magnifique déjeuner.
Entre midi & une
heure Milord Comte de
Skardel, accompagné de
six Gentilshommes de la
Chambre privée de la Reine,
vint faire à Son Excellence
compliment sur son
heureuse arrivée dans le
Royaume.Monsieur le Duc
descendit trois marches de
l'escalier pour le recevoir,
& lui donna la droite jusqu'à
la chambre,où il y
avoit deux fauteüils, six
chaises pour les six GentilsbOiTImes,
&une autre chaise
à main gauche, & un peu
derriere le fateüil de M.le
Duc, pour M. le Chevalier
Cotherel Maître des Ceremonies.
LeComte eut la
place d'honneur, & se couvrit
avec sa suite. Il n'y eut
de nôtre part que M. le
Duc & le Maître des Ceremonies
qui furent assis &
couverts.
D'abord aprés le compliment
Son Excellence proposa
à Messieurs les Anglois
d'aller déjeûner, & leur
donna toûjours la droite
jusqu'à la salle de l'ambigu,
qui fut des plus somptueux,
sur deux tables de quarante
couverts, où l'on ne s'assit
pas, chacun mangeant debout&
àla placeoù il [e
trouva. Sur les trois heures
on sortit de la maison de
M. Robinson, & depuis ce
moment-làles François eurent
toujours la droite. On
traversa
, pour gagner le
port, plusieurs rues parsemées
de fleurs & lacour de
l'Hôtel desInvalides,oùl'on
trouvalessoldats sous les
armes,les tambours battant
aux champs
,
le Gouverneur
à la premiere porte
avec tous les Officiers, qui
vinrent faire cortege à M.
l'Ambassadeur. Toutes les
berges de la Reine étoient
la à nous attendre. Rien
n'est plus propre, ni plus
galant; ce n'est en dehors
que sculpture & dorure, &
le dedans est tapissé de velours.
Celle où entra M. le
Duc, avec le Milord qui le
conduisoit, étoit superbe ôc
doréejusqual'eau:ellen'avoit
jamais servi à aucun
Ambassadeur. Tous les
yacths de la Reine, moüillez
prés de Grenvvich
, avoient
arboré tous leurs
pavillons;il y en avoit tout
le long des cordages, &
j'en comptai à un seul plus
de cinquante qui jouent au
gré des vents. Ils saluerent
de tous leurs canons la bergede
Son Excellence, &
tous les autres bâtimens
dont la Tamise est couverteétoient
pleins de monde
jusqu'au haut des mats:
ce n'étoient que chapeaux
en Tair, & que cris reÏrerez
de hous,.boufàyJ hou.
J&y.
- On arriva vers les qua- treheures au pied de la
Tour de Londres. Milord
Comte de Northampton,
Connêtable de la Tour,fiiivi
du Commandant Se des
principaux,Officiers, se
trouva au bas de l'escalier
du gay pour recevoir M.le
Duc, & lui presenter la
main au sortir de sa berge.
Il lui fit compliment de la
part de la Reine, & le conduisit
au carosse de Sa Majesté.
C'est un honneur qui
n'avoit pas encore eu d'exemple,
& nul Ambassadeur
n'avoit été reçu jusqu'apresentque
par le
Commandant de la Tour.
Tout le quay étoit bordé
par les gardes de la Reine,
la bayonnette au bout du
fil11
,
les enseignes déployées,
les tambours battant
aux champs, tous les
Officiers à leurs places &
saluant de l'esponton:autre
distinction sans exemple.
&qui n'a été accordée qu'à
M. le Duc d'Aumont.
Quand on sortit de la
Tour, tout le canon nous
falua au nombre de cent
quatre pieces. Voici l'ordreque
l'on garda.
Ilyavoit à la tête une
trentaine d'Anglois parfaitement
bien montez; ce
sont les marchands & les
ouvriers qui fournissent
l'Hôtel de Son Excellence.
Ils étoient suivis des gardes
de M. le Chevalier Maréchal
de la Maison de la Reine,
qu'ils precedoient,
M. le Chevalier Englich,
Maréchal des Ceremonies
lequel étoit dans le carossey
de Milord Comte de Skardel,
par où commençoit la
marche.
Ensuite les quatre Suisses
de M. le Duc sur des che,-
vaux,& aprés eux les trente
valets de pied de M. le
Duc,qui n'a voulu que si
feule Maison, & n'a pas
pris un seul homme de parade.
Ensuite deux écuyers sur
les plus beaux chevaux
d'Angleterre, à la tête de
douze pages, tous Gentilshoninles,
parmi lesquels il
y ades Chevaliers de Malte.
Entre les deux files de
leurs chevaux il y avoit un
Ecuyer à cheval pour les
conduire.
Six palfreniers à cheval,
qui menoient des chevaux
de main;deux autres Gentilshommes
de Son Excellence
marchoient à cheval
immédiatement devant le
carosse de la Reine, dans
lequel étoit M. l'Ambassadcur
, Milord Comte de
Skardel,nommé Ambassadeur
à la Cour de Vienne,
le Secretaire de nôtreambassade,
& le Maître des
Ceremonies.
Un second carosse de la
Reine pour les six Gentilshommes
de sa Chambre, le
carosse du corps de Son Excellence,
attelé de huit chevaux
gris- pommelez, couverts
de harnois dorez, les
crins tressez de rubans cramoisy
, avec des aigrettes
de plume sur la tête. Ce carosse
était vuide,toutes les
glaces levées, suivi de quatre
carosses à huitchevaux,
appartenans à Son Excellence,
& de cinq auti es carossesàsix
chevaux appartenans
à des Gentilshommes
de sa fuite, dont les cochers
& portillons avoienc
la livrée de M.le Duc. Tous
les domestiques de ces
Gentilshommes accompagnoient
à pied ces dix carosses
:
ils étoient habillez
de surtous rouges, uniformes,
& formoient une
nombreuse livrée.
Aprés toute cette pompe
suivoient les carosses à six
chevaux des SeigneursTorris
qui y avoient envoyé
tous leurs gens, & je crois
qu'il y avoit bien cinquante
carosses.
En arrivant à Sommerset
House Son Excellence trouva
dans la cour unecompagnie
des Gardes de la Reine
fous les armes, comme
à la Tour, & toutes les
trompettes de Sa Majesté,
qui avec les timbales &
tambours sonnoientdes
fanfares sur la retraiTe. Il
ne fut plus permis à qui que
ce soit de nôtre livrée d'entrer
dans les appartemens,
& Son Excellence n'eut
plus d'autres Officiers que
ceux de la Reine. La salle
des Gardes se trouva bordée
de trente ou quarante
Hoquetons en toque & en
habits de ceremonie,lahalebardc
à la main, & ils
n'en font pas fortis jusqu'à
Samedi après l'audience.
Le Comte de Skardel
conduisit M. le Duc dans
son appartement, & l'en
mit en possession; & après
lui avoir fait un second
compliment au nom de la
Reine, M. l'Ambassadeur
le reconduisit jusqua sa
chaise à porteurs, en lui
donnant à son tour la main.
Un moment aprés arriva
Milord Comte de Vvindfor,
que Son Excellence
alla recevoir jusques dans
la
la première salle, en lui
donnant la droite ôc la place
dhonneur dans la chambre
d'audience. Le Comte
s'assît, & se couvrit en même
temps que M. le Duc,
à qui il fit compliment de
la part de Sa Majeste
;
aprés
quoy Son Excellence, en
lui donnant toujours la
main, l'alla reconduire jusqu'à
sa chaise.
Toute la soirée se passa
à recevoir des visites ou
des complimens. A dixheures
le Maître d'Hôtel de la
Reine vint avertir Son Excellence
que le souper étoÍr
servi. On n'a jamais rien vû
de plus magnifique. C'étoit
une table longue, dont un
bout donnoit fous le dais i
avec un seul couvert b cadenat,
&un fauteüil de velours
pour M. le Duc, qui
étoit seul à ce bout-là. Plus
bas des deux côtez, &à
une assez grandedistance,
etoient vingt-quatre couverts
, où saffirent sur des
chaises de natte à rAn
gloise Milord Skardel à la
droite, &Milord Vvin¥or
à la gauche, d'autres Milords
après eux, le Maître
des Ceremonies, le premier
Controlleur de la Maison
de la Reine, & dans le
reste des places ce qu'il y
put tenir de Gentilshommes
François. Son Excellence
a toujours été servie
à verre couvert & en vermeildoré
par les mêmes
Officiers qui ont l'honneur
de servir la Reine. C'étoient
les Hoquetons qui
portoient les plats couverts,
& les Gentilshommes servans
qui les mettoient sur
la table. Pendant tout le
repas les trompettesnont
pascesse de sonner: on a
bû toutes les fois à la santé
du Roy,& celle de Sa Majessé
Britannique, & celle
du Roy d'Espagne. Ces santez
ont été bûës debout &
à découvert. Ensuite on a
bû les santez de Monseigneur
le Dauphin, de
Monseigneur le Duc de
Berry, de Monsieur le
Duc d'Orléans, & de Milord
Grand Tresorier. Je
vous avouë que toutes ces
santez n'accommodoient
pas lamienne: c'étoit un
vin de Volney très vif, ou
un fin vin de Champagne,
qu'il faloit boire pur & à
plein verre. Il y a eu six
repas servis avec cette magnificence
,
sans compter
une autre table de plus de
quarante couverts pour les
autres Gentilshommes,qui
ne pouvoienr tenir tous à
celle de M. le Duc. Cette
table,dont M.le Maréchal
des Ceremonies faisoit les
honneurs,étoit servie comme
la premiere par lesOfficiers
de Sa Majesté. Cette
grande Princcesse
, qui ne
dédaigne pas d'entrer dans
les moindres détailsen nôtre
faveur; a donné ordre
qu'on servît la plupart des
plats à la Françoise
,
& a
bien voulu envoyer en
France chercher toutes fortes
de vins, de confitures
seches & liquides.
Outre ces deux grandes
tables, il y en a eu une autre
pour les douze pages &
leurs gouverneurs, servie
avec la mêmesomptuosité.
Enfin l'on peut dire
que tout a répondu à la
magnificence d'une si grande
Reine, & que toute la
fête a été veritablement
royale.
Le Samedi l'aprésdînée,
sur les six heures du soir,
Milord Comte de Salisburi
est venu prendre M.l'Ambaffadeur
pour le conduire
à l'audience publique. Il a
été reçu avec les mêmes
honneurs que les deux autres
Comtes, & la pompe
a été la même que celle du
Mercredi, même cortege,
mêmeséquipages,mêmes
carosses, & même foule à
nous voir passer, & même
ardeur à [e battre pour rzmasser
l'argent du gencreux
Ambassadeur.
A la porte de saint James
Son Excellence a été
reçûë par le Chevalier Maréchal
, par le Maréchal
des Ceremonies, ôc par le
Concierge du Palais, avec
leurs bâtons de commandement
à la main, les Gardes
de Sa Majesté fous les
armes,enseignes déployées,
les Officiers saluant
,
&
les tambours battant aux
champs, même dans le Palais
de la Reine.
Les
Lesvalets de pied de Son
Excellence ont été rangez -
en haye tout le long de l'escalier,
les pages ont entré
dans la salle des Gardes.
M. le Duc a été conduit
dans la Chambre du Conseil,
en attendant que toute
sa fuite fût rassemblée:alors
un Chevalier est venu ravertir
que la Reine éroie
sur son trône, c'est à dire
dans un fauteüil
,
sur une
estrade fous son dais. On a
traversé la salle des Hoquetons
, leur Commandant à
leur tête, qui a conduit Son
Excellence jusqu'à la salle
des Gentilshommes Pensionnaires
magnifiquement
vétus, tous en haye, tenant
leurs hallebardes dorées.
Milord Duc de Beaufort,
leur Capitaine
) a reçû
l'Ambassadeur à la porte de
la salle, & l'a conduit jusqu'à
la Chambre de la Reine,
à la porte de laquelle
tous les Gentilshommes
François qui precedoient
Son Excellence se sont ouverts
pour la laisser entrer
la premiere entre le Comte
de Salisbury & M. le Chevalier
Cook, Vicechambellan
,
faisant les fonctions
en l'absence de M. le
Duc de Shrevvsbury grand
Chambellan.
M. le Duc a fait une premiere
reverence dés l'entrée
de la chambre, une seconde
au milieu, & une
troisiéme aux pieds de la
Reine. Le ceremonial vouloit
que Sa Majesté se levât
à la seconde
: mais l'incommodité
de la Reine & la foiblesse
de ses jambes ne le
lui a pas permis. Avant l'audience
Sa Majestéavoit fait
écrireàSon Excellencepar
MilordDarmouth premier
Secretaire d'Etat une lettre
d'émeute
,
qui a suppléé
à la rigueur du ceremonial.
M le Duc se couvrit un
moment pour la forme, &
prononça son compliment
en presentant ses lettres de
creance. Sa Majesté y répondit
trés- gracieusement
en Anglois, que le Maître
de Ceremonie interpreta;
après quoy Son Excellence
se retira, en faisant trois
reverences aux mêmes endroits
qu'en entrant, en
marchant en arriere jusqu'à
la sortie de la chambre.
On a été reconduit avec
tous les honneurs qu'on avoit
reçus en entrant,&
l'on est revenu au Palais de
Sommerfet dans le même
ordre qu'on en étoit forci.
Aprés que le Milord Comte
de Salisbury eut ramené
M. le Duc dans son appartement,
Son Excellence lui
donna la main, & le reconduisit
en cortege jusqu'à sa
chaise.
Le lendemaindeson aa
dience étant allé à Kinsinp
on faire sa cour à la Reine
, il lui demanda une grace
, qu'il supplia instamment
Sa Majesté de ne lui
pas refuser. La Reine le lui
promit, & Son Excellence
lui dit qu'ilavoitappris que
SSaaMajestéavoit donné or- ~i !c ité avoir ordre
qu'on achetâtpour elle
enHollandeunattelagede
chevaux gris- pommelez ;
qu'il en avoit neuf qu'on
avoit trouvez passables
; ôc
qu'ilsupplioittrés-humblement
Sa Majesté de les accepter
:
osant lui dire qu'
Elle ne pouvoit s'en défendre
après la parole qu'Elle
lui avoit fait l'honneur de
lui donner. La Reine, qui
ne s'attendoit pas à accorder
une pareille grace, parut
un moment interdite ;
mais d'abord d'un visage riant Elle lui répondiot:
Monfeur le Duc,il n'y a
pas moyen de refuser une offre
faite d'une maniere si engageAnte;
d'un autre j'y pfnJerois
4 deux jots: mais devotre
part je reçois tout avec
grand plaisir. Vousjugez
bien que les neuf chevaux
avec leurs parures n'ont pas
tardé à être conduits à Kinsington.
Ce sont les plus
beaux qu'on ait vûs ici, &
les neuf ont coûté en Hollande
dix mil francs. Vous
reconnoissez là les manieres
de M. le Duc d'Aumont.
Avanthier il y eut à Londres
une fête fort solemnelle
pour le Te Deum en
musique, chanté à S. Paul
en actions de graces de la
paix. La Reine ne put s'y
trouver; ce qui diminua
beaucoup de la beautéde
la cavalcade: mais tous les
Meilleurs du Parlement de
l'une & l'aurre Chambre s'y
ren dirent tous en cortege
dans leurscarosses, que les
Torris avoient rendus fort
brillans. Le soir Se toute la
nuit il y eut des feux dans
la ville, & toutes les fenêtres
éclairées. Ceux qui n'y
mirent pas de lumieress'exposoient
à voirbriser leurs
vitres
,
& il n'yen a gueres
de celles-ci qui ayent echa<
péà la tumultueuse rejoüissance
de la mable: c'est ainsi
qu'onappelle la populace
de Londres, qui ces joursla
est la maîtresse, &' que
nulle puissance n'a le droit
ni la force dereprimer. Il
y eut cette nuit là deux fort
beaux feux d'artifice; l'un
dans Hoborn pour la ville,
& l'autre pour la Reine sur
la Tamise, entre Sommerset
& Vvitheal.
pas dans le Mercure precedent
une relation exacte
ni étenduë de cctte
if , A cntree, on n'en a pu
dire que deux mots en
attendant celle-ci.
Relation de fentréede M. le
Ducd'Aamont, /fmbdfiach ur
extraordinaire de Francey à
Londres lelO. JuilLt 1713.
LETTRE DE LONDRES.
J'ai reçu, Monsieur,vos
deux lettres du 2. & du 9.
Juillet; & pour satisfaire
avant toutes choses à vôtre
curiosité sur l'entrée publique
de Monsieur le Duc
d'Aumont ,
j'aurail'honneur
de vous dire que ce
fut Mercredi IL. de ce mois,
& le premier du vieux stile.
Nous nous étions tous rendus
à Grenwich
,
dans la
maison de MonsieurRobinfon,
Capitaine du yacth
qui nous a amenez de France.
Monsieur le Duc y avoit
envoyé dés la veille
tous ses Officiers pour y
preparer un magnifique déjeuner.
Entre midi & une
heure Milord Comte de
Skardel, accompagné de
six Gentilshommes de la
Chambre privée de la Reine,
vint faire à Son Excellence
compliment sur son
heureuse arrivée dans le
Royaume.Monsieur le Duc
descendit trois marches de
l'escalier pour le recevoir,
& lui donna la droite jusqu'à
la chambre,où il y
avoit deux fauteüils, six
chaises pour les six GentilsbOiTImes,
&une autre chaise
à main gauche, & un peu
derriere le fateüil de M.le
Duc, pour M. le Chevalier
Cotherel Maître des Ceremonies.
LeComte eut la
place d'honneur, & se couvrit
avec sa suite. Il n'y eut
de nôtre part que M. le
Duc & le Maître des Ceremonies
qui furent assis &
couverts.
D'abord aprés le compliment
Son Excellence proposa
à Messieurs les Anglois
d'aller déjeûner, & leur
donna toûjours la droite
jusqu'à la salle de l'ambigu,
qui fut des plus somptueux,
sur deux tables de quarante
couverts, où l'on ne s'assit
pas, chacun mangeant debout&
àla placeoù il [e
trouva. Sur les trois heures
on sortit de la maison de
M. Robinson, & depuis ce
moment-làles François eurent
toujours la droite. On
traversa
, pour gagner le
port, plusieurs rues parsemées
de fleurs & lacour de
l'Hôtel desInvalides,oùl'on
trouvalessoldats sous les
armes,les tambours battant
aux champs
,
le Gouverneur
à la premiere porte
avec tous les Officiers, qui
vinrent faire cortege à M.
l'Ambassadeur. Toutes les
berges de la Reine étoient
la à nous attendre. Rien
n'est plus propre, ni plus
galant; ce n'est en dehors
que sculpture & dorure, &
le dedans est tapissé de velours.
Celle où entra M. le
Duc, avec le Milord qui le
conduisoit, étoit superbe ôc
doréejusqual'eau:ellen'avoit
jamais servi à aucun
Ambassadeur. Tous les
yacths de la Reine, moüillez
prés de Grenvvich
, avoient
arboré tous leurs
pavillons;il y en avoit tout
le long des cordages, &
j'en comptai à un seul plus
de cinquante qui jouent au
gré des vents. Ils saluerent
de tous leurs canons la bergede
Son Excellence, &
tous les autres bâtimens
dont la Tamise est couverteétoient
pleins de monde
jusqu'au haut des mats:
ce n'étoient que chapeaux
en Tair, & que cris reÏrerez
de hous,.boufàyJ hou.
J&y.
- On arriva vers les qua- treheures au pied de la
Tour de Londres. Milord
Comte de Northampton,
Connêtable de la Tour,fiiivi
du Commandant Se des
principaux,Officiers, se
trouva au bas de l'escalier
du gay pour recevoir M.le
Duc, & lui presenter la
main au sortir de sa berge.
Il lui fit compliment de la
part de la Reine, & le conduisit
au carosse de Sa Majesté.
C'est un honneur qui
n'avoit pas encore eu d'exemple,
& nul Ambassadeur
n'avoit été reçu jusqu'apresentque
par le
Commandant de la Tour.
Tout le quay étoit bordé
par les gardes de la Reine,
la bayonnette au bout du
fil11
,
les enseignes déployées,
les tambours battant
aux champs, tous les
Officiers à leurs places &
saluant de l'esponton:autre
distinction sans exemple.
&qui n'a été accordée qu'à
M. le Duc d'Aumont.
Quand on sortit de la
Tour, tout le canon nous
falua au nombre de cent
quatre pieces. Voici l'ordreque
l'on garda.
Ilyavoit à la tête une
trentaine d'Anglois parfaitement
bien montez; ce
sont les marchands & les
ouvriers qui fournissent
l'Hôtel de Son Excellence.
Ils étoient suivis des gardes
de M. le Chevalier Maréchal
de la Maison de la Reine,
qu'ils precedoient,
M. le Chevalier Englich,
Maréchal des Ceremonies
lequel étoit dans le carossey
de Milord Comte de Skardel,
par où commençoit la
marche.
Ensuite les quatre Suisses
de M. le Duc sur des che,-
vaux,& aprés eux les trente
valets de pied de M. le
Duc,qui n'a voulu que si
feule Maison, & n'a pas
pris un seul homme de parade.
Ensuite deux écuyers sur
les plus beaux chevaux
d'Angleterre, à la tête de
douze pages, tous Gentilshoninles,
parmi lesquels il
y ades Chevaliers de Malte.
Entre les deux files de
leurs chevaux il y avoit un
Ecuyer à cheval pour les
conduire.
Six palfreniers à cheval,
qui menoient des chevaux
de main;deux autres Gentilshommes
de Son Excellence
marchoient à cheval
immédiatement devant le
carosse de la Reine, dans
lequel étoit M. l'Ambassadcur
, Milord Comte de
Skardel,nommé Ambassadeur
à la Cour de Vienne,
le Secretaire de nôtreambassade,
& le Maître des
Ceremonies.
Un second carosse de la
Reine pour les six Gentilshommes
de sa Chambre, le
carosse du corps de Son Excellence,
attelé de huit chevaux
gris- pommelez, couverts
de harnois dorez, les
crins tressez de rubans cramoisy
, avec des aigrettes
de plume sur la tête. Ce carosse
était vuide,toutes les
glaces levées, suivi de quatre
carosses à huitchevaux,
appartenans à Son Excellence,
& de cinq auti es carossesàsix
chevaux appartenans
à des Gentilshommes
de sa fuite, dont les cochers
& portillons avoienc
la livrée de M.le Duc. Tous
les domestiques de ces
Gentilshommes accompagnoient
à pied ces dix carosses
:
ils étoient habillez
de surtous rouges, uniformes,
& formoient une
nombreuse livrée.
Aprés toute cette pompe
suivoient les carosses à six
chevaux des SeigneursTorris
qui y avoient envoyé
tous leurs gens, & je crois
qu'il y avoit bien cinquante
carosses.
En arrivant à Sommerset
House Son Excellence trouva
dans la cour unecompagnie
des Gardes de la Reine
fous les armes, comme
à la Tour, & toutes les
trompettes de Sa Majesté,
qui avec les timbales &
tambours sonnoientdes
fanfares sur la retraiTe. Il
ne fut plus permis à qui que
ce soit de nôtre livrée d'entrer
dans les appartemens,
& Son Excellence n'eut
plus d'autres Officiers que
ceux de la Reine. La salle
des Gardes se trouva bordée
de trente ou quarante
Hoquetons en toque & en
habits de ceremonie,lahalebardc
à la main, & ils
n'en font pas fortis jusqu'à
Samedi après l'audience.
Le Comte de Skardel
conduisit M. le Duc dans
son appartement, & l'en
mit en possession; & après
lui avoir fait un second
compliment au nom de la
Reine, M. l'Ambassadeur
le reconduisit jusqua sa
chaise à porteurs, en lui
donnant à son tour la main.
Un moment aprés arriva
Milord Comte de Vvindfor,
que Son Excellence
alla recevoir jusques dans
la
la première salle, en lui
donnant la droite ôc la place
dhonneur dans la chambre
d'audience. Le Comte
s'assît, & se couvrit en même
temps que M. le Duc,
à qui il fit compliment de
la part de Sa Majeste
;
aprés
quoy Son Excellence, en
lui donnant toujours la
main, l'alla reconduire jusqu'à
sa chaise.
Toute la soirée se passa
à recevoir des visites ou
des complimens. A dixheures
le Maître d'Hôtel de la
Reine vint avertir Son Excellence
que le souper étoÍr
servi. On n'a jamais rien vû
de plus magnifique. C'étoit
une table longue, dont un
bout donnoit fous le dais i
avec un seul couvert b cadenat,
&un fauteüil de velours
pour M. le Duc, qui
étoit seul à ce bout-là. Plus
bas des deux côtez, &à
une assez grandedistance,
etoient vingt-quatre couverts
, où saffirent sur des
chaises de natte à rAn
gloise Milord Skardel à la
droite, &Milord Vvin¥or
à la gauche, d'autres Milords
après eux, le Maître
des Ceremonies, le premier
Controlleur de la Maison
de la Reine, & dans le
reste des places ce qu'il y
put tenir de Gentilshommes
François. Son Excellence
a toujours été servie
à verre couvert & en vermeildoré
par les mêmes
Officiers qui ont l'honneur
de servir la Reine. C'étoient
les Hoquetons qui
portoient les plats couverts,
& les Gentilshommes servans
qui les mettoient sur
la table. Pendant tout le
repas les trompettesnont
pascesse de sonner: on a
bû toutes les fois à la santé
du Roy,& celle de Sa Majessé
Britannique, & celle
du Roy d'Espagne. Ces santez
ont été bûës debout &
à découvert. Ensuite on a
bû les santez de Monseigneur
le Dauphin, de
Monseigneur le Duc de
Berry, de Monsieur le
Duc d'Orléans, & de Milord
Grand Tresorier. Je
vous avouë que toutes ces
santez n'accommodoient
pas lamienne: c'étoit un
vin de Volney très vif, ou
un fin vin de Champagne,
qu'il faloit boire pur & à
plein verre. Il y a eu six
repas servis avec cette magnificence
,
sans compter
une autre table de plus de
quarante couverts pour les
autres Gentilshommes,qui
ne pouvoienr tenir tous à
celle de M. le Duc. Cette
table,dont M.le Maréchal
des Ceremonies faisoit les
honneurs,étoit servie comme
la premiere par lesOfficiers
de Sa Majesté. Cette
grande Princcesse
, qui ne
dédaigne pas d'entrer dans
les moindres détailsen nôtre
faveur; a donné ordre
qu'on servît la plupart des
plats à la Françoise
,
& a
bien voulu envoyer en
France chercher toutes fortes
de vins, de confitures
seches & liquides.
Outre ces deux grandes
tables, il y en a eu une autre
pour les douze pages &
leurs gouverneurs, servie
avec la mêmesomptuosité.
Enfin l'on peut dire
que tout a répondu à la
magnificence d'une si grande
Reine, & que toute la
fête a été veritablement
royale.
Le Samedi l'aprésdînée,
sur les six heures du soir,
Milord Comte de Salisburi
est venu prendre M.l'Ambaffadeur
pour le conduire
à l'audience publique. Il a
été reçu avec les mêmes
honneurs que les deux autres
Comtes, & la pompe
a été la même que celle du
Mercredi, même cortege,
mêmeséquipages,mêmes
carosses, & même foule à
nous voir passer, & même
ardeur à [e battre pour rzmasser
l'argent du gencreux
Ambassadeur.
A la porte de saint James
Son Excellence a été
reçûë par le Chevalier Maréchal
, par le Maréchal
des Ceremonies, ôc par le
Concierge du Palais, avec
leurs bâtons de commandement
à la main, les Gardes
de Sa Majesté fous les
armes,enseignes déployées,
les Officiers saluant
,
&
les tambours battant aux
champs, même dans le Palais
de la Reine.
Les
Lesvalets de pied de Son
Excellence ont été rangez -
en haye tout le long de l'escalier,
les pages ont entré
dans la salle des Gardes.
M. le Duc a été conduit
dans la Chambre du Conseil,
en attendant que toute
sa fuite fût rassemblée:alors
un Chevalier est venu ravertir
que la Reine éroie
sur son trône, c'est à dire
dans un fauteüil
,
sur une
estrade fous son dais. On a
traversé la salle des Hoquetons
, leur Commandant à
leur tête, qui a conduit Son
Excellence jusqu'à la salle
des Gentilshommes Pensionnaires
magnifiquement
vétus, tous en haye, tenant
leurs hallebardes dorées.
Milord Duc de Beaufort,
leur Capitaine
) a reçû
l'Ambassadeur à la porte de
la salle, & l'a conduit jusqu'à
la Chambre de la Reine,
à la porte de laquelle
tous les Gentilshommes
François qui precedoient
Son Excellence se sont ouverts
pour la laisser entrer
la premiere entre le Comte
de Salisbury & M. le Chevalier
Cook, Vicechambellan
,
faisant les fonctions
en l'absence de M. le
Duc de Shrevvsbury grand
Chambellan.
M. le Duc a fait une premiere
reverence dés l'entrée
de la chambre, une seconde
au milieu, & une
troisiéme aux pieds de la
Reine. Le ceremonial vouloit
que Sa Majesté se levât
à la seconde
: mais l'incommodité
de la Reine & la foiblesse
de ses jambes ne le
lui a pas permis. Avant l'audience
Sa Majestéavoit fait
écrireàSon Excellencepar
MilordDarmouth premier
Secretaire d'Etat une lettre
d'émeute
,
qui a suppléé
à la rigueur du ceremonial.
M le Duc se couvrit un
moment pour la forme, &
prononça son compliment
en presentant ses lettres de
creance. Sa Majesté y répondit
trés- gracieusement
en Anglois, que le Maître
de Ceremonie interpreta;
après quoy Son Excellence
se retira, en faisant trois
reverences aux mêmes endroits
qu'en entrant, en
marchant en arriere jusqu'à
la sortie de la chambre.
On a été reconduit avec
tous les honneurs qu'on avoit
reçus en entrant,&
l'on est revenu au Palais de
Sommerfet dans le même
ordre qu'on en étoit forci.
Aprés que le Milord Comte
de Salisbury eut ramené
M. le Duc dans son appartement,
Son Excellence lui
donna la main, & le reconduisit
en cortege jusqu'à sa
chaise.
Le lendemaindeson aa
dience étant allé à Kinsinp
on faire sa cour à la Reine
, il lui demanda une grace
, qu'il supplia instamment
Sa Majesté de ne lui
pas refuser. La Reine le lui
promit, & Son Excellence
lui dit qu'ilavoitappris que
SSaaMajestéavoit donné or- ~i !c ité avoir ordre
qu'on achetâtpour elle
enHollandeunattelagede
chevaux gris- pommelez ;
qu'il en avoit neuf qu'on
avoit trouvez passables
; ôc
qu'ilsupplioittrés-humblement
Sa Majesté de les accepter
:
osant lui dire qu'
Elle ne pouvoit s'en défendre
après la parole qu'Elle
lui avoit fait l'honneur de
lui donner. La Reine, qui
ne s'attendoit pas à accorder
une pareille grace, parut
un moment interdite ;
mais d'abord d'un visage riant Elle lui répondiot:
Monfeur le Duc,il n'y a
pas moyen de refuser une offre
faite d'une maniere si engageAnte;
d'un autre j'y pfnJerois
4 deux jots: mais devotre
part je reçois tout avec
grand plaisir. Vousjugez
bien que les neuf chevaux
avec leurs parures n'ont pas
tardé à être conduits à Kinsington.
Ce sont les plus
beaux qu'on ait vûs ici, &
les neuf ont coûté en Hollande
dix mil francs. Vous
reconnoissez là les manieres
de M. le Duc d'Aumont.
Avanthier il y eut à Londres
une fête fort solemnelle
pour le Te Deum en
musique, chanté à S. Paul
en actions de graces de la
paix. La Reine ne put s'y
trouver; ce qui diminua
beaucoup de la beautéde
la cavalcade: mais tous les
Meilleurs du Parlement de
l'une & l'aurre Chambre s'y
ren dirent tous en cortege
dans leurscarosses, que les
Torris avoient rendus fort
brillans. Le soir Se toute la
nuit il y eut des feux dans
la ville, & toutes les fenêtres
éclairées. Ceux qui n'y
mirent pas de lumieress'exposoient
à voirbriser leurs
vitres
,
& il n'yen a gueres
de celles-ci qui ayent echa<
péà la tumultueuse rejoüissance
de la mable: c'est ainsi
qu'onappelle la populace
de Londres, qui ces joursla
est la maîtresse, &' que
nulle puissance n'a le droit
ni la force dereprimer. Il
y eut cette nuit là deux fort
beaux feux d'artifice; l'un
dans Hoborn pour la ville,
& l'autre pour la Reine sur
la Tamise, entre Sommerset
& Vvitheal.
Fermer
Résumé : Relation de l'entrée de M. le Duc d'Aumont, Ambassadeur extraordinaire de France, à Londres le 20. Juillet 1713.
Le texte décrit plusieurs événements liés à la visite du Duc d'Aumont, ambassadeur extraordinaire de France à Londres, en juillet 1713. Le 10 juillet, le Duc d'Aumont arrive à Greenwich où il est accueilli par Milord Comte de Skardel et six gentilshommes de la Chambre privée de la Reine. Après un déjeuner somptueux, ils se rendent à la Tour de Londres, où le Duc est reçu par Milord Comte de Northampton. La procession inclut des gardes, des valets de pied, des pages, et des carrosses ornés. À Somerset House, le Duc est accueilli par une compagnie des Gardes de la Reine et reçoit des visites toute la soirée. Un souper magnifique est servi, et des santés sont portées au Roi de France, à la Reine Britannique, et à d'autres personnalités. Le lendemain, le Duc assiste à une audience publique avec la Reine, qui est reçue dans un fauteuil sur une estrade sous son dais. Le Duc prononce son compliment avant de se retirer. La Reine, en raison de son incommodité, ne se lève pas mais répond gracieusement. Le Duc retourne ensuite à Somerset House avec les mêmes honneurs. Le texte mentionne également deux autres événements. Premièrement, le Duc d'Aumont offre neuf chevaux gris-pommelés à la Reine, estimés à dix mille francs en Hollande. La Reine accepte l'offre en raison de la manière engageante dont elle est faite. Les chevaux, jugés parmi les plus beaux, sont conduits à Kensington. Deuxièmement, une fête solennelle est organisée à Londres pour célébrer la paix par un Te Deum à l'église Saint-Paul. La Reine ne peut y assister, ce qui diminue la splendeur de la cavalcade. Cependant, les membres du Parlement des deux chambres y participent en cortège dans des carrosses brillamment décorés. La nuit est marquée par des feux d'artifice et des illuminations obligatoires. La populace londonienne, appelée la 'mable', profite de l'occasion pour se livrer à des réjouissances tumultueuses. Deux feux d'artifice sont tirés, l'un pour la ville à Hoborn et l'autre pour la Reine sur la Tamise.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
9
p. 1152-1156
L'Italie Galante, ou les Contes, &c. [titre d'après la table]
Début :
Les Comédiens représenterent le 11. de ce mois une Piece nouvelle intitulée [...]
Mots clefs :
Comédiens, Bienséances, Extinction de voix, Tumulte, Divertissement, Fête, Magnificence
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : L'Italie Galante, ou les Contes, &c. [titre d'après la table]
Les Comédiens représenterent le 11.
de ce mois une Piece nouvelle intitulée
PItalie Galante , ou les Contes . Ce sont
trois Comédies differentes , où M. Delamotte
, s'est fait un plaisir d'accomoder
au Théatre , et de ramener aux bonnes
moeurs er aux bienséances , trois Contes
de la Fontaine ; l'Oraison de S. Julien
Richard Minutolo , et le Magnifique.
*
L'Oraison de S. Julien changée en Talisman
, dont on avoit déja vû trois Répre
sentations il y a quelques années , fût r‹ -
ceue avec beaucoup de plaisir.
Le Magnifique en deux Actes , eût le
succès le plus eclatant qu'un Autheur
puisse souhaitter : mais il arriva à Minu
tolo l'inconvenient de n'être pas entendu .
Un
MAY. 1737 TIT
Un des Acteurs principaux , et même le
plus nécessaire pour faire entendre la
Piéce , fût surpris d'une extinction de
voix , qui ne lui permit pas de prononcer
un seul mot de son Rôle : le tumulte que
ce contre-temps excita dans l'Assemblée ,
ne laissa point entendre les autres Acteurs:
ainsi l'on peut dire que la Piéce ne fût
pas representée ce jour- là ; elle le fut deux
jours aprés , et elle fut géneralement aplau
die. Le Public donne de jour en jour de
nouvelles louanges à tout l'ouvrage , et
le trouve digne de son Auteur
Chaque Piéce est ornée d'un Divertis
sement , la Musique est vive , enjoüée ,
ou tendre , selon que les caractéres l'éxigent
: elle est de M. Quinaut. Le Balet est
galand , et comique : il est de M. Dangeville.
La Fête de Renaud d'Ast est un Bal.
Le Vaudeville roule sur les Talismans ,
en voici deux Couplets.
Four surmonter l'Indifference ,
Il est tant de secrets charmants.
Faut il que contre l'Inconstance
L'Amour n'ait point de Talismans.
Pour bon gîte et bonne avanture
Faut-il
1154 MERCURE DE FRANCE
Faut- il des Aneaux et des Sorts ?
Soyez aimable , et je vous jure ,
Vous ne coucherez pas déhors.
La Fête de Minutolo est une Fête cham
pêtre. Le Vaudeville roule fur le bonheur
des Bergers , en voici trois Couplets:
Vous de qui la Richesse
Flate en vain les désirs ,
Vous cherchés les plaisirs ,
Et les manqués sans cesse ;
Nos Amours sont tout nôtre bien
Et nous ne vous envions rien.
Le Ciel a fait aux Hommes
Des Destins differents :
Vous paroissez contens :
Mais c'est nous qui le sommes ,
Nos Amours & c.
Au Parterre .
Si nos soins , pour vous plaire ,
N'avoient pas été vains ,
Vous auriés dans vos mains
Nôtre plus doux salaire ;
Vos
MAY. 1731
1159
Vos plaisirs sont tout nôtre bien
Hors delà nous n'envions rien.
2
La Fête du Magnifique : ce sont differents
Peuples qui offrent à Lucille les Richesses
de leur pays. Le Vaudeville rou
le sur la Magnificence. En voiçi trois
Couplets:
L'Amant avare et tiranique
Verra rebutter ses désirs :
Mais si l'Amour a des plaisirs ;
Ils sont pour l'Amant Magnifique,
Donnés , Amants ; mais donnés bien
Donner mal , c'est ne donner rien.
粥
La maniere ajoûte au service :
Il faut que les dons soient adroits ;
Les présens même quelquefois
Offensent plus que l'avarice .
Donnés , Amants &c.
Au Parters .
ន
W
Soyez avares de Critiques ,
Si vous ne sortés pas contens :
Ce n'est qu'en applaudissemen,
Qu'il
156 MERCURE DE FRANCE
Qu'il vous sied d'être Magnifiques.
Applaudissez pour nôtre bien :
Critiqués , mais si peu que rien.
Ce Couplet , que chante la Dlle. Gossin
avec beaucoup de grace, est fort applaudi :
les autres Couplets sont chantez vivement
et trés-bien exprimez . Les Dilles . Labate .
et Dangeville
font un très grand plaisir
dans le Balet , au milieu duquel la petite
Dlle. Dubreuil, en Sauve-Souris , danse ,
toujours; poursuivie
par ceux qui veulent
l'attrapper. Toutes ces Piéces, au reste,sont
trés bien représentées. Ce qui a fait remarquer
par plusieurs bons connoisseurs
que depuis fort long- temps , il n'y avoit
cu à la Comédie Françoise , tant ni de si
excellens sujets . Nous nous abstenons de
les nommer icy de peur de décourager
ceux dont les talens ne sont pas encore dévelopés
, et dont le Public empêche souvent
les progrés par trop peu d'indulgence.
de ce mois une Piece nouvelle intitulée
PItalie Galante , ou les Contes . Ce sont
trois Comédies differentes , où M. Delamotte
, s'est fait un plaisir d'accomoder
au Théatre , et de ramener aux bonnes
moeurs er aux bienséances , trois Contes
de la Fontaine ; l'Oraison de S. Julien
Richard Minutolo , et le Magnifique.
*
L'Oraison de S. Julien changée en Talisman
, dont on avoit déja vû trois Répre
sentations il y a quelques années , fût r‹ -
ceue avec beaucoup de plaisir.
Le Magnifique en deux Actes , eût le
succès le plus eclatant qu'un Autheur
puisse souhaitter : mais il arriva à Minu
tolo l'inconvenient de n'être pas entendu .
Un
MAY. 1737 TIT
Un des Acteurs principaux , et même le
plus nécessaire pour faire entendre la
Piéce , fût surpris d'une extinction de
voix , qui ne lui permit pas de prononcer
un seul mot de son Rôle : le tumulte que
ce contre-temps excita dans l'Assemblée ,
ne laissa point entendre les autres Acteurs:
ainsi l'on peut dire que la Piéce ne fût
pas representée ce jour- là ; elle le fut deux
jours aprés , et elle fut géneralement aplau
die. Le Public donne de jour en jour de
nouvelles louanges à tout l'ouvrage , et
le trouve digne de son Auteur
Chaque Piéce est ornée d'un Divertis
sement , la Musique est vive , enjoüée ,
ou tendre , selon que les caractéres l'éxigent
: elle est de M. Quinaut. Le Balet est
galand , et comique : il est de M. Dangeville.
La Fête de Renaud d'Ast est un Bal.
Le Vaudeville roule sur les Talismans ,
en voici deux Couplets.
Four surmonter l'Indifference ,
Il est tant de secrets charmants.
Faut il que contre l'Inconstance
L'Amour n'ait point de Talismans.
Pour bon gîte et bonne avanture
Faut-il
1154 MERCURE DE FRANCE
Faut- il des Aneaux et des Sorts ?
Soyez aimable , et je vous jure ,
Vous ne coucherez pas déhors.
La Fête de Minutolo est une Fête cham
pêtre. Le Vaudeville roule fur le bonheur
des Bergers , en voici trois Couplets:
Vous de qui la Richesse
Flate en vain les désirs ,
Vous cherchés les plaisirs ,
Et les manqués sans cesse ;
Nos Amours sont tout nôtre bien
Et nous ne vous envions rien.
Le Ciel a fait aux Hommes
Des Destins differents :
Vous paroissez contens :
Mais c'est nous qui le sommes ,
Nos Amours & c.
Au Parterre .
Si nos soins , pour vous plaire ,
N'avoient pas été vains ,
Vous auriés dans vos mains
Nôtre plus doux salaire ;
Vos
MAY. 1731
1159
Vos plaisirs sont tout nôtre bien
Hors delà nous n'envions rien.
2
La Fête du Magnifique : ce sont differents
Peuples qui offrent à Lucille les Richesses
de leur pays. Le Vaudeville rou
le sur la Magnificence. En voiçi trois
Couplets:
L'Amant avare et tiranique
Verra rebutter ses désirs :
Mais si l'Amour a des plaisirs ;
Ils sont pour l'Amant Magnifique,
Donnés , Amants ; mais donnés bien
Donner mal , c'est ne donner rien.
粥
La maniere ajoûte au service :
Il faut que les dons soient adroits ;
Les présens même quelquefois
Offensent plus que l'avarice .
Donnés , Amants &c.
Au Parters .
ន
W
Soyez avares de Critiques ,
Si vous ne sortés pas contens :
Ce n'est qu'en applaudissemen,
Qu'il
156 MERCURE DE FRANCE
Qu'il vous sied d'être Magnifiques.
Applaudissez pour nôtre bien :
Critiqués , mais si peu que rien.
Ce Couplet , que chante la Dlle. Gossin
avec beaucoup de grace, est fort applaudi :
les autres Couplets sont chantez vivement
et trés-bien exprimez . Les Dilles . Labate .
et Dangeville
font un très grand plaisir
dans le Balet , au milieu duquel la petite
Dlle. Dubreuil, en Sauve-Souris , danse ,
toujours; poursuivie
par ceux qui veulent
l'attrapper. Toutes ces Piéces, au reste,sont
trés bien représentées. Ce qui a fait remarquer
par plusieurs bons connoisseurs
que depuis fort long- temps , il n'y avoit
cu à la Comédie Françoise , tant ni de si
excellens sujets . Nous nous abstenons de
les nommer icy de peur de décourager
ceux dont les talens ne sont pas encore dévelopés
, et dont le Public empêche souvent
les progrés par trop peu d'indulgence.
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Résumé : L'Italie Galante, ou les Contes, &c. [titre d'après la table]
Le 11 mai 1737, les Comédiens ont présenté une pièce intitulée 'L'Italie Galante, ou les Contes'. Cette œuvre est composée de trois comédies adaptées par M. Delamotte à partir de contes de La Fontaine : 'L'Oraison de S. Julien', 'Richard Minutolo' et 'Le Magnifique'. La première comédie, 'L'Oraison de S. Julien', rebaptisée 'Le Talisman', a été bien accueillie après trois représentations précédentes. La deuxième comédie, 'Le Magnifique', en deux actes, a connu un succès remarquable malgré un incident lors de la première représentation où un acteur principal a perdu sa voix, rendant la pièce inaudible. La représentation a été reprise deux jours plus tard et a été applaudie. Chaque pièce est accompagnée de divertissements musicaux et chorégraphiques. La musique, composée par M. Quinaut, est adaptée aux caractères des pièces, tandis que le ballet, créé par M. Dangeville, est galant et comique. Les vaudevilles accompagnant les pièces traitent des thèmes des talismans, du bonheur des bergers et de la magnificence. Les représentations ont été saluées pour leur excellence, et le public a loué les talents des acteurs et des auteurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
p. 1427-1428
ODE SACRÉE, Tirée du Pseaume CX. Confitebor tibi, Domine, &c.
Début :
Seigneur, pour publier ta gloire, [...]
Mots clefs :
Psaume, Gloire, Lois, Magnificence, Équité, Providence, Alliance
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texteReconnaissance textuelle : ODE SACRÉE, Tirée du Pseaume CX. Confitebor tibi, Domine, &c.
ODE SA CREE,
Tirée du Pseaume cx.
& c.. Confitebor tibi , Domine
Seigneur, Eigneur , pour publier ta gloire ,
J'éleverai par tout ma voix ;
J'en rappellerai la memoire ,
Aux hommes qui suivent tes Loix.
Je mésurerai mes hommages ,
Sur la grandeur de tes Ouvrages ,
Conformes à ta volonté :
Ils sont pleins de magnificence ,,
Et tous annoncent ta Puissance
Et ton immuable équité.
.
De mon Dieu , quelle est la clémence
Pour la Nation qui le sert ?
Son indulgente Providence ,
L'a nourir dans le Desert.
sçu
Il éternise ses Miracles ;
Israël , selon ses Oracles ,
Tu verras fuir tes ennemis ; .
Et suivant sa sainte Alliance
dla Vola
11
428 MERCURE DE FRANCE
Il va mettre sous ta Puissance ,
L'heritage qu'il t'a promis.
Tout ce qu'il fait n'est que sagesse
Que justice et que verité ;
Ses Loix subsisteront sans cesse
Pour confondre l'impieté.
Il délivra Sion naissante .""
De la puissance ravissante ,
De ses infléxibles Tyrans ;
Et l'Alliance salutaire ,
Qu'avec son Peuple il daigna faire ,
Sera stable dans tous les tems.
"
讚
Son nom est saint et redoutable ;
C
Ceux qui craignent son Jugement ,
De la Sagesse veritable ,
Possedent le commencement.
S'ils prennent leur crainte pour guide ,
Bien- tôt de ce Monde perfide ,
Ils connoîtront la vanité ;
Et du Seigneur dans les délices ,
Ils celebreront les Justices ,
Pendant toute l'Eternité.
Tirée du Pseaume cx.
& c.. Confitebor tibi , Domine
Seigneur, Eigneur , pour publier ta gloire ,
J'éleverai par tout ma voix ;
J'en rappellerai la memoire ,
Aux hommes qui suivent tes Loix.
Je mésurerai mes hommages ,
Sur la grandeur de tes Ouvrages ,
Conformes à ta volonté :
Ils sont pleins de magnificence ,,
Et tous annoncent ta Puissance
Et ton immuable équité.
.
De mon Dieu , quelle est la clémence
Pour la Nation qui le sert ?
Son indulgente Providence ,
L'a nourir dans le Desert.
sçu
Il éternise ses Miracles ;
Israël , selon ses Oracles ,
Tu verras fuir tes ennemis ; .
Et suivant sa sainte Alliance
dla Vola
11
428 MERCURE DE FRANCE
Il va mettre sous ta Puissance ,
L'heritage qu'il t'a promis.
Tout ce qu'il fait n'est que sagesse
Que justice et que verité ;
Ses Loix subsisteront sans cesse
Pour confondre l'impieté.
Il délivra Sion naissante .""
De la puissance ravissante ,
De ses infléxibles Tyrans ;
Et l'Alliance salutaire ,
Qu'avec son Peuple il daigna faire ,
Sera stable dans tous les tems.
"
讚
Son nom est saint et redoutable ;
C
Ceux qui craignent son Jugement ,
De la Sagesse veritable ,
Possedent le commencement.
S'ils prennent leur crainte pour guide ,
Bien- tôt de ce Monde perfide ,
Ils connoîtront la vanité ;
Et du Seigneur dans les délices ,
Ils celebreront les Justices ,
Pendant toute l'Eternité.
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Résumé : ODE SACRÉE, Tirée du Pseaume CX. Confitebor tibi, Domine, &c.
Le poème 'ODE SA CREE' est tiré du Psaume 110 et commence par une louange à Dieu, exprimant le désir de proclamer Sa gloire et de rappeler les lois divines. Le poète souligne la magnificence, la puissance et l'équité des œuvres de Dieu. Il met en avant la clémence divine envers la nation qui sert Dieu, mentionnant la Providence qui a nourri Israël dans le désert et les miracles éternels de Dieu. Israël est assuré de voir ses ennemis fuir et de recevoir l'héritage promis par Dieu, en vertu de l'alliance sainte. Les actions de Dieu sont décrites comme sages, justes et vraies, et Ses lois subsisteront pour confondre l'impiété. Le poème évoque également la délivrance de Sion des tyrans et la stabilité de l'alliance salutaire entre Dieu et Son peuple. Enfin, il souligne que ceux qui craignent le jugement de Dieu possèdent la véritable sagesse et connaîtront la vanité du monde, célébrant les justices du Seigneur pour l'éternité.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 2549-2551
ODE Sur le respect dû aux Eglises. Pavete ad Sanctuarium meum.
Début :
Du redoutable éclat de sa magnificence [...]
Mots clefs :
Magnificence, Mortels coupables, Asile, Vengeance, Pénitent, Profanateurs
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texteReconnaissance textuelle : ODE Sur le respect dû aux Eglises. Pavete ad Sanctuarium meum.
ODE
Sur le respect dû aux Eglises,
Pavete ad Sanctuarium meum.
U redoutable éclat de sa magnificence
Le Seigneur autrefois marchoit environné ;
Les Eclairs et la Foudre annonçoient sa presence
Au Peuple prosterné.
Mais
2550 MERCURE DE FRANCE
Mais aujourd'hui voilant sous des ombres palpables
Les rayons de sa gloire à nos trop foibles yeux,
Ce même Dieu descend chez les mortels coupables
Le
Pour écouter leurs voeux.
témps est un azile où regne la Clemence
1
De nos gémissemens dés qu'elle entend la voix ;
Elle arrache les traits des mains de la vengeance
Qui lui cede ses droits.
Mais je frémis > ô Ciel ! quel attentat , quel
crime !
'Anges , le voyez -vous sans en être irrités ?
L'hommeaux pieds des Autels insulte à la victime
De ses iniquités ,
Des objets indécens , des discours sacrileges
Ravissent au très-haut les coeurs de toutes parts
L'innocence aux abois ne trouve que
Dans ses plus saints Remparts.
des piéges
Est- ce avec tant d'orgueil , de vanité , d'audace ,
Que l'humble Penitent y porte ses remords ?
D'un
NOVEMBRE. 1731. 2551
D'un Chef anéanti croit - il obtenir grace
Sous ces pompeux dehors ?
Nous tremblons à l'aspect des Princes de la
Terre ,
Leur Trône est entouré des vils adorateurs ;
Et l'on ne voit aux pieds du Maître du Tonnerre
Que des Prophanateurs,
Faut-il que l'Eternel arrache nos hommages
Par l'horreur et l'effroi dans un coeur égaré ?
d'un libre amour sous de tendres , non › Non
images
Il veut être honoré.
Pour être moins terrible , est-il moins respec
table ?
Un Dieu nous traite en pere , aimons - le donc
en fils.
Sa tendresse doit- elle , ô Mortel exécrable
Enhardir tes mépris ≥
Dieu vangera son culte , il t'observe en silence à
Inexorable Juge à l'instant du trépas ,
Ainsi que sa bonté sa colere est immense ;
Crains les coups de son braş.
Sur le respect dû aux Eglises,
Pavete ad Sanctuarium meum.
U redoutable éclat de sa magnificence
Le Seigneur autrefois marchoit environné ;
Les Eclairs et la Foudre annonçoient sa presence
Au Peuple prosterné.
Mais
2550 MERCURE DE FRANCE
Mais aujourd'hui voilant sous des ombres palpables
Les rayons de sa gloire à nos trop foibles yeux,
Ce même Dieu descend chez les mortels coupables
Le
Pour écouter leurs voeux.
témps est un azile où regne la Clemence
1
De nos gémissemens dés qu'elle entend la voix ;
Elle arrache les traits des mains de la vengeance
Qui lui cede ses droits.
Mais je frémis > ô Ciel ! quel attentat , quel
crime !
'Anges , le voyez -vous sans en être irrités ?
L'hommeaux pieds des Autels insulte à la victime
De ses iniquités ,
Des objets indécens , des discours sacrileges
Ravissent au très-haut les coeurs de toutes parts
L'innocence aux abois ne trouve que
Dans ses plus saints Remparts.
des piéges
Est- ce avec tant d'orgueil , de vanité , d'audace ,
Que l'humble Penitent y porte ses remords ?
D'un
NOVEMBRE. 1731. 2551
D'un Chef anéanti croit - il obtenir grace
Sous ces pompeux dehors ?
Nous tremblons à l'aspect des Princes de la
Terre ,
Leur Trône est entouré des vils adorateurs ;
Et l'on ne voit aux pieds du Maître du Tonnerre
Que des Prophanateurs,
Faut-il que l'Eternel arrache nos hommages
Par l'horreur et l'effroi dans un coeur égaré ?
d'un libre amour sous de tendres , non › Non
images
Il veut être honoré.
Pour être moins terrible , est-il moins respec
table ?
Un Dieu nous traite en pere , aimons - le donc
en fils.
Sa tendresse doit- elle , ô Mortel exécrable
Enhardir tes mépris ≥
Dieu vangera son culte , il t'observe en silence à
Inexorable Juge à l'instant du trépas ,
Ainsi que sa bonté sa colere est immense ;
Crains les coups de son braş.
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Résumé : ODE Sur le respect dû aux Eglises. Pavete ad Sanctuarium meum.
L''ODE' est un poème qui exalte le respect dû aux églises et à la divinité. Il commence par rappeler la majesté divine passée, marquée par des phénomènes spectaculaires comme les éclairs et la foudre. Aujourd'hui, Dieu se montre plus clément et accessible, prêt à écouter les prières des hommes. Cependant, le poète exprime son indignation face aux profanations et aux insultes commises par les hommes aux pieds des autels. Il dénonce l'orgueil et l'audace de ceux qui se présentent humblement en pénitents tout en étant remplis de vanité. Le poème critique également ceux qui ne respectent pas Dieu malgré sa tendresse paternelle, soulignant que Dieu observera et jugera les hommes avec sévérité. Il conclut en appelant à craindre la colère divine et à honorer Dieu avec un amour sincère.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 67-72
COPIE de la Lettre écrite le 12 Août 1755. par M. Voisin, Avocat au Parlement à M. le Prince de ..... Chevalier de la Toison d'or.
Début :
MONSIEUR, La simple idée par écrit, que vous me demandez du Livre (I), dont, avant votre [...]
Mots clefs :
Princes, Gloire, Seigneurs, Magnificence, Prince, Devoirs, Richesses, Esprit
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COPIE de la Lettre écrite le 12 Août 1755. par M. Voisin, Avocat au Parlement à M. le Prince de ..... Chevalier de la Toison d'or.
COPIE de la Leure écrite le 12 Août
1755. par M. Voifin , Avocat au Parlement
à M. le Prince de Chevalier de
la Toifon d'or,
MONSIEUR ,
14
La fimple idée par écrit , que vous me
demandez du Livre ( 1 ) , dont , avant votre
départ de Paris , j'ai eu l'honneur de.
vous entretenir , & auquel je travaille depuis
plufieurs années , exige elle-même un
affez grand détail par la multitude des objers.
Je crois , Monfieur , ne pouvoir
mieux fatisfaire à ce que vous défitez de
moi à cet égard , qu'en vous communiquant
par forme de lettres , le difcours
que je projette de mettre à la tête de l'ouvrage
pour y fervir d'introduction.
( 1 ) Ce Livre a pour titre , Le Confeilfamilier
& économique des Princes des grands Seigneurs ;
ou Moyens de conferver , d'augmenter & de perpétuer
les richeffes , la magnificence & la véritable
gloire de leurs Maiſons.
68 MERCURE DE FRANCE.
PREMIERE LETTRE.
Que les Princes & les grands Seigneurs
foient dans l'opulence , c'eft un attribut
naturel de leur condition : mais ils ne doivent
pas fe flatter de conferver , d'augmenter
, ni de perpétuer leurs richeffes , fans
une heureufe intelligence , foutenue de
cette économie libérale , qui ne prodigue
rien , pour donner fans ceffe avec difcernement.
Que les Princes & les grands Seigneurs
ayent en général le défir de la magnificence
, faut-il s'en étonner ? Ils naiffent
dans fon fein ; on en recrée leur enfance :
hommes formés , ils en ajoutent l'habitude
au goût naturel ; ils y meurent . Mais étoitce
une véritable magnificence que l'éclat
qui leur fit illufion pendant leur vie ? ou
n'étoit ce au contraire , qu'un faux brillant
qui , en deshonorant la mémoire de
ceux qu'il féduit , ne laiffe fouvent dans
leurs fucceffions que l'indigence & l'infolvabilité.
La véritable magnificence trouve dans
la fageffe qui la dirige , les moyens de ſe
conferver , de s'augmenter & de fe perpétuer.
Un efprit d'arrangement fans contrainte
, blâme ou avoue les motifs & les
occafions de la magnificence. Si la riche
DECEMBRE . 1755. 69
économie qui prend foin , quand il le faut,
que rien ne manque au fpectacle , lui prefcrit
cependant quelquefois des bornes ,
c'eſt pour faire , en évitant le défaut d'une
confufion inutile & choquante , fubfifter
cette magnificence même avec plus de folidité
, & pour affurer par-là à celui qui en´
fupporte la dépenfe , le fuffrage des perfonnes
dont le goût & la raifon font les
guides éclairés.
Que les Princes & les grands Seigneurs
confiderent la gloire de leurs Maifons
comme leur principal objet , & le plus
digne de les occuper , l'antiquité & la nobleffe
de leur origine femblent , à leur
naiffance , en graver le fentiment dans
leurs coeurs il feroit à fouhaiter qu'au
foin qu'on fe donne de leur en préfenter
fans ceffe la perfpective dans le cours de
leur éducation , on joignît l'attention de
leur développer les caracteres effentiels
de la véritable gloire , & de leur en infpirer
cet amour raiſonné qui , ennemi d'un
aveugle orgueil , reçoit de l'efprit même
du Chriftianifme , la permiffion d'aiguillonner
les gens d'honneur.
Penfer , comme on croit fincerement le
devoir ; s'inftruire , pour penfer mieux
encore ; faire ce qu'on peut & ce qu'on
doit par inclination pour le bon ordre
70 MERCURE DE FRANCE.
voilà en général la bafe inebranlable de
la véritable gloire des Princes & des
grands Seigneurs. C'eft , en un mot , le
fondement de la gloire folide dans tous
les états.
Ce principe annonce donc que , pour
conferver , augmenter & perpétuer la véritable
gloire des Grands , il faut ,
Premierement , qu'ils foyent convaincus
de l'indifpenfable néceffité de remplir les
devoirs de leur état .
Secondement , qu'ils travaillent folidement
à les connoître dans la vérité , parcequ'il
eft impoffible de bien faire ce dont
on ignore les principes .
Enfin il est néceffaire que les Grands
furmontent avec courage les dégoûts & les
contradictions que des paffions tumul- .
tueufes élevent quelquefois contre le regne
tranquille de l'ordre & de la raifon.
Que la réunion de ces ennemis intérieurs
n'effraye pas le combattant ; je ferai
voir dans fon lieu que l'idée du combat
eft plus terrible que le combat même. Le
Combattant doit craindre d'autant moins
d'effayer fes forces , que fon courage le
rend fûr d'une victoire , dont les fuites
font la paix du coeur & la gayeté de
l'efprit .
Les Princes & les Grands ont donc des
DECEMBRE . 1755. 71
devoirs d'état à remplir , & ce n'eft que
par leur exactitude à s'en acquitter , qu'ils
peuvent conferver , augmenter & perpétuer
la véritable gloire de leurs Maifons.
Mais pour fçavoir quelle eft l'étendue
des devoirs d'état des Princes & des
Grands , il faut déterminer quel eft leur
état même.
Parce qu'ils font grands , ne font- ils
qu'hommes de Cour , & ne fe croyent- ils
affujettis à des devoirs qu'envers la Cour ?
Je les confidere dans trois pofitions différentes
, dont chacune exige des connoiffances
qui lui font immédiatement néceffaires.
Le Prince ou le grand Seigneur, comme
particulier dans l'intérieur de fa maiſon &
de fes terres : Premiere Partie.
Le Prince ou le grand Seigneur perè
de famille : Seconde Partie.
Le Prince ou le grand Seigneur membre
de la Société , & homme d'Etat : Troifieme
Partie.
C'est en propofant mes réflexions fur
chacune de ces trois conditions , que je
mets fous les yeux des Princes & des
grands Seigneurs , les moyens de conferver
, d'augmenter & de perpétuer les richeffes
, la magnificence & la véritable
gloire de leurs Maiſons.
72 MERCURE DE FRANCE.
Ces trois points de vue fous lefquels les
Princes & les grands Seigneurs peuvent
être envifagés , font auffi la divifion naturelle
de ce difcours , dont les trois parties
réunies renferment le plan général de
l'Ouvrage.
1755. par M. Voifin , Avocat au Parlement
à M. le Prince de Chevalier de
la Toifon d'or,
MONSIEUR ,
14
La fimple idée par écrit , que vous me
demandez du Livre ( 1 ) , dont , avant votre
départ de Paris , j'ai eu l'honneur de.
vous entretenir , & auquel je travaille depuis
plufieurs années , exige elle-même un
affez grand détail par la multitude des objers.
Je crois , Monfieur , ne pouvoir
mieux fatisfaire à ce que vous défitez de
moi à cet égard , qu'en vous communiquant
par forme de lettres , le difcours
que je projette de mettre à la tête de l'ouvrage
pour y fervir d'introduction.
( 1 ) Ce Livre a pour titre , Le Confeilfamilier
& économique des Princes des grands Seigneurs ;
ou Moyens de conferver , d'augmenter & de perpétuer
les richeffes , la magnificence & la véritable
gloire de leurs Maiſons.
68 MERCURE DE FRANCE.
PREMIERE LETTRE.
Que les Princes & les grands Seigneurs
foient dans l'opulence , c'eft un attribut
naturel de leur condition : mais ils ne doivent
pas fe flatter de conferver , d'augmenter
, ni de perpétuer leurs richeffes , fans
une heureufe intelligence , foutenue de
cette économie libérale , qui ne prodigue
rien , pour donner fans ceffe avec difcernement.
Que les Princes & les grands Seigneurs
ayent en général le défir de la magnificence
, faut-il s'en étonner ? Ils naiffent
dans fon fein ; on en recrée leur enfance :
hommes formés , ils en ajoutent l'habitude
au goût naturel ; ils y meurent . Mais étoitce
une véritable magnificence que l'éclat
qui leur fit illufion pendant leur vie ? ou
n'étoit ce au contraire , qu'un faux brillant
qui , en deshonorant la mémoire de
ceux qu'il féduit , ne laiffe fouvent dans
leurs fucceffions que l'indigence & l'infolvabilité.
La véritable magnificence trouve dans
la fageffe qui la dirige , les moyens de ſe
conferver , de s'augmenter & de fe perpétuer.
Un efprit d'arrangement fans contrainte
, blâme ou avoue les motifs & les
occafions de la magnificence. Si la riche
DECEMBRE . 1755. 69
économie qui prend foin , quand il le faut,
que rien ne manque au fpectacle , lui prefcrit
cependant quelquefois des bornes ,
c'eſt pour faire , en évitant le défaut d'une
confufion inutile & choquante , fubfifter
cette magnificence même avec plus de folidité
, & pour affurer par-là à celui qui en´
fupporte la dépenfe , le fuffrage des perfonnes
dont le goût & la raifon font les
guides éclairés.
Que les Princes & les grands Seigneurs
confiderent la gloire de leurs Maifons
comme leur principal objet , & le plus
digne de les occuper , l'antiquité & la nobleffe
de leur origine femblent , à leur
naiffance , en graver le fentiment dans
leurs coeurs il feroit à fouhaiter qu'au
foin qu'on fe donne de leur en préfenter
fans ceffe la perfpective dans le cours de
leur éducation , on joignît l'attention de
leur développer les caracteres effentiels
de la véritable gloire , & de leur en infpirer
cet amour raiſonné qui , ennemi d'un
aveugle orgueil , reçoit de l'efprit même
du Chriftianifme , la permiffion d'aiguillonner
les gens d'honneur.
Penfer , comme on croit fincerement le
devoir ; s'inftruire , pour penfer mieux
encore ; faire ce qu'on peut & ce qu'on
doit par inclination pour le bon ordre
70 MERCURE DE FRANCE.
voilà en général la bafe inebranlable de
la véritable gloire des Princes & des
grands Seigneurs. C'eft , en un mot , le
fondement de la gloire folide dans tous
les états.
Ce principe annonce donc que , pour
conferver , augmenter & perpétuer la véritable
gloire des Grands , il faut ,
Premierement , qu'ils foyent convaincus
de l'indifpenfable néceffité de remplir les
devoirs de leur état .
Secondement , qu'ils travaillent folidement
à les connoître dans la vérité , parcequ'il
eft impoffible de bien faire ce dont
on ignore les principes .
Enfin il est néceffaire que les Grands
furmontent avec courage les dégoûts & les
contradictions que des paffions tumul- .
tueufes élevent quelquefois contre le regne
tranquille de l'ordre & de la raifon.
Que la réunion de ces ennemis intérieurs
n'effraye pas le combattant ; je ferai
voir dans fon lieu que l'idée du combat
eft plus terrible que le combat même. Le
Combattant doit craindre d'autant moins
d'effayer fes forces , que fon courage le
rend fûr d'une victoire , dont les fuites
font la paix du coeur & la gayeté de
l'efprit .
Les Princes & les Grands ont donc des
DECEMBRE . 1755. 71
devoirs d'état à remplir , & ce n'eft que
par leur exactitude à s'en acquitter , qu'ils
peuvent conferver , augmenter & perpétuer
la véritable gloire de leurs Maifons.
Mais pour fçavoir quelle eft l'étendue
des devoirs d'état des Princes & des
Grands , il faut déterminer quel eft leur
état même.
Parce qu'ils font grands , ne font- ils
qu'hommes de Cour , & ne fe croyent- ils
affujettis à des devoirs qu'envers la Cour ?
Je les confidere dans trois pofitions différentes
, dont chacune exige des connoiffances
qui lui font immédiatement néceffaires.
Le Prince ou le grand Seigneur, comme
particulier dans l'intérieur de fa maiſon &
de fes terres : Premiere Partie.
Le Prince ou le grand Seigneur perè
de famille : Seconde Partie.
Le Prince ou le grand Seigneur membre
de la Société , & homme d'Etat : Troifieme
Partie.
C'est en propofant mes réflexions fur
chacune de ces trois conditions , que je
mets fous les yeux des Princes & des
grands Seigneurs , les moyens de conferver
, d'augmenter & de perpétuer les richeffes
, la magnificence & la véritable
gloire de leurs Maiſons.
72 MERCURE DE FRANCE.
Ces trois points de vue fous lefquels les
Princes & les grands Seigneurs peuvent
être envifagés , font auffi la divifion naturelle
de ce difcours , dont les trois parties
réunies renferment le plan général de
l'Ouvrage.
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Résumé : COPIE de la Lettre écrite le 12 Août 1755. par M. Voisin, Avocat au Parlement à M. le Prince de ..... Chevalier de la Toison d'or.
Le document est une lettre datée du 12 août 1755, rédigée par M. Voifin, avocat au Parlement, adressée à M. le Prince de Chevalier de la Toison d'or. Voifin y présente un livre intitulé 'Le Conseil familier & économique des Princes des grands Seigneurs; ou Moyens de conserver, d'augmenter & de perpétuer les richesses, la magnificence & la véritable gloire de leurs Maisons'. L'auteur souligne l'importance pour les princes et grands seigneurs de posséder une intelligence économique afin de conserver et d'accroître leurs richesses. Il distingue la véritable magnificence, guidée par la sagesse, qui se maintient et s'accroît, de l'éclat trompeur qui peut mener à l'indigence. La gloire des maisons princières repose sur la connaissance et l'accomplissement des devoirs d'état, ainsi que sur le courage face aux passions tumultueuses. L'ouvrage de Voifin est structuré en trois parties. La première traite du prince en tant que particulier dans sa maison, la deuxième le considère en tant que père de famille, et la troisième en tant que membre de la société et homme d'État. Chaque section vise à fournir des moyens pour conserver, augmenter et perpétuer les richesses, la magnificence et la gloire des maisons princières.
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13
p. 203-204
DE VIENNE, le 8 Janvier.
Début :
Sa Majesté Impériale, accompagnée des Archiducs & des Chevaliers de la [...]
Mots clefs :
Sa Majesté impériale, Chevaliers, Cérémonie, Mausolée, Prince Eugène, Magnificence, Prince, Comte, Maréchal Daun, Régiment
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texteReconnaissance textuelle : DE VIENNE, le 8 Janvier.
De VIENNE, le 8 Janvier..
Sa Majefté Impériale , accompagnée des Ar
chiducs & des Chevaliers de la Toifon d'Or , fie
le 6 de ce mois , la cérémonie de revêtir du
manteau & des marques diftinctives de l'Ordre ,
le Feld Maréchal Prince de Deux - ponts ; qui fur
auffi reçu le 21 , Grand Croix de l'Ordre Mili--
taire de Marie- Thérèfe.
Notre Cour a fait publier un détail exact &
dreffé par
le Commiffariat des guerres , du nom
bre d'hommes faits prifonniers à l'affaire de Ma
ken. Ce nombre monte à quatorze mille neufcens
vingt-deux , parmi lefquels il y a cinq cens trentedeux
Officiers .
On a expofé , depuis peu de jours , à la vuẽ đư
Public , le magnifique Maufolée du Prince Eu
gène , conftruit dans l'Eglife de Saint Etienne .
Ce monument , lui a été élevé par la Ducheffe
douairière de Savoye , née Princeffe de Lichtenf
tein. Il répond , par fa magnificence , & par l'inf¹
cription qui l'accompagne , à la haute réputation
du Héros , à la mémoire duquel il eft confacré.
Le Prince Léopold de Lobkowitz , Major du
Ivi
204 MERCURE DE FRANCE.
Régiment des Deux ponts, eft mort à Drefde ,
après peu de jours de maladie , à l'âge de 25 ans .
On a appris, de Pologne , que les Haydamacs ,.
dont les cour fes avoient cellé depuis quelque
temps , venoient de les recommencer. Ils ont
fondu à l'improvifte fur les Terres du Prince.
Jablonowski, & ils y ont commis mille défordres,.
pillant & mailacrant tout ce qui eft tombé entre
leurs mains.
Le quartier du Maréchal de Daun eſt toujours
dans les environs de Drefde. Le Roi de Pruile , a
abandonné fon pofte de Prefchendorff. Il a établi
de nouveau fon quartier général à Freyberg. Ce
Prince , loin de fonger à attaquer le Maréchal de
Daun, femble fe borner, pour le moment préfent,
à la défenfive.
>
Le Comte de Schmetrau , s'eft porté depuis
peu , à la tête de fix mille Pruffiens vers .
Lauban , Gorlitz , & Oftritz. Le Maréchal de
Daun a auffitôt détaché les chevaux légers faxons,
les Régimens de Vieux Modene, & de Schmertzing
, Cuirafiers , & les deux Régimens de Marf
hall & d'Angern , Infanterie , qui ont arrêté fes
progrès. Le Général Beck tient toujours en échec
le corps aux ordres du Général Fouquet , &
l'empêche de fe joindre à l'Armée du Roi , Ce
Corps a été obligé, par les manoeuvres du Général
Autrichien , de refter près de Glogaw en Silćfie .
Le Général de Ried a eu près de Marienberg ,
une efcarmouche avec un Corps Pruffien. La fupériorité
du nombre , l'a obligé d'abandonner fon
pofte. Ila cependant fait quelques prifonniers,
Pruffiens.
Sa Majefté Impériale , accompagnée des Ar
chiducs & des Chevaliers de la Toifon d'Or , fie
le 6 de ce mois , la cérémonie de revêtir du
manteau & des marques diftinctives de l'Ordre ,
le Feld Maréchal Prince de Deux - ponts ; qui fur
auffi reçu le 21 , Grand Croix de l'Ordre Mili--
taire de Marie- Thérèfe.
Notre Cour a fait publier un détail exact &
dreffé par
le Commiffariat des guerres , du nom
bre d'hommes faits prifonniers à l'affaire de Ma
ken. Ce nombre monte à quatorze mille neufcens
vingt-deux , parmi lefquels il y a cinq cens trentedeux
Officiers .
On a expofé , depuis peu de jours , à la vuẽ đư
Public , le magnifique Maufolée du Prince Eu
gène , conftruit dans l'Eglife de Saint Etienne .
Ce monument , lui a été élevé par la Ducheffe
douairière de Savoye , née Princeffe de Lichtenf
tein. Il répond , par fa magnificence , & par l'inf¹
cription qui l'accompagne , à la haute réputation
du Héros , à la mémoire duquel il eft confacré.
Le Prince Léopold de Lobkowitz , Major du
Ivi
204 MERCURE DE FRANCE.
Régiment des Deux ponts, eft mort à Drefde ,
après peu de jours de maladie , à l'âge de 25 ans .
On a appris, de Pologne , que les Haydamacs ,.
dont les cour fes avoient cellé depuis quelque
temps , venoient de les recommencer. Ils ont
fondu à l'improvifte fur les Terres du Prince.
Jablonowski, & ils y ont commis mille défordres,.
pillant & mailacrant tout ce qui eft tombé entre
leurs mains.
Le quartier du Maréchal de Daun eſt toujours
dans les environs de Drefde. Le Roi de Pruile , a
abandonné fon pofte de Prefchendorff. Il a établi
de nouveau fon quartier général à Freyberg. Ce
Prince , loin de fonger à attaquer le Maréchal de
Daun, femble fe borner, pour le moment préfent,
à la défenfive.
>
Le Comte de Schmetrau , s'eft porté depuis
peu , à la tête de fix mille Pruffiens vers .
Lauban , Gorlitz , & Oftritz. Le Maréchal de
Daun a auffitôt détaché les chevaux légers faxons,
les Régimens de Vieux Modene, & de Schmertzing
, Cuirafiers , & les deux Régimens de Marf
hall & d'Angern , Infanterie , qui ont arrêté fes
progrès. Le Général Beck tient toujours en échec
le corps aux ordres du Général Fouquet , &
l'empêche de fe joindre à l'Armée du Roi , Ce
Corps a été obligé, par les manoeuvres du Général
Autrichien , de refter près de Glogaw en Silćfie .
Le Général de Ried a eu près de Marienberg ,
une efcarmouche avec un Corps Pruffien. La fupériorité
du nombre , l'a obligé d'abandonner fon
pofte. Ila cependant fait quelques prifonniers,
Pruffiens.
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Résumé : DE VIENNE, le 8 Janvier.
Le 6 janvier, Sa Majesté Impériale a décoré le Feld Maréchal Prince de Deux-Ponts de l'Ordre et de la Grand Croix de l'Ordre Militaire de Marie-Thérèse. La Cour a annoncé 14 922 prisonniers dans l'affaire de Macken, incluant 532 officiers. Le mausolée du Prince Eugène, construit par la Duchesse douairière de Savoie, a été inauguré. Le Prince Léopold de Lobkowitz est décédé à Dresde à l'âge de 25 ans. En Pologne, les Haydamacs ont attaqué les terres du Prince Jablonowski, causant pillages et massacres. Le Maréchal de Daun est près de Dresde, tandis que le Roi de Prusse a déplacé son quartier général à Freyberg. Le Comte de Schmetrau, avec 6 000 Prussiens, a été arrêté par les forces autrichiennes. Le Général Beck a empêché le Général Fouquet de rejoindre l'armée prussienne, le retenant près de Glogau. Le Général de Ried a eu une escarmouche près de Marienberg, se retirant malgré quelques prisonniers pris.
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14
p. 187-203
Suite de la Relation de tout ce qui s'est passé depuis.
Début :
L'Opera que l'on représenta, est composé de trois Actes ; il est intitulé [...]
Mots clefs :
Opéra, Amour, Hymen, Dieux, Querelles, Humanité, Destin, Campagne, Mer, Nymphe, Conseils, Magnificence, Enchantements, Merveilles, Fête, Noblesse, Ministres étrangers, Comte, Dîner, Marquis, Cérémonie, Mariage, Escadrons, Église, Décorations, Cortège, Ornements, Argent, Or, Étoffes, Arcades, Nef, Lumières, Sanctuaire, Hallebardiers, Chevaux, Capitaine, Carosse, Anneaux, Salle, Repas, Plats, Palais, Union, Temple, Jardins, Colonnes, Pyramides, Beauté, Clémence, Fécondité, Douceur, Figures, Dignité, Intelligence, Fontaines, Illuminations, Feu d'artifice, Guirlandes, Fleurs, Bal, Archiduchesse, Officiers, Chevaliers
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texteReconnaissance textuelle : Suite de la Relation de tout ce qui s'est passé depuis.
Suite de la Relation de tout ce qui s'eft
paffé depuis.
L'Opera que l'on repréſenta , eft compofé de
trois Actes ; il eft intitulé les Fétes de L'Hymen
pour les nôces de LL. AA. RR. &c. il eft précédé
d'un Prologue.
Ce Prologue , qui a pour Titre le Triomphe de
PAmour , eft une querelle que les Dieux font à
l'Amour , fur les maux qu'il ne ceffe de faire
aux hommes . L'Amour convient de toutes ces
fauces, & obtient fon pardon en faveur de l'Union ,
qu'il vient de faire de la vertu & de la beauté,
188 MERCURE DE FRANCE.
Les fajets des trois Actes qui compofent l'Opéra
font féparés. C'est une licence que l'on a cru
devoir prendre à caufe du merveilleux & de la
galanterie qu'apportent avec eux des fujers fabuleux
& variés , qui femblent mieux convenir à la
Fête qu'on a célébrée .
L'Acte d'Aris eft le premier. L'Amour par ordre
du Deftin , ceffe d'être aveugle ; il jette fes premiers
regards fur Iris , & en devient amoureux ;
Iris le prend pour le Zéphire ; mais revenue de
fon erreur, elle en devient éprife , diffipe les nuages
qu'Aquilon jaloux lui oppofe fans ceffe , &
sunit à l'Amour pour rendre au monde les jours
les plus beaux & les plus fereins.
Le fecond Acte , eft celui de Sapho . Le Poëte
a feint cette dixiéme Muſe , amoureufe d'Alcée
celèbre Poëte Lyrique natif de Lesbos : il a
feint aufli Doris , fils de Neptune , amant de Sapho
, qui fe voyant préferer fon rival , a recours
a fon pére , & le prie de le vanger par la mort
de l'un & de l'autre. Neptune écoute les voeux
de fon fiis ; & par le fecours d'Eole , & des vents
fouléve tellement les eaux , que les habitans de
la campagne craignent d'ètre fubmergés : 1
paroît lui-même fur une vague qui s'élève beaucoup
au defius des autres ; menace de tour
inonder , fi dans une heure , Sapho n'eft pas fenible
à l'amour de fon fils il rentre dans le fein
de la mer , qui continue dans la plus grande
agitation .
Sapho invoque Apollon , & l'Amour. Une
Lyre defcend du Ciel attachée à des guirlandes
de fleurs ; un arc s'élève dans la Mer à l'endroit
où elle doit avoir fes bornes , & les lui marque
pour l'avenir.
Sapho prend la Lyre : à mesure qu'elle chante
les prodiges opérés par Apollon , & l'Amour ;
OCTOBRE. 1760. 189
la Mer fe calme & fe retire au lieu où elle
étoit avant le débordement ; remplie des infpirations
divines , & de l'enthousiasme poétique ,
elle voit dans l'avenir la fuitte nombreufe des
héros , dont elle doit célébrer l'alliance , annonce
le bonheur dont l'Univers doit jouir ; & par fon
mariage avec Alcée , accomplit le triomphe de
l'harmonie , & de l'amour.
Le troifiéme Acte eft intitulé Eglé. Cette Nymphe
eft amoureufe de Chromis ; Alcée fa compagne
l'eft de Lincée .Elles fe plaifent enſemble
à faire foupirer leurs Amants , en leur cachant
leur tendreffe ; enfin Eglé dit à Chromis qu'elle
l'aimera , lorfqu'elle verra les eaux d'un torrent
enchaînées ; Alcée promet à Lincée de l'aimer
quand Eglé aimera Chromis.
Ces deux jeunes Faunes , déſeſpérés , fe confultent
enſemble , & vont trouver Silene pour qu'il
les aide de fes confeils . Ce vieillard leur demande
où ils ont laillé Eglé & Alcée ; ils répondent
qu'elles font à cueillir des mûres pour lui
teindre le vifage, lorfqu'elles le trouveront endormi
. Silene confole les deux Faunes, leur ordonne
de ſe retirer , leur promet de les fervir , & fe
met fur un lit de gazon où il feint de dormir
en attendant les deux Nymphes. Elles arrivent
avec des guirlandes de fleurs , en enchaînent Si-
Lene qu'elles croyent endormi ; elles le pouffents
il feint de s'éveiller & montre de la colere :
mais bien-tôt après il leur conte la fable d'Acis
& Galatée. Au milieu de cette fable , il s'arrête
comme infpiré , & leur conſeille d'aller trouver
Prothée , de le furprendre endormi , & de l'enchaîner
fans s'épouvanter des différentes formes
qu'il prendra , parce qu'à la fin il parlera , & leur
apprendra des chofes merveilleules.
Elles remercient Silene , & le quittent pour al190
MERCURE DE FRANCE:
ler chercher Prothée ; Chromis & Lincée les accoma
pagnent. Elles le furprennent , l'enchaînent , &
ferrent toujours plus fes liens , à mesure qu'il change
de forme ; il fe change enfin en un Torrent
qui refte immobile : toutes les Nymphes admirent
ce prodige . Silene arrive , rapelle à Eglé le ferment
qu'elle a fait d'être à Chromis lorſqu'elle
verra enchaîner un torrent ; Eglé confent à être
unie à Chromis , & Alcée tient auffi fa parole à
Lincée ; les Faunes & les Nymphes applaudiffent
à cette union,& Silene; au lieu de finir la fable qu'il
fe fouvient d'avoir commencée , ordonne aux Faunes,
& aux Nymphes, de célébrer cet heureux jour,
en repréfentant par leurs danfes , les amours
d'Acis , & Galatée.
L'Italie a vû dans cette occafion renaître fur la
fcène les enchantemens , & la nouveauté de ce
fpectacle digne de l'admiration des étrangers , par
la magnificence , la vérité , & le bon goût qui eft
diftribué dans l'exécution de toutes ces parties. Les
machines employées aux différens prodiges amenés
par le Sujet , ont eu le plus grand fuccès ;
& le Théâtre actuellement difpofé par les machines
à recevoir tout ce que l'imagination peut fournir
de plus merveilleux , retracera chaque fois le
fouvenir de la fête pour laquelle il fert la premiere
fois.
Après l'Opéra l'Infant & Madame Infante Iſabelle,
furent à l'hôtel Palavicini où M. le Prince de
Lichtenſtein avoit fait préparer une Fête, à laquelle
toute la Nobleſſe fut invitée ; plufieurs tables furent
abondamment ſervies , ainſi que quantité de
rafraîchiffemens. On y danſa juſqu'au matin.
1
Le lendemain, M. le Prince de Lichtenſtein donna
un fuperbe dîner à tous les Miniftres étrangers ,
& à la Nobleffe la plus confidérable de l'Etat , &
Etrangere . Le foir il y eut Opéra.
OCTOBRE. 1760. Iol
Le Vendredi cinq , M. le Comte de Rochechouart
donna un grand dîner à M. le Prince de
Lichtenſtein & aux mêmes perfonnes qui avoient
dîné chez lui la veille . Il y eut Opéra le foir.
Le Samedi fix , M. de Lichtenſtein le Prince
dîna chez M. le Marquis de Revilla . Il y eut le foir
affemblée au Palais.
Le Dimanche ſept, jour fixé pour la Cérémonie
du Mariage , les Troupes prirent les Armes dès le
matin ; deux bataillons du Régiment de Parme &
quatorze Compagnies de Grenadiers borderent
les rues par où le Cortége devoit paffer.
Six cens Carabiniers formèrent quatre eſcadrons
fur la place , deux defquelles y retterent , jufques
après que le cortége y eut paffé ; les deux autres
furent repartis pour fermer toutes les rues qui
viennent aboutir à celles par où les Princes pafferent:
chaque troupe étoit formée fur deux rangs ,
à trente pas derriere l'Infanterie qui occupoit le
débouché de la rue.
" L'Eglife Cathédrale , où fe fit la cérémonie ,
étoit magnifiquement décorée. Les Peintures du
Corrége , & des autres excellents Maîtres dont ce
vafte Edifice fe trouve orné dans les voutes , &
dans les frifes , donnant des bornes à la richeffe
de la décoration projettée pour cette Augufte cérémonie
; on fut obligé de fe contenter d'orner
les pilaftres , les arcades , & les baffes nefs de damas
cramoifi à fleurs , enrichis de grandes lames
d'étoffes d'argent , de deux pieds de large; lefquelles
interrompoient fymétriquenient , d'espace
en efpace, le cours du damas d'une maniere agréable
& gracieufe; les impoftes fur lesquelles repofent
les arcades , étoient entourées d'une riche
pente du même damas , pliffée & terminée par
une frange d'or , ainfi que les rideaux qui ornoient
le dedans des arcades , & qui étoient retrouffés
192 MERCURE DE FRANCE.
vers l'impofte , pour donner lieu de découvrir la
décoration des chapelles , & des nefs laterales . Aux
deux côtés de la porte de lagrande nef étoient deur
orcheftres , parées dans le même goût que le refte
de l'Eglife : elles étoient remplies de trente Muficiens
que l'on avoit fait venir pour jouer des
fanfares , depuis le moment où les Princes defcen➡
dirent de carolles , juſqu'a celui où ils furent entrés
dans le fanctuaire ; les deux tribunes qui fe'
trouvent près du Maître Autel , étoient remplies
des Muficiens de la Chambre de S. A. R. qui exé-'
cuterent fupérieurement d'excellentes fymphonies
à deux choeurs.
Le Maître-Autel , beaucoup plus étendu qu'à
l'ordinaire , le trouvoit richement paré d'étoffe
d'or , & couvert d'une quantité de lumieres . Du
côté de l'Evangile , étoit le dais de S. A. R. du
côté de l'Epitre , étoit la Cathetra , deftinée pour
l'Evêque de Plaifance , qui devoit faire la cérémonie.
Au milieu du Sanctuaire , qui étoit couvert de
tapis de la Savonerie , étoit un prie- Dieu , cou-'
vert d'un grand tapis de velours cramoihi galonné
d'or , ainfi que trois couffins , qui étoient pofés
au bas.
Les latereaux du Sanctuaire , furent remplis
par un nombre infini de Nobleffe. Aux deux côtés ,
en face du Maître - Autel , étoient deux grands parquets
décorés dans la même ordonnance de l'Eglife
, l'un defquels étoit deftiné pour tous les
Miniftres Etrangers , l'autre pour les Dames de
la premiere diftinction .
Le Sanctuaire étoit gardé par les Gardes du
Corps de S. A. R. le veftibule du Sanctuaire ainfi
que les degrés qui defcendent à la grande nef
& toute cette nef jufqu'à la porte de l'Eglife
étoir bordée par la garde des Hallebardiers
Royaux. M.
OCTOBRE. 1760.
M.Je Prince de Lichtenſtein partit à 11 heures de
195
l'Hôtel Palavicini où il étoit logé pour le rendre à
la Cathédrale,fon cortége marchoit dans le même
ordre que le jour de fon Audience publique ; il fut
reçu à la porte de L'Eglife par le Chapitre qui le
complimenta. Sa Livrée entra dans la nef du milieu
& fe rangea des deux côtés devant les Hailebardiers
Royaux.
Pendant ce tems- là le cortége de la Cour s'étoit
mis en mrcche dans l'ordre fuivant.
Quarante Hallebardiers Royaux ouvroient la
marche ; la mufique de cette Compagnie étoit à
la tête.
Le Commandant de l'Ecurie & deux Officiers
de l'Ecurie à cheval , quatre Palfreniers les fuivoient
à pied .
I caroffe à fix chevaux pour le Maître des
Cérémonies & trois
Majordomes.
I caroffe à fix chevaux , quatre Gentilshommes
de la Chambre.
I caroffe à fix chevaux, quatre Dames du Palais.
I caroffe à fix chevaux , quatre Dames du Palais.
I caroffe àfix chevaux , quatre
Gentilshommes
de la Chambre.
I caroffe à 8 chevaux. Le Gentilhomme de la
Chambre de fervice à l'Infant.
Le premier Ecuyer , le Majordome de ſervice.
I caroffe à huit chevaux . Le ſervice de Madame
Infante Ifabelle.
Les trompettes & timballes des Gardes du
Corps , avec feize Gardes.
1 caroffe à huit chevaux , l'Infant.
Le Capitaine des Gardes , le Grand Ecuyer.
I caroffe à 8 chevaux ,¡Madame InfanteÏfabelle,
Madame de Gonzales , Madame de Siſſa .
La Compagnie des Gardes du Corps ayant à
II. Vol. I
194 MERCURE DE FRANCE.
leur tête le Lieutenant , l'Enſeigne , & huic
Exempts.
2 caroffes de refpect vuidės , attelés à 8 chevaux.
I caroffe à fix chevaux , quatre Gentilshommes
de la Chambre.
Tous les Pages marchoient à pied aux deux côtés
des caroffes des Princes .
On arriva dans cet ordre à la porte de l'Eglife :
on marchoit lentement pour donner aux perfonnes
qui étoient dans les caroffes qui précédoient
ceux des Princes , le temps de defcendre .
M.le Prince de Lichtenſtein attendoit à la porte
de l'Eglife.
Pendant que l'Infant defcendoit de fon carolle,
Le Maître desCérémonies fut prendre M.le Prince
Liechtenſtein & le conduifit à la portiere du caroffe
de Madame Infantelfabelle . L'Infant s'en aprocha
auffi & reçut la main droite de Madame fa fille en
defcendant du caroffe;M. le Prince reçur la main
gauche.
Ils marcherent ainfi jufqu'au prie- Dieu qui fe
trouvoit dans le Sanctuaire en face du Maître-
Autel , où ils fe mirent à genoux fur les couffins
qui étoient au bas de ce prie- Dieu. L'Infant occupa
celui de la droite ; Madame Ifabelle celui
du milieu ; M. de Lichtenſtein celui de la gauche.
Ils fe leverent un moment après , & s'approcherent
des degrés de l'Autel ; l'Evêque déranda
à M. le Prince s'il avoit le pouvoir d'épouler Mae
InfanteIfabelle, au nom de l'Archiduc Jofeph ; fes
Pouvoirs furent lus à haute voix par un Secretaire
impérial , après quoi le Chancelier de l'Evêché
lutauffi à haute voix la Difpenfe du Pape .
Le refte de la Cérémonie fut exécutée ſuivant le
Rituel ordinaire de l'Eglife , excepté que l'anneau
fut préfenté à Madame l'Archiduchelle par M. le
Prince de Lichtenftein , fur une foucoupe , & qu'elle
le mit elle-même à fon doigt.
OCTOBRE. 1760.
195
Après cette cérémonie , Madame l'Archiducheffe
retourna au Pri - Dieu , ayant toujours M.
de Lichtenſtein à la gauche. Après une courte
priere , les Princes fe remirent en marche pour
fortir de l'Eglife dans le même ordre qu'ils y
étoient entrés ; l'Infant & M. de Lichtenttein
donnerent la main à Madaine
l'Archiducheffe
pour monter dans fon carolle , l'Infant monta
dans le fien , & M. le Prince fut joindre les
équipages qui l'attendoient à une des portes latérales
de l'Eglife.
l'on
On le mit en marche pour retourner au Palais
par un chemin plus long que celui
avoit fait en venant du Palais à la Cathédrale
que
afin que tout le Peuple , & une quantité prodigieufe
d'Etrangers qui s'étoient rendus à Parme
pullent voir la magnificence , de cette marche.
Le Cortége de M. le Prince de Lichtenſtein
précédoit celui de la Cour , de 60 ou 80 pas . Les
Troupes qui bordoient les rues lui préfenterent
les armes , les tambours rappelloient , & les
Officiers le faluerent du chapeau .
Pendant l'efpace qui étoit entre le caroffe de
M. de Lichtenftein & celui de l'Infant , l'Infanterie
mit la bayonnette au bout du fufl. Lorsqu'ils
pafferent , on préſenta les armes , les tambours
battirent au champ , & les Officiers faluerent de
l'eſponton .
M. de Lichtenſtein defcendit à la porte du Palais
pour y attendre Madame l'Archiducheſſe ;
l'Infant aufuôt arrivé defcendit de fon caroffe ,
& s'avança à la portiere de celui de Madame
l'Archiducheffe fa fille pour lui donner la main.
Elle fut conduite à ſon
appartement par l'Infant
& M. de Lichtenftein toujours dans l'ordre
obfervé
précédemment , c'eft à dire l'Infant à
fa droite , & M. de Lichtenſtein à la gauche ;
I j
196 MERCURE DE FRANCE.
yne quantité prodigieufe de Nobleffe rem pliffoit
le Palais .
S. A. R. l'Infant fe retira dans fon appartement
, après avoir reſté un moment dans celui
de la fille ; qui , après que l'Infant fut retiré
donna fa main à baifer à tous les Sujets de la
Maifon d'Autriche qui fe trouverent préfens.
L'heure du repas étant arrivée , le Maître des
Cérémonies fut avertir l'Infant , & marcha devant
lui jufques à l'appartement de Madame
l'Archiducheffe , où S. A. R. s'étoit propofée de
l'aller prendre pour la conduire à la table de
nôces.
2
Cette table étoit préparée dans la falle d'audience
, de façon que les trois fiéges fe trouvoient
fous le dais ; il n'y avoit pas de fauteuil ,
mais trois chaifes à dos parfaitement égales.
Madame l'Archiducheſſe entra dans la falle &
fut conduite à table par Monfeigneur l'Infant à
qui elle donnoit la main droite , & M. le Prince
de Lichtenſtein à qui elle donnoit la main gauche
; elle fe plaça au milieu , l'Infant à fa droite ,
& M. de Lichtenftein à fa gauche ; le Maître des
Cérémonies avoit toujours précédé les Princes jufques
à la table.
M. le Comte de S. Vital , Gouverneur de la
Maifon de S. A. R. avec tous les Majordomes ,
excepté celui qui étoit de fervice , furent prendre
lés plats au buffet , & les apporterent ſur la table
dans l'ordre ci-après.
L'Huifier des viandes entre deux Gardes du
Corps , la carabine fur l'épaule : les Gardes s'arrêterent
à la porte de la falle .
Le Maître des Cérémonies marchoit feul quatre
pas après l'Huiffier des viandes.
Douze Pages , portant chacun un plat.
Six Majordomes , portant chacun un plat.
OCTOBRE. 1760. 197
M. le Comte de S. Vital , marchant feul immédiatement
après ,
Le Contrôleur de la Bouche.
Quatre Gardes du Corps la carabine fur l'épaule
, qui fe font arrêtés au même endroit que
les deux premiers.
Le Majordome de fervice prit les plats des
mains des autres Majordomes , & des Pages , &
les arrangea fur la table. Pendant ce temps ,
M. de S. Vital fut fe mettre derriere les Princes
pour fervir Madame l'Archiducheffe , il lui ap
procha fa chaife , celle de l'Infant fut approchée
par un Majordone , & celle de M. le Prince de
Lichtentein par un Gentilhomme de la Maiſon
de S. A R. Madame l'Archiducheffe fut fervie
par M. de S. Vital , l'infant le fut à l'ordinaire
par le entilhomme de la Chambre de fervice ,
& M. le Prince de Lichtenſtein par un Gentilhomme
de la Maiſon.
Ce repas fut fervi avec toute la magnificence
& tout le goût imaginable.
Au fortir de table , Madame l'Archiducheffe
fut reconduite dans fon appartement dans le mê -
me ordre qui avoit été observé en venant à table.
Il n'y eut plus rien jufqu'au foir.
L
Toute la Nobleffe étoit invitée de fe rendre à
huit heures du foir au Palais du Jardin , pour de
là , voir tirer un feu d'artifice , & voir en même
temps une fuperbe illumination difpofée dans le
Jardin . L'ordonnance en étoit riche & galante.
Le Palais du jardin fut dès fept heures rempli
d'un grand nombre de Nobleffe. M. le Prince de
Lichtenftein s'y rendit à fept heures & demie. Le
Prince Ferdinand & Madame Louife , s'y rendirent
peu après , & l'Infant & Madame l'Archiduchefle
y arriverent à huit heures précifes.
Le feu d'artifice fut appliqué à un monument
· Iiij
198 MERCURE DE FRANCE.
Hlevé au milieu d'une très- grande place dans le
jardin de Parme , & faifoit face au Palais où les
Princes fe tranfportérent pour en voir l'effet .
Il repréfentoit l'union de l'Amour & de l'hymen
dans le Temple de Minerve. Ce Temple
étoit élevé fur un grand fondement amtique , dont
la forme étoit ovale , de quatre - vingt - dix - huit
pieds de longueur , fur foixante- quatre pieds de
large ; un grand focle de porphyre , comprenant.
dans fa hauteur les gradins qui formoient les deux
entrées principales du Temple , s'élevoit au-delfus
de ce fondement , & contournoit la baſe de ce
monument , qui étoit orné de vingt- quatre colonnes
d'ordre Dorique entourées de guirlandes
de fleurs. Il avoit quatre faces égales , & fes angles
étoient flanqués de quatre pyramides ifolées
dédiées aux Arts & portant leurs attributs en trophées.
Ces Pyramides étoient environnées de quatre
colonnes du même ordre , formant des avantcorne
à jour , rachetés fur les angles du quarré
du Temple , en forme de tours ou de baftions.
L'entablement étoit décoré de guirlandes de
fleurs dans la frife , & les quatre avant- corps. de
colonnes qui couvroient les Pyramides , foutenoient
fur chaque face des médaillons , en tout au
nombre de ſeize , moitié appuyés ſur la frife &
l'architrave de cet ordre , & moitié tombant dans
le vuide de l'entre- colonne. Ils repréſentoient
des tableaux où étoient peintes les qualités vertueufes
de l'Archiduc & de Madame Iſabelle
comme la nobleffe , la magnanimité , la Majesté
Royale , la libéralité , la jeunelle , la beauté , la
bonté , la clémence , la fécondité , la douceur ,
l'amour de la gloire , l'amour de la Patrie , l'amour
des Sciences , l'amour des Arts , l'enjoûment
& l'affabilité .
Au- deffus des quatre tours des Colonnes , s'élevoir
OCTOBRE. 1760. 199
au milieu des trophées Militaires, un piédeftal portant
des renommées,fur les quatre portes ou Arcades
de ce Temple étoient les Écuffons de l'Archiduc
& de Madame Ifabelle , au milieu de deux
vales ,de Parfums , & appuyé fur le focle qui couronnait
la Corniche .
Au -dellus de ce Socle, dont le plan étoit quarré
comme le Temple , s'élevoit une attique ronde
en forme de Piédeftal couronnée d'un dôme ouvert
par le haur & décoré de guirlandes de fleurs .
Ce Piédeſtal fervita porterautour dela Naillance
du dôme 12 Figures réprefentant les Jeux , les
Ris, & les Plairs , danfant & formant une chaîne
de guirlandes autour de ce monument.
Les quatre portes du Temple étoient décorées &
comme gardées par huit Figures repréſentantes la
vigilance , la dignité , l'Intelligence , la pureté ,
le filence , la douceur , & le courage , qui compo.
fept enfemble toutes les vertus qui caractérisent.
la fagelle.
Au milieu de ce temple dont la forme intérieure.
étoit octogone rachetant une voûte ronde & farbaillée
, étoit la Figure de Minerve fur différens
plans de quées , réuniffant entre fes bras les Figures
de l'Amour & de l'Hymen.
Sur les deux aîles du focle qui joignoit toute la
longueur du fondement ovale , & qui comprenoit
toute la hauteur des perrons , étoient de chaque
côté les autels de l'Amour & de l'Hymen .
Quatre fontaines de feu élevées fur des rochers
qui fortoient de terre contribuoient à la richeſſe de
la bafe de ce monument , en même tems qu'elles
augmentoient l'effet des différens tableaux de feu
qui fortoient de cet édifice deftiné à faire éclater
la joie publique que procure cet événement.
L'Illumination générale de cette machine d'Artifice
fur accompagnée de deux Phénomènes qui
I iv
200 MERCURE DE FRANCE
fe voyoient à droite & à gauche à une certaine dif :
tance du feu & comme dans le lointain. Ils montroient
chacun le Globe du Monde tranfparent
d'un diamètre confidérable , environnés dans l'air
d'un cercle de feu , en figne de l'allégreffe que
qu'infpire à tout l'Univers cet Augufte Mariage
. Une grande quantité de fufées fortoient
également de derriere ces Phénomènes , & formoient
en l'air des Bouquets qui , dirigés pour fe
réunir ſur le ſommer du Temple , conftruifoient
une voute de feu , qui le couvroit continuelle
ment.
Tout ce Spectacle étoit accompagné d'une illumination
générale dans le jardin ; les terraffes décorées
d'ifs , de girandoles & de cordons de lu
mieres hautes & baſſes ; les miroirs de feu , les
pots à-feu formant des cordons élevés , toutes les
allées éclairées fur différens deffeins , & l'illumination
de toute la façade du Palais qui fait face
l'entrée de ce jardin , auffi bien que les différen
tes avenues en étoile , qui y conduifent ; enfin
rien ne fut oublié pour rendre cette Fête augufte
& digne de fon Souverain.
Après le feu d'artifice , l'Infant & Madame
l'Archiducheffe furent fouper. Pendant ce tems
toute la Nobleffe fe ren lit au Théâtre , que l'on
avoit préparé pour y donner un Bal mafqué.
On avoit élevé le Parterre à la hauteur du plane
cher du Théâtre , & l'on avoit pratiqué fur ce
même Théâtre , des Loges folides , femblables à
celles de la Salle ; de façon que le Theâtre &
le Parterre ne faifoient qu'une grande Salle
ovale , applatie par les flancs , & toute entourrée .
de trois rangs de Loges les unes fur les autres ;
cette Salle étoit ornée de guirlandes de fleurs , &
gazes bleues & argent , qui fe rattachoient galamment
aux montants qui feparent les Loges , &
de
OCTOBRE. 1760. 201
qui tomboient en feftons fur les appuis des Loges ,
d'une maniere agréable & pleine de goût ; elle
étoit éclairée par une quantité de luftres de cryftal
ornés de guirlandes de petites fleurs , & par
des bras de cryftal ornés de même , appliqués contre
les appuis des Loges des rangs fupérieurs ; c'étoit
à ces bras que venoient s'attacher les guirlan
des de fleurs , qui ornoient le devant des Loges .
On entroit dans cette Salle par la Loge de la couronne
qui s'avance fur le Parterre , comme les
Amphithéâtres employés en France dans les Salles
des Spectacles ; on en avoit coupé l'appui par
devant , & on defcendoit de-là dans le corps de la
Salle par quatre degrés couverts de tapis de Turquie.
Toutes les Loges étoient remplies , tant celles
pratiquées fur le Théâtre que celles de la Salle ,
pår une grande quantité de Dames & de Cavaliers
ment parés.
Madame l'Archiducheffe étant arrivée , on ouvrit
le Bal par une Allemande , où douze perfonnes
danferent enſemble : Madame l'Archiduchefe
donnoit la main au Prince François , neveu de M.
le Prince de Lichtenſtein . On danſa jufqu'à quatre
heures du matin ; & pendant tout le tems que
durat le Bal , les Officiers de la maiſon de l'Infant
fervirent abondamment de toutes fortes de rafraîchiflemens.
Tout fe paffa avec beaucoup d'ordre ,
& tout le monde fortit extrêmement fatisfait.
Le lendemain 8 , M. le Prince de Lichtenſtein
prit fon Audience de congé ; tout fut obſervé à
cette Audience comme à celle de la demande ,
excepté que l'Introducteur , le Maître des Cérémonies
, & M. le Marquis Palavicini , furent pren .
dre.M. le Prince dans l'Appartement qu'il occupoit
à la Cour ; & que M. de Lichtenſtein , en
fortant de l'Audience de l'Infant , fur à celle de
I v
200 MERCURE DE FRANCE
fe voyoient à droite & à gauche à une certaine dif
tance du feu & comme dans le lointain. Ils mon
troient chacun le Globe du Monde tranſparent
d'un diamètre confidérable , environnés dans l'air
d'un cercle de feu , en figne de l'allégreffe que
qu'infpire à tout l'Univers cet Augufte Mariage.
Une grande quantité de fufées fortoient
également de derriere ces Phénomènes , & formoient
en l'air des Bouquets qui , dirigés pour fe
réunir fur le fommer du Temple , conftruifoient
une voute de feu , qui le couvroit continuelle
ment.
Tout ce Spectacle étoit accompagné d'une illu
mination générale dans le jardin ; les terraffes décorées
d'ifs , de girandoles & de cordons de lu
mieres hautes & balles ; les miroirs de feu , les
pots à- feu formant des cordons élevés , toutes les
allées éclairées fur différens deffeins , & l'illumination
de toute la façade du Palais qui fait face à
l'entrée de ce jardin , auffi bien que les différen➡
tes avenues en étoile , qui y conduifent ; enfin
rien ne fut oublié pour rendre cette Fête auguſte
& digne de fon Souverain.
Après le feu d'artifice , l'Infant & Madame :
l'Archiducheffe furent fouper. Pendant ce tems
toute la Nobleffe fe ren lit au Théâtre , que l'on
avoit préparé pour y donner un Bal mafqué.
On avoit élevé le Parterre à la hauteur du plan
cher du Théâtre , & l'on avoit pratiqué fur ce
même Théâtre , des Loges folides , femblables à
celles de la Salle ; de façon que le Theâtre &
le Parterre ne faifoient qu'une grande Salle
ovale , applatie par les flancs , & toute entourrée
de trois rangs de Loges les unes fur les autres ;
cette Salle étoit ornée de guirlandes de fleurs , &
de gazes bleues & argent , qui fe rattachoient galamment
aux montants qui feparent les Loges , &
OCTOBRE. 1760. 201
qui tomboient en feftons fur les appuis des Loges ,
d'une maniere agréable & pleine de goût ; elle
étoit éclairée par une quantité de luftres de cryftal
ornés de guirlandes de petites fleurs , & par
des bras de cryftal ornés de même , appliqués contre
les appuis des Loges des rangs fupérieurs ; c'étoit
à ces bras que venoient s'attacher les guirlan
des de fleurs , qui ornoient le devant des Loges.
On entroit dans cette Salle par la Loge de la couronne
qui s'avance fur le Parterre , comme les
Amphithéâtres employés en France dans les Salles
des Spectacles ; on en avoit coupé l'appui pardevant
, & on defcendoit de -là dans le corps de la
Salle par quatre degrés couverts de tapis de Tur
quie.
Toutes les Loges étoient remplies , tant celles
pratiquées fur le Théâtre que celles de la Salle ,
par une grande quantité de Dames & de Cavaliers
ment parés.
Madame l'Archiducheffe étant arrivée , on ouvrit
le Bal par une Allemande , où douze perfonnes
danſerent enſemble : Madame l'Archiduchele
donnoit la main au Prince François , neveu de M.
le Prince de Lichtenſtein . On danſa jufqu'à quatre
heures du matin ; & pendant tout le tems que
durat le Bal , les Officiers de la maiſon de l'Infant
fervirent abondamment de toutes fortes de rafraîchiflemens.
Tout fe paffa avec beaucoup d'ordre ,
& tout le monde fortit extrêmement fatisfait.
Le lendemain 8 , M. le Prince de Lichtenftein
prit fon Audience de congé ; tout fut obfervé à
cette Audience comme à celle de la demande 9
excepté que l'Introducteur , le Maître des Cérémonies
, & M. le Marquis Palavicini , furent pren .
dre.M. le Prince dans l'Appartement qu'il occupoit
à la Cour ; & que M. de Lichtenſtein , en
fortant de l'Audience de l'Infant , fur à celle de
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200 MERCURE DE FRANCE
fe voyoient à droite & à gauche à une certaine dif
tance du feu & comme dans le lointain. Ils montroient
chacun le Globe du Monde tranfparent , '
d'un diamètre confidérable , environnés dans l'air
d'un cercle de feu , en figne de l'allégreffe que
qu'infpire à tout l'Univers cet Augufte Mariage
. Une grande quantité de fufées fortoient
également de derriere ces Phénomènes , & formoient
en l'air des Bouquets qui , dirigés pour fe
réunir fur le fommet du Temple , conftruifoient
une voute de feu , qui le couvroit continuelle
ment.
Tout ce Spectacle étoit accompagné d'une illu
mination générale dans le jardin ; les terraffes décorées
d'ifs , de girandoles & de cordons de lu
mieres hautes & baffes ; les miroirs de feu , les
pots à-feu formant des cordons élevés , toutes les
allées éclairées fur différens deffeins , & l'illumination
de toute la façade du Palais qui fait face à
l'entrée de ce jardin , auffi bien que les différen
tes avenues en étoile , qui y conduifent enfin
rien ne fut oublié pour rendre cette Fête augufte
& digne de fon Souverain.
Après le feu d'artifice , l'Infant & Madame
l'Archiducheffe furent fouper. Pendant ce tems
toute la Nobleffe ſe ren fit au Théâtre , que l'on
avoit préparé pour y donner un Bal maſqué .
On avoit élevé le Parterre à la hauteur du plan
cher du Théâtre , & l'on avoit pratiqué fur ce
même Théâtre , des Loges folides , femblables à
celles de la Salle ; de façon que le Theâtre &
le Parterre ne faifoient qu'une grande Salle
ovale , applatie par les flancs , & toute entourrée
de trois rangs de Loges les unes fur les autres ;
cette Salle étoit ornée de guirlandes de fleurs , &
de gazes bleues & argent , qui fe rattachoient galamment
aux montants qui ſéparent les Loges , &
OCTOBRE. 1760. 201
qui tomboient en feftons fur les appuis des Loges ,
d'une maniere agréable & pleine de goût ; elle
étoit éclairée par une quantité de luftres de cryftal
ornés de guirlandes de petites fleurs , & par
des bras de cryſtal ornés de même , appliqués contre
les appuis des Loges des rangs fupérieurs ; c'étoit
à ces bras que venoient s'attacher les guirlandes
de fleurs , qui ornoient le devant des Loges.
On entroit dans cette Salle par la Loge de la couronne
qui s'avance fur le Parterre , comme les
Amphithéâtres employés en France dans les Salles
des Spectacles ; on en avoit coupé l'appui pardevant
, & on defcendoit de -là dans le corps de la
Salle par quatre degrés couverts de tapis de Turquie.
Toutes les Loges étoient remplies , tant celles
pratiquées fur le Théâtre que celles de la Salle
pår une grande quantité de Dames & de Cavaliers
ment parés.
Madame l'Archiducheſſe étant arrivée , on ouvrit
le Bal par une Allemande , où douze perfonnes
danferent enſemble : Madame l'Archiduchele
donnoit la main au Prince François , neveu de M.
le Prince de Lichtenftein . On danſa jufqu'à quatre
heures du matin ; & pendant tout le tems que
durat le Bal , les Officiers de la maiſon de l'Infant
fervirent abondamment de toutes fortes de rafraîchiflemens.
Tout fe paffa avec beaucoup d'ordre ,
& tout le monde fortit extrêmement fatisfait.
Le lendemain 8 , M. le Prince de Lichtenftein
prit fon Audience de congé ; tout fut obfervé à
cette Audience comme à celle de la demande ,
excepté que l'Introducteur , le Maître des Cérémonies
, & M. le Marquis Palavicini , furent pren .
dre.M. le Prince dans l'Appartement qu'il occupoit
à la Cour ; & que M. de Lichtenſtein , en
fortant de l'Audience de l'Infant , fut à celle de
I v
202 MERCURE DE FRANCE.
Madame l'Archiducheffe , avant d'être conduit à
celle du Prince Ferdinand.
Après l'Audience de Madame Louife , M. le
Prince , au lieu de retourner dans fon appartement
a la Cour , defcendit par le grand efcalier ,
& fut monter dans fon Caroffe qui l'attendoit a la
porte du Palais , pour le ramener à l'Hôtel Palavicini
.
Le Maître des Cérémonies l'accompagna juf
qu'au bas de l'efcalier , M. de Palavicini & M.
Introducteur jufques à la portiere de la voiture ,
qui ne fur fermée que quand ces Meffieurs fe futent
retirés.
Le foir , il y eut Opéra.
Le 9. l'Infant fut dîner chez M. de Lichtenſtein.
Lé foir , il y eut Opéra.
Le to M. le Prince de Lichtenſtein dina chez M.
Dutillot , & partit après dîner pour Cafalmajor.
Le foir , il y eut Aflemblée au Paļais .
Le 11. au matin tous les Corps de l'Etat , le
Militaire , la Nobleffe , & la Maifon de S. A R.
eurent l'honneur de baifer la main à Madame
l'Archiducheffe .
Il y eut Opéra , le ſoir.
Le .les Princes n'ont reçu perfonne .
Le 13. S. A. R. Madame l'Archiducheffe partit
à dix heures du matin pour le rendre à Cafalmajor:
elle y a été accompagnée par Madame de
Gonzales , Madame de Silla , quatre Dames du
Pálais , des Majordomes , & huit Gentilshommes
de la Chambre ; elle étoit faivîe d'un nombre de
Pages , d'Ecuyers , de fon premier fervice , & defon
fervice du fecond Ordre , du Commandant de
l'Ecurie de deux Officiers des Ecuries , du Sellier >
du Maréchal , du Charron & de 24 Palfreniers à
Cheval;elle étoit éfcortée par des Gardes du Corps.
Les rues par lesquelles elle a pallé, étoient bordées
OCTOBRE , 1760. 203
de troupes , on avoit difpofé des Détachemens de
Cavalerie & d'Infanterie fur différens endroits de
la roure.
Des Bataillons Provinciaux , fix Compagnies de
Grenadiers, un Bataillon du Régiment de Parme ,
& les deux Compagnies de Grenadiers de inême
Régiment, étoient difpofées fur les bords du Pô ,
en deçà de la tête du Pont. Elle y a trouvé des
Elcadrons de Gardes du Corps & de Cavalerie. Elle
eft arrivée à Cafalmajor à midi & deux minutes.
M. le Comte de S. Vital eft chargé de la Cérémonie
de la remife , un Secrétaire du Cabinet de
l'Acte de certe ' remiſe .
S. A. R. s'arrête demain à Cafalmajor pour y
donner la main à bailer aux Deputés de la Lombardie
Autrichienne , aux Chambres Souveraines ,
& à la Nobleffe. Le lundi elle ira à Mantoue, où elle
s'arrêtera encore un jour, pour un objet ſemblable.
paffé depuis.
L'Opera que l'on repréſenta , eft compofé de
trois Actes ; il eft intitulé les Fétes de L'Hymen
pour les nôces de LL. AA. RR. &c. il eft précédé
d'un Prologue.
Ce Prologue , qui a pour Titre le Triomphe de
PAmour , eft une querelle que les Dieux font à
l'Amour , fur les maux qu'il ne ceffe de faire
aux hommes . L'Amour convient de toutes ces
fauces, & obtient fon pardon en faveur de l'Union ,
qu'il vient de faire de la vertu & de la beauté,
188 MERCURE DE FRANCE.
Les fajets des trois Actes qui compofent l'Opéra
font féparés. C'est une licence que l'on a cru
devoir prendre à caufe du merveilleux & de la
galanterie qu'apportent avec eux des fujers fabuleux
& variés , qui femblent mieux convenir à la
Fête qu'on a célébrée .
L'Acte d'Aris eft le premier. L'Amour par ordre
du Deftin , ceffe d'être aveugle ; il jette fes premiers
regards fur Iris , & en devient amoureux ;
Iris le prend pour le Zéphire ; mais revenue de
fon erreur, elle en devient éprife , diffipe les nuages
qu'Aquilon jaloux lui oppofe fans ceffe , &
sunit à l'Amour pour rendre au monde les jours
les plus beaux & les plus fereins.
Le fecond Acte , eft celui de Sapho . Le Poëte
a feint cette dixiéme Muſe , amoureufe d'Alcée
celèbre Poëte Lyrique natif de Lesbos : il a
feint aufli Doris , fils de Neptune , amant de Sapho
, qui fe voyant préferer fon rival , a recours
a fon pére , & le prie de le vanger par la mort
de l'un & de l'autre. Neptune écoute les voeux
de fon fiis ; & par le fecours d'Eole , & des vents
fouléve tellement les eaux , que les habitans de
la campagne craignent d'ètre fubmergés : 1
paroît lui-même fur une vague qui s'élève beaucoup
au defius des autres ; menace de tour
inonder , fi dans une heure , Sapho n'eft pas fenible
à l'amour de fon fils il rentre dans le fein
de la mer , qui continue dans la plus grande
agitation .
Sapho invoque Apollon , & l'Amour. Une
Lyre defcend du Ciel attachée à des guirlandes
de fleurs ; un arc s'élève dans la Mer à l'endroit
où elle doit avoir fes bornes , & les lui marque
pour l'avenir.
Sapho prend la Lyre : à mesure qu'elle chante
les prodiges opérés par Apollon , & l'Amour ;
OCTOBRE. 1760. 189
la Mer fe calme & fe retire au lieu où elle
étoit avant le débordement ; remplie des infpirations
divines , & de l'enthousiasme poétique ,
elle voit dans l'avenir la fuitte nombreufe des
héros , dont elle doit célébrer l'alliance , annonce
le bonheur dont l'Univers doit jouir ; & par fon
mariage avec Alcée , accomplit le triomphe de
l'harmonie , & de l'amour.
Le troifiéme Acte eft intitulé Eglé. Cette Nymphe
eft amoureufe de Chromis ; Alcée fa compagne
l'eft de Lincée .Elles fe plaifent enſemble
à faire foupirer leurs Amants , en leur cachant
leur tendreffe ; enfin Eglé dit à Chromis qu'elle
l'aimera , lorfqu'elle verra les eaux d'un torrent
enchaînées ; Alcée promet à Lincée de l'aimer
quand Eglé aimera Chromis.
Ces deux jeunes Faunes , déſeſpérés , fe confultent
enſemble , & vont trouver Silene pour qu'il
les aide de fes confeils . Ce vieillard leur demande
où ils ont laillé Eglé & Alcée ; ils répondent
qu'elles font à cueillir des mûres pour lui
teindre le vifage, lorfqu'elles le trouveront endormi
. Silene confole les deux Faunes, leur ordonne
de ſe retirer , leur promet de les fervir , & fe
met fur un lit de gazon où il feint de dormir
en attendant les deux Nymphes. Elles arrivent
avec des guirlandes de fleurs , en enchaînent Si-
Lene qu'elles croyent endormi ; elles le pouffents
il feint de s'éveiller & montre de la colere :
mais bien-tôt après il leur conte la fable d'Acis
& Galatée. Au milieu de cette fable , il s'arrête
comme infpiré , & leur conſeille d'aller trouver
Prothée , de le furprendre endormi , & de l'enchaîner
fans s'épouvanter des différentes formes
qu'il prendra , parce qu'à la fin il parlera , & leur
apprendra des chofes merveilleules.
Elles remercient Silene , & le quittent pour al190
MERCURE DE FRANCE:
ler chercher Prothée ; Chromis & Lincée les accoma
pagnent. Elles le furprennent , l'enchaînent , &
ferrent toujours plus fes liens , à mesure qu'il change
de forme ; il fe change enfin en un Torrent
qui refte immobile : toutes les Nymphes admirent
ce prodige . Silene arrive , rapelle à Eglé le ferment
qu'elle a fait d'être à Chromis lorſqu'elle
verra enchaîner un torrent ; Eglé confent à être
unie à Chromis , & Alcée tient auffi fa parole à
Lincée ; les Faunes & les Nymphes applaudiffent
à cette union,& Silene; au lieu de finir la fable qu'il
fe fouvient d'avoir commencée , ordonne aux Faunes,
& aux Nymphes, de célébrer cet heureux jour,
en repréfentant par leurs danfes , les amours
d'Acis , & Galatée.
L'Italie a vû dans cette occafion renaître fur la
fcène les enchantemens , & la nouveauté de ce
fpectacle digne de l'admiration des étrangers , par
la magnificence , la vérité , & le bon goût qui eft
diftribué dans l'exécution de toutes ces parties. Les
machines employées aux différens prodiges amenés
par le Sujet , ont eu le plus grand fuccès ;
& le Théâtre actuellement difpofé par les machines
à recevoir tout ce que l'imagination peut fournir
de plus merveilleux , retracera chaque fois le
fouvenir de la fête pour laquelle il fert la premiere
fois.
Après l'Opéra l'Infant & Madame Infante Iſabelle,
furent à l'hôtel Palavicini où M. le Prince de
Lichtenſtein avoit fait préparer une Fête, à laquelle
toute la Nobleſſe fut invitée ; plufieurs tables furent
abondamment ſervies , ainſi que quantité de
rafraîchiffemens. On y danſa juſqu'au matin.
1
Le lendemain, M. le Prince de Lichtenſtein donna
un fuperbe dîner à tous les Miniftres étrangers ,
& à la Nobleffe la plus confidérable de l'Etat , &
Etrangere . Le foir il y eut Opéra.
OCTOBRE. 1760. Iol
Le Vendredi cinq , M. le Comte de Rochechouart
donna un grand dîner à M. le Prince de
Lichtenſtein & aux mêmes perfonnes qui avoient
dîné chez lui la veille . Il y eut Opéra le foir.
Le Samedi fix , M. de Lichtenſtein le Prince
dîna chez M. le Marquis de Revilla . Il y eut le foir
affemblée au Palais.
Le Dimanche ſept, jour fixé pour la Cérémonie
du Mariage , les Troupes prirent les Armes dès le
matin ; deux bataillons du Régiment de Parme &
quatorze Compagnies de Grenadiers borderent
les rues par où le Cortége devoit paffer.
Six cens Carabiniers formèrent quatre eſcadrons
fur la place , deux defquelles y retterent , jufques
après que le cortége y eut paffé ; les deux autres
furent repartis pour fermer toutes les rues qui
viennent aboutir à celles par où les Princes pafferent:
chaque troupe étoit formée fur deux rangs ,
à trente pas derriere l'Infanterie qui occupoit le
débouché de la rue.
" L'Eglife Cathédrale , où fe fit la cérémonie ,
étoit magnifiquement décorée. Les Peintures du
Corrége , & des autres excellents Maîtres dont ce
vafte Edifice fe trouve orné dans les voutes , &
dans les frifes , donnant des bornes à la richeffe
de la décoration projettée pour cette Augufte cérémonie
; on fut obligé de fe contenter d'orner
les pilaftres , les arcades , & les baffes nefs de damas
cramoifi à fleurs , enrichis de grandes lames
d'étoffes d'argent , de deux pieds de large; lefquelles
interrompoient fymétriquenient , d'espace
en efpace, le cours du damas d'une maniere agréable
& gracieufe; les impoftes fur lesquelles repofent
les arcades , étoient entourées d'une riche
pente du même damas , pliffée & terminée par
une frange d'or , ainfi que les rideaux qui ornoient
le dedans des arcades , & qui étoient retrouffés
192 MERCURE DE FRANCE.
vers l'impofte , pour donner lieu de découvrir la
décoration des chapelles , & des nefs laterales . Aux
deux côtés de la porte de lagrande nef étoient deur
orcheftres , parées dans le même goût que le refte
de l'Eglife : elles étoient remplies de trente Muficiens
que l'on avoit fait venir pour jouer des
fanfares , depuis le moment où les Princes defcen➡
dirent de carolles , juſqu'a celui où ils furent entrés
dans le fanctuaire ; les deux tribunes qui fe'
trouvent près du Maître Autel , étoient remplies
des Muficiens de la Chambre de S. A. R. qui exé-'
cuterent fupérieurement d'excellentes fymphonies
à deux choeurs.
Le Maître-Autel , beaucoup plus étendu qu'à
l'ordinaire , le trouvoit richement paré d'étoffe
d'or , & couvert d'une quantité de lumieres . Du
côté de l'Evangile , étoit le dais de S. A. R. du
côté de l'Epitre , étoit la Cathetra , deftinée pour
l'Evêque de Plaifance , qui devoit faire la cérémonie.
Au milieu du Sanctuaire , qui étoit couvert de
tapis de la Savonerie , étoit un prie- Dieu , cou-'
vert d'un grand tapis de velours cramoihi galonné
d'or , ainfi que trois couffins , qui étoient pofés
au bas.
Les latereaux du Sanctuaire , furent remplis
par un nombre infini de Nobleffe. Aux deux côtés ,
en face du Maître - Autel , étoient deux grands parquets
décorés dans la même ordonnance de l'Eglife
, l'un defquels étoit deftiné pour tous les
Miniftres Etrangers , l'autre pour les Dames de
la premiere diftinction .
Le Sanctuaire étoit gardé par les Gardes du
Corps de S. A. R. le veftibule du Sanctuaire ainfi
que les degrés qui defcendent à la grande nef
& toute cette nef jufqu'à la porte de l'Eglife
étoir bordée par la garde des Hallebardiers
Royaux. M.
OCTOBRE. 1760.
M.Je Prince de Lichtenſtein partit à 11 heures de
195
l'Hôtel Palavicini où il étoit logé pour le rendre à
la Cathédrale,fon cortége marchoit dans le même
ordre que le jour de fon Audience publique ; il fut
reçu à la porte de L'Eglife par le Chapitre qui le
complimenta. Sa Livrée entra dans la nef du milieu
& fe rangea des deux côtés devant les Hailebardiers
Royaux.
Pendant ce tems- là le cortége de la Cour s'étoit
mis en mrcche dans l'ordre fuivant.
Quarante Hallebardiers Royaux ouvroient la
marche ; la mufique de cette Compagnie étoit à
la tête.
Le Commandant de l'Ecurie & deux Officiers
de l'Ecurie à cheval , quatre Palfreniers les fuivoient
à pied .
I caroffe à fix chevaux pour le Maître des
Cérémonies & trois
Majordomes.
I caroffe à fix chevaux , quatre Gentilshommes
de la Chambre.
I caroffe à fix chevaux, quatre Dames du Palais.
I caroffe à fix chevaux , quatre Dames du Palais.
I caroffe àfix chevaux , quatre
Gentilshommes
de la Chambre.
I caroffe à 8 chevaux. Le Gentilhomme de la
Chambre de fervice à l'Infant.
Le premier Ecuyer , le Majordome de ſervice.
I caroffe à huit chevaux . Le ſervice de Madame
Infante Ifabelle.
Les trompettes & timballes des Gardes du
Corps , avec feize Gardes.
1 caroffe à huit chevaux , l'Infant.
Le Capitaine des Gardes , le Grand Ecuyer.
I caroffe à 8 chevaux ,¡Madame InfanteÏfabelle,
Madame de Gonzales , Madame de Siſſa .
La Compagnie des Gardes du Corps ayant à
II. Vol. I
194 MERCURE DE FRANCE.
leur tête le Lieutenant , l'Enſeigne , & huic
Exempts.
2 caroffes de refpect vuidės , attelés à 8 chevaux.
I caroffe à fix chevaux , quatre Gentilshommes
de la Chambre.
Tous les Pages marchoient à pied aux deux côtés
des caroffes des Princes .
On arriva dans cet ordre à la porte de l'Eglife :
on marchoit lentement pour donner aux perfonnes
qui étoient dans les caroffes qui précédoient
ceux des Princes , le temps de defcendre .
M.le Prince de Lichtenſtein attendoit à la porte
de l'Eglife.
Pendant que l'Infant defcendoit de fon carolle,
Le Maître desCérémonies fut prendre M.le Prince
Liechtenſtein & le conduifit à la portiere du caroffe
de Madame Infantelfabelle . L'Infant s'en aprocha
auffi & reçut la main droite de Madame fa fille en
defcendant du caroffe;M. le Prince reçur la main
gauche.
Ils marcherent ainfi jufqu'au prie- Dieu qui fe
trouvoit dans le Sanctuaire en face du Maître-
Autel , où ils fe mirent à genoux fur les couffins
qui étoient au bas de ce prie- Dieu. L'Infant occupa
celui de la droite ; Madame Ifabelle celui
du milieu ; M. de Lichtenſtein celui de la gauche.
Ils fe leverent un moment après , & s'approcherent
des degrés de l'Autel ; l'Evêque déranda
à M. le Prince s'il avoit le pouvoir d'épouler Mae
InfanteIfabelle, au nom de l'Archiduc Jofeph ; fes
Pouvoirs furent lus à haute voix par un Secretaire
impérial , après quoi le Chancelier de l'Evêché
lutauffi à haute voix la Difpenfe du Pape .
Le refte de la Cérémonie fut exécutée ſuivant le
Rituel ordinaire de l'Eglife , excepté que l'anneau
fut préfenté à Madame l'Archiduchelle par M. le
Prince de Lichtenftein , fur une foucoupe , & qu'elle
le mit elle-même à fon doigt.
OCTOBRE. 1760.
195
Après cette cérémonie , Madame l'Archiducheffe
retourna au Pri - Dieu , ayant toujours M.
de Lichtenſtein à la gauche. Après une courte
priere , les Princes fe remirent en marche pour
fortir de l'Eglife dans le même ordre qu'ils y
étoient entrés ; l'Infant & M. de Lichtenttein
donnerent la main à Madaine
l'Archiducheffe
pour monter dans fon carolle , l'Infant monta
dans le fien , & M. le Prince fut joindre les
équipages qui l'attendoient à une des portes latérales
de l'Eglife.
l'on
On le mit en marche pour retourner au Palais
par un chemin plus long que celui
avoit fait en venant du Palais à la Cathédrale
que
afin que tout le Peuple , & une quantité prodigieufe
d'Etrangers qui s'étoient rendus à Parme
pullent voir la magnificence , de cette marche.
Le Cortége de M. le Prince de Lichtenſtein
précédoit celui de la Cour , de 60 ou 80 pas . Les
Troupes qui bordoient les rues lui préfenterent
les armes , les tambours rappelloient , & les
Officiers le faluerent du chapeau .
Pendant l'efpace qui étoit entre le caroffe de
M. de Lichtenftein & celui de l'Infant , l'Infanterie
mit la bayonnette au bout du fufl. Lorsqu'ils
pafferent , on préſenta les armes , les tambours
battirent au champ , & les Officiers faluerent de
l'eſponton .
M. de Lichtenſtein defcendit à la porte du Palais
pour y attendre Madame l'Archiducheſſe ;
l'Infant aufuôt arrivé defcendit de fon caroffe ,
& s'avança à la portiere de celui de Madame
l'Archiducheffe fa fille pour lui donner la main.
Elle fut conduite à ſon
appartement par l'Infant
& M. de Lichtenftein toujours dans l'ordre
obfervé
précédemment , c'eft à dire l'Infant à
fa droite , & M. de Lichtenſtein à la gauche ;
I j
196 MERCURE DE FRANCE.
yne quantité prodigieufe de Nobleffe rem pliffoit
le Palais .
S. A. R. l'Infant fe retira dans fon appartement
, après avoir reſté un moment dans celui
de la fille ; qui , après que l'Infant fut retiré
donna fa main à baifer à tous les Sujets de la
Maifon d'Autriche qui fe trouverent préfens.
L'heure du repas étant arrivée , le Maître des
Cérémonies fut avertir l'Infant , & marcha devant
lui jufques à l'appartement de Madame
l'Archiducheffe , où S. A. R. s'étoit propofée de
l'aller prendre pour la conduire à la table de
nôces.
2
Cette table étoit préparée dans la falle d'audience
, de façon que les trois fiéges fe trouvoient
fous le dais ; il n'y avoit pas de fauteuil ,
mais trois chaifes à dos parfaitement égales.
Madame l'Archiducheſſe entra dans la falle &
fut conduite à table par Monfeigneur l'Infant à
qui elle donnoit la main droite , & M. le Prince
de Lichtenſtein à qui elle donnoit la main gauche
; elle fe plaça au milieu , l'Infant à fa droite ,
& M. de Lichtenftein à fa gauche ; le Maître des
Cérémonies avoit toujours précédé les Princes jufques
à la table.
M. le Comte de S. Vital , Gouverneur de la
Maifon de S. A. R. avec tous les Majordomes ,
excepté celui qui étoit de fervice , furent prendre
lés plats au buffet , & les apporterent ſur la table
dans l'ordre ci-après.
L'Huifier des viandes entre deux Gardes du
Corps , la carabine fur l'épaule : les Gardes s'arrêterent
à la porte de la falle .
Le Maître des Cérémonies marchoit feul quatre
pas après l'Huiffier des viandes.
Douze Pages , portant chacun un plat.
Six Majordomes , portant chacun un plat.
OCTOBRE. 1760. 197
M. le Comte de S. Vital , marchant feul immédiatement
après ,
Le Contrôleur de la Bouche.
Quatre Gardes du Corps la carabine fur l'épaule
, qui fe font arrêtés au même endroit que
les deux premiers.
Le Majordome de fervice prit les plats des
mains des autres Majordomes , & des Pages , &
les arrangea fur la table. Pendant ce temps ,
M. de S. Vital fut fe mettre derriere les Princes
pour fervir Madame l'Archiducheffe , il lui ap
procha fa chaife , celle de l'Infant fut approchée
par un Majordone , & celle de M. le Prince de
Lichtentein par un Gentilhomme de la Maiſon
de S. A R. Madame l'Archiducheffe fut fervie
par M. de S. Vital , l'infant le fut à l'ordinaire
par le entilhomme de la Chambre de fervice ,
& M. le Prince de Lichtenſtein par un Gentilhomme
de la Maiſon.
Ce repas fut fervi avec toute la magnificence
& tout le goût imaginable.
Au fortir de table , Madame l'Archiducheffe
fut reconduite dans fon appartement dans le mê -
me ordre qui avoit été observé en venant à table.
Il n'y eut plus rien jufqu'au foir.
L
Toute la Nobleffe étoit invitée de fe rendre à
huit heures du foir au Palais du Jardin , pour de
là , voir tirer un feu d'artifice , & voir en même
temps une fuperbe illumination difpofée dans le
Jardin . L'ordonnance en étoit riche & galante.
Le Palais du jardin fut dès fept heures rempli
d'un grand nombre de Nobleffe. M. le Prince de
Lichtenftein s'y rendit à fept heures & demie. Le
Prince Ferdinand & Madame Louife , s'y rendirent
peu après , & l'Infant & Madame l'Archiduchefle
y arriverent à huit heures précifes.
Le feu d'artifice fut appliqué à un monument
· Iiij
198 MERCURE DE FRANCE.
Hlevé au milieu d'une très- grande place dans le
jardin de Parme , & faifoit face au Palais où les
Princes fe tranfportérent pour en voir l'effet .
Il repréfentoit l'union de l'Amour & de l'hymen
dans le Temple de Minerve. Ce Temple
étoit élevé fur un grand fondement amtique , dont
la forme étoit ovale , de quatre - vingt - dix - huit
pieds de longueur , fur foixante- quatre pieds de
large ; un grand focle de porphyre , comprenant.
dans fa hauteur les gradins qui formoient les deux
entrées principales du Temple , s'élevoit au-delfus
de ce fondement , & contournoit la baſe de ce
monument , qui étoit orné de vingt- quatre colonnes
d'ordre Dorique entourées de guirlandes
de fleurs. Il avoit quatre faces égales , & fes angles
étoient flanqués de quatre pyramides ifolées
dédiées aux Arts & portant leurs attributs en trophées.
Ces Pyramides étoient environnées de quatre
colonnes du même ordre , formant des avantcorne
à jour , rachetés fur les angles du quarré
du Temple , en forme de tours ou de baftions.
L'entablement étoit décoré de guirlandes de
fleurs dans la frife , & les quatre avant- corps. de
colonnes qui couvroient les Pyramides , foutenoient
fur chaque face des médaillons , en tout au
nombre de ſeize , moitié appuyés ſur la frife &
l'architrave de cet ordre , & moitié tombant dans
le vuide de l'entre- colonne. Ils repréſentoient
des tableaux où étoient peintes les qualités vertueufes
de l'Archiduc & de Madame Iſabelle
comme la nobleffe , la magnanimité , la Majesté
Royale , la libéralité , la jeunelle , la beauté , la
bonté , la clémence , la fécondité , la douceur ,
l'amour de la gloire , l'amour de la Patrie , l'amour
des Sciences , l'amour des Arts , l'enjoûment
& l'affabilité .
Au- deffus des quatre tours des Colonnes , s'élevoir
OCTOBRE. 1760. 199
au milieu des trophées Militaires, un piédeftal portant
des renommées,fur les quatre portes ou Arcades
de ce Temple étoient les Écuffons de l'Archiduc
& de Madame Ifabelle , au milieu de deux
vales ,de Parfums , & appuyé fur le focle qui couronnait
la Corniche .
Au -dellus de ce Socle, dont le plan étoit quarré
comme le Temple , s'élevoit une attique ronde
en forme de Piédeftal couronnée d'un dôme ouvert
par le haur & décoré de guirlandes de fleurs .
Ce Piédeſtal fervita porterautour dela Naillance
du dôme 12 Figures réprefentant les Jeux , les
Ris, & les Plairs , danfant & formant une chaîne
de guirlandes autour de ce monument.
Les quatre portes du Temple étoient décorées &
comme gardées par huit Figures repréſentantes la
vigilance , la dignité , l'Intelligence , la pureté ,
le filence , la douceur , & le courage , qui compo.
fept enfemble toutes les vertus qui caractérisent.
la fagelle.
Au milieu de ce temple dont la forme intérieure.
étoit octogone rachetant une voûte ronde & farbaillée
, étoit la Figure de Minerve fur différens
plans de quées , réuniffant entre fes bras les Figures
de l'Amour & de l'Hymen.
Sur les deux aîles du focle qui joignoit toute la
longueur du fondement ovale , & qui comprenoit
toute la hauteur des perrons , étoient de chaque
côté les autels de l'Amour & de l'Hymen .
Quatre fontaines de feu élevées fur des rochers
qui fortoient de terre contribuoient à la richeſſe de
la bafe de ce monument , en même tems qu'elles
augmentoient l'effet des différens tableaux de feu
qui fortoient de cet édifice deftiné à faire éclater
la joie publique que procure cet événement.
L'Illumination générale de cette machine d'Artifice
fur accompagnée de deux Phénomènes qui
I iv
200 MERCURE DE FRANCE
fe voyoient à droite & à gauche à une certaine dif :
tance du feu & comme dans le lointain. Ils montroient
chacun le Globe du Monde tranfparent
d'un diamètre confidérable , environnés dans l'air
d'un cercle de feu , en figne de l'allégreffe que
qu'infpire à tout l'Univers cet Augufte Mariage
. Une grande quantité de fufées fortoient
également de derriere ces Phénomènes , & formoient
en l'air des Bouquets qui , dirigés pour fe
réunir ſur le ſommer du Temple , conftruifoient
une voute de feu , qui le couvroit continuelle
ment.
Tout ce Spectacle étoit accompagné d'une illumination
générale dans le jardin ; les terraffes décorées
d'ifs , de girandoles & de cordons de lu
mieres hautes & baſſes ; les miroirs de feu , les
pots à-feu formant des cordons élevés , toutes les
allées éclairées fur différens deffeins , & l'illumination
de toute la façade du Palais qui fait face
l'entrée de ce jardin , auffi bien que les différen
tes avenues en étoile , qui y conduifent ; enfin
rien ne fut oublié pour rendre cette Fête augufte
& digne de fon Souverain.
Après le feu d'artifice , l'Infant & Madame
l'Archiducheffe furent fouper. Pendant ce tems
toute la Nobleffe fe ren lit au Théâtre , que l'on
avoit préparé pour y donner un Bal mafqué.
On avoit élevé le Parterre à la hauteur du plane
cher du Théâtre , & l'on avoit pratiqué fur ce
même Théâtre , des Loges folides , femblables à
celles de la Salle ; de façon que le Theâtre &
le Parterre ne faifoient qu'une grande Salle
ovale , applatie par les flancs , & toute entourrée .
de trois rangs de Loges les unes fur les autres ;
cette Salle étoit ornée de guirlandes de fleurs , &
gazes bleues & argent , qui fe rattachoient galamment
aux montants qui feparent les Loges , &
de
OCTOBRE. 1760. 201
qui tomboient en feftons fur les appuis des Loges ,
d'une maniere agréable & pleine de goût ; elle
étoit éclairée par une quantité de luftres de cryftal
ornés de guirlandes de petites fleurs , & par
des bras de cryftal ornés de même , appliqués contre
les appuis des Loges des rangs fupérieurs ; c'étoit
à ces bras que venoient s'attacher les guirlan
des de fleurs , qui ornoient le devant des Loges .
On entroit dans cette Salle par la Loge de la couronne
qui s'avance fur le Parterre , comme les
Amphithéâtres employés en France dans les Salles
des Spectacles ; on en avoit coupé l'appui par
devant , & on defcendoit de-là dans le corps de la
Salle par quatre degrés couverts de tapis de Turquie.
Toutes les Loges étoient remplies , tant celles
pratiquées fur le Théâtre que celles de la Salle ,
pår une grande quantité de Dames & de Cavaliers
ment parés.
Madame l'Archiducheffe étant arrivée , on ouvrit
le Bal par une Allemande , où douze perfonnes
danferent enſemble : Madame l'Archiduchefe
donnoit la main au Prince François , neveu de M.
le Prince de Lichtenſtein . On danſa jufqu'à quatre
heures du matin ; & pendant tout le tems que
durat le Bal , les Officiers de la maiſon de l'Infant
fervirent abondamment de toutes fortes de rafraîchiflemens.
Tout fe paffa avec beaucoup d'ordre ,
& tout le monde fortit extrêmement fatisfait.
Le lendemain 8 , M. le Prince de Lichtenſtein
prit fon Audience de congé ; tout fut obſervé à
cette Audience comme à celle de la demande ,
excepté que l'Introducteur , le Maître des Cérémonies
, & M. le Marquis Palavicini , furent pren .
dre.M. le Prince dans l'Appartement qu'il occupoit
à la Cour ; & que M. de Lichtenſtein , en
fortant de l'Audience de l'Infant , fur à celle de
I v
200 MERCURE DE FRANCE
fe voyoient à droite & à gauche à une certaine dif
tance du feu & comme dans le lointain. Ils mon
troient chacun le Globe du Monde tranſparent
d'un diamètre confidérable , environnés dans l'air
d'un cercle de feu , en figne de l'allégreffe que
qu'infpire à tout l'Univers cet Augufte Mariage.
Une grande quantité de fufées fortoient
également de derriere ces Phénomènes , & formoient
en l'air des Bouquets qui , dirigés pour fe
réunir fur le fommer du Temple , conftruifoient
une voute de feu , qui le couvroit continuelle
ment.
Tout ce Spectacle étoit accompagné d'une illu
mination générale dans le jardin ; les terraffes décorées
d'ifs , de girandoles & de cordons de lu
mieres hautes & balles ; les miroirs de feu , les
pots à- feu formant des cordons élevés , toutes les
allées éclairées fur différens deffeins , & l'illumination
de toute la façade du Palais qui fait face à
l'entrée de ce jardin , auffi bien que les différen➡
tes avenues en étoile , qui y conduifent ; enfin
rien ne fut oublié pour rendre cette Fête auguſte
& digne de fon Souverain.
Après le feu d'artifice , l'Infant & Madame :
l'Archiducheffe furent fouper. Pendant ce tems
toute la Nobleffe fe ren lit au Théâtre , que l'on
avoit préparé pour y donner un Bal mafqué.
On avoit élevé le Parterre à la hauteur du plan
cher du Théâtre , & l'on avoit pratiqué fur ce
même Théâtre , des Loges folides , femblables à
celles de la Salle ; de façon que le Theâtre &
le Parterre ne faifoient qu'une grande Salle
ovale , applatie par les flancs , & toute entourrée
de trois rangs de Loges les unes fur les autres ;
cette Salle étoit ornée de guirlandes de fleurs , &
de gazes bleues & argent , qui fe rattachoient galamment
aux montants qui feparent les Loges , &
OCTOBRE. 1760. 201
qui tomboient en feftons fur les appuis des Loges ,
d'une maniere agréable & pleine de goût ; elle
étoit éclairée par une quantité de luftres de cryftal
ornés de guirlandes de petites fleurs , & par
des bras de cryftal ornés de même , appliqués contre
les appuis des Loges des rangs fupérieurs ; c'étoit
à ces bras que venoient s'attacher les guirlan
des de fleurs , qui ornoient le devant des Loges.
On entroit dans cette Salle par la Loge de la couronne
qui s'avance fur le Parterre , comme les
Amphithéâtres employés en France dans les Salles
des Spectacles ; on en avoit coupé l'appui pardevant
, & on defcendoit de -là dans le corps de la
Salle par quatre degrés couverts de tapis de Tur
quie.
Toutes les Loges étoient remplies , tant celles
pratiquées fur le Théâtre que celles de la Salle ,
par une grande quantité de Dames & de Cavaliers
ment parés.
Madame l'Archiducheffe étant arrivée , on ouvrit
le Bal par une Allemande , où douze perfonnes
danſerent enſemble : Madame l'Archiduchele
donnoit la main au Prince François , neveu de M.
le Prince de Lichtenſtein . On danſa jufqu'à quatre
heures du matin ; & pendant tout le tems que
durat le Bal , les Officiers de la maiſon de l'Infant
fervirent abondamment de toutes fortes de rafraîchiflemens.
Tout fe paffa avec beaucoup d'ordre ,
& tout le monde fortit extrêmement fatisfait.
Le lendemain 8 , M. le Prince de Lichtenftein
prit fon Audience de congé ; tout fut obfervé à
cette Audience comme à celle de la demande 9
excepté que l'Introducteur , le Maître des Cérémonies
, & M. le Marquis Palavicini , furent pren .
dre.M. le Prince dans l'Appartement qu'il occupoit
à la Cour ; & que M. de Lichtenſtein , en
fortant de l'Audience de l'Infant , fur à celle de
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200 MERCURE DE FRANCE
fe voyoient à droite & à gauche à une certaine dif
tance du feu & comme dans le lointain. Ils montroient
chacun le Globe du Monde tranfparent , '
d'un diamètre confidérable , environnés dans l'air
d'un cercle de feu , en figne de l'allégreffe que
qu'infpire à tout l'Univers cet Augufte Mariage
. Une grande quantité de fufées fortoient
également de derriere ces Phénomènes , & formoient
en l'air des Bouquets qui , dirigés pour fe
réunir fur le fommet du Temple , conftruifoient
une voute de feu , qui le couvroit continuelle
ment.
Tout ce Spectacle étoit accompagné d'une illu
mination générale dans le jardin ; les terraffes décorées
d'ifs , de girandoles & de cordons de lu
mieres hautes & baffes ; les miroirs de feu , les
pots à-feu formant des cordons élevés , toutes les
allées éclairées fur différens deffeins , & l'illumination
de toute la façade du Palais qui fait face à
l'entrée de ce jardin , auffi bien que les différen
tes avenues en étoile , qui y conduifent enfin
rien ne fut oublié pour rendre cette Fête augufte
& digne de fon Souverain.
Après le feu d'artifice , l'Infant & Madame
l'Archiducheffe furent fouper. Pendant ce tems
toute la Nobleffe ſe ren fit au Théâtre , que l'on
avoit préparé pour y donner un Bal maſqué .
On avoit élevé le Parterre à la hauteur du plan
cher du Théâtre , & l'on avoit pratiqué fur ce
même Théâtre , des Loges folides , femblables à
celles de la Salle ; de façon que le Theâtre &
le Parterre ne faifoient qu'une grande Salle
ovale , applatie par les flancs , & toute entourrée
de trois rangs de Loges les unes fur les autres ;
cette Salle étoit ornée de guirlandes de fleurs , &
de gazes bleues & argent , qui fe rattachoient galamment
aux montants qui ſéparent les Loges , &
OCTOBRE. 1760. 201
qui tomboient en feftons fur les appuis des Loges ,
d'une maniere agréable & pleine de goût ; elle
étoit éclairée par une quantité de luftres de cryftal
ornés de guirlandes de petites fleurs , & par
des bras de cryſtal ornés de même , appliqués contre
les appuis des Loges des rangs fupérieurs ; c'étoit
à ces bras que venoient s'attacher les guirlandes
de fleurs , qui ornoient le devant des Loges.
On entroit dans cette Salle par la Loge de la couronne
qui s'avance fur le Parterre , comme les
Amphithéâtres employés en France dans les Salles
des Spectacles ; on en avoit coupé l'appui pardevant
, & on defcendoit de -là dans le corps de la
Salle par quatre degrés couverts de tapis de Turquie.
Toutes les Loges étoient remplies , tant celles
pratiquées fur le Théâtre que celles de la Salle
pår une grande quantité de Dames & de Cavaliers
ment parés.
Madame l'Archiducheſſe étant arrivée , on ouvrit
le Bal par une Allemande , où douze perfonnes
danferent enſemble : Madame l'Archiduchele
donnoit la main au Prince François , neveu de M.
le Prince de Lichtenftein . On danſa jufqu'à quatre
heures du matin ; & pendant tout le tems que
durat le Bal , les Officiers de la maiſon de l'Infant
fervirent abondamment de toutes fortes de rafraîchiflemens.
Tout fe paffa avec beaucoup d'ordre ,
& tout le monde fortit extrêmement fatisfait.
Le lendemain 8 , M. le Prince de Lichtenftein
prit fon Audience de congé ; tout fut obfervé à
cette Audience comme à celle de la demande ,
excepté que l'Introducteur , le Maître des Cérémonies
, & M. le Marquis Palavicini , furent pren .
dre.M. le Prince dans l'Appartement qu'il occupoit
à la Cour ; & que M. de Lichtenſtein , en
fortant de l'Audience de l'Infant , fut à celle de
I v
202 MERCURE DE FRANCE.
Madame l'Archiducheffe , avant d'être conduit à
celle du Prince Ferdinand.
Après l'Audience de Madame Louife , M. le
Prince , au lieu de retourner dans fon appartement
a la Cour , defcendit par le grand efcalier ,
& fut monter dans fon Caroffe qui l'attendoit a la
porte du Palais , pour le ramener à l'Hôtel Palavicini
.
Le Maître des Cérémonies l'accompagna juf
qu'au bas de l'efcalier , M. de Palavicini & M.
Introducteur jufques à la portiere de la voiture ,
qui ne fur fermée que quand ces Meffieurs fe futent
retirés.
Le foir , il y eut Opéra.
Le 9. l'Infant fut dîner chez M. de Lichtenſtein.
Lé foir , il y eut Opéra.
Le to M. le Prince de Lichtenſtein dina chez M.
Dutillot , & partit après dîner pour Cafalmajor.
Le foir , il y eut Aflemblée au Paļais .
Le 11. au matin tous les Corps de l'Etat , le
Militaire , la Nobleffe , & la Maifon de S. A R.
eurent l'honneur de baifer la main à Madame
l'Archiducheffe .
Il y eut Opéra , le ſoir.
Le .les Princes n'ont reçu perfonne .
Le 13. S. A. R. Madame l'Archiducheffe partit
à dix heures du matin pour le rendre à Cafalmajor:
elle y a été accompagnée par Madame de
Gonzales , Madame de Silla , quatre Dames du
Pálais , des Majordomes , & huit Gentilshommes
de la Chambre ; elle étoit faivîe d'un nombre de
Pages , d'Ecuyers , de fon premier fervice , & defon
fervice du fecond Ordre , du Commandant de
l'Ecurie de deux Officiers des Ecuries , du Sellier >
du Maréchal , du Charron & de 24 Palfreniers à
Cheval;elle étoit éfcortée par des Gardes du Corps.
Les rues par lesquelles elle a pallé, étoient bordées
OCTOBRE , 1760. 203
de troupes , on avoit difpofé des Détachemens de
Cavalerie & d'Infanterie fur différens endroits de
la roure.
Des Bataillons Provinciaux , fix Compagnies de
Grenadiers, un Bataillon du Régiment de Parme ,
& les deux Compagnies de Grenadiers de inême
Régiment, étoient difpofées fur les bords du Pô ,
en deçà de la tête du Pont. Elle y a trouvé des
Elcadrons de Gardes du Corps & de Cavalerie. Elle
eft arrivée à Cafalmajor à midi & deux minutes.
M. le Comte de S. Vital eft chargé de la Cérémonie
de la remife , un Secrétaire du Cabinet de
l'Acte de certe ' remiſe .
S. A. R. s'arrête demain à Cafalmajor pour y
donner la main à bailer aux Deputés de la Lombardie
Autrichienne , aux Chambres Souveraines ,
& à la Nobleffe. Le lundi elle ira à Mantoue, où elle
s'arrêtera encore un jour, pour un objet ſemblable.
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Résumé : Suite de la Relation de tout ce qui s'est passé depuis.
Le texte relate les festivités entourant le mariage des Altesses Royales, notamment Madame l'Archiduchesse à Parme. Les célébrations incluent la représentation de l'opéra 'Les Fêtes de l'Hymen', composé de trois actes indépendants précédés d'un prologue intitulé 'Le Triomphe de l'Amour'. Ce prologue met en scène une querelle entre les dieux et l'Amour, qui obtient leur pardon pour l'union de la vertu et de la beauté. Les trois actes de l'opéra sont 'Aris', 'Sapho' et 'Eglé', chacun racontant des histoires d'amour et d'interventions divines. Les festivités comprennent des réceptions et des dîners offerts par des nobles tels que le Prince de Liechtenstein et le Comte de Rochechouart, avec des représentations d'opéra et des danses. La cérémonie de mariage à la cathédrale est décrite avec une décoration somptueuse et une procession ordonnée. Les troupes et les gardes assurent la sécurité, et la cérémonie religieuse suit le rituel ordinaire avec quelques adaptations spécifiques. Après la cérémonie, les princes retournent au palais dans le même ordre qu'à l'arrivée. Les événements incluent également un feu d'artifice et une illumination dans le jardin du palais, représentant l'union de l'Amour et de l'Hymen, suivi d'un bal masqué au théâtre. Madame l'Archiduchesse ouvre le bal avec le Prince François. Le lendemain, le Prince de Liechtenstein prend congé selon les cérémonies protocolaires. Les festivités se poursuivent avec des audiences et des repas officiels. Le 11 octobre, divers corps de l'État rendent hommage à Madame l'Archiduchesse. Le 13 octobre, elle quitte pour Casalmaggiore, escortée par des troupes et des dignitaires, et arrive à midi. Elle prévoit de s'arrêter à Casalmaggiore et à Mantoue pour saluer les députés et la noblesse.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 183-188
De VIENNE, le 10 Octobre.
Début :
La nouvelle Archiduchesse étant arrivée le 13 du mois dernier [...]
Mots clefs :
Archiduchesse, Comte, Ministre plénipotentiaire, Duc, Cour, Déplacements, Mondanités, Bal, Repas, Princesse, Chevalier, Décorations, Magnificence, Évêque, Bourgeoises, Château, Majestés impériales, Archiduc, Concert, Carosse, Arc de triomphe, Bénédiction, Église, Symphonie, Célébrations, Constantinople, Rébellion
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texteReconnaissance textuelle : De VIENNE, le 10 Octobre.
De VIENNE ,le 10 Oftobre.
A nouvelle Archiducheffe étant arrivée le
13 du mois dernier à midi à Cafal- Maggiore ,
fut remife par le Comte de Saint Vital , Grand-
Maître , & Miniftre Plénipotentiaire de l'Infant
Duc de Parme , de Plaiſance & de Guaftalle , entre
les mains du Prince de Lichtenſtein , chargé
de la recevoir au nom de Leurs Majestés Impériales
, & de l'accompagner jufqu'à Vienne. La
Cour qui l'avoit fuivie de Parme , prit alors publiquement
congé d'elle en lui baifant la main , &
fa nouvelle Cour lui fut préfentée , & eut le même.
honneur . La Princeffe , après avoir auffi donné
fa main à baifer à un grand nombre de perfonnes
de diftinction , qui étoient venues de divers endroits
pour la complimenter , dîna en public fous
le dais. Elle fe rendit le foir à la falle que les Etats
de Milan avoient fait préparer. On y exécuta un
Concert dans lequel plufieurs excellentes voix fe
firent entendre. La Ville fut illuminée cette nuit ,
ainfi que la fuivante ..
L'Archiducheffe partit le 15 au matin de Caſal-
Maggiore pour le rendre à Mantoue. Elle y arriva
vers une heure, après midi , au bruit d'une
triple décharge de l'artillerie . Une double haie
de troupes bordoit les rues depuis la porte de la
Ville jufqu'au Château , où elle defcendit . Après
184 MERCURE DE FRANCE.
avoir pris quelques momens de repos , elle donna
fa main à baifer à une grande quantité de No.
bleffe du Milanois. Elle dîna enfuite en public ,
& le foir Elle affifta à un Concert qui fut exécuté
au Théâtre du Château ; après quoi Elle ſe rendit
au Bal où Elle retta quelque temps. Le lendemain
16 , Elle féjourna dans la même Ville , Elle parcourut
en caroffe les principales rues. Elle parur
très -fatisfaite de leur décoration . Le Duc de Modène
, qui fe trouva à Montignano , eut l'honneur
de la complimenter.
Le 17 , la Princefle continua fa route. A fon
arrivée à Rovera -Bella dans les Etats de Venife
qu'elle devoit traverfer , Elle fut reçue & compli
mentée au nom de la République par le Chevalier
Contarini , Commandant de Vérone , accompagné
de vingt -quatre Nobles . Deux détachemens de
Cavalerie des Troupes Vénitiennes fe joignirent à
fon escorte . On avoit conftruit à Caftel - Nuovo ,
où la Princeffe devoit dîner , un Bâtiment , dont
l'intérieur étoit magnifiquement décoré en glaces ,
en cryftaux & en tapis. Ce fut là que l'Archiduchelle
defcendit. Elle y dina en public . Il y eur
enfuite onze tables fervies magnifiquement , par
ordre de la République , pour la Cour de l'Archiduchelle
& pour la Nobleffe qui fe trouvoit à
Caftel-Nuovo. Au départ de la Princeffe , le Chevalier
Contarinila pria , au nom de la République ,
d'accepter les glaces , les cryftaux & les tapis qui
avoient fervi d'ameublement à la falle où Elle
avoit dîné. Le Chevalier Contarini ſe trouva encore
avec la même députation au pont d'Etích , où l'on
devoit fortir des Etats de Venife , & il y prit congé
de l'Archiducheffe , qui lui témoigna la plus gran
de fatisfaction des attentions de la République , &
de la magnificence avec laquelle elle avoit été
reçue.
NOVEMBRE. 1760.
185
On arriva le même ſoir à Ala ; la Princeffe y
fut complimentée au nom de l'Evêque de Trente.
Elle en partit le 19 , & Elle a continué fa marche
par Trente , Bolzano , Brixen , & par la Carinthie.
Elle a trouvé dans toutes les Villes de fa route
des Troupes & des Compagnies bourgeoifes fous
les armes , & l'on s'eft empreffé partout à lui témoigner
par des fêtes la joie de fon augufte union
avec l'Archiduc Jofeph. Cette Princefle arriva enfin
le i de ce mois au matin à Laxembourg où Elle
dîna . Elle partit enfuite pour le Château de Belvedere
, où Elle refta jufqu'au 6 , jour de la célébration
de fon mariage.
Le 2 , Leurs Majeftés Impériales , accompagnées
de l'Archiduc Jofeph , des deux Archiducheffes
aînées , du Prince Charles & de la Princelle
Charlotte de Lorraine , fe rendirent vers le midi
au Belvedere , pour faire la premiere vifite à l'Archiduchelle
; Elles dinèrent enfuite en particulier
avec cette Princeffe que le refte de la Famille Impériale
vint complimenter l'après - midi. Il y eut le
foir dans la Galerie un magnifique Concert , dans
lequel plufieurs Muficiens dú premier ordre , appellés
de divers endroits de l'Europe , firent connoître
leurs talens . Les Ambaffadeurs & Miniftres
Etrangers , les Confeillers d'Etat & les Principaux
Officiers de la Maifon de Leurs Majeftés Impériales
, furent préfentés le même foir à l'Archiducheffe
& eurent l'honneur de lui baiſer la main . Le
lendemain , il y eut encore concert au Belvedere.
Le 4 , jour de la fête de l'Empereur , la Cour
fut en Gala , & Sa Majefte Impériale reçut les
complimens accoutumés. La nouvelle garde des
Nobles Hongrois , qui étoit arrivée le 2 de Pref
bourg, fe rendit fur la place du Palais , & après
avoir fait le maniement des armes & plufieurs
186 MERCURE DE FRANCE.
évolutions , elle fut admiſe à l'honneur de baifer
la main de l'Empereur..
L'Archiducheffe fit , le 6 , fon entrée publique
dans cette Capitale. Elle partit du Beldevere à
deux heures après- midi. Les Trompettes & les
Timbales des Etats d'Autriche ouvroient la marche.
Après eux , venoient un grand nombre de
Caroffes remplis par diverfes perfonnes de la
Cour ou de la Maifon de Leurs Majeftés Impériales.
Ils étoient fuivis du Carolle du Grand Ecuyer
où étoient cet Oficier & le Grand- Maître de la
Maifon de l'Archiducheffe . Le Caroffe du Prince
de Lichtenſtein , avec le Cortége nombreux qui
Favoit accompagné dans fon Ambaffade , marchoic
enfuite & précédoit le Caroffe de l'Archiducheffe ,
dans lequel étoit la Comteffe d'Erdodi , Grand-
Maîtrelle de fa Maiſon . Ce Caroffe étoit fuivi par
fix Pages à cheval , par plufieurs Sous- Ecuyers ,
par un détachement des Gardes-du-Corps , par la
garde des Nobles Hongrois , & par quelques au
tres Caroffes dans lefquels étoient plufieurs perfonnes
de la Cour. La Marche étoit fermée par un
détachement du Régiment des Dragons de l'Archiduc
Jofeph.
On avoit élevé plufieurs Arcs-de-triomphe en
divers quartiers de la Ville qui étoient décorés
avec goût & magnificence. Les rues étoient bordées
par la Bourgeoifie qui étoit fous les armes , &
vêtue de beaux uniformes.
On fe rendit dans cet ordre à l'Eglife des Auguftins-
Déchauffés , où l'Archiducheffe artiva vers
les cinq heures du foir. Leurs Majeftés Impériales
vinrent la recevoir à l'entrée de l'Eglife , & l'Arehiduc
Jofeph lui donna la main lorfqu'elle defcendit
de fon Caroffe. La Princeffe , après avoir
reçu ainfi que l'Archiduc, la bénédiction du Nonce
& l'eau benite que ce Prince leur préſenta , fut
NOVEMBRE. 1760. 187
conduite par l'Impératrice dans une Chapelle par
ticuliere pendant qu'on chantoit quelques Prieres,
après lefquelles Leurs Majeftés Impériales , précé
dées du Nonce & du Clergé , fe rendirent dans le
Choeur. Leurs Majeftés Impériales fe placèrent
fous le dais du côté de l'Evangile. L'Archiduc &
P'Archiducheffe , vêtus de drap d'argent , fe placerent
en face du Grand - Autel . Après quelques
Prieres , le Nonce leur donna la Bénédiction Nuptiale
;
il entonna le Te Deum qui fut chanté par la
Mufique de la Cour. Leurs Majeftés Impériales
fortirent de l'Eglife , & Elles rentrèrent au Palais
avec toute la Famille Impériale par la Galerie
qui conduit de ce Palais à l'Eglife. L'Archiducheffe
prit enfuite quelque repos , après quoi , Elle donna
fa main à baifer à plufieurs Miniftres & Confeillers
d'Etat , aux Généraux , & aux perfonnes de la
haute Nobleffe , qui n'avoient pas encore reçu cer
honneur.
A huit heures du foir ,. Leurs Majeftés Timpé
riales , les nouveaux Epoux , les Archiducs Charles
& Léopold , les quatre Archiducheffes aînées ,
le Prince Charles & la Princeffe Charlotte de Lorraine
, fe rendirent à la falle du feftin. Cette falle
avoit été décorée par le Chevalier Servandoni ş
elle étoit éclairée par un très- grand nombre de
luftres & de Girandoles de cryftal ; celles des
quatre coins avoient vingt cinq pieds de hauteurs ,
portées par des groupes d'Amours. Le dais étoit
d'une forme nouvelle , & décoré par le même Artifte
de figures fymboliques en fculpture . La Cour :
entra dans cette falle au bruit des fanfares . L'Empereur
& l'impératrice fe placerent fous le dais ,
& l'Archiducheffe à droite , entre l'Empereur &
F'Archiduc. La table fut fervie en vailfelle d'or
nouvellement faite , & d'un travail exquis. Une
nombreuſe troupe de Muficiens exécura , pendant
188 MERCURE DE FRANCE.
le repas , des fymphonies & des morceaux de mu
fique vocale , analogues à l'objet de la Fête. La
falle étoit remplie d'une foule de Spectateus placés
fur un amphithéâtre & fur une tribune , & l'on
donna au Peuple la permiffion d'y entrer fucceffivement.
Le feftin Impérial étant fini , Leurs
Majeftés retournerent dans leurs appartemens ,
& la Princeffe fut conduite dans celui qui lui étoit
deftiné. Il y eut pendant la nuit une illumination
générale.
On célébra le lendemain , dans l'Eglife des Auguftins
, une Meffe en inufique pour la prospérité
des nouveaux Epoux. L'Archevêque de Vienne
officia , & toure la Cour y affifta. Leurs Majeftés
Impériales dînerent enfuite en public , & le
foir on exécuta , for le Théâtre de la Cour , un
nouvel Opéra , intitulé Alcide al Bivio , piéce allégorique
, dont les paroles font de l'Abbé Metaftafio
, & la musique du fieur Haffe . Le Spectacle
fut terminé par un Ballet ingénieux du ſieur
Angiolini.
Selon les nouvelles de Conftantinople , le Pacha
d'Iconium perfifie dans fa rébellion . Il a
évité les différens piéges qu'on lui avoit dreffés ,
& après avoir battu quelques corps de troupes
qu'on avoit envoyés contre lui , il a pris , aur
environs d'Erferom , une pofition avantageuſe ,
qui le met en état de réfifter à des forces trèsfupérieures.
Les mêmes nouvelles portent qu'une
des Sultanes eft enceinte de quatre mois ; ce qui
fait beaucoup de plaifir dans cette Capitale , où
F'on conçoit l'efpérance de voir naître un Succeffeur
à fa Hautelle.
A nouvelle Archiducheffe étant arrivée le
13 du mois dernier à midi à Cafal- Maggiore ,
fut remife par le Comte de Saint Vital , Grand-
Maître , & Miniftre Plénipotentiaire de l'Infant
Duc de Parme , de Plaiſance & de Guaftalle , entre
les mains du Prince de Lichtenſtein , chargé
de la recevoir au nom de Leurs Majestés Impériales
, & de l'accompagner jufqu'à Vienne. La
Cour qui l'avoit fuivie de Parme , prit alors publiquement
congé d'elle en lui baifant la main , &
fa nouvelle Cour lui fut préfentée , & eut le même.
honneur . La Princeffe , après avoir auffi donné
fa main à baifer à un grand nombre de perfonnes
de diftinction , qui étoient venues de divers endroits
pour la complimenter , dîna en public fous
le dais. Elle fe rendit le foir à la falle que les Etats
de Milan avoient fait préparer. On y exécuta un
Concert dans lequel plufieurs excellentes voix fe
firent entendre. La Ville fut illuminée cette nuit ,
ainfi que la fuivante ..
L'Archiducheffe partit le 15 au matin de Caſal-
Maggiore pour le rendre à Mantoue. Elle y arriva
vers une heure, après midi , au bruit d'une
triple décharge de l'artillerie . Une double haie
de troupes bordoit les rues depuis la porte de la
Ville jufqu'au Château , où elle defcendit . Après
184 MERCURE DE FRANCE.
avoir pris quelques momens de repos , elle donna
fa main à baifer à une grande quantité de No.
bleffe du Milanois. Elle dîna enfuite en public ,
& le foir Elle affifta à un Concert qui fut exécuté
au Théâtre du Château ; après quoi Elle ſe rendit
au Bal où Elle retta quelque temps. Le lendemain
16 , Elle féjourna dans la même Ville , Elle parcourut
en caroffe les principales rues. Elle parur
très -fatisfaite de leur décoration . Le Duc de Modène
, qui fe trouva à Montignano , eut l'honneur
de la complimenter.
Le 17 , la Princefle continua fa route. A fon
arrivée à Rovera -Bella dans les Etats de Venife
qu'elle devoit traverfer , Elle fut reçue & compli
mentée au nom de la République par le Chevalier
Contarini , Commandant de Vérone , accompagné
de vingt -quatre Nobles . Deux détachemens de
Cavalerie des Troupes Vénitiennes fe joignirent à
fon escorte . On avoit conftruit à Caftel - Nuovo ,
où la Princeffe devoit dîner , un Bâtiment , dont
l'intérieur étoit magnifiquement décoré en glaces ,
en cryftaux & en tapis. Ce fut là que l'Archiduchelle
defcendit. Elle y dina en public . Il y eur
enfuite onze tables fervies magnifiquement , par
ordre de la République , pour la Cour de l'Archiduchelle
& pour la Nobleffe qui fe trouvoit à
Caftel-Nuovo. Au départ de la Princeffe , le Chevalier
Contarinila pria , au nom de la République ,
d'accepter les glaces , les cryftaux & les tapis qui
avoient fervi d'ameublement à la falle où Elle
avoit dîné. Le Chevalier Contarini ſe trouva encore
avec la même députation au pont d'Etích , où l'on
devoit fortir des Etats de Venife , & il y prit congé
de l'Archiducheffe , qui lui témoigna la plus gran
de fatisfaction des attentions de la République , &
de la magnificence avec laquelle elle avoit été
reçue.
NOVEMBRE. 1760.
185
On arriva le même ſoir à Ala ; la Princeffe y
fut complimentée au nom de l'Evêque de Trente.
Elle en partit le 19 , & Elle a continué fa marche
par Trente , Bolzano , Brixen , & par la Carinthie.
Elle a trouvé dans toutes les Villes de fa route
des Troupes & des Compagnies bourgeoifes fous
les armes , & l'on s'eft empreffé partout à lui témoigner
par des fêtes la joie de fon augufte union
avec l'Archiduc Jofeph. Cette Princefle arriva enfin
le i de ce mois au matin à Laxembourg où Elle
dîna . Elle partit enfuite pour le Château de Belvedere
, où Elle refta jufqu'au 6 , jour de la célébration
de fon mariage.
Le 2 , Leurs Majeftés Impériales , accompagnées
de l'Archiduc Jofeph , des deux Archiducheffes
aînées , du Prince Charles & de la Princelle
Charlotte de Lorraine , fe rendirent vers le midi
au Belvedere , pour faire la premiere vifite à l'Archiduchelle
; Elles dinèrent enfuite en particulier
avec cette Princeffe que le refte de la Famille Impériale
vint complimenter l'après - midi. Il y eut le
foir dans la Galerie un magnifique Concert , dans
lequel plufieurs Muficiens dú premier ordre , appellés
de divers endroits de l'Europe , firent connoître
leurs talens . Les Ambaffadeurs & Miniftres
Etrangers , les Confeillers d'Etat & les Principaux
Officiers de la Maifon de Leurs Majeftés Impériales
, furent préfentés le même foir à l'Archiducheffe
& eurent l'honneur de lui baiſer la main . Le
lendemain , il y eut encore concert au Belvedere.
Le 4 , jour de la fête de l'Empereur , la Cour
fut en Gala , & Sa Majefte Impériale reçut les
complimens accoutumés. La nouvelle garde des
Nobles Hongrois , qui étoit arrivée le 2 de Pref
bourg, fe rendit fur la place du Palais , & après
avoir fait le maniement des armes & plufieurs
186 MERCURE DE FRANCE.
évolutions , elle fut admiſe à l'honneur de baifer
la main de l'Empereur..
L'Archiducheffe fit , le 6 , fon entrée publique
dans cette Capitale. Elle partit du Beldevere à
deux heures après- midi. Les Trompettes & les
Timbales des Etats d'Autriche ouvroient la marche.
Après eux , venoient un grand nombre de
Caroffes remplis par diverfes perfonnes de la
Cour ou de la Maifon de Leurs Majeftés Impériales.
Ils étoient fuivis du Carolle du Grand Ecuyer
où étoient cet Oficier & le Grand- Maître de la
Maifon de l'Archiducheffe . Le Caroffe du Prince
de Lichtenſtein , avec le Cortége nombreux qui
Favoit accompagné dans fon Ambaffade , marchoic
enfuite & précédoit le Caroffe de l'Archiducheffe ,
dans lequel étoit la Comteffe d'Erdodi , Grand-
Maîtrelle de fa Maiſon . Ce Caroffe étoit fuivi par
fix Pages à cheval , par plufieurs Sous- Ecuyers ,
par un détachement des Gardes-du-Corps , par la
garde des Nobles Hongrois , & par quelques au
tres Caroffes dans lefquels étoient plufieurs perfonnes
de la Cour. La Marche étoit fermée par un
détachement du Régiment des Dragons de l'Archiduc
Jofeph.
On avoit élevé plufieurs Arcs-de-triomphe en
divers quartiers de la Ville qui étoient décorés
avec goût & magnificence. Les rues étoient bordées
par la Bourgeoifie qui étoit fous les armes , &
vêtue de beaux uniformes.
On fe rendit dans cet ordre à l'Eglife des Auguftins-
Déchauffés , où l'Archiducheffe artiva vers
les cinq heures du foir. Leurs Majeftés Impériales
vinrent la recevoir à l'entrée de l'Eglife , & l'Arehiduc
Jofeph lui donna la main lorfqu'elle defcendit
de fon Caroffe. La Princeffe , après avoir
reçu ainfi que l'Archiduc, la bénédiction du Nonce
& l'eau benite que ce Prince leur préſenta , fut
NOVEMBRE. 1760. 187
conduite par l'Impératrice dans une Chapelle par
ticuliere pendant qu'on chantoit quelques Prieres,
après lefquelles Leurs Majeftés Impériales , précé
dées du Nonce & du Clergé , fe rendirent dans le
Choeur. Leurs Majeftés Impériales fe placèrent
fous le dais du côté de l'Evangile. L'Archiduc &
P'Archiducheffe , vêtus de drap d'argent , fe placerent
en face du Grand - Autel . Après quelques
Prieres , le Nonce leur donna la Bénédiction Nuptiale
;
il entonna le Te Deum qui fut chanté par la
Mufique de la Cour. Leurs Majeftés Impériales
fortirent de l'Eglife , & Elles rentrèrent au Palais
avec toute la Famille Impériale par la Galerie
qui conduit de ce Palais à l'Eglife. L'Archiducheffe
prit enfuite quelque repos , après quoi , Elle donna
fa main à baifer à plufieurs Miniftres & Confeillers
d'Etat , aux Généraux , & aux perfonnes de la
haute Nobleffe , qui n'avoient pas encore reçu cer
honneur.
A huit heures du foir ,. Leurs Majeftés Timpé
riales , les nouveaux Epoux , les Archiducs Charles
& Léopold , les quatre Archiducheffes aînées ,
le Prince Charles & la Princeffe Charlotte de Lorraine
, fe rendirent à la falle du feftin. Cette falle
avoit été décorée par le Chevalier Servandoni ş
elle étoit éclairée par un très- grand nombre de
luftres & de Girandoles de cryftal ; celles des
quatre coins avoient vingt cinq pieds de hauteurs ,
portées par des groupes d'Amours. Le dais étoit
d'une forme nouvelle , & décoré par le même Artifte
de figures fymboliques en fculpture . La Cour :
entra dans cette falle au bruit des fanfares . L'Empereur
& l'impératrice fe placerent fous le dais ,
& l'Archiducheffe à droite , entre l'Empereur &
F'Archiduc. La table fut fervie en vailfelle d'or
nouvellement faite , & d'un travail exquis. Une
nombreuſe troupe de Muficiens exécura , pendant
188 MERCURE DE FRANCE.
le repas , des fymphonies & des morceaux de mu
fique vocale , analogues à l'objet de la Fête. La
falle étoit remplie d'une foule de Spectateus placés
fur un amphithéâtre & fur une tribune , & l'on
donna au Peuple la permiffion d'y entrer fucceffivement.
Le feftin Impérial étant fini , Leurs
Majeftés retournerent dans leurs appartemens ,
& la Princeffe fut conduite dans celui qui lui étoit
deftiné. Il y eut pendant la nuit une illumination
générale.
On célébra le lendemain , dans l'Eglife des Auguftins
, une Meffe en inufique pour la prospérité
des nouveaux Epoux. L'Archevêque de Vienne
officia , & toure la Cour y affifta. Leurs Majeftés
Impériales dînerent enfuite en public , & le
foir on exécuta , for le Théâtre de la Cour , un
nouvel Opéra , intitulé Alcide al Bivio , piéce allégorique
, dont les paroles font de l'Abbé Metaftafio
, & la musique du fieur Haffe . Le Spectacle
fut terminé par un Ballet ingénieux du ſieur
Angiolini.
Selon les nouvelles de Conftantinople , le Pacha
d'Iconium perfifie dans fa rébellion . Il a
évité les différens piéges qu'on lui avoit dreffés ,
& après avoir battu quelques corps de troupes
qu'on avoit envoyés contre lui , il a pris , aur
environs d'Erferom , une pofition avantageuſe ,
qui le met en état de réfifter à des forces trèsfupérieures.
Les mêmes nouvelles portent qu'une
des Sultanes eft enceinte de quatre mois ; ce qui
fait beaucoup de plaifir dans cette Capitale , où
F'on conçoit l'efpérance de voir naître un Succeffeur
à fa Hautelle.
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Résumé : De VIENNE, le 10 Octobre.
Le 13 octobre, l'archiduchesse arriva à Casal-Maggiore, où elle fut remise au prince de Liechtenstein par le comte de Saint Vital. La cour de Parme lui présenta ses adieux, et elle rencontra sa nouvelle cour. Elle dîna en public et assista à un concert, tandis que la ville était illuminée. Le 15 octobre, elle se dirigea vers Mantoue, accueillie par une triple salve d'artillerie et une haie de troupes. Elle rencontra le duc de Modène à Montignano. Le 17 octobre, elle poursuivit son voyage à travers les États de Venise, où elle fut reçue par le chevalier Contarini. Elle dîna à Castel-Nuovo et reçut des cadeaux de la République de Venise. Son itinéraire se poursuivit par Ala, Trente, Bolzano, Brixen et la Carinthie, où elle fut accueillie par des troupes et des fêtes. Le 1er novembre, elle arriva à Laxembourg et séjourna au château de Belvedere jusqu'au 6 novembre, jour de son mariage. Le 2 novembre, les Majestés Impériales lui rendirent visite au Belvedere. Le 6 novembre, l'archiduchesse fit son entrée publique à Vienne, accompagnée d'une procession solennelle et d'arcs de triomphe. Elle se rendit à l'église des Augustins-Déchaussés pour la bénédiction nuptiale, suivie d'un festin impérial et d'une illumination générale. Le lendemain, une messe fut célébrée pour la prospérité des nouveaux époux, suivie d'un opéra allégorique.
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16
p. 211-214
FESTES PUBLIQUES. Description de la Fête donnée à Venise au Duc d'YORCK.
Début :
Le Duc d'Yorck arriva ici le 26 du mois dernier, & fut complimenté le lendemain [...]
Mots clefs :
Fête, République de Venise, Prince, Bâtiment, Cérémonie, Épousailles de la mer, Magnificence, Dorures, Baldaquin, Couleurs, Argent, Illustrations, Ornements, Vénus, Bateaux, Inscriptions, Fleurs
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : FESTES PUBLIQUES. Description de la Fête donnée à Venise au Duc d'YORCK.
FESTES PUBLIQUES .
Defcription de la Fête donnée à Venife au Duc
' Хокск .
Le Duc d'Yorck arriva ici le 26 du mois dernier
, & fut complimenté le lendemain par quatre
Députés qu'avoit nommés la République pour lai
faire tous les honneurs des à fon rang. Le 29 , ces
Prince alla vifiter l'Arfénal : les ouvriers de toutes
les différentes parties de ce grand Bâtiment exécuterent
en la préfence quelque ouvrage particu
lier de leur métier. Le 31 , jour de l'Afcenfion ,
la violence du vent obligea de renvoyer au Dimanche
fuivant , la cérémonie des époufailles de
la mer. Le même jour , les Députés donnerent
un grand repas au Duc d'Yorck dans l'Ile de
Muran. Le 3 de ce mois , la cérémonie des épou
failles de la mer fe fit avec la magnificence ordinaire
devant un concours prodigieux d'étrangers.
Le lendemain 4 , jour de la naiffance du Roi
d'Angleterre , les Députés donnerent à Son Alteffe
Royale le fpectacle de la courſe des Bateaux
nommée Régate ; c'eſt une fête qu'on réſerve ordinairement
pour de grandes occaſions : on n'en
avoit point donné depuis 1740 , où il y en eut une
en l'honneur du Prince Electoral de Saxe.
212 MERCURE DE FRANCE.
Vers les deux heures après - midi , la fête com →
mença par l'arrivée de neuf Peotes ou grands Bateaux
, qui s'avancerent au bruit des tymbales &
des trompettes. Ces Peotes étoient ornées d'emblêmes
& de figures allégoriques. La première
étoit toute argentée , & repréfentoit l'Elément de
l'Eau & le triomphe de Neptune. Ce Dieu étoit
fur la poupe fous un baldaquin de panaches noirs
& azurs mêlés d'algue ; il avoit fon Trident à la
main , & étoit environné de Tritons & autres Divinités
de la Mer.
La feconde , dorée & argentée , repréſentoit la
Terre , fous le fymbole de Cybèle vêtue magnifiquement
, couronnée de tours , & placée fous un
baldaquin de panaches rouges , noirs & azurs. La
proue formoit une colline d'or ornée d'arbriffeaux
chargés de fruits & garnie d'animaux. Les Rameurs
portoient des habits relatifs au ſujet , & voguoient
au fon des inftrumens.
La troifiéme , dont le fond étoit bleu célefte
avec des ornemens d'argent , repréſentoit l'Air.
La principale figure étoit l'enlèvement d'Orithie
par Borée : on y voyoit des zéphirs & des amours
qui fe réjouiffoient de cette aventure.
La quatriéme repréfentoit le Feu & étoit peinte
de la couleur de cet élément. On remarquoit d'un
côté Vulcain & les Cyclopes occupés à leurs travaux
, & de l'autre , Vénus qui venoit demander
des armes pour Enée. Ces quatre Peotes étoient
celles des Députés chargés de faire les honneurs
de la réception du Duc d'Yorck .
La cinquième , fond argent , repréſentoit la
pêche de la baleine . Le bas de la proue avoit la
forme d'une baleine ayant la gueule ouverte.
Tous les pêcheurs étoient habillés à l'Angloife.
Le reste de la Peote étoit garni de filets remplis de
poillons & de corbeilles pleines de perles & de
coral.
OCTOBRE . 1764. 213
La fixiéme repréfentoit le Char d'Apollon ou
du Soleil , tiré par quatre chevaux de différentes
couleurs. On y voyoit l'Aurore affife dans une
coquille & tirée par Pégafe : elle avoit à la main
un flambeau , avec lequel elle fembloit chaſſer la
nuit.
La feptiéme repréſentoit la Grande - Bretagne
menée en triomphe par l'Europe : on y voyoit de
tous côtés plufieurs figures d'hommes & d'ani
maux , & des richeffes de toute espéce des quatre
parties du Monde , des ornemens d'or & d'ar
gent , & c.
La huitiéme repréfentoit le triomphe de Miner
ve , Déefle de la Sageffe : elle avoit les ornemens
de la Royauté ; à fes deux côtés étoient cinq trophées
enrichis d'or , d'argent & de plumes , faifant
alluſion aux Beaux - Arts.
La neuviéme repréſentoit Vénus affile ſur un
Char tiré par quatre colombes , accompagnée de
Cupidon & environnée des amours.
Ces Péotes furent fuivies d'onze Biffones * , de
fix Malgarotes & de deux Ballotines ornées d'étoffes
& de dentelles d'argent. Les Rameurs , qui
étoient très-élégamment habillés , changerent
trois ou quatre fois d'habits , tous plus riches les
uns que les autres.
Enfin l'on commença la courfe des différens
Bâtimens : il y avoit dix Bateaux & dix Gondoles
à une rame ; dix Bateaux & dix Gondoles à deux
rames , & dix autres Bateaux à deux rames
* Les Biſſones font des Bateaux affez longs , à huit rames
& huit Rameurs ; les Malgarotes en ont fix , & les Bellotines
, quatre . Il y a fur chacun de ces Bateaux des Nobles
préposés pour veiller à la police & écarter les Gondoles
qui viendroient à la traverfe & fermeroient le pallage
aux Régatans : ils ont même des arcs avec lefquels ils décochent
des balles de terre cuite , d'un pouce de diamètre
ou environ , contre ceux qui ne fe rangent pas allez promp
tement,
214 MERCURE DE FRANCE .
*
manoeuvrés par des femmes. Tous ces Bateaux ,
excepté les dix derniers , partirent , ſelon l'uſage ,
de la pointe de Saint- Antoine & parcoururent
route la longueur du grand Canal jufques vers
l'Eglife de la Croix , où étoit planté un poteau
qui fervoit de bornes & autour duquel les Régatans
tournerent une fois & revinrent fur leurs pas
jufqu'à l'endroit de la Machine, où les Vaiffeaux
prirent en y arrivant les drapeaux qui font les
marques de leur victoire . Cette courſe eft d'environ
quatre mille quatre cens pas de cinq pieds
Vénitiens chacun. Les femmes ne partent que de
la Douane , ce qui fait environ un tiers du chemin
de moins. La Machine eft un édifice d'une belle
Architecture , avec des colonnes , des balustrades ,
&c. Elle repréfentoit le Palais de la Joie & étoit ornée
de figures de grandeur naturelle: au milieu de
cet Edifice on diftinguoit deux figures principales
repréfentant Venife & l'Angleterre : la première
fembloit embraffer celle- ci & avoit pour infcription
, Fadus æternum . On voyoit à leur côté la
Juftice & la Prudence , & au deffous Apollon ;
Venus & Diane. Le haut de la Machine , où il y
avoit un grand nombre de Muficiens , étoit terminé
par des guirlandes & des vafes de fleurs . Toutes
les fenêtres du grand Canal étoient ornées
de tapis & garnies d'une prodigieufe quantité de
fpectateurs.
* LepiedVénitien eft un peu plus grand que le
nôtre.
Defcription de la Fête donnée à Venife au Duc
' Хокск .
Le Duc d'Yorck arriva ici le 26 du mois dernier
, & fut complimenté le lendemain par quatre
Députés qu'avoit nommés la République pour lai
faire tous les honneurs des à fon rang. Le 29 , ces
Prince alla vifiter l'Arfénal : les ouvriers de toutes
les différentes parties de ce grand Bâtiment exécuterent
en la préfence quelque ouvrage particu
lier de leur métier. Le 31 , jour de l'Afcenfion ,
la violence du vent obligea de renvoyer au Dimanche
fuivant , la cérémonie des époufailles de
la mer. Le même jour , les Députés donnerent
un grand repas au Duc d'Yorck dans l'Ile de
Muran. Le 3 de ce mois , la cérémonie des épou
failles de la mer fe fit avec la magnificence ordinaire
devant un concours prodigieux d'étrangers.
Le lendemain 4 , jour de la naiffance du Roi
d'Angleterre , les Députés donnerent à Son Alteffe
Royale le fpectacle de la courſe des Bateaux
nommée Régate ; c'eſt une fête qu'on réſerve ordinairement
pour de grandes occaſions : on n'en
avoit point donné depuis 1740 , où il y en eut une
en l'honneur du Prince Electoral de Saxe.
212 MERCURE DE FRANCE.
Vers les deux heures après - midi , la fête com →
mença par l'arrivée de neuf Peotes ou grands Bateaux
, qui s'avancerent au bruit des tymbales &
des trompettes. Ces Peotes étoient ornées d'emblêmes
& de figures allégoriques. La première
étoit toute argentée , & repréfentoit l'Elément de
l'Eau & le triomphe de Neptune. Ce Dieu étoit
fur la poupe fous un baldaquin de panaches noirs
& azurs mêlés d'algue ; il avoit fon Trident à la
main , & étoit environné de Tritons & autres Divinités
de la Mer.
La feconde , dorée & argentée , repréſentoit la
Terre , fous le fymbole de Cybèle vêtue magnifiquement
, couronnée de tours , & placée fous un
baldaquin de panaches rouges , noirs & azurs. La
proue formoit une colline d'or ornée d'arbriffeaux
chargés de fruits & garnie d'animaux. Les Rameurs
portoient des habits relatifs au ſujet , & voguoient
au fon des inftrumens.
La troifiéme , dont le fond étoit bleu célefte
avec des ornemens d'argent , repréſentoit l'Air.
La principale figure étoit l'enlèvement d'Orithie
par Borée : on y voyoit des zéphirs & des amours
qui fe réjouiffoient de cette aventure.
La quatriéme repréfentoit le Feu & étoit peinte
de la couleur de cet élément. On remarquoit d'un
côté Vulcain & les Cyclopes occupés à leurs travaux
, & de l'autre , Vénus qui venoit demander
des armes pour Enée. Ces quatre Peotes étoient
celles des Députés chargés de faire les honneurs
de la réception du Duc d'Yorck .
La cinquième , fond argent , repréſentoit la
pêche de la baleine . Le bas de la proue avoit la
forme d'une baleine ayant la gueule ouverte.
Tous les pêcheurs étoient habillés à l'Angloife.
Le reste de la Peote étoit garni de filets remplis de
poillons & de corbeilles pleines de perles & de
coral.
OCTOBRE . 1764. 213
La fixiéme repréfentoit le Char d'Apollon ou
du Soleil , tiré par quatre chevaux de différentes
couleurs. On y voyoit l'Aurore affife dans une
coquille & tirée par Pégafe : elle avoit à la main
un flambeau , avec lequel elle fembloit chaſſer la
nuit.
La feptiéme repréſentoit la Grande - Bretagne
menée en triomphe par l'Europe : on y voyoit de
tous côtés plufieurs figures d'hommes & d'ani
maux , & des richeffes de toute espéce des quatre
parties du Monde , des ornemens d'or & d'ar
gent , & c.
La huitiéme repréfentoit le triomphe de Miner
ve , Déefle de la Sageffe : elle avoit les ornemens
de la Royauté ; à fes deux côtés étoient cinq trophées
enrichis d'or , d'argent & de plumes , faifant
alluſion aux Beaux - Arts.
La neuviéme repréſentoit Vénus affile ſur un
Char tiré par quatre colombes , accompagnée de
Cupidon & environnée des amours.
Ces Péotes furent fuivies d'onze Biffones * , de
fix Malgarotes & de deux Ballotines ornées d'étoffes
& de dentelles d'argent. Les Rameurs , qui
étoient très-élégamment habillés , changerent
trois ou quatre fois d'habits , tous plus riches les
uns que les autres.
Enfin l'on commença la courfe des différens
Bâtimens : il y avoit dix Bateaux & dix Gondoles
à une rame ; dix Bateaux & dix Gondoles à deux
rames , & dix autres Bateaux à deux rames
* Les Biſſones font des Bateaux affez longs , à huit rames
& huit Rameurs ; les Malgarotes en ont fix , & les Bellotines
, quatre . Il y a fur chacun de ces Bateaux des Nobles
préposés pour veiller à la police & écarter les Gondoles
qui viendroient à la traverfe & fermeroient le pallage
aux Régatans : ils ont même des arcs avec lefquels ils décochent
des balles de terre cuite , d'un pouce de diamètre
ou environ , contre ceux qui ne fe rangent pas allez promp
tement,
214 MERCURE DE FRANCE .
*
manoeuvrés par des femmes. Tous ces Bateaux ,
excepté les dix derniers , partirent , ſelon l'uſage ,
de la pointe de Saint- Antoine & parcoururent
route la longueur du grand Canal jufques vers
l'Eglife de la Croix , où étoit planté un poteau
qui fervoit de bornes & autour duquel les Régatans
tournerent une fois & revinrent fur leurs pas
jufqu'à l'endroit de la Machine, où les Vaiffeaux
prirent en y arrivant les drapeaux qui font les
marques de leur victoire . Cette courſe eft d'environ
quatre mille quatre cens pas de cinq pieds
Vénitiens chacun. Les femmes ne partent que de
la Douane , ce qui fait environ un tiers du chemin
de moins. La Machine eft un édifice d'une belle
Architecture , avec des colonnes , des balustrades ,
&c. Elle repréfentoit le Palais de la Joie & étoit ornée
de figures de grandeur naturelle: au milieu de
cet Edifice on diftinguoit deux figures principales
repréfentant Venife & l'Angleterre : la première
fembloit embraffer celle- ci & avoit pour infcription
, Fadus æternum . On voyoit à leur côté la
Juftice & la Prudence , & au deffous Apollon ;
Venus & Diane. Le haut de la Machine , où il y
avoit un grand nombre de Muficiens , étoit terminé
par des guirlandes & des vafes de fleurs . Toutes
les fenêtres du grand Canal étoient ornées
de tapis & garnies d'une prodigieufe quantité de
fpectateurs.
* LepiedVénitien eft un peu plus grand que le
nôtre.
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Résumé : FESTES PUBLIQUES. Description de la Fête donnée à Venise au Duc d'YORCK.
Le texte relate les festivités organisées à Venise en l'honneur du Duc d'Yorck. Le Duc est arrivé le 26 du mois précédent et a été accueilli par des députés de la République. Le 29, il a visité l'Arsenal où les ouvriers ont présenté des démonstrations de leur métier. Le 31, en raison du mauvais temps, la cérémonie des épouvantails de la mer a été reportée au dimanche suivant. Ce même jour, les députés ont offert un grand repas au Duc sur l'île de Muran. Le 3, la cérémonie des épouvantails de la mer a eu lieu avec une grande magnificence et une affluence considérable d'étrangers. Le 4, à l'occasion de l'anniversaire du Roi d'Angleterre, les députés ont organisé une régate, une fête réservée aux grandes occasions et qui n'avait pas été donnée depuis 1740. Neuf grandes barques décorées d'emblèmes et de figures allégoriques ont participé à la course. Chaque barque représentait un élément naturel ou une divinité. La course a impliqué divers types de bateaux et de gondoles, manœuvrés par des hommes et des femmes. La course s'est déroulée sur une distance d'environ quatre mille quatre cents pas vénitiens, avec un point de retournement près de l'église de la Croix. La 'Machine', un édifice orné, représentait le Palais de la Joie et était décoré de figures allégoriques. Les fenêtres du grand Canal étaient ornées de tapis et remplies de spectateurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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17
p. 174-177
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Warsovie, le 8 Septembre 1764.
Début :
Voici quelques détails sur ce qui s'est passé à l'occasion [...]
Mots clefs :
Élection du roi, Nobles, Diète, Officiers, Divisions, Palatinat, Nonces, Magnificence, Procession, Comte, Cérémonie, Jardin
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Warsovie, le 8 Septembre 1764.
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Warfovie , le 8
Septembre 1764.
Voici quelques détails fur ce qui s'eft paffé à
l'occafion de l'Election du Roi.
Le 6 à huit heures du matin , les Nobles de
onze Palatinats , arrivés viritim pour la Diete
d'Election , défilerent par divifion pour le rendre
au Szoppa , ainfi que les Députés des autres Pala
NOVEMBRE . 1764 , 175
1
tinats ils étoient précédés de leur Chambellan
ou l'ancien des Nonces , ayant en main la Butawa
* , & monté fur un cheval harnaché à la
Turque , de même que les autres Officiers des
Palatinats , Territoires & Districts , qui portoient
l'Enfeigne de chacune des Divifions . Chaque Divifion
étoit fuivie d'un grand nombre de Seigneurs
attachés à fon parti. Les Palatins de Ruffie
, d'Inowroclaw & de Poldachie , le Grand Veneur
de la Couronne , le Prince Lubomirski ,
Général de l'Avant- Garde & plufieurs autres Seigneurs
précédoient à cheval leurs Palatinats
aflemblés viritim , ou les Nonces , du nombre
defquels ils étoient ; les Nonces du Palatinat de
Mazovie , du Territoire de Czerki & des autres
qui font compris dans ce Palatinat , étoient tous
au nombre de quatre-vingt , vêtus d'écarlate. Le
Primat qui , fuivant les Loix , auroit dû monter
à cheval pour recueillir les voix de chaque Palatinat
étoit , à cauſe de ſon âge avancé , dans une
efpéce de palanquin Chinois de la plus grande
magnificence , traîné par quatre chevaux dont les
harnois étoient de velours verd . A peine eut - il
adreflé la parole aux Nonces , qui étoient à un
bout du Champ d'Election , que ceux qui étoient
placés a l'autre bout crierent à haute voix : Nous
voulons le Grand Panetier de Lithuanie . Quatre
Palatinats , & entr'autres ceux de Podolie & de
Kiovie , furent lents à répondre. Le Palatin de
Kiovie , interrogé fur celui qu'il defiroit pour
Roi , répondit , celui que les autres veulent. Ce
n'eft pas affez, reprit le Primat , ilfaut le nommer
* Bâton femblable à celui que porte le Grand-
Général,
H iv
176 MERCURE DE FRANCE.
à haute voix. Le Palatin dit alors , le Grand Panetier
de Lithuanie. Le Palatin de Podolie & les
deux autres le déterminerent auffi à crier a haute
voix , le Grand Panetier de Lithuanie. Enfuite les
Sénateurs , les Miniftres & les Nonces des Palatinats
, Territoires & Diſtricts , ainſi que la Nobleffe
, rentrerent dans la Ville & dans leurs
Camps , où ils reſterent juſqu'au lendemain .
Hier , toute la Nobleffe fe rendit au Szoppa
vers les deux heures après - midi , dans le même
ordre que la veille, fi ce n'eſt que plufieurs des premers
Officiers de chaque Palatinat n'avoient pas
leurs cafques , & qu'un grand nombre de Chefs &
de Nonces arriverent en carroffe , ainfi que le
Prince Palatin de Ruffie. Celui - ci , en entrant dans
le Szoppa , falua d'abord le Primat , les Sénateurs
& les Nonces , leur recommanda le nouveau Roi
& adreffa la parole à plufieurs Gentilshommes
qu'il embraſſa enfuite. Une heure après & au
fecond coup de canon le Comte Poniatowski
fur proclamé. On députa auffi -tôt à la Ville le
jeune Comte Wielopolski , fils du Grand- Ecuyer
de la Couronne , pour annoncer au Comte Poniatowski
fon Election , & le féliciter de la pare
de la République. Le Grand Chambellan de la
Couronne fe rendit enfuite chez le nouveau Roi
pour lui faire fa cour,& il fut fuivi peu de temps
après de tous les Seigneurs. La Nobleffe voulut à
fon tour le ranger devant le Palais ; mais y ayant
été prévenue par les Nonces & par la Nobleffe du
Territoire de Warfovie qui avoit à fa tête le Nonce
Szydłowski , elle fut obligée de fe placer au
Fauxbourg de Cracovie. Alors le nouveau Roi fe
préfenta a une fenêtre , & l'on entendit crier de
toutes parts : Vivat Stanislaus - Auguſtus : il fälua
NOVEMBRE. 1764. 177
tes Nonces du Palatinat de Warfovie , & l'Egfeigne
de ce Palatinat lui fit les honneurs d'afage .
A quatre heures , le Primat arriva avec- les autres
Sénateurs & les Miniftres : il offrit fon carroffe
au nouveau Roi pour le conduire à la Collégiale ; -
mais Sa Majefté jugea à propos de s'y rendre à
cheval précédée par le Primat & par les Sénateurs
& Miniftres qui étoient dans leurs carroffes ,
& accompagnée par les autres qui étoient à che
val & vêtus d'écarlate , ainfi que le Roi . Le Comte
Wielopolski , Grand- Ecuyer , le Comte Potocki ,
Grand Général d'Artillerie de Lithuanie , le Prince
Adam Czatoriski , le Général Poniatowski , le
fieur Poniatowski , Grand Chambellan de la Cou
ronne , & plufieurs autres Nobles entouroient Sa
Majefté. Le concours du Peuple & le nombre des
carroffes étoient fi confidérables , que le Roi n'arriva
qu'après une heure de marche à la Collégiale
où l'on entonna le Te Deum , pendant lequel il fe
fit une décharge de cent coups de canon . Après
cette cérémonie , Sa Majesté fut conduite au Château
, où Elle foupa à une Table de fix couverts.
Aujourd'hui il y a grand gala , & les Seigneurs ,
ainfi que l'Ambaffadeur de Prufſe , ſe ſont rendus
de bonne heure au Château. Demain , le
Prince Repnin donnera un bal à Ujaldow:
On a joui d'une fûreté entière , tant dans la
Ville qu'au Champ d'Election , où les Dames mê
mes ont eu la liberté de fe promener.
Septembre 1764.
Voici quelques détails fur ce qui s'eft paffé à
l'occafion de l'Election du Roi.
Le 6 à huit heures du matin , les Nobles de
onze Palatinats , arrivés viritim pour la Diete
d'Election , défilerent par divifion pour le rendre
au Szoppa , ainfi que les Députés des autres Pala
NOVEMBRE . 1764 , 175
1
tinats ils étoient précédés de leur Chambellan
ou l'ancien des Nonces , ayant en main la Butawa
* , & monté fur un cheval harnaché à la
Turque , de même que les autres Officiers des
Palatinats , Territoires & Districts , qui portoient
l'Enfeigne de chacune des Divifions . Chaque Divifion
étoit fuivie d'un grand nombre de Seigneurs
attachés à fon parti. Les Palatins de Ruffie
, d'Inowroclaw & de Poldachie , le Grand Veneur
de la Couronne , le Prince Lubomirski ,
Général de l'Avant- Garde & plufieurs autres Seigneurs
précédoient à cheval leurs Palatinats
aflemblés viritim , ou les Nonces , du nombre
defquels ils étoient ; les Nonces du Palatinat de
Mazovie , du Territoire de Czerki & des autres
qui font compris dans ce Palatinat , étoient tous
au nombre de quatre-vingt , vêtus d'écarlate. Le
Primat qui , fuivant les Loix , auroit dû monter
à cheval pour recueillir les voix de chaque Palatinat
étoit , à cauſe de ſon âge avancé , dans une
efpéce de palanquin Chinois de la plus grande
magnificence , traîné par quatre chevaux dont les
harnois étoient de velours verd . A peine eut - il
adreflé la parole aux Nonces , qui étoient à un
bout du Champ d'Election , que ceux qui étoient
placés a l'autre bout crierent à haute voix : Nous
voulons le Grand Panetier de Lithuanie . Quatre
Palatinats , & entr'autres ceux de Podolie & de
Kiovie , furent lents à répondre. Le Palatin de
Kiovie , interrogé fur celui qu'il defiroit pour
Roi , répondit , celui que les autres veulent. Ce
n'eft pas affez, reprit le Primat , ilfaut le nommer
* Bâton femblable à celui que porte le Grand-
Général,
H iv
176 MERCURE DE FRANCE.
à haute voix. Le Palatin dit alors , le Grand Panetier
de Lithuanie. Le Palatin de Podolie & les
deux autres le déterminerent auffi à crier a haute
voix , le Grand Panetier de Lithuanie. Enfuite les
Sénateurs , les Miniftres & les Nonces des Palatinats
, Territoires & Diſtricts , ainſi que la Nobleffe
, rentrerent dans la Ville & dans leurs
Camps , où ils reſterent juſqu'au lendemain .
Hier , toute la Nobleffe fe rendit au Szoppa
vers les deux heures après - midi , dans le même
ordre que la veille, fi ce n'eſt que plufieurs des premers
Officiers de chaque Palatinat n'avoient pas
leurs cafques , & qu'un grand nombre de Chefs &
de Nonces arriverent en carroffe , ainfi que le
Prince Palatin de Ruffie. Celui - ci , en entrant dans
le Szoppa , falua d'abord le Primat , les Sénateurs
& les Nonces , leur recommanda le nouveau Roi
& adreffa la parole à plufieurs Gentilshommes
qu'il embraſſa enfuite. Une heure après & au
fecond coup de canon le Comte Poniatowski
fur proclamé. On députa auffi -tôt à la Ville le
jeune Comte Wielopolski , fils du Grand- Ecuyer
de la Couronne , pour annoncer au Comte Poniatowski
fon Election , & le féliciter de la pare
de la République. Le Grand Chambellan de la
Couronne fe rendit enfuite chez le nouveau Roi
pour lui faire fa cour,& il fut fuivi peu de temps
après de tous les Seigneurs. La Nobleffe voulut à
fon tour le ranger devant le Palais ; mais y ayant
été prévenue par les Nonces & par la Nobleffe du
Territoire de Warfovie qui avoit à fa tête le Nonce
Szydłowski , elle fut obligée de fe placer au
Fauxbourg de Cracovie. Alors le nouveau Roi fe
préfenta a une fenêtre , & l'on entendit crier de
toutes parts : Vivat Stanislaus - Auguſtus : il fälua
NOVEMBRE. 1764. 177
tes Nonces du Palatinat de Warfovie , & l'Egfeigne
de ce Palatinat lui fit les honneurs d'afage .
A quatre heures , le Primat arriva avec- les autres
Sénateurs & les Miniftres : il offrit fon carroffe
au nouveau Roi pour le conduire à la Collégiale ; -
mais Sa Majefté jugea à propos de s'y rendre à
cheval précédée par le Primat & par les Sénateurs
& Miniftres qui étoient dans leurs carroffes ,
& accompagnée par les autres qui étoient à che
val & vêtus d'écarlate , ainfi que le Roi . Le Comte
Wielopolski , Grand- Ecuyer , le Comte Potocki ,
Grand Général d'Artillerie de Lithuanie , le Prince
Adam Czatoriski , le Général Poniatowski , le
fieur Poniatowski , Grand Chambellan de la Cou
ronne , & plufieurs autres Nobles entouroient Sa
Majefté. Le concours du Peuple & le nombre des
carroffes étoient fi confidérables , que le Roi n'arriva
qu'après une heure de marche à la Collégiale
où l'on entonna le Te Deum , pendant lequel il fe
fit une décharge de cent coups de canon . Après
cette cérémonie , Sa Majesté fut conduite au Château
, où Elle foupa à une Table de fix couverts.
Aujourd'hui il y a grand gala , & les Seigneurs ,
ainfi que l'Ambaffadeur de Prufſe , ſe ſont rendus
de bonne heure au Château. Demain , le
Prince Repnin donnera un bal à Ujaldow:
On a joui d'une fûreté entière , tant dans la
Ville qu'au Champ d'Election , où les Dames mê
mes ont eu la liberté de fe promener.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Warsovie, le 8 Septembre 1764.
Le 6 septembre 1764, les nobles de onze palatinats se réunirent pour élire le roi. Ils défilèrent jusqu'au Szoppa, précédés de leur chambellan ou du plus ancien des nonces monté sur un cheval harnaché à la turque. Chaque division était suivie de nombreux seigneurs. Les palatins de Russie, d'Inowrocław et de Podlachie, ainsi que le Grand Veneur et le Prince Lubomirski, précédaient leurs palatinats. Les nonces du palatinat de Mazovie et du territoire de Czerki, au nombre de quatre-vingt, étaient vêtus d'écarlate. Le Primat, en raison de son âge avancé, était transporté dans un palanquin chinois traîné par quatre chevaux aux harnais de velours vert. Lors de l'élection, des voix proposèrent le Grand Panetier de Lituanie comme roi. Quatre palatinats, dont ceux de Podolie et de Kiev, furent lents à répondre. Le Primat insista pour que chaque palatinat nomme le roi à haute voix. Finalement, tous les palatinats proclamèrent le Grand Panetier de Lituanie comme roi. Les sénateurs, ministres et nonces rentrèrent ensuite dans la ville. Le lendemain, la noblesse se rendit de nouveau au Szoppa. Le Prince Palatin de Russie salua le Primat et les sénateurs, recommandant le nouveau roi. Une heure plus tard, le Comte Poniatowski fut proclamé roi. Le Comte Wielopolski fut envoyé pour annoncer l'élection au Comte Poniatowski. Le Grand Chambellan de la Couronne se rendit ensuite chez le nouveau roi pour lui faire sa cour, suivi de tous les seigneurs. Le nouveau roi, Stanislas-Auguste, se présenta à une fenêtre et fut acclamé par la foule. Il se rendit ensuite à la collégiale à cheval, accompagné par le Primat et les sénateurs. Un Te Deum fut chanté, suivi d'une salve de cent coups de canon. Après la cérémonie, le roi fut conduit au château où il dîna. Le jour suivant, un grand gala fut organisé au château, et un bal fut prévu par le Prince Repnin à Ujazdów. La sécurité fut assurée, permettant même aux dames de se promener librement.
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