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201
p. 1638-1651
Pelopée, Tragédie nouvelle[.] Extrait. [titre d'après la table]
Début :
Le 18 Juillet, les Comédiens François représenterent pour la premiere fois, la Tragedie de [...]
Mots clefs :
Pélopée, Comédie-Française, Thyeste, Atrée, Sostrate, Égisthe, Vers, Amour, Mort, Dieux, Fils, Eurymédon, Hymen, Père, Secours, Yeux, Vengeance, Secret, Coeur, Spectateurs, Billet
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texteReconnaissance textuelle : Pelopée, Tragédie nouvelle[.] Extrait. [titre d'après la table]
Le 18 Juillet , les Comédiens François représenterent
pour la premiere fois , la Tragedie de
Pélopée. Cette Piece , dont M. le Chevalier Pellegrin
est l'Autheur , fut reçue avec un applaudissement
général , et fit esperer un grand succès
malAJUILLET.
1733.
1733. 1539
malgré Pincommodité de la saison ; nous
Croions que nós Lecteurs en verront l'Extrait
avec plaisir.
Le sujet de ce Poëme se trouve dans Servius
dans Lactance , et dans Hygin . Ce dernier en raconte
les Evenemens de deux manieres. Il dit au
chap. 87. avec la plus part des Autheurs , que
Pinceste de Thyeste fut volontaire , attendu qu'uff
Oracle lui avoit prédit qu'un fils qui naîtroit dé
så fille et de lui , le vangeroit d'Atrée , son frete.
Mais dans le Chapitre suivant le même Hygia
met un correctif à une action si horrible , et dit
que Thyeste viola sa fille Pélopée sans la connoître.
L'Auteur a pris ce dernier parti , et y a
ajouté un nouveau correctif pour la décence da
Theatre.
Au premier Acte, Sostrate, Gouverneur d'Agyste
cherchant par tout ce Prince , qui trompant sa
vigilance , s'est échappé de la. Forêt où il a été
nourri par une Chévre , comme le porte L'étimologie
de son nom , arrive dans le Camp d'Atrée,
et s'entretient à la faveur de la nuit avec Arcas
son ancien ami ; il s'informe d'abord de la situation
de Thyeste , frere d'Atrée , son premier et
véritable Maître. Arcas lui apprend que Thyeste
secouru par Tyndare , Roy de Sparthe , avoit
remporté de grands et de nombreux avantages
snr . Atrée, mais qu'un jeune inconnu étant venu
offrir le secours de son bras à ce dernier , avoit
ramené la victoire sous ses étendarts ; il ajoute
que Thyeste réduit au désespoir et craignant
d'être trop long- temps à charge à son Protecteur
, venoit de défier ce jeune conquerant à un
combat singulier. Sostrate lui demande le nom
de cet inconnu ; il lui répond , qu'il s'appelle
Ægysth:. A et nom , Sostrate frémit d'horreur
a
Hiiij
il
1640 MERCURE DE FRANCE
il reconnoit que le fils va combatre le pere ; il no
s'explique point avec Arcas sur un secret qu'il a
juré de garder ; mais il lui dit , que s'il est aussi
fidele à Thyeste qu'il le lui a pare autrefois , il
faut qu'il lui porte un Billet, et lui parle ainsi
Tu ne peux pour Thyeste , être assez empressé,
Mais il faut qu'un billet par moi-même tracé ,
Me rende dans son coeur ma premiere innocence ,
Ab si ces lieux encor n'exigeoient ma présence ¿
Combienje t'envierois le soin de le porter!
Qu'avec joie à ses yeux j'irois me présenter !
ኑ
Il fait connoître par- là aux Spectateurs qu'il
veut parler à Ægysthe,s'il en peut trouver l'occasion.
L'arrivée d'Atrée fait retirer Sostrate et Arcas,
et la Scene finit par ce Vers que Sostrate dit:
Vien ;pressons ton départ ; Dieux, daignez le conduire.
1
Atrée fait la seconde exposition du Sujet , pour ,
préparer le Spectateur à un caractere aussi nois
que celui qu'il va voir sur la Scene ,
l'Auteur.
met ces Vers dans la bouche même de son Acteur
, dont l'origine remonte jusqu'à Jupiter.
De mon coeur irrité les transports furieux ,
Plus que mon Throne encor me rapprochent des
Dieux.
ILST
Qu'il est beau qu'un mortel puisse tout mettre en
poudre
Chaque fois qu'il se vange, il croit lancer lafoudre."
C'est peu d'être au dessus des Rois les plus puissans
Montrons à l'Univers de quel Dieu je descends ;
Son
JUILLET. 1733. 1641
Son Empire comprend et le Ciel et la Terre ;
Au gré de sa vangeance , il lance le tonnerre ,
Et moi j'aime àporter de si terribles coups ,
Que Jupiter lui-même en puisse être jaloux !
Atrée fait entendre à Eurimedon, son confident
que cette Pélopée qui passe pour sa fille , est fille
de Thyeste , par ces deux Vers :
Mais mafille au tombeaus m'ayant étéravie ,
La sienne en même temps prit sa place et son nom.
Eurimedon est frappé de ce qu'Atrée lui apprend,
attendu qu'il avoit consenti autrefois que Thyeste
l'épousa. Quoi ? lui dit - il , vous pouviez lui
faire un si funeste don ?
Atrée après avoir fair connoître comment la
fille de Thyeste qui passe pour sa propre fille
avoit été misee
entre ses mains , et par ce même
Eurimedon , à qui il parle actuellement , lui dit :
Apprends quel fruit heureux j'attendois de mon
crime.:
Il lui fait connoître que par cet Hymen il esperoit
détacher Tyndare du parti de Thyeste,attendu
que ce dernier ne lui avoit prêté som secours
pour le faire remonter au Thrône d'Argos
que son frere avoit usurpé sur lui , qu'à condition
qu'il y placeroit Clytemnestre sa fille , il fi
nit Pétalage de sa politique par ces Vers :
La vangeance toujours a de quoi satisfaire ;
Mais c'étoit peu pour moi , j'en voulois un salaire
Et dans l'artde regner c'est être vertueux,
Que n'entreprendre rien qui soit infructurux.
Hv
On
1642 MERCURE DE FRANCE
On expose encore dans cette Scene le défi dont '
on a parlé, dans lapremiere,et l'amour d'Ægysthe
pour Pelopée; amour dont Atrée veut se prévaloir
pour le mieux engager à donner la mort
à Thyeste.
Eurylas , Capitaine des gardes d'Atrée , vient
lui apporter un billet qu'on a intercepté , c'est le
même dont on a parlé dans la premiere Scen
en voici le contenu •
Choisissez mieux vos ennemis.
Vouspréservent les Dieux d'un combat si funeste
Fremissez, malheureux Thyeste ,
Egyssthe est votre Fils.
Sostrate.
M
67
Afrée triomphe par avance du parricide qu'
gysthe va commettre, il ordonne à Eurylas d'aller
faire venir ce Prince qui ne se connoit pas
core lui même. Il dit à Eurimedon de ne rien oublier
pour découvrir Sostrate et pour s'en as--
surer.
en
Ægysthe vient; il se refuse au combat où Atrée
l'invite,et fonde ce refus sur le respect qu'il garde
pour les Rois , et sur tout pour un sang aussi
précieux que celui qu'il veut lui faire répandre ;
Atrée le pressant toujours plus vivement, Egys
the dit :
Ciel ! contre ma vertu que d'ennemis ensemble !
Et les Dieux et les Rois contre moi tout s'assemble.
Les Dieux , si l'on m'afait unfile rapport,
Aux crimes les plus noirs ont enchaîné mon sort ,
J'ose pourtant lutter contre leur Loy suprême , &c.
Ægysthe
JUILLET. 1733 1643
•
gysthe dans cet endroit fait connoître quelle
a été son éducation ; mais il ne peut rien dire
de sa naissance qu'on lui a laissé ignorery Atrée
ne pouvant le porter à remplir sa vengeance
employe enfin le plus puissant motif qui est celui
de l'amour donr Egysthe brule pour Pélopée
voici par où il finit cette Scene :[/
"
Ilaudroit pour placer son coeur en si haut rang,
qui monter à la source où l'on puisa son sang, gibot
Dais faites de ma fille une juste conquête t
the our le prix de sa main , je ne veux qu'unt tête,
" Vous m'entendez , adieu , je vous laisse y penser
Et je n'attends qu'un mot pour vous récompenser.
.<
2
gysthe frémit du projet d'Atrée, il voudroit
sy refuser,, mais son amour pour Pelopée l'emporte
sur sa répugnance ; on expose dans cette
Scene comment ce Prince a vu Pelòpée pour la
premiere fois , on y parle des leçons qu'il a re
çues de Sostrate.dans les Forêts où il a été élevés
l'Amour lui fait tout oublier ; il finit l'Acte par
ces Vers :
25.00
Et je renoncerois au prix de ma victoire
Quand l'amour
gloire
mais que dis-je ? il y va de ma
On m'appelle au combat, sij'avois reculé,
Thyeste hautement diroit que j'ai tremble , I
Car enfin , au Combat c'est lui qui me défie ;
Qui peut me condamner quand il me justifie ?
N'en déliberons plus ; allons , cherchons le Roi ,
Et qu'au gré de sa haine il dispose de moi.
H vj Nous
164 MERCURE DE FRANCE
€
Nous avons été obligez de nous étendre dans
Set Acte , dont les deux tiers se passent en expo
Sitions nécessaires.
2
11 ct af 3 20
Pelopée ouvre la Scene du second Acte avec
Phoenice , sa Confidente ; elle
qu'elle a fait avertir ; elle fait
attend Ægystho
connotre l'inte
rêt qu'elle prend dans le péril qui menace Thyes
te ; elle déclare son hymen secret avec lui ; elle
parle d'un fils qu'elle cut de cet hymen , elle ra
conte un songe terrible qu'elle fit au sujet de ce
fils. Le voicist
A peine la lumiere
rauke hang of tw.I
03
De cefils malheureux vint frapper la paupiere
Que l'éclat de la foudre , au milieu des éclairs
D'un vaste embrasement menaça l'Univers.
Jour affreux jour suivi d'une nuit plus terri blet
De Spectres entassés un assemblage horrible ,
Dans un songe funeste effrayant mes regards:
Pret a fondre sur moi , vole de coutes parts.
Je vois une Furie et mon Ayeul Tantale
Qu'elle force à sortir de la nuit infernale ;
La barbare sur lui versant son noir poison
Lui fait un autre enfer de sa propre maison .
Cette ombre infortunée après soi traîne encore,
Et la faim et la soifdont l'ardeur la dévore :
Elle approche . Le fruit de mon malheureux flanc
La nourrit de carnage et l'abbreuve de sang ;
Phénice à cet aspect le sommeil m'abandonne,
5
Mais
JUILLET. 1733. 1645
Mais non la juste horreur , dont encor je fuissonne:
!
-Relopée apprend à Phoenice que ce songe terrible
l'obligea à consulter l'Oracle d'Apollon ;
que ce Dicu lui annonça que son Fils étoit
menacé d'inceste et de parricide ; elle ajoûte
qu'elle confia ce malheureux enfant à Sostrate ,
qui l'enleva à l'insçu de Thyeste son pere , avec
Ordre de ne le jamais instruire de son sort.
Dans la Scene suivante , Pelopée détourne Egysthe
du Combat qu'il va entreprendre contre
Thyeste. Elle lui parle d'une maniere si pathetique
, qu'il lui jure que sa main ne se trempera
jamais dans le sang de Thyeste ; elle finit la
Scene par ces Vers :
Ah ! Seigneur , croyez que Pelopée ;
Malgré le tendre am amour dont vous êtes épris ,
N'est pas de vos Vertus un assez digne prix .
Egysthe explique cès Vers en faveur de son
amour , &c. Il prie Atrée de le dispenser d'un
Combat qui fétriroit sa gloire Atrée impute
se changement de résolution à Pelopée ; il veut
lui même aller combattre Thyeste . Pélopée éperdue
prie Egysthe de détourner un Combat si
funeste Egysthe la jette dans de nouvelles al
larmes , en lui disant qu'il va chercher Thyeste
il fait pourtant connoître aux Spectateurs quel
est son dessein par ces Vers équivoques.
Je sçaurai dans cejour
Prendre soin de magloire et ser vir mon amour.
3 Pelopée
1646 MERCURE DE FRANCE
.
Pelopée au désespoir veut suivre Agysthe
Atrée la retient et lui reproche'sa désobéissance ;
Pelopée lui dit que Thyeste lui est plus cher qu'il
ne sçauroit croire. Elle se retire , Attée ordohne
à sa Garde de la suivre.
Ce que Pelopée vient de lui dire lui fait soupe
çonner qu'elle pourroit bien avoir épousé Thyes
te ; il ordonne à Eurimedon de ne rien oublier
pour trouver Sostrate , qui peut seul éclaircir ces
soupçons. 11 finit ce second Acte par ces Vers
37 C
D
Ne descends pas encor dans l'éternelle nuit
Thyeste , de ta mort je perdrois tout le fruit ;
Nefût-ce qu'un moment , jouis de la lumiere
Pour sçavoir quels forfaits terminent ta carriere ;
Pour la premiere fois je fais pour toi des voeux
Tremble , c'est pour te rendre encor plus malheu
* reux .
Thyeste prisonnier , commence le troisiéme
Acte par ces Vers :: ~
1
I
Fortune , contre moi des long-tems conjurée ,
Triomphe , me voici dans les prisons d'Atrée
Dieux cruels , dont le bras appesanti sur moi
Afait à votre honte un Esclave d'un Roieng
Dieux injustes , en vain ma chûre est votre ou
vrage ,
Vous n'avezpas encore abbaissé mon courage, &L.
Il instruit les Spectateurs de ce qui s'est passé
dans son Combat contre gysthe, qu'il croit ne
l'avoir épargné que pour réserver au barbare
Atrés le plaisir de lui donner la mort. Il expose
Ge
JUILLET. 1733 . 1647.
ce que les Dieux lui ont annoncé autrefois quand
il les a consultez sur le moyen de se vanger d'A-l
trée , voici l'Oracle :
Argos rentrera sous ta loy
Far un Fils qui naîtra de ta fille et de toi.
Il dit à Arbate que ce fût pour éviter cet abominable
inceste qu'il le chargea lui- même du
soin d'égorger sa Fille dans l'âge le plus tendre,
&c. Pelopée vient apprendre à Thyeste qu'Atrée
, qu'elle croit son Pere , est prês à faire la
paix avec lui , pourvû qu'il l'épouse ; elle lui dit ,
qu'il n'a qu'à lul déclarer son Hymen. Thyeste
lai deffend de reveler un secret , qui faisant voir
à Tyndare qu'il l'a trompé , le deshonoreroit à
ses yeux , et obligeroit ce Prince de l'abandon-,
ner à toute la fureur d'Atrée, qui n'a point d'autre
dessein que de le priver de tout secours ; il
parle de la mort de ce fils malheureux , que Sostrate
lui a enlevé , et il ne doute pas qu'Atrée në
l'ait fait égorger.
Ægysthe vient annoncer à Thyeste que tout
menace sa vie , et qu'Atrée plus furieux que ja
mais , viendra le chercher même dans sa Tente ;
il ajoute qu'il deffendra ses jours , ou qu'il
mourra avec lui. La Nature qui parle dans le
coeur du Pere et du Fils , excite entr'eux de tendres
transports , qui tiennent lieu de reconnoissance
anticipée. Atrée arrive , Egysthe prie
Thyeste de rentrer dans sa Tente , de peur que
sa vuë ne redouble encore la fureur d'un frere si
dénaturé.
Atrée demande à Egysthe d'où vient qu'il lui
cache si long - tems sa victime la première moisié
de ce Dialogue est fiere de part et d'autre ;
Egysthe
1648 MERCURE DE FRANCE
Egysthe a enfin recours à la priere, Atrée prend
le parti de la dissimulation ; ll feint de se rendre,
mais il dit auparavant à Ægysthe qu'il lui en
coûtera plus qu'il ne pense ; Egysthe lui répond
qu'il ne sçauroit trop payer le sacrifice qu'il
veut bien lut faire de son inimitié. Atrée lui dir
qu'il consent à la paix , à condition que Thyeste
réparera l'affront dont il l'a fait rougir trop
long-tems : qu'il vous épouse , dit- il à Pelopée ;::
Egysthe et Petopée sont également frappés de
cette proposition , quoique par differens motifs..
Atrée jouissant de leur trouble , dit à Ægyste ,
d'un ton presque insultant :
> J'entends vous gémissez du coup que je vous
porte ;
Mais l'union des coeurs plus que tout vous importe;
Vous demandez la Paix , je la donne à ce prix,
Prenez à votre tour un conseil que j'ai pris ;
Faites-vous violence ; on a bien moins de peine :
A vaincre son amour , qu'à surmonter sa haine.
Atrée porte enfin le dernier coup à Ægisthe
par cet hemistiche , en parlant de Thyeste :
Il aime , autant qu'il est aimé.
Egysthe devient furieux ; Arrée lui dit que ce
n'est que de ce jour qu'il a penetré un secret si
fatal et le quitte,en lu disant :
Si vous êtes trahi ; je n'en suis point complice ;
Et je laisse en vos mains la grace , ou le supplice.
Egysthe reproche à Pelopée son manque de
foy
JUILLET. 1732... 1649
foy ; elle lui dit qu'elle ne lui a rien promis ; elle
s'explique ainsi :
Quel serment ! quel reproche ! est - ce trahir ma foi ;
Que mettre vos veriùs à plus haut prix que moi ?
Ce dernier Vers se rapporte à
Acte ou Pelopée lui a dit :
ceux du second
Ah ! Seigneur , croyez que Pelopée ,
Malgré le tendre amour dont vous êtes épris ,
N'est pas de vos vertus un assez digne prix.
Elle ajoûte encore :
Votre amour est allé plus loin que ma pensée ,
Et j'étois dans l'erreur assez interessée ;
Pour ne la pas détruire , et pour m'en prévaloir.
La tromperie qu'elle lui a faite , et sur tout la
préférence qu'elle donne à son Rival , l'empêchent
d'écouter sa justification ; tout ce qu'elle
lui dit jette le désespoir dans son coeur ; son
aveugle fureur s'exhale en murmures contre les
Dieux , et lui met ces Vers dans la bouche ,
Vous serez satisfaits, Dieux , qui dès ma naissance
Avez tous conspiré contre mon innocence ;‹ "
J'adopte vos decrets et mes transportsjaloux ,
Pour les justifier iront plus loin que vous.
Il la quitte transporté de rage ; elle le suit , e
finit l'Acte par ces Vers :
Allons ; suivons ses pas ,
1650 MERCURE DE FRANCE
Et ne pouvant sauver un Epoux que j'adore ,
Offrons à ses Bourreaux une victime encore.
Atrée commence par ces Vers le quatriémo
Acte.
Enfin voici le jour où le crime et l'horreur ,
Vont regner en ces lieux au gré de ma fureur.
Ce n'est pas ton secours qu'ici ma haine implore ,
Soleil , si tu le veux , pális , recule encore ;
Cefunesie chemin par moi-même tracé, “
De répandre tes feux , t'a déja dispensé ;
Va , fui , pour exercer mes noires barbaries
J'ai besoin seulement du flambeau de Furies.
Ce qu'il dit dans la suite expose le plan de la
vengeance qu'il médite , il ne s'agit pas moins
que de faire périr tous ses Ennemis les uns par les
autres , il finit cette terrible Scene par ce regres
digne de sa foreur.
D
ev l'avouerai qué ma joye eût été plus entiere ,
Si Thieste , touchant à son heure derniere,
Par moi-même eût appris que pour trancher se
jours ,
De la main de sonfils j'empruntai le secours ;
Mais je crains qu'à leurs yeux ce grand secret n'éclatte
;
Un moment`auprès d'eux peut conduire Sostrate ;
Ce moment me perdroit ; il faut le prévenir ;
Craignons , pour trop vouloir , de ne rien obtenir :
Tyndare n'est pas loin et déja l'on murmure ;
JUILLET. 1733 1651
1733..
#
Laplus prompte vengeance enfin est la plus sûre ;
Oui de mes ennemis prêcipitons la mort .
Qu'importe, en expirant qu'ils ignorent leur sort
Bien- tôt dans le séjour des Ombres criminelles .
On va leur dévoiler des horreurs éternelles ;
Aussi-tôt quefermez , leurs yeux seront ouverts ;
Ils se reconnoîtront tous trois dans les Enfers.
Il a déja fait entendre à Eurimédon, qu'il retient
Pélopée dans sa Tente , de peur qu'elle n'attendrisse
gisthe ; et voyant approcher cet
Amant jaloux , il se détermine à continuer une
dissimulation qui vient de lui être si utile dans
P'Acte précedent ; il feint d'être désarmé par les
pleurs de Pélopée , et prie Agysthe de consentir..
à l'hymen de cette Princesse avec Thyeste, cette
priere rend Egysthe encore plus furieux . Atrée
Payant mis dans la disposition où il le souhaite,
lui dit enfin en le quittant ;
Plus que vous à vous servir fidelle ,
Je veux bien hazarder cette épreuve nouvelle ;
J'abandonne Thyeste à tout votre courroux ;
Mais prêt à lefrapper , répondez bien de vous ;
C'est à vous désormais que je le sacrifie ,
Et si votre tendresse encor le justifie ‚
J'explique cet Arrêt en faveur de ses feux ;
Je renonce à ma haine , et je lè rends heureux.
Ægysthe s'abandonne tout entier à sa jalouse
rage ; Antenor vient et lui demande s'il est vrai
qu'on va immoler Thyeste ; Agysthe le rassure
on
1652 MERCURE DE FRANCE
en apparence en lui ordonnant de lui faire rendre
ses armes . Antenor transporté de joye , lui
témoigne combien Sostrate , son sage Gouverneur
, sera charmé de voir cet heureux fruit
de ses leçons. Au nom de Sostrate , Ægysthe est
frappé. Quel nom , lui dit -il , prononces - tu ?
Antenor lui répond , qu'il croit l'avoir vû s'avançant
vers sa Tente ; mais qu'ayant apperçu des
Soldats , il s'est retiré de peur d'être reconnu.
On doit sçavoir gré à l'Auteur d'avoir rappellé
aux Spectateurs le souvenir de ce même Sostrate
qu'il n'a vu que dans la premiere Scene. Je vous
entends , grands Dieux , dit Egysthe dans un à
parte. Il ordonne à Antenor de ne point perdre
de temps pour remettre Thyeste en liberté, avant
que Sostrate se presente à ses yeux , & c. Egyste
se détermine à presser sa vengeance.
Thyeste vient , pénetré de reconnoissance pour
Egysthe; mais sajoye est de peu de durée . Egys
the lui apprend qu'il est devenu son mortel ennemi
, depuis qu'il a appris qu'il est son Rival ; il
lui dit que des que la nuit pourra cacher sa fuite,
il le fera conduire dans le Camp de Tyndare , et
qu'il s'y rendra lui - même pour lui redemanderce
sang qu'il a pú répandre : cette Scene est une
des plus touchantes de la Piece ; chaque mot ne
sert qu'à irriter Egysthe de plus en plus . Ils par
tent enfin , l'un pour donner la mort , l'autre pour
la recevoir , sans se deffendre , lorsque ce Sostrate
qui vient d'être annoncé avec tant d'art , les
arrête et leur apprend leur sort . Cette recon- ¿
noissance a tiré des larmes aux plus insensibles ;
Egysthe apprenant que Pelopée est sa mere
change son amour en tendresse filiale. Sostrate
lui apprend qu'Atrée lui donnera la mort s'il
met le pied dans sa Tente , et que ce cruel a sur-
?
pris
JUILLET. 1733. 1653
pris un Billet de sa main , qui l'a instruit de sa
naissance. Egyste furieux veut aller donner la
mort â ce barbare ; mais Thyeste retient cette
impétuosité. On finit ce bel Acte par la résolution
qu'on prend de répandre le bruit de la mort
de Thyeste , er de tromper Pelopée même par
ce bruit , afin que l'excès de sa douleur fasse
mieux passer la feinte pour une verite , cependant
Egysthe ordonne à Sostrate de partir pour
le Camp de Tyndare , avec les instructions né
cessaires.
Cet Extrait n'étant déja que trop long, nous ne
dirons qu'un mot du cinquiéme Acte ; Atrée le
commence , il doute de la mort de Thyeste ,
malgré le soin qu'on a pris d'en répandre le
bruit ; d'ailleurs le Pere vivant encore dans un
fils plus terrible , il n'a pas lieu d'être tranquille ,
il apprend à Eurimedon ce que Sostrate a dit
dans l'Acte précedent ; sçavoir , qu'il a donné ordre
de faire périr Ægysthe , s'il entre dans sa
Tente. Pelopée vient. Atrée pour commencer à
goûter les fruits de sa vengeance , lui annonce la
mort de Thyeste ; elle ne croit plus avoir de ménagement
à garder , elle apprend à Atrée que 3
Thyeste étoit son Epoux , ce qui le met au com,
ble de la joye ; il lui dit en la quittant :
Egysthe.... à ce seul nom, tremble ; dès aujourd'hui,
Par des noeuds éternels je veux t'unir à lui.
Pelopée au désespoir , se resout à souffrir plu
tôt mille morts , qu'à consentir à l'hymen qu'Atrée
vient de lui annoncer sous des termes dont'
les Spectateurs ont bien senti l'équivoque , &c.
Egysthe arrive ; il veut se retirer à la vue de sa
Mere ; elle l'arrête et lui donne les noms les plus
execrables ,
1651 MERCURE DE FRANCE
།
execrables ; il ne peut plus les soutenir ; il lui
apprend que Thyeste est sauvé, et que dans le
temps qu'il alloit le combattre , il a appris que
son Rival étoit son Pere. Cette derniere reconnoissance
n'a pas moins attendri que la premiere.
Sostrate annonce à Egysthe que le secours de
Tyndare est arrivé ; Ægysthe va se mettre à la
tête des Soldats et ordonne à Sostrate de garder
sa Mere ; on vient annoncer à Pelopée la mort
d'Atrée ; cet irréconciliable ennemi de Thyeste
vient expirer sur le Théatre, mais c'est pour por
ter le dernier coup ¿ son frere ; il lui apprend que
Pelopée est sa fille et en apporte pour preuve le
témoignage d'Eurimedon et d'Arbaste , qui se
trouvent présens sur la Scene ; pour confirma
tion de preuve , Thyeste lui dit :
Va , j'en croisplus encor les Oracles des Dieux.
pour la premiere fois , la Tragedie de
Pélopée. Cette Piece , dont M. le Chevalier Pellegrin
est l'Autheur , fut reçue avec un applaudissement
général , et fit esperer un grand succès
malAJUILLET.
1733.
1733. 1539
malgré Pincommodité de la saison ; nous
Croions que nós Lecteurs en verront l'Extrait
avec plaisir.
Le sujet de ce Poëme se trouve dans Servius
dans Lactance , et dans Hygin . Ce dernier en raconte
les Evenemens de deux manieres. Il dit au
chap. 87. avec la plus part des Autheurs , que
Pinceste de Thyeste fut volontaire , attendu qu'uff
Oracle lui avoit prédit qu'un fils qui naîtroit dé
så fille et de lui , le vangeroit d'Atrée , son frete.
Mais dans le Chapitre suivant le même Hygia
met un correctif à une action si horrible , et dit
que Thyeste viola sa fille Pélopée sans la connoître.
L'Auteur a pris ce dernier parti , et y a
ajouté un nouveau correctif pour la décence da
Theatre.
Au premier Acte, Sostrate, Gouverneur d'Agyste
cherchant par tout ce Prince , qui trompant sa
vigilance , s'est échappé de la. Forêt où il a été
nourri par une Chévre , comme le porte L'étimologie
de son nom , arrive dans le Camp d'Atrée,
et s'entretient à la faveur de la nuit avec Arcas
son ancien ami ; il s'informe d'abord de la situation
de Thyeste , frere d'Atrée , son premier et
véritable Maître. Arcas lui apprend que Thyeste
secouru par Tyndare , Roy de Sparthe , avoit
remporté de grands et de nombreux avantages
snr . Atrée, mais qu'un jeune inconnu étant venu
offrir le secours de son bras à ce dernier , avoit
ramené la victoire sous ses étendarts ; il ajoute
que Thyeste réduit au désespoir et craignant
d'être trop long- temps à charge à son Protecteur
, venoit de défier ce jeune conquerant à un
combat singulier. Sostrate lui demande le nom
de cet inconnu ; il lui répond , qu'il s'appelle
Ægysth:. A et nom , Sostrate frémit d'horreur
a
Hiiij
il
1640 MERCURE DE FRANCE
il reconnoit que le fils va combatre le pere ; il no
s'explique point avec Arcas sur un secret qu'il a
juré de garder ; mais il lui dit , que s'il est aussi
fidele à Thyeste qu'il le lui a pare autrefois , il
faut qu'il lui porte un Billet, et lui parle ainsi
Tu ne peux pour Thyeste , être assez empressé,
Mais il faut qu'un billet par moi-même tracé ,
Me rende dans son coeur ma premiere innocence ,
Ab si ces lieux encor n'exigeoient ma présence ¿
Combienje t'envierois le soin de le porter!
Qu'avec joie à ses yeux j'irois me présenter !
ኑ
Il fait connoître par- là aux Spectateurs qu'il
veut parler à Ægysthe,s'il en peut trouver l'occasion.
L'arrivée d'Atrée fait retirer Sostrate et Arcas,
et la Scene finit par ce Vers que Sostrate dit:
Vien ;pressons ton départ ; Dieux, daignez le conduire.
1
Atrée fait la seconde exposition du Sujet , pour ,
préparer le Spectateur à un caractere aussi nois
que celui qu'il va voir sur la Scene ,
l'Auteur.
met ces Vers dans la bouche même de son Acteur
, dont l'origine remonte jusqu'à Jupiter.
De mon coeur irrité les transports furieux ,
Plus que mon Throne encor me rapprochent des
Dieux.
ILST
Qu'il est beau qu'un mortel puisse tout mettre en
poudre
Chaque fois qu'il se vange, il croit lancer lafoudre."
C'est peu d'être au dessus des Rois les plus puissans
Montrons à l'Univers de quel Dieu je descends ;
Son
JUILLET. 1733. 1641
Son Empire comprend et le Ciel et la Terre ;
Au gré de sa vangeance , il lance le tonnerre ,
Et moi j'aime àporter de si terribles coups ,
Que Jupiter lui-même en puisse être jaloux !
Atrée fait entendre à Eurimedon, son confident
que cette Pélopée qui passe pour sa fille , est fille
de Thyeste , par ces deux Vers :
Mais mafille au tombeaus m'ayant étéravie ,
La sienne en même temps prit sa place et son nom.
Eurimedon est frappé de ce qu'Atrée lui apprend,
attendu qu'il avoit consenti autrefois que Thyeste
l'épousa. Quoi ? lui dit - il , vous pouviez lui
faire un si funeste don ?
Atrée après avoir fair connoître comment la
fille de Thyeste qui passe pour sa propre fille
avoit été misee
entre ses mains , et par ce même
Eurimedon , à qui il parle actuellement , lui dit :
Apprends quel fruit heureux j'attendois de mon
crime.:
Il lui fait connoître que par cet Hymen il esperoit
détacher Tyndare du parti de Thyeste,attendu
que ce dernier ne lui avoit prêté som secours
pour le faire remonter au Thrône d'Argos
que son frere avoit usurpé sur lui , qu'à condition
qu'il y placeroit Clytemnestre sa fille , il fi
nit Pétalage de sa politique par ces Vers :
La vangeance toujours a de quoi satisfaire ;
Mais c'étoit peu pour moi , j'en voulois un salaire
Et dans l'artde regner c'est être vertueux,
Que n'entreprendre rien qui soit infructurux.
Hv
On
1642 MERCURE DE FRANCE
On expose encore dans cette Scene le défi dont '
on a parlé, dans lapremiere,et l'amour d'Ægysthe
pour Pelopée; amour dont Atrée veut se prévaloir
pour le mieux engager à donner la mort
à Thyeste.
Eurylas , Capitaine des gardes d'Atrée , vient
lui apporter un billet qu'on a intercepté , c'est le
même dont on a parlé dans la premiere Scen
en voici le contenu •
Choisissez mieux vos ennemis.
Vouspréservent les Dieux d'un combat si funeste
Fremissez, malheureux Thyeste ,
Egyssthe est votre Fils.
Sostrate.
M
67
Afrée triomphe par avance du parricide qu'
gysthe va commettre, il ordonne à Eurylas d'aller
faire venir ce Prince qui ne se connoit pas
core lui même. Il dit à Eurimedon de ne rien oublier
pour découvrir Sostrate et pour s'en as--
surer.
en
Ægysthe vient; il se refuse au combat où Atrée
l'invite,et fonde ce refus sur le respect qu'il garde
pour les Rois , et sur tout pour un sang aussi
précieux que celui qu'il veut lui faire répandre ;
Atrée le pressant toujours plus vivement, Egys
the dit :
Ciel ! contre ma vertu que d'ennemis ensemble !
Et les Dieux et les Rois contre moi tout s'assemble.
Les Dieux , si l'on m'afait unfile rapport,
Aux crimes les plus noirs ont enchaîné mon sort ,
J'ose pourtant lutter contre leur Loy suprême , &c.
Ægysthe
JUILLET. 1733 1643
•
gysthe dans cet endroit fait connoître quelle
a été son éducation ; mais il ne peut rien dire
de sa naissance qu'on lui a laissé ignorery Atrée
ne pouvant le porter à remplir sa vengeance
employe enfin le plus puissant motif qui est celui
de l'amour donr Egysthe brule pour Pélopée
voici par où il finit cette Scene :[/
"
Ilaudroit pour placer son coeur en si haut rang,
qui monter à la source où l'on puisa son sang, gibot
Dais faites de ma fille une juste conquête t
the our le prix de sa main , je ne veux qu'unt tête,
" Vous m'entendez , adieu , je vous laisse y penser
Et je n'attends qu'un mot pour vous récompenser.
.<
2
gysthe frémit du projet d'Atrée, il voudroit
sy refuser,, mais son amour pour Pelopée l'emporte
sur sa répugnance ; on expose dans cette
Scene comment ce Prince a vu Pelòpée pour la
premiere fois , on y parle des leçons qu'il a re
çues de Sostrate.dans les Forêts où il a été élevés
l'Amour lui fait tout oublier ; il finit l'Acte par
ces Vers :
25.00
Et je renoncerois au prix de ma victoire
Quand l'amour
gloire
mais que dis-je ? il y va de ma
On m'appelle au combat, sij'avois reculé,
Thyeste hautement diroit que j'ai tremble , I
Car enfin , au Combat c'est lui qui me défie ;
Qui peut me condamner quand il me justifie ?
N'en déliberons plus ; allons , cherchons le Roi ,
Et qu'au gré de sa haine il dispose de moi.
H vj Nous
164 MERCURE DE FRANCE
€
Nous avons été obligez de nous étendre dans
Set Acte , dont les deux tiers se passent en expo
Sitions nécessaires.
2
11 ct af 3 20
Pelopée ouvre la Scene du second Acte avec
Phoenice , sa Confidente ; elle
qu'elle a fait avertir ; elle fait
attend Ægystho
connotre l'inte
rêt qu'elle prend dans le péril qui menace Thyes
te ; elle déclare son hymen secret avec lui ; elle
parle d'un fils qu'elle cut de cet hymen , elle ra
conte un songe terrible qu'elle fit au sujet de ce
fils. Le voicist
A peine la lumiere
rauke hang of tw.I
03
De cefils malheureux vint frapper la paupiere
Que l'éclat de la foudre , au milieu des éclairs
D'un vaste embrasement menaça l'Univers.
Jour affreux jour suivi d'une nuit plus terri blet
De Spectres entassés un assemblage horrible ,
Dans un songe funeste effrayant mes regards:
Pret a fondre sur moi , vole de coutes parts.
Je vois une Furie et mon Ayeul Tantale
Qu'elle force à sortir de la nuit infernale ;
La barbare sur lui versant son noir poison
Lui fait un autre enfer de sa propre maison .
Cette ombre infortunée après soi traîne encore,
Et la faim et la soifdont l'ardeur la dévore :
Elle approche . Le fruit de mon malheureux flanc
La nourrit de carnage et l'abbreuve de sang ;
Phénice à cet aspect le sommeil m'abandonne,
5
Mais
JUILLET. 1733. 1645
Mais non la juste horreur , dont encor je fuissonne:
!
-Relopée apprend à Phoenice que ce songe terrible
l'obligea à consulter l'Oracle d'Apollon ;
que ce Dicu lui annonça que son Fils étoit
menacé d'inceste et de parricide ; elle ajoûte
qu'elle confia ce malheureux enfant à Sostrate ,
qui l'enleva à l'insçu de Thyeste son pere , avec
Ordre de ne le jamais instruire de son sort.
Dans la Scene suivante , Pelopée détourne Egysthe
du Combat qu'il va entreprendre contre
Thyeste. Elle lui parle d'une maniere si pathetique
, qu'il lui jure que sa main ne se trempera
jamais dans le sang de Thyeste ; elle finit la
Scene par ces Vers :
Ah ! Seigneur , croyez que Pelopée ;
Malgré le tendre am amour dont vous êtes épris ,
N'est pas de vos Vertus un assez digne prix .
Egysthe explique cès Vers en faveur de son
amour , &c. Il prie Atrée de le dispenser d'un
Combat qui fétriroit sa gloire Atrée impute
se changement de résolution à Pelopée ; il veut
lui même aller combattre Thyeste . Pélopée éperdue
prie Egysthe de détourner un Combat si
funeste Egysthe la jette dans de nouvelles al
larmes , en lui disant qu'il va chercher Thyeste
il fait pourtant connoître aux Spectateurs quel
est son dessein par ces Vers équivoques.
Je sçaurai dans cejour
Prendre soin de magloire et ser vir mon amour.
3 Pelopée
1646 MERCURE DE FRANCE
.
Pelopée au désespoir veut suivre Agysthe
Atrée la retient et lui reproche'sa désobéissance ;
Pelopée lui dit que Thyeste lui est plus cher qu'il
ne sçauroit croire. Elle se retire , Attée ordohne
à sa Garde de la suivre.
Ce que Pelopée vient de lui dire lui fait soupe
çonner qu'elle pourroit bien avoir épousé Thyes
te ; il ordonne à Eurimedon de ne rien oublier
pour trouver Sostrate , qui peut seul éclaircir ces
soupçons. 11 finit ce second Acte par ces Vers
37 C
D
Ne descends pas encor dans l'éternelle nuit
Thyeste , de ta mort je perdrois tout le fruit ;
Nefût-ce qu'un moment , jouis de la lumiere
Pour sçavoir quels forfaits terminent ta carriere ;
Pour la premiere fois je fais pour toi des voeux
Tremble , c'est pour te rendre encor plus malheu
* reux .
Thyeste prisonnier , commence le troisiéme
Acte par ces Vers :: ~
1
I
Fortune , contre moi des long-tems conjurée ,
Triomphe , me voici dans les prisons d'Atrée
Dieux cruels , dont le bras appesanti sur moi
Afait à votre honte un Esclave d'un Roieng
Dieux injustes , en vain ma chûre est votre ou
vrage ,
Vous n'avezpas encore abbaissé mon courage, &L.
Il instruit les Spectateurs de ce qui s'est passé
dans son Combat contre gysthe, qu'il croit ne
l'avoir épargné que pour réserver au barbare
Atrés le plaisir de lui donner la mort. Il expose
Ge
JUILLET. 1733 . 1647.
ce que les Dieux lui ont annoncé autrefois quand
il les a consultez sur le moyen de se vanger d'A-l
trée , voici l'Oracle :
Argos rentrera sous ta loy
Far un Fils qui naîtra de ta fille et de toi.
Il dit à Arbate que ce fût pour éviter cet abominable
inceste qu'il le chargea lui- même du
soin d'égorger sa Fille dans l'âge le plus tendre,
&c. Pelopée vient apprendre à Thyeste qu'Atrée
, qu'elle croit son Pere , est prês à faire la
paix avec lui , pourvû qu'il l'épouse ; elle lui dit ,
qu'il n'a qu'à lul déclarer son Hymen. Thyeste
lai deffend de reveler un secret , qui faisant voir
à Tyndare qu'il l'a trompé , le deshonoreroit à
ses yeux , et obligeroit ce Prince de l'abandon-,
ner à toute la fureur d'Atrée, qui n'a point d'autre
dessein que de le priver de tout secours ; il
parle de la mort de ce fils malheureux , que Sostrate
lui a enlevé , et il ne doute pas qu'Atrée në
l'ait fait égorger.
Ægysthe vient annoncer à Thyeste que tout
menace sa vie , et qu'Atrée plus furieux que ja
mais , viendra le chercher même dans sa Tente ;
il ajoute qu'il deffendra ses jours , ou qu'il
mourra avec lui. La Nature qui parle dans le
coeur du Pere et du Fils , excite entr'eux de tendres
transports , qui tiennent lieu de reconnoissance
anticipée. Atrée arrive , Egysthe prie
Thyeste de rentrer dans sa Tente , de peur que
sa vuë ne redouble encore la fureur d'un frere si
dénaturé.
Atrée demande à Egysthe d'où vient qu'il lui
cache si long - tems sa victime la première moisié
de ce Dialogue est fiere de part et d'autre ;
Egysthe
1648 MERCURE DE FRANCE
Egysthe a enfin recours à la priere, Atrée prend
le parti de la dissimulation ; ll feint de se rendre,
mais il dit auparavant à Ægysthe qu'il lui en
coûtera plus qu'il ne pense ; Egysthe lui répond
qu'il ne sçauroit trop payer le sacrifice qu'il
veut bien lut faire de son inimitié. Atrée lui dir
qu'il consent à la paix , à condition que Thyeste
réparera l'affront dont il l'a fait rougir trop
long-tems : qu'il vous épouse , dit- il à Pelopée ;::
Egysthe et Petopée sont également frappés de
cette proposition , quoique par differens motifs..
Atrée jouissant de leur trouble , dit à Ægyste ,
d'un ton presque insultant :
> J'entends vous gémissez du coup que je vous
porte ;
Mais l'union des coeurs plus que tout vous importe;
Vous demandez la Paix , je la donne à ce prix,
Prenez à votre tour un conseil que j'ai pris ;
Faites-vous violence ; on a bien moins de peine :
A vaincre son amour , qu'à surmonter sa haine.
Atrée porte enfin le dernier coup à Ægisthe
par cet hemistiche , en parlant de Thyeste :
Il aime , autant qu'il est aimé.
Egysthe devient furieux ; Arrée lui dit que ce
n'est que de ce jour qu'il a penetré un secret si
fatal et le quitte,en lu disant :
Si vous êtes trahi ; je n'en suis point complice ;
Et je laisse en vos mains la grace , ou le supplice.
Egysthe reproche à Pelopée son manque de
foy
JUILLET. 1732... 1649
foy ; elle lui dit qu'elle ne lui a rien promis ; elle
s'explique ainsi :
Quel serment ! quel reproche ! est - ce trahir ma foi ;
Que mettre vos veriùs à plus haut prix que moi ?
Ce dernier Vers se rapporte à
Acte ou Pelopée lui a dit :
ceux du second
Ah ! Seigneur , croyez que Pelopée ,
Malgré le tendre amour dont vous êtes épris ,
N'est pas de vos vertus un assez digne prix.
Elle ajoûte encore :
Votre amour est allé plus loin que ma pensée ,
Et j'étois dans l'erreur assez interessée ;
Pour ne la pas détruire , et pour m'en prévaloir.
La tromperie qu'elle lui a faite , et sur tout la
préférence qu'elle donne à son Rival , l'empêchent
d'écouter sa justification ; tout ce qu'elle
lui dit jette le désespoir dans son coeur ; son
aveugle fureur s'exhale en murmures contre les
Dieux , et lui met ces Vers dans la bouche ,
Vous serez satisfaits, Dieux , qui dès ma naissance
Avez tous conspiré contre mon innocence ;‹ "
J'adopte vos decrets et mes transportsjaloux ,
Pour les justifier iront plus loin que vous.
Il la quitte transporté de rage ; elle le suit , e
finit l'Acte par ces Vers :
Allons ; suivons ses pas ,
1650 MERCURE DE FRANCE
Et ne pouvant sauver un Epoux que j'adore ,
Offrons à ses Bourreaux une victime encore.
Atrée commence par ces Vers le quatriémo
Acte.
Enfin voici le jour où le crime et l'horreur ,
Vont regner en ces lieux au gré de ma fureur.
Ce n'est pas ton secours qu'ici ma haine implore ,
Soleil , si tu le veux , pális , recule encore ;
Cefunesie chemin par moi-même tracé, “
De répandre tes feux , t'a déja dispensé ;
Va , fui , pour exercer mes noires barbaries
J'ai besoin seulement du flambeau de Furies.
Ce qu'il dit dans la suite expose le plan de la
vengeance qu'il médite , il ne s'agit pas moins
que de faire périr tous ses Ennemis les uns par les
autres , il finit cette terrible Scene par ce regres
digne de sa foreur.
D
ev l'avouerai qué ma joye eût été plus entiere ,
Si Thieste , touchant à son heure derniere,
Par moi-même eût appris que pour trancher se
jours ,
De la main de sonfils j'empruntai le secours ;
Mais je crains qu'à leurs yeux ce grand secret n'éclatte
;
Un moment`auprès d'eux peut conduire Sostrate ;
Ce moment me perdroit ; il faut le prévenir ;
Craignons , pour trop vouloir , de ne rien obtenir :
Tyndare n'est pas loin et déja l'on murmure ;
JUILLET. 1733 1651
1733..
#
Laplus prompte vengeance enfin est la plus sûre ;
Oui de mes ennemis prêcipitons la mort .
Qu'importe, en expirant qu'ils ignorent leur sort
Bien- tôt dans le séjour des Ombres criminelles .
On va leur dévoiler des horreurs éternelles ;
Aussi-tôt quefermez , leurs yeux seront ouverts ;
Ils se reconnoîtront tous trois dans les Enfers.
Il a déja fait entendre à Eurimédon, qu'il retient
Pélopée dans sa Tente , de peur qu'elle n'attendrisse
gisthe ; et voyant approcher cet
Amant jaloux , il se détermine à continuer une
dissimulation qui vient de lui être si utile dans
P'Acte précedent ; il feint d'être désarmé par les
pleurs de Pélopée , et prie Agysthe de consentir..
à l'hymen de cette Princesse avec Thyeste, cette
priere rend Egysthe encore plus furieux . Atrée
Payant mis dans la disposition où il le souhaite,
lui dit enfin en le quittant ;
Plus que vous à vous servir fidelle ,
Je veux bien hazarder cette épreuve nouvelle ;
J'abandonne Thyeste à tout votre courroux ;
Mais prêt à lefrapper , répondez bien de vous ;
C'est à vous désormais que je le sacrifie ,
Et si votre tendresse encor le justifie ‚
J'explique cet Arrêt en faveur de ses feux ;
Je renonce à ma haine , et je lè rends heureux.
Ægysthe s'abandonne tout entier à sa jalouse
rage ; Antenor vient et lui demande s'il est vrai
qu'on va immoler Thyeste ; Agysthe le rassure
on
1652 MERCURE DE FRANCE
en apparence en lui ordonnant de lui faire rendre
ses armes . Antenor transporté de joye , lui
témoigne combien Sostrate , son sage Gouverneur
, sera charmé de voir cet heureux fruit
de ses leçons. Au nom de Sostrate , Ægysthe est
frappé. Quel nom , lui dit -il , prononces - tu ?
Antenor lui répond , qu'il croit l'avoir vû s'avançant
vers sa Tente ; mais qu'ayant apperçu des
Soldats , il s'est retiré de peur d'être reconnu.
On doit sçavoir gré à l'Auteur d'avoir rappellé
aux Spectateurs le souvenir de ce même Sostrate
qu'il n'a vu que dans la premiere Scene. Je vous
entends , grands Dieux , dit Egysthe dans un à
parte. Il ordonne à Antenor de ne point perdre
de temps pour remettre Thyeste en liberté, avant
que Sostrate se presente à ses yeux , & c. Egyste
se détermine à presser sa vengeance.
Thyeste vient , pénetré de reconnoissance pour
Egysthe; mais sajoye est de peu de durée . Egys
the lui apprend qu'il est devenu son mortel ennemi
, depuis qu'il a appris qu'il est son Rival ; il
lui dit que des que la nuit pourra cacher sa fuite,
il le fera conduire dans le Camp de Tyndare , et
qu'il s'y rendra lui - même pour lui redemanderce
sang qu'il a pú répandre : cette Scene est une
des plus touchantes de la Piece ; chaque mot ne
sert qu'à irriter Egysthe de plus en plus . Ils par
tent enfin , l'un pour donner la mort , l'autre pour
la recevoir , sans se deffendre , lorsque ce Sostrate
qui vient d'être annoncé avec tant d'art , les
arrête et leur apprend leur sort . Cette recon- ¿
noissance a tiré des larmes aux plus insensibles ;
Egysthe apprenant que Pelopée est sa mere
change son amour en tendresse filiale. Sostrate
lui apprend qu'Atrée lui donnera la mort s'il
met le pied dans sa Tente , et que ce cruel a sur-
?
pris
JUILLET. 1733. 1653
pris un Billet de sa main , qui l'a instruit de sa
naissance. Egyste furieux veut aller donner la
mort â ce barbare ; mais Thyeste retient cette
impétuosité. On finit ce bel Acte par la résolution
qu'on prend de répandre le bruit de la mort
de Thyeste , er de tromper Pelopée même par
ce bruit , afin que l'excès de sa douleur fasse
mieux passer la feinte pour une verite , cependant
Egysthe ordonne à Sostrate de partir pour
le Camp de Tyndare , avec les instructions né
cessaires.
Cet Extrait n'étant déja que trop long, nous ne
dirons qu'un mot du cinquiéme Acte ; Atrée le
commence , il doute de la mort de Thyeste ,
malgré le soin qu'on a pris d'en répandre le
bruit ; d'ailleurs le Pere vivant encore dans un
fils plus terrible , il n'a pas lieu d'être tranquille ,
il apprend à Eurimedon ce que Sostrate a dit
dans l'Acte précedent ; sçavoir , qu'il a donné ordre
de faire périr Ægysthe , s'il entre dans sa
Tente. Pelopée vient. Atrée pour commencer à
goûter les fruits de sa vengeance , lui annonce la
mort de Thyeste ; elle ne croit plus avoir de ménagement
à garder , elle apprend à Atrée que 3
Thyeste étoit son Epoux , ce qui le met au com,
ble de la joye ; il lui dit en la quittant :
Egysthe.... à ce seul nom, tremble ; dès aujourd'hui,
Par des noeuds éternels je veux t'unir à lui.
Pelopée au désespoir , se resout à souffrir plu
tôt mille morts , qu'à consentir à l'hymen qu'Atrée
vient de lui annoncer sous des termes dont'
les Spectateurs ont bien senti l'équivoque , &c.
Egysthe arrive ; il veut se retirer à la vue de sa
Mere ; elle l'arrête et lui donne les noms les plus
execrables ,
1651 MERCURE DE FRANCE
།
execrables ; il ne peut plus les soutenir ; il lui
apprend que Thyeste est sauvé, et que dans le
temps qu'il alloit le combattre , il a appris que
son Rival étoit son Pere. Cette derniere reconnoissance
n'a pas moins attendri que la premiere.
Sostrate annonce à Egysthe que le secours de
Tyndare est arrivé ; Ægysthe va se mettre à la
tête des Soldats et ordonne à Sostrate de garder
sa Mere ; on vient annoncer à Pelopée la mort
d'Atrée ; cet irréconciliable ennemi de Thyeste
vient expirer sur le Théatre, mais c'est pour por
ter le dernier coup ¿ son frere ; il lui apprend que
Pelopée est sa fille et en apporte pour preuve le
témoignage d'Eurimedon et d'Arbaste , qui se
trouvent présens sur la Scene ; pour confirma
tion de preuve , Thyeste lui dit :
Va , j'en croisplus encor les Oracles des Dieux.
Fermer
Résumé : Pelopée, Tragédie nouvelle[.] Extrait. [titre d'après la table]
Le 18 juillet 1733, les Comédiens Français présentèrent pour la première fois la tragédie 'Pélopée', écrite par le Chevalier Pellegrin. La pièce, tirée des récits de Servius, Lactance et Hygin, fut accueillie avec enthousiasme. Hygin relate deux versions des événements : dans la première, Pinceste commet l'inceste volontairement après une prédiction oraculaire ; dans la seconde, Thyeste viole sa fille Pélopée sans la reconnaître. La pièce adopte cette dernière version et y ajoute des correctifs pour la décence théâtrale. Au premier acte, Sostrate, gouverneur d'Agyste, recherche le prince Ægysthe, échappé de la forêt où il a été élevé par une chèvre. Il rencontre Arcas, qui lui apprend que Thyeste, frère d'Atrée, a remporté des victoires grâce à Tyndare, roi de Sparte. Cependant, un jeune inconnu, Ægysthe, a récemment ramené la victoire à Atrée. Thyeste, désespéré, a défié ce jeune homme à un combat singulier. Sostrate reconnaît en Ægysthe son fils et cherche à l'avertir sans révéler son secret. Atrée révèle à Eurimedon que Pélopée, qu'il considère comme sa fille, est en réalité la fille de Thyeste. Il espère que le mariage de Pélopée avec Ægysthe détournera Tyndare du parti de Thyeste. Dans le second acte, Pélopée, accompagnée de Phoenice, sa confidente, attend Ægysthe. Elle révèle son mariage secret avec Thyeste et un songe prémonitoire où elle voit son fils menacé d'inceste et de parricide. Elle confie cet enfant à Sostrate, qui l'élève sans lui révéler son origine. Pélopée convainc Ægysthe de ne pas combattre Thyeste, mais Atrée, soupçonnant la vérité, ordonne à sa garde de la suivre. Au troisième acte, Thyeste, prisonnier, apprend qu'Atrée veut le tuer. Il révèle à Arbate qu'il a ordonné l'exécution de sa fille pour éviter l'inceste prédit par l'oracle. Pélopée informe Thyeste qu'Atrée propose la paix en échange de son mariage. Thyeste refuse, craignant de déshonorer Tyndare. Ægysthe, venu annoncer les menaces contre Thyeste, promet de le défendre. Atrée arrive et exige des explications d'Ægysthe, qui finit par le supplier. Dans le quatrième acte, Atrée expose son plan de vengeance, visant à faire périr ses ennemis les uns par les autres. Il feint de consentir à l'union de Pélopée et Thyeste pour manipuler Ægysthe. Ægysthe, après avoir appris que Sostrate retient Pélopée, libère Thyeste et lui révèle qu'il est son rival. Sostrate intervient alors pour révéler la vérité : Pélopée est la mère d'Ægysthe, et Atrée prévoit de tuer Ægysthe. Dans le cinquième acte, Atrée annonce à Pélopée la mort de Thyeste, mais elle révèle ensuite à Atrée que Thyeste était son époux. Ægysthe apprend alors que Thyeste est son père et que Pélopée est sa mère. Sostrate informe Ægysthe de l'arrivée des renforts de Tyndare. Finalement, Atrée, mourant, révèle à Thyeste que Pélopée est sa fille, confirmant ainsi les prédictions divines.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
202
p. 1852-1853
JONATHAS, MACHABÉE, Tragédie, représentée au College de LOUIS LE GRAND, pour la Distribution des Prix, fondez par S. M. le Mercredi, 5. Août.
Début :
SUJET. Triphon, General des Troupes de Syrie, voulant déthrôner Démétrius son Roy, et [...]
Mots clefs :
Jonathas, Général des troupes de Syrie, Collège Louis le Grand, Macchabée, Prix
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : JONATHAS, MACHABÉE, Tragédie, représentée au College de LOUIS LE GRAND, pour la Distribution des Prix, fondez par S. M. le Mercredi, 5. Août.
ONATHAS , MACHABE'E , Tragédie ,
représentée au College de LOUIS LE
GRAND , pour la Distribution des Prix , fondez
par S. M. le Mercredi , s . Août.
SUJET. Triphon , General des Troupes de
Syrie , voulant détrôner Démétrius son Roy , et
mettre en sa place le jeune Antiochus , dont il prétendoit
envahir la Couronne , craignit d'être traversé
dans cette double entreprise par Jonathas
Prince d'Israël , frere et successeur du brave Judas
Machabée. Pour se défaire d'un ennemi siformidable
, il résolut de l'attaquer avec une nombreuse
Armée qu'il fit avancer vers Jérusalem . Mais
comme il vit le General des Israëlites disposé à le
recevoir
ONATHAS , MACHABE'E , Tragédie ,
représentée au College de LOUIS LE
GRAND , pour la Distribution des Prix , fondez
par S. M. le Mercredi , s . Août.
SUJET. Triphon , General des Troupes de
Syrie , voulant détrôner Démétrius son Roy , et
mettre en sa place le jeune Antiochus , dont il prétendoit
envahir la Couronne , craignit d'être traversé
dans cette double entreprise par Jonathas
Prince d'Israël , frere et successeur du brave Judas
Machabée. Pour se défaire d'un ennemi siformidable
, il résolut de l'attaquer avec une nombreuse
Armée qu'il fit avancer vers Jérusalem . Mais
comme il vit le General des Israëlites disposé à le
recevoir
1:
MIUNDU
C
THE NEW YORK
PUBLIC LIBRARY.
ASTOR, LENOX AND
TILDEN FOUNDATIONS.
よ
HORK
PUBLIC
LIBRARY
.
ASTOR
, LENOX
AND
TILDEN
FOUNDATIONS
.
FUU
AOUST. 1732 . 18 <3
recevoir avec des Troupes aguerries , il feignit de
wouloir la paix , engagea Jonathas , par de belles
promesses, à congédier ses Troupes , et l'attira dans
la Ville de Ptolemaide , où il fit égorger presque
toute l'escorte qu'il s'étoit réservée , le fit Prisonnier
lui-même , demanda cent talens pour sa rançon ,
et ses deux enfans pour otages . Simon , frere de
Jonathas , découvrit l'artifice ; il ne laissa pas
d'envoyer au perfide Tryphon la somme d'argent
avec ses neveux , pour ne pas s'attirer la haine
du Peuple d'Israël , qui ne manqueroit pas d'interpréter
malignement son refus , et de dire hautement
qu'il laissoit languir son frere dans les fers ,
afin de commander en sa place . Tryphon retint
L'argent avec les Captifs ; et sachant que Simon.
venoit avec une Armée pour les délivrer, ilfit inhumainement_
massacrer Jonathas et ses enfans , et
défiler ses Troupes vers la Syrie.
Cette Piéce fût précédée d'un Prologue , et terminée
par un Eloge du Roy.
représentée au College de LOUIS LE
GRAND , pour la Distribution des Prix , fondez
par S. M. le Mercredi , s . Août.
SUJET. Triphon , General des Troupes de
Syrie , voulant détrôner Démétrius son Roy , et
mettre en sa place le jeune Antiochus , dont il prétendoit
envahir la Couronne , craignit d'être traversé
dans cette double entreprise par Jonathas
Prince d'Israël , frere et successeur du brave Judas
Machabée. Pour se défaire d'un ennemi siformidable
, il résolut de l'attaquer avec une nombreuse
Armée qu'il fit avancer vers Jérusalem . Mais
comme il vit le General des Israëlites disposé à le
recevoir
ONATHAS , MACHABE'E , Tragédie ,
représentée au College de LOUIS LE
GRAND , pour la Distribution des Prix , fondez
par S. M. le Mercredi , s . Août.
SUJET. Triphon , General des Troupes de
Syrie , voulant détrôner Démétrius son Roy , et
mettre en sa place le jeune Antiochus , dont il prétendoit
envahir la Couronne , craignit d'être traversé
dans cette double entreprise par Jonathas
Prince d'Israël , frere et successeur du brave Judas
Machabée. Pour se défaire d'un ennemi siformidable
, il résolut de l'attaquer avec une nombreuse
Armée qu'il fit avancer vers Jérusalem . Mais
comme il vit le General des Israëlites disposé à le
recevoir
1:
MIUNDU
C
THE NEW YORK
PUBLIC LIBRARY.
ASTOR, LENOX AND
TILDEN FOUNDATIONS.
よ
HORK
PUBLIC
LIBRARY
.
ASTOR
, LENOX
AND
TILDEN
FOUNDATIONS
.
FUU
AOUST. 1732 . 18 <3
recevoir avec des Troupes aguerries , il feignit de
wouloir la paix , engagea Jonathas , par de belles
promesses, à congédier ses Troupes , et l'attira dans
la Ville de Ptolemaide , où il fit égorger presque
toute l'escorte qu'il s'étoit réservée , le fit Prisonnier
lui-même , demanda cent talens pour sa rançon ,
et ses deux enfans pour otages . Simon , frere de
Jonathas , découvrit l'artifice ; il ne laissa pas
d'envoyer au perfide Tryphon la somme d'argent
avec ses neveux , pour ne pas s'attirer la haine
du Peuple d'Israël , qui ne manqueroit pas d'interpréter
malignement son refus , et de dire hautement
qu'il laissoit languir son frere dans les fers ,
afin de commander en sa place . Tryphon retint
L'argent avec les Captifs ; et sachant que Simon.
venoit avec une Armée pour les délivrer, ilfit inhumainement_
massacrer Jonathas et ses enfans , et
défiler ses Troupes vers la Syrie.
Cette Piéce fût précédée d'un Prologue , et terminée
par un Eloge du Roy.
Fermer
Résumé : JONATHAS, MACHABÉE, Tragédie, représentée au College de LOUIS LE GRAND, pour la Distribution des Prix, fondez par S. M. le Mercredi, 5. Août.
La tragédie 'Onathas, Machabée' a été représentée au Collège de Louis le Grand le 1er août pour la distribution des prix. L'intrigue suit Triphon, général des troupes de Syrie, qui cherche à détrôner Démétrius pour placer Antiochus sur le trône. Craignant l'opposition de Jonathas, prince d'Israël et frère de Judas Machabée, Triphon attaque Jonathas avec une armée nombreuse. Voyant Jonathas prêt à le recevoir avec des troupes aguerries, Triphon feint de vouloir la paix et convainc Jonathas de congédier ses troupes. Il l'attire à Ptolemaide, où il massacre son escorte et capture Jonathas. Triphon demande ensuite une rançon de cent talents et les deux enfants de Jonathas en otages. Simon, frère de Jonathas, envoie l'argent et les neveux pour éviter la colère du peuple. Cependant, Triphon retient l'argent et les captifs, et massacre Jonathas et ses enfants lorsqu'il apprend que Simon arrive avec une armée pour les délivrer. La pièce est précédée d'un prologue et se termine par un éloge du roi.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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203
p. 1853-1860
L'ENVIE, Balet dansé à la Tragédie de Jonathas, Machabée.
Début :
DESSEIN ET DIVISION. On sçait que ce qui détermina en partie le brave Simon Machabée, [...]
Mots clefs :
Envie, Envieux, Ballet, Vertus, Troupe, Enfants, Jalousie, Gloire
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texteReconnaissance textuelle : L'ENVIE, Balet dansé à la Tragédie de Jonathas, Machabée.
ENVIE , Balet dansé à la Tragédie
de Jonathas , Machabée .
DESSEIN ET DIVISION. On sçait que
e qui détermina en partie le brave Simon Machabée
, à livrer la rançon et les Enfans de son
frere Jonathas , au perfide Triphon , General des
Troupes Syriennes , fut la crainte d'aigrir la haine
et l'envie du Peuple d'Israël , qui commençoit à
murmurer contre la lenteur de ses démarches en
faveur d'un Captif , dont il occupoit la place dans
Le Gouvernement . Ces plaintes ameres d'une Troupe
d'envieux , ont fait naître l'idée du Balet da
Envie , qui paroît avoir une liaison assez naturelle
avec la Piece Tragique , où l'on représente la
mort
1854 MERCURE DE FRANCE
mort de Jonathas et de ses enfans . Pour executer
ce dessein , on envisage l'Envie sous quatre rapports
essentiels qui fournissent les quatre parties de ce
Balet. La découvre les principales sources d'où
naît l'Envie. La 2 ° peint les noirs complots qu'el
le trame. La 3 fait voir le cruel supplice qu'elle
endure. La 4º montre les solides avantages qu'en
sire la Sagesse.
Le Theatre représente le délicieux Valon de
Tempé , où la Félicité et la Jalousie , assises sur
des Trônes , versent leurs dons à pleines mains
sur la Jeunesse de Thessalie , qui fait une Fête
où elle se réjouit de sa prosperité . Dans le lointain
de cet aimable séjour , paroît l'affreuse Caverne
de l'Envie , qui , se nourrissant de fiel
d'Aspic et de chair de Vipere , s'afflige de ne rien
voir d'affligeant et fond en larmes , parce qu'elle
' apperçoit aucun sujet de peurs. Elle détache
une Brigade de ses Sujets , qui viennent troubler
la Fête et le bonheur de ceux qui la celebrent.
Comme elle ne rit jamais que de ce qui fait pleuzer
les autres , elle s'applaudit d'avoir dissipé la
Troupe joyeuse , et prétend fixer son Empire
dans cette Contrée , qu'elle regarde comme un
Pays de conquête.
Ón voit dans la premeere Entrée les principales
sources d'où naît l'Envie . Petitesse de génie ,
basse rivalité , naturel mal -faisant.
Zole , miserable Sophiste , esprit mince et
borné , entreprend , avec le secours de certains
petits Crecs , de culbuter de la cime du double
Mont , le fameux Homere , dont il envie la
gloire. Il engage inême quelques Bouffons de
son parti à représenter cet ingenieux Aveugle
comme un simple Vielleur et comme une Muse
sampagnarde, dont ses Consorts se font unjouer.
Mais
A OUST. 17338 1855
Mais Minerve , Déesse du bon goût , châtie ces
insoleus ; et les Guerriers de laade vangent
Poutrage fait au Chan re de leurs exploits , &c.
Il n'est peut-être point de condition au monde
plus sujette à la jalousie de métier , que celle
des Auteurs Dia.matiques . Cette jalousie dégenere
quelquefois en basse riva ité , dont on ne
trace ici qu'un Portrait énigmatique dans la ridicule
avanture qu'un Ecrivain burlesque raconte
d'une Troupe de Comédiens nouvellement débarquez
dans une Vile de Province. Ils y sifflent
un Rival de Théatre ', et font une Parodie badine
d'une Piece sérieuse , où l'on représente le
festin de Théodoric , qui voit sortir de la tête.
d'un Foisson celle de Symmaque, égorgé par
son ordre.
>
Médee ne pouvant souffrir la douce union qui
regne dans la famille du vieux Roi Pélias , imagine
un stratagême funeste pour faire périr ce
respectable Vieillard . Elle se fait apporter par
ses Enchanteurs des herbes de Thessalie , qu'elle
met dans une chaudi re bouillante où elle
plonge son beau pere Ason , qu'elle rajeunit en
présence des enfans de Pélias. Elle leur persuade
par la vue de ce prodige de faire la même opération
à leur Pere , et même de lui trer tout le
sang des veines , pour le remplacer par de nouveau
sang. Le charm disparoît , il ne reste que
le corps ensanglanté du bon Prince , sacrifié au
naturel mal faisant de l'envieuse Megere.
1
SECONDE PARTIE. Les noirs complots que trame
Enve contre la Fortune contre la réputation
et quel ruefois même contre la vie de ceux dont le
bonheur ou les talens la chagrinent,
BELISAIRE , Vainqueur d'un grand nombre
de Nations , fait son Entrée triomphante dans
H Rome
1846 MERCURE DE FRANCE
Rome sur un Char traîné par des Lions d'Afri
que , où il a dompté les Vandales pour la seconde
fois. Il est placé au faîte de la roue de Fortune
, il y reçoit les hommages des Guerriers et
des Courtisans. Ce comble de grandeur anime
contre lui une foule d'envieux . Ils l'attaquent ,
le précipitent , lui Crévent les yeux , et l'enchaî
nent derriere le Char avec une partie de ses Suivans
, dont la plupart l'abandonnent dans sa dişgrace
, pour s'attacher à la fortune de ses Rivaux.
10:07
+
"
La Renommée publie , la trompette à la main ,
les louanges de la Probité , dont elle couronne
les vertus . La Calomnie , jalouse de ces éloges
suscite contre sa vertueuse Rivale une Troupe de
Furies qui l'enveloppent , lá saisissent et se préparent
à l'entraîner dans l'abîme déja ouvert sous
ses pieds. Mais du sein même de ce gouffre profond
sort la Verité , dont la brillante lumiere
jette la consternation parmi les Eumenides . Elles
sont mises en déroute par les Partisans de la
Déesse , qui fait ériger un Trophée à la gloire
de la Probité.
Des voisins envieux viennent accuser de malé
fice le pieux et laborieux Furius , dont le Vigno
ble étoit de bon rapport dans les années mêmes
ou ceux des autres ne portoient rien. Les Accusateurs
produisent des Baguettes magiques et
des Tambours prétendus enchantez , dont ils
soutiennent que l'Accusé se sert pour arracher
la Lune du Ciel , et pour évoquer des Monstres
odieux , qui répandent la grêle et la gelée sur les
Champs d'autrui . Pendant qu'on fait jouer cette
Machine frauduleuse , Furius , suivi de ses Enfans
, n'apporte pour sa deffense que les Outils
de son travail , qu'il expose aux yeux des Juges,
ср
AOUST. 1733.- 1857
en leur montrant le cal et le durillon de ses
mains , qu'il leve au Ciel. Il leur fait entendre
que c'est là toute sa Magie. Il est absous , et ses
Accusateurs sont confondus par l'équité des sages
Magistrats .
Le cruel supplice que souffre l'Envie , esr le
Sujet de la troisiéme Partie . 1 ° . L'hommage qu'elle
est forcée de rendre au vrai mérite 2 ° . L'aveu secret
qu'elle est contrainte de faire de sa propre inferiorité.
3. Le vif sentiment de son mal qu'elle
devore sans en oser dire le principe , de sorte qu'elle
est elle-même son plus grand supplice.
Les mêmes Seigneurs , qu'un dépit jaloux avoit
portés à bannir de Rome le grand Camille , s'en
voyant chassés par les Gaulois qui assicgent le
Capitole , sont forcez de recourir à la valeur de
çet illustre General , et par là de rendre homma-,
ge à son génie supérieur pour la guerre . Il se
met à la tête de quelques Officiers fuyards , il
charge les Assiegeans , et les oblige à laisser les
sommes d'argent que leur comptoient les Assiegez
pour se garantir du dernier malheur .
Quelques jeunes Béotiens , indignez de l'avantage
qu'avoient remporté sur eux de jeunes Mégariens
, dans un Combat du Ceste , viennent insulter
leurs Vainqueurs dans leur Triomphe , et
piquez d'une jalousie maligne , osent les defier à
la lutte , se flattant d'être aussi supérieurs en
adresse que leurs Rivaux l'avoient été en force.
Les Mégariens acceptent le défi , terrassent leurs
Adversaires , les relevent et les obligent à convenir
de leur inferiorité.
1.
Latone , dans un Sacrifice que lui offrent les
Matelots et les Bergers de son Isle de Delos ,
exige pour la principale victime l'insolent Titys
,qui avoit parû lui envier sa gloire. Pendant
Hij que
1818 MERCURE DE FRANCE
que les Insulaires rendent leurs hommages et
présentent leurs offrandes à cette Décse , ks Sal
crificateurs amenent le Coupable enchaî é au
pied de l'Autel , où un Vautour lui ronge le coeur
et le foye en punition de son attentat. De à il
est abîmé dans le Tartare. Les Déliens en témoignent
leur contentement par une Danse
joyeuse.
On expose dans la quatriéme Partie , les avantages
que la Sagesse tire de l'Envie . 1º . Elle ap- .
prend à ne donner prise à l'Envie par aucun foible.
2 ° . A concevoir un souverain mépris pour une
si lache passion. 3 ° . A confondre l'acharnement
des envieux
pratique constante des plus su par
blimes vertus.
la
Ulisse irrité de l'estime qu'a conçû toute la
Grece pour les éminentes quali ez de Palamede ,
le fait observer de près par des surveillans à gages.
Pendant que ce grand homme forme de jeunes
Heros à de nobles exercices , les Espions
apostez ont beau examiner toutes ses démarches,
ils ne trouvent rien dont on lui puisse faire un
crime . Ulisse a recours à l'Imposture , il saısıt le
moment où Palamede va au fourrage avec ses
Guerriers , il fait mettre dans sa Tente des sacs
d'argent ; il accuse Pa'amede à son retour d'avoir
reçu ces sommes de Priam . Les Chefs de
l'Armée condamnent l'Accusé . qui sur le champ
seroit victime de la fourberie , si ses braves Eleves
n'avoient soin de soustraire l'injus ice.
Alcide , après avoir dompté les Monstres ,
s'endort tranquillement à l'ombre de ses Lauriers;
une multitude de Pigmées bassement ja'ouse du
nom qu'il s'est acquis par ses exploits , vient
is ayer ses armes contre lui , chante victoire
avant le combat , investit ce Héros et tâche de
lai
AQUST. 1733 1859
lui enlever l'instrument de tant de triomphes.
Il ne daigne pas interrompre son repos pour de
si toibles ennemis Il se contente d'écarter d'un
geste et d'un soufle cette race importune , qui
échit le genouil devant lui au premier mouvement
de sa Massue Les compagnons de ses travaux
viennent se divertir de la posture supplian
te de ces petits témeraires , ausquels ils font plus
de peur que de mal. Cette Partie du Balet n'est
pas celle qui a été la moins applau die.
Arist de,, que les Athéniens surnommerent le
Juste , banui par les intrigues de quelques Factieux
, et par la dure loi de l'Ostracisme , se retire
dans une Campagne déserte où il n'est suivi
que par les Vertus . Il continue à leur rendre
un culte fidele. A leur tour elles lui érigent un
beau Monument , où il est placé au milieu d'elles
, et couronné par la Constance. Sa Patrie
éplorée vient à la tête des bons Citoyens , implorer
son secours contre les desordres que produit
son éloignement. Elle lui amene les Auteurs
de sa disgrace , les enchaîne à ses pieds , et le
conduit avec un pompeux appareil dans les murs
d'Athénes , où les Vertus lui font cortege à la
honte des Envieux .
Pour la distribution des Prix , voici le D.ssein
du Balet General.
L'Emulation est une passion aussi noble et
aussi louable que l'Envie est un vice bas et odieux.
La premiere , bien differente de la seconde , ne
s'attriste point du bonheur et du succès d'autrui;
mais elle s'anime à égaler ou même à surpasser
les talens et les vertus qu'elle voit dans les autres
. Elle pique le courage sans exciter la jalou- ;
sie. Elle aspire au bien que possedent d'illustres
Rivaux , sans vouloir les en dépouiller ; elle tend
A iij à
1860 MERCURE DE FRANCE
à la même gloire , sans vouloir la leur ravir. Le
motif en est honnête ; c'est le desir de se perfectionner.
L'effet en est utile ; c'est le progrès des
Beaux- Arts , d'où résulte le bien public.
-- Telle est l'émulation que Minerve et Apollon
couronnent dans leurs jeunes Eleves , en leur dis :
tribuant des Prix et des Lauriers , qui sont les
heureux fruits de leurs veilles et de leurs travaux .
Aprés la distribution solemnelle des Prix , les
deux Divinitez rassemblent leur Jeunesse victorieuse
, et lui montrent un plus digne objet de son
émulation ; c'est l'Olympe où les Vertus appellent
leurs plus zelez Favoris. Elles en descendent'
pour en tracer la route à toute la Troupe des
génereux Aspirans. L'Envie 'sortant de son Antre
avec les Partisans , fait une nouvelle tentative
pour traverser la marche des Braves , que son
aspect rend d'abord immobiles . Mais bien - tôt
après ils reprennent courage, ils mettent en fuite
les Envieux , ils font une Fête en forme de
Triomphe ; et superieurs à tous les évenemens ,
ils parviennent enfin à l'Olympe, où ils vont être
à couvert de tous les traits de l'Envie .
de Jonathas , Machabée .
DESSEIN ET DIVISION. On sçait que
e qui détermina en partie le brave Simon Machabée
, à livrer la rançon et les Enfans de son
frere Jonathas , au perfide Triphon , General des
Troupes Syriennes , fut la crainte d'aigrir la haine
et l'envie du Peuple d'Israël , qui commençoit à
murmurer contre la lenteur de ses démarches en
faveur d'un Captif , dont il occupoit la place dans
Le Gouvernement . Ces plaintes ameres d'une Troupe
d'envieux , ont fait naître l'idée du Balet da
Envie , qui paroît avoir une liaison assez naturelle
avec la Piece Tragique , où l'on représente la
mort
1854 MERCURE DE FRANCE
mort de Jonathas et de ses enfans . Pour executer
ce dessein , on envisage l'Envie sous quatre rapports
essentiels qui fournissent les quatre parties de ce
Balet. La découvre les principales sources d'où
naît l'Envie. La 2 ° peint les noirs complots qu'el
le trame. La 3 fait voir le cruel supplice qu'elle
endure. La 4º montre les solides avantages qu'en
sire la Sagesse.
Le Theatre représente le délicieux Valon de
Tempé , où la Félicité et la Jalousie , assises sur
des Trônes , versent leurs dons à pleines mains
sur la Jeunesse de Thessalie , qui fait une Fête
où elle se réjouit de sa prosperité . Dans le lointain
de cet aimable séjour , paroît l'affreuse Caverne
de l'Envie , qui , se nourrissant de fiel
d'Aspic et de chair de Vipere , s'afflige de ne rien
voir d'affligeant et fond en larmes , parce qu'elle
' apperçoit aucun sujet de peurs. Elle détache
une Brigade de ses Sujets , qui viennent troubler
la Fête et le bonheur de ceux qui la celebrent.
Comme elle ne rit jamais que de ce qui fait pleuzer
les autres , elle s'applaudit d'avoir dissipé la
Troupe joyeuse , et prétend fixer son Empire
dans cette Contrée , qu'elle regarde comme un
Pays de conquête.
Ón voit dans la premeere Entrée les principales
sources d'où naît l'Envie . Petitesse de génie ,
basse rivalité , naturel mal -faisant.
Zole , miserable Sophiste , esprit mince et
borné , entreprend , avec le secours de certains
petits Crecs , de culbuter de la cime du double
Mont , le fameux Homere , dont il envie la
gloire. Il engage inême quelques Bouffons de
son parti à représenter cet ingenieux Aveugle
comme un simple Vielleur et comme une Muse
sampagnarde, dont ses Consorts se font unjouer.
Mais
A OUST. 17338 1855
Mais Minerve , Déesse du bon goût , châtie ces
insoleus ; et les Guerriers de laade vangent
Poutrage fait au Chan re de leurs exploits , &c.
Il n'est peut-être point de condition au monde
plus sujette à la jalousie de métier , que celle
des Auteurs Dia.matiques . Cette jalousie dégenere
quelquefois en basse riva ité , dont on ne
trace ici qu'un Portrait énigmatique dans la ridicule
avanture qu'un Ecrivain burlesque raconte
d'une Troupe de Comédiens nouvellement débarquez
dans une Vile de Province. Ils y sifflent
un Rival de Théatre ', et font une Parodie badine
d'une Piece sérieuse , où l'on représente le
festin de Théodoric , qui voit sortir de la tête.
d'un Foisson celle de Symmaque, égorgé par
son ordre.
>
Médee ne pouvant souffrir la douce union qui
regne dans la famille du vieux Roi Pélias , imagine
un stratagême funeste pour faire périr ce
respectable Vieillard . Elle se fait apporter par
ses Enchanteurs des herbes de Thessalie , qu'elle
met dans une chaudi re bouillante où elle
plonge son beau pere Ason , qu'elle rajeunit en
présence des enfans de Pélias. Elle leur persuade
par la vue de ce prodige de faire la même opération
à leur Pere , et même de lui trer tout le
sang des veines , pour le remplacer par de nouveau
sang. Le charm disparoît , il ne reste que
le corps ensanglanté du bon Prince , sacrifié au
naturel mal faisant de l'envieuse Megere.
1
SECONDE PARTIE. Les noirs complots que trame
Enve contre la Fortune contre la réputation
et quel ruefois même contre la vie de ceux dont le
bonheur ou les talens la chagrinent,
BELISAIRE , Vainqueur d'un grand nombre
de Nations , fait son Entrée triomphante dans
H Rome
1846 MERCURE DE FRANCE
Rome sur un Char traîné par des Lions d'Afri
que , où il a dompté les Vandales pour la seconde
fois. Il est placé au faîte de la roue de Fortune
, il y reçoit les hommages des Guerriers et
des Courtisans. Ce comble de grandeur anime
contre lui une foule d'envieux . Ils l'attaquent ,
le précipitent , lui Crévent les yeux , et l'enchaî
nent derriere le Char avec une partie de ses Suivans
, dont la plupart l'abandonnent dans sa dişgrace
, pour s'attacher à la fortune de ses Rivaux.
10:07
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"
La Renommée publie , la trompette à la main ,
les louanges de la Probité , dont elle couronne
les vertus . La Calomnie , jalouse de ces éloges
suscite contre sa vertueuse Rivale une Troupe de
Furies qui l'enveloppent , lá saisissent et se préparent
à l'entraîner dans l'abîme déja ouvert sous
ses pieds. Mais du sein même de ce gouffre profond
sort la Verité , dont la brillante lumiere
jette la consternation parmi les Eumenides . Elles
sont mises en déroute par les Partisans de la
Déesse , qui fait ériger un Trophée à la gloire
de la Probité.
Des voisins envieux viennent accuser de malé
fice le pieux et laborieux Furius , dont le Vigno
ble étoit de bon rapport dans les années mêmes
ou ceux des autres ne portoient rien. Les Accusateurs
produisent des Baguettes magiques et
des Tambours prétendus enchantez , dont ils
soutiennent que l'Accusé se sert pour arracher
la Lune du Ciel , et pour évoquer des Monstres
odieux , qui répandent la grêle et la gelée sur les
Champs d'autrui . Pendant qu'on fait jouer cette
Machine frauduleuse , Furius , suivi de ses Enfans
, n'apporte pour sa deffense que les Outils
de son travail , qu'il expose aux yeux des Juges,
ср
AOUST. 1733.- 1857
en leur montrant le cal et le durillon de ses
mains , qu'il leve au Ciel. Il leur fait entendre
que c'est là toute sa Magie. Il est absous , et ses
Accusateurs sont confondus par l'équité des sages
Magistrats .
Le cruel supplice que souffre l'Envie , esr le
Sujet de la troisiéme Partie . 1 ° . L'hommage qu'elle
est forcée de rendre au vrai mérite 2 ° . L'aveu secret
qu'elle est contrainte de faire de sa propre inferiorité.
3. Le vif sentiment de son mal qu'elle
devore sans en oser dire le principe , de sorte qu'elle
est elle-même son plus grand supplice.
Les mêmes Seigneurs , qu'un dépit jaloux avoit
portés à bannir de Rome le grand Camille , s'en
voyant chassés par les Gaulois qui assicgent le
Capitole , sont forcez de recourir à la valeur de
çet illustre General , et par là de rendre homma-,
ge à son génie supérieur pour la guerre . Il se
met à la tête de quelques Officiers fuyards , il
charge les Assiegeans , et les oblige à laisser les
sommes d'argent que leur comptoient les Assiegez
pour se garantir du dernier malheur .
Quelques jeunes Béotiens , indignez de l'avantage
qu'avoient remporté sur eux de jeunes Mégariens
, dans un Combat du Ceste , viennent insulter
leurs Vainqueurs dans leur Triomphe , et
piquez d'une jalousie maligne , osent les defier à
la lutte , se flattant d'être aussi supérieurs en
adresse que leurs Rivaux l'avoient été en force.
Les Mégariens acceptent le défi , terrassent leurs
Adversaires , les relevent et les obligent à convenir
de leur inferiorité.
1.
Latone , dans un Sacrifice que lui offrent les
Matelots et les Bergers de son Isle de Delos ,
exige pour la principale victime l'insolent Titys
,qui avoit parû lui envier sa gloire. Pendant
Hij que
1818 MERCURE DE FRANCE
que les Insulaires rendent leurs hommages et
présentent leurs offrandes à cette Décse , ks Sal
crificateurs amenent le Coupable enchaî é au
pied de l'Autel , où un Vautour lui ronge le coeur
et le foye en punition de son attentat. De à il
est abîmé dans le Tartare. Les Déliens en témoignent
leur contentement par une Danse
joyeuse.
On expose dans la quatriéme Partie , les avantages
que la Sagesse tire de l'Envie . 1º . Elle ap- .
prend à ne donner prise à l'Envie par aucun foible.
2 ° . A concevoir un souverain mépris pour une
si lache passion. 3 ° . A confondre l'acharnement
des envieux
pratique constante des plus su par
blimes vertus.
la
Ulisse irrité de l'estime qu'a conçû toute la
Grece pour les éminentes quali ez de Palamede ,
le fait observer de près par des surveillans à gages.
Pendant que ce grand homme forme de jeunes
Heros à de nobles exercices , les Espions
apostez ont beau examiner toutes ses démarches,
ils ne trouvent rien dont on lui puisse faire un
crime . Ulisse a recours à l'Imposture , il saısıt le
moment où Palamede va au fourrage avec ses
Guerriers , il fait mettre dans sa Tente des sacs
d'argent ; il accuse Pa'amede à son retour d'avoir
reçu ces sommes de Priam . Les Chefs de
l'Armée condamnent l'Accusé . qui sur le champ
seroit victime de la fourberie , si ses braves Eleves
n'avoient soin de soustraire l'injus ice.
Alcide , après avoir dompté les Monstres ,
s'endort tranquillement à l'ombre de ses Lauriers;
une multitude de Pigmées bassement ja'ouse du
nom qu'il s'est acquis par ses exploits , vient
is ayer ses armes contre lui , chante victoire
avant le combat , investit ce Héros et tâche de
lai
AQUST. 1733 1859
lui enlever l'instrument de tant de triomphes.
Il ne daigne pas interrompre son repos pour de
si toibles ennemis Il se contente d'écarter d'un
geste et d'un soufle cette race importune , qui
échit le genouil devant lui au premier mouvement
de sa Massue Les compagnons de ses travaux
viennent se divertir de la posture supplian
te de ces petits témeraires , ausquels ils font plus
de peur que de mal. Cette Partie du Balet n'est
pas celle qui a été la moins applau die.
Arist de,, que les Athéniens surnommerent le
Juste , banui par les intrigues de quelques Factieux
, et par la dure loi de l'Ostracisme , se retire
dans une Campagne déserte où il n'est suivi
que par les Vertus . Il continue à leur rendre
un culte fidele. A leur tour elles lui érigent un
beau Monument , où il est placé au milieu d'elles
, et couronné par la Constance. Sa Patrie
éplorée vient à la tête des bons Citoyens , implorer
son secours contre les desordres que produit
son éloignement. Elle lui amene les Auteurs
de sa disgrace , les enchaîne à ses pieds , et le
conduit avec un pompeux appareil dans les murs
d'Athénes , où les Vertus lui font cortege à la
honte des Envieux .
Pour la distribution des Prix , voici le D.ssein
du Balet General.
L'Emulation est une passion aussi noble et
aussi louable que l'Envie est un vice bas et odieux.
La premiere , bien differente de la seconde , ne
s'attriste point du bonheur et du succès d'autrui;
mais elle s'anime à égaler ou même à surpasser
les talens et les vertus qu'elle voit dans les autres
. Elle pique le courage sans exciter la jalou- ;
sie. Elle aspire au bien que possedent d'illustres
Rivaux , sans vouloir les en dépouiller ; elle tend
A iij à
1860 MERCURE DE FRANCE
à la même gloire , sans vouloir la leur ravir. Le
motif en est honnête ; c'est le desir de se perfectionner.
L'effet en est utile ; c'est le progrès des
Beaux- Arts , d'où résulte le bien public.
-- Telle est l'émulation que Minerve et Apollon
couronnent dans leurs jeunes Eleves , en leur dis :
tribuant des Prix et des Lauriers , qui sont les
heureux fruits de leurs veilles et de leurs travaux .
Aprés la distribution solemnelle des Prix , les
deux Divinitez rassemblent leur Jeunesse victorieuse
, et lui montrent un plus digne objet de son
émulation ; c'est l'Olympe où les Vertus appellent
leurs plus zelez Favoris. Elles en descendent'
pour en tracer la route à toute la Troupe des
génereux Aspirans. L'Envie 'sortant de son Antre
avec les Partisans , fait une nouvelle tentative
pour traverser la marche des Braves , que son
aspect rend d'abord immobiles . Mais bien - tôt
après ils reprennent courage, ils mettent en fuite
les Envieux , ils font une Fête en forme de
Triomphe ; et superieurs à tous les évenemens ,
ils parviennent enfin à l'Olympe, où ils vont être
à couvert de tous les traits de l'Envie .
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Résumé : L'ENVIE, Balet dansé à la Tragédie de Jonathas, Machabée.
Le ballet 'Envie' s'inspire de la tragédie de Jonathas Machabée. Simon Machabée, frère de Jonathas, a livré ce dernier et ses enfants au général syrien Triphon par crainte de la haine et de l'envie du peuple d'Israël, qui murmurait contre la lenteur de ses démarches pour libérer Jonathas. Le ballet explore l'Envie sous quatre aspects : ses sources, ses complots, son supplice et les avantages de la sagesse face à elle. La première partie met en lumière les principales sources de l'Envie, telles que la petitesse de génie, la basse rivalité et le naturel malfaisant. La deuxième partie illustre les complots de l'Envie contre la fortune, la réputation et la vie des personnes talentueuses ou heureuses. La troisième partie décrit le supplice de l'Envie, forcée de reconnaître le mérite des autres et de souffrir en silence. La quatrième partie expose les avantages de la sagesse, qui apprend à éviter les faiblesses que l'Envie exploite et à mépriser cette passion. Le ballet se déroule dans le Valon de Tempé, où la Félicité et la Jalousie distribuent leurs dons. L'Envie, nourrie de fiel et de chair de vipère, envoie ses sujets troubler la fête des jeunes Thessaliens. Diverses scènes illustrent les effets de l'Envie, comme la rivalité entre Zole et Homère, les intrigues de Médée, la chute de Bélisaire, et les accusations contre Furius. Le ballet se conclut par une distribution de prix à l'émulation, opposée à l'Envie, et par une ascension vers l'Olympe, symbole des vertus et des talents supérieurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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204
p. 1860-1861
« Le 29 de ce mois, on donna au Théatre François, la 16 Représentation de la Tragédie de [...] »
Début :
Le 29 de ce mois, on donna au Théatre François, la 16 Représentation de la Tragédie de [...]
Mots clefs :
Mademoiselle Dufresne, Pélopée, Comédiens-Italiens, Bouquet
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texteReconnaissance textuelle : « Le 29 de ce mois, on donna au Théatre François, la 16 Représentation de la Tragédie de [...] »
Le 29 de ce mois, on donna au Théatre Fran
çois , la 16 Représentation de la Tragédie de
Péloppée , à laquelle le public prend toujours
beaucoup d'intérêt et de plaisir. Le principal
Rôle est excellemment joué par la Dlle Dufresne.
Ceux d'Atrée , de Thieste et d'Egyste sont
fort bien remplis par les Srs Sarrazin , Dufresne
et Grand-Val. On a suspendu les Représentations
de cette Piéce , pour la reprendre dans un
tems plus favorable.
Le 12. de ce mois , les Comédiens Italiens
donA
O UST . 1733 .
1861
donnerent une Comédie nouvelle sous le titre
de Bouquet , que le Public reçut favorablement.
On en parlera plus au long.
çois , la 16 Représentation de la Tragédie de
Péloppée , à laquelle le public prend toujours
beaucoup d'intérêt et de plaisir. Le principal
Rôle est excellemment joué par la Dlle Dufresne.
Ceux d'Atrée , de Thieste et d'Egyste sont
fort bien remplis par les Srs Sarrazin , Dufresne
et Grand-Val. On a suspendu les Représentations
de cette Piéce , pour la reprendre dans un
tems plus favorable.
Le 12. de ce mois , les Comédiens Italiens
donA
O UST . 1733 .
1861
donnerent une Comédie nouvelle sous le titre
de Bouquet , que le Public reçut favorablement.
On en parlera plus au long.
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Résumé : « Le 29 de ce mois, on donna au Théatre François, la 16 Représentation de la Tragédie de [...] »
Le 29 du mois, la tragédie 'Péloppée' a été jouée pour la seizième fois au Théâtre Français, avec Mlle Dufresne dans le rôle principal et les sieurs Sarrazin, Dufresne et Grand-Val dans les rôles d'Atrée, Thyeste et Égyste. Le 12 du mois, les Comédiens Italiens ont présenté la comédie 'Bouquet', bien accueillie par le public.
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205
p. 1861
L'Opera Comique, Pieces nouvelles [titre d'après la table]
Début :
Le 20 Juillet, l'Opéra Comique donna une Piece nouvelle d'un Acte, en Vaudevilles, qui a [...]
Mots clefs :
Opéra comique, Vaudeville, Maître à chanter, Foire, Île du mariage, Olivette, Départ de l'Opéra comique, Les Sincères malgré eux, Vaudevilles, Divertissements
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texteReconnaissance textuelle : L'Opera Comique, Pieces nouvelles [titre d'après la table]
Le 20 Juillet , l'Opéra Comique donna une
Piece nouvelle d'un Acte , en Vaudevilles , qui a
pour titre l'Isle du Mariage , avec des Divertissemens.
Le 28. le même Opera Comique donna, deut
petites Pieces nouvelles d'un Acte chacune , en
Vaudevilles ; intitulée : Les Sinceres malgré eux
et le Départ de l'Opera Comique , avec des Divertissemens
.
que
Dans la seconde Piece , la Foire personnifiée
ouvre la Scene, et se plaint du mauvais état de sa
santé aussi - bien que de celle de l'Opera Comique
son fils , qui n'est pas meilleure la ŝienne
, étant sur son départ pour la Province. La
Foire charge Olivette , sa Suivante , de faire une
Recruë d'Acteurs et d'Actrices , pour former la
Troupe qui doit accompagner son Fils , et d'examiner
les differens talens de ceux qui se présenteront
. Un Maître à chanter vient le premier ,
accompagné de deux de ses Ecolieres ;l'une chante
un Récitatif , qui paroît trop sérieux à Olivette
pour l'Opera Comique ; elle dit au Maître
à chanter que le Vaudeville est le Chant qui
convient le mieux pour ce Spectacle : Le Maître
à chanter répond qu'il en a un tout prêt
ií et qu'il se fate qu'il sera tres- bien reçu ;
chante alternativement avec ses deux Ecolières
le Vaudeville suivant , dont Olivette est si fort
satisfaite , qu'elle les reçoit dans la nouvelle
Troupe.
Piece nouvelle d'un Acte , en Vaudevilles , qui a
pour titre l'Isle du Mariage , avec des Divertissemens.
Le 28. le même Opera Comique donna, deut
petites Pieces nouvelles d'un Acte chacune , en
Vaudevilles ; intitulée : Les Sinceres malgré eux
et le Départ de l'Opera Comique , avec des Divertissemens
.
que
Dans la seconde Piece , la Foire personnifiée
ouvre la Scene, et se plaint du mauvais état de sa
santé aussi - bien que de celle de l'Opera Comique
son fils , qui n'est pas meilleure la ŝienne
, étant sur son départ pour la Province. La
Foire charge Olivette , sa Suivante , de faire une
Recruë d'Acteurs et d'Actrices , pour former la
Troupe qui doit accompagner son Fils , et d'examiner
les differens talens de ceux qui se présenteront
. Un Maître à chanter vient le premier ,
accompagné de deux de ses Ecolieres ;l'une chante
un Récitatif , qui paroît trop sérieux à Olivette
pour l'Opera Comique ; elle dit au Maître
à chanter que le Vaudeville est le Chant qui
convient le mieux pour ce Spectacle : Le Maître
à chanter répond qu'il en a un tout prêt
ií et qu'il se fate qu'il sera tres- bien reçu ;
chante alternativement avec ses deux Ecolières
le Vaudeville suivant , dont Olivette est si fort
satisfaite , qu'elle les reçoit dans la nouvelle
Troupe.
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Résumé : L'Opera Comique, Pieces nouvelles [titre d'après la table]
Le 20 juillet, l'Opéra Comique présenta 'L'Isle du Mariage', une pièce en un acte accompagnée de divertissements. Le 28 juillet, deux nouvelles pièces en un acte furent jouées : 'Les Sinceres malgré eux' et 'Le Départ de l'Opéra Comique', également accompagnées de divertissements. Dans 'Le Départ de l'Opéra Comique', la Foire, personnifiée, ouvre la scène en se plaignant de sa santé et de celle de l'Opéra Comique, son fils, qui part pour la province. Elle charge Olivette, sa suivante, de recruter des acteurs et actrices pour former la troupe accompagnant son fils et d'examiner les talents des candidats. Un maître à chanter se présente avec deux élèves. L'une chante un récitatif jugé trop sérieux par Olivette, qui préfère le vaudeville. Le maître à chanter répond qu'il a un vaudeville prêt et le chante alternativement avec ses élèves. Satisfait, Olivette les accepte dans la nouvelle troupe.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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206
p. 1862-1864
VAUDEVILLE.
Début :
Que les Mortels redoutent le trépas, [...]
Mots clefs :
Vaudeville, Beauté, Âges, Surprendre, Étonner
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : VAUDEVILLE.
VAUDEVILLE .
Ue les Mortels redoutent le trépas ,
Et que tout homme ait grande envie
De joüir long-temps de la vie ,
Cela ne me surprend pas :
Mais que chacun à l'abréger s'adonne ,
Et que pour en hâter le cours ,
Leur intempérance ait recours
Aux expédiens les plus courts ,
C'est-là ce qui m'étonne.
►
Que le Mari d'un Objet sans appas ,
Cherche un amusement aimable ,
Quoiqu'au fond il soit très - blâmable ,
Cela ne me surprend pas :
Mais que l'Epoux d'une Beauté mignonne ;
Qui de bien vivre a le renom
La quitte pour une Guenon ,
Qui jamais ne répondit non ,
1
C'est-là ce qui m'étonne.
Qu'à s'ajuster du haut jusques en bas ;
Iris , pour paroître jolie ,
Passe les trois quarts de sa vie "
Cela ne me surprend pas :
Mais qu'un Abbé tous les jours s'amidonne ,
Et
AOUST. 1733 . 1863
Et qu'à pas comptez ce Poupin ;
Sur la pointe de l'escarpin ,
Marche toujours droit comme un Pin ;
C'est-là ce qui m'étonne.
Qu'un Soupirant prodigue les ducats ,
Quand chez la Beauté qui le picque ,
Il est le premier et l'unique ,
Cela ne me surprend pas ;
Mais qu'au Pays où l'on danse et fredonne ;
Une foule d'enchérisseurs ,
Se ruinent pour des douceurs ,
Qu'ont goûté tant de Précurseurs ,
C'est-là ce qui m'étonne.
來
Que dans Alger on trouve des ingrats ;
Et que chez le Peuple Tartare ,
La reconnoissance soit rare ,
Cela ne me surprend pas :
Mais qu'à Paris mainte et mainte personne ,
Qui vint vous demander Lundi ,
Un plaisir qu'on lui fit Mardi ,
N'y pense plus le Mercredi ,
C'est- là ce qui m'étonne .
Cette Piece est terminée par un Ballet Pantomime
, inti ulé les Ages , représenté par quatre
differentes Entrées qui les caractérisent , et exe-
Hv cuté
1864 MERCURE DE FRANCE
cuté par de très- bons Sujets qui sont fort applaudis.
On trouvera l'Air noté du Vaudeville
au bas de la Chanson.
Ue les Mortels redoutent le trépas ,
Et que tout homme ait grande envie
De joüir long-temps de la vie ,
Cela ne me surprend pas :
Mais que chacun à l'abréger s'adonne ,
Et que pour en hâter le cours ,
Leur intempérance ait recours
Aux expédiens les plus courts ,
C'est-là ce qui m'étonne.
►
Que le Mari d'un Objet sans appas ,
Cherche un amusement aimable ,
Quoiqu'au fond il soit très - blâmable ,
Cela ne me surprend pas :
Mais que l'Epoux d'une Beauté mignonne ;
Qui de bien vivre a le renom
La quitte pour une Guenon ,
Qui jamais ne répondit non ,
1
C'est-là ce qui m'étonne.
Qu'à s'ajuster du haut jusques en bas ;
Iris , pour paroître jolie ,
Passe les trois quarts de sa vie "
Cela ne me surprend pas :
Mais qu'un Abbé tous les jours s'amidonne ,
Et
AOUST. 1733 . 1863
Et qu'à pas comptez ce Poupin ;
Sur la pointe de l'escarpin ,
Marche toujours droit comme un Pin ;
C'est-là ce qui m'étonne.
Qu'un Soupirant prodigue les ducats ,
Quand chez la Beauté qui le picque ,
Il est le premier et l'unique ,
Cela ne me surprend pas ;
Mais qu'au Pays où l'on danse et fredonne ;
Une foule d'enchérisseurs ,
Se ruinent pour des douceurs ,
Qu'ont goûté tant de Précurseurs ,
C'est-là ce qui m'étonne.
來
Que dans Alger on trouve des ingrats ;
Et que chez le Peuple Tartare ,
La reconnoissance soit rare ,
Cela ne me surprend pas :
Mais qu'à Paris mainte et mainte personne ,
Qui vint vous demander Lundi ,
Un plaisir qu'on lui fit Mardi ,
N'y pense plus le Mercredi ,
C'est- là ce qui m'étonne .
Cette Piece est terminée par un Ballet Pantomime
, inti ulé les Ages , représenté par quatre
differentes Entrées qui les caractérisent , et exe-
Hv cuté
1864 MERCURE DE FRANCE
cuté par de très- bons Sujets qui sont fort applaudis.
On trouvera l'Air noté du Vaudeville
au bas de la Chanson.
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Résumé : VAUDEVILLE.
Le texte est un vaudeville intitulé 'VAUDEVILLE' daté d'août 1733 et réédité en 1863 et 1864. Il explore diverses situations humaines absurdes mais compréhensibles. Le vaudeville commence par la contradiction entre le désir de vivre longtemps et les comportements qui abrègent la vie. Il aborde ensuite des thèmes tels que l'infidélité, les efforts excessifs pour la beauté et les dépenses extravagantes. Le texte mentionne également l'ingratitude dans différentes cultures et la volatilité des relations humaines à Paris. La pièce se termine par un ballet pantomime intitulé 'Les Âges', représenté par quatre entrées distinctes et exécuté par des sujets très applaudis. L'air du vaudeville est noté au bas de la chanson.
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207
p. 2040-2042
Piéces nouvelles, &c. [titre d'après la table]
Début :
Les Comédiens François ont reçû depuis quelque temps une Comédie [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français, Tragédie, Comédie, Applaudir, Voltaire, Rôle, Oedipe
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texteReconnaissance textuelle : Piéces nouvelles, &c. [titre d'après la table]
Es Comédiens François ont reçû de-
Luis quelque temps une Comédie
en Vers , en cinq Actes , intitulée la
Fausse Antipatie , qu'on doit jouer dans
peu.
Sur la fin du mois dernier , M. de
Voltaire , lût à l'Assemblée des Comédiens
SEPTEMBRE. 1733. 2041
diens François , une Tragédie nouvelle
e sa composition , sous le titre d'Adelaide
, qui fut unaniment reçûe , pour
être représentée au commencement de
hyver.
Les mêmes Comédiens ont aussi reçû
depuis peu une petite Comédie ,.
sous le titre de la Coquette Amoureuse ,
u'on doit jouer incessamment .
Ils ont encore reçû peu de jours après ,
une Tragédie nouvelle , dont le sujet
adéja été traité : elle est intitulée , Marie
Stuart.
Au commencement de ce mois , les
mêmes Comédiens remirent au Théatre
la Tragédie de Tiridate , et la " petite
Piece du François à Londres , dont les
principaux Rôles furent jouez par le
sieur Prin , nouveau Comédien , qui y
fut applaudi. Il a été encore plus applaudi
dans le Rôle d'Oedipe , qu'il a
joué depuis , dans la Tragédie de M. de
Voltaire.
Le même Rôle d'Oedipe a aussi été
joué par le sieur Fleury , qui y a été
applaudi.
L'Académie Royale de Musique ne doit
tesser le Balet des Fêtes Grecques et Rɔmaines
, qu'au dernier de ce mois , après
plus
2042 MERCURE DE FRANCE
plus de cinquante Représentations consécutives
ce qui marque à quel dégré
cet Ouvrage est agréable au Public.
On donnera le premier Octobre le
nouvel Opera d'Hypolite et Aricie , Tragédie
, dont nous rendrons compte àરે
nos Lecteurs dans le prochain Mercure.
Luis quelque temps une Comédie
en Vers , en cinq Actes , intitulée la
Fausse Antipatie , qu'on doit jouer dans
peu.
Sur la fin du mois dernier , M. de
Voltaire , lût à l'Assemblée des Comédiens
SEPTEMBRE. 1733. 2041
diens François , une Tragédie nouvelle
e sa composition , sous le titre d'Adelaide
, qui fut unaniment reçûe , pour
être représentée au commencement de
hyver.
Les mêmes Comédiens ont aussi reçû
depuis peu une petite Comédie ,.
sous le titre de la Coquette Amoureuse ,
u'on doit jouer incessamment .
Ils ont encore reçû peu de jours après ,
une Tragédie nouvelle , dont le sujet
adéja été traité : elle est intitulée , Marie
Stuart.
Au commencement de ce mois , les
mêmes Comédiens remirent au Théatre
la Tragédie de Tiridate , et la " petite
Piece du François à Londres , dont les
principaux Rôles furent jouez par le
sieur Prin , nouveau Comédien , qui y
fut applaudi. Il a été encore plus applaudi
dans le Rôle d'Oedipe , qu'il a
joué depuis , dans la Tragédie de M. de
Voltaire.
Le même Rôle d'Oedipe a aussi été
joué par le sieur Fleury , qui y a été
applaudi.
L'Académie Royale de Musique ne doit
tesser le Balet des Fêtes Grecques et Rɔmaines
, qu'au dernier de ce mois , après
plus
2042 MERCURE DE FRANCE
plus de cinquante Représentations consécutives
ce qui marque à quel dégré
cet Ouvrage est agréable au Public.
On donnera le premier Octobre le
nouvel Opera d'Hypolite et Aricie , Tragédie
, dont nous rendrons compte àરે
nos Lecteurs dans le prochain Mercure.
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Résumé : Piéces nouvelles, &c. [titre d'après la table]
En septembre 1733, les Comédiens Français ont reçu plusieurs œuvres. Ils ont d'abord reçu la comédie en vers 'La Fausse Antipathie', prévue pour une prochaine représentation. Voltaire a ensuite présenté la tragédie 'Adelaïde', acceptée pour l'hiver. La petite comédie 'La Coquette Amoureuse' a également été reçue pour une représentation imminente. La tragédie 'Marie Stuart', déjà traitée, a été acceptée. Les comédiens ont remis en scène 'Tiridate' et 'Le François à Londres', où le sieur Prin a été applaudi. Le sieur Prin et le sieur Fleury ont été acclamés dans le rôle d'Œdipe. L'Académie Royale de Musique prévoit de représenter le ballet 'Les Fêtes Grecques et Romaines' après plus de cinquante représentations consécutives. Le 1er octobre, l'opéra 'Hypolite et Aricie' sera donné, avec un compte rendu prévu dans le prochain Mercure de France.
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208
p. 2042-2046
EXTRAIT de la petite Comédie en Vers libres et en un Acte, joüée au Théatre Italien, qui a pour titre le Bouquet, annoncée dans le dernier Mercure.
Début :
Rosimont et le Chevalier Muguet, se rencontrent dans un Jardin public, [...]
Mots clefs :
Chevalier, Bouquet, Maîtresse, Bouquet, Rosimont, Florise, Amour, Inconstance, Valet, Théâtre-Italien
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT de la petite Comédie en Vers libres et en un Acte, joüée au Théatre Italien, qui a pour titre le Bouquet, annoncée dans le dernier Mercure.
EXTRAIT de la petite Comédie en
Vers libres et en un Acte , jouée an
Théatre Italien , qui apour titre le Bouquet
, annoncée dans le dernier Mercure
R
Osimont et le Chevalier Muguet , se
·rencontrent dans un Jardin public ,
où a Scene se passe Rosimont reproche
au chevalier , son ancien ami , de ne lui
avoir pas fait sçavoir plutôt son arrivée le
Chevalier s'excuse sur un nouvel amour
qui l'a occupé tour entier , malgré son
inconstance ordinaire ; Rosimont est surpris
d'un amour si sérieux ; le Chevalier
fait l'éloge de l'Inconstance , et Rosimont
celui de la Fidelité ; le premier proteste
que son nouvel amour sera constant , et
se flatte d'obtenir en mariage celle qui
en est l'objet ; il lui dit que ce jour étant
la Fête de sa nouvelle Maîtresse , il a
chargé Tricolor , son Valet , de lui présenter
un Bouquet de sa part. Tricolor
vient
SEPTEMBRE. 1733. 2043
fent avec le Bouquet ; Rosimont , en
'examinant , plaisante sur quelques Paillons
qui sont sur les fleurs , attendu
qu'ils sont le simbole de la légereté ; le
Chevalier lui dit que son inconstance
naturelle , exprimée dans son Bouquet ,
est un nouveau trophée pour la Beauté
qui en a triomphé ; il promet à Rosinont
de lui apprendre le succès de son
amour ,quand il en sera temps.
Rosimont doute fort de ce prétendu
succès, et quitte le Chevalier pour s'aller
promener dans une autre allée du Jardin,
dans l'esperance d'y rencontrer Florise
son ancienne Maîtresse. Violette , Suivante
de Jacinte , nouvelle Maîtresse du Che
valier , arrive ; le Chevalier lui demande
vec empressement des nouvelles de sa
Maîtresse ; Tricolor lui en demande d'ele
même ; le Chevalier Muguet lui ordonne
de se taire ; mais ce Valet lui ré
pond que c'est à lui à parler , puisqu'il
est l'Amant de Violette , et qu'il
n'auroit pas l'indiscrétion de l'interromare
s'il parloit à Jacinte , sa Maîtresse.
Le Chevalier se retire pour laisser son
Valet en liberté de faire le message dont
il l'a chargé. Aprés une conversation
courte et badine entre Tricolor et la
Soubrette , la Maîtresse arrive . Le Valet
2044 MERCURE DE FRANCE
let lui présente le Bouquet de son Maître
, Jacinte le reçoit avec plaisir , mais
y voyant briller quelques diamans , elle
veut le rendre à Tricolor . Violette s'en
saisit , de peur que sa Maîtresse ne le
refuse par bienséance . Jacinte qui craint
la sévérité de son pere , consent à le
garder , pourvû qu'elle puisse cacher
qu'il vient de la main d'un Amant. Elle
ordonne à Violette de le porter à sa cousine
Florise , Maîtresse de Rosimond ,
afin qu'elle paroisse l'Auteur de cette
galanterie ; ce projet est executé , Florise
veut pourtant avoir le plaisir de s'en
parer pour quelques heures . Rosimont ,
que le Chevalier a instruit du favorable
accueil que sa nouvelle Maîtresse a fait
à son Bouquet , sans pourtant lui apprendre
son nom , est très- surpris en
trouvant Florise , son Amante , de voir
ce fatal Bouquet sur son sein ; sa jalousie
ne peut s'empêcher d'éclater , il reproche
à Florise une infidélité dont elle
ose faire parade à ses yeux . Florise ne
comprend rien aux reproches qu'il lui
fait , et ne doute point qu'il ne prenne ,
d'une inconstance prétendue , un prétexte
pour en autoriser un veritable. Ils
se quittent très - mal satisfaits l'un de
Pautre , Florise sort.
Le
SEPTEMBRE. 1733- 2045
Le Chevalier arrive , transporté de
joye il vient joindre Rosimond , pour
lui dire que ses affaires vont à merveille,
que le Bouquet a été reçû favorablement,
et qu'il va posseder sa charmante Maîtresse
; Rosimont , peu satisfait de cette
confidence , lui répond d'un air sérieux
que cette nouvelle Maîtresse dont il vante
tant la fidelité , n'est qu'une volige ,
et que c'est lui , Rosimont , qu'elle aimoit
; le Chevalier rèpond d'un ton babadin
que cela pourroit bien être ; Rosirmont
qui prend ces discours pour une
plaisanterie , dit au Chevalier qu'il ne
lui enlevera pas impunément sa conquêté
; ils se querellent tout de bon , et prêts
à sortir pour aller terminer ailleurs leur
different à la pointe de l'épée , Florise
et Jacinte parée du Bouquet , arrivent ;
elles trouvent leurs Amans fort agitez , elles
leur demande le sujet de leur dispute;
Rosimont reproche à Florise d'aimer le
Chevalier , puisque c'est elle qui s'est parée
de son Bouquet ; le Chevalier ne
comprend rien à ce reproche , n'ayant
jamais vû , dit- il , Florise ; Jacinte reproche
aussi au Chevalier de courir de
Belle en Belle ; Violette, arrive , qui développe
1 : quiproquo du Bouquet , en
disant que Florise ne s'en étoit parée
G qu'à
2046 MERCURE DE FRANCE
qu'à la priere de sa Cousine , & c . Les
deux Amans conviennent de la bonne.
foi de leurs Maîtresses , se raccommodent
avec elles et sortent ensemble pour
aller demander le consentement à leurs
parens pour célebrer ce double Mariage.
Cette Piece , qui a été applaudie , est
des sieurs Romagnesy et Riccoboni ; elle
est terminée par une Fête très - galante'
mise en Musique par M. Mouret.
Vers libres et en un Acte , jouée an
Théatre Italien , qui apour titre le Bouquet
, annoncée dans le dernier Mercure
R
Osimont et le Chevalier Muguet , se
·rencontrent dans un Jardin public ,
où a Scene se passe Rosimont reproche
au chevalier , son ancien ami , de ne lui
avoir pas fait sçavoir plutôt son arrivée le
Chevalier s'excuse sur un nouvel amour
qui l'a occupé tour entier , malgré son
inconstance ordinaire ; Rosimont est surpris
d'un amour si sérieux ; le Chevalier
fait l'éloge de l'Inconstance , et Rosimont
celui de la Fidelité ; le premier proteste
que son nouvel amour sera constant , et
se flatte d'obtenir en mariage celle qui
en est l'objet ; il lui dit que ce jour étant
la Fête de sa nouvelle Maîtresse , il a
chargé Tricolor , son Valet , de lui présenter
un Bouquet de sa part. Tricolor
vient
SEPTEMBRE. 1733. 2043
fent avec le Bouquet ; Rosimont , en
'examinant , plaisante sur quelques Paillons
qui sont sur les fleurs , attendu
qu'ils sont le simbole de la légereté ; le
Chevalier lui dit que son inconstance
naturelle , exprimée dans son Bouquet ,
est un nouveau trophée pour la Beauté
qui en a triomphé ; il promet à Rosinont
de lui apprendre le succès de son
amour ,quand il en sera temps.
Rosimont doute fort de ce prétendu
succès, et quitte le Chevalier pour s'aller
promener dans une autre allée du Jardin,
dans l'esperance d'y rencontrer Florise
son ancienne Maîtresse. Violette , Suivante
de Jacinte , nouvelle Maîtresse du Che
valier , arrive ; le Chevalier lui demande
vec empressement des nouvelles de sa
Maîtresse ; Tricolor lui en demande d'ele
même ; le Chevalier Muguet lui ordonne
de se taire ; mais ce Valet lui ré
pond que c'est à lui à parler , puisqu'il
est l'Amant de Violette , et qu'il
n'auroit pas l'indiscrétion de l'interromare
s'il parloit à Jacinte , sa Maîtresse.
Le Chevalier se retire pour laisser son
Valet en liberté de faire le message dont
il l'a chargé. Aprés une conversation
courte et badine entre Tricolor et la
Soubrette , la Maîtresse arrive . Le Valet
2044 MERCURE DE FRANCE
let lui présente le Bouquet de son Maître
, Jacinte le reçoit avec plaisir , mais
y voyant briller quelques diamans , elle
veut le rendre à Tricolor . Violette s'en
saisit , de peur que sa Maîtresse ne le
refuse par bienséance . Jacinte qui craint
la sévérité de son pere , consent à le
garder , pourvû qu'elle puisse cacher
qu'il vient de la main d'un Amant. Elle
ordonne à Violette de le porter à sa cousine
Florise , Maîtresse de Rosimond ,
afin qu'elle paroisse l'Auteur de cette
galanterie ; ce projet est executé , Florise
veut pourtant avoir le plaisir de s'en
parer pour quelques heures . Rosimont ,
que le Chevalier a instruit du favorable
accueil que sa nouvelle Maîtresse a fait
à son Bouquet , sans pourtant lui apprendre
son nom , est très- surpris en
trouvant Florise , son Amante , de voir
ce fatal Bouquet sur son sein ; sa jalousie
ne peut s'empêcher d'éclater , il reproche
à Florise une infidélité dont elle
ose faire parade à ses yeux . Florise ne
comprend rien aux reproches qu'il lui
fait , et ne doute point qu'il ne prenne ,
d'une inconstance prétendue , un prétexte
pour en autoriser un veritable. Ils
se quittent très - mal satisfaits l'un de
Pautre , Florise sort.
Le
SEPTEMBRE. 1733- 2045
Le Chevalier arrive , transporté de
joye il vient joindre Rosimond , pour
lui dire que ses affaires vont à merveille,
que le Bouquet a été reçû favorablement,
et qu'il va posseder sa charmante Maîtresse
; Rosimont , peu satisfait de cette
confidence , lui répond d'un air sérieux
que cette nouvelle Maîtresse dont il vante
tant la fidelité , n'est qu'une volige ,
et que c'est lui , Rosimont , qu'elle aimoit
; le Chevalier rèpond d'un ton babadin
que cela pourroit bien être ; Rosirmont
qui prend ces discours pour une
plaisanterie , dit au Chevalier qu'il ne
lui enlevera pas impunément sa conquêté
; ils se querellent tout de bon , et prêts
à sortir pour aller terminer ailleurs leur
different à la pointe de l'épée , Florise
et Jacinte parée du Bouquet , arrivent ;
elles trouvent leurs Amans fort agitez , elles
leur demande le sujet de leur dispute;
Rosimont reproche à Florise d'aimer le
Chevalier , puisque c'est elle qui s'est parée
de son Bouquet ; le Chevalier ne
comprend rien à ce reproche , n'ayant
jamais vû , dit- il , Florise ; Jacinte reproche
aussi au Chevalier de courir de
Belle en Belle ; Violette, arrive , qui développe
1 : quiproquo du Bouquet , en
disant que Florise ne s'en étoit parée
G qu'à
2046 MERCURE DE FRANCE
qu'à la priere de sa Cousine , & c . Les
deux Amans conviennent de la bonne.
foi de leurs Maîtresses , se raccommodent
avec elles et sortent ensemble pour
aller demander le consentement à leurs
parens pour célebrer ce double Mariage.
Cette Piece , qui a été applaudie , est
des sieurs Romagnesy et Riccoboni ; elle
est terminée par une Fête très - galante'
mise en Musique par M. Mouret.
Fermer
Résumé : EXTRAIT de la petite Comédie en Vers libres et en un Acte, joüée au Théatre Italien, qui a pour titre le Bouquet, annoncée dans le dernier Mercure.
La pièce de théâtre 'Le Bouquet' se déroule dans un jardin public où Rosimont rencontre le Chevalier Muguet. Rosimont reproche à son ancien ami de ne pas lui avoir annoncé son arrivée plus tôt. Le Chevalier s'excuse en invoquant un nouvel amour qui l'a occupé. Rosimont est surpris par la constance de cet amour, tandis que le Chevalier vante l'inconstance. Il promet à Rosimont de lui révéler le succès de son amour en temps voulu. Tricolor, le valet du Chevalier, apporte un bouquet à Jacinte, la nouvelle maîtresse du Chevalier. Jacinte accepte le bouquet mais demande à le cacher, craignant la sévérité de son père. Elle envoie le bouquet à sa cousine Florise, la maîtresse de Rosimont, pour éviter les apparences. Rosimont, informé par le Chevalier de l'accueil favorable du bouquet, est jaloux en voyant Florise le porter. Une dispute éclate entre Rosimont et Florise, qui ne comprend pas les reproches. Le Chevalier arrive, joyeux, et annonce à Rosimont que ses affaires vont bien. Rosimont révèle que Florise est sa maîtresse, ce qui mène à une querelle entre les deux hommes. Florise et Jacinte interviennent, et Violette, la suivante de Jacinte, explique le quiproquo. Les amants se réconcilient et décident de demander le consentement de leurs parents pour célébrer un double mariage. La pièce, applaudie, est écrite par les sieurs Romagnesy et Riccoboni et se termine par une fête galante mise en musique par M. Mouret.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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209
p. 2046
« Le 2. et le 6. Septembre, les mêmes Comédiens remirent au Théâtre la Comédie [...] »
Début :
Le 2. et le 6. Septembre, les mêmes Comédiens remirent au Théâtre la Comédie [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens
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texteReconnaissance textuelle : « Le 2. et le 6. Septembre, les mêmes Comédiens remirent au Théâtre la Comédie [...] »
Le 2, et le 6. Septembre , les mêmes
Comédiens remirent au Théatre la Comédie
du Prince Malade ou les Jeux
Olympiques , et la petite Piece du Je ne
sçai quoi , dans lesquelles le sieur Berard,
nouveau Chanteur , chanta differens Airs
des Divertissemens de la premiere Piece ,
avec applaudissement; il chanta aussi dans
la seconde Piece la Scene du Maître à
Chanter , qui est une Parodie d'une Scene
du Balet des Fêtes Venitiennes . Ce nouvel
Acteur est jeune , bien fait , et a la
voix très-jolie ; il a été fort goûté et applaudi
du Public.
Comédiens remirent au Théatre la Comédie
du Prince Malade ou les Jeux
Olympiques , et la petite Piece du Je ne
sçai quoi , dans lesquelles le sieur Berard,
nouveau Chanteur , chanta differens Airs
des Divertissemens de la premiere Piece ,
avec applaudissement; il chanta aussi dans
la seconde Piece la Scene du Maître à
Chanter , qui est une Parodie d'une Scene
du Balet des Fêtes Venitiennes . Ce nouvel
Acteur est jeune , bien fait , et a la
voix très-jolie ; il a été fort goûté et applaudi
du Public.
Fermer
Résumé : « Le 2. et le 6. Septembre, les mêmes Comédiens remirent au Théâtre la Comédie [...] »
Les 2 et 6 septembre, les comédiens ont joué 'Le Prince Malade ou les Jeux Olympiques' et 'Le Je ne sçai quoi'. Le chanteur Bérard, jeune et bien fait, a interprété divers airs et une scène parodique. Il a été bien accueilli et applaudi par le public.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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210
p. 2047-2052
EXTRAIT de la petite Piece de l'Isle du Mariage, de l'Opera Comique, représentée le 20. Août, annoncée dans le dernier Mercure.
Début :
Le Théatre représente une Isle, et la Mer dans l'éloignement ; on y voit [...]
Mots clefs :
Hymen, Époux, Fille, Aimer, Temple, Amour, Amant, Vaudeville, Opéra comique
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT de la petite Piece de l'Isle du Mariage, de l'Opera Comique, représentée le 20. Août, annoncée dans le dernier Mercure.
EXTRAIT de la petite Piece de l'Isle
du Mariage , de l'Opera Comique, représentée
le 20. Août , annoncée dans le
dernier Mercure.
L
E Théatre représente une Isle , et
la Mer dans l'éloignement ; on y voit
le Temple de l'Hymen caractérisé avec
ses attributs. L'Hymen ouvre la Scene
par ce Vaudeville , sur l'Air des Folies
d'Espagne.
Tendres Epoux , dont j'ai fini les peines,
Vous , qui goûtez les plaisirs les plus doux ,
Chantez ici le pouvoir de mes chaines ;
Dans ces beaux lieux , venez , heureux Epoux.
L'Hymen surpris de ne voir personne ,
continue de les appeller et de les exciter
au plaisir. L'Indifference personifiée paroît
seule , et chaute sur l'Air du Badinage.
Pour un Dieu comme vous
Vous n'êtes pas trop sage
D'insulter aux Epoux ,
Dans leur triste esclavage ;
Aujourd'hui qui s'engage ,
Sons les loix de l'Hymen ,
Demain ,
Renonce au badinage.
Gij L'In2048
MERCURE DE FRANCE
L'Indifference lui fait entendre que
les coeurs lui appartiennent de droit ;
aussi-tôt qu'ils sont sous son Empire , mais
Hymen rejette sur elle les mauvais procedez
des Epoux , & c.
Un Vieillard survient , qui a épousé
par inclination une jeune fille ; il se plaint
à l'Hymen de n'être point aimé , celuicy
lui répond que c'est plutôt sa faute
que la sienne , et qu'il ne doit pas lui
imputer une sottise que l'Amour lui a
fait faire , & c.
Une petite fille arrive , qui dit à
'Hymen qu'elle va se marier à un Amant
qu'elle aime , et que sa Mere veut lui
en donner un autre qu'elle n'aime point;
elle fait le portrait de tous les deux par
ce Vaudeville , qu'elle chante sur un Air
de la Comédie Italienne:
L'un est contrariant , farouche ;
Il n'a que des sermons en bouche ;
C'est un vrai Gaulois,
LOKA
L'autre est complaisant et traitable
Il badine , il aime la rable ,
C'est un vrai François ,
Autre sur l'Air des Débuts,
Quand celui-cy me sçait seulette ,
Pans ma chambre il aime à monter ;
D'abord
س و
LAYA DIL
2949 *755•
Dabord à mon col il se jette.
L'Hymen
C'est fort bien débuter.
La petite Fille.
Mais l'autre avec un air benest ,
Attend qu'on me fasse descendre'
Il me salue et puis se taist.
L'Hymen.
C'est mal s'y prendre.
La petite Fille quitte l'Hymen en le
conjurant de l'unir à l'Amant qu'elle
aime , & c.
- Un Gascon arrive et dit à l'Hymen
que si complaisance l'a conduit dans
son Temple , plutôt que lAmour , et
qu'il se fait violence pour épouser une
fille , belle , riche , sage , jeune & noble ,
il chante sur l'Air du Cap de bonne esperance.
J'attendris la plus cruelle ,
Panéantis son orgueil ,
La Beauté la plus rebelle .
M'évite comme un écueil ;
Aux Maris je fais la guerre
Mon aspect les desespere ;
Je suis leur épouvantail .
L'Univers est mon Serrail.
Ginj I
2050 MERCURE DE FRANCE
Il dit en sortant qu'il ne veut poing
se gêner en rien , et qu'il est comptable
de tous ses momens à l'Amour.
Un Suisse survient , qui se loüe fort
de l'Hymen , puisqu'il lui a donné une
femme qui , non seulement à la complaisance
de le laisser boire tant qu'il
veut , mais qui boit aussi de même pour
lui tenir compagnie.
Une jeune femme vient se plaindre
au Dieu de l'Hymen , de ce que depuis
qu'elle est mariée , son Mari lui préfere
une Maîtresse laide et coquette.
L'Hymen la plaint et blâme l'injustice
de son Epoux ; elle répond par ce Vaudeville
, sur l'Air : Charmante Gabrielle.
L'Amant est tout de flamme ,
Quand il veut être Epoux ,
Mais l'Hymen dans son ame
Eteint des feux si doux :
Triste ceremonię
Malheureux jour !
Si -tôt qu'on se marie ,
Adieu l'Amour.
Elle quitte l'Hymen , qui lui dit de
tout esperer de ses charmes et de sa
vertu .
Un gros Fermier vient remercier l'Hy .
men ,
SEPTEMBRE. 1733. 201
men , de lui avoir donné une femme
qui , par sa bonne mine , fait venir l'eau
au Moulin , il lui fait entendre qu'elle
est aimée du Seigneur de son Village
qui est complaisant , généreux et qu'il
a mille bontez pour lui ; l'Hymen répond
qu'il est charmé d'avoir fait son
bonheur et chante sur l'Air des Fraises.
Combien d'Epoux malheureux ,
Pour mieux vivre à leur aise ,
Prudemment ferment les yeux ,
Et suivent l'exemple heureux ,
Dé Blaise *, de Blaise , de Blaise
Léonore arrive avec sa Suivante Olivette
; elle est fort surprise de ne pas
trouver Léandre son Amant au Temple
de l'Hymen ce Dieu la questionne
et lui demande quel chemin elle a pris
pour arriver dans son Isle ; elle lui répond
sur l'Air de la Ceinture.
Nous avons du Temple d'Amour ,
Parcouru le séjour aimable.
L'Hymen.
Pour arriver droit à ma Cour ,
La route n'est pas favorable.
Enfin Léandre arrive , accompagné de
Pierrot , qui dit à Olivette qu'ayant pris
Giiij . le
2052 MERCURE DE FRANCE
le même chemin que son Maître , elle
doit aussi faire son bonheur. Léandre
épouse Léonore sous les auspices de l'Hymen
, qui leur promet mille douceurs ,
à quoi Olivette répond sur l'Air du
Charivari.
L'Hymen dore la pilule ,
C'est un Matois .
Dès qu'une fille crédule ,
Est sous ses Loix ,
Que fait près d'elle sọn Mary
Charivari.
Léandre dit à sa Maîtresse , sur l'Air
J'entends déja le bruit des Armes.
Couronnez l'ardeur qui me presse ,
Dans ce Temple portons nos pas ;
L'Amour m'y conduira sans cesse
Oui , j'en jure par vos appas.
Léonore.
C'est l'Amant qui fait la promesse ;
Mais l'Epoux ne la tiendra. pas.
Cette Piece , qui a été goûtée du Pưblic
, finit par un Balet caractérisé , sui .
vi d'un Vaudeville ; elle est de la conposition
de M. Carolet , qui travaille à
donner un 9. volume du Théatre de la
Foire , qui contiendra onze Pieces de sa
composition.
du Mariage , de l'Opera Comique, représentée
le 20. Août , annoncée dans le
dernier Mercure.
L
E Théatre représente une Isle , et
la Mer dans l'éloignement ; on y voit
le Temple de l'Hymen caractérisé avec
ses attributs. L'Hymen ouvre la Scene
par ce Vaudeville , sur l'Air des Folies
d'Espagne.
Tendres Epoux , dont j'ai fini les peines,
Vous , qui goûtez les plaisirs les plus doux ,
Chantez ici le pouvoir de mes chaines ;
Dans ces beaux lieux , venez , heureux Epoux.
L'Hymen surpris de ne voir personne ,
continue de les appeller et de les exciter
au plaisir. L'Indifference personifiée paroît
seule , et chaute sur l'Air du Badinage.
Pour un Dieu comme vous
Vous n'êtes pas trop sage
D'insulter aux Epoux ,
Dans leur triste esclavage ;
Aujourd'hui qui s'engage ,
Sons les loix de l'Hymen ,
Demain ,
Renonce au badinage.
Gij L'In2048
MERCURE DE FRANCE
L'Indifference lui fait entendre que
les coeurs lui appartiennent de droit ;
aussi-tôt qu'ils sont sous son Empire , mais
Hymen rejette sur elle les mauvais procedez
des Epoux , & c.
Un Vieillard survient , qui a épousé
par inclination une jeune fille ; il se plaint
à l'Hymen de n'être point aimé , celuicy
lui répond que c'est plutôt sa faute
que la sienne , et qu'il ne doit pas lui
imputer une sottise que l'Amour lui a
fait faire , & c.
Une petite fille arrive , qui dit à
'Hymen qu'elle va se marier à un Amant
qu'elle aime , et que sa Mere veut lui
en donner un autre qu'elle n'aime point;
elle fait le portrait de tous les deux par
ce Vaudeville , qu'elle chante sur un Air
de la Comédie Italienne:
L'un est contrariant , farouche ;
Il n'a que des sermons en bouche ;
C'est un vrai Gaulois,
LOKA
L'autre est complaisant et traitable
Il badine , il aime la rable ,
C'est un vrai François ,
Autre sur l'Air des Débuts,
Quand celui-cy me sçait seulette ,
Pans ma chambre il aime à monter ;
D'abord
س و
LAYA DIL
2949 *755•
Dabord à mon col il se jette.
L'Hymen
C'est fort bien débuter.
La petite Fille.
Mais l'autre avec un air benest ,
Attend qu'on me fasse descendre'
Il me salue et puis se taist.
L'Hymen.
C'est mal s'y prendre.
La petite Fille quitte l'Hymen en le
conjurant de l'unir à l'Amant qu'elle
aime , & c.
- Un Gascon arrive et dit à l'Hymen
que si complaisance l'a conduit dans
son Temple , plutôt que lAmour , et
qu'il se fait violence pour épouser une
fille , belle , riche , sage , jeune & noble ,
il chante sur l'Air du Cap de bonne esperance.
J'attendris la plus cruelle ,
Panéantis son orgueil ,
La Beauté la plus rebelle .
M'évite comme un écueil ;
Aux Maris je fais la guerre
Mon aspect les desespere ;
Je suis leur épouvantail .
L'Univers est mon Serrail.
Ginj I
2050 MERCURE DE FRANCE
Il dit en sortant qu'il ne veut poing
se gêner en rien , et qu'il est comptable
de tous ses momens à l'Amour.
Un Suisse survient , qui se loüe fort
de l'Hymen , puisqu'il lui a donné une
femme qui , non seulement à la complaisance
de le laisser boire tant qu'il
veut , mais qui boit aussi de même pour
lui tenir compagnie.
Une jeune femme vient se plaindre
au Dieu de l'Hymen , de ce que depuis
qu'elle est mariée , son Mari lui préfere
une Maîtresse laide et coquette.
L'Hymen la plaint et blâme l'injustice
de son Epoux ; elle répond par ce Vaudeville
, sur l'Air : Charmante Gabrielle.
L'Amant est tout de flamme ,
Quand il veut être Epoux ,
Mais l'Hymen dans son ame
Eteint des feux si doux :
Triste ceremonię
Malheureux jour !
Si -tôt qu'on se marie ,
Adieu l'Amour.
Elle quitte l'Hymen , qui lui dit de
tout esperer de ses charmes et de sa
vertu .
Un gros Fermier vient remercier l'Hy .
men ,
SEPTEMBRE. 1733. 201
men , de lui avoir donné une femme
qui , par sa bonne mine , fait venir l'eau
au Moulin , il lui fait entendre qu'elle
est aimée du Seigneur de son Village
qui est complaisant , généreux et qu'il
a mille bontez pour lui ; l'Hymen répond
qu'il est charmé d'avoir fait son
bonheur et chante sur l'Air des Fraises.
Combien d'Epoux malheureux ,
Pour mieux vivre à leur aise ,
Prudemment ferment les yeux ,
Et suivent l'exemple heureux ,
Dé Blaise *, de Blaise , de Blaise
Léonore arrive avec sa Suivante Olivette
; elle est fort surprise de ne pas
trouver Léandre son Amant au Temple
de l'Hymen ce Dieu la questionne
et lui demande quel chemin elle a pris
pour arriver dans son Isle ; elle lui répond
sur l'Air de la Ceinture.
Nous avons du Temple d'Amour ,
Parcouru le séjour aimable.
L'Hymen.
Pour arriver droit à ma Cour ,
La route n'est pas favorable.
Enfin Léandre arrive , accompagné de
Pierrot , qui dit à Olivette qu'ayant pris
Giiij . le
2052 MERCURE DE FRANCE
le même chemin que son Maître , elle
doit aussi faire son bonheur. Léandre
épouse Léonore sous les auspices de l'Hymen
, qui leur promet mille douceurs ,
à quoi Olivette répond sur l'Air du
Charivari.
L'Hymen dore la pilule ,
C'est un Matois .
Dès qu'une fille crédule ,
Est sous ses Loix ,
Que fait près d'elle sọn Mary
Charivari.
Léandre dit à sa Maîtresse , sur l'Air
J'entends déja le bruit des Armes.
Couronnez l'ardeur qui me presse ,
Dans ce Temple portons nos pas ;
L'Amour m'y conduira sans cesse
Oui , j'en jure par vos appas.
Léonore.
C'est l'Amant qui fait la promesse ;
Mais l'Epoux ne la tiendra. pas.
Cette Piece , qui a été goûtée du Pưblic
, finit par un Balet caractérisé , sui .
vi d'un Vaudeville ; elle est de la conposition
de M. Carolet , qui travaille à
donner un 9. volume du Théatre de la
Foire , qui contiendra onze Pieces de sa
composition.
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Résumé : EXTRAIT de la petite Piece de l'Isle du Mariage, de l'Opera Comique, représentée le 20. Août, annoncée dans le dernier Mercure.
La pièce de théâtre 'Le Mariage' de l'Opéra Comique, représentée le 20 août, se déroule sur une île où se trouve un temple dédié à l'Hymen. L'Hymen ouvre la scène en invitant les époux à célébrer leur bonheur, mais il est surpris par leur absence. L'Indifférence apparaît alors, affirmant que les cœurs lui appartiennent dès qu'ils sont sous son empire. Un vieillard se plaint à l'Hymen de ne pas être aimé par sa jeune épouse, et l'Hymen lui répond que c'est plutôt sa faute. Une petite fille arrive et explique qu'elle va se marier avec un amant qu'elle aime, tandis que sa mère veut lui imposer un autre époux. Elle décrit les deux hommes à travers des vaudevilles. Un Gascon explique ensuite qu'il se marie par complaisance plutôt que par amour. Un Suisse loue l'Hymen pour lui avoir donné une épouse qui partage son goût pour l'alcool. Une jeune femme se plaint de son mari infidèle, et l'Hymen la console en lui promettant qu'elle retrouvera l'amour grâce à ses charmes et à sa vertu. Un fermier remercie l'Hymen pour lui avoir donné une épouse aimée du seigneur du village. Léonore arrive au temple de l'Hymen à la recherche de son amant Léandre, qui finit par arriver et l'épouse sous les auspices de l'Hymen. La pièce se termine par un ballet et un vaudeville. La pièce est de la composition de M. Carolet, qui prépare un neuvième volume du Théâtre de la Foire.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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211
p. 2053
VAUDEVILLE.
Début :
L'Hymen a quelquefois des charmes, [...]
Mots clefs :
Amour, Coeur, Abbé
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : VAUDEVILLE.
VAUDEVILLE.
L'Hymen a quelquefois des charmes ,
Quand l'Amour lui préte ses Armes ;
Sous son Empire tout nous rit ;
Mais souvent l'Amour fait retraire
Tâtez- en tourelourirette ,
Si le coeur vous en dit.
*
Un Abbé dans une ruelle ,
En secret amuse une Belle ,
Un Petit Maître l'étourdit ;
De. l'Abbé je ferois emplette ;
Tâtez-en , & c.
M
18
;
Si cette Piece à sçû vous plaire',
Pour l'Auteur , quel plus doux salaire !'
Votre suffrage lui suffit ;
La voila telle qu'elle est faite ,
Tâtez en , tourelourirette ',,
Si le coeur vous en dit.-
L'Hymen a quelquefois des charmes ,
Quand l'Amour lui préte ses Armes ;
Sous son Empire tout nous rit ;
Mais souvent l'Amour fait retraire
Tâtez- en tourelourirette ,
Si le coeur vous en dit.
*
Un Abbé dans une ruelle ,
En secret amuse une Belle ,
Un Petit Maître l'étourdit ;
De. l'Abbé je ferois emplette ;
Tâtez-en , & c.
M
18
;
Si cette Piece à sçû vous plaire',
Pour l'Auteur , quel plus doux salaire !'
Votre suffrage lui suffit ;
La voila telle qu'elle est faite ,
Tâtez en , tourelourirette ',,
Si le coeur vous en dit.-
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Résumé : VAUDEVILLE.
Le texte est un extrait de vaudeville sur l'amour et le mariage. Il souligne que l'amour peut rendre le mariage agréable mais peut aussi se retirer. Une scène montre un abbé et un jeune homme courtisant une femme. L'auteur préfère l'abbé mais laisse le jugement au lecteur. Il invite le public à apprécier la pièce et à décider s'il l'aime.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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212
p. 2053-2054
« Le 9. Septembre, l'Opera Comique donna une Piece nouvelle d'un Acte, [...] »
Début :
Le 9. Septembre, l'Opera Comique donna une Piece nouvelle d'un Acte, [...]
Mots clefs :
Opéra comique
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 9. Septembre, l'Opera Comique donna une Piece nouvelle d'un Acte, [...] »
Le 9. Septembre , l'Opera Comique"
donna une Piece nouvelle d'un Acte
en Vaudeville , intitulé : Zéphire et la
Lune , ou la Nuit d'Elé. Elle fut précé--
dée d'un Prologue nouveau , qui a pour
Gy titre ,
2054 MERCURE DE FRANCE
titre , l'Impromptu. Ces deux Pieces sont
terminées par le Baler Pantomine des
Ages , dont on a déja parlé , et qui fait
toujours beaucoup de plaisir .
donna une Piece nouvelle d'un Acte
en Vaudeville , intitulé : Zéphire et la
Lune , ou la Nuit d'Elé. Elle fut précé--
dée d'un Prologue nouveau , qui a pour
Gy titre ,
2054 MERCURE DE FRANCE
titre , l'Impromptu. Ces deux Pieces sont
terminées par le Baler Pantomine des
Ages , dont on a déja parlé , et qui fait
toujours beaucoup de plaisir .
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213
p. 2233-2249
Hypolite et Aricie, Extrait, [titre d'après la table]
Début :
L'Académie Royale de Musique donna le premier Octobre la premiere [...]
Mots clefs :
Hippolyte, Thésée, Diane, Phèdre, Aricie, Amour, Père, Enfers, Mort, Monstre, Fils, Dieux, Vers, Théâtre, Destin
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Hypolite et Aricie, Extrait, [titre d'après la table]
' Académie Royale de Musique donna
le premier Octobre la premiere
Représentation de la Tragédie nouvelle ,
intitulée : Hippolyte et Aricie. Le Poëme
est de M.le Chevalier Pellegrin , et la Musique
de M. Rameau. Le premier est déja
connu par plusieurs Ouvrages applaudis ;
et le second vient de faire voir par son
coup d'essai , dans ce genre de Musique,
qu'il peut égaler les plus grands Maîtres.
L'accueil favorable que le public a fait à
cet Opéra en fait esperer de nombreuses
Représentations : En voici l'Extrait.
L'Auteur du Poëme déclare dans sa Préface
que c'est
pour
authoriser
le caractere
qu'il
donne
à Diane
dans
la Piéce
, qu'il
a
fait
son
Prologue
. Hygin
lui en a fourni
la Fable
. Le Théatre
représente
la Forêt
d'Erymanthe
, si fameuse
par
un des trayaux
d'Hercule
. Diane
le fait
connoître
F par
1234 MERCURE DE FRANCE
par ces Vers , qu'elle addresse à ses Nym
phes et aux habitans des Bois.
Vous êtes dans ces mêmes lieux ,
Où sur un monstre furieux ,
Vn fils de Jupiter , remporta la victoire ;
Mais un monstre plus fier le soumit à son tour g
Du plus grand des Héros vous surpassez l
gloire ,
Quand vous triomphez de l'Amour.
L'Amour ne peut souffrir que Diane
le bannisse de ses Forêts ; il vient lui demander
raison de cet outrage ; Diane invoque
Jupiter son Pere,et le prie de con-
Armer le don qu'il lui a fait de l'Empire
des Forêts ; Jupiter descend au bruit du
tonnerre,et annonce à Diane que le Destin
ordonne que l'Amour regne par tout,
avec cette restriction , qu'il n'exercera sa
puissance sur les sujets de Diane qu'un
seul jour de l'année ; il ajoute que ce jour
doit être éclairé par le flambeau de l'Hymen.
Diane obéit aux Loix du Destin ;
elle ne veut pas pourtant être témoin
d'une Fête si favorable à l'Amour ; elle
annonce le sujet de la Tragédie , par ces
Vers :
Hippolyte , Aricie , exposés à périr ,
Ne fondent que sur moi leur derniere esperances
conOCTOBRE.
1733. 2235
Contre une injuste violence ,
C'est à moi de les secourir.
L'Amour entreprend de consoler les
sujets de Diane de l'absence de leur Souveraine
, par les plus doux plaisirs. Il ap
pelle par ces Vers ,les Jeux et les Amours.
Regnez , aimables jeux , regnez dans ces Forêts,
Qu'à mes voeux empressez votre zêle réponde :
Si vous, tendres Amours , faites voler ces traits ,
D'où dépend le bonheur du monde.
Cet ordre produit une Fête aussi affec
tueuse que brillante : Le Prologue finit
par ces quatre Vers , conformes aux vofontez
suprêmes du Destin; c'est l'Amour
qui parle
Par de nouveaux plaisirs , couronnons ce grand
jour ,
Au Temple de l'Hymen il faut que je vous guide
,
Qu'à cette heureuse Fête , avec lui je préside;
Que son flambeau s'allume aux flammes de l'A }
mour.
Le Théatre représente au premier Acte
de la Tragédie , un Temple consacré à
Diane.
Aricie,Princesse du Sang des Pallantides ,
expose sa situation par ce Monologue.
Fij Tem2236
MERCURE DE FRANCE
> Temple sacré , séjour tranquille
Où Diane aujourd'hui doit recevoir mes voeux
A mon coeur agité daigne servir d'azile ,
Contre un amour trop malheureux ¿
Et toi , dont malgré moi , je rappelle l'image ,
Sher Prince , si mes voeux ne te sont pas offerts;
Du moins j'en apporte l'hommage
A la Déesse que tu sers,
Temple sacré , & c,
Hyppolite vient assûrer Aricie de l'in
dignation que lui inspire la violence que
Phédre lui fait par l'ordre que Thesée son
Pere lui en a donné à son départ de Tréséne
; il déplore son sort d'une maniere
qui le fait soupçonner d'être Amant ;
Voici comment il le fait connoître.
Dans un Pere irrité , confondez -vous son Fils
Et comptez- vous mon coeur entre vos ennemis
& c.
Je pourrois vous hair quelle injustice extreme
!
Je sens pour vous une pitié ,
Aussi tendre que l'amour même."
: Cette déclaration a paru bien ménagée
de part et d'autre.
Les Prêtresses de Diane forment la Fêe
de ce premier Acte,
Phodre
OCTOBRE.´´ 1733.´´ £ 237ì
Phedre vient ensuite féliciter Aricie
sur la gloire qu'elle va acquerir en s'unissant
aux Immortels , par les voeux
qu'elle doit offrir à Diane. Aricie fait entendre
que ces voeux n'étant pas libres
ils ne sont pas dignes des Dieux ; les Prêtresses
de Diane se rangent de son parti,
Phédre fait sonner la Trompette pour
punir leur désobéïssance ; les Prêtresses
invoquent les Dieux pour la punir ellemême
de la violence qu'elle veut leur
faire. Diane descend au bruit du Tonnerre
, comme fille de Jupiter ; ce qu'elle
fait connoître par ces Vers , addressez à
ses Prêtresses :
售
Vous voyez Jupiter se déclarer mon Pere;
Sa foudre vole devant moy.
La Déesse après avoir rassuré ses Prêtresses
, menace Phedre de la vangeance
des Dieux , et prend Hippolyte et Aricie
sous sa protection . Elle remonte dans le
ciel. Les Prêtresses rentrent dans le Temple
; Hippolyte emmene Aricie. Phédre
abandonne à ses transports jaloux, qu'el¬
le fait connoître par ces Vers :
Que voi -je ? contre moi tous les Dieux soat
armez !
Ma Rivale me brave! Elle suit Hippolyte !
Fiij
Ah !
2238 MERCURE DE FRANCE
Ah ! plus je voi leurs coeurs, l'un pour l'aptres
enflammez *
Plus mon jaloux transport s'irrite ,
Que rien n'échappe à ma fureur , &c.
Arcas vient annoncer que Thésée es
descendu dans les Enfers : Il s'exprime
ainsi :
La terre sous ses pas ouverte .'
A favorisé ses efforts ;
Et d'affreux heurlemens , sortis des sombre
bords ,
Du plus grand des Mortels , m'ont confirmé la
perte
J
Anone fait entendre à Phédre qu'elle
peut aimer sans crime , et concevoir de
l'espérance, en offrant son Thrône à Hippolyte,
Phédre se livre à un espoir si flatteur.
Au II Acte, le Théatre représente l'entrée
des Enfers. Thésée tourmenté par
une Furie , expose ce qui s'est passé par
çes Vers :
Dieux! n'est- ce pas assez des maux que j'ai souf
ferts ?
J'ai vuPirythous déchiré par Cerbere ;
J'ai vu ce Monstre affreux , trancher des jours
si chers ,
Sans daigner dans mon sang, assouvir sa coferes
J'enOCTOBRE
17388 · 1239
J'attendois la mort sans effroi ,
Et la mort fuyoit loin de moi.
La Furie conduit Thésée au pied du
Thrône de Pluton : Thésée dit à ce Me
narque des Enfers :
Inéxorable Roy de l'Empire infernal ',
Digne Frere , et digne Rival ,
Du Dieu qui lance le tonnerre ,
Est-ce donc pour vanger tant de Monstres di
vers ,
Dont ce bras a purgé la Terre ,
Que l'on me livre en proye aux Monstres des
Enfers
Pluton
Si tes Exploits sont grands , voy quelle en est la
gloire ,
Ton nom sur les trépas remporte la victoire ;
Comme nous il est immortel ;
Mais , d'une égale main , puisqu'il faut qu'on
dispense ,
Et la peine et la récompense ;´
J'attends plus de Pluton qu'un tourment érernel.
Pluton reproche à Thésée le coupable
projet qu'il a formé avec Pirythoüs d'enlever
Proserpine. Thésée se justifie autant
qu'il lui est possible . Pluton le renvoie au
Tribunal des trois Juges des Enfers.Cette
Filij Scene
246 MERCURE DE FRANCE
Scene est sans contredit la plus belle de
la Tragédie , tant du côté du Poëte que
de celui du Musicien.
Pluton invite toutes les Divinitez infer
nales à le vanger. Thésée revient , suivi
de la Furie vangeresse ; ne pouvant revoir
que par le secours de la mort. Il
l'implore ; les Parques lui parlent ainsi ;
son ami
Du Destin le vouloir suprême ,
Amis entre nos mains la trame de tes jours ;
Mais le fatal Ciseau n'en peut trancher le cours
Qu'au redoutable instant , qu'il a marqué lui
même.
i..
Thésée ne pouvant obtenir la mort ,
implore Neptune son Pere , et lui deman
de l'exécution du serment qu'il a fait de
l'exaucer trois fois : Neptune lui ayant
ouvert la route des Enfers , il le prie de
l'en retirer. Mercure vient de la part du
Dieu des Mers ; il obtient le retour de
Thésée sur la terre , mais avant qu'il´en
sorte , il ordonne aux Parques de lui réveler
le sort que l'avenir lui garde. Ces
trois Déesses lui parlent ainsi .
Quelle soudaine horreur ton destin nous ins
pire !
Où cours-tu, malheureux Tremble, frémi d'ef
froi ;
Tu sors de l'infernal empire ,
Pou
OCTOBRE . 1733. 2241
Pour trouver les Enfers chez toi.
Ce Oracle remplit Thésée d'effroi au
Sujet de Phédre et d'Hippolyte ; qui sono
ce qu'il a de plus cher chez lui. Mercure
lui ouvre le chemin , pour remonter sur
la terre. Thésée dit en partant :
Ciel ! cachons mon retour, et trompons tous les
yeux.
Ce projet de se cacher à tout le mon
de, prépare le coup de Théatre qu'on doit
voir dans l'Acte suivant.
Le Théatre représente au III.Acte, une
partie du Palais de Thésée , sur le rivage
de la Mer.
Phedre prie Venus de lui être favorable.
Enone vient lui dire qu'Hippolyte
qu'elle a mandé , va se rendre auprès
d'elle . 漏
Hippolyte dit à Ph'dre que ce n'est
que pour obéir à ses ordres qu'il vient lui
montrer encore un objet odieux . Phédre
lui fait entendre qu'elle ne l'a jamais haï
qu'en apparence : Hippolyte se flatte de
ne l'avoir plus pour ennemie , et lui pro
met en récompense de tenir lieu de Pere à
son fils : Phédre trompée par le sens équivoque
de cette promesse , lui dit tendrement
&
Fv Hip
$ 242 MERCURE DE FRANCE
Vous pouviez jusques - là vous attendrir poun
y moi !
C'en est trop , et le Thrône , et le Fils er
Mere ,
Je range tout sous votre Loy.
Hippolyte lui répond qu'il borne toute
son ambition à regner sur le coeur d'Aricie.
Phédre détrompée par ces mots , ne
peut plus se contenir ; elle jure la mòrt
de sa Rivale. Au nom de Rivale, Hippolyte
saisi d'horreur s'écrie :
Terribles Ennemis des perfides humains ;
Dieux , si promts autrefois à les réduire en po
dre ,
Qu'attendez- vous ? Lancez la foudre
Qui la retient entre vos mains ?
Phédre au désespoir , lui dit :
Ah ! cesse par tes voeux d'allumer le tonnerre ;
Eclatte ; éveille-toi ; sors d'un honteux repos §
Rends toi digne Fils d'un Héros ,
Qui de Monstres sans nombre, a délivré la terres
El n'en est échappé qu'un seul à sa fureur ;
Frappe ; ce Monstre est dans mon coeur.
Phédre ne pouvant obtenir la mort
qu'elle demande à Hippolyte, se jette sur
son Epée , Hippolyte la lui arrache,Thé
séc
OCTOBRE. 1733. 2243
sée arrive et trouve son Fils l'Epée à la
main contre sa femme; il se rappelle aussi-
tôt la prédiction des Parques , ce qu'il
fait connoître par ces mots :
O'trop fatal oracle !
Je trouve les malheurs que m'a prédits l'Enfer.
Il interroge Phédre, qui le quitte après
lui avoir dit :
L'Amour est outrage ;
Que l'Amour soit vange
Hippolyte interrogé à son tour , n'ose
lui révéler sa honte , et lui demande un
exil éternel. Thésée ordonne à Enone de
ne lui rien cacher. Enone pour sauver
les jours et la gloire de la Reine , parle
ainsi à Thésée :
Un désespoir affreux ; ..... pouvez - vous l'ígnorer
Vous n'en avez été qu'un témoin trop fidelle
Je n'ose accuser votre Fils ...
Mais la Reine ... Seigneur , ce fer armé contre
elle ;
Ne vous en a que trop appris , &c.-
Un amour funeste , &c,-
Thésée n'en veut pas sçavoir davanta
ge ; livré à son désespoir , il invoque
B vj
Neptu
2244 MERCURE DE FRANCE
Neptune et lui demande la mort d'Hippolyte
; une Troupe de Matelots qui
viennent rendre graces à Neptune du retour
de leur Roy , obligent Thésée de se
retirer, et forment le Divertissement qui
finit ce troisiéme Acte.
Au IV Acte le Théatre représente un
Bois consacré à Diane.
,
Hippolyte expose dans un Monologue
ce qui s'est passé dans l'entr'Acte , c'està-
dire , l'exil où son Pere l'a condamné.
Aricie vient se plaindre à Hippolyte
du sort qui va les separer ; Hippolyte ,
pour excuser Thésée , lui dit qu'il a demandé
lui- même cet exil , qu'elle impute
à la rigueur de son Pere. Aricie lui
répond :
Votre exil me donne la mort ,
Et c'est vous seul , ingrat , qu'il faut que j'es
accuse !
Quel soupçon ? ... Dieux puissans , faites que
je m'abuse.
Hippolyte pour se justifier de l'incons
tance dont elle l'accuse , lui fait entendre
qu'une raison secrette lui a fait demander
cet exil dont elle se plaint ; il la prie
de ne lui en pas demander davantage ; cependant
quelques mots qui lui échappent
, quoique ménagez avec art , lui em
disent
OCTOBR E. 1733. 2245*
disent assez pour lui faire pénétrer cet
odieux mystere ; il l'invite à le suivre
dans son exil en qualité d'Epouse ; elle
consent à lui donner sa foy ; ils prient
Diane de vouloir bien former leur nouvelle
chaîne. Un bruit de Cors leur annonce
l'arrivée d'une Troupe de Chasseurs
et de Chasseresses ; ils conviennent
ensemble de les prendre pour témoins
de leurs sacrez sermens ; cependant ils ne
veulent point troubler des jeux qui sont
chers à Diane leur Protectrice : Ces Chasseurs
forment une Fête qui a paru des
plus brillantes. La Fête est interrompue
par une tempête; la Mer en courroux jette
sur le rivage un Monstre furieux. Hippolyte
va le combattre ; le Monstre blessé
vomit du feu et de la fumée , & c. Tout
étant dissipé , Arice éperduë de ne voir
plus ni Hippolyte ni le Monstre tombe
évanouie ; les Chasseurs trompés par la
disparition d'Hippolyte le croient mort
ils déplorent son sort. Phedre appellée
par leurs cris , arrive ; elle leur demande
la cause de leurs plaintes ; ils lui annoncent
la mort d'Hippolyte , par ces deux
Vers :
pa
Un Monstre furieux , sorti du sein des Flots ;
: Vient de nous ravir ce Héros.
Phedre
2246 MERCURE DE FRANCE
Phédre s'accuse elle-même d'une mort
qu'elle impute à son imposture ; agitéo
de remords , elle croit entendre le tonnerre
, voir trembler la terre , et les Enfers
s'ouvrir sous ses pas ; elle finit l’Acte
par ces Vres :
›
>
"
Dieux cruels , vangeurs implacables
Suspendez un courroux qui me glace d'effroi ş
Ah ! si vous êtes équitables ,
Ne tonnez pas encor sur moi ;
La gloire d'un Héros que l'imposture opprime &
Vous demande un juste secours ;
Laissez-moi révéler à l'Auteur de ses jours ,
Et son innocence , er mon crime.
Au VeActe , le Théatre ne change qu'à
la troisiéme Scene. Les deux premieres
Scenes sont employées à apprendre aux
Spectateurs que Phédre est morte aux
yeux de Thesée , après avoir justifié Hippolyte
, comme elle l'a promis à la fin de
PActe précédent. Ce malheureux Pere
veut se précipiter dans la Mer : Neptune
Pen empêche et lui apprend que son Fils
a été sauvé par Diane. Il lui annonce que
le Destin dans le temps qu'il alloit servir
son aveugle colere , à daigné l'affranchir
de son serment. Il ajoute que ce Maître
des Dieux a ordonné en même temps
qu'un
1
1
OCTOBRE 1733. 2247
qu'un Pere si injuste soit privé pour jas
mais de la vuë d'un Fils si vertueux.
1
On a retranché ces deux premieres
Scenes qui produisoient quelque irrégula
rité contre l'unité de lieu , par le chan
gement de Scene dans le même Acte.
L'Auteur avoit prévenu l'objection dans
sa Préface; mais le Public ne s'y étant pas
prêté , il n'a pas balancé à le satisfaire.
L'Acte commence présentement par
le changement de Lieuson voit un nuage
transporter Aricie dans la Forêt qui porte
son nom ; comme elle croit avoir vû
périr Hippolyte , elle se livre toute entiere
à sa douleur , qu'elle fait éclater par
un Monologue des plus touchans , tandis
qu'elle est ensevelie dans une profon
de tristesse ; une Troupe de Bergers et de
Bergeres invitent Diane à descendre des
Cieux. Au nom de Diane , Aricie , malgré
sa douleur mortelle, sent ranimer son
zele pour la Divinité , à qui elle s'est dévouée
dès sa plus tendre enfance.
La Déesse promet un nouveau Maître
aux Peuples , pour prix de leur zele ; elle
leur ordonne d'aller préparer les plus
beaux Jeux pour le recevoir ; elle arrête
Aricie prête à se retirer. Ala voix de
Diane , les Zéphirs amenent Hyppolyte
qu'elle leur a confié , après l'avoir sauvé
du
E248 MERCURE DE FRANCE
du Monstre ; ces tendres Amans passent
tout d'un coup de la plus mortelle dou
leur à la joye la plus vive. Diane leur
rend compte de tout ce qui s'est passé au
sujet de Thesée et de Phédre . Voici comme
elle s'explique :
Neptune alloit servir une aveugle vangeance ;
Quand le Destin , dont la puissance ,
Fait trembler les Enfers, et la Terre et les Cieux,
A daigné l'affranchir d'un serment odieux ;
Qui faisoit périr l'innocence .
Phédre , aux yeux de Thésée a terminé son sort,
Et t'a rendu ta gloire en se donnant la mort.
Les Peuples d'Aricie viennent célébrer
la fête du couronnement d'Hippolyte et
d'Aricie , par leurs Chants et par leurs
Danses.
On à trouvé la Musique de cet Opéra
un peu difficile à exécuter , mais par l'habileté
des Simphonistes et des autres Musicions
, la dificulté n'en a pas empêché
l'exécution . Les Principaux Acteurs , tant
chantans , que dansans ,s'y sont surpassez.
La DellePetitpas s'y est distinguée par un
ramage de Rossignol qu'on n'a jamais
porté si loin . Le Poëte n'a pas démenti ·
ses Ouvrages précedens ; et le Musicien a
forcé les plus séveres critiques à convenir
que
C
OCTOBRE. 1733. 2249
que dans son premier Ouvrage Lyrique .
li a donné une Musique mâle et harmonieuse
; d'un caractere neuf; nous
voudrions en rouvoir donner un Extrait,
comme nous faisons du Poëme , et faire
sentir ce qu'elle a de sçavant pour l'ex-.
pression dans les Airs caracterisez , les
Tableaux , les intentions heureuses et
soutenues, comme le Choeur et la Chasse
du 4 Acte ; l'Entrée des Amours au Prologue
; le Choeur et la Simphonie du To
nerre; la Gavotte parodiée que chante la
Delle Petitpas au ier Acte ; les Enfers du
2e Acte , l'Image effrayante de la Furie
avec Thesée et le Choeur,&c. Au 3me Ac
te , le Monologue de Thesée , son invocation
à Neptune , le Frémissement des
= Flots. Le Monologue de Phedre dâns
l'Acte suivant. Celui d'Aricie , dans le S
la Bergerie , & c.
le premier Octobre la premiere
Représentation de la Tragédie nouvelle ,
intitulée : Hippolyte et Aricie. Le Poëme
est de M.le Chevalier Pellegrin , et la Musique
de M. Rameau. Le premier est déja
connu par plusieurs Ouvrages applaudis ;
et le second vient de faire voir par son
coup d'essai , dans ce genre de Musique,
qu'il peut égaler les plus grands Maîtres.
L'accueil favorable que le public a fait à
cet Opéra en fait esperer de nombreuses
Représentations : En voici l'Extrait.
L'Auteur du Poëme déclare dans sa Préface
que c'est
pour
authoriser
le caractere
qu'il
donne
à Diane
dans
la Piéce
, qu'il
a
fait
son
Prologue
. Hygin
lui en a fourni
la Fable
. Le Théatre
représente
la Forêt
d'Erymanthe
, si fameuse
par
un des trayaux
d'Hercule
. Diane
le fait
connoître
F par
1234 MERCURE DE FRANCE
par ces Vers , qu'elle addresse à ses Nym
phes et aux habitans des Bois.
Vous êtes dans ces mêmes lieux ,
Où sur un monstre furieux ,
Vn fils de Jupiter , remporta la victoire ;
Mais un monstre plus fier le soumit à son tour g
Du plus grand des Héros vous surpassez l
gloire ,
Quand vous triomphez de l'Amour.
L'Amour ne peut souffrir que Diane
le bannisse de ses Forêts ; il vient lui demander
raison de cet outrage ; Diane invoque
Jupiter son Pere,et le prie de con-
Armer le don qu'il lui a fait de l'Empire
des Forêts ; Jupiter descend au bruit du
tonnerre,et annonce à Diane que le Destin
ordonne que l'Amour regne par tout,
avec cette restriction , qu'il n'exercera sa
puissance sur les sujets de Diane qu'un
seul jour de l'année ; il ajoute que ce jour
doit être éclairé par le flambeau de l'Hymen.
Diane obéit aux Loix du Destin ;
elle ne veut pas pourtant être témoin
d'une Fête si favorable à l'Amour ; elle
annonce le sujet de la Tragédie , par ces
Vers :
Hippolyte , Aricie , exposés à périr ,
Ne fondent que sur moi leur derniere esperances
conOCTOBRE.
1733. 2235
Contre une injuste violence ,
C'est à moi de les secourir.
L'Amour entreprend de consoler les
sujets de Diane de l'absence de leur Souveraine
, par les plus doux plaisirs. Il ap
pelle par ces Vers ,les Jeux et les Amours.
Regnez , aimables jeux , regnez dans ces Forêts,
Qu'à mes voeux empressez votre zêle réponde :
Si vous, tendres Amours , faites voler ces traits ,
D'où dépend le bonheur du monde.
Cet ordre produit une Fête aussi affec
tueuse que brillante : Le Prologue finit
par ces quatre Vers , conformes aux vofontez
suprêmes du Destin; c'est l'Amour
qui parle
Par de nouveaux plaisirs , couronnons ce grand
jour ,
Au Temple de l'Hymen il faut que je vous guide
,
Qu'à cette heureuse Fête , avec lui je préside;
Que son flambeau s'allume aux flammes de l'A }
mour.
Le Théatre représente au premier Acte
de la Tragédie , un Temple consacré à
Diane.
Aricie,Princesse du Sang des Pallantides ,
expose sa situation par ce Monologue.
Fij Tem2236
MERCURE DE FRANCE
> Temple sacré , séjour tranquille
Où Diane aujourd'hui doit recevoir mes voeux
A mon coeur agité daigne servir d'azile ,
Contre un amour trop malheureux ¿
Et toi , dont malgré moi , je rappelle l'image ,
Sher Prince , si mes voeux ne te sont pas offerts;
Du moins j'en apporte l'hommage
A la Déesse que tu sers,
Temple sacré , & c,
Hyppolite vient assûrer Aricie de l'in
dignation que lui inspire la violence que
Phédre lui fait par l'ordre que Thesée son
Pere lui en a donné à son départ de Tréséne
; il déplore son sort d'une maniere
qui le fait soupçonner d'être Amant ;
Voici comment il le fait connoître.
Dans un Pere irrité , confondez -vous son Fils
Et comptez- vous mon coeur entre vos ennemis
& c.
Je pourrois vous hair quelle injustice extreme
!
Je sens pour vous une pitié ,
Aussi tendre que l'amour même."
: Cette déclaration a paru bien ménagée
de part et d'autre.
Les Prêtresses de Diane forment la Fêe
de ce premier Acte,
Phodre
OCTOBRE.´´ 1733.´´ £ 237ì
Phedre vient ensuite féliciter Aricie
sur la gloire qu'elle va acquerir en s'unissant
aux Immortels , par les voeux
qu'elle doit offrir à Diane. Aricie fait entendre
que ces voeux n'étant pas libres
ils ne sont pas dignes des Dieux ; les Prêtresses
de Diane se rangent de son parti,
Phédre fait sonner la Trompette pour
punir leur désobéïssance ; les Prêtresses
invoquent les Dieux pour la punir ellemême
de la violence qu'elle veut leur
faire. Diane descend au bruit du Tonnerre
, comme fille de Jupiter ; ce qu'elle
fait connoître par ces Vers , addressez à
ses Prêtresses :
售
Vous voyez Jupiter se déclarer mon Pere;
Sa foudre vole devant moy.
La Déesse après avoir rassuré ses Prêtresses
, menace Phedre de la vangeance
des Dieux , et prend Hippolyte et Aricie
sous sa protection . Elle remonte dans le
ciel. Les Prêtresses rentrent dans le Temple
; Hippolyte emmene Aricie. Phédre
abandonne à ses transports jaloux, qu'el¬
le fait connoître par ces Vers :
Que voi -je ? contre moi tous les Dieux soat
armez !
Ma Rivale me brave! Elle suit Hippolyte !
Fiij
Ah !
2238 MERCURE DE FRANCE
Ah ! plus je voi leurs coeurs, l'un pour l'aptres
enflammez *
Plus mon jaloux transport s'irrite ,
Que rien n'échappe à ma fureur , &c.
Arcas vient annoncer que Thésée es
descendu dans les Enfers : Il s'exprime
ainsi :
La terre sous ses pas ouverte .'
A favorisé ses efforts ;
Et d'affreux heurlemens , sortis des sombre
bords ,
Du plus grand des Mortels , m'ont confirmé la
perte
J
Anone fait entendre à Phédre qu'elle
peut aimer sans crime , et concevoir de
l'espérance, en offrant son Thrône à Hippolyte,
Phédre se livre à un espoir si flatteur.
Au II Acte, le Théatre représente l'entrée
des Enfers. Thésée tourmenté par
une Furie , expose ce qui s'est passé par
çes Vers :
Dieux! n'est- ce pas assez des maux que j'ai souf
ferts ?
J'ai vuPirythous déchiré par Cerbere ;
J'ai vu ce Monstre affreux , trancher des jours
si chers ,
Sans daigner dans mon sang, assouvir sa coferes
J'enOCTOBRE
17388 · 1239
J'attendois la mort sans effroi ,
Et la mort fuyoit loin de moi.
La Furie conduit Thésée au pied du
Thrône de Pluton : Thésée dit à ce Me
narque des Enfers :
Inéxorable Roy de l'Empire infernal ',
Digne Frere , et digne Rival ,
Du Dieu qui lance le tonnerre ,
Est-ce donc pour vanger tant de Monstres di
vers ,
Dont ce bras a purgé la Terre ,
Que l'on me livre en proye aux Monstres des
Enfers
Pluton
Si tes Exploits sont grands , voy quelle en est la
gloire ,
Ton nom sur les trépas remporte la victoire ;
Comme nous il est immortel ;
Mais , d'une égale main , puisqu'il faut qu'on
dispense ,
Et la peine et la récompense ;´
J'attends plus de Pluton qu'un tourment érernel.
Pluton reproche à Thésée le coupable
projet qu'il a formé avec Pirythoüs d'enlever
Proserpine. Thésée se justifie autant
qu'il lui est possible . Pluton le renvoie au
Tribunal des trois Juges des Enfers.Cette
Filij Scene
246 MERCURE DE FRANCE
Scene est sans contredit la plus belle de
la Tragédie , tant du côté du Poëte que
de celui du Musicien.
Pluton invite toutes les Divinitez infer
nales à le vanger. Thésée revient , suivi
de la Furie vangeresse ; ne pouvant revoir
que par le secours de la mort. Il
l'implore ; les Parques lui parlent ainsi ;
son ami
Du Destin le vouloir suprême ,
Amis entre nos mains la trame de tes jours ;
Mais le fatal Ciseau n'en peut trancher le cours
Qu'au redoutable instant , qu'il a marqué lui
même.
i..
Thésée ne pouvant obtenir la mort ,
implore Neptune son Pere , et lui deman
de l'exécution du serment qu'il a fait de
l'exaucer trois fois : Neptune lui ayant
ouvert la route des Enfers , il le prie de
l'en retirer. Mercure vient de la part du
Dieu des Mers ; il obtient le retour de
Thésée sur la terre , mais avant qu'il´en
sorte , il ordonne aux Parques de lui réveler
le sort que l'avenir lui garde. Ces
trois Déesses lui parlent ainsi .
Quelle soudaine horreur ton destin nous ins
pire !
Où cours-tu, malheureux Tremble, frémi d'ef
froi ;
Tu sors de l'infernal empire ,
Pou
OCTOBRE . 1733. 2241
Pour trouver les Enfers chez toi.
Ce Oracle remplit Thésée d'effroi au
Sujet de Phédre et d'Hippolyte ; qui sono
ce qu'il a de plus cher chez lui. Mercure
lui ouvre le chemin , pour remonter sur
la terre. Thésée dit en partant :
Ciel ! cachons mon retour, et trompons tous les
yeux.
Ce projet de se cacher à tout le mon
de, prépare le coup de Théatre qu'on doit
voir dans l'Acte suivant.
Le Théatre représente au III.Acte, une
partie du Palais de Thésée , sur le rivage
de la Mer.
Phedre prie Venus de lui être favorable.
Enone vient lui dire qu'Hippolyte
qu'elle a mandé , va se rendre auprès
d'elle . 漏
Hippolyte dit à Ph'dre que ce n'est
que pour obéir à ses ordres qu'il vient lui
montrer encore un objet odieux . Phédre
lui fait entendre qu'elle ne l'a jamais haï
qu'en apparence : Hippolyte se flatte de
ne l'avoir plus pour ennemie , et lui pro
met en récompense de tenir lieu de Pere à
son fils : Phédre trompée par le sens équivoque
de cette promesse , lui dit tendrement
&
Fv Hip
$ 242 MERCURE DE FRANCE
Vous pouviez jusques - là vous attendrir poun
y moi !
C'en est trop , et le Thrône , et le Fils er
Mere ,
Je range tout sous votre Loy.
Hippolyte lui répond qu'il borne toute
son ambition à regner sur le coeur d'Aricie.
Phédre détrompée par ces mots , ne
peut plus se contenir ; elle jure la mòrt
de sa Rivale. Au nom de Rivale, Hippolyte
saisi d'horreur s'écrie :
Terribles Ennemis des perfides humains ;
Dieux , si promts autrefois à les réduire en po
dre ,
Qu'attendez- vous ? Lancez la foudre
Qui la retient entre vos mains ?
Phédre au désespoir , lui dit :
Ah ! cesse par tes voeux d'allumer le tonnerre ;
Eclatte ; éveille-toi ; sors d'un honteux repos §
Rends toi digne Fils d'un Héros ,
Qui de Monstres sans nombre, a délivré la terres
El n'en est échappé qu'un seul à sa fureur ;
Frappe ; ce Monstre est dans mon coeur.
Phédre ne pouvant obtenir la mort
qu'elle demande à Hippolyte, se jette sur
son Epée , Hippolyte la lui arrache,Thé
séc
OCTOBRE. 1733. 2243
sée arrive et trouve son Fils l'Epée à la
main contre sa femme; il se rappelle aussi-
tôt la prédiction des Parques , ce qu'il
fait connoître par ces mots :
O'trop fatal oracle !
Je trouve les malheurs que m'a prédits l'Enfer.
Il interroge Phédre, qui le quitte après
lui avoir dit :
L'Amour est outrage ;
Que l'Amour soit vange
Hippolyte interrogé à son tour , n'ose
lui révéler sa honte , et lui demande un
exil éternel. Thésée ordonne à Enone de
ne lui rien cacher. Enone pour sauver
les jours et la gloire de la Reine , parle
ainsi à Thésée :
Un désespoir affreux ; ..... pouvez - vous l'ígnorer
Vous n'en avez été qu'un témoin trop fidelle
Je n'ose accuser votre Fils ...
Mais la Reine ... Seigneur , ce fer armé contre
elle ;
Ne vous en a que trop appris , &c.-
Un amour funeste , &c,-
Thésée n'en veut pas sçavoir davanta
ge ; livré à son désespoir , il invoque
B vj
Neptu
2244 MERCURE DE FRANCE
Neptune et lui demande la mort d'Hippolyte
; une Troupe de Matelots qui
viennent rendre graces à Neptune du retour
de leur Roy , obligent Thésée de se
retirer, et forment le Divertissement qui
finit ce troisiéme Acte.
Au IV Acte le Théatre représente un
Bois consacré à Diane.
,
Hippolyte expose dans un Monologue
ce qui s'est passé dans l'entr'Acte , c'està-
dire , l'exil où son Pere l'a condamné.
Aricie vient se plaindre à Hippolyte
du sort qui va les separer ; Hippolyte ,
pour excuser Thésée , lui dit qu'il a demandé
lui- même cet exil , qu'elle impute
à la rigueur de son Pere. Aricie lui
répond :
Votre exil me donne la mort ,
Et c'est vous seul , ingrat , qu'il faut que j'es
accuse !
Quel soupçon ? ... Dieux puissans , faites que
je m'abuse.
Hippolyte pour se justifier de l'incons
tance dont elle l'accuse , lui fait entendre
qu'une raison secrette lui a fait demander
cet exil dont elle se plaint ; il la prie
de ne lui en pas demander davantage ; cependant
quelques mots qui lui échappent
, quoique ménagez avec art , lui em
disent
OCTOBR E. 1733. 2245*
disent assez pour lui faire pénétrer cet
odieux mystere ; il l'invite à le suivre
dans son exil en qualité d'Epouse ; elle
consent à lui donner sa foy ; ils prient
Diane de vouloir bien former leur nouvelle
chaîne. Un bruit de Cors leur annonce
l'arrivée d'une Troupe de Chasseurs
et de Chasseresses ; ils conviennent
ensemble de les prendre pour témoins
de leurs sacrez sermens ; cependant ils ne
veulent point troubler des jeux qui sont
chers à Diane leur Protectrice : Ces Chasseurs
forment une Fête qui a paru des
plus brillantes. La Fête est interrompue
par une tempête; la Mer en courroux jette
sur le rivage un Monstre furieux. Hippolyte
va le combattre ; le Monstre blessé
vomit du feu et de la fumée , & c. Tout
étant dissipé , Arice éperduë de ne voir
plus ni Hippolyte ni le Monstre tombe
évanouie ; les Chasseurs trompés par la
disparition d'Hippolyte le croient mort
ils déplorent son sort. Phedre appellée
par leurs cris , arrive ; elle leur demande
la cause de leurs plaintes ; ils lui annoncent
la mort d'Hippolyte , par ces deux
Vers :
pa
Un Monstre furieux , sorti du sein des Flots ;
: Vient de nous ravir ce Héros.
Phedre
2246 MERCURE DE FRANCE
Phédre s'accuse elle-même d'une mort
qu'elle impute à son imposture ; agitéo
de remords , elle croit entendre le tonnerre
, voir trembler la terre , et les Enfers
s'ouvrir sous ses pas ; elle finit l’Acte
par ces Vres :
›
>
"
Dieux cruels , vangeurs implacables
Suspendez un courroux qui me glace d'effroi ş
Ah ! si vous êtes équitables ,
Ne tonnez pas encor sur moi ;
La gloire d'un Héros que l'imposture opprime &
Vous demande un juste secours ;
Laissez-moi révéler à l'Auteur de ses jours ,
Et son innocence , er mon crime.
Au VeActe , le Théatre ne change qu'à
la troisiéme Scene. Les deux premieres
Scenes sont employées à apprendre aux
Spectateurs que Phédre est morte aux
yeux de Thesée , après avoir justifié Hippolyte
, comme elle l'a promis à la fin de
PActe précédent. Ce malheureux Pere
veut se précipiter dans la Mer : Neptune
Pen empêche et lui apprend que son Fils
a été sauvé par Diane. Il lui annonce que
le Destin dans le temps qu'il alloit servir
son aveugle colere , à daigné l'affranchir
de son serment. Il ajoute que ce Maître
des Dieux a ordonné en même temps
qu'un
1
1
OCTOBRE 1733. 2247
qu'un Pere si injuste soit privé pour jas
mais de la vuë d'un Fils si vertueux.
1
On a retranché ces deux premieres
Scenes qui produisoient quelque irrégula
rité contre l'unité de lieu , par le chan
gement de Scene dans le même Acte.
L'Auteur avoit prévenu l'objection dans
sa Préface; mais le Public ne s'y étant pas
prêté , il n'a pas balancé à le satisfaire.
L'Acte commence présentement par
le changement de Lieuson voit un nuage
transporter Aricie dans la Forêt qui porte
son nom ; comme elle croit avoir vû
périr Hippolyte , elle se livre toute entiere
à sa douleur , qu'elle fait éclater par
un Monologue des plus touchans , tandis
qu'elle est ensevelie dans une profon
de tristesse ; une Troupe de Bergers et de
Bergeres invitent Diane à descendre des
Cieux. Au nom de Diane , Aricie , malgré
sa douleur mortelle, sent ranimer son
zele pour la Divinité , à qui elle s'est dévouée
dès sa plus tendre enfance.
La Déesse promet un nouveau Maître
aux Peuples , pour prix de leur zele ; elle
leur ordonne d'aller préparer les plus
beaux Jeux pour le recevoir ; elle arrête
Aricie prête à se retirer. Ala voix de
Diane , les Zéphirs amenent Hyppolyte
qu'elle leur a confié , après l'avoir sauvé
du
E248 MERCURE DE FRANCE
du Monstre ; ces tendres Amans passent
tout d'un coup de la plus mortelle dou
leur à la joye la plus vive. Diane leur
rend compte de tout ce qui s'est passé au
sujet de Thesée et de Phédre . Voici comme
elle s'explique :
Neptune alloit servir une aveugle vangeance ;
Quand le Destin , dont la puissance ,
Fait trembler les Enfers, et la Terre et les Cieux,
A daigné l'affranchir d'un serment odieux ;
Qui faisoit périr l'innocence .
Phédre , aux yeux de Thésée a terminé son sort,
Et t'a rendu ta gloire en se donnant la mort.
Les Peuples d'Aricie viennent célébrer
la fête du couronnement d'Hippolyte et
d'Aricie , par leurs Chants et par leurs
Danses.
On à trouvé la Musique de cet Opéra
un peu difficile à exécuter , mais par l'habileté
des Simphonistes et des autres Musicions
, la dificulté n'en a pas empêché
l'exécution . Les Principaux Acteurs , tant
chantans , que dansans ,s'y sont surpassez.
La DellePetitpas s'y est distinguée par un
ramage de Rossignol qu'on n'a jamais
porté si loin . Le Poëte n'a pas démenti ·
ses Ouvrages précedens ; et le Musicien a
forcé les plus séveres critiques à convenir
que
C
OCTOBRE. 1733. 2249
que dans son premier Ouvrage Lyrique .
li a donné une Musique mâle et harmonieuse
; d'un caractere neuf; nous
voudrions en rouvoir donner un Extrait,
comme nous faisons du Poëme , et faire
sentir ce qu'elle a de sçavant pour l'ex-.
pression dans les Airs caracterisez , les
Tableaux , les intentions heureuses et
soutenues, comme le Choeur et la Chasse
du 4 Acte ; l'Entrée des Amours au Prologue
; le Choeur et la Simphonie du To
nerre; la Gavotte parodiée que chante la
Delle Petitpas au ier Acte ; les Enfers du
2e Acte , l'Image effrayante de la Furie
avec Thesée et le Choeur,&c. Au 3me Ac
te , le Monologue de Thesée , son invocation
à Neptune , le Frémissement des
= Flots. Le Monologue de Phedre dâns
l'Acte suivant. Celui d'Aricie , dans le S
la Bergerie , & c.
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Résumé : Hypolite et Aricie, Extrait, [titre d'après la table]
Le 1er octobre, l'Académie Royale de Musique a présenté la première représentation de la tragédie en musique 'Hippolyte et Aricie'. Le poème est de M. le Chevalier Pellegrin et la musique de M. Rameau. Le public a accueilli favorablement cet opéra, laissant espérer de nombreuses représentations. Le prologue, inspiré par Hygin, se déroule dans la forêt d'Érymanthe. Diane y évoque la victoire d'Hercule sur un monstre et l'invincibilité de l'amour. Jupiter descend et annonce que l'amour régnera partout, sauf un jour par an, éclairé par le flambeau de l'Hymen. Diane, obéissant au destin, quitte la scène. Dans la tragédie, Aricie, princesse des Pallantides, expose sa situation dans un monologue. Hippolyte assure Aricie de son indignation face à la violence de Phèdre, ordonnée par Thésée. Phèdre félicite Aricie sur sa future gloire, mais Aricie refuse ces vœux forcés. Diane descend et menace Phèdre, protégeant Hippolyte et Aricie. Phèdre, jalouse, se livre à ses transports. Arcas annonce que Thésée est descendu aux Enfers. Thésée, tourmenté par une Furie, expose ses malheurs à Pluton, qui le renvoie devant les juges des Enfers. Thésée implore Neptune, qui lui permet de revenir sur terre. Les Parques révèlent à Thésée que les Enfers l'attendent chez lui. Au troisième acte, Phèdre prie Vénus. Hippolyte, venu sur ordre de Phèdre, refuse ses avances. Phèdre, déçue, jure la mort d'Aricie. Thésée arrive et, rappelant la prédiction des Parques, ordonne à Enone de révéler la vérité. Enone accuse Phèdre d'amour funeste. Thésée, désespéré, invoque Neptune pour la mort d'Hippolyte. Au quatrième acte, Hippolyte, en exil, expose sa situation à Aricie. Ils décident de se marier et prient Diane. Une tempête apporte un monstre marin. Hippolyte combat le monstre, mais disparaît. Aricie, évanouie, est secourue par Phèdre, informée de la mort d'Hippolyte. Dans le cinquième acte, il est révélé que Phèdre est morte après avoir innocenté Hippolyte devant Thésée, son père. Thésée, désespéré, tente de se suicider mais est arrêté par Neptune, qui lui annonce qu'Hippolyte a été sauvé par Diane et que Thésée est puni pour son injustice. La scène change ensuite pour montrer Aricie, qui pleure la perte d'Hippolyte. Diane apparaît, ramène Hippolyte à la vie et les unit avec Aricie. La musique de l'opéra est décrite comme difficile mais bien exécutée, avec des performances remarquables des acteurs et musiciens. Le poète et le musicien sont loués pour leur travail, notamment pour les airs caractéristiques, les tableaux et les chœurs.
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214
p. 2249-2250
« On apprend de Rome qu'on y fit le 7 du mois dernier, l'ouverture du Théatre [...] »
Début :
On apprend de Rome qu'on y fit le 7 du mois dernier, l'ouverture du Théatre [...]
Mots clefs :
Comédie, Comédiens, Théâtre de Viterbe, Représentation, Fausse antipathie, Dangeville
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « On apprend de Rome qu'on y fit le 7 du mois dernier, l'ouverture du Théatre [...] »
On apprend de Rome qu'on y fit le 7
du mois dernier , l'ouverture du Théatre
de Viterbe, par la premiere Représentation
d'un Opera , intitulé : Il Siroe , qui
fut tres -applaudi .
Le z. de ce mois , les Comédiens François
donnerent la premiere Représentation de la
Fausse Antipatie , Comédie en Vers , en trois
Actes,avec un Prologue , Cette Piece est de M. de
la
4150 MERCURE DE FRANCE
la Chaussée. Le Public a beaucoup applaudi à cer
Ouvrage, qu'il trouve ingenieux , plein d'esprit er
très-bien écrit. Nous en parlerons plus au long.
Ils ont remis depuis peu une petite Comédie de
feu M. Dancourt , sous le titre du Tuteur, en um
Acte.
Les mêmes Comédiens ont aussi remis an
Théatre , La Comédie des Comédiens , et l'Amour
Charlatan, du même Auteur , qui furent goûtées
dans leur nouveauté en 1710. et qu'on revoit
avec plaisir . La Dile Dangeville y joue le
Rôle de l'Amour , avec les graces et la legereté
tout le monde lui connoît.
que
On va jouer incessamment sur le même Théatre
, le Badinage , Comédie nouvelle , dont nous
parlerons dans le prochain Mercure.
du mois dernier , l'ouverture du Théatre
de Viterbe, par la premiere Représentation
d'un Opera , intitulé : Il Siroe , qui
fut tres -applaudi .
Le z. de ce mois , les Comédiens François
donnerent la premiere Représentation de la
Fausse Antipatie , Comédie en Vers , en trois
Actes,avec un Prologue , Cette Piece est de M. de
la
4150 MERCURE DE FRANCE
la Chaussée. Le Public a beaucoup applaudi à cer
Ouvrage, qu'il trouve ingenieux , plein d'esprit er
très-bien écrit. Nous en parlerons plus au long.
Ils ont remis depuis peu une petite Comédie de
feu M. Dancourt , sous le titre du Tuteur, en um
Acte.
Les mêmes Comédiens ont aussi remis an
Théatre , La Comédie des Comédiens , et l'Amour
Charlatan, du même Auteur , qui furent goûtées
dans leur nouveauté en 1710. et qu'on revoit
avec plaisir . La Dile Dangeville y joue le
Rôle de l'Amour , avec les graces et la legereté
tout le monde lui connoît.
que
On va jouer incessamment sur le même Théatre
, le Badinage , Comédie nouvelle , dont nous
parlerons dans le prochain Mercure.
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Résumé : « On apprend de Rome qu'on y fit le 7 du mois dernier, l'ouverture du Théatre [...] »
Le texte décrit des événements récents dans le monde du théâtre à Rome et à Paris. À Rome, le Théâtre de Viterbe a été inauguré le 7 du mois précédent avec la représentation de l'opéra 'Il Siroe', qui a été très applaudie. À Paris, le 20 du mois, les Comédiens Français ont présenté la première de 'La Fausse Antipathie', une comédie en vers en trois actes avec un prologue, écrite par M. de la Chaussée. Cette pièce a été bien accueillie pour son ingéniosité, son esprit et sa qualité d'écriture. Les Comédiens Français ont également repris plusieurs œuvres, dont 'Le Tuteur' de feu M. Dancourt, 'La Comédie des Comédiens' et 'L'Amour Charlatan', toutes deux de l'auteur et jouées avec succès en 1710. La comédienne Dangeville a interprété le rôle de l'Amour avec grâce et légèreté. Une nouvelle comédie intitulée 'Le Badinage' est prévue pour être jouée prochainement.
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215
p. 2250
Vers déclamez à la Reine, par le sieur Poisson, Comédien, que S. M. reçût avec bonté le 22. Septembre dernier.
Début :
Le Comique Poisson, qui partage la joye, [...]
Mots clefs :
Reine, Actrices
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Vers déclamez à la Reine, par le sieur Poisson, Comédien, que S. M. reçût avec bonté le 22. Septembre dernier.
Vers déclamez à la Reine , par le sieur
Poisson , Comédien , que S. M. reçûz
avec bonié le 22. Septembre dernier.
LE Comique Poisson , qui partage la joye ,
Qu'à Votre Majesté , le juste Ciel envoye ,
Ose vous présenter ce Placet en petit.
Sa femme est sage et belle , à ce que chacun dit;
Daignez lamettre au rangdes Actrices bien nées
Pour celebrer le jour des Vertus couronnées.
Poisson , Comédien , que S. M. reçûz
avec bonié le 22. Septembre dernier.
LE Comique Poisson , qui partage la joye ,
Qu'à Votre Majesté , le juste Ciel envoye ,
Ose vous présenter ce Placet en petit.
Sa femme est sage et belle , à ce que chacun dit;
Daignez lamettre au rangdes Actrices bien nées
Pour celebrer le jour des Vertus couronnées.
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216
p. 2250-2251
« Voici la Description de la Décoration du Temple du Goût, faite pour la Piece qui porte ce [...] »
Début :
Voici la Description de la Décoration du Temple du Goût, faite pour la Piece qui porte ce [...]
Mots clefs :
Décoration, Théâtre italien
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Voici la Description de la Décoration du Temple du Goût, faite pour la Piece qui porte ce [...] »
Voici la Description de la Décoration dư
Temple du Gout , faite pour la Piece qui porte ce
titre , représentée sur le Théatre Italien.
Cette Décoration forme sur le devant un Plan
quarré , et le Sanctuaire où est l'Autel , un Plan
Octogone, toute l'ordonnance est un ordre com
posé
OCTOBRE. 17357 2259
posé. Les Colomnes feintes de Marbre verd, song
revét és jusques au- delà du tiers de la hauteur ,
de Palmiers et Lauriers alternativement , et les
autres de grandes Armures en Cartouche , dans
Jesquels sont gravés des Trophées d'Instrumene
de tous les Arts , Sur le devant , à la droite et à la
gauche du Théatre, sont placez Marot et la Fon
taine, ensuite Rabelais , et Momus, Moliere et Tha
tie. Cette Muse lui présente un Laurier. Vers le
Sanctuaire , on voit Racine et Corneille, couronnez
par Melpomene. Au côté opposé , sont les
trois Muses Françoises , Me de Villedieu, M. Des
Houlieres , et Me Dacier. Autour de l'Autel sout
représentez Anacreon, Virgile. Horace et Homere.
Toutes ces Figures sont peintes en Marbre blane
sur des piedestaux de Marbre de Sarrancolin.
Temple du Gout , faite pour la Piece qui porte ce
titre , représentée sur le Théatre Italien.
Cette Décoration forme sur le devant un Plan
quarré , et le Sanctuaire où est l'Autel , un Plan
Octogone, toute l'ordonnance est un ordre com
posé
OCTOBRE. 17357 2259
posé. Les Colomnes feintes de Marbre verd, song
revét és jusques au- delà du tiers de la hauteur ,
de Palmiers et Lauriers alternativement , et les
autres de grandes Armures en Cartouche , dans
Jesquels sont gravés des Trophées d'Instrumene
de tous les Arts , Sur le devant , à la droite et à la
gauche du Théatre, sont placez Marot et la Fon
taine, ensuite Rabelais , et Momus, Moliere et Tha
tie. Cette Muse lui présente un Laurier. Vers le
Sanctuaire , on voit Racine et Corneille, couronnez
par Melpomene. Au côté opposé , sont les
trois Muses Françoises , Me de Villedieu, M. Des
Houlieres , et Me Dacier. Autour de l'Autel sout
représentez Anacreon, Virgile. Horace et Homere.
Toutes ces Figures sont peintes en Marbre blane
sur des piedestaux de Marbre de Sarrancolin.
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Résumé : « Voici la Description de la Décoration du Temple du Goût, faite pour la Piece qui porte ce [...] »
Le Temple du Goût, conçu pour une pièce représentée sur le Théâtre Italien, présente une décoration architecturale spécifique. La salle principale est carrée, tandis que le sanctuaire est octogonal. Les colonnes feintes en marbre verd alternent entre des palmiers et des lauriers, et d'autres colonnes affichent des armures en cartouche avec des trophées d'instruments des arts. À l'avant du théâtre, des figures telles que Marot, la Fontaine, Rabelais, Momus, Molière et Thalie sont représentées. Thalie reçoit un laurier d'une Muse. Vers le sanctuaire, Racine et Corneille sont couronnés par Melpomène. Les trois Muses françaises, Madame de Villedieu, Monsieur Des Houlières et Madame Dacier, sont également présentes. Autour de l'autel, Anacréon, Virgile, Horace et Homère sont représentés. Toutes ces figures sont peintes en marbre blanc sur des piédestaux en marbre de Sarrancolin.
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217
p. 2466-2469
« Le 11. Novembre, Fête de S. Martin, l'Academie Royale de Musique, donna [...] »
Début :
Le 11. Novembre, Fête de S. Martin, l'Academie Royale de Musique, donna [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique, Vienne, Naples, Théâtre-Français, Comédiens-Français, Comédiens-Italiens
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 11. Novembre, Fête de S. Martin, l'Academie Royale de Musique, donna [...] »
E Novembre , Fête de S. Martin ,
L'Academie Royale de Musique, don
na le premier Bal public qu'on donne
tous les ans à pareil jour , et qu'on con
tinuë pendant differens jours jusqu'à l'Avent.
On les réprend ordinairement à la
Fête des Rois jusqu'à la fin du Carnaval.
Le 17.la même Académie donna la 21 .
Représentation de l'Opera d'Hippolyte et
Aricie , dont il a été parlé , et le 19. Elle
remit au Théatre Issé , Pastorale Heroique
, qui n'avoit pas été reprise depuis
le mois de Septembre
1719. Cette Piece, dont le Poëme est de feu M. de la Mothe,
et la Musique de M. d'Estouches
Sur-
Intendant
de la Musique
du Roi , est
reçue du Public avec de grands applaudissemens
; la Dlle le Maure y jouë le
principal
rolle ; les autres sont aussi parfaitement
bien remplis
: Nous en parle
tons
NOVEMBRE. 1733. 2467
tons plus au long. On n'a pas cessé les
Représentations d'Hippolyte et Aricie , on
joue actuellement cette Piece tous les
Jeudis.
On apprend de Vienne , qu'on y a représenté
devant la Cour Imperiale l'Opera
de Demophon , avec un grand succès
le 4. de ce mois .
On apprend aussi de Londres , qu'on
y a représenté devant le Roi et la Famille
Royale, avec un fort grand succès, lenou
vel Opera de Semiramis.
Le 1. Octobre , on représenta à Naples
sur le Théatre de S. Barthelemy , le nouvel
Opera intitulé , Il Pastor Sfortunato.
Le Théatre François n'a rien donné de
nouveau depuis assez long - tems ; on a
seulement remis au Théatre depuis peu ,
une ancienne Comedie en vers et en cinq
Actes , de feu M. Dancour , intitulée La
Trahison punie , dans laquelle il y a un
rôle de Suivante , rempli autrefois par
Mlle Desmarres , dont la Dlle d'Angeville,
sa Niéce , rappelle aujourd'hui parfaitement
le souvenir , à la grande satisfaction
des Spectateurs.
Le 23. de ce mois on donna enfin sur
CO
1458 MERCURE DE FRANCE
ce Théatre la premiere Représentation
d'une Piece en un Acte , en Vers de M.
de Boissy , intitulée le Badinage, que nous
avons déja annoncée, et depuis long- tems
promise , elle est dans le goût des autres
Parodies de cet Auteur. La critique de
celle - ci , bien plus severe que badine
tombe sur le nouvel Opera d'Hyppolite
et Avicie.
Le 3. Novembre les Comediens François
représenterent à Fontainebleau Esope
à la Cour , et Crispin Médecin.
Le s . Heraclius , et le Rendez- vous .
Le 9. L'Avare , et la Comtesse d'Escarbagnas.
Le 11. L'Andrienne , & Crispin bel
esprit.
Le 16. La Tragedie de Guftave et le
Dédit.
Le 18. L'Ecole des Maris et les Bourgeoises
de Qualité.
Les Comediens Italiens , représenterent
fur le même Théatre , la Comedie du
Prince malade , ou les Jeux Oylmpiques ,
ornée de quatre Intermedes , qui fut suivie
des Effets du Dépit.
Le 14. Les Quatre Semblables , Comedie
du sieur Dominique qui fut fort goutée ,
et l'Ecole des Meres.
Le
NOVEMBRE. 1733. 2469
Le 21. Arlequin apprentif Philosophe , et
la petite Piece d'Arlequin Voleur.
Le 29. Novembre , les Comediens Italiens
firent l'ouverture de leur Théatre à
Paris, après leur retour de Fontainebleau,
par la Comedie de Timon le Misantrope,
par la petite Piéce du Retour de tendresse.
Le 30. ils donnerent une petite Piece
nouvelle d'un Acte , en Vaudevilles, avec
des divertissemens de chants et de danses
intitulée Hyppolite et Aricie , Parodie de
Opera qui porte le même nom ; on ca
parlera plus au long.
L'Academie Royale de Musique, don
na le premier Bal public qu'on donne
tous les ans à pareil jour , et qu'on con
tinuë pendant differens jours jusqu'à l'Avent.
On les réprend ordinairement à la
Fête des Rois jusqu'à la fin du Carnaval.
Le 17.la même Académie donna la 21 .
Représentation de l'Opera d'Hippolyte et
Aricie , dont il a été parlé , et le 19. Elle
remit au Théatre Issé , Pastorale Heroique
, qui n'avoit pas été reprise depuis
le mois de Septembre
1719. Cette Piece, dont le Poëme est de feu M. de la Mothe,
et la Musique de M. d'Estouches
Sur-
Intendant
de la Musique
du Roi , est
reçue du Public avec de grands applaudissemens
; la Dlle le Maure y jouë le
principal
rolle ; les autres sont aussi parfaitement
bien remplis
: Nous en parle
tons
NOVEMBRE. 1733. 2467
tons plus au long. On n'a pas cessé les
Représentations d'Hippolyte et Aricie , on
joue actuellement cette Piece tous les
Jeudis.
On apprend de Vienne , qu'on y a représenté
devant la Cour Imperiale l'Opera
de Demophon , avec un grand succès
le 4. de ce mois .
On apprend aussi de Londres , qu'on
y a représenté devant le Roi et la Famille
Royale, avec un fort grand succès, lenou
vel Opera de Semiramis.
Le 1. Octobre , on représenta à Naples
sur le Théatre de S. Barthelemy , le nouvel
Opera intitulé , Il Pastor Sfortunato.
Le Théatre François n'a rien donné de
nouveau depuis assez long - tems ; on a
seulement remis au Théatre depuis peu ,
une ancienne Comedie en vers et en cinq
Actes , de feu M. Dancour , intitulée La
Trahison punie , dans laquelle il y a un
rôle de Suivante , rempli autrefois par
Mlle Desmarres , dont la Dlle d'Angeville,
sa Niéce , rappelle aujourd'hui parfaitement
le souvenir , à la grande satisfaction
des Spectateurs.
Le 23. de ce mois on donna enfin sur
CO
1458 MERCURE DE FRANCE
ce Théatre la premiere Représentation
d'une Piece en un Acte , en Vers de M.
de Boissy , intitulée le Badinage, que nous
avons déja annoncée, et depuis long- tems
promise , elle est dans le goût des autres
Parodies de cet Auteur. La critique de
celle - ci , bien plus severe que badine
tombe sur le nouvel Opera d'Hyppolite
et Avicie.
Le 3. Novembre les Comediens François
représenterent à Fontainebleau Esope
à la Cour , et Crispin Médecin.
Le s . Heraclius , et le Rendez- vous .
Le 9. L'Avare , et la Comtesse d'Escarbagnas.
Le 11. L'Andrienne , & Crispin bel
esprit.
Le 16. La Tragedie de Guftave et le
Dédit.
Le 18. L'Ecole des Maris et les Bourgeoises
de Qualité.
Les Comediens Italiens , représenterent
fur le même Théatre , la Comedie du
Prince malade , ou les Jeux Oylmpiques ,
ornée de quatre Intermedes , qui fut suivie
des Effets du Dépit.
Le 14. Les Quatre Semblables , Comedie
du sieur Dominique qui fut fort goutée ,
et l'Ecole des Meres.
Le
NOVEMBRE. 1733. 2469
Le 21. Arlequin apprentif Philosophe , et
la petite Piece d'Arlequin Voleur.
Le 29. Novembre , les Comediens Italiens
firent l'ouverture de leur Théatre à
Paris, après leur retour de Fontainebleau,
par la Comedie de Timon le Misantrope,
par la petite Piéce du Retour de tendresse.
Le 30. ils donnerent une petite Piece
nouvelle d'un Acte , en Vaudevilles, avec
des divertissemens de chants et de danses
intitulée Hyppolite et Aricie , Parodie de
Opera qui porte le même nom ; on ca
parlera plus au long.
Fermer
Résumé : « Le 11. Novembre, Fête de S. Martin, l'Academie Royale de Musique, donna [...] »
En novembre 1733, l'Académie Royale de Musique organise des bals publics annuels à partir de la fête de Saint-Martin jusqu'à l'Avent, et des représentations reprennent à la fête des Rois jusqu'à la fin du Carnaval. Le 17 novembre, l'Académie présente la 21e représentation de l'opéra 'Hippolyte et Aricie'. Le 19 novembre, elle remet en scène 'Issé', une pastorale héroïque acclamée. Des succès sont notés à Vienne avec 'Demophon' et à Londres avec 'Semiramis'. À Naples, 'Il Pastor Sfortunato' est représenté le 1er octobre. Le Théâtre Français joue 'La Trahison punie' avec la Dlle d'Angeville. Le 23 novembre, 'Le Badinage' critique 'Hippolyte et Aricie'. Les Comédiens Français jouent à Fontainebleau, tandis que les Comédiens Italiens représentent des comédies à Paris, dont 'Arlequin apprenti philosophe' et 'Timon le Misantrope'. Le 30 novembre, les Comédiens Italiens ouvrent leur théâtre parisien avec une parodie de 'Hippolyte et Aricie'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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218
p. 2678-2692
L'Opéra d'Issé, Extrait, [titre d'après la table]
Début :
L'Académie Royale de Musique a remis pour la quatriéme fois au Théatre [...]
Mots clefs :
Issé, Amour, Apollon, Hilas, Coeur, Philémon, Nymphe, Fête, Vers, Académie royale de musique, Théâtre, Gloire, Dragon, Pastorale, Berger
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : L'Opéra d'Issé, Extrait, [titre d'après la table]
'Académie Royale de Musique a res
mis pour la quatrième fois au Théatre
Issé , Pastorale Héroïque . Depuis l'année
1697. qu'elle parut pour la premiere
fois , on l'a reprise en 1708. et en 17194
et toujours avec plus de succès , cette
derniere reprise est des plus brillantes.
C'est le premier Ouvrage de deux jeunes
Auteurs , qui semblent se disputer
à qui entrera avec plus de vivacité dans
une carriere qu'ils ont depuis remplie
avec beaucoup d'éclat. M. de la Mothe
qui a fait le Poëme , qu'on croit antérieur
à celui de l'Europe Galante , n'y
dément pas le nom dejeune Homere , qu'il
se donne dans son Epitre Dédicatoire ,
où il choisit Monseigneur le Duc de
Bourgogne pour son Achille ; la gloire
qu'il s'est acquise depuis , a justifié son
ambition naissante ; on remarque que
son stile dans Issé n'est pas tout- à- fait
aussi correct qu'il l'a été dans beaucoup
d'autres Ouvrages qui lui ont assuré l'im
mortalité qu'il se proposoit pour prix
de ses travaux ; mais on en esr dédom
1. Vol
magt
DECEMBRE. 1733. 2679
magé par le plus beau feu qu'Apollon
puisse inspirer à un jeune Eleve.
M. Destouches , Auteur de la Musique ,
non moins avide de gloire , fait voir
dans cette Pastorale , qu'on peut dès
le premier pas faire douter si l'on pourra
se surpasser dans la suite ; son génie et
son goût s'y déployent tout entiers
rien de plus naturel que son chant , rien
de plus vif que ses peintures , sur tout
rien de plus flatteur que son récitatif.
Voilà le témoignage que la voix publique
nous excite à rendre , sur le mérite
des deux Auteurs de cette Pastorales
en voici l'Extrait .
La Fable du Jardin des Hesperides a
fourni à l'ingénieux Auteur de cette Pastorale
, le sujet d'un Prologue Allegorique.
La Paix que LOUIS LE GRAND
accorda à l'Europe , en est l'objet ; nous
ne pouvons donner une plus juste intelligence
de l'allégorie en question ,
qu'en nous servant des propres termes
de M. de, la Mothe . Les voicy.
Ce Prologue est une allégorie dont il est
aisé de découvrir les rapports. Le Jardin
des Hesperides représente l'Abondance ; le
Dragon qui en deffend l'entrée , y signifie
la Guerre , qui , suspendant le Commerce,
ferme aux Peuples qu'elle divise la voye
1. Vol.
do
2680 MERCURE DE FRANCE
de l'Abondance ; enfin Hercule , qui par
la
défaite du Dragon , rend ce Fardin accessible
à tout le monde , est l'image exacte du
Roy , qui n'a vaincu tant de fois que pour
pouvoir terminer la Guerre et rendre à ses
Peuples et à ses Voisrns , l'abondance qu'ils
souhaitoient.
Passons à l'action Théatrale.
Le Théatre représente le Jardin des Hesperides
; les Arbres sont chargez de fruits
d'or; et l'on découvre dans le fonds l'en
trée de ce Jardin deffendue par un Dragon
qui vomit incessamment des flammes.
La premiere Hesperide expose le sujet
par ces Vers :
Nous jouissons ici d'une douceur profonde ;
L'abondance en ces lieux regne de toutes parts;
Nos Bois et nos Vergers offrent à nos regards
Les seuls biens qu'adore le monde ;
Leurs fruits sont enviez du reste des Humains ;
Mais nous ne craignons rien du désir qui les
presse ;
Et ce Dragon veille sans cesse ,
Pour sauver nos trésors de leurs profanes mains.
Elle invite ses soeurs et tous les Habitans
de ce Jardin précieux à chanter le
bonheur dont ils jouissent. On entend
un bruit de guerre ; la premiere Hespeide
excite le Dragon à mettre en pieces
I. Vol. la
DECEMBRE . 1733. 268 i
téméraire Mortel qui vient chercher
La mort; Hercule combat le Dragon , et
en triomphe ; il rassure les Hesperides
par ces Vers :
Craignez-vous que mon bras vienne vous asservir,
Et faire de vos fruits un injuste pillage ?
Non ; je ne viens pas les ravir ;
Mais je veux que le monde avec vous les partage,
Jupiter vient confirmer la promesse
d'Hercule et lui parle ainsi :
Que ton bras se repose, ainsi que mon Tonnerre
Mon fils , termine tes travaux ;
Jouis toi- même du repos
Que ta valeur donne à la Terre.
Il rassemble les Peuples effrayez , qui
témoignent leur joye par ane Féte éclatante.
Jupiter termine ce charmant Pro
logue par ces Vers adressez à Hercule ,
c'est-à- dire au Héros de la France .
Alcide , ce grand jour marqué par la Victoire ,
Assure à l'Univers le sort le plus charmant ;
Plus d'un heureux évenement ,
En doit à l'avenir consacrer la memoire ,
Quand par un effort genereux ,
Ton bras vient aux Mortels rendre une Paix
profonde
5. Vol.
L'Hymenés
2682 MERCURE DE FRANCE
L'Hymenée et l'Amour joignant des plus beaux
noeuds ,
Deux coeurs formez pour le bonheur du monde.
De cette auguste Fête Apollon prend le soin ;
Viens avec tous les Dieux en être le témoin.
Tout le monde sent bien que Jupiter
annonce ici l'Hymen glorieux auquel
nous devons notre auguste Maître.
AU PREMIER ACTE , Apollon sous le
nom de Philemon , se plaint de l'Amour
qui ne l'a jamais blessé de ses Traits que
pour le rendre malheureux ; il se rappelle
la rigueur de Daphné et se reproche
de gémir encore sous de mêmes loix .
Pan , déguisé en Berger , lui conseille
de ne plus cacher sa Divinité aux yeux
d'Issé dont il est épris ; Apollon lui
répond qu'il ne veut devoir le coeur de
cette Nymphe qu'à son amour ; voyant
venir Issé , il se retire pour surprendre
son secret sans être apperçû . Issé , dans
un tendre Monologue , regrette la perte
de son heureuse indifference.
>
Doris soupçonne Issé d'aimer Hylas;
la Nymphe la laisse dans son erreur et
lui fait entendre la nouvelle situation
de son coeur par ces Vers :
Mes jours couloient dans les plaisirs ;
Je goûtois à la fois la paix et l'innocence ,
1. Vol et
DECEMBRE. 1733 2683
Et mon coeur satisfait de son indifference ,
Vivoit sans crainte et sans desirs ;
Mais depuis que l'Amour l'a rendu trop sensible,
Les plaisirs l'ont abandonné ;
Quel changement ! ô Ciel ! est- il possible ?
Non, ce n'est plus ce coeur si content , si paisible;
C'est un coeur tout nouveau que l'Amour m'a
donné.
On entend un bruit d'Instrumens s
Doris apprend à Issé que c'est une Fête
qu'Hilas a fair préparer pour elle.
La Suite d'Hilas représente les Néreïdes
et les Nymphes de Diane , conduites
par l'Amour et les Plaisirs, Hilas déclare
son amour à Issé par ces Vers :
L'Amour a tout soumis à ses loix souveraines ;
Il fait sentir ses feux dans l'humide séjour ;
Il blesse de ses traits , il charge de ses chaînes ,
La fiere Diane à son tour ;
Mais il n'est pas content de sa victoire ;
Le coeur d'Issé manque à sa gloire,
L'objet de cette Fête c'est d'inviter
Issé à aimer. Après la Fête la Nymphe
répond à Hilas :
Autant que je le puis , je résiste aux Amours ;
De leurs traits dangereux je redoute l'atteinte ;
Heureuse si ma crainte
2. Vol. M'an
2684 MERCURE DE FRANCE
M'en deffendoit toujours.
Cette réponse équivoque laisse un peu
d'esperance à Hilas .
Le Théatre représente au second Acte,
le Palais d'Issé et ses Jardins ; Issé se plaint
de l'Amour , et le prie de s'adresser à
d'autres coeurs qui se feroient un plaisir
de se rendre. Doris l'avertit que Philemon
s'avance.
Issé voudroit fuir la présence de Philemon
; mais ce Dieu , transformé en Berger,
Parrête. Cette Scene est très interessante
et très - bien dialoguée ; voici les
Vers qui la terminent.
Issé.
Cessez une ardeur si pressante ;
Je ne veux plus vous écouter .
Apollon.
'Arrêtez, Nymphe trop charmante,
Issé.
Non ; laissez - moi vous éviter.
Apollon.
Vous me fuyez et je vous aime !
Issé.
Je fuis l'Amour quand je vous fuis.
Apollon.
Dissipez le trouble où je suis,
I. Vol.
Issér
1
DECEMBRE. 1733. 2685
Issé.
N'augmentez pas celui qui m'agite moi- même.
Apollon.
Rendez-vous à mes feux.
Issé.
Ne tentez plus mon coeux,
Apollon.
Pourquoi craindre d'aimer.
Issé.
On doit craindre un
Vainqueur.
Apollon suit Issé , qui se retire. L'Acte
Eniroir ici , s'il n'y falloit une Fête ; l'Au
teur y supplée par un Episode ; Pan arrête
Doris , et lui parle d'amour , mais
sur un ton bien different de celui dont
Apellon vient d'en parler à Issé ; il sagit
d'un amour volage ; des Bergers , des
Bergeres et des Pâtres , viennent par
son ordre celebrer le plaisir d'être in ,
constans.
Au troisiéme Acte , Apollon dit à
Pan , que, tout aimé qu'il se croit de la
tendre Issé , il n'est pas encore parfaitement
heureux; il exprime ainsi ce qu'il
souhaite :
Je ne borne point mes desirs ,
A l'imparfait bonheur d'une flamme vulgaire ;
1. Vol.
G. Acheve
2686 MERCURE DE FRANCE
Acheve, acheve, Amour , de combler mes plaisirs;
Tu sçais ce qui te reste à faire,
Il dit à Pan, qui paroît surpris de voir
la celebre Forêt de Dodone , dont les
Arbres rendent des Oracles , qu'Issé doit
les consulter , et que par l'Oracle qu'ils
vont rendre , il sçaura si cette Nymphe
est digne de son amour. Il se retire avec
Pan à l'approche d'Hilas.
Hilas se plaint de l'Amour dont Issé
lui ; voici com- brûle pour un autre que
ment il s'exprime :
Sombres Déserts, témoins de mes tristes regrets;
Rien ne manque plus à ma peine.
Mes cris ont fait cent fois retentir ces Forêts ,
De la froideur d'une inhumaine ;
Hélas ! que n'est- ce encor le sujet qui m'amenę?
L'ingrate , de l'Amour ressent enfin les traits ;
Un perfide penchant l'entraîne.
Sombres Déserts , &c.
Issé qui vient consulter Dodone , veut
éviter la présence d'Hilas ; ce Berger l'arrête
pour se plaindre de l'amour qu'elle
sent pour un autre ; le Monologue et
le Dialogue font également honneur au
Poëte et au Musicien ; les plaintes d'Hilas
obligent Issé de se retirer , il la suit ,
Et le Théare resteroit vuide sans le se-
I. Vol. Cours
DECEMBRE. 1733. 2687
cours de l'Episode ; Pan et Doris se parlent
toujours sur le même ton ; ils conviennent
enfin de s'engager l'un à l'autre
le moins qu'ils pourront , ce qu'ils
font connoître par ce Duo :
Cédons à nos tendres désirs ;
Qu'un heureux penchant nous entraîne ;
Et que l'Amour laisse aux plaisirs
Le soin de serrer notre chaîne.
Leur convention étant faite, on reprend'
le fil de l'action principale ; les Prêtres
et les Prêtresses de Dodone viennent celebrer
leurs sacrez mysteres , et satisfaire le
desir curieux d'Issé , qui vient avec eux ,
et qui leur a déja fait entendre ce qu'el.e
souhaite. Rien n'est si beau que l'invccation
de Dodone ; le Poëte et le Musicien
s'y sont également surpassez ; " lcs
Rameaux mysterieux rendent enfin cet
Oracle :
3
Issé doit s'enflammer de l'ardeur la plus belle ;
Apollon veut être aimé d'elle.
Cet Oracle porte un coup fatal à l'a
mour que la Nymphe sent pour le faux
Philemon ; elle ne laisse pas d'assister à
la Fête qu'on celebre en l'honneur da
choix d'Apollon .
1. Vol. Gi
Le
1688 MERCURE DE FRANCE
Le Théatre représente au quatriéme
Acte une Grotte . Issé vient se plaindre
de la Loi fatale que l'Oracle de Dodone
vient de lui imposer ; ce Monologue.est
des plus touchants , tant par les paroles
que par la Musique ; il finit par cette
résolution d'Issé :
Vainement , Apollon , votre grandeur suprême
Fera luire à mes yeux ce qu'elle a de plus doux;
Je ne changerai pas pour vous ,
Le fidelle Berger que j'aime,
Le sommeil , accompagné des Songes ;
de Zephirs et de Nymphes , vient inviter
Issé au repos ; elle s'endort ; après
les danses , le Sommeil parle ainsi aux
Songes ;
Songes , pour Apollon , signalez votre zele ;
Il veut de cette Nymphe , éprouver tout l'amour,
Tracez à ses esprits une image fidelle
De la gloire du Dieu du jour,
Hilas vient déplorer son sort par un
Monologue , qui exprime tout l'amour
qu'il a pour Issé , qu'il trouve endormie ;
après ce récit , dont tous les Spectateurs
sont justement enchantez , Issé se reveil
le en sursaut , et dit ;
I.Vola
Qu'ai-je
DECEMBRE.
17332689
Qu'ai- je pensé quel songe est venu me séduire
?
J'ai cru voir Apollon quitter les cieux pour
moi ;
Je me trouvois sensible à l'ardeur qui l'inspire #
Un mutuel amour engageoit notre foy ,
Hélas ! cher Philemon , pour qui seul je sou
pire ,
Ne me reprochez point ces songes impuissans
Mon coeur n'a point de part à l'erreur de mes
sens.
Hilas frappé de la victoire que Philemon
remporte sur Apollon même dans
le coeur d'Issé , quitte cette Nymphe
pour jamais. Pan vient apprendre à İssé
que Philemon , instruit de l'Oracle de
Dodonne , se livre au désespoir ; Issé lui
demande où elle pourra le trouver pour
le rassurer ; Pan lui répond qu'il l'alaissé
dans le prochain Bocage . Issé part
sur le champ , pour aller secourir son
Amant, et finit ce bel Acte par ce Vers :
Vole , Amour , sui mes pas, et vien le rassurer.
Le Théatre représente au cinquième
'Acte , une Solitude. Doris commence
l'Acte , et Pan en remplit la seconde Scece
avec elle ; mais comme cela coupe l'action
dans l'endroit le plus interressant ,
nos Lecteurs ne trouveront pas mauvais
I.Vol. Giij que
2690 MERCURE DE FRANCE
que nous ne suivions pas exactement ce
Poëme ; nous passons donc à Appollon
et à Issé , pour qui tous les coeurs s'inté
ressent. Apollon jouit pleinement de la
victoire qu'il remporte sur lui - même ;
Issé n'oublie rien pour détruire les feintes
allarmes de son cher Philemon ; il
lui fait entendre ses frayeurs secrettes ,
par ces Vers :
Les noeuds
que l'Amour a formez ,
Vont être brisez par la gloire ;
Pardonnez mes transporss jaloux , &c.
La tendre Issé lui répond :
Je ne la connois point cette gloire fatale ;
Mon coeur ne reconnoit que vous ,
Ils se disent ensemble :
C'est moi qui vous aime ,
Le plus tendrement ;
Si vous m'aimiez de même ;
Mon sort seroit charmant.
&c.
On trouve que ce Duo étoit mieux
amené dans la premiere Edition ; il venoit
après ces Vers qu'Issé adressoit à son
cher Philemon :
Un vain espoir vous séduit et vous charme §
Et moi , je crains incessamment ,
I. Vol. Votre
DECEMBRE . 1733 2694
"
Votre amour espere aisément ,
Et le mien aisément s'allarme ,
Que nous aimons différemment !
C'est moi qui vous aime ,
Le plus tendrement.
Apollon fait enfin la derniere épreuve
du coeur d'Issé ; le Théatre change et représente
un Palais magnifique. On voit
les Heures qui descendent des Cieux sur
des nuages; Issé ne peut soûtenir ce spectacle
; elle tremble pour son Amant, elle
le presse de fuir avec elle , pour se dérober
à la fureur d'un Dieu jaloux ; Apollon
ne peut plus tenir contre des preuves
si éclatantes d'une fidelité inébranlable
; il se jette aux pieds d'Issé et lui
fait connoître que le Dieu qu'elle craint ',
et le Berger qu'elle aime , ne sont qu'une
même personne ; les Heures forment la
fête de ce dernier Acte , et cette aimable
Pastorale finit par un Choeur des plus
brillans.
On auroit souhaité qu'une action si interessante
ne fut pas coupée par un
Episode dont elle pourroit se passer absolument.
On doit même présumer que
M. de la Mothe s'est défié de lui- même,
quand il a appellé ce galant hors d'auvre
à son secours ; on croit même que s'il
1. Vol. Giiij avoit
2692 MERCURE DE FRANCE
avoit d'abord mis sa Pastorale en cinq
Actes , il l'auroit traitée plus séricusement
, et n'auroit pas rappellé hors de
saison ,une forme de Poëme Lyrique , dont
les Italiens sont les créateurs , que leur
premier imitateur avoit d'abord adoptée
; mais à laquelle il renonça après son
troisiéme Opera , parce qu'il s'apperçut
bien que les François ne s'en accommodoient
pas. Au reste cette Pastotale est
generalement approuvée ; et l'exécution
répond parfaitement à la bonté de l'Ouvrage.
La Dlle le Maure ne brille pas
moins dans le Rôle d'Issé , qu'elle avoit
fait dans celui d'Oriane , dans Amadis .
mis pour la quatrième fois au Théatre
Issé , Pastorale Héroïque . Depuis l'année
1697. qu'elle parut pour la premiere
fois , on l'a reprise en 1708. et en 17194
et toujours avec plus de succès , cette
derniere reprise est des plus brillantes.
C'est le premier Ouvrage de deux jeunes
Auteurs , qui semblent se disputer
à qui entrera avec plus de vivacité dans
une carriere qu'ils ont depuis remplie
avec beaucoup d'éclat. M. de la Mothe
qui a fait le Poëme , qu'on croit antérieur
à celui de l'Europe Galante , n'y
dément pas le nom dejeune Homere , qu'il
se donne dans son Epitre Dédicatoire ,
où il choisit Monseigneur le Duc de
Bourgogne pour son Achille ; la gloire
qu'il s'est acquise depuis , a justifié son
ambition naissante ; on remarque que
son stile dans Issé n'est pas tout- à- fait
aussi correct qu'il l'a été dans beaucoup
d'autres Ouvrages qui lui ont assuré l'im
mortalité qu'il se proposoit pour prix
de ses travaux ; mais on en esr dédom
1. Vol
magt
DECEMBRE. 1733. 2679
magé par le plus beau feu qu'Apollon
puisse inspirer à un jeune Eleve.
M. Destouches , Auteur de la Musique ,
non moins avide de gloire , fait voir
dans cette Pastorale , qu'on peut dès
le premier pas faire douter si l'on pourra
se surpasser dans la suite ; son génie et
son goût s'y déployent tout entiers
rien de plus naturel que son chant , rien
de plus vif que ses peintures , sur tout
rien de plus flatteur que son récitatif.
Voilà le témoignage que la voix publique
nous excite à rendre , sur le mérite
des deux Auteurs de cette Pastorales
en voici l'Extrait .
La Fable du Jardin des Hesperides a
fourni à l'ingénieux Auteur de cette Pastorale
, le sujet d'un Prologue Allegorique.
La Paix que LOUIS LE GRAND
accorda à l'Europe , en est l'objet ; nous
ne pouvons donner une plus juste intelligence
de l'allégorie en question ,
qu'en nous servant des propres termes
de M. de, la Mothe . Les voicy.
Ce Prologue est une allégorie dont il est
aisé de découvrir les rapports. Le Jardin
des Hesperides représente l'Abondance ; le
Dragon qui en deffend l'entrée , y signifie
la Guerre , qui , suspendant le Commerce,
ferme aux Peuples qu'elle divise la voye
1. Vol.
do
2680 MERCURE DE FRANCE
de l'Abondance ; enfin Hercule , qui par
la
défaite du Dragon , rend ce Fardin accessible
à tout le monde , est l'image exacte du
Roy , qui n'a vaincu tant de fois que pour
pouvoir terminer la Guerre et rendre à ses
Peuples et à ses Voisrns , l'abondance qu'ils
souhaitoient.
Passons à l'action Théatrale.
Le Théatre représente le Jardin des Hesperides
; les Arbres sont chargez de fruits
d'or; et l'on découvre dans le fonds l'en
trée de ce Jardin deffendue par un Dragon
qui vomit incessamment des flammes.
La premiere Hesperide expose le sujet
par ces Vers :
Nous jouissons ici d'une douceur profonde ;
L'abondance en ces lieux regne de toutes parts;
Nos Bois et nos Vergers offrent à nos regards
Les seuls biens qu'adore le monde ;
Leurs fruits sont enviez du reste des Humains ;
Mais nous ne craignons rien du désir qui les
presse ;
Et ce Dragon veille sans cesse ,
Pour sauver nos trésors de leurs profanes mains.
Elle invite ses soeurs et tous les Habitans
de ce Jardin précieux à chanter le
bonheur dont ils jouissent. On entend
un bruit de guerre ; la premiere Hespeide
excite le Dragon à mettre en pieces
I. Vol. la
DECEMBRE . 1733. 268 i
téméraire Mortel qui vient chercher
La mort; Hercule combat le Dragon , et
en triomphe ; il rassure les Hesperides
par ces Vers :
Craignez-vous que mon bras vienne vous asservir,
Et faire de vos fruits un injuste pillage ?
Non ; je ne viens pas les ravir ;
Mais je veux que le monde avec vous les partage,
Jupiter vient confirmer la promesse
d'Hercule et lui parle ainsi :
Que ton bras se repose, ainsi que mon Tonnerre
Mon fils , termine tes travaux ;
Jouis toi- même du repos
Que ta valeur donne à la Terre.
Il rassemble les Peuples effrayez , qui
témoignent leur joye par ane Féte éclatante.
Jupiter termine ce charmant Pro
logue par ces Vers adressez à Hercule ,
c'est-à- dire au Héros de la France .
Alcide , ce grand jour marqué par la Victoire ,
Assure à l'Univers le sort le plus charmant ;
Plus d'un heureux évenement ,
En doit à l'avenir consacrer la memoire ,
Quand par un effort genereux ,
Ton bras vient aux Mortels rendre une Paix
profonde
5. Vol.
L'Hymenés
2682 MERCURE DE FRANCE
L'Hymenée et l'Amour joignant des plus beaux
noeuds ,
Deux coeurs formez pour le bonheur du monde.
De cette auguste Fête Apollon prend le soin ;
Viens avec tous les Dieux en être le témoin.
Tout le monde sent bien que Jupiter
annonce ici l'Hymen glorieux auquel
nous devons notre auguste Maître.
AU PREMIER ACTE , Apollon sous le
nom de Philemon , se plaint de l'Amour
qui ne l'a jamais blessé de ses Traits que
pour le rendre malheureux ; il se rappelle
la rigueur de Daphné et se reproche
de gémir encore sous de mêmes loix .
Pan , déguisé en Berger , lui conseille
de ne plus cacher sa Divinité aux yeux
d'Issé dont il est épris ; Apollon lui
répond qu'il ne veut devoir le coeur de
cette Nymphe qu'à son amour ; voyant
venir Issé , il se retire pour surprendre
son secret sans être apperçû . Issé , dans
un tendre Monologue , regrette la perte
de son heureuse indifference.
>
Doris soupçonne Issé d'aimer Hylas;
la Nymphe la laisse dans son erreur et
lui fait entendre la nouvelle situation
de son coeur par ces Vers :
Mes jours couloient dans les plaisirs ;
Je goûtois à la fois la paix et l'innocence ,
1. Vol et
DECEMBRE. 1733 2683
Et mon coeur satisfait de son indifference ,
Vivoit sans crainte et sans desirs ;
Mais depuis que l'Amour l'a rendu trop sensible,
Les plaisirs l'ont abandonné ;
Quel changement ! ô Ciel ! est- il possible ?
Non, ce n'est plus ce coeur si content , si paisible;
C'est un coeur tout nouveau que l'Amour m'a
donné.
On entend un bruit d'Instrumens s
Doris apprend à Issé que c'est une Fête
qu'Hilas a fair préparer pour elle.
La Suite d'Hilas représente les Néreïdes
et les Nymphes de Diane , conduites
par l'Amour et les Plaisirs, Hilas déclare
son amour à Issé par ces Vers :
L'Amour a tout soumis à ses loix souveraines ;
Il fait sentir ses feux dans l'humide séjour ;
Il blesse de ses traits , il charge de ses chaînes ,
La fiere Diane à son tour ;
Mais il n'est pas content de sa victoire ;
Le coeur d'Issé manque à sa gloire,
L'objet de cette Fête c'est d'inviter
Issé à aimer. Après la Fête la Nymphe
répond à Hilas :
Autant que je le puis , je résiste aux Amours ;
De leurs traits dangereux je redoute l'atteinte ;
Heureuse si ma crainte
2. Vol. M'an
2684 MERCURE DE FRANCE
M'en deffendoit toujours.
Cette réponse équivoque laisse un peu
d'esperance à Hilas .
Le Théatre représente au second Acte,
le Palais d'Issé et ses Jardins ; Issé se plaint
de l'Amour , et le prie de s'adresser à
d'autres coeurs qui se feroient un plaisir
de se rendre. Doris l'avertit que Philemon
s'avance.
Issé voudroit fuir la présence de Philemon
; mais ce Dieu , transformé en Berger,
Parrête. Cette Scene est très interessante
et très - bien dialoguée ; voici les
Vers qui la terminent.
Issé.
Cessez une ardeur si pressante ;
Je ne veux plus vous écouter .
Apollon.
'Arrêtez, Nymphe trop charmante,
Issé.
Non ; laissez - moi vous éviter.
Apollon.
Vous me fuyez et je vous aime !
Issé.
Je fuis l'Amour quand je vous fuis.
Apollon.
Dissipez le trouble où je suis,
I. Vol.
Issér
1
DECEMBRE. 1733. 2685
Issé.
N'augmentez pas celui qui m'agite moi- même.
Apollon.
Rendez-vous à mes feux.
Issé.
Ne tentez plus mon coeux,
Apollon.
Pourquoi craindre d'aimer.
Issé.
On doit craindre un
Vainqueur.
Apollon suit Issé , qui se retire. L'Acte
Eniroir ici , s'il n'y falloit une Fête ; l'Au
teur y supplée par un Episode ; Pan arrête
Doris , et lui parle d'amour , mais
sur un ton bien different de celui dont
Apellon vient d'en parler à Issé ; il sagit
d'un amour volage ; des Bergers , des
Bergeres et des Pâtres , viennent par
son ordre celebrer le plaisir d'être in ,
constans.
Au troisiéme Acte , Apollon dit à
Pan , que, tout aimé qu'il se croit de la
tendre Issé , il n'est pas encore parfaitement
heureux; il exprime ainsi ce qu'il
souhaite :
Je ne borne point mes desirs ,
A l'imparfait bonheur d'une flamme vulgaire ;
1. Vol.
G. Acheve
2686 MERCURE DE FRANCE
Acheve, acheve, Amour , de combler mes plaisirs;
Tu sçais ce qui te reste à faire,
Il dit à Pan, qui paroît surpris de voir
la celebre Forêt de Dodone , dont les
Arbres rendent des Oracles , qu'Issé doit
les consulter , et que par l'Oracle qu'ils
vont rendre , il sçaura si cette Nymphe
est digne de son amour. Il se retire avec
Pan à l'approche d'Hilas.
Hilas se plaint de l'Amour dont Issé
lui ; voici com- brûle pour un autre que
ment il s'exprime :
Sombres Déserts, témoins de mes tristes regrets;
Rien ne manque plus à ma peine.
Mes cris ont fait cent fois retentir ces Forêts ,
De la froideur d'une inhumaine ;
Hélas ! que n'est- ce encor le sujet qui m'amenę?
L'ingrate , de l'Amour ressent enfin les traits ;
Un perfide penchant l'entraîne.
Sombres Déserts , &c.
Issé qui vient consulter Dodone , veut
éviter la présence d'Hilas ; ce Berger l'arrête
pour se plaindre de l'amour qu'elle
sent pour un autre ; le Monologue et
le Dialogue font également honneur au
Poëte et au Musicien ; les plaintes d'Hilas
obligent Issé de se retirer , il la suit ,
Et le Théare resteroit vuide sans le se-
I. Vol. Cours
DECEMBRE. 1733. 2687
cours de l'Episode ; Pan et Doris se parlent
toujours sur le même ton ; ils conviennent
enfin de s'engager l'un à l'autre
le moins qu'ils pourront , ce qu'ils
font connoître par ce Duo :
Cédons à nos tendres désirs ;
Qu'un heureux penchant nous entraîne ;
Et que l'Amour laisse aux plaisirs
Le soin de serrer notre chaîne.
Leur convention étant faite, on reprend'
le fil de l'action principale ; les Prêtres
et les Prêtresses de Dodone viennent celebrer
leurs sacrez mysteres , et satisfaire le
desir curieux d'Issé , qui vient avec eux ,
et qui leur a déja fait entendre ce qu'el.e
souhaite. Rien n'est si beau que l'invccation
de Dodone ; le Poëte et le Musicien
s'y sont également surpassez ; " lcs
Rameaux mysterieux rendent enfin cet
Oracle :
3
Issé doit s'enflammer de l'ardeur la plus belle ;
Apollon veut être aimé d'elle.
Cet Oracle porte un coup fatal à l'a
mour que la Nymphe sent pour le faux
Philemon ; elle ne laisse pas d'assister à
la Fête qu'on celebre en l'honneur da
choix d'Apollon .
1. Vol. Gi
Le
1688 MERCURE DE FRANCE
Le Théatre représente au quatriéme
Acte une Grotte . Issé vient se plaindre
de la Loi fatale que l'Oracle de Dodone
vient de lui imposer ; ce Monologue.est
des plus touchants , tant par les paroles
que par la Musique ; il finit par cette
résolution d'Issé :
Vainement , Apollon , votre grandeur suprême
Fera luire à mes yeux ce qu'elle a de plus doux;
Je ne changerai pas pour vous ,
Le fidelle Berger que j'aime,
Le sommeil , accompagné des Songes ;
de Zephirs et de Nymphes , vient inviter
Issé au repos ; elle s'endort ; après
les danses , le Sommeil parle ainsi aux
Songes ;
Songes , pour Apollon , signalez votre zele ;
Il veut de cette Nymphe , éprouver tout l'amour,
Tracez à ses esprits une image fidelle
De la gloire du Dieu du jour,
Hilas vient déplorer son sort par un
Monologue , qui exprime tout l'amour
qu'il a pour Issé , qu'il trouve endormie ;
après ce récit , dont tous les Spectateurs
sont justement enchantez , Issé se reveil
le en sursaut , et dit ;
I.Vola
Qu'ai-je
DECEMBRE.
17332689
Qu'ai- je pensé quel songe est venu me séduire
?
J'ai cru voir Apollon quitter les cieux pour
moi ;
Je me trouvois sensible à l'ardeur qui l'inspire #
Un mutuel amour engageoit notre foy ,
Hélas ! cher Philemon , pour qui seul je sou
pire ,
Ne me reprochez point ces songes impuissans
Mon coeur n'a point de part à l'erreur de mes
sens.
Hilas frappé de la victoire que Philemon
remporte sur Apollon même dans
le coeur d'Issé , quitte cette Nymphe
pour jamais. Pan vient apprendre à İssé
que Philemon , instruit de l'Oracle de
Dodonne , se livre au désespoir ; Issé lui
demande où elle pourra le trouver pour
le rassurer ; Pan lui répond qu'il l'alaissé
dans le prochain Bocage . Issé part
sur le champ , pour aller secourir son
Amant, et finit ce bel Acte par ce Vers :
Vole , Amour , sui mes pas, et vien le rassurer.
Le Théatre représente au cinquième
'Acte , une Solitude. Doris commence
l'Acte , et Pan en remplit la seconde Scece
avec elle ; mais comme cela coupe l'action
dans l'endroit le plus interressant ,
nos Lecteurs ne trouveront pas mauvais
I.Vol. Giij que
2690 MERCURE DE FRANCE
que nous ne suivions pas exactement ce
Poëme ; nous passons donc à Appollon
et à Issé , pour qui tous les coeurs s'inté
ressent. Apollon jouit pleinement de la
victoire qu'il remporte sur lui - même ;
Issé n'oublie rien pour détruire les feintes
allarmes de son cher Philemon ; il
lui fait entendre ses frayeurs secrettes ,
par ces Vers :
Les noeuds
que l'Amour a formez ,
Vont être brisez par la gloire ;
Pardonnez mes transporss jaloux , &c.
La tendre Issé lui répond :
Je ne la connois point cette gloire fatale ;
Mon coeur ne reconnoit que vous ,
Ils se disent ensemble :
C'est moi qui vous aime ,
Le plus tendrement ;
Si vous m'aimiez de même ;
Mon sort seroit charmant.
&c.
On trouve que ce Duo étoit mieux
amené dans la premiere Edition ; il venoit
après ces Vers qu'Issé adressoit à son
cher Philemon :
Un vain espoir vous séduit et vous charme §
Et moi , je crains incessamment ,
I. Vol. Votre
DECEMBRE . 1733 2694
"
Votre amour espere aisément ,
Et le mien aisément s'allarme ,
Que nous aimons différemment !
C'est moi qui vous aime ,
Le plus tendrement.
Apollon fait enfin la derniere épreuve
du coeur d'Issé ; le Théatre change et représente
un Palais magnifique. On voit
les Heures qui descendent des Cieux sur
des nuages; Issé ne peut soûtenir ce spectacle
; elle tremble pour son Amant, elle
le presse de fuir avec elle , pour se dérober
à la fureur d'un Dieu jaloux ; Apollon
ne peut plus tenir contre des preuves
si éclatantes d'une fidelité inébranlable
; il se jette aux pieds d'Issé et lui
fait connoître que le Dieu qu'elle craint ',
et le Berger qu'elle aime , ne sont qu'une
même personne ; les Heures forment la
fête de ce dernier Acte , et cette aimable
Pastorale finit par un Choeur des plus
brillans.
On auroit souhaité qu'une action si interessante
ne fut pas coupée par un
Episode dont elle pourroit se passer absolument.
On doit même présumer que
M. de la Mothe s'est défié de lui- même,
quand il a appellé ce galant hors d'auvre
à son secours ; on croit même que s'il
1. Vol. Giiij avoit
2692 MERCURE DE FRANCE
avoit d'abord mis sa Pastorale en cinq
Actes , il l'auroit traitée plus séricusement
, et n'auroit pas rappellé hors de
saison ,une forme de Poëme Lyrique , dont
les Italiens sont les créateurs , que leur
premier imitateur avoit d'abord adoptée
; mais à laquelle il renonça après son
troisiéme Opera , parce qu'il s'apperçut
bien que les François ne s'en accommodoient
pas. Au reste cette Pastotale est
generalement approuvée ; et l'exécution
répond parfaitement à la bonté de l'Ouvrage.
La Dlle le Maure ne brille pas
moins dans le Rôle d'Issé , qu'elle avoit
fait dans celui d'Oriane , dans Amadis .
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Résumé : L'Opéra d'Issé, Extrait, [titre d'après la table]
L'Académie Royale de Musique a représenté pour la quatrième fois l'œuvre 'Issé, Pastorale Héroïque' au Théâtre. Cette pastorale, créée en 1697, a été reprise en 1708 et 1719, chaque représentation rencontrant un succès croissant. La dernière reprise est particulièrement brillante. 'Issé' est le premier ouvrage de deux jeunes auteurs, M. de la Mothe et M. Destouches, qui ont tous deux brillamment entamé leur carrière. M. de la Mothe, auteur du poème, est comparé à un jeune Homère dans son épître dédicatoire à Monseigneur le Duc de Bourgogne. Son style dans 'Issé' n'est pas aussi correct que dans d'autres œuvres, mais il est marqué par un 'beau feu' inspiré par Apollon. M. Destouches, compositeur de la musique, démontre dès cette œuvre un génie et un goût remarquables, avec un chant naturel, des peintures vives et un récitatif flatteur. L'intrigue de 'Issé' s'inspire de la fable du Jardin des Hespérides, symbolisant l'abondance accordée par Louis le Grand à l'Europe après la paix. Le prologue allégorique représente le jardin défendu par un dragon (la guerre) et Hercule (le roi) qui vainc le dragon pour rendre l'abondance accessible. L'action se déroule dans le jardin des Hespérides, où les nymphes jouissent d'une abondance protégée par un dragon. Hercule combat et vainc le dragon, permettant à tous de partager les fruits du jardin. Jupiter confirme la promesse d'Hercule et annonce une fête pour célébrer la paix. Dans le premier acte, Apollon, sous le nom de Philemon, se plaint de l'amour qui le rend malheureux. Pan lui conseille de révéler son identité à Issé, dont il est épris. Issé, dans un monologue, regrette la perte de son indifférence. Doris, une amie, soupçonne Issé d'aimer Hylas. Hylas organise une fête pour déclarer son amour à Issé, mais elle résiste à ses avances. Le deuxième acte se déroule dans le palais d'Issé et ses jardins. Issé se plaint de l'amour et prie de ne pas être visée. Apollon, déguisé en berger, la retient et lui déclare son amour. Issé tente de fuir, mais Apollon la suit. Un épisode avec Pan et Doris interrompt la scène. Dans le troisième acte, Apollon exprime son désir de voir Issé partager son amour. Il consulte l'oracle de Dodone pour connaître les sentiments d'Issé. Hylas, désespéré, se plaint de l'amour non partagé d'Issé. L'oracle révèle qu'Issé doit aimer Apollon, ce qui la contrarie. Le quatrième acte montre Issé se plaindre de la loi imposée par l'oracle. Elle s'endort et rêve d'Apollon. À son réveil, elle trouve Hylas qui se lamente. Pan informe Issé du désespoir de Philemon, et elle part le rassurer. Le cinquième acte se déroule dans une solitude. Apollon et Issé expriment leurs sentiments. Issé rassure Philemon sur ses frayeurs secrètes, et ils se réconcilient. Dans la scène finale, Apollon teste la fidélité d'Issé. Un palais magnifique apparaît sur scène, avec les Heures descendant des cieux. Issé, inquiète pour son amant, le presse de fuir. Apollon, convaincu de sa fidélité, révèle qu'il est à la fois le dieu qu'elle craint et le berger qu'elle aime. Les Heures célèbrent cette révélation, et la pastorale se termine par un chœur brillant.
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219
p. 2692-2693
« Les Comédiens François ont remis au Théatre depuis peu une petite Comédie [...] »
Début :
Les Comédiens François ont remis au Théatre depuis peu une petite Comédie [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français, Comédie, Dancourt, Piron, Poisson l'aîné
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Les Comédiens François ont remis au Théatre depuis peu une petite Comédie [...] »
Les Comédiens François ont remis au
Théatre depuis peu une petite Comédie
de feu M. Dancour , intitulée : Le Retour
des Officiers , qui n'avoit pas été représentée
depuis tres- long- temps.
>
Ils ont aussi repris la Tragédie nouvelle
de Gustave , de M. Piron , que le
Public revoit avec un nouveau plaisir ,
ainsi que
la Comédie des Fils - Îngrats ,
du même Auteur , qu'on vient de remettre
au Théatre.
Les mêmes Comédiens ont donné la
premiere Représentation d'une petite Comédie
nouvelle , en Vers , de M. Poisson,
1. Vole l'aîné,
DECEMBRE . 1733. 2693
l'aîné , sous le Titre de l'Impromptu de
Campagne , qui a été fort applaudie. On
en parlera plus au long.
Théatre depuis peu une petite Comédie
de feu M. Dancour , intitulée : Le Retour
des Officiers , qui n'avoit pas été représentée
depuis tres- long- temps.
>
Ils ont aussi repris la Tragédie nouvelle
de Gustave , de M. Piron , que le
Public revoit avec un nouveau plaisir ,
ainsi que
la Comédie des Fils - Îngrats ,
du même Auteur , qu'on vient de remettre
au Théatre.
Les mêmes Comédiens ont donné la
premiere Représentation d'une petite Comédie
nouvelle , en Vers , de M. Poisson,
1. Vole l'aîné,
DECEMBRE . 1733. 2693
l'aîné , sous le Titre de l'Impromptu de
Campagne , qui a été fort applaudie. On
en parlera plus au long.
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Résumé : « Les Comédiens François ont remis au Théatre depuis peu une petite Comédie [...] »
En décembre 1733, les Comédiens François ont présenté plusieurs œuvres au théâtre. Ils ont repris 'Le Retour des Officiers' de Dancour, 'Gustave' et 'Les Fils Ingrats' de Piron. Ils ont également créé 'L'Impromptu de Campagne', une comédie en vers de Poisson, très applaudie.
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220
p. 139-141
« Le 14 de ce mois les Comédiens François remirent au Theatre la [...] »
Début :
Le 14 de ce mois les Comédiens François remirent au Theatre la [...]
Mots clefs :
Théâtre, Comédie, Comédiens, Représentation, Comédiens-Français, Théâtre-Français, Comédiens-Italiens, Théâtre de l'Opéra, Bajazet, Adélaïde du Guesclin, Voltaire, Arlequin Grand Mogol, Misanthrope, Fêtes grecques et romaines, Fabrice, Théâtre du marché au foin, Carnaval
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 14 de ce mois les Comédiens François remirent au Theatre la [...] »
E 14 de ce mois les Comédiens
François remirent au Theatre la
Tragédie de Bajazet , dans laquelle la
Dlle Grandval, épouse du Sr Grandval
Comédien du Roy , joia pour la
premiere
fois le rôle d'Atalide et le joua
fort naturellement et avec intelligence .
Elle fut fort applaudie ; ce n'est cependant
que son coup d'essai. Les rôles Comiques
qu'elle a joués depuis, ont encore,
confirmé la bonne opinion qu'on a de ses,
talens , sur tout dans le rôle d'Hortense
dans la petite Comédie du Florentin.
. Le Lundi 18 , on donna sur le Theatre
François la premiere représentation d'Adelaide
Tragédie de M. de Voltaire :
elle fut aussi extraordinairement applaudie
و
que sevérement critiquée par une très
nombreuse assemblée , et peut- être à
l'excès ; car le Public, ne se contient
gueres dans de justes bornes sur les premieres
impressions qu'il reçoit d'un Ouvrage
d'esprit. Celui - ci fut beaucoup
mieux entendu , plus goûté et plus applaudi
à la seconde représentation qu'on
en donna le Mercredy 27. après quelques
Gvj chan
140 MERCURE DE FRANCE
changemens
faits par l'Auteur sur les
observations
du Public. Nous parlerons.
plus au long de cette Tragédie , dont
tous les Personnages
portent des noms
illustres
connus dans l'Histoire de
France .
>
On doit donner sur le même Theatre
au commencement de Février, une petite
Comédie nouvelle en un Acte , en Prose
de M. Fagan , sous le titre de la Grondense.
Le 14. les Comédiens Italiens donnerent
la premiere représentation d'une Comédie
nouvelle en Prose , en trois Actes , ornée
de trois Divertissements de Chant et de
Danses , ayant pour titre , Arlequin
Grand Mogo'. Elle est de la composition
de M. Delisle , Auteur de Timon le Misantrope,
et d'autres Piéces qu'il a données
au Theatre Italien .
Le 5. de ce mois les Comédiens François
représenterent à Versailles la Comédie
du Misantrope et la petite Piéce du
Tuteur. Le Sr Fiet ville joua avec applaudissement
le principal rôle dans la premiere
, et celui de Lucas dans l'autre.
Le 28. Andronic , et l'Impromptu de
Campagne.
Le 30. Janvier les Comédiens Italiens
représenterent à la Cour la Comédie
JANVIER . 1734. 141
Arlequin Sauvage , et celle d'Arlequin
Poli par l'Amour.
On continue sur le Theatre de l'Opera
les représentations d'Issé , et de Hypolite
et Aricie. On remettra au commencement
du mois prochain, le Ballet des Fêtes Grecques
etRomaines , avec une nouvelleEntrée,
Les paroles sont de M. Fuzelier , et la
Musique de M. de Blamont.
le 9
L'Opera de Fabrice en Italien,a été représenté
depuis peu à Londres , en présence
du Roy , de la Reine et de la Famille
Royale , avec beaucoup de succès.
On a appris de la même Ville que
de ce mois , on représenta en présence
du Roy et de la Reine sur le Theatre de
Lincols Innfiglds , le nouvel Opera
d'Ariadne. C'est le premier qu'on ait representé
sur ce Theâtre.
-
Le 16. on représenta à Londres , sur le
Theatre du Marché au Foin l'Opera
d'Arbaces. Et le même jour on joüa sur
le Theatre de Lincolns Innfields , celui
d'Ariadne.
On représenta le même jour pour l'ouverturedu
Carnaval à Rome , on donna sur le Theatre
de Florence , la premiere représentation d'une
Piéce intitulée Neron , ou le Mariage par interests:
François remirent au Theatre la
Tragédie de Bajazet , dans laquelle la
Dlle Grandval, épouse du Sr Grandval
Comédien du Roy , joia pour la
premiere
fois le rôle d'Atalide et le joua
fort naturellement et avec intelligence .
Elle fut fort applaudie ; ce n'est cependant
que son coup d'essai. Les rôles Comiques
qu'elle a joués depuis, ont encore,
confirmé la bonne opinion qu'on a de ses,
talens , sur tout dans le rôle d'Hortense
dans la petite Comédie du Florentin.
. Le Lundi 18 , on donna sur le Theatre
François la premiere représentation d'Adelaide
Tragédie de M. de Voltaire :
elle fut aussi extraordinairement applaudie
و
que sevérement critiquée par une très
nombreuse assemblée , et peut- être à
l'excès ; car le Public, ne se contient
gueres dans de justes bornes sur les premieres
impressions qu'il reçoit d'un Ouvrage
d'esprit. Celui - ci fut beaucoup
mieux entendu , plus goûté et plus applaudi
à la seconde représentation qu'on
en donna le Mercredy 27. après quelques
Gvj chan
140 MERCURE DE FRANCE
changemens
faits par l'Auteur sur les
observations
du Public. Nous parlerons.
plus au long de cette Tragédie , dont
tous les Personnages
portent des noms
illustres
connus dans l'Histoire de
France .
>
On doit donner sur le même Theatre
au commencement de Février, une petite
Comédie nouvelle en un Acte , en Prose
de M. Fagan , sous le titre de la Grondense.
Le 14. les Comédiens Italiens donnerent
la premiere représentation d'une Comédie
nouvelle en Prose , en trois Actes , ornée
de trois Divertissements de Chant et de
Danses , ayant pour titre , Arlequin
Grand Mogo'. Elle est de la composition
de M. Delisle , Auteur de Timon le Misantrope,
et d'autres Piéces qu'il a données
au Theatre Italien .
Le 5. de ce mois les Comédiens François
représenterent à Versailles la Comédie
du Misantrope et la petite Piéce du
Tuteur. Le Sr Fiet ville joua avec applaudissement
le principal rôle dans la premiere
, et celui de Lucas dans l'autre.
Le 28. Andronic , et l'Impromptu de
Campagne.
Le 30. Janvier les Comédiens Italiens
représenterent à la Cour la Comédie
JANVIER . 1734. 141
Arlequin Sauvage , et celle d'Arlequin
Poli par l'Amour.
On continue sur le Theatre de l'Opera
les représentations d'Issé , et de Hypolite
et Aricie. On remettra au commencement
du mois prochain, le Ballet des Fêtes Grecques
etRomaines , avec une nouvelleEntrée,
Les paroles sont de M. Fuzelier , et la
Musique de M. de Blamont.
le 9
L'Opera de Fabrice en Italien,a été représenté
depuis peu à Londres , en présence
du Roy , de la Reine et de la Famille
Royale , avec beaucoup de succès.
On a appris de la même Ville que
de ce mois , on représenta en présence
du Roy et de la Reine sur le Theatre de
Lincols Innfiglds , le nouvel Opera
d'Ariadne. C'est le premier qu'on ait representé
sur ce Theâtre.
-
Le 16. on représenta à Londres , sur le
Theatre du Marché au Foin l'Opera
d'Arbaces. Et le même jour on joüa sur
le Theatre de Lincolns Innfields , celui
d'Ariadne.
On représenta le même jour pour l'ouverturedu
Carnaval à Rome , on donna sur le Theatre
de Florence , la premiere représentation d'une
Piéce intitulée Neron , ou le Mariage par interests:
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Résumé : « Le 14 de ce mois les Comédiens François remirent au Theatre la [...] »
En janvier 1734, plusieurs événements marquants eurent lieu dans le monde du théâtre. Le 14 janvier, les Comédiens Français reprirent 'Bajazet', avec la demoiselle Grandval interprétant Atalide pour la première fois, recevant des applaudissements. Le 18 janvier, la tragédie 'Adélaïde' de Voltaire fut jouée au Théâtre Français, mieux appréciée lors de la seconde représentation le 27 janvier après modifications. Les Comédiens Italiens présentèrent 'Arlequin Grand Mogo', une comédie en prose en trois actes avec des divertissements. Les Comédiens Français jouèrent 'Le Misanthrope' et 'Le Tuteur' à Versailles le 5 janvier, et 'Andronic' et 'L'Impromptu de Versailles' le 28 janvier. Le 30 janvier, les Comédiens Italiens interprétèrent 'Arlequin Sauvage' et 'Arlequin Poli par l'Amour' à la Cour. À l'Opéra, les représentations d''Issé' et d''Hypolite et Aricie' continuaient, avec le ballet 'Les Fêtes Grecques et Romaines' prévu pour le mois suivant. À Londres, l'opéra 'Fabrice' fut représenté en présence de la famille royale, ainsi que 'Ariadne'. Le 16 janvier, 'Arbaces' et 'Ariadne' furent joués sur différents théâtres. À Rome, la pièce 'Néron, ou le Mariage par intérêts' ouvrit le carnaval.
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221
p. 142-147
EXTRAIT de l'Impromptu de Campagne, ou l'Amant déguisé. Petite Comédie nouvelle de M. Poisson l'aîné.
Début :
La Scene de cette Piece est dans le Château d'un Comte ; Lucas, Jardinier [...]
Mots clefs :
Isabelle, Lisette, Comte, Éraste, Château, Père, Frontin, Comédie, Jardinier, Valet, Mariage, Campagne, Secret
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT de l'Impromptu de Campagne, ou l'Amant déguisé. Petite Comédie nouvelle de M. Poisson l'aîné.
EXTRAIT de l'Impromptu de Campagne,
ou l'Amant déguisé . Petite Comédie
nouvelle de M. Poisson l'aîné.
Loh
A Scene de cette Piece est dans le
Château d'un Comte ; Lucas , Jardinier
de cette Terre , et Lisette , Suivante
d'Isabelle , fille unique du Seigneur , ouvrent
la Scene ; Lisette veut sçavoir de
lui , s'il n'a point découvert quel peut
être un jeune Cavalier , qu'on a vû roder
autour du Château ; Lucas lui apprend
que le Valet de ce Cavalier lui a paru
apartenir à bonMaître , parce qu'il l'a bien
fait boire sans exiger de retour. Lisette
l'a traité d'animal. Ils se retirent tous
deux , parce qu'ils entendent du bruit.
Eraste qui est le Cavalier , dont le Jardinier
vient de parler à Lisette , et Frontin
, son valet , commencent la seconde
Scene ; c'est par leur entretien qu'on apprend
qu'Eraste est un fils de famille, lequel
n'ayant pas voulu consentir à un
mariage que son pere avoit conclu sans
lui , s'est enfui de la maison paternelle ,
après avoir volé trois cent Louis à ce même
Pere , qui vouloit l'engager dans le
mariage. Son valet lui fait entendre sagement
qu'avant que ses finances fussent
tout- à - fait épuisées , il feroit bien de retour
JANVIER. 1734. 143
tourner à Paris , où son pere voudroit
bien encore le recevoir , malgré le vol
qu'il lui fit en partant. Eraste rejette ce
conseil, et lui dit qu'il est trop amoureux
d'une aimable personne qu'il croit habiter
ce Château ; il lui demande s'il n'a
point appris du Jardinier de ce Château
quel en est le Maître ; Frontin lui répond
que c'est un Comte d'une humeur assez
particuliere, qui passe sa vie avec sa femme
et sa fille , à faire des Concerts et à
jouer des Comédies ; Eraste est charmé
de ce que son valet lui apprend et se flate
de s'introduire dans ce Château , sous
le nom de Comédien de Campagne ;
Frontin ne se prête pas d'abord à un
stratagéme ? qui lui paroît un peu dangereux;
mais il consent enfin à jouer à son
tour lé Rôle de Comédien ; il ne laisse
pas de faire entendre à son Maître , qu'il
ne convient pas trop à un homme de condition
comme lui , de jouer la Comédie;
ce qui donne lieu à l'Auteur qui l'a joüée
autrefois, de faire l'apologie de cette profession
par ccs Vers :
La Comédie est belle ,
Et je ne trouve rien de condamnable en elle ;.
Elle est du ridicule , un si parfait miroir ,
Qu'on peut devenir sage , à force de s'y voir ;
Elle
144 MERCURE DE FRANCE
Elle forme les moeurs et donne à la jeunesse ,
L'ornement de l'esprit , le goût , la politesse ;
Tel même qui la fait avec habileté ,
Peut , quoiqu'on puisse dire , en tirer vanité ;
La Comédie enfin , par d'heureux artifices ,
Fait aimer les vertus , et détester les vices ,
Dans les ames excite un noble sentiment ,
Corrige les défauts , instruit en amusant ,
En morale agréable , en mille endroits abonde ;
Et pour dire le vrai , c'est l'éxile du monde.
Ils se retirent tous deux pour aller concerter
une Scene, dont ils veulent regaler
à leur tour le Comte.
Isabelle er Lisette font une Scene qui a
paru tres- fine ; la Suivante se doute que
sa Maîtresse ne hait pas le Cavalier qu'on
a vû roder autour du Château , elle sonde
Isabelle ; mais voyant qu'elle dissimu
le , elle prend le parti de feindre à son
tour , et c'est en blâmant le Cavalier en
faveur duquel il la croit secretement prévenue
; cette maniere d'arracher un secret
n'est pas nouvelle au Théatre ; mais
le tour que l'Auteur a mis dans sa Scène
ne laisse pas d'avoir quelque chose de
neuf, sur tout dans les Vers par où elle
fini. Les voici ;
LiJANVIER.
1734- 145
Lisette.
Mais il a l'air commun ; l'air d'un homme ordinaire
.
Isabelle.
Tu t'es trompée , il a l'air tres- noble au contraire.
Lisette.
J'ai cependant bien vâ , sa figure au grand jour ;
A est vouté , je croi ,
Isabelle.
Que dis- tu Fait au tour.
Lisette.
Fort- bien , je ne suis pas contre lui prévenuë ,
Mais je le vis sur vous , tenir long- tems la vue ;
Ses yeux ne disent rien du tout.
Isabelle,
·
Ah ! quelle erreur !
Il les a vifs , perçans , ils vont jusques au coeur.
Lisette.
Ah ! vous l'avoüez donc , &c.
Lisette ayant tiré le secret d'Isabelle ,
l'afflige en lui apprenant qu'elle croit
qu'on veut la marier. Elles se retirent
toutes deux à l'approche du Comte et
de la Comtesse. La
146 MERCURE DE FRANCE
La Scene entre ce vieux Seigneur , et sa
femme , n'a n'a pas paru la plus amusante ;
elle est interrompue par l'arrivée d'Isabelle
et de Lisette ; et bien- tôt après par
celle des prétendus Comédiens de Campagne.
La Scene qu'ils jouent devant le
Comte et toute sa fimille , convient à la
situation présente de nos Amants ; la Pićce
est intitulée : l'Amant déguisé.
r
Le Comte est tres satisfait de cette
Scene , et prie Eraste et Frontin de rester
quelques jours dans son Château pour
le divertir.
Eraste qui ne demande pas mieux,trouve
le secret d'avoir un entretien avec Isabelle
; il lui déclare son amour , et cette
déclaration est reçue au gré de ses souhaits
, sur tout lorsqu'il a fait connoître .
à Isabelle qu'il est d'une condition à pouvoir
aspirer à son Hymen ; mais le Jar
dinier vient troubler leur joïe , il leur
apprend qu'il vient d'arriver un M² qui
a parlé de mariage à M. le Comte ; Isabelle
tremble d'être arrachée à sonAmant ;
Eraste la rassures et se jettant à ses pieds ,
il est surpris dans cette situation , par le
Comte qui ne sçait ce que cela veut dire .
Frontin lui fait entendre que c'est une
Scene d'Amphitrion , qu'Erate montre à
Isabelle.
Enfin
JANVIER. 7134 147
Enfin le Monsieur dont le Jardinier a
parlé , vient faire le dénouement ; c'est le
Pere d'Eraste ; le Pere et le Fils sont également
surpris; le Comte ni la Comtesse
n'y comprennent rien ; Frontin dit en
plaisantant ; que c'est une Scene de reconnoissance
entre un Pere et son Fils ; le
Pere fait connoître que c'est une réalité
et consent au mariage d'Eraste et d'Isabelle
, que ces deux vieux amis avoient
résolu depuis long - temps pour se lier
d'un noeud plus fort.
ou l'Amant déguisé . Petite Comédie
nouvelle de M. Poisson l'aîné.
Loh
A Scene de cette Piece est dans le
Château d'un Comte ; Lucas , Jardinier
de cette Terre , et Lisette , Suivante
d'Isabelle , fille unique du Seigneur , ouvrent
la Scene ; Lisette veut sçavoir de
lui , s'il n'a point découvert quel peut
être un jeune Cavalier , qu'on a vû roder
autour du Château ; Lucas lui apprend
que le Valet de ce Cavalier lui a paru
apartenir à bonMaître , parce qu'il l'a bien
fait boire sans exiger de retour. Lisette
l'a traité d'animal. Ils se retirent tous
deux , parce qu'ils entendent du bruit.
Eraste qui est le Cavalier , dont le Jardinier
vient de parler à Lisette , et Frontin
, son valet , commencent la seconde
Scene ; c'est par leur entretien qu'on apprend
qu'Eraste est un fils de famille, lequel
n'ayant pas voulu consentir à un
mariage que son pere avoit conclu sans
lui , s'est enfui de la maison paternelle ,
après avoir volé trois cent Louis à ce même
Pere , qui vouloit l'engager dans le
mariage. Son valet lui fait entendre sagement
qu'avant que ses finances fussent
tout- à - fait épuisées , il feroit bien de retour
JANVIER. 1734. 143
tourner à Paris , où son pere voudroit
bien encore le recevoir , malgré le vol
qu'il lui fit en partant. Eraste rejette ce
conseil, et lui dit qu'il est trop amoureux
d'une aimable personne qu'il croit habiter
ce Château ; il lui demande s'il n'a
point appris du Jardinier de ce Château
quel en est le Maître ; Frontin lui répond
que c'est un Comte d'une humeur assez
particuliere, qui passe sa vie avec sa femme
et sa fille , à faire des Concerts et à
jouer des Comédies ; Eraste est charmé
de ce que son valet lui apprend et se flate
de s'introduire dans ce Château , sous
le nom de Comédien de Campagne ;
Frontin ne se prête pas d'abord à un
stratagéme ? qui lui paroît un peu dangereux;
mais il consent enfin à jouer à son
tour lé Rôle de Comédien ; il ne laisse
pas de faire entendre à son Maître , qu'il
ne convient pas trop à un homme de condition
comme lui , de jouer la Comédie;
ce qui donne lieu à l'Auteur qui l'a joüée
autrefois, de faire l'apologie de cette profession
par ccs Vers :
La Comédie est belle ,
Et je ne trouve rien de condamnable en elle ;.
Elle est du ridicule , un si parfait miroir ,
Qu'on peut devenir sage , à force de s'y voir ;
Elle
144 MERCURE DE FRANCE
Elle forme les moeurs et donne à la jeunesse ,
L'ornement de l'esprit , le goût , la politesse ;
Tel même qui la fait avec habileté ,
Peut , quoiqu'on puisse dire , en tirer vanité ;
La Comédie enfin , par d'heureux artifices ,
Fait aimer les vertus , et détester les vices ,
Dans les ames excite un noble sentiment ,
Corrige les défauts , instruit en amusant ,
En morale agréable , en mille endroits abonde ;
Et pour dire le vrai , c'est l'éxile du monde.
Ils se retirent tous deux pour aller concerter
une Scene, dont ils veulent regaler
à leur tour le Comte.
Isabelle er Lisette font une Scene qui a
paru tres- fine ; la Suivante se doute que
sa Maîtresse ne hait pas le Cavalier qu'on
a vû roder autour du Château , elle sonde
Isabelle ; mais voyant qu'elle dissimu
le , elle prend le parti de feindre à son
tour , et c'est en blâmant le Cavalier en
faveur duquel il la croit secretement prévenue
; cette maniere d'arracher un secret
n'est pas nouvelle au Théatre ; mais
le tour que l'Auteur a mis dans sa Scène
ne laisse pas d'avoir quelque chose de
neuf, sur tout dans les Vers par où elle
fini. Les voici ;
LiJANVIER.
1734- 145
Lisette.
Mais il a l'air commun ; l'air d'un homme ordinaire
.
Isabelle.
Tu t'es trompée , il a l'air tres- noble au contraire.
Lisette.
J'ai cependant bien vâ , sa figure au grand jour ;
A est vouté , je croi ,
Isabelle.
Que dis- tu Fait au tour.
Lisette.
Fort- bien , je ne suis pas contre lui prévenuë ,
Mais je le vis sur vous , tenir long- tems la vue ;
Ses yeux ne disent rien du tout.
Isabelle,
·
Ah ! quelle erreur !
Il les a vifs , perçans , ils vont jusques au coeur.
Lisette.
Ah ! vous l'avoüez donc , &c.
Lisette ayant tiré le secret d'Isabelle ,
l'afflige en lui apprenant qu'elle croit
qu'on veut la marier. Elles se retirent
toutes deux à l'approche du Comte et
de la Comtesse. La
146 MERCURE DE FRANCE
La Scene entre ce vieux Seigneur , et sa
femme , n'a n'a pas paru la plus amusante ;
elle est interrompue par l'arrivée d'Isabelle
et de Lisette ; et bien- tôt après par
celle des prétendus Comédiens de Campagne.
La Scene qu'ils jouent devant le
Comte et toute sa fimille , convient à la
situation présente de nos Amants ; la Pićce
est intitulée : l'Amant déguisé.
r
Le Comte est tres satisfait de cette
Scene , et prie Eraste et Frontin de rester
quelques jours dans son Château pour
le divertir.
Eraste qui ne demande pas mieux,trouve
le secret d'avoir un entretien avec Isabelle
; il lui déclare son amour , et cette
déclaration est reçue au gré de ses souhaits
, sur tout lorsqu'il a fait connoître .
à Isabelle qu'il est d'une condition à pouvoir
aspirer à son Hymen ; mais le Jar
dinier vient troubler leur joïe , il leur
apprend qu'il vient d'arriver un M² qui
a parlé de mariage à M. le Comte ; Isabelle
tremble d'être arrachée à sonAmant ;
Eraste la rassures et se jettant à ses pieds ,
il est surpris dans cette situation , par le
Comte qui ne sçait ce que cela veut dire .
Frontin lui fait entendre que c'est une
Scene d'Amphitrion , qu'Erate montre à
Isabelle.
Enfin
JANVIER. 7134 147
Enfin le Monsieur dont le Jardinier a
parlé , vient faire le dénouement ; c'est le
Pere d'Eraste ; le Pere et le Fils sont également
surpris; le Comte ni la Comtesse
n'y comprennent rien ; Frontin dit en
plaisantant ; que c'est une Scene de reconnoissance
entre un Pere et son Fils ; le
Pere fait connoître que c'est une réalité
et consent au mariage d'Eraste et d'Isabelle
, que ces deux vieux amis avoient
résolu depuis long - temps pour se lier
d'un noeud plus fort.
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Résumé : EXTRAIT de l'Impromptu de Campagne, ou l'Amant déguisé. Petite Comédie nouvelle de M. Poisson l'aîné.
L'Impromptu de Campagne, ou l'Amant déguisé, est une pièce de théâtre dont l'action se déroule dans le château d'un comte. Lucas, le jardinier, et Lisette, la suivante d'Isabelle, la fille unique du comte, discutent d'un jeune cavalier rôdant autour du château. Lucas révèle que le valet de ce cavalier a montré une grande générosité. Lisette traite ce valet d'animal. Ils se retirent en entendant du bruit. Eraste, le cavalier en question, et son valet Frontin apparaissent ensuite. Eraste est un fils de famille qui s'est enfui de chez lui après avoir volé trois cents louis à son père pour éviter un mariage arrangé. Frontin conseille à Eraste de retourner à Paris, où son père est prêt à le pardonner. Eraste refuse, car il est amoureux d'une personne qu'il croit habiter le château. Il souhaite se faire passer pour un comédien de campagne pour s'introduire dans le château. Frontin accepte finalement de jouer le rôle de comédien, malgré ses réserves. Ils discutent de la comédie, que Frontin défend comme une forme d'art éducative et moralisatrice. Isabelle et Lisette discutent ensuite du cavalier. Lisette devine qu'Isabelle est amoureuse de lui et utilise une ruse pour le découvrir. Isabelle finit par avouer son attirance pour le cavalier. Elles sont interrompues par l'arrivée du comte et de la comtesse. Eraste et Frontin jouent une scène de comédie devant le comte et sa famille, intitulée 'l'Amant déguisé'. Le comte est satisfait et les invite à rester quelques jours. Eraste profite de l'occasion pour déclarer son amour à Isabelle, qui accepte après qu'il lui révèle sa condition sociale. Leur joie est interrompue par le jardinier, qui annonce l'arrivée d'un homme parlant de mariage. Isabelle craint d'être séparée de son amant, mais Eraste la rassure. Le dénouement révèle que l'homme en question est le père d'Eraste. Père et fils sont surpris de se retrouver. Le père consent au mariage d'Eraste et d'Isabelle, un projet qu'il avait déjà envisagé avec le comte.
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222
p. 147-148
PARALLELE.
Début :
Dans l'article des Spectacles, les Vers qu'on va lire sur les Dlles d'Angeville et / Le croiriez-vous ? votre suffrage, [...]
Mots clefs :
Mlle Dangeville, Mlle Gaussin
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : PARALLELE.
Dans l'article des Spectacles , les Vers
qu'on va lire sur les Dlles d'Angeville et
Gaussin , deux Actrices chéries du Théatre
François , peuvent trouver heureusement
leur place . Ce qui y a donné licu
est une contestation entre Madame ***
et M. de Royaucourt , de Soissons , Auteur
des Vers .
PARALLELE.
LE croiriez- vous ? votre suffrage ,
Charmante Iris , n'entraîne pas le mien ;
Votre choix dédommage bien ,
D'un si foible désavantage ;
Approuvez ina témérité ,
aime mieux , au péril d'une légere offense ,
J'aime
Vous prouver ma sincerité ,
Que
148 MERCURE DE FRANCE
Que vous marquer ma complaisance .
Entre deux illustres vainqueurs ,
Souffrez que d'une main fidelle ,
En Plutarque nouveau je trace un Parallele ,
Et que j'ose peser tous leurs droits sur nos
coeurs.
L'heureux (a) objet de votre complaisance
'Arme un air noble et doux contre notre raison ;
Celle ( b ) pour qui je panche la balance i
A l'oeil mutin , l'air Papillon ,
L'une est belle , l'autre est jolie ;
C'est une Rose épanouïe ,
Comparée avec son bouton;
Celle-ci de Paphos paroît avoir l'Empire ,
L'autre paroît Hébé dans ses riants attraits,
1
Je t'admire , belle Zaïre ,
Folatre amour , que tu me plais !
L'une nous presente les Graces ,
L'autre les Ris et l'enjoument ;
Libérale nature , ainsi tu te surpasses ,
Ou dans un tout parfait , ou dans un rien charmant
>
Aux trésors éclatans que Gossain nous étale ,
Enfin si la raison doit adjuger le prix ,"
Ha ! je ne sçai quoi , belle Iris ,
Parle chez nous pour sa rivale.
( a ) Mlle Gossain.
(b ) Mlle d'Angeville,
qu'on va lire sur les Dlles d'Angeville et
Gaussin , deux Actrices chéries du Théatre
François , peuvent trouver heureusement
leur place . Ce qui y a donné licu
est une contestation entre Madame ***
et M. de Royaucourt , de Soissons , Auteur
des Vers .
PARALLELE.
LE croiriez- vous ? votre suffrage ,
Charmante Iris , n'entraîne pas le mien ;
Votre choix dédommage bien ,
D'un si foible désavantage ;
Approuvez ina témérité ,
aime mieux , au péril d'une légere offense ,
J'aime
Vous prouver ma sincerité ,
Que
148 MERCURE DE FRANCE
Que vous marquer ma complaisance .
Entre deux illustres vainqueurs ,
Souffrez que d'une main fidelle ,
En Plutarque nouveau je trace un Parallele ,
Et que j'ose peser tous leurs droits sur nos
coeurs.
L'heureux (a) objet de votre complaisance
'Arme un air noble et doux contre notre raison ;
Celle ( b ) pour qui je panche la balance i
A l'oeil mutin , l'air Papillon ,
L'une est belle , l'autre est jolie ;
C'est une Rose épanouïe ,
Comparée avec son bouton;
Celle-ci de Paphos paroît avoir l'Empire ,
L'autre paroît Hébé dans ses riants attraits,
1
Je t'admire , belle Zaïre ,
Folatre amour , que tu me plais !
L'une nous presente les Graces ,
L'autre les Ris et l'enjoument ;
Libérale nature , ainsi tu te surpasses ,
Ou dans un tout parfait , ou dans un rien charmant
>
Aux trésors éclatans que Gossain nous étale ,
Enfin si la raison doit adjuger le prix ,"
Ha ! je ne sçai quoi , belle Iris ,
Parle chez nous pour sa rivale.
( a ) Mlle Gossain.
(b ) Mlle d'Angeville,
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Résumé : PARALLELE.
Le texte relate une controverse littéraire entre Madame *** et M. de Royaucourt, auteur des vers, au sujet de deux actrices du Théâtre François, Mlles d'Angeville et Gaussin. La dispute est illustrée par un poème intitulé 'Parallèle', où l'auteur compare les deux actrices. Dans ce poème, l'auteur exprime son désaccord avec le choix de Charmante Iris, une interlocutrice fictive, et affirme sa préférence pour Mlle d'Angeville. Il décrit Mlle Gaussin comme ayant un air noble et doux, tandis que Mlle d'Angeville est qualifiée d'ayant un œil mutin et un air papillon. Le poème met en parallèle les qualités des deux actrices, soulignant que l'une est belle et l'autre jolie, comparant Mlle Gaussin à une rose épanouie et Mlle d'Angeville à son bouton. L'auteur conclut en exprimant son admiration pour Mlle d'Angeville et en laissant la raison décider du prix entre les deux actrices.
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223
p. 351
« La saison de l'Hyver, si abondante ordinairement en nouveautez Theatrales, [...] »
Début :
La saison de l'Hyver, si abondante ordinairement en nouveautez Theatrales, [...]
Mots clefs :
Saison de l'hiver, Nouveautés théâtrales
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « La saison de l'Hyver, si abondante ordinairement en nouveautez Theatrales, [...] »
A saison de l'Hyver , si abondante
ordinairement en nouveautez Theatrales
, ne l'a point été cette année , et
l'article des Spectacles s'en est ressenti .
On sent que ce n'est nullement notre
faute , mais on pourroit nous accuser
de quelque négligence et manquer d'artention
pour une matiere qui fait plaisir
au Public , si nous ne cherchions pas des
secours plus loin , quand nous n'en avons
pas sous notre main . Voici une Piéce
qui dans ce genre nous paroît propre
à réparer cette disette et dont nous
esperons que le Lecteur nous sçaura bon
gré.
ordinairement en nouveautez Theatrales
, ne l'a point été cette année , et
l'article des Spectacles s'en est ressenti .
On sent que ce n'est nullement notre
faute , mais on pourroit nous accuser
de quelque négligence et manquer d'artention
pour une matiere qui fait plaisir
au Public , si nous ne cherchions pas des
secours plus loin , quand nous n'en avons
pas sous notre main . Voici une Piéce
qui dans ce genre nous paroît propre
à réparer cette disette et dont nous
esperons que le Lecteur nous sçaura bon
gré.
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Résumé : « La saison de l'Hyver, si abondante ordinairement en nouveautez Theatrales, [...] »
Le texte mentionne une pénurie de nouvelles pièces théâtrales durant l'hiver, affectant les spectacles. L'auteur n'est pas responsable mais cherche des alternatives. Il présente une pièce jugée appropriée et espère qu'elle sera appréciée.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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224
p. 351-365
LETTRE écrite de Brest, contenant l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
Début :
Un de mes amis revenu l'année passée de la Chine m'a fait voir une singularité [...]
Mots clefs :
Tragédie chinoise, Médecin, Orphelin, Fils, Tchao-Chi-cou, Mort, Chinois, Princesse, Enfant, Jeune, Tragédie, Histoire, Théâtre, Ministre, Action
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Brest, contenant l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
LETTRE écrite de Brest contenant
l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
Un de mes amis revenu l'année passée
de la Chine m'a fait voir une singula-
G vj
rité
352 MERCURE DE FRANCE
rité Littéraire que je me fais un plaisir de
vous annoncer. C'est la Traduction d'une
Tragédie Chinoise. L'Ouvrage en doit être
envoyé à Paris ; si l'idée generale que
vous en prendrez dans l'Extrait que je
vous envoye pique votre curiosité , il
vous sera facile de voir l'Ouvrage entier,
qui doit être remis à M.....
Le Traducteur avertit dans une Préface
que les Tragédies Chinoises ne sont
assujetties à aucune des Regles de nôtre
Théatre moderne , celle des trois unitez
y est absolument inconnue et une Tragédie
Chinoise est proprement une Histoire
mise en Dialogue , dont les différentes
parties sont autant de Scenes détachées
, entre lesquelles il n'y a d'autre
liaison que celle qu'ont entr'elles les diverses
actions particulieres qui forment
la suite de cette Histoire.
Le Lieu change le plus souvent d'une
Scene à l'autre , mais de même que l'Acteur
en se montrant la premiere fois à
soin de dire , je suis un tel , et je viens
telle chose ; de même aussi en
pour
changeant de lieu il a soin d'avertir qu'il
est en un tel endroit, et que c'est là mêine
que va se passer l'action.
> Il en est de même du tems lorsque
l'intervalle d'une Scene à l'autre est un
peu
FEVRIER. 1734. 353
peu considérable,l'Acteur ne manque pas
de le dire et d'ajoûter que depuis un tel
Evenement il s'est écoulé tant de tems .
,
Vous voyez par-là , Monsieur , que
ces Tragédies ont du moins le mérite de
la clarté et que le violement de nos
regles ne cause aucun embarras à l'imagination
des Spectateurs. Les Piéces
Espagnoles , Italiennes , Angloises et
même les Piéces Françoises du commencement
du dernier siécle n'étoient pas
plus régulieres que celle des Chinois ;
mais le violement de la Regle des unitez
, y jettoit une obscurité bien plus
grande,parce que le Spectateur ne sçavoit
jamais dans quel tems et dans quel lieu
il s'étoit transporté, qu'après avoir entendu
une partie de la Scene ; l'embarras
étoit peut être encore plus grand dans
quelques unes de nos Piéces où l'on
cache l'inobservation de l'unité de tems
et de l'unité de lieu au dépens de la vraisemblance
et de la bienséance , comme
dans Cinna.
Il ne paroît pas beaucoup d'art dans
la maniere dont s'annoncent les Personnages
Chinois dans la Piéce que j'ai lûë
mais je ne doute pas que d'autres Piéces
n'en montrent davantage . Si quelqu'un
des Missionnaires Européens vouloit faire
sur
354 MERCURE DE FRANCE
sur le Théatre Chinois , ce que le R. P.
Brumoi a fait sur le Theatre des Grecs ,
nous en donner une Histoire ou une
Notice , je ne doute pas que son Ouvrage
ne fut bien reçu ; et à juger des
Tragédies Chinoises par le caractere general
de cette Nation , et par le ton de
celle-ci , je suis persuadé que l'on y verroit
bien d'autres exemples de vertu et de
courage, que dans les Tragédies Grecques
où la véritable vertu est presque inconnuë
; ou le courage est une passion et
une passion turbulente qui offusque la
raison et bannit la tranquillité de l'Ame ;
où l'orgueil et l'amour de la gloire bien
plus que l'attachement au devoir sont la
Source des grandes actions et où les
crimes ne se punissent presque jamais
que par d'autres crimes .
La Déclamation Chinoise , à ce que
nous apprend le Traducteur , est souvent
entremêlée de chant. Le même Personnage
interrompant sa Déclamation
par quelques paroles chantées, et plaçant
de même au milieu d'une suite de paroles
chantées , quelques paroles simplement
déclamées. Il faudroir avoir les
oreilles bien faites à l'harmonie de la
prononciation Chinoise pour juger de
l'effet que doit produire ce mélange. Il ,
n'est
FEVRIER 1734 359
n'est pas peut être plus ridicule que cette
Déclamation empoulée , ou ce Chant
Tragique , dont les grands Acteurs que
* nous avons perdu depuis peu , ont tenté
inutilement de délivrer nôtre Theatre.
A juger de la Déclamation Chinoise
par l'idée que les Relations nous donnent
de leur prononciation , elle doit être
pour le Chant , ce que le Récitatif de
nos Opéra est pour les grands Airs . La
comparaison est d'autant plus juste que
c'est principalement pour exprimer quetque
sentiment plus vifou quelque mouvement
plus animé que les Acteurs
Chinois ont recours au Chant.
Après ce Préambule je viens à la Tragédie
même qui y a donné occasion . Elle
est intitulée l'Orphelin de sa Maison
THEAO , et il s'agit des Avantures de
cet Enfant depuis sa naissance jusqu'à-ce
qu'il eût vangé ses Parens . Ainsi l'Action
de la Piéce dure environ 20 ans.
Sous le Regne de Cing Cong , Empe.
reur de la Dynastie des Tsine , Tou ngan
Con , Ministre de la Guerre et Theao
Tune , Ministre de la Justice et des Finances
partageoient entr'eux deux le
Gouvernement. Tou ngan Cou , jaloux
du crédit de son Rival , après avoir tenté
différentes voyes pour le faire périr, vint
enfin
356 MERCURE DE FRAN CE
enfin à bout de le rendre suspect à l'Empereur.
Ce Prince persuadé des crimes de
Tehao Tune qui avoit pris la fuite , signa
un ordre pour faire mourir la famille
et les Domestiques de ce Ministre au
nombre de trois cent personnes . Tehaoso ,
Fils du Ministre disgracié , er gendre de
l'Empereur , fut le seul épargné en considération
de son alliance avec la famille
Royale ; Tou ngan Cou , croyant sa vengeance
imparfaite tant qu'il resteroit
quelqu'un de cette Maison , supposa un
ordre de l'Empereur à Tehaoso de se
donner la mort, et le lui envoya porter
avec le fer , le poison et le cordeau , lui
laissant le choix de son supplice. Cette
espece d'Argument de la Pièce est dans
un long Monologue par lequel Ngan
Cou ouvre le Theatre.
Dans la Scene suivante Tehaoso paroît
avec son Epouse , et comme il est per--
suadé qu'on ne l'épargnera pas encore
longtems , il lui donne par avance ses
derniers ordres ; lui recommande le fruit
dont elle est enceinte et veut , qu'il soit
nommé l'Orphelin de Tehao, au cas que
cc soit un Garçon , et qu'il soit élevé
pour être le vengeur de sa famille . Dans
ce moment on apporte l'ordre de l'Empereur
; Tehaoso le reçoit à genoux ,
choiFEVRIER.
1734. 357
choisit le poignard et se frappe après
avoir renouvellé ses derniers ordres .
La Princesse est enfermée dans son Palais
pour être gardée exactement jusqu'à
ses couches . L'introduction au Prologue
nommé Sié tscè , finit - là . Il y a ensuite
cinq Sections ou divisions tchè , que l'on
peut nommer Actes à nôtre maniere.
On apprend dans la premiere partie à
Tougnen Cou , que la Princesse femme
de Tehaoso , est accouchée d'un fils et
qu'elle l'a nommé l'Orphelin de Tehao .
La haine de Ngan Cou , s'irrite à cette
nouvelle ; il jure la mort de cet Enfant ,
et donne des ordres pour redoubler la
garde du Palais de cette Princesse.
Dans la Scene suivante cette Princesse
paroît avec son fils dans ses bras ; elle
déplore ses propres malheurs , ceux de
toute sa Maison : la mort cruelle de son
Mari, le péril auquel son fils est exposé ,
dit qu'elle a envoyé chercher le Médecin
Tehing ing, le seul des 300 Domestiques
de la Maison de son Beau- pere , qui ait
échapé au carnage ; qu'elle connoît sa
vertu , son courage , son affection pour
la Maison Tehao et qu'il est le seul qui
puisse sauver les restes infortunez de
cette Maison.
Tehing ing , arrive dans l'équipage
d'un
358 MERCURE DE FRANCE :
d'un Médecin Chinois , portant avec lui
sa Cassette aux Remedes pendue à son
col . La Princesse lui propose d'emporter
le jeune Tehao , et de se charger du soin
de le cacher. Tehing ing représente à la
Princesse les difficultez et le péril d'une
telle entreprise elle se jette à ses pieds;
Tehing ing la releve , lui proteste qu'il
est prêt à tout entreprendre pour elle ;
mais continue- t-il , si je sauve mon
jeune Maître , comment poutrez - vous
cacher cette action au Tyran ? il vous
arrachera ce secret ; nous périrons moi
et ma famille , et nous périrons sans
sauver vôtre Fils. Tehing ing , dir la
Princesse , ne craignez rien de ma foiblesse
; partez avec mon fils ; son pere
est mort sous le Couteau , c'en est fait,
sa Mere va rejoindre son Epoux , elle va
mourir. En achevant ces mots ; la Prin
cesse qui a détaché sa ceinture , la passe
dans son col et s'étrangle .
Tehing-ing pénétré d'un Spectacle si
touchant prend l'Enfant et le cache
dans son coffre , le couvre de quelques
hardes et l'emporte. Il est arrêté par
Han Koné , Mandarin d'Armes qui garde
les portes du Palais par ordre de Toungan
Cou. Han Koué doit le commencement
de sa fortune à Tebao tune , et
comme
FEVRIER. 1734- 359
, comme il aime la vertu c'est à regret
qu'il obéït à Ngan Cou , dont il déteste
les crimes ; le Mandarin soupçonne bientôt
à l'air inquiet et embarassé du Médecin
, ce qu'il vient de faire , fait retirer
ses Soldats , ouvre le coffre , apperçoit
l'enfant , est attendri à sa vûë , promet
à Tehing de ne le point dénoncer
lui ordonne de l'emporter et de se retirer.
Le Médecin sort et revient se jetter
aux pieds de Han Koué comme s'il eût
craint que tout cela ne fut un piége qu'on
lui tendit ; cette manoeuvre se répete
plusieurs fois Han Koué , reproche à
Tehing ing cette méfiance , si tu n'as pas
le courage d'exposer ta vie , lui dit- il ,
pourquoi t'es- tu engagé dans cette entreprise
? rassures- toi , ajoute-t-il , tų
n'auras rien à craindre de ma part , en
disant ces mots , Han Koué se frappe de
son poignard et tombe mort. Tehing emporte
l'Enfant , et sort en nommant le
lieu qu'il a choisi pour sa retraite.
Vous serez sans doute un peu blessé
Monsieur , de la brusque résolution que
le pauvre Han Koué prend assez legerement
de sortir de la vie pour ôter toute
inquiétude au Médecin ; c'est même- là
une répetition de ce qu'a fait la Princesse.
Il est vrai que ces deux Personnages auroient
360 MERCURE DE FRANCE
roient embarassé dans la suite de la Piéce,
mais la façon de s'en défaire me semble
un peu singuliere apparemment que
. les Chinois, malgré le peu d'opinion que
nous avons de leur bravoure , ne regardent
pas la mort avec crainte et qu'ils
croyent au moins spéculativement qu'il
n'est pas nécessaire d'avoir des raisons
bien fortes pour se la donner. Leur
Histoire confirme cette opinion
crois d'ailleurs que l'on peut juger du
caractere et des opinions d'une Nation
du moins jusqu'à un certain point , par
ses Piéces de Theatre.
و etje
Dans la Division suivante , on apprend
à Tou- ngan Cou , ce qui vient d'arriver ;
il est saisi de fureur et il forme le dessein
de
supposer un nouvel Ordre du Roy
pour se faire apporter tous les Enfans
âgez de six mois , résolu de les poignar
der tous, pour envelopper dans le Massacre
general l'Orphelin de Tehao. Je passe
Monsieur le détail des Scenes difficiles
à abréger et qui ne servent à rien pour
arriver à la quatrième Scene de cette
Section .
Le Médecin Tehing qui a pris la résolution
d'aller chercher un azile pour le
jeune Tehao auprès de Kong Lun , ancien
Ministre, ennemi de Tou -ngan Kou
et
1
FEVRIER 1734. 361
et ami de Tehao - tune , retiré à la Campagne.
Il arrive chez ce vicillard , lui découvre
son secret , et lui remet entre les mains
l'Orphelin de Tehao , et lui apprend la
Loy portée contre tous les Enfans du
Royaume , après quoi il lui déclare qu'il
est résolu de reconnoître les obligations.
qu'il a à ceux de la maison de Theao
et de sauver les jours de tous ces infortunez
condamnez à la mort par l'Arrêt
de Ngan- Kou. J'ai un Fils du même âge
que le jeune Prince , ajoute- t- il , je vais
emporter chez moi ses vêtemens , j'en
couvrirai mon Fils , vous irez me dénoncer
au Tyran comme le dépositaire et
le gardien de l'Orphelin de Tehao ;
j'avouerai touts on prendra mon Fils
pour cet Orphelin , nous mourrons lui
et moi et vous éleverez ce cher Enfant
que je vous confie ; vous l'instruirez de
son sort , et vous l'aiderez à venger
mort de ses Parens .
la
Cong - Lun répond à cela en demandant
à ce Médecin quel âge il a , et il répond
qu'il a 45 ans . Vous avez 45 ans , dit
Cong- Lun ? Il faut attendre au moins
20 ans avant que cet Enfant puisse connoître
son sort et venger sa famille , vous
aurez alors 65 ans , moi j'en aurai alors"
3.
90,
352 MERCURE DE FRANCE
90 , et quand même je pourrois vivre
jusques- là , de quel secours lui serois - je ?
Croyez moi , portez chez vous ce jeune
Orphelin , mettez- le à la place de vôtre
fils ? et puisque vous voulez bien sacrifier
ce ls , apportez - le ici , et m'allez
accuser au Tyran ? il viendra me chercher
, nous périrons vôtre fils et moi
mais vous sauverez l'Orphelin ; allez ?
ce projet est plus sage que le vôtre.
Le Médecin ne se rend qu'après avoir
employé les discours les plus pressans
pour détourner Cong Lun de son dessein ,
et l'on voit que c'est à regret qu'il consent
à sauver ses jours aux dépens de
ceux de ce Vieillard . Une chose qui mérite
d'être remarquée dans cette Scene
c'est la tranquillité avec laquelle ces deux
Hommes déliberent sur le choix de celui
qui doit s'immoler ; l'utilité dont ils
peuvent être à l'Orphelin de Theao , est
la seule chose qu'ils ayent en vûë. Je ne
crois pas que l'imagination puisse aller
au delà, pour donner une idée de l'extrê
me fermeté et de l'extrême courage .
Dans la troisiéme Division le Médecin
va dénoncer Cong- Lun à Tou ngan Cou ;
celui - ci paroît douter de la verité de la
dénonciation , et lui demande les motifs
' qui l'ont porté à la faire. Le Méd.cin
réFEVRIER.
1734. 363
répond que c'est pour sauver les jours
de son propre Fils et ceux de tous les
Enfans condamnez à périr. Ngan Cou le
conduit avec lui chez Cong- Lun. On interroge
celui - ci , on lui confronte le Dénonciateur
, et je ne sçai sur quel fondement
Ngan Cou soupçonnant la bonne
foi du Médecin , et croyant qu'il y a
quelque intelligence entre lui et Cong-
Lun , oblige ce Médecin de lui donner
la Bastonnade ; cette Scene qui ne seroit
guere de notre gout , m'a paru au fond
assez mal imaginée. L'Auteur Chinois a
crû , sans doute , rendre la situation de
Cong Lun plus interessante ; mais il n'a
pas pensé qu'en voulant outrer le Grand,
on tombe dans le Gigantesque , lequel est
toujours voisin du Puerile .
CetteScene est interrompue par l'arrivée
d'un Soldat qui apporte le fils du Médecin
, qu'on prend pour l'Orphelin de
Tehao. Ngan Cou à cette vûë s'abandonne
à la joye et poignarde cette Enfant
aux yeux du Médecin et de Cong - Lun .
Celui- ci après lui avoir reproché tous ses
crimes et déploré la mort du prétendu
Orphelin se précipite du haut d'une Terrasse
et se tuë.
Ngan Cou prend chez lui le Médecin
avec le véritable Orphelin de Tehao,
qu'il
364 MERCURE DE FRANCE
qu'il croit son Fils , et déclare qu'il veut
le combler de biens , et même adopter
le Fils , parce qu'il n'a plus d'espérance
d'en avoir. C'est-là où finit la troisiéme
Section.
L'intervalle de la troisième à la quatriéme
Section , est supposé de 20 ans
entiers , comme ledit Ngan Cou , dans
la Scene qui commence cette Section .
Ce Ministre déclare que prêt à s'emparer
du Trône et à faire périr le Roy , il
va associer ce jeune Homme à son entreprise
.
Dans la Scene suivante le Médecin Tehing
, paroît un Rouleau à la main , sur
lequel il a fait dépeindre son Histoire
et celle de l'Orphelin . Il veut instruire
l'Orphelin de son sort ; mais pour s'assurer
de ses sentimens il est résolu d'essaïer
l'impression que fera sur lui la vuë de
ces Tableaux et le récit des Evénemens
qu'ils représentent. Cette idée m'a paru
ingenieuse , et malgré le défaut de la
repétition des choses déja connues , qui
se trouve dans la maniere dont cela est
exécuté , je vous avoie que cette Scene
m'a attaché à la Lecture , par la gradation
des sentimens qui s'excitent dans
l'ame du jeune homme , en écoutant une
Histoire à laquelle il croit n'avoir aucun
interêt. Cette
FEVRIER. 1734. 365
Cette Scene occupe toute la quatriéme
Section. La cinquième contient le dénoüement
ou la maniere dont l'Orphe-
"lin de Tebao se découvre au Roy , qui
donne des ordres pour arrêter et punir
Tou- Ngan Cou. L'Action du Médecin est
la même dans cette Tragédie que celle
de Leontine dans celle d'Heraclide . Les
Chinois ont mis en cette Action ce que
Corneille a mis en récit.
Voilà , M. la singularité que je vous
avois promise , mandez - moi ce que vous
et vos amis penseront de cette Tragédie
Chinoise , et si le plaisir qu'elle m'a fait
n'a pas sa source dans la disposition qui
nous porte presque toujours à admirer
les choses extrémement éloignées de nous,
soit par la distance des tems
soit par
celle des lieux. Je suis & c.
l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
Un de mes amis revenu l'année passée
de la Chine m'a fait voir une singula-
G vj
rité
352 MERCURE DE FRANCE
rité Littéraire que je me fais un plaisir de
vous annoncer. C'est la Traduction d'une
Tragédie Chinoise. L'Ouvrage en doit être
envoyé à Paris ; si l'idée generale que
vous en prendrez dans l'Extrait que je
vous envoye pique votre curiosité , il
vous sera facile de voir l'Ouvrage entier,
qui doit être remis à M.....
Le Traducteur avertit dans une Préface
que les Tragédies Chinoises ne sont
assujetties à aucune des Regles de nôtre
Théatre moderne , celle des trois unitez
y est absolument inconnue et une Tragédie
Chinoise est proprement une Histoire
mise en Dialogue , dont les différentes
parties sont autant de Scenes détachées
, entre lesquelles il n'y a d'autre
liaison que celle qu'ont entr'elles les diverses
actions particulieres qui forment
la suite de cette Histoire.
Le Lieu change le plus souvent d'une
Scene à l'autre , mais de même que l'Acteur
en se montrant la premiere fois à
soin de dire , je suis un tel , et je viens
telle chose ; de même aussi en
pour
changeant de lieu il a soin d'avertir qu'il
est en un tel endroit, et que c'est là mêine
que va se passer l'action.
> Il en est de même du tems lorsque
l'intervalle d'une Scene à l'autre est un
peu
FEVRIER. 1734. 353
peu considérable,l'Acteur ne manque pas
de le dire et d'ajoûter que depuis un tel
Evenement il s'est écoulé tant de tems .
,
Vous voyez par-là , Monsieur , que
ces Tragédies ont du moins le mérite de
la clarté et que le violement de nos
regles ne cause aucun embarras à l'imagination
des Spectateurs. Les Piéces
Espagnoles , Italiennes , Angloises et
même les Piéces Françoises du commencement
du dernier siécle n'étoient pas
plus régulieres que celle des Chinois ;
mais le violement de la Regle des unitez
, y jettoit une obscurité bien plus
grande,parce que le Spectateur ne sçavoit
jamais dans quel tems et dans quel lieu
il s'étoit transporté, qu'après avoir entendu
une partie de la Scene ; l'embarras
étoit peut être encore plus grand dans
quelques unes de nos Piéces où l'on
cache l'inobservation de l'unité de tems
et de l'unité de lieu au dépens de la vraisemblance
et de la bienséance , comme
dans Cinna.
Il ne paroît pas beaucoup d'art dans
la maniere dont s'annoncent les Personnages
Chinois dans la Piéce que j'ai lûë
mais je ne doute pas que d'autres Piéces
n'en montrent davantage . Si quelqu'un
des Missionnaires Européens vouloit faire
sur
354 MERCURE DE FRANCE
sur le Théatre Chinois , ce que le R. P.
Brumoi a fait sur le Theatre des Grecs ,
nous en donner une Histoire ou une
Notice , je ne doute pas que son Ouvrage
ne fut bien reçu ; et à juger des
Tragédies Chinoises par le caractere general
de cette Nation , et par le ton de
celle-ci , je suis persuadé que l'on y verroit
bien d'autres exemples de vertu et de
courage, que dans les Tragédies Grecques
où la véritable vertu est presque inconnuë
; ou le courage est une passion et
une passion turbulente qui offusque la
raison et bannit la tranquillité de l'Ame ;
où l'orgueil et l'amour de la gloire bien
plus que l'attachement au devoir sont la
Source des grandes actions et où les
crimes ne se punissent presque jamais
que par d'autres crimes .
La Déclamation Chinoise , à ce que
nous apprend le Traducteur , est souvent
entremêlée de chant. Le même Personnage
interrompant sa Déclamation
par quelques paroles chantées, et plaçant
de même au milieu d'une suite de paroles
chantées , quelques paroles simplement
déclamées. Il faudroir avoir les
oreilles bien faites à l'harmonie de la
prononciation Chinoise pour juger de
l'effet que doit produire ce mélange. Il ,
n'est
FEVRIER 1734 359
n'est pas peut être plus ridicule que cette
Déclamation empoulée , ou ce Chant
Tragique , dont les grands Acteurs que
* nous avons perdu depuis peu , ont tenté
inutilement de délivrer nôtre Theatre.
A juger de la Déclamation Chinoise
par l'idée que les Relations nous donnent
de leur prononciation , elle doit être
pour le Chant , ce que le Récitatif de
nos Opéra est pour les grands Airs . La
comparaison est d'autant plus juste que
c'est principalement pour exprimer quetque
sentiment plus vifou quelque mouvement
plus animé que les Acteurs
Chinois ont recours au Chant.
Après ce Préambule je viens à la Tragédie
même qui y a donné occasion . Elle
est intitulée l'Orphelin de sa Maison
THEAO , et il s'agit des Avantures de
cet Enfant depuis sa naissance jusqu'à-ce
qu'il eût vangé ses Parens . Ainsi l'Action
de la Piéce dure environ 20 ans.
Sous le Regne de Cing Cong , Empe.
reur de la Dynastie des Tsine , Tou ngan
Con , Ministre de la Guerre et Theao
Tune , Ministre de la Justice et des Finances
partageoient entr'eux deux le
Gouvernement. Tou ngan Cou , jaloux
du crédit de son Rival , après avoir tenté
différentes voyes pour le faire périr, vint
enfin
356 MERCURE DE FRAN CE
enfin à bout de le rendre suspect à l'Empereur.
Ce Prince persuadé des crimes de
Tehao Tune qui avoit pris la fuite , signa
un ordre pour faire mourir la famille
et les Domestiques de ce Ministre au
nombre de trois cent personnes . Tehaoso ,
Fils du Ministre disgracié , er gendre de
l'Empereur , fut le seul épargné en considération
de son alliance avec la famille
Royale ; Tou ngan Cou , croyant sa vengeance
imparfaite tant qu'il resteroit
quelqu'un de cette Maison , supposa un
ordre de l'Empereur à Tehaoso de se
donner la mort, et le lui envoya porter
avec le fer , le poison et le cordeau , lui
laissant le choix de son supplice. Cette
espece d'Argument de la Pièce est dans
un long Monologue par lequel Ngan
Cou ouvre le Theatre.
Dans la Scene suivante Tehaoso paroît
avec son Epouse , et comme il est per--
suadé qu'on ne l'épargnera pas encore
longtems , il lui donne par avance ses
derniers ordres ; lui recommande le fruit
dont elle est enceinte et veut , qu'il soit
nommé l'Orphelin de Tehao, au cas que
cc soit un Garçon , et qu'il soit élevé
pour être le vengeur de sa famille . Dans
ce moment on apporte l'ordre de l'Empereur
; Tehaoso le reçoit à genoux ,
choiFEVRIER.
1734. 357
choisit le poignard et se frappe après
avoir renouvellé ses derniers ordres .
La Princesse est enfermée dans son Palais
pour être gardée exactement jusqu'à
ses couches . L'introduction au Prologue
nommé Sié tscè , finit - là . Il y a ensuite
cinq Sections ou divisions tchè , que l'on
peut nommer Actes à nôtre maniere.
On apprend dans la premiere partie à
Tougnen Cou , que la Princesse femme
de Tehaoso , est accouchée d'un fils et
qu'elle l'a nommé l'Orphelin de Tehao .
La haine de Ngan Cou , s'irrite à cette
nouvelle ; il jure la mort de cet Enfant ,
et donne des ordres pour redoubler la
garde du Palais de cette Princesse.
Dans la Scene suivante cette Princesse
paroît avec son fils dans ses bras ; elle
déplore ses propres malheurs , ceux de
toute sa Maison : la mort cruelle de son
Mari, le péril auquel son fils est exposé ,
dit qu'elle a envoyé chercher le Médecin
Tehing ing, le seul des 300 Domestiques
de la Maison de son Beau- pere , qui ait
échapé au carnage ; qu'elle connoît sa
vertu , son courage , son affection pour
la Maison Tehao et qu'il est le seul qui
puisse sauver les restes infortunez de
cette Maison.
Tehing ing , arrive dans l'équipage
d'un
358 MERCURE DE FRANCE :
d'un Médecin Chinois , portant avec lui
sa Cassette aux Remedes pendue à son
col . La Princesse lui propose d'emporter
le jeune Tehao , et de se charger du soin
de le cacher. Tehing ing représente à la
Princesse les difficultez et le péril d'une
telle entreprise elle se jette à ses pieds;
Tehing ing la releve , lui proteste qu'il
est prêt à tout entreprendre pour elle ;
mais continue- t-il , si je sauve mon
jeune Maître , comment poutrez - vous
cacher cette action au Tyran ? il vous
arrachera ce secret ; nous périrons moi
et ma famille , et nous périrons sans
sauver vôtre Fils. Tehing ing , dir la
Princesse , ne craignez rien de ma foiblesse
; partez avec mon fils ; son pere
est mort sous le Couteau , c'en est fait,
sa Mere va rejoindre son Epoux , elle va
mourir. En achevant ces mots ; la Prin
cesse qui a détaché sa ceinture , la passe
dans son col et s'étrangle .
Tehing-ing pénétré d'un Spectacle si
touchant prend l'Enfant et le cache
dans son coffre , le couvre de quelques
hardes et l'emporte. Il est arrêté par
Han Koné , Mandarin d'Armes qui garde
les portes du Palais par ordre de Toungan
Cou. Han Koué doit le commencement
de sa fortune à Tebao tune , et
comme
FEVRIER. 1734- 359
, comme il aime la vertu c'est à regret
qu'il obéït à Ngan Cou , dont il déteste
les crimes ; le Mandarin soupçonne bientôt
à l'air inquiet et embarassé du Médecin
, ce qu'il vient de faire , fait retirer
ses Soldats , ouvre le coffre , apperçoit
l'enfant , est attendri à sa vûë , promet
à Tehing de ne le point dénoncer
lui ordonne de l'emporter et de se retirer.
Le Médecin sort et revient se jetter
aux pieds de Han Koué comme s'il eût
craint que tout cela ne fut un piége qu'on
lui tendit ; cette manoeuvre se répete
plusieurs fois Han Koué , reproche à
Tehing ing cette méfiance , si tu n'as pas
le courage d'exposer ta vie , lui dit- il ,
pourquoi t'es- tu engagé dans cette entreprise
? rassures- toi , ajoute-t-il , tų
n'auras rien à craindre de ma part , en
disant ces mots , Han Koué se frappe de
son poignard et tombe mort. Tehing emporte
l'Enfant , et sort en nommant le
lieu qu'il a choisi pour sa retraite.
Vous serez sans doute un peu blessé
Monsieur , de la brusque résolution que
le pauvre Han Koué prend assez legerement
de sortir de la vie pour ôter toute
inquiétude au Médecin ; c'est même- là
une répetition de ce qu'a fait la Princesse.
Il est vrai que ces deux Personnages auroient
360 MERCURE DE FRANCE
roient embarassé dans la suite de la Piéce,
mais la façon de s'en défaire me semble
un peu singuliere apparemment que
. les Chinois, malgré le peu d'opinion que
nous avons de leur bravoure , ne regardent
pas la mort avec crainte et qu'ils
croyent au moins spéculativement qu'il
n'est pas nécessaire d'avoir des raisons
bien fortes pour se la donner. Leur
Histoire confirme cette opinion
crois d'ailleurs que l'on peut juger du
caractere et des opinions d'une Nation
du moins jusqu'à un certain point , par
ses Piéces de Theatre.
و etje
Dans la Division suivante , on apprend
à Tou- ngan Cou , ce qui vient d'arriver ;
il est saisi de fureur et il forme le dessein
de
supposer un nouvel Ordre du Roy
pour se faire apporter tous les Enfans
âgez de six mois , résolu de les poignar
der tous, pour envelopper dans le Massacre
general l'Orphelin de Tehao. Je passe
Monsieur le détail des Scenes difficiles
à abréger et qui ne servent à rien pour
arriver à la quatrième Scene de cette
Section .
Le Médecin Tehing qui a pris la résolution
d'aller chercher un azile pour le
jeune Tehao auprès de Kong Lun , ancien
Ministre, ennemi de Tou -ngan Kou
et
1
FEVRIER 1734. 361
et ami de Tehao - tune , retiré à la Campagne.
Il arrive chez ce vicillard , lui découvre
son secret , et lui remet entre les mains
l'Orphelin de Tehao , et lui apprend la
Loy portée contre tous les Enfans du
Royaume , après quoi il lui déclare qu'il
est résolu de reconnoître les obligations.
qu'il a à ceux de la maison de Theao
et de sauver les jours de tous ces infortunez
condamnez à la mort par l'Arrêt
de Ngan- Kou. J'ai un Fils du même âge
que le jeune Prince , ajoute- t- il , je vais
emporter chez moi ses vêtemens , j'en
couvrirai mon Fils , vous irez me dénoncer
au Tyran comme le dépositaire et
le gardien de l'Orphelin de Tehao ;
j'avouerai touts on prendra mon Fils
pour cet Orphelin , nous mourrons lui
et moi et vous éleverez ce cher Enfant
que je vous confie ; vous l'instruirez de
son sort , et vous l'aiderez à venger
mort de ses Parens .
la
Cong - Lun répond à cela en demandant
à ce Médecin quel âge il a , et il répond
qu'il a 45 ans . Vous avez 45 ans , dit
Cong- Lun ? Il faut attendre au moins
20 ans avant que cet Enfant puisse connoître
son sort et venger sa famille , vous
aurez alors 65 ans , moi j'en aurai alors"
3.
90,
352 MERCURE DE FRANCE
90 , et quand même je pourrois vivre
jusques- là , de quel secours lui serois - je ?
Croyez moi , portez chez vous ce jeune
Orphelin , mettez- le à la place de vôtre
fils ? et puisque vous voulez bien sacrifier
ce ls , apportez - le ici , et m'allez
accuser au Tyran ? il viendra me chercher
, nous périrons vôtre fils et moi
mais vous sauverez l'Orphelin ; allez ?
ce projet est plus sage que le vôtre.
Le Médecin ne se rend qu'après avoir
employé les discours les plus pressans
pour détourner Cong Lun de son dessein ,
et l'on voit que c'est à regret qu'il consent
à sauver ses jours aux dépens de
ceux de ce Vieillard . Une chose qui mérite
d'être remarquée dans cette Scene
c'est la tranquillité avec laquelle ces deux
Hommes déliberent sur le choix de celui
qui doit s'immoler ; l'utilité dont ils
peuvent être à l'Orphelin de Theao , est
la seule chose qu'ils ayent en vûë. Je ne
crois pas que l'imagination puisse aller
au delà, pour donner une idée de l'extrê
me fermeté et de l'extrême courage .
Dans la troisiéme Division le Médecin
va dénoncer Cong- Lun à Tou ngan Cou ;
celui - ci paroît douter de la verité de la
dénonciation , et lui demande les motifs
' qui l'ont porté à la faire. Le Méd.cin
réFEVRIER.
1734. 363
répond que c'est pour sauver les jours
de son propre Fils et ceux de tous les
Enfans condamnez à périr. Ngan Cou le
conduit avec lui chez Cong- Lun. On interroge
celui - ci , on lui confronte le Dénonciateur
, et je ne sçai sur quel fondement
Ngan Cou soupçonnant la bonne
foi du Médecin , et croyant qu'il y a
quelque intelligence entre lui et Cong-
Lun , oblige ce Médecin de lui donner
la Bastonnade ; cette Scene qui ne seroit
guere de notre gout , m'a paru au fond
assez mal imaginée. L'Auteur Chinois a
crû , sans doute , rendre la situation de
Cong Lun plus interessante ; mais il n'a
pas pensé qu'en voulant outrer le Grand,
on tombe dans le Gigantesque , lequel est
toujours voisin du Puerile .
CetteScene est interrompue par l'arrivée
d'un Soldat qui apporte le fils du Médecin
, qu'on prend pour l'Orphelin de
Tehao. Ngan Cou à cette vûë s'abandonne
à la joye et poignarde cette Enfant
aux yeux du Médecin et de Cong - Lun .
Celui- ci après lui avoir reproché tous ses
crimes et déploré la mort du prétendu
Orphelin se précipite du haut d'une Terrasse
et se tuë.
Ngan Cou prend chez lui le Médecin
avec le véritable Orphelin de Tehao,
qu'il
364 MERCURE DE FRANCE
qu'il croit son Fils , et déclare qu'il veut
le combler de biens , et même adopter
le Fils , parce qu'il n'a plus d'espérance
d'en avoir. C'est-là où finit la troisiéme
Section.
L'intervalle de la troisième à la quatriéme
Section , est supposé de 20 ans
entiers , comme ledit Ngan Cou , dans
la Scene qui commence cette Section .
Ce Ministre déclare que prêt à s'emparer
du Trône et à faire périr le Roy , il
va associer ce jeune Homme à son entreprise
.
Dans la Scene suivante le Médecin Tehing
, paroît un Rouleau à la main , sur
lequel il a fait dépeindre son Histoire
et celle de l'Orphelin . Il veut instruire
l'Orphelin de son sort ; mais pour s'assurer
de ses sentimens il est résolu d'essaïer
l'impression que fera sur lui la vuë de
ces Tableaux et le récit des Evénemens
qu'ils représentent. Cette idée m'a paru
ingenieuse , et malgré le défaut de la
repétition des choses déja connues , qui
se trouve dans la maniere dont cela est
exécuté , je vous avoie que cette Scene
m'a attaché à la Lecture , par la gradation
des sentimens qui s'excitent dans
l'ame du jeune homme , en écoutant une
Histoire à laquelle il croit n'avoir aucun
interêt. Cette
FEVRIER. 1734. 365
Cette Scene occupe toute la quatriéme
Section. La cinquième contient le dénoüement
ou la maniere dont l'Orphe-
"lin de Tebao se découvre au Roy , qui
donne des ordres pour arrêter et punir
Tou- Ngan Cou. L'Action du Médecin est
la même dans cette Tragédie que celle
de Leontine dans celle d'Heraclide . Les
Chinois ont mis en cette Action ce que
Corneille a mis en récit.
Voilà , M. la singularité que je vous
avois promise , mandez - moi ce que vous
et vos amis penseront de cette Tragédie
Chinoise , et si le plaisir qu'elle m'a fait
n'a pas sa source dans la disposition qui
nous porte presque toujours à admirer
les choses extrémement éloignées de nous,
soit par la distance des tems
soit par
celle des lieux. Je suis & c.
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Résumé : LETTRE écrite de Brest, contenant l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
Un ami de l'auteur, récemment revenu de Chine, lui a montré la traduction d'une tragédie chinoise intitulée 'L'Orphelin de sa Maison Theao'. Cette tragédie relate les aventures d'un enfant depuis sa naissance jusqu'à la vengeance de ses parents, sur une période d'environ 20 ans sous le règne de l'empereur Cing Cong. La pièce ne respecte pas les règles des trois unités (temps, lieu, action) du théâtre moderne. Chaque scène est indépendante et les changements de lieu et de temps sont explicitement annoncés par les acteurs. La pièce est structurée en sections appelées 'tchè', similaires à des actes. L'intrigue principale commence avec la disgrâce du ministre Tehao Tune, accusé à tort par son rival Tou ngan Cou. Tehao Tune est condamné à mort et sa famille massacrée, à l'exception de son fils Tehaoso, épargné en raison de son alliance avec la famille royale. Tou ngan Cou ordonne à Tehaoso de se suicider, ce qu'il fait après avoir donné ses dernières instructions à son épouse enceinte. L'épouse de Tehaoso donne naissance à un fils, nommé 'L'Orphelin de Tehao'. Elle confie l'enfant au médecin Tehing ing, qui le cache et le sauve malgré les obstacles. Plusieurs personnages, comme le mandarin Han Koué et le vieillard Cong Lun, jouent des rôles cruciaux en aidant à protéger l'orphelin. Dans la troisième division, le médecin dénonce Cong-Lun à Tou Ngan Cou pour sauver son fils et d'autres enfants condamnés. Ngan Cou, doutant de la bonne foi du médecin, le fait bastonner. La scène est interrompue par l'arrivée d'un soldat apportant le fils du médecin, pris pour l'orphelin de Tehao. Ngan Cou, croyant avoir retrouvé son fils, poignarde l'enfant devant le médecin et Cong-Lun, qui se suicide ensuite. Ngan Cou adopte alors le véritable orphelin de Tehao, croyant que c'est son fils. Vingt ans plus tard, dans la quatrième section, Ngan Cou, prêt à s'emparer du trône, veut associer le jeune homme à son entreprise. Le médecin Tehing montre à l'orphelin des tableaux représentant son histoire pour tester ses sentiments. La cinquième section révèle comment l'orphelin de Tehao se découvre au roi, qui ordonne l'arrestation et la punition de Tou Ngan Cou. La pièce met en avant des thèmes de courage, de vertu et de sacrifice, caractéristiques de la culture chinoise. La déclamation dans les tragédies chinoises est souvent mélangée de chant, et les acteurs annoncent clairement les changements de lieu et de temps.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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225
p. 365-366
« Le 4 Février, l'Académie Royale de Musique donna la trente-deuxiéme et [...] »
Début :
Le 4 Février, l'Académie Royale de Musique donna la trente-deuxiéme et [...]
Mots clefs :
Musique, Opéra, Public, Académie royale de musique, Pirithoüs
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texteReconnaissance textuelle : « Le 4 Février, l'Académie Royale de Musique donna la trente-deuxiéme et [...] »
Le 4 Février , l'Académie Royale de
Musique donna la trente - deuxième et
derniere Représentation de l'Opéra d'Hypolite
et Aricie; et remit au Théatre le 9.
le Ballet des Fêtes Grecques et Romaines ;
avec une nouvelle Entrée , intitulée , La
Fête de Diane , pour être joué les Mardis
et les Jeudis ; et la Pastorale d'Issé , les
Vendredis et les Dimanches.
Ces deux Piéces sont toujours tres-
H gou'
366 MERCURE DE FRANCE
goutées du public . On prépare actuellement
l'Opéra de Pirithons , pour être remis
auThéatre le mois prochain , le Public
a été bien aise de revoir le Balet dont
on vient de parler , les paroles sont de M.
Fuzilier, et la Musique de M.de Blamont.
Musique donna la trente - deuxième et
derniere Représentation de l'Opéra d'Hypolite
et Aricie; et remit au Théatre le 9.
le Ballet des Fêtes Grecques et Romaines ;
avec une nouvelle Entrée , intitulée , La
Fête de Diane , pour être joué les Mardis
et les Jeudis ; et la Pastorale d'Issé , les
Vendredis et les Dimanches.
Ces deux Piéces sont toujours tres-
H gou'
366 MERCURE DE FRANCE
goutées du public . On prépare actuellement
l'Opéra de Pirithons , pour être remis
auThéatre le mois prochain , le Public
a été bien aise de revoir le Balet dont
on vient de parler , les paroles sont de M.
Fuzilier, et la Musique de M.de Blamont.
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Résumé : « Le 4 Février, l'Académie Royale de Musique donna la trente-deuxiéme et [...] »
Le 4 février, l'Académie Royale de Musique présenta la dernière représentation de l'opéra 'Hypolite et Aricie'. Le 9 février, le théâtre accueillit le ballet 'Les Fêtes Grecques et Romaines' et la pastorale 'Issé', tous deux appréciés du public. Le ballet inclut une nouvelle entrée, 'La Fête de Diane'. L'opéra 'Pirithoüs' est en préparation pour le mois suivant. Les paroles du ballet sont de M. Fuzelier et la musique de M. de Blamont.
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226
p. 366
PARODIE, Sur la Sarabande de l'Opéra d'Issé.
Début :
Que tes Pavots ont d'invincibles charmes ! [...]
Mots clefs :
Issé
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texteReconnaissance textuelle : PARODIE, Sur la Sarabande de l'Opéra d'Issé.
PARODIE ,
Sur la Sarabande de l'Opéra d'Issé.
Ue tes Pavots ont d'invincibles charmes !
Par tes attraits puissans , triomphe de nos sens
Des malheureux tu séches les larmes ,
Heureux Mortels , il vous rend plus contens ;
De vos plaisirs il retrace l'image ,
De mille soins un songe dédommage ;
Venez , songes fateurs ,
Par d'aimables erreurs ,
Séduisez tous les coeurs,
Sur la Sarabande de l'Opéra d'Issé.
Ue tes Pavots ont d'invincibles charmes !
Par tes attraits puissans , triomphe de nos sens
Des malheureux tu séches les larmes ,
Heureux Mortels , il vous rend plus contens ;
De vos plaisirs il retrace l'image ,
De mille soins un songe dédommage ;
Venez , songes fateurs ,
Par d'aimables erreurs ,
Séduisez tous les coeurs,
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227
p. 366-368
« Les Comédiens François représenterent à la Cour, le 4 de ce mois, la Comédie [...] »
Début :
Les Comédiens François représenterent à la Cour, le 4 de ce mois, la Comédie [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Comédiens-Français, Comédie, Pièce, Théâtre
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texteReconnaissance textuelle : « Les Comédiens François représenterent à la Cour, le 4 de ce mois, la Comédie [...] »
Les Comédiens François représenterent
à la Cour , le 4 de ce mois , la Comédie
du Menteur , et celle du double Veuvage.
Le 9 , la Tragédie de Bajazet , et le
Retour imprévu . La Dlle Grandval joüa le
Rôle d'Atalide , dans la premiere Piéce ,
avec beaucoup de succès . Cette nouvelle
Actrice joua quelques jours après à Paris,
le Rôle de la Duchesse , dans la Tragédie
,
FEVRIER: 1734: 367
die du Comte d'Essex , et elle y fut fort
applaudie.
Les mêmes Comédiens ont remis au
Théatre le 27 de ce mois, la Fausse Antipatie
, Comédie en Vers , en trois Actes ,
avec un Prologue , de M. de la Chaussée.
C'est un Ouvrage generalement goûté
des connoisseurs , et aussi ingénieux et
bien écrit , que plein d'esprit , de délicatesse
et de moeurs . On avoit déja donné
quelques Représentations de cette Piece
PAutomne dernier , avant le Voyage de
Fontainebleau , et le Public lui avoit fait
un accueil tres - favorable et tel qu'elle le
merite. Nous en parlerons plus au long.
Le 6 de ce mois, les Comédiens Italiens
représenterent à la Cour , la Comédie du
Faucon ou les Oyes de Bocace , et la Verité
Fabuliste.
Le 10 , les mêmes Comédiens donnerent
sur leur Théatre, la premiere Représentation
d'une Comédie en Vers et en
trois -Actes , avec un Divertissement de
chants et de danses , intitulée : La Surprise
de la Haine. Cette Piece a été reçuë
tres-favorablement du public . Elle attire
de nombreuses assemblées à l'Hôtel de
Bourgogne. On en parlera plus au long,
Hij
Le
368 MERCURE DE FRANCE .
Le 3 Février , l'ouverture de la Foire
S. Germain fut faite par le Lieutenant
Général de Police en la maniere accoutumée.
Le 27 , l'Opéra Comique fit l'ouverture
d'un nouveau Théatre , qu'on a construit
dans la rue de Bussy , et on y representa
le même jour deux Pieces nouvelles
, d'un Acte chacune , avec des Divertissements
, intitulés : le Palais enchanté
, et l'Heureux Déguisement. Ces deux
Comédies sont précédées d'un Prologue ,
qui a pour titre Le Retour de l'Opera
Comique au Fauxbourg S. Germain , dont
on parlera plus au long.
à la Cour , le 4 de ce mois , la Comédie
du Menteur , et celle du double Veuvage.
Le 9 , la Tragédie de Bajazet , et le
Retour imprévu . La Dlle Grandval joüa le
Rôle d'Atalide , dans la premiere Piéce ,
avec beaucoup de succès . Cette nouvelle
Actrice joua quelques jours après à Paris,
le Rôle de la Duchesse , dans la Tragédie
,
FEVRIER: 1734: 367
die du Comte d'Essex , et elle y fut fort
applaudie.
Les mêmes Comédiens ont remis au
Théatre le 27 de ce mois, la Fausse Antipatie
, Comédie en Vers , en trois Actes ,
avec un Prologue , de M. de la Chaussée.
C'est un Ouvrage generalement goûté
des connoisseurs , et aussi ingénieux et
bien écrit , que plein d'esprit , de délicatesse
et de moeurs . On avoit déja donné
quelques Représentations de cette Piece
PAutomne dernier , avant le Voyage de
Fontainebleau , et le Public lui avoit fait
un accueil tres - favorable et tel qu'elle le
merite. Nous en parlerons plus au long.
Le 6 de ce mois, les Comédiens Italiens
représenterent à la Cour , la Comédie du
Faucon ou les Oyes de Bocace , et la Verité
Fabuliste.
Le 10 , les mêmes Comédiens donnerent
sur leur Théatre, la premiere Représentation
d'une Comédie en Vers et en
trois -Actes , avec un Divertissement de
chants et de danses , intitulée : La Surprise
de la Haine. Cette Piece a été reçuë
tres-favorablement du public . Elle attire
de nombreuses assemblées à l'Hôtel de
Bourgogne. On en parlera plus au long,
Hij
Le
368 MERCURE DE FRANCE .
Le 3 Février , l'ouverture de la Foire
S. Germain fut faite par le Lieutenant
Général de Police en la maniere accoutumée.
Le 27 , l'Opéra Comique fit l'ouverture
d'un nouveau Théatre , qu'on a construit
dans la rue de Bussy , et on y representa
le même jour deux Pieces nouvelles
, d'un Acte chacune , avec des Divertissements
, intitulés : le Palais enchanté
, et l'Heureux Déguisement. Ces deux
Comédies sont précédées d'un Prologue ,
qui a pour titre Le Retour de l'Opera
Comique au Fauxbourg S. Germain , dont
on parlera plus au long.
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Résumé : « Les Comédiens François représenterent à la Cour, le 4 de ce mois, la Comédie [...] »
En février 1734, plusieurs événements culturels marquèrent la Cour et Paris. Les Comédiens Français présentèrent 'Le Menteur' et 'Le Double Veuvage' le 4 février, puis 'Bajazet' et 'Le Retour imprévu' le 9 février. Mademoiselle Grandval interpréta Atalide dans 'Bajazet' et joua la Duchesse dans 'La Tragédie du Comte d'Essex' à Paris, où elle fut acclamée. Le 27 février, les Comédiens Français reprirent 'La Fausse Antipathie'. Les Comédiens Italiens jouèrent 'Le Faucon ou les Oyes de Bocace' et 'La Vérité Fabuliste' le 6 février à la Cour, et 'La Surprise de la Haine' le 10 février à l'Hôtel de Bourgogne, avec un grand succès. La Foire Saint-Germain ouvrit le 3 février sous la supervision du Lieutenant Général de Police. Le 27 février, l'Opéra Comique inaugura un nouveau théâtre rue de Bussy avec deux pièces nouvelles, 'Le Palais enchanté' et 'L'Heureux Déguisement', précédées d'un prologue intitulé 'Le Retour de l'Opéra Comique au Faubourg Saint-Germain'.
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228
p. 368-379
Comedie à l'Arcenal, Prologue &c. [titre d'après la table]
Début :
Le goût pour la Comédie, si en vogue depuis quelque temps, ne s'est point rallenti [...]
Mots clefs :
Apollon, Mercure, Thalie, Momus, Melpomène, Déesse, Princesse, Duchesse du Maine, Prologue, Plaisir, Arts, Cour, Jeux, Théâtre de l'Arsenal, Comédie, Pierre de Morand
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texteReconnaissance textuelle : Comedie à l'Arcenal, Prologue &c. [titre d'après la table]
Le goût pour la Comédie , si en vogue
depuis quelque temps , ne s'est point rallenti
du tout à Paris ; on voit tous les
jours des Compagnies , où l'on se fait un
plaisir de représenter des Fiéces de Théatre
, et où elles sont , pour l'ordinaire
jouées avec applaudissement. Parmi ces
sortes de Sociétez , celle qui étoit à l'Hôtel
de Brancas , et ensuite à l'Hôtel de
Lauzun , est une de celles parmi lesquelles
il y a de meilleurs sujets . Nous en avons
parlé dans le Mercure de Mars 1732. Des
Personnes de distinction , et des connoisseurs
éclaircz ont vû leurs Représentations
FEVRIER . 1734. 369
tions avec plaisir ;et ces Mrs ont été souvent
honorez de la présence de plusieurs
Princes et Princesses , entr'autres Madame
la Duchesse du Maine y a assisté plusieurs
fois , et en a paru satisfaite . C'est
ce qui les a engagez à demander à cette
Princesse une Salle propre à jour la Comédie
. Ils lui ont présentez le Placet
qu'on va lire :
Toi , qui toujours des Arts , fus le plus ferme
appui ;
Toi , dont l'auguste Cour , est ce fameux Parnasse
,
Dont on ne trouve ailleurs que quelque foible
trace ,
Princesse , sois sensible à notre juste ennui.
Tantôt de Melpomene , et tantôt de Thalie ,
Nous avons autrefois osé former les jeux ;
Et du plus beau succès notre audace suivie ,
Leur mérita l'honneur de paroître à tes yeux.
Par ton aveu flateur , devenu moins timides ,
De ce doux souvenir , sans relâche frappez ,
Nos coeurs , depuis long - temqs , ne sont plus
occupez ,
Qu'à chercher un bonheur dont ils sont plus
avides.
H iij Mais
370 MERCURE DE FRANCE
Mais , quoique redoublez , nos soins sont sans
effets ;
Nos Muses sans secours , errantes , désolées ,
N'ont presque plus d'espoir de se voir rassem
blées ;
Elles ne trouvent plus ni Temples , ni Palais.
Princesse , c'est à toi de finir leur disgrace ,
Daigne les recevoir au milieu de ta Cour ,
Assure leur , toi -même , un tranquile séjour :
Ta nouvelle bonté , ranimant leur audace ,
Elles te donneront un innocent plaisir ,
Digne , peut- être encor d'occuper ton loisir.
Ce Placer fut reçu favorablement de
la Princesse , qui a eu la bonté de donner
à ces Mrs , une Salle dans l'Arsenal , où
ils ont fait dresser leur Théatre , et sur
lequel ils ont représenté pour la premiere
fois , le 21 Février , en présence de
Madame la Duchesse du Maine, et d'une
Compagnie choisie , la Tragédie de
Manlius Capitolinus , de M. de la Fosse ,
suivie de la petite Comédie des trois Freres
Rivaux , à laquelle ils ont ajouté un
Divertissement de Chants et de Danses
dont les paroles sont de M. Parfait , et la
Musique de M. Bouvar. Le tout précédé
d'un Prologue , fait à la loüange de la
Princesse, qui après la Représentation , eut
la
FEVRIER. 1734 377
la bonté d'en témoigner sa satisfaction à
l'Auteur.
Les Acteurs de ce Prologue sont , Apol
lon , Mercure, Momus , Me'pomene et Thar
lie. Melpomene seule ouvre la Scene par
ces Vers :
Mes yeux , préparez- vous à répandre des larmes,
Si vous voulez avoir des charmes ,
Pour cette aimable Cour ,
Où le bon goût se mêle à la délicatesse ,
Où dans cet heureux jour ,
M'appelle une Déesse ;
Où je vois auprès d'elle une Auguste Princesse .
Dont les vertus illustrent ce séjour .
Autant que ses appas , ses graces , sa jeunesse.
;
Thalie arrive en ordonnant aux Jeux ,
aux Ris , et aux Graces de la suivre les
deux Muses sont également surprises de
se trouver ensemble , et se disputent la
préférence de leur Art ; chacune veut
avoir la gloire d'amuser la Déesse ; elles
prennent Apollon pour Juge.Ce Dieu les
rassure , en leur annonçant que la Déesse
veut voir les Jeux de l'une et de l'autre.
Il dit à Melpomene qu'elle aura so'n
de toucher son coeur ; et qu'ensuite Th -
lie viendra dissiper les tristes impression s
de la Muse Tragique ; il a oute que i
Hiiij elles
372 MERCURE DE FRANCE
elles veulent lui plaire , elles doivent précisément
se renfermer dans le caractere
de leur Art. Songez , leur dit il :
Que vous , ( 1 ) en gémissant , il faut encore
instruire ;
Et que vous , ( 2 ) en raillant , vous ne devez
pas nuire .
Que le vice par vous ( 3 ) sans cesse combattu ,
Ne doit jamais accabler la vertu
Que vous , ( 4 ) sans crainte , sans scru
pule ,
Livrant la Guerre au Ridicule ,
Sous des traits généraux ,
Vous devez le faire paroître ,
Mais que l'on ne doit reconnoître
Aucun particulier trop peint dans vos Tableaux >
En un mor , que la Tragédie ,
De toucher les grands coeurs doit tirer tout son
prix ,
Et que la Comédie ,
Doit tirer tout le sien de plaire aux bons esprits.
Melpoméne répond à Apollon que telles
sont les loix que ses favoris observe,
rent dans Athénes , et qu'elle n'a jamais
approuvé ces écrits fastueux , où l'on
( 1 ) A Melpomene.
( 2 ) A Thalie.-
( 3 ) A Melpomene.
(4 )A Thalie.
veut
FEVRIER. 1734. 373
veut la dépouiller de ses premieres graces
, qu'elle préfére la conduite et les
moeurs à toute autre beauté. Thalie assure
à son tour Apollon , qu'elle n'a jamais
dicté ces traits grossiers de l'envie ,
qui attaquent la probité , et que lorsque
la raillerie n'est pas accompagnée d'une
utile leçon , ce n'est point là son 、ouvra
ge. Apollon leur dit qu'il est charmé de
les voir penser ainsi qu'on pense dans la
Cour où elles paroissent.
Mercure en arrivant est fort surpris à
l'aspect d'Apollon et des deux Muses.
Apollon lui en demande la cause. Mercure
répond qu'il ne s'attendoit pas de
les trouver tous trois dans ces mêines
lieux , où Mars tient la foudre de Jupiter
en dépôt. Il ajoute :
Pour achever de mettre en poudre
Les Titans orgueilleux ,.
Qui bravoient , sans trembler , le Souverain des
Cieux ;
Je venois au Dieu de la Guerre
Porter l'ordre nouveau du Maître du Tonnerre ,
Et je ne croyois pas ce terrible séjour
Un lieu trop propre à tenir votre Cour.
Apollon répond qu'il a lieu d'être surpris
à son tour, et dit : Mercure ignore- til
H v
que
374 MERCURE DE FRANCE
que Minerve suit toujours Mars dans ces
lieux , et que sur les pas de la Déesse ,
Apollon conduit les Muses et les beaux
Arts ?
Qu'à son gré , Jupiter signale sa vengeance
Contre ses ennemis jaloux ;
Que Mars seconde son courroux ;
Que deux jeunes Héros qui reçûrent naissance
Du terrible Dieu des Combats
Fassent sentir par tout la force de leurs bras ,
Sur les pas de Minerve
Apollon toujours se reserve
Le soin de célébrer les Dieux et les Héros
Et de les délasser de leurs nobles travaux.
Quand sur les Enfans de la terre
Jupiter lance le tonnerre
Son Empire est- il ébranlé ?
Sa fureur , des beaux Arts , détruit- elle l'azyle ♬
Dans mes travaux suis je troublé ?
Et le séjour des Cieux devient- il moins tranquile
, Non , les rebelles seuls doivent trembler
d'effroi , et Mercure [ dit à Apollon
qu'il ne craint pas que le tegne des Arts
périsse sous le regne de Jupiter ; qu'il a
lui-même trop d'interêt à les favoriser, et
que ce seroit en vain qu'il triompheroit
de
FEVRIER . 1734- 375
de ses ennemis , si Apollon et les Muses
n'immortalisoient ses exploits.
Oui, ( dit-il ) les Lauriers que la Victoire
donne ,
Şont d'eux - mêmes bien - tôt Alétris ;
Ils ne sont toujours verds qu'autant qu'à leur
Couronne
Vous ajoutez , vous - même , un nouveau
prix.
Par ce Dieu triomphant une vaste Carriere
Vient d'être ouverte à vos efforts ;
Bien- tôt il va fournir la plus ample matiere
A des accents plus brillants et plus forts ;
Préparez - vous sous les loix de Minerve ,
A faire ouir des sons dignes d'elle et de lui ;
Et lorsque par vos soins , la Déesse aujourd'hui
Prendra les seuls plaisirs que son coeur se réserve
,
Songez qu'elle est du sang du Souverain des
Dieux ;
Et que d'en celebrer les Exploits glorieux ,
C'est- là Pexalter elle- même ;
Que quand mille vertus en elle se font voir ,
Le seul encens qu'elle veut recevoir
Est d'entendre louer son Empire suprême.
Mercure quitte Apollon en lui disane
qu'il court où Jupiter l'envoye , et qu'il
H vj
Ie376
MERCURE DE FRANCE
reviendra prendre part aux plaisirs qu'il
prépare à la Déesse . Apollon invite les
Muses de hâter leurs Jeux , & c. Momus
arrive en riant , on lui en demande la
cause , il répond :
Peut-on le demander ? J'apprens que dans ces
lieux
Vous préparez tous trois des jeux
Pour amuser une Déesse
Dont les hautes vertus
L'Esprit , le Sçavoir , la Sagesse ,
Furent toujours respectez de Momus ,
Je crois d'abord que votre zéle ,
Ne lui présentera qu'un plaisir digne d'elle,
Que rassemblant de toutes parts
Les plus renommez dans vos Arts ,
Vous pourrez mériter l'honneur de sa présence →
Point du tout : Quel objet a frappé mes regards!
Je ne puls m'empêcher d'en rire , quand j'y
pense ,)
J'ai vû que vous aviez fait choix
D'un tas d'Acteurs sans art et sans expérience
Et qui n'ont du Théatre aucune connoissance ;
Dont les gestes , les tons de voix ,
Le jeu , le peu d'intelligence
Vont gâter les plus beaux endroits.
Ah ! quel excès d'extravagance.
Apollon répond que c'est la coutume
des
FEVRIER 1734 377
des Critiques du tems de décider de tout
par prévention et sans avoir vû un Ouvrage.
Momus soutient qu'on se trompet
rarement en décidant ainsi , et que le
succès de toute chose vient du premier
coup d'oeil dont on l'envisage ; et il ajoute :
Quand le public s'accorde à prononcer
Que ce qu'on lui promet doit êrre détestable ,
Aussi- tôt cet Arrêt rend la chose exécrable ;
Fut- elle bonne , ensuite on doit sans balancer ,
Soutenir constamment qu'elle est abominable ,
Tel sst votre Spectacle , il sera pitoyable.
Thalie dit à Momus qu'il gagne infiniment
à frequenter certains lieux , d'où
partent des traits si justes. Melpomene
interrompt Thalie , en lui disant qu'il est
inutile de vouloir faire entendre raison
au caustique Momus ; mais qu'il leur importe
peu qu'il approuve où qu'il blâme
leur dessein :
Pourvu que la Déesse à qui nous voulons plaire
Approuve les Acteurs dont nous avons fait
choix ,
Et que même elle les préfére
A ceux qui nous vendant leur voix .
Pour leur interêt seul sont soumis à nos laix ,
Et n'ont d'objet que le salaire.
File
378 MERCURE DE FRANCE
Elle ajoute que le zéle dont ils brûlent
leur tiendra lieu de tout mérite.
L'indulgence est le prix de si nobles objets.
Momus replique qu'il est persuadé que
leurs Acteurs ne manquent pas de zéle
mais que cela ne suffit pas pour faire de
bons Comédiens . Autrefois , dit il , Melpoméne
avoit trouvé l'art de m'attendrir
, mais je rentre plus que jamais dans
mes droits ; et je crains seulement que ce
ne soit le tour de Thalie de me faire pleu
rer. Thalie s'offense beaucoup de cette
raillerie; et Momus dit , que rire à la Tragédie
, et pleurer à la Comédie est un plaisir
bien digne de lui. Melpomene quitte
la partie. Thalie la suit , en menaçant
Momus. Apollon reste seul avec lui et lui
représente que le triste fruit qu'on retire
de mordre toujours est d'être fuy et détesté
d'un chacunsà quoi Momus répond:
De donner des leçons vous voulez vous mêler ;
Je veux aussi vous en faire une
Vous êtes un Pédant , d'espece non commune
Fade, ennuyeux , de tout voulant toujours parler ;
Et que l'on ne sçauroit enter dre sans bâiller :
Adieu .
"
Il sort et Apollon se récrie sur le caraçtere
FEVRIER 379 1734.
tere de ces sortes d'esprits ; il dit qu'en
voulant leur contredire , on s'attire leur
mépris. Le Prologue finit par ces quatre
Vers .
Princesse , tu connois l'écücil qui nous menace ,
Et nous mêmes trop tard nous sentons le danger
Mais ta bonté pour nous doit nous encourager
L'espoir de l'obtenir nous rendra notre audace.
Le Prologue est de M. de Morand,dans
lequel il jouoit lui- même le Rôle d'Apollon.
Nous apprenons que ces Mrs se
préparent à donner sur le même Théatre
une Tragédie nouvelle du même Au
teur , dont nous parlerons en son temps.
C'est de lui dont il est parlé dans le
Mercure de Février 1732. au sujet d'un
pareil Spectacle , représenté à Nîmes, & c.
depuis quelque temps , ne s'est point rallenti
du tout à Paris ; on voit tous les
jours des Compagnies , où l'on se fait un
plaisir de représenter des Fiéces de Théatre
, et où elles sont , pour l'ordinaire
jouées avec applaudissement. Parmi ces
sortes de Sociétez , celle qui étoit à l'Hôtel
de Brancas , et ensuite à l'Hôtel de
Lauzun , est une de celles parmi lesquelles
il y a de meilleurs sujets . Nous en avons
parlé dans le Mercure de Mars 1732. Des
Personnes de distinction , et des connoisseurs
éclaircz ont vû leurs Représentations
FEVRIER . 1734. 369
tions avec plaisir ;et ces Mrs ont été souvent
honorez de la présence de plusieurs
Princes et Princesses , entr'autres Madame
la Duchesse du Maine y a assisté plusieurs
fois , et en a paru satisfaite . C'est
ce qui les a engagez à demander à cette
Princesse une Salle propre à jour la Comédie
. Ils lui ont présentez le Placet
qu'on va lire :
Toi , qui toujours des Arts , fus le plus ferme
appui ;
Toi , dont l'auguste Cour , est ce fameux Parnasse
,
Dont on ne trouve ailleurs que quelque foible
trace ,
Princesse , sois sensible à notre juste ennui.
Tantôt de Melpomene , et tantôt de Thalie ,
Nous avons autrefois osé former les jeux ;
Et du plus beau succès notre audace suivie ,
Leur mérita l'honneur de paroître à tes yeux.
Par ton aveu flateur , devenu moins timides ,
De ce doux souvenir , sans relâche frappez ,
Nos coeurs , depuis long - temqs , ne sont plus
occupez ,
Qu'à chercher un bonheur dont ils sont plus
avides.
H iij Mais
370 MERCURE DE FRANCE
Mais , quoique redoublez , nos soins sont sans
effets ;
Nos Muses sans secours , errantes , désolées ,
N'ont presque plus d'espoir de se voir rassem
blées ;
Elles ne trouvent plus ni Temples , ni Palais.
Princesse , c'est à toi de finir leur disgrace ,
Daigne les recevoir au milieu de ta Cour ,
Assure leur , toi -même , un tranquile séjour :
Ta nouvelle bonté , ranimant leur audace ,
Elles te donneront un innocent plaisir ,
Digne , peut- être encor d'occuper ton loisir.
Ce Placer fut reçu favorablement de
la Princesse , qui a eu la bonté de donner
à ces Mrs , une Salle dans l'Arsenal , où
ils ont fait dresser leur Théatre , et sur
lequel ils ont représenté pour la premiere
fois , le 21 Février , en présence de
Madame la Duchesse du Maine, et d'une
Compagnie choisie , la Tragédie de
Manlius Capitolinus , de M. de la Fosse ,
suivie de la petite Comédie des trois Freres
Rivaux , à laquelle ils ont ajouté un
Divertissement de Chants et de Danses
dont les paroles sont de M. Parfait , et la
Musique de M. Bouvar. Le tout précédé
d'un Prologue , fait à la loüange de la
Princesse, qui après la Représentation , eut
la
FEVRIER. 1734 377
la bonté d'en témoigner sa satisfaction à
l'Auteur.
Les Acteurs de ce Prologue sont , Apol
lon , Mercure, Momus , Me'pomene et Thar
lie. Melpomene seule ouvre la Scene par
ces Vers :
Mes yeux , préparez- vous à répandre des larmes,
Si vous voulez avoir des charmes ,
Pour cette aimable Cour ,
Où le bon goût se mêle à la délicatesse ,
Où dans cet heureux jour ,
M'appelle une Déesse ;
Où je vois auprès d'elle une Auguste Princesse .
Dont les vertus illustrent ce séjour .
Autant que ses appas , ses graces , sa jeunesse.
;
Thalie arrive en ordonnant aux Jeux ,
aux Ris , et aux Graces de la suivre les
deux Muses sont également surprises de
se trouver ensemble , et se disputent la
préférence de leur Art ; chacune veut
avoir la gloire d'amuser la Déesse ; elles
prennent Apollon pour Juge.Ce Dieu les
rassure , en leur annonçant que la Déesse
veut voir les Jeux de l'une et de l'autre.
Il dit à Melpomene qu'elle aura so'n
de toucher son coeur ; et qu'ensuite Th -
lie viendra dissiper les tristes impression s
de la Muse Tragique ; il a oute que i
Hiiij elles
372 MERCURE DE FRANCE
elles veulent lui plaire , elles doivent précisément
se renfermer dans le caractere
de leur Art. Songez , leur dit il :
Que vous , ( 1 ) en gémissant , il faut encore
instruire ;
Et que vous , ( 2 ) en raillant , vous ne devez
pas nuire .
Que le vice par vous ( 3 ) sans cesse combattu ,
Ne doit jamais accabler la vertu
Que vous , ( 4 ) sans crainte , sans scru
pule ,
Livrant la Guerre au Ridicule ,
Sous des traits généraux ,
Vous devez le faire paroître ,
Mais que l'on ne doit reconnoître
Aucun particulier trop peint dans vos Tableaux >
En un mor , que la Tragédie ,
De toucher les grands coeurs doit tirer tout son
prix ,
Et que la Comédie ,
Doit tirer tout le sien de plaire aux bons esprits.
Melpoméne répond à Apollon que telles
sont les loix que ses favoris observe,
rent dans Athénes , et qu'elle n'a jamais
approuvé ces écrits fastueux , où l'on
( 1 ) A Melpomene.
( 2 ) A Thalie.-
( 3 ) A Melpomene.
(4 )A Thalie.
veut
FEVRIER. 1734. 373
veut la dépouiller de ses premieres graces
, qu'elle préfére la conduite et les
moeurs à toute autre beauté. Thalie assure
à son tour Apollon , qu'elle n'a jamais
dicté ces traits grossiers de l'envie ,
qui attaquent la probité , et que lorsque
la raillerie n'est pas accompagnée d'une
utile leçon , ce n'est point là son 、ouvra
ge. Apollon leur dit qu'il est charmé de
les voir penser ainsi qu'on pense dans la
Cour où elles paroissent.
Mercure en arrivant est fort surpris à
l'aspect d'Apollon et des deux Muses.
Apollon lui en demande la cause. Mercure
répond qu'il ne s'attendoit pas de
les trouver tous trois dans ces mêines
lieux , où Mars tient la foudre de Jupiter
en dépôt. Il ajoute :
Pour achever de mettre en poudre
Les Titans orgueilleux ,.
Qui bravoient , sans trembler , le Souverain des
Cieux ;
Je venois au Dieu de la Guerre
Porter l'ordre nouveau du Maître du Tonnerre ,
Et je ne croyois pas ce terrible séjour
Un lieu trop propre à tenir votre Cour.
Apollon répond qu'il a lieu d'être surpris
à son tour, et dit : Mercure ignore- til
H v
que
374 MERCURE DE FRANCE
que Minerve suit toujours Mars dans ces
lieux , et que sur les pas de la Déesse ,
Apollon conduit les Muses et les beaux
Arts ?
Qu'à son gré , Jupiter signale sa vengeance
Contre ses ennemis jaloux ;
Que Mars seconde son courroux ;
Que deux jeunes Héros qui reçûrent naissance
Du terrible Dieu des Combats
Fassent sentir par tout la force de leurs bras ,
Sur les pas de Minerve
Apollon toujours se reserve
Le soin de célébrer les Dieux et les Héros
Et de les délasser de leurs nobles travaux.
Quand sur les Enfans de la terre
Jupiter lance le tonnerre
Son Empire est- il ébranlé ?
Sa fureur , des beaux Arts , détruit- elle l'azyle ♬
Dans mes travaux suis je troublé ?
Et le séjour des Cieux devient- il moins tranquile
, Non , les rebelles seuls doivent trembler
d'effroi , et Mercure [ dit à Apollon
qu'il ne craint pas que le tegne des Arts
périsse sous le regne de Jupiter ; qu'il a
lui-même trop d'interêt à les favoriser, et
que ce seroit en vain qu'il triompheroit
de
FEVRIER . 1734- 375
de ses ennemis , si Apollon et les Muses
n'immortalisoient ses exploits.
Oui, ( dit-il ) les Lauriers que la Victoire
donne ,
Şont d'eux - mêmes bien - tôt Alétris ;
Ils ne sont toujours verds qu'autant qu'à leur
Couronne
Vous ajoutez , vous - même , un nouveau
prix.
Par ce Dieu triomphant une vaste Carriere
Vient d'être ouverte à vos efforts ;
Bien- tôt il va fournir la plus ample matiere
A des accents plus brillants et plus forts ;
Préparez - vous sous les loix de Minerve ,
A faire ouir des sons dignes d'elle et de lui ;
Et lorsque par vos soins , la Déesse aujourd'hui
Prendra les seuls plaisirs que son coeur se réserve
,
Songez qu'elle est du sang du Souverain des
Dieux ;
Et que d'en celebrer les Exploits glorieux ,
C'est- là Pexalter elle- même ;
Que quand mille vertus en elle se font voir ,
Le seul encens qu'elle veut recevoir
Est d'entendre louer son Empire suprême.
Mercure quitte Apollon en lui disane
qu'il court où Jupiter l'envoye , et qu'il
H vj
Ie376
MERCURE DE FRANCE
reviendra prendre part aux plaisirs qu'il
prépare à la Déesse . Apollon invite les
Muses de hâter leurs Jeux , & c. Momus
arrive en riant , on lui en demande la
cause , il répond :
Peut-on le demander ? J'apprens que dans ces
lieux
Vous préparez tous trois des jeux
Pour amuser une Déesse
Dont les hautes vertus
L'Esprit , le Sçavoir , la Sagesse ,
Furent toujours respectez de Momus ,
Je crois d'abord que votre zéle ,
Ne lui présentera qu'un plaisir digne d'elle,
Que rassemblant de toutes parts
Les plus renommez dans vos Arts ,
Vous pourrez mériter l'honneur de sa présence →
Point du tout : Quel objet a frappé mes regards!
Je ne puls m'empêcher d'en rire , quand j'y
pense ,)
J'ai vû que vous aviez fait choix
D'un tas d'Acteurs sans art et sans expérience
Et qui n'ont du Théatre aucune connoissance ;
Dont les gestes , les tons de voix ,
Le jeu , le peu d'intelligence
Vont gâter les plus beaux endroits.
Ah ! quel excès d'extravagance.
Apollon répond que c'est la coutume
des
FEVRIER 1734 377
des Critiques du tems de décider de tout
par prévention et sans avoir vû un Ouvrage.
Momus soutient qu'on se trompet
rarement en décidant ainsi , et que le
succès de toute chose vient du premier
coup d'oeil dont on l'envisage ; et il ajoute :
Quand le public s'accorde à prononcer
Que ce qu'on lui promet doit êrre détestable ,
Aussi- tôt cet Arrêt rend la chose exécrable ;
Fut- elle bonne , ensuite on doit sans balancer ,
Soutenir constamment qu'elle est abominable ,
Tel sst votre Spectacle , il sera pitoyable.
Thalie dit à Momus qu'il gagne infiniment
à frequenter certains lieux , d'où
partent des traits si justes. Melpomene
interrompt Thalie , en lui disant qu'il est
inutile de vouloir faire entendre raison
au caustique Momus ; mais qu'il leur importe
peu qu'il approuve où qu'il blâme
leur dessein :
Pourvu que la Déesse à qui nous voulons plaire
Approuve les Acteurs dont nous avons fait
choix ,
Et que même elle les préfére
A ceux qui nous vendant leur voix .
Pour leur interêt seul sont soumis à nos laix ,
Et n'ont d'objet que le salaire.
File
378 MERCURE DE FRANCE
Elle ajoute que le zéle dont ils brûlent
leur tiendra lieu de tout mérite.
L'indulgence est le prix de si nobles objets.
Momus replique qu'il est persuadé que
leurs Acteurs ne manquent pas de zéle
mais que cela ne suffit pas pour faire de
bons Comédiens . Autrefois , dit il , Melpoméne
avoit trouvé l'art de m'attendrir
, mais je rentre plus que jamais dans
mes droits ; et je crains seulement que ce
ne soit le tour de Thalie de me faire pleu
rer. Thalie s'offense beaucoup de cette
raillerie; et Momus dit , que rire à la Tragédie
, et pleurer à la Comédie est un plaisir
bien digne de lui. Melpomene quitte
la partie. Thalie la suit , en menaçant
Momus. Apollon reste seul avec lui et lui
représente que le triste fruit qu'on retire
de mordre toujours est d'être fuy et détesté
d'un chacunsà quoi Momus répond:
De donner des leçons vous voulez vous mêler ;
Je veux aussi vous en faire une
Vous êtes un Pédant , d'espece non commune
Fade, ennuyeux , de tout voulant toujours parler ;
Et que l'on ne sçauroit enter dre sans bâiller :
Adieu .
"
Il sort et Apollon se récrie sur le caraçtere
FEVRIER 379 1734.
tere de ces sortes d'esprits ; il dit qu'en
voulant leur contredire , on s'attire leur
mépris. Le Prologue finit par ces quatre
Vers .
Princesse , tu connois l'écücil qui nous menace ,
Et nous mêmes trop tard nous sentons le danger
Mais ta bonté pour nous doit nous encourager
L'espoir de l'obtenir nous rendra notre audace.
Le Prologue est de M. de Morand,dans
lequel il jouoit lui- même le Rôle d'Apollon.
Nous apprenons que ces Mrs se
préparent à donner sur le même Théatre
une Tragédie nouvelle du même Au
teur , dont nous parlerons en son temps.
C'est de lui dont il est parlé dans le
Mercure de Février 1732. au sujet d'un
pareil Spectacle , représenté à Nîmes, & c.
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Résumé : Comedie à l'Arcenal, Prologue &c. [titre d'après la table]
Le texte relate la montée en popularité de la comédie à Paris, avec plusieurs compagnies connaissant le succès. Parmi elles, la société de l'Hôtel de Brancas, puis de l'Hôtel de Lauzun, se distingue particulièrement. Cette compagnie a été appréciée par des personnes de haut rang et des connaisseurs, et a souvent accueilli des princes et princesses, notamment la Duchesse du Maine. En février 1734, la compagnie a sollicité l'aide de la Duchesse du Maine pour obtenir une salle de représentation. Ils lui ont présenté un placet poétique, la suppliant de les aider à trouver un lieu approprié. La Duchesse du Maine a accepté et leur a fourni une salle dans l'Arsenal. La première représentation dans cette nouvelle salle a eu lieu le 21 février 1734, en présence de la Duchesse du Maine et d'une compagnie choisie. Ils ont joué la tragédie 'Manlius Capitolinus' de M. de la Fosse, suivie de la comédie 'Les trois Frères Rivaux' et d'un divertissement musical. Le prologue, écrit par M. de Morand, louait la princesse et était interprété par des personnages mythologiques tels qu'Apollon, Mercure, Momus, Melpomène et Thalie. Le prologue discutait des rôles de la tragédie et de la comédie, et de leur importance dans l'art. La compagnie prévoit de présenter une nouvelle tragédie du même auteur.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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229
p. 560-564
EXTRAIT de la Comédie de la Surprise de la Haine, annoncée dans le dernier Mercure.
Début :
Deux Familles qui ont été long-temps divisées par des Procès, veulent se [...]
Mots clefs :
Haine, Lucile, Lettre, Lisidor, Amour, Comédie, Hymen, Manière, Arlequin, Valet
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT de la Comédie de la Surprise de la Haine, annoncée dans le dernier Mercure.
EXTRAIT de la Comédie de la Surprise
de la Haine , annoncée dans le
dernier Mercure.
Eux Familles qui ont été long- temps
Ddivisées par des Procès , veulent se par
réünir par un Hymen , qui semble d'abord
projetté sous les meilleurs auspices.
Cléon , Pere de Lisidor , et Clarice , Mere
de Lucile , sont les deux Chefs des Familles
divisées ; Lisidor aime Lucile , et a le
bonheur de ne pas déplaire à l'objet de
son
Tend
THE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY
.
ASTOR
, LENOX
AND
TILDEN
FOUNDATIONS
.
MARS. 1734. 161
son amour ; il lui fait une déclaration toute
des plus tendres ; elle y répond de la
maniere la plus favorable ; mais par malheur
cet Amant aimé , lui dit , lui dit , pour lui
prouver l'excès de son amour , qu'il voudroit
la voir , l'adorer et le lui dire sans
cesse ; cette maniere d'aimer paroît toutà-
fait romanesque à Lucile , qui au grand
étonnement de Lisidor passe rapidement
des sentimens les plus raisonnables aux
plus capricieux; son Amant ne dit pas un
mot qu'elle ne saisisse du mauvais côté ;
il a beau lui en témoigner sou juste étonnement
, elle ne fait qu'enchérir sur ce
qu'elle a déja avancés enfin il en est si
mécontent qu'après qu'ils se sont séparez;
il lui écrit une Lettre que le dépit lui dicte
, et dans laquelle cependant l'amour et
la plainte regnent également à peine.
a-t-il donné cette Lettre à Arlequin son
valet , pour la rendre à sa capricieuse
Maîtresse , qu'il se repent de l'avoir écrite
et qu'il deffend à Arlequin de la porter à
Lucile ; heureux s'il avoit eu le temps de
la retirer des mains d'un Valet si étourdi .
Cette Lettre arrive malgré lui jusqu'à
Lucile ; Arlequin déja engagé à dire du
mal de son Maître , par la libéralité de
Lucile , lui dit qu'il a sur lui une piéce
impayable. Lucile lui met entre les
Gv mains
562 MERCURE DE FRANCE
mains une Tabatiere d'or ; ce nouveau
don est payé sur le champ , par celui de
la fatale Lettre ; Lucile en fait l'usage qui
convient au dessein qu'elle a formé de ne
point épouser un homme qui l'aime trop,
elle la montre à Clarice sa mere , qui ce
pendant n'en est pas si allarmée que sa
Fille l'auroit souhaité. Cléon à qui la Let
tre est aussi communiquée , traite cela de
bagatelle , et commande à son fils d'achever
un Hymen qui les va tous reconcilier.
Lisidor surmonte la repugnance secrette
qui devroit l'empêcher d'épouser une fille
aussi capricieuse que Lucille ; il n'oublie
rien pour caliner sa colere au sujet de
la Lettre, où il lui dit de si mortifiantes
véritez il lui proteste que cette Lettre
n'a été écrite que dans un mouvement de
dépit qu'elle avoit excité par des réponses
que son amour n'avoit pas meritées ; il
ajoute que son valet lui a rendu cette
Lettre contre ses ordres .
Lucille ne reçoit point ses excuses , et
voulant rompre à quelque prix que ce
soit un mariage , pour lequel elle a conçu
une secrette aversion , sans qu'on puisse
démêler pourquoi ; elle se transforme,
pour ainsi dire , en Furie à ses yeux , pour
lui faire entendre à quel point elle le hai
roit , s'il osoit la prendre pour femme ;
c'est
MARS. 1734- 15%
c'est ici où elle fait l'image la plus affreuse
d'une haine , qu'elle seroit peutêtre
incapable de sentir , et cela fait une
telle impression sur le Spectateur qu'il
est presque saisi d'horreur .
Nous n'avons point encore parlé de
l'Episode de Mylord Guinée, pour ne pas
interrompre le fil d'une action à laquel
le il est étranger ; il faut pourtant avouer
qu'il n'est pas inutile , puisque la Piéce
lui doit une bonne partie de son grand
succès ; le Rôle de ce Mylord est parfaitement
bien joué par le Sr Riccoboni , et
'il fait une heureuse diversion à tout ce
qu'il y a de révoltant et d'outré dans le caractere
de Lucille ; on auroit même été
embarrassé à ajouter un Divertissement à
cette Comédie sans le secours du Mylord ,
qui par une espece de coup du hazard , a
fait préparer une fête si analogue à la
Piéce , il semble en avoir prévu le dénoument.
Voici en quoi consiste ce Divertissement
: La Haine travestie en Hymen
paroît vouloir unir plusieursAmans;
mais dès qu'ils touchent au moment qui
doit les rendre heureux , elle reprend sa
véritable forme, et souffle par tout la discorde.
Au reste tout le monde convient.
que cette Comédie est tres bien et tresvivement
écrite . On n'en trouve pas à
G vj beau
564 MERCURE DE FRANCE
beaucoup près , les moeurs si admirables,
ni le fond si heureux : Elle est applaudie
par de tres nombreuses assemblées . La
DlleSilvia y jouë le principal personnage
d'une maniere inimitable.
de la Haine , annoncée dans le
dernier Mercure.
Eux Familles qui ont été long- temps
Ddivisées par des Procès , veulent se par
réünir par un Hymen , qui semble d'abord
projetté sous les meilleurs auspices.
Cléon , Pere de Lisidor , et Clarice , Mere
de Lucile , sont les deux Chefs des Familles
divisées ; Lisidor aime Lucile , et a le
bonheur de ne pas déplaire à l'objet de
son
Tend
THE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY
.
ASTOR
, LENOX
AND
TILDEN
FOUNDATIONS
.
MARS. 1734. 161
son amour ; il lui fait une déclaration toute
des plus tendres ; elle y répond de la
maniere la plus favorable ; mais par malheur
cet Amant aimé , lui dit , lui dit , pour lui
prouver l'excès de son amour , qu'il voudroit
la voir , l'adorer et le lui dire sans
cesse ; cette maniere d'aimer paroît toutà-
fait romanesque à Lucile , qui au grand
étonnement de Lisidor passe rapidement
des sentimens les plus raisonnables aux
plus capricieux; son Amant ne dit pas un
mot qu'elle ne saisisse du mauvais côté ;
il a beau lui en témoigner sou juste étonnement
, elle ne fait qu'enchérir sur ce
qu'elle a déja avancés enfin il en est si
mécontent qu'après qu'ils se sont séparez;
il lui écrit une Lettre que le dépit lui dicte
, et dans laquelle cependant l'amour et
la plainte regnent également à peine.
a-t-il donné cette Lettre à Arlequin son
valet , pour la rendre à sa capricieuse
Maîtresse , qu'il se repent de l'avoir écrite
et qu'il deffend à Arlequin de la porter à
Lucile ; heureux s'il avoit eu le temps de
la retirer des mains d'un Valet si étourdi .
Cette Lettre arrive malgré lui jusqu'à
Lucile ; Arlequin déja engagé à dire du
mal de son Maître , par la libéralité de
Lucile , lui dit qu'il a sur lui une piéce
impayable. Lucile lui met entre les
Gv mains
562 MERCURE DE FRANCE
mains une Tabatiere d'or ; ce nouveau
don est payé sur le champ , par celui de
la fatale Lettre ; Lucile en fait l'usage qui
convient au dessein qu'elle a formé de ne
point épouser un homme qui l'aime trop,
elle la montre à Clarice sa mere , qui ce
pendant n'en est pas si allarmée que sa
Fille l'auroit souhaité. Cléon à qui la Let
tre est aussi communiquée , traite cela de
bagatelle , et commande à son fils d'achever
un Hymen qui les va tous reconcilier.
Lisidor surmonte la repugnance secrette
qui devroit l'empêcher d'épouser une fille
aussi capricieuse que Lucille ; il n'oublie
rien pour caliner sa colere au sujet de
la Lettre, où il lui dit de si mortifiantes
véritez il lui proteste que cette Lettre
n'a été écrite que dans un mouvement de
dépit qu'elle avoit excité par des réponses
que son amour n'avoit pas meritées ; il
ajoute que son valet lui a rendu cette
Lettre contre ses ordres .
Lucille ne reçoit point ses excuses , et
voulant rompre à quelque prix que ce
soit un mariage , pour lequel elle a conçu
une secrette aversion , sans qu'on puisse
démêler pourquoi ; elle se transforme,
pour ainsi dire , en Furie à ses yeux , pour
lui faire entendre à quel point elle le hai
roit , s'il osoit la prendre pour femme ;
c'est
MARS. 1734- 15%
c'est ici où elle fait l'image la plus affreuse
d'une haine , qu'elle seroit peutêtre
incapable de sentir , et cela fait une
telle impression sur le Spectateur qu'il
est presque saisi d'horreur .
Nous n'avons point encore parlé de
l'Episode de Mylord Guinée, pour ne pas
interrompre le fil d'une action à laquel
le il est étranger ; il faut pourtant avouer
qu'il n'est pas inutile , puisque la Piéce
lui doit une bonne partie de son grand
succès ; le Rôle de ce Mylord est parfaitement
bien joué par le Sr Riccoboni , et
'il fait une heureuse diversion à tout ce
qu'il y a de révoltant et d'outré dans le caractere
de Lucille ; on auroit même été
embarrassé à ajouter un Divertissement à
cette Comédie sans le secours du Mylord ,
qui par une espece de coup du hazard , a
fait préparer une fête si analogue à la
Piéce , il semble en avoir prévu le dénoument.
Voici en quoi consiste ce Divertissement
: La Haine travestie en Hymen
paroît vouloir unir plusieursAmans;
mais dès qu'ils touchent au moment qui
doit les rendre heureux , elle reprend sa
véritable forme, et souffle par tout la discorde.
Au reste tout le monde convient.
que cette Comédie est tres bien et tresvivement
écrite . On n'en trouve pas à
G vj beau
564 MERCURE DE FRANCE
beaucoup près , les moeurs si admirables,
ni le fond si heureux : Elle est applaudie
par de tres nombreuses assemblées . La
DlleSilvia y jouë le principal personnage
d'une maniere inimitable.
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Résumé : EXTRAIT de la Comédie de la Surprise de la Haine, annoncée dans le dernier Mercure.
L'extrait de la comédie 'La Surprise de la Haine' raconte l'histoire de deux familles divisées par des procès et cherchant à se réconcilier par le mariage de Lisidor et Lucile. Lisidor, fils de Cléon, et Lucile, fille de Clarice, s'aiment mutuellement. Cependant, Lucile trouve les déclarations d'amour de Lisidor trop romanesques et les interprète mal. Lisidor, mécontent, écrit une lettre sous le coup du dépit qu'il regrette immédiatement et tente d'empêcher Arlequin, son valet, de la livrer. Malgré ses efforts, la lettre parvient à Lucile, qui la montre à sa mère Clarice et à Cléon. Malgré les excuses de Lisidor, Lucile refuse de l'accepter et exprime une haine soudaine envers lui. La pièce inclut également un épisode avec Mylord Guinée, interprété par le Sr Riccoboni, qui apporte une diversion bienvenue et prépare une fête en lien avec le dénouement. La comédie est bien accueillie pour son écriture vive et ses mœurs admirables, avec une performance remarquable de la Dlle Silvia dans le rôle principal.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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230
p. 564
Le Complaisant, [titre d'après la table]
Début :
Le 2 de ce mois, les Comédiens François remirent au Théatre la Comédie du [...]
Mots clefs :
Complaisant, Nouveauté
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Le Complaisant, [titre d'après la table]
Le 2 de ce mois , les Comédiens François
remirent au Théatre la Comédie du
Complaisant , qu'on n'avoit pas reprise
depuis sa nouveauté ; et le Sr Quinaut ,
qui s'étoit retiré à la Campagne , il y a
près d'un an , reparut dans le principal
Rôle de cette Piece , à la grande satisfaction
du Public , dont il fut reçu avec
de grands applaudissemens.
Nous avons parlé du Complaisant dans
sa nouveauté comme d'une excellente
Piéce ; elle est aussi excellemment représentée
. On en peut voir l'Extrait dans le
Mercure d'Avril dernier , page 780 .
remirent au Théatre la Comédie du
Complaisant , qu'on n'avoit pas reprise
depuis sa nouveauté ; et le Sr Quinaut ,
qui s'étoit retiré à la Campagne , il y a
près d'un an , reparut dans le principal
Rôle de cette Piece , à la grande satisfaction
du Public , dont il fut reçu avec
de grands applaudissemens.
Nous avons parlé du Complaisant dans
sa nouveauté comme d'une excellente
Piéce ; elle est aussi excellemment représentée
. On en peut voir l'Extrait dans le
Mercure d'Avril dernier , page 780 .
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Résumé : Le Complaisant, [titre d'après la table]
Le 2 du mois, les Comédiens Français ont repris 'Le Complaisant' au théâtre. Monsieur Quinaut, de retour après un an de retraite, a interprété le rôle principal. Le public l'a acclamé. La pièce, déjà saluée, a été jugée excellente. Un extrait est disponible dans le Mercure d'avril précédent, page 780.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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231
p. 564-576
LA FAUSSE ANTIPATIE, Comedie Nouvelle. Extrait.
Début :
ACTEURS DU PROLOGUE. Le Génie de la Comédie, Le Sr [...]
Mots clefs :
Antipathie, Léonore, Damon, Orphise, Comédie, Nérine, Géronte, Génie, Frontin, Maître, Public, Pièce, Époux, Bon sens, Mort, Départ, Comédie-Française
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LA FAUSSE ANTIPATIE, Comedie Nouvelle. Extrait.
LA FAUSSE ANTIPATIE , Comedie
Nouvelle. Extrait.
ACTEURS DU PROLOGUE.
Le Génie de la
Le Sr Granval.
Comédie ,
La Folie , La Dlle Quinaut.
Le Bon sens ,
Le Sr de Montménil.
Un
MARS 1734 565
Un Bourgeois , une Précieuse , un Admirateur
, un Critique , un Petit- Maître
un Homme sensé .
Les Sieurs Duchemin , Dlle du Breuil ,
Dangeville , Armand, Dufresne , Dubreuil.
La Dlle du Bocage .
Thalie ,
La Scene est sur le Théatre de la Comédie
Françoise.
C'est M. de la Chaussée qui a enrichi le
Théatre François de cette Comédie . Le
Public lui rend tous les jours la justice
que mérite son coup d'essay , pour l'inviter
à continuer une carriere qu'il vient
de commencer avec tant d'éclat. Il fait
l'éloge de ce véritable Fublic dans un
Prologue , qui marque la noble hardies-.
se de son Auteur. Voici de quoi il s'agit :
Le Génie de la Comédie Françoise vient,
demander au Public , par où il pourra
avoir le bonheur de lui plaire ; ce Public
est composé des Personnages qu'on vient
de nommer ; le Bon Sens est de la partie ,
mais il est assez maltraité , sur tout par la
Folie , qui natureilement ne doit jamais
s'accorder avec lui ; les sentimens de cette
assemblée , dont chaque membre usurpe
le respectable nom de Public , se trouvent
si opposez, que le Génie ne sçait de
quel
366 MERCURE DE FRANCE
quel côté pancher ; l'un blâme tout ;
Fautre approuve tout ; le Bourgeois don
ne dans la Farce ; la Précieuse dans la Métaphisique
; le Petit - Maître ne se soucie
que de voir et de se montrer : Voici
comment s'explique ce dernier , qui n'a
que trop d'imitateurs.
Ma décision roule alternativement ,
Sur ces deux mots , divin , ou détestable ;
Et souvent le dernier est le plus véritable .
Enfin les Spectacles que j'aime ,
Sont ceux où la presse est extrême..
Les nouveautez sont toujours belles ;
Sans vous embarrasser du choix ;
Ne nous donnez jamais que des Piéces nouvelles
Affichez-les d'abord pour la derniere fois ;
Prenez double , rendez vos plaisirs impayables;
Exceptez le Parterre ; ilpourroit au surplus ,
Vous envoyer à tous les Diables ;
C'est à quoi je conclus.
Toute l'Assemblée qui compose ce Public
, que le Génie a voulu consulter sur
le choix des pièces , disparoit insensiblement
; le Génie reste , accompagné du
Bon Sens , er d'un homme sensé ; ce dernier
s'explique avec tant de réserve , que
le Bon Sens après son départ , dit au Génie
que c'est là ce véritable Public qu'il
lui
MARS 1734. 567
lui a d'abord annoncé ; Thalie vient enfin
apporter une Comédie; le Génie l'adopte
à tout hazard , et finit le Prologue en
disant à Thalie.
Donnez , donnez toujours ; les temps sont mal
heureux .
Argument de la Comédie.
Damon et Leonore , qui sont les Héros
de la Piéce , ont été mariez malgré eux ,
ce qui a produit dans leurs coeurs une
antipathie réciproque ; leurs véritables
noms sont Sainflore et Sylvie, et ils n'en
ont changé que parce que leur interêt l'a
demandé. Sainflore en sortant de l'Eglise,
a été attaqué par un de ses Rivaux , que
son prochain bonheur a mis au désespoir ;
l'agresseur a été tué , et Sainflore a pris la
fuite , pour se dérober à la poursuite des
Parens de son ennemi ; c'est pour plus de
sureté qu'il a pris le nom de Damon ;)
Sylvie voyant disparoître Sainflore , se
jette dans un Convent , où elle se cache
sa mere et à tous ses parens , sous le
nom de Léonore. Un bruit , que son
Epoux fait courir lui- même , et la mort
de sa mere , la déterminent à sortir de
son azyle . Un oncle officieux vient l'en
tirer ; mais elle ne reprend pas encore
son
568 MERCURE DE FRANCE
son premier nom , parce que l'état de ses
affaires l'exige . Sortie du Convent où
elle a été cachée pendant dix ou douze
ans , elle va à une Maison de Campagne
de Géronte , son oncle . C'est - là que Sainflore
la voit pour la premiere fois , il en
devient amoureux , il s'en fait aimer
sous le nom de Damon ; ils ne se reconnoissent
pas , parce qu'ils ne se sont jamais
vûs ; l'aversion qu'ils avoient l'un
pour l'autre , pour des noeuds qu'on formoit
malgré eux , les a empêchés de se
regarder en face , quand ils ont prononcé
leur Arrêt ; ils se trouvent aussi aimables
qu'ils se sont crus haïssables ; cette
simpathie naissante , trouve pourtant des
obstacles à surmonter , comme on le verra
dans la Piéce ; mais ces mêmes obstacles
venant à être levez , ils éprouvent
heureusement que leur antipathie étoit
fausse.
Nérine , Suivante de Leonore , ouvre la
premiere Scene avec Frontin , valet de
Damon ; ils exposent le sujet et apprenent
aux Spectateurs que Léonore a été
mariée autrefois et qu'elle se trouva
presque veuve un moment après son mariage
, par l'accident que nous avons dit ;
ils font entendre que douze ans se sont
passez depuis ce prétendu veuvage ; que
,
LéoMARS
1734: 569
Léonore croyant son mari mort , fut tirée
d'un Convent qu'elle avoit choisi pour
azyle , par les soins de Géronte , son oncle
, et que la mere de Léonore étoit
morte de regret d'avoir marié sa fille
malgré elle.
On apprend encore dans cette premiere
Scene que Damon et Léonore paroissent
s'aimer , sans oser se le dire.
Frontin se retire à l'approche de Léonóre.
Nérine tire avec adresse le secret.
de sa Maîtrese ; Léonore lui avouë que
Damon ne lui est pas indifferent ; mais
elle doute qu'il l'aime à son tour.
Orphise , femme de Géronte , vient
prier Léonore d'empêcher le départ de
Damon , qui est prêt à les quitter ; elle
lui dit en confidence , qu'elle voudroit
bien en faire sonGendre et le marier avec
sa fille , qu'elle a euë d'un premier lit ;
Léonore n'a garde d'accepter une commission
si fatale à son amour ; elle s'en
défend autant qu'elle peut . Orphise la
quitte , en se promettant qu'elle ne lui
refusera pas ce bon office. Léonore ne
sçait ce qu'elle doit faire dans une conjoncture
si embarrassante , elle veut laisser
partir Damon sans le voir.
Damon vient , il prend congé de Léonore
; elle lui dit , qu'elle consent à son
départ
570 MERCURE DE FRANCE
départ , puisqu'apparemment il a des raisons
pour partir; Damon , croyant qu'elle
le soupçonne de quelque engagement secret
, ne peut plus résister à l'interêt secret
qu'il a de la dérromper ; il lui parle
ainsi :
Moi, des raisons ! Je voy vos injustes soupçons ;
Vous croyez que je vole où mon amour m'appelle
!
Si vous sçaviez combien votre erreur m'est
cruelle ? .
Puisque vous m'y forcez , apprenez mon état ;
Si j'aimois , mon amour éviteroit l'éclat ;
Je dis plus; mon amour deviendroit un outrage,
Qui déshonoreroit l'objet de mon hommage ;
Mon vainqueur n'oseroit répondre à mon amours
Eh ! que lui serviroit le plus tendre retour ?
Il feroit le malheur de cette infortunée ;
Je gémis dans les fers d'un cruel Hyménée.
Ce dernier Vers est un coup mortel
pour la tendre Léonore; elle est trop vertueuse
pour retenir Damon après cet
aveu. Il sort en lui disant que son malheur
n'est pas sans remede . Léonore mortellement
affligée d'aimer un homme qui
ne peut être à elle , se retire dans son appartement
, où elle ne veut voir personne.
Frontin
MARS. 1734 571
Frontin arrive , tenant une Lettre; Nerine
le veut étrangler pour lui avoir caché
que son Maître est marié ; Frontin .
lui proteste qu'il l'ignore , et que si Damon
a pris femme , ce n'est pas de son
bail. Nérine se rappellant ce que Damon
a dit , que son malheur n'est pas sans remede
, demande à Frontin , s'il ne sçait
rien de ce qui doit être dans cette Lettre
qu'il va porter à son Maître. Frontin lui
répond qu'il ne sçauroit le deviner à
moins que d'être sorcier ; il lui dit seulement
qu'un Avocat qui est en vacance
dans le voisinage , la lui a remise , en lui
disant : Voilà votre Maître en repos. Nérine
conçoit quelque esperance et finit l'Acte
par ce Vers:
Je ne sçais pas pourquoi j'ose encore esperer.
Orphise et Léonore commencent le second
Acte ; Léonore est tres - surprise des remercimens
que lui fait Orphise au sujet
de Damon ; ce dernier ne part point , et'
Orphise croit que c'est Léonore qui lui a
rendu ce bon office . Léonore lui assure
qu'elle n'y a point de part. Orphise
croyant que sa Fille ne doit ce bonheur
qu'à ses attraits , et picquée de ce que
Léonore n'a pas daigné y contribuer, par$
72 MERCURE DE FRANCE
•
ce qu'elle auroit voulu ménager le coeur
de Damon pour elle- même , lui en fait
un reproche plein d'aigreur , qui lui attire
cette réponse :
Oui , je sçais qu'une femme aime un peu trop à
plaire ;
C'est de l'âge où je suis la foiblesse ordinaire :
Dans l'arriere saison on ne fait qu'en changer ;
Du monde qui nous quitte, on cherche à se vanger
, & c.
On se croit vertueuse , en voulant le paroître ;
Tandis qu'au fond du coeur on néglige de l'être,
Qu'au contraire on se fait un plaisir inhumain
De nourrir son orgueil aux dépens du prochain,
& c.
Elle lui apprend que Damon est marié ;
Orphise lui demande malignement si
c'est avec elle , et la quitte en lui faisant
entendre qu'elle n'en doute point. Léonore
vivement picquée de ce qu'Orphise
lui a reproché , se détermine à ne plus
voir Damon, et sort pour lui aller écrire.
Nérine la suit.
Damon vient et témoigne la joye qu'il
ressent d'une heureuse nouvelle qu'il a
reçue ; il fait entendre que celle qu'il a
épousée malgré lui et malgré elle- même,
consent à la rupture d'un mariage , si fumeste
à tous les deux . Il ajoûte :
Celle
MARS 573 1734.
Se porte
Celle à qui mon malheur avoit uni ma vie ,
à dénouer la chaîne qui nous lie.
Cette maniere positive de s'exprimer a
produit quelque sorte d'obscurité ; on n'a
pas bien pû comprendre comment cette
même Leonore, qui doit redevenir Sylvie
à la fin de la Piéce, a pû donner les mains
à une rupture si opposée à son caractere ;
il est vrai que l'Auteur ajoute ensuite: Da
moins on s'en fait fort ; mais les deux
miers Vers ayant déja fait leur impression
, on n'a pas assez refléchi sur le troisieme;
et d'ailleurs, dans un autre endroit
de la Comédie, Damon dit à Léonore, en
parlant de Sylvie :
Une heureuse rupture ,
pre-
Nous dégage tous deux d'une Chaine trop dure
& c.
Reprenons le fil de la Piéce. Damon '
par une adresse tres - neuve , engage Nérine
à porter à sa Maîtresse un Billet qu'il
va écrire ; il le rapporte dans le même
temps que Léonore vient remettre le sien
entre les mains de Nérine pour le donner
à Damon. Léonore veut se retirer ; Damon
la retient et lui apprend que celle
qu'il a épousée consent à faire dissoudre
leur Hymen ; Léonore a assez de verta
FOUT
574 MERCURE DE FRANCE
-
pour refuser son consentement à cette
rupture , qu'elle croit forcée de la part
de l'Epouse ; elle laisse pourtant échapper
quelques mots , qui témoignent le regret
qu'elle a de ne pouvoir être à Da
mon ; il se jerte à ses pieds pour l'en remercier
: Orphise le surprend dans cette
attitude ; il se sauve. Orphise dit des paroles
insultantes à Léonore , qui l'obligent
à avouer qu'elle aime Damon et
qu'elle le peut , puisque son mariage est
rompu . Orphise lui dit que si Damon
est libre, elle ne l'est pas , et que Géronte
vient de lui apprendre que son Epoux
n'est pas mort ; c'est un coup de foudre
pour Orphise , qui se retire dans la noble
résolution d'aller retrouver son
Epoux , malgré son antipathie , qu'ellé
se fatte de surmonter .
Pour abréger le dernier Acte , nous
passons les premieres Scenes : Orphise
presse en vain Géronte de porter Léonore
à exécuter le projet qu'elle a noblement
formé d'aller se livrer à Sain
flore son Epoux , et de reprendre son
nom de Sylvie. Géronte n'y veut pas
consentir . Damon vient , il se plaint de
la trop austere vertu de Léonore , qui ne
veut pas donner les mains à une rupture
que sonEpoux a demandée.Léonore vient
à
MARS 1734. 575
ル
à son tour et demeure ferme, dans le dessein
que sa vertu lui a fait prendre ; sa
conversation avec Damon est aussi vertueuse
que tendre ; enfin Damon ouvre
les yeux par le portrait que Géronte fait
de l'Epoux , à qui Léonore veut se rejoindre
: Le voici.
Si c'étoit un Epoux , tel qu'eût été Damon
Passe ; mais c'en est un qui n'en a que le nom
Un jeune écervelé qui laisse sa compagne ,
Et pour libertiner , va battre la campagne ,
Que je ne connois point , car ma soeur , Dieu
merci ,
Ne consultoit
personne en tout comme en ceci ;
Un homme qui n'agit que par des Emissaires ,
Et n'ose se montrer que par ses gens d'affaires ,
Qui lorsqu'on le croit mort, revient après douze
ans ,
Pour se démarier . ...
Damon ne peut plus se méconnoître
à ces traits , il se jette aux pieds de Léonore
pour lui demander si elle n'est pas
Sylvie , comme il est Sainflore ; cela
produit
une reconnoissance des plus interessantes
, et finit la Piéce de la maniere la
plus satisfaisante et la plus heureuse.
L'art ingénieux avec lequel cette Comédie
est conduite , la maniere élegante,
simple
576 MERCURE DE FRANCE
>
sans
simple et naturelle dont elle est écrite
et sur tout les moeurs admirables
être austeres , d'après lesquelles chaque
caractere est peint de main de Maître ,
font grand plaisir aux honnêtes gens ,
qui sont agréablement amusez, interessez
attendris et même édifiez.
Au reste cette Piece est parfaitement
représentée par les sieurs Dufresne , Duchemin
et Armand , et par les Dlles Gaussin
, la Motte et Quinault.
Nouvelle. Extrait.
ACTEURS DU PROLOGUE.
Le Génie de la
Le Sr Granval.
Comédie ,
La Folie , La Dlle Quinaut.
Le Bon sens ,
Le Sr de Montménil.
Un
MARS 1734 565
Un Bourgeois , une Précieuse , un Admirateur
, un Critique , un Petit- Maître
un Homme sensé .
Les Sieurs Duchemin , Dlle du Breuil ,
Dangeville , Armand, Dufresne , Dubreuil.
La Dlle du Bocage .
Thalie ,
La Scene est sur le Théatre de la Comédie
Françoise.
C'est M. de la Chaussée qui a enrichi le
Théatre François de cette Comédie . Le
Public lui rend tous les jours la justice
que mérite son coup d'essay , pour l'inviter
à continuer une carriere qu'il vient
de commencer avec tant d'éclat. Il fait
l'éloge de ce véritable Fublic dans un
Prologue , qui marque la noble hardies-.
se de son Auteur. Voici de quoi il s'agit :
Le Génie de la Comédie Françoise vient,
demander au Public , par où il pourra
avoir le bonheur de lui plaire ; ce Public
est composé des Personnages qu'on vient
de nommer ; le Bon Sens est de la partie ,
mais il est assez maltraité , sur tout par la
Folie , qui natureilement ne doit jamais
s'accorder avec lui ; les sentimens de cette
assemblée , dont chaque membre usurpe
le respectable nom de Public , se trouvent
si opposez, que le Génie ne sçait de
quel
366 MERCURE DE FRANCE
quel côté pancher ; l'un blâme tout ;
Fautre approuve tout ; le Bourgeois don
ne dans la Farce ; la Précieuse dans la Métaphisique
; le Petit - Maître ne se soucie
que de voir et de se montrer : Voici
comment s'explique ce dernier , qui n'a
que trop d'imitateurs.
Ma décision roule alternativement ,
Sur ces deux mots , divin , ou détestable ;
Et souvent le dernier est le plus véritable .
Enfin les Spectacles que j'aime ,
Sont ceux où la presse est extrême..
Les nouveautez sont toujours belles ;
Sans vous embarrasser du choix ;
Ne nous donnez jamais que des Piéces nouvelles
Affichez-les d'abord pour la derniere fois ;
Prenez double , rendez vos plaisirs impayables;
Exceptez le Parterre ; ilpourroit au surplus ,
Vous envoyer à tous les Diables ;
C'est à quoi je conclus.
Toute l'Assemblée qui compose ce Public
, que le Génie a voulu consulter sur
le choix des pièces , disparoit insensiblement
; le Génie reste , accompagné du
Bon Sens , er d'un homme sensé ; ce dernier
s'explique avec tant de réserve , que
le Bon Sens après son départ , dit au Génie
que c'est là ce véritable Public qu'il
lui
MARS 1734. 567
lui a d'abord annoncé ; Thalie vient enfin
apporter une Comédie; le Génie l'adopte
à tout hazard , et finit le Prologue en
disant à Thalie.
Donnez , donnez toujours ; les temps sont mal
heureux .
Argument de la Comédie.
Damon et Leonore , qui sont les Héros
de la Piéce , ont été mariez malgré eux ,
ce qui a produit dans leurs coeurs une
antipathie réciproque ; leurs véritables
noms sont Sainflore et Sylvie, et ils n'en
ont changé que parce que leur interêt l'a
demandé. Sainflore en sortant de l'Eglise,
a été attaqué par un de ses Rivaux , que
son prochain bonheur a mis au désespoir ;
l'agresseur a été tué , et Sainflore a pris la
fuite , pour se dérober à la poursuite des
Parens de son ennemi ; c'est pour plus de
sureté qu'il a pris le nom de Damon ;)
Sylvie voyant disparoître Sainflore , se
jette dans un Convent , où elle se cache
sa mere et à tous ses parens , sous le
nom de Léonore. Un bruit , que son
Epoux fait courir lui- même , et la mort
de sa mere , la déterminent à sortir de
son azyle . Un oncle officieux vient l'en
tirer ; mais elle ne reprend pas encore
son
568 MERCURE DE FRANCE
son premier nom , parce que l'état de ses
affaires l'exige . Sortie du Convent où
elle a été cachée pendant dix ou douze
ans , elle va à une Maison de Campagne
de Géronte , son oncle . C'est - là que Sainflore
la voit pour la premiere fois , il en
devient amoureux , il s'en fait aimer
sous le nom de Damon ; ils ne se reconnoissent
pas , parce qu'ils ne se sont jamais
vûs ; l'aversion qu'ils avoient l'un
pour l'autre , pour des noeuds qu'on formoit
malgré eux , les a empêchés de se
regarder en face , quand ils ont prononcé
leur Arrêt ; ils se trouvent aussi aimables
qu'ils se sont crus haïssables ; cette
simpathie naissante , trouve pourtant des
obstacles à surmonter , comme on le verra
dans la Piéce ; mais ces mêmes obstacles
venant à être levez , ils éprouvent
heureusement que leur antipathie étoit
fausse.
Nérine , Suivante de Leonore , ouvre la
premiere Scene avec Frontin , valet de
Damon ; ils exposent le sujet et apprenent
aux Spectateurs que Léonore a été
mariée autrefois et qu'elle se trouva
presque veuve un moment après son mariage
, par l'accident que nous avons dit ;
ils font entendre que douze ans se sont
passez depuis ce prétendu veuvage ; que
,
LéoMARS
1734: 569
Léonore croyant son mari mort , fut tirée
d'un Convent qu'elle avoit choisi pour
azyle , par les soins de Géronte , son oncle
, et que la mere de Léonore étoit
morte de regret d'avoir marié sa fille
malgré elle.
On apprend encore dans cette premiere
Scene que Damon et Léonore paroissent
s'aimer , sans oser se le dire.
Frontin se retire à l'approche de Léonóre.
Nérine tire avec adresse le secret.
de sa Maîtrese ; Léonore lui avouë que
Damon ne lui est pas indifferent ; mais
elle doute qu'il l'aime à son tour.
Orphise , femme de Géronte , vient
prier Léonore d'empêcher le départ de
Damon , qui est prêt à les quitter ; elle
lui dit en confidence , qu'elle voudroit
bien en faire sonGendre et le marier avec
sa fille , qu'elle a euë d'un premier lit ;
Léonore n'a garde d'accepter une commission
si fatale à son amour ; elle s'en
défend autant qu'elle peut . Orphise la
quitte , en se promettant qu'elle ne lui
refusera pas ce bon office. Léonore ne
sçait ce qu'elle doit faire dans une conjoncture
si embarrassante , elle veut laisser
partir Damon sans le voir.
Damon vient , il prend congé de Léonore
; elle lui dit , qu'elle consent à son
départ
570 MERCURE DE FRANCE
départ , puisqu'apparemment il a des raisons
pour partir; Damon , croyant qu'elle
le soupçonne de quelque engagement secret
, ne peut plus résister à l'interêt secret
qu'il a de la dérromper ; il lui parle
ainsi :
Moi, des raisons ! Je voy vos injustes soupçons ;
Vous croyez que je vole où mon amour m'appelle
!
Si vous sçaviez combien votre erreur m'est
cruelle ? .
Puisque vous m'y forcez , apprenez mon état ;
Si j'aimois , mon amour éviteroit l'éclat ;
Je dis plus; mon amour deviendroit un outrage,
Qui déshonoreroit l'objet de mon hommage ;
Mon vainqueur n'oseroit répondre à mon amours
Eh ! que lui serviroit le plus tendre retour ?
Il feroit le malheur de cette infortunée ;
Je gémis dans les fers d'un cruel Hyménée.
Ce dernier Vers est un coup mortel
pour la tendre Léonore; elle est trop vertueuse
pour retenir Damon après cet
aveu. Il sort en lui disant que son malheur
n'est pas sans remede . Léonore mortellement
affligée d'aimer un homme qui
ne peut être à elle , se retire dans son appartement
, où elle ne veut voir personne.
Frontin
MARS. 1734 571
Frontin arrive , tenant une Lettre; Nerine
le veut étrangler pour lui avoir caché
que son Maître est marié ; Frontin .
lui proteste qu'il l'ignore , et que si Damon
a pris femme , ce n'est pas de son
bail. Nérine se rappellant ce que Damon
a dit , que son malheur n'est pas sans remede
, demande à Frontin , s'il ne sçait
rien de ce qui doit être dans cette Lettre
qu'il va porter à son Maître. Frontin lui
répond qu'il ne sçauroit le deviner à
moins que d'être sorcier ; il lui dit seulement
qu'un Avocat qui est en vacance
dans le voisinage , la lui a remise , en lui
disant : Voilà votre Maître en repos. Nérine
conçoit quelque esperance et finit l'Acte
par ce Vers:
Je ne sçais pas pourquoi j'ose encore esperer.
Orphise et Léonore commencent le second
Acte ; Léonore est tres - surprise des remercimens
que lui fait Orphise au sujet
de Damon ; ce dernier ne part point , et'
Orphise croit que c'est Léonore qui lui a
rendu ce bon office . Léonore lui assure
qu'elle n'y a point de part. Orphise
croyant que sa Fille ne doit ce bonheur
qu'à ses attraits , et picquée de ce que
Léonore n'a pas daigné y contribuer, par$
72 MERCURE DE FRANCE
•
ce qu'elle auroit voulu ménager le coeur
de Damon pour elle- même , lui en fait
un reproche plein d'aigreur , qui lui attire
cette réponse :
Oui , je sçais qu'une femme aime un peu trop à
plaire ;
C'est de l'âge où je suis la foiblesse ordinaire :
Dans l'arriere saison on ne fait qu'en changer ;
Du monde qui nous quitte, on cherche à se vanger
, & c.
On se croit vertueuse , en voulant le paroître ;
Tandis qu'au fond du coeur on néglige de l'être,
Qu'au contraire on se fait un plaisir inhumain
De nourrir son orgueil aux dépens du prochain,
& c.
Elle lui apprend que Damon est marié ;
Orphise lui demande malignement si
c'est avec elle , et la quitte en lui faisant
entendre qu'elle n'en doute point. Léonore
vivement picquée de ce qu'Orphise
lui a reproché , se détermine à ne plus
voir Damon, et sort pour lui aller écrire.
Nérine la suit.
Damon vient et témoigne la joye qu'il
ressent d'une heureuse nouvelle qu'il a
reçue ; il fait entendre que celle qu'il a
épousée malgré lui et malgré elle- même,
consent à la rupture d'un mariage , si fumeste
à tous les deux . Il ajoûte :
Celle
MARS 573 1734.
Se porte
Celle à qui mon malheur avoit uni ma vie ,
à dénouer la chaîne qui nous lie.
Cette maniere positive de s'exprimer a
produit quelque sorte d'obscurité ; on n'a
pas bien pû comprendre comment cette
même Leonore, qui doit redevenir Sylvie
à la fin de la Piéce, a pû donner les mains
à une rupture si opposée à son caractere ;
il est vrai que l'Auteur ajoute ensuite: Da
moins on s'en fait fort ; mais les deux
miers Vers ayant déja fait leur impression
, on n'a pas assez refléchi sur le troisieme;
et d'ailleurs, dans un autre endroit
de la Comédie, Damon dit à Léonore, en
parlant de Sylvie :
Une heureuse rupture ,
pre-
Nous dégage tous deux d'une Chaine trop dure
& c.
Reprenons le fil de la Piéce. Damon '
par une adresse tres - neuve , engage Nérine
à porter à sa Maîtresse un Billet qu'il
va écrire ; il le rapporte dans le même
temps que Léonore vient remettre le sien
entre les mains de Nérine pour le donner
à Damon. Léonore veut se retirer ; Damon
la retient et lui apprend que celle
qu'il a épousée consent à faire dissoudre
leur Hymen ; Léonore a assez de verta
FOUT
574 MERCURE DE FRANCE
-
pour refuser son consentement à cette
rupture , qu'elle croit forcée de la part
de l'Epouse ; elle laisse pourtant échapper
quelques mots , qui témoignent le regret
qu'elle a de ne pouvoir être à Da
mon ; il se jerte à ses pieds pour l'en remercier
: Orphise le surprend dans cette
attitude ; il se sauve. Orphise dit des paroles
insultantes à Léonore , qui l'obligent
à avouer qu'elle aime Damon et
qu'elle le peut , puisque son mariage est
rompu . Orphise lui dit que si Damon
est libre, elle ne l'est pas , et que Géronte
vient de lui apprendre que son Epoux
n'est pas mort ; c'est un coup de foudre
pour Orphise , qui se retire dans la noble
résolution d'aller retrouver son
Epoux , malgré son antipathie , qu'ellé
se fatte de surmonter .
Pour abréger le dernier Acte , nous
passons les premieres Scenes : Orphise
presse en vain Géronte de porter Léonore
à exécuter le projet qu'elle a noblement
formé d'aller se livrer à Sain
flore son Epoux , et de reprendre son
nom de Sylvie. Géronte n'y veut pas
consentir . Damon vient , il se plaint de
la trop austere vertu de Léonore , qui ne
veut pas donner les mains à une rupture
que sonEpoux a demandée.Léonore vient
à
MARS 1734. 575
ル
à son tour et demeure ferme, dans le dessein
que sa vertu lui a fait prendre ; sa
conversation avec Damon est aussi vertueuse
que tendre ; enfin Damon ouvre
les yeux par le portrait que Géronte fait
de l'Epoux , à qui Léonore veut se rejoindre
: Le voici.
Si c'étoit un Epoux , tel qu'eût été Damon
Passe ; mais c'en est un qui n'en a que le nom
Un jeune écervelé qui laisse sa compagne ,
Et pour libertiner , va battre la campagne ,
Que je ne connois point , car ma soeur , Dieu
merci ,
Ne consultoit
personne en tout comme en ceci ;
Un homme qui n'agit que par des Emissaires ,
Et n'ose se montrer que par ses gens d'affaires ,
Qui lorsqu'on le croit mort, revient après douze
ans ,
Pour se démarier . ...
Damon ne peut plus se méconnoître
à ces traits , il se jette aux pieds de Léonore
pour lui demander si elle n'est pas
Sylvie , comme il est Sainflore ; cela
produit
une reconnoissance des plus interessantes
, et finit la Piéce de la maniere la
plus satisfaisante et la plus heureuse.
L'art ingénieux avec lequel cette Comédie
est conduite , la maniere élegante,
simple
576 MERCURE DE FRANCE
>
sans
simple et naturelle dont elle est écrite
et sur tout les moeurs admirables
être austeres , d'après lesquelles chaque
caractere est peint de main de Maître ,
font grand plaisir aux honnêtes gens ,
qui sont agréablement amusez, interessez
attendris et même édifiez.
Au reste cette Piece est parfaitement
représentée par les sieurs Dufresne , Duchemin
et Armand , et par les Dlles Gaussin
, la Motte et Quinault.
Fermer
Résumé : LA FAUSSE ANTIPATIE, Comedie Nouvelle. Extrait.
La pièce 'La Fausse Antipathie' est une comédie écrite par M. de la Chaussée, représentée pour la première fois en mars 1734 au Théâtre de la Comédie Française. Le prologue introduit divers personnages représentant le public, tels qu'un Bourgeois, une Précieuse, un Admirateur, un Critique, un Petit-Maître, et un Homme sensé. Le Génie de la Comédie Française consulte ce public pour savoir comment lui plaire, mais les avis divergent, rendant la tâche difficile. Finalement, le Bon Sens et un homme sensé guident le Génie vers une comédie appropriée. L'intrigue principale suit Damon et Léonore, initialement mariés contre leur gré et développant une antipathie réciproque. Leurs vrais noms sont Sainflore et Sylvie, qu'ils ont changés pour des raisons de sécurité. Sainflore, après un incident, prend la fuite et change d'identité. Sylvie, croyant Sainflore mort, se retire dans un couvent. Des années plus tard, ils se rencontrent sans se reconnaître et tombent amoureux sous leurs nouvelles identités. La pièce explore les obstacles à leur amour naissant et leur reconnaissance mutuelle. Les personnages secondaires, comme Nérine et Frontin, valets de Léonore et Damon, ainsi qu'Orphise, femme de Géronte, jouent des rôles cruciaux dans le développement de l'intrigue. La pièce se conclut par la reconnaissance des héros et la dissolution de leur fausse antipathie, offrant une fin heureuse et satisfaisante. La comédie est louée pour son art ingénieux, son écriture élégante et naturelle, et ses mœurs austères, plaisant ainsi aux honnêtes gens.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
232
p. 576-579
EXTRAIT de la Fête de Diane, nouvelle Entrée, ajoûtée au Ballet des Fêtes Grecques et Romaines.
Début :
Nous ne pouvons donner une idée plus juste de ce petit Poëme, qu'en [...]
Mots clefs :
Périandre, Amour, Mélisse, Diane, Fête, Corinthe
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT de la Fête de Diane, nouvelle Entrée, ajoûtée au Ballet des Fêtes Grecques et Romaines.
EXTRAIT de la Fête de Diane ,
nouvelle Entrée , ajoûtée au Ballet des
Fêtes Grecques et Romaines .
N
Ous ne pouvons donner une idée
plus juste de ce petit Poëme , qu'en
nous servant de l'Argument que l'Auteur
y a mis à la tête : le voici.
Periandre, Roy de Corinthe , que la Grece
a compié parmi ses Sages , ent le malheur
d'inspirer à sa Mere une passion incestuen ,
se. Cette Reine coupable remplit ses voeux ,
on se supposant elle - même à son Fils pour
une prétendue Maîtresse qu'elle lui avoit
fait esperer les tenebres de la nuit conser
verent l'innocence de Periandre , en favorisant
le crime de sa Mere. Dès que ce
Prince abusé le découvrit , il le détesta ,et
sette fausse avanture fit naître sa haine
Contre
MARS. 1731 . 577
contre l'Amour. Les charmes et les verius
de Melisse, Fille du Roy d'Epidaure, triompherent
enfin d'une aversion si bien fondée ,
et soumirent Periandre aux loix de l'Amour
et de l'Hymen.
Le Théatre représente un Bois , coupé
de Ruisseaux, et voisin de la Ville de Corinthe.
Periandre expose la situation de
son coeur par ce Monologue :
Ruisseaux, qui disputez aux volages Zéphirs ,
Le soin de conserver les Fleurs et la Verdure
Coulez, que votre doux murmure ,
Réponde à mes soupirs.
Sur ces Bords , l'objet qui m'engage ,
De votre Onde , en rêvant suit quelquefois le
cours ;
Vos Eaux , de ses attraits ne gardent pas l'i
mage ;
Mais dans mon tendre coeur elle reste toujours
C'est là qu'elle reçoit un éternel hommage.
Ruisseaux , &c.
Idas, Confident de Periandre, est sürpris
de le trouver rêveur et solitaire,
tandis qu'on a déjà commencé de celebrer
la Fête de Diane , où assistent tant
de Rois et de Héros assemblez ; il lui
dit qu'il le soupçonneroit de quelque attachement
secret , s'il ne sçavoit pas la
H haine
$78 MERCURE DE FRANCE
haine éternelle qu'il a jurée à l'Amour.
Periandre lui fait l'aveu de sa défaite
par ces Vers :
Claires Ondes , votre repos
De l'indifference est l'image ;
Il ne faut qu'un moment pour agiter les flots ;
Pour agiter les coeurs en faut- il davantage
Il lui fait connoître que les charmes
de Melisse causent le trouble dont il le
voit agité ; Melisse vient ; Periandre ap
plaudit en apparence à son heureuse
insensibilité ; mais c'est pour lui faire
entendre qu'il la lui envie. Melisse est
étonnée d'un langage si contraire à celui
que Periandre lui a cent fois tenu. Periandre
rougit de ce reproche et la prie
d'oublier tout ce qu'il a pû dire contre
l'Amour ; il ajoûte que si quelqu'un doit
rendre hommage à l'Amour , c'est elle
à qui il a prodigué tant d'attraits . Voici
comment il fait cette galante déclaration .
Ah! qui doit plus aimer que vous ,
S'il faut aimer autant qu'on est aimable ?
La tendresse la plus durable
Ne peut vous acquitter d'un hommage si doux.
Ah ! qui doit plus aimer que vous ,
S'il faut aimer autant qu'on est aimable ?
Melisse
MARS. 17340. 579
Melisse toujours plus surprise , feint
de vouloir se retirer ; Periandre l'arrête ;
après un grand nombre de Vers très- délicats
, Melisse dit à Periandre qu'elle a
imité son indifference , et finit par lui
dire qu'elle imite encore son amour ; que
non- seulement elle l'aime , mais qu'elle
l'a toûjours aimé , malgré sa feinte insensibilité.
Pour autoriser la Fête galante
qui suit cette tendre Scene , Periandre
dit à Melisse , qui veut dérober son
amour aux yeux des Sujets de Diane :
Ignorez-vous que la Déesse
De l'Amour , a senti les feux ?
Nous pouvons chanter sa puissance ,
Et mêler son nom dans nos Jeux ,
Sans que Diane s'en offense .
Ces cinq Vers préviennent heureusement
la Critique qu'on auroit pû faire ,
car la Fête de Diane roule également
sur l'Amour et sur la Chasse.
Cette Entrée a paru très - bien traitée
par l'Auteur du Poëme et par celui de
la Musique. Le sieur Geliote , et la Dlle
Petitpas ont rempli les Rôles de Periandre
et de Melisse , à la satisfaction du
Public , et la beauté du Ballet a couron
né l'Ouvrage.
nouvelle Entrée , ajoûtée au Ballet des
Fêtes Grecques et Romaines .
N
Ous ne pouvons donner une idée
plus juste de ce petit Poëme , qu'en
nous servant de l'Argument que l'Auteur
y a mis à la tête : le voici.
Periandre, Roy de Corinthe , que la Grece
a compié parmi ses Sages , ent le malheur
d'inspirer à sa Mere une passion incestuen ,
se. Cette Reine coupable remplit ses voeux ,
on se supposant elle - même à son Fils pour
une prétendue Maîtresse qu'elle lui avoit
fait esperer les tenebres de la nuit conser
verent l'innocence de Periandre , en favorisant
le crime de sa Mere. Dès que ce
Prince abusé le découvrit , il le détesta ,et
sette fausse avanture fit naître sa haine
Contre
MARS. 1731 . 577
contre l'Amour. Les charmes et les verius
de Melisse, Fille du Roy d'Epidaure, triompherent
enfin d'une aversion si bien fondée ,
et soumirent Periandre aux loix de l'Amour
et de l'Hymen.
Le Théatre représente un Bois , coupé
de Ruisseaux, et voisin de la Ville de Corinthe.
Periandre expose la situation de
son coeur par ce Monologue :
Ruisseaux, qui disputez aux volages Zéphirs ,
Le soin de conserver les Fleurs et la Verdure
Coulez, que votre doux murmure ,
Réponde à mes soupirs.
Sur ces Bords , l'objet qui m'engage ,
De votre Onde , en rêvant suit quelquefois le
cours ;
Vos Eaux , de ses attraits ne gardent pas l'i
mage ;
Mais dans mon tendre coeur elle reste toujours
C'est là qu'elle reçoit un éternel hommage.
Ruisseaux , &c.
Idas, Confident de Periandre, est sürpris
de le trouver rêveur et solitaire,
tandis qu'on a déjà commencé de celebrer
la Fête de Diane , où assistent tant
de Rois et de Héros assemblez ; il lui
dit qu'il le soupçonneroit de quelque attachement
secret , s'il ne sçavoit pas la
H haine
$78 MERCURE DE FRANCE
haine éternelle qu'il a jurée à l'Amour.
Periandre lui fait l'aveu de sa défaite
par ces Vers :
Claires Ondes , votre repos
De l'indifference est l'image ;
Il ne faut qu'un moment pour agiter les flots ;
Pour agiter les coeurs en faut- il davantage
Il lui fait connoître que les charmes
de Melisse causent le trouble dont il le
voit agité ; Melisse vient ; Periandre ap
plaudit en apparence à son heureuse
insensibilité ; mais c'est pour lui faire
entendre qu'il la lui envie. Melisse est
étonnée d'un langage si contraire à celui
que Periandre lui a cent fois tenu. Periandre
rougit de ce reproche et la prie
d'oublier tout ce qu'il a pû dire contre
l'Amour ; il ajoûte que si quelqu'un doit
rendre hommage à l'Amour , c'est elle
à qui il a prodigué tant d'attraits . Voici
comment il fait cette galante déclaration .
Ah! qui doit plus aimer que vous ,
S'il faut aimer autant qu'on est aimable ?
La tendresse la plus durable
Ne peut vous acquitter d'un hommage si doux.
Ah ! qui doit plus aimer que vous ,
S'il faut aimer autant qu'on est aimable ?
Melisse
MARS. 17340. 579
Melisse toujours plus surprise , feint
de vouloir se retirer ; Periandre l'arrête ;
après un grand nombre de Vers très- délicats
, Melisse dit à Periandre qu'elle a
imité son indifference , et finit par lui
dire qu'elle imite encore son amour ; que
non- seulement elle l'aime , mais qu'elle
l'a toûjours aimé , malgré sa feinte insensibilité.
Pour autoriser la Fête galante
qui suit cette tendre Scene , Periandre
dit à Melisse , qui veut dérober son
amour aux yeux des Sujets de Diane :
Ignorez-vous que la Déesse
De l'Amour , a senti les feux ?
Nous pouvons chanter sa puissance ,
Et mêler son nom dans nos Jeux ,
Sans que Diane s'en offense .
Ces cinq Vers préviennent heureusement
la Critique qu'on auroit pû faire ,
car la Fête de Diane roule également
sur l'Amour et sur la Chasse.
Cette Entrée a paru très - bien traitée
par l'Auteur du Poëme et par celui de
la Musique. Le sieur Geliote , et la Dlle
Petitpas ont rempli les Rôles de Periandre
et de Melisse , à la satisfaction du
Public , et la beauté du Ballet a couron
né l'Ouvrage.
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Résumé : EXTRAIT de la Fête de Diane, nouvelle Entrée, ajoûtée au Ballet des Fêtes Grecques et Romaines.
L'extrait de la 'Fête de Diane' relate l'histoire de Périandre, roi de Corinthe, qui, après avoir découvert l'inceste de sa mère, avait juré haine à l'amour. Cependant, il finit par succomber aux charmes de Mélisse, fille du roi d'Épidaure, et se soumet aux lois de l'amour et du mariage. La pièce se déroule dans un bois près de Corinthe, où Périandre exprime ses sentiments dans un monologue. Son confident, Idas, le trouve rêveur et solitaire, contrastant avec la fête de Diane en cours. Périandre avoue à Idas que Mélisse est la cause de son trouble. Lorsqu'elle arrive, Périandre feint l'indifférence mais finit par déclarer son amour. Mélisse, surprise, révèle qu'elle l'aime également. Périandre justifie la célébration de l'amour lors de la fête de Diane, car Diane elle-même a ressenti les feux de l'amour. La pièce est bien accueillie par le public, avec des performances remarquées de Geliote et de la demoiselle Petitpas dans les rôles principaux.
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233
p. 580-581
« Le 11. Mars, l'Académie Royale de Musique remit au Théatre l'Opera de [...] »
Début :
Le 11. Mars, l'Académie Royale de Musique remit au Théatre l'Opera de [...]
Mots clefs :
Musique, Théâtre, Opéra, Pièce, Académie royale de musique, Pompeo Aldrovandi, Théâtre de la paix
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texteReconnaissance textuelle : « Le 11. Mars, l'Académie Royale de Musique remit au Théatre l'Opera de [...] »
Le 11. Mars , l'Académie Royale de
Musique remit au Théatre l'Opera' de
Pirithens , dont le Poëme est de M. de
la Serre , et la Musique de M. Mouret.
Cette Piece , qui a été reçûë favorablement
du Public , avoit été donnée dans
sa nouveauté en Janvier 1723. Les principaux
Kôles sont très- bien tendus par
les Dlles Antier et le Maure , et par les
sieurs Tribou , Chassé et Dun ; les Ballets
toujours de la composition du sieur Blondi,
sont très bien caracterisez ; la Dlle Camargo
, et les sieurs Dupré , Dumoulin
Javilliers , y soutiennent très - bien leur
réputation . Nous n'entrerons dans aucun
détail au sujet de cette Piece , en
ayant donné un Extrait fort au long
dans le Mercure de Fevrier 1723. pa
ge 321.
Il paroît une seconde Edition de la
Musique de cet Opera , imprimée chez
Balard , avec des changemens et des augmentations
considerables .
On apprend d'Italie , que M. Aldovrandi
, Gouverneur de Rome , y a fait
publier une nouvelle Ordonnance pour
faire observer une exacte Police dans les
Spectacles ; que le 7. du mois dernier ,
ony fit l'ouverture du Théatre de la Paix
par
"
MARS. 1734 5.81
le
par la Représentation d'une Piece nouvelle
, intitulée L'ERODISHE , et que
16. il y eut un Opera pour la premiere
fois de cette année sur le Théatre de .
Tordinone.
Musique remit au Théatre l'Opera' de
Pirithens , dont le Poëme est de M. de
la Serre , et la Musique de M. Mouret.
Cette Piece , qui a été reçûë favorablement
du Public , avoit été donnée dans
sa nouveauté en Janvier 1723. Les principaux
Kôles sont très- bien tendus par
les Dlles Antier et le Maure , et par les
sieurs Tribou , Chassé et Dun ; les Ballets
toujours de la composition du sieur Blondi,
sont très bien caracterisez ; la Dlle Camargo
, et les sieurs Dupré , Dumoulin
Javilliers , y soutiennent très - bien leur
réputation . Nous n'entrerons dans aucun
détail au sujet de cette Piece , en
ayant donné un Extrait fort au long
dans le Mercure de Fevrier 1723. pa
ge 321.
Il paroît une seconde Edition de la
Musique de cet Opera , imprimée chez
Balard , avec des changemens et des augmentations
considerables .
On apprend d'Italie , que M. Aldovrandi
, Gouverneur de Rome , y a fait
publier une nouvelle Ordonnance pour
faire observer une exacte Police dans les
Spectacles ; que le 7. du mois dernier ,
ony fit l'ouverture du Théatre de la Paix
par
"
MARS. 1734 5.81
le
par la Représentation d'une Piece nouvelle
, intitulée L'ERODISHE , et que
16. il y eut un Opera pour la premiere
fois de cette année sur le Théatre de .
Tordinone.
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Résumé : « Le 11. Mars, l'Académie Royale de Musique remit au Théatre l'Opera de [...] »
Le 11 mars, l'Académie Royale de Musique a présenté l'opéra 'Pirithoüs' au Théâtre de l'Opéra, avec un poème de M. de la Serre et une musique de M. Mouret. Cet opéra, déjà acclamé lors de sa première représentation en janvier 1723, met en vedette les demoiselles Antier et le Maure, ainsi que les sieurs Tribou, Chassé et Dun. Les ballets, chorégraphiés par le sieur Blondi, sont bien exécutés par la demoiselle Camargo et les sieurs Dupré, Dumoulin et Javilliers. Une seconde édition de la musique, imprimée chez Balard, inclut des modifications et des ajouts significatifs. En Italie, M. Aldovrandi, Gouverneur de Rome, a publié une nouvelle ordonnance pour renforcer la sécurité dans les spectacles. Le Théâtre de la Paix a ouvert le 7 du mois précédent avec 'L'Erodishe', et le 16, un opéra a été présenté pour la première fois de l'année au Théâtre Tordinone.
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234
p. 581
« Les jeunes gens de l'un et l'autre Sexe, qui représentent des Comédies à l'Arsenal, [...] »
Début :
Les jeunes gens de l'un et l'autre Sexe, qui représentent des Comédies à l'Arsenal, [...]
Mots clefs :
Duchesse du Maine, Théâtre de l'Arsenal, Représentation
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Les jeunes gens de l'un et l'autre Sexe, qui représentent des Comédies à l'Arsenal, [...] »
Les jeunes gens de l'un et l'autre Sexe,
qui représentent des Comédies à l'Arsenal
, dont nous avons parlé dans le
dernier Mercure , donnerent le 28. Février
une Représentation de l'Ecole des
Femmes , suivie de la Parisienne , en présence
de S. A. S. Madame la Duchesse
du Maine ; ces deux Pieces furent extrémement
applaudies , et cette petite
Societé a encore augmenté dans le genre
Comique , la réputation qu'elle s'est acquise
dans le sérieux ; quelques- uns de
ces Sujets , dont les talents sont très- goû
tez , mériteroient bien en effet d'être.
nommez et plus connus .
M. de Morand , Auteur du Prologue
dont nous avons donné l'Extrait , et qui
avoit affecté de ne rien dire de Mademoiselle
du Maine , prononça avant la
Représentation de la Coniédie , les Vers
suivans , qui furent extrémement applaudis,
et qui lui attirerent de nouvelles
marques de bonté de Madame et de Mademoiselle
du Maine .
qui représentent des Comédies à l'Arsenal
, dont nous avons parlé dans le
dernier Mercure , donnerent le 28. Février
une Représentation de l'Ecole des
Femmes , suivie de la Parisienne , en présence
de S. A. S. Madame la Duchesse
du Maine ; ces deux Pieces furent extrémement
applaudies , et cette petite
Societé a encore augmenté dans le genre
Comique , la réputation qu'elle s'est acquise
dans le sérieux ; quelques- uns de
ces Sujets , dont les talents sont très- goû
tez , mériteroient bien en effet d'être.
nommez et plus connus .
M. de Morand , Auteur du Prologue
dont nous avons donné l'Extrait , et qui
avoit affecté de ne rien dire de Mademoiselle
du Maine , prononça avant la
Représentation de la Coniédie , les Vers
suivans , qui furent extrémement applaudis,
et qui lui attirerent de nouvelles
marques de bonté de Madame et de Mademoiselle
du Maine .
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Résumé : « Les jeunes gens de l'un et l'autre Sexe, qui représentent des Comédies à l'Arsenal, [...] »
Le 28 février, des jeunes ont joué 'L'École des Femmes' et 'La Parisienne' à l'Arsenal devant Madame la Duchesse du Maine. Les pièces ont été très applaudies, confirmant le talent de cette société. M. de Morand, auteur du prologue, a reçu des éloges de Madame et Mademoiselle du Maine pour ses vers.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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235
p. 582-585
JUGEMENT du veritable Apollon sur le Prologue représenté le 21. Février devant S. A. S. Madame la Duchesse du Maine. A S. A. S. Mademoiselle du Maine.
Début :
Flatté de l'accueil favorable, [...]
Mots clefs :
Princesse, Apollon, Cour, Vers, Duchesse du Maine, Mademoiselle du Maine
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : JUGEMENT du veritable Apollon sur le Prologue représenté le 21. Février devant S. A. S. Madame la Duchesse du Maine. A S. A. S. Mademoiselle du Maine.
JUGEMENT du veritable Apollon
sur le Prologue représenté le 21. Février
devant S. A. S. Madame la Duchesse
du Maine.
A S. A. S. Mademoiselle du Maine .
FLatté de l'accueil favorable ,
Que l'autre jour mon Apollon
Reçut dans la Cour respectable ,
Dont le bon goût et la décision
Marque à chacun son rang dans le sacré Vallon ,
Même auprès du Dieu du Parnasse
Je croïois hardiment pouvoir prendre ma place ,
Et je courois m'y présenter.
Mais ce Dieu m'arrêtant , que prétend ton audace
?
Me dit - il , et par où penses - tu mériter
L'immortel avantage
D'habiter ce brillant séjour ?
D'une Minerve et de sa Cour ,
N'en viens-je pas d'obtenir le suffrage ?
Lui dis -je ; et voilà mon Ouvrage.
Il le prend , il le lit ; je suis assez content ,
Répond-il , du dessein , des tours et des pensées,
Qui ne sont point embarrassées ;
L'Allégorie est noble et le stile élegant.
Mais j'apperçois une bévuë ,
Qui
MARS .
583
1734.
Qui marque peu de jugement ,
Et qui de cette Cour aura frappé la vûë.
Tu parles assez dignement ,
J'en conviens , de la Mere ,
Et des Fils et du Pere ;
Mais quel est ton aveuglement !
Tu ne dis rien d'une Princesse >
Dont les appas , les vertus , la sagesse ,
Retracent si fidellement
Les hautes qualitez de sa Maison illustre ,
Et même en relevent le lustre.
Un oubli si grossier te chasse de ces Lieux ,
Et ne sçauroit trouver grace devant mes yeux.
Si par oubli , Seigneur , j'avois commis ce crime,
Répliquai- je en tremblant , confus , désesperé ,
Ton courroux seroit légitime.
Dès long- temps j'avois admiré
Tous les glorieux avantages ,
Qui pour cette Princesse exigent nos hommages ;
Même en secret je m'étois préparé
A demander bien-tôt ton assistance ,
Pour pouvoir mieux les exalter ;
Pour elle seule , un jour je prétendois chanter.
Je dois le dire encor , cet injuste silence
Ne vient ici que de mon ignorance ;
Je fus embarassé ; la Déesse des Arts
Nayant jamais eu de Famille ,
Je n'osai dans mes Vers lui donner une fille .
Hi
Le
584 MERCURE DE FRANCE
Le scrupule est plaisant ! reprend- il : le Dien
Mars
Eut - il jamais d'Epouse ?
Tu viens pourtant de parler de ses Fils.
Les Héros à ses Loix soumis ,
Dont la valeur , de gloire et de grandeur jalouse,
Asservit de fiers ennemis ,
De ce terrible Dieu n'ont - ils pas pris naissance ?
Lui dis - je ; oui , répond - il ; ainsi les grands
esprits
Qui chérissent les Arts , les Talents , la Science ,
Et par qui dans tous lieux on les voit triomphants
,
De Minerve sont les Enfants :
Et tes excuses sont frivoles.
Mais sans tant de détours , tu pouvois aisément,
Et même en très- peu de paroles ,
Tourner ton Compliment :
Dès l'abord Melpomene même
Auroit pû ... je t'entens ; tu viens de m'inspires
Par quel heureux moyen je pourrai réparer
Mon imprudence extrême ! .... *
Je crains pourtant,dit -il , que ce qu'en ces instants ,
Tu pourrois ajoûter à ton premier Ouvrage ,
Ne paroissant à contretemps ,
Ne te soit d'aucun avantage.
* C'est en consequence de cet ordre d'Apollon
que les trois Vers qui regardent cette Princesse ont
été ajoûtez à la premiere Scene du Prologue,
Mais
MAR S. 1734.
585
Mais n'importe , fais tes efforts ;
Que ton zele s'empresse
A fléchir la Princesse
Par de nouveaux accords ;
En un mot , obtiens- en ta grace ,
Ou ne parois jamais sur le Parnasse.
Ainsi , Princesse , dans tes mains ,
Tu tiens aujourd'hui mes destins ,
Prononce mon Arrêt ; mais prends soin de ma
gloire ;
Place-moi , tu le peux , au Temple de Menioire ,
Songe que désormais mes Chants harmonieux
Publieront tes bienfaits et ta gloire en tous lieux.
Que dis-je ? quelle erreur ! quel fol orgueil m'anime
!
Ma Lire est - elle assez sublime ,
Pour chanter un sujet et si noble et si grand !
Je m'allarmois à tort ; il t'est indifferent ,
Que j'ose de ton nom ou parler ou le taire :
Pour avoir pû , Princesse , te déplaire ,
Il faudroit que mes Vers fussent d'un autre prix;
Que l'immortalité devenant leur salaire ,
Fat assurée à mes Ecrits.
sur le Prologue représenté le 21. Février
devant S. A. S. Madame la Duchesse
du Maine.
A S. A. S. Mademoiselle du Maine .
FLatté de l'accueil favorable ,
Que l'autre jour mon Apollon
Reçut dans la Cour respectable ,
Dont le bon goût et la décision
Marque à chacun son rang dans le sacré Vallon ,
Même auprès du Dieu du Parnasse
Je croïois hardiment pouvoir prendre ma place ,
Et je courois m'y présenter.
Mais ce Dieu m'arrêtant , que prétend ton audace
?
Me dit - il , et par où penses - tu mériter
L'immortel avantage
D'habiter ce brillant séjour ?
D'une Minerve et de sa Cour ,
N'en viens-je pas d'obtenir le suffrage ?
Lui dis -je ; et voilà mon Ouvrage.
Il le prend , il le lit ; je suis assez content ,
Répond-il , du dessein , des tours et des pensées,
Qui ne sont point embarrassées ;
L'Allégorie est noble et le stile élegant.
Mais j'apperçois une bévuë ,
Qui
MARS .
583
1734.
Qui marque peu de jugement ,
Et qui de cette Cour aura frappé la vûë.
Tu parles assez dignement ,
J'en conviens , de la Mere ,
Et des Fils et du Pere ;
Mais quel est ton aveuglement !
Tu ne dis rien d'une Princesse >
Dont les appas , les vertus , la sagesse ,
Retracent si fidellement
Les hautes qualitez de sa Maison illustre ,
Et même en relevent le lustre.
Un oubli si grossier te chasse de ces Lieux ,
Et ne sçauroit trouver grace devant mes yeux.
Si par oubli , Seigneur , j'avois commis ce crime,
Répliquai- je en tremblant , confus , désesperé ,
Ton courroux seroit légitime.
Dès long- temps j'avois admiré
Tous les glorieux avantages ,
Qui pour cette Princesse exigent nos hommages ;
Même en secret je m'étois préparé
A demander bien-tôt ton assistance ,
Pour pouvoir mieux les exalter ;
Pour elle seule , un jour je prétendois chanter.
Je dois le dire encor , cet injuste silence
Ne vient ici que de mon ignorance ;
Je fus embarassé ; la Déesse des Arts
Nayant jamais eu de Famille ,
Je n'osai dans mes Vers lui donner une fille .
Hi
Le
584 MERCURE DE FRANCE
Le scrupule est plaisant ! reprend- il : le Dien
Mars
Eut - il jamais d'Epouse ?
Tu viens pourtant de parler de ses Fils.
Les Héros à ses Loix soumis ,
Dont la valeur , de gloire et de grandeur jalouse,
Asservit de fiers ennemis ,
De ce terrible Dieu n'ont - ils pas pris naissance ?
Lui dis - je ; oui , répond - il ; ainsi les grands
esprits
Qui chérissent les Arts , les Talents , la Science ,
Et par qui dans tous lieux on les voit triomphants
,
De Minerve sont les Enfants :
Et tes excuses sont frivoles.
Mais sans tant de détours , tu pouvois aisément,
Et même en très- peu de paroles ,
Tourner ton Compliment :
Dès l'abord Melpomene même
Auroit pû ... je t'entens ; tu viens de m'inspires
Par quel heureux moyen je pourrai réparer
Mon imprudence extrême ! .... *
Je crains pourtant,dit -il , que ce qu'en ces instants ,
Tu pourrois ajoûter à ton premier Ouvrage ,
Ne paroissant à contretemps ,
Ne te soit d'aucun avantage.
* C'est en consequence de cet ordre d'Apollon
que les trois Vers qui regardent cette Princesse ont
été ajoûtez à la premiere Scene du Prologue,
Mais
MAR S. 1734.
585
Mais n'importe , fais tes efforts ;
Que ton zele s'empresse
A fléchir la Princesse
Par de nouveaux accords ;
En un mot , obtiens- en ta grace ,
Ou ne parois jamais sur le Parnasse.
Ainsi , Princesse , dans tes mains ,
Tu tiens aujourd'hui mes destins ,
Prononce mon Arrêt ; mais prends soin de ma
gloire ;
Place-moi , tu le peux , au Temple de Menioire ,
Songe que désormais mes Chants harmonieux
Publieront tes bienfaits et ta gloire en tous lieux.
Que dis-je ? quelle erreur ! quel fol orgueil m'anime
!
Ma Lire est - elle assez sublime ,
Pour chanter un sujet et si noble et si grand !
Je m'allarmois à tort ; il t'est indifferent ,
Que j'ose de ton nom ou parler ou le taire :
Pour avoir pû , Princesse , te déplaire ,
Il faudroit que mes Vers fussent d'un autre prix;
Que l'immortalité devenant leur salaire ,
Fat assurée à mes Ecrits.
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Résumé : JUGEMENT du veritable Apollon sur le Prologue représenté le 21. Février devant S. A. S. Madame la Duchesse du Maine. A S. A. S. Mademoiselle du Maine.
Le texte relate un jugement d'Apollon concernant un prologue représenté le 21 février devant Madame la Duchesse du Maine et Mademoiselle du Maine. L'auteur du prologue, ayant reçu un accueil favorable, espérait obtenir une place auprès du Dieu du Parnasse. Apollon lui demande comment il mérite cet honneur. L'auteur mentionne avoir obtenu le suffrage d'une Minerve et de sa cour. Apollon examine l'ouvrage, le trouvant bien conçu mais notant une erreur grave : l'oubli de mentionner une princesse dont les vertus et la sagesse sont remarquables. L'auteur, confus, explique que cet oubli est dû à son ignorance. Apollon rétorque que même Mars, sans épouse, a des fils et des héros soumis à ses lois. Il conseille à l'auteur de réparer son erreur en ajoutant des vers en l'honneur de la princesse et menace de le bannir du Parnasse s'il ne parvient pas à obtenir la grâce de la princesse. L'auteur reconnaît son orgueil et affirme que ses vers ne peuvent déplaire à la princesse, sauf s'ils étaient dignes d'immortalité.
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236
p. 756-758
Décoration de l'Opera de Jephté, [titre d'après la table]
Début :
Le 28. Mars, l'Académie Royale de Musique remit au Théatre, à la [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique, Arbres, Décoration, Théâtre, Architecture, Jardin
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texteReconnaissance textuelle : Décoration de l'Opera de Jephté, [titre d'après la table]
E 28. Mars , l'Académie Royale de
grande satisfaction du Public , l'Opera
de Jephté , dont toutes les Représenta
tions ont reçû de grands applaudissemens
. Nous renvoyons le Lecteur pour
les paroles et la Musique de cette Tragédie
, à ce que nous en avons dit au
- mois de Mars 1733. page 564 et en
Mars 1732. page 571. Mais une nou
velle Décoration , sur les Desseins du
Chevalier Servandoni , faite pour
pera
AVRIL. 1734. 757
pera de Pirithous , et qui paroît au quatriéme
Acte de Jephté , mérite bien que
nous en donnions une idée à nos Lecteurs.
Cette Décoration n'occupe que la moitié
du Théatre dans le fond. Elle représente
un Jardin enchanté , qui dans
ce petit espace est vû obliquement et
paroît extrémement vaste .
On y voit d'abord un grand Morceau
d'Architecture rustique , au milieu duquel
est un Grouppe de figure gigantesque
, représentant Hercule , dans le
moment qu'il étouffe Anthée. de la bouche
de ce dernier sort un grand Jet
d'eau. Au-dessous de ce Grouppe on voit
des Lions , qui semblent sortir de leurs
Antres , et qui vomissent une grande
quantité d'eau que plusieurs Bassins reçoivent
; ces eaux sont si bien feintes pardes
gases qu'on fait mouvoir par le moyen de
plusieurs roues,qu'elles paroissent vrayes.
Cette Fontaine est placée au milieu
d'une grande Allée d'arbres , à côté de
laquelle s'éleve une haute Charmille ,
taillée en Pilastres et en Arcades . Entre
la Charmille et les Arbres , ce qui forme
une seconde Allée , on voit des Piédestaux
avec des figures imitant le Marbre
blanc. Le fond est agréablement varié
par
758 MERCURE DE FRANCE
par plusieurs Terrasses et Jets d'eau , des
Allées et des Arbres de differentes especes.
> Au bout de la derniere Terrasse , sur
une hauteur à laquelle on arrive par une
montée en fer à cheval , ornée d'Architecture
, de Vases , de Statues , & c. on
apperçoit un grand Edifice rond , percé
à jour par des Arcades et des Colomnes ,
entre et au milieu desquelles s'élevent
plusieurs Arbres.
Ce Jardin , par l'art de la Perspective
et la dégradation des couleurs , fait paroître
le fond du Théatre plus grand
qu'on ne l'a encore vû. Cette Décoration
a été fort goûtée et fort applaudie.
grande satisfaction du Public , l'Opera
de Jephté , dont toutes les Représenta
tions ont reçû de grands applaudissemens
. Nous renvoyons le Lecteur pour
les paroles et la Musique de cette Tragédie
, à ce que nous en avons dit au
- mois de Mars 1733. page 564 et en
Mars 1732. page 571. Mais une nou
velle Décoration , sur les Desseins du
Chevalier Servandoni , faite pour
pera
AVRIL. 1734. 757
pera de Pirithous , et qui paroît au quatriéme
Acte de Jephté , mérite bien que
nous en donnions une idée à nos Lecteurs.
Cette Décoration n'occupe que la moitié
du Théatre dans le fond. Elle représente
un Jardin enchanté , qui dans
ce petit espace est vû obliquement et
paroît extrémement vaste .
On y voit d'abord un grand Morceau
d'Architecture rustique , au milieu duquel
est un Grouppe de figure gigantesque
, représentant Hercule , dans le
moment qu'il étouffe Anthée. de la bouche
de ce dernier sort un grand Jet
d'eau. Au-dessous de ce Grouppe on voit
des Lions , qui semblent sortir de leurs
Antres , et qui vomissent une grande
quantité d'eau que plusieurs Bassins reçoivent
; ces eaux sont si bien feintes pardes
gases qu'on fait mouvoir par le moyen de
plusieurs roues,qu'elles paroissent vrayes.
Cette Fontaine est placée au milieu
d'une grande Allée d'arbres , à côté de
laquelle s'éleve une haute Charmille ,
taillée en Pilastres et en Arcades . Entre
la Charmille et les Arbres , ce qui forme
une seconde Allée , on voit des Piédestaux
avec des figures imitant le Marbre
blanc. Le fond est agréablement varié
par
758 MERCURE DE FRANCE
par plusieurs Terrasses et Jets d'eau , des
Allées et des Arbres de differentes especes.
> Au bout de la derniere Terrasse , sur
une hauteur à laquelle on arrive par une
montée en fer à cheval , ornée d'Architecture
, de Vases , de Statues , & c. on
apperçoit un grand Edifice rond , percé
à jour par des Arcades et des Colomnes ,
entre et au milieu desquelles s'élevent
plusieurs Arbres.
Ce Jardin , par l'art de la Perspective
et la dégradation des couleurs , fait paroître
le fond du Théatre plus grand
qu'on ne l'a encore vû. Cette Décoration
a été fort goûtée et fort applaudie.
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Résumé : Décoration de l'Opera de Jephté, [titre d'après la table]
En mars 1734, l'Académie Royale a présenté l'opéra de Jephté, acclamé par le public. La décoration du quatrième acte, réalisée par le Chevalier Servandoni, a particulièrement retenu l'attention. Elle occupe la moitié du théâtre et représente un jardin enchanté, conçu pour sembler extrêmement vaste. Au centre, une architecture rustique montre Hercule étouffant Anthée, dont la bouche laisse jaillir un jet d'eau. Des lions, sortant de leurs antres, vomissent également de l'eau, recueillie dans des bassins. Cette fontaine est placée dans une allée d'arbres, à côté d'une haute charmille taillée en pilastres et arcades. Entre la charmille et les arbres, des piédestaux avec des figures imitant le marbre blanc sont visibles. Le fond est varié par des terrasses, des jets d'eau, des allées et des arbres de différentes espèces. Au bout de la dernière terrasse, un grand édifice rond percé d'arcades et de colonnes s'élève, entre lesquelles se dressent plusieurs arbres. Grâce à la perspective et à la dégradation des couleurs, le fond du théâtre semble plus grand qu'à l'accoutumée. Cette décoration a été très appréciée et applaudie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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237
p. 758-759
« Le 5. Avril on donna par extraordinaire, la Pastorale d'Issé, pour la Capitation [...] »
Début :
Le 5. Avril on donna par extraordinaire, la Pastorale d'Issé, pour la Capitation [...]
Mots clefs :
Musique, Capitation des acteurs
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texteReconnaissance textuelle : « Le 5. Avril on donna par extraordinaire, la Pastorale d'Issé, pour la Capitation [...] »
Le 5. Avril on donna par extraordinaire
, la Pastorale d'Issé , pour la Capitation
des Acteurs , comme cela se pratique
toutes les années ; on représenta
la même Piece le 19. pour la clôture du
Théatre , elle fut suivie d'une Cantate
de M. de Blamont , Sur - Intendant de la
Musique du Roy , chantée par la Dlle Pe
titpas , et d'un Air Italien , chanté par
le sieur Jeliot , ces deux Morceaux de
Musique furent très- applaudis .
Le 16. Mars les Comédiens François représenerent
à Versailles , le Complaisant et l'Impromptu
de Campagne.
Le
AVRIL. 1734.
759
Le 18. Andromaque et le Baron de la Crasse.
Le 23. la Fausse Antipathie, la Critique et l'Usurier
Gentilhomme.
Le 6 , Avril , le Philosophe Marié et la Parinne
.
Le 8. Heraclius et le Port de Mer.
, la Pastorale d'Issé , pour la Capitation
des Acteurs , comme cela se pratique
toutes les années ; on représenta
la même Piece le 19. pour la clôture du
Théatre , elle fut suivie d'une Cantate
de M. de Blamont , Sur - Intendant de la
Musique du Roy , chantée par la Dlle Pe
titpas , et d'un Air Italien , chanté par
le sieur Jeliot , ces deux Morceaux de
Musique furent très- applaudis .
Le 16. Mars les Comédiens François représenerent
à Versailles , le Complaisant et l'Impromptu
de Campagne.
Le
AVRIL. 1734.
759
Le 18. Andromaque et le Baron de la Crasse.
Le 23. la Fausse Antipathie, la Critique et l'Usurier
Gentilhomme.
Le 6 , Avril , le Philosophe Marié et la Parinne
.
Le 8. Heraclius et le Port de Mer.
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Résumé : « Le 5. Avril on donna par extraordinaire, la Pastorale d'Issé, pour la Capitation [...] »
En avril 1734, plusieurs représentations théâtrales ont eu lieu. Le 5 avril, la Pastorale d'Issé a été jouée pour la capitation des acteurs. Le 19 avril, la même pièce a clôturé la saison, suivie d'une cantate et d'un air italien applaudis. Les Comédiens Français ont joué diverses pièces à Versailles et à Paris, notamment 'Andromaque', 'Le Baron de la Crasse' et 'Héraclius'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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238
p. 759-760
Compliment, &c. [titre d'après la table]
Début :
Le Samedi 10. de ce mois, on fie [sic] la clôture du Théatre François par la représentation de la [...]
Mots clefs :
Théâtre-Français, Tragédie, Dangeville
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texteReconnaissance textuelle : Compliment, &c. [titre d'après la table]
Le Samedi 10. de ce mois , on fie la clôture du
Théatre François par la représentation de la
Tragédie de Zaire , de M. de Voltaire , au lieu
de la Tragédie sainte de Polyeucte , de P. Corneille
, qui étoit en possession depuis très- longtemps
, d'être donnée au public ce jour- là.
Le sieur Dangeville , le jeune , prononça ce
Compliment entre les deux Pieces , et il fut fort
applaudi .
MESSIEURS ,
Un usage fondé sur notre juste reconnoissance
nous engage à vous faire aujourd'hui des remerci..
mens; nous vous en devons toujours, et nous sommes
heureux quand la dette se trouve forte. Je voudrois
pouvoir acquitter dignement celle qui vient d'écheoir,
mais je ne me sens pas l'éloquence qu'exige un
pareil emploi , ainsi , Messieurs , loin de vous entretenir
de la solidité de votre jugement , de la délicatesse
de votre goût , et de l'embarras des Auteurs
que votre attention doit souvent plus intimider que
vos distractions , je me bornerai à vous demander
pour moi même votre indulgence . Songez, Messieurs
, qu'elle est aussi nécessaire à la perfection de
vos plaisirs , qu'à l'avancement des Acteurs qui
l'implorent , et que ce n'est qu'en excusant leurs
fautes que vous pouvez les en corriger ; songezque
pour pouvoir vous amuser , ou du moins ne vous
PAS
763 MERCURE DE FRANCE
pas ennuyer , il ne faut pas arriver sur la Scêne
avec la triste certitude de n'y trouver que des marques
effrayantes de votre aversion .
Ah! Messieurs . si l'envle extrême de vous plaire
donnoit les talens qui obtiennent vos suffrages , et
si le zele étoit la mesure du mérite , je serois le
mieux partagé du Théatre François. Daignez ,
Messieurs , daignez non- seulement nous guider
mais encore nous soutenir dans une carriere épi→
neuse et que vous seuls pouvez défricher en notre
faveur. Nous tâcherons toujours de vous satisfaire
par le choix de nos Pieces . Les chef- d'oeuvres sont
rares , mais ils ne sont pas impossibles . La source
des Zaïres, des Gustaves, des Adelaïdes , des Pelopées
, et des Glorieux , n'est pae tarie ; le Complai
sant vous a procuré une double satisfaction , en
vous rendant une Piece et un Acteur que vous estimez
; nous avons eu même depuis peu le bonheur
de contenter la justesse de votre discernement dans
la Fausse Antipathie; le Comique vous en a parû
noble et instructif, vous avez été ravis d'accorder
votre Approbation à un génie qui n'a point tâté de la
contagion du style précieux et du brillant superficiel.
Continuez , Messieurs , continuez , d'encourager
par vos applaudissemens les Poëtes qui osent être naturels
et judicieux , ce n'est pas vous recommander
tout le Parnasse.
Continuez aussi de nous honorer de vos leçons ,
mais ne les séparez pas de vos bontez ; quant à moi,
Messieurs , je sçai de reste que vous êtes éclairez ,
voudriez-vous bien me prouver que vous êtes indulgents.
Théatre François par la représentation de la
Tragédie de Zaire , de M. de Voltaire , au lieu
de la Tragédie sainte de Polyeucte , de P. Corneille
, qui étoit en possession depuis très- longtemps
, d'être donnée au public ce jour- là.
Le sieur Dangeville , le jeune , prononça ce
Compliment entre les deux Pieces , et il fut fort
applaudi .
MESSIEURS ,
Un usage fondé sur notre juste reconnoissance
nous engage à vous faire aujourd'hui des remerci..
mens; nous vous en devons toujours, et nous sommes
heureux quand la dette se trouve forte. Je voudrois
pouvoir acquitter dignement celle qui vient d'écheoir,
mais je ne me sens pas l'éloquence qu'exige un
pareil emploi , ainsi , Messieurs , loin de vous entretenir
de la solidité de votre jugement , de la délicatesse
de votre goût , et de l'embarras des Auteurs
que votre attention doit souvent plus intimider que
vos distractions , je me bornerai à vous demander
pour moi même votre indulgence . Songez, Messieurs
, qu'elle est aussi nécessaire à la perfection de
vos plaisirs , qu'à l'avancement des Acteurs qui
l'implorent , et que ce n'est qu'en excusant leurs
fautes que vous pouvez les en corriger ; songezque
pour pouvoir vous amuser , ou du moins ne vous
PAS
763 MERCURE DE FRANCE
pas ennuyer , il ne faut pas arriver sur la Scêne
avec la triste certitude de n'y trouver que des marques
effrayantes de votre aversion .
Ah! Messieurs . si l'envle extrême de vous plaire
donnoit les talens qui obtiennent vos suffrages , et
si le zele étoit la mesure du mérite , je serois le
mieux partagé du Théatre François. Daignez ,
Messieurs , daignez non- seulement nous guider
mais encore nous soutenir dans une carriere épi→
neuse et que vous seuls pouvez défricher en notre
faveur. Nous tâcherons toujours de vous satisfaire
par le choix de nos Pieces . Les chef- d'oeuvres sont
rares , mais ils ne sont pas impossibles . La source
des Zaïres, des Gustaves, des Adelaïdes , des Pelopées
, et des Glorieux , n'est pae tarie ; le Complai
sant vous a procuré une double satisfaction , en
vous rendant une Piece et un Acteur que vous estimez
; nous avons eu même depuis peu le bonheur
de contenter la justesse de votre discernement dans
la Fausse Antipathie; le Comique vous en a parû
noble et instructif, vous avez été ravis d'accorder
votre Approbation à un génie qui n'a point tâté de la
contagion du style précieux et du brillant superficiel.
Continuez , Messieurs , continuez , d'encourager
par vos applaudissemens les Poëtes qui osent être naturels
et judicieux , ce n'est pas vous recommander
tout le Parnasse.
Continuez aussi de nous honorer de vos leçons ,
mais ne les séparez pas de vos bontez ; quant à moi,
Messieurs , je sçai de reste que vous êtes éclairez ,
voudriez-vous bien me prouver que vous êtes indulgents.
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Résumé : Compliment, &c. [titre d'après la table]
Le 10 du mois, la clôture du Théâtre François a été marquée par la représentation de la tragédie 'Zaire' de Voltaire, remplaçant 'Polyeucte' de Corneille. Entre les deux pièces, le jeune Dangeville a prononcé un compliment acclamé par le public. Dans son discours, Dangeville a exprimé sa gratitude envers le public et a reconnu la difficulté de répondre à leurs attentes. Il a souligné l'importance de l'indulgence du public pour permettre aux acteurs de s'améliorer et de les encourager à éviter les erreurs. Il a mentionné que le désir de plaire au public est essentiel, mais que les talents nécessaires pour y parvenir sont rares. Dangeville a également évoqué plusieurs œuvres célèbres comme 'Zaïres', 'Gustaves', 'Adelaïdes', 'Pelopées', et 'Glorieux'. Il a salué la satisfaction du public face à des pièces comme 'La Fausse Antipathie', jugée noble et instructive. Il a encouragé le public à continuer d'applaudir les poètes naturels et judicieux, et à offrir des leçons accompagnées de bienveillance. Il a conclu en espérant prouver l'indulgence du public.
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239
p. 760-761
« Le 10. Avril, les Comédiens Italiens donnerent pour la clôture de leur Théatre, la Comédie [...] »
Début :
Le 10. Avril, les Comédiens Italiens donnerent pour la clôture de leur Théatre, la Comédie [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Clôture
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texteReconnaissance textuelle : « Le 10. Avril, les Comédiens Italiens donnerent pour la clôture de leur Théatre, la Comédie [...] »
Le ro. Avril , les Comédiens Italiens donnerent
pour la clôture de leur Théatre , la Coméd
die des Amans Réunis , qui fut suivie de la petite
Piece
AVRIL . 1734. 761
Piece de l'Apologie du Siecle , dont nous parlelerons
le mois prochain. Le sieur Riccoboni
prononça le Compliment qu'on fait ordinairement
toutes les années , qui fut fort applaudi
du Public, Ce Discours en Vers parut imprimé
le même jour,
pour la clôture de leur Théatre , la Coméd
die des Amans Réunis , qui fut suivie de la petite
Piece
AVRIL . 1734. 761
Piece de l'Apologie du Siecle , dont nous parlelerons
le mois prochain. Le sieur Riccoboni
prononça le Compliment qu'on fait ordinairement
toutes les années , qui fut fort applaudi
du Public, Ce Discours en Vers parut imprimé
le même jour,
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240
p. 761
Mort du sieur Dominique, [titre d'après la table]
Début :
Le Théatre Italien a fait une perte considerable en la personne de Pierre-François Biancolelly, [...]
Mots clefs :
Pierre-François Biancolelli, Théâtre-Italien, Arlequin, Acteur, Provinces, Rôle, Mémoire prodigieuse
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texteReconnaissance textuelle : Mort du sieur Dominique, [titre d'après la table]
Le Théatre Italien a fait une perte considerable
en la personne de Pierre- François Biancolelly ,
mort le 18. Avril , âgé de 53. ans. Il étoit natif
de Paris et fils du fameux Dominique Biancolel
ly , connu sous le nom d'Arlequin de l'ancien
Théatre , Italien , mort très - regreté en 1688.
L'Acteur qui vient de mourir , après avoir joué
quelques années en Italie , revint en France et y
joua pendant quelque temps dans les Provinces et
à l'Opera Comique , le Rôle d'Arlequin avec suc
cès. Il fut reçû auThéatre Italien enOctobre 1717
Cet Acteur jouoit très - sensément et avoit une
mémoire prodigieuse.Le Rôle de Trivelin masqué
, étoit celui auquel il s'étoit le plus attaché,
il le jouoit avec toute l'intelligence possible et
au gré du Public , qui le regrette fort . Il étoit
Auteur de plusieurs Comédies jouées dans les
Provinces et de plusieurs autres représentées avec
succes à l'Hôtel de Bourgogna. Son dernier Ou
vrage , qui est un des meilleurs , est une Traduction
en Vers d'une ancienne Comédie Italienne
intitulée , les Quatre semblables , dont on voit
souvent les Representations avec plaisir . Tous
ses Ouvrages sont imprimez de même que ceux
qu'il a faits en societé avec les sieurs Riccoboni
Pere et Fils , et Romagnesy,
en la personne de Pierre- François Biancolelly ,
mort le 18. Avril , âgé de 53. ans. Il étoit natif
de Paris et fils du fameux Dominique Biancolel
ly , connu sous le nom d'Arlequin de l'ancien
Théatre , Italien , mort très - regreté en 1688.
L'Acteur qui vient de mourir , après avoir joué
quelques années en Italie , revint en France et y
joua pendant quelque temps dans les Provinces et
à l'Opera Comique , le Rôle d'Arlequin avec suc
cès. Il fut reçû auThéatre Italien enOctobre 1717
Cet Acteur jouoit très - sensément et avoit une
mémoire prodigieuse.Le Rôle de Trivelin masqué
, étoit celui auquel il s'étoit le plus attaché,
il le jouoit avec toute l'intelligence possible et
au gré du Public , qui le regrette fort . Il étoit
Auteur de plusieurs Comédies jouées dans les
Provinces et de plusieurs autres représentées avec
succes à l'Hôtel de Bourgogna. Son dernier Ou
vrage , qui est un des meilleurs , est une Traduction
en Vers d'une ancienne Comédie Italienne
intitulée , les Quatre semblables , dont on voit
souvent les Representations avec plaisir . Tous
ses Ouvrages sont imprimez de même que ceux
qu'il a faits en societé avec les sieurs Riccoboni
Pere et Fils , et Romagnesy,
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Résumé : Mort du sieur Dominique, [titre d'après la table]
Pierre-François Biancolelli, acteur et dramaturge, est décédé le 18 avril à l'âge de 53 ans. Fils de Dominique Biancolelli, célèbre Arlequin au Théâtre Italien, il a joué en Italie avant de revenir en France. Il a interprété Arlequin avec succès dans les provinces et à l'Opéra Comique, rejoignant le Théâtre Italien en octobre 1717. Biancolelli était reconnu pour son jeu sensible et sa mémoire exceptionnelle, notamment dans le rôle de Trivelin masqué. Il a également écrit plusieurs comédies représentées dans les provinces et à l'Hôtel de Bourgogne. Son dernier ouvrage, une traduction en vers de 'Les Quatre semblables', a été bien accueilli. Ses travaux, ainsi que ceux réalisés avec Riccoboni père et fils, et Romagnesy, ont été imprimés.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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241
p. 761-764
« Le 22. Mars, l'Opera Comique donna une Piece nouvelle d'un Acte en Vaudeville, avec un [...] »
Début :
Le 22. Mars, l'Opera Comique donna une Piece nouvelle d'un Acte en Vaudeville, avec un [...]
Mots clefs :
Opéra comique, Divertissement, Pièce nouvelle, Vaudeville, Audiences de Thalie, Faridondaine, Dlle Delisle
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 22. Mars, l'Opera Comique donna une Piece nouvelle d'un Acte en Vaudeville, avec un [...] »
Le 22. Mars , l'Opera Comique donna une
Piece nouvelle d'un Acte en Vaudeville , avec un
Divertissement de Chants et de Danses , qui a
pour
762 MERCURE DE FRANCE
pour titre , Les Jumelles. Cette Piece fut suivie
d'un autre Divertissement ou Concerto Pantomi
me , dansé par un nombre de très - bons Sujets ,
dont l'execution est fort applaudie.
Le premier Avril on donna une autre Piece
nouvelle d'un Acte , intitulée , Les Audiences de
Thalie , suivie du même Concerto . Ce divertissement
a continué jusques et compris le 17. qui
fut la clôture de ce Théatre. "
La Dlle Delifle , premiere Actrice de cette
Troupe , fit le même jour , à la fin de la Piece ,
un Compliment en Vaudeville , dont voici les
Couplets , sur l'Air : Petite la Valiere.
Quel sort plus déplorable !
Il faut quitter ce lieu ;
La tristesse m'accable ,
Quand je vous dis adieu ;
J'ai peine à retenir
La douleur qui me presse ;
La Foire va finir ;
Elle meurt de foiblesse.
Sur l'Air : Non , je neferai pas.
A peine dans ces lieux faisons- nous connoissance,
Que nous allons , Messieurs , perdre votre présence
,
Depuis près de deux mois , que ne vous voyoit- on ?
Mais pour vous voir chez nous , il nous falloit
du bon.
Sur l'Air : La faridondaine.
Nos soins ont été superflus ,
Nous
A VRI L. 1734.
763
Nous n'avons pû vous plaire ;
Si nous en eussions été crus ,
C'étoit une autre affaire.
Notre Protecteur Apollon ,
La faridondaine , la faridondon ,
Nous a presque toujours servi
Biribi ,
A la façon de Barbari mon ami ,
Sur un Air nouveau du sieur Correte.
Chacun se croit digne de plaire ,
C'est le deffaut de maint Auteur ;
Il ne faut qu'un ami flateur
Pour rendre un Rimeur témeraire ;
Mais ma foi c'est le Hic
Que de plaire au Public .
Sur l'Air : Tu croyois en aimant Colette.
Vous nous avez fait mille graces ,
Sensibles à nos moindres soins ;
De nos Jeux dénuez de graces ,
Vous avez été les témoins.
Sur l'Air : Je ne suis né ni Roy ni Princes
Mais , Messieurs , la Foire prochaine ,
Rend notre esperance certaine ,
Vous vous y rendrez , s'il vous plaît ;
Oubliez nos fautes présentes ;
Nous vous payeront l'interêt ,
De vos bontez trop indulgentes.
On
764 MERCURE DE FRANCE
On donne avis au Public , que le neuviéme
vol . du Theatre de la Foire , qui est actuellement
fous presse , paroîtra incessamment , il
contiendra dix Pieces , sçavoir le Reveil de l'Opera
Comique , la Lanterne Veridique , le Parterre
merveilleux , le Rival de lui -même , la Mere
jalouse , l' Allure , l'Ile du Mariage , le Retour
de l'Opera Comique au Fauxbourg S. Germain ,
le Pere Rival , et les Audiences de Thalie , ce
dernier vol. sera orné de figure en taille douce
avec une table des Airs graves et Notes à la fin
du Livre. Il se vendra A Paris , chez Prault le
Fils , Libraire Quay de Conty 1734.
Piece nouvelle d'un Acte en Vaudeville , avec un
Divertissement de Chants et de Danses , qui a
pour
762 MERCURE DE FRANCE
pour titre , Les Jumelles. Cette Piece fut suivie
d'un autre Divertissement ou Concerto Pantomi
me , dansé par un nombre de très - bons Sujets ,
dont l'execution est fort applaudie.
Le premier Avril on donna une autre Piece
nouvelle d'un Acte , intitulée , Les Audiences de
Thalie , suivie du même Concerto . Ce divertissement
a continué jusques et compris le 17. qui
fut la clôture de ce Théatre. "
La Dlle Delifle , premiere Actrice de cette
Troupe , fit le même jour , à la fin de la Piece ,
un Compliment en Vaudeville , dont voici les
Couplets , sur l'Air : Petite la Valiere.
Quel sort plus déplorable !
Il faut quitter ce lieu ;
La tristesse m'accable ,
Quand je vous dis adieu ;
J'ai peine à retenir
La douleur qui me presse ;
La Foire va finir ;
Elle meurt de foiblesse.
Sur l'Air : Non , je neferai pas.
A peine dans ces lieux faisons- nous connoissance,
Que nous allons , Messieurs , perdre votre présence
,
Depuis près de deux mois , que ne vous voyoit- on ?
Mais pour vous voir chez nous , il nous falloit
du bon.
Sur l'Air : La faridondaine.
Nos soins ont été superflus ,
Nous
A VRI L. 1734.
763
Nous n'avons pû vous plaire ;
Si nous en eussions été crus ,
C'étoit une autre affaire.
Notre Protecteur Apollon ,
La faridondaine , la faridondon ,
Nous a presque toujours servi
Biribi ,
A la façon de Barbari mon ami ,
Sur un Air nouveau du sieur Correte.
Chacun se croit digne de plaire ,
C'est le deffaut de maint Auteur ;
Il ne faut qu'un ami flateur
Pour rendre un Rimeur témeraire ;
Mais ma foi c'est le Hic
Que de plaire au Public .
Sur l'Air : Tu croyois en aimant Colette.
Vous nous avez fait mille graces ,
Sensibles à nos moindres soins ;
De nos Jeux dénuez de graces ,
Vous avez été les témoins.
Sur l'Air : Je ne suis né ni Roy ni Princes
Mais , Messieurs , la Foire prochaine ,
Rend notre esperance certaine ,
Vous vous y rendrez , s'il vous plaît ;
Oubliez nos fautes présentes ;
Nous vous payeront l'interêt ,
De vos bontez trop indulgentes.
On
764 MERCURE DE FRANCE
On donne avis au Public , que le neuviéme
vol . du Theatre de la Foire , qui est actuellement
fous presse , paroîtra incessamment , il
contiendra dix Pieces , sçavoir le Reveil de l'Opera
Comique , la Lanterne Veridique , le Parterre
merveilleux , le Rival de lui -même , la Mere
jalouse , l' Allure , l'Ile du Mariage , le Retour
de l'Opera Comique au Fauxbourg S. Germain ,
le Pere Rival , et les Audiences de Thalie , ce
dernier vol. sera orné de figure en taille douce
avec une table des Airs graves et Notes à la fin
du Livre. Il se vendra A Paris , chez Prault le
Fils , Libraire Quay de Conty 1734.
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Résumé : « Le 22. Mars, l'Opera Comique donna une Piece nouvelle d'un Acte en Vaudeville, avec un [...] »
Du 22 mars au 17 avril, l'Opéra Comique présenta plusieurs représentations théâtrales. Le 22 mars, la pièce 'Les Jumelles' fut jouée, suivie d'un divertissement de chants et de danses, ainsi qu'un concerto pantomime. Le 1er avril, la pièce 'Les Audiences de Thalie' fut donnée, accompagnée du même concerto. La dernière représentation eut lieu le 17 avril. Mlle Delifle, première actrice, prononça un compliment en vaudeville, exprimant sa tristesse de quitter le théâtre et remerciant le public pour sa présence. Elle souligna les efforts de la troupe et espéra revoir le public lors de la prochaine foire. Un avis annonça la parution du neuvième volume du 'Théâtre de la Foire', incluant dix pièces comme 'Les Audiences de Thalie', disponible chez Prault le Fils, libraire à Paris, en 1734.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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242
p. 764-770
Tragédie nouvelle, jouée à l'Arsenal, et Prologue, [titre d'après la table]
Début :
Le 7. de ce mois, on representa sur le Théatre de l'Arsenal, la Tragedie nouvelle annoncée [...]
Mots clefs :
Acteur, Marquis, Tragédie nouvelle, Théâtre de l'Arsenal, Pyrrhus, Prologue, Comédie, Auteurs, Pièce nouvelle
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texteReconnaissance textuelle : Tragédie nouvelle, jouée à l'Arsenal, et Prologue, [titre d'après la table]
Le 7. de ce mois , on representa
sur le Théatre
de l'Arsenal , la Tragedie nouvelle annoncée
dans le Mercure de Fevrier ; Elle fut reçue avec
beaucoup
d'aplaudissement
par une nombreuse
Assemblée : On la rejoua le onze avec plus d'aplaudissements
encore.
Certe Piece est intitulée , Pyrrhus et Teglis :
le Sujet en est tiré partie de Justin , et partie
d'Athénée. Comme elle doit être reprise après
Pâques , nous pourrons alors être en état d'en
donner un Extrait. Elle a été précedée d'une
Scene en forme de Prologue , entre un Marquis
ridicule , et un Acteur de la Comedie de l'Arsenal
, qui a fait beaucoup de plaisir . Voici l'idée
que nous pouvons donner de ce Prologue.
Lorsqu'on leve la toile , le Marquis paroit ,
Occupant un fauteuil nécessaire pour la Tragedie
: Un Acteur surprit de le voir dans cette
place , s'approche poliment , et lui dit qu'il ne
sçauroit demeurer là . Le Marquis en demande
la raison , l'Acteur lui répond que leur Theatre
est trop petit pour que des spectateurs y puissent
AVRIL 765
.
1724.
sent prendre place ; Vous voyez bien , dit - il ,
que vous êtes le seul qui s'y soit placé.
Le Marquis replique que la regle generale n'em
est pas une pour lui , qu'un homme comme lui
en fait toujours l'exception , et que ne venant
au Spectacle que pour être vû , et pour y voir
le beau monde , il n'est point de place plus commode
pour cela que le Theatre.
L'Acteur lui dit que s'il ne vient au Specta
cle que pour être vû , c'est sur un plus grand
Theatre , et devant une assemblée plus nombreuse
qu'il doit paroître. Le Marquis répond
qu'il a déja assisté au Prologue de l'Opera , à
un Acte de la Comédie Françoise , à quelques
Scenes de l'Italienne ; et qu'ayant apris qu'il y
avoit à l'Arsenal une Comedie , où se rassembloient
de fort aimables Personnes , il étoit venu
y passer qu'elques moments, en attendant l'heure
d'aller lutiner les Danseuses de l'Opera Comique.
L'Acteur le remercie de la préférance ....
Ce Marquis demande quelle est la Piéce qu'on
va jouer : on lui dit que c'est une Piece nouvelle.
Il reprend avec vivacité.
Une Piece nouvelle ! Comment , morbleu , une
Piece nouvelle ! Et quel est ce fat d'Auteur qui s'avife
de donner une Piece nouvelle , sans être venú
La lire à ma Toilette ! Sçait - il bien que les Auteurs,
même les plus fameux , viennent me demander
ma protection , aussi je les sers à merveille :
Quand une fois j'ai aprouvé un Ouvrage , le Public
a beau le condamner , je sçai le moien de
faire tout applaudir , de faire paroitre le parterre
plein lors même que la Piece est dans les regles et
si les Comediens n'osent plus la donner , je sçai
l'art de la faire redemander autc de grands broubabas
, afin que sa chute soit imputée à leur mau-
G
:
vaise
766 MERCURE DE FRANCE
vaise humeur , plutôt qu'au dégout du Public.
> ›
L'Acteur lui répond que si les grands Auteurs
vont briguer son suffrage , il n'est pas
étonnant que celui de la Piece nouvelle ne l'ait
pas mandié : que comme il ne fait que de cominencer
, il ne sçait pas comment il faut s'y
prendre pour faire réussir une Piece . Et il
ajoute ensuite. Auteurs , Acteurs Musiciens
tous n'agissent ici que pour leur propre plaisir , pour
celui de leurs amis , et surtout par l'espoir de contribuer
quelquefois aux amusements d'une Princesse
illustre qui nous honore de sa protection
et qui veut bien se contenter de nos foibles
efforts. Ainsi, Monsieur, nous n'avons besoin d'aucun
artifice , ni pour faire applaudir nos Acteurs ,
ni pour faire réussir nos nouveautés &c.
2
Cela est fort heureux , dit le Marquis , mais
la vanité guide tout Acteur qui paroit sur un
Theatre et encore plus un Auteur . Il faut même
que celui de votre Piece nouvelle en ait plus
qu'un autre pour mettre son Ouvrage dans les
mains d'Acteurs, qui ne sont pas consommez dans
l'Art , il faut qu'il le croye asses superieur pour
pouvoir être admiré malgré les défauts de la
réprésentation , où il faut qu'aiant été refusé
par les grands Comédiens , il n'ait plus que
cette triste ressource pour le faire paroître. Il
s'écrie.
Je gagerois , morbleu , cent contre un , que
cette Piece a été refusée des François et des
Italiens.
l'Acteur.
Vous perdriez certainement , elle n'a ja-
* Madame la Duchesse Du Maine.
mais
AVRIL. 173 t . 767
>
mais été luë dans aucun foyer : l'Auteur a craint
le jugement & c . Il s'est deffié de ses propres
forces, et a cru que ce qui pouvoit lui faire honneur
ici et parmi nous , n'auroit pas tout le més
rite nécessaire pour être exposé à un plus grand
jour.
Le Marquis rit de ce que l'on supose de la modestie
dans un Auteur et dit qu'il n'en est
point qui ne se croye égal aux plus grands Maitres
de l'Art ; qu'il en est même qui se croient
bien au dessus et qui sont assez heureux , à
force de le dire , pour le persuader à beaucoup
d'autres.L'Acteur répond que n'étant pas Auteur,
il ignore ce qui se passe dans leur ame : Il ajoute
qu'ils ont pressé leur ami de leur donner son
Ouvrage , afin de l'encourager par là à faire
quelque chose de meilleur , et qu'ils se sont flatés
que
leurs Spectateurs, entrant dans leurs vues,
voudroient bien par leurs aplaudissements don--
ner de l'émulation à un jeune Auteur qui commence.
›
Le Marquis replique que c'est être fort charitable
, et qu'ils sont bien bons d'engager un
nombre d'honnetes - gens à venir s'ennuier pour
donner de l'émulation à un Auteur. Il demande
si la Tragedie nouvelle est en Prose , ou en
Vers ?
l'Acteur.
Une Tragedie en Prose !
Le Marquis.
Il est vrai que le projet n'en a pas fait fortune
je l'avois toujours fort aprouvé à caufe de
sa singularité.
Gij Acteur
768 MERCURE DE FRANCE
l'Acteur.
Ceux qui ne se tirent d'affaire que par le
faste des Vers , n'y auroient pas trouvé leur
compte , et ce ne pourroit être la ressource
que dé quelque Auteur judicieux , sensé , plein
de sentimens capables de composer une Fable ingenieuse
, et de conduire une Piece , mais sans
Brillant , fans feu , sans saillies , et qui n'auroit
pas l'art de bien tourner un Vers .
Le Marquis.
Eh , dites moi , les Vers de votre Tragedie
sont- ils beaux ? y a - t'il de ces Vers ronflants
épithétiques , pompeux ; de ces Vers qui éblouissent
, ravissent , étourdissent ; y a - t'il de ces
traits neufs , hardis......
•
L'Acteur répond que tout est simple chez
eux et que dans la Piece il n'y a qu'un morseau
un peu trop épique que l'Auteur s'est obstiné
à vouloir laisser malgré l'avis de plusieurs
connoisseurs . Le Marquis dit que l'Auteur a fort
bien fait , et qu'il ne faut que deux ou trois mor
ceaux dans ce genre pour faire le succes , d'une
Tragedie : il conclut que le sujet en est tiré d'un
Roman. L'Acteur l'assure qu'il est pris de
l'Histoire , et qu'elle n'est presque pas alterée
dans cette Piece. Le Marquis en paroît fâché
et ajoute . Parlez moi d'un beau Roman mis en
Tragedie , cela fournit des situations , des traits
saillants , des images touchantes , des évenemens.
Beaucoup d'evenemens , morbleu ! beaucoup
d'evenemens entassez les uns sur les autres ,
qui se succedent sans être liés. Cela tient l'esprit
en haleine , on est toujours surpris par
quelque chose d'inesperé.
PActeur
AVRIL
769 1734.
l'Acteur.
Cinq Tragedies dans une ; n'est - ce pas
Le Marquis.
Vous croiez badiner ; mais rien ne marque
mieux l'imagination et la fecondité d'un Auteur .
Voilà qui est bien merveilleux , une seule action
dans Actes ! eh pour moi , je m'endors si je
n'en trouve pas une à chaque Acte , et quand
il y en auroit davantage , je ne m'en plaindrois
pas.
$ L'Acteur lui répond que c'est ce qu'il ne
trouvera pas dans la Piece nouvelle : qu'une
seule action très - simple , fait tout le fond de ce
Poëme. Le Marquis dit qu'il n'est pas curieux
de tant de simplicité ; qu'il veut quelque chose
qui pique , qui réveille , et aprenant le titre de
la Piece , il se recrie : quoi ? encore un Pyrrhus !
L'Acteur l'assure que quoique le nom de ce
Heros ne soit pas nouveau au Theatre , celui - ci
paroit pourtant sur la Scene pour la premiére
fois , etpeut- être pour la derniere, dit le Marquis,
Cela se pourroit , dit l'Acteur , car nous n'aimons
pas à jouer souvent la même chose . Le
Marquis demande qui est cette Teglis qu'il ne
connoit pas. L'Acteur lui répond que c'est à
peu pres * le nom d'une Princeese dont Pyrrhus
étoit épris. Le Marquis en conclut qu'il
y a beaucoup de tendre dans la Piece . et l'Acteur
lui avoue qu'il croit même qu'il y en a
un peu trop , que le Heros aime trop. passio-
* Le vrai nom de cette Maitresse de Pyrrhus étoit
Tigris. Ce nom n'étoit pas favorable pour la Poësie,
ni pour le titre d'une Piece , et il n'a fallu changer
que deux lettres pour en faire un beaucoup plus doux⚫
G' iij
nement
778 MERCURE DE FRANCE
nement et trop constamment , mais que comme
il l'a déja dit , l'Auteur est un jeune homme qui
a cru plaire au beau sexe , en mettant sur la
Scene un Prince qui sacrifie tout à son amour
hors sa vertu et son devoir.
Le Marquis.
>
>
C'est un Amant tendre , constant , fidelle
doucereux , tout cela ne sauroit plaire : ce n'est
plus là le gout du siècle : les Dames même que
vôtre Auteur a cru flater par là seront les premieres
à s'y ennuyer , adieu : j'en sçais assez
pour en pouvoir décider ; simplicité, constance ,
fidelité th ! fi , fi ... vive la confusion , la vivacité
et le changement . ( il sort )
L'Auteur est charmé d'être délivré de cet étourdi
et finit ainsi :Nous n'avons à parler que devant
des perfonnes sensées et raisonnables , qui voudront
bien voir avec bonté le coup d'essai qu'on va leur
offrir. Annoncer un coup d'essai , n'est-ce pas demander
de l'indulgence ? qui ne sçait que des plus
foibles commencements sont sortis quelquefois de
vrais chef-d'oeuvres.
sur le Théatre
de l'Arsenal , la Tragedie nouvelle annoncée
dans le Mercure de Fevrier ; Elle fut reçue avec
beaucoup
d'aplaudissement
par une nombreuse
Assemblée : On la rejoua le onze avec plus d'aplaudissements
encore.
Certe Piece est intitulée , Pyrrhus et Teglis :
le Sujet en est tiré partie de Justin , et partie
d'Athénée. Comme elle doit être reprise après
Pâques , nous pourrons alors être en état d'en
donner un Extrait. Elle a été précedée d'une
Scene en forme de Prologue , entre un Marquis
ridicule , et un Acteur de la Comedie de l'Arsenal
, qui a fait beaucoup de plaisir . Voici l'idée
que nous pouvons donner de ce Prologue.
Lorsqu'on leve la toile , le Marquis paroit ,
Occupant un fauteuil nécessaire pour la Tragedie
: Un Acteur surprit de le voir dans cette
place , s'approche poliment , et lui dit qu'il ne
sçauroit demeurer là . Le Marquis en demande
la raison , l'Acteur lui répond que leur Theatre
est trop petit pour que des spectateurs y puissent
AVRIL 765
.
1724.
sent prendre place ; Vous voyez bien , dit - il ,
que vous êtes le seul qui s'y soit placé.
Le Marquis replique que la regle generale n'em
est pas une pour lui , qu'un homme comme lui
en fait toujours l'exception , et que ne venant
au Spectacle que pour être vû , et pour y voir
le beau monde , il n'est point de place plus commode
pour cela que le Theatre.
L'Acteur lui dit que s'il ne vient au Specta
cle que pour être vû , c'est sur un plus grand
Theatre , et devant une assemblée plus nombreuse
qu'il doit paroître. Le Marquis répond
qu'il a déja assisté au Prologue de l'Opera , à
un Acte de la Comédie Françoise , à quelques
Scenes de l'Italienne ; et qu'ayant apris qu'il y
avoit à l'Arsenal une Comedie , où se rassembloient
de fort aimables Personnes , il étoit venu
y passer qu'elques moments, en attendant l'heure
d'aller lutiner les Danseuses de l'Opera Comique.
L'Acteur le remercie de la préférance ....
Ce Marquis demande quelle est la Piéce qu'on
va jouer : on lui dit que c'est une Piece nouvelle.
Il reprend avec vivacité.
Une Piece nouvelle ! Comment , morbleu , une
Piece nouvelle ! Et quel est ce fat d'Auteur qui s'avife
de donner une Piece nouvelle , sans être venú
La lire à ma Toilette ! Sçait - il bien que les Auteurs,
même les plus fameux , viennent me demander
ma protection , aussi je les sers à merveille :
Quand une fois j'ai aprouvé un Ouvrage , le Public
a beau le condamner , je sçai le moien de
faire tout applaudir , de faire paroitre le parterre
plein lors même que la Piece est dans les regles et
si les Comediens n'osent plus la donner , je sçai
l'art de la faire redemander autc de grands broubabas
, afin que sa chute soit imputée à leur mau-
G
:
vaise
766 MERCURE DE FRANCE
vaise humeur , plutôt qu'au dégout du Public.
> ›
L'Acteur lui répond que si les grands Auteurs
vont briguer son suffrage , il n'est pas
étonnant que celui de la Piece nouvelle ne l'ait
pas mandié : que comme il ne fait que de cominencer
, il ne sçait pas comment il faut s'y
prendre pour faire réussir une Piece . Et il
ajoute ensuite. Auteurs , Acteurs Musiciens
tous n'agissent ici que pour leur propre plaisir , pour
celui de leurs amis , et surtout par l'espoir de contribuer
quelquefois aux amusements d'une Princesse
illustre qui nous honore de sa protection
et qui veut bien se contenter de nos foibles
efforts. Ainsi, Monsieur, nous n'avons besoin d'aucun
artifice , ni pour faire applaudir nos Acteurs ,
ni pour faire réussir nos nouveautés &c.
2
Cela est fort heureux , dit le Marquis , mais
la vanité guide tout Acteur qui paroit sur un
Theatre et encore plus un Auteur . Il faut même
que celui de votre Piece nouvelle en ait plus
qu'un autre pour mettre son Ouvrage dans les
mains d'Acteurs, qui ne sont pas consommez dans
l'Art , il faut qu'il le croye asses superieur pour
pouvoir être admiré malgré les défauts de la
réprésentation , où il faut qu'aiant été refusé
par les grands Comédiens , il n'ait plus que
cette triste ressource pour le faire paroître. Il
s'écrie.
Je gagerois , morbleu , cent contre un , que
cette Piece a été refusée des François et des
Italiens.
l'Acteur.
Vous perdriez certainement , elle n'a ja-
* Madame la Duchesse Du Maine.
mais
AVRIL. 173 t . 767
>
mais été luë dans aucun foyer : l'Auteur a craint
le jugement & c . Il s'est deffié de ses propres
forces, et a cru que ce qui pouvoit lui faire honneur
ici et parmi nous , n'auroit pas tout le més
rite nécessaire pour être exposé à un plus grand
jour.
Le Marquis rit de ce que l'on supose de la modestie
dans un Auteur et dit qu'il n'en est
point qui ne se croye égal aux plus grands Maitres
de l'Art ; qu'il en est même qui se croient
bien au dessus et qui sont assez heureux , à
force de le dire , pour le persuader à beaucoup
d'autres.L'Acteur répond que n'étant pas Auteur,
il ignore ce qui se passe dans leur ame : Il ajoute
qu'ils ont pressé leur ami de leur donner son
Ouvrage , afin de l'encourager par là à faire
quelque chose de meilleur , et qu'ils se sont flatés
que
leurs Spectateurs, entrant dans leurs vues,
voudroient bien par leurs aplaudissements don--
ner de l'émulation à un jeune Auteur qui commence.
›
Le Marquis replique que c'est être fort charitable
, et qu'ils sont bien bons d'engager un
nombre d'honnetes - gens à venir s'ennuier pour
donner de l'émulation à un Auteur. Il demande
si la Tragedie nouvelle est en Prose , ou en
Vers ?
l'Acteur.
Une Tragedie en Prose !
Le Marquis.
Il est vrai que le projet n'en a pas fait fortune
je l'avois toujours fort aprouvé à caufe de
sa singularité.
Gij Acteur
768 MERCURE DE FRANCE
l'Acteur.
Ceux qui ne se tirent d'affaire que par le
faste des Vers , n'y auroient pas trouvé leur
compte , et ce ne pourroit être la ressource
que dé quelque Auteur judicieux , sensé , plein
de sentimens capables de composer une Fable ingenieuse
, et de conduire une Piece , mais sans
Brillant , fans feu , sans saillies , et qui n'auroit
pas l'art de bien tourner un Vers .
Le Marquis.
Eh , dites moi , les Vers de votre Tragedie
sont- ils beaux ? y a - t'il de ces Vers ronflants
épithétiques , pompeux ; de ces Vers qui éblouissent
, ravissent , étourdissent ; y a - t'il de ces
traits neufs , hardis......
•
L'Acteur répond que tout est simple chez
eux et que dans la Piece il n'y a qu'un morseau
un peu trop épique que l'Auteur s'est obstiné
à vouloir laisser malgré l'avis de plusieurs
connoisseurs . Le Marquis dit que l'Auteur a fort
bien fait , et qu'il ne faut que deux ou trois mor
ceaux dans ce genre pour faire le succes , d'une
Tragedie : il conclut que le sujet en est tiré d'un
Roman. L'Acteur l'assure qu'il est pris de
l'Histoire , et qu'elle n'est presque pas alterée
dans cette Piece. Le Marquis en paroît fâché
et ajoute . Parlez moi d'un beau Roman mis en
Tragedie , cela fournit des situations , des traits
saillants , des images touchantes , des évenemens.
Beaucoup d'evenemens , morbleu ! beaucoup
d'evenemens entassez les uns sur les autres ,
qui se succedent sans être liés. Cela tient l'esprit
en haleine , on est toujours surpris par
quelque chose d'inesperé.
PActeur
AVRIL
769 1734.
l'Acteur.
Cinq Tragedies dans une ; n'est - ce pas
Le Marquis.
Vous croiez badiner ; mais rien ne marque
mieux l'imagination et la fecondité d'un Auteur .
Voilà qui est bien merveilleux , une seule action
dans Actes ! eh pour moi , je m'endors si je
n'en trouve pas une à chaque Acte , et quand
il y en auroit davantage , je ne m'en plaindrois
pas.
$ L'Acteur lui répond que c'est ce qu'il ne
trouvera pas dans la Piece nouvelle : qu'une
seule action très - simple , fait tout le fond de ce
Poëme. Le Marquis dit qu'il n'est pas curieux
de tant de simplicité ; qu'il veut quelque chose
qui pique , qui réveille , et aprenant le titre de
la Piece , il se recrie : quoi ? encore un Pyrrhus !
L'Acteur l'assure que quoique le nom de ce
Heros ne soit pas nouveau au Theatre , celui - ci
paroit pourtant sur la Scene pour la premiére
fois , etpeut- être pour la derniere, dit le Marquis,
Cela se pourroit , dit l'Acteur , car nous n'aimons
pas à jouer souvent la même chose . Le
Marquis demande qui est cette Teglis qu'il ne
connoit pas. L'Acteur lui répond que c'est à
peu pres * le nom d'une Princeese dont Pyrrhus
étoit épris. Le Marquis en conclut qu'il
y a beaucoup de tendre dans la Piece . et l'Acteur
lui avoue qu'il croit même qu'il y en a
un peu trop , que le Heros aime trop. passio-
* Le vrai nom de cette Maitresse de Pyrrhus étoit
Tigris. Ce nom n'étoit pas favorable pour la Poësie,
ni pour le titre d'une Piece , et il n'a fallu changer
que deux lettres pour en faire un beaucoup plus doux⚫
G' iij
nement
778 MERCURE DE FRANCE
nement et trop constamment , mais que comme
il l'a déja dit , l'Auteur est un jeune homme qui
a cru plaire au beau sexe , en mettant sur la
Scene un Prince qui sacrifie tout à son amour
hors sa vertu et son devoir.
Le Marquis.
>
>
C'est un Amant tendre , constant , fidelle
doucereux , tout cela ne sauroit plaire : ce n'est
plus là le gout du siècle : les Dames même que
vôtre Auteur a cru flater par là seront les premieres
à s'y ennuyer , adieu : j'en sçais assez
pour en pouvoir décider ; simplicité, constance ,
fidelité th ! fi , fi ... vive la confusion , la vivacité
et le changement . ( il sort )
L'Auteur est charmé d'être délivré de cet étourdi
et finit ainsi :Nous n'avons à parler que devant
des perfonnes sensées et raisonnables , qui voudront
bien voir avec bonté le coup d'essai qu'on va leur
offrir. Annoncer un coup d'essai , n'est-ce pas demander
de l'indulgence ? qui ne sçait que des plus
foibles commencements sont sortis quelquefois de
vrais chef-d'oeuvres.
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Résumé : Tragédie nouvelle, jouée à l'Arsenal, et Prologue, [titre d'après la table]
Le 7 avril 1724, la tragédie 'Pyrrhus et Teglis' a été représentée au Théâtre de l'Arsenal et a été acclamée par une nombreuse assemblée. La pièce, dont le sujet est tiré de Justin et d'Athénée, a été rejouée le 11 avril avec encore plus d'applaudissements. Elle sera reprise après Pâques, permettant alors de fournir un extrait. La représentation a été précédée d'un prologue entre un marquis ridicule et un acteur de la Comédie de l'Arsenal, qui a beaucoup plu au public. Le prologue commence avec le marquis occupant un fauteuil nécessaire pour la tragédie. Un acteur lui demande poliment de quitter sa place, arguant que le théâtre est trop petit pour que des spectateurs s'y installent. Le marquis répond qu'il vient au spectacle pour être vu et voir le beau monde, et qu'il n'y a pas de place plus commode que le théâtre. L'acteur lui suggère alors de se produire sur un plus grand théâtre devant une assemblée plus nombreuse. Le marquis mentionne avoir assisté à divers spectacles et être venu à l'Arsenal pour passer quelques moments en attendant l'heure d'aller voir les danseuses de l'Opéra Comique. Le marquis demande ensuite quelle est la pièce qui va être jouée. On lui répond qu'il s'agit d'une pièce nouvelle. Il s'indigne que l'auteur n'ait pas lu sa pièce lors de sa toilette et affirme que les auteurs, même les plus célèbres, viennent chercher sa protection. L'acteur lui explique que les auteurs, acteurs et musiciens agissent pour leur propre plaisir, celui de leurs amis et surtout pour contribuer aux amusements d'une princesse illustre qui les protège. Le marquis continue de critiquer la pièce, affirmant que l'auteur doit être vaniteux pour la présenter à des acteurs non consommés dans l'art. L'acteur répond que la pièce n'a jamais été lue dans aucun foyer et que l'auteur a craint le jugement du public. Le marquis rit de cette modestie supposée et affirme que tous les auteurs se croient égaux aux plus grands maîtres. L'acteur ignore les critiques et explique que les acteurs ont encouragé l'auteur à présenter son œuvre pour lui donner de l'émulation. Le marquis demande ensuite si la tragédie est en prose ou en vers. L'acteur répond qu'il s'agit d'une tragédie en vers, car ceux qui ne se tirent d'affaire que par le faste des vers n'y auraient pas trouvé leur compte. Le marquis insiste sur la beauté des vers et les traits saillants, mais l'acteur assure que tout est simple dans la pièce, à l'exception d'un morceau un peu trop épique. Le marquis conclut que le sujet est tiré d'un roman, mais l'acteur affirme qu'il est tiré de l'histoire et presque inchangé. Le marquis exprime son mécontentement face à cette simplicité et apprend le titre de la pièce, 'Pyrrhus et Teglis'. Il s'étonne que le nom de Pyrrhus ne soit pas nouveau au théâtre, mais l'acteur assure que ce Pyrrhus apparaît pour la première fois sur scène. Le marquis demande qui est Teglis, et l'acteur répond qu'il s'agit d'une princesse dont Pyrrhus était épris. Le marquis conclut qu'il y a beaucoup de tendresse dans la pièce, et l'acteur avoue qu'il y en a peut-être un peu trop, le héros aimant passionnément et constamment. Le marquis critique cette constance et fidélité, affirmant que ce n'est plus le goût du siècle. Il quitte la scène, et l'acteur conclut en espérant que le public verra avec bonté ce coup d'essai, rappelant que des chefs-d'œuvre peuvent naître de faibles commencements.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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243
p. 770-772
LETTRE à M. ***
Début :
Mlle Sallé, sans trop considerer l'embarras où elle m'expose, me charge, Monsieur, de [...]
Mots clefs :
Pygmalion, Marie Sallé, Danse, Bacchus et Ariane, Statue
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE à M. ***
LETTRE à M. ***
Mlle Sallé , sans trop considerer l'embarras
où elle m'expose , me charge , Monsieur , de
vous rendre compte de ses succès. Il s'agit de
vous dire de quelle maniere elle a rendu la Fable
de Pigmalion et celle de Bacchus et d'Ariane,
et les applaudissemens que ces deux Ballets de
son invention, ont excités à la Cour d'Angleterre .
Il y a près de deux mois qu'on voit représenter
Pigmalion sans s'en lasser. Voici de quelle maniere
se développe le Sujet . Pigmalion entre
dans
AVRIL. 1734. 771
dans son Attelier avec ses Sculpteurs qui forment
une Danse caracterisée, le Maillet et le Ciseau à
la main. Pigmalion leur ordoune d'ouvrir le fond
de l'Attelier , qui est orné de Statuës aussi bien
que le devant ; il en paroît au milieu une qui
attire pardessus toutes les autres l'admiration de
tout le monde . Il la regarde , il la considere et
soupire ; il porte ses mains sur ses pieds , sur sa
taille , il en examine et en observe tous les contours
, aussi bien- que des bras qu'il pare de
bracelets précieux , il orne son col d'un riche
collier , il baise les mains de sa chere Statuë ,
en devient enfin passionné ; il exprime ses inquiétudes
, d'où il tombe dans la réverie ; après
quoi il se jette aux pieds de Venus qu'il conjure
d'animer ce marbre .
Venus répond à sa priere ; trois traits de lu
miere paroissent et sur une simphonie convenable
, la Statue commence à sortir par degré de
son insensibilité , à la surprise de Pigmalion et
de ses suivans elle témoigne son étonnement
de sa nouvelle existence et de tous les objets
dont elle est entourée .
Pigmalion plein d'étonnement et de transport
lui tend la main pour sortir de sa position ; elle
tâte , pour ainsi dire, la terre , et forme quelque
pas par degrés dans les plus elegantes attitudes .
que la Sculpture puisse desirer . Pigmalion danse
devant elle comme pour lui montrer ; elle repetè
depuis les choses les plus simples jusqu'aux composées
et aux plus difficiles ; il tâche d'inspirer
la tendresse dont il se sent penetré et il en vient
à bout.
Vous concevez , Monsieur , ce que peuvent
devenir tous les passages de cette action exécutée
et mise en danse avec les graces fines et délicates
G.iiij : de
772 MERCURE DE FRANCE
de Mlle Sallé. Elle a osé paroître dans cette
Entrée sans panier , sans jupe , sans corps et
échevelée , et sans aucun ornement sur sa tête ;
elle n'estoit vêtue avec son corset et un jupon ,
que d'une fimple robbe de mousseline tournée en
draperie , et ajustée sur le modele d'une Statue
Grecque.
• Vous ne devez pas douter Monsieur , du
prodigieux succès de cet ingenieux Balet, si heureusement
exécuté. Le Roy, la Reine, toute la Famille
Royale et toute la Cour, ont encore deman
dé cette danse pour le jour du Benefit " pour lequel
toutes les Loges et les Places du Theatre es
de l'Amphitheatre sont retenuës il y a un mois.
Ce sera le premier jour d'Avril.
N'artendez pas que je vous décrive Ariane
comme Pigmalion : ce sont des beautez plus
nobles et plus difficiles à rapporter , ce sont les
expressions et les sentimens de la douleur la plus
profonde , du désespoir , de la fureur et de
l'abbattement, en un mot, tous les grands mouvements
et la déclamation la plus parfaite , par
le moyen des pas ,. des attitudes et des
gestes
pour représenter une femme abandonnée par ce
qu'elle aime ; vous pouvez avancer , Monsieur ,
que Mlle Sallé devient ici la Rivale des Journets,
des Duclos et des le Couvreur. Les Anglois qui
conservent un tendre souvenir de la fameuse
Oldfields , jusqu'au point de l'avoir mise parmi
les grands hommes de l'Etat dans Westminster,
la regardent comme ressuscitée dans Mlle Sallé
lorsqu'elle représente Ariane. Je suis &c.
Londres 15. Mars.
Mlle Sallé , sans trop considerer l'embarras
où elle m'expose , me charge , Monsieur , de
vous rendre compte de ses succès. Il s'agit de
vous dire de quelle maniere elle a rendu la Fable
de Pigmalion et celle de Bacchus et d'Ariane,
et les applaudissemens que ces deux Ballets de
son invention, ont excités à la Cour d'Angleterre .
Il y a près de deux mois qu'on voit représenter
Pigmalion sans s'en lasser. Voici de quelle maniere
se développe le Sujet . Pigmalion entre
dans
AVRIL. 1734. 771
dans son Attelier avec ses Sculpteurs qui forment
une Danse caracterisée, le Maillet et le Ciseau à
la main. Pigmalion leur ordoune d'ouvrir le fond
de l'Attelier , qui est orné de Statuës aussi bien
que le devant ; il en paroît au milieu une qui
attire pardessus toutes les autres l'admiration de
tout le monde . Il la regarde , il la considere et
soupire ; il porte ses mains sur ses pieds , sur sa
taille , il en examine et en observe tous les contours
, aussi bien- que des bras qu'il pare de
bracelets précieux , il orne son col d'un riche
collier , il baise les mains de sa chere Statuë ,
en devient enfin passionné ; il exprime ses inquiétudes
, d'où il tombe dans la réverie ; après
quoi il se jette aux pieds de Venus qu'il conjure
d'animer ce marbre .
Venus répond à sa priere ; trois traits de lu
miere paroissent et sur une simphonie convenable
, la Statue commence à sortir par degré de
son insensibilité , à la surprise de Pigmalion et
de ses suivans elle témoigne son étonnement
de sa nouvelle existence et de tous les objets
dont elle est entourée .
Pigmalion plein d'étonnement et de transport
lui tend la main pour sortir de sa position ; elle
tâte , pour ainsi dire, la terre , et forme quelque
pas par degrés dans les plus elegantes attitudes .
que la Sculpture puisse desirer . Pigmalion danse
devant elle comme pour lui montrer ; elle repetè
depuis les choses les plus simples jusqu'aux composées
et aux plus difficiles ; il tâche d'inspirer
la tendresse dont il se sent penetré et il en vient
à bout.
Vous concevez , Monsieur , ce que peuvent
devenir tous les passages de cette action exécutée
et mise en danse avec les graces fines et délicates
G.iiij : de
772 MERCURE DE FRANCE
de Mlle Sallé. Elle a osé paroître dans cette
Entrée sans panier , sans jupe , sans corps et
échevelée , et sans aucun ornement sur sa tête ;
elle n'estoit vêtue avec son corset et un jupon ,
que d'une fimple robbe de mousseline tournée en
draperie , et ajustée sur le modele d'une Statue
Grecque.
• Vous ne devez pas douter Monsieur , du
prodigieux succès de cet ingenieux Balet, si heureusement
exécuté. Le Roy, la Reine, toute la Famille
Royale et toute la Cour, ont encore deman
dé cette danse pour le jour du Benefit " pour lequel
toutes les Loges et les Places du Theatre es
de l'Amphitheatre sont retenuës il y a un mois.
Ce sera le premier jour d'Avril.
N'artendez pas que je vous décrive Ariane
comme Pigmalion : ce sont des beautez plus
nobles et plus difficiles à rapporter , ce sont les
expressions et les sentimens de la douleur la plus
profonde , du désespoir , de la fureur et de
l'abbattement, en un mot, tous les grands mouvements
et la déclamation la plus parfaite , par
le moyen des pas ,. des attitudes et des
gestes
pour représenter une femme abandonnée par ce
qu'elle aime ; vous pouvez avancer , Monsieur ,
que Mlle Sallé devient ici la Rivale des Journets,
des Duclos et des le Couvreur. Les Anglois qui
conservent un tendre souvenir de la fameuse
Oldfields , jusqu'au point de l'avoir mise parmi
les grands hommes de l'Etat dans Westminster,
la regardent comme ressuscitée dans Mlle Sallé
lorsqu'elle représente Ariane. Je suis &c.
Londres 15. Mars.
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Résumé : LETTRE à M. ***
La lettre relate les succès de Mlle Sallé à la cour d'Angleterre, notamment à travers deux ballets de sa création : 'Pigmalion' et 'Bacchus et Ariane'. Le ballet 'Pigmalion' raconte l'histoire de Pigmalion, sculpteur qui tombe amoureux d'une statue qu'il a créée. Vénus anime la statue, permettant à Pigmalion de lui apprendre à danser. Mlle Sallé incarne le rôle principal avec grâce et délicatesse, vêtue d'une simple robe de mousseline. Ce ballet est acclamé depuis deux mois et a été demandé par le roi, la reine et toute la cour pour le jour du bénéfice. Dans 'Bacchus et Ariane', Mlle Sallé exprime des émotions intenses, rivalisant avec des acteurs renommés comme Journets, Duclos et Le Couvreur. Sa performance est comparée à celle de la célèbre Oldfields.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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244
p. 772-773
« Le premier de ce mois, le Prince d'Orange, acompagné du Prince de Galles, du Duc de [...] »
Début :
Le premier de ce mois, le Prince d'Orange, acompagné du Prince de Galles, du Duc de [...]
Mots clefs :
Covent Garden Theatre, Marie Sallé, Henry IV
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le premier de ce mois, le Prince d'Orange, acompagné du Prince de Galles, du Duc de [...] »
Le premier de ce mois , le Prince d'Orange ,
accomAVRIL
1714. 773
acompagné du Prince de Galles , du Duc de
Cumberland et des Princesses , alla au Théatre
du Commun Jardin , voir la Tragédie du Roy
H.nry IV. où il y eut une très - nombreuse Assemblée
, et toute la recette de cette Représentation
fut au profit de la Dlle Sallé.
accomAVRIL
1714. 773
acompagné du Prince de Galles , du Duc de
Cumberland et des Princesses , alla au Théatre
du Commun Jardin , voir la Tragédie du Roy
H.nry IV. où il y eut une très - nombreuse Assemblée
, et toute la recette de cette Représentation
fut au profit de la Dlle Sallé.
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245
p. 946-948
Discours, &c. [titre d'après la table]
Début :
Le Lundy 3 de ce mois, les Comédiens François firent l'ouverture de / Ne craignez pas, Messieurs, que j'abuse aujourd'hui de l'extrême bonté que vous [...]
Mots clefs :
Public, Auteur, Comédiens-Français, Ouverture
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Discours, &c. [titre d'après la table]
Ldiens François firent l'ouverture de
leur Theatre , après trois semaines de vacances,
par la Representation d'une Tragédie
nouvelle sous le titre de Marie
Stuard , qui fut fort bien reçûë du public.
Nous en parlerons plus au long.
E Lundy, 3 de ce mois , les Comé-
Avant qu'on commençat la Piéce , le
Sr
MAY. 1734. 947
Sr d'Angeville fit ce compliment au Public
, et il fut fort aplaudi .
,
Ne craignez pas , Messieurs , que j'abuse
aujourd'hui de l'extrême bonté que vous
m'avés témoignée àla clôture de notreTheatre.
Je ne m'ingererai point de vous faire des
dissertations sur les Piéces nouvelles que nous
vous préparons ; je vous dirai simplement
que malgré la juste envie que nous avons de
varier vos amusemens Thalie n'a pas été
aussifavorable à nos voeux que Melpomene.
Je vous annonce , Messieurs , un Poëte Tragique
qui ne cherche d'autre prix de ses travaux
que l'honneur de vos suffrages et qui
nous cache son nom en nous faisant un don
que nous avons trouvé digne d'être partagé
avec vous. Cet Auteur instruit du poids
et de la justesse de vos décisions , ne peut
manquer d'obtenir votre estime ; nous esperons
, Messieurs , que vous accorderez des
louanges sinceres à son Ouvrage , mais vous
ne pouvez vous dispenser d'en donner déja
à sa modestie ; elle fait l'éloge de votre discernement.
Le craindre , c'est en connoître l'étendue
la mesure de la défiance d'un Auteur
est souvent celle de son mérite et toujours
celle du respect qu'il a pour vos jugemens .
Je ne vous répeterai point ici , Messieurs,
L'Auteur de Marie Stuart,
€6
948 MERCURE DE FRANCE
{
1
ce que l'on vous a dit centfois de la finesse
de votregout et de la terreur judicieuse qu'il
inspire aux talens qui lui sont soumis . Fe
scais que nous ne pouvons offrir trop d'encens
à votre équité ; que nous ne pouvons trop célébrer
vos lumieres , mais aussi je réfléchis
avec douleur que nous ne pouvons jamais
complimenterle Public que sur de bonnes qualitez
ou parfaites connoissances qui causent
quelquefois notre ruine. Permettez moi , Messieurs
, de vous rappeller uniquement les
pressantes sollicitations que j'ai pris la liberté
de vous faire pour moi même ; la critique a
condamné ma démarche et vous l'avez iustifiée
; ainsi j'ose implorer une seconde juis votre
indulgence, une pareille récidive est excusable-
Le Magistrat le plus severe pardonne
les redites à un malheureux Plaideur; et jamais
on n'a condamné un Client pour avoir
présenté trop de Placets à son Juge.
leur Theatre , après trois semaines de vacances,
par la Representation d'une Tragédie
nouvelle sous le titre de Marie
Stuard , qui fut fort bien reçûë du public.
Nous en parlerons plus au long.
E Lundy, 3 de ce mois , les Comé-
Avant qu'on commençat la Piéce , le
Sr
MAY. 1734. 947
Sr d'Angeville fit ce compliment au Public
, et il fut fort aplaudi .
,
Ne craignez pas , Messieurs , que j'abuse
aujourd'hui de l'extrême bonté que vous
m'avés témoignée àla clôture de notreTheatre.
Je ne m'ingererai point de vous faire des
dissertations sur les Piéces nouvelles que nous
vous préparons ; je vous dirai simplement
que malgré la juste envie que nous avons de
varier vos amusemens Thalie n'a pas été
aussifavorable à nos voeux que Melpomene.
Je vous annonce , Messieurs , un Poëte Tragique
qui ne cherche d'autre prix de ses travaux
que l'honneur de vos suffrages et qui
nous cache son nom en nous faisant un don
que nous avons trouvé digne d'être partagé
avec vous. Cet Auteur instruit du poids
et de la justesse de vos décisions , ne peut
manquer d'obtenir votre estime ; nous esperons
, Messieurs , que vous accorderez des
louanges sinceres à son Ouvrage , mais vous
ne pouvez vous dispenser d'en donner déja
à sa modestie ; elle fait l'éloge de votre discernement.
Le craindre , c'est en connoître l'étendue
la mesure de la défiance d'un Auteur
est souvent celle de son mérite et toujours
celle du respect qu'il a pour vos jugemens .
Je ne vous répeterai point ici , Messieurs,
L'Auteur de Marie Stuart,
€6
948 MERCURE DE FRANCE
{
1
ce que l'on vous a dit centfois de la finesse
de votregout et de la terreur judicieuse qu'il
inspire aux talens qui lui sont soumis . Fe
scais que nous ne pouvons offrir trop d'encens
à votre équité ; que nous ne pouvons trop célébrer
vos lumieres , mais aussi je réfléchis
avec douleur que nous ne pouvons jamais
complimenterle Public que sur de bonnes qualitez
ou parfaites connoissances qui causent
quelquefois notre ruine. Permettez moi , Messieurs
, de vous rappeller uniquement les
pressantes sollicitations que j'ai pris la liberté
de vous faire pour moi même ; la critique a
condamné ma démarche et vous l'avez iustifiée
; ainsi j'ose implorer une seconde juis votre
indulgence, une pareille récidive est excusable-
Le Magistrat le plus severe pardonne
les redites à un malheureux Plaideur; et jamais
on n'a condamné un Client pour avoir
présenté trop de Placets à son Juge.
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Résumé : Discours, &c. [titre d'après la table]
Le 3 mai 1734, les comédiens français rouvrirent leur théâtre après trois semaines de fermeture avec la représentation de la tragédie 'Marie Stuart', qui fut bien accueillie par le public. Avant la pièce, le sieur d'Angeville s'adressa au public pour souligner qu'il ne chercherait pas à abuser de leur bonté ni à faire des dissertations sur les nouvelles pièces. Il annonça la présence d'un poète tragique anonyme espérant obtenir l'honneur des suffrages du public. D'Angeville loua la modestie de l'auteur et rappela l'importance du jugement du public. Il exprima également la difficulté de complimenter le public sans risquer de causer leur ruine, tout en sollicitant une nouvelle fois leur indulgence.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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246
p. 948-958
LA GRONDEUSE, Comédie nouvelle, représentée par les Comédiens François, le Jeudy 11. Fév. 1734. Extrait.
Début :
ACTEURS. Aminte, veuve, la Dlle Quinault. Cléante, Amant d'Aminte, [...]
Mots clefs :
Cléante, Aminte, Oronte, Dorine, Frère, Caractère, Temps, Grondeuse, Maîtresse, Maître
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LA GRONDEUSE, Comédie nouvelle, représentée par les Comédiens François, le Jeudy 11. Fév. 1734. Extrait.
LA GRONDEUSE , Comédie
nouvelle , représentée par les Comédiens
François, le Jendy 11.Fév.1734.Extrait .
ACTEURS.
Aminte , veuve ,
Cléante
la Dlle Quinault.
Amant d'Aminte , le sieur
Grandval.
Dorine , Suivante d'Aminte , la Dlle
Dangeville.
M.
MAY. 1734. 949
M. Oronte , beau- frere d'Aminte , le sieur
Duchemin.
Dartimont , Voyageur , autre beau-frere,
le sieur Armand.
Le Candidat , jeune Medecin , fils d'O- ›
le sieur Dangeville: ronte ,
Crispin, Valet de Cleante , le Sr Poisson .
M. Double- Croche , Musicien , le sieur
le Grand.
La Scêne est dans la Maison d'Aminte.
Cette Piece , qui est de l'Auteur du
Rendez - vous , n'a pas eû le sort qu'elle
méritoit ; mais malgré son peu de réus
site , es Connoisseurs lui ont rendu justice
. L'Auteur y a soutenu , autant qu'il
est possible , le caractere principal ; il
est vrai que ce même caractere a parû
avec tant d'avantage dans le premier
Acte du Grondeur de M. Palapra , qu'il
étoit difficile d'y ajoûter de nouveaux
traits.. On a fait à sa Comédie le même
reproche qu'on fait encore tous les jours
aux deux derniers Actes du Grondeur ,
dont nous venons de parler ; c'est de
n'avoir pas toujours fourni à son principal
Acteur des occasions de gronder
injustement ; on verra le méme inconvenient
dans l'Extrait que nous allons
donner de la Grondeuse. Au reste pour
ne
950 MERCURE DE FRANCE
ne point enfraindre la loi que nous nous
les
sommes prescrite , nous ne serons que
échos des jugemens que le Public a portez
sur cet ingenieux Ouvrage.
pour
Oronte , beau- frere d'Aminte , ouvre la
Scêne avec Cleante , Amant de cette Veuve
. Elle est encore aimable et jeune , mais
par malheur Cléante elle a un défaut;
c'est d'être grondeuse. Oronte a beau
lui dire qu'il lui a dit cent fois lui - même
que les défauts qui ne sont que des
vices d'humeur , doivent se pardonner ;
il soutient toûjours qu'il y a quelque
chose de plus dans le coeur d'Aminte et
que sa mauvaise humeur part d'un fond
d'indifference et de mépris qu'elle a conçus
pour lui. L'Auteur a pris soin d'établir
dans cette premiere Scêne à quel
coin doit être marqué le veritable caractere
de Grondeur ou de Grondeuse ; on
le voit par ce fragment . C'est Oronte
qui parle.
Ce qu'il y a de certain , c'est que vous
•prenez pour mépris et indifference , une humeur
altiere et mutine qu'elle a eûë toute
sa vie. Cléante.
J'y suis trop interessé pour pouvoir m'y
tromper.
Oronte.
Enfin vous l'avez vûë et aimée avant
qu'elle
MAY. 1734.
951
2
qu'elle fut mariée à feu mon frere ; ne grondoit-
elle pas alors ?
Cleante .
Assurément on forçoit son inclination .
Oronte.
Mariée , tout le monde sçait ....
Cléante.
Peut-on vivre en paix avec un homme
qu'on épouse ?
Oronte.
Mais depuis qu'elle est veuve !
Cléante.
Ah ! le veuvage est un état si triste.
Oronte.
Il a réponse à tout.
Cléante.
Vous ne la verrez tranquille et contente
que quand l'ingrate sera unie à quelqu'un
qui lui plaise. Je m'étois flatté d'être ce
quelqu'un , mais les traitemens que j'ai reçûs
m'ont assez prouvé le contraire,
L'Auteur fait bien voir par ce morceau
de Dialogue , que sí le caractere dominant
de sa Piece n'est pas à la rigueur tel
qu'il devroit être , ce n'est pas faute de
l'avoir bien connu ; passons à l'action .
Oronte fait entendre à Cléante qu'il
veut absolument le réconcilier avec
Aminte ; il lui dit qu'en qualité de parent
du deffunt , il doit la presser
de se
remarier
952 MERCURE DE FRANCE
le
remarier avantageusement ; qu'il doit la
voir pour lui en faire la proposition ,
accompagné de son frere , vieux Voyaguur
, et de son fils le Candidat ; une
petite difficulté l'arrête ; c'est que par
Testament de son frere , Mary d'Aminte
, il est obligé de faire dix mille francs
de rente à Aminte , tant qu'elle ne se
remariera pas , et qu'en lui insinuant de
se marier , il lui deviendra suspect d'interêt.
Cléante lui répond qu'il n'a qu'à
lui offrir de lui continuer cette rente ,
même en se mariant , et que par un Acte
secret il s'engagera , lui Cléante , à lui
en tenir compte. Cette premiere difficulté
étant levée , Oronte s'en va pour
mettre en execution ce qu'il vient de
promettre à Cléante.
Crispin , Valet de Cléante , vient lui
dire qu'Aminte , chez qui il l'avoit envoyé
pour sçavoir si elle étoit visible ,
ne veut pas le voir. Dorine , vient lui confirmer
ce prétendu refus , en lui disant
pourtant qu'il peut entrer s'il veut ; mais
qu'il feroit mieux de revenir dans une
demie heure, parce que sa Maîtresse lui a
parû surprise qu'on vint chez elle si matin.
Cléante picqué , se retire.
Crispin s'amuse quelque temps avec
Dorine , qu'il plaint d'être au service.
d'une
MAY. 1734. 953.
d'une Maîtresse dont l'humeur est si difficile
Dorinc lui répond qu'il y a des
dédommagemens , et que si sa Maîtresse
gronde , elle paye bien et récompense
encore mieux ; elle le prie de se retirer ,
attendu qu'Aminte est intraitable sur
tout ce qui a l'air de galanterie et de rendez-
vous .
Aminte vient et demande à Dorine
d'un ton grondeur , pourquoi Cléante
ne paroît point; Dorine lui répond qu'elle
lui a dit de sa part de revenir dans un
autre temps ; de ma part ! lui dit sa Maîtresse
; la pauvre Suivante n'ose la contredire
absolument , et la laisse s'exhaler
en reproches par cette tirade : Ce sont
tous les jours nouvelles sottises. Sans juges
ment, sans adresse , sans sçavoir ; dans tout
ce qu'elle fait et dans tout ce qu'elle dit , il
semble qu'elle prenne plaisir à me desesperer.
J'excuse sans cesse ; sans cesse je pardonne
, et l'on me regarde encore comme une
femme difficile à contenter. Renvoyer Cléante!
me soutenir que c'est par mon ordre ! a
t'on jamais fait une plus lourde faute ? Et
après l'avoirfaite , l'a- t'on jamais appuyée
d'une plus grande effronterie ? Oh ! je vous
avoue qu'ilfaut bien prendre sur soi pour
souffrir sans rien dire de pareilles bévues.
Si toutes les Scénes de cette Piece,
F avoient
954 MERCURE DE FRANCE
avoient la valeur intrinseque de celle
cy , on ne pourroit pas disconvenir que
le caractere de Grondeuse ne fût parfaitement
rempli ; c'est là gronder veritablement
, quand on n'en a pas lieu ; puisque
Dorine n'a fait qu'executer ses ordres
en renvoyant son Amant , on pourroit
dire qu'elle nie d'avoir donné un
pareil ordre , et que sur ce fondement
elle a raison de gronder ; mais ne seroitce
pas llaa rreennddrree' trop déraisonnable que
de lui faire avouer qu'elle ne gronde
que pour le plaisir de gronder ; il est dif
ficile de tenir un juste milieu entre deux
extrémitez également vicieuses. Crispin
sort pour aller faire revenir son Maître ;
en l'attendant Aminte continuë à quereller
Dorine d'une maniere assez analogue
au caractere que l'Auteur lui a
donné .
Cléante revient ; il essuye de temps en
temps quelques traits de la mauvaise humeur
où Dorine a mis sa Maîtresse ; pour
achever de chagriner Aminte, M. Double-
Croche , son Maître à chanter , arrive ;
elle trouve très- mauvais qu'il ait si mal
pris son temps ; Cléante , pour appuyer
le reproche qu'elle fait au Musicien , lui
dit de se retirer ; Aminte est très choquée
de l'air d'autorité que Cléante ose
prendre
MAY. 1734. 955
prendre chez elle . Cléante voyant qu'il
commence à lui déplaire , prend congé
d'elles où allez- vous donc ? lui dit- elle ,
vous prenez un travers ; Cleante lui dit en
se retirant qu'il vient de se souvenir d'avoir
donné une parole qui l'oblige à la
quitter.
La Scéne suivante qui se passe entre
Aminte et son Maître à chanter est des
plus plaisantes ; il veut chanter malgré
elle , fondé sur le droit que sa Profession
lui donne ; elle ne veut ni chanter ni
l'entendre chanter ; il ne lais e pas d'aller
son train ; chaque mot qu'il chante est
accompagné d'une injure qui lui sert ,
pour ainsi dire , de basse - continuë ;
Double - Croche , se retire aussi mécontent
de son Ecoliere , qu'elle l'est de son
Maître.
·
Enfin , pour achever de pousser à bout
la patience d'Aminte , Oronte vient , suivi
de son frere et de son fils ; cette Scéne .
a parû d'autant moins à sa place , que
la Grondeuse y est la femme du monde
la plus patiente ; on pousse le désagrément
de cette Scéne délibérative , jusqu'à
citer des passages Latins pour appuyer
ce qu'on veut prouver , comme
Aminte s'est long- temps contrainte , elle
lâche la bonde à sa colere avec plus
Fij d'im
956 MERCURE DE FRANCE
d'impétuosité et dit à ces fastidieux harangueurs
: Ah ! je ne puis plus tenir à tant
d'impertinences ; non , non , c'est trop me
contraindre , je suis bien bonne d'écouter les
rêveries d'un radoteur , d'un imbécile et
d'un Invalide. Elle se retire après avoir
lâché ces obligeantes épithetes .
que
Cléante vient , Oronte lui dit qu'il
avoit bien raison, quand il lui soutenoit
que sa belle- soeur n'avoit pour lui qu'in
difference et que mépris ; les trois Orateurs
disgraciez s'en vont ; Cléante ne
doute plus des dispositions d'Aminte à
son égard. Pour le confirmer dans cette
croyance , Dorine vient lui dire qu'elle
n'a jamais vû sa Maîtresse dans une si
grande colere , l'indignation , ajoûte - t'elle,
peinte sur son visage , elle a mis la main
à la plume , et au milieu des plaintes et des
invectives , elle a tracé ce Billet qu'elle m'a
chargée de vous remettre, Cléante ne veut
pas recevoir le Billet , il le croit trop outrageant
pour son amour ; Crispin le reçoit
pour lui , en disant : je pourrois m'en
servir auprès de mon Maître , son amour a
quelque chose de périodique. Son Maître
étoit déja sorti quand il dir cela à Dorine ;
ils sont bien surpris tous deux de le voir
revenir avec Aminte , qui ne sçait pourquoi
il l'évite ; Cléante lui fait des re
proches
MAY . 1734.
957
proches auxquels elle ne comprend rien ,
après le Billet obligeant qu'elle vient de
lui faire remettre par Dorine ; elle lui
demande s'il a lû ce qu'elle lui a écrits
il lui dit qu'il n'a eû garde de lire des
injures ; Crispin dit à part : auroit- elle fait
le Billet tendre exprès pour se ménager une
occasion de gronder. Il donne ce Billet à
Cléante , qui y lit ce qui suit :
La proposition que l'on m'a faite de me
continuer ma pension me donne un soupçon
bien extraordinaire. Si ce que j'imagine est
vrai , vous ne méritez guere l'estime et l'in
clination qu'on a pour vous . Ceux qui m'ont
parlé sur ee ton ont trop peu de generosité ,
pour que je ne voye pas les arrangemens que
vous avez pris avec eux. Comment osezvous
me croire interessée , moi qui vous sacrifierois
tous les biens ? D'où partent des
sentimens si bizares après les assurances
que vous avez de mon coeur , et après m'avoir
déterminée à un second hymen, qui me
seroit odieux avec tout autre qu'avec vous ?
Cléante se jette à ses pieds pour lui
demander pardon ; mais l'Auteur lui fait
reprendre ici son caractere ; elle veut continuer
d'être fâchée ; elle lui dit en le
quittant qu'elle avoit pris soin de mander
le Notaire chez elle ; mais qu'elle
veut lui laisser le temps de refléchir sur
Fiij
ce
958 MERCURE DE FRANCE
ce qu'il doit faire ; Cléante la suit et ne
balance plus à l'épouser; J'aime, dit- il , et
je suis aimé , il faut ceder à ma destinée ,
quand il m'en cotteroit un peu de
repos...
Au reste , tous les Connoisseurs conviennent
que cette petite Comédie est
remplie de traits ingénieux , et l'on peut
juger de l'élegance du stile par les petits
morceaux que nous avons citez .
nouvelle , représentée par les Comédiens
François, le Jendy 11.Fév.1734.Extrait .
ACTEURS.
Aminte , veuve ,
Cléante
la Dlle Quinault.
Amant d'Aminte , le sieur
Grandval.
Dorine , Suivante d'Aminte , la Dlle
Dangeville.
M.
MAY. 1734. 949
M. Oronte , beau- frere d'Aminte , le sieur
Duchemin.
Dartimont , Voyageur , autre beau-frere,
le sieur Armand.
Le Candidat , jeune Medecin , fils d'O- ›
le sieur Dangeville: ronte ,
Crispin, Valet de Cleante , le Sr Poisson .
M. Double- Croche , Musicien , le sieur
le Grand.
La Scêne est dans la Maison d'Aminte.
Cette Piece , qui est de l'Auteur du
Rendez - vous , n'a pas eû le sort qu'elle
méritoit ; mais malgré son peu de réus
site , es Connoisseurs lui ont rendu justice
. L'Auteur y a soutenu , autant qu'il
est possible , le caractere principal ; il
est vrai que ce même caractere a parû
avec tant d'avantage dans le premier
Acte du Grondeur de M. Palapra , qu'il
étoit difficile d'y ajoûter de nouveaux
traits.. On a fait à sa Comédie le même
reproche qu'on fait encore tous les jours
aux deux derniers Actes du Grondeur ,
dont nous venons de parler ; c'est de
n'avoir pas toujours fourni à son principal
Acteur des occasions de gronder
injustement ; on verra le méme inconvenient
dans l'Extrait que nous allons
donner de la Grondeuse. Au reste pour
ne
950 MERCURE DE FRANCE
ne point enfraindre la loi que nous nous
les
sommes prescrite , nous ne serons que
échos des jugemens que le Public a portez
sur cet ingenieux Ouvrage.
pour
Oronte , beau- frere d'Aminte , ouvre la
Scêne avec Cleante , Amant de cette Veuve
. Elle est encore aimable et jeune , mais
par malheur Cléante elle a un défaut;
c'est d'être grondeuse. Oronte a beau
lui dire qu'il lui a dit cent fois lui - même
que les défauts qui ne sont que des
vices d'humeur , doivent se pardonner ;
il soutient toûjours qu'il y a quelque
chose de plus dans le coeur d'Aminte et
que sa mauvaise humeur part d'un fond
d'indifference et de mépris qu'elle a conçus
pour lui. L'Auteur a pris soin d'établir
dans cette premiere Scêne à quel
coin doit être marqué le veritable caractere
de Grondeur ou de Grondeuse ; on
le voit par ce fragment . C'est Oronte
qui parle.
Ce qu'il y a de certain , c'est que vous
•prenez pour mépris et indifference , une humeur
altiere et mutine qu'elle a eûë toute
sa vie. Cléante.
J'y suis trop interessé pour pouvoir m'y
tromper.
Oronte.
Enfin vous l'avez vûë et aimée avant
qu'elle
MAY. 1734.
951
2
qu'elle fut mariée à feu mon frere ; ne grondoit-
elle pas alors ?
Cleante .
Assurément on forçoit son inclination .
Oronte.
Mariée , tout le monde sçait ....
Cléante.
Peut-on vivre en paix avec un homme
qu'on épouse ?
Oronte.
Mais depuis qu'elle est veuve !
Cléante.
Ah ! le veuvage est un état si triste.
Oronte.
Il a réponse à tout.
Cléante.
Vous ne la verrez tranquille et contente
que quand l'ingrate sera unie à quelqu'un
qui lui plaise. Je m'étois flatté d'être ce
quelqu'un , mais les traitemens que j'ai reçûs
m'ont assez prouvé le contraire,
L'Auteur fait bien voir par ce morceau
de Dialogue , que sí le caractere dominant
de sa Piece n'est pas à la rigueur tel
qu'il devroit être , ce n'est pas faute de
l'avoir bien connu ; passons à l'action .
Oronte fait entendre à Cléante qu'il
veut absolument le réconcilier avec
Aminte ; il lui dit qu'en qualité de parent
du deffunt , il doit la presser
de se
remarier
952 MERCURE DE FRANCE
le
remarier avantageusement ; qu'il doit la
voir pour lui en faire la proposition ,
accompagné de son frere , vieux Voyaguur
, et de son fils le Candidat ; une
petite difficulté l'arrête ; c'est que par
Testament de son frere , Mary d'Aminte
, il est obligé de faire dix mille francs
de rente à Aminte , tant qu'elle ne se
remariera pas , et qu'en lui insinuant de
se marier , il lui deviendra suspect d'interêt.
Cléante lui répond qu'il n'a qu'à
lui offrir de lui continuer cette rente ,
même en se mariant , et que par un Acte
secret il s'engagera , lui Cléante , à lui
en tenir compte. Cette premiere difficulté
étant levée , Oronte s'en va pour
mettre en execution ce qu'il vient de
promettre à Cléante.
Crispin , Valet de Cléante , vient lui
dire qu'Aminte , chez qui il l'avoit envoyé
pour sçavoir si elle étoit visible ,
ne veut pas le voir. Dorine , vient lui confirmer
ce prétendu refus , en lui disant
pourtant qu'il peut entrer s'il veut ; mais
qu'il feroit mieux de revenir dans une
demie heure, parce que sa Maîtresse lui a
parû surprise qu'on vint chez elle si matin.
Cléante picqué , se retire.
Crispin s'amuse quelque temps avec
Dorine , qu'il plaint d'être au service.
d'une
MAY. 1734. 953.
d'une Maîtresse dont l'humeur est si difficile
Dorinc lui répond qu'il y a des
dédommagemens , et que si sa Maîtresse
gronde , elle paye bien et récompense
encore mieux ; elle le prie de se retirer ,
attendu qu'Aminte est intraitable sur
tout ce qui a l'air de galanterie et de rendez-
vous .
Aminte vient et demande à Dorine
d'un ton grondeur , pourquoi Cléante
ne paroît point; Dorine lui répond qu'elle
lui a dit de sa part de revenir dans un
autre temps ; de ma part ! lui dit sa Maîtresse
; la pauvre Suivante n'ose la contredire
absolument , et la laisse s'exhaler
en reproches par cette tirade : Ce sont
tous les jours nouvelles sottises. Sans juges
ment, sans adresse , sans sçavoir ; dans tout
ce qu'elle fait et dans tout ce qu'elle dit , il
semble qu'elle prenne plaisir à me desesperer.
J'excuse sans cesse ; sans cesse je pardonne
, et l'on me regarde encore comme une
femme difficile à contenter. Renvoyer Cléante!
me soutenir que c'est par mon ordre ! a
t'on jamais fait une plus lourde faute ? Et
après l'avoirfaite , l'a- t'on jamais appuyée
d'une plus grande effronterie ? Oh ! je vous
avoue qu'ilfaut bien prendre sur soi pour
souffrir sans rien dire de pareilles bévues.
Si toutes les Scénes de cette Piece,
F avoient
954 MERCURE DE FRANCE
avoient la valeur intrinseque de celle
cy , on ne pourroit pas disconvenir que
le caractere de Grondeuse ne fût parfaitement
rempli ; c'est là gronder veritablement
, quand on n'en a pas lieu ; puisque
Dorine n'a fait qu'executer ses ordres
en renvoyant son Amant , on pourroit
dire qu'elle nie d'avoir donné un
pareil ordre , et que sur ce fondement
elle a raison de gronder ; mais ne seroitce
pas llaa rreennddrree' trop déraisonnable que
de lui faire avouer qu'elle ne gronde
que pour le plaisir de gronder ; il est dif
ficile de tenir un juste milieu entre deux
extrémitez également vicieuses. Crispin
sort pour aller faire revenir son Maître ;
en l'attendant Aminte continuë à quereller
Dorine d'une maniere assez analogue
au caractere que l'Auteur lui a
donné .
Cléante revient ; il essuye de temps en
temps quelques traits de la mauvaise humeur
où Dorine a mis sa Maîtresse ; pour
achever de chagriner Aminte, M. Double-
Croche , son Maître à chanter , arrive ;
elle trouve très- mauvais qu'il ait si mal
pris son temps ; Cléante , pour appuyer
le reproche qu'elle fait au Musicien , lui
dit de se retirer ; Aminte est très choquée
de l'air d'autorité que Cléante ose
prendre
MAY. 1734. 955
prendre chez elle . Cléante voyant qu'il
commence à lui déplaire , prend congé
d'elles où allez- vous donc ? lui dit- elle ,
vous prenez un travers ; Cleante lui dit en
se retirant qu'il vient de se souvenir d'avoir
donné une parole qui l'oblige à la
quitter.
La Scéne suivante qui se passe entre
Aminte et son Maître à chanter est des
plus plaisantes ; il veut chanter malgré
elle , fondé sur le droit que sa Profession
lui donne ; elle ne veut ni chanter ni
l'entendre chanter ; il ne lais e pas d'aller
son train ; chaque mot qu'il chante est
accompagné d'une injure qui lui sert ,
pour ainsi dire , de basse - continuë ;
Double - Croche , se retire aussi mécontent
de son Ecoliere , qu'elle l'est de son
Maître.
·
Enfin , pour achever de pousser à bout
la patience d'Aminte , Oronte vient , suivi
de son frere et de son fils ; cette Scéne .
a parû d'autant moins à sa place , que
la Grondeuse y est la femme du monde
la plus patiente ; on pousse le désagrément
de cette Scéne délibérative , jusqu'à
citer des passages Latins pour appuyer
ce qu'on veut prouver , comme
Aminte s'est long- temps contrainte , elle
lâche la bonde à sa colere avec plus
Fij d'im
956 MERCURE DE FRANCE
d'impétuosité et dit à ces fastidieux harangueurs
: Ah ! je ne puis plus tenir à tant
d'impertinences ; non , non , c'est trop me
contraindre , je suis bien bonne d'écouter les
rêveries d'un radoteur , d'un imbécile et
d'un Invalide. Elle se retire après avoir
lâché ces obligeantes épithetes .
que
Cléante vient , Oronte lui dit qu'il
avoit bien raison, quand il lui soutenoit
que sa belle- soeur n'avoit pour lui qu'in
difference et que mépris ; les trois Orateurs
disgraciez s'en vont ; Cléante ne
doute plus des dispositions d'Aminte à
son égard. Pour le confirmer dans cette
croyance , Dorine vient lui dire qu'elle
n'a jamais vû sa Maîtresse dans une si
grande colere , l'indignation , ajoûte - t'elle,
peinte sur son visage , elle a mis la main
à la plume , et au milieu des plaintes et des
invectives , elle a tracé ce Billet qu'elle m'a
chargée de vous remettre, Cléante ne veut
pas recevoir le Billet , il le croit trop outrageant
pour son amour ; Crispin le reçoit
pour lui , en disant : je pourrois m'en
servir auprès de mon Maître , son amour a
quelque chose de périodique. Son Maître
étoit déja sorti quand il dir cela à Dorine ;
ils sont bien surpris tous deux de le voir
revenir avec Aminte , qui ne sçait pourquoi
il l'évite ; Cléante lui fait des re
proches
MAY . 1734.
957
proches auxquels elle ne comprend rien ,
après le Billet obligeant qu'elle vient de
lui faire remettre par Dorine ; elle lui
demande s'il a lû ce qu'elle lui a écrits
il lui dit qu'il n'a eû garde de lire des
injures ; Crispin dit à part : auroit- elle fait
le Billet tendre exprès pour se ménager une
occasion de gronder. Il donne ce Billet à
Cléante , qui y lit ce qui suit :
La proposition que l'on m'a faite de me
continuer ma pension me donne un soupçon
bien extraordinaire. Si ce que j'imagine est
vrai , vous ne méritez guere l'estime et l'in
clination qu'on a pour vous . Ceux qui m'ont
parlé sur ee ton ont trop peu de generosité ,
pour que je ne voye pas les arrangemens que
vous avez pris avec eux. Comment osezvous
me croire interessée , moi qui vous sacrifierois
tous les biens ? D'où partent des
sentimens si bizares après les assurances
que vous avez de mon coeur , et après m'avoir
déterminée à un second hymen, qui me
seroit odieux avec tout autre qu'avec vous ?
Cléante se jette à ses pieds pour lui
demander pardon ; mais l'Auteur lui fait
reprendre ici son caractere ; elle veut continuer
d'être fâchée ; elle lui dit en le
quittant qu'elle avoit pris soin de mander
le Notaire chez elle ; mais qu'elle
veut lui laisser le temps de refléchir sur
Fiij
ce
958 MERCURE DE FRANCE
ce qu'il doit faire ; Cléante la suit et ne
balance plus à l'épouser; J'aime, dit- il , et
je suis aimé , il faut ceder à ma destinée ,
quand il m'en cotteroit un peu de
repos...
Au reste , tous les Connoisseurs conviennent
que cette petite Comédie est
remplie de traits ingénieux , et l'on peut
juger de l'élegance du stile par les petits
morceaux que nous avons citez .
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Résumé : LA GRONDEUSE, Comédie nouvelle, représentée par les Comédiens François, le Jeudy 11. Fév. 1734. Extrait.
La pièce 'La Grondeuse' est une comédie jouée par les Comédiens Français le 11 février 1734. Elle met en scène Aminte, une jeune veuve aimable mais au caractère difficile, et Cléante, son amant. La pièce commence avec Oronte, le beau-frère d'Aminte, qui discute avec Cléante des défauts d'Aminte, qu'il attribue à une indifférence et un mépris envers Cléante. Aminte, malgré son amour pour Cléante, manifeste une humeur altière et mutine. Oronte souhaite réconcilier Cléante et Aminte et propose de lui trouver un nouveau mari. Cependant, un testament oblige à verser une rente à Aminte tant qu'elle ne se remarie pas. Cléante suggère de continuer cette rente par un acte secret. Oronte part alors mettre en œuvre cette proposition. Pendant ce temps, Crispin, valet de Cléante, et Dorine, suivante d'Aminte, échangent sur le caractère difficile de leur maîtresse. Aminte, mécontente, reproche à Dorine d'avoir renvoyé Cléante. Cléante revient et essuie les reproches d'Aminte, qui se montre de plus en plus irritable. La situation se complique avec l'arrivée de M. Double-Croche, le maître à chanter d'Aminte, et des beaux-frères d'Aminte, qui tentent de la convaincre de se remarier. Aminte finit par exploser de colère contre ses visiteurs et se retire. Cléante, après avoir reçu un billet d'Aminte, se jette à ses pieds pour lui demander pardon. Aminte, reprenant son caractère grondeur, lui laisse le temps de réfléchir avant de l'épouser. La pièce se termine sur la décision de Cléante d'accepter son destin et d'épouser Aminte. Les connaisseurs reconnaissent l'ingéniosité des traits de la pièce et l'élégance de son style.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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247
p. 958
La Nouveauté, Comédie, [titre d'après la table]
Début :
Le 18 de ce mois, on remit au Theatre François la petite Comédie du feu sieur [...]
Mots clefs :
Nouveauté
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : La Nouveauté, Comédie, [titre d'après la table]
Le 18 de ce mois , on remit au Theatre
François la petite Comédie du feu sieur
le Grand , Comédien , intitulée la Nouveauté
, laquelle fit beaucoup de plaisir.
On y voit une Scéne très originale et très
bien exécutée , entre le Sr Dufresne et la
Dile Quinaut sa soeur. C'est un essai pour
le projet d'un Opera sans paroles ; dans
le fragment dont il s'agit ici , on exprime
le sujet par l'action et le chant , en nom
mant seulement toutes les notes . Nous
avons parlé de cette Piéce au mois de
Janvier 17.7. pag. 14c.
François la petite Comédie du feu sieur
le Grand , Comédien , intitulée la Nouveauté
, laquelle fit beaucoup de plaisir.
On y voit une Scéne très originale et très
bien exécutée , entre le Sr Dufresne et la
Dile Quinaut sa soeur. C'est un essai pour
le projet d'un Opera sans paroles ; dans
le fragment dont il s'agit ici , on exprime
le sujet par l'action et le chant , en nom
mant seulement toutes les notes . Nous
avons parlé de cette Piéce au mois de
Janvier 17.7. pag. 14c.
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Résumé : La Nouveauté, Comédie, [titre d'après la table]
Le 18 du mois, la pièce 'La Nouveauté' de Le Grand a été jouée au Théâtre François. Elle a été bien accueillie par le public. La scène la plus remarquable, interprétée par Dufresne et sa sœur, la Dile Quinaut, est un opéra sans paroles. Les notes sont nommées à la place des mots. La pièce avait déjà été mentionnée en janvier 1777.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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248
p. 958-959
Nouvelle Actrice, [titre d'après la table]
Début :
Le 19, on représenta la Tragédie de Britannicus et les Folies amoureuses. La Dlle [...]
Mots clefs :
Comédie, Tragédie, Iphigénie, Britannicus, Mademoiselle Connell
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelle Actrice, [titre d'après la table]
Le 19 , on représenta la Tragédie de
Britannicus et les Folies amoureuses .LaDlle
Conel , jeune personne fort bien faite
pleine d'agremens , qui a déja joué quantité
de Rôles en Bourgeoisie , mais qui
n'étoit jamais montée sur aucun Theatre
public , fut fort aplaudie dans le rôle de
Junie et dans celui d'Agathe.
MAY. 1734. 959
Ĺë 20 , on joù la Comédie du Philo
sophe marié,dont le Sr de Montmenil templit
le principal rôle avec aplaudissement,
à la place du Sr Quinaut , qui a de nouveau
quitté la Comédie."
Le 24 la nouvelle Actrice fut encore
fort aplaudie dans la Tragédie d'Iphigenie
et dans la Comédie du Florentin. Elle oüa
dans la premiere le rôle d'Iphigenie, cesse
dans l'autre celui d'Hortense.
Britannicus et les Folies amoureuses .LaDlle
Conel , jeune personne fort bien faite
pleine d'agremens , qui a déja joué quantité
de Rôles en Bourgeoisie , mais qui
n'étoit jamais montée sur aucun Theatre
public , fut fort aplaudie dans le rôle de
Junie et dans celui d'Agathe.
MAY. 1734. 959
Ĺë 20 , on joù la Comédie du Philo
sophe marié,dont le Sr de Montmenil templit
le principal rôle avec aplaudissement,
à la place du Sr Quinaut , qui a de nouveau
quitté la Comédie."
Le 24 la nouvelle Actrice fut encore
fort aplaudie dans la Tragédie d'Iphigenie
et dans la Comédie du Florentin. Elle oüa
dans la premiere le rôle d'Iphigenie, cesse
dans l'autre celui d'Hortense.
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Résumé : Nouvelle Actrice, [titre d'après la table]
Du 19 au 24 mai 1734, plusieurs pièces furent représentées. Mademoiselle Conel fut applaudie pour ses rôles de Junie dans 'Britannicus', d'Agathe dans 'Les Folies amoureuses', d'Iphigénie dans 'Iphigénie' et d'Hortense dans 'Le Florentin'. Le 20 mai, Monsieur de Montmenil joua le rôle principal dans 'Le Philosophe marié'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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249
p. 959-960
« Le 4 May, l'Académie Royale de Musique fit l'ouverture du Theatre par la [...] »
Début :
Le 4 May, l'Académie Royale de Musique fit l'ouverture du Theatre par la [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique, Omphale, Hippolyte et Aricie, Ballet des Éléments, Timon le misanthrope
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 4 May, l'Académie Royale de Musique fit l'ouverture du Theatre par la [...] »
Le 4 May , l'Académie Royale de Musique
fit l'ouverture du Theatre par la
Pastoraled' Issé,qu'on revoit toujours avec
plaisir.
Le 13 ,
on donna par extraordinaire
pour la capitation
des Acteurs , l'Opéra
d'Ophale
, qu'on avoit repris l'année
dernière au mois de Janv.er. Cette Piéce
fut suivie d'une des Entrées du Billet des
Sens , qui a pour titre la Vue , dans la
quelle les Dlies le Maure et Petitpas
joüerent les rôles de l'Amour et de Zephire
avec beaucoup
d'aplaudissement
.
Après quelques Représentations d'Hy
polite et Arici , on remit au Theatre la
Jeudi 27 de ce mois , le Ballet des Elemens
de la composition de M. Destouches . Le
Poëme est de M. Roy. Il fut très aplaudi .
Fiiij
Le
so MERCURE DE FRANCE
Le 3 May , les Comédiens Italiens firent
l'ouverture de leur Theatre par la
Comédie de Timon le Misantrope , ornéc
de Chants et de Danses . Cette Piéce fut
précédée du compliment qu'on fait ordinairement
à la Rentrée du Théatre , qui
fut prononcé avec aplaudissement par le
Sr Thomassin dont le public aime le
badinage.
fit l'ouverture du Theatre par la
Pastoraled' Issé,qu'on revoit toujours avec
plaisir.
Le 13 ,
on donna par extraordinaire
pour la capitation
des Acteurs , l'Opéra
d'Ophale
, qu'on avoit repris l'année
dernière au mois de Janv.er. Cette Piéce
fut suivie d'une des Entrées du Billet des
Sens , qui a pour titre la Vue , dans la
quelle les Dlies le Maure et Petitpas
joüerent les rôles de l'Amour et de Zephire
avec beaucoup
d'aplaudissement
.
Après quelques Représentations d'Hy
polite et Arici , on remit au Theatre la
Jeudi 27 de ce mois , le Ballet des Elemens
de la composition de M. Destouches . Le
Poëme est de M. Roy. Il fut très aplaudi .
Fiiij
Le
so MERCURE DE FRANCE
Le 3 May , les Comédiens Italiens firent
l'ouverture de leur Theatre par la
Comédie de Timon le Misantrope , ornéc
de Chants et de Danses . Cette Piéce fut
précédée du compliment qu'on fait ordinairement
à la Rentrée du Théatre , qui
fut prononcé avec aplaudissement par le
Sr Thomassin dont le public aime le
badinage.
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Résumé : « Le 4 May, l'Académie Royale de Musique fit l'ouverture du Theatre par la [...] »
Le 4 mai, l'Académie Royale de Musique débuta sa saison avec la pastorale 'Issé', saluée par le public. Le 13 mai, l'opéra 'Ophale' fut joué exceptionnellement pour la capitation des acteurs. Cette pièce, déjà représentée en janvier précédent, fut suivie d'une entrée du 'Billet des Sens' intitulée 'la Vue', avec les acteurs Dlies le Maure et Petitpas dans les rôles de l'Amour et de Zéphire. Après quelques représentations d''Hypolite et Arici', le ballet 'Les Éléments', composé par M. Destouches et avec un poème de M. Roy, fut remis au théâtre le 27 mai et reçut des applaudissements enthousiastes. Le 3 mai, les Comédiens Italiens commencèrent leur saison avec la comédie 'Timon le Misantrope', enrichie de chants et de danses. Cette pièce fut précédée d'un compliment de rentrée prononcé par le sieur Thomassin, apprécié pour son badinage.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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250
p. 960-967
EXTRAIT de la Comédie de l'Apologie du siécle, ou Momus corrigé, représenté au Theatre Italien le premier Avril.
Début :
Tout le monde convient que l'ironie n'a jamais été employée avec plus de finesse [...]
Mots clefs :
Momus, Ironie, Génie du siècle, Philinte, Actrice, Esprit, Candeur, Vertus, Modestie , Constance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT de la Comédie de l'Apologie du siécle, ou Momus corrigé, représenté au Theatre Italien le premier Avril.
EXTRAIT de la Comédie de l'Apolo
gie du siècle , on Momus corrigé , représenté
au Theatre Italien le premier
Avril.
Tout le monde convient que l'ironie
n'a jamais été employée avec plus de fidans
cette Piéce ; en voici les
nesse que
Acteurs.
Momus ,
Une Actrice ;
Philinte
L'indifferent ;
Le Génie du siécle,
Terpsicore
›
le sieur Romagnesi.
la Dlle Belmont.
le sieur Ricoboni.
le sieur Dominique.
la Dlle Silvia.
la Dlle Roland.
Momus ouvre la Scéne , un bouquet à
la main , au lieu de Marote : une Actrice
le suit , et lui témoigne la surprise où son
nouvel attribut la jette ; et comme ce censeur
des Hommes & des Dieux lui dit
qu'il
MAY. 1734. 961
qu'il est corrigé et qu'au lieu de tout
blâmer , il veut tout loüer , elle lui répond
:
Allons , Seigneur ; vous vous mocquez de moi ;
On sçait que vous aimez à rire ;
Et l'encens de Momus est un trait de Satyre.
Momus persiste dans son hipocrisie
on le peut voir dans cette tirade , qui
lui tient lieu d'attestation.
Depuis qu'en bien tout le monde est changé ,
Scachez que je suis corrigé ;
De la douceur que je respire ,
Ces fleurs sont un garant qu'on ne peut contre
dire :
La Critique est hors de saison
Et le siécle vit de façon ,
Qu'il ne convient plus d'en médire
Il fait voir tant d'esprit , de candeur , de raison,
Qu'en dépit qu'on en ait il faut bien qu'on l'ad
mire.
Plein de sagesse , exemt d'abus ,
De ridicules , d'injustices
Il m'oblige à changer d'humeur & d'attributs
A l'avenir je ne dois plus
Faire la Satyre des vices
Que par l'éloge de vertus .
Cette résolution de Momus fait trembler
l'Actrice , et l'oblige à lui répondre.
FV
Mais
262 MERCURE DE FRANCES
Mais jamais au panegirique
Ces lieux ne furent consacrez ;
Et de tout temps sur la Critique
Nos revenus sont assurez ;
Sans elle serviteur au Theatre italique.
A cette Actrice succede Philinte , lo
plus mordicant de tous les hommes.
Momus le blâme malignement de l'implacable
haine qu'il a concuë contre tout
le genre humain ; pour prouver la mali
gnité de Momus , il n'y a qu'à jetter les
yeux sur ce fragment de Dialogue :
Philinte .
Pour m'enseigner cet art où vous semblez primer
Apprenez moi d'abord comment je dois nommer
Une frippone , une coquette ,
Dont la bouche me jure un amour sans égal
Et qui l'instant d'après me trahit en cachette
Et favorise mon Rival &
Momus.
Mais on l'appelle une femme ordinaire &
Philinte .
Et l'Ami déloyal qui m'enleve la Belle ;
Et qui m'emprunte mon argent
Pour triompher de l'infidelle ,
Comment l'appelle- t'ondans ce siécle charmane
MoMA
Ÿ . 1734. 963
Momus.
Un Ami foible et que l'amour emporte ;
On doit avoir pitié d'un homme de la sorte,
Philinte.
Momus est bien compatissant.
Et de quelle façon est - ce qu'il qualifie
Un Procureur avide et qui sans modestie
De toutes mains reçoit double valeur
Et qui me vend à ma Partie ?
Momus.
Mais , je l'appelle un Procureur.
Après avoir fait passer en revûë plu
sieurs autres professions , voici par quel
trait Momus finit ses prétendus correctifss
Philinte .
Pour finir en un mot : comment est- ce qu'om
nomme
L'animal vicieux , esclave des plaisiss
Qui manque
à tous ses devoirs.
Momus.
Phomme & c.
Cet Extrait passeroit les bornes que
nous nous sommes pre crites , si nous
mettions tous les traits aillants qui ‹ ortent
de cette Piece. Nous finirons par
F vj que34
MERCURE DE FRANCE
quelques traits des deux plus bellesScenes ,
la premiere est entre Momus et un Indifferent
de profession , qui ne veut ni blamer
, ni admirer . Voici comme il parle à
la fin de sa Scene :
Que l'on possede un mince , ou bien un grand.
génie ,
Je ne méprise pas , mais je n'admire point.
Un malheureux , à qui la nature cruelle
A même refusé sa plus simple faveur ,
En est assez puni par la douleur mortelle
Que lui cause en secret cet excès de rigueur
Qui l'avilit à ses yeux, même
Sans que j'aille ajouter encor à son maiheur,
En l'accablant du poids de mon mépris extrême,
En le perçant d'un ris mocqueur.
Un triomphe si bas et qu'on obtient sans peine
Deshonore l'esprit et fair outrage au coeur
Alors , plus la victoire est pleine ,
Plus son éclat honteux dégrade le vainqueur
Quant à celui sur qui le sort propice
A liberalement versé
Tous les dons séducteurs qu'accorde son caprice
N'en est - il pas assez recompensé ,
Par ces mêmes présents de son étoile heureuse
Et la comparaison fatteuse
Qu'il fait de son mérite avec celui d'autrui ?
Il ne le sent que trop ce mérite suprême ,
Et nous pouvons nous reposer sur lui
Du
MAY.
964
1734.
Du soin de s'applaudir lui même.
La derniere Scene dont on vient de
parler , est entre le Génie du siécle & Momus
; voici le portrait que ce Génie fait
de lui-même :
Du siécle en moi vous voyez le Génie ;
Remplissant l'Univers de nouvelles clartez,
J'ai des vieux préjugez banni la tyrannic ,
De nos Ayeux bornez corrigé les abus
D'une constance ridicule
Affranchi les Amours qui ne soupirent plus ,
Degagé l'amitié des devoirs superflus ,
La probité du poids d'un vain scrupule
Et j'ai créé d'autres vertus .
Momus lui répond d'un ton ironique a
Cette reforme est des plus belles
On fait tout ce qu'on veut , quand on a de l'èsprit
;
Mais les vieilles vertus n'ont donc plus de crédits
Le Génie.
Non ; j'ai sur leur rüine établi les nouvelles
Ces controleuses éternelles ,
Etoient dures à vivre et d'un sot entretien.
Momus.
De m'avertir vous faites bien ;
Car j'aurois dans mon ignorance ,
Loüié
966 MERCURE DE FRANCE
Loué bêtement la constance :
La candeur , la fi lelité ,
La modestie et la franchise
La bonne foi , l'integrité
Le Génie.
Vous auriez fait une insigne méprise.
Apprenez qu'aujourd'hui la candeur est sottise
La constance fadeur , ou défaut d'agréments ,
La modestie un vice des plus grands ,
Qui par la crainte qu'elle excite ;
Ote la grace , étouffe les talents ,
Et fait souvent un sot d'un homme de merite
La bonne foi produit les plus petits Esprits,
Qui n'osant s'écarter de la marche commune ,
Ne font jamais un pas vers la fortune ;
L'integrité , des Gens durs , impolis ,
Sur qui ne peuvent rien les Parens , les Amis ,
Et qui refusent tout aux Dames ;
La franchise des Etourdis ,
Et la fidelité fait les plus sottes femmes..
Il fiur avouer que l'Auteur a tour
Isprit du monde ; mais il est quelque
fois dangereux d'n trop voir et tout
le monde convient que le siécle dont il
prétend fire l'apo ogie , n'est pas mieux
traité dans cette Piéce qui dans Srprise
de la haine ; le Lecteur en pourra juger
en
MAY. 1734. 967
en examinant certe derniere tirade. Voici
le Vaudeville qui termine l'Ouvrage :
Regardons en beau le Monde ,
Trop poli pour qu'on le fronde
Approuvons également :
Qu'on pardonne , ou qu'on se vange
L'un est juste , et l'autre est grand
Tout est digne de loüange.
Qu'à sa guise chacun aime ;
Ne b'âmons aucun systême ,
On doit suivre son penchant ;
C'est sagesse , quand on change .
Vertu , quand on est constant,
Tout est digne de loüange.
Cette Piéce qui est de la composition de
M. de Boissy, a été reçûe très favorablement
du Public ; elle est parfaitement
bien représentée.
gie du siècle , on Momus corrigé , représenté
au Theatre Italien le premier
Avril.
Tout le monde convient que l'ironie
n'a jamais été employée avec plus de fidans
cette Piéce ; en voici les
nesse que
Acteurs.
Momus ,
Une Actrice ;
Philinte
L'indifferent ;
Le Génie du siécle,
Terpsicore
›
le sieur Romagnesi.
la Dlle Belmont.
le sieur Ricoboni.
le sieur Dominique.
la Dlle Silvia.
la Dlle Roland.
Momus ouvre la Scéne , un bouquet à
la main , au lieu de Marote : une Actrice
le suit , et lui témoigne la surprise où son
nouvel attribut la jette ; et comme ce censeur
des Hommes & des Dieux lui dit
qu'il
MAY. 1734. 961
qu'il est corrigé et qu'au lieu de tout
blâmer , il veut tout loüer , elle lui répond
:
Allons , Seigneur ; vous vous mocquez de moi ;
On sçait que vous aimez à rire ;
Et l'encens de Momus est un trait de Satyre.
Momus persiste dans son hipocrisie
on le peut voir dans cette tirade , qui
lui tient lieu d'attestation.
Depuis qu'en bien tout le monde est changé ,
Scachez que je suis corrigé ;
De la douceur que je respire ,
Ces fleurs sont un garant qu'on ne peut contre
dire :
La Critique est hors de saison
Et le siécle vit de façon ,
Qu'il ne convient plus d'en médire
Il fait voir tant d'esprit , de candeur , de raison,
Qu'en dépit qu'on en ait il faut bien qu'on l'ad
mire.
Plein de sagesse , exemt d'abus ,
De ridicules , d'injustices
Il m'oblige à changer d'humeur & d'attributs
A l'avenir je ne dois plus
Faire la Satyre des vices
Que par l'éloge de vertus .
Cette résolution de Momus fait trembler
l'Actrice , et l'oblige à lui répondre.
FV
Mais
262 MERCURE DE FRANCES
Mais jamais au panegirique
Ces lieux ne furent consacrez ;
Et de tout temps sur la Critique
Nos revenus sont assurez ;
Sans elle serviteur au Theatre italique.
A cette Actrice succede Philinte , lo
plus mordicant de tous les hommes.
Momus le blâme malignement de l'implacable
haine qu'il a concuë contre tout
le genre humain ; pour prouver la mali
gnité de Momus , il n'y a qu'à jetter les
yeux sur ce fragment de Dialogue :
Philinte .
Pour m'enseigner cet art où vous semblez primer
Apprenez moi d'abord comment je dois nommer
Une frippone , une coquette ,
Dont la bouche me jure un amour sans égal
Et qui l'instant d'après me trahit en cachette
Et favorise mon Rival &
Momus.
Mais on l'appelle une femme ordinaire &
Philinte .
Et l'Ami déloyal qui m'enleve la Belle ;
Et qui m'emprunte mon argent
Pour triompher de l'infidelle ,
Comment l'appelle- t'ondans ce siécle charmane
MoMA
Ÿ . 1734. 963
Momus.
Un Ami foible et que l'amour emporte ;
On doit avoir pitié d'un homme de la sorte,
Philinte.
Momus est bien compatissant.
Et de quelle façon est - ce qu'il qualifie
Un Procureur avide et qui sans modestie
De toutes mains reçoit double valeur
Et qui me vend à ma Partie ?
Momus.
Mais , je l'appelle un Procureur.
Après avoir fait passer en revûë plu
sieurs autres professions , voici par quel
trait Momus finit ses prétendus correctifss
Philinte .
Pour finir en un mot : comment est- ce qu'om
nomme
L'animal vicieux , esclave des plaisiss
Qui manque
à tous ses devoirs.
Momus.
Phomme & c.
Cet Extrait passeroit les bornes que
nous nous sommes pre crites , si nous
mettions tous les traits aillants qui ‹ ortent
de cette Piece. Nous finirons par
F vj que34
MERCURE DE FRANCE
quelques traits des deux plus bellesScenes ,
la premiere est entre Momus et un Indifferent
de profession , qui ne veut ni blamer
, ni admirer . Voici comme il parle à
la fin de sa Scene :
Que l'on possede un mince , ou bien un grand.
génie ,
Je ne méprise pas , mais je n'admire point.
Un malheureux , à qui la nature cruelle
A même refusé sa plus simple faveur ,
En est assez puni par la douleur mortelle
Que lui cause en secret cet excès de rigueur
Qui l'avilit à ses yeux, même
Sans que j'aille ajouter encor à son maiheur,
En l'accablant du poids de mon mépris extrême,
En le perçant d'un ris mocqueur.
Un triomphe si bas et qu'on obtient sans peine
Deshonore l'esprit et fair outrage au coeur
Alors , plus la victoire est pleine ,
Plus son éclat honteux dégrade le vainqueur
Quant à celui sur qui le sort propice
A liberalement versé
Tous les dons séducteurs qu'accorde son caprice
N'en est - il pas assez recompensé ,
Par ces mêmes présents de son étoile heureuse
Et la comparaison fatteuse
Qu'il fait de son mérite avec celui d'autrui ?
Il ne le sent que trop ce mérite suprême ,
Et nous pouvons nous reposer sur lui
Du
MAY.
964
1734.
Du soin de s'applaudir lui même.
La derniere Scene dont on vient de
parler , est entre le Génie du siécle & Momus
; voici le portrait que ce Génie fait
de lui-même :
Du siécle en moi vous voyez le Génie ;
Remplissant l'Univers de nouvelles clartez,
J'ai des vieux préjugez banni la tyrannic ,
De nos Ayeux bornez corrigé les abus
D'une constance ridicule
Affranchi les Amours qui ne soupirent plus ,
Degagé l'amitié des devoirs superflus ,
La probité du poids d'un vain scrupule
Et j'ai créé d'autres vertus .
Momus lui répond d'un ton ironique a
Cette reforme est des plus belles
On fait tout ce qu'on veut , quand on a de l'èsprit
;
Mais les vieilles vertus n'ont donc plus de crédits
Le Génie.
Non ; j'ai sur leur rüine établi les nouvelles
Ces controleuses éternelles ,
Etoient dures à vivre et d'un sot entretien.
Momus.
De m'avertir vous faites bien ;
Car j'aurois dans mon ignorance ,
Loüié
966 MERCURE DE FRANCE
Loué bêtement la constance :
La candeur , la fi lelité ,
La modestie et la franchise
La bonne foi , l'integrité
Le Génie.
Vous auriez fait une insigne méprise.
Apprenez qu'aujourd'hui la candeur est sottise
La constance fadeur , ou défaut d'agréments ,
La modestie un vice des plus grands ,
Qui par la crainte qu'elle excite ;
Ote la grace , étouffe les talents ,
Et fait souvent un sot d'un homme de merite
La bonne foi produit les plus petits Esprits,
Qui n'osant s'écarter de la marche commune ,
Ne font jamais un pas vers la fortune ;
L'integrité , des Gens durs , impolis ,
Sur qui ne peuvent rien les Parens , les Amis ,
Et qui refusent tout aux Dames ;
La franchise des Etourdis ,
Et la fidelité fait les plus sottes femmes..
Il fiur avouer que l'Auteur a tour
Isprit du monde ; mais il est quelque
fois dangereux d'n trop voir et tout
le monde convient que le siécle dont il
prétend fire l'apo ogie , n'est pas mieux
traité dans cette Piéce qui dans Srprise
de la haine ; le Lecteur en pourra juger
en
MAY. 1734. 967
en examinant certe derniere tirade. Voici
le Vaudeville qui termine l'Ouvrage :
Regardons en beau le Monde ,
Trop poli pour qu'on le fronde
Approuvons également :
Qu'on pardonne , ou qu'on se vange
L'un est juste , et l'autre est grand
Tout est digne de loüange.
Qu'à sa guise chacun aime ;
Ne b'âmons aucun systême ,
On doit suivre son penchant ;
C'est sagesse , quand on change .
Vertu , quand on est constant,
Tout est digne de loüange.
Cette Piéce qui est de la composition de
M. de Boissy, a été reçûe très favorablement
du Public ; elle est parfaitement
bien représentée.
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Résumé : EXTRAIT de la Comédie de l'Apologie du siécle, ou Momus corrigé, représenté au Theatre Italien le premier Avril.
L'extrait de la Comédie de l'Apolo, intitulée 'Momus corrigé', a été représenté au Théâtre Italien le 1er avril. La pièce est appréciée pour son ironie et son utilisation fidèle de ce ton. Les rôles principaux sont interprétés par Momus, joué par une actrice, Philinte par le sieur Ricoboni, et le Génie du siècle par le sieur Dominique. Momus, tenant un bouquet à la place de la marotte, annonce qu'il est corrigé et souhaite louer plutôt que blâmer, ce qui surprend une actrice. Momus persiste dans son hypocrisie, affirmant que le siècle est plein d'esprit, de candeur et de raison, ce qui justifie son changement d'attitude. L'actrice réagit en soulignant que le théâtre italien repose sur la critique. Philinte, décrit comme le plus mordant des hommes, est blâmé par Momus pour sa haine implacable envers le genre humain. Momus utilise des dialogues pour illustrer sa vision des vices et des vertus du siècle. Une scène notable oppose Momus à un Indifférent, qui refuse de blâmer ou d'admirer, préférant éviter le mépris et le ris moqueur. La pièce se termine par une scène entre le Génie du siècle et Momus. Le Génie décrit les nouvelles vertus qu'il a créées, remplaçant les anciennes. Momus répond ironiquement, soulignant que les vieilles vertus n'ont plus de crédit. Le Génie explique que la candeur, la constance, la modestie, la bonne foi, l'intégrité et la franchise sont désormais perçues négativement. La pièce, composée par M. de Boissy, a été bien reçue par le public et est parfaitement représentée.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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