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1
p. 1638-1651
Pelopée, Tragédie nouvelle[.] Extrait. [titre d'après la table]
Début :
Le 18 Juillet, les Comédiens François représenterent pour la premiere fois, la Tragedie de [...]
Mots clefs :
Pélopée, Comédie-Française, Thyeste, Atrée, Sostrate, Égisthe, Vers, Amour, Mort, Dieux, Fils, Eurymédon, Hymen, Père, Secours, Yeux, Vengeance, Secret, Coeur, Spectateurs, Billet
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texteReconnaissance textuelle : Pelopée, Tragédie nouvelle[.] Extrait. [titre d'après la table]
Le 18 Juillet , les Comédiens François représenterent
pour la premiere fois , la Tragedie de
Pélopée. Cette Piece , dont M. le Chevalier Pellegrin
est l'Autheur , fut reçue avec un applaudissement
général , et fit esperer un grand succès
malAJUILLET.
1733.
1733. 1539
malgré Pincommodité de la saison ; nous
Croions que nós Lecteurs en verront l'Extrait
avec plaisir.
Le sujet de ce Poëme se trouve dans Servius
dans Lactance , et dans Hygin . Ce dernier en raconte
les Evenemens de deux manieres. Il dit au
chap. 87. avec la plus part des Autheurs , que
Pinceste de Thyeste fut volontaire , attendu qu'uff
Oracle lui avoit prédit qu'un fils qui naîtroit dé
så fille et de lui , le vangeroit d'Atrée , son frete.
Mais dans le Chapitre suivant le même Hygia
met un correctif à une action si horrible , et dit
que Thyeste viola sa fille Pélopée sans la connoître.
L'Auteur a pris ce dernier parti , et y a
ajouté un nouveau correctif pour la décence da
Theatre.
Au premier Acte, Sostrate, Gouverneur d'Agyste
cherchant par tout ce Prince , qui trompant sa
vigilance , s'est échappé de la. Forêt où il a été
nourri par une Chévre , comme le porte L'étimologie
de son nom , arrive dans le Camp d'Atrée,
et s'entretient à la faveur de la nuit avec Arcas
son ancien ami ; il s'informe d'abord de la situation
de Thyeste , frere d'Atrée , son premier et
véritable Maître. Arcas lui apprend que Thyeste
secouru par Tyndare , Roy de Sparthe , avoit
remporté de grands et de nombreux avantages
snr . Atrée, mais qu'un jeune inconnu étant venu
offrir le secours de son bras à ce dernier , avoit
ramené la victoire sous ses étendarts ; il ajoute
que Thyeste réduit au désespoir et craignant
d'être trop long- temps à charge à son Protecteur
, venoit de défier ce jeune conquerant à un
combat singulier. Sostrate lui demande le nom
de cet inconnu ; il lui répond , qu'il s'appelle
Ægysth:. A et nom , Sostrate frémit d'horreur
a
Hiiij
il
1640 MERCURE DE FRANCE
il reconnoit que le fils va combatre le pere ; il no
s'explique point avec Arcas sur un secret qu'il a
juré de garder ; mais il lui dit , que s'il est aussi
fidele à Thyeste qu'il le lui a pare autrefois , il
faut qu'il lui porte un Billet, et lui parle ainsi
Tu ne peux pour Thyeste , être assez empressé,
Mais il faut qu'un billet par moi-même tracé ,
Me rende dans son coeur ma premiere innocence ,
Ab si ces lieux encor n'exigeoient ma présence ¿
Combienje t'envierois le soin de le porter!
Qu'avec joie à ses yeux j'irois me présenter !
ኑ
Il fait connoître par- là aux Spectateurs qu'il
veut parler à Ægysthe,s'il en peut trouver l'occasion.
L'arrivée d'Atrée fait retirer Sostrate et Arcas,
et la Scene finit par ce Vers que Sostrate dit:
Vien ;pressons ton départ ; Dieux, daignez le conduire.
1
Atrée fait la seconde exposition du Sujet , pour ,
préparer le Spectateur à un caractere aussi nois
que celui qu'il va voir sur la Scene ,
l'Auteur.
met ces Vers dans la bouche même de son Acteur
, dont l'origine remonte jusqu'à Jupiter.
De mon coeur irrité les transports furieux ,
Plus que mon Throne encor me rapprochent des
Dieux.
ILST
Qu'il est beau qu'un mortel puisse tout mettre en
poudre
Chaque fois qu'il se vange, il croit lancer lafoudre."
C'est peu d'être au dessus des Rois les plus puissans
Montrons à l'Univers de quel Dieu je descends ;
Son
JUILLET. 1733. 1641
Son Empire comprend et le Ciel et la Terre ;
Au gré de sa vangeance , il lance le tonnerre ,
Et moi j'aime àporter de si terribles coups ,
Que Jupiter lui-même en puisse être jaloux !
Atrée fait entendre à Eurimedon, son confident
que cette Pélopée qui passe pour sa fille , est fille
de Thyeste , par ces deux Vers :
Mais mafille au tombeaus m'ayant étéravie ,
La sienne en même temps prit sa place et son nom.
Eurimedon est frappé de ce qu'Atrée lui apprend,
attendu qu'il avoit consenti autrefois que Thyeste
l'épousa. Quoi ? lui dit - il , vous pouviez lui
faire un si funeste don ?
Atrée après avoir fair connoître comment la
fille de Thyeste qui passe pour sa propre fille
avoit été misee
entre ses mains , et par ce même
Eurimedon , à qui il parle actuellement , lui dit :
Apprends quel fruit heureux j'attendois de mon
crime.:
Il lui fait connoître que par cet Hymen il esperoit
détacher Tyndare du parti de Thyeste,attendu
que ce dernier ne lui avoit prêté som secours
pour le faire remonter au Thrône d'Argos
que son frere avoit usurpé sur lui , qu'à condition
qu'il y placeroit Clytemnestre sa fille , il fi
nit Pétalage de sa politique par ces Vers :
La vangeance toujours a de quoi satisfaire ;
Mais c'étoit peu pour moi , j'en voulois un salaire
Et dans l'artde regner c'est être vertueux,
Que n'entreprendre rien qui soit infructurux.
Hv
On
1642 MERCURE DE FRANCE
On expose encore dans cette Scene le défi dont '
on a parlé, dans lapremiere,et l'amour d'Ægysthe
pour Pelopée; amour dont Atrée veut se prévaloir
pour le mieux engager à donner la mort
à Thyeste.
Eurylas , Capitaine des gardes d'Atrée , vient
lui apporter un billet qu'on a intercepté , c'est le
même dont on a parlé dans la premiere Scen
en voici le contenu •
Choisissez mieux vos ennemis.
Vouspréservent les Dieux d'un combat si funeste
Fremissez, malheureux Thyeste ,
Egyssthe est votre Fils.
Sostrate.
M
67
Afrée triomphe par avance du parricide qu'
gysthe va commettre, il ordonne à Eurylas d'aller
faire venir ce Prince qui ne se connoit pas
core lui même. Il dit à Eurimedon de ne rien oublier
pour découvrir Sostrate et pour s'en as--
surer.
en
Ægysthe vient; il se refuse au combat où Atrée
l'invite,et fonde ce refus sur le respect qu'il garde
pour les Rois , et sur tout pour un sang aussi
précieux que celui qu'il veut lui faire répandre ;
Atrée le pressant toujours plus vivement, Egys
the dit :
Ciel ! contre ma vertu que d'ennemis ensemble !
Et les Dieux et les Rois contre moi tout s'assemble.
Les Dieux , si l'on m'afait unfile rapport,
Aux crimes les plus noirs ont enchaîné mon sort ,
J'ose pourtant lutter contre leur Loy suprême , &c.
Ægysthe
JUILLET. 1733 1643
•
gysthe dans cet endroit fait connoître quelle
a été son éducation ; mais il ne peut rien dire
de sa naissance qu'on lui a laissé ignorery Atrée
ne pouvant le porter à remplir sa vengeance
employe enfin le plus puissant motif qui est celui
de l'amour donr Egysthe brule pour Pélopée
voici par où il finit cette Scene :[/
"
Ilaudroit pour placer son coeur en si haut rang,
qui monter à la source où l'on puisa son sang, gibot
Dais faites de ma fille une juste conquête t
the our le prix de sa main , je ne veux qu'unt tête,
" Vous m'entendez , adieu , je vous laisse y penser
Et je n'attends qu'un mot pour vous récompenser.
.<
2
gysthe frémit du projet d'Atrée, il voudroit
sy refuser,, mais son amour pour Pelopée l'emporte
sur sa répugnance ; on expose dans cette
Scene comment ce Prince a vu Pelòpée pour la
premiere fois , on y parle des leçons qu'il a re
çues de Sostrate.dans les Forêts où il a été élevés
l'Amour lui fait tout oublier ; il finit l'Acte par
ces Vers :
25.00
Et je renoncerois au prix de ma victoire
Quand l'amour
gloire
mais que dis-je ? il y va de ma
On m'appelle au combat, sij'avois reculé,
Thyeste hautement diroit que j'ai tremble , I
Car enfin , au Combat c'est lui qui me défie ;
Qui peut me condamner quand il me justifie ?
N'en déliberons plus ; allons , cherchons le Roi ,
Et qu'au gré de sa haine il dispose de moi.
H vj Nous
164 MERCURE DE FRANCE
€
Nous avons été obligez de nous étendre dans
Set Acte , dont les deux tiers se passent en expo
Sitions nécessaires.
2
11 ct af 3 20
Pelopée ouvre la Scene du second Acte avec
Phoenice , sa Confidente ; elle
qu'elle a fait avertir ; elle fait
attend Ægystho
connotre l'inte
rêt qu'elle prend dans le péril qui menace Thyes
te ; elle déclare son hymen secret avec lui ; elle
parle d'un fils qu'elle cut de cet hymen , elle ra
conte un songe terrible qu'elle fit au sujet de ce
fils. Le voicist
A peine la lumiere
rauke hang of tw.I
03
De cefils malheureux vint frapper la paupiere
Que l'éclat de la foudre , au milieu des éclairs
D'un vaste embrasement menaça l'Univers.
Jour affreux jour suivi d'une nuit plus terri blet
De Spectres entassés un assemblage horrible ,
Dans un songe funeste effrayant mes regards:
Pret a fondre sur moi , vole de coutes parts.
Je vois une Furie et mon Ayeul Tantale
Qu'elle force à sortir de la nuit infernale ;
La barbare sur lui versant son noir poison
Lui fait un autre enfer de sa propre maison .
Cette ombre infortunée après soi traîne encore,
Et la faim et la soifdont l'ardeur la dévore :
Elle approche . Le fruit de mon malheureux flanc
La nourrit de carnage et l'abbreuve de sang ;
Phénice à cet aspect le sommeil m'abandonne,
5
Mais
JUILLET. 1733. 1645
Mais non la juste horreur , dont encor je fuissonne:
!
-Relopée apprend à Phoenice que ce songe terrible
l'obligea à consulter l'Oracle d'Apollon ;
que ce Dicu lui annonça que son Fils étoit
menacé d'inceste et de parricide ; elle ajoûte
qu'elle confia ce malheureux enfant à Sostrate ,
qui l'enleva à l'insçu de Thyeste son pere , avec
Ordre de ne le jamais instruire de son sort.
Dans la Scene suivante , Pelopée détourne Egysthe
du Combat qu'il va entreprendre contre
Thyeste. Elle lui parle d'une maniere si pathetique
, qu'il lui jure que sa main ne se trempera
jamais dans le sang de Thyeste ; elle finit la
Scene par ces Vers :
Ah ! Seigneur , croyez que Pelopée ;
Malgré le tendre am amour dont vous êtes épris ,
N'est pas de vos Vertus un assez digne prix .
Egysthe explique cès Vers en faveur de son
amour , &c. Il prie Atrée de le dispenser d'un
Combat qui fétriroit sa gloire Atrée impute
se changement de résolution à Pelopée ; il veut
lui même aller combattre Thyeste . Pélopée éperdue
prie Egysthe de détourner un Combat si
funeste Egysthe la jette dans de nouvelles al
larmes , en lui disant qu'il va chercher Thyeste
il fait pourtant connoître aux Spectateurs quel
est son dessein par ces Vers équivoques.
Je sçaurai dans cejour
Prendre soin de magloire et ser vir mon amour.
3 Pelopée
1646 MERCURE DE FRANCE
.
Pelopée au désespoir veut suivre Agysthe
Atrée la retient et lui reproche'sa désobéissance ;
Pelopée lui dit que Thyeste lui est plus cher qu'il
ne sçauroit croire. Elle se retire , Attée ordohne
à sa Garde de la suivre.
Ce que Pelopée vient de lui dire lui fait soupe
çonner qu'elle pourroit bien avoir épousé Thyes
te ; il ordonne à Eurimedon de ne rien oublier
pour trouver Sostrate , qui peut seul éclaircir ces
soupçons. 11 finit ce second Acte par ces Vers
37 C
D
Ne descends pas encor dans l'éternelle nuit
Thyeste , de ta mort je perdrois tout le fruit ;
Nefût-ce qu'un moment , jouis de la lumiere
Pour sçavoir quels forfaits terminent ta carriere ;
Pour la premiere fois je fais pour toi des voeux
Tremble , c'est pour te rendre encor plus malheu
* reux .
Thyeste prisonnier , commence le troisiéme
Acte par ces Vers :: ~
1
I
Fortune , contre moi des long-tems conjurée ,
Triomphe , me voici dans les prisons d'Atrée
Dieux cruels , dont le bras appesanti sur moi
Afait à votre honte un Esclave d'un Roieng
Dieux injustes , en vain ma chûre est votre ou
vrage ,
Vous n'avezpas encore abbaissé mon courage, &L.
Il instruit les Spectateurs de ce qui s'est passé
dans son Combat contre gysthe, qu'il croit ne
l'avoir épargné que pour réserver au barbare
Atrés le plaisir de lui donner la mort. Il expose
Ge
JUILLET. 1733 . 1647.
ce que les Dieux lui ont annoncé autrefois quand
il les a consultez sur le moyen de se vanger d'A-l
trée , voici l'Oracle :
Argos rentrera sous ta loy
Far un Fils qui naîtra de ta fille et de toi.
Il dit à Arbate que ce fût pour éviter cet abominable
inceste qu'il le chargea lui- même du
soin d'égorger sa Fille dans l'âge le plus tendre,
&c. Pelopée vient apprendre à Thyeste qu'Atrée
, qu'elle croit son Pere , est prês à faire la
paix avec lui , pourvû qu'il l'épouse ; elle lui dit ,
qu'il n'a qu'à lul déclarer son Hymen. Thyeste
lai deffend de reveler un secret , qui faisant voir
à Tyndare qu'il l'a trompé , le deshonoreroit à
ses yeux , et obligeroit ce Prince de l'abandon-,
ner à toute la fureur d'Atrée, qui n'a point d'autre
dessein que de le priver de tout secours ; il
parle de la mort de ce fils malheureux , que Sostrate
lui a enlevé , et il ne doute pas qu'Atrée në
l'ait fait égorger.
Ægysthe vient annoncer à Thyeste que tout
menace sa vie , et qu'Atrée plus furieux que ja
mais , viendra le chercher même dans sa Tente ;
il ajoute qu'il deffendra ses jours , ou qu'il
mourra avec lui. La Nature qui parle dans le
coeur du Pere et du Fils , excite entr'eux de tendres
transports , qui tiennent lieu de reconnoissance
anticipée. Atrée arrive , Egysthe prie
Thyeste de rentrer dans sa Tente , de peur que
sa vuë ne redouble encore la fureur d'un frere si
dénaturé.
Atrée demande à Egysthe d'où vient qu'il lui
cache si long - tems sa victime la première moisié
de ce Dialogue est fiere de part et d'autre ;
Egysthe
1648 MERCURE DE FRANCE
Egysthe a enfin recours à la priere, Atrée prend
le parti de la dissimulation ; ll feint de se rendre,
mais il dit auparavant à Ægysthe qu'il lui en
coûtera plus qu'il ne pense ; Egysthe lui répond
qu'il ne sçauroit trop payer le sacrifice qu'il
veut bien lut faire de son inimitié. Atrée lui dir
qu'il consent à la paix , à condition que Thyeste
réparera l'affront dont il l'a fait rougir trop
long-tems : qu'il vous épouse , dit- il à Pelopée ;::
Egysthe et Petopée sont également frappés de
cette proposition , quoique par differens motifs..
Atrée jouissant de leur trouble , dit à Ægyste ,
d'un ton presque insultant :
> J'entends vous gémissez du coup que je vous
porte ;
Mais l'union des coeurs plus que tout vous importe;
Vous demandez la Paix , je la donne à ce prix,
Prenez à votre tour un conseil que j'ai pris ;
Faites-vous violence ; on a bien moins de peine :
A vaincre son amour , qu'à surmonter sa haine.
Atrée porte enfin le dernier coup à Ægisthe
par cet hemistiche , en parlant de Thyeste :
Il aime , autant qu'il est aimé.
Egysthe devient furieux ; Arrée lui dit que ce
n'est que de ce jour qu'il a penetré un secret si
fatal et le quitte,en lu disant :
Si vous êtes trahi ; je n'en suis point complice ;
Et je laisse en vos mains la grace , ou le supplice.
Egysthe reproche à Pelopée son manque de
foy
JUILLET. 1732... 1649
foy ; elle lui dit qu'elle ne lui a rien promis ; elle
s'explique ainsi :
Quel serment ! quel reproche ! est - ce trahir ma foi ;
Que mettre vos veriùs à plus haut prix que moi ?
Ce dernier Vers se rapporte à
Acte ou Pelopée lui a dit :
ceux du second
Ah ! Seigneur , croyez que Pelopée ,
Malgré le tendre amour dont vous êtes épris ,
N'est pas de vos vertus un assez digne prix.
Elle ajoûte encore :
Votre amour est allé plus loin que ma pensée ,
Et j'étois dans l'erreur assez interessée ;
Pour ne la pas détruire , et pour m'en prévaloir.
La tromperie qu'elle lui a faite , et sur tout la
préférence qu'elle donne à son Rival , l'empêchent
d'écouter sa justification ; tout ce qu'elle
lui dit jette le désespoir dans son coeur ; son
aveugle fureur s'exhale en murmures contre les
Dieux , et lui met ces Vers dans la bouche ,
Vous serez satisfaits, Dieux , qui dès ma naissance
Avez tous conspiré contre mon innocence ;‹ "
J'adopte vos decrets et mes transportsjaloux ,
Pour les justifier iront plus loin que vous.
Il la quitte transporté de rage ; elle le suit , e
finit l'Acte par ces Vers :
Allons ; suivons ses pas ,
1650 MERCURE DE FRANCE
Et ne pouvant sauver un Epoux que j'adore ,
Offrons à ses Bourreaux une victime encore.
Atrée commence par ces Vers le quatriémo
Acte.
Enfin voici le jour où le crime et l'horreur ,
Vont regner en ces lieux au gré de ma fureur.
Ce n'est pas ton secours qu'ici ma haine implore ,
Soleil , si tu le veux , pális , recule encore ;
Cefunesie chemin par moi-même tracé, “
De répandre tes feux , t'a déja dispensé ;
Va , fui , pour exercer mes noires barbaries
J'ai besoin seulement du flambeau de Furies.
Ce qu'il dit dans la suite expose le plan de la
vengeance qu'il médite , il ne s'agit pas moins
que de faire périr tous ses Ennemis les uns par les
autres , il finit cette terrible Scene par ce regres
digne de sa foreur.
D
ev l'avouerai qué ma joye eût été plus entiere ,
Si Thieste , touchant à son heure derniere,
Par moi-même eût appris que pour trancher se
jours ,
De la main de sonfils j'empruntai le secours ;
Mais je crains qu'à leurs yeux ce grand secret n'éclatte
;
Un moment`auprès d'eux peut conduire Sostrate ;
Ce moment me perdroit ; il faut le prévenir ;
Craignons , pour trop vouloir , de ne rien obtenir :
Tyndare n'est pas loin et déja l'on murmure ;
JUILLET. 1733 1651
1733..
#
Laplus prompte vengeance enfin est la plus sûre ;
Oui de mes ennemis prêcipitons la mort .
Qu'importe, en expirant qu'ils ignorent leur sort
Bien- tôt dans le séjour des Ombres criminelles .
On va leur dévoiler des horreurs éternelles ;
Aussi-tôt quefermez , leurs yeux seront ouverts ;
Ils se reconnoîtront tous trois dans les Enfers.
Il a déja fait entendre à Eurimédon, qu'il retient
Pélopée dans sa Tente , de peur qu'elle n'attendrisse
gisthe ; et voyant approcher cet
Amant jaloux , il se détermine à continuer une
dissimulation qui vient de lui être si utile dans
P'Acte précedent ; il feint d'être désarmé par les
pleurs de Pélopée , et prie Agysthe de consentir..
à l'hymen de cette Princesse avec Thyeste, cette
priere rend Egysthe encore plus furieux . Atrée
Payant mis dans la disposition où il le souhaite,
lui dit enfin en le quittant ;
Plus que vous à vous servir fidelle ,
Je veux bien hazarder cette épreuve nouvelle ;
J'abandonne Thyeste à tout votre courroux ;
Mais prêt à lefrapper , répondez bien de vous ;
C'est à vous désormais que je le sacrifie ,
Et si votre tendresse encor le justifie ‚
J'explique cet Arrêt en faveur de ses feux ;
Je renonce à ma haine , et je lè rends heureux.
Ægysthe s'abandonne tout entier à sa jalouse
rage ; Antenor vient et lui demande s'il est vrai
qu'on va immoler Thyeste ; Agysthe le rassure
on
1652 MERCURE DE FRANCE
en apparence en lui ordonnant de lui faire rendre
ses armes . Antenor transporté de joye , lui
témoigne combien Sostrate , son sage Gouverneur
, sera charmé de voir cet heureux fruit
de ses leçons. Au nom de Sostrate , Ægysthe est
frappé. Quel nom , lui dit -il , prononces - tu ?
Antenor lui répond , qu'il croit l'avoir vû s'avançant
vers sa Tente ; mais qu'ayant apperçu des
Soldats , il s'est retiré de peur d'être reconnu.
On doit sçavoir gré à l'Auteur d'avoir rappellé
aux Spectateurs le souvenir de ce même Sostrate
qu'il n'a vu que dans la premiere Scene. Je vous
entends , grands Dieux , dit Egysthe dans un à
parte. Il ordonne à Antenor de ne point perdre
de temps pour remettre Thyeste en liberté, avant
que Sostrate se presente à ses yeux , & c. Egyste
se détermine à presser sa vengeance.
Thyeste vient , pénetré de reconnoissance pour
Egysthe; mais sajoye est de peu de durée . Egys
the lui apprend qu'il est devenu son mortel ennemi
, depuis qu'il a appris qu'il est son Rival ; il
lui dit que des que la nuit pourra cacher sa fuite,
il le fera conduire dans le Camp de Tyndare , et
qu'il s'y rendra lui - même pour lui redemanderce
sang qu'il a pú répandre : cette Scene est une
des plus touchantes de la Piece ; chaque mot ne
sert qu'à irriter Egysthe de plus en plus . Ils par
tent enfin , l'un pour donner la mort , l'autre pour
la recevoir , sans se deffendre , lorsque ce Sostrate
qui vient d'être annoncé avec tant d'art , les
arrête et leur apprend leur sort . Cette recon- ¿
noissance a tiré des larmes aux plus insensibles ;
Egysthe apprenant que Pelopée est sa mere
change son amour en tendresse filiale. Sostrate
lui apprend qu'Atrée lui donnera la mort s'il
met le pied dans sa Tente , et que ce cruel a sur-
?
pris
JUILLET. 1733. 1653
pris un Billet de sa main , qui l'a instruit de sa
naissance. Egyste furieux veut aller donner la
mort â ce barbare ; mais Thyeste retient cette
impétuosité. On finit ce bel Acte par la résolution
qu'on prend de répandre le bruit de la mort
de Thyeste , er de tromper Pelopée même par
ce bruit , afin que l'excès de sa douleur fasse
mieux passer la feinte pour une verite , cependant
Egysthe ordonne à Sostrate de partir pour
le Camp de Tyndare , avec les instructions né
cessaires.
Cet Extrait n'étant déja que trop long, nous ne
dirons qu'un mot du cinquiéme Acte ; Atrée le
commence , il doute de la mort de Thyeste ,
malgré le soin qu'on a pris d'en répandre le
bruit ; d'ailleurs le Pere vivant encore dans un
fils plus terrible , il n'a pas lieu d'être tranquille ,
il apprend à Eurimedon ce que Sostrate a dit
dans l'Acte précedent ; sçavoir , qu'il a donné ordre
de faire périr Ægysthe , s'il entre dans sa
Tente. Pelopée vient. Atrée pour commencer à
goûter les fruits de sa vengeance , lui annonce la
mort de Thyeste ; elle ne croit plus avoir de ménagement
à garder , elle apprend à Atrée que 3
Thyeste étoit son Epoux , ce qui le met au com,
ble de la joye ; il lui dit en la quittant :
Egysthe.... à ce seul nom, tremble ; dès aujourd'hui,
Par des noeuds éternels je veux t'unir à lui.
Pelopée au désespoir , se resout à souffrir plu
tôt mille morts , qu'à consentir à l'hymen qu'Atrée
vient de lui annoncer sous des termes dont'
les Spectateurs ont bien senti l'équivoque , &c.
Egysthe arrive ; il veut se retirer à la vue de sa
Mere ; elle l'arrête et lui donne les noms les plus
execrables ,
1651 MERCURE DE FRANCE
།
execrables ; il ne peut plus les soutenir ; il lui
apprend que Thyeste est sauvé, et que dans le
temps qu'il alloit le combattre , il a appris que
son Rival étoit son Pere. Cette derniere reconnoissance
n'a pas moins attendri que la premiere.
Sostrate annonce à Egysthe que le secours de
Tyndare est arrivé ; Ægysthe va se mettre à la
tête des Soldats et ordonne à Sostrate de garder
sa Mere ; on vient annoncer à Pelopée la mort
d'Atrée ; cet irréconciliable ennemi de Thyeste
vient expirer sur le Théatre, mais c'est pour por
ter le dernier coup ¿ son frere ; il lui apprend que
Pelopée est sa fille et en apporte pour preuve le
témoignage d'Eurimedon et d'Arbaste , qui se
trouvent présens sur la Scene ; pour confirma
tion de preuve , Thyeste lui dit :
Va , j'en croisplus encor les Oracles des Dieux.
pour la premiere fois , la Tragedie de
Pélopée. Cette Piece , dont M. le Chevalier Pellegrin
est l'Autheur , fut reçue avec un applaudissement
général , et fit esperer un grand succès
malAJUILLET.
1733.
1733. 1539
malgré Pincommodité de la saison ; nous
Croions que nós Lecteurs en verront l'Extrait
avec plaisir.
Le sujet de ce Poëme se trouve dans Servius
dans Lactance , et dans Hygin . Ce dernier en raconte
les Evenemens de deux manieres. Il dit au
chap. 87. avec la plus part des Autheurs , que
Pinceste de Thyeste fut volontaire , attendu qu'uff
Oracle lui avoit prédit qu'un fils qui naîtroit dé
så fille et de lui , le vangeroit d'Atrée , son frete.
Mais dans le Chapitre suivant le même Hygia
met un correctif à une action si horrible , et dit
que Thyeste viola sa fille Pélopée sans la connoître.
L'Auteur a pris ce dernier parti , et y a
ajouté un nouveau correctif pour la décence da
Theatre.
Au premier Acte, Sostrate, Gouverneur d'Agyste
cherchant par tout ce Prince , qui trompant sa
vigilance , s'est échappé de la. Forêt où il a été
nourri par une Chévre , comme le porte L'étimologie
de son nom , arrive dans le Camp d'Atrée,
et s'entretient à la faveur de la nuit avec Arcas
son ancien ami ; il s'informe d'abord de la situation
de Thyeste , frere d'Atrée , son premier et
véritable Maître. Arcas lui apprend que Thyeste
secouru par Tyndare , Roy de Sparthe , avoit
remporté de grands et de nombreux avantages
snr . Atrée, mais qu'un jeune inconnu étant venu
offrir le secours de son bras à ce dernier , avoit
ramené la victoire sous ses étendarts ; il ajoute
que Thyeste réduit au désespoir et craignant
d'être trop long- temps à charge à son Protecteur
, venoit de défier ce jeune conquerant à un
combat singulier. Sostrate lui demande le nom
de cet inconnu ; il lui répond , qu'il s'appelle
Ægysth:. A et nom , Sostrate frémit d'horreur
a
Hiiij
il
1640 MERCURE DE FRANCE
il reconnoit que le fils va combatre le pere ; il no
s'explique point avec Arcas sur un secret qu'il a
juré de garder ; mais il lui dit , que s'il est aussi
fidele à Thyeste qu'il le lui a pare autrefois , il
faut qu'il lui porte un Billet, et lui parle ainsi
Tu ne peux pour Thyeste , être assez empressé,
Mais il faut qu'un billet par moi-même tracé ,
Me rende dans son coeur ma premiere innocence ,
Ab si ces lieux encor n'exigeoient ma présence ¿
Combienje t'envierois le soin de le porter!
Qu'avec joie à ses yeux j'irois me présenter !
ኑ
Il fait connoître par- là aux Spectateurs qu'il
veut parler à Ægysthe,s'il en peut trouver l'occasion.
L'arrivée d'Atrée fait retirer Sostrate et Arcas,
et la Scene finit par ce Vers que Sostrate dit:
Vien ;pressons ton départ ; Dieux, daignez le conduire.
1
Atrée fait la seconde exposition du Sujet , pour ,
préparer le Spectateur à un caractere aussi nois
que celui qu'il va voir sur la Scene ,
l'Auteur.
met ces Vers dans la bouche même de son Acteur
, dont l'origine remonte jusqu'à Jupiter.
De mon coeur irrité les transports furieux ,
Plus que mon Throne encor me rapprochent des
Dieux.
ILST
Qu'il est beau qu'un mortel puisse tout mettre en
poudre
Chaque fois qu'il se vange, il croit lancer lafoudre."
C'est peu d'être au dessus des Rois les plus puissans
Montrons à l'Univers de quel Dieu je descends ;
Son
JUILLET. 1733. 1641
Son Empire comprend et le Ciel et la Terre ;
Au gré de sa vangeance , il lance le tonnerre ,
Et moi j'aime àporter de si terribles coups ,
Que Jupiter lui-même en puisse être jaloux !
Atrée fait entendre à Eurimedon, son confident
que cette Pélopée qui passe pour sa fille , est fille
de Thyeste , par ces deux Vers :
Mais mafille au tombeaus m'ayant étéravie ,
La sienne en même temps prit sa place et son nom.
Eurimedon est frappé de ce qu'Atrée lui apprend,
attendu qu'il avoit consenti autrefois que Thyeste
l'épousa. Quoi ? lui dit - il , vous pouviez lui
faire un si funeste don ?
Atrée après avoir fair connoître comment la
fille de Thyeste qui passe pour sa propre fille
avoit été misee
entre ses mains , et par ce même
Eurimedon , à qui il parle actuellement , lui dit :
Apprends quel fruit heureux j'attendois de mon
crime.:
Il lui fait connoître que par cet Hymen il esperoit
détacher Tyndare du parti de Thyeste,attendu
que ce dernier ne lui avoit prêté som secours
pour le faire remonter au Thrône d'Argos
que son frere avoit usurpé sur lui , qu'à condition
qu'il y placeroit Clytemnestre sa fille , il fi
nit Pétalage de sa politique par ces Vers :
La vangeance toujours a de quoi satisfaire ;
Mais c'étoit peu pour moi , j'en voulois un salaire
Et dans l'artde regner c'est être vertueux,
Que n'entreprendre rien qui soit infructurux.
Hv
On
1642 MERCURE DE FRANCE
On expose encore dans cette Scene le défi dont '
on a parlé, dans lapremiere,et l'amour d'Ægysthe
pour Pelopée; amour dont Atrée veut se prévaloir
pour le mieux engager à donner la mort
à Thyeste.
Eurylas , Capitaine des gardes d'Atrée , vient
lui apporter un billet qu'on a intercepté , c'est le
même dont on a parlé dans la premiere Scen
en voici le contenu •
Choisissez mieux vos ennemis.
Vouspréservent les Dieux d'un combat si funeste
Fremissez, malheureux Thyeste ,
Egyssthe est votre Fils.
Sostrate.
M
67
Afrée triomphe par avance du parricide qu'
gysthe va commettre, il ordonne à Eurylas d'aller
faire venir ce Prince qui ne se connoit pas
core lui même. Il dit à Eurimedon de ne rien oublier
pour découvrir Sostrate et pour s'en as--
surer.
en
Ægysthe vient; il se refuse au combat où Atrée
l'invite,et fonde ce refus sur le respect qu'il garde
pour les Rois , et sur tout pour un sang aussi
précieux que celui qu'il veut lui faire répandre ;
Atrée le pressant toujours plus vivement, Egys
the dit :
Ciel ! contre ma vertu que d'ennemis ensemble !
Et les Dieux et les Rois contre moi tout s'assemble.
Les Dieux , si l'on m'afait unfile rapport,
Aux crimes les plus noirs ont enchaîné mon sort ,
J'ose pourtant lutter contre leur Loy suprême , &c.
Ægysthe
JUILLET. 1733 1643
•
gysthe dans cet endroit fait connoître quelle
a été son éducation ; mais il ne peut rien dire
de sa naissance qu'on lui a laissé ignorery Atrée
ne pouvant le porter à remplir sa vengeance
employe enfin le plus puissant motif qui est celui
de l'amour donr Egysthe brule pour Pélopée
voici par où il finit cette Scene :[/
"
Ilaudroit pour placer son coeur en si haut rang,
qui monter à la source où l'on puisa son sang, gibot
Dais faites de ma fille une juste conquête t
the our le prix de sa main , je ne veux qu'unt tête,
" Vous m'entendez , adieu , je vous laisse y penser
Et je n'attends qu'un mot pour vous récompenser.
.<
2
gysthe frémit du projet d'Atrée, il voudroit
sy refuser,, mais son amour pour Pelopée l'emporte
sur sa répugnance ; on expose dans cette
Scene comment ce Prince a vu Pelòpée pour la
premiere fois , on y parle des leçons qu'il a re
çues de Sostrate.dans les Forêts où il a été élevés
l'Amour lui fait tout oublier ; il finit l'Acte par
ces Vers :
25.00
Et je renoncerois au prix de ma victoire
Quand l'amour
gloire
mais que dis-je ? il y va de ma
On m'appelle au combat, sij'avois reculé,
Thyeste hautement diroit que j'ai tremble , I
Car enfin , au Combat c'est lui qui me défie ;
Qui peut me condamner quand il me justifie ?
N'en déliberons plus ; allons , cherchons le Roi ,
Et qu'au gré de sa haine il dispose de moi.
H vj Nous
164 MERCURE DE FRANCE
€
Nous avons été obligez de nous étendre dans
Set Acte , dont les deux tiers se passent en expo
Sitions nécessaires.
2
11 ct af 3 20
Pelopée ouvre la Scene du second Acte avec
Phoenice , sa Confidente ; elle
qu'elle a fait avertir ; elle fait
attend Ægystho
connotre l'inte
rêt qu'elle prend dans le péril qui menace Thyes
te ; elle déclare son hymen secret avec lui ; elle
parle d'un fils qu'elle cut de cet hymen , elle ra
conte un songe terrible qu'elle fit au sujet de ce
fils. Le voicist
A peine la lumiere
rauke hang of tw.I
03
De cefils malheureux vint frapper la paupiere
Que l'éclat de la foudre , au milieu des éclairs
D'un vaste embrasement menaça l'Univers.
Jour affreux jour suivi d'une nuit plus terri blet
De Spectres entassés un assemblage horrible ,
Dans un songe funeste effrayant mes regards:
Pret a fondre sur moi , vole de coutes parts.
Je vois une Furie et mon Ayeul Tantale
Qu'elle force à sortir de la nuit infernale ;
La barbare sur lui versant son noir poison
Lui fait un autre enfer de sa propre maison .
Cette ombre infortunée après soi traîne encore,
Et la faim et la soifdont l'ardeur la dévore :
Elle approche . Le fruit de mon malheureux flanc
La nourrit de carnage et l'abbreuve de sang ;
Phénice à cet aspect le sommeil m'abandonne,
5
Mais
JUILLET. 1733. 1645
Mais non la juste horreur , dont encor je fuissonne:
!
-Relopée apprend à Phoenice que ce songe terrible
l'obligea à consulter l'Oracle d'Apollon ;
que ce Dicu lui annonça que son Fils étoit
menacé d'inceste et de parricide ; elle ajoûte
qu'elle confia ce malheureux enfant à Sostrate ,
qui l'enleva à l'insçu de Thyeste son pere , avec
Ordre de ne le jamais instruire de son sort.
Dans la Scene suivante , Pelopée détourne Egysthe
du Combat qu'il va entreprendre contre
Thyeste. Elle lui parle d'une maniere si pathetique
, qu'il lui jure que sa main ne se trempera
jamais dans le sang de Thyeste ; elle finit la
Scene par ces Vers :
Ah ! Seigneur , croyez que Pelopée ;
Malgré le tendre am amour dont vous êtes épris ,
N'est pas de vos Vertus un assez digne prix .
Egysthe explique cès Vers en faveur de son
amour , &c. Il prie Atrée de le dispenser d'un
Combat qui fétriroit sa gloire Atrée impute
se changement de résolution à Pelopée ; il veut
lui même aller combattre Thyeste . Pélopée éperdue
prie Egysthe de détourner un Combat si
funeste Egysthe la jette dans de nouvelles al
larmes , en lui disant qu'il va chercher Thyeste
il fait pourtant connoître aux Spectateurs quel
est son dessein par ces Vers équivoques.
Je sçaurai dans cejour
Prendre soin de magloire et ser vir mon amour.
3 Pelopée
1646 MERCURE DE FRANCE
.
Pelopée au désespoir veut suivre Agysthe
Atrée la retient et lui reproche'sa désobéissance ;
Pelopée lui dit que Thyeste lui est plus cher qu'il
ne sçauroit croire. Elle se retire , Attée ordohne
à sa Garde de la suivre.
Ce que Pelopée vient de lui dire lui fait soupe
çonner qu'elle pourroit bien avoir épousé Thyes
te ; il ordonne à Eurimedon de ne rien oublier
pour trouver Sostrate , qui peut seul éclaircir ces
soupçons. 11 finit ce second Acte par ces Vers
37 C
D
Ne descends pas encor dans l'éternelle nuit
Thyeste , de ta mort je perdrois tout le fruit ;
Nefût-ce qu'un moment , jouis de la lumiere
Pour sçavoir quels forfaits terminent ta carriere ;
Pour la premiere fois je fais pour toi des voeux
Tremble , c'est pour te rendre encor plus malheu
* reux .
Thyeste prisonnier , commence le troisiéme
Acte par ces Vers :: ~
1
I
Fortune , contre moi des long-tems conjurée ,
Triomphe , me voici dans les prisons d'Atrée
Dieux cruels , dont le bras appesanti sur moi
Afait à votre honte un Esclave d'un Roieng
Dieux injustes , en vain ma chûre est votre ou
vrage ,
Vous n'avezpas encore abbaissé mon courage, &L.
Il instruit les Spectateurs de ce qui s'est passé
dans son Combat contre gysthe, qu'il croit ne
l'avoir épargné que pour réserver au barbare
Atrés le plaisir de lui donner la mort. Il expose
Ge
JUILLET. 1733 . 1647.
ce que les Dieux lui ont annoncé autrefois quand
il les a consultez sur le moyen de se vanger d'A-l
trée , voici l'Oracle :
Argos rentrera sous ta loy
Far un Fils qui naîtra de ta fille et de toi.
Il dit à Arbate que ce fût pour éviter cet abominable
inceste qu'il le chargea lui- même du
soin d'égorger sa Fille dans l'âge le plus tendre,
&c. Pelopée vient apprendre à Thyeste qu'Atrée
, qu'elle croit son Pere , est prês à faire la
paix avec lui , pourvû qu'il l'épouse ; elle lui dit ,
qu'il n'a qu'à lul déclarer son Hymen. Thyeste
lai deffend de reveler un secret , qui faisant voir
à Tyndare qu'il l'a trompé , le deshonoreroit à
ses yeux , et obligeroit ce Prince de l'abandon-,
ner à toute la fureur d'Atrée, qui n'a point d'autre
dessein que de le priver de tout secours ; il
parle de la mort de ce fils malheureux , que Sostrate
lui a enlevé , et il ne doute pas qu'Atrée në
l'ait fait égorger.
Ægysthe vient annoncer à Thyeste que tout
menace sa vie , et qu'Atrée plus furieux que ja
mais , viendra le chercher même dans sa Tente ;
il ajoute qu'il deffendra ses jours , ou qu'il
mourra avec lui. La Nature qui parle dans le
coeur du Pere et du Fils , excite entr'eux de tendres
transports , qui tiennent lieu de reconnoissance
anticipée. Atrée arrive , Egysthe prie
Thyeste de rentrer dans sa Tente , de peur que
sa vuë ne redouble encore la fureur d'un frere si
dénaturé.
Atrée demande à Egysthe d'où vient qu'il lui
cache si long - tems sa victime la première moisié
de ce Dialogue est fiere de part et d'autre ;
Egysthe
1648 MERCURE DE FRANCE
Egysthe a enfin recours à la priere, Atrée prend
le parti de la dissimulation ; ll feint de se rendre,
mais il dit auparavant à Ægysthe qu'il lui en
coûtera plus qu'il ne pense ; Egysthe lui répond
qu'il ne sçauroit trop payer le sacrifice qu'il
veut bien lut faire de son inimitié. Atrée lui dir
qu'il consent à la paix , à condition que Thyeste
réparera l'affront dont il l'a fait rougir trop
long-tems : qu'il vous épouse , dit- il à Pelopée ;::
Egysthe et Petopée sont également frappés de
cette proposition , quoique par differens motifs..
Atrée jouissant de leur trouble , dit à Ægyste ,
d'un ton presque insultant :
> J'entends vous gémissez du coup que je vous
porte ;
Mais l'union des coeurs plus que tout vous importe;
Vous demandez la Paix , je la donne à ce prix,
Prenez à votre tour un conseil que j'ai pris ;
Faites-vous violence ; on a bien moins de peine :
A vaincre son amour , qu'à surmonter sa haine.
Atrée porte enfin le dernier coup à Ægisthe
par cet hemistiche , en parlant de Thyeste :
Il aime , autant qu'il est aimé.
Egysthe devient furieux ; Arrée lui dit que ce
n'est que de ce jour qu'il a penetré un secret si
fatal et le quitte,en lu disant :
Si vous êtes trahi ; je n'en suis point complice ;
Et je laisse en vos mains la grace , ou le supplice.
Egysthe reproche à Pelopée son manque de
foy
JUILLET. 1732... 1649
foy ; elle lui dit qu'elle ne lui a rien promis ; elle
s'explique ainsi :
Quel serment ! quel reproche ! est - ce trahir ma foi ;
Que mettre vos veriùs à plus haut prix que moi ?
Ce dernier Vers se rapporte à
Acte ou Pelopée lui a dit :
ceux du second
Ah ! Seigneur , croyez que Pelopée ,
Malgré le tendre amour dont vous êtes épris ,
N'est pas de vos vertus un assez digne prix.
Elle ajoûte encore :
Votre amour est allé plus loin que ma pensée ,
Et j'étois dans l'erreur assez interessée ;
Pour ne la pas détruire , et pour m'en prévaloir.
La tromperie qu'elle lui a faite , et sur tout la
préférence qu'elle donne à son Rival , l'empêchent
d'écouter sa justification ; tout ce qu'elle
lui dit jette le désespoir dans son coeur ; son
aveugle fureur s'exhale en murmures contre les
Dieux , et lui met ces Vers dans la bouche ,
Vous serez satisfaits, Dieux , qui dès ma naissance
Avez tous conspiré contre mon innocence ;‹ "
J'adopte vos decrets et mes transportsjaloux ,
Pour les justifier iront plus loin que vous.
Il la quitte transporté de rage ; elle le suit , e
finit l'Acte par ces Vers :
Allons ; suivons ses pas ,
1650 MERCURE DE FRANCE
Et ne pouvant sauver un Epoux que j'adore ,
Offrons à ses Bourreaux une victime encore.
Atrée commence par ces Vers le quatriémo
Acte.
Enfin voici le jour où le crime et l'horreur ,
Vont regner en ces lieux au gré de ma fureur.
Ce n'est pas ton secours qu'ici ma haine implore ,
Soleil , si tu le veux , pális , recule encore ;
Cefunesie chemin par moi-même tracé, “
De répandre tes feux , t'a déja dispensé ;
Va , fui , pour exercer mes noires barbaries
J'ai besoin seulement du flambeau de Furies.
Ce qu'il dit dans la suite expose le plan de la
vengeance qu'il médite , il ne s'agit pas moins
que de faire périr tous ses Ennemis les uns par les
autres , il finit cette terrible Scene par ce regres
digne de sa foreur.
D
ev l'avouerai qué ma joye eût été plus entiere ,
Si Thieste , touchant à son heure derniere,
Par moi-même eût appris que pour trancher se
jours ,
De la main de sonfils j'empruntai le secours ;
Mais je crains qu'à leurs yeux ce grand secret n'éclatte
;
Un moment`auprès d'eux peut conduire Sostrate ;
Ce moment me perdroit ; il faut le prévenir ;
Craignons , pour trop vouloir , de ne rien obtenir :
Tyndare n'est pas loin et déja l'on murmure ;
JUILLET. 1733 1651
1733..
#
Laplus prompte vengeance enfin est la plus sûre ;
Oui de mes ennemis prêcipitons la mort .
Qu'importe, en expirant qu'ils ignorent leur sort
Bien- tôt dans le séjour des Ombres criminelles .
On va leur dévoiler des horreurs éternelles ;
Aussi-tôt quefermez , leurs yeux seront ouverts ;
Ils se reconnoîtront tous trois dans les Enfers.
Il a déja fait entendre à Eurimédon, qu'il retient
Pélopée dans sa Tente , de peur qu'elle n'attendrisse
gisthe ; et voyant approcher cet
Amant jaloux , il se détermine à continuer une
dissimulation qui vient de lui être si utile dans
P'Acte précedent ; il feint d'être désarmé par les
pleurs de Pélopée , et prie Agysthe de consentir..
à l'hymen de cette Princesse avec Thyeste, cette
priere rend Egysthe encore plus furieux . Atrée
Payant mis dans la disposition où il le souhaite,
lui dit enfin en le quittant ;
Plus que vous à vous servir fidelle ,
Je veux bien hazarder cette épreuve nouvelle ;
J'abandonne Thyeste à tout votre courroux ;
Mais prêt à lefrapper , répondez bien de vous ;
C'est à vous désormais que je le sacrifie ,
Et si votre tendresse encor le justifie ‚
J'explique cet Arrêt en faveur de ses feux ;
Je renonce à ma haine , et je lè rends heureux.
Ægysthe s'abandonne tout entier à sa jalouse
rage ; Antenor vient et lui demande s'il est vrai
qu'on va immoler Thyeste ; Agysthe le rassure
on
1652 MERCURE DE FRANCE
en apparence en lui ordonnant de lui faire rendre
ses armes . Antenor transporté de joye , lui
témoigne combien Sostrate , son sage Gouverneur
, sera charmé de voir cet heureux fruit
de ses leçons. Au nom de Sostrate , Ægysthe est
frappé. Quel nom , lui dit -il , prononces - tu ?
Antenor lui répond , qu'il croit l'avoir vû s'avançant
vers sa Tente ; mais qu'ayant apperçu des
Soldats , il s'est retiré de peur d'être reconnu.
On doit sçavoir gré à l'Auteur d'avoir rappellé
aux Spectateurs le souvenir de ce même Sostrate
qu'il n'a vu que dans la premiere Scene. Je vous
entends , grands Dieux , dit Egysthe dans un à
parte. Il ordonne à Antenor de ne point perdre
de temps pour remettre Thyeste en liberté, avant
que Sostrate se presente à ses yeux , & c. Egyste
se détermine à presser sa vengeance.
Thyeste vient , pénetré de reconnoissance pour
Egysthe; mais sajoye est de peu de durée . Egys
the lui apprend qu'il est devenu son mortel ennemi
, depuis qu'il a appris qu'il est son Rival ; il
lui dit que des que la nuit pourra cacher sa fuite,
il le fera conduire dans le Camp de Tyndare , et
qu'il s'y rendra lui - même pour lui redemanderce
sang qu'il a pú répandre : cette Scene est une
des plus touchantes de la Piece ; chaque mot ne
sert qu'à irriter Egysthe de plus en plus . Ils par
tent enfin , l'un pour donner la mort , l'autre pour
la recevoir , sans se deffendre , lorsque ce Sostrate
qui vient d'être annoncé avec tant d'art , les
arrête et leur apprend leur sort . Cette recon- ¿
noissance a tiré des larmes aux plus insensibles ;
Egysthe apprenant que Pelopée est sa mere
change son amour en tendresse filiale. Sostrate
lui apprend qu'Atrée lui donnera la mort s'il
met le pied dans sa Tente , et que ce cruel a sur-
?
pris
JUILLET. 1733. 1653
pris un Billet de sa main , qui l'a instruit de sa
naissance. Egyste furieux veut aller donner la
mort â ce barbare ; mais Thyeste retient cette
impétuosité. On finit ce bel Acte par la résolution
qu'on prend de répandre le bruit de la mort
de Thyeste , er de tromper Pelopée même par
ce bruit , afin que l'excès de sa douleur fasse
mieux passer la feinte pour une verite , cependant
Egysthe ordonne à Sostrate de partir pour
le Camp de Tyndare , avec les instructions né
cessaires.
Cet Extrait n'étant déja que trop long, nous ne
dirons qu'un mot du cinquiéme Acte ; Atrée le
commence , il doute de la mort de Thyeste ,
malgré le soin qu'on a pris d'en répandre le
bruit ; d'ailleurs le Pere vivant encore dans un
fils plus terrible , il n'a pas lieu d'être tranquille ,
il apprend à Eurimedon ce que Sostrate a dit
dans l'Acte précedent ; sçavoir , qu'il a donné ordre
de faire périr Ægysthe , s'il entre dans sa
Tente. Pelopée vient. Atrée pour commencer à
goûter les fruits de sa vengeance , lui annonce la
mort de Thyeste ; elle ne croit plus avoir de ménagement
à garder , elle apprend à Atrée que 3
Thyeste étoit son Epoux , ce qui le met au com,
ble de la joye ; il lui dit en la quittant :
Egysthe.... à ce seul nom, tremble ; dès aujourd'hui,
Par des noeuds éternels je veux t'unir à lui.
Pelopée au désespoir , se resout à souffrir plu
tôt mille morts , qu'à consentir à l'hymen qu'Atrée
vient de lui annoncer sous des termes dont'
les Spectateurs ont bien senti l'équivoque , &c.
Egysthe arrive ; il veut se retirer à la vue de sa
Mere ; elle l'arrête et lui donne les noms les plus
execrables ,
1651 MERCURE DE FRANCE
།
execrables ; il ne peut plus les soutenir ; il lui
apprend que Thyeste est sauvé, et que dans le
temps qu'il alloit le combattre , il a appris que
son Rival étoit son Pere. Cette derniere reconnoissance
n'a pas moins attendri que la premiere.
Sostrate annonce à Egysthe que le secours de
Tyndare est arrivé ; Ægysthe va se mettre à la
tête des Soldats et ordonne à Sostrate de garder
sa Mere ; on vient annoncer à Pelopée la mort
d'Atrée ; cet irréconciliable ennemi de Thyeste
vient expirer sur le Théatre, mais c'est pour por
ter le dernier coup ¿ son frere ; il lui apprend que
Pelopée est sa fille et en apporte pour preuve le
témoignage d'Eurimedon et d'Arbaste , qui se
trouvent présens sur la Scene ; pour confirma
tion de preuve , Thyeste lui dit :
Va , j'en croisplus encor les Oracles des Dieux.
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Résumé : Pelopée, Tragédie nouvelle[.] Extrait. [titre d'après la table]
Le 18 juillet 1733, les Comédiens Français présentèrent pour la première fois la tragédie 'Pélopée', écrite par le Chevalier Pellegrin. La pièce, tirée des récits de Servius, Lactance et Hygin, fut accueillie avec enthousiasme. Hygin relate deux versions des événements : dans la première, Pinceste commet l'inceste volontairement après une prédiction oraculaire ; dans la seconde, Thyeste viole sa fille Pélopée sans la reconnaître. La pièce adopte cette dernière version et y ajoute des correctifs pour la décence théâtrale. Au premier acte, Sostrate, gouverneur d'Agyste, recherche le prince Ægysthe, échappé de la forêt où il a été élevé par une chèvre. Il rencontre Arcas, qui lui apprend que Thyeste, frère d'Atrée, a remporté des victoires grâce à Tyndare, roi de Sparte. Cependant, un jeune inconnu, Ægysthe, a récemment ramené la victoire à Atrée. Thyeste, désespéré, a défié ce jeune homme à un combat singulier. Sostrate reconnaît en Ægysthe son fils et cherche à l'avertir sans révéler son secret. Atrée révèle à Eurimedon que Pélopée, qu'il considère comme sa fille, est en réalité la fille de Thyeste. Il espère que le mariage de Pélopée avec Ægysthe détournera Tyndare du parti de Thyeste. Dans le second acte, Pélopée, accompagnée de Phoenice, sa confidente, attend Ægysthe. Elle révèle son mariage secret avec Thyeste et un songe prémonitoire où elle voit son fils menacé d'inceste et de parricide. Elle confie cet enfant à Sostrate, qui l'élève sans lui révéler son origine. Pélopée convainc Ægysthe de ne pas combattre Thyeste, mais Atrée, soupçonnant la vérité, ordonne à sa garde de la suivre. Au troisième acte, Thyeste, prisonnier, apprend qu'Atrée veut le tuer. Il révèle à Arbate qu'il a ordonné l'exécution de sa fille pour éviter l'inceste prédit par l'oracle. Pélopée informe Thyeste qu'Atrée propose la paix en échange de son mariage. Thyeste refuse, craignant de déshonorer Tyndare. Ægysthe, venu annoncer les menaces contre Thyeste, promet de le défendre. Atrée arrive et exige des explications d'Ægysthe, qui finit par le supplier. Dans le quatrième acte, Atrée expose son plan de vengeance, visant à faire périr ses ennemis les uns par les autres. Il feint de consentir à l'union de Pélopée et Thyeste pour manipuler Ægysthe. Ægysthe, après avoir appris que Sostrate retient Pélopée, libère Thyeste et lui révèle qu'il est son rival. Sostrate intervient alors pour révéler la vérité : Pélopée est la mère d'Ægysthe, et Atrée prévoit de tuer Ægysthe. Dans le cinquième acte, Atrée annonce à Pélopée la mort de Thyeste, mais elle révèle ensuite à Atrée que Thyeste était son époux. Ægysthe apprend alors que Thyeste est son père et que Pélopée est sa mère. Sostrate informe Ægysthe de l'arrivée des renforts de Tyndare. Finalement, Atrée, mourant, révèle à Thyeste que Pélopée est sa fille, confirmant ainsi les prédictions divines.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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