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p. 25-26
SUR LES MESURES geometriques des Voutes. par M. PARENT.
Début :
Un sçavant Architecte de Paris m'ayant representé que les mesures [...]
Mots clefs :
Mesures, Géométrie, Voûtes, Architecture
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texteReconnaissance textuelle : SUR LES MESURES geometriques des Voutes. par M. PARENT.
svR LES MESURES
geométriques des Voutes.
PARM- PARENT.
UN sçavantArchitecte
de Paris m'ayant representé que les mesures géomé- triques des voutes en dosnies oblongs ou applatis,
manquoient dans l'Architecture, ou du moins n'avoient point esté mises à
la portée de tout le monde, ce qui oblige à en employer de fausses., & mesme de grossieres au lieu
des véritables, je luy envoiay celles-cy deux jours
après, & j'ai creu faire le
mesme plaisir au public, en
les luy communiquant
d'une maniere pratiquable, avec les Tables dont
on se fert ordinairement
pour resoudre les problèmes de geometrie pratique.
geométriques des Voutes.
PARM- PARENT.
UN sçavantArchitecte
de Paris m'ayant representé que les mesures géomé- triques des voutes en dosnies oblongs ou applatis,
manquoient dans l'Architecture, ou du moins n'avoient point esté mises à
la portée de tout le monde, ce qui oblige à en employer de fausses., & mesme de grossieres au lieu
des véritables, je luy envoiay celles-cy deux jours
après, & j'ai creu faire le
mesme plaisir au public, en
les luy communiquant
d'une maniere pratiquable, avec les Tables dont
on se fert ordinairement
pour resoudre les problèmes de geometrie pratique.
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Résumé : SUR LES MESURES geometriques des Voutes. par M. PARENT.
L'absence de mesures géométriques précises pour les voûtes en dos d'âne a été signalée par un architecte parisien. L'auteur a fourni les mesures appropriées deux jours plus tard et les a partagées avec le public. Ces mesures sont présentées de manière pratique, accompagnées de tables couramment utilisées pour résoudre les problèmes de géométrie.
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2
p. 26-30
Sur la mesure geometrique des Voutes surhaussées, ou des demi spheroïdes oblongs.
Début :
1. Ayant mesuré la hauteur du dosme qu'on suppose demi elliptique [...]
Mots clefs :
Voûtes, Géométrie, Mesure, Dômes
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texteReconnaissance textuelle : Sur la mesure geometrique des Voutes surhaussées, ou des demi spheroïdes oblongs.
Sur lamesure geometrique des
Voutes surbaussées
5
ou des
demispheroïdes oblongs.
I. Ayant mesure la hau-
.teur du dosme qu'on suppose demi elliptique, &
l'ayant doublée, on luy ajouxtera sa plus grande
largeur, c'est à direlediametre de la base, & on l'en
retranchera,on multipliera
la somme parle reste,& on
tirera la racine quarrée du
produit, pour faire l'analogie suivante.
2. Si le double de la hauteur du dosme, donne la
racine quarrée cy-dessus
;
que donnera le finustotal?
Il viendra au quatriéme
termie un finus, qui mar-
quera un nombre de degrez & de minutes, dont
on se servira pour multiplier le double de la hauteur, afin d'avoir un produit.
3. Comme le nombre absolu ( 180000. ) est à l'absolu ( 3141. ) ainsi le produit
cy-deflfus,est àun quatriéme terme.
4. Comme la racine du
premier article est au double de la hauteur, ainsi le
quatrième terme de l'article precedent
5
a un qua-
,
trième e
terme nouveau, au-
quel on adjoustera le diametre de la bafe pour avoir
une somme qu'on multipliera par la largeur.
5. Enfin si (4ooo. ) nombre absolu, donnent (3141.)
que donnera le produit de
l'article precedent :
Il
viendra un quatriéme terme, qui fera la surface de
la Voûte ;
sçavoir l'interieure, si les mesures ont
este' prises en dedans, &
l'exterieure sielles onteste
prises en dehors.
Et pour avoir la solidité
on prendra la hauteur &
k largeur par le milieu de
l'épaisseur, pour avoir une
superficie moyenne, qu'on
multipliera par son épaiC.
seur, ce qui donnera la soliditédesirée.
Voutes surbaussées
5
ou des
demispheroïdes oblongs.
I. Ayant mesure la hau-
.teur du dosme qu'on suppose demi elliptique, &
l'ayant doublée, on luy ajouxtera sa plus grande
largeur, c'est à direlediametre de la base, & on l'en
retranchera,on multipliera
la somme parle reste,& on
tirera la racine quarrée du
produit, pour faire l'analogie suivante.
2. Si le double de la hauteur du dosme, donne la
racine quarrée cy-dessus
;
que donnera le finustotal?
Il viendra au quatriéme
termie un finus, qui mar-
quera un nombre de degrez & de minutes, dont
on se servira pour multiplier le double de la hauteur, afin d'avoir un produit.
3. Comme le nombre absolu ( 180000. ) est à l'absolu ( 3141. ) ainsi le produit
cy-deflfus,est àun quatriéme terme.
4. Comme la racine du
premier article est au double de la hauteur, ainsi le
quatrième terme de l'article precedent
5
a un qua-
,
trième e
terme nouveau, au-
quel on adjoustera le diametre de la bafe pour avoir
une somme qu'on multipliera par la largeur.
5. Enfin si (4ooo. ) nombre absolu, donnent (3141.)
que donnera le produit de
l'article precedent :
Il
viendra un quatriéme terme, qui fera la surface de
la Voûte ;
sçavoir l'interieure, si les mesures ont
este' prises en dedans, &
l'exterieure sielles onteste
prises en dehors.
Et pour avoir la solidité
on prendra la hauteur &
k largeur par le milieu de
l'épaisseur, pour avoir une
superficie moyenne, qu'on
multipliera par son épaiC.
seur, ce qui donnera la soliditédesirée.
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Résumé : Sur la mesure geometrique des Voutes surhaussées, ou des demi spheroïdes oblongs.
Le texte décrit une méthode pour mesurer géométriquement des voûtes surbaissées ou des demi-sphéroïdes oblongs. La procédure commence par mesurer la hauteur du dôme, supposée demi-elliptique, et la doubler. Ensuite, on ajoute le diamètre de la base et on retranche la somme obtenue. Le résultat est multiplié par le reste, et on extrait la racine carrée du produit. Si le double de la hauteur donne la racine carrée, le sinus total fournit un nombre de degrés et de minutes, utilisé pour multiplier le double de la hauteur. Des proportions sont établies entre des nombres absolus et les produits obtenus. Une autre proportion est créée entre la racine du premier article et le double de la hauteur, ainsi qu'entre un quatrième terme et un troisième terme nouveau. À ce troisième terme, on ajoute le diamètre de la base, puis on multiplie la somme par la largeur pour obtenir la surface de la voûte. La surface intérieure est obtenue si les mesures sont prises à l'intérieur, et la surface extérieure si elles sont prises à l'extérieur. Pour déterminer la solidité, on multiplie la hauteur et la largeur au milieu de l'épaisseur pour obtenir une superficie moyenne, que l'on multiplie par l'épaisseur.
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3
p. 30-34
Sur la mesure des Voutes surbaissées, ou des demi spheroïdes applatis.
Début :
1. Ayant mesuré, comme cy-dessus, le dosme qu'on suppose encore [...]
Mots clefs :
Voûtes, Dômes, Géométrie, Mesure
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texteReconnaissance textuelle : Sur la mesure des Voutes surbaissées, ou des demi spheroïdes applatis.
Sur la mesure des Voutessurbaissées,
ou des demispheroidesaplatis,
1. Ayant mesuré, comme
cy-dessus, le dosme qu'on
suppose encore demi elliptique, on dou blera la hauteur qu'on adjoustera avec
la largeur, pour avoir une
somme onosteraaussi de
la mesme largeur la hauteur doublée, pour avoir
un reste;on multipliera la
somme par le reste, & ofi
tirera la racine quarrée du
produit ( ce qui donnera la
distance desfoyers.)
2. Adjoustez la largeurà
cette racine ou distance
des foyers prenez le logaritme de la somme,&ostezen le logaritme du double
de la hauteur, pour avoir
un second reste.
3. Multipliez ce second
reste par le quarré du double de la hauteur, & divisez
tousjours le produit par
3010300 fois la racine quarrée du premier article
,
pour avoir un quotient.
4. Adjouftez la largeur
à
ce quotient; multipliez
la somme par la mesme
largeur, & faites l'analogie
suivante.
5. Si(4000. ) nombre absolu, donnent (3141. absolu) que donnera le produit cy -
dessus ?
il viendra au quatrième terme U
surface du spheroïde elliptique applati, sur laquelle
on fera les mesmes reHc-
xions que pour l'oblong.
Si les dosmes sont à arrestes
,
au lieu de l'analogie si4000. donnent 214.1.
&c. faites cette autre:si huit
foisle demi diamettre de
la base donne son circuit,
que donnera le produit
trouve, &c.
Voicy donc les Réglés
queMrHuygens n'a donnéesqu'en énigme à,sa manicre ordinaire,dans son
Traité de la Pendule, &
par des voyes beaucoup
plus longues:j'en donneray
les demonstrations
quand l'occasion s'en presentera
ou des demispheroidesaplatis,
1. Ayant mesuré, comme
cy-dessus, le dosme qu'on
suppose encore demi elliptique, on dou blera la hauteur qu'on adjoustera avec
la largeur, pour avoir une
somme onosteraaussi de
la mesme largeur la hauteur doublée, pour avoir
un reste;on multipliera la
somme par le reste, & ofi
tirera la racine quarrée du
produit ( ce qui donnera la
distance desfoyers.)
2. Adjoustez la largeurà
cette racine ou distance
des foyers prenez le logaritme de la somme,&ostezen le logaritme du double
de la hauteur, pour avoir
un second reste.
3. Multipliez ce second
reste par le quarré du double de la hauteur, & divisez
tousjours le produit par
3010300 fois la racine quarrée du premier article
,
pour avoir un quotient.
4. Adjouftez la largeur
à
ce quotient; multipliez
la somme par la mesme
largeur, & faites l'analogie
suivante.
5. Si(4000. ) nombre absolu, donnent (3141. absolu) que donnera le produit cy -
dessus ?
il viendra au quatrième terme U
surface du spheroïde elliptique applati, sur laquelle
on fera les mesmes reHc-
xions que pour l'oblong.
Si les dosmes sont à arrestes
,
au lieu de l'analogie si4000. donnent 214.1.
&c. faites cette autre:si huit
foisle demi diamettre de
la base donne son circuit,
que donnera le produit
trouve, &c.
Voicy donc les Réglés
queMrHuygens n'a donnéesqu'en énigme à,sa manicre ordinaire,dans son
Traité de la Pendule, &
par des voyes beaucoup
plus longues:j'en donneray
les demonstrations
quand l'occasion s'en presentera
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Résumé : Sur la mesure des Voutes surbaissées, ou des demi spheroïdes applatis.
Le texte présente une méthode pour mesurer les vitesses surbaissées ou les demi-sphéroïdes aplatis. La procédure comprend plusieurs étapes. Premièrement, on mesure le dosme supposé demi-elliptique, on double la hauteur et on l'ajoute à la largeur pour obtenir une somme. On double également la hauteur pour obtenir un reste. Ensuite, on multiplie la somme par le reste et on extrait la racine carrée du produit, ce qui donne la distance des foyers. Deuxièmement, on ajoute la largeur à cette racine et on prend le logarithme de la somme. On soustrait le logarithme du double de la hauteur pour obtenir un second reste. Troisièmement, on multiplie ce second reste par le carré du double de la hauteur et on divise le produit par 3010300 fois la racine carrée du premier article pour obtenir un quotient. Quatrièmement, on ajoute la largeur à ce quotient et on multiplie la somme par la même largeur pour effectuer une analogie. Le texte mentionne des ajustements spécifiques si les dosmes sont à arêtes. Ces règles ont été données par Mr. Huygens sous forme d'énigme dans son Traité de la Pendule, et des démonstrations seront fournies ultérieurement.
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4
p. 265-300
LES MERVEILLES des Abeilles, ou analyse du fond des Alveoles, dont leurs Rayons sont composez. Par Mr PARENT.
Début :
1. Plusieurs Naturalistes habilles ont admiré la figure exagonale des [...]
Mots clefs :
Abeilles, Rhombes, Alvéoles, Figures, Angles, Sphères, Géométrie
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texteReconnaissance textuelle : LES MERVEILLES des Abeilles, ou analyse du fond des Alveoles, dont leurs Rayons sont composez. Par Mr PARENT.
LES MERVEILLES des Abeilles> ouanayse du fond des Alveoles, dont leurs Rayonssont composez. ParMrPARENT, I#l? Lufieurs Naturalistes habilles ont admiré la figure exagonale des alveoles ou cellules des mouches à miel; mais il ne me fouvienc pas quaucun ait rien écric sur celle du fond de ces cellules merveilleuses, & sur la maniere donc ellesfont as. semblees& opposées entre elles, quoyque ce (bit peut estre tout ce qu'il y à d'admirable dans cesujet, des figures exagonales pouvant estre forméesnaturellement , & par le seul mouvement descorps, sans presupposeraucune connoissance , comme je l'ayexpliqué dans une autre occasion Mais en examinant la figure du fond de ces Alveoles avec application , on trouve qu'elle renferme toute la perfection que l'esprit hu- main, muni de la plus subtile geometrie peut imaginer. Car elles ont de toutes les figures qu'elles pourroient recevoir la plus reguliere, par consequent la plus belle , & la plus aisée à bastir, & aussi la plus logeable, à moindres frais, ou la plus spatieuse , avec mesme surface, la plus aisée à s'y tourner en tout sens , & en mesme temps la plus solide , quiest tout ce quele plus habile Archirecte pourroit souhaiter. C'est ce qui ma fait penser que te public ne seroit peutestre pas fasché que je luy communiquasse mes re flexions fijr un sujet aussi curieux, & qui semble nous ouvrir une voye à la connoissance de l'ame des bestes; d'autant plus que j'espere l'y faire parvenir par la voye la plus abrégée , laquelle estant exempted'Algèbre, ôc de triangles spheriques, (quim'ont servi à - le developer)lemet à la portée de ceux qui ont les moindres teintures dela geometrie. 2.. Soit donc BSDTFR la base d'un tuyau prifmatique exagonal perpendiculaire à son axe VOI, lequel tuyau represente une des Alvéoles des Abeilles. Spit X le cenrre de cette bafe : soient R A K , BI,SCM,DN,TEP&FQ les six cotiez ou arestes des faces de l'Alveole; qu'on suppose veuë si l'on veut par le dedans,l'œil respondant directement au point V de la bafe qui est entre son centre X & sa circonférence , si l'on prend un point Ofùrl^âxc VOIau dessousde cette bafe, duquel onmene trois plans par les rrois collez BF,BD,DF,dutriangle équilateral inscrit à l'exagone, sçavoir AB O Fqui coupe AFenA; & les deux faces KAFQ, KABL, de l'Alveole enAF&AB; BODC qui coupe CMen Ç9 & les faces~BCML, DCMN en RC , & CD; DOFEqui coupe EPT enE , &les faces NDEP,PEFQ,enDE, EF ; ces trois plans se cou- pant les uns les autres dans les droites OB, OD,OF; le fond de l'Alveole se trouvera fermépartrois rhombesOBAF,ODEF,ODCB, qui feront égaux &semblables en tout, comme il est assez évident;car FB, par exemple , estant le costé' du triangle équilateral inscrit à l'exagone , si l'on mene le rayon XR de , l'exagone qui rencontre BF perpendiculairement: dans son milieu G, & qui est égal au rayon X F; on aura ( à cause de l'angle. XFG de trente degrez) X G égale à la moitié de XF, & par consequent aussi à la moitié de XR; menant donc encore la droite OA, elle rencontrera XRau point G,carelles font toutes deux dans le plan des paralleles VOI, KAR) & ne scauroient avoir que G de commun. On aura donc ( à cause des triangles rectangles semblablesAGR,XGO)l'analogie (QG: GA::XG'• GR. ) Donc G est le milieu des deux droites AO, FB. M Ainsi,) àcause des angles opposezégaux AGF,BGO, & AGB, OGF, ilest évident que les deux triangles AGF, BGO, & AGB,FGO, font parfaitement égaux ; c'est pourquoi AF est parallele &égale à OB,&AB, àFO: doncABOFestun Rhombe, puisque OB & OFsont égales. On prouvera de mesme que ODEF, OBCD font aussi des Rhombes; & d'aiileurs la régularité de la construction fait voir que ces 3. Rhombes font égaux en tout. 3. Il ne s'agit donc plus maintenant, que de trouver quelle doit estrel'inclinaifon des Rhombes B AFO,DEFO,DOBC, sur l'axe VOI,afin que l'Alveole ait toutes les persections dont on a parlé cy-dessus. Pour y parvenir je considerequ'à mesure qu'on prend le point A sur K AR plus proche de K, pour mener les droites AF,AB,( ou ce quiestle mesme , à mesure qu'on prend le point O plus audessous de X pour mener la faceABOF,) l'angle B A F devient moindre que l'angle BRF de 120. degrez , & l'angle F A K ou BAK , plus grand que l'angle droit ARF ou, A RB ; c'est pourquoy on peut prendre ces points A & O à telle distance de R ou X , que les 3. angles autour de A, feront égaux; ce qui est une des conditions proposées à trouver, &laplussimplede toutes: Et l'on verra ensuite que toutes les autres perfections en derivent, & que la prudente, & subtile Abeille ne s'y trompe jamais. Or je dis qu'il faut que pour cet effet ARou OX, (car ces 2. lignes font égales, puisque GXest égale à GR) soit le tiers de A F;ce.quiestàlavérité une équation d'Algèbre à réfoudre , puisque ces 2. lignes sontinconnues. Mais supposant la chose telle, le quarré de AR que je suppose valoir, I, estans I, celuy de A F vaudra 9, & celuy deF R 8.(à cause de l'an.;, gle droitA RF.) Mais Yans gleRFGestantde 30. degrez, demesme queXFG; 1,G fera la moitié de RF & son quarré fera le quart deceluy de RF, c'est à-dire qu'il vaudra 2; donc celuy de A G fera de3 )( à cause de l'angle droit AR G,) & celuy de F G de6. tà causedel'angle droit A - GF , ou,RGF,) donc le quarré de A G fera la moitié deceluy de FG, ou celuy de A O la moitié de celuy deFB.AinsiAOfera à F B, comme le costé d'un quarréest à sa diagonale. Si l'on mene maintenant AHsurFR qui fasse l'angleHARégalàFAG,les triangles rectangles ARH, AGF, feront semblables ; ainsi le quarré de AR fera aussi le double de celuy de HR, qui par conséquent vaudraiSciera la seiziéme partie de celui de RF Aui vaut 8. donc RH serale quart de RF, & le tiers de HF , demesmequeARest sup posée le tiers de AF; ainsi l'angle RAF fera double de l'angle RAH & double de AFG. Donc RAFfe- ra égal à AFO com plément au demi cercle de BAF(àcauseduRhombe BAFO. ) Mais le mesme R AF est le complement au demi cercle de l'angle K AF;donc les anglesBAF , KAF , & par consequent aussi KAB feront égaux, ce qu'il falloitprouver. Si l'on confidere maintenant que les angles alternes FA R, AFQ, font égaux, (à cause des parallèles KAR, QFO)on verra aussi-tost que les angles AFO,AF Q; & parconsequent aussi EFO , EFQ, font encore égaux, & les complemens au demi cercle des angles autour de A, donc les n. angles plans autour de B, F,D, font touségauxen- t'reux, de mesme que les îr. autour de A,C,E,O, & les uns font les complemens des autres au demi cercle. 4. De plus on ne peut douter que les Angles des faces autour de ACEO ne soient encore égaux entr'eux;de mesme qu'autour de BDF; puisqu'iln'y a a aucune raison, pourquoy quelqu'un feroit plus grand ou ,moindre que les autres, dumoment que touslesangles plansysont égaux ; & qu'ondémontre qu'un trian gle spherique quiales troiscostez égaux, a aussi les trois angles égaux -, donc tous les angles des faces, & du fond de l'Alveole,ou ses iy arestes font de 120.degrez chacune, puisque ceux de son contoursçavoir, BRF) BSD, SBR &c, ont cette valeur. D'ou il fuit évidem- ment que cette figure est plus commode pour se loger , que si les angles estoient inégaux; & que de plus une mesme Sphère en peut toucher toutes les faces. Or elle touchera celles du fond dans leurs centres G., Y, Z, & son centre fera sur l'axe VOI , comme en I, ensorte que les perpendiculaires IG, IY,IZ)'(eronc égales à ses rayons ce qui est évident par l'égalité desangles des faces & des Rhombes.Ainsila figure du fond de ces Alveoles doit participer de celle de cette Sphere , qui est de contenir plus d'espace que tout autre, qui auroit mesme surface &un mesme nombre de faces. 5. Pourconnoistre maintenant les angles BAF , AFO , des Rhombes , & en général tous les angles tant obtusqu'aigus autour des points A,C)E"0)lk B, D, F,on se souviendra de ce qu'on vient de voir; que le quarré de AF, étant de 9 celui de AG vaut 3, celui de FG , 6 , celui de FR, 8,ainsi celui de AO vaudra12,, & celui BF 24; parconséquentces4.quarrez feront entr'eux comme les nombres9. 8-11.2.4. & les lignes AF, RF, AO,FB, comme lesnombres3. 2R2.2R3.&2R6.)ou, Rt.R3.R6) connoissant donc les raportsdescostez FA,FO, AG, qui fontles finus des angles opposez, , dans le triangle rectangle : AGF, on aura aussi-tofi la valeur de ses angles aigus , qui font les moitiés des angles du Rhombe. Ou pluitolt prenant AR qui vaut 1. pour finustotal,ôc RF qui eu la racine de 8. oui 2R2. ) pour la tangente de l'angle FAR égal AFO on en tirera l'analogie ( si 1. donne 2. R 2.. combien 100000 )dontle quatrième terme 182842. est la tangente de 70. degrez 32.minutes 8. ou de AFO, ce qui fait voir que son complément BAF est de L09. d.28. ,min.conformémentaux experiences que les sçavants Mrs. de Cassini & Maraldi en ont faites avec toute la justesse que des figures aus si petites que celles de ces Alvéolés peuvent recevoir. Car ces Mefifeurs m'ont assuré les avoir toûjours trouves; de 70. & de 110. degrez. Je leur dois au reftecettejustice d'avouerque je leur ai l'obligation de m'avoir tiré de l'erreur où j'etois, que les Abeilles travaillassenten commun, & non feulesà seules comme elles font -,& quelles fissent'leurs Alvéoles plates parie fond; & de m'avoir par-là doané occasiond'ii magmer quelle devoit estre donc la figure du fond de ces cellules qui renfermoit le plus de perfection. Il est bon d'ajouster cnco. re icy qu'on peut parvenir à la connoissance du fond de ces cellules en fupofanc d'abord les angles en AEF chacun de 120. degrez concevant chacun de ces points au centre d'une Sphère, & les rayons A,B, AB, AK, AF, prolongées jusquà sa surface , ce qui donnera un triangle spherique à résoudre , dont chaqueangle fera de 120: degrez &dontontrouvera les costez de 109. degrez 28. minuteschacun, , 6. Il restemaintenantAc Faire voir quelafigure exagonale de ces cellulesleur a donne plusde régularité , que toute autre imaginable. Pour cet effet il est premierement évident quelles ne .peuvent avoir outre la figure exagonale , que taquarree,ou la triangulaire; puisqu'il n'y aque ces 3. figures régulières qui j>ui(Tenç feules couvrir un plan quarré , ou d'un triangulaire , ( comme nous avons fait ceuxd'un exagonal) parles milieux des cotez de sà bafe, les faces du fonds ; feront avec celles du contour des angles obtus; tandis que ces derniers en font de droits entrelles, ou de 60. degrez. Ainsi ces cellules triangulaires ou quarrées auroient moins de regularité & de commodité que les exagonales, & même moins de capacitépour une surface égale, puis quelles auroient un moindre nombre de faces. On peut même tirer de là que les éxagonales ont encore plus de solidité, puis quelles tiennent les unes avec les autres par plus de faces, & que lestuyaux les plusronds sont plus solides que ceux qui ont moins de faces, comme on le voit dans toutes les productions de la nature. 7. Il reste donc de conclure que ces alveoles admirables ont toute la per- , session qu'on pouvoit fou. haiter. Par où l'on voit que l'auteur dela nature, qui conduit ces animaux,Semble nous inviterà approfondir lesfecrets dela Geometrie & de la Physique, bien loin de les'meprHer ,comme font laplupart de ceux qui neconnoissent pasces merveilles. Cest cequima porte à chercher encore la valeur du rayon G de la sphere infcriptible àl'alveole; &pour y parvenir,jeconsidereque cette sphere (touchant les faces de l'alveoleopposées diametralehicnc ;tellesqtffc DC, EF AB,DE;AF, DC, & qui font paralleles entrelles, il est évidentque son diametre doit être égal à la distance de ces mêmes faces. Or cette distance est égale à chacun des côtez BF;, B D, DF, du triangle équilateral inscrit à l'exagone , ou à chacune des grandes diagonales des rhombes ; ce qui est aisé à voir, en ce que de l'angle de l'exagone AEF deno. degrez ôtant l'angle BFD de 60, il reste 60 degrez, dont la moitié est la valeur deIangleEFD ; lequel étant ajoutéà l'angle BFD, donne Fangle-BFE droit, &de même de FBC.Ainsi BFest perpendiculaire à ces mêmes faces, & en est par consequent atiffi la distance. Donc ce diametreest à FR comme R3 a ï , & à FA comme 2R6 à 3, ou comme 6 à —R 6. 8. J'ai été plus loin. J'ai terminé le dessus d'une alvéolé par 3 rhombes égaux & semblables à ceux du fond, en faisent en sorte que les faces du contour fuflènç aussi des rhombes pareils ; ce qui sefait, en prenant les arêtesAK,BL, &c.égales aux cotes des. fbpç&t}es:du fond, & leur menant par KL, &c. des ) paralleles,commeonlevoit dans la figure solide reprefernée en perspective. Ce qui m'a donné un nouveau corps solide terminé par ix rhombestous égaux & femblables, ayant tous les angles de ses faces égaux, & de 120 degrez ; de plus 14 angles plans aigus, chacun de 70 deg. 31. min. & 2.4 obtus, chacun de 109,28, & qui est circonscriptible à ,. une (pbcfe. Il est vrai qu'il a 6 angles solides composez chacun de4anglesplans aigus de70deg. 52. min. chacun, & 8 autres angles solides corpposez de 3 angles plans obtus, chacun de 109 deg. 28 min. Ainsi il n'est pas inscriptible, àune sphere. Ce nouveau corps ta au/ïi deux especes d'axes ; & ecanc coupe perpendiculairement a ceux qui passent par les premiers anglessolides opposez,sça- voir par son centre, la coupe cA toujours un quarré: au lieu que si on le coupe de même perpendiculairement a ceuxqui passent par les derniers opposez,lecoupe est toûjours un exagone. Ce qui fait que ce corps re- presente en tout sens (étant vu selon les derniers axes) des alveoles exagonales >- & étant vu selon les premiers, il represente des alveoles quarrees. 9. De plus, on peut l'environner de iz autres corps - tous pareils, posez sur cha- cuftc de ses faces; en forte qu'il ne restera aucun jour encre ces 13 corps, à cause que les angles de ces mêmes faces font chacun de 110 degrez : d'où il luit que ce nouveau corps (que je nomme dedecaëdre apiain ou rhombique ) peur exactement remplir l'univers; de même que l'exaëdre rhombique; dont le cube ri'est qu'une espece ; ou si l'on veut, de même que l'octaëdre joint avec le tetraedre , comme jel'ai demontré ailleurs. Nous a- vous joint ici le developemenr de ce nouveau dedecaëdre. 9. Enfin il est évident qu'on peut supposer une Sphère en chacun de ces 12, corps environnans qui les touche dans les centres de leursfaces. Ce qui nousfait connoître de quelle maniéré ezspheres doivent être rangées autour d'une treizièmeégale à chacune -d'elles, pour se toucher toutes ; & on voit qu'il n'y en a pas une feule des 13 qui n'en doivetoucher 5. au- -~ ••.7 1: 4 tres, & que de pluselles se touchenttoutes4à 4^.entfin elles sont rangées 6.z:6 autour de grands cercles de la premiere , qui font entr'eux les anglesdes r hombes ci-dessus ; & chaque cercle en a de plus3 dechaque côté dè son plan , qui se tou- chent mutuellement , & quitouchentles ô.xjiji sont toutautour delui.At (a, mirâtiliu*&>
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Résumé : LES MERVEILLES des Abeilles, ou analyse du fond des Alveoles, dont leurs Rayons sont composez. Par Mr PARENT.
Le texte 'LES MERVEILLES des Abeilles' de Mr Parent explore la structure des alvéoles des abeilles, en se concentrant particulièrement sur la forme hexagonale de leur fond. Les naturalistes ont souvent admiré la figure hexagonale des alvéoles, mais peu ont étudié la forme du fond de ces cellules. Parent découvre que cette forme est d'une perfection géométrique remarquable. Les alvéoles ont une forme hexagonale régulière, ce qui les rend esthétiques, faciles à construire et économes en espace. Cette structure assure également une grande solidité et une capacité maximale pour une surface donnée. Le texte décrit en détail la géométrie des alvéoles, utilisant des concepts de géométrie et d'algèbre pour expliquer comment les abeilles construisent ces structures parfaites. Les angles des rhombes formés au fond des alvéoles sont de 120 degrés, et ces rhombes sont égaux et semblables. Parent souligne que la structure hexagonale est la plus régulière et la plus efficace, comparée aux formes triangulaires ou carrées. Par ailleurs, le texte décrit les propriétés géométriques d'un corps solide et ses interactions avec d'autres corps similaires. Lorsqu'on coupe ce corps perpendiculairement à travers ses axes, la section obtenue est un carré si le coupe passe par les premiers angles solides opposés, et un hexagone si elle passe par les derniers angles opposés. Cela signifie que le corps présente des alvéoles carrées lorsqu'il est vu selon les premiers axes et des alvéoles hexagonales selon les derniers axes. Il est possible d'entourer ce corps de 12 autres corps identiques, chacun posé sur une face du corps central. Les angles des faces, chacun mesurant 110 degrés, permettent à ces 13 corps de s'emboîter parfaitement sans laisser d'espace vide. Ce nouvel ensemble, nommé 'dédécacèdre aplain ou rhombique', peut remplir l'univers de manière exacte, similaire à l'hexacèdre rhombique ou à la combinaison de l'octaèdre et du tétraèdre. De plus, il est possible de supposer une sphère en chacun des 12 corps environnants, touchant les centres des faces. Cela permet de comprendre comment les sphères doivent être disposées autour d'une treizième sphère égale pour se toucher toutes. Chaque sphère touche 5 autres sphères, et elles sont organisées en cercles autour de la sphère centrale. Ces cercles forment des angles rhombiques et chaque cercle a trois autres cercles de chaque côté de son plan, qui se touchent mutuellement et touchent ceux qui sont autour d'eux.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 145-214
Suite de la Dissertation Philosophique sur l'ame des bestes.
Début :
Une personne de ma connoissance qui a vescu pendant 9. [...]
Mots clefs :
Dissertation philosophique, Âme, Bêtes, Castors, Sociétés animales , Éducation des petits , Remèdes naturels , Prévoyance , Société, Instinct, Architectures animales, Médecine animale , Machines, Liberté, Intelligence, Fidélité, Reconnaissance, Chien, Observation, Vertus animales, Chasse, Perfection, Construction, Architecture, Géométrie, Abeilles, Taons , Fourmis, Pigeons, Mouches à miel, Diligence, Enfants animaux, Jeux, Éducation, Perception
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Suite de la Dissertation Philosophique sur l'ame des bestes.
Suite de la DijjertationPhilofopbiquesur
lame des befles.
w Une personne de ma
connoissance qui a vescu
pendant9.années dans la
Loüiziane au Canada,m'a
assuré que rien n'etf plus
certain,que ce que Lahontan
& autres Auteurs rapportent
des Castors de ce
Pays; sçavoir
, que ces
animaux s'assemblent en
quantité, & rongent par le
pied,des arbres qui font le
long des bords des ruisseaux
, en telle forte qu'ils
les font tomber dans le
travers de l'eau pour en arrester
le cours, & soustenir
la terre qu'ils jettent
ensuite dedans au devant
de ces arbres,& dontils
font des Chaussées. Et pour
cet effet la societé de ces..,
ouvriers est commandée
par un chef; les uns cernent
& arrachent à belles
dents des gazons, & les
chargent ensuite sur les
queuës des autres ,
qui
font faites comme une
fole ; ceux-cy marchant
gravement & droits sur
leurs jambes de derriere,
traifnent leur charge jusques
surces arbres, &la
déchargent ensuite dans
l'eau. A mesure que la digue
s'esleve il y a des ouvriers
qui ont soin d'y pratiquer
des appartements
pour se loger
,
des greniers
pour conserverl'écorce
d'arbre qu'ils y amassent
pour leur nourriture; & des
galleries souterraines pour
aller à la pesche dans les
estangs formez par ces digues.
Ily a jusqu'à des hospitaux
pour retirer leurs
malades fatiguez du travail
; & d'un autre costéles
faineants qui se couchent
sur le dos pour sereposer,
sans avoir le dessous de la
queuë écorché,à force de
charier des gazons, y sont
rigoureusement punis &
chassez. Les digues sontartissement
recouverres de
gazon,ensorteque la pluye
ne peut les endommager,
&qu'on passe aifémenc desfus
sans se douter de rien.
Beaux exemples que les
stupides bestes nous fournissent,
nonseulement pour
avoir soin des malheureux,
mais encore pour ne point
souffrir dans les Etats de
ces gens qui se croyent
uniquement faits pour vivre
& joüir du travail d'autruy.
f
4. On sçait assez que les
bestes ontaussil'instinctde
chercher des remedes pour
leurs malades; que les
Chiens mangent du chiendant
pour s'exciter à vomir;
que les Gruës se donnent
des lavements;que
les Macreuses qui n'ont
pointde jabot avalent force
petits cailloux, pour broyer
dans leur gozier les petits
coquillages dont elles se
nourrissent
, & quantité
d'autres singularitez qui
regardent leur santé. Et
peut estre les hommessont
ils encore redevables aux
bestes des premieres régles,
de la Medecine.
Prétendra-t-on donc en-»
core que les machines font
aussi capables de prévoyance
& de crainte, de former
des societez, de bastir des
domicilles, d'avoir pitié
des malheureux,de punir
les vauriens,& en un mot
1
de trouver des remedes
contre ce qui peut les endommager?
Il vaut mieux
penser que les premiersAuteurs
de ce beau systesme
n'avoient pasune parfaite
connoissance des proprietez
des bestes, & que leurs
Sectateurs ont mieux aimé
s'attacher servilement à
leur opinion; que dese
donner la peine d'examiner
eux mêmes la question
avec toute rexaaitlldeù'loo
elle demande,comme ce
n'est que trop l'ordinaire.
5. A l'égard de rinfiind:
des belles pour ce qui regarde
l'éducation de leurs
petits, qu'yac-il de plus
admirable que de voir cette
méprisable & stupide
Araignée, dont nousavons
déjà parle, s'ourdir un sac
d'une toiletres-fine& trèsforte,
pour y pondre & y
conserver ses oeufs. & ses
petits : Un Loriot suspendre
son nid à 3. branches
d'arbre par trois fils de plus
d'une demie aulne-de longueur
chacun, de crainte
apparemment que les Ecureuils
ou les Belettes ne.
viennent manger les oeufs,
ou ses petits; & qui fçaic
aussi si ce n'est point en^-
core pour bercer ces nouveaux
nez, & les endor*-
mir, tandis que leurs pa.
rens leur cherchent la vie?
UnTirarache ou Moineau
aquatique attache le ben
librement à deux ou trois
roseaux
,
afin qu'il puisse
flotter sur l'eau-, hausser &
baisser comme eUe, rani
en estré emporré, c'estce
que j'ay vû plusieurs fois
avec beaucoup d'admiration.
On raconteaussi
Jes stupides Hiboux ont
foin decasser les pattesaux
souris qu'ils apportent à
leurs petits, & qu'ils la-if.
sent en reserve dans leurs
trous, ôc mesme d'appor.
ter dubledà ces souris pour
vivre, afin que leurs jeunes
éleves ayent le plaisir de
lescroquertoutesvivantes^
quand la faim les prend
e qu'ils trouvent tousjours,
par ce moyen dela viande
fraischeàmanger.Sur tout
les Aigles ont grand foin
de plumer ôc çl'a^acher le
poil des animaux qu'ils apportent
à leurs petits, de
crainte qu'un peu trop de
gloutonnerie ne les sasse
étrangler. Jeneparle point
des Guenons qui portent
leurs petits sur leurs épau*
les jusques au haut des
toits & des arbres, pour
leur apprendre à grimperr
& peut estreaussiàmépris
ser les dangers.
Mais je ne fçauroisassez
admirerlirft'nd: qui don
ne une intrépidité & un
courage surprenant
, ( &
qui va quelquefois jusqu'à
la sureur)aux animaux qui
ont des petits, pourenoser
attaquer d'autres d'ailleurs
beaucoup plus méchants
qu'eux,& les chasser, lorsqu'ils
s'en veulent approcher
; ny cette tendresse
plus que maternelle qui
porte les Perd rix à se jetter
pour ainsi dire dans la
gueule des chiens de chasse
pour les amuser,& don
ner lieu à leur petits de
sévader; cVil ce que j'ay
veu cent fois, non
lins
un
veritible estonnement.
Qu'y a t il deplusconstante.
& en mesme temps
de plus inconcevable que
l'histoire des Pigeons qu'on
emporte d'Alep à Alexandrette
en Syrie( ou tout au
contraire) par l'espace de
50. ou 60. lieuës, & qu'on
lasche ensuite avec une lettre
aucol, sitostqu'on est
arrive; car ces courriers
de l'air prennent aussitost
leur essor jurques au dessus
des nuées, & montent tant
qu'ils apperçoivent leur
chere patrie, & le lieu de
leurs petits,& de leurcompagne,
où ils se rendent en
trois ou quatre heures de
temps au plus. Par ce moyen
on apprend des nouvelles
toutes recentes, quon
ne pourroit sçavoir,que
plusieurs jours aprés. Ilest
évident aussi que les différentes
especes de Mouches
à miel, comme les Abeilles,
lesGuespes, les Freflons
,
Bourdons) Taons
,
&c. doivent avoir une sagacité
pareille à celle des
oiseaux,pourreconnoistre
le lieu de leur domicile &
leurs rusches. Goedart écrit
dans son Livre des insectes,
qu'il a eu chez luy
unetaniereouil aobserve
que les Taons, lorsqu'ils
travaillent aux cellules devinées
pour leurs oeufs, ont
aussi un Commandant
comme les Castors, lequel
a soind'eveillerles ouvriers
dès la pointe du jour par le
bruit de Ces ailes. Qu'auuitost
chacun s'en va à son
ouvrage , ceux qui ont un
an paffé vont chercher la
cire & le miel, pour bastir
les cellules ou nids, & pour
vivre, & outre cela de l'eau
pour détrem per de la terre
& en former des voûtes.
Les jeunes Taons comme
aides maçons,détrempent
cette terre, & en font des
boulins ou rouleaux qu'ils
roulent ensuite avec leurs
pieds dederrière jusqu'aux
sommets des ouvrages, ou
les plus anciens qui ne sont
plus propres qu'à bastir les
reçoivent, & en forment
des voutes au dessus deces
nids, de crainte qu'il ne
tombe de la terre dedans.
Les plus vigoureux ont foin
de faire la chatTe) & d'étrangler
sans misericorde
les vauriens, qui non contens
tens dene pointtravailler,
vont encore manger la
nourriture des leur, ouvriers en absence,;
Sil'ontraittoit ainsitous
ceux qui en usent de mesme
dans les Estars policez,
il n'y auroit pas tant
de faineants& de voleurs
& l'abondance y regneroic
en la place du brigandage.
Au reste quoyque je n'aye
pas de témoin oculaire des
merveilles des Taons, il
n'y a pas
@
cependant plus
de peine à les-croire que
celles des;Fourmis& dee
Castors dont je suis certain,
ou que celles des Abeilles
qui les surpassent
peut-estre encore de bien
loin, comme on laveudans
le Mercure de Paris de fan.
née1712.. au mois d'Avril.
Car on peut asseurer qu'il
n'y a peut-estrepasd'animal
si brute qu'il foit
;
qui ne devienne comme
sensé &intelligent lorsqu'il
s'agit de sa conservation,
ou de la production
de ses petits. Est- il rien
qi4i paroiiflcplustbFute ql.Í.
ui* Limaçon?ilcreuse cc*
pendant un nid en terre
pour y pondte ses oettfs; il
les couvre ensuite d'une
especedecole quise durcit
extrêmement, & qui les
conserve contre les insectes
& contre toutes les injures
du temps. Qu'estildeplus
pefanc qu'une Tortue, elle
fort néanmoins du fond de
la mer, elle vient creuser
un nid dans le fable où elle
fait sa ponte,& recouvre
ensuite ses oeufs de ce met
me fable,afin que la chaleur
du soleil suppléé au
deffaut de lasienne
, qui
ne feroit pas suffisante pour
les faire éclorre. Les Saumons
& plusieurs autres
poissons remontent les ri.
vieres jusqu'à leur source,
& fouvenc par. respace de
plus de cent cinquante
lieues
, pour femer leurs
oeufs sur la bouë Ôc dans
une eau peu profonde afin
que la chaleur du Soleil
puisse les faire éclorre.
Faut-il que desbestes
pour qui nous avons tant
de mépris., surpassent la
,
pluspart des Peres & Meres
en tendresse &.. en soins
1
pour l'éducation de leurs
enfants?
•
Quoy donc les Machines
opereront-elles aussi des
prodiges pour enfanter
d'autres Machines, pour
les conserver, & pour leur
sauverla vie; & a pprendront-
elles à nos amesraisonnables
à avoir des sentimens
de rendresse & de
crainte;àestrelaborieuses,
soigneuses , courageuses ,
& tantd'autres vertus necessaires
à l'éducation des
pietits?Mais auparavant que
de quitter ce sujet,considerons
un peu quel plaisir
nos bestes brutes prennent
à exercer leurs jeunes adul.A
Ks, désqu'ils commencent
à courir, voler, ou
nager. Ne diroit-on pas
qu'elles ont recouvert une
nouvelle jeunesse pour
jouër & folastreravec eux?
Que ne doit.on point penser
aussi des jeux de ces
jeunes animaux,qui sont
remplis de feintises,d'imitations
,
& de singeries ;
tantost ils feignent d'estre
fort en colere ; & dese
mordre tantost de fuïr tantost de poursuivre,tan-r
tost de flatter
,
tantost
-
de
craindre,en un mot ils imitent
parfaitement les jeux
des enfants, qui ne font
jeux qu'en ce qu'ils ne sont,
comme ceux- là
, que de
pures fictions. Il n'est pas
jusques aux plus stupides
animaux,dont les amufementis
de jeunesse ne eausent
beaucou p d'admiration
,
& de plaisir à ceux
qui les observent. Si quelqu'un
en doute,iln'a qu'à
considerer pendant quelque
beau jour de Printems,
les jeux des jeunes Arai-r gnées des jardins. On les
trouve au iixleil contre les
muraillesqui selivrent mita
le combats,moitié feints,
moitié san g lants
; là elles
(e mordent
,
se précipitent.
s'arrachent les pattes, 5e..
tranglent, & surpassent de
bien loin,tout ce qu'on rapporte
des gladiateuts sur les
arenes.
Les Machines seront-elles
donc encore capables
de fictions
,
& d'imitation
comme les enfants, & produiront-
elles
duiront-elles des opera»
tions pour lesquelles e lles
ne sont pas veritablement
montées? Une montre par
exemple qui est montée
pour marquer deux fois
douze heures par jour, s'a).
visera-t-elle, pour se divertir
, & pour nous jouër, de
les marquer en une heure,
& reprendra telle ensuite
d'elle-mesme son serieux,
& son veritable train. J'avouë
qu'on entrevoit des
étincelles de liberté dans le
delire des enfants, par la
communication qu'ils ont
avec nous de leurs pensées
, & que nous ne pouvons
rien appercevoir de
semblable dans les animaux,
avec lesquels nous ne
pouvons point avoir cette
sorte de commerce. Mais
avantd'entrer plus avant
dans cette discussion, examinons
encore quc!qucs
vertus des bef.l:e)q.ui nous
aideront à prendre parti
plusseurement.
7. Tout le monde sçait
assez l'arrache,la fidélité,
la soumission & la reconnoissance
, que les Chiens
ont pour leurs maistres,leur
docilité,l'impatience qu'ils
ont de les revoir quand
ils sont absens
,
la tristesse
que cette absence leurcause
,& la joye qu'ils marquent
quand ils les retrouvent,
ou lorsqu'ils peuvent
leur rendre quelque service;
avec quelle chaleur ils
prennent leur deffense,
leur patience à en souffrir,
leur perseverance à leur
estresoumis,leur contrain- te&leurcomplaisance pour
eux. Undemesamisayant
fait emporter à dix lieuës
de Paris un vilain Chien ,
qui s'estoit addonné chez
luy
5
& qu'on n'avoit pû en
estranger à force de coups
de baston; ce Chien revintà
samaison aprésquelques
jours.Le maistre las de
lemaltraiter luy fit lier les
quatre pattes, attacher une
pierre au col, & lefit jetter
de dessus le pont Marie
dans la Seine. Le Chien ne
laissa pas de se sauver, ( ce
que j'aurois toutes les peines
du monde à croire,s'il
ne m'estoit arrivé une chose
toute pareille, ) & s en
revint au plus viste donner
de nouveaux tefmoignages
d'une fidélité & d'une foumission
inviolables à son
maistre adoptif, lequel en
fut tellement touché d'estonnement,
qu'il changea
dans le moment toute sa
rigueur enaffection.Tout
Paris a veu avec surprise, il
y a eennYvilrroonncfi.:nlnqquuaannttec 'ilnn's)
la constanceinvincible
d'un Chien,qui demeura
pendant plusieurs années
collé sur la fosse de son maistre,
dans le cimetiere des
saints Innocens , sans que
"Dy flatteries, ny nlrnaces.
ny lâFhecelïite peussent l'en
tirer. Ayantblesséunefois
un Lievre,il k sauva dans
tuàfe vigne
y
oùje le suivis
à lâ vbix de mes Chiens;
peu dete-n, psaprês;les voix
ayant etffé-,jc&urav
qu'ils*T-avoientafrêïïé-,<K
comme je les clltrèhÓisa
costé & d'autre
,
j'en ap -
perceus un qui venoit à
moyen grande diligence;
me flattant & thc caressant
,
aprés quoy il s'en
retourna avec beaucoup
-V
d'em pressement,ce qui me
fit comprendre qu'il falloir
le suivre: pendant que je
marchois, il prenoit le devant,
& revenoit fouvenc
sur ses pas, marquant tousjours
de l'im patience; à la
fin il ne revint plus, &
m'estant un peu avancé,
j'entendis mes deuxChiens
( d'ailleurs tousjours tresbons
amis) qui se mangeoient
l'un l'autre.Dés que
le second m'aperceut il prit
aussitost la suite
,
fentané
apparemment que ficatifë
n'estoit pas bonne. 1c vis
effectivement que le sujet
de leur querelle estoit que
le second avoit fort endommage
le Lievre pendantl'absence
dupremier,
lequel au contraire me caressoit
avec beaucoup de
confiance,comme pour me
marquer son innocence de
sa Cfiodmélibtiée.n
de belles regles
de morale ne peut-on
pas tirer de tousces exemples
; mais il vaut mieux
que chacun aitle plaisir de
les endeduire, que d'ennuyer
icy le kdieur par des
reflexions qu'il peut faire
aisément luy-mesme.
Je ne sçaurois cependant
m'empescher de luy
faire observer,que ces marques
de fidelité, de complaisance
& de retenuë,
n'ont gueres de compatibilité
avec l'idée que nous
avons d'une machine, qui
doit tousjours aller son
train, & tendre droit à sa
fin, dez qu'elle est une fois
desmontée d'une certaine
façon.
8. Que ne devons. nous
point penser encore de la
réglé que la pluspart des
belles observent dans toutes
leurs actions; les unes
ne sortent jamais qu'à une
certaine heure de nuit pour
chercher leur vie, ou une
com pagne,comme les Becasses,
les Lapins,les Limaces
,
les Herissons
,
les
Hiboux, & quantité d'autres
animaufc nocturnes
& sauvages qui rentrent
tous constamment à une
certaine heure du matin;
D'autres au contraire tid
manquent jamais de s'éJ
Veiller au lever du soleilJ
&de se rendormir à ion
coucher, ne perdanr pas
pour ainsi dire un seul ravon
de sa lumiere. En
Jquoy certes ils font beaucoup
plus dignes de louanges
que tant d'hommes déréglées,
qui paissentléurvie
comme les Hiboux, veillant
toute la nuit, & dormant
tout le jour.
On sçaicaussi que quan
tité d'oiseauxpassent tous
les ans des pays chauds:
dans des contrées plus temperées,
pour se sauver de
l'ardeurdusoleil. D'autres
au contraire
, vont des
paysfroids dans les mesmes
comrees, pour eviter
la rigueur de l'hyver, & les
uns & les autres s'en retournent
tous les ans d'où
ils font venus; sans que la
distance decinq ousixcens,
lieuës de pays, ny les trajets
des mers,soient capables
de leur faire Interrompre
leur réglé ( passant airtsi
toute leur vie comme des
voyageurs .& des étrangers
sur la rerre) Entre les differens
oisèaux les uns se
marient pour un temps,
d'autres mesme pour toute
leur vie) comme les
Tourterelles. Ils ne connoissent
point le divorce,
&. leurs mariages demeurent
inviolables, jusques à
ce que leurs petits n'ayent
plus besoin de leur secours.
Quel sujet de confusion
pour tant d'hommes d'ailleurs
raisonnables, mais
certainement inférieurs en
cecy aux bestes. De plus
le mariage n'est point en
eux une lubricitépuisqu'il
ne se contracte unique.
ment que pour la generation.
C'est pour cela que
leur rut dure si peu,&qu'il
ne vient que dans des tems
reglez& propres pour l'é.
ducatiori des petits; au lieu
que la lubricité des hommes
débauchez est perpetuelle.
«>. Disons encore un mot
de la chanté, de l'honnes.
teté & de lajustice que les
belles exercent entre elles,
outre ce que nous avons
remarqué des Cerfs à l'égard
de leurs compagnons
fatiguez, des Castors, des
Taons,& des peres &meres
a regard de leurs petits.
Plusieurs, ont apparemment
entendu dire un ancien
Proverbe, asinus asinum
fricat, mais peu en
gavent la vericable raison,
& peut estre que çeluy qui
la mis au jour ne la sçavoit
pas bien IUY.tesme. Pour
donc l'entendre
,
il faut
considererque quandun
Cheval, Asne ouMulet ne
sçauroit se gratter en quel.
que partie de son corps qui
: hlY démange, comme sur
le dos, le col, ou la teste, ils'approche de son cama.
rade, & le grate al'endroit
pareil à celuy quiluy démange.
Aussitost ce compagnon
charitable ne manque
pas, comme comprenant
le besoin de son camarade
, de le grater au
mesme endroit où il a esté
graté, & souventmesme
de l'avertir d'un endroit
qui luy demange aussi
> ôc
c'est alors qu'il est vray de
dire (qu'un Cheval grate
un autre Cheval, ) ces animaux
se prellant alors un
secours mutuel, dont chacun
a bes•oin, & dans l'en. k droic
droit qu'il souhaine. Qui
est-ce qui n'a pas veu les
Chiens d'un logis, & mesme
d'une rue, courir à la
deffense d'un de leurs camarades
attaque par quelqu'autre?
Qui ne sçait pas
la complaisance & les égards
qu'un animal a pour
un autre de mesme espece
plus jeune, ou plus foible
que luy
, & celle que les
masles en general ont pour
toutes les femelles? Qui
est:ce qui n'a pas remarque
le soin que les Chats
ont de cacher leur ordure,
ôc de nettoyer leur toison ?
Les oiseaux ont le mesme
foin de nettoyer les nids de
leurs petits, & les fourmis
leurs fourmillieresOnsçait
assez que les animaux corrigent
leurs perirs,-& quemesme
cespetits ont pour
létor^merèstoute'sa fbumissionpossible,
mais peutestre
tout le rriendenè sçait
f>rs queles Fôùrrftfa àidenif
courêS en : tbminun 'ccllè&:.
quiviennent s'estabmordans
fëurvôisinàge^Icdnftrmfé
fài/tfelji^iltiere*, qu'elfes
tfeÂir1 ^rêft?entdateur'graiiï
pendant ce temps-là, &
que celles-cy le leur rendent
fidellement
,
quand
leurestablissement est fini.
Que les Fourmis exercent
en rigoureux supplice contre
les Fourmis larronnefses
ou paresseuses, en les
déchirant à quatre. Mais
on ne finiroit jamais, si l'on
vouloit ra pporter toutes les
singularitez morales qu'on
remarque dans la conduite
des animaux;& peut-estre
arriveroit- on à s'asseurer
un repos & un bonheur
parfait dés cette vie, si on
estoit allez prudent pour
en bien profiter.
Qui pourra penser aprés
cela que les belles soient
de pures Machines, toutes
matérielles, meuës feule-
X ment par des loix du mouvement
générales & estoignées
J
dépendemment
d'une organisation de parties.
Il vaudroit autant faire
tout d'un cou p de la raison
& de la prudence hu-,
maine une espece de Ma-,
chine, necessitée aussipar
les mesmes loix, & par consequent
aveugle & sans li.
berté; mais dans quel excez
d'aveuglement faudroit-
il tomber pour imaginer
une telle chimere;
& quand mesme uneraison
dérangée pourroit y consentir,
nostre sentiment intérieur
ladementiroittousjours.
10. Que penser donc
maintenant sur la nature
du principe qui meut les
bestes, voyant qu'il est
pourveu de tant de belles
& bonnes qualirez ; qu'il
cft si judicieux, si vigilant,
si prudent, & si reglé dans
toutes ses opérations; tandis
que nostre amé au contraire
est sujette à tant
d'imperëfdibns&devices;
à T-éVréur5 à linjtTftice; à
l'ingràtitude, à l'infidélité,
àl'oisivetéà l'inhumanité,
à: l'impicte,a I'hypocrifie&
au dereglementdes moeurs.
Mais cette différence est
encore peu de chose, (s'il
rit permis de le dire) en
comparaison de cettequi
setire de la sagacité des
bestes à executer leursou.
vrages sans aucune estude,
&mesme sans aucun inftrument
étranger; tandis
que nos ouvriers font au
contraire obligez de faire
dé longs apprentissages,
d'où souvent ils sortent encore
fort ignorants, quelquefois
mesme font-ils
tout-à-fair incapables dé
rien apprendre. Nos Architectes
( par exemple) ne
sçatiroient bastirsansavoir
âppris avec bien du temps
&des peines les réglés dé
la Geornerrie& de l'Archirecture.
Cependant les Gac.
tors duCanada font des
digues&desappartements
pourse loger, conformes
à la droite architeaure sans
avoirappris aucunes réglés.;
Les Taons font de
mesme leurs voûtes sans le.
secours d'aucuns precepres,
que de leur bon genie. En
un mot les animaux construisent
leurs ouvrages de
la maniere qu! est tousjours
la plus parfaite en
chaque espece, comme
nous l'avons fait voir par
l'examen des raïons des Abeilles;
dans le mémoire
cite cy- devant, article l.
J'avoue qu'en cela mesme
me les bestes paroissent
bornées dans leurs operations;
elles ne sçavent point
varier leurs ouvrages en
uneinfinité de manieres.
comme l'homme, elles
sont, pour ainsi dire, asservies
à leur sujet ;au lieu que
l'homme travailleen maistre
dans ce qu'il possede.
Outre qu'il rassemble, pour
ainsi dire, éminemment en
luy toutes les inventions
dont les différents animaux
sont capables;& quoyqu'ii
n'y parvienne qu'à force
de travail&de temps,cela
ne laisse pas de prouver
parfaitement la fecondité
de son genie. Mais cette
secondité ne suffit pas pour
luy donner la Préférence
du codé de la perfection;
d'autant plus que les bestes
sont aussi capables par leur
docilité, d'apprendre une
infinité dechosestrès singuliere,
outre celles qu'elles
tiennent de leur inClinét
naturel. Ensorte que si les
bestes pouvoient le communiquer
leurs idées comme
les hommes font entre
eux, & si elles avoient des
mains, & des instruments
propres à tout executer
comme nous, peut-estre
auroient-elles aussi chez elles
des arts beaucoup plus
parfairs que lesnostres.J'ay
veu il y a environ dix ans
à la foire de saint Germain
un animal appelle Fecan,
assez semblable à un Renard
,
excepté qu'il a les
pattes d'un Singe, il se fervoit
de celles de devant
avec une adresse surprenante.
Au contraire les animaux
les plus stupides ont
les pieds ordinairement les
moins divitez. Il y a plusieurs
animaux qui ont la
partie de l'oreille appellée
le labyrinthe, semblable à
celle de l'homme, comme
les Chiens
J
les Chevaux,
les Elephans, les oiseaux
,
&c. lesquels sont tres- sensïbles
à la musique;ôc ceux
au contraire qui en font
privez y sont tout-a-fait in.
sensibles, furquoy l'on peut
voir nostre discours de l'oreille
imprimé en 1711.
dans le Mercure de Février,
d'où l'on pourroit inferer,
que si les bestes paroissent
si bornées, c'est du moins
en partie, parce que les instruments
leur manquent.
Mais du costé de la perfection
il ne faut qu'examiner
leurs ouvrages avec exactitude
, pour voir qu'elles
remportent de bien loin
sur nous. Si l'on se donne
la peine, par exemple,de
considerer la figure du
fond des cellules des Abeil.
les, & de quelle maniere
cescellules sontassemble'es
&oppocées les unes aux autres,
on fera forcé d'avouer
que l'intelligence qui les
conduit,est naturellement
pourveuë des connoissances
de la Géométrie,& de
l'Architeâure, & que pour
donner la mesure la plus
parfaite aux angles plans
ôc solides qui s'y rencontrent,
il faut qu'ellesçache
non seulementle calcu l des
triangles, mais mesme l'Algebre
; qu'elle possede les
proprietez de la sphere, &
des polyedres in scrits ôc
circonscrits; & en un mot
tout ce que nos plus habiles
Architectes ne sçavent
que fort mediocrement;
puisque ces cellules admirables
renferment toute la
perfeaion quecessciences
demandent,tant pour avoir
de la solidité & de la régularité
, que pour s'assembler
les unes avec les autres,&
pour s'y loger commodément
& seurement j ôc je
ne douté nullement que si
l'on faisoit un examen pareil
à celuy-cy des ouvrages
des Castors, des Taons ôc
des autres animaux archicettes)
on y trouveroit la
mesme perfection que dans
les raïons desAbeilles.
11. Nous voicy donc forcez
par nostre propre experience
d'avouer que l'intelligence
qui guide les animaux,
de quelque nature
qu'elle foit, est infiniment
plus parfaite en son essence
, que l'esprit de l'homme.
Maisenmesmetemps
quelle honte n'est
- ce pas
pour nous, si nous faisons
cet aveu en faveur de créatures,
que nous traittons de
stupides, & pour lesquelles
nous avons le dernier mépris-
N'est-ce pas la nous
précipiter nous-mesmes de
ce throne de gloire ou nous
nous estions placez au def-
-
fus detoutce quirespire?
- Quel parti prendré dans
une telle conjoncture,ne
pouvant ny osterla raison
aux belles pour en faire de
pures Machines, sans tomber
dans un ridicule intolérable
; ny leur donner un
principe spirituel sans estre
obligezd'abbaisser nostre
amour proprejusquà consentir
de le faire infiniment
plus parfait que nostre
ame.
Je ne voy plus d'autre
parti que de reconnoistre
dans tous ces effets singuliers,
oùla raison & le jugement
reluisent, le doigt
de l'Autheur de la nature,
( vereeniimdigitus Dei hi,cess )
ôc d'avouer que c'est sa
main qui se fert alors librement
des bestes, comme
d'un instrument sensible
pour se faire admirer, 0&
pour nous enseigner les leçons
de sa sagesse & de sa
justice. Voilàcetteintelligence
toujours libre, & infiniment
estevée au dessus
dela nostre, qui n'a besoin
ny de regles,ny d'apprentissage,
ny d'instruments,
pour operer tous ses miracles;
qui est toute en toutes
ses créatures,& toute en
chacune, sans leur estre aucunement
asservie,,& sans
estre déterminée par leurs
organizations presentes,
comme les Carthesiens le
prétendent, puisque c'est
elle au contraire qui en
produit librement tous les
mouven ens judicieux,selon
les differentes conjonétures
où elles se trouvent; le
tout uniquement pour leur
conservation
, pour nostre
utilité, 6c pour sa gloire.
Et si elle ne tire pas de chaque
sujettout ce qu'elle
pourroiten tirer, c'est quelle
a voulu manifester sa
secondité, en multipliant
& variant ses sujets indefiniment,
afin d'exciter davantage
nostre admiration,
&de lareveiller continuellement
; au lieu qu'elle languiroit
bien tost, si nous
trouvions les mesmes operations
dans coures les bestes.
Par ce moyen toutes
les difficultez sont levées;
nous nous délivrons du ridicule,
de vouloir tirer une
raison ( & une raison tressuperieure
à la nostre ) d'une
Machine purement materielle;
& ceux à quila propre
conscience de leur libertédans
les operations
intellectuelles,nefuflitpas
pour les sauver de la terreur
panique de devenir aussi de
pures Machines,files bestes
estoient telles, font entièrement
rasseurez. Nous
ne nous dégradons point
de nostre estat,en nous mettant
au dessous de l'intelli*
gence qui meut les bestes;
puisque nous y reconnoissons
l'Auteur de la nature,
qui se dévoile, pour ainsi
dire, librement & de luymesme
à nos yeux; nous
confondons aussi l'endurcissement
des Athées, en
adorant sa providence, &
nous trouvons un moyen
facile pour expliquer tout
ce qui paroist de plusmerveilleux
dans les actions
des bestes, sans qu'il nous
en couste aucun travail, ny
aucune estude.
12. Je ne prérends pas
cependant par là osteraux
belles une espece d'ame
materielle
,
qui préside à
leurs operations vitales, &
qui soit mesme susceptible
desentiments,&de perceptions,
de plaisir,de douleur,
de joye,de tristesse,de colere,
d'amour,decrainte, de
haine, de jalousie,&de toutes
les autres passionsqu'on
remarque dans les bestes;
même encore si on le veut,
d'imagination, de memoire&
d'action,parce que ces
operations sont encore infiniment
esloignées de la raison.
Je soustiens au contraire
que toutes ces passions
ou actions se passent
uniquement dans les esprits
animaux,qui sont contenus
dans leur cerveau, ans leurs nerfs, & dans
leurs membranes. Car il
suffit pour cela que ces cCprits
coulent continuellement
dans le sang, dans les
autres humeurs, & dans
toutes les parties de leur
corps; & que de plus ils
soient capables de recevoir
les impressions des objets
extérieurs par les sens, d'en
conserver
conserver les motions ou
images, & que ces images
ayenc communication les
unes avec les autres, pour
produire toutes les actions
destituées de jugement ôc
de raison
, ce que je n'ay
pas entrepris d'expliquer
icy en détail. Je dis seulement
icy que ces esprits
animaux sont la feule ame
matérielle
,
sensitive & animale,
Ôc la forme substantielle
des bestes, dont l'Autheur
de la nature se sert librement
pour produire
tout ce qui est au dessus de
la nature, je veux dire ce
qui tient de la raison & du
jugementsans qu'il soitnecessaire
de leur donner encoreune
ame spirituelle,qui
compare ces images formées
dans les esprits,qui
conçoive des idées & des
partions à leuroccasionqui
reflechissesur elle
-
mesme,
& sursesoperations,qui soit
capabledese déterminer la
première,&quisoitsusceptible
de rtgles.)ou de connoissances
universelles &
âb'ftriiittcs,comme la nostre,&
cela par lesraisons
que nous avons rapportées.
Il est évident que nous
ostons par là toute connoissance
aux bestes, pour leur
laisser feulement la vie, la
perception, & le mouvement
, comme font les CarteGens;
parce que cela
suffit pour leurs opérations
naturelles & vitales; &
qu'à l'égard des autres ope- A rations, cette âme materielle
,
sensitive & animale
, cette forme substantielle
n'enest que l'organe
& l'instrument
,
qui bien
loin de déterminer l'Auteur
de la nature à agir d'ue maniere
machinale&fcrvile,
comme le prétendent ces
Messieurs,est au contraire
déterminée par ce mesme
Auteur àsuivre ses impressions,
& à produire les actions
dont la matière est incapable
par elle.'-mefnJc.
Ainsi nous devons bien distinguer
deux especes d'operations
de Dieu dans les
bestes; la premiere qui est
leur vie est generale& éloignée
,
elle est déterminée
par les loix qu'il a establies
en formant le monde&a
parconsequent une connexion
necessaire avec tous
les autres mouvemens qui
s'y font; on peut l'appeller
à cause de cela naturelle &
necessaire; la secon de au
contraire estlibre & comme
surnaturelle,elle ne dépend
au plus que des conjonctures
presentes, & nullement
des organes ou des
loix gencrales. La première
est ce qu'on entend par
le simple concours de Dieu;
la feconde est l'effet d'une
Providence qui ne differe
du miracle, qu'en ce
qu'il ne produit aucun dé..
rangement sensible dans la
nature, &qu'il ne manque
jamais de se faire dans IC4
mesmescirconstances, parce
que Dieu est toujours le,
mesme;c'est si l'on veut un*
miracle naturel & ordinaire>
qui n'est méconnu ôc
ignoré
, que parce qu'il est
tousjours present aux yeux
detous les hommes.
lame des befles.
w Une personne de ma
connoissance qui a vescu
pendant9.années dans la
Loüiziane au Canada,m'a
assuré que rien n'etf plus
certain,que ce que Lahontan
& autres Auteurs rapportent
des Castors de ce
Pays; sçavoir
, que ces
animaux s'assemblent en
quantité, & rongent par le
pied,des arbres qui font le
long des bords des ruisseaux
, en telle forte qu'ils
les font tomber dans le
travers de l'eau pour en arrester
le cours, & soustenir
la terre qu'ils jettent
ensuite dedans au devant
de ces arbres,& dontils
font des Chaussées. Et pour
cet effet la societé de ces..,
ouvriers est commandée
par un chef; les uns cernent
& arrachent à belles
dents des gazons, & les
chargent ensuite sur les
queuës des autres ,
qui
font faites comme une
fole ; ceux-cy marchant
gravement & droits sur
leurs jambes de derriere,
traifnent leur charge jusques
surces arbres, &la
déchargent ensuite dans
l'eau. A mesure que la digue
s'esleve il y a des ouvriers
qui ont soin d'y pratiquer
des appartements
pour se loger
,
des greniers
pour conserverl'écorce
d'arbre qu'ils y amassent
pour leur nourriture; & des
galleries souterraines pour
aller à la pesche dans les
estangs formez par ces digues.
Ily a jusqu'à des hospitaux
pour retirer leurs
malades fatiguez du travail
; & d'un autre costéles
faineants qui se couchent
sur le dos pour sereposer,
sans avoir le dessous de la
queuë écorché,à force de
charier des gazons, y sont
rigoureusement punis &
chassez. Les digues sontartissement
recouverres de
gazon,ensorteque la pluye
ne peut les endommager,
&qu'on passe aifémenc desfus
sans se douter de rien.
Beaux exemples que les
stupides bestes nous fournissent,
nonseulement pour
avoir soin des malheureux,
mais encore pour ne point
souffrir dans les Etats de
ces gens qui se croyent
uniquement faits pour vivre
& joüir du travail d'autruy.
f
4. On sçait assez que les
bestes ontaussil'instinctde
chercher des remedes pour
leurs malades; que les
Chiens mangent du chiendant
pour s'exciter à vomir;
que les Gruës se donnent
des lavements;que
les Macreuses qui n'ont
pointde jabot avalent force
petits cailloux, pour broyer
dans leur gozier les petits
coquillages dont elles se
nourrissent
, & quantité
d'autres singularitez qui
regardent leur santé. Et
peut estre les hommessont
ils encore redevables aux
bestes des premieres régles,
de la Medecine.
Prétendra-t-on donc en-»
core que les machines font
aussi capables de prévoyance
& de crainte, de former
des societez, de bastir des
domicilles, d'avoir pitié
des malheureux,de punir
les vauriens,& en un mot
1
de trouver des remedes
contre ce qui peut les endommager?
Il vaut mieux
penser que les premiersAuteurs
de ce beau systesme
n'avoient pasune parfaite
connoissance des proprietez
des bestes, & que leurs
Sectateurs ont mieux aimé
s'attacher servilement à
leur opinion; que dese
donner la peine d'examiner
eux mêmes la question
avec toute rexaaitlldeù'loo
elle demande,comme ce
n'est que trop l'ordinaire.
5. A l'égard de rinfiind:
des belles pour ce qui regarde
l'éducation de leurs
petits, qu'yac-il de plus
admirable que de voir cette
méprisable & stupide
Araignée, dont nousavons
déjà parle, s'ourdir un sac
d'une toiletres-fine& trèsforte,
pour y pondre & y
conserver ses oeufs. & ses
petits : Un Loriot suspendre
son nid à 3. branches
d'arbre par trois fils de plus
d'une demie aulne-de longueur
chacun, de crainte
apparemment que les Ecureuils
ou les Belettes ne.
viennent manger les oeufs,
ou ses petits; & qui fçaic
aussi si ce n'est point en^-
core pour bercer ces nouveaux
nez, & les endor*-
mir, tandis que leurs pa.
rens leur cherchent la vie?
UnTirarache ou Moineau
aquatique attache le ben
librement à deux ou trois
roseaux
,
afin qu'il puisse
flotter sur l'eau-, hausser &
baisser comme eUe, rani
en estré emporré, c'estce
que j'ay vû plusieurs fois
avec beaucoup d'admiration.
On raconteaussi
Jes stupides Hiboux ont
foin decasser les pattesaux
souris qu'ils apportent à
leurs petits, & qu'ils la-if.
sent en reserve dans leurs
trous, ôc mesme d'appor.
ter dubledà ces souris pour
vivre, afin que leurs jeunes
éleves ayent le plaisir de
lescroquertoutesvivantes^
quand la faim les prend
e qu'ils trouvent tousjours,
par ce moyen dela viande
fraischeàmanger.Sur tout
les Aigles ont grand foin
de plumer ôc çl'a^acher le
poil des animaux qu'ils apportent
à leurs petits, de
crainte qu'un peu trop de
gloutonnerie ne les sasse
étrangler. Jeneparle point
des Guenons qui portent
leurs petits sur leurs épau*
les jusques au haut des
toits & des arbres, pour
leur apprendre à grimperr
& peut estreaussiàmépris
ser les dangers.
Mais je ne fçauroisassez
admirerlirft'nd: qui don
ne une intrépidité & un
courage surprenant
, ( &
qui va quelquefois jusqu'à
la sureur)aux animaux qui
ont des petits, pourenoser
attaquer d'autres d'ailleurs
beaucoup plus méchants
qu'eux,& les chasser, lorsqu'ils
s'en veulent approcher
; ny cette tendresse
plus que maternelle qui
porte les Perd rix à se jetter
pour ainsi dire dans la
gueule des chiens de chasse
pour les amuser,& don
ner lieu à leur petits de
sévader; cVil ce que j'ay
veu cent fois, non
lins
un
veritible estonnement.
Qu'y a t il deplusconstante.
& en mesme temps
de plus inconcevable que
l'histoire des Pigeons qu'on
emporte d'Alep à Alexandrette
en Syrie( ou tout au
contraire) par l'espace de
50. ou 60. lieuës, & qu'on
lasche ensuite avec une lettre
aucol, sitostqu'on est
arrive; car ces courriers
de l'air prennent aussitost
leur essor jurques au dessus
des nuées, & montent tant
qu'ils apperçoivent leur
chere patrie, & le lieu de
leurs petits,& de leurcompagne,
où ils se rendent en
trois ou quatre heures de
temps au plus. Par ce moyen
on apprend des nouvelles
toutes recentes, quon
ne pourroit sçavoir,que
plusieurs jours aprés. Ilest
évident aussi que les différentes
especes de Mouches
à miel, comme les Abeilles,
lesGuespes, les Freflons
,
Bourdons) Taons
,
&c. doivent avoir une sagacité
pareille à celle des
oiseaux,pourreconnoistre
le lieu de leur domicile &
leurs rusches. Goedart écrit
dans son Livre des insectes,
qu'il a eu chez luy
unetaniereouil aobserve
que les Taons, lorsqu'ils
travaillent aux cellules devinées
pour leurs oeufs, ont
aussi un Commandant
comme les Castors, lequel
a soind'eveillerles ouvriers
dès la pointe du jour par le
bruit de Ces ailes. Qu'auuitost
chacun s'en va à son
ouvrage , ceux qui ont un
an paffé vont chercher la
cire & le miel, pour bastir
les cellules ou nids, & pour
vivre, & outre cela de l'eau
pour détrem per de la terre
& en former des voûtes.
Les jeunes Taons comme
aides maçons,détrempent
cette terre, & en font des
boulins ou rouleaux qu'ils
roulent ensuite avec leurs
pieds dederrière jusqu'aux
sommets des ouvrages, ou
les plus anciens qui ne sont
plus propres qu'à bastir les
reçoivent, & en forment
des voutes au dessus deces
nids, de crainte qu'il ne
tombe de la terre dedans.
Les plus vigoureux ont foin
de faire la chatTe) & d'étrangler
sans misericorde
les vauriens, qui non contens
tens dene pointtravailler,
vont encore manger la
nourriture des leur, ouvriers en absence,;
Sil'ontraittoit ainsitous
ceux qui en usent de mesme
dans les Estars policez,
il n'y auroit pas tant
de faineants& de voleurs
& l'abondance y regneroic
en la place du brigandage.
Au reste quoyque je n'aye
pas de témoin oculaire des
merveilles des Taons, il
n'y a pas
@
cependant plus
de peine à les-croire que
celles des;Fourmis& dee
Castors dont je suis certain,
ou que celles des Abeilles
qui les surpassent
peut-estre encore de bien
loin, comme on laveudans
le Mercure de Paris de fan.
née1712.. au mois d'Avril.
Car on peut asseurer qu'il
n'y a peut-estrepasd'animal
si brute qu'il foit
;
qui ne devienne comme
sensé &intelligent lorsqu'il
s'agit de sa conservation,
ou de la production
de ses petits. Est- il rien
qi4i paroiiflcplustbFute ql.Í.
ui* Limaçon?ilcreuse cc*
pendant un nid en terre
pour y pondte ses oettfs; il
les couvre ensuite d'une
especedecole quise durcit
extrêmement, & qui les
conserve contre les insectes
& contre toutes les injures
du temps. Qu'estildeplus
pefanc qu'une Tortue, elle
fort néanmoins du fond de
la mer, elle vient creuser
un nid dans le fable où elle
fait sa ponte,& recouvre
ensuite ses oeufs de ce met
me fable,afin que la chaleur
du soleil suppléé au
deffaut de lasienne
, qui
ne feroit pas suffisante pour
les faire éclorre. Les Saumons
& plusieurs autres
poissons remontent les ri.
vieres jusqu'à leur source,
& fouvenc par. respace de
plus de cent cinquante
lieues
, pour femer leurs
oeufs sur la bouë Ôc dans
une eau peu profonde afin
que la chaleur du Soleil
puisse les faire éclorre.
Faut-il que desbestes
pour qui nous avons tant
de mépris., surpassent la
,
pluspart des Peres & Meres
en tendresse &.. en soins
1
pour l'éducation de leurs
enfants?
•
Quoy donc les Machines
opereront-elles aussi des
prodiges pour enfanter
d'autres Machines, pour
les conserver, & pour leur
sauverla vie; & a pprendront-
elles à nos amesraisonnables
à avoir des sentimens
de rendresse & de
crainte;àestrelaborieuses,
soigneuses , courageuses ,
& tantd'autres vertus necessaires
à l'éducation des
pietits?Mais auparavant que
de quitter ce sujet,considerons
un peu quel plaisir
nos bestes brutes prennent
à exercer leurs jeunes adul.A
Ks, désqu'ils commencent
à courir, voler, ou
nager. Ne diroit-on pas
qu'elles ont recouvert une
nouvelle jeunesse pour
jouër & folastreravec eux?
Que ne doit.on point penser
aussi des jeux de ces
jeunes animaux,qui sont
remplis de feintises,d'imitations
,
& de singeries ;
tantost ils feignent d'estre
fort en colere ; & dese
mordre tantost de fuïr tantost de poursuivre,tan-r
tost de flatter
,
tantost
-
de
craindre,en un mot ils imitent
parfaitement les jeux
des enfants, qui ne font
jeux qu'en ce qu'ils ne sont,
comme ceux- là
, que de
pures fictions. Il n'est pas
jusques aux plus stupides
animaux,dont les amufementis
de jeunesse ne eausent
beaucou p d'admiration
,
& de plaisir à ceux
qui les observent. Si quelqu'un
en doute,iln'a qu'à
considerer pendant quelque
beau jour de Printems,
les jeux des jeunes Arai-r gnées des jardins. On les
trouve au iixleil contre les
muraillesqui selivrent mita
le combats,moitié feints,
moitié san g lants
; là elles
(e mordent
,
se précipitent.
s'arrachent les pattes, 5e..
tranglent, & surpassent de
bien loin,tout ce qu'on rapporte
des gladiateuts sur les
arenes.
Les Machines seront-elles
donc encore capables
de fictions
,
& d'imitation
comme les enfants, & produiront-
elles
duiront-elles des opera»
tions pour lesquelles e lles
ne sont pas veritablement
montées? Une montre par
exemple qui est montée
pour marquer deux fois
douze heures par jour, s'a).
visera-t-elle, pour se divertir
, & pour nous jouër, de
les marquer en une heure,
& reprendra telle ensuite
d'elle-mesme son serieux,
& son veritable train. J'avouë
qu'on entrevoit des
étincelles de liberté dans le
delire des enfants, par la
communication qu'ils ont
avec nous de leurs pensées
, & que nous ne pouvons
rien appercevoir de
semblable dans les animaux,
avec lesquels nous ne
pouvons point avoir cette
sorte de commerce. Mais
avantd'entrer plus avant
dans cette discussion, examinons
encore quc!qucs
vertus des bef.l:e)q.ui nous
aideront à prendre parti
plusseurement.
7. Tout le monde sçait
assez l'arrache,la fidélité,
la soumission & la reconnoissance
, que les Chiens
ont pour leurs maistres,leur
docilité,l'impatience qu'ils
ont de les revoir quand
ils sont absens
,
la tristesse
que cette absence leurcause
,& la joye qu'ils marquent
quand ils les retrouvent,
ou lorsqu'ils peuvent
leur rendre quelque service;
avec quelle chaleur ils
prennent leur deffense,
leur patience à en souffrir,
leur perseverance à leur
estresoumis,leur contrain- te&leurcomplaisance pour
eux. Undemesamisayant
fait emporter à dix lieuës
de Paris un vilain Chien ,
qui s'estoit addonné chez
luy
5
& qu'on n'avoit pû en
estranger à force de coups
de baston; ce Chien revintà
samaison aprésquelques
jours.Le maistre las de
lemaltraiter luy fit lier les
quatre pattes, attacher une
pierre au col, & lefit jetter
de dessus le pont Marie
dans la Seine. Le Chien ne
laissa pas de se sauver, ( ce
que j'aurois toutes les peines
du monde à croire,s'il
ne m'estoit arrivé une chose
toute pareille, ) & s en
revint au plus viste donner
de nouveaux tefmoignages
d'une fidélité & d'une foumission
inviolables à son
maistre adoptif, lequel en
fut tellement touché d'estonnement,
qu'il changea
dans le moment toute sa
rigueur enaffection.Tout
Paris a veu avec surprise, il
y a eennYvilrroonncfi.:nlnqquuaannttec 'ilnn's)
la constanceinvincible
d'un Chien,qui demeura
pendant plusieurs années
collé sur la fosse de son maistre,
dans le cimetiere des
saints Innocens , sans que
"Dy flatteries, ny nlrnaces.
ny lâFhecelïite peussent l'en
tirer. Ayantblesséunefois
un Lievre,il k sauva dans
tuàfe vigne
y
oùje le suivis
à lâ vbix de mes Chiens;
peu dete-n, psaprês;les voix
ayant etffé-,jc&urav
qu'ils*T-avoientafrêïïé-,<K
comme je les clltrèhÓisa
costé & d'autre
,
j'en ap -
perceus un qui venoit à
moyen grande diligence;
me flattant & thc caressant
,
aprés quoy il s'en
retourna avec beaucoup
-V
d'em pressement,ce qui me
fit comprendre qu'il falloir
le suivre: pendant que je
marchois, il prenoit le devant,
& revenoit fouvenc
sur ses pas, marquant tousjours
de l'im patience; à la
fin il ne revint plus, &
m'estant un peu avancé,
j'entendis mes deuxChiens
( d'ailleurs tousjours tresbons
amis) qui se mangeoient
l'un l'autre.Dés que
le second m'aperceut il prit
aussitost la suite
,
fentané
apparemment que ficatifë
n'estoit pas bonne. 1c vis
effectivement que le sujet
de leur querelle estoit que
le second avoit fort endommage
le Lievre pendantl'absence
dupremier,
lequel au contraire me caressoit
avec beaucoup de
confiance,comme pour me
marquer son innocence de
sa Cfiodmélibtiée.n
de belles regles
de morale ne peut-on
pas tirer de tousces exemples
; mais il vaut mieux
que chacun aitle plaisir de
les endeduire, que d'ennuyer
icy le kdieur par des
reflexions qu'il peut faire
aisément luy-mesme.
Je ne sçaurois cependant
m'empescher de luy
faire observer,que ces marques
de fidelité, de complaisance
& de retenuë,
n'ont gueres de compatibilité
avec l'idée que nous
avons d'une machine, qui
doit tousjours aller son
train, & tendre droit à sa
fin, dez qu'elle est une fois
desmontée d'une certaine
façon.
8. Que ne devons. nous
point penser encore de la
réglé que la pluspart des
belles observent dans toutes
leurs actions; les unes
ne sortent jamais qu'à une
certaine heure de nuit pour
chercher leur vie, ou une
com pagne,comme les Becasses,
les Lapins,les Limaces
,
les Herissons
,
les
Hiboux, & quantité d'autres
animaufc nocturnes
& sauvages qui rentrent
tous constamment à une
certaine heure du matin;
D'autres au contraire tid
manquent jamais de s'éJ
Veiller au lever du soleilJ
&de se rendormir à ion
coucher, ne perdanr pas
pour ainsi dire un seul ravon
de sa lumiere. En
Jquoy certes ils font beaucoup
plus dignes de louanges
que tant d'hommes déréglées,
qui paissentléurvie
comme les Hiboux, veillant
toute la nuit, & dormant
tout le jour.
On sçaicaussi que quan
tité d'oiseauxpassent tous
les ans des pays chauds:
dans des contrées plus temperées,
pour se sauver de
l'ardeurdusoleil. D'autres
au contraire
, vont des
paysfroids dans les mesmes
comrees, pour eviter
la rigueur de l'hyver, & les
uns & les autres s'en retournent
tous les ans d'où
ils font venus; sans que la
distance decinq ousixcens,
lieuës de pays, ny les trajets
des mers,soient capables
de leur faire Interrompre
leur réglé ( passant airtsi
toute leur vie comme des
voyageurs .& des étrangers
sur la rerre) Entre les differens
oisèaux les uns se
marient pour un temps,
d'autres mesme pour toute
leur vie) comme les
Tourterelles. Ils ne connoissent
point le divorce,
&. leurs mariages demeurent
inviolables, jusques à
ce que leurs petits n'ayent
plus besoin de leur secours.
Quel sujet de confusion
pour tant d'hommes d'ailleurs
raisonnables, mais
certainement inférieurs en
cecy aux bestes. De plus
le mariage n'est point en
eux une lubricitépuisqu'il
ne se contracte unique.
ment que pour la generation.
C'est pour cela que
leur rut dure si peu,&qu'il
ne vient que dans des tems
reglez& propres pour l'é.
ducatiori des petits; au lieu
que la lubricité des hommes
débauchez est perpetuelle.
«>. Disons encore un mot
de la chanté, de l'honnes.
teté & de lajustice que les
belles exercent entre elles,
outre ce que nous avons
remarqué des Cerfs à l'égard
de leurs compagnons
fatiguez, des Castors, des
Taons,& des peres &meres
a regard de leurs petits.
Plusieurs, ont apparemment
entendu dire un ancien
Proverbe, asinus asinum
fricat, mais peu en
gavent la vericable raison,
& peut estre que çeluy qui
la mis au jour ne la sçavoit
pas bien IUY.tesme. Pour
donc l'entendre
,
il faut
considererque quandun
Cheval, Asne ouMulet ne
sçauroit se gratter en quel.
que partie de son corps qui
: hlY démange, comme sur
le dos, le col, ou la teste, ils'approche de son cama.
rade, & le grate al'endroit
pareil à celuy quiluy démange.
Aussitost ce compagnon
charitable ne manque
pas, comme comprenant
le besoin de son camarade
, de le grater au
mesme endroit où il a esté
graté, & souventmesme
de l'avertir d'un endroit
qui luy demange aussi
> ôc
c'est alors qu'il est vray de
dire (qu'un Cheval grate
un autre Cheval, ) ces animaux
se prellant alors un
secours mutuel, dont chacun
a bes•oin, & dans l'en. k droic
droit qu'il souhaine. Qui
est-ce qui n'a pas veu les
Chiens d'un logis, & mesme
d'une rue, courir à la
deffense d'un de leurs camarades
attaque par quelqu'autre?
Qui ne sçait pas
la complaisance & les égards
qu'un animal a pour
un autre de mesme espece
plus jeune, ou plus foible
que luy
, & celle que les
masles en general ont pour
toutes les femelles? Qui
est:ce qui n'a pas remarque
le soin que les Chats
ont de cacher leur ordure,
ôc de nettoyer leur toison ?
Les oiseaux ont le mesme
foin de nettoyer les nids de
leurs petits, & les fourmis
leurs fourmillieresOnsçait
assez que les animaux corrigent
leurs perirs,-& quemesme
cespetits ont pour
létor^merèstoute'sa fbumissionpossible,
mais peutestre
tout le rriendenè sçait
f>rs queles Fôùrrftfa àidenif
courêS en : tbminun 'ccllè&:.
quiviennent s'estabmordans
fëurvôisinàge^Icdnftrmfé
fài/tfelji^iltiere*, qu'elfes
tfeÂir1 ^rêft?entdateur'graiiï
pendant ce temps-là, &
que celles-cy le leur rendent
fidellement
,
quand
leurestablissement est fini.
Que les Fourmis exercent
en rigoureux supplice contre
les Fourmis larronnefses
ou paresseuses, en les
déchirant à quatre. Mais
on ne finiroit jamais, si l'on
vouloit ra pporter toutes les
singularitez morales qu'on
remarque dans la conduite
des animaux;& peut-estre
arriveroit- on à s'asseurer
un repos & un bonheur
parfait dés cette vie, si on
estoit allez prudent pour
en bien profiter.
Qui pourra penser aprés
cela que les belles soient
de pures Machines, toutes
matérielles, meuës feule-
X ment par des loix du mouvement
générales & estoignées
J
dépendemment
d'une organisation de parties.
Il vaudroit autant faire
tout d'un cou p de la raison
& de la prudence hu-,
maine une espece de Ma-,
chine, necessitée aussipar
les mesmes loix, & par consequent
aveugle & sans li.
berté; mais dans quel excez
d'aveuglement faudroit-
il tomber pour imaginer
une telle chimere;
& quand mesme uneraison
dérangée pourroit y consentir,
nostre sentiment intérieur
ladementiroittousjours.
10. Que penser donc
maintenant sur la nature
du principe qui meut les
bestes, voyant qu'il est
pourveu de tant de belles
& bonnes qualirez ; qu'il
cft si judicieux, si vigilant,
si prudent, & si reglé dans
toutes ses opérations; tandis
que nostre amé au contraire
est sujette à tant
d'imperëfdibns&devices;
à T-éVréur5 à linjtTftice; à
l'ingràtitude, à l'infidélité,
àl'oisivetéà l'inhumanité,
à: l'impicte,a I'hypocrifie&
au dereglementdes moeurs.
Mais cette différence est
encore peu de chose, (s'il
rit permis de le dire) en
comparaison de cettequi
setire de la sagacité des
bestes à executer leursou.
vrages sans aucune estude,
&mesme sans aucun inftrument
étranger; tandis
que nos ouvriers font au
contraire obligez de faire
dé longs apprentissages,
d'où souvent ils sortent encore
fort ignorants, quelquefois
mesme font-ils
tout-à-fair incapables dé
rien apprendre. Nos Architectes
( par exemple) ne
sçatiroient bastirsansavoir
âppris avec bien du temps
&des peines les réglés dé
la Geornerrie& de l'Archirecture.
Cependant les Gac.
tors duCanada font des
digues&desappartements
pourse loger, conformes
à la droite architeaure sans
avoirappris aucunes réglés.;
Les Taons font de
mesme leurs voûtes sans le.
secours d'aucuns precepres,
que de leur bon genie. En
un mot les animaux construisent
leurs ouvrages de
la maniere qu! est tousjours
la plus parfaite en
chaque espece, comme
nous l'avons fait voir par
l'examen des raïons des Abeilles;
dans le mémoire
cite cy- devant, article l.
J'avoue qu'en cela mesme
me les bestes paroissent
bornées dans leurs operations;
elles ne sçavent point
varier leurs ouvrages en
uneinfinité de manieres.
comme l'homme, elles
sont, pour ainsi dire, asservies
à leur sujet ;au lieu que
l'homme travailleen maistre
dans ce qu'il possede.
Outre qu'il rassemble, pour
ainsi dire, éminemment en
luy toutes les inventions
dont les différents animaux
sont capables;& quoyqu'ii
n'y parvienne qu'à force
de travail&de temps,cela
ne laisse pas de prouver
parfaitement la fecondité
de son genie. Mais cette
secondité ne suffit pas pour
luy donner la Préférence
du codé de la perfection;
d'autant plus que les bestes
sont aussi capables par leur
docilité, d'apprendre une
infinité dechosestrès singuliere,
outre celles qu'elles
tiennent de leur inClinét
naturel. Ensorte que si les
bestes pouvoient le communiquer
leurs idées comme
les hommes font entre
eux, & si elles avoient des
mains, & des instruments
propres à tout executer
comme nous, peut-estre
auroient-elles aussi chez elles
des arts beaucoup plus
parfairs que lesnostres.J'ay
veu il y a environ dix ans
à la foire de saint Germain
un animal appelle Fecan,
assez semblable à un Renard
,
excepté qu'il a les
pattes d'un Singe, il se fervoit
de celles de devant
avec une adresse surprenante.
Au contraire les animaux
les plus stupides ont
les pieds ordinairement les
moins divitez. Il y a plusieurs
animaux qui ont la
partie de l'oreille appellée
le labyrinthe, semblable à
celle de l'homme, comme
les Chiens
J
les Chevaux,
les Elephans, les oiseaux
,
&c. lesquels sont tres- sensïbles
à la musique;ôc ceux
au contraire qui en font
privez y sont tout-a-fait in.
sensibles, furquoy l'on peut
voir nostre discours de l'oreille
imprimé en 1711.
dans le Mercure de Février,
d'où l'on pourroit inferer,
que si les bestes paroissent
si bornées, c'est du moins
en partie, parce que les instruments
leur manquent.
Mais du costé de la perfection
il ne faut qu'examiner
leurs ouvrages avec exactitude
, pour voir qu'elles
remportent de bien loin
sur nous. Si l'on se donne
la peine, par exemple,de
considerer la figure du
fond des cellules des Abeil.
les, & de quelle maniere
cescellules sontassemble'es
&oppocées les unes aux autres,
on fera forcé d'avouer
que l'intelligence qui les
conduit,est naturellement
pourveuë des connoissances
de la Géométrie,& de
l'Architeâure, & que pour
donner la mesure la plus
parfaite aux angles plans
ôc solides qui s'y rencontrent,
il faut qu'ellesçache
non seulementle calcu l des
triangles, mais mesme l'Algebre
; qu'elle possede les
proprietez de la sphere, &
des polyedres in scrits ôc
circonscrits; & en un mot
tout ce que nos plus habiles
Architectes ne sçavent
que fort mediocrement;
puisque ces cellules admirables
renferment toute la
perfeaion quecessciences
demandent,tant pour avoir
de la solidité & de la régularité
, que pour s'assembler
les unes avec les autres,&
pour s'y loger commodément
& seurement j ôc je
ne douté nullement que si
l'on faisoit un examen pareil
à celuy-cy des ouvrages
des Castors, des Taons ôc
des autres animaux archicettes)
on y trouveroit la
mesme perfection que dans
les raïons desAbeilles.
11. Nous voicy donc forcez
par nostre propre experience
d'avouer que l'intelligence
qui guide les animaux,
de quelque nature
qu'elle foit, est infiniment
plus parfaite en son essence
, que l'esprit de l'homme.
Maisenmesmetemps
quelle honte n'est
- ce pas
pour nous, si nous faisons
cet aveu en faveur de créatures,
que nous traittons de
stupides, & pour lesquelles
nous avons le dernier mépris-
N'est-ce pas la nous
précipiter nous-mesmes de
ce throne de gloire ou nous
nous estions placez au def-
-
fus detoutce quirespire?
- Quel parti prendré dans
une telle conjoncture,ne
pouvant ny osterla raison
aux belles pour en faire de
pures Machines, sans tomber
dans un ridicule intolérable
; ny leur donner un
principe spirituel sans estre
obligezd'abbaisser nostre
amour proprejusquà consentir
de le faire infiniment
plus parfait que nostre
ame.
Je ne voy plus d'autre
parti que de reconnoistre
dans tous ces effets singuliers,
oùla raison & le jugement
reluisent, le doigt
de l'Autheur de la nature,
( vereeniimdigitus Dei hi,cess )
ôc d'avouer que c'est sa
main qui se fert alors librement
des bestes, comme
d'un instrument sensible
pour se faire admirer, 0&
pour nous enseigner les leçons
de sa sagesse & de sa
justice. Voilàcetteintelligence
toujours libre, & infiniment
estevée au dessus
dela nostre, qui n'a besoin
ny de regles,ny d'apprentissage,
ny d'instruments,
pour operer tous ses miracles;
qui est toute en toutes
ses créatures,& toute en
chacune, sans leur estre aucunement
asservie,,& sans
estre déterminée par leurs
organizations presentes,
comme les Carthesiens le
prétendent, puisque c'est
elle au contraire qui en
produit librement tous les
mouven ens judicieux,selon
les differentes conjonétures
où elles se trouvent; le
tout uniquement pour leur
conservation
, pour nostre
utilité, 6c pour sa gloire.
Et si elle ne tire pas de chaque
sujettout ce qu'elle
pourroiten tirer, c'est quelle
a voulu manifester sa
secondité, en multipliant
& variant ses sujets indefiniment,
afin d'exciter davantage
nostre admiration,
&de lareveiller continuellement
; au lieu qu'elle languiroit
bien tost, si nous
trouvions les mesmes operations
dans coures les bestes.
Par ce moyen toutes
les difficultez sont levées;
nous nous délivrons du ridicule,
de vouloir tirer une
raison ( & une raison tressuperieure
à la nostre ) d'une
Machine purement materielle;
& ceux à quila propre
conscience de leur libertédans
les operations
intellectuelles,nefuflitpas
pour les sauver de la terreur
panique de devenir aussi de
pures Machines,files bestes
estoient telles, font entièrement
rasseurez. Nous
ne nous dégradons point
de nostre estat,en nous mettant
au dessous de l'intelli*
gence qui meut les bestes;
puisque nous y reconnoissons
l'Auteur de la nature,
qui se dévoile, pour ainsi
dire, librement & de luymesme
à nos yeux; nous
confondons aussi l'endurcissement
des Athées, en
adorant sa providence, &
nous trouvons un moyen
facile pour expliquer tout
ce qui paroist de plusmerveilleux
dans les actions
des bestes, sans qu'il nous
en couste aucun travail, ny
aucune estude.
12. Je ne prérends pas
cependant par là osteraux
belles une espece d'ame
materielle
,
qui préside à
leurs operations vitales, &
qui soit mesme susceptible
desentiments,&de perceptions,
de plaisir,de douleur,
de joye,de tristesse,de colere,
d'amour,decrainte, de
haine, de jalousie,&de toutes
les autres passionsqu'on
remarque dans les bestes;
même encore si on le veut,
d'imagination, de memoire&
d'action,parce que ces
operations sont encore infiniment
esloignées de la raison.
Je soustiens au contraire
que toutes ces passions
ou actions se passent
uniquement dans les esprits
animaux,qui sont contenus
dans leur cerveau, ans leurs nerfs, & dans
leurs membranes. Car il
suffit pour cela que ces cCprits
coulent continuellement
dans le sang, dans les
autres humeurs, & dans
toutes les parties de leur
corps; & que de plus ils
soient capables de recevoir
les impressions des objets
extérieurs par les sens, d'en
conserver
conserver les motions ou
images, & que ces images
ayenc communication les
unes avec les autres, pour
produire toutes les actions
destituées de jugement ôc
de raison
, ce que je n'ay
pas entrepris d'expliquer
icy en détail. Je dis seulement
icy que ces esprits
animaux sont la feule ame
matérielle
,
sensitive & animale,
Ôc la forme substantielle
des bestes, dont l'Autheur
de la nature se sert librement
pour produire
tout ce qui est au dessus de
la nature, je veux dire ce
qui tient de la raison & du
jugementsans qu'il soitnecessaire
de leur donner encoreune
ame spirituelle,qui
compare ces images formées
dans les esprits,qui
conçoive des idées & des
partions à leuroccasionqui
reflechissesur elle
-
mesme,
& sursesoperations,qui soit
capabledese déterminer la
première,&quisoitsusceptible
de rtgles.)ou de connoissances
universelles &
âb'ftriiittcs,comme la nostre,&
cela par lesraisons
que nous avons rapportées.
Il est évident que nous
ostons par là toute connoissance
aux bestes, pour leur
laisser feulement la vie, la
perception, & le mouvement
, comme font les CarteGens;
parce que cela
suffit pour leurs opérations
naturelles & vitales; &
qu'à l'égard des autres ope- A rations, cette âme materielle
,
sensitive & animale
, cette forme substantielle
n'enest que l'organe
& l'instrument
,
qui bien
loin de déterminer l'Auteur
de la nature à agir d'ue maniere
machinale&fcrvile,
comme le prétendent ces
Messieurs,est au contraire
déterminée par ce mesme
Auteur àsuivre ses impressions,
& à produire les actions
dont la matière est incapable
par elle.'-mefnJc.
Ainsi nous devons bien distinguer
deux especes d'operations
de Dieu dans les
bestes; la premiere qui est
leur vie est generale& éloignée
,
elle est déterminée
par les loix qu'il a establies
en formant le monde&a
parconsequent une connexion
necessaire avec tous
les autres mouvemens qui
s'y font; on peut l'appeller
à cause de cela naturelle &
necessaire; la secon de au
contraire estlibre & comme
surnaturelle,elle ne dépend
au plus que des conjonctures
presentes, & nullement
des organes ou des
loix gencrales. La première
est ce qu'on entend par
le simple concours de Dieu;
la feconde est l'effet d'une
Providence qui ne differe
du miracle, qu'en ce
qu'il ne produit aucun dé..
rangement sensible dans la
nature, &qu'il ne manque
jamais de se faire dans IC4
mesmescirconstances, parce
que Dieu est toujours le,
mesme;c'est si l'on veut un*
miracle naturel & ordinaire>
qui n'est méconnu ôc
ignoré
, que parce qu'il est
tousjours present aux yeux
detous les hommes.
Fermer
Résumé : Suite de la Dissertation Philosophique sur l'ame des bestes.
Le texte explore les comportements remarquables et les capacités des animaux, illustrant leur intelligence et leur organisation sociale. Les castors, par exemple, construisent des digues et des logements en abattant des arbres et en travaillant en société organisée. Ils prennent soin de leurs malades et punissent les fainéants. Les animaux cherchent également des remèdes pour leurs maladies, comme les chiens qui mangent du chiendent pour vomir. Les araignées construisent des sacs pour leurs œufs, les loriots suspendent leurs nids pour protéger leurs petits, et les hiboux cassent les pattes des souris pour les conserver. Les pigeons voyageurs sont capables de retrouver leur domicile après avoir été transportés sur de longues distances. Les fourmis et les abeilles démontrent une organisation sociale complexe, avec des rôles spécifiques pour chaque membre de la colonie. Le texte souligne la fidélité et la soumission des chiens envers leurs maîtres, illustrées par des exemples de chiens revenant chez eux malgré les obstacles. Les animaux montrent également des comportements admirables dans l'éducation de leurs petits, comme les chats qui cachent leur ordure et nettoient leur toison, et les oiseaux et les fourmis qui entretiennent leurs nids et fourmilières. Les animaux corrigent leurs petits et leur montrent de la soumission. Les fourmis, par exemple, aident celles qui déménagent et punissent les paresseuses. Le texte insiste sur le fait que les animaux ne sont pas de simples machines, mais possèdent des qualités morales et une intelligence remarquable. Ils construisent des ouvrages parfaits sans étude ni instruments, comme les castors et les taons. Les abeilles, par exemple, construisent des cellules géométriquement parfaites, démontrant une connaissance avancée de la géométrie et de l'architecture. Le texte conclut que l'intelligence qui guide les animaux est supérieure à celle des humains, qui sont sujets à des imperfections morales. Il propose que cette intelligence est l'œuvre de l'Auteur de la nature, qui se manifeste librement à travers les animaux. Enfin, il reconnaît que les animaux possèdent une âme matérielle capable de sentiments et de perceptions, mais sans raison ni jugement.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 1156-1159
« Commentaire sur la Géométrie de M. Descartes. Par le R. P. Claude [...] »
Début :
Commentaire sur la Géométrie de M. Descartes. Par le R. P. Claude [...]
Mots clefs :
Médecine, Cours de physique, Géométrie, Aventures de Télémaque
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texteReconnaissance textuelle : « Commentaire sur la Géométrie de M. Descartes. Par le R. P. Claude [...] »
OMMENTAIRE fur la Géométrie
Cde M. Delcartes . Par le R.P. Claude
Rebuel, de la C. de J. à Lyon , rue Mer-
I. Vol. ciere
JUIN. 1730. 1157
ciere , chez Marcelin Duplain , in 4. de 590
pages , & 23 Planches.
COURS DE PHYSIQUE , accompagné de
plufieurs piéces concernant la Phyfique ,
qui ont déja paru , & d'un Extrait critique
des Lettres de M. Leeuwenhoek , par
feu M. Harfoeker. A la Haye, chez Fean
Swrat , 1730. in 4.
On trouve entre autres pieces dans cet
Ouvrage , une Differtation fur la Pefte
& fur les moyens de s'en garantir.
3
OBSERVATIONS fur les effets de la
Saignée , tant dans les Maladies du reffort
de la Médecine , que de la Chirurgie
, fondées fur les Loix de l'Hydroftatique
, avec des Remarques Critiques fur
le Traité de l'ufage des differentes fortes
de Saignées de M. Silva. Par François
Quefnay , Maître ès Arts , Membre de la
Société des Arts , & Chirurgien de Mante
, reçu à S. Côme. Paris, ruë S. Jacques,
chez Ofmont , 1730. in 12.
HISTOIRE DE LA MEDECINE
depuis Galien , jufqu'au xvi . fiecle , où
l'on voit les progrès de cet Art , de fiecle
en fiecle , par rapport principalement à
la Pratique .
Les nouvelles maladies qu'on a vû naî-
I. Vol. E iij tre
1158 MERCURE DE FRANCE
tre , & les noms des Medecins ; avec les
circonftances les plus remarquables de
leur vie , leurs découvertes , leurs opinions
, & enfin leur méthode de traiter les
Maladies , traduite de l'Anglois de Jean
Freind , Docteur en Medecine. A Paris ,
ruë S. Severin , chez Jacq. Vincent , 1730.
NOUVELLES DE COUVERTES En Mede-
CINE , ou ancienne Médecine développée;
très-utile pour le fervice du Roy & du
public. Par le fieur de Marcounay , Docteursen
Médecine. Nouvelle édition , A
Paris , rue de la Harpe , & Quay de Conti,
chez d' Houry , la veuve Piſſot , &c. 1730.
40 fols relié
ABREGE' CHRONOLOGIQUE de
P'Hiftoire univerfelle, facrée & prophane.
traduction nouvelle , fuivant la derniere
édition latine du P. Petan , par M. Maucroix
, & continuée jufqu'en 1701. avec
un Traité de Chronologie , par M. de
Pifle. A Paris , rue faint Jacques , chez la i
veuve Delaulne , 1730. 3. vol . in 12.
LES AVANTURES DE TELEMAQUE , fils
d'Uliffe , par feu M" François de Salignac
de la Motte- Fenelon , Precepteur de
Meffeigneurs les Enfans de France , &
depuis Archevêque de Cambray , &c.
I. Vel
NouJUIN.
1730. 1159
Nouvelle Edition, enrichie de Figures en.
Taille - douce , avec des Notes , chez lamême
, 1730. 2. vol. in 4° .
Cde M. Delcartes . Par le R.P. Claude
Rebuel, de la C. de J. à Lyon , rue Mer-
I. Vol. ciere
JUIN. 1730. 1157
ciere , chez Marcelin Duplain , in 4. de 590
pages , & 23 Planches.
COURS DE PHYSIQUE , accompagné de
plufieurs piéces concernant la Phyfique ,
qui ont déja paru , & d'un Extrait critique
des Lettres de M. Leeuwenhoek , par
feu M. Harfoeker. A la Haye, chez Fean
Swrat , 1730. in 4.
On trouve entre autres pieces dans cet
Ouvrage , une Differtation fur la Pefte
& fur les moyens de s'en garantir.
3
OBSERVATIONS fur les effets de la
Saignée , tant dans les Maladies du reffort
de la Médecine , que de la Chirurgie
, fondées fur les Loix de l'Hydroftatique
, avec des Remarques Critiques fur
le Traité de l'ufage des differentes fortes
de Saignées de M. Silva. Par François
Quefnay , Maître ès Arts , Membre de la
Société des Arts , & Chirurgien de Mante
, reçu à S. Côme. Paris, ruë S. Jacques,
chez Ofmont , 1730. in 12.
HISTOIRE DE LA MEDECINE
depuis Galien , jufqu'au xvi . fiecle , où
l'on voit les progrès de cet Art , de fiecle
en fiecle , par rapport principalement à
la Pratique .
Les nouvelles maladies qu'on a vû naî-
I. Vol. E iij tre
1158 MERCURE DE FRANCE
tre , & les noms des Medecins ; avec les
circonftances les plus remarquables de
leur vie , leurs découvertes , leurs opinions
, & enfin leur méthode de traiter les
Maladies , traduite de l'Anglois de Jean
Freind , Docteur en Medecine. A Paris ,
ruë S. Severin , chez Jacq. Vincent , 1730.
NOUVELLES DE COUVERTES En Mede-
CINE , ou ancienne Médecine développée;
très-utile pour le fervice du Roy & du
public. Par le fieur de Marcounay , Docteursen
Médecine. Nouvelle édition , A
Paris , rue de la Harpe , & Quay de Conti,
chez d' Houry , la veuve Piſſot , &c. 1730.
40 fols relié
ABREGE' CHRONOLOGIQUE de
P'Hiftoire univerfelle, facrée & prophane.
traduction nouvelle , fuivant la derniere
édition latine du P. Petan , par M. Maucroix
, & continuée jufqu'en 1701. avec
un Traité de Chronologie , par M. de
Pifle. A Paris , rue faint Jacques , chez la i
veuve Delaulne , 1730. 3. vol . in 12.
LES AVANTURES DE TELEMAQUE , fils
d'Uliffe , par feu M" François de Salignac
de la Motte- Fenelon , Precepteur de
Meffeigneurs les Enfans de France , &
depuis Archevêque de Cambray , &c.
I. Vel
NouJUIN.
1730. 1159
Nouvelle Edition, enrichie de Figures en.
Taille - douce , avec des Notes , chez lamême
, 1730. 2. vol. in 4° .
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Résumé : « Commentaire sur la Géométrie de M. Descartes. Par le R. P. Claude [...] »
En 1730, plusieurs publications scientifiques et littéraires ont été publiées. À Lyon, le R.P. Claude Rebuel a commenté la géométrie de Descartes. À La Haye, un 'Cours de Physique' a été publié avec des pièces critiques et des extraits des lettres de M. Leeuwenhoek. À Paris, François Quefnay a publié 'Observations sur les effets de la Saignée', traitant des pratiques médicales et chirurgicales. Jean Freind a traduit une 'Histoire de la Médecine' depuis Galien jusqu'au XVIe siècle. Le sieur de Marcounay a publié une nouvelle édition des 'Nouvelles Découvertes en Médecine'. M. Maucroix a traduit et continué jusqu'en 1701 un 'Abrégé Chronologique de l'Histoire Universelle'. Enfin, une nouvelle édition des 'Aventures de Télémaque' de François de Salignac de La Motte-Fénelon, enrichie de figures et de notes, a été publiée à Paris.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 1541-1544
Les Elemens de Mathématique de M. Varignon, &c. [titre d'après la table]
Début :
M. Cochet, de la Maison et Société de Sorbonne, Professeur de Philosophie [...]
Mots clefs :
Maison et Société de Sorbonne, Mathématique, Algèbre, Arithmétique, Géométrie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Les Elemens de Mathématique de M. Varignon, &c. [titre d'après la table]
M. Cochet , de la Maison et Societé
de Sorbonne , Professeur de Philosophie:
au College des Quatre -Nations , vient
de donner au Public , en François , les
Elemens de Mathématique du celebre
M. de Varignon , &c. des Académies,
Royales des Sciences de France , d'Angleterre
et de Prusse , Professeur de Ma
thématique au College de Mazarin , et
Lecteur du Roi en Philosophie au Col
lege Royal ..
C'est un volume in 4. qui contient un
Traité abregé d'Algebre et d'Arithméti
que , qui peut servir d'introduction à tou
tes les parties des Mathématiques , et un
autre Traité des plus complers de la Géo
metrie Elementaire. E v
1542 MERCURE DE FRANCE
Le Traité d'Algebre d'Arithmétique est
divisé en quatre Livres , dont le premier
est de l'Addition , Soustraction , Multi
plication et Division ; le second , des Pro
portions et des Fractions ; on trouve dans
ce second Livre la Regle de Proportion
ou la Regle de Trois , qu'on appelle aussi
Regle d'Or , à cause de sa grande utili
té ; elle est expliquée de la façon la plus
simple et la plus intelligible , de même
que la Regle de Compagnie , et par les
principes qu'on établit dans ce second
Livre on peut aisément résoudre plusieurs
autres questions qu'on trouve dans ces
Traitez particuliers d'Arithmétique ; le
troisiénie Livre est de l'extraction des Ra
cines , et le quatrième des Equations . 7
Les Regles d'Arithmétique sont par
tout jointes à celle d'Algebre , pour faire
mieux sentir l'analogie qui est entr'elles.
Le Traité de Géométrie est divisé en
deux Parties dont la premiere est la Géo
metrie spéculative , ei la seconde , la Géo
métrie pratique.
La Geométrie speculative contient cinq
Livres dans le premier , on traite des
Lignes ; dans le second , des surfaces ;
dansle troisiéme , des Proportions ou des
Regles de compa : er , des grandeurs entre
elles ; dans le quatrième , des Proportions
II. Vol. des
JUIN. 1735.
1543
des lignes droites et des figures qu'elles
renferment ; dans le cinquième , des So
lides ou des Corps.
Tout ce qu'Euclide a dit des Propor
tions , se trouve renfermé dans sept Re
gles qui suffisent pour l'intelligence de
tout ce qui appartient aux Proportions
en general , et les démonstrations de ces
Regles sont si courtes , qu'elles sont con
tenues dans deux pages .
Toute la Trigonométrie est réduite à
trois Théorêmes , par le moyen desquels
on mesure toutes sortes de Triangles et
de figures rectilignes , et par consequent
toutes sortes d'étendues.
La Géométrie pratique, qui est la seconde
Partie, apprend à mesurer toute sorte d'é
tenduës, et comme toute Etenduë est ou li
gne, ou surface , ou solide, elle est divisée
en trois Chapitres ; le premier traite des
Lignes ; le second des Surfaces; le troisié
me des Solides our des Corps.
Les principes de Géométrie sont dé
veloppez dans cet Ouvrage avec tant de
justesse et d'exactitude , les propositions
y sont enchaînées d'une maniere si simple
et si naturelle , les démonstrations y sont
si courtes et si faciles , qu'on y recon noît
aisément la superiorité du génie de celui
qui en est Auteur. La Méthode qu'il a
F vj
II. Vol. su vic
1544 MERCURE DE FRANCE
suivie dans ces Elemens , le met parfai
tement à couvert des reproches qu'on fait
avec assez de fondement à quelques Géo
métres , en les accusant de manquer d'or
dre dans l'arrangement de leur matiere ;
il s'est étudié à mettre tout dans le plus
grand jour , et il ne s'est point épargné
le travail de l'arrangement , beaucoup
moins flatteur et souvent plus pénible
que celui de la production mêmes de- là
vient que nous avons si peu de bons Ele
mens de Mathématiques ,et que l'on peut
tirer un très- grand avantage de l'impres
sion de ceux de M. Varignon . Il les a tra
vaillez pendant plusieurs années avec tous
les soins et toute l'attention possible, pour
faciliter aux Commençans l'entrée dans
la Science des Mathématiques , qu'il pos
sedoit si parfaitement, et à laquelle il s'est
appliqué toute sa vie avec tant de succès
qu'il est parvenu à mériter le rang le
plus di tingué parmi les plus celebres Ma
thématiciens de l'Europe.
Cet Ouvrage de 155. pages , sans la
Table , la Préface et l'Epitre Dédicatoire à
S.A. S. M. le Comte de Clermont , est orné
de 22. grandes Planches et de grand nom
bre de figures . Il se vend à Paris , Quay
des Augustins , chez P. M. Brunet , 1731 .
de Sorbonne , Professeur de Philosophie:
au College des Quatre -Nations , vient
de donner au Public , en François , les
Elemens de Mathématique du celebre
M. de Varignon , &c. des Académies,
Royales des Sciences de France , d'Angleterre
et de Prusse , Professeur de Ma
thématique au College de Mazarin , et
Lecteur du Roi en Philosophie au Col
lege Royal ..
C'est un volume in 4. qui contient un
Traité abregé d'Algebre et d'Arithméti
que , qui peut servir d'introduction à tou
tes les parties des Mathématiques , et un
autre Traité des plus complers de la Géo
metrie Elementaire. E v
1542 MERCURE DE FRANCE
Le Traité d'Algebre d'Arithmétique est
divisé en quatre Livres , dont le premier
est de l'Addition , Soustraction , Multi
plication et Division ; le second , des Pro
portions et des Fractions ; on trouve dans
ce second Livre la Regle de Proportion
ou la Regle de Trois , qu'on appelle aussi
Regle d'Or , à cause de sa grande utili
té ; elle est expliquée de la façon la plus
simple et la plus intelligible , de même
que la Regle de Compagnie , et par les
principes qu'on établit dans ce second
Livre on peut aisément résoudre plusieurs
autres questions qu'on trouve dans ces
Traitez particuliers d'Arithmétique ; le
troisiénie Livre est de l'extraction des Ra
cines , et le quatrième des Equations . 7
Les Regles d'Arithmétique sont par
tout jointes à celle d'Algebre , pour faire
mieux sentir l'analogie qui est entr'elles.
Le Traité de Géométrie est divisé en
deux Parties dont la premiere est la Géo
metrie spéculative , ei la seconde , la Géo
métrie pratique.
La Geométrie speculative contient cinq
Livres dans le premier , on traite des
Lignes ; dans le second , des surfaces ;
dansle troisiéme , des Proportions ou des
Regles de compa : er , des grandeurs entre
elles ; dans le quatrième , des Proportions
II. Vol. des
JUIN. 1735.
1543
des lignes droites et des figures qu'elles
renferment ; dans le cinquième , des So
lides ou des Corps.
Tout ce qu'Euclide a dit des Propor
tions , se trouve renfermé dans sept Re
gles qui suffisent pour l'intelligence de
tout ce qui appartient aux Proportions
en general , et les démonstrations de ces
Regles sont si courtes , qu'elles sont con
tenues dans deux pages .
Toute la Trigonométrie est réduite à
trois Théorêmes , par le moyen desquels
on mesure toutes sortes de Triangles et
de figures rectilignes , et par consequent
toutes sortes d'étendues.
La Géométrie pratique, qui est la seconde
Partie, apprend à mesurer toute sorte d'é
tenduës, et comme toute Etenduë est ou li
gne, ou surface , ou solide, elle est divisée
en trois Chapitres ; le premier traite des
Lignes ; le second des Surfaces; le troisié
me des Solides our des Corps.
Les principes de Géométrie sont dé
veloppez dans cet Ouvrage avec tant de
justesse et d'exactitude , les propositions
y sont enchaînées d'une maniere si simple
et si naturelle , les démonstrations y sont
si courtes et si faciles , qu'on y recon noît
aisément la superiorité du génie de celui
qui en est Auteur. La Méthode qu'il a
F vj
II. Vol. su vic
1544 MERCURE DE FRANCE
suivie dans ces Elemens , le met parfai
tement à couvert des reproches qu'on fait
avec assez de fondement à quelques Géo
métres , en les accusant de manquer d'or
dre dans l'arrangement de leur matiere ;
il s'est étudié à mettre tout dans le plus
grand jour , et il ne s'est point épargné
le travail de l'arrangement , beaucoup
moins flatteur et souvent plus pénible
que celui de la production mêmes de- là
vient que nous avons si peu de bons Ele
mens de Mathématiques ,et que l'on peut
tirer un très- grand avantage de l'impres
sion de ceux de M. Varignon . Il les a tra
vaillez pendant plusieurs années avec tous
les soins et toute l'attention possible, pour
faciliter aux Commençans l'entrée dans
la Science des Mathématiques , qu'il pos
sedoit si parfaitement, et à laquelle il s'est
appliqué toute sa vie avec tant de succès
qu'il est parvenu à mériter le rang le
plus di tingué parmi les plus celebres Ma
thématiciens de l'Europe.
Cet Ouvrage de 155. pages , sans la
Table , la Préface et l'Epitre Dédicatoire à
S.A. S. M. le Comte de Clermont , est orné
de 22. grandes Planches et de grand nom
bre de figures . Il se vend à Paris , Quay
des Augustins , chez P. M. Brunet , 1731 .
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Résumé : Les Elemens de Mathématique de M. Varignon, &c. [titre d'après la table]
M. Cochet, professeur de philosophie au Collège des Quatre-Nations, a publié les 'Éléments de Mathématique' de M. de Varignon, académicien des sciences de France, d'Angleterre et de Prusse, professeur de mathématiques au Collège de Mazarin et lecteur du roi en philosophie au Collège Royal. Cet ouvrage, en format in-4, se compose d'un traité abrégé d'algèbre et d'arithmétique, servant d'introduction aux mathématiques, et d'un traité complet de géométrie élémentaire. Le traité d'algèbre et d'arithmétique est structuré en quatre livres. Le premier livre traite de l'addition, de la soustraction, de la multiplication et de la division. Le second livre aborde les proportions et les fractions, incluant la règle de proportion et la règle de compagnie. Le troisième livre concerne l'extraction des racines, et le quatrième traite des équations. Les règles d'arithmétique sont intégrées à celles de l'algèbre pour mieux en montrer l'analogie. Le traité de géométrie est divisé en deux parties : la géométrie spéculative et la géométrie pratique. La géométrie spéculative contient cinq livres traitant des lignes, des surfaces, des proportions, des figures et des solides. La trigonométrie est réduite à trois théorèmes permettant de mesurer divers triangles et figures. La géométrie pratique, divisée en trois chapitres, enseigne à mesurer les lignes, surfaces et solides. L'ouvrage est remarquable par la justesse et l'exactitude des principes de géométrie, la simplicité des propositions et la clarté des démonstrations. M. Varignon a travaillé plusieurs années sur cet ouvrage pour faciliter l'apprentissage des mathématiques. Le livre, de 155 pages, est illustré de 22 grandes planches et de nombreuses figures, et se vend à Paris chez P. M. Brunet.
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8
p. 2150-2155
RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
Début :
Puisque j'ay osé m'introduire dans la République des Lettres, je dois comme [...]
Mots clefs :
Républiques des Lettres, Tribunal de la critique, Journal de Trévoux, Réfutation, Géométrie
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texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
RE'PONSE du P. Romuald le Muët
Religieux de la Charité , à M. le Monnier.
Puisque j'ay osé m'introduire dans la
République des Lettres , je dois comme
bon Citoyen , me soûmettre à la Jurisdiction
qui s'y trouve établie dès son
commencement. C'est le tribunal de la
Critique , dont la puissance est soûtenuë
de l'autorité du Droit Public.
Les
SEPTEMBRE. 1731. 21ST
114
,
Les sentimens d'estime que j'ay pour la
saine Critique , peuvent persuader d'a
bord M. le Monnier , que j'ay vû avec
plaisir dans le Journal de Trevoux du
mois de Mars 1731. la réfutation qu'il a
faite de mon petit ouvrage sur la Quadrature
du Cercle la Duplication da
Cube et la Trisection de l'Angle ; mais
quelque soit mon respect pour sa personne
, et mon estime pour la Critique ,
je ne pense pas qu'il doive en inferer que
je sois disposé à me soûmettre aux loix
qu'il me préscrit , et que je me déporte
de ma methode simple et nouvelle,s'il veut,
mais exacte , mais solide , de diviser les
360. degrez de la circonference du Cercle
en vingt- deux parties , dont vingt et
une étant de seize degrez vingt - deux minutes
chacune , laissent seize degrez dixhuit
minutes pour la vingt - deuxième
qui est une difference de quatre minutes
moins que les autres , laquelle fait connoître
qu'elle est la portion que le Polygone
circonscrit de 360 , côtez , a de plus
que la circonférence du Cercle de 360 .
degrez , et qu'elle donne ainsi le dévelopement
entier de la solution parfaite du
fameux Problême de la Quadrature du
Cercle , en donnant le vrai rapport du
Diametre, 114. degrez 34. m. à la circonference
E iiij
2152 MERCURE DE FRANCE
•
ference du Cercle de 360. degrez , qui est
celui de sept à vingt- deux moins quelque
chose , lequel quelque chose , l'on voit
enfin ici , fixé à quatre minutes , à quoi
se doivent aussi fixer les difficultez que
M. le Monnier essaye inutilement d'y
opposer .
A l'égard de ce que j'ay dit que la Géometrie
simple est la seule réelle , la seule
solide , quoi qu'en puisse dire M. le Monnier
, en faveur des sections coniques , et
même de la Géometrie de l'infini , il ne
peut disconvenir sans se commettre un
peu , que ce qu'il y a de plus utile et de
plus dans l'usage , n'excede point le ressort
de la Géometrie simple , et que ce
qu'on y a imaginé de plus par la nouvelle
Algébre , cet art ingenieux , speculatif
et séduisant , qui parle aux yeux , et fait
taire la bouche , ne sont que des traits ,
que des figures symboliques qui ne servent
gueres plus qu'à irriter la curiosité
et à amuser l'esprit en effet n'est- ce pas
dans la plus haute sublimité de son intelligence
, à laquelle ses éleves puissent par
venir , qu'elle leur apprend à démontrer
que deux et deux , à quelques égards
ne font pas quatre ? Grande preuve
de sa
solidité et de son utilité ! Ce n'est pas que
je méprise ces connoissances , au contraire,
:
>
IG
SEPTEMBRE. 1731. 2153
je reconnois qu'elles ne m'ont amusé que
trop agréablement , et peut-être trop souvent;
mais je voudrois qu'on ne les encherit
point au- dessus de la valeur que le sçavant
P. Castel leur a si judicieusement
assignée dans son excellent livre de Mathématique
universelle.
C'est sincerement avec peine que je me
trouve obligé de dire que M. le Monnier
n'a pû parvenir à connoître , quelque effort
qu'il paroisse avoir fait que cinquante-
sept fois 57. degrez 17. m. valent
3265. degrez9.m. , et que dix-sept fois 17 .
m. valent quatre degrez quarante- neuf minutes
, qui font la somme totale 3269 .
degrez 58. m. J'admire comment il a squ
trouver des secondes où il ne s'agit que
de primes , je veux dire que de minutes .
N'y a-t-il point encore sujet de s'étonner
que M. le Monnier me propose de
comparer des nombres à des nombres
pour la Duplication du Cube , lui qui
doit sçavoir , que comme la Duplication
du quarré est impossible en nombre et
possible en ligne , de même la Duplication
du Cube ne se peut faire en nombre
et peut se faire en ligne , en trouvant deux
lignes moyennes proportionnelles entre
une et deux ? Quoique jusqu'à present
on ait cherché inutilement ces movennes
proportionnelles par la Géometrie
simple , E v
2154 MERCURE DE FRANCE
simple ; je crois cependant les avoir
trouvées par ce proċedé ici . Soit la ligne
A
ر
B
1
,
C D
E
" divisée en B en deux parties égales
pour faire une et deux , comme on le
verra dans la suite et chacune moitié
subdivisée en deux autres qui fassent quatre
parties égales . Alors prenant la seconde
moitié de la ligne AB , pour le côté
d'un quarré , soit sa diagonale , conduite
en C , et que D marque la moitié de la
ligne BE ; car en procedant ainsi , il est
indubitable que AB : AC AD : AE. Et
par conséquent que ces quatre lignes sont
en proportion Géometrique et continuellement
proportionnelles
, desquelles AC
et AD sont les deux moyennes. Et comme
il est démontré depuis long- temps , que
la premiere est la racine cubique du Cube
deux , il s'ensuit que la ligne AC est le
côté du Cube double du Cube de AB ,
d'où l'on doit indubitablement conclure
que la solution du célebre Problême de la
Duplication du Cube est enfin trouvée.
Quant àl'operation de la Trisection de
l'Angle , M. le Monnier peut continuer
à la faire ; les difficultez en sont levées ;
il n'a plus de Paralogisme à craindre
ayant autant de sagacité et de pénetra
tion que je lui en crois .
>
Voici
SEPTEMBRE . 1731. 2155
Voici donc bien démontrées les solutions
tant désirées et presque inesperées
de ces anciens Apores , la Quadrature du
Cercle , la Duplication du Cube et la
Trisection de l'Angle par la Géometrie
simple , sans le secours des sections Coniques
, ni de la Géometrie de l'infini ,
dont les operations ne sont point si lumi
neuses , qu'elles ne laissent quelque doute.
Religieux de la Charité , à M. le Monnier.
Puisque j'ay osé m'introduire dans la
République des Lettres , je dois comme
bon Citoyen , me soûmettre à la Jurisdiction
qui s'y trouve établie dès son
commencement. C'est le tribunal de la
Critique , dont la puissance est soûtenuë
de l'autorité du Droit Public.
Les
SEPTEMBRE. 1731. 21ST
114
,
Les sentimens d'estime que j'ay pour la
saine Critique , peuvent persuader d'a
bord M. le Monnier , que j'ay vû avec
plaisir dans le Journal de Trevoux du
mois de Mars 1731. la réfutation qu'il a
faite de mon petit ouvrage sur la Quadrature
du Cercle la Duplication da
Cube et la Trisection de l'Angle ; mais
quelque soit mon respect pour sa personne
, et mon estime pour la Critique ,
je ne pense pas qu'il doive en inferer que
je sois disposé à me soûmettre aux loix
qu'il me préscrit , et que je me déporte
de ma methode simple et nouvelle,s'il veut,
mais exacte , mais solide , de diviser les
360. degrez de la circonference du Cercle
en vingt- deux parties , dont vingt et
une étant de seize degrez vingt - deux minutes
chacune , laissent seize degrez dixhuit
minutes pour la vingt - deuxième
qui est une difference de quatre minutes
moins que les autres , laquelle fait connoître
qu'elle est la portion que le Polygone
circonscrit de 360 , côtez , a de plus
que la circonférence du Cercle de 360 .
degrez , et qu'elle donne ainsi le dévelopement
entier de la solution parfaite du
fameux Problême de la Quadrature du
Cercle , en donnant le vrai rapport du
Diametre, 114. degrez 34. m. à la circonference
E iiij
2152 MERCURE DE FRANCE
•
ference du Cercle de 360. degrez , qui est
celui de sept à vingt- deux moins quelque
chose , lequel quelque chose , l'on voit
enfin ici , fixé à quatre minutes , à quoi
se doivent aussi fixer les difficultez que
M. le Monnier essaye inutilement d'y
opposer .
A l'égard de ce que j'ay dit que la Géometrie
simple est la seule réelle , la seule
solide , quoi qu'en puisse dire M. le Monnier
, en faveur des sections coniques , et
même de la Géometrie de l'infini , il ne
peut disconvenir sans se commettre un
peu , que ce qu'il y a de plus utile et de
plus dans l'usage , n'excede point le ressort
de la Géometrie simple , et que ce
qu'on y a imaginé de plus par la nouvelle
Algébre , cet art ingenieux , speculatif
et séduisant , qui parle aux yeux , et fait
taire la bouche , ne sont que des traits ,
que des figures symboliques qui ne servent
gueres plus qu'à irriter la curiosité
et à amuser l'esprit en effet n'est- ce pas
dans la plus haute sublimité de son intelligence
, à laquelle ses éleves puissent par
venir , qu'elle leur apprend à démontrer
que deux et deux , à quelques égards
ne font pas quatre ? Grande preuve
de sa
solidité et de son utilité ! Ce n'est pas que
je méprise ces connoissances , au contraire,
:
>
IG
SEPTEMBRE. 1731. 2153
je reconnois qu'elles ne m'ont amusé que
trop agréablement , et peut-être trop souvent;
mais je voudrois qu'on ne les encherit
point au- dessus de la valeur que le sçavant
P. Castel leur a si judicieusement
assignée dans son excellent livre de Mathématique
universelle.
C'est sincerement avec peine que je me
trouve obligé de dire que M. le Monnier
n'a pû parvenir à connoître , quelque effort
qu'il paroisse avoir fait que cinquante-
sept fois 57. degrez 17. m. valent
3265. degrez9.m. , et que dix-sept fois 17 .
m. valent quatre degrez quarante- neuf minutes
, qui font la somme totale 3269 .
degrez 58. m. J'admire comment il a squ
trouver des secondes où il ne s'agit que
de primes , je veux dire que de minutes .
N'y a-t-il point encore sujet de s'étonner
que M. le Monnier me propose de
comparer des nombres à des nombres
pour la Duplication du Cube , lui qui
doit sçavoir , que comme la Duplication
du quarré est impossible en nombre et
possible en ligne , de même la Duplication
du Cube ne se peut faire en nombre
et peut se faire en ligne , en trouvant deux
lignes moyennes proportionnelles entre
une et deux ? Quoique jusqu'à present
on ait cherché inutilement ces movennes
proportionnelles par la Géometrie
simple , E v
2154 MERCURE DE FRANCE
simple ; je crois cependant les avoir
trouvées par ce proċedé ici . Soit la ligne
A
ر
B
1
,
C D
E
" divisée en B en deux parties égales
pour faire une et deux , comme on le
verra dans la suite et chacune moitié
subdivisée en deux autres qui fassent quatre
parties égales . Alors prenant la seconde
moitié de la ligne AB , pour le côté
d'un quarré , soit sa diagonale , conduite
en C , et que D marque la moitié de la
ligne BE ; car en procedant ainsi , il est
indubitable que AB : AC AD : AE. Et
par conséquent que ces quatre lignes sont
en proportion Géometrique et continuellement
proportionnelles
, desquelles AC
et AD sont les deux moyennes. Et comme
il est démontré depuis long- temps , que
la premiere est la racine cubique du Cube
deux , il s'ensuit que la ligne AC est le
côté du Cube double du Cube de AB ,
d'où l'on doit indubitablement conclure
que la solution du célebre Problême de la
Duplication du Cube est enfin trouvée.
Quant àl'operation de la Trisection de
l'Angle , M. le Monnier peut continuer
à la faire ; les difficultez en sont levées ;
il n'a plus de Paralogisme à craindre
ayant autant de sagacité et de pénetra
tion que je lui en crois .
>
Voici
SEPTEMBRE . 1731. 2155
Voici donc bien démontrées les solutions
tant désirées et presque inesperées
de ces anciens Apores , la Quadrature du
Cercle , la Duplication du Cube et la
Trisection de l'Angle par la Géometrie
simple , sans le secours des sections Coniques
, ni de la Géometrie de l'infini ,
dont les operations ne sont point si lumi
neuses , qu'elles ne laissent quelque doute.
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Résumé : RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
Le Père Romuald le Muët, religieux de la Charité, répond à M. le Monnier après que ce dernier ait critiqué son ouvrage sur la quadrature du cercle, la duplication du cube et la trisection de l'angle. Le Père Romuald exprime son respect pour la critique mais refuse de se soumettre aux lois que M. le Monnier lui prescrit. Il défend sa méthode de division des 360 degrés de la circonférence du cercle en vingt-deux parties, affirmant que cette méthode permet de résoudre le problème de la quadrature du cercle en déterminant le rapport entre le diamètre et la circonférence. Le Père Romuald soutient que la géométrie simple est la seule réelle et solide, contrairement aux sections coniques et à la géométrie de l'infini, qu'il considère comme des artifices symboliques. Il reconnaît l'utilité de ces connaissances mais les juge surévaluées. Il critique également M. le Monnier pour ses erreurs de calcul, notamment dans la duplication du cube, et affirme avoir trouvé une solution en utilisant la géométrie simple. Il explique que la duplication du cube peut se faire en ligne en trouvant deux lignes moyennes proportionnelles entre une et deux. Le Père Romuald conclut que les solutions aux problèmes de la quadrature du cercle, de la duplication du cube et de la trisection de l'angle sont démontrées par la géométrie simple, sans recours aux sections coniques ou à la géométrie de l'infini.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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9
p. 2434-2436
Elemens de Géométrie, &c. [titre d'après la table]
Début :
ELEMENS DE GEOMETRIE, avec un abregé d'Arithmetique et d'Algebre, dédiez [...]
Mots clefs :
Géométrie, Arithmétique, Algèbre, Trigonométrie
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texteReconnaissance textuelle : Elemens de Géométrie, &c. [titre d'après la table]
ELEMENS PE GEOMETRRIE , avec un
abregé d'Arithmetique et d'Algebre , dédiez à l'Université de Paris , par M. Rivard. A Paris , rue S. Jacques, chez Clande Jombert et Henry , vis-à -vis S. Yves ,
1732. 400 pag. in quarto.
Get Ouvrage renferme deux Parties ,
dont la premiere est un abregé d'Arith
métique et d'Algebre ; et la seconde, qui
est la principale , sont les Elemens de
Géométrie , ausquels on a ajouté un Trai
té de Trigonométrie rectiligne. L'Auteur
ayant souhaité le dédier à l'Université
de
NOVEMBRE 1731 243¶
de Paris , M. le Recteur l'a fait examiner
par quelques Professeurs de Philosophie
qui en ont rendu un témoignage fort
avantageux , comme on le peut voir par
par une conclusion du Tribunal de l'U
niversité , que l'on trouve imprimée après
le Privilege. M. Grandin , Professeur de
Philosophie , au College de Navarre, qui
est un de ceux qui avoient été priez
d'examiner l'Ouvrage , a envoié à l'Auteur l'Approbation suivante.
Les connoissances qu'on veut donner
Lesprit , doivent être précédées de tout ce qu'el
Les supposent , pour être comprises dans toute
leur étendue. L'ordre et la nettetési néces
saire en tout genre , le sont plus particuliere
ment , quand il s'agit de Géométrie. C'est
dans un fécond enchaînement de propósi
tions , clairement énoncées , que consiste tou
te la difficulté et tout le prix des Elemens de
Géométrie. L'Auteur de cet Ouvrage m'a pa
rú avoir disposé ces Elemens de maniere que
ce qu'ilpresente d'abord mene naturellement
Lesprit à Pintelligence de ce qui suit.
Il a écarté ce qui peut être suppléé , il æ
passé du simple au composé , et il s'est atta
ché à suivre cet ordre naturel , qu'on recher
che avectant d'ardeur depuis plus d'un sié
cle.Les Mathematiques font aujourd'hui une
partie si commune et si necessaire de la PhyF iiij sique,
2436 MERCURE DE FRANCE
sique , qu'on ne sçauroit trop en recommander l'étude à la jeunesse. On ne peut aussi
marquer trop de reconnoissance aux per
sonnes habiles , qui prennent la peine d'en
faciliter l'entrée. A Paris ce premier jour d'Août 1732.
Signé M. GRANDIN.
abregé d'Arithmetique et d'Algebre , dédiez à l'Université de Paris , par M. Rivard. A Paris , rue S. Jacques, chez Clande Jombert et Henry , vis-à -vis S. Yves ,
1732. 400 pag. in quarto.
Get Ouvrage renferme deux Parties ,
dont la premiere est un abregé d'Arith
métique et d'Algebre ; et la seconde, qui
est la principale , sont les Elemens de
Géométrie , ausquels on a ajouté un Trai
té de Trigonométrie rectiligne. L'Auteur
ayant souhaité le dédier à l'Université
de
NOVEMBRE 1731 243¶
de Paris , M. le Recteur l'a fait examiner
par quelques Professeurs de Philosophie
qui en ont rendu un témoignage fort
avantageux , comme on le peut voir par
par une conclusion du Tribunal de l'U
niversité , que l'on trouve imprimée après
le Privilege. M. Grandin , Professeur de
Philosophie , au College de Navarre, qui
est un de ceux qui avoient été priez
d'examiner l'Ouvrage , a envoié à l'Auteur l'Approbation suivante.
Les connoissances qu'on veut donner
Lesprit , doivent être précédées de tout ce qu'el
Les supposent , pour être comprises dans toute
leur étendue. L'ordre et la nettetési néces
saire en tout genre , le sont plus particuliere
ment , quand il s'agit de Géométrie. C'est
dans un fécond enchaînement de propósi
tions , clairement énoncées , que consiste tou
te la difficulté et tout le prix des Elemens de
Géométrie. L'Auteur de cet Ouvrage m'a pa
rú avoir disposé ces Elemens de maniere que
ce qu'ilpresente d'abord mene naturellement
Lesprit à Pintelligence de ce qui suit.
Il a écarté ce qui peut être suppléé , il æ
passé du simple au composé , et il s'est atta
ché à suivre cet ordre naturel , qu'on recher
che avectant d'ardeur depuis plus d'un sié
cle.Les Mathematiques font aujourd'hui une
partie si commune et si necessaire de la PhyF iiij sique,
2436 MERCURE DE FRANCE
sique , qu'on ne sçauroit trop en recommander l'étude à la jeunesse. On ne peut aussi
marquer trop de reconnoissance aux per
sonnes habiles , qui prennent la peine d'en
faciliter l'entrée. A Paris ce premier jour d'Août 1732.
Signé M. GRANDIN.
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Résumé : Elemens de Géométrie, &c. [titre d'après la table]
Le texte présente 'Éléments de Géométrie', un ouvrage publié en 1732 par M. Rivard et dédié à l'Université de Paris. Cet ouvrage se divise en deux parties : un abrégé d'arithmétique et d'algèbre, et une section principale sur les éléments de géométrie, incluant un traité de trigonométrie rectiligne. L'ouvrage a été examiné par des professeurs de philosophie de l'Université de Paris, qui ont rendu un témoignage favorable. M. Grandin, professeur de philosophie au Collège de Navarre, a approuvé l'ouvrage, soulignant l'importance de l'ordre et de la clarté dans l'enseignement de la géométrie. Il a noté que l'auteur a structuré les éléments de manière à guider naturellement l'esprit du lecteur du simple au composé, suivant un ordre naturel recherché depuis plus d'un siècle. L'étude des mathématiques est considérée comme essentielle pour la physique et doit être recommandée à la jeunesse. L'approbation de M. Grandin est datée du 1er août 1732.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
p. 2393-2408
RÉPONSE de M. le Gendre de S. Aubin, au Problême qui a été proposé dans le Mercure du mois de Septembre dernier, aux Métaphysiciens Géométres, sur l'Essence de la Matiere.
Début :
C'est aujourd'hui le génie des Sciences de pousser à bout toutes les idées. N'est-ce [...]
Mots clefs :
Infini, Matière, Mouvement, Fini, Essence de la matière, Esprit humain, Homme, Propriétés, Infinis, Corps, Géométrie, Nature, Problème, Géomètres, Principe
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texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE de M. le Gendre de S. Aubin, au Problême qui a été proposé dans le Mercure du mois de Septembre dernier, aux Métaphysiciens Géométres, sur l'Essence de la Matiere.
REPONSE de M. le Gendre de
S. Aubin , au Problême qui a été
proposé
dans le Mercure du mois de Septembre
dernier , aux Métaphysiciens Geométres
, sur l'Essence de la Matiere .
C'ES
'Est aujourd'hui le génie des Sciences de
pousser à bout toutes les idées. N'est-ce
point un effort pour parvenir à la gloire de la
nou
2394 MERCURE DE FRANCE
nouveauté , dans un siecle où le nouveau sem→
ble depuis long-temps épuisé ? L'esprit humain
se flatte de parvenir aux degrez les plus sublimes
des connoissances , par des suppositions sans
bornes ; mais cette voye l'écarte infiniment de la
verité, pour peu qu'il y ait d'erreur dans le principe
, ou que la conséquence manque de la plus
exacte précision.
Des Cartes a consideré la matiere et l'étenduë
comme une même chose. Les modernes , pour
la plupart , ne l'ont pas suivi jusques- là , ils ont
persisté à distinguer la matiere de l'étenduë ,
comme le sujet de son essence. On entend par
essence et par proprietez , des qualitez inséparables
naturellement d'une substance , au lieu que
les accidents varient. Il y a même quelque distinction
entre essence et proprietez . Cette distinction
consiste en ce que parmi les proprietes
il s'en trouve quelqu'une plus génerale , et de laquelle
les autres semblent émaner. Or cette essence
, cette proprieté primitive de la matiere , c'est
l'étendue et l'impénetrabilité , la divisibilité à
l'infini , l'unité du lieu , en sont des proprietez.
Aristote a écrit dans sa Métaphysique , que la matiere
n'est rien de tout ce qu'on peut répondre aux
questions qui regardent l'essence , la quantité , la.
qualité , et que ce n'est point un être déterminé.
L'opinion d'Aristote , de la façon dont il la pro
pose , réduit la matiere au néant.
Dans le Problême proposé aux Métaphysiciens
Géometres , sur l'essence de la matiere , on lui
enleve son essence et ses proprietez sans effort ;
il n'en coûte pour cela qu'une supposition , et
l'Auteur du Problême persuadé qu'il ne reste
à la matiere aucune de ses proprietez , invite
Les Métaphysiciens Géométres à lui en chercher
de
NOVEMBRE. 1733. 2395.
de nouvelles. Les conséquences qui résultent des
principes expliquez dans le Problême , sont , à
ce qu'on prétend , que la matiere n'est pas nécessairement
étendue , qu'elle n'a plus d'impéné
trabilité , qu'un corps peut être à la fois aux
deux bouts de l'Univers , aussi- bien que dans
tous les lieux qui remplissent cet intervalle . On
se fonde sur la Géométrie , qui a la certitude en
partage , pour dépouiller tout d'un coup la matiere
des proprietez les plus inhérentes , dont la
Physique l'avoit mise en possession. Comment
les Métaphysitiens Géométres pourront- ils réparer
tant de pertes ? Il y a plus ; la matiere est
réduite à une simple possibilité. Le Pere Castel ,
dit-on , l'insinue ainsi dans sa Mathématique,
Universelle. Je suis bien éloigné de croire que
ce puisse être le sentiment du Pere Castel , puisque
cet ingénieux Auteur établit pour princi
pe , que de la possibilité à l'existence , il y a aussi
loin que du néant à l'être. L'Auteur du Problême
ne prétend assurément pas que Dieu n'ait
créé que des esprits. Cependant si la matiere est
réduite à une pure possibilité , si toutes les proprietez
lui sont enlevées, elle est réduite au néant;
car ce qui n'a aucune proprieté est le néant , auquel
on ne refuse même pas les proprietez néga
tives. Ces conséquences vont loin et trop loin.
Si la matiere n'a aucune existence par ses proprietez
, elie en aura encore moins par une forme
déterminée ou par ses accidents. Il s'agit
même ici de la matière accompagnée de la forme
, puisqu'on prétend que l'unité de lieu n'est
pas une proprieté du corps d'un homme . Examinons
si les principes et les inductions qu'on
Tr. de Physiq. T. 1. Liv. s . Ch. 7.
2396 MERCURE DE FRANCE
en tire pour dépoüiller la matiere de toutes ses
proprietez , nous obligent indispensablement à
les abandonner.
"
"
Il est possible , dit-on , que le même corps
» se trouve la même année à Paris et à Constan-
»tinople , dans l'espace de six mois , de trois , et
» peut- être de deux . Le mouvement de sa nature
est susceptible de plus et de moins à l'infini
la nature est pleine de mouvemens très - rapides
, un boulet , les Planetes , le son , la lumiere.
La lumiere peut parcourir des miliers de
licües en une minute , en une seconde. Dieu
peut transporter le corps d'un homme en un
clin d'oeil d'un bout du Monde à l'autre. Le
plus ou moins de mouvement n'a rien qui
D passe sa toute- puissance , et la matiere n'a rien
qui s'y refuse . Supposons donc un mouvement
toujours croissant par le pouvoir de Dieu , il
» est vrai de dire qu'on peut voir le même hom
"me à Constantinople et à Paris , non - seulement
dans la même année et dans le même
mois , mais dans la même semaine , dans le
même jour , dans la même minute , seconde ,
tierce , quarte , sixte , dixième , centiéme , mil-
» liéme , millioniéme , billioniéme , trillioniéme,
&c . Cela va lóin, et rien ne l'arrête . » Enfin on
prétend conclure de ces principes que le mouvement
en question croissant à l'infini , l'homme
qui seroit porté et rapporté par ce mouvement
de Paris à Constantinople , se trouveroit exactement
au même instant indivisible à Paris et à
Constantinople , dans tout l'entredeux et en mille
autres lieux de l'Univers , dans l'Univers même
antier , si l'on veut.
Il faut d'abord se mettre bien au fait de la
question. Nous examinons quel pourroit être
l'effet
NOVEM BK E. 1733. 2397
T'effet d'un mouvement naturel , susceptible
d'augmentation de plus en plus . Cette question
est semblable à celles de l'asymptotisme infini de
quelques courbes . A la verité , dans l'hypothese
on parle de la puissance de Dieu , mais ce n'est
que pour mettre en oeuvre dans toute son étendue
ce qui est dans la nature , ce dont le mouvement
est capable de lui-même , et à quoi la
matiere n'a rien qui se refuse , dont on trouve
même des exemples assez semblables dans le
cours le plus ordinaire de la nature , comme la
vitesse très rapide de la lumiere . L'Auteur du Problême
entreprend de démontrer par le raisonnement
et par le calcul , que le mouvement étant
susceptible d'augmentation à l'infini , un corps
peut par la force du mouvement portée jusqu'où
elle est capable d'aller , être à la fois dans tout
les lieux de l'Univers, Si cette proposition pou
voit être vraye , nous serions forcez non - sculement
d'abandonner la Physique , dont il ne seroit
pas impossible de se passer , mais de renoncer
tout- à- fait à la faculté de raisonner . J'accorde
pour un moment à l'Auteur du Problême,
que le mouvement qui transporte notre homme
de Paris à Constantinople , fût infini , il n'en
résulteroit autre chose sinon que le temps seroit
divisé à l'infini avec la même réciprocité que le
mouvement de transport auroit été augmenté,
Ainsi , quoique vous vissiez cet homme continuellement
, qu'il ne cessat de vous parler , le
mouvement infini le porteroit et rapporteroit
dans des instants divisez à l'infini , sans que
vous vous apperçussiez de son transport . La division
à l'infini de l'instant , dans lequel ce
transport seroit réïteré , empêcheroit que le
même corps ne fût en même temps dans deux
endroits. Re
2398 MERCURE DE FRANCE
Reprenons l'hypothese des plus imaginaires de
notre homme transporté à Constantinople , c'est
tout au plus une présomption de la divisibilité
du temps à l'infini , qui a toujours été soutenuë
par le plus grand nombre des Philosophes , et
que tous les Infinitaires , à ce que je pense , admettent
aujourd'hui. Quoique vous eussiez continuellement
cet homme devant les yeux , quoique
la vitesse du mouvement vous rendit le
transport imperceptible , l'homme transporté ne
seroit pas davantage à Paris et à Constantinople
dans le même instant,qu'un charbon brûlant qui
tourne avec une vitesse assez médiocre , n'est en
même-temps dans tous les points du cercle qu'il
décrit , lorsque vous croyez voir un cercle de
feu , non parce que le charbon est à la fois dans
tous les points du cercle , mais parce qu'il fait
impression sur des parties de la rétine disposées
en rond, et que l'impression n'a pas cessé dans la
premiere partie ébranlée , quand le charbon agit
sur la derniere. De ce Phénomene on peut conclure
que ,quoique la vision se fasse en un instant fort
court de la présence de l'objet , le sentiment de
voir ne laisse pas de durer pendant un petit espace
de temps au--delà . Nous éprouvons à toute
heure des illusions de nos sens , qui nous font
paroître comme non interrompu , ce qui ne les
affecte que par des mouvemens semez de mille
interruptions. Mais portons nos vûës plus loin.
Un mouvement susceptible d'augmentation de
plus en plus peut- il être supposé infini ?
L'Auteur du Problême appelle le Sistême de
l'infini au secours de son hypothese, et il cite une
autorité qui a le plus de poids et de force ; c'est
celle de M. de Fontenelle, qui a dit , que la grandeur
capable d'augmentation à l'infini , peut être
supposée
NUVEM BK E. 1733. 2290
supposée augmentée à l'infini . C'est effectivement
un principe dont les plus sçavans Géométres se
sont servis depuis près d'un siecle . Mais en fait
de Géométrie , l'autorité est un motif d'examen
et non pas de conviction. Suivons donc de près
cette proposition ; elle présente d'abord une évidence
non suspecte , mais c'est sa contradictojte
qui est réellement évidente. La grandeur capable
d'augmentation à l'infini , ne peut être supposée
augmentée à l'infini , par cette raison même
qu'elle est capable d'augmentation à l'infini. Ainsi
ce qui est inépuisable ne peut être supposé
épuisé , ce qui est infini ne peut être supposé terminé
, ce qui est susceptible d'augmentation et
par conséquent fini , ne peut être supposé infini
Or c'est un principe employé par les Géométres
* et évident en soi- même , que toute ligne
soit méchanique , soit géometrique , ou rentre en
elle-même, ou s'étend à l'infini , puisqu'on peut toujours
en continuer la génération . Aucune ligne
soit méchanique , soit géométrique, ne peut donc
être supposée infinie.
La Géométrie transcendante m'a causé beaucoup
de perplexité. Je trouvois d'une part l'autorité
de plusieurs Sçavans , qui ont donné les plus
grandes preuves de force de génie , et je voyois
un enchaînement bien lié de conclusions et de
calculs . D'un autre côté , je sçavois que la verité
est une dans les objets diversifiez des Sciences ;
que , suivant ce principe , le calcul ne peut être
contraire au raisonnement , et que les veritez
d'un ordre purement naturel ne doivent être con-
* Le Marquis de l'Hôpital , Anal. des Infinim,
pet. § . 5. p. 100. Guinée , Applicat. de l'Algebr, à
la Géométr. §. 12.p.235.
sidéréo
2400 MERCURE DE FRANCE
siderées comme telles par l'esprit humain , qu'autant
qu'elles sont à sa portée et compréhensibles.
Je n'entens pas dire par là que toutes les véritez
naturelles soient à la portée de l'esprit humain,je
suis aussi persuadé qu'il y en a beaucoup de celles
qui sont à sa portée , qui ne sont pas encore
découvertes. Je me renferme à dire ( ce qui me
semble incontestable ) que l'esprit humain ne
peut mettre au nombre des veritez purement naturelles
, que ce qu'il a compris.
J'avoue encore que cette derniere refléxion
augmentoit ma défiance. Je soupçonne une vérité
, me disois -je à moi - même , que quelques
hommes celebres ont donnée pour démontrée
après un travail infatigable ; c'est parce que je
n'ai pas la force d'atteindre où ces hommes sçavans
sont parvenus. Mais enfin lorsque j'ai été
pleinement convaincu que non- seulement ces
prétendues véritez de la Géometrie de l'infini
étoient incompréhensibles pour moi , mais que
j'y découvrois une contradiction évidente
que ceux mêmes qui les soutenoient, reconnoissoient
en même temps qu'ils ne pouvoient les
concevoir , je n'ai plus balancé à chercher l'issuë
de ce labyrinthe de l'esprit humain , et j'ai été
assuré qu'il y en avoit une. J'ai trouvé le fondement
du calcul ruineux , aussi-bien que celui
du raisonnement. Je ne traiterai ici que de la
partie qui concerne le raisonnement , je ne l'acheverai
même pas , de de peur passer les bornes
convenables au Mercure , et je réserverai pour le
mois prochain ce qui restera de la partie du raisonnement
, et la partie entiere qui regarde le
calcul.
La Géométrie dans son état présent est remplie
de conclusions si yastes , qu'elles paroissent
surpasser
NOVEMBRE . 1733. 2401
surpasser infiniment les bornes de l'esprit humain.
Il n'y auroitrien d'étonnant si elle n'étoit
pas la production de l'esprit humain ; mais comme
elle ne se vante pas d'une autre source, et que
si elle étoit assez témeraire pour s'en vanter
il lui seroit impossible de la prouver , qui peut
inspirer à l'esprit humain tant de soumission
pour son propre Ouvrage ? La Géométrie qui
doit être une science de conviction , m'offre de
toutes parts des écueils de raisonnement . Des
infiniment grands , qui sont infiniment petits
par rapport à d'autres ordres ou degrez infinis
d'infinis ; des asymptotismes dont les espaces
sont plus qu'infinis ; des rectangles infinis égaux
à d'autres rectangles finis ; le fini et l'infini proportionnels
, en même-temps qu'on admet pour
principe que les infinis sont égaux entre eux 5
des espaces infinis , qui par leurs révolutions
autour de leurs axes , ne donnent que des produits
finis , appellez fuseaux hyperboliques ; enfin
le mouvement infini semblable au parfait repos
, et la matiere dépouillée de toutes ses proprietez
, suivant l'Auteur du Problême , car tout
cela ne me paroît pas plus solide l'un que l'autre.
Heureusement ces conclusions inconcevables tombent
d'elles-mêmes , par l'unique observation
que j'ai faite cy - dessus , que la grandeur capable
d'augmentation à l'infini , ne peut être supposée
infinie, Comme un moment connu et fini ne
peut être supposé une éternité , de même un
asymptotisme de l'hyperbole d'un degré quelconque
, ni les asymptotistes de la Conchoïde ,
de la Syssoïde ou autres courbes, ne peuvent être
supposez étendus à l'infini , puisque par leur essence
ils sont capables d'être augmentez de plus
en plus. Suivant le même principe , leur prolon
D gement
2402 MERCURE DE FRANCE
gement supposé infini ne pourroit être limite
par une derniere ordonnée , ni aucune figure ne
pourroit être circonscrite à leurs espaces suppo- sez infinis.
Une somme dont je suppose qu'on prend la
moitié , ensuite la moitié de cette moitié , et tou
jours la moitié de la précédente moitié , ne peut
être épuisée ni supposée épuisée, Il est fort aisé de
prendre deux écus dans un sac de mille francs, et
celui qui les tirede ce sac, n'a pas pour cela attrapé
une richesse infinie , mais en supposant qu'un
homme prenne un écu, la moitié d'un écu , la moitié
de cette moitié, et toujours la moitié de la précédente
moitié , ou une portion quelconque des
précédentes portions , sans qu'il soit nécessaire
que le même rapport regne dans la progression ,
je ne puis supposer que cet homme prenne jamais
deux écus ; car quoique j'aye l'idée de deux
écus , comme d'une somme finie , la progession
que je suppose continuée à l'infini , n'y arrivera
jamais , et ce seroit une contradiction manifeste
de supposer en même- temps que cet homme ne
s'écartât jamais de cette progression , et qu'il pût
parvenir à prendre la somme très - modique de
deux écus . Ainsi le fini le plus borné renferme
en soi ( pour me servir des termes très- énergiques
du Pere Castel ) un infini essentiellement
concentré dans son enveloppe , et inépuisable
dans sa mine , qu'aucun développement ne peut
jamais épuiser : c'est la seule espece d'infini géometrique
et physique , auquel tout ce qui peut
être imaginé par l'esprit humain , vient aboutig
comme à un centre commun ; ou plutôt il ne
peut y avoir d'infini en Géométrie et en Physi
que , et tout se réduit dans l'une et dans l'autre
ou fini extensible et divisible de plus en plus , ee
qui
NOVEMBRE . 1733. 2403
qui parconséquent ne peut devenir infini.
On découvre la contradiction d'une maniere
encore plus sensible dans le plus qu'infini . Quel
ques Géometres ont prétendu donner à des
quan .
sitez numériques la qualité de plus qu'infinis ;
nous en parlerons dans la seconde partie de cette
Réponse ; il s'agit maintenant d'expliquer l'Asymptotisme
plus qu'infini de Wallis , * rejetté
par Varignon. Pour cela il faut entendre que
suivant le systême de l'infini , la parabole ordinaire
est une ovale infiniment allongée, qui a ses
deux sommets à une distance infinie , et opposez
par leurs concavitez l'un à l'autre , au lieu que
T'hyperbole a ses deux sommets très - proches ,
mais renversez et opposez l'un à l'autre par leurs
convexitez , comme si après avoir coupé une ovale
en deux , vous retourniez les deux moitież , ou
comme si vous opposiez deux calottes l'une à
l'autre par le dessus . Cela est si clair , qu'il n'est
pas besoin de figures et une plus ample description
de ces deux courbes seroit inutile ici. L'hyperbole
donc partant d'un sommet, et allant de la
gauche à la droite, si l'on veut, aura à parcourir
un espace infini pour joindre son asymptote; elle
sera alors,suivant Wallis, plus qu'infiniment éloignée
de son autre sommet transposé de la droite à
gauche ; ensorte que si une parabole et une hyperbole
s'étendoient à l'infini , la premiere pour
joindre son sommet , la seconde pour atteindre
son asymptote , lorsque la parabole seroit parvenue
à son sommer par un prolongement infini,
Phyperbole arrivée à l'extrémité de son asymptote
auroit encore à parcounir en revenant le même
espace infini , et de plus , la distance qui est entre
ces deux sommets , pour joindre le sommet
✦Vvall. Arith. infin . Schol. propos. 101. et 104.
Dij ima
2454 MERCURE DE FRANCE
opposé à celui d'où elle est partie. On peut
imaginer l'asymptote comme une ligne droite
tirée à côté d'une courbe , dont cette courbe ap
proche toujours , mais par une progression géometrique
semblable à celle dont nous avons par
lé cy- dessus , son progrès n'étant jamais que
d'une partie du précedent espace , comme si l'aproximation
étoit d'un pouce , de la moitié d'un
pouce, de la moitié de cette moitié, & c . De même
que Wallis a appellé certains espaces asymp
rotiques plus qu'infinis , je pourrois dire que Paris
est plus qu'infiniment éloigné de Chaillot
car si je passe par Pekin pour aller de Paris
Chaillot , j'aurai non- seulement à traverser l'espace
que j'ai supposé infini depuis Pekin jusqu'à
Paris , mais il faudra que j'ajoûte à cet espace
le chemin de Paris à Chaillot. Voilà ce que
Wallis a appellé des espaces plus qu'infinis , er
ce que Varignon ( 1 ) a réduit auc omplément fini
d'un espace infini .
M. Chesne dit que le passage du fini à l'infini
se fait par une addition d'unités ; mais il est évident
qu'une addition d'unités , qui peut toujours,
suivant la supposition , être augmentée , ne change
rien à la nature d'une grandeur , et les Géometrès
conviennent que par rapport au fini , un
grain de sable et un Globe qui auroit la distance
de Sirius pour rajon , sont de même nature. Les
Géométres Anglois ( 2 ) considerent le fiai comme
étant en mouvement , ou suivant leur terme
en fluxion pour devenir infini ; or ce qui est en
Auxion pour devenir infini , ne peut être suppo-
(1) Memoires de l'Académie des Sciences , anmée
1706. page 13 .
(2 ) Elem. de la Géométrie de l'infini , part. 1 .
§. 3.2. 197. P. 65.
NOVEMBRE . 173. 2405
sé infini. L'Auteur du Problême prétend expli
quer le passage du fini à l'infini , par l'exaltation
d'une nature inférieure à une nature superieure ,
comme de la ligne à la surface , &c . Mais les
points , les lignes et les surfaces sont des idées.
et des abstractions sans réalité. L'entendement
peut examiner les trois dimensions d'un corps ,
longueur , largeur et profondeur séparément et
d'une maniere abstraite , quoiqu'il soit démontré
que ces trois dimensions ne peuvent être séparées.
La divisibilité à l'infini est fondée sur ce
principe , que la plus petite portion de matiere
ne cesse point d'être matiere elle - même , que
la portion d'un corps la plus divisée , est
toujours un corps qui a de l'étendue et par conséquent
des parties divisibles. Si le corps pouvoit
se résoudre en points , lignes et surfaces ,
on rencontreroit bien- tôt les Atômes d'Epicure
et de Gassendi ; mais ces Atômes ou points indivisibles
, n'ayant point de parties , ne pour
roient avoir ni figure ni étendue, et leur assembla
ge ne pourroit former un corps. La portion de
matiere la plus divisée qu'on puisse imaginer ,
étant mise sur un plan , le touchera toujours par
une de ses parties et ne le touchera pas par celle
qui est au-dessus. Il est donc démontré qu'on
ne peut admettre les points indivisibles et inégaux
soutenus par le Pere Castel , dans sa Mathématique
universelle , ausquels il donne le
nom d'être absorbe dans le néant. Dailleurs l'inégalité
de ces points suppose nécessairement des
parties inégales, une figure et une étendue inéga
les ; c'est une raison de plus pour qu'ils ne puissent
cesser d'être divisibles. Le Pere Castel * ems
Mathém, Univers. p. 5oz.
Diij ploye
9406 MERCURE DE FRANCE
ו כ
ploye ce raisonnement pour une démonstration.
de ces atômes inégaux . Plus l'intersection est
oblique , plus le point d'intersection est grand.
Cela a- t'il besoin d'une démonstration plus expresse
Elle saute aux yeux. Dans un quarré
qui a sa diagonale , les lignes qui coupent un
Coté parallelement à l'autre côté , coupent la
diagonale en autant de points ni plus ni moins;
» or la diagonale est plus grande que le côté ,
donc ses points d'intersection sont plus grands,
ce qu'il falloit démontrer. Les Infinitaires
n'ont pas de peine à répondre que les endroits
où se fait l'intersection , ne sont pas des points
indivisibles , et que si la diagonale est coupée par
le même nombre de sections que le côté plus
petit qu'elle , c'est que les intervalles des sections
sont plus grands dans cette diagonale que dans
ce côté.
Pour revenir à la question dont nous nous
sommes un peu écartez , l'exaltation d'une nature
inférieure à une nature superieure comme
du point à la ligne , de la ligne à la surface
de la surface au solide , ne peut expliquer la
passage du fini à l'infini. On ne peut donner
aucune explication de ce passage , parce qu'il est
impossible et imaginaire. Il ne peut y avoir
d'infini , que l'infini métaphysique de Dieu et de
PEternité. Ces infinis sont très- concevables ;
l'idée de l'infini est naturelle et proportionnée à
Pentendement humain , qui conçoit une chose
sans bornes , aussi aisément qu'une chose bornée.
Nous pensons même à une chose , avant que de
faire réflexion à ses limites . L'infini en Dieu et
dans l'éternité n'est susceptible d'aucune augmentation
; il n'y a d'infini que ce qui l'est par
son essence ; mais le passage du fini à l'infini et
10
NOVEMBRE. 1733 2407
fe retour sont inconcevables à l'esprit humain
et il n'y a en Geometrie et en Physique qu'une
seule espece de substance finie et divisible ou extensible
à l'infini .
C'est par le même principe que peut être décidée
la question de l'infinité du monde , ques
tion qui à si fort embarassé les Philosophes des
differens siccles. La proprieté de la matiere d'être
finie er divisible ou extensible à l'infini , fait
que le Monde entier , sans être infini et étant fini
au contraire , n'a cependant aucunes limites
absolues , en ce qu'elles peuvent être reculées de
plus en plus ; le Monde entier étant comme cha
que portion de matiere , fini mais divisible ou
extensible à l'infini . Si l'on objecte que le Monde
ne peut être limité , parce qu'il est impossible
d'imaginer ce qui seroit plus loin , et que l'Univers
, quelque forme qu'il cut , se dissiperoit
s'il n'y avoit rien au -delà pour le contenir ; il est
aisé de répondre que l'imagination ne pouvant se
représenter que ce qui y est entré par les sens ,
il n'est pas étonnant que nous ne puissions pas
imaginer ce qui est au - delà du Monde ; que c'est
à la Physique à nous accompagner jusqu'à ses
limites, mais que si nous entreprenons de les franchir,
la Physique ou la science du monde matériel
ne peut s'étendre au- delà de ce monde . C'est alors
à la Métaphysique à nous enseigner que l'immensité
de Dieu remplit tout , et que comme il seroit
insensé de ne pas rapporter la création de l'Univers
à la toute - puissance deDieu , il ne le seroit pas
moins de prétendre s'en passer pour sa conservation,
enfin que de vastes et innombrables tourbillons
peuvent être contenus dans leurs bornes
par la Providence divine aussi facilement , que
les Mers dans de petits espaces du Globe que
mous habitons.
D iiij Quel2408
MERCURE DE
FRANCE.
Quelque chemin que l'infini
il ne nous a conduits à rien
d'incompréhensible , nous ait fait faire,
il me semble au
contraire que l'esprit se trouve
affranchi de tout ce que la
Géometrie lui présentoit
d'inconcevable et de
contradictoire. Il suffit
d'être ferme sur ce
principe , que ce
principe, que ce qui est capable
d'augmentaion à l'infini , ne peut être supposé
infini. Ces veritez
deviendront de plus en
plus sensibles par la seconde partie de cette Réponse
. En
attendant , je crois que les
Métaphysiciens
Géométres
s'inquiéteront peu de
suppléer
à un
dépouillement
imaginaire des
propriete
de la matiere.
La suite dans le second volume de
Décemb.prochain.
S. Aubin , au Problême qui a été
proposé
dans le Mercure du mois de Septembre
dernier , aux Métaphysiciens Geométres
, sur l'Essence de la Matiere .
C'ES
'Est aujourd'hui le génie des Sciences de
pousser à bout toutes les idées. N'est-ce
point un effort pour parvenir à la gloire de la
nou
2394 MERCURE DE FRANCE
nouveauté , dans un siecle où le nouveau sem→
ble depuis long-temps épuisé ? L'esprit humain
se flatte de parvenir aux degrez les plus sublimes
des connoissances , par des suppositions sans
bornes ; mais cette voye l'écarte infiniment de la
verité, pour peu qu'il y ait d'erreur dans le principe
, ou que la conséquence manque de la plus
exacte précision.
Des Cartes a consideré la matiere et l'étenduë
comme une même chose. Les modernes , pour
la plupart , ne l'ont pas suivi jusques- là , ils ont
persisté à distinguer la matiere de l'étenduë ,
comme le sujet de son essence. On entend par
essence et par proprietez , des qualitez inséparables
naturellement d'une substance , au lieu que
les accidents varient. Il y a même quelque distinction
entre essence et proprietez . Cette distinction
consiste en ce que parmi les proprietes
il s'en trouve quelqu'une plus génerale , et de laquelle
les autres semblent émaner. Or cette essence
, cette proprieté primitive de la matiere , c'est
l'étendue et l'impénetrabilité , la divisibilité à
l'infini , l'unité du lieu , en sont des proprietez.
Aristote a écrit dans sa Métaphysique , que la matiere
n'est rien de tout ce qu'on peut répondre aux
questions qui regardent l'essence , la quantité , la.
qualité , et que ce n'est point un être déterminé.
L'opinion d'Aristote , de la façon dont il la pro
pose , réduit la matiere au néant.
Dans le Problême proposé aux Métaphysiciens
Géometres , sur l'essence de la matiere , on lui
enleve son essence et ses proprietez sans effort ;
il n'en coûte pour cela qu'une supposition , et
l'Auteur du Problême persuadé qu'il ne reste
à la matiere aucune de ses proprietez , invite
Les Métaphysiciens Géométres à lui en chercher
de
NOVEMBRE. 1733. 2395.
de nouvelles. Les conséquences qui résultent des
principes expliquez dans le Problême , sont , à
ce qu'on prétend , que la matiere n'est pas nécessairement
étendue , qu'elle n'a plus d'impéné
trabilité , qu'un corps peut être à la fois aux
deux bouts de l'Univers , aussi- bien que dans
tous les lieux qui remplissent cet intervalle . On
se fonde sur la Géométrie , qui a la certitude en
partage , pour dépouiller tout d'un coup la matiere
des proprietez les plus inhérentes , dont la
Physique l'avoit mise en possession. Comment
les Métaphysitiens Géométres pourront- ils réparer
tant de pertes ? Il y a plus ; la matiere est
réduite à une simple possibilité. Le Pere Castel ,
dit-on , l'insinue ainsi dans sa Mathématique,
Universelle. Je suis bien éloigné de croire que
ce puisse être le sentiment du Pere Castel , puisque
cet ingénieux Auteur établit pour princi
pe , que de la possibilité à l'existence , il y a aussi
loin que du néant à l'être. L'Auteur du Problême
ne prétend assurément pas que Dieu n'ait
créé que des esprits. Cependant si la matiere est
réduite à une pure possibilité , si toutes les proprietez
lui sont enlevées, elle est réduite au néant;
car ce qui n'a aucune proprieté est le néant , auquel
on ne refuse même pas les proprietez néga
tives. Ces conséquences vont loin et trop loin.
Si la matiere n'a aucune existence par ses proprietez
, elie en aura encore moins par une forme
déterminée ou par ses accidents. Il s'agit
même ici de la matière accompagnée de la forme
, puisqu'on prétend que l'unité de lieu n'est
pas une proprieté du corps d'un homme . Examinons
si les principes et les inductions qu'on
Tr. de Physiq. T. 1. Liv. s . Ch. 7.
2396 MERCURE DE FRANCE
en tire pour dépoüiller la matiere de toutes ses
proprietez , nous obligent indispensablement à
les abandonner.
"
"
Il est possible , dit-on , que le même corps
» se trouve la même année à Paris et à Constan-
»tinople , dans l'espace de six mois , de trois , et
» peut- être de deux . Le mouvement de sa nature
est susceptible de plus et de moins à l'infini
la nature est pleine de mouvemens très - rapides
, un boulet , les Planetes , le son , la lumiere.
La lumiere peut parcourir des miliers de
licües en une minute , en une seconde. Dieu
peut transporter le corps d'un homme en un
clin d'oeil d'un bout du Monde à l'autre. Le
plus ou moins de mouvement n'a rien qui
D passe sa toute- puissance , et la matiere n'a rien
qui s'y refuse . Supposons donc un mouvement
toujours croissant par le pouvoir de Dieu , il
» est vrai de dire qu'on peut voir le même hom
"me à Constantinople et à Paris , non - seulement
dans la même année et dans le même
mois , mais dans la même semaine , dans le
même jour , dans la même minute , seconde ,
tierce , quarte , sixte , dixième , centiéme , mil-
» liéme , millioniéme , billioniéme , trillioniéme,
&c . Cela va lóin, et rien ne l'arrête . » Enfin on
prétend conclure de ces principes que le mouvement
en question croissant à l'infini , l'homme
qui seroit porté et rapporté par ce mouvement
de Paris à Constantinople , se trouveroit exactement
au même instant indivisible à Paris et à
Constantinople , dans tout l'entredeux et en mille
autres lieux de l'Univers , dans l'Univers même
antier , si l'on veut.
Il faut d'abord se mettre bien au fait de la
question. Nous examinons quel pourroit être
l'effet
NOVEM BK E. 1733. 2397
T'effet d'un mouvement naturel , susceptible
d'augmentation de plus en plus . Cette question
est semblable à celles de l'asymptotisme infini de
quelques courbes . A la verité , dans l'hypothese
on parle de la puissance de Dieu , mais ce n'est
que pour mettre en oeuvre dans toute son étendue
ce qui est dans la nature , ce dont le mouvement
est capable de lui-même , et à quoi la
matiere n'a rien qui se refuse , dont on trouve
même des exemples assez semblables dans le
cours le plus ordinaire de la nature , comme la
vitesse très rapide de la lumiere . L'Auteur du Problême
entreprend de démontrer par le raisonnement
et par le calcul , que le mouvement étant
susceptible d'augmentation à l'infini , un corps
peut par la force du mouvement portée jusqu'où
elle est capable d'aller , être à la fois dans tout
les lieux de l'Univers, Si cette proposition pou
voit être vraye , nous serions forcez non - sculement
d'abandonner la Physique , dont il ne seroit
pas impossible de se passer , mais de renoncer
tout- à- fait à la faculté de raisonner . J'accorde
pour un moment à l'Auteur du Problême,
que le mouvement qui transporte notre homme
de Paris à Constantinople , fût infini , il n'en
résulteroit autre chose sinon que le temps seroit
divisé à l'infini avec la même réciprocité que le
mouvement de transport auroit été augmenté,
Ainsi , quoique vous vissiez cet homme continuellement
, qu'il ne cessat de vous parler , le
mouvement infini le porteroit et rapporteroit
dans des instants divisez à l'infini , sans que
vous vous apperçussiez de son transport . La division
à l'infini de l'instant , dans lequel ce
transport seroit réïteré , empêcheroit que le
même corps ne fût en même temps dans deux
endroits. Re
2398 MERCURE DE FRANCE
Reprenons l'hypothese des plus imaginaires de
notre homme transporté à Constantinople , c'est
tout au plus une présomption de la divisibilité
du temps à l'infini , qui a toujours été soutenuë
par le plus grand nombre des Philosophes , et
que tous les Infinitaires , à ce que je pense , admettent
aujourd'hui. Quoique vous eussiez continuellement
cet homme devant les yeux , quoique
la vitesse du mouvement vous rendit le
transport imperceptible , l'homme transporté ne
seroit pas davantage à Paris et à Constantinople
dans le même instant,qu'un charbon brûlant qui
tourne avec une vitesse assez médiocre , n'est en
même-temps dans tous les points du cercle qu'il
décrit , lorsque vous croyez voir un cercle de
feu , non parce que le charbon est à la fois dans
tous les points du cercle , mais parce qu'il fait
impression sur des parties de la rétine disposées
en rond, et que l'impression n'a pas cessé dans la
premiere partie ébranlée , quand le charbon agit
sur la derniere. De ce Phénomene on peut conclure
que ,quoique la vision se fasse en un instant fort
court de la présence de l'objet , le sentiment de
voir ne laisse pas de durer pendant un petit espace
de temps au--delà . Nous éprouvons à toute
heure des illusions de nos sens , qui nous font
paroître comme non interrompu , ce qui ne les
affecte que par des mouvemens semez de mille
interruptions. Mais portons nos vûës plus loin.
Un mouvement susceptible d'augmentation de
plus en plus peut- il être supposé infini ?
L'Auteur du Problême appelle le Sistême de
l'infini au secours de son hypothese, et il cite une
autorité qui a le plus de poids et de force ; c'est
celle de M. de Fontenelle, qui a dit , que la grandeur
capable d'augmentation à l'infini , peut être
supposée
NUVEM BK E. 1733. 2290
supposée augmentée à l'infini . C'est effectivement
un principe dont les plus sçavans Géométres se
sont servis depuis près d'un siecle . Mais en fait
de Géométrie , l'autorité est un motif d'examen
et non pas de conviction. Suivons donc de près
cette proposition ; elle présente d'abord une évidence
non suspecte , mais c'est sa contradictojte
qui est réellement évidente. La grandeur capable
d'augmentation à l'infini , ne peut être supposée
augmentée à l'infini , par cette raison même
qu'elle est capable d'augmentation à l'infini. Ainsi
ce qui est inépuisable ne peut être supposé
épuisé , ce qui est infini ne peut être supposé terminé
, ce qui est susceptible d'augmentation et
par conséquent fini , ne peut être supposé infini
Or c'est un principe employé par les Géométres
* et évident en soi- même , que toute ligne
soit méchanique , soit géometrique , ou rentre en
elle-même, ou s'étend à l'infini , puisqu'on peut toujours
en continuer la génération . Aucune ligne
soit méchanique , soit géométrique, ne peut donc
être supposée infinie.
La Géométrie transcendante m'a causé beaucoup
de perplexité. Je trouvois d'une part l'autorité
de plusieurs Sçavans , qui ont donné les plus
grandes preuves de force de génie , et je voyois
un enchaînement bien lié de conclusions et de
calculs . D'un autre côté , je sçavois que la verité
est une dans les objets diversifiez des Sciences ;
que , suivant ce principe , le calcul ne peut être
contraire au raisonnement , et que les veritez
d'un ordre purement naturel ne doivent être con-
* Le Marquis de l'Hôpital , Anal. des Infinim,
pet. § . 5. p. 100. Guinée , Applicat. de l'Algebr, à
la Géométr. §. 12.p.235.
sidéréo
2400 MERCURE DE FRANCE
siderées comme telles par l'esprit humain , qu'autant
qu'elles sont à sa portée et compréhensibles.
Je n'entens pas dire par là que toutes les véritez
naturelles soient à la portée de l'esprit humain,je
suis aussi persuadé qu'il y en a beaucoup de celles
qui sont à sa portée , qui ne sont pas encore
découvertes. Je me renferme à dire ( ce qui me
semble incontestable ) que l'esprit humain ne
peut mettre au nombre des veritez purement naturelles
, que ce qu'il a compris.
J'avoue encore que cette derniere refléxion
augmentoit ma défiance. Je soupçonne une vérité
, me disois -je à moi - même , que quelques
hommes celebres ont donnée pour démontrée
après un travail infatigable ; c'est parce que je
n'ai pas la force d'atteindre où ces hommes sçavans
sont parvenus. Mais enfin lorsque j'ai été
pleinement convaincu que non- seulement ces
prétendues véritez de la Géometrie de l'infini
étoient incompréhensibles pour moi , mais que
j'y découvrois une contradiction évidente
que ceux mêmes qui les soutenoient, reconnoissoient
en même temps qu'ils ne pouvoient les
concevoir , je n'ai plus balancé à chercher l'issuë
de ce labyrinthe de l'esprit humain , et j'ai été
assuré qu'il y en avoit une. J'ai trouvé le fondement
du calcul ruineux , aussi-bien que celui
du raisonnement. Je ne traiterai ici que de la
partie qui concerne le raisonnement , je ne l'acheverai
même pas , de de peur passer les bornes
convenables au Mercure , et je réserverai pour le
mois prochain ce qui restera de la partie du raisonnement
, et la partie entiere qui regarde le
calcul.
La Géométrie dans son état présent est remplie
de conclusions si yastes , qu'elles paroissent
surpasser
NOVEMBRE . 1733. 2401
surpasser infiniment les bornes de l'esprit humain.
Il n'y auroitrien d'étonnant si elle n'étoit
pas la production de l'esprit humain ; mais comme
elle ne se vante pas d'une autre source, et que
si elle étoit assez témeraire pour s'en vanter
il lui seroit impossible de la prouver , qui peut
inspirer à l'esprit humain tant de soumission
pour son propre Ouvrage ? La Géométrie qui
doit être une science de conviction , m'offre de
toutes parts des écueils de raisonnement . Des
infiniment grands , qui sont infiniment petits
par rapport à d'autres ordres ou degrez infinis
d'infinis ; des asymptotismes dont les espaces
sont plus qu'infinis ; des rectangles infinis égaux
à d'autres rectangles finis ; le fini et l'infini proportionnels
, en même-temps qu'on admet pour
principe que les infinis sont égaux entre eux 5
des espaces infinis , qui par leurs révolutions
autour de leurs axes , ne donnent que des produits
finis , appellez fuseaux hyperboliques ; enfin
le mouvement infini semblable au parfait repos
, et la matiere dépouillée de toutes ses proprietez
, suivant l'Auteur du Problême , car tout
cela ne me paroît pas plus solide l'un que l'autre.
Heureusement ces conclusions inconcevables tombent
d'elles-mêmes , par l'unique observation
que j'ai faite cy - dessus , que la grandeur capable
d'augmentation à l'infini , ne peut être supposée
infinie, Comme un moment connu et fini ne
peut être supposé une éternité , de même un
asymptotisme de l'hyperbole d'un degré quelconque
, ni les asymptotistes de la Conchoïde ,
de la Syssoïde ou autres courbes, ne peuvent être
supposez étendus à l'infini , puisque par leur essence
ils sont capables d'être augmentez de plus
en plus. Suivant le même principe , leur prolon
D gement
2402 MERCURE DE FRANCE
gement supposé infini ne pourroit être limite
par une derniere ordonnée , ni aucune figure ne
pourroit être circonscrite à leurs espaces suppo- sez infinis.
Une somme dont je suppose qu'on prend la
moitié , ensuite la moitié de cette moitié , et tou
jours la moitié de la précédente moitié , ne peut
être épuisée ni supposée épuisée, Il est fort aisé de
prendre deux écus dans un sac de mille francs, et
celui qui les tirede ce sac, n'a pas pour cela attrapé
une richesse infinie , mais en supposant qu'un
homme prenne un écu, la moitié d'un écu , la moitié
de cette moitié, et toujours la moitié de la précédente
moitié , ou une portion quelconque des
précédentes portions , sans qu'il soit nécessaire
que le même rapport regne dans la progression ,
je ne puis supposer que cet homme prenne jamais
deux écus ; car quoique j'aye l'idée de deux
écus , comme d'une somme finie , la progession
que je suppose continuée à l'infini , n'y arrivera
jamais , et ce seroit une contradiction manifeste
de supposer en même- temps que cet homme ne
s'écartât jamais de cette progression , et qu'il pût
parvenir à prendre la somme très - modique de
deux écus . Ainsi le fini le plus borné renferme
en soi ( pour me servir des termes très- énergiques
du Pere Castel ) un infini essentiellement
concentré dans son enveloppe , et inépuisable
dans sa mine , qu'aucun développement ne peut
jamais épuiser : c'est la seule espece d'infini géometrique
et physique , auquel tout ce qui peut
être imaginé par l'esprit humain , vient aboutig
comme à un centre commun ; ou plutôt il ne
peut y avoir d'infini en Géométrie et en Physi
que , et tout se réduit dans l'une et dans l'autre
ou fini extensible et divisible de plus en plus , ee
qui
NOVEMBRE . 1733. 2403
qui parconséquent ne peut devenir infini.
On découvre la contradiction d'une maniere
encore plus sensible dans le plus qu'infini . Quel
ques Géometres ont prétendu donner à des
quan .
sitez numériques la qualité de plus qu'infinis ;
nous en parlerons dans la seconde partie de cette
Réponse ; il s'agit maintenant d'expliquer l'Asymptotisme
plus qu'infini de Wallis , * rejetté
par Varignon. Pour cela il faut entendre que
suivant le systême de l'infini , la parabole ordinaire
est une ovale infiniment allongée, qui a ses
deux sommets à une distance infinie , et opposez
par leurs concavitez l'un à l'autre , au lieu que
T'hyperbole a ses deux sommets très - proches ,
mais renversez et opposez l'un à l'autre par leurs
convexitez , comme si après avoir coupé une ovale
en deux , vous retourniez les deux moitież , ou
comme si vous opposiez deux calottes l'une à
l'autre par le dessus . Cela est si clair , qu'il n'est
pas besoin de figures et une plus ample description
de ces deux courbes seroit inutile ici. L'hyperbole
donc partant d'un sommet, et allant de la
gauche à la droite, si l'on veut, aura à parcourir
un espace infini pour joindre son asymptote; elle
sera alors,suivant Wallis, plus qu'infiniment éloignée
de son autre sommet transposé de la droite à
gauche ; ensorte que si une parabole et une hyperbole
s'étendoient à l'infini , la premiere pour
joindre son sommet , la seconde pour atteindre
son asymptote , lorsque la parabole seroit parvenue
à son sommer par un prolongement infini,
Phyperbole arrivée à l'extrémité de son asymptote
auroit encore à parcounir en revenant le même
espace infini , et de plus , la distance qui est entre
ces deux sommets , pour joindre le sommet
✦Vvall. Arith. infin . Schol. propos. 101. et 104.
Dij ima
2454 MERCURE DE FRANCE
opposé à celui d'où elle est partie. On peut
imaginer l'asymptote comme une ligne droite
tirée à côté d'une courbe , dont cette courbe ap
proche toujours , mais par une progression géometrique
semblable à celle dont nous avons par
lé cy- dessus , son progrès n'étant jamais que
d'une partie du précedent espace , comme si l'aproximation
étoit d'un pouce , de la moitié d'un
pouce, de la moitié de cette moitié, & c . De même
que Wallis a appellé certains espaces asymp
rotiques plus qu'infinis , je pourrois dire que Paris
est plus qu'infiniment éloigné de Chaillot
car si je passe par Pekin pour aller de Paris
Chaillot , j'aurai non- seulement à traverser l'espace
que j'ai supposé infini depuis Pekin jusqu'à
Paris , mais il faudra que j'ajoûte à cet espace
le chemin de Paris à Chaillot. Voilà ce que
Wallis a appellé des espaces plus qu'infinis , er
ce que Varignon ( 1 ) a réduit auc omplément fini
d'un espace infini .
M. Chesne dit que le passage du fini à l'infini
se fait par une addition d'unités ; mais il est évident
qu'une addition d'unités , qui peut toujours,
suivant la supposition , être augmentée , ne change
rien à la nature d'une grandeur , et les Géometrès
conviennent que par rapport au fini , un
grain de sable et un Globe qui auroit la distance
de Sirius pour rajon , sont de même nature. Les
Géométres Anglois ( 2 ) considerent le fiai comme
étant en mouvement , ou suivant leur terme
en fluxion pour devenir infini ; or ce qui est en
Auxion pour devenir infini , ne peut être suppo-
(1) Memoires de l'Académie des Sciences , anmée
1706. page 13 .
(2 ) Elem. de la Géométrie de l'infini , part. 1 .
§. 3.2. 197. P. 65.
NOVEMBRE . 173. 2405
sé infini. L'Auteur du Problême prétend expli
quer le passage du fini à l'infini , par l'exaltation
d'une nature inférieure à une nature superieure ,
comme de la ligne à la surface , &c . Mais les
points , les lignes et les surfaces sont des idées.
et des abstractions sans réalité. L'entendement
peut examiner les trois dimensions d'un corps ,
longueur , largeur et profondeur séparément et
d'une maniere abstraite , quoiqu'il soit démontré
que ces trois dimensions ne peuvent être séparées.
La divisibilité à l'infini est fondée sur ce
principe , que la plus petite portion de matiere
ne cesse point d'être matiere elle - même , que
la portion d'un corps la plus divisée , est
toujours un corps qui a de l'étendue et par conséquent
des parties divisibles. Si le corps pouvoit
se résoudre en points , lignes et surfaces ,
on rencontreroit bien- tôt les Atômes d'Epicure
et de Gassendi ; mais ces Atômes ou points indivisibles
, n'ayant point de parties , ne pour
roient avoir ni figure ni étendue, et leur assembla
ge ne pourroit former un corps. La portion de
matiere la plus divisée qu'on puisse imaginer ,
étant mise sur un plan , le touchera toujours par
une de ses parties et ne le touchera pas par celle
qui est au-dessus. Il est donc démontré qu'on
ne peut admettre les points indivisibles et inégaux
soutenus par le Pere Castel , dans sa Mathématique
universelle , ausquels il donne le
nom d'être absorbe dans le néant. Dailleurs l'inégalité
de ces points suppose nécessairement des
parties inégales, une figure et une étendue inéga
les ; c'est une raison de plus pour qu'ils ne puissent
cesser d'être divisibles. Le Pere Castel * ems
Mathém, Univers. p. 5oz.
Diij ploye
9406 MERCURE DE FRANCE
ו כ
ploye ce raisonnement pour une démonstration.
de ces atômes inégaux . Plus l'intersection est
oblique , plus le point d'intersection est grand.
Cela a- t'il besoin d'une démonstration plus expresse
Elle saute aux yeux. Dans un quarré
qui a sa diagonale , les lignes qui coupent un
Coté parallelement à l'autre côté , coupent la
diagonale en autant de points ni plus ni moins;
» or la diagonale est plus grande que le côté ,
donc ses points d'intersection sont plus grands,
ce qu'il falloit démontrer. Les Infinitaires
n'ont pas de peine à répondre que les endroits
où se fait l'intersection , ne sont pas des points
indivisibles , et que si la diagonale est coupée par
le même nombre de sections que le côté plus
petit qu'elle , c'est que les intervalles des sections
sont plus grands dans cette diagonale que dans
ce côté.
Pour revenir à la question dont nous nous
sommes un peu écartez , l'exaltation d'une nature
inférieure à une nature superieure comme
du point à la ligne , de la ligne à la surface
de la surface au solide , ne peut expliquer la
passage du fini à l'infini. On ne peut donner
aucune explication de ce passage , parce qu'il est
impossible et imaginaire. Il ne peut y avoir
d'infini , que l'infini métaphysique de Dieu et de
PEternité. Ces infinis sont très- concevables ;
l'idée de l'infini est naturelle et proportionnée à
Pentendement humain , qui conçoit une chose
sans bornes , aussi aisément qu'une chose bornée.
Nous pensons même à une chose , avant que de
faire réflexion à ses limites . L'infini en Dieu et
dans l'éternité n'est susceptible d'aucune augmentation
; il n'y a d'infini que ce qui l'est par
son essence ; mais le passage du fini à l'infini et
10
NOVEMBRE. 1733 2407
fe retour sont inconcevables à l'esprit humain
et il n'y a en Geometrie et en Physique qu'une
seule espece de substance finie et divisible ou extensible
à l'infini .
C'est par le même principe que peut être décidée
la question de l'infinité du monde , ques
tion qui à si fort embarassé les Philosophes des
differens siccles. La proprieté de la matiere d'être
finie er divisible ou extensible à l'infini , fait
que le Monde entier , sans être infini et étant fini
au contraire , n'a cependant aucunes limites
absolues , en ce qu'elles peuvent être reculées de
plus en plus ; le Monde entier étant comme cha
que portion de matiere , fini mais divisible ou
extensible à l'infini . Si l'on objecte que le Monde
ne peut être limité , parce qu'il est impossible
d'imaginer ce qui seroit plus loin , et que l'Univers
, quelque forme qu'il cut , se dissiperoit
s'il n'y avoit rien au -delà pour le contenir ; il est
aisé de répondre que l'imagination ne pouvant se
représenter que ce qui y est entré par les sens ,
il n'est pas étonnant que nous ne puissions pas
imaginer ce qui est au - delà du Monde ; que c'est
à la Physique à nous accompagner jusqu'à ses
limites, mais que si nous entreprenons de les franchir,
la Physique ou la science du monde matériel
ne peut s'étendre au- delà de ce monde . C'est alors
à la Métaphysique à nous enseigner que l'immensité
de Dieu remplit tout , et que comme il seroit
insensé de ne pas rapporter la création de l'Univers
à la toute - puissance deDieu , il ne le seroit pas
moins de prétendre s'en passer pour sa conservation,
enfin que de vastes et innombrables tourbillons
peuvent être contenus dans leurs bornes
par la Providence divine aussi facilement , que
les Mers dans de petits espaces du Globe que
mous habitons.
D iiij Quel2408
MERCURE DE
FRANCE.
Quelque chemin que l'infini
il ne nous a conduits à rien
d'incompréhensible , nous ait fait faire,
il me semble au
contraire que l'esprit se trouve
affranchi de tout ce que la
Géometrie lui présentoit
d'inconcevable et de
contradictoire. Il suffit
d'être ferme sur ce
principe , que ce
principe, que ce qui est capable
d'augmentaion à l'infini , ne peut être supposé
infini. Ces veritez
deviendront de plus en
plus sensibles par la seconde partie de cette Réponse
. En
attendant , je crois que les
Métaphysiciens
Géométres
s'inquiéteront peu de
suppléer
à un
dépouillement
imaginaire des
propriete
de la matiere.
La suite dans le second volume de
Décemb.prochain.
Fermer
Résumé : RÉPONSE de M. le Gendre de S. Aubin, au Problême qui a été proposé dans le Mercure du mois de Septembre dernier, aux Métaphysiciens Géométres, sur l'Essence de la Matiere.
M. le Gendre de S. Aubin répond à un problème publié dans le Mercure de septembre précédent, concernant l'essence de la matière. Il critique les sciences qui, par des suppositions sans bornes, s'éloignent de la vérité. Il distingue la matière de l'étendue, considérant l'étendue, l'impénétrabilité, la divisibilité à l'infini et l'unité du lieu comme des propriétés essentielles de la matière. Le problème proposé aux métaphysiciens et géomètres suggère que la matière n'a pas nécessairement d'étendue ni d'impénétrabilité et peut être simultanément à plusieurs endroits. L'auteur conteste ces idées, affirmant que la matière réduite à une simple possibilité est réduite au néant. Il examine également la possibilité d'un mouvement infini, citant des exemples naturels comme la lumière, mais conclut que la matière ne peut être à plusieurs endroits en même temps. L'auteur critique la géométrie transcendante, trouvant des contradictions dans les principes de l'infini. Il affirme que l'esprit humain ne peut comprendre que ce qu'il a saisi et que les vérités naturelles doivent être compréhensibles. Il promet de traiter plus en détail les contradictions du raisonnement et du calcul dans un prochain numéro. Le texte discute également des concepts d'infini et de fini en mathématiques et en physique. L'auteur rejette les idées d'espaces infinis ou de mouvements infinis comme des réalités solides, affirmant que ces concepts tombent d'eux-mêmes en observant que ce qui est capable d'augmentation à l'infini ne peut être supposé infini. Il illustre cette idée avec des exemples géométriques et mathématiques, comme les asymptotes des courbes hyperboliques ou les divisions successives d'une somme. L'auteur rejette également l'idée d'un 'plus qu'infini' et explique que les géomètres anglais considèrent le fini comme étant en mouvement ou en fluxion pour devenir infini, ce qui est contradictoire. Il soutient que la divisibilité à l'infini est fondée sur le principe que la matière, même divisée, conserve son étendue et ses parties divisibles. Le texte aborde la question de l'infini métaphysique, affirmant qu'il n'y a d'infini que celui de Dieu et de l'éternité. Il conclut que le monde, bien que fini, est extensible à l'infini, et que les limites de l'univers sont reculables. L'auteur invite à se fier à la métaphysique pour comprendre ce qui dépasse le monde matériel.
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11
p. 2659-2662
« On apprend d'Allemagne qu'on a imprimé à Altena un Traité sur les Femmes [...] »
Début :
On apprend d'Allemagne qu'on a imprimé à Altena un Traité sur les Femmes [...]
Mots clefs :
Maison de Goyon-Matignon, Académie royale des inscriptions et belles-lettres, Traité, Parlement de Bretagne, Femmes savantes, Rames, Géométrie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « On apprend d'Allemagne qu'on a imprimé à Altena un Traité sur les Femmes [...] »
On apprend d'Allemagne qu'on a imprimé
à Altena un Traité sur les Femmes
Sçavantes de Danemarck , intitulé : Gyna-
I. Vol. Cruar
2650 MERCURE DE FRANCE
ceum Dania Litteratum.Par M.AlbertThi
ra , Ministre ; qui a déja donnée l'idée d
l'Histoire Littéraire de Dannemark , et qui
ajoutera pour Supplément divers Ou
vrages.
"On mande de Londres , que le sieur le
Camus doit faire à Wolwich , en présen
ce des Commissaires de l'Amirauté , l'Es
sai de deux Rames , par le moyen des
quelles il prétend qu'un Vaisseau de figne
, même du premier rang , pourra re
virer de bord, et faire trois quarts de lieuë
par heure , dans un calme.
de
M. le Gendre de S. Aubin , Auteur du
Traité de l'Opinion ,en lisant ce qui a été
relevé dans le Mercure du mois dernier ',
au sujet de la Maison de Goyon - Mati
gnon , a remarqué deux Equivoques dans
la Critique qui a été faite du passage
ce Traité , où il est dit , tom. 4. part. 2.
page 16. que Mrs de Goyon , Aînez de la
Maison de Matignon , sont encore aujourd'hui
dans le Parlement de Bretagne.
Il ne s'agit pas en cet endroit d'une Afnesse
entre cousins germains ou issus de
germains, et personne n'ignore que l'Aîné
et le Chef de la Maison de Goyon - Masignon
, est aujourd'hui M. le Prince
1. Vo!. M
DECEMBRE . 1733. 2665
Monaco. Ce passage ne signifie pas non
plus qu'il y ait aucun homme de robbe en
Bretagne du nom de Goyon - Matignon . La
question se réduit à sçavoir , si la Maison
de Goyon , d'une ancienne noblesse, qui
est dans le Parlement de Bretagne , a la
même tige que la Maison de Goyon- Matignon
, originaire de la même Province;
et en ce cas , si la branche de Goyon , qui
est restée en Bretagne , est l'Aînée de la
Maison de Goyon - Matignon , établie
depuis long- temps en Normandie. L'Auteur
du Traité de l'Opinion s'en rappor
te, sur ces questions de fait , aux Parties
intéressées.
L'Académie Royale des Inscriptions
ét Belles Lettres , s'assembla le Vendredy
II de ce mois , pour remplir les deux
places d'Honoraires, vacantes par la mort
de M. l'Evêque de Blois , et de M. l'Evêque
de Langres : Elle nomma pour ces
deux Places M. l'Abbé de Rottelin , et
M. le Comte d'Argenson. Le choix de
l'Académie ayant été agréé par le Roy ,
ces Messieurs prirent sceance le Vendre
dy , 18 Decembre .
·
Le Sieur Clausier , demeurant ruë Ga
lande , chez la veuve Frouart , Chande-
I. Vola F liere,
2662 MERCURE DE FRANCE
licre , donne des leçons pour la Géométrie
ancienne et moderne , pour les principales
Langues de l'Europe , et pour enseigner
l'Allemand avec plus de facilité et plus
de perfection. Outre les Méthodes ordinaires,
il se sert des Racines de cette Lan,
gue et d'un Recueil de Germanismes , par
ordre Alphabétique , qu'il a composé.
L'Académie Royale de l'Histoire , à
Lisbonne, élut , sur la fin du mois dernier
pour remplir les deux Places qui y vas
quoient , D Joseph de Cavalho et Mello,
et D. Manuel Moreira de Souza ; et elle
a nommé Académiciens surnumeraires
Don François de Pina de Mello , et le
Docteur Don Joachin Pereira da Silva
Leal,
à Altena un Traité sur les Femmes
Sçavantes de Danemarck , intitulé : Gyna-
I. Vol. Cruar
2650 MERCURE DE FRANCE
ceum Dania Litteratum.Par M.AlbertThi
ra , Ministre ; qui a déja donnée l'idée d
l'Histoire Littéraire de Dannemark , et qui
ajoutera pour Supplément divers Ou
vrages.
"On mande de Londres , que le sieur le
Camus doit faire à Wolwich , en présen
ce des Commissaires de l'Amirauté , l'Es
sai de deux Rames , par le moyen des
quelles il prétend qu'un Vaisseau de figne
, même du premier rang , pourra re
virer de bord, et faire trois quarts de lieuë
par heure , dans un calme.
de
M. le Gendre de S. Aubin , Auteur du
Traité de l'Opinion ,en lisant ce qui a été
relevé dans le Mercure du mois dernier ',
au sujet de la Maison de Goyon - Mati
gnon , a remarqué deux Equivoques dans
la Critique qui a été faite du passage
ce Traité , où il est dit , tom. 4. part. 2.
page 16. que Mrs de Goyon , Aînez de la
Maison de Matignon , sont encore aujourd'hui
dans le Parlement de Bretagne.
Il ne s'agit pas en cet endroit d'une Afnesse
entre cousins germains ou issus de
germains, et personne n'ignore que l'Aîné
et le Chef de la Maison de Goyon - Masignon
, est aujourd'hui M. le Prince
1. Vo!. M
DECEMBRE . 1733. 2665
Monaco. Ce passage ne signifie pas non
plus qu'il y ait aucun homme de robbe en
Bretagne du nom de Goyon - Matignon . La
question se réduit à sçavoir , si la Maison
de Goyon , d'une ancienne noblesse, qui
est dans le Parlement de Bretagne , a la
même tige que la Maison de Goyon- Matignon
, originaire de la même Province;
et en ce cas , si la branche de Goyon , qui
est restée en Bretagne , est l'Aînée de la
Maison de Goyon - Matignon , établie
depuis long- temps en Normandie. L'Auteur
du Traité de l'Opinion s'en rappor
te, sur ces questions de fait , aux Parties
intéressées.
L'Académie Royale des Inscriptions
ét Belles Lettres , s'assembla le Vendredy
II de ce mois , pour remplir les deux
places d'Honoraires, vacantes par la mort
de M. l'Evêque de Blois , et de M. l'Evêque
de Langres : Elle nomma pour ces
deux Places M. l'Abbé de Rottelin , et
M. le Comte d'Argenson. Le choix de
l'Académie ayant été agréé par le Roy ,
ces Messieurs prirent sceance le Vendre
dy , 18 Decembre .
·
Le Sieur Clausier , demeurant ruë Ga
lande , chez la veuve Frouart , Chande-
I. Vola F liere,
2662 MERCURE DE FRANCE
licre , donne des leçons pour la Géométrie
ancienne et moderne , pour les principales
Langues de l'Europe , et pour enseigner
l'Allemand avec plus de facilité et plus
de perfection. Outre les Méthodes ordinaires,
il se sert des Racines de cette Lan,
gue et d'un Recueil de Germanismes , par
ordre Alphabétique , qu'il a composé.
L'Académie Royale de l'Histoire , à
Lisbonne, élut , sur la fin du mois dernier
pour remplir les deux Places qui y vas
quoient , D Joseph de Cavalho et Mello,
et D. Manuel Moreira de Souza ; et elle
a nommé Académiciens surnumeraires
Don François de Pina de Mello , et le
Docteur Don Joachin Pereira da Silva
Leal,
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Résumé : « On apprend d'Allemagne qu'on a imprimé à Altena un Traité sur les Femmes [...] »
En décembre 1733, le Mercure de France rapporte divers événements et publications. En Allemagne, M. Albert Thira, ministre, a imprimé à Altena un traité sur les femmes savantes du Danemark, intitulé 'Gynaecium Dania Litteratum'. À Londres, le sieur Camus doit tester deux rames innovantes à Woolwich, permettant à un vaisseau de premier rang de virer de bord et de naviguer à trois quarts de lieue par heure en calme, en présence des commissaires de l'Amirauté. En France, M. le Gendre de S. Aubin, auteur du Traité de l'Opinion, a clarifié deux équivoques concernant la Maison de Goyon-Matignon, en précisant que la question porte sur la filiation et l'ancienneté des branches de cette maison. L'Académie Royale des Inscriptions et Belles Lettres a nommé M. l'Abbé de Rottelin et M. le Comte d'Argenson pour remplacer les évêques de Blois et de Langres, décédés. Le sieur Clausier propose des leçons de géométrie, de langues européennes et d'allemand à Paris. Enfin, l'Académie Royale de l'Histoire à Lisbonne a élu D. Joseph de Cavalho et Mello, et D. Manuel Moreira de Souza, et nommé Don François de Pina de Mello et le Docteur Don Joachin Pereira da Silva comme académiciens surnuméraires.
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12
p. 15-20
DEFFENSE de la Géométrie de l'Infini, contre les Objections de M. le Gendre de Saint Aubin.
Début :
Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on attaque la Géométrie ; et l'on ne doit [...]
Mots clefs :
Géométrie, Point, Géomètres, Infini, Euclide, Le Gendre, Lignes, Attaque, Science, Vérités, Défense
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DEFFENSE de la Géométrie de l'Infini, contre les Objections de M. le Gendre de Saint Aubin.
DEFFENSE de la Géométrie de l'Infini ,
contre les Objections de M. le Gendre de
Saint Aubin.
C
E n'est pas d'aujourd'hui qu'on attaque
la Géométrie ; et l'on ne doit
pas croire que ce soit l'Infini qu'elle a
tout-à-fait embrassé dans ces derniers
siécles , qui l'ait rendue l'objet de ces attaques.
Les définitions mêmes d'Euclide
ont trouvé des contradictions dans les
siécles les plus reculez. Les Sceptiques ,
B iiij pour
16 MERCURE DE FRANCE
pour le moins , se sont joüez de l'évidence
, comme ils se jouoient de la clarté
même du jour.
On peut dire cependant que le gros du
public , sçavant , et même ignorant , a
toujours regardé la Géométrie comme
une science respectable sur la certitude ,
et sur la verités et loin qu'en dernier lieu
ce Public se soit défié de l'Infini qu'on
introduisoit dans cette science ; l'admiration
s'est jointe au respect , malgré la prorestation
des Geometres mêmes , peu
que
instruits , ont cru devoir faire contre
cette prétendue innovation.
Il faut l'avouer aussi : La Géométrie de
l'Infini , par là même qu'elle manie l'Infini
, est pleine , comme ledit fort bien
M. le Gendre , de conclusions vastes , de
veritez hardies , et paradoxes , de points
de vûë extrémement difficiles et escarpez
, qui paroissent même sortir du Géométrique
, et embrasser les sciences les
plus éloignées ; mais ce sçavant Auteur
a tort de vouloir retrouver icy les contradictions
qu'il a fort bien relevées dans
la plupart des Opinions Philosophiques
dont il a fait la matiere de l'Ouvrage
, qui porte ce titre De l'Opinion. Et
quand même il trouveroit quelques conclusions
hazardées , et plus Philosophiques
JANVIER : 1734. 17
ques que Mathématiques dans les Ouvrages
des Géometres modernes , comme
on en a trouvé , sans doute , dans les anciens
, il ne seroit jamais assez autorisé
par là à proscrire toute la Géometrie , ni
même toute la Géométrie moderne , comme
il le fait trop universellement dans
sa réponse du Mercure de Novembre.
Je dis toute la Géometrie en général s
car il est vrai que M.le Gendre sappe tout
en sappant cette premiere notion d'Euclide
, que le point est ce qui n'a point de
parties ; la ligne , ce qui n'a point de largeur
, &c. Notion qui ne semble rien ,
mais qui est pourtant
le fondement
unique
sur lequel toute la précision
, nonseulement
de la Géométrie
transcendante
,
mais de toute sorte de Géométrie
, est absolument
établie.
-
Car rien n'est plus lié , plus systématique
que la Géométrie , et la Transcendante
s'enchaine tres immédiatement
avec la plus simple, et en particulier avec
ces premieres Notions ; ce qui est si vrai
qu'on a remarqué que les plus hautes
spéculations de la nouvelle Géométrie
étoient communément établies sur les
propositions les plus simples des Elemens
d'Euclide ; témoin , par exemple , cette
admirable méthode de la transformation
Bv des
18 MERCURE DE FRANCE
des courbes qui dérive immédiatement
de l'égalité des Rectangles , qui ont leurs
côtez réciproquement proportionnels , et
bien d'autres pareilles dont on voit les
exemples chez les Géometres Anglois , et
en particulier , chez le célébre Neuton.
Une preuve encore de ce que je dis,
c'est qu'il est tres- singulier que tous ceux
qui , de même que M. le Gendre , ont attaqué
la Géométrie de l'Infini , ont tous
attaqué les Notions d'Euclide , sur le
point, la ligne, la surface ; comme si l'on
ne pouvoit secoüer le Faîte de l'Edifice
sans en ébranler les fondemens ; telle est
la correspondance et la liaison systématique
de cette admirable science.
Deux sortes de Sçavans parlent de Surfaces
, de Lignes , de Points ; les Philosophes
et les Géométres. Les Premiers
disputent s'il y a des Points et des Lignes.
proprement dites dans la nature ; et leur
dispute ayant mille et mille fois recommencé
, n'a pas encore fini une fois ;
les Géometres n'en disent qu'un mot , en
commençant ; et ce mot est celui d'Euclide
; le Point n'a aucune partie ; la Ligne
n'a point de largeur; la Surface,point
de profondeur ; cela une fois dit, ils vont
en avant , parce qu'ils sont tous d'accord
.
Et
JANVIER. 1734. 19
Et où vont - ils ? A un systême de véritez
merveilleuses qui se réalisent dans
la pratique de tous les Arts ; à mesurer la
Terre et les Cieux ; à prédire , à point
nommé , les Eclipses , à débrouiller, la
Chronologie et l'Histoire, à regler le Calandrier
, à naviger aux extrémitez des
Mers , à arpenter , à toiser , à fortifier
des Villes , à faire des Horloges , des Lunettes
, des Microscopes , des Machines
de toutes les sortes.
Et ce n'est pas là encore llee plus haut
point où ils arrivent : La Géométrie de
Î'Infini , au jugement de l'esprit , est encore
plus sublime et plus merveilleuse
que tout cela; mais pendant que les Géometres
s'élevent ainsi , les Philosophes
sont encore à disputer s'il y a des Points,
des Lignes et des Surfaces , et à chicaner
Euclide , la Géométrie et les Géomêtres.
Je demande de quel côté on oroit que se
trouve la verité , la réalité , ou la simple
abstraction de l'entendement , pour ne pas
dire l'illusion de l'esprit et la pure chimere.
Et voilà tout ce que j'avois à répondre
au Sçavant Aggresseur de la Géométrie
et des Géometres , auquel on peut
assurer que la Géométrie transcendante
seule offre autant de véritez incontestables
à recueillir pour l'honneur du genre humain
B vj
20 MERCURE DE FRANCE
main qu'il a pû recueillir d'opinions erronées
, pour constater les égaremens de
la Philosophie : ce seroit un second Ouvrage
digne de M. Saint-Aubin.
contre les Objections de M. le Gendre de
Saint Aubin.
C
E n'est pas d'aujourd'hui qu'on attaque
la Géométrie ; et l'on ne doit
pas croire que ce soit l'Infini qu'elle a
tout-à-fait embrassé dans ces derniers
siécles , qui l'ait rendue l'objet de ces attaques.
Les définitions mêmes d'Euclide
ont trouvé des contradictions dans les
siécles les plus reculez. Les Sceptiques ,
B iiij pour
16 MERCURE DE FRANCE
pour le moins , se sont joüez de l'évidence
, comme ils se jouoient de la clarté
même du jour.
On peut dire cependant que le gros du
public , sçavant , et même ignorant , a
toujours regardé la Géométrie comme
une science respectable sur la certitude ,
et sur la verités et loin qu'en dernier lieu
ce Public se soit défié de l'Infini qu'on
introduisoit dans cette science ; l'admiration
s'est jointe au respect , malgré la prorestation
des Geometres mêmes , peu
que
instruits , ont cru devoir faire contre
cette prétendue innovation.
Il faut l'avouer aussi : La Géométrie de
l'Infini , par là même qu'elle manie l'Infini
, est pleine , comme ledit fort bien
M. le Gendre , de conclusions vastes , de
veritez hardies , et paradoxes , de points
de vûë extrémement difficiles et escarpez
, qui paroissent même sortir du Géométrique
, et embrasser les sciences les
plus éloignées ; mais ce sçavant Auteur
a tort de vouloir retrouver icy les contradictions
qu'il a fort bien relevées dans
la plupart des Opinions Philosophiques
dont il a fait la matiere de l'Ouvrage
, qui porte ce titre De l'Opinion. Et
quand même il trouveroit quelques conclusions
hazardées , et plus Philosophiques
JANVIER : 1734. 17
ques que Mathématiques dans les Ouvrages
des Géometres modernes , comme
on en a trouvé , sans doute , dans les anciens
, il ne seroit jamais assez autorisé
par là à proscrire toute la Géometrie , ni
même toute la Géométrie moderne , comme
il le fait trop universellement dans
sa réponse du Mercure de Novembre.
Je dis toute la Géometrie en général s
car il est vrai que M.le Gendre sappe tout
en sappant cette premiere notion d'Euclide
, que le point est ce qui n'a point de
parties ; la ligne , ce qui n'a point de largeur
, &c. Notion qui ne semble rien ,
mais qui est pourtant
le fondement
unique
sur lequel toute la précision
, nonseulement
de la Géométrie
transcendante
,
mais de toute sorte de Géométrie
, est absolument
établie.
-
Car rien n'est plus lié , plus systématique
que la Géométrie , et la Transcendante
s'enchaine tres immédiatement
avec la plus simple, et en particulier avec
ces premieres Notions ; ce qui est si vrai
qu'on a remarqué que les plus hautes
spéculations de la nouvelle Géométrie
étoient communément établies sur les
propositions les plus simples des Elemens
d'Euclide ; témoin , par exemple , cette
admirable méthode de la transformation
Bv des
18 MERCURE DE FRANCE
des courbes qui dérive immédiatement
de l'égalité des Rectangles , qui ont leurs
côtez réciproquement proportionnels , et
bien d'autres pareilles dont on voit les
exemples chez les Géometres Anglois , et
en particulier , chez le célébre Neuton.
Une preuve encore de ce que je dis,
c'est qu'il est tres- singulier que tous ceux
qui , de même que M. le Gendre , ont attaqué
la Géométrie de l'Infini , ont tous
attaqué les Notions d'Euclide , sur le
point, la ligne, la surface ; comme si l'on
ne pouvoit secoüer le Faîte de l'Edifice
sans en ébranler les fondemens ; telle est
la correspondance et la liaison systématique
de cette admirable science.
Deux sortes de Sçavans parlent de Surfaces
, de Lignes , de Points ; les Philosophes
et les Géométres. Les Premiers
disputent s'il y a des Points et des Lignes.
proprement dites dans la nature ; et leur
dispute ayant mille et mille fois recommencé
, n'a pas encore fini une fois ;
les Géometres n'en disent qu'un mot , en
commençant ; et ce mot est celui d'Euclide
; le Point n'a aucune partie ; la Ligne
n'a point de largeur; la Surface,point
de profondeur ; cela une fois dit, ils vont
en avant , parce qu'ils sont tous d'accord
.
Et
JANVIER. 1734. 19
Et où vont - ils ? A un systême de véritez
merveilleuses qui se réalisent dans
la pratique de tous les Arts ; à mesurer la
Terre et les Cieux ; à prédire , à point
nommé , les Eclipses , à débrouiller, la
Chronologie et l'Histoire, à regler le Calandrier
, à naviger aux extrémitez des
Mers , à arpenter , à toiser , à fortifier
des Villes , à faire des Horloges , des Lunettes
, des Microscopes , des Machines
de toutes les sortes.
Et ce n'est pas là encore llee plus haut
point où ils arrivent : La Géométrie de
Î'Infini , au jugement de l'esprit , est encore
plus sublime et plus merveilleuse
que tout cela; mais pendant que les Géometres
s'élevent ainsi , les Philosophes
sont encore à disputer s'il y a des Points,
des Lignes et des Surfaces , et à chicaner
Euclide , la Géométrie et les Géomêtres.
Je demande de quel côté on oroit que se
trouve la verité , la réalité , ou la simple
abstraction de l'entendement , pour ne pas
dire l'illusion de l'esprit et la pure chimere.
Et voilà tout ce que j'avois à répondre
au Sçavant Aggresseur de la Géométrie
et des Géometres , auquel on peut
assurer que la Géométrie transcendante
seule offre autant de véritez incontestables
à recueillir pour l'honneur du genre humain
B vj
20 MERCURE DE FRANCE
main qu'il a pû recueillir d'opinions erronées
, pour constater les égaremens de
la Philosophie : ce seroit un second Ouvrage
digne de M. Saint-Aubin.
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Résumé : DEFFENSE de la Géométrie de l'Infini, contre les Objections de M. le Gendre de Saint Aubin.
Le texte 'Défense de la Géométrie de l'Infini' répond aux critiques de M. le Gendre de Saint-Aubin concernant la géométrie, notamment celle de l'infini. L'auteur souligne que les attaques contre la géométrie ne sont pas nouvelles et que même les définitions d'Euclide ont été contestées par le passé. Malgré ces contestations, la géométrie a toujours été respectée pour sa certitude et sa vérité. L'auteur reconnaît que la géométrie de l'infini comporte des conclusions vastes et des paradoxes, mais critique Saint-Aubin pour vouloir y trouver des contradictions similaires à celles des opinions philosophiques. Il défend les notions fondamentales d'Euclide, telles que le point sans parties et la ligne sans largeur, qui sont essentielles à toute géométrie, y compris la géométrie transcendante. L'auteur illustre cette liaison systématique en mentionnant des méthodes géométriques avancées basées sur des propositions simples d'Euclide. Le texte oppose les géomètres, qui utilisent ces notions pour des applications pratiques et scientifiques, aux philosophes, qui disputent encore de l'existence des points, lignes et surfaces. L'auteur conclut en affirmant que la géométrie transcendante offre des vérités incontestables et honore le genre humain, contrairement aux erreurs philosophiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 51-58
RÉPONSE aux démonstrations du plus qu'infini, et de ce principe : Que toute grandeur qui peut être augmentée à l'infini, peut être supposée augmentée à l'infini.
Début :
Mr de S. Aubin avoüe que s'il y avoit différens ordres d'infinis, le plus [...]
Mots clefs :
Infini, Grandeur, Calcul, Pied, Géométrie, Raisonnement, Étendue, Plus qu'infini, Divisible, Absurde
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE aux démonstrations du plus qu'infini, et de ce principe : Que toute grandeur qui peut être augmentée à l'infini, peut être supposée augmentée à l'infini.
REPO NS E aux démonstrations du plus
qu'infini , et de ce principe : Que toute
grandeur qui peut être augmentée à l'infini,
peut être supposée augmentée à l'infini,
R de S. Aubin avoue que s'il y avoit
M différens ordres d'infinis , le plus
qu'infini exifteroit , mais il a prouvé que
les différens ordres d'infinis ne sont pas
moins contradictoires que le plus qu'infini
A l'égard de la seconde démonstration ,
voilà comment le Géométre anonyme
tourne l'objection de M. de S. Aubin :
C'est comme si l'on disoit qu'une grandeur qui
peut être augmentée à l'infini , ne peut être
augmentée à l'infini , par cette raison même
qu'elle peut être augmentée à l'infini . Mais il
ne s'agit que d'expliquer les termes , pour
rendre à l'objection toute sa force.
Une grandeur supposée toujours augmentable
ou divisible de plus en plus , ne
peut être supposée augmentés ou divisée
à l'infini , en sorte qu'elle ne soit plus
augmentable ou divisible.
* On
52
MERCURE
DE FRANCE
On ne peut pas supposer une grandeur
dans ces deux états différens , puisqu'on
suppose qu'il est impossible , qu'elle sorte
de son premier état , en la supposant toujours
divisible de plus en plus : ainsi il est
contradictoire de regarder l'espace asymprotique
, comme extensible à l'infini et terminé
, ou une progression géométrique
comme inépuisable et épuisée.
Le Géometre anonyme donne pour une
démonstration directe du principe , ce
raisonnement : qu'une grandeur qui peut
augmenter d'un pié d'étendue ne le peut , que
purce qu'il y a dans la nature des choses ,
un pie d'étenduë qui éxiste , que si elle
peut augmenter de deux piés , il y a donc
dans la nature une étendue de deux piés ;
&c. et qu'ainsi une grandeur pouvant
augmenter à l'infini , suppose nécessairement
unegrandeur à l'infini , c'est- à - dire , infinie,
actuellement subsistante.
M. de S. Aubin répond que rien ne fait
mieux sentir la contradiction du pricipe ,
qui régne dans la Géométrie transcendante
, que cette prétendüe démonstration .
Il est vrai qu'une grandeur n'est susceptible
de l'augmentation d'un pié , que parce
que l'étendue d'un pié subsiste dans la
natures mais prétendre que parce qu'une
grandeur est toujours augmentable ou divisible
de plus en plus , cette grandeur
est susceptible d'une augmentation actuellement
JANVIER 1734. 53
lement infinie , même de différens ordres
d'infinis , ou du plus qu'infini , et d'en
inférer que tout cela est nécessairement
subsistant dans la nature , d'une maniere
réelle et actuelle , comme l'étendue d'un
pié , de deux piés & c. c'est donner pour
démonstrations des suppositions contradictoires;
la contradiction la plus formelle
résultant de ce qu'une chose soit augmen
table ou divisible, et ne soit pas augmentable
ou divisible.
D'ailleurs on conçoit aisément , com
ment une grandeur augmentable d'un
pié ,, passe de cet état à celui d'être augmentée
d'un pié , mais le passage du fini à
l'infini , et le retour sont inconcevables ;
et une grandeur ne peut jamais être augmentée
d'un pié , si l'on y met la condition
d'un progression géométrique , suivant
laquelle l'augmentation soit de la
moitié d'un pié , d'un quart , d'un huitiéme
, & c. Les deux démonstrations du plus.
qu'infini et du principe , ne servent done
qu'à faire connoître que ces propositions
sont insoutenables.
Dans la seconde partie de la réponse au
Problême sur l'Essence de la Matiere
Mercur. de Décembr . dernier 2. vol . pag.
2850. lign . 4. Au lieu de ces mots , nombres
entiers & fractions du dessus et au dessous
de l'unité , lisez , nombres positifs et
négatifs au dessus et au dessous de zéro .
III.
$4 MERCURE DE FRANCE
III. Partie de la Réponse au Problême.
Lplus
A Réponse aux Démonstrations du
plus qu'infini , et du principe , s'est
présentée ici fort à propos , pour rappeller
les idées , dont l'évidence a été développée
dans les deux premieres Parties
de cette Dissertation .
Celle cy est la plus importante , non
que le Calcul puisse commander au raisonnement
: tous deux marchent de pair,
et doivent toujours concourir dans une
parfaite intelligence ; mais le Calcul est
plus d'usage que le raisonnement , dans
les trois especes de Géométrie , simple ,
composée et transcendante.
Les Observations suivantes , qui rou
lent sur le Calcul , ne sont proprement
convenables qu'à ceux qui sont versez
dans l'Algebre ; car je ne puis suppléer
ici aux principes du Calcul Algébrique
qui demandent des explications étenduës
et même quelque usage,pour être entendu .
Cependant ceux qui n'ont aucune teinture
d'Algebre, pourront entendre , sinon
le Calcul même , au moins les raisons sur
lesquelles je me fonde , et quel est l'usage
et l'esprit en géneral de la Géometrie de
l'infini, y
Soit le mouvement désigné par m ,
et le repos désigné par r . L'Auteur du
Problême prétend démontrer par le Cal-.
cul
JANVIER. 1734 55
eul suivant , qu'un mouvement infini est
égal à un parfait repos.
m plus t diminüe , plus m augmente
, sans que e varie ; de sorte que t
étant , alors moet em 。=r
- Ce Calcul se détruit premierement par
les conséquences qui en résultent,ainsi que
je l'ai démontré . Or la verité est une, et ce
qui est faux par le raisonnement , ne peut
être vrai le Calcul. Mais il y a plus 3
par
ce Calcul ne se détruit pas moins par
les principes du Calcul même.
Ce qui a causé l'erreur qui s'y trouve,
c'est que l'Auteur du Problême n'a pas
remonté aux principes , suivant l'exemple
de la plupart des Géométres plus attentifs
à calculer qu'à chercher les raisons
pour lesquelles il faut calculer ainsi , plus
occupez des regles du calcul que de la
source de ces regles . C'est neanmoins la
principale utilité de la Géometrie, de considerer
autant pourquoi chaque opération
se fait , que de quelle maniere elle doit sa
faire. C'est encore plus dans les causes des
préceptes , que dans les préceptes mêmes
de la Géométrie et de l'Algébre , que l'èsprit
peut trouver le plus grand avantage
qui en résulte, et acquerir cette précision
et cette étendue , qui sont les fruits les
plus précieux de ces deux Sciences . Je
passe à l'examen du Calcul en question .
Il est clair que par e l'Auteur entend
se
uno
56 MERCURE DE FRANCE
une quantité de mouvement constante et
finie ; par tune grandeur numérique variable
et décroissante à l'infini , et par r
le repos ou le mouvement nul : d'où il
suit que mest une quantité de
mouvement , finie lorsque t est un nombre
fini , et infinie , lorsque to , et
alors on a mte , ou moe , mettant
au lieu de t sa valeur o . Mais on n'a
pas mor , puisque r est le repos.ou
le mouvement nul , et que moe
quantité de mouvement constante et finie.
Il est vrai que c'est un principe reçû en
Géométrie , que toute grandeur multipliée
par o , donne un produit nul , et
qu'ainsi on doit avoir mxoo, ou
; mais cela prouve simplement que si
l'on a moe quantité constante , la
supposition est absurde et par conséquent
mabsurde, et parce que , suivant les prin-,
cipes des Géometres Infinitaires , m infinie
( , t étant o ) est une grandeur
qui multipliée par to , donne e grandeur
constante , il s'ensuit que m
est une grandeur absurde ; mais il ne s'ensuit
pas que mor mouvement nul; en
effet il seroit facile de démontrer géometriquement
que par la loi même qui donne
m , c'est- à- dire , une quantité finie
e , divisée par une grandeur t décroissante
à l'infini , il est absurde que t soit
L'infini
JANVIER 1734. 57
L'infini en grandeur est absurde , mais
par la raison qu'on peut concevoir qu'u
ne chose est absurde , on peut aussi l'exprimer
, et c'est ce qui faitou ∞ . De
plus on peut aussi se servir de l'expression
de l'absurdité dans la recherche du vrai ;
suivant la méthode des plus grands géometres
. Mais il y faut apporter beaucoup de
précaution, et il y a souvent lieu de craindre
que l'absurdité supposée dans le Calcul
ne passe dans le raisonnement, et ne
fasse prendre de fausses idées , ce qui peut
arriver sur tout , quand on donne trop
l'essort à son imagination .
C'estune magnifique invention d'avoir
par leCalcul differentiel les cxpressionsdes
grandeurs nulles, telles que, quoique nulles
, elles conservent leurs rapports primitifs,
en sorte que par là les Géometres Infinitaires
ont assujetti ces nullitez aux Calculs
, et qu'il operent aussi aisément sur les
grandeurs nulles , que sur les grandeurs
finies ; ce qui leur donne des voies beaucoup
plus abregées , et sert à découvrir
tous les Problêmes , où deux ou plusieurs
points se réunissent ; à trouver les tangentes,
les grandeurs négatives, les points d'in
flexion et de rebroussement, les caustiques
tant réflexion
par que par réfraction , et les
autres proprietez des courbes et de toutes
sortes de figures. Mais tous ceux qui ont la
véritable clef de la Géométrie , ne pren.
D nent
58 MERCURE DE FRANCE
nent ces nullitez que pour ce qu'elles sont ,
et il s'en faut bien qu'ils ne les regardent
comme réelles.
Il étoit important de justifier la Géométrie
des désordres dans le raisonnement
,
qui lui étoient Imputés.
De tout cecy il résulte qu'un corps ne
peut être à la fois à Paris et à Constantinople
, et que cette conséquence ne répugne
pas moins à la Géométrie qu'au raisonnement
. Je finirai par cette observation
, que le calcul , au lieu d'être l'instrument
, est quelquefois rendu le voile des
Sciences .
qu'infini , et de ce principe : Que toute
grandeur qui peut être augmentée à l'infini,
peut être supposée augmentée à l'infini,
R de S. Aubin avoue que s'il y avoit
M différens ordres d'infinis , le plus
qu'infini exifteroit , mais il a prouvé que
les différens ordres d'infinis ne sont pas
moins contradictoires que le plus qu'infini
A l'égard de la seconde démonstration ,
voilà comment le Géométre anonyme
tourne l'objection de M. de S. Aubin :
C'est comme si l'on disoit qu'une grandeur qui
peut être augmentée à l'infini , ne peut être
augmentée à l'infini , par cette raison même
qu'elle peut être augmentée à l'infini . Mais il
ne s'agit que d'expliquer les termes , pour
rendre à l'objection toute sa force.
Une grandeur supposée toujours augmentable
ou divisible de plus en plus , ne
peut être supposée augmentés ou divisée
à l'infini , en sorte qu'elle ne soit plus
augmentable ou divisible.
* On
52
MERCURE
DE FRANCE
On ne peut pas supposer une grandeur
dans ces deux états différens , puisqu'on
suppose qu'il est impossible , qu'elle sorte
de son premier état , en la supposant toujours
divisible de plus en plus : ainsi il est
contradictoire de regarder l'espace asymprotique
, comme extensible à l'infini et terminé
, ou une progression géométrique
comme inépuisable et épuisée.
Le Géometre anonyme donne pour une
démonstration directe du principe , ce
raisonnement : qu'une grandeur qui peut
augmenter d'un pié d'étendue ne le peut , que
purce qu'il y a dans la nature des choses ,
un pie d'étenduë qui éxiste , que si elle
peut augmenter de deux piés , il y a donc
dans la nature une étendue de deux piés ;
&c. et qu'ainsi une grandeur pouvant
augmenter à l'infini , suppose nécessairement
unegrandeur à l'infini , c'est- à - dire , infinie,
actuellement subsistante.
M. de S. Aubin répond que rien ne fait
mieux sentir la contradiction du pricipe ,
qui régne dans la Géométrie transcendante
, que cette prétendüe démonstration .
Il est vrai qu'une grandeur n'est susceptible
de l'augmentation d'un pié , que parce
que l'étendue d'un pié subsiste dans la
natures mais prétendre que parce qu'une
grandeur est toujours augmentable ou divisible
de plus en plus , cette grandeur
est susceptible d'une augmentation actuellement
JANVIER 1734. 53
lement infinie , même de différens ordres
d'infinis , ou du plus qu'infini , et d'en
inférer que tout cela est nécessairement
subsistant dans la nature , d'une maniere
réelle et actuelle , comme l'étendue d'un
pié , de deux piés & c. c'est donner pour
démonstrations des suppositions contradictoires;
la contradiction la plus formelle
résultant de ce qu'une chose soit augmen
table ou divisible, et ne soit pas augmentable
ou divisible.
D'ailleurs on conçoit aisément , com
ment une grandeur augmentable d'un
pié ,, passe de cet état à celui d'être augmentée
d'un pié , mais le passage du fini à
l'infini , et le retour sont inconcevables ;
et une grandeur ne peut jamais être augmentée
d'un pié , si l'on y met la condition
d'un progression géométrique , suivant
laquelle l'augmentation soit de la
moitié d'un pié , d'un quart , d'un huitiéme
, & c. Les deux démonstrations du plus.
qu'infini et du principe , ne servent done
qu'à faire connoître que ces propositions
sont insoutenables.
Dans la seconde partie de la réponse au
Problême sur l'Essence de la Matiere
Mercur. de Décembr . dernier 2. vol . pag.
2850. lign . 4. Au lieu de ces mots , nombres
entiers & fractions du dessus et au dessous
de l'unité , lisez , nombres positifs et
négatifs au dessus et au dessous de zéro .
III.
$4 MERCURE DE FRANCE
III. Partie de la Réponse au Problême.
Lplus
A Réponse aux Démonstrations du
plus qu'infini , et du principe , s'est
présentée ici fort à propos , pour rappeller
les idées , dont l'évidence a été développée
dans les deux premieres Parties
de cette Dissertation .
Celle cy est la plus importante , non
que le Calcul puisse commander au raisonnement
: tous deux marchent de pair,
et doivent toujours concourir dans une
parfaite intelligence ; mais le Calcul est
plus d'usage que le raisonnement , dans
les trois especes de Géométrie , simple ,
composée et transcendante.
Les Observations suivantes , qui rou
lent sur le Calcul , ne sont proprement
convenables qu'à ceux qui sont versez
dans l'Algebre ; car je ne puis suppléer
ici aux principes du Calcul Algébrique
qui demandent des explications étenduës
et même quelque usage,pour être entendu .
Cependant ceux qui n'ont aucune teinture
d'Algebre, pourront entendre , sinon
le Calcul même , au moins les raisons sur
lesquelles je me fonde , et quel est l'usage
et l'esprit en géneral de la Géometrie de
l'infini, y
Soit le mouvement désigné par m ,
et le repos désigné par r . L'Auteur du
Problême prétend démontrer par le Cal-.
cul
JANVIER. 1734 55
eul suivant , qu'un mouvement infini est
égal à un parfait repos.
m plus t diminüe , plus m augmente
, sans que e varie ; de sorte que t
étant , alors moet em 。=r
- Ce Calcul se détruit premierement par
les conséquences qui en résultent,ainsi que
je l'ai démontré . Or la verité est une, et ce
qui est faux par le raisonnement , ne peut
être vrai le Calcul. Mais il y a plus 3
par
ce Calcul ne se détruit pas moins par
les principes du Calcul même.
Ce qui a causé l'erreur qui s'y trouve,
c'est que l'Auteur du Problême n'a pas
remonté aux principes , suivant l'exemple
de la plupart des Géométres plus attentifs
à calculer qu'à chercher les raisons
pour lesquelles il faut calculer ainsi , plus
occupez des regles du calcul que de la
source de ces regles . C'est neanmoins la
principale utilité de la Géometrie, de considerer
autant pourquoi chaque opération
se fait , que de quelle maniere elle doit sa
faire. C'est encore plus dans les causes des
préceptes , que dans les préceptes mêmes
de la Géométrie et de l'Algébre , que l'èsprit
peut trouver le plus grand avantage
qui en résulte, et acquerir cette précision
et cette étendue , qui sont les fruits les
plus précieux de ces deux Sciences . Je
passe à l'examen du Calcul en question .
Il est clair que par e l'Auteur entend
se
uno
56 MERCURE DE FRANCE
une quantité de mouvement constante et
finie ; par tune grandeur numérique variable
et décroissante à l'infini , et par r
le repos ou le mouvement nul : d'où il
suit que mest une quantité de
mouvement , finie lorsque t est un nombre
fini , et infinie , lorsque to , et
alors on a mte , ou moe , mettant
au lieu de t sa valeur o . Mais on n'a
pas mor , puisque r est le repos.ou
le mouvement nul , et que moe
quantité de mouvement constante et finie.
Il est vrai que c'est un principe reçû en
Géométrie , que toute grandeur multipliée
par o , donne un produit nul , et
qu'ainsi on doit avoir mxoo, ou
; mais cela prouve simplement que si
l'on a moe quantité constante , la
supposition est absurde et par conséquent
mabsurde, et parce que , suivant les prin-,
cipes des Géometres Infinitaires , m infinie
( , t étant o ) est une grandeur
qui multipliée par to , donne e grandeur
constante , il s'ensuit que m
est une grandeur absurde ; mais il ne s'ensuit
pas que mor mouvement nul; en
effet il seroit facile de démontrer géometriquement
que par la loi même qui donne
m , c'est- à- dire , une quantité finie
e , divisée par une grandeur t décroissante
à l'infini , il est absurde que t soit
L'infini
JANVIER 1734. 57
L'infini en grandeur est absurde , mais
par la raison qu'on peut concevoir qu'u
ne chose est absurde , on peut aussi l'exprimer
, et c'est ce qui faitou ∞ . De
plus on peut aussi se servir de l'expression
de l'absurdité dans la recherche du vrai ;
suivant la méthode des plus grands géometres
. Mais il y faut apporter beaucoup de
précaution, et il y a souvent lieu de craindre
que l'absurdité supposée dans le Calcul
ne passe dans le raisonnement, et ne
fasse prendre de fausses idées , ce qui peut
arriver sur tout , quand on donne trop
l'essort à son imagination .
C'estune magnifique invention d'avoir
par leCalcul differentiel les cxpressionsdes
grandeurs nulles, telles que, quoique nulles
, elles conservent leurs rapports primitifs,
en sorte que par là les Géometres Infinitaires
ont assujetti ces nullitez aux Calculs
, et qu'il operent aussi aisément sur les
grandeurs nulles , que sur les grandeurs
finies ; ce qui leur donne des voies beaucoup
plus abregées , et sert à découvrir
tous les Problêmes , où deux ou plusieurs
points se réunissent ; à trouver les tangentes,
les grandeurs négatives, les points d'in
flexion et de rebroussement, les caustiques
tant réflexion
par que par réfraction , et les
autres proprietez des courbes et de toutes
sortes de figures. Mais tous ceux qui ont la
véritable clef de la Géométrie , ne pren.
D nent
58 MERCURE DE FRANCE
nent ces nullitez que pour ce qu'elles sont ,
et il s'en faut bien qu'ils ne les regardent
comme réelles.
Il étoit important de justifier la Géométrie
des désordres dans le raisonnement
,
qui lui étoient Imputés.
De tout cecy il résulte qu'un corps ne
peut être à la fois à Paris et à Constantinople
, et que cette conséquence ne répugne
pas moins à la Géométrie qu'au raisonnement
. Je finirai par cette observation
, que le calcul , au lieu d'être l'instrument
, est quelquefois rendu le voile des
Sciences .
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Résumé : RÉPONSE aux démonstrations du plus qu'infini, et de ce principe : Que toute grandeur qui peut être augmentée à l'infini, peut être supposée augmentée à l'infini.
Le texte explore les controverses mathématiques et philosophiques autour des concepts d'infini et de grandeur infinie. Un géomètre anonyme et M. de S. Aubin débattent de l'existence du 'plus qu'infini' et des différents ordres d'infinis. Le géomètre anonyme argue que supposer une grandeur augmentable à l'infini mène à des contradictions, car cette grandeur ne peut être à la fois augmentable et déjà augmentée à l'infini. M. de S. Aubin critique cette démonstration, la jugeant fondée sur des suppositions contradictoires. Le texte examine également une démonstration directe selon laquelle une grandeur augmentable à l'infini suppose l'existence d'une grandeur infinie. M. de S. Aubin réfute cette idée, affirmant que le passage du fini à l'infini est inconcevable et que les démonstrations du 'plus qu'infini' et du principe sont insoutenables. Par ailleurs, le texte met en avant l'importance de la Géométrie et de l'Algèbre, soulignant la nécessité de comprendre les raisons derrière les opérations calculatoires. Il critique un calcul présenté par l'auteur d'un problème sur l'essence de la matière, démontrant que ce calcul est erroné tant par ses conséquences que par ses principes. Le texte conclut en insistant sur la nécessité pour la Géométrie de se justifier des désordres dans le raisonnement qui lui sont imputés et en soulignant que le calcul peut parfois masquer les véritables fondements des sciences.
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14
p. 131
REPONSE à M. le Gendre de Saint Aubin, par l'Auteur du Problême proposé aux Métaphysiciens Géometres.
Début :
Mr, comme vous n'attaquez mon Problême qu'indirectement en attaquant M. de Fontenelle, [...]
Mots clefs :
Problème, Géomètres, Géométrie
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texteReconnaissance textuelle : REPONSE à M. le Gendre de Saint Aubin, par l'Auteur du Problême proposé aux Métaphysiciens Géometres.
REPONSE à M. le Gendre de Saint
Aubin , par l'Auteur du Problême proposé
aux Métaphysiciens Géometres.
Mqu'indirectement en attaquant M. de Fonvous
n'attaquez mon Problême
tenelle , M. Wallis , le P. Castel , tous les Géométres
, et toute la Géométrie , principalement
la moderne , et que vous dites même en propres
termes que cette Géometrie n'est pas plus solide
que le Problême en question , je crois que sans
perdre le temps en longues discussions , il me
convient , après vous avoir remercié de l'honneur
que vous faites à ce Problême , de prendre
acte de sa solidité constatée par un Adversaire
de votre réputation et de votre mérite . Je suis
avec respect , & c.
Aubin , par l'Auteur du Problême proposé
aux Métaphysiciens Géometres.
Mqu'indirectement en attaquant M. de Fonvous
n'attaquez mon Problême
tenelle , M. Wallis , le P. Castel , tous les Géométres
, et toute la Géométrie , principalement
la moderne , et que vous dites même en propres
termes que cette Géometrie n'est pas plus solide
que le Problême en question , je crois que sans
perdre le temps en longues discussions , il me
convient , après vous avoir remercié de l'honneur
que vous faites à ce Problême , de prendre
acte de sa solidité constatée par un Adversaire
de votre réputation et de votre mérite . Je suis
avec respect , & c.
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Résumé : REPONSE à M. le Gendre de Saint Aubin, par l'Auteur du Problême proposé aux Métaphysiciens Géometres.
L'auteur répond à M. le Gendre de Saint Aubin sur un problème mathématique critiqué par M. de Fonvous. Des figures comme M. Wallis et le Père Castel sont impliquées. M. le Gendre affirme que la géométrie moderne n'est pas plus solide que le problème. L'auteur reconnaît la solidité du problème et exprime son respect.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 234-238
LETTRE du P. Castel, en Réponse à M. le Gendre de S. Aubin, sur l'Existence des Points inégaux.
Début :
J'ay lû, M. ce que vous m'avez fait l'honneur d'écrire pour et contre quelques-unes de mes [...]
Mots clefs :
Points inégaux, Point, Points, Géométrie, Surface, Ligne, Étendue, Corps, Entendement, Profondeur
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE du P. Castel, en Réponse à M. le Gendre de S. Aubin, sur l'Existence des Points inégaux.
LETTRE du P. Castel , en Réponse
à M. le Gendre de S. Aubin , sur l'Existence
des Points inégaux .
J'Ay lit ,M. ce que vous m'avez faitl'honneur d'écrire pour et contre quelques- unes de mes
Pensées. Là - dessus et sur vos autres Ouvrages
j'ai conçu une grande idée de votre Erudition
philosophique et de la maniere nette et débarassée
dont vous maniez la plupart des questions
que votre sujet vous présente. Mais , avec la même
candeur , je vous avoue que je voudrois que
yous n'eussiez point touché , au moins si fortement
, à la Géométrie moderne , qui est tout aussi
certaine que la Géométrie ancienne , lorsqu'elle
est en bonne main .
Pour ce qui me regarde , je ne me formalise
point que vous soyez un peu révolté contre mes
Points inégaux, et même, si vous voulez . incommensurables
. Il est bon d'éclaircir les nouveautéz.
Et croyez vous que la premiere fois que ces
Points se présenterent à moi , je fus fort docile
à m'y ren ire , et que je m'y fusse jamais rendu,
si la suite invariable des conclusions géométriques
qui m'y avoient conduit , ne m'avoient
enfin entraîné malgré moi ?
Car vous insinuez dans votre Réponse qu'on
aime la nouveauté et qu'on court après , comme
s'il n'y avoit qu'à courir . Croyez - moy , M. ceux
qui y donnent , le font tout bonnement sans y
penser , sans le sçavoir , et parce qu'apparamment
ils sont faits pour y donner ; au lieu que
je.
FEVRIER. 7134. 235
je meferois bien fort de montrer que ce sont ceux
qui n'y donnent pas , qui souvent y courent le
plus . Peu importe , chacun fait comme il veut,
Comme il sçait et comme il peut.
Pour mes Points ils sont démontrez , puisqu'ils
le sont géométriquement et par la Géometrie
même d'Euclide, sans aucun excès de raisonnement
ou de discours , dont on puisse se défier.
Car c'est Euclide même qui dit qu'un cercle ne
touche une ligne qu'en un point , et que l'intersection
de deux lignes droites n'est jamais qu'un
point. Or le contact d'un plus grand cercle est
un plus grand point , aussi bien que l'intersection
plus oblique de deux lignes ; cela se voit
dans le Physique, et se conçoit très-bien dans le
Géometrique ; et voilà tout.
La chose est si vraye au reste , qu'après avoir
rapporté une de mes Démonstrations , vous n'avez
pas jugé à propos de l'entamer . Vous avez
pris un autre tour , selon l'ancienne maniere philosophique
, dont vous deviez pourtant vous défier
, après avoir si bien montré dans votre Traité
qu'elle n'est bonne qu'à former des opinions
frivoles.
Vous concevez une partie de matiere et vous
la concevez , dites - vous , aussi petite qu'elle peut
être. C'est beaucoup ,je n'en veux pas davantage.
Mais c'est en Géométre qu'il faut prendre desormais
cette supposition avec précision , avec
force , sans la rétracter par aucune contre supposition
secrette.
Une partie de matiere aussi petite qu'elle peut
être , n'est ni d'un pied de diametre , ni d'un demi
pied , ni d'un pouce , ni d'une ligne , ni a'une
demi ligne , ni d'un centiéme , ni d'un miliémo ,
&c. de ligne , ni d'une mesure, en un mot, qu'on
puisse
236 MERCURE DE FRANCE
puisse partager ni en deux , ni en trois , ni en
aucun nombre imaginable. Cette partie ainsi di
minuée est une partie en effet et non un tout.
Elle est une , elle est indivisible c . q. f. d. même
par votre supposition.
Comment donc, M. y distinguez - vous tout de
suite deux parties , dont l'une touche à un plan ,
l'autre ne le touche pas , l'une étant en dessus et
l'autre en dessous ? C'est que vous n'avez pas
suivi le fil géometrique de votre propre hypothese.
Mais ce que vous n'avez pas fait , c'est
à moi de le faire pour éluder votre objection . Je
le ferai donc , ma coûtume , lorque j'ai un principe
, étant de le laisser aller tout droit , me réservant
à juger de sa valeur par le but où il va
aboutir.
Comme celui- cy n'aboutit qu'à dire avec Euclide
, que le Point est ce qui n'a point de parties
, punctum est cujus pars nulla mais je ne
sçaurois m'en défier.
›
Les Points que j'admets sont de vrais Points
physiques autant que géométriques . Leur donnez-
vous un dessous ? Je leur ôte donc le dessus.
J'étois jeune lorsqu'un Maître m'amusoit de ce
raisonnement. S'il y avoit un Point quelque part
au milieu de l'air , il regarderoit l'Orient et l'Occident
, le Septentrion et le Midi , le Zénith et le
Nadir. Je trouvois cela évident ; je ne connoissois
encore que des corps , et le Point que je concevois
étoit un corps.
Mais un Point , ai - je dit enfin , est un Point
et n'a par conséquent qu'un aspect. Six Points
cardinaux qui ont six aspects , sont six points.
Celui de l'Orient n'est pas celui de l'Occident.
Est -ce qu'un angle qui tourne la pointe au Midy,
la tourne aussi au Nord Est-ce que dans une
Place
FEVRIER . 1734. 237
Place de guerre , le même angle est saillant et
rentrant Est- ce qu'une pointe pique en dedans
comme en dehors.
Le Point , dites- vous , est une abstraction de
l'entendement. J'avois prévenu cette objection
dans l'endroit de ma Mathématique que vous at
taquez . Le Point , la ligne , la surface . appartiennent
à l'étendue , sont dans l'étenduë , indépendamment
de notre entendement ; et s'ils sont
dans notre entendement , ils sont donc aussi dans
l'étenduë qui en est l'objet . Il seroit ridicule que
la Géomerie , tant pratique que speculative , ne
fut fondée que sur une abstraction de l'entendement.
Ce seroit une Géometrie toute fantastique
à laquelle il n'y a nul doute que l'etenduë ne se
refusât ; au lieu que dans la pratique , l'étenduë
se prête à la Géométrie avec un concert qu'on
ne peut trop admirer .
Il est réel et très- réel que les corps sont terminez
par des surfaces , par des lignes , par des
points. Y a- t'il rien de plus réel que les bornes
qui terminent toutes choses ? Or ces bornes sont
indivisibles et n'ont chacune qu'un côté . La surface
n'est surface que du côté qu'elle présente ,
en dehors et non en dedans . On voit ce côté ,
mais on ne voit que ce côté ; on fait plus , on le
touche et on ne touche que lui . Bien surement
ce qu'on voit et ce qu'on touche est réel hors
de notre entendement.
Quoi ! je puis par une operation aussi grossiere
que l'est le toucher , faire le discernement
de la surface et du corps ; toucher la surface ,
longueur et largeur , sans toucher la profondeur?
Et vous me direz que ces choses là ne sont pas
réellement distinctes , et qu'elles ne le sont que
par une operation de l'esprit , tandis qu'elles le
sont
228 MERCURE DE FRANCE
sont par une operation de l'oeil , et même de la
main.
Car absolument ce que je vois , ce que je tou
che, n'a point de profondeur. Au - dessous , je sçai
bien qu'il y a une profondeur ; mais elle appartient
au corps et non à la surface.
Je vois ce qui vous embarasse et ce qui a de
tout temps embarassé ceux qui ont agité cette
question pour et contre. Si le Point n'est pas la
ligne , si la longueur n'est pas la largeur ou la
profondeur , vous voudriez qu'on séparât tout
cela et qu'on laissât - là la matiere sans largeur ,
sans longueur , &c .
Quand je dirois que cela est impossible , je ne
dirois autre chose , si ce n'est que les modification
ne se séparent pas des choses modifiées , ni
les accidens des substances . Mais qui suis - je pour
dire que cela est impossible ? Il est impossible
aux hommes de faire des Points indivisibles.
Mais je n'oserois dire que cela fût impossible à
Dieu , et c'est , j'ose le dire , la Géometrie même
qui de concert avec la Religion , m'inspire ce respect
, depuis sur tout qu'elle m'a fourni cette expression
simple d'une chose bien sublime 1 :
I dont j'ai donné ailleurs l'explication.
à M. le Gendre de S. Aubin , sur l'Existence
des Points inégaux .
J'Ay lit ,M. ce que vous m'avez faitl'honneur d'écrire pour et contre quelques- unes de mes
Pensées. Là - dessus et sur vos autres Ouvrages
j'ai conçu une grande idée de votre Erudition
philosophique et de la maniere nette et débarassée
dont vous maniez la plupart des questions
que votre sujet vous présente. Mais , avec la même
candeur , je vous avoue que je voudrois que
yous n'eussiez point touché , au moins si fortement
, à la Géométrie moderne , qui est tout aussi
certaine que la Géométrie ancienne , lorsqu'elle
est en bonne main .
Pour ce qui me regarde , je ne me formalise
point que vous soyez un peu révolté contre mes
Points inégaux, et même, si vous voulez . incommensurables
. Il est bon d'éclaircir les nouveautéz.
Et croyez vous que la premiere fois que ces
Points se présenterent à moi , je fus fort docile
à m'y ren ire , et que je m'y fusse jamais rendu,
si la suite invariable des conclusions géométriques
qui m'y avoient conduit , ne m'avoient
enfin entraîné malgré moi ?
Car vous insinuez dans votre Réponse qu'on
aime la nouveauté et qu'on court après , comme
s'il n'y avoit qu'à courir . Croyez - moy , M. ceux
qui y donnent , le font tout bonnement sans y
penser , sans le sçavoir , et parce qu'apparamment
ils sont faits pour y donner ; au lieu que
je.
FEVRIER. 7134. 235
je meferois bien fort de montrer que ce sont ceux
qui n'y donnent pas , qui souvent y courent le
plus . Peu importe , chacun fait comme il veut,
Comme il sçait et comme il peut.
Pour mes Points ils sont démontrez , puisqu'ils
le sont géométriquement et par la Géometrie
même d'Euclide, sans aucun excès de raisonnement
ou de discours , dont on puisse se défier.
Car c'est Euclide même qui dit qu'un cercle ne
touche une ligne qu'en un point , et que l'intersection
de deux lignes droites n'est jamais qu'un
point. Or le contact d'un plus grand cercle est
un plus grand point , aussi bien que l'intersection
plus oblique de deux lignes ; cela se voit
dans le Physique, et se conçoit très-bien dans le
Géometrique ; et voilà tout.
La chose est si vraye au reste , qu'après avoir
rapporté une de mes Démonstrations , vous n'avez
pas jugé à propos de l'entamer . Vous avez
pris un autre tour , selon l'ancienne maniere philosophique
, dont vous deviez pourtant vous défier
, après avoir si bien montré dans votre Traité
qu'elle n'est bonne qu'à former des opinions
frivoles.
Vous concevez une partie de matiere et vous
la concevez , dites - vous , aussi petite qu'elle peut
être. C'est beaucoup ,je n'en veux pas davantage.
Mais c'est en Géométre qu'il faut prendre desormais
cette supposition avec précision , avec
force , sans la rétracter par aucune contre supposition
secrette.
Une partie de matiere aussi petite qu'elle peut
être , n'est ni d'un pied de diametre , ni d'un demi
pied , ni d'un pouce , ni d'une ligne , ni a'une
demi ligne , ni d'un centiéme , ni d'un miliémo ,
&c. de ligne , ni d'une mesure, en un mot, qu'on
puisse
236 MERCURE DE FRANCE
puisse partager ni en deux , ni en trois , ni en
aucun nombre imaginable. Cette partie ainsi di
minuée est une partie en effet et non un tout.
Elle est une , elle est indivisible c . q. f. d. même
par votre supposition.
Comment donc, M. y distinguez - vous tout de
suite deux parties , dont l'une touche à un plan ,
l'autre ne le touche pas , l'une étant en dessus et
l'autre en dessous ? C'est que vous n'avez pas
suivi le fil géometrique de votre propre hypothese.
Mais ce que vous n'avez pas fait , c'est
à moi de le faire pour éluder votre objection . Je
le ferai donc , ma coûtume , lorque j'ai un principe
, étant de le laisser aller tout droit , me réservant
à juger de sa valeur par le but où il va
aboutir.
Comme celui- cy n'aboutit qu'à dire avec Euclide
, que le Point est ce qui n'a point de parties
, punctum est cujus pars nulla mais je ne
sçaurois m'en défier.
›
Les Points que j'admets sont de vrais Points
physiques autant que géométriques . Leur donnez-
vous un dessous ? Je leur ôte donc le dessus.
J'étois jeune lorsqu'un Maître m'amusoit de ce
raisonnement. S'il y avoit un Point quelque part
au milieu de l'air , il regarderoit l'Orient et l'Occident
, le Septentrion et le Midi , le Zénith et le
Nadir. Je trouvois cela évident ; je ne connoissois
encore que des corps , et le Point que je concevois
étoit un corps.
Mais un Point , ai - je dit enfin , est un Point
et n'a par conséquent qu'un aspect. Six Points
cardinaux qui ont six aspects , sont six points.
Celui de l'Orient n'est pas celui de l'Occident.
Est -ce qu'un angle qui tourne la pointe au Midy,
la tourne aussi au Nord Est-ce que dans une
Place
FEVRIER . 1734. 237
Place de guerre , le même angle est saillant et
rentrant Est- ce qu'une pointe pique en dedans
comme en dehors.
Le Point , dites- vous , est une abstraction de
l'entendement. J'avois prévenu cette objection
dans l'endroit de ma Mathématique que vous at
taquez . Le Point , la ligne , la surface . appartiennent
à l'étendue , sont dans l'étenduë , indépendamment
de notre entendement ; et s'ils sont
dans notre entendement , ils sont donc aussi dans
l'étenduë qui en est l'objet . Il seroit ridicule que
la Géomerie , tant pratique que speculative , ne
fut fondée que sur une abstraction de l'entendement.
Ce seroit une Géometrie toute fantastique
à laquelle il n'y a nul doute que l'etenduë ne se
refusât ; au lieu que dans la pratique , l'étenduë
se prête à la Géométrie avec un concert qu'on
ne peut trop admirer .
Il est réel et très- réel que les corps sont terminez
par des surfaces , par des lignes , par des
points. Y a- t'il rien de plus réel que les bornes
qui terminent toutes choses ? Or ces bornes sont
indivisibles et n'ont chacune qu'un côté . La surface
n'est surface que du côté qu'elle présente ,
en dehors et non en dedans . On voit ce côté ,
mais on ne voit que ce côté ; on fait plus , on le
touche et on ne touche que lui . Bien surement
ce qu'on voit et ce qu'on touche est réel hors
de notre entendement.
Quoi ! je puis par une operation aussi grossiere
que l'est le toucher , faire le discernement
de la surface et du corps ; toucher la surface ,
longueur et largeur , sans toucher la profondeur?
Et vous me direz que ces choses là ne sont pas
réellement distinctes , et qu'elles ne le sont que
par une operation de l'esprit , tandis qu'elles le
sont
228 MERCURE DE FRANCE
sont par une operation de l'oeil , et même de la
main.
Car absolument ce que je vois , ce que je tou
che, n'a point de profondeur. Au - dessous , je sçai
bien qu'il y a une profondeur ; mais elle appartient
au corps et non à la surface.
Je vois ce qui vous embarasse et ce qui a de
tout temps embarassé ceux qui ont agité cette
question pour et contre. Si le Point n'est pas la
ligne , si la longueur n'est pas la largeur ou la
profondeur , vous voudriez qu'on séparât tout
cela et qu'on laissât - là la matiere sans largeur ,
sans longueur , &c .
Quand je dirois que cela est impossible , je ne
dirois autre chose , si ce n'est que les modification
ne se séparent pas des choses modifiées , ni
les accidens des substances . Mais qui suis - je pour
dire que cela est impossible ? Il est impossible
aux hommes de faire des Points indivisibles.
Mais je n'oserois dire que cela fût impossible à
Dieu , et c'est , j'ose le dire , la Géometrie même
qui de concert avec la Religion , m'inspire ce respect
, depuis sur tout qu'elle m'a fourni cette expression
simple d'une chose bien sublime 1 :
I dont j'ai donné ailleurs l'explication.
Fermer
Résumé : LETTRE du P. Castel, en Réponse à M. le Gendre de S. Aubin, sur l'Existence des Points inégaux.
Le Père Castel répond à M. le Gendre de Saint-Aubin au sujet de l'existence des points inégaux. Castel commence par louer l'érudition et la clarté de Saint-Aubin, tout en regrettant que ce dernier ait critiqué la géométrie moderne, qu'il considère aussi certaine que la géométrie ancienne. Castel défend ses points inégaux en affirmant qu'ils sont démontrés géométriquement et conformément aux principes d'Euclide. Il explique que les points inégaux sont des points physiques et géométriques réels, et non des abstractions de l'entendement. Selon Castel, les surfaces, lignes et points sont des bornes réelles et indivisibles, terminant les corps. Il soutient que, bien que les hommes ne puissent créer des points indivisibles, cela n'est pas impossible pour Dieu. Castel conclut en affirmant que la géométrie et la religion confirment cette idée.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
16
p. 307-313
Pensées Critiques sur les Mathématiques, [titre d'après la table]
Début :
On vend depuis peu chez Osmon, rue S. Jacques, proche la Fontaine S. Severin, [...]
Mots clefs :
Mathématiques, Préjugé, Unité, Principes, Géométrie, Géomètres, Grandeur, Objet
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Pensées Critiques sur les Mathématiques, [titre d'après la table]
On vend depuis peu chez Osmon , rue
S. Jacques , proche la Fontaine S. Severin
, et chez Clousier , dans la même rue,
aux Armes de France , un Livre intitulé
Pensées Critiques sur les Mathematiques , où
l'on propose plusieurs Préjugez contre ces
Sciences, à dessein d'en ébranler la certitude,
et de prouver qu'elles ont peu contribué à la
perfection des Beaux Arts . Par M. Cartand.
Volume in 12.
L'Auteur a mis à la tête de cet Ouvrage
un long Discours , dans lequel
on trouve des Réfléxions neuves sur
le culte des Payens , sur
sur l'Astrologie
et sur la Magie . Après ce discours préliminaire
l'on propose sept Préjugez contre
les Mathématiques.
M. Cartaud fait voir dans le premier
que les Mathématiciens ne peuvent arriver
à la haute certitude sans avoir auparavant
308 MERCURE DE FRANCE
ravant établi des principes certains dans
la Métaphysique , puisque la seule hypothese
d'un Dieu trompeurferoit de cette
Geométrie un Pays de soupçons et d'incertitude
; il faut , dit- il , entrer aussi
dans l'examen de la nature de l'ame , et
des idées , pour nous assurer que nous
n'avons aucune erreur à craindre de ce
côté- là. Car enfin , ajoute t-il , il est important
pour les Géometres de démontrer
la spiritualité de l'ame , puisque
bien qu'elle fût une matiere très subtile;
elle ne le seroit jamais assez pour atteindre
aux objets insensibles de la haute Géométrie.
Le second Prejugé est une Compila
tion des autoritez de ceux qui ont mis
en problême la verité des Mathématiques ,
tels que sont Mrs Bayle , Huet , Gassendi
, la Mothe le Vayer , la Placette
Agrippa , Joseph Scaliger , le Chevalier
Meré , les deux Pics de la Mirandole ,
Pascal , Descartes , Couti , le Clerc , & c.
L'Auteur prouve ensuite par plusieurs
raisonnemens que les doutes de tous ces
Grands hommes, devroient rendre les
Geométres moins décisifs.
L'Auteur raporte dans le troisiéme
Préjugé le témoignage de plusieursGrands
Geométres , qui avoient que les Mathé
matiFEVRIER.
1734. 309
matiques sont remplies de profondeurs ,
et d'obscuritez qu'on ne peut percer. Il
fait voir à la fin de ce même préjugé
que la Geométrie la plus élementaire
demande qu'on entre dans l'Analyse des
infiniment petits , ce qui fait naître indispensablement
les discussions sur l'Infini
, qui est , selon nôtre Auteur , une
source inépuisable de ténébres et d'incer
titudes.
On fait voir dans le quatriéme préju
gé que les Mathématiciens ne sont pas
plus unanimes que les autres Scavans , et
pour le prouver, on raporte les disputes
qui s'éleverent dans l'Académie des Sciences
au sujet des nouvelles méthodes de
l'Infini. L'Auteur fait aussi mention de
quelques. légeres diversitez de sentiment ,
qui diviserent il y a quelque tems M. de
Fontenelle et le P. Castel. On n'a pas
oublié Hobbes , le Jesuite Mancanus , ni
Vossius , qui se sont un peu écarté de la
route que tiennent les Geométres ; on
s'est également prévalu des incertitudes
de M. Leibnitz , qui sembloit s'être relâché
jusqu'au point de réduire les Infinis
de différens ordres à n'être que des
incommensurables au Globe de la Terre,
ou ce Globe à un Globe dont le rayon
seroit la distance du Soleil à Sirius ; ce
qui
310 MERCURE DE FRANCE
qui ruineroit l'exactitude Geométrique
des calculs . L'on a ajouté à toutes ces
contrarietez le peu d'unanimité qui se
trouve entre ceux qui déterminent la
distance des Globes celestes , et qui prétendent
trouver au juste la grandeur de
leur rayon . Enfin l'on fait voir que les
Mathématiciens sont le plus souvent aux
prises , et qu'ils ne partent pas toujours
des mêmes principes.
L'Auteur des Pensées critiques se propose
de prouver dans le cinquième préjugé
que l'objet des Mathématiques est
obscur. Voici ce qu'il dit sur ce sujet .
Les Mathématiques ont pour objet où
la grandeur en general , ou l'étendue ,
ou les nombres , ou le mouvement , ou
le tems.
Nous ignorons quelle est la nature de
la grandeur en general . Premierement
il est certain qu'elle n'est pas un être : en
second lieu , si elle étoit un néant , comment
pourroit- elle être l'objet des Mathématiques
?Troisiémement on auroit tore
de dire que les Algebristes prennent pour
objet deleur science la grandeur en general
en ce sens , que toutes leurs opérations
peuvent également avoir lieu en
Geometrie et en Aritmetique , puisqu'il
est très-certain que les nombres et l'étenduë
A
FEVRIER. 1734. 311
due ont des proprietez tout- à - fait differentes
. 2° . Les notions que nous avons
de l'étenduë sont très- incertaines , puisque
nous ignorons si elle est divisible à
l'infini , ou si elle est composée d'indivisibles
, si ces indivisibles sont étendus
ou inétendus . Cependant , ajoute notre
Auteur ; on ne peut s'assurer d'aucunes
conséquences Geométriques , jusqu'à - ce
que les Physiciens ayent vuidé leurs différends
sur ce sujet , puisque les conclusions
que l'on tire de ces divers systêmes
sont aussi opposées entr'elles , que la supposition
des indivisibles l'est de celle de
la divisibilité inépuisable. Ainsi , puisque
les principes sont arbitraires , les conséquences
doivent l'être aussi . 3 °. Notre
Auteur après avoir dit qu'il est souvent
inutile et même dangereux de trop rafiner
sur les premiers principes , ajoute ,
pour faire voir que les premieres notions
même ne sont pas exemptes d'obscurité,
lorsqu'on donne un plein essor à son
esprit ; l'idée qu'on a de l'unité n'est pas
fixée sur la perception d'un être simple ,
parce qu'on ne sçait qu'un objet est simple
qu'autant qu'on le confronte avec
l'idée qu'on a de l'unité . Ainsi l'idée
qu'on a de l'unité précede la perception
de l'être qui est simple. Mais si la per-
сер-
312 MERCURE DE FRANCE .
ception de l'être qui est simple est postérieure
à l'idée qu'on a de l'unité , il faut
donc que l'unité soit quelque chose de
réel , et qu'elle subsiste indépendament
de tout sujet. Voilà donc le triomphe des
Pitagoriciens quelle sera la nature de
l'unité?L'on fait voir ensuite que les fractions
seules suffisent pour rendre la notion
de l'unité douteuse et équivoque.
L'on parcourt ainsi toutes les autres
grandeurs , er on prouve que
les notions
que nous en avons doivent nous paroître
incertaines .
L'Auteur fait voir dans le sixième préjugé
qu'en supposant une fois le principe
des indivisibles , qu'il n'est pas bien
aisé de combattre , il faut jetter les fondemens
d'une nouvelle Geométrie . Pour
cet effet il choisit plusieurs propositions
qui concernent lesLignes , les Plans et les
Solides , et démontre qu'elles sont des
Paralogismes hors la divisibilité inépuisable
, qui ne paroît pas à notre Auteur
être établie sur des principes assez certains
pour servir de fondement à des
conséquences infaillibles.
On propose un septiéme préjugé , où
l'on prétend prouver que les Mathématiques
ont peu contribué à la perfection
des Beaux Arts , toutes les réfléxions que
notre
FEVRIER, 1734. 313
ture ,
>
notre Auteur emploie dans ce préjugé ,
peuvent se réduire à celle- ci ,
L'Architecture civile et militaire , la
Marine,l'Astronomie , les Méchaniques
la Cosmographie , la Peinture , la Sculpet
tous les Beaux Arts ont atteint
à un très-haut degré de perfection dans
des tems auxquels on n'avoit point les
méthodes de résoudre les problêmes , et
où les connoisseurs Geométriques se bornoient
à quelques propositions élementaires
d'un usage très- peu fécond. En second
lieu les Sciences qui ont emprunté
le secours des Mathématiques ne sont
jamais arrivées à une parfaite précision :
l'on pourroit même dire que l'Astronomie
est incertaine en ce qu'elle a de
commun avec les Mathématiques , puisque
malgré toutes les regles de la Trigonometrie
on n'a pû réussir à assigner la
vraie distance des Astres , ni déterminer
la grandeur de leur diamétre , et que
malgré toutes les observations des Geométres
de notre siècle et du siécie dernier
, on n'en connoît pas mieux la figure
du Globe de la terre.
S. Jacques , proche la Fontaine S. Severin
, et chez Clousier , dans la même rue,
aux Armes de France , un Livre intitulé
Pensées Critiques sur les Mathematiques , où
l'on propose plusieurs Préjugez contre ces
Sciences, à dessein d'en ébranler la certitude,
et de prouver qu'elles ont peu contribué à la
perfection des Beaux Arts . Par M. Cartand.
Volume in 12.
L'Auteur a mis à la tête de cet Ouvrage
un long Discours , dans lequel
on trouve des Réfléxions neuves sur
le culte des Payens , sur
sur l'Astrologie
et sur la Magie . Après ce discours préliminaire
l'on propose sept Préjugez contre
les Mathématiques.
M. Cartaud fait voir dans le premier
que les Mathématiciens ne peuvent arriver
à la haute certitude sans avoir auparavant
308 MERCURE DE FRANCE
ravant établi des principes certains dans
la Métaphysique , puisque la seule hypothese
d'un Dieu trompeurferoit de cette
Geométrie un Pays de soupçons et d'incertitude
; il faut , dit- il , entrer aussi
dans l'examen de la nature de l'ame , et
des idées , pour nous assurer que nous
n'avons aucune erreur à craindre de ce
côté- là. Car enfin , ajoute t-il , il est important
pour les Géometres de démontrer
la spiritualité de l'ame , puisque
bien qu'elle fût une matiere très subtile;
elle ne le seroit jamais assez pour atteindre
aux objets insensibles de la haute Géométrie.
Le second Prejugé est une Compila
tion des autoritez de ceux qui ont mis
en problême la verité des Mathématiques ,
tels que sont Mrs Bayle , Huet , Gassendi
, la Mothe le Vayer , la Placette
Agrippa , Joseph Scaliger , le Chevalier
Meré , les deux Pics de la Mirandole ,
Pascal , Descartes , Couti , le Clerc , & c.
L'Auteur prouve ensuite par plusieurs
raisonnemens que les doutes de tous ces
Grands hommes, devroient rendre les
Geométres moins décisifs.
L'Auteur raporte dans le troisiéme
Préjugé le témoignage de plusieursGrands
Geométres , qui avoient que les Mathé
matiFEVRIER.
1734. 309
matiques sont remplies de profondeurs ,
et d'obscuritez qu'on ne peut percer. Il
fait voir à la fin de ce même préjugé
que la Geométrie la plus élementaire
demande qu'on entre dans l'Analyse des
infiniment petits , ce qui fait naître indispensablement
les discussions sur l'Infini
, qui est , selon nôtre Auteur , une
source inépuisable de ténébres et d'incer
titudes.
On fait voir dans le quatriéme préju
gé que les Mathématiciens ne sont pas
plus unanimes que les autres Scavans , et
pour le prouver, on raporte les disputes
qui s'éleverent dans l'Académie des Sciences
au sujet des nouvelles méthodes de
l'Infini. L'Auteur fait aussi mention de
quelques. légeres diversitez de sentiment ,
qui diviserent il y a quelque tems M. de
Fontenelle et le P. Castel. On n'a pas
oublié Hobbes , le Jesuite Mancanus , ni
Vossius , qui se sont un peu écarté de la
route que tiennent les Geométres ; on
s'est également prévalu des incertitudes
de M. Leibnitz , qui sembloit s'être relâché
jusqu'au point de réduire les Infinis
de différens ordres à n'être que des
incommensurables au Globe de la Terre,
ou ce Globe à un Globe dont le rayon
seroit la distance du Soleil à Sirius ; ce
qui
310 MERCURE DE FRANCE
qui ruineroit l'exactitude Geométrique
des calculs . L'on a ajouté à toutes ces
contrarietez le peu d'unanimité qui se
trouve entre ceux qui déterminent la
distance des Globes celestes , et qui prétendent
trouver au juste la grandeur de
leur rayon . Enfin l'on fait voir que les
Mathématiciens sont le plus souvent aux
prises , et qu'ils ne partent pas toujours
des mêmes principes.
L'Auteur des Pensées critiques se propose
de prouver dans le cinquième préjugé
que l'objet des Mathématiques est
obscur. Voici ce qu'il dit sur ce sujet .
Les Mathématiques ont pour objet où
la grandeur en general , ou l'étendue ,
ou les nombres , ou le mouvement , ou
le tems.
Nous ignorons quelle est la nature de
la grandeur en general . Premierement
il est certain qu'elle n'est pas un être : en
second lieu , si elle étoit un néant , comment
pourroit- elle être l'objet des Mathématiques
?Troisiémement on auroit tore
de dire que les Algebristes prennent pour
objet deleur science la grandeur en general
en ce sens , que toutes leurs opérations
peuvent également avoir lieu en
Geometrie et en Aritmetique , puisqu'il
est très-certain que les nombres et l'étenduë
A
FEVRIER. 1734. 311
due ont des proprietez tout- à - fait differentes
. 2° . Les notions que nous avons
de l'étenduë sont très- incertaines , puisque
nous ignorons si elle est divisible à
l'infini , ou si elle est composée d'indivisibles
, si ces indivisibles sont étendus
ou inétendus . Cependant , ajoute notre
Auteur ; on ne peut s'assurer d'aucunes
conséquences Geométriques , jusqu'à - ce
que les Physiciens ayent vuidé leurs différends
sur ce sujet , puisque les conclusions
que l'on tire de ces divers systêmes
sont aussi opposées entr'elles , que la supposition
des indivisibles l'est de celle de
la divisibilité inépuisable. Ainsi , puisque
les principes sont arbitraires , les conséquences
doivent l'être aussi . 3 °. Notre
Auteur après avoir dit qu'il est souvent
inutile et même dangereux de trop rafiner
sur les premiers principes , ajoute ,
pour faire voir que les premieres notions
même ne sont pas exemptes d'obscurité,
lorsqu'on donne un plein essor à son
esprit ; l'idée qu'on a de l'unité n'est pas
fixée sur la perception d'un être simple ,
parce qu'on ne sçait qu'un objet est simple
qu'autant qu'on le confronte avec
l'idée qu'on a de l'unité . Ainsi l'idée
qu'on a de l'unité précede la perception
de l'être qui est simple. Mais si la per-
сер-
312 MERCURE DE FRANCE .
ception de l'être qui est simple est postérieure
à l'idée qu'on a de l'unité , il faut
donc que l'unité soit quelque chose de
réel , et qu'elle subsiste indépendament
de tout sujet. Voilà donc le triomphe des
Pitagoriciens quelle sera la nature de
l'unité?L'on fait voir ensuite que les fractions
seules suffisent pour rendre la notion
de l'unité douteuse et équivoque.
L'on parcourt ainsi toutes les autres
grandeurs , er on prouve que
les notions
que nous en avons doivent nous paroître
incertaines .
L'Auteur fait voir dans le sixième préjugé
qu'en supposant une fois le principe
des indivisibles , qu'il n'est pas bien
aisé de combattre , il faut jetter les fondemens
d'une nouvelle Geométrie . Pour
cet effet il choisit plusieurs propositions
qui concernent lesLignes , les Plans et les
Solides , et démontre qu'elles sont des
Paralogismes hors la divisibilité inépuisable
, qui ne paroît pas à notre Auteur
être établie sur des principes assez certains
pour servir de fondement à des
conséquences infaillibles.
On propose un septiéme préjugé , où
l'on prétend prouver que les Mathématiques
ont peu contribué à la perfection
des Beaux Arts , toutes les réfléxions que
notre
FEVRIER, 1734. 313
ture ,
>
notre Auteur emploie dans ce préjugé ,
peuvent se réduire à celle- ci ,
L'Architecture civile et militaire , la
Marine,l'Astronomie , les Méchaniques
la Cosmographie , la Peinture , la Sculpet
tous les Beaux Arts ont atteint
à un très-haut degré de perfection dans
des tems auxquels on n'avoit point les
méthodes de résoudre les problêmes , et
où les connoisseurs Geométriques se bornoient
à quelques propositions élementaires
d'un usage très- peu fécond. En second
lieu les Sciences qui ont emprunté
le secours des Mathématiques ne sont
jamais arrivées à une parfaite précision :
l'on pourroit même dire que l'Astronomie
est incertaine en ce qu'elle a de
commun avec les Mathématiques , puisque
malgré toutes les regles de la Trigonometrie
on n'a pû réussir à assigner la
vraie distance des Astres , ni déterminer
la grandeur de leur diamétre , et que
malgré toutes les observations des Geométres
de notre siècle et du siécie dernier
, on n'en connoît pas mieux la figure
du Globe de la terre.
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Résumé : Pensées Critiques sur les Mathématiques, [titre d'après la table]
Le livre 'Pensées Critiques sur les Mathématiques' de M. Cartand, publié chez Osmon et Clousier à Paris, rue Saint-Jacques, remet en question la certitude et la contribution des mathématiques, notamment dans les beaux-arts. L'auteur commence par un discours sur le culte des païens, l'astrologie et la magie avant de présenter sept préjugés contre les mathématiques. Le premier préjugé souligne que les mathématiciens ne peuvent atteindre une haute certitude sans principes métaphysiques solides, car l'hypothèse d'un Dieu trompeur rendrait la géométrie incertaine. Le second préjugé compile les doutes exprimés par des penseurs comme Bayle, Huet et Descartes sur la vérité des mathématiques. Le troisième préjugé cite des géomètres reconnaissant les profondeurs et obscurités des mathématiques, notamment les discussions sur l'infini. Le quatrième préjugé met en lumière les disputes au sein de l'Académie des Sciences et les divergences entre savants comme Fontenelle et Castel. Le cinquième préjugé argue que l'objet des mathématiques est obscur, en discutant la nature de la grandeur, de l'étendue et des nombres. Le sixième préjugé explore les paradoxes liés aux indivisibles et leur impact sur la géométrie. Enfin, le septième préjugé affirme que les mathématiques ont peu contribué à la perfection des beaux-arts, citant des exemples où ces arts ont atteint une grande perfection sans méthodes mathématiques avancées.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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17
p. 349-350
« On avertit le Public qu'il y a actuellement vingt volumes des Motets de M. de la Lande, imprimez, [...] »
Début :
On avertit le Public qu'il y a actuellement vingt volumes des Motets de M. de la Lande, imprimez, [...]
Mots clefs :
Motets, De La Lande, Géométrie, Architecture, Encriers
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texteReconnaissance textuelle : « On avertit le Public qu'il y a actuellement vingt volumes des Motets de M. de la Lande, imprimez, [...] »
On avertit le Public qu'il y a actuellement vingt
volumes des Motets de M. de la Lande , imprimez
, ce qui fait quarante Motets , sans compter
les Leçons de Tenebres et le petit Miserere , qui
font un volume à part , en attendant qu'on en
donne davantage . Ces Ouvrages se vendent chez
la veuve Boivin , à la Regle d'or , rue S. Honoré,
et chez le Sr le Clerc , à la Croix d'or , ruë des
Prouveres.
Le dépôt de tous ces Ouvrages est chez Mlle
Hue , Marchande Lingere , au coin de la ruë
S. Cristophle, près le petit Pont. Chaque Volume
contient deux Motets , et se vend 6. livres.
Le Sieur de S. Marc , Mathématicien , avertit
le Public , qu'il continue d'enseigner la Géométrie
, l'Architecture , tant Civile que Militaire ,
G V
350 MERCURE DE FRANCE
et la Perspective par des Regles très - faciles et en
fort peu de temps. Il demeure ruë de Bussy ,
l'Hôtel d'Angleterre , Fauxbourg S. Germain.
Le Sieur Baradelle , Ingenieur du Roy pour les
Instrumens de Mathématique , avertit le Public
qu'il a fait une grande quantité de ces Encriers
qui conservent l'Encre plusieurs années sans se
secher ni s'épaissir , on n'y met point de coton
parce qu'ilest exactement fermé par le moyen
d'une Sou- pape à queue , avec une vis à oreille.
Ces Encriers sont fort propres pour les personnes
qui vont en Campagne , ce sont de vrais reservoirs
d'Encre.Il ne sont point sujets à se renverser
en telle situation puissent- ils être. On en construit
de differentes forines et l'on en trouvera toujours
à choisir , grand ou petit chez le sieur Baradelle .
Sa demeure est toujours Quay de l'Horloge du
Palais , à l'Enseigne de l'Observatoire , vis -à - vis
le grand Degré de la Riviere.
volumes des Motets de M. de la Lande , imprimez
, ce qui fait quarante Motets , sans compter
les Leçons de Tenebres et le petit Miserere , qui
font un volume à part , en attendant qu'on en
donne davantage . Ces Ouvrages se vendent chez
la veuve Boivin , à la Regle d'or , rue S. Honoré,
et chez le Sr le Clerc , à la Croix d'or , ruë des
Prouveres.
Le dépôt de tous ces Ouvrages est chez Mlle
Hue , Marchande Lingere , au coin de la ruë
S. Cristophle, près le petit Pont. Chaque Volume
contient deux Motets , et se vend 6. livres.
Le Sieur de S. Marc , Mathématicien , avertit
le Public , qu'il continue d'enseigner la Géométrie
, l'Architecture , tant Civile que Militaire ,
G V
350 MERCURE DE FRANCE
et la Perspective par des Regles très - faciles et en
fort peu de temps. Il demeure ruë de Bussy ,
l'Hôtel d'Angleterre , Fauxbourg S. Germain.
Le Sieur Baradelle , Ingenieur du Roy pour les
Instrumens de Mathématique , avertit le Public
qu'il a fait une grande quantité de ces Encriers
qui conservent l'Encre plusieurs années sans se
secher ni s'épaissir , on n'y met point de coton
parce qu'ilest exactement fermé par le moyen
d'une Sou- pape à queue , avec une vis à oreille.
Ces Encriers sont fort propres pour les personnes
qui vont en Campagne , ce sont de vrais reservoirs
d'Encre.Il ne sont point sujets à se renverser
en telle situation puissent- ils être. On en construit
de differentes forines et l'on en trouvera toujours
à choisir , grand ou petit chez le sieur Baradelle .
Sa demeure est toujours Quay de l'Horloge du
Palais , à l'Enseigne de l'Observatoire , vis -à - vis
le grand Degré de la Riviere.
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Résumé : « On avertit le Public qu'il y a actuellement vingt volumes des Motets de M. de la Lande, imprimez, [...] »
Le texte annonce la disponibilité de vingt volumes des Motets de M. de la Lande, comprenant quarante Motets, ainsi que des Leçons de Tenèbres et un petit Miserere dans un volume séparé. Ces ouvrages sont en vente chez la veuve Boivin, rue Saint-Honoré, et chez le Sr le Clerc, rue des Prouveres. Le dépôt se trouve chez Mlle Hue, rue Saint-Christophe. Chaque volume, contenant deux Motets, est vendu six livres. Le Sieur de Saint-Marc, mathématicien, continue d'enseigner la géométrie, l'architecture (civile et militaire) et la perspective. Il réside rue de Bussy, à l'Hôtel d'Angleterre, faubourg Saint-Germain. Le Sieur Baradelle, ingénieur du Roi, fabrique des encriers conservant l'encre plusieurs années sans se sécher ni s'épaissir. Équipés d'une soupape à queue avec une vis à oreille, ces encriers sont adaptés pour les personnes en campagne et disponibles en différentes formes et tailles. Ils sont vendus chez le Sieur Baradelle, quai de l'Horloge du Palais, à l'Enseigne de l'Observatoire.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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18
p. 872-879
SUITE de la Réponse de M. de Saint-Aubin, au Problême sur l'Essence de la Matiere.
Début :
J'ay affaire aujourd'hui à trois Géometres, à deux Anonymes et au P. Castel. Le premier [...]
Mots clefs :
Essence de la matière, Point, Matière, Louis-Bertrand Castel, Infini, Calcul, Corps, Géométrie, Points, Raisonnement, Portion, Absurde, Entendement
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUITE de la Réponse de M. de Saint-Aubin, au Problême sur l'Essence de la Matiere.
SUITE de la Réponse de M. de Saint-
Aubin , au Problême sur l'Essence de
la Matiere.
' Ay affaire aujourd'hui à trois Géometres , à
deux Anonymes et au P. Castel. Le premier
des Anonymes croit que , suivant mon aveu ,
toute la solidité de la Géométrie réside dans le
Problême sur l'Essence de la Matiere , dont il se
déclare l'Auteur ; et il me fait dire en propres
termes , que la Géométrie n'est pas plus solide ,
quoique je n'aye comparé le Problème qu'aux
écueils de raisonnement , que la plupart des Géométres
n'ont pas évitez . C'est ce qu'il est facile
de voir dans la premiere Partie de ma Réponse.
L'Analise de l'Infini se propose de pousser toujours
en avant son Calcul , sans se soucier des
absurditez. Suivant ce Principe , elle considere
les quantitez positives et les négatives , les possibles
et les imaginaires , les vrayes et les absurdes .
Ces distinctions sont si bien établies , que les termes
de nul , d'imaginaire et d'absurde , sont propres
à la science et affectez à differentes quantitez
Algebriques. Elle tire de l'infini des solutions
plus courtes , des vûës plus étenduës , une analogie
et des expressions plus generales .
Mais les écueils du raisonnement qu'elle rencontre
sur sa route , elle ne doit les considerer
que comme des ecueils ; ce qui est compris dans
le Calcul , ne devant pas toujours passer dans le
raisonnement. Et c'est encore un avantage de
l'infini , d'avertir quand il se présente dans une
anaMAY.
1734. 873
analogie, que la supposition cesse d'être possible .
L'Auteur du Problême , au contraire , veut
guider le raisonnement par des opérations qui
ne sont propres qu'au Calcul . Il prétend trouver
par le Calcul , que le mouvement infini est égal
au repos ; et partant de cette conclusion absurde ,
il detruit toutes les propriétez de la Matiere ; il
la réduit à une simple possibilité , ce qui est nier
son existence ; et il soutient qu'un corps peut
être à la fois dans tous les lieux de l'Univers.
Mais , dira- t'on , le Calcul est donc imparfait
et trompeur , puisqu'il a donné à l'Auteur du
Problême cette premiere conclusion de l'égalité
du mouvement infini et du repos.
0 .
Je réponds que l'Auteur du Problême a dû
s'appercevoir que le Calcul lui donnoit les deux
contradictoires , sçavoir , moe , et mo
Car il est évidemment contradictoire que e ,
quantité de mouvement finie , soit égale à o
nullité de mouvement. Il n'y a rien de plus opposé
à la précision du Calcul , que d'en inferer
qu'une quantité de mouvement soit en mêmesemps
réelle et déterminée , et qu'elle soit nulle.
Toute grandeur , multipliée par zero, est égale
à zéro ; et si d'une grandeur multipliée par zéro,
il résulte un produit réel , c'est une marque infail
lible que cette grandeur est absurde.
Est - ce la faute du Calcul ? Ce ne l'est en aucune
maniere. Sa charge est autre que celle du raisonnement.
Suivant le raisonnement , à une demande
absurde point de réponse; suivant le calcul
, à une demande absurde , réponse absurde.
Vous interrogez le calcul par l'infini , grandeur
absurde en Géométrie , que vous supposez
séelie ; le calcul vous répond une absurdité , qui
est une confirmation de l'absurdité de l'infini
géométriques
La
874 MERCURE DE FRANCE
La Géométrie transcendante considere comme
point de rencontre un point , qui par la supposition
ne peut rencontrer . Elle examine aussi dans
la réunion des deux points , les rapports qu'auroient
ces deux points séparez . C'est - là tout le
mystere de l'infini , auquel rien ne manque du
côté du Calcul , et auquel il ne manque du côté
du raisonnement , que d'employer des mots qui
Bussent de la justesse et qui parussent moins merveilleux
; ce qui seroit facile.Voilà quels sont les
vrais principes de la Géométrie de l'infini ; et
quoiqu'ils n'ayent été expliquez nulle part , je ne
crains pas qu'ils soient désavouez par les plus
sçavans Géométres . C'est deffendre cette Géométrie
que de montrer qu'elle n'a aucune part
au Scepticisme et aux inclusions inconcevables ,
que l'Auteur du Problême a voulu y introduire.
Dans le même Mercure de Janvier , un autre
Géométre s'est imaginé que j'attaquois la Géométrie
, en tant que ses Elements , qui sont des
points , des lignes , des surfaces , ne sont que des
abstractions de l'entendement sans réalité. C'est
l'ancienne objection des Sceptiques , renouvellée
par Bayle. Les Géométres ont raison de ne s'y
pas arrêter. Quoique la précision géométrique
ne puisse être executée réellement et dans la matiere,
c'est un objet très- digne de l'entendement,
et qui conduit à la plus grande exactitude réelle
qui soit possible . Mais cette question n'étoit
qu'indirecte ; il s'agissoit de sçavoir si le passage
du fini à l'infini peut se faire par l'exaltation
du point à la ligne , de la ligne à la surface , &c.
et j'ay soutenu que les Infinitaires ne l'entendent
ni ne le peuvent entendre ainsi ; car une infinité
de surfaces n'est point un solide.
Le P. Castel est depuis survenu dans le Mercu
MAY. 1734- 875
re de Février. Il ne touche pas la plupart des
questions principales , sçavoir si , en Géométrie ,
on peut expliquer le passage du fini à l'infini ; si
la matiere n'est qu'une simple possibilité ; si c'est
une chose concevable que l'Etre absorbé dans le
néant ; si le plusqu'infini , les differens ordres
d'infinis et le simple infini géométrique actuelle
ment subsistant , sont des objets réels de l'entendement
ou des contradictions.
Le P. Castel se renferme dans la question de
la divisibilité à l'infini , si souvent debattuë et qui
appartient plus à la Physique qu'à la Géométrie.
Les Points , dit-il , que j'admets , sont de vrais
Points Physiques , autant que géométriques. Il admet
donc de vrais atomes , en même- temps qu'il
soutient l'infini géométrique , les differens ordres
d'infinis et le plusqu'infini .
Il vient de dire que le Point,qu'il admet; est Phy-
Bique , c'est à-dire , qu'il est matériel ou qu'il
est un corps et pour faire entendre qu'en suivant
le sentiment de la divisibilité à l'infini , il a été
dans l'erreur , il dit aussi- tôt après : le Point que
je concevois étoit un corps ; c'est- à - dire, que le
Point qu'il conçoit aujourd'hui , n'est pas un
corps , ou que le Point qu'il admet , n'est pas un
Point Physique.
Il nous donne ensuite des exemples sensibles.
Un point suspendu en l'air n'a qu'un aspect. Oui ,
un point Mathématique conçû en l'air,et qui n'est
qu'une abstraction de l'entendement ; mais si
c'est telle portion qu'on voudra de matiere , elle
aura toujours differents aspects relatifs à tout ce
qui l'environne. Je puis considerer l'angle d'une
fortification , en tant qu'il est saillant ; mais la
matiere qui compose cet angle , a nécessairement
an côté opposé et qui regarde la Place,
Le
876 MERCURE DE FRANCE
Le P. Castel m'impute une contre supposition
secrette , parce que j'ai dit que la plus petite por
tion de matiere ne cesse point , par la division
d'être matiere elle - même ; que la portion de matiere
la plus divisée qu'on puisse imaginer , étant
mise sur un plan , le touchera toujours par une de
ses parties , et ne le touchera pas par celle qui est
au-dessus, Il n'y a aucune contre- supposition ni expresse
ni secrette dans cette hypotèse . La portion
de matiere , la plus petite et la plus divisée qu'on
puisse imaginer, est encore divisible, parce que l'imagination
est finie, et que la divisibilité est infinie.
Ou si ces expressions de la portion de la
Matiere la plus petite et la plus divisée qu'on
puisse imaginer, déplaisent au P. Castel , il n'y
a qu'à dire qu'une portion de matiere , quelque
petite et quelque divisée qu'on la suppose , étant
mise sur un plan, le touchera toujours par une de
ses parties , et ne le touchera pas par celle qui est
au-dessus.
Le P. Castel continuë ainsi : Le point, la ligne,
la surface , appartiennent à l'étendue , sont dans
P'étendue indépendamment de notre entendement.
Je répons qu'au contraire le point , la ligne , la
surface , n'appartiennent en aucune maniere à
l'étendue et n'y sont point ni dépendamment ni
indépendamment de notre entendement. L'esprit
les considere abstractivement, mais ils ne peuvent
être réellement dans l'étendue . Tout ce qui est.
étendu et matériel , a nécessairement longueur ,
largeur et profondeur .
Ya-t'il rien de plus réel , dh le P. Castel , que
les bornes qui terminent quelque chose ? Non, sans
doute , mais si je ne fais attention en elles qu'à
cette qualité terminative , pour ainsi - dire , c'est
ane abstraction de l'entendement , Si je considere
MAY . 1734. 877
les bornes telles que réellement elles existent , si
je les considere comme des corps ou des portions
de corps , elles ne peuvent cesser d'avoir un côté
interieur joint à un exterieur , et d'être composées
de parties. Car toute portion d'un corps est
matér! elle , et elle - même est un corps.
Quoi ! je puis , dit le P. Castel , par une operation
aussi grassiere que l'est le toucher , faire le discernement
de la surface et du corps , toucher la surface,
longueur et largeur , sans toucher la profondeur , et
vous me direz que ces choses -là ne sont pas réellement
distinctes , et qu'elles ne le sont que par une
operation de l'esprit , tandis qu'elles le sont par
une operation de l'oeil et même de la main? Car
absolument ce que je vois et ce que je touche , n'a
point de profondeur. Au - dessous je sçais bien qu'il
ya une profondeur , mais elle appartient au corps
e non à la surface.
être
Ces paroles renferment la démonstration la
plus forte de la divisibilité à l'infini et l'exclusion
la plus formelle des atomes , puisque , de l'aveu
du P. Castel , la profondeur est réellement distincte
de la longueur , et que l'une ne peut
sans l'autre, Donc tout ce qui est Physique est
composé de parties réellement distinctes ; donc
il ne peut y avoir de point physique , le point
étant un, simple et sans parties ; donc la plus petite
portion de matiere qu'on puisse imaginer ,
peut encore devenir plus petite et ne peut cesser
d'être divisible ; C. Q. F. D.
Je puis me promener sur une Montagne sans
descendre dans une Vallée. Le P. Castel voudroit-
il en conclure qu'une Montagne peut être
sans vallée Une portion de matiere ne peut pas
être davantage sans longueur , largeur et profon
deur , disons plus, sans une multiplicité de partiog
878 MERCURE DE FRANCE
ties et d'aspects qui répondent à tous les corps
qui l'environnent , qu'une montagne peut être
sans vallée .
Mais je suppose que le Systême des atomes
soit soutenable : ces atomes , au moins , ne peuvent
être inégaux. Car leur difference seroit une
multiplicité de parties , et le plus gros pourroit
par un retranchement être rendu égal au plus
petit. Les atomes inégaux du P. Castel reviennent
au même que les points naissants et évanouissants
, auxquels Newton attribue differens
rapports entr'eux . L'inégalité des points Mathématiques
, quoique soutenue par ces deux Auteurs
celebres , n'en est pas moins contradictoire,
Après avoir rapporté la démonstration suivante
du P. Castel ; Dans un quarré qui à sa
diagonale , les lignes qui coupent ce quarré
parallelement à l'autre côté , coupent la diagonale
en autant de points , ni plus ni moins ; or la diagonale
est plus grande que le côté; donc les points d'in
tersection sont plus grands , ce qu'il falloit démontrer.
J'ai pleinement réfuté ce raisonnement
que le P. Castel dit que je n'ai pas jugé à propos
d'entamer , et je l'ai réfuté de la maniere la
plus directe , en faisant voir qu'il ne résulte autre
chose de l'hypothèse , sinon que les intervalles
d'intersection sont plus grands dans la dia
gonale que dans le côté du quarré.
C'est une pétition de principe, de prétendre que
le point est plus grand dans un plus grand cercle
: Euclide a bien sûrement pensé le contraire ,
lorsqu'il a démontré que dans tout cercle on ne
peut tirer qu'une tangente au même point. Les
objections qu'on peut faire sur le point de contact
d'un plus grand cercle , se rapportent au
cercle matériel , où il ne peut y avoir de point
MaMAY.
1734. 879
Mathématique et dans lequel la précision géométrique
ne peut se rencontrer,
pour
Quant à ce que le P. Castel donne l'expression
simple d'une chose bien sublime ,
xo1 ; il me permettra de dire que je n'y
trouve aucune sublimité ; et les principes que j'ai
expliquez , ne m'y laissent appercevoir qu'une
double impossibilité , dont les deux parties se
detruisent par la division et la multiplication.
Il est temps de finir une Dissertation aussi
abstraite. La Géométrie qui va rigoureusement
à la précision du vrai , est fort éloignée de l'esprit
de dispute. Ne donnons pas lieu aux Dialec
ticiens et aux Physiciens de prétendre que cett
science soit , comme les leurs , sujette aux contrarietez
d'opinions.
Aubin , au Problême sur l'Essence de
la Matiere.
' Ay affaire aujourd'hui à trois Géometres , à
deux Anonymes et au P. Castel. Le premier
des Anonymes croit que , suivant mon aveu ,
toute la solidité de la Géométrie réside dans le
Problême sur l'Essence de la Matiere , dont il se
déclare l'Auteur ; et il me fait dire en propres
termes , que la Géométrie n'est pas plus solide ,
quoique je n'aye comparé le Problème qu'aux
écueils de raisonnement , que la plupart des Géométres
n'ont pas évitez . C'est ce qu'il est facile
de voir dans la premiere Partie de ma Réponse.
L'Analise de l'Infini se propose de pousser toujours
en avant son Calcul , sans se soucier des
absurditez. Suivant ce Principe , elle considere
les quantitez positives et les négatives , les possibles
et les imaginaires , les vrayes et les absurdes .
Ces distinctions sont si bien établies , que les termes
de nul , d'imaginaire et d'absurde , sont propres
à la science et affectez à differentes quantitez
Algebriques. Elle tire de l'infini des solutions
plus courtes , des vûës plus étenduës , une analogie
et des expressions plus generales .
Mais les écueils du raisonnement qu'elle rencontre
sur sa route , elle ne doit les considerer
que comme des ecueils ; ce qui est compris dans
le Calcul , ne devant pas toujours passer dans le
raisonnement. Et c'est encore un avantage de
l'infini , d'avertir quand il se présente dans une
anaMAY.
1734. 873
analogie, que la supposition cesse d'être possible .
L'Auteur du Problême , au contraire , veut
guider le raisonnement par des opérations qui
ne sont propres qu'au Calcul . Il prétend trouver
par le Calcul , que le mouvement infini est égal
au repos ; et partant de cette conclusion absurde ,
il detruit toutes les propriétez de la Matiere ; il
la réduit à une simple possibilité , ce qui est nier
son existence ; et il soutient qu'un corps peut
être à la fois dans tous les lieux de l'Univers.
Mais , dira- t'on , le Calcul est donc imparfait
et trompeur , puisqu'il a donné à l'Auteur du
Problême cette premiere conclusion de l'égalité
du mouvement infini et du repos.
0 .
Je réponds que l'Auteur du Problême a dû
s'appercevoir que le Calcul lui donnoit les deux
contradictoires , sçavoir , moe , et mo
Car il est évidemment contradictoire que e ,
quantité de mouvement finie , soit égale à o
nullité de mouvement. Il n'y a rien de plus opposé
à la précision du Calcul , que d'en inferer
qu'une quantité de mouvement soit en mêmesemps
réelle et déterminée , et qu'elle soit nulle.
Toute grandeur , multipliée par zero, est égale
à zéro ; et si d'une grandeur multipliée par zéro,
il résulte un produit réel , c'est une marque infail
lible que cette grandeur est absurde.
Est - ce la faute du Calcul ? Ce ne l'est en aucune
maniere. Sa charge est autre que celle du raisonnement.
Suivant le raisonnement , à une demande
absurde point de réponse; suivant le calcul
, à une demande absurde , réponse absurde.
Vous interrogez le calcul par l'infini , grandeur
absurde en Géométrie , que vous supposez
séelie ; le calcul vous répond une absurdité , qui
est une confirmation de l'absurdité de l'infini
géométriques
La
874 MERCURE DE FRANCE
La Géométrie transcendante considere comme
point de rencontre un point , qui par la supposition
ne peut rencontrer . Elle examine aussi dans
la réunion des deux points , les rapports qu'auroient
ces deux points séparez . C'est - là tout le
mystere de l'infini , auquel rien ne manque du
côté du Calcul , et auquel il ne manque du côté
du raisonnement , que d'employer des mots qui
Bussent de la justesse et qui parussent moins merveilleux
; ce qui seroit facile.Voilà quels sont les
vrais principes de la Géométrie de l'infini ; et
quoiqu'ils n'ayent été expliquez nulle part , je ne
crains pas qu'ils soient désavouez par les plus
sçavans Géométres . C'est deffendre cette Géométrie
que de montrer qu'elle n'a aucune part
au Scepticisme et aux inclusions inconcevables ,
que l'Auteur du Problême a voulu y introduire.
Dans le même Mercure de Janvier , un autre
Géométre s'est imaginé que j'attaquois la Géométrie
, en tant que ses Elements , qui sont des
points , des lignes , des surfaces , ne sont que des
abstractions de l'entendement sans réalité. C'est
l'ancienne objection des Sceptiques , renouvellée
par Bayle. Les Géométres ont raison de ne s'y
pas arrêter. Quoique la précision géométrique
ne puisse être executée réellement et dans la matiere,
c'est un objet très- digne de l'entendement,
et qui conduit à la plus grande exactitude réelle
qui soit possible . Mais cette question n'étoit
qu'indirecte ; il s'agissoit de sçavoir si le passage
du fini à l'infini peut se faire par l'exaltation
du point à la ligne , de la ligne à la surface , &c.
et j'ay soutenu que les Infinitaires ne l'entendent
ni ne le peuvent entendre ainsi ; car une infinité
de surfaces n'est point un solide.
Le P. Castel est depuis survenu dans le Mercu
MAY. 1734- 875
re de Février. Il ne touche pas la plupart des
questions principales , sçavoir si , en Géométrie ,
on peut expliquer le passage du fini à l'infini ; si
la matiere n'est qu'une simple possibilité ; si c'est
une chose concevable que l'Etre absorbé dans le
néant ; si le plusqu'infini , les differens ordres
d'infinis et le simple infini géométrique actuelle
ment subsistant , sont des objets réels de l'entendement
ou des contradictions.
Le P. Castel se renferme dans la question de
la divisibilité à l'infini , si souvent debattuë et qui
appartient plus à la Physique qu'à la Géométrie.
Les Points , dit-il , que j'admets , sont de vrais
Points Physiques , autant que géométriques. Il admet
donc de vrais atomes , en même- temps qu'il
soutient l'infini géométrique , les differens ordres
d'infinis et le plusqu'infini .
Il vient de dire que le Point,qu'il admet; est Phy-
Bique , c'est à-dire , qu'il est matériel ou qu'il
est un corps et pour faire entendre qu'en suivant
le sentiment de la divisibilité à l'infini , il a été
dans l'erreur , il dit aussi- tôt après : le Point que
je concevois étoit un corps ; c'est- à - dire, que le
Point qu'il conçoit aujourd'hui , n'est pas un
corps , ou que le Point qu'il admet , n'est pas un
Point Physique.
Il nous donne ensuite des exemples sensibles.
Un point suspendu en l'air n'a qu'un aspect. Oui ,
un point Mathématique conçû en l'air,et qui n'est
qu'une abstraction de l'entendement ; mais si
c'est telle portion qu'on voudra de matiere , elle
aura toujours differents aspects relatifs à tout ce
qui l'environne. Je puis considerer l'angle d'une
fortification , en tant qu'il est saillant ; mais la
matiere qui compose cet angle , a nécessairement
an côté opposé et qui regarde la Place,
Le
876 MERCURE DE FRANCE
Le P. Castel m'impute une contre supposition
secrette , parce que j'ai dit que la plus petite por
tion de matiere ne cesse point , par la division
d'être matiere elle - même ; que la portion de matiere
la plus divisée qu'on puisse imaginer , étant
mise sur un plan , le touchera toujours par une de
ses parties , et ne le touchera pas par celle qui est
au-dessus, Il n'y a aucune contre- supposition ni expresse
ni secrette dans cette hypotèse . La portion
de matiere , la plus petite et la plus divisée qu'on
puisse imaginer, est encore divisible, parce que l'imagination
est finie, et que la divisibilité est infinie.
Ou si ces expressions de la portion de la
Matiere la plus petite et la plus divisée qu'on
puisse imaginer, déplaisent au P. Castel , il n'y
a qu'à dire qu'une portion de matiere , quelque
petite et quelque divisée qu'on la suppose , étant
mise sur un plan, le touchera toujours par une de
ses parties , et ne le touchera pas par celle qui est
au-dessus.
Le P. Castel continuë ainsi : Le point, la ligne,
la surface , appartiennent à l'étendue , sont dans
P'étendue indépendamment de notre entendement.
Je répons qu'au contraire le point , la ligne , la
surface , n'appartiennent en aucune maniere à
l'étendue et n'y sont point ni dépendamment ni
indépendamment de notre entendement. L'esprit
les considere abstractivement, mais ils ne peuvent
être réellement dans l'étendue . Tout ce qui est.
étendu et matériel , a nécessairement longueur ,
largeur et profondeur .
Ya-t'il rien de plus réel , dh le P. Castel , que
les bornes qui terminent quelque chose ? Non, sans
doute , mais si je ne fais attention en elles qu'à
cette qualité terminative , pour ainsi - dire , c'est
ane abstraction de l'entendement , Si je considere
MAY . 1734. 877
les bornes telles que réellement elles existent , si
je les considere comme des corps ou des portions
de corps , elles ne peuvent cesser d'avoir un côté
interieur joint à un exterieur , et d'être composées
de parties. Car toute portion d'un corps est
matér! elle , et elle - même est un corps.
Quoi ! je puis , dit le P. Castel , par une operation
aussi grassiere que l'est le toucher , faire le discernement
de la surface et du corps , toucher la surface,
longueur et largeur , sans toucher la profondeur , et
vous me direz que ces choses -là ne sont pas réellement
distinctes , et qu'elles ne le sont que par une
operation de l'esprit , tandis qu'elles le sont par
une operation de l'oeil et même de la main? Car
absolument ce que je vois et ce que je touche , n'a
point de profondeur. Au - dessous je sçais bien qu'il
ya une profondeur , mais elle appartient au corps
e non à la surface.
être
Ces paroles renferment la démonstration la
plus forte de la divisibilité à l'infini et l'exclusion
la plus formelle des atomes , puisque , de l'aveu
du P. Castel , la profondeur est réellement distincte
de la longueur , et que l'une ne peut
sans l'autre, Donc tout ce qui est Physique est
composé de parties réellement distinctes ; donc
il ne peut y avoir de point physique , le point
étant un, simple et sans parties ; donc la plus petite
portion de matiere qu'on puisse imaginer ,
peut encore devenir plus petite et ne peut cesser
d'être divisible ; C. Q. F. D.
Je puis me promener sur une Montagne sans
descendre dans une Vallée. Le P. Castel voudroit-
il en conclure qu'une Montagne peut être
sans vallée Une portion de matiere ne peut pas
être davantage sans longueur , largeur et profon
deur , disons plus, sans une multiplicité de partiog
878 MERCURE DE FRANCE
ties et d'aspects qui répondent à tous les corps
qui l'environnent , qu'une montagne peut être
sans vallée .
Mais je suppose que le Systême des atomes
soit soutenable : ces atomes , au moins , ne peuvent
être inégaux. Car leur difference seroit une
multiplicité de parties , et le plus gros pourroit
par un retranchement être rendu égal au plus
petit. Les atomes inégaux du P. Castel reviennent
au même que les points naissants et évanouissants
, auxquels Newton attribue differens
rapports entr'eux . L'inégalité des points Mathématiques
, quoique soutenue par ces deux Auteurs
celebres , n'en est pas moins contradictoire,
Après avoir rapporté la démonstration suivante
du P. Castel ; Dans un quarré qui à sa
diagonale , les lignes qui coupent ce quarré
parallelement à l'autre côté , coupent la diagonale
en autant de points , ni plus ni moins ; or la diagonale
est plus grande que le côté; donc les points d'in
tersection sont plus grands , ce qu'il falloit démontrer.
J'ai pleinement réfuté ce raisonnement
que le P. Castel dit que je n'ai pas jugé à propos
d'entamer , et je l'ai réfuté de la maniere la
plus directe , en faisant voir qu'il ne résulte autre
chose de l'hypothèse , sinon que les intervalles
d'intersection sont plus grands dans la dia
gonale que dans le côté du quarré.
C'est une pétition de principe, de prétendre que
le point est plus grand dans un plus grand cercle
: Euclide a bien sûrement pensé le contraire ,
lorsqu'il a démontré que dans tout cercle on ne
peut tirer qu'une tangente au même point. Les
objections qu'on peut faire sur le point de contact
d'un plus grand cercle , se rapportent au
cercle matériel , où il ne peut y avoir de point
MaMAY.
1734. 879
Mathématique et dans lequel la précision géométrique
ne peut se rencontrer,
pour
Quant à ce que le P. Castel donne l'expression
simple d'une chose bien sublime ,
xo1 ; il me permettra de dire que je n'y
trouve aucune sublimité ; et les principes que j'ai
expliquez , ne m'y laissent appercevoir qu'une
double impossibilité , dont les deux parties se
detruisent par la division et la multiplication.
Il est temps de finir une Dissertation aussi
abstraite. La Géométrie qui va rigoureusement
à la précision du vrai , est fort éloignée de l'esprit
de dispute. Ne donnons pas lieu aux Dialec
ticiens et aux Physiciens de prétendre que cett
science soit , comme les leurs , sujette aux contrarietez
d'opinions.
Fermer
Résumé : SUITE de la Réponse de M. de Saint-Aubin, au Problême sur l'Essence de la Matiere.
Le texte présente une réponse à des critiques concernant l'essence de la matière et la géométrie, impliquant trois géomètres : deux anonymes et le Père Castel. Le premier anonyme soutient que la solidité de la géométrie repose sur le problème de l'essence de la matière et accuse l'auteur de la réponse de considérer la géométrie comme fragile. L'auteur de la réponse explique que l'analyse de l'infini utilise diverses quantités pour obtenir des solutions plus courtes et des vues plus étendues, mais critique l'utilisation incorrecte du calcul qui mène à des conclusions absurdes, comme l'égalité du mouvement infini et du repos. Il défend la géométrie de l'infini en distinguant les rôles du calcul et du raisonnement. Un autre géomètre anonyme accuse l'auteur de la réponse d'attaquer la géométrie en considérant ses éléments comme des abstractions sans réalité. L'auteur réplique que, bien que les éléments géométriques soient abstraits, ils sont dignes de l'entendement et conduisent à une grande exactitude. Le Père Castel aborde la question de la divisibilité à l'infini, admettant des points physiques tout en soutenant l'infini géométrique. Il donne des exemples pour illustrer ses arguments, mais l'auteur de la réponse conteste ses suppositions et démontre la divisibilité infinie de la matière. L'auteur conclut en affirmant que la géométrie vise la précision du vrai et doit éviter les disputes. Il réfute les objections du Père Castel sur les points mathématiques et leur taille dans les cercles.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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19
p. 7-30
IDÉES DES PROGRÈS De la Philosophie en France.
Début :
La Philosophie est de toutes les sciences celle qui a fait les progrès les plus [...]
Mots clefs :
Philosophie, France, Progrès, Esprit, Système, Newton, Descartes, Physique, Nature, Philosophes, Géométrie, Découvertes, Observations
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IDÉE DES PROGRES
Les
De la Philofophie en France.
a
A Philofophie eft de toutes les fciences
celle qui a fait les progrès les plus
rapides de nos jours ; les autres connoif-
Lances n'ont pas été portées à un dégré de
perfection plus haut que dans les beaux
fécles de la Grece & de Rome. Les reffources
de l'art font bornées ; l'efprit humain
ne faifant que fe replier fur lui - même ,
a bientôt parcouru la petite fphere de fes
idées , & trouvé les limites que la main
éternelle a prefcrites à fon activité. Au
lieu que la nature eft un abyfme où l'oeil
du Philofophe fe perd fans en trouver jamais
le fond ; c'eft une carriere immenfe
& dont l'immenfité femble augmenter à
mefure qu'on y pénétre plus avant . Les
Philofophes modernes , qui femblent avoit
marché à pas de géans dans cette carriere
, & qui ont laiffé les anciens fi
loin derriere eux , n'ont fait que nous
montrer le but ; les nouvelles lumieres
qu'ils ont portées dans la nuit de la nature
n'ont pas été affez vives pour nous conduire
à la vérité , & n'ont guere fervi qu'à
A iiij
8 MERCURE DE FRANCE.
nous éclairer fur l'intervalle énorme qui
nous en féparoit encore. Mais fi le méchanifme
de l'univers eft toujours un fecret
pour nous , du moins pouvons- nous
nous flatter d'être fur la bonne route pour
le découvrir ou pour fentir l'impoffibilité
d'y réuffir. Les François ne font pas ceux
qui ont eu le moins de part aux progrès
de la philofophie ; le grand Defcartes qui
a fi bien mérité d'en être appellé le pere ,
a ouvert le premier la carriere , & a fervi
de guide aux philofophes qui l'ont fuivi .
On fçait affez le defpotifme avec lequel
la philofophie d'Ariftote regnoit fur les
bancs de l'école ; le fanatifme pour fes décifions
étoit monté au plus haut point de
l'extravagance ; on ne cherchoit plus à
concilier fes principes avec les phénomenes
de la nature qui les contredifoient ,
c'étoit les phénomenes que l'on vouloit
adapter à ces principes. Quelques bons efprits
avoient connu les abfurdités du péripatetime
, & avoient fait de vains efforts
pour en réformer les abus : cette philofophie
qu'on avoit eu raifon d'admirer
dans des fiécles d'engourdiffement & de
barbarie de l'efprit humain , avoir été
confacrée par le tems , l'ignorance & le
pédantifme. Bacon parut ; ce grand homme
vit les entraves que cette fuperfti
DECEMBRE . 1754.
tion ridicule mettoit à la raifon ; il ofa
propofer de refondre le fyftême des connoillances
humaines , & démontra la néceffité
d'une nouvelle méthode pour étudier
la nature. Ce que l'illuftre Anglois
n'avoit fait qu'entrevoir , Defcartes l'exécuta
: il détruifit de fond en comble le péripatétifme
, & chercha à élever un nouveau
fyftême fur d'autres fondemens.
Il n'y avoit alors que l'aftronomie & les
mathématiques qui fuffent cultivées avec
fuccès , les autres parties de la philofophie
étoient prefque abandonnées ; d'ailleurs
elles étoient entierement détachées
les unes des autres , & traitées féparément :
un aſtronome n'étoit qu'aftronome , un
géometre n'étoit que geometre , un médecin
n'étoit que médecin , un métaphyficien
n'étoit rien . Defcartes apperçut les
rapports qui lioient ces différentes connoiffances
, & les fecours qu'elles devoient fe
prêter l'une à l'autre ; il rapprocha ces
membres épars , & n'en fit qu'un feul corps
de fcience.
Il appliqua l'algebre à la géométrie , &
la géométrie à la phyfique : c'est à cette
idée fublime , à ce coup de génie qu'il faut
rapporter les progrès étonnans qu'on a fait
dans les fciences phyfico-mathématiques.
On peut dire qu'il a créé la métaphysique ,
A v
10 MERCURE DE FRANCE.
par la diftinction auffi fimple que lumineu
fe des deux fubſtances ; diſtinction qui
anéantit les difputes frivoles & ridicules
des métaphyficiens fcholaftiques fur la nature
de l'ame , & par fon admirable méthode
, à laquelle nous devons peut- être
cet efprit philofophique qui s'eſt développé
dans fon fiécle , & a fait des progrès fi
fenfibles dans le nôtre. Il a pris la géomé
trie où les anciens l'avoient laiffée , & en
a reculé bien loin les limites . Enfin il 2
répandu une nouvelle lumiere par- tout ;
mais elle n'a guere fervi qu'à ceux qui
font venus après lui , & ne l'a pas empêché
de s'égarer. Il auroit deviné la nature
fi elle avoit pû fe deviner ; mais il
falloit l'obferver , & il n'en a pas eu le
tems fes erreurs appartiennent à la foi
bieffe de l'humanité & à l'ignorance de fon
fiécle ; mais fes découvertes ne font qu'à
lui ainfi en abandonnant fes idées fauffes
, refpectons toujours fon génie , admi
rable même lorfqu'il s'eft trompé . L'hy
pothefe brillante des tourbillons , fi célé→
bre , fi combattue , & fi bien détruite par
les nouvelles obfervations , ne feroit fûrement
pas entrée dans la tête d'un hommemédiocre
; fon fyftême fur l'ame des bêtes ,
regardé communément comme une plaifanterie
, & ridicule aux yeux de bien des
DECEMBRE. 1754 .
gens , eft à mon avis une idée plus férieufe
, & qui s'étend plus loin qu'on ne penfe ,
lorfqu'on la confidere dans tous fes rapports
: demandez- le à Bayle , & au médecin
Lami.
Je me fuis beaucoup étendu fur Defcartes
, parce qu'on commence à oublier
tout ce qu'on lui doit. Comme la plupart
de fes ouvrages ne font plus d'une grande
utilité , parce qu'on a été plus loin que
lui , on ne fe fouvient plus que fans lui ,
peut-être on feroit encore dans les ténébres.
Lorfqu'il a paru , la philofophie étoit
une terre en friche : elle n'a pas produit
beaucoup de fruits fous fes mains ; mais il
en a arraché les ronces , il l'a préparée , &
a appris à là rendre féconde : en eft - ce trop
peu pour mériter notre reconnoiffance ?
Je ne peux m'empêcher de le regarder comme
un homme rare , qui fubjugué par l'impulfion
du génie , étoit né pour faire une
révolution , & dont les découvertes feront
une des plus brillantes époques de l'hiftoire
de l'efprit humain.
Gaffendi , contemporain de Descartes",
mérite auffi une place honorable dans l'hiftoire
de la philofophie , quoiqu'il n'ait pas'
travaillé avec beaucoup de fuccès pour elle.
Né avec un génie extrêmement méthodique
& une fagacité peu commune , il fue
Avj
12 MERCURE DE FRANCE.
révolté , comme Defcartes , des abfurdités
de la fcholaftique : il la combattit avec vivacité
, & voulut relever le fyftême d'Epicure
, pour l'établir fur les débris de celui
d'Ariftote . Il employa beaucoup d'adreffe
& de fubtilité pour expliquer la
formation & la confervation de l'univers
par le mouvement direct & la déclinaifon
des atômes . Il donna à cette hypotheſe un
vernis d'orthodoxie , & toute la probabi
lité dont elle étoit fufceptible ; mais cette
fecte des atomiftes modernes ne fut pas
nombreuſe ; chimere pour chimere , on
garda celle qui étoit déja établie , quoique
plus abfurde encore .
Le cartéfianifme n'eut pas le même fort ,
parce qu'il étoit mieux fondé ; il fit une
fortune étonnante dans toute l'Europe , il
eut les adverfaires & les fectateurs les plus
diftingués ; il fut profcrit en France , rétabli
enfuite , & adopté avec empreffement
dès qu'il fut mieux connu .
Mrs Rohault & Regis furent les premiers
qui le profefferent en France , & ils
le firent avec un fuccès & des applaudiffemens
finguliers. Mais le plus illuftre partifan
de Defcartes fut fans doute le P. Malebranche
, de l'Oratoire , phyficien , géometre
, & plus grand métaphyficien encore
; il ne prit que les principes de fon
2
I
a
DECEMBRE. 1754. 13
maître , & s'en fervit en homme de génie.
Il adopta fon fyftême des tourbillons ,
après y avoir reformé beaucoup de choſes ,
& le défendit avec vigueur. Dans la métaphyfique
il alla beaucoup plus loin que
Defcartes ; fes principes le conduifirent à
nier l'existence des corps , & s'il l'admit ,
ce fut parce que l'Ecriture Sainte le lui enfeignoit
: quelque finguliere que foit cette
conclufion , on ne peut prefque pas douter
qu'il n'ait été de la meilleure foi du monde .
Il prétendit démontrer que nous nepouvions
pas voir les objets hors de nous , encore
inoins dans nous , & que nous ne pouvions
les appercevoir que dans Dieu. Il étaya ces
idées abftraites de la métaphyfique la plus
fubtile, d'une élocution pleine de force & de
nobleffe , & de l'imagination la plus brillante
: mais malgré ces avantages , la profondeur
&l'obfcurité de fes idées garantirent de
la féduction. Il faut une grande contention
d'efprit & un grand goût de métaphyfique
pour le fuivre dans fes fpéculations ; ce
font des espéces de points indivisibles , dit M.
de Fontenelle : fi on ne les attrappe pas toutà-
fait jufie , on les manque tout - à -fait . Aufli
le P. Mallebranche fe plaignit-il beaucoup
de n'être pas compris par ceux qui le critiquoient.
On fçait que M. Arnaud attaqua
fon fyftême avec un acharnement des
14 MERCURE DE FRANCE.
moins philofophiques . M. Arnaud ne m'en.
tend pas , difoit Mallebranche : cb qui voulez
- vous donc qui vous entende ? lui répondit-
on .
Le mallebranchifme a fait naître la fecte
des immatérialistes , fort peu reçue en France
, mais qui a fait plus de progrès en Angleterre
; ces philofophes nient l'existence
de la matiere , telle que nous la concevons
, & même fa poflibilité ; les illufions
des fens font leur grand argument : ils
prouvent très-bien que les qualités que
nous regardons comme inhérentes aux
corps , telles que la couleur , l'étendue ,
&c. ne font que de pures idées de notre
ame, qui n'exiftent point hors d'elle , & qui
n'ont aucune analogie avec la nature des
objets qui les excitent en nous. Les dialogues
de Berkeley , ouvrage fingulier , où
Fon trouve une logique fubtile avec beaucoup
de fimplicité , font voir combien ce
fyftême eft féduifant, quelque abfurde qu'il
paroiffe au premier coup d'oeil , & combien
font preffans les argumens fur lef- ,
quels il est établi. Quelques-uns pouffent
encore ces idées plus loin , & prétendent
que chaque individu n'eft fûr que de fa
propre exiftence , & qu'il pourroit avoir
routes les idées & les fenfations dont il eft
affecté , fans qu'il y eût aucun autre être
DECEMBRE. 1754. 15
hors de lui ; c'eft la fecte des Egorftes : quel
que inacceffible qu'elle foit aux traits de
la métaphyfique , elle révolte trop les notions
les plus fimples pour trouver beaucoup
de fectateurs.
M. de Fontenelle a peut-être mieux mérité
de la philofophie que beaucoup de
ceux qui l'ont enrichie de découvertes. On
ne voit que des dévots qui dégoûtent de la dévotion
, dit un de nos moraliſtes. Avant
M. de Fontenelle on voyoit des philofophes
qui dégoûtoient de la philofophie ;
il fit voir que ce n'étoit pas la faute de la
philofophie : il la dépouilla de cet air fauvage
qui la rendoit fi peu trairable ; il l'embellit
des graces de fon imagination , & il
fit naître des fleurs où l'on ne foupçonnoit
que des épines : fon livre de la pluralité
des mondes eft un monument qui lui
fera autant d'honneur qu'à l'efprit de la
nation.
Qu'on me permette une digreffion à
laquelle je ne peux me refufer , & que
l'efprit de patriotifme m'arrache. Il y a
long- tems qu'on accufe les François d'être
legers & fuperficiels , & de ne faire qu'effleurer
les fciences : les Anglois , dit- on ,
font bien plus philofophes que nous : pourquoi
? parce qu'ils traitent la philofophie:
d'un air grave & ferieux. Et moi je crois
"
16 MERCURE DE FRANCE.
que nous le fommes pour le moins autant
qu'eux , précisément parce que nous la traitons
légèrement ; il faut polléder bien nettement
une matiere philofophique , pour la
dégager des termes barbares , des idées abtrules
, & des épines du calcul fous lef
quels d'autres font obligés de l'envelopper
, & pour la réduire à un raifonnement
fimple , à des images fenfibles , & aux expreflions
les plus communes , pour lui prêter
même des ornemens : c'est ce que M.
de Fontenelle , & d'autres après lui ont fait
avec fuccès. Il y a des gens qui croyent
que la féchereffe eft effentielle aux ouvra
ges fcientifiques , comme il y en a eu jadis
qui ne croyoient pas qu'on pût être philofophe
fans avoir une barbe fale & un
manteau déchiré. Cet efprit de fuperficie
qu'on nous reproche , n'eft que le vernis de
nos ouvrages qui ne nuit point à leur folidité.
La raifon toute nue a fouvent l'air
rebutant ; nos écrivains la rendent aimable
en la parant de fleurs : c'eft le vaſe dont
on frotte les bords de miel , pour faire ava
ler à un enfant un reméde falutaire : aux
yeux du philofophe , les hommes ordinaires
font- ils autre chofe que des enfans ?
Le cartéfianifme commençoit à être reçu
affez généralement , fur tout en France
lorfque le newtonianiſme parut , & vint
DECEMBRE. 1754. 17
partager les efprits. Comme les ouvrages
de Newton paroiffoient inacceffibles fans le
fecours de la plus fublime géométrie , fon
fyftême ne fut pas répandu d'abord , & refta
quelque tems entre les mains de quelques
adeptes. M. de Maupertuis a été le premier
qui en a donné quelques effais dans
notre langue ; mais il étoit réfervé à un
homme qui ne s'étoit fait qu'un jeu de la
phyfique & de la géométrie , de le produire
au grand jour c'eft M. de Voltaire . Il
donna fes Elémens de la philofophie de Newton
, ouvrage écrit avec la précifion , l'élégance
& la netteté qui lui font propres.
Ce livre fit une fenfation prodigieufe , &
par le nom de l'Auteur , & par les nouveautés
philofophiques qu'il mettoit fous
les yeux du public. D'abord les géometres
que M. de V. humilioit , & les beaux efprits
qu'il avoit humiliés dès long - tems ,
fe déchaînerent à l'uniflon contre lui ; il
paroiffoit inconcevable qu'un homme qui
avoit fait de beaux vers pût être géometre
& phyficien : on ne peut pas mieux
parler , difoit-on , de ce qu'on n'entend
pas ; comme fi l'efprit , en philofophie ,
pouvoit fuppléer aux lumieres. Pour apprécier
le mérite de cet ouvrage & la prévention
ridicule de certaines gens qui ne
font pas même en état de le lire , il faut
18 MERCURE DE FRANCE.
jetter les yeux fur les critiques qu'on en
fit dans le tems. Cette multitude de fautes
énormes qu'on devoit mettre au grand jour ,
fe réduisirent à des erreurs légeres , à quelques
mauvaifes épigrammes , à des ob
jections vagues , & dont la plupart tomboient
fur Newton , & non pas fur M. de
Voltaire . D'ailleurs quand il n'auroit pas
bien faifi Newton dans quelques détails ,
quel eft le phyficien qui puiffe fe flatter
de ne l'avoir jamais manqué : Le reproche
le mieux fondé qu'on ait fait à M. de Voltaire
, c'est peut-être fur la maniere peu
avantageufe dont il a parlé de Deſcartes :
je ne peux pas mieux faire que de rapporter
ici quelques reflexions du P. Caftel à
ce fujet ( Mem. de Trev . Octob. 1739. )..
» M. de Voltaire a fi fort honoré notre
» nation par fes propres talens , qu'elle
peut bien lui pardonner le peu d'hon .
neur qu'elle lui enleve en rabaiffant
» Defcartes. En faveur de M. de Voltaire
» poëte , on devroir juger moins rigoureu-
» fement M. de Voltaire philofophe ; &
»en prenant les chofes du bon côté , en-
>>core eft- ce une louable entrepriſe d'avoir
» ofé s'enfoncer i avant dans des matie-
» res fi épineufes , au mépris de toutes ces
» fleurs qu'il pouvoit s'amufer à cueillir fi
agréablement , & toujours prêtes à éclore
ود
DECEMBRE . 1754 IS
fous fa main ; & n'eft-ce rien que la célébrité
qu'il a donnée à la philofophie ,
» & par conféquent aux philofophes ; l'oc-
» cafion même qu'il donne aux cartéfiens
de triompher du grand Newton ?
Le Newtonianifme une fois mis au
grand jour , fit fur les efprits des impreffions
bien différentes ; il fut adopté des
ans & attaqué par d'autres avec une égale
vivacité. Comme il battoit en ruine le cartéfianifme
, les Carréfiens fe mirent fur la
défenfive . M. Privat de Molieres , bon géometre
& affez fubtil phyficien , fut celui
qui défendit les tourbillons avec le plus de
faccès : il fentit bien qu'ils étoient en défaut
dans beaucoup de phénomenes , & il les réforma
en habile homme ; il les adapta aux
nouvelles expériences avec adreffe , & ii
fit fervir à confirmer fon fyftême les mê
mes obfervations que les Newtoniens apportoient
pour le détruire. Malgré tous
fes efforts cependant , les tourbillons tom
berent dans un difcrédit total , & on peut
dire qu'ils ont pouffé les derniers foupirs
entre les mains de M. de Fontenelle , dont
la Théorie des tourbillons fera vraisemblablement
le dernier ouvrage qu'on fera en leur
faveur.
Quelque abfurdités métaphyfiques que
le Newtonianifme entraîne après lui , on
20 MERCURE DE FRANCE.
ne peut nier que ce fyftême ne foit bien
féduifant ; il ſemble n'être fondé que fur
des faits & des démonftrations. La facilité
admirable avec laquelle il explique les mouvemens
des corps céleftes & beaucoup de
phénomenes julques- là inacceffibles , la fineffe
& la mutitude des obfervations qui en
font la bafe , & un grand étalage de calcul ,
en ont impofé ; on n'a pas voulu voir l'illufion
de quelques expériences , & le peu
de liaifon de certains faits avec les inductions
que Newton en tire pour établir fes
principes ; enfin la ruine des tourbillons
& la néceffité d'un fyftême pour le vulgaire
des philofophes , tout cela a beaucoup favorifé
l'établiffement de la nouvelle phyfique.
Peu de tems après , Madame la Marquife
du Chaſtelet vint auffi fe mettre fur
les rangs , & oppofer Leibnitz à Newton.
Leibnitz , commenté par M. Wolf , avoit
fait beaucoup de fortune en Allemagne ;
quelques idées métaphyfiques , de fimples
projections éparfes dans fes ouvrages , fe
font étendues fous la main de M. Wolf,
& ont donné matiere à beaucoup de gros
volumes , dans lefquels il a remis en honneur
le goût des définitions , & les termes
barbares de l'école combinés avec une méthode
féchement géométrique. Leibnitz
DECEMBRE. 1754. 21
n'a pas été fi heureux en France , quoique
Madame du Chaſtelet lui eût donné un
air plus François dans fes Inftitutions de
physique. Cet ouvrage et écrit avec beaucoup
de méthode , de nobleffe & de précifion
; mais il ne fit pas beaucoup de profélites
, & on ne jugea pas à propos de
croire aux Monades fur la parole de Madame
du Chaftelet . Cette femme illuftre a
laiffé entre les mains de M. de Clairault
une traduction Françoife du grand ouvrage
de Newton , avec des commentaires
très -profonds fur ce que les mathématiques
ont de plus fublime : ce livre eft prêt
à paroître. Madame du Chaftelet & cette
célébre Mlle Agnefi, qui profeffe les mathé
matiques à Boulogne , & qui a donné il y
quelques années un excellent ouvrage d'analyfe
, font des phénomenes qui feront
honneur au beau fexe , à la géométrie &
notre fiécle.
Quoique Newton l'ait emporté fur Defcartes
& Leibnitz , il s'en faut cependant
bien qu'il ait fubjugué tous les efprits ; il a
encore enFrance des adverfaires bien redoutables.
Il y a trop de chofes dans fon ſyſ
tême qui font de la peine à la raifon , pour
ne pas révolter tous ceux qui croyent encore
que la méthode de Defcartes eft la
feule qui puiffe nous conduire à la vérité,
22 MERCURE DE FRANCE.
1
s'il nous eft donné d'y atteindre .
1 Toutes ces difputes philofophiques ont
éclairé les efprits , le goût des fyftêmes
s'eft perdu , & a fait place à un fcepticifme
raifonné & modéré , fort généralement
répandu , & d'autant mieux établi qu'il
n'eft ni l'effet de l'ignorance , ni une affectation
de fingularité ; c'eft peut- être auffi
ce qui nuira le plus aux progrès de la philofophie.
Il faut donner l'effor à l'imagi
nation pour aller loin : les plus grandes
découvertes de fpéculation ne font gueres
que des heureuſes témérités du génie ,
& les plus habiles philofophes ont été des
gens à fyftêmes : ce n'eft qu'à force de s'égarer
en effayant differentes routes , que
l'on rencontrera la bonne.
Il est vrai que la voye des expériences ,
quoique la plus lente , eft bien plus sûret
& plus commode ; c'eft auffi celle qu'a
prife l'Académie des Sciences : elle a déclaré
qu'elle n'adoptoit aucun fyftême. Le
tems d'en faire un n'eft pas encore arrivé ,
il faut attendre que l'on ait affez de matériaux
pour bâtir un fyftême général de l'univers
; ce n'eft qu'en amaffant des obfervations
& en établiffant des faits , que l'on
pourra y parvenir. On s'eft donc jetté principalement
du côté de la phyfique expéri
mentale , comme la partie de la philo
1
I
1
DECEMBRE. 1754. 23
fophie dont l'utilité eft plus fenfible.
Bacon , Galilée & Torricelli ont jetté les
fondemens de la phyfique expérimentale ;
le premier par des vues neuves & fublimes
; Galilée par fa théorie de l'accéléra
tion du mouvement dans la chûte des
corps ; & Torricelli par fes expériences fur
la pefanteur de l'air. Ces découvertes importantes
ont porté dans la phyfique une
nouvelle lumiere , que les Boyle , les Pafcal
, les Newton , &c . ont encore étendue
bien au-delà : ce font des veines heureuſes
qui ont conduit à des mines fécondes .
Le goût des expériences s'eft répandu
chez toutes les nations fçavantes , & il eft
cultivé aujourd'hui avec beaucoup de foin
& de fuccès. Parmi ceux qui peuvent être
cités dans ce genre , on s'attend bien à voir
le nom de M. de Reaumur , qui a fait des
recherches approfondies fur plufieurs parties
de la phyfique , & principalement fur
l'hiftoire naturelle. Obfervateur exact &
infatigable , les plus petits détails n'échap
perent pas à la fineffe & à la fagacité qu'it
porte dans tous fes procédés : fon Hiftoire
des infectes , avec beaucoup de longueurs ,
eft remplie de chofes neuves , utiles & délicates
. Zélé pour le bien public , il n'a pas
dédaigné de confacrer fes talens à des objets
, petits en apparence , mais qui tendent
14 MERCURE DE FRANCE.
à perfectionner les arts méchaniques , ou
prévenir quelques befoins de la fociété .
Les moyens de faire une nouvelle teintud'augmenter
la fécondité des terres ,
de garantir les étoffes des teignes , de conferver
des oeufs frais pendant trois à quatre
mois , voilà les objets de fa curiofité & de
fon travail. Des vues auffi fages & auffi
eſtimables devroient fervir d'exemple à
beaucoup de fçavans , qui croiroient s'avilir
par de femblables détails , & qui facrifient
à des recherches brillantes des recherches
plus utiles , mais obfcures . M. de Reaumur
ne trouve pas dans tous fes concitoyens
les mêmes difpofitions à rendre juſtice à
fes travaux , mais il les trouvera dans fa
nation ; & fa réputation ne peut être bleffée
par les petites épigrammes & le mépris
affecté de quelques perfonnes qui , ce
me femble , n'ont pas pris confeil de leurs
lumieres & de leur philofophie.
C'eft bien ici le lieu de rendre à un philofophe
citoyen l'hommage que méritent
fes talens & l'emploi refpectable qu'il en
fait ; je parle de M. Duhamel , de l'Académie
des Sciences , à qui nous devons
l'excellent Traité de la culture des terres ,
dont les principes font fi peu connus & mériteroient
tant de l'être. Il a réuni fes lumieres
& fes obfervations aux découvertes
des
DECEMBRE. 1754. 25
des Anglois , qui dans cette partie effentielle
font bien faits pour être nos maîtres
& nos modeles. Il a cherché les moyens de
conferver les grains dans les greniers ; il
a imaginé une charrue d'une conftruction
neuve & fort commode , qui abrege beaucoup
les travaux des laboureurs , cette portion
du peuple la plus néceffaire & la plus
miférable. Les principes de M. Duhamel
font fimples & évidens ; on lui a rendu
juftice : mais c'eſt peu d'être loué , il veut
être utile ; & ce ne feroit pas la premiere
fois qu'un philofophe auroit parlé , qu'on
auroit trouvé qu'il a raifon , & que fes
avis n'auroient été fuivis. Quoiqu'il
en foit , on ne doit pas fe laffer de travailler
à la perfection de l'agriculture , qui en
ouvrant dans l'Etat une nouvelle fource
de richeffes réelles & permanentes , donneroit
à notre commerce le plus grand
avantage , & prefque le feul qui lui manque
fur celui de nos voisins .
pas
Si quelqu'un a eu l'efprit de fyftême
dans notre fiécle , je crois que c'eft M. de
Buffon : une tête philofophe , des vûes
grandes , une imagination forte & lumineufe
, & l'art de faifir les analogies ; voilà
ce qu'il m'a femblé appercevoir dans l'Hiftoire
naturelle , & ce qui forme , fi je ne
me trompe , l'efprit de fyftême. M. de Buf-
II.Vol. B
26 MERCURE DE FRANCE.
fon , qui par un ftyle riche , élégant , har
monieux , plein de nobleſſe & de poëfie ,
efface Platon & Mallebranche , & donne
à la philofophie un éclat qu'elle n'avoit
pas encore eu , n'a pas été plus heureux
que Deſcartes dans fes conjectures fur l'origine
du monde & la génération des animaux.
Mais fi l'hiftoire de notre globe par
M. de Buffon eft un roman , c'eft celui
d'un habile phyficien : fon hypotheſe fur
la génération marque les bornes de nos
lumieres dans cette matiere ténébreuſe , le
defefpoir de la phyfique : fes obfervations
microfcopiques fi délicates & fi fingulieres,
feront peut-être plus utiles , parce qu'il
eft toujours utile de détruire des erreurs.
Les anciens avoient cru , fur de fimples apparences
peu approfondies , que la corruption
pouvoit engendrer des animaux.
Lorfque le microfcope , qui a élargi l'univers
aux yeux des philofophes , eut découvert
à Hartzoeker & à Lewenhoek les animalcules
qui fe meuvent dans les liqueurs ,
on fe moqua beaucoup des anciens , & il
ne parut plus douteux que tous les êtres
vivans font déja organifés dans la femence
, & qu'ils ne font que fe développer &
augmenter de volume. Mais ce principe
reçu fans conteftation & avancé avec ce
ton de confiance que donne trop fouvent
DECEMBRE . 1754. 29
la chaleur des premieres découvertes , s'eſt
trouvé en défaut dans la reproduction merveilleufe
des polypes , & il eft anéanti
aujourd'hui par les expériences de MM. de
Buffon & de Needham ; la production des
petites anguilles qu'ils ont vû fe former
dans le bled niellé & dans d'autres infufions
, remet en honneur l'opinion des anciens
; nous avons cru voir une étincelle
de lumiere , & nous rentrons dans une nuit
plus fombre. Les animalcules fpermatiques
ne font plus que de petites machines or
ganifées & fans vie ; il eft vrai que les obfervations
microfcopiques font trop fuf
ceptibles d'illufion pour qu'on ne s'en dépas
: celles de Lewenhoek ont été détruites
par celles de M. de Buffon , cellesci
peuvent être détruites par d'autres ; dans
cette matiere obfcure on finit , comme dans
prefque toutes les autres , par douter.
fie
Les fectateurs de la philofophie corpufculaire
ne pardonneront pas aifément à
M. de Buffon d'avoir établi la poffibilité
de fes moules intérieurs fur la ruine du méchaniſme
univerfel , & d'avoir mieux ainé
expliquer la circulation du fang , le jeu des
muſcles , en général toute l'économie animale
par des qualités occultes femblables
aux caufes de la pefanteur , des attractions
magnétiques , &c. que par des principes
Bij
28 MERCURE DE FRANCE.
purement méchaniques ; cela pourroit faire
craindre , difent- ils , le retour du fiécle
d'Ariftote. Epicure créa la phyfique corpufculaire
; ne voyant dans la nature que
de la matiere & du mouvement , il ne
chercha pas d'autres caufes pour expliquer
tous les phénomenes ; mais n'ayant pas encore
affez de faits & d'obſervations , ce
principe lui manqua dans l'application ;
on crut pour lors que ce qu'on ne pouvoit
pas expliquer par les loix du méchanifme
ne s'opéroit pas par ces loix ; de là
l'horreur du vuide , de- là l'attraction , &c.
L'attraction , ce monftre métaphysique ,
dont on ne peut plus fe paffer dans la phy-.
fique célefte , s'eft introduite auffi dans la
chymie. Les affinités de M. Geoffroi ne
font que le même terme déguifé ; elles paroiffent
préfenter une idée plus fimple , &
n'en font pas moins inintelligibles . Nous
devons aux Anglois cet abus de l'attraction ,
auffi bien que celui du calcul : ils réduifent
tout en problêmes algébriques ; l'antique
fuperftition fur la fcience mystérieuse
des nombres femble renaître . Jean Craig
a ofé calculer les dégrés de probabilité
des principes du chriftianifme , & le décroiffement
de cette probabilité : felon fes
calculs , la religion ne peut plus durer que
1400 ans. L'eſtimable auteur de l'Hiftoire
DECEMBRE . 1754 29
critique de la philofophie a calculé auffi les
dégrés de force de la certitude morale . Le
Chevalier Petty , créateur de l'arithmétique
politique , a cru pouvoir foumettre à
l'algebre l'art même de gouverner les hommes.
Le résultat de quelques -uns de fes
calculs peut faire juger de leur folidité ;
il croit avoir démontré que le grand nombre
des impôts ne fçauroit être nuifible à
la fociété & au bien d'un Etat . Il a calculé
ce que valoit un homme en Angleterre ,
& il l'a évalué à 1300 livres environ de
notre monnoie. Un Philofophe fublime
qui connoît bien le prix des hommes , ajoute
qu'il y a des pays où un homme ne
vaut rien , & d'autres où il vaut moins
que rien ( a ) . La médecine n'a pas été à
l'abri des excurfions de la géométrie : aux
aphorifmes d'Hypocrate & de Boerhaave
on a fubftitué des formules algébriques ;
on a voulu évaluer le mouvement des fluides
dans le corps humain , la force des
nerfs & des mufcles confidérés comme des
cordes , des leviers d'un certain genre ,
des piftons , &c. Mais qu'avons nous gagné
à ces abus de la géométrie on l'a
détournée de fon véritable objet , & elle a
eu le fort de l'efprit de notre nation : elle
( a ) Efprit des loix , liv. XXIII . chap. XVII,
Bij
30 MERCURE DE FRANCE.
a perdu en profondeur ce qu'elle a gagné
en fuperficie , & je ne doute pas qu'elle
ne touche au moment de fa décadence ,
qui vient d'être prédite par un homme de
beaucoup d'efprit . Cette fcience qui n'étoit
qu'un inftrument entre les mains de Defcartes
& de Newton , & qui n'eft faite
que pour en fervir , étoit devenue une
fcience orgueilleufe qui s'étoit élevée fur
les débris des autres , fur ceux de la métaphyfique
fur tout , parce qu'il eft bien
plus facile d'apprendre à calculer qu'à raifonner.
Il est bien à fouhaiter que le goût
abufif du calcul ne fafle plus d'obſtacle au
retour de la métaphyfique , dont le flambeau
peut feul nous éclairer fur les nouvelles
erreurs que de faufles lumieres ont
introduites , & qui retardent fenfiblement
les progrès de la philofophie.
Les
De la Philofophie en France.
a
A Philofophie eft de toutes les fciences
celle qui a fait les progrès les plus
rapides de nos jours ; les autres connoif-
Lances n'ont pas été portées à un dégré de
perfection plus haut que dans les beaux
fécles de la Grece & de Rome. Les reffources
de l'art font bornées ; l'efprit humain
ne faifant que fe replier fur lui - même ,
a bientôt parcouru la petite fphere de fes
idées , & trouvé les limites que la main
éternelle a prefcrites à fon activité. Au
lieu que la nature eft un abyfme où l'oeil
du Philofophe fe perd fans en trouver jamais
le fond ; c'eft une carriere immenfe
& dont l'immenfité femble augmenter à
mefure qu'on y pénétre plus avant . Les
Philofophes modernes , qui femblent avoit
marché à pas de géans dans cette carriere
, & qui ont laiffé les anciens fi
loin derriere eux , n'ont fait que nous
montrer le but ; les nouvelles lumieres
qu'ils ont portées dans la nuit de la nature
n'ont pas été affez vives pour nous conduire
à la vérité , & n'ont guere fervi qu'à
A iiij
8 MERCURE DE FRANCE.
nous éclairer fur l'intervalle énorme qui
nous en féparoit encore. Mais fi le méchanifme
de l'univers eft toujours un fecret
pour nous , du moins pouvons- nous
nous flatter d'être fur la bonne route pour
le découvrir ou pour fentir l'impoffibilité
d'y réuffir. Les François ne font pas ceux
qui ont eu le moins de part aux progrès
de la philofophie ; le grand Defcartes qui
a fi bien mérité d'en être appellé le pere ,
a ouvert le premier la carriere , & a fervi
de guide aux philofophes qui l'ont fuivi .
On fçait affez le defpotifme avec lequel
la philofophie d'Ariftote regnoit fur les
bancs de l'école ; le fanatifme pour fes décifions
étoit monté au plus haut point de
l'extravagance ; on ne cherchoit plus à
concilier fes principes avec les phénomenes
de la nature qui les contredifoient ,
c'étoit les phénomenes que l'on vouloit
adapter à ces principes. Quelques bons efprits
avoient connu les abfurdités du péripatetime
, & avoient fait de vains efforts
pour en réformer les abus : cette philofophie
qu'on avoit eu raifon d'admirer
dans des fiécles d'engourdiffement & de
barbarie de l'efprit humain , avoir été
confacrée par le tems , l'ignorance & le
pédantifme. Bacon parut ; ce grand homme
vit les entraves que cette fuperfti
DECEMBRE . 1754.
tion ridicule mettoit à la raifon ; il ofa
propofer de refondre le fyftême des connoillances
humaines , & démontra la néceffité
d'une nouvelle méthode pour étudier
la nature. Ce que l'illuftre Anglois
n'avoit fait qu'entrevoir , Defcartes l'exécuta
: il détruifit de fond en comble le péripatétifme
, & chercha à élever un nouveau
fyftême fur d'autres fondemens.
Il n'y avoit alors que l'aftronomie & les
mathématiques qui fuffent cultivées avec
fuccès , les autres parties de la philofophie
étoient prefque abandonnées ; d'ailleurs
elles étoient entierement détachées
les unes des autres , & traitées féparément :
un aſtronome n'étoit qu'aftronome , un
géometre n'étoit que geometre , un médecin
n'étoit que médecin , un métaphyficien
n'étoit rien . Defcartes apperçut les
rapports qui lioient ces différentes connoiffances
, & les fecours qu'elles devoient fe
prêter l'une à l'autre ; il rapprocha ces
membres épars , & n'en fit qu'un feul corps
de fcience.
Il appliqua l'algebre à la géométrie , &
la géométrie à la phyfique : c'est à cette
idée fublime , à ce coup de génie qu'il faut
rapporter les progrès étonnans qu'on a fait
dans les fciences phyfico-mathématiques.
On peut dire qu'il a créé la métaphysique ,
A v
10 MERCURE DE FRANCE.
par la diftinction auffi fimple que lumineu
fe des deux fubſtances ; diſtinction qui
anéantit les difputes frivoles & ridicules
des métaphyficiens fcholaftiques fur la nature
de l'ame , & par fon admirable méthode
, à laquelle nous devons peut- être
cet efprit philofophique qui s'eſt développé
dans fon fiécle , & a fait des progrès fi
fenfibles dans le nôtre. Il a pris la géomé
trie où les anciens l'avoient laiffée , & en
a reculé bien loin les limites . Enfin il 2
répandu une nouvelle lumiere par- tout ;
mais elle n'a guere fervi qu'à ceux qui
font venus après lui , & ne l'a pas empêché
de s'égarer. Il auroit deviné la nature
fi elle avoit pû fe deviner ; mais il
falloit l'obferver , & il n'en a pas eu le
tems fes erreurs appartiennent à la foi
bieffe de l'humanité & à l'ignorance de fon
fiécle ; mais fes découvertes ne font qu'à
lui ainfi en abandonnant fes idées fauffes
, refpectons toujours fon génie , admi
rable même lorfqu'il s'eft trompé . L'hy
pothefe brillante des tourbillons , fi célé→
bre , fi combattue , & fi bien détruite par
les nouvelles obfervations , ne feroit fûrement
pas entrée dans la tête d'un hommemédiocre
; fon fyftême fur l'ame des bêtes ,
regardé communément comme une plaifanterie
, & ridicule aux yeux de bien des
DECEMBRE. 1754 .
gens , eft à mon avis une idée plus férieufe
, & qui s'étend plus loin qu'on ne penfe ,
lorfqu'on la confidere dans tous fes rapports
: demandez- le à Bayle , & au médecin
Lami.
Je me fuis beaucoup étendu fur Defcartes
, parce qu'on commence à oublier
tout ce qu'on lui doit. Comme la plupart
de fes ouvrages ne font plus d'une grande
utilité , parce qu'on a été plus loin que
lui , on ne fe fouvient plus que fans lui ,
peut-être on feroit encore dans les ténébres.
Lorfqu'il a paru , la philofophie étoit
une terre en friche : elle n'a pas produit
beaucoup de fruits fous fes mains ; mais il
en a arraché les ronces , il l'a préparée , &
a appris à là rendre féconde : en eft - ce trop
peu pour mériter notre reconnoiffance ?
Je ne peux m'empêcher de le regarder comme
un homme rare , qui fubjugué par l'impulfion
du génie , étoit né pour faire une
révolution , & dont les découvertes feront
une des plus brillantes époques de l'hiftoire
de l'efprit humain.
Gaffendi , contemporain de Descartes",
mérite auffi une place honorable dans l'hiftoire
de la philofophie , quoiqu'il n'ait pas'
travaillé avec beaucoup de fuccès pour elle.
Né avec un génie extrêmement méthodique
& une fagacité peu commune , il fue
Avj
12 MERCURE DE FRANCE.
révolté , comme Defcartes , des abfurdités
de la fcholaftique : il la combattit avec vivacité
, & voulut relever le fyftême d'Epicure
, pour l'établir fur les débris de celui
d'Ariftote . Il employa beaucoup d'adreffe
& de fubtilité pour expliquer la
formation & la confervation de l'univers
par le mouvement direct & la déclinaifon
des atômes . Il donna à cette hypotheſe un
vernis d'orthodoxie , & toute la probabi
lité dont elle étoit fufceptible ; mais cette
fecte des atomiftes modernes ne fut pas
nombreuſe ; chimere pour chimere , on
garda celle qui étoit déja établie , quoique
plus abfurde encore .
Le cartéfianifme n'eut pas le même fort ,
parce qu'il étoit mieux fondé ; il fit une
fortune étonnante dans toute l'Europe , il
eut les adverfaires & les fectateurs les plus
diftingués ; il fut profcrit en France , rétabli
enfuite , & adopté avec empreffement
dès qu'il fut mieux connu .
Mrs Rohault & Regis furent les premiers
qui le profefferent en France , & ils
le firent avec un fuccès & des applaudiffemens
finguliers. Mais le plus illuftre partifan
de Defcartes fut fans doute le P. Malebranche
, de l'Oratoire , phyficien , géometre
, & plus grand métaphyficien encore
; il ne prit que les principes de fon
2
I
a
DECEMBRE. 1754. 13
maître , & s'en fervit en homme de génie.
Il adopta fon fyftême des tourbillons ,
après y avoir reformé beaucoup de choſes ,
& le défendit avec vigueur. Dans la métaphyfique
il alla beaucoup plus loin que
Defcartes ; fes principes le conduifirent à
nier l'existence des corps , & s'il l'admit ,
ce fut parce que l'Ecriture Sainte le lui enfeignoit
: quelque finguliere que foit cette
conclufion , on ne peut prefque pas douter
qu'il n'ait été de la meilleure foi du monde .
Il prétendit démontrer que nous nepouvions
pas voir les objets hors de nous , encore
inoins dans nous , & que nous ne pouvions
les appercevoir que dans Dieu. Il étaya ces
idées abftraites de la métaphyfique la plus
fubtile, d'une élocution pleine de force & de
nobleffe , & de l'imagination la plus brillante
: mais malgré ces avantages , la profondeur
&l'obfcurité de fes idées garantirent de
la féduction. Il faut une grande contention
d'efprit & un grand goût de métaphyfique
pour le fuivre dans fes fpéculations ; ce
font des espéces de points indivisibles , dit M.
de Fontenelle : fi on ne les attrappe pas toutà-
fait jufie , on les manque tout - à -fait . Aufli
le P. Mallebranche fe plaignit-il beaucoup
de n'être pas compris par ceux qui le critiquoient.
On fçait que M. Arnaud attaqua
fon fyftême avec un acharnement des
14 MERCURE DE FRANCE.
moins philofophiques . M. Arnaud ne m'en.
tend pas , difoit Mallebranche : cb qui voulez
- vous donc qui vous entende ? lui répondit-
on .
Le mallebranchifme a fait naître la fecte
des immatérialistes , fort peu reçue en France
, mais qui a fait plus de progrès en Angleterre
; ces philofophes nient l'existence
de la matiere , telle que nous la concevons
, & même fa poflibilité ; les illufions
des fens font leur grand argument : ils
prouvent très-bien que les qualités que
nous regardons comme inhérentes aux
corps , telles que la couleur , l'étendue ,
&c. ne font que de pures idées de notre
ame, qui n'exiftent point hors d'elle , & qui
n'ont aucune analogie avec la nature des
objets qui les excitent en nous. Les dialogues
de Berkeley , ouvrage fingulier , où
Fon trouve une logique fubtile avec beaucoup
de fimplicité , font voir combien ce
fyftême eft féduifant, quelque abfurde qu'il
paroiffe au premier coup d'oeil , & combien
font preffans les argumens fur lef- ,
quels il est établi. Quelques-uns pouffent
encore ces idées plus loin , & prétendent
que chaque individu n'eft fûr que de fa
propre exiftence , & qu'il pourroit avoir
routes les idées & les fenfations dont il eft
affecté , fans qu'il y eût aucun autre être
DECEMBRE. 1754. 15
hors de lui ; c'eft la fecte des Egorftes : quel
que inacceffible qu'elle foit aux traits de
la métaphyfique , elle révolte trop les notions
les plus fimples pour trouver beaucoup
de fectateurs.
M. de Fontenelle a peut-être mieux mérité
de la philofophie que beaucoup de
ceux qui l'ont enrichie de découvertes. On
ne voit que des dévots qui dégoûtent de la dévotion
, dit un de nos moraliſtes. Avant
M. de Fontenelle on voyoit des philofophes
qui dégoûtoient de la philofophie ;
il fit voir que ce n'étoit pas la faute de la
philofophie : il la dépouilla de cet air fauvage
qui la rendoit fi peu trairable ; il l'embellit
des graces de fon imagination , & il
fit naître des fleurs où l'on ne foupçonnoit
que des épines : fon livre de la pluralité
des mondes eft un monument qui lui
fera autant d'honneur qu'à l'efprit de la
nation.
Qu'on me permette une digreffion à
laquelle je ne peux me refufer , & que
l'efprit de patriotifme m'arrache. Il y a
long- tems qu'on accufe les François d'être
legers & fuperficiels , & de ne faire qu'effleurer
les fciences : les Anglois , dit- on ,
font bien plus philofophes que nous : pourquoi
? parce qu'ils traitent la philofophie:
d'un air grave & ferieux. Et moi je crois
"
16 MERCURE DE FRANCE.
que nous le fommes pour le moins autant
qu'eux , précisément parce que nous la traitons
légèrement ; il faut polléder bien nettement
une matiere philofophique , pour la
dégager des termes barbares , des idées abtrules
, & des épines du calcul fous lef
quels d'autres font obligés de l'envelopper
, & pour la réduire à un raifonnement
fimple , à des images fenfibles , & aux expreflions
les plus communes , pour lui prêter
même des ornemens : c'est ce que M.
de Fontenelle , & d'autres après lui ont fait
avec fuccès. Il y a des gens qui croyent
que la féchereffe eft effentielle aux ouvra
ges fcientifiques , comme il y en a eu jadis
qui ne croyoient pas qu'on pût être philofophe
fans avoir une barbe fale & un
manteau déchiré. Cet efprit de fuperficie
qu'on nous reproche , n'eft que le vernis de
nos ouvrages qui ne nuit point à leur folidité.
La raifon toute nue a fouvent l'air
rebutant ; nos écrivains la rendent aimable
en la parant de fleurs : c'eft le vaſe dont
on frotte les bords de miel , pour faire ava
ler à un enfant un reméde falutaire : aux
yeux du philofophe , les hommes ordinaires
font- ils autre chofe que des enfans ?
Le cartéfianifme commençoit à être reçu
affez généralement , fur tout en France
lorfque le newtonianiſme parut , & vint
DECEMBRE. 1754. 17
partager les efprits. Comme les ouvrages
de Newton paroiffoient inacceffibles fans le
fecours de la plus fublime géométrie , fon
fyftême ne fut pas répandu d'abord , & refta
quelque tems entre les mains de quelques
adeptes. M. de Maupertuis a été le premier
qui en a donné quelques effais dans
notre langue ; mais il étoit réfervé à un
homme qui ne s'étoit fait qu'un jeu de la
phyfique & de la géométrie , de le produire
au grand jour c'eft M. de Voltaire . Il
donna fes Elémens de la philofophie de Newton
, ouvrage écrit avec la précifion , l'élégance
& la netteté qui lui font propres.
Ce livre fit une fenfation prodigieufe , &
par le nom de l'Auteur , & par les nouveautés
philofophiques qu'il mettoit fous
les yeux du public. D'abord les géometres
que M. de V. humilioit , & les beaux efprits
qu'il avoit humiliés dès long - tems ,
fe déchaînerent à l'uniflon contre lui ; il
paroiffoit inconcevable qu'un homme qui
avoit fait de beaux vers pût être géometre
& phyficien : on ne peut pas mieux
parler , difoit-on , de ce qu'on n'entend
pas ; comme fi l'efprit , en philofophie ,
pouvoit fuppléer aux lumieres. Pour apprécier
le mérite de cet ouvrage & la prévention
ridicule de certaines gens qui ne
font pas même en état de le lire , il faut
18 MERCURE DE FRANCE.
jetter les yeux fur les critiques qu'on en
fit dans le tems. Cette multitude de fautes
énormes qu'on devoit mettre au grand jour ,
fe réduisirent à des erreurs légeres , à quelques
mauvaifes épigrammes , à des ob
jections vagues , & dont la plupart tomboient
fur Newton , & non pas fur M. de
Voltaire . D'ailleurs quand il n'auroit pas
bien faifi Newton dans quelques détails ,
quel eft le phyficien qui puiffe fe flatter
de ne l'avoir jamais manqué : Le reproche
le mieux fondé qu'on ait fait à M. de Voltaire
, c'est peut-être fur la maniere peu
avantageufe dont il a parlé de Deſcartes :
je ne peux pas mieux faire que de rapporter
ici quelques reflexions du P. Caftel à
ce fujet ( Mem. de Trev . Octob. 1739. )..
» M. de Voltaire a fi fort honoré notre
» nation par fes propres talens , qu'elle
peut bien lui pardonner le peu d'hon .
neur qu'elle lui enleve en rabaiffant
» Defcartes. En faveur de M. de Voltaire
» poëte , on devroir juger moins rigoureu-
» fement M. de Voltaire philofophe ; &
»en prenant les chofes du bon côté , en-
>>core eft- ce une louable entrepriſe d'avoir
» ofé s'enfoncer i avant dans des matie-
» res fi épineufes , au mépris de toutes ces
» fleurs qu'il pouvoit s'amufer à cueillir fi
agréablement , & toujours prêtes à éclore
ود
DECEMBRE . 1754 IS
fous fa main ; & n'eft-ce rien que la célébrité
qu'il a donnée à la philofophie ,
» & par conféquent aux philofophes ; l'oc-
» cafion même qu'il donne aux cartéfiens
de triompher du grand Newton ?
Le Newtonianifme une fois mis au
grand jour , fit fur les efprits des impreffions
bien différentes ; il fut adopté des
ans & attaqué par d'autres avec une égale
vivacité. Comme il battoit en ruine le cartéfianifme
, les Carréfiens fe mirent fur la
défenfive . M. Privat de Molieres , bon géometre
& affez fubtil phyficien , fut celui
qui défendit les tourbillons avec le plus de
faccès : il fentit bien qu'ils étoient en défaut
dans beaucoup de phénomenes , & il les réforma
en habile homme ; il les adapta aux
nouvelles expériences avec adreffe , & ii
fit fervir à confirmer fon fyftême les mê
mes obfervations que les Newtoniens apportoient
pour le détruire. Malgré tous
fes efforts cependant , les tourbillons tom
berent dans un difcrédit total , & on peut
dire qu'ils ont pouffé les derniers foupirs
entre les mains de M. de Fontenelle , dont
la Théorie des tourbillons fera vraisemblablement
le dernier ouvrage qu'on fera en leur
faveur.
Quelque abfurdités métaphyfiques que
le Newtonianifme entraîne après lui , on
20 MERCURE DE FRANCE.
ne peut nier que ce fyftême ne foit bien
féduifant ; il ſemble n'être fondé que fur
des faits & des démonftrations. La facilité
admirable avec laquelle il explique les mouvemens
des corps céleftes & beaucoup de
phénomenes julques- là inacceffibles , la fineffe
& la mutitude des obfervations qui en
font la bafe , & un grand étalage de calcul ,
en ont impofé ; on n'a pas voulu voir l'illufion
de quelques expériences , & le peu
de liaifon de certains faits avec les inductions
que Newton en tire pour établir fes
principes ; enfin la ruine des tourbillons
& la néceffité d'un fyftême pour le vulgaire
des philofophes , tout cela a beaucoup favorifé
l'établiffement de la nouvelle phyfique.
Peu de tems après , Madame la Marquife
du Chaſtelet vint auffi fe mettre fur
les rangs , & oppofer Leibnitz à Newton.
Leibnitz , commenté par M. Wolf , avoit
fait beaucoup de fortune en Allemagne ;
quelques idées métaphyfiques , de fimples
projections éparfes dans fes ouvrages , fe
font étendues fous la main de M. Wolf,
& ont donné matiere à beaucoup de gros
volumes , dans lefquels il a remis en honneur
le goût des définitions , & les termes
barbares de l'école combinés avec une méthode
féchement géométrique. Leibnitz
DECEMBRE. 1754. 21
n'a pas été fi heureux en France , quoique
Madame du Chaſtelet lui eût donné un
air plus François dans fes Inftitutions de
physique. Cet ouvrage et écrit avec beaucoup
de méthode , de nobleffe & de précifion
; mais il ne fit pas beaucoup de profélites
, & on ne jugea pas à propos de
croire aux Monades fur la parole de Madame
du Chaftelet . Cette femme illuftre a
laiffé entre les mains de M. de Clairault
une traduction Françoife du grand ouvrage
de Newton , avec des commentaires
très -profonds fur ce que les mathématiques
ont de plus fublime : ce livre eft prêt
à paroître. Madame du Chaftelet & cette
célébre Mlle Agnefi, qui profeffe les mathé
matiques à Boulogne , & qui a donné il y
quelques années un excellent ouvrage d'analyfe
, font des phénomenes qui feront
honneur au beau fexe , à la géométrie &
notre fiécle.
Quoique Newton l'ait emporté fur Defcartes
& Leibnitz , il s'en faut cependant
bien qu'il ait fubjugué tous les efprits ; il a
encore enFrance des adverfaires bien redoutables.
Il y a trop de chofes dans fon ſyſ
tême qui font de la peine à la raifon , pour
ne pas révolter tous ceux qui croyent encore
que la méthode de Defcartes eft la
feule qui puiffe nous conduire à la vérité,
22 MERCURE DE FRANCE.
1
s'il nous eft donné d'y atteindre .
1 Toutes ces difputes philofophiques ont
éclairé les efprits , le goût des fyftêmes
s'eft perdu , & a fait place à un fcepticifme
raifonné & modéré , fort généralement
répandu , & d'autant mieux établi qu'il
n'eft ni l'effet de l'ignorance , ni une affectation
de fingularité ; c'eft peut- être auffi
ce qui nuira le plus aux progrès de la philofophie.
Il faut donner l'effor à l'imagi
nation pour aller loin : les plus grandes
découvertes de fpéculation ne font gueres
que des heureuſes témérités du génie ,
& les plus habiles philofophes ont été des
gens à fyftêmes : ce n'eft qu'à force de s'égarer
en effayant differentes routes , que
l'on rencontrera la bonne.
Il est vrai que la voye des expériences ,
quoique la plus lente , eft bien plus sûret
& plus commode ; c'eft auffi celle qu'a
prife l'Académie des Sciences : elle a déclaré
qu'elle n'adoptoit aucun fyftême. Le
tems d'en faire un n'eft pas encore arrivé ,
il faut attendre que l'on ait affez de matériaux
pour bâtir un fyftême général de l'univers
; ce n'eft qu'en amaffant des obfervations
& en établiffant des faits , que l'on
pourra y parvenir. On s'eft donc jetté principalement
du côté de la phyfique expéri
mentale , comme la partie de la philo
1
I
1
DECEMBRE. 1754. 23
fophie dont l'utilité eft plus fenfible.
Bacon , Galilée & Torricelli ont jetté les
fondemens de la phyfique expérimentale ;
le premier par des vues neuves & fublimes
; Galilée par fa théorie de l'accéléra
tion du mouvement dans la chûte des
corps ; & Torricelli par fes expériences fur
la pefanteur de l'air. Ces découvertes importantes
ont porté dans la phyfique une
nouvelle lumiere , que les Boyle , les Pafcal
, les Newton , &c . ont encore étendue
bien au-delà : ce font des veines heureuſes
qui ont conduit à des mines fécondes .
Le goût des expériences s'eft répandu
chez toutes les nations fçavantes , & il eft
cultivé aujourd'hui avec beaucoup de foin
& de fuccès. Parmi ceux qui peuvent être
cités dans ce genre , on s'attend bien à voir
le nom de M. de Reaumur , qui a fait des
recherches approfondies fur plufieurs parties
de la phyfique , & principalement fur
l'hiftoire naturelle. Obfervateur exact &
infatigable , les plus petits détails n'échap
perent pas à la fineffe & à la fagacité qu'it
porte dans tous fes procédés : fon Hiftoire
des infectes , avec beaucoup de longueurs ,
eft remplie de chofes neuves , utiles & délicates
. Zélé pour le bien public , il n'a pas
dédaigné de confacrer fes talens à des objets
, petits en apparence , mais qui tendent
14 MERCURE DE FRANCE.
à perfectionner les arts méchaniques , ou
prévenir quelques befoins de la fociété .
Les moyens de faire une nouvelle teintud'augmenter
la fécondité des terres ,
de garantir les étoffes des teignes , de conferver
des oeufs frais pendant trois à quatre
mois , voilà les objets de fa curiofité & de
fon travail. Des vues auffi fages & auffi
eſtimables devroient fervir d'exemple à
beaucoup de fçavans , qui croiroient s'avilir
par de femblables détails , & qui facrifient
à des recherches brillantes des recherches
plus utiles , mais obfcures . M. de Reaumur
ne trouve pas dans tous fes concitoyens
les mêmes difpofitions à rendre juſtice à
fes travaux , mais il les trouvera dans fa
nation ; & fa réputation ne peut être bleffée
par les petites épigrammes & le mépris
affecté de quelques perfonnes qui , ce
me femble , n'ont pas pris confeil de leurs
lumieres & de leur philofophie.
C'eft bien ici le lieu de rendre à un philofophe
citoyen l'hommage que méritent
fes talens & l'emploi refpectable qu'il en
fait ; je parle de M. Duhamel , de l'Académie
des Sciences , à qui nous devons
l'excellent Traité de la culture des terres ,
dont les principes font fi peu connus & mériteroient
tant de l'être. Il a réuni fes lumieres
& fes obfervations aux découvertes
des
DECEMBRE. 1754. 25
des Anglois , qui dans cette partie effentielle
font bien faits pour être nos maîtres
& nos modeles. Il a cherché les moyens de
conferver les grains dans les greniers ; il
a imaginé une charrue d'une conftruction
neuve & fort commode , qui abrege beaucoup
les travaux des laboureurs , cette portion
du peuple la plus néceffaire & la plus
miférable. Les principes de M. Duhamel
font fimples & évidens ; on lui a rendu
juftice : mais c'eſt peu d'être loué , il veut
être utile ; & ce ne feroit pas la premiere
fois qu'un philofophe auroit parlé , qu'on
auroit trouvé qu'il a raifon , & que fes
avis n'auroient été fuivis. Quoiqu'il
en foit , on ne doit pas fe laffer de travailler
à la perfection de l'agriculture , qui en
ouvrant dans l'Etat une nouvelle fource
de richeffes réelles & permanentes , donneroit
à notre commerce le plus grand
avantage , & prefque le feul qui lui manque
fur celui de nos voisins .
pas
Si quelqu'un a eu l'efprit de fyftême
dans notre fiécle , je crois que c'eft M. de
Buffon : une tête philofophe , des vûes
grandes , une imagination forte & lumineufe
, & l'art de faifir les analogies ; voilà
ce qu'il m'a femblé appercevoir dans l'Hiftoire
naturelle , & ce qui forme , fi je ne
me trompe , l'efprit de fyftême. M. de Buf-
II.Vol. B
26 MERCURE DE FRANCE.
fon , qui par un ftyle riche , élégant , har
monieux , plein de nobleſſe & de poëfie ,
efface Platon & Mallebranche , & donne
à la philofophie un éclat qu'elle n'avoit
pas encore eu , n'a pas été plus heureux
que Deſcartes dans fes conjectures fur l'origine
du monde & la génération des animaux.
Mais fi l'hiftoire de notre globe par
M. de Buffon eft un roman , c'eft celui
d'un habile phyficien : fon hypotheſe fur
la génération marque les bornes de nos
lumieres dans cette matiere ténébreuſe , le
defefpoir de la phyfique : fes obfervations
microfcopiques fi délicates & fi fingulieres,
feront peut-être plus utiles , parce qu'il
eft toujours utile de détruire des erreurs.
Les anciens avoient cru , fur de fimples apparences
peu approfondies , que la corruption
pouvoit engendrer des animaux.
Lorfque le microfcope , qui a élargi l'univers
aux yeux des philofophes , eut découvert
à Hartzoeker & à Lewenhoek les animalcules
qui fe meuvent dans les liqueurs ,
on fe moqua beaucoup des anciens , & il
ne parut plus douteux que tous les êtres
vivans font déja organifés dans la femence
, & qu'ils ne font que fe développer &
augmenter de volume. Mais ce principe
reçu fans conteftation & avancé avec ce
ton de confiance que donne trop fouvent
DECEMBRE . 1754. 29
la chaleur des premieres découvertes , s'eſt
trouvé en défaut dans la reproduction merveilleufe
des polypes , & il eft anéanti
aujourd'hui par les expériences de MM. de
Buffon & de Needham ; la production des
petites anguilles qu'ils ont vû fe former
dans le bled niellé & dans d'autres infufions
, remet en honneur l'opinion des anciens
; nous avons cru voir une étincelle
de lumiere , & nous rentrons dans une nuit
plus fombre. Les animalcules fpermatiques
ne font plus que de petites machines or
ganifées & fans vie ; il eft vrai que les obfervations
microfcopiques font trop fuf
ceptibles d'illufion pour qu'on ne s'en dépas
: celles de Lewenhoek ont été détruites
par celles de M. de Buffon , cellesci
peuvent être détruites par d'autres ; dans
cette matiere obfcure on finit , comme dans
prefque toutes les autres , par douter.
fie
Les fectateurs de la philofophie corpufculaire
ne pardonneront pas aifément à
M. de Buffon d'avoir établi la poffibilité
de fes moules intérieurs fur la ruine du méchaniſme
univerfel , & d'avoir mieux ainé
expliquer la circulation du fang , le jeu des
muſcles , en général toute l'économie animale
par des qualités occultes femblables
aux caufes de la pefanteur , des attractions
magnétiques , &c. que par des principes
Bij
28 MERCURE DE FRANCE.
purement méchaniques ; cela pourroit faire
craindre , difent- ils , le retour du fiécle
d'Ariftote. Epicure créa la phyfique corpufculaire
; ne voyant dans la nature que
de la matiere & du mouvement , il ne
chercha pas d'autres caufes pour expliquer
tous les phénomenes ; mais n'ayant pas encore
affez de faits & d'obſervations , ce
principe lui manqua dans l'application ;
on crut pour lors que ce qu'on ne pouvoit
pas expliquer par les loix du méchanifme
ne s'opéroit pas par ces loix ; de là
l'horreur du vuide , de- là l'attraction , &c.
L'attraction , ce monftre métaphysique ,
dont on ne peut plus fe paffer dans la phy-.
fique célefte , s'eft introduite auffi dans la
chymie. Les affinités de M. Geoffroi ne
font que le même terme déguifé ; elles paroiffent
préfenter une idée plus fimple , &
n'en font pas moins inintelligibles . Nous
devons aux Anglois cet abus de l'attraction ,
auffi bien que celui du calcul : ils réduifent
tout en problêmes algébriques ; l'antique
fuperftition fur la fcience mystérieuse
des nombres femble renaître . Jean Craig
a ofé calculer les dégrés de probabilité
des principes du chriftianifme , & le décroiffement
de cette probabilité : felon fes
calculs , la religion ne peut plus durer que
1400 ans. L'eſtimable auteur de l'Hiftoire
DECEMBRE . 1754 29
critique de la philofophie a calculé auffi les
dégrés de force de la certitude morale . Le
Chevalier Petty , créateur de l'arithmétique
politique , a cru pouvoir foumettre à
l'algebre l'art même de gouverner les hommes.
Le résultat de quelques -uns de fes
calculs peut faire juger de leur folidité ;
il croit avoir démontré que le grand nombre
des impôts ne fçauroit être nuifible à
la fociété & au bien d'un Etat . Il a calculé
ce que valoit un homme en Angleterre ,
& il l'a évalué à 1300 livres environ de
notre monnoie. Un Philofophe fublime
qui connoît bien le prix des hommes , ajoute
qu'il y a des pays où un homme ne
vaut rien , & d'autres où il vaut moins
que rien ( a ) . La médecine n'a pas été à
l'abri des excurfions de la géométrie : aux
aphorifmes d'Hypocrate & de Boerhaave
on a fubftitué des formules algébriques ;
on a voulu évaluer le mouvement des fluides
dans le corps humain , la force des
nerfs & des mufcles confidérés comme des
cordes , des leviers d'un certain genre ,
des piftons , &c. Mais qu'avons nous gagné
à ces abus de la géométrie on l'a
détournée de fon véritable objet , & elle a
eu le fort de l'efprit de notre nation : elle
( a ) Efprit des loix , liv. XXIII . chap. XVII,
Bij
30 MERCURE DE FRANCE.
a perdu en profondeur ce qu'elle a gagné
en fuperficie , & je ne doute pas qu'elle
ne touche au moment de fa décadence ,
qui vient d'être prédite par un homme de
beaucoup d'efprit . Cette fcience qui n'étoit
qu'un inftrument entre les mains de Defcartes
& de Newton , & qui n'eft faite
que pour en fervir , étoit devenue une
fcience orgueilleufe qui s'étoit élevée fur
les débris des autres , fur ceux de la métaphyfique
fur tout , parce qu'il eft bien
plus facile d'apprendre à calculer qu'à raifonner.
Il est bien à fouhaiter que le goût
abufif du calcul ne fafle plus d'obſtacle au
retour de la métaphyfique , dont le flambeau
peut feul nous éclairer fur les nouvelles
erreurs que de faufles lumieres ont
introduites , & qui retardent fenfiblement
les progrès de la philofophie.
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Résumé : IDÉES DES PROGRÈS De la Philosophie en France.
Le texte discute des progrès rapides de la philosophie en France, notant que les autres sciences n'ont pas atteint le niveau de perfection des époques grecques et romaines. La philosophie moderne, bien que prometteuse, n'a pas encore révélé toutes les vérités de la nature. René Descartes, considéré comme le père de la philosophie moderne, a joué un rôle crucial en révolutionnant la pensée en détruisant l'aristotélisme et en proposant une nouvelle méthode pour étudier la nature. Il a uni différentes branches des sciences, comme l'astronomie, les mathématiques et la physique, et a appliqué l'algèbre à la géométrie et à la physique. Ses contributions ont marqué une époque brillante dans l'histoire de l'esprit humain. D'autres philosophes, comme Gassendi, ont combattu la scolastique et tenté de réformer la philosophie en s'inspirant d'Épicure. Le cartésianisme, bien que controversé, a gagné en popularité en Europe avec des partisans influents comme Rohault, Regis et Malebranche. Ce dernier a développé des idées métaphysiques complexes et a défendu le système des tourbillons de Descartes, donnant naissance à la secte des immatérialistes qui nient l'existence de la matière telle que nous la concevons. Fontenelle est loué pour avoir rendu la philosophie accessible et agréable, dépouillant ses aspects austères. Le texte compare les approches françaises et anglaises de la philosophie, soulignant que les Français traitent la philosophie de manière légère mais efficace, la rendant accessible et agréable. Le livre de Voltaire a suscité des réactions variées dans la communauté philosophique et scientifique. Les géomètres et les esprits éclairés, initialement humiliés, critiquèrent Voltaire, trouvant inconcevable qu'un poète puisse exceller en géométrie et en physique. Les critiques se réduisirent à des erreurs mineures et des épigrammes vagues, souvent dirigées contre Newton plutôt que contre Voltaire. Le Newtonianisme divisa les esprits, les cartésiens défendant les tourbillons avec acharnement, mais ces derniers tombèrent en disgrâce grâce aux efforts de M. de Fontenelle. Malgré certaines absurdités métaphysiques, le système newtonien fut adopté pour sa base factuelle et démonstrative, expliquant les mouvements des corps célestes et divers phénomènes. Madame du Châtelet soutint Leibnitz contre Newton, mais son ouvrage, bien que méthodique et précis, ne fit pas beaucoup de prosélytes. Elle laissa également une traduction de Newton avec des commentaires profonds. D'autres figures, comme Mlle Agnesi et M. de Reaumur, contribuèrent à la philosophie et à la physique expérimentale, cette dernière étant privilégiée par l'Académie des Sciences. Le texte critique l'approche de M. de Buffon, qui a proposé des explications pour la circulation du sang et l'économie animale en utilisant des qualités occultes similaires aux causes de la pesanteur et des attractions magnétiques, plutôt que des principes mécaniques. Cette méthode est comparée à celle d'Épicure, qui a créé la physique corpusculaire mais manquait de faits et d'observations pour l'appliquer correctement, menant à des concepts comme l'horreur du vide et l'attraction. Le texte dénonce également l'abus de l'attraction en chimie et l'influence des Anglais qui réduisent tout en problèmes algébriques. La médecine n'est pas épargnée, avec des formules algébriques remplaçant les aphorismes d'Hippocrate et de Boerhaave. Enfin, le texte déplore que la géométrie, autrefois un instrument au service de la philosophie, soit devenue une science orgueilleuse, détournée de son véritable objet.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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20
p. 55-64
« HISTOIRE DES RECHERCHES SUR LA QUADRATURE DU CERCLE, ouvrage [...] »
Début :
HISTOIRE DES RECHERCHES SUR LA QUADRATURE DU CERCLE, ouvrage [...]
Mots clefs :
Géomètres, Cercle, Quadrature, Géométrie, Découvertes, Figure, Exactitude
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « HISTOIRE DES RECHERCHES SUR LA QUADRATURE DU CERCLE, ouvrage [...] »
H
ISTOIRE DES RECHERCHES SUR LA
QUADRATURE DU CERCLE > ouvrage
propre à inftruire des découvertes réelles
fur ce problême célébre , &c. A Paris ,
chez Jombert. 1755.
Il fuffit qu'une queſtion ait de la célébrité
dans une fcience , pour la voir auffitôt
exciter les efforts de ceux qui font les
moins capables de la réfoudre. La quadrature
du cercle , la tranfmutation des
métaux , le mouvement perpétuel , le problême
des longitudes nous en fourniffent
journellement des exemples. Pour un Chymifte
habile que l'efpérance de parvenir
au grand oeuvre a entraîné dans cette recherche
,
, que de gens épuiſent encore leur
fortune & leur fanté à combiner des minéraux
, fans fçavoir la différence dun acide
& d'un alkali ! combien de perfonnes recherchent
les longitudes ou le mouvement
perpétuel , qui ignorent les loix les plus
fimples de la méchanique , les procédés
les plus ordinaires de l'aftronomie & de la
Civ
16 MERCURE DE FRANCE.
navigation ! Mais c'eft fur- tout à l'occafion
de la quadrature du cercle que cette remarque
fe vérifie ; rien n'eft plus ordinaire aujourd'hui
, & rien ne l'a plus été dans tous
les tems que de voir ce problême tenté par
des perfonnes peu verfées dans la Géométrie,
ordinairement même fi étrangeres dans
cette fcience , qu'elles font obligées , par
un retour modefte fur elles - mêmes , de regarder
leur découverte comme une révélation
fpéciale dont la divinité les a favorifées.
Nous fommes cependant fort éloignés
de mettre le problême de la quadrature du
cercle dans le même rang que le mouvement
perpétuel & la pierre philofophale :
ces deux dernieres recherches ne peuvent
Occuper que des gens qui n'ont pas affez
de connoiffances pour voir le chimérique
de leur objet. La quadrature du cercle eft
un problême raisonnable , & qui devoit
naturellement occuper les Géometres. En
effet , l'objet de la Géométrie eft de mefurer
les différentes efpéces d'étendues ou
de figures : quand on dit mefurer , cela doit
s'entendre avec cette précifion qui eft la vérité
même , & par des voies telles que celles
que la Géométrie fe permet , c'est- à - dire
fans tâtonnement , fans méchanifme , &
d'une maniere démonftrative. La quadraAVRIL.
1755. 57
ture du cercle eft la mefure exacte de la
furface renfermée dans cette courbe fi fimple
, & néanmoins fi rebelle à la Geométrie
: on l'appelle la quadrature , parce que
la coutume étant dans toutes les mesures de
rappeller la grandeur mefurée à la figure la
plus fimple, les Géometres ont pris le quarré
pour celle à laquelle ils rappelleroient toutes
les étendues fuperficielles. Ainfi la quadrature
, la meſure d'une furface d'une
figure , font des termes tout-à-fait fynonimes
en Géométrie : de là l'on voit que c'eft
n'avoir aucune idée da problême ni de la
Géométrie , que de donner à ces termes
de la quadrature du cercle le fens qu'y
attache le vulgaire , en s'imaginant qu'il
s'agit de faire un cercle quarré.
De tout tems d'habiles Géometres ont
fait des efforts ou pour mefurer le cercle
avec toute l'exactitude poffible , ou
pour approcher de plus en plus de fa mefure
précife ; & leurs travaux ont fucceffivement
enrichi la Géométrie de belles découvertes
de tout tems auffi des pygmées
en Géométrie ont annoncé avec emphaſe
la découverte de la quadrature du cercle ,
& ont excité la rifée des Géometres intelligens.
Je dois remarquer que les premiers
ontrarement crû avoir touché le but , qu'ils
fe font prefque jamais mépris au point
Cv
18 MERCURE DE FRANCE.
de penfer qu'ils euffent trouvé la folution
parfaite du problème. On peut échouet
fans honte à la recherche d'une queſtion
géométrique , mais on ne peut fans honte
donner des paralogifmes pour de légitimes
démonftrations.
L'objet que s'eft propofé l'auteur de
l'hiftoire que nous annonçons , n'a pas
été de tirer de la pouffiere les méprifables
tentatives que la quadrature du cercle a
excitées ; des paralogifmes qui n'en ont
jamais impofé qu'à leurs auteurs , des prétentions
d'une abfurdité palpable , méritoient
trop peu d'occuper la plume d'un
hiftorien raifonnable. L'auteur a judicieufement
penſé ne devoir préfenter que les
découvertes réelles dont ce problême a été
l'occafion il n'a cependant pas entierement
négligé de faire connoître quelquesuns
de ceux qui ont acquis une malheureufe
célébrité par leurs mauvais raifonnemens
& leur obftination à youloir les faire
adopter. Nous allons donner à préfent une
idée un peu détaillée de ce que contient
cet ouvrage .
Après une préface où l'auteur expofe
quel a été fon objet , quelle utilité peut
réfulter de fon travail , & qui contient
plufieurs chofes inftructives concernant
la quadrature du cercle , & ceux qui s'obfAVRIL.
1755. 59
tinent à la chercher , il entre en matiere .
Le premier chapitre eft occupé à donner
une idée claire de la nature du problême ,
des moyens que la Géométrie permet d'employer
pour le réfoudre ; on y explique les
diverfes manieres de l'envifager , & furtout
l'utilité qu'on doit lui affigner . Nous
ne pouvons nous difpenfer de remarquer
avec l'auteur , que c'est une erreur , & une
erreur qui ne peut être accréditée qu'auprès
de gens entierement deftitués des notions
de la Géométrie & de l'Aftronomie' , que de
penfer que le problême des longitudes dépend
de celui de la quadrature du cercle :
c'en eft encore une que de croire qu'il y
ait des récompenfes à efpérer pour celui
qui réfoudra ce dernier problême. On convient
que la théorie de la Géométrie y gagneroit
une vérité nouvelle , quoique
peut-être fort stérile , mais la pratique
n'en recevroit aucun avantage : car les Géometres
ont des moyens affez fimples d'approcher
de la grandeur du cercle , jufqu'à
une telle exactitude qu'elle furpaffe de
beaucoup nos befoins. Il leur eft facile
d'affigner un nombre qui ne s'écarteroit
que d'un pied , ou d'un pouce , d'une ligne
; que dis- je ! de l'épaiffeur d'un chede
la véritable grandeur d'un cercle
, dont le demi-diametre feroit celui de
Cvj
60 MERCURE DE FRANCE.
la terre , & même d'un autre incomparablement
plus grand.
Après ces préliminaires , l'auteur fait l'hiftoire
de ce problême chez les anciens : c'eft
l'objet du fecond chapitre. Cette queftion ',
dit-il , a dû être prefque auffi ancienne
que la Géométrie ; car les premiers Géometres
s'éleverent bientôt au- delà des confidérations
élémentaires des figures rectilignes
, & après ces figures le cercle eft
celle qui fe préfente la prémiere. Auffi
Anaxagore s'en occupa-t- il dans fa prifon ,
& prefque dès le tems de ce Philofophe la
quadrature du cercle étoit devenue célebre
jufques auprès du vulgaire . Nous rencontrons
ici un trait curieux , c'eft qu'Ariftophane
joua les Géométres au fujet de la
quadrature du cercle , dans la perfonne du
célebre Meton , l'inventeur du cycle lunaire.
Ce Poëte l'introduit fur la fcene dans
fa comédie des Oiseaux , & lui fait tenir
des propos impertinens fur la Géométrie
& fur l'Aftronomie. Voulez- vous , dit Meton
à l'autre interlocuteur , qui lui demande
qui il eft & à quoi il eft bon ; voulezvous
, dit - il , que la regle & l'équerre en
main , je vous quare le cercle ? Ce trait peut
encore avoir rapport à la folie fimulée ,
par laquelle un autre Ecrivain nous apprend
que ce Mathématicien fçut s'exempAVRIL.
1755. 61
ter d'aller à la guerre de Sicile .
>
Ces plaifanteries d'Ariftophane n'empêcherent
cependant pas les Géométres , ou
contemporains , ou fucceffeurs de Meton ,
de continuer à s'intéreffer au problême de la
quadrature du cercle . Hippocrate le tenta ,
& en donna même une faufle folution
mais l'auteur de cet ouvrage le juftifie.
Quoiqu'ilen foit, les travaux d'Hippocrate
fur ce fujet font devenus recommendables
chez la postérité géometre par la découverte
incidente de fes lunulles abfolument quarrables.
On appelle ainfi une portion du cercle
en forme de croiffant dont on démontre
très-bien l'égalité avec une figure rectiligne
, quoique le moyen de quarrer le
cercle ait éludé jufqu'ici tous les efforts
de la Géométrie . Plufieurs Géometres modernes
ont amplifié cette invention d'Hippocrate
, ce qu'on trouve fommairement
expliqué dans une note.
Lorfque les Géometres ne peuvent par
venir à la dimenſion préciſe d'une figure
ils fe bornent à en approcher de plus en
plus près. Archimede recourut à cette
voie , & donna , comme tout le monde
fçait , le rapport de fept à vingt - deux
pour la raifon approchée du diametre à la
circonférence. On remarque ici quelques
fineſſes particulieres dans le calcul d'Ar62
MERCURE DE FRANCE.
chimede , & l'on cite quelques anciens
qui avoient laborieufement encheri fur fon
exactitude. Ce chapitre eft terminé par
quelques réflexions fur les courbes qui
dépendent de la quadrature du cercle ; on
démontre que c'eft en vain qu'on cherchera
par leur moyen la folution de ce problême
.
Le troifieme chapitre eſt deſtiné à faire
connoître les découvertes faites fur la mefure
du cercle , depuis la renaiffance des
fciences en Europe jufques à l'invention
des nouveaux calculs. On voit ici fucceffivement
les approximations de Metius
de Viete , d'Adrianus Romanus , de Ludolph
, les inventions de Snellius & d'Huygens
pour en diminuer le travail , la quadrature
prétendue de Gregoire de Saint-
Vincent , à qui l'on donne une place diftinguée
de celle des autres qui fe font
trompés fur ce fujet , la querelle qu'elle
excita , celle qui s'éleva bientôt après entre
Gregori & M. Huygens fur une démonftration
que le premier propofa pour
établir l'impoffibilité de la quadrature du
cercle , &c.
Le quatrieme paroîtra fans doute trèsintéreffant
aux Géometres , car il contient
les travaux de ceux qui ont employé les
nouvelles méthodes pour parvenir à la foAVRIL.
1755. 63
lution du problême : c'eft même à l'occafion
de cette recherche que plufieurs de
çes méthodes nouvelles ont été imaginées.
L'auteur fait à cette occafion l'hiftoire de
la naiffance du calcul intégral ; on y voit
comment Wallis , le premier , trouva une
fuite infinie de nombres pour exprimer la
grandeur du cercle , que Milord Brouncker
défigna d'une autre façon particuliere ;
mais ceci ne regardoit encore que le cercle
entier , Wallis ne put en faire autant à l'égard
de fes parties quelconques , dont la
mefure eft néceffaire pour la folution parfaite
du problême ; & ce fut en cherchant
à furmonter cet obftacle que le grand Newton
, jeune encore , & depuis peu initié
dans la Géométrie , trouva la théorie des
fuites infinies , le calcul appellé intégral
parmi nous , & plufieurs autres méthodes.
On trouvera ici expofé avec beaucoup de
foin & de clarté les divers dégrés par lefquels
les différentes inventions fe font
développées , & celles qui les ont fuivies ;
ces chofes & une foule d'autres également
intéreffantes , du moins pour les Géometres
, ne font gueres fufceptibles d'extrait ,
ou conviendroient peu à un ouvrage périodique
de la nature de celui- ci ; c'eft pourquoi
nous nous bornons à les avoir indiquées.
64 MERCURE DE FRANCE .
C'auroit été omettre une partie remarquable
de l'hiſtoire de la quadrature du cercle
, que de fupprimer entierement celle de
divers Géometres ou prétendus Géometres,
qui fe font fingularifés par leurs erreurs ou
leurs prétentions abfurdes fur ce fujet . On
en palle en revûe quelques- uns , je dis avec
l'auteur , quelques - uns , car cette matiere
feule fourniroit celle d'un gros volume.
Nous devons approuver fa délicateſſe à ne
pas s'étendre beaucoup fur des objets trop
peu dignes en effet d'occuper les loisirs d'un
Ecrivain fenfé , & trop peu capables d'amufer
les lecteurs raifonnables.L'ouvrage enfin
eft terminé par un dernier chapitre , où l'on
traite hiftoriquement deux autres problêmes
prefque auffi célebres que celui de la
quadrature du cercle , & qui ont été l'occafion
d'autant de méprifes ridicules ou
deshonorantes pour leurs auteurs : ce font
ceux de la trifection de l'angle & de la
duplication du cube. Ce dernier fujet nous
a paru traité avec le même foin , la même
exactitude , & ne peut manquer de plaire
aux Géometres.
ISTOIRE DES RECHERCHES SUR LA
QUADRATURE DU CERCLE > ouvrage
propre à inftruire des découvertes réelles
fur ce problême célébre , &c. A Paris ,
chez Jombert. 1755.
Il fuffit qu'une queſtion ait de la célébrité
dans une fcience , pour la voir auffitôt
exciter les efforts de ceux qui font les
moins capables de la réfoudre. La quadrature
du cercle , la tranfmutation des
métaux , le mouvement perpétuel , le problême
des longitudes nous en fourniffent
journellement des exemples. Pour un Chymifte
habile que l'efpérance de parvenir
au grand oeuvre a entraîné dans cette recherche
,
, que de gens épuiſent encore leur
fortune & leur fanté à combiner des minéraux
, fans fçavoir la différence dun acide
& d'un alkali ! combien de perfonnes recherchent
les longitudes ou le mouvement
perpétuel , qui ignorent les loix les plus
fimples de la méchanique , les procédés
les plus ordinaires de l'aftronomie & de la
Civ
16 MERCURE DE FRANCE.
navigation ! Mais c'eft fur- tout à l'occafion
de la quadrature du cercle que cette remarque
fe vérifie ; rien n'eft plus ordinaire aujourd'hui
, & rien ne l'a plus été dans tous
les tems que de voir ce problême tenté par
des perfonnes peu verfées dans la Géométrie,
ordinairement même fi étrangeres dans
cette fcience , qu'elles font obligées , par
un retour modefte fur elles - mêmes , de regarder
leur découverte comme une révélation
fpéciale dont la divinité les a favorifées.
Nous fommes cependant fort éloignés
de mettre le problême de la quadrature du
cercle dans le même rang que le mouvement
perpétuel & la pierre philofophale :
ces deux dernieres recherches ne peuvent
Occuper que des gens qui n'ont pas affez
de connoiffances pour voir le chimérique
de leur objet. La quadrature du cercle eft
un problême raisonnable , & qui devoit
naturellement occuper les Géometres. En
effet , l'objet de la Géométrie eft de mefurer
les différentes efpéces d'étendues ou
de figures : quand on dit mefurer , cela doit
s'entendre avec cette précifion qui eft la vérité
même , & par des voies telles que celles
que la Géométrie fe permet , c'est- à - dire
fans tâtonnement , fans méchanifme , &
d'une maniere démonftrative. La quadraAVRIL.
1755. 57
ture du cercle eft la mefure exacte de la
furface renfermée dans cette courbe fi fimple
, & néanmoins fi rebelle à la Geométrie
: on l'appelle la quadrature , parce que
la coutume étant dans toutes les mesures de
rappeller la grandeur mefurée à la figure la
plus fimple, les Géometres ont pris le quarré
pour celle à laquelle ils rappelleroient toutes
les étendues fuperficielles. Ainfi la quadrature
, la meſure d'une furface d'une
figure , font des termes tout-à-fait fynonimes
en Géométrie : de là l'on voit que c'eft
n'avoir aucune idée da problême ni de la
Géométrie , que de donner à ces termes
de la quadrature du cercle le fens qu'y
attache le vulgaire , en s'imaginant qu'il
s'agit de faire un cercle quarré.
De tout tems d'habiles Géometres ont
fait des efforts ou pour mefurer le cercle
avec toute l'exactitude poffible , ou
pour approcher de plus en plus de fa mefure
précife ; & leurs travaux ont fucceffivement
enrichi la Géométrie de belles découvertes
de tout tems auffi des pygmées
en Géométrie ont annoncé avec emphaſe
la découverte de la quadrature du cercle ,
& ont excité la rifée des Géometres intelligens.
Je dois remarquer que les premiers
ontrarement crû avoir touché le but , qu'ils
fe font prefque jamais mépris au point
Cv
18 MERCURE DE FRANCE.
de penfer qu'ils euffent trouvé la folution
parfaite du problème. On peut échouet
fans honte à la recherche d'une queſtion
géométrique , mais on ne peut fans honte
donner des paralogifmes pour de légitimes
démonftrations.
L'objet que s'eft propofé l'auteur de
l'hiftoire que nous annonçons , n'a pas
été de tirer de la pouffiere les méprifables
tentatives que la quadrature du cercle a
excitées ; des paralogifmes qui n'en ont
jamais impofé qu'à leurs auteurs , des prétentions
d'une abfurdité palpable , méritoient
trop peu d'occuper la plume d'un
hiftorien raifonnable. L'auteur a judicieufement
penſé ne devoir préfenter que les
découvertes réelles dont ce problême a été
l'occafion il n'a cependant pas entierement
négligé de faire connoître quelquesuns
de ceux qui ont acquis une malheureufe
célébrité par leurs mauvais raifonnemens
& leur obftination à youloir les faire
adopter. Nous allons donner à préfent une
idée un peu détaillée de ce que contient
cet ouvrage .
Après une préface où l'auteur expofe
quel a été fon objet , quelle utilité peut
réfulter de fon travail , & qui contient
plufieurs chofes inftructives concernant
la quadrature du cercle , & ceux qui s'obfAVRIL.
1755. 59
tinent à la chercher , il entre en matiere .
Le premier chapitre eft occupé à donner
une idée claire de la nature du problême ,
des moyens que la Géométrie permet d'employer
pour le réfoudre ; on y explique les
diverfes manieres de l'envifager , & furtout
l'utilité qu'on doit lui affigner . Nous
ne pouvons nous difpenfer de remarquer
avec l'auteur , que c'est une erreur , & une
erreur qui ne peut être accréditée qu'auprès
de gens entierement deftitués des notions
de la Géométrie & de l'Aftronomie' , que de
penfer que le problême des longitudes dépend
de celui de la quadrature du cercle :
c'en eft encore une que de croire qu'il y
ait des récompenfes à efpérer pour celui
qui réfoudra ce dernier problême. On convient
que la théorie de la Géométrie y gagneroit
une vérité nouvelle , quoique
peut-être fort stérile , mais la pratique
n'en recevroit aucun avantage : car les Géometres
ont des moyens affez fimples d'approcher
de la grandeur du cercle , jufqu'à
une telle exactitude qu'elle furpaffe de
beaucoup nos befoins. Il leur eft facile
d'affigner un nombre qui ne s'écarteroit
que d'un pied , ou d'un pouce , d'une ligne
; que dis- je ! de l'épaiffeur d'un chede
la véritable grandeur d'un cercle
, dont le demi-diametre feroit celui de
Cvj
60 MERCURE DE FRANCE.
la terre , & même d'un autre incomparablement
plus grand.
Après ces préliminaires , l'auteur fait l'hiftoire
de ce problême chez les anciens : c'eft
l'objet du fecond chapitre. Cette queftion ',
dit-il , a dû être prefque auffi ancienne
que la Géométrie ; car les premiers Géometres
s'éleverent bientôt au- delà des confidérations
élémentaires des figures rectilignes
, & après ces figures le cercle eft
celle qui fe préfente la prémiere. Auffi
Anaxagore s'en occupa-t- il dans fa prifon ,
& prefque dès le tems de ce Philofophe la
quadrature du cercle étoit devenue célebre
jufques auprès du vulgaire . Nous rencontrons
ici un trait curieux , c'eft qu'Ariftophane
joua les Géométres au fujet de la
quadrature du cercle , dans la perfonne du
célebre Meton , l'inventeur du cycle lunaire.
Ce Poëte l'introduit fur la fcene dans
fa comédie des Oiseaux , & lui fait tenir
des propos impertinens fur la Géométrie
& fur l'Aftronomie. Voulez- vous , dit Meton
à l'autre interlocuteur , qui lui demande
qui il eft & à quoi il eft bon ; voulezvous
, dit - il , que la regle & l'équerre en
main , je vous quare le cercle ? Ce trait peut
encore avoir rapport à la folie fimulée ,
par laquelle un autre Ecrivain nous apprend
que ce Mathématicien fçut s'exempAVRIL.
1755. 61
ter d'aller à la guerre de Sicile .
>
Ces plaifanteries d'Ariftophane n'empêcherent
cependant pas les Géométres , ou
contemporains , ou fucceffeurs de Meton ,
de continuer à s'intéreffer au problême de la
quadrature du cercle . Hippocrate le tenta ,
& en donna même une faufle folution
mais l'auteur de cet ouvrage le juftifie.
Quoiqu'ilen foit, les travaux d'Hippocrate
fur ce fujet font devenus recommendables
chez la postérité géometre par la découverte
incidente de fes lunulles abfolument quarrables.
On appelle ainfi une portion du cercle
en forme de croiffant dont on démontre
très-bien l'égalité avec une figure rectiligne
, quoique le moyen de quarrer le
cercle ait éludé jufqu'ici tous les efforts
de la Géométrie . Plufieurs Géometres modernes
ont amplifié cette invention d'Hippocrate
, ce qu'on trouve fommairement
expliqué dans une note.
Lorfque les Géometres ne peuvent par
venir à la dimenſion préciſe d'une figure
ils fe bornent à en approcher de plus en
plus près. Archimede recourut à cette
voie , & donna , comme tout le monde
fçait , le rapport de fept à vingt - deux
pour la raifon approchée du diametre à la
circonférence. On remarque ici quelques
fineſſes particulieres dans le calcul d'Ar62
MERCURE DE FRANCE.
chimede , & l'on cite quelques anciens
qui avoient laborieufement encheri fur fon
exactitude. Ce chapitre eft terminé par
quelques réflexions fur les courbes qui
dépendent de la quadrature du cercle ; on
démontre que c'eft en vain qu'on cherchera
par leur moyen la folution de ce problême
.
Le troifieme chapitre eſt deſtiné à faire
connoître les découvertes faites fur la mefure
du cercle , depuis la renaiffance des
fciences en Europe jufques à l'invention
des nouveaux calculs. On voit ici fucceffivement
les approximations de Metius
de Viete , d'Adrianus Romanus , de Ludolph
, les inventions de Snellius & d'Huygens
pour en diminuer le travail , la quadrature
prétendue de Gregoire de Saint-
Vincent , à qui l'on donne une place diftinguée
de celle des autres qui fe font
trompés fur ce fujet , la querelle qu'elle
excita , celle qui s'éleva bientôt après entre
Gregori & M. Huygens fur une démonftration
que le premier propofa pour
établir l'impoffibilité de la quadrature du
cercle , &c.
Le quatrieme paroîtra fans doute trèsintéreffant
aux Géometres , car il contient
les travaux de ceux qui ont employé les
nouvelles méthodes pour parvenir à la foAVRIL.
1755. 63
lution du problême : c'eft même à l'occafion
de cette recherche que plufieurs de
çes méthodes nouvelles ont été imaginées.
L'auteur fait à cette occafion l'hiftoire de
la naiffance du calcul intégral ; on y voit
comment Wallis , le premier , trouva une
fuite infinie de nombres pour exprimer la
grandeur du cercle , que Milord Brouncker
défigna d'une autre façon particuliere ;
mais ceci ne regardoit encore que le cercle
entier , Wallis ne put en faire autant à l'égard
de fes parties quelconques , dont la
mefure eft néceffaire pour la folution parfaite
du problême ; & ce fut en cherchant
à furmonter cet obftacle que le grand Newton
, jeune encore , & depuis peu initié
dans la Géométrie , trouva la théorie des
fuites infinies , le calcul appellé intégral
parmi nous , & plufieurs autres méthodes.
On trouvera ici expofé avec beaucoup de
foin & de clarté les divers dégrés par lefquels
les différentes inventions fe font
développées , & celles qui les ont fuivies ;
ces chofes & une foule d'autres également
intéreffantes , du moins pour les Géometres
, ne font gueres fufceptibles d'extrait ,
ou conviendroient peu à un ouvrage périodique
de la nature de celui- ci ; c'eft pourquoi
nous nous bornons à les avoir indiquées.
64 MERCURE DE FRANCE .
C'auroit été omettre une partie remarquable
de l'hiſtoire de la quadrature du cercle
, que de fupprimer entierement celle de
divers Géometres ou prétendus Géometres,
qui fe font fingularifés par leurs erreurs ou
leurs prétentions abfurdes fur ce fujet . On
en palle en revûe quelques- uns , je dis avec
l'auteur , quelques - uns , car cette matiere
feule fourniroit celle d'un gros volume.
Nous devons approuver fa délicateſſe à ne
pas s'étendre beaucoup fur des objets trop
peu dignes en effet d'occuper les loisirs d'un
Ecrivain fenfé , & trop peu capables d'amufer
les lecteurs raifonnables.L'ouvrage enfin
eft terminé par un dernier chapitre , où l'on
traite hiftoriquement deux autres problêmes
prefque auffi célebres que celui de la
quadrature du cercle , & qui ont été l'occafion
d'autant de méprifes ridicules ou
deshonorantes pour leurs auteurs : ce font
ceux de la trifection de l'angle & de la
duplication du cube. Ce dernier fujet nous
a paru traité avec le même foin , la même
exactitude , & ne peut manquer de plaire
aux Géometres.
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Résumé : « HISTOIRE DES RECHERCHES SUR LA QUADRATURE DU CERCLE, ouvrage [...] »
Le texte aborde l'histoire des recherches sur la quadrature du cercle, un problème géométrique célèbre. Il souligne que des questions célèbres, telles que la quadrature du cercle, la transmutation des métaux, le mouvement perpétuel et le problème des longitudes, attirent souvent des tentatives de résolution par des personnes peu compétentes. La quadrature du cercle consiste à mesurer exactement la surface d'un cercle en la rapportant à un carré, ce qui est un problème légitime en géométrie. Le texte distingue la quadrature du cercle des recherches chimériques comme le mouvement perpétuel ou la pierre philosophale. Il explique que la géométrie vise à mesurer les figures de manière précise et démonstrative, sans tâtonnement ni mécanisme. Des géomètres compétents ont travaillé sur ce problème, enrichissant la géométrie de découvertes, tandis que d'autres, moins compétents, ont annoncé faussement avoir résolu le problème. L'ouvrage mentionné se concentre sur les découvertes réelles liées à la quadrature du cercle, tout en mentionnant quelques erreurs notables. Il commence par une préface expliquant l'objet et l'utilité du travail, suivi de chapitres détaillant la nature du problème, les efforts des anciens géomètres comme Anaxagore et Hippocrate, et les travaux modernes depuis la renaissance des sciences en Europe. Le texte mentionne également les contributions d'Archimède, Metius, Vieta, Ludolph, Snellius, Huygens, et d'autres, ainsi que les nouvelles méthodes comme le calcul intégral développé par Newton. Enfin, l'ouvrage traite brièvement des erreurs et prétentions absurdes de certains prétendus géomètres, et aborde d'autres problèmes célèbres comme la trisection de l'angle et la duplication du cube.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
21
p. 87-92
LETTRE à M..... Professeur & Censeur royal, par M. G. Ecuyer, Officier de la chambre de Madame la Dauphine, sur un problême d'algebre appliqué à la science de la guerre.
Début :
Monsieur, j'avois décidé avec moi-même de faire un divorce irréconciliable [...]
Mots clefs :
Algèbre, Géométrie, Science de la guerre, Madame la Dauphine, Problème d'algèbre, Guerre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE à M..... Professeur & Censeur royal, par M. G. Ecuyer, Officier de la chambre de Madame la Dauphine, sur un problême d'algebre appliqué à la science de la guerre.
LETTRE à M ..... Profeſſeur & Cenfeur
royal , par M. G. Ecuyer , Officier
de la chambre de Madame la Dauphine
, fur un problême d'algebre appliqué
à la fcience de la guerre .
Onfieur , j'avois décidé avec moi-
Mmême de faire un divorce irréconciliable
avec l'Algebre & la Géométrie :
la néceffité de faire valoir mon bien de
campagne , celle de fuivre plufieurs procès
de fucceffion , mon peu de fanté , &
par conféquent le peu d'efpérance d'y acquerir
une forte de célébrité , m'avoient
fait prendre un parti fi contraire à mon
goût . J'eus l'honneur cet automne &
en même tems le vrai bonheur d'être admis
à faire ma cour à des perfonnes de
qualité de mon voifinage ; j'y retrouvai
des compas , des équerres , des niveaux ,
des graphometres , des cartes topographi
,
38 MERCURE DE FRANCE .
ques , des plans de bataille , de fiége , de
marches militaires , des projets de campa
gne , &c. en un mot tout ce qui caractériſe
un ſyſtème de travail ferieux , fuivi ,
& propre à des perfonnes deftinées par leur
naiffance & leurs talens héréditaires &
perfonnels , aux premiers emplois de la
guerre en falloit- il davantage pour me
rappeller à mes premieres foibleffes : On
me propofa de réfoudre le problême d'algebre
dont je vous fais aujoud'hui la dédicace
; nouvelles chaînes , nouveau motif
d'ardeur & d'émulation , & voilà l'époque
glorieufe pour moi de mon retour à
la géométrie. Je vis dans cette refpectable
maifon , avec un plaifir bien fenfible
& bien délicat , des enfans à peine de fept
ou huit ans , tracer des lignes & des angles
, reconnoître leurs rapports & leurs
combinaiſons , manier des inftrumens de
Mathématique je fus enchanté de n'entendre
fortir de leur bouche que les termes
de fervice du Roi , de la haine de
fes ennemis , de l'honneur , de la bravoure
, & de la néceffité d'acquerir les talens
du coeur & de l'efprit , indifpenfables pour
commander les autres ; on me pardonnera
cette forte d'indifcrétion , j'y vis avec la
plus vive furpriſe , & comme une efpéce
de paradoxe , les dames , fans perdre la
MA 1. 1755. 89 ·
plus légere de leurs graces , ni de ce tour
délicat & ingénieux de la converſation
que donne l'ufage du grand monde ; les
dames , dis- je , paffer avec fuccès , de la
poëfie , de la mufique , de l'hiftoire , ou
des ouvrages de goût & de légereté , à calculer
, à réfoudre des problèmes de Géométrie
& d'Algebre.
Enfin j'y vis les terres & les arbres
cultivés fuivant les principes de M M.
Sthul , Duhamel , de Buffon ; les abeilles
& les vers à foie élevés fuivant les regles
de M. de Réaumur ; la pratique de l'éducation
fauvage des beftiaux , en un mot
plufieurs de ces arts champêtres innocens ,
utiles à la fociété , à la fanté , à la confervation
de fon bien , & dont les héros rendus
à la paix ne rougiffoient point autrefois.
Tout refpiroit dans cette belle & délicieuſe
campagne l'efprit de calcul & de
fyftême , & ces principes folides de la
raifon fupérieure de l'illuftre M. de P. auffi
grand à la guerre que férieux & appliqué
chez lui , d'où il avoit banni cette frivo-.
lité qui ne gagne que trop aujourd'hui .
Les bornes d'une lettre femblent contraindre
de fi juftes motifs d'éloges ; mais la
vertu & le vrai mérite font fi peu communs
qu'on n'en reconnoît les traces qu'avec
un fecret & délicieux enchantement ;
90 MERCURE DE FRANCE.
ces motifs ne font pas néanmoins étrangers
à l'objet de ma lettre , puifqu'il vous
entretiennent d'application de calcul aux
affaires de la vie ; méthode que vous eftimez
. avec raiſon , bien fupérieure à celle
qui ne traite que des x & des y , & dont
vous ne ceſſez de recommander l'uſage à
vos difciples après qu'ils fe font mis en
poffeffion de cette derniere .
?
&
Parlons maintenant de mon problême ,
qui eft , je penſe , un des plus forts qu'on
puiffe propofer en Algebre indéterminée du
premier dégré ; j'ai pris à tâche de réunir
toutes les méthodes de Diophante , de Bachet
, du P. Prefter , & d'autres. Il contient ,
proprement parler , huit problêmes différens
; ce n'eft que la quatrieme condition
qui lie les trois précédentes , comme vous
le verrez dans la premierepréparation
qui les rappelle à une expreffion où les inconnues
font égalées à des quantités connues
mêlées avec deux indéterminées . Les
fept & huitiémes conditions font deux.
problêmes nouveaux , qu'on peut encore
réfoudre féparément des premiers ; mais
comme ils font une efpéce d'hiftoire fuivie
, il faut trouver l'art de les lier avec
la deuxième préparation il y a encore
un choix délicat à faire dans les rapports
des pertes ou des foldats défaits de chaM
A I.
1755 . 91
que
détachement , car fi on ne les tire
point de la nature intrinfeque du problême
, on ne fera rien qui vaille , on aura
bien des folutions vraies , mais qui feront
à d'autres queftions. Il eft inexprimable
combien j'ai gâté de papier , & combien
il m'en a coûté de peines pour fixer ces
rapports , fans compter les fautes d'étourderie
& les erreurs des fignes . Je joins à ma
lettre le mis au net de mes calculs , qui contiennent
cinq ou fix feuillets , fans aucun
détail de divifion ou de multiplication.
C'eſt un hommage que je vous adreffe ,
un tribut , le paiement d'une dette , car
affurément je vous dois beaucoup ; c'eft
en un fens votre bien , votre ouvrage ,
puifqu'il eft bâti des matériaux recueillis
fous vous au Collège royal ; c'eft le fruit
du long loifir que me laiffe mon fervice ,
& duquel je ne crois pas devoir faire un
meilleur ufage , les devoirs de la fociété
remplis , pour mériter l'honneur de votre
eftime , & le nom de &c.
Les nombres les plus fimples qui fatisfont
à toutes les conditions du problê
me , font : 551 , 431 , 311 .
All x 8400 μss!?
J : 64052 + 431
4410
➡0.1.2.3.4.5. &cj
311
92 MERCURE DE FRANCE.
1 ° . Effectivement le tiers de 551 eſt
1832, le quart de 551 eft 135 +3 .
e
2°. Le 5º de 431 eft 86 + 1 , & le 7º
de 431 eft 614.
3 °. Le 7° de 311 eft 44 + 3 , & le 9º
de 311 eft 34 + 4.
4°. 551 + 311 = 2 × 431 = 862.
50. 551 +9 , 43x + +2 , 431 +4 :: 140. 61 .
7
60 551 +9 311 ·
'SI.
140.102
:: 50 :
C. Q.F. F. & D.
A Versailles , ce 10 Avril 1755 .
royal , par M. G. Ecuyer , Officier
de la chambre de Madame la Dauphine
, fur un problême d'algebre appliqué
à la fcience de la guerre .
Onfieur , j'avois décidé avec moi-
Mmême de faire un divorce irréconciliable
avec l'Algebre & la Géométrie :
la néceffité de faire valoir mon bien de
campagne , celle de fuivre plufieurs procès
de fucceffion , mon peu de fanté , &
par conféquent le peu d'efpérance d'y acquerir
une forte de célébrité , m'avoient
fait prendre un parti fi contraire à mon
goût . J'eus l'honneur cet automne &
en même tems le vrai bonheur d'être admis
à faire ma cour à des perfonnes de
qualité de mon voifinage ; j'y retrouvai
des compas , des équerres , des niveaux ,
des graphometres , des cartes topographi
,
38 MERCURE DE FRANCE .
ques , des plans de bataille , de fiége , de
marches militaires , des projets de campa
gne , &c. en un mot tout ce qui caractériſe
un ſyſtème de travail ferieux , fuivi ,
& propre à des perfonnes deftinées par leur
naiffance & leurs talens héréditaires &
perfonnels , aux premiers emplois de la
guerre en falloit- il davantage pour me
rappeller à mes premieres foibleffes : On
me propofa de réfoudre le problême d'algebre
dont je vous fais aujoud'hui la dédicace
; nouvelles chaînes , nouveau motif
d'ardeur & d'émulation , & voilà l'époque
glorieufe pour moi de mon retour à
la géométrie. Je vis dans cette refpectable
maifon , avec un plaifir bien fenfible
& bien délicat , des enfans à peine de fept
ou huit ans , tracer des lignes & des angles
, reconnoître leurs rapports & leurs
combinaiſons , manier des inftrumens de
Mathématique je fus enchanté de n'entendre
fortir de leur bouche que les termes
de fervice du Roi , de la haine de
fes ennemis , de l'honneur , de la bravoure
, & de la néceffité d'acquerir les talens
du coeur & de l'efprit , indifpenfables pour
commander les autres ; on me pardonnera
cette forte d'indifcrétion , j'y vis avec la
plus vive furpriſe , & comme une efpéce
de paradoxe , les dames , fans perdre la
MA 1. 1755. 89 ·
plus légere de leurs graces , ni de ce tour
délicat & ingénieux de la converſation
que donne l'ufage du grand monde ; les
dames , dis- je , paffer avec fuccès , de la
poëfie , de la mufique , de l'hiftoire , ou
des ouvrages de goût & de légereté , à calculer
, à réfoudre des problèmes de Géométrie
& d'Algebre.
Enfin j'y vis les terres & les arbres
cultivés fuivant les principes de M M.
Sthul , Duhamel , de Buffon ; les abeilles
& les vers à foie élevés fuivant les regles
de M. de Réaumur ; la pratique de l'éducation
fauvage des beftiaux , en un mot
plufieurs de ces arts champêtres innocens ,
utiles à la fociété , à la fanté , à la confervation
de fon bien , & dont les héros rendus
à la paix ne rougiffoient point autrefois.
Tout refpiroit dans cette belle & délicieuſe
campagne l'efprit de calcul & de
fyftême , & ces principes folides de la
raifon fupérieure de l'illuftre M. de P. auffi
grand à la guerre que férieux & appliqué
chez lui , d'où il avoit banni cette frivo-.
lité qui ne gagne que trop aujourd'hui .
Les bornes d'une lettre femblent contraindre
de fi juftes motifs d'éloges ; mais la
vertu & le vrai mérite font fi peu communs
qu'on n'en reconnoît les traces qu'avec
un fecret & délicieux enchantement ;
90 MERCURE DE FRANCE.
ces motifs ne font pas néanmoins étrangers
à l'objet de ma lettre , puifqu'il vous
entretiennent d'application de calcul aux
affaires de la vie ; méthode que vous eftimez
. avec raiſon , bien fupérieure à celle
qui ne traite que des x & des y , & dont
vous ne ceſſez de recommander l'uſage à
vos difciples après qu'ils fe font mis en
poffeffion de cette derniere .
?
&
Parlons maintenant de mon problême ,
qui eft , je penſe , un des plus forts qu'on
puiffe propofer en Algebre indéterminée du
premier dégré ; j'ai pris à tâche de réunir
toutes les méthodes de Diophante , de Bachet
, du P. Prefter , & d'autres. Il contient ,
proprement parler , huit problêmes différens
; ce n'eft que la quatrieme condition
qui lie les trois précédentes , comme vous
le verrez dans la premierepréparation
qui les rappelle à une expreffion où les inconnues
font égalées à des quantités connues
mêlées avec deux indéterminées . Les
fept & huitiémes conditions font deux.
problêmes nouveaux , qu'on peut encore
réfoudre féparément des premiers ; mais
comme ils font une efpéce d'hiftoire fuivie
, il faut trouver l'art de les lier avec
la deuxième préparation il y a encore
un choix délicat à faire dans les rapports
des pertes ou des foldats défaits de chaM
A I.
1755 . 91
que
détachement , car fi on ne les tire
point de la nature intrinfeque du problême
, on ne fera rien qui vaille , on aura
bien des folutions vraies , mais qui feront
à d'autres queftions. Il eft inexprimable
combien j'ai gâté de papier , & combien
il m'en a coûté de peines pour fixer ces
rapports , fans compter les fautes d'étourderie
& les erreurs des fignes . Je joins à ma
lettre le mis au net de mes calculs , qui contiennent
cinq ou fix feuillets , fans aucun
détail de divifion ou de multiplication.
C'eſt un hommage que je vous adreffe ,
un tribut , le paiement d'une dette , car
affurément je vous dois beaucoup ; c'eft
en un fens votre bien , votre ouvrage ,
puifqu'il eft bâti des matériaux recueillis
fous vous au Collège royal ; c'eft le fruit
du long loifir que me laiffe mon fervice ,
& duquel je ne crois pas devoir faire un
meilleur ufage , les devoirs de la fociété
remplis , pour mériter l'honneur de votre
eftime , & le nom de &c.
Les nombres les plus fimples qui fatisfont
à toutes les conditions du problê
me , font : 551 , 431 , 311 .
All x 8400 μss!?
J : 64052 + 431
4410
➡0.1.2.3.4.5. &cj
311
92 MERCURE DE FRANCE.
1 ° . Effectivement le tiers de 551 eſt
1832, le quart de 551 eft 135 +3 .
e
2°. Le 5º de 431 eft 86 + 1 , & le 7º
de 431 eft 614.
3 °. Le 7° de 311 eft 44 + 3 , & le 9º
de 311 eft 34 + 4.
4°. 551 + 311 = 2 × 431 = 862.
50. 551 +9 , 43x + +2 , 431 +4 :: 140. 61 .
7
60 551 +9 311 ·
'SI.
140.102
:: 50 :
C. Q.F. F. & D.
A Versailles , ce 10 Avril 1755 .
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Résumé : LETTRE à M..... Professeur & Censeur royal, par M. G. Ecuyer, Officier de la chambre de Madame la Dauphine, sur un problême d'algebre appliqué à la science de la guerre.
La lettre est adressée à un professeur et censeur royal par M. G., écuyer et officier de la chambre de Madame la Dauphine. L'auteur avait initialement abandonné l'algèbre et la géométrie en raison de ses obligations personnelles et de son manque de temps. Cependant, lors d'une visite chez des personnes de qualité, il a été inspiré par l'environnement mathématique et militaire qu'il y a trouvé. Il a été invité à résoudre un problème d'algèbre appliqué à la science de la guerre, ce qui l'a ramené à ses premières passions. Dans cette maison, il a observé des enfants et des dames s'adonnant aux mathématiques avec succès, tout en cultivant des terres et élevant des animaux selon des principes scientifiques. L'auteur a été impressionné par l'esprit de calcul et de système qui y régnait, ainsi que par les principes solides de la raison supérieure. L'auteur décrit ensuite le problème d'algèbre qu'il a résolu, un problème complexe d'algèbre indéterminée du premier degré, réunissant diverses méthodes. Il mentionne les difficultés rencontrées et les erreurs commises lors de la résolution. Il joint à sa lettre le résultat de ses calculs, qu'il considère comme un hommage au professeur. Les nombres les plus simples satisfaisant aux conditions du problème sont 551, 431 et 311. L'auteur fournit également des détails sur les calculs effectués pour vérifier ces solutions. La lettre est datée du 10 avril 1755.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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22
p. 113
PROBLEME DE GÉOMÉTRIE.
Début :
UN triangle isocèle étant circonscrit à deux cercles contigus qui ont leurs [...]
Mots clefs :
Géométrie, Isocèle, Base, Côtes
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texteReconnaissance textuelle : PROBLEME DE GÉOMÉTRIE.
PROBLEME DE GÉOMÉTRIE.
UNN triangle ifocèle étant circonfcrit
à deux cercles contigus qui ont leursdiametres
dans la raifon de trois à un ;
de manière que fa bafe touche la grande
circonférence , & chacun de fes côtés ,
celle-ci & la petite : on demande quel
eft dans ce triangle , le rapport de la
bafe aux côtés . Propofé par Albert, Etudiant
en Mathématique fous M. Baubé,
ǎ Lyon.
A Lyon , ce 7 Janvier 1763.
UNN triangle ifocèle étant circonfcrit
à deux cercles contigus qui ont leursdiametres
dans la raifon de trois à un ;
de manière que fa bafe touche la grande
circonférence , & chacun de fes côtés ,
celle-ci & la petite : on demande quel
eft dans ce triangle , le rapport de la
bafe aux côtés . Propofé par Albert, Etudiant
en Mathématique fous M. Baubé,
ǎ Lyon.
A Lyon , ce 7 Janvier 1763.
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23
p. 71-72
LOGOGRYPHE.
Début :
Je suis d'une structure un peu trop étendue [...]
Mots clefs :
Géométrie