Résultats : 20 texte(s)
Détail
Liste
1
p. 835-838
ANDROMEDE. CANTATE.
Début :
Sur un affreux Rocher que la Mer irritée, [...]
Mots clefs :
Andromède, Monstre, Rocher, Attraits, Amour, Instant, Mer
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texteReconnaissance textuelle : ANDROMEDE. CANTATE.
MEDE.
CANTATE.
"
UR un affreux Rocher que la Mer
irritée ,
Battoit de tous côtez de ses flots
écumeux ,
Andromede, étoit enchaînée :
Victime du courroux des Dieux ,
:
Pour expier l'orgueil d'une More insensée ,
A périr sous les coups d'un Monstre furicux ,
A ij
L'Ora
SH.P
836
MERCURE
DE
FRANCE
:
L'Oracle l'avoit condamnée :
Jeune , pleine d'attraits , fille d'un Roy puissane
Sur le point d'allumer les feux de l'himenée ,
Par un revers terrible , elle est en un instant
Seule , proscrite , abandonnée ;
Envain l'air retentit de ses gémissemens ;
Le Ciel s'est déclaré contre elle ;
Rien ne peut adoucir ses Arrêts violents :
En vain par ces tristes accents ,
7
Bile exprime l'excès de sa douleur mortelle ;
Vains attraits , funeste Beauté ,
Objet d'une jalouse envie ,
Qui faisoit ma félicité ,.
Tu fais le malheur de ma vie
C'en est fait , ces traits séduisants ,
Qui bruloient des plus vives flammes
Les coeurs d'une foule d'A
N'ont plus de pouvoir sur leurs ames
Grands Dieux ! quel affreux changement !
Tout me fuit , que dis- je! Phinée ,
Peu touché de ma destinée ,
N'est plus qu'un lâche , un inconstant,
Tandis que sa douleur profonde ,
Porte ses plaintes jusqu'aux Cieux ,
L'air s'obscurcit , la foudre gronde ,
Les vents souflent , le Ciel brille de mille feux ,
La
MAY: 1734 7837
La Mer s'agite, un flot avec force s'élance ,
S'abbaisse tout à coup , vers le Rocher s'avance ,
Et vomit le Monstre à ses yeux .
Déja vers l'aimable Princesse ,
Il marche à pas précipité ,
Il atteint le Rocher ; sa fureur vengeresse ,
Est prête à dévorer cette jeune Beauté ;
Ne craignez ' rien , Princesse infortunée ,
L'Amour s'interesse à vos jours ;
Ce Dieu vous amene Persée ;
Esperez tout avec de tels secours ,
Cet Amant génereux , mieux que l'ingrat Phi
née ,*
Sçaura de vos malheurs faire finir le cours ;
Persée à cet instant s'avance vers la Roche
L'aspect de tant d'appas redouble sa valeur ;
Furieux , du Monstre il s'approche ,
Il l'arrête , et d'un trait il lui perce le cour
Le'Monstre fait des résistances vaines ;
Il perd son sang , il tombe , il meurt ;
Cependant cet Amant vainqueur ,
D'Andromede brise les chaînes ,
Et lui fait un aveu de sa secrette ardeur ;
La Belle ne fut pas insensible à ses peines ,
Un service si grand parloit en sa faveur
L'Amour se mit d'intelligence ;
Une tendre reconnoissance |
La fit ceder bien- tôt à son Liberateur ;
3
A iij Amans ,
838 MERCURE DE FRANCE
Amans , les froideurs de vos Belles ,
Ne doivent point vous dégager
Les plus ficres , les plus cruelles ,
Peuvent en un instant changer.
Soyez tendres , soyez fidelles ,
Et ne vous relâchez jamais ,
Le moindre service pour elles ,
A toûjours de puissants attraits.
Un amour de reconnoissance
Chez le Sexe naît aisément ;
Et souvent plus loin qu'il ne pense ,
Il porte cet engagement.
V. D. G.
CANTATE.
"
UR un affreux Rocher que la Mer
irritée ,
Battoit de tous côtez de ses flots
écumeux ,
Andromede, étoit enchaînée :
Victime du courroux des Dieux ,
:
Pour expier l'orgueil d'une More insensée ,
A périr sous les coups d'un Monstre furicux ,
A ij
L'Ora
SH.P
836
MERCURE
DE
FRANCE
:
L'Oracle l'avoit condamnée :
Jeune , pleine d'attraits , fille d'un Roy puissane
Sur le point d'allumer les feux de l'himenée ,
Par un revers terrible , elle est en un instant
Seule , proscrite , abandonnée ;
Envain l'air retentit de ses gémissemens ;
Le Ciel s'est déclaré contre elle ;
Rien ne peut adoucir ses Arrêts violents :
En vain par ces tristes accents ,
7
Bile exprime l'excès de sa douleur mortelle ;
Vains attraits , funeste Beauté ,
Objet d'une jalouse envie ,
Qui faisoit ma félicité ,.
Tu fais le malheur de ma vie
C'en est fait , ces traits séduisants ,
Qui bruloient des plus vives flammes
Les coeurs d'une foule d'A
N'ont plus de pouvoir sur leurs ames
Grands Dieux ! quel affreux changement !
Tout me fuit , que dis- je! Phinée ,
Peu touché de ma destinée ,
N'est plus qu'un lâche , un inconstant,
Tandis que sa douleur profonde ,
Porte ses plaintes jusqu'aux Cieux ,
L'air s'obscurcit , la foudre gronde ,
Les vents souflent , le Ciel brille de mille feux ,
La
MAY: 1734 7837
La Mer s'agite, un flot avec force s'élance ,
S'abbaisse tout à coup , vers le Rocher s'avance ,
Et vomit le Monstre à ses yeux .
Déja vers l'aimable Princesse ,
Il marche à pas précipité ,
Il atteint le Rocher ; sa fureur vengeresse ,
Est prête à dévorer cette jeune Beauté ;
Ne craignez ' rien , Princesse infortunée ,
L'Amour s'interesse à vos jours ;
Ce Dieu vous amene Persée ;
Esperez tout avec de tels secours ,
Cet Amant génereux , mieux que l'ingrat Phi
née ,*
Sçaura de vos malheurs faire finir le cours ;
Persée à cet instant s'avance vers la Roche
L'aspect de tant d'appas redouble sa valeur ;
Furieux , du Monstre il s'approche ,
Il l'arrête , et d'un trait il lui perce le cour
Le'Monstre fait des résistances vaines ;
Il perd son sang , il tombe , il meurt ;
Cependant cet Amant vainqueur ,
D'Andromede brise les chaînes ,
Et lui fait un aveu de sa secrette ardeur ;
La Belle ne fut pas insensible à ses peines ,
Un service si grand parloit en sa faveur
L'Amour se mit d'intelligence ;
Une tendre reconnoissance |
La fit ceder bien- tôt à son Liberateur ;
3
A iij Amans ,
838 MERCURE DE FRANCE
Amans , les froideurs de vos Belles ,
Ne doivent point vous dégager
Les plus ficres , les plus cruelles ,
Peuvent en un instant changer.
Soyez tendres , soyez fidelles ,
Et ne vous relâchez jamais ,
Le moindre service pour elles ,
A toûjours de puissants attraits.
Un amour de reconnoissance
Chez le Sexe naît aisément ;
Et souvent plus loin qu'il ne pense ,
Il porte cet engagement.
V. D. G.
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Résumé : ANDROMEDE. CANTATE.
Le texte raconte l'histoire d'Andromède, fille d'un roi puissant, condamnée par un oracle à périr sous les coups d'un monstre en raison de l'orgueil de sa mère. Jeune et belle, elle est sur le point de se marier mais se retrouve seule et abandonnée. Ses appels à l'aide restent vains, y compris auprès de Phinée, son amant. Alors que le monstre approche, Persée, guidé par l'Amour, arrive pour la sauver. Il tue le monstre et libère Andromède, lui avouant son amour. Touchée par son geste, Andromède répond à ses sentiments. Le texte conclut en conseillant aux amants de rester tendres et fidèles, car même les femmes les plus froides peuvent changer et éprouver de la reconnaissance.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 838-849
LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
Début :
Il y a, Messieurs, plus de trente ans qu'un sçavant Ecclesiastique d'Orleans, [...]
Mots clefs :
Saint Aignan, Sépulture, Orléans, Évêque, Église, Saint Laurent, Nom, Translation, Saint Pierre, Saints, Églises, Roi Robert
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
LETTRE de M. L *** Ch . et S.
d'Auxerre , aux Auteurs du Mercure de
France , touchant la Sépulture de saint
Agnan , Evêque d'Orleans.
Lya , Messieurs , plus de trente ans
leans , nommé M. le Brun , avoit composé
une ample Dissertation sur la Sépulture
de S. Agnan , dont on vous a envoyé
un Extrait , que vous avez publié
dans
MAY
839
་
1734
dans le Mercure de Septembre dernier .
Ainsi je ne croi pas que celui de qui vous
tenez cet Extrair , se fasse honneur de
la Dissertation. Je la conserve écrite de
la main de l'Auteur , avec la copie d'une
Lettre que M. Baillet lui écrivit en conséquence
de la communication qu'il lui
en donna. Certe Piece servit aussi à Orleans
à détromper tous ceux qui voulurent
en prendre communication . Je
suis bien aise que vous en ayez publié
l'essentiel.
C'est en effet une erreur grossiere de
croire que S. Agnan ait été inhumé dans
l'Eglise de S Laurent , qui est située à
l'Occident de la Ville d'Orleans . Outre
Is témoignages tirez du Testament de
eodebode , de la Vie de S. Mémin , de
celle de S. Euspice , que M. le Brun a
fait valoir , il s'en présente encore un
plus formel , qui n'est pas venu à sa
connoissance , et dont on ne peut éluder
la force , quelque antiquité qu'on s'avise
de donner à la Tranflation prétenduë
du Saint Corps d'une Eglise de S Laurent
, bâtie à l'Occident d'Orleans , en
celle de S. Pierre , bâtie à l'Orient. Cette
Tranflation doit passer pour chimerique,
dès-là qu'on lit dans une Vie authentique
de S. Agnan , qu'après son décès
A iiij un
842 MERCURE DE FRANCE
de S. Laurent à l'Occid.nt d'Orleans ,
laquelle est appellée S. Laurent des Orge
rils ,mais je me croi assez fondé pour soutenir
qu'il y en a eu une autre du nom
du même Saint , du côté Oriental. Si
dans Orleans il a existé jusqu'à cinq ou
six Eglises du nom de Saint Pierre ,
deux sous le titre de Saint Jean , et deux
sous celui de S. Germain d'Auxerre ;
quelle impossibilité y a-t'il qu'il n'y ait
aussi existé deux Eglises du nom de saint
Laurent N'y a- t'il pas eû de- même à
Paris deux Eglises du nom de S. Vincent,
Martyr d'Espagne ? Combien de Villes
où il y a plus d'une Eglise du titre de
S. Martin ou de quelqu'autre Saint célebre
?
Une preuve qu'il y a eu pendant quelques
siecles une Eglise ou Oratoire de
S. Laurent dans le Champ de Tétrade à
l'Orient d'Orleans et sur le Territoire de
l'Eglise qui a porté depuis le nom de
S. Agnan , est , que la memoire de ce saint
Martyr est distinguée de temps immémorial
de celle des autres Saints étrangers
, dans l'Eglise de S. Agnan même.
Dans le Catalogue des dix- neuf Autels
que l'on y érigea lorsque le Roy Robert
fit rebâtir à neuf cette Eglise , on voit
qu'après l'Autel principal sous l'invoca
tion
MAY. 1734.
843
tion de S. Pierre et S. Paul , celui de
S. Benoît et celui de S. Euverte , c'est
celui de S. Laurent qui suit immédiate
ment , par distinction au dessus de ceux
qui portoient le nom de S. Sauveur , de
Notre- Dame , de S. Jean , de S. Michel,
qui ne sont nommez qu'après. Je ne
prétens point qu'il y ait eu dans l'étenduë
du Champ de Tétrade , ni autour
de l'Eglise de S. Pierre , dite depuis saint
Agnan , autant d'Eglises qu'on érigea
d'Autels dans le nouvel Edifice achevé
l'an 1029. mais au moins y en avoit- il
eu d'érigez sous l'invocation de ceux qui
y sont nommez les premiers avant Notre
-Seigneur et la Sainte Vierge .
Helgaud , Moine de Fleury , ne parlet'il
pas d'une Eglise de S. Martin comme
existante sous le Roy Robert , laquelle
étoit une Chapelle à l'extremité du Cloftre
de S. Agnan , et qui n'existe plus ? Il
ne faut donc pasjuger des siecles passez par
les choses qui subsistent de nos jours , ni
croire qu'il n'y a jamais eu à Orleans
qu'une seule Eglise de S. Laurent , parce
qu'on n'en voit qu'une aujourd'hui . Il
doit y en avoir existé une autre à l'Orient
de la Cité ; et c'est cette Eglise aujourd'ui
inconnue et dans l'oubli , qui
sert de fondement à la Tradition d'Or-
A vj leans
844 MERCURE DE FRANCE
leans , que le Corps de S. Agnan a été
transferé de l'Eglise de S. Laurent en celle
qui a depuis porté son nom.
Lorsque le Corps de ce saint Evêque furt
remué pour la premiere fois , il a pû se
faire qu'il reposoit alors dans un Oratoire
ou petite Eglise de S. Laurent , bâtie
dans le Champ de Tétrade , et que
de- là , vû le peu d'éloignement , le Tombeau
tel qu'il étoit , ait été transporté dans
l'Eglise de S. Pierre , qui étoit le principal
Edifice entre ceux de ce Champ . La
petite Eglise de S. Laurent ayant ensuite
été détruite comme inutile , ou étant tombée
de vétusté , il sera arrivé depuis , lorsqu'on
parloit de la Tranflation du Corps.
de S. Agnan , que le Peuple aura attribué
à l'Eglise de S. Laurent des Orgerils ,
ce qui ne convenoit , dans la verité , qu'à
P'Oratoire de S. Laurent , qui avoit été
situé dans la partie toute opposée . Ainsi
se forment souvent les Traditions populaires.
On attribuë à l'objet existant , ce
qui n'avoit été dit ou écrit que de l'objet
détruit ou anéanti ; et pendant que personne
ne produit des preuves de la méprise
, l'erreur prend racine , elle s'autorise
ensuite de son antiquité , trouve
des Protecteurs dans les Habitans du Lieu
qu le nom se conserve , et il faur user
après
MAY. 1734 845
après cela de mille ménagemens pour les
faire revenir de la bévûe où la simplicité
de leurs prédécesseurs les avoit jettez.
M. Baillet n'a pas voulu adopter la nouvelle
Tradition de S. Laurent au Fauxbourg
Occidental d'Orleans . Le Pere de
Longueval , Jesuite , ne déterminant
point la situation de l'Eglise de S. Laurent
, a évité de la favoriser ouvertement.
Quoique la Tranflation du Corps de
S. Agnan du premier lieu de sa Sépulture
dans le lieu qui portoit le nom de
Basilique de S. Pierre , n'eût pas été d'un
grand trajet , et qu'elle n'ait peut- être
été que d'un jet de pierre , elle a cependant
été écrite dans les anciens Martyrologes
et Calendriers , parce qu'elle a été
assez remarquable pour ces temps - là où
les remuemens des Corps des Saints ne
se faisoient gueres que lorsqu'une Eglise
menaçoit ruine ou qu'elle étoit trop petite
pour le concours qui se faisoit à leurs
Tombeaux. On la croit du commencement
du septiéme siecle. L'Ombre de
M. Thiers auroit pû l'ajouter aux exemples
de Tranflations de Saints Confesseurs
qui autorisent sa rétractation * sur celle
de S. Firmin le Confès d'Amiens , outre
1
Cette rétractation est imprimée dans le Mersure:
de Juin x7.3.1 IĮ. volume.
celles
846 MERCURE DE FRANCE
celles de S. Vaast d'Arras , qui fut faite
dans le même siecle par S. Aubert , l'un
de ses Successeurs , et celle de S. Maximin
, Evêque de Tréves , faite aussi alors
par S. Hidulfe , Corevêque de ce Siege.
Je ne parle pas de quelques autres plus
anciennes , telle que celle des Saints Evêques
de Verdun , prédecesseurs de S. Airy
, faite par lui -même au sixiéme siecle ,
ni de celle de S. Gatien , premier Evêque
de Tours , faite par S. Martin.
On doit compter parmi les Martyrologes
où la premiere Tranfiation du Corps
de S. Agnan se trouve , outre celui de
Bede , deux autres qui ont été publiez
par Dom Martene , l'un au troisiéme vofume
de ses Anecdotes , page 1556. où
on lit Aurelianis Translatio S. Aniani ;
l'autre au sixième tome de son ample Col
lection , page 708. où se lit ce qui suit :
In civitate Aurelianis Tranflatio Corporis
S. Aniani Episcopi , et liberatio civitatis
ipsius à Hunnis. Les deux premiers sont
anterieurs au Roy Robert. Le troisiéme
a été écrit de son temps ; mais il copie
le fait de la premiére Transflation , et
non pas celle qui fut faite sous son Regne
l'an 1029. M. de Tillemont s'étonnoit
en 1697. que dans le Breviaire d'Orleans
, publié en 1693 , par M. de Coiſlin ,
l'on
MAY. 1734. 847
l'on ne parlât au XIV. Juin , que de la
Tranflation faite sous le Roy Robert :
et sa surprise étoit bien fondée . Il auroit
fallu en effet parler en ce jour d'abord
de la délivrance de la Ville d'Orleans
des mains des Huns , qui est le premier
Evenement remarquable , par rapport à
ce qui regarde S. Agnan . Puisque la Tradition
étoit il y a neuf cent ans ou mille
ans , que cette délivrance étoit arrivée
le 14. Juin , il étoit bon d'en conserver
la memoire à ce jour et de ne la pas porter
au 17. de Novembre , jour de la mort
du saint Evêque , comme on m'a assuré
qu'elle y a été portée avec son ancien
nom de Fête du Miracle. Secondement ,
il étoit à propos d'y inserer le souvenir
de la premiere Tranflation , au moins
d'une maniere generale ; puisque c'est
elle probablement qui a été la cause pour
laquelle on choisit en 1029. le 14 , et le
Is. Juin faire la seconde et pour
pour
proceder à la Dédicace de la nouvelle
Basilique , dont il ne reste plus aujourd'hui
que les Souterrains.
Ce sont autant de corrections qu'on
auroit pû faire dans la nouvelle Edition
du Breviaire d'Orleans de l'an 1731. mais
au lieu de cela , les Réviseurs ont mieux
aimé rétablir dans la Legende de S. Agnan
l'expres
848 MERCURE DE FRANCE
l'expression , qui avoit fait naître ancien
nement l'erreur populaire , que M. le
Brun des Marettes a combattuë et queje
combats après lui par un texte dont
on aura de la peine à éluder la force.
Ce deffaut d'exactitude dans les Légendes
locales , se trouve aussi accompagné
du retranchement de l'Office de plusieurs
Saints Locaux . Je me contenterai pour
le présent de nommer S. Aunaire , fameux
Evêque , né au VI . siecle dans la
Ville d'Orleans , mort le 25. Septembre ,
et d'y ajoûter une Fête que les Auteurs
du IX. siecle qualifioient de celebre dans
toutes les Eglises des Gaules au 1. Octobre,
laquelle étoit en memoire d'un Saint ,
qui en passant par Orleans au V.- siecle ,
y avoit operé deux Miracles rapportez
dans les Manuscrits de la Cathédrale
même. Tant que les Calendriers des nouveaux
Breviaires particuliers , ne seront
pas fondez sur les Histoires locales , les
imperfections y seront inévitables .
Il est temps maintenant de vous donner
la Lettre que M. Baillet écrivoit
le 16. Décembre 1703. à M. le Brun ,
duquel je vous ai parlé ; les plus petites
Productions de la plume des grands
Hommes , sont toujours bonnes à recueillir..
»Ja
MAY. 1734. 849
t
it
es
To
33
» Je suis fâché , M. que le mois de
» Novembre soit achevé pour la réim-
» pression , car je me serois fait un plai-
» sir et un devoir de profiter de ce que
» vous remarquez au sujet du lieu de la
Sépulture de S. Agnan , et de l'emploi
qu'il eut à S. Laurent avant son Epis-
» copat ; et je n'aurois point fait difficul-
» té de changer le titre équivoque d'A-
» bé , quoique l'on pût l'entendre d'un
» Superieur ou Pasteur de Paroisse , sans
prétendre qu'il y eût des Moines. Il
>> me paroît que les autres endroits sur
»quoi tombent vos Remarques , peuvent
» s'expliquer favorablement et subsister
»comme je les ai mis sans préjudice de
la verité des faits , autant qu'on peut
» faire foy sur l'autorité humaine. Je
n suis , &c .
と
2
Ce 17. Novembre 1733 .
d'Auxerre , aux Auteurs du Mercure de
France , touchant la Sépulture de saint
Agnan , Evêque d'Orleans.
Lya , Messieurs , plus de trente ans
leans , nommé M. le Brun , avoit composé
une ample Dissertation sur la Sépulture
de S. Agnan , dont on vous a envoyé
un Extrait , que vous avez publié
dans
MAY
839
་
1734
dans le Mercure de Septembre dernier .
Ainsi je ne croi pas que celui de qui vous
tenez cet Extrair , se fasse honneur de
la Dissertation. Je la conserve écrite de
la main de l'Auteur , avec la copie d'une
Lettre que M. Baillet lui écrivit en conséquence
de la communication qu'il lui
en donna. Certe Piece servit aussi à Orleans
à détromper tous ceux qui voulurent
en prendre communication . Je
suis bien aise que vous en ayez publié
l'essentiel.
C'est en effet une erreur grossiere de
croire que S. Agnan ait été inhumé dans
l'Eglise de S Laurent , qui est située à
l'Occident de la Ville d'Orleans . Outre
Is témoignages tirez du Testament de
eodebode , de la Vie de S. Mémin , de
celle de S. Euspice , que M. le Brun a
fait valoir , il s'en présente encore un
plus formel , qui n'est pas venu à sa
connoissance , et dont on ne peut éluder
la force , quelque antiquité qu'on s'avise
de donner à la Tranflation prétenduë
du Saint Corps d'une Eglise de S Laurent
, bâtie à l'Occident d'Orleans , en
celle de S. Pierre , bâtie à l'Orient. Cette
Tranflation doit passer pour chimerique,
dès-là qu'on lit dans une Vie authentique
de S. Agnan , qu'après son décès
A iiij un
842 MERCURE DE FRANCE
de S. Laurent à l'Occid.nt d'Orleans ,
laquelle est appellée S. Laurent des Orge
rils ,mais je me croi assez fondé pour soutenir
qu'il y en a eu une autre du nom
du même Saint , du côté Oriental. Si
dans Orleans il a existé jusqu'à cinq ou
six Eglises du nom de Saint Pierre ,
deux sous le titre de Saint Jean , et deux
sous celui de S. Germain d'Auxerre ;
quelle impossibilité y a-t'il qu'il n'y ait
aussi existé deux Eglises du nom de saint
Laurent N'y a- t'il pas eû de- même à
Paris deux Eglises du nom de S. Vincent,
Martyr d'Espagne ? Combien de Villes
où il y a plus d'une Eglise du titre de
S. Martin ou de quelqu'autre Saint célebre
?
Une preuve qu'il y a eu pendant quelques
siecles une Eglise ou Oratoire de
S. Laurent dans le Champ de Tétrade à
l'Orient d'Orleans et sur le Territoire de
l'Eglise qui a porté depuis le nom de
S. Agnan , est , que la memoire de ce saint
Martyr est distinguée de temps immémorial
de celle des autres Saints étrangers
, dans l'Eglise de S. Agnan même.
Dans le Catalogue des dix- neuf Autels
que l'on y érigea lorsque le Roy Robert
fit rebâtir à neuf cette Eglise , on voit
qu'après l'Autel principal sous l'invoca
tion
MAY. 1734.
843
tion de S. Pierre et S. Paul , celui de
S. Benoît et celui de S. Euverte , c'est
celui de S. Laurent qui suit immédiate
ment , par distinction au dessus de ceux
qui portoient le nom de S. Sauveur , de
Notre- Dame , de S. Jean , de S. Michel,
qui ne sont nommez qu'après. Je ne
prétens point qu'il y ait eu dans l'étenduë
du Champ de Tétrade , ni autour
de l'Eglise de S. Pierre , dite depuis saint
Agnan , autant d'Eglises qu'on érigea
d'Autels dans le nouvel Edifice achevé
l'an 1029. mais au moins y en avoit- il
eu d'érigez sous l'invocation de ceux qui
y sont nommez les premiers avant Notre
-Seigneur et la Sainte Vierge .
Helgaud , Moine de Fleury , ne parlet'il
pas d'une Eglise de S. Martin comme
existante sous le Roy Robert , laquelle
étoit une Chapelle à l'extremité du Cloftre
de S. Agnan , et qui n'existe plus ? Il
ne faut donc pasjuger des siecles passez par
les choses qui subsistent de nos jours , ni
croire qu'il n'y a jamais eu à Orleans
qu'une seule Eglise de S. Laurent , parce
qu'on n'en voit qu'une aujourd'hui . Il
doit y en avoir existé une autre à l'Orient
de la Cité ; et c'est cette Eglise aujourd'ui
inconnue et dans l'oubli , qui
sert de fondement à la Tradition d'Or-
A vj leans
844 MERCURE DE FRANCE
leans , que le Corps de S. Agnan a été
transferé de l'Eglise de S. Laurent en celle
qui a depuis porté son nom.
Lorsque le Corps de ce saint Evêque furt
remué pour la premiere fois , il a pû se
faire qu'il reposoit alors dans un Oratoire
ou petite Eglise de S. Laurent , bâtie
dans le Champ de Tétrade , et que
de- là , vû le peu d'éloignement , le Tombeau
tel qu'il étoit , ait été transporté dans
l'Eglise de S. Pierre , qui étoit le principal
Edifice entre ceux de ce Champ . La
petite Eglise de S. Laurent ayant ensuite
été détruite comme inutile , ou étant tombée
de vétusté , il sera arrivé depuis , lorsqu'on
parloit de la Tranflation du Corps.
de S. Agnan , que le Peuple aura attribué
à l'Eglise de S. Laurent des Orgerils ,
ce qui ne convenoit , dans la verité , qu'à
P'Oratoire de S. Laurent , qui avoit été
situé dans la partie toute opposée . Ainsi
se forment souvent les Traditions populaires.
On attribuë à l'objet existant , ce
qui n'avoit été dit ou écrit que de l'objet
détruit ou anéanti ; et pendant que personne
ne produit des preuves de la méprise
, l'erreur prend racine , elle s'autorise
ensuite de son antiquité , trouve
des Protecteurs dans les Habitans du Lieu
qu le nom se conserve , et il faur user
après
MAY. 1734 845
après cela de mille ménagemens pour les
faire revenir de la bévûe où la simplicité
de leurs prédécesseurs les avoit jettez.
M. Baillet n'a pas voulu adopter la nouvelle
Tradition de S. Laurent au Fauxbourg
Occidental d'Orleans . Le Pere de
Longueval , Jesuite , ne déterminant
point la situation de l'Eglise de S. Laurent
, a évité de la favoriser ouvertement.
Quoique la Tranflation du Corps de
S. Agnan du premier lieu de sa Sépulture
dans le lieu qui portoit le nom de
Basilique de S. Pierre , n'eût pas été d'un
grand trajet , et qu'elle n'ait peut- être
été que d'un jet de pierre , elle a cependant
été écrite dans les anciens Martyrologes
et Calendriers , parce qu'elle a été
assez remarquable pour ces temps - là où
les remuemens des Corps des Saints ne
se faisoient gueres que lorsqu'une Eglise
menaçoit ruine ou qu'elle étoit trop petite
pour le concours qui se faisoit à leurs
Tombeaux. On la croit du commencement
du septiéme siecle. L'Ombre de
M. Thiers auroit pû l'ajouter aux exemples
de Tranflations de Saints Confesseurs
qui autorisent sa rétractation * sur celle
de S. Firmin le Confès d'Amiens , outre
1
Cette rétractation est imprimée dans le Mersure:
de Juin x7.3.1 IĮ. volume.
celles
846 MERCURE DE FRANCE
celles de S. Vaast d'Arras , qui fut faite
dans le même siecle par S. Aubert , l'un
de ses Successeurs , et celle de S. Maximin
, Evêque de Tréves , faite aussi alors
par S. Hidulfe , Corevêque de ce Siege.
Je ne parle pas de quelques autres plus
anciennes , telle que celle des Saints Evêques
de Verdun , prédecesseurs de S. Airy
, faite par lui -même au sixiéme siecle ,
ni de celle de S. Gatien , premier Evêque
de Tours , faite par S. Martin.
On doit compter parmi les Martyrologes
où la premiere Tranfiation du Corps
de S. Agnan se trouve , outre celui de
Bede , deux autres qui ont été publiez
par Dom Martene , l'un au troisiéme vofume
de ses Anecdotes , page 1556. où
on lit Aurelianis Translatio S. Aniani ;
l'autre au sixième tome de son ample Col
lection , page 708. où se lit ce qui suit :
In civitate Aurelianis Tranflatio Corporis
S. Aniani Episcopi , et liberatio civitatis
ipsius à Hunnis. Les deux premiers sont
anterieurs au Roy Robert. Le troisiéme
a été écrit de son temps ; mais il copie
le fait de la premiére Transflation , et
non pas celle qui fut faite sous son Regne
l'an 1029. M. de Tillemont s'étonnoit
en 1697. que dans le Breviaire d'Orleans
, publié en 1693 , par M. de Coiſlin ,
l'on
MAY. 1734. 847
l'on ne parlât au XIV. Juin , que de la
Tranflation faite sous le Roy Robert :
et sa surprise étoit bien fondée . Il auroit
fallu en effet parler en ce jour d'abord
de la délivrance de la Ville d'Orleans
des mains des Huns , qui est le premier
Evenement remarquable , par rapport à
ce qui regarde S. Agnan . Puisque la Tradition
étoit il y a neuf cent ans ou mille
ans , que cette délivrance étoit arrivée
le 14. Juin , il étoit bon d'en conserver
la memoire à ce jour et de ne la pas porter
au 17. de Novembre , jour de la mort
du saint Evêque , comme on m'a assuré
qu'elle y a été portée avec son ancien
nom de Fête du Miracle. Secondement ,
il étoit à propos d'y inserer le souvenir
de la premiere Tranflation , au moins
d'une maniere generale ; puisque c'est
elle probablement qui a été la cause pour
laquelle on choisit en 1029. le 14 , et le
Is. Juin faire la seconde et pour
pour
proceder à la Dédicace de la nouvelle
Basilique , dont il ne reste plus aujourd'hui
que les Souterrains.
Ce sont autant de corrections qu'on
auroit pû faire dans la nouvelle Edition
du Breviaire d'Orleans de l'an 1731. mais
au lieu de cela , les Réviseurs ont mieux
aimé rétablir dans la Legende de S. Agnan
l'expres
848 MERCURE DE FRANCE
l'expression , qui avoit fait naître ancien
nement l'erreur populaire , que M. le
Brun des Marettes a combattuë et queje
combats après lui par un texte dont
on aura de la peine à éluder la force.
Ce deffaut d'exactitude dans les Légendes
locales , se trouve aussi accompagné
du retranchement de l'Office de plusieurs
Saints Locaux . Je me contenterai pour
le présent de nommer S. Aunaire , fameux
Evêque , né au VI . siecle dans la
Ville d'Orleans , mort le 25. Septembre ,
et d'y ajoûter une Fête que les Auteurs
du IX. siecle qualifioient de celebre dans
toutes les Eglises des Gaules au 1. Octobre,
laquelle étoit en memoire d'un Saint ,
qui en passant par Orleans au V.- siecle ,
y avoit operé deux Miracles rapportez
dans les Manuscrits de la Cathédrale
même. Tant que les Calendriers des nouveaux
Breviaires particuliers , ne seront
pas fondez sur les Histoires locales , les
imperfections y seront inévitables .
Il est temps maintenant de vous donner
la Lettre que M. Baillet écrivoit
le 16. Décembre 1703. à M. le Brun ,
duquel je vous ai parlé ; les plus petites
Productions de la plume des grands
Hommes , sont toujours bonnes à recueillir..
»Ja
MAY. 1734. 849
t
it
es
To
33
» Je suis fâché , M. que le mois de
» Novembre soit achevé pour la réim-
» pression , car je me serois fait un plai-
» sir et un devoir de profiter de ce que
» vous remarquez au sujet du lieu de la
Sépulture de S. Agnan , et de l'emploi
qu'il eut à S. Laurent avant son Epis-
» copat ; et je n'aurois point fait difficul-
» té de changer le titre équivoque d'A-
» bé , quoique l'on pût l'entendre d'un
» Superieur ou Pasteur de Paroisse , sans
prétendre qu'il y eût des Moines. Il
>> me paroît que les autres endroits sur
»quoi tombent vos Remarques , peuvent
» s'expliquer favorablement et subsister
»comme je les ai mis sans préjudice de
la verité des faits , autant qu'on peut
» faire foy sur l'autorité humaine. Je
n suis , &c .
と
2
Ce 17. Novembre 1733 .
Fermer
Résumé : LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
M. L*** répond à une publication du Mercure de France concernant la sépulture de saint Agnan, évêque d'Orléans. Il mentionne que M. le Brun avait rédigé une dissertation sur ce sujet, dont un extrait avait été publié dans le Mercure de Septembre 1734. M. L*** possède cette dissertation manuscrite ainsi qu'une lettre de M. Baillet à ce sujet. La lettre rectifie une erreur selon laquelle saint Agnan aurait été inhumé dans l'église de Saint-Laurent à l'ouest d'Orléans. Plusieurs témoignages, dont ceux du testament de Chrodebode, de la vie de saint Mémin et de saint Euspice, ainsi qu'une vie authentique de saint Agnan, démontrent que cette croyance est erronée. Une église de Saint-Laurent existait également à l'est d'Orléans, et il était courant qu'une ville possède plusieurs églises portant le même nom. L'auteur soutient que le corps de saint Agnan a été transféré d'un oratoire de Saint-Laurent situé dans le champ de Tétrade à l'église de Saint-Pierre, qui est devenue par la suite l'église Saint-Agnan. Cette translation est attestée par des martyrologes et calendriers anciens, et elle est datée du début du septième siècle. La confusion populaire a attribué cette translation à l'église de Saint-Laurent des Orgerils, située à l'ouest, alors qu'elle concernait un oratoire à l'est. M. Baillet et le père de Longueval n'ont pas adopté la tradition erronée de la translation du corps de saint Agnan. L'auteur critique également le Breviaire d'Orléans de 1731 pour avoir omis de mentionner la première translation et la délivrance de la ville d'Orléans des Huns, événements liés à saint Agnan. Il conclut en mentionnant une lettre de M. Baillet à M. le Brun, datée du 16 décembre 1703, qui reconnaît les remarques de M. le Brun sur la sépulture de saint Agnan.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 849-850
RÉPONSE à M. Servin, par Mlle de Malcrais de la Vigne, sur son Apothéose anticipée, qu'il a donnée dans le Mercure de Mars.
Début :
En lisant les apprets flateurs [...]
Mots clefs :
Apothéose, Vers
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE à M. Servin, par Mlle de Malcrais de la Vigne, sur son Apothéose anticipée, qu'il a donnée dans le Mercure de Mars.
RE'PONSE à M. Servin , par Mlle de
Malcrais de la Vigne , sur son Apothéose
anticipée , qu'il a donnée dans le
Mercure de Mars.
EN lisant les apprets flateurs
De la future Apothéose ,
Dopt
850 MERCURE DE FRANCE
Dont tu veux m'assurer dans tes Vers enchanteurs
>
Je n'ai pu m'empêcher de sentir quelque chose
De ces doux mouvemens qui chatouillent les
coeurs.
Je tremble pourtant et je n'ose
M'y laisser trop aller ; je crains qu'un tel honneur
,
Contre une Muse encor naissante ,
Ne mette de mauvaise humeur
La Troupe jalouse et sçavante ,
Par qui sur l'Hélicon sont formez les Concerts
Dont les brillants accords charment tout l'U
nivers.
Poëte ingenieux je rends grace à ton zele i
Mais si je vole à l'immortalité ,
Ce ne peut être que sur Paîle
De tes Vers obligeans , dont la posterité ,
Loüera le tour et la beauté.
Malcrais de la Vigne , sur son Apothéose
anticipée , qu'il a donnée dans le
Mercure de Mars.
EN lisant les apprets flateurs
De la future Apothéose ,
Dopt
850 MERCURE DE FRANCE
Dont tu veux m'assurer dans tes Vers enchanteurs
>
Je n'ai pu m'empêcher de sentir quelque chose
De ces doux mouvemens qui chatouillent les
coeurs.
Je tremble pourtant et je n'ose
M'y laisser trop aller ; je crains qu'un tel honneur
,
Contre une Muse encor naissante ,
Ne mette de mauvaise humeur
La Troupe jalouse et sçavante ,
Par qui sur l'Hélicon sont formez les Concerts
Dont les brillants accords charment tout l'U
nivers.
Poëte ingenieux je rends grace à ton zele i
Mais si je vole à l'immortalité ,
Ce ne peut être que sur Paîle
De tes Vers obligeans , dont la posterité ,
Loüera le tour et la beauté.
Fermer
Résumé : RÉPONSE à M. Servin, par Mlle de Malcrais de la Vigne, sur son Apothéose anticipée, qu'il a donnée dans le Mercure de Mars.
Mlle de Malcrais de la Vigne remercie M. Servin pour ses éloges mais exprime des réserves sur son apothéose anticipée. Elle craint la jalousie des autres muses et poètes. Elle reconnaît le talent de M. Servin et espère que la postérité louera ses écrits.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 851-860
LETTRE du R. P. Dom Jacques Alexandre, Benedictin de la Congrégation de S. Maur, au sujet de son Traité general des Horloges, imprimé à Paris, chez Hypolite-Loüis Guerin, rue S. Jacques, vol. in 8. 1734.
Début :
Il est vrai, Monsieur, que le Public souhaitoit depuis long tems d'avoir [...]
Mots clefs :
Horloges, Traité, Article, Planche, Chapitre, Mouvement, Roues, Montres, Heures, Jours, Soleil
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE du R. P. Dom Jacques Alexandre, Benedictin de la Congrégation de S. Maur, au sujet de son Traité general des Horloges, imprimé à Paris, chez Hypolite-Loüis Guerin, rue S. Jacques, vol. in 8. 1734.
LETTRE du R. P. Dom Jacques
Alexandre , Benedictin de la Congrégation
de S. Maur , au sujet de son Traité
general des Horloges , imprimé à Paris
, chez Hypolite- Louis Guerin
rue S. Jacques , vol. in 8. 1734.
I
L est vrai , Monsieur , que le Public
souhaitoit depuis long tems d'avoir
un Ouvrage entier sur les Horloges . J'ai
tâché de satisfaire à ce désir ; vous jugerez
si j'ai réussi par l'exposé que je vais
yous faire de mon Livre. Je le commence
par deux Articles Préliminaires.
Le premier marque la maniere dont les
'Anciens distinguoient les Années , et les
partageoient en Mois , Jours et Heures ,
et fait voir par la Description du Déluge
que Moïse a faite dans la Genese , que
l'année étoit composée de douze Mois
comme elle l'est encore aujourd'hui.
Le second Article contient une Histoire
generale des Horloges , depuis leur
commencement jusqu'au temps présent..
La plus ancienne Horloge est le Cadran
d'Achaz. Anaximandre fit ensuite des
Cadrans dans la Grece , lesquels furent
aussi
$54 MERCURE DE FRANCE
>
par le moyen d'un tambour qui descendant
pendant 24 ou 3 h ures peut
marquer distinctement toutes le. heures;
c'est dequoi je donne une explication
dans ce Chapitre par le moyen de la
huitiéme Planche.
Dans le troisiéme Chapirre il est parlé
des Horloges à roues de gros volume ;
d'abord on donne un abregé des termes
les plus ordinaires qui sont en usage chez
les Horlogers , et une neuviéme Planche
est destinée à représenter les Piéces qui
sont marquées par ces termes. On donne
ensuite la Méthode pour avoir la longueur
d'un Pendule et des vibrations que
l'on souhaite ; et pour s'épargner la peine.
des opérations qu'i faudroit faire , on
donne aussi une Table particuliére depuis
une vibration par heure usqu'à cinq vibracions
par heure , dont la longueur du
Pendule est d'un pouces lignes & points,
. Comme le P /ndule peut avoir quelque
petite irrégularité par rapport à la diver
sité de la température de l'air , on donne
pour y remedier la maniere de faire un
Pendule Isocrone , dont les , vibrations
sont d'une parfaire égalité de durée jet
qui sert à faire des Horloges , qui peu
vent marquer le moyen mouvement du'
Soleil & c. La Planché o représente en-
8
suite
MAY 1734.
755
suite la construction d'une grosse Horloge
, et les Planches 11 ct 12 font voir
la figure des roües.
Le Chapitre IV. traite des Horloges à
mouvement apparent. Quelque perfection
qu'on ait pû donner aux Horloges
les plus achevées , ce n'a été que pour
leur faire suivre le mouvement moyen
du Soleil , mais je crois avoir été plus
loin ; car dès l'année 1698. je representai
à Mrs de l'Académie Royale des Sciences
un projet qui fut aprouvé , pour faire des
Horloges qui suivroient le mouvement
aparent et vrai du Soleil . L'explication
est dans ce même Chapitre IV . qui contient
sur ce sujet trois Planches entieres.
>
sa
Dans le Chapitre V. on parle du mouvement
des Planetes, On trouve dans le
premier Article un précis de ce qui regarde
chaque Planete en particulier , son
diamétre , le temps de sa révolution
distance du Soleil &c. et une seizième
Planche qui contient le systême des Planetes
selon Copernic . Le second article
est pour le Soleil en particulier , lequel
fait une révolution en 365 jours heures
49 m. Dans toutes les Horloges qu'on a
faites jusqu'à présent , on a mis une roue
qui fait un tour en un an on n'y a employé
qu'une role qui fait le tour en 365.
jours ,
3
856 MERCURE DE FRANCE
jours ; c'est un mouvement qui est trop
court environ de 6 heures , et on n'a vù
encore personne qui ait travaillé à faire
une roue qui fasse un tour en 365 jours
S heures 49 , minutes car cela est impossible
en ne mettant que des roues dont
le nombre des dents soit moindre que
100. Mais puisque cela n'est pas possible,
du moins devroit - on tâcher d'en aprocher
autant que cela se pouvoit . C'est ce
que j'ai fait , et je donne ici une roue qui
fait un tour en 365 jours 5 heures 48 m.
58 secondes , de secondes qui est le
mouvement le plus aprochant quon ait
pû trouver jusqu'à présent. En voici le
Roüage. La roue de Cadran fait un tour
en 12 heures. - 7.50 7.69. 8 .
83.
་
2
38
4
-
On trouve en même tems toutes les
opérations qu'il a fallu faire pour arriver
à cette précision. Viennent ensuite plusieurs
roues faisant un tour conforme aux
révolutions de chaque Planete &c. Le
Lecteur consultera pour tout ce détail
les Planches 17. 18. et 19. et les Mecanistes
auront lieu d'être satisfaits en particulier
d'une Aiguille qui montre le lieu de
la Planete dans le Zodiaque, aiguille dont
les mouvements son fort différents , et
qui tire cependant toutes ces inégalitez
d'un
MAY. 1734.
857
d'un mouvement circulaire et uniforme
de l'Horloge.
Le Chapitre VI. destiné aux Horloges
de moyen volume , est accompagné de
la Planche 21. qui représente une Horloge
de cette espece , où l'on voit l'arangement
et la disposition des roües avec
une seconde et troisiéme figure pour la
Montre ou Cadran et pour la Cycloide .
Le détail de tout ce qui appartient à ce
Chapitre est contenu dans neuf Articles
différens , et représenté en diverses figures
de la Planche vingtiéme .
點
Les Horloges de petit volume ou les
Montres font la matiere du VII. Chapitre.
L'instrument le plus nécessaire aux
Horlogeurs de petit volume, est la Plateforme
, qui sert à marquer sur les roiies
le nombre des dents qu'on leur veut
donner . On explique d'abord la construction
de cette Piéce. Dans l'article suivant
on explique pareillement l'usage du Balancier
qui modére le mouvement des
Montres. On n'avoit point autrefois d'autre
moyen pour regler les Montres , que
de faire ce Balancier moins ou plus pesant
mais depuis que l'Abbé de Hautefeüille
a trouvé le secret important de
modérer ce Balancier par un petit ressort
droit , qui dans la suite a été changé en
B ressort
858 MERCURE DE FRANCE
ressort spiral par M. Hugens , les Montres
ont acquis un tel point de perfection,
que celles où on a mis ce ressort ont pris
le nom de Montres à Fendules , à cause
de leur justesse. On trouve dans l'article
troisiéme une Table où sont les rouages
ordinaires que l'on employe pour les
Montres ; et la Planche 22. représente la
structure entiere d'une Montre. Un article
entier qui est le huitième contient de
bons avis pour le choix des Montres.
Le Chapitre VIII . est pour la répetition
, et pour l'instrument à fendre les
roües. Dans le premier article se trouve
la Planche 23 , où son : gravées les principales
Piéces de la répetition , le Limaçon
et la détente graduée , qui fait sonmer
autant de coups qu'il est descendu
de dents de cette détente. Dans l'article
second on traite de l'Instrument à diviser
et fendre les roües et Pignons avec autant
de facilité que de justesse , ce qui
fait gagner aux Ouvriers beaucoup de
tems. La Planche 23 représente cette
Machine, dont la Piéce fondamentale est
la Plateforme on verra dans le Livre
l'explication de cette Machine qui seroit
trop longue ici pour une Lettre.
On donne ensuite les Quadratures des
repétitions qu'on employe aux Pendules
MAY. 1734. 859
et aux Montres de poche. On a mis dans
la Planche 24. les Piéces pour une repétition
de Pendule , et dans la Planche 25.
sont figurées les Piéces d'une repétition
de Montre de poche. L'explication en
seroit ici inutile ; car la bien compourn
prendre il faut avoir devant soi les figures
gravées.
Le Chapitre IX. et dernier , contient
une Bibliographic ou un Catalogue des
Auteurs , qui ont écrit sur les Horloges ,
avec une Analise des principaux Ouvrages
qui sont venus à ma connoissance.
Le premier article de ce Chapitre est, pour
les Cadrans où je me contente de mettre
le titre des Livres , le nom de l'Auteur
et l'Edition ; l'article second est
pour les Horloges de Sable et d'Eau
Le troisiéme est destiné aux Horloges à
roües. On trouve dans cet article non
seulement le titre des Livres , mais en-t
core des Extraits très amples de ces mêmes
Livres , avec quelques Réfléxions qui
ont paru nécessaires , et qui ne peuvent
offenser personne. Enfin le quatriéme article
est des Auteurs qui sont citez dans
l'Ouvrage.
J'ai tâché, au reste, d'écrire avec simplicité,
avec ordre et briéveté , les Curieux
trouveront ce Livre bien imprimé , et les
Bij 27
860 MERCURE DE FRANCE
27 Planches qui y entrent fort proprement
gravées. Je suis , Monsieur , &c.
A Orleans le 24 Mars 1734
Alexandre , Benedictin de la Congrégation
de S. Maur , au sujet de son Traité
general des Horloges , imprimé à Paris
, chez Hypolite- Louis Guerin
rue S. Jacques , vol. in 8. 1734.
I
L est vrai , Monsieur , que le Public
souhaitoit depuis long tems d'avoir
un Ouvrage entier sur les Horloges . J'ai
tâché de satisfaire à ce désir ; vous jugerez
si j'ai réussi par l'exposé que je vais
yous faire de mon Livre. Je le commence
par deux Articles Préliminaires.
Le premier marque la maniere dont les
'Anciens distinguoient les Années , et les
partageoient en Mois , Jours et Heures ,
et fait voir par la Description du Déluge
que Moïse a faite dans la Genese , que
l'année étoit composée de douze Mois
comme elle l'est encore aujourd'hui.
Le second Article contient une Histoire
generale des Horloges , depuis leur
commencement jusqu'au temps présent..
La plus ancienne Horloge est le Cadran
d'Achaz. Anaximandre fit ensuite des
Cadrans dans la Grece , lesquels furent
aussi
$54 MERCURE DE FRANCE
>
par le moyen d'un tambour qui descendant
pendant 24 ou 3 h ures peut
marquer distinctement toutes le. heures;
c'est dequoi je donne une explication
dans ce Chapitre par le moyen de la
huitiéme Planche.
Dans le troisiéme Chapirre il est parlé
des Horloges à roues de gros volume ;
d'abord on donne un abregé des termes
les plus ordinaires qui sont en usage chez
les Horlogers , et une neuviéme Planche
est destinée à représenter les Piéces qui
sont marquées par ces termes. On donne
ensuite la Méthode pour avoir la longueur
d'un Pendule et des vibrations que
l'on souhaite ; et pour s'épargner la peine.
des opérations qu'i faudroit faire , on
donne aussi une Table particuliére depuis
une vibration par heure usqu'à cinq vibracions
par heure , dont la longueur du
Pendule est d'un pouces lignes & points,
. Comme le P /ndule peut avoir quelque
petite irrégularité par rapport à la diver
sité de la température de l'air , on donne
pour y remedier la maniere de faire un
Pendule Isocrone , dont les , vibrations
sont d'une parfaire égalité de durée jet
qui sert à faire des Horloges , qui peu
vent marquer le moyen mouvement du'
Soleil & c. La Planché o représente en-
8
suite
MAY 1734.
755
suite la construction d'une grosse Horloge
, et les Planches 11 ct 12 font voir
la figure des roües.
Le Chapitre IV. traite des Horloges à
mouvement apparent. Quelque perfection
qu'on ait pû donner aux Horloges
les plus achevées , ce n'a été que pour
leur faire suivre le mouvement moyen
du Soleil , mais je crois avoir été plus
loin ; car dès l'année 1698. je representai
à Mrs de l'Académie Royale des Sciences
un projet qui fut aprouvé , pour faire des
Horloges qui suivroient le mouvement
aparent et vrai du Soleil . L'explication
est dans ce même Chapitre IV . qui contient
sur ce sujet trois Planches entieres.
>
sa
Dans le Chapitre V. on parle du mouvement
des Planetes, On trouve dans le
premier Article un précis de ce qui regarde
chaque Planete en particulier , son
diamétre , le temps de sa révolution
distance du Soleil &c. et une seizième
Planche qui contient le systême des Planetes
selon Copernic . Le second article
est pour le Soleil en particulier , lequel
fait une révolution en 365 jours heures
49 m. Dans toutes les Horloges qu'on a
faites jusqu'à présent , on a mis une roue
qui fait un tour en un an on n'y a employé
qu'une role qui fait le tour en 365.
jours ,
3
856 MERCURE DE FRANCE
jours ; c'est un mouvement qui est trop
court environ de 6 heures , et on n'a vù
encore personne qui ait travaillé à faire
une roue qui fasse un tour en 365 jours
S heures 49 , minutes car cela est impossible
en ne mettant que des roues dont
le nombre des dents soit moindre que
100. Mais puisque cela n'est pas possible,
du moins devroit - on tâcher d'en aprocher
autant que cela se pouvoit . C'est ce
que j'ai fait , et je donne ici une roue qui
fait un tour en 365 jours 5 heures 48 m.
58 secondes , de secondes qui est le
mouvement le plus aprochant quon ait
pû trouver jusqu'à présent. En voici le
Roüage. La roue de Cadran fait un tour
en 12 heures. - 7.50 7.69. 8 .
83.
་
2
38
4
-
On trouve en même tems toutes les
opérations qu'il a fallu faire pour arriver
à cette précision. Viennent ensuite plusieurs
roues faisant un tour conforme aux
révolutions de chaque Planete &c. Le
Lecteur consultera pour tout ce détail
les Planches 17. 18. et 19. et les Mecanistes
auront lieu d'être satisfaits en particulier
d'une Aiguille qui montre le lieu de
la Planete dans le Zodiaque, aiguille dont
les mouvements son fort différents , et
qui tire cependant toutes ces inégalitez
d'un
MAY. 1734.
857
d'un mouvement circulaire et uniforme
de l'Horloge.
Le Chapitre VI. destiné aux Horloges
de moyen volume , est accompagné de
la Planche 21. qui représente une Horloge
de cette espece , où l'on voit l'arangement
et la disposition des roües avec
une seconde et troisiéme figure pour la
Montre ou Cadran et pour la Cycloide .
Le détail de tout ce qui appartient à ce
Chapitre est contenu dans neuf Articles
différens , et représenté en diverses figures
de la Planche vingtiéme .
點
Les Horloges de petit volume ou les
Montres font la matiere du VII. Chapitre.
L'instrument le plus nécessaire aux
Horlogeurs de petit volume, est la Plateforme
, qui sert à marquer sur les roiies
le nombre des dents qu'on leur veut
donner . On explique d'abord la construction
de cette Piéce. Dans l'article suivant
on explique pareillement l'usage du Balancier
qui modére le mouvement des
Montres. On n'avoit point autrefois d'autre
moyen pour regler les Montres , que
de faire ce Balancier moins ou plus pesant
mais depuis que l'Abbé de Hautefeüille
a trouvé le secret important de
modérer ce Balancier par un petit ressort
droit , qui dans la suite a été changé en
B ressort
858 MERCURE DE FRANCE
ressort spiral par M. Hugens , les Montres
ont acquis un tel point de perfection,
que celles où on a mis ce ressort ont pris
le nom de Montres à Fendules , à cause
de leur justesse. On trouve dans l'article
troisiéme une Table où sont les rouages
ordinaires que l'on employe pour les
Montres ; et la Planche 22. représente la
structure entiere d'une Montre. Un article
entier qui est le huitième contient de
bons avis pour le choix des Montres.
Le Chapitre VIII . est pour la répetition
, et pour l'instrument à fendre les
roües. Dans le premier article se trouve
la Planche 23 , où son : gravées les principales
Piéces de la répetition , le Limaçon
et la détente graduée , qui fait sonmer
autant de coups qu'il est descendu
de dents de cette détente. Dans l'article
second on traite de l'Instrument à diviser
et fendre les roües et Pignons avec autant
de facilité que de justesse , ce qui
fait gagner aux Ouvriers beaucoup de
tems. La Planche 23 représente cette
Machine, dont la Piéce fondamentale est
la Plateforme on verra dans le Livre
l'explication de cette Machine qui seroit
trop longue ici pour une Lettre.
On donne ensuite les Quadratures des
repétitions qu'on employe aux Pendules
MAY. 1734. 859
et aux Montres de poche. On a mis dans
la Planche 24. les Piéces pour une repétition
de Pendule , et dans la Planche 25.
sont figurées les Piéces d'une repétition
de Montre de poche. L'explication en
seroit ici inutile ; car la bien compourn
prendre il faut avoir devant soi les figures
gravées.
Le Chapitre IX. et dernier , contient
une Bibliographic ou un Catalogue des
Auteurs , qui ont écrit sur les Horloges ,
avec une Analise des principaux Ouvrages
qui sont venus à ma connoissance.
Le premier article de ce Chapitre est, pour
les Cadrans où je me contente de mettre
le titre des Livres , le nom de l'Auteur
et l'Edition ; l'article second est
pour les Horloges de Sable et d'Eau
Le troisiéme est destiné aux Horloges à
roües. On trouve dans cet article non
seulement le titre des Livres , mais en-t
core des Extraits très amples de ces mêmes
Livres , avec quelques Réfléxions qui
ont paru nécessaires , et qui ne peuvent
offenser personne. Enfin le quatriéme article
est des Auteurs qui sont citez dans
l'Ouvrage.
J'ai tâché, au reste, d'écrire avec simplicité,
avec ordre et briéveté , les Curieux
trouveront ce Livre bien imprimé , et les
Bij 27
860 MERCURE DE FRANCE
27 Planches qui y entrent fort proprement
gravées. Je suis , Monsieur , &c.
A Orleans le 24 Mars 1734
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Résumé : LETTRE du R. P. Dom Jacques Alexandre, Benedictin de la Congrégation de S. Maur, au sujet de son Traité general des Horloges, imprimé à Paris, chez Hypolite-Loüis Guerin, rue S. Jacques, vol. in 8. 1734.
Le document est une lettre du R. P. Dom Jacques Alexandre, un bénédictin de la Congrégation de S. Maur, présentant son ouvrage sur les horloges, imprimé à Paris en 1734. L'auteur répond à une demande publique d'un traité complet sur les horloges et structure son livre en plusieurs chapitres. Le premier chapitre préliminaire explique comment les Anciens divisaient les années et les mois, en se référant à la description du Déluge dans la Genèse. Le second chapitre préliminaire offre une histoire générale des horloges, depuis les cadrans anciens jusqu'aux horloges modernes. L'ouvrage détaille divers types d'horloges, y compris les cadrans solaires, les horloges à roues, et les horloges à mouvement apparent. Il inclut des explications techniques sur la longueur des pendules, les vibrations, et les corrections pour les variations de température. Le livre traite également des horloges de moyen et petit volume, ainsi que des montres, en fournissant des tables et des planches illustratives. Un chapitre est dédié à la répétition et aux instruments pour diviser les roues. Enfin, le dernier chapitre présente une bibliographie des auteurs ayant écrit sur les horloges, avec des analyses des principaux ouvrages. L'auteur souligne la simplicité, l'ordre et la brièveté de son écriture, ainsi que la qualité de l'impression et des gravures des 27 planches incluses.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 860-861
LE COQ ET LE LIMAÇON, FABLE. Par M. Richer.
Début :
Un jeune Coq ambitieux [...]
Mots clefs :
Coq, Limaçon, Oiseau, Sommet
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LE COQ ET LE LIMAÇON, FABLE. Par M. Richer.
LE COQ
ET LE LIMACON ,
S
FABLE,
Par M. Richer.
UN jeune Coq ambitieux
Et le mieux hupé da village,
Pour chanter ses exploits et montrer son pla
mage ,
Prétendoit se percher sur un Pin sourcilleux,
Enflé d'une telle espérance >
Il prend sa volée ; il s'élance ;
Mais quoique notre Oiseau ne fut pas des plus
lourds ,
Il fit de yains efforts , et retomba toujours.
Les Poules s'en railloient. Șa honte étoit extrê
me ;
Quand au sommet de l'arbre même ,
Qu'il ne pouvoit atteindre , il voit un Limaçon .
Pour un Oiseau şi fier quel surcroît de disgrace
!
India
MAY. 17347 361
Indigné que dans cette place
Ce méprisable insecte eut porté sa maison ,
Eh ! qui t'a mis si haut? lui dit - il en furie ,
Sçais-tu fendre les airst non , mais je sçais ram
per ,
Repart le Limaçon : avec cette industrie
Est-il sommet si haut qu'on ne puisse atraper è
ET LE LIMACON ,
S
FABLE,
Par M. Richer.
UN jeune Coq ambitieux
Et le mieux hupé da village,
Pour chanter ses exploits et montrer son pla
mage ,
Prétendoit se percher sur un Pin sourcilleux,
Enflé d'une telle espérance >
Il prend sa volée ; il s'élance ;
Mais quoique notre Oiseau ne fut pas des plus
lourds ,
Il fit de yains efforts , et retomba toujours.
Les Poules s'en railloient. Șa honte étoit extrê
me ;
Quand au sommet de l'arbre même ,
Qu'il ne pouvoit atteindre , il voit un Limaçon .
Pour un Oiseau şi fier quel surcroît de disgrace
!
India
MAY. 17347 361
Indigné que dans cette place
Ce méprisable insecte eut porté sa maison ,
Eh ! qui t'a mis si haut? lui dit - il en furie ,
Sçais-tu fendre les airst non , mais je sçais ram
per ,
Repart le Limaçon : avec cette industrie
Est-il sommet si haut qu'on ne puisse atraper è
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Résumé : LE COQ ET LE LIMAÇON, FABLE. Par M. Richer.
Dans la fable 'Le Coq et le Limacon' de M. Richer, un coq ambitieux tente en vain de se percher sur un pin. Après plusieurs échecs, il voit un limacon au sommet. Ce dernier explique qu'il a atteint cette hauteur en rampant patiemment.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 861-870
LETTRE de M. *** à Mlle *** sur l'Origine de la Musique.
Début :
Vous m'avez souvent demandé ce que je pensois sur les différentes [...]
Mots clefs :
Origine de la musique, Musique, Amour, Psyché, Ballet, Coeur, Yeux, Sons, Vénus, Chant
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. *** à Mlle *** sur l'Origine de la Musique.
LETTRE de M. *** à Mlle ***
sur l'Origine de la Musique.
V
Ous m'avez souvent demandé ce
que je pensois sur les différentes
sortes de Musique , en personne qui n'a
pas decidé quel est son gout , qui n'ose
s'y fier, et qui reste dans l'incertitude ; les
différentes opinions n'ont pas la force
de vous entraîner mais bien celle de
suspendre l'impression du sentiment auquel
vous n'osez vous livrer : voici votre
excuse.
"
د
Votre coeur n'a jamais été touché,vous
ne connoissez point l'amour, vos Amants
ont voulu vainement vous le faire connoître
vous n'avez connu que vos
Amants , les uns emportez et grossiers ne
vouloient que vous corrompre , ils vous
ont inspiré de l'horreur , d'autres ayant
Bilj le
852 MERCURE DE FRANCE
le même projet l'ont dissimulé , les uns
se sont donnez pour Philosophes uniquement
charmez de vos vertus , la plûpart
se disoient séduits par les graces de
votre esprit , ce même esprit qu'ils vantoient
vous a servi à connoître la fausseté
de leur caractere , les voilà démasquez er
méprisez ; d'autres encore ont essayé de
vous plaire par les discours flatteurs , les
coquetteries et les gentillesses frivoles
qui séduisent presque toutes les femmes ;
cet art , ce manége vous a paru plat¸
et tous les Amans vous ont paru dangereux
et incapables de satisfaire vôtre esprit
et de toucher votre coeur.
Il m'a paru nécessaire de débroüiller
en vous les idées fausses que vous avez de
l'amour avant que de vous parler de lui .
Ne croyez pas que j'entreprenne de vous
le faire connoître autrement que par la
simple théorie,peut-être un jour l'Amant
qu'il vous a destiné vous fera sentir quel
il est.
amours
On a distingué il y a longtems deux
l'un sous le nom d'Eros et
l'autre d'Anteros , c'est du premier dont
je veux vous parler , c'est lui qui aima
Psiché , cet amour tendre , pur , vrai ,
vif , constant , fidele , ne pouvoit aimer
que Psiché, il vouloit être aimé de même;
1
pour
MAY . 1734 863
"
>
pour cela il lui falloit une ame toute entiere
, il trouvoit dans toutes les femmes
les deffauts et les dégouts que Psiché
trouvoit dans tous les hommes , rien ne
pouvoit plaire à Psiché et n'étoit digne
d'elle que l'Amour lui - même , la Fable
vous a apris tous ses malheurs, la curiosité
et la vanité les causerent , elle y joignit
la défiance , crime pour l'amitié
mais affreux et irrémissible aux yeux du
véritable Amour , vous êtes étonnée de
m'entendre dire aux yeux du véritable
Amour:Oui à ces yeux: celui là n'est point
aveugle, ilest clairvoyant,mais silentieux ;
il parle peu , simplement, évite les frases
et les tours affectez , son langage est vif ;
plein de naiveté et d'expressions , tout
parle en lui rien n'étoit perdu pour
Psiché, une ame n'a pas besoin de grands
discours pour entendre toute la force et
toute la grace d'une pensée, encore moins
lorsque ces pensées viennent du sentiment.
Après toutes les peines que les défauts
de Psiché lui avoient causées , après
qu'elle eut expié ses crimes , en se livrant
entierement a l'Amour , il l'épousa ; les
Dieux approuvérent ce mariage, ils étoient
seuls dans l'univers faits l'un pour l'autte;
de ce couple charmant naquit la volup
té , cette Deésse étoit digne de son ori-
و
Bilij gine ,
864 MERCURE DE FRANCE
•
gine , elle ne se sépara jamais de son pere
et de sa mere , elle enfaisoit les délices
sans parler les différens idiomes , elle se faisoit
entendre à toutesles nations , il suffisoit
pour cela d'avoir une ame ou de l'amour
, tout ce qui étoit privé de l'un ou
de l'autre ne l'entendoit point , tout ce
qui suivoit les étendarts d'Anteros étois
sourd pour sa voix délicate et gracieuse ;
vous sçavez qu'Anteros , le faux amour
vint s'établir sur la terre , qu'il subjugua
presque tous les mortels , il les blessoit
avec des fléches empoisonnées, il trainoit
après lui la jalousie , la fraude , la trahil'inconstance
, l'indiscretion ; delà
vinrent des guerres et des meurtres sans
nombre ; pour les séduire , il menoit avec
lui une fausse volupté qui ne ressembloit
en rien à la fille de Psiché ; elle ne don- .
noit que
des plaisirs grossiers qui ne flattant
les sens que pour des instants, les détruisoient
en peu de temps ; la fille de
Psiché un jour en badinant essaya
d'imiter
les soupirs d'amour sur un instrument
qu'elle fit avec un roseau ; sur ce même
instrument elle trouva le moyen de peindre
par des sons les differentes agitations
d'un coeur amoureux : langueurs, larmes,
délices , joye douce et naïve ; son pere et
sa mere sentoient augmenter leurs plaisirs
son ,
pac
MAY. 1734. `865
par les sons touchans qui les représentoient
; la volupté ne s'en tint pas à ce
coup d'essay , elle inventa plusieurs instrumens
, ayant tous des beautez particulieres
et propres à caractériser et à peindre
tous les differents mouvements de
l'ame au point de les faire ressentir à ceux
qui en étoient susceptibles : les Oyseaux
habitans des bocages du pays fortuné ou
ces Dieux charmans avoient choisi leur
retraite , apprirent bien- tôt à former des
sons mélodieux et agréables ; les Bergers
soupiroient sur la flutte & animoient
leurs danses , par le son de la Musette et
du Tambourin . Un jour un Rosignol
s'étant éloigné de sa demeure ordinaire ,
fut surpris par un amour folâtre qui voltigeoit
près de l'isle fortunée , son chant
lui parut nouveau ; il porta l'Oyseau à
Venus comme un présent rare et digne
d'elle , elle en connut tout le prix , et sur
le champ ayant fait atteler son Char, elle
ordonna au Rossignol de voler devant
ses Pigeons et de la conduire dans les
climats , inconnus jusqu'alors , où les
Oyseaux avoient un ramage si tendre ,
il obeït , elle part et arrive , son Char
resta suspendu dans les airs enveloppé
d'un nuage ; elle vouloit vor sans être
apperçue , ses yeux furent frappez du
>
B v plus
866 MERCURE DE FRANCE
plus agréable spectacle qui fut jamais
son fils et Psiché sur un Trône de gazon
et de fleurs dans le lieu le plus délicieux
de l'univers. Je n'en ferai point la description
, l'Amour l'avoit choisi pour
sa demeure , et sa fille l'avoit orné , à la
tête des Nimphes et de leur cour elle
leur donnoit une Fête champêtre , elles
dansoient sur le gazon , les Zephirs legers
dansoient avec elles , les Bergers et les
Bergeres danserent quelques Entrées de
ce Ballet ; les Graces de la suite de Psiché
en danserent aussi; ces Graces ne ressemblent
point à celles qui accompagnent
Venus , elles sont aussi modestes, naïves et
touchantes , que les dernieres sont effrontées
et minaudieres , toute la Musique du
Ballet étoit caractérisée, les yeux fermez,
on pouvoit deviner quels étoient lesDanseurs
et se représenter à peu près les différentes
figures du Ballet , tant la même
expression regnoit et dans le Chant et
dans la Danse ; il sembloit que la nature
seule eut produit l'une et l'autre ; et sans
que l'on s'en apperçut , on ressentoit les
plus délicates nuances des douces passions
exprimées par les Sons. Lorsque les jeux
furent terminez , Venus regagna Cichére
plus jalouse que jamais de la beauté et
du bonheur de Psiché , il n'étoit plus en
1
son
MA Y. 867
1734
son pouvoir de le troubler , elle voulut
du moins essayer de joüir du même plaisir
, et si les spectacles qu'elle donneroit
à Cithére n'avoient pas les mêmes charmes
, les surpasser du moins en magnificence
; elle fit construire un Theatre dont
les ornemens étoient chargez d'or et de
Pierres précieuses , les Décorations et les
Prespectives tâcherent d'imiter ce beau
Paysage qu'elle venoit de voir , un nombre
prodigieux d'Instrumens furent fabriquez
, Venus promit des dons et des
faveurs à tous ceux qui travailleroient
avec succès pour son Théatre ; tous les
hommes croyant avoir besoin de la protection
de Venus ont recours à elle
comme à une Divinité bienfaisante ; ils
ignorent que
d'elle et de ses enfans viennent
les peines dont ils gémissent , tous
travaillent à l'envi à composer de la
Musique , chacun vantoit son travail et.
la peine qu'il s'étoit donnée , les Grométres
même s'en mêlerent , ils loüoient les
calculs immenses qu'ils avoient fait pour
trouver moyen de parcourir dans les Airs
de violons toutes les differentes combinaisons
d'un ré ou d'un mi , avec les au
tres Notes; il est vrai que cet Air n'avoit
point de chant , et dans cette Musique
contrainte et si pénible à composer , rien
B vj
>
ne
868 MERCURE DE FRANCE
•
2
que
ne couloit de source , nul génie ne les
animoit , ils fuioient la nature et le sentiment
, l'art n'auroit dû servir qu'à chercher
l'un et l'autre pour les orner et les
mettre dans leur plus beau jour : quand
celui où l'on devoit exécuter sur leThéatre
deCithére ce Ballet tant vanté,fut arrivé,
la plus part des Spectateurs s'écriérent
les Instrumens étoient faux , leurs
Sons faisoient peine aux oreilles les moins
délicates on leur déclara dogmatiquement
que c'étoit des dissonnances faites
exprès et le chef- d'oeuvre de l'Art , les
Chats originaires de Cithére ont transmis
jusqu'à nous quelques tons de cette harmonie,
comme lesRosignols nous en font
entendre quelqu'uns de celle qu'ils ont
entendue dans l'isle de l'Amour.
Le Ballet fut dansé par les Nimphes de
la suite deVenus , Danses indécentes où
se mêloient des Athlettes de la suite de
Mars , les Graces faisoient des sauts et des
tours de force la confusion regnoit ,
la Musique n'avoit de raport à la Danse
que par le mouvement plus ou moins
vif , point de pensée par conséquent ,
point d'expression; on parcouroit tous les
tours avec rapidité , les dissonances prodiguées
sans cesses quelquefois on s'obsti
noit à rebattre deux Notes pendant un
quart
M/ACY. 1734. 369
quart d'heure , beaucoup de bruit , force
fredons ; et lorsque par hazard il se rencontroit
deux mesures qui pouvoient
faire un Chant agréable , l'on changeoit
bien vîte de ton , de mode et de mesure,
toujours de la tristesse au lieu de tendresse,
le singulier étoit du barocque , la fureur
du tintamare; au licu de gayeté, du turbulant,
et jamais de gentillesse, ni rien qui
put aller au coeur ; vous en sçavez à présent
autant que moi , faite votre choix
l'une des deux Musiques vient de Cithére,
l'autre de la fille de l'Amour et de Psiché ,
ne croyez pas qu'une nation s'en soit
proprié, l'une à l'exclusion de l'autre ; les
deux Musiques se sont répandues dans
toutes les nations , vôtre coeur et vôtre
gout vous feront démêler quelle est leur
origine. K
ap-
Vous trouverez peut- être que j'avance
sans preuve que les Chats sont originaires
de Cithere , ils en conservent encore
les inclinations et les manieres , remplis
de gentillesses dans leurs badinages , un
cruels
trompeurs, féroces, sans amitié ; lorsque
l'Amour les rend heureux, leur indiscrétion
l'aprend au voisinage par leurs clameurs
ils sont légers et volages comme
les Cupidons , le Rosignol amoureux
air doux
plein de dissinmitié
,
I
Venu
870 MERCURE DE FRANCE
venu de l'Ifle fortunée ne chante que
pour toucher sa Maîtresse ; est - il heureux
? il se tait et ne chante plus. Content
de sa bonne fortune , il la goute
en silence.
sur l'Origine de la Musique.
V
Ous m'avez souvent demandé ce
que je pensois sur les différentes
sortes de Musique , en personne qui n'a
pas decidé quel est son gout , qui n'ose
s'y fier, et qui reste dans l'incertitude ; les
différentes opinions n'ont pas la force
de vous entraîner mais bien celle de
suspendre l'impression du sentiment auquel
vous n'osez vous livrer : voici votre
excuse.
"
د
Votre coeur n'a jamais été touché,vous
ne connoissez point l'amour, vos Amants
ont voulu vainement vous le faire connoître
vous n'avez connu que vos
Amants , les uns emportez et grossiers ne
vouloient que vous corrompre , ils vous
ont inspiré de l'horreur , d'autres ayant
Bilj le
852 MERCURE DE FRANCE
le même projet l'ont dissimulé , les uns
se sont donnez pour Philosophes uniquement
charmez de vos vertus , la plûpart
se disoient séduits par les graces de
votre esprit , ce même esprit qu'ils vantoient
vous a servi à connoître la fausseté
de leur caractere , les voilà démasquez er
méprisez ; d'autres encore ont essayé de
vous plaire par les discours flatteurs , les
coquetteries et les gentillesses frivoles
qui séduisent presque toutes les femmes ;
cet art , ce manége vous a paru plat¸
et tous les Amans vous ont paru dangereux
et incapables de satisfaire vôtre esprit
et de toucher votre coeur.
Il m'a paru nécessaire de débroüiller
en vous les idées fausses que vous avez de
l'amour avant que de vous parler de lui .
Ne croyez pas que j'entreprenne de vous
le faire connoître autrement que par la
simple théorie,peut-être un jour l'Amant
qu'il vous a destiné vous fera sentir quel
il est.
amours
On a distingué il y a longtems deux
l'un sous le nom d'Eros et
l'autre d'Anteros , c'est du premier dont
je veux vous parler , c'est lui qui aima
Psiché , cet amour tendre , pur , vrai ,
vif , constant , fidele , ne pouvoit aimer
que Psiché, il vouloit être aimé de même;
1
pour
MAY . 1734 863
"
>
pour cela il lui falloit une ame toute entiere
, il trouvoit dans toutes les femmes
les deffauts et les dégouts que Psiché
trouvoit dans tous les hommes , rien ne
pouvoit plaire à Psiché et n'étoit digne
d'elle que l'Amour lui - même , la Fable
vous a apris tous ses malheurs, la curiosité
et la vanité les causerent , elle y joignit
la défiance , crime pour l'amitié
mais affreux et irrémissible aux yeux du
véritable Amour , vous êtes étonnée de
m'entendre dire aux yeux du véritable
Amour:Oui à ces yeux: celui là n'est point
aveugle, ilest clairvoyant,mais silentieux ;
il parle peu , simplement, évite les frases
et les tours affectez , son langage est vif ;
plein de naiveté et d'expressions , tout
parle en lui rien n'étoit perdu pour
Psiché, une ame n'a pas besoin de grands
discours pour entendre toute la force et
toute la grace d'une pensée, encore moins
lorsque ces pensées viennent du sentiment.
Après toutes les peines que les défauts
de Psiché lui avoient causées , après
qu'elle eut expié ses crimes , en se livrant
entierement a l'Amour , il l'épousa ; les
Dieux approuvérent ce mariage, ils étoient
seuls dans l'univers faits l'un pour l'autte;
de ce couple charmant naquit la volup
té , cette Deésse étoit digne de son ori-
و
Bilij gine ,
864 MERCURE DE FRANCE
•
gine , elle ne se sépara jamais de son pere
et de sa mere , elle enfaisoit les délices
sans parler les différens idiomes , elle se faisoit
entendre à toutesles nations , il suffisoit
pour cela d'avoir une ame ou de l'amour
, tout ce qui étoit privé de l'un ou
de l'autre ne l'entendoit point , tout ce
qui suivoit les étendarts d'Anteros étois
sourd pour sa voix délicate et gracieuse ;
vous sçavez qu'Anteros , le faux amour
vint s'établir sur la terre , qu'il subjugua
presque tous les mortels , il les blessoit
avec des fléches empoisonnées, il trainoit
après lui la jalousie , la fraude , la trahil'inconstance
, l'indiscretion ; delà
vinrent des guerres et des meurtres sans
nombre ; pour les séduire , il menoit avec
lui une fausse volupté qui ne ressembloit
en rien à la fille de Psiché ; elle ne don- .
noit que
des plaisirs grossiers qui ne flattant
les sens que pour des instants, les détruisoient
en peu de temps ; la fille de
Psiché un jour en badinant essaya
d'imiter
les soupirs d'amour sur un instrument
qu'elle fit avec un roseau ; sur ce même
instrument elle trouva le moyen de peindre
par des sons les differentes agitations
d'un coeur amoureux : langueurs, larmes,
délices , joye douce et naïve ; son pere et
sa mere sentoient augmenter leurs plaisirs
son ,
pac
MAY. 1734. `865
par les sons touchans qui les représentoient
; la volupté ne s'en tint pas à ce
coup d'essay , elle inventa plusieurs instrumens
, ayant tous des beautez particulieres
et propres à caractériser et à peindre
tous les differents mouvements de
l'ame au point de les faire ressentir à ceux
qui en étoient susceptibles : les Oyseaux
habitans des bocages du pays fortuné ou
ces Dieux charmans avoient choisi leur
retraite , apprirent bien- tôt à former des
sons mélodieux et agréables ; les Bergers
soupiroient sur la flutte & animoient
leurs danses , par le son de la Musette et
du Tambourin . Un jour un Rosignol
s'étant éloigné de sa demeure ordinaire ,
fut surpris par un amour folâtre qui voltigeoit
près de l'isle fortunée , son chant
lui parut nouveau ; il porta l'Oyseau à
Venus comme un présent rare et digne
d'elle , elle en connut tout le prix , et sur
le champ ayant fait atteler son Char, elle
ordonna au Rossignol de voler devant
ses Pigeons et de la conduire dans les
climats , inconnus jusqu'alors , où les
Oyseaux avoient un ramage si tendre ,
il obeït , elle part et arrive , son Char
resta suspendu dans les airs enveloppé
d'un nuage ; elle vouloit vor sans être
apperçue , ses yeux furent frappez du
>
B v plus
866 MERCURE DE FRANCE
plus agréable spectacle qui fut jamais
son fils et Psiché sur un Trône de gazon
et de fleurs dans le lieu le plus délicieux
de l'univers. Je n'en ferai point la description
, l'Amour l'avoit choisi pour
sa demeure , et sa fille l'avoit orné , à la
tête des Nimphes et de leur cour elle
leur donnoit une Fête champêtre , elles
dansoient sur le gazon , les Zephirs legers
dansoient avec elles , les Bergers et les
Bergeres danserent quelques Entrées de
ce Ballet ; les Graces de la suite de Psiché
en danserent aussi; ces Graces ne ressemblent
point à celles qui accompagnent
Venus , elles sont aussi modestes, naïves et
touchantes , que les dernieres sont effrontées
et minaudieres , toute la Musique du
Ballet étoit caractérisée, les yeux fermez,
on pouvoit deviner quels étoient lesDanseurs
et se représenter à peu près les différentes
figures du Ballet , tant la même
expression regnoit et dans le Chant et
dans la Danse ; il sembloit que la nature
seule eut produit l'une et l'autre ; et sans
que l'on s'en apperçut , on ressentoit les
plus délicates nuances des douces passions
exprimées par les Sons. Lorsque les jeux
furent terminez , Venus regagna Cichére
plus jalouse que jamais de la beauté et
du bonheur de Psiché , il n'étoit plus en
1
son
MA Y. 867
1734
son pouvoir de le troubler , elle voulut
du moins essayer de joüir du même plaisir
, et si les spectacles qu'elle donneroit
à Cithére n'avoient pas les mêmes charmes
, les surpasser du moins en magnificence
; elle fit construire un Theatre dont
les ornemens étoient chargez d'or et de
Pierres précieuses , les Décorations et les
Prespectives tâcherent d'imiter ce beau
Paysage qu'elle venoit de voir , un nombre
prodigieux d'Instrumens furent fabriquez
, Venus promit des dons et des
faveurs à tous ceux qui travailleroient
avec succès pour son Théatre ; tous les
hommes croyant avoir besoin de la protection
de Venus ont recours à elle
comme à une Divinité bienfaisante ; ils
ignorent que
d'elle et de ses enfans viennent
les peines dont ils gémissent , tous
travaillent à l'envi à composer de la
Musique , chacun vantoit son travail et.
la peine qu'il s'étoit donnée , les Grométres
même s'en mêlerent , ils loüoient les
calculs immenses qu'ils avoient fait pour
trouver moyen de parcourir dans les Airs
de violons toutes les differentes combinaisons
d'un ré ou d'un mi , avec les au
tres Notes; il est vrai que cet Air n'avoit
point de chant , et dans cette Musique
contrainte et si pénible à composer , rien
B vj
>
ne
868 MERCURE DE FRANCE
•
2
que
ne couloit de source , nul génie ne les
animoit , ils fuioient la nature et le sentiment
, l'art n'auroit dû servir qu'à chercher
l'un et l'autre pour les orner et les
mettre dans leur plus beau jour : quand
celui où l'on devoit exécuter sur leThéatre
deCithére ce Ballet tant vanté,fut arrivé,
la plus part des Spectateurs s'écriérent
les Instrumens étoient faux , leurs
Sons faisoient peine aux oreilles les moins
délicates on leur déclara dogmatiquement
que c'étoit des dissonnances faites
exprès et le chef- d'oeuvre de l'Art , les
Chats originaires de Cithére ont transmis
jusqu'à nous quelques tons de cette harmonie,
comme lesRosignols nous en font
entendre quelqu'uns de celle qu'ils ont
entendue dans l'isle de l'Amour.
Le Ballet fut dansé par les Nimphes de
la suite deVenus , Danses indécentes où
se mêloient des Athlettes de la suite de
Mars , les Graces faisoient des sauts et des
tours de force la confusion regnoit ,
la Musique n'avoit de raport à la Danse
que par le mouvement plus ou moins
vif , point de pensée par conséquent ,
point d'expression; on parcouroit tous les
tours avec rapidité , les dissonances prodiguées
sans cesses quelquefois on s'obsti
noit à rebattre deux Notes pendant un
quart
M/ACY. 1734. 369
quart d'heure , beaucoup de bruit , force
fredons ; et lorsque par hazard il se rencontroit
deux mesures qui pouvoient
faire un Chant agréable , l'on changeoit
bien vîte de ton , de mode et de mesure,
toujours de la tristesse au lieu de tendresse,
le singulier étoit du barocque , la fureur
du tintamare; au licu de gayeté, du turbulant,
et jamais de gentillesse, ni rien qui
put aller au coeur ; vous en sçavez à présent
autant que moi , faite votre choix
l'une des deux Musiques vient de Cithére,
l'autre de la fille de l'Amour et de Psiché ,
ne croyez pas qu'une nation s'en soit
proprié, l'une à l'exclusion de l'autre ; les
deux Musiques se sont répandues dans
toutes les nations , vôtre coeur et vôtre
gout vous feront démêler quelle est leur
origine. K
ap-
Vous trouverez peut- être que j'avance
sans preuve que les Chats sont originaires
de Cithere , ils en conservent encore
les inclinations et les manieres , remplis
de gentillesses dans leurs badinages , un
cruels
trompeurs, féroces, sans amitié ; lorsque
l'Amour les rend heureux, leur indiscrétion
l'aprend au voisinage par leurs clameurs
ils sont légers et volages comme
les Cupidons , le Rosignol amoureux
air doux
plein de dissinmitié
,
I
Venu
870 MERCURE DE FRANCE
venu de l'Ifle fortunée ne chante que
pour toucher sa Maîtresse ; est - il heureux
? il se tait et ne chante plus. Content
de sa bonne fortune , il la goute
en silence.
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Résumé : LETTRE de M. *** à Mlle *** sur l'Origine de la Musique.
La lettre de M. *** à Mlle *** aborde l'origine de la musique et les différentes formes d'amour. L'auteur observe que Mlle *** n'a jamais été véritablement touchée par l'amour, ayant rencontré des amants grossiers, hypocrites, flatteurs ou superficiels. Il estime nécessaire de clarifier ses idées sur l'amour avant d'en discuter. L'auteur distingue deux types d'amour : Éros et Anteros. Il se concentre sur Éros, l'amour tendre, pur et fidèle, illustré par l'histoire de Psyché et Amour. Psyché, après avoir surmonté ses erreurs, est récompensée par un mariage avec Amour, et de leur union naît la Volupté, une déesse qui exprime les délices de l'amour à travers la musique. La lettre décrit ensuite l'invention de la musique par la fille de Psyché et Amour, qui utilise un roseau pour imiter les soupirs d'amour. La Volupté invente divers instruments pour exprimer les mouvements de l'âme. Les oiseaux et les bergers adoptent ces sons mélodieux. Venus, jalouse du bonheur de Psyché, tente de recréer cette musique sur Cythère, mais échoue, produisant une musique artificielle et dissonante. L'auteur conclut en opposant la musique authentique, née de l'amour véritable, à celle, artificielle et barbare, venue de Cythère. Il invite Mlle *** à reconnaître les origines de ces deux types de musique pour faire son propre choix.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 870-871
RÉPONSE à l'Epitre de M. Néricaut Destouches, de l'Académie Françoise, insérée dans le Mercure du mois de Février dernier, page 219. Par Mlle de Malcrais de la Vigne, du Croisic en Bretagne.
Début :
Le triomphant Auteur qu'adopta Melpomene, [...]
Mots clefs :
Coeur, Donner, Dieux, Usage
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texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE à l'Epitre de M. Néricaut Destouches, de l'Académie Françoise, insérée dans le Mercure du mois de Février dernier, page 219. Par Mlle de Malcrais de la Vigne, du Croisic en Bretagne.
REPONSE à l'Epitre de M. Néricant
Destouches , de l'Académie Françoise
, insérée dans le Mercure du mois de
Février dernier , page 219. Par Mlle de
Malcrais de la Vigne , du Croisic en
Bretagne.
LE
10
E triomphant Auteur qu'adopta Melpomene,
Qu'Erato siempressa d'alaiter au bérceau ,
Daigna me couronner du Laurier le plus beau.
Celui par qui Thalie aujourd'hui sur la Scene ,
Sçait de nos passions exposer le Tableau ,
Vient d'honorer mes Vers d'un suffrage nouveau .
Voltaire , Esprit divin , dont la Verve hardie
Dans ses poëtiques transports ,
De Sophocle et d'Homere , égale les efforts ,
Néricaut , facile génie ,
را
Du délicat Térence , adroit ImitateurgetAl
Partagez entre yous mon coeur. }
Ne vous offensez pas, beaux Seigneurs, du partage
D'uncoeur queje voudrois vous pouvoir à chacun
Donner
MAY. 871
?
1734.
Donner tout entier ; mais l'usage ,
Cet usage charmant prétend qu'on n'en ait qu'un
Tel est mon sort , et l'on dit même
Qu'un coeur double est trompeur et ne vaut ja
mais rien ,
Et qu'en vous jurant qu'il vous aime ,
Il sçait cacher aux yeux dans un tendre entretien,
Sous l'écorce d'un doux maintien ,
Une ame traitresse et sauvage.
Grands Dieux
avantage ,
préservez- moi d'un si triste
N'ayons qu'un coeur , mais qu'il soit bon ,
Qu'une candeur de lait , que la simple franchise
L'accompagne en tout tems et le caractérise
Dieux que revére l'Hélicon ,
Si de mon coeur que je divise ,
Vous n'êtes point contens , agréez l'humble don
D'une estime qui vous est duë.
Je la puis entre vous partager librement ,
Et dans toute son étenduë
Yous la donner également.
Destouches , de l'Académie Françoise
, insérée dans le Mercure du mois de
Février dernier , page 219. Par Mlle de
Malcrais de la Vigne , du Croisic en
Bretagne.
LE
10
E triomphant Auteur qu'adopta Melpomene,
Qu'Erato siempressa d'alaiter au bérceau ,
Daigna me couronner du Laurier le plus beau.
Celui par qui Thalie aujourd'hui sur la Scene ,
Sçait de nos passions exposer le Tableau ,
Vient d'honorer mes Vers d'un suffrage nouveau .
Voltaire , Esprit divin , dont la Verve hardie
Dans ses poëtiques transports ,
De Sophocle et d'Homere , égale les efforts ,
Néricaut , facile génie ,
را
Du délicat Térence , adroit ImitateurgetAl
Partagez entre yous mon coeur. }
Ne vous offensez pas, beaux Seigneurs, du partage
D'uncoeur queje voudrois vous pouvoir à chacun
Donner
MAY. 871
?
1734.
Donner tout entier ; mais l'usage ,
Cet usage charmant prétend qu'on n'en ait qu'un
Tel est mon sort , et l'on dit même
Qu'un coeur double est trompeur et ne vaut ja
mais rien ,
Et qu'en vous jurant qu'il vous aime ,
Il sçait cacher aux yeux dans un tendre entretien,
Sous l'écorce d'un doux maintien ,
Une ame traitresse et sauvage.
Grands Dieux
avantage ,
préservez- moi d'un si triste
N'ayons qu'un coeur , mais qu'il soit bon ,
Qu'une candeur de lait , que la simple franchise
L'accompagne en tout tems et le caractérise
Dieux que revére l'Hélicon ,
Si de mon coeur que je divise ,
Vous n'êtes point contens , agréez l'humble don
D'une estime qui vous est duë.
Je la puis entre vous partager librement ,
Et dans toute son étenduë
Yous la donner également.
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Résumé : RÉPONSE à l'Epitre de M. Néricaut Destouches, de l'Académie Françoise, insérée dans le Mercure du mois de Février dernier, page 219. Par Mlle de Malcrais de la Vigne, du Croisic en Bretagne.
Mlle de Malcrais de la Vigne, du Croisic en Bretagne, répond à l'épître de M. Néricaut, publiée dans le Mercure de février précédent. Elle exprime sa gratitude envers Voltaire et Néricaut, les comparant à des figures littéraires célèbres comme Sophocle, Homère et Térence. Elle reconnaît l'honneur que Voltaire lui a fait en appréciant ses vers. L'auteure aborde ensuite la question du partage de son cœur, soulignant qu'il est impossible de le diviser sans tromperie. Elle prie les dieux de la préserver de cette situation et affirme qu'elle préfère avoir un cœur bon et franc. Elle conclut en offrant son estime, qu'elle peut partager équitablement entre eux.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 872-879
SUITE de la Réponse de M. de Saint-Aubin, au Problême sur l'Essence de la Matiere.
Début :
J'ay affaire aujourd'hui à trois Géometres, à deux Anonymes et au P. Castel. Le premier [...]
Mots clefs :
Essence de la matière, Point, Matière, Louis-Bertrand Castel, Infini, Calcul, Corps, Géométrie, Points, Raisonnement, Portion, Absurde, Entendement
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUITE de la Réponse de M. de Saint-Aubin, au Problême sur l'Essence de la Matiere.
SUITE de la Réponse de M. de Saint-
Aubin , au Problême sur l'Essence de
la Matiere.
' Ay affaire aujourd'hui à trois Géometres , à
deux Anonymes et au P. Castel. Le premier
des Anonymes croit que , suivant mon aveu ,
toute la solidité de la Géométrie réside dans le
Problême sur l'Essence de la Matiere , dont il se
déclare l'Auteur ; et il me fait dire en propres
termes , que la Géométrie n'est pas plus solide ,
quoique je n'aye comparé le Problème qu'aux
écueils de raisonnement , que la plupart des Géométres
n'ont pas évitez . C'est ce qu'il est facile
de voir dans la premiere Partie de ma Réponse.
L'Analise de l'Infini se propose de pousser toujours
en avant son Calcul , sans se soucier des
absurditez. Suivant ce Principe , elle considere
les quantitez positives et les négatives , les possibles
et les imaginaires , les vrayes et les absurdes .
Ces distinctions sont si bien établies , que les termes
de nul , d'imaginaire et d'absurde , sont propres
à la science et affectez à differentes quantitez
Algebriques. Elle tire de l'infini des solutions
plus courtes , des vûës plus étenduës , une analogie
et des expressions plus generales .
Mais les écueils du raisonnement qu'elle rencontre
sur sa route , elle ne doit les considerer
que comme des ecueils ; ce qui est compris dans
le Calcul , ne devant pas toujours passer dans le
raisonnement. Et c'est encore un avantage de
l'infini , d'avertir quand il se présente dans une
anaMAY.
1734. 873
analogie, que la supposition cesse d'être possible .
L'Auteur du Problême , au contraire , veut
guider le raisonnement par des opérations qui
ne sont propres qu'au Calcul . Il prétend trouver
par le Calcul , que le mouvement infini est égal
au repos ; et partant de cette conclusion absurde ,
il detruit toutes les propriétez de la Matiere ; il
la réduit à une simple possibilité , ce qui est nier
son existence ; et il soutient qu'un corps peut
être à la fois dans tous les lieux de l'Univers.
Mais , dira- t'on , le Calcul est donc imparfait
et trompeur , puisqu'il a donné à l'Auteur du
Problême cette premiere conclusion de l'égalité
du mouvement infini et du repos.
0 .
Je réponds que l'Auteur du Problême a dû
s'appercevoir que le Calcul lui donnoit les deux
contradictoires , sçavoir , moe , et mo
Car il est évidemment contradictoire que e ,
quantité de mouvement finie , soit égale à o
nullité de mouvement. Il n'y a rien de plus opposé
à la précision du Calcul , que d'en inferer
qu'une quantité de mouvement soit en mêmesemps
réelle et déterminée , et qu'elle soit nulle.
Toute grandeur , multipliée par zero, est égale
à zéro ; et si d'une grandeur multipliée par zéro,
il résulte un produit réel , c'est une marque infail
lible que cette grandeur est absurde.
Est - ce la faute du Calcul ? Ce ne l'est en aucune
maniere. Sa charge est autre que celle du raisonnement.
Suivant le raisonnement , à une demande
absurde point de réponse; suivant le calcul
, à une demande absurde , réponse absurde.
Vous interrogez le calcul par l'infini , grandeur
absurde en Géométrie , que vous supposez
séelie ; le calcul vous répond une absurdité , qui
est une confirmation de l'absurdité de l'infini
géométriques
La
874 MERCURE DE FRANCE
La Géométrie transcendante considere comme
point de rencontre un point , qui par la supposition
ne peut rencontrer . Elle examine aussi dans
la réunion des deux points , les rapports qu'auroient
ces deux points séparez . C'est - là tout le
mystere de l'infini , auquel rien ne manque du
côté du Calcul , et auquel il ne manque du côté
du raisonnement , que d'employer des mots qui
Bussent de la justesse et qui parussent moins merveilleux
; ce qui seroit facile.Voilà quels sont les
vrais principes de la Géométrie de l'infini ; et
quoiqu'ils n'ayent été expliquez nulle part , je ne
crains pas qu'ils soient désavouez par les plus
sçavans Géométres . C'est deffendre cette Géométrie
que de montrer qu'elle n'a aucune part
au Scepticisme et aux inclusions inconcevables ,
que l'Auteur du Problême a voulu y introduire.
Dans le même Mercure de Janvier , un autre
Géométre s'est imaginé que j'attaquois la Géométrie
, en tant que ses Elements , qui sont des
points , des lignes , des surfaces , ne sont que des
abstractions de l'entendement sans réalité. C'est
l'ancienne objection des Sceptiques , renouvellée
par Bayle. Les Géométres ont raison de ne s'y
pas arrêter. Quoique la précision géométrique
ne puisse être executée réellement et dans la matiere,
c'est un objet très- digne de l'entendement,
et qui conduit à la plus grande exactitude réelle
qui soit possible . Mais cette question n'étoit
qu'indirecte ; il s'agissoit de sçavoir si le passage
du fini à l'infini peut se faire par l'exaltation
du point à la ligne , de la ligne à la surface , &c.
et j'ay soutenu que les Infinitaires ne l'entendent
ni ne le peuvent entendre ainsi ; car une infinité
de surfaces n'est point un solide.
Le P. Castel est depuis survenu dans le Mercu
MAY. 1734- 875
re de Février. Il ne touche pas la plupart des
questions principales , sçavoir si , en Géométrie ,
on peut expliquer le passage du fini à l'infini ; si
la matiere n'est qu'une simple possibilité ; si c'est
une chose concevable que l'Etre absorbé dans le
néant ; si le plusqu'infini , les differens ordres
d'infinis et le simple infini géométrique actuelle
ment subsistant , sont des objets réels de l'entendement
ou des contradictions.
Le P. Castel se renferme dans la question de
la divisibilité à l'infini , si souvent debattuë et qui
appartient plus à la Physique qu'à la Géométrie.
Les Points , dit-il , que j'admets , sont de vrais
Points Physiques , autant que géométriques. Il admet
donc de vrais atomes , en même- temps qu'il
soutient l'infini géométrique , les differens ordres
d'infinis et le plusqu'infini .
Il vient de dire que le Point,qu'il admet; est Phy-
Bique , c'est à-dire , qu'il est matériel ou qu'il
est un corps et pour faire entendre qu'en suivant
le sentiment de la divisibilité à l'infini , il a été
dans l'erreur , il dit aussi- tôt après : le Point que
je concevois étoit un corps ; c'est- à - dire, que le
Point qu'il conçoit aujourd'hui , n'est pas un
corps , ou que le Point qu'il admet , n'est pas un
Point Physique.
Il nous donne ensuite des exemples sensibles.
Un point suspendu en l'air n'a qu'un aspect. Oui ,
un point Mathématique conçû en l'air,et qui n'est
qu'une abstraction de l'entendement ; mais si
c'est telle portion qu'on voudra de matiere , elle
aura toujours differents aspects relatifs à tout ce
qui l'environne. Je puis considerer l'angle d'une
fortification , en tant qu'il est saillant ; mais la
matiere qui compose cet angle , a nécessairement
an côté opposé et qui regarde la Place,
Le
876 MERCURE DE FRANCE
Le P. Castel m'impute une contre supposition
secrette , parce que j'ai dit que la plus petite por
tion de matiere ne cesse point , par la division
d'être matiere elle - même ; que la portion de matiere
la plus divisée qu'on puisse imaginer , étant
mise sur un plan , le touchera toujours par une de
ses parties , et ne le touchera pas par celle qui est
au-dessus, Il n'y a aucune contre- supposition ni expresse
ni secrette dans cette hypotèse . La portion
de matiere , la plus petite et la plus divisée qu'on
puisse imaginer, est encore divisible, parce que l'imagination
est finie, et que la divisibilité est infinie.
Ou si ces expressions de la portion de la
Matiere la plus petite et la plus divisée qu'on
puisse imaginer, déplaisent au P. Castel , il n'y
a qu'à dire qu'une portion de matiere , quelque
petite et quelque divisée qu'on la suppose , étant
mise sur un plan, le touchera toujours par une de
ses parties , et ne le touchera pas par celle qui est
au-dessus.
Le P. Castel continuë ainsi : Le point, la ligne,
la surface , appartiennent à l'étendue , sont dans
P'étendue indépendamment de notre entendement.
Je répons qu'au contraire le point , la ligne , la
surface , n'appartiennent en aucune maniere à
l'étendue et n'y sont point ni dépendamment ni
indépendamment de notre entendement. L'esprit
les considere abstractivement, mais ils ne peuvent
être réellement dans l'étendue . Tout ce qui est.
étendu et matériel , a nécessairement longueur ,
largeur et profondeur .
Ya-t'il rien de plus réel , dh le P. Castel , que
les bornes qui terminent quelque chose ? Non, sans
doute , mais si je ne fais attention en elles qu'à
cette qualité terminative , pour ainsi - dire , c'est
ane abstraction de l'entendement , Si je considere
MAY . 1734. 877
les bornes telles que réellement elles existent , si
je les considere comme des corps ou des portions
de corps , elles ne peuvent cesser d'avoir un côté
interieur joint à un exterieur , et d'être composées
de parties. Car toute portion d'un corps est
matér! elle , et elle - même est un corps.
Quoi ! je puis , dit le P. Castel , par une operation
aussi grassiere que l'est le toucher , faire le discernement
de la surface et du corps , toucher la surface,
longueur et largeur , sans toucher la profondeur , et
vous me direz que ces choses -là ne sont pas réellement
distinctes , et qu'elles ne le sont que par une
operation de l'esprit , tandis qu'elles le sont par
une operation de l'oeil et même de la main? Car
absolument ce que je vois et ce que je touche , n'a
point de profondeur. Au - dessous je sçais bien qu'il
ya une profondeur , mais elle appartient au corps
e non à la surface.
être
Ces paroles renferment la démonstration la
plus forte de la divisibilité à l'infini et l'exclusion
la plus formelle des atomes , puisque , de l'aveu
du P. Castel , la profondeur est réellement distincte
de la longueur , et que l'une ne peut
sans l'autre, Donc tout ce qui est Physique est
composé de parties réellement distinctes ; donc
il ne peut y avoir de point physique , le point
étant un, simple et sans parties ; donc la plus petite
portion de matiere qu'on puisse imaginer ,
peut encore devenir plus petite et ne peut cesser
d'être divisible ; C. Q. F. D.
Je puis me promener sur une Montagne sans
descendre dans une Vallée. Le P. Castel voudroit-
il en conclure qu'une Montagne peut être
sans vallée Une portion de matiere ne peut pas
être davantage sans longueur , largeur et profon
deur , disons plus, sans une multiplicité de partiog
878 MERCURE DE FRANCE
ties et d'aspects qui répondent à tous les corps
qui l'environnent , qu'une montagne peut être
sans vallée .
Mais je suppose que le Systême des atomes
soit soutenable : ces atomes , au moins , ne peuvent
être inégaux. Car leur difference seroit une
multiplicité de parties , et le plus gros pourroit
par un retranchement être rendu égal au plus
petit. Les atomes inégaux du P. Castel reviennent
au même que les points naissants et évanouissants
, auxquels Newton attribue differens
rapports entr'eux . L'inégalité des points Mathématiques
, quoique soutenue par ces deux Auteurs
celebres , n'en est pas moins contradictoire,
Après avoir rapporté la démonstration suivante
du P. Castel ; Dans un quarré qui à sa
diagonale , les lignes qui coupent ce quarré
parallelement à l'autre côté , coupent la diagonale
en autant de points , ni plus ni moins ; or la diagonale
est plus grande que le côté; donc les points d'in
tersection sont plus grands , ce qu'il falloit démontrer.
J'ai pleinement réfuté ce raisonnement
que le P. Castel dit que je n'ai pas jugé à propos
d'entamer , et je l'ai réfuté de la maniere la
plus directe , en faisant voir qu'il ne résulte autre
chose de l'hypothèse , sinon que les intervalles
d'intersection sont plus grands dans la dia
gonale que dans le côté du quarré.
C'est une pétition de principe, de prétendre que
le point est plus grand dans un plus grand cercle
: Euclide a bien sûrement pensé le contraire ,
lorsqu'il a démontré que dans tout cercle on ne
peut tirer qu'une tangente au même point. Les
objections qu'on peut faire sur le point de contact
d'un plus grand cercle , se rapportent au
cercle matériel , où il ne peut y avoir de point
MaMAY.
1734. 879
Mathématique et dans lequel la précision géométrique
ne peut se rencontrer,
pour
Quant à ce que le P. Castel donne l'expression
simple d'une chose bien sublime ,
xo1 ; il me permettra de dire que je n'y
trouve aucune sublimité ; et les principes que j'ai
expliquez , ne m'y laissent appercevoir qu'une
double impossibilité , dont les deux parties se
detruisent par la division et la multiplication.
Il est temps de finir une Dissertation aussi
abstraite. La Géométrie qui va rigoureusement
à la précision du vrai , est fort éloignée de l'esprit
de dispute. Ne donnons pas lieu aux Dialec
ticiens et aux Physiciens de prétendre que cett
science soit , comme les leurs , sujette aux contrarietez
d'opinions.
Aubin , au Problême sur l'Essence de
la Matiere.
' Ay affaire aujourd'hui à trois Géometres , à
deux Anonymes et au P. Castel. Le premier
des Anonymes croit que , suivant mon aveu ,
toute la solidité de la Géométrie réside dans le
Problême sur l'Essence de la Matiere , dont il se
déclare l'Auteur ; et il me fait dire en propres
termes , que la Géométrie n'est pas plus solide ,
quoique je n'aye comparé le Problème qu'aux
écueils de raisonnement , que la plupart des Géométres
n'ont pas évitez . C'est ce qu'il est facile
de voir dans la premiere Partie de ma Réponse.
L'Analise de l'Infini se propose de pousser toujours
en avant son Calcul , sans se soucier des
absurditez. Suivant ce Principe , elle considere
les quantitez positives et les négatives , les possibles
et les imaginaires , les vrayes et les absurdes .
Ces distinctions sont si bien établies , que les termes
de nul , d'imaginaire et d'absurde , sont propres
à la science et affectez à differentes quantitez
Algebriques. Elle tire de l'infini des solutions
plus courtes , des vûës plus étenduës , une analogie
et des expressions plus generales .
Mais les écueils du raisonnement qu'elle rencontre
sur sa route , elle ne doit les considerer
que comme des ecueils ; ce qui est compris dans
le Calcul , ne devant pas toujours passer dans le
raisonnement. Et c'est encore un avantage de
l'infini , d'avertir quand il se présente dans une
anaMAY.
1734. 873
analogie, que la supposition cesse d'être possible .
L'Auteur du Problême , au contraire , veut
guider le raisonnement par des opérations qui
ne sont propres qu'au Calcul . Il prétend trouver
par le Calcul , que le mouvement infini est égal
au repos ; et partant de cette conclusion absurde ,
il detruit toutes les propriétez de la Matiere ; il
la réduit à une simple possibilité , ce qui est nier
son existence ; et il soutient qu'un corps peut
être à la fois dans tous les lieux de l'Univers.
Mais , dira- t'on , le Calcul est donc imparfait
et trompeur , puisqu'il a donné à l'Auteur du
Problême cette premiere conclusion de l'égalité
du mouvement infini et du repos.
0 .
Je réponds que l'Auteur du Problême a dû
s'appercevoir que le Calcul lui donnoit les deux
contradictoires , sçavoir , moe , et mo
Car il est évidemment contradictoire que e ,
quantité de mouvement finie , soit égale à o
nullité de mouvement. Il n'y a rien de plus opposé
à la précision du Calcul , que d'en inferer
qu'une quantité de mouvement soit en mêmesemps
réelle et déterminée , et qu'elle soit nulle.
Toute grandeur , multipliée par zero, est égale
à zéro ; et si d'une grandeur multipliée par zéro,
il résulte un produit réel , c'est une marque infail
lible que cette grandeur est absurde.
Est - ce la faute du Calcul ? Ce ne l'est en aucune
maniere. Sa charge est autre que celle du raisonnement.
Suivant le raisonnement , à une demande
absurde point de réponse; suivant le calcul
, à une demande absurde , réponse absurde.
Vous interrogez le calcul par l'infini , grandeur
absurde en Géométrie , que vous supposez
séelie ; le calcul vous répond une absurdité , qui
est une confirmation de l'absurdité de l'infini
géométriques
La
874 MERCURE DE FRANCE
La Géométrie transcendante considere comme
point de rencontre un point , qui par la supposition
ne peut rencontrer . Elle examine aussi dans
la réunion des deux points , les rapports qu'auroient
ces deux points séparez . C'est - là tout le
mystere de l'infini , auquel rien ne manque du
côté du Calcul , et auquel il ne manque du côté
du raisonnement , que d'employer des mots qui
Bussent de la justesse et qui parussent moins merveilleux
; ce qui seroit facile.Voilà quels sont les
vrais principes de la Géométrie de l'infini ; et
quoiqu'ils n'ayent été expliquez nulle part , je ne
crains pas qu'ils soient désavouez par les plus
sçavans Géométres . C'est deffendre cette Géométrie
que de montrer qu'elle n'a aucune part
au Scepticisme et aux inclusions inconcevables ,
que l'Auteur du Problême a voulu y introduire.
Dans le même Mercure de Janvier , un autre
Géométre s'est imaginé que j'attaquois la Géométrie
, en tant que ses Elements , qui sont des
points , des lignes , des surfaces , ne sont que des
abstractions de l'entendement sans réalité. C'est
l'ancienne objection des Sceptiques , renouvellée
par Bayle. Les Géométres ont raison de ne s'y
pas arrêter. Quoique la précision géométrique
ne puisse être executée réellement et dans la matiere,
c'est un objet très- digne de l'entendement,
et qui conduit à la plus grande exactitude réelle
qui soit possible . Mais cette question n'étoit
qu'indirecte ; il s'agissoit de sçavoir si le passage
du fini à l'infini peut se faire par l'exaltation
du point à la ligne , de la ligne à la surface , &c.
et j'ay soutenu que les Infinitaires ne l'entendent
ni ne le peuvent entendre ainsi ; car une infinité
de surfaces n'est point un solide.
Le P. Castel est depuis survenu dans le Mercu
MAY. 1734- 875
re de Février. Il ne touche pas la plupart des
questions principales , sçavoir si , en Géométrie ,
on peut expliquer le passage du fini à l'infini ; si
la matiere n'est qu'une simple possibilité ; si c'est
une chose concevable que l'Etre absorbé dans le
néant ; si le plusqu'infini , les differens ordres
d'infinis et le simple infini géométrique actuelle
ment subsistant , sont des objets réels de l'entendement
ou des contradictions.
Le P. Castel se renferme dans la question de
la divisibilité à l'infini , si souvent debattuë et qui
appartient plus à la Physique qu'à la Géométrie.
Les Points , dit-il , que j'admets , sont de vrais
Points Physiques , autant que géométriques. Il admet
donc de vrais atomes , en même- temps qu'il
soutient l'infini géométrique , les differens ordres
d'infinis et le plusqu'infini .
Il vient de dire que le Point,qu'il admet; est Phy-
Bique , c'est à-dire , qu'il est matériel ou qu'il
est un corps et pour faire entendre qu'en suivant
le sentiment de la divisibilité à l'infini , il a été
dans l'erreur , il dit aussi- tôt après : le Point que
je concevois étoit un corps ; c'est- à - dire, que le
Point qu'il conçoit aujourd'hui , n'est pas un
corps , ou que le Point qu'il admet , n'est pas un
Point Physique.
Il nous donne ensuite des exemples sensibles.
Un point suspendu en l'air n'a qu'un aspect. Oui ,
un point Mathématique conçû en l'air,et qui n'est
qu'une abstraction de l'entendement ; mais si
c'est telle portion qu'on voudra de matiere , elle
aura toujours differents aspects relatifs à tout ce
qui l'environne. Je puis considerer l'angle d'une
fortification , en tant qu'il est saillant ; mais la
matiere qui compose cet angle , a nécessairement
an côté opposé et qui regarde la Place,
Le
876 MERCURE DE FRANCE
Le P. Castel m'impute une contre supposition
secrette , parce que j'ai dit que la plus petite por
tion de matiere ne cesse point , par la division
d'être matiere elle - même ; que la portion de matiere
la plus divisée qu'on puisse imaginer , étant
mise sur un plan , le touchera toujours par une de
ses parties , et ne le touchera pas par celle qui est
au-dessus, Il n'y a aucune contre- supposition ni expresse
ni secrette dans cette hypotèse . La portion
de matiere , la plus petite et la plus divisée qu'on
puisse imaginer, est encore divisible, parce que l'imagination
est finie, et que la divisibilité est infinie.
Ou si ces expressions de la portion de la
Matiere la plus petite et la plus divisée qu'on
puisse imaginer, déplaisent au P. Castel , il n'y
a qu'à dire qu'une portion de matiere , quelque
petite et quelque divisée qu'on la suppose , étant
mise sur un plan, le touchera toujours par une de
ses parties , et ne le touchera pas par celle qui est
au-dessus.
Le P. Castel continuë ainsi : Le point, la ligne,
la surface , appartiennent à l'étendue , sont dans
P'étendue indépendamment de notre entendement.
Je répons qu'au contraire le point , la ligne , la
surface , n'appartiennent en aucune maniere à
l'étendue et n'y sont point ni dépendamment ni
indépendamment de notre entendement. L'esprit
les considere abstractivement, mais ils ne peuvent
être réellement dans l'étendue . Tout ce qui est.
étendu et matériel , a nécessairement longueur ,
largeur et profondeur .
Ya-t'il rien de plus réel , dh le P. Castel , que
les bornes qui terminent quelque chose ? Non, sans
doute , mais si je ne fais attention en elles qu'à
cette qualité terminative , pour ainsi - dire , c'est
ane abstraction de l'entendement , Si je considere
MAY . 1734. 877
les bornes telles que réellement elles existent , si
je les considere comme des corps ou des portions
de corps , elles ne peuvent cesser d'avoir un côté
interieur joint à un exterieur , et d'être composées
de parties. Car toute portion d'un corps est
matér! elle , et elle - même est un corps.
Quoi ! je puis , dit le P. Castel , par une operation
aussi grassiere que l'est le toucher , faire le discernement
de la surface et du corps , toucher la surface,
longueur et largeur , sans toucher la profondeur , et
vous me direz que ces choses -là ne sont pas réellement
distinctes , et qu'elles ne le sont que par une
operation de l'esprit , tandis qu'elles le sont par
une operation de l'oeil et même de la main? Car
absolument ce que je vois et ce que je touche , n'a
point de profondeur. Au - dessous je sçais bien qu'il
ya une profondeur , mais elle appartient au corps
e non à la surface.
être
Ces paroles renferment la démonstration la
plus forte de la divisibilité à l'infini et l'exclusion
la plus formelle des atomes , puisque , de l'aveu
du P. Castel , la profondeur est réellement distincte
de la longueur , et que l'une ne peut
sans l'autre, Donc tout ce qui est Physique est
composé de parties réellement distinctes ; donc
il ne peut y avoir de point physique , le point
étant un, simple et sans parties ; donc la plus petite
portion de matiere qu'on puisse imaginer ,
peut encore devenir plus petite et ne peut cesser
d'être divisible ; C. Q. F. D.
Je puis me promener sur une Montagne sans
descendre dans une Vallée. Le P. Castel voudroit-
il en conclure qu'une Montagne peut être
sans vallée Une portion de matiere ne peut pas
être davantage sans longueur , largeur et profon
deur , disons plus, sans une multiplicité de partiog
878 MERCURE DE FRANCE
ties et d'aspects qui répondent à tous les corps
qui l'environnent , qu'une montagne peut être
sans vallée .
Mais je suppose que le Systême des atomes
soit soutenable : ces atomes , au moins , ne peuvent
être inégaux. Car leur difference seroit une
multiplicité de parties , et le plus gros pourroit
par un retranchement être rendu égal au plus
petit. Les atomes inégaux du P. Castel reviennent
au même que les points naissants et évanouissants
, auxquels Newton attribue differens
rapports entr'eux . L'inégalité des points Mathématiques
, quoique soutenue par ces deux Auteurs
celebres , n'en est pas moins contradictoire,
Après avoir rapporté la démonstration suivante
du P. Castel ; Dans un quarré qui à sa
diagonale , les lignes qui coupent ce quarré
parallelement à l'autre côté , coupent la diagonale
en autant de points , ni plus ni moins ; or la diagonale
est plus grande que le côté; donc les points d'in
tersection sont plus grands , ce qu'il falloit démontrer.
J'ai pleinement réfuté ce raisonnement
que le P. Castel dit que je n'ai pas jugé à propos
d'entamer , et je l'ai réfuté de la maniere la
plus directe , en faisant voir qu'il ne résulte autre
chose de l'hypothèse , sinon que les intervalles
d'intersection sont plus grands dans la dia
gonale que dans le côté du quarré.
C'est une pétition de principe, de prétendre que
le point est plus grand dans un plus grand cercle
: Euclide a bien sûrement pensé le contraire ,
lorsqu'il a démontré que dans tout cercle on ne
peut tirer qu'une tangente au même point. Les
objections qu'on peut faire sur le point de contact
d'un plus grand cercle , se rapportent au
cercle matériel , où il ne peut y avoir de point
MaMAY.
1734. 879
Mathématique et dans lequel la précision géométrique
ne peut se rencontrer,
pour
Quant à ce que le P. Castel donne l'expression
simple d'une chose bien sublime ,
xo1 ; il me permettra de dire que je n'y
trouve aucune sublimité ; et les principes que j'ai
expliquez , ne m'y laissent appercevoir qu'une
double impossibilité , dont les deux parties se
detruisent par la division et la multiplication.
Il est temps de finir une Dissertation aussi
abstraite. La Géométrie qui va rigoureusement
à la précision du vrai , est fort éloignée de l'esprit
de dispute. Ne donnons pas lieu aux Dialec
ticiens et aux Physiciens de prétendre que cett
science soit , comme les leurs , sujette aux contrarietez
d'opinions.
Fermer
Résumé : SUITE de la Réponse de M. de Saint-Aubin, au Problême sur l'Essence de la Matiere.
Le texte présente une réponse à des critiques concernant l'essence de la matière et la géométrie, impliquant trois géomètres : deux anonymes et le Père Castel. Le premier anonyme soutient que la solidité de la géométrie repose sur le problème de l'essence de la matière et accuse l'auteur de la réponse de considérer la géométrie comme fragile. L'auteur de la réponse explique que l'analyse de l'infini utilise diverses quantités pour obtenir des solutions plus courtes et des vues plus étendues, mais critique l'utilisation incorrecte du calcul qui mène à des conclusions absurdes, comme l'égalité du mouvement infini et du repos. Il défend la géométrie de l'infini en distinguant les rôles du calcul et du raisonnement. Un autre géomètre anonyme accuse l'auteur de la réponse d'attaquer la géométrie en considérant ses éléments comme des abstractions sans réalité. L'auteur réplique que, bien que les éléments géométriques soient abstraits, ils sont dignes de l'entendement et conduisent à une grande exactitude. Le Père Castel aborde la question de la divisibilité à l'infini, admettant des points physiques tout en soutenant l'infini géométrique. Il donne des exemples pour illustrer ses arguments, mais l'auteur de la réponse conteste ses suppositions et démontre la divisibilité infinie de la matière. L'auteur conclut en affirmant que la géométrie vise la précision du vrai et doit éviter les disputes. Il réfute les objections du Père Castel sur les points mathématiques et leur taille dans les cercles.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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9
p. 879-881
LA NATURE ET L'ART. FABLE. A Mlle de N***.
Début :
Enflé de ses progrès et fier de ses appas, [...]
Mots clefs :
Nature, Art
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LA NATURE ET L'ART. FABLE. A Mlle de N***.
LA NATURE ET L'ART .
FABLE.
A Mile de N **
ENAé de ses progrès et fier de sés appas ;
On dit qu'un jour à la Nature ,
L'Art voulut disputer le pas ;
Qui de nous deux ( dit- il ) a de l'Architecture , ]
De l'ingénieuse Peinture
Et de l'agreable Sculpture ,
Reglé les operations.
C'est l'Art , sa science féconde
Do
380 MERCURE DE FRANCE
De nouvelles productions ,
Chaque jour enrichit le Monde.
Au corps le plus matériel ,
L'Art donne un air leger et d'agréables formes
Qu'on s'en tienne au contraire au simple naturel !
Que de confusion et que d'objets informes,
Que l'Art les mette en oeuvre : à peine ils son
polis
Que nous les trouvons embellis.
En un mot , sans cet Art en Beautez si fertile
Tout ce que parmi vous la Nature produit ,
Mortels , deviendroit inutile.
Ton amour propre te séduit ,
Dit la Nature ; ch ! quelle est ta folic,
De vouloir me donner la Loy ?
Mais , là , parlons de bonne foi ,
Ces chef- d'oeuvres fameux que ton orgueil public
Sçais -tu bien qu'ils ne sont jamais de bon alloi
Qu'autant qu'ils approchent de moi
Cette simplicite que ton affecterie ,
Contre moi tourne en raillerie ,
Mon cher , ne va pas t'y tromper ,
Il te faut du travail pour pouvoir l'attraper
Et souvent ta main l'estropie .
Je ris quand je vois l'Art me traiter en Rival ,
Il me semble voir la Copie ,
Se mocquer de l'Original .
ENMAY:
888 1734
ENVO r.
Vous, qui par un noble partage ,
Faites éclater à nos yeux
Le rare et brillant assemblage ,,
Des talens les plus précieux ;
Daignez , charmante Iris , en lisant cette Fable ,
L'honorer d'un regard affable ,
Jadis par ses naïvetez , }
Pleines de graces nouvelles ,
D'instructions et de beautez ,
La Fontaine auprès des Belles
S'ouvrit un favorable accès ;
Je travaille pour vous , comme il rimoit pour
elles ,
Peut-être , je l'avoue , avec moins de succès ,
Vous avez bien reçû des dons de la Nature ;
Mais il n'en est aucun ( tout en vous m'en assure)
Que l'Art n'ait aussi cultivé ;
Un petit differend entre eux s'est élevé ,
La Nature vous fit ce qui dépendit d'elle,
Et l'Art , de son côté , vous favorisa fort ;
Je vous fais aujourd'hui Juge de leur querelle ,
C'est le moyen, je croi , qu'ils soient bien- tôt
d'accord .
Pesselier, de la Ferté sous-Foüars .
FABLE.
A Mile de N **
ENAé de ses progrès et fier de sés appas ;
On dit qu'un jour à la Nature ,
L'Art voulut disputer le pas ;
Qui de nous deux ( dit- il ) a de l'Architecture , ]
De l'ingénieuse Peinture
Et de l'agreable Sculpture ,
Reglé les operations.
C'est l'Art , sa science féconde
Do
380 MERCURE DE FRANCE
De nouvelles productions ,
Chaque jour enrichit le Monde.
Au corps le plus matériel ,
L'Art donne un air leger et d'agréables formes
Qu'on s'en tienne au contraire au simple naturel !
Que de confusion et que d'objets informes,
Que l'Art les mette en oeuvre : à peine ils son
polis
Que nous les trouvons embellis.
En un mot , sans cet Art en Beautez si fertile
Tout ce que parmi vous la Nature produit ,
Mortels , deviendroit inutile.
Ton amour propre te séduit ,
Dit la Nature ; ch ! quelle est ta folic,
De vouloir me donner la Loy ?
Mais , là , parlons de bonne foi ,
Ces chef- d'oeuvres fameux que ton orgueil public
Sçais -tu bien qu'ils ne sont jamais de bon alloi
Qu'autant qu'ils approchent de moi
Cette simplicite que ton affecterie ,
Contre moi tourne en raillerie ,
Mon cher , ne va pas t'y tromper ,
Il te faut du travail pour pouvoir l'attraper
Et souvent ta main l'estropie .
Je ris quand je vois l'Art me traiter en Rival ,
Il me semble voir la Copie ,
Se mocquer de l'Original .
ENMAY:
888 1734
ENVO r.
Vous, qui par un noble partage ,
Faites éclater à nos yeux
Le rare et brillant assemblage ,,
Des talens les plus précieux ;
Daignez , charmante Iris , en lisant cette Fable ,
L'honorer d'un regard affable ,
Jadis par ses naïvetez , }
Pleines de graces nouvelles ,
D'instructions et de beautez ,
La Fontaine auprès des Belles
S'ouvrit un favorable accès ;
Je travaille pour vous , comme il rimoit pour
elles ,
Peut-être , je l'avoue , avec moins de succès ,
Vous avez bien reçû des dons de la Nature ;
Mais il n'en est aucun ( tout en vous m'en assure)
Que l'Art n'ait aussi cultivé ;
Un petit differend entre eux s'est élevé ,
La Nature vous fit ce qui dépendit d'elle,
Et l'Art , de son côté , vous favorisa fort ;
Je vous fais aujourd'hui Juge de leur querelle ,
C'est le moyen, je croi , qu'ils soient bien- tôt
d'accord .
Pesselier, de la Ferté sous-Foüars .
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Résumé : LA NATURE ET L'ART. FABLE. A Mlle de N***.
Le texte présente une fable intitulée 'La Nature et l'Art'. Dans cette fable, l'Art et la Nature discutent de leurs mérites respectifs. L'Art se vante de ses contributions à l'architecture, la peinture et la sculpture, affirmant qu'il enrichit le monde de nouvelles productions et embellit les formes naturelles. La Nature critique l'orgueil de l'Art et souligne que ses chefs-d'œuvre ne valent que s'ils se rapprochent d'elle. Elle ajoute que l'Art nécessite beaucoup de travail et peut souvent déformer ses créations. La Nature se moque de l'Art, le comparant à une copie de l'original. Le texte se conclut par une dédicace à une personne nommée Iris, comparant l'auteur à La Fontaine et soulignant que tant la Nature que l'Art ont contribué aux talents de cette personne. L'auteur invite Iris à juger la querelle entre la Nature et l'Art pour qu'ils puissent s'accorder.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
p. 882-888
LETTRE de M. Capperon, ancien Doyen de S. Maxent, à M. D. L. R. sur des Champignons formez dans l'estomach d'une Femme.
Début :
Je vous écris aujourd'hui, Monsieur, sur un effet assez singulier de la Nature, [...]
Mots clefs :
Estomac, Femme, Champignons, Eau, Grains, Pédicules, Graines, Liqueur, Vomissement, Ragoûts
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. Capperon, ancien Doyen de S. Maxent, à M. D. L. R. sur des Champignons formez dans l'estomach d'une Femme.
LETTRE de M. Capperon , ancien
Doyen de S. Maxent , à M. D. L. R.
sur des Champignons formez dans l'esi
tomach d'une Femme,
J
E vous écris aujourd'hui , Monsieur ;
sur un effet assez singulier de la Nature
, et qui mérite bien , à mon avis ,
d'être rendu public , tant à cause de la
rareté du fait , que par les consequences
qu'on en peut tirer, Une Femme d'honneur
et incapable de me tromper , âgét
d'environ soixante et dix ans , d'un temperament
flegmatique , me vint trouver
ces jours passez fort allarmée de ce qui
4ui étoit arrivé , pour m'en faire le récit,
et pour sçavoir ce que je pouvois penser
sur une chose aussi extraordinaire. Elle
me dit que depuis quelque temps elle
s'étoit trouvée fort incommodée de ventositez
, qui lui sortolent fréquemment
parhaut et par bas; qu'enfin lassée du mal
que
JIA
celá lui causoit , elle qrut que prenant
un peu d'eau - de- vie , cette liqueur
pourroit la soulager ; comme en effet, elle
ne l'eut pas plutôt avalée , qu'il lui prit
un grand vomissement , par le moyen
duquel
MAY. 1734
883
duquel elle rendit quantité de matieres
glaireuses , où il paroissoit plusieurs petits
corps bruns , diversement figurez ,
confondus et mêlez parmi ces glaires .
Revenue de la peine que ce vomissement
lui avoit causée , elle fut curieuse
de voir ce que c'étoit que ces petits corps
ainsi dispersez dans ce qu'elle avoit vomi
, et les ayant tirez les uns après les
autres , elle fut bien surprise de voir que
c'étoient quinze ou seize petits Champignons
, aussi exactement formez que
ceux qui croissent sur la terre ; les
les ayant
rangez sur un petit plat , elle me les fit
apporter un moment après qu'elle fut
venue chez moi. Quelques jours après
elle en jetta encore d'autres , qui me furent
pareillement apportez par la même
personne qui les lui avoit vû vomir.
Les ayant examinez à loisir et avec toute
l'attention possible , j'y en ai trouvé
particulierement un , dont la tête parfaitement
épanouie , a au moins un bon
pouce de largeur , et dont le pédicule
est long de dix lignes ; quelques autres
également épanouis , dont les têtes sont.
larges de dix à onze lignes , posées sur
des pédicules longs de cinq à six lignes ;
d'autres tant soit peu plus petits , dont
les uns sont ouverts et d'autres encore
Cij fer884
MERCURE DE FRANCE
fermez , ayant tous leurs têtes et leurs
pédicules. Il y en a un qui n'a même
que cinq lignes de hauteur , et dont
la tête ronde est fermée n'est large
que d'environ trois lignes , de couleur
plus noire que les autres ; car il est à
observer , que loin d'avoir la moindre
blancheur , ils sont tous très - bruns et
d'une contexture très - tendre. Je les ai
tous mis dans l'eau de vie , où je les conserve
pour les faire voir à ceux qui en
sont curieux .
Après cet exposé , Monsieur , il s'agit
de sçavoir d'où sont provenus ces Champignons
dans l'estomach de cette femme ;
comment ils ont pû y germer , y vege
ter et y croître . Pour bien connoître
cela , je lui demandai d'abord si dans la
la maison où elle demeure on n'y mangeoit
pas souvent des Champignons , et
si elle n'en avoit pas mangé comme les
autres , soit dans les ragoûts ou autrement
? Si elle n'avoit pas coûtume de
boire quelquefois de l'eau pendant le
jour ? Elle me répondit qu'il étoit vrai
qu'elle avoit mangé des Champignons
comme les autres ; que pendant le jour
elle buvoit quelquefois de l'eau avec
un peu de vin , et quelquefois même de
l'eau pure.
DeMAY.
1734 885
De- là j'ai conclu , que suivant toute
apparence , s'étant trouvé quelques graines
de Champignons dans l'eau qu'on
lui avoit donnée à boire , pour être res
tées imperceptibles dans quelque perit
endroit des vaisseaux où on les avoit
lavez , et que s'étant répandues ensuite
dans l'eau plus claire qu'on avoit mise
dans ces vaisseaux , c'étoit sans doute de
cette eau qu'on lui avoit donnée pour
boire , et où ces graines s'étoient trouvées
, et avec laquelle elles étoient tombées
dans son estomach. Je dis qu'il y
a plus lieu de croire que ça été par le
moyen de cette eau , plutôt qu'en mangeant
les Champignons mêmes cuits , apprêtez
et mêlangez dans des ragoûts et
des sausses ; la cuisson et le mêlange du
beure ou de graisse , ayant dû leur
ôter la disposition convenable qui leur
est nécessaire pour germer et vegeter.
On ne peut pas dire que cette Dame
a pû les manger et les avaler tels qu'ils
se sont trouvez dans son vomissement ;
car outre qu'on n'apprête pas les Champignons
pour les manger et pour les met
tre dans les ragouts avec leurs têtes toutes
épanouies , les pédicules y restant
attachez dans tout leur entier , c'est que
cette Dame n'auroit pas avalé ces Cham-
C iij pignons
886 MERCURE DE FRANCE
pignons ainsi entiers , sans leur avoir auparavant
donné le moindre coup de dent;
il faudroit pour cela qu'elle fût extrê
mement vorace , ce qui n'est pas.
Disons donc d'abord que dans l'estomach
, il se trouve une liqueur mucilagineuse
, qui s'y filtre par des ouvertures
qui représentent des especes de mamelons
, laquelle sert pour empêcher que
les choses trop âcres , trop picquantes et
trop corrosives qu'on peut avaler , n'irritent
fortement ce viscere ; et c'est cette.
liqueur mucilagineuse qui enduit le fond
de l'estomach , plus ou moins , selon que
le sang se trouve plus ou moins grossier
et visqueux dans certaines personnes.
Cela étant , il n'est pas surprenant que
des graines de Champignons, ayant été
avalées , elles se soient attachées à cette
matiere visqueuse , d'autant plus abon
dante dans l'estomach de cette Dame ;
qu'elle est d'un temperamment flegmatique
, dont le sang doit avoir moins de
volatilité à cause de son grand âge ; et
ces graines ainsi attachées et incorporées
dans cette matiere glaireuse , aidées par
la douce chaleur de l'estomach , s'y sont
suffisamment dilatées pour y pousser de
légeres racines et y vegeter de la manie
re dont on les voit.
C'est
MAY. 1734
887
-
C'est même ce qui n'est pas nouveau ,
puisqu'on voit dans les Observations de
Physique , imprimées en 1717. qu'un
Soldat à Coppenhague , ayant mangé
quelques grains d'avoine , ces grains lui
demeurerent pendant plusieurs mois dans
l'estomach , où ils lui causerent differentes
douleurs , jusqu'à ce qu'ayant pris
un remede vomitif , cela lui fit jetter
ces grains , lesquels avoient pris racine
et avoient germé comme en pleine terre,
ayant même poussé des feuilles , quoique
sans grains. C'est par le même moyen
qu'on a vû souvent des personnes vomir de
petites Grenouilles et d'autres Insectes ;
ce qu'on attribuoit souvent à sortilege ;
mais cela ne venoit que pour avoir bû
de quelque eau dormante , où s'étoient
trouvez des germes de ces animaux , lesquels
attachez aux matieres glaireuses
de l'estomach , et y ayant reçû l'impres
sion de la douce chaleur qui s'y trouve
accompagnée des parties salines et ter
restres de ces viscositez , avoient été di
latez , nourris et formez comme s'ils
avoient été dans l'eau ou dans la terre.
Enfin la conséquence naturelle qu'on
"S
* Ce Fait est rapporté par M. Bayle , dans ses
Nouvelles de la République des Lettres , mois de
Septembre 1685. page 1005.
C iiij peut
888 MERCURE DE FRANCE
peut tirer de l'état où ces Champignons
se sont trouvez à la sortie de l'estomach
où ils s'étoient formez , c'est de conclure
qu'ayant été trouvez entiers avec leurs
têtes et leurs pédicules qui y étoient attachez
, aussi tendres et aussi délicats
qu'ils sont , c'est une preuve certaine que
la digestion des aliments ne se fait pas
par la trituration causée par le simple
mouvement de l'estomach ; puisqu'il auroit
été impossible que ces petites plantes
eussent pû se former , s'étendre et
croître jusqu'au point où elles sont , sans
se trouver à la fin rompuës par pieces et
brisées , à cause de leur contexture si tendre
et si délicate . Je suis , Monsieur , & c..
A la Ville d'Eu le 14.
Avril
1734
Doyen de S. Maxent , à M. D. L. R.
sur des Champignons formez dans l'esi
tomach d'une Femme,
J
E vous écris aujourd'hui , Monsieur ;
sur un effet assez singulier de la Nature
, et qui mérite bien , à mon avis ,
d'être rendu public , tant à cause de la
rareté du fait , que par les consequences
qu'on en peut tirer, Une Femme d'honneur
et incapable de me tromper , âgét
d'environ soixante et dix ans , d'un temperament
flegmatique , me vint trouver
ces jours passez fort allarmée de ce qui
4ui étoit arrivé , pour m'en faire le récit,
et pour sçavoir ce que je pouvois penser
sur une chose aussi extraordinaire. Elle
me dit que depuis quelque temps elle
s'étoit trouvée fort incommodée de ventositez
, qui lui sortolent fréquemment
parhaut et par bas; qu'enfin lassée du mal
que
JIA
celá lui causoit , elle qrut que prenant
un peu d'eau - de- vie , cette liqueur
pourroit la soulager ; comme en effet, elle
ne l'eut pas plutôt avalée , qu'il lui prit
un grand vomissement , par le moyen
duquel
MAY. 1734
883
duquel elle rendit quantité de matieres
glaireuses , où il paroissoit plusieurs petits
corps bruns , diversement figurez ,
confondus et mêlez parmi ces glaires .
Revenue de la peine que ce vomissement
lui avoit causée , elle fut curieuse
de voir ce que c'étoit que ces petits corps
ainsi dispersez dans ce qu'elle avoit vomi
, et les ayant tirez les uns après les
autres , elle fut bien surprise de voir que
c'étoient quinze ou seize petits Champignons
, aussi exactement formez que
ceux qui croissent sur la terre ; les
les ayant
rangez sur un petit plat , elle me les fit
apporter un moment après qu'elle fut
venue chez moi. Quelques jours après
elle en jetta encore d'autres , qui me furent
pareillement apportez par la même
personne qui les lui avoit vû vomir.
Les ayant examinez à loisir et avec toute
l'attention possible , j'y en ai trouvé
particulierement un , dont la tête parfaitement
épanouie , a au moins un bon
pouce de largeur , et dont le pédicule
est long de dix lignes ; quelques autres
également épanouis , dont les têtes sont.
larges de dix à onze lignes , posées sur
des pédicules longs de cinq à six lignes ;
d'autres tant soit peu plus petits , dont
les uns sont ouverts et d'autres encore
Cij fer884
MERCURE DE FRANCE
fermez , ayant tous leurs têtes et leurs
pédicules. Il y en a un qui n'a même
que cinq lignes de hauteur , et dont
la tête ronde est fermée n'est large
que d'environ trois lignes , de couleur
plus noire que les autres ; car il est à
observer , que loin d'avoir la moindre
blancheur , ils sont tous très - bruns et
d'une contexture très - tendre. Je les ai
tous mis dans l'eau de vie , où je les conserve
pour les faire voir à ceux qui en
sont curieux .
Après cet exposé , Monsieur , il s'agit
de sçavoir d'où sont provenus ces Champignons
dans l'estomach de cette femme ;
comment ils ont pû y germer , y vege
ter et y croître . Pour bien connoître
cela , je lui demandai d'abord si dans la
la maison où elle demeure on n'y mangeoit
pas souvent des Champignons , et
si elle n'en avoit pas mangé comme les
autres , soit dans les ragoûts ou autrement
? Si elle n'avoit pas coûtume de
boire quelquefois de l'eau pendant le
jour ? Elle me répondit qu'il étoit vrai
qu'elle avoit mangé des Champignons
comme les autres ; que pendant le jour
elle buvoit quelquefois de l'eau avec
un peu de vin , et quelquefois même de
l'eau pure.
DeMAY.
1734 885
De- là j'ai conclu , que suivant toute
apparence , s'étant trouvé quelques graines
de Champignons dans l'eau qu'on
lui avoit donnée à boire , pour être res
tées imperceptibles dans quelque perit
endroit des vaisseaux où on les avoit
lavez , et que s'étant répandues ensuite
dans l'eau plus claire qu'on avoit mise
dans ces vaisseaux , c'étoit sans doute de
cette eau qu'on lui avoit donnée pour
boire , et où ces graines s'étoient trouvées
, et avec laquelle elles étoient tombées
dans son estomach. Je dis qu'il y
a plus lieu de croire que ça été par le
moyen de cette eau , plutôt qu'en mangeant
les Champignons mêmes cuits , apprêtez
et mêlangez dans des ragoûts et
des sausses ; la cuisson et le mêlange du
beure ou de graisse , ayant dû leur
ôter la disposition convenable qui leur
est nécessaire pour germer et vegeter.
On ne peut pas dire que cette Dame
a pû les manger et les avaler tels qu'ils
se sont trouvez dans son vomissement ;
car outre qu'on n'apprête pas les Champignons
pour les manger et pour les met
tre dans les ragouts avec leurs têtes toutes
épanouies , les pédicules y restant
attachez dans tout leur entier , c'est que
cette Dame n'auroit pas avalé ces Cham-
C iij pignons
886 MERCURE DE FRANCE
pignons ainsi entiers , sans leur avoir auparavant
donné le moindre coup de dent;
il faudroit pour cela qu'elle fût extrê
mement vorace , ce qui n'est pas.
Disons donc d'abord que dans l'estomach
, il se trouve une liqueur mucilagineuse
, qui s'y filtre par des ouvertures
qui représentent des especes de mamelons
, laquelle sert pour empêcher que
les choses trop âcres , trop picquantes et
trop corrosives qu'on peut avaler , n'irritent
fortement ce viscere ; et c'est cette.
liqueur mucilagineuse qui enduit le fond
de l'estomach , plus ou moins , selon que
le sang se trouve plus ou moins grossier
et visqueux dans certaines personnes.
Cela étant , il n'est pas surprenant que
des graines de Champignons, ayant été
avalées , elles se soient attachées à cette
matiere visqueuse , d'autant plus abon
dante dans l'estomach de cette Dame ;
qu'elle est d'un temperamment flegmatique
, dont le sang doit avoir moins de
volatilité à cause de son grand âge ; et
ces graines ainsi attachées et incorporées
dans cette matiere glaireuse , aidées par
la douce chaleur de l'estomach , s'y sont
suffisamment dilatées pour y pousser de
légeres racines et y vegeter de la manie
re dont on les voit.
C'est
MAY. 1734
887
-
C'est même ce qui n'est pas nouveau ,
puisqu'on voit dans les Observations de
Physique , imprimées en 1717. qu'un
Soldat à Coppenhague , ayant mangé
quelques grains d'avoine , ces grains lui
demeurerent pendant plusieurs mois dans
l'estomach , où ils lui causerent differentes
douleurs , jusqu'à ce qu'ayant pris
un remede vomitif , cela lui fit jetter
ces grains , lesquels avoient pris racine
et avoient germé comme en pleine terre,
ayant même poussé des feuilles , quoique
sans grains. C'est par le même moyen
qu'on a vû souvent des personnes vomir de
petites Grenouilles et d'autres Insectes ;
ce qu'on attribuoit souvent à sortilege ;
mais cela ne venoit que pour avoir bû
de quelque eau dormante , où s'étoient
trouvez des germes de ces animaux , lesquels
attachez aux matieres glaireuses
de l'estomach , et y ayant reçû l'impres
sion de la douce chaleur qui s'y trouve
accompagnée des parties salines et ter
restres de ces viscositez , avoient été di
latez , nourris et formez comme s'ils
avoient été dans l'eau ou dans la terre.
Enfin la conséquence naturelle qu'on
"S
* Ce Fait est rapporté par M. Bayle , dans ses
Nouvelles de la République des Lettres , mois de
Septembre 1685. page 1005.
C iiij peut
888 MERCURE DE FRANCE
peut tirer de l'état où ces Champignons
se sont trouvez à la sortie de l'estomach
où ils s'étoient formez , c'est de conclure
qu'ayant été trouvez entiers avec leurs
têtes et leurs pédicules qui y étoient attachez
, aussi tendres et aussi délicats
qu'ils sont , c'est une preuve certaine que
la digestion des aliments ne se fait pas
par la trituration causée par le simple
mouvement de l'estomach ; puisqu'il auroit
été impossible que ces petites plantes
eussent pû se former , s'étendre et
croître jusqu'au point où elles sont , sans
se trouver à la fin rompuës par pieces et
brisées , à cause de leur contexture si tendre
et si délicate . Je suis , Monsieur , & c..
A la Ville d'Eu le 14.
Avril
1734
Fermer
Résumé : LETTRE de M. Capperon, ancien Doyen de S. Maxent, à M. D. L. R. sur des Champignons formez dans l'estomach d'une Femme.
M. Capperon, ancien doyen de Saint-Maxent, a relaté un cas exceptionnel impliquant une femme de soixante-dix ans au tempérament flegmatique. Cette femme a vomi plusieurs petits champignons après avoir consommé de l'eau-de-vie pour soulager des flatulences. Les matières vomies contenaient des champignons parfaitement formés, au nombre de quinze ou seize, variant en taille et en état de développement. M. Capperon a examiné ces champignons et les a conservés dans de l'eau-de-vie pour les montrer à des personnes intéressées. Il a émis l'hypothèse que les graines de champignons, présentes dans l'eau qu'elle buvait, avaient germé dans son estomac grâce à la liqueur mucilagineuse qui tapisse cet organe. Cette liqueur, plus abondante chez les personnes au sang visqueux, aurait permis aux graines de s'attacher et de se développer grâce à la chaleur de l'estomac. Ce phénomène n'est pas isolé, car des cas similaires ont été observés, comme celui d'un soldat ayant vomi des grains d'avoine germés dans son estomac. M. Capperon en a déduit que la digestion ne se fait pas uniquement par la trituration des aliments, car les champignons sont sortis intacts et entiers.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 888-890
RÉPONSE de M. de Claville, à l'ingenieux Poëme intitulé : Le Manteau Bleu du sieur Ferré, Brigadier des Fermes au Croisic. Par Mlle de Malcrais, et inseré dans le Mercure de Janvier dernier.
Début :
A Minerve Malcrais vient de donner le reste, [...]
Mots clefs :
Manteau bleu, M. Ferré, Malcrais, Loire
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texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE de M. de Claville, à l'ingenieux Poëme intitulé : Le Manteau Bleu du sieur Ferré, Brigadier des Fermes au Croisic. Par Mlle de Malcrais, et inseré dans le Mercure de Janvier dernier.
REPONSE de M. de Claville
Pingenieux Poëme intitulé : Le Manteau
Bleu du sienr Ferré , Brigadier des Fermes
au Croisic. Par Mlle de Malcrais ,
et inseré dans le Mercure de Janvier
dernier.
A Minerve Malcrais vient de donner le reste,
En comptant tous les fils du plus vieux des Manteaux
,
Blen
MAY. 889 1734.
Bleu pâle , bleu turquin , bleu changeant , blen
celeste >
Tout autre que Ferré moins sage , moins mos
deste ,
Pourroit bien faire le gros dos.
Une loüange délicate ,
Honore plus que l'écarlate ,
Et n'est jamais mise à l'Index.
Les couleurs sont pour ceux que la fortune berne,
Et de notre Sapho moderne ,
L'Encre teint mieux que le murex.
Rengorge-toi , Ferré, plus pimpant qu'un Chanoine
,
Ton Manteau te couvre d'honneur ,
Et jusqu'au moindre fil , tout prouve en ta faveur
Que l'habit ne fait pas le Moine .
Un fripon seroit mieux vétu ;
Le drap d'or est souvent l'enveloppe du vice ;
Et ta miserable Pélisse ,
Fait l'éloge de ta Vertu.
Sois content du peu qu'on t'accorde ;
Près d'un Fleuve qui se déborde , *
Pense aux dangers de ceux qui regorgent de bien
*Le Croisic est auprès de l'embouchure de la Loire.
C v Que
890 MERCURE DE FRANCE
Que ton Manteau ne vaille rien ,
Mais que ta probité ne montre pas la corde.
Nous faisons tous des voeux pour ton avance
ment ; .9
Réjouis toi du moins de cet amusement.
Je voudrois pouvoir davantage ;
N'est- ce rien après tout de gagner le suffrage
De la Bretonne et du Normand ?
De la Sirenne de la Loire
Un Triton de la Seine admire tous les Chants
Qu'ils sont harmonieux , naturels et touchants
Sa Lire est d'or , et la mienne est d'yvoire.-
Enfin de ce Manteau bel et bien baloté ,
Qui pique des Sçavans la curiosité ,
Voici d'après Malcrais ce que dira l'Histoire !
Si des Vers ont flétri sa gloire ,
S'ils l'ont haché menu comme chair à pâté ,
D'autres Vers l'ont ressuscité,
Et vont l'éterniser au Temple de Memoire.
Pingenieux Poëme intitulé : Le Manteau
Bleu du sienr Ferré , Brigadier des Fermes
au Croisic. Par Mlle de Malcrais ,
et inseré dans le Mercure de Janvier
dernier.
A Minerve Malcrais vient de donner le reste,
En comptant tous les fils du plus vieux des Manteaux
,
Blen
MAY. 889 1734.
Bleu pâle , bleu turquin , bleu changeant , blen
celeste >
Tout autre que Ferré moins sage , moins mos
deste ,
Pourroit bien faire le gros dos.
Une loüange délicate ,
Honore plus que l'écarlate ,
Et n'est jamais mise à l'Index.
Les couleurs sont pour ceux que la fortune berne,
Et de notre Sapho moderne ,
L'Encre teint mieux que le murex.
Rengorge-toi , Ferré, plus pimpant qu'un Chanoine
,
Ton Manteau te couvre d'honneur ,
Et jusqu'au moindre fil , tout prouve en ta faveur
Que l'habit ne fait pas le Moine .
Un fripon seroit mieux vétu ;
Le drap d'or est souvent l'enveloppe du vice ;
Et ta miserable Pélisse ,
Fait l'éloge de ta Vertu.
Sois content du peu qu'on t'accorde ;
Près d'un Fleuve qui se déborde , *
Pense aux dangers de ceux qui regorgent de bien
*Le Croisic est auprès de l'embouchure de la Loire.
C v Que
890 MERCURE DE FRANCE
Que ton Manteau ne vaille rien ,
Mais que ta probité ne montre pas la corde.
Nous faisons tous des voeux pour ton avance
ment ; .9
Réjouis toi du moins de cet amusement.
Je voudrois pouvoir davantage ;
N'est- ce rien après tout de gagner le suffrage
De la Bretonne et du Normand ?
De la Sirenne de la Loire
Un Triton de la Seine admire tous les Chants
Qu'ils sont harmonieux , naturels et touchants
Sa Lire est d'or , et la mienne est d'yvoire.-
Enfin de ce Manteau bel et bien baloté ,
Qui pique des Sçavans la curiosité ,
Voici d'après Malcrais ce que dira l'Histoire !
Si des Vers ont flétri sa gloire ,
S'ils l'ont haché menu comme chair à pâté ,
D'autres Vers l'ont ressuscité,
Et vont l'éterniser au Temple de Memoire.
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Résumé : RÉPONSE de M. de Claville, à l'ingenieux Poëme intitulé : Le Manteau Bleu du sieur Ferré, Brigadier des Fermes au Croisic. Par Mlle de Malcrais, et inseré dans le Mercure de Janvier dernier.
M. de Claville répond au poème 'Le Manteau' de Mlle de Malcrais, publié dans le Mercure de janvier 1734 et dédié à M. Ferré, brigadier des Fermes au Croisic. Claville apprécie la délicatesse de la louange, soulignant que les couleurs modestes du manteau de Ferré l'honorent davantage que des teintes plus prestigieuses. Il compare ce manteau à une preuve de vertu, contrastant avec les habits somptueux qui peuvent dissimuler le vice. Claville encourage Ferré à se contenter de ses possessions et à éviter les dangers de l'excès. Il admire les qualités littéraires du poème, notant que les chants de Mlle de Malcrais sont harmonieux et touchants. Claville conclut en affirmant que, malgré les critiques, le poème contribuera à immortaliser la mémoire de Ferré.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 891-901
LETTRE du R. P. Dom Augustin Calmet, Abbé de Senones, au sujet de la Prophétie attribuée au Roy David, &c.
Début :
MONSIEUR, J'ai reçu avec reconnoissance les deux volumes de votre [...]
Mots clefs :
David, Prophétie, Exemplaires grecs, Septante, Version, Grecs, Texte, Origène, Hébreu, Hébreux, Anciens, Juifs, Termes, Autorité, Justin
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE du R. P. Dom Augustin Calmet, Abbé de Senones, au sujet de la Prophétie attribuée au Roy David, &c.
LETTRE du R. P. Dom Augustin
Calmet , Abbé de Senones , au sujet de
la Prophétie attribuée au Roy David, & c.
MoxONSIEUR ,
J'ai reçu avec reconnoissance les deux
volumes de votre Journal , dans lesquels
sont deux Lettres , l'une de vous , Monsieur
, et l'autre du R. P. Tournemine ,
sur ces paroles du Pseaume XCV v. 19.
Dicite in gentibus, quia Dominus regnavis
&c. Il est question de sçavoir si ces mots:
regnavit à ligno , que l'on explique du
Regne de J. C. par sa Croix , sçavoir
dis-je , si ces mots à ligno étoient originairement
au moins dans quelques.
Exemplaires du texte Hebreu ,si les Septante
interprêtes les y ont lûs , et les ont
inserez dans leur version ,, si c'est delà
qu'ils sont passez dans les anciennes Editions
latines , où la plûpart des anciens
Peres Latins , jusqu'au neuvième siècle
les ont lûs , ou si c'est une addition faite
après coup par quelques Chrétiens dans
certains Exemplaires grecs , d'où elle seroit
passée dans les Bibles latines , ou au
•
C vj
con-
ا ه س
892 MERCURE DE FRANCE
contraire , si ces mots ayant d'abord été
mis dans quelques Exemplaires latins
seroient passez dans quelques Exemplaires
grecs des Septante ; vous m'avez fait
l'honneur , Monsieur , de me citer dans
la Lettre que vous avez écrite sur ce sujet
, imprimée dans le Mercure d'Août
du mois dernier , et vous souhaitez que
je vous dise mon sentiment sur la Réponse
du R P. Tournemine , inserée dans
votre mois de Septembre suivant.
J'ai reçu tant de marques de bienveillance
du R. P. Tournemine pendant mon
séjour à Paris , il a annoncé mes Ouvrages
dans ses Journaux d'une maniere si
honnête et si polie , que je ne puis me
résoudre à entrer avec lui dans aucune
contestation . Si donc vous jugez à propos
de faire quelque usage de ce que j'ai
l'honneur de vous écrire , je vous prie de
le lui communiquer auparavant et de
lui déclarer que je le rends absolument
le maître de tout. Avec cette condition ,.
je vais vous exposer ce que je pense sur
le sujet en question.
Le R. P. T. dit qu'il est certain que le
Texte des Septante sur lequel l'ancienne
Version italique a été faite , version qui est
sûrement du premier siècle de l'Eglise , consenoit
de que l'Auteur de la version a traduit
MAY. 1734.
893
duit , à ligno ; pour le prouver il dit
1° . Que ces termes à ligno , se lisoient
dans l'ancienne version italique , 2 °. Que
S. Justin les lisoit dans ses Exemplaires
des LXX. 3 °. Que Cassiodore
soutient
la même leçon par l'autorité des L X X.
4°. Que S. Ephrem les lisoit aussi dans
la version Siriaque , faite dès les premiers
siécles de l'Eglise sur celle des LXX.
5°. Qu'Origene
ayant un Texte Hebreu
pareil à celui que nous avons aujourd'hui
,
crut qu'il falloit corriger le Texte des
LXX. sur ce Texte , et sur les autres
versions grecques ; et que S. Jerôme embrassa
le sentiment d'Origene , et eût de
la peine à le faire passer dans les Eglises
d'Occident. Examinons toutes ces preuves
.
1º. Est- il bien certain que l'ancienne
version des Septante contenoit ces mots ,
à ligno ? quelle raison en apporte-t'on !
on ne connoît ni Edition ni Manuscrit
qui les porte , le Manuscrit grec Alexandrin
, imprimé à Oxfort en 1707. qui
passe pour un des plus anciens qui soient
dans le monde,et où l'on voit les Obéles
et les Asterisques d'Origene, ne le marque
point , quoique dans le même verset dont
nous parlons , on ait marqué d'un obéle
la particule quia ri , qui n'est pas
dans
l'he
894 MERCURE DE FRANCE
l'hebreu. On ne le voit point non plus
dans ceux de Rome , qu'a suivi Nobilius
, ni dans ceux d'Alde , ni dans ceux
sur lesquels ont travaillé le P. Morin et
M. Bos , et dont ils raportent les Variantesdans
lesEditions qu'ils ont donnéesde
la version desSeptante.
Seroit- il possible que ces termes si favorables
au Christianisme , eussent été
effacez si universellement de tous les
Exemplairesqu'il n'en restât aucun vestige
, ni dans les Manuscrits les plus anciens
, ni dans les Peres ? Qu'Origene
Saint Clement d'Alexandrie ,Saint Irenée,
Eusebe de Cesarée , Saint Athanase , Saint
Chrysostome , les Chaînes grecques sur
les P'seaumes, n'eussent pas fait mention
de cette varieté ? On n'en voit rien dans
la nouvelle Edition d'Origene , dans laquelle
on a ramassé avec soin tout ce
qu'on a trouvé de lui épars en differens
endroits.
Les anciens Traducteurs grecs, Aquilay
Symmaque , et Theodotion , ne l'ont pas
fu , non plus que le Paraphraste Chaldéen,
ni l'ancienne Version Siriaque faite
sur l'hebreu ; ni les Apôtres , ni les hom
mes Apostoliques , n'ont point cité ce
passage avec l'addition , à ligno , quoique
si propre à convaincre les Juifs et les
Payens
MAY. 1734 855
Payens . Enfin les Eglises d'Orient ne
l'ont jamais lû dans leur Office ; d'où je
crois avoir lieu de conclure qu'il n'étoit
originairement, ni dans le Texte hebreu,
ni dans laVersion des Septante.
" 2º. J'avoue que ces termes à ligno
se lisoient dans l'ancienne Version italique
, que plusieurs Peres Latins les ont
lûs dans leurs Exemplaites , et que malgré
la réforme de Saint Jerôme , ont les
a chantés dans lesEglises latines pendant
près de neuf siécles , et encore les chantet'on
aujourd'hui dans l'Hymne Vexilla
Regis mais cela ne me persuade pas que,
ni l'hebreu , ni le grec des Septante ait
porté à ligno : je soupçonnerois bien plutôt
que quelque Chrétien du premier
siécle par une fraude pieuse , auroit inseré
ces termes dans quelque Pseautier Grec,
ou dans le Latin ; comme on a composé
dans le même tems le quatriéme Livre
d'Esdras , le Testament des douze Patriarches
, l'Evangile de l'Enfance de J. C.
et peut-être le fameux Passage de Joseph,
où il est parlé du Sauveur , et tant d'autres
Monuments anciens dont la supposition
est aujourd'hui reconnuë et avouée.
3 °. On soutient que Saint Justin le
Martyr lisoit l'addition à ligno , dans ses
Exemplaires des Septante. Če Saint accusoir
896 MERCURE DE FRANCE
soit hautement les Juifs de l'avoir retranché
de leurs Exemplaires hebreux , en
haine de J. C. et des Chrétiens. Tryphon
son Interlocuteur , qui étoit Juif , soutient
ce retranchement incroyable , sans
s'expliquer davantage ; ni lui ni Saint
Justin n'avoient pas en main les Exemplaires
ni grecs ni hebreux , pour les confronter.
Or dans ces sortes de disputes il faut
avoir piéces en main ; l'un avance , l'autre
nie , à qui croire ? Saint Justin ne
sçavoit pas l'hebreu , ni aparemment
Tryphon , ils n'étoient point à portée
des Bibliotéques , disputants à la campagne
et sur le bord de la Mer ; or il auroit
fallu pour décider la question consulter
plusieurs Exemplaires en l'une et en l'autre
Langu , et les comparer l'un à l'autre.
Saint Justin avance hardiment que les
Septante avoient lû à ligno : comme la
chose importoit peu à Tryphon , il n'en
demande point de preuves , mais il nie
que les Juifs ayent retranché ces termes
de leur Texte , sans en donner non plus
aucune raison ; d'ailleurs il paroît que
Saint Justin n'étoit nullement Critique ,
et si l'on exigeoit de lui des preuves de
tout ce qu'il avance principalement contre
les Juifs , il lui seroit certainement
malMAY
. 1734. 897
malaisé d'en donner ; il est tout aussi
croyable que les termes à ligno soient
passez du latin dans quelques Exemplaires
grecs , que non pas qu'ils soient passez
du Grec dans le Latin.
4°. Cassiodore sur le Pseaume XCV.
V. 10. lit Dominus regnavit : à ligno , et il
ajoûte à ligno : alii quidem non habent .
interpretes , sed nobis sufficit quod L X X.
Interpretum autoritate firmatum est : voilà
qui est précis et décisif : mais qui croira .
sur l'autorité de Cassiodore , qu'au sixième
siécle où il vivoit , le Texte des Septante
eut communément porté à ligno , pendant
que tous les Peres Grecs qui avoient.
écrit avant lui , ne lisoient point cette
addition , et qu'aucun de nos Exemplaires
grecs d'aujourd'hui , qui sont copiez
sur ceux de son temps , ne le porte.
5°. On dit que Saint Ephrem lisoit :
à ligno, dans les Exemplaires Syriaques de
son Eglise , puisqu'il le cite ainsi dans
son Sermon de la Croix. Il est vrai que
ce Saint lit : Dominus regnavit à ligno :
dans l'Edition latine du Sermon qu'on
cite ; mais on ne lit pas à ligno dans
l'Edition grecque d'Angleterre . De plus
ce Sermon de la Croix ne se trouve point
parmi ceux que M. Assemani a vûs en
Sy98
MERCURE DE FRANCE
Syriaque et en Arabe , et qu'il cite dans
le premier Tomè de sa Bibliothéque
Orientale , comme indubitablement de
Saint Ephrem .
On dit de plus que la Version Syriaque
est faite sur le Texte des Septante , qu'elle
est aussi ancienne que l'Eglise , et que les
Versions postérieures n'ont pas la même autorité.
Il est vrai qu'il y a uneVersion Syriaque
faite sur le Grec des Septante , mais elle
est moderne ; Masius en cite une faite
l'an 615. de J. C. je ne sçai si elle est
differente de celle d'un nommé Mar-
Abba mais tout cela est bien éloigné
des premiers siècles de l'Eglise. Cette
Traduction , faité sur le Grec , n'a ja̸ż
mais été imprimée , et est bien posté→
rieure et de moindre autorité que l'an
cienne Version Syriaque faite sur l'hebreu.
dès le premier siécle de l'Eglise , et imprimée
dans les Bibles Poliglottes de
M.le Jay à Paris en 1545. et ensuite réimprimées
à Londres par Walton avec
l'addition de quelques nouveaux Livres
de l'Ecriture, qui n'avoient pas paru dans
l'Edition de Paris ; je puis assurer que
l'addition à ligno n'est dans aucun Pseautier
Syriaque de ceux qui ont paru jusqu'ici
, je ne puis dire la même chose de
,
ceux
MA Y. 1734. 895
teux qui n'ont pas paru , et qui ne sont
pas venus à nôtre connoissance. Toujours
est- il vrai que Saint Ephrem n'a pas να
ces derniers , puisqu'ils sont plus récents
que lui : ainsi , soit qu'ils portent à lignoz
ou non, on nen peut rien inferer ni pour
ni contre ce Saint,de sorte que sans beaucoup
hazarder ; on peut avancer que ces
Versions ne portent point à ligno : puisqu'au
temps où elles ont été faites , ces
expressions ne se lisoient plus dans les
Septante.
6º. Enfin , Monsieur , puisque la derniere
réfléxion du R. P. Tournemine est
une pure conjecture empruntée de Sala
meron et d'Agellius , qui n'est fondée
sur aucun fait historique , ni sur aucun
témoignage des Anciens , ni sur aucun
Texte , ni sur aucun Manuscrit ; on peut
la laisser dans son être de conjecture ,
sans se donner la peine de la refuter ; on
peut
la nier tout net comme chose non
prouvée et improbable.
En effet quelle aparence que du temps
d'Origene il y eût des Exemplaires
hebreux
, quoiqu'en assez petit nombre ,
qui portassent Mihez yyo à ligno ; pendant
que le plus grand nombre lisoit aph
utique comme portent aujourd'hui
tous nos Exemplaires , et qu'on ne trou-
VO
800195
Joo MERCURE DE FRANCE
>
ve ni dans Origene , ni dans S. Jerôme
aucun vestige de cette ancienne leçon
pas même pour la rejetter ou pour la refuter.
Quelle aparence que la seule autorité
d'Origene ait pû d'un trait de plume
faire disparoître à ligno: de tous les Exemplaires
Grecs et Hebreux où il étoit ,
pendant que S. Jerôme apuyé de toute
l'autorité d'Origene et de celle de tous
les Manuscrits Grecs et Hebreux , d'où
l'on avoit retranché ces termes , n'a pû
réussir à les faire ôter des Textes latins
où ils étoient demeurez ?
Je ne m'étends pas ici à relever l'im
possibilité qu'il y a à corriger les anciens
Exemplaires grecs ni hebreux , et les corriger
de telle maniere que depuis tant de
siècles il ne paroisse aucun vestige de
l'ancienne leçon , ni dans les Manuscrits
ni dans les imprimez. Que les Juifs ayent
eû assez de malice pour l'ôter de tous
leurs livres ; cela est déja très difficile , les
Juifs convertis au Christianisme auroient
crié à la falsification . Mais que les Grecs
l'ayent voulu retrancher des leurs , cette
leçon se trouvant , dit- on , autorisée par
quelques Exemplaires hebreux , cela paroît
bien plus impossible , et plus incompréhensible
, le Christianisme ayant autant
d'interêt à la conserver pour convaincre
les
MAY.
901 1734:
les Juifs d'incredulité et de falsifica- ›
tion .
Voilà , Monsieur , quelles sont mes
réfléxions sur cette matiere . Je suis tou
jours & c.
A Senones le 2 Janvier 1734;
Calmet , Abbé de Senones , au sujet de
la Prophétie attribuée au Roy David, & c.
MoxONSIEUR ,
J'ai reçu avec reconnoissance les deux
volumes de votre Journal , dans lesquels
sont deux Lettres , l'une de vous , Monsieur
, et l'autre du R. P. Tournemine ,
sur ces paroles du Pseaume XCV v. 19.
Dicite in gentibus, quia Dominus regnavis
&c. Il est question de sçavoir si ces mots:
regnavit à ligno , que l'on explique du
Regne de J. C. par sa Croix , sçavoir
dis-je , si ces mots à ligno étoient originairement
au moins dans quelques.
Exemplaires du texte Hebreu ,si les Septante
interprêtes les y ont lûs , et les ont
inserez dans leur version ,, si c'est delà
qu'ils sont passez dans les anciennes Editions
latines , où la plûpart des anciens
Peres Latins , jusqu'au neuvième siècle
les ont lûs , ou si c'est une addition faite
après coup par quelques Chrétiens dans
certains Exemplaires grecs , d'où elle seroit
passée dans les Bibles latines , ou au
•
C vj
con-
ا ه س
892 MERCURE DE FRANCE
contraire , si ces mots ayant d'abord été
mis dans quelques Exemplaires latins
seroient passez dans quelques Exemplaires
grecs des Septante ; vous m'avez fait
l'honneur , Monsieur , de me citer dans
la Lettre que vous avez écrite sur ce sujet
, imprimée dans le Mercure d'Août
du mois dernier , et vous souhaitez que
je vous dise mon sentiment sur la Réponse
du R P. Tournemine , inserée dans
votre mois de Septembre suivant.
J'ai reçu tant de marques de bienveillance
du R. P. Tournemine pendant mon
séjour à Paris , il a annoncé mes Ouvrages
dans ses Journaux d'une maniere si
honnête et si polie , que je ne puis me
résoudre à entrer avec lui dans aucune
contestation . Si donc vous jugez à propos
de faire quelque usage de ce que j'ai
l'honneur de vous écrire , je vous prie de
le lui communiquer auparavant et de
lui déclarer que je le rends absolument
le maître de tout. Avec cette condition ,.
je vais vous exposer ce que je pense sur
le sujet en question.
Le R. P. T. dit qu'il est certain que le
Texte des Septante sur lequel l'ancienne
Version italique a été faite , version qui est
sûrement du premier siècle de l'Eglise , consenoit
de que l'Auteur de la version a traduit
MAY. 1734.
893
duit , à ligno ; pour le prouver il dit
1° . Que ces termes à ligno , se lisoient
dans l'ancienne version italique , 2 °. Que
S. Justin les lisoit dans ses Exemplaires
des LXX. 3 °. Que Cassiodore
soutient
la même leçon par l'autorité des L X X.
4°. Que S. Ephrem les lisoit aussi dans
la version Siriaque , faite dès les premiers
siécles de l'Eglise sur celle des LXX.
5°. Qu'Origene
ayant un Texte Hebreu
pareil à celui que nous avons aujourd'hui
,
crut qu'il falloit corriger le Texte des
LXX. sur ce Texte , et sur les autres
versions grecques ; et que S. Jerôme embrassa
le sentiment d'Origene , et eût de
la peine à le faire passer dans les Eglises
d'Occident. Examinons toutes ces preuves
.
1º. Est- il bien certain que l'ancienne
version des Septante contenoit ces mots ,
à ligno ? quelle raison en apporte-t'on !
on ne connoît ni Edition ni Manuscrit
qui les porte , le Manuscrit grec Alexandrin
, imprimé à Oxfort en 1707. qui
passe pour un des plus anciens qui soient
dans le monde,et où l'on voit les Obéles
et les Asterisques d'Origene, ne le marque
point , quoique dans le même verset dont
nous parlons , on ait marqué d'un obéle
la particule quia ri , qui n'est pas
dans
l'he
894 MERCURE DE FRANCE
l'hebreu. On ne le voit point non plus
dans ceux de Rome , qu'a suivi Nobilius
, ni dans ceux d'Alde , ni dans ceux
sur lesquels ont travaillé le P. Morin et
M. Bos , et dont ils raportent les Variantesdans
lesEditions qu'ils ont donnéesde
la version desSeptante.
Seroit- il possible que ces termes si favorables
au Christianisme , eussent été
effacez si universellement de tous les
Exemplairesqu'il n'en restât aucun vestige
, ni dans les Manuscrits les plus anciens
, ni dans les Peres ? Qu'Origene
Saint Clement d'Alexandrie ,Saint Irenée,
Eusebe de Cesarée , Saint Athanase , Saint
Chrysostome , les Chaînes grecques sur
les P'seaumes, n'eussent pas fait mention
de cette varieté ? On n'en voit rien dans
la nouvelle Edition d'Origene , dans laquelle
on a ramassé avec soin tout ce
qu'on a trouvé de lui épars en differens
endroits.
Les anciens Traducteurs grecs, Aquilay
Symmaque , et Theodotion , ne l'ont pas
fu , non plus que le Paraphraste Chaldéen,
ni l'ancienne Version Siriaque faite
sur l'hebreu ; ni les Apôtres , ni les hom
mes Apostoliques , n'ont point cité ce
passage avec l'addition , à ligno , quoique
si propre à convaincre les Juifs et les
Payens
MAY. 1734 855
Payens . Enfin les Eglises d'Orient ne
l'ont jamais lû dans leur Office ; d'où je
crois avoir lieu de conclure qu'il n'étoit
originairement, ni dans le Texte hebreu,
ni dans laVersion des Septante.
" 2º. J'avoue que ces termes à ligno
se lisoient dans l'ancienne Version italique
, que plusieurs Peres Latins les ont
lûs dans leurs Exemplaites , et que malgré
la réforme de Saint Jerôme , ont les
a chantés dans lesEglises latines pendant
près de neuf siécles , et encore les chantet'on
aujourd'hui dans l'Hymne Vexilla
Regis mais cela ne me persuade pas que,
ni l'hebreu , ni le grec des Septante ait
porté à ligno : je soupçonnerois bien plutôt
que quelque Chrétien du premier
siécle par une fraude pieuse , auroit inseré
ces termes dans quelque Pseautier Grec,
ou dans le Latin ; comme on a composé
dans le même tems le quatriéme Livre
d'Esdras , le Testament des douze Patriarches
, l'Evangile de l'Enfance de J. C.
et peut-être le fameux Passage de Joseph,
où il est parlé du Sauveur , et tant d'autres
Monuments anciens dont la supposition
est aujourd'hui reconnuë et avouée.
3 °. On soutient que Saint Justin le
Martyr lisoit l'addition à ligno , dans ses
Exemplaires des Septante. Če Saint accusoir
896 MERCURE DE FRANCE
soit hautement les Juifs de l'avoir retranché
de leurs Exemplaires hebreux , en
haine de J. C. et des Chrétiens. Tryphon
son Interlocuteur , qui étoit Juif , soutient
ce retranchement incroyable , sans
s'expliquer davantage ; ni lui ni Saint
Justin n'avoient pas en main les Exemplaires
ni grecs ni hebreux , pour les confronter.
Or dans ces sortes de disputes il faut
avoir piéces en main ; l'un avance , l'autre
nie , à qui croire ? Saint Justin ne
sçavoit pas l'hebreu , ni aparemment
Tryphon , ils n'étoient point à portée
des Bibliotéques , disputants à la campagne
et sur le bord de la Mer ; or il auroit
fallu pour décider la question consulter
plusieurs Exemplaires en l'une et en l'autre
Langu , et les comparer l'un à l'autre.
Saint Justin avance hardiment que les
Septante avoient lû à ligno : comme la
chose importoit peu à Tryphon , il n'en
demande point de preuves , mais il nie
que les Juifs ayent retranché ces termes
de leur Texte , sans en donner non plus
aucune raison ; d'ailleurs il paroît que
Saint Justin n'étoit nullement Critique ,
et si l'on exigeoit de lui des preuves de
tout ce qu'il avance principalement contre
les Juifs , il lui seroit certainement
malMAY
. 1734. 897
malaisé d'en donner ; il est tout aussi
croyable que les termes à ligno soient
passez du latin dans quelques Exemplaires
grecs , que non pas qu'ils soient passez
du Grec dans le Latin.
4°. Cassiodore sur le Pseaume XCV.
V. 10. lit Dominus regnavit : à ligno , et il
ajoûte à ligno : alii quidem non habent .
interpretes , sed nobis sufficit quod L X X.
Interpretum autoritate firmatum est : voilà
qui est précis et décisif : mais qui croira .
sur l'autorité de Cassiodore , qu'au sixième
siécle où il vivoit , le Texte des Septante
eut communément porté à ligno , pendant
que tous les Peres Grecs qui avoient.
écrit avant lui , ne lisoient point cette
addition , et qu'aucun de nos Exemplaires
grecs d'aujourd'hui , qui sont copiez
sur ceux de son temps , ne le porte.
5°. On dit que Saint Ephrem lisoit :
à ligno, dans les Exemplaires Syriaques de
son Eglise , puisqu'il le cite ainsi dans
son Sermon de la Croix. Il est vrai que
ce Saint lit : Dominus regnavit à ligno :
dans l'Edition latine du Sermon qu'on
cite ; mais on ne lit pas à ligno dans
l'Edition grecque d'Angleterre . De plus
ce Sermon de la Croix ne se trouve point
parmi ceux que M. Assemani a vûs en
Sy98
MERCURE DE FRANCE
Syriaque et en Arabe , et qu'il cite dans
le premier Tomè de sa Bibliothéque
Orientale , comme indubitablement de
Saint Ephrem .
On dit de plus que la Version Syriaque
est faite sur le Texte des Septante , qu'elle
est aussi ancienne que l'Eglise , et que les
Versions postérieures n'ont pas la même autorité.
Il est vrai qu'il y a uneVersion Syriaque
faite sur le Grec des Septante , mais elle
est moderne ; Masius en cite une faite
l'an 615. de J. C. je ne sçai si elle est
differente de celle d'un nommé Mar-
Abba mais tout cela est bien éloigné
des premiers siècles de l'Eglise. Cette
Traduction , faité sur le Grec , n'a ja̸ż
mais été imprimée , et est bien posté→
rieure et de moindre autorité que l'an
cienne Version Syriaque faite sur l'hebreu.
dès le premier siécle de l'Eglise , et imprimée
dans les Bibles Poliglottes de
M.le Jay à Paris en 1545. et ensuite réimprimées
à Londres par Walton avec
l'addition de quelques nouveaux Livres
de l'Ecriture, qui n'avoient pas paru dans
l'Edition de Paris ; je puis assurer que
l'addition à ligno n'est dans aucun Pseautier
Syriaque de ceux qui ont paru jusqu'ici
, je ne puis dire la même chose de
,
ceux
MA Y. 1734. 895
teux qui n'ont pas paru , et qui ne sont
pas venus à nôtre connoissance. Toujours
est- il vrai que Saint Ephrem n'a pas να
ces derniers , puisqu'ils sont plus récents
que lui : ainsi , soit qu'ils portent à lignoz
ou non, on nen peut rien inferer ni pour
ni contre ce Saint,de sorte que sans beaucoup
hazarder ; on peut avancer que ces
Versions ne portent point à ligno : puisqu'au
temps où elles ont été faites , ces
expressions ne se lisoient plus dans les
Septante.
6º. Enfin , Monsieur , puisque la derniere
réfléxion du R. P. Tournemine est
une pure conjecture empruntée de Sala
meron et d'Agellius , qui n'est fondée
sur aucun fait historique , ni sur aucun
témoignage des Anciens , ni sur aucun
Texte , ni sur aucun Manuscrit ; on peut
la laisser dans son être de conjecture ,
sans se donner la peine de la refuter ; on
peut
la nier tout net comme chose non
prouvée et improbable.
En effet quelle aparence que du temps
d'Origene il y eût des Exemplaires
hebreux
, quoiqu'en assez petit nombre ,
qui portassent Mihez yyo à ligno ; pendant
que le plus grand nombre lisoit aph
utique comme portent aujourd'hui
tous nos Exemplaires , et qu'on ne trou-
VO
800195
Joo MERCURE DE FRANCE
>
ve ni dans Origene , ni dans S. Jerôme
aucun vestige de cette ancienne leçon
pas même pour la rejetter ou pour la refuter.
Quelle aparence que la seule autorité
d'Origene ait pû d'un trait de plume
faire disparoître à ligno: de tous les Exemplaires
Grecs et Hebreux où il étoit ,
pendant que S. Jerôme apuyé de toute
l'autorité d'Origene et de celle de tous
les Manuscrits Grecs et Hebreux , d'où
l'on avoit retranché ces termes , n'a pû
réussir à les faire ôter des Textes latins
où ils étoient demeurez ?
Je ne m'étends pas ici à relever l'im
possibilité qu'il y a à corriger les anciens
Exemplaires grecs ni hebreux , et les corriger
de telle maniere que depuis tant de
siècles il ne paroisse aucun vestige de
l'ancienne leçon , ni dans les Manuscrits
ni dans les imprimez. Que les Juifs ayent
eû assez de malice pour l'ôter de tous
leurs livres ; cela est déja très difficile , les
Juifs convertis au Christianisme auroient
crié à la falsification . Mais que les Grecs
l'ayent voulu retrancher des leurs , cette
leçon se trouvant , dit- on , autorisée par
quelques Exemplaires hebreux , cela paroît
bien plus impossible , et plus incompréhensible
, le Christianisme ayant autant
d'interêt à la conserver pour convaincre
les
MAY.
901 1734:
les Juifs d'incredulité et de falsifica- ›
tion .
Voilà , Monsieur , quelles sont mes
réfléxions sur cette matiere . Je suis tou
jours & c.
A Senones le 2 Janvier 1734;
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Résumé : LETTRE du R. P. Dom Augustin Calmet, Abbé de Senones, au sujet de la Prophétie attribuée au Roy David, &c.
Le R. P. Dom Augustin Calmet, abbé de Senones, adresse une lettre à un destinataire non nommé pour discuter de la prophétie attribuée au roi David dans le Psaume XCV, verset 19. La lettre répond à une question soulevée dans le journal du destinataire concernant les mots 'regnavit à ligno' et leur origine dans les textes hébreux et grecs des Septante. Calmet examine les arguments du R. P. Tournemine, qui affirme que ces mots étaient présents dans les anciens textes des Septante et dans diverses versions anciennes. Calmet conteste cette affirmation en soulignant l'absence de ces mots dans les manuscrits anciens et les versions des Septante. Il mentionne que ni les manuscrits grecs les plus anciens, ni les Pères de l'Église n'ont fait mention de cette variante. Il suggère que ces mots ont pu être ajoutés par des chrétiens dans des exemplaires grecs ou latins postérieurs. Calmet examine également les témoignages de Saint Justin, Cassiodore, et Saint Éphrem, concluant que leurs références à 'regnavit à ligno' ne sont pas fiables ou sont basées sur des versions tardives. Il conclut que les mots 'regnavit à ligno' n'étaient pas originairement présents dans les textes hébreux ou grecs des Septante, mais ont probablement été ajoutés plus tard par des chrétiens.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 901-903
STANCES.
Début :
Qui peut donc m'inspirer cette horreur pour le Crime ? [...]
Mots clefs :
Crime, Grâce, Bonté, Dieu, Yeux
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texteReconnaissance textuelle : STANCES.
STANCES.
Ui peut donc m'inspirer cette horreu
pour le Crime
Que sens- je ? quels remords viennent m'épou
vanter ?
Et qui m'arrête ainsi sur le bord de l'abîme
Où j'allois me précipiter ?
C'est toi même , ô mon Dieu ! c'est l'effort de
ta grace ,
Qui vient de mettre un terme à mon impieté.
Tout pêcheur que je suis , ta justice fait place
Aux sentimens de ta bonté .
Quand ton juste couroux m'auroit pris pour
victime ,
Je n'aurois point eu lieu de me plaindre de toi ,
Mais plus en m'égarant j'allois de crime em
crime ,'
Et plas tu t'aprochois de moi.
Non, tu ne conçois point une haine implacable
A perdre tes enfans tu ne peux consentir,
Tu
02 MERCURE DE FRANCE
Tu nous aimes toujours, et la mort du coupa
ble ,
Te plaît moins que son repentir.
O Divine tendresse ! ô bonté paternelle !
Qui pouroit résister à tes empressemens !
Je te céde et mon ame à ta grace fidelle
Gémit sur ses égaremens.
Malheureux que j'étois, le monde avec ses char
mes ,
Eblouissoit mes yeux et possedoit mon coeur ;
Et toutefois sans cesse inquiet, plein d'allarmes
Je détestois ce fier vainqueur.
Combien de fois, hélas ! dans ma douleur amére,
Tentai-je vainement de m'élancer vers toi !
D'invisibles liens m'attachoient à la terre ,
Et m'y retenoient malgré moi.
Envain j'en repoussois la dangereuse amorce ;
Je secouois envain un joug si rigoureux ,
Mes efforts redoublez en redoubloient la force ;
Et me rendoient plus malheureux.
Tu parois,ô mon Dieu ! ta grace triomphante
Me dégage du monde et brise mes liens ;
Je ne suis plus qu'à toi , tout ce qui me con
1
tente ,
Est d'être admis parmi les tiens .
D'aujourd'hui seulement je commence de vivre ,
D'aujourd'hui seulement je suis vrayement Chré
tien
Je
MAY
1734 ༡༠༡
Je l'étois , mais hélas ? j'ignorois qu'à
Consiste le souverain bien.
suivre
Mes yeux ne s'ouvrent plus à d'inutiles larmes
Ta bonté pour jamais en à tari le cours ,
Que ta grace a d'attraits ! que ton joug a de
charmes
Heureux qui le porte toujours.
F. J. Procureur au Parlement.
Ui peut donc m'inspirer cette horreu
pour le Crime
Que sens- je ? quels remords viennent m'épou
vanter ?
Et qui m'arrête ainsi sur le bord de l'abîme
Où j'allois me précipiter ?
C'est toi même , ô mon Dieu ! c'est l'effort de
ta grace ,
Qui vient de mettre un terme à mon impieté.
Tout pêcheur que je suis , ta justice fait place
Aux sentimens de ta bonté .
Quand ton juste couroux m'auroit pris pour
victime ,
Je n'aurois point eu lieu de me plaindre de toi ,
Mais plus en m'égarant j'allois de crime em
crime ,'
Et plas tu t'aprochois de moi.
Non, tu ne conçois point une haine implacable
A perdre tes enfans tu ne peux consentir,
Tu
02 MERCURE DE FRANCE
Tu nous aimes toujours, et la mort du coupa
ble ,
Te plaît moins que son repentir.
O Divine tendresse ! ô bonté paternelle !
Qui pouroit résister à tes empressemens !
Je te céde et mon ame à ta grace fidelle
Gémit sur ses égaremens.
Malheureux que j'étois, le monde avec ses char
mes ,
Eblouissoit mes yeux et possedoit mon coeur ;
Et toutefois sans cesse inquiet, plein d'allarmes
Je détestois ce fier vainqueur.
Combien de fois, hélas ! dans ma douleur amére,
Tentai-je vainement de m'élancer vers toi !
D'invisibles liens m'attachoient à la terre ,
Et m'y retenoient malgré moi.
Envain j'en repoussois la dangereuse amorce ;
Je secouois envain un joug si rigoureux ,
Mes efforts redoublez en redoubloient la force ;
Et me rendoient plus malheureux.
Tu parois,ô mon Dieu ! ta grace triomphante
Me dégage du monde et brise mes liens ;
Je ne suis plus qu'à toi , tout ce qui me con
1
tente ,
Est d'être admis parmi les tiens .
D'aujourd'hui seulement je commence de vivre ,
D'aujourd'hui seulement je suis vrayement Chré
tien
Je
MAY
1734 ༡༠༡
Je l'étois , mais hélas ? j'ignorois qu'à
Consiste le souverain bien.
suivre
Mes yeux ne s'ouvrent plus à d'inutiles larmes
Ta bonté pour jamais en à tari le cours ,
Que ta grace a d'attraits ! que ton joug a de
charmes
Heureux qui le porte toujours.
F. J. Procureur au Parlement.
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Résumé : STANCES.
Le texte relate une série de stances exprimant un profond remords et une conversion spirituelle. L'auteur, conscient de ses péchés, reconnaît que la grâce divine l'a empêché de sombrer dans le crime. Il souligne que la bonté de Dieu prévaut sur sa justice et que Dieu préfère le repentir à la mort du coupable. L'auteur admire la tendresse et la bonté paternelle de Dieu, à laquelle il finit par céder. Il avoue avoir été ébloui par le monde et ses charmes, mais toujours inquiet et alarmé. Il tente vainement de se tourner vers Dieu, retenu par des liens invisibles. La grâce divine triomphe finalement, le libérant du monde et brisant ses liens. À partir de ce moment, il se consacre entièrement à Dieu et commence véritablement à vivre en tant que chrétien. Il loue la grâce divine et les charmes de son joug.
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14
p. 903-910
DISSERTATION dans laquelle on expose les differences et les raisons des differences des trois Systêmes Chronologiques de Caton, de Verrius-Flaccus, ou des Fastes ou Marbres Capitolins, et de Varron, tant par rapport aux années de la Fondation de Rome, que par rapport à celles d'avant J. C. et où l'on démontre la verité du Systême de Caton.
Début :
PREMIERE PARTIE. Exposition des trois Systêmes. La véritable cause des [...]
Mots clefs :
Caton, Verrius Flaccus, Varron, Systèmes chronologiques, Années, Fastes, Rome, Fondation de Rome, Compte, Systèmes, Consulat
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texteReconnaissance textuelle : DISSERTATION dans laquelle on expose les differences et les raisons des differences des trois Systêmes Chronologiques de Caton, de Verrius-Flaccus, ou des Fastes ou Marbres Capitolins, et de Varron, tant par rapport aux années de la Fondation de Rome, que par rapport à celles d'avant J. C. et où l'on démontre la verité du Systême de Caton.
DISSERTATION dans laquelle
on expose les differences et les raisons des
differences des trois Systêmes Chronolo➡
giques de Calon , de Verrius-Flaccus , on
des Fastes on Marbres Capitolins , et de
Varron , tant par rapport aux années de
la Fondation de Rome , que par rapport
à celles d'avant J. G. et où l'on démontre
La verité du Systême de Caton,
L
PREMIERE PARTIE .
Exposition des trois Systêmes.
A véritable cause des differences qui
se trouvent entre Caton , Verrius
et Varron , tant par rapport aux années
de la Fondation de Rome , que par rap
port à celles de la Période Julienne
des
904 MERCURE DE FRANCE
des Olympiades , ou d'avant J. C. vient
1º. de ce que les Fastes ne donnent aux
sept Rois de Rome que 243. ans de durée
jusqu'au premier Consulat , qu'ils
mettent l'an de Rome 244. au lieu que
Caton et Varron , faisant durer ces Rois
244. ans pleins , placent par conséquent
le Consulat de Brutus et de Collatinus
l'an 245-
2º. Varron et les Fastes confondent
la troisième année du Decemvirat 305.
de Rome avec le Consulat de Valerius
et d'Horatius , que Caton distingue et
sépare de cette troisiéme année , et qu'il
met l'année suivante 306. R.
3°. Le même Varron et lesdits Fastes
inserent use premiere dictature de Papirius-
Cursor entre le Consulat de Camillus
et de Brutus Scéva 430. R. et celui
de Sulpicius Longus , et d'Æmilius-
Céretanus; une seconde dictature du même
Papirius , entre les Consulats de Mareius-
Rutilus et de Fabius - Rullianus. 2 ° .
444. R. et de Fabius Rullianus , 3 ° . et
Decius-Mus 445. enfin encore une dictature
de Valerius , entre les Consuls Livius-
Denter ou Dento et Æmilius -Paulus
451. et les Consuls Valerius- Corvus
ou Corvinus et Apuleius - Pansa 452.
De-là plusieurs contrarietez entre Var
ron
MA Y. 1734 . 909
ton , les Fastes et Caton , par rapport à
la supputation des années , quand on les
compte , soit depuis la Fondation de Rome
, soit dans la Période Julienne ou
avant J. C.
Et d'abord jusqu'à 243. de Rome inclusivement
, les trois Systêmes s'accordent ,
ou plutôt ne sont qu'un seul et même
Systême pour les années depuis la Fondation
de Rome ; mais les Fastes ont un
an et Varon deux ans plus que Caton
pour les années avant J. C. de sorte , par
exemple , que la premiere année de cette
Fondation étant , selon Caton , la 751.
elle est , selon les Fastes , la 752. et selon
Varron , le 753. La 243. étant la 509.
selon le même Caton , elle est la 510. ou
511. selon les deux autres Auteurs .
Mais en second lieu , la 2 44. derniere
de ces Rois ou de Tarquin le Superbe ,
selon Caton et Varron , est supprimée
par les Fastes ; ce qui est cause que jusqu'à
la 305. derniere année des Decemvirs
les Fastes comptent une année
de la Ville de Rome moins que Caton et
Varron , et des années avant J. C. deux
plus que Caton et tout autant que Varron
. Ainsi la 245. qui est celle de l'établissement
du Consulat , étant la 507.
avant J. C. selon Caton , est aussi la 245 .
D selon
306 MERCURE DE FRANCE
selon Varron ; la 244. seulement selon les
Fastes , mais elle est la 509. avant J. C.
tant selon les Fastes que selon Varron. La
même diversité entre les trois calculs subsiste
jusqu'à l'an 305. de Rome , ou la
suppression du Consulat de Valerius et
d'Horatius ( que les Fastes et Varron mettent
dans la même année 305. avec la
3. année du Decemvirat ) fait naître une
nouvelle difference .
Troisiémement donc , Varron à cette
année 305. perd uncannée de la Ville de
Rome , et les Fastes en perdent une seconde
année , mais ils gagnent chacun
une année avant J. C. je veux dire que
Varron compte un an moins que Caton
de la Fondation de Rome et trois ans
avant J. C. plus que lui , les Fastes
comptent des années depuis la Fondation,
deux moins que Caton et une moins
que Varrons et des années avant J. C.
trois toutes entieres comme Varron .
de plus que Caton . Par consequent voici
comme on doit arranger et calculer les
125. années suivantes jusqu'à la 430 .
,
Caton. Varron. Fastes.
R. A.C. R. A.C. R. A.C.
306. 446.
3.07. 445.
305. 449.
306. 448 .
304. 449.
305. 448;
Les
MAY. 1734 907
7
}
Les trois dictatures de 430. 444.´
451. supprimées par Caton , ou identifiées
avec les Consulats précedens , font
d'un côté croître les années de Rome >
et de l'autre diminuer les années avant
J. C. de trois années entieres dans la
Chronologie de Varron , et dans celle des
Fastes , ensorte qu'après cette augmentation
et cette diminution , tous les trois
Systêmes ont les mêmes années avant J.C.
et ne different que d'une ou deux années
pour celles de la Fondation de Rome depuis
cette année 451. au lieu qu'avan
l'année 244. ils étoient les mêmes quant
aux années de Rome et differoient sculemena
d'un ou deux ans , quant à celles
d'avant J. C.
En un mot , pour reprendre en abregé
tout ce que nous venons de dire , les trois
calculs de Varron , des Fastes et de Caton ,
sont, pour ainsi parler, accordants, quant
aux années de Rome , et discordants d'un
ou deux ans quant aux années d'avant
J. C. et cela depuis la premiere année de
Rome jusqu'à la 243. inclusivement ; ils
sont au contraire discordants d'un ou
deux ans , quant aux années de Rome
et accordants quant aux années d'avant
J. C. et cela depuis la 451. de Rome , selon
Caton , 452. années selon les Fastes ,
Dij es
908 MERCURE DE FRANCE
er 453. selon Varron , 301. avant J. C.
selon tous les trois , jusqu'à Auguste et
jusqu'à la fin des Consulats.
Depuis l'année 244. jusqu'à la 305.
inclusivement , Caton continuë à s'accorder
avec Varron pour le calcul des années
de Rome , et à differer de lui de
deux ans pour les années d'avant J. C.
mais il commence à compter un an de
plus que les Fastes , quant aux premieres ,
et deux ans de moins , quant aux dernic.
res. Les Fastes s'accordent aussi avec Varron
, quant à celles - cy , et ont un an de
inoins lui que quant à celle- là.
Depuis l'an 306. jusqu'à la 430. inclusivement
, Caton compte un an de plus
que Varron et deux plus que les Fastes
pour les années de Rome , mais il compte
trois ans moins que l'un et l'autre par
années d'avant J. C.
les
Depuis l'an 430. inclusivement jusqu'à
l'an 444. aussi inclusivement , Caton
compte autant d'années que Varron , et
une seulement plus que les Fastes pour
les années de Rome , et deux de moins
que l'un et l'autre pour les années d'a
vant J. C.
Depuis l'an 444. jusqu'à l'an 451. il
compte une année de moins que Varron
et autant que les Fastes , par rapport aux
années
MAY. 1734 909
années de Rome , et il compte aussi une
année de moins qu'eux deux par rapport.
aux années d'avant J. C.
Enfin depuis l'an 45 I. on voit regner
la même difference pour toute la suite ,
c'est- à- dire que , selon les trois Systêmes,
on compte toujours les mêmes années
avant J. C. et que Caton compte toujours
d'une maniere uniforme un an de Rome
moins que les Fastes et deux moins que
Varron.
Je n'ai si fort insisté sur cette explication
longue et détaillée des trois Systêmes
Chronologiques des années de la
Fondation deRome , que parce que les plus
Cavans, commeLenglet etDodwel même,
(qui nous a donné si au long et année par
année , une Table de Chronologie Romaine
dans le Denis d'Halicarnasse de Londres)
se sont trompez très -lourdement en
appliquant aux 45o. premieres années de
Rome la même difference qui se trouve
entre les 300. dernieres. Dans une matiere
aussi épineuse et aussi nécessaire pour
ceux qui se mêlent de Chronologie et
d'Histoire Komaine , j'ai pensé que la
longueur et la répétition étoient une vertu
plutôt qu'un deffaut , quand elles servoient
, comme ici , à éviter l'obscurité ,
la confusion et l'erreur .
Diij Afin
910 MERCURE DE FRANCE
Afin donc qu'on n'y retombe plus , je
ne ferai point difficulté de mettre sous les
yeux du dans la Table suivante , ce
que dans les Refléxions précedentes j'ai
exposé aux yeux de l'esprit.
corps
TABLE des Années de Rome ( R ) es
d'avant Jesus- Christ ( J. C. ) selon les
trois differentes supputations , de Caton ;
des Fastes et de Varron.
Caton .
R. J.C.
Fastes .
R. J. C.
Varron .
R. J.C.
I.
751 .
I.
752.
I. 753.
101. 651 .
ΙΟΙ IOI. 652. 101. 653.
201.
SSI .
201. 552. 201. 553.
243. 509. 243. Sio. 243. SII.
244. 508. 243 * SIO. 244. SIO.
305. 447. 304. 449. 305. 449.
306. 446.
406. 346.
304 449. 305 * 449:
404. 349. 405. 349.
430. 322. 428. 325. 429. 325.
430 * 322 . 429. 324. 430. 324.
444. 308. 443 . 310. 444 310.
444 * 308.
444. 309 . 445. 309.
451. 301. 45 !. 302. 452. 302.
451
*
301. 452 . 301. 453. 301.
551.
201 .
552.
201 . $53. 201 .
651 . ICI . 652. ΙΟΙ . 653. 101.
751 . I.
752.
I. 753. I.
752. 1.
753. I. 754.
La suite pout le prochain Mercure.
on expose les differences et les raisons des
differences des trois Systêmes Chronolo➡
giques de Calon , de Verrius-Flaccus , on
des Fastes on Marbres Capitolins , et de
Varron , tant par rapport aux années de
la Fondation de Rome , que par rapport
à celles d'avant J. G. et où l'on démontre
La verité du Systême de Caton,
L
PREMIERE PARTIE .
Exposition des trois Systêmes.
A véritable cause des differences qui
se trouvent entre Caton , Verrius
et Varron , tant par rapport aux années
de la Fondation de Rome , que par rap
port à celles de la Période Julienne
des
904 MERCURE DE FRANCE
des Olympiades , ou d'avant J. C. vient
1º. de ce que les Fastes ne donnent aux
sept Rois de Rome que 243. ans de durée
jusqu'au premier Consulat , qu'ils
mettent l'an de Rome 244. au lieu que
Caton et Varron , faisant durer ces Rois
244. ans pleins , placent par conséquent
le Consulat de Brutus et de Collatinus
l'an 245-
2º. Varron et les Fastes confondent
la troisième année du Decemvirat 305.
de Rome avec le Consulat de Valerius
et d'Horatius , que Caton distingue et
sépare de cette troisiéme année , et qu'il
met l'année suivante 306. R.
3°. Le même Varron et lesdits Fastes
inserent use premiere dictature de Papirius-
Cursor entre le Consulat de Camillus
et de Brutus Scéva 430. R. et celui
de Sulpicius Longus , et d'Æmilius-
Céretanus; une seconde dictature du même
Papirius , entre les Consulats de Mareius-
Rutilus et de Fabius - Rullianus. 2 ° .
444. R. et de Fabius Rullianus , 3 ° . et
Decius-Mus 445. enfin encore une dictature
de Valerius , entre les Consuls Livius-
Denter ou Dento et Æmilius -Paulus
451. et les Consuls Valerius- Corvus
ou Corvinus et Apuleius - Pansa 452.
De-là plusieurs contrarietez entre Var
ron
MA Y. 1734 . 909
ton , les Fastes et Caton , par rapport à
la supputation des années , quand on les
compte , soit depuis la Fondation de Rome
, soit dans la Période Julienne ou
avant J. C.
Et d'abord jusqu'à 243. de Rome inclusivement
, les trois Systêmes s'accordent ,
ou plutôt ne sont qu'un seul et même
Systême pour les années depuis la Fondation
de Rome ; mais les Fastes ont un
an et Varon deux ans plus que Caton
pour les années avant J. C. de sorte , par
exemple , que la premiere année de cette
Fondation étant , selon Caton , la 751.
elle est , selon les Fastes , la 752. et selon
Varron , le 753. La 243. étant la 509.
selon le même Caton , elle est la 510. ou
511. selon les deux autres Auteurs .
Mais en second lieu , la 2 44. derniere
de ces Rois ou de Tarquin le Superbe ,
selon Caton et Varron , est supprimée
par les Fastes ; ce qui est cause que jusqu'à
la 305. derniere année des Decemvirs
les Fastes comptent une année
de la Ville de Rome moins que Caton et
Varron , et des années avant J. C. deux
plus que Caton et tout autant que Varron
. Ainsi la 245. qui est celle de l'établissement
du Consulat , étant la 507.
avant J. C. selon Caton , est aussi la 245 .
D selon
306 MERCURE DE FRANCE
selon Varron ; la 244. seulement selon les
Fastes , mais elle est la 509. avant J. C.
tant selon les Fastes que selon Varron. La
même diversité entre les trois calculs subsiste
jusqu'à l'an 305. de Rome , ou la
suppression du Consulat de Valerius et
d'Horatius ( que les Fastes et Varron mettent
dans la même année 305. avec la
3. année du Decemvirat ) fait naître une
nouvelle difference .
Troisiémement donc , Varron à cette
année 305. perd uncannée de la Ville de
Rome , et les Fastes en perdent une seconde
année , mais ils gagnent chacun
une année avant J. C. je veux dire que
Varron compte un an moins que Caton
de la Fondation de Rome et trois ans
avant J. C. plus que lui , les Fastes
comptent des années depuis la Fondation,
deux moins que Caton et une moins
que Varrons et des années avant J. C.
trois toutes entieres comme Varron .
de plus que Caton . Par consequent voici
comme on doit arranger et calculer les
125. années suivantes jusqu'à la 430 .
,
Caton. Varron. Fastes.
R. A.C. R. A.C. R. A.C.
306. 446.
3.07. 445.
305. 449.
306. 448 .
304. 449.
305. 448;
Les
MAY. 1734 907
7
}
Les trois dictatures de 430. 444.´
451. supprimées par Caton , ou identifiées
avec les Consulats précedens , font
d'un côté croître les années de Rome >
et de l'autre diminuer les années avant
J. C. de trois années entieres dans la
Chronologie de Varron , et dans celle des
Fastes , ensorte qu'après cette augmentation
et cette diminution , tous les trois
Systêmes ont les mêmes années avant J.C.
et ne different que d'une ou deux années
pour celles de la Fondation de Rome depuis
cette année 451. au lieu qu'avan
l'année 244. ils étoient les mêmes quant
aux années de Rome et differoient sculemena
d'un ou deux ans , quant à celles
d'avant J. C.
En un mot , pour reprendre en abregé
tout ce que nous venons de dire , les trois
calculs de Varron , des Fastes et de Caton ,
sont, pour ainsi parler, accordants, quant
aux années de Rome , et discordants d'un
ou deux ans quant aux années d'avant
J. C. et cela depuis la premiere année de
Rome jusqu'à la 243. inclusivement ; ils
sont au contraire discordants d'un ou
deux ans , quant aux années de Rome
et accordants quant aux années d'avant
J. C. et cela depuis la 451. de Rome , selon
Caton , 452. années selon les Fastes ,
Dij es
908 MERCURE DE FRANCE
er 453. selon Varron , 301. avant J. C.
selon tous les trois , jusqu'à Auguste et
jusqu'à la fin des Consulats.
Depuis l'année 244. jusqu'à la 305.
inclusivement , Caton continuë à s'accorder
avec Varron pour le calcul des années
de Rome , et à differer de lui de
deux ans pour les années d'avant J. C.
mais il commence à compter un an de
plus que les Fastes , quant aux premieres ,
et deux ans de moins , quant aux dernic.
res. Les Fastes s'accordent aussi avec Varron
, quant à celles - cy , et ont un an de
inoins lui que quant à celle- là.
Depuis l'an 306. jusqu'à la 430. inclusivement
, Caton compte un an de plus
que Varron et deux plus que les Fastes
pour les années de Rome , mais il compte
trois ans moins que l'un et l'autre par
années d'avant J. C.
les
Depuis l'an 430. inclusivement jusqu'à
l'an 444. aussi inclusivement , Caton
compte autant d'années que Varron , et
une seulement plus que les Fastes pour
les années de Rome , et deux de moins
que l'un et l'autre pour les années d'a
vant J. C.
Depuis l'an 444. jusqu'à l'an 451. il
compte une année de moins que Varron
et autant que les Fastes , par rapport aux
années
MAY. 1734 909
années de Rome , et il compte aussi une
année de moins qu'eux deux par rapport.
aux années d'avant J. C.
Enfin depuis l'an 45 I. on voit regner
la même difference pour toute la suite ,
c'est- à- dire que , selon les trois Systêmes,
on compte toujours les mêmes années
avant J. C. et que Caton compte toujours
d'une maniere uniforme un an de Rome
moins que les Fastes et deux moins que
Varron.
Je n'ai si fort insisté sur cette explication
longue et détaillée des trois Systêmes
Chronologiques des années de la
Fondation deRome , que parce que les plus
Cavans, commeLenglet etDodwel même,
(qui nous a donné si au long et année par
année , une Table de Chronologie Romaine
dans le Denis d'Halicarnasse de Londres)
se sont trompez très -lourdement en
appliquant aux 45o. premieres années de
Rome la même difference qui se trouve
entre les 300. dernieres. Dans une matiere
aussi épineuse et aussi nécessaire pour
ceux qui se mêlent de Chronologie et
d'Histoire Komaine , j'ai pensé que la
longueur et la répétition étoient une vertu
plutôt qu'un deffaut , quand elles servoient
, comme ici , à éviter l'obscurité ,
la confusion et l'erreur .
Diij Afin
910 MERCURE DE FRANCE
Afin donc qu'on n'y retombe plus , je
ne ferai point difficulté de mettre sous les
yeux du dans la Table suivante , ce
que dans les Refléxions précedentes j'ai
exposé aux yeux de l'esprit.
corps
TABLE des Années de Rome ( R ) es
d'avant Jesus- Christ ( J. C. ) selon les
trois differentes supputations , de Caton ;
des Fastes et de Varron.
Caton .
R. J.C.
Fastes .
R. J. C.
Varron .
R. J.C.
I.
751 .
I.
752.
I. 753.
101. 651 .
ΙΟΙ IOI. 652. 101. 653.
201.
SSI .
201. 552. 201. 553.
243. 509. 243. Sio. 243. SII.
244. 508. 243 * SIO. 244. SIO.
305. 447. 304. 449. 305. 449.
306. 446.
406. 346.
304 449. 305 * 449:
404. 349. 405. 349.
430. 322. 428. 325. 429. 325.
430 * 322 . 429. 324. 430. 324.
444. 308. 443 . 310. 444 310.
444 * 308.
444. 309 . 445. 309.
451. 301. 45 !. 302. 452. 302.
451
*
301. 452 . 301. 453. 301.
551.
201 .
552.
201 . $53. 201 .
651 . ICI . 652. ΙΟΙ . 653. 101.
751 . I.
752.
I. 753. I.
752. 1.
753. I. 754.
La suite pout le prochain Mercure.
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Résumé : DISSERTATION dans laquelle on expose les differences et les raisons des differences des trois Systêmes Chronologiques de Caton, de Verrius-Flaccus, ou des Fastes ou Marbres Capitolins, et de Varron, tant par rapport aux années de la Fondation de Rome, que par rapport à celles d'avant J. C. et où l'on démontre la verité du Systême de Caton.
La dissertation compare les systèmes chronologiques de Caton, Verrius-Flaccus (les Fastes des Marbres Capitolins) et Varron, en se concentrant sur les différences concernant les années de la Fondation de Rome et celles avant J.-C. Les divergences principales sont les suivantes : Les Fastes attribuent 243 ans aux sept rois de Rome jusqu'au premier consulat, tandis que Caton et Varron leur attribuent 244 ans, plaçant ainsi le consulat de Brutus et Collatinus à l'année 245 de Rome. Varron et les Fastes confondent la troisième année du décemvirat avec le consulat de Valerius et Horatius, alors que Caton les distingue. Varron et les Fastes insèrent des dictatures supplémentaires entre certains consulats, ce qui crée des contradictions avec Caton. Jusqu'à l'année 243 de Rome, les trois systèmes s'accordent sur les années depuis la Fondation de Rome mais diffèrent d'un ou deux ans pour les années avant J.-C. Par exemple, la première année de la Fondation est 751 selon Caton, 752 selon les Fastes, et 753 selon Varron. Après l'année 244, les Fastes suppriment une année, ce qui modifie les calculs pour les années suivantes. Varron et les Fastes insèrent des dictatures supplémentaires, ce qui augmente les années de Rome et diminue les années avant J.-C. Après l'année 451, les trois systèmes s'accordent sur les années avant J.-C. mais diffèrent d'une ou deux années pour celles de la Fondation de Rome.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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14
DISSERTATION dans laquelle on expose les differences et les raisons des differences des trois Systêmes Chronologiques de Caton, de Verrius-Flaccus, ou des Fastes ou Marbres Capitolins, et de Varron, tant par rapport aux années de la Fondation de Rome, que par rapport à celles d'avant J. C. et où l'on démontre la verité du Systême de Caton.
15
p. 911
ENIGME.
Début :
Qu'ai-je fait aux Mortels pour en être traité [...]
Mots clefs :
Oie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
Qu'ai -je fait aux Mortels pour en être traité
Avec si grande dureté ?
Loin de leur faire aucune peine
Je leur cause mille plaisirs ;
Et cependant tous leurs désirs ,
Vont à me démembrer . Une joye inhumaine ,
Pour comble de malheur , fait encor couronner
Celui qui le dernier a sçû me détrôner .
Hélas tous les ans on m'accable
De cette façon déplorable ,
Sans qu'aucun Prince ou Potentat
Prenne pitié de mon état .
Qu'ai -je fait aux Mortels pour en être traité
Avec si grande dureté ?
Loin de leur faire aucune peine
Je leur cause mille plaisirs ;
Et cependant tous leurs désirs ,
Vont à me démembrer . Une joye inhumaine ,
Pour comble de malheur , fait encor couronner
Celui qui le dernier a sçû me détrôner .
Hélas tous les ans on m'accable
De cette façon déplorable ,
Sans qu'aucun Prince ou Potentat
Prenne pitié de mon état .
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16
p. 911-912
AUTRE.
Début :
Je marche sans changer de place, [...]
Mots clefs :
Horloge
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE.
AUTR E.
E marche sans changer de place ,
Et suis sans cesse en mouvement ,
Sans pour cela que je me lasse ,
Et je vais toujours rondement.
Tantôt legere et tantôt plus pesante ,
Suivant que j'ai le corps plus grand ou plus petit;
Il est certains lieux où je chante ,
Ailleurs je marche à petit bruit.
Sans parler je me fais entendre ,
Et fais mouvoir tous les humains ,
D iiij Je
12 MERCURE DE FRANCE
Je les conduis sans jamais les attendre ,
Reglant presque tous leurs desseins.
Partout où je suis je domine ,
Afin de mieux les commander;"
Là , tel par mon ordre chemine ,
Qui bien tôt va se reposer.
Un autre ici se met à table ,
Que je forcerai d'en sortir ;
Pour tel devoir indispensable ,
Dont je le ferai souvenir .
Sujets de l'amoureux Empire ,
Près de vous j'ai mon agrémentt ;
Plus d'un coeur après moi soupire ,
Comme maîtresse du moment
Où son tendre désir aspire ,
Et par la j'ai plus d'un Amant.
Là , c'est un Criminel qui tremble ;
Je puis précipiter son sort.
Un Peuple nombreux qui s'assemble ,
N'attend que moi pour
voir sa mort.
Ma démarche , Lecteur , est imprudente ou sage
Selon que l'on me fait aller ;
Mais c'est à toi de me regler ,
Puisque je suis ton propre ouvrage.
E marche sans changer de place ,
Et suis sans cesse en mouvement ,
Sans pour cela que je me lasse ,
Et je vais toujours rondement.
Tantôt legere et tantôt plus pesante ,
Suivant que j'ai le corps plus grand ou plus petit;
Il est certains lieux où je chante ,
Ailleurs je marche à petit bruit.
Sans parler je me fais entendre ,
Et fais mouvoir tous les humains ,
D iiij Je
12 MERCURE DE FRANCE
Je les conduis sans jamais les attendre ,
Reglant presque tous leurs desseins.
Partout où je suis je domine ,
Afin de mieux les commander;"
Là , tel par mon ordre chemine ,
Qui bien tôt va se reposer.
Un autre ici se met à table ,
Que je forcerai d'en sortir ;
Pour tel devoir indispensable ,
Dont je le ferai souvenir .
Sujets de l'amoureux Empire ,
Près de vous j'ai mon agrémentt ;
Plus d'un coeur après moi soupire ,
Comme maîtresse du moment
Où son tendre désir aspire ,
Et par la j'ai plus d'un Amant.
Là , c'est un Criminel qui tremble ;
Je puis précipiter son sort.
Un Peuple nombreux qui s'assemble ,
N'attend que moi pour
voir sa mort.
Ma démarche , Lecteur , est imprudente ou sage
Selon que l'on me fait aller ;
Mais c'est à toi de me regler ,
Puisque je suis ton propre ouvrage.
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17
p. 913
LOGOGRYPHE.
Début :
Avec les quatre pieds qui font tout mon partage, [...]
Mots clefs :
Remi
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LOGOGRYPHE.
LOGOGRYPHE.
Vec les quatre pieds qui font tout mon
partage ,
Je vous nomme un saint Personnage.
Prenez encor mon tout , mais d'une autre façon;
Je forme au bout du Vers un agréable son.
Rognez; j'ouvre à vos yeux une Scêne tragique ,
Sur qui maint Voyageur éprouve un triste sort.
Remettez - moi comme j'étois d'abord ;
T'offre sans rien changer deux Notes de Musique
A. X. H.
Vec les quatre pieds qui font tout mon
partage ,
Je vous nomme un saint Personnage.
Prenez encor mon tout , mais d'une autre façon;
Je forme au bout du Vers un agréable son.
Rognez; j'ouvre à vos yeux une Scêne tragique ,
Sur qui maint Voyageur éprouve un triste sort.
Remettez - moi comme j'étois d'abord ;
T'offre sans rien changer deux Notes de Musique
A. X. H.
Fermer
18
p. 913
AUTRE.
Début :
Voici mon tout ; tête, pieds et deux cous ; [...]
Mots clefs :
Coucou
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE.
AUTR E.
Voici mon tout ; tête , pieds et deux cous
La tête aux pieds , et les pieds à la tête.
Vous qui croyez que je suis une bête ,
Peut-être aussi.vous- mêmes l'êtes- vous.
Voici mon tout ; tête , pieds et deux cous
La tête aux pieds , et les pieds à la tête.
Vous qui croyez que je suis une bête ,
Peut-être aussi.vous- mêmes l'êtes- vous.
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19
p. 913
AUTRE.
Début :
Mon tout de quatre pieds, forme un vil animal, [...]
Mots clefs :
Porc
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE.
AUTR E.
On tout de quatre pieds , forme un vil
Manimal ,
Qui ne se plaît que dans l'ordure ;
En combinant , dans ma structure ,
On trouve un excellent métal ,
Qui des autres sur tout par son grand prix differeg
D v Un
914 MERCURE DE FRANCE
Un autre corps solide engendré de la terre
Un noble Instrument de Chasseur ,
>
Et pour finir, Lecteur, je nomme encor le Fleuve,
Où subit un Cocher une fatale épreuve .
On tout de quatre pieds , forme un vil
Manimal ,
Qui ne se plaît que dans l'ordure ;
En combinant , dans ma structure ,
On trouve un excellent métal ,
Qui des autres sur tout par son grand prix differeg
D v Un
914 MERCURE DE FRANCE
Un autre corps solide engendré de la terre
Un noble Instrument de Chasseur ,
>
Et pour finir, Lecteur, je nomme encor le Fleuve,
Où subit un Cocher une fatale épreuve .
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20
p. *914-914
« L'Enigme du mois dernier a dû s'expliquer par le Poisson d'Avril ; et les [...] »
Début :
L'Enigme du mois dernier a dû s'expliquer par le Poisson d'Avril ; et les [...]
Mots clefs :
Poisson d'avril, Broche, Grange, Bourse
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « L'Enigme du mois dernier a dû s'expliquer par le Poisson d'Avril ; et les [...] »
L'Enigme du mois dernier a dû s'expliquer
par le Poisson d'Avril ; et les
Logogryphes par Broche , Bourse , Grange.
On trouve dans le premier , Broc , Roch ,
Roc , Bec , Echo , & c. Dans le deuxième ,
Ourse , Ours , Or , Buse et Ruse. Dans le
troisième , Gange , Ange , Age , Gage
Rage.
par le Poisson d'Avril ; et les
Logogryphes par Broche , Bourse , Grange.
On trouve dans le premier , Broc , Roch ,
Roc , Bec , Echo , & c. Dans le deuxième ,
Ourse , Ours , Or , Buse et Ruse. Dans le
troisième , Gange , Ange , Age , Gage
Rage.
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