Résultats : 15 texte(s)
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1
p. [2051]-2053
ODE SACRÉE, Tirée du Pseaume. Laudate Pueri, &c.
Début :
Enfans, publiez les loüanges, [...]
Mots clefs :
Louanges, Souverain, Chants, Créateur
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texteReconnaissance textuelle : ODE SACRÉE, Tirée du Pseaume. Laudate Pueri, &c.
ODE SA CREE ,
E
Tirée du Pseaume.
Laudate Pueri , &c.
Nfans , publiez les louanges ;
Du Souverain Maître des Rois,
Et mêlez au Concert des Anges ,
Les tendres accents de vos voix,
Dès que le Soliel fait éclore ,
Les feux de la naissante Aurore ,
Vers le Ciel élevez yos Chants ;
A ij Jus
1052 MERCURE DE FRANCE
Jusqu'à ce qu'il rentre dans l'Onde ,
Louez le Créateur du Monde ;
Qu'on le celebre en tous les temps.
Du haut de la Vout azurée
Il gouverne tout l'Univers ;
C'est lui qui regle la durée ,
De tant de Royaumes divers ,
C'est lui qui lance le Tonnerre
Le Ciel et la Mer et la Terre ,
Sont remplis de sa Majesté ,
Des Rois il borne les conquêtes ;
Et lui seul commande aux Tempêtes}
Dont l'Ocean est agité.
dire ;
Nul autre que fui ne peut
Que son Trône est le Firmament
Et qu'il voit tout ce qui respire ,
Soumis à son commandeinent.
Souvent du sein de l'indigence ,
Il éleve l'humble innocence ,
Pour la placer aux plus hauts rangs
Et quelquefois des Bergers même ,
On a vu son pouvoir suprême ,
Faire d'illustres fuerants .
Tol
SEPTEMBRE . 1731 2053
Toi ,. qui commences d'être Mere ,
Dans l'âge de sterilité ,
C'est au Dieu qu'Israël revére ,
Que tu dois ta fécondité :
Par son ordre dans sa vieillesse ,
L'homme de bien plein d'allegresse
Se voit revivre en ses enfans ,
Pendant que sa juste vengeance ;
Fait périr dans l'adolescence ,
La posterité des méchans:
Par M. de Sainte Palaye , de Montfort
Lamaury.
E
Tirée du Pseaume.
Laudate Pueri , &c.
Nfans , publiez les louanges ;
Du Souverain Maître des Rois,
Et mêlez au Concert des Anges ,
Les tendres accents de vos voix,
Dès que le Soliel fait éclore ,
Les feux de la naissante Aurore ,
Vers le Ciel élevez yos Chants ;
A ij Jus
1052 MERCURE DE FRANCE
Jusqu'à ce qu'il rentre dans l'Onde ,
Louez le Créateur du Monde ;
Qu'on le celebre en tous les temps.
Du haut de la Vout azurée
Il gouverne tout l'Univers ;
C'est lui qui regle la durée ,
De tant de Royaumes divers ,
C'est lui qui lance le Tonnerre
Le Ciel et la Mer et la Terre ,
Sont remplis de sa Majesté ,
Des Rois il borne les conquêtes ;
Et lui seul commande aux Tempêtes}
Dont l'Ocean est agité.
dire ;
Nul autre que fui ne peut
Que son Trône est le Firmament
Et qu'il voit tout ce qui respire ,
Soumis à son commandeinent.
Souvent du sein de l'indigence ,
Il éleve l'humble innocence ,
Pour la placer aux plus hauts rangs
Et quelquefois des Bergers même ,
On a vu son pouvoir suprême ,
Faire d'illustres fuerants .
Tol
SEPTEMBRE . 1731 2053
Toi ,. qui commences d'être Mere ,
Dans l'âge de sterilité ,
C'est au Dieu qu'Israël revére ,
Que tu dois ta fécondité :
Par son ordre dans sa vieillesse ,
L'homme de bien plein d'allegresse
Se voit revivre en ses enfans ,
Pendant que sa juste vengeance ;
Fait périr dans l'adolescence ,
La posterité des méchans:
Par M. de Sainte Palaye , de Montfort
Lamaury.
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Résumé : ODE SACRÉE, Tirée du Pseaume. Laudate Pueri, &c.
Le Psaume 113, intitulé 'Laudate Pueri', invite les enfants à louer le Souverain Maître des Rois. Ce poème religieux décrit Dieu comme le Créateur et gouverneur de l'univers, régissant les royaumes et commandant aux éléments naturels. Il souligne la majesté divine omniprésente dans le ciel, la mer et la terre, et la capacité de Dieu à limiter les conquêtes des rois. Le texte met en avant l'élévation des humbles et la transformation de bergers en personnages illustres. Il mentionne également une femme stérile à qui Dieu accorde la fécondité. Le poème contraste la bénédiction des justes avec la vengeance divine sur les méchants. Signé par M. de Sainte Palaye, de Montfort Lamaury, il est daté de septembre 1731.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 2053-2066
LETTRE écrite à M. Adam, Medecin, sur la secheresse de la presente année 1731. et sur la maladie des Bestiaux en certains Pays.
Début :
Nous sommes, Monsieur, dans une année distinguée par la secheresse extrême [...]
Mots clefs :
Sécheresse , Bétail domestique, Bêtes fauves, Cerfs, Hiver, Prières publiques, Palestine, Chrétiens, Évêque de Lyon
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite à M. Adam, Medecin, sur la secheresse de la presente année 1731. et sur la maladie des Bestiaux en certains Pays.
LETTRE écrite à M. Adam, Medecin,
surla secheresse de la presente année 1731 .
et sur la maladie des Bestiaux en certains
Pays.
'Ous sommes , Monsieur , dans une
Narinée distinguée par la secheresse extrême
qui y a regné , et qui y regne encore.
Je ne sçai si nous ne pourrions pas
la comparer à celle dont parle S. Grégoire
de Tours sur la fin de Histoire de
France , et dont il dit : Siccitas immensa
>
fuit que omne pabulum herbarum avertit.
A iij
Cet
2034 MERCURE DE FRANCE
Cet Historien du sixiéme siecle , qui en
fut le témoin, ajoûte que les Quadrupedes
en souffrirent beaucoup , et qu'il en mourut
un si grand nombre , qu'à peine en
resta- t'il pour perpetuer la race , et il
applique à cette occasion ce que dit le
Prophete Habacuc : Abscindetur de ovili
pecus , & c. (a) Il ajoûte que ce ne fut pas
seulement sur le Bétail domestique que
s'étendit le mal , mais encore sur les bêtes
fauves , et qu'on trouvoit dans les Forêts
les Cerfs et autres animaux étendus morts
sur la place .
L'expérience du passé ayant fait craindre
que pareilles choses n'arrivassent de
nos jours , on a sagement prévenu le mal
en plusieurs endroits du Royaume : on
a eu recours aux Intercesseurs qui sont
les Saints , et on s'est mis sous la protection
de ceux qui sont regardez comme les
Tutelaires des Lieux , et il paroît qu'on
s'en est bien trouvé. Une remarque cependant
que quelques- uns ont faite , est
qu'il leur a semblé que les Diocèses dont
S. Etienne est Patron ont été privilegiez
et qu'ils ont eu de la pluye en abondance
(4) Je rapporte ici ce Passage suivant la Vul-
S. Grégoire le cite selon la Version qui
avoit cours dans les Gaules de son temps. Defieient
ab csca oves , Úc.
avánt
SEPTEMBRE . 1731 2055
avant les autres. Il y en a en France au
moins une douzaine ; mais je ne puis cer
tifier le fait qu'à l'égard de deux de ces
Diocèses où je me suis trouvé vers la saint
Jean derniere , dans le temps que ces
pluyes sont venues après la secheresse
commencée au mois de Fevrier . Aussi peutêtre
ne faisoit-on pas des Prieres dans tous,
et peut- être que
dans les lieux où l'on en
faisoit , on n'interroissoit pas également
S. Etienne dans ce qu'on vouloit obtenir .
Ce qu'il y a de certain c'est que depuis la
révelation faite au Prêtre Lucien , dans un
temps de secheresse , que Dieu écouteroit
les Prieres de son Peuple , appuyées de
l'intercession de S. Etienne , et qu'il en
auroit pitié , on a toûjours eu dans l'Eglise
une grande dévotion envers ce saint
Martyr , lorsqu'il a été besoin d'obtenir
la cessation de cette espece de calamité.
Le souvenir de ce qui étoit arrivé au commencement
du V. siecle pendant cette
secheresse d'hyver qui fut si fatale aux
biens de la Terre dans la Palestine , a toûjours
été present à ceux qui lisent l'Histoire
avec attention .
Je prévois dans ce moment que plus
d'une personne seront frappez de ma remarque
; mais je les prie d'observer les
Livres où sont marquées les Prieres pu-
A iiij bliques
056 MERCURE DE FRANCE
bliques de l'Antiquité pour les temps d'af-
Aliction , et ils verront que l'invocation
de S. Etienne y est marquée avec distinc-
´tion . Ce n'est donc pas la faute de nos ancêtres
, si le fait historique d'une pluye
salutaire esperée et obtenue par l'intercession
de S. Etienne , commence à être mise
en oubli . Ils ont toûjours eû soin d'en
inserer quelque chose dans leurs Livres
de l'Office divin , y faisant entrer la Revelation
du Prêtre Lucien , tant en chant
qu'en lecture. Mais depuis que l'on n'en
chante plus rien et qu'on se contente d'en
lire un abregé très- succint , où il n'est
point fait mention de cet évenement , it
est à craindre qu'on n'oublie le fait , ou
du moins qu'on ne l'ait plus si present à
l'esprit .
و
Il en étoit resté quelque vestige dans le
Breviaire de Sens de l'an 1702.à l'Office de
l'Invention deS.Etienne; on s'est fait depuis
ce temps- là un systême qui n'a point permis
que la memoire de ce trait historique
entrât dans l'Office refondu en 1726.Je ne
sçai s'il en sera de même dans toutes les
Eglises. Je tonnois un Chapitre insigne
où il sera difficile d'oublier tout-à-fait
cette ancienne Histoire : l'antiquité des
moyens temps y a pourvû d'une maniere
singuliere ; je ne veux pas la rapporter à
present ,
SETEMBRE. 1731. 2057
present. Au reste Saint Etienne n'est
pas le seul Saint par l'intercession duquel
on ait eu confiance d'obtenir de
la pluye dans les temps de secheresse.
Il paroît seulement qu'il est le premier
dont les Reliques ayent occasionné ce
secours salutaire , et c'est l'époque que.
l'on peut donner à l'antiquité de l'usage
de porter en Procession les Reliques
des Martyrs dans les temps de calamité.
à
Quelques années avant cette désolation
qu'on fixe à l'an 415. la Palestine s'étoit
ressentie d'une semblable affliction. La
secheresse avoit duré dans l'année 394.
ou 395. durant le mois de Die et d'Appellée
, qui sont deux mois de l'hyver
répondant à Novembre et Décembre ,
quelques jours près. Un S. Evêque nouvellement
placé sur le Siege de Gaze , obtint
miraculeusement de la pluye , au
moins pour son Territoire. L'Histoire en
est si curieuse qu'on ne peut la rendre
trop publique en ce temps- cy. Les Idolâtres
de cette Ville étoient allez au Temple
de Marnas , pour y prier et sacrifier ,
croyant que Marnas étoit maître de la
pluye , et qu'il étoit Jupiter même . Ils
continuerent leur chant pendant sept
jours ; mais le voyant sans effet , ils s'en'
retour2058
MERCURE DE FRANCE
retournerent à leurs ouvrages. La vie de
S. Porphyre , Evêque de cette Ville , écrite
par Marc , son Disciple , témoin oculaire ,
rapporte ensuite comment ce saint Prélat
eut le crédit d'obtenir de l'eau du Ciel.
Les Chrétiens , au nombre de 280. étoient
accourus à lui pour le prier de demander
à Dieu la cessation de la secheresse . Il ordonna
d'abord un jeûne , et commanda
qu'on s'assemblat le soir dans la grande
Eglise pour y celebrer les Vigiles , et cette
nuit-là , dit l'Ecrivain qui étoit un des
Diacres , nous y fimes trente Prieres , avec
autant d'agenouillemens , sans compter la
Psalmodie et les Leçons . Le récit de ce
Diacre témoin , appellé Marc , étant trèspropre
à prouver l'antiquité des usages
de l'Eglise Catholique , j'emprunterai ici
ses propres termes . Le matin , continuë- t'il ,
S. Porphyre faisant porter la sainte Croix
devant nous , nous marchames en chantant
des Hymnes vers l'Occident de la Ville , et
allâmes à la vieille Eglise de S. Asclepas
et là nous fimes autant de Prieres que dans
La grande Eglise. Puis nous allâmes à saint
Timothée , où sont les Reliques de sainte
Meure, Martyre, et de sainte Thée, qui a été
mise au nombre des Confesseurs , et y ayant
encore fait autant de Prieres et d'agenowil-
Lemens , nous retournâmes à la Ville ; fil
étoit
SEPTEMBRE. 1731. 2059
étoit trois heures après midi , ) et nous la
trouvâmes fermée; car les Payens vouloient
dissiper la Procession. Nous nous y
tinmes
deux heures sans qu'on voulût nous ouvrir :
et pour lors un vent de midi commença à convrir
le Ciel de nuées , et dès que le Soleilfut
couché, il fit une grosse pluye avec Tonnerre,
et les Payens voyant ce Miracle , nous ouvrirent
et vinrent avec nous à la grande
Eglise , disant : Christ est le seul Dieu. Il
plut donc depuis le buit d'Audynée jusqu'au
dix. (Audynée est le Janvier des Romains ,
hors qu'il commence cinq jours plutôt ,
comme les autres mois. ) L'onze nous celebrâmes
le saint jour de la Théophanie s et
il y eut cent cinq Payens convertis.
Il y a en France une Ville Episcopale
que je connois particulierement , où les
Prieres de cette presente année ont été
reglées à peu près sur le plan de celles
qu'on voit ordonnées par S. Porphire , et .
l'on a eû la consolation d'être exaucé le
lendemain du jeûne qui accompagna la .
ceremonie.
Mais revenons à la mortalité des Bestiaux
. C'est ordinairement la grande secheresse
qui la cause , parce que la secheresse
excessive brûlant l'herbe des Prez , les
animaux se trouvent obligez de brouter
les feuilles des arbres , aux feuilles des-
A vj quels
2060 MERCURE DE FRANCE
quels sont attachez certains Insectes qui
leur sont nuisibles. C'est une expérience
qu'on m'écrit avoir été faite en Bourgogne
au mois de Juin dernier. Elle suffit
ce me semble , pour assurer qu'Agobard,
Evêque de Lyon , avoit grande raison de
se mocquer de ceux qui croyoient de.
son temps que la mortalité qui regna sur
les Bestiaux , venoit d'une certaine poudre
des Maleficiers envoyez par le
Duc de Benevent , répandoient par la
campagne , et que le vent faisoit entrer
dans les narines des Boeufs et des Vaches.
Cette mortalité remarquable arriva en
l'an 810. Il ne faut pas songer à d'autres
causes dans celles qui arrivoient aux temps
de secheresse , qu'aux Insectes attachez
sous les feüillages.
que
Je ne sçai si celle qui arriva sous le
Roi Chilperic I. après la Bataille donnée
à Chateau -Meillan , en Berry , procedoit
d'un pareil principe ; elle fut si grande ,
au rapport de Gregoire de Tours , qu'après
qu'elle eut cessé , on regardoit comme
une chose merveilleuse de trouver une
Vache ou un Cheval sur pied . Sigebert
marque aussi dans sa Chronique à l'an
1137. qu'il y eut une si grande secheresse
en France , que de memoire d'homme
on n'en n'avoit vû de semblable. Il dit
qu'elle
SEPTEMBRE. 1731. 206
qu'elle fit tarir les Fontaines , les Puits ,
et même des Rivieres ; mais il n'ajoûte
pas si elle fut suivie d'aucune mortalité.
Il paroît que les paroles de l'Antiennedu
vieil Office de S. Etienne conviendroient
à merveille en ces ocsasions , et
qu'on peut les adresser à ceux dont il dépendroit
d'obtenir de la pluye par l'intercession
des Saints , mais qui moins diligens.
que S.Porphyre de Gaze , differeroient de
prendre cette voye. Nonne vides quanta
sit siccitas et tribulatio in toto mundo , et tu
negligenter agis ? On connoît à ce langage
alec'est le vieillard Gamaliel qui reprend
Lucien , de la négligence qu'il apportoit à
Gire proceder à la découverte du Corps de
S. Etienne , dont on attendoit le soulageanent
qui étoit si necessaire.J'ai trouvé ces
paroles dans les anciens Breviaires de Langres
et de Toul ; mais il y a une autre Eglise
queje ne veux pas nommer, où l'on chante
Cette Antienne avec une particularité qui
Rous divertira. Comme c'est le soir du
second jour d'Août , veille de l'Invention
de S. Etienne , l'un des Patrons de cette
Eglise, que cette Antienne se présente dans
l'Office , et que c'est au troisiéme Nocturne
,temps auquel la saison permet d'avoir
le gosier desseché après avoir déja chanté
deux grands Nocturnes ; on m'a assuré
qu'aussi-
1
1
2062 MERCURE DE FRANCE
qu'aussi - tôt et à l'instant que cette Antienne
est notifiée ou intimée , arrivent
au Choeur des Bedeaux ou Huissiers d'Eglise
avec des brocs de vin et des tasses .
et qu'ils y font la ronde , en offrant du
vin à tous ceux du Clergé qui en souhaitent
; bien plus , que selon la maxime ne
potus noceat , une ou deux autres personnes
portent sur un bassin des Biscuits ou
des Macarons, et en présentent à ceux qui
veulent redoubler. C'est ainsi que la gran
de secheresse ou chaleur causée au palais
par le chant , se trouve fort à propos hu
mectée et agréablement rafraîchie. Com
me je n'approfondis pas beaucoup les Ru
briques , je ne me suis pas informé si le
Breviaire ou l'Antiphonier marque dupli-,
catur à cette Antienne ; je crois cependant
que non , parce que c'est un Chapitre où
F'on ne suit pas le Breviaire Romain .
Je parierois bien , Monsieur , qu'en lisant
cecy , vous en faites l'application à
quelque Chapitre de l'Allemagne. Si cela
est , je puis vous certifier que vous vous
trompez. Mais je connois une autre pratique
usitée dans les Eglises de la Campagne
du côté de cette Region . Les Sta
Legian 1604*
tuts Synodaux de Metz de l'an 1604
m'ont donné occasion d'en être instruita
Par un article de ces Statuts , il est enjointaux
SEPTEMBRE. 1751. 2063
aux Curez , ut aboleant profana tonitrualia
festa cum paganismum redoleant , cæterasque
vanas observationes pro curandis et conservandis
pecoribus. Remarquez en passant
que les bestiaux sont toûjours en butte à
quelque adversité , que les soins ingénieux
des Paysans sçavent détourner ou faire cesser,
autant qu'il est en eux. Je ne pouvois
deviner ce que c'étoient que ces Fêtes Tonitruales,
qui paroissent influer sur la conservation
des bestiaux, mais j'en ai eu d'expli
cation d'une personne très - versée dans
toute l'Antiquité, et principalement dang
celle du Pays Messin et des environs.
Ce Sçavant m'a écrit que cette cere
monie s'appelle la Fête du Tonnerre: qu'elle
a été abolie presque par tout le Diocèse ,
mais que le voisinage du Diocèse de Tré
ves est cause qu'on n'a pû l'abolir entierement
dans le canton du Diocèse de
Metz , qui confine avec l'Allemagne , et
qu'elle est réservée dans quelques Paroisses
de ces quartiers- là . Cette Fête consiste
à celebrer certains jours de l'année
avec son des Cloches , Messe haute et avec
plusieurs ceremonies superstitieuses dif
ferentes , selon les lieux . On croit que
par ce moyen l'on est préservé du Tonnerre
, et qu'il tomberoit infailliblement
sur le lieu , si l'on n'y celebroit pas cette
Fête.
2064 MERCURE DE FRANCE
Fête .C'est un usage commun dans les Dio
cèses de Tréves , de Spire , de Cologne, de
Mayence , & c L'ancien Calendrier des
Romains , quoique rempli de Fêtes , n'avoit
point celle - la. Il peut se faire qu'elle
ait eu une origine pieuse dans le Christianisme
, et que dans la suite on ait dégeneré.
Le Méteore du Tonnerre étant
inconcevable dans ces effets , est souvent
nuisible , non -seulement aux animaux de
la Campagne , mais encore aux Hommes
et aux Edifices. Il est cependant hors de
toute apparence de croire que jamais il
ne tombe dans les Diocèses que je viens
de nommer , quoiqu'on y soit exact à
celebrer sa Fête ; il est , au contraire, certain
que de tant de milliers de Paroisses
qu'il y a en France où l'on ne la celebre
pas , à peine y en a- t'il vingt ou trente
par an qui ayent le malheur d'en être
frappées.
Je ne vous celerai point, Monsieur, que
quoiqu'on passe pour être plus éclairé en
France qu'on ne l'est en Allemagne , j'ai
trouvé des Villages en Champagne , où
les Paysans ont la même idée de certains
de nos Saints , que les Payens de la Ville
de Gaze avoient de l'Idole Marnas , dont
je vous ai parlé. Il y a de ces Villages où
l'on croit bonnement que S. Abdon
Martyr
SEPTEMBRE. 1731. 206)
Martyr de la Perse , du trente Juillet ,
est Maître du Tonnerre , et qu'il . en
peut disposer comme il lui plaît. C'est
pour cela , me disoit un jour un de ces
Paysans , c'est pour cela que notre Curé ne
manque jamais defaire la Fête de S. Abdon
de bonne heure ; il en fait grande solemnité
dans l'Octave de la Fête - Dieu , avant que
les grandes chaleurs viennent ; et personne ne
se dispense de venir ce jour-la au Service.
Encore si c'étoit de S. Jacques le Majeur
qu'ils eussent cette idée , ou de S. Jean
Evangeliste son frere , on diroit que cela
a quelque fondement dans le langage de
l'Evangile ; mais je vous avoue mon ignorance
touchant le rapport qu'a S. Abdon
avec le Tonnerre. c'est dommage que
S. Ceadde , Evêque de Lindisfarne , dont
parle le venerable Bede , n'ait pas sçû
le secret de nos Diocèses Allemans ; il se
seroit tenu fort tranquille lorsqu'il tonnoit
, lui , qui non - seulement se mettoit
alors en priere , mais y faisoit encore met.
tre les autres.
Au reste , Monsieur , quoique j'aye
attribué cy-dessus aux grandes secheresses
la mortalité des Bestiaux , je ne prétends
pas qu'elle en soit la seule cause .
On en a vû quelquefois artiver en des
années communes ; et même dans les
Pays2066
MERCURE DE FRANCE
Pays-Bas ,où les Canaux empêchent que les
Prez ne deviennent jamais si arides qu'en
France , les Bestiaux y meurent souvent
comme ailleurs ; mais ce qui doit être remarqué,
est que lorsque la maladie se met
sur ces animaux , les Religionnaires accourent
comme les Catholiques aux lieux de
dévotion , et viennent implorer l'intercession
des Saints ; Multiplicate sunt infirmitates
eorum ; postea acceleraverunt . Autour
de Bruxelles , c'est sainte Vivine , premiere
Abbesse du Grand Bigard , qu'on
invoque pour cela , comme étant l'une
des Tutelaires du Pays. Dom Martene
rapporte dans son second Voyage Litteraire
, qu'au mois de Juillet de l'année
1718. un Hollandois à qui il étoit mort
vingt- quatre Bestiaux , et à qui il en restoit
seize malades , étant venu demander
leur guérison à cette Sainte , les trouva
tous parfaitement guéris à son retour . Il
admira la vertu de la Sainte et reconnut
que dans sa Secte on ne trouve point de
si habiles Medecins. Il ne dit point si ce
Hollandois se convertit , comme firent les
Habitans de la Ville de Gaze. C'est peutêtre
ce qu'il n'avoit pas demandé , ou
plutôt ce qu'il auroit fort apprehendê.
Je suis , &c.
Ce dernier Juillet , jour du grand S. Ger
main d'Auxerre 1731 .
surla secheresse de la presente année 1731 .
et sur la maladie des Bestiaux en certains
Pays.
'Ous sommes , Monsieur , dans une
Narinée distinguée par la secheresse extrême
qui y a regné , et qui y regne encore.
Je ne sçai si nous ne pourrions pas
la comparer à celle dont parle S. Grégoire
de Tours sur la fin de Histoire de
France , et dont il dit : Siccitas immensa
>
fuit que omne pabulum herbarum avertit.
A iij
Cet
2034 MERCURE DE FRANCE
Cet Historien du sixiéme siecle , qui en
fut le témoin, ajoûte que les Quadrupedes
en souffrirent beaucoup , et qu'il en mourut
un si grand nombre , qu'à peine en
resta- t'il pour perpetuer la race , et il
applique à cette occasion ce que dit le
Prophete Habacuc : Abscindetur de ovili
pecus , & c. (a) Il ajoûte que ce ne fut pas
seulement sur le Bétail domestique que
s'étendit le mal , mais encore sur les bêtes
fauves , et qu'on trouvoit dans les Forêts
les Cerfs et autres animaux étendus morts
sur la place .
L'expérience du passé ayant fait craindre
que pareilles choses n'arrivassent de
nos jours , on a sagement prévenu le mal
en plusieurs endroits du Royaume : on
a eu recours aux Intercesseurs qui sont
les Saints , et on s'est mis sous la protection
de ceux qui sont regardez comme les
Tutelaires des Lieux , et il paroît qu'on
s'en est bien trouvé. Une remarque cependant
que quelques- uns ont faite , est
qu'il leur a semblé que les Diocèses dont
S. Etienne est Patron ont été privilegiez
et qu'ils ont eu de la pluye en abondance
(4) Je rapporte ici ce Passage suivant la Vul-
S. Grégoire le cite selon la Version qui
avoit cours dans les Gaules de son temps. Defieient
ab csca oves , Úc.
avánt
SEPTEMBRE . 1731 2055
avant les autres. Il y en a en France au
moins une douzaine ; mais je ne puis cer
tifier le fait qu'à l'égard de deux de ces
Diocèses où je me suis trouvé vers la saint
Jean derniere , dans le temps que ces
pluyes sont venues après la secheresse
commencée au mois de Fevrier . Aussi peutêtre
ne faisoit-on pas des Prieres dans tous,
et peut- être que
dans les lieux où l'on en
faisoit , on n'interroissoit pas également
S. Etienne dans ce qu'on vouloit obtenir .
Ce qu'il y a de certain c'est que depuis la
révelation faite au Prêtre Lucien , dans un
temps de secheresse , que Dieu écouteroit
les Prieres de son Peuple , appuyées de
l'intercession de S. Etienne , et qu'il en
auroit pitié , on a toûjours eu dans l'Eglise
une grande dévotion envers ce saint
Martyr , lorsqu'il a été besoin d'obtenir
la cessation de cette espece de calamité.
Le souvenir de ce qui étoit arrivé au commencement
du V. siecle pendant cette
secheresse d'hyver qui fut si fatale aux
biens de la Terre dans la Palestine , a toûjours
été present à ceux qui lisent l'Histoire
avec attention .
Je prévois dans ce moment que plus
d'une personne seront frappez de ma remarque
; mais je les prie d'observer les
Livres où sont marquées les Prieres pu-
A iiij bliques
056 MERCURE DE FRANCE
bliques de l'Antiquité pour les temps d'af-
Aliction , et ils verront que l'invocation
de S. Etienne y est marquée avec distinc-
´tion . Ce n'est donc pas la faute de nos ancêtres
, si le fait historique d'une pluye
salutaire esperée et obtenue par l'intercession
de S. Etienne , commence à être mise
en oubli . Ils ont toûjours eû soin d'en
inserer quelque chose dans leurs Livres
de l'Office divin , y faisant entrer la Revelation
du Prêtre Lucien , tant en chant
qu'en lecture. Mais depuis que l'on n'en
chante plus rien et qu'on se contente d'en
lire un abregé très- succint , où il n'est
point fait mention de cet évenement , it
est à craindre qu'on n'oublie le fait , ou
du moins qu'on ne l'ait plus si present à
l'esprit .
و
Il en étoit resté quelque vestige dans le
Breviaire de Sens de l'an 1702.à l'Office de
l'Invention deS.Etienne; on s'est fait depuis
ce temps- là un systême qui n'a point permis
que la memoire de ce trait historique
entrât dans l'Office refondu en 1726.Je ne
sçai s'il en sera de même dans toutes les
Eglises. Je tonnois un Chapitre insigne
où il sera difficile d'oublier tout-à-fait
cette ancienne Histoire : l'antiquité des
moyens temps y a pourvû d'une maniere
singuliere ; je ne veux pas la rapporter à
present ,
SETEMBRE. 1731. 2057
present. Au reste Saint Etienne n'est
pas le seul Saint par l'intercession duquel
on ait eu confiance d'obtenir de
la pluye dans les temps de secheresse.
Il paroît seulement qu'il est le premier
dont les Reliques ayent occasionné ce
secours salutaire , et c'est l'époque que.
l'on peut donner à l'antiquité de l'usage
de porter en Procession les Reliques
des Martyrs dans les temps de calamité.
à
Quelques années avant cette désolation
qu'on fixe à l'an 415. la Palestine s'étoit
ressentie d'une semblable affliction. La
secheresse avoit duré dans l'année 394.
ou 395. durant le mois de Die et d'Appellée
, qui sont deux mois de l'hyver
répondant à Novembre et Décembre ,
quelques jours près. Un S. Evêque nouvellement
placé sur le Siege de Gaze , obtint
miraculeusement de la pluye , au
moins pour son Territoire. L'Histoire en
est si curieuse qu'on ne peut la rendre
trop publique en ce temps- cy. Les Idolâtres
de cette Ville étoient allez au Temple
de Marnas , pour y prier et sacrifier ,
croyant que Marnas étoit maître de la
pluye , et qu'il étoit Jupiter même . Ils
continuerent leur chant pendant sept
jours ; mais le voyant sans effet , ils s'en'
retour2058
MERCURE DE FRANCE
retournerent à leurs ouvrages. La vie de
S. Porphyre , Evêque de cette Ville , écrite
par Marc , son Disciple , témoin oculaire ,
rapporte ensuite comment ce saint Prélat
eut le crédit d'obtenir de l'eau du Ciel.
Les Chrétiens , au nombre de 280. étoient
accourus à lui pour le prier de demander
à Dieu la cessation de la secheresse . Il ordonna
d'abord un jeûne , et commanda
qu'on s'assemblat le soir dans la grande
Eglise pour y celebrer les Vigiles , et cette
nuit-là , dit l'Ecrivain qui étoit un des
Diacres , nous y fimes trente Prieres , avec
autant d'agenouillemens , sans compter la
Psalmodie et les Leçons . Le récit de ce
Diacre témoin , appellé Marc , étant trèspropre
à prouver l'antiquité des usages
de l'Eglise Catholique , j'emprunterai ici
ses propres termes . Le matin , continuë- t'il ,
S. Porphyre faisant porter la sainte Croix
devant nous , nous marchames en chantant
des Hymnes vers l'Occident de la Ville , et
allâmes à la vieille Eglise de S. Asclepas
et là nous fimes autant de Prieres que dans
La grande Eglise. Puis nous allâmes à saint
Timothée , où sont les Reliques de sainte
Meure, Martyre, et de sainte Thée, qui a été
mise au nombre des Confesseurs , et y ayant
encore fait autant de Prieres et d'agenowil-
Lemens , nous retournâmes à la Ville ; fil
étoit
SEPTEMBRE. 1731. 2059
étoit trois heures après midi , ) et nous la
trouvâmes fermée; car les Payens vouloient
dissiper la Procession. Nous nous y
tinmes
deux heures sans qu'on voulût nous ouvrir :
et pour lors un vent de midi commença à convrir
le Ciel de nuées , et dès que le Soleilfut
couché, il fit une grosse pluye avec Tonnerre,
et les Payens voyant ce Miracle , nous ouvrirent
et vinrent avec nous à la grande
Eglise , disant : Christ est le seul Dieu. Il
plut donc depuis le buit d'Audynée jusqu'au
dix. (Audynée est le Janvier des Romains ,
hors qu'il commence cinq jours plutôt ,
comme les autres mois. ) L'onze nous celebrâmes
le saint jour de la Théophanie s et
il y eut cent cinq Payens convertis.
Il y a en France une Ville Episcopale
que je connois particulierement , où les
Prieres de cette presente année ont été
reglées à peu près sur le plan de celles
qu'on voit ordonnées par S. Porphire , et .
l'on a eû la consolation d'être exaucé le
lendemain du jeûne qui accompagna la .
ceremonie.
Mais revenons à la mortalité des Bestiaux
. C'est ordinairement la grande secheresse
qui la cause , parce que la secheresse
excessive brûlant l'herbe des Prez , les
animaux se trouvent obligez de brouter
les feuilles des arbres , aux feuilles des-
A vj quels
2060 MERCURE DE FRANCE
quels sont attachez certains Insectes qui
leur sont nuisibles. C'est une expérience
qu'on m'écrit avoir été faite en Bourgogne
au mois de Juin dernier. Elle suffit
ce me semble , pour assurer qu'Agobard,
Evêque de Lyon , avoit grande raison de
se mocquer de ceux qui croyoient de.
son temps que la mortalité qui regna sur
les Bestiaux , venoit d'une certaine poudre
des Maleficiers envoyez par le
Duc de Benevent , répandoient par la
campagne , et que le vent faisoit entrer
dans les narines des Boeufs et des Vaches.
Cette mortalité remarquable arriva en
l'an 810. Il ne faut pas songer à d'autres
causes dans celles qui arrivoient aux temps
de secheresse , qu'aux Insectes attachez
sous les feüillages.
que
Je ne sçai si celle qui arriva sous le
Roi Chilperic I. après la Bataille donnée
à Chateau -Meillan , en Berry , procedoit
d'un pareil principe ; elle fut si grande ,
au rapport de Gregoire de Tours , qu'après
qu'elle eut cessé , on regardoit comme
une chose merveilleuse de trouver une
Vache ou un Cheval sur pied . Sigebert
marque aussi dans sa Chronique à l'an
1137. qu'il y eut une si grande secheresse
en France , que de memoire d'homme
on n'en n'avoit vû de semblable. Il dit
qu'elle
SEPTEMBRE. 1731. 206
qu'elle fit tarir les Fontaines , les Puits ,
et même des Rivieres ; mais il n'ajoûte
pas si elle fut suivie d'aucune mortalité.
Il paroît que les paroles de l'Antiennedu
vieil Office de S. Etienne conviendroient
à merveille en ces ocsasions , et
qu'on peut les adresser à ceux dont il dépendroit
d'obtenir de la pluye par l'intercession
des Saints , mais qui moins diligens.
que S.Porphyre de Gaze , differeroient de
prendre cette voye. Nonne vides quanta
sit siccitas et tribulatio in toto mundo , et tu
negligenter agis ? On connoît à ce langage
alec'est le vieillard Gamaliel qui reprend
Lucien , de la négligence qu'il apportoit à
Gire proceder à la découverte du Corps de
S. Etienne , dont on attendoit le soulageanent
qui étoit si necessaire.J'ai trouvé ces
paroles dans les anciens Breviaires de Langres
et de Toul ; mais il y a une autre Eglise
queje ne veux pas nommer, où l'on chante
Cette Antienne avec une particularité qui
Rous divertira. Comme c'est le soir du
second jour d'Août , veille de l'Invention
de S. Etienne , l'un des Patrons de cette
Eglise, que cette Antienne se présente dans
l'Office , et que c'est au troisiéme Nocturne
,temps auquel la saison permet d'avoir
le gosier desseché après avoir déja chanté
deux grands Nocturnes ; on m'a assuré
qu'aussi-
1
1
2062 MERCURE DE FRANCE
qu'aussi - tôt et à l'instant que cette Antienne
est notifiée ou intimée , arrivent
au Choeur des Bedeaux ou Huissiers d'Eglise
avec des brocs de vin et des tasses .
et qu'ils y font la ronde , en offrant du
vin à tous ceux du Clergé qui en souhaitent
; bien plus , que selon la maxime ne
potus noceat , une ou deux autres personnes
portent sur un bassin des Biscuits ou
des Macarons, et en présentent à ceux qui
veulent redoubler. C'est ainsi que la gran
de secheresse ou chaleur causée au palais
par le chant , se trouve fort à propos hu
mectée et agréablement rafraîchie. Com
me je n'approfondis pas beaucoup les Ru
briques , je ne me suis pas informé si le
Breviaire ou l'Antiphonier marque dupli-,
catur à cette Antienne ; je crois cependant
que non , parce que c'est un Chapitre où
F'on ne suit pas le Breviaire Romain .
Je parierois bien , Monsieur , qu'en lisant
cecy , vous en faites l'application à
quelque Chapitre de l'Allemagne. Si cela
est , je puis vous certifier que vous vous
trompez. Mais je connois une autre pratique
usitée dans les Eglises de la Campagne
du côté de cette Region . Les Sta
Legian 1604*
tuts Synodaux de Metz de l'an 1604
m'ont donné occasion d'en être instruita
Par un article de ces Statuts , il est enjointaux
SEPTEMBRE. 1751. 2063
aux Curez , ut aboleant profana tonitrualia
festa cum paganismum redoleant , cæterasque
vanas observationes pro curandis et conservandis
pecoribus. Remarquez en passant
que les bestiaux sont toûjours en butte à
quelque adversité , que les soins ingénieux
des Paysans sçavent détourner ou faire cesser,
autant qu'il est en eux. Je ne pouvois
deviner ce que c'étoient que ces Fêtes Tonitruales,
qui paroissent influer sur la conservation
des bestiaux, mais j'en ai eu d'expli
cation d'une personne très - versée dans
toute l'Antiquité, et principalement dang
celle du Pays Messin et des environs.
Ce Sçavant m'a écrit que cette cere
monie s'appelle la Fête du Tonnerre: qu'elle
a été abolie presque par tout le Diocèse ,
mais que le voisinage du Diocèse de Tré
ves est cause qu'on n'a pû l'abolir entierement
dans le canton du Diocèse de
Metz , qui confine avec l'Allemagne , et
qu'elle est réservée dans quelques Paroisses
de ces quartiers- là . Cette Fête consiste
à celebrer certains jours de l'année
avec son des Cloches , Messe haute et avec
plusieurs ceremonies superstitieuses dif
ferentes , selon les lieux . On croit que
par ce moyen l'on est préservé du Tonnerre
, et qu'il tomberoit infailliblement
sur le lieu , si l'on n'y celebroit pas cette
Fête.
2064 MERCURE DE FRANCE
Fête .C'est un usage commun dans les Dio
cèses de Tréves , de Spire , de Cologne, de
Mayence , & c L'ancien Calendrier des
Romains , quoique rempli de Fêtes , n'avoit
point celle - la. Il peut se faire qu'elle
ait eu une origine pieuse dans le Christianisme
, et que dans la suite on ait dégeneré.
Le Méteore du Tonnerre étant
inconcevable dans ces effets , est souvent
nuisible , non -seulement aux animaux de
la Campagne , mais encore aux Hommes
et aux Edifices. Il est cependant hors de
toute apparence de croire que jamais il
ne tombe dans les Diocèses que je viens
de nommer , quoiqu'on y soit exact à
celebrer sa Fête ; il est , au contraire, certain
que de tant de milliers de Paroisses
qu'il y a en France où l'on ne la celebre
pas , à peine y en a- t'il vingt ou trente
par an qui ayent le malheur d'en être
frappées.
Je ne vous celerai point, Monsieur, que
quoiqu'on passe pour être plus éclairé en
France qu'on ne l'est en Allemagne , j'ai
trouvé des Villages en Champagne , où
les Paysans ont la même idée de certains
de nos Saints , que les Payens de la Ville
de Gaze avoient de l'Idole Marnas , dont
je vous ai parlé. Il y a de ces Villages où
l'on croit bonnement que S. Abdon
Martyr
SEPTEMBRE. 1731. 206)
Martyr de la Perse , du trente Juillet ,
est Maître du Tonnerre , et qu'il . en
peut disposer comme il lui plaît. C'est
pour cela , me disoit un jour un de ces
Paysans , c'est pour cela que notre Curé ne
manque jamais defaire la Fête de S. Abdon
de bonne heure ; il en fait grande solemnité
dans l'Octave de la Fête - Dieu , avant que
les grandes chaleurs viennent ; et personne ne
se dispense de venir ce jour-la au Service.
Encore si c'étoit de S. Jacques le Majeur
qu'ils eussent cette idée , ou de S. Jean
Evangeliste son frere , on diroit que cela
a quelque fondement dans le langage de
l'Evangile ; mais je vous avoue mon ignorance
touchant le rapport qu'a S. Abdon
avec le Tonnerre. c'est dommage que
S. Ceadde , Evêque de Lindisfarne , dont
parle le venerable Bede , n'ait pas sçû
le secret de nos Diocèses Allemans ; il se
seroit tenu fort tranquille lorsqu'il tonnoit
, lui , qui non - seulement se mettoit
alors en priere , mais y faisoit encore met.
tre les autres.
Au reste , Monsieur , quoique j'aye
attribué cy-dessus aux grandes secheresses
la mortalité des Bestiaux , je ne prétends
pas qu'elle en soit la seule cause .
On en a vû quelquefois artiver en des
années communes ; et même dans les
Pays2066
MERCURE DE FRANCE
Pays-Bas ,où les Canaux empêchent que les
Prez ne deviennent jamais si arides qu'en
France , les Bestiaux y meurent souvent
comme ailleurs ; mais ce qui doit être remarqué,
est que lorsque la maladie se met
sur ces animaux , les Religionnaires accourent
comme les Catholiques aux lieux de
dévotion , et viennent implorer l'intercession
des Saints ; Multiplicate sunt infirmitates
eorum ; postea acceleraverunt . Autour
de Bruxelles , c'est sainte Vivine , premiere
Abbesse du Grand Bigard , qu'on
invoque pour cela , comme étant l'une
des Tutelaires du Pays. Dom Martene
rapporte dans son second Voyage Litteraire
, qu'au mois de Juillet de l'année
1718. un Hollandois à qui il étoit mort
vingt- quatre Bestiaux , et à qui il en restoit
seize malades , étant venu demander
leur guérison à cette Sainte , les trouva
tous parfaitement guéris à son retour . Il
admira la vertu de la Sainte et reconnut
que dans sa Secte on ne trouve point de
si habiles Medecins. Il ne dit point si ce
Hollandois se convertit , comme firent les
Habitans de la Ville de Gaze. C'est peutêtre
ce qu'il n'avoit pas demandé , ou
plutôt ce qu'il auroit fort apprehendê.
Je suis , &c.
Ce dernier Juillet , jour du grand S. Ger
main d'Auxerre 1731 .
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Résumé : LETTRE écrite à M. Adam, Medecin, sur la secheresse de la presente année 1731. et sur la maladie des Bestiaux en certains Pays.
La lettre adressée à M. Adam, médecin, discute de la sécheresse extrême de l'année 1731 et de la maladie des bestiaux dans certains pays. L'auteur compare cette sécheresse à celle décrite par Grégoire de Tours au VIe siècle, qui avait causé une grande mortalité parmi les animaux. Pour prévenir cette catastrophe, des prières ont été adressées aux saints protecteurs des lieux, notamment saint Étienne, dont les intercessions ont été jugées efficaces dans plusieurs diocèses. Des pratiques anciennes, comme les processions avec les reliques des martyrs, étaient également utilisées pour obtenir de la pluie en temps de sécheresse. La lettre mentionne l'exemple de saint Porphyre à Gaza, qui avait obtenu de la pluie par des prières et des jeûnes. La mortalité des bestiaux est souvent causée par la sécheresse excessive, qui les force à manger des feuilles d'arbres infestées d'insectes nuisibles. Le texte évoque également une fête célébrée dans plusieurs diocèses allemands, comme Trèves, Spire, Cologne et Mayence, visant à se protéger du tonnerre. Ce phénomène météorologique, nuisible aux animaux, aux hommes et aux édifices, est perçu différemment selon les régions. En France, malgré la célébration de cette fête dans certains diocèses allemands, le tonnerre frappe rarement ces lieux, contrairement à certaines paroisses françaises où il cause des dommages. L'auteur mentionne des croyances populaires en Champagne, où les paysans attribuent à Saint Abdon, martyr perse, le pouvoir de contrôler le tonnerre. Cette croyance est comparée à celle des païens de Gaza concernant l'idole Marnas. L'auteur exprime son ignorance quant au lien entre Saint Abdon et le tonnerre et regrette que Saint Cuthbert, évêque de Lindisfarne, n'ait pas connu ces croyances pour se protéger du tonnerre. La lettre aborde également la mortalité des bestiaux, attribuée non seulement aux grandes sécheresses mais aussi à d'autres causes. En Belgique, les religionnaires invoquent sainte Vivine pour guérir leurs animaux malades. Un Hollandais, ayant perdu vingt-quatre bestiaux et en ayant seize malades, les retrouva guéris après avoir imploré sainte Vivine.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 2067-2068
EPIGRAMME IMITÉE DE BUCHANAM,
Début :
De même que l'on voit les Lys, [...]
Mots clefs :
Lys, Merveilles, Esprit, Douce pluie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EPIGRAMME IMITÉE DE BUCHANAM,
EPIGRAMME
IMITE'E DE BUCHANAM
DE
Qualiter ad solem.
E même que l'on voit les Lys ,
Qu'une chaste main à cueillis ,
Se flétrir quand on les expose ,
Aux rayons d'un Soleil brulant ,
Ainsi l'on me voit , Leonose ,
Comme consumé d'un feu lent ,
Dès que tes yeux trop redoutables ,
Dardent quelques rayons aimables.
Mais quand je puis heureusement ,
Cueillir sur tes levres vermeilles ,
Quelques baisers. Que de merveilles ,
Je vois dans le même moment !
Tous mes esprits reprennent vie ,
Je sens un feu plein de vigueur.
Ainsi que pendant la chaleur ,
L'herbe , après une douce pluye ,
Devient plus belle que jamais .
Je ne sçai par quels doux attraits ,
Tes baisers me rendent la vie ,
Que tes beaux yeux m'ayoient ravie.
Ainsi
2068 MERCURE DE FRANCE
Puissay-je ainsi mourir souvent ,
Pour ainsi revivre à l'instant !
E. T. R.
IMITE'E DE BUCHANAM
DE
Qualiter ad solem.
E même que l'on voit les Lys ,
Qu'une chaste main à cueillis ,
Se flétrir quand on les expose ,
Aux rayons d'un Soleil brulant ,
Ainsi l'on me voit , Leonose ,
Comme consumé d'un feu lent ,
Dès que tes yeux trop redoutables ,
Dardent quelques rayons aimables.
Mais quand je puis heureusement ,
Cueillir sur tes levres vermeilles ,
Quelques baisers. Que de merveilles ,
Je vois dans le même moment !
Tous mes esprits reprennent vie ,
Je sens un feu plein de vigueur.
Ainsi que pendant la chaleur ,
L'herbe , après une douce pluye ,
Devient plus belle que jamais .
Je ne sçai par quels doux attraits ,
Tes baisers me rendent la vie ,
Que tes beaux yeux m'ayoient ravie.
Ainsi
2068 MERCURE DE FRANCE
Puissay-je ainsi mourir souvent ,
Pour ainsi revivre à l'instant !
E. T. R.
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Résumé : EPIGRAMME IMITÉE DE BUCHANAM,
L'épigramme compare les effets des regards et des baisers de Léonose sur le poète à ceux du soleil sur les lys. Les regards de Léonose le consument, tandis que ses baisers lui redonnent vigueur. Le poète exprime son incompréhension de ces 'doux attraits' et souhaite mourir et revivre sous l'influence de Léonose.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 2068-2082
EXPLICATION d'une Médaille antique trés- singuliere de CARAUSIUS, Empereur des Anciens Bretons au temps de Diocletien et de Maximien Hercule, adressée à Mylord Comte de Pembrok, Pair d'Angleterre &c. Par M. Genebrier, Docteur en Medecine.
Début :
MYLORD, De toutes les Médailles de l'Empereur Carausius, dont je fais depuis longtemps [...]
Mots clefs :
Neptune, Carausius, Médaille, Médailles, Inscription, Mer, Bretons, Temple, Type, Grande-Bretagne, Flotte, Légende, Trident, Vaisseau, Maximien, Lettres, Cheval, Figure, Abondance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXPLICATION d'une Médaille antique trés- singuliere de CARAUSIUS, Empereur des Anciens Bretons au temps de Diocletien et de Maximien Hercule, adressée à Mylord Comte de Pembrok, Pair d'Angleterre &c. Par M. Genebrier, Docteur en Medecine.
EXPLICATION d'une Médaille ans
tique trés- singuliere de CARAUSIUS
Empereur des Anciens Bretons au temps
de Diocletien et de Maximien Hercule ,
adressée à Mylord Comte de Pembrok •
Pair d'Angleterre & c. Par M. Genebrier
, Docteur en Medecine,
MYLORD,
De toutes les Médailles de l'Empereur
Carausius , dont je fais depuis long-temps
une récherche très- exacte , et qui sont
venues en assés bon nombre à ma connoissance
, l'une des plus singulieres ,
et qui intéresse le plus le Royaume de
la Grande Bretagne , est celle dont j'ai
entrepris de donner une explication .
Elle ne se trouve que dans votre Cabinet
, où j'ai eu la satisfaction de la voir ,
avec quantité d'autres raretez Litteraires
de toute espece , que vous possedez et
que
THE
NEW
YOR
SUCINC
LIBRAF
ASTOR
, LENOX
AN TILDEN
FOUNDATIO
(K
RY
.
N8.
SEPTEMBRE . 1731 2009
que vous vous faites un plaisir de communiquer
aux Amateurs de l'Antiquité ;
ce qui me suffit pour justifier la liberté
que je prens de faire paroître sous vos
Auspices ce que j'ai écrit au sujet de ce
Monument .
La Médaille est de petit Bronze , nette
et bien conservée ; on y voit d'un côté
la tête de Carausius couronnée de rayons,
et tournée du côté gauche , avec cette
Inscription IMP. CARAUSIUS P. F
AUG.
Au revers pour Type , Neptune , et
Carausius débout qui se donnent la main
droite: Neptune , qui est nud au côté
droit , à la réserve des parties inferieures ,
qui sont à demi couvertes d'un manteau
Aottant , s'appuye de la main gauche sur
son Trident , ayant le pied gauche posé
sur la Proue d'un Vaisseau . Carausius de
l'autre côté en habit de Guerre , la tête
couronnée de Laurier , s'appuye de la
main gauche sur une Pique , la pointe en
haut. Pour Legende VBERITAS AUG. et
dans l'Exergue R. S. R.
•
Les Types qu'on avoit vûs jusqu'ici avec
la Legende Ubertas ou Uberitas se reduisoient
à deux differents , dont le
premier ne commence à se trouver sur
les Médailles Imperiales que sous Trajan
Dece
2070 MERCURE DE FRANCE
Dece. On y voit la figure d'une femme
debout , tenant de la main droite une
Bourse , et de la gauche une Corne d'abondance,
couchée sur le bras. Cette Médaille
étoit du Cabinet de feüe S. A. R.
MADAME , dont la Mémoire me sera toujours
en singuliere véneration .
Le second Type se trouve sur une Médaille
de Quintillus , frere de Claude le
Gothique , à qui il succeda à l'Empire
pour peu de jours. C'est une Femme debout
, le corps un peu panché en devant ,
laquelle tient des deux mains une Corne
d'abondance renversée , d'où sortent des
Pieces d'Or et d'Argent , ayant le pied
droit posé sur un Globe terrestre. Médail
le du Duc Darschot.
Il n'y a rien de semblable sur notre
Médaille de Carausius , le Type en est
tout different. Ce sont , comme je l'ai dit ,
deux figures debout ; celle d'une Divinité
, et celle d'un Heros qui se donnent la
main , et dont les divers attributs paroisgent
n'avoir guere de rapport aux autres
Types que nous venons de décrire.
Cependant à bien examiner le Type
et la Legende de celle-ci , rien de plus ingenieux
ni de plus flatteur.
En effet , que pouvoient imaginer de
plus expressif les Bretons pour donner
ung
SEPTEMBRE. 1731 207
ane juste idée de l'heureuse abondance
dont ils joüissoient sous Carausius , que
de représenter , comme ils ont fait , sur
ces Médailles Neptune qui lui donne la
main , et qui par cette attitude paroît
l'associer à l'Empire de la Mer , et le partager
avec lui ? On diroit qu'aprés la défaite
de la Flotte de Maximien Hercule ;
qui n'étoit point present à ce combat
Naval, les Bretons enflés d'une Victoire si
éclatante , eussent voulu mettre dans la
bouche de leur Protecteur cesVers deVirgi
le qui semblent avoir été faits pour relever
la gloire d'un évenement si mémorable.
Maturatefugam , Regique hac dicite vestro,
Non illi Imperium Pelagi savumque tridentem
و
›
Sed mihi sorte datum.
-On sçait qu'un Souverain qui s'est une
fois rendu le maître de la Mer joüit necessairement
de toutes choses suivant l'ex
pression de ( a ) l'Orateur Romain ; qui
mare teneat , eum necesse rerum potiri. Et si
dans le Continent il n'y a point de Peuples
heureux sans commerce , que feroient
sans ce secours ceux qui sont séparés
du reste des hommes par les Mers
C'est laNavigation et le Commerce qui de
(a) Epit. à Atticus¿
tout
2072 MERCURE DE FRANCE
tout temps ont rendu les Etats Maritimes
si florissans , en y apportant l'abondance.
c'est ce qui a formé en peu de temps les
plus puissantes Républiques de l'Univers.
Carausius ayant néttoyé l'Ocean de
Pirates , en ayant chassé les Flottes de
plusieurs Nations rédoutables , celles des
Francs et des Saxons , ayant enfin mis le
comble à ses travaux de Mer par la Victoire
navale qu'il venoit de remporter sur
la Flotte de Maximien Hercule son
concurrent , que pouvoient faire de
mieux les anciens Bretons pour immor
taliser la mémoire de leur Heros , que
de le représenter ainsi avec Neptune
qui lui donne la main ? Quoy de plus
convenable aux temps , aux lieux et aux
autres circonstances que ce Type et que
cette Legende VBERITAS AVG? puisque
par cette Victoire les Bretons demeuroient
les Maîtres de la Mer , et des
Trésors de l'Ocean. Quelque flatteur
que soit cet Eloge symbolique , il me
paroît bien plus modeste et plus beau que
celui que Pompée se donna lui même en
se disant par une vanité outrée le fils *
* Sextus Pompeius Magni Filius eo stultitia
processit inflammatus rerum maritimarum
felicitate , uutt NNeeppttuunnii se Filium diceret , es
Cyanea veste obduceretur Forph, in Horat.
de
SEPTEMBRE. 1731. 2073
de Neptune . Et cela seulement pour avoir
nettoyé, en 33. jours , la Mer de Sicile de
quelques miserables Esclaves revoltés , ou
des fugitifs des Armées de Sicile et de Capoüe.
Če qui lui suffit pour prendre le titre
que nous venons de dire , et pour se parer
d'une robe bleue cum marifeliciter uteretur,
Neptuni se Filium confessus est. Eumque bobus
auratis , et equo placavit. Aur. Victor .
On ne doit donc point être surpris de
voir Neptune sur les Médailles de Carausius
qui s'étoit rendu si redoutable sur
la Mer , et qui avoit surpassé de beaucoup
les Victoires de Pompée par ses exploits
Maritimes .
Cette Médaille de Carausius avec la
Figure de Neptune , n'est pas le seul
• Monument qui nous reste pour prouver
que les Bretons rendoient un culte particulier
à cette Divinité. On a trouvé depuis
quelque temps une Inscription antique
dans la Grande Bretagne qui merite
d'être rapportée ici , laquelle fait
remonter encore plus haut , le Culte de
Neptune dans cette Isle. Voici cette Inscription
exactement copiée sur l'Original
, gravée avec soin et avec les mêmes
Lacunes qui s'y trouvent par l'injure du
temps , mais que M. Roger Gale a heureusement
rétablies par de petits points
B aux
2074 MERCURE DE FRANCE
aux endroits qui ne sont pas assez visi .
bles et où la pierre est tronquée.
Ce Sçavant conjecture que les premieres
lettres qui manquent au commencement
de la septiéme ligne pouvoient être A
SACR. S. ou SACER . S. ( n'y ayant pas
assez de place pour un plus grand nombre
de lettres) pour dire A SACR is sunt ou
Sacerdotes sunt. Quoiqu'il en soit , cette
Inscription nous apprend qu'il y avoit
dans la grande Bretagne un Temple érigé
sous l'invocation de Neptune et sous celle
de Minerve , pour la conservation de la
Famille Imperiale , exprimée par le ter
me de Divine. DOMŪS DIVINAE.
L'Inscription apprend aussi que ce
Temple fut construit des deniers de la ,
Communauté ou du Corps des Maîtres
Charpentiers : Collegium Fabrorum , et des
autres Personnes qui pouvoient y être
admises , comme Ministres ou sous quelque
autre titre , cequi paroît être exprimé
par ces trois lettres D. S. D. de suo
dedicaverunt. Elle apprend encore que
Pudens , fils de Pudentinus , avoit donné
le fond sur lequel le Temple étoit bâti
Donante Aream Pudente Pudentini filio.
Et enfin que ce même Temple fut édifié
par l'autorité du Roy Cogidubnus , surnommé
Tibere-Claude , du nom de cet
Empereux
SEPTEMBRE. 1731. 2075
Empereur Romain , dont le Roy Breton
se faisoit honneur de prendre aussi la
qualité de Lieutenant ou de Viceroy dans
la Partie de la Grande Bretagne qui étoit
soumise à cet Empereur. Ex authoritate
Tiberii Claudii Cogidubni Regis Legati
Augusti in Britannia. C'est ainsi à peu
près que Cesar avoit établi Cavarinus
Roy des Senons , qui fut ensuite chassé
par les Siens.
Ce précieux Monument de l'Antiquité
Payenne fut trouvé à Chichester en 1723 .
·à quatre pieds sous terre , en creusant pour
faire une Cave dans la maison qui fait
le coin de la ruë de S. Martins- lane , en
tirant vers le Nord. Il est enclavé présentement
dans la muraille , sous une fenêtre
de la même Maison d'où il fut déterré.
C'est un Marbre gris , que M. Gale
croit avoir été tiré des Carrieres de Suffex .
Sa longueur est de six pieds, sur deux pieds
et trois quarts de largeur. Les lettres en
sont très-belles ; celles qui sont dans les
deux premieres lignes ont trois pouces de
longueur , et les autres ont deux pouces
un quart. Le mur du Temple * dont il
* Ily a plusieurs exemples d'un Temple consacré
à deux Divinitez. Jupiter et Minerve
avoient un Temple commun à Athenes près du
Trésor public, lequel leur étoit dédié sous le ritre
de CONSERVATEURS.Pausan,dans ses Atriques , & c.
Bij s'agit
2075 MERCURE DE FRANCE
s'agit et dont les Curieux ont examiné les
fondemens , avoit environ trois pieds
d'épaisseur .
Chichester où cette Inscription a été
trouvée , est une Ville d'Angleterre ,
qui n'est qu'à deux milles de la Mer, dont
un bras pouvoit anciennement arroser ses
Murailles. Elle est située assez près de
la Forêt d'Anderida , et de la Côte Meridionale
de l'Isle Britannique.
Minerve , dont il est parlé dans cette
Inscription , comme Inventrice des Arts,
étoit invoquée par tous les Artisans , selon
Lactance , ce qui donne lieu de
conjecturer qu'il y avoit peut-être auprès
de cette Ville un Arcenal pour la fabrique
des Vaisseaux , et que la Ville peut
avoir été autrefois beaucoup plus considerable
qu'on ne pense . On voit en effet
et aux environs les restes de trois grands
Chemins Romains qui y aboutissoient ,
et qui viennent de Porsthmouth, de Mid-,
surst et d'Arondel .
On
peut voir
l'explication
entiere
que
M.
Gale
a donnée
de cette
Inscription
dans
les
Transactions
Philosophiques
, ou
Journal
Anglois
, de l'Académie
Royale
de Londres
, page
379.
du
31. Octobre
1723.
la même
année
de sa découverte
.
* Instit
. Divin
. L. 1. P. 134,
Cet
SEPTEMBRE . 1731. 2077
Cet habile Académicien a fait là-dessus
plusieurs observations qui ne laissent rien
à desirer.
>
Pour revenir au Type de Neptune ,
qui paroît sur notre Médaille , Hygin
observe que ceux qui vouloient représenter
ce Dieu , lui mettoient ordinairement
un Dauphin à la main , ou sous le pied
croyant que c'étoit de tous les Poissons
celui qui lui étoit le plus agréable. Qui
Neptuno simulachrum faciunt Delphinum
aut in manu , aut sub pede ejus constituere
videmus , quod Neptuno gratissimum arbitrantur.
Cela se trouve conforme à la plûpart
des figures que nous avons de Neptune,
sur les Médailles de plusieurs Empereurs
et sur celles de quelques Villes Maritimes
qui représentent ainsi Neptune . Mais sur
les Médailles de Carausius , au lieu d'un
Dauphin , les Bretons ont affecté de mettre
sous les pieds de Neptune la Proie
d'un Vaisseau , pour montrer qu'ils avoient
mis leurs Vaisseaux et leurs Flottes sous
la protection d'une Divinité , laquelle
selon Diodote de Sicile , Livre s . avoit
trouvé l'Art de la Navigation , et de
mettre en Mer une Flotte entiere. Aussi
les Capitaines de Vaisseaux et les Matelots
, ne manquoient jamais avant que de
B iij mettre
3
2078 MERCURE DE FRANCE
mettre à la voile , d'adresser leurs voeux
et leurs prieres à Neptune , pour lui demander
une heureuse Navigation .
Nous avons dans Seneque , dans Plutarque
et dans Ciceron , là formule d'une
Priere que lui faisoient les Grecs avant
que de s'embarquer. Elle est toute des
plus courtes : Ορθαν αν ναῦν , ἀπαξ θανείν.
Les Latins l'ont tournée de la sorte. Quaaunque
Tempestas veniat , Neptune si averas
Navim sedens ad gubernaculum semper
rectam everte. » Divin Neptune , quelque
Tempête qui nous arrive , si vous
>> voyez que notre Vaisseau soit prêt à
» faire nauffrage ou à renverser , prenez
» vous-même le Gouvernail en main , et
" faites , par votre bonté , que notre Vaisseau
ne puisse jamais tomber que debout.
Aristide , dans un Hymne qu'il a composé
en l'honneur de Neptune , nous ap→
prend que les Fleuves , les Fontaines , et
en general toutes les Eaux étoient reverez
comme les plus grands et les premiers
Dieux de l'Antiquité. C'est pour cela que
le culte de Neptune étoit en grande veneration
chez les Grecs , sur tout dans les
Villes Maritimes. Ils avoient les Posidenies
, qui étoient des Fêtes instituées en
l'honneur de Neptune , dont elles portent
le nom . Ils avoient encore les Thynnées
SEPTEMBRE . 1731. 2079
3
nées , qui étoient des autres jours de Fê
tes où les Pêcheurs lui immoloient des
Thons. Tertullien , dans son Traité des
Spectacles , nous apprend que les Jeux
Isthmiens si celebres dans la Grece ,
( quoique le Victorieux n'y fût couronné
que d'Ache ou de Pin ) étoient
consacrez à Neptune. Ces Jeux tiroient
leur nom de Listhme de Corinthe , où
ils furent d'abord celebrez , selon Pausanias.
A Rome on faisoit la Fête de Neptune
le dixième des Kalendes de Septembre ,
sous le nom de Neptunales , et on lui
immoloit un Taureau , selon Virgile.
Taurum Neptuno , Taurum tibi pulchey
Apollo.
Homere avoit dit la même chose dans
le cinquiéme Livre de l'Odissée.
Cyaneos crines Taurus mactetur habenti.
On voit par ce Vers qu'Homere dis
tingue Neptune des autres Dieux par ses
cheveux bleus.
Arnobe , dans son huitiéme Livre contre
les Gentils , donne des yeux bleus à
Neptune. Neptunus oculis glaucis . En quoi
il est du sentiment de Lucien , mais ce
dernier lui donne des cheveux noirs ,
B iiij
contre
2080 MERCURE DE FRANCE
contre l'autorité d'Homere. Le bleu étoit
aussi la couleur de son Manteau , selon
Phurnutus , Neptuni vestis cyanea .
C'est pour cela que le fils de Pompée
prit une robbe
de cette couleur
après
son Expedition
Maritime
. Ce même General
de la Flotte Romaine
dans le passage
d'Aurelius
Victor
, rapporté
ci- dessus,
lui sacrifia
plusieurs
Taureaux
et un Cheval,
Eumque
bobus auratis et equo placavit.
On sçait que le cheval
étoit consacré
à
Neptune
, comme
à la Divinité
qui l'avoit
fait sortir de la terre d'un coup de
Trident
.
•
Tuque , cui prima frementem
Fudit equum Magno tellus percussa Trie
dente. Virg.
C'est aussi pour cette raison qu'on avoit
placé la Statuë de Neptune dans le Cirque
; mais par malheur Auguste y ayant
fait une espece de nauffrage , il en fit
-ôter la Statue , pour punir , en quelque
maniere , ce Dieu du peu de soin qu'il
avoit pris de sa personne.
•
Nous avons dans les Médailles de Gallien
deux Revers differens qui nous apprennent
que le Cheval Marin et le Ca
pricorne étoient aussi consacrez à Neptune.
Ces deux Types ont la même Lẹ-
gende
SEPTEMBRE. 1731. 208r
gende , NEPTUNO Conservatori AvGusti ;
Legende qui est commune avec la figure
du Cheval Marin . Quatre de ces Animaux
tirent ordinairement son Char sur
les Médailles de quelques autres Empereurs
; mais les Médailles de Gallien avec
Ia figure du Capricorne , sont très- rares
ou plutôt elles n'avoient pas encore été
connuës. M. l'Abbé de Rothelin en a
une, dans son Cabinet , et j'en possede une
autre ; je n'en parle ici que parce que
cette Médaille n'a encore été publiée ,
que je sçache , par aucun Antiquaire.
A l'égard du Trident sur lequel Neptune
s'appuye de la main gauche dans
notre Médaille , c'est , comme l'on sçait
le Sceptre qui lui fut fabriqué par les
Cyclopes , lorsque l'Empire de la Mer
Iui échut en partage.
Commodien , assez mauvais Poëte du
temps de Constantin , dit que Neptune
porte un Trident pour percer les Poissons.
Neptunum facitis Divum ex Saturno pronatum
Et Tridentem gerit , ut Pisces suffigere possit
Mais Prudence pense plus noblement,
forsqu'il dit que le Trident désigne la
triple qualité de l'Eau , qui est d'être liquide
, féconde , et potable. Tridentem
B. v verò
2082 MERCURE DE FRANCE
vero ob hanc rem gerere pingitur, quod aquarum
natura triplici virtute fungatur , id est
liquida , foecunda , potabili.
Je n'entrerai point ici dans un plus
grand détail sur le culte qu'on rendoit à
Neptune , principalement dans la Grece
et dans la Grande Bretagne en particulier..
Je n'ay pas dessein aussi de rapporter tout
ce que les Médailles , les Marbres , les
Pierres gravées , les Statuës et les autres
Monumens antiques , pourroient nous
fournir sur ce sujet. Tout ce que j'ay dit,
Milord , me paroît suffire pour l'explication
de cette Médaille singuliere de Carausius
, qui ne se trouve jusqu'à present
que dans votre Cabinet , et qui fut frappée
au sujet de la défaite de la Flotte de Maximien
Hercules , par le même Carausius.
J'ajoûte que c'est un Monument des plus
glorieux et des plus interessans qui puisse
se trouver pour le Royaume de la Gran
de Bretagne. Je suis avec beaucoup de
Respect , &c.
tique trés- singuliere de CARAUSIUS
Empereur des Anciens Bretons au temps
de Diocletien et de Maximien Hercule ,
adressée à Mylord Comte de Pembrok •
Pair d'Angleterre & c. Par M. Genebrier
, Docteur en Medecine,
MYLORD,
De toutes les Médailles de l'Empereur
Carausius , dont je fais depuis long-temps
une récherche très- exacte , et qui sont
venues en assés bon nombre à ma connoissance
, l'une des plus singulieres ,
et qui intéresse le plus le Royaume de
la Grande Bretagne , est celle dont j'ai
entrepris de donner une explication .
Elle ne se trouve que dans votre Cabinet
, où j'ai eu la satisfaction de la voir ,
avec quantité d'autres raretez Litteraires
de toute espece , que vous possedez et
que
THE
NEW
YOR
SUCINC
LIBRAF
ASTOR
, LENOX
AN TILDEN
FOUNDATIO
(K
RY
.
N8.
SEPTEMBRE . 1731 2009
que vous vous faites un plaisir de communiquer
aux Amateurs de l'Antiquité ;
ce qui me suffit pour justifier la liberté
que je prens de faire paroître sous vos
Auspices ce que j'ai écrit au sujet de ce
Monument .
La Médaille est de petit Bronze , nette
et bien conservée ; on y voit d'un côté
la tête de Carausius couronnée de rayons,
et tournée du côté gauche , avec cette
Inscription IMP. CARAUSIUS P. F
AUG.
Au revers pour Type , Neptune , et
Carausius débout qui se donnent la main
droite: Neptune , qui est nud au côté
droit , à la réserve des parties inferieures ,
qui sont à demi couvertes d'un manteau
Aottant , s'appuye de la main gauche sur
son Trident , ayant le pied gauche posé
sur la Proue d'un Vaisseau . Carausius de
l'autre côté en habit de Guerre , la tête
couronnée de Laurier , s'appuye de la
main gauche sur une Pique , la pointe en
haut. Pour Legende VBERITAS AUG. et
dans l'Exergue R. S. R.
•
Les Types qu'on avoit vûs jusqu'ici avec
la Legende Ubertas ou Uberitas se reduisoient
à deux differents , dont le
premier ne commence à se trouver sur
les Médailles Imperiales que sous Trajan
Dece
2070 MERCURE DE FRANCE
Dece. On y voit la figure d'une femme
debout , tenant de la main droite une
Bourse , et de la gauche une Corne d'abondance,
couchée sur le bras. Cette Médaille
étoit du Cabinet de feüe S. A. R.
MADAME , dont la Mémoire me sera toujours
en singuliere véneration .
Le second Type se trouve sur une Médaille
de Quintillus , frere de Claude le
Gothique , à qui il succeda à l'Empire
pour peu de jours. C'est une Femme debout
, le corps un peu panché en devant ,
laquelle tient des deux mains une Corne
d'abondance renversée , d'où sortent des
Pieces d'Or et d'Argent , ayant le pied
droit posé sur un Globe terrestre. Médail
le du Duc Darschot.
Il n'y a rien de semblable sur notre
Médaille de Carausius , le Type en est
tout different. Ce sont , comme je l'ai dit ,
deux figures debout ; celle d'une Divinité
, et celle d'un Heros qui se donnent la
main , et dont les divers attributs paroisgent
n'avoir guere de rapport aux autres
Types que nous venons de décrire.
Cependant à bien examiner le Type
et la Legende de celle-ci , rien de plus ingenieux
ni de plus flatteur.
En effet , que pouvoient imaginer de
plus expressif les Bretons pour donner
ung
SEPTEMBRE. 1731 207
ane juste idée de l'heureuse abondance
dont ils joüissoient sous Carausius , que
de représenter , comme ils ont fait , sur
ces Médailles Neptune qui lui donne la
main , et qui par cette attitude paroît
l'associer à l'Empire de la Mer , et le partager
avec lui ? On diroit qu'aprés la défaite
de la Flotte de Maximien Hercule ;
qui n'étoit point present à ce combat
Naval, les Bretons enflés d'une Victoire si
éclatante , eussent voulu mettre dans la
bouche de leur Protecteur cesVers deVirgi
le qui semblent avoir été faits pour relever
la gloire d'un évenement si mémorable.
Maturatefugam , Regique hac dicite vestro,
Non illi Imperium Pelagi savumque tridentem
و
›
Sed mihi sorte datum.
-On sçait qu'un Souverain qui s'est une
fois rendu le maître de la Mer joüit necessairement
de toutes choses suivant l'ex
pression de ( a ) l'Orateur Romain ; qui
mare teneat , eum necesse rerum potiri. Et si
dans le Continent il n'y a point de Peuples
heureux sans commerce , que feroient
sans ce secours ceux qui sont séparés
du reste des hommes par les Mers
C'est laNavigation et le Commerce qui de
(a) Epit. à Atticus¿
tout
2072 MERCURE DE FRANCE
tout temps ont rendu les Etats Maritimes
si florissans , en y apportant l'abondance.
c'est ce qui a formé en peu de temps les
plus puissantes Républiques de l'Univers.
Carausius ayant néttoyé l'Ocean de
Pirates , en ayant chassé les Flottes de
plusieurs Nations rédoutables , celles des
Francs et des Saxons , ayant enfin mis le
comble à ses travaux de Mer par la Victoire
navale qu'il venoit de remporter sur
la Flotte de Maximien Hercule son
concurrent , que pouvoient faire de
mieux les anciens Bretons pour immor
taliser la mémoire de leur Heros , que
de le représenter ainsi avec Neptune
qui lui donne la main ? Quoy de plus
convenable aux temps , aux lieux et aux
autres circonstances que ce Type et que
cette Legende VBERITAS AVG? puisque
par cette Victoire les Bretons demeuroient
les Maîtres de la Mer , et des
Trésors de l'Ocean. Quelque flatteur
que soit cet Eloge symbolique , il me
paroît bien plus modeste et plus beau que
celui que Pompée se donna lui même en
se disant par une vanité outrée le fils *
* Sextus Pompeius Magni Filius eo stultitia
processit inflammatus rerum maritimarum
felicitate , uutt NNeeppttuunnii se Filium diceret , es
Cyanea veste obduceretur Forph, in Horat.
de
SEPTEMBRE. 1731. 2073
de Neptune . Et cela seulement pour avoir
nettoyé, en 33. jours , la Mer de Sicile de
quelques miserables Esclaves revoltés , ou
des fugitifs des Armées de Sicile et de Capoüe.
Če qui lui suffit pour prendre le titre
que nous venons de dire , et pour se parer
d'une robe bleue cum marifeliciter uteretur,
Neptuni se Filium confessus est. Eumque bobus
auratis , et equo placavit. Aur. Victor .
On ne doit donc point être surpris de
voir Neptune sur les Médailles de Carausius
qui s'étoit rendu si redoutable sur
la Mer , et qui avoit surpassé de beaucoup
les Victoires de Pompée par ses exploits
Maritimes .
Cette Médaille de Carausius avec la
Figure de Neptune , n'est pas le seul
• Monument qui nous reste pour prouver
que les Bretons rendoient un culte particulier
à cette Divinité. On a trouvé depuis
quelque temps une Inscription antique
dans la Grande Bretagne qui merite
d'être rapportée ici , laquelle fait
remonter encore plus haut , le Culte de
Neptune dans cette Isle. Voici cette Inscription
exactement copiée sur l'Original
, gravée avec soin et avec les mêmes
Lacunes qui s'y trouvent par l'injure du
temps , mais que M. Roger Gale a heureusement
rétablies par de petits points
B aux
2074 MERCURE DE FRANCE
aux endroits qui ne sont pas assez visi .
bles et où la pierre est tronquée.
Ce Sçavant conjecture que les premieres
lettres qui manquent au commencement
de la septiéme ligne pouvoient être A
SACR. S. ou SACER . S. ( n'y ayant pas
assez de place pour un plus grand nombre
de lettres) pour dire A SACR is sunt ou
Sacerdotes sunt. Quoiqu'il en soit , cette
Inscription nous apprend qu'il y avoit
dans la grande Bretagne un Temple érigé
sous l'invocation de Neptune et sous celle
de Minerve , pour la conservation de la
Famille Imperiale , exprimée par le ter
me de Divine. DOMŪS DIVINAE.
L'Inscription apprend aussi que ce
Temple fut construit des deniers de la ,
Communauté ou du Corps des Maîtres
Charpentiers : Collegium Fabrorum , et des
autres Personnes qui pouvoient y être
admises , comme Ministres ou sous quelque
autre titre , cequi paroît être exprimé
par ces trois lettres D. S. D. de suo
dedicaverunt. Elle apprend encore que
Pudens , fils de Pudentinus , avoit donné
le fond sur lequel le Temple étoit bâti
Donante Aream Pudente Pudentini filio.
Et enfin que ce même Temple fut édifié
par l'autorité du Roy Cogidubnus , surnommé
Tibere-Claude , du nom de cet
Empereux
SEPTEMBRE. 1731. 2075
Empereur Romain , dont le Roy Breton
se faisoit honneur de prendre aussi la
qualité de Lieutenant ou de Viceroy dans
la Partie de la Grande Bretagne qui étoit
soumise à cet Empereur. Ex authoritate
Tiberii Claudii Cogidubni Regis Legati
Augusti in Britannia. C'est ainsi à peu
près que Cesar avoit établi Cavarinus
Roy des Senons , qui fut ensuite chassé
par les Siens.
Ce précieux Monument de l'Antiquité
Payenne fut trouvé à Chichester en 1723 .
·à quatre pieds sous terre , en creusant pour
faire une Cave dans la maison qui fait
le coin de la ruë de S. Martins- lane , en
tirant vers le Nord. Il est enclavé présentement
dans la muraille , sous une fenêtre
de la même Maison d'où il fut déterré.
C'est un Marbre gris , que M. Gale
croit avoir été tiré des Carrieres de Suffex .
Sa longueur est de six pieds, sur deux pieds
et trois quarts de largeur. Les lettres en
sont très-belles ; celles qui sont dans les
deux premieres lignes ont trois pouces de
longueur , et les autres ont deux pouces
un quart. Le mur du Temple * dont il
* Ily a plusieurs exemples d'un Temple consacré
à deux Divinitez. Jupiter et Minerve
avoient un Temple commun à Athenes près du
Trésor public, lequel leur étoit dédié sous le ritre
de CONSERVATEURS.Pausan,dans ses Atriques , & c.
Bij s'agit
2075 MERCURE DE FRANCE
s'agit et dont les Curieux ont examiné les
fondemens , avoit environ trois pieds
d'épaisseur .
Chichester où cette Inscription a été
trouvée , est une Ville d'Angleterre ,
qui n'est qu'à deux milles de la Mer, dont
un bras pouvoit anciennement arroser ses
Murailles. Elle est située assez près de
la Forêt d'Anderida , et de la Côte Meridionale
de l'Isle Britannique.
Minerve , dont il est parlé dans cette
Inscription , comme Inventrice des Arts,
étoit invoquée par tous les Artisans , selon
Lactance , ce qui donne lieu de
conjecturer qu'il y avoit peut-être auprès
de cette Ville un Arcenal pour la fabrique
des Vaisseaux , et que la Ville peut
avoir été autrefois beaucoup plus considerable
qu'on ne pense . On voit en effet
et aux environs les restes de trois grands
Chemins Romains qui y aboutissoient ,
et qui viennent de Porsthmouth, de Mid-,
surst et d'Arondel .
On
peut voir
l'explication
entiere
que
M.
Gale
a donnée
de cette
Inscription
dans
les
Transactions
Philosophiques
, ou
Journal
Anglois
, de l'Académie
Royale
de Londres
, page
379.
du
31. Octobre
1723.
la même
année
de sa découverte
.
* Instit
. Divin
. L. 1. P. 134,
Cet
SEPTEMBRE . 1731. 2077
Cet habile Académicien a fait là-dessus
plusieurs observations qui ne laissent rien
à desirer.
>
Pour revenir au Type de Neptune ,
qui paroît sur notre Médaille , Hygin
observe que ceux qui vouloient représenter
ce Dieu , lui mettoient ordinairement
un Dauphin à la main , ou sous le pied
croyant que c'étoit de tous les Poissons
celui qui lui étoit le plus agréable. Qui
Neptuno simulachrum faciunt Delphinum
aut in manu , aut sub pede ejus constituere
videmus , quod Neptuno gratissimum arbitrantur.
Cela se trouve conforme à la plûpart
des figures que nous avons de Neptune,
sur les Médailles de plusieurs Empereurs
et sur celles de quelques Villes Maritimes
qui représentent ainsi Neptune . Mais sur
les Médailles de Carausius , au lieu d'un
Dauphin , les Bretons ont affecté de mettre
sous les pieds de Neptune la Proie
d'un Vaisseau , pour montrer qu'ils avoient
mis leurs Vaisseaux et leurs Flottes sous
la protection d'une Divinité , laquelle
selon Diodote de Sicile , Livre s . avoit
trouvé l'Art de la Navigation , et de
mettre en Mer une Flotte entiere. Aussi
les Capitaines de Vaisseaux et les Matelots
, ne manquoient jamais avant que de
B iij mettre
3
2078 MERCURE DE FRANCE
mettre à la voile , d'adresser leurs voeux
et leurs prieres à Neptune , pour lui demander
une heureuse Navigation .
Nous avons dans Seneque , dans Plutarque
et dans Ciceron , là formule d'une
Priere que lui faisoient les Grecs avant
que de s'embarquer. Elle est toute des
plus courtes : Ορθαν αν ναῦν , ἀπαξ θανείν.
Les Latins l'ont tournée de la sorte. Quaaunque
Tempestas veniat , Neptune si averas
Navim sedens ad gubernaculum semper
rectam everte. » Divin Neptune , quelque
Tempête qui nous arrive , si vous
>> voyez que notre Vaisseau soit prêt à
» faire nauffrage ou à renverser , prenez
» vous-même le Gouvernail en main , et
" faites , par votre bonté , que notre Vaisseau
ne puisse jamais tomber que debout.
Aristide , dans un Hymne qu'il a composé
en l'honneur de Neptune , nous ap→
prend que les Fleuves , les Fontaines , et
en general toutes les Eaux étoient reverez
comme les plus grands et les premiers
Dieux de l'Antiquité. C'est pour cela que
le culte de Neptune étoit en grande veneration
chez les Grecs , sur tout dans les
Villes Maritimes. Ils avoient les Posidenies
, qui étoient des Fêtes instituées en
l'honneur de Neptune , dont elles portent
le nom . Ils avoient encore les Thynnées
SEPTEMBRE . 1731. 2079
3
nées , qui étoient des autres jours de Fê
tes où les Pêcheurs lui immoloient des
Thons. Tertullien , dans son Traité des
Spectacles , nous apprend que les Jeux
Isthmiens si celebres dans la Grece ,
( quoique le Victorieux n'y fût couronné
que d'Ache ou de Pin ) étoient
consacrez à Neptune. Ces Jeux tiroient
leur nom de Listhme de Corinthe , où
ils furent d'abord celebrez , selon Pausanias.
A Rome on faisoit la Fête de Neptune
le dixième des Kalendes de Septembre ,
sous le nom de Neptunales , et on lui
immoloit un Taureau , selon Virgile.
Taurum Neptuno , Taurum tibi pulchey
Apollo.
Homere avoit dit la même chose dans
le cinquiéme Livre de l'Odissée.
Cyaneos crines Taurus mactetur habenti.
On voit par ce Vers qu'Homere dis
tingue Neptune des autres Dieux par ses
cheveux bleus.
Arnobe , dans son huitiéme Livre contre
les Gentils , donne des yeux bleus à
Neptune. Neptunus oculis glaucis . En quoi
il est du sentiment de Lucien , mais ce
dernier lui donne des cheveux noirs ,
B iiij
contre
2080 MERCURE DE FRANCE
contre l'autorité d'Homere. Le bleu étoit
aussi la couleur de son Manteau , selon
Phurnutus , Neptuni vestis cyanea .
C'est pour cela que le fils de Pompée
prit une robbe
de cette couleur
après
son Expedition
Maritime
. Ce même General
de la Flotte Romaine
dans le passage
d'Aurelius
Victor
, rapporté
ci- dessus,
lui sacrifia
plusieurs
Taureaux
et un Cheval,
Eumque
bobus auratis et equo placavit.
On sçait que le cheval
étoit consacré
à
Neptune
, comme
à la Divinité
qui l'avoit
fait sortir de la terre d'un coup de
Trident
.
•
Tuque , cui prima frementem
Fudit equum Magno tellus percussa Trie
dente. Virg.
C'est aussi pour cette raison qu'on avoit
placé la Statuë de Neptune dans le Cirque
; mais par malheur Auguste y ayant
fait une espece de nauffrage , il en fit
-ôter la Statue , pour punir , en quelque
maniere , ce Dieu du peu de soin qu'il
avoit pris de sa personne.
•
Nous avons dans les Médailles de Gallien
deux Revers differens qui nous apprennent
que le Cheval Marin et le Ca
pricorne étoient aussi consacrez à Neptune.
Ces deux Types ont la même Lẹ-
gende
SEPTEMBRE. 1731. 208r
gende , NEPTUNO Conservatori AvGusti ;
Legende qui est commune avec la figure
du Cheval Marin . Quatre de ces Animaux
tirent ordinairement son Char sur
les Médailles de quelques autres Empereurs
; mais les Médailles de Gallien avec
Ia figure du Capricorne , sont très- rares
ou plutôt elles n'avoient pas encore été
connuës. M. l'Abbé de Rothelin en a
une, dans son Cabinet , et j'en possede une
autre ; je n'en parle ici que parce que
cette Médaille n'a encore été publiée ,
que je sçache , par aucun Antiquaire.
A l'égard du Trident sur lequel Neptune
s'appuye de la main gauche dans
notre Médaille , c'est , comme l'on sçait
le Sceptre qui lui fut fabriqué par les
Cyclopes , lorsque l'Empire de la Mer
Iui échut en partage.
Commodien , assez mauvais Poëte du
temps de Constantin , dit que Neptune
porte un Trident pour percer les Poissons.
Neptunum facitis Divum ex Saturno pronatum
Et Tridentem gerit , ut Pisces suffigere possit
Mais Prudence pense plus noblement,
forsqu'il dit que le Trident désigne la
triple qualité de l'Eau , qui est d'être liquide
, féconde , et potable. Tridentem
B. v verò
2082 MERCURE DE FRANCE
vero ob hanc rem gerere pingitur, quod aquarum
natura triplici virtute fungatur , id est
liquida , foecunda , potabili.
Je n'entrerai point ici dans un plus
grand détail sur le culte qu'on rendoit à
Neptune , principalement dans la Grece
et dans la Grande Bretagne en particulier..
Je n'ay pas dessein aussi de rapporter tout
ce que les Médailles , les Marbres , les
Pierres gravées , les Statuës et les autres
Monumens antiques , pourroient nous
fournir sur ce sujet. Tout ce que j'ay dit,
Milord , me paroît suffire pour l'explication
de cette Médaille singuliere de Carausius
, qui ne se trouve jusqu'à present
que dans votre Cabinet , et qui fut frappée
au sujet de la défaite de la Flotte de Maximien
Hercules , par le même Carausius.
J'ajoûte que c'est un Monument des plus
glorieux et des plus interessans qui puisse
se trouver pour le Royaume de la Gran
de Bretagne. Je suis avec beaucoup de
Respect , &c.
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Résumé : EXPLICATION d'une Médaille antique trés- singuliere de CARAUSIUS, Empereur des Anciens Bretons au temps de Diocletien et de Maximien Hercule, adressée à Mylord Comte de Pembrok, Pair d'Angleterre &c. Par M. Genebrier, Docteur en Medecine.
Le texte présente une médaille antique de l'empereur Carausius, un souverain des anciens Bretons ayant régné à l'époque de Diocletien et de Maximien Hercule. Cette médaille, conservée dans le cabinet de Mylord Comte de Pembrok, est en petit bronze et bien conservée. Elle porte sur une face la tête de Carausius couronnée de rayons, avec l'inscription 'IMP. CARAUSIUS P. F AUG.' Sur l'autre face, on voit Neptune et Carausius se donnant la main, avec Neptune appuyé sur son trident et Carausius sur une pique. La légende indique 'VBERITAS AUG.' et 'R. S. R.' dans l'exergue. Cette médaille se distingue des autres types de médailles impériales, qui représentent généralement une femme tenant une bourse et une corne d'abondance. La représentation de Neptune et Carausius se donnant la main symbolise la maîtrise de la mer et l'abondance apportée par la navigation et le commerce maritime. Cette scène célèbre la victoire navale de Carausius sur la flotte de Maximien Hercule, soulignant son contrôle sur les mers et les richesses océaniques. Le texte mentionne également une inscription antique trouvée à Chichester, en Angleterre, dédiée à Neptune et Minerve. Cette inscription prouve le culte rendu à ces divinités par les anciens Bretons et révèle l'existence d'un temple construit par la communauté des maîtres charpentiers sous l'autorité du roi Cogidubnus. Le culte de Neptune était particulièrement vénéré dans les villes maritimes, et les marins lui adressaient des prières pour une navigation sûre. Les Jeux Isthmiens, célébrés en Grèce en l'honneur de Neptune, étaient couronnés d'ache ou de pin et tiraient leur nom de l'Isthme de Corinthe. À Rome, la fête de Neptune, appelée Neptunales, se déroulait le 21 août et incluait le sacrifice d'un taureau. Homère et Arnobe décrivent Neptune avec des cheveux bleus, tandis que Lucien lui attribue des cheveux noirs. La couleur bleue était également associée à son manteau. Neptune était souvent représenté avec un trident, symbole de son pouvoir sur les mers. Le cheval, sorti de la terre par un coup de trident, était également consacré à Neptune. À Rome, une statue de Neptune était placée dans le Cirque, mais fut retirée après un incident impliquant Auguste. Des médailles, notamment celles de Gallien, montrent Neptune avec un cheval marin ou un capricorne, soulignant son lien avec les mers. Le trident de Neptune, fabriqué par les Cyclopes, symbolisait les trois qualités de l'eau : liquide, féconde et potable.
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5
p. 2083-2085
LE TRIOMPHE D' AMPHITRITE, CANTATE.
Mots clefs :
Hymen, Regard languissant, Soupir doux, Vainqueurs
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texteReconnaissance textuelle : LE TRIOMPHE D' AMPHITRITE, CANTATE.
LE
TRIOMPHE
D' AMPHITRITE ,
CANTATE.
Depuis le jour qu'aux yeux d'une brillant
Cour ,
Venus parut et si fiere et si belle ,
Lorsque l'Hymen de concert avec ellt ,
La menoit à Cythere établir son séjour ,
Amphitrite rêveuse , inquiéte et jalouse ,
Des honneurs qu'on rendoit à la nouvelle épouse,
Pressoit le Dieu des Eaux de vouloir à son tour ,
Attacher à son Char l'Hymenée et l'Amour ;
Un regard languissant, un soupir doux et tendre
Qui s'échappoit à tout moment ,
De ses souhaits instruisoit son Amant ,
Et Neptune amoureux , ne pouvant se deffendrej
Contre un si juste empressement,
Ne différa plus de s'y rendre.
Que ne peuvent point sur nos coeurs ,
Les appas riants et flatteurs ,
D'une Nymphe jeune et charmante ?
Ce sont de trop puissans vainqueurs ,
Tout nous séduit , tout nous enchante.
B. vj Hymen
2084 MERCURE DE FRANCE
Hymen , que ton joug est charmant ,
Quand c'est la Maîtresse et l'Amant
Qui s'y sont engagez sans peine ;
Mais il n'est heureux qu'un moment ;
Si l'Amour n'en serre la chaîne .
Que ne peuvent point , &c .
'Amphitrite paroît sur la face des Eaux ,
Là, brille de son Char , la pompe triomphale ;
1
Les Nymphes quittent leurs Roseaux ,
Pour venir de Venus honorer la Rivale ;
Les Tritons , tous les Dieux des Mèrs ,
S'assemblent pour la voir des bouts de l'Univers;
Eblouis , charmez de sa gloire.
Leurs cris de joye éclattent jusqu'aux Cieux,
Tous à l'envi celebrent sa victoire ,
Par ce Concert mélodieux.
Triomphez , aimable Déesse ;
Joüissez des plus grands bienfaits,
Qu'a mérité votre tendresse ,
Et qui sont dus à vos attraits.
De l'Element le plus terrible ;
Les Jeux , les Ris et les Amours >
Ont fait un séjour si paisible ,
Que le calme y regne toûjours.
Triomphez , aimable Déesse , &c.
Cc's
SEPTEMBRE. 1731. 2005
Ces transports , ces chants d'allegresse ,
Qu'on entend redoubler sans cesse
Ce triomphe éclatant , ce superbe appareil ,.
Troublent l'Aurore à son réveil ,-
SEt
les brulants coursiers du Dieu de la lumiere:
Sortant de l'humide Element ,
Apeine ouvrent-ils leur paupiere ;
Qu'ils sont saisis d'étonnement.
Les Aquilons retiennent leur haleine
Ravis de cet enchantement ;
1 disparut , helas ! et la liquide Plaine ,
Ne redonna jamais ce spectable charmant.
L'Amour forcé ne sçauroit plaire ;
Eût-il mille fois plus d'appas ;
Confus , il s'envole à Cythere ,,
L'Amour ne se commande pas
Les plaisirs d'une amour nouvelle
Sont des plaisirs plus ravissants ,
Chaque Printemps les renouvelle ,
Ceux de l'Hymen sont languissants.
L'Amour forcé ne sçauroit plaire , &Co
TRIOMPHE
D' AMPHITRITE ,
CANTATE.
Depuis le jour qu'aux yeux d'une brillant
Cour ,
Venus parut et si fiere et si belle ,
Lorsque l'Hymen de concert avec ellt ,
La menoit à Cythere établir son séjour ,
Amphitrite rêveuse , inquiéte et jalouse ,
Des honneurs qu'on rendoit à la nouvelle épouse,
Pressoit le Dieu des Eaux de vouloir à son tour ,
Attacher à son Char l'Hymenée et l'Amour ;
Un regard languissant, un soupir doux et tendre
Qui s'échappoit à tout moment ,
De ses souhaits instruisoit son Amant ,
Et Neptune amoureux , ne pouvant se deffendrej
Contre un si juste empressement,
Ne différa plus de s'y rendre.
Que ne peuvent point sur nos coeurs ,
Les appas riants et flatteurs ,
D'une Nymphe jeune et charmante ?
Ce sont de trop puissans vainqueurs ,
Tout nous séduit , tout nous enchante.
B. vj Hymen
2084 MERCURE DE FRANCE
Hymen , que ton joug est charmant ,
Quand c'est la Maîtresse et l'Amant
Qui s'y sont engagez sans peine ;
Mais il n'est heureux qu'un moment ;
Si l'Amour n'en serre la chaîne .
Que ne peuvent point , &c .
'Amphitrite paroît sur la face des Eaux ,
Là, brille de son Char , la pompe triomphale ;
1
Les Nymphes quittent leurs Roseaux ,
Pour venir de Venus honorer la Rivale ;
Les Tritons , tous les Dieux des Mèrs ,
S'assemblent pour la voir des bouts de l'Univers;
Eblouis , charmez de sa gloire.
Leurs cris de joye éclattent jusqu'aux Cieux,
Tous à l'envi celebrent sa victoire ,
Par ce Concert mélodieux.
Triomphez , aimable Déesse ;
Joüissez des plus grands bienfaits,
Qu'a mérité votre tendresse ,
Et qui sont dus à vos attraits.
De l'Element le plus terrible ;
Les Jeux , les Ris et les Amours >
Ont fait un séjour si paisible ,
Que le calme y regne toûjours.
Triomphez , aimable Déesse , &c.
Cc's
SEPTEMBRE. 1731. 2005
Ces transports , ces chants d'allegresse ,
Qu'on entend redoubler sans cesse
Ce triomphe éclatant , ce superbe appareil ,.
Troublent l'Aurore à son réveil ,-
SEt
les brulants coursiers du Dieu de la lumiere:
Sortant de l'humide Element ,
Apeine ouvrent-ils leur paupiere ;
Qu'ils sont saisis d'étonnement.
Les Aquilons retiennent leur haleine
Ravis de cet enchantement ;
1 disparut , helas ! et la liquide Plaine ,
Ne redonna jamais ce spectable charmant.
L'Amour forcé ne sçauroit plaire ;
Eût-il mille fois plus d'appas ;
Confus , il s'envole à Cythere ,,
L'Amour ne se commande pas
Les plaisirs d'une amour nouvelle
Sont des plaisirs plus ravissants ,
Chaque Printemps les renouvelle ,
Ceux de l'Hymen sont languissants.
L'Amour forcé ne sçauroit plaire , &Co
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Résumé : LE TRIOMPHE D' AMPHITRITE, CANTATE.
Le texte présente la cantate 'Le Triomphe d'Amphitrite'. Amphitrite, jalouse des honneurs rendus à Vénus lors de son mariage, souhaite que Neptune célèbre leur union. Ému par ses regards et soupirs, Neptune accepte. La cantate célèbre ensuite le triomphe d'Amphitrite, qui apparaît sur les eaux avec une pompe triomphale, accompagnée des nymphes, des tritons et des dieux des mers. Tous célèbrent sa victoire et la paix qu'elle apporte. Cependant, le texte souligne que l'amour forcé ne peut plaire et que les plaisirs d'un nouvel amour sont plus ravissants que ceux de l'Hymen. L'Amour est décrit comme incontrôlable et les plaisirs de l'Hymen comme languissants.
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6
p. 2086-2104
EXTRAIT d'une Lettre contenant la Relation de la défaite des Natches (a) par M. Perier, Commandant General à la Loüisianne, au mois de Janvier 1731.
Début :
Notre General jugeant qu'il étoit necessaire avant de rien entreprendre, [...]
Mots clefs :
Défaite, Chactas, Natches, Louisiane, Traités de commerce et d'alliance, Guerre, Détachement des troupes de la Marine, Sauvages, Rivière-Rouge, Embuscades
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre contenant la Relation de la défaite des Natches (a) par M. Perier, Commandant General à la Loüisianne, au mois de Janvier 1731.
EXTRAIT d'une Lettre contenant la
*
Relation de la défaite des Natches (a)
par M. Perier, Commandant General à
la Louisianne , au mois de Janvier 1731 .
No
,
Otre General jugeant qu'il étoit ne
cessaire avant de rien entreprendre ,
de s'éclaircir avec les Chactas , Nation
Sauvage la plus considerable de la Loüisianne
sur les differens bruits qui s'étoient
répandus de leur mauvaise volonté
pour nous , se rendit à la Mobile , Fort
occupé par les Françóis , à la Côte de l'Est
de la Louisianne , où il avoit fait avertir
leurs Chefs de se rendre dans les premiers
jours de Novembre , et les ayant trouvez
bien disposez , il renouvella en la manie◄
re ordinaire , les Traitez de Commerce et
d'Alliance que nous avons depuis longtemps
avec eux , et leur proposa de re
connoître pour Grand- Chef de la partie
du Ouest , qu'on appelle Bas- Chacra , le
Chef des Castacha , Village de la mêmę
( a ) C'est une Nation Sauvage , qui au mois
de Decembre 1729. massacra les François qui
étoient établis auprès d'elle , quoiqu'elle fût en
paix avec eux.
Nation,
SEPTEMBRE. 1731 2087
Nation. Ils l'accepterent avec plaisir et
promirent de nous renvoyer le reste des
Negres qu'ils avoient pris sur les Natches
, et de payer tout ce qu'ils devoient
aux François , avec lesquels ils avoient
négocié. Ils lui demanderent ensuite d'aller
en guerre contre les Natches , mais i'
leur répondit seulement qu'il les feroit
avertir s'il avoit besoin d'eux , étant bien
résolu de ne s'en pas servir pour les tirer
de l'erreur où ils étoient , que nous ne
pouvions nous passer de leur secours , et
que sans leur appui nous serions obligez:
d'abandonner nos établissemens.
Après les avoir renvoyez chez eux
il partit pour la nouvelle Orleans , où il
arriva le 13. Novembre 1730. il y trouva
M. de Salvert son frere , Lieutenant de
Vaisseau , commandant un Détachement
des Troupes de la Marine , très - avancé
dans les préparatifs dont il l'avoit chargé
pour aller attaquer les Natches. L'Equipage
du Vaisseau du Roi , qu'il commandoit
, y avoit travaillé fort utilement , et
on peut assurer que sans lui nous n'eussions
pas été si-tôt prêt à marcher contre
l'Ennemi .
Le 9. Decembre M. de Salvert partit à
la tête du Détachement de la Marine ,
qui formoit un petit Bataillon , il avoit
ordre
2088 MERCURE DE FRANCE
ordre d'attendre au Village de Carlestin
Habitations françoises , situées à environ
15. lieües au-dessus de la nouvelle Orleans
, en montant le Fleuve , le General
qui le joignit le 13. avec les Troupes de
la Colonie et les Munitions de guerre.
Le 14. ils marcherent ensemble jus
qu'aux Bayagoulas , où ils resterent quatre
jours pour attendre le Détachement
des Milices du Pays , commandé par M. de
Benac , Officier retiré du Service , qui
s'est établi dans la Colonie , et les grands
Bateaux chargez de vivres qui ne pou
voient suivre..
Le General avoit divisé ses forces en
trois Corps , pour éviter toute tracasseric
et donner plus d'émulation . Le premier
étoit commandé par M. de Salvert ; il
étoit composé de iso . Soldats de la Marine
et d'environ 40. hommes de son
Equipage . Le second étoit commandé par
le Baron de Crenay , Lieutenant - Colo❤
nel , et étoit composé d'un Détachement
de 150. hommes des Troupes de la Co-
Ionie ; et le troisième étoit commandé par
le sieur de Benac , et étoit composé de
120. habitans qui s'étoient offerts d'aller
à la guerre
.
Le 22. tout étant rassemblé , on se mit
en marche et on fat coucher à Manchac
où
SEPTEMBRE. 1731. 2089
ù le sieur de Laye , Habitant , attendoit
le General , il lui dit que s'il vouloit se
servir des Sauvages Tonnicas , petite Nation
située sur les bords du Fleuve ,
environ 70. lieuës au - dessus de la nouvelle
Orleans , en suivant le Fleuve , il
étoit necessaire qu'il se rendît lui -même
chez eux pour les faire marcher ; ce qu'il
fit en laissant la conduite de la petite
armée à M. son frere , qui malgré la
neige et le verglas , le joignit aux Tonnicas
le 27.
Le 28. il continua sa marche jusqu'à
l'entrée de la Riviere Rouge , (a ) où étoit
le rendez - vous general. Le Vaisseau le
Prince de Conty , sur lequel on avoit fai ■
faire des Fours , y arriva le même jour.
Le General fut obligé de rester jusqu'au .
3. de Janvier aux Tonnicas pour leur
faire achever leurs préparatifs de guerre ,
ils étoient d'autant plus lents , que la
peur les avoit saisis sur la nouvelle qu'ils
venoient d'apprendre que le sieur de Coulange
, ( Canadien , frère d'un Officier des
Troupes de la Colonie , et fils du sieur
de Livilliers , Officier des Troupes de Ca
nada , ) qui avoit été envoyé dans une
grande Pirogue , armée de zo. hommes :
(a) A 9. lieues au- dessus du Village des Tonnicas
, situé à present au portage de la Croix .
grande
2090 MERCURE DE FRANCE
volontaires Sauvages , et Negres libres ,
pour faire porter les ordres du General
aux Arkansas , avoit été attaqué à quelques
journées de chez eux par les Natches , qui
lui avoient tué ou blessé la moitié de ses
gens , parmi lesquels les sieurs de la Touche
,Beaulieu et Cochart, ( le premier, Gen--
tilhomme Breton ; le second , Officier de
Marine de la Compagnie , ) ont eu le
malheur de se trouver au nombre des
morts. Le sieur de Coulange y reçût deux
coups de fusil , dont un au travers du
été mortel. Cette accorps
, qui n'a pas
tion , qui ne décidoit de rien , avoit cependant
si fort abattu le courage de nos
Sauvages , qu'il ne s'en trouva que iso .
des plus braves à l'Armée , les autres s'étant
retirez peu à peu sous differens pré
textes.
Le 4. Janvier , le General joignit l'Ar
mée à la Riviere Rouge , où il trouva les
Détachemens des Garnisons des Natches
et Natchitoches (a) arrivez , et la division
des Habitans , partie pour se montrer à
la hauteur des Natches , (b) afin de faire
(a) Forts François qui portent le nom des Na→
tions Sauvages auprès desquelles ils ont éte cons
truits.
(b) C'est la Nation même qui depuis qu'elle se
vit menacée d'être châtiée par les Frauçois , aban--
croire
SEPTEMBRE . 1731. 209%
croire à leurs découvreurs s'ils nous rencontroient
, que notre intention étoit de
les aller attaquer par le Fleuve , quoique
notre parti fût pris , d'aller par la Riviere
Rouge.
Le 11. l'Armée entra dans cette Riviere
pour chercher l'Ennemi , car nous n'avions
pû sçavoir depuis 9. mois l'endroit
positif où les Natches avoient fait leur
Fort , quoique le General y eût envoyé
zo . Partis differens , tant forts que foi
bles ; ensorte que ce ne fut que sur le
peu de connoissance qu'il avoit tirée d'un
enfant de 12 à 13. ans , qui avoit deserté
de cette Nation , qu'il se hazarda à l'aller
- chercher , contre le sentiment general des
Sauvages , vers la Riviere Rouge , dans ,
des Pays marécageux et coupez , jusques
là inconnus à nos Sauvages du Fleuve .
Cependant l'Armée guidée par l'esperance
et encouragée par son General dans
les peines inexprimables que le mauvais
temps et la difficulté du Pays, lui faisoient
souffrir , se trouva le 19. sans le sçavoir ,
précisement à une lieuë du Fort de Valeur
, c'est le Fort de la Nation Natches.
donna le lieu de sa demeure ordinaire et se transporta
dans un autre endroit qu'elle croyoit inconnu
à tous autres Sauvages et inaccessibles aux
François.
Le
2092 MERCURE DE FRANCE
Le General prenoit toutes sortes de me
sures pour éviter les embuscades qu'il
étoit aisé de nous dresser , y ayant apparence
que les Ennemis sçavoient notre
marche , puisque le 18. quelques - uns de
nos Sauvages qui étoient allez à la découverte
, ( car ils s'étoient un peu rassurez
par l'exemple des François qu'ils voyoient
marcher courageusement par terre ) étant
venus avertir qu'ils avoient appefçû un
. Parti de Natches à deux lieuës au - dessous
de nous , de l'autre côté de la Riviere,
le General y envoya un Détachement de
François et de Sauvages , pour tâcher de
le surprendre , mais on ne put y réussir
par la jalousie de six Sauvages Houmas ;
qui tirerent dessus avant que nos gens
fussent arrivez ; ensorte que ce Parti prie
la fuite et s'éloigna en peu de temps. Si
nous avions pû l'attaquer , on se flattoit
de pouvoir faire quelque prisonnier et
d'apprendre des nouvelles positives du
lieu où la Nation s'étoit retirée .
Nous restâmes le 19. dans la même in
quietude , quoique nos Sauvages vissent
encore plusieurs Natches , dont ils tuerent
un homme et une femme , mais le
20. le General ayant envoyé à la découverte
un Parti d'Habitans et de Sauvages,
soutenus par les Compagnies de Mrs de
la
S
SEPTEMBRE. 1731. 2093
la Giroüardiere et de Lusser ; le premier
Capitaine d'une Compagnie de la Marine,
l'autre Capitaine d'une Compagnie des
Troupes de la Colonie. On vint lui dire
une demie heure après leur départ qu'ils
se trouvoient dans un chemin battu ;
aussi-tôt on ne douta point que ce ne fût
celui du Fort , et on se prépara à marcher.
Le General fit monter les Bateaux vis-àvis
cet endroit , et ayant ordonné au Baron
de Crenay d'y rester avec 100. hommes
, il se tenoit prèt à marcher avec
M. Salvert , pour aller investir le Fort
dès qu'il en auroit quelque nouvelle. A
peine les Bateaux et Pirogues furent- ils
arrivez l'on entendit la Mousqueteque
rie du Fort et celle des Escarmoucheurs
du Détachement qui avoit toûjours suivi
le chemin battu ; dans l'instant on marcha
et on rencontra les sieurs Marin et
Outlas , qui venoient dire que nos gens
avoient trouvé le Fort , nous y arrivâmes
en une heure de marche par un Pays
tout couvert de bois ; dès que nous
l'apperçûmes , le General fit battre aux
champs . A ce bruit les Tonnicas se sentant
soutenus , attaquerent quelques Cases
aux environs du Fort , d'où ils chasserent
les Natches et y mirent le feu."
Pendant ce temps M. de Salvert marcha
pan
094 MERCURE DE FRANCE
1
35.
la droite avec partie des Troupes
par
et le General par la gauche pour rejoindre
Mrs de la Giroüardiere et de Lusser,
Il les trouva qui s'étoient avancez à
toises du Fort , à la faveur de plusieurs
arbres , où ils resterenr jusqu'à ce qu'il
leur dit de venir se mettre derriere une
butte qui étoit à 120. toises du Fort , lieu
qui lui étoit très- favorablement situé pour
mettre une partie de notre Camp à cou
vert. Il fut aussi - tôt joindre M. de Salvert
, et ils passerent ensemble une petite
Riviere ou gros Ruisseau , auprès duquel
les Natches avoient construit leur Fort ;
ils étoient suivis par les Compagnies de
Dartaguette et de Sanzei , la premiere
de la Colonie , l'autre , de la Marine. Ils
rangerent ce Fort de très-près , à la faveur
de quelques Cabanes , et après avoir
reconnu le terrain , ils firent l'un et
l'autre le tour du Fort par les derrieres
jusqu'à la butte dont on vient de parler,
et ils convinrent d'y établir le Quartier
general , par rapport à la facilité qu'il y
avoit de recevoir là nos besoins qui venoient
du bord de la Riviere , sans que
l'on fût obligé de passer le Ruisseau.
Le 21. le General envoya ordre au Baron
de Crenay de venir le joindre pour
commander l'attaque de la gauche , et le.
même
SEPTEMBRE. 1731 2095
même jour il fit arborer un Drapeau blanc
pour demander aux Sauvages qu'ils eussent
à lui remettre des Negres qu'ils
avoient pris ; ils tirerent sur le Drapeau
en disant à l'Interprete qu'ils ne vouloient
pas parler à des chiens comme nous.
Sur les deux heures un de nos Mortiers
de bois arriva. ( a) On jetta sur le champ
quelques Grenades Royales , dont deux
tomberent dans le Fort , sur une de leurs
maisons et y mit le feu. Après qu'elles
eurent crevé , nous entendîmes de grands
cris et des pleurs de femmes et d'enfans,'
ce qui nous fit redoubler notre feu de
Mousqueterie et de double Grenade , mais
malheureusement nos Mortiers furent
trop tôt hors de service par les cercles
qui manquerent.
A 5. heures et demie du soir , les Natches
firent une sortie sur un de nos Postes, oùil
y avoit 15. hommes retranchez derriere un
gros arbre qui n'étoit qu'à 20 toises du
Fort ; ils le prirent à revers et tuerent un
Grenadier de la Marine, Un Sergent des
Troupes de la Colonie y reçut un coup
de fusil qui lui perça les deux épaules.
Dès que nous eûmes connoissance de
(a) C'étoit des Mortiers portatifs , que le sieur
Baron , Ingenieur , avoit inventez , ils étoient
faits d'un bois fort dur , et çerçlez de fer.
cette
20961 MERCURE DE FRANCE
cette sortie , nous crûmes que les Ennemis
alloient tenter de se sauver dans les
Bois par l'intervale du Camp des Habitans
au nôtre , ce qui détermina M. Salvert à
prendre la Compagnie de Lusser , pour
les couper. Mais voyant qu'ils n'en vouloient
qu'à notre Poste , il donna dessus
avec quelques Habitans et les obligea de
rentrer avec précipitation dans leur Fort.
Dans cette Action le sieur Dehaye ,
Capitaine de Milice , reçut deux coups.
de fusil , et un Negre fut tué.
A 8. heures du soir , quoique le tems
fût très- mauvais , le General fit ouvrir de
son côté la Tranchée à 30. toises du Fort,
et nous ne la poussâmes qu'à 15. toises,
faute de Gabions.
Le 22. on fit venir le Canon et le der
nier Mortier ; nous en tirâmes quelques
coups sur la fin du jour en redoublant
le feu de notre Mousqueterie , qui ne discontinua
point toute la nuit.
Avant que de continuer le travail de
la Tranchée , le General fit visiter sur le
soir une maison forte , qui enfiloit nos
travaux ; il envoya un Officier avec 12 .
Grenadiers et autant de Sappeurs armez
pour s'en emparer , mais ils furent repoussez
par le feu des Ennemis , qui étoit
extrémement vif. M. de Salvert y accou
rug
SEPTEMBRE. 1731. 2097
rut ; et se mettant à la tête des Assaillants
, il recommença si vivement l'attaque
, qu'en un quart d'heure il força l'Ennemi
d'abandonner la maison . Il trouva
que c'étoit une espece de redoute à l'épreuve
du coup de fusil , avec des meurtrieres
tout autour ; il la fit garder , jugeant
qu'elle serviroit bien à deffendre la
tête de notre Tranchée.
En effet le 23. nous poussâmes trèsvigoureusement
le travail de la Tranchće,
à la faveur de cette redoute , de façon que
le General comptoit achever le lendemain
la communication de ses Travaux avec
ceux de M. le Baron de Crenay , qui de
son côté travailloit aussi avec beaucoup
de vigueur.
Le 24. les Natches voyant que nous
les serrions de fort près , et se trouvant
fort incommodez par nos doubles Grenades
et par le Canon , ( quoique notre
petite Artillerie ne tirât que de loin en
Loin , ) ( a ) arborerent un Drapeau blanc
7. heures du matin , et nous envoyeà
(a ), Ils avoient bien trouvé le secret de se garantir
du Canon et de la Mousqueterie , en faisant
des trous en terre , dans lesquels te tenoient
leurs femmes et leurs enfans , et où ils se reposoient
eux-mêmes , mais ces trous étant ouverts
par le haut , les Grenades ou leurs éclats qui y
tomboient y causoient beaucoup de desordre.
C rent
2098 MERCURE DE FRANCE
rent un Sauvage qui parloit un peu François.
Le General lui dit qu'il ne les écouteroit
point qu'ils ne lui eussent renvoyé
tous les Negres qui étoient dans le Fort.
Ce Député retourné , on vit arriver avec
lui un moment après 19. Negres et une
Negresse , qui rapporterent que six autres
Negres étoient à la Chasse avec des Natches
, et que le reste avoit été tué. Le General
dit au même Sauvage qu'il ne vou
loit donner sa parole sur rien qu'il n'eût
les Chefs de sa Nation dans son Camp ;
après quoi il le renvoya.
Il vint ensuite un autre Sauvage nommé
S. Côme , (a) mais il le renvoya aussi
sans l'entendre , en lui disant , que si le
Grand - Chef, celui de la Farine et lui (b)
ne venoient pas bien - tôt ensemble , il-fe-
(a ) Quand les Sauvages sont bien avec les
François , ils se font honneur de prendre des
noms que ceux- cy portent.
(b) Avant que cette Nation eût frappé les François
, elle étoit divisée en 5. Villages , le premier
nommé la Valeur ; le 2. la Farine ; le 3 ° . la
Pomme ; le 4. les Gris , et le se . le grand Village
.Chaque Village avoit son Chef, et cependant
tous étoient soumis à un Grand - Chef , et tous
ces Chefs particuliers s'appelloient Soleil par Excellence
; ces Sauvages ayant une dévotion toute
particuliere pour cet Astre , en l'honneur duquel
ils entretenoient un feu perpetuel.
ne
SEPTEMR E. 1731. 2099
-
roit recommencer à tirer sur eux . Malgré
le mauvais temps ils se rendirent à
notre Camp sur les 4. heures du soir ; on
les conduisit au General ; ils l'aborderent
avec toutes les façons qui parmi eux peuvent
marquer le repentiret la soumission,
et ils dirent qu'ils ressentoient la grandeur
du crime qu'ils avoient commis ,
qu'ils n'osoient demander la vie , mais
qu'ils s'estimeroient heureux en mourant,
si on vouloit l'accorder à leurs femmes
et à leurs enfans.
Le General leur répondit qu'il la donneroit
à tous ceux de la Nation , même
aux hommes qui se rendroient à lui le
lendemain , mais que passé ce jour là , il
feroit bruler ceux qui ne profiteroient
pas de la grace qu'il vouloit bien leur
faire ; ils répliquerent que sa résolution
étoit juste. Cependant à minuit le Chef
de la Farine , qui étoit dans une Tente
gardée par 12. hommes , tant François
que Sauvages des plus alertes , doutant
de la parole du General , se sauva à la faveur
de la nuit , qui étoit la plus obscure
que l'on ait jamais vûë , et du temps effroyable
qu'il faisoit , la pluye tombant
si furieusement , qu'il falloit être Sauvage
et craindre le bucher pour tenir dehors ;
on tira sur lui sans l'atteindre.
Cij Le
2100 MERCURE DE FRANCE
Le 25. quoique le temps continuât d'être
mauvais , ( ce qui nous incommodoit
extrémement ) la femme du Grand- Chef
et sa Famille , sortirent le matin du Fort
avec 450. femmes ou enfans , et vinrent
se rendre. A l'égard des hommes , ils ne
venoient que l'un après l'autre , ensorte
que le soir il en restoit encore dans le
Fort environ 20. qui demanderent qu'on
les laissât jusqu'au lendemain , ce qui leur
fut accordé , parce que le temps ne permettoit
pas de les aller prendre. Nous
étions alors entre deux eaux ; car là pluye
ne cessa que vers les 9 , heures du soir. A
8. he es , presque tous ceux qui étoient
restez dans le Fort s'évaderent. Le quartier
des Habitans s'en apperçut ,
fut impossible ni de tirer sur eux un seul
coup de fusil , ni de les faire poursuivre
par nos Sauvages , l'eau du Ciel nous ayant
réduits en tel état que nos gens ne pouvoient
ni marcher , ni faire usage de leurs
armes. Cependant la pluye ayant cessé
nous entrâmes dans le Fort , où nous
trouvâmes seulement deux hommes et
une femme , et nous apprîmes que ceux
qui s'étoient enfuis , étoient au nombre
de 16. hommes et de 4. femmes.
mais il
Le General fit ensuite le recensement
de ses Prisonniers qu'il avoit résolu pour
l'exemple
SEPTEMBRE. 1731. zioł
;
l'exemple d'envoyer dans une autre Colonie
pour y être vendus comme Esclaves
; et voyant qu'il ne se trouvoit que
45. hommes , il demanda ce que les autres
étoient devenus , parce que cette Nation
devoit être forte d'envirom 500. Guerriers
,lorsqu'elle surprit le Poste François .
le principal d'entr'eux dit qu'ils avoient
perdu du monde dans cette malheureuse
Action , qu'ensuite les Partis des Nations
Sauvages qui sont dans notre Alliance ,
les ayant attaquez en differens endroits ,
et nous-mêmes les ayant assiegez dans
leurs anciens Forts , ils y avoient encore
fait de grandes pertes que depuis s'étant
venus établir dans l'endroit où nous venons
de les prendre , la fatigue du chemin
et le mauvais air du lieu , avoient
fait périr par maladie plus de la moitié
de leurs gens. Que tandis qu'ils souffroient
tant de miseres , les Partis de nos Sauvages
leur avoient détruit peu à peu et en
differens Cantons beaucoup de Guerriers,
que nous venions de leur en tuer encore
un grand nombre en les forçant de se rendre
; et qu'enfin il n'en restoit point d'autres
que ceux que l'on voyoit prisonniers ,
que les 16. qui s'étoient sauvez du Fort ,
et qu'un très- petit nombre qui étoit à la
Chasse , lorsque nous les avons assiegez
C iij .
il
2102 MERCURE DE FRANCE
dizil
fut facile de juger que le
compte
Sauvage étoit juste , et le General en parut
content.
Le lendemain 26 , nos Sauvages qui
étoient en course , prirent deux Ñatches
qu'ils brulerent , et enleverent la chevefure
d'un autre qu'ils avoient tué.
Ce jour- là et le suivant furent employez
à démolir le Fort , et à bruler les
bois dont il étoit construit. Le General
envoya M. son frere avec le Bataillon de
la Marine et 25o . Esclaves , au Camp qui
gardoit les Bateaux.
Le 28. tout ce qui appartenoit aux Natches
se trouvant détruit , le General partit
avec le reste de son monde et des Esclaves
pour joindre M. de Salvert , et le
29. tout se mit en mouvement pour se
rendre dans le Fleuve de Mississipy , ou
chacun avoit grand besoin d'arriver en
un lieu commode , pour se remettre des
fatigues qu'il avoit essuyées.
On jugera aisément par cette Relation
que si nous n'avions pas pressé l'Ennemi
aussi vivement que nous avons fait , nous
cussions couru grand risque de ne pas
réüissir et de perdre la plus grande partie
de notre petite Armée par la fatigue et
par le mauvais temps , ce qui infailliblement
auroit causé des maladies , qui toutes
SEPTEMBRE. 1731. 2103
tes auroient été mortelles dans un lieu où
les hommes les plus vigoureux souffriroient
beaucoup.
Jamais Expedition ne fut plus utile ;
elle a vangé la Nation Françoise d'un horrible
massacre fait d'une partie de ses Habitans
à la Louisianne par des Sauvages
qui étoient en pleine Paix avec eux , et
qui pour les surprendre s'étoient répandus
dans leurs maisons , sous l'apparence
de l'amitié et sous le prétexte de leur
rendre service . Elle a servi en même-temps
à faire connoître à tous les Sauvages du
Continent , que les François ne trouvent
rien d'impossible lorsqu'il s'agit de punir
le crime , et qu'ils sçavent trouver et
dompter leurs Ennemis dans les lieux les
plus écartez , les plus difficiles à abor
der et les mieux fortifiez .
Et enfin cette Expedition a dû effacer
de l'esprit des Sauvages Chaetas , Nation
très- nombreuse et la plus redoutable du
Continent , l'opinion qu'elle avoit que
nous ne pouvions châtier nos Ennemis.
sans son secours , ce qui la rendoit le
plus souvent si insolente , que M. Perrier
s'étoit déterminé à ne la point employer
dans l'entreprise qu'il avoit projettée
contre les Natches , ainsi qu'on l'a
dit dans le commencement de cette Re-
Lation C iiij Tous
2104 MERCURE DE FRANCE
Tous ces objets animoient tellement
nos gens dans cette affaire , qu'il n'y a
eû aucun Officier ni Soldat , tant des
Troupes reglées , que des Milices , qui
n'ait fait tout ce qui a dépendu de ses
forces pour avancer le travail , chacun
ayant mis la main à l'oeuvre , et qui n'ait
agi avec toute la valeur imaginable . Il
est vrai que le bon exemple des Chefs
y a beaucoup contribué , et certainement
les deux frères ont bien Fait connoître
qu'ils sçavent former une entreprise difficile
, et qu'ils sont également habiles et
courageux dans l'execution. Ils ont donné
beaucoup de loüanges à M. le Baron
de Crenay , et generalement à tous les
Officiers qui ont eû part à cette Expedition.
*
Relation de la défaite des Natches (a)
par M. Perier, Commandant General à
la Louisianne , au mois de Janvier 1731 .
No
,
Otre General jugeant qu'il étoit ne
cessaire avant de rien entreprendre ,
de s'éclaircir avec les Chactas , Nation
Sauvage la plus considerable de la Loüisianne
sur les differens bruits qui s'étoient
répandus de leur mauvaise volonté
pour nous , se rendit à la Mobile , Fort
occupé par les Françóis , à la Côte de l'Est
de la Louisianne , où il avoit fait avertir
leurs Chefs de se rendre dans les premiers
jours de Novembre , et les ayant trouvez
bien disposez , il renouvella en la manie◄
re ordinaire , les Traitez de Commerce et
d'Alliance que nous avons depuis longtemps
avec eux , et leur proposa de re
connoître pour Grand- Chef de la partie
du Ouest , qu'on appelle Bas- Chacra , le
Chef des Castacha , Village de la mêmę
( a ) C'est une Nation Sauvage , qui au mois
de Decembre 1729. massacra les François qui
étoient établis auprès d'elle , quoiqu'elle fût en
paix avec eux.
Nation,
SEPTEMBRE. 1731 2087
Nation. Ils l'accepterent avec plaisir et
promirent de nous renvoyer le reste des
Negres qu'ils avoient pris sur les Natches
, et de payer tout ce qu'ils devoient
aux François , avec lesquels ils avoient
négocié. Ils lui demanderent ensuite d'aller
en guerre contre les Natches , mais i'
leur répondit seulement qu'il les feroit
avertir s'il avoit besoin d'eux , étant bien
résolu de ne s'en pas servir pour les tirer
de l'erreur où ils étoient , que nous ne
pouvions nous passer de leur secours , et
que sans leur appui nous serions obligez:
d'abandonner nos établissemens.
Après les avoir renvoyez chez eux
il partit pour la nouvelle Orleans , où il
arriva le 13. Novembre 1730. il y trouva
M. de Salvert son frere , Lieutenant de
Vaisseau , commandant un Détachement
des Troupes de la Marine , très - avancé
dans les préparatifs dont il l'avoit chargé
pour aller attaquer les Natches. L'Equipage
du Vaisseau du Roi , qu'il commandoit
, y avoit travaillé fort utilement , et
on peut assurer que sans lui nous n'eussions
pas été si-tôt prêt à marcher contre
l'Ennemi .
Le 9. Decembre M. de Salvert partit à
la tête du Détachement de la Marine ,
qui formoit un petit Bataillon , il avoit
ordre
2088 MERCURE DE FRANCE
ordre d'attendre au Village de Carlestin
Habitations françoises , situées à environ
15. lieües au-dessus de la nouvelle Orleans
, en montant le Fleuve , le General
qui le joignit le 13. avec les Troupes de
la Colonie et les Munitions de guerre.
Le 14. ils marcherent ensemble jus
qu'aux Bayagoulas , où ils resterent quatre
jours pour attendre le Détachement
des Milices du Pays , commandé par M. de
Benac , Officier retiré du Service , qui
s'est établi dans la Colonie , et les grands
Bateaux chargez de vivres qui ne pou
voient suivre..
Le General avoit divisé ses forces en
trois Corps , pour éviter toute tracasseric
et donner plus d'émulation . Le premier
étoit commandé par M. de Salvert ; il
étoit composé de iso . Soldats de la Marine
et d'environ 40. hommes de son
Equipage . Le second étoit commandé par
le Baron de Crenay , Lieutenant - Colo❤
nel , et étoit composé d'un Détachement
de 150. hommes des Troupes de la Co-
Ionie ; et le troisième étoit commandé par
le sieur de Benac , et étoit composé de
120. habitans qui s'étoient offerts d'aller
à la guerre
.
Le 22. tout étant rassemblé , on se mit
en marche et on fat coucher à Manchac
où
SEPTEMBRE. 1731. 2089
ù le sieur de Laye , Habitant , attendoit
le General , il lui dit que s'il vouloit se
servir des Sauvages Tonnicas , petite Nation
située sur les bords du Fleuve ,
environ 70. lieuës au - dessus de la nouvelle
Orleans , en suivant le Fleuve , il
étoit necessaire qu'il se rendît lui -même
chez eux pour les faire marcher ; ce qu'il
fit en laissant la conduite de la petite
armée à M. son frere , qui malgré la
neige et le verglas , le joignit aux Tonnicas
le 27.
Le 28. il continua sa marche jusqu'à
l'entrée de la Riviere Rouge , (a ) où étoit
le rendez - vous general. Le Vaisseau le
Prince de Conty , sur lequel on avoit fai ■
faire des Fours , y arriva le même jour.
Le General fut obligé de rester jusqu'au .
3. de Janvier aux Tonnicas pour leur
faire achever leurs préparatifs de guerre ,
ils étoient d'autant plus lents , que la
peur les avoit saisis sur la nouvelle qu'ils
venoient d'apprendre que le sieur de Coulange
, ( Canadien , frère d'un Officier des
Troupes de la Colonie , et fils du sieur
de Livilliers , Officier des Troupes de Ca
nada , ) qui avoit été envoyé dans une
grande Pirogue , armée de zo. hommes :
(a) A 9. lieues au- dessus du Village des Tonnicas
, situé à present au portage de la Croix .
grande
2090 MERCURE DE FRANCE
volontaires Sauvages , et Negres libres ,
pour faire porter les ordres du General
aux Arkansas , avoit été attaqué à quelques
journées de chez eux par les Natches , qui
lui avoient tué ou blessé la moitié de ses
gens , parmi lesquels les sieurs de la Touche
,Beaulieu et Cochart, ( le premier, Gen--
tilhomme Breton ; le second , Officier de
Marine de la Compagnie , ) ont eu le
malheur de se trouver au nombre des
morts. Le sieur de Coulange y reçût deux
coups de fusil , dont un au travers du
été mortel. Cette accorps
, qui n'a pas
tion , qui ne décidoit de rien , avoit cependant
si fort abattu le courage de nos
Sauvages , qu'il ne s'en trouva que iso .
des plus braves à l'Armée , les autres s'étant
retirez peu à peu sous differens pré
textes.
Le 4. Janvier , le General joignit l'Ar
mée à la Riviere Rouge , où il trouva les
Détachemens des Garnisons des Natches
et Natchitoches (a) arrivez , et la division
des Habitans , partie pour se montrer à
la hauteur des Natches , (b) afin de faire
(a) Forts François qui portent le nom des Na→
tions Sauvages auprès desquelles ils ont éte cons
truits.
(b) C'est la Nation même qui depuis qu'elle se
vit menacée d'être châtiée par les Frauçois , aban--
croire
SEPTEMBRE . 1731. 209%
croire à leurs découvreurs s'ils nous rencontroient
, que notre intention étoit de
les aller attaquer par le Fleuve , quoique
notre parti fût pris , d'aller par la Riviere
Rouge.
Le 11. l'Armée entra dans cette Riviere
pour chercher l'Ennemi , car nous n'avions
pû sçavoir depuis 9. mois l'endroit
positif où les Natches avoient fait leur
Fort , quoique le General y eût envoyé
zo . Partis differens , tant forts que foi
bles ; ensorte que ce ne fut que sur le
peu de connoissance qu'il avoit tirée d'un
enfant de 12 à 13. ans , qui avoit deserté
de cette Nation , qu'il se hazarda à l'aller
- chercher , contre le sentiment general des
Sauvages , vers la Riviere Rouge , dans ,
des Pays marécageux et coupez , jusques
là inconnus à nos Sauvages du Fleuve .
Cependant l'Armée guidée par l'esperance
et encouragée par son General dans
les peines inexprimables que le mauvais
temps et la difficulté du Pays, lui faisoient
souffrir , se trouva le 19. sans le sçavoir ,
précisement à une lieuë du Fort de Valeur
, c'est le Fort de la Nation Natches.
donna le lieu de sa demeure ordinaire et se transporta
dans un autre endroit qu'elle croyoit inconnu
à tous autres Sauvages et inaccessibles aux
François.
Le
2092 MERCURE DE FRANCE
Le General prenoit toutes sortes de me
sures pour éviter les embuscades qu'il
étoit aisé de nous dresser , y ayant apparence
que les Ennemis sçavoient notre
marche , puisque le 18. quelques - uns de
nos Sauvages qui étoient allez à la découverte
, ( car ils s'étoient un peu rassurez
par l'exemple des François qu'ils voyoient
marcher courageusement par terre ) étant
venus avertir qu'ils avoient appefçû un
. Parti de Natches à deux lieuës au - dessous
de nous , de l'autre côté de la Riviere,
le General y envoya un Détachement de
François et de Sauvages , pour tâcher de
le surprendre , mais on ne put y réussir
par la jalousie de six Sauvages Houmas ;
qui tirerent dessus avant que nos gens
fussent arrivez ; ensorte que ce Parti prie
la fuite et s'éloigna en peu de temps. Si
nous avions pû l'attaquer , on se flattoit
de pouvoir faire quelque prisonnier et
d'apprendre des nouvelles positives du
lieu où la Nation s'étoit retirée .
Nous restâmes le 19. dans la même in
quietude , quoique nos Sauvages vissent
encore plusieurs Natches , dont ils tuerent
un homme et une femme , mais le
20. le General ayant envoyé à la découverte
un Parti d'Habitans et de Sauvages,
soutenus par les Compagnies de Mrs de
la
S
SEPTEMBRE. 1731. 2093
la Giroüardiere et de Lusser ; le premier
Capitaine d'une Compagnie de la Marine,
l'autre Capitaine d'une Compagnie des
Troupes de la Colonie. On vint lui dire
une demie heure après leur départ qu'ils
se trouvoient dans un chemin battu ;
aussi-tôt on ne douta point que ce ne fût
celui du Fort , et on se prépara à marcher.
Le General fit monter les Bateaux vis-àvis
cet endroit , et ayant ordonné au Baron
de Crenay d'y rester avec 100. hommes
, il se tenoit prèt à marcher avec
M. Salvert , pour aller investir le Fort
dès qu'il en auroit quelque nouvelle. A
peine les Bateaux et Pirogues furent- ils
arrivez l'on entendit la Mousqueteque
rie du Fort et celle des Escarmoucheurs
du Détachement qui avoit toûjours suivi
le chemin battu ; dans l'instant on marcha
et on rencontra les sieurs Marin et
Outlas , qui venoient dire que nos gens
avoient trouvé le Fort , nous y arrivâmes
en une heure de marche par un Pays
tout couvert de bois ; dès que nous
l'apperçûmes , le General fit battre aux
champs . A ce bruit les Tonnicas se sentant
soutenus , attaquerent quelques Cases
aux environs du Fort , d'où ils chasserent
les Natches et y mirent le feu."
Pendant ce temps M. de Salvert marcha
pan
094 MERCURE DE FRANCE
1
35.
la droite avec partie des Troupes
par
et le General par la gauche pour rejoindre
Mrs de la Giroüardiere et de Lusser,
Il les trouva qui s'étoient avancez à
toises du Fort , à la faveur de plusieurs
arbres , où ils resterenr jusqu'à ce qu'il
leur dit de venir se mettre derriere une
butte qui étoit à 120. toises du Fort , lieu
qui lui étoit très- favorablement situé pour
mettre une partie de notre Camp à cou
vert. Il fut aussi - tôt joindre M. de Salvert
, et ils passerent ensemble une petite
Riviere ou gros Ruisseau , auprès duquel
les Natches avoient construit leur Fort ;
ils étoient suivis par les Compagnies de
Dartaguette et de Sanzei , la premiere
de la Colonie , l'autre , de la Marine. Ils
rangerent ce Fort de très-près , à la faveur
de quelques Cabanes , et après avoir
reconnu le terrain , ils firent l'un et
l'autre le tour du Fort par les derrieres
jusqu'à la butte dont on vient de parler,
et ils convinrent d'y établir le Quartier
general , par rapport à la facilité qu'il y
avoit de recevoir là nos besoins qui venoient
du bord de la Riviere , sans que
l'on fût obligé de passer le Ruisseau.
Le 21. le General envoya ordre au Baron
de Crenay de venir le joindre pour
commander l'attaque de la gauche , et le.
même
SEPTEMBRE. 1731 2095
même jour il fit arborer un Drapeau blanc
pour demander aux Sauvages qu'ils eussent
à lui remettre des Negres qu'ils
avoient pris ; ils tirerent sur le Drapeau
en disant à l'Interprete qu'ils ne vouloient
pas parler à des chiens comme nous.
Sur les deux heures un de nos Mortiers
de bois arriva. ( a) On jetta sur le champ
quelques Grenades Royales , dont deux
tomberent dans le Fort , sur une de leurs
maisons et y mit le feu. Après qu'elles
eurent crevé , nous entendîmes de grands
cris et des pleurs de femmes et d'enfans,'
ce qui nous fit redoubler notre feu de
Mousqueterie et de double Grenade , mais
malheureusement nos Mortiers furent
trop tôt hors de service par les cercles
qui manquerent.
A 5. heures et demie du soir , les Natches
firent une sortie sur un de nos Postes, oùil
y avoit 15. hommes retranchez derriere un
gros arbre qui n'étoit qu'à 20 toises du
Fort ; ils le prirent à revers et tuerent un
Grenadier de la Marine, Un Sergent des
Troupes de la Colonie y reçut un coup
de fusil qui lui perça les deux épaules.
Dès que nous eûmes connoissance de
(a) C'étoit des Mortiers portatifs , que le sieur
Baron , Ingenieur , avoit inventez , ils étoient
faits d'un bois fort dur , et çerçlez de fer.
cette
20961 MERCURE DE FRANCE
cette sortie , nous crûmes que les Ennemis
alloient tenter de se sauver dans les
Bois par l'intervale du Camp des Habitans
au nôtre , ce qui détermina M. Salvert à
prendre la Compagnie de Lusser , pour
les couper. Mais voyant qu'ils n'en vouloient
qu'à notre Poste , il donna dessus
avec quelques Habitans et les obligea de
rentrer avec précipitation dans leur Fort.
Dans cette Action le sieur Dehaye ,
Capitaine de Milice , reçut deux coups.
de fusil , et un Negre fut tué.
A 8. heures du soir , quoique le tems
fût très- mauvais , le General fit ouvrir de
son côté la Tranchée à 30. toises du Fort,
et nous ne la poussâmes qu'à 15. toises,
faute de Gabions.
Le 22. on fit venir le Canon et le der
nier Mortier ; nous en tirâmes quelques
coups sur la fin du jour en redoublant
le feu de notre Mousqueterie , qui ne discontinua
point toute la nuit.
Avant que de continuer le travail de
la Tranchée , le General fit visiter sur le
soir une maison forte , qui enfiloit nos
travaux ; il envoya un Officier avec 12 .
Grenadiers et autant de Sappeurs armez
pour s'en emparer , mais ils furent repoussez
par le feu des Ennemis , qui étoit
extrémement vif. M. de Salvert y accou
rug
SEPTEMBRE. 1731. 2097
rut ; et se mettant à la tête des Assaillants
, il recommença si vivement l'attaque
, qu'en un quart d'heure il força l'Ennemi
d'abandonner la maison . Il trouva
que c'étoit une espece de redoute à l'épreuve
du coup de fusil , avec des meurtrieres
tout autour ; il la fit garder , jugeant
qu'elle serviroit bien à deffendre la
tête de notre Tranchée.
En effet le 23. nous poussâmes trèsvigoureusement
le travail de la Tranchće,
à la faveur de cette redoute , de façon que
le General comptoit achever le lendemain
la communication de ses Travaux avec
ceux de M. le Baron de Crenay , qui de
son côté travailloit aussi avec beaucoup
de vigueur.
Le 24. les Natches voyant que nous
les serrions de fort près , et se trouvant
fort incommodez par nos doubles Grenades
et par le Canon , ( quoique notre
petite Artillerie ne tirât que de loin en
Loin , ) ( a ) arborerent un Drapeau blanc
7. heures du matin , et nous envoyeà
(a ), Ils avoient bien trouvé le secret de se garantir
du Canon et de la Mousqueterie , en faisant
des trous en terre , dans lesquels te tenoient
leurs femmes et leurs enfans , et où ils se reposoient
eux-mêmes , mais ces trous étant ouverts
par le haut , les Grenades ou leurs éclats qui y
tomboient y causoient beaucoup de desordre.
C rent
2098 MERCURE DE FRANCE
rent un Sauvage qui parloit un peu François.
Le General lui dit qu'il ne les écouteroit
point qu'ils ne lui eussent renvoyé
tous les Negres qui étoient dans le Fort.
Ce Député retourné , on vit arriver avec
lui un moment après 19. Negres et une
Negresse , qui rapporterent que six autres
Negres étoient à la Chasse avec des Natches
, et que le reste avoit été tué. Le General
dit au même Sauvage qu'il ne vou
loit donner sa parole sur rien qu'il n'eût
les Chefs de sa Nation dans son Camp ;
après quoi il le renvoya.
Il vint ensuite un autre Sauvage nommé
S. Côme , (a) mais il le renvoya aussi
sans l'entendre , en lui disant , que si le
Grand - Chef, celui de la Farine et lui (b)
ne venoient pas bien - tôt ensemble , il-fe-
(a ) Quand les Sauvages sont bien avec les
François , ils se font honneur de prendre des
noms que ceux- cy portent.
(b) Avant que cette Nation eût frappé les François
, elle étoit divisée en 5. Villages , le premier
nommé la Valeur ; le 2. la Farine ; le 3 ° . la
Pomme ; le 4. les Gris , et le se . le grand Village
.Chaque Village avoit son Chef, et cependant
tous étoient soumis à un Grand - Chef , et tous
ces Chefs particuliers s'appelloient Soleil par Excellence
; ces Sauvages ayant une dévotion toute
particuliere pour cet Astre , en l'honneur duquel
ils entretenoient un feu perpetuel.
ne
SEPTEMR E. 1731. 2099
-
roit recommencer à tirer sur eux . Malgré
le mauvais temps ils se rendirent à
notre Camp sur les 4. heures du soir ; on
les conduisit au General ; ils l'aborderent
avec toutes les façons qui parmi eux peuvent
marquer le repentiret la soumission,
et ils dirent qu'ils ressentoient la grandeur
du crime qu'ils avoient commis ,
qu'ils n'osoient demander la vie , mais
qu'ils s'estimeroient heureux en mourant,
si on vouloit l'accorder à leurs femmes
et à leurs enfans.
Le General leur répondit qu'il la donneroit
à tous ceux de la Nation , même
aux hommes qui se rendroient à lui le
lendemain , mais que passé ce jour là , il
feroit bruler ceux qui ne profiteroient
pas de la grace qu'il vouloit bien leur
faire ; ils répliquerent que sa résolution
étoit juste. Cependant à minuit le Chef
de la Farine , qui étoit dans une Tente
gardée par 12. hommes , tant François
que Sauvages des plus alertes , doutant
de la parole du General , se sauva à la faveur
de la nuit , qui étoit la plus obscure
que l'on ait jamais vûë , et du temps effroyable
qu'il faisoit , la pluye tombant
si furieusement , qu'il falloit être Sauvage
et craindre le bucher pour tenir dehors ;
on tira sur lui sans l'atteindre.
Cij Le
2100 MERCURE DE FRANCE
Le 25. quoique le temps continuât d'être
mauvais , ( ce qui nous incommodoit
extrémement ) la femme du Grand- Chef
et sa Famille , sortirent le matin du Fort
avec 450. femmes ou enfans , et vinrent
se rendre. A l'égard des hommes , ils ne
venoient que l'un après l'autre , ensorte
que le soir il en restoit encore dans le
Fort environ 20. qui demanderent qu'on
les laissât jusqu'au lendemain , ce qui leur
fut accordé , parce que le temps ne permettoit
pas de les aller prendre. Nous
étions alors entre deux eaux ; car là pluye
ne cessa que vers les 9 , heures du soir. A
8. he es , presque tous ceux qui étoient
restez dans le Fort s'évaderent. Le quartier
des Habitans s'en apperçut ,
fut impossible ni de tirer sur eux un seul
coup de fusil , ni de les faire poursuivre
par nos Sauvages , l'eau du Ciel nous ayant
réduits en tel état que nos gens ne pouvoient
ni marcher , ni faire usage de leurs
armes. Cependant la pluye ayant cessé
nous entrâmes dans le Fort , où nous
trouvâmes seulement deux hommes et
une femme , et nous apprîmes que ceux
qui s'étoient enfuis , étoient au nombre
de 16. hommes et de 4. femmes.
mais il
Le General fit ensuite le recensement
de ses Prisonniers qu'il avoit résolu pour
l'exemple
SEPTEMBRE. 1731. zioł
;
l'exemple d'envoyer dans une autre Colonie
pour y être vendus comme Esclaves
; et voyant qu'il ne se trouvoit que
45. hommes , il demanda ce que les autres
étoient devenus , parce que cette Nation
devoit être forte d'envirom 500. Guerriers
,lorsqu'elle surprit le Poste François .
le principal d'entr'eux dit qu'ils avoient
perdu du monde dans cette malheureuse
Action , qu'ensuite les Partis des Nations
Sauvages qui sont dans notre Alliance ,
les ayant attaquez en differens endroits ,
et nous-mêmes les ayant assiegez dans
leurs anciens Forts , ils y avoient encore
fait de grandes pertes que depuis s'étant
venus établir dans l'endroit où nous venons
de les prendre , la fatigue du chemin
et le mauvais air du lieu , avoient
fait périr par maladie plus de la moitié
de leurs gens. Que tandis qu'ils souffroient
tant de miseres , les Partis de nos Sauvages
leur avoient détruit peu à peu et en
differens Cantons beaucoup de Guerriers,
que nous venions de leur en tuer encore
un grand nombre en les forçant de se rendre
; et qu'enfin il n'en restoit point d'autres
que ceux que l'on voyoit prisonniers ,
que les 16. qui s'étoient sauvez du Fort ,
et qu'un très- petit nombre qui étoit à la
Chasse , lorsque nous les avons assiegez
C iij .
il
2102 MERCURE DE FRANCE
dizil
fut facile de juger que le
compte
Sauvage étoit juste , et le General en parut
content.
Le lendemain 26 , nos Sauvages qui
étoient en course , prirent deux Ñatches
qu'ils brulerent , et enleverent la chevefure
d'un autre qu'ils avoient tué.
Ce jour- là et le suivant furent employez
à démolir le Fort , et à bruler les
bois dont il étoit construit. Le General
envoya M. son frere avec le Bataillon de
la Marine et 25o . Esclaves , au Camp qui
gardoit les Bateaux.
Le 28. tout ce qui appartenoit aux Natches
se trouvant détruit , le General partit
avec le reste de son monde et des Esclaves
pour joindre M. de Salvert , et le
29. tout se mit en mouvement pour se
rendre dans le Fleuve de Mississipy , ou
chacun avoit grand besoin d'arriver en
un lieu commode , pour se remettre des
fatigues qu'il avoit essuyées.
On jugera aisément par cette Relation
que si nous n'avions pas pressé l'Ennemi
aussi vivement que nous avons fait , nous
cussions couru grand risque de ne pas
réüissir et de perdre la plus grande partie
de notre petite Armée par la fatigue et
par le mauvais temps , ce qui infailliblement
auroit causé des maladies , qui toutes
SEPTEMBRE. 1731. 2103
tes auroient été mortelles dans un lieu où
les hommes les plus vigoureux souffriroient
beaucoup.
Jamais Expedition ne fut plus utile ;
elle a vangé la Nation Françoise d'un horrible
massacre fait d'une partie de ses Habitans
à la Louisianne par des Sauvages
qui étoient en pleine Paix avec eux , et
qui pour les surprendre s'étoient répandus
dans leurs maisons , sous l'apparence
de l'amitié et sous le prétexte de leur
rendre service . Elle a servi en même-temps
à faire connoître à tous les Sauvages du
Continent , que les François ne trouvent
rien d'impossible lorsqu'il s'agit de punir
le crime , et qu'ils sçavent trouver et
dompter leurs Ennemis dans les lieux les
plus écartez , les plus difficiles à abor
der et les mieux fortifiez .
Et enfin cette Expedition a dû effacer
de l'esprit des Sauvages Chaetas , Nation
très- nombreuse et la plus redoutable du
Continent , l'opinion qu'elle avoit que
nous ne pouvions châtier nos Ennemis.
sans son secours , ce qui la rendoit le
plus souvent si insolente , que M. Perrier
s'étoit déterminé à ne la point employer
dans l'entreprise qu'il avoit projettée
contre les Natches , ainsi qu'on l'a
dit dans le commencement de cette Re-
Lation C iiij Tous
2104 MERCURE DE FRANCE
Tous ces objets animoient tellement
nos gens dans cette affaire , qu'il n'y a
eû aucun Officier ni Soldat , tant des
Troupes reglées , que des Milices , qui
n'ait fait tout ce qui a dépendu de ses
forces pour avancer le travail , chacun
ayant mis la main à l'oeuvre , et qui n'ait
agi avec toute la valeur imaginable . Il
est vrai que le bon exemple des Chefs
y a beaucoup contribué , et certainement
les deux frères ont bien Fait connoître
qu'ils sçavent former une entreprise difficile
, et qu'ils sont également habiles et
courageux dans l'execution. Ils ont donné
beaucoup de loüanges à M. le Baron
de Crenay , et generalement à tous les
Officiers qui ont eû part à cette Expedition.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre contenant la Relation de la défaite des Natches (a) par M. Perier, Commandant General à la Loüisianne, au mois de Janvier 1731.
En janvier 1731, M. Perier, Commandant Général en Louisiane, entreprit de clarifier les relations avec les Chactas, une nation amérindienne influente, après des rumeurs de mauvaise volonté. Il se rendit à la Mobile pour renouveler les traités de commerce et d'alliance avec les Chactas, qui acceptèrent de renvoyer des esclaves capturés sur les Natches et de payer leurs dettes aux Français. Perier se rendit ensuite à la Nouvelle-Orléans, où il retrouva son frère, M. de Salvert, commandant un détachement des troupes de la marine. Le 9 décembre, M. de Salvert partit pour le village de Carlestin, où il rejoignit Perier avec les troupes de la colonie et les munitions. Ils marchèrent ensuite vers les Bayagoulas, où ils attendirent les milices du pays et les bateaux de vivres. Les forces françaises furent divisées en trois corps : le premier commandé par M. de Salvert, le second par le Baron de Crenay, et le troisième par le sieur de Benac. Le 22 décembre, ils se mirent en marche vers les Tonnicas, une petite nation amérindienne. Perier dut rester jusqu'au 3 janvier pour permettre aux Tonnicas de finaliser leurs préparatifs de guerre, retardés par la peur après une attaque des Natches. Le 4 janvier, Perier rejoignit l'armée à la Rivière Rouge, où il trouva des détachements des garnisons des Natches et des Natchitoches. Le 11 janvier, l'armée entra dans la Rivière Rouge pour chercher les Natches, dont le fort était inconnu. Guidés par un jeune déserteur, ils découvrirent le fort des Natches le 19 janvier. Le 20 janvier, après avoir repéré le chemin menant au fort, les Français se préparèrent à l'attaquer. Le 21 janvier, ils trouvèrent le fort et commencèrent à le bombarder avec des mortiers et des grenades. Les Natches firent une sortie, tuant un grenadier et blessant un sergent. Les Français ouvrirent une tranchée à 30 toises du fort. Le 22 janvier, ils continuèrent à bombarder le fort avec du canon et un mortier. En septembre 1731, les troupes françaises engagées dans une expédition contre les Natches ont affronté des conditions difficiles. La nuit précédant une attaque, la mousqueterie française continua sans interruption. M. de Salvert captura une redoute ennemie, utilisée pour défendre la tête de la tranchée française. Le 23 septembre, les travaux de la tranchée furent poussés vigoureusement à l'abri de cette redoute. Le 24 septembre, face à la pression des Français et aux attaques de grenades et de canon, les Natches arborèrent un drapeau blanc à 7 heures du matin. Ils demandèrent la paix en échange de la reddition de leurs esclaves noirs. Le général exigea la présence des chefs de la nation Natché pour négocier. Malgré le mauvais temps, les chefs Natches se rendirent au camp français en fin d'après-midi. Ils exprimèrent leur repentir et leur soumission, demandant la clémence pour leurs femmes et enfants. Le général accorda la vie à tous ceux qui se rendraient le lendemain, mais menaça de brûler ceux qui refuseraient. Le 25 septembre, de nombreux Natches se rendirent, mais environ 20 hommes restèrent dans le fort. La nuit suivante, la plupart des hommes restants s'enfuirent. Les Français démolirent ensuite le fort et brûlèrent les bois. Le 26 septembre, des Sauvages alliés capturèrent et brûlèrent deux Natches, et en tuèrent un autre. Les jours suivants furent consacrés à la démolition du fort et à la préparation du départ. Le 29 septembre, l'expédition quitta les lieux pour rejoindre le fleuve Mississippi. Cette expédition venger un massacre perpétré par les Natches et renforça la réputation des Français auprès des autres nations sauvages.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 2104-2106
A MLLE SALLÉ, Danseuse de l'Opera, pour celebrer son retour. EPITRE.
Début :
Les Amours pendant votre absence [...]
Mots clefs :
Amours, Vénus, Grâces
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texteReconnaissance textuelle : A MLLE SALLÉ, Danseuse de l'Opera, pour celebrer son retour. EPITRE.
A MLLE SALLE' ,
Danseuse de l'Opera , pour celebrer
son retour.
EPITRE.
LEs Amours pendant votre absence
'Avec vous s'étoient envolez ;
Enfin les voila rappellez
Dan
SEPTEMBRE. 1731. 2105
Dans le séjour de leur naissance.
Je les vis , ces Enfans aîlez ,
Voler en foule sur la Scene ,
Ou , pour voir triompher leur Reine
Leurs Etats furent assemblez ;
Dieux ! quel fut leur plaisir extréme ,
Ce jour , le plus beau de vos jours ,
Où, recevant de Venus même ,
Et sa Ceinture et ses atours
Vous vîtes l'avide concours ,
D'un Peuple entraîné sur vos traces ,
Qui se rappellera toûjours ,
Ces Ras mésurez par les graces >
Et composez par les Amours.
Des Ris l'essain vif et folâtre ,
Pour contempler ces Jeux charmans
Avoient occupé le Théatre ,
Sous la forme de mille Amans ;
Pour vous voir , les Graces parées ,
De modernes habillemens ,
Des Loges s'étoient emparées ;
Pour empoisonner ces douceurs ,
Une Troupe d'Amours censeurs
Osa se glisser au Parterre ,
Amours étrangers , inconnus ,
Qui sans doute n'étoient venus
21
99
Que pour vous déclarer la guerre ;
CY To
2106 MERCURE DE FRANCE
Je vis leur party frémissant ,.
Forcé de changer de langage ,
Vous rendre , en pestant , son homage ,
Et jurer en applaudissant.
Restez , Fille de Terpsicore ,.
L'Amour est las de voyager ;
Laissez soupirer l'Etranger ,
Brulant de vous revoir encore.' ,
Je sçai que pour nous attirer ,
L'Anglois solide récompense
Le mérite errant que la France
Ne fait tout au plus qu'admirer..
Par sa genereuse industrie ,
Laissons l'Anglois se signaler ,
Est-il rien qui puisse égaler
Le suffrage de la Patrie ?.
Danseuse de l'Opera , pour celebrer
son retour.
EPITRE.
LEs Amours pendant votre absence
'Avec vous s'étoient envolez ;
Enfin les voila rappellez
Dan
SEPTEMBRE. 1731. 2105
Dans le séjour de leur naissance.
Je les vis , ces Enfans aîlez ,
Voler en foule sur la Scene ,
Ou , pour voir triompher leur Reine
Leurs Etats furent assemblez ;
Dieux ! quel fut leur plaisir extréme ,
Ce jour , le plus beau de vos jours ,
Où, recevant de Venus même ,
Et sa Ceinture et ses atours
Vous vîtes l'avide concours ,
D'un Peuple entraîné sur vos traces ,
Qui se rappellera toûjours ,
Ces Ras mésurez par les graces >
Et composez par les Amours.
Des Ris l'essain vif et folâtre ,
Pour contempler ces Jeux charmans
Avoient occupé le Théatre ,
Sous la forme de mille Amans ;
Pour vous voir , les Graces parées ,
De modernes habillemens ,
Des Loges s'étoient emparées ;
Pour empoisonner ces douceurs ,
Une Troupe d'Amours censeurs
Osa se glisser au Parterre ,
Amours étrangers , inconnus ,
Qui sans doute n'étoient venus
21
99
Que pour vous déclarer la guerre ;
CY To
2106 MERCURE DE FRANCE
Je vis leur party frémissant ,.
Forcé de changer de langage ,
Vous rendre , en pestant , son homage ,
Et jurer en applaudissant.
Restez , Fille de Terpsicore ,.
L'Amour est las de voyager ;
Laissez soupirer l'Etranger ,
Brulant de vous revoir encore.' ,
Je sçai que pour nous attirer ,
L'Anglois solide récompense
Le mérite errant que la France
Ne fait tout au plus qu'admirer..
Par sa genereuse industrie ,
Laissons l'Anglois se signaler ,
Est-il rien qui puisse égaler
Le suffrage de la Patrie ?.
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Résumé : A MLLE SALLÉ, Danseuse de l'Opera, pour celebrer son retour. EPITRE.
En septembre 1731, une épître célèbre le retour de Mlle Salle, une danseuse de l'Opéra. Les Amours, symbolisant les passions et les admirateurs, l'ont suivie et se sont rassemblés pour la voir triompher sur scène. Le jour de son retour a été marqué par un enthousiasme extrême, avec un public avide et des Grâces vêtues de modernes habits occupant les loges. Cependant, une troupe d'Amours censeurs, étrangers et inconnus, a tenté de perturber cet enthousiasme en déclarant la guerre à Mlle Salle. Malgré cela, ces Amours ont dû changer de langage et rendre hommage à la danseuse en applaudissant. L'auteur exprime le souhait que Mlle Salle reste, car l'Amour est las de voyager. Il mentionne également la générosité des Anglais à récompenser le mérite, mais souligne l'importance du suffrage de la Patrie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 2106-2123
VOYAGE dans les Etats de Bacchus. Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
Début :
J'ay fait depuis peu, Messieurs, un voyage assez subit et singulier. J'ay visité [...]
Mots clefs :
Voyage, Ordonnance, Registres, Recueil des déclarations du dieu Bacchus, Empire, Vin, Rivage de l'Yonne, Auxerre, Joigny, Vignes
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texteReconnaissance textuelle : VOYAGE dans les Etats de Bacchus. Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
VOYAGE dans les Etats de Bacchus..
Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
J4y fait depuis peu , Messieurs
, un
voyage assezsubit et singulier.Fay visité
sans le secours d'aucun guide ni d'aucune
voiture, les Châteaux et les Palais des Dieuxdu
Paganisme. A ce langage , vous vous·
imaginez que mon voyage a dû être de longue
durée , et vous ne vous tromperiez pas,
SZ
SEPTEMBRE. 1731. 2107
si je l'eusse fait physiquement ; mais la verité
est que je n'ay voyagé qu'en esprit. Fe
n'ai point marqué sur mes Tablettes le jour
de mon départ ; je sçai seulement que je
commençai à parcourir tous ces Palais et
ces Châteaux un certain soir du mois de
Fevrier dernier, auquel les fumées du repas
ne m'incommodoient pas beaucoup , et j'ai
idée que le Soleil étoit déja pour lors dans
le Signe des Poissons . Quel qu'ait été mon
voyage , et qu'elle qu'en ait été la cause , me
voila heureusement de retour ; j'ai rapporté
avec moi certaines Ordonnancės assez curieuses
, que les Bibliothequaires de ces Palais,
plus complaisans et moins formalistes
que certains d'Italie , m'ont permis de transcrire
de dessus les Registres dont ils ont la
garde.
En parcourant le Recueil des Déclarations
du Dieu Bacchus , qui est écrit en belles
lettres d'or sur un Velin couleur de Pourpre,
grand in folio , j'en ai apperçû une qui m'a
frappé plus que toutes les autres. Je pense que
c'est l'avant derniere du volume. Sur le champ
j'en ai tiré une copie , avec la résolution de
m'en servir dans l'occasion. Cette occasion
s'est presentée , Messieurs , plutôt que je ne
Faurois crû ; car à peine étois-je un pew
remis de mon vryage spirituel vers le milieu
du mois de Mars , quun de mes amis m'en..
Cvj tendant
1108 MERCURE DE FRANCE
tendant plaindre à table d'un certain vin
clairet et leger que l'on m'avoit servi , tira
de sa poche le Mercure de Fevrier 1731-
et my fit voir à la page 271. un Ecrit que
j'ai reconnu à l'instant être celui que le Dieu
Bacchus a eù en vue de faire supprimer par
son Ordonnanoe. Je vous laisse à juger du
rapport que ces deux Pieces ont l'une avec
l'autre. J'en retranche une partie du préambule
qui est dans le style ordinaire des Sonverains
, et qui ne vous apprendroit autre
chose que les Provinces et les Seigneuries qui
composent le vaste Empire de cette Divinité.
ORDONNANCE du Dieu Bacchus,
donnée dans le Printemps dernier.
fils de Jupiter dit ......
Biber , Lycus , Lenæus , Osyris ,
Dionysus , &c. Jadis la Déesse de la Paix
accorda les differends qui s'étoient élevez
entre la Bourgogne et la Champagne , sur
la primauté du Fruit qui nous est consacré
dans l'étendue de ces deux Provinces
des Gaules ; il y avoit eû force procedures
écrites , mainte Poësie signifiée de part
et d'autre , Pourchot et Grenan , plaidans
pour la Bourgogne , et Coffin pour la
Champagne. (4) Cette bonne Déesse en-
(a) Voyez le Procès Poëtique , imprimé à Paris
an 1712. chez la veuve de Claude Thiboust .
fin
SEPTEMBRE 1731. 2109
in trouva le secret de les mettre tous
d'accord ; elle fit verser dans une grande
Couppe une quantité égale de vin de
Bourgogne et de Champagne , et soudain
ayant fait gouter de ce mêlange aux deux
Partis , ils mirent les armes bas , la Champagne
cedant l'honneur à la Bourgogne ,
dont le vin avoit dominé dans la Couppe
, en gout , en couleur et en force.
Aujourd'hui un Ecrivain récemment
formé sur le Rivage de l'Yonne , réveille
en quelque sorte ce Procès , qui avoit
été jugé définitivement. Il semble avoir
pour but dans son raisonnement de donner
gain de cause à la Champagne , essayant
de faire comprendre que des vins
tendres , peu colorez , de peu de durée ,
et qui de plus ont un goût de terroir ,
doivent aller de pair avec des vins qui
ent du corps , une couleur bien rosée ,
qui sont francs , bien - faisans , amis de
l'estomach , et dont la séve est fine en
même-temps qu'elle est mâle et vigoureuse.
Et ce qu'il y a encore de plus sur
prenant dans son procedé, c'est qu'il prétend
être bon Bourguignon , en écrivant,
comme il fait , en faveur de ces vins tendres
et délicats .
Ce trop zelé Partisan fait paroître sur
les rangs Joigny , petite Ville , qu'il lui
plaît
110 MERCURE DE FRANCE
plaît de placer dans notre Province de
Bourgogne , quoiqu'elle n'y soit point
comprise , suivant l'exacte Géographie de
notre Empire ; et après avoir égalé ses
vins à ceux de notre bonne et ancienne
Ville d'Auxerre , de tout temps renfermée
dans notre Cercle de Bourgogne ,
il pousse la prévention et l'audace jusqu'à
leur donner le dessus. Oubliant lui - même
d'où il est natif , et faisant semblant
de ne pas appercevoir que c'est l'amour
aveugle de sa Patrie qui le rend Auteur,
il va jusqu'à reprocher à notre zelé Analiste
d'Auxerre , duquel Mercure nous
a fait voir les Ecrits , de s'être trop étendu
par l'effet du même amour , à rapporter
les avantages de son Pays. Nous DECLARONS
que nous aimons tous nos fideles
Sujets ; mais nous devons aussi rendre.
justice à qui elle appartient , et réfuter
ce qui mérite de l'être. Sans nous arrê
ter à remarquer que l'Avocat des vins
de joigny pourroit avoir besoin de passer
quelques mois , tant sur le Parnasse
que
dans l'une de nos Universitez , pour
y apprendre à discerner les vins par la fréquentation
des personnages versez en cette
Scienće , et à ne pas prodiguer , comme
il fait , les Citations des Poëtes Latins
dont il abuse quelquefois. Nous disons.
>
qu'il
SEPTEMBRE. 1731. 21FT
qu'il paroît par son langage qu'il n'a jamais
vû de ses yeux ces Vignobles qui
sont si renommez dans nos Etats , qu'à
l'entendre raisonner il semble que jamais:
il n'est sorti des limites de son petit Ter--
ritoire , si ce n'est peut-être pour venir à
Auxerre considerer superficiellement la
situation des Côteaux .
Si ce jeune Ecrivain avoit voulu se détromper
serieusement et de bonne foi ,
ainsi que font tous ceux qui sont étroitement
attachez à notre service , il auroit
pû recourir à nos Papiers - Terriers de
Coulanges - les - Vineuses , à ceux de nos:
Vignobles d'autour de Beaune et des environs,
de Nuys , Volnay , Pomar , Chase
sagne , à ceux des climats du clos de Vougeot
, ( a ) Champbertin , Savigny , la
Romance les Serrieres proche Dijon
et les côtes de Chenove auprès de la
même Ville. Il y auroit appris par les
Declarations circonstanciées de nos féaux
et amez sujets qui peuplent ces cantons ,
que les Vignes qu'ils appellent des meilleurs
endroits et du produit le plus ex-
,
3-
( a ) Vougeot est un Village entre Dijon &
Nuys , où M. l'Abbé de Citeaux a un. Clos de
Vignes très- vaste et presque tout plat , lequel
cependant produit un Vin très- excellent , contre
la Maxime de l'Avocat des Vins de Joigny.
cellent
2111 MERCURE DE FRANCE
cellent , ne sont pas situées dans un territoire
dont l'extension soit comme perpendiculaire
du Ciel vers la Terre , ainsi
qu'il se figure par une idée bizarre , que
doivent être plantées les Vignes d'une
qualité superieure. Pour peu qu'il eût
jetté la vue sur les Cartes Topographiques
qui décorent les murs de nos sallons ,
il y eût appris que dans les côteaux de
Vignes , il y a la Region suprême , la
moyenne et l'inferieure ; que comme ce
n'est pas dans la region la plus basse , la
plus applanie ou la plus inondée que croît
le meilleur vin , ce n'est pas non plus
dans la Region la plus échauffée ou la
plus chauve , et pour parler humainement
, que ce n'est pas dans le plus roide
de la côte qu'on recueille ce Vin supe ♣
rieur et transcendant , mais que c'est dans
la naissance du plis des côteaux , parce
que c'est comme le lieu de concentration ,
tant des sucs choisis de la Terre , que de
la refléxion des rayons solaires . De- là
vient que dans la Capitale de Bourgogne ,
on appelle cet endroit Le Rognon de la Côte.
L'un de nos Geographes qui connoît jusqu'aux
moindres cantons de nos Etats ,
se donna autrefois la peine d'enluminer
de couleur rouge les endroits de ces Cartes
Topographiques , dont les Vignes
sont
SEPTEMBRE. 1731. 2113
•
sont dans la situation la plus heureuse
et dont le grain de terre est en même
temps le plus favorable.
Après l'exhibition qui nous a été faite
de ces Cartes , nous déclarons n'avoir apperçû
que quelques legers coups de pinceau
sur les côtes de Joigny , au lieu que
les climats des environs d'Auxerre sont
presque tous chargez de riches et nombreux
traits de ce pinceau décisif , qui
marquent que ce qui constituë radicalement
le bon vin , y est commun et ordinaire
, c'est-à - dire › que generalement
parlant , les Vignes d'autour notre bienaimée
Ville d'Auxerre sont dans une
و
bonne exposition et qu'elles naissent
dans un grain de terre qui n'est vitié ni
par des veines nitreuses ni par une superficie
sulfureuse. Ces coups de pinceau se
trouvent abondamment
marquez entre
autres Climats , sur ceux de la Chainette,
Migraine , Boivin , Clerion , qui sont au
Septentrion
et à l'Occident de la Ville ,
et sur plus de vingt autres qui sont au
levant et au midi de la même Ville , à
une demi - lieue , ou un peu plus de distance
, dont les productions
par une
licence que jusqu'ici nous avons tolerée ,
quoique contraire à la sincerité de notre
caractere , ne sont point distribuées dans
,
>
la
2114 MERCURE DE FRANCE
la Capitale des Gaules et plus loin , sous
d'autre nom que sous celui de Vin de
Coulanges .
En vain le zelateur des Vins de Joigny,
mal instruit du prix des Vins de notre
illustre Ville d'Auxerre , voudroit - il les
abaisser jusqu'à les mettre de Niveau avec
ceux de sa Patrie. Les Historiens de nos
Etats marquent dans leurs Annales Latines
, qu'en tout temps les Vins d'Autricum
Senonum se sont vendus le double ou
environ des Vins de Joviniacum : Et même
notre Controlleur General nous ayant
representé le Registre de l'Année courante
, nous y avons vû que le Vin de la
derniere récolte , que le Partisan vante
tant , a été débité à Auxerre , à un prix
une fois plus haut que celui du cru de
Joigny. ( a ) Nous ne croyons point qu'il
y ait mortel assez téméraire pour oser
s'inscrire en faux contre un témoignage
si authentique. On sçait que nous sommes
disposez à punir de peines très- séveres
les faussaires ou les faux témoins s'il
( a ) Les Vins du plus haut prix à Joigny
n'ont pas êté à 80. livres le Muid , au lieu qu'à
Auxerre ils ont été vendus 130. et 140. livres
quoique les Tonneaux ne soient pas plus grands ,
et qu'il y ait un plus grand éloignement de la
Ville de Paris.
s'en
SEPTEMBRE. 1731. 2215
s'en trouvoit sur nos Terres , et que nous
les condamnerions à user le reste de leurs
jours d'une boisson , qui n'est ni rare ni
délicieuse.
Si après le temps de l'Hyver il reste
peu de Vins dans notre Vignoble de Joigny
, il n'est pas besoin que nous en rapportions
ici la cause ; elle est connuë du
Bourgeois comme du Vigneron ; ils
avouent franchement l'un et l'autre que
leur liqueur est de peu de garde. Qui
pourroit après cela les blâmer de ce qu'ils
s'en défont promptement ? Deplus , leur
territoire n'est point de l'étenduë dont
est celui de notre bonne Ville d'Auxerre
ni fertile au même point. Il est notoire
par la simple confrontation des Inventaires
dressez par nos Inquisiteurs modernes
, ( a ) que les reservoirs soûterrains de
Joigny n'ont jamais eû l'honneur de contenir
dans leur capacité une quantité égale
à celle de nos reservoirs d'Auxerre.
Cette Ville qui est la clef de notre incomparable
Province de Bourgogne ,
jouit d'un Territoire si avantagé des bénignes
influences des autres Divinitez qui
nous sont amies , qu'avec la qualité du
( a ) On entend sous ce nom les Tabeliers qui
wont depuis peu dans les Caves , pour prendre
le nombre des Tonneaux pleins.
Raisin J
2118 MERCURE DE FRANCE
Raisin , il y en a toujours une quantité
qui excede celle du produit de Joigny.
Phoebus et Cybele semblent s'être accordez
à le combler de leurs bienfaits . Auxerre
a mille et mille côteaux renfermez
dans des sinuositez tortueuses qui regnent
en differens vallons ; et le Vignoble de
Joigny n'est, pour ainsi dire, qu'un simple
revers d'une ou de deux Montagnes , sur
lequel est arboré celui des Domaines du
Dieu Sylvain , que l'antiquité appelle
La Forêt d'Othe. Outre cela , par une justice
qui étoit dûë au Territoire d'Auxerre,
ancienne Cité Romaine , nous l'avons
aggrandi de diverses Colonies celebres
qui lui sont soumises à trois et quatre
lieuës vers la Region Australe , et qui le
regardent comme le chef- lieu .
د
Telles sont ces Colonies , dites Vineufes
par excellence ; tel est Irancy , Jussy
Ecouleves , la Palote &c. Joigny au contraire
, au rapport des Enquêteurs nos
Commissaires en cette Partie , n'est qu'un
simple Château qui sert de Rempart au
Territoire du Dieu Sylvain ci - dessus
nommé , autour duquel Château , l'on a
fait disparoître depuis fort peu de siécles ,
l'Arbre Favori des Druides Gaulois , pour
y planter de notre Bois tortu . Mais pour
çe faire , il a bien fallu de nécessité prendre
SEPTEMBRE . 1731 . 2117
dre le terrain tel qu'il s'est presenté , terrain
caustique , rempli de craye , de cailloux
enflâmez et petillans , terrain que
nous regardons comme une écume recuite
de la Bourbe qu'engendra sur plusieurs
Côtes de l'Univers le mêlange des Fleuves
et des Mers au siécle de Deucalion. C'est
ce qui fait que dans les années les plus favorisées
par Phoebus notre frere pour les
bons Vins , ceux de Joigny ont un goût
que les Mortels appellent fort à propos
goût de Terroir ; ne sont point francs ,
sentent le Tufou le Crayon ; et plus les
rayons de Phoebus ont été violemment
lancés , plus il est besoin de faire sur les
Cuves une salutaire injection d'une lymphe
benigne et temperative.
et
Le Vin de Joigny au rapport des mêmes
Enquêteurs , est non - seulement de
peu de durée
de durée , mais encore de difficile
transport dans les Pays éloignez ; ainsi
qu'il nous a paru par certaines Querimonies
inserées dans des Placets que les Députez
de ces Pays lointains nous ont presentez.
Ce Vin est tel , presque universellement
parlant , qu'il a de la peine à se
bien comporter jusqu'au signe de la Vierge
et de la Balance dans les années qu'il
est bon. Il a si peu de corps , au dire des
mêmes Commissaires , que la moindre
cau
2118 MERCURE DE FRANCE
eau suffit pour l'éteindre et l'amortir ; et
c'est mal à propos qu'on lui donneroit
l'épitette de Generofum. Quiconque veut
le garder chaste et sans alteration doit
>
و
mettre en pratique une espece de Paradoxe
, c'est-à- dire , qu'il faut nécessairement
qu'il le marie avec d'autre Vin ,
sinon sa propre vertu fait voir combien
d'elle-même elle est fragile et caduque.
Il est Capiteux , ajoutent- ils , à raison du
terrain brûlant qui le produit. C'est ce
qui fait que les Seps en sont si courts et
si petits qu'un simple fétu les soutient.
Deplus la Déesse Cybele et le Dieu Sylvain
ont certifié à nos Secretaires par plusieurs
de leurs Vassaux , qu'il est faux que
les habitans de la Colline Jovinienne ne
mettent rien dans leurs Vignes . Ils tirent
adroitement du Domaine voisin
appartenant au dieu Sylvain , une certaine
terre jaune qu'ils appellent du Lateux
dont ils sçavent imprégner leur
terrain blanchâtre pour en corriger le défaut,
si faire se pouvoit ; au lieu qu'Auxerre
n'a besoin ni de Lateux ni de Fumier :
Aussi n'avons nous permis d'y mettre du
Fumier dans certaines Vignes basses , qu'à
ceux de nos Vassaux , qui ont déclaré à
notre Chancelier,que ces héritages étoient
destinés à abreuver abondamment le Pay-
›
san
SEPTEMBRE 1731. 2119
-san apporteur de provisions , et à humecter
journellement le gosier du Laboureur
Artisan et de l'infatigable Vigneron : em
ploi qui est conforme à nos anciennes
Ordonnances , Registre premier.
Quant à la proposition par laquelle le
Panegyriste attribue à la vente du jus dont
nous daignons favoriser la côte de Joigny,
le nombre de mâles qu'il dit y surpasser
considerablement celui des femeles ; supposant
pour un moment la verité de son
calcul , nous disons que sa conclusion est
fausse , comme se trouvant absolument
détruite par l'experience dont les disciples
d'Hippocrate nous sont garants. Et
en nous servant de leur langage clair et
précis , nous ajoûtons qu'il prend pour
cause ce qui ne l'est pas. Ces habiles Scrutateurs
de l'origine du genre humain
admis dans notre Conseil , nous assurent
que communément, c'est en tous pays que
le nombre des mâles excede d'un peu celui
des femmes ; en quoi ils font remarquer la
sagesse du Conseil des Dieux , qui a prohibé
la Polygamie. Mais ce qu'ils observent
de plus , c'est que ce n'est pas
dans
quelques Villes de pays de Vignobles seulement
qu'on trouve le nombre de mâles
excéder notablement celui de l'autre sexe ;
ils ajoûtent que cela se rencontre aussi
dans
2120 MERCURE DE FRANCE
›
dans des Villes où le mauvais usage est
resté de ne dissoudre les Alimens et de
n'éteindre la soif qu'avec dujus de pomme,
ou avec une certaine eau bouillie , et même
dans des Pays , où par un effet de notre
colere , les Animaux raisonnables et
les irraisonnables usent d'une seule et même
boisson. Les Habitans des Ifles Britanniques
, bons connoisseurs, de notre Vin
de Bourgogne se sont donné la peine
de faire là - dessus des supputations qui
sont restées sans replique. ( a )
و
Toutes ces raisons pesées et murement
examinées , dans notre Conseil , les Hippocrates
et les Galiens de toutes les Nations,
duement appellez , et entendus, ensemble
les Echansons de tous les Dieux
nos Freres ; NOUS DECLARONS les Vins
de notre bonne Ville d'Auxerre à perpetuité
superieurs en qualité à ceux de
Joigny , ainsi qu'ils l'étoient par le passé
et qu'ils le sont actuellement . Voulons
en outre que l'on mette dans le même
rang de superiorité tous Vignobles dont
les Vins supportent la limphe , ct qui au
lieu de se laisser vaincre par ce foible
Element , le parfument du goût de la
celeste ambrosie , que les Mortels appel-
( a ) Lifez les Transactions Philosophiques ,
Du Journaux de l'Académie des Sciences de`
Londres.
lent
SEPTEMBRE . 1731. 272T
lent du nom de Pinot , (i) et donnent
réellement à ceux qui en usent , des forces
perseverantes et fermement inhérentes
. Accordons de grace speciale aux Vins
de Joigny d'être d'usage aux déj ûnez de
nos Courtisans, qui les ont reconnus suffisamment
apéritifs et proportionnez à
l'exercice qu'ils prennent. Permettons pareillement
à notre Grand Bouteillier de
nous en servir au même repas , avec deffenses
, sous peine de leze- Majesté , de
nous en présenter en d'autres temps , et
sur tout à l'heure du coucher de Phébus,
et lorsque Morphée vient nous inviter
au repos. Deffendons d'usurper le titre
de superiorité , à tous Vignobles dont les
Vins ne donnent que de ces forces passageres
, qu'on ne voit briller que durant
quelques jours , lesquels n'étant point éta-
Blis sur celui de notre Jus qui a le plus
de solidité , disparoissent aisément , s'évanoüissent
à la longueur du travail , et
font succomber les Champions qui en
usoient habituellement , par un aveu forcé
de leur foiblesse et de leur insuffisance.
(a) Le Pinot est une espece de Raisin noir,
qui fait le meilleur Vin. Les Comptes de la
Ville d'Auxerre pariant des Présens de Vin ,
faits aux Princes , specifient ordinairement
qu'ils sont de Vin de Pinet,
D Faisons
2122 MERCURE DE FRANCE
Faisons les mêmes deffenses et prohibitions
à tous Vignobles quelconques , dont
les Vins contiennent trop de ce Nitre fatal
aux intestins des Buveurs , comme
étant sujets à y causer une relaxation qui
devient sensible et deshonnorante , lorsqu'elle
concourt avec certains exercices du
corps au milieu des chaleurs de la Canicule.
(a)
Er sera notre presente Déclaration affichée
ès Carrefours de la Ville de Joigny
, à ce que nul n'en ignore , et publiée
chaque année esdits lieux aux jours
suivans , par Nous spécialement choisis ,
pour raisons à Nous connues ; sçavoir
en. Août le jour de la Consecration, des,
Autels de la Déesse Ops et de Cérès . (b)
Item. En Septembre , le jour de la Dé-
(a) Il est clair que Bacchus veut parler ici
de l'antiperistase qui éclatta à Auxerre les premiersjours
d'Août de l'an 1723. lorsque le Vin
de cette Ville commença à combattre la bile
formée delongue main dans le corps des Joueurs
de Paulme de Joigny..
(b) Bacchus parle ici suivant le Calendrier
des anciens Romains ; Les quatre jours qu'il
indique répondent au 10. Août , 14. Septembre
1. Octobre et 1. janvier , jours des quatre For-
RES deJoigny et par consequent de grand concours.
C'est celle du 10. Août qui est la cause
du choix qu'a fait Bacchus.
dicace
SEPTEMBRE. 1731. 2823
dicace du Temple de Jupiter Capitolin.
De plus , aux Calendes d'Octobre et de
Janvier. SI MANDONS à nos Baillifs.
et Sénechaux , &c.
Il n'est
pas
nécessaire , Messieurs , de
vous prier de rendre publique une Ordonnance
si juste et si équitable , et à laquelle
#outes les Langues les plus fines de Paris et
des Pays- Bas ne manqueront pas d'applandir.
J'aurois souhaité d'en trouver un plus
grand nombre de pareille nature dans ce
précieux in Folio , qui me fût communiqué
fort poliment par l' Archiviste du Dieu Bac
chus. Mais je me souviens que cette Ordonnance
étoit la seule dans son genre , et qu'après
elle le Volume n'en contenoit qu'une à
baquelle le Sceau venoit d'être mis tout recem
ment après la tenue des Etats Generaux. C'est
celle qui défend de planter de la Vigne dans
des endroits qui ne conviennent point à ce
Bois. Cette derniere Ordonnance vient d'être
heureusement notifiée dans le Royaume de
France par les Publications et Placards ordinaires
; et il faut esperer que l'on tiendra la
main à son observation.
Je suis & c. ce 12. Juillet 1731.
Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
J4y fait depuis peu , Messieurs
, un
voyage assezsubit et singulier.Fay visité
sans le secours d'aucun guide ni d'aucune
voiture, les Châteaux et les Palais des Dieuxdu
Paganisme. A ce langage , vous vous·
imaginez que mon voyage a dû être de longue
durée , et vous ne vous tromperiez pas,
SZ
SEPTEMBRE. 1731. 2107
si je l'eusse fait physiquement ; mais la verité
est que je n'ay voyagé qu'en esprit. Fe
n'ai point marqué sur mes Tablettes le jour
de mon départ ; je sçai seulement que je
commençai à parcourir tous ces Palais et
ces Châteaux un certain soir du mois de
Fevrier dernier, auquel les fumées du repas
ne m'incommodoient pas beaucoup , et j'ai
idée que le Soleil étoit déja pour lors dans
le Signe des Poissons . Quel qu'ait été mon
voyage , et qu'elle qu'en ait été la cause , me
voila heureusement de retour ; j'ai rapporté
avec moi certaines Ordonnancės assez curieuses
, que les Bibliothequaires de ces Palais,
plus complaisans et moins formalistes
que certains d'Italie , m'ont permis de transcrire
de dessus les Registres dont ils ont la
garde.
En parcourant le Recueil des Déclarations
du Dieu Bacchus , qui est écrit en belles
lettres d'or sur un Velin couleur de Pourpre,
grand in folio , j'en ai apperçû une qui m'a
frappé plus que toutes les autres. Je pense que
c'est l'avant derniere du volume. Sur le champ
j'en ai tiré une copie , avec la résolution de
m'en servir dans l'occasion. Cette occasion
s'est presentée , Messieurs , plutôt que je ne
Faurois crû ; car à peine étois-je un pew
remis de mon vryage spirituel vers le milieu
du mois de Mars , quun de mes amis m'en..
Cvj tendant
1108 MERCURE DE FRANCE
tendant plaindre à table d'un certain vin
clairet et leger que l'on m'avoit servi , tira
de sa poche le Mercure de Fevrier 1731-
et my fit voir à la page 271. un Ecrit que
j'ai reconnu à l'instant être celui que le Dieu
Bacchus a eù en vue de faire supprimer par
son Ordonnanoe. Je vous laisse à juger du
rapport que ces deux Pieces ont l'une avec
l'autre. J'en retranche une partie du préambule
qui est dans le style ordinaire des Sonverains
, et qui ne vous apprendroit autre
chose que les Provinces et les Seigneuries qui
composent le vaste Empire de cette Divinité.
ORDONNANCE du Dieu Bacchus,
donnée dans le Printemps dernier.
fils de Jupiter dit ......
Biber , Lycus , Lenæus , Osyris ,
Dionysus , &c. Jadis la Déesse de la Paix
accorda les differends qui s'étoient élevez
entre la Bourgogne et la Champagne , sur
la primauté du Fruit qui nous est consacré
dans l'étendue de ces deux Provinces
des Gaules ; il y avoit eû force procedures
écrites , mainte Poësie signifiée de part
et d'autre , Pourchot et Grenan , plaidans
pour la Bourgogne , et Coffin pour la
Champagne. (4) Cette bonne Déesse en-
(a) Voyez le Procès Poëtique , imprimé à Paris
an 1712. chez la veuve de Claude Thiboust .
fin
SEPTEMBRE 1731. 2109
in trouva le secret de les mettre tous
d'accord ; elle fit verser dans une grande
Couppe une quantité égale de vin de
Bourgogne et de Champagne , et soudain
ayant fait gouter de ce mêlange aux deux
Partis , ils mirent les armes bas , la Champagne
cedant l'honneur à la Bourgogne ,
dont le vin avoit dominé dans la Couppe
, en gout , en couleur et en force.
Aujourd'hui un Ecrivain récemment
formé sur le Rivage de l'Yonne , réveille
en quelque sorte ce Procès , qui avoit
été jugé définitivement. Il semble avoir
pour but dans son raisonnement de donner
gain de cause à la Champagne , essayant
de faire comprendre que des vins
tendres , peu colorez , de peu de durée ,
et qui de plus ont un goût de terroir ,
doivent aller de pair avec des vins qui
ent du corps , une couleur bien rosée ,
qui sont francs , bien - faisans , amis de
l'estomach , et dont la séve est fine en
même-temps qu'elle est mâle et vigoureuse.
Et ce qu'il y a encore de plus sur
prenant dans son procedé, c'est qu'il prétend
être bon Bourguignon , en écrivant,
comme il fait , en faveur de ces vins tendres
et délicats .
Ce trop zelé Partisan fait paroître sur
les rangs Joigny , petite Ville , qu'il lui
plaît
110 MERCURE DE FRANCE
plaît de placer dans notre Province de
Bourgogne , quoiqu'elle n'y soit point
comprise , suivant l'exacte Géographie de
notre Empire ; et après avoir égalé ses
vins à ceux de notre bonne et ancienne
Ville d'Auxerre , de tout temps renfermée
dans notre Cercle de Bourgogne ,
il pousse la prévention et l'audace jusqu'à
leur donner le dessus. Oubliant lui - même
d'où il est natif , et faisant semblant
de ne pas appercevoir que c'est l'amour
aveugle de sa Patrie qui le rend Auteur,
il va jusqu'à reprocher à notre zelé Analiste
d'Auxerre , duquel Mercure nous
a fait voir les Ecrits , de s'être trop étendu
par l'effet du même amour , à rapporter
les avantages de son Pays. Nous DECLARONS
que nous aimons tous nos fideles
Sujets ; mais nous devons aussi rendre.
justice à qui elle appartient , et réfuter
ce qui mérite de l'être. Sans nous arrê
ter à remarquer que l'Avocat des vins
de joigny pourroit avoir besoin de passer
quelques mois , tant sur le Parnasse
que
dans l'une de nos Universitez , pour
y apprendre à discerner les vins par la fréquentation
des personnages versez en cette
Scienće , et à ne pas prodiguer , comme
il fait , les Citations des Poëtes Latins
dont il abuse quelquefois. Nous disons.
>
qu'il
SEPTEMBRE. 1731. 21FT
qu'il paroît par son langage qu'il n'a jamais
vû de ses yeux ces Vignobles qui
sont si renommez dans nos Etats , qu'à
l'entendre raisonner il semble que jamais:
il n'est sorti des limites de son petit Ter--
ritoire , si ce n'est peut-être pour venir à
Auxerre considerer superficiellement la
situation des Côteaux .
Si ce jeune Ecrivain avoit voulu se détromper
serieusement et de bonne foi ,
ainsi que font tous ceux qui sont étroitement
attachez à notre service , il auroit
pû recourir à nos Papiers - Terriers de
Coulanges - les - Vineuses , à ceux de nos:
Vignobles d'autour de Beaune et des environs,
de Nuys , Volnay , Pomar , Chase
sagne , à ceux des climats du clos de Vougeot
, ( a ) Champbertin , Savigny , la
Romance les Serrieres proche Dijon
et les côtes de Chenove auprès de la
même Ville. Il y auroit appris par les
Declarations circonstanciées de nos féaux
et amez sujets qui peuplent ces cantons ,
que les Vignes qu'ils appellent des meilleurs
endroits et du produit le plus ex-
,
3-
( a ) Vougeot est un Village entre Dijon &
Nuys , où M. l'Abbé de Citeaux a un. Clos de
Vignes très- vaste et presque tout plat , lequel
cependant produit un Vin très- excellent , contre
la Maxime de l'Avocat des Vins de Joigny.
cellent
2111 MERCURE DE FRANCE
cellent , ne sont pas situées dans un territoire
dont l'extension soit comme perpendiculaire
du Ciel vers la Terre , ainsi
qu'il se figure par une idée bizarre , que
doivent être plantées les Vignes d'une
qualité superieure. Pour peu qu'il eût
jetté la vue sur les Cartes Topographiques
qui décorent les murs de nos sallons ,
il y eût appris que dans les côteaux de
Vignes , il y a la Region suprême , la
moyenne et l'inferieure ; que comme ce
n'est pas dans la region la plus basse , la
plus applanie ou la plus inondée que croît
le meilleur vin , ce n'est pas non plus
dans la Region la plus échauffée ou la
plus chauve , et pour parler humainement
, que ce n'est pas dans le plus roide
de la côte qu'on recueille ce Vin supe ♣
rieur et transcendant , mais que c'est dans
la naissance du plis des côteaux , parce
que c'est comme le lieu de concentration ,
tant des sucs choisis de la Terre , que de
la refléxion des rayons solaires . De- là
vient que dans la Capitale de Bourgogne ,
on appelle cet endroit Le Rognon de la Côte.
L'un de nos Geographes qui connoît jusqu'aux
moindres cantons de nos Etats ,
se donna autrefois la peine d'enluminer
de couleur rouge les endroits de ces Cartes
Topographiques , dont les Vignes
sont
SEPTEMBRE. 1731. 2113
•
sont dans la situation la plus heureuse
et dont le grain de terre est en même
temps le plus favorable.
Après l'exhibition qui nous a été faite
de ces Cartes , nous déclarons n'avoir apperçû
que quelques legers coups de pinceau
sur les côtes de Joigny , au lieu que
les climats des environs d'Auxerre sont
presque tous chargez de riches et nombreux
traits de ce pinceau décisif , qui
marquent que ce qui constituë radicalement
le bon vin , y est commun et ordinaire
, c'est-à - dire › que generalement
parlant , les Vignes d'autour notre bienaimée
Ville d'Auxerre sont dans une
و
bonne exposition et qu'elles naissent
dans un grain de terre qui n'est vitié ni
par des veines nitreuses ni par une superficie
sulfureuse. Ces coups de pinceau se
trouvent abondamment
marquez entre
autres Climats , sur ceux de la Chainette,
Migraine , Boivin , Clerion , qui sont au
Septentrion
et à l'Occident de la Ville ,
et sur plus de vingt autres qui sont au
levant et au midi de la même Ville , à
une demi - lieue , ou un peu plus de distance
, dont les productions
par une
licence que jusqu'ici nous avons tolerée ,
quoique contraire à la sincerité de notre
caractere , ne sont point distribuées dans
,
>
la
2114 MERCURE DE FRANCE
la Capitale des Gaules et plus loin , sous
d'autre nom que sous celui de Vin de
Coulanges .
En vain le zelateur des Vins de Joigny,
mal instruit du prix des Vins de notre
illustre Ville d'Auxerre , voudroit - il les
abaisser jusqu'à les mettre de Niveau avec
ceux de sa Patrie. Les Historiens de nos
Etats marquent dans leurs Annales Latines
, qu'en tout temps les Vins d'Autricum
Senonum se sont vendus le double ou
environ des Vins de Joviniacum : Et même
notre Controlleur General nous ayant
representé le Registre de l'Année courante
, nous y avons vû que le Vin de la
derniere récolte , que le Partisan vante
tant , a été débité à Auxerre , à un prix
une fois plus haut que celui du cru de
Joigny. ( a ) Nous ne croyons point qu'il
y ait mortel assez téméraire pour oser
s'inscrire en faux contre un témoignage
si authentique. On sçait que nous sommes
disposez à punir de peines très- séveres
les faussaires ou les faux témoins s'il
( a ) Les Vins du plus haut prix à Joigny
n'ont pas êté à 80. livres le Muid , au lieu qu'à
Auxerre ils ont été vendus 130. et 140. livres
quoique les Tonneaux ne soient pas plus grands ,
et qu'il y ait un plus grand éloignement de la
Ville de Paris.
s'en
SEPTEMBRE. 1731. 2215
s'en trouvoit sur nos Terres , et que nous
les condamnerions à user le reste de leurs
jours d'une boisson , qui n'est ni rare ni
délicieuse.
Si après le temps de l'Hyver il reste
peu de Vins dans notre Vignoble de Joigny
, il n'est pas besoin que nous en rapportions
ici la cause ; elle est connuë du
Bourgeois comme du Vigneron ; ils
avouent franchement l'un et l'autre que
leur liqueur est de peu de garde. Qui
pourroit après cela les blâmer de ce qu'ils
s'en défont promptement ? Deplus , leur
territoire n'est point de l'étenduë dont
est celui de notre bonne Ville d'Auxerre
ni fertile au même point. Il est notoire
par la simple confrontation des Inventaires
dressez par nos Inquisiteurs modernes
, ( a ) que les reservoirs soûterrains de
Joigny n'ont jamais eû l'honneur de contenir
dans leur capacité une quantité égale
à celle de nos reservoirs d'Auxerre.
Cette Ville qui est la clef de notre incomparable
Province de Bourgogne ,
jouit d'un Territoire si avantagé des bénignes
influences des autres Divinitez qui
nous sont amies , qu'avec la qualité du
( a ) On entend sous ce nom les Tabeliers qui
wont depuis peu dans les Caves , pour prendre
le nombre des Tonneaux pleins.
Raisin J
2118 MERCURE DE FRANCE
Raisin , il y en a toujours une quantité
qui excede celle du produit de Joigny.
Phoebus et Cybele semblent s'être accordez
à le combler de leurs bienfaits . Auxerre
a mille et mille côteaux renfermez
dans des sinuositez tortueuses qui regnent
en differens vallons ; et le Vignoble de
Joigny n'est, pour ainsi dire, qu'un simple
revers d'une ou de deux Montagnes , sur
lequel est arboré celui des Domaines du
Dieu Sylvain , que l'antiquité appelle
La Forêt d'Othe. Outre cela , par une justice
qui étoit dûë au Territoire d'Auxerre,
ancienne Cité Romaine , nous l'avons
aggrandi de diverses Colonies celebres
qui lui sont soumises à trois et quatre
lieuës vers la Region Australe , et qui le
regardent comme le chef- lieu .
د
Telles sont ces Colonies , dites Vineufes
par excellence ; tel est Irancy , Jussy
Ecouleves , la Palote &c. Joigny au contraire
, au rapport des Enquêteurs nos
Commissaires en cette Partie , n'est qu'un
simple Château qui sert de Rempart au
Territoire du Dieu Sylvain ci - dessus
nommé , autour duquel Château , l'on a
fait disparoître depuis fort peu de siécles ,
l'Arbre Favori des Druides Gaulois , pour
y planter de notre Bois tortu . Mais pour
çe faire , il a bien fallu de nécessité prendre
SEPTEMBRE . 1731 . 2117
dre le terrain tel qu'il s'est presenté , terrain
caustique , rempli de craye , de cailloux
enflâmez et petillans , terrain que
nous regardons comme une écume recuite
de la Bourbe qu'engendra sur plusieurs
Côtes de l'Univers le mêlange des Fleuves
et des Mers au siécle de Deucalion. C'est
ce qui fait que dans les années les plus favorisées
par Phoebus notre frere pour les
bons Vins , ceux de Joigny ont un goût
que les Mortels appellent fort à propos
goût de Terroir ; ne sont point francs ,
sentent le Tufou le Crayon ; et plus les
rayons de Phoebus ont été violemment
lancés , plus il est besoin de faire sur les
Cuves une salutaire injection d'une lymphe
benigne et temperative.
et
Le Vin de Joigny au rapport des mêmes
Enquêteurs , est non - seulement de
peu de durée
de durée , mais encore de difficile
transport dans les Pays éloignez ; ainsi
qu'il nous a paru par certaines Querimonies
inserées dans des Placets que les Députez
de ces Pays lointains nous ont presentez.
Ce Vin est tel , presque universellement
parlant , qu'il a de la peine à se
bien comporter jusqu'au signe de la Vierge
et de la Balance dans les années qu'il
est bon. Il a si peu de corps , au dire des
mêmes Commissaires , que la moindre
cau
2118 MERCURE DE FRANCE
eau suffit pour l'éteindre et l'amortir ; et
c'est mal à propos qu'on lui donneroit
l'épitette de Generofum. Quiconque veut
le garder chaste et sans alteration doit
>
و
mettre en pratique une espece de Paradoxe
, c'est-à- dire , qu'il faut nécessairement
qu'il le marie avec d'autre Vin ,
sinon sa propre vertu fait voir combien
d'elle-même elle est fragile et caduque.
Il est Capiteux , ajoutent- ils , à raison du
terrain brûlant qui le produit. C'est ce
qui fait que les Seps en sont si courts et
si petits qu'un simple fétu les soutient.
Deplus la Déesse Cybele et le Dieu Sylvain
ont certifié à nos Secretaires par plusieurs
de leurs Vassaux , qu'il est faux que
les habitans de la Colline Jovinienne ne
mettent rien dans leurs Vignes . Ils tirent
adroitement du Domaine voisin
appartenant au dieu Sylvain , une certaine
terre jaune qu'ils appellent du Lateux
dont ils sçavent imprégner leur
terrain blanchâtre pour en corriger le défaut,
si faire se pouvoit ; au lieu qu'Auxerre
n'a besoin ni de Lateux ni de Fumier :
Aussi n'avons nous permis d'y mettre du
Fumier dans certaines Vignes basses , qu'à
ceux de nos Vassaux , qui ont déclaré à
notre Chancelier,que ces héritages étoient
destinés à abreuver abondamment le Pay-
›
san
SEPTEMBRE 1731. 2119
-san apporteur de provisions , et à humecter
journellement le gosier du Laboureur
Artisan et de l'infatigable Vigneron : em
ploi qui est conforme à nos anciennes
Ordonnances , Registre premier.
Quant à la proposition par laquelle le
Panegyriste attribue à la vente du jus dont
nous daignons favoriser la côte de Joigny,
le nombre de mâles qu'il dit y surpasser
considerablement celui des femeles ; supposant
pour un moment la verité de son
calcul , nous disons que sa conclusion est
fausse , comme se trouvant absolument
détruite par l'experience dont les disciples
d'Hippocrate nous sont garants. Et
en nous servant de leur langage clair et
précis , nous ajoûtons qu'il prend pour
cause ce qui ne l'est pas. Ces habiles Scrutateurs
de l'origine du genre humain
admis dans notre Conseil , nous assurent
que communément, c'est en tous pays que
le nombre des mâles excede d'un peu celui
des femmes ; en quoi ils font remarquer la
sagesse du Conseil des Dieux , qui a prohibé
la Polygamie. Mais ce qu'ils observent
de plus , c'est que ce n'est pas
dans
quelques Villes de pays de Vignobles seulement
qu'on trouve le nombre de mâles
excéder notablement celui de l'autre sexe ;
ils ajoûtent que cela se rencontre aussi
dans
2120 MERCURE DE FRANCE
›
dans des Villes où le mauvais usage est
resté de ne dissoudre les Alimens et de
n'éteindre la soif qu'avec dujus de pomme,
ou avec une certaine eau bouillie , et même
dans des Pays , où par un effet de notre
colere , les Animaux raisonnables et
les irraisonnables usent d'une seule et même
boisson. Les Habitans des Ifles Britanniques
, bons connoisseurs, de notre Vin
de Bourgogne se sont donné la peine
de faire là - dessus des supputations qui
sont restées sans replique. ( a )
و
Toutes ces raisons pesées et murement
examinées , dans notre Conseil , les Hippocrates
et les Galiens de toutes les Nations,
duement appellez , et entendus, ensemble
les Echansons de tous les Dieux
nos Freres ; NOUS DECLARONS les Vins
de notre bonne Ville d'Auxerre à perpetuité
superieurs en qualité à ceux de
Joigny , ainsi qu'ils l'étoient par le passé
et qu'ils le sont actuellement . Voulons
en outre que l'on mette dans le même
rang de superiorité tous Vignobles dont
les Vins supportent la limphe , ct qui au
lieu de se laisser vaincre par ce foible
Element , le parfument du goût de la
celeste ambrosie , que les Mortels appel-
( a ) Lifez les Transactions Philosophiques ,
Du Journaux de l'Académie des Sciences de`
Londres.
lent
SEPTEMBRE . 1731. 272T
lent du nom de Pinot , (i) et donnent
réellement à ceux qui en usent , des forces
perseverantes et fermement inhérentes
. Accordons de grace speciale aux Vins
de Joigny d'être d'usage aux déj ûnez de
nos Courtisans, qui les ont reconnus suffisamment
apéritifs et proportionnez à
l'exercice qu'ils prennent. Permettons pareillement
à notre Grand Bouteillier de
nous en servir au même repas , avec deffenses
, sous peine de leze- Majesté , de
nous en présenter en d'autres temps , et
sur tout à l'heure du coucher de Phébus,
et lorsque Morphée vient nous inviter
au repos. Deffendons d'usurper le titre
de superiorité , à tous Vignobles dont les
Vins ne donnent que de ces forces passageres
, qu'on ne voit briller que durant
quelques jours , lesquels n'étant point éta-
Blis sur celui de notre Jus qui a le plus
de solidité , disparoissent aisément , s'évanoüissent
à la longueur du travail , et
font succomber les Champions qui en
usoient habituellement , par un aveu forcé
de leur foiblesse et de leur insuffisance.
(a) Le Pinot est une espece de Raisin noir,
qui fait le meilleur Vin. Les Comptes de la
Ville d'Auxerre pariant des Présens de Vin ,
faits aux Princes , specifient ordinairement
qu'ils sont de Vin de Pinet,
D Faisons
2122 MERCURE DE FRANCE
Faisons les mêmes deffenses et prohibitions
à tous Vignobles quelconques , dont
les Vins contiennent trop de ce Nitre fatal
aux intestins des Buveurs , comme
étant sujets à y causer une relaxation qui
devient sensible et deshonnorante , lorsqu'elle
concourt avec certains exercices du
corps au milieu des chaleurs de la Canicule.
(a)
Er sera notre presente Déclaration affichée
ès Carrefours de la Ville de Joigny
, à ce que nul n'en ignore , et publiée
chaque année esdits lieux aux jours
suivans , par Nous spécialement choisis ,
pour raisons à Nous connues ; sçavoir
en. Août le jour de la Consecration, des,
Autels de la Déesse Ops et de Cérès . (b)
Item. En Septembre , le jour de la Dé-
(a) Il est clair que Bacchus veut parler ici
de l'antiperistase qui éclatta à Auxerre les premiersjours
d'Août de l'an 1723. lorsque le Vin
de cette Ville commença à combattre la bile
formée delongue main dans le corps des Joueurs
de Paulme de Joigny..
(b) Bacchus parle ici suivant le Calendrier
des anciens Romains ; Les quatre jours qu'il
indique répondent au 10. Août , 14. Septembre
1. Octobre et 1. janvier , jours des quatre For-
RES deJoigny et par consequent de grand concours.
C'est celle du 10. Août qui est la cause
du choix qu'a fait Bacchus.
dicace
SEPTEMBRE. 1731. 2823
dicace du Temple de Jupiter Capitolin.
De plus , aux Calendes d'Octobre et de
Janvier. SI MANDONS à nos Baillifs.
et Sénechaux , &c.
Il n'est
pas
nécessaire , Messieurs , de
vous prier de rendre publique une Ordonnance
si juste et si équitable , et à laquelle
#outes les Langues les plus fines de Paris et
des Pays- Bas ne manqueront pas d'applandir.
J'aurois souhaité d'en trouver un plus
grand nombre de pareille nature dans ce
précieux in Folio , qui me fût communiqué
fort poliment par l' Archiviste du Dieu Bac
chus. Mais je me souviens que cette Ordonnance
étoit la seule dans son genre , et qu'après
elle le Volume n'en contenoit qu'une à
baquelle le Sceau venoit d'être mis tout recem
ment après la tenue des Etats Generaux. C'est
celle qui défend de planter de la Vigne dans
des endroits qui ne conviennent point à ce
Bois. Cette derniere Ordonnance vient d'être
heureusement notifiée dans le Royaume de
France par les Publications et Placards ordinaires
; et il faut esperer que l'on tiendra la
main à son observation.
Je suis & c. ce 12. Juillet 1731.
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Résumé : VOYAGE dans les Etats de Bacchus. Lettre écrite aux Auteurs du Mercure.
La lettre adressée aux auteurs du Mercure relate un voyage spirituel effectué par l'auteur dans les États de Bacchus en février 1731. Ce périple a permis à l'auteur de visiter les châteaux et palais des dieux du paganisme et de transcrire des ordonnances trouvées dans leurs bibliothèques. L'une de ces ordonnances, datée du printemps précédent, traite d'un ancien différend entre la Bourgogne et la Champagne concernant la primauté du vin. La déesse de la Paix avait tranché en faveur de la Bourgogne, dont le vin avait dominé dans un mélange testé par les deux parties. Un écrivain récent de l'Yonne a relancé ce débat en faveur des vins de Champagne, qualifiés de tendres et délicats, contrairement aux vins bourguignons, décrits comme ayant du corps et une couleur bien rosée. L'ordonnance de Bacchus réfute ces arguments, soulignant que les vins de Bourgogne proviennent de terroirs exceptionnels et sont reconnus pour leur qualité supérieure. Elle critique l'écrivain pour son manque de connaissance des vignobles bourguignons et son utilisation abusive des citations poétiques. L'ordonnance met en avant la supériorité des vins d'Auxerre et des environs, soutenue par des documents historiques et des inventaires modernes. Les vins de Joigny sont décrits comme de faible garde et produits dans des terroirs moins favorables. Ils ont un goût de terroir, sentent le tuf et le crayon, et sont de courte durée, s'altérant facilement même avant la fin de l'été. Leur faible corps les rend sensibles à l'eau, nécessitant souvent d'être mélangés avec d'autres vins pour éviter l'altération. Les vignerons de Joigny utilisent du 'lateux', une terre jaune tirée du domaine voisin, pour améliorer leur terroir. En revanche, les vins d'Auxerre n'ont pas besoin de tels amendements et sont jugés supérieurs en qualité. Ils sont reconnus pour leur solidité et leur capacité à résister à l'eau. Les vins de Joigny sont autorisés pour les déjeuners des courtisans mais interdits à d'autres moments. Le texte se conclut par des instructions pour afficher et publier ces déclarations à Joigny à des dates spécifiques.
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9
p. 2124-2126
A Me C*** Par un Ami qui en plaisantant elle appelloit son Mari.
Début :
Jeune C *** vous exigés [...]
Mots clefs :
Honneur, Muse, Apollon
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A Me C*** Par un Ami qui en plaisantant elle appelloit son Mari.
A Mc C ***
Par un Ami qui en plaisantant elle appelloit
fon Mari.
J
Eune C *** vous exigés
Qu'à votre honneur ma Muse rime
Hélas ! à quoi vous m'engagez !
Vous avez un droit légitime
Sur l'Encens du sacré Vallon ;
Je le sçai fort bien , les Catules ,
Les Ovides et les Tibules ,
Solliciteroient Apollon
Pour obtenir la préférence
Qu'à ma veine vous accordez ;
J'en ai de la reconnoissance ,
Plus que vous ne m'en demandez ,
Mais réfléchissez-y , ma chere ,
Me sieroit-il à moi de faire
Le Portrait de ces doux appas
Qui sçavent fixer sur vos pas
L'Amour quittant pour vous sa Mere ?
Me sieroit-il pareillement
De craioner votre enjoument,
Cette humeur folichone et vive
Que suit toujours l'Amusement ,
Sans
SEPTEMBRE 1731. 2125
Sans que jamais l'ennui le suive
Si j'avois fait un tel Tableau
D'abord les Plaisans de Cithere
Apostrophans de mon Pinceau
La complaisance débonnaire
D'un Brevet ou d'un Petpouri ,
( Calotinique Récompense )
Auroient pour moi fait la Dépense ;
Sur-tout Amour auroit bien ri,
En s'écriant , ho ! la bonne ame !
Il fait l'Eloge de sa femme !
Est-ce là l'Emploi d'un Mari ›
Ce n'est son fait que la louange ;
Abandonne ce ton étrange ;
L'Hymen n'est pas Complimenteur.
Quand par hazard peu vrai-semblable ,
Un Epoux , rare Adorateur ,,
Ose vanter sa femme aimable ,
Er persuade l'Auditeur ,
C'est lui que
par notre Orateur
De son récit déraisonnable
Est bien-tôt justement puni.
Le Roi ( * ) GANDAULE en a fourni
Un Exemple assez mémorable.
Et nous apprend qu'il faut céler "'
* Candaule , Roi impudent. Ilperdit le Throne
et la vie , pour avoir fait voir dans le Bain la
Reine sa femme à un Seigneur de sa Cour , qui
en devint amoureux,
Diij
Un
2126 MERCURE DE FRANCE
; Un bonheur souvent rédoutable
Oui , plus l'Epouse est adorable
Et moins l'Epoux en doit parler.
Lá Maxime est sage et discrete ,
Si tu la suis exactement ,
Tu vas garder parfaitement
Un silence d'Anacorette.
Renguaine donc ton compliment :
Ta moitié doit être éxaltéc
Par la Plume de quelque Amant
Qui s'en acquite galament ; ..... 2
Que la Belle sera fêtée ,
Si tous les coeurs qu'elle a surpris
De ses Attraits chantent le prix !
Pour elle tu verras éclore
Plus de Vers qu'à Petrarque épris
Je n'en ai dictés pour sa ( * ) Laure.
* Laure , Beauté mille et mille fois célébrés
dans les Sonnets de Petrarque.
Par un Ami qui en plaisantant elle appelloit
fon Mari.
J
Eune C *** vous exigés
Qu'à votre honneur ma Muse rime
Hélas ! à quoi vous m'engagez !
Vous avez un droit légitime
Sur l'Encens du sacré Vallon ;
Je le sçai fort bien , les Catules ,
Les Ovides et les Tibules ,
Solliciteroient Apollon
Pour obtenir la préférence
Qu'à ma veine vous accordez ;
J'en ai de la reconnoissance ,
Plus que vous ne m'en demandez ,
Mais réfléchissez-y , ma chere ,
Me sieroit-il à moi de faire
Le Portrait de ces doux appas
Qui sçavent fixer sur vos pas
L'Amour quittant pour vous sa Mere ?
Me sieroit-il pareillement
De craioner votre enjoument,
Cette humeur folichone et vive
Que suit toujours l'Amusement ,
Sans
SEPTEMBRE 1731. 2125
Sans que jamais l'ennui le suive
Si j'avois fait un tel Tableau
D'abord les Plaisans de Cithere
Apostrophans de mon Pinceau
La complaisance débonnaire
D'un Brevet ou d'un Petpouri ,
( Calotinique Récompense )
Auroient pour moi fait la Dépense ;
Sur-tout Amour auroit bien ri,
En s'écriant , ho ! la bonne ame !
Il fait l'Eloge de sa femme !
Est-ce là l'Emploi d'un Mari ›
Ce n'est son fait que la louange ;
Abandonne ce ton étrange ;
L'Hymen n'est pas Complimenteur.
Quand par hazard peu vrai-semblable ,
Un Epoux , rare Adorateur ,,
Ose vanter sa femme aimable ,
Er persuade l'Auditeur ,
C'est lui que
par notre Orateur
De son récit déraisonnable
Est bien-tôt justement puni.
Le Roi ( * ) GANDAULE en a fourni
Un Exemple assez mémorable.
Et nous apprend qu'il faut céler "'
* Candaule , Roi impudent. Ilperdit le Throne
et la vie , pour avoir fait voir dans le Bain la
Reine sa femme à un Seigneur de sa Cour , qui
en devint amoureux,
Diij
Un
2126 MERCURE DE FRANCE
; Un bonheur souvent rédoutable
Oui , plus l'Epouse est adorable
Et moins l'Epoux en doit parler.
Lá Maxime est sage et discrete ,
Si tu la suis exactement ,
Tu vas garder parfaitement
Un silence d'Anacorette.
Renguaine donc ton compliment :
Ta moitié doit être éxaltéc
Par la Plume de quelque Amant
Qui s'en acquite galament ; ..... 2
Que la Belle sera fêtée ,
Si tous les coeurs qu'elle a surpris
De ses Attraits chantent le prix !
Pour elle tu verras éclore
Plus de Vers qu'à Petrarque épris
Je n'en ai dictés pour sa ( * ) Laure.
* Laure , Beauté mille et mille fois célébrés
dans les Sonnets de Petrarque.
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Résumé : A Me C*** Par un Ami qui en plaisantant elle appelloit son Mari.
Dans une lettre poétique adressée à une femme surnommée 'Mc C ***', l'auteur exprime sa gratitude pour la préférence qu'elle lui accorde, la comparant à la reconnaissance que les grands poètes classiques sollicitaient d'Apollon. Il hésite à décrire les charmes de cette femme, craignant que cela ne soit inapproprié pour un mari. Il évoque les risques de moqueries et de réprimandes, notamment celle de l'Amour, qui pourrait trouver étrange qu'un mari loue sa femme. L'auteur cite l'exemple de Candaule, un roi qui perdit son trône et sa vie pour avoir montré sa femme nue à un seigneur de sa cour. Il conclut que plus une épouse est admirable, moins son époux doit en parler. Il conseille à l'époux de laisser à un amant le soin de célébrer les mérites de sa femme, afin qu'elle soit fêtée par tous les cœurs qu'elle a conquis. Il compare cette situation à celle de Pétrarque, qui écrivit de nombreux sonnets pour Laure.
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10
p. 2126-2145
LETTRE de M. à M. sur la Musique.
Début :
Nous avons eu très-souvent occasion, Monsieur, de parler Musique, vous [...]
Mots clefs :
Musique, Basse fondamentale, Dissonances, Ton majeur, Septième superflue, Quinte, Note tonique, Basse continue, Tierce mineure, Dominante
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. à M. sur la Musique.
LETTRE
de M. à M. sur la Musique.
Ous avons eu très- souvent occasion.
Monsieur , de parler Musique , vous
m'avez
SEPTEMBRE 1731. 2127
m'avez fait l'honneur de me demander
raison sur bien des choses ; et comme
vous ne m'avez pas paru satisfait de mes
réponses sur la façon de placer les accords
, de les sauver , et de les préparer ;
je viens de faire une Carte generale de
la Basse fondamentalle , après laquelle
vous trouverez une suite de gès . ét 11es.
une suite de secondes une suite de
, septiémes
en montant et en descendant , et
un éxemple pour les Dissonances ; le tout
me paroît clair et je me flate que vous
le trouverez de même. J'ay l'honneur
d'être &c.
>
Explication de la Carte generale de la
Basse fondamentale et de ses dérivés , di
visée en quatre Articles .
Il n'y a que deux accords dans la mu
sique , d'où dérivent tous les autres , sçavoir
le parfait et la septiéme ; mais il y a
trois sortes de septiéme dans la Basse fondamentale
; sçavoir, dans le ton majeur et
mineur la septième de la seconde note dut
on , et la septième de la dominante ou
cinquiéme note du ton , et dans le ton
mineur seulement la septiéme diminuće
de la note sensible ou septiéme note
du ton.
Diiij Toute
2128 MER CURE DE FRANCE
Toute note qui porte septième ou accord
parfait , est Basse fondamentale
excepté la septiéme superfluë '
comme
vous le verrez dans les articles 3. et 4º .
LaBasse Fondamentale de la seconde , est
la septième de la note au -dessus , comme
par exemple , la Basse fondamentale de
la seconde de l'ut , est le re portant septiéme
, comme vous le verrez dans le car
ticle, excepté qu'elle ne soit accompagnée
de la 11. ou 4º , et de la se. Car alors
c'est la se..en- dessus portant septiéme qui
en est la Basse fondamentale, comme vous
le verrez dans le 3 article..
La Basse fondamentale des neuvièmes
est la tierce en dessus , portante com
me par exemple , la Basse fondamentale
de la neuvième du mi est le sol , portant
7. comme vous le verrez dans le 3e. article.
Il y a une sorte de neuviéme dans le
ton mineur , accompagnée de la quinta
superfluë , qui se met sur la médiante ou
troisiéme note du ton ; elle suit toûjours
la regle de la neuviéme précedente pour
la Basse fondamentale. comme vous le
verrez dans la 3 article , où je la marquerai
par un 5. avec une croix devant pour
la distinguer des autres .
›
La B sse fondamentale des 11es ou 4es.
est la je en -dessus portant 7e , comme
Vous
SEPTEMBRE. 1731. 2129
vous le verrez dans le 2e. article , et dans
la suite des ges et 11es. , excepté qu'elle.
ne soit accompagnée de la se superfluë ,
car alors c'est la se superfluë en -dessus
portant 7. diminuée qui en est la Basse:
fondamentale.
Dans le premier Article où je traite de:
l'accord parfait de la note tonique ou note:
du ton où l'on est , et de ses derivés , vous
trouverez la sixte de la médiante ou troi- .
siéme note du ton et la sixte et quarte
de la dominante ou cinquième note du:
ton . La regle est generale pour. le majeur
et le mineur..
,
و
Dans le second Article où je traite de
la septième , de la seconde note du ton et
de ses derivés , vous trouverez dans la
premiere partie mede majeur , la sixte et .
quinte sur la quatriéme note du ton , ce
la sixte qui se met sur la sixième note du
ton en montant , en retranchant l'oc
tave de la Basse fondamentale ; et sans y
rien retrancher , vous trouverez la petitesixte
mineure , qui se met sur la sixième :
note du ton en descendant , et sur la mê
me note vous trouverez la petite sixte:
majeure en mettant tierce majeure, à la
Basse fondamentale , qui devient alorss
dominante , et la note où l'on a mis la pea
tite sixte majeure , devient seconde note:
Div. dir
2
2130 MERCURE DE FRANCE
› du ton et en remettant
la tierce
au naturel
dans
la Basse
fondamentale
, ce qui
nous
fait
revenir
à nôtre
premier
ton
vous
trouverez
la seconde
de la note
tonique
et l'accord
de petite
onzième
ou quar
te sur la
dominante
ou
cinquiéme
note
du ton en retranchant
la tierce
et la
quinte
de la Basse
fondamentale
, et ajoûtant
l'octave
de la Basse
continuë
, qu'il
faut
regarder
comme
une
note
étrangere
à l'accord
, ainsi
que la Basse
continuë
puisqu'elle
n'en
est que la répetition
.
›
>
Dans la seconde partie mode mineure ,
ou la septième de la seconde note du ton,
est accompagnée de la fausse quinte , vous
trouverez l'accord de sixte et quinte avec
la tierce mineure sur la quatrième note
du ton , et la petite sixte majeure sur la
sixième note du ton et sur la même note
vous trouverez encore la petite sixte .
superfluë , en mettant dans la Basse fondamentale
la tierce majeure , quoi qu'il
y ait une fausse quinte et remettant
la tierce au naturel , vous trouverez la
seconde de la note tonique accompagnée
de la sixte mineure.
"
Dans le troisiéme Article où je traite
de la septième de la dominante , ou cinquiéme
note du ton et de ses derivés ,
premiere partie mode majeur , vous trou
verez
SEPTEMBRE. 1731. 2131
que ,
verez la sixte mineure qui se met sur la
septiéme note du ton en descendant , en
retranchant la septième de la Basse fondamentale
qui devient alors note tonique ,
et la note où l'on a mis la sixte , en devient
la mediante , er remettant la septie
me ce qui la fait revenir dominante , vous
trouverez la fausse quinte sur la note sensible
ou septiéme note du ton en montant,
et la septiéme superfluë de la note toniaccompagnée
de la seconde et de
la onzième ou quarte et de la quinte ;
Vous trouverez encore la petite sixte majeure
sur la seconde note du ton , et la
neuviéme sur la médiante ou troisiéme
note du ton , et le triton sur la quatriéme
note du ton accompagné de la se
conde et de la sixte, en retranchant la septiéme
de la Basse fondamentale , qui feroit
octave contre la Basse continue , er
remettant la septième dans la Basse fondamentale
, et retranchant la tierce , vous
trouverez la seconde accompagnée de la
onzième ou quarte , et de la quinte sur
la note tonique.
,
J Dans la seconde partie mode mineur
vous trouverez la sixte majeure sur la
septiême note du ton en descendant , en
retranchanr la septième de la Basse fondamentale
ce qui la fait devenir note
D vj tonique,
>
2132 MERCURE DE FRANCE
tonique , et la note où est la sixte majeure
, en devient la médiante , et en remettant
la septiéme , et l'accompagnant,
de la tierce majeure , ce qui la fait revenir
do ninante , vous trouverez la quinte
superfluë sur la mediante..
,
>
Dans le quatriéme Article mode mineur,
où je traite de la septiéme diminuée
de la note sensible , ou septiéme note du,
ton et de ses derivés vous trouverez la
septiéme superfluë de la no - e tonique „
accompagnée de la seconde , de la onzié
me ou quarte et de la sixte mineure , et
la sixte majeure sur la seconde note du.
ton accompagnée de la tierce et de la,
fauss quinte , et la onzième complette.
ou quarte accompagnée de la quinte su-.
perfluë de la septième et de la neuvième
sur la médiante ou troisiéme note du ton,
et le triton sur la quatriéme note du ton .
accompagné de la tierce mineure et de
la sixte , et la neuvième min´ure sur la
dominante ou cinquiéme note du ton
et le seconde superfluë sur la sixième note
du ton.
La onzime complette et là petite onziéme
se préparent par la sixte et quinte :
et se sauvent par l'acco d de septiéme
comme vous le verrez dans la suite des
sest lies. mais la 11 accompagnée de
le
SEPTEMBRE . 1731 2133
la
5e. superfluë qui se met sur la médiante
ou troisiéme note du ton , se doit sauver
la 6e. accord ordinaire de la médiante
, parceque la se superflue doit toû
jours remonter.
par
La petite onzième se prépare encore de
plusieurs façons , par la petite e sur la
6e. note du ton ou par la 7e de la se
2..
, conde note du ton ce qui revient au
même par l'accord parfait de la note to .
nique ou par ses derivés .
Quand il y a deux onzièmes de suite
la seconde se trouve preparée par la 7e.
La neuvième se prépare et se sauve parlae.
et se excepté la 9e. accompagnée de
la se superflue , qui se sauve. par l'accord:
de 6e.. pour faire remonter tou ours la se
superflue ; mais quand il y a deux ges. de :
suite et que
la premiere est accompa
gnée de la se superflue , la seconde setrouve
préparée de la 6e. comme vous le
verrez dans la suite des ges. et iles.
Après la suite des ges, et 11es . vous trouverez
une suite dé secondes préparées etsauvées
de la 6 et je . excepté la seconde :
accompagnée de la 11. ou 4 et de las
se qu'il fut préparer par l'accord par
fait , ce qui fera faire le veritable mouvement
à la Basse fondamentale car si on:
la préparoit de la 6. et se la Basse fon-.
damentale
2134 MERCURE DE FRANCE
3
damentale iroit par degrés conjoints em
descendant d'une septième sur l'autre
mouvement qu'elle ne peut pas faire.
Quoique vous trouviez le triton dans la
suite des secondes , il n'est pas toûjours
nécessaire de le préparer , et il ne suit pas.
la regle des secondes pour être sauvé , car
on le sauve ordinairement par la sixte sur
la médiante , ou par l'accord parfait de la
note tonique , ce qui revient au même.
Après cette suite de secondes , vous trouverez
une suite de septiémes en montant ,
préparées et sauvées de 6e et se et en
descendant preparées et sauvées de petite:
6. , mais dans le ton mineur il faut sauver
la 7. de la mediante en montant par
l'accord de 6. et la septiéme de la dominante
en descendant' par la 6e. et 4 .
car si on sauvoit la premiere par la ce et
se et la seconde par la petite 6. , cela
donneroit un accord de 7e. superfluë accompagnée
de la tierce mineure dans la
Basse fondamentale ce qu'on ne doit
jamais faire.
Quoique je n'aye pas mis l'octave dans:
toutes les 7es. de cette suite , cela n'empêche
pas qu'on ne puisse la mettre dans
f'accompagnement ; toute note qui monte
de quatre ou descend de cinq demande
76 ou accord parfait.
程
SEPTEMBRE. 7731. 2135
Il faut remarquer que la seconde superflue
et la septiéme superfluë n'ont pas besoin
d'être preparées , mais qu'on sauve
la seconde superflue par un des derivés
de l'accord parfait de la note tonique , et
la 7. superfluë par l'accord parfait de la
note tonique.
Regle generale pour préparer et sauver les:
Dissonantes du dessus ou d'une partie
à la Basse.
>
Il y a deux sortes de Dissonances qu'on
appelle majeures et mineures ; les majeu
res n'ont pas besoin d'être preparées , et
se sauvent en faisant remonter d'un degré
le dessus ou la partie qui , les a faites ,
comme vous le verrez dans le premier
article de l'exemple des dissonances ; dans
les dissonances mineures , il y en a qui
n'ont pas besoin d'être preparées , et
d'autres qu'il faut preparer ; mais elles se
sauvent toutes en faisant descendre d'un
degré le dessus ou la partie qui les a faites,
excepté la seconde , où c'est la Basse qui
est obligée de descendre d'un degré
comme vous le verrez dans le second
article.
Dans le premier Article , vous trouverez
la septiéme superflue , qui se sauve par
L'octave en faisant remonter le dessus.
d'un
2136 MERCURE DE FRANCE
d'un degré la Basse tenant le même son "
la petite sixte majeure qui se sauve par la
sixte , en faisant remonter le dessus d'ún
degré et la basse d'un autre , ou par
l'oc
tave , en faisant descendre la basse d'un
degré , ce qui revient au même , la quinte
superfluë qui se sauve par la sixte , en faisant
remonter le dessus d'un degré la
Basse tenant le même son , lè triton què
se sauve par là sixte en faisant remonter
le dessus d'un degré et descendre la Bassed'un
autre ou par
l'octave , en faisant
descendre la Basse de quatre ; Enfin vous
y trouverez la seconde superfluë qui se
sauve en faisant monter le dessus d'un
degré et descendre -la Basse d'un autre par
la quarte consonante sur la dominante
c'est à-dire , accompagnée de la sixte et
de l'octave Ou
,
la sixte sur la me
par
diante , en faisant descendre la Basse.da
quatre degrés.
,
La sixte superfluë se sauve par l'octave
en faisant monter le dessus d'un degré ec
descendre la Basse d'un autre , cet accord
se met sur la sixième note du ton dans le
mode mineur pour descendre à l'accord
parfait de la dominante.
Dans le second Article , vous trouverez
la seconde qui se prepare par la sincope
de la Basse , c'est- à-dire , que si l'on veur
faire.
SEPTEMBRE. 1731 2137
3.
2
faire une seconde sur l'ut , il faut que cet
ut ait paru un temps avant que la seconde
frappe dessus , elle se sauve par la tierce,
en faisant descendre la Basse d'un degré
le dessus tenant le même son ou par la
sixte , en faisant monter le dessus de quatre
degrés ; vous trouverez la fausse quinte
qui n'a pas besoin d'être preparée , et qui
se sauve par la tierce , en faisant descendre
le dessus d'un degré et monter la Basse
d'un autre ; vous y trouverez la septième
diminuée , qu'il n'est pas toûjours necessaire
de preparer , et qui se sauve par la
sixte , en faisant descendre le dessus d'un
degré,la Basse tenant le même son , ou par
la quinte , en faisant monter la Basse d'um
degré , ou par la tierce , en faisant monter
la Basse de quatre degrés , ou descendre
de cinq , mais qui se prepare quelquefois
comme vous le verrez ensuite ; vous
y trouverez les septièmes qui se preparent
par la sincope du dessus
conde par la sincope de la Basse , et qui se
sauvent par la sixte , en faisant descendre.
le dessus d'un degré , la Basse tenant le
même son ou par la tierce , en faisant
monter la Basse de quatre degrés ou descendre
de cinq ; vous trouverez la neuviéme
qui se prepare par la sincope du
dessus comme la septième , et qui se
2.
comme la sesauve
138 MERCURE DE FRANCE
sauve par l'octave , en faisant descendre
le dessus d'un degré , la Basse tenant le
même son ; enfin vous trouverez la onziéme
ou quarte qui se prepare par la sincope
du dessus , comme la neuvième , et
qui se sauve par la dixième ou tierce , en
faisant descendre le dessus d'un degré , la
Basse tenant le même son.
La septième de la dominante n'a pas
toûjours besoin d'être préparée , comme
vous le verrez à la fin de ce dernier article.
La septiéme diminuée et la septiéme ,
se sauvent quelquefois par la sixte majeure
, en faisant descendre le dessus d'un
degré et la note de la basse d'un demi
ton , comme vous le verrez par la seconde
septiéme diminuée du même article
, qui est sur le Si naturel , et qui est
sauvée par la sixte majeure sur le Si bmo!,
et par la septiéme qui est après sur le
La naturel , qui est encore sauvée par la
sixte majeure sur le La bmol.
Quoique dans le second article de ma
Carte , j'aye mis la Sixte sur la sixième
note du ton , je ne l'ai fait que pour me
conformer à la regle de l'Octave , et je
croi qu'il seroit mieux d'y mettre la petite
Sixte , tant en montant qu'en descendant
; car puisqu'on l'y met en descendant
SEPTEMBRE. 1731. 2139
tendant sur la dominante , on doit la .
mettre aussi pour monter à la note sensible
, puisque la note sensible représente
la dominante , et la preuve de ce que je
dis se trouve dans la regle de l'Octave
sur la seconde note du ton où l'on met
la petite Sixte , quoique la basse monte à
la mediante ou qu'elle descende à la
note tonique.
Il faut remarquer encore que la basse
fondamentale ne peut pas toûjours servir
de seconde basse , comme par exemple, dessous
les neuvièmes septièmes superfluës ,
seconde accompagnée de onzième ou
quarte et de quinte , et accord de onziéme
ou quarte , dans lesquels endroits elle
ne sert que de preuve , au lieu que dans
tout le reste elle sert de preuve et peut
presque toûjours servir de seconde basse.
Reflexions sur la nature des Onziémes
ou Quartes.
Il y a plusieurs especes de quartes ,
dont les unes ne méritent pas même le
nom d'accord , mais celui de remplissage,
les autres sont celles dont j'ai déja parlé
sous le nom de onzièmes ou quartes.
Celles de la premiere espece ne sont
jamais sauvées , parce qu'elles dérivent
de deux consonances , les unes de l'Octave
2140 MERCURE DE FRANCE
tave et les autres de la tierce de la basse
fondamentale , comme par exemple , si
je fais la petite Sixte sur la seconde note
du ton qui est Ré , la bassefon damentale
en est Sol dominante , et son octave
fait quarte contre le Ré , cette quarte ne
peut pas être sauvée , parce que si je fais
monter le Ré à la médiante de l'Ut¸
qui est Mi , ou que je le fasse descendre
à la note tonique , le Sol est obligé de
tenir pour faire la tierce sur la médiante
ou la quinte sur la note tonique : la regle
est la même pour toutes les petites Sixtess
Si je fais la seconde sur l'Ut , la basse
fondamentale en est le Ré , et la tierce de
la basse fondamentale qui est Fa , fair
quarte contre l'Ut , cette quarte ne peut
pas être sauvée , parce que si je fais descendre
l'Ut au S naturel ou au Si bmol,
le Fa est obligé de tenir pour faire la
fausse quinte du Sï naturel ou la quinte.
du Si bmol.
Il y a encore une raison pour prouver que
la quarte de la petite Sixte ne peut pas être
sauvée et qu'elle est obligée de tenir le
même son après cet accord , parce qu'elle
est accompagnée de la tierce , et que y
ayant seconde entre elles , il faut qu'elle
attende que cette tierce ait descendu d'un
degré , mouvement que fait toûjours la
tierce
SEPTEMBRE. 1731. 2141
tierce de la petite Sixte , parce qu'elle fait
septiéme contre la basse fondamentale et
que la septième est obligé de descendre
d'un degré pour trouver son repos.
La petite Sixte se trouve quelquefois
accompagnée du Triton à la place de la
quarte par la force de la modulation
mais ce Triton ne se sauve pas mieux que
la quarte , car il est obligé de tenir le même
son pour faire la quinte dans l'accord
qui suit.
Celles de la seconde espece dont j'ai
déja parlé sous le nom de onzième ou
quarte , se sauvent toutes en les faisant
descendre d'un degré , parce qu'elles dérivent
de trois dissonances , les unes de
la septième , les autres de la septiéme diminuée
, et les autres de la fausse quinte
de la basse fondamentale.
. Il faut distinguer deux sortes de onziémes,
dons les unes se préparent comme la
neuvième , par la sincope du dessus et les
autres ne se préparent point .
. Il faut encore diviser celles qui se préparent
en trois especes et celles qui ne
se préparent point aussi en trois especes.
La premiere espece d'onzièmes ou
quartes de celles qui se préparent, dérive de
la septième , c'est celle qui se met sur la
seconde note du ton dont j'ai déja parlé
Sous
142 MERCURE DE FRANCE
sous le nom d'onziémé complette ou quarte
accompagnée de la 9 , de la 7e & de
la se ou fausse quinte dans le ton mineur,
comme vous le verrez dans la suite des
ges et 11es , elle se sauve par la dixiéme
ou tierce , en la faisant descendre d'un
degré , la basse tenant le même son .
La seconde dérive de la 7 diminuée
de la note sensible , c'est celle qui se met
sur la médiante dans le ton mineur accompagnée
de la quinte superfluë de la
septième et de la neuvième , comme vous
le verrez dans le quatrième article de la
Carte , elle se sauve aussi par la dixiéme
ou tierce , en la faisant descendre d'un
degré de la basse , tenant le même son.
La troisiéme dérive de la septiéme de
la seconde note du ton , c'est celle dont
j'ai déja parlé sous le nom de petite onziéme
ou quarte , parce qu'elle n'est accompagnée
que de la quinte et de l'octave
, comme vous le verrez dans le second
article de la Carte premiere partie
mode majeur , et quelquefois de la septiéme
, comme vous le verrez dans la suite,
des ges et 11es ; elle se met sur la dominante
pour faire la cadence finale et elle
se sauve par la dixième ou tierce majeure,
la basse tenant le même son .
La premiere espece de celles qui ne se
prépare
SEPTEMBRE . 1731. 2143
réparent point , dérive de la 7 de la doninante
, c'est celle qui accompagne la
superflue sur la note tonique , comme
ous le verrez dans le 3 article de la Carse
premiere partie mode majeure ,
elle se
sauve par la 10 ou 3e , en la faisant descendre
d'un degré , la basse tenant le
:
ême son.
,
La seconde dérive aussi de la 7 de la
Hominante , c'est celle qui accompagne la
et se sur la note tonique ; elle ne se
Ive pas comme les autres mais elle
obligée de tenir le même son pour
aire la fausse quinte sur la note sensible
où la note tonique qui porte cet accord
doit toûjous descendre , mais elle
se sauve par la tierce , en la faisant descendre
d'un dégré quand la basse continuë
est remontée à la note tonique , l
raison qui l'oblige à tenir le même son
pour faire la fausse quinte , c'est que son
fondement , qui est la dominante continuë
aussi , comme vous le verrez à la fin
de la suité des secondes .
La troisiéme dérive de la fausse quinte
de la note sensible , portant septiéme diminuée
, c'est celle qui se met sur la note
ronique dans le mode mineur avec la sepiéme
superflue , accompagnée de la Sixte
nineure et de la seconde , comme vous le
verrez
2144 MERCURE DE FRANCE
verrez dans le quatrième article de la Car
te , elle se sauve par la 10 ou tierce , en
la faisant descendre d'un degré , la basse
tenant le même son .
La raison qui fait que ces trois onzićimes
n'ont pas besoin d'être préparées
c'est qu'elles dérivent de deux dissonar.
ces qui ne le demandent pas .
Il y a encore ue quarte qui dérive d
l'octave de la basse fondamentale no
tonique , portant accord parfait , c'est ce
te qu'on appelle la quarte consonant
c'est- à - dire accompagnée de la Sixte et
l'octave ; elle se met sur la dominante
descend ordinairement sur la tierce n
jeure , mais elle sincope quelquefois po
attendre que la Sixte qui l'accompag
soit descendue à la quinte pour faire l'acord
de petite onzième sur la dominante .
1
Explication des Signes.
I
Par tout où il faudra une petite Sixte
je la marquerai par un 6.
Aux endroits où il faudra retranch
des notes pour la compositio
les marquerai par un r qui
dera la note.
1. Et les notes ou chiffres qu'il faudra
retrancher pour l'accompagnement
et la composition , par un ret
'un point.
C
NEW
YORK
Article premier dissonan
Exemple pour les dissor
22
फ
x7
20
O
94
dissonances mineures.
Second Article
O
9999
PUBLIC
LIBRARY
ondamentale
Partie
neur
be bebe
888
POR,
LENOX, AND
TILDEN F
Article Disreme
1rePartie Modemajeur
о
8 8 8 8
dant .
70
9-0000
7
1000
O
f
7
Хо
ने
7
et
C
191
SEPTEMBRE .
1731. 2845.
J
Ce qu'il faudra ajoûter , par un a
Je
remarquerai la note tonique ou
note du ton où l'on est par un t qui
la
précedera.
La seconde note du ton pár un s.
m La médiante ou troisiéme note du
ton , par un m .
q La quatriéme note du ton , par un q
d La
dominante ou
cinquiéme note du
ton , par un d.
si La sixième note du ton , par si .
se Et la note sensible ou septiéme note
du ton , pår se.
de M. à M. sur la Musique.
Ous avons eu très- souvent occasion.
Monsieur , de parler Musique , vous
m'avez
SEPTEMBRE 1731. 2127
m'avez fait l'honneur de me demander
raison sur bien des choses ; et comme
vous ne m'avez pas paru satisfait de mes
réponses sur la façon de placer les accords
, de les sauver , et de les préparer ;
je viens de faire une Carte generale de
la Basse fondamentalle , après laquelle
vous trouverez une suite de gès . ét 11es.
une suite de secondes une suite de
, septiémes
en montant et en descendant , et
un éxemple pour les Dissonances ; le tout
me paroît clair et je me flate que vous
le trouverez de même. J'ay l'honneur
d'être &c.
>
Explication de la Carte generale de la
Basse fondamentale et de ses dérivés , di
visée en quatre Articles .
Il n'y a que deux accords dans la mu
sique , d'où dérivent tous les autres , sçavoir
le parfait et la septiéme ; mais il y a
trois sortes de septiéme dans la Basse fondamentale
; sçavoir, dans le ton majeur et
mineur la septième de la seconde note dut
on , et la septième de la dominante ou
cinquiéme note du ton , et dans le ton
mineur seulement la septiéme diminuće
de la note sensible ou septiéme note
du ton.
Diiij Toute
2128 MER CURE DE FRANCE
Toute note qui porte septième ou accord
parfait , est Basse fondamentale
excepté la septiéme superfluë '
comme
vous le verrez dans les articles 3. et 4º .
LaBasse Fondamentale de la seconde , est
la septième de la note au -dessus , comme
par exemple , la Basse fondamentale de
la seconde de l'ut , est le re portant septiéme
, comme vous le verrez dans le car
ticle, excepté qu'elle ne soit accompagnée
de la 11. ou 4º , et de la se. Car alors
c'est la se..en- dessus portant septiéme qui
en est la Basse fondamentale, comme vous
le verrez dans le 3 article..
La Basse fondamentale des neuvièmes
est la tierce en dessus , portante com
me par exemple , la Basse fondamentale
de la neuvième du mi est le sol , portant
7. comme vous le verrez dans le 3e. article.
Il y a une sorte de neuviéme dans le
ton mineur , accompagnée de la quinta
superfluë , qui se met sur la médiante ou
troisiéme note du ton ; elle suit toûjours
la regle de la neuviéme précedente pour
la Basse fondamentale. comme vous le
verrez dans la 3 article , où je la marquerai
par un 5. avec une croix devant pour
la distinguer des autres .
›
La B sse fondamentale des 11es ou 4es.
est la je en -dessus portant 7e , comme
Vous
SEPTEMBRE. 1731. 2129
vous le verrez dans le 2e. article , et dans
la suite des ges et 11es. , excepté qu'elle.
ne soit accompagnée de la se superfluë ,
car alors c'est la se superfluë en -dessus
portant 7. diminuée qui en est la Basse:
fondamentale.
Dans le premier Article où je traite de:
l'accord parfait de la note tonique ou note:
du ton où l'on est , et de ses derivés , vous
trouverez la sixte de la médiante ou troi- .
siéme note du ton et la sixte et quarte
de la dominante ou cinquième note du:
ton . La regle est generale pour. le majeur
et le mineur..
,
و
Dans le second Article où je traite de
la septième , de la seconde note du ton et
de ses derivés , vous trouverez dans la
premiere partie mede majeur , la sixte et .
quinte sur la quatriéme note du ton , ce
la sixte qui se met sur la sixième note du
ton en montant , en retranchant l'oc
tave de la Basse fondamentale ; et sans y
rien retrancher , vous trouverez la petitesixte
mineure , qui se met sur la sixième :
note du ton en descendant , et sur la mê
me note vous trouverez la petite sixte:
majeure en mettant tierce majeure, à la
Basse fondamentale , qui devient alorss
dominante , et la note où l'on a mis la pea
tite sixte majeure , devient seconde note:
Div. dir
2
2130 MERCURE DE FRANCE
› du ton et en remettant
la tierce
au naturel
dans
la Basse
fondamentale
, ce qui
nous
fait
revenir
à nôtre
premier
ton
vous
trouverez
la seconde
de la note
tonique
et l'accord
de petite
onzième
ou quar
te sur la
dominante
ou
cinquiéme
note
du ton en retranchant
la tierce
et la
quinte
de la Basse
fondamentale
, et ajoûtant
l'octave
de la Basse
continuë
, qu'il
faut
regarder
comme
une
note
étrangere
à l'accord
, ainsi
que la Basse
continuë
puisqu'elle
n'en
est que la répetition
.
›
>
Dans la seconde partie mode mineure ,
ou la septième de la seconde note du ton,
est accompagnée de la fausse quinte , vous
trouverez l'accord de sixte et quinte avec
la tierce mineure sur la quatrième note
du ton , et la petite sixte majeure sur la
sixième note du ton et sur la même note
vous trouverez encore la petite sixte .
superfluë , en mettant dans la Basse fondamentale
la tierce majeure , quoi qu'il
y ait une fausse quinte et remettant
la tierce au naturel , vous trouverez la
seconde de la note tonique accompagnée
de la sixte mineure.
"
Dans le troisiéme Article où je traite
de la septième de la dominante , ou cinquiéme
note du ton et de ses derivés ,
premiere partie mode majeur , vous trou
verez
SEPTEMBRE. 1731. 2131
que ,
verez la sixte mineure qui se met sur la
septiéme note du ton en descendant , en
retranchant la septième de la Basse fondamentale
qui devient alors note tonique ,
et la note où l'on a mis la sixte , en devient
la mediante , er remettant la septie
me ce qui la fait revenir dominante , vous
trouverez la fausse quinte sur la note sensible
ou septiéme note du ton en montant,
et la septiéme superfluë de la note toniaccompagnée
de la seconde et de
la onzième ou quarte et de la quinte ;
Vous trouverez encore la petite sixte majeure
sur la seconde note du ton , et la
neuviéme sur la médiante ou troisiéme
note du ton , et le triton sur la quatriéme
note du ton accompagné de la se
conde et de la sixte, en retranchant la septiéme
de la Basse fondamentale , qui feroit
octave contre la Basse continue , er
remettant la septième dans la Basse fondamentale
, et retranchant la tierce , vous
trouverez la seconde accompagnée de la
onzième ou quarte , et de la quinte sur
la note tonique.
,
J Dans la seconde partie mode mineur
vous trouverez la sixte majeure sur la
septiême note du ton en descendant , en
retranchanr la septième de la Basse fondamentale
ce qui la fait devenir note
D vj tonique,
>
2132 MERCURE DE FRANCE
tonique , et la note où est la sixte majeure
, en devient la médiante , et en remettant
la septiéme , et l'accompagnant,
de la tierce majeure , ce qui la fait revenir
do ninante , vous trouverez la quinte
superfluë sur la mediante..
,
>
Dans le quatriéme Article mode mineur,
où je traite de la septiéme diminuée
de la note sensible , ou septiéme note du,
ton et de ses derivés vous trouverez la
septiéme superfluë de la no - e tonique „
accompagnée de la seconde , de la onzié
me ou quarte et de la sixte mineure , et
la sixte majeure sur la seconde note du.
ton accompagnée de la tierce et de la,
fauss quinte , et la onzième complette.
ou quarte accompagnée de la quinte su-.
perfluë de la septième et de la neuvième
sur la médiante ou troisiéme note du ton,
et le triton sur la quatriéme note du ton .
accompagné de la tierce mineure et de
la sixte , et la neuvième min´ure sur la
dominante ou cinquiéme note du ton
et le seconde superfluë sur la sixième note
du ton.
La onzime complette et là petite onziéme
se préparent par la sixte et quinte :
et se sauvent par l'acco d de septiéme
comme vous le verrez dans la suite des
sest lies. mais la 11 accompagnée de
le
SEPTEMBRE . 1731 2133
la
5e. superfluë qui se met sur la médiante
ou troisiéme note du ton , se doit sauver
la 6e. accord ordinaire de la médiante
, parceque la se superflue doit toû
jours remonter.
par
La petite onzième se prépare encore de
plusieurs façons , par la petite e sur la
6e. note du ton ou par la 7e de la se
2..
, conde note du ton ce qui revient au
même par l'accord parfait de la note to .
nique ou par ses derivés .
Quand il y a deux onzièmes de suite
la seconde se trouve preparée par la 7e.
La neuvième se prépare et se sauve parlae.
et se excepté la 9e. accompagnée de
la se superflue , qui se sauve. par l'accord:
de 6e.. pour faire remonter tou ours la se
superflue ; mais quand il y a deux ges. de :
suite et que
la premiere est accompa
gnée de la se superflue , la seconde setrouve
préparée de la 6e. comme vous le
verrez dans la suite des ges. et iles.
Après la suite des ges, et 11es . vous trouverez
une suite dé secondes préparées etsauvées
de la 6 et je . excepté la seconde :
accompagnée de la 11. ou 4 et de las
se qu'il fut préparer par l'accord par
fait , ce qui fera faire le veritable mouvement
à la Basse fondamentale car si on:
la préparoit de la 6. et se la Basse fon-.
damentale
2134 MERCURE DE FRANCE
3
damentale iroit par degrés conjoints em
descendant d'une septième sur l'autre
mouvement qu'elle ne peut pas faire.
Quoique vous trouviez le triton dans la
suite des secondes , il n'est pas toûjours
nécessaire de le préparer , et il ne suit pas.
la regle des secondes pour être sauvé , car
on le sauve ordinairement par la sixte sur
la médiante , ou par l'accord parfait de la
note tonique , ce qui revient au même.
Après cette suite de secondes , vous trouverez
une suite de septiémes en montant ,
préparées et sauvées de 6e et se et en
descendant preparées et sauvées de petite:
6. , mais dans le ton mineur il faut sauver
la 7. de la mediante en montant par
l'accord de 6. et la septiéme de la dominante
en descendant' par la 6e. et 4 .
car si on sauvoit la premiere par la ce et
se et la seconde par la petite 6. , cela
donneroit un accord de 7e. superfluë accompagnée
de la tierce mineure dans la
Basse fondamentale ce qu'on ne doit
jamais faire.
Quoique je n'aye pas mis l'octave dans:
toutes les 7es. de cette suite , cela n'empêche
pas qu'on ne puisse la mettre dans
f'accompagnement ; toute note qui monte
de quatre ou descend de cinq demande
76 ou accord parfait.
程
SEPTEMBRE. 7731. 2135
Il faut remarquer que la seconde superflue
et la septiéme superfluë n'ont pas besoin
d'être preparées , mais qu'on sauve
la seconde superflue par un des derivés
de l'accord parfait de la note tonique , et
la 7. superfluë par l'accord parfait de la
note tonique.
Regle generale pour préparer et sauver les:
Dissonantes du dessus ou d'une partie
à la Basse.
>
Il y a deux sortes de Dissonances qu'on
appelle majeures et mineures ; les majeu
res n'ont pas besoin d'être preparées , et
se sauvent en faisant remonter d'un degré
le dessus ou la partie qui , les a faites ,
comme vous le verrez dans le premier
article de l'exemple des dissonances ; dans
les dissonances mineures , il y en a qui
n'ont pas besoin d'être preparées , et
d'autres qu'il faut preparer ; mais elles se
sauvent toutes en faisant descendre d'un
degré le dessus ou la partie qui les a faites,
excepté la seconde , où c'est la Basse qui
est obligée de descendre d'un degré
comme vous le verrez dans le second
article.
Dans le premier Article , vous trouverez
la septiéme superflue , qui se sauve par
L'octave en faisant remonter le dessus.
d'un
2136 MERCURE DE FRANCE
d'un degré la Basse tenant le même son "
la petite sixte majeure qui se sauve par la
sixte , en faisant remonter le dessus d'ún
degré et la basse d'un autre , ou par
l'oc
tave , en faisant descendre la basse d'un
degré , ce qui revient au même , la quinte
superfluë qui se sauve par la sixte , en faisant
remonter le dessus d'un degré la
Basse tenant le même son , lè triton què
se sauve par là sixte en faisant remonter
le dessus d'un degré et descendre la Bassed'un
autre ou par
l'octave , en faisant
descendre la Basse de quatre ; Enfin vous
y trouverez la seconde superfluë qui se
sauve en faisant monter le dessus d'un
degré et descendre -la Basse d'un autre par
la quarte consonante sur la dominante
c'est à-dire , accompagnée de la sixte et
de l'octave Ou
,
la sixte sur la me
par
diante , en faisant descendre la Basse.da
quatre degrés.
,
La sixte superfluë se sauve par l'octave
en faisant monter le dessus d'un degré ec
descendre la Basse d'un autre , cet accord
se met sur la sixième note du ton dans le
mode mineur pour descendre à l'accord
parfait de la dominante.
Dans le second Article , vous trouverez
la seconde qui se prepare par la sincope
de la Basse , c'est- à-dire , que si l'on veur
faire.
SEPTEMBRE. 1731 2137
3.
2
faire une seconde sur l'ut , il faut que cet
ut ait paru un temps avant que la seconde
frappe dessus , elle se sauve par la tierce,
en faisant descendre la Basse d'un degré
le dessus tenant le même son ou par la
sixte , en faisant monter le dessus de quatre
degrés ; vous trouverez la fausse quinte
qui n'a pas besoin d'être preparée , et qui
se sauve par la tierce , en faisant descendre
le dessus d'un degré et monter la Basse
d'un autre ; vous y trouverez la septième
diminuée , qu'il n'est pas toûjours necessaire
de preparer , et qui se sauve par la
sixte , en faisant descendre le dessus d'un
degré,la Basse tenant le même son , ou par
la quinte , en faisant monter la Basse d'um
degré , ou par la tierce , en faisant monter
la Basse de quatre degrés , ou descendre
de cinq , mais qui se prepare quelquefois
comme vous le verrez ensuite ; vous
y trouverez les septièmes qui se preparent
par la sincope du dessus
conde par la sincope de la Basse , et qui se
sauvent par la sixte , en faisant descendre.
le dessus d'un degré , la Basse tenant le
même son ou par la tierce , en faisant
monter la Basse de quatre degrés ou descendre
de cinq ; vous trouverez la neuviéme
qui se prepare par la sincope du
dessus comme la septième , et qui se
2.
comme la sesauve
138 MERCURE DE FRANCE
sauve par l'octave , en faisant descendre
le dessus d'un degré , la Basse tenant le
même son ; enfin vous trouverez la onziéme
ou quarte qui se prepare par la sincope
du dessus , comme la neuvième , et
qui se sauve par la dixième ou tierce , en
faisant descendre le dessus d'un degré , la
Basse tenant le même son.
La septième de la dominante n'a pas
toûjours besoin d'être préparée , comme
vous le verrez à la fin de ce dernier article.
La septiéme diminuée et la septiéme ,
se sauvent quelquefois par la sixte majeure
, en faisant descendre le dessus d'un
degré et la note de la basse d'un demi
ton , comme vous le verrez par la seconde
septiéme diminuée du même article
, qui est sur le Si naturel , et qui est
sauvée par la sixte majeure sur le Si bmo!,
et par la septiéme qui est après sur le
La naturel , qui est encore sauvée par la
sixte majeure sur le La bmol.
Quoique dans le second article de ma
Carte , j'aye mis la Sixte sur la sixième
note du ton , je ne l'ai fait que pour me
conformer à la regle de l'Octave , et je
croi qu'il seroit mieux d'y mettre la petite
Sixte , tant en montant qu'en descendant
; car puisqu'on l'y met en descendant
SEPTEMBRE. 1731. 2139
tendant sur la dominante , on doit la .
mettre aussi pour monter à la note sensible
, puisque la note sensible représente
la dominante , et la preuve de ce que je
dis se trouve dans la regle de l'Octave
sur la seconde note du ton où l'on met
la petite Sixte , quoique la basse monte à
la mediante ou qu'elle descende à la
note tonique.
Il faut remarquer encore que la basse
fondamentale ne peut pas toûjours servir
de seconde basse , comme par exemple, dessous
les neuvièmes septièmes superfluës ,
seconde accompagnée de onzième ou
quarte et de quinte , et accord de onziéme
ou quarte , dans lesquels endroits elle
ne sert que de preuve , au lieu que dans
tout le reste elle sert de preuve et peut
presque toûjours servir de seconde basse.
Reflexions sur la nature des Onziémes
ou Quartes.
Il y a plusieurs especes de quartes ,
dont les unes ne méritent pas même le
nom d'accord , mais celui de remplissage,
les autres sont celles dont j'ai déja parlé
sous le nom de onzièmes ou quartes.
Celles de la premiere espece ne sont
jamais sauvées , parce qu'elles dérivent
de deux consonances , les unes de l'Octave
2140 MERCURE DE FRANCE
tave et les autres de la tierce de la basse
fondamentale , comme par exemple , si
je fais la petite Sixte sur la seconde note
du ton qui est Ré , la bassefon damentale
en est Sol dominante , et son octave
fait quarte contre le Ré , cette quarte ne
peut pas être sauvée , parce que si je fais
monter le Ré à la médiante de l'Ut¸
qui est Mi , ou que je le fasse descendre
à la note tonique , le Sol est obligé de
tenir pour faire la tierce sur la médiante
ou la quinte sur la note tonique : la regle
est la même pour toutes les petites Sixtess
Si je fais la seconde sur l'Ut , la basse
fondamentale en est le Ré , et la tierce de
la basse fondamentale qui est Fa , fair
quarte contre l'Ut , cette quarte ne peut
pas être sauvée , parce que si je fais descendre
l'Ut au S naturel ou au Si bmol,
le Fa est obligé de tenir pour faire la
fausse quinte du Sï naturel ou la quinte.
du Si bmol.
Il y a encore une raison pour prouver que
la quarte de la petite Sixte ne peut pas être
sauvée et qu'elle est obligée de tenir le
même son après cet accord , parce qu'elle
est accompagnée de la tierce , et que y
ayant seconde entre elles , il faut qu'elle
attende que cette tierce ait descendu d'un
degré , mouvement que fait toûjours la
tierce
SEPTEMBRE. 1731. 2141
tierce de la petite Sixte , parce qu'elle fait
septiéme contre la basse fondamentale et
que la septième est obligé de descendre
d'un degré pour trouver son repos.
La petite Sixte se trouve quelquefois
accompagnée du Triton à la place de la
quarte par la force de la modulation
mais ce Triton ne se sauve pas mieux que
la quarte , car il est obligé de tenir le même
son pour faire la quinte dans l'accord
qui suit.
Celles de la seconde espece dont j'ai
déja parlé sous le nom de onzième ou
quarte , se sauvent toutes en les faisant
descendre d'un degré , parce qu'elles dérivent
de trois dissonances , les unes de
la septième , les autres de la septiéme diminuée
, et les autres de la fausse quinte
de la basse fondamentale.
. Il faut distinguer deux sortes de onziémes,
dons les unes se préparent comme la
neuvième , par la sincope du dessus et les
autres ne se préparent point .
. Il faut encore diviser celles qui se préparent
en trois especes et celles qui ne
se préparent point aussi en trois especes.
La premiere espece d'onzièmes ou
quartes de celles qui se préparent, dérive de
la septième , c'est celle qui se met sur la
seconde note du ton dont j'ai déja parlé
Sous
142 MERCURE DE FRANCE
sous le nom d'onziémé complette ou quarte
accompagnée de la 9 , de la 7e & de
la se ou fausse quinte dans le ton mineur,
comme vous le verrez dans la suite des
ges et 11es , elle se sauve par la dixiéme
ou tierce , en la faisant descendre d'un
degré , la basse tenant le même son .
La seconde dérive de la 7 diminuée
de la note sensible , c'est celle qui se met
sur la médiante dans le ton mineur accompagnée
de la quinte superfluë de la
septième et de la neuvième , comme vous
le verrez dans le quatrième article de la
Carte , elle se sauve aussi par la dixiéme
ou tierce , en la faisant descendre d'un
degré de la basse , tenant le même son.
La troisiéme dérive de la septiéme de
la seconde note du ton , c'est celle dont
j'ai déja parlé sous le nom de petite onziéme
ou quarte , parce qu'elle n'est accompagnée
que de la quinte et de l'octave
, comme vous le verrez dans le second
article de la Carte premiere partie
mode majeur , et quelquefois de la septiéme
, comme vous le verrez dans la suite,
des ges et 11es ; elle se met sur la dominante
pour faire la cadence finale et elle
se sauve par la dixième ou tierce majeure,
la basse tenant le même son .
La premiere espece de celles qui ne se
prépare
SEPTEMBRE . 1731. 2143
réparent point , dérive de la 7 de la doninante
, c'est celle qui accompagne la
superflue sur la note tonique , comme
ous le verrez dans le 3 article de la Carse
premiere partie mode majeure ,
elle se
sauve par la 10 ou 3e , en la faisant descendre
d'un degré , la basse tenant le
:
ême son.
,
La seconde dérive aussi de la 7 de la
Hominante , c'est celle qui accompagne la
et se sur la note tonique ; elle ne se
Ive pas comme les autres mais elle
obligée de tenir le même son pour
aire la fausse quinte sur la note sensible
où la note tonique qui porte cet accord
doit toûjous descendre , mais elle
se sauve par la tierce , en la faisant descendre
d'un dégré quand la basse continuë
est remontée à la note tonique , l
raison qui l'oblige à tenir le même son
pour faire la fausse quinte , c'est que son
fondement , qui est la dominante continuë
aussi , comme vous le verrez à la fin
de la suité des secondes .
La troisiéme dérive de la fausse quinte
de la note sensible , portant septiéme diminuée
, c'est celle qui se met sur la note
ronique dans le mode mineur avec la sepiéme
superflue , accompagnée de la Sixte
nineure et de la seconde , comme vous le
verrez
2144 MERCURE DE FRANCE
verrez dans le quatrième article de la Car
te , elle se sauve par la 10 ou tierce , en
la faisant descendre d'un degré , la basse
tenant le même son .
La raison qui fait que ces trois onzićimes
n'ont pas besoin d'être préparées
c'est qu'elles dérivent de deux dissonar.
ces qui ne le demandent pas .
Il y a encore ue quarte qui dérive d
l'octave de la basse fondamentale no
tonique , portant accord parfait , c'est ce
te qu'on appelle la quarte consonant
c'est- à - dire accompagnée de la Sixte et
l'octave ; elle se met sur la dominante
descend ordinairement sur la tierce n
jeure , mais elle sincope quelquefois po
attendre que la Sixte qui l'accompag
soit descendue à la quinte pour faire l'acord
de petite onzième sur la dominante .
1
Explication des Signes.
I
Par tout où il faudra une petite Sixte
je la marquerai par un 6.
Aux endroits où il faudra retranch
des notes pour la compositio
les marquerai par un r qui
dera la note.
1. Et les notes ou chiffres qu'il faudra
retrancher pour l'accompagnement
et la composition , par un ret
'un point.
C
NEW
YORK
Article premier dissonan
Exemple pour les dissor
22
फ
x7
20
O
94
dissonances mineures.
Second Article
O
9999
PUBLIC
LIBRARY
ondamentale
Partie
neur
be bebe
888
POR,
LENOX, AND
TILDEN F
Article Disreme
1rePartie Modemajeur
о
8 8 8 8
dant .
70
9-0000
7
1000
O
f
7
Хо
ने
7
et
C
191
SEPTEMBRE .
1731. 2845.
J
Ce qu'il faudra ajoûter , par un a
Je
remarquerai la note tonique ou
note du ton où l'on est par un t qui
la
précedera.
La seconde note du ton pár un s.
m La médiante ou troisiéme note du
ton , par un m .
q La quatriéme note du ton , par un q
d La
dominante ou
cinquiéme note du
ton , par un d.
si La sixième note du ton , par si .
se Et la note sensible ou septiéme note
du ton , pår se.
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Résumé : LETTRE de M. à M. sur la Musique.
La lettre de septembre 1731 aborde la musique, en se concentrant particulièrement sur la basse fondamentale. L'auteur y répond à une demande d'explications sur la manière de placer, sauvegarder et préparer les accords. Il présente une carte générale de la basse fondamentale, accompagnée d'exemples de secondes, neuvièmes, onzièmes et dissonances. L'auteur distingue deux types d'accords fondamentaux en musique : l'accord parfait et la septième. Il détaille les différentes sortes de septièmes dans les tons majeurs et mineurs, ainsi que les règles pour les préparer et les résoudre. Le texte explique également les accords dérivés, les dissonances majeures et mineures, et les règles générales pour les préparer et les résoudre. Certaines dissonances n'ont pas besoin d'être préparées et se résolvent en faisant monter ou descendre les notes concernées. Par exemple, la septième peut se préparer par la sincope du dessus et se résoudre par la sixte ou la tierce. La neuvième et l'onzième se préparent également par la sincope du dessus et se résolvent respectivement par l'octave et la dixième. La septième de la dominante n'a pas toujours besoin d'être préparée. Le texte distingue entre les quartes qui sont des remplissages et celles qui sont des onzièmes ou quartes. Ces dernières se divisent en plusieurs espèces, certaines nécessitant une préparation par sincope, d'autres non. Des exemples spécifiques de ces espèces et leurs résolutions sont fournis. La petite sixte et le triton sont également abordés, soulignant qu'ils ne se résolvent pas de la même manière que les autres quartes. Enfin, le texte explique les signes utilisés pour marquer les notes à retrancher ou à ajouter dans la composition musicale.
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11
p. 2145-2150
ODE En l'honneur de l'Immaculée Conception de la sainte Vierge, laquelle a remporté le dernier Prix du PALINOD, à Caën. Le Sujet allegorique est l'Etoile du matin, nommée Lucifer, Phosphore ou Venus. Cicer. L. 2. de la Nature des Dieux.
Début :
Parois, aimable Avant-couriere [...]
Mots clefs :
Carrière, Ténèbres, Nuit, Aurore, Rayons du soleil, Astre, Fantômes, Nature
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texteReconnaissance textuelle : ODE En l'honneur de l'Immaculée Conception de la sainte Vierge, laquelle a remporté le dernier Prix du PALINOD, à Caën. Le Sujet allegorique est l'Etoile du matin, nommée Lucifer, Phosphore ou Venus. Cicer. L. 2. de la Nature des Dieux.
CODE
l'honneur de
l'Immaculée
Conception de
ia sainte Vierge , laquelle a remporté le
dernier Prix du
PALINOD , à Caen .
Le sujet allegorique est l'Etoile du matin,
nommée Lucifer , Phosphore ou Venus.
Cicer. L. 2. de la Nature des Dieux,
Parois, aimable Avant- couriere
Du Dieu dont juttends la faveur ,
Guide mes pas dans la carriere ,
Où m'appelle aujourd'hui l'honneur
Bannis ces épaises tenebres
E Dont
2146 MERCURE DE FRANCE
Dont me couvrent les temps funebres ,
Et de la nuit et du sommeil ,
Je veux dès les traits de l'Aurore ,
Faire un Tableau qui brille encore
Aux plus beaux rayons du Soleil.
Pour montrer l'heureux assemblage ,
Des biens que cet Astre produit ,
Muse , peins- moi l'affreuse image ,
Des horreurs qu'enfante la Nuit . (a)
Quand une fois ses tristes voiles ,
Nous cachant le front des Etoiles ,
Privent nos yeux du plus grand bien ;
On ne voit plus que vains phantômes ,
Qu'abîmes creux , que noirs atômes
( Parlons plus juste , ) on ne voit rien.
>
Les Citez , les Bourgs , les Campagnes ,
Durant ce temps perdent leurs noms ;
L'orgueilleux sommer des Montagnes ,
S'abaissé au niveau des Vallons;
On voit languir dans la tristesse , (b )
Dans le silence et la paresse ,
L'homme , la Brute et les Oiseaux ,
Et parmi cette erreur profonde ,
(a ) Cette Nuit est la figure de la Loi Judaïque,
(b)L'état du peché.
Од
SEPTEMBRE. 1731 2147,
On croiroit que déja le Monde ,
Rentre dans son premier cahos.
Mais quoi ! Venus brillante et pure ,
Perce la sombre obscurité ;
Son aspect (a) rend à la Nature ,
L'espoir , la joye et la Clarté
Telle qu'un Captif miserable,
Quand il voit la main secourable ;
Qui vient l'affranchir de ses fers ;
La Troupe des Mortels plaintive ,
Se ranime à la splen deur vive ,
Qu'offre cet Astre à l'Univers.
, Sa lumiere active et perçante
Eclaircit les objets confus ,
La Terre obscure et languissante ,
Recouvre ses honneurs perdus.
Avec les brouillards homicides ,
Je vois fuir cent Spectres livides ,
Monstrueux (6) Enfans de la Nuit ;
Venus éclairant ces lieux sombres ,
Fait succeder aux pâles Ombres ,
Les traits du Soleil qui la suit.
(a) Commencement de la Loi de Grate.
(b) Tenebres du peché dissipées par la Naissance
de J. C,
E ij
Grand
2148 MERCURE DE FRANCE
Grand Dieu quel ravissant Spectacle ,
De tous côtez s'offre à mes yeux !
On diroit qu'un second Miracle , (a)
Reproduit la Terre et les Cieux.
Les Forteresses se découvrent ,
Les Champs , les Prez , les Forêts s'ouvrent
Et semblent sortir du Tombeau;
Les Beautez du Monde paroissent :
Les Fleurs et les Plantes renaissent ,
Tout brille d'un éclat nouveau.
C'est cet Astre dont la presence ;
Annonce aux Mortels le réveil
Frappé par les rayons qu'il lance ;
L'Artisan s'arrache au sommeil ,
Le Berger plein d'un nouveau zele ,
Suit ce flambeau qui le rappelle ,
Et conduit ses Troupeaux aux champs į
Son coeur dans la Plaine fleurie ,
A son Etoile (b) si chérie ,
Consacre et ses voeux et ses chants.
Qu'entends-je au fond de ces Bocages a
Le charmant Concert ( e) des Oiseaux ,
.
J.
(a) Effets de la Loi de Grace.
(b) Le culte de Marie.
(c) Pays Etrangers convertis
SEPTEMBRE. 1731. 2149
Qui joignent leurs tendres ramages ,
Au son joyeux des Chalumeaux ;
Sinistres amis des tenebres >
Hibous , (a) portez vos cris funebres ;
Loin de ce fortuné séjour.
Et vous , Tigres , Loups et Panthéres ,
Cherchez dans vos affreux Repaires ,
Un azile contre le jour.
J'abhorre ces dangereux Astres ,
Dont les trop cuisantes chaleurs
Causent de si fréquens desastres ,
9.
Aux Moissons , aux Plantes , aux Fleu
Loin d'ici l'âpre Canicule ,
Qui perd , qui consume , qui brule ,
Du Vigneron les doux souhaits.
Par de plus molles influences ,
Phosphore (b ) échauffe les semences;
Et répand par tout ses bienfaits.
ALLUSION.
L'Auguste Vierge toûjours pure ,
Dans un siecle d'iniquité ,
Vint ainsi rendre à la Nature ,
L'allegresse et la liberté.
(a) Puissances Infernales détruites.
(b) Douceur de la Grace.
E iij
Le
2150 MERCURE DE , FRANCE
Le crime avoit plongé le Monde ,
'Dans l'horreur d'une nuit profonde ,
Le Ciel n'offroit que des éclairs ;
Mais cet Astre aux Mortels propice
Produit un Soleil de justice >
Qui rend l'éclat à l'Univers.
REMERCIEMENT à M. de Luyur ,
Evêque de Bayeux , Juge du Puy.
Prélat , soutien des Arts , ainsi que de la Foy
Mon front brilla jadis sous la même Courome;
Mais ce docte Laurier, qu'aujourd'hui je reçois ,
Tire un éclat nouveau de la main qui la donne,
HEURTAUL D.
l'honneur de
l'Immaculée
Conception de
ia sainte Vierge , laquelle a remporté le
dernier Prix du
PALINOD , à Caen .
Le sujet allegorique est l'Etoile du matin,
nommée Lucifer , Phosphore ou Venus.
Cicer. L. 2. de la Nature des Dieux,
Parois, aimable Avant- couriere
Du Dieu dont juttends la faveur ,
Guide mes pas dans la carriere ,
Où m'appelle aujourd'hui l'honneur
Bannis ces épaises tenebres
E Dont
2146 MERCURE DE FRANCE
Dont me couvrent les temps funebres ,
Et de la nuit et du sommeil ,
Je veux dès les traits de l'Aurore ,
Faire un Tableau qui brille encore
Aux plus beaux rayons du Soleil.
Pour montrer l'heureux assemblage ,
Des biens que cet Astre produit ,
Muse , peins- moi l'affreuse image ,
Des horreurs qu'enfante la Nuit . (a)
Quand une fois ses tristes voiles ,
Nous cachant le front des Etoiles ,
Privent nos yeux du plus grand bien ;
On ne voit plus que vains phantômes ,
Qu'abîmes creux , que noirs atômes
( Parlons plus juste , ) on ne voit rien.
>
Les Citez , les Bourgs , les Campagnes ,
Durant ce temps perdent leurs noms ;
L'orgueilleux sommer des Montagnes ,
S'abaissé au niveau des Vallons;
On voit languir dans la tristesse , (b )
Dans le silence et la paresse ,
L'homme , la Brute et les Oiseaux ,
Et parmi cette erreur profonde ,
(a ) Cette Nuit est la figure de la Loi Judaïque,
(b)L'état du peché.
Од
SEPTEMBRE. 1731 2147,
On croiroit que déja le Monde ,
Rentre dans son premier cahos.
Mais quoi ! Venus brillante et pure ,
Perce la sombre obscurité ;
Son aspect (a) rend à la Nature ,
L'espoir , la joye et la Clarté
Telle qu'un Captif miserable,
Quand il voit la main secourable ;
Qui vient l'affranchir de ses fers ;
La Troupe des Mortels plaintive ,
Se ranime à la splen deur vive ,
Qu'offre cet Astre à l'Univers.
, Sa lumiere active et perçante
Eclaircit les objets confus ,
La Terre obscure et languissante ,
Recouvre ses honneurs perdus.
Avec les brouillards homicides ,
Je vois fuir cent Spectres livides ,
Monstrueux (6) Enfans de la Nuit ;
Venus éclairant ces lieux sombres ,
Fait succeder aux pâles Ombres ,
Les traits du Soleil qui la suit.
(a) Commencement de la Loi de Grate.
(b) Tenebres du peché dissipées par la Naissance
de J. C,
E ij
Grand
2148 MERCURE DE FRANCE
Grand Dieu quel ravissant Spectacle ,
De tous côtez s'offre à mes yeux !
On diroit qu'un second Miracle , (a)
Reproduit la Terre et les Cieux.
Les Forteresses se découvrent ,
Les Champs , les Prez , les Forêts s'ouvrent
Et semblent sortir du Tombeau;
Les Beautez du Monde paroissent :
Les Fleurs et les Plantes renaissent ,
Tout brille d'un éclat nouveau.
C'est cet Astre dont la presence ;
Annonce aux Mortels le réveil
Frappé par les rayons qu'il lance ;
L'Artisan s'arrache au sommeil ,
Le Berger plein d'un nouveau zele ,
Suit ce flambeau qui le rappelle ,
Et conduit ses Troupeaux aux champs į
Son coeur dans la Plaine fleurie ,
A son Etoile (b) si chérie ,
Consacre et ses voeux et ses chants.
Qu'entends-je au fond de ces Bocages a
Le charmant Concert ( e) des Oiseaux ,
.
J.
(a) Effets de la Loi de Grace.
(b) Le culte de Marie.
(c) Pays Etrangers convertis
SEPTEMBRE. 1731. 2149
Qui joignent leurs tendres ramages ,
Au son joyeux des Chalumeaux ;
Sinistres amis des tenebres >
Hibous , (a) portez vos cris funebres ;
Loin de ce fortuné séjour.
Et vous , Tigres , Loups et Panthéres ,
Cherchez dans vos affreux Repaires ,
Un azile contre le jour.
J'abhorre ces dangereux Astres ,
Dont les trop cuisantes chaleurs
Causent de si fréquens desastres ,
9.
Aux Moissons , aux Plantes , aux Fleu
Loin d'ici l'âpre Canicule ,
Qui perd , qui consume , qui brule ,
Du Vigneron les doux souhaits.
Par de plus molles influences ,
Phosphore (b ) échauffe les semences;
Et répand par tout ses bienfaits.
ALLUSION.
L'Auguste Vierge toûjours pure ,
Dans un siecle d'iniquité ,
Vint ainsi rendre à la Nature ,
L'allegresse et la liberté.
(a) Puissances Infernales détruites.
(b) Douceur de la Grace.
E iij
Le
2150 MERCURE DE , FRANCE
Le crime avoit plongé le Monde ,
'Dans l'horreur d'une nuit profonde ,
Le Ciel n'offroit que des éclairs ;
Mais cet Astre aux Mortels propice
Produit un Soleil de justice >
Qui rend l'éclat à l'Univers.
REMERCIEMENT à M. de Luyur ,
Evêque de Bayeux , Juge du Puy.
Prélat , soutien des Arts , ainsi que de la Foy
Mon front brilla jadis sous la même Courome;
Mais ce docte Laurier, qu'aujourd'hui je reçois ,
Tire un éclat nouveau de la main qui la donne,
HEURTAUL D.
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Résumé : ODE En l'honneur de l'Immaculée Conception de la sainte Vierge, laquelle a remporté le dernier Prix du PALINOD, à Caën. Le Sujet allegorique est l'Etoile du matin, nommée Lucifer, Phosphore ou Venus. Cicer. L. 2. de la Nature des Dieux.
Le poème célébrant l'Immaculée Conception de la sainte Vierge, lauréat du dernier Prix du Palinod à Caen, utilise l'Étoile du matin, nommée Lucifer, Phosphore ou Vénus, comme sujet allégorique. Il oppose la nuit, symbolisant la Loi judaïque et l'état du péché, à l'aube, représentant la Loi de Grâce et la naissance de Jésus-Christ. La nuit est décrite comme une période de ténèbres où les villes, les campagnes et les montagnes perdent leurs noms et leur splendeur, et où les êtres vivants sont plongés dans la tristesse et la paresse. L'arrivée de Vénus, symbole de la grâce divine, dissipe ces ténèbres. Elle redonne espoir, joie et clarté à la nature et aux hommes, qui se raniment à sa lumière. Le poème décrit ensuite la transformation du monde à l'aube, avec les forteresses, les champs et les forêts qui se découvrent et renaissent. Les artisans et les bergers se lèvent, et les oiseaux chantent joyeusement. Le poème se termine par une allusion à la Vierge Marie, qui a rendu à la nature l'allégresse et la liberté dans un siècle d'iniquité. Le crime avait plongé le monde dans une nuit profonde, mais l'Astre propice, symbolisant la justice divine, a produit un soleil de justice qui rend l'éclat à l'univers. Le texte se conclut par un remerciement à M. de Luyur, évêque de Bayeux et juge du Puy, pour son soutien aux arts et à la foi.
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12
p. 2150-2155
RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
Début :
Puisque j'ay osé m'introduire dans la République des Lettres, je dois comme [...]
Mots clefs :
Républiques des Lettres, Tribunal de la critique, Journal de Trévoux, Réfutation, Géométrie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
RE'PONSE du P. Romuald le Muët
Religieux de la Charité , à M. le Monnier.
Puisque j'ay osé m'introduire dans la
République des Lettres , je dois comme
bon Citoyen , me soûmettre à la Jurisdiction
qui s'y trouve établie dès son
commencement. C'est le tribunal de la
Critique , dont la puissance est soûtenuë
de l'autorité du Droit Public.
Les
SEPTEMBRE. 1731. 21ST
114
,
Les sentimens d'estime que j'ay pour la
saine Critique , peuvent persuader d'a
bord M. le Monnier , que j'ay vû avec
plaisir dans le Journal de Trevoux du
mois de Mars 1731. la réfutation qu'il a
faite de mon petit ouvrage sur la Quadrature
du Cercle la Duplication da
Cube et la Trisection de l'Angle ; mais
quelque soit mon respect pour sa personne
, et mon estime pour la Critique ,
je ne pense pas qu'il doive en inferer que
je sois disposé à me soûmettre aux loix
qu'il me préscrit , et que je me déporte
de ma methode simple et nouvelle,s'il veut,
mais exacte , mais solide , de diviser les
360. degrez de la circonference du Cercle
en vingt- deux parties , dont vingt et
une étant de seize degrez vingt - deux minutes
chacune , laissent seize degrez dixhuit
minutes pour la vingt - deuxième
qui est une difference de quatre minutes
moins que les autres , laquelle fait connoître
qu'elle est la portion que le Polygone
circonscrit de 360 , côtez , a de plus
que la circonférence du Cercle de 360 .
degrez , et qu'elle donne ainsi le dévelopement
entier de la solution parfaite du
fameux Problême de la Quadrature du
Cercle , en donnant le vrai rapport du
Diametre, 114. degrez 34. m. à la circonference
E iiij
2152 MERCURE DE FRANCE
•
ference du Cercle de 360. degrez , qui est
celui de sept à vingt- deux moins quelque
chose , lequel quelque chose , l'on voit
enfin ici , fixé à quatre minutes , à quoi
se doivent aussi fixer les difficultez que
M. le Monnier essaye inutilement d'y
opposer .
A l'égard de ce que j'ay dit que la Géometrie
simple est la seule réelle , la seule
solide , quoi qu'en puisse dire M. le Monnier
, en faveur des sections coniques , et
même de la Géometrie de l'infini , il ne
peut disconvenir sans se commettre un
peu , que ce qu'il y a de plus utile et de
plus dans l'usage , n'excede point le ressort
de la Géometrie simple , et que ce
qu'on y a imaginé de plus par la nouvelle
Algébre , cet art ingenieux , speculatif
et séduisant , qui parle aux yeux , et fait
taire la bouche , ne sont que des traits ,
que des figures symboliques qui ne servent
gueres plus qu'à irriter la curiosité
et à amuser l'esprit en effet n'est- ce pas
dans la plus haute sublimité de son intelligence
, à laquelle ses éleves puissent par
venir , qu'elle leur apprend à démontrer
que deux et deux , à quelques égards
ne font pas quatre ? Grande preuve
de sa
solidité et de son utilité ! Ce n'est pas que
je méprise ces connoissances , au contraire,
:
>
IG
SEPTEMBRE. 1731. 2153
je reconnois qu'elles ne m'ont amusé que
trop agréablement , et peut-être trop souvent;
mais je voudrois qu'on ne les encherit
point au- dessus de la valeur que le sçavant
P. Castel leur a si judicieusement
assignée dans son excellent livre de Mathématique
universelle.
C'est sincerement avec peine que je me
trouve obligé de dire que M. le Monnier
n'a pû parvenir à connoître , quelque effort
qu'il paroisse avoir fait que cinquante-
sept fois 57. degrez 17. m. valent
3265. degrez9.m. , et que dix-sept fois 17 .
m. valent quatre degrez quarante- neuf minutes
, qui font la somme totale 3269 .
degrez 58. m. J'admire comment il a squ
trouver des secondes où il ne s'agit que
de primes , je veux dire que de minutes .
N'y a-t-il point encore sujet de s'étonner
que M. le Monnier me propose de
comparer des nombres à des nombres
pour la Duplication du Cube , lui qui
doit sçavoir , que comme la Duplication
du quarré est impossible en nombre et
possible en ligne , de même la Duplication
du Cube ne se peut faire en nombre
et peut se faire en ligne , en trouvant deux
lignes moyennes proportionnelles entre
une et deux ? Quoique jusqu'à present
on ait cherché inutilement ces movennes
proportionnelles par la Géometrie
simple , E v
2154 MERCURE DE FRANCE
simple ; je crois cependant les avoir
trouvées par ce proċedé ici . Soit la ligne
A
ر
B
1
,
C D
E
" divisée en B en deux parties égales
pour faire une et deux , comme on le
verra dans la suite et chacune moitié
subdivisée en deux autres qui fassent quatre
parties égales . Alors prenant la seconde
moitié de la ligne AB , pour le côté
d'un quarré , soit sa diagonale , conduite
en C , et que D marque la moitié de la
ligne BE ; car en procedant ainsi , il est
indubitable que AB : AC AD : AE. Et
par conséquent que ces quatre lignes sont
en proportion Géometrique et continuellement
proportionnelles
, desquelles AC
et AD sont les deux moyennes. Et comme
il est démontré depuis long- temps , que
la premiere est la racine cubique du Cube
deux , il s'ensuit que la ligne AC est le
côté du Cube double du Cube de AB ,
d'où l'on doit indubitablement conclure
que la solution du célebre Problême de la
Duplication du Cube est enfin trouvée.
Quant àl'operation de la Trisection de
l'Angle , M. le Monnier peut continuer
à la faire ; les difficultez en sont levées ;
il n'a plus de Paralogisme à craindre
ayant autant de sagacité et de pénetra
tion que je lui en crois .
>
Voici
SEPTEMBRE . 1731. 2155
Voici donc bien démontrées les solutions
tant désirées et presque inesperées
de ces anciens Apores , la Quadrature du
Cercle , la Duplication du Cube et la
Trisection de l'Angle par la Géometrie
simple , sans le secours des sections Coniques
, ni de la Géometrie de l'infini ,
dont les operations ne sont point si lumi
neuses , qu'elles ne laissent quelque doute.
Religieux de la Charité , à M. le Monnier.
Puisque j'ay osé m'introduire dans la
République des Lettres , je dois comme
bon Citoyen , me soûmettre à la Jurisdiction
qui s'y trouve établie dès son
commencement. C'est le tribunal de la
Critique , dont la puissance est soûtenuë
de l'autorité du Droit Public.
Les
SEPTEMBRE. 1731. 21ST
114
,
Les sentimens d'estime que j'ay pour la
saine Critique , peuvent persuader d'a
bord M. le Monnier , que j'ay vû avec
plaisir dans le Journal de Trevoux du
mois de Mars 1731. la réfutation qu'il a
faite de mon petit ouvrage sur la Quadrature
du Cercle la Duplication da
Cube et la Trisection de l'Angle ; mais
quelque soit mon respect pour sa personne
, et mon estime pour la Critique ,
je ne pense pas qu'il doive en inferer que
je sois disposé à me soûmettre aux loix
qu'il me préscrit , et que je me déporte
de ma methode simple et nouvelle,s'il veut,
mais exacte , mais solide , de diviser les
360. degrez de la circonference du Cercle
en vingt- deux parties , dont vingt et
une étant de seize degrez vingt - deux minutes
chacune , laissent seize degrez dixhuit
minutes pour la vingt - deuxième
qui est une difference de quatre minutes
moins que les autres , laquelle fait connoître
qu'elle est la portion que le Polygone
circonscrit de 360 , côtez , a de plus
que la circonférence du Cercle de 360 .
degrez , et qu'elle donne ainsi le dévelopement
entier de la solution parfaite du
fameux Problême de la Quadrature du
Cercle , en donnant le vrai rapport du
Diametre, 114. degrez 34. m. à la circonference
E iiij
2152 MERCURE DE FRANCE
•
ference du Cercle de 360. degrez , qui est
celui de sept à vingt- deux moins quelque
chose , lequel quelque chose , l'on voit
enfin ici , fixé à quatre minutes , à quoi
se doivent aussi fixer les difficultez que
M. le Monnier essaye inutilement d'y
opposer .
A l'égard de ce que j'ay dit que la Géometrie
simple est la seule réelle , la seule
solide , quoi qu'en puisse dire M. le Monnier
, en faveur des sections coniques , et
même de la Géometrie de l'infini , il ne
peut disconvenir sans se commettre un
peu , que ce qu'il y a de plus utile et de
plus dans l'usage , n'excede point le ressort
de la Géometrie simple , et que ce
qu'on y a imaginé de plus par la nouvelle
Algébre , cet art ingenieux , speculatif
et séduisant , qui parle aux yeux , et fait
taire la bouche , ne sont que des traits ,
que des figures symboliques qui ne servent
gueres plus qu'à irriter la curiosité
et à amuser l'esprit en effet n'est- ce pas
dans la plus haute sublimité de son intelligence
, à laquelle ses éleves puissent par
venir , qu'elle leur apprend à démontrer
que deux et deux , à quelques égards
ne font pas quatre ? Grande preuve
de sa
solidité et de son utilité ! Ce n'est pas que
je méprise ces connoissances , au contraire,
:
>
IG
SEPTEMBRE. 1731. 2153
je reconnois qu'elles ne m'ont amusé que
trop agréablement , et peut-être trop souvent;
mais je voudrois qu'on ne les encherit
point au- dessus de la valeur que le sçavant
P. Castel leur a si judicieusement
assignée dans son excellent livre de Mathématique
universelle.
C'est sincerement avec peine que je me
trouve obligé de dire que M. le Monnier
n'a pû parvenir à connoître , quelque effort
qu'il paroisse avoir fait que cinquante-
sept fois 57. degrez 17. m. valent
3265. degrez9.m. , et que dix-sept fois 17 .
m. valent quatre degrez quarante- neuf minutes
, qui font la somme totale 3269 .
degrez 58. m. J'admire comment il a squ
trouver des secondes où il ne s'agit que
de primes , je veux dire que de minutes .
N'y a-t-il point encore sujet de s'étonner
que M. le Monnier me propose de
comparer des nombres à des nombres
pour la Duplication du Cube , lui qui
doit sçavoir , que comme la Duplication
du quarré est impossible en nombre et
possible en ligne , de même la Duplication
du Cube ne se peut faire en nombre
et peut se faire en ligne , en trouvant deux
lignes moyennes proportionnelles entre
une et deux ? Quoique jusqu'à present
on ait cherché inutilement ces movennes
proportionnelles par la Géometrie
simple , E v
2154 MERCURE DE FRANCE
simple ; je crois cependant les avoir
trouvées par ce proċedé ici . Soit la ligne
A
ر
B
1
,
C D
E
" divisée en B en deux parties égales
pour faire une et deux , comme on le
verra dans la suite et chacune moitié
subdivisée en deux autres qui fassent quatre
parties égales . Alors prenant la seconde
moitié de la ligne AB , pour le côté
d'un quarré , soit sa diagonale , conduite
en C , et que D marque la moitié de la
ligne BE ; car en procedant ainsi , il est
indubitable que AB : AC AD : AE. Et
par conséquent que ces quatre lignes sont
en proportion Géometrique et continuellement
proportionnelles
, desquelles AC
et AD sont les deux moyennes. Et comme
il est démontré depuis long- temps , que
la premiere est la racine cubique du Cube
deux , il s'ensuit que la ligne AC est le
côté du Cube double du Cube de AB ,
d'où l'on doit indubitablement conclure
que la solution du célebre Problême de la
Duplication du Cube est enfin trouvée.
Quant àl'operation de la Trisection de
l'Angle , M. le Monnier peut continuer
à la faire ; les difficultez en sont levées ;
il n'a plus de Paralogisme à craindre
ayant autant de sagacité et de pénetra
tion que je lui en crois .
>
Voici
SEPTEMBRE . 1731. 2155
Voici donc bien démontrées les solutions
tant désirées et presque inesperées
de ces anciens Apores , la Quadrature du
Cercle , la Duplication du Cube et la
Trisection de l'Angle par la Géometrie
simple , sans le secours des sections Coniques
, ni de la Géometrie de l'infini ,
dont les operations ne sont point si lumi
neuses , qu'elles ne laissent quelque doute.
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Résumé : RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
Le Père Romuald le Muët, religieux de la Charité, répond à M. le Monnier après que ce dernier ait critiqué son ouvrage sur la quadrature du cercle, la duplication du cube et la trisection de l'angle. Le Père Romuald exprime son respect pour la critique mais refuse de se soumettre aux lois que M. le Monnier lui prescrit. Il défend sa méthode de division des 360 degrés de la circonférence du cercle en vingt-deux parties, affirmant que cette méthode permet de résoudre le problème de la quadrature du cercle en déterminant le rapport entre le diamètre et la circonférence. Le Père Romuald soutient que la géométrie simple est la seule réelle et solide, contrairement aux sections coniques et à la géométrie de l'infini, qu'il considère comme des artifices symboliques. Il reconnaît l'utilité de ces connaissances mais les juge surévaluées. Il critique également M. le Monnier pour ses erreurs de calcul, notamment dans la duplication du cube, et affirme avoir trouvé une solution en utilisant la géométrie simple. Il explique que la duplication du cube peut se faire en ligne en trouvant deux lignes moyennes proportionnelles entre une et deux. Le Père Romuald conclut que les solutions aux problèmes de la quadrature du cercle, de la duplication du cube et de la trisection de l'angle sont démontrées par la géométrie simple, sans recours aux sections coniques ou à la géométrie de l'infini.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 2155-2156
ENIGME.
Début :
Nous sommes vingt, tous de même âge, [...]
Mots clefs :
Doigts
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
Ous sommes vingt, tous de même âge,
Divisez en quatre Quartiers ,
Aux plantes attachez souvent en esclavage
Moitié de nous sont Prisonniers ,
Et telle est nôtre destinée ;
Que c'est par nôtre autre moitié
Que nous sommes logez en prison sans pitié :
Pendant tous les jours de l'Année ;
E vj
11
2156 MERCURE DE FRANCE
Il est vrai que pendant les Nuits ,
De nos Cachots étant sortis ,
On nous laisse jouir aux heures ordinaires
Des mêmes libertez dont jouissent nos freres.
AS. Vallery.
Ous sommes vingt, tous de même âge,
Divisez en quatre Quartiers ,
Aux plantes attachez souvent en esclavage
Moitié de nous sont Prisonniers ,
Et telle est nôtre destinée ;
Que c'est par nôtre autre moitié
Que nous sommes logez en prison sans pitié :
Pendant tous les jours de l'Année ;
E vj
11
2156 MERCURE DE FRANCE
Il est vrai que pendant les Nuits ,
De nos Cachots étant sortis ,
On nous laisse jouir aux heures ordinaires
Des mêmes libertez dont jouissent nos freres.
AS. Vallery.
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14
p. 2156
LOGOGRYPHE.
Début :
Cinq lettres composent mon nom ; [...]
Mots clefs :
Louis
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LOGOGRYPHE.
LOGOGRYPHE.
Cinq lettres composent mon nom ♪
Qui dans la Franee a grand renom ,
J'y fûs grand , juste , débonnaire
Pieux , et des Peuples le Pere ;
On m'y vit d'Outremer sans avoir de bons yeuxi
Enfin parmi les Saints on me voit dans les Cieux.
Tu trouveras en moi deux Notes de Musique ;
Mes derniers pieds unis , sans moi la Mecanique
Presseroit les corps foiblement ;
Devine, Lecteur, promptement.
M. L. C. L ... d'Arles,
Cinq lettres composent mon nom ♪
Qui dans la Franee a grand renom ,
J'y fûs grand , juste , débonnaire
Pieux , et des Peuples le Pere ;
On m'y vit d'Outremer sans avoir de bons yeuxi
Enfin parmi les Saints on me voit dans les Cieux.
Tu trouveras en moi deux Notes de Musique ;
Mes derniers pieds unis , sans moi la Mecanique
Presseroit les corps foiblement ;
Devine, Lecteur, promptement.
M. L. C. L ... d'Arles,
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15
p. 2156-2157
SECOND LOGOGRYPHE.
Début :
Je suis chez toute Nation [...]
Mots clefs :
Médecine
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SECOND LOGOGRYPHE.
SECOND LOGOGRYPHE
JEE suis chez toute Nation
Science et composition
D'un assez perilleux usage ;
Cependant
SEPTEMBRE. 1731. 27
Cependant l'homme le plus sage ,
Malgré ce qu'il voit tous les jours ,
Croit trouver en moi du secours.
Tel je suis tout entier , mais si l'on me partage
Mon dernier membre ôté je deviens un Docteur
Qui decide à tâtons , si tu m'en crois , Lecteur ,
Evite ses Ecrits , son langage barbare ;
Je craindrois moins un Arabe , un Tartare.
L'histoire t'offre un Peuple 2 en me coupant e
deux ,
Qui jadis occupoit un Empire fameux.
Tranche un quart de mon tout , dans un Pays
sterile,
Interdit aux Chrétiens , je presente une Ville.
L. T. Demontrob .
de Vernon.
JEE suis chez toute Nation
Science et composition
D'un assez perilleux usage ;
Cependant
SEPTEMBRE. 1731. 27
Cependant l'homme le plus sage ,
Malgré ce qu'il voit tous les jours ,
Croit trouver en moi du secours.
Tel je suis tout entier , mais si l'on me partage
Mon dernier membre ôté je deviens un Docteur
Qui decide à tâtons , si tu m'en crois , Lecteur ,
Evite ses Ecrits , son langage barbare ;
Je craindrois moins un Arabe , un Tartare.
L'histoire t'offre un Peuple 2 en me coupant e
deux ,
Qui jadis occupoit un Empire fameux.
Tranche un quart de mon tout , dans un Pays
sterile,
Interdit aux Chrétiens , je presente une Ville.
L. T. Demontrob .
de Vernon.
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