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Détail
Liste
1
p. 93-111
LE PERROQUET ET LA GUENUCHE. FABLE. A MADEMOISELLE DE M**
Début :
Il nous arriva hier de Lisbonne une Barque chargée de [...]
Mots clefs :
Perroquet, Guenuche, Amour, Animaux, Galanterie, Berger, Conversation, Belle, Laide, Inconstance, Métamorphose, Portugal, Histoire, Morale
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texteReconnaissance textuelle : LE PERROQUET ET LA GUENUCHE. FABLE. A MADEMOISELLE DE M**
LE
PERROQUET
ET LA GUENUCHE.
7
FABLE.
A MADEMOISELLE DE M**
1
Lnous arriva hier de Lisbonneune
Barque chargéedeSinges &de Per- roquets. Vousjugezbien, Mademoiselle,
GALANT 61
que je n'ay pas perduune si belle occa- fion devous tenirparole. F'aychoisipar- my cegrand nombre un Perroquet d'un plumage tres particulier , &une Gue- nuche d'une petiteſſefort rare. Ce qu'il yade fâcheux , c'est que le Perroquet
neparle point François , que la Guenu- che ne sçait point danser , &que mesme elle est encore habillée à la Portugaise;
mais vous serez peut-estre bien aise d'estre leur Maiſtreſſe en toutes façons.
Vos Leçons leur apprendront la belle maniere. Tous les autres Perroquets ne Sçavent prononcerque des injures grof- fieres , & quand vous aurezinſtruit le voſtre , il sçaura dire des malices inge- nieuses. A voſtre Ecole la Guenuche
apprendra bien- toft la Bourrée & le
Menuët ; &fi vous avezſoin de l'ha biller à la mode & de voſtremain ,je
gage qu'on la trouvera plus propre &
demeilleur air que vostre petite laide Voisine. Cependant comme vous n'en- tendrez point d'abord le jargon ny de la Guenuche ny du Perroquet , je me crois obligé en vous les envoyant, d'estre aupres de vous leur Interprete. SansSça-
62 LE MERCVRE
voir la Langue de leur Pays, j'ay bien- toft compris leurs discours, parce qu'ils estoient tendres &amoureux..
Entendre àdemymotfut toûjoursmon
partage;
Si- toſt que l'on parle d'amour ,
Iln'eſt point pour moy de langage Qui ne foit clair comme le jour.
Pour vous ma , jeune Demoiselle,
Quand memes en François l'amour fertd'entretien ,
Malgré tout voſtre Eſprit , vous ne ré- pondez rien Et vousn'entendez pas la langue ma- ternelle;
Vous voila cependant dans la belle ſaiſon ,
Vous avez quatorze ans, à cet âge, ma Belle,
N'entendre pas l'Amour , mafoy cela s'appelle N'entendre pas raiſon.
Jeveux aujourd'huy tâcher devous rendre raisonnable , en vous faisant comprendre l'Histoire amoureuse de
GALAN T. 63 vostre Guenuche & de vostre Perroquet.
Aufſi- toft que ces deux petits Animauxfurent entre mes mains , ils parle- rent entr'eux certain jargon Moresque,
&j'entendis quele Perroquet reprochoit àla Guenucheſes ſingeries , & la Gue- nuche luy reprochoitſon caquet. Comme leursdiscours meſemblerent aſſez plai- Sans, j'entray dans leur conversation.
Ils enfurent d'abordsurpris , mais en- fin nous devinſmes familiers &fûmes bien toſt ſi grands Amis , que je les obligeay àme conter leurHistoire. Le Perroquet , comme le plus grand Cau- feur , voulut estre l'Historien ; &vo cy en François àpeu pres comme il pliqua en Moresque.. *
LYON
1893-
MaMere me donna le jour
Dans un Climat de la Guinée ,
Où le Soleil joint à l'Amour ,
Enflame tout toute l'année.
L'on n'y voit point de Cœur glacé,
N'yde Bergere indiferente;
Quand unBerger eſt empreſſé LaBergere ſe montre ardente.
64 LE MERCVRE
Là je vivois jadis enBerger fort coquet,
Aujourd'huyje ſuis Perroquet,
Car , helas ! ma Coqueterie ,
Queje nommois Galanterie ,
Choqua le cruel Cupidon ,
Qui ſans m'accorder de pardon ,
Fit de moy la Métamorphoſe ,
Queje vais vous conter en Profe.
Sur les bords du Fleuve Niger on ne fait pas l'amour ainſi que fur les bords de la Seine on du Rhône. On m'a dit
qu'icyla constance paſſe pour une vertu,
là elle paſſeroit pour un vice : En France un Amant bien reglé n'a beſoin que d'une Amante , &ſouvent en ayant une , il en a trop ; mais en Ethiopie les Galans ont beſoin de diverſes Maiſtref.
Ses , &nostre miserable Roy qui mourut ilyaquelque temps dans ce Royaume,
pourroit estre un témoin de cette verité.
Estant Berger je voyois ſuivant noftre coustume diverſesBergeres , &je témoi gnois à toutes beaucoup d'amour,mais àlaveritéje n'en reſſentois queres. Dans ma conversation, dans mes Chansons
GALANT. 65 dans mes Billets , je paroiſſois l' Amant du monde leplus ardent , &dans mon cœur ie mesentois fort tranquille; enfin tout mon amour n'estoit que du caquet.
Mais,helas ! depuis ce temps j'ay bien appris que Cupidon est un Dieu qui pu- nit cruellement le mensonge. Pour com.
mencer àse vanger demoy , il me fit devenir trop veritablement amoureux d'une petite Laide , plus volage &plus.
coquette que je n'estois , &c'est iuste.
ment Dame Guenuche que vous voyez là , qui a esté Bergere dans le temps que i'estois Berger. Apresavoir trompé tant de Perſonnes parmesfaux Sermens , ie ne pûs pas mesine perfuader mapetite Laide par des veritez tres- constantes.
Cependantpour mefaire mieux enrager,
au commencement elle fit mine de m'aimer, elle affecta toutes les petites ma- nieres d'une Perſonnefort paſſionnée, &
quand elle me vit bien ſenſiblement tou- ché , elle me fit cent malices & mequit- ta enfin pour un autre Bergerauffi laid qu'un vieux Singe.
Dieux ! qu'un Berger vivroit content
66 LE MERCVRE
Silchangeoit auffi-toft que changeſon Amante !
Mais,helas ! que de maux nous cauſe
une Inconftante,
Quandon ne peut être inconſtant !
L'amourque ieſentois pour mapetite Ingrate , & la haine que i'avois pour mon laid Rival , me mirent dans untel
deſeſpoir , que ie quitay mes Moutons,
&laſocietédes autres Bergers. Je m'en allay comme un furieux ,errant dans lesDeserts : ie déchiray mes habits , ie me couvris defeüilles d'arbres , &enfin
icdevins tout-à-fait infensé. L'Amour alors me voyantdans une Forest en estat demourir ,voulut meſauver la vie , &
ie nesçay si cefutparpitiéouparven- geance. Il changea mapeau &monha- bit en plumesde la couteur des feüilles
qui me couvroient , ma bouche en bec ,
mes bras en cuiſſes , &ainfi du reſte de
mon Corps. Voila comme ie me trouvay Perroquet , &ie vousiureque ien'en ay point confervé de regret.
Nehaïſſant plus monRival,
GALANT. 67 Etn'aimantplus mon Inconſtante Je ſens monAme plus contente ,
D'animer pour toûjours le Corps d'un Animal ,
Que celuy d'un Berger ,quand l'A- mour le tourmente.
Mapetite Laide ne demeura pas auſſiſans châtiment , parce qu'elle n'a- voit aiméqu'en apparence, & que toute fa tendreſſe n'avoit esté que fingerie ;
l'Amour n'ayant point esté trompépar ſes grimaces , voulut punirfonhipocri fie ,comme il avoit puny mon liberti- nage. Il la changea donc en Guenuche ; &comme c'estoit unepetite Berge- re fort laide &fort malicieuse , il n'eut
pas beaucoup depeine àfaire ce changement.
Depuis cette double Metamorphose nousavons vescu, maMaiſtreſſe &moy,
dans les Solitudes & dans les Forests.
Cependant nous n'eſtions pas tout -à-fait Sauvages , & cela est si vray que nous noussommes laislé prendre aux premiers Hommes qui ſeſont preſentez. D'abord onnous mena en Portugal , où l'humeur
68 LE MERCVRE
de la Nation ne nous plaiſoit gueres,
parcequele caquet &les fingeriesn'y ont pas tant de coursqu'en France , ou i'ap- prens que nous sommes auiourd'huy.
Nous nousyplaifons ſans doute ,parce que nous avons encoreconfervéquelque choſe de nostre premier caractere. Pour moy quipendantque i'estois Berger di- fois centfleurettesfans penser àce queie difois,iedis encore eftant Perroquet cent parolesfanssçavoir ce que ie dis. Pour ma Maistreffe , qui estant Bergerecon- trefaisoit l' Amante ſansſentird'amour,
&qui de plusfaisoit tous les jours mil- temalices , estant Guenuche elle enfait
encore, & contrefait mille choſesqu'elle voit faire.
Voila , me dit le Perroquet , noſtre Histoireiusques icy : c'est àvous, Mon- fieur, ànous apprendre le reſte. Dites- nous pourquoy nous sommes entre vos mains , &àquoy nousſommes deſtinez,
puis que vous nousfaitespartirpourun SecondVoyage. Acette question i'ay ré- pondude cettemaniere.
Allez trop heureux Animaux ,
GALAN T. 69
Voicy la fin de tous vos maux :
Aprenez que l'on vous deſtine Pour aller faire les plaiſirs D'une belle & jeune Blondine ,
Quidonne mille ardens defirs,
Etqui cauſe mille ſoûpirs Amille Amans qui n'oſent dire ,
Belle, c'est pour vous qu'on ſoûpire;
Vous, Peroquet , & nuit &jour ,
Vous luy pourrez parler d'amour ;
Vous pourrez dire , ie vous aime,
Sans vous attirer ſon courroux.
Que mon bonheur ſeroit extrême
Si j'ofois parler comme vous !
Vous Guenuche, VOS fingeries LYON
Loin de luy donnerdu chagrin,
La charmeront ſoir & matin ;
ODieux ! que'mes Galanteries N'ont-elles le meſmedeſtin !
C'est ainsi , Mademoiselle , que finit la conversation que i'ay cue avecvostre Perroquet & vostre Guenuche. L'ay crû que ie devois vous enfaire part,
quevousferiez bien aiſe deſçavoir leurs
Avantures, le pourrois bien tirer de cette Hiftoire une belle Morale en faveur de
70 LE MERCVRE l'Amour; mais belas ,je n'oferoisavec vous moraliſerſur cette matiere.
De Marſeille.
PERROQUET
ET LA GUENUCHE.
7
FABLE.
A MADEMOISELLE DE M**
1
Lnous arriva hier de Lisbonneune
Barque chargéedeSinges &de Per- roquets. Vousjugezbien, Mademoiselle,
GALANT 61
que je n'ay pas perduune si belle occa- fion devous tenirparole. F'aychoisipar- my cegrand nombre un Perroquet d'un plumage tres particulier , &une Gue- nuche d'une petiteſſefort rare. Ce qu'il yade fâcheux , c'est que le Perroquet
neparle point François , que la Guenu- che ne sçait point danser , &que mesme elle est encore habillée à la Portugaise;
mais vous serez peut-estre bien aise d'estre leur Maiſtreſſe en toutes façons.
Vos Leçons leur apprendront la belle maniere. Tous les autres Perroquets ne Sçavent prononcerque des injures grof- fieres , & quand vous aurezinſtruit le voſtre , il sçaura dire des malices inge- nieuses. A voſtre Ecole la Guenuche
apprendra bien- toft la Bourrée & le
Menuët ; &fi vous avezſoin de l'ha biller à la mode & de voſtremain ,je
gage qu'on la trouvera plus propre &
demeilleur air que vostre petite laide Voisine. Cependant comme vous n'en- tendrez point d'abord le jargon ny de la Guenuche ny du Perroquet , je me crois obligé en vous les envoyant, d'estre aupres de vous leur Interprete. SansSça-
62 LE MERCVRE
voir la Langue de leur Pays, j'ay bien- toft compris leurs discours, parce qu'ils estoient tendres &amoureux..
Entendre àdemymotfut toûjoursmon
partage;
Si- toſt que l'on parle d'amour ,
Iln'eſt point pour moy de langage Qui ne foit clair comme le jour.
Pour vous ma , jeune Demoiselle,
Quand memes en François l'amour fertd'entretien ,
Malgré tout voſtre Eſprit , vous ne ré- pondez rien Et vousn'entendez pas la langue ma- ternelle;
Vous voila cependant dans la belle ſaiſon ,
Vous avez quatorze ans, à cet âge, ma Belle,
N'entendre pas l'Amour , mafoy cela s'appelle N'entendre pas raiſon.
Jeveux aujourd'huy tâcher devous rendre raisonnable , en vous faisant comprendre l'Histoire amoureuse de
GALAN T. 63 vostre Guenuche & de vostre Perroquet.
Aufſi- toft que ces deux petits Animauxfurent entre mes mains , ils parle- rent entr'eux certain jargon Moresque,
&j'entendis quele Perroquet reprochoit àla Guenucheſes ſingeries , & la Gue- nuche luy reprochoitſon caquet. Comme leursdiscours meſemblerent aſſez plai- Sans, j'entray dans leur conversation.
Ils enfurent d'abordsurpris , mais en- fin nous devinſmes familiers &fûmes bien toſt ſi grands Amis , que je les obligeay àme conter leurHistoire. Le Perroquet , comme le plus grand Cau- feur , voulut estre l'Historien ; &vo cy en François àpeu pres comme il pliqua en Moresque.. *
LYON
1893-
MaMere me donna le jour
Dans un Climat de la Guinée ,
Où le Soleil joint à l'Amour ,
Enflame tout toute l'année.
L'on n'y voit point de Cœur glacé,
N'yde Bergere indiferente;
Quand unBerger eſt empreſſé LaBergere ſe montre ardente.
64 LE MERCVRE
Là je vivois jadis enBerger fort coquet,
Aujourd'huyje ſuis Perroquet,
Car , helas ! ma Coqueterie ,
Queje nommois Galanterie ,
Choqua le cruel Cupidon ,
Qui ſans m'accorder de pardon ,
Fit de moy la Métamorphoſe ,
Queje vais vous conter en Profe.
Sur les bords du Fleuve Niger on ne fait pas l'amour ainſi que fur les bords de la Seine on du Rhône. On m'a dit
qu'icyla constance paſſe pour une vertu,
là elle paſſeroit pour un vice : En France un Amant bien reglé n'a beſoin que d'une Amante , &ſouvent en ayant une , il en a trop ; mais en Ethiopie les Galans ont beſoin de diverſes Maiſtref.
Ses , &nostre miserable Roy qui mourut ilyaquelque temps dans ce Royaume,
pourroit estre un témoin de cette verité.
Estant Berger je voyois ſuivant noftre coustume diverſesBergeres , &je témoi gnois à toutes beaucoup d'amour,mais àlaveritéje n'en reſſentois queres. Dans ma conversation, dans mes Chansons
GALANT. 65 dans mes Billets , je paroiſſois l' Amant du monde leplus ardent , &dans mon cœur ie mesentois fort tranquille; enfin tout mon amour n'estoit que du caquet.
Mais,helas ! depuis ce temps j'ay bien appris que Cupidon est un Dieu qui pu- nit cruellement le mensonge. Pour com.
mencer àse vanger demoy , il me fit devenir trop veritablement amoureux d'une petite Laide , plus volage &plus.
coquette que je n'estois , &c'est iuste.
ment Dame Guenuche que vous voyez là , qui a esté Bergere dans le temps que i'estois Berger. Apresavoir trompé tant de Perſonnes parmesfaux Sermens , ie ne pûs pas mesine perfuader mapetite Laide par des veritez tres- constantes.
Cependantpour mefaire mieux enrager,
au commencement elle fit mine de m'aimer, elle affecta toutes les petites ma- nieres d'une Perſonnefort paſſionnée, &
quand elle me vit bien ſenſiblement tou- ché , elle me fit cent malices & mequit- ta enfin pour un autre Bergerauffi laid qu'un vieux Singe.
Dieux ! qu'un Berger vivroit content
66 LE MERCVRE
Silchangeoit auffi-toft que changeſon Amante !
Mais,helas ! que de maux nous cauſe
une Inconftante,
Quandon ne peut être inconſtant !
L'amourque ieſentois pour mapetite Ingrate , & la haine que i'avois pour mon laid Rival , me mirent dans untel
deſeſpoir , que ie quitay mes Moutons,
&laſocietédes autres Bergers. Je m'en allay comme un furieux ,errant dans lesDeserts : ie déchiray mes habits , ie me couvris defeüilles d'arbres , &enfin
icdevins tout-à-fait infensé. L'Amour alors me voyantdans une Forest en estat demourir ,voulut meſauver la vie , &
ie nesçay si cefutparpitiéouparven- geance. Il changea mapeau &monha- bit en plumesde la couteur des feüilles
qui me couvroient , ma bouche en bec ,
mes bras en cuiſſes , &ainfi du reſte de
mon Corps. Voila comme ie me trouvay Perroquet , &ie vousiureque ien'en ay point confervé de regret.
Nehaïſſant plus monRival,
GALANT. 67 Etn'aimantplus mon Inconſtante Je ſens monAme plus contente ,
D'animer pour toûjours le Corps d'un Animal ,
Que celuy d'un Berger ,quand l'A- mour le tourmente.
Mapetite Laide ne demeura pas auſſiſans châtiment , parce qu'elle n'a- voit aiméqu'en apparence, & que toute fa tendreſſe n'avoit esté que fingerie ;
l'Amour n'ayant point esté trompépar ſes grimaces , voulut punirfonhipocri fie ,comme il avoit puny mon liberti- nage. Il la changea donc en Guenuche ; &comme c'estoit unepetite Berge- re fort laide &fort malicieuse , il n'eut
pas beaucoup depeine àfaire ce changement.
Depuis cette double Metamorphose nousavons vescu, maMaiſtreſſe &moy,
dans les Solitudes & dans les Forests.
Cependant nous n'eſtions pas tout -à-fait Sauvages , & cela est si vray que nous noussommes laislé prendre aux premiers Hommes qui ſeſont preſentez. D'abord onnous mena en Portugal , où l'humeur
68 LE MERCVRE
de la Nation ne nous plaiſoit gueres,
parcequele caquet &les fingeriesn'y ont pas tant de coursqu'en France , ou i'ap- prens que nous sommes auiourd'huy.
Nous nousyplaifons ſans doute ,parce que nous avons encoreconfervéquelque choſe de nostre premier caractere. Pour moy quipendantque i'estois Berger di- fois centfleurettesfans penser àce queie difois,iedis encore eftant Perroquet cent parolesfanssçavoir ce que ie dis. Pour ma Maistreffe , qui estant Bergerecon- trefaisoit l' Amante ſansſentird'amour,
&qui de plusfaisoit tous les jours mil- temalices , estant Guenuche elle enfait
encore, & contrefait mille choſesqu'elle voit faire.
Voila , me dit le Perroquet , noſtre Histoireiusques icy : c'est àvous, Mon- fieur, ànous apprendre le reſte. Dites- nous pourquoy nous sommes entre vos mains , &àquoy nousſommes deſtinez,
puis que vous nousfaitespartirpourun SecondVoyage. Acette question i'ay ré- pondude cettemaniere.
Allez trop heureux Animaux ,
GALAN T. 69
Voicy la fin de tous vos maux :
Aprenez que l'on vous deſtine Pour aller faire les plaiſirs D'une belle & jeune Blondine ,
Quidonne mille ardens defirs,
Etqui cauſe mille ſoûpirs Amille Amans qui n'oſent dire ,
Belle, c'est pour vous qu'on ſoûpire;
Vous, Peroquet , & nuit &jour ,
Vous luy pourrez parler d'amour ;
Vous pourrez dire , ie vous aime,
Sans vous attirer ſon courroux.
Que mon bonheur ſeroit extrême
Si j'ofois parler comme vous !
Vous Guenuche, VOS fingeries LYON
Loin de luy donnerdu chagrin,
La charmeront ſoir & matin ;
ODieux ! que'mes Galanteries N'ont-elles le meſmedeſtin !
C'est ainsi , Mademoiselle , que finit la conversation que i'ay cue avecvostre Perroquet & vostre Guenuche. L'ay crû que ie devois vous enfaire part,
quevousferiez bien aiſe deſçavoir leurs
Avantures, le pourrois bien tirer de cette Hiftoire une belle Morale en faveur de
70 LE MERCVRE l'Amour; mais belas ,je n'oferoisavec vous moraliſerſur cette matiere.
De Marſeille.
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Résumé : LE PERROQUET ET LA GUENUCHE. FABLE. A MADEMOISELLE DE M**
La fable 'Le Perroquet et la Guenuche' est adressée à Mademoiselle de M**. L'auteur décrit l'arrivée d'une barque de Lisbonne transportant des singes et des perroquets. Parmi eux, il choisit un perroquet au plumage particulier et une guenuche de petite taille. Cependant, le perroquet ne parle pas français et la guenuche ne sait pas danser, étant encore vêtue à la portugaise. L'auteur espère que la demoiselle pourra leur apprendre les bonnes manières, la danse et les habits à la mode. L'auteur raconte ensuite l'histoire amoureuse du perroquet et de la guenuche. Originaires de Guinée, ils vivaient autrefois comme bergers. Le perroquet, coquet et galant, séduisait plusieurs bergères sans ressentir de véritable amour. Cupidon le punit en le rendant amoureux d'une laide et volage bergère, la guenuche. Après avoir été trompé, le perroquet tomba dans le désespoir et fut transformé en perroquet. La guenuche, punie pour son hypocrisie, fut transformée en guenuche. Les deux animaux vécurent ensuite dans les solitudes et les forêts avant d'être capturés et emmenés au Portugal, puis en France. L'auteur les destine à la demoiselle, espérant qu'ils pourront lui parler d'amour et la charmer par leurs danses et leurs grimaces.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 314-316
ENIGME.
Début :
Voicy deux Enigmes nouvelles, dont la premiere est / Je me trouve presque en tous lieux. [...]
Mots clefs :
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texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
Voicy deux Enigmes nou .
velles , dont la premiere eft
de M l'Abbé de la Coudoliere
de Marſeille ; & l'autre
de M' Rault de Rouen .
J
ENIGME . ·
E me trouve presque en tous
lieux.
Sans mon fecours l' Aftrologie,
Les Loix, l'Artde parler, & la Theologie,
GALANT. 315
Ne pourroient pas montrer leur éclat
à vos
yeux.
$ 2
Femarche quelquefois, quelquefoisje
m'arreste,
Ayantpris mon repos,je ne puis plus
marcher;
De ce mefme repos on ne peut m'arracher.
Fe faisparler plufieurs, quoy queje
foismuette.
$2
Famais je n'appris rien,
Mais malgré mon infuffisance,
Fe puis dire que la Science
Sans moy perdroitun grandfoû.
tien.
Se
Les Langues dont l'étude éloigne
l'ignorance,
L'Hébreu, le Gres & le Latin,
Dd ij
316 MERCURE
Pour rendre immortel leur deftin ,
Ont befoin de mon affistance .
$2
Quoy que je ne poffede rien,
Aux uns je procure du Bien ,
Aux autres tres-fouvent je le ravis de
même.
La lounge & le blâme éclatent par
mes traits;
D'unefcule couleur jefais pluſieurs
Portraits
De la Mitre & du Diadéme.
velles , dont la premiere eft
de M l'Abbé de la Coudoliere
de Marſeille ; & l'autre
de M' Rault de Rouen .
J
ENIGME . ·
E me trouve presque en tous
lieux.
Sans mon fecours l' Aftrologie,
Les Loix, l'Artde parler, & la Theologie,
GALANT. 315
Ne pourroient pas montrer leur éclat
à vos
yeux.
$ 2
Femarche quelquefois, quelquefoisje
m'arreste,
Ayantpris mon repos,je ne puis plus
marcher;
De ce mefme repos on ne peut m'arracher.
Fe faisparler plufieurs, quoy queje
foismuette.
$2
Famais je n'appris rien,
Mais malgré mon infuffisance,
Fe puis dire que la Science
Sans moy perdroitun grandfoû.
tien.
Se
Les Langues dont l'étude éloigne
l'ignorance,
L'Hébreu, le Gres & le Latin,
Dd ij
316 MERCURE
Pour rendre immortel leur deftin ,
Ont befoin de mon affistance .
$2
Quoy que je ne poffede rien,
Aux uns je procure du Bien ,
Aux autres tres-fouvent je le ravis de
même.
La lounge & le blâme éclatent par
mes traits;
D'unefcule couleur jefais pluſieurs
Portraits
De la Mitre & du Diadéme.
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4
p. 554-557
EXTRAIT d'une Lettre de Marseille, sur la Goute.
Début :
Mr. Sicard, Medecin à Marseille, a découvert depuis quelques années un remede contre [...]
Mots clefs :
Goutte, Remède
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre de Marseille, sur la Goute.
EXTRAIT d'une Lettre de Marseille;
fur la Goute.
M
R. Sicard , Medecin à Marſeille , a décou
vert depuis quelques années un remede contre
la Goute ; il en a fait ici diverſes experiences
fur differens malades qui en ont été promtement
foulagés & infenfiblement gueris ; les uns plutôt,
les autres un peu plus tard. Ceux qui font gouteux
depuis long-tems , font quelquefois obligés
d'ufer deux ou trois fois de ce remede ; mais une
Goute recente eft pour l'ordinaire arrêtée &
guerie à la premiere application du topique. C'eſt
une eau de couleur de paille , qui fe conferve
long- tems , pourvû qu'on ait foin de tenir la
bouteille bien bouchée ; on en baffine la partie
fouffrante , & c'eft fur-tout dans le moment des
plus vives douleurs qu'il en faut faire l'application .
Cette eau ne détruit pas les nodofités , mais elle
fortifie la partie malade , & la defobftruë ; elle diwife
, elle fubtilife , & diffout la matiere gouteufe,
fans crainte de la repercuter dans la maffè du fang,
ni de procurer au malade cette Goute anomale ou
irreguliere , appellée en France Goute remontée ;
bien plus , par l'experience de plufieurs Gouteux
qui ont été gueris ici , on s'eft apperçû que l'application
de cette eau , fait ceffer les fymptomes.
qui fuivent ordinairement la Goute , comme la.
difficulté de refpirer , les douleurs de tête , la rougeur
du vifage , la fievre même , quelque violente
qu'elle foit , & cela fans faignée , fans purgatif,
& fans autre remede , moyennant pourtant
un régime de vie frugale.
Cette découverte a donné lieu à l'illuftre M.
Didier , Profeffeur Royal de Chymie , en la Faculté
de Medecine à Montpellier , de faire foûteniz
M. AR S. 1730 .
SS.S
air une Theſe pleine d'efprit & d'érudition , ou
après avoir parlé des mauvais effets de la faignée,
des purgatifs , des dieuretiques & des fudorifiques,
il fe retranche à conclure qu'il n'y a que le feul
topique qui peut être utile dans cette cruelle maladie
, & qu'il faut chercher un topique Hitomtrique
; c'eft ce que M. Sicard a cherché pendant.
long-tems avec grand foin , & ce qu'il fe flatte
enfin d'avoir heureuſement trouvé. Il n'y a qu'une
feule forte de malade qui ait reſiſté à l'efficacité
de fon remede , ce font ces Gouteux qui ont
les jambes enflées & hidropiques; l'hidropifie arrê
te l'effet du remede , & l'empêche de penetrer jufques
dans le centre du mal.
une écuelle
2. pour
Pour fe fervir de ce topique , il faut prendre
un linge ufé , le plier en double , & l'étendre fur
la partie fouffrante ; on l'attache avec un fil , one
verfe enfuite un peu d'eau Antipodragique dans
la faire tiedir, on y trempe une
petite éponge pour baigner le linge étendu fur la
partie malade , & dès que le linge eft prefque fec,
on le rebaigne comme auparavant , en continuant
ainfi jufqu'à la ceffation de la douleur. Cette fomentation
doit être continuée pendant tout le jour
& une partie de la nuit , excepté les heures du repos
jufqu'à une parfaite guerifon..
Si ce remede réuffit , ce fera une vraye trouvaille
pour le Public ; car l'eau en queftion n'eft
pas fort chere , & même M. Sicard qui eft trèsbon
Chymifte , s'en remettra à la difcretion des
malades.
fur la Goute.
M
R. Sicard , Medecin à Marſeille , a décou
vert depuis quelques années un remede contre
la Goute ; il en a fait ici diverſes experiences
fur differens malades qui en ont été promtement
foulagés & infenfiblement gueris ; les uns plutôt,
les autres un peu plus tard. Ceux qui font gouteux
depuis long-tems , font quelquefois obligés
d'ufer deux ou trois fois de ce remede ; mais une
Goute recente eft pour l'ordinaire arrêtée &
guerie à la premiere application du topique. C'eſt
une eau de couleur de paille , qui fe conferve
long- tems , pourvû qu'on ait foin de tenir la
bouteille bien bouchée ; on en baffine la partie
fouffrante , & c'eft fur-tout dans le moment des
plus vives douleurs qu'il en faut faire l'application .
Cette eau ne détruit pas les nodofités , mais elle
fortifie la partie malade , & la defobftruë ; elle diwife
, elle fubtilife , & diffout la matiere gouteufe,
fans crainte de la repercuter dans la maffè du fang,
ni de procurer au malade cette Goute anomale ou
irreguliere , appellée en France Goute remontée ;
bien plus , par l'experience de plufieurs Gouteux
qui ont été gueris ici , on s'eft apperçû que l'application
de cette eau , fait ceffer les fymptomes.
qui fuivent ordinairement la Goute , comme la.
difficulté de refpirer , les douleurs de tête , la rougeur
du vifage , la fievre même , quelque violente
qu'elle foit , & cela fans faignée , fans purgatif,
& fans autre remede , moyennant pourtant
un régime de vie frugale.
Cette découverte a donné lieu à l'illuftre M.
Didier , Profeffeur Royal de Chymie , en la Faculté
de Medecine à Montpellier , de faire foûteniz
M. AR S. 1730 .
SS.S
air une Theſe pleine d'efprit & d'érudition , ou
après avoir parlé des mauvais effets de la faignée,
des purgatifs , des dieuretiques & des fudorifiques,
il fe retranche à conclure qu'il n'y a que le feul
topique qui peut être utile dans cette cruelle maladie
, & qu'il faut chercher un topique Hitomtrique
; c'eft ce que M. Sicard a cherché pendant.
long-tems avec grand foin , & ce qu'il fe flatte
enfin d'avoir heureuſement trouvé. Il n'y a qu'une
feule forte de malade qui ait reſiſté à l'efficacité
de fon remede , ce font ces Gouteux qui ont
les jambes enflées & hidropiques; l'hidropifie arrê
te l'effet du remede , & l'empêche de penetrer jufques
dans le centre du mal.
une écuelle
2. pour
Pour fe fervir de ce topique , il faut prendre
un linge ufé , le plier en double , & l'étendre fur
la partie fouffrante ; on l'attache avec un fil , one
verfe enfuite un peu d'eau Antipodragique dans
la faire tiedir, on y trempe une
petite éponge pour baigner le linge étendu fur la
partie malade , & dès que le linge eft prefque fec,
on le rebaigne comme auparavant , en continuant
ainfi jufqu'à la ceffation de la douleur. Cette fomentation
doit être continuée pendant tout le jour
& une partie de la nuit , excepté les heures du repos
jufqu'à une parfaite guerifon..
Si ce remede réuffit , ce fera une vraye trouvaille
pour le Public ; car l'eau en queftion n'eft
pas fort chere , & même M. Sicard qui eft trèsbon
Chymifte , s'en remettra à la difcretion des
malades.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre de Marseille, sur la Goute.
Le médecin marseillais R. Sicard a découvert un remède contre la goutte, une eau de couleur paille, efficace pour soulager et guérir rapidement les douleurs, notamment lors des crises aiguës. Ce remède fortifie la partie malade, dissout et élimine la matière goutteuse sans la répandre dans le sang. Il supprime également les symptômes associés comme la difficulté à respirer, les maux de tête, la rougeur du visage et la fièvre, sans nécessiter de jeûne ou de purgatif, à condition de suivre un régime frugal. L'illustre M. Didier, professeur de chimie à Montpellier, avait conclu en 1730 que seul un topique humoristique était utile contre la goutte. Sicard a trouvé ce topique après des recherches approfondies, bien que son efficacité soit limitée chez les goutteux avec des jambes enflées et hydropiques. L'application du remède consiste à imbiber un linge plié et appliqué sur la partie douloureuse avec une éponge trempée dans l'eau tiédie, en continu jusqu'à la cessation de la douleur. Ce remède, modéré en coût et disponible grâce à Sicard, pourrait être une véritable trouvaille pour le public.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 1829-1830
EXTRAIT d'une Lettre de Marseille du 24 Juillet, sur une Machine singuliere & utile.
Début :
Il y a ici une Eglise assez jolie, où s'assemblent les Pénitens de la Rédemption des Esclaves [...]
Mots clefs :
Machine, Voûte, Machiniste
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre de Marseille du 24 Juillet, sur une Machine singuliere & utile.
EXTRAIT d'une Lettre de Marseille du
24 Juillet ,fur une Machinefinguliere
& utile .
a ici une Eglife affez jolie , où s'affem-
I blent les Pénitens de la Rédemption des Efclaves
;
teur ,
>
cette Eglife a 17 toifes de longueur , & 4
toifes & demi de largeur dans oeuvre La voute
eft foutenue par deux murailles , l'une de 8 toifes
& demi , & l'autre de 7 toifes & demi de haucette
inégalité vient de l'inégalité du terrain.
La pouffée de la voute demandoit toute
l'épaiffeur du mur mais on n'avoit pas donné
à la terre toute la pouffée qui lui étoit neceffaire
pour l'empêcher de s'étendre ; cette inégalité de
terrain , & ce défaut de pouffée avoit caufé un
élargiffement de dix - huit pouces par le haut
& la voute s'étoit abaiffée de huit ou dix pieds
elle s'étoit même fendue par le milieu dans toute
fa longueur , tout l'édifice menaçoit ruine , on
craignoit qu'il ne vint à crouler tout à coup , on
fe difpofoit à le démolir entierement pour le reprendre
dès les fondemens. Un Machiniſte nommé
Pierre Veran de Vaux , s'offrit au commencement
>
18 30 MERCURE DE FRANCE
cement de cette année , de remettre l'Eglife en
fon premier état , de rapprocher les murailles, &
de relever la voute , on lui promit quinze cent
livres , s'il venoit à bout de fon deffein , il entreprit
ce grand ouvrage quinze jours avant Pâques
, il ne fe fervit que de fimples Leviers de
bois , de plufieurs cordages , & d'un Cabeſtan
la voute à été relevée , les murailles fe font approchées
, les fentes ont difparu , l'Eglife eft en
meilleur état qu'auparavant , & à préſent on y
fait l'Office Divin , au grand étonnement de
tous ceux qui avoient vû il y a quelques mois en
quel état étoit pour lors cette Eglife.
24 Juillet ,fur une Machinefinguliere
& utile .
a ici une Eglife affez jolie , où s'affem-
I blent les Pénitens de la Rédemption des Efclaves
;
teur ,
>
cette Eglife a 17 toifes de longueur , & 4
toifes & demi de largeur dans oeuvre La voute
eft foutenue par deux murailles , l'une de 8 toifes
& demi , & l'autre de 7 toifes & demi de haucette
inégalité vient de l'inégalité du terrain.
La pouffée de la voute demandoit toute
l'épaiffeur du mur mais on n'avoit pas donné
à la terre toute la pouffée qui lui étoit neceffaire
pour l'empêcher de s'étendre ; cette inégalité de
terrain , & ce défaut de pouffée avoit caufé un
élargiffement de dix - huit pouces par le haut
& la voute s'étoit abaiffée de huit ou dix pieds
elle s'étoit même fendue par le milieu dans toute
fa longueur , tout l'édifice menaçoit ruine , on
craignoit qu'il ne vint à crouler tout à coup , on
fe difpofoit à le démolir entierement pour le reprendre
dès les fondemens. Un Machiniſte nommé
Pierre Veran de Vaux , s'offrit au commencement
>
18 30 MERCURE DE FRANCE
cement de cette année , de remettre l'Eglife en
fon premier état , de rapprocher les murailles, &
de relever la voute , on lui promit quinze cent
livres , s'il venoit à bout de fon deffein , il entreprit
ce grand ouvrage quinze jours avant Pâques
, il ne fe fervit que de fimples Leviers de
bois , de plufieurs cordages , & d'un Cabeſtan
la voute à été relevée , les murailles fe font approchées
, les fentes ont difparu , l'Eglife eft en
meilleur état qu'auparavant , & à préſent on y
fait l'Office Divin , au grand étonnement de
tous ceux qui avoient vû il y a quelques mois en
quel état étoit pour lors cette Eglife.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre de Marseille du 24 Juillet, sur une Machine singuliere & utile.
Une lettre de Marseille datée du 24 juillet décrit une église fréquentée par les Pénitents de la Rédemption des Esclaves. L'église mesure 17 toises de longueur et 4 toises et demi de largeur. Sa voûte, soutenue par deux murailles inégales en hauteur, a subi des dommages en raison de l'inégalité du terrain et d'un manque de pression sur la terre. Ces problèmes ont causé un élargissement et un abaissement de la voûte, ainsi qu'une fissure sur toute sa longueur, menaçant l'effondrement de l'édifice. Pierre Veran de Vaux, un machiniste, a proposé de restaurer l'église au début de l'année. Quinze jours avant Pâques, il a utilisé des leviers de bois, des cordages et un cabestan pour relever la voûte, rapprocher les murailles et réparer les fissures. L'église est désormais en meilleur état qu'auparavant, permettant la reprise des offices divins, au grand étonnement de tous.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 1873-1882
LETTRE écrite de Marseille, le 1. Juillet 1731. A M. de la R. au sujet des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
Début :
Je n'ay pû lire sans étonnement, Monsieur, les Eloges avec lesquels [...]
Mots clefs :
Comédie, Éloges, Molière, Nourriture des passions, Assemblage des ruses, Obscènes, Profanes, Anathèmes, Tolérance, Conciles
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Marseille, le 1. Juillet 1731. A M. de la R. au sujet des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
LETTRE écrite de Marseille , le 1.
Juillet 1731. A M. de la R. au sujet
des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
E n'ay pû lire sans étonnement ,
Monsieur , les Eloges avec lesquels
vous annoncés dans votre Mercure du
mois de May dernier les Discours du P.
le Brun sur la Comédie. Si le P.. le Brun
a refuté si solidement la Lettre du P.
Caffaro, qui a justifié les Comédies telles
qu'on les représente depuis Moliere , si
le P. le Brun a raison de dépeindre nôtre
>> Théatre comme l'Ecole de l'impureté
» la nourriture des passions , l'assem
» blage des ruses du Demon pour les re-
» veiller , ou les yeux sont environnés
» d'objets seducteurs , les oreilles ouvertes
à des Discours souvent obscénes .
et toujours prophanes , qui infectent »
9
» le
1874 MERCURE DE FRANCE
» le coeur , et l'esprit , pourquoy , homme
pieux et rigoriste , comme vous le
paroissés dans cet Extrait , nous donnezvous
dans tous vos Mercures des Analises
de toutes les pieces de Théatre , si vives
, et si expressives , que vous engagez
la plupart de vos Lecteurs à aller partieiper
à ces Spectacles que le P. le Brun
soutient si pernicieux et si criminels ?
une personne d'esprit doit toujours parler
, et agir par principes. La Comédie
telle qu'on la représente depuis plus de
30. ans sur nôtre Théatre est un mal en
elle-même , ou elle n'en est pas un . Si elleest
encore un mal en elle-même , comme
elle étoit lorsque les Peres de l'Eglise et
les Conciles Pont condamnée avec tant
sagesse , non seulement les Comédiens
meritent toujours les Anathémes que
PEglise a autrefois prononcés contre eux ,
mais la conduite de quelques Rigoristes
qui refusent d'absoudre tous ceux qui assistent
à la Comédie est reguliere , et doit
absolument être suivie par tous les Directeurs.
La tolerance du P. le Brun qui n'ose:
condamner ceux qui y assistent , est donc
contraire aux principes , puisqu'il n'a
pu ignorer qu'une chose qui est crimi
nelle en elle - même , ne doit jamais être
tolerée et l'on seroit mieux fondé à lu
de
demander
A O UST. 1731. 1.877
demander une retractation , s'il vivoit
encore , qu'on ne l'a été à en exiger
une du P. Caffaro , qui après avoir éta
bli et démontré , par des principes , et
par des faits incontestables , que nôtre
Comédie n'est pas un mal en elle - même
a conclu qu'on y pouvoit assister très - innocemment.
Si la Comédie épurée et châtiée , comme
elle est sur nôtre Théatre , n'est plus
un mal en elle -même , ceux qui la représentent
ne meritent plus les foudres de
PEglise , et ils sont en droit depuis longtems
de faire à ce sujet de très-humbles
remontrances à ceux de nos Evêques qui
continuent à faire prononcer contre eux
des Anathémes dans les Eglises Paroissia
les de leurs Diocèses.
Le P. Caffaro n'a entrepris de justifier
nos Comédies qu'en faisant un juste pa
rallele entre les anciennes et celles de notre
tems. Il a mis en fait que les Peres et
les Conciles n'ont prononcé des Anathémes
contre les Comédies , que parce
que ce n'étoient de leur tems que des
assemblées d'impudicité , où l'on n'approuvoit
que ce qui étoit vicieux , où
Les Acteurs jouoient avec les gestes les
plus honteux , où les hommes et les femes
méprisoient toutes les regles de la
pudeus,
1876 MERCURE DE FRANCE
pudeur, et où l'on prononçoit souvent des
blasphemes contre le saint Nom de Dieu :
ce qu'il a prouvé par les témoignages
de Tertulien , de Salvien , de Lactance
de S. Cyprien , et de S. Chrisostome. It a
remarqué qu'à mesure que le Théatre
s'est purgé de ses ordures , et de ses impietés
, les Peres de l'Eglise l'ont traité
avec plus d'indulgence que S. Thomas
dans la 2. partie de sa Somme , art. 2 .
quest. 168. soutient que dans les jeux
et les divertissemens , lorsqu'ils sont modérez
, non seulement il n'y croît point
de mal , mais même qu'il y trouve quelque
bien , parcequ'il est necessaire
l'homme relâche quelquefois son esprit
trop attaché aux affaires : que ce Pere
ajoute que ce délassement de l'esprit ne
se fait que par des paroles ou des actions
divertissantes ou ingenieuses. Ce que j'ai
trouvé en effet dans sa conclusion , où il
dit précisement : Sed ista remissio anime à
rebus agendis fit per ludicra verba et facta ;
'd'où ce Docteur de l'Eglise , qui dans un
autre endroit justifie l'emploi des Comédiens
, conclut que la Comédie , qui ne
consiste qu'en de pareils divertissemens
ne sçauroit passer pour criminelle , pourvû
qu ' lle soit renferniée dans les bornes
de la pudeur , et de la moderation : que
que
A O UST . 1731. 1877
S.Bonaventure , Dist. 16. Dub . 13. dit
formellement que les Spectacles sons
bons , et permis , s'ils s'ont accompagnés
des précautions nécessaires : Doctrine
qu'il avoit apprise de son Maître Albert
le Grand , qui l'a publié hautement
dans ses ouvrages : que S. Antonin decide
la même chose que S. François de
Sales , ce grand Directeur des ames devotes
ne deffendoit point les Comédies , quofqu'elles
fussent très - communes de son
tems : et que l'illustre S. Charles Borromée
les permit dans son Diocèse par une
Ordonnance de 1583. à condition qu'elles
seroient examinées et approuvées par
son grand Vicaire , afin qu'il ne s'y glissat
rien de deshonnête. A quoy il auroit
pû ajouter que la plupart des Casuistes
modernes les plus éclairés ont soutenu
que la Comédie étoit permise , entre
autres les Cardinaux de Turrecremata ,
et Cajetan , Jean Viguier , Medina , Silvester
, Comitolius , Henriques , Bonacina
, Tabiena : et que les Censeurs Rcmains
ont condamné dans l'Histoire Ecelesiastique
du P. Alexandre cette proposition
Comedia sunt illicita.
Le P. Caffaro a mis aussi en fait que
la Comédie étoit à present si châtiée et
si épurée sur le Théatre François , qu'il
n'y
1878 MERCURE DE FRANCE
n'y avoit rien que les oreilles les plus
chastes ne pussent entendre , et qu'elle
étoit même capable de corriger beaucoup
de vices et d'abus dans la conduite des
hommes.
*
Le P. le Brun ne pouvoit refuter solidement
la Lettre du P. Caffaro qu'en démontrant
la fausseté de tous ces faits .
et en prouvant que nos Comédies sont
encore aussi dissolues , et aussi impies ,
que celles qu'on représentoit dans les
tems que les Peres de l'Eglise les ont anathematisées.
L'a- t- il fait ? l'a- t-il pû faire?
je vous en laisse juge vous - même , et
toutes les personnes éclairées qui se trou
vent dans le Public.
Le P. le Brun , que j'ai connu particu
fierement , avoit beaucoup de zele , et de
pieté. Il a professé avec succès la Théologie
positive à S. Magloire , où il parloit
facilement et avec beaucoup de netteté ;
mais il ne s'étoit pas accoutumé à raisonner
par principes : et il n'avoit jamais étudié
la bonne Phisique , comme il n'a que
trop paru dans le Traité qu'il composa
sur la baguette divinatoire , au sujet de
l'Avanture du fameux Jacques Aimard ,
arrivée à Lyon en 1692. qu'il ne put
expliquer qu'en l'attribuant au pouvoir
duDemon . C'est cet ouvrage dont on nous
promer
A O UST. 1731. 1879
promet une seconde Edition sous le titre
de Traité du Discernement des effets naturels
d'avec ceux qui ne le sont pas.
Pour en juger sçavamment il faut lire la
Phisique occulte de l'Abbé de Vallemont,
qui raisonne sur des Principes bien diffe
rens , et qui connoissant les ressorts se
crets de la nature , et ses agens invisibles
, n'a pas eu besoin du secours du
Prince des ténebres pour expliquer cet
évenement , non plus qu'une infinité
d'autres des plus extraordinaires.
Mais pour vous convaincre entierement
du peu de justesse des invectives
du P. le Brun contre notre Théatre
qu'il me soit permis , Monsieur , d'ajoûter
encore quelques Reflexions sur ce su→
jet , qui est d'autant plus important , que
ce Traité sur la Comédie , qui vous a
paru si solide , pourroit causer du scrupule
, et de l'embarras à plusieurs de nos
Directeurs , qui croyant comme l'auteur ,
que notre Comédie est une des plus pernicieuses
inventions du Demon , pourroient
ne pas croire comme lui qu'on la
puisse tolerer , et permettre aux Chré
tiens d'y assister .
Quoy de plus grand ! quoy de plus noble
que tous les sentimens qui regnent
dans les Tragedies de Corneille , et ide
Racine
1880 MERCURE DE FRANCE
›
Racine , où l'on voit toujours la vertu
applaudie , et triomphante ? toutes les
Pieces de Moliere , et des autres Auteurs
modernes , ont- elles d'autre but que de
combattre les vices , en les représentant
aux yeux des Spectateurs avec tous les
traits capables de les rendre ridicules , et
odieux ; mais , disent le P.le Brun et quelques
autres Rigoristes , il n'y a point de
Tragedie , ni de Comédie où il n'y ait
quelque intrigue d'Amour , et où l'ambition
, la jalousie , la vangeance , ou la harne
ne paroissent dans tout leur jour. Cette
objection se détruit en remarquant
que toutes ces passions ne sont étalées sur
notre Théatre que pour les rendre odieuses
: et que quand elles seroient capables
de faire impression dans quelque coeur
foible , il faut bien distinguer les choses
qui peuvent par hazard exciter les passions
, d'avec celles qui naturellement
les excitent en effet. Les dernieres sont
criminelles , et déffendues : mais pour
les premieres , il faudroit fuir dans les
deserts pour les éviter. On ne sçauroit
faire un pas , entrer dans les lieux les
plus saints , lire un Livre d'Histoire ,
enfin vivre dans le monde , sans rencontrer
mille objets capables d'exciter les
passions. Faut- il qu'une belle femme
'aille
A O UST. 1731. 1881
n'aille jamais aux promenades , ni même
à l'Eglise que les personnes de la Cour
les Prelats , et les personnes constituées
en dignité quittent un éclat qui leur est
à présent de bienséance , et même de necessité
? et que personne ne porte d'épée,
à cause des mauvais effets que tout cela
peut produire ? cette pensée seroit ridicnle.
Faut-il , disoit le sage Licurgus ,
arracher les vignes , parcequ'il se trouve
des personnes qui boivent trop de leur
jus ? faut- il aussi deffendre la Comédie
qui sert aux hommes d'un honnête divertissement
, parce qu'il y a quelques
personnes qui ne la peuvent voir sans
ressentir interieurement les passions qu'on
y représente ?
On doit donc conclure que la Comédie
, avec les conditions marquées par
S. Charles , et par les autres Docteurs
que nous avons citez , est de sa nature
indifferente , et même a son utilité : que
les personnes trop susceptibles , à qui
elle est dangereuse , la doivent éviter :
et que les autres ne se la doivent permettre
que comme un plaisir innocent pour
se délasser de leurs occupations.
Enfin une derniere raison sans replique
contre les invectives du P. le Brun
c'est que dans un Royaume aussi Chrétien
que
882 MERCURE DE FRANCE
que la France , dans une Ville aussi bien
policée que Paris , sous les yeux de differens
Evêques recommandables
par leurs
lumieres et par leur zele , de tant de Magistrats
si graves et si vertueux , et
en particulier
de celui qui préside à la
Police , dont la pieté est aussi connue
que
l'étendue
de ses lumieres , la Comédie
établie par Lettres Patentes dès l'an 1402 .
et autorisée par Arrêts du Parlement
, ne seroit pas entretenue
aux dépens du Roy ,
et soutenue comme un établissement
necessaire
au bien public , et que leurs Majestés
si récommandables
par leur religion
, et
par leur vertu exemplaire
, ne la feroient
pas représenter
devant elles fi elle
étoit regardée
comme une pernicieuse
invention
du demon . Je suis toujours
Monsieur
, avec toute l'estime possible ,
Votre très humble & c. P. D. L. Ì.
Juillet 1731. A M. de la R. au sujet
des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
E n'ay pû lire sans étonnement ,
Monsieur , les Eloges avec lesquels
vous annoncés dans votre Mercure du
mois de May dernier les Discours du P.
le Brun sur la Comédie. Si le P.. le Brun
a refuté si solidement la Lettre du P.
Caffaro, qui a justifié les Comédies telles
qu'on les représente depuis Moliere , si
le P. le Brun a raison de dépeindre nôtre
>> Théatre comme l'Ecole de l'impureté
» la nourriture des passions , l'assem
» blage des ruses du Demon pour les re-
» veiller , ou les yeux sont environnés
» d'objets seducteurs , les oreilles ouvertes
à des Discours souvent obscénes .
et toujours prophanes , qui infectent »
9
» le
1874 MERCURE DE FRANCE
» le coeur , et l'esprit , pourquoy , homme
pieux et rigoriste , comme vous le
paroissés dans cet Extrait , nous donnezvous
dans tous vos Mercures des Analises
de toutes les pieces de Théatre , si vives
, et si expressives , que vous engagez
la plupart de vos Lecteurs à aller partieiper
à ces Spectacles que le P. le Brun
soutient si pernicieux et si criminels ?
une personne d'esprit doit toujours parler
, et agir par principes. La Comédie
telle qu'on la représente depuis plus de
30. ans sur nôtre Théatre est un mal en
elle-même , ou elle n'en est pas un . Si elleest
encore un mal en elle-même , comme
elle étoit lorsque les Peres de l'Eglise et
les Conciles Pont condamnée avec tant
sagesse , non seulement les Comédiens
meritent toujours les Anathémes que
PEglise a autrefois prononcés contre eux ,
mais la conduite de quelques Rigoristes
qui refusent d'absoudre tous ceux qui assistent
à la Comédie est reguliere , et doit
absolument être suivie par tous les Directeurs.
La tolerance du P. le Brun qui n'ose:
condamner ceux qui y assistent , est donc
contraire aux principes , puisqu'il n'a
pu ignorer qu'une chose qui est crimi
nelle en elle - même , ne doit jamais être
tolerée et l'on seroit mieux fondé à lu
de
demander
A O UST. 1731. 1.877
demander une retractation , s'il vivoit
encore , qu'on ne l'a été à en exiger
une du P. Caffaro , qui après avoir éta
bli et démontré , par des principes , et
par des faits incontestables , que nôtre
Comédie n'est pas un mal en elle - même
a conclu qu'on y pouvoit assister très - innocemment.
Si la Comédie épurée et châtiée , comme
elle est sur nôtre Théatre , n'est plus
un mal en elle -même , ceux qui la représentent
ne meritent plus les foudres de
PEglise , et ils sont en droit depuis longtems
de faire à ce sujet de très-humbles
remontrances à ceux de nos Evêques qui
continuent à faire prononcer contre eux
des Anathémes dans les Eglises Paroissia
les de leurs Diocèses.
Le P. Caffaro n'a entrepris de justifier
nos Comédies qu'en faisant un juste pa
rallele entre les anciennes et celles de notre
tems. Il a mis en fait que les Peres et
les Conciles n'ont prononcé des Anathémes
contre les Comédies , que parce
que ce n'étoient de leur tems que des
assemblées d'impudicité , où l'on n'approuvoit
que ce qui étoit vicieux , où
Les Acteurs jouoient avec les gestes les
plus honteux , où les hommes et les femes
méprisoient toutes les regles de la
pudeus,
1876 MERCURE DE FRANCE
pudeur, et où l'on prononçoit souvent des
blasphemes contre le saint Nom de Dieu :
ce qu'il a prouvé par les témoignages
de Tertulien , de Salvien , de Lactance
de S. Cyprien , et de S. Chrisostome. It a
remarqué qu'à mesure que le Théatre
s'est purgé de ses ordures , et de ses impietés
, les Peres de l'Eglise l'ont traité
avec plus d'indulgence que S. Thomas
dans la 2. partie de sa Somme , art. 2 .
quest. 168. soutient que dans les jeux
et les divertissemens , lorsqu'ils sont modérez
, non seulement il n'y croît point
de mal , mais même qu'il y trouve quelque
bien , parcequ'il est necessaire
l'homme relâche quelquefois son esprit
trop attaché aux affaires : que ce Pere
ajoute que ce délassement de l'esprit ne
se fait que par des paroles ou des actions
divertissantes ou ingenieuses. Ce que j'ai
trouvé en effet dans sa conclusion , où il
dit précisement : Sed ista remissio anime à
rebus agendis fit per ludicra verba et facta ;
'd'où ce Docteur de l'Eglise , qui dans un
autre endroit justifie l'emploi des Comédiens
, conclut que la Comédie , qui ne
consiste qu'en de pareils divertissemens
ne sçauroit passer pour criminelle , pourvû
qu ' lle soit renferniée dans les bornes
de la pudeur , et de la moderation : que
que
A O UST . 1731. 1877
S.Bonaventure , Dist. 16. Dub . 13. dit
formellement que les Spectacles sons
bons , et permis , s'ils s'ont accompagnés
des précautions nécessaires : Doctrine
qu'il avoit apprise de son Maître Albert
le Grand , qui l'a publié hautement
dans ses ouvrages : que S. Antonin decide
la même chose que S. François de
Sales , ce grand Directeur des ames devotes
ne deffendoit point les Comédies , quofqu'elles
fussent très - communes de son
tems : et que l'illustre S. Charles Borromée
les permit dans son Diocèse par une
Ordonnance de 1583. à condition qu'elles
seroient examinées et approuvées par
son grand Vicaire , afin qu'il ne s'y glissat
rien de deshonnête. A quoy il auroit
pû ajouter que la plupart des Casuistes
modernes les plus éclairés ont soutenu
que la Comédie étoit permise , entre
autres les Cardinaux de Turrecremata ,
et Cajetan , Jean Viguier , Medina , Silvester
, Comitolius , Henriques , Bonacina
, Tabiena : et que les Censeurs Rcmains
ont condamné dans l'Histoire Ecelesiastique
du P. Alexandre cette proposition
Comedia sunt illicita.
Le P. Caffaro a mis aussi en fait que
la Comédie étoit à present si châtiée et
si épurée sur le Théatre François , qu'il
n'y
1878 MERCURE DE FRANCE
n'y avoit rien que les oreilles les plus
chastes ne pussent entendre , et qu'elle
étoit même capable de corriger beaucoup
de vices et d'abus dans la conduite des
hommes.
*
Le P. le Brun ne pouvoit refuter solidement
la Lettre du P. Caffaro qu'en démontrant
la fausseté de tous ces faits .
et en prouvant que nos Comédies sont
encore aussi dissolues , et aussi impies ,
que celles qu'on représentoit dans les
tems que les Peres de l'Eglise les ont anathematisées.
L'a- t- il fait ? l'a- t-il pû faire?
je vous en laisse juge vous - même , et
toutes les personnes éclairées qui se trou
vent dans le Public.
Le P. le Brun , que j'ai connu particu
fierement , avoit beaucoup de zele , et de
pieté. Il a professé avec succès la Théologie
positive à S. Magloire , où il parloit
facilement et avec beaucoup de netteté ;
mais il ne s'étoit pas accoutumé à raisonner
par principes : et il n'avoit jamais étudié
la bonne Phisique , comme il n'a que
trop paru dans le Traité qu'il composa
sur la baguette divinatoire , au sujet de
l'Avanture du fameux Jacques Aimard ,
arrivée à Lyon en 1692. qu'il ne put
expliquer qu'en l'attribuant au pouvoir
duDemon . C'est cet ouvrage dont on nous
promer
A O UST. 1731. 1879
promet une seconde Edition sous le titre
de Traité du Discernement des effets naturels
d'avec ceux qui ne le sont pas.
Pour en juger sçavamment il faut lire la
Phisique occulte de l'Abbé de Vallemont,
qui raisonne sur des Principes bien diffe
rens , et qui connoissant les ressorts se
crets de la nature , et ses agens invisibles
, n'a pas eu besoin du secours du
Prince des ténebres pour expliquer cet
évenement , non plus qu'une infinité
d'autres des plus extraordinaires.
Mais pour vous convaincre entierement
du peu de justesse des invectives
du P. le Brun contre notre Théatre
qu'il me soit permis , Monsieur , d'ajoûter
encore quelques Reflexions sur ce su→
jet , qui est d'autant plus important , que
ce Traité sur la Comédie , qui vous a
paru si solide , pourroit causer du scrupule
, et de l'embarras à plusieurs de nos
Directeurs , qui croyant comme l'auteur ,
que notre Comédie est une des plus pernicieuses
inventions du Demon , pourroient
ne pas croire comme lui qu'on la
puisse tolerer , et permettre aux Chré
tiens d'y assister .
Quoy de plus grand ! quoy de plus noble
que tous les sentimens qui regnent
dans les Tragedies de Corneille , et ide
Racine
1880 MERCURE DE FRANCE
›
Racine , où l'on voit toujours la vertu
applaudie , et triomphante ? toutes les
Pieces de Moliere , et des autres Auteurs
modernes , ont- elles d'autre but que de
combattre les vices , en les représentant
aux yeux des Spectateurs avec tous les
traits capables de les rendre ridicules , et
odieux ; mais , disent le P.le Brun et quelques
autres Rigoristes , il n'y a point de
Tragedie , ni de Comédie où il n'y ait
quelque intrigue d'Amour , et où l'ambition
, la jalousie , la vangeance , ou la harne
ne paroissent dans tout leur jour. Cette
objection se détruit en remarquant
que toutes ces passions ne sont étalées sur
notre Théatre que pour les rendre odieuses
: et que quand elles seroient capables
de faire impression dans quelque coeur
foible , il faut bien distinguer les choses
qui peuvent par hazard exciter les passions
, d'avec celles qui naturellement
les excitent en effet. Les dernieres sont
criminelles , et déffendues : mais pour
les premieres , il faudroit fuir dans les
deserts pour les éviter. On ne sçauroit
faire un pas , entrer dans les lieux les
plus saints , lire un Livre d'Histoire ,
enfin vivre dans le monde , sans rencontrer
mille objets capables d'exciter les
passions. Faut- il qu'une belle femme
'aille
A O UST. 1731. 1881
n'aille jamais aux promenades , ni même
à l'Eglise que les personnes de la Cour
les Prelats , et les personnes constituées
en dignité quittent un éclat qui leur est
à présent de bienséance , et même de necessité
? et que personne ne porte d'épée,
à cause des mauvais effets que tout cela
peut produire ? cette pensée seroit ridicnle.
Faut-il , disoit le sage Licurgus ,
arracher les vignes , parcequ'il se trouve
des personnes qui boivent trop de leur
jus ? faut- il aussi deffendre la Comédie
qui sert aux hommes d'un honnête divertissement
, parce qu'il y a quelques
personnes qui ne la peuvent voir sans
ressentir interieurement les passions qu'on
y représente ?
On doit donc conclure que la Comédie
, avec les conditions marquées par
S. Charles , et par les autres Docteurs
que nous avons citez , est de sa nature
indifferente , et même a son utilité : que
les personnes trop susceptibles , à qui
elle est dangereuse , la doivent éviter :
et que les autres ne se la doivent permettre
que comme un plaisir innocent pour
se délasser de leurs occupations.
Enfin une derniere raison sans replique
contre les invectives du P. le Brun
c'est que dans un Royaume aussi Chrétien
que
882 MERCURE DE FRANCE
que la France , dans une Ville aussi bien
policée que Paris , sous les yeux de differens
Evêques recommandables
par leurs
lumieres et par leur zele , de tant de Magistrats
si graves et si vertueux , et
en particulier
de celui qui préside à la
Police , dont la pieté est aussi connue
que
l'étendue
de ses lumieres , la Comédie
établie par Lettres Patentes dès l'an 1402 .
et autorisée par Arrêts du Parlement
, ne seroit pas entretenue
aux dépens du Roy ,
et soutenue comme un établissement
necessaire
au bien public , et que leurs Majestés
si récommandables
par leur religion
, et
par leur vertu exemplaire
, ne la feroient
pas représenter
devant elles fi elle
étoit regardée
comme une pernicieuse
invention
du demon . Je suis toujours
Monsieur
, avec toute l'estime possible ,
Votre très humble & c. P. D. L. Ì.
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Résumé : LETTRE écrite de Marseille, le 1. Juillet 1731. A M. de la R. au sujet des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
La lettre datée du 1er juillet 1731 critique les éloges du Père le Brun sur la comédie, publiés dans le Mercure de mai précédent. L'auteur exprime son étonnement face à la contradiction entre les discours rigoristes du Père le Brun et les analyses détaillées des pièces de théâtre dans le Mercure, qui encouragent les lecteurs à assister à des spectacles que le Père le Brun considère comme pernicieux. L'auteur soutient que la comédie, telle qu'elle est représentée depuis Molière, n'est pas intrinsèquement mauvaise. Il argue que les Pères de l'Église et les Conciles ont condamné les comédies en raison de leur impudicité et de leur immoralité, mais que les comédies modernes sont épurées et peuvent même corriger des vices. Le Père Caffaro, qui a justifié les comédies, a comparé les anciennes comédies aux modernes, notant que les premières étaient des assemblées d'impudicité, tandis que les secondes sont modérées et divertissantes. Le Père le Brun, connu pour son zèle et sa piété, n'a pas réussi à réfuter solidement les arguments du Père Caffaro. L'auteur critique également le Père le Brun pour son manque de raisonnement par principes et son recours au démon pour expliquer des phénomènes naturels. La lettre conclut en affirmant que la comédie, sous certaines conditions, est indifférente et même utile. Elle souligne que les autorités religieuses et civiles en France tolèrent et soutiennent la comédie, ce qui montre qu'elle n'est pas considérée comme une invention pernicieuse du démon.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 2142-2144
LETTRE écrite de Marseille le 3. Septembre, au sujet du mot de Guespin attribué aux Orleanois.
Début :
En relisant, Monsieur, le Mercure du mois de mai dernier, j'ai fait attention [...]
Mots clefs :
Orléanais, Guespin, Ville des Gaules
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Marseille le 3. Septembre, au sujet du mot de Guespin attribué aux Orleanois.
LETTRE écrite de Marseille le 3. Sepau sujet du mot de Guespin tembre
attribué aux Orleanois.
E
N relisant , Monsieur , le Mercure du
mois de mai dernier , j'ai fait attention à une petite Dissertation , faite par
M. P. au sujet du mot de Guespin , qu'on
donne aux Orléanois. Quelque sçavant
que m'ait parû son Ouvrage , je n'ai pas
laissé de m'appercevoir qu'il n'avoit pour
fondement qu'une erreur populaire, à laquel1
OCTOBRE. 1732. 2143
quelle je m'étonne qu'un homme versé
comme lui dans l'Antiquité soumette si
facilement son jugement ; il ne devroit
pas, ce me semble, ignorer qu'Orleans est
une des plus anciennes Villes des Gaules ,
fondée par une Colonie Grecque sortie
des environs de l'Epire , 250. ans après la
destruction de Troyes; et comme dans ces
tems là les Grecs étoient les seuls Peuples
addonnez aux Sciences , ils firent par leur
nouvelle Colonie, d'Orleans, la plus sçavante Ville des Gaules. On remarqubit
dans ses habitans un certain génie vif et
brillant , qu'on ne distinguoit point dans
les autres Gaulois : aussi leur donna- t'on
dès lors le nom de Guespos , qui en Grec
signifie ( comme il est facile de le voir )
Pierre brillante , c'étoit une espece de
caillou transparant qui se trouvoit aux
environs de l'Epire , et qui a long - tems
decoré les Temples des Grecs. Ce nom
leur est resté depuis , et par corruption
de langage a été changé en celui de Guespin.
Je n'ignore pas que ce même mot entraîne une autre idée , que quelques ignorans lui ont donnée , par rapport à une
sorte de Mouche appellée Guespe , dont
la piqueure est mauvaise. Je pardonnetois à tout autre qu'à un Orleanois éclaiτέ
2144 MERCURE DE FRANCE
ré , de donner dans une idée si grossiere ;
la franchise qu'il affecte dahs son Ecrit
n'est , ce me semble , qu'un voile dont
il couvre adroitement sa négligence pour
la recherche de la verité.
Au reste , les qualitez qu'il attribuë
aux Orleanois sont très- bien fondées , et
à l'exception du génie mordant , dont il
prétend les taxer pour autoriser son explication , je n'y trouve rien que de conforme aux sentimens de tous les Etrangers
qui les connoissent . J'ai l'honneur d'être , &c.
V. D. G.
attribué aux Orleanois.
E
N relisant , Monsieur , le Mercure du
mois de mai dernier , j'ai fait attention à une petite Dissertation , faite par
M. P. au sujet du mot de Guespin , qu'on
donne aux Orléanois. Quelque sçavant
que m'ait parû son Ouvrage , je n'ai pas
laissé de m'appercevoir qu'il n'avoit pour
fondement qu'une erreur populaire, à laquel1
OCTOBRE. 1732. 2143
quelle je m'étonne qu'un homme versé
comme lui dans l'Antiquité soumette si
facilement son jugement ; il ne devroit
pas, ce me semble, ignorer qu'Orleans est
une des plus anciennes Villes des Gaules ,
fondée par une Colonie Grecque sortie
des environs de l'Epire , 250. ans après la
destruction de Troyes; et comme dans ces
tems là les Grecs étoient les seuls Peuples
addonnez aux Sciences , ils firent par leur
nouvelle Colonie, d'Orleans, la plus sçavante Ville des Gaules. On remarqubit
dans ses habitans un certain génie vif et
brillant , qu'on ne distinguoit point dans
les autres Gaulois : aussi leur donna- t'on
dès lors le nom de Guespos , qui en Grec
signifie ( comme il est facile de le voir )
Pierre brillante , c'étoit une espece de
caillou transparant qui se trouvoit aux
environs de l'Epire , et qui a long - tems
decoré les Temples des Grecs. Ce nom
leur est resté depuis , et par corruption
de langage a été changé en celui de Guespin.
Je n'ignore pas que ce même mot entraîne une autre idée , que quelques ignorans lui ont donnée , par rapport à une
sorte de Mouche appellée Guespe , dont
la piqueure est mauvaise. Je pardonnetois à tout autre qu'à un Orleanois éclaiτέ
2144 MERCURE DE FRANCE
ré , de donner dans une idée si grossiere ;
la franchise qu'il affecte dahs son Ecrit
n'est , ce me semble , qu'un voile dont
il couvre adroitement sa négligence pour
la recherche de la verité.
Au reste , les qualitez qu'il attribuë
aux Orleanois sont très- bien fondées , et
à l'exception du génie mordant , dont il
prétend les taxer pour autoriser son explication , je n'y trouve rien que de conforme aux sentimens de tous les Etrangers
qui les connoissent . J'ai l'honneur d'être , &c.
V. D. G.
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Résumé : LETTRE écrite de Marseille le 3. Septembre, au sujet du mot de Guespin attribué aux Orleanois.
La lettre, datée du 3 septembre et écrite à Marseille, aborde le terme 'Guespin' attribué aux habitants d'Orléans. L'auteur conteste une dissertation de M. P. publiée dans le Mercure de mai, qui repose sur une erreur populaire. Il affirme qu'Orléans est l'une des plus anciennes villes des Gaules, fondée par une colonie grecque venue des environs de l'Épire, 250 ans après la destruction de Troie. Les Grecs, alors les seuls peuples savants, firent d'Orléans une ville érudite. Les Orléanois étaient réputés pour leur esprit vif et brillant, ce qui leur valut le nom de 'Guespos', signifiant 'Pierre brillante' en grec. Ce nom a évolué en 'Guespin' par corruption linguistique. L'auteur rejette l'idée que 'Guespin' soit lié à une mouche, comme le suggèrent certains. Il conclut que les qualités attribuées aux Orléanois par M. P. sont bien fondées, sauf le génie mordant.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 2188
A MLLE MALCRAIS DE LA VIGNE du Croisy.
Début :
Docte Malcrais, dont les gentils Ecrits, [...]
Mots clefs :
Mercure, Docte, Génie, Savoir, Être imaginaire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A MLLE MALCRAIS DE LA VIGNE du Croisy.
A MILE M ALCRAIS DE LA VIGNE
du Croisy.
Docte Malcrais , dont les gentils Ecrits ,
Dans le Mercure obtiennent toûjours place ,
Lorsque je lis vos Vers remplis de grace ,
Certain soupçon se forme en mes esprits.
Je vous le dis , quand devrois vous déplaire ,
Vous n'êtes femme en aucune façon ,
Si fin génie et sçavoir si profond ,
Dans votre Sexe est extraordinaire ,
Ainsi je vois ; confirmant mon soupçon ,
Que Malcrais n'est qu'un Estre imaginaire,
V. D. G.
De Marseille le 3. Septembre 17 32.
du Croisy.
Docte Malcrais , dont les gentils Ecrits ,
Dans le Mercure obtiennent toûjours place ,
Lorsque je lis vos Vers remplis de grace ,
Certain soupçon se forme en mes esprits.
Je vous le dis , quand devrois vous déplaire ,
Vous n'êtes femme en aucune façon ,
Si fin génie et sçavoir si profond ,
Dans votre Sexe est extraordinaire ,
Ainsi je vois ; confirmant mon soupçon ,
Que Malcrais n'est qu'un Estre imaginaire,
V. D. G.
De Marseille le 3. Septembre 17 32.
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Résumé : A MLLE MALCRAIS DE LA VIGNE du Croisy.
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9
p. 258-261
ODE. L'Ame persecutée par les ennemis de son innocence, invoque le Seigneur.
Début :
De mes tristes sanglots reçoy le sacrifice, [...]
Mots clefs :
Seigneur, Ennemis, Innocence, Gloire, Heureux, Cruels, Âme, Victoire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ODE. L'Ame persecutée par les ennemis de son innocence, invoque le Seigneur.
O D E.
L'Ame persecutée par les ennemis de son
innocence , invoque le Seigneur.
DE mes tristes sanglots reçoy le sacrifice ,
Mes cruels ennemis , Seigneur ,
arment contre mon sein la barbare injustice
D'une
FEVRIER. 1733. 259
D'une sacrilege fureur,
Mets dans tes mains , Seigneur , les traits de ta
vengeance ,
Déclare toi pour l'innocence ;
Qu'ils tombent à tes pieds sous tes coups abate
tus.
Que vois -je! ma plainte t'anime.
Tu parois dans ta gloire et déja dans l'abîme
,
Ces cruels ennemis gémissent confondus.
M
Tremblés Peuples , armé de sa foudre bra .
·
lante ,
Le Seigneur devient mon appui ,
Les Cieux sont étonnés de sa gloire écla
tante ,
L'Univers fléchit devant lui.
Sous son bras foudroyant , les plus superbes
têtes
Tombent au rang de ses conquêtes.
D'un témeraire orgueil l'éclat audacieux
Se dissipe devant sa gloire ,
Le Seigneur a vaincu ; graces à sa victoire ,
Mes jours à ses Autels couleront sous ses
yeux.
De mes fiers ennemis les fureurs criminel
les
Ne
160 MERCURE DE FRANCE
Ne troubleront plus mon bonheur ,
Et je puis aux beautez de ses loix éternelles
Consacrer à jamais mon coeur.
A l'abri de son Throne et charmé de sa
gloire ,
Le jour heureux de sa victoire
Retracé dans mes chants augmentera ma paix,
Rempli de sa bonté suprême ,
Puisse plutôt mon coeur s'oublier de lui- même
Que du prix glorieux qu'il tient de ses bien
faits !
Des frivoles grandeurs d'un pompeux escla
vage ,
Mes yeux ne sont plus éblouis ;
Je vois , dans le repos où le Seigneur m'en
gage ,
Ces fantômes évanouis.
Heureux , Seigneur , heureux , le coeur qui to
révere !
Embrasé d'un amour sincere ,
Il goûte des vrais biens Les solides appas :
De son innocence éternelle
Rien ne peut alterer la pureté fidelle ;
Il craint le seul malheur de ne te loüer pas.
譏
Non , non , le monde en vain m'étale ses `délices
,
Le
FEVRIER. 261 1733.
Le seul bonheur est sous ta loy ,
Et je ne compte plus que parmi les suplices
.
Les biens qui me privent de toi.
Le Seigneur est ma force , à l'ombre sal
taire
De son auguste Sanctuaire ,
Des traits les plus cruels je brave la rigueur.
Vous , dont une indigne licence
Poursuit sur cette mer la timide innocence ,
Voulez-vous triompher ? invoqués le Seigneur
,
Dominus pars hareditatis mea et Calicis mei
Tu es qui restitues hareditatem meam mihi.
Par M. l'Abbé P. V. de Marseilles
L'Ame persecutée par les ennemis de son
innocence , invoque le Seigneur.
DE mes tristes sanglots reçoy le sacrifice ,
Mes cruels ennemis , Seigneur ,
arment contre mon sein la barbare injustice
D'une
FEVRIER. 1733. 259
D'une sacrilege fureur,
Mets dans tes mains , Seigneur , les traits de ta
vengeance ,
Déclare toi pour l'innocence ;
Qu'ils tombent à tes pieds sous tes coups abate
tus.
Que vois -je! ma plainte t'anime.
Tu parois dans ta gloire et déja dans l'abîme
,
Ces cruels ennemis gémissent confondus.
M
Tremblés Peuples , armé de sa foudre bra .
·
lante ,
Le Seigneur devient mon appui ,
Les Cieux sont étonnés de sa gloire écla
tante ,
L'Univers fléchit devant lui.
Sous son bras foudroyant , les plus superbes
têtes
Tombent au rang de ses conquêtes.
D'un témeraire orgueil l'éclat audacieux
Se dissipe devant sa gloire ,
Le Seigneur a vaincu ; graces à sa victoire ,
Mes jours à ses Autels couleront sous ses
yeux.
De mes fiers ennemis les fureurs criminel
les
Ne
160 MERCURE DE FRANCE
Ne troubleront plus mon bonheur ,
Et je puis aux beautez de ses loix éternelles
Consacrer à jamais mon coeur.
A l'abri de son Throne et charmé de sa
gloire ,
Le jour heureux de sa victoire
Retracé dans mes chants augmentera ma paix,
Rempli de sa bonté suprême ,
Puisse plutôt mon coeur s'oublier de lui- même
Que du prix glorieux qu'il tient de ses bien
faits !
Des frivoles grandeurs d'un pompeux escla
vage ,
Mes yeux ne sont plus éblouis ;
Je vois , dans le repos où le Seigneur m'en
gage ,
Ces fantômes évanouis.
Heureux , Seigneur , heureux , le coeur qui to
révere !
Embrasé d'un amour sincere ,
Il goûte des vrais biens Les solides appas :
De son innocence éternelle
Rien ne peut alterer la pureté fidelle ;
Il craint le seul malheur de ne te loüer pas.
譏
Non , non , le monde en vain m'étale ses `délices
,
Le
FEVRIER. 261 1733.
Le seul bonheur est sous ta loy ,
Et je ne compte plus que parmi les suplices
.
Les biens qui me privent de toi.
Le Seigneur est ma force , à l'ombre sal
taire
De son auguste Sanctuaire ,
Des traits les plus cruels je brave la rigueur.
Vous , dont une indigne licence
Poursuit sur cette mer la timide innocence ,
Voulez-vous triompher ? invoqués le Seigneur
,
Dominus pars hareditatis mea et Calicis mei
Tu es qui restitues hareditatem meam mihi.
Par M. l'Abbé P. V. de Marseilles
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Résumé : ODE. L'Ame persecutée par les ennemis de son innocence, invoque le Seigneur.
Le poème 'L'Ame persecutée par les ennemis de son innocence, invoque le Seigneur' de l'Abbé P. V. de Marseilles décrit la souffrance d'une âme persécutée par des ennemis cruels et injustes. L'âme implore le Seigneur de prendre vengeance et de défendre son innocence. Le Seigneur répond à cette prière en apparaissant dans sa gloire et en terrassant les ennemis. L'auteur exalte la victoire du Seigneur, qui devient son appui et sa force. Grâce à cette victoire, l'âme peut désormais consacrer son cœur aux lois éternelles du Seigneur, à l'abri de sa gloire. L'auteur exprime son bonheur et sa révérence envers le Seigneur, rejetant les plaisirs mondains. Il affirme que le seul véritable bonheur réside dans la loyauté au Seigneur. Le poème se conclut par une invocation au Seigneur pour protéger l'innocence et restaurer son héritage.
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10
p. 2408-2409
ENIGME.
Début :
Je suis fille d'une chimere, [...]
Mots clefs :
Rime
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
E suis fille d'une
chimere ,
Si l'on
consulte la raison ;
Mais
NOVEMBRE. 1733. 2409
Mais si l'on en croit ceux à qui j'ai l'art de
plaire
Je suis de meilleure Maison ,
Et dans les Cieux , je puis choisir pour Père ,,
Le Dieu qui fait briller notre Orison.
Je suis mâle et je suis femelle ,
Mon rang est toujours tout mon bien
Je n'existe qu'étant jumelle ,
Et sans ma soeur je ne suis rien.
Très connue au Spectacle , où j'ai droit de paroître
,
Avec bien plus d'éclat qu'en tous autres Endroits,
Dans l'Olympe les Dieux se prétent à ma voix ,
Ami , Lecteur , voilà mon Etre.
Mlle F. M. de Marseille.
E suis fille d'une
chimere ,
Si l'on
consulte la raison ;
Mais
NOVEMBRE. 1733. 2409
Mais si l'on en croit ceux à qui j'ai l'art de
plaire
Je suis de meilleure Maison ,
Et dans les Cieux , je puis choisir pour Père ,,
Le Dieu qui fait briller notre Orison.
Je suis mâle et je suis femelle ,
Mon rang est toujours tout mon bien
Je n'existe qu'étant jumelle ,
Et sans ma soeur je ne suis rien.
Très connue au Spectacle , où j'ai droit de paroître
,
Avec bien plus d'éclat qu'en tous autres Endroits,
Dans l'Olympe les Dieux se prétent à ma voix ,
Ami , Lecteur , voilà mon Etre.
Mlle F. M. de Marseille.
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11
p. 461-464
ODE TIRÉE DU CANTIQUE D'HABACUC, Domine, audivi auditionem tuam et timui, &c.
Début :
L'ai-je bien entendu ! quelle horrible Sentence [...]
Mots clefs :
Habacuc, Cantique, Ennemi, Mort, Ennemis, Mer, Regards , Voix, Maux, Seigneur
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ODE TIRÉE DU CANTIQUE D'HABACUC, Domine, audivi auditionem tuam et timui, &c.
ODE
TIRE'E DU CANTIQUE D'HABACUĆ ,
Domine, audivi auditionem tuam
et timui , & c.
L'Ai- je bien entendu ! quelle horrible Sentence
Vient émouvoir mes sens ! quelle sinistre voix !
Ah! pardonne, Seigneur ; differe ta vengeance ;
Sois touché de mes pleurs pour la derniere foist
Où t'alloit emporter un Jugement funeste ! ´´.
Pour quel forfait le glaive armoit- il ton courroux?
Pouvois -tu l'immoler , ce déplorable reste
D'un Peuple que tu mis à couvert de tes coups.
'Armé pour sa deffense , il est tems de paroître ,
Vainement Babylone oppose ses Remparts ;
Combats , triomphe , cours ; Seigneur , fais- toi
connoître ;
Que dis-je? tu le peux d'un seul de tes regards.
Tel jadis tu parus , quand éclatant de gloire ,
Tu trainois à ton Char tes Ennemis vaincus ;
Les Echos du Pharam témoins de ta victoire ,
Du bruit de tes Exploits furent soudain émûs.
C iij
Le
462 MERCURE DE FRANCE
Le Soleil , à l'aspect de ta face brillante ,
Dans un nuage épais renferma sa splendeur ;
Les Foudres qui partoient de ta main menaçante ,
Terrassant l'Ennemi , rassuroient le vainqueur.
La Mort devant ton Char précipitoit ses traces ;
Le carnage et l'horreur suivoient ses tristes pas ;
L'Enfer à tes côtez , vengeur de tes disgraces ,
Portoit, selon ton ordre , à chacun le trépas .
Tu fixes tes regards ; tu parlas ; et la Terre
Reçoit , en frémissant , ton ordre souverains
Elle obéit , s'entr'ouvre , et bien - tôt le Tonnerre
Force tes Ennemis à rentrer dans son sein.
Tout fléchit devant toi , les Vallons et les Plaines
Aux Monts les plus chenus , se virent égalez ;
La Mer retint ses flots , les Fleuves, les Fontaines ,
Vers leurs Sources soudain fuyrent épouvantez.
L'Aveugle Egyptien , le blasphême à la bouche ,
Fut contraint de ceder aux efforts de ton bras;
Le sacrilege Chef d'une Race farouche ,
Abandonna son Camp au gré de tes Soldats .
Le Soleil dans les flots va finir sa carriere ;
La nuit confond déja ton Peuple dans l'oubli
Ти
MARS 1734 .
Tu tonnes . . . des Eclairs la bleuâtre lumiere ...
Guide le coup mortel qui frappe l'Ennemi.
La Mer entend ta voix ; son Onde menaçante
Attend pour s'écarter un seul de tes regards ;
Tu la fixes ; bien -tôt étonnée et tremblante ,
Elle forme en son sein deux humides remparts.
Ton Peuple craint les flots ; ta présence l'anime;
Il franchit des sentiers aux Mortels inconnus ;
L'Ennemi court , s'élance , il chancelle ; il s'abîme
,
La Mer gronde , se joint, et l'Ennemi n'est plus.
Mais ce jour a jamais marqué pour ta clémence,
Que d'horreurs, que de maux doivent le préceder !
Tu m'en as revelé la funeste science ,
Dieu Puissant , et je tremble à m'en persuader.
mort , vien de mes ans terminer la misere ;
Douce Mort hâte- toi de m'unir au Seigneur ;
Dérobez -moi, Tombeaux , aux traits de sa colere,
J'en connois la justice et j'en prévois l'horreur .
Tous les maux à la fois regneront sur la Terre
Une éternelle mort dévorera son sein
Nos Champs ensanglantez des fureurs de la guerre
Du triste Moissonneur tromperont le dessein .
C iiij
Les
464 MERCURE DE FRANCE
Les Fleuves tariront ; l'Astre qui nous éclaire
Refusera ses feux à nos Arbres naissants ;
Les Troupeaux périront sous la dent meurtriere
Des Lions affamez et des Ours dévorants.
Mais pourquoi t'affliger,ô mon ame ? qu'importe?
Pourquoi t'abandonner aux plus vives douleurs ?
Espere au Tout-Puissant ; crains - tu que sa main
forte ,
Ne puisse t'affranchir des plus pressans malheurs?
O Dieu , parmi les maux que ton bras nous
prépare ,
Ma voix ne cessera d'éxalter tes bienfaits ;
Israël dans les fers d'un Ennemi barbare
Connoîtra que c'est toi qui punis ses forfaits.
Oui c'est toi... quel rayon vient éclairer mon
ame !
Quel tumulte , quel bruit se répand dans les airs !
Les Remparts ennemis sont en proye à la flâme
Israël a brisé la honte de ses fers.
Releve- toi , Sion , mille cris de victoire
Annoncent la grandeur du Dieu de tes Ayeux ,
Vante à tout l'Univers sa puissance et sa gloire ,
Et que son nom soit craint de tes derniers Neveux.
Par M. R. Billard de Marseille.
TIRE'E DU CANTIQUE D'HABACUĆ ,
Domine, audivi auditionem tuam
et timui , & c.
L'Ai- je bien entendu ! quelle horrible Sentence
Vient émouvoir mes sens ! quelle sinistre voix !
Ah! pardonne, Seigneur ; differe ta vengeance ;
Sois touché de mes pleurs pour la derniere foist
Où t'alloit emporter un Jugement funeste ! ´´.
Pour quel forfait le glaive armoit- il ton courroux?
Pouvois -tu l'immoler , ce déplorable reste
D'un Peuple que tu mis à couvert de tes coups.
'Armé pour sa deffense , il est tems de paroître ,
Vainement Babylone oppose ses Remparts ;
Combats , triomphe , cours ; Seigneur , fais- toi
connoître ;
Que dis-je? tu le peux d'un seul de tes regards.
Tel jadis tu parus , quand éclatant de gloire ,
Tu trainois à ton Char tes Ennemis vaincus ;
Les Echos du Pharam témoins de ta victoire ,
Du bruit de tes Exploits furent soudain émûs.
C iij
Le
462 MERCURE DE FRANCE
Le Soleil , à l'aspect de ta face brillante ,
Dans un nuage épais renferma sa splendeur ;
Les Foudres qui partoient de ta main menaçante ,
Terrassant l'Ennemi , rassuroient le vainqueur.
La Mort devant ton Char précipitoit ses traces ;
Le carnage et l'horreur suivoient ses tristes pas ;
L'Enfer à tes côtez , vengeur de tes disgraces ,
Portoit, selon ton ordre , à chacun le trépas .
Tu fixes tes regards ; tu parlas ; et la Terre
Reçoit , en frémissant , ton ordre souverains
Elle obéit , s'entr'ouvre , et bien - tôt le Tonnerre
Force tes Ennemis à rentrer dans son sein.
Tout fléchit devant toi , les Vallons et les Plaines
Aux Monts les plus chenus , se virent égalez ;
La Mer retint ses flots , les Fleuves, les Fontaines ,
Vers leurs Sources soudain fuyrent épouvantez.
L'Aveugle Egyptien , le blasphême à la bouche ,
Fut contraint de ceder aux efforts de ton bras;
Le sacrilege Chef d'une Race farouche ,
Abandonna son Camp au gré de tes Soldats .
Le Soleil dans les flots va finir sa carriere ;
La nuit confond déja ton Peuple dans l'oubli
Ти
MARS 1734 .
Tu tonnes . . . des Eclairs la bleuâtre lumiere ...
Guide le coup mortel qui frappe l'Ennemi.
La Mer entend ta voix ; son Onde menaçante
Attend pour s'écarter un seul de tes regards ;
Tu la fixes ; bien -tôt étonnée et tremblante ,
Elle forme en son sein deux humides remparts.
Ton Peuple craint les flots ; ta présence l'anime;
Il franchit des sentiers aux Mortels inconnus ;
L'Ennemi court , s'élance , il chancelle ; il s'abîme
,
La Mer gronde , se joint, et l'Ennemi n'est plus.
Mais ce jour a jamais marqué pour ta clémence,
Que d'horreurs, que de maux doivent le préceder !
Tu m'en as revelé la funeste science ,
Dieu Puissant , et je tremble à m'en persuader.
mort , vien de mes ans terminer la misere ;
Douce Mort hâte- toi de m'unir au Seigneur ;
Dérobez -moi, Tombeaux , aux traits de sa colere,
J'en connois la justice et j'en prévois l'horreur .
Tous les maux à la fois regneront sur la Terre
Une éternelle mort dévorera son sein
Nos Champs ensanglantez des fureurs de la guerre
Du triste Moissonneur tromperont le dessein .
C iiij
Les
464 MERCURE DE FRANCE
Les Fleuves tariront ; l'Astre qui nous éclaire
Refusera ses feux à nos Arbres naissants ;
Les Troupeaux périront sous la dent meurtriere
Des Lions affamez et des Ours dévorants.
Mais pourquoi t'affliger,ô mon ame ? qu'importe?
Pourquoi t'abandonner aux plus vives douleurs ?
Espere au Tout-Puissant ; crains - tu que sa main
forte ,
Ne puisse t'affranchir des plus pressans malheurs?
O Dieu , parmi les maux que ton bras nous
prépare ,
Ma voix ne cessera d'éxalter tes bienfaits ;
Israël dans les fers d'un Ennemi barbare
Connoîtra que c'est toi qui punis ses forfaits.
Oui c'est toi... quel rayon vient éclairer mon
ame !
Quel tumulte , quel bruit se répand dans les airs !
Les Remparts ennemis sont en proye à la flâme
Israël a brisé la honte de ses fers.
Releve- toi , Sion , mille cris de victoire
Annoncent la grandeur du Dieu de tes Ayeux ,
Vante à tout l'Univers sa puissance et sa gloire ,
Et que son nom soit craint de tes derniers Neveux.
Par M. R. Billard de Marseille.
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Résumé : ODE TIRÉE DU CANTIQUE D'HABACUC, Domine, audivi auditionem tuam et timui, &c.
Le texte est une ode extraite du Cantique d'Habacuc, qui exprime la peur et la supplication face à la vengeance divine. Le narrateur, après avoir entendu une sentence terrible, implore Dieu de retarder sa vengeance et de pardonner. Il s'interroge sur la raison pour laquelle le glaive est levé contre un peuple déjà éprouvé et espère que Dieu se manifestera pour défendre son peuple contre Babylone. Le narrateur rappelle la puissance divine en évoquant les victoires passées où Dieu a terrassé ses ennemis et commandé aux éléments naturels. Il décrit les signes de la colère divine, tels que la mer qui s'ouvre et les montagnes qui s'abaissent. L'ode se conclut par une acceptation des maux à venir, mais aussi par une espérance en la clémence divine et la libération d'Israël de ses oppresseurs. Le peuple est appelé à se relever et à proclamer la grandeur et la puissance de Dieu.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 804-810
RECEPTION de M. le Marquis de Villars à Marseille en qualité de Gouverneur de Provence. Extrait d'une Lettre écrite de cette Ville le 22 Mars 1734.
Début :
M. le Marquis de Villars arriva à Marseille le quinze de ce mois. La Noblesse [...]
Mots clefs :
Marquis de Villars, Gouverneur de Provence, Marquis de Pilles, Gardes, Noblesse, Marseille, Marche, Distinction, Musique, Souper
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texteReconnaissance textuelle : RECEPTION de M. le Marquis de Villars à Marseille en qualité de Gouverneur de Provence. Extrait d'une Lettre écrite de cette Ville le 22 Mars 1734.
RECEPTION de M. le Marquis
de Villars à Marseille en qualité de Gouverneur
de Provence. Extrait d'une Lettre
écrite de cette Ville le 22 Mars 1734.
M. le Marquis de Villars arriva à
Marseille le quinze de ce mois. La Noblesse
étoit allée audevant de lui jusqu'aux
confins du Territoire , ayant à
sa tête le Marquis de Pilles , Gouverneur-
Vignier de Marseille , qui eût l'honneur
de présenter tous les Gentilshommes ,
qui l'avoient suivi , et qui furent reçus
de la maniere du monde la plus gracieuse .
Le Marquis de Villars monta ensuite
sur un très - beau Cheval du Marquis de
Pilles , superbement harnaché , suivi de
la
AVRIL. 1734. 805
la Noblesse , et précedé de la Compagnie
de ses Gardes . Il arriva ainsi au lieu de
la Viste , marqué pour la réception que
devoient lui faire les Echevins de Mar-
'seille. Ce Lieu est remarquable par sa
situation élevée et qui offre une veuë
toute charmante , par la multiplicité des
différents objets de Terre et de Mer , qui
font ensemble une Perspective enchantée.
C'est- là que le Marquis de Pilles s'étant
mis à la tête des Echevins et les ayant
présentez au Gouverneur , l'Orateur harangua
au nom de la Ville , on tira en
même tems quantité de Boëtes , et on fit
plusieurs Salves de Mousqueterie.
>
On se remit en marche au milieu
d'une foule innombrable de peuple , accouru
de toutes parts , et on arriva aux
Portes de la Ville . Le Marquis de Villars
précedé de sa Maison , de ses Gardes et
de la Noblesse , avoit à sa droite le Marquis
de Pilles , et le premier Echevin à
sa gauche les autres Echevins étoient
derriere lui avec son Capitaine des Gardes,
suivis duCorps de Ville et des PrincipauxBourgeois
et Négocians deMarseille.
C'est avec ce Cortége qu'il entra dans
la Ville par la Porte Royale, qu'on avoit
ornée d'un fort bel Arc de Triomphe
d'ordre Corinthien. Au milieu du Frontispi806
MERCURE DE FRANCE
tispice étoit l'Ecu des Armes du Marquis
de Villars , et au bas de l'Arc de Triomphe
couloient deux Fontaines de vin .
Le Marquis de Pilles lui présenta alors,
´en qualité de Gouverneur - Viguier , les
Clefs de la Ville. C'étoient les mêmes
Clef d'or que son Bisayeul avoit eû
l'honneur de présenter à Louis XIV , le
2 Mars de l'année 1660. et que ce grand
Prince lui rendit, en lui disant:M. de Pilles
gardez ces Clefs , elles sont bien entre vos
mains. Les Ech vins présenterent ensuite
le Dais que le Gouverneur refusa.
,
-
La marche fut continuée jusqu'à l'Eglise
Cathedrale au milieu d'une double haye,
formée par les quatre Compagnies Bourgeoises
de la Ville de cent hommes chacune
, bien armez et très
proprement
habillez . Durant la marche deux Officiers
du Marquis deVillars jettoient de l'argent
au Peuple , et les Trompertes , les Tambours
et les Hautbois ne cessérent de se
faire entendre.
M. l'Evêque de Marseille l'ayant reçu
et complimenté à la tête de son Chapi
tre , il le conduisit jusqu'au Prie- Dieu
qui lui avoit été preparé dans le Sanc-
* La seule Ville de Marseille présente des Clefs
d'or. Voyez la raison de cette distinction dans le
Mercure d'Avril 1723. p. 696.
tuaire .
AVRIL. 1734 807 .
.
tuaire. Le Te Deum fut ensuite solemnellement
chanté par la Musique de la
Cathédrale ; le Choeur et le reste de l'Eglise
étant magnifiquement ornez.
Au sortir de cette cérémonie le Marquis
de Villars ,suivi du même Cortége ,
se rendit à l'Hôtel Le M. Le Bret , Conseiller
d'Etat , Premier Président du Parlement
, Intendant de Justice et du Commerce
, et Commandant en Provence . Il
remercia là le Marquis de Pilles et toute
la Noblesse qui l'avoit suivi pour se reti
rer dans son Appartement , où il reçut
peu de tems après la visite de l'Evêque
de Marseille , et les complimens des différents
Corps et Jurisdictions de la Ville.
Peu de tems après il se rendit dans la
Sale de l'Académie de Musique pour entendre
le Concert . Il trouva un magnifique
Fauteuil avec un tapis de pied placé
dans la Galerie , qui regne autour de
cette Sale ; mais comme il y avoit beaucoup
de Dames, et qu'il n'y avoit que ce
seul Fauteuil , le Marquis de Villars ne
voulut point l'occuper , il se plaça au milieu
des Principales Dames de la Ville
dans le bas de la Sale .
Après le Concert il alla à pied , précedé
de ses Gardes et suivi de la Noblesse,
souper chez le Chevalier de Pilles, Capitaine
868 MERCURE DE FRANCE
taine de Galeres , et exerçant la Charge
de Gouverneur-Viguier pendant la minorité
du Marquis de Pilles son neveu .
Toute la Maison étoit extraordinairement
éclairée en dedans et en dehors : plus de
cent personnes de distinction y souperent.
La premiere table fut servie pour
le Marquis de Villars qui y fit placer
vingt-quatre Dames. Les autres Dames
souperent à deux autres Tables avec les
principaux Gentilhommes de la Ville et
de la Province ; tout fut servi avec la
délicatesse , le bon gout , et l'ordre qui
se rencontrent rarement avec la profusion
et le grand Monde . On admira sur tout
a magnificence du Fruit qui fut tout servi
en Porcelaines rares , et en cristaux .
Le souper fut suivi du Jeu et d'un Bal.
Le lendemain matin le Marquis de
Villars fut occupé à recevoir les Corps
des Communautez Religieuses , qui vin.
rent le complimenter , et qui furent
traitées avec toute la politesse et toute la
distinction possible . Il retourna diner
chez le Chevalier de Pilles . Ce diner répondit
parfaitement au soupé de la veille
et la joye y fut entiere. On y but plusieurs
fois avec les meilleurs vins de
France , la santé du Marêchal Duc de
Villars et la sienne..
Sur
AVRIL. 1734- 805
و
Sur la fin du Repas arriveren tles
Prudhommes du Quartier S. Jean , Cefs
et Juges du Corps des Pescheurs de la
Ville avec leurs habits de cérémonie à
l'Antiquité , l'épée nue sur l'épaule , appareil
assez singulier qui ne déplût pas
au Marquis de Villars il les reçût avec
beaucoup de bonté , loüa leur probité ,
leur exacte et briéve justice.
:
Il alla ensuite à la Comédie , dont il
vit la Représentation sur le Theatre , où
étoient aussi placées avec lui trente des
principales Dames de la Ville . Le Spectacle
étoit des plus brillants par les ornemens
extraordinaires et par le beau
Monde, La Sale étoit absolument touse
remplie.
Je ne finirois point s'il falloit ajouter
ici le détail du souper , que donna le
Biême jour au Marquis de Villars Monsieur
d'Hericourt , Intendant des Galeres ,
de celui que lui donna le lendemain M. de
S. Cannat , de la Fête et du Bal qu'il y
cut dans la Sale de l'Académie de Musique
, établie à Marseille sous la protection
particuliere du Gouverneur de la
Province. Tout fut magnifique et somptueux
par tout où il fut receu , et ce Seigneur
donna tout des marques
par tout de politesse
et de bonté , qui l'ont fait adorer
ence pays- cy.
810 MERCURE DE FRANCE .
I le quitta après avoir séjourné deux
jours et demi , témoignant autant d'empressement
d'y revenir que nous en avons
nous mêmes de le posseder un plus longtems.
Il partit hier pour Toulon suivi
du Marquis de Rognes , Premier Procureur
des Etats et Pays de Provence , du
Marquis de Pilles , qui l'accompagne en
Italie , pour servir en qualité d Ayde de
Camp du Maréchal de Villars , du Marquis
de Foresta , du Comte de Flotte et
de plusieurs autres Gentilhommes qualifiez
de la Province.
de Villars à Marseille en qualité de Gouverneur
de Provence. Extrait d'une Lettre
écrite de cette Ville le 22 Mars 1734.
M. le Marquis de Villars arriva à
Marseille le quinze de ce mois. La Noblesse
étoit allée audevant de lui jusqu'aux
confins du Territoire , ayant à
sa tête le Marquis de Pilles , Gouverneur-
Vignier de Marseille , qui eût l'honneur
de présenter tous les Gentilshommes ,
qui l'avoient suivi , et qui furent reçus
de la maniere du monde la plus gracieuse .
Le Marquis de Villars monta ensuite
sur un très - beau Cheval du Marquis de
Pilles , superbement harnaché , suivi de
la
AVRIL. 1734. 805
la Noblesse , et précedé de la Compagnie
de ses Gardes . Il arriva ainsi au lieu de
la Viste , marqué pour la réception que
devoient lui faire les Echevins de Mar-
'seille. Ce Lieu est remarquable par sa
situation élevée et qui offre une veuë
toute charmante , par la multiplicité des
différents objets de Terre et de Mer , qui
font ensemble une Perspective enchantée.
C'est- là que le Marquis de Pilles s'étant
mis à la tête des Echevins et les ayant
présentez au Gouverneur , l'Orateur harangua
au nom de la Ville , on tira en
même tems quantité de Boëtes , et on fit
plusieurs Salves de Mousqueterie.
>
On se remit en marche au milieu
d'une foule innombrable de peuple , accouru
de toutes parts , et on arriva aux
Portes de la Ville . Le Marquis de Villars
précedé de sa Maison , de ses Gardes et
de la Noblesse , avoit à sa droite le Marquis
de Pilles , et le premier Echevin à
sa gauche les autres Echevins étoient
derriere lui avec son Capitaine des Gardes,
suivis duCorps de Ville et des PrincipauxBourgeois
et Négocians deMarseille.
C'est avec ce Cortége qu'il entra dans
la Ville par la Porte Royale, qu'on avoit
ornée d'un fort bel Arc de Triomphe
d'ordre Corinthien. Au milieu du Frontispi806
MERCURE DE FRANCE
tispice étoit l'Ecu des Armes du Marquis
de Villars , et au bas de l'Arc de Triomphe
couloient deux Fontaines de vin .
Le Marquis de Pilles lui présenta alors,
´en qualité de Gouverneur - Viguier , les
Clefs de la Ville. C'étoient les mêmes
Clef d'or que son Bisayeul avoit eû
l'honneur de présenter à Louis XIV , le
2 Mars de l'année 1660. et que ce grand
Prince lui rendit, en lui disant:M. de Pilles
gardez ces Clefs , elles sont bien entre vos
mains. Les Ech vins présenterent ensuite
le Dais que le Gouverneur refusa.
,
-
La marche fut continuée jusqu'à l'Eglise
Cathedrale au milieu d'une double haye,
formée par les quatre Compagnies Bourgeoises
de la Ville de cent hommes chacune
, bien armez et très
proprement
habillez . Durant la marche deux Officiers
du Marquis deVillars jettoient de l'argent
au Peuple , et les Trompertes , les Tambours
et les Hautbois ne cessérent de se
faire entendre.
M. l'Evêque de Marseille l'ayant reçu
et complimenté à la tête de son Chapi
tre , il le conduisit jusqu'au Prie- Dieu
qui lui avoit été preparé dans le Sanc-
* La seule Ville de Marseille présente des Clefs
d'or. Voyez la raison de cette distinction dans le
Mercure d'Avril 1723. p. 696.
tuaire .
AVRIL. 1734 807 .
.
tuaire. Le Te Deum fut ensuite solemnellement
chanté par la Musique de la
Cathédrale ; le Choeur et le reste de l'Eglise
étant magnifiquement ornez.
Au sortir de cette cérémonie le Marquis
de Villars ,suivi du même Cortége ,
se rendit à l'Hôtel Le M. Le Bret , Conseiller
d'Etat , Premier Président du Parlement
, Intendant de Justice et du Commerce
, et Commandant en Provence . Il
remercia là le Marquis de Pilles et toute
la Noblesse qui l'avoit suivi pour se reti
rer dans son Appartement , où il reçut
peu de tems après la visite de l'Evêque
de Marseille , et les complimens des différents
Corps et Jurisdictions de la Ville.
Peu de tems après il se rendit dans la
Sale de l'Académie de Musique pour entendre
le Concert . Il trouva un magnifique
Fauteuil avec un tapis de pied placé
dans la Galerie , qui regne autour de
cette Sale ; mais comme il y avoit beaucoup
de Dames, et qu'il n'y avoit que ce
seul Fauteuil , le Marquis de Villars ne
voulut point l'occuper , il se plaça au milieu
des Principales Dames de la Ville
dans le bas de la Sale .
Après le Concert il alla à pied , précedé
de ses Gardes et suivi de la Noblesse,
souper chez le Chevalier de Pilles, Capitaine
868 MERCURE DE FRANCE
taine de Galeres , et exerçant la Charge
de Gouverneur-Viguier pendant la minorité
du Marquis de Pilles son neveu .
Toute la Maison étoit extraordinairement
éclairée en dedans et en dehors : plus de
cent personnes de distinction y souperent.
La premiere table fut servie pour
le Marquis de Villars qui y fit placer
vingt-quatre Dames. Les autres Dames
souperent à deux autres Tables avec les
principaux Gentilhommes de la Ville et
de la Province ; tout fut servi avec la
délicatesse , le bon gout , et l'ordre qui
se rencontrent rarement avec la profusion
et le grand Monde . On admira sur tout
a magnificence du Fruit qui fut tout servi
en Porcelaines rares , et en cristaux .
Le souper fut suivi du Jeu et d'un Bal.
Le lendemain matin le Marquis de
Villars fut occupé à recevoir les Corps
des Communautez Religieuses , qui vin.
rent le complimenter , et qui furent
traitées avec toute la politesse et toute la
distinction possible . Il retourna diner
chez le Chevalier de Pilles . Ce diner répondit
parfaitement au soupé de la veille
et la joye y fut entiere. On y but plusieurs
fois avec les meilleurs vins de
France , la santé du Marêchal Duc de
Villars et la sienne..
Sur
AVRIL. 1734- 805
و
Sur la fin du Repas arriveren tles
Prudhommes du Quartier S. Jean , Cefs
et Juges du Corps des Pescheurs de la
Ville avec leurs habits de cérémonie à
l'Antiquité , l'épée nue sur l'épaule , appareil
assez singulier qui ne déplût pas
au Marquis de Villars il les reçût avec
beaucoup de bonté , loüa leur probité ,
leur exacte et briéve justice.
:
Il alla ensuite à la Comédie , dont il
vit la Représentation sur le Theatre , où
étoient aussi placées avec lui trente des
principales Dames de la Ville . Le Spectacle
étoit des plus brillants par les ornemens
extraordinaires et par le beau
Monde, La Sale étoit absolument touse
remplie.
Je ne finirois point s'il falloit ajouter
ici le détail du souper , que donna le
Biême jour au Marquis de Villars Monsieur
d'Hericourt , Intendant des Galeres ,
de celui que lui donna le lendemain M. de
S. Cannat , de la Fête et du Bal qu'il y
cut dans la Sale de l'Académie de Musique
, établie à Marseille sous la protection
particuliere du Gouverneur de la
Province. Tout fut magnifique et somptueux
par tout où il fut receu , et ce Seigneur
donna tout des marques
par tout de politesse
et de bonté , qui l'ont fait adorer
ence pays- cy.
810 MERCURE DE FRANCE .
I le quitta après avoir séjourné deux
jours et demi , témoignant autant d'empressement
d'y revenir que nous en avons
nous mêmes de le posseder un plus longtems.
Il partit hier pour Toulon suivi
du Marquis de Rognes , Premier Procureur
des Etats et Pays de Provence , du
Marquis de Pilles , qui l'accompagne en
Italie , pour servir en qualité d Ayde de
Camp du Maréchal de Villars , du Marquis
de Foresta , du Comte de Flotte et
de plusieurs autres Gentilhommes qualifiez
de la Province.
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Résumé : RECEPTION de M. le Marquis de Villars à Marseille en qualité de Gouverneur de Provence. Extrait d'une Lettre écrite de cette Ville le 22 Mars 1734.
Le 15 mars 1734, le Marquis de Villars arriva à Marseille pour prendre ses fonctions de Gouverneur de Provence. Il fut accueilli par la noblesse, dirigée par le Marquis de Pilles, Gouverneur-Viguier de Marseille, aux confins du territoire. Le Marquis de Villars monta un cheval superbement harnaché fourni par le Marquis de Pilles et fut escorté jusqu'à un lieu de visite élevé offrant une vue charmante. Là, le Marquis de Pilles présenta les échevins au Gouverneur, qui fut harangué au nom de la ville, tandis que des salves de mousqueterie étaient tirées. La procession continua vers Marseille, accompagnée par une foule innombrable. Le Marquis de Villars entra dans la ville par la Porte Royale, ornée d'un arc de triomphe corinthien avec les armes du Marquis et deux fontaines de vin. Le Marquis de Pilles lui remit les clefs d'or de la ville, les mêmes que son aïeul avait présentées à Louis XIV en 1660. Les échevins offrirent ensuite un dais, que le Gouverneur refusa. La marche se poursuivit jusqu'à la cathédrale, flanquée de compagnies bourgeoises armées. Durant la marche, des officiers jetaient de l'argent au peuple et des musiciens jouaient. À la cathédrale, l'évêque de Marseille accueillit le Marquis de Villars, qui assista au Te Deum. Après la cérémonie, il se rendit à l'hôtel du Conseiller d'État Le Bret, où il remercia le Marquis de Pilles et la noblesse. Le Marquis de Villars se rendit ensuite à l'Académie de Musique, puis soupa chez le Chevalier de Pilles. Le lendemain, il reçut les corps des communautés religieuses et dina à nouveau chez le Chevalier de Pilles. Il assista également à une représentation théâtrale et à divers soupers et bals donnés en son honneur. Après un séjour de deux jours et demi, le Marquis de Villars quitta Marseille pour Toulon, accompagné de plusieurs gentilshommes de la province.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
25
p. 206-211
LETTRE de M. Naudinat, Administrateur des dragées, antivéneriennes, à Marseille, à M. Keyser, en date du 25 Septembre 1757.
Début :
Les bontés & la protection particuliere dont il a plu, Monsieur, à M. le Duc [...]
Mots clefs :
Dragées, Guérison, Malades, Succès, Symptômes, Douleurs, Maladies vénériennes, Certificats, Médecins, Marseille, Chirurgiens, Hôtel-Dieu, Échevins
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. Naudinat, Administrateur des dragées, antivéneriennes, à Marseille, à M. Keyser, en date du 25 Septembre 1757.
LETTRE de M. Naudinat, Administrateur des
dragées , antivéneriennes , à Marseille , à M.
Keyfer , en date du 25 Septembre 1757.
Les bontés & la protection particuliere dont il
a plu , Monfieur , à M. le Duc de Villars de
m'honorer , celles de MM . les Magiftrats &
Echevins de cette Ville , le zele & l'amour da
bien public , qui a animé MM . les Recteurs de
l'Hôtel - Dieu & de l'Hôpital , les bons offices
& l'impartialité de M. le Médecin de quartier , &
de M. le Chirurgien Gagnant maîtrife ; tout a
concouru ici , Monfieur , à faire mes épreuves
avec tout l'agrément & l'authenticité poffibles
Fo
ΣΟ
E
27
C
C
E
NOVEMBRE. 1757. 207
Point de brigue point de jaloufie aidé par
tout , & éclairé cependant , tous les fecours
m'ont été procurés. Les malades m'ont été donnés
: mes traitemens ont été fuivis , la vérité s'eft
montrée dans tout fon jour . Chacun a voulu voir,a
été fatisfait de mes épreuves , & c'eft avec le plus
grand empreffement qu'il m'a été donné , Monheur
, les certificats authentiques que j'ai l'honneur
de vous envoyer , avec le compte des dix
malades ci joints . Permettez moi de vous ajouter
en même temps , que plus ces temoignages font
flatteurs pour vous , pour votre remede & pour
moi , plus nous en devons rendre les hommages les
plus refpectueux aux illuftres protecteurs qui nous
honorent , & plus nous devons redoubler de
zele ; vous , pour m'aider de vos confeils , & me
fournir les moyens d'être de plus en plus utile à
l'humanité , & moi , pour en profiter , en confacrant
mes jours au fervice des pauvres & de tous
ceux qui auront befoin de mes fecours .
ETAT de dix malades traités à l'Hôtel- Dieu da
Marfeille , avec les dragées de M. Keyfer , fuivant
l'état conftaté par M. Montagnier , Medecin
de quartier , & M. Melicy , Chirurgien
dudit Hopital ygagnant maitrife.
1º. Jean Baptifte Neton , âgé de 10 ans , né
avec la maladie vénérienne , avoit un ulcere au
gofier , large d'environ un écu de trois livres ,
lequel avoit détruit une partie de la cloifon de la
luette & de la glande amygdale droite ; il avoit
plufieurs autres ulceres dans la bouche : cet enfant
a été parfaitement guéri .
2º. Jean Arge , âgé de 22 ans , outre plufieurs
fymptômes bien caractérisés , avoit des douleurs
4
208 MERCURE DE FRANCE.
nocturnes à prefque toutes les parties du corps,
& une entr'autres très- vive au bras droit , avec
un gonflement fur la partie latérale externe de l'avant
bras , qui empêchoit de faire aucune fonction
de fon bras depuis 3 mois. Vers le quinzieme
jour de fon traitement , ce malade fut attaqué de
la petite vérole , & il a été délivré de ces deux ma
ladies fans aucune incommodité.
3. Chriftophe Jourdan âgé de 20 ans , à la
fuite de graves fymptômes qui lui avoient paru il
y a7 à 8 mois , avoit des puftules feches au front,
une dureté confidérable & d'un pouce d'épaiffeur,
des douleurs de tête affreufes , & qui lui occafion.
noient des infomnies perpétuelles. Ce malade a été
parfaitement guéri .
4°. Catherine Canonge , âgée de 18 ans , ou
tre des fymptômes bien caractérités , avoit des
douleurs nocturnes aux extrêmités fupérieures
& inférieures : elle a été parfaitement guérie.
5. Marie Audibert , âgée de 22 ans , outre
des fymptômes bien caractérisés , avoit une ulcération
dans l'aîne , & une dureté confidérable à
une des glandes inguinales de la groffeur de
noix , elle avoit de plus des douleurs très-aigués à
la cuiffe droite. Elle a été parfaitement guérie.
6. Agnès Roche , âgée de 25 ans , avoit gagné
la maladie vénérienne , d'un enfant qu'elle
avoit nourri . Ses mammelles étoient à moitié rongées
par le virus , & elle y avoit deux chancres de
la largeur d'une piece de 24 fols chacun : elle avoit
de plus des douleurs fi aiguës , qu'elle ne pouvoit
dormir la nuit. Elle a été parfaitement guérie.
Les quatre malades qui fuivent , font encore
dans les remedes ; mais fur la fin de leurs traitemens
, & dans le meilleur état du monde.
7°. Honoré Mouton, âgé de 18 ans, eft atteint de
NOVEMBRE. 1757. 209
Tymptômes bien caractérisés à chaque côté des al
nes & autres. La fuppuration s'eft bien établie , &
fa guérifon eft très prochaine.
8. Marguerite Michel , âgée de 32 ans , à la
fuite d'un mal contidérable , fe trouve atteinte de
deux ulceres au gofier , un à chaque glande amygdale
, de la largeur d'une piece de 24 fols chacun.
Ces deux ulceres font prefque cicatrifes & fa guézifon
très - prochaine.
9. Marie Caftellant , âgée de 26 ans, étoit atreinte
d'une quantité de fymptômes bien caractérifés
, & entr'autres de dix à douze puftules fuppurées.
Tout eft féché, & fa guérifon très prochaine.
10°. Marie Rochet , eft auffi atteinte , d'une
quantité de fymptômes , & entr'autres de plufieurs
puftules durcies. Sa guérifon cit de même trèsprochaine.
J'aurai l'honneur de vous envoyer par le premier
Courier , la confirmation de ces quatres guérifons
, & j'ai celui d'être bien fincérement
Monfieur , votre & c. NAUDINAT
Certificat de M.le Médecin de quartier , de l'Hôtel-
Dieu de Marfeille.
En qualité de Médecin de quartier actuellement
de fervice , j'attefte que les fix premiers malades
ei - deffus , font fortis , qu'ils nous ont paru
bien guéris , & que les quatre autres font en voie
de guérifon. A Marseille , le 22 Septembre 1797-
Montagnier , Médecin .
Certificat de M. Mélicy , Chirurgiengagnant mak
trife à l'Hôtel-Dieu de Marfeille.
Je, fouffigné Chirurgien gagnant maîtriſe à l'Hô
el- Dieu de Marſeille attefte avoir vifité les mala
210 MERCURE DE FRANCE.
des denoncés dans cet état , & les avoir trouvé
tous atteints des fymptômes y mentionnés , &
qu'ayant fuivi le traitement du fieur Naudinat , je
déclare qu'il ne s'eft fervi que des dragées antivénériennes
de M. Keyfer , que les fix premiers malades
font fortis guéris , & que les quatre autres
font en voie d'une heureuſe guériſon , attendu
qu'il n'ont commencé à uſer du remede , que
quelque jours après les autres . A Marseille , le 22
Septembre 1757. Melicy.
Certificat de MM. les Directeurs de l'Hôtel - Dien
de Marſeille.
Nous , Directeurs dudit Hôtel- Dieu , certifions
le contenu des deux certificats ci- deffus , & atteftons
à tous qu'il appartiendra , que ceux qui les
ont fignés , font tels qu'ils fe qualifient . En foi de
quoi , nous avons figné le prefent , & à icelui fait
appofer le fceau des armes de cet Hôpital . Fait à
Marseille , le 22 Septembre 1757. Nouvil , Orry ,
Granier , Boiffon , Daller , Arnaud , Gouffet.
Certificat de MM. les Echevins de Marſeillle.
Nous , Echevins , Confeillers du Roi , Lieutenants
Généraux de police de cette ville de Marfeille
, certifions & atteftons à tous qu'il appartiendra
, que le fieur Naudinat , Chirurgien,
éleve de M. Keyfer pour adminiftrer les dragées
antivénériennes , s'eft préfenté à nous , & nous
a requis de lui indiquer des perfonnes pauvres de
l'un & de l'autre fexe , atteintes du mal vénérien ,
pour les traiter gratis , à quoi adhéraus , & informés
de l'efficacité de ce remede , nous lui avons
affigné les dix pauvres malades dénommés dans l'état
ci-deffus , dont fix ont été parfaitement guéris
fous nos yeux , & les quatre autres font en vois
NOVEMBRE: 1757. 211
de guériſon , conformément à ce qui nous eft
porté par les certificats des fieurs Directeurs de
Î'Hôtel- Dieu , du Médecin de quartier , & du
Chirurgien gagnant maîtrife . En foi de quoi nous
avons figné les préfentes , & à icelles ,
fait appofer
le fceau & armes de la Ville , pour fervir & valoir
ce que de raifon. Fait & donné , dans l'Hôtel
de Ville de Marfeille , le 24 Septembre 1757.
Mennicard , Ricaud , Couturier , la Force.
dragées , antivéneriennes , à Marseille , à M.
Keyfer , en date du 25 Septembre 1757.
Les bontés & la protection particuliere dont il
a plu , Monfieur , à M. le Duc de Villars de
m'honorer , celles de MM . les Magiftrats &
Echevins de cette Ville , le zele & l'amour da
bien public , qui a animé MM . les Recteurs de
l'Hôtel - Dieu & de l'Hôpital , les bons offices
& l'impartialité de M. le Médecin de quartier , &
de M. le Chirurgien Gagnant maîtrife ; tout a
concouru ici , Monfieur , à faire mes épreuves
avec tout l'agrément & l'authenticité poffibles
Fo
ΣΟ
E
27
C
C
E
NOVEMBRE. 1757. 207
Point de brigue point de jaloufie aidé par
tout , & éclairé cependant , tous les fecours
m'ont été procurés. Les malades m'ont été donnés
: mes traitemens ont été fuivis , la vérité s'eft
montrée dans tout fon jour . Chacun a voulu voir,a
été fatisfait de mes épreuves , & c'eft avec le plus
grand empreffement qu'il m'a été donné , Monheur
, les certificats authentiques que j'ai l'honneur
de vous envoyer , avec le compte des dix
malades ci joints . Permettez moi de vous ajouter
en même temps , que plus ces temoignages font
flatteurs pour vous , pour votre remede & pour
moi , plus nous en devons rendre les hommages les
plus refpectueux aux illuftres protecteurs qui nous
honorent , & plus nous devons redoubler de
zele ; vous , pour m'aider de vos confeils , & me
fournir les moyens d'être de plus en plus utile à
l'humanité , & moi , pour en profiter , en confacrant
mes jours au fervice des pauvres & de tous
ceux qui auront befoin de mes fecours .
ETAT de dix malades traités à l'Hôtel- Dieu da
Marfeille , avec les dragées de M. Keyfer , fuivant
l'état conftaté par M. Montagnier , Medecin
de quartier , & M. Melicy , Chirurgien
dudit Hopital ygagnant maitrife.
1º. Jean Baptifte Neton , âgé de 10 ans , né
avec la maladie vénérienne , avoit un ulcere au
gofier , large d'environ un écu de trois livres ,
lequel avoit détruit une partie de la cloifon de la
luette & de la glande amygdale droite ; il avoit
plufieurs autres ulceres dans la bouche : cet enfant
a été parfaitement guéri .
2º. Jean Arge , âgé de 22 ans , outre plufieurs
fymptômes bien caractérisés , avoit des douleurs
4
208 MERCURE DE FRANCE.
nocturnes à prefque toutes les parties du corps,
& une entr'autres très- vive au bras droit , avec
un gonflement fur la partie latérale externe de l'avant
bras , qui empêchoit de faire aucune fonction
de fon bras depuis 3 mois. Vers le quinzieme
jour de fon traitement , ce malade fut attaqué de
la petite vérole , & il a été délivré de ces deux ma
ladies fans aucune incommodité.
3. Chriftophe Jourdan âgé de 20 ans , à la
fuite de graves fymptômes qui lui avoient paru il
y a7 à 8 mois , avoit des puftules feches au front,
une dureté confidérable & d'un pouce d'épaiffeur,
des douleurs de tête affreufes , & qui lui occafion.
noient des infomnies perpétuelles. Ce malade a été
parfaitement guéri .
4°. Catherine Canonge , âgée de 18 ans , ou
tre des fymptômes bien caractérités , avoit des
douleurs nocturnes aux extrêmités fupérieures
& inférieures : elle a été parfaitement guérie.
5. Marie Audibert , âgée de 22 ans , outre
des fymptômes bien caractérisés , avoit une ulcération
dans l'aîne , & une dureté confidérable à
une des glandes inguinales de la groffeur de
noix , elle avoit de plus des douleurs très-aigués à
la cuiffe droite. Elle a été parfaitement guérie.
6. Agnès Roche , âgée de 25 ans , avoit gagné
la maladie vénérienne , d'un enfant qu'elle
avoit nourri . Ses mammelles étoient à moitié rongées
par le virus , & elle y avoit deux chancres de
la largeur d'une piece de 24 fols chacun : elle avoit
de plus des douleurs fi aiguës , qu'elle ne pouvoit
dormir la nuit. Elle a été parfaitement guérie.
Les quatre malades qui fuivent , font encore
dans les remedes ; mais fur la fin de leurs traitemens
, & dans le meilleur état du monde.
7°. Honoré Mouton, âgé de 18 ans, eft atteint de
NOVEMBRE. 1757. 209
Tymptômes bien caractérisés à chaque côté des al
nes & autres. La fuppuration s'eft bien établie , &
fa guérifon eft très prochaine.
8. Marguerite Michel , âgée de 32 ans , à la
fuite d'un mal contidérable , fe trouve atteinte de
deux ulceres au gofier , un à chaque glande amygdale
, de la largeur d'une piece de 24 fols chacun.
Ces deux ulceres font prefque cicatrifes & fa guézifon
très - prochaine.
9. Marie Caftellant , âgée de 26 ans, étoit atreinte
d'une quantité de fymptômes bien caractérifés
, & entr'autres de dix à douze puftules fuppurées.
Tout eft féché, & fa guérifon très prochaine.
10°. Marie Rochet , eft auffi atteinte , d'une
quantité de fymptômes , & entr'autres de plufieurs
puftules durcies. Sa guérifon cit de même trèsprochaine.
J'aurai l'honneur de vous envoyer par le premier
Courier , la confirmation de ces quatres guérifons
, & j'ai celui d'être bien fincérement
Monfieur , votre & c. NAUDINAT
Certificat de M.le Médecin de quartier , de l'Hôtel-
Dieu de Marfeille.
En qualité de Médecin de quartier actuellement
de fervice , j'attefte que les fix premiers malades
ei - deffus , font fortis , qu'ils nous ont paru
bien guéris , & que les quatre autres font en voie
de guérifon. A Marseille , le 22 Septembre 1797-
Montagnier , Médecin .
Certificat de M. Mélicy , Chirurgiengagnant mak
trife à l'Hôtel-Dieu de Marfeille.
Je, fouffigné Chirurgien gagnant maîtriſe à l'Hô
el- Dieu de Marſeille attefte avoir vifité les mala
210 MERCURE DE FRANCE.
des denoncés dans cet état , & les avoir trouvé
tous atteints des fymptômes y mentionnés , &
qu'ayant fuivi le traitement du fieur Naudinat , je
déclare qu'il ne s'eft fervi que des dragées antivénériennes
de M. Keyfer , que les fix premiers malades
font fortis guéris , & que les quatre autres
font en voie d'une heureuſe guériſon , attendu
qu'il n'ont commencé à uſer du remede , que
quelque jours après les autres . A Marseille , le 22
Septembre 1757. Melicy.
Certificat de MM. les Directeurs de l'Hôtel - Dien
de Marſeille.
Nous , Directeurs dudit Hôtel- Dieu , certifions
le contenu des deux certificats ci- deffus , & atteftons
à tous qu'il appartiendra , que ceux qui les
ont fignés , font tels qu'ils fe qualifient . En foi de
quoi , nous avons figné le prefent , & à icelui fait
appofer le fceau des armes de cet Hôpital . Fait à
Marseille , le 22 Septembre 1757. Nouvil , Orry ,
Granier , Boiffon , Daller , Arnaud , Gouffet.
Certificat de MM. les Echevins de Marſeillle.
Nous , Echevins , Confeillers du Roi , Lieutenants
Généraux de police de cette ville de Marfeille
, certifions & atteftons à tous qu'il appartiendra
, que le fieur Naudinat , Chirurgien,
éleve de M. Keyfer pour adminiftrer les dragées
antivénériennes , s'eft préfenté à nous , & nous
a requis de lui indiquer des perfonnes pauvres de
l'un & de l'autre fexe , atteintes du mal vénérien ,
pour les traiter gratis , à quoi adhéraus , & informés
de l'efficacité de ce remede , nous lui avons
affigné les dix pauvres malades dénommés dans l'état
ci-deffus , dont fix ont été parfaitement guéris
fous nos yeux , & les quatre autres font en vois
NOVEMBRE: 1757. 211
de guériſon , conformément à ce qui nous eft
porté par les certificats des fieurs Directeurs de
Î'Hôtel- Dieu , du Médecin de quartier , & du
Chirurgien gagnant maîtrife . En foi de quoi nous
avons figné les préfentes , & à icelles ,
fait appofer
le fceau & armes de la Ville , pour fervir & valoir
ce que de raifon. Fait & donné , dans l'Hôtel
de Ville de Marfeille , le 24 Septembre 1757.
Mennicard , Ricaud , Couturier , la Force.
Fermer
Résumé : LETTRE de M. Naudinat, Administrateur des dragées, antivéneriennes, à Marseille, à M. Keyser, en date du 25 Septembre 1757.
Dans une lettre datée du 25 septembre 1757, M. Naudinat, administrateur des dragées antivénériennes à Marseille, informe M. Keyfer des résultats positifs des traitements effectués sur des malades atteints de la maladie vénérienne. Naudinat exprime sa gratitude envers le Duc de Villars, les magistrats et échevins de Marseille, ainsi que les recteurs de l'Hôtel-Dieu et de l'hôpital, pour leur soutien et leur collaboration. Les traitements ont été suivis avec succès, conduisant à la guérison ou à une amélioration notable des patients. L'état des dix malades traités à l'Hôtel-Dieu de Marseille, établi par M. Montagnier, médecin de quartier, et M. Melicy, chirurgien, révèle que six malades ont été parfaitement guéris. Les quatre autres sont en voie de guérison. Parmi les cas notables, Jean Baptiste Neton, âgé de 10 ans, a été guéri d'un ulcère au goitre et d'autres ulcères dans la bouche. Jean Arge, âgé de 22 ans, a été délivré de douleurs nocturnes et d'un gonflement au bras droit, tout en surmontant la petite vérole. Catherine Canonge, âgée de 18 ans, et Marie Audibert, âgée de 22 ans, ont également été parfaitement guéries de leurs symptômes. Les certificats des directeurs de l'Hôtel-Dieu, du médecin de quartier, du chirurgien, et des échevins de Marseille confirment l'efficacité des dragées antivénériennes de M. Keyfer et la guérison des malades. Naudinat conclut en exprimant son désir de continuer à servir l'humanité et de redoubler de zèle pour aider les pauvres et ceux qui ont besoin de ses soins.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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26
p. 118-126
A M. DE LA PLACE, Auteur du MERCURE.
Début :
PERSUADE, Monsieur, des avantages que les Arts de Peinture, de Sculpture [...]
Mots clefs :
Sculpture, Peinture, Expressions douces, Grâces, Ruisseau
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A M. DE LA PLACE, Auteur du MERCURE.
A M. DE LA PLACE , Auteur du
MERCURE.
PERSUADE , Monfieur , des avantages
que les Arts de Peinture , de Sculpture
& c , les Peintres & les Connoiffeurs
peuvent retirer de la defcription d'un
fameux Tableau du célébre Corrége ,
que la France vient tout nouvellement
d'acquérir , je vous prie d'en permettre
l'infertion dans votre Mercure . Elle fait
le contenu d'une lettre que M. Luet de
Bifcontin , ancien Officier d'Infanterie ,
vient de m'adreffer de Marſeille ici à S.
Chamas.Ce favant Connoiffeur nous le
décrit avec beaucoup de lumieres &
de fagacité. Une imagination brillante
& un ftyle délicat femblent en faire le
moindre mérite : en voici l'extrait.
J'ai l'honneur d'être & c.
P. de V **** de P. ****
LETTRE contenant la defcription d'un
Tableau repréfentant les GRACES
qui fe baignent dans la fontaine
d'Acidalie.
J'AI 'AI enfin vu ce précieux Morceau : il
eft non -feulement très-beau , mais encore
je l'ai trouvé parfaitement bien
confervé. On peut dire , Monfieur ,
qu'il n'a pas été payé , quoiqu'on ne
l'ait acquis qu'en le couvrant d'or. Il a ,
franc de baguette,quatre pieds un pouce
de hauteur fur fix pieds cinq pouces de
largeur . Hâtons - nous de vous le décrire.
Je ne voulus point le découvrir qu'auparavant
je ne l'euffe fait placer en un
jour favorable , afin que je puffe jouir
de l'effet du tout enfemble . Il le fit fi
bien , & j'éprouvai un fi grand plaifir
à fon afpect , que je fentis naître dans
l'ame les mêmes mouvemens que l'action
y eût excité , fi elle fe fût paffée
réellement à mes yeux.
Il eſt certain , Monfieur , que de tous
les fujets de Peinture , ceux du genre
galant font ceux qui intéreffent davanrage
, qui ont le plus d'attraits fur l'ima120
MERCURE DE FRANCE .
gination , & qui pénétrent le plus l'âme
du Spectateur. Vous favez que c'eſt là
un goût qui , en enfantant & exécutant
des Sujets gracieux & aimables , ne
manque jamais de donner aux objets
des fituations riantes , des caractères
agréables , & aux figures des expreffions
douces , tendres , délicates , qui flattent
l'oeil , égayent l'efprit , féduifent le coeur.
11 eft donc conftant que les tableaux
comme celui - ci , repréfentans des femmes
dans l'âge de plaire , ont un appas
général. Cela eft aifé à concevoir ; tout
eft charmes , tout eft délices en elles :
elles font la production la plus touchante
, la plus exquife de la nature :
le plaifir anime leurs moindres mouvemens
, & la plupart de leurs actions acquierent
enfin un redoublement d'intérêt.
Notre Tableau devient ainfi un des
plus fatisfaifans ; il nous dépeint , comme
je vous l'écrivis , les Grâces qui fe
baignent dans la fontaine d'Acidalie.
Mais le Corrége les a épifodiquement
accompagnées de divers petits Génies
repréfentans les Amours , les Ris , les
Jeux , les Attraits dont elles font toujours
fuivies. Cupidon , ce redoutable
Dieu , voltige au-deffus des trois Divinités
:
JANVIER. 1763. 121
nités la Fontaine , le Ruiffeau qui en
naît , les Sites & les Arbres du Payfage
y paroiffent avoir été fi fimplement
conduits par la Nature , qu'on
croiroit encore voir ceux du temps de
l'âge d'or.
L'une des Grâces , que je préfume
être Aglaïa , comme la premiere d'entre
elles , occupe la principale place qui eſt
vers le milieu , un peu dans l'enfoncement.
Elle eft de face & debout fur le
bord du ruiffeau : elle a même un pied
dedans. D'une main elle s'appuye fur
le bras de fa compagne ; de l'autre ,
elle fe preffe le mammellon pour en
faire fortir du lait qu'elle répand dans
l'eau . Cette charmante figure ſe préfente
dans une attitude , dont le contour
eft d'une élégance achevée : elle
étale une gorge des mieux fournies , &
des hanches d'une parfaite conformation.
Son teint , dont l'éclatante couleur
eft des plus flatteufes , frappe vivement.
Ses cheveux dorés , & un voile incarnat
attaché fur l'épaule , flottent au gré des
zéphirs.
Quelle douce langueur ne nous montre-
t-elle pas ! De quelle grace , & avec
quelle fine expreffion n'épanche-t - elle
II. Vol. F
-122 MERCURE DE FRANCE .
pas
fon lait ? On croit voir couler du
nectar. Ses yeux languiffans , fa bouche
riante , & un certain air entre le tendre
& le mélancolique , la rendent touchante
& adorable. Auffi pourroit- on
dire que cette Gráce a plus de grâces que
les deux autres .
Cependant celle fur laquelle Aglaia
s'appuye , que nous nommerons Thalie
ne fe préfente pas moins agréablement ,
quoique de profil. La forme de fa
gorge , la coupe délicate de fa taille ,
ont des charmes qui féduifent & nous
prouvent ce qu'elle eft . Notre incomparable
Peintre ne l'auroit pas admiſe au
nombre des grâces , fi elle n'en eût été
pétrie. Elle tâtonne dans l'eau jufqu'à
moitié cuiffe ; & d'une forte
de flacon de cristal à l'antique , elle
répand fur la tête d'un des Jeux , fans
doute , quelque éffence odoriférante
dont le parfum imaginé femble embaumer
l'air qu'on refpire.
Non loin de-là un des Amours traîne
après foi Euphrofine dans la fontaine ,
celle des Graces qui nous montre le dos.
Elle marche en avant , & femble vouloir
s'élancer dans l'eau. Je n'ai guère
vu de dos mieux deffiné , ni d'une fi
JANVIER . 1763 . 123
charmante eurifthmie. Celui de la Vénus
de Medicis n'eft certainement pas d'une
plus belle proportion ; l'attitude en eft
gracieufe à l'extrême . Les parties de
formes ondoyantes ont je ne fai -quoi
de vif, de remuant , d'animé , qu'il n'eft
pas poffible de rencontrer fi bien
ailleurs. Elle eft de caractère léger , délicat
, tel que le charmant Corrége le
donne ordinairement aux Déeffes & aux
Nymphes.
Quelle légéreté ne remarque-t- on
pas dans l'Amour qui vole ? Sufpendu
dans les airs , il femble planer , pour
mieux ajufter fon coup . Le minois capricieux
& dépité , avec lequel il décoche
fon dard , eft d'une expreffion fi
vive , & fi naturelle , qu'en croyant
qu'il refpire véritablement , on ſe perfuaderoit
prefque être foi même en
butte à fes traits.
-
Notre aimable Artifte enfin , toujours
plus ingénieux à nous peindre les
mouvemens de la Nature , a mis entre
les mains d'un des Ris le brandon de
ce Dieu , que fans doute il vient de lui
dérober ; car de l'air avec lequel il fe
cache derrière Thalie l'on préfume
qu'il en eft l'efcamoteur. De plus ,
Fij
124 MERCURE DE FRANCE.
croyant mieux couvrir fon larcin , il
l'enfonce & l'éteint dans la fontaine
d'où s'éxhale une vapeur noire , qui
doit vraisemblablement le décéler. Cette
fumée eft caractérisée & coloriée avec
tant de vérité , qu'elle fait illufion au
point de nous perfuader que l'on entend
le même bouillonnement que produir
la flamme précipitée dans l'eau.
Tous ces petits Génies fe divertiffent
parmi elles ; l'un nâge , l'autre
plonge , l'un danfe , l'autre voltige , &
tous expriment certaines naïvetés fi ingénues
& fi enfantines , que l'Art reffemble
à la Nature même.
C'est en ces fortes de fituations
tendres que l'inimitable Corrége , excellemment
doué du talent merveilleux
de remuer les coeurs par la fineffe
des expreffions ,
a caractérisé en cet
intéreffant tableau différentes paffions.
Je ne finirois point , s'il falloit
vous détailler tous les agrémens que le
Corrége a donné aux objets de fa riante
peinture. On ne peut difconvenir que
toutes les idées qui compofent les tableaux
de ce grand Maître , ne foient nobles
, élevées , extraordinaires
, même
un peu bifarres : que le ftyle en eft fuJANVIER.
1763. 125
blime , les airs de tête finguliers & frappans
: cela eft habituel à notre favant
Artifte ; mais ce qui doit vous furpren
dre , ainfi qu'il m'étonné aujourd'hui
dans la compofition de celui-ci , c'eft
que contre fon ordinaire ce fécond génie
a chargé la fcène d'un nombre confidérable
de figures. Sa verve montée
fur le ton riant & badin' , y a caractériſé ,
d'une aimable gaieté , les principales
paffions . Sous ce nouveau crayon , devenues
plus attrayantes , elles m'ont
paru intéreffer jufqu'à féduire. Je pense
que c'eft ici le plus précieux morceau
qui foit forti de fes mains. Je me flatte
de n'être pas contredit, & nos vrais connoiffeurs
feront de mon opinion lorfqu'ils
l'auront vu . Mais pourquoi ne pas dire
un mot de fon furprenant coloris ? Je
ne puis paffer fous filence la partie ou
ce grand Maître nous a prefque fait
croire qu'un Ange conduifoit fon pinceau.
Tout enchanté dans cette délectable
peinture ; on y trouvé un ragoût
de couleurs , & une touche légère
qu'on ne voit pas même toujours dans
fes ouvrages. Tout y eft moelleux ;
tout y paroît tendre & merveilleux ;
mais en même temps quelle fraîcheur ,
?
Fiij
126 MERCURE DE FRANCE .
quelle force de coloris ! quelle vérité ! &
quelle excellente manière d'empâter n'y
reconnoît-on pas ? Sa touche élégante
eft d'un fini qui fait fon effet de loin
comme de près. Le tout enfemble tenant
de la magie , a un relief & un
accord dont l'harmonie fe manifefte
généralement dans toutes les parties de
ce délicieux tableau , qui étonne &
fait l'admiration de nos Académiciens ,
ainfi
que de nos plus fins Amateurs.
J'ai l'honneur d'être , & c .
J. LUET DE BISCONTIN.
A Marseille , les Décembre 1762.
MERCURE.
PERSUADE , Monfieur , des avantages
que les Arts de Peinture , de Sculpture
& c , les Peintres & les Connoiffeurs
peuvent retirer de la defcription d'un
fameux Tableau du célébre Corrége ,
que la France vient tout nouvellement
d'acquérir , je vous prie d'en permettre
l'infertion dans votre Mercure . Elle fait
le contenu d'une lettre que M. Luet de
Bifcontin , ancien Officier d'Infanterie ,
vient de m'adreffer de Marſeille ici à S.
Chamas.Ce favant Connoiffeur nous le
décrit avec beaucoup de lumieres &
de fagacité. Une imagination brillante
& un ftyle délicat femblent en faire le
moindre mérite : en voici l'extrait.
J'ai l'honneur d'être & c.
P. de V **** de P. ****
LETTRE contenant la defcription d'un
Tableau repréfentant les GRACES
qui fe baignent dans la fontaine
d'Acidalie.
J'AI 'AI enfin vu ce précieux Morceau : il
eft non -feulement très-beau , mais encore
je l'ai trouvé parfaitement bien
confervé. On peut dire , Monfieur ,
qu'il n'a pas été payé , quoiqu'on ne
l'ait acquis qu'en le couvrant d'or. Il a ,
franc de baguette,quatre pieds un pouce
de hauteur fur fix pieds cinq pouces de
largeur . Hâtons - nous de vous le décrire.
Je ne voulus point le découvrir qu'auparavant
je ne l'euffe fait placer en un
jour favorable , afin que je puffe jouir
de l'effet du tout enfemble . Il le fit fi
bien , & j'éprouvai un fi grand plaifir
à fon afpect , que je fentis naître dans
l'ame les mêmes mouvemens que l'action
y eût excité , fi elle fe fût paffée
réellement à mes yeux.
Il eſt certain , Monfieur , que de tous
les fujets de Peinture , ceux du genre
galant font ceux qui intéreffent davanrage
, qui ont le plus d'attraits fur l'ima120
MERCURE DE FRANCE .
gination , & qui pénétrent le plus l'âme
du Spectateur. Vous favez que c'eſt là
un goût qui , en enfantant & exécutant
des Sujets gracieux & aimables , ne
manque jamais de donner aux objets
des fituations riantes , des caractères
agréables , & aux figures des expreffions
douces , tendres , délicates , qui flattent
l'oeil , égayent l'efprit , féduifent le coeur.
11 eft donc conftant que les tableaux
comme celui - ci , repréfentans des femmes
dans l'âge de plaire , ont un appas
général. Cela eft aifé à concevoir ; tout
eft charmes , tout eft délices en elles :
elles font la production la plus touchante
, la plus exquife de la nature :
le plaifir anime leurs moindres mouvemens
, & la plupart de leurs actions acquierent
enfin un redoublement d'intérêt.
Notre Tableau devient ainfi un des
plus fatisfaifans ; il nous dépeint , comme
je vous l'écrivis , les Grâces qui fe
baignent dans la fontaine d'Acidalie.
Mais le Corrége les a épifodiquement
accompagnées de divers petits Génies
repréfentans les Amours , les Ris , les
Jeux , les Attraits dont elles font toujours
fuivies. Cupidon , ce redoutable
Dieu , voltige au-deffus des trois Divinités
:
JANVIER. 1763. 121
nités la Fontaine , le Ruiffeau qui en
naît , les Sites & les Arbres du Payfage
y paroiffent avoir été fi fimplement
conduits par la Nature , qu'on
croiroit encore voir ceux du temps de
l'âge d'or.
L'une des Grâces , que je préfume
être Aglaïa , comme la premiere d'entre
elles , occupe la principale place qui eſt
vers le milieu , un peu dans l'enfoncement.
Elle eft de face & debout fur le
bord du ruiffeau : elle a même un pied
dedans. D'une main elle s'appuye fur
le bras de fa compagne ; de l'autre ,
elle fe preffe le mammellon pour en
faire fortir du lait qu'elle répand dans
l'eau . Cette charmante figure ſe préfente
dans une attitude , dont le contour
eft d'une élégance achevée : elle
étale une gorge des mieux fournies , &
des hanches d'une parfaite conformation.
Son teint , dont l'éclatante couleur
eft des plus flatteufes , frappe vivement.
Ses cheveux dorés , & un voile incarnat
attaché fur l'épaule , flottent au gré des
zéphirs.
Quelle douce langueur ne nous montre-
t-elle pas ! De quelle grace , & avec
quelle fine expreffion n'épanche-t - elle
II. Vol. F
-122 MERCURE DE FRANCE .
pas
fon lait ? On croit voir couler du
nectar. Ses yeux languiffans , fa bouche
riante , & un certain air entre le tendre
& le mélancolique , la rendent touchante
& adorable. Auffi pourroit- on
dire que cette Gráce a plus de grâces que
les deux autres .
Cependant celle fur laquelle Aglaia
s'appuye , que nous nommerons Thalie
ne fe préfente pas moins agréablement ,
quoique de profil. La forme de fa
gorge , la coupe délicate de fa taille ,
ont des charmes qui féduifent & nous
prouvent ce qu'elle eft . Notre incomparable
Peintre ne l'auroit pas admiſe au
nombre des grâces , fi elle n'en eût été
pétrie. Elle tâtonne dans l'eau jufqu'à
moitié cuiffe ; & d'une forte
de flacon de cristal à l'antique , elle
répand fur la tête d'un des Jeux , fans
doute , quelque éffence odoriférante
dont le parfum imaginé femble embaumer
l'air qu'on refpire.
Non loin de-là un des Amours traîne
après foi Euphrofine dans la fontaine ,
celle des Graces qui nous montre le dos.
Elle marche en avant , & femble vouloir
s'élancer dans l'eau. Je n'ai guère
vu de dos mieux deffiné , ni d'une fi
JANVIER . 1763 . 123
charmante eurifthmie. Celui de la Vénus
de Medicis n'eft certainement pas d'une
plus belle proportion ; l'attitude en eft
gracieufe à l'extrême . Les parties de
formes ondoyantes ont je ne fai -quoi
de vif, de remuant , d'animé , qu'il n'eft
pas poffible de rencontrer fi bien
ailleurs. Elle eft de caractère léger , délicat
, tel que le charmant Corrége le
donne ordinairement aux Déeffes & aux
Nymphes.
Quelle légéreté ne remarque-t- on
pas dans l'Amour qui vole ? Sufpendu
dans les airs , il femble planer , pour
mieux ajufter fon coup . Le minois capricieux
& dépité , avec lequel il décoche
fon dard , eft d'une expreffion fi
vive , & fi naturelle , qu'en croyant
qu'il refpire véritablement , on ſe perfuaderoit
prefque être foi même en
butte à fes traits.
-
Notre aimable Artifte enfin , toujours
plus ingénieux à nous peindre les
mouvemens de la Nature , a mis entre
les mains d'un des Ris le brandon de
ce Dieu , que fans doute il vient de lui
dérober ; car de l'air avec lequel il fe
cache derrière Thalie l'on préfume
qu'il en eft l'efcamoteur. De plus ,
Fij
124 MERCURE DE FRANCE.
croyant mieux couvrir fon larcin , il
l'enfonce & l'éteint dans la fontaine
d'où s'éxhale une vapeur noire , qui
doit vraisemblablement le décéler. Cette
fumée eft caractérisée & coloriée avec
tant de vérité , qu'elle fait illufion au
point de nous perfuader que l'on entend
le même bouillonnement que produir
la flamme précipitée dans l'eau.
Tous ces petits Génies fe divertiffent
parmi elles ; l'un nâge , l'autre
plonge , l'un danfe , l'autre voltige , &
tous expriment certaines naïvetés fi ingénues
& fi enfantines , que l'Art reffemble
à la Nature même.
C'est en ces fortes de fituations
tendres que l'inimitable Corrége , excellemment
doué du talent merveilleux
de remuer les coeurs par la fineffe
des expreffions ,
a caractérisé en cet
intéreffant tableau différentes paffions.
Je ne finirois point , s'il falloit
vous détailler tous les agrémens que le
Corrége a donné aux objets de fa riante
peinture. On ne peut difconvenir que
toutes les idées qui compofent les tableaux
de ce grand Maître , ne foient nobles
, élevées , extraordinaires
, même
un peu bifarres : que le ftyle en eft fuJANVIER.
1763. 125
blime , les airs de tête finguliers & frappans
: cela eft habituel à notre favant
Artifte ; mais ce qui doit vous furpren
dre , ainfi qu'il m'étonné aujourd'hui
dans la compofition de celui-ci , c'eft
que contre fon ordinaire ce fécond génie
a chargé la fcène d'un nombre confidérable
de figures. Sa verve montée
fur le ton riant & badin' , y a caractériſé ,
d'une aimable gaieté , les principales
paffions . Sous ce nouveau crayon , devenues
plus attrayantes , elles m'ont
paru intéreffer jufqu'à féduire. Je pense
que c'eft ici le plus précieux morceau
qui foit forti de fes mains. Je me flatte
de n'être pas contredit, & nos vrais connoiffeurs
feront de mon opinion lorfqu'ils
l'auront vu . Mais pourquoi ne pas dire
un mot de fon furprenant coloris ? Je
ne puis paffer fous filence la partie ou
ce grand Maître nous a prefque fait
croire qu'un Ange conduifoit fon pinceau.
Tout enchanté dans cette délectable
peinture ; on y trouvé un ragoût
de couleurs , & une touche légère
qu'on ne voit pas même toujours dans
fes ouvrages. Tout y eft moelleux ;
tout y paroît tendre & merveilleux ;
mais en même temps quelle fraîcheur ,
?
Fiij
126 MERCURE DE FRANCE .
quelle force de coloris ! quelle vérité ! &
quelle excellente manière d'empâter n'y
reconnoît-on pas ? Sa touche élégante
eft d'un fini qui fait fon effet de loin
comme de près. Le tout enfemble tenant
de la magie , a un relief & un
accord dont l'harmonie fe manifefte
généralement dans toutes les parties de
ce délicieux tableau , qui étonne &
fait l'admiration de nos Académiciens ,
ainfi
que de nos plus fins Amateurs.
J'ai l'honneur d'être , & c .
J. LUET DE BISCONTIN.
A Marseille , les Décembre 1762.
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Résumé : A M. DE LA PLACE, Auteur du MERCURE.
La lettre adressée à M. de La Place, auteur du Mercure, décrit un célèbre tableau du peintre Corrége, récemment acquis par la France. L'auteur de la lettre, M. Luet de Biscontin, ancien officier d'infanterie, admire ce tableau représentant les Grâces se baignant dans la fontaine d'Acidalie. Le tableau mesure quatre pieds un pouce de hauteur sur six pieds cinq pouces de largeur et est en excellent état malgré les sommes dépensées pour son acquisition. Luet de Biscontin souligne que les sujets galants, comme celui représenté, sont particulièrement captivants. Le tableau montre les Grâces accompagnées de divers petits génies représentant les Amours, les Rires, les Jeux et les Attraits. Cupidon plane au-dessus des trois divinités, et la scène est entourée de la fontaine, du ruisseau, des sites et des arbres du paysage, tous rendus avec une simplicité naturelle. La Grâce principale, présumée être Aglaïa, est décrite en détail : elle est debout sur le bord du ruisseau, appuyée sur une compagne, et presse son sein pour faire sortir du lait qu'elle répand dans l'eau. Sa posture, son teint éclatant, ses cheveux dorés et son voile incarnat sont soulignés pour leur élégance et leur douceur. Les autres Grâces, Thalie et Euphrosine, sont également admirées pour leurs formes et leurs attitudes gracieuses. Les petits génies sont représentés en train de se divertir, exprimant des naïvetés ingénues. Corrége est loué pour son talent à remuer les cœurs par la finesse des expressions et pour la richesse des idées nobles et élevées dans ses tableaux. Le coloris du tableau est particulièrement remarqué pour sa fraîcheur, sa force et sa vérité, avec une touche élégante et un fini exceptionnel. Le tableau est considéré comme un chef-d'œuvre, admiré par les Académiciens et les amateurs d'art.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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p. 74-75
Imitation Françoise.
Début :
Même forme & même grandeur [...]
Mots clefs :
Bottes fortes