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1
s. p.
A L'AUTEUR DE L'EPITRE A URANIE.
Début :
Quelle audace effrenée ! Ô ciel ! qu'ai-je entendu ? [...]
Mots clefs :
Uranie, Dieu, Religion, Culte antique, Révélation
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texteReconnaissance textuelle : A L'AUTEUR DE L'EPITRE A URANIE.
A L'AUTEUR
DE L'EPITRE A URANIE.
Uelle audace effrenée ! ô Ciel!
qu'ai-je entendu ?
Qui que tu sois , dont le systême impie ,
Insulte à la foi d'Uranie,
Par un și vain effort as-tu donc prétendu ,
Arracher de nos cœurs les profondes racines ,
Qu'y jetterent jadis les Semences divines ,
D'un culte antique et du Ciel descendu ?
A ij Pour
626 MERCURE DE FRANCE
Pour la Religion que mon ame respecte ,
Ta haine me paroît suspecte.
La destruction des Autels ,
Flatte nos penchants criminels ;
Que ces penchants sont doux ! que le vice est aimable ,
Dès qu'on ne connoît plus d'avenir redoutable !
Quelques soient tes raisonnemens
Certes , pour moi je me deffie ,
De l'étrange Philosophie ,
Qui dans les Passions puise ses Argumens.
La Vertu tyrannise. Un Dieu vengeur nous gêne
Et le cœur vicieux qui redoute sa haine ,
Pour mieux s'en garentir ,
Voudroit pouvoir l'anéantir.
Nul frein , pour lors , à la licence,
Gardez l'équilibre un moment,
De quel côté penchera la balance ,
Si le vice est sans châtiment ,
Et la Vertu sans récompense ?
Loin d'ici tes projets dans le crime enfantez ;
E mille fois en naissant avortez.
Les saints dogmes de l'Evangile ,
Surchargent ta raison débile ;
Elle ne peut , dis- tu , les accorder ;
Avec ce qu'on doit demander ,
D'un Dieu juste et débonnaire;
J'en tire un Argument contraire,
Et
AVRIL. 17328 6207
Ét s'il est un Dieu juste et bon ,
Tout est certain dans ma Religion.
Quelle foule de témoignages,
Dans tous les tems , dans tous les âges ,
De Jesus Christ prouvent la Mission !
La foi d'un Dieu Sauveur en Miracles féconde
A commencé les Annales du Monde.
Ouvre les Volumes sacrez ,
De ces Ecrivains inspirez ,
Qui , dans ce qu'ils ont sçû prédire ,
Dudivin Auteur des Chrétiens ,
Semblent être à qui veut les lire ,
Moins Prophetes qu'Historiens.
Quel autre que Dieu même a pû les faire écrire
Juge enfin sans prévention.
Que te produit la Revelation ?
Des Prodiges incontestables
Et des témoins irreprochables ;
Du Monde converti le Miracle éclattant ,
Du Peuple vagabond , détruit et subsistant ,
Qui porte dans cent Républiques ,
Dusalut des Humains les gages authentiques.
D'humbles Pecheurs que l'on charge de fers ,
Troupe aux yeux des Mortels et vile et mépri sable ,
Apeine ont répandu leur doctrine adorable ,
Que les Vertus inondent l'Univers.
Als déposent au fond , qu'après que le Messie ,
A iij Suv
628 MERCURE DE FRANCE
Sur l'Autel de la Croix eut immolé sa vie ,
De la Grace nouvelle allumant le flambeau ,
Il sortit triomphant de la nuit du Tombeau,
Et que montant au Ciel , une brillante nuë ,
Vint comme un Trône d'or l'enlever à leur vûë.
Je croirai , quoiqu'ici l'Impie ose en juger ,
Je croirai des Témoins qui se font égorger.
Je n'ai pas entrepris de retracer l'Histoire ,
De l'Evangile et de sa gloire ;
De sublimes Ecrits pleins de force et de sens
En conservent les Monumens ;
Mais tous ces faits sont de nature ,
An'être point soupçonnez d'imposture
Dieu qui les a permis ne peut être trompeur
Il le seroit pourtant , au gré de ton erreur
Si du vrai dont il est le pere ,
Le mensonge odieux portoit le caractére.
Sa bonté, je l'ai dit , doit m'être un sûr garand;
Des merveilles qu'enfin l'Evangile m'apprend
Sur cent vertus sa doctrine se fonde ,
Et ton systême fait horreur,
Qui par la porte de l'erreur ,
Veut les faire entrer dans le monde.
L'Eclat dont luit la Révelation ,
Et les tenebres du Mystere ,
C'est la Nuée obscure et claire ,
Qui des Hébreux guidoit la Nation.
Tu ne peux concevoir la chute déplorable,
Qui
AVRIL. 1732. 629
Qui de l'Homme innocent fit un homme cou
pable.
Tu ne peux concevoir qu'un Dieu soit mort
pour nous ,
Sans toutesfois nous sauver tous';
Et cet adorable Mystere ,
Pour ta raison est un joug trop austere ;
Mais quand tu veux t'en affranchir ,
La Révelation , source de l'évidence ,
Malgré toi , l'oblige à fléchir ,
Sous une immortelle Puissance.
De Lucrece aujourd'hui dangereux Nourrisson ,
Sauve- toi des écarts de l'humaine raison ,
Son devoir n'est pas de comprendre ,
· Ce que Dieu nous a revelé ,
Mais de se taire et de se rendre
S'il est vrai qu'il nous ait parlé.
Cette raison reçoit des bornes legitimes ;
C'est agir contre ses maximes ,
ปี
Que de restraindre ainsi Dieu même et son pou voir ,
Ace qu'elle en peut concevoir.
Dépouille donc ici l'orgueil de ton Deïsme ,
Et crois - moi , rends ton vieux sophisme,
ACelse , à Porphire , à Julien ,
Quoique leurs plumes criminelles ,
En eussent armé leurs Libelles ,
Le monde entier n'en fut pas moins chrétien.
A iiij Où
63030 MERCURE DE FRANCE
Où suis- je ? ô Ciel ! quelle terreur subite ,
Se répand au fond de mon cœur ?
Tout s'ébranle. La Mer s'agite ,
Et les flots irritez font un bruit plein d'horreur;
Les antres au loin en mugissent.´
Le Soleil perd ses feux, les Astres s'obcurcissent
Da Firmament tous ces corps détachez ,
S'envont-ils fondre sur ma tête ?
Qù fuir l'effroyable tempête
Terre ouvre- moi tes abymes cachez.
De tout secours mon ame est- elle dénuée ;
Mais tout à coup les Cieux sont éclaircis ,
Le Tonnerre et les feux partent de la Nuée,
Où le fils de l'Homme est assis.
Crains l'Eternel; crains ses vengeances &
Par un prompt repentir appaise son courroux ;
Sçache qu'il doit , ce Dieu jaloux ,.
Tejuger sur ta foi comme sur tes offenses.
M. Tanevot.
DE L'EPITRE A URANIE.
Uelle audace effrenée ! ô Ciel!
qu'ai-je entendu ?
Qui que tu sois , dont le systême impie ,
Insulte à la foi d'Uranie,
Par un și vain effort as-tu donc prétendu ,
Arracher de nos cœurs les profondes racines ,
Qu'y jetterent jadis les Semences divines ,
D'un culte antique et du Ciel descendu ?
A ij Pour
626 MERCURE DE FRANCE
Pour la Religion que mon ame respecte ,
Ta haine me paroît suspecte.
La destruction des Autels ,
Flatte nos penchants criminels ;
Que ces penchants sont doux ! que le vice est aimable ,
Dès qu'on ne connoît plus d'avenir redoutable !
Quelques soient tes raisonnemens
Certes , pour moi je me deffie ,
De l'étrange Philosophie ,
Qui dans les Passions puise ses Argumens.
La Vertu tyrannise. Un Dieu vengeur nous gêne
Et le cœur vicieux qui redoute sa haine ,
Pour mieux s'en garentir ,
Voudroit pouvoir l'anéantir.
Nul frein , pour lors , à la licence,
Gardez l'équilibre un moment,
De quel côté penchera la balance ,
Si le vice est sans châtiment ,
Et la Vertu sans récompense ?
Loin d'ici tes projets dans le crime enfantez ;
E mille fois en naissant avortez.
Les saints dogmes de l'Evangile ,
Surchargent ta raison débile ;
Elle ne peut , dis- tu , les accorder ;
Avec ce qu'on doit demander ,
D'un Dieu juste et débonnaire;
J'en tire un Argument contraire,
Et
AVRIL. 17328 6207
Ét s'il est un Dieu juste et bon ,
Tout est certain dans ma Religion.
Quelle foule de témoignages,
Dans tous les tems , dans tous les âges ,
De Jesus Christ prouvent la Mission !
La foi d'un Dieu Sauveur en Miracles féconde
A commencé les Annales du Monde.
Ouvre les Volumes sacrez ,
De ces Ecrivains inspirez ,
Qui , dans ce qu'ils ont sçû prédire ,
Dudivin Auteur des Chrétiens ,
Semblent être à qui veut les lire ,
Moins Prophetes qu'Historiens.
Quel autre que Dieu même a pû les faire écrire
Juge enfin sans prévention.
Que te produit la Revelation ?
Des Prodiges incontestables
Et des témoins irreprochables ;
Du Monde converti le Miracle éclattant ,
Du Peuple vagabond , détruit et subsistant ,
Qui porte dans cent Républiques ,
Dusalut des Humains les gages authentiques.
D'humbles Pecheurs que l'on charge de fers ,
Troupe aux yeux des Mortels et vile et mépri sable ,
Apeine ont répandu leur doctrine adorable ,
Que les Vertus inondent l'Univers.
Als déposent au fond , qu'après que le Messie ,
A iij Suv
628 MERCURE DE FRANCE
Sur l'Autel de la Croix eut immolé sa vie ,
De la Grace nouvelle allumant le flambeau ,
Il sortit triomphant de la nuit du Tombeau,
Et que montant au Ciel , une brillante nuë ,
Vint comme un Trône d'or l'enlever à leur vûë.
Je croirai , quoiqu'ici l'Impie ose en juger ,
Je croirai des Témoins qui se font égorger.
Je n'ai pas entrepris de retracer l'Histoire ,
De l'Evangile et de sa gloire ;
De sublimes Ecrits pleins de force et de sens
En conservent les Monumens ;
Mais tous ces faits sont de nature ,
An'être point soupçonnez d'imposture
Dieu qui les a permis ne peut être trompeur
Il le seroit pourtant , au gré de ton erreur
Si du vrai dont il est le pere ,
Le mensonge odieux portoit le caractére.
Sa bonté, je l'ai dit , doit m'être un sûr garand;
Des merveilles qu'enfin l'Evangile m'apprend
Sur cent vertus sa doctrine se fonde ,
Et ton systême fait horreur,
Qui par la porte de l'erreur ,
Veut les faire entrer dans le monde.
L'Eclat dont luit la Révelation ,
Et les tenebres du Mystere ,
C'est la Nuée obscure et claire ,
Qui des Hébreux guidoit la Nation.
Tu ne peux concevoir la chute déplorable,
Qui
AVRIL. 1732. 629
Qui de l'Homme innocent fit un homme cou
pable.
Tu ne peux concevoir qu'un Dieu soit mort
pour nous ,
Sans toutesfois nous sauver tous';
Et cet adorable Mystere ,
Pour ta raison est un joug trop austere ;
Mais quand tu veux t'en affranchir ,
La Révelation , source de l'évidence ,
Malgré toi , l'oblige à fléchir ,
Sous une immortelle Puissance.
De Lucrece aujourd'hui dangereux Nourrisson ,
Sauve- toi des écarts de l'humaine raison ,
Son devoir n'est pas de comprendre ,
· Ce que Dieu nous a revelé ,
Mais de se taire et de se rendre
S'il est vrai qu'il nous ait parlé.
Cette raison reçoit des bornes legitimes ;
C'est agir contre ses maximes ,
ปี
Que de restraindre ainsi Dieu même et son pou voir ,
Ace qu'elle en peut concevoir.
Dépouille donc ici l'orgueil de ton Deïsme ,
Et crois - moi , rends ton vieux sophisme,
ACelse , à Porphire , à Julien ,
Quoique leurs plumes criminelles ,
En eussent armé leurs Libelles ,
Le monde entier n'en fut pas moins chrétien.
A iiij Où
63030 MERCURE DE FRANCE
Où suis- je ? ô Ciel ! quelle terreur subite ,
Se répand au fond de mon cœur ?
Tout s'ébranle. La Mer s'agite ,
Et les flots irritez font un bruit plein d'horreur;
Les antres au loin en mugissent.´
Le Soleil perd ses feux, les Astres s'obcurcissent
Da Firmament tous ces corps détachez ,
S'envont-ils fondre sur ma tête ?
Qù fuir l'effroyable tempête
Terre ouvre- moi tes abymes cachez.
De tout secours mon ame est- elle dénuée ;
Mais tout à coup les Cieux sont éclaircis ,
Le Tonnerre et les feux partent de la Nuée,
Où le fils de l'Homme est assis.
Crains l'Eternel; crains ses vengeances &
Par un prompt repentir appaise son courroux ;
Sçache qu'il doit , ce Dieu jaloux ,.
Tejuger sur ta foi comme sur tes offenses.
M. Tanevot.
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Résumé : A L'AUTEUR DE L'EPITRE A URANIE.
La lettre est adressée à un individu anonyme qui remet en question la foi d'Uranie. L'auteur exprime son indignation face à l'audace et à l'impiété de cet individu, qui cherche à détruire les fondements de la foi chrétienne et à encourager les penchants criminels. Il souligne que la destruction des autels et la liberté sans frein mènent à la licence et au vice, mettant en avant la nécessité de la vertu et de la crainte de Dieu pour maintenir l'équilibre moral. L'auteur défend la religion chrétienne en soulignant les témoignages et les miracles qui prouvent la mission de Jésus-Christ. Il cite les prophéties et les écrits sacrés qui attestent de la vérité de la révélation divine. Il argue que les faits relatés dans l'Évangile sont authentiques et ne peuvent être soupçonnés d'imposture, car Dieu ne peut être trompeur. La lettre critique la raison humaine qui cherche à comprendre les mystères divins au-delà de ses limites légitimes. Elle invite à se soumettre à la révélation divine et à éviter les écarts de la raison humaine. L'auteur conclut en appelant à la crainte de Dieu et au repentir pour échapper à sa vengeance.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
2
p. 631-641
SUITE du Voyage de Basse Normandie. LETTRE VIII.
Début :
Mr Foucault, Intendant de la Géneralité de Caën, bien persuadé, [...]
Mots clefs :
Voyage, Bases Normandie, Pierres, Inscriptions, Médailles, M. Belin, Antiquités, M. Foucault
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUITE du Voyage de Basse Normandie. LETTRE VIII.
SUITE du Voyage de Basse Normandie.
LETTRE VIII.
M
'R Foucault , Intendant de la Géneralité de Caën , bien persuadé ,
Monsieur , que la Tradition du Pays touchant le lieu deVieux, n'étoit point vaine,
avoit toûjours eu envie de s'en assurer
par quelque recherche ; mais il étoit bien
aise qu'il se présentât une occasion un
peu plausible de la faire , lorsqu'au mois
de Mars de l'année 1705. le Seigneur de
Vieux vint lui donner avis qu'on avoit
trouvé deux Pierres avec des Inscriptions,
ajoûtant que des Maçons en avoient déja
pris une à son insçû , pour employer à
quelques réparations et en avoient gâté
les Lettres que Fautre étant plus difficile à tirer, avoit été abandonnée , et recouverte de terre, ne doutant point qu'on
ne fit en cet endroit quelque découverte
plus considerable. M. l'Intendant , qui
étoit alors avec M. Belain , Curé de Blainville , et Secretaire de l'Académie de
Caën, résolut d'aller sur les lieux le lendemain , l'engageant de l'y accompagner,
ce qui fut executé,
י
AV Oh
632 MERCURE DE FRANCE
On chercha en vain la Pierre en question , elle ne fut point retrouvée ; on déterra seulement quelques Médailles. Tandis qu'on faisoit ce travail inutile , un
Laboureur vint dire que dans sa Piece de
terre il emportoit souvent avec la Charruede fort belles Briques , dont quelquesunes étoient ornées de feuillages , ce qui
détermina de faire creuser dans ce Champ..
En y entrant on apperçut une petite élevation couverte de ronces , et tout au
près quantité de morceaux de Brique ,
ornées de feuilles d'Acanthe. M. Belin
ayant poussé sa Canne dans un trou , en
remuant ces Briques , trouva une liberté
de tourner dans ce même trou , ce qui
fit juger et déterminer qu'il falloit commencer par là à foüiller.
Les Paysans ne travaillerent pas longtemps sans decouvrir un Mur d'environ
cinq pieds d'épaisseur , et en continuant
de creuser à trois pieds de profondeur ,
on découvrit environ vingt pieds de long
du même Mur , au bout duquel travail
il se trouva une espece d'Angle er de
Contour qui étoit de neuf pieds. M. Foucault crut d'abord que c'étoient des fondations , mais M. Belin pensa le contraire
sur ce que ce Mur étoit crêpi fort proprement, et conjectura que ce reste d'élevation
AVRIL: 17320 633
levation d'un Bâtiment iroit jusqu'au niveau d'un Ruisseau qui coule au bas de
ce Champ ; de quoi on convint. Commet
l'heure de partir pressoit , on ne put pour
cette premiere fois en faire davantage.
M. Foucault pria M. de Vieux , de mettre dès le lendemain le plus d'Ouvriers
qu'il pourroit et de faire travailler diligemment jusqu'à la huitaine qu'il y re- tourneroit.
Il n'y manqua pas , en effet , toûjours
accompagné de M. Belln , et trouva qu'en
creusant jusqu'au bout de la trace qu'on
avoit marquée et jusqu'à l'extremité du
Champ , on avoit découvert un beau
Bassin de pierre , d'environ douze pieds
de diametre , entouré de trois rangs de
Sieges , avec une ouverture par laquelle ,
au moyen d'un degré de cinq marches ,
on descendoit dans ce Bassin , dont le
fond étoit fort uni et formé de belles pierres blanches , jointes ensemble avec un
mortier très -poli , dans lequel on voyoit
de petits morceaux de Marbre rouge. Ce
mortier étoit si dur qu'on eut bien de la
peine à l'entamer avec une Pince , pour
voir surquoi ce Bassin étoit assis . Il l'étoit
sur d'autres pierres , posées de côté sur
du sable , au- dessous duquel il y avoir
encore un lit du même mortier , et entre
A vj ces
634 MERCURE DE FRANCE
ces pierres on voyoit plusieurs Tuyaux
de Brique.
Ce qui avoit paru un Angle dans le
Mur , d'abord découvert , se trouva être
une voute qui couvroit une Etuve, dans
laquelle on trouva encore le Fourneau qui
l'échauffoit, tout noirci de fumée , dans
une petite fenêtre plusieurs petits Instrumens d'Yvoire qui servoient dans l'usage
des Bains à la propreté du corps , &c.
Comme la terre avoit couvert le debris du grand Bâtiment , dont le Bassin
et l'Etuve ne faisoient qu'une partie , on
découvrit aussi en remuant cette même
terre et en continuant de creuser , plu
sieurs parties de très- belles voûtes , la
pluspart renversées , sous lesquelles on
avoit enfermé des Tuyaux de Brique. Le
mortier étoit si bien lié et uni avec les
pierres , qu'on les cassoit plutôt que de
les séparer de ce mortier.
Les Murs du Bâtiment principal dont
on vient de parler , ayant plus de 200.
pieds de longueur et 4 à 5. pieds d'é
paisseur , étoient construits alternativementd'un lit de Briques d'un pied en quar
ré , de trois pouces d'épaisseur , et d'un
très beau rouge , et d'un lit de pierres
blanches , toutes d'un même échantillon,
liées avec du ciment. L'ordre fut donné
de
AVRIL. 1732. 635
de continuer le creusement et le remuage des terres , et d'augmenter le nombre
des Ouvriers , ce qui fut executé pendant
huit autres jours.
י
Au bout de ce temps- là M. Foucault
et M. Belin retournerent sur les lieux et
trouverent qu'au moyen d'un grand travail , on avoit découvert un second Bassin construit comme le premier de ces
belles Pierres blanches qu'on voit à Caen,
et ayant les mêmes accompagnemens. Če
Bassin avoit ses écoulemens par des tuyaux
de Brique , qui portoient les eaux jusques
dans le Ruisseau dont il est parlé cydessus. On avoit aussi découvert le commencement d'un Aqueduc , qui selon sa
direction , devoit passer sous le Village
de Vieux , pour recevoir l'eau d'une Fontaine qu'on voit encore auprès. On ne
put pas découvrir davantage de cet Aqueduc , il auroit fallu pour cela renverser
une partie du Village.
Au lieu d'un travail inutile , on creusa
encore jusqu'à une des extremitez du
Champ, ce qui acheva de faire découvrir
toute l'enceinte de l'Edifice entier , qui
devoit être d'une grande étendue , er
qu'on crut , avec raison , avoir été un
Gymnase , ou lieu des Exercices que les
Romains avoient bâti en cet endroit et
qu'ils
836 MERCURE DE FRANCE
qu'ils avoient accompagné de Thermes
de Commoditez et d'autres ornemens utiles et en usage chez les Anciens. Pour
s'y moins tromper , M. Foucault avoit
apporté son Vitruve , dont la lecture sur
la construction de pareils Bâtimens , appliquée à l'examen des Monumens dont
on vient de parler , acheva de constater
ce qu'on n'avoit encore fait que conjecturer par leur conformité avec les descrip
tions exactes et les regles données par cet
Auteur.
On trouva au reste des Antiquitez de
plus d'une espece dans ce remuement des
terres ; d'abord un grand Tombeau de
pierre, dans lequel étoient enfermez un
Squelete humain et quelques Médailles.
Romaines , ensuite le Fust d'une Colomne de Marbre , dont on ne peut découvrir la bize ni le chapiteau. La Statuë d'une
femme, ayant la tête voilée et la plus belle qu'on puisse voir tenant de la
main droite une Patere ou Coupe , servant aux Libations , la Statue étoit tron
quée par le bas. On découvrit aussi plusieurs fragmens d'Inscriptions , ceux- cy
entre autres.
و
MEMO RIAM
MAGNINI
SENICIONIS
ME-
AVRIL. 1732. 637
MEMORIA
VASSIONI
Q: K.
La plus entiere de ces Inscriptions étoit
gravée sur une Cyppe ou espece de Piedestal quarré, en forme de petit Autel
et contenoit ces mots :
DEO MARTI
C. VICTORIVS
FELIX PROSEET
IVNIO FILIO SVO
ET MATERNAE VIC
TORIS CONIVGIS
MÆE. V. S. L. M. DIALE
ET. BASSO. COS. IDIBVS
MARTIS.
Celle qui suit n'est pas moins entiere , elle étoit gravée sur un Bloc de
Marbre rougeâtre , comme celui de la
Carriere dont j'ai parlé.
NOVIVS VIC
TOR MEMO
RIAE DOMI
TIAE PANFILE
M Galland prétend dans une de ses Lettres ,
qu'il falloit Sax , au lieu de Mex , mais qu'on a
employé ce dernier motpour éviter toute équivoque.. Voici
338 MERCURE DE FRANCE
Voici encore deux fragmens d'Inscriptions , aussi sur du Marbre..
D M
SEX. SENODIO SEVERO
VESTIARIO HEREDES POSVEVN...
Ꭰ M
LERONTIO IVNIANO DEFVNCTO
L.FRONTIVS IVNIVS. PATER.V.S.P.
Enfin dans ces differens travaux , où
l'on avoit creusé considerablement en
divers endroits , il se trouva beaucoup
de Médailles de bronze de toutes les
grandeurs , et quelques-unes d'argent ,
d'Empereurs , d'Imperatrices , de Cesars,.
&c. depuis le plus haut Empire jusqu'aux
Constantins ; mais ce qui surprit beau
coup , ce fut de découvrir parmi ces Médailles unDiadumenien Grec , avec un revers qui rendoit la Médaille encore plus
singuliere. Voici , Monsieur , de quelle maniere M. Galland m'écrivit sur cette:
Découverte , dans une de ses Lettres datée de Caën le 13. Juillet 1705.
>> Au retour de mon voyage de Paris
>>M. Foucault , qui avoit fait travailler à
Vieux pendant mon absence, me donna
à
AVRIL. 1732. 639
à examiner un grand nombre de Mé-
»dailles fort crasseuses qu'on y avoit déter-
» rées . Il s'en est trouvé une de moyen
» Bronze , où l'on n'appercevoit presque
»rien , ni du côté de la tête , ni au re-
» vers ; je la nettoyai et je vis paroître
»une très- belle Médaille Grecque de Dia-
»dumenien, ayant d'un côté la tête de cet
»Empereur avec cette Legende M ONEA
» ΔΙΑΔΟΥΜΕΝIANOC. et sur le revers ,
»le Philosophe Heraclite de bout avec
»le Manteau de Philosophe , et une Mas-
»suë qu'il tient de la main gauche , et
» ces deux mots , ΕΦΕΣΙΩΝ ΗΡΑΚΛΕΙΤΟΣ.
» Cette Médaille a donné lieu à une Dissertation que je mets actuellement au
»net, et dont je me propose de vous
»faire part.
M. Galland tint sa parole : il m'envoya peu de temps après cette Dissertation , avec un dessein exact de la Médaille en question , que j'ai depuis vûë
en original dans le Cabinet de M. Foucault , je vous communiquerai l'une et
l'autre en son temps ; je reviens cependant à mon narré.
Quand M. Foucault jugea qu'il avoit
fait assez travailler à Vieux , et assez découvert de ruine et de Monumens , il
fit faire de toutes ces Ruines et de l'état
des
640 MERCURE DE FRANCE
des lieux en question , une espece d'Iconographie , pour en mieux conserver l'idée , prévoyant bien que tout cela changeroit bien- tôt de face et que les Proprieraires remettroient les choses dans leur
prémier état , pour continuer de labourer la terre , &c. Cette Iconographie , est
une élevation de tout l'Ouvrage sur une
Table d'environ 12. pieds de longueur
et de largeur proportionnée , sur laquelle
avec du gros carton diversement coloré ,
on avoit représenté au naturel la figure
de ces Ruines en petit , il y avoit sur
ces Cartons des Enduits et de la terre
élevée autour pour les soutenir et pour
mieux figurer les endroits creusez , &c .
M. Foucault fit porter cette Représen
tation à sa Maison d'Atie , située à quatre lieuës de Paris , avec les Marbres contenant les Inscriptions et les autres fragmens d'antiquité trouvez à Vieux , parmi
lesquels il y avoit un Mercure de pierre
d'un pied et demi dehauteur, parfaitement
beau et très-bien conservé ; ce Morceau
fut trouvé en curant un Puits du Village,
peu de temps avant les autres Découver
tes. C'est à Atie que plusieurs Curieux
ont vû et examiné ces Monumens d'Antiquité , qui en seront aussi de la sagacité
de M. Foucault , de son bon goût et de
son amour pour les Lettres.
AVRIL, 1732. 64r
Voilà , Monsieur , tout ce qu'on peut
sçavoir, et tout ce qui se peut dire de plus
exact sur les découvertes de Vieux. Elles
confirment la tradition ancienne et universelle du Païs , sur le séjour des Romains , dans le même Païs , et sur l'existence d'une Ville , qui , comme beaucoup
d'autres , n'ayant pû résister à la vicissitude des temps, a perdu jusqu'à son nom
permettez -moi d'ajouter quelques Remarques à ma Narration
LETTRE VIII.
M
'R Foucault , Intendant de la Géneralité de Caën , bien persuadé ,
Monsieur , que la Tradition du Pays touchant le lieu deVieux, n'étoit point vaine,
avoit toûjours eu envie de s'en assurer
par quelque recherche ; mais il étoit bien
aise qu'il se présentât une occasion un
peu plausible de la faire , lorsqu'au mois
de Mars de l'année 1705. le Seigneur de
Vieux vint lui donner avis qu'on avoit
trouvé deux Pierres avec des Inscriptions,
ajoûtant que des Maçons en avoient déja
pris une à son insçû , pour employer à
quelques réparations et en avoient gâté
les Lettres que Fautre étant plus difficile à tirer, avoit été abandonnée , et recouverte de terre, ne doutant point qu'on
ne fit en cet endroit quelque découverte
plus considerable. M. l'Intendant , qui
étoit alors avec M. Belain , Curé de Blainville , et Secretaire de l'Académie de
Caën, résolut d'aller sur les lieux le lendemain , l'engageant de l'y accompagner,
ce qui fut executé,
י
AV Oh
632 MERCURE DE FRANCE
On chercha en vain la Pierre en question , elle ne fut point retrouvée ; on déterra seulement quelques Médailles. Tandis qu'on faisoit ce travail inutile , un
Laboureur vint dire que dans sa Piece de
terre il emportoit souvent avec la Charruede fort belles Briques , dont quelquesunes étoient ornées de feuillages , ce qui
détermina de faire creuser dans ce Champ..
En y entrant on apperçut une petite élevation couverte de ronces , et tout au
près quantité de morceaux de Brique ,
ornées de feuilles d'Acanthe. M. Belin
ayant poussé sa Canne dans un trou , en
remuant ces Briques , trouva une liberté
de tourner dans ce même trou , ce qui
fit juger et déterminer qu'il falloit commencer par là à foüiller.
Les Paysans ne travaillerent pas longtemps sans decouvrir un Mur d'environ
cinq pieds d'épaisseur , et en continuant
de creuser à trois pieds de profondeur ,
on découvrit environ vingt pieds de long
du même Mur , au bout duquel travail
il se trouva une espece d'Angle er de
Contour qui étoit de neuf pieds. M. Foucault crut d'abord que c'étoient des fondations , mais M. Belin pensa le contraire
sur ce que ce Mur étoit crêpi fort proprement, et conjectura que ce reste d'élevation
AVRIL: 17320 633
levation d'un Bâtiment iroit jusqu'au niveau d'un Ruisseau qui coule au bas de
ce Champ ; de quoi on convint. Commet
l'heure de partir pressoit , on ne put pour
cette premiere fois en faire davantage.
M. Foucault pria M. de Vieux , de mettre dès le lendemain le plus d'Ouvriers
qu'il pourroit et de faire travailler diligemment jusqu'à la huitaine qu'il y re- tourneroit.
Il n'y manqua pas , en effet , toûjours
accompagné de M. Belln , et trouva qu'en
creusant jusqu'au bout de la trace qu'on
avoit marquée et jusqu'à l'extremité du
Champ , on avoit découvert un beau
Bassin de pierre , d'environ douze pieds
de diametre , entouré de trois rangs de
Sieges , avec une ouverture par laquelle ,
au moyen d'un degré de cinq marches ,
on descendoit dans ce Bassin , dont le
fond étoit fort uni et formé de belles pierres blanches , jointes ensemble avec un
mortier très -poli , dans lequel on voyoit
de petits morceaux de Marbre rouge. Ce
mortier étoit si dur qu'on eut bien de la
peine à l'entamer avec une Pince , pour
voir surquoi ce Bassin étoit assis . Il l'étoit
sur d'autres pierres , posées de côté sur
du sable , au- dessous duquel il y avoir
encore un lit du même mortier , et entre
A vj ces
634 MERCURE DE FRANCE
ces pierres on voyoit plusieurs Tuyaux
de Brique.
Ce qui avoit paru un Angle dans le
Mur , d'abord découvert , se trouva être
une voute qui couvroit une Etuve, dans
laquelle on trouva encore le Fourneau qui
l'échauffoit, tout noirci de fumée , dans
une petite fenêtre plusieurs petits Instrumens d'Yvoire qui servoient dans l'usage
des Bains à la propreté du corps , &c.
Comme la terre avoit couvert le debris du grand Bâtiment , dont le Bassin
et l'Etuve ne faisoient qu'une partie , on
découvrit aussi en remuant cette même
terre et en continuant de creuser , plu
sieurs parties de très- belles voûtes , la
pluspart renversées , sous lesquelles on
avoit enfermé des Tuyaux de Brique. Le
mortier étoit si bien lié et uni avec les
pierres , qu'on les cassoit plutôt que de
les séparer de ce mortier.
Les Murs du Bâtiment principal dont
on vient de parler , ayant plus de 200.
pieds de longueur et 4 à 5. pieds d'é
paisseur , étoient construits alternativementd'un lit de Briques d'un pied en quar
ré , de trois pouces d'épaisseur , et d'un
très beau rouge , et d'un lit de pierres
blanches , toutes d'un même échantillon,
liées avec du ciment. L'ordre fut donné
de
AVRIL. 1732. 635
de continuer le creusement et le remuage des terres , et d'augmenter le nombre
des Ouvriers , ce qui fut executé pendant
huit autres jours.
י
Au bout de ce temps- là M. Foucault
et M. Belin retournerent sur les lieux et
trouverent qu'au moyen d'un grand travail , on avoit découvert un second Bassin construit comme le premier de ces
belles Pierres blanches qu'on voit à Caen,
et ayant les mêmes accompagnemens. Če
Bassin avoit ses écoulemens par des tuyaux
de Brique , qui portoient les eaux jusques
dans le Ruisseau dont il est parlé cydessus. On avoit aussi découvert le commencement d'un Aqueduc , qui selon sa
direction , devoit passer sous le Village
de Vieux , pour recevoir l'eau d'une Fontaine qu'on voit encore auprès. On ne
put pas découvrir davantage de cet Aqueduc , il auroit fallu pour cela renverser
une partie du Village.
Au lieu d'un travail inutile , on creusa
encore jusqu'à une des extremitez du
Champ, ce qui acheva de faire découvrir
toute l'enceinte de l'Edifice entier , qui
devoit être d'une grande étendue , er
qu'on crut , avec raison , avoir été un
Gymnase , ou lieu des Exercices que les
Romains avoient bâti en cet endroit et
qu'ils
836 MERCURE DE FRANCE
qu'ils avoient accompagné de Thermes
de Commoditez et d'autres ornemens utiles et en usage chez les Anciens. Pour
s'y moins tromper , M. Foucault avoit
apporté son Vitruve , dont la lecture sur
la construction de pareils Bâtimens , appliquée à l'examen des Monumens dont
on vient de parler , acheva de constater
ce qu'on n'avoit encore fait que conjecturer par leur conformité avec les descrip
tions exactes et les regles données par cet
Auteur.
On trouva au reste des Antiquitez de
plus d'une espece dans ce remuement des
terres ; d'abord un grand Tombeau de
pierre, dans lequel étoient enfermez un
Squelete humain et quelques Médailles.
Romaines , ensuite le Fust d'une Colomne de Marbre , dont on ne peut découvrir la bize ni le chapiteau. La Statuë d'une
femme, ayant la tête voilée et la plus belle qu'on puisse voir tenant de la
main droite une Patere ou Coupe , servant aux Libations , la Statue étoit tron
quée par le bas. On découvrit aussi plusieurs fragmens d'Inscriptions , ceux- cy
entre autres.
و
MEMO RIAM
MAGNINI
SENICIONIS
ME-
AVRIL. 1732. 637
MEMORIA
VASSIONI
Q: K.
La plus entiere de ces Inscriptions étoit
gravée sur une Cyppe ou espece de Piedestal quarré, en forme de petit Autel
et contenoit ces mots :
DEO MARTI
C. VICTORIVS
FELIX PROSEET
IVNIO FILIO SVO
ET MATERNAE VIC
TORIS CONIVGIS
MÆE. V. S. L. M. DIALE
ET. BASSO. COS. IDIBVS
MARTIS.
Celle qui suit n'est pas moins entiere , elle étoit gravée sur un Bloc de
Marbre rougeâtre , comme celui de la
Carriere dont j'ai parlé.
NOVIVS VIC
TOR MEMO
RIAE DOMI
TIAE PANFILE
M Galland prétend dans une de ses Lettres ,
qu'il falloit Sax , au lieu de Mex , mais qu'on a
employé ce dernier motpour éviter toute équivoque.. Voici
338 MERCURE DE FRANCE
Voici encore deux fragmens d'Inscriptions , aussi sur du Marbre..
D M
SEX. SENODIO SEVERO
VESTIARIO HEREDES POSVEVN...
Ꭰ M
LERONTIO IVNIANO DEFVNCTO
L.FRONTIVS IVNIVS. PATER.V.S.P.
Enfin dans ces differens travaux , où
l'on avoit creusé considerablement en
divers endroits , il se trouva beaucoup
de Médailles de bronze de toutes les
grandeurs , et quelques-unes d'argent ,
d'Empereurs , d'Imperatrices , de Cesars,.
&c. depuis le plus haut Empire jusqu'aux
Constantins ; mais ce qui surprit beau
coup , ce fut de découvrir parmi ces Médailles unDiadumenien Grec , avec un revers qui rendoit la Médaille encore plus
singuliere. Voici , Monsieur , de quelle maniere M. Galland m'écrivit sur cette:
Découverte , dans une de ses Lettres datée de Caën le 13. Juillet 1705.
>> Au retour de mon voyage de Paris
>>M. Foucault , qui avoit fait travailler à
Vieux pendant mon absence, me donna
à
AVRIL. 1732. 639
à examiner un grand nombre de Mé-
»dailles fort crasseuses qu'on y avoit déter-
» rées . Il s'en est trouvé une de moyen
» Bronze , où l'on n'appercevoit presque
»rien , ni du côté de la tête , ni au re-
» vers ; je la nettoyai et je vis paroître
»une très- belle Médaille Grecque de Dia-
»dumenien, ayant d'un côté la tête de cet
»Empereur avec cette Legende M ONEA
» ΔΙΑΔΟΥΜΕΝIANOC. et sur le revers ,
»le Philosophe Heraclite de bout avec
»le Manteau de Philosophe , et une Mas-
»suë qu'il tient de la main gauche , et
» ces deux mots , ΕΦΕΣΙΩΝ ΗΡΑΚΛΕΙΤΟΣ.
» Cette Médaille a donné lieu à une Dissertation que je mets actuellement au
»net, et dont je me propose de vous
»faire part.
M. Galland tint sa parole : il m'envoya peu de temps après cette Dissertation , avec un dessein exact de la Médaille en question , que j'ai depuis vûë
en original dans le Cabinet de M. Foucault , je vous communiquerai l'une et
l'autre en son temps ; je reviens cependant à mon narré.
Quand M. Foucault jugea qu'il avoit
fait assez travailler à Vieux , et assez découvert de ruine et de Monumens , il
fit faire de toutes ces Ruines et de l'état
des
640 MERCURE DE FRANCE
des lieux en question , une espece d'Iconographie , pour en mieux conserver l'idée , prévoyant bien que tout cela changeroit bien- tôt de face et que les Proprieraires remettroient les choses dans leur
prémier état , pour continuer de labourer la terre , &c. Cette Iconographie , est
une élevation de tout l'Ouvrage sur une
Table d'environ 12. pieds de longueur
et de largeur proportionnée , sur laquelle
avec du gros carton diversement coloré ,
on avoit représenté au naturel la figure
de ces Ruines en petit , il y avoit sur
ces Cartons des Enduits et de la terre
élevée autour pour les soutenir et pour
mieux figurer les endroits creusez , &c .
M. Foucault fit porter cette Représen
tation à sa Maison d'Atie , située à quatre lieuës de Paris , avec les Marbres contenant les Inscriptions et les autres fragmens d'antiquité trouvez à Vieux , parmi
lesquels il y avoit un Mercure de pierre
d'un pied et demi dehauteur, parfaitement
beau et très-bien conservé ; ce Morceau
fut trouvé en curant un Puits du Village,
peu de temps avant les autres Découver
tes. C'est à Atie que plusieurs Curieux
ont vû et examiné ces Monumens d'Antiquité , qui en seront aussi de la sagacité
de M. Foucault , de son bon goût et de
son amour pour les Lettres.
AVRIL, 1732. 64r
Voilà , Monsieur , tout ce qu'on peut
sçavoir, et tout ce qui se peut dire de plus
exact sur les découvertes de Vieux. Elles
confirment la tradition ancienne et universelle du Païs , sur le séjour des Romains , dans le même Païs , et sur l'existence d'une Ville , qui , comme beaucoup
d'autres , n'ayant pû résister à la vicissitude des temps, a perdu jusqu'à son nom
permettez -moi d'ajouter quelques Remarques à ma Narration
Fermer
Résumé : SUITE du Voyage de Basse Normandie. LETTRE VIII.
En 1705, M. Foucault, Intendant de la Généralité de Caen, initia une enquête sur la tradition locale concernant le lieu de Vieux, après avoir été informé de la découverte de deux pierres inscrites. Accompagné de M. Belain, curé de Blainville et secrétaire de l'Académie de Caen, ils se rendirent sur place mais ne trouvèrent pas les pierres. Un laboureur les orienta vers des briques ornées de feuillages dans son champ, ce qui mena à la découverte d'un mur épais et d'un bassin de pierre entouré de sièges, probablement une partie d'un bâtiment romain. Les fouilles révélèrent également une étuve avec des instruments en ivoire, des voûtes et des tuyaux de brique. Le bâtiment principal, long de plus de 200 pieds, était construit avec des briques et des pierres blanches liées par du ciment. Divers objets antiques, tels que des médailles, des statues et des inscriptions, furent également découverts. Parmi les inscriptions, certaines mentionnaient des noms romains et des dédicaces à des divinités. Ces découvertes confirmèrent la présence romaine et la tradition locale d'une ville disparue. M. Foucault fit réaliser une iconographie des ruines et conserva les artefacts dans sa maison d'Auteuil.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 641-656
REMARQUES sur les ruines de Vieux.
Début :
L'un des plus Sçavans Hommes que la Normandie ait [...]
Mots clefs :
M. Foucault, Médailles, Inscription, Ruines de Vieux, Marbre, Pline, Antiquité, Romains
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : REMARQUES sur les ruines de Vieux.
REMARQUES sur les ruines
deVieux.
L'un des plus Sçavans Hommes que la
Normandie ait porté , je veux dire M.
Huet,Evêque d'Avranches,n'auroit peutêtre pas écrit , comme il a fait , au sujet
de Vieux , si les découvertes dont je viens
de parler , avoient précédé la composition de ses Origines de Caen , l'un des plus
curieux Ouvrages qui ayent été écrits en
ce genre , et le plus rempli de recherches historiques , géographyques , étymologiques, &c. ensortequ'il seroit à souhaiter que chaque Ville un peu importante , et de quelque ancienneté , eut un
Historien à peu près semblable. Il est cependant arrivé à ce grand critique de n'avoir pas toujours écrit avec la même jus tesse
642 MERCURE DE FRANCE
tesse , dans le Livre dont je viens de parler ; cela se remarque sur tout dans l'Article de Vieux ; soit amour de la Patrie ;
qui ne lui a pas permis de reconnoître
dans le même canton une Ville plus an
cienne que Caën , qui de son aveu ne l'est
pas beaucoup , soit prévention ou éloignement de penser , commeon a toujours
fait dans le Païs , à l'égard des ruines de
Vieux, M.Huet ne veut pas que ce soient
les restes d'une ancienne Ville ; et on n'y
voit , selon lui , tout au plus que les vestiges d'un Camp des Romains.
Il est inutile d'entrer icy dans un détail des raisons , ou plutôt des conjectures que rapporte ce Sçavant Ecrivain`,
pour ne point reconnoître une Ville ancienne dans les ruines de Vieux , parce
que ces raisons tombent d'elles- mêmes
depuis les monumens qui y ont été découverts , avant, durant et après les Recherches de M. Foucault ; monumens qui
ne peuvent convenir qu'à une Ville et
à une Ville considérable.
Le plus remarquable de ces monumens ,
et qui fait icy , selon moy , une démons
tration ; c'est , sans doute, le fameux Marbre de Joigny , trouvé à Vieux , il y a déja
bien des années. Ce Marbre, tout à-fait
semblable à celui dela Carriere deVieux ;
est
AVRIL 1732 843
est , comme je l'ai dit ailleurs , le Piédestal , sur lequel étoit élevée la Statuë de
T. SENNIUS SOLENNIS , Grand-Prêtre Gaulois , Homme des plus distinguez dans sa
Nation , lequel étoit originaire de la cité
des Viducassiens. Cette Cité est nommée trois fois dans la longue Inscription , gravée sur le Piédestal dont je vous
ai envoyé une coppie, avec ma Ive Lettre, en sorte qu'on ne peut se refuser à
une preuve si évidente.
M. Huet qui a senti la force de cette
preuve , a cru l'affoiblir , en disant que
quoique ce Marbre soit semblable à celui de
Vieux , il peut bien avoir été tiré de quelqu'autre Carriere de Marbre pareil , qui
aura depuis été épuisée ou recouverte et abandonnée. Tout le Marbre blanc ne vient pas
de Paros, Je vous laisse , Monsieur , à juger de la solidité de ce raisonnement ; et
en attendant , on peut , je crois , s'en raporter au témoignage de quantité de
personnes éclairées , qui ont vu le Piédestal de Torigny , et qui l'ayant comparé
à plusieurs Marbres , tirez de la Carriere
de Vieux entr'autres , avec les Colomnes
qui sont dans les Eglises de S. Jean et des
Carmes de Caen, assurent toutes que c'est
la même nature , la même qualité , &c.
Il est vrai que tout le Marbre blanc ne
vient
344 MERCURE DE FRANCE
-
vient pas de Paros ; mais il est aussi vrai
que comme nos Connoisseurs , nos Marbriers même , distinguent fort bien le
Marbre de cette Isle , d'avec les autres.
Marbres blancs par la difference du grain,
du poli , de la dureté , &c. On peut distinguer de même le Marbre rougeâtre et
veiné , de Vieux , d'avec les autres Marbres de pareille espece. Celui de Vieux a
cela de particulier , que le poli n'en est nullement beau.
>
Quant au témoignage de l'Inscription,
notre sçavant Prélat y répond en disant
que: Civitas viducassium , signifie là
comme en cent autres lieux des anciens
un Peuple , et non une Ville, Mais je ne
sçai si cette interpretation éludera un témoignage si formel ; on peut bien accorder que Viducasses , est le nom d'un Peuple; mais les Peuples ayant bâti les Villes,
ausquelles ils ont donné des noms particuliers , il est communément arrivé que
dans la suite ces noms particuliers ont
cessé d'être usitez , et qu'on n'a employé
dans le discours que le nom du Peuple
qui les avoit bâties, où dont elles avoient
été capitales. C'est ce qu'on peut reconnoître par la lecture de César , de Pline
de Ptolomée, &c. chez lesquels les noms
de nos Villes d'aujourd'hui,sont des noms
de
AVRIL 1732 645
1
de Peuples , de Nations. Les Viducassiens
ou une partie de ce Peuple ont donc construit la Cité dont il s'agit icy. Il est vrai
que nous ne sçavons pas le nom particulier qu'ils lui donnerent , aussi parfaite
ment que nous sçavons que la Capitale
des Lexoviens s'appelloit Neomagus ; mais
les Monumens trouvez en ce même lieu ,
témoignent évidemment que c'étoit une
Ville ; et les termes de la fameuse Inscription de T. S. Solennis , déterminent à
croire que c'étoit une Ville des Viducassiens.
Au reste , Monsieur , quand je vous
ai dit , en vous envoyant cette Inscription , qu'elle ne se trouvenulle part dans
les differens , Recueils imprimez , je n'ai
pas parlé avec exactitude ; je l'ai depuis
trouvée moi-même , dans le Recueil de
M. Spon , intitulé : Miscellanea erudite
Antiquitatis , &c. 1. vol. fol. Lyon, 1685.
à la page 82. Mais elle y est rapportée
tres-imparfaitement , sur une coppie envoyée à M. Spon , qui ne contenoit que
ce qui se trouve sur les deux côtez du
Piedestal , et rien du tout de ce qui est
gravé sur la face , et qui est pourtant le
plus remarquable et le plus instructif de
ce Monument. J'aurai occasion de vous
en parler encore une fois , mais revenons
à M. Huet,
Cet
45 MERCURE DE FRANCE
Cet habile Ecrivain oppose le silence
'des Historiens , celui de Ptolomée , de
Itineraire d'Antonin , et des Tables de
Peutinger , à ceux qui veulent que Vieux
ait été la Ville des Viducassiens , et qui
outre la tradition du Païs , citent un Passage de Pline , dont je vais parler. Mais on
peut lui répondre avec fondement , que
nous n'avons pas tous les Historiens et
tous les Géographes anciens , que nous
n'avons pas les Ouvrages entiers de tous
ceux qui restent , et que ceux- cy ont encore fait bien des omissions , ce qui ne
peut jamais former qu'un Argument négatif; Argument qui tombe à la vûë des
Monumens découverts à Vieux.
Le silence , au reste , de Ptolomée , est
icy fort mal allégué , puisqu'il est du
moins certain que ce fameux Géographe
liv. 11. chap. 8. en traitant de la Gaule
Lyonnoise: Celto Galatia Lugdunensis situs ; et faisant l'énumeration des Peuples
qui bordent l'Ocean depuis la Seine jusqu'au fond de la basse Bretagne , à l'endroit appellé alors Gobeum Promontorium ,
met parmi ces Peuples , Biducenses , qui
est la même chose que s'il avoit mis viducenses , lequel terme de Biducenses ou
Viducenses , a une égale analogie avec
Vieux , comme Viducasses,
Le
AVRIL 1732% 847.
Le passage de Pline se trouve dans le
18 ch. du 4 liv. M. Huet le rapporte et
en jugé de cette maniere : » Ceux qui
» veulent , dit-il , que Vieux ait été une
Ville , se fondent sur ce Passage de Pli
>> ne , où il met entre les Peuples de la
» Gaule Lyonnoise , Parrhisios , Trecasses,
» Andegavos , Viducasses, Vadicasses;d'où
ils inferent que ces derniers , désignant
» les Peuples du Bessin , les Viducasses
marquent la Ville de Vieux... Mais il
» est tres- probable que dans le Passage de
» Pline , Viducasses ou Fadicasses , sont
» un même nom , qui signifie le Bessin
* et qu'un de ces mots est une diverse
» leçon de l'autre , qui a passé de la mar-
» ge dans le texte , comme il est arrivé
» dans une infinité de lieux des anciens
» Autheurs. De plus , Pline marque des
» Peuples en cet endroit , et non pas des » Villes.
Avant que de réfléchir sur cette Critique de M. Huet , il est bon d'observer
que le Passage de Pline est different dans
toutes les Editions que j'ai vûës , de celui
qu'on vient de lire ; mais pour ne point
entrer icy dans un détail ennuyeux des
Variations , et de différentes leçons qu'on
trouve sur ce sujet , je me contente de
rapporterce même Passage , pris dans l'EB dition
18 MERCURE DE FRANCE
dition du P. Hardouin , la plus récente , et
qu'on a lie de croire la plus correcte de toutes , l'Auteur ayant consulté les meilleurs Manuscrits , et n'ayant ignoré aucunes des Editions imprimées. Or ce Påssage est tel : Parisi , Trecosse's, Andegavi,
Viducasses , Bodiocasses , &c. Par ce der
nier terme , toute la probabilité de M.
Huet disparoît ; on ne croira jamais en
effet que Bodiocasses et Viducasses ne sont
qu'un même nom , qui signifie le Bessin ,
&c. Bodiocasses peut le signifier fort naturellement , et beaucoup mieux que Vadicasses , ainsi toute la conjecture du sçavant Prélat devient plus ingénieuse que
solide.
J'ai répondu cy- dessus à ce qu'il ajoute , qu'en cet endroit Pline marque des
Peuples et non pas des Villes , au sujet de
l'interprétation qu'il donne au terme de
Civitas Viducassium , de l'Inscription de
Torigny trouvée à Vieux ; ainsi , Monsieur,au lieu d'une répetition inutile,jeme
contente de remarquer icy que le P. Hardouin , dans une Note qu'il a faite sur
Pendroit de Pline , dont nous venons de
parler , reconnoît que Ptolomée a parlé
des Viducassiens ; mais on ne sçait sur
quelle autorité il place , comme il fait ,
ce Peuple dans la Basse- Bretagne , et les
recon-
AVRIL 1132 649
reconnoît pour les Fondateurs de la Ville
de Dinan; l'idée en doit paroître singuliere aux bas Normands , sur tout depuis
les Découvertes de Vieux,
la
On voit cependant , que selon les anciens Auteurs , les Viducassiens étoient
un Peuple de la Gaule Lyonnoise, et que
ce Peuple étoit où est Vieux , ou aux environs , vers le Midy et le Couchant..
L'Inscription de Torigny confirme ces
autoritez. Il est plus que probable par
circonstance du lieu où cette Inscription
a été trouvée , que la Ville en question ,
étoit assise sur le Terrain , dont le Village de Vieux , occupe encore une partie
entre la Riviere d'Orne , appellée O'λiva
dans Ptolomée et celle d'Odon.
- Vous sçavez , Monsieur , qu'après la
conquête des Gaules par les Romains
les Monumens publics ne furent plus
gueres érigez dans ce Païs , que dans la
Langue , et selon l'usage et le génie des
Vainqueurs Outre l'Inscription Romaine, dont je viens de parler , qui est toute à la gloire d'un Prêtre Gaulois , vous
avez vû dans ma Lettre , qu'on a trouvé
dans le même lieu , d'autres Inscriptions
Romaines , qui , en prouvant cet usage ,
prouvent aussi que les Romains ont été
long- temps les Maîtres de la Ville des ViBij ducas-
*
750 MERCURE DE FRANCE
ducassiens. Celle qui commence ainsi :
DEOMARTI, &c.indique assez le bas Empire et la décadence des Arts. Plusieurs
Lettres y sont mal formées , et sur tout
les Lettres A. L. o. M. Galland la croïoit
environ dutemps de Claude le Gothique,
mortvers 271.11 croïoit aussi qu'il y avoit
là un Temple dédié au Dieu Mars. Des
deux Consuls , Dialis et Bassus , sommez
dans l'Inscription , le nom dupremier ne
se trouve point, dans les Fastes que nous avons. On en voit du nom du second
Bassus , sous plusieurs Empereurs , mênie
du haut Empire. Il est vrai que dans les
Fastes , les noms des Consuls subrogez ou
substituez sont souvent omis. Le Consul
Dialis , de l'Inscription , étoit peut-être
de cette espece. Au reste, l'ignorant ouvrier a gravé sur le Marbre DIALÆ, au lieu de DIALE. Ce même nom se lit
dans Gruter , 8 Inscript. Edit. de 1707.
pag. 307.
12 ران .
Les autres Inscriptions , quoique mutilées , marquent une plus hauteAntiquité,
par la beauté et par la correction des caracteres ; on y voit les noms de quelques
anciennes Familles Romaines ; entre- autres des Familles Domitia , Novia , Comu
ficia , &c.
Je crois que vous trouverez juste l'obser-
AVRIL. 17523
servation de M. G. au sujet du mot MEMORIA , qui se trouve dans les deux Fragmens d'Inscription , cy devant rapportez ; il signifie là la même chose que Monumentum et Sepulcrum ; on le trouve en
effet, employé en ce sens dans Suetone, qui
dit qu'Othon , avant que de se donner la
mort , laissa le soin de sa Sépulture et de
ses Funérailles à Messaline. Commendans ,
Reliquias suas et Memoriam.
Ce Sçavant Antiquaire pensoit aussi
que Magninus Senecio , dont le nom est
gravé dans l'un de ces Fragmens , pouvoit
bien être le fils et le descendant de ce Senecion , dont parle assez plaisamment le
Rhereur Sénéque , lequel étoit surnommé Grandio, par Sobriquet, à cause de son
affectation ridicule pour tout ce qui
étoit grand dans les choses deson usage
les plus communes. Grands. Vases à boire,
grands Souli rs , grosses Figures , grands
Esclaves , et jusqu'à sa Maîtresse , qui tenoit du Colosse. Le surnom de Magninus
de l'Inscription , ne revient pas mal à célui de Grandio.
La grande quantité de Médailles trouvées à Vieux , et celles qu'on y déterre
tous les jours , méritent une attention
particuliere ; elles démontrent concurBiij remment
652 MERCURE DE FRANCE
•
remment avec les Inscriptions et les autres Monumens , découverts au même
lieu , que les Romains ont été long- tems
en possession dela Ville des Viducassiens.
Ces Médailles , comme je l'ai déja observé , sont depuis les premiers Empereurs
jusqu'aux enfans de Constantin. On peut
donc raisonnablement présumer quecette
Ville a subsisté jusques dans le rv siécle ;
on pourroit former des conjectures
moins solides sur les causes et le temps
plus précis de sa destruction ; circonstances omises par les Historiens ; mais je
ne m'engagerai point dans cette recherche aussi pénible qu'inftuctueuse.
Je me dispense aussi d'examiner si la
Ville de Caen a été bâtie , comme quelques-uns le prétendent , des ruines de
celle des Viducassiens , ou de Vieux. M.
Huet tient pour la négative et soutient
que Caën , du temps de Charles le Chauve , c'est- à- dire , vers 840. n'étoit guéres
plus qu'un Village.
Je finis mes Remarques , en observant
que ce Sçavant Homme , malgré la prevention dont j'ai parlé , semble revenir
au sentiment qu'il a prétendu combattre
au sujet des ruines de Vieux: Voici com
ment il s'exprime , après avoir beaucoup
discouru là-dessus.
»IL
AVRIL. 17321 653
Il est donc beaucoup plus apparent ,
"par tous ces Monumens d'antiquité, qué
» Vieux étoit autrefois un Camp des Ro
»mains , placé sur la Riviere d'Orne ,
» pour y conserver un passage ,
tendant
» vers le Païs ( a ) d'Hiesmes. Ce Camp
» ayant été fixé en ce lieu , donna l'occa-
» sion et le loisir aux Soldats d'y bâtir des
» Maisons , et un Aqueduc , pour leur
در
commodité , dont il reste des ruines.
» La même chose est arrivée en plusieurs
» autres endroits et quelquefois ces .
Camps sont devenus Villes , et quoi-
»que Villes , ils ont retenu le nom de
» Camps , témoin la Ville de Constance ,
qui étoit dans le commencement le
Camp de Constantius Chlorus , Pere de
»Constantin le Grend , et qui dans la suite est devenu une Ville celebre et floris-
» sante. Témoin encore la Ville de Cou
» tance, qui quoique Ville, s'appelle com-
» me la premiere : Constantia Castra. Cela
» se confirme encore par ce grand chemin
» pavé , qui alloit du Bessin dans l'Hies- "
» mois , et qui passe par Vieux-, bâti dơ
» Brique , ainsi que l'Aqueduc.
C'est toujours beaucoup de convenir
que Vieux a pu être une Ville , dont un
( a ) Le Païs d'Hiesmes est un Canton qui comprend une partie du Diocèse de Bayeux.
Biiij Camp
64 MERCURE DE FRANCE
Camp des Romains ait été l'origine. Pour
moi , je croirois plutôt le contraire ; sçavoir , qu'auprès de la Ville Gauloise des
Viducassiens , les Romains la trouvant
bien située , suivant leurs veuës , &c. auroient établi un de leurs Camps , conjecture que j'abandonne encore à votre critique , et que je n'entreprens pas de sou- tenir..
Outre l'aveu que nous venons de remarquer de la part de M. Huet, il n'est
pas indifferent de rapporter icy ce qu'il
nous apprend dans le même chapitre sur
la dénomination de Vieux. Vieux , dit it ,
est appellée Vedioca et Veoca , dans les
vieux titres de l'Abbaye de Fontenay. I
est assez incertain , continue - t- il , si
Veoca et Vedioca ont été formez du mot
de Vieux, ou Vieca de Vedioca, et de Veoce. Le nom de Bayeux ne vient pas de
Bajoca, mais de Biducasses , &c. je ne le
suivrai pas dans le reste de cette discussion étymologique , où notre Auteur ne
dit rien , ce me semble , de solide , n'apprend qu'à douter et ne fait que conjec- turer.
Mais vous me prévenez sans doute icy ,
Monsieur , sur le nom de Vedioca , pour
signifier Vieux , qui se trouve dans les
titres d'une ancienne Abbaye voisine.; et
vous.
AVRIL 1732. 655
vous m'allez dire qu'on ne peut guéres
méconnoître dans ce nom les Biducenses de Ptolomée , et les Badiocasses de
Pline , et le Civitas viducassium de l'Inscription trouvée à Vieux. Votre réfléxion
est juste , et me dispense d'examiner si le
nom de Vieux , ne viendroit point de Vetera Castra ; en supposant dans ce lieu ,
avec M. Huet , un Camp des Romains ';
ou de Ve , du Latin , Vadum , un Gué ;
supposant encore qu'il y en avoit un dans
le même lieu , lequel mot , Ve , s'exprimoit autrefois par Vien ; comme pour
André, on disoit Andrieu , c. toutes
conjectures des plus frivoles , qui ne méritoient pas de sortir d'une pareille plume, et qui tombent d'elles - mêmes par ce que vous venez de voir.
On peut , ce me semble , conclure de
toutes ces observations , que la Ville des
Viducassiens dont deux anciens Ecrivains
ont parlé , étoit située à peu près dans le
terrain , dont le Village de Vieux occupe
aujourd'hui une partie , entre les Rivie
res d'Orne et d'Odon , et que les ruines découvertes dans ce terrain sont celles de
cette ancienne Ville , qu'elle a été considérable du temps que les Romains l'ont
occupée , comme il paroît sur tout par les
beaux restes de son Gymnase , et des acBy com-
656 MERCURE DE FRANCE
compagnemens de cet Edifice public ,
( qu'on n'en voyoit de pareils que dans
les bonnes Villes ) et par les autres Monumens dont on a parlé ; que cette Ville
étoit avantageusement située , à cause des
deux Rivieres , dont l'une lui donnoit la
communication avec la Mer Oceane , l'éloignement n'étant que d'environ 5 lieuës;
que la même Ville devoit être florissante
par le commerce et par la communication qu'elle pouvoit avoir avec les Nations les plus éloignées.
La Médaille Grecque de Diaduménien
en est une preuve indirecte, et cette preu
ve est fortifiée par d'autres Médailles
Grecques et de fabrique étrangere , par
rapport aux Romains , découvertes depuis au même lieu , dont j'espere de vous
entretenir dans une autre Lettre. Celle- cy
s'est allongée beaucoup plus que je ne
croyois ; je soumets à vos lumieres tout ce
qu'elle renferme , et je suis,Monsieur, &c.
deVieux.
L'un des plus Sçavans Hommes que la
Normandie ait porté , je veux dire M.
Huet,Evêque d'Avranches,n'auroit peutêtre pas écrit , comme il a fait , au sujet
de Vieux , si les découvertes dont je viens
de parler , avoient précédé la composition de ses Origines de Caen , l'un des plus
curieux Ouvrages qui ayent été écrits en
ce genre , et le plus rempli de recherches historiques , géographyques , étymologiques, &c. ensortequ'il seroit à souhaiter que chaque Ville un peu importante , et de quelque ancienneté , eut un
Historien à peu près semblable. Il est cependant arrivé à ce grand critique de n'avoir pas toujours écrit avec la même jus tesse
642 MERCURE DE FRANCE
tesse , dans le Livre dont je viens de parler ; cela se remarque sur tout dans l'Article de Vieux ; soit amour de la Patrie ;
qui ne lui a pas permis de reconnoître
dans le même canton une Ville plus an
cienne que Caën , qui de son aveu ne l'est
pas beaucoup , soit prévention ou éloignement de penser , commeon a toujours
fait dans le Païs , à l'égard des ruines de
Vieux, M.Huet ne veut pas que ce soient
les restes d'une ancienne Ville ; et on n'y
voit , selon lui , tout au plus que les vestiges d'un Camp des Romains.
Il est inutile d'entrer icy dans un détail des raisons , ou plutôt des conjectures que rapporte ce Sçavant Ecrivain`,
pour ne point reconnoître une Ville ancienne dans les ruines de Vieux , parce
que ces raisons tombent d'elles- mêmes
depuis les monumens qui y ont été découverts , avant, durant et après les Recherches de M. Foucault ; monumens qui
ne peuvent convenir qu'à une Ville et
à une Ville considérable.
Le plus remarquable de ces monumens ,
et qui fait icy , selon moy , une démons
tration ; c'est , sans doute, le fameux Marbre de Joigny , trouvé à Vieux , il y a déja
bien des années. Ce Marbre, tout à-fait
semblable à celui dela Carriere deVieux ;
est
AVRIL 1732 843
est , comme je l'ai dit ailleurs , le Piédestal , sur lequel étoit élevée la Statuë de
T. SENNIUS SOLENNIS , Grand-Prêtre Gaulois , Homme des plus distinguez dans sa
Nation , lequel étoit originaire de la cité
des Viducassiens. Cette Cité est nommée trois fois dans la longue Inscription , gravée sur le Piédestal dont je vous
ai envoyé une coppie, avec ma Ive Lettre, en sorte qu'on ne peut se refuser à
une preuve si évidente.
M. Huet qui a senti la force de cette
preuve , a cru l'affoiblir , en disant que
quoique ce Marbre soit semblable à celui de
Vieux , il peut bien avoir été tiré de quelqu'autre Carriere de Marbre pareil , qui
aura depuis été épuisée ou recouverte et abandonnée. Tout le Marbre blanc ne vient pas
de Paros, Je vous laisse , Monsieur , à juger de la solidité de ce raisonnement ; et
en attendant , on peut , je crois , s'en raporter au témoignage de quantité de
personnes éclairées , qui ont vu le Piédestal de Torigny , et qui l'ayant comparé
à plusieurs Marbres , tirez de la Carriere
de Vieux entr'autres , avec les Colomnes
qui sont dans les Eglises de S. Jean et des
Carmes de Caen, assurent toutes que c'est
la même nature , la même qualité , &c.
Il est vrai que tout le Marbre blanc ne
vient
344 MERCURE DE FRANCE
-
vient pas de Paros ; mais il est aussi vrai
que comme nos Connoisseurs , nos Marbriers même , distinguent fort bien le
Marbre de cette Isle , d'avec les autres.
Marbres blancs par la difference du grain,
du poli , de la dureté , &c. On peut distinguer de même le Marbre rougeâtre et
veiné , de Vieux , d'avec les autres Marbres de pareille espece. Celui de Vieux a
cela de particulier , que le poli n'en est nullement beau.
>
Quant au témoignage de l'Inscription,
notre sçavant Prélat y répond en disant
que: Civitas viducassium , signifie là
comme en cent autres lieux des anciens
un Peuple , et non une Ville, Mais je ne
sçai si cette interpretation éludera un témoignage si formel ; on peut bien accorder que Viducasses , est le nom d'un Peuple; mais les Peuples ayant bâti les Villes,
ausquelles ils ont donné des noms particuliers , il est communément arrivé que
dans la suite ces noms particuliers ont
cessé d'être usitez , et qu'on n'a employé
dans le discours que le nom du Peuple
qui les avoit bâties, où dont elles avoient
été capitales. C'est ce qu'on peut reconnoître par la lecture de César , de Pline
de Ptolomée, &c. chez lesquels les noms
de nos Villes d'aujourd'hui,sont des noms
de
AVRIL 1732 645
1
de Peuples , de Nations. Les Viducassiens
ou une partie de ce Peuple ont donc construit la Cité dont il s'agit icy. Il est vrai
que nous ne sçavons pas le nom particulier qu'ils lui donnerent , aussi parfaite
ment que nous sçavons que la Capitale
des Lexoviens s'appelloit Neomagus ; mais
les Monumens trouvez en ce même lieu ,
témoignent évidemment que c'étoit une
Ville ; et les termes de la fameuse Inscription de T. S. Solennis , déterminent à
croire que c'étoit une Ville des Viducassiens.
Au reste , Monsieur , quand je vous
ai dit , en vous envoyant cette Inscription , qu'elle ne se trouvenulle part dans
les differens , Recueils imprimez , je n'ai
pas parlé avec exactitude ; je l'ai depuis
trouvée moi-même , dans le Recueil de
M. Spon , intitulé : Miscellanea erudite
Antiquitatis , &c. 1. vol. fol. Lyon, 1685.
à la page 82. Mais elle y est rapportée
tres-imparfaitement , sur une coppie envoyée à M. Spon , qui ne contenoit que
ce qui se trouve sur les deux côtez du
Piedestal , et rien du tout de ce qui est
gravé sur la face , et qui est pourtant le
plus remarquable et le plus instructif de
ce Monument. J'aurai occasion de vous
en parler encore une fois , mais revenons
à M. Huet,
Cet
45 MERCURE DE FRANCE
Cet habile Ecrivain oppose le silence
'des Historiens , celui de Ptolomée , de
Itineraire d'Antonin , et des Tables de
Peutinger , à ceux qui veulent que Vieux
ait été la Ville des Viducassiens , et qui
outre la tradition du Païs , citent un Passage de Pline , dont je vais parler. Mais on
peut lui répondre avec fondement , que
nous n'avons pas tous les Historiens et
tous les Géographes anciens , que nous
n'avons pas les Ouvrages entiers de tous
ceux qui restent , et que ceux- cy ont encore fait bien des omissions , ce qui ne
peut jamais former qu'un Argument négatif; Argument qui tombe à la vûë des
Monumens découverts à Vieux.
Le silence , au reste , de Ptolomée , est
icy fort mal allégué , puisqu'il est du
moins certain que ce fameux Géographe
liv. 11. chap. 8. en traitant de la Gaule
Lyonnoise: Celto Galatia Lugdunensis situs ; et faisant l'énumeration des Peuples
qui bordent l'Ocean depuis la Seine jusqu'au fond de la basse Bretagne , à l'endroit appellé alors Gobeum Promontorium ,
met parmi ces Peuples , Biducenses , qui
est la même chose que s'il avoit mis viducenses , lequel terme de Biducenses ou
Viducenses , a une égale analogie avec
Vieux , comme Viducasses,
Le
AVRIL 1732% 847.
Le passage de Pline se trouve dans le
18 ch. du 4 liv. M. Huet le rapporte et
en jugé de cette maniere : » Ceux qui
» veulent , dit-il , que Vieux ait été une
Ville , se fondent sur ce Passage de Pli
>> ne , où il met entre les Peuples de la
» Gaule Lyonnoise , Parrhisios , Trecasses,
» Andegavos , Viducasses, Vadicasses;d'où
ils inferent que ces derniers , désignant
» les Peuples du Bessin , les Viducasses
marquent la Ville de Vieux... Mais il
» est tres- probable que dans le Passage de
» Pline , Viducasses ou Fadicasses , sont
» un même nom , qui signifie le Bessin
* et qu'un de ces mots est une diverse
» leçon de l'autre , qui a passé de la mar-
» ge dans le texte , comme il est arrivé
» dans une infinité de lieux des anciens
» Autheurs. De plus , Pline marque des
» Peuples en cet endroit , et non pas des » Villes.
Avant que de réfléchir sur cette Critique de M. Huet , il est bon d'observer
que le Passage de Pline est different dans
toutes les Editions que j'ai vûës , de celui
qu'on vient de lire ; mais pour ne point
entrer icy dans un détail ennuyeux des
Variations , et de différentes leçons qu'on
trouve sur ce sujet , je me contente de
rapporterce même Passage , pris dans l'EB dition
18 MERCURE DE FRANCE
dition du P. Hardouin , la plus récente , et
qu'on a lie de croire la plus correcte de toutes , l'Auteur ayant consulté les meilleurs Manuscrits , et n'ayant ignoré aucunes des Editions imprimées. Or ce Påssage est tel : Parisi , Trecosse's, Andegavi,
Viducasses , Bodiocasses , &c. Par ce der
nier terme , toute la probabilité de M.
Huet disparoît ; on ne croira jamais en
effet que Bodiocasses et Viducasses ne sont
qu'un même nom , qui signifie le Bessin ,
&c. Bodiocasses peut le signifier fort naturellement , et beaucoup mieux que Vadicasses , ainsi toute la conjecture du sçavant Prélat devient plus ingénieuse que
solide.
J'ai répondu cy- dessus à ce qu'il ajoute , qu'en cet endroit Pline marque des
Peuples et non pas des Villes , au sujet de
l'interprétation qu'il donne au terme de
Civitas Viducassium , de l'Inscription de
Torigny trouvée à Vieux ; ainsi , Monsieur,au lieu d'une répetition inutile,jeme
contente de remarquer icy que le P. Hardouin , dans une Note qu'il a faite sur
Pendroit de Pline , dont nous venons de
parler , reconnoît que Ptolomée a parlé
des Viducassiens ; mais on ne sçait sur
quelle autorité il place , comme il fait ,
ce Peuple dans la Basse- Bretagne , et les
recon-
AVRIL 1132 649
reconnoît pour les Fondateurs de la Ville
de Dinan; l'idée en doit paroître singuliere aux bas Normands , sur tout depuis
les Découvertes de Vieux,
la
On voit cependant , que selon les anciens Auteurs , les Viducassiens étoient
un Peuple de la Gaule Lyonnoise, et que
ce Peuple étoit où est Vieux , ou aux environs , vers le Midy et le Couchant..
L'Inscription de Torigny confirme ces
autoritez. Il est plus que probable par
circonstance du lieu où cette Inscription
a été trouvée , que la Ville en question ,
étoit assise sur le Terrain , dont le Village de Vieux , occupe encore une partie
entre la Riviere d'Orne , appellée O'λiva
dans Ptolomée et celle d'Odon.
- Vous sçavez , Monsieur , qu'après la
conquête des Gaules par les Romains
les Monumens publics ne furent plus
gueres érigez dans ce Païs , que dans la
Langue , et selon l'usage et le génie des
Vainqueurs Outre l'Inscription Romaine, dont je viens de parler , qui est toute à la gloire d'un Prêtre Gaulois , vous
avez vû dans ma Lettre , qu'on a trouvé
dans le même lieu , d'autres Inscriptions
Romaines , qui , en prouvant cet usage ,
prouvent aussi que les Romains ont été
long- temps les Maîtres de la Ville des ViBij ducas-
*
750 MERCURE DE FRANCE
ducassiens. Celle qui commence ainsi :
DEOMARTI, &c.indique assez le bas Empire et la décadence des Arts. Plusieurs
Lettres y sont mal formées , et sur tout
les Lettres A. L. o. M. Galland la croïoit
environ dutemps de Claude le Gothique,
mortvers 271.11 croïoit aussi qu'il y avoit
là un Temple dédié au Dieu Mars. Des
deux Consuls , Dialis et Bassus , sommez
dans l'Inscription , le nom dupremier ne
se trouve point, dans les Fastes que nous avons. On en voit du nom du second
Bassus , sous plusieurs Empereurs , mênie
du haut Empire. Il est vrai que dans les
Fastes , les noms des Consuls subrogez ou
substituez sont souvent omis. Le Consul
Dialis , de l'Inscription , étoit peut-être
de cette espece. Au reste, l'ignorant ouvrier a gravé sur le Marbre DIALÆ, au lieu de DIALE. Ce même nom se lit
dans Gruter , 8 Inscript. Edit. de 1707.
pag. 307.
12 ران .
Les autres Inscriptions , quoique mutilées , marquent une plus hauteAntiquité,
par la beauté et par la correction des caracteres ; on y voit les noms de quelques
anciennes Familles Romaines ; entre- autres des Familles Domitia , Novia , Comu
ficia , &c.
Je crois que vous trouverez juste l'obser-
AVRIL. 17523
servation de M. G. au sujet du mot MEMORIA , qui se trouve dans les deux Fragmens d'Inscription , cy devant rapportez ; il signifie là la même chose que Monumentum et Sepulcrum ; on le trouve en
effet, employé en ce sens dans Suetone, qui
dit qu'Othon , avant que de se donner la
mort , laissa le soin de sa Sépulture et de
ses Funérailles à Messaline. Commendans ,
Reliquias suas et Memoriam.
Ce Sçavant Antiquaire pensoit aussi
que Magninus Senecio , dont le nom est
gravé dans l'un de ces Fragmens , pouvoit
bien être le fils et le descendant de ce Senecion , dont parle assez plaisamment le
Rhereur Sénéque , lequel étoit surnommé Grandio, par Sobriquet, à cause de son
affectation ridicule pour tout ce qui
étoit grand dans les choses deson usage
les plus communes. Grands. Vases à boire,
grands Souli rs , grosses Figures , grands
Esclaves , et jusqu'à sa Maîtresse , qui tenoit du Colosse. Le surnom de Magninus
de l'Inscription , ne revient pas mal à célui de Grandio.
La grande quantité de Médailles trouvées à Vieux , et celles qu'on y déterre
tous les jours , méritent une attention
particuliere ; elles démontrent concurBiij remment
652 MERCURE DE FRANCE
•
remment avec les Inscriptions et les autres Monumens , découverts au même
lieu , que les Romains ont été long- tems
en possession dela Ville des Viducassiens.
Ces Médailles , comme je l'ai déja observé , sont depuis les premiers Empereurs
jusqu'aux enfans de Constantin. On peut
donc raisonnablement présumer quecette
Ville a subsisté jusques dans le rv siécle ;
on pourroit former des conjectures
moins solides sur les causes et le temps
plus précis de sa destruction ; circonstances omises par les Historiens ; mais je
ne m'engagerai point dans cette recherche aussi pénible qu'inftuctueuse.
Je me dispense aussi d'examiner si la
Ville de Caen a été bâtie , comme quelques-uns le prétendent , des ruines de
celle des Viducassiens , ou de Vieux. M.
Huet tient pour la négative et soutient
que Caën , du temps de Charles le Chauve , c'est- à- dire , vers 840. n'étoit guéres
plus qu'un Village.
Je finis mes Remarques , en observant
que ce Sçavant Homme , malgré la prevention dont j'ai parlé , semble revenir
au sentiment qu'il a prétendu combattre
au sujet des ruines de Vieux: Voici com
ment il s'exprime , après avoir beaucoup
discouru là-dessus.
»IL
AVRIL. 17321 653
Il est donc beaucoup plus apparent ,
"par tous ces Monumens d'antiquité, qué
» Vieux étoit autrefois un Camp des Ro
»mains , placé sur la Riviere d'Orne ,
» pour y conserver un passage ,
tendant
» vers le Païs ( a ) d'Hiesmes. Ce Camp
» ayant été fixé en ce lieu , donna l'occa-
» sion et le loisir aux Soldats d'y bâtir des
» Maisons , et un Aqueduc , pour leur
در
commodité , dont il reste des ruines.
» La même chose est arrivée en plusieurs
» autres endroits et quelquefois ces .
Camps sont devenus Villes , et quoi-
»que Villes , ils ont retenu le nom de
» Camps , témoin la Ville de Constance ,
qui étoit dans le commencement le
Camp de Constantius Chlorus , Pere de
»Constantin le Grend , et qui dans la suite est devenu une Ville celebre et floris-
» sante. Témoin encore la Ville de Cou
» tance, qui quoique Ville, s'appelle com-
» me la premiere : Constantia Castra. Cela
» se confirme encore par ce grand chemin
» pavé , qui alloit du Bessin dans l'Hies- "
» mois , et qui passe par Vieux-, bâti dơ
» Brique , ainsi que l'Aqueduc.
C'est toujours beaucoup de convenir
que Vieux a pu être une Ville , dont un
( a ) Le Païs d'Hiesmes est un Canton qui comprend une partie du Diocèse de Bayeux.
Biiij Camp
64 MERCURE DE FRANCE
Camp des Romains ait été l'origine. Pour
moi , je croirois plutôt le contraire ; sçavoir , qu'auprès de la Ville Gauloise des
Viducassiens , les Romains la trouvant
bien située , suivant leurs veuës , &c. auroient établi un de leurs Camps , conjecture que j'abandonne encore à votre critique , et que je n'entreprens pas de sou- tenir..
Outre l'aveu que nous venons de remarquer de la part de M. Huet, il n'est
pas indifferent de rapporter icy ce qu'il
nous apprend dans le même chapitre sur
la dénomination de Vieux. Vieux , dit it ,
est appellée Vedioca et Veoca , dans les
vieux titres de l'Abbaye de Fontenay. I
est assez incertain , continue - t- il , si
Veoca et Vedioca ont été formez du mot
de Vieux, ou Vieca de Vedioca, et de Veoce. Le nom de Bayeux ne vient pas de
Bajoca, mais de Biducasses , &c. je ne le
suivrai pas dans le reste de cette discussion étymologique , où notre Auteur ne
dit rien , ce me semble , de solide , n'apprend qu'à douter et ne fait que conjec- turer.
Mais vous me prévenez sans doute icy ,
Monsieur , sur le nom de Vedioca , pour
signifier Vieux , qui se trouve dans les
titres d'une ancienne Abbaye voisine.; et
vous.
AVRIL 1732. 655
vous m'allez dire qu'on ne peut guéres
méconnoître dans ce nom les Biducenses de Ptolomée , et les Badiocasses de
Pline , et le Civitas viducassium de l'Inscription trouvée à Vieux. Votre réfléxion
est juste , et me dispense d'examiner si le
nom de Vieux , ne viendroit point de Vetera Castra ; en supposant dans ce lieu ,
avec M. Huet , un Camp des Romains ';
ou de Ve , du Latin , Vadum , un Gué ;
supposant encore qu'il y en avoit un dans
le même lieu , lequel mot , Ve , s'exprimoit autrefois par Vien ; comme pour
André, on disoit Andrieu , c. toutes
conjectures des plus frivoles , qui ne méritoient pas de sortir d'une pareille plume, et qui tombent d'elles - mêmes par ce que vous venez de voir.
On peut , ce me semble , conclure de
toutes ces observations , que la Ville des
Viducassiens dont deux anciens Ecrivains
ont parlé , étoit située à peu près dans le
terrain , dont le Village de Vieux occupe
aujourd'hui une partie , entre les Rivie
res d'Orne et d'Odon , et que les ruines découvertes dans ce terrain sont celles de
cette ancienne Ville , qu'elle a été considérable du temps que les Romains l'ont
occupée , comme il paroît sur tout par les
beaux restes de son Gymnase , et des acBy com-
656 MERCURE DE FRANCE
compagnemens de cet Edifice public ,
( qu'on n'en voyoit de pareils que dans
les bonnes Villes ) et par les autres Monumens dont on a parlé ; que cette Ville
étoit avantageusement située , à cause des
deux Rivieres , dont l'une lui donnoit la
communication avec la Mer Oceane , l'éloignement n'étant que d'environ 5 lieuës;
que la même Ville devoit être florissante
par le commerce et par la communication qu'elle pouvoit avoir avec les Nations les plus éloignées.
La Médaille Grecque de Diaduménien
en est une preuve indirecte, et cette preu
ve est fortifiée par d'autres Médailles
Grecques et de fabrique étrangere , par
rapport aux Romains , découvertes depuis au même lieu , dont j'espere de vous
entretenir dans une autre Lettre. Celle- cy
s'est allongée beaucoup plus que je ne
croyois ; je soumets à vos lumieres tout ce
qu'elle renferme , et je suis,Monsieur, &c.
Fermer
Résumé : REMARQUES sur les ruines de Vieux.
Le texte traite des ruines de Vieux, une ville en Normandie, et des débats historiques concernant son ancienneté et son importance. M. Huet, évêque d'Avranches, dans son ouvrage 'Origines de Caen', ne reconnaît pas Vieux comme une ancienne ville, y voyant plutôt les vestiges d'un camp romain. L'auteur conteste cette vision en se basant sur plusieurs monuments découverts à Vieux, notamment le marbre de Joigny, un piédestal de statue dédié à T. Sennius Solennis, un grand-prêtre gaulois des Viducassiens. Cette inscription mentionne trois fois la cité des Viducassiens, prouvant ainsi l'existence d'une ville ancienne. Huet tente de minimiser cette preuve en suggérant que le marbre pourrait provenir d'une autre carrière. L'auteur réfute cette hypothèse en soulignant que des experts peuvent distinguer le marbre de Vieux par ses caractéristiques spécifiques. Le texte aborde également le silence des historiens anciens comme Ptolémée et l'Itinéraire d'Antonin concernant Vieux, mais note que ces silences ne sont pas concluants face aux preuves matérielles. L'auteur cite un passage de Pline qui mentionne les Viducassiens et conteste l'interprétation de Huet selon laquelle ce terme désignerait simplement un peuple et non une ville. Le texte mentionne diverses inscriptions romaines et médailles trouvées à Vieux, témoignant de la présence romaine prolongée dans la ville des Viducassiens. Ces découvertes confirment l'importance historique de Vieux et contredisent l'opinion de Huet. Les médailles trouvées sur le site permettent de dater la présence romaine jusqu'aux enfants de Constantin, soit au IVe siècle. La ville de Caen, quant à elle, n'était qu'un village au temps de Charles le Chauve, vers 840. L'auteur refuse de spéculer sur la destruction de la ville des Viducassiens, un sujet omis par les historiens. Il mentionne également les débats sur l'origine de Caen, certains affirmant qu'elle aurait été construite à partir des ruines de la ville des Viducassiens ou de Vieux. Des vestiges comme un aqueduc et un chemin pavé soutiennent l'hypothèse que Vieux aurait pu devenir une ville. L'auteur conclut que la ville des Viducassiens était située dans la région actuelle de Vieux, entre les rivières d'Orne et d'Odon, et qu'elle était prospère grâce à sa situation stratégique et à son commerce. Des médailles grecques et étrangères découvertes sur place renforcent cette conclusion.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
4
p. 656-661
POEME Sur les progrès de l'Art des Jardins. Sous LOÜIS LE GRAND.
Début :
Du siécle de LOUIS, les prodges divers, [...]
Mots clefs :
Prière, Paix, Roi de France, Art des jardins, Nature, Fleurs, Génie, Louis le Grand
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : POEME Sur les progrès de l'Art des Jardins. Sous LOÜIS LE GRAND.
POEM E
Sur les progrès de l'Art des Jardins..
Sous LoüiS LE GRAND.
DUsiécle de Louis , les prodiges divers,
Sont l'étude du nôtre , et l'objet de nos Vers.
Muscs ›
AVRIL. 1732. 657
Muses , qui de ce Roy , chérissez la mémoire ,
Pour prix de notre ardeur à conserver sa gloire.
Vous nous devez vos soins , j'implore votre appui ,
Inspirez-moy des Vers , tels qu'on les fit sous lui.
Si le gout de son siecle
est banni
de mes rimes
,
Muses
, n'exaucez
point
des vœux
illégitimes
. "
Le Laurier
, où j'aspire
, est un affront
pour
moy,
S'il n'est coupé d'un Tronc, planté sous ce grand
Roy.
Chassez de mes Ecrits , toute vaine peinture ,
Le fard est inutile , à qui peint la nature.
L'art doit l'orner de fleurs , mais non pas l'en
charger ,
C'est ainsi , sous Louis, qu'on sçut la ménager.
C'est sous ce regne heureux , si fécond en miracles ,
Que la Nature et l'Art s'unirent sans obstacles.
La raison en régla l'accord selon ses vœux ,
Et la perfection naquit de ces beaux nœuds.
Ainsi des sages Grecs , le sublime Génie ,
Acet amant discret , l'avoit jadis unie.
Sure du gout exquis de ce discret Amant ,
Gout formé sur le sien , et sobre en arnement.
La Déesse , toujours simple , naïve et pure ,
Laissoit aux mains de l'Art , le soin de sa pasure B vj L'Art
6,8 MERCURE DE FRANCE
L'Art content de ce soin , et l'œil sur ses appas ›
La faisoit briller seule , et ne se montroit pas.
Si la Nature en pleurs soupiroit sur la Scéne ,
Les malheurs d'Hyppolite , ou ceux de Polixéne.
L'Art d'une main cachée et prompte en ses besoins ,
Lui chaussoit le Cothurne , et bornoit là ses soins.
Mais que cet age d'or fut prompt à disparoître ?
Louis , en ta faveur , le Ciel la fit renaître.
Tout , jusques aux Jardins, sous ce Roy si vanté,
Atteignit le haut point de sa juste bonté.
Ce n'est plus ces Jardins , que , voisins du Tonė ,
nerre ,
Suspendit dans les airs , au mépris de la terre.
L'Epouse de Ninus , l'Amante de son fils ,
De la Nature , hélas ! connut elle le prix ?
L'Emphrate sur son Urne , en ses Grottes pro- fondes ,
Plaiguit ces bois , privez du secours de ses Ondes.
Sur ses bords sabloneux , prodigua ce secours ,
Et les rendit si beaux , qu'on désertà ces tours.
Au gout de la raison, noble , simple , et sensée,
Louis a des humains , ramené la pensée.
Deux Vertumnes fameux , à son regne donnez ,
Firent voir aux vivans les Jardins fortunez ,
Où les ombres d'Achille et d'Hector réunies >
Réposent dans la paix , sur l'Email' des Prairies.
L'un
AVRIL. 17320 659
L'un , des beautés de l'Ordre instruit par le bon
goût ,
Mit la Nature en regle et la fit voir en tout.
De naïfs ornemens , Dispensateur habile ,
Il donna même au faste un air simple et facile,
Apprit par un secret que lui seul sçut trouver ,
Aux Chênes sourcilleux l'art de faire rêver,
Se fit suivre à son gré de l'Element humide ,
Ingénieux , forma de ce Cristal liquide
Mille Jeux séducteurs , cent Théatres divers ;
Plus qu'aucun avant lui l'élança dans les Airs ;
Des Graces et des Jeux accompagné sans cesse ,
Fit au triste Cyprès respirer la temiresse ;
Dans un Dédale heureux de Myrthes verdoyans,
Emprisonna les Ris sous les fleurs s'égayans ;
Et d'un Peuple de Dieux , ou palis ou sauvages,
Avec art disposez , anima ses Boccags ;
Puis ouvrant des Vallons les lo ntains gracieux,
Sçut finir ses Jardins où commencent les Cieux ,
Et presentant au loin mile oby ts à la vûë,
Prêter aux Champs étroits une immense étenduë.
De Nymphes , cependant un jeune et tendre Essein ,
Le suivoit pas à pas la Guirlande à la main ;
D'où tirant avec choix mille fleurs éclatantes ,
Flore en semoit par tout les couleurs differentes.
De Pomone au sein riche , auteint frais et fleuri,
L'autre, sçayant Eleve, et Confident chéri ,, Du
50 MERCURE DE FRANCE
Dufruit , vrai gland jadis insipide et sauvage ,
Triptoleme nouveau , bannit l'austere usage ,
Corrigea de nos Champs les Sels contagieux ,
Et versant dans la séve un Nectar précieux,
Nous rendit ces beaux fruits que, Roy de la Na ture ,
L'homme, aux Vergers d'Edem ; cueilloit d'une
main pure.
La branche obeissante et souple à ses leçons,
Prit sous ses doctes mains cent diverses façons.
Du Lierre rampant le verd mélancolique ,
Scut couvrir les débris de quelque tombe antique,,
Où ses bras tortueux , par dinquiets efforts ,
Vont jusques dans leur cendre importuner les -
Morts.
Tandis que les amours de Flore et de Pomone,
Étalant à la fois le Printemps et l'Automne ,
Le Citronier docile à notre œil enchanté
Déroboit de nos murs l'informe nudité ;
Et dans ses bras , qu'il ouvre aux traits de l'œil du monde ,
En reçoit à l'abri l'influence féconde.
Vous n'avilirez point le prix des mes accens , ·
Vous, de nos bons Ayeux les repas innocens
Herbages fortunez , que ce Mortel si sage ,
Ala Cour, chez les Rois , ramena du Village.
Mases , tel est le fruit du gout qu'on a pous vous.
Tout objet fait ses soins, il les embellit tous.
Et
AVRIL. 17322 661
Et si l'appui du Trône est le prix de vos veilles ,
Où neportez- vous pas vos sublimes merveilles !
PRIERE POUR LEROT.
20
Tels que sur le penchant d'une aimable ColineSous un Ciel favorable un Olivier planté ,
Voit d'heureux rejettons sa féconde racine ,
L'environner de tout côté.
Tel , Seigneur, chaque jour par un exemple uni
*que ,
LOUIS, se voit renaitre et combler de ses dons ;
Mais pour rendre éternels les biens que nousgoutons ,
Sous son Empire pacifique ,
Conserve , Dieu de Paix , sous ta main magnifique ,
Et la Tige et les Rejettons.
Auteurs, en écrivant , imitez la Nature:
Sur les progrès de l'Art des Jardins..
Sous LoüiS LE GRAND.
DUsiécle de Louis , les prodiges divers,
Sont l'étude du nôtre , et l'objet de nos Vers.
Muscs ›
AVRIL. 1732. 657
Muses , qui de ce Roy , chérissez la mémoire ,
Pour prix de notre ardeur à conserver sa gloire.
Vous nous devez vos soins , j'implore votre appui ,
Inspirez-moy des Vers , tels qu'on les fit sous lui.
Si le gout de son siecle
est banni
de mes rimes
,
Muses
, n'exaucez
point
des vœux
illégitimes
. "
Le Laurier
, où j'aspire
, est un affront
pour
moy,
S'il n'est coupé d'un Tronc, planté sous ce grand
Roy.
Chassez de mes Ecrits , toute vaine peinture ,
Le fard est inutile , à qui peint la nature.
L'art doit l'orner de fleurs , mais non pas l'en
charger ,
C'est ainsi , sous Louis, qu'on sçut la ménager.
C'est sous ce regne heureux , si fécond en miracles ,
Que la Nature et l'Art s'unirent sans obstacles.
La raison en régla l'accord selon ses vœux ,
Et la perfection naquit de ces beaux nœuds.
Ainsi des sages Grecs , le sublime Génie ,
Acet amant discret , l'avoit jadis unie.
Sure du gout exquis de ce discret Amant ,
Gout formé sur le sien , et sobre en arnement.
La Déesse , toujours simple , naïve et pure ,
Laissoit aux mains de l'Art , le soin de sa pasure B vj L'Art
6,8 MERCURE DE FRANCE
L'Art content de ce soin , et l'œil sur ses appas ›
La faisoit briller seule , et ne se montroit pas.
Si la Nature en pleurs soupiroit sur la Scéne ,
Les malheurs d'Hyppolite , ou ceux de Polixéne.
L'Art d'une main cachée et prompte en ses besoins ,
Lui chaussoit le Cothurne , et bornoit là ses soins.
Mais que cet age d'or fut prompt à disparoître ?
Louis , en ta faveur , le Ciel la fit renaître.
Tout , jusques aux Jardins, sous ce Roy si vanté,
Atteignit le haut point de sa juste bonté.
Ce n'est plus ces Jardins , que , voisins du Tonė ,
nerre ,
Suspendit dans les airs , au mépris de la terre.
L'Epouse de Ninus , l'Amante de son fils ,
De la Nature , hélas ! connut elle le prix ?
L'Emphrate sur son Urne , en ses Grottes pro- fondes ,
Plaiguit ces bois , privez du secours de ses Ondes.
Sur ses bords sabloneux , prodigua ce secours ,
Et les rendit si beaux , qu'on désertà ces tours.
Au gout de la raison, noble , simple , et sensée,
Louis a des humains , ramené la pensée.
Deux Vertumnes fameux , à son regne donnez ,
Firent voir aux vivans les Jardins fortunez ,
Où les ombres d'Achille et d'Hector réunies >
Réposent dans la paix , sur l'Email' des Prairies.
L'un
AVRIL. 17320 659
L'un , des beautés de l'Ordre instruit par le bon
goût ,
Mit la Nature en regle et la fit voir en tout.
De naïfs ornemens , Dispensateur habile ,
Il donna même au faste un air simple et facile,
Apprit par un secret que lui seul sçut trouver ,
Aux Chênes sourcilleux l'art de faire rêver,
Se fit suivre à son gré de l'Element humide ,
Ingénieux , forma de ce Cristal liquide
Mille Jeux séducteurs , cent Théatres divers ;
Plus qu'aucun avant lui l'élança dans les Airs ;
Des Graces et des Jeux accompagné sans cesse ,
Fit au triste Cyprès respirer la temiresse ;
Dans un Dédale heureux de Myrthes verdoyans,
Emprisonna les Ris sous les fleurs s'égayans ;
Et d'un Peuple de Dieux , ou palis ou sauvages,
Avec art disposez , anima ses Boccags ;
Puis ouvrant des Vallons les lo ntains gracieux,
Sçut finir ses Jardins où commencent les Cieux ,
Et presentant au loin mile oby ts à la vûë,
Prêter aux Champs étroits une immense étenduë.
De Nymphes , cependant un jeune et tendre Essein ,
Le suivoit pas à pas la Guirlande à la main ;
D'où tirant avec choix mille fleurs éclatantes ,
Flore en semoit par tout les couleurs differentes.
De Pomone au sein riche , auteint frais et fleuri,
L'autre, sçayant Eleve, et Confident chéri ,, Du
50 MERCURE DE FRANCE
Dufruit , vrai gland jadis insipide et sauvage ,
Triptoleme nouveau , bannit l'austere usage ,
Corrigea de nos Champs les Sels contagieux ,
Et versant dans la séve un Nectar précieux,
Nous rendit ces beaux fruits que, Roy de la Na ture ,
L'homme, aux Vergers d'Edem ; cueilloit d'une
main pure.
La branche obeissante et souple à ses leçons,
Prit sous ses doctes mains cent diverses façons.
Du Lierre rampant le verd mélancolique ,
Scut couvrir les débris de quelque tombe antique,,
Où ses bras tortueux , par dinquiets efforts ,
Vont jusques dans leur cendre importuner les -
Morts.
Tandis que les amours de Flore et de Pomone,
Étalant à la fois le Printemps et l'Automne ,
Le Citronier docile à notre œil enchanté
Déroboit de nos murs l'informe nudité ;
Et dans ses bras , qu'il ouvre aux traits de l'œil du monde ,
En reçoit à l'abri l'influence féconde.
Vous n'avilirez point le prix des mes accens , ·
Vous, de nos bons Ayeux les repas innocens
Herbages fortunez , que ce Mortel si sage ,
Ala Cour, chez les Rois , ramena du Village.
Mases , tel est le fruit du gout qu'on a pous vous.
Tout objet fait ses soins, il les embellit tous.
Et
AVRIL. 17322 661
Et si l'appui du Trône est le prix de vos veilles ,
Où neportez- vous pas vos sublimes merveilles !
PRIERE POUR LEROT.
20
Tels que sur le penchant d'une aimable ColineSous un Ciel favorable un Olivier planté ,
Voit d'heureux rejettons sa féconde racine ,
L'environner de tout côté.
Tel , Seigneur, chaque jour par un exemple uni
*que ,
LOUIS, se voit renaitre et combler de ses dons ;
Mais pour rendre éternels les biens que nousgoutons ,
Sous son Empire pacifique ,
Conserve , Dieu de Paix , sous ta main magnifique ,
Et la Tige et les Rejettons.
Auteurs, en écrivant , imitez la Nature:
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Résumé : POEME Sur les progrès de l'Art des Jardins. Sous LOÜIS LE GRAND.
Le texte 'POEM E' célèbre les avancées de l'art des jardins sous le règne de Louis XIV. En avril 1732, l'auteur invoque les Muses pour inspirer ses vers et aspire à égaler la grandeur de cette époque. Il souligne que l'art des jardins a atteint une perfection où la nature et l'art se sont harmonisés sous la guidance de la raison, créant des jardins d'une beauté exceptionnelle, loin des excès des jardins suspendus des époques antérieures. Le poème met en lumière deux célèbres jardiniers du règne de Louis XIV, comparés à des Vertumnes, qui ont su ordonner la nature et lui donner un aspect simple et noble. Le premier a su dompter les éléments naturels, créer des jeux d'eau et des théâtres divers, et animer les jardins avec des statues de dieux. Le second a amélioré les fruits et les plantes, rendant les vergers à la fois productifs et esthétiques. L'auteur exalte également les repas simples et innocents des ancêtres, ramenés à la cour par ce roi sage. Il conclut en priant pour que les bienfaits du règne de Louis XIV soient éternels, comparant le roi à un olivier dont les rejets prolifèrent. Le texte se termine par une exhortation aux auteurs à imiter la nature dans leurs écrits.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 661-671
EXPLICATION Physico-Mathematique du Principe des Machines. Par L.P.C.J.
Début :
Deux Corps égaux ou inégaux, suspendus aux deux extrémitez d'un [...]
Mots clefs :
Corps, Mouvement, Force, Sensible, Mécanismes, Principe des Machines, Géomètres, Physiciens
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texteReconnaissance textuelle : EXPLICATION Physico-Mathematique du Principe des Machines. Par L.P.C.J.
EXPLICATIONPhysico-Mathematique
du Principe des Machines. Par L.P.C.J.
Dpendus aux deux extrémitez d'un
Eux Corps égaux ou inégaux , susLevier , ou d'un Bâton ou d'une Barre de
fer , lequel Levier de fer ou de bois ap
puyé
-662 MERCURE DE FRANCE
puyé sur un Pivot aigu , fixe et inébranlable , qui partage sa longueur en raison
réciproque des deux poids ; ces deux Corps
sont en équilibre et restent en repos ; aucun des deux ne pouvant descendre
parce qu'aucun ne peut prévaloir à lautre , à cause de l'égalité absolue de leurs
forces relatives. Voilà le fait et tout l'état de la question présente.
Or cette égalité de forces relatives ,
fondée sur la réciprocité des Corps et de
leur distance du point fixe , Descartes et
les Cartesiens , l'établissent sur ce que ,
que?
si ces Corps venoient à se remuer , leurs
mouvemens seroient égaux , les espaces.
parcourus ou les vitesses compensant les
masses , parce que la disposition de la
Machine détermine à un mouvement circulaire, d'autant plus grand que le Rayon
est plus long
C'est là une raison mathématique, tout
à- fait géometrique et abstraite , et mềme de la plus basse espece , et de celles
qui convainquant l'esprit sans l'éclairer ,
sans même le persuader , s'appell nt des
Réductions à l'absurde. Car si vous alliez
prétendre que ces Corps. devroient se remuer , on calculeroit leur mouvement
et leur force , et les trouvant absolument
égaux, on concluroit qu'une force égale
à
AVRIL 1732. 603
2 donc prévalu à une force égale ; ce qui
est absurde.
Les Géometres peuvent donc s'en contenter comme d'une démonstration qui¨
constate le fait ; mais les Physiciens venlent et demandent depuis long-temps une
raison qui l'explique. Il est bien question en
effet de la force qu'auroient ces Corps s'ils
venoient à se remuer. Ils ne se remuënt
pas et sont pourtant en équilibre ; il s'agit
de la force qu'ils ont actuellement et à
tous les instans pour s'y maintenir.
Descartes n'avoit garde d'aller plus loin.
Il étoit naturel d'expliquer cet équilibre
par l'effort actuel que font à chaque instant ces deux Corps pour descendre et se
surmonter. Mais ce celebre Philosophe ne
connoissoit point d'effort au mouvement
qui fut un mouvement actuel ; lui pourtant, qui par tout ailleurs , expliquoit tout
parle mouvement. Il est vrai qu'ici même
il recouroitau mouvement, mais à un mou--
vement possible et sensible , comme si les
mouvemens primitifs de la Nature , et
tout ce qui s'appelle forces méchaniques
et efforts , ne consistoient pas essentiellement dans des mouvemens secrets et
très-insensibles.
Les yeux ne vont pas là ; mais la rai
son , ou du moins le raisonnement y va
et
664 MERCURE DE FRANCE
et nous apprend que tout Corps pesant
étant toujours pesant , soit qu'il tombe
soit qu'il soit arrêté , soit qu'il soit forcé
même de monter , tend toûjours et fait
toûjours effort pour tomber , et a par
consequent toûjours un mouvement secret qui le sollicite à la chute , un mouvement naissant et sans cesse renaissant
àcoups redoublez , qui ne demande qu'à
se développer et à se changer en un mouvement continu , et par là sensible vers
le centre.
J'ai démontré ce mouvement secret des
Corps pesans dans mon Traité de Physique, imprimé à Paris , chez Cailleau. Et
il m'a parû que cette Démonstration avoit
passé sans contradiction ; et que tous
ceux , au moins dont j'ai eu occasion de
connoître les sentimens , l'avoient adop
tée. Il est temps de porter cela un peu
plus loin.
On la confond trop , ce me semble ,
pesanteur avec la chute ; et l'idée des Aneiens qui croyoient les Elemens quittes.
er exempts de pesanteur dans ce qu'ils
appelloient leurs Spheres propres ; l'Eau ,
par exemple , dans la Mer , l'Air dans
l'Atmosphere ; cette idée ne me paroît
que trop regner encore dans les esprits.
Je dois donc remarquer que la pesanteur
AVRIL. 1732. 665
teur est la cause , et que la chute n'est
qu'un effet ; qu'un Corps tombe parce
qu'il est pesant; mais que lors même qu'il ne tombe pas , il est toûjours pesant , et
que dans aucun instant il ne cesse de l'ê
tre. C'est-là ce qu'il faut bien sentir.
En quelque temps que vous tâchiez à
soulever un Corps pesant , vous le trouvez pesant , il vous résiste de toute sa
force, et il vous faut toute la vôtre pour
en venir à bout. Portez- le quelque temps
entre vos bras ou sur vos épaules , peuà peu il vous devient tout à fait insupportable et vous force à lâcher prise. Si
vous le suspendez à un fil , à une corde,
dès le moment que vous tranchez le fil,
il tombe , il n'attend pas vos ordres pour
cela , il tire , il tiraille le fil ou la corde ,
et après en avoir surmonté peu à peu le
tissu et rompu en détail tous les fila
mens , il la rompt tout- à- fait et tombe lourdement.
S'il est posé sur la terre, avec le temps
il l'enfonce et s'y enterre ; et si tout d'un
coup vous sappez sous lui cette terre qui
le porte, tout du même coup il tombe
plus bas , et toûjours aussi bas qu'il le
peut. Si vous coupez cette terre en plan
incliné, de quelque côté que vous fassiez
la pente, il y roule et gagne l'endroit
le plus bas.
666 MERCURE DE FRANCE
L'Eau même la plus immobile et la
plus croupissante , va couler tout de suite
si vous lui ouvrez une rigole en pente
à côté de son Båssin. Toutes les Rivieres
coulent et la Mer même a des Courans
et des Goufres soûterrains qui l'appel
lent d'abîme en abîme vers le centre
de la terre. Il est vrai que les abîmes n'étant pas infinis , l'eau ne tombe toûjours
que parce qu'elle remonte aussi toûjours
par d'autres conduits soûterrains dans
les Sources d'où elle recommence à con
ler vers le centre. Mais c'est qu'il y a
dans le corps de la Terre , comme dans
nos corps,un Principe de circulation qui,
sans ôter à l'eau la pesanteur , l'entretient/
dans une perpetuelle mobilité. Tout cela
est établi dans le Traité déja cité.
L'Air même , qu'on ne s'y trompe pas,
ne demande qu'à couler et à tomber : à
mesure qu'on creuse dans la terre , il y
entre et remplit les plus petites excavations. Dès que l'eau ou tout autre corps
quitte une place, l'Air la prend aussi- tôt.
Nous sentons nous-mêmes assez le
poids des Corps toûjours subsistant , toû
jours agissant. Nos jambes se lassent de
nous porter. Notre col , nos épaules pliroient sous notre tête , si elle n'avoit ses
momens de repos. Et puis il faut bien- tôt
οὐ κ
1
AVRIL. -1732. 1 667
ou tard , que l'affaissement de nos membres devenant general , nous rentrions
dans la poussiere , d'où un soufle de vie
qui s'exhale , nous avoit fait sortir. Tout
le monde sçait tout cela , je le crois.
Tous les Corps font donc un effort et
ont une tendance continuelle vers le centre. Cette tendance étoit la qualité occulte de nos Anciens. Ils la concevoient
comme un appétit et presque comme une
volonté naturelle de se réunir à leur centre. Descartes a fort bien remarqué que
la matiere pure n'avoit point de ces
sortes d'appétits et de volontez. Mais cette
tendance et cet effort étant pourtant- quelque chose de réel et de toûjours subsistant , il auroit dû , en supprimant une
mauvaise façon de les expliquer , y sub2
stituer un mouvement secret et insensible , qui est la seule façon dont un Corps
peut tendre et faire effort. M. de Leibnis
y reconnoissoit uneforce morte.
Mais il n'y a point ici de mort , et l'effort que les Corps font pour regagner
leur centre , est toûjours , sinon vivant ,
du moins très- vif et très- animé , et mê
me très- sensible , au moins dans ses effats.
: J'ai expliqué cet effort méchanique
dans l'Ouvrage en question , et j'ai fair voir
68 MERCURE DE FRANCE
voir qu'il consistoit dans un mouvement
non continu , parce qu'il est empêché ;
mais continuel et sans cesse redoublé
de vibration , de battement , d'oscillation
qui est le vrai mouvement primigénie de
la pesanteur , et l'unique cause tout- àfait primitive de la chute des Corps qui ont la liberté de tomber.
Pour rendre même ce Principe plus
sensible , j'ai fait voir que c'étoit le Principe general de la Nature , l'agent primitif de tous les Méchanismes , et que.
tout se faisoit dans l'Univers par l'impression d'un mouvement secret de vibration , tous les Corps étant buttez les
uns contre les autres, et faisant des efforts
et des contr'efforts continuels , d'où résultoit l'équilibre general.
Descartes se bornoit trop à son Principe de simple impulsion , qui étoit pourtant un beau Principe ou un demi Principe. Car point d'impulsion sans Répulsion. A bien prendre même les choses ,
l'impulsion n'est qu'un Principe secondaire et un effet sensible , un Phénomene
de la Répulsion.
Cui , tout ce que j'appelle cause Physique , cffort méchanique , action naturelle , est dû à la répulsion , au repoussement , et consiste formellement dans.
8
un
AVRIL: 17320 669
peu
un mouvement de vibration, vif, prompt,
étendu et sans cesse redoublé.
Nous pouvons sans sortir de nous-mêmes , nous en appercevoir avec un peu
d'attention. Nous ne sçaurions rien pousser , non pas même notre corps , notre
bras , notre jambe en avant , si nous ne
repoussons en même-temps en arriere
quelque chose de fixe et d'immobile qui
nous repousse en avant.
Par exemple , en marchant , nous repoussons le terrain , et il faut que ce terrain soutienne le repoussement et nous
le rende pour que nous avancions. Un
sable mouvant qui nous cede en partie ,
une terre labourée nous épuisent bientôt. Un pavé glissant qui ne nous oppose aucune inégalité pour soutenir l'effort de nos pieds , nous laisse tomber.
Nous ne sçaurions marcher sur l'eau.
Je ne me lasse point d'inculquer ce
Principe , sans lequel je ne connois point
de vraye Physique. Un Oiseau qui vole
ne vole en avant qu'en repoussant l'Air
avec ses aîles en arriere. Celui qui nâge
repousse l'eau avec ses bras , la Rame re.
pousse aussi l'eau ou le terrain. Et le vent
qui fait voguer un Vaisseau , quoiqu'il
semble n'avoir qu'un simple mouvement
d'impulsion directe , doit dans son origine
670 MERCURE DE FRANCE
-
rigine , avoir un Principe de répulsion ,
un point d'appui fixe qui l'empêche de
rétrograder. Et c'est par là que je crois
être en état de démontrer que tous les
vents prennent leur origine dans l'interieur même de la Terre et dans la réaction même du centre , qui est comme un
ressort toûjours bandé qui se débande du
côté où il trouve le moins de résistance.
Cela soit dit en passant.
Voyez deux hommes d'égale force buttez l'un contre l'autre , et qui font effort.
pour se culbuter. On les voit , après s'ê→
tre roidis par les jambes contre le terrain , "
agitez de vibrations assez sensibles , se
pousser et se repousser , avancer et reculer , ceder et reprendre le dessus avec
une alternative , qui seule maintient l'équilibre.
Voilà l'état précis de deux Corps plaecz en équilibre aux deux extrémitez
d'un Levier , partagé par le point fixe
mitoyen , en raison réciproque de leurs
pesanteurs. Toûjours pesant , toûjours faiSant effort pour se surmonter ou pour
rompre le Levier qui les arrête , ils sont
agitez d'un mouvement actuel de batrement ou de vibration qui fait leur force
actuelle et leur équilibre actuel.
Car cette force est égale de part et
d'autre
AVRIL 1732 678
d'autre, parce que le mouvement est égal.
Or, il est égal , parce qu'il est proportionné à la longueur des Leviers , tout
comme le mouvement sensible auquel
les Cartésiens ont recours et auquel il est,
je pense , démontré désormais qu'on n'a
nul besoin de recourir.
Tous les équilibres de l'Univers se font
par là , et il n'y a nul autre Principe Physique de tous les Méchanismes , soit naturels , soit artificiels. Toute puissance
appliquée à un Levier ou à toute autre
Machine , agit par les efforts qu'elle fait
à chaque instant , et tout effort agit par
secousses et par vibrations. Qu'on se rende tant soit peu attentif à l'effet de ses
propres mains et de ses bras , lorsqu'on
en fait , on y sentira , on y verra ces secousses et une espece de tremoussement ,
d'ébranlement vif et redoublé. J'avertirai même, en finissant, que lorsqu'on voudra se donner dans ce cas un peu plus
de force , on n'a qu'à donner à son bras,
à ses pieds , à son corps un pareil tremblement encore plus sensible et plus
prompt , cela aide tout- à- fait , et c'est la
Nature même qui nous indique ce secret,
qui est son secret.
du Principe des Machines. Par L.P.C.J.
Dpendus aux deux extrémitez d'un
Eux Corps égaux ou inégaux , susLevier , ou d'un Bâton ou d'une Barre de
fer , lequel Levier de fer ou de bois ap
puyé
-662 MERCURE DE FRANCE
puyé sur un Pivot aigu , fixe et inébranlable , qui partage sa longueur en raison
réciproque des deux poids ; ces deux Corps
sont en équilibre et restent en repos ; aucun des deux ne pouvant descendre
parce qu'aucun ne peut prévaloir à lautre , à cause de l'égalité absolue de leurs
forces relatives. Voilà le fait et tout l'état de la question présente.
Or cette égalité de forces relatives ,
fondée sur la réciprocité des Corps et de
leur distance du point fixe , Descartes et
les Cartesiens , l'établissent sur ce que ,
que?
si ces Corps venoient à se remuer , leurs
mouvemens seroient égaux , les espaces.
parcourus ou les vitesses compensant les
masses , parce que la disposition de la
Machine détermine à un mouvement circulaire, d'autant plus grand que le Rayon
est plus long
C'est là une raison mathématique, tout
à- fait géometrique et abstraite , et mềme de la plus basse espece , et de celles
qui convainquant l'esprit sans l'éclairer ,
sans même le persuader , s'appell nt des
Réductions à l'absurde. Car si vous alliez
prétendre que ces Corps. devroient se remuer , on calculeroit leur mouvement
et leur force , et les trouvant absolument
égaux, on concluroit qu'une force égale
à
AVRIL 1732. 603
2 donc prévalu à une force égale ; ce qui
est absurde.
Les Géometres peuvent donc s'en contenter comme d'une démonstration qui¨
constate le fait ; mais les Physiciens venlent et demandent depuis long-temps une
raison qui l'explique. Il est bien question en
effet de la force qu'auroient ces Corps s'ils
venoient à se remuer. Ils ne se remuënt
pas et sont pourtant en équilibre ; il s'agit
de la force qu'ils ont actuellement et à
tous les instans pour s'y maintenir.
Descartes n'avoit garde d'aller plus loin.
Il étoit naturel d'expliquer cet équilibre
par l'effort actuel que font à chaque instant ces deux Corps pour descendre et se
surmonter. Mais ce celebre Philosophe ne
connoissoit point d'effort au mouvement
qui fut un mouvement actuel ; lui pourtant, qui par tout ailleurs , expliquoit tout
parle mouvement. Il est vrai qu'ici même
il recouroitau mouvement, mais à un mou--
vement possible et sensible , comme si les
mouvemens primitifs de la Nature , et
tout ce qui s'appelle forces méchaniques
et efforts , ne consistoient pas essentiellement dans des mouvemens secrets et
très-insensibles.
Les yeux ne vont pas là ; mais la rai
son , ou du moins le raisonnement y va
et
664 MERCURE DE FRANCE
et nous apprend que tout Corps pesant
étant toujours pesant , soit qu'il tombe
soit qu'il soit arrêté , soit qu'il soit forcé
même de monter , tend toûjours et fait
toûjours effort pour tomber , et a par
consequent toûjours un mouvement secret qui le sollicite à la chute , un mouvement naissant et sans cesse renaissant
àcoups redoublez , qui ne demande qu'à
se développer et à se changer en un mouvement continu , et par là sensible vers
le centre.
J'ai démontré ce mouvement secret des
Corps pesans dans mon Traité de Physique, imprimé à Paris , chez Cailleau. Et
il m'a parû que cette Démonstration avoit
passé sans contradiction ; et que tous
ceux , au moins dont j'ai eu occasion de
connoître les sentimens , l'avoient adop
tée. Il est temps de porter cela un peu
plus loin.
On la confond trop , ce me semble ,
pesanteur avec la chute ; et l'idée des Aneiens qui croyoient les Elemens quittes.
er exempts de pesanteur dans ce qu'ils
appelloient leurs Spheres propres ; l'Eau ,
par exemple , dans la Mer , l'Air dans
l'Atmosphere ; cette idée ne me paroît
que trop regner encore dans les esprits.
Je dois donc remarquer que la pesanteur
AVRIL. 1732. 665
teur est la cause , et que la chute n'est
qu'un effet ; qu'un Corps tombe parce
qu'il est pesant; mais que lors même qu'il ne tombe pas , il est toûjours pesant , et
que dans aucun instant il ne cesse de l'ê
tre. C'est-là ce qu'il faut bien sentir.
En quelque temps que vous tâchiez à
soulever un Corps pesant , vous le trouvez pesant , il vous résiste de toute sa
force, et il vous faut toute la vôtre pour
en venir à bout. Portez- le quelque temps
entre vos bras ou sur vos épaules , peuà peu il vous devient tout à fait insupportable et vous force à lâcher prise. Si
vous le suspendez à un fil , à une corde,
dès le moment que vous tranchez le fil,
il tombe , il n'attend pas vos ordres pour
cela , il tire , il tiraille le fil ou la corde ,
et après en avoir surmonté peu à peu le
tissu et rompu en détail tous les fila
mens , il la rompt tout- à- fait et tombe lourdement.
S'il est posé sur la terre, avec le temps
il l'enfonce et s'y enterre ; et si tout d'un
coup vous sappez sous lui cette terre qui
le porte, tout du même coup il tombe
plus bas , et toûjours aussi bas qu'il le
peut. Si vous coupez cette terre en plan
incliné, de quelque côté que vous fassiez
la pente, il y roule et gagne l'endroit
le plus bas.
666 MERCURE DE FRANCE
L'Eau même la plus immobile et la
plus croupissante , va couler tout de suite
si vous lui ouvrez une rigole en pente
à côté de son Båssin. Toutes les Rivieres
coulent et la Mer même a des Courans
et des Goufres soûterrains qui l'appel
lent d'abîme en abîme vers le centre
de la terre. Il est vrai que les abîmes n'étant pas infinis , l'eau ne tombe toûjours
que parce qu'elle remonte aussi toûjours
par d'autres conduits soûterrains dans
les Sources d'où elle recommence à con
ler vers le centre. Mais c'est qu'il y a
dans le corps de la Terre , comme dans
nos corps,un Principe de circulation qui,
sans ôter à l'eau la pesanteur , l'entretient/
dans une perpetuelle mobilité. Tout cela
est établi dans le Traité déja cité.
L'Air même , qu'on ne s'y trompe pas,
ne demande qu'à couler et à tomber : à
mesure qu'on creuse dans la terre , il y
entre et remplit les plus petites excavations. Dès que l'eau ou tout autre corps
quitte une place, l'Air la prend aussi- tôt.
Nous sentons nous-mêmes assez le
poids des Corps toûjours subsistant , toû
jours agissant. Nos jambes se lassent de
nous porter. Notre col , nos épaules pliroient sous notre tête , si elle n'avoit ses
momens de repos. Et puis il faut bien- tôt
οὐ κ
1
AVRIL. -1732. 1 667
ou tard , que l'affaissement de nos membres devenant general , nous rentrions
dans la poussiere , d'où un soufle de vie
qui s'exhale , nous avoit fait sortir. Tout
le monde sçait tout cela , je le crois.
Tous les Corps font donc un effort et
ont une tendance continuelle vers le centre. Cette tendance étoit la qualité occulte de nos Anciens. Ils la concevoient
comme un appétit et presque comme une
volonté naturelle de se réunir à leur centre. Descartes a fort bien remarqué que
la matiere pure n'avoit point de ces
sortes d'appétits et de volontez. Mais cette
tendance et cet effort étant pourtant- quelque chose de réel et de toûjours subsistant , il auroit dû , en supprimant une
mauvaise façon de les expliquer , y sub2
stituer un mouvement secret et insensible , qui est la seule façon dont un Corps
peut tendre et faire effort. M. de Leibnis
y reconnoissoit uneforce morte.
Mais il n'y a point ici de mort , et l'effort que les Corps font pour regagner
leur centre , est toûjours , sinon vivant ,
du moins très- vif et très- animé , et mê
me très- sensible , au moins dans ses effats.
: J'ai expliqué cet effort méchanique
dans l'Ouvrage en question , et j'ai fair voir
68 MERCURE DE FRANCE
voir qu'il consistoit dans un mouvement
non continu , parce qu'il est empêché ;
mais continuel et sans cesse redoublé
de vibration , de battement , d'oscillation
qui est le vrai mouvement primigénie de
la pesanteur , et l'unique cause tout- àfait primitive de la chute des Corps qui ont la liberté de tomber.
Pour rendre même ce Principe plus
sensible , j'ai fait voir que c'étoit le Principe general de la Nature , l'agent primitif de tous les Méchanismes , et que.
tout se faisoit dans l'Univers par l'impression d'un mouvement secret de vibration , tous les Corps étant buttez les
uns contre les autres, et faisant des efforts
et des contr'efforts continuels , d'où résultoit l'équilibre general.
Descartes se bornoit trop à son Principe de simple impulsion , qui étoit pourtant un beau Principe ou un demi Principe. Car point d'impulsion sans Répulsion. A bien prendre même les choses ,
l'impulsion n'est qu'un Principe secondaire et un effet sensible , un Phénomene
de la Répulsion.
Cui , tout ce que j'appelle cause Physique , cffort méchanique , action naturelle , est dû à la répulsion , au repoussement , et consiste formellement dans.
8
un
AVRIL: 17320 669
peu
un mouvement de vibration, vif, prompt,
étendu et sans cesse redoublé.
Nous pouvons sans sortir de nous-mêmes , nous en appercevoir avec un peu
d'attention. Nous ne sçaurions rien pousser , non pas même notre corps , notre
bras , notre jambe en avant , si nous ne
repoussons en même-temps en arriere
quelque chose de fixe et d'immobile qui
nous repousse en avant.
Par exemple , en marchant , nous repoussons le terrain , et il faut que ce terrain soutienne le repoussement et nous
le rende pour que nous avancions. Un
sable mouvant qui nous cede en partie ,
une terre labourée nous épuisent bientôt. Un pavé glissant qui ne nous oppose aucune inégalité pour soutenir l'effort de nos pieds , nous laisse tomber.
Nous ne sçaurions marcher sur l'eau.
Je ne me lasse point d'inculquer ce
Principe , sans lequel je ne connois point
de vraye Physique. Un Oiseau qui vole
ne vole en avant qu'en repoussant l'Air
avec ses aîles en arriere. Celui qui nâge
repousse l'eau avec ses bras , la Rame re.
pousse aussi l'eau ou le terrain. Et le vent
qui fait voguer un Vaisseau , quoiqu'il
semble n'avoir qu'un simple mouvement
d'impulsion directe , doit dans son origine
670 MERCURE DE FRANCE
-
rigine , avoir un Principe de répulsion ,
un point d'appui fixe qui l'empêche de
rétrograder. Et c'est par là que je crois
être en état de démontrer que tous les
vents prennent leur origine dans l'interieur même de la Terre et dans la réaction même du centre , qui est comme un
ressort toûjours bandé qui se débande du
côté où il trouve le moins de résistance.
Cela soit dit en passant.
Voyez deux hommes d'égale force buttez l'un contre l'autre , et qui font effort.
pour se culbuter. On les voit , après s'ê→
tre roidis par les jambes contre le terrain , "
agitez de vibrations assez sensibles , se
pousser et se repousser , avancer et reculer , ceder et reprendre le dessus avec
une alternative , qui seule maintient l'équilibre.
Voilà l'état précis de deux Corps plaecz en équilibre aux deux extrémitez
d'un Levier , partagé par le point fixe
mitoyen , en raison réciproque de leurs
pesanteurs. Toûjours pesant , toûjours faiSant effort pour se surmonter ou pour
rompre le Levier qui les arrête , ils sont
agitez d'un mouvement actuel de batrement ou de vibration qui fait leur force
actuelle et leur équilibre actuel.
Car cette force est égale de part et
d'autre
AVRIL 1732 678
d'autre, parce que le mouvement est égal.
Or, il est égal , parce qu'il est proportionné à la longueur des Leviers , tout
comme le mouvement sensible auquel
les Cartésiens ont recours et auquel il est,
je pense , démontré désormais qu'on n'a
nul besoin de recourir.
Tous les équilibres de l'Univers se font
par là , et il n'y a nul autre Principe Physique de tous les Méchanismes , soit naturels , soit artificiels. Toute puissance
appliquée à un Levier ou à toute autre
Machine , agit par les efforts qu'elle fait
à chaque instant , et tout effort agit par
secousses et par vibrations. Qu'on se rende tant soit peu attentif à l'effet de ses
propres mains et de ses bras , lorsqu'on
en fait , on y sentira , on y verra ces secousses et une espece de tremoussement ,
d'ébranlement vif et redoublé. J'avertirai même, en finissant, que lorsqu'on voudra se donner dans ce cas un peu plus
de force , on n'a qu'à donner à son bras,
à ses pieds , à son corps un pareil tremblement encore plus sensible et plus
prompt , cela aide tout- à- fait , et c'est la
Nature même qui nous indique ce secret,
qui est son secret.
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Résumé : EXPLICATION Physico-Mathematique du Principe des Machines. Par L.P.C.J.
Le texte 'Explication Physico-Mathematique du Principe des Machines' traite du principe de l'équilibre des corps sur un levier. Lorsque deux corps, égaux ou inégaux, sont suspendus aux extrémités d'un levier appuyé sur un pivot fixe, ils sont en équilibre lorsque leurs forces relatives sont égales. Cette égalité repose sur la réciprocité des corps et de leur distance par rapport au point fixe. Les Cartésiens expliquent cet équilibre par des raisons mathématiques et géométriques, affirmant que si les corps se mettaient en mouvement, leurs mouvements seraient égaux, les espaces parcourus ou les vitesses compensant les masses. Cependant, les physiciens recherchent une explication plus profonde de la force actuelle des corps en équilibre. L'auteur critique Descartes pour ne pas avoir expliqué l'équilibre par l'effort actuel des corps. Il introduit l'idée d'un mouvement secret et insensible des corps pesants, qui tendent toujours à tomber, même lorsqu'ils sont arrêtés. Ce mouvement secret est décrit comme un effort continu et redoublé, essentiel pour maintenir l'équilibre. L'auteur distingue la pesanteur, cause de la chute, de la chute elle-même, qui en est l'effet. Il illustre cette tendance des corps à tomber par divers exemples, comme l'eau qui coule ou l'air qui remplit les espaces vides. Il conclut que tous les corps font un effort continu vers le centre, effort qui est la cause de l'équilibre. L'auteur critique également Descartes pour avoir négligé ce mouvement secret et insensible, et propose que l'impulsion est un effet secondaire de la répulsion. Il illustre ce principe par divers exemples, comme la marche, la nage ou le vol des oiseaux, montrant que tout mouvement implique une réaction de repoussement. Enfin, l'auteur affirme que l'équilibre des corps sur un levier est maintenu par des vibrations et des secousses, et que cette force est égale de part et d'autre car le mouvement est proportionné à la longueur des leviers. Il conclut que tous les équilibres de l'Univers se font par ces efforts continus et redoublés.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 672-674
THERESE, ODE. Par M. de Soultrait, Maître des Comptes de la Chambre de Nevers.
Début :
L'Amour vient de monter ma Lire; [...]
Mots clefs :
Thérèse, Idole, Guide, Coeur, Chansons
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texteReconnaissance textuelle : THERESE, ODE. Par M. de Soultrait, Maître des Comptes de la Chambre de Nevers.
THERESE,
ODE.
Par M. de Soultrait , Maître des Comptes
de la Chambre de Nevers.
L'Amou Amour vient de monter ma Lire ;
Therese anime mes Concerts.
Guidé par le feu qui m'inspire ,
Je vois à flots couler mes Vers.
Fuyez d'ici , Troupe égarée
Des sentiers de la verité.
Cherchez une Idole parée ;
Pour moije veux du temps d'Astrée ;
Rappeller la simplicité.
M
Achile , aux Rives du Scamandre;
A
Briscooffrit des voeux.
A
Glicere , Horace sçut rendre ,
Tout ce qu'on doit à de beaux yeux;
L'un et l'autre , de la parure ,
Evitant l'appas médité
Echapperent à l'imposture ;
Et
3.
AVRIL. 1732. 673
Et placerent dans la Nature ,
Le Trône de la Volupté.
龍
Seroit-ce au brillant étalage ,
De quelque frivole ornement ,
Que mon cœur fixeroit l'hommage ,
A la beauté dû seulement.
Mais j'entends l'instinct qui s'explique.
Il me fait dire par mes sens ,
Que votre cœur au vrai s'applique ;
Tout autre culte est fanatique ,
Et flétriroit vos sentimens
Lecteurs , de Cyrus , de Clelie ,
Vous ne goutez pas mes Leçons
Votre ame est trop enorgueillie ,
Pour vous prêter à mes raisons
Voyez Venus fendant les Nuës ,
Qui vient approuver mes accens.
Et , se mocquant de vos bévûës
Voyez les Graces demi nuës ,
Rejetter vos fades encens.
Décorez-vous , Héros du Tasse ,
De la vertu des Paladins ,
Morfondez-vous suivant leur trace C1
Je
774 MERCURE DE FRANCE
Je vous suis par d'autres chemins ;
Horace que je prends pour guide,
Présente Therese à mes feux.
Un air naïf, fimple , timide
Vaut mieux que les faveurs d'Armide
Pour l'Amant qui veut être heureux,
Enfant chéri de la Nature ,
Therese , objet de tous ses dons;
Je veux que la Race future,
Te connoisse par mes Chansons,
Si la Fortune qui nous joue,
Dans sa colere a fait ton sort;
Tevoyant au bas de sa Roue ,
Est-il un Mortel qui n'avoue,
Qu'elle est aveugle et qu'elle a tort.
ODE.
Par M. de Soultrait , Maître des Comptes
de la Chambre de Nevers.
L'Amou Amour vient de monter ma Lire ;
Therese anime mes Concerts.
Guidé par le feu qui m'inspire ,
Je vois à flots couler mes Vers.
Fuyez d'ici , Troupe égarée
Des sentiers de la verité.
Cherchez une Idole parée ;
Pour moije veux du temps d'Astrée ;
Rappeller la simplicité.
M
Achile , aux Rives du Scamandre;
A
Briscooffrit des voeux.
A
Glicere , Horace sçut rendre ,
Tout ce qu'on doit à de beaux yeux;
L'un et l'autre , de la parure ,
Evitant l'appas médité
Echapperent à l'imposture ;
Et
3.
AVRIL. 1732. 673
Et placerent dans la Nature ,
Le Trône de la Volupté.
龍
Seroit-ce au brillant étalage ,
De quelque frivole ornement ,
Que mon cœur fixeroit l'hommage ,
A la beauté dû seulement.
Mais j'entends l'instinct qui s'explique.
Il me fait dire par mes sens ,
Que votre cœur au vrai s'applique ;
Tout autre culte est fanatique ,
Et flétriroit vos sentimens
Lecteurs , de Cyrus , de Clelie ,
Vous ne goutez pas mes Leçons
Votre ame est trop enorgueillie ,
Pour vous prêter à mes raisons
Voyez Venus fendant les Nuës ,
Qui vient approuver mes accens.
Et , se mocquant de vos bévûës
Voyez les Graces demi nuës ,
Rejetter vos fades encens.
Décorez-vous , Héros du Tasse ,
De la vertu des Paladins ,
Morfondez-vous suivant leur trace C1
Je
774 MERCURE DE FRANCE
Je vous suis par d'autres chemins ;
Horace que je prends pour guide,
Présente Therese à mes feux.
Un air naïf, fimple , timide
Vaut mieux que les faveurs d'Armide
Pour l'Amant qui veut être heureux,
Enfant chéri de la Nature ,
Therese , objet de tous ses dons;
Je veux que la Race future,
Te connoisse par mes Chansons,
Si la Fortune qui nous joue,
Dans sa colere a fait ton sort;
Tevoyant au bas de sa Roue ,
Est-il un Mortel qui n'avoue,
Qu'elle est aveugle et qu'elle a tort.
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Résumé : THERESE, ODE. Par M. de Soultrait, Maître des Comptes de la Chambre de Nevers.
Le texte est une ode intitulée 'THERESE' écrite par M. de Soultrait, Maître des Comptes de la Chambre de Nevers. L'auteur exprime son amour pour Thérèse, qui inspire ses concerts et ses vers. Il critique ceux qui s'éloignent de la vérité et cherchent des idoles artificielles, préférant la simplicité et la nature. Il cite des exemples de la mythologie et de la littérature, comme Achille et Horace, pour illustrer la pureté des sentiments amoureux. L'auteur rejette les ornements frivoles et les apparences trompeuses, affirmant que son cœur est attiré par la véritable beauté. Il invite les lecteurs à suivre des leçons de simplicité et de naturel, en opposition à l'orgueil et aux fausses valeurs. Thérèse est présentée comme un enfant chéri de la nature, digne d'être connu par les générations futures. L'auteur critique également la fortune aveugle qui peut jouer avec le destin des hommes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 674-683
REPLIQUE à la Réponse de M.L.B. sur son Explication de l'Inscription d'Auxerre.
Début :
J'ay lû ce que M.L.B. oppose aux Remarques que [...]
Mots clefs :
Inscription d'Auxerre, Ovinius, Monnaies antiques, Ouvrage, M. L. B., Association, Guerre, Alexandre
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texteReconnaissance textuelle : REPLIQUE à la Réponse de M.L.B. sur son Explication de l'Inscription d'Auxerre.
REPLIQUE àla Réponse de M, L. B
sur son Explication de l'Inscription d'Auxerre.
Ay lû ce que M. L. B. oppose aux
Remarques que j'ai données dans le
mois de Juillet dernier , sur son Explication de l'Inscription d'Auxerre. Sa Réponse est d'un homme du métier qui
écrit d'une maniere aussi spirituelle que
sçavante;
AVRIL. 1732. 675
sçavante ; mais les raisonnemens qu'il
employe pour soutenir sa prétendue association d'Ovinius , ne me paroissent pas
solides , et il m'accuse d'ailleurs assez légerement de lui faire dire au sujet de la
Guerre d'Allemagne , ce qu'il ne dit pas,
et cela dans la vûë de combattre son sentiment ; il me permettra donc , s'il lui
plaît, de m'expliquer sur ces deux articles.
Premierement,pour ce qui regarde Ovinius , je soutiens , comme je l'ai déja fait,
que la lecturo seule du Texte de Lampride , qui nous rapporte l'association de ce
Sénateur à l'Empire , suffit pour nous
convaincre de la fausseté de cet Evenement. En effet a-t'on jamais vû qu'un
Prince puissant et paisible , à la premiere
nouvelle qu'un de ses Sujets est dans le
dessein de brouiller l'Etat , ait aussi- tôt .
sans autre consideration et par une foiblesse indigne , partagé avec lui son pouvoir , l'ait associé au Trône, et lui ait voulû de plus laisser le commandement des
Armées , c'est-à-dire en bon François
se livrer entierement à sa discretion. Voilà
pourtant la conduite de Severe Alexandre , si l'on s'en rapporte à Lampride.
Cum quidam Ovinius ... rebellare voluisset...participem imperii appellavit ... &
eam expeditio barbarica esset nunciata
Ciij vel
676 MERCURE DE FRANCE
vel ipsum, si vellet ire, vel ut secum proficis ceretur hortatus est. Un tel récit révolte le
Lecteur le plus crédule , aussi ne suis-je
pas le seul qui le révoque en doute. It
me suffira pour la de preuve, rapporter
ici les paroles de M. de Tillemont , sur
l'action qui fait la dispute. Nous ne vou
lons pas omettre ici , ( dit cet Auteur , p.
214. du Tome 3. de l'Hist. des Empereurs ) un Evenement qui semble apparte
nir plus que tout autre à l'an 228. S'il est
veritable dans toutes les circonstances que
l'on en dit ; car il est vrai qu'il y en a qui
paroissent tenir de la fable.
Secondement, non-seulement les Auteurs qui vivoient sous Severe Alexandre
et dont les Ouvrages sont parvenus jusqu'à nous , comme Dion et Herodien, (a)
ne nous disent rien de l'Association d'O
vinius ; mais par la maniere dont ils nous
marquent que Severe Alexandre agit dans
des temps de Révolte , il nous font assez
connoître ce que nous devons penser du
(a) En citant Herodien , je réponds incidemment à une Observation de M. L. B. qui prétend
que le silence des Historiens sur le sujet d'Ovinius , ne vient que de ce que ces Auteurs n'ont
écrit que de simples abregez. Herodien seurement ne passera jamais pour un Epitomiste , et le silence d'un Ecrivain aussi exact , balancera toujours l'autorité de Lampride,
récit
AVRIL. 1732.
677
récit de Lampride. Puisque chez eux Se- vere Alexandre est un Prince ferme et
vigilant , qui au premier bruit de quel¬
que entreprise contre son autorité , a
soin de la réprimer avec courage et d'en
punir les auteurs. Conduite qui convient
parfaitement à un Empereur , que M.L.B.
lui-même compare à Trajan. Voici les
Passages des Auteurs que j'ai citez . Per
id tempus ( dit Dion ) multa rebellionesfacte
sunt , quarum cum fuissent formidolosa ,
repressa ac restincta sunt. Et selon Hérodien: Nequi non in Syria res novas contra
Imperium moliti alii , sed universioppressi
statim supplicioque affecti sunt.
En troisiéme lieu , ce qui s'observoit
d'abord dans l'association d'un Prince à
l'Empire , étoit de frapper des Monnoyes
(a) au coin du nouveau Souverain , ç'a
été un usageconstamment gardé sous tous
les Empereurs ; soit que ces Associations
ayent été libres , comme celles de Trajan
par Nerva, d'Elius par Hadrien , soit
qu'elles ayent.été forcées , comme quand
Balbin et Puppien furent obligez de déclarer Cesar le jeune Gordien , ou que
(a) Et vero simul Imperii summam adepti erant ,
Imperatores ) prima hac cura fuit nummos sua ,
mox conjugum denique et liberorum effigie insignire.
Anton, Augustinus. Dial. T. de Vet. Num. antiq..
Cij Ma-
678 MERCURE DE FRANCE
Maximien Hercule fut contraint par Galere , d'accorder le même titre à Severe.
Il nous reste des Médailles de tous ces
Princes. Ovinius seroit- il le seul pour qui
on eut négligé une coûtume si essentielle
et si continue? Sur tout ce Sénateur ayant
vécu plus de 7 ans , après sa prétendue
association , si l'on s'en rapporte à M.L.B.
qui ne le fait mourir qu'après Severe
Aléxandre.
Enfin pour me servir des armes que
M. L. B. me fournit lui-même, je ferai
remarquer que si Ovinius avoit effectivement été associé par Severe Alexandre;
les Loix que ce dernier donna la même
année de cet Evénement , n'auroient pas
manqué de faire mention d'Ovinius , ou
nommément ou en nom collectif , ce qui
n'est pas., Severe Aléxandre y étant seul
nommé , et cela contre la Regle générale , s'il avoit cu un Collégue ; puisque
nous voyons dans toutes les Loix des Empereurs qui nous restent , le nombre des
Augustes qui regnoient,' exactement marqué. Divi FRATRES AA. IMP. Severus
ET ANTON. A.A. IMPP.GRATIANUS VALENS
ET THEODOSIUS AAA.
Mais , dit M. L. B. l'association d'Ovinius nous est racontée par un Auteur de
réputation , qui vivoit seulement cent ans
après
AVRIL 17320 679
après Severe Alexandre , et qui comme il
le dit lui-même , avoit emprunté ce fait
des Mémoires de quatre Courtisans de ce
Prince; en faut-il davantage pour autoriser cet Evenement ? Je réponds , que ces
quatre Auteurs n'étant point connus autrement que par ce que nous en dit Lampride , ou les autres Auteurs de l'Histoire
Auguste on n'en sçauroit tirer aucun avantage , s'il est vrai qu'on soit en droit de
révoquer en doute ce que ces Ecrivains
avancent, quand il ne se trouve pas d'ail
leurs confirmé , du moins pour le fonds;.
et c'est ce qu'il est aisé de prouver.
teurs ,
Le corps d'Histoire,appellée Auguste, est
l'ouvrage d'un Compilateur , demi sçavant, qui sans choix , et sans ordre , a
mêlé ensemble les Narrations des Audont son Recueil porte les noms
et de quelques autres , peut-être encore ,
qui nous sont inconnus. C'est le sentiment
de ( a ) Casaubon , de ( b ) Saumaise , et
de M. de ( c) Tillemont , qui suffit pour
nous convaincre, qu'à moins que les faitsqu'on trouve dans cette compilation , ne
se rencontrent ailleurs , on est toujours
(a ) Casaub. Pref. in Hist. Augustë”-
(b ) Saum. Idem .
(c) Till. tom. 4. pag. 66.
Cly bien
680 MERCURE DE FRANCE
reçu , comme je l'ai dit, à ne les point bien
recevoir comme véritables.
د
Mais M. L. B. qui veut absolument
donner la Pourpre à Ovinius , a trouvé
une maniere de le faire , sans inter
resser le Prince. C'est de dire que du côté
de Severe Alexandre , l'association d'O
vinius pouvoit n'être que simulée. J'ai
honte de rapporter un expédient aussi
foible et qui tout mysterieux qu'il est , s'il
étoit même véritable , ne changeoit rien .
aux inconveniens , que n'auroit pas manqué d'emporter avec elle une action aussi
publique , et d'une aussi grande consé→
quence , du moins pour les peuples , qui
conduit par les apparences , auroient tou
jours été dans la bonne foy.
Je passe donc à la seconde partie de la
réponse de M. L. B. mais je dois conve
nir auparavant avec lui,que le mot Vulgi,
que j'ai cité dans ma Lettre du mois de
Juillet , se rapporte moins à l'associa
tion d'Ovinius, qu'au temps où elle peutavoir été faite , sous Trajan ou sous Seve
re Alexandre. C'est un manque d'atten
tion de mapart , mais qui n'ôte rien à mes
preuves , et que je ne veux pas excuser.
M. L. B. nous dit que par l'expedition
qui suivit l'association d'Ovinius, il a entendu la guerre d'Illyrie , qu'on peut appeller :
AVRIL. 1732. 681
peller la Guerre d'Allemagne , et que je
suppose que c'est de la derniere guerre
d'Allemagne dans laquelle périt Severe
Alexandre , dont il a voulu parler. Qu'il
me soit permis de dire que jamais repro
che ne fut plus mal fondé. 1º . En parlant
simplement d'une guerre contre les Allemans , comme a fait M. L. B. dans sa
Lettre du mois de May , il est naturel
`d'entendre la derniere contre ces peuples,
comme la plus considérable , et celle où
ils sont désignez par leur nom dans Lam- "
pride. 2°. C'est , qu'en suivant cet Auteur , comme il a fait , on ne peut l'en- "
rendre autrement. Je m'explique : Lampride nous dit que Severe Alexandre "
ayant appris l'irruption de quelques Barbares sur les Terres de l'Empire , marcha
en personne contre eux , et que dans ce
voyage il mena Ovinius ; or cecy ne peut
convenir à l'expédition d'Illyrie où ce
Prince ne se trouva pas , et qui fut conduite par ses Généraux ; le Texte de Lam
pride y est précis. Acta sunt res feliciter et
in Mauretania per Durium Celsum , et in
Illyrico per Varium Macrinum. Ainsi , s'il
s'agit d'Allemans , et que Severe Alexan- 1
dre ait marché contre eux ; ce ne peutêtre
que dans la seconde guerre , et j'ai euraison d'avancer que quand même l'associa
Cvj tion
682 MERCURE DE FRANCE
tion d'Ovinius ne seroit pas insoutenable. M. L. B. se seroit toujours trompé à
cet égard.
Voilà ce que j'avois à dire pour madeffence ; mais avant que de finir,je dois rapporter une Inscription , qui fait , au sujet
qui nous divise, M. L. B. et moi. Elle se
trouve à Rome , dans les Jardins du Palais Giustiniani , et c'est Reinesius qui la
rapporte.
Syntag. Inscrip. Antiq. cxIx. Part. I.
FORTVNE AVG..
PRO. SAL VTE FERENDINE
DOMINORVM. NN.
SEVERI. PIL. AV G.
FIL. IVLIÆ. AVG. MATRIS
و
Dans cette Inscription , comme on le
voit, Antonin Caracalle et Julie sa mere
sont appellez Domini nostri, ce qui est une
confirmation tout- à- fait décisive de l'ex-.
plication que j'ai donnée de Dominorum
nostrorum , de l'Inscription d'Auxerre , en
l'entendant de Severe Alexandre et de:
Mammée , mere de ce Prince. Tout est
semblable dans ces deux Monumens ; j'ajoute seulement que quoiqu'il semble d'abord qu'on puisse aussi- bien expliquer
celle
AVRIL. 17320 6·831
celle d'Auxerre par rapport à Severe Alexandre et à Sallustia Bårbia Osbiana " son.
épouse ; et que je paroisse en quelque façon donner dans mes Remarques l'alternative sur ce sujet. Je suis néanmoins trèspersuadé que c'est de Mammée seule, que.
I'Inscription peut parler, parce que les(a)
Médailles Grecques qui nous restent d'Orbiana , et qui sont marquées des années.
du Regne de son Mary, nous offrent seu--
lement la cinquième année de ce Prince ;
et comme l'Inscription a été posée la septiéme, il n'y a pas d'apparence d'y trou
ver Orbiana, que Herodion, sans la nommer, nous dit avoir été renvoyée peu de
temps après son mariage , aux instances
de sa belle-mere, j'alouse qu'une autre
partageat avec elle les honneurs de la
Cour. Dedit autem ( Mammée ) filio in matrimoniumpuellam... eadempaulo post aula
per omnem contumeliam exegit , et quum ipsa
tantum vocari angusta vellet , &c.
A Orleans , ce 7 Fev. 1732.D.P..
(a)Vaillant. Nusmism. Graca
sur son Explication de l'Inscription d'Auxerre.
Ay lû ce que M. L. B. oppose aux
Remarques que j'ai données dans le
mois de Juillet dernier , sur son Explication de l'Inscription d'Auxerre. Sa Réponse est d'un homme du métier qui
écrit d'une maniere aussi spirituelle que
sçavante;
AVRIL. 1732. 675
sçavante ; mais les raisonnemens qu'il
employe pour soutenir sa prétendue association d'Ovinius , ne me paroissent pas
solides , et il m'accuse d'ailleurs assez légerement de lui faire dire au sujet de la
Guerre d'Allemagne , ce qu'il ne dit pas,
et cela dans la vûë de combattre son sentiment ; il me permettra donc , s'il lui
plaît, de m'expliquer sur ces deux articles.
Premierement,pour ce qui regarde Ovinius , je soutiens , comme je l'ai déja fait,
que la lecturo seule du Texte de Lampride , qui nous rapporte l'association de ce
Sénateur à l'Empire , suffit pour nous
convaincre de la fausseté de cet Evenement. En effet a-t'on jamais vû qu'un
Prince puissant et paisible , à la premiere
nouvelle qu'un de ses Sujets est dans le
dessein de brouiller l'Etat , ait aussi- tôt .
sans autre consideration et par une foiblesse indigne , partagé avec lui son pouvoir , l'ait associé au Trône, et lui ait voulû de plus laisser le commandement des
Armées , c'est-à-dire en bon François
se livrer entierement à sa discretion. Voilà
pourtant la conduite de Severe Alexandre , si l'on s'en rapporte à Lampride.
Cum quidam Ovinius ... rebellare voluisset...participem imperii appellavit ... &
eam expeditio barbarica esset nunciata
Ciij vel
676 MERCURE DE FRANCE
vel ipsum, si vellet ire, vel ut secum proficis ceretur hortatus est. Un tel récit révolte le
Lecteur le plus crédule , aussi ne suis-je
pas le seul qui le révoque en doute. It
me suffira pour la de preuve, rapporter
ici les paroles de M. de Tillemont , sur
l'action qui fait la dispute. Nous ne vou
lons pas omettre ici , ( dit cet Auteur , p.
214. du Tome 3. de l'Hist. des Empereurs ) un Evenement qui semble apparte
nir plus que tout autre à l'an 228. S'il est
veritable dans toutes les circonstances que
l'on en dit ; car il est vrai qu'il y en a qui
paroissent tenir de la fable.
Secondement, non-seulement les Auteurs qui vivoient sous Severe Alexandre
et dont les Ouvrages sont parvenus jusqu'à nous , comme Dion et Herodien, (a)
ne nous disent rien de l'Association d'O
vinius ; mais par la maniere dont ils nous
marquent que Severe Alexandre agit dans
des temps de Révolte , il nous font assez
connoître ce que nous devons penser du
(a) En citant Herodien , je réponds incidemment à une Observation de M. L. B. qui prétend
que le silence des Historiens sur le sujet d'Ovinius , ne vient que de ce que ces Auteurs n'ont
écrit que de simples abregez. Herodien seurement ne passera jamais pour un Epitomiste , et le silence d'un Ecrivain aussi exact , balancera toujours l'autorité de Lampride,
récit
AVRIL. 1732.
677
récit de Lampride. Puisque chez eux Se- vere Alexandre est un Prince ferme et
vigilant , qui au premier bruit de quel¬
que entreprise contre son autorité , a
soin de la réprimer avec courage et d'en
punir les auteurs. Conduite qui convient
parfaitement à un Empereur , que M.L.B.
lui-même compare à Trajan. Voici les
Passages des Auteurs que j'ai citez . Per
id tempus ( dit Dion ) multa rebellionesfacte
sunt , quarum cum fuissent formidolosa ,
repressa ac restincta sunt. Et selon Hérodien: Nequi non in Syria res novas contra
Imperium moliti alii , sed universioppressi
statim supplicioque affecti sunt.
En troisiéme lieu , ce qui s'observoit
d'abord dans l'association d'un Prince à
l'Empire , étoit de frapper des Monnoyes
(a) au coin du nouveau Souverain , ç'a
été un usageconstamment gardé sous tous
les Empereurs ; soit que ces Associations
ayent été libres , comme celles de Trajan
par Nerva, d'Elius par Hadrien , soit
qu'elles ayent.été forcées , comme quand
Balbin et Puppien furent obligez de déclarer Cesar le jeune Gordien , ou que
(a) Et vero simul Imperii summam adepti erant ,
Imperatores ) prima hac cura fuit nummos sua ,
mox conjugum denique et liberorum effigie insignire.
Anton, Augustinus. Dial. T. de Vet. Num. antiq..
Cij Ma-
678 MERCURE DE FRANCE
Maximien Hercule fut contraint par Galere , d'accorder le même titre à Severe.
Il nous reste des Médailles de tous ces
Princes. Ovinius seroit- il le seul pour qui
on eut négligé une coûtume si essentielle
et si continue? Sur tout ce Sénateur ayant
vécu plus de 7 ans , après sa prétendue
association , si l'on s'en rapporte à M.L.B.
qui ne le fait mourir qu'après Severe
Aléxandre.
Enfin pour me servir des armes que
M. L. B. me fournit lui-même, je ferai
remarquer que si Ovinius avoit effectivement été associé par Severe Alexandre;
les Loix que ce dernier donna la même
année de cet Evénement , n'auroient pas
manqué de faire mention d'Ovinius , ou
nommément ou en nom collectif , ce qui
n'est pas., Severe Aléxandre y étant seul
nommé , et cela contre la Regle générale , s'il avoit cu un Collégue ; puisque
nous voyons dans toutes les Loix des Empereurs qui nous restent , le nombre des
Augustes qui regnoient,' exactement marqué. Divi FRATRES AA. IMP. Severus
ET ANTON. A.A. IMPP.GRATIANUS VALENS
ET THEODOSIUS AAA.
Mais , dit M. L. B. l'association d'Ovinius nous est racontée par un Auteur de
réputation , qui vivoit seulement cent ans
après
AVRIL 17320 679
après Severe Alexandre , et qui comme il
le dit lui-même , avoit emprunté ce fait
des Mémoires de quatre Courtisans de ce
Prince; en faut-il davantage pour autoriser cet Evenement ? Je réponds , que ces
quatre Auteurs n'étant point connus autrement que par ce que nous en dit Lampride , ou les autres Auteurs de l'Histoire
Auguste on n'en sçauroit tirer aucun avantage , s'il est vrai qu'on soit en droit de
révoquer en doute ce que ces Ecrivains
avancent, quand il ne se trouve pas d'ail
leurs confirmé , du moins pour le fonds;.
et c'est ce qu'il est aisé de prouver.
teurs ,
Le corps d'Histoire,appellée Auguste, est
l'ouvrage d'un Compilateur , demi sçavant, qui sans choix , et sans ordre , a
mêlé ensemble les Narrations des Audont son Recueil porte les noms
et de quelques autres , peut-être encore ,
qui nous sont inconnus. C'est le sentiment
de ( a ) Casaubon , de ( b ) Saumaise , et
de M. de ( c) Tillemont , qui suffit pour
nous convaincre, qu'à moins que les faitsqu'on trouve dans cette compilation , ne
se rencontrent ailleurs , on est toujours
(a ) Casaub. Pref. in Hist. Augustë”-
(b ) Saum. Idem .
(c) Till. tom. 4. pag. 66.
Cly bien
680 MERCURE DE FRANCE
reçu , comme je l'ai dit, à ne les point bien
recevoir comme véritables.
د
Mais M. L. B. qui veut absolument
donner la Pourpre à Ovinius , a trouvé
une maniere de le faire , sans inter
resser le Prince. C'est de dire que du côté
de Severe Alexandre , l'association d'O
vinius pouvoit n'être que simulée. J'ai
honte de rapporter un expédient aussi
foible et qui tout mysterieux qu'il est , s'il
étoit même véritable , ne changeoit rien .
aux inconveniens , que n'auroit pas manqué d'emporter avec elle une action aussi
publique , et d'une aussi grande consé→
quence , du moins pour les peuples , qui
conduit par les apparences , auroient tou
jours été dans la bonne foy.
Je passe donc à la seconde partie de la
réponse de M. L. B. mais je dois conve
nir auparavant avec lui,que le mot Vulgi,
que j'ai cité dans ma Lettre du mois de
Juillet , se rapporte moins à l'associa
tion d'Ovinius, qu'au temps où elle peutavoir été faite , sous Trajan ou sous Seve
re Alexandre. C'est un manque d'atten
tion de mapart , mais qui n'ôte rien à mes
preuves , et que je ne veux pas excuser.
M. L. B. nous dit que par l'expedition
qui suivit l'association d'Ovinius, il a entendu la guerre d'Illyrie , qu'on peut appeller :
AVRIL. 1732. 681
peller la Guerre d'Allemagne , et que je
suppose que c'est de la derniere guerre
d'Allemagne dans laquelle périt Severe
Alexandre , dont il a voulu parler. Qu'il
me soit permis de dire que jamais repro
che ne fut plus mal fondé. 1º . En parlant
simplement d'une guerre contre les Allemans , comme a fait M. L. B. dans sa
Lettre du mois de May , il est naturel
`d'entendre la derniere contre ces peuples,
comme la plus considérable , et celle où
ils sont désignez par leur nom dans Lam- "
pride. 2°. C'est , qu'en suivant cet Auteur , comme il a fait , on ne peut l'en- "
rendre autrement. Je m'explique : Lampride nous dit que Severe Alexandre "
ayant appris l'irruption de quelques Barbares sur les Terres de l'Empire , marcha
en personne contre eux , et que dans ce
voyage il mena Ovinius ; or cecy ne peut
convenir à l'expédition d'Illyrie où ce
Prince ne se trouva pas , et qui fut conduite par ses Généraux ; le Texte de Lam
pride y est précis. Acta sunt res feliciter et
in Mauretania per Durium Celsum , et in
Illyrico per Varium Macrinum. Ainsi , s'il
s'agit d'Allemans , et que Severe Alexan- 1
dre ait marché contre eux ; ce ne peutêtre
que dans la seconde guerre , et j'ai euraison d'avancer que quand même l'associa
Cvj tion
682 MERCURE DE FRANCE
tion d'Ovinius ne seroit pas insoutenable. M. L. B. se seroit toujours trompé à
cet égard.
Voilà ce que j'avois à dire pour madeffence ; mais avant que de finir,je dois rapporter une Inscription , qui fait , au sujet
qui nous divise, M. L. B. et moi. Elle se
trouve à Rome , dans les Jardins du Palais Giustiniani , et c'est Reinesius qui la
rapporte.
Syntag. Inscrip. Antiq. cxIx. Part. I.
FORTVNE AVG..
PRO. SAL VTE FERENDINE
DOMINORVM. NN.
SEVERI. PIL. AV G.
FIL. IVLIÆ. AVG. MATRIS
و
Dans cette Inscription , comme on le
voit, Antonin Caracalle et Julie sa mere
sont appellez Domini nostri, ce qui est une
confirmation tout- à- fait décisive de l'ex-.
plication que j'ai donnée de Dominorum
nostrorum , de l'Inscription d'Auxerre , en
l'entendant de Severe Alexandre et de:
Mammée , mere de ce Prince. Tout est
semblable dans ces deux Monumens ; j'ajoute seulement que quoiqu'il semble d'abord qu'on puisse aussi- bien expliquer
celle
AVRIL. 17320 6·831
celle d'Auxerre par rapport à Severe Alexandre et à Sallustia Bårbia Osbiana " son.
épouse ; et que je paroisse en quelque façon donner dans mes Remarques l'alternative sur ce sujet. Je suis néanmoins trèspersuadé que c'est de Mammée seule, que.
I'Inscription peut parler, parce que les(a)
Médailles Grecques qui nous restent d'Orbiana , et qui sont marquées des années.
du Regne de son Mary, nous offrent seu--
lement la cinquième année de ce Prince ;
et comme l'Inscription a été posée la septiéme, il n'y a pas d'apparence d'y trou
ver Orbiana, que Herodion, sans la nommer, nous dit avoir été renvoyée peu de
temps après son mariage , aux instances
de sa belle-mere, j'alouse qu'une autre
partageat avec elle les honneurs de la
Cour. Dedit autem ( Mammée ) filio in matrimoniumpuellam... eadempaulo post aula
per omnem contumeliam exegit , et quum ipsa
tantum vocari angusta vellet , &c.
A Orleans , ce 7 Fev. 1732.D.P..
(a)Vaillant. Nusmism. Graca
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Résumé : REPLIQUE à la Réponse de M.L.B. sur son Explication de l'Inscription d'Auxerre.
L'auteur répond à M. L. B. concernant l'interprétation d'une inscription d'Auxerre. Il conteste l'idée que Ovinius aurait été associé à l'Empire sous Sévère Alexandre, comme le suggère M. L. B. Selon l'auteur, la lecture du texte de Lampride, qui mentionne cet événement, suffit à en prouver la fausseté. Un prince puissant et pacifique n'aurait pas partagé son pouvoir avec un sujet rebelle sans considération préalable. L'auteur cite également M. de Tillemont, qui exprime des doutes sur la véracité de cet événement. Les historiens contemporains de Sévère Alexandre, tels que Dion et Hérode, ne font aucune mention de cette association et décrivent l'empereur comme un prince ferme et vigilant. L'auteur souligne que les empereurs avaient l'habitude de frapper des monnaies à l'effigie des nouveaux souverains associés, ce qui n'a pas été fait pour Ovinius. L'auteur réfute également l'argument de M. L. B. selon lequel l'association d'Ovinius pourrait avoir été simulée. Il corrige une erreur concernant l'interprétation d'un mot dans sa lettre précédente. Enfin, il présente une inscription romaine qui confirme son interprétation de l'inscription d'Auxerre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 684-686
ARIANE. CANTATE.
Début :
L'Infidèle Thésée, épris de nouveaux charmes; [...]
Mots clefs :
Ariane , Thésée, Amour, Nouvelles faveurs, Inconstance, Venger
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texteReconnaissance textuelle : ARIANE. CANTATE.
ARIAN E
CANTATE
L'Infidele Thésée , épris de nouveaux charmes ;
Avoit laissé la fille de Minos
Exposée aux fureurs des Monstres de Naxos
Şans espoir de tarir la source de ses larmes ;
La trifte Ariane en ces mots ,
Aux Echos d'alentour annonçoit ses allarmes,
Le souvenir odieux
Del'ingrat qui m'abandonne‚¨
M'est un tourment plus affreux
Que la mort qui m'environne,
Quand de més jaloux transports
Je suis la seule victime ,*
Mon perfide sans remords,
Goute les fruits de son crime
Mais que mille objets divers ;
Pour prix de son inconstance
Dédaignent , les vœux offerts ,
Du volage qui m'offense.
Lex
AVRIL. 1732. 685
Le souvenir odieux
De l'ingrat qui m'abandonne ,
M'est un tourment plus affreux
Que la mort qui m'environne.
Tandis qu'Ariane outragée ,
Aux Rochers attendris racontoit ses malheurs
Foibles soulagemens à ses vives douleurs !
L'amour pour consoler cette amante affligée
De la perte du fils d'Egée ,
7
Soumet Bacchus à ses attraits
Et ce fier. Dieu , blessé de mille traits,
Vient ainsi rendre hommage à sa beauté vangée.
Lorsqu'à chasser vos déplaisirs
Un Dieu lui - même s'y interesse
Pour un ingrat qui vous délaisse
Osez-vous pousser des soupirs ?
Laisserez-vous , belle Ariane,
Ternir l'éclat de vos appas
Dans l'obscurité du trépas •
です
Où votre douleur les condamnes ??
Mortelle , oubliez les mortels ,
Un Dieu que l'Univers adore ,
A votre douleur qu'il implore ,
Dresse lui-même des Autels.
Qui
686 MERCURE DE FRANCE
Qui l'eût cru! pour bruler d'une flame nouvelle
L'Amante de Thésée éteint ses premiers feux ;
Mais malgré les efforts de Bacchus amoureux
A sa premiere ardeur Ariane fidelle ,
N'auroit pas ressenti cet heureux changement ;
Si l'amour qui veilloit à leur contentement
N'avoit effacé de son ame
L'injurieux oubli dont son perfide amant™
Avoit payé l'ardeur de la plus belle flame.
*
Jeunes Beautez , si quelque amant ve
lage ,
De votre joug dédaigne lès douceurs ,
L'Amour,soigneux devanger cet outrage,
Vous comblera de nouvelles faveurs.
A ses desseins rendez-vous favorables ,
Il tarira la source de vos pleurs ,
Brulez de nouveaux feux , et ces feux plus du-- rables ,
Vous feront oublier l'objet de vos douleurs.
Jeunes Beautéz , si quelque Amant volage ,
Dé votre joug dédaigne les douceurs ,
L'Amour, soigneux de vanger cet outrage ,
Vous comblera de nouvelles faveurs.
J. M. GAULT DE R. $
REMAR
CANTATE
L'Infidele Thésée , épris de nouveaux charmes ;
Avoit laissé la fille de Minos
Exposée aux fureurs des Monstres de Naxos
Şans espoir de tarir la source de ses larmes ;
La trifte Ariane en ces mots ,
Aux Echos d'alentour annonçoit ses allarmes,
Le souvenir odieux
Del'ingrat qui m'abandonne‚¨
M'est un tourment plus affreux
Que la mort qui m'environne,
Quand de més jaloux transports
Je suis la seule victime ,*
Mon perfide sans remords,
Goute les fruits de son crime
Mais que mille objets divers ;
Pour prix de son inconstance
Dédaignent , les vœux offerts ,
Du volage qui m'offense.
Lex
AVRIL. 1732. 685
Le souvenir odieux
De l'ingrat qui m'abandonne ,
M'est un tourment plus affreux
Que la mort qui m'environne.
Tandis qu'Ariane outragée ,
Aux Rochers attendris racontoit ses malheurs
Foibles soulagemens à ses vives douleurs !
L'amour pour consoler cette amante affligée
De la perte du fils d'Egée ,
7
Soumet Bacchus à ses attraits
Et ce fier. Dieu , blessé de mille traits,
Vient ainsi rendre hommage à sa beauté vangée.
Lorsqu'à chasser vos déplaisirs
Un Dieu lui - même s'y interesse
Pour un ingrat qui vous délaisse
Osez-vous pousser des soupirs ?
Laisserez-vous , belle Ariane,
Ternir l'éclat de vos appas
Dans l'obscurité du trépas •
です
Où votre douleur les condamnes ??
Mortelle , oubliez les mortels ,
Un Dieu que l'Univers adore ,
A votre douleur qu'il implore ,
Dresse lui-même des Autels.
Qui
686 MERCURE DE FRANCE
Qui l'eût cru! pour bruler d'une flame nouvelle
L'Amante de Thésée éteint ses premiers feux ;
Mais malgré les efforts de Bacchus amoureux
A sa premiere ardeur Ariane fidelle ,
N'auroit pas ressenti cet heureux changement ;
Si l'amour qui veilloit à leur contentement
N'avoit effacé de son ame
L'injurieux oubli dont son perfide amant™
Avoit payé l'ardeur de la plus belle flame.
*
Jeunes Beautez , si quelque amant ve
lage ,
De votre joug dédaigne lès douceurs ,
L'Amour,soigneux devanger cet outrage,
Vous comblera de nouvelles faveurs.
A ses desseins rendez-vous favorables ,
Il tarira la source de vos pleurs ,
Brulez de nouveaux feux , et ces feux plus du-- rables ,
Vous feront oublier l'objet de vos douleurs.
Jeunes Beautéz , si quelque Amant volage ,
Dé votre joug dédaigne les douceurs ,
L'Amour, soigneux de vanger cet outrage ,
Vous comblera de nouvelles faveurs.
J. M. GAULT DE R. $
REMAR
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Résumé : ARIANE. CANTATE.
Le texte narre la tragédie d'Ariane, abandonnée par Thésée sur l'île de Naxos. Ariane exprime sa douleur et son désespoir face à l'ingratitude de Thésée, comparant sa souffrance à une mort environnante. Elle se remémore amèrement l'homme qui l'a laissée seule face aux monstres de l'île. Malgré ses malheurs, elle trouve un certain soulagement en partageant ses douleurs avec les rochers. Bacchus, ému par sa souffrance, lui offre son amour pour consoler sa perte. Il la persuade de ne pas se laisser abattre par la trahison de Thésée et de reconnaître la valeur de l'amour divin qu'il lui porte. Ariane, initialement fidèle à Thésée, finit par accepter l'amour de Bacchus, effaçant ainsi le souvenir douloureux de son premier amour. Le texte se conclut par un conseil aux jeunes beautés : si un amant volage les dédaigne, l'amour saura les venger en leur offrant de nouvelles faveurs et en tarissant la source de leurs pleurs.
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9
p. 687-692
REMARQUE sur un endroit de l'Histoire de l'Eglise de Meaux. Par Dom du Plessis.
Début :
Les Nouvellistes du Parnasse nous régalent si souvent de ce [...]
Mots clefs :
Histoire de l'Église de Meaux, Cloches, Inscription, Siècle
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texteReconnaissance textuelle : REMARQUE sur un endroit de l'Histoire de l'Eglise de Meaux. Par Dom du Plessis.
REMARQUE sur un endroit de
l'Histoire de l'Eglise de Meaux. Par
Dom du Plessis.
Es Nouvellistes du Parnasse nous réLgalent galent si souvent de ce qui leur paroît réjouissant dans l'Histoire de l'Eglise.
de Meaux; comme Epitaphes, Articles de
Testamens, Titres d'Eglises , &c. que cela
m'a fait naître l'envie de lire cette Histoire. En me donnant cette satisfaction ,
je suis tombé dès le second jour sur une
circonstance particuliere qui regarde l'an
tiquité d'un Prieuré de ce Diocèse.Quoique l'Auteur ne manque pas de preuves ,
qui établissent cette antiquité , il en va
chercher une jusques sur une Cloche ;
mais par malheur il ne prend pas, le veritable sens de l'Inscription qu'on y lit.
Et afin que vous n'en doutiez pas , il faut
vous nommer le Prieuré dont il est question. C'est celui de Nanteuil le Haudoin,
qui est sur les limites du Valois et du
Mulcien. Dom Toussaints du Plessis en
parle à la page 120. de son premier vo- Tume.
Il nous dit qu'une des deux Tours de
l'Eglise
·
683 MERCURE DE FRANCE
2.
l'Eglise de ce Prieuré , appellée la Tour
de Saint-Babylas , contient deux grosses
Cloches , sur l'une desquelles on lit ces
mots : Mentem sanctam , spontaneam , bo
norem Deo et patria liberationem. Radulfus
Silvanectensis nos fecit.Ces derniers mots,
dit- il , signifient : Raoul , Comte de Senlis
nous afaitfondre ; et il tire delà une seconde preuve de l'ancienneté de ce Monastere ; car , ajoute- t- il , le seul Raoul de
Senlis ou de Crépy , qui ait été Seigneur
de Nanteuil, vivoit sur la fin du dixième
siécle. Pour moy , en finissant de lire cet
endroit , je n'ai point hésité de dire que
Dom du Plessis ne donnoit point à l'Inscription de la Cloche, le sens qu'elle doir
avoir. Plein des noms personnels des Seigneurs du voisinage de Meaux , il a cru
en trouver jusques sur cette Cloche; et
quoique le Titre de Comes ne soit point
employé dans l'Inscription , il a cru pouvoir le sous- entendre.
Je ne sçai si Dom Toussains a visité ce
Prieuré en personne , et s'il a vû la Cloche dont il tire sa Preuve. Quelque soit
le caractere de l'fascription , il ne peut
être d'un siècle si reculé que le dixième.
Les Cloches sont sujettes à tant d'accidens , que ce seroit une merveille d'en
voir une grosse subsister depuis 7 à 8 cens
ans
AVRIL. 1732. 689
ans. Il n'y a qu'à faire attention aux differens malheurs , qui dans l'espace seulement d'un siecle , peuvent arriver à une
Eglise et à unClocher, pour comprendre.
que dans l'espace de huit siécles , ces accidens sont présumez, à plus forte raison,
avoir pu arriver. Comme l'Edifice de l'Eglise de Nanteuil , que j'ai vû et examiné, n'est point d'une si haute date, quoiqu'il soit ancien ; il faudroit dire encore ,
que cette Cloche proviendroit d'un Clocher de la Basilique précédente (a) ; mais
non , il n'y a qu'à s'en tenir au sens naturel de l'Inscription : Radulphus , Silvanectensis nos fecit , signifie tout naturellement : Raoul de Senlis nous a fonduës.
C'étoit un Fondeur , nommé Raoul, et
surnommé ou originaire de Senlis, qui fit
l'opération , et qui dirigea l'Inscription
de la Cloche.
Il n'y faut pas entendre plus de finesse , que dans les Inscriptions qu'on lit
au dessous des Statues , ou au bas des Tableaux. NN. sculpsit. NN. pinxit ; et
jamais on ne s'avisa de croire que les noms
propres , marquez au bas de ces ouvrages
soient ceux des personnes qui ont fait faire
les Tableaux ou les Statues. Chacun com-
(a )Il m'aparu que dans le côté droit , il ne
restoit que deux Pilliers de lapermiere Eglise.
prend
90 MERCURE DE FRANCE
prend que c'est celui des ouvriers.
Sa Sentence qui est avant la Note du
Fondeur,consiste dans l'Epitaphe de sainte Agathe. On la trouve dans la Légende de cette Sainte , et on la chante encore dans l'Office en plusieurs Eglises , le
jour du Martyre , de cette Vierge.
Tout ce que je puis en dire , est que
cette Inscription se mettoit communé
ment sur les Cloches,au quinziéme siècle.
L'Histoire des Evêques de Montpellier ,
du sieur Gariel , nous apprend qu'une
Cloche fondue , vers l'an 1450. pour les
Cordeliers de cette Ville , portoit la même Sentence : Mentem Sanctam , &c. Je
me souviens aussi qu'en l'an 1711. lorsqu'on eut descendu du Clocher de certains Religieux du même Ordre ( mais
d'une autre Province ) une Cloche cassée,
du poids d'environ 5 à 6 cens , j'y lûs les
mêmes paroles , en Lettres Gothiques, Capitales : MENTEM SANCTAM , &c. avec le
chiffre , M. CCCCXXV. Soit donc que ce fût
la Sentence favorite de quelques Fondeurs de Cloches au quinziéme siecle ,
soit que le Clergé ait eu en cela l'intention de mettre ces Cloches sous la protection de sainte Agathe; cela ne contribuë
pas davantage à faire croire que le Radul
phus de l'Inscription , fût un Comte de
Senlis ou de Crépy..
Il
AVRIL. 1732. €91
Il est vrai que l'on a pû être au quinziéme siécle dans l'usage d'opposer aux
accidens des Foudres et des Ouragans cette venerable Inscription qui a tant excité
la foy des Catanois , contre les périls menaçans du Mont Etna : Mais sans rafiner
dans la spiritualité plus qu'il ne convient,
le Cloche en question , ne viendroit- elle
point de l'Eglise de sainte Agathe de Crépy en Valois , qui n'est qu'à trois lieuës de
Nanteuil, et qui est tres-ancienne, à en juger par le Portail ? Il n'est pas rare de
voir une Cloche déplayée et portée d'un
Clocher dans un autre. Dom Toussaint
sçait à merveille que les Cloches de la
Cathedrale d'Orleans sont en vente , depuis que la Tour est abbatuë ; et que l'on
a eu quelques pensées de les transferer dans
les deux Tours de S. Laumer de Blois.On
pourroit produire des exemples de translation de Cloches d'une Eglise à une autre ; mais cette matiere est trop peu intéressante pour s'y étendre.
Vouspouvezjuger, M , par ce que j'ai
dit cy dessus , que je n'aurois aucune peine à croire qu'une petite Cloche , qui ne
seroit point d'usage , n'y exposée aux accidens , ne pûtsubsister des milliers d'années. Telle est celle que l'on montre à
S. Jeande Laon , et qu'on croit être du
temps
692 MERCURE DE FRANCE
peçe que
temps de Sainte Salaberge , Abbesse, c'està-dire , du septième siècle. Mais ce n'est
pas proprement une Cloche , c'est plutôt
une Sonnette en forme de Timbre,de l'esde celles les Soldats François, du
temps de la premiere Race , attachoient
au col de leurs Chevaux, lorsqu'ils les faisoient paître dans les Campagnes et dans
les Bois voisins du Camp. Il en est parlé
dans les Articles de la Loy Salique , sous
le nom de Skilla.
Le Pere Daniel en fait aussi mention
à l'an 593. Ce nom de Skilla a passé dans
le langage vulgaire de quelque Province
pour signifier une Cloche. Le College de
Equille , comme on parle à Toulouse,
est un des principaux de cette Ville.
l'Histoire de l'Eglise de Meaux. Par
Dom du Plessis.
Es Nouvellistes du Parnasse nous réLgalent galent si souvent de ce qui leur paroît réjouissant dans l'Histoire de l'Eglise.
de Meaux; comme Epitaphes, Articles de
Testamens, Titres d'Eglises , &c. que cela
m'a fait naître l'envie de lire cette Histoire. En me donnant cette satisfaction ,
je suis tombé dès le second jour sur une
circonstance particuliere qui regarde l'an
tiquité d'un Prieuré de ce Diocèse.Quoique l'Auteur ne manque pas de preuves ,
qui établissent cette antiquité , il en va
chercher une jusques sur une Cloche ;
mais par malheur il ne prend pas, le veritable sens de l'Inscription qu'on y lit.
Et afin que vous n'en doutiez pas , il faut
vous nommer le Prieuré dont il est question. C'est celui de Nanteuil le Haudoin,
qui est sur les limites du Valois et du
Mulcien. Dom Toussaints du Plessis en
parle à la page 120. de son premier vo- Tume.
Il nous dit qu'une des deux Tours de
l'Eglise
·
683 MERCURE DE FRANCE
2.
l'Eglise de ce Prieuré , appellée la Tour
de Saint-Babylas , contient deux grosses
Cloches , sur l'une desquelles on lit ces
mots : Mentem sanctam , spontaneam , bo
norem Deo et patria liberationem. Radulfus
Silvanectensis nos fecit.Ces derniers mots,
dit- il , signifient : Raoul , Comte de Senlis
nous afaitfondre ; et il tire delà une seconde preuve de l'ancienneté de ce Monastere ; car , ajoute- t- il , le seul Raoul de
Senlis ou de Crépy , qui ait été Seigneur
de Nanteuil, vivoit sur la fin du dixième
siécle. Pour moy , en finissant de lire cet
endroit , je n'ai point hésité de dire que
Dom du Plessis ne donnoit point à l'Inscription de la Cloche, le sens qu'elle doir
avoir. Plein des noms personnels des Seigneurs du voisinage de Meaux , il a cru
en trouver jusques sur cette Cloche; et
quoique le Titre de Comes ne soit point
employé dans l'Inscription , il a cru pouvoir le sous- entendre.
Je ne sçai si Dom Toussains a visité ce
Prieuré en personne , et s'il a vû la Cloche dont il tire sa Preuve. Quelque soit
le caractere de l'fascription , il ne peut
être d'un siècle si reculé que le dixième.
Les Cloches sont sujettes à tant d'accidens , que ce seroit une merveille d'en
voir une grosse subsister depuis 7 à 8 cens
ans
AVRIL. 1732. 689
ans. Il n'y a qu'à faire attention aux differens malheurs , qui dans l'espace seulement d'un siecle , peuvent arriver à une
Eglise et à unClocher, pour comprendre.
que dans l'espace de huit siécles , ces accidens sont présumez, à plus forte raison,
avoir pu arriver. Comme l'Edifice de l'Eglise de Nanteuil , que j'ai vû et examiné, n'est point d'une si haute date, quoiqu'il soit ancien ; il faudroit dire encore ,
que cette Cloche proviendroit d'un Clocher de la Basilique précédente (a) ; mais
non , il n'y a qu'à s'en tenir au sens naturel de l'Inscription : Radulphus , Silvanectensis nos fecit , signifie tout naturellement : Raoul de Senlis nous a fonduës.
C'étoit un Fondeur , nommé Raoul, et
surnommé ou originaire de Senlis, qui fit
l'opération , et qui dirigea l'Inscription
de la Cloche.
Il n'y faut pas entendre plus de finesse , que dans les Inscriptions qu'on lit
au dessous des Statues , ou au bas des Tableaux. NN. sculpsit. NN. pinxit ; et
jamais on ne s'avisa de croire que les noms
propres , marquez au bas de ces ouvrages
soient ceux des personnes qui ont fait faire
les Tableaux ou les Statues. Chacun com-
(a )Il m'aparu que dans le côté droit , il ne
restoit que deux Pilliers de lapermiere Eglise.
prend
90 MERCURE DE FRANCE
prend que c'est celui des ouvriers.
Sa Sentence qui est avant la Note du
Fondeur,consiste dans l'Epitaphe de sainte Agathe. On la trouve dans la Légende de cette Sainte , et on la chante encore dans l'Office en plusieurs Eglises , le
jour du Martyre , de cette Vierge.
Tout ce que je puis en dire , est que
cette Inscription se mettoit communé
ment sur les Cloches,au quinziéme siècle.
L'Histoire des Evêques de Montpellier ,
du sieur Gariel , nous apprend qu'une
Cloche fondue , vers l'an 1450. pour les
Cordeliers de cette Ville , portoit la même Sentence : Mentem Sanctam , &c. Je
me souviens aussi qu'en l'an 1711. lorsqu'on eut descendu du Clocher de certains Religieux du même Ordre ( mais
d'une autre Province ) une Cloche cassée,
du poids d'environ 5 à 6 cens , j'y lûs les
mêmes paroles , en Lettres Gothiques, Capitales : MENTEM SANCTAM , &c. avec le
chiffre , M. CCCCXXV. Soit donc que ce fût
la Sentence favorite de quelques Fondeurs de Cloches au quinziéme siecle ,
soit que le Clergé ait eu en cela l'intention de mettre ces Cloches sous la protection de sainte Agathe; cela ne contribuë
pas davantage à faire croire que le Radul
phus de l'Inscription , fût un Comte de
Senlis ou de Crépy..
Il
AVRIL. 1732. €91
Il est vrai que l'on a pû être au quinziéme siécle dans l'usage d'opposer aux
accidens des Foudres et des Ouragans cette venerable Inscription qui a tant excité
la foy des Catanois , contre les périls menaçans du Mont Etna : Mais sans rafiner
dans la spiritualité plus qu'il ne convient,
le Cloche en question , ne viendroit- elle
point de l'Eglise de sainte Agathe de Crépy en Valois , qui n'est qu'à trois lieuës de
Nanteuil, et qui est tres-ancienne, à en juger par le Portail ? Il n'est pas rare de
voir une Cloche déplayée et portée d'un
Clocher dans un autre. Dom Toussaint
sçait à merveille que les Cloches de la
Cathedrale d'Orleans sont en vente , depuis que la Tour est abbatuë ; et que l'on
a eu quelques pensées de les transferer dans
les deux Tours de S. Laumer de Blois.On
pourroit produire des exemples de translation de Cloches d'une Eglise à une autre ; mais cette matiere est trop peu intéressante pour s'y étendre.
Vouspouvezjuger, M , par ce que j'ai
dit cy dessus , que je n'aurois aucune peine à croire qu'une petite Cloche , qui ne
seroit point d'usage , n'y exposée aux accidens , ne pûtsubsister des milliers d'années. Telle est celle que l'on montre à
S. Jeande Laon , et qu'on croit être du
temps
692 MERCURE DE FRANCE
peçe que
temps de Sainte Salaberge , Abbesse, c'està-dire , du septième siècle. Mais ce n'est
pas proprement une Cloche , c'est plutôt
une Sonnette en forme de Timbre,de l'esde celles les Soldats François, du
temps de la premiere Race , attachoient
au col de leurs Chevaux, lorsqu'ils les faisoient paître dans les Campagnes et dans
les Bois voisins du Camp. Il en est parlé
dans les Articles de la Loy Salique , sous
le nom de Skilla.
Le Pere Daniel en fait aussi mention
à l'an 593. Ce nom de Skilla a passé dans
le langage vulgaire de quelque Province
pour signifier une Cloche. Le College de
Equille , comme on parle à Toulouse,
est un des principaux de cette Ville.
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Résumé : REMARQUE sur un endroit de l'Histoire de l'Eglise de Meaux. Par Dom du Plessis.
L'auteur critique une interprétation erronée d'une inscription sur une cloche du prieuré de Nanteuil-le-Haudouin, telle que présentée dans l'Histoire de l'Église de Meaux par Dom du Plessis. Dom du Plessis avait attribué l'inscription 'Radulfus Silvanectensis nos fecit' à Raoul, Comte de Senlis, vivant à la fin du dixième siècle, pour prouver l'antiquité du prieuré. Cependant, l'auteur conteste cette interprétation, affirmant que 'Radulfus Silvanectensis' désigne un fondeur de cloches nommé Raoul, originaire ou surnommé de Senlis. L'auteur souligne que les cloches sont sujettes à divers accidents et que leur conservation sur une longue période est improbable. Il mentionne également que l'inscription 'Mentem sanctam, spontaneam, bonorem Deo et patria liberationem' est courante au quinzième siècle et ne prouve pas l'antiquité du prieuré. Enfin, il suggère que la cloche pourrait provenir de l'église de Sainte-Agathe de Crépy-en-Valois, située près de Nanteuil.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
p. 692-693
SONNET Sur les Bouts-Rimez, proposez dans le Mercure, par une Dame.
Début :
Commencer un Sonnet par l'affreux mot de Mort. [...]
Mots clefs :
Sonnet, Cercueil
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SONNET Sur les Bouts-Rimez, proposez dans le Mercure, par une Dame.
SONNET
Sur les Bouts - Rimez proposez dans
le Mercure , par une Dame.
Commencer Ommencer un Sonnet par l'affreux mot de
Mort.
Quand on ne veut parler de Cercücil ni de
C'est de gayeté de cœur vouloir périr au
Et se faire à soi- même une rude
Biere ,
Port .
Carricre.
Cet
AVRIL. 1732.
•693
Cet ouvrage sublime independant du
Ne se fait pas si-tôt qu'un tour de
Sort,
Gibeciere,
Et s'il ne nous plaît pas , quoique court ,
il en
Dort ,
Cotin , dans ses Ecrits , l'apprend mieux que Moliere
Il doit faire adoucir d'un Censeur l'œil Hagard,
Et contenter le goût du jeune et du
Rien ne doit y manquer , pas même une
Vieillard;
Apostrophe;
Si l'Auteur n'en bannit et le froid et le
Il aura sûrement , avec Echec et
·Plat ›
Mast ,
D'un Poëte crotté la triste Catastrophe.
THEVEN ART , Amiens
Sur les Bouts - Rimez proposez dans
le Mercure , par une Dame.
Commencer Ommencer un Sonnet par l'affreux mot de
Mort.
Quand on ne veut parler de Cercücil ni de
C'est de gayeté de cœur vouloir périr au
Et se faire à soi- même une rude
Biere ,
Port .
Carricre.
Cet
AVRIL. 1732.
•693
Cet ouvrage sublime independant du
Ne se fait pas si-tôt qu'un tour de
Sort,
Gibeciere,
Et s'il ne nous plaît pas , quoique court ,
il en
Dort ,
Cotin , dans ses Ecrits , l'apprend mieux que Moliere
Il doit faire adoucir d'un Censeur l'œil Hagard,
Et contenter le goût du jeune et du
Rien ne doit y manquer , pas même une
Vieillard;
Apostrophe;
Si l'Auteur n'en bannit et le froid et le
Il aura sûrement , avec Echec et
·Plat ›
Mast ,
D'un Poëte crotté la triste Catastrophe.
THEVEN ART , Amiens
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Résumé : SONNET Sur les Bouts-Rimez, proposez dans le Mercure, par une Dame.
En avril 1732, un texte critique l'usage du mot 'mort' en début de sonnet, prônant une approche plus joyeuse. La création poétique exige du travail et doit plaire à tous les âges. Un poème doit éviter le froid et le plat pour réussir. L'auteur cite Cotin comme plus instructif que Molière. Il avertit que manquer de ces qualités mène à l'échec. Le texte se termine par 'THEVEN ART, Amiens'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 693-706
LETTRE de M. Bouguer, à M. Meynier, au sujet d'un Ecrit inseré dans le Mercure de France du mois de Février dernier, page 274. et suiv.
Début :
MONSIEUR, La plûpart des personnes qui jetteront les yeux sur [...]
Mots clefs :
Demi-cercle, Pinule, Circonférence, Instrument, Académie royale des sciences, Balancier, Vibrations, Machine, Boussole
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. Bouguer, à M. Meynier, au sujet d'un Ecrit inseré dans le Mercure de France du mois de Février dernier, page 274. et suiv.
LETTRE de M. Bouguer , à M. Meynier, au sujet d'un Ecrit inseré dans le
Mercure de France du mois de Février
dernier, page 274. et suiv.
MONONSIEUR,
La plupart des personnes qui jetteront
les yeux sur l'Ecrit que vous avez fait inserer dans le Mercure de France de
Fevrier
4 MERCURE DE FRANCE
Fevrier dernier , ne pourront jamais découvrir pourquoi vous exagerez si fort
la faute dont vous m'accusez, ni pourquoi vous poussez si loin vos plaintes.
Ils verront , non-seulement que je ne
pouvois pas découvrir toutes les particularitez de votre demi Cercle , dans une
Description qui ne les contenoit pas , ils
verront encore que si je n'en ai pas donné
une idée assez exacte , je n'avois aucune
mauvaise intention , et ils ne comprendront point ce qui peut vous avoir fait
prendre pour une censure , ce qu'on ne
doit regarder que commeune espece d'approbation. Je n'ai pas une notion assez
distincte de votre demi Cercle ; il me
semble qu'il est sujet à un inconvénient,
et j'affirme aussi-tôt sur la connoissance
que j'ai de vos lumieres , que vous avez
trouvé le moyen de l'éviter : Nous ne
connoissons ce demi Cercle , ce sont mes
propres termes , que pour en avoir vu une
description très-succincte ; mais nous ne dontons point que son sçavant Auteur ne lui
procure une situation constamment horisontale , malgré le poids de la Pinule qui est
située sur la circonference. Je le demande à
tout le monde , je le demande même à
vos amis les plus intimes , si c'est- là le
langage d'un homme qui cherche à vous
offenser
AVRIL. 1732 695
offenser , et si ce ne sont pas là plutôt les
termes de la prédilection et de l'estime.
Mais puisque vous me forcez à expHquer l'Enigme; je vais montrer comment
Fai , malgré moi , donné occasion à votre
chagrin. Tous les Instrumens dont on peut
se servir en Mer pour observer la hau
teur des Astres , se réduisent à deux especes ; ou ils se mettent de niveau par
leur propre pesanteur , ou c'est le Pilote
qui les met dans cette situation , en vi
sant à l'horison sensible. Je me suis trouvé dans la nécessité d'examiner ces di
vers Instrumens ; cet examen fait le sujet
de la premiere Partie d'un petit Traité
publié en 1729. qui remporta le Prix proposé par l'Académie Royale des Sciences.
Je me déclarai dans cet Ouvrage pour les
Instrumens de la seconde espece , lesquels
sont en usage depuis longtemps dans la
Marine , et je justifiai mon choix par des
raisons , qui , parcequ'elles sont generales,
donnent l'exclusion à votre demi Cercle,
comme à tous les autres Instrumens qui
sont suspendus de la même maniere. Vollà, je pense , ce qui vous a indisposé contre moi ; car je mets à part tous les autres
motifs. Vous avez trouvé mes raisons trop
fortes , quoique j'aye eu la politesse de >
n'en faire aucune application particuliere;
D elles
695 MERCURE DE FRANCE
elles vous ont fâché en même- temps qu'elles vous ont paru utiles ; et comme vous
avez senti qu'il n'étoit point à propos
d'y répondre , vous vous êtes à la fin crû
obligé d'écrire au moins contre l'endroit où je parlois avantageusement de
vous. Il vous est facile de me réfuter de
cette sorte , et vous pouvez continuer
tant que vous le voudrez , à m'apprendre
toutes les particularitez de votre demi
cercle , avec tout l'appareil d'une réprimande. Il vous importe peu d'ailleurs de
le faire sans aucune apparence de necessité, pouvû que vous puissiez faire croire
qu'il ne s'agis point entre nous d'autre
chose. Mais comme on ne peut point en
imposer au Public , qui est un Juge trop
éclairé , il s'appercevra bien que vous
abandonnez réellement la deffense de votre cause, et que vous ne touchez pointdu
tout au sujet.
Il n'importe point en effet , que j'aye
bien ou mal décrit votre demi Cercle ,
puisque j'ay déclaré moi- même que je ne
le connoissois pas parfaitement. Toute
la question est de sçavoir si j'ai pû cependant le condamner avec tous les autres Instrumens de la même espece. Or
il me suffiroit pour avoir ce droit , de
sçavoir qu'il se plaçoit de niveau par sa
construc
AVRIL. 1732. 697
construction et qu'il étoit suspendu par
sa partie superieure. Car dès lors je pouvois le regarder comme un Pendule dont
l'agitation est continuelle , puisque le Navire est sans cesse sujet pendant sa marche ; ou au tangage ou au roulis , ou à
faire quelques élans , et que son mouvement n'est jamais parfaitement uniforme.
Si l'Instrument étoit suspendu par son
centre de gravité , toutes ses parties participeroient en même temps aux secousses; mais aussi tôt qu'il est suspendu par
un autre endroit , une de ses extrémitez
doit toûjours recevoir par l'entremise des
Ressorts et des Balanciers , l'agitation
du Vaisseau , pendant que les autres parties n'auront encore que leur premier
mouvement , et ainsi il doit être sujet à
faire sans cesse des vibrations , lesquelles
seront encore perpetuées par la main de
l'Observateur , qui est obligé presque
chaque instant de toucher à la Boëte pour
l'orienter , ou à l'Allidade pour la diriger.
Remarquez de plus que quelques foibles
que soient ces vibrations , elles feront
toûjours que l'Instrument perdra sa situa-
*
à
★ Les Balanciers sont des especes de Cercles ou
de Quadres de cuivre , dont on se sert avec des
Pivots à l'oposite l'un de l'autre , pour suspendre en Mer les Boussoles.
Dij tion
98 MERCURE DE FRANCE
tion verticale de plusieurs degrez , et qu'll
la perdra dans divers sens , à cause de
Pirrégularité des secousses. Or en voilà
assez pour rendre deffectueuses presque
toutes les Observations qu'on fera au
Soleil ; d'autant plus que le temps absolument propre à les faire , s'échappe avec
rapidité. Mais ce sera encore toute autre
chose , lorsqu'on voudra la nuit prendre
la hauteur des Etoiles. Car comment voulez vous pendant que votre demi Cercle
sera agité et que l'Observateur sera aussi
exposé de son côté à un grand mouvement et à un mouvement qui n'a aucune
conformité avec celui du demi Cercle ,
puisque l'Observateur est toûjours obligé
de s'incliner d'un côté lorsque le Navire
s'incline de l'autre, comment voulez- vous
que pendant cette complication de deux
ou trois mouvemens qui ne s'accordent
point , le Pilote puisse appliquer l'œil à
une Pinule extrémement étroite , et viser
à un objet aussi difficile à saisir qu'une
Etoile Vous devez bien sentir que cela
est absolument impossible avec tous les
Instrumens de l'espece du vôtre , sans
aucune exception ; et que pour réüssir
dans une pareille Observation , on est
obligé, comme je l'ai toûjours soutenu ,
d'employer ceux qui sont actuellement
›
en
A VRIE 17327 699
en usage. Car il faut qu'on puisse ôter
à l'Instrument dont on se sert , tous ses
balancemens particuliers et l'assujettir
contre l'œil et il faut parçonséquent
que le Pilote se charge de tout le soin
de le disposer en visant à l'horison sen- sible.
>
Mais je serois obligé de transcrire
presque toute la premiere Partie de mon
petit Traité , si je voulois vous rapporter
toutes les choses qui vous interessent et
auxquelles vous n'entreprenez point de
répondre. Je pourrois cependant encore
ajouter, maintenant que je connois mieux
votre demi Cercle , que comme une de
ses graduations est conforme à celle de
l'Anneau Astronomique , il doit être extrémement difficile de distinguer avec
exactitude les scrupules du degré, et que
ce n'a pû être que par hazard , ou parce
que vous sçaviez d'avance la hauteur que
vous deviez trouver , que vous ne vous
êtes trompé à Brest que d'environ une
minute. Je pourrois encore vous montrer combien est inutile la suspension que
vous employez , faute d'avoir fait attention qu'on ne doit se servir de Balancier
que lorsqu'on veut suspendre quelque
chose par un point qui est interieur et
qui ne se presente pas aisément. Est-il
Diij question
700 MERCURE DE FRANCE
question de suspendre une Boussole où
une Lampe par un point qu'on ne peut
point aller chercher au- dedans , il faut
dans cette rencontre mettte un Balancier
par dehors. Mais ce n'est plus la même.
chose , aussi- tôt qu'il s'agit de suspendre
un corps par un endroit qui est exterieur
et qu'on peut saisir sans peine. Car tous
les Balanciers que vous mettriez , ne serviroient qu'à rendre immobile un certain
point par rapport à la Boëte et aussi- tôt
que vous en avez la commodité, vous devez bien plutôt suspendre l'Instrument
immédiatement à ce point , sans rendre
inutilement la Machine plus composée et
plus sujette à se déranger. J'insisterois
sur toutes ces choses et je tâcherois de les
porter jusqu'à la derniere évidence, si je ne.
voyois quevous ne donnez aucuneatteinte
à mes premieres Remarques , et que vous
les laissez subsister dans toute leur force..
Je vois d'ailleurs qu'elles ont fait quelque impression sur vous , et qu'elles ne
vous ont pas été inutiles. Car vous avez
depuis changé d'avis dans la construction
d'un autre Instrument destiné encore à
des usages nautiques. Il s'agit , dans un
Ouvrage que vous venez de donner au
Public , de la suspension des Boussoles , et
quoiqu'elles ayent déja un Balancier comme
AVRIL. 1732. 701
me votre demi Cercle , vous reconnoissez néanmoins que tant qu'elles sont appliquées sur quelque chose qui tient au
Vaisseau , elles en reçoivent tous les mou
vemens , et que les Observations se trouvent par là dérangées ; parce que , ditesvous , (a) tantôt le Soleil ne peut être vû
par la fenêtre qui est du côté de l'Observateur, que beaucoup au- dessus ou aux côtez
de lafenêtre opposée à cause du mouvement,
comme lorsque le Vaisseau est incliné du côté
du Soleil on àla droite ou à lagauche, de
PObservateur , lorsqu'il fait Observation ;
et tantôt , &c. C'est pourquoi vous aimez
mieux maintenant laisser au Pilote le soin
de donner à l'Instrument la situation
qu'il doit avoir, et cela parce que (b) le
Pilote , par une habitude qui lui est enpar tie devenuë naturelle à la Mer, entretenant
assez bien son corps en équilibre , et en même temps l'Instrument qui qui lui sert lui sert pour observer la latitude , quoique dans ce temps- la le Vaisseau incline considerablement , tantôt
d'un côté, tantôt de l'autre , à cause du roulis et du Tangage, il entretiendra cet Instrument dans le même équilibre de son corps.
lorsqu'il s'en servira pour observer la déclinaison de l'Aiguille aimantée , tant au Soleil qu'aux Etoiles , ce qui rendra l'Obser-
(a) Au bas de la page 6. (b) Page 17.
Diiij vation
702 MERCURE DE FRANCE
vation bien plus seure. Je vous félicite,
Monsieur , sur votre changement , mais
souffrez en même-temps que je m'en pré
vale ; puisque vous mettez vous même le
sceau à votre condamnation en employant contre les Boussoles ordinaires ,
les mêmes raisons , aux termes près , que
j'avois déja employées contre votre demiCercle.
•
Après cela je ne suis plus étonné si vous
ne lui donnez plus la préference sur l'Arbalestrille ni sur le quartier Anglois ordinaire , et si vous n'entreprenez pas même de la comparer à un Instrument que
j'ai proposé , qui est soutenu par son centre de gravité et qui est parconsequent
de même espece que le vôtre, quoique
je le croye beaucoup mieux suspendu.
Tout ce que vous prétendez faire , c'est
de montrer que je me suis mépris lorsque j'ai préferé le quart de Cercle formé
d'un seul Arc , non- pas à votre demi Cercle , dont il n'étoit plus question , mais
au quartier Anglois ordinaire. Que j'aye
cependant bien ou mal choisi dans cette
derniere circonstance , le sort de votre
Instrument ne change point ; et si je ne
me suis trompé que dans cette rencontre,
j'ai toûjours eu l'avantage de rendre un
service assez considerable au Public , en
pros-
A-V R- IL. 17.320 703
·
proscrivant toutes ces diverses suspensions , dons on vouloit , mal à propos
lui faire embrasser l'usage. Mais de quelle
manieré prouvez- vous que le quart de
Cercle formé d'un seul Arc , est moins
exact que le quartier Anglois ? La nature
de vos preuves me dispense d'y répondre.
Il s'agit d'un changement fait il y a plus
d'un siecle ; il s'agit de sçavoir les motifs
qui ont déterminé à le faire , et vous m'alleguez pour cela l'experience des Marins
d'aujourd'hui. Nous avons une suite de
Traités de Navigation, qui nous marquent
les divers progrès du Pilotage ; Pierre de
Médine et Pierre Nonius en Espagne et
en Portugal; Willebrod Snellius et plu- sieurs autres en Hollande ; M. Denis et
les P. Fournier et Dechales en France ,
ont écrit sur cet Art , et nous en ont représenté tous les differens âges. Mais vous
ne consultez point ces Livres ; vous vous
adressez à nos Pilotes , pour qu'ils vous
rendent compte d'une chose qu'ils doivent encore moins sçavoir que vous, puisqu'elle ne s'est point passée sous leurs
yeux ni de leur temps , et qu'elle n'est
pour eux qu'un point de pure spéculation. De grace , Monsieur , ne renversez
pas ainsi une autre fois l'ordre des cho
ses ou si à la honte des Professeurs
Dv VOUS
2
My
704 MERCURE DE FRANCE
vous suivez encore une pareille conduite,
faites au moins assez usage de vos lumieres , pour peser les réponses que les Pilotes vous feront. Ils vous ont assuré ,
dites-vous , qu'on a abandonné l'usage du
quart de Cerclé formé d'un seul " Arc ,
parce qu'on a experimentéque cet Instrument est sujet à tel et tel inconvenient.
Mais ne deviez- vous pas penser qu'on ne
peut rien établir sur une experience que
personne n'a vûë et que personne ne peut
attester ? ne deviez - vous pas encore examiner si les inconveniens dont on vous
parloit, étoient réels , et s'il n'étoit pas
possible de les lever ?
Je finis , Monsieur , en vous assurant
que comme je n'ai que faire d'en venir
à l'experience pour sçavoir ce que je dois
penser de votre demi Cercle , je ne crois
pas que je me donne jamais la peine d'en
faire l'essai. Je m'imagine bien que vous
me ferez encore un crime de ce que je
persiste ainsi à condamner une Production qui a été approuvée par une Compagnie , dont je suis plus interessé que
personne au monde , à faire valoir les
Jugemens. Ce reproche me toucheroit ,
s'il n'étoit aussi mal fondé que les autres;
et si l'Académie des Sciences , qui prononce toûjours avec autant de prudence
que
AVRIL 1732 705
que de lumieres , n'avoit pas eu le soin
de mettre de sages restrictions à l'Approbation qu'elle vous donna. Cette Compagnie a , outre cela , assez montré depuis
qu'elle ne prétendoit point avoir décidé
la question en votre faveur , puisqu'elle
en a fait le sujet du Prix qui fut distri-,
bué en 1729. et dont elle m'honora. Objectez-moi encore , si vous le voulez , que
je n'ai point été en Mer ; je vous répondrai que si dans certaines matieres de Marine , la premiere chose est d'acquerir des
connoissances de fait , et de se former
une juste idée des mouvemens de la Mer
et de ceux du Vaisseau , le point le plus
essentiel et en même- temps le plus dif.
ficile , est de penetrer la cause de tous
ces mouvemens et d'être en état d'en prévoir les divers effets ; et j'ajouterai qu'on
peut s'appliquer à tout cela avec autant
de succès à Terre que dans tout autre
endroit. Je dois aussi me rendre ce bon
témoignage , puisque vous m'y obligez ,
que quoique je connusse tout le péril
qu'il y avoit à venir remplir une place
que vous aviez occupée , vous qui avez
-fait un voyage de long cours ; personne
ne s'est encore apperçu ici que je n'aye
cultivé l'Hydrographie que dans le Cabinet. J'ai l'honneur d'être , malgré tous
D vj nos
7c6 MERCURE DE FRANCE
nos differends , avec bien de la conside
ration , Monsieur , votre , &c. -
Au Havre , le premier d'Avril 1732.
Mercure de France du mois de Février
dernier, page 274. et suiv.
MONONSIEUR,
La plupart des personnes qui jetteront
les yeux sur l'Ecrit que vous avez fait inserer dans le Mercure de France de
Fevrier
4 MERCURE DE FRANCE
Fevrier dernier , ne pourront jamais découvrir pourquoi vous exagerez si fort
la faute dont vous m'accusez, ni pourquoi vous poussez si loin vos plaintes.
Ils verront , non-seulement que je ne
pouvois pas découvrir toutes les particularitez de votre demi Cercle , dans une
Description qui ne les contenoit pas , ils
verront encore que si je n'en ai pas donné
une idée assez exacte , je n'avois aucune
mauvaise intention , et ils ne comprendront point ce qui peut vous avoir fait
prendre pour une censure , ce qu'on ne
doit regarder que commeune espece d'approbation. Je n'ai pas une notion assez
distincte de votre demi Cercle ; il me
semble qu'il est sujet à un inconvénient,
et j'affirme aussi-tôt sur la connoissance
que j'ai de vos lumieres , que vous avez
trouvé le moyen de l'éviter : Nous ne
connoissons ce demi Cercle , ce sont mes
propres termes , que pour en avoir vu une
description très-succincte ; mais nous ne dontons point que son sçavant Auteur ne lui
procure une situation constamment horisontale , malgré le poids de la Pinule qui est
située sur la circonference. Je le demande à
tout le monde , je le demande même à
vos amis les plus intimes , si c'est- là le
langage d'un homme qui cherche à vous
offenser
AVRIL. 1732 695
offenser , et si ce ne sont pas là plutôt les
termes de la prédilection et de l'estime.
Mais puisque vous me forcez à expHquer l'Enigme; je vais montrer comment
Fai , malgré moi , donné occasion à votre
chagrin. Tous les Instrumens dont on peut
se servir en Mer pour observer la hau
teur des Astres , se réduisent à deux especes ; ou ils se mettent de niveau par
leur propre pesanteur , ou c'est le Pilote
qui les met dans cette situation , en vi
sant à l'horison sensible. Je me suis trouvé dans la nécessité d'examiner ces di
vers Instrumens ; cet examen fait le sujet
de la premiere Partie d'un petit Traité
publié en 1729. qui remporta le Prix proposé par l'Académie Royale des Sciences.
Je me déclarai dans cet Ouvrage pour les
Instrumens de la seconde espece , lesquels
sont en usage depuis longtemps dans la
Marine , et je justifiai mon choix par des
raisons , qui , parcequ'elles sont generales,
donnent l'exclusion à votre demi Cercle,
comme à tous les autres Instrumens qui
sont suspendus de la même maniere. Vollà, je pense , ce qui vous a indisposé contre moi ; car je mets à part tous les autres
motifs. Vous avez trouvé mes raisons trop
fortes , quoique j'aye eu la politesse de >
n'en faire aucune application particuliere;
D elles
695 MERCURE DE FRANCE
elles vous ont fâché en même- temps qu'elles vous ont paru utiles ; et comme vous
avez senti qu'il n'étoit point à propos
d'y répondre , vous vous êtes à la fin crû
obligé d'écrire au moins contre l'endroit où je parlois avantageusement de
vous. Il vous est facile de me réfuter de
cette sorte , et vous pouvez continuer
tant que vous le voudrez , à m'apprendre
toutes les particularitez de votre demi
cercle , avec tout l'appareil d'une réprimande. Il vous importe peu d'ailleurs de
le faire sans aucune apparence de necessité, pouvû que vous puissiez faire croire
qu'il ne s'agis point entre nous d'autre
chose. Mais comme on ne peut point en
imposer au Public , qui est un Juge trop
éclairé , il s'appercevra bien que vous
abandonnez réellement la deffense de votre cause, et que vous ne touchez pointdu
tout au sujet.
Il n'importe point en effet , que j'aye
bien ou mal décrit votre demi Cercle ,
puisque j'ay déclaré moi- même que je ne
le connoissois pas parfaitement. Toute
la question est de sçavoir si j'ai pû cependant le condamner avec tous les autres Instrumens de la même espece. Or
il me suffiroit pour avoir ce droit , de
sçavoir qu'il se plaçoit de niveau par sa
construc
AVRIL. 1732. 697
construction et qu'il étoit suspendu par
sa partie superieure. Car dès lors je pouvois le regarder comme un Pendule dont
l'agitation est continuelle , puisque le Navire est sans cesse sujet pendant sa marche ; ou au tangage ou au roulis , ou à
faire quelques élans , et que son mouvement n'est jamais parfaitement uniforme.
Si l'Instrument étoit suspendu par son
centre de gravité , toutes ses parties participeroient en même temps aux secousses; mais aussi tôt qu'il est suspendu par
un autre endroit , une de ses extrémitez
doit toûjours recevoir par l'entremise des
Ressorts et des Balanciers , l'agitation
du Vaisseau , pendant que les autres parties n'auront encore que leur premier
mouvement , et ainsi il doit être sujet à
faire sans cesse des vibrations , lesquelles
seront encore perpetuées par la main de
l'Observateur , qui est obligé presque
chaque instant de toucher à la Boëte pour
l'orienter , ou à l'Allidade pour la diriger.
Remarquez de plus que quelques foibles
que soient ces vibrations , elles feront
toûjours que l'Instrument perdra sa situa-
*
à
★ Les Balanciers sont des especes de Cercles ou
de Quadres de cuivre , dont on se sert avec des
Pivots à l'oposite l'un de l'autre , pour suspendre en Mer les Boussoles.
Dij tion
98 MERCURE DE FRANCE
tion verticale de plusieurs degrez , et qu'll
la perdra dans divers sens , à cause de
Pirrégularité des secousses. Or en voilà
assez pour rendre deffectueuses presque
toutes les Observations qu'on fera au
Soleil ; d'autant plus que le temps absolument propre à les faire , s'échappe avec
rapidité. Mais ce sera encore toute autre
chose , lorsqu'on voudra la nuit prendre
la hauteur des Etoiles. Car comment voulez vous pendant que votre demi Cercle
sera agité et que l'Observateur sera aussi
exposé de son côté à un grand mouvement et à un mouvement qui n'a aucune
conformité avec celui du demi Cercle ,
puisque l'Observateur est toûjours obligé
de s'incliner d'un côté lorsque le Navire
s'incline de l'autre, comment voulez- vous
que pendant cette complication de deux
ou trois mouvemens qui ne s'accordent
point , le Pilote puisse appliquer l'œil à
une Pinule extrémement étroite , et viser
à un objet aussi difficile à saisir qu'une
Etoile Vous devez bien sentir que cela
est absolument impossible avec tous les
Instrumens de l'espece du vôtre , sans
aucune exception ; et que pour réüssir
dans une pareille Observation , on est
obligé, comme je l'ai toûjours soutenu ,
d'employer ceux qui sont actuellement
›
en
A VRIE 17327 699
en usage. Car il faut qu'on puisse ôter
à l'Instrument dont on se sert , tous ses
balancemens particuliers et l'assujettir
contre l'œil et il faut parçonséquent
que le Pilote se charge de tout le soin
de le disposer en visant à l'horison sen- sible.
>
Mais je serois obligé de transcrire
presque toute la premiere Partie de mon
petit Traité , si je voulois vous rapporter
toutes les choses qui vous interessent et
auxquelles vous n'entreprenez point de
répondre. Je pourrois cependant encore
ajouter, maintenant que je connois mieux
votre demi Cercle , que comme une de
ses graduations est conforme à celle de
l'Anneau Astronomique , il doit être extrémement difficile de distinguer avec
exactitude les scrupules du degré, et que
ce n'a pû être que par hazard , ou parce
que vous sçaviez d'avance la hauteur que
vous deviez trouver , que vous ne vous
êtes trompé à Brest que d'environ une
minute. Je pourrois encore vous montrer combien est inutile la suspension que
vous employez , faute d'avoir fait attention qu'on ne doit se servir de Balancier
que lorsqu'on veut suspendre quelque
chose par un point qui est interieur et
qui ne se presente pas aisément. Est-il
Diij question
700 MERCURE DE FRANCE
question de suspendre une Boussole où
une Lampe par un point qu'on ne peut
point aller chercher au- dedans , il faut
dans cette rencontre mettte un Balancier
par dehors. Mais ce n'est plus la même.
chose , aussi- tôt qu'il s'agit de suspendre
un corps par un endroit qui est exterieur
et qu'on peut saisir sans peine. Car tous
les Balanciers que vous mettriez , ne serviroient qu'à rendre immobile un certain
point par rapport à la Boëte et aussi- tôt
que vous en avez la commodité, vous devez bien plutôt suspendre l'Instrument
immédiatement à ce point , sans rendre
inutilement la Machine plus composée et
plus sujette à se déranger. J'insisterois
sur toutes ces choses et je tâcherois de les
porter jusqu'à la derniere évidence, si je ne.
voyois quevous ne donnez aucuneatteinte
à mes premieres Remarques , et que vous
les laissez subsister dans toute leur force..
Je vois d'ailleurs qu'elles ont fait quelque impression sur vous , et qu'elles ne
vous ont pas été inutiles. Car vous avez
depuis changé d'avis dans la construction
d'un autre Instrument destiné encore à
des usages nautiques. Il s'agit , dans un
Ouvrage que vous venez de donner au
Public , de la suspension des Boussoles , et
quoiqu'elles ayent déja un Balancier comme
AVRIL. 1732. 701
me votre demi Cercle , vous reconnoissez néanmoins que tant qu'elles sont appliquées sur quelque chose qui tient au
Vaisseau , elles en reçoivent tous les mou
vemens , et que les Observations se trouvent par là dérangées ; parce que , ditesvous , (a) tantôt le Soleil ne peut être vû
par la fenêtre qui est du côté de l'Observateur, que beaucoup au- dessus ou aux côtez
de lafenêtre opposée à cause du mouvement,
comme lorsque le Vaisseau est incliné du côté
du Soleil on àla droite ou à lagauche, de
PObservateur , lorsqu'il fait Observation ;
et tantôt , &c. C'est pourquoi vous aimez
mieux maintenant laisser au Pilote le soin
de donner à l'Instrument la situation
qu'il doit avoir, et cela parce que (b) le
Pilote , par une habitude qui lui est enpar tie devenuë naturelle à la Mer, entretenant
assez bien son corps en équilibre , et en même temps l'Instrument qui qui lui sert lui sert pour observer la latitude , quoique dans ce temps- la le Vaisseau incline considerablement , tantôt
d'un côté, tantôt de l'autre , à cause du roulis et du Tangage, il entretiendra cet Instrument dans le même équilibre de son corps.
lorsqu'il s'en servira pour observer la déclinaison de l'Aiguille aimantée , tant au Soleil qu'aux Etoiles , ce qui rendra l'Obser-
(a) Au bas de la page 6. (b) Page 17.
Diiij vation
702 MERCURE DE FRANCE
vation bien plus seure. Je vous félicite,
Monsieur , sur votre changement , mais
souffrez en même-temps que je m'en pré
vale ; puisque vous mettez vous même le
sceau à votre condamnation en employant contre les Boussoles ordinaires ,
les mêmes raisons , aux termes près , que
j'avois déja employées contre votre demiCercle.
•
Après cela je ne suis plus étonné si vous
ne lui donnez plus la préference sur l'Arbalestrille ni sur le quartier Anglois ordinaire , et si vous n'entreprenez pas même de la comparer à un Instrument que
j'ai proposé , qui est soutenu par son centre de gravité et qui est parconsequent
de même espece que le vôtre, quoique
je le croye beaucoup mieux suspendu.
Tout ce que vous prétendez faire , c'est
de montrer que je me suis mépris lorsque j'ai préferé le quart de Cercle formé
d'un seul Arc , non- pas à votre demi Cercle , dont il n'étoit plus question , mais
au quartier Anglois ordinaire. Que j'aye
cependant bien ou mal choisi dans cette
derniere circonstance , le sort de votre
Instrument ne change point ; et si je ne
me suis trompé que dans cette rencontre,
j'ai toûjours eu l'avantage de rendre un
service assez considerable au Public , en
pros-
A-V R- IL. 17.320 703
·
proscrivant toutes ces diverses suspensions , dons on vouloit , mal à propos
lui faire embrasser l'usage. Mais de quelle
manieré prouvez- vous que le quart de
Cercle formé d'un seul Arc , est moins
exact que le quartier Anglois ? La nature
de vos preuves me dispense d'y répondre.
Il s'agit d'un changement fait il y a plus
d'un siecle ; il s'agit de sçavoir les motifs
qui ont déterminé à le faire , et vous m'alleguez pour cela l'experience des Marins
d'aujourd'hui. Nous avons une suite de
Traités de Navigation, qui nous marquent
les divers progrès du Pilotage ; Pierre de
Médine et Pierre Nonius en Espagne et
en Portugal; Willebrod Snellius et plu- sieurs autres en Hollande ; M. Denis et
les P. Fournier et Dechales en France ,
ont écrit sur cet Art , et nous en ont représenté tous les differens âges. Mais vous
ne consultez point ces Livres ; vous vous
adressez à nos Pilotes , pour qu'ils vous
rendent compte d'une chose qu'ils doivent encore moins sçavoir que vous, puisqu'elle ne s'est point passée sous leurs
yeux ni de leur temps , et qu'elle n'est
pour eux qu'un point de pure spéculation. De grace , Monsieur , ne renversez
pas ainsi une autre fois l'ordre des cho
ses ou si à la honte des Professeurs
Dv VOUS
2
My
704 MERCURE DE FRANCE
vous suivez encore une pareille conduite,
faites au moins assez usage de vos lumieres , pour peser les réponses que les Pilotes vous feront. Ils vous ont assuré ,
dites-vous , qu'on a abandonné l'usage du
quart de Cerclé formé d'un seul " Arc ,
parce qu'on a experimentéque cet Instrument est sujet à tel et tel inconvenient.
Mais ne deviez- vous pas penser qu'on ne
peut rien établir sur une experience que
personne n'a vûë et que personne ne peut
attester ? ne deviez - vous pas encore examiner si les inconveniens dont on vous
parloit, étoient réels , et s'il n'étoit pas
possible de les lever ?
Je finis , Monsieur , en vous assurant
que comme je n'ai que faire d'en venir
à l'experience pour sçavoir ce que je dois
penser de votre demi Cercle , je ne crois
pas que je me donne jamais la peine d'en
faire l'essai. Je m'imagine bien que vous
me ferez encore un crime de ce que je
persiste ainsi à condamner une Production qui a été approuvée par une Compagnie , dont je suis plus interessé que
personne au monde , à faire valoir les
Jugemens. Ce reproche me toucheroit ,
s'il n'étoit aussi mal fondé que les autres;
et si l'Académie des Sciences , qui prononce toûjours avec autant de prudence
que
AVRIL 1732 705
que de lumieres , n'avoit pas eu le soin
de mettre de sages restrictions à l'Approbation qu'elle vous donna. Cette Compagnie a , outre cela , assez montré depuis
qu'elle ne prétendoit point avoir décidé
la question en votre faveur , puisqu'elle
en a fait le sujet du Prix qui fut distri-,
bué en 1729. et dont elle m'honora. Objectez-moi encore , si vous le voulez , que
je n'ai point été en Mer ; je vous répondrai que si dans certaines matieres de Marine , la premiere chose est d'acquerir des
connoissances de fait , et de se former
une juste idée des mouvemens de la Mer
et de ceux du Vaisseau , le point le plus
essentiel et en même- temps le plus dif.
ficile , est de penetrer la cause de tous
ces mouvemens et d'être en état d'en prévoir les divers effets ; et j'ajouterai qu'on
peut s'appliquer à tout cela avec autant
de succès à Terre que dans tout autre
endroit. Je dois aussi me rendre ce bon
témoignage , puisque vous m'y obligez ,
que quoique je connusse tout le péril
qu'il y avoit à venir remplir une place
que vous aviez occupée , vous qui avez
-fait un voyage de long cours ; personne
ne s'est encore apperçu ici que je n'aye
cultivé l'Hydrographie que dans le Cabinet. J'ai l'honneur d'être , malgré tous
D vj nos
7c6 MERCURE DE FRANCE
nos differends , avec bien de la conside
ration , Monsieur , votre , &c. -
Au Havre , le premier d'Avril 1732.
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Résumé : LETTRE de M. Bouguer, à M. Meynier, au sujet d'un Ecrit inseré dans le Mercure de France du mois de Février dernier, page 274. et suiv.
La lettre de M. Bouguer à M. Méchain répond à des critiques publiées dans le Mercure de France de février précédent concernant une description de son demi-cercle. Bouguer affirme que ses remarques étaient bienveillantes et non malveillantes. Il reconnaît ne pas avoir une connaissance parfaite du demi-cercle de Méchain mais exprime des réserves sur son utilisation en mer. Bouguer rappelle avoir publié un traité en 1729, récompensé par l'Académie Royale des Sciences, où il justifiait l'usage d'instruments de la seconde espèce, ceux que le pilote met en niveau en visant l'horizon sensible. Il pense que Méchain s'est offensé car ses raisons excluaient les instruments suspendus, comme le demi-cercle. Bouguer détaille les inconvénients des instruments suspendus, notamment les vibrations causées par le tangage et le roulis du navire, rendant les observations astronomiques imprécises. Il insiste sur l'impossibilité d'utiliser efficacement ces instruments pour observer les étoiles en raison des mouvements contradictoires du navire et de l'observateur. Il note également que Méchain a modifié sa position sur la suspension des boussoles, reconnaissant les problèmes soulevés par Bouguer. Méchain préfère désormais laisser au pilote le soin de mettre l'instrument en niveau, ce que Bouguer considère comme une validation de ses arguments. Bouguer critique Méchain pour ne pas avoir consulté les traités historiques de navigation et pour se fier uniquement aux expériences actuelles des marins, ce qui est insuffisant pour juger des évolutions passées. Par ailleurs, un texte daté du 1er avril 1732 conteste l'abandon de l'usage d'un quart de cercle formé d'un seul arc. L'auteur critique l'absence de preuves concrètes et d'expériences vérifiables concernant les inconvénients supposés de cet instrument. Il souligne l'importance de vérifier la réalité de ces inconvénients et la possibilité de les surmonter. Il exprime son refus de tester cet instrument, affirmant qu'il n'a pas besoin d'expérience pour se forger une opinion. L'auteur mentionne que l'Académie des Sciences a approuvé le quart de cercle avec des restrictions et a fait de son évaluation le sujet d'un prix en 1729. Il reconnaît ne pas avoir navigué mais affirme que la compréhension des mouvements marins et la prédiction de leurs effets peuvent être étudiées à terre avec succès. Enfin, il se défend d'avoir négligé l'hydrographie et affirme avoir cultivé cette discipline dans son cabinet.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 706-707
A M. FOURMONT, En lui envoyant un Ouvrage en Vers.
Début :
O Vous, en qui délicatesse innée, [...]
Mots clefs :
Parnasse, Lyre, Essai
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A M. FOURMONT, En lui envoyant un Ouvrage en Vers.
A M. FOURMONT,
En lui envoyant un Ouvrage en Vers:
Vous , en quí délicatesse innée ,
Et d'agrément raison assaisonnée ;.
Önt fait ici tant d'illustres amis,
Sur mon talent , Fourmont, daignez m'instruire ;
Puis-je au Parnasse esperer d'être admis. ?
Dois-je accorder, ou démonter ma Lyre !!
Tel est le sort des Enfans d'Apollon ,.
Ou tout ou rien , ou Voltaire , ou Gacon...
Prêtez- moi donc vos yeux pour me connoître ;
Si par les fleurs on peut juger des fruits ::
Vous pouvez bien sur le peu que je suis
Juger aussi de ce que je dois être ;
C'est là-dessus que j'attens vos avis ;
Sans doute aussi , vos amis , gens d'élite ,
Verront l'Essay , si l'Essay le mérite ;
Mais à quoi bon recueillir tant de voix -
Si vous pouvez , sans courir par la Ville ,
>
En
AVRIL 1732. 707
En un seul lieu le montrer à la fois ,
A* Quinte-Curce, à Sophocle , à Virgile.
*M. de Voltaire.
En lui envoyant un Ouvrage en Vers:
Vous , en quí délicatesse innée ,
Et d'agrément raison assaisonnée ;.
Önt fait ici tant d'illustres amis,
Sur mon talent , Fourmont, daignez m'instruire ;
Puis-je au Parnasse esperer d'être admis. ?
Dois-je accorder, ou démonter ma Lyre !!
Tel est le sort des Enfans d'Apollon ,.
Ou tout ou rien , ou Voltaire , ou Gacon...
Prêtez- moi donc vos yeux pour me connoître ;
Si par les fleurs on peut juger des fruits ::
Vous pouvez bien sur le peu que je suis
Juger aussi de ce que je dois être ;
C'est là-dessus que j'attens vos avis ;
Sans doute aussi , vos amis , gens d'élite ,
Verront l'Essay , si l'Essay le mérite ;
Mais à quoi bon recueillir tant de voix -
Si vous pouvez , sans courir par la Ville ,
>
En
AVRIL 1732. 707
En un seul lieu le montrer à la fois ,
A* Quinte-Curce, à Sophocle , à Virgile.
*M. de Voltaire.
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Résumé : A M. FOURMONT, En lui envoyant un Ouvrage en Vers.
L'auteur adresse une lettre à M. Fourmont en avril 1732, lui envoyant un ouvrage en vers. Il admire la délicatesse de Fourmont et sollicite son avis sur son talent poétique. Il compare son dilemme à celui des enfants d'Apollon, entre succès et échec. L'auteur espère que Fourmont jugera son œuvre et attend également les avis des amis de Fourmont, des personnes d'élite.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 707-725
SECONDE LETTRE d'un Professeur de l'Université de Paris, à un Principal de Province, sur le Bureau Typographique.
Début :
Je viens présentement, Monsieur, à l'Abregé que nous donne [...]
Mots clefs :
Bureau typographique, Professeur de l'Université de Paris, Parnasse, Charlatans, Buriver, Réformateurs, Personnages, Badineries, Poème
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SECONDE LETTRE d'un Professeur de l'Université de Paris, à un Principal de Province, sur le Bureau Typographique.
SECONDE LETTRE dun Professeur
de l'Université de Paris , à un Principal
de Province , sur le Bureau Typographyque.
JauE viens présentement , Monsieur , à l'Abregé´
que nous donne le Buraliste de la petite Piece
du Professeur de Seconde , intitulée , Le Parnasse
réformé, ou Apollon à l'Ecole , qu'on pourroit
aussi nommer la Critique des Charlatans de la
menuë Litterature. Or afin que vous puissiez
mieux juger si cet abregé est exact et si la censure
de notre Docteur Abecediste est raisonnable , je
vais vous exposer d'abord le sujet de ce petit Dra
me, auquel il a jugé à propos de donner lui seul le
nom de Farce. La chose ne me sera pas difficile ,
puisque, malgré le secret synderetique recommandé aux Acteurs , je n'ai pas laissé d'avoir communication des Personnages , surtout de celui de Buriver....
Occasion et Sujet de la Piece.
Le jeudi 22. Août dernier , au College du Ples
sis-Sorbonne , à la fin de la Répresentation ordinaire de la Tragedie et avant la distribution des
Prix , onjoua cette petite Piece qui est d'environ
huit cent Vers. Elle est de la composition de Meta
708 MERCURE DE FRANCE
M. le Beau, Regent de Seconde, et a été applaus die par l'Assemblée qui étoit , comme de coûtume, très nombreuse et composée de toutes sortés de personnes d'élite. La nouveauté du sujet ,
jointe à la maniere dont il est traité, causa de fréquentes acclamations , et bien des personnes d'esprit et de distinction , avoüoient ingénument que
depuis long-temps elles n'avoient tant ri. Il est clair que l'Auteur a prétendu tourner en ridicule
les gens à systême , qui depuis environ vingt ans
ne sont occupez qu'à parler et à écrire contre les
Colleges , à en décrier la maniere d'enseigner , et à louer la leur sans mesure et sans retenue.
Ceux qui sont l'objet principal de la Critique
se réduisent à trois ou quatre. 1º . Celui , qui à
l'aide d'une Machine de bois appellée Bureau Ty
pographique ou Imprimerie en Colombier , et divisée en 180. Logettes ou Boulins , prétend enseigner à unenfant toutes sortes de Langues et tou--
res les Sciences , comme il s'en vante lui même,-
sur tout à la page 62. de sa 4º. Lettre . Ce Personnage est nommé Buriver. 2 ° . Celui qui par sa
Regle Monosyllabique ad et son unique leçon d'une demie heure , ne promet rien moins que de
mettre un Septiéme en état de faire la leçon
aux autres et de leur expliquer toutes sortes d'Auteurs Latins. C'est lui qui est appellés
Mr de la Minute. 3 °. Celui qui veut que les
Nourrices mêmes enseignent le Latin, et qui pour
faire gouter et apprendre plus facilement et plus
agréablement les lettres de l'Alphabeth aux enfans , conseille de leur faire avaler des Lettres de
Pain d'Epice , est nommé M. de l'Enthimeme.
4. Le Restaurateur et Réformateur des Gloses
interlineaires , qui ne fait pas un personnage à
part , mais à qui se rapportent ces six Vers de la seconde Scene De-
AVRIL. 1732. 709
De peur que vieux Auteurs, Hebreux , Grecs , on Latins,
› N'osent se soulever et faire les mutins ,
On les menace tous , s'ils ne veulent se taire ,
D'un supplice nommé Glöse Interlineaire ;
Oùgênez, empallez , difloquez , pourfendus ,
De leurs meilleurs amis ils seront méconnus.
Ces trois Réformateurs , Buriver , M. de la
Minute et de l'Enthimeme , avec Thibaud , Menuisier , et les trois Dieux , Jupiter , Apollon ets
Momus , sont en tout sept Personnages ou Acteurs qui parlent dans ce petit Drame, divisé en,
huit Scenes , dont voici le contenu.
Dans la première paroît Jupiter , qui étant tout étourdi du tintamare et du frácas des marteaux et
des Rabots dont onse sert pour fabriquer des Bu- reaux Typographiques , descend du Ciel sur le Parnasse pour voir ce que c'est , et dit avoir dépêché Mercure vers sonfils Apollon , pour avoir
là- dessus quelque nouvelle certaine.
Dans la seconde Scene Momus échappé des
Charlatans de la menuë Litterature , entre sur le
Théatre en courant , sans appercevoir Jupiter ,
qui l'oblige à s'arrêter et à lui dire de point en
point la raison du tapage qu'il entend sur le Pars
nasse. Momus la lui explique ainsi.
Jefumois dans un coin ma pipe d'ambroisie , ·
De mille mots confus la barbare énergie ,
Mefrappe tout-à-coup , Candiac , Cassetin ,
Blictric , bonnet picqué , Colombier , Magazin.”
Te cours de ce côté : si j'ai bonne memoire , ›
Je
710 MERCURE DE FRANCE
Je vais vous retracer ici toute l'histoire.
Unhomme pale , sec , monté sur deux treteaux ,.
Faisoit le diable à quatre , et chargé d'écriteaux ,
Crioit desonfaucet ; Orvietan specifique
Logico-Physico , Graco- Typographique
Antidote. d'erreur et de prévention ,
Par le moyen duquel sans application ,
Un enfant de deux ans , voire de deux semaines ,
Peut apprendre en joüant trois ou quatre douzaines
D'Arts liberaux Hebreu , Syriaque , Chinois ,
Arabe, Provençal, Grec , Picard, Ilinois,
ĽA, Bé, Cé réformé, pilotage , Chimie,
Lejeu de l'Oye, Algebre , Histoire , Astronomiez
Point de Livre sur tout , l'enfant enfera; mais
Il ne lira jamais que ceux qu'il aurafaits.
Devant notre homme étoit une Table magique,
Qu'il nomme par honneur , Table Encyclopedique.
Sur la Table regnoit un joli Colombier ,
Etiqueté par tout de morceaux de papier.
Chaque Boulin caré, large et long d'une carte ,
Niche aulieu de Pigeon , mainte belle Pancarte. ~
La les Suppins galans et les Conjugaisons ,
Dans ces compartimens de petites maisons ,
Sur leur Carte couchez d'une encre non pareille ,
Gisent en attendant que l'enfant les éveille.
Enfin , l'enfant parut avec un tablier ;
Notez cepoint, Seigneur , ear depuis le soulier ;
Jusqu'au boutdu bonnet tout tient dans ce systême ,
•
, .
L'Auteur
AVRIL. 1732.
751
L'Auteur du Tablier fit le patron lui-même ;
Et cet hommeplaisant et d'agréable humeur,
L'appelle joliment Barette de Docteur.
Momuscontinuant de raconter ce qu'il a vû, les
trois Charlatans sont amenez sur la Scene à point
nommé et d'une maniere très-vrai - semblable.
Car Jupiter ayant dit : oh la belle couvée !
Eh! commentpeuvent- ils sçavoir mon arrivée ?
Momus répond :
Ils ont des Espions , vous dis-je , en tout endroit ,
Et puis à vous cacher 1 vous n'êtes pas adroit.
1
Dans la troisiéme Scene paroissent donc les
trois nouveaux Méthodistes qui demandent à Jupiter la Ferme des Sciences et des Beaux- Arts.
Buriver , dont le personnage nous a été commu
niqué en entier , parle ainsi :
Le Seigneur Jupiter est un très-galant homme ,
Je l'estimai toujours ; maisje ne sçais pas comme,
Unpere peut si mal élever ses enfans
Ils sont pour la plupart ineptes , ignorans ,
En bécare , en bémol. En un mot pour tout dire ...
Je gage qu'Apollon même ne sçait pas lire:
Ne sçaitpas lire? Non. Je veux pour votre honneur,
MoiBuriver , en faire un prodige , unDocteur;
Si deux ans seulement , sans nulle redevances,
Vous me voulez donner la Ferme des Sciences ;
Oui , je réformerai le Parnasse , et cela,
Sans Livre aucun , sinon ce jeu de Cartes-là.
Il tire des Cartes de sa poche,
712 MERCURE DE FRANCE
Momus , en s'avançant vers lui ,
Honneur à l'As de Pique.
Buriver.
Ehpoint de mommerie;
Parlez raison , Momus , une fois en la vie.
Ces Cartes sur leur dos portent mon Alphabet.
Tenez, lisez d'un ton intelligible et net.
Momus prend les Cartes et lit:
A. bé. cé. dé. e. fé.....fé?
Buriver.
Cela vous étonne?
Momus.
C'est ef apparemment.
Buriver.
Voyez comme il raisonne
Mais monpetit ami , dites- vous pas bé, dé?
Sans doute.
Momus.
Buriver se fachant..
Ehpourquoi donc ne direz-vous pasfé
Vous prétendez dans bé transposer la voyelle,
Pourquoi , pourquoi dans efse préposera-t'elle ?
Quelabus ? quelle erreur ? quelle stupidité ?
Moije veux redresser cette inégalité.
Je veux comme Amadis , courir toute la Terre ,
Au vulgaire alphabet ,faire une illustre guerre :
Da Lance aupoing, à pied, on s'il veut à cheval,
Lui
AVRIL. 1732 713
Lui faire confesser qu'il n'est qu'un animal;
Et dans tout le Païs de la Litterature ,
L'envoyerfaire aveu de sa déconfiture
Il jette Momus à terre.
Momus couché par terre et embrassant
le pied de Buriver.
Dom Alphabeticos , genereux Chevalier ,
Réparateur des torts ; je suis vaincu , quartier.
Modereles transports de ton ardente bile ,
Je blâme comme toi la voyelle incivile.
Buriver ôte son pied.
Je suis ton prisonnier.
Momus saute sur son dos.
Ce maudit turlupix
Buriver.
Laissez-moi , finissez,
Jupiter fait finir à Momus ses badineries , ets
P'envoye chercher Apollon , à la décision duquel
il remet toute cette affaire. Jupiter dans la quatriéme Scene adresse la parole aux trois contendans , et leur dit :
Messieurs , votreprojet me semble merveilleux ;
Mais ce projet pour vous est un peu périlleux.
Je connois Apollon , pour vous parler sans feinte,
Il est un peu mutin et sujet à la quintė.
Le pauvre Marsias le traita d'ignorant,
Il l'écorcha tout vif; s'il enfaisoit autant ,
Malgré vos grands secrets , votre litterature ,
Vous
714 MERCURE DE FRANCE
Pous seriez, ce me semble, en mauvaise posture.
Chacun des trois répond à son tour et de la'
maniere qui convient à son caractere. Buriver dit :
Pour moije ne crains rien , et ma Philosophie,.
Me met seul à l'abri des craintes de la vie.
Après tout , Apollon n'est pas un querelleur ,
Et c'estun ignorant d'une fort douce humeur.
Je l'ai dit quelque part , et la pensée est belle.- 1
Si contre mon Projet l'Univers se rebelle ,
Je m'en étonne , aussi c'est un projet tout d'or ;·´
Et s'il le reçoit bien . je m'en étonne encor ;
Maisla Race future à son tour étonnée ,
Exaltant mes efforts , dira dans telle année ,
ParutJean Buriver , un dédale nouveau ,
Incomparable Auteur du merveilleux Bureau,
Qui rabattit l'orgueil des Sciences antiques ,
Et des Arts liberaux fit des Arts mécaniques.
Par lui le Savetier gai sur son tabouret ,
Peut en Hebreu siffler ainsi qu'un Massoret ;
Par lui les Perroquets , les Linottes , les Merles ;
Sçavent parler latin comme enfiler des perles.
Ah! s'il eût plus vécu , l'on eût par ses secrets ,
Viparler les Boiteux et marcher les Muets.
Voilà ce qu'on dira ; me nommant Trismegiste ,
Ou l'Hercule gaulois ; et le Chronologiste , ·
Frappé de mon grand nom oubliera son dîné ,
Pour sçavoir à quelle heure , en queljour je suis néEt
AVRIL. 173.2. 715
Et les petits garçons instruits à ma maniere ,
Feront sur mon tombeau l'école buissonniere.
Pour depareils honneures, oui , je m'exposerai.
Au milieu du Parnasse , ici je dresserai ,
Ma Table, mes Boulins , mes Cartes , mon Systême
En dépit d'Apollon et de la raison même;
Si les Muses en corps osent me chicanner,
Je les empêcherai bien-tôt de raisonner.
Je vous prendrois Talie , Euterpe , Calliope,
Et les amenuisant à grands coups de varlope.
Chacune en son Boulinje vous les taperois ,
Et la montrantle col , écarquillant les doigts ,
CommePigeons patus , ces Déesses si fieres ,
Apprendront à parler le jargon des Volieres.
Cependant dans la cinquiéme Scene arrive
Apollon , que Momus , par ordre de Jupiter ,
avoit mis au fait , en lui expliquant les trois Systêmes , et lui contant en chemin toute l'affaire
sur quoi il devoit prononcer. Il se contente donc
de leur faire expliquer tour-à-tour les utilitez de
leurs Systêmes.lls disent tous des choses plus ridicules les unes que les autres.
Buriver.
Pour les utilitez que contient mon Ouvrage,
J'en vois trois cens dix-huit, quelque peu davantage.
Primo. J'ai remarqué que les jeunes enfans ,
Entre les mains de qui l'on met des Rudimens ,
Marmotant leurs leçons et dodinant la tête,
Mangent leur Livre ains que pâtez de Requêtes.
J'ai
716 MERCURE DE FRANCE
î
J'ai vu même un enfant qui n'étant qu'à bonus,
Avoit déja mangé musa , vir , Dominus.
Je vous laisse àpenser si c'est viande indigeste ;
Et quatre mois après il eut mangé le reste.
Momus.
Comment! il avala les cinq déclinaisons ?
Buriver.
Baste ! et Noms et Pronoms , quatre Conjugaisons,
Syntaxe, tout étoit passépar l'Esophage.
Vous voyez comme moi , quel étrange ravage,
Fit dans son estomac ce mets empoisonneur ,
Plus coriace encor qu'un sac de Procureur.
Moi , toujours attentifau bien de la Patrie ,
Pour rompre les effets de cette fantaisie,
Je m'évertue et dis trouvons des Rudimens,
Durs, solides , massifs , à l'épreuve des dents.
DesRudimens de bois ; et sur cette pensée ,
Bientôt de mon Bureauje meformai l'idée.
Secundo. Dans le cours de mes Refléxions ,
Carje suis très-fécond en Observations ,
Je voyois que l'enfant par coûtume abusive,
Pour tourner les feuillets consumoit sa salive ,
Et dessechoit par là tous les sucs nourriciers ,
Qui de sonpetit corps arrosent les sentiers.
La chose meparut d'un préjudice extrême ;
Je rêvai là-dessus , et me dis à moi-même,
Invente, Buriver, quelque Livre nouveau,
DuqueL
AVRIL. -17320 717
Duquel tous les feuillets se rangent de niveau ;
L'enfant de sa leçon verra tout l'étalage,
Sans se mouiller le pouce et sans tourner la page.
Fe restaifort long- temps à rêver sur ce point.
Tout ce queje trouvois ne me contentoit point ;
Enfin , par un effort de l'imaginative ,
Quej'ai, sans vanité , très- brillante et très-vive ,
Je m'avisai qu'un Jeu de Cartes dePiquet
Venoit comme de cire à remplir mon Projet.
Les Cartes à present sont le livre à la mode ;
C'est des honnêtes gens le Digeste et le Code.
Leursprécieux feuillets volans et détachez,
-Tout le longd'un Bureau l'un de l'autre approchez ,
N'auront pour se tourner aucun besoin du pouce.
L'enfant conservera cette subtile mousse,
Qu'il dépensoit jadis en dépit des poulmons,
Et d'un coup d'oeil , à sec , apprendra ses leçons ,
Augrand contentement des glandes salivaires.
Ces deux utilitez , je crois , sont assez claires.
Assurément.
Apollon.
Buriver.
Et si vous n'étiez pas contens ,
Je vous dirois encor ....
Apollon.
Nous n'avons pas le temps.
Buriver.
Que mon Systême apprend à faire des capelles Qu'il
718 MERCURE DE FRANCE
Qu'il affermit les reins , soulage les aisselles « …«
Il suffit:
Apollon.
Buriver.
Quel'enfant , ferme sur ses talons ,
Sçaurapirouetter , marcher à reculons....
C'en est trop
Apollon.
Buriver.
Que le monde admirant mamaniere,
Mefera des Beaux Arts le grandPorte Banniere ,
Et queje passerai pour un Confucius.
Sur ces entrefaites Thibaud , Menuisier de Buriver , revient du Parnasse et raconte en patois
et d'une maniere fort plaisante , comment les
Muses ont renversé et brisé les Bureaux qu'il
faisoit sur le Parnasse pour M. Buriver. Apollon
donne de l'argent à Thibaut pour r'avoir des Outils , approuve ce que les Muses ont fait, comme
étant fait par son ordre , et conseille aux trois
Réformateurs de s'en retourner dans leur famille,
à l'exemple de Thibaut , ou bien d'aller habiter
l'Ile des Perroquets , et là ,
Au Peuple bigarré débiter leurs caquets.
Ils se recrient sur ce Jugement , sur tout Bu
river , qui en appelle à Jupiter , M. de l'Enthi meme ayant dit :
Prononça-t'onjamais Jugement plus inique !
Buriver de son côté répond :
Non, votre procedé n'est point abécédique.
Et
AVRIL. 17320 719
Et je dirai toûjours qu'injustement honni,
Victrix causa Diis , sed victa Catoni.
Après le départ des Charlatans , la Piece finit par ces deux Scenes.
Jupiter.
Bon,les voilà partis ; desormais du Parnasse,
Ayez soin , Apollon , d'éloigner cette race,
Sesont autant de rats , qui la bourse rongeans ,
Tournent à leur profit la sottise des gens.
Momus.
Pour les attraper tous , mettez sur les lisieres ,
Tout autour duVallon beaucoup de sourissieres.
Suspendez en dedans des bourses pour appas ;
Mesgens yviendront mordre, ils n'y manquerontpas,
Et la trape sur eux incontinent baissée ,
La machine dûment sassée et ressassée ;
Envoyez-les någer dans le fond du bourbier.
Je m'en vais de ce pas enfaire expedier ,
Detoutes les grandeurs.
Jupiter.
J'approuve ton idée.
Momus.
Si nous allions la haut boire quelque gorgée ,
De doux etfrais Nectar , car l'air est si salé!
Et puis leurs sots discours m'ont sifort alteré .. •
Jupiter.
Momus dit d'or, allons.
E
Apollon
720 MERCURE DE FRANCE
Apollon seul.
Je vous suis tout à l'heure ;
Maisje ne voudrois pas quitter cette demeure
Sans récompenser ceux dont le sage travail ,
De tous ces Triacleurs ignore l'attirail ,
Et dont l'esprit guidépar des gens pleins de zele
N'a point d'autresecret qu'une étude réelle.
Venez, Enfans chéris , recevoir ces Présens ,
Dontj'aime à couronner vos succès tous les ans.
Vous voyez à present bien clairement , Monsieur , que ce petit Poëme n'est pas si méprisable qu'une Partie interessée le vouloit faire croire
et que le stile en est un peu plus agréable que celui des lettres sur le Bureau Typographique,
C'est ce qui a donné lieu à une refléxion très judicieuse , d'une personne en place, et qui se con- noît à ces sortes de Pieces ; sçavoir , que pour ré
futer parfaitement cette Lettre- cy et toutes les
autres , il ne faudroit que faire imprimer la petite
Piece de M. le Beau. Ecoutons présentement le
Buraliste, et voyons s'il parlera mieux que le Poëte
ne le fait parler.
2
Pour revenir à cette petite Piece dont le sujet devoit , disoit-on , s'annoncer de lui-même, die
notre Docteur , après la longue et inutile digression sur la chute d'un petit Echaffaut ; Momus ouvre la Scène en se tenant les côtez de rire du
projet ridicule de certains Avanturiers de la menue
Litterature , qui s'érigeant en Réformateurs du Par- nasse , voudroient renvoyer les Muses àl'école et remettre Apollon lui-même à l'abécé. Jupiter , person—
nage entierementinutile , et qui ne sert au plus qu
multiplic
AVRIL 17320 721
multiplier les Rôles de la Piece pour le compte du
Régent qui en est l'Auteur , vient demander à Momus quel est le bruit des scies et des marteaux qu'on entend sur le Parnasse ? Momus lui répond, que c'est
une Manufacture de Bureaux Typographiques qu'on
•veut y établir et dont un visionnaire nomméM.Bu.
river , vient demander à Apollon le privilege ;Apol
lon survient, et entendant parler de Buriver, demande à Momus , quelle espece d'homme est ce Buriver!
Momus lui dit que c'est un fol sérieux , qui croit
avoir une mission pour changer le nom des lettres de
l'Alphabet, et qui a tellement à cœur de mettre à
profit les premieres années de l'enfance qu'il veut absolument , au dire de l'Auteur , qu'on apprenne à
lire aux enfans dès le maillot , pour réparer le temps
qu'ils ontperdu dans le ventre de leur mere.
Ce n'est point Momus qui ouvre la Scene, c'est
comme on l'a vû , Jupiter , qui pour les raisons
marquées , descend du Ciel. C'est lui aussi qui , à
proprement parler , ferme la Scene en confirmant
le Jugement rendu par Apollon ; c'est lui qui reste sur la Scene du commencement à la fin , qui
envoye chercher son fils Apollon , et qui le premier donne audiance aux Charlatans , et qui les
entend encore parler après l'arrivée d'Apollon.
Bien loin donc que Jupiter soit un personnage
entierement inutile. C'est , à le bien prendre , le
plus utile et le plus nécessaire de toute la Piece ,
puisque selon qu'il convient à sa nature et àsa
souveraineté , il agit en tout et par tout comme
cause premiere.
Il faut que le Buraliste soit bien ignorant ou
bien soubçonneux , et qu'il juge des autres par
hui- même , quand il avance avec assurance que la
multiplication des Rôles est pour le compte du
Régent. S'il eut voulu prendre la peine de s'in- Eij former
22 MERCURE DE FRANCE
former de la coûtume de ce College par rapport
aux Tragédies , comme il le pouvoit facilement ,
et comme il le devoit ; voulant en parler , il au- roit appris que ce sont les Acteurs qui font la dépense , et que , soit qu'il y ait une petite Piece,
soit qu'il n'y en ait point , soit qu'elle soit longue , soit qu'elle soit courte ; soit qu'il y ait deux
ou trois Rêles , soit qu'il y en ait six ou sept , i
ne leur en coute ni plus ni moins , et que par
consequent le Régent n'y trouve ni plus ni moin
son compte. Tout ce qui lui en reste c'est le tra
vail de la composition et la gloire du succès.
Enfin il paroît par toute cette exposition du
sujet que le Docteur Abécédiste ne sçait pas
mieux les regles de la Comédie que celles de l'ortographe , et qu'il ignore parfaitement que M. Racine dans la Préface sur la Comédie des
Plaideurs , soutient que les Poëtes Comiques ont
raison d'outrer le ridicule et de le pousser au-delà
de la vrai - semblance. Je le renvoye donc à cer
ilustre Auteur et aux autres que j'ai citez dans
les regles de poëtique en traitant de la Comédie
page 326 342.
Apollon , continue le Buraliste , ayant donné or
dre de l'introduire , on voit entrer M. Buriver ,
suivi de deux autres Réformateurs ausquels on ne
somprend rien , et qui n'étant là que pourfaire nombre, ne servent, comme on a dit de Jupiter , qu'a
multiplier les personnages de la Piece. L'Auteurfaiz
ensuite exposer à M. Buriver le projet et lapratique
de sa Reforme, de la maniere du monde la plus
platte et la plus insipide aux yeux des Spectateurs -
mais d'une maniere très-ingénieuse aux yeux des
Régens, qui trouvent que cette Piece pétille d'espriz.
On en peutjugerpar l'exemple suivant ; pour epêcher les enfans de ronger leurs Livres, Buriver ,
hiton
AVRIL. 1732:
dit-on, a imaginé de leur donner des Rudimens de
bois , et d'en mettre les leçons sur des Cartes détachées , pour les empêcher d'épuiser leur salive et
d'user leurpouce à en tourner les feuillets. Voilà les
gentillesses que l'Auteur met dans la bouche de
M.Buriver , et il n'a eu garde defaire un mauvais
usage de son esprit , en lui faisant dire , pour prou
ver les effets merveilleux de sa Méthode, que c'étoit
par son moyen que la Chienne de la Foire S. Germain avoit appris à lire , tant il a eu soin d'éviter
les basses plaisanteries , quoique plus naturelles et
plus propres à son sujet.
Pour réfuter en peu de mots cet exposé , il suffit de relire ce que nous venons de dire. Ce n'est
point Apollon qui donne ordre d'introduire le seul Buriver ; les trois Charlatans sont depuis
long- temps sur la Scene , lorsque ce Dieu amené
par Momus , arrive pour les juger. On comprend
partement bien pourquoi deux autres Réfor- mateurs suivent Buriver ; c'est pour lui disputer
la victoire et engager Jupiter à prononcer contre
son Systême en faveur du leur ; ils mettent en
pratique le principe qu'ils ont lû dans la seconde
Lettre , page 27. où ils parlent ainsi : On voit tant de Charlatans , de visionnaires et d'imposteurs
de toute classe , qu'il y auroit de lafoiblesse , de l'imprudence et même de la folie , à les croire tous sur
leur parole : C'est à dire en deux mots , qu'ils se
regardent et se traitent tous réciproquement de
Charlatans, de visionnaires et d'imposteurs.
Si le Buraliste dit que le Poëte fait exposer
Buriver les utilitez de son Systême de la maniere
du monde la plus platte et la plus insipide aux
yeux des Spectateurs ; vous comprenez aisément ,
M. qu'il n'a garde de dire autrement, et que c'est
plutôt son propre interêt que la verité qui le fait
parler , &c. E iij Pour
724 MERCURE DE FRANCE
Pour ce qui est de la Chienne de la Foire , qui n'avoit point du tout affaire ici , le Buraliste en
parle avec une certaine complaisance , parce qu'il croit avoir mis en poudre l'objection que lui
avoit faite à ce sujet le Grammairien de Ventabren, c'est-à- dire, qu'il s'étoit faite à lui-même.
Pour moi je pense qu'il auroit fait bien plus săgement de n'en point parler du tout , et que biendes personnes pourroient , avec raison , mettre
cette objection bien au-dessus de la réponse.
a
Enfin, dit le Buraliste , un Menuisier nomméThibaut,annoncepour dénouement queles Muses viennent
de mettre enpieces tous ses Bureaux, de briser ses Outils et de lui rompre ses Regles surle dos , et ilfinit la
Piece ense proposant de retourner à sa Boutique, et en conseillant à M.Buriver de le suivre et de devenir son
garçon. C'est ainsi que desgens de College s'efforcent
de tourner en ridicule la Méthode du Bureau , pendant que les personnes les plus sages de la Villet de la Cour ,font gloire d'en reconnoître l'utilité , et que
cette Méthode a l'avantage d'être employée à l'ins- truction des Enfans de France.
Pour avoir le véritable dénouëment , donnezvous seulement la peine de relire les deux dernieres Scenes rapportées plus haut ; vous verrez que
du commencement à la fin le sujet de la Piece
s'arrange, s'explique, et s'annonce de lui- même
comme l'avoit promis le Professeur. C'est ce qui
arrive dans toutes les bonnes Pieces , même dans .
celles qu'on représente pour la premiere fois et
dont on sçait à peine le nom. Cependant le nouveau Méthodiste ne trouve cette petite Comédie
très ingénieuse qu'aux yeux des Régens du College , mais la plus platte et la plus insipide du
monde à ceux des Spectateurs. M. le Beau
M. Gaullyer, et tous ceux q ne sont pas pourLe
?
AVRIL. 1732. 735
le Bureau , sont des gens ignorans , vains , présomptueux, entêtex , envieux , de mauvaisefoi , c.
Ce sont de vains Déclamateurs , de petits génies.
des Maîtres mercenaires , indifferens pour le bien
public et pour la bonne éducation , &c. C'est ainsi
qu'un homme sans science et sans autorité s'efforce de calomnier sans modération et sans pudeur, une infinité de très- honnêtes et très- habiles gens , et de mépriser toutes les meilleures et
les plus anciennes Méthodes tandis que les personnes les plus illustres et les plus sçavantes de la
Ville et de la Cour , de l'Epée et de la Robe ; en
un mot, de tous les differens Etats , se sont toujours fait honneur d'en reconnoître l'utilité ,
que ces Méthodes ont toujours eu et ont encore
l'avantage d'être employées à l'instruction de
toute l'Europe , et même à celle des Princes ,
Rois et des Empereurs de l'Univers , &c.
et
des
***: ***:*****
de l'Université de Paris , à un Principal
de Province , sur le Bureau Typographyque.
JauE viens présentement , Monsieur , à l'Abregé´
que nous donne le Buraliste de la petite Piece
du Professeur de Seconde , intitulée , Le Parnasse
réformé, ou Apollon à l'Ecole , qu'on pourroit
aussi nommer la Critique des Charlatans de la
menuë Litterature. Or afin que vous puissiez
mieux juger si cet abregé est exact et si la censure
de notre Docteur Abecediste est raisonnable , je
vais vous exposer d'abord le sujet de ce petit Dra
me, auquel il a jugé à propos de donner lui seul le
nom de Farce. La chose ne me sera pas difficile ,
puisque, malgré le secret synderetique recommandé aux Acteurs , je n'ai pas laissé d'avoir communication des Personnages , surtout de celui de Buriver....
Occasion et Sujet de la Piece.
Le jeudi 22. Août dernier , au College du Ples
sis-Sorbonne , à la fin de la Répresentation ordinaire de la Tragedie et avant la distribution des
Prix , onjoua cette petite Piece qui est d'environ
huit cent Vers. Elle est de la composition de Meta
708 MERCURE DE FRANCE
M. le Beau, Regent de Seconde, et a été applaus die par l'Assemblée qui étoit , comme de coûtume, très nombreuse et composée de toutes sortés de personnes d'élite. La nouveauté du sujet ,
jointe à la maniere dont il est traité, causa de fréquentes acclamations , et bien des personnes d'esprit et de distinction , avoüoient ingénument que
depuis long-temps elles n'avoient tant ri. Il est clair que l'Auteur a prétendu tourner en ridicule
les gens à systême , qui depuis environ vingt ans
ne sont occupez qu'à parler et à écrire contre les
Colleges , à en décrier la maniere d'enseigner , et à louer la leur sans mesure et sans retenue.
Ceux qui sont l'objet principal de la Critique
se réduisent à trois ou quatre. 1º . Celui , qui à
l'aide d'une Machine de bois appellée Bureau Ty
pographique ou Imprimerie en Colombier , et divisée en 180. Logettes ou Boulins , prétend enseigner à unenfant toutes sortes de Langues et tou--
res les Sciences , comme il s'en vante lui même,-
sur tout à la page 62. de sa 4º. Lettre . Ce Personnage est nommé Buriver. 2 ° . Celui qui par sa
Regle Monosyllabique ad et son unique leçon d'une demie heure , ne promet rien moins que de
mettre un Septiéme en état de faire la leçon
aux autres et de leur expliquer toutes sortes d'Auteurs Latins. C'est lui qui est appellés
Mr de la Minute. 3 °. Celui qui veut que les
Nourrices mêmes enseignent le Latin, et qui pour
faire gouter et apprendre plus facilement et plus
agréablement les lettres de l'Alphabeth aux enfans , conseille de leur faire avaler des Lettres de
Pain d'Epice , est nommé M. de l'Enthimeme.
4. Le Restaurateur et Réformateur des Gloses
interlineaires , qui ne fait pas un personnage à
part , mais à qui se rapportent ces six Vers de la seconde Scene De-
AVRIL. 1732. 709
De peur que vieux Auteurs, Hebreux , Grecs , on Latins,
› N'osent se soulever et faire les mutins ,
On les menace tous , s'ils ne veulent se taire ,
D'un supplice nommé Glöse Interlineaire ;
Oùgênez, empallez , difloquez , pourfendus ,
De leurs meilleurs amis ils seront méconnus.
Ces trois Réformateurs , Buriver , M. de la
Minute et de l'Enthimeme , avec Thibaud , Menuisier , et les trois Dieux , Jupiter , Apollon ets
Momus , sont en tout sept Personnages ou Acteurs qui parlent dans ce petit Drame, divisé en,
huit Scenes , dont voici le contenu.
Dans la première paroît Jupiter , qui étant tout étourdi du tintamare et du frácas des marteaux et
des Rabots dont onse sert pour fabriquer des Bu- reaux Typographiques , descend du Ciel sur le Parnasse pour voir ce que c'est , et dit avoir dépêché Mercure vers sonfils Apollon , pour avoir
là- dessus quelque nouvelle certaine.
Dans la seconde Scene Momus échappé des
Charlatans de la menuë Litterature , entre sur le
Théatre en courant , sans appercevoir Jupiter ,
qui l'oblige à s'arrêter et à lui dire de point en
point la raison du tapage qu'il entend sur le Pars
nasse. Momus la lui explique ainsi.
Jefumois dans un coin ma pipe d'ambroisie , ·
De mille mots confus la barbare énergie ,
Mefrappe tout-à-coup , Candiac , Cassetin ,
Blictric , bonnet picqué , Colombier , Magazin.”
Te cours de ce côté : si j'ai bonne memoire , ›
Je
710 MERCURE DE FRANCE
Je vais vous retracer ici toute l'histoire.
Unhomme pale , sec , monté sur deux treteaux ,.
Faisoit le diable à quatre , et chargé d'écriteaux ,
Crioit desonfaucet ; Orvietan specifique
Logico-Physico , Graco- Typographique
Antidote. d'erreur et de prévention ,
Par le moyen duquel sans application ,
Un enfant de deux ans , voire de deux semaines ,
Peut apprendre en joüant trois ou quatre douzaines
D'Arts liberaux Hebreu , Syriaque , Chinois ,
Arabe, Provençal, Grec , Picard, Ilinois,
ĽA, Bé, Cé réformé, pilotage , Chimie,
Lejeu de l'Oye, Algebre , Histoire , Astronomiez
Point de Livre sur tout , l'enfant enfera; mais
Il ne lira jamais que ceux qu'il aurafaits.
Devant notre homme étoit une Table magique,
Qu'il nomme par honneur , Table Encyclopedique.
Sur la Table regnoit un joli Colombier ,
Etiqueté par tout de morceaux de papier.
Chaque Boulin caré, large et long d'une carte ,
Niche aulieu de Pigeon , mainte belle Pancarte. ~
La les Suppins galans et les Conjugaisons ,
Dans ces compartimens de petites maisons ,
Sur leur Carte couchez d'une encre non pareille ,
Gisent en attendant que l'enfant les éveille.
Enfin , l'enfant parut avec un tablier ;
Notez cepoint, Seigneur , ear depuis le soulier ;
Jusqu'au boutdu bonnet tout tient dans ce systême ,
•
, .
L'Auteur
AVRIL. 1732.
751
L'Auteur du Tablier fit le patron lui-même ;
Et cet hommeplaisant et d'agréable humeur,
L'appelle joliment Barette de Docteur.
Momuscontinuant de raconter ce qu'il a vû, les
trois Charlatans sont amenez sur la Scene à point
nommé et d'une maniere très-vrai - semblable.
Car Jupiter ayant dit : oh la belle couvée !
Eh! commentpeuvent- ils sçavoir mon arrivée ?
Momus répond :
Ils ont des Espions , vous dis-je , en tout endroit ,
Et puis à vous cacher 1 vous n'êtes pas adroit.
1
Dans la troisiéme Scene paroissent donc les
trois nouveaux Méthodistes qui demandent à Jupiter la Ferme des Sciences et des Beaux- Arts.
Buriver , dont le personnage nous a été commu
niqué en entier , parle ainsi :
Le Seigneur Jupiter est un très-galant homme ,
Je l'estimai toujours ; maisje ne sçais pas comme,
Unpere peut si mal élever ses enfans
Ils sont pour la plupart ineptes , ignorans ,
En bécare , en bémol. En un mot pour tout dire ...
Je gage qu'Apollon même ne sçait pas lire:
Ne sçaitpas lire? Non. Je veux pour votre honneur,
MoiBuriver , en faire un prodige , unDocteur;
Si deux ans seulement , sans nulle redevances,
Vous me voulez donner la Ferme des Sciences ;
Oui , je réformerai le Parnasse , et cela,
Sans Livre aucun , sinon ce jeu de Cartes-là.
Il tire des Cartes de sa poche,
712 MERCURE DE FRANCE
Momus , en s'avançant vers lui ,
Honneur à l'As de Pique.
Buriver.
Ehpoint de mommerie;
Parlez raison , Momus , une fois en la vie.
Ces Cartes sur leur dos portent mon Alphabet.
Tenez, lisez d'un ton intelligible et net.
Momus prend les Cartes et lit:
A. bé. cé. dé. e. fé.....fé?
Buriver.
Cela vous étonne?
Momus.
C'est ef apparemment.
Buriver.
Voyez comme il raisonne
Mais monpetit ami , dites- vous pas bé, dé?
Sans doute.
Momus.
Buriver se fachant..
Ehpourquoi donc ne direz-vous pasfé
Vous prétendez dans bé transposer la voyelle,
Pourquoi , pourquoi dans efse préposera-t'elle ?
Quelabus ? quelle erreur ? quelle stupidité ?
Moije veux redresser cette inégalité.
Je veux comme Amadis , courir toute la Terre ,
Au vulgaire alphabet ,faire une illustre guerre :
Da Lance aupoing, à pied, on s'il veut à cheval,
Lui
AVRIL. 1732 713
Lui faire confesser qu'il n'est qu'un animal;
Et dans tout le Païs de la Litterature ,
L'envoyerfaire aveu de sa déconfiture
Il jette Momus à terre.
Momus couché par terre et embrassant
le pied de Buriver.
Dom Alphabeticos , genereux Chevalier ,
Réparateur des torts ; je suis vaincu , quartier.
Modereles transports de ton ardente bile ,
Je blâme comme toi la voyelle incivile.
Buriver ôte son pied.
Je suis ton prisonnier.
Momus saute sur son dos.
Ce maudit turlupix
Buriver.
Laissez-moi , finissez,
Jupiter fait finir à Momus ses badineries , ets
P'envoye chercher Apollon , à la décision duquel
il remet toute cette affaire. Jupiter dans la quatriéme Scene adresse la parole aux trois contendans , et leur dit :
Messieurs , votreprojet me semble merveilleux ;
Mais ce projet pour vous est un peu périlleux.
Je connois Apollon , pour vous parler sans feinte,
Il est un peu mutin et sujet à la quintė.
Le pauvre Marsias le traita d'ignorant,
Il l'écorcha tout vif; s'il enfaisoit autant ,
Malgré vos grands secrets , votre litterature ,
Vous
714 MERCURE DE FRANCE
Pous seriez, ce me semble, en mauvaise posture.
Chacun des trois répond à son tour et de la'
maniere qui convient à son caractere. Buriver dit :
Pour moije ne crains rien , et ma Philosophie,.
Me met seul à l'abri des craintes de la vie.
Après tout , Apollon n'est pas un querelleur ,
Et c'estun ignorant d'une fort douce humeur.
Je l'ai dit quelque part , et la pensée est belle.- 1
Si contre mon Projet l'Univers se rebelle ,
Je m'en étonne , aussi c'est un projet tout d'or ;·´
Et s'il le reçoit bien . je m'en étonne encor ;
Maisla Race future à son tour étonnée ,
Exaltant mes efforts , dira dans telle année ,
ParutJean Buriver , un dédale nouveau ,
Incomparable Auteur du merveilleux Bureau,
Qui rabattit l'orgueil des Sciences antiques ,
Et des Arts liberaux fit des Arts mécaniques.
Par lui le Savetier gai sur son tabouret ,
Peut en Hebreu siffler ainsi qu'un Massoret ;
Par lui les Perroquets , les Linottes , les Merles ;
Sçavent parler latin comme enfiler des perles.
Ah! s'il eût plus vécu , l'on eût par ses secrets ,
Viparler les Boiteux et marcher les Muets.
Voilà ce qu'on dira ; me nommant Trismegiste ,
Ou l'Hercule gaulois ; et le Chronologiste , ·
Frappé de mon grand nom oubliera son dîné ,
Pour sçavoir à quelle heure , en queljour je suis néEt
AVRIL. 173.2. 715
Et les petits garçons instruits à ma maniere ,
Feront sur mon tombeau l'école buissonniere.
Pour depareils honneures, oui , je m'exposerai.
Au milieu du Parnasse , ici je dresserai ,
Ma Table, mes Boulins , mes Cartes , mon Systême
En dépit d'Apollon et de la raison même;
Si les Muses en corps osent me chicanner,
Je les empêcherai bien-tôt de raisonner.
Je vous prendrois Talie , Euterpe , Calliope,
Et les amenuisant à grands coups de varlope.
Chacune en son Boulinje vous les taperois ,
Et la montrantle col , écarquillant les doigts ,
CommePigeons patus , ces Déesses si fieres ,
Apprendront à parler le jargon des Volieres.
Cependant dans la cinquiéme Scene arrive
Apollon , que Momus , par ordre de Jupiter ,
avoit mis au fait , en lui expliquant les trois Systêmes , et lui contant en chemin toute l'affaire
sur quoi il devoit prononcer. Il se contente donc
de leur faire expliquer tour-à-tour les utilitez de
leurs Systêmes.lls disent tous des choses plus ridicules les unes que les autres.
Buriver.
Pour les utilitez que contient mon Ouvrage,
J'en vois trois cens dix-huit, quelque peu davantage.
Primo. J'ai remarqué que les jeunes enfans ,
Entre les mains de qui l'on met des Rudimens ,
Marmotant leurs leçons et dodinant la tête,
Mangent leur Livre ains que pâtez de Requêtes.
J'ai
716 MERCURE DE FRANCE
î
J'ai vu même un enfant qui n'étant qu'à bonus,
Avoit déja mangé musa , vir , Dominus.
Je vous laisse àpenser si c'est viande indigeste ;
Et quatre mois après il eut mangé le reste.
Momus.
Comment! il avala les cinq déclinaisons ?
Buriver.
Baste ! et Noms et Pronoms , quatre Conjugaisons,
Syntaxe, tout étoit passépar l'Esophage.
Vous voyez comme moi , quel étrange ravage,
Fit dans son estomac ce mets empoisonneur ,
Plus coriace encor qu'un sac de Procureur.
Moi , toujours attentifau bien de la Patrie ,
Pour rompre les effets de cette fantaisie,
Je m'évertue et dis trouvons des Rudimens,
Durs, solides , massifs , à l'épreuve des dents.
DesRudimens de bois ; et sur cette pensée ,
Bientôt de mon Bureauje meformai l'idée.
Secundo. Dans le cours de mes Refléxions ,
Carje suis très-fécond en Observations ,
Je voyois que l'enfant par coûtume abusive,
Pour tourner les feuillets consumoit sa salive ,
Et dessechoit par là tous les sucs nourriciers ,
Qui de sonpetit corps arrosent les sentiers.
La chose meparut d'un préjudice extrême ;
Je rêvai là-dessus , et me dis à moi-même,
Invente, Buriver, quelque Livre nouveau,
DuqueL
AVRIL. -17320 717
Duquel tous les feuillets se rangent de niveau ;
L'enfant de sa leçon verra tout l'étalage,
Sans se mouiller le pouce et sans tourner la page.
Fe restaifort long- temps à rêver sur ce point.
Tout ce queje trouvois ne me contentoit point ;
Enfin , par un effort de l'imaginative ,
Quej'ai, sans vanité , très- brillante et très-vive ,
Je m'avisai qu'un Jeu de Cartes dePiquet
Venoit comme de cire à remplir mon Projet.
Les Cartes à present sont le livre à la mode ;
C'est des honnêtes gens le Digeste et le Code.
Leursprécieux feuillets volans et détachez,
-Tout le longd'un Bureau l'un de l'autre approchez ,
N'auront pour se tourner aucun besoin du pouce.
L'enfant conservera cette subtile mousse,
Qu'il dépensoit jadis en dépit des poulmons,
Et d'un coup d'oeil , à sec , apprendra ses leçons ,
Augrand contentement des glandes salivaires.
Ces deux utilitez , je crois , sont assez claires.
Assurément.
Apollon.
Buriver.
Et si vous n'étiez pas contens ,
Je vous dirois encor ....
Apollon.
Nous n'avons pas le temps.
Buriver.
Que mon Systême apprend à faire des capelles Qu'il
718 MERCURE DE FRANCE
Qu'il affermit les reins , soulage les aisselles « …«
Il suffit:
Apollon.
Buriver.
Quel'enfant , ferme sur ses talons ,
Sçaurapirouetter , marcher à reculons....
C'en est trop
Apollon.
Buriver.
Que le monde admirant mamaniere,
Mefera des Beaux Arts le grandPorte Banniere ,
Et queje passerai pour un Confucius.
Sur ces entrefaites Thibaud , Menuisier de Buriver , revient du Parnasse et raconte en patois
et d'une maniere fort plaisante , comment les
Muses ont renversé et brisé les Bureaux qu'il
faisoit sur le Parnasse pour M. Buriver. Apollon
donne de l'argent à Thibaut pour r'avoir des Outils , approuve ce que les Muses ont fait, comme
étant fait par son ordre , et conseille aux trois
Réformateurs de s'en retourner dans leur famille,
à l'exemple de Thibaut , ou bien d'aller habiter
l'Ile des Perroquets , et là ,
Au Peuple bigarré débiter leurs caquets.
Ils se recrient sur ce Jugement , sur tout Bu
river , qui en appelle à Jupiter , M. de l'Enthi meme ayant dit :
Prononça-t'onjamais Jugement plus inique !
Buriver de son côté répond :
Non, votre procedé n'est point abécédique.
Et
AVRIL. 17320 719
Et je dirai toûjours qu'injustement honni,
Victrix causa Diis , sed victa Catoni.
Après le départ des Charlatans , la Piece finit par ces deux Scenes.
Jupiter.
Bon,les voilà partis ; desormais du Parnasse,
Ayez soin , Apollon , d'éloigner cette race,
Sesont autant de rats , qui la bourse rongeans ,
Tournent à leur profit la sottise des gens.
Momus.
Pour les attraper tous , mettez sur les lisieres ,
Tout autour duVallon beaucoup de sourissieres.
Suspendez en dedans des bourses pour appas ;
Mesgens yviendront mordre, ils n'y manquerontpas,
Et la trape sur eux incontinent baissée ,
La machine dûment sassée et ressassée ;
Envoyez-les någer dans le fond du bourbier.
Je m'en vais de ce pas enfaire expedier ,
Detoutes les grandeurs.
Jupiter.
J'approuve ton idée.
Momus.
Si nous allions la haut boire quelque gorgée ,
De doux etfrais Nectar , car l'air est si salé!
Et puis leurs sots discours m'ont sifort alteré .. •
Jupiter.
Momus dit d'or, allons.
E
Apollon
720 MERCURE DE FRANCE
Apollon seul.
Je vous suis tout à l'heure ;
Maisje ne voudrois pas quitter cette demeure
Sans récompenser ceux dont le sage travail ,
De tous ces Triacleurs ignore l'attirail ,
Et dont l'esprit guidépar des gens pleins de zele
N'a point d'autresecret qu'une étude réelle.
Venez, Enfans chéris , recevoir ces Présens ,
Dontj'aime à couronner vos succès tous les ans.
Vous voyez à present bien clairement , Monsieur , que ce petit Poëme n'est pas si méprisable qu'une Partie interessée le vouloit faire croire
et que le stile en est un peu plus agréable que celui des lettres sur le Bureau Typographique,
C'est ce qui a donné lieu à une refléxion très judicieuse , d'une personne en place, et qui se con- noît à ces sortes de Pieces ; sçavoir , que pour ré
futer parfaitement cette Lettre- cy et toutes les
autres , il ne faudroit que faire imprimer la petite
Piece de M. le Beau. Ecoutons présentement le
Buraliste, et voyons s'il parlera mieux que le Poëte
ne le fait parler.
2
Pour revenir à cette petite Piece dont le sujet devoit , disoit-on , s'annoncer de lui-même, die
notre Docteur , après la longue et inutile digression sur la chute d'un petit Echaffaut ; Momus ouvre la Scène en se tenant les côtez de rire du
projet ridicule de certains Avanturiers de la menue
Litterature , qui s'érigeant en Réformateurs du Par- nasse , voudroient renvoyer les Muses àl'école et remettre Apollon lui-même à l'abécé. Jupiter , person—
nage entierementinutile , et qui ne sert au plus qu
multiplic
AVRIL 17320 721
multiplier les Rôles de la Piece pour le compte du
Régent qui en est l'Auteur , vient demander à Momus quel est le bruit des scies et des marteaux qu'on entend sur le Parnasse ? Momus lui répond, que c'est
une Manufacture de Bureaux Typographiques qu'on
•veut y établir et dont un visionnaire nomméM.Bu.
river , vient demander à Apollon le privilege ;Apol
lon survient, et entendant parler de Buriver, demande à Momus , quelle espece d'homme est ce Buriver!
Momus lui dit que c'est un fol sérieux , qui croit
avoir une mission pour changer le nom des lettres de
l'Alphabet, et qui a tellement à cœur de mettre à
profit les premieres années de l'enfance qu'il veut absolument , au dire de l'Auteur , qu'on apprenne à
lire aux enfans dès le maillot , pour réparer le temps
qu'ils ontperdu dans le ventre de leur mere.
Ce n'est point Momus qui ouvre la Scene, c'est
comme on l'a vû , Jupiter , qui pour les raisons
marquées , descend du Ciel. C'est lui aussi qui , à
proprement parler , ferme la Scene en confirmant
le Jugement rendu par Apollon ; c'est lui qui reste sur la Scene du commencement à la fin , qui
envoye chercher son fils Apollon , et qui le premier donne audiance aux Charlatans , et qui les
entend encore parler après l'arrivée d'Apollon.
Bien loin donc que Jupiter soit un personnage
entierement inutile. C'est , à le bien prendre , le
plus utile et le plus nécessaire de toute la Piece ,
puisque selon qu'il convient à sa nature et àsa
souveraineté , il agit en tout et par tout comme
cause premiere.
Il faut que le Buraliste soit bien ignorant ou
bien soubçonneux , et qu'il juge des autres par
hui- même , quand il avance avec assurance que la
multiplication des Rôles est pour le compte du
Régent. S'il eut voulu prendre la peine de s'in- Eij former
22 MERCURE DE FRANCE
former de la coûtume de ce College par rapport
aux Tragédies , comme il le pouvoit facilement ,
et comme il le devoit ; voulant en parler , il au- roit appris que ce sont les Acteurs qui font la dépense , et que , soit qu'il y ait une petite Piece,
soit qu'il n'y en ait point , soit qu'elle soit longue , soit qu'elle soit courte ; soit qu'il y ait deux
ou trois Rêles , soit qu'il y en ait six ou sept , i
ne leur en coute ni plus ni moins , et que par
consequent le Régent n'y trouve ni plus ni moin
son compte. Tout ce qui lui en reste c'est le tra
vail de la composition et la gloire du succès.
Enfin il paroît par toute cette exposition du
sujet que le Docteur Abécédiste ne sçait pas
mieux les regles de la Comédie que celles de l'ortographe , et qu'il ignore parfaitement que M. Racine dans la Préface sur la Comédie des
Plaideurs , soutient que les Poëtes Comiques ont
raison d'outrer le ridicule et de le pousser au-delà
de la vrai - semblance. Je le renvoye donc à cer
ilustre Auteur et aux autres que j'ai citez dans
les regles de poëtique en traitant de la Comédie
page 326 342.
Apollon , continue le Buraliste , ayant donné or
dre de l'introduire , on voit entrer M. Buriver ,
suivi de deux autres Réformateurs ausquels on ne
somprend rien , et qui n'étant là que pourfaire nombre, ne servent, comme on a dit de Jupiter , qu'a
multiplier les personnages de la Piece. L'Auteurfaiz
ensuite exposer à M. Buriver le projet et lapratique
de sa Reforme, de la maniere du monde la plus
platte et la plus insipide aux yeux des Spectateurs -
mais d'une maniere très-ingénieuse aux yeux des
Régens, qui trouvent que cette Piece pétille d'espriz.
On en peutjugerpar l'exemple suivant ; pour epêcher les enfans de ronger leurs Livres, Buriver ,
hiton
AVRIL. 1732:
dit-on, a imaginé de leur donner des Rudimens de
bois , et d'en mettre les leçons sur des Cartes détachées , pour les empêcher d'épuiser leur salive et
d'user leurpouce à en tourner les feuillets. Voilà les
gentillesses que l'Auteur met dans la bouche de
M.Buriver , et il n'a eu garde defaire un mauvais
usage de son esprit , en lui faisant dire , pour prou
ver les effets merveilleux de sa Méthode, que c'étoit
par son moyen que la Chienne de la Foire S. Germain avoit appris à lire , tant il a eu soin d'éviter
les basses plaisanteries , quoique plus naturelles et
plus propres à son sujet.
Pour réfuter en peu de mots cet exposé , il suffit de relire ce que nous venons de dire. Ce n'est
point Apollon qui donne ordre d'introduire le seul Buriver ; les trois Charlatans sont depuis
long- temps sur la Scene , lorsque ce Dieu amené
par Momus , arrive pour les juger. On comprend
partement bien pourquoi deux autres Réfor- mateurs suivent Buriver ; c'est pour lui disputer
la victoire et engager Jupiter à prononcer contre
son Systême en faveur du leur ; ils mettent en
pratique le principe qu'ils ont lû dans la seconde
Lettre , page 27. où ils parlent ainsi : On voit tant de Charlatans , de visionnaires et d'imposteurs
de toute classe , qu'il y auroit de lafoiblesse , de l'imprudence et même de la folie , à les croire tous sur
leur parole : C'est à dire en deux mots , qu'ils se
regardent et se traitent tous réciproquement de
Charlatans, de visionnaires et d'imposteurs.
Si le Buraliste dit que le Poëte fait exposer
Buriver les utilitez de son Systême de la maniere
du monde la plus platte et la plus insipide aux
yeux des Spectateurs ; vous comprenez aisément ,
M. qu'il n'a garde de dire autrement, et que c'est
plutôt son propre interêt que la verité qui le fait
parler , &c. E iij Pour
724 MERCURE DE FRANCE
Pour ce qui est de la Chienne de la Foire , qui n'avoit point du tout affaire ici , le Buraliste en
parle avec une certaine complaisance , parce qu'il croit avoir mis en poudre l'objection que lui
avoit faite à ce sujet le Grammairien de Ventabren, c'est-à- dire, qu'il s'étoit faite à lui-même.
Pour moi je pense qu'il auroit fait bien plus săgement de n'en point parler du tout , et que biendes personnes pourroient , avec raison , mettre
cette objection bien au-dessus de la réponse.
a
Enfin, dit le Buraliste , un Menuisier nomméThibaut,annoncepour dénouement queles Muses viennent
de mettre enpieces tous ses Bureaux, de briser ses Outils et de lui rompre ses Regles surle dos , et ilfinit la
Piece ense proposant de retourner à sa Boutique, et en conseillant à M.Buriver de le suivre et de devenir son
garçon. C'est ainsi que desgens de College s'efforcent
de tourner en ridicule la Méthode du Bureau , pendant que les personnes les plus sages de la Villet de la Cour ,font gloire d'en reconnoître l'utilité , et que
cette Méthode a l'avantage d'être employée à l'ins- truction des Enfans de France.
Pour avoir le véritable dénouëment , donnezvous seulement la peine de relire les deux dernieres Scenes rapportées plus haut ; vous verrez que
du commencement à la fin le sujet de la Piece
s'arrange, s'explique, et s'annonce de lui- même
comme l'avoit promis le Professeur. C'est ce qui
arrive dans toutes les bonnes Pieces , même dans .
celles qu'on représente pour la premiere fois et
dont on sçait à peine le nom. Cependant le nouveau Méthodiste ne trouve cette petite Comédie
très ingénieuse qu'aux yeux des Régens du College , mais la plus platte et la plus insipide du
monde à ceux des Spectateurs. M. le Beau
M. Gaullyer, et tous ceux q ne sont pas pourLe
?
AVRIL. 1732. 735
le Bureau , sont des gens ignorans , vains , présomptueux, entêtex , envieux , de mauvaisefoi , c.
Ce sont de vains Déclamateurs , de petits génies.
des Maîtres mercenaires , indifferens pour le bien
public et pour la bonne éducation , &c. C'est ainsi
qu'un homme sans science et sans autorité s'efforce de calomnier sans modération et sans pudeur, une infinité de très- honnêtes et très- habiles gens , et de mépriser toutes les meilleures et
les plus anciennes Méthodes tandis que les personnes les plus illustres et les plus sçavantes de la
Ville et de la Cour , de l'Epée et de la Robe ; en
un mot, de tous les differens Etats , se sont toujours fait honneur d'en reconnoître l'utilité ,
que ces Méthodes ont toujours eu et ont encore
l'avantage d'être employées à l'instruction de
toute l'Europe , et même à celle des Princes ,
Rois et des Empereurs de l'Univers , &c.
et
des
***: ***:*****
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Résumé : SECONDE LETTRE d'un Professeur de l'Université de Paris, à un Principal de Province, sur le Bureau Typographique.
Le texte est une lettre d'un professeur de l'Université de Paris adressée à un principal de province. Cette lettre discute d'une pièce de théâtre intitulée 'Le Parnasse réformé, ou Apollon à l'École', écrite par M. le Beau, régent de seconde. La pièce a été jouée au Collège du Plessis-Sorbonne le 22 août précédent et a été acclamée par le public. Elle critique les 'charlatans de la menuë littérature' qui, depuis environ vingt ans, attaquent les collèges et vantent leurs propres méthodes d'enseignement. La pièce met en scène sept personnages, dont trois réformateurs principaux : Buriver, M. de la Minute et M. de l'Enthimeme. Buriver utilise un 'Bureau typographique' pour enseigner les langues et les sciences. M. de la Minute promet de rendre un élève de septième capable d'enseigner à ses camarades après une seule leçon. M. de l'Enthimeme suggère d'enseigner le latin aux nourrices et de faire apprendre l'alphabet aux enfants avec des lettres en pain d'épice. L'intrigue se déroule en huit scènes. Elle commence par l'arrivée de Jupiter sur le Parnasse, intrigué par le bruit des marteaux et des rabots. Momus explique ensuite à Jupiter les méthodes des réformateurs. Buriver, M. de la Minute et M. de l'Enthimeme demandent à Jupiter la ferme des sciences et des beaux-arts, chacun vantant sa méthode. Jupiter, sceptique, envoie chercher Apollon pour trancher l'affaire. Apollon écoute les explications des réformateurs, qui se révèlent ridicules. Par exemple, Buriver affirme que son système permet d'apprendre toutes les langues et les sciences sans livres, grâce à des cartes et un 'Colombier'. La pièce se conclut par le départ des réformateurs, jugés inutiles et ridicules.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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14
p. 725-726
MADRIGAL. Traduit de l'Italien du Marini.
Début :
Venus, je sçai qu'Amour a fui de ton Empire, [...]
Mots clefs :
Marini, Baiser
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MADRIGAL. Traduit de l'Italien du Marini.
MADRIGAL.
Traduit de l'Italien du Marini.
Enus , je sçai qu'Amour a fui de ton Empire.
Et qu'en proye au plus vifchagrin ,
Tu promets un baiser à qui te pourra dire ,
Ou se cache ce Dieu málin , *
Ah! cesse les regrets où ton cœur s'abandonne ,
* Le Poëte dans ces quatre Vers a fait allusion
aucommencement de la premiere Idille de Moschus,
et ce Madrigal est , à vrai dire , une Réponse à
cette Idille.
E iiij Déesse
726 MERCURE DE FRANCE
Déesse , donne-moi ce doux baiser promis,
Ou fais qu'Ismene me le donne ;
C'es dans ses beaux yeux qu'est ton Fils.
M. COQUARD, Avocat au Parlement .
de Dijon.
Traduit de l'Italien du Marini.
Enus , je sçai qu'Amour a fui de ton Empire.
Et qu'en proye au plus vifchagrin ,
Tu promets un baiser à qui te pourra dire ,
Ou se cache ce Dieu málin , *
Ah! cesse les regrets où ton cœur s'abandonne ,
* Le Poëte dans ces quatre Vers a fait allusion
aucommencement de la premiere Idille de Moschus,
et ce Madrigal est , à vrai dire , une Réponse à
cette Idille.
E iiij Déesse
726 MERCURE DE FRANCE
Déesse , donne-moi ce doux baiser promis,
Ou fais qu'Ismene me le donne ;
C'es dans ses beaux yeux qu'est ton Fils.
M. COQUARD, Avocat au Parlement .
de Dijon.
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Résumé : MADRIGAL. Traduit de l'Italien du Marini.
Le texte présente un madrigal traduit de l'italien par Marini, adressé à Enus. Amour a quitté son empire, et Enus promet un baiser à celui qui trouvera ce dieu. Le poème fait référence à la première idylle de Moschus et mentionne M. Coquard, avocat au Parlement de Dijon.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 726-733
DOUZIEME LETTRE sur la Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
Début :
Vous voulez, Monsieur, juger du Systême Typographique par l'experience [...]
Mots clefs :
Bureau typographique, Méthode, Bibliothèque des enfants, Système de morale, Expérience
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DOUZIEME LETTRE sur la Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
OUZIEME LETTRE sur la
Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
VOU
Ous voulez , Monsieur , juger du Systême
Typographique par l'experience et par la
pratique, ou enfin par des exemples et des autoritez modernes. Cela paroît raisonnable jusqu'à un
certain point , je n'ignore pas que les preuves
sensibles ne frappent davantage , mais je sçai
aussi que ces prétendues preuves sensibles sont
souvent plus sujettes à l'erreur que les preuves de
raisonnement. J'avoue que lorsqu'il s'agit d'un
effet prompt et physique , l'experience est le
moyen le plus sur pour en décider ; supposons ,
par exemple, une dispute sur deux sortes de Poudre à Canon, où il s'agit de sçavoir laquelle a
plus de force et porte plus loin ; tous les raisonnemens sur la composition de cette Poudre , ne
feront jamais sur un bon esprit la même impression que l'experience réïterée, et après laquelle ces
raisonnemens serviront à confirmer , ou pour
mieux dire , à expliquer cette même experience.
Il en est de même de la circulation du sang etde
bien d'autres choses.
AVRIL. 17321 727
Mais quand il s'agit de Méthode et d'institution litteraire ou d'une experience soumise à une
infinité de combinaisons physiques et morales ,
il faut pour lors que la raison soit de la partie
et qu'elle serve par provision à discerner la bonté
et la superiorité de cette Méthode sur les autres ;
je croi que c'est ici le cas du Bureau Tipographique , malgré le raisonnement de ceux qui disent qu'il faut juger de la bonté de cette Méthode
par le grand nombre des Sçavans qu'elle produi c'est- à- dire , selon eux , attendre 20. 30. ou
So.ans avant que de se déterminer. Raisonner ainsi
n'est- ce pas raisonner à peu près comme si l'on
eut dit autrefois ? 1 °. Qu'il falloit juger de la
bonté et de l'excellence de la nouvelle Medecine
par le plus grand nombre de Vieillards de l'un et
del'autre Sexe, auquel cas laMedecine des Patriarches auroit été préferable à toutes les autres.
ra ,
2º. Qu'il falloit juger de la bonté des Loix de
chaque Païs , et de la probité de chaque Nation ,
par le plus petit nombre de procès et par le
moindre casuel des Executeurs de la haute Justice.
3°. Qu'il falloit juger de la politique et de la
science Militaire d'un siecle , par le nombre des
Héros , des grands Souverains et des Peuples heureux qu'ils gouvernoient.
4°. Qu'il falloit juger des avantages de l'Im
primerie , par le plus grand nonbre des Sçavans
et des Livres modernes préferables à ceux des- anciens:
5. Juger des avantages de la Boussole , de la
nouvelle Navigation et de la découverte du nouveau Monde , par le plus grand bonheur et le
meilleur être des Nations qui jouissent des fruits de cette découverte.
6. Juger de la bonté de l'Horlogerie et même B-v des
728 MERCURE DE FRANCE
des Prédicateurs ,, par le meilleur emploi du tems.
. De la préference et superiorité morale des Nations et de leur commerce , par le plus grand
nombre des honnêtes gens,par le plus grand nomnombre des riches , et le plus petit nombre des miserables.
8". Juger de la bonté des Systêmes de morale ,
de politique et même de Religion , par le plus
grand nombre des gens de bien, des gens de probité et de pieté , &c.
Vous voyez par là , Monsieur , qu' est plus --
aisé de juger des effets de pure Mécanique , que
de juger des effets combinez à l'infini dans le Physique et dans le Moral. Que d'incertitudes dans
l'enquête et dans le témoignage des hommes !
sur la complexion et le temperament des enfans !
sur les dispositions de leur esprit sur la Méthode qu'ils ont suivie ! sur les moyens , la capacité ,
les talens , et les soins des parens , des Maîtres et
même des domestiques ! sur l'usage et les Coûtumes de chaque Pays, et enfin sur tous les accidens
de la vie !
Descartes , Pascal , Baile , Newton , Leibnits ,
&c. ont été de grands hommes , s'ensuit- il que
leurs Abécé et leurs Rudimens fussent les meilleurs De quel Rudiment , de quelle Méthode se
servoient a utrefois les Hébreux , les Grecs et les
Latins , et de quelle Méthode se servent aujourd'hui les E spagnols et les Portugais , les Anglois
et les Hollandois ; en faut- il juger par le plus
grand nombre de leurs Sçavans ? Il n'est donc
pas toujours aisé de prouver la bonté d'un Systême ou d'une Méthode, par le plus grand nombre
des habiles gens qu'elle a produits , et si on peut
le dir e à p resent de la Méthode de Décartes , elle
me lai ssoit pas de porter par elle- même la preuve morale
AVRIL 1732. 729
•
2
morale et géométrique de son excellence et de sa
superiorité sur les autres Méthodes. On juge fa、
cilement de la bonté et de l'abondance des récoltes par la qualité , la quantité et le prix des denrées. Il n'en est pas tout- à -fait de même des Méthodes des Sçavans , ni de leurs Ouvrages. Concluons qu'il en est d'une Méthode comme d'un
outil ; un bon Ecrivain écrira mieux avec une
mauvaise plume , qu'an mauvais Ecrivain avec la
meilleure plume du monde. On n'apporte pas assez de soin sur le choix des Maîtres , voilà un
inconvenient. Les Maîtres ne cherchent pas assez
les rapports et les proportions entre la doctrine
et les enfans , voilà un autre inconvenient. Il n'est
donc pas absolument vrai qu'on puisse toûjours
juger de l'outil ou de la Méthode par l'Ouvrage et par l'Eleve.
Pour vous donner cependant , comme vous le
souhaitez , Monsieur , des témoignages rendus en faveur de la Méthode du Bureau , je puis vous
assurer que de toutes les personnes qui ont vu
cette Machine , il n'y en a point qui n'ait avoüé
de bonne foi que cette maniere de montrer les
premiers élemens des Lettres étoit ingénieuse et
plus à la portée des petits enfans que les Méthodes vulgaires ; en passant sous silence le détail des
témoignages de quelques Particuliers, je pourrois vous nomnier ici un des plus intelligens Magistrats et des plus zelez pour le bien de la République des Lettres , qui cut la curiosité de voir par
lui même l'exercice et les operations du Bureau
Typographique. M. Gallyot , accompagna ce Magistrat au College du Plessis , où M. Rollin et
M. l'Abbé de S. Pierre , avoient déja pris la peine
de se rendre. Tous ces Messieurs parlerent favorablement de cette Méthode et je me flatte qu'en -Evj -favcut
730 MERCURE DE FRANCE
faveur de notre cause ils voudront bien me par
donner la liberté que je viens de prendre de les
nommer. Le R. P. Buffier , le Régent de Quatrié
me du College de Louis le Grand , le P. Bouche
ron , Prêtre de l'Oratoire , M. Thomé , Conseiller au Parlement de Grenoble et d'autres Messieurs , se trouverent une autre fois ensemble au
Bureau du College du Plessis et rendirent également témoignage à la verité ; je pourrois vous
citer le Principal et les deux Sous- Principaux du
même College, qui , exempts de prévention , pen
sent favorablement de la Méthode Typographique. Je pourrois vous nommer le Proviseur et le
Principal du College d'Harcourt où le jeune Seigneur Dom Ventura de Liria , a déja fait et
'heureuse experience du Bureau Typographi
que. Je pourrois vous parler de M. Chom
pré , Maître de Pension , et depuis peu Maître
de petite Ecole , qui fait usage actuellement
des classes du Bureau Typographique , dans le
rue des Carmes ou saint Jean de Beauvais.;
exemple qui va être suivi par plusieurs. Maîtres d'Ecoles.
Je pourrois vous rapporter l'exemple d'une petite fille de trois ans , vis- à- vis sainte Catherine ,
rue S.Denis,qui imprime joliment à son Bureau,la
copie qu'on lui donne sur des cartes. Il y a plusieurs autres enfans qui s'amusent utilement au
Bureau Typographique ; cela devroit fermer la.
bouche aux Critiques , retenir leur plume et leur
apprendre enfin à en faire un meilleur usage pour le Public..
Je pourrois vous rapporter le Certificat de la Societé des Arts , inseré dans le Mercure du mois
de Septembre dernier , et vous dire qu'à la Cour même, Qn. fair usage du Bureau pour Monseigneur
AVRIL. 1732. 732
gneur le Dauphin et pour Mesdames de France.
Mais il faut vous dire le fort et le foible , un
Grammairien de Ventabren , donna dans le Mercure du mois de Janvier dernier , une Critique
contre le Bureau , et il en parut une autre dans le
mois de Février suivant , dont le Public fut en◄
core plus mécontent ; enfin M. Gaullier , Régent
de Quatriéme au Plessis , dans les Notes sur la
Méthode de M.le Févre, et M.le Beau, Regent de
Seconde au même College , dans sa petite Piece
comique du mois d'Août dernier , ont pris le
parti de se déclarer hautement contre le Systême
et contre l'Auteur du Bureau Typographique.
C'est à vous , Monsieur , à present d'aprécier ,
d'estimer et d'évaluer chaque témoignage ; si
vous voulez compter les voix avant que de péser
les raisons ; vous avez trois Maîtres qui se sont déclarez contre le Bureau et contre ses Partisans
de la Cour et de la Ville. De ces trois Maîtres
le premier étant, dit- on, imaginé et fait à plaisir ,
il n'en reste que deux ; de ces deux il ne faut pas
compter M. le Beau , qui par licence poëtique
plutôt qu'à mauvais dessein , a préferé le Bureau
pour le sujet de sa petite Piece ; on le lui auroit
même prêté avec plaisir, pour rendre plus sensible aux Spectateurs, la Critique qu'il en vouloit
faire ;on auroit pû fournir bien des pensées comiques sur cette matiere , et on en auroit ri comme
les autres , sans approuver neanmoins l'affectation des personalitez indécentes contre les morts
et les vivans ; conduite qui fait toujours tort au
jugement et au cœur , quelque honneur qu'elle
puisse faire d'ailleurs à l'esprit du Poëte.
2.
De ces trois Maîtres , il ne nous reste donc à
craindre contre le Bureau , que les Critiques de
M.Gaullier , ce laborieux et infatigable Profes- seur
732 MERCURE DE FRANCE
seur , dont les Notes sur la Méthode de M. le
Fevre , p. 104. parlant de la lecture de Terence,
et croyant avoir pour lui l'autorité de M. le Fevre , du P. Jouvency , des Statuts de l'Université,
de M. M. et R. P. des P. de l'Eglise , enfin du
Monde entier, pense- t'il , bors le seul M. Rollin ,
a voulu peut-être à son tour et dans cette occasion , se singulariser contre le jugement du Public , de la Cour , de la Ville , des Colleges , des
Maîtres d'Ecole , de la Societé des Arts , de l'experience , il a peut- être voulu qu'on pût aussi dire delui ce que l'Ecriture dit d'Ismaël. Gen. 16.
12. qu'il leva la main contre tous , Manus ejus
contra omnes ; et ajoûter que tous leveront aussi la
main contre lui , Et manus omnium contra eum ;
article et paroles que M. Gaullier rapporte dans
sa Lettre inserée dans le Mercure du mois d'Octobre dernier , contre quelques lignes du Nouvelliste du Parnasse , dont il ne paroît pas qu'il
eût tant à se plaindre par un long et ennuyeux Commentaire. Bien des Auteurs à Paris , se sont
déclarez contre les Critiques de ce Professeur.
L'Auteur des Tropes attend sa réponse , 1 ° . sur
la difference des Colleges bien ou mal montez,
2. Sur la veritable diference de la Méthode de
Mile Fevre et de la Méthodedes Colleges. 3 ° . Sur
la contradiction de ceux qui, selon leur Méthode,
exigent l'âge de dix ou douze ans pour l'étude
des Rudimens et qui néanmoins les accablent d'une infinité de Regles Grammaticales avant cet âge
là. 4°. Sur les Charlatans de la menuë Litterature,
qui donnent le Catalogue fastueux de leurs petites
compilations. . Sur l'imparfaite division et
l'injuste accusation d'heresie ou de folie. 6° . Sur
les Longins connus et inconnus. 7° . Sur les Livres de compilation , imprimez exprès en lettres fort
"
AVRIL. 1732. 733
fort menuës , pour faciliter la grosse et grande
Litterature. 8. Sur la veritable définition des
mots Pedant et Pedenterie. 9 ° Et enfin , sur la
difference d'un vain Déclamateur, et d'un vrai et
utile Critique.
UnAuteur de Rennes en Bretagne s'est déclaré
contre ce Regent de quatriéme. M. Perquis autre
Breton , a donné une Réponse à la Lettre d'un
Profeffeur anonyme que M. Gaullier avoue être
de lui , petite consolation que l'honneur de tant
d'adversaires , tant qu'un fameux et ancien Recteur de l'Université de Paris , ne daignera pas en
augmenter le nombre , et que méprisant les vaines déclamations de ses critiques, il continuera ses
dignes et pénibles travaux pour enrichir la République des Lettres de la suite du cours historique que le public attend toujours avec impatience , et
qu'il reçoit et lit avec empressement.
1
Je vous envoie , Mr. les nouvelles dimensions
du Bureau , afin que vous puissiez en faire faire selon la mesure des Cartes et des Lettres dont
vous voudrez vous servir. Vous avez dans le Mercure de Novembre la suite des Jeux , des opérations , des exercices et des leçons du Sistême Ty- pografique ; et dans le premier Volume du mois s
de Decembre dernier, la maniere d'étiqueter et degarnir un Bureau complet.
Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
VOU
Ous voulez , Monsieur , juger du Systême
Typographique par l'experience et par la
pratique, ou enfin par des exemples et des autoritez modernes. Cela paroît raisonnable jusqu'à un
certain point , je n'ignore pas que les preuves
sensibles ne frappent davantage , mais je sçai
aussi que ces prétendues preuves sensibles sont
souvent plus sujettes à l'erreur que les preuves de
raisonnement. J'avoue que lorsqu'il s'agit d'un
effet prompt et physique , l'experience est le
moyen le plus sur pour en décider ; supposons ,
par exemple, une dispute sur deux sortes de Poudre à Canon, où il s'agit de sçavoir laquelle a
plus de force et porte plus loin ; tous les raisonnemens sur la composition de cette Poudre , ne
feront jamais sur un bon esprit la même impression que l'experience réïterée, et après laquelle ces
raisonnemens serviront à confirmer , ou pour
mieux dire , à expliquer cette même experience.
Il en est de même de la circulation du sang etde
bien d'autres choses.
AVRIL. 17321 727
Mais quand il s'agit de Méthode et d'institution litteraire ou d'une experience soumise à une
infinité de combinaisons physiques et morales ,
il faut pour lors que la raison soit de la partie
et qu'elle serve par provision à discerner la bonté
et la superiorité de cette Méthode sur les autres ;
je croi que c'est ici le cas du Bureau Tipographique , malgré le raisonnement de ceux qui disent qu'il faut juger de la bonté de cette Méthode
par le grand nombre des Sçavans qu'elle produi c'est- à- dire , selon eux , attendre 20. 30. ou
So.ans avant que de se déterminer. Raisonner ainsi
n'est- ce pas raisonner à peu près comme si l'on
eut dit autrefois ? 1 °. Qu'il falloit juger de la
bonté et de l'excellence de la nouvelle Medecine
par le plus grand nombre de Vieillards de l'un et
del'autre Sexe, auquel cas laMedecine des Patriarches auroit été préferable à toutes les autres.
ra ,
2º. Qu'il falloit juger de la bonté des Loix de
chaque Païs , et de la probité de chaque Nation ,
par le plus petit nombre de procès et par le
moindre casuel des Executeurs de la haute Justice.
3°. Qu'il falloit juger de la politique et de la
science Militaire d'un siecle , par le nombre des
Héros , des grands Souverains et des Peuples heureux qu'ils gouvernoient.
4°. Qu'il falloit juger des avantages de l'Im
primerie , par le plus grand nonbre des Sçavans
et des Livres modernes préferables à ceux des- anciens:
5. Juger des avantages de la Boussole , de la
nouvelle Navigation et de la découverte du nouveau Monde , par le plus grand bonheur et le
meilleur être des Nations qui jouissent des fruits de cette découverte.
6. Juger de la bonté de l'Horlogerie et même B-v des
728 MERCURE DE FRANCE
des Prédicateurs ,, par le meilleur emploi du tems.
. De la préference et superiorité morale des Nations et de leur commerce , par le plus grand
nombre des honnêtes gens,par le plus grand nomnombre des riches , et le plus petit nombre des miserables.
8". Juger de la bonté des Systêmes de morale ,
de politique et même de Religion , par le plus
grand nombre des gens de bien, des gens de probité et de pieté , &c.
Vous voyez par là , Monsieur , qu' est plus --
aisé de juger des effets de pure Mécanique , que
de juger des effets combinez à l'infini dans le Physique et dans le Moral. Que d'incertitudes dans
l'enquête et dans le témoignage des hommes !
sur la complexion et le temperament des enfans !
sur les dispositions de leur esprit sur la Méthode qu'ils ont suivie ! sur les moyens , la capacité ,
les talens , et les soins des parens , des Maîtres et
même des domestiques ! sur l'usage et les Coûtumes de chaque Pays, et enfin sur tous les accidens
de la vie !
Descartes , Pascal , Baile , Newton , Leibnits ,
&c. ont été de grands hommes , s'ensuit- il que
leurs Abécé et leurs Rudimens fussent les meilleurs De quel Rudiment , de quelle Méthode se
servoient a utrefois les Hébreux , les Grecs et les
Latins , et de quelle Méthode se servent aujourd'hui les E spagnols et les Portugais , les Anglois
et les Hollandois ; en faut- il juger par le plus
grand nombre de leurs Sçavans ? Il n'est donc
pas toujours aisé de prouver la bonté d'un Systême ou d'une Méthode, par le plus grand nombre
des habiles gens qu'elle a produits , et si on peut
le dir e à p resent de la Méthode de Décartes , elle
me lai ssoit pas de porter par elle- même la preuve morale
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morale et géométrique de son excellence et de sa
superiorité sur les autres Méthodes. On juge fa、
cilement de la bonté et de l'abondance des récoltes par la qualité , la quantité et le prix des denrées. Il n'en est pas tout- à -fait de même des Méthodes des Sçavans , ni de leurs Ouvrages. Concluons qu'il en est d'une Méthode comme d'un
outil ; un bon Ecrivain écrira mieux avec une
mauvaise plume , qu'an mauvais Ecrivain avec la
meilleure plume du monde. On n'apporte pas assez de soin sur le choix des Maîtres , voilà un
inconvenient. Les Maîtres ne cherchent pas assez
les rapports et les proportions entre la doctrine
et les enfans , voilà un autre inconvenient. Il n'est
donc pas absolument vrai qu'on puisse toûjours
juger de l'outil ou de la Méthode par l'Ouvrage et par l'Eleve.
Pour vous donner cependant , comme vous le
souhaitez , Monsieur , des témoignages rendus en faveur de la Méthode du Bureau , je puis vous
assurer que de toutes les personnes qui ont vu
cette Machine , il n'y en a point qui n'ait avoüé
de bonne foi que cette maniere de montrer les
premiers élemens des Lettres étoit ingénieuse et
plus à la portée des petits enfans que les Méthodes vulgaires ; en passant sous silence le détail des
témoignages de quelques Particuliers, je pourrois vous nomnier ici un des plus intelligens Magistrats et des plus zelez pour le bien de la République des Lettres , qui cut la curiosité de voir par
lui même l'exercice et les operations du Bureau
Typographique. M. Gallyot , accompagna ce Magistrat au College du Plessis , où M. Rollin et
M. l'Abbé de S. Pierre , avoient déja pris la peine
de se rendre. Tous ces Messieurs parlerent favorablement de cette Méthode et je me flatte qu'en -Evj -favcut
730 MERCURE DE FRANCE
faveur de notre cause ils voudront bien me par
donner la liberté que je viens de prendre de les
nommer. Le R. P. Buffier , le Régent de Quatrié
me du College de Louis le Grand , le P. Bouche
ron , Prêtre de l'Oratoire , M. Thomé , Conseiller au Parlement de Grenoble et d'autres Messieurs , se trouverent une autre fois ensemble au
Bureau du College du Plessis et rendirent également témoignage à la verité ; je pourrois vous
citer le Principal et les deux Sous- Principaux du
même College, qui , exempts de prévention , pen
sent favorablement de la Méthode Typographique. Je pourrois vous nommer le Proviseur et le
Principal du College d'Harcourt où le jeune Seigneur Dom Ventura de Liria , a déja fait et
'heureuse experience du Bureau Typographi
que. Je pourrois vous parler de M. Chom
pré , Maître de Pension , et depuis peu Maître
de petite Ecole , qui fait usage actuellement
des classes du Bureau Typographique , dans le
rue des Carmes ou saint Jean de Beauvais.;
exemple qui va être suivi par plusieurs. Maîtres d'Ecoles.
Je pourrois vous rapporter l'exemple d'une petite fille de trois ans , vis- à- vis sainte Catherine ,
rue S.Denis,qui imprime joliment à son Bureau,la
copie qu'on lui donne sur des cartes. Il y a plusieurs autres enfans qui s'amusent utilement au
Bureau Typographique ; cela devroit fermer la.
bouche aux Critiques , retenir leur plume et leur
apprendre enfin à en faire un meilleur usage pour le Public..
Je pourrois vous rapporter le Certificat de la Societé des Arts , inseré dans le Mercure du mois
de Septembre dernier , et vous dire qu'à la Cour même, Qn. fair usage du Bureau pour Monseigneur
AVRIL. 1732. 732
gneur le Dauphin et pour Mesdames de France.
Mais il faut vous dire le fort et le foible , un
Grammairien de Ventabren , donna dans le Mercure du mois de Janvier dernier , une Critique
contre le Bureau , et il en parut une autre dans le
mois de Février suivant , dont le Public fut en◄
core plus mécontent ; enfin M. Gaullier , Régent
de Quatriéme au Plessis , dans les Notes sur la
Méthode de M.le Févre, et M.le Beau, Regent de
Seconde au même College , dans sa petite Piece
comique du mois d'Août dernier , ont pris le
parti de se déclarer hautement contre le Systême
et contre l'Auteur du Bureau Typographique.
C'est à vous , Monsieur , à present d'aprécier ,
d'estimer et d'évaluer chaque témoignage ; si
vous voulez compter les voix avant que de péser
les raisons ; vous avez trois Maîtres qui se sont déclarez contre le Bureau et contre ses Partisans
de la Cour et de la Ville. De ces trois Maîtres
le premier étant, dit- on, imaginé et fait à plaisir ,
il n'en reste que deux ; de ces deux il ne faut pas
compter M. le Beau , qui par licence poëtique
plutôt qu'à mauvais dessein , a préferé le Bureau
pour le sujet de sa petite Piece ; on le lui auroit
même prêté avec plaisir, pour rendre plus sensible aux Spectateurs, la Critique qu'il en vouloit
faire ;on auroit pû fournir bien des pensées comiques sur cette matiere , et on en auroit ri comme
les autres , sans approuver neanmoins l'affectation des personalitez indécentes contre les morts
et les vivans ; conduite qui fait toujours tort au
jugement et au cœur , quelque honneur qu'elle
puisse faire d'ailleurs à l'esprit du Poëte.
2.
De ces trois Maîtres , il ne nous reste donc à
craindre contre le Bureau , que les Critiques de
M.Gaullier , ce laborieux et infatigable Profes- seur
732 MERCURE DE FRANCE
seur , dont les Notes sur la Méthode de M. le
Fevre , p. 104. parlant de la lecture de Terence,
et croyant avoir pour lui l'autorité de M. le Fevre , du P. Jouvency , des Statuts de l'Université,
de M. M. et R. P. des P. de l'Eglise , enfin du
Monde entier, pense- t'il , bors le seul M. Rollin ,
a voulu peut-être à son tour et dans cette occasion , se singulariser contre le jugement du Public , de la Cour , de la Ville , des Colleges , des
Maîtres d'Ecole , de la Societé des Arts , de l'experience , il a peut- être voulu qu'on pût aussi dire delui ce que l'Ecriture dit d'Ismaël. Gen. 16.
12. qu'il leva la main contre tous , Manus ejus
contra omnes ; et ajoûter que tous leveront aussi la
main contre lui , Et manus omnium contra eum ;
article et paroles que M. Gaullier rapporte dans
sa Lettre inserée dans le Mercure du mois d'Octobre dernier , contre quelques lignes du Nouvelliste du Parnasse , dont il ne paroît pas qu'il
eût tant à se plaindre par un long et ennuyeux Commentaire. Bien des Auteurs à Paris , se sont
déclarez contre les Critiques de ce Professeur.
L'Auteur des Tropes attend sa réponse , 1 ° . sur
la difference des Colleges bien ou mal montez,
2. Sur la veritable diference de la Méthode de
Mile Fevre et de la Méthodedes Colleges. 3 ° . Sur
la contradiction de ceux qui, selon leur Méthode,
exigent l'âge de dix ou douze ans pour l'étude
des Rudimens et qui néanmoins les accablent d'une infinité de Regles Grammaticales avant cet âge
là. 4°. Sur les Charlatans de la menuë Litterature,
qui donnent le Catalogue fastueux de leurs petites
compilations. . Sur l'imparfaite division et
l'injuste accusation d'heresie ou de folie. 6° . Sur
les Longins connus et inconnus. 7° . Sur les Livres de compilation , imprimez exprès en lettres fort
"
AVRIL. 1732. 733
fort menuës , pour faciliter la grosse et grande
Litterature. 8. Sur la veritable définition des
mots Pedant et Pedenterie. 9 ° Et enfin , sur la
difference d'un vain Déclamateur, et d'un vrai et
utile Critique.
UnAuteur de Rennes en Bretagne s'est déclaré
contre ce Regent de quatriéme. M. Perquis autre
Breton , a donné une Réponse à la Lettre d'un
Profeffeur anonyme que M. Gaullier avoue être
de lui , petite consolation que l'honneur de tant
d'adversaires , tant qu'un fameux et ancien Recteur de l'Université de Paris , ne daignera pas en
augmenter le nombre , et que méprisant les vaines déclamations de ses critiques, il continuera ses
dignes et pénibles travaux pour enrichir la République des Lettres de la suite du cours historique que le public attend toujours avec impatience , et
qu'il reçoit et lit avec empressement.
1
Je vous envoie , Mr. les nouvelles dimensions
du Bureau , afin que vous puissiez en faire faire selon la mesure des Cartes et des Lettres dont
vous voudrez vous servir. Vous avez dans le Mercure de Novembre la suite des Jeux , des opérations , des exercices et des leçons du Sistême Ty- pografique ; et dans le premier Volume du mois s
de Decembre dernier, la maniere d'étiqueter et degarnir un Bureau complet.
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Résumé : DOUZIEME LETTRE sur la Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
La lettre aborde la méthode typographique employée dans la Bibliothèque des Enfants et les dimensions du Bureau Typographique. L'auteur examine la validité de juger une méthode par l'expérience ou par le raisonnement. Il estime que, bien que l'expérience soit essentielle pour des questions mécaniques, elle est moins fiable pour évaluer des méthodes littéraires ou éducatives en raison de la complexité des facteurs impliqués. L'auteur critique l'idée de juger la méthode typographique par le nombre de savants qu'elle produit, comparant cela à des jugements absurdes dans d'autres domaines comme la médecine, les lois ou la politique. Il affirme que la qualité d'une méthode ne peut pas toujours être prouvée par le nombre de personnes qu'elle forme. La lettre mentionne plusieurs témoignages favorables à la méthode typographique, provenant de magistrats, de professeurs et de membres de la cour. Cependant, elle reconnaît également des critiques, notamment celles de certains professeurs et d'un grammairien. L'auteur conclut en soulignant la difficulté de juger une méthode uniquement par ses résultats et en invitant à une évaluation plus nuancée des témoignages et des raisons. Il fournit également des informations sur les dimensions du Bureau Typographique et les ressources disponibles pour en savoir plus sur le système typographique.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
16
p. 733-736
Dimension du Bureau Typografique , composé d'un Casseau de six rangs , de trente logètes chacun, et d'une Table brisée en deux parties inégales, dont la petite sert d'appui au Casseau , et l'autre sert à le fermer.
Début :
A l'exemple des Imprimeurs, on appelle Casseau une Caisse, [...]
Mots clefs :
Bureau typographique, Casseau, Imprimeurs, Table, Logètes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Dimension du Bureau Typografique , composé d'un Casseau de six rangs , de trente logètes chacun, et d'une Table brisée en deux parties inégales, dont la petite sert d'appui au Casseau , et l'autre sert à le fermer.
Dimension du Bureau Typografique , composé d'un Casseau de six rangs , detrente
logètes chacun, et d'une Table brisée en s
deux parties inégales , dont la petite sert
d'appui au Casseau , et l'autre sert à le
fermer.
A l'exemple des Imprimeurs , on appelle Cas seau
734 MERCURE DE FRANCE
seau une Caisse, divisée en petits compartimens our
Cassetins , dans lesquels on tient les Lettres nécessaires pour imprimer. Les Casseaux des Imprimeries sont à plat ou inclinez pour la commodité des Compositeurs , et le Casseau du Bureau est appuyé perpendiculairement et en forme
de Colombier contre la tringle du derriere de la
plus petite et la plus courte partie de la Table, où
on le retient par deux Crochets et deux Pitons à
vis. Ce Casseau est composé ainsi qu'il a été
dit de six rangs de Logètes , trente pour chacun,
-de sorte qu'il y a les deux montans extrêmes , de
l'épaisseur de ces traverses , et 29 petits montans
qui séparent et divisent les 30 Logètes de chaque
rang. Onpeut faire les petits montans d'une ou
de plusieurs pieces , mais la maniere la plus solide et la plus propre c'est de donner à chaque Logète son petit montant de séparation , entaillé
dans ses deux traverses , et ainsi au lieu de 29 petits montans d'une piéce , il y en aura 6 fois 29,
ou 174. Ceux qui voudront des Casseaux plus
courts , pourront faire faire de petites Cartes et
des Montans de fer blanc à leur fantaisie , et à
proportion du lieu qu'ils destineront à cette ma- chine.
Les dimensions du Bureau Typographique
doivent donc se regler sur les dimensions des
Cartes à jouer et des caracteres à jour dont on
veut se servir pour imprimer les Etiquettes sur
les traverses , au bas de chaque Cassetin. Les Cartes de Paris ont environ 25 lignes de largeur, sur
38 lignes de longueur , et je suppose icy, des caracteres de 8 lignes de hauteur pour les Capitales et pour les Lettres à tête et à¨queuë. -
Io-
A VRIL, 1732. 73
§. 1. Longueur du Casseau et du Bureau. ·
Premier Montant de 9 lignes ,-
30 Logètes , à 25 lignes ,
30 fois le jeu ou l'aisance des Cartes mises dans la Logète, à deux lignes par Logè- te ,
3
9ligne
62 pouc. 6
S
29 petits Montans à lign. 7
Dernier Montant, de 9 lignes ,
Ajoutant 2 pouces à
fa longueur du Casseau
pour l'excedant des ex- trémitez de la Table qui
retiennent et qui ferment
ce Casseau , vous trouverez pour toute la longueur de la Table ,
>
39
76 pouces 3 lign.
ou 6 piés, 4 pouces , lignes.
6 pieds , 6 pouc. 3. lign
§. 2. Hauteur ou largeur du Casseau.
Six rangs de Logêtes par coIone , à 18 lignes , le vuide ou
la hauteur d'une Logète font 9 pouc.
Sept traverses , à9 lignes shacune ,
3 lign.
14 pouc.3
S. 3.
736 MERCURE DE FRANCE
S. 3. Epaisseur ou profondeur du Casseau.
Longueur de la Carte pour
la Logète ,
L'aisance ou l'excedant de
chaque Logète ,
Epaisseur du Bois du derricre ou du fond du Casseau,
Epaisseur de la Tringle qui sert de rebord à la petite partie de la Table , et qui retient la Casseau ,
Epaisseur de la grande partie de la Table qui sert à fer- mer le Casseau ,
3 pouc. lignes .
s pouc. -2 lignes,
Pour fermer le Bureau on ferre les deux piéees de la Table avec trois Fiches ou trois Couplets ; on met un Crochet sur le premier et le
dernier Montant , et un Piton à vis sur chaque
console aux extrêmitez de la Table.
On met aussi une Serrure plate au milieu de
la Table fermée , et son Moraillon au milieu de
la plus haute traverse. Voilà , Monsieur, les nouvelles dimensions du Bureau Typografique ; je
vous prie au surplus d'user toujours de votre
indulgence à mon égard , et de vouloir bien me
pardonner les fautes de langage , et d'expression
en faveur des sentimens et des intentions que
vous me connoissez pour le bien litteraire du public , et pour la premiere institution des enfans
qui font la partie la plus chere , la plus aimable
et la plus innocente du genre humain. J'ai l'honneur d'être , Monsieur , &c.-
logètes chacun, et d'une Table brisée en s
deux parties inégales , dont la petite sert
d'appui au Casseau , et l'autre sert à le
fermer.
A l'exemple des Imprimeurs , on appelle Cas seau
734 MERCURE DE FRANCE
seau une Caisse, divisée en petits compartimens our
Cassetins , dans lesquels on tient les Lettres nécessaires pour imprimer. Les Casseaux des Imprimeries sont à plat ou inclinez pour la commodité des Compositeurs , et le Casseau du Bureau est appuyé perpendiculairement et en forme
de Colombier contre la tringle du derriere de la
plus petite et la plus courte partie de la Table, où
on le retient par deux Crochets et deux Pitons à
vis. Ce Casseau est composé ainsi qu'il a été
dit de six rangs de Logètes , trente pour chacun,
-de sorte qu'il y a les deux montans extrêmes , de
l'épaisseur de ces traverses , et 29 petits montans
qui séparent et divisent les 30 Logètes de chaque
rang. Onpeut faire les petits montans d'une ou
de plusieurs pieces , mais la maniere la plus solide et la plus propre c'est de donner à chaque Logète son petit montant de séparation , entaillé
dans ses deux traverses , et ainsi au lieu de 29 petits montans d'une piéce , il y en aura 6 fois 29,
ou 174. Ceux qui voudront des Casseaux plus
courts , pourront faire faire de petites Cartes et
des Montans de fer blanc à leur fantaisie , et à
proportion du lieu qu'ils destineront à cette ma- chine.
Les dimensions du Bureau Typographique
doivent donc se regler sur les dimensions des
Cartes à jouer et des caracteres à jour dont on
veut se servir pour imprimer les Etiquettes sur
les traverses , au bas de chaque Cassetin. Les Cartes de Paris ont environ 25 lignes de largeur, sur
38 lignes de longueur , et je suppose icy, des caracteres de 8 lignes de hauteur pour les Capitales et pour les Lettres à tête et à¨queuë. -
Io-
A VRIL, 1732. 73
§. 1. Longueur du Casseau et du Bureau. ·
Premier Montant de 9 lignes ,-
30 Logètes , à 25 lignes ,
30 fois le jeu ou l'aisance des Cartes mises dans la Logète, à deux lignes par Logè- te ,
3
9ligne
62 pouc. 6
S
29 petits Montans à lign. 7
Dernier Montant, de 9 lignes ,
Ajoutant 2 pouces à
fa longueur du Casseau
pour l'excedant des ex- trémitez de la Table qui
retiennent et qui ferment
ce Casseau , vous trouverez pour toute la longueur de la Table ,
>
39
76 pouces 3 lign.
ou 6 piés, 4 pouces , lignes.
6 pieds , 6 pouc. 3. lign
§. 2. Hauteur ou largeur du Casseau.
Six rangs de Logêtes par coIone , à 18 lignes , le vuide ou
la hauteur d'une Logète font 9 pouc.
Sept traverses , à9 lignes shacune ,
3 lign.
14 pouc.3
S. 3.
736 MERCURE DE FRANCE
S. 3. Epaisseur ou profondeur du Casseau.
Longueur de la Carte pour
la Logète ,
L'aisance ou l'excedant de
chaque Logète ,
Epaisseur du Bois du derricre ou du fond du Casseau,
Epaisseur de la Tringle qui sert de rebord à la petite partie de la Table , et qui retient la Casseau ,
Epaisseur de la grande partie de la Table qui sert à fer- mer le Casseau ,
3 pouc. lignes .
s pouc. -2 lignes,
Pour fermer le Bureau on ferre les deux piéees de la Table avec trois Fiches ou trois Couplets ; on met un Crochet sur le premier et le
dernier Montant , et un Piton à vis sur chaque
console aux extrêmitez de la Table.
On met aussi une Serrure plate au milieu de
la Table fermée , et son Moraillon au milieu de
la plus haute traverse. Voilà , Monsieur, les nouvelles dimensions du Bureau Typografique ; je
vous prie au surplus d'user toujours de votre
indulgence à mon égard , et de vouloir bien me
pardonner les fautes de langage , et d'expression
en faveur des sentimens et des intentions que
vous me connoissez pour le bien litteraire du public , et pour la premiere institution des enfans
qui font la partie la plus chere , la plus aimable
et la plus innocente du genre humain. J'ai l'honneur d'être , Monsieur , &c.-
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Résumé : Dimension du Bureau Typografique , composé d'un Casseau de six rangs , de trente logètes chacun, et d'une Table brisée en deux parties inégales, dont la petite sert d'appui au Casseau , et l'autre sert à le fermer.
Le texte décrit la structure et les dimensions d'un Bureau Typographique, utilisé pour l'impression. Ce bureau comprend un Casseau, une caisse divisée en compartiments appelés Logètes, où sont rangées les lettres nécessaires à l'impression. Le Casseau est composé de six rangs de trente Logètes chacun, soit un total de 180 Logètes. Les dimensions du Casseau sont précisées : la longueur totale de la Table est de 6 pieds, 4 pouces et 6 lignes, et la hauteur ou largeur du Casseau est de 9 pouces. L'épaisseur ou profondeur du Casseau est déterminée par la longueur de la Carte, l'aisance des Logètes, et l'épaisseur du bois. Le Bureau est fermé par deux parties de la Table, maintenues par des Crochets, des Pitons à vis et une Serrure plate. Les dimensions du Bureau doivent être adaptées aux Cartes à jouer et aux caractères utilisés pour imprimer les étiquettes sur les traverses des Logètes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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17
p. 737
Enigmes, Logogryphes, &c. [titre d'après la table]
Début :
Les mots de l'Enigme et des Logogryphes du mois [...]
Mots clefs :
Palais, Pépin, Montferrat, Balance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Enigmes, Logogryphes, &c. [titre d'après la table]
Les mots de l'Enigme et des Logogry.
phes du mois de Mars sont Palais , Pepin,
Montferrat , Balance.
phes du mois de Mars sont Palais , Pepin,
Montferrat , Balance.
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18
p. 737-738
ENIGME.
Début :
De mes soeurs je suis la derniere, [...]
Mots clefs :
Lettre Z
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
DE mes sœurs je suis la derniere ,
Nous sommes deux fois douze , un homme ess
notre pere ;
Son nom , je ne m'en souviens pas ;
Pour me reconnoître , en tout cas ,
Ce nom n'est pas bien necessaire.
J'avoue ici de bonne foy ,
Que de rire à chacun je fais naître l'envie ;
Car un Nain, un Pigmée à taille mal polic ,
De le railler , si l'on a la manie 9
On dit qu'il est fait comme moi.
Quoiqu'il en soit , j'ai sçû me couronner de
gloire ,
En me trouvant toûjours dans les hazards.
Je m'offre aux yeux de toutes parts ;
Et (ce qu'on aura peine à croire )
Je ne suis point dans l'eau , dans le feu , dans les
Airs ,
Ni même dans tout l'Univers.
Je vais pourtant, et sans me contredire ,
Vous
738 MERCURE DE FRANCE
Vous dire où l'on peut me trouver ;
C'est toujours avec le Zéphire ,
Au Zodiaque encor... Fort bien , allez vous dire
Je n'rrai pas vous y chercher.
Par M. V.J. A. Ľ.
DE mes sœurs je suis la derniere ,
Nous sommes deux fois douze , un homme ess
notre pere ;
Son nom , je ne m'en souviens pas ;
Pour me reconnoître , en tout cas ,
Ce nom n'est pas bien necessaire.
J'avoue ici de bonne foy ,
Que de rire à chacun je fais naître l'envie ;
Car un Nain, un Pigmée à taille mal polic ,
De le railler , si l'on a la manie 9
On dit qu'il est fait comme moi.
Quoiqu'il en soit , j'ai sçû me couronner de
gloire ,
En me trouvant toûjours dans les hazards.
Je m'offre aux yeux de toutes parts ;
Et (ce qu'on aura peine à croire )
Je ne suis point dans l'eau , dans le feu , dans les
Airs ,
Ni même dans tout l'Univers.
Je vais pourtant, et sans me contredire ,
Vous
738 MERCURE DE FRANCE
Vous dire où l'on peut me trouver ;
C'est toujours avec le Zéphire ,
Au Zodiaque encor... Fort bien , allez vous dire
Je n'rrai pas vous y chercher.
Par M. V.J. A. Ľ.
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19
p. 738
SECONDE ENIGME.
Début :
Mon origine est incertaine, [...]
Mots clefs :
Boussole
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SECONDE ENIGME.
SECONDE ENIGME.
Monorigine est incertaine ,
Mais on me dit communément ,
Ou Chinoise ou Napolitaine.
Je navige très-fréquemment ,
Et l'Empire affreux de Neptune ,
Que mon sexe a tant en horreur ,
Ne m'inspire point de terreur ;
Quand l'homme y va chercher fortune,
Il ne l'entreprend pas sans moi;
Sans moi , foible est son esperance.
Je possede sa confiance ,
Sans que je devine pourquoi ;
Car chez moi ce n'est qu'inconstance
Que foiblesse et fragilité ;
Souvent une vivacité ,
Qu'on prendroit pour extravagance.
A me consulter empressé,
Malgré ces deffauts , plus d'un sage ,
Atrès- souvent eu l'avantage ,
De 'se voir par moi redressé.
P.D. F. de Granville , en Normandie.
Monorigine est incertaine ,
Mais on me dit communément ,
Ou Chinoise ou Napolitaine.
Je navige très-fréquemment ,
Et l'Empire affreux de Neptune ,
Que mon sexe a tant en horreur ,
Ne m'inspire point de terreur ;
Quand l'homme y va chercher fortune,
Il ne l'entreprend pas sans moi;
Sans moi , foible est son esperance.
Je possede sa confiance ,
Sans que je devine pourquoi ;
Car chez moi ce n'est qu'inconstance
Que foiblesse et fragilité ;
Souvent une vivacité ,
Qu'on prendroit pour extravagance.
A me consulter empressé,
Malgré ces deffauts , plus d'un sage ,
Atrès- souvent eu l'avantage ,
De 'se voir par moi redressé.
P.D. F. de Granville , en Normandie.
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20
p. 739
LOGOGRIPHE.
Début :
Vous allez voir à l'instant qui je suis, [...]
Mots clefs :
Pavé
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LOGOGRIPHE.
LOGOGRIPHE.
Ous allez voir à l'instant qui je suis,
Puisque mon gîte est dans la rue;
Ma tête à bas , je vous saluë.
Dès que mon chefsera remis ,
Si vous retranchez ma finale,
Je serai Ville Capitale.
Que ledit membre retranché,
Soit à present après mon chef niché,
Lecteur , alors je vous suis chose chere.
Qu'en cet état , je sois encor décapité ,
Je soutiens avec verité ,
Qu'au corps humain je suis très necessaire.
Ous allez voir à l'instant qui je suis,
Puisque mon gîte est dans la rue;
Ma tête à bas , je vous saluë.
Dès que mon chefsera remis ,
Si vous retranchez ma finale,
Je serai Ville Capitale.
Que ledit membre retranché,
Soit à present après mon chef niché,
Lecteur , alors je vous suis chose chere.
Qu'en cet état , je sois encor décapité ,
Je soutiens avec verité ,
Qu'au corps humain je suis très necessaire.
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21
p. 739-741
SECOND LOGOGRYPHE.
Début :
Sept Lettres composent mon nom ; [...]
Mots clefs :
Crochet
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SECOND LOGOGRYPHE.
ECOND LOGOGRYPHE.
SeptLettres composent mon nom ;
Je suis d'une obscure naissance ;
Je vis sans gloire et sans renoms
Mais du sein de mon abondance ,
Avec l'aide du chiffre , un Lecteur curieux,
Pourra facilement tirer des noms fameux.
Cinq, six , un, sept , trois , deux, je passe dans l'Histoire
Pour un vaillant Héros , plein de force et de
gloire.
Quatre
740 MERCURE DE FRANCE
Quatre , cinq, six et deux, me rendent toûjours
..cher.
Un, trois , quatre , cinq , six , je sers pour le
voyage;
Mais il faut , pour me voir marcher ,
Ajouter à ma queue un nombre davantage ;
Cinq , trois , sept , six , tantôt je suis vil instru→
ment ,
Et tantôt je reçois le monde poliment.
Mes extrémes coupez , le timide Pilote ,
Craint ma rencontre avec raison.
Mon dernier membre ôté , je fais hater la note.
Quatre , trois , deux , le chien connoît mon son.
Quatre, cinq, trois et un , j'ai l'humeur martiale.
Et je réduis souvent un Guerrier aux abois.
Six et trois , je n'ai que la voix.
Cinq , trois , un, je suis bas , et sens un peu la
Hale.
Quatre , trois , sept et six , le Sexe feminin ,
De moi tire son origine.
Sept , cinq et six , on me prend le matin.
Sous differens états j'habite la Cuisine ;
Quatre , deux, trois et un , d'une étrange ma
niere ,
De m'y prendre on se fait unjeu.
Deux, trois et sept , une maia meurtriere;
M'y fait passer par le fer et le feu.
Retranchant mon membre premier ,
J'accompagne toujours un Evêque à l'Eglise.
Ajoutant
AVRIL. 17327 741
Ajoûtant mon membre dernier ,
A deux , trois , un , je suis utile en marchandise.
Six, un, trois , sept , au Cabaret ,
On me trouve toujours à la fin de la table ,
Deux , trois et sept , je rends un son desagréable.
Je finis ; si tu peux , devine mon secret.
Parun Ecclesiastique de Senlis.
SeptLettres composent mon nom ;
Je suis d'une obscure naissance ;
Je vis sans gloire et sans renoms
Mais du sein de mon abondance ,
Avec l'aide du chiffre , un Lecteur curieux,
Pourra facilement tirer des noms fameux.
Cinq, six , un, sept , trois , deux, je passe dans l'Histoire
Pour un vaillant Héros , plein de force et de
gloire.
Quatre
740 MERCURE DE FRANCE
Quatre , cinq, six et deux, me rendent toûjours
..cher.
Un, trois , quatre , cinq , six , je sers pour le
voyage;
Mais il faut , pour me voir marcher ,
Ajouter à ma queue un nombre davantage ;
Cinq , trois , sept , six , tantôt je suis vil instru→
ment ,
Et tantôt je reçois le monde poliment.
Mes extrémes coupez , le timide Pilote ,
Craint ma rencontre avec raison.
Mon dernier membre ôté , je fais hater la note.
Quatre , trois , deux , le chien connoît mon son.
Quatre, cinq, trois et un , j'ai l'humeur martiale.
Et je réduis souvent un Guerrier aux abois.
Six et trois , je n'ai que la voix.
Cinq , trois , un, je suis bas , et sens un peu la
Hale.
Quatre , trois , sept et six , le Sexe feminin ,
De moi tire son origine.
Sept , cinq et six , on me prend le matin.
Sous differens états j'habite la Cuisine ;
Quatre , deux, trois et un , d'une étrange ma
niere ,
De m'y prendre on se fait unjeu.
Deux, trois et sept , une maia meurtriere;
M'y fait passer par le fer et le feu.
Retranchant mon membre premier ,
J'accompagne toujours un Evêque à l'Eglise.
Ajoutant
AVRIL. 17327 741
Ajoûtant mon membre dernier ,
A deux , trois , un , je suis utile en marchandise.
Six, un, trois , sept , au Cabaret ,
On me trouve toujours à la fin de la table ,
Deux , trois et sept , je rends un son desagréable.
Je finis ; si tu peux , devine mon secret.
Parun Ecclesiastique de Senlis.
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