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1
p. 234-240
AVIS.
Début :
Pour la comodité du public, on a divisé le bureau tipographique en quatre classes qui pourront [...]
Mots clefs :
Bureau typographique, Classes, Lettres, Exemplaire, Ordre abécédaire, Leçons, Méthodes vulgaires, Bibliothèque des enfants
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texteReconnaissance textuelle : AVIS.
AVIS.
la comodité du public , on a divisé le
bureau tipografique en quatre classes qui pouront
ètre vendues et achetées séparément , et les
unes après les autres à mesure que l'enfant croitra
en age et en conoissance.
La premiere classe contient 1 °. une table sans
pié , avec ses rebors dans les deus extremités , er
la tringle ou la regle du derriere sur laquelle on a
imprimé les grandes et les petites lètres dans l'ordre
abécédique , ainsi qu'il a été dit en parlant du
premier bureau tipografique pour un enfant de
deus à trois ans. 2 °. Deus jeus de cartes élémentaires
, c'est- à-dire au dos desquelles on a mis
les grandes et les petites lètres que l'enfant aprend
a. ranger vis-à-vis cèles de la regle sur la table
de ce premier bureau. 3 °. Deus petits cartons élémentaires
contenant huit leçons abécédiques , et
le vrai nom ou la vraiè dénomination des lètres
dans
FEVRIER . 235 1731.
dans un ordre nouveau métodique et facile.
4. Là feuille élémentaire des mèmes combinai
sons et en placard pour le segond exemplaire.
5. Une planche gravée pour le plan des quatre
classes , et du dictionaire du bureau tipografique.
6. une brochure de neuf feuilles sur la
bibliotèque des enfans , etc. et pour l'instruction
préliminaire touchant la métode du bureau tipografique.
7. une cassète de gros cartón , renforcée
de parchemin à tous les angles exterieurs ,
bordés de papier de couleur , et couverte des huir
leçons de la feuille élémentaire. cette cassète sert
à tenir le petit atirail literaire qui doit servir d'a
musement instructif à un enfant de deus à trois:
ans ou au - dessus de cer age. Le tout ne coutera
que
la some de dis livres.
La segonde classe consiste , 1 ° . en une table
sans pié , un peu plus large que celle de la premiere
classe. 2 °. En un casseau de deus rans de cas--
setins. 3 °. En leurs étiquetes tipografiques au bas
de chaque logète pour indiquer l'espece des .
cartes que l'on doit tenir dans ces mèmes logètes.
4. En une garniture de cartes imprimées
pour l'atirail des soissantes logètes , et le tout pour
le pris de vint livres . on rabatra quatre francs à
ceus qui rendront la table de la premiere classe
desorte que la segonde ne leur reviendra qu'à scise:
livres.
La troisieme classe comprend , 1. une table
sans pié. 2 ° . un casseau de quatre rans de logè..
tés ou de cent-vint cassetins. 3. Leurs étiquetes.
tipografiques au bas de chaque celule pour indiquer
les cartes qu'on y doit tenir. 4° . La garniture
des cartes imprimées pour les 120. cassetins:
contenant les grandes et les petites lètres de la
segonde classe , plus les sons simples et compo
sés , les chifres , et tous les signes nécessaires pour
imprimer du latin er du françois sur la table du
B vj
bureau
236 MERCURE DE FRANCE
bureau ; le tout pour la some de
quarante livres , et
l'on rabatra vint francs à ceus qui rendront le bu
reau de la deusième classe , ainsi celui de la
troisième ne leur reviendra qu'à vint livres.
D
La quatrième classe comprend , r . une table
brisée et ferrée , sans pié . 2 ° . Un casseau de sis
rans de cassetins , c'est-à- dire , les quatre rans de.
la troisiéme classe , et les deus rans du rudiment.
pratique. 3º . Les etiquètes de 180. celules. 4
L'assortiment necessaire pour garnir les quatre
rans de l'imprimerie, et les deus rans du rudiment:
pratique de la langue françoise et de la langue latine,
ainsi qu'on l'a détaillé dans la sètiéme lètre
de la bibliotèque des enfans , et cela pour le pris
de quatre-vint dis livres , sur lesquèles on rabatra.
quarante livres aus persones qui rendront le bu
reau de la troisième classe , de sorte que celui de
la quatrième ne leur reviendra qu'à so. livres.
Ceus qui voudront le bureau complet avec un
pié pour la table brisée , ferrée et fermant à clé
doneront une pistole de plus , c'est -à- dire en tout
cent francs ou soissante livres en rendant le bureau.
de la troisième classe ou de quarante livres.
NM le grammairien de Ventabrèn en Provence
, trouvera pour son instruction dans le
Mercure du mois prochain, la critique d'un Professeur
anonime de l'Université de Paris, ennemi
déclaré de la metode du bureau tipografique , et:
fameus champion des métodes vulgaires : en atendant
la réponse à ces deus critiques , le grammairien
est, prié de lire les sis dernieres lètres
sur la bibliotèqu des enfans inserées dans les
Mercures depuis le mois d'octobre dernier jusqu'au
present mois de fevrier. On se flate que
cète ètre radoucira un peu les, adversaires du
bureau tipografique, du moins ceus qui sans prévention
n'agiront que de bone foi et dans la
soule vue du bien public, sur lequel influra ton
jours lapremiere éducation des enfans.
FEVRIER.
173.1. 237
§. 13. A BC FRANÇOIS- LATIN..
Carac- Noms vul. Nomséfectifs ,
teres . gaires et valeur réele.
Figures. souvert veritable
Signes. faus , équi- dénomination
Letres. voques ou
captieus.
Exemplest
A.. a..
B.. b.
a.
be.
ce. C. c.
D. d. de.
E. e.
هن
a.
be.
de.
ce-ka- qu.
c muet.
é fermé.
è ouvert.
Aaron.
bombe.
cecrops.
ode:
juste.
bonté.
procès.
F. f.
effe..
fe. vif.
G.
g. ge. ge-ga-gu.
H. h. ache. he.
gigot.
héros.
I. i. i. i. if.
J. j. j. consone. je -ja .
K. k. Ka, ka-qu.
L. 1. elle. le.
jauge.
quiconque
seul.
M m. emme . me. ame,
N. n. enne. ne. mine.
O. o.
P. P
Q.
q.
R. r.
pe.
qu .
erre
0. 0.
coq..
pe.
qu-ka.
Gap.
quand.
re.
S. f. esse. se- ze.
rire.
Suson.
T. t. t. te- ci.. intention.
U. u. u. u. busc.
V. v. V. consone. ve. vive .
X. X. icse. kse-gze. axe. exil.
Y.
Y. y. grec.
i-ïe.
ny. payen
Z. z. zede . ze -ce.. zést . Usez...
EL & Cle &-et etc. et lui.
Letra
238 MERCURE DE FRANCE
Letres. Noms
vulgaires.
a. a.
e.
Noms Exem
éfectifs.
a . Bala.
e muet. vie.
§.14. TRENTE -DEUS SONS DELA LANGUE FRANÇOISE .
18. sons avec les consones françoises ,
J
1.vfo4ry.aenlçeosises
-V
amouillés 4liquides .12. sons ,6.forts ,6.forbles .s.voyeles naz .9.ordinaires .
i..
éfermé. clarté.
è ouvert
. accès.
Isaïe.
mot. Οι
u. u. une./
eu.se ,
ou. O ,
ü. cu . feu.
ü.. ou. cou.
ajenneja,titre.a.
é, enne;e , titre.é.
i, ennesi, titre.ĩ.
o,enne;o,titre.o.
u,enne;u,titre.ú.
tát.
bié
igrat.
pot.
"
ludi..
d .
come dans l'ABC'françoislatin..
BASEÒN BOX NATÉ
ch. ce , ache. che. chiche
come dans l'AB C. françoislatin.
三晶
ill. i , elle, elle. lhe paille
gn. ( g , enne .. gne, vigne
FEVRIER. 1731. 2397
S. 15. ABC PRONONCE'.
Initial Médial. Final
i.
1..
n.
P
ASJIJE BCAA62
abé,. téatre. Goá.
b. benir. Abel. Raab
cerise. recevoir. croc.
d..
dépit.
élant.
femele.
perdreaus jod
javelot. poste
rafle.. vif.
géất , gai. regard. Agag..
heron.
idée..
j. jujube.
k. kiriele .
Chathuant. ah !
élire . ni.
rejouir.
alkali . talk.
levreau: Alexis. bal.
m.. Mnemosine. Homere. Sem.
Nevers. anerie. Himen.
ognoi. adorer. Cacao.
pelican. adopter. Cap.
q: queue. aquerir. coq.
r. renard.
perdris. mer.
S. saucisse. Samson. as.
t. teton. rectitude. brut.
u. Uranic. chathuant. cocu.
V. Venus. revenir. verve..
X. Xénophon. Alexandre. styx .
y..
Z.
yeus. moyen. Henry.
Zenon. azile. dez à joue
eu. heureus.. demeure. jeu.
1
ou. ouaille.
jalousie.
hibou.
ch . cheval. acheter. hache.
gn. gniole. magnifique. regne.
ill. ailleurs. paille.
oi. oie. envoyé. \ loi.
ui. huile. reduire. lui.
ã. ange, enfance, an.
240 MERCURE DE FRANCE
ĕ. chrétienté. mien.
i. ingrat.
distincte.. vin.
ö. onde.
répondre.
thon .
Hun. lundi. brun.
&t. Ctesias. arctique. aspect.
ft. stile. histoire.
protest.
6. 16 . A B C MUET.
Initial Medial. Final
2. Août. Saone.
b. debte.
plomb.
Jacques .
banc.
d.
advis. nord.
Europe.
nuement. vie.
£. juifve . cléf
Magdelaine. loing.
habit. Jehan.
i.
gaigner..
j.
k. } nul exemple.
1. tiltre. baril.
m.
n.
commode, Montcalm
donner.
Θα oeconome.. choeur.
P. ptisane. baptême. camp.
coqdinde. cocq .
arriver. monsieur.
asne.
paradis.
chathuant .
vuide.
r.
S..
t.
u..
v, &c. nul exemple.
,
& , ét.
Voilà ce que j'avois à dire touchant l'essai de
Portografe passagère , et sur la métode du bureau
tipografique. Il faut apresent se mètre en garde
et songer à parer les coups que l'ignorance , la
prévention et peut -ètrel'envie ou la mauvaise for
méditent de porter contre la nouveauté , la simplicité
et l'utilité decète métode. J'ai l'honeur.etc.
la comodité du public , on a divisé le
bureau tipografique en quatre classes qui pouront
ètre vendues et achetées séparément , et les
unes après les autres à mesure que l'enfant croitra
en age et en conoissance.
La premiere classe contient 1 °. une table sans
pié , avec ses rebors dans les deus extremités , er
la tringle ou la regle du derriere sur laquelle on a
imprimé les grandes et les petites lètres dans l'ordre
abécédique , ainsi qu'il a été dit en parlant du
premier bureau tipografique pour un enfant de
deus à trois ans. 2 °. Deus jeus de cartes élémentaires
, c'est- à-dire au dos desquelles on a mis
les grandes et les petites lètres que l'enfant aprend
a. ranger vis-à-vis cèles de la regle sur la table
de ce premier bureau. 3 °. Deus petits cartons élémentaires
contenant huit leçons abécédiques , et
le vrai nom ou la vraiè dénomination des lètres
dans
FEVRIER . 235 1731.
dans un ordre nouveau métodique et facile.
4. Là feuille élémentaire des mèmes combinai
sons et en placard pour le segond exemplaire.
5. Une planche gravée pour le plan des quatre
classes , et du dictionaire du bureau tipografique.
6. une brochure de neuf feuilles sur la
bibliotèque des enfans , etc. et pour l'instruction
préliminaire touchant la métode du bureau tipografique.
7. une cassète de gros cartón , renforcée
de parchemin à tous les angles exterieurs ,
bordés de papier de couleur , et couverte des huir
leçons de la feuille élémentaire. cette cassète sert
à tenir le petit atirail literaire qui doit servir d'a
musement instructif à un enfant de deus à trois:
ans ou au - dessus de cer age. Le tout ne coutera
que
la some de dis livres.
La segonde classe consiste , 1 ° . en une table
sans pié , un peu plus large que celle de la premiere
classe. 2 °. En un casseau de deus rans de cas--
setins. 3 °. En leurs étiquetes tipografiques au bas
de chaque logète pour indiquer l'espece des .
cartes que l'on doit tenir dans ces mèmes logètes.
4. En une garniture de cartes imprimées
pour l'atirail des soissantes logètes , et le tout pour
le pris de vint livres . on rabatra quatre francs à
ceus qui rendront la table de la premiere classe
desorte que la segonde ne leur reviendra qu'à scise:
livres.
La troisieme classe comprend , 1. une table
sans pié. 2 ° . un casseau de quatre rans de logè..
tés ou de cent-vint cassetins. 3. Leurs étiquetes.
tipografiques au bas de chaque celule pour indiquer
les cartes qu'on y doit tenir. 4° . La garniture
des cartes imprimées pour les 120. cassetins:
contenant les grandes et les petites lètres de la
segonde classe , plus les sons simples et compo
sés , les chifres , et tous les signes nécessaires pour
imprimer du latin er du françois sur la table du
B vj
bureau
236 MERCURE DE FRANCE
bureau ; le tout pour la some de
quarante livres , et
l'on rabatra vint francs à ceus qui rendront le bu
reau de la deusième classe , ainsi celui de la
troisième ne leur reviendra qu'à vint livres.
D
La quatrième classe comprend , r . une table
brisée et ferrée , sans pié . 2 ° . Un casseau de sis
rans de cassetins , c'est-à- dire , les quatre rans de.
la troisiéme classe , et les deus rans du rudiment.
pratique. 3º . Les etiquètes de 180. celules. 4
L'assortiment necessaire pour garnir les quatre
rans de l'imprimerie, et les deus rans du rudiment:
pratique de la langue françoise et de la langue latine,
ainsi qu'on l'a détaillé dans la sètiéme lètre
de la bibliotèque des enfans , et cela pour le pris
de quatre-vint dis livres , sur lesquèles on rabatra.
quarante livres aus persones qui rendront le bu
reau de la troisième classe , de sorte que celui de
la quatrième ne leur reviendra qu'à so. livres.
Ceus qui voudront le bureau complet avec un
pié pour la table brisée , ferrée et fermant à clé
doneront une pistole de plus , c'est -à- dire en tout
cent francs ou soissante livres en rendant le bureau.
de la troisième classe ou de quarante livres.
NM le grammairien de Ventabrèn en Provence
, trouvera pour son instruction dans le
Mercure du mois prochain, la critique d'un Professeur
anonime de l'Université de Paris, ennemi
déclaré de la metode du bureau tipografique , et:
fameus champion des métodes vulgaires : en atendant
la réponse à ces deus critiques , le grammairien
est, prié de lire les sis dernieres lètres
sur la bibliotèqu des enfans inserées dans les
Mercures depuis le mois d'octobre dernier jusqu'au
present mois de fevrier. On se flate que
cète ètre radoucira un peu les, adversaires du
bureau tipografique, du moins ceus qui sans prévention
n'agiront que de bone foi et dans la
soule vue du bien public, sur lequel influra ton
jours lapremiere éducation des enfans.
FEVRIER.
173.1. 237
§. 13. A BC FRANÇOIS- LATIN..
Carac- Noms vul. Nomséfectifs ,
teres . gaires et valeur réele.
Figures. souvert veritable
Signes. faus , équi- dénomination
Letres. voques ou
captieus.
Exemplest
A.. a..
B.. b.
a.
be.
ce. C. c.
D. d. de.
E. e.
هن
a.
be.
de.
ce-ka- qu.
c muet.
é fermé.
è ouvert.
Aaron.
bombe.
cecrops.
ode:
juste.
bonté.
procès.
F. f.
effe..
fe. vif.
G.
g. ge. ge-ga-gu.
H. h. ache. he.
gigot.
héros.
I. i. i. i. if.
J. j. j. consone. je -ja .
K. k. Ka, ka-qu.
L. 1. elle. le.
jauge.
quiconque
seul.
M m. emme . me. ame,
N. n. enne. ne. mine.
O. o.
P. P
Q.
q.
R. r.
pe.
qu .
erre
0. 0.
coq..
pe.
qu-ka.
Gap.
quand.
re.
S. f. esse. se- ze.
rire.
Suson.
T. t. t. te- ci.. intention.
U. u. u. u. busc.
V. v. V. consone. ve. vive .
X. X. icse. kse-gze. axe. exil.
Y.
Y. y. grec.
i-ïe.
ny. payen
Z. z. zede . ze -ce.. zést . Usez...
EL & Cle &-et etc. et lui.
Letra
238 MERCURE DE FRANCE
Letres. Noms
vulgaires.
a. a.
e.
Noms Exem
éfectifs.
a . Bala.
e muet. vie.
§.14. TRENTE -DEUS SONS DELA LANGUE FRANÇOISE .
18. sons avec les consones françoises ,
J
1.vfo4ry.aenlçeosises
-V
amouillés 4liquides .12. sons ,6.forts ,6.forbles .s.voyeles naz .9.ordinaires .
i..
éfermé. clarté.
è ouvert
. accès.
Isaïe.
mot. Οι
u. u. une./
eu.se ,
ou. O ,
ü. cu . feu.
ü.. ou. cou.
ajenneja,titre.a.
é, enne;e , titre.é.
i, ennesi, titre.ĩ.
o,enne;o,titre.o.
u,enne;u,titre.ú.
tát.
bié
igrat.
pot.
"
ludi..
d .
come dans l'ABC'françoislatin..
BASEÒN BOX NATÉ
ch. ce , ache. che. chiche
come dans l'AB C. françoislatin.
三晶
ill. i , elle, elle. lhe paille
gn. ( g , enne .. gne, vigne
FEVRIER. 1731. 2397
S. 15. ABC PRONONCE'.
Initial Médial. Final
i.
1..
n.
P
ASJIJE BCAA62
abé,. téatre. Goá.
b. benir. Abel. Raab
cerise. recevoir. croc.
d..
dépit.
élant.
femele.
perdreaus jod
javelot. poste
rafle.. vif.
géất , gai. regard. Agag..
heron.
idée..
j. jujube.
k. kiriele .
Chathuant. ah !
élire . ni.
rejouir.
alkali . talk.
levreau: Alexis. bal.
m.. Mnemosine. Homere. Sem.
Nevers. anerie. Himen.
ognoi. adorer. Cacao.
pelican. adopter. Cap.
q: queue. aquerir. coq.
r. renard.
perdris. mer.
S. saucisse. Samson. as.
t. teton. rectitude. brut.
u. Uranic. chathuant. cocu.
V. Venus. revenir. verve..
X. Xénophon. Alexandre. styx .
y..
Z.
yeus. moyen. Henry.
Zenon. azile. dez à joue
eu. heureus.. demeure. jeu.
1
ou. ouaille.
jalousie.
hibou.
ch . cheval. acheter. hache.
gn. gniole. magnifique. regne.
ill. ailleurs. paille.
oi. oie. envoyé. \ loi.
ui. huile. reduire. lui.
ã. ange, enfance, an.
240 MERCURE DE FRANCE
ĕ. chrétienté. mien.
i. ingrat.
distincte.. vin.
ö. onde.
répondre.
thon .
Hun. lundi. brun.
&t. Ctesias. arctique. aspect.
ft. stile. histoire.
protest.
6. 16 . A B C MUET.
Initial Medial. Final
2. Août. Saone.
b. debte.
plomb.
Jacques .
banc.
d.
advis. nord.
Europe.
nuement. vie.
£. juifve . cléf
Magdelaine. loing.
habit. Jehan.
i.
gaigner..
j.
k. } nul exemple.
1. tiltre. baril.
m.
n.
commode, Montcalm
donner.
Θα oeconome.. choeur.
P. ptisane. baptême. camp.
coqdinde. cocq .
arriver. monsieur.
asne.
paradis.
chathuant .
vuide.
r.
S..
t.
u..
v, &c. nul exemple.
,
& , ét.
Voilà ce que j'avois à dire touchant l'essai de
Portografe passagère , et sur la métode du bureau
tipografique. Il faut apresent se mètre en garde
et songer à parer les coups que l'ignorance , la
prévention et peut -ètrel'envie ou la mauvaise for
méditent de porter contre la nouveauté , la simplicité
et l'utilité decète métode. J'ai l'honeur.etc.
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Résumé : AVIS.
Le texte décrit une division du bureau typographique en quatre classes, destinées à être vendues et achetées séparément en fonction de l'âge de l'enfant. Chaque classe contient des éléments spécifiques pour l'apprentissage de la lecture et de l'écriture. La première classe, pour les enfants de deux à trois ans, inclut une table sans pied avec des lettres imprimées, des jeux de cartes élémentaires, des cartons contenant des leçons abécédiques, une feuille élémentaire, une planche gravée, une brochure sur la bibliothèque des enfants, et une cassette pour ranger le matériel. Le coût total est de dix livres. La deuxième classe comprend une table plus large, un casseau de deux rangs de cassetins, des étiquettes typographiques, et une garniture de cartes imprimées. Le prix est de vingt livres, avec une réduction de quatre francs pour ceux qui rendent la table de la première classe. La troisième classe inclut une table, un casseau de quatre rangs de cassetins, des étiquettes typographiques, et des cartes imprimées pour les cassetins. Le coût est de quarante livres, avec une réduction de vingt francs pour ceux qui rendent le bureau de la deuxième classe. La quatrième classe, la plus complète, comprend une table brisée et ferrée, un casseau de six rangs de cassetins, des étiquettes pour 180 cellules, et un assortiment nécessaire pour l'imprimerie et le rudiment pratique des langues française et latine. Le prix est de quatre-vingt-dix livres, avec une réduction de quarante livres pour ceux qui rendent le bureau de la troisième classe. Le texte mentionne également une critique d'un professeur anonyme de l'Université de Paris, adversaire de la méthode du bureau typographique. Il invite le grammairien de Ventabrèn à lire les lettres sur la bibliothèque des enfants pour se préparer à cette critique. Enfin, le texte liste les lettres de l'alphabet français et latin avec leurs noms vulgaires et effectifs, ainsi que des exemples de mots et des sons de la langue française.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 246-261
LETTRE d'un Professeur de l'Université de Paris à un Principal de College de Province, sur l'ABC DE CANDIAC, OU LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS, OU LES PREMIERS ELEMENS DES LETTRES, &c.
Début :
Vous voulez donc, Monsieur, que je vous dise mon sentiment sur cette nouvelle Méthode [...]
Mots clefs :
Bibliothèque des enfants, Université de Paris, Bureau typographique, Charlatans, Système abécédaire, Alphabet, Algèbre, Syntaxe
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE d'un Professeur de l'Université de Paris à un Principal de College de Province, sur l'ABC DE CANDIAC, OU LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS, OU LES PREMIERS ELEMENS DES LETTRES, &c.
LETTRE d'un Professeur de l'Univer
sité de Paris à un Principal de College
de Province , sur l'ABC DE CANDIAC,
OU LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS , ou
LES PREMIERS ELEMENS DES LETTRES, & C
Vous voulez donc , Monsieur, que jevous dise mon sentiment sur cette nouvelle Méthode
dont vous avez appris qu'on fait beaucoup
de bruit à Paris depuis environ six mois , que
quelques Principaux ont laissé introduire dans
deux ou trois celebres Colleges de l'Université
et sur laq le Mercure de France a fait imprimer
cinq Lettres dont la premiere est
du mois de Mai , et la cinquiéme du mois d'Octobre
de la presente année 1730.
J'avois cependant résolu de garder un silence
constant à l'égard de l'Anonime , Auteur de ce
nouveau sistême Abécedique , comme je l'ai gardé
à l'égard de tant d'autres Charlatans de la
menuë litterature , qui ont jugé plus à propos
de faire connoître leur nom au Public , en le
faisant imprimer au Frontispice de leurs Livres.
Mais les prieres réïterées que vous me faites , le
désir que j'ai d'empêcher , autant qu'il sera en
moi , plusieurs Enfans de famille , particulierement
ceux qui sont confiés à vos soins , d'être la
dupe de ce nouvel avanturier , l'occasion favorable
FEVRIER . 1731. 247
Table de venger l'insulte qu'il fait à tous les habiles
et honnêtes gens qui suivent une autre maniere
d'enseigner que la sienne , en les accusant
d'ignorance , d'injustice et de vanité ; tout cela
m'engage à parler malgré l'inclination que j'avois
à me taire.
Je vais donc faire trois choses. 1° J'expliquerai
la structure de son Bureau Tipographique , suivant
une Carte imprimée qui m'est tombée entre
les mains , sans quoi vous ne pouvez rien comprendre
non plus que bien d'autres à ce qui en
est dit dans le Mercure que vous avez lû. 2° Je
ferai voir qu'il est impossible d'enseigner et d'apprendre
bien aucune Langue et aucune Science
par le moyen de ce Bureau . 3 ° Qu'un bon Alphabet
est une Méthode au moins aussi facile
aussi courte , aussi avantageuse et bien plus
›
commode pour bien montrer à lire à un Enfant.
.
Figurez -vous donc d'abord , Monsieur , un
ouvrage de menuiserie en forme de Colombier
qu'on attache à un mur à la hauteur d'un Enfant
de 4. à 5. ans. Ce Colombier de bois est
coupé ou partagé en 210. petits ous , sept en
hauteur , et trente en longueur. in nteur de
cette belle piece de menuiserie les appelle tantôt
cassetins et cassetes , tantôt cellules et logetes . Un
de mes amis qui a lû les cinq Lettres sans en
comprendre ni la beauté ni l'utilité , soutient
qu'on devroit plutôt les appeller Boulins , puisque
toute la boisure se nomme Colombier.
Mais quelque nom qu'on veuille donner à ces
trous , il faut sçavoir qu'ils sont à peu près quarrés
selon les trois dimensions , et de telle grandeur
qu'un Enfant y peut faire entrer aisément
sa main. On met dans ces trous des cartes , sur
lesquelles sont écrites differentes choses, La premiere
rangée de 30. trous est posée sur la table
du
248 MERCURE DE FRANCE.
du Bureau , qui est au-dessous , et de la même
longueur ; elle est appellée par l'Auteur Premier
Bureau Abécedique , c'est - à -dire Alphabetique.
Les 26. premiers trous contiennent sur des
cartes les 24. lettres de l'Alphabet , tant petites
que majuscules , et l'j et l'v consonnes ; les 4 .
derniers sont pour l'E æ , l'E ∞ , &t , ff , ft
ch , ph , rh , th : on ne voit pas la raison pourquoi
on appelle premier ce Bureau Abécedique ,
puisqu'il n'y en a point de second qui porte ce
nom.
Quoiqu'il en soit , les deux rangées de trente
logettes ou boulins chacune , qui sont immédiatement
au dessus de la premiere , portent le nom
de Bureau Latin , qu'on auroit pû aussi bien ,
et même encore mieux , nommer Bureau Franfois
, puisque les 2. premieres logettes ne renferment
que les lettres de l'Alphabet , grandes et
petites , Romaines et Italiques , qui sont communes
au François aussi bien qu'au Latin , et que
les 4. suivantes sont pour les e ouverts et fermés
, qui sont propres seulement à la Langue
Françoise. Les 4. dernieres cellules sont destinées
à l'Histoire Sainte et Prophane , à la Géographie
et à la Fable. Vous connoissez donc déja
bien en détail le contenu des 90. premiers cassetins
compris dans les trois premieres rangées.
Montons présentement aux 120. qui nous restent
, et qui sont et dominent les uns sur les au
tres.
La quatrième et cinquiéme rangée porte le beau
titre de Bureau François - Latin , cependant on
ne trouve dans les 60. cellules qui le composent
rien qui soit particulier au Latin , si ce n'est la
Io et la 11. intitulées Tèmes à faire , Tèmes
faits. Voici les étiquetes des 58. autres : 1. à , à ,
2 bb , bb , la 3 , 4 , 7 , 12 , 16 contiennent c ,
>
FEVRIER. 1731. 249
mm ,
d , g , 1 , p doublés comme le b'en Romain et en
Italique. La 5 , 6 , 9 , 17 , 18 , 20 , 21 , 23 , 24
contiennent aussi en Romain et en Italique he ,
ph , hi , qu , rh , th , hu , xc , hy ; la 8. est intitulée
Magasin ; je ne sçais pas pourquoi. La 13
m ; la 14 ñ , nn ; la 15 eau , au ; la 19 ç ;
fç , ff , la 2 2 W , w
, W, vv ; la 25 Livrèt , au
dessus duquel mot il y a écrit 10 10 , et au dessous
15 15 ; cette cassete est aparemment un
reservoir de chifres . ) La 26 &c , & c ; la 27 ai ,
aient , oient ; la 28 æ
et ; la 29 S *
; la 30 contient trois signes
de l'Algebre , qui signifient le moins , le plus ,
l'égalité ; ils ont été mis là , sans doute , afin de
pouvoir faire accroire au Public que par le moyen
de ce Bureau on apprend les principes de l'Algebre
, comme tout le reste . Voilà la rangée inférieure
du prétendu Bureau François-Latin ;
voici la superieure.
J;
> oe , et ,
>
,
,
On trouve dans les I 2
? 3 4 , 6 , 8 et g
cellules les marques ou signes de ponctuation , ;
: .? ! ' apostrophe : les 5 , 7 , 10 , 12 , 13 , 14
et 15 renferment eu , gn , ch , ill , ui , oi , où en
Romain et en Italique. La 11 a les parentheses
( et les crochets [ ] . La 16 20 ã‚ẽ‚í‚õ ,
en Romain et en Italique ; la 21 30 les dix premiers
chiffres , soit Romains , soit Arabiques.
Les deux rangées superieures du Bureau Tipographique
qui sont chacune de 30. cellules comme
les autres portent,pour titreRudiment pratique de
la Langue Latine. C'est là ce qu'on regarde particulierement
comme un Chef- d'oeuvre d'invention
, qui est bien au- dessus de toutes les Méthodes
dont on s'est servi jusqu'à présent pour
enseigner le Latin. Voici néanmoins tout ce que
c'est dans les six premieres logettes de ces deux
dernieres rangées : on voit les cinq Déclinaisons
C latines
250 MERCURE DE FRANCE ,
>
>
as,
Latines a æ &c . les Pronoms latins et françois
ego , je , tu , tu , vous ; ille , il , elle , l'article
hic , ce , cette , ( on auroit du dire le Pronom
demonstratif; ) le Pronom relatif qui , qui , lequel
; les terminaisons , Pronoms , piam , re , les
termin . Noms orum , ibus . Les cinq logettes suivantes
, soit d'enhaut , soit d'enbas contiennent
le Présent , l'Imparfait , le Parfait , le Plusqueparfait
et le Futur , tant de l'Indicatif que du
Subjonctif des Verbes sum , amo , et aparemment
des trois autres Conjugaisons . Voilà déja 22 .
logettes bien marquées. Les deux suivantes sont
pour l'Impératif et l'Infinitif, esto , ama , esse .
amare. Les 25 et 26. pour les Gérondifs et Supins,
amando , amatu , et les Participes ans , ens,
Les 27 et 28 pour les terminaisons actives, o >
α amus , et les passives, or , aris , atur , amur.
Les 29 38. sont pour les Verbes Actifs , Passifs ,
Neutres , Irreguliers , Déponens , Communs
Substantifs , Vocatifs , Reciproques , Irreguliers
( qui sont ici marqués pour la seconde fois )
Defectueux , Impersonels. Les 39 et 40. sont
pour les terminaisons françoises des Verbes , er
des Noms et Pronoms. Les 41 et 42 pour les
Verbes Auxiliaires François. Les 43 et 44. pour
les Noms Substantifs et Articles françois. Les
45 et 46. pour les Adjectifs , Positifs , Comparatifs
et Superlatifs . Les 47 et 48. pour les Pronoms
demonstratifs et Possessifs . Les 49 et 50. pour
les Verbes François et Particules Françoises. Les
51 et 52. pour les Indéclinables in , úbi , vel ,
et autres aparemment. Les 53 et 54. pour les
genres hic homo. Les 55 et 56. pour les Déclinaisons
homo inis. Les 57 et 58. pour les
Conjugaisons amo , avi Atum are. Enfin les
59 et 60. po la Syntaxe , ego amo Deum.
Je ne dou point que cette énumeration des
>
>
logettes
FEVRIER. 17310
251
logettes et de ce qui y est contenu , ne vous ait
fort ennuyé ; je vous en demande pardon ; mais
j'en avois besoin pour prouver la deuxième proposition
que j'avois avancée. Je dis donc en second
lieu que par cette machine de bois en Colombier
, et par tous les Boulins et toutes les lo
gettes dont elle est composée , aucune Langue
ni aucune Science ne peut être bien enseignée
et bien apprise , quoiqu'en disent ses inventeurs
ou ses approbateurs.
Faut-il se mettre en frais pour le prouver , et
n'est-il pas évident à quiconque a du bon sens
que ni la Philosophie , ni la Rhétorique , ni la
Poëtique , ni les Auteurs Grecs et Latins , même
les plus faciles , qu'on fait expliquer dans les
plus basses Classes des Colleges , n'entreront ja
mais dans la tête d'un enfant à l'aide de cette
pure méchanique. Que dis- je ? il est même impossible
d'apprendre à écrire par ce moyen ; aussi
nos bonnes gens paroissent - ils avoir entierement
renoncé d'eux -mêmes à toutes ces connoissances
, puisqu'ils n'y ont pas même consacré une
seule petite logette.
>
Mais du moins diront- ils on apprendra
P'Histoire Sainte et Prophane , la Géographie er
la Fable ; car elles ont chacune leur cellule , qui
sont les quatre dernieres du Bureau Latin.
A cela je réponds qu'on les apprendra à peu
près comme l'Arithmétique et l'Algebre , ausquelles
sont destinées les 25 et 30. logettes de
la deuxième rangée du Bureau François- Latin ;
c'est-à-dire , que quelques Noms propres d'Empereurs
et de Rois , de grands Royaumes et de
grandes Villes , tirés des cellules où on les met-
, pourront entrer et rester dans la mémoire
de l'enfant , s'il en a , et si on a coin de lui rebatre
plusieurs fois la même che Or c'est un
tra
C avanta
252 MERCURE DE FRANCE
avantage qu'on trouvera pour le moins aussi grand
dans quelque Méthode que ce soit , si tout est égal,
soit de la part de l'enfant , soit de celle du Maître
, à moins qu'on ne veuille croire , comme le
croyent, sans doute, ces Messieurs , que les principes
des Arts et des Sciences ont une vertu particuliere
pour s'insinuer dans l'idée et dans la
mémoire d'un enfant , parcequ'ils sont écrits sur
des cartes , et qu'ils ont eu l'attouchement de sa
petite main , et du bois des cellules étroites qui
les tiennent comme en prison.
Mais qui peut douter , diront encore nos gens
enthousiasmés de leur Rudiment Pratique de la
Langue Latine , composé de 60. logettes et d'autant
de cartes pour le moins , qui peut douter
qu'avec un tel secours on n'enseigne et on n'apprenne
bien mieux les déclinaisons des Noms et
des Pronoms , les Conjugaisons de toutes sortes
de Verbes , les Genres , les Préterits , les Supins
et la Syntaxe Latine, qu'on ne les enseigneroit et
ne les apprendroit avec le secours du Rudiment
et des Maîtres ordinaires .
Qui en peut douter ? moi certainement , tant
je suis incrédule. Pour faire voir combien mon
doute est raisonnable , je ne veux que comparer
un endroit de la cinquiéme Lettre de l'Auteur
avec un autre du celebre M. le Fevre , sur la
maniere de faire des interrogations aux enfans.
כ כ
ラン
Lorsqu'on voudra interroger l'écolier sur les
Déclinaisons et sur les Conjugaisons ( dit ´notre
Abécediste dans le Mercure d'Octobre page
» 2123. ) il ne faut pas suivre la Méthode peu
judicicuse de ces Maîtres qui demandent troptôt
, par exemple : Comment fait Musa à
l'accusatif plurier ? Quel est le genitif plurier
de Dominus ? Quelle est la troisiéme personne
» du Futur Indicatif du Verbe amo ? Cominent
dit -on en Latin ils auroient aimé ? &c.
50
FEVRIER. 1731. 253
Voilà les propres paroles du Docteur Tipografique
dont nous avons pris la liberté de changer
l'ortographe , quoique sa troisième partie
du Volume du Maître contienne dit-il , en
trente et tant de pages une Réponse aux raisonnemens
ou aux préjugés de M. l'Abbé Regnier ,
dans son Traité de l'ortografe , et quelques reflexions
sur l'ortographe des Dictionaires de
Richelet , de Furetiere , de Trévoux , de l'Académie
Françoise et de l'Académie d'Espagne.
Ecoutons presentement M. le Fevre. » Comme
de toutes les parties mobiles de l'Oraison ,
n'y en a point de plus difficile que les Verbes
, ( dit-il dans sa Méthode pour commencer
les Humanités , à Paris 1701. page 12. ) il
5
il
faut s'y arrêter aussi beaucoup plus que
» sur les noms , jusqu'à ce que l'enfant puisse
répondre sur le champ , et sans varier , à ces
» petites Questions , par exemple : où est audiet?
et que veut-il dire en françois ? où est audivisset
? Audire ne se trouve - t'il point en plus
d'un ou de deux endroits où est amatum iri?
» &c. Quand une fois l'enfant est bien assuré
là- dessus , il est en beau chemin , si le Maître
» a les qualités qu'il doit avoir.
Ne voit-on pas une manifeste contradiction
entre ces deux manieres d'enseigner les premiers
principes ? Ainsi nous voici dans un défilé d'où
nous ne pouvons sortir qu'en disant que l'une
de ces deux Méthodes est bien plus judicieuse que
l'autre.
Le Buraliste ne manquera pas de soutenir har→
diment que c'est la sienne , et il citera en sa faveur
l'exemple de M. de la Valette , petit-fils de
M. Chirac , qu'il appelle un enfant celebre du
Bureau tipographique , ( page 19. de la seconde
des quatre premieres Lettres qu'il a fait impri-
Cij mer
54 MERCURE DE FRANCE
mer séparément ) ; il citera encore le petit Gos
sard , fils d'un Marchand Tapissier , le fils de
M. Durand , le petit Espagnol Hernandez del
Valle , le petit Guillot , un Savoyard de zo . ans
qui a appris à lire le latin à cet âge , par le moyen
de cette Méthode , ibid. page 20. et 21. Quel
miracle ! Il n'oubliera pas M. Chompré , Maître
de Pension dans la rue des Carmes , qui se sert
du Bureau tipographique pour les enfans ( page
22 ) , ni M. & Mad . Hervé , qui étant , dit-il ,
témoins du progrés surprenant de l'exercice du
Bureau typographique , en ont fait faire un de
quatre rangées de logettes pour Mlle leur fille
page 28 , ni enfin le Cardinal Lugo , qui dés
l'âge de trois ans sçavoit lire les imprimez et les
manuscrits ; ni le Tasse , qui à l'âge de trois ans
commença à étudier la Grammaire , qui fut envoyé
au College des Jesuites dès l'âge de quatre
ans , et fit sous ces habiles Maîtres de si grands.
progrès , qu'à sept ans il sçavoit parfaitement le
Latin et très-passablement le Grec ; ni le petit
Jean- Philippe Baratier de Schwalbach , qui commença
d'apprendre les Lettres avant l'âge de deux
ans , page II . 12. et 20.
Mais sans vouloir examiner tout ce qu'on dit de
tous ces enfans celebres , ni rien rabattre de leur
science prématurée , ne puis-je pas dire avec verité
que tous ces exemples ne font rien en faveur
du Bureau typographique , puisque certainement
ni le petit Lugo , ni le Taffe , ni Baratier , qui
sont les trois plus rares exemples cités , ne sont
point du tout redevables de leurs miraculeux progrès
aux cellules de bois dont la rare invention
est posterieure a
Quant aux autres , outre qu'on ne nous dit
point que le petit Durand et le petit Hernandez
me soient servis du Bureau , et qu'on nous fait
entendre
FEVRIER.
1731. 255
Entendre au contraire qu'ils ont suivi une autre
Méthode ; n'est-il pas évident que leur érudition ,
quelle qu'elle soit , vient plutôt de leur heureux
naturel et de l'habileté de leurs Maîtres , que de la
nouvelle machine Alphabetique.
11 n'en eft pas de même de la Méthode de M. le
Févre , qui étant toute fondée sur la raison et
l'experience , a dû produire et a produit des miracles
, sur tout dans la personne de Mad. Dacier,
sa fille , et d'un fils , qui ayant commencé a apprendre
le Latin et le Grec â dix ans seulement
suivant la pratique de M. le Fevre , qui me paroît
bien fondée , et sçachant alors seulement bien lire
et bien écrire, » lorsqu'il mourut vers la fin de
sa 14 année , avoit lû et expliqué deux fois l'I-
» liade d'un bout à l'autre , et rendoit raison des
parties aussi prestement qu'auroit pû faire un
assez bon Maîrre , sans balancer et sans hesiter
jamais. Il sçavoit aussi l'Eneide de Virgile de
même , Terence , Phedre , les Métamorphoses
» d'Ovide, Saluste, la premiere Comedie de Plau-
» te , la premiere et la seconde d'Aristophane ,
avec les trois premiers Livres de Tite- Live ,
outre les autres petits Auteurs qu'il faut sça-
» voir pour entendre ceux -ci , Eutrope , Aurelius
Victor , Justin , les Fables d'Esope , et les cinq
» Livres Historiques du Nouveau Testament. Ù
avoit encore appris à fond de son pere , qui étoit
aussi son Précepteur , la Grammaire Latine et la
Grecque, et il avoit entamé même l'Hébraïque à
T'âge de 13. ans. Enfin il n'ignoroit ni la Géogra
phie , ni la Chronologie , ni l'Histoire.
Voilà des faits certains et exposez au grand
jour ; voilà des témoins illustres et non suspects
de la bonté de la Méthode de M. le Fevre , qui a
été presque entierement suivie et même perfectionnée
en quelques points dans les meilleurs Col-
Ciiij leges
256 MERCURE DE FRANCE
ges de l'Université. Nos Méchanistes avec leur
Bureau typographique , pousseront- ils un enfant
aussi loin et en si peu de temps, et l'instruiront -ils
d'une maniere aussi solide des premiers principes
de la Langue Grecque , de la Latine , et de la
Françoise ? S'ils sont assez présomptueux , pour
ne pas dire assez fous , pour le promettre, se trous
verat- il quelqu'un qui soit assez sot et assez duppe
pour le croire ? Peut-être que oui , puisque selon
le Poëte Satirique , mais véridique ,
Un sot trouve toujours un plus sot qui l'admire.
Quoiqu'il en soit , nous pouvons conclure présentement
que les Méthodes ordinaires , sur tout
si elles sont semblables à celles de M. le Févre 2
sont bien au-dessus du Rudiment pratique de la
Langue Latine , qui est le troisiéme ou quatrième
Bureau de 60. Logettes , qui fait partie du Bureau
zypographique et general . Je pourois apporter encore
plusieurs raisons invincibles de cette même
verité ; mais je les omets pour abreger et passer
ma troisiéme proposition , d'autant plus que si
je la prouve , comme je l'espere j'aurai prouvé
encore une fois celle -ci . En effet si le Bureau typographique
n'apprend pas mieux à lire qu'un
bon Alphabet , à combien plus forte raison apprendra-
t-il encore moins bien qu'une bonne Mé
thode , les principes des Langues et des Sciences ?
Je dis donc en troisiéme lieu , quand nos Bibliothecaires
typographistes devroient se fâcher ,
que tout cet attirail de cartes écrites sur le dos ,
et de cassettes d'Imprimerie , n'est pas aussi bon
pour apprendre à lire , qu'un Alphabet en bon
ordre et bien digeré. On a vu dans la description
détaillée que nous avons faite du Bureau , qu'on
a sacrifié près de 100. cellules aux Lettres grandes
et petites , Romaines et Italiques , aux consonmes
doubles bb , ce , & c . et à la ponctuation . Un
bon
FEVRIER. 1731 . 257
ba ,
,
bon Alphabet dans les trois ou quatre premieres
pages, contient non - seulement les lettres simples,
mais encore presque toutes les syllabes qu'on peut
former par l'assemblage d'une voyelle et d'une ou
plufieurs consones, comme ,
be bi, bo , bu,
&c. bla, ble, bli, blo, blu , &c . ab , eb, ib, ob , ub ,
&c. ar , er , ir , or , ur , &c. stra , stre , stri ,
stro , stru, &c. L'Enfant les voit d'un coup d'oeil,
et s'accoutume à les prononcer presque lui seul.
par routine , avec le moindre secours du plus petit
Maître d'Ecole.
Or tout cela demande bien du temps dans le
nouveau Systême. Il faut que l'Enfant aille prendre
dans les logettes differentes les lettres qui
composent ces syllabes ; il faut un Maître bien
assidu et bien patient , tel qu'on en trouve peu ,
pour être toujours là present , et empêcher que
Enfant ne se trompe , ou le corriger quand il
s'est trompé.
Un seul Maître d'un médiocre sçavoir et d'une
médiocre exactitude , peut montrer à lire tout
à la fois à une cinquantaine d'Enfans , les obliger
à avoir tous ensemble les fixez sur le
yeux
même endroit , et les faire reprendre les uns par
les autres , ce qui les pique d'honneur et d'émulation
; et quand la leçon est achevée , chacun peut
emporter fon Livre avec foi à la maison , à l'Eglise
, à la promenade , et repasser ce qu'on lui a
fait lire. Le Bureau , au contraire , est très -embarassant
, on ne peut le faire fervir à trois ou
quatre tout à la fois ; il n'est pas portatif , et
P'Enfant , quand il le voudroit , ne pourroit pas
le mettre dans sa poche , il est d'une toute autre
mesure.
Un Alphabet s'achette 4 ou 5. sols ; un Bureau
est d'un bien plus haut prix , sur tout si on le fait
faire d'Ebene, comme l'Auteur semble le conseil-
Cv ley
258 MERCURE DE FRANCE
9A
ler aux Curieux et aux riches , vers la fin de sa
seconde Lettre , page 29. Un Alphabet ordinaire
contient 30 ou 40. pages , il est très -court et
très -clair. L'A B C de Candiac , dont on a obtenu
le privilege , mais qui n'est pas encore imprimé
est divisé en deux volumes qui contiennent 250.
leçons pour trois A B C Latins et trois François,.
et plus de cinq ou six cens pages , suivant le calcul
détaillé fait par l'Auteur , premiere Lettre
page 2 , 3 , 4 et 5. et seconde Let. page 23.et 24 ) .
Ce qu'on a mis dans le Mercure , pour donner
une idée et un précis de cet Ouvrage , est assez
obscur et confus , et à peu près du même gout
que l'Art de transposer toute sorte de Musique
donné au Public par le même Auteur en 1711.
dont deux celebres Musiciens qui l'ont depuis peu
examiné , à ma priere , avec attention , ont jugé
qu'il n'est pas clair , et que la plus grande utilité
qu'on en puisse tirer ,est de l'ignorer Parfaitement.
9%
Enfin un Alphabet ou on trouve des pages.
toutes entieres de syllabes et d'exemples de lectures
qui y sont proposez , peut servir aux Enfans
à bien employer ces premieres années de la vie ,
qui sont si précieuses , et donner matiere d'exercice
à leur mémoire , qui est alors la plus saine et
la plus parfaite de leurs facultez et presque la seule
dont ils puissent faire usage. Par lå on observe ce
beau précepte de Quintilien , ( L. 1. C. 1. ) Non
perdamus primum statim tempus atque eò
minus quod initia litterarum solâ memoriâ
constant; qua non modo jam est in parvis , sed
tum etiam tenacissima est . » Ne souffrons .
point qu'un Enfant perde ses premieres années,
et souffrons-le d'autant moins , que pour ces
commencemens de lettres il ne faut que de la
» mémoire , et que non-seulement les Enfans
en ont , mais qu'ils l'ont même très bonne et
très- fidele.
FEVRIER. 1731. 259
L'Auteur,qui cite quelquefois Quintilien quand
il croit qu'il lui est favorable , ne paroît pas faire
grand cas de ce précepte , puisqu'il ne parle jamais
d'exercer la mémoire des Enfans , et qu'il
paroît même peu approuver cette pratique , Lettre
5. page 2133. Ce qui est de certain , c'est
que son Systême et son Bureau typographique
n'y est point du tout favorable .
En voilà assez pour faire voir que ma troisiéme
proposition n'est pas moins veritable que la seconde,
et que l'Imprimerie en Colombier ne vaut
pas un A B C. bien composé et bien imprimé.
Avant que de finir cette Lettre , je fais une re
marque sur ce que l'Auteur dit , ( L. 2. p. 22. )
» que l'exercice du Bureau tipographique , bien
loin d'exposer les Enfans à être malades et à
rester nains et noüez , faute d'action , les entre
tient au contraire dans une bonne santé, dissipe
» peu à peu l'humeur noueuse qui les empêche de
> croître et leur allonge le corps , les bras et les
»jambes , dans la necessité où ils sont de prendre
» et de remettre les cartes aux plus hauts casse-
» tins du Bureau Typographique.
92
95
ود
Si cet avantage est aussi réel qu'on voudroit
nous le faire croire , pourquoi les Enfans gouvernez
par les Inventeurs de ce Bureau sont -ils
morts entre leurs mains ? Pourquoi le petit Candiac
, qui est si souvent cité dans ces Lettres comme
un prodige , et qui aimoit tant l'exercice du
Bureau Abecedique , n'a-t - il pas vécu au delà de
sa 8 ou 10 année? Au reste cette mort, qui d'une
part a été très-desavantageuse à l'Auteur de l'A
BC de Candiac , en lui enlevant un cher Disci →
ple ; lui a été d'une autre part assez avantageuse,,
puisqu'il peut nous alleguer sans cesse en faveur
de sa Méthode , un témoin que nous ne pouvons
ressusciter. D'ailleurs si on fait tant valoir le Bur
Cvj
ream
26 MERCURE DE FRANCE
reau , parce qu'il donne de l'exercice et de la santé
aux enfans , combien ne doit- on pas estimer
par cet endroit la coutume de les faire aller à pié
matin et soir aux petites Ecoles et aux Colleges ?
Je finis cette Lettre , qui vous paroîtra peutêtre
trop longue , par une reflexion de l'Auteur ,
qui m'a frappé , et qui ne peut manquer d'être
très-utile à un Lecteur judicieux et qui sçait faire
son profit de tout ce qu'il lit. On doit , dit - il ,
» ( L. 2. P. 27. ) regarder comme suspectes les
Méthodes mysterieuses et hierogliphiques , qui
annoncent & promettent des miracles , ou des.
choses au-delà de l'esprit humain : une bonne
Méthode exige la franchise et la generosité
» qu'inspire l'amour du bien public... L'incrédu
→ lité du Public n'est pas sans fondement, on voit
» tant de Charlatans , de visionnaires et d'impos-
» teurs , de toute classe , qu'il y auroit de la foiblesse
, de l'imprudence et même de la folie à
» les croire sur leur parole.
30
à
Quintilien ( L. 1. C. 1. ) après avoir recommandé
aux peres et aux meres de choisir pour
leurs enfans les meilleures Nourrices pour les allaiter
, et les meilleurs enfans de leur âge pour
leur tenir compagnie , ajoûte sur le choix des
Maîtres un précepte qui a beaucoup de rapport
ce qu'on vient de lire . A l'égard des Précepteurs
» qu'on donne aux Eafans , ce que j'ai , dit- il , à
recommander le plus , c'est qu'ils soient veritablement
habiles , ou qu'ils sçachent du moins
qu'ils ne le sont pas car je ne vois rien de
pire au monde , que ces gens , qui parce qu'ils
ont quelque legere teinture de Lettres , s'imaginent
être fort sçavans , et se donnent pour
tels . C'est en vain que vous voudrez les redresser;
ils croyent en sçavoir plus que tous les
Maîtres , et fiers de leur autorité comme ils
sont
FEVRIER . 2.61
173 .
"
5)
» sont ordinairement, ils enseignent leurs sottises
jusqu'à se mettre en fureur contre qui ose les
» contredire , souvent même leur ignorance ne
» nuit pas moins aux moeurs. De padagogis hoc
amplius ( dictum sit, ) ut aut sint eruditi planè,
quam primam esse curam velim aut se non
esse eruditos , sciant. Nihil enim pejus est irs
qui paulum aliquid ultra primas litteras pregressi
, falsam sibi scientia persuasionem induerunt.
Nam et credere pracipiendi peritis
indignantur , er jure quodam potestatis , que
ferè hoc hominum genus intumescit , imperiosi
atque interim savientes , stultitiam suam perdocent.
On voit par là , comme dit un de nos plus excellens
Poëtes , que le monde n'a jamais , manqué
de Charlatans , et que cette Science de tout tems
fut en Professeurs très - fertiles . Je suis , Monsieur
, &c..
sité de Paris à un Principal de College
de Province , sur l'ABC DE CANDIAC,
OU LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS , ou
LES PREMIERS ELEMENS DES LETTRES, & C
Vous voulez donc , Monsieur, que jevous dise mon sentiment sur cette nouvelle Méthode
dont vous avez appris qu'on fait beaucoup
de bruit à Paris depuis environ six mois , que
quelques Principaux ont laissé introduire dans
deux ou trois celebres Colleges de l'Université
et sur laq le Mercure de France a fait imprimer
cinq Lettres dont la premiere est
du mois de Mai , et la cinquiéme du mois d'Octobre
de la presente année 1730.
J'avois cependant résolu de garder un silence
constant à l'égard de l'Anonime , Auteur de ce
nouveau sistême Abécedique , comme je l'ai gardé
à l'égard de tant d'autres Charlatans de la
menuë litterature , qui ont jugé plus à propos
de faire connoître leur nom au Public , en le
faisant imprimer au Frontispice de leurs Livres.
Mais les prieres réïterées que vous me faites , le
désir que j'ai d'empêcher , autant qu'il sera en
moi , plusieurs Enfans de famille , particulierement
ceux qui sont confiés à vos soins , d'être la
dupe de ce nouvel avanturier , l'occasion favorable
FEVRIER . 1731. 247
Table de venger l'insulte qu'il fait à tous les habiles
et honnêtes gens qui suivent une autre maniere
d'enseigner que la sienne , en les accusant
d'ignorance , d'injustice et de vanité ; tout cela
m'engage à parler malgré l'inclination que j'avois
à me taire.
Je vais donc faire trois choses. 1° J'expliquerai
la structure de son Bureau Tipographique , suivant
une Carte imprimée qui m'est tombée entre
les mains , sans quoi vous ne pouvez rien comprendre
non plus que bien d'autres à ce qui en
est dit dans le Mercure que vous avez lû. 2° Je
ferai voir qu'il est impossible d'enseigner et d'apprendre
bien aucune Langue et aucune Science
par le moyen de ce Bureau . 3 ° Qu'un bon Alphabet
est une Méthode au moins aussi facile
aussi courte , aussi avantageuse et bien plus
›
commode pour bien montrer à lire à un Enfant.
.
Figurez -vous donc d'abord , Monsieur , un
ouvrage de menuiserie en forme de Colombier
qu'on attache à un mur à la hauteur d'un Enfant
de 4. à 5. ans. Ce Colombier de bois est
coupé ou partagé en 210. petits ous , sept en
hauteur , et trente en longueur. in nteur de
cette belle piece de menuiserie les appelle tantôt
cassetins et cassetes , tantôt cellules et logetes . Un
de mes amis qui a lû les cinq Lettres sans en
comprendre ni la beauté ni l'utilité , soutient
qu'on devroit plutôt les appeller Boulins , puisque
toute la boisure se nomme Colombier.
Mais quelque nom qu'on veuille donner à ces
trous , il faut sçavoir qu'ils sont à peu près quarrés
selon les trois dimensions , et de telle grandeur
qu'un Enfant y peut faire entrer aisément
sa main. On met dans ces trous des cartes , sur
lesquelles sont écrites differentes choses, La premiere
rangée de 30. trous est posée sur la table
du
248 MERCURE DE FRANCE.
du Bureau , qui est au-dessous , et de la même
longueur ; elle est appellée par l'Auteur Premier
Bureau Abécedique , c'est - à -dire Alphabetique.
Les 26. premiers trous contiennent sur des
cartes les 24. lettres de l'Alphabet , tant petites
que majuscules , et l'j et l'v consonnes ; les 4 .
derniers sont pour l'E æ , l'E ∞ , &t , ff , ft
ch , ph , rh , th : on ne voit pas la raison pourquoi
on appelle premier ce Bureau Abécedique ,
puisqu'il n'y en a point de second qui porte ce
nom.
Quoiqu'il en soit , les deux rangées de trente
logettes ou boulins chacune , qui sont immédiatement
au dessus de la premiere , portent le nom
de Bureau Latin , qu'on auroit pû aussi bien ,
et même encore mieux , nommer Bureau Franfois
, puisque les 2. premieres logettes ne renferment
que les lettres de l'Alphabet , grandes et
petites , Romaines et Italiques , qui sont communes
au François aussi bien qu'au Latin , et que
les 4. suivantes sont pour les e ouverts et fermés
, qui sont propres seulement à la Langue
Françoise. Les 4. dernieres cellules sont destinées
à l'Histoire Sainte et Prophane , à la Géographie
et à la Fable. Vous connoissez donc déja
bien en détail le contenu des 90. premiers cassetins
compris dans les trois premieres rangées.
Montons présentement aux 120. qui nous restent
, et qui sont et dominent les uns sur les au
tres.
La quatrième et cinquiéme rangée porte le beau
titre de Bureau François - Latin , cependant on
ne trouve dans les 60. cellules qui le composent
rien qui soit particulier au Latin , si ce n'est la
Io et la 11. intitulées Tèmes à faire , Tèmes
faits. Voici les étiquetes des 58. autres : 1. à , à ,
2 bb , bb , la 3 , 4 , 7 , 12 , 16 contiennent c ,
>
FEVRIER. 1731. 249
mm ,
d , g , 1 , p doublés comme le b'en Romain et en
Italique. La 5 , 6 , 9 , 17 , 18 , 20 , 21 , 23 , 24
contiennent aussi en Romain et en Italique he ,
ph , hi , qu , rh , th , hu , xc , hy ; la 8. est intitulée
Magasin ; je ne sçais pas pourquoi. La 13
m ; la 14 ñ , nn ; la 15 eau , au ; la 19 ç ;
fç , ff , la 2 2 W , w
, W, vv ; la 25 Livrèt , au
dessus duquel mot il y a écrit 10 10 , et au dessous
15 15 ; cette cassete est aparemment un
reservoir de chifres . ) La 26 &c , & c ; la 27 ai ,
aient , oient ; la 28 æ
et ; la 29 S *
; la 30 contient trois signes
de l'Algebre , qui signifient le moins , le plus ,
l'égalité ; ils ont été mis là , sans doute , afin de
pouvoir faire accroire au Public que par le moyen
de ce Bureau on apprend les principes de l'Algebre
, comme tout le reste . Voilà la rangée inférieure
du prétendu Bureau François-Latin ;
voici la superieure.
J;
> oe , et ,
>
,
,
On trouve dans les I 2
? 3 4 , 6 , 8 et g
cellules les marques ou signes de ponctuation , ;
: .? ! ' apostrophe : les 5 , 7 , 10 , 12 , 13 , 14
et 15 renferment eu , gn , ch , ill , ui , oi , où en
Romain et en Italique. La 11 a les parentheses
( et les crochets [ ] . La 16 20 ã‚ẽ‚í‚õ ,
en Romain et en Italique ; la 21 30 les dix premiers
chiffres , soit Romains , soit Arabiques.
Les deux rangées superieures du Bureau Tipographique
qui sont chacune de 30. cellules comme
les autres portent,pour titreRudiment pratique de
la Langue Latine. C'est là ce qu'on regarde particulierement
comme un Chef- d'oeuvre d'invention
, qui est bien au- dessus de toutes les Méthodes
dont on s'est servi jusqu'à présent pour
enseigner le Latin. Voici néanmoins tout ce que
c'est dans les six premieres logettes de ces deux
dernieres rangées : on voit les cinq Déclinaisons
C latines
250 MERCURE DE FRANCE ,
>
>
as,
Latines a æ &c . les Pronoms latins et françois
ego , je , tu , tu , vous ; ille , il , elle , l'article
hic , ce , cette , ( on auroit du dire le Pronom
demonstratif; ) le Pronom relatif qui , qui , lequel
; les terminaisons , Pronoms , piam , re , les
termin . Noms orum , ibus . Les cinq logettes suivantes
, soit d'enhaut , soit d'enbas contiennent
le Présent , l'Imparfait , le Parfait , le Plusqueparfait
et le Futur , tant de l'Indicatif que du
Subjonctif des Verbes sum , amo , et aparemment
des trois autres Conjugaisons . Voilà déja 22 .
logettes bien marquées. Les deux suivantes sont
pour l'Impératif et l'Infinitif, esto , ama , esse .
amare. Les 25 et 26. pour les Gérondifs et Supins,
amando , amatu , et les Participes ans , ens,
Les 27 et 28 pour les terminaisons actives, o >
α amus , et les passives, or , aris , atur , amur.
Les 29 38. sont pour les Verbes Actifs , Passifs ,
Neutres , Irreguliers , Déponens , Communs
Substantifs , Vocatifs , Reciproques , Irreguliers
( qui sont ici marqués pour la seconde fois )
Defectueux , Impersonels. Les 39 et 40. sont
pour les terminaisons françoises des Verbes , er
des Noms et Pronoms. Les 41 et 42 pour les
Verbes Auxiliaires François. Les 43 et 44. pour
les Noms Substantifs et Articles françois. Les
45 et 46. pour les Adjectifs , Positifs , Comparatifs
et Superlatifs . Les 47 et 48. pour les Pronoms
demonstratifs et Possessifs . Les 49 et 50. pour
les Verbes François et Particules Françoises. Les
51 et 52. pour les Indéclinables in , úbi , vel ,
et autres aparemment. Les 53 et 54. pour les
genres hic homo. Les 55 et 56. pour les Déclinaisons
homo inis. Les 57 et 58. pour les
Conjugaisons amo , avi Atum are. Enfin les
59 et 60. po la Syntaxe , ego amo Deum.
Je ne dou point que cette énumeration des
>
>
logettes
FEVRIER. 17310
251
logettes et de ce qui y est contenu , ne vous ait
fort ennuyé ; je vous en demande pardon ; mais
j'en avois besoin pour prouver la deuxième proposition
que j'avois avancée. Je dis donc en second
lieu que par cette machine de bois en Colombier
, et par tous les Boulins et toutes les lo
gettes dont elle est composée , aucune Langue
ni aucune Science ne peut être bien enseignée
et bien apprise , quoiqu'en disent ses inventeurs
ou ses approbateurs.
Faut-il se mettre en frais pour le prouver , et
n'est-il pas évident à quiconque a du bon sens
que ni la Philosophie , ni la Rhétorique , ni la
Poëtique , ni les Auteurs Grecs et Latins , même
les plus faciles , qu'on fait expliquer dans les
plus basses Classes des Colleges , n'entreront ja
mais dans la tête d'un enfant à l'aide de cette
pure méchanique. Que dis- je ? il est même impossible
d'apprendre à écrire par ce moyen ; aussi
nos bonnes gens paroissent - ils avoir entierement
renoncé d'eux -mêmes à toutes ces connoissances
, puisqu'ils n'y ont pas même consacré une
seule petite logette.
>
Mais du moins diront- ils on apprendra
P'Histoire Sainte et Prophane , la Géographie er
la Fable ; car elles ont chacune leur cellule , qui
sont les quatre dernieres du Bureau Latin.
A cela je réponds qu'on les apprendra à peu
près comme l'Arithmétique et l'Algebre , ausquelles
sont destinées les 25 et 30. logettes de
la deuxième rangée du Bureau François- Latin ;
c'est-à-dire , que quelques Noms propres d'Empereurs
et de Rois , de grands Royaumes et de
grandes Villes , tirés des cellules où on les met-
, pourront entrer et rester dans la mémoire
de l'enfant , s'il en a , et si on a coin de lui rebatre
plusieurs fois la même che Or c'est un
tra
C avanta
252 MERCURE DE FRANCE
avantage qu'on trouvera pour le moins aussi grand
dans quelque Méthode que ce soit , si tout est égal,
soit de la part de l'enfant , soit de celle du Maître
, à moins qu'on ne veuille croire , comme le
croyent, sans doute, ces Messieurs , que les principes
des Arts et des Sciences ont une vertu particuliere
pour s'insinuer dans l'idée et dans la
mémoire d'un enfant , parcequ'ils sont écrits sur
des cartes , et qu'ils ont eu l'attouchement de sa
petite main , et du bois des cellules étroites qui
les tiennent comme en prison.
Mais qui peut douter , diront encore nos gens
enthousiasmés de leur Rudiment Pratique de la
Langue Latine , composé de 60. logettes et d'autant
de cartes pour le moins , qui peut douter
qu'avec un tel secours on n'enseigne et on n'apprenne
bien mieux les déclinaisons des Noms et
des Pronoms , les Conjugaisons de toutes sortes
de Verbes , les Genres , les Préterits , les Supins
et la Syntaxe Latine, qu'on ne les enseigneroit et
ne les apprendroit avec le secours du Rudiment
et des Maîtres ordinaires .
Qui en peut douter ? moi certainement , tant
je suis incrédule. Pour faire voir combien mon
doute est raisonnable , je ne veux que comparer
un endroit de la cinquiéme Lettre de l'Auteur
avec un autre du celebre M. le Fevre , sur la
maniere de faire des interrogations aux enfans.
כ כ
ラン
Lorsqu'on voudra interroger l'écolier sur les
Déclinaisons et sur les Conjugaisons ( dit ´notre
Abécediste dans le Mercure d'Octobre page
» 2123. ) il ne faut pas suivre la Méthode peu
judicicuse de ces Maîtres qui demandent troptôt
, par exemple : Comment fait Musa à
l'accusatif plurier ? Quel est le genitif plurier
de Dominus ? Quelle est la troisiéme personne
» du Futur Indicatif du Verbe amo ? Cominent
dit -on en Latin ils auroient aimé ? &c.
50
FEVRIER. 1731. 253
Voilà les propres paroles du Docteur Tipografique
dont nous avons pris la liberté de changer
l'ortographe , quoique sa troisième partie
du Volume du Maître contienne dit-il , en
trente et tant de pages une Réponse aux raisonnemens
ou aux préjugés de M. l'Abbé Regnier ,
dans son Traité de l'ortografe , et quelques reflexions
sur l'ortographe des Dictionaires de
Richelet , de Furetiere , de Trévoux , de l'Académie
Françoise et de l'Académie d'Espagne.
Ecoutons presentement M. le Fevre. » Comme
de toutes les parties mobiles de l'Oraison ,
n'y en a point de plus difficile que les Verbes
, ( dit-il dans sa Méthode pour commencer
les Humanités , à Paris 1701. page 12. ) il
5
il
faut s'y arrêter aussi beaucoup plus que
» sur les noms , jusqu'à ce que l'enfant puisse
répondre sur le champ , et sans varier , à ces
» petites Questions , par exemple : où est audiet?
et que veut-il dire en françois ? où est audivisset
? Audire ne se trouve - t'il point en plus
d'un ou de deux endroits où est amatum iri?
» &c. Quand une fois l'enfant est bien assuré
là- dessus , il est en beau chemin , si le Maître
» a les qualités qu'il doit avoir.
Ne voit-on pas une manifeste contradiction
entre ces deux manieres d'enseigner les premiers
principes ? Ainsi nous voici dans un défilé d'où
nous ne pouvons sortir qu'en disant que l'une
de ces deux Méthodes est bien plus judicieuse que
l'autre.
Le Buraliste ne manquera pas de soutenir har→
diment que c'est la sienne , et il citera en sa faveur
l'exemple de M. de la Valette , petit-fils de
M. Chirac , qu'il appelle un enfant celebre du
Bureau tipographique , ( page 19. de la seconde
des quatre premieres Lettres qu'il a fait impri-
Cij mer
54 MERCURE DE FRANCE
mer séparément ) ; il citera encore le petit Gos
sard , fils d'un Marchand Tapissier , le fils de
M. Durand , le petit Espagnol Hernandez del
Valle , le petit Guillot , un Savoyard de zo . ans
qui a appris à lire le latin à cet âge , par le moyen
de cette Méthode , ibid. page 20. et 21. Quel
miracle ! Il n'oubliera pas M. Chompré , Maître
de Pension dans la rue des Carmes , qui se sert
du Bureau tipographique pour les enfans ( page
22 ) , ni M. & Mad . Hervé , qui étant , dit-il ,
témoins du progrés surprenant de l'exercice du
Bureau typographique , en ont fait faire un de
quatre rangées de logettes pour Mlle leur fille
page 28 , ni enfin le Cardinal Lugo , qui dés
l'âge de trois ans sçavoit lire les imprimez et les
manuscrits ; ni le Tasse , qui à l'âge de trois ans
commença à étudier la Grammaire , qui fut envoyé
au College des Jesuites dès l'âge de quatre
ans , et fit sous ces habiles Maîtres de si grands.
progrès , qu'à sept ans il sçavoit parfaitement le
Latin et très-passablement le Grec ; ni le petit
Jean- Philippe Baratier de Schwalbach , qui commença
d'apprendre les Lettres avant l'âge de deux
ans , page II . 12. et 20.
Mais sans vouloir examiner tout ce qu'on dit de
tous ces enfans celebres , ni rien rabattre de leur
science prématurée , ne puis-je pas dire avec verité
que tous ces exemples ne font rien en faveur
du Bureau typographique , puisque certainement
ni le petit Lugo , ni le Taffe , ni Baratier , qui
sont les trois plus rares exemples cités , ne sont
point du tout redevables de leurs miraculeux progrès
aux cellules de bois dont la rare invention
est posterieure a
Quant aux autres , outre qu'on ne nous dit
point que le petit Durand et le petit Hernandez
me soient servis du Bureau , et qu'on nous fait
entendre
FEVRIER.
1731. 255
Entendre au contraire qu'ils ont suivi une autre
Méthode ; n'est-il pas évident que leur érudition ,
quelle qu'elle soit , vient plutôt de leur heureux
naturel et de l'habileté de leurs Maîtres , que de la
nouvelle machine Alphabetique.
11 n'en eft pas de même de la Méthode de M. le
Févre , qui étant toute fondée sur la raison et
l'experience , a dû produire et a produit des miracles
, sur tout dans la personne de Mad. Dacier,
sa fille , et d'un fils , qui ayant commencé a apprendre
le Latin et le Grec â dix ans seulement
suivant la pratique de M. le Fevre , qui me paroît
bien fondée , et sçachant alors seulement bien lire
et bien écrire, » lorsqu'il mourut vers la fin de
sa 14 année , avoit lû et expliqué deux fois l'I-
» liade d'un bout à l'autre , et rendoit raison des
parties aussi prestement qu'auroit pû faire un
assez bon Maîrre , sans balancer et sans hesiter
jamais. Il sçavoit aussi l'Eneide de Virgile de
même , Terence , Phedre , les Métamorphoses
» d'Ovide, Saluste, la premiere Comedie de Plau-
» te , la premiere et la seconde d'Aristophane ,
avec les trois premiers Livres de Tite- Live ,
outre les autres petits Auteurs qu'il faut sça-
» voir pour entendre ceux -ci , Eutrope , Aurelius
Victor , Justin , les Fables d'Esope , et les cinq
» Livres Historiques du Nouveau Testament. Ù
avoit encore appris à fond de son pere , qui étoit
aussi son Précepteur , la Grammaire Latine et la
Grecque, et il avoit entamé même l'Hébraïque à
T'âge de 13. ans. Enfin il n'ignoroit ni la Géogra
phie , ni la Chronologie , ni l'Histoire.
Voilà des faits certains et exposez au grand
jour ; voilà des témoins illustres et non suspects
de la bonté de la Méthode de M. le Fevre , qui a
été presque entierement suivie et même perfectionnée
en quelques points dans les meilleurs Col-
Ciiij leges
256 MERCURE DE FRANCE
ges de l'Université. Nos Méchanistes avec leur
Bureau typographique , pousseront- ils un enfant
aussi loin et en si peu de temps, et l'instruiront -ils
d'une maniere aussi solide des premiers principes
de la Langue Grecque , de la Latine , et de la
Françoise ? S'ils sont assez présomptueux , pour
ne pas dire assez fous , pour le promettre, se trous
verat- il quelqu'un qui soit assez sot et assez duppe
pour le croire ? Peut-être que oui , puisque selon
le Poëte Satirique , mais véridique ,
Un sot trouve toujours un plus sot qui l'admire.
Quoiqu'il en soit , nous pouvons conclure présentement
que les Méthodes ordinaires , sur tout
si elles sont semblables à celles de M. le Févre 2
sont bien au-dessus du Rudiment pratique de la
Langue Latine , qui est le troisiéme ou quatrième
Bureau de 60. Logettes , qui fait partie du Bureau
zypographique et general . Je pourois apporter encore
plusieurs raisons invincibles de cette même
verité ; mais je les omets pour abreger et passer
ma troisiéme proposition , d'autant plus que si
je la prouve , comme je l'espere j'aurai prouvé
encore une fois celle -ci . En effet si le Bureau typographique
n'apprend pas mieux à lire qu'un
bon Alphabet , à combien plus forte raison apprendra-
t-il encore moins bien qu'une bonne Mé
thode , les principes des Langues et des Sciences ?
Je dis donc en troisiéme lieu , quand nos Bibliothecaires
typographistes devroient se fâcher ,
que tout cet attirail de cartes écrites sur le dos ,
et de cassettes d'Imprimerie , n'est pas aussi bon
pour apprendre à lire , qu'un Alphabet en bon
ordre et bien digeré. On a vu dans la description
détaillée que nous avons faite du Bureau , qu'on
a sacrifié près de 100. cellules aux Lettres grandes
et petites , Romaines et Italiques , aux consonmes
doubles bb , ce , & c . et à la ponctuation . Un
bon
FEVRIER. 1731 . 257
ba ,
,
bon Alphabet dans les trois ou quatre premieres
pages, contient non - seulement les lettres simples,
mais encore presque toutes les syllabes qu'on peut
former par l'assemblage d'une voyelle et d'une ou
plufieurs consones, comme ,
be bi, bo , bu,
&c. bla, ble, bli, blo, blu , &c . ab , eb, ib, ob , ub ,
&c. ar , er , ir , or , ur , &c. stra , stre , stri ,
stro , stru, &c. L'Enfant les voit d'un coup d'oeil,
et s'accoutume à les prononcer presque lui seul.
par routine , avec le moindre secours du plus petit
Maître d'Ecole.
Or tout cela demande bien du temps dans le
nouveau Systême. Il faut que l'Enfant aille prendre
dans les logettes differentes les lettres qui
composent ces syllabes ; il faut un Maître bien
assidu et bien patient , tel qu'on en trouve peu ,
pour être toujours là present , et empêcher que
Enfant ne se trompe , ou le corriger quand il
s'est trompé.
Un seul Maître d'un médiocre sçavoir et d'une
médiocre exactitude , peut montrer à lire tout
à la fois à une cinquantaine d'Enfans , les obliger
à avoir tous ensemble les fixez sur le
yeux
même endroit , et les faire reprendre les uns par
les autres , ce qui les pique d'honneur et d'émulation
; et quand la leçon est achevée , chacun peut
emporter fon Livre avec foi à la maison , à l'Eglise
, à la promenade , et repasser ce qu'on lui a
fait lire. Le Bureau , au contraire , est très -embarassant
, on ne peut le faire fervir à trois ou
quatre tout à la fois ; il n'est pas portatif , et
P'Enfant , quand il le voudroit , ne pourroit pas
le mettre dans sa poche , il est d'une toute autre
mesure.
Un Alphabet s'achette 4 ou 5. sols ; un Bureau
est d'un bien plus haut prix , sur tout si on le fait
faire d'Ebene, comme l'Auteur semble le conseil-
Cv ley
258 MERCURE DE FRANCE
9A
ler aux Curieux et aux riches , vers la fin de sa
seconde Lettre , page 29. Un Alphabet ordinaire
contient 30 ou 40. pages , il est très -court et
très -clair. L'A B C de Candiac , dont on a obtenu
le privilege , mais qui n'est pas encore imprimé
est divisé en deux volumes qui contiennent 250.
leçons pour trois A B C Latins et trois François,.
et plus de cinq ou six cens pages , suivant le calcul
détaillé fait par l'Auteur , premiere Lettre
page 2 , 3 , 4 et 5. et seconde Let. page 23.et 24 ) .
Ce qu'on a mis dans le Mercure , pour donner
une idée et un précis de cet Ouvrage , est assez
obscur et confus , et à peu près du même gout
que l'Art de transposer toute sorte de Musique
donné au Public par le même Auteur en 1711.
dont deux celebres Musiciens qui l'ont depuis peu
examiné , à ma priere , avec attention , ont jugé
qu'il n'est pas clair , et que la plus grande utilité
qu'on en puisse tirer ,est de l'ignorer Parfaitement.
9%
Enfin un Alphabet ou on trouve des pages.
toutes entieres de syllabes et d'exemples de lectures
qui y sont proposez , peut servir aux Enfans
à bien employer ces premieres années de la vie ,
qui sont si précieuses , et donner matiere d'exercice
à leur mémoire , qui est alors la plus saine et
la plus parfaite de leurs facultez et presque la seule
dont ils puissent faire usage. Par lå on observe ce
beau précepte de Quintilien , ( L. 1. C. 1. ) Non
perdamus primum statim tempus atque eò
minus quod initia litterarum solâ memoriâ
constant; qua non modo jam est in parvis , sed
tum etiam tenacissima est . » Ne souffrons .
point qu'un Enfant perde ses premieres années,
et souffrons-le d'autant moins , que pour ces
commencemens de lettres il ne faut que de la
» mémoire , et que non-seulement les Enfans
en ont , mais qu'ils l'ont même très bonne et
très- fidele.
FEVRIER. 1731. 259
L'Auteur,qui cite quelquefois Quintilien quand
il croit qu'il lui est favorable , ne paroît pas faire
grand cas de ce précepte , puisqu'il ne parle jamais
d'exercer la mémoire des Enfans , et qu'il
paroît même peu approuver cette pratique , Lettre
5. page 2133. Ce qui est de certain , c'est
que son Systême et son Bureau typographique
n'y est point du tout favorable .
En voilà assez pour faire voir que ma troisiéme
proposition n'est pas moins veritable que la seconde,
et que l'Imprimerie en Colombier ne vaut
pas un A B C. bien composé et bien imprimé.
Avant que de finir cette Lettre , je fais une re
marque sur ce que l'Auteur dit , ( L. 2. p. 22. )
» que l'exercice du Bureau tipographique , bien
loin d'exposer les Enfans à être malades et à
rester nains et noüez , faute d'action , les entre
tient au contraire dans une bonne santé, dissipe
» peu à peu l'humeur noueuse qui les empêche de
> croître et leur allonge le corps , les bras et les
»jambes , dans la necessité où ils sont de prendre
» et de remettre les cartes aux plus hauts casse-
» tins du Bureau Typographique.
92
95
ود
Si cet avantage est aussi réel qu'on voudroit
nous le faire croire , pourquoi les Enfans gouvernez
par les Inventeurs de ce Bureau sont -ils
morts entre leurs mains ? Pourquoi le petit Candiac
, qui est si souvent cité dans ces Lettres comme
un prodige , et qui aimoit tant l'exercice du
Bureau Abecedique , n'a-t - il pas vécu au delà de
sa 8 ou 10 année? Au reste cette mort, qui d'une
part a été très-desavantageuse à l'Auteur de l'A
BC de Candiac , en lui enlevant un cher Disci →
ple ; lui a été d'une autre part assez avantageuse,,
puisqu'il peut nous alleguer sans cesse en faveur
de sa Méthode , un témoin que nous ne pouvons
ressusciter. D'ailleurs si on fait tant valoir le Bur
Cvj
ream
26 MERCURE DE FRANCE
reau , parce qu'il donne de l'exercice et de la santé
aux enfans , combien ne doit- on pas estimer
par cet endroit la coutume de les faire aller à pié
matin et soir aux petites Ecoles et aux Colleges ?
Je finis cette Lettre , qui vous paroîtra peutêtre
trop longue , par une reflexion de l'Auteur ,
qui m'a frappé , et qui ne peut manquer d'être
très-utile à un Lecteur judicieux et qui sçait faire
son profit de tout ce qu'il lit. On doit , dit - il ,
» ( L. 2. P. 27. ) regarder comme suspectes les
Méthodes mysterieuses et hierogliphiques , qui
annoncent & promettent des miracles , ou des.
choses au-delà de l'esprit humain : une bonne
Méthode exige la franchise et la generosité
» qu'inspire l'amour du bien public... L'incrédu
→ lité du Public n'est pas sans fondement, on voit
» tant de Charlatans , de visionnaires et d'impos-
» teurs , de toute classe , qu'il y auroit de la foiblesse
, de l'imprudence et même de la folie à
» les croire sur leur parole.
30
à
Quintilien ( L. 1. C. 1. ) après avoir recommandé
aux peres et aux meres de choisir pour
leurs enfans les meilleures Nourrices pour les allaiter
, et les meilleurs enfans de leur âge pour
leur tenir compagnie , ajoûte sur le choix des
Maîtres un précepte qui a beaucoup de rapport
ce qu'on vient de lire . A l'égard des Précepteurs
» qu'on donne aux Eafans , ce que j'ai , dit- il , à
recommander le plus , c'est qu'ils soient veritablement
habiles , ou qu'ils sçachent du moins
qu'ils ne le sont pas car je ne vois rien de
pire au monde , que ces gens , qui parce qu'ils
ont quelque legere teinture de Lettres , s'imaginent
être fort sçavans , et se donnent pour
tels . C'est en vain que vous voudrez les redresser;
ils croyent en sçavoir plus que tous les
Maîtres , et fiers de leur autorité comme ils
sont
FEVRIER . 2.61
173 .
"
5)
» sont ordinairement, ils enseignent leurs sottises
jusqu'à se mettre en fureur contre qui ose les
» contredire , souvent même leur ignorance ne
» nuit pas moins aux moeurs. De padagogis hoc
amplius ( dictum sit, ) ut aut sint eruditi planè,
quam primam esse curam velim aut se non
esse eruditos , sciant. Nihil enim pejus est irs
qui paulum aliquid ultra primas litteras pregressi
, falsam sibi scientia persuasionem induerunt.
Nam et credere pracipiendi peritis
indignantur , er jure quodam potestatis , que
ferè hoc hominum genus intumescit , imperiosi
atque interim savientes , stultitiam suam perdocent.
On voit par là , comme dit un de nos plus excellens
Poëtes , que le monde n'a jamais , manqué
de Charlatans , et que cette Science de tout tems
fut en Professeurs très - fertiles . Je suis , Monsieur
, &c..
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Résumé : LETTRE d'un Professeur de l'Université de Paris à un Principal de College de Province, sur l'ABC DE CANDIAC, OU LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS, OU LES PREMIERS ELEMENS DES LETTRES, &c.
Un professeur de l'Université de Paris adresse une lettre à un principal de collège de province pour discuter de la méthode d'enseignement appelée l'ABC de Candiac, qui a suscité des débats à Paris et a été adoptée dans certains collèges renommés. Cette méthode utilise un dispositif nommé Bureau Tipographique, composé de 210 compartiments contenant des cartes avec des lettres, des mots et des symboles. Le dispositif est organisé en plusieurs rangées dédiées à l'alphabet, au français, au latin, et à d'autres matières comme l'histoire et la géographie. Le professeur critique cette méthode, estimant qu'il est impossible d'enseigner correctement une langue ou une science par un moyen mécanique. Il remet en question l'idée que cette méthode faciliterait l'apprentissage des déclinaisons latines et des conjugaisons, comparant les recommandations de l'auteur de l'ABC de Candiac à celles de M. le Fevre, un éminent pédagogue. Le professeur conclut que les méthodes traditionnelles, avec un bon alphabet et des maîtres compétents, sont plus efficaces pour enseigner aux enfants. Le texte compare ensuite le Bureau typographique à la méthode de M. le Fevre. Le buraliste, promoteur du Bureau typographique, cite des exemples d'enfants célèbres ayant appris à lire grâce à cette méthode, mais le texte conteste la validité de ces exemples. Il souligne que des figures historiques comme le Cardinal Lugo et le Tasse n'ont pas utilisé le Bureau typographique. Le texte met en avant la méthode de M. le Fevre, basée sur la raison et l'expérience, et cite l'exemple de sa fille, Madame Dacier, et de son fils, qui ont fait des progrès remarquables en latin et en grec avec cette méthode. Le texte critique le Bureau typographique, le jugeant moins efficace qu'un bon alphabet bien structuré. Il souligne que le Bureau est encombrant, non portatif et coûteux, tandis qu'un alphabet est économique et pratique. Il conclut que les méthodes ordinaires, comme celle de M. le Fevre, sont supérieures au Bureau typographique pour enseigner la lecture et les principes des langues et des sciences. Enfin, le texte aborde les défauts des pédagogues et l'impact négatif de leur ignorance sur les mœurs. Il souligne que ces enseignants propagent souvent des sottises et se mettent en colère face à la contradiction. Leur manque de savoir peut nuire aux valeurs morales. Le texte insiste sur l'importance que les pédagogues soient soit très érudits, soit conscients de leur manque de connaissances. Il critique ceux qui, ayant acquis une fausse idée de leur savoir, se croient supérieurs et refusent d'apprendre des experts. Ces individus, gonflés d'un sentiment de pouvoir, se montrent arrogants et enseignent leur propre sottise. Le texte conclut en citant un poète qui affirme que le monde a toujours été rempli de charlatans et que cette 'science' a toujours trouvé des professeurs en abondance.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 2205-2206
« Les Parens curieux en fait d'éducation, qui voudront connoître par eux-mêmes le mérite [...] »
Début :
Les Parens curieux en fait d'éducation, qui voudront connoître par eux-mêmes le mérite [...]
Mots clefs :
Enfants typographes, École vulgaire, Bibliothèque des enfants
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Les Parens curieux en fait d'éducation, qui voudront connoître par eux-mêmes le mérite [...] »
Les Parens curieux en fait d'éducation , qui
voudront connoître par eux - mêmes le mérite
et l'utilité du Bureau Typographique , pourront
prendre la peine d'aller voir les Enfans Typographes
, instruits et exercéz selon cette nouvelle
métode. On trouvera chez un Marchand de Soye;
au bras d'or , dans la rue S. Denis vis- à- vis
Sainte Catherine , une aimable petite fille ,
dessous de trois ans qui , en peu de mois a appris
avec le Bureau ce que bien des enfans ignorent
après des années d'école vulgaire. On trouvera
chez Madame Beaulieu , à l'égoût Montmartre
vis - à - vis le petit Hôtel de Charot , un digne
Enfant , dont le seul exemple est capable de fermer
la bouche à tous les critiques. On pourroitindiquer
un grand nombre d'autres Enfans Typogriphes
, si on ne craignoit de fatiguer les
Parens ou les Maîtres. Dom Ventura de Liria ,
qui a un Bureau au College d'Harcourt , a fais
en peu de tems . l'heureuse expérience de cette
métode , de même que le petit Remilli , qui ,
ayant aussi un Bureau au College du Plessis
eu un des prix de mémoire distribués le jour de
la Tragedie , et qui est en état d'aller en classe
selon le goût et la volonté de ses Parens .
Les Personnes bien intentionnées qui aiment
le bien public , sçachant que Monseigneur le
DAUPHIN et MES DAMES DE FRANCE ,
apprennent à lire par la métode du Bureau Typographique
, et que l'Auteur par commission ,
en a déja envoyé dans les Provinces , ces persondis
je s'embarrasseront peu des
critiques
qu'ont produit jusqu'ici l'ignorance , la préven
tion , et peut-être l'Envie ou la mauvaise foi.
nes ,
·
>
,
a
2
Ceux qui souhaitteront avoir quelqu'unes des
quatre Classes du Bureau Typographique "
en
trous
2206 MERCURE DE FRANCE
twouveront de toutes garnies dans la maison ate---
nant la porte du College de Lisieux , ruë Saint
Etienne des Grès ; l'Avis , le Prix et l'instruction
sur ces quatre Classes se trouvent à la fin de la
neuviéme lettre sur la Bibliotheque des Enfans .
inserée dans le Mercure du mois de Fevrier dernier
, p. 209. ou 234. En attendant la suite de la…
Relation Typographique , J'ay l'honneur d'être
&c..A. Paris ce 15. Septembre 173 I.
RIOMBA L.
voudront connoître par eux - mêmes le mérite
et l'utilité du Bureau Typographique , pourront
prendre la peine d'aller voir les Enfans Typographes
, instruits et exercéz selon cette nouvelle
métode. On trouvera chez un Marchand de Soye;
au bras d'or , dans la rue S. Denis vis- à- vis
Sainte Catherine , une aimable petite fille ,
dessous de trois ans qui , en peu de mois a appris
avec le Bureau ce que bien des enfans ignorent
après des années d'école vulgaire. On trouvera
chez Madame Beaulieu , à l'égoût Montmartre
vis - à - vis le petit Hôtel de Charot , un digne
Enfant , dont le seul exemple est capable de fermer
la bouche à tous les critiques. On pourroitindiquer
un grand nombre d'autres Enfans Typogriphes
, si on ne craignoit de fatiguer les
Parens ou les Maîtres. Dom Ventura de Liria ,
qui a un Bureau au College d'Harcourt , a fais
en peu de tems . l'heureuse expérience de cette
métode , de même que le petit Remilli , qui ,
ayant aussi un Bureau au College du Plessis
eu un des prix de mémoire distribués le jour de
la Tragedie , et qui est en état d'aller en classe
selon le goût et la volonté de ses Parens .
Les Personnes bien intentionnées qui aiment
le bien public , sçachant que Monseigneur le
DAUPHIN et MES DAMES DE FRANCE ,
apprennent à lire par la métode du Bureau Typographique
, et que l'Auteur par commission ,
en a déja envoyé dans les Provinces , ces persondis
je s'embarrasseront peu des
critiques
qu'ont produit jusqu'ici l'ignorance , la préven
tion , et peut-être l'Envie ou la mauvaise foi.
nes ,
·
>
,
a
2
Ceux qui souhaitteront avoir quelqu'unes des
quatre Classes du Bureau Typographique "
en
trous
2206 MERCURE DE FRANCE
twouveront de toutes garnies dans la maison ate---
nant la porte du College de Lisieux , ruë Saint
Etienne des Grès ; l'Avis , le Prix et l'instruction
sur ces quatre Classes se trouvent à la fin de la
neuviéme lettre sur la Bibliotheque des Enfans .
inserée dans le Mercure du mois de Fevrier dernier
, p. 209. ou 234. En attendant la suite de la…
Relation Typographique , J'ay l'honneur d'être
&c..A. Paris ce 15. Septembre 173 I.
RIOMBA L.
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Résumé : « Les Parens curieux en fait d'éducation, qui voudront connoître par eux-mêmes le mérite [...] »
Le Bureau Typographique est une nouvelle méthode d'éducation qui attire l'attention des parents. Pour en évaluer l'efficacité, ils peuvent observer des enfants ayant appris à lire rapidement grâce à cette méthode. Par exemple, une petite fille de moins de trois ans a appris à lire rapidement, contrairement à d'autres enfants ayant suivi l'enseignement traditionnel. Un autre enfant, chez Madame Beaulieu, illustre également les avantages de cette méthode. Dom Ventura de Liria et le petit Remilli, utilisant le Bureau Typographique dans leurs collèges respectifs, ont constaté son efficacité. Le petit Remilli a même reçu un prix de mémoire. Le Dauphin et les Dames de France apprennent également à lire par cette méthode, et des bureaux ont été envoyés dans les provinces. Les personnes intéressées par le bien public sont encouragées à ne pas se laisser décourager par les critiques. Les quatre classes du Bureau Typographique sont disponibles dans la maison attenante à la porte du Collège de Lisieux, rue Saint-Étienne des Grès. Des informations supplémentaires sont disponibles dans la neuvième lettre sur la Bibliothèque des Enfants, publiée dans le Mercure de France de février.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 726-733
DOUZIEME LETTRE sur la Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
Début :
Vous voulez, Monsieur, juger du Systême Typographique par l'experience [...]
Mots clefs :
Bureau typographique, Méthode, Bibliothèque des enfants, Système de morale, Expérience
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DOUZIEME LETTRE sur la Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
OUZIEME LETTRE sur la
Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
VOU
Ous voulez , Monsieur , juger du Systême
Typographique par l'experience et par la
pratique, ou enfin par des exemples et des autoritez modernes. Cela paroît raisonnable jusqu'à un
certain point , je n'ignore pas que les preuves
sensibles ne frappent davantage , mais je sçai
aussi que ces prétendues preuves sensibles sont
souvent plus sujettes à l'erreur que les preuves de
raisonnement. J'avoue que lorsqu'il s'agit d'un
effet prompt et physique , l'experience est le
moyen le plus sur pour en décider ; supposons ,
par exemple, une dispute sur deux sortes de Poudre à Canon, où il s'agit de sçavoir laquelle a
plus de force et porte plus loin ; tous les raisonnemens sur la composition de cette Poudre , ne
feront jamais sur un bon esprit la même impression que l'experience réïterée, et après laquelle ces
raisonnemens serviront à confirmer , ou pour
mieux dire , à expliquer cette même experience.
Il en est de même de la circulation du sang etde
bien d'autres choses.
AVRIL. 17321 727
Mais quand il s'agit de Méthode et d'institution litteraire ou d'une experience soumise à une
infinité de combinaisons physiques et morales ,
il faut pour lors que la raison soit de la partie
et qu'elle serve par provision à discerner la bonté
et la superiorité de cette Méthode sur les autres ;
je croi que c'est ici le cas du Bureau Tipographique , malgré le raisonnement de ceux qui disent qu'il faut juger de la bonté de cette Méthode
par le grand nombre des Sçavans qu'elle produi c'est- à- dire , selon eux , attendre 20. 30. ou
So.ans avant que de se déterminer. Raisonner ainsi
n'est- ce pas raisonner à peu près comme si l'on
eut dit autrefois ? 1 °. Qu'il falloit juger de la
bonté et de l'excellence de la nouvelle Medecine
par le plus grand nombre de Vieillards de l'un et
del'autre Sexe, auquel cas laMedecine des Patriarches auroit été préferable à toutes les autres.
ra ,
2º. Qu'il falloit juger de la bonté des Loix de
chaque Païs , et de la probité de chaque Nation ,
par le plus petit nombre de procès et par le
moindre casuel des Executeurs de la haute Justice.
3°. Qu'il falloit juger de la politique et de la
science Militaire d'un siecle , par le nombre des
Héros , des grands Souverains et des Peuples heureux qu'ils gouvernoient.
4°. Qu'il falloit juger des avantages de l'Im
primerie , par le plus grand nonbre des Sçavans
et des Livres modernes préferables à ceux des- anciens:
5. Juger des avantages de la Boussole , de la
nouvelle Navigation et de la découverte du nouveau Monde , par le plus grand bonheur et le
meilleur être des Nations qui jouissent des fruits de cette découverte.
6. Juger de la bonté de l'Horlogerie et même B-v des
728 MERCURE DE FRANCE
des Prédicateurs ,, par le meilleur emploi du tems.
. De la préference et superiorité morale des Nations et de leur commerce , par le plus grand
nombre des honnêtes gens,par le plus grand nomnombre des riches , et le plus petit nombre des miserables.
8". Juger de la bonté des Systêmes de morale ,
de politique et même de Religion , par le plus
grand nombre des gens de bien, des gens de probité et de pieté , &c.
Vous voyez par là , Monsieur , qu' est plus --
aisé de juger des effets de pure Mécanique , que
de juger des effets combinez à l'infini dans le Physique et dans le Moral. Que d'incertitudes dans
l'enquête et dans le témoignage des hommes !
sur la complexion et le temperament des enfans !
sur les dispositions de leur esprit sur la Méthode qu'ils ont suivie ! sur les moyens , la capacité ,
les talens , et les soins des parens , des Maîtres et
même des domestiques ! sur l'usage et les Coûtumes de chaque Pays, et enfin sur tous les accidens
de la vie !
Descartes , Pascal , Baile , Newton , Leibnits ,
&c. ont été de grands hommes , s'ensuit- il que
leurs Abécé et leurs Rudimens fussent les meilleurs De quel Rudiment , de quelle Méthode se
servoient a utrefois les Hébreux , les Grecs et les
Latins , et de quelle Méthode se servent aujourd'hui les E spagnols et les Portugais , les Anglois
et les Hollandois ; en faut- il juger par le plus
grand nombre de leurs Sçavans ? Il n'est donc
pas toujours aisé de prouver la bonté d'un Systême ou d'une Méthode, par le plus grand nombre
des habiles gens qu'elle a produits , et si on peut
le dir e à p resent de la Méthode de Décartes , elle
me lai ssoit pas de porter par elle- même la preuve morale
AVRIL 1732. 729
•
2
morale et géométrique de son excellence et de sa
superiorité sur les autres Méthodes. On juge fa、
cilement de la bonté et de l'abondance des récoltes par la qualité , la quantité et le prix des denrées. Il n'en est pas tout- à -fait de même des Méthodes des Sçavans , ni de leurs Ouvrages. Concluons qu'il en est d'une Méthode comme d'un
outil ; un bon Ecrivain écrira mieux avec une
mauvaise plume , qu'an mauvais Ecrivain avec la
meilleure plume du monde. On n'apporte pas assez de soin sur le choix des Maîtres , voilà un
inconvenient. Les Maîtres ne cherchent pas assez
les rapports et les proportions entre la doctrine
et les enfans , voilà un autre inconvenient. Il n'est
donc pas absolument vrai qu'on puisse toûjours
juger de l'outil ou de la Méthode par l'Ouvrage et par l'Eleve.
Pour vous donner cependant , comme vous le
souhaitez , Monsieur , des témoignages rendus en faveur de la Méthode du Bureau , je puis vous
assurer que de toutes les personnes qui ont vu
cette Machine , il n'y en a point qui n'ait avoüé
de bonne foi que cette maniere de montrer les
premiers élemens des Lettres étoit ingénieuse et
plus à la portée des petits enfans que les Méthodes vulgaires ; en passant sous silence le détail des
témoignages de quelques Particuliers, je pourrois vous nomnier ici un des plus intelligens Magistrats et des plus zelez pour le bien de la République des Lettres , qui cut la curiosité de voir par
lui même l'exercice et les operations du Bureau
Typographique. M. Gallyot , accompagna ce Magistrat au College du Plessis , où M. Rollin et
M. l'Abbé de S. Pierre , avoient déja pris la peine
de se rendre. Tous ces Messieurs parlerent favorablement de cette Méthode et je me flatte qu'en -Evj -favcut
730 MERCURE DE FRANCE
faveur de notre cause ils voudront bien me par
donner la liberté que je viens de prendre de les
nommer. Le R. P. Buffier , le Régent de Quatrié
me du College de Louis le Grand , le P. Bouche
ron , Prêtre de l'Oratoire , M. Thomé , Conseiller au Parlement de Grenoble et d'autres Messieurs , se trouverent une autre fois ensemble au
Bureau du College du Plessis et rendirent également témoignage à la verité ; je pourrois vous
citer le Principal et les deux Sous- Principaux du
même College, qui , exempts de prévention , pen
sent favorablement de la Méthode Typographique. Je pourrois vous nommer le Proviseur et le
Principal du College d'Harcourt où le jeune Seigneur Dom Ventura de Liria , a déja fait et
'heureuse experience du Bureau Typographi
que. Je pourrois vous parler de M. Chom
pré , Maître de Pension , et depuis peu Maître
de petite Ecole , qui fait usage actuellement
des classes du Bureau Typographique , dans le
rue des Carmes ou saint Jean de Beauvais.;
exemple qui va être suivi par plusieurs. Maîtres d'Ecoles.
Je pourrois vous rapporter l'exemple d'une petite fille de trois ans , vis- à- vis sainte Catherine ,
rue S.Denis,qui imprime joliment à son Bureau,la
copie qu'on lui donne sur des cartes. Il y a plusieurs autres enfans qui s'amusent utilement au
Bureau Typographique ; cela devroit fermer la.
bouche aux Critiques , retenir leur plume et leur
apprendre enfin à en faire un meilleur usage pour le Public..
Je pourrois vous rapporter le Certificat de la Societé des Arts , inseré dans le Mercure du mois
de Septembre dernier , et vous dire qu'à la Cour même, Qn. fair usage du Bureau pour Monseigneur
AVRIL. 1732. 732
gneur le Dauphin et pour Mesdames de France.
Mais il faut vous dire le fort et le foible , un
Grammairien de Ventabren , donna dans le Mercure du mois de Janvier dernier , une Critique
contre le Bureau , et il en parut une autre dans le
mois de Février suivant , dont le Public fut en◄
core plus mécontent ; enfin M. Gaullier , Régent
de Quatriéme au Plessis , dans les Notes sur la
Méthode de M.le Févre, et M.le Beau, Regent de
Seconde au même College , dans sa petite Piece
comique du mois d'Août dernier , ont pris le
parti de se déclarer hautement contre le Systême
et contre l'Auteur du Bureau Typographique.
C'est à vous , Monsieur , à present d'aprécier ,
d'estimer et d'évaluer chaque témoignage ; si
vous voulez compter les voix avant que de péser
les raisons ; vous avez trois Maîtres qui se sont déclarez contre le Bureau et contre ses Partisans
de la Cour et de la Ville. De ces trois Maîtres
le premier étant, dit- on, imaginé et fait à plaisir ,
il n'en reste que deux ; de ces deux il ne faut pas
compter M. le Beau , qui par licence poëtique
plutôt qu'à mauvais dessein , a préferé le Bureau
pour le sujet de sa petite Piece ; on le lui auroit
même prêté avec plaisir, pour rendre plus sensible aux Spectateurs, la Critique qu'il en vouloit
faire ;on auroit pû fournir bien des pensées comiques sur cette matiere , et on en auroit ri comme
les autres , sans approuver neanmoins l'affectation des personalitez indécentes contre les morts
et les vivans ; conduite qui fait toujours tort au
jugement et au cœur , quelque honneur qu'elle
puisse faire d'ailleurs à l'esprit du Poëte.
2.
De ces trois Maîtres , il ne nous reste donc à
craindre contre le Bureau , que les Critiques de
M.Gaullier , ce laborieux et infatigable Profes- seur
732 MERCURE DE FRANCE
seur , dont les Notes sur la Méthode de M. le
Fevre , p. 104. parlant de la lecture de Terence,
et croyant avoir pour lui l'autorité de M. le Fevre , du P. Jouvency , des Statuts de l'Université,
de M. M. et R. P. des P. de l'Eglise , enfin du
Monde entier, pense- t'il , bors le seul M. Rollin ,
a voulu peut-être à son tour et dans cette occasion , se singulariser contre le jugement du Public , de la Cour , de la Ville , des Colleges , des
Maîtres d'Ecole , de la Societé des Arts , de l'experience , il a peut- être voulu qu'on pût aussi dire delui ce que l'Ecriture dit d'Ismaël. Gen. 16.
12. qu'il leva la main contre tous , Manus ejus
contra omnes ; et ajoûter que tous leveront aussi la
main contre lui , Et manus omnium contra eum ;
article et paroles que M. Gaullier rapporte dans
sa Lettre inserée dans le Mercure du mois d'Octobre dernier , contre quelques lignes du Nouvelliste du Parnasse , dont il ne paroît pas qu'il
eût tant à se plaindre par un long et ennuyeux Commentaire. Bien des Auteurs à Paris , se sont
déclarez contre les Critiques de ce Professeur.
L'Auteur des Tropes attend sa réponse , 1 ° . sur
la difference des Colleges bien ou mal montez,
2. Sur la veritable diference de la Méthode de
Mile Fevre et de la Méthodedes Colleges. 3 ° . Sur
la contradiction de ceux qui, selon leur Méthode,
exigent l'âge de dix ou douze ans pour l'étude
des Rudimens et qui néanmoins les accablent d'une infinité de Regles Grammaticales avant cet âge
là. 4°. Sur les Charlatans de la menuë Litterature,
qui donnent le Catalogue fastueux de leurs petites
compilations. . Sur l'imparfaite division et
l'injuste accusation d'heresie ou de folie. 6° . Sur
les Longins connus et inconnus. 7° . Sur les Livres de compilation , imprimez exprès en lettres fort
"
AVRIL. 1732. 733
fort menuës , pour faciliter la grosse et grande
Litterature. 8. Sur la veritable définition des
mots Pedant et Pedenterie. 9 ° Et enfin , sur la
difference d'un vain Déclamateur, et d'un vrai et
utile Critique.
UnAuteur de Rennes en Bretagne s'est déclaré
contre ce Regent de quatriéme. M. Perquis autre
Breton , a donné une Réponse à la Lettre d'un
Profeffeur anonyme que M. Gaullier avoue être
de lui , petite consolation que l'honneur de tant
d'adversaires , tant qu'un fameux et ancien Recteur de l'Université de Paris , ne daignera pas en
augmenter le nombre , et que méprisant les vaines déclamations de ses critiques, il continuera ses
dignes et pénibles travaux pour enrichir la République des Lettres de la suite du cours historique que le public attend toujours avec impatience , et
qu'il reçoit et lit avec empressement.
1
Je vous envoie , Mr. les nouvelles dimensions
du Bureau , afin que vous puissiez en faire faire selon la mesure des Cartes et des Lettres dont
vous voudrez vous servir. Vous avez dans le Mercure de Novembre la suite des Jeux , des opérations , des exercices et des leçons du Sistême Ty- pografique ; et dans le premier Volume du mois s
de Decembre dernier, la maniere d'étiqueter et degarnir un Bureau complet.
Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
VOU
Ous voulez , Monsieur , juger du Systême
Typographique par l'experience et par la
pratique, ou enfin par des exemples et des autoritez modernes. Cela paroît raisonnable jusqu'à un
certain point , je n'ignore pas que les preuves
sensibles ne frappent davantage , mais je sçai
aussi que ces prétendues preuves sensibles sont
souvent plus sujettes à l'erreur que les preuves de
raisonnement. J'avoue que lorsqu'il s'agit d'un
effet prompt et physique , l'experience est le
moyen le plus sur pour en décider ; supposons ,
par exemple, une dispute sur deux sortes de Poudre à Canon, où il s'agit de sçavoir laquelle a
plus de force et porte plus loin ; tous les raisonnemens sur la composition de cette Poudre , ne
feront jamais sur un bon esprit la même impression que l'experience réïterée, et après laquelle ces
raisonnemens serviront à confirmer , ou pour
mieux dire , à expliquer cette même experience.
Il en est de même de la circulation du sang etde
bien d'autres choses.
AVRIL. 17321 727
Mais quand il s'agit de Méthode et d'institution litteraire ou d'une experience soumise à une
infinité de combinaisons physiques et morales ,
il faut pour lors que la raison soit de la partie
et qu'elle serve par provision à discerner la bonté
et la superiorité de cette Méthode sur les autres ;
je croi que c'est ici le cas du Bureau Tipographique , malgré le raisonnement de ceux qui disent qu'il faut juger de la bonté de cette Méthode
par le grand nombre des Sçavans qu'elle produi c'est- à- dire , selon eux , attendre 20. 30. ou
So.ans avant que de se déterminer. Raisonner ainsi
n'est- ce pas raisonner à peu près comme si l'on
eut dit autrefois ? 1 °. Qu'il falloit juger de la
bonté et de l'excellence de la nouvelle Medecine
par le plus grand nombre de Vieillards de l'un et
del'autre Sexe, auquel cas laMedecine des Patriarches auroit été préferable à toutes les autres.
ra ,
2º. Qu'il falloit juger de la bonté des Loix de
chaque Païs , et de la probité de chaque Nation ,
par le plus petit nombre de procès et par le
moindre casuel des Executeurs de la haute Justice.
3°. Qu'il falloit juger de la politique et de la
science Militaire d'un siecle , par le nombre des
Héros , des grands Souverains et des Peuples heureux qu'ils gouvernoient.
4°. Qu'il falloit juger des avantages de l'Im
primerie , par le plus grand nonbre des Sçavans
et des Livres modernes préferables à ceux des- anciens:
5. Juger des avantages de la Boussole , de la
nouvelle Navigation et de la découverte du nouveau Monde , par le plus grand bonheur et le
meilleur être des Nations qui jouissent des fruits de cette découverte.
6. Juger de la bonté de l'Horlogerie et même B-v des
728 MERCURE DE FRANCE
des Prédicateurs ,, par le meilleur emploi du tems.
. De la préference et superiorité morale des Nations et de leur commerce , par le plus grand
nombre des honnêtes gens,par le plus grand nomnombre des riches , et le plus petit nombre des miserables.
8". Juger de la bonté des Systêmes de morale ,
de politique et même de Religion , par le plus
grand nombre des gens de bien, des gens de probité et de pieté , &c.
Vous voyez par là , Monsieur , qu' est plus --
aisé de juger des effets de pure Mécanique , que
de juger des effets combinez à l'infini dans le Physique et dans le Moral. Que d'incertitudes dans
l'enquête et dans le témoignage des hommes !
sur la complexion et le temperament des enfans !
sur les dispositions de leur esprit sur la Méthode qu'ils ont suivie ! sur les moyens , la capacité ,
les talens , et les soins des parens , des Maîtres et
même des domestiques ! sur l'usage et les Coûtumes de chaque Pays, et enfin sur tous les accidens
de la vie !
Descartes , Pascal , Baile , Newton , Leibnits ,
&c. ont été de grands hommes , s'ensuit- il que
leurs Abécé et leurs Rudimens fussent les meilleurs De quel Rudiment , de quelle Méthode se
servoient a utrefois les Hébreux , les Grecs et les
Latins , et de quelle Méthode se servent aujourd'hui les E spagnols et les Portugais , les Anglois
et les Hollandois ; en faut- il juger par le plus
grand nombre de leurs Sçavans ? Il n'est donc
pas toujours aisé de prouver la bonté d'un Systême ou d'une Méthode, par le plus grand nombre
des habiles gens qu'elle a produits , et si on peut
le dir e à p resent de la Méthode de Décartes , elle
me lai ssoit pas de porter par elle- même la preuve morale
AVRIL 1732. 729
•
2
morale et géométrique de son excellence et de sa
superiorité sur les autres Méthodes. On juge fa、
cilement de la bonté et de l'abondance des récoltes par la qualité , la quantité et le prix des denrées. Il n'en est pas tout- à -fait de même des Méthodes des Sçavans , ni de leurs Ouvrages. Concluons qu'il en est d'une Méthode comme d'un
outil ; un bon Ecrivain écrira mieux avec une
mauvaise plume , qu'an mauvais Ecrivain avec la
meilleure plume du monde. On n'apporte pas assez de soin sur le choix des Maîtres , voilà un
inconvenient. Les Maîtres ne cherchent pas assez
les rapports et les proportions entre la doctrine
et les enfans , voilà un autre inconvenient. Il n'est
donc pas absolument vrai qu'on puisse toûjours
juger de l'outil ou de la Méthode par l'Ouvrage et par l'Eleve.
Pour vous donner cependant , comme vous le
souhaitez , Monsieur , des témoignages rendus en faveur de la Méthode du Bureau , je puis vous
assurer que de toutes les personnes qui ont vu
cette Machine , il n'y en a point qui n'ait avoüé
de bonne foi que cette maniere de montrer les
premiers élemens des Lettres étoit ingénieuse et
plus à la portée des petits enfans que les Méthodes vulgaires ; en passant sous silence le détail des
témoignages de quelques Particuliers, je pourrois vous nomnier ici un des plus intelligens Magistrats et des plus zelez pour le bien de la République des Lettres , qui cut la curiosité de voir par
lui même l'exercice et les operations du Bureau
Typographique. M. Gallyot , accompagna ce Magistrat au College du Plessis , où M. Rollin et
M. l'Abbé de S. Pierre , avoient déja pris la peine
de se rendre. Tous ces Messieurs parlerent favorablement de cette Méthode et je me flatte qu'en -Evj -favcut
730 MERCURE DE FRANCE
faveur de notre cause ils voudront bien me par
donner la liberté que je viens de prendre de les
nommer. Le R. P. Buffier , le Régent de Quatrié
me du College de Louis le Grand , le P. Bouche
ron , Prêtre de l'Oratoire , M. Thomé , Conseiller au Parlement de Grenoble et d'autres Messieurs , se trouverent une autre fois ensemble au
Bureau du College du Plessis et rendirent également témoignage à la verité ; je pourrois vous
citer le Principal et les deux Sous- Principaux du
même College, qui , exempts de prévention , pen
sent favorablement de la Méthode Typographique. Je pourrois vous nommer le Proviseur et le
Principal du College d'Harcourt où le jeune Seigneur Dom Ventura de Liria , a déja fait et
'heureuse experience du Bureau Typographi
que. Je pourrois vous parler de M. Chom
pré , Maître de Pension , et depuis peu Maître
de petite Ecole , qui fait usage actuellement
des classes du Bureau Typographique , dans le
rue des Carmes ou saint Jean de Beauvais.;
exemple qui va être suivi par plusieurs. Maîtres d'Ecoles.
Je pourrois vous rapporter l'exemple d'une petite fille de trois ans , vis- à- vis sainte Catherine ,
rue S.Denis,qui imprime joliment à son Bureau,la
copie qu'on lui donne sur des cartes. Il y a plusieurs autres enfans qui s'amusent utilement au
Bureau Typographique ; cela devroit fermer la.
bouche aux Critiques , retenir leur plume et leur
apprendre enfin à en faire un meilleur usage pour le Public..
Je pourrois vous rapporter le Certificat de la Societé des Arts , inseré dans le Mercure du mois
de Septembre dernier , et vous dire qu'à la Cour même, Qn. fair usage du Bureau pour Monseigneur
AVRIL. 1732. 732
gneur le Dauphin et pour Mesdames de France.
Mais il faut vous dire le fort et le foible , un
Grammairien de Ventabren , donna dans le Mercure du mois de Janvier dernier , une Critique
contre le Bureau , et il en parut une autre dans le
mois de Février suivant , dont le Public fut en◄
core plus mécontent ; enfin M. Gaullier , Régent
de Quatriéme au Plessis , dans les Notes sur la
Méthode de M.le Févre, et M.le Beau, Regent de
Seconde au même College , dans sa petite Piece
comique du mois d'Août dernier , ont pris le
parti de se déclarer hautement contre le Systême
et contre l'Auteur du Bureau Typographique.
C'est à vous , Monsieur , à present d'aprécier ,
d'estimer et d'évaluer chaque témoignage ; si
vous voulez compter les voix avant que de péser
les raisons ; vous avez trois Maîtres qui se sont déclarez contre le Bureau et contre ses Partisans
de la Cour et de la Ville. De ces trois Maîtres
le premier étant, dit- on, imaginé et fait à plaisir ,
il n'en reste que deux ; de ces deux il ne faut pas
compter M. le Beau , qui par licence poëtique
plutôt qu'à mauvais dessein , a préferé le Bureau
pour le sujet de sa petite Piece ; on le lui auroit
même prêté avec plaisir, pour rendre plus sensible aux Spectateurs, la Critique qu'il en vouloit
faire ;on auroit pû fournir bien des pensées comiques sur cette matiere , et on en auroit ri comme
les autres , sans approuver neanmoins l'affectation des personalitez indécentes contre les morts
et les vivans ; conduite qui fait toujours tort au
jugement et au cœur , quelque honneur qu'elle
puisse faire d'ailleurs à l'esprit du Poëte.
2.
De ces trois Maîtres , il ne nous reste donc à
craindre contre le Bureau , que les Critiques de
M.Gaullier , ce laborieux et infatigable Profes- seur
732 MERCURE DE FRANCE
seur , dont les Notes sur la Méthode de M. le
Fevre , p. 104. parlant de la lecture de Terence,
et croyant avoir pour lui l'autorité de M. le Fevre , du P. Jouvency , des Statuts de l'Université,
de M. M. et R. P. des P. de l'Eglise , enfin du
Monde entier, pense- t'il , bors le seul M. Rollin ,
a voulu peut-être à son tour et dans cette occasion , se singulariser contre le jugement du Public , de la Cour , de la Ville , des Colleges , des
Maîtres d'Ecole , de la Societé des Arts , de l'experience , il a peut- être voulu qu'on pût aussi dire delui ce que l'Ecriture dit d'Ismaël. Gen. 16.
12. qu'il leva la main contre tous , Manus ejus
contra omnes ; et ajoûter que tous leveront aussi la
main contre lui , Et manus omnium contra eum ;
article et paroles que M. Gaullier rapporte dans
sa Lettre inserée dans le Mercure du mois d'Octobre dernier , contre quelques lignes du Nouvelliste du Parnasse , dont il ne paroît pas qu'il
eût tant à se plaindre par un long et ennuyeux Commentaire. Bien des Auteurs à Paris , se sont
déclarez contre les Critiques de ce Professeur.
L'Auteur des Tropes attend sa réponse , 1 ° . sur
la difference des Colleges bien ou mal montez,
2. Sur la veritable diference de la Méthode de
Mile Fevre et de la Méthodedes Colleges. 3 ° . Sur
la contradiction de ceux qui, selon leur Méthode,
exigent l'âge de dix ou douze ans pour l'étude
des Rudimens et qui néanmoins les accablent d'une infinité de Regles Grammaticales avant cet âge
là. 4°. Sur les Charlatans de la menuë Litterature,
qui donnent le Catalogue fastueux de leurs petites
compilations. . Sur l'imparfaite division et
l'injuste accusation d'heresie ou de folie. 6° . Sur
les Longins connus et inconnus. 7° . Sur les Livres de compilation , imprimez exprès en lettres fort
"
AVRIL. 1732. 733
fort menuës , pour faciliter la grosse et grande
Litterature. 8. Sur la veritable définition des
mots Pedant et Pedenterie. 9 ° Et enfin , sur la
difference d'un vain Déclamateur, et d'un vrai et
utile Critique.
UnAuteur de Rennes en Bretagne s'est déclaré
contre ce Regent de quatriéme. M. Perquis autre
Breton , a donné une Réponse à la Lettre d'un
Profeffeur anonyme que M. Gaullier avoue être
de lui , petite consolation que l'honneur de tant
d'adversaires , tant qu'un fameux et ancien Recteur de l'Université de Paris , ne daignera pas en
augmenter le nombre , et que méprisant les vaines déclamations de ses critiques, il continuera ses
dignes et pénibles travaux pour enrichir la République des Lettres de la suite du cours historique que le public attend toujours avec impatience , et
qu'il reçoit et lit avec empressement.
1
Je vous envoie , Mr. les nouvelles dimensions
du Bureau , afin que vous puissiez en faire faire selon la mesure des Cartes et des Lettres dont
vous voudrez vous servir. Vous avez dans le Mercure de Novembre la suite des Jeux , des opérations , des exercices et des leçons du Sistême Ty- pografique ; et dans le premier Volume du mois s
de Decembre dernier, la maniere d'étiqueter et degarnir un Bureau complet.
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Résumé : DOUZIEME LETTRE sur la Bibliotheque des Enfans et sur les dimensions du Bureau Typographique.
La lettre aborde la méthode typographique employée dans la Bibliothèque des Enfants et les dimensions du Bureau Typographique. L'auteur examine la validité de juger une méthode par l'expérience ou par le raisonnement. Il estime que, bien que l'expérience soit essentielle pour des questions mécaniques, elle est moins fiable pour évaluer des méthodes littéraires ou éducatives en raison de la complexité des facteurs impliqués. L'auteur critique l'idée de juger la méthode typographique par le nombre de savants qu'elle produit, comparant cela à des jugements absurdes dans d'autres domaines comme la médecine, les lois ou la politique. Il affirme que la qualité d'une méthode ne peut pas toujours être prouvée par le nombre de personnes qu'elle forme. La lettre mentionne plusieurs témoignages favorables à la méthode typographique, provenant de magistrats, de professeurs et de membres de la cour. Cependant, elle reconnaît également des critiques, notamment celles de certains professeurs et d'un grammairien. L'auteur conclut en soulignant la difficulté de juger une méthode uniquement par ses résultats et en invitant à une évaluation plus nuancée des témoignages et des raisons. Il fournit également des informations sur les dimensions du Bureau Typographique et les ressources disponibles pour en savoir plus sur le système typographique.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 857-871
TREISIÈME Lettre, sur la Biblioteque des Enfans.
Début :
Vous demandez, MONSIEUR, si pour exercer la mémoire d'un petit [...]
Mots clefs :
Bibliothèque des enfants, Méthode, Mémoire, Apprendre, Livre, Collèges, Écoles, Opérations de l'esprit, Théorie, Pratique, Latin
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : TREISIÈME Lettre, sur la Biblioteque des Enfans.
TREISIEME Lettre , sur la Biblioteque
des Enfans.
§. 1. Sur l'Exercice de la Mémoire.
V
Ous demandez ,
MONSIEUR , si
pour exercer la mémoire d'un petit
Enfant, il est mieux de lui faire apprendre bien des choses par cœur , ou de se
contenter de simples lectures et de quelques opérations de l'esprit proportionées
à son âge et à sa capacité ; vous supposez
que la mémoire d'un enfant est peut être
quelquefois assez exercée par l'attention
continuelle qu'il donne à écouter , à imiter et à retenir les sons et les mots de la
langue maternelle. Je crois que pour bien
répondre à votre question , il faut sçavoir en premier lieu , si l'enfant doit ensuite aller au College , ou faire ses études
dans une maison particuliere;et en second
lieu , sçavoir à quoi les parens destinent
leur
858 MERCURE DE FRANCE
leur enfant ; car quoique les premiers élémens des Lettres soient également necessaires pour la bonne et la noble éducation dans la plupart des professions, il faut
cependant convenir que le Prêtre , le Soldat , l'Avocat , le Medecin , le Financier ,
le Marchand , l'Artisan , &c. pouroient
être conduits de bonne heure , par des
routes un peu differentes , et quand il y
auroit des Colléges , ou des Ecoles exprès
pour chacune de ces professions , il n'en
seroit peut être pas plus mal.
à
Lorqu'on sçait à quel Etat un enfant est
destiné, on fait choix des Livres qui conviennent le mieux à cet état ; on inspire. de bonne heure et peu peu à l'enfant
les nobles sentimens de la profession qu'il
doit embrasser un jour;on le tourne toutà-fait du côté de son devoir ; on lui parle incessamment du point d'honneur de sa
profession ; on lui donne des exemples
sensibles de ceux , qui, par leur mérite et
leurs vertus , s'y sont rendus illustres ; et
enfin des exemples de ceux , qui , par
leurs vices et par leurs défauts , ont été
méprisez pendant leur vie et après leur
mort. Par là on imprime peu à peu , profondement et souvent pour toujours , l'amour de la vertu et les sentimens exigez
dans chaque état. Par là on donne de
l'hor
MA Y. 859 .
1732.
Phorreur pour le crime , et l'on prépare
un enfant à l'ordre habituel d'une vie réglée. Je veux dire , par exemple , qu'on
éleve en poltron, selon le monde, un enfant destiné à l'Eglise , pendant qu'on l'éleve aussi encourageux martyr,selon J.C.
s'il falloit répandre son sang et souffrir la
mort pour la foy , &c. Quoique chaque
Chrétien soit dans la même obligation ,
le Prêtre doit l'exemple au laïque.
Un homme d'épée est toujours censé
homme de guerre , homme d'honneur et
de cœur ; on lui doit une éducation plus
noble , plus cavaliere, plus aisée, plus polie , mais en visant à la perfection de son
état, elle n'est pas moins soumise aux devoirs de la Religion .
Connoître le vrai et le faux , le juste
et l'injuste , ou le bien et le mal , les devoirs du sujet et ceux du Prince ; avoiť
quelque idée de tout , sçavoir en cas de
besoin , ce qu'un Gentilhomme a dû apprendre pour la gloire du Prince, et pour
le bien de l'état , être au courant des nouvelles litteraires , historiques et politiques , après avoir parcouru les siècles de
Fantiquité; sçavoir , enfin la Théorie et la
Pratique de ce qui a rapport à sa profession; Voilà le but qu'on ne devroit jamais
perdre de vûë. Du temps des Hébreux
B des
860 MERCURE DE FRANCE
des Grecs et des Romains, le même homme pouvoit servir de Soldat pendant la
guerre, et de Juge pendant la paix ; aujourd'hui à peine veut - on se rendre bien
capable de l'une de ces deux professions ,
mais venons à la question.
Quand il sera temps d'exercer la mémoire d'un Enfant , on ne doit pas le
charger beaucoup par jour , il lui faut
donner peu de leçons , mais il est bon de
continuer sans interruption et d'ajouter
les leçons les unes aux autres , pour faire
réciter la semaine et le mois , afin de connoître et de cultiver la mémoire à proportion de l'âge et des forces de l'enfant;
l'essentiel est de bien choisir les sujets et
de tenir l'enfant en haleine , autrement
c'est du temps perdu , parce que la moindre maladie , la moindre absence , et le
moindre relâchement , obligent toujours
à recommencer; c'est pourquoi la plupart
des enfans ne sçavent ensuite presquerien;
avec eux onne peut compter que sur l'habitude contractée par la continuelle réïtération des actes , selon la méthode du
Bureau tipographique.
و
Je ne crois pas,au reste,qu'il faille char:
ger la mémoire d'un Enfant de plusieurs
longues Prieres , ni d'aucun grand Catechisme; on doit se contenter du petit Catéchisme
MAY. 1732. 861
techisme du diocèse ; il est aisé de l'alonger par les explications que l'on aura soin
d'en faire à l'enfant , à propos et dans les
Occasions favorables. On peut faire lire de
grands Catéchismes et des Catéchismes
historiques , par demandes et par réponses , sans obliger de les apprendre par
cœur et mot à mot ; il suffit de les faire
bien comprendre et d'en faire retenir le
sens et les choses plutôt que les termes ;
on voit bien des enfans de huit , de dix
à douze ans , oublier les centaines de pages apprises inutilement par cœur ; on
doit instruire l'esprit en cultivant la mémoire et ne pas s'en tenir à la méthode
de ceux qui ne sçavent que faire réciter
la leçon donnée à un enfant ; c'est une erreur de s'imaginer qu'un enfant n'est capable que de mémoire; il est bon de l'exercer à retenir un fait , une Fable , un Conte , après en avoir fait la lecture , mais
on doit tâcher de le lui faire rendre su
le champ,sans l'asservir aux mêmes termės.
Des critiques du Bureau et zélez partisans des Méthodes vulgaires , ayant fait
de leur mieux pour prouver à une Dame
que les Méthodes et les Réfléxions étoient
nuisibles à la santé des petits enfans; certè
bonne mere , trop crédule , a ôté le CatéBij chisme
862 MERCURE DE FRANCE
chisme au sien , et en a différé l'usage
pour une autre fois , s'imaginant qu'il est
plus difficile , et parconséquant plus dangereux de faire passer le catéchisme abstrait à l'esprit par l'oreille , que d'y faire
passer l'A , B, C, matériel et sensible
par les yeux. Cette mere me rappelle celle
dont on blâmoit, avec raison , la criminelle indulgence qu'elle avoit pour les excès vicieux de son fils , et qui répondit ,
en parlant de son enfant, qu'il soit ce qu'il
voudra , pourvu qu'il vive. Le Lecteur.
voit facilement l'erreur et la fausseté de
ces sortes de maximes , mais il ne voit pas
toujours également à qui en est la plus
grande faute. Il est vrai que les Méthodes
et les Catéchismes demandent beaucoup
de réfléxions de la part des bons Maîtres,
mais il n'est pas également vrai que ces
bons Maîtres exigent d'abord d'un petit
enfant aucune application ni aucune réfléxion pénible dans l'exercice litteraire ,
ni dans l'articulation , ou la récitation de
ses Prieres et de son Catéchisme. On ne
songe pour lors qu'à semer, et l'on attend
peu à peu et à proportion de l'âge, le dévelopement , la suite et la liaison des
idées , on attend ainsi l'action de réflé
chir , avec l'intelligence des mots et des
choses , ajoutez à cela que l'objection ,
tirée
MAY. 1732: 867
tirée du côté de la santé du corps est nulle , quand il s'agit de l'instruction chré
tienne , nécessaire à tous les enfans sains
ou malades , de quelque état et de quelque condition qu'ils puissent être.
La lecture des Livres historiques de la
Bible , celle des Métamorphoses d'Ovide
et des Fables d'Esope, exerceront agréablement un enfant , les images parlent
aux yeux , et les discours aux oreilles ; il
faut donc faire bien remarquer les exemples sensibles des vices et des vertus , et
apprendre à l'enfant à juger sainement de
chaque chose; ilen est capable à tout âge;
l'opération du jugement est l'exercice essentiel qui influe le plus dans toute la vie,
et c'est ordinairement celui qu'on exige
le moins dans un simple Précepteur ; en
quoi les parens ne font pas mieux , ils
devroient être plus éclairez et plus déli- cats sur cet article. Il est donc inutile de
faire apprendre par cœur mille choses méprisées dans un âge avancé , mais on peut
cultiver la mémoire en apprenant des
choses que l'on peut utilement réciter
toute la vie , comme des Sentences , des
Maximes de la Bible , de l'Imitation de
J. C. et de plusieurs autres bons Livres ,
saints ou prophanes , consultant toujours
les forces et le gout de l'enfant.
Biij Quand
894 MERCURE DE FRANCE
Quand l'enfant verra et expliquera les
Auteurs Latins , doit- on l'asservir chaque jour à en apprendre des leçons par
cœur, en Prose et en Vers ? Il semble que
dans les Colléges où l'on est obligé de
faire travailler, pour ainsi dire , à la toise , cette Méthode soit absolument nécessaire ; d'ailleurs, en cultivant la mémoire
on peut former peu à peu le gout des enfans sur celui des Auteurs qu'ils voient..
Dans les Etudes particulieres et domeștiques , il est encore bon de faire apprendre les plus beaux endroits des Auteurs ,
mais on doit en faire un bon choix et ne
pas s'asservir au courant du Livre , ainsi
qu'on le pratique dans la plupart des Ecofes. On doit viser à bien employer letems
et à remplir de bonnes idées la tête de
L'Ecolier , qui n'apprend guére.que des
mots , selon l'usage vulgaire.
Que fait ordinairement un enfant aprèsIo ou 12 ans de College , on dit qu'il y
apprend seulement la maniere d'étudier ,
il est vrai qu'il pourroit et qu'il devroit.
même y avoir appris cette maniere , mais ,
le grand nombre en sort comme des Galeres et pour renoncer aux Etudes. Est- ce
là le fruit d'une bonne Méthode ? J'ai
qui dire à un jeune Seigneur , sur la fin
de sa Rhétorique, qu'il auroit mieux aimé.
Cou
MAY 173.2. 865
coucher sur le sable d'un Manége , que
dans le meilleur lit de son Collége. Il en
parloit comme du lieu le plus haïssable ,
et ne pouvoit pas comprendre comment
ses parensavoient eu le courage de le laisser croupir si long- temps dans le même
endroit, pour y apprendre si peu de chose ; au lieu de lui avoir donné plutôt une
éducation Militaire et digne de sa naissance.
Jecr oi qu'un Enfant pourroit bien exercer sa mémoire , sans apprendre par cœur
des pages de Latin et de François, en Prose
ou en Vers; je ne voudrois exiger régu
lierement cet exercice que quand il commence de sentir et de gouter les morceaux choisis qu'on voudroit lui faire ap
prendre , c'est-à- dire , pour le plutôt en
cinquième et en quatriéme ; je ne veux
pas dire par-làqu'il ne doive rien appren
dre avant ce temps-là ; mais je ne vou
drois exercer sa mémoire que sur des
choses agréables et qui ne lui inspirassent
jamais la haine ou le dégout qu'ils font ordinairement paroître pour les Maîtres et
pour les Livres. Je m'en rapporte volon
tiers à l'expérience des meilleurs Maîtres,
qui , bien loin de gêner les enfans dans
leurs premiers exercices, ne leur montrent
que des objets atrayans et instructifs, proBiiij. por-
86% MERCURE DE FRANCE
portionnez à leur gout et à leur âge.
N'est- ce pas abuser de l'enfant que de
l'obliger d'apprendre par cœur et à coups
de verges de grandes leçons qu'il ne comprend point , et que bien souvent le Maî
tre ne pourroit expliquer lui-même,comme la doctrine de plusieurs Rudimens en
Latin et en François , sur les Parties du
Discours , sur les Concordances et sur les
termes bizarres et inintelligibles de Gérondif et de Supin , &c. Il est bon de faire apprendre ces termes d'usage avec les
conjugaisons des Verbes , mais il est inutile de raisonner beaucoup avec lui sur
des mots qu'on n'entend pas bien en sortant de Philosophie. On doit avoir beaucoup de discrétion pour la foiblesse des
enfans , et ne pas imiter la simplicité de
cette bonne mere , qui prenant soin ellemême de la premiere éducation de son
fils , lui fit apprendre par cœur l'Avis au
Lecteur , et ensuite le Privilege du Roy,
imprimez à la tête du Livre.
Je ne sçais , au reste , lequel on doit le
plus admirer, de la simplicité de cette bonne mere,ou de la Méthode de ce même Rudiment , dont l'Editeur , entre le Privilege
et la premiere Déclinaison , donne par demandes et par réponses , l'explication et
la définition des noms, des cas et de l'ar
ticle
MA Y. 1732. 867
ticle hic , hac, hoc , qu'il met sans François, afin de le marier ensuite avec Musa
( la Muse ) &c. et Penelope ( la femme
d'Ulisse ) &c. et qu'il donne avec ce Titre
judicieux : Méthode pour bien apprendre
aux enfans à décliner les Noms ; car d'ordinaire ils les déclinent sans sçavoir l'origine
de ce Verbe, Décliner, et apprennent le Latin plutôt par routine , qu'àfond. Ce Rudiment fait par un P.. D. L..C. D. J. et
qui est peut-être un des plus gros et des
plus complets en Latin et en François , a
été bien imprimé à Grenoble , chezJean
François Champ en 1717.
J'ai rapporté ce fait et cet exemple
pour faire voir que l'ordre Théorique
des Livres n'est pas toujours le meilleus
à suivre , en conduisant et en dirigeant les enfans ; car le plus habile homme du monde ne fera jamais comprendre
à un enfant ce que c'est que Décliner et
Conjuguer, à moins qu'il ne pratique les
Déclinaisons et les Conjugaisons, et qu'il
ne rende sensibles les exemples à mesure
Penfant déclinera et conjuguera ,
comme on le fait pratiquer sur la Table.:
du Bureau Typographyque , et en suivant l'essai du Rudiment pratique de la
Langue Latine. Un enfant n'est- il pas bien
avancé lorsqu'il sçait que décliner, vient
que 9.
B.Y
dia
868 MERCURE DE FRANCE
du mot declinare. Avec cette sçavante etprofonde définition , un enfant appren- i
dra-t-il le Latin àfond , plutôt que par routi- ·
ne? Et quand il l'apprendroit par routine,
comme sa propre Langue , en seroit- ce
plus mal ?
L'Enfant destiné au Collége , doit être
montré autrement que celui qui doit faire -
ses études dans la maison paternelle. Le
premier apprendra son Rudiment par
cœur , il sera exercé pour répondre à certaines questions d'usage scolastique , et
pour composer en Latin quelques petites
Frases ; en unmot , il doit remplir sa mé...
moire , d'une maniere à pouvoir subir
l'examen préliminaire qui donne l'entrée
des Classes. L'enfant qui reste chez lui
peut mieux employer son temps ; il s'agit
moins de le faire paroître et dele faire ré-..
pondre en Perroquet , que de le rendre .
réellement fort sur ses petits exercices.Je
croi cette distinction absolument necessaire , parce qu'il pourroit arriver qu'un
enfant de 7 à 9 ans , tres capable dans sa
maison , scachant bien lire le Latin , fe.
François et le Grec , sçachant l'Histoire
et la Fable ; sçachant un peu expliquer
Phédre , ou quelque autre Auteur , seroit
néanmoins condamné dans un College à
passer au Marmoutier , ou à la Classe des
enfans
MA Y. 1732. 869
enfans qui apprennent à lire ; et cela ,
pour n'avoir pû mettre en Latin une petite Frase et n'avoir pû répondre à l'Examinateur qui lui auroit demandé , par
exemple, (audire ) ne se trouve- t- il point en
plus d'un ou de deux endroits?Surquoi il est
bon d'observer deux choses ; la premiere,
que l'abus de communiquer les demanet les argumens , regarde les Philosophes et les Théologiens , plutôt que les
petits enfans ; la seconde , que bien des
Regens , pour décrier les Méthodes particulieres et relever leur Méthode vulgaire , refuseront à un enfant assez avancé,
le témoignage qu'ils accorderont à d'autres enfans moins habiles, quant au fond ,
mais mieux au fait de l'articulation sco---
lastique , c'est pourquoi il faut opter entre ces deux Méthodes.
Mais l'éducation publique doit- elle
être préférée à l'instruction domestique.
et particuliere ? On peut lire là - dessus
Quintilien et M. l'Abbé de S. Pierre ; en
attendant , voici la réponse du sçavant et
zélé Professeur M. R. ancien Recteur de
l'Université, dans l'article second, du gouvernement des Colleges , pag. 418. Delamaniere d'enseigner et d'étudier les Belles Lettres , par rapport à l'esprit et au cœur, tom.
4. Pendant tout le temps que j'ai été
Bvj "
chargé
870 MERCURE DE FRANCE
» chargé de l'éducation de la jeunesse ,
>> parfaitement instruit des dangers qui se
>> rencontrent et dans les Maisons parti-.
culieres, et dans les Colléges , je n'ai jamais osé prendre sur moi de donner con-
» seil sur cette matiere , et je me suis con
».tenté de m'appliquer avec le plus de
» soin qu'il m'a été possible , à l'instruc-
» tion des jeunes gens , que la divine Pro-
» vidence m'addressoit. Je crois devoir
» encore garder la même neutralité et lais-
»ser à la prudence des parens à décider
» une question , qui soufre certainement
» de grandes difficultez de part et d'autre.
La neutralité de M. Rollin . semble décider la question.
On lit dans le livre du R. P. Jean Croiset , de la Compagnie de Jesus , que La
jeunesse , comme plus susceptible de venin
ne sedeffend jamais de la contagion, et qu'une
assemblée de jeunes gens, tant soit- pen négli
gez, est une pernicieuse Ecoles etyfit -on,
s'il est possible , quelque progrès dans les
Lettres, on y fera toujours une terrible perte
pour les mœurs. Reglement pour M M. les
Pensionnaires des Peres Jesuites du Col
le de Lyon , 2. édition , p. 47. p. 65
C'est donc aux parens à bien examiner
devant Dieu quel parti ils doivent prendre, à . balancer équitablement les avans
rages et les inconveniens qui se rencontrent de part et d'autre , à faire un bon
choix de Colleges ou de Maîtres. Si les
Colleges paroissent tant soit peu négligez , la contagion et la peste étant plus
probables dans les Ecoles publiques que
dans la maison paternelle , il sera encore
aisé de décider la question , mais si les
Colleges sont tels qu'ils devroient être
ou selon le Projet de M. l'Abbé de Saine
Pierre , ils sont peut-être pour lors préferables pour le plus grand nombre des enfans destinez à l'Eglise ou à la Robe.
des Enfans.
§. 1. Sur l'Exercice de la Mémoire.
V
Ous demandez ,
MONSIEUR , si
pour exercer la mémoire d'un petit
Enfant, il est mieux de lui faire apprendre bien des choses par cœur , ou de se
contenter de simples lectures et de quelques opérations de l'esprit proportionées
à son âge et à sa capacité ; vous supposez
que la mémoire d'un enfant est peut être
quelquefois assez exercée par l'attention
continuelle qu'il donne à écouter , à imiter et à retenir les sons et les mots de la
langue maternelle. Je crois que pour bien
répondre à votre question , il faut sçavoir en premier lieu , si l'enfant doit ensuite aller au College , ou faire ses études
dans une maison particuliere;et en second
lieu , sçavoir à quoi les parens destinent
leur
858 MERCURE DE FRANCE
leur enfant ; car quoique les premiers élémens des Lettres soient également necessaires pour la bonne et la noble éducation dans la plupart des professions, il faut
cependant convenir que le Prêtre , le Soldat , l'Avocat , le Medecin , le Financier ,
le Marchand , l'Artisan , &c. pouroient
être conduits de bonne heure , par des
routes un peu differentes , et quand il y
auroit des Colléges , ou des Ecoles exprès
pour chacune de ces professions , il n'en
seroit peut être pas plus mal.
à
Lorqu'on sçait à quel Etat un enfant est
destiné, on fait choix des Livres qui conviennent le mieux à cet état ; on inspire. de bonne heure et peu peu à l'enfant
les nobles sentimens de la profession qu'il
doit embrasser un jour;on le tourne toutà-fait du côté de son devoir ; on lui parle incessamment du point d'honneur de sa
profession ; on lui donne des exemples
sensibles de ceux , qui, par leur mérite et
leurs vertus , s'y sont rendus illustres ; et
enfin des exemples de ceux , qui , par
leurs vices et par leurs défauts , ont été
méprisez pendant leur vie et après leur
mort. Par là on imprime peu à peu , profondement et souvent pour toujours , l'amour de la vertu et les sentimens exigez
dans chaque état. Par là on donne de
l'hor
MA Y. 859 .
1732.
Phorreur pour le crime , et l'on prépare
un enfant à l'ordre habituel d'une vie réglée. Je veux dire , par exemple , qu'on
éleve en poltron, selon le monde, un enfant destiné à l'Eglise , pendant qu'on l'éleve aussi encourageux martyr,selon J.C.
s'il falloit répandre son sang et souffrir la
mort pour la foy , &c. Quoique chaque
Chrétien soit dans la même obligation ,
le Prêtre doit l'exemple au laïque.
Un homme d'épée est toujours censé
homme de guerre , homme d'honneur et
de cœur ; on lui doit une éducation plus
noble , plus cavaliere, plus aisée, plus polie , mais en visant à la perfection de son
état, elle n'est pas moins soumise aux devoirs de la Religion .
Connoître le vrai et le faux , le juste
et l'injuste , ou le bien et le mal , les devoirs du sujet et ceux du Prince ; avoiť
quelque idée de tout , sçavoir en cas de
besoin , ce qu'un Gentilhomme a dû apprendre pour la gloire du Prince, et pour
le bien de l'état , être au courant des nouvelles litteraires , historiques et politiques , après avoir parcouru les siècles de
Fantiquité; sçavoir , enfin la Théorie et la
Pratique de ce qui a rapport à sa profession; Voilà le but qu'on ne devroit jamais
perdre de vûë. Du temps des Hébreux
B des
860 MERCURE DE FRANCE
des Grecs et des Romains, le même homme pouvoit servir de Soldat pendant la
guerre, et de Juge pendant la paix ; aujourd'hui à peine veut - on se rendre bien
capable de l'une de ces deux professions ,
mais venons à la question.
Quand il sera temps d'exercer la mémoire d'un Enfant , on ne doit pas le
charger beaucoup par jour , il lui faut
donner peu de leçons , mais il est bon de
continuer sans interruption et d'ajouter
les leçons les unes aux autres , pour faire
réciter la semaine et le mois , afin de connoître et de cultiver la mémoire à proportion de l'âge et des forces de l'enfant;
l'essentiel est de bien choisir les sujets et
de tenir l'enfant en haleine , autrement
c'est du temps perdu , parce que la moindre maladie , la moindre absence , et le
moindre relâchement , obligent toujours
à recommencer; c'est pourquoi la plupart
des enfans ne sçavent ensuite presquerien;
avec eux onne peut compter que sur l'habitude contractée par la continuelle réïtération des actes , selon la méthode du
Bureau tipographique.
و
Je ne crois pas,au reste,qu'il faille char:
ger la mémoire d'un Enfant de plusieurs
longues Prieres , ni d'aucun grand Catechisme; on doit se contenter du petit Catéchisme
MAY. 1732. 861
techisme du diocèse ; il est aisé de l'alonger par les explications que l'on aura soin
d'en faire à l'enfant , à propos et dans les
Occasions favorables. On peut faire lire de
grands Catéchismes et des Catéchismes
historiques , par demandes et par réponses , sans obliger de les apprendre par
cœur et mot à mot ; il suffit de les faire
bien comprendre et d'en faire retenir le
sens et les choses plutôt que les termes ;
on voit bien des enfans de huit , de dix
à douze ans , oublier les centaines de pages apprises inutilement par cœur ; on
doit instruire l'esprit en cultivant la mémoire et ne pas s'en tenir à la méthode
de ceux qui ne sçavent que faire réciter
la leçon donnée à un enfant ; c'est une erreur de s'imaginer qu'un enfant n'est capable que de mémoire; il est bon de l'exercer à retenir un fait , une Fable , un Conte , après en avoir fait la lecture , mais
on doit tâcher de le lui faire rendre su
le champ,sans l'asservir aux mêmes termės.
Des critiques du Bureau et zélez partisans des Méthodes vulgaires , ayant fait
de leur mieux pour prouver à une Dame
que les Méthodes et les Réfléxions étoient
nuisibles à la santé des petits enfans; certè
bonne mere , trop crédule , a ôté le CatéBij chisme
862 MERCURE DE FRANCE
chisme au sien , et en a différé l'usage
pour une autre fois , s'imaginant qu'il est
plus difficile , et parconséquant plus dangereux de faire passer le catéchisme abstrait à l'esprit par l'oreille , que d'y faire
passer l'A , B, C, matériel et sensible
par les yeux. Cette mere me rappelle celle
dont on blâmoit, avec raison , la criminelle indulgence qu'elle avoit pour les excès vicieux de son fils , et qui répondit ,
en parlant de son enfant, qu'il soit ce qu'il
voudra , pourvu qu'il vive. Le Lecteur.
voit facilement l'erreur et la fausseté de
ces sortes de maximes , mais il ne voit pas
toujours également à qui en est la plus
grande faute. Il est vrai que les Méthodes
et les Catéchismes demandent beaucoup
de réfléxions de la part des bons Maîtres,
mais il n'est pas également vrai que ces
bons Maîtres exigent d'abord d'un petit
enfant aucune application ni aucune réfléxion pénible dans l'exercice litteraire ,
ni dans l'articulation , ou la récitation de
ses Prieres et de son Catéchisme. On ne
songe pour lors qu'à semer, et l'on attend
peu à peu et à proportion de l'âge, le dévelopement , la suite et la liaison des
idées , on attend ainsi l'action de réflé
chir , avec l'intelligence des mots et des
choses , ajoutez à cela que l'objection ,
tirée
MAY. 1732: 867
tirée du côté de la santé du corps est nulle , quand il s'agit de l'instruction chré
tienne , nécessaire à tous les enfans sains
ou malades , de quelque état et de quelque condition qu'ils puissent être.
La lecture des Livres historiques de la
Bible , celle des Métamorphoses d'Ovide
et des Fables d'Esope, exerceront agréablement un enfant , les images parlent
aux yeux , et les discours aux oreilles ; il
faut donc faire bien remarquer les exemples sensibles des vices et des vertus , et
apprendre à l'enfant à juger sainement de
chaque chose; ilen est capable à tout âge;
l'opération du jugement est l'exercice essentiel qui influe le plus dans toute la vie,
et c'est ordinairement celui qu'on exige
le moins dans un simple Précepteur ; en
quoi les parens ne font pas mieux , ils
devroient être plus éclairez et plus déli- cats sur cet article. Il est donc inutile de
faire apprendre par cœur mille choses méprisées dans un âge avancé , mais on peut
cultiver la mémoire en apprenant des
choses que l'on peut utilement réciter
toute la vie , comme des Sentences , des
Maximes de la Bible , de l'Imitation de
J. C. et de plusieurs autres bons Livres ,
saints ou prophanes , consultant toujours
les forces et le gout de l'enfant.
Biij Quand
894 MERCURE DE FRANCE
Quand l'enfant verra et expliquera les
Auteurs Latins , doit- on l'asservir chaque jour à en apprendre des leçons par
cœur, en Prose et en Vers ? Il semble que
dans les Colléges où l'on est obligé de
faire travailler, pour ainsi dire , à la toise , cette Méthode soit absolument nécessaire ; d'ailleurs, en cultivant la mémoire
on peut former peu à peu le gout des enfans sur celui des Auteurs qu'ils voient..
Dans les Etudes particulieres et domeștiques , il est encore bon de faire apprendre les plus beaux endroits des Auteurs ,
mais on doit en faire un bon choix et ne
pas s'asservir au courant du Livre , ainsi
qu'on le pratique dans la plupart des Ecofes. On doit viser à bien employer letems
et à remplir de bonnes idées la tête de
L'Ecolier , qui n'apprend guére.que des
mots , selon l'usage vulgaire.
Que fait ordinairement un enfant aprèsIo ou 12 ans de College , on dit qu'il y
apprend seulement la maniere d'étudier ,
il est vrai qu'il pourroit et qu'il devroit.
même y avoir appris cette maniere , mais ,
le grand nombre en sort comme des Galeres et pour renoncer aux Etudes. Est- ce
là le fruit d'une bonne Méthode ? J'ai
qui dire à un jeune Seigneur , sur la fin
de sa Rhétorique, qu'il auroit mieux aimé.
Cou
MAY 173.2. 865
coucher sur le sable d'un Manége , que
dans le meilleur lit de son Collége. Il en
parloit comme du lieu le plus haïssable ,
et ne pouvoit pas comprendre comment
ses parensavoient eu le courage de le laisser croupir si long- temps dans le même
endroit, pour y apprendre si peu de chose ; au lieu de lui avoir donné plutôt une
éducation Militaire et digne de sa naissance.
Jecr oi qu'un Enfant pourroit bien exercer sa mémoire , sans apprendre par cœur
des pages de Latin et de François, en Prose
ou en Vers; je ne voudrois exiger régu
lierement cet exercice que quand il commence de sentir et de gouter les morceaux choisis qu'on voudroit lui faire ap
prendre , c'est-à- dire , pour le plutôt en
cinquième et en quatriéme ; je ne veux
pas dire par-làqu'il ne doive rien appren
dre avant ce temps-là ; mais je ne vou
drois exercer sa mémoire que sur des
choses agréables et qui ne lui inspirassent
jamais la haine ou le dégout qu'ils font ordinairement paroître pour les Maîtres et
pour les Livres. Je m'en rapporte volon
tiers à l'expérience des meilleurs Maîtres,
qui , bien loin de gêner les enfans dans
leurs premiers exercices, ne leur montrent
que des objets atrayans et instructifs, proBiiij. por-
86% MERCURE DE FRANCE
portionnez à leur gout et à leur âge.
N'est- ce pas abuser de l'enfant que de
l'obliger d'apprendre par cœur et à coups
de verges de grandes leçons qu'il ne comprend point , et que bien souvent le Maî
tre ne pourroit expliquer lui-même,comme la doctrine de plusieurs Rudimens en
Latin et en François , sur les Parties du
Discours , sur les Concordances et sur les
termes bizarres et inintelligibles de Gérondif et de Supin , &c. Il est bon de faire apprendre ces termes d'usage avec les
conjugaisons des Verbes , mais il est inutile de raisonner beaucoup avec lui sur
des mots qu'on n'entend pas bien en sortant de Philosophie. On doit avoir beaucoup de discrétion pour la foiblesse des
enfans , et ne pas imiter la simplicité de
cette bonne mere , qui prenant soin ellemême de la premiere éducation de son
fils , lui fit apprendre par cœur l'Avis au
Lecteur , et ensuite le Privilege du Roy,
imprimez à la tête du Livre.
Je ne sçais , au reste , lequel on doit le
plus admirer, de la simplicité de cette bonne mere,ou de la Méthode de ce même Rudiment , dont l'Editeur , entre le Privilege
et la premiere Déclinaison , donne par demandes et par réponses , l'explication et
la définition des noms, des cas et de l'ar
ticle
MA Y. 1732. 867
ticle hic , hac, hoc , qu'il met sans François, afin de le marier ensuite avec Musa
( la Muse ) &c. et Penelope ( la femme
d'Ulisse ) &c. et qu'il donne avec ce Titre
judicieux : Méthode pour bien apprendre
aux enfans à décliner les Noms ; car d'ordinaire ils les déclinent sans sçavoir l'origine
de ce Verbe, Décliner, et apprennent le Latin plutôt par routine , qu'àfond. Ce Rudiment fait par un P.. D. L..C. D. J. et
qui est peut-être un des plus gros et des
plus complets en Latin et en François , a
été bien imprimé à Grenoble , chezJean
François Champ en 1717.
J'ai rapporté ce fait et cet exemple
pour faire voir que l'ordre Théorique
des Livres n'est pas toujours le meilleus
à suivre , en conduisant et en dirigeant les enfans ; car le plus habile homme du monde ne fera jamais comprendre
à un enfant ce que c'est que Décliner et
Conjuguer, à moins qu'il ne pratique les
Déclinaisons et les Conjugaisons, et qu'il
ne rende sensibles les exemples à mesure
Penfant déclinera et conjuguera ,
comme on le fait pratiquer sur la Table.:
du Bureau Typographyque , et en suivant l'essai du Rudiment pratique de la
Langue Latine. Un enfant n'est- il pas bien
avancé lorsqu'il sçait que décliner, vient
que 9.
B.Y
dia
868 MERCURE DE FRANCE
du mot declinare. Avec cette sçavante etprofonde définition , un enfant appren- i
dra-t-il le Latin àfond , plutôt que par routi- ·
ne? Et quand il l'apprendroit par routine,
comme sa propre Langue , en seroit- ce
plus mal ?
L'Enfant destiné au Collége , doit être
montré autrement que celui qui doit faire -
ses études dans la maison paternelle. Le
premier apprendra son Rudiment par
cœur , il sera exercé pour répondre à certaines questions d'usage scolastique , et
pour composer en Latin quelques petites
Frases ; en unmot , il doit remplir sa mé...
moire , d'une maniere à pouvoir subir
l'examen préliminaire qui donne l'entrée
des Classes. L'enfant qui reste chez lui
peut mieux employer son temps ; il s'agit
moins de le faire paroître et dele faire ré-..
pondre en Perroquet , que de le rendre .
réellement fort sur ses petits exercices.Je
croi cette distinction absolument necessaire , parce qu'il pourroit arriver qu'un
enfant de 7 à 9 ans , tres capable dans sa
maison , scachant bien lire le Latin , fe.
François et le Grec , sçachant l'Histoire
et la Fable ; sçachant un peu expliquer
Phédre , ou quelque autre Auteur , seroit
néanmoins condamné dans un College à
passer au Marmoutier , ou à la Classe des
enfans
MA Y. 1732. 869
enfans qui apprennent à lire ; et cela ,
pour n'avoir pû mettre en Latin une petite Frase et n'avoir pû répondre à l'Examinateur qui lui auroit demandé , par
exemple, (audire ) ne se trouve- t- il point en
plus d'un ou de deux endroits?Surquoi il est
bon d'observer deux choses ; la premiere,
que l'abus de communiquer les demanet les argumens , regarde les Philosophes et les Théologiens , plutôt que les
petits enfans ; la seconde , que bien des
Regens , pour décrier les Méthodes particulieres et relever leur Méthode vulgaire , refuseront à un enfant assez avancé,
le témoignage qu'ils accorderont à d'autres enfans moins habiles, quant au fond ,
mais mieux au fait de l'articulation sco---
lastique , c'est pourquoi il faut opter entre ces deux Méthodes.
Mais l'éducation publique doit- elle
être préférée à l'instruction domestique.
et particuliere ? On peut lire là - dessus
Quintilien et M. l'Abbé de S. Pierre ; en
attendant , voici la réponse du sçavant et
zélé Professeur M. R. ancien Recteur de
l'Université, dans l'article second, du gouvernement des Colleges , pag. 418. Delamaniere d'enseigner et d'étudier les Belles Lettres , par rapport à l'esprit et au cœur, tom.
4. Pendant tout le temps que j'ai été
Bvj "
chargé
870 MERCURE DE FRANCE
» chargé de l'éducation de la jeunesse ,
>> parfaitement instruit des dangers qui se
>> rencontrent et dans les Maisons parti-.
culieres, et dans les Colléges , je n'ai jamais osé prendre sur moi de donner con-
» seil sur cette matiere , et je me suis con
».tenté de m'appliquer avec le plus de
» soin qu'il m'a été possible , à l'instruc-
» tion des jeunes gens , que la divine Pro-
» vidence m'addressoit. Je crois devoir
» encore garder la même neutralité et lais-
»ser à la prudence des parens à décider
» une question , qui soufre certainement
» de grandes difficultez de part et d'autre.
La neutralité de M. Rollin . semble décider la question.
On lit dans le livre du R. P. Jean Croiset , de la Compagnie de Jesus , que La
jeunesse , comme plus susceptible de venin
ne sedeffend jamais de la contagion, et qu'une
assemblée de jeunes gens, tant soit- pen négli
gez, est une pernicieuse Ecoles etyfit -on,
s'il est possible , quelque progrès dans les
Lettres, on y fera toujours une terrible perte
pour les mœurs. Reglement pour M M. les
Pensionnaires des Peres Jesuites du Col
le de Lyon , 2. édition , p. 47. p. 65
C'est donc aux parens à bien examiner
devant Dieu quel parti ils doivent prendre, à . balancer équitablement les avans
rages et les inconveniens qui se rencontrent de part et d'autre , à faire un bon
choix de Colleges ou de Maîtres. Si les
Colleges paroissent tant soit peu négligez , la contagion et la peste étant plus
probables dans les Ecoles publiques que
dans la maison paternelle , il sera encore
aisé de décider la question , mais si les
Colleges sont tels qu'ils devroient être
ou selon le Projet de M. l'Abbé de Saine
Pierre , ils sont peut-être pour lors préferables pour le plus grand nombre des enfans destinez à l'Eglise ou à la Robe.
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Résumé : TREISIÈME Lettre, sur la Biblioteque des Enfans.
Le texte aborde les méthodes d'éducation des enfants, en mettant l'accent sur l'apprentissage de la mémoire et l'importance de la destination professionnelle de l'enfant. L'auteur souligne que les livres et les valeurs à inculquer doivent être choisis en fonction de la future profession de l'enfant, qu'il soit destiné à devenir prêtre, soldat, avocat, etc. Il recommande de ne pas surcharger l'enfant mais de maintenir une continuité dans les leçons pour cultiver sa mémoire. L'auteur critique l'apprentissage par cœur de longs textes inutiles et prône l'enseignement du sens plutôt que des termes exacts. Il encourage la lecture de livres historiques et de fables pour exercer le jugement de l'enfant. Le texte distingue également deux approches éducatives : celle des collèges et celle de l'instruction domestique. Dans les collèges, les enfants doivent mémoriser des rudiments, répondre à des questions scolastiques et composer en latin pour passer les examens préliminaires. À la maison, l'enfant peut se concentrer sur une compréhension réelle des matières, comme la lecture du latin, du français et du grec, ainsi que l'histoire et la fable. L'auteur met en garde contre les risques de l'éducation publique, notamment la contagion morale parmi les jeunes, comme le mentionne Jean Croiset de la Compagnie de Jésus. Il critique les méthodes rigides des collèges et les pratiques inutiles comme l'apprentissage par cœur de termes latins incompris. Le texte cite également des experts comme Quintilien et l'Abbé de Saint-Pierre pour discuter des avantages et des inconvénients des deux types d'éducation. Le Professeur M. Rollin, ancien recteur de l'Université, reste neutre sur la question, laissant aux parents le soin de décider en fonction des circonstances spécifiques. L'auteur conclut en soulignant l'importance pour les parents de bien examiner les avantages et les inconvénients des collèges et des maîtres privés pour faire un choix éclairé.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 1183-1186
LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS, ou les premiers Elemens des Lettres, contenant le systeme du Bureau Typographique, à l'usage de Monseigneur le Dauphin et de Messeigneurs les Enfans de France. A Paris, chez Pierre Simon, ruë de la Harpe, et chez P. Witte, ruë S. Jacques, 1732.
Début :
Il y a deux ans que l'on parle du [...]
Mots clefs :
Bibliothèque des enfants, Système du bureau typographique, A, B, C Latin, A, B, C Français, Orthographe
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS, ou les premiers Elemens des Lettres, contenant le systeme du Bureau Typographique, à l'usage de Monseigneur le Dauphin et de Messeigneurs les Enfans de France. A Paris, chez Pierre Simon, ruë de la Harpe, et chez P. Witte, ruë S. Jacques, 1732.
LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS , on les
premiers Elemens des Lettres , contenant la
systeme du Bureau Typographique , à l'usage de Monseigneur le Dauphin et de Mes
seigneurs les Enfans de France. A Paris
chez Pierre Simon , rue de la Harpe , es
shez P. Witte , ruë S. Jacques , 1732.
Il y a deux ans que l'on parle du BiBu
reau Typographique dans les Mercures
de France. On a donné quatorze Lettres
sur ce sujet , ou sur l'importante matiere
qui regarde la premiere éducation des
Enfans. L'abregé de ces Lettres donnera
le volume qui roule précisement sur le
sistême du Bureau Typographique ; mais
voici un Livre dont tous les Parens , tous
les Maîtres et tous les Enfans pourront
se servir utilement , soit qu'ils ayent des
1. Vala Bureaux
1184 MERCURE DE FRANCE
par
Bureaux , soit qu'ils n'en ayent point.
C'est un nouvel A, B, C, Latin ,
le moyen duquel on apprendra par principes plus facilement et en moins de tems
les premiers élemens des Lettres ignorez
ordinairement par le plus grand nombre
de ceux qui se mêlent de les montrer.
Ce Livre que l'Auteur a eu l'honneur
de dédier et de présenter à MONSEIGNEUR
LE DAUPHIN , Contient en 24. pages , l'Epitre Dédicatoire, un Avertissement Préliminaire sur l'Ortographe passagere d'Enfans et des sons ou de l'oreille , en attendant l'Ortographe permanente d'hom- me , des yeux ou de l'usage ; la Préface
en deux feuilles de gros Romain , l'Extrait du Registre des Déliberations de la
Societé des Arts , qui a fait examiner le
Bureau Typographique ; ce Livre contient encore la Table des Leçons de trois
A, B, C, Latins , celle des noms de dixhuit sortes de Caracteres employez pour
varier utilement l'impression de ce volume , et enfin un Avis aux Parens et
aux Maîtres dans lequel l'Auteur dit qu'il
donnera de la même maniere in 4° . et in
16. les A, B, C , François pour la suite
de la Bibliotheque des Enfans.
Le premier A, B, C , Latin contient
en 38. pages 21. Leçons pour le Maître
=
L. Vol. et
JUIN. 1731. 1185
"
et alternativement autant pour l'Enfant ,
il ne s'agit dans cet A, B, C, que de
la seule connoissance et de la seule dénomination des Lettres ou des sons , avec
laquelle dénomination l'Enfant lira bientôt des sillabes et des mots , même sans
épeler , comme dans les Leçons 12. 13.
14. 15. 16. 17. 18. et 19.
Le second A, B , C , Latin contient en
20. pages 15. Leçons pour le Maître , et
autant pour l'Enfant ; il s'agit dans cet
A, B, C , de Lettres du Sillabaire , ou
du Recueil des sillabes élementaires , sur
lesquelles il faut tâcher de rendre imperturbable Enfant auquel on veut montrer à lire.
Le troisiéme A, B , C , Latin contient
en 38. pages , 14. Leçons pour le Maître
et autant pour l'Enfant ; il s'agit dans
cet A , B, C , des Lettres de l'épellation de la sillabe et de la Lettre ordinaire et extraordinaire.
On peut dire que cet Ouvrage estsingu
lier et peut-être unique dans ce goût- là ,
c'est pourquoi le Lecteur y est prié d'avoir quelque indulgence pour l'Auteur ,
qui avoue son ignorance ou sa négligence
à l'égard de l'expression , de la précision
et de la ponctuation. On doit s'attacher
aux choses , plutôt qu'aux mots ; heureux
1. Vol. qui-
1186 MERCURE DE FRANCE
qui possede également bien l'art de penser et l'art de s'exprimer dans les grandes et dans les petites choses. La matiere
Abécédique paroît en general si mince et
et si méprisée , qu'on trouvera peut- être
difficile , obscure ou abstraite , la maniere
dont l'Auteur a essayé de la traiter. Mais
il faut esperer que dans la suite on rendra le sujet plus clair, et qu'enfin on le
perfectionnera , sur tout si M M. de l'Académie Françoise daignent un jour revoir l'Ouvrage en faveur des Enfans
de notre Empire et de tous les enfans de
l'Europe.
Les Critiques du Bureau Typographi
que , au reste , en attaquant ce nouvel
A, B, C, pourront continuer de faire
connoître leur goût et leur discernement
en fait d'institution morale et litteraire.
Le Public continuera aussi d'admirer la
prévention et la simplicité des Latinistes.
scandalisez mal- à- propos de la moindre
nouveauté élementaire et du moindre solecisme; mais peu accoûtumez à l'Analise
des pensées , à l'exactitude et à la justesse
d'un raisonnement suivi et philosophique; justesse cependant à laquelle de- vroient tendre nos lectures et nos études,
tout autre motif ne paroît tolerable
dans un homme payé pour parler, plutôt que
que pour penser.
premiers Elemens des Lettres , contenant la
systeme du Bureau Typographique , à l'usage de Monseigneur le Dauphin et de Mes
seigneurs les Enfans de France. A Paris
chez Pierre Simon , rue de la Harpe , es
shez P. Witte , ruë S. Jacques , 1732.
Il y a deux ans que l'on parle du BiBu
reau Typographique dans les Mercures
de France. On a donné quatorze Lettres
sur ce sujet , ou sur l'importante matiere
qui regarde la premiere éducation des
Enfans. L'abregé de ces Lettres donnera
le volume qui roule précisement sur le
sistême du Bureau Typographique ; mais
voici un Livre dont tous les Parens , tous
les Maîtres et tous les Enfans pourront
se servir utilement , soit qu'ils ayent des
1. Vala Bureaux
1184 MERCURE DE FRANCE
par
Bureaux , soit qu'ils n'en ayent point.
C'est un nouvel A, B, C, Latin ,
le moyen duquel on apprendra par principes plus facilement et en moins de tems
les premiers élemens des Lettres ignorez
ordinairement par le plus grand nombre
de ceux qui se mêlent de les montrer.
Ce Livre que l'Auteur a eu l'honneur
de dédier et de présenter à MONSEIGNEUR
LE DAUPHIN , Contient en 24. pages , l'Epitre Dédicatoire, un Avertissement Préliminaire sur l'Ortographe passagere d'Enfans et des sons ou de l'oreille , en attendant l'Ortographe permanente d'hom- me , des yeux ou de l'usage ; la Préface
en deux feuilles de gros Romain , l'Extrait du Registre des Déliberations de la
Societé des Arts , qui a fait examiner le
Bureau Typographique ; ce Livre contient encore la Table des Leçons de trois
A, B, C, Latins , celle des noms de dixhuit sortes de Caracteres employez pour
varier utilement l'impression de ce volume , et enfin un Avis aux Parens et
aux Maîtres dans lequel l'Auteur dit qu'il
donnera de la même maniere in 4° . et in
16. les A, B, C , François pour la suite
de la Bibliotheque des Enfans.
Le premier A, B, C , Latin contient
en 38. pages 21. Leçons pour le Maître
=
L. Vol. et
JUIN. 1731. 1185
"
et alternativement autant pour l'Enfant ,
il ne s'agit dans cet A, B, C, que de
la seule connoissance et de la seule dénomination des Lettres ou des sons , avec
laquelle dénomination l'Enfant lira bientôt des sillabes et des mots , même sans
épeler , comme dans les Leçons 12. 13.
14. 15. 16. 17. 18. et 19.
Le second A, B , C , Latin contient en
20. pages 15. Leçons pour le Maître , et
autant pour l'Enfant ; il s'agit dans cet
A, B, C , de Lettres du Sillabaire , ou
du Recueil des sillabes élementaires , sur
lesquelles il faut tâcher de rendre imperturbable Enfant auquel on veut montrer à lire.
Le troisiéme A, B , C , Latin contient
en 38. pages , 14. Leçons pour le Maître
et autant pour l'Enfant ; il s'agit dans
cet A , B, C , des Lettres de l'épellation de la sillabe et de la Lettre ordinaire et extraordinaire.
On peut dire que cet Ouvrage estsingu
lier et peut-être unique dans ce goût- là ,
c'est pourquoi le Lecteur y est prié d'avoir quelque indulgence pour l'Auteur ,
qui avoue son ignorance ou sa négligence
à l'égard de l'expression , de la précision
et de la ponctuation. On doit s'attacher
aux choses , plutôt qu'aux mots ; heureux
1. Vol. qui-
1186 MERCURE DE FRANCE
qui possede également bien l'art de penser et l'art de s'exprimer dans les grandes et dans les petites choses. La matiere
Abécédique paroît en general si mince et
et si méprisée , qu'on trouvera peut- être
difficile , obscure ou abstraite , la maniere
dont l'Auteur a essayé de la traiter. Mais
il faut esperer que dans la suite on rendra le sujet plus clair, et qu'enfin on le
perfectionnera , sur tout si M M. de l'Académie Françoise daignent un jour revoir l'Ouvrage en faveur des Enfans
de notre Empire et de tous les enfans de
l'Europe.
Les Critiques du Bureau Typographi
que , au reste , en attaquant ce nouvel
A, B, C, pourront continuer de faire
connoître leur goût et leur discernement
en fait d'institution morale et litteraire.
Le Public continuera aussi d'admirer la
prévention et la simplicité des Latinistes.
scandalisez mal- à- propos de la moindre
nouveauté élementaire et du moindre solecisme; mais peu accoûtumez à l'Analise
des pensées , à l'exactitude et à la justesse
d'un raisonnement suivi et philosophique; justesse cependant à laquelle de- vroient tendre nos lectures et nos études,
tout autre motif ne paroît tolerable
dans un homme payé pour parler, plutôt que
que pour penser.
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Résumé : LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS, ou les premiers Elemens des Lettres, contenant le systeme du Bureau Typographique, à l'usage de Monseigneur le Dauphin et de Messeigneurs les Enfans de France. A Paris, chez Pierre Simon, ruë de la Harpe, et chez P. Witte, ruë S. Jacques, 1732.
Le texte présente 'LA BIBLIOTHEQUE DES ENFANS', un ouvrage éducatif publié en 1732 à Paris. Destiné à l'éducation des enfants, il est dédié à Monseigneur le Dauphin et aux Enfants de France. L'ouvrage propose un système d'enseignement des lettres via le Bureau Typographique et a été mentionné dans les Mercures de France à travers quatorze lettres sur l'éducation des enfants. Il est conçu pour être utile à tous les parents, maîtres et enfants, indépendamment de la possession de Bureaux Typographiques. L'ouvrage est structuré en plusieurs sections : une épître dédicatoire, un avertissement préliminaire sur l'orthographe, une préface, un extrait du registre des délibérations de la Société des Arts, une table des leçons, une liste des caractères typographiques, et un avis aux parents et maîtres. Il inclut trois sections intitulées A, B, C Latins, chacune contenant des leçons pour les maîtres et les enfants. Le premier A, B, C se concentre sur la connaissance et la dénomination des lettres, permettant aux enfants de lire des syllabes et des mots sans épeler. Le second A, B, C traite des syllabes élémentaires, et le troisième des techniques d'épellation. L'auteur reconnaît l'unicité de l'ouvrage et demande indulgence pour les imperfections de style. Il espère que l'Académie Française pourrait un jour examiner et améliorer l'ouvrage pour le bénéfice des enfants en Europe. Le texte mentionne également les critiques potentielles et la simplicité des latinistes face aux nouvelles méthodes éducatives.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 1294-1306
QUATORZIÈME LETTRE sur le Systeme du Bureau Typographique et sur le choix d'un Précepteur, pour la premiere éducation d'un Enfant.
Début :
VOICI, Monsieur, une objection que l'on ne m'auroit [...]
Mots clefs :
Bureau typographique, Bibliothèque des enfants, Éducation, Précepteur, Système, Méthode, A, Bé, Cé Typographique, Maîtres
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texteReconnaissance textuelle : QUATORZIÈME LETTRE sur le Systeme du Bureau Typographique et sur le choix d'un Précepteur, pour la premiere éducation d'un Enfant.
QUATORZIEME LETTRE
sur le Systeme du Bureau Typographique
et sur le choix d'un Précepteur, pour la
premiere éducation d'un Enfant.
Oici , Monsieur , une objection que l'on ne
m'auroit peut- être pas faite , si l'on avoit
pris la peine de lire attentivement les dernieres
Lettres sur le Systême du Bureau Typographi
que , et si l'on avoit un peu parcouru la Brochure qui se vend chez Pierre Witte , ruë S. Jacques,
à l'Ange Gardien , intitulée : Réponse de M. Perquis , Maitre de Philosophie , d'Humanitez et de
Typographie, à la Lettre d'un Professeur anonime
de l'Université de Paris , inserée dans le Mercure
du mois de Février 1731.
Si ce Sisteme , m'a- t'on dit , étoit aussi utile que vous le publiez depuis près de deux ans , lès
Parens et les Maîtres se feroient un plaisir et mê- me un devoir de le suivre pour la premiere institution des enfans de trois à sept et à huit ans ,
cependant les Maîtres sont effrayez à la vûë de cette Machine , et l'on dit que du grand nombre de personnes qui ont lû vos Lettres , qui ont en--
tendu parler de ce Sisteme , ou qui ont vu des Bureaux et même l'exercice de cette Méthode , il
y en a peu qui ayent mis leurs enfans aux Clas- IT. Vol
JUIN. 1732. 1295
ses du Bureau Typographique , il faut donc conclure , a-t'on poursuivi , que ce nouveau Sistême
n'est point aussi utile que vous le prétendez , ni
au-dessus de la Méthode vulgaire.
Voilà , Monsieur , ce que nos Critiques appellent une Démonstration , car ce mot est devenu aujourd'hui si commun , qu'on l'employe
hardiment pour les matieres les plus probléma- tiques ; vous trouvez des Ecrivains de parti ,
acharnez les uns contre les autres qui se flattent
d'avoir procedé à la maniere des Géometres dans
toutes leurs disputes , et l'on peut dire qu'en supposant la verité de leurs principes contestez, bien
des Auteurs , comme Spinosa , ont effectivement suivi la Méthode des Géometres. Venons au fait.-
pour
être
être
Pour répondre à cette prétendue Démonstration , je dis , 1 °. que les Maîtres vulgaires s'opposeront toujours à toutes les Méthodes qui feront:
connoître au Public leur ignorance ou leur pré--
vention , et que leur opposition aveugle et témeraire augmentera toujours le mépris dû à leurs
vaines déclamations. 2°. Qu'un sistème peut
fort utile et meilleur qu'un autre , sans obtenir
néanmoins la préference , parce qu'il ne suffit pas
qu'une chose soit bonne en elle- même recherchée , il faut encore que l'on soit persuadé
de cette bonté , et ce deffaut de persuasion qui
vient d'une infinité de causes , ne diminuë en rien
la bonté réelle de cette même chose. Un exemple
sensible rendra ce raisonnement plus clair. Que
diroit-on à un Chinois qui feroit cette difficulté ,
si une telle Loi , une telle Coutume , et une telle.
Religion , étoient les meilleures du monde , les
Souverains et les Peuples de la Terre se feroient
un plaisir et même un devoir de les pratiquer dèsqu'on leur en parleroit , cependant ils ne le font
II. Vol pase;
1296 MERCURE DE FRANCE
pas ; donc cette Loi , cette Coûtume et cette Religion , ne sont point les meilleures du monde. Le
Lecteur sensé et judicieux , n'a pas besoin qu'on
lui fasse voir la fausseté et le sophisme dans un
pareil raisonnement.
3. Je dis qu'aucun Journal n'a encore parlé
du Bureau Typographique , parce que les Lettres.
insérées dans les Mercures , n'ont encore été ni
affichées , ni mises en vente chez des Libraires.
Je dis que peu de gens lisent les Journaux, la plûpart même des Lecteurs passent les matieres ou
Ies Pieces qu'ils n'entendent point, et qu'ils trouvent toûjours trop longues , de même que celles
où ils ne prennent aucune part. Ceux qui ont lu les Lettres sur le sistème du Bureau , ou qui em
ont entendu parler , ne sont pas tous dans le cas
d'avoir de petits enfans , et quand ce peu de Lecteurs auroit excité la curiosité des autres , ce premier empressement est bien - tôt ralenti par le torrent des embarras du siecle , ou par le flux et
reflux de mille affaires domestiques, Tel Pere
avoit voulu d'abord donner un Bureau à ses enfans , qui ensuite en a été détourné par la mere.
trop œconome ou trop allarmée en fait d'éducation ; tels parens ont proposé l'experience du Bureau, qui en ont été détournez par les Précep
teurs ; c'est ainsi que beaucoup de gens, d'ailleurs
pleins de mérite et bien intentionnez , se laissent
quelquefois mener en aveugles.
4°. Je dis que de tous ceux qui ont vu le Bu
reau , il n'y a personne qui , du moins exterieument et en apparence , n'en ait reconnu l'utilités.
je ne dois pas même en excepter notre Critique.
M. G. quelque mal qu'il ait crû avoir interêt d'en
dire ailleurs. Le Bureau peut se vanter d'avoir à la Cour , à la Ville et dans les Provinces , un grand
II.. Vol. nombre.
JUIN 1732. 1297
nombre d'illustres Partisans dont le témoignage
autentique fera toujours mépriser les mauvaises critiques , malgré le mérite de leurs Auteurs, -
5. Je dis que quand il n'y auroit encore qu'u ne trentaine d'enfans de l'un ou de l'autre sexe
exercez par le sistème du Bureau , ce seroit toûjours beaucoup qu'en si peu de temps , malgré le préjugé vulgaire , malgré les affiches et les vaines.
promesses de plusieurs Charlatans en menuë Litterature , qui dégoutent et indisposent le Public
malgré les Critiques anonimes et celle de M. G.
malgré les calomnies et les faux rapports des
Maîtres et des Précepteurs prévenus ou passion
nez contre le sistème Typographique , ce seroit,
dis-je , toûjours beaucoup d'avoir autant d'enfans connus , exercez et montrez selon cette nouvelle
maniere d'enseigner les premiers élemens des
Lettres..
6º.Je dis que le préjugé , l'ignorance , la paresse,
L'indifference , l'interêt , l'envie et la mauvaisefoi ,
peuvent arrêter pour quelque temps les progrès du
Bureau Typographique ; et afin que mes Critiques
ne blâment point l'emploi de pareils termes , je.
leur déclare que par le mot préjugé , j'entens le ju- les Maîtres por- gement vague et indéterminé que tent par tradition et sans examen en faveur de la
Méthode vulgaire contre toutes les nouvelles
Méthodes ; les trois quarts des Maîtres , pour le
moins , sont dans ce préjugé et presque tous les
parens. Par le mot ignorance , j'entens la privation des connoissances grammaticales necessaires
pour l'intelligence de la doctrine typographique
ou des sons de la Langue Françoise et de la vraye dénomination des Lettres , pour la prompte et fa
cile sillabisation ; nos Critiques et bien d'autres
sont dans cette ignorance. Par le mot paresse ,
II.. Vel j'entens
1298 MERCURE DE FRANCE
j'entens l'aversion et l'éloignement qu'un Maître
fait souvent paroître quand il s'agit de travailler
avec un enfant; cela regarde le plus grand nombre des Précepteurs. Par indifference , j'entens le
caractere de certains Maîtres mercenaires , plus -
occupez , de pane lucrando , que de puero instiuendo. Par interêt , j'entens le motif de certains
Auteurs qui craignent mal à propos que le systême du Bureau ne nuise à la vente de leurs perites Brochures. Par envie, j'entens les sentimens
jaloux de ceux qui ne voudroient jouir que de
leur propre gloire , et même aux dépens de ce lle
des autres. Par mauvaisefoy, j'entens le caractere et le sentiment de ceux qui persuadez de la
bonté et de l'utilité du systême , cachent ce sentiment et agissent contre la vérité connue, poussez par diverses passions, qu'ils n'oseroient avoüer
devant les hommes, et qu'ils ont la malice d'entretenir devant Dieu. Tous ces injustes motifs de
critique , peuvent se rencontrer dans la même
personne ; on pourroit même les désigner , à lamauvais foy près , dont Dieu seul est le juge.
7°. Je dis que l'ortographe passagere dont on
a fait l'essai et dont on a rendu compte dans la
neuvième Lettre sur le sistême du Bureau , je dis
que cette ortographe passagere d'épfant et des
sons ou de l'oreille , peut avoir éloigné bien des
gens , du systême Typographique , ce que n'auroit peut- être pas fait l'ortographe permanente
d'homme , des yeux et de l'usage. Quoiqu'on cut
facilement prévu que cela pourroit arriver ainsi ,
on a été cependant obligé de suivre son Plan
pour mettre le Lecteur bien intentionné , au fait
des sons de la Langue , et en état de mieux juger
du systême ; et cela au hazard de déplaire aux
Lecteurs prévenus qu'on pourroit un peu comII. Vol. parer
JUIN. 1299 1732.
parer à celui qui aima mieux perdre la valeur d'une Lettre de Change , que d'en faire usage ,
malgré l'ortographe singuliere de cette Lettre ,
ou au malade qui refusa tout soulagement , faute
de parfaite guérison.
9
8. J'ajouterai que la saison de l'hyver , propre à faire Recruë de Soldats, ne l'est guere pour
celle des enfans du Bureau. Le froid en fait differer l'exercice , le Printems en paroît la premiere
saison ; outre cela les objets frivoles qu'on donne ordinairement pour étrennes aux petits enfans
dans le commencement de l'année , les occupent
si fort , qu'il seroit pour lors assez inutile de leur
donner un Bureau. Les parens , les amis , les domestiques, tous à l'envi , présentent à l'enfant
bien des niaiseries, plus nuisibles que profitables.
Une Classe de Bureau pour étrennes amuseroit et
instruiroit l'enfant ; mais les parens en general
aiment mieux se prêter au torrent du préjugé
vulgaire,et ausystême ou au jeu des Marionettes,
dont ils font souvent eux-mêmes leur amusement.
9. Oserois- je dire que le prix d'un Bureau
arrête bien des gens riches , dans l'esprit desquels l'argent tient souvent la place de fils aîné
et quelquefois celle de fils unique , même à la
vue d'une nombreuse famille. Dix Pistoles pour
la suite des quatre Classes du Bureau peuvent pa-- roître une somme non seulement à de riches
Bourgeois , mais encore à certaines personnes qui
ne dépensent guere moins de cent francs par jour
pour leur table et pour leur écurie. C'est aux
parens à s'examiner là- dessus devant Dieu et devant les hommes.
,
10°. Il faut convenir que la disette des Maîtres qui veuillent s'asservir au systême du Buseau , en arrétera toûjours les progrès ; mais
II. Vol.
c'est
1300 MERCURE DE FRANCE
c'est faute d'entendre leur véritable interêt qu'ils
refusent d'apprendre et de pratiquer cette métho
de. Elle les feroit rechercher et préferer aux
Maîtres vulgaires ; enfin elle assureroit aux Maîtres externes un nombre de meilleures Maisons
et donneroit aux Précepteurs le choix des meilleurs Elèves. Je dois ajouter icy qu'un mois de
Leçons tipographiques , mettra facilement une
Gouvernante , un Domestique en état de montrer les premieres Classes du Bureau , en atten- dant que l'on donne à l'enfant un Précepteur, ou
bien un Maître -externe.
Q
11 Pour derniere réponse, je donnerai à mon
tour un argument qu'on pourra opposer à celui
de nos critiques. Le voici : Si les Professeurs , les
Régens , les Préfets , ni les Maîtres ne peuvent
pas détruire les preuves qui font voir les avan
tages du Bureau typographique sur la Méthode
vulgaire ; il faut conclure en faveur du Bureau.
Or est-il que ces MM) n'ont pu jusqu'icy prouver l'infériorité du Bureau , ni la supériorité de
la Méthode vulgaire ; donc en faveur de la verité , et pour le bien de la cause des enfans , on
peut, par provision et hardiment predire que les Maîtres ne viendront jamais à bout de prouver l'excellence de leur Méthode vulgaire, contre
celle du Bureau. On doit donc aussi conclure en
faveur du Bureau , contre les mauvaises critiques, C'est au Public à décider , en attendant le
jugement des Commissaires que l'Université de
Paris, et les Académies pourroient nommer dans
la suite , pour l'examen de ce systême.
Je conclus, après toutes ces réfléxions, que les
parens bien intentionnez et curieux de trouver un
bon Précepteur pour leurs petits enfans , ne sauroient mieux faire que de l'éprouver , par le
1. Vel. moyen
JUIN. 1732. 1301
moïen du Bureau tipographyque ; ce sera la
vraie Pierre de touche , en fait de Pédagogie , er l'on peut assurer , sans témérité, que tout Maître
qui refusera aux parens de suivre la Méthode du
Bureau , pour un enfant de trois à sept et à huit
ans , donnera contre lui des préjugez suffisans
pour le refuser lui- même ; et l'on voit par là
que l'épreuve du Maître par celle du Bureau, sera
toujours d'une grande utilité et d'un grand secours pour les parens capables ou incapables de
faire par eux-mêmes choix d'un bon Maître,
>
Les Précepteurs qui refuseront de suivre le systême du Bureau , aux parens qui le leur propos seront , seront obligez de dire pourquoi ? Or ces
Précepteurs , ou ils connoissent le Bureau , ou ils
ne le connoissent pas ; s'ils ne le connoissent
point , et que sans examen ils refusent d'en
faire usage , ils se rendront suspects de préjugé ,
ou d'ignorance , ou de paresse , ou d'indifference; qualitez suffisantes pour refuser ces Précepteurs , dans la plupart desquels on trouvera ordinairement un esprit vain , superficiel , aigre,
indocile , impatient ; un esprit mercenaire , qui
fuit la peine , qui craint le travail , et sur tout
qui redoute l'examen.
Si les Précepteurs au contraire , en refusant absolument de suivre la Méthode du Bureau tipographyque , disent que c'est par connoissance
de cause ; il est juste de les entendre et de répondie à leurs difficultez; ce sera là un des plus surs moyens pour juger de leur maniere de penser , de
parler , et de raisonner. Qualitez rares mais essentielles pour la bonne et la noble éducation.
Cette opposition , d'ailleurs soutenuë de bonne
foy et avec quelque apparence de fondement, ne
peut que faire honneur à l'adversaire , qui se dé11. Vol. clarera
302 MERCURE DE FRANCE
4
clarera contre le systême du Bureau , sans - renoncer à un plus grand examen de cette Methode , ni au dessein de la suivre ; supposé qu'elle se
trouvât la meilleure, L'Auteur , au reste offre
d'intervenir avec plaisir , dans le differend , lorsque les parens témoigneront le désirer , pour le bien de leurs enfans et de la cause publique.
›
Mais si le Maîrre, simple latiniste, plein de luimême, se trouve un esprit faux , incapable de
justesse dans le raisonnement , un esprit sans méthode , enfin un esprit qui ne voye que par les
yeux du préjugé vulgaire , et qui sans vouloir raisonner, soûtienne obstinément que le systême
du Bureau est frivole ; il sera aisé de s'appercevoir qu'un tel caractere n'est pas le meilleur que
l'on puisse désirer pour élever un enfant , et c'est
un grand avantage que de pouvoir s'en assurer
dès le premier jour , sans s'exposer si souvent
à essayer de nouveaux Précepteurs ; car ce frequent changement de Maître , est ordinairement
un obstacle à l'avancement de l'enfant , et le Bureau préviendra quelquefois cetinconvenient.
Les parens qui aiment à se déterminer par rai.
son plutôt que par coutume, remarqueront bientôt dans le monde que les partisans du Bureau
sont ordinairementou personnes d'ordre ou gens
d'esprit Philosophique , aimant le bien public ;
et qu'au contraire ceux qui se déclarent contre le
Bureau ne sont que de simples latinistes , tres- indifferens sur le bien et le mieux , et la plupart incapables d'analiser les idées et de suivre.
avec honneur , le moindre raisonnement. Or si
la chose est , comme j'ose le dire, et comme chacun peut s'en convaincre lui-même , avec les critiques qu'il trouvera dans son chemin ; n'est-ce
pas un grand avantage pour les dignes parens es
D
JUIN. 1732.
1303
pour le public d'avoir un moyen si simple et si
propre à développer l'intérieur des Maîtres les plus dissimulez , qui se présenteront pour la pre- miere institution de l'enfance.
Je ne prétens pas , au reste , conclure qu'un
Maître qui offre de se soumettre au systême du
Bureau devienne par-là et sur le champ un bon
Précepteur ; mais je veux seulement dire qu'entre deux hommes de Lettres , à peu près d'égale réputation , en fait de Pédagogie, on doit toujours préferer l'esprit doux , docile , bien intentionné,
méthodique, qui se prétera volontiers et sans répugnance à l'exercice du Bureau, et qui en hom- me d'honneur et de bien , par ses discours et par
sa complaisance litteraire,prouvera qu'il ne craint
pas le travail , et qu'il est capable d'affection et d'attachement pour l'enfant dont on veut bien
d'abord lui confier la premiere éducation,
5
On pourra aussi trouver des Maîtres d'ailleurs
tres-capables , qui pleins d'eux- mêmes et de la Méthode vulgaire , diront qu'il est possible que
le Bureau soit bon et utile , mais que leur répu- tation étant faite , ils n'ont pas besoin d'entrer
dans le détail de ce systême, et qu'ils s'en tiennent à leur maniere d'enseigner , sans vouloir
être remis à l'A , Bé, Cé Tipographyque. Or ne
peut-on pas encore dire , sans témérité , que ces Maîtres , quelque habiles qu'ils soient dans le
Grec et dans le Latin ; que ces Maîtres , dis-je ,
en craignant la peine et le travail , donnent parlà contr'eux, des préjugez suffisans pour leur refuser la préférence sur les autres Maîtres ? Car
c'est déja un grand préjugé contre un Précep- teur que de vouloir d'abord canoniser son indifference, sa paresse , et son peu de goût litteraire ,
en refusant de lire une Méthode qui fait quelque
11. Vol. bruit
1304 MERCURE DE FRANCE
bruit dans le monde , et qui , selon l'expression
d'un grand homme, annonce une révolution dans l'éducation des enfans.
Enfin il y a des Maîtres bien intentionnez , qui
feroient volontiers usage du Bureau s'ils en comprenoient le systême , mais ils s'en font d'abord une épouvantail et tâchent adroitement de
détourner les parens qui en voudroient faire l'expérience.
Je n'ai rien à dire contre la prudence de ces
Maîtres , si ce n'est qu'ils apprendroient facilement le systême , dès que sans prévention , et à
l'exemple des autres , ils en voudroient faire l'essai ; les enfans donneront aux Maîtres le temps
necessaire pour cette étude ; comme les Ecoliers
de certains Colleges , donnent aux Regens des
Basses classes, le temps de se rendre capables des
plus hautes. Le Maître apprendra le sistème Ty ,
pographique en le mostrant à l'enfant , après
avoir un peu raisonné et conferé avec quelque
Maître de Typographie , et après avoir vú travailler quelque Enfant sur la Table de son Bureau. Ce sera toujours un grand préjugé contre
un Précepteur s'il trouve pénible et difficile un
petit exercice d'enfant. Un Maître qui craint ce
petit travail , fait voir sans y prendre garde, qu'il
est occupé à chercher du pain , plutôt qu'à le
gagner.
On trouvera au surplus facilement de bons
Maîtres quand les parens connoîtront le prix de l'éducation , qu'ils ne regarderont pas un Precep
teur comme un simple domestique , indigne de manger à leur table , à propos de quoi il n'est
pas mal de rapporter ici ce que le Maréchal
de Villeroy dit autrefois à l'occasion d'un Prési- dent à Mortier, dont le fils ne mangeoit pomt
II. Vol. avec
JUIN 1732. 1305
avec son Précepteur : Je ne voudrois point , dit le
Maréchal , donner à mon fils un homme que je ne
croirois pas digne de manger à matable. Il est visible qu'un Maître , Précepteur , ou Gouverneur
qui ne mangera pas avec son Eleve , ei sera
bientôt méprisé. Enfin les parens trouveront un
bon Précepteur quand ils seront dans le dessein
de le dédommager du sacrifice qu'il aura fait de
sa liberté , de son tems , et de la meilleure partie de ses années.
D'où vient qu'on est si libéral à l'égard d'un
Cuisinier, envers un Maître de Musique et d'Ins- trument, à l'égard d'un Maître à Danser , même
avec un dresseur de Chiens , et qu'on leur donne
volontiers pour un seul mois la somme qu'on
marchande quelquefois pour six mois de simple
pédagogic
Doit- on être surpris après cela si les bons Précepteurs sont rares, et si l'on voit manquer tant
d'éducations. Je l'ai dit bien des fois , c'est souvent la faute des parens , des domestiques et des
Maîtres , plutôt que celle des enfans. Et c'est sur
cette matiere qu'on pourroit donner bien des gemissemens. Trop de gens pensent sur cet article commeM. G. Ce Regent suppose que le moindre
secours du plus petit Maître d'Ecole d'un Maître
d'unmédiocre sçavoir et d'une médiocre exaatitude;
que ce moindre secours suffit pour montrer
lire aux petits enfans.
כי Voici ce qu'on lit là- dessus , dans la Réponse,
du M. Perquis à un critique anonime. Jem'é3 tonne, M. que citant quelquefoisQuintilien quand
→ vous croyez qu'il vous estfavorable , vous n'ayez
» pas remarqué qu'il condamne ceux qui ne pren- nent d'abord que de petits Maîtres pour don-
"ner,disent-ils, les principes des sciences , au lieu
II.Vel C » de
1396 MERCURE DE FRANCE
3
9
??
de choisir les plus habiles , et d'imiter Philippe,
qui ne voulut pas permettre qu'un autre qu'Aristote montrat à lire à Alexandre , parce qu'il
étoit persuadé que la perfection dépendoit deces
» commencemens.Ne faut- il pas parler et raison-
» ner avec un petit enfant ? Or, pour me servir
de l'expression de M. le Févre , si le Maitre est
≫ unâne , que voulez-vous qu'un âne fasse , sinon
» un âne comme lui.S.Jérôme a fair la même remarque ,il pensoit autrement que vous , et le
moindre Lecteur s'appercevra que Philippe ,
Quintilien et S. Jérôme se seroient accommo
dez du Bureau Typographique , plutôt que de
so, voire A, Bé , Cé Vulgaire , et de votre Maitre
d'un médiocre sçavoir et d'une médiocre exactitude , ou enfin du moindre secours du plus petit- Maître d'Ecole.
"
33
Je repeterai encore ici que si on ne goute point
la Méthode du Bureau Typographique , je m'en
étonne , et que si on la goute , je m'en étonne de
même.
sur le Systeme du Bureau Typographique
et sur le choix d'un Précepteur, pour la
premiere éducation d'un Enfant.
Oici , Monsieur , une objection que l'on ne
m'auroit peut- être pas faite , si l'on avoit
pris la peine de lire attentivement les dernieres
Lettres sur le Systême du Bureau Typographi
que , et si l'on avoit un peu parcouru la Brochure qui se vend chez Pierre Witte , ruë S. Jacques,
à l'Ange Gardien , intitulée : Réponse de M. Perquis , Maitre de Philosophie , d'Humanitez et de
Typographie, à la Lettre d'un Professeur anonime
de l'Université de Paris , inserée dans le Mercure
du mois de Février 1731.
Si ce Sisteme , m'a- t'on dit , étoit aussi utile que vous le publiez depuis près de deux ans , lès
Parens et les Maîtres se feroient un plaisir et mê- me un devoir de le suivre pour la premiere institution des enfans de trois à sept et à huit ans ,
cependant les Maîtres sont effrayez à la vûë de cette Machine , et l'on dit que du grand nombre de personnes qui ont lû vos Lettres , qui ont en--
tendu parler de ce Sisteme , ou qui ont vu des Bureaux et même l'exercice de cette Méthode , il
y en a peu qui ayent mis leurs enfans aux Clas- IT. Vol
JUIN. 1732. 1295
ses du Bureau Typographique , il faut donc conclure , a-t'on poursuivi , que ce nouveau Sistême
n'est point aussi utile que vous le prétendez , ni
au-dessus de la Méthode vulgaire.
Voilà , Monsieur , ce que nos Critiques appellent une Démonstration , car ce mot est devenu aujourd'hui si commun , qu'on l'employe
hardiment pour les matieres les plus probléma- tiques ; vous trouvez des Ecrivains de parti ,
acharnez les uns contre les autres qui se flattent
d'avoir procedé à la maniere des Géometres dans
toutes leurs disputes , et l'on peut dire qu'en supposant la verité de leurs principes contestez, bien
des Auteurs , comme Spinosa , ont effectivement suivi la Méthode des Géometres. Venons au fait.-
pour
être
être
Pour répondre à cette prétendue Démonstration , je dis , 1 °. que les Maîtres vulgaires s'opposeront toujours à toutes les Méthodes qui feront:
connoître au Public leur ignorance ou leur pré--
vention , et que leur opposition aveugle et témeraire augmentera toujours le mépris dû à leurs
vaines déclamations. 2°. Qu'un sistème peut
fort utile et meilleur qu'un autre , sans obtenir
néanmoins la préference , parce qu'il ne suffit pas
qu'une chose soit bonne en elle- même recherchée , il faut encore que l'on soit persuadé
de cette bonté , et ce deffaut de persuasion qui
vient d'une infinité de causes , ne diminuë en rien
la bonté réelle de cette même chose. Un exemple
sensible rendra ce raisonnement plus clair. Que
diroit-on à un Chinois qui feroit cette difficulté ,
si une telle Loi , une telle Coutume , et une telle.
Religion , étoient les meilleures du monde , les
Souverains et les Peuples de la Terre se feroient
un plaisir et même un devoir de les pratiquer dèsqu'on leur en parleroit , cependant ils ne le font
II. Vol pase;
1296 MERCURE DE FRANCE
pas ; donc cette Loi , cette Coûtume et cette Religion , ne sont point les meilleures du monde. Le
Lecteur sensé et judicieux , n'a pas besoin qu'on
lui fasse voir la fausseté et le sophisme dans un
pareil raisonnement.
3. Je dis qu'aucun Journal n'a encore parlé
du Bureau Typographique , parce que les Lettres.
insérées dans les Mercures , n'ont encore été ni
affichées , ni mises en vente chez des Libraires.
Je dis que peu de gens lisent les Journaux, la plûpart même des Lecteurs passent les matieres ou
Ies Pieces qu'ils n'entendent point, et qu'ils trouvent toûjours trop longues , de même que celles
où ils ne prennent aucune part. Ceux qui ont lu les Lettres sur le sistème du Bureau , ou qui em
ont entendu parler , ne sont pas tous dans le cas
d'avoir de petits enfans , et quand ce peu de Lecteurs auroit excité la curiosité des autres , ce premier empressement est bien - tôt ralenti par le torrent des embarras du siecle , ou par le flux et
reflux de mille affaires domestiques, Tel Pere
avoit voulu d'abord donner un Bureau à ses enfans , qui ensuite en a été détourné par la mere.
trop œconome ou trop allarmée en fait d'éducation ; tels parens ont proposé l'experience du Bureau, qui en ont été détournez par les Précep
teurs ; c'est ainsi que beaucoup de gens, d'ailleurs
pleins de mérite et bien intentionnez , se laissent
quelquefois mener en aveugles.
4°. Je dis que de tous ceux qui ont vu le Bu
reau , il n'y a personne qui , du moins exterieument et en apparence , n'en ait reconnu l'utilités.
je ne dois pas même en excepter notre Critique.
M. G. quelque mal qu'il ait crû avoir interêt d'en
dire ailleurs. Le Bureau peut se vanter d'avoir à la Cour , à la Ville et dans les Provinces , un grand
II.. Vol. nombre.
JUIN 1732. 1297
nombre d'illustres Partisans dont le témoignage
autentique fera toujours mépriser les mauvaises critiques , malgré le mérite de leurs Auteurs, -
5. Je dis que quand il n'y auroit encore qu'u ne trentaine d'enfans de l'un ou de l'autre sexe
exercez par le sistème du Bureau , ce seroit toûjours beaucoup qu'en si peu de temps , malgré le préjugé vulgaire , malgré les affiches et les vaines.
promesses de plusieurs Charlatans en menuë Litterature , qui dégoutent et indisposent le Public
malgré les Critiques anonimes et celle de M. G.
malgré les calomnies et les faux rapports des
Maîtres et des Précepteurs prévenus ou passion
nez contre le sistème Typographique , ce seroit,
dis-je , toûjours beaucoup d'avoir autant d'enfans connus , exercez et montrez selon cette nouvelle
maniere d'enseigner les premiers élemens des
Lettres..
6º.Je dis que le préjugé , l'ignorance , la paresse,
L'indifference , l'interêt , l'envie et la mauvaisefoi ,
peuvent arrêter pour quelque temps les progrès du
Bureau Typographique ; et afin que mes Critiques
ne blâment point l'emploi de pareils termes , je.
leur déclare que par le mot préjugé , j'entens le ju- les Maîtres por- gement vague et indéterminé que tent par tradition et sans examen en faveur de la
Méthode vulgaire contre toutes les nouvelles
Méthodes ; les trois quarts des Maîtres , pour le
moins , sont dans ce préjugé et presque tous les
parens. Par le mot ignorance , j'entens la privation des connoissances grammaticales necessaires
pour l'intelligence de la doctrine typographique
ou des sons de la Langue Françoise et de la vraye dénomination des Lettres , pour la prompte et fa
cile sillabisation ; nos Critiques et bien d'autres
sont dans cette ignorance. Par le mot paresse ,
II.. Vel j'entens
1298 MERCURE DE FRANCE
j'entens l'aversion et l'éloignement qu'un Maître
fait souvent paroître quand il s'agit de travailler
avec un enfant; cela regarde le plus grand nombre des Précepteurs. Par indifference , j'entens le
caractere de certains Maîtres mercenaires , plus -
occupez , de pane lucrando , que de puero instiuendo. Par interêt , j'entens le motif de certains
Auteurs qui craignent mal à propos que le systême du Bureau ne nuise à la vente de leurs perites Brochures. Par envie, j'entens les sentimens
jaloux de ceux qui ne voudroient jouir que de
leur propre gloire , et même aux dépens de ce lle
des autres. Par mauvaisefoy, j'entens le caractere et le sentiment de ceux qui persuadez de la
bonté et de l'utilité du systême , cachent ce sentiment et agissent contre la vérité connue, poussez par diverses passions, qu'ils n'oseroient avoüer
devant les hommes, et qu'ils ont la malice d'entretenir devant Dieu. Tous ces injustes motifs de
critique , peuvent se rencontrer dans la même
personne ; on pourroit même les désigner , à lamauvais foy près , dont Dieu seul est le juge.
7°. Je dis que l'ortographe passagere dont on
a fait l'essai et dont on a rendu compte dans la
neuvième Lettre sur le sistême du Bureau , je dis
que cette ortographe passagere d'épfant et des
sons ou de l'oreille , peut avoir éloigné bien des
gens , du systême Typographique , ce que n'auroit peut- être pas fait l'ortographe permanente
d'homme , des yeux et de l'usage. Quoiqu'on cut
facilement prévu que cela pourroit arriver ainsi ,
on a été cependant obligé de suivre son Plan
pour mettre le Lecteur bien intentionné , au fait
des sons de la Langue , et en état de mieux juger
du systême ; et cela au hazard de déplaire aux
Lecteurs prévenus qu'on pourroit un peu comII. Vol. parer
JUIN. 1299 1732.
parer à celui qui aima mieux perdre la valeur d'une Lettre de Change , que d'en faire usage ,
malgré l'ortographe singuliere de cette Lettre ,
ou au malade qui refusa tout soulagement , faute
de parfaite guérison.
9
8. J'ajouterai que la saison de l'hyver , propre à faire Recruë de Soldats, ne l'est guere pour
celle des enfans du Bureau. Le froid en fait differer l'exercice , le Printems en paroît la premiere
saison ; outre cela les objets frivoles qu'on donne ordinairement pour étrennes aux petits enfans
dans le commencement de l'année , les occupent
si fort , qu'il seroit pour lors assez inutile de leur
donner un Bureau. Les parens , les amis , les domestiques, tous à l'envi , présentent à l'enfant
bien des niaiseries, plus nuisibles que profitables.
Une Classe de Bureau pour étrennes amuseroit et
instruiroit l'enfant ; mais les parens en general
aiment mieux se prêter au torrent du préjugé
vulgaire,et ausystême ou au jeu des Marionettes,
dont ils font souvent eux-mêmes leur amusement.
9. Oserois- je dire que le prix d'un Bureau
arrête bien des gens riches , dans l'esprit desquels l'argent tient souvent la place de fils aîné
et quelquefois celle de fils unique , même à la
vue d'une nombreuse famille. Dix Pistoles pour
la suite des quatre Classes du Bureau peuvent pa-- roître une somme non seulement à de riches
Bourgeois , mais encore à certaines personnes qui
ne dépensent guere moins de cent francs par jour
pour leur table et pour leur écurie. C'est aux
parens à s'examiner là- dessus devant Dieu et devant les hommes.
,
10°. Il faut convenir que la disette des Maîtres qui veuillent s'asservir au systême du Buseau , en arrétera toûjours les progrès ; mais
II. Vol.
c'est
1300 MERCURE DE FRANCE
c'est faute d'entendre leur véritable interêt qu'ils
refusent d'apprendre et de pratiquer cette métho
de. Elle les feroit rechercher et préferer aux
Maîtres vulgaires ; enfin elle assureroit aux Maîtres externes un nombre de meilleures Maisons
et donneroit aux Précepteurs le choix des meilleurs Elèves. Je dois ajouter icy qu'un mois de
Leçons tipographiques , mettra facilement une
Gouvernante , un Domestique en état de montrer les premieres Classes du Bureau , en atten- dant que l'on donne à l'enfant un Précepteur, ou
bien un Maître -externe.
Q
11 Pour derniere réponse, je donnerai à mon
tour un argument qu'on pourra opposer à celui
de nos critiques. Le voici : Si les Professeurs , les
Régens , les Préfets , ni les Maîtres ne peuvent
pas détruire les preuves qui font voir les avan
tages du Bureau typographique sur la Méthode
vulgaire ; il faut conclure en faveur du Bureau.
Or est-il que ces MM) n'ont pu jusqu'icy prouver l'infériorité du Bureau , ni la supériorité de
la Méthode vulgaire ; donc en faveur de la verité , et pour le bien de la cause des enfans , on
peut, par provision et hardiment predire que les Maîtres ne viendront jamais à bout de prouver l'excellence de leur Méthode vulgaire, contre
celle du Bureau. On doit donc aussi conclure en
faveur du Bureau , contre les mauvaises critiques, C'est au Public à décider , en attendant le
jugement des Commissaires que l'Université de
Paris, et les Académies pourroient nommer dans
la suite , pour l'examen de ce systême.
Je conclus, après toutes ces réfléxions, que les
parens bien intentionnez et curieux de trouver un
bon Précepteur pour leurs petits enfans , ne sauroient mieux faire que de l'éprouver , par le
1. Vel. moyen
JUIN. 1732. 1301
moïen du Bureau tipographyque ; ce sera la
vraie Pierre de touche , en fait de Pédagogie , er l'on peut assurer , sans témérité, que tout Maître
qui refusera aux parens de suivre la Méthode du
Bureau , pour un enfant de trois à sept et à huit
ans , donnera contre lui des préjugez suffisans
pour le refuser lui- même ; et l'on voit par là
que l'épreuve du Maître par celle du Bureau, sera
toujours d'une grande utilité et d'un grand secours pour les parens capables ou incapables de
faire par eux-mêmes choix d'un bon Maître,
>
Les Précepteurs qui refuseront de suivre le systême du Bureau , aux parens qui le leur propos seront , seront obligez de dire pourquoi ? Or ces
Précepteurs , ou ils connoissent le Bureau , ou ils
ne le connoissent pas ; s'ils ne le connoissent
point , et que sans examen ils refusent d'en
faire usage , ils se rendront suspects de préjugé ,
ou d'ignorance , ou de paresse , ou d'indifference; qualitez suffisantes pour refuser ces Précepteurs , dans la plupart desquels on trouvera ordinairement un esprit vain , superficiel , aigre,
indocile , impatient ; un esprit mercenaire , qui
fuit la peine , qui craint le travail , et sur tout
qui redoute l'examen.
Si les Précepteurs au contraire , en refusant absolument de suivre la Méthode du Bureau tipographyque , disent que c'est par connoissance
de cause ; il est juste de les entendre et de répondie à leurs difficultez; ce sera là un des plus surs moyens pour juger de leur maniere de penser , de
parler , et de raisonner. Qualitez rares mais essentielles pour la bonne et la noble éducation.
Cette opposition , d'ailleurs soutenuë de bonne
foy et avec quelque apparence de fondement, ne
peut que faire honneur à l'adversaire , qui se dé11. Vol. clarera
302 MERCURE DE FRANCE
4
clarera contre le systême du Bureau , sans - renoncer à un plus grand examen de cette Methode , ni au dessein de la suivre ; supposé qu'elle se
trouvât la meilleure, L'Auteur , au reste offre
d'intervenir avec plaisir , dans le differend , lorsque les parens témoigneront le désirer , pour le bien de leurs enfans et de la cause publique.
›
Mais si le Maîrre, simple latiniste, plein de luimême, se trouve un esprit faux , incapable de
justesse dans le raisonnement , un esprit sans méthode , enfin un esprit qui ne voye que par les
yeux du préjugé vulgaire , et qui sans vouloir raisonner, soûtienne obstinément que le systême
du Bureau est frivole ; il sera aisé de s'appercevoir qu'un tel caractere n'est pas le meilleur que
l'on puisse désirer pour élever un enfant , et c'est
un grand avantage que de pouvoir s'en assurer
dès le premier jour , sans s'exposer si souvent
à essayer de nouveaux Précepteurs ; car ce frequent changement de Maître , est ordinairement
un obstacle à l'avancement de l'enfant , et le Bureau préviendra quelquefois cetinconvenient.
Les parens qui aiment à se déterminer par rai.
son plutôt que par coutume, remarqueront bientôt dans le monde que les partisans du Bureau
sont ordinairementou personnes d'ordre ou gens
d'esprit Philosophique , aimant le bien public ;
et qu'au contraire ceux qui se déclarent contre le
Bureau ne sont que de simples latinistes , tres- indifferens sur le bien et le mieux , et la plupart incapables d'analiser les idées et de suivre.
avec honneur , le moindre raisonnement. Or si
la chose est , comme j'ose le dire, et comme chacun peut s'en convaincre lui-même , avec les critiques qu'il trouvera dans son chemin ; n'est-ce
pas un grand avantage pour les dignes parens es
D
JUIN. 1732.
1303
pour le public d'avoir un moyen si simple et si
propre à développer l'intérieur des Maîtres les plus dissimulez , qui se présenteront pour la pre- miere institution de l'enfance.
Je ne prétens pas , au reste , conclure qu'un
Maître qui offre de se soumettre au systême du
Bureau devienne par-là et sur le champ un bon
Précepteur ; mais je veux seulement dire qu'entre deux hommes de Lettres , à peu près d'égale réputation , en fait de Pédagogie, on doit toujours préferer l'esprit doux , docile , bien intentionné,
méthodique, qui se prétera volontiers et sans répugnance à l'exercice du Bureau, et qui en hom- me d'honneur et de bien , par ses discours et par
sa complaisance litteraire,prouvera qu'il ne craint
pas le travail , et qu'il est capable d'affection et d'attachement pour l'enfant dont on veut bien
d'abord lui confier la premiere éducation,
5
On pourra aussi trouver des Maîtres d'ailleurs
tres-capables , qui pleins d'eux- mêmes et de la Méthode vulgaire , diront qu'il est possible que
le Bureau soit bon et utile , mais que leur répu- tation étant faite , ils n'ont pas besoin d'entrer
dans le détail de ce systême, et qu'ils s'en tiennent à leur maniere d'enseigner , sans vouloir
être remis à l'A , Bé, Cé Tipographyque. Or ne
peut-on pas encore dire , sans témérité , que ces Maîtres , quelque habiles qu'ils soient dans le
Grec et dans le Latin ; que ces Maîtres , dis-je ,
en craignant la peine et le travail , donnent parlà contr'eux, des préjugez suffisans pour leur refuser la préférence sur les autres Maîtres ? Car
c'est déja un grand préjugé contre un Précep- teur que de vouloir d'abord canoniser son indifference, sa paresse , et son peu de goût litteraire ,
en refusant de lire une Méthode qui fait quelque
11. Vol. bruit
1304 MERCURE DE FRANCE
bruit dans le monde , et qui , selon l'expression
d'un grand homme, annonce une révolution dans l'éducation des enfans.
Enfin il y a des Maîtres bien intentionnez , qui
feroient volontiers usage du Bureau s'ils en comprenoient le systême , mais ils s'en font d'abord une épouvantail et tâchent adroitement de
détourner les parens qui en voudroient faire l'expérience.
Je n'ai rien à dire contre la prudence de ces
Maîtres , si ce n'est qu'ils apprendroient facilement le systême , dès que sans prévention , et à
l'exemple des autres , ils en voudroient faire l'essai ; les enfans donneront aux Maîtres le temps
necessaire pour cette étude ; comme les Ecoliers
de certains Colleges , donnent aux Regens des
Basses classes, le temps de se rendre capables des
plus hautes. Le Maître apprendra le sistème Ty ,
pographique en le mostrant à l'enfant , après
avoir un peu raisonné et conferé avec quelque
Maître de Typographie , et après avoir vú travailler quelque Enfant sur la Table de son Bureau. Ce sera toujours un grand préjugé contre
un Précepteur s'il trouve pénible et difficile un
petit exercice d'enfant. Un Maître qui craint ce
petit travail , fait voir sans y prendre garde, qu'il
est occupé à chercher du pain , plutôt qu'à le
gagner.
On trouvera au surplus facilement de bons
Maîtres quand les parens connoîtront le prix de l'éducation , qu'ils ne regarderont pas un Precep
teur comme un simple domestique , indigne de manger à leur table , à propos de quoi il n'est
pas mal de rapporter ici ce que le Maréchal
de Villeroy dit autrefois à l'occasion d'un Prési- dent à Mortier, dont le fils ne mangeoit pomt
II. Vol. avec
JUIN 1732. 1305
avec son Précepteur : Je ne voudrois point , dit le
Maréchal , donner à mon fils un homme que je ne
croirois pas digne de manger à matable. Il est visible qu'un Maître , Précepteur , ou Gouverneur
qui ne mangera pas avec son Eleve , ei sera
bientôt méprisé. Enfin les parens trouveront un
bon Précepteur quand ils seront dans le dessein
de le dédommager du sacrifice qu'il aura fait de
sa liberté , de son tems , et de la meilleure partie de ses années.
D'où vient qu'on est si libéral à l'égard d'un
Cuisinier, envers un Maître de Musique et d'Ins- trument, à l'égard d'un Maître à Danser , même
avec un dresseur de Chiens , et qu'on leur donne
volontiers pour un seul mois la somme qu'on
marchande quelquefois pour six mois de simple
pédagogic
Doit- on être surpris après cela si les bons Précepteurs sont rares, et si l'on voit manquer tant
d'éducations. Je l'ai dit bien des fois , c'est souvent la faute des parens , des domestiques et des
Maîtres , plutôt que celle des enfans. Et c'est sur
cette matiere qu'on pourroit donner bien des gemissemens. Trop de gens pensent sur cet article commeM. G. Ce Regent suppose que le moindre
secours du plus petit Maître d'Ecole d'un Maître
d'unmédiocre sçavoir et d'une médiocre exaatitude;
que ce moindre secours suffit pour montrer
lire aux petits enfans.
כי Voici ce qu'on lit là- dessus , dans la Réponse,
du M. Perquis à un critique anonime. Jem'é3 tonne, M. que citant quelquefoisQuintilien quand
→ vous croyez qu'il vous estfavorable , vous n'ayez
» pas remarqué qu'il condamne ceux qui ne pren- nent d'abord que de petits Maîtres pour don-
"ner,disent-ils, les principes des sciences , au lieu
II.Vel C » de
1396 MERCURE DE FRANCE
3
9
??
de choisir les plus habiles , et d'imiter Philippe,
qui ne voulut pas permettre qu'un autre qu'Aristote montrat à lire à Alexandre , parce qu'il
étoit persuadé que la perfection dépendoit deces
» commencemens.Ne faut- il pas parler et raison-
» ner avec un petit enfant ? Or, pour me servir
de l'expression de M. le Févre , si le Maitre est
≫ unâne , que voulez-vous qu'un âne fasse , sinon
» un âne comme lui.S.Jérôme a fair la même remarque ,il pensoit autrement que vous , et le
moindre Lecteur s'appercevra que Philippe ,
Quintilien et S. Jérôme se seroient accommo
dez du Bureau Typographique , plutôt que de
so, voire A, Bé , Cé Vulgaire , et de votre Maitre
d'un médiocre sçavoir et d'une médiocre exactitude , ou enfin du moindre secours du plus petit- Maître d'Ecole.
"
33
Je repeterai encore ici que si on ne goute point
la Méthode du Bureau Typographique , je m'en
étonne , et que si on la goute , je m'en étonne de
même.
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Résumé : QUATORZIÈME LETTRE sur le Systeme du Bureau Typographique et sur le choix d'un Précepteur, pour la premiere éducation d'un Enfant.
La quatorzième lettre aborde le système du Bureau Typographique et le choix d'un précepteur pour l'éducation des jeunes enfants. L'auteur répond à une objection selon laquelle, si ce système était aussi utile que prétendu, plus de parents et de maîtres l'adopteraient. Il explique que les maîtres s'opposent souvent aux nouvelles méthodes par ignorance ou prévention. La bonté d'un système ne dépend pas seulement de sa qualité intrinsèque, mais aussi de la persuasion des gens quant à cette bonté. L'auteur mentionne que peu de journaux ont parlé du Bureau Typographique, car les lettres insérées dans les Mercures n'ont pas été largement diffusées. De plus, beaucoup de lecteurs ne lisent pas les journaux ou passent les sujets qu'ils ne comprennent pas. Ceux qui ont vu le Bureau en ont reconnu l'utilité, y compris les critiques. Cependant, des facteurs comme le préjugé, l'ignorance, la paresse, l'indifférence, l'intérêt, l'envie et la mauvaise foi peuvent freiner les progrès du système. L'auteur ajoute que l'orthographe passagère utilisée dans les lettres pourrait avoir éloigné certains lecteurs. Il note également que la saison hivernale n'est pas propice à l'enseignement avec le Bureau Typographique, et que le prix de ce dernier peut dissuader certains parents. La disette de maîtres formés à ce système en freine également l'adoption. Le texte distingue deux types de précepteurs : ceux qui refusent la méthode par connaissance de cause et ceux qui la rejettent par orgueil ou paresse. Les premiers méritent d'être entendus et peuvent contribuer à un débat constructif. Les seconds sont décrits comme des latinistes simples, incapables de raisonnement juste et méthodique, et leur caractère est jugé inapproprié pour l'éducation des enfants. Les parents sont encouragés à observer les partisans du Bureau, souvent des personnes d'ordre ou des philosophes, et à éviter ceux qui s'y opposent par indifférence ou incapacité. Il est souligné l'importance de choisir des précepteurs dociles, méthodiques et bien intentionnés, capables de s'adapter à la méthode du Bureau. Les maîtres réticents à adopter la méthode sont invités à l'étudier pour le bien des enfants. Le texte critique la sous-estimation des précepteurs par les parents, comparée à la générosité accordée à d'autres professionnels comme les cuisiniers ou les maîtres de danse. Enfin, il rappelle l'importance de choisir des précepteurs compétents dès le début de l'éducation, citant des autorités comme Quintilien, Philippe et Jérôme, qui prônaient l'excellence dès les premiers apprentissages.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 2220-2222
EXTRAIT des Actes qui sont en dépôt au Greffe de la Jurisdiction de M. le Chantre de l'Eglise de Paris. A M. le Grand-Chantre de l'Eglise de Paris.
Début :
Supplie humblement, &c[.] Soit communiqué à notre Promoteur, ce premier Septembre [...]
Mots clefs :
Paris, Enfants, Promoteur, Chantre, Système, Bureau typographique, Bibliothèque des enfants
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT des Actes qui sont en dépôt au Greffe de la Jurisdiction de M. le Chantre de l'Eglise de Paris. A M. le Grand-Chantre de l'Eglise de Paris.
EXTRAIT des Actes qui sont en
dépôt an Greffe de la Jurisdiction de
M. le Chantre de l'Eglise de Paris.
P A M. le Grand Chantre de l'Eglise
de Paris ..
Supplie humblement , &c Soit communiqué.
à notre Promoteur , ce premier Septembre
1732. Signé , F. Vivant.
Vu l'utilité que le Public peut retirer d'une
Méthode qui passe pour abreger un temps considerable
que les Maîtres employent ordinairement
, pour apprendre à. la jeunesse confiée à
leurs soins , les premiers principes de la lecture ,
je n'empêche les fins de la présenté Requête . A
Paris , ce 2 Septembre 1732. Signé , Collin , Promoteur
, avec paraphe .
Vû la Requête de l'autre part et les Conclusions
de notre Promoteur nous nommons
pour Commissairrs les sieurs Ceullin , le Faux
et Chompré, lesquels conjointement avec notre
Promoteur et notre Greffier , examineront la
susdite Méthode et noùs en feront leur rapport
pour ordonner ce que nous jugerons le plus utile -
au
OCTOBRE . 1733 2227
au bien public et à l'instruction de la jeunesse.
A Paris, ce 2. Septembre 1732. Signé, F. Vivant
Vu par par Nous la Requête présentée à M. le
Chantre de l'Eglise de Paris , par le sieur Dumas,
Auteur du Systême du Bureau Tipographique et
de la Bibliotheque des Enfans , Livre qui contient
la maniere de se servir dudit Bureau et de la Méthode
pour montrer aux enfans les premiers élemens
des Lettres , en date du premier Septembre
1732. au bas de laquelle Requête sont les Conclusions
de M. le Promoteur en datte du 2. dudit
mois et an. Vû l'Ordonnance de M. le Chantre, du
même jour et an , par laquelle il a jugé à propos
de nous nommer Commissaires à l'effet d'éxaminer
le susdit Systême et la susdite Méthode
dont on fait actuellement usage pour Monseigneur
le Dauphin et pour les augustes Enfans
de France.
Nous , après avoir entendu l'Auteur, er vi des
enfans travailler audit Bureau ; ayant examiné
le tout avec exactitude , avons jugé ledit Systême
très- ingénieux , fort propre à avancer la jeunesse
sans la dégoûter , et très - capable d'ôter
les épines qui se trouvent , surtout en apprenant
aux enfans les premiers élémens ; c'est pourquoi
nous estimons et croyons que M. le Chantre
peut permettre la pratique de ce Systême, l'usage
de la Bibliotheque des Enfans,dans les Ecoles de sa
Jurisdiction , et exhorter les Maîtres qui le pourront
commodément, à les pratiquer , et l'exercice
du Bureau Tipographique;c'est le témoignage que
nous avons cru devoir rendre à la vérité en faveur
de l'utilité publique , en foi de quoi nous avons
signé ce 11. Novembre 1732 Signé, Collin , Promoteur,
le Faux , Ceullin , Chompré , Chanu,
Nous , François Vivant , Prêtre , Docteur en
Théo2222
MERCURE DE FRANCE
Théologie de la Maison et Societé de Sorbonne,
Grand- Vicaire de M. l'Archevêque de Paris ,
Chantre et Chanoine de l'Eglise Métropolitaine
de Paris , Collateur , Juge et Directeur des petites
Ecoles de la Ville , Cité , Université , Fauxbourgs.
etBanlieuë de Paris , après avoir oui notre Promoteur
, en notre Jurisdiction , et les Commissaires
par nous nommez pour l'examen du Livre intitulé
, la Bibliotheque des Enfans , ou les premiers
Elemens de Lettres , contenant le Systéme du Bureau.
Tipographique , à l'usage de Monseigneur le Dauphin
, et des augustes Enfans de France . Vû et lû
le rapport desdits Commissaites , permettons
d'introduire l'usage dudit Systême, Livre et Méthode
dans les Ecoles de notre Jurisdiction , et
exhortons les Maîtres , Maîtresses et autres , enseignant
sous notre autorité , qui le pourront
commodément , à les pratiquer , et.l'exercice du
Bureau Tipographique. Fait en notre Hôtel à
Paris , ce 24. Novembre 1732. Signé, F. Vivant.
Collationné à la minute originale , étant au
Greffe desdites Ecoles , par moi Greffier d'icelles ,
spussigné ce 1. Decembre 1732. Chanu , Greffier.
dépôt an Greffe de la Jurisdiction de
M. le Chantre de l'Eglise de Paris.
P A M. le Grand Chantre de l'Eglise
de Paris ..
Supplie humblement , &c Soit communiqué.
à notre Promoteur , ce premier Septembre
1732. Signé , F. Vivant.
Vu l'utilité que le Public peut retirer d'une
Méthode qui passe pour abreger un temps considerable
que les Maîtres employent ordinairement
, pour apprendre à. la jeunesse confiée à
leurs soins , les premiers principes de la lecture ,
je n'empêche les fins de la présenté Requête . A
Paris , ce 2 Septembre 1732. Signé , Collin , Promoteur
, avec paraphe .
Vû la Requête de l'autre part et les Conclusions
de notre Promoteur nous nommons
pour Commissairrs les sieurs Ceullin , le Faux
et Chompré, lesquels conjointement avec notre
Promoteur et notre Greffier , examineront la
susdite Méthode et noùs en feront leur rapport
pour ordonner ce que nous jugerons le plus utile -
au
OCTOBRE . 1733 2227
au bien public et à l'instruction de la jeunesse.
A Paris, ce 2. Septembre 1732. Signé, F. Vivant
Vu par par Nous la Requête présentée à M. le
Chantre de l'Eglise de Paris , par le sieur Dumas,
Auteur du Systême du Bureau Tipographique et
de la Bibliotheque des Enfans , Livre qui contient
la maniere de se servir dudit Bureau et de la Méthode
pour montrer aux enfans les premiers élemens
des Lettres , en date du premier Septembre
1732. au bas de laquelle Requête sont les Conclusions
de M. le Promoteur en datte du 2. dudit
mois et an. Vû l'Ordonnance de M. le Chantre, du
même jour et an , par laquelle il a jugé à propos
de nous nommer Commissaires à l'effet d'éxaminer
le susdit Systême et la susdite Méthode
dont on fait actuellement usage pour Monseigneur
le Dauphin et pour les augustes Enfans
de France.
Nous , après avoir entendu l'Auteur, er vi des
enfans travailler audit Bureau ; ayant examiné
le tout avec exactitude , avons jugé ledit Systême
très- ingénieux , fort propre à avancer la jeunesse
sans la dégoûter , et très - capable d'ôter
les épines qui se trouvent , surtout en apprenant
aux enfans les premiers élémens ; c'est pourquoi
nous estimons et croyons que M. le Chantre
peut permettre la pratique de ce Systême, l'usage
de la Bibliotheque des Enfans,dans les Ecoles de sa
Jurisdiction , et exhorter les Maîtres qui le pourront
commodément, à les pratiquer , et l'exercice
du Bureau Tipographique;c'est le témoignage que
nous avons cru devoir rendre à la vérité en faveur
de l'utilité publique , en foi de quoi nous avons
signé ce 11. Novembre 1732 Signé, Collin , Promoteur,
le Faux , Ceullin , Chompré , Chanu,
Nous , François Vivant , Prêtre , Docteur en
Théo2222
MERCURE DE FRANCE
Théologie de la Maison et Societé de Sorbonne,
Grand- Vicaire de M. l'Archevêque de Paris ,
Chantre et Chanoine de l'Eglise Métropolitaine
de Paris , Collateur , Juge et Directeur des petites
Ecoles de la Ville , Cité , Université , Fauxbourgs.
etBanlieuë de Paris , après avoir oui notre Promoteur
, en notre Jurisdiction , et les Commissaires
par nous nommez pour l'examen du Livre intitulé
, la Bibliotheque des Enfans , ou les premiers
Elemens de Lettres , contenant le Systéme du Bureau.
Tipographique , à l'usage de Monseigneur le Dauphin
, et des augustes Enfans de France . Vû et lû
le rapport desdits Commissaites , permettons
d'introduire l'usage dudit Systême, Livre et Méthode
dans les Ecoles de notre Jurisdiction , et
exhortons les Maîtres , Maîtresses et autres , enseignant
sous notre autorité , qui le pourront
commodément , à les pratiquer , et.l'exercice du
Bureau Tipographique. Fait en notre Hôtel à
Paris , ce 24. Novembre 1732. Signé, F. Vivant.
Collationné à la minute originale , étant au
Greffe desdites Ecoles , par moi Greffier d'icelles ,
spussigné ce 1. Decembre 1732. Chanu , Greffier.
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Résumé : EXTRAIT des Actes qui sont en dépôt au Greffe de la Jurisdiction de M. le Chantre de l'Eglise de Paris. A M. le Grand-Chantre de l'Eglise de Paris.
En septembre 1732, une requête fut soumise à M. le Grand Chantre de l'Église de Paris concernant une méthode d'enseignement de la lecture. Cette méthode visait à réduire le temps nécessaire pour apprendre les premiers principes de la lecture aux jeunes élèves. Le Promoteur, après examen, ne s'opposa pas à cette méthode et recommanda son étude par des commissaires. Ces derniers, après avoir observé des enfants utilisant la méthode et entendu son auteur, la jugèrent ingénieuse et efficace pour avancer l'instruction sans décourager les élèves. Ils recommandèrent son adoption dans les écoles sous la juridiction de M. le Chantre. Le 24 novembre 1732, M. le Grand Chantre autorisa l'introduction de cette méthode et encouragea les enseignants à l'adopter. Le document fut ensuite collationné et signé par le greffier le 1er décembre 1732.
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