Résultats : 739 texte(s)
Détail
Liste
551
p. 1988
LOGOGRYPHE en Réponse à un Logogryphe du Mercure de Juin 1737. premier volume.
Début :
Quoi, l'on trouve dans Charlatan, [...]
Mots clefs :
Chantre
552
p. 1148-1149
LOGOGRYPHE.
Début :
Mes Etats sont plus grands que ceux de tous les Rois, [...]
Mots clefs :
Providence
553
p. 1149
AUTRE.
Début :
Tu t'abuses, Lecteur, si tu veux me comprendre. [...]
Mots clefs :
Incarnation
555
p. 2689-2690
AUTRE.
Début :
D'onze Lettres formé, je chante les hauts faits [...]
Mots clefs :
Martyrologe
557
p. 1382-1383
LOGOGRYPHE.
Début :
Pour te prouver, Lecteur, jusqu'où va ma tendresse, [...]
Mots clefs :
Idolâtrie
561
p. 147-148
AUTRE.
Début :
J'ai dix pieds qui d'abord presentent à tes yeux [...]
Mots clefs :
Pèlerinage
565
p. 124-125
LOGOGRYPHE.
Début :
Je ne suis Ange, esprit, homme, ni diable, [...]
Mots clefs :
Pentecôte
566
p. 123-124
AUTRE.
Début :
Je ne suis point encor ce qu'un jour je dois être, [...]
Mots clefs :
Catéchumène
570
p. 84-85
ENIGME.
Début :
Né d'un homme adultére & pourtant légitime, [...]
Mots clefs :
Psaume Miserere
572
p. 106-108
LOGOGRIPHE.
Début :
Je marche sur trois pieds ; mais de notre langage, [...]
Mots clefs :
Jubilé
577
p. 19-28
CONVERSATION SINGULIERE.
Début :
Je passois en Allemagne, il n'y a pas long-tems. Mes affaires me retinrent [...]
Mots clefs :
Philosophe, Adam, Feuille périodique, Conversation
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texteReconnaissance textuelle : CONVERSATION SINGULIERE.
CONVERSATION SINGULIERE.
E paffois en Allemagne , il n'y a pas
long - tems . Mes affaires me retinrent
quelques jours dans une ville d'Univerfité ,
dont le nom n'importe pas à la choſe. Je
fus introduit dans la plus fine aſſemblée
de la ville : on y parloit François. Le jeune
Atys , avec qui j'avois fait une partie de
mon voyage , y fut auffi conduit : il cherchoit
à rire, & j'obſervois.
L'objet le plus remarquable de la compagnie
étoit le grave & profond Marfonius
, Profeffeur en langues orientales ,
perfonnage refpectable , dont la tête accablée
fous le poids de la ſcience & des années
, étoit ombragée fous le vafte contour
d'un feutre large & détrouffé , qui s'en20
MERCURE DE FRANCE.
fon
fonçoit fur une perruque vénérable par
antiquité. Son menton à triple étage defcendoit
avec grace fur une fraife ample &
craffeufe , qui contraftoit peu avec un habit
dont le tems avoir rendu la couleur
indécife entre le blanc & le noir. Sa fcience
étoit fur-tout reconnoiffable , par la
profonde empreinte qu'avoit laiffée fur fon
nez une paire d'énormes lunettes. 11 eft ,
dit - on , fort érudit. Cela fe peut ; mais làdeffus
il eft fi facile d'en impofer ! Du bon
fens vous en jugerez.
Le refte de la compagnie étoit compofé
d'un affez grand nombre de devots admirateurs
de M. Marfonius , & de deux ou trois
gens d'efprit qui s'en moquoient.
On eut bientôt épuifé les annales du
beau tems , la chronique du quartier & la
littérature des Romans ; car on en parle
même en Allemagne. On propofa des queftions
, on difputa , & le parti de M. Marfonius
fut toujours le plus fort , parce que
les autres raifonnoient , & qu'il citoit des
autorités d'un ton haut & décifif , ce qui
impofoit un filence de pitié aux gens d'efprit
& d'admiration aux fots .
Je ne fçai par quel hazard quelqu'un s'avifa
de parler de la feuille périodique d'Adam
, fils d'Adam . On fe récria fur la bizarrerie
du titre. Que le Spectateur Anglois
DECEMBRE. 1754. 21
fe foit intitulé Socrate moderne , cela eft
raifonnable , Socrate étoit bon obfervateur...
Oui fans doute , interrompit brufquement
Atys , Socrate étoit un habile
homme , je l'entends citer tous les jours :
mais, Adam ! Adam n'étoit pas Philofophe .
Adam n'étoit pas Philofophe ! s'écria notre
Théologien en fureur, & mettant les poings
fur les côtés : où avez - vous pris cela ? Je
vous foutiens avec le fçavant George Hornius
, qu'Adam avoit par infufion toutes
les fciences , tout comme je vous prouverai
auffi que Socrate n'a jamais écrit .
Pour Socrate , répartit vivement Atys ,
je vous l'abandonne ; mais , Monfieur , faites-
moi la grace de me dire fi Adam étoit
Ariftotelicien , Cartéfien , Sceptique , Académicien
, Newtonien , Stoïcien , Pirrhonien
, Pithagoricien , Cynique ? ce qu'il
penfoit du mouvement de la terre , de la
chaleur , du froid , des couleurs , du magnétifme
, des particules organiques , de
l'origine des idées , de l'électricité , des
longitudes & de toutes ces matieres fur lefquelles
nos Philofophes modernes difputent
fans fin .
Notre Sçavant ne fe poffédoit pas pendant
toute cette tirade ; il l'auroit interrompue
plufieurs fois , fi l'impétuofité avec
laquelle elle fut prononcée le lui eût per
22 MERCURE DE FRANCE.
mis ; mais enfin elle fe termina d'ellemême
, & laiffa le tems à M. Marfonius
de refpirer. Oh ! prodige d'ignorance ,
s'écria - t - il , en levant les yeux au ciel ,
Adam pouvoit - il fçavoir ce qui n'a été
trouvé que long-tems après lui ? Pour mon
ignorance , je l'avoue , interrompit le jeune
homme ; mais , Monfieur , il ne s'agit pas
de la mienne , il s'agit d'Adam ; faitesmoi
la grace de me dire ce qu'il fçavoit. Il
fçavoit , répondit le docte Théologien , la
Médecine , l'Hiftoire naturelle , l'Architecture
, les Mathématiques , l'Aftronomie
, l'Aftrologie , l'Agriculture , en un
mot toutes les ſciences . Cela eft fort poffible
& fort vraisemblable , répliqua d'un
ton railleur le jeune étourdi ; mais , Monfieur
, toutes ces fciences ont été inventées
& perfectionnées bien long-tems après le
déluge. O pectora caca ! s'écria M. Marfonius
; cela eft-il poffible ! Je vous dis
iterum atque iterum , que cela eft certain ,
d'une certitude morale , phyfique & métaphyfique
, & que la Philofophie antediluvienne
étoit beaucoup plus avancée que
la nôtre.
Fort bien , répartit Atys , je ne vous
avois pas d'abord compris. Voilà ce que
c'eft que d'expliquer tranquillement fes
raifons , on s'éclaircit toujours. Les PatriarDECEMBRE.
1754. 23
1.
S
ches étoient fans doute de très - fçavans
hommes. Mais , Monfieur , quel fyſtême
fuivoit- on dans ce tems-là ? car il n'eft
pas poffible de s'en paffer. Qu'il y eût un
fyfteme reçu & fuivi , répondit M. le Profeffeur
, c'eft de quoi on ne fçauroit douter.
Tout comme auffi on doit fe perfuader
néceffairement que le fyftême d'Adam
triomphoit comme le plus ancien .
Atys. Adam avoit donc un fyftême ?
Marfonius. Cela eft hors de doute ; car
il étoit non feulement Philofophe , mais
encore Prophete & de plus Théologien :
les Juifs lui attribuent le Pfeaume XCII .
Le Pape Gelafe a connu quelques livres
que les Gnoftiques lui fuppofoient. Le P.
Salian cite là - deffus Mafius , & enfin il eft
certain que les Arabes parlent de plus de
vingt volumes écrits de fa main. Vous pouvez
confulter là- deffus , non 'feulement
Hottinger , mais encore Reland , de religione
Mahumedanâ.
Atys. Ah , Monfieur , des livres d'Adam !
en quelle langue les fit- il imprimer ? n'en
auriez-vous point ? pourriez-vous me les
faire voir ?
Marf. Voilà , voilà les jeunes gens , ils
font toujours dans les extrêmes . Je ne vous
dis
pas que les Juifs , les Gnoftiques , ni
les Arabes en doivent être crus fur leur
24 MERCURE DE FRANCE.
parole , je prétens feulement qu'il y a làdeffus
une tradition conftante qui doit
avoir néceſſairement quelque fondement
réel .
Atys. Oh ! pour votre tradition , Monfieur
, je n'y ai pas la foi ; tout cela font
des rêveries.
Marfonius. Des rêveries. Je crois , petit
mirmidon , que vous prétendez ici m'infulter
; il vous fied bien à votre âge de vous
oppofer au fentiment d'un homme qui étudie
depuis quarante- cinq ans les langues
orientales. Apprenez , jeune préfomptueux ,
que vous devez refpecter ma fcience , mes
cheveux gris & ma charge. Souvenez- vous
qu'avec ce ton décifif & ce petit orgueil ,
Vous courez droit à l'impieté.
Eh ! de grace , M. le Profeffeur , reprit
Atys , d'un ton hypocrite , ne vous fâchez
pas , mon deffein n'étoit pas de vous offenfer
; je recevrai , puifqu'il le faut , la tradition
, non feulement antediluvienne
mais même préadamique.
Marfonius. Je vois avec plaifir que vous
vous rendez à mes raiſons , auffi je veux
bien vous inftruire des véritables argumens
fur lefquels nous nous fondons , pour
croire qu'Adam étoit philofophe. Vous
avez lu la Geneſe ?
Atys. Oui vraiment .
Marf.
DECEMBRE.
1754. 25
Marf. Vous y avez donc lû que le premier
homme fortit parfait des mains du
Créateur ?
Atys . Non , Monfieur.
Marf. Quelle mémoire ! N'y avez - vous
pas lû que le premier homme fut fait à l'image
de Dieu ?
Atys. Affurément.
Marf.Eh bien ! ne s'enfuit-il pas de là
qu'Adam avoit par infufion toutes les
fciences ?
Ays. La conféquence vous paroît - elle
juſte ?
Mars. En doutez-vous ?
Atys. Il faut donc bien la recevoir.
Que je fuis charmé , repartit M. Marfonius
, de vous voir fi docile ! il faut que
je vous embraffe. Là deffus le grave Profeffeur
s'approche , le ferre étroitement
dans fes bras , l'étouffe , le dérange & lui
donne un baifer ; mais un baifer ! ... 11
fe feroit bien paffé de cette accolade ; il la
fouffrit cependant , afin d'être initié dans
tous les myfteres. En effet , quand la gravité
de M. Marfonius eut repris fon équilibre
: voici , dit- il , l'argument des argumens
, la preuve des preuves , en faveur
du fyftême de la Philofophie adamique.
Vous fçavez que Dieu fit paffer en revûe
en préfence d'Adam tous les animaux , &
1. Vol. B
26 MERCURE DE FRANCE.
qu'il leur donna à chacun leur nom ?
Atys. Je m'en fouviens très-bien . Et cela
prouve ?..
Marf.Cela prouve. Attendez donc le
fçavant Bochart a fait voir dans un de fes
fermons , que ces noms des animaux défignent
leurs qualités effentielles . Cela ne
prouve-t-il pas qu'Adam avoit une connoiffance
exacte de l'Hiftoire naturelle &
même de la logique , fuivant le ſentiment
d'Eufebe ?
Atys. Eufebe & Bochart ! Cela eft clair ;
il n'y a rien à dire.
Marf. J'ai cependant oui raifonner des
fçavans qui n'étoient pas de ce fentiment ,
& même j'ai là deffus depuis dix ans une
correfpondance fort intéreffante avec un
Profeffeur de .. J'en vais publier l'abrégé
en deux volumes in folio , fous ce titre :
Adami doctrina adverfus reluctantium incurfiones
vindicata, five Mularius confutatus ,
c. Il eft certain qu'il aura du deffous ; car
fes lettres , quoique je les aye mifes toutes
entieres , ne rempliffent pas vingt pages.
L'ouvrage est tout prêt , & il ne s'agit plus
que de trouver un Libraire qui veuille's'en
charger.
Atys. Ce n'eft pas l'embarras mais
Monfieur , que peut répondre votre antagoniſte
à tant de preuves ? Il faut qu'il foit
DECEMBRE. 1754. 27
bien opiniâtre & bien peu fubtil.
Marf.Il dit qu'il n'eft pas certain qu'Adam
parlât Hébreu , que cependant Bochart
a pofé fur ce principe ; peut- être les
animaux n'ont pas pris leur nom des qualités
qu'ils ont , mais que ces qualités ont
été ainſi appellées à caufe des animaux qui
les avoient. Que tout le fyftême porte fur
la fcience des étymologies qui eft i fouvent
chimerique ; il ajoute je ne fçai combien
d'autres fadaifes , qui ne méritent pas
qu'on s'y arrête , d'autant mieux qu'elles
tendent à foutenir une opinion dangereuſe.
Atys. Enforte , Monfieur , que celui qui
attaque la Philofophie d'Adam , attaque
Dieu , la religion , & qui plus eft les fçavans.
Mais jufqu'où , je vous prie , alloit
la fcience de notre premier pere ?
Ce point , répondit Marfonius , en baiffant
les yeux par orgueil , n'eft pas abfolument
décidé. Il y a dans cette question
importante deux principaux écueils à éviter
; l'un où eft tombé Henri de Haffia ,
qui prétend qu'Adam n'étoit pas plus fçavant
qu'Ariftote ; l'autre vers lequel inclinent
les Rabbins , qui mettent Adam audeffus
de Moïfe , de Salomon & des Anges
même. L'un péche en défaut , comme vous
voyez , & l'autre en excès.
B ij
28 MERCURE DE FRANCE.
Atys , qui fe trouvoit tout auffi inftruit
après cette converfation qu'on a coutume
de l'être après une difpute publique , prit
alors le ton d'un écolier qui vient d'oppo
fer à une theſe , & faifant une profonde
revérence : je vous rends grace , dit - il ,
fçavantiffime , illuftriffime , doctiffime ,
vigilantiffime Profeffeur , de ce que vous
avez daigné éclaircir mes doutes ; je continue
à faire des voeux pour la fanté de
votre corps , pour celle de votre efprit &
pour l'heureuſe organiſation de votre cerveau.
M. Marfonius étoit fi content de lui ,
que fans s'appercevoir qu'on le railloit , il
alloit remercier par le compliment le plus
emphatique , lorfqu'il fut déconcerté par
un éclat de rire prodigieux qu'Atys entonna,
& qui fut repété par quelques - uns même
des adorateurs de M. Marfonius. Les
autres regardoient le jeune étranger avec
des yeux de flamme , & méditoient fans
doute une vengeance éclatante , lorſqu'il
prit prudemment le parti de la retraite . Je
le fuivis , & nous vînmes écrire enſemble
ce fingulier dialogue.
E paffois en Allemagne , il n'y a pas
long - tems . Mes affaires me retinrent
quelques jours dans une ville d'Univerfité ,
dont le nom n'importe pas à la choſe. Je
fus introduit dans la plus fine aſſemblée
de la ville : on y parloit François. Le jeune
Atys , avec qui j'avois fait une partie de
mon voyage , y fut auffi conduit : il cherchoit
à rire, & j'obſervois.
L'objet le plus remarquable de la compagnie
étoit le grave & profond Marfonius
, Profeffeur en langues orientales ,
perfonnage refpectable , dont la tête accablée
fous le poids de la ſcience & des années
, étoit ombragée fous le vafte contour
d'un feutre large & détrouffé , qui s'en20
MERCURE DE FRANCE.
fon
fonçoit fur une perruque vénérable par
antiquité. Son menton à triple étage defcendoit
avec grace fur une fraife ample &
craffeufe , qui contraftoit peu avec un habit
dont le tems avoir rendu la couleur
indécife entre le blanc & le noir. Sa fcience
étoit fur-tout reconnoiffable , par la
profonde empreinte qu'avoit laiffée fur fon
nez une paire d'énormes lunettes. 11 eft ,
dit - on , fort érudit. Cela fe peut ; mais làdeffus
il eft fi facile d'en impofer ! Du bon
fens vous en jugerez.
Le refte de la compagnie étoit compofé
d'un affez grand nombre de devots admirateurs
de M. Marfonius , & de deux ou trois
gens d'efprit qui s'en moquoient.
On eut bientôt épuifé les annales du
beau tems , la chronique du quartier & la
littérature des Romans ; car on en parle
même en Allemagne. On propofa des queftions
, on difputa , & le parti de M. Marfonius
fut toujours le plus fort , parce que
les autres raifonnoient , & qu'il citoit des
autorités d'un ton haut & décifif , ce qui
impofoit un filence de pitié aux gens d'efprit
& d'admiration aux fots .
Je ne fçai par quel hazard quelqu'un s'avifa
de parler de la feuille périodique d'Adam
, fils d'Adam . On fe récria fur la bizarrerie
du titre. Que le Spectateur Anglois
DECEMBRE. 1754. 21
fe foit intitulé Socrate moderne , cela eft
raifonnable , Socrate étoit bon obfervateur...
Oui fans doute , interrompit brufquement
Atys , Socrate étoit un habile
homme , je l'entends citer tous les jours :
mais, Adam ! Adam n'étoit pas Philofophe .
Adam n'étoit pas Philofophe ! s'écria notre
Théologien en fureur, & mettant les poings
fur les côtés : où avez - vous pris cela ? Je
vous foutiens avec le fçavant George Hornius
, qu'Adam avoit par infufion toutes
les fciences , tout comme je vous prouverai
auffi que Socrate n'a jamais écrit .
Pour Socrate , répartit vivement Atys ,
je vous l'abandonne ; mais , Monfieur , faites-
moi la grace de me dire fi Adam étoit
Ariftotelicien , Cartéfien , Sceptique , Académicien
, Newtonien , Stoïcien , Pirrhonien
, Pithagoricien , Cynique ? ce qu'il
penfoit du mouvement de la terre , de la
chaleur , du froid , des couleurs , du magnétifme
, des particules organiques , de
l'origine des idées , de l'électricité , des
longitudes & de toutes ces matieres fur lefquelles
nos Philofophes modernes difputent
fans fin .
Notre Sçavant ne fe poffédoit pas pendant
toute cette tirade ; il l'auroit interrompue
plufieurs fois , fi l'impétuofité avec
laquelle elle fut prononcée le lui eût per
22 MERCURE DE FRANCE.
mis ; mais enfin elle fe termina d'ellemême
, & laiffa le tems à M. Marfonius
de refpirer. Oh ! prodige d'ignorance ,
s'écria - t - il , en levant les yeux au ciel ,
Adam pouvoit - il fçavoir ce qui n'a été
trouvé que long-tems après lui ? Pour mon
ignorance , je l'avoue , interrompit le jeune
homme ; mais , Monfieur , il ne s'agit pas
de la mienne , il s'agit d'Adam ; faitesmoi
la grace de me dire ce qu'il fçavoit. Il
fçavoit , répondit le docte Théologien , la
Médecine , l'Hiftoire naturelle , l'Architecture
, les Mathématiques , l'Aftronomie
, l'Aftrologie , l'Agriculture , en un
mot toutes les ſciences . Cela eft fort poffible
& fort vraisemblable , répliqua d'un
ton railleur le jeune étourdi ; mais , Monfieur
, toutes ces fciences ont été inventées
& perfectionnées bien long-tems après le
déluge. O pectora caca ! s'écria M. Marfonius
; cela eft-il poffible ! Je vous dis
iterum atque iterum , que cela eft certain ,
d'une certitude morale , phyfique & métaphyfique
, & que la Philofophie antediluvienne
étoit beaucoup plus avancée que
la nôtre.
Fort bien , répartit Atys , je ne vous
avois pas d'abord compris. Voilà ce que
c'eft que d'expliquer tranquillement fes
raifons , on s'éclaircit toujours. Les PatriarDECEMBRE.
1754. 23
1.
S
ches étoient fans doute de très - fçavans
hommes. Mais , Monfieur , quel fyſtême
fuivoit- on dans ce tems-là ? car il n'eft
pas poffible de s'en paffer. Qu'il y eût un
fyfteme reçu & fuivi , répondit M. le Profeffeur
, c'eft de quoi on ne fçauroit douter.
Tout comme auffi on doit fe perfuader
néceffairement que le fyftême d'Adam
triomphoit comme le plus ancien .
Atys. Adam avoit donc un fyftême ?
Marfonius. Cela eft hors de doute ; car
il étoit non feulement Philofophe , mais
encore Prophete & de plus Théologien :
les Juifs lui attribuent le Pfeaume XCII .
Le Pape Gelafe a connu quelques livres
que les Gnoftiques lui fuppofoient. Le P.
Salian cite là - deffus Mafius , & enfin il eft
certain que les Arabes parlent de plus de
vingt volumes écrits de fa main. Vous pouvez
confulter là- deffus , non 'feulement
Hottinger , mais encore Reland , de religione
Mahumedanâ.
Atys. Ah , Monfieur , des livres d'Adam !
en quelle langue les fit- il imprimer ? n'en
auriez-vous point ? pourriez-vous me les
faire voir ?
Marf. Voilà , voilà les jeunes gens , ils
font toujours dans les extrêmes . Je ne vous
dis
pas que les Juifs , les Gnoftiques , ni
les Arabes en doivent être crus fur leur
24 MERCURE DE FRANCE.
parole , je prétens feulement qu'il y a làdeffus
une tradition conftante qui doit
avoir néceſſairement quelque fondement
réel .
Atys. Oh ! pour votre tradition , Monfieur
, je n'y ai pas la foi ; tout cela font
des rêveries.
Marfonius. Des rêveries. Je crois , petit
mirmidon , que vous prétendez ici m'infulter
; il vous fied bien à votre âge de vous
oppofer au fentiment d'un homme qui étudie
depuis quarante- cinq ans les langues
orientales. Apprenez , jeune préfomptueux ,
que vous devez refpecter ma fcience , mes
cheveux gris & ma charge. Souvenez- vous
qu'avec ce ton décifif & ce petit orgueil ,
Vous courez droit à l'impieté.
Eh ! de grace , M. le Profeffeur , reprit
Atys , d'un ton hypocrite , ne vous fâchez
pas , mon deffein n'étoit pas de vous offenfer
; je recevrai , puifqu'il le faut , la tradition
, non feulement antediluvienne
mais même préadamique.
Marfonius. Je vois avec plaifir que vous
vous rendez à mes raiſons , auffi je veux
bien vous inftruire des véritables argumens
fur lefquels nous nous fondons , pour
croire qu'Adam étoit philofophe. Vous
avez lu la Geneſe ?
Atys. Oui vraiment .
Marf.
DECEMBRE.
1754. 25
Marf. Vous y avez donc lû que le premier
homme fortit parfait des mains du
Créateur ?
Atys . Non , Monfieur.
Marf. Quelle mémoire ! N'y avez - vous
pas lû que le premier homme fut fait à l'image
de Dieu ?
Atys. Affurément.
Marf.Eh bien ! ne s'enfuit-il pas de là
qu'Adam avoit par infufion toutes les
fciences ?
Ays. La conféquence vous paroît - elle
juſte ?
Mars. En doutez-vous ?
Atys. Il faut donc bien la recevoir.
Que je fuis charmé , repartit M. Marfonius
, de vous voir fi docile ! il faut que
je vous embraffe. Là deffus le grave Profeffeur
s'approche , le ferre étroitement
dans fes bras , l'étouffe , le dérange & lui
donne un baifer ; mais un baifer ! ... 11
fe feroit bien paffé de cette accolade ; il la
fouffrit cependant , afin d'être initié dans
tous les myfteres. En effet , quand la gravité
de M. Marfonius eut repris fon équilibre
: voici , dit- il , l'argument des argumens
, la preuve des preuves , en faveur
du fyftême de la Philofophie adamique.
Vous fçavez que Dieu fit paffer en revûe
en préfence d'Adam tous les animaux , &
1. Vol. B
26 MERCURE DE FRANCE.
qu'il leur donna à chacun leur nom ?
Atys. Je m'en fouviens très-bien . Et cela
prouve ?..
Marf.Cela prouve. Attendez donc le
fçavant Bochart a fait voir dans un de fes
fermons , que ces noms des animaux défignent
leurs qualités effentielles . Cela ne
prouve-t-il pas qu'Adam avoit une connoiffance
exacte de l'Hiftoire naturelle &
même de la logique , fuivant le ſentiment
d'Eufebe ?
Atys. Eufebe & Bochart ! Cela eft clair ;
il n'y a rien à dire.
Marf. J'ai cependant oui raifonner des
fçavans qui n'étoient pas de ce fentiment ,
& même j'ai là deffus depuis dix ans une
correfpondance fort intéreffante avec un
Profeffeur de .. J'en vais publier l'abrégé
en deux volumes in folio , fous ce titre :
Adami doctrina adverfus reluctantium incurfiones
vindicata, five Mularius confutatus ,
c. Il eft certain qu'il aura du deffous ; car
fes lettres , quoique je les aye mifes toutes
entieres , ne rempliffent pas vingt pages.
L'ouvrage est tout prêt , & il ne s'agit plus
que de trouver un Libraire qui veuille's'en
charger.
Atys. Ce n'eft pas l'embarras mais
Monfieur , que peut répondre votre antagoniſte
à tant de preuves ? Il faut qu'il foit
DECEMBRE. 1754. 27
bien opiniâtre & bien peu fubtil.
Marf.Il dit qu'il n'eft pas certain qu'Adam
parlât Hébreu , que cependant Bochart
a pofé fur ce principe ; peut- être les
animaux n'ont pas pris leur nom des qualités
qu'ils ont , mais que ces qualités ont
été ainſi appellées à caufe des animaux qui
les avoient. Que tout le fyftême porte fur
la fcience des étymologies qui eft i fouvent
chimerique ; il ajoute je ne fçai combien
d'autres fadaifes , qui ne méritent pas
qu'on s'y arrête , d'autant mieux qu'elles
tendent à foutenir une opinion dangereuſe.
Atys. Enforte , Monfieur , que celui qui
attaque la Philofophie d'Adam , attaque
Dieu , la religion , & qui plus eft les fçavans.
Mais jufqu'où , je vous prie , alloit
la fcience de notre premier pere ?
Ce point , répondit Marfonius , en baiffant
les yeux par orgueil , n'eft pas abfolument
décidé. Il y a dans cette question
importante deux principaux écueils à éviter
; l'un où eft tombé Henri de Haffia ,
qui prétend qu'Adam n'étoit pas plus fçavant
qu'Ariftote ; l'autre vers lequel inclinent
les Rabbins , qui mettent Adam audeffus
de Moïfe , de Salomon & des Anges
même. L'un péche en défaut , comme vous
voyez , & l'autre en excès.
B ij
28 MERCURE DE FRANCE.
Atys , qui fe trouvoit tout auffi inftruit
après cette converfation qu'on a coutume
de l'être après une difpute publique , prit
alors le ton d'un écolier qui vient d'oppo
fer à une theſe , & faifant une profonde
revérence : je vous rends grace , dit - il ,
fçavantiffime , illuftriffime , doctiffime ,
vigilantiffime Profeffeur , de ce que vous
avez daigné éclaircir mes doutes ; je continue
à faire des voeux pour la fanté de
votre corps , pour celle de votre efprit &
pour l'heureuſe organiſation de votre cerveau.
M. Marfonius étoit fi content de lui ,
que fans s'appercevoir qu'on le railloit , il
alloit remercier par le compliment le plus
emphatique , lorfqu'il fut déconcerté par
un éclat de rire prodigieux qu'Atys entonna,
& qui fut repété par quelques - uns même
des adorateurs de M. Marfonius. Les
autres regardoient le jeune étranger avec
des yeux de flamme , & méditoient fans
doute une vengeance éclatante , lorſqu'il
prit prudemment le parti de la retraite . Je
le fuivis , & nous vînmes écrire enſemble
ce fingulier dialogue.
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Résumé : CONVERSATION SINGULIERE.
Le texte décrit une conversation qui se déroule en Allemagne, dans une ville universitaire, entre le narrateur, Atys et une assemblée parlant français. La figure centrale de cette assemblée est Marfonius, un professeur de langues orientales respecté pour ses connaissances, mais dont l'apparence et les manières sont ridicules. Marfonius est entouré de dévots admirateurs et de quelques esprits moqueurs. La discussion porte sur la feuille périodique d'Adam, fils d'Adam. Atys critique l'idée qu'Adam était philosophe, ce qui provoque la colère de Marfonius. Ce dernier affirme qu'Adam possédait toutes les sciences par infusion divine. Atys remet en question les connaissances supposées d'Adam sur des sujets modernes à travers une série de questions. Marfonius, irrité, insiste sur la tradition constante qui attribue à Adam une grande érudition. Atys, pour éviter un conflit, feint la soumission et accepte les arguments de Marfonius. Satisfait, Marfonius embrasse Atys et lui expose ses preuves, notamment l'idée que les noms donnés par Adam aux animaux prouvent sa connaissance de l'histoire naturelle et de la logique. Atys, après avoir écouté Marfonius, prend congé en le raillant subtilement. Marfonius, ne s'apercevant pas de la moquerie, est sur le point de le remercier lorsque Atys et le narrateur quittent l'assemblée, laissant derrière eux une atmosphère tendue.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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578
p. 46-53
ESSAI PHILOSOPHIQUE.
Début :
L'Histoire de l'esprit humain est l'étude la plus flateuse & en même tems la [...]
Mots clefs :
Philosophie, Religion, Esprit, Philosophes, Athéisme, Christianisme
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ESSAI PHILOSOPHIQUE.
ESSAI PHILOSOPHIQUE.
'Hiftoire de l'efprit humain eft l'étude
la plus flateufe & en même tems la
plus humiliante pour un fage. Après bien
des réflexions , l'homme n'eft plus à fes yeux
qu'une efpece bizarre en qui la mifere &
la grandeur fe tiennent par la main , &
dont l'être entier eft un paradoxe. Si on
le confidere du côté des lumieres de l'efprit
, il n'eft jamais fi petit que lorfqu'il
paroît monté à fon plus haut point d'élévation.
Les connoiffances les plus refé7
DECEMBRE 1754 . 47
chies n'ont fervi aux efprits bienfaits qu'à
leur faire voir de plus près leur ignorance
, & n'ont fait qu'égarer les autres . La
Philofophie dont le but doit être de nous
apprendre nos devoirs , n'a gueres fervi
qu'à fournir des prétextes pour fe difpenfer
de les remplir . La religion fur tour
cet objet fi intéreſſant pour nous , puif
qu'il décidé de notre fort dans cette vie
& de celui qui nous attend dans l'immenfité
de la nature ; la religion , dis- je , a
prefque toujours été la victime des fauffes
lumieres de la raifonte Suivons la marche
de l'incrédulité , nous la verrons , à la honte
de l'efprit humain , s'élever avec l'aurore
de la Philofophie , s'accroître avec elle
par dégrès , & la fuivre dans tous fes développemens.
L'existence d'une divinité , cette vérité fi
fimple que le fentiment démontre à tous les
hommes , ne devint un paradoxe que lorfque
la raifon voulut la foumettre à l'analy
fe. Prefque tous les Philofophes anciens la
nierent ; Philofophe & Athée chez les Grecs
& les Romains étoient à peu- près fynonymes
, & on mettoit , dit Cicéron , au nombre
des propofitions probables celles - ci :
Les meres aiment leurs enfans : les Philofophes
ne croyent point de dieux . Thalés , Démocrite
, Epicure , &c. enfeignerent l'Athéif48
MERCURE DE FRANCE.
me : on ne fçaitpas fi Ariftote a été Athée ,
parce qu'il ne s'eft pas expliqué affez clairement
, mais au moins nia- t-il , la providence.
Pour Straton fon difciple , il fit un
fyftême de matérialiſme des plus décidés.
Tous les autres embrafferent le Scepticifme
, qui ne vaut pas mieux que l'Athéifme..
L'impiété ne prit chez les Romains que
fort tard , parce qu'ils ne connurent la
Philofophie que fort tard. Quelques Sçavans
qui voyagerengen Gréce , y puiferent
avec les principes de la Philofophie , ceux
de l'irréligion . Lucrece afficha le Matérialifme
; & les écrits de Cicéron , de Pline
& Senéque , refpirent le Scepticiſme.
Si nous paffons au Judaïfme , nous verrons
la religion de Moïfe confervée avec
vénération chez les Hébreux , malgré la
captivité , la difperfion & les révolutions
qu'ils eurent à effuyer , jufqu'à ce que la
Philofophie s'étant mêlée parmi eux , on
vit naître le Saducéïfme qui rejetta la fpiritualité
& l'immortalité de l'ame . Cette
fecte impie fut non feulement tolérée &
admife à la communion judaïque ; mais
on vit même un de fes plus zélés partifans ,
le célebre Hircan , affis fur le thrône pontifical.
Dans les premiers fiécles du Chriftianifine
,
DECEMBRE. 1754 49
nifme , où la religion devoit être d'autant
plus pure qu'elle étoit plus près de fa
fource , l'introduction de la Philofophie
payenne ouvrit la porte à l'erreur. Le Platoniſme
étoit pour lors en regne , la conformité
de ce lyftême avec quelques dogmes
de la religion le firent adopter : de
là cette foule d'héréfies , qui ne font qu'un
mêlange monstrueux des principes du
Chriftianifme avec quelques idées des
Philofophes payens , & qui ne furent enfantées
ni par l'erreur ni par le fanatif
me. Leurs Auteurs étoient des ambitieux
fans religion , qui fe jouant de la crédulité
des peuples , en firent l'inftrument de
leur ambition .
La Philofophie ayant été tranſplantée
chez les Arabes dans le VIII fiécle , ne
manqua pas de répandre fes influences fur
la religion de ces peuples. Le célebre Almanzor
, ce Calife Aftronome & Philofophe
, & après lui Abdallah & Almamon
voulant faire fleurir les Arts & les Sciences
chez cette nation , jufques- là barbare ,
y attirerent plufieurs fçavans , & firent traduire
en Arabe les meilleurs Auteurs anciens
& fur-tout leurs ouvrages philofophiques.
Le goût de la Philofophie s'étant
répandu , les efprits devinrent plus éclairés,
& l'Alcoran perdit en même tems beau-
1. Vol. C
so MERCURE DE FRANCE.
coup de la vénération qu'on lui portoit.
On vit naître une fecte de Philofophes ,
Médecins & Chymiftes , la plûpart Athées.
On ne connoît que trop le fameux Aver
roës , dont le fyftême de matérialiſme trouva
des profelites jufqu'en Europe . La dégradation
du Mahometifme ne manqua pas
d'exciter les murmures des zélés Mufulmans.
Bayle rapporte que Takiddin , un
de leurs Auteurs , s'éleva fort contre Almanzor
qu'il menaça de la colere célefte
pour avoir altéré la dévotion des vrais
croyans par l'introduction de la Philofophie.
Enfin par tout où vous trouverez les
traces de la Philofophie , vous trouverez
celles de l'irréligion qui la fuit toujours.
›
Lotfque Mahomet II eut pris Conftantinople
, où l'empire des Lettres avoit été
tranfplanté avec l'Empire Romain , les plus
fçavans hommes de la Grece fe retirerent
en Italie , où ils porterent les femences de
l'athéifme , qui s'y développa avec une rapidité
prodigieufe. Il est étonnant combien
on vit paroître d'athées en Italie dans les 15
& 16 fiécles ; on n'en a point connu en
France avant la reftauration des lettres par
François I. Mais depuis cette époque , la
philofophie y ayant monté au point de perfection
où elle eft aujourd'hui , l'incrédu
lité a gagné du terrein , & a ſuivi les mêDECEMBRE
. 1754
Sx
mes proportions dans fes progrès.
Les abus que les efprits forts ont fait
de tous les fyftêmes philophiques prouvent
que les principes de la philofophie ne font
pas faits
pour être adaptés à ceux de la
religion. Le pere de la philofophie mo-
1 derne , Descartes a malheureuſement
moins réuffi à démontrer l'exiſtence d'un
Dieu qu'à prouver que l'univers a pû fe
former & fe conferver tel qu'il eft par les
loix générales du mouvement. Quelque
éloigné que Defcartes ait voulu paroître
d'appuyer l'athéifme par ſon ſyſtême , il
n'en eft pas moins vrai que Spinofa n'a
fondé fon hypothèſe que fur les principes
du Cartefianifme. Bayle s'eft fervi de
ces mêmes principes pour établir fon fyftême
de pyrronifme , & pour combattre
tous les raifonnemens que l'on pouvoit
faire en faveur de la religion.
L'optimisme du célébre Leibnitz conduit
naturellement au fatalifme , & eft
d'autant plus féduifant qu'il juftifie la providence
de l'imputation du mal moral &
du mal phyfique ; l'harmonie préétablie du
même philofophe exclut toute liberté dans
l'homme.
Locke , ce fage & dangereux métaphyficien
, doit être regardé comme le pere du
matérialiſme moderne. Démontrer, comme
Cij
52. MERCURE DE FRANCE.
il prétendoit l'avoir fait , que la matiere
peut penfer , c'étoit en bonne logique démontrer
qu'elle penfe effectivement ; car
fi la matière eft fufceptible d'intelligence ,
la création d'une autre fubftance feroit
un hors d'oeuvre , & nous ferions d'autant
plus autorisés à la rejetter qu'il n'y a
que la néceffité de fon exiftence pour expliquer
la penfée , qui puiffe faire recourir
à un être qu'il nous eft impoffible de
concevoir.
Le grand Newton , malgré fon reſpect
pour la Divinité , n'a pû empêcher que
fon fyftême ne foit un des plus favorables
à l'irréligion ; & les pfeudo-Newtoniens ,
je veux dire ceux qui regardent , certe le
fentiment de Newton , l'attraction comme
une qualité effentielle à la matiere , font
de ce principe la baſe de l'athéifme le plus
décidé.
Mallebranche , qui a été le philofphe le
plus pénétré des fentimens de la religion ,
eft un de ceux dont les opinions ont été les
plus dangereufes ; fes principes l'avoient
conduit à nier l'existence des corps , & il
ne la croyoit que parce que l'Ecriture Sainte
le lui enfeignoit. En fuivant fes idées ,
d'autres ont conclu de la non - exiſtence de
la matiere , que les livres de l'écriture n'étoient
, ainfi que les corps , qu'une illufion
DECEMBRE . 1754 $ 3
des fens. Je regarde Mallebranche comme
l'auteur de la fecte des idéaliſtes , plus étendue
qu'on ne penfe , & dont l'opinion eft
un pur fcepticiſme , abfurde au premier
coup d'oeil , mais qui n'en devient que plus
dangereux dès qu'on l'approfondit.
Ce font là cependant les oracles de la
philofophie : fi les lumieres de leur efprit
& la droiture de leur coeur n'ont pû les
mettre à l'abri de l'erreur , croyons que
notre raiſon eft un flambeau trop foible
pour nous éclairer , & cherchons une
lumiere plus fûre , que nous ne pouvons
trouver que dans la religion : notre ame
ne fe connoît pas elle-même , ni le corps
qu'elle gouverne , ni les objets avec lefquels
elle a des rapports immédiats ; comment
connoîtroit- elle les rapports de l'homme
avec l'être fuprême ? elle ne peut parcourir
la chaîne immenfe qui les fépare :
qu'elle refte donc dans fa fphere. Reconnoiffons
la foibleffe & l'impuiffance de
notre raison , qui n'eft pas même capable
de me prouver l'existence de mon propre
corps , le fentiment feul me le perfuade ,
& je ne puis en douter : ainfi je ne fuis
pas convaincu , mais je fens l'exiſtence
d'un être fuprême , & la néceffité d'un
culte ; cela me me fuffit , je me tais , &
j'adore .
'Hiftoire de l'efprit humain eft l'étude
la plus flateufe & en même tems la
plus humiliante pour un fage. Après bien
des réflexions , l'homme n'eft plus à fes yeux
qu'une efpece bizarre en qui la mifere &
la grandeur fe tiennent par la main , &
dont l'être entier eft un paradoxe. Si on
le confidere du côté des lumieres de l'efprit
, il n'eft jamais fi petit que lorfqu'il
paroît monté à fon plus haut point d'élévation.
Les connoiffances les plus refé7
DECEMBRE 1754 . 47
chies n'ont fervi aux efprits bienfaits qu'à
leur faire voir de plus près leur ignorance
, & n'ont fait qu'égarer les autres . La
Philofophie dont le but doit être de nous
apprendre nos devoirs , n'a gueres fervi
qu'à fournir des prétextes pour fe difpenfer
de les remplir . La religion fur tour
cet objet fi intéreſſant pour nous , puif
qu'il décidé de notre fort dans cette vie
& de celui qui nous attend dans l'immenfité
de la nature ; la religion , dis- je , a
prefque toujours été la victime des fauffes
lumieres de la raifonte Suivons la marche
de l'incrédulité , nous la verrons , à la honte
de l'efprit humain , s'élever avec l'aurore
de la Philofophie , s'accroître avec elle
par dégrès , & la fuivre dans tous fes développemens.
L'existence d'une divinité , cette vérité fi
fimple que le fentiment démontre à tous les
hommes , ne devint un paradoxe que lorfque
la raifon voulut la foumettre à l'analy
fe. Prefque tous les Philofophes anciens la
nierent ; Philofophe & Athée chez les Grecs
& les Romains étoient à peu- près fynonymes
, & on mettoit , dit Cicéron , au nombre
des propofitions probables celles - ci :
Les meres aiment leurs enfans : les Philofophes
ne croyent point de dieux . Thalés , Démocrite
, Epicure , &c. enfeignerent l'Athéif48
MERCURE DE FRANCE.
me : on ne fçaitpas fi Ariftote a été Athée ,
parce qu'il ne s'eft pas expliqué affez clairement
, mais au moins nia- t-il , la providence.
Pour Straton fon difciple , il fit un
fyftême de matérialiſme des plus décidés.
Tous les autres embrafferent le Scepticifme
, qui ne vaut pas mieux que l'Athéifme..
L'impiété ne prit chez les Romains que
fort tard , parce qu'ils ne connurent la
Philofophie que fort tard. Quelques Sçavans
qui voyagerengen Gréce , y puiferent
avec les principes de la Philofophie , ceux
de l'irréligion . Lucrece afficha le Matérialifme
; & les écrits de Cicéron , de Pline
& Senéque , refpirent le Scepticiſme.
Si nous paffons au Judaïfme , nous verrons
la religion de Moïfe confervée avec
vénération chez les Hébreux , malgré la
captivité , la difperfion & les révolutions
qu'ils eurent à effuyer , jufqu'à ce que la
Philofophie s'étant mêlée parmi eux , on
vit naître le Saducéïfme qui rejetta la fpiritualité
& l'immortalité de l'ame . Cette
fecte impie fut non feulement tolérée &
admife à la communion judaïque ; mais
on vit même un de fes plus zélés partifans ,
le célebre Hircan , affis fur le thrône pontifical.
Dans les premiers fiécles du Chriftianifine
,
DECEMBRE. 1754 49
nifme , où la religion devoit être d'autant
plus pure qu'elle étoit plus près de fa
fource , l'introduction de la Philofophie
payenne ouvrit la porte à l'erreur. Le Platoniſme
étoit pour lors en regne , la conformité
de ce lyftême avec quelques dogmes
de la religion le firent adopter : de
là cette foule d'héréfies , qui ne font qu'un
mêlange monstrueux des principes du
Chriftianifme avec quelques idées des
Philofophes payens , & qui ne furent enfantées
ni par l'erreur ni par le fanatif
me. Leurs Auteurs étoient des ambitieux
fans religion , qui fe jouant de la crédulité
des peuples , en firent l'inftrument de
leur ambition .
La Philofophie ayant été tranſplantée
chez les Arabes dans le VIII fiécle , ne
manqua pas de répandre fes influences fur
la religion de ces peuples. Le célebre Almanzor
, ce Calife Aftronome & Philofophe
, & après lui Abdallah & Almamon
voulant faire fleurir les Arts & les Sciences
chez cette nation , jufques- là barbare ,
y attirerent plufieurs fçavans , & firent traduire
en Arabe les meilleurs Auteurs anciens
& fur-tout leurs ouvrages philofophiques.
Le goût de la Philofophie s'étant
répandu , les efprits devinrent plus éclairés,
& l'Alcoran perdit en même tems beau-
1. Vol. C
so MERCURE DE FRANCE.
coup de la vénération qu'on lui portoit.
On vit naître une fecte de Philofophes ,
Médecins & Chymiftes , la plûpart Athées.
On ne connoît que trop le fameux Aver
roës , dont le fyftême de matérialiſme trouva
des profelites jufqu'en Europe . La dégradation
du Mahometifme ne manqua pas
d'exciter les murmures des zélés Mufulmans.
Bayle rapporte que Takiddin , un
de leurs Auteurs , s'éleva fort contre Almanzor
qu'il menaça de la colere célefte
pour avoir altéré la dévotion des vrais
croyans par l'introduction de la Philofophie.
Enfin par tout où vous trouverez les
traces de la Philofophie , vous trouverez
celles de l'irréligion qui la fuit toujours.
›
Lotfque Mahomet II eut pris Conftantinople
, où l'empire des Lettres avoit été
tranfplanté avec l'Empire Romain , les plus
fçavans hommes de la Grece fe retirerent
en Italie , où ils porterent les femences de
l'athéifme , qui s'y développa avec une rapidité
prodigieufe. Il est étonnant combien
on vit paroître d'athées en Italie dans les 15
& 16 fiécles ; on n'en a point connu en
France avant la reftauration des lettres par
François I. Mais depuis cette époque , la
philofophie y ayant monté au point de perfection
où elle eft aujourd'hui , l'incrédu
lité a gagné du terrein , & a ſuivi les mêDECEMBRE
. 1754
Sx
mes proportions dans fes progrès.
Les abus que les efprits forts ont fait
de tous les fyftêmes philophiques prouvent
que les principes de la philofophie ne font
pas faits
pour être adaptés à ceux de la
religion. Le pere de la philofophie mo-
1 derne , Descartes a malheureuſement
moins réuffi à démontrer l'exiſtence d'un
Dieu qu'à prouver que l'univers a pû fe
former & fe conferver tel qu'il eft par les
loix générales du mouvement. Quelque
éloigné que Defcartes ait voulu paroître
d'appuyer l'athéifme par ſon ſyſtême , il
n'en eft pas moins vrai que Spinofa n'a
fondé fon hypothèſe que fur les principes
du Cartefianifme. Bayle s'eft fervi de
ces mêmes principes pour établir fon fyftême
de pyrronifme , & pour combattre
tous les raifonnemens que l'on pouvoit
faire en faveur de la religion.
L'optimisme du célébre Leibnitz conduit
naturellement au fatalifme , & eft
d'autant plus féduifant qu'il juftifie la providence
de l'imputation du mal moral &
du mal phyfique ; l'harmonie préétablie du
même philofophe exclut toute liberté dans
l'homme.
Locke , ce fage & dangereux métaphyficien
, doit être regardé comme le pere du
matérialiſme moderne. Démontrer, comme
Cij
52. MERCURE DE FRANCE.
il prétendoit l'avoir fait , que la matiere
peut penfer , c'étoit en bonne logique démontrer
qu'elle penfe effectivement ; car
fi la matière eft fufceptible d'intelligence ,
la création d'une autre fubftance feroit
un hors d'oeuvre , & nous ferions d'autant
plus autorisés à la rejetter qu'il n'y a
que la néceffité de fon exiftence pour expliquer
la penfée , qui puiffe faire recourir
à un être qu'il nous eft impoffible de
concevoir.
Le grand Newton , malgré fon reſpect
pour la Divinité , n'a pû empêcher que
fon fyftême ne foit un des plus favorables
à l'irréligion ; & les pfeudo-Newtoniens ,
je veux dire ceux qui regardent , certe le
fentiment de Newton , l'attraction comme
une qualité effentielle à la matiere , font
de ce principe la baſe de l'athéifme le plus
décidé.
Mallebranche , qui a été le philofphe le
plus pénétré des fentimens de la religion ,
eft un de ceux dont les opinions ont été les
plus dangereufes ; fes principes l'avoient
conduit à nier l'existence des corps , & il
ne la croyoit que parce que l'Ecriture Sainte
le lui enfeignoit. En fuivant fes idées ,
d'autres ont conclu de la non - exiſtence de
la matiere , que les livres de l'écriture n'étoient
, ainfi que les corps , qu'une illufion
DECEMBRE . 1754 $ 3
des fens. Je regarde Mallebranche comme
l'auteur de la fecte des idéaliſtes , plus étendue
qu'on ne penfe , & dont l'opinion eft
un pur fcepticiſme , abfurde au premier
coup d'oeil , mais qui n'en devient que plus
dangereux dès qu'on l'approfondit.
Ce font là cependant les oracles de la
philofophie : fi les lumieres de leur efprit
& la droiture de leur coeur n'ont pû les
mettre à l'abri de l'erreur , croyons que
notre raiſon eft un flambeau trop foible
pour nous éclairer , & cherchons une
lumiere plus fûre , que nous ne pouvons
trouver que dans la religion : notre ame
ne fe connoît pas elle-même , ni le corps
qu'elle gouverne , ni les objets avec lefquels
elle a des rapports immédiats ; comment
connoîtroit- elle les rapports de l'homme
avec l'être fuprême ? elle ne peut parcourir
la chaîne immenfe qui les fépare :
qu'elle refte donc dans fa fphere. Reconnoiffons
la foibleffe & l'impuiffance de
notre raison , qui n'eft pas même capable
de me prouver l'existence de mon propre
corps , le fentiment feul me le perfuade ,
& je ne puis en douter : ainfi je ne fuis
pas convaincu , mais je fens l'exiſtence
d'un être fuprême , & la néceffité d'un
culte ; cela me me fuffit , je me tais , &
j'adore .
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Résumé : ESSAI PHILOSOPHIQUE.
L'essai philosophique 'Histoire de l'esprit humain' examine la dualité de l'homme, oscillant entre misère et grandeur. Les connaissances humaines, plutôt que d'éclairer, révèlent souvent l'ignorance et égarent les esprits. La philosophie, destinée à enseigner les devoirs, a souvent été utilisée comme prétexte pour s'en dispenser. La religion, essentielle pour la destinée humaine, a été altérée par les fausses lumières de la raison. L'incrédulité a progressé avec la philosophie, notamment chez les philosophes grecs et romains, où athéisme et philosophie étaient presque synonymes. Des penseurs comme Thalès, Démocrite et Épicure enseignaient l'athéisme, tandis que d'autres adoptaient le scepticisme. À Rome, l'incrédulité est apparue plus tard, introduite par des savants ayant voyagé en Grèce. Dans le judaïsme, la religion de Moïse était vénérée jusqu'à l'introduction de la philosophie, qui a donné naissance au sadducéisme, rejetant la spiritualité et l'immortalité de l'âme. Dans le christianisme primitif, la philosophie païenne a engendré des hérésies mêlant christianisme et idées philosophiques. Chez les Arabes, la philosophie a affaibli la vénération de l'Alcoran, menant à l'athéisme et au matérialisme, comme celui d'Averroès. En Europe, après la chute de Constantinople, l'athéisme s'est développé en Italie et en France, suivant les progrès de la philosophie. Les systèmes philosophiques modernes, de Descartes à Newton, ont souvent conduit à l'irréligion. Descartes a démontré un univers sans Dieu, Spinoza a fondé son système sur le cartésianisme, et Bayle a utilisé ces principes pour le pyrrhonisme. Leibniz a justifié le fatalisme, Locke a promu le matérialisme, et Newton a indirectement favorisé l'athéisme. Mallebranche, malgré sa piété, a conduit au scepticisme idéaliste. L'auteur conclut que la raison humaine est insuffisante pour comprendre les rapports avec l'être suprême et recommande de se fier au sentiment religieux.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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579
p. 195-202
« Le 13 Octobre le Commandeur de la Cerda, Envoyé extraordinaire du Roi de Portugal, eut [...] »
Début :
Le 13 Octobre le Commandeur de la Cerda, Envoyé extraordinaire du Roi de Portugal, eut [...]
Mots clefs :
Roi, Reine, Famille royale, Aumônier du roi, Évêque, Chapelle, Dauphine, Dauphin
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 13 Octobre le Commandeur de la Cerda, Envoyé extraordinaire du Roi de Portugal, eut [...] »
LE 13 Octobre le Commandeur de la Cerda ,
Envoyé extraordinaire du Roi de Portugal , eut
une audience particuliere du Roi , dans laquelle
il préfenta à Sa Majefté une lettre de compliment
du Roi fon Maître , fur l'heureux accouchement
de Madame la Dauphine , & fur la naiffance de
Monfeigneur le Duc de Berry. Le Commandeur
de la Cerda fut conduit à cette audience par M.
Dufort , Introducteur des Ambaſſadeurs .
Le même jour leurs Majeftés accompagnées de
la Famille Royale , affifterent aux Vêpres & au
Salut dans la Chapelle du Château.
Le Roi a érigé la Terre de Marigny en Marquifat
, en faveur de M. de Vandiere , Directeur
& Ordonnateur Général des Bâtimens. Il a eu
l'honneur d'être préfenté le 9 à leurs Majeftés &
à la Famille royale , & d'entrer deux jours après
dans les carroffes du Roi.
L'ouverture de l'affemblée des Etats de Bretagne
s'eft faite à Rennes le 14 .
Le 15 , fête de Sainte Therefe , la Reine entendit
la Meffe dans l'Eglife du Couvent des Carmes
réclus des Loges.
Monfeigneur le Dauphin & Mefdames de
France affifterent l'après- midi au Salut dans la
même Eglife.
Le Comte de Sartiranne Ambaffadeur ordinaire
du Roi de Sardaigne , eut le même jour une
audience particuliere du Roi , dans laquelle il
I ij
196 MERCURE DE FRANCE.
donna part à Sa Majesté , au nom du Roi fon
Maître , de l'heureux accouchement de Madame
la Ducheffe de Savoye , & de la naiſſance d'un
Prince. Cet Ambaffadeur fut conduit à cette audience
, ainsi qu'à celles de la Reine , de Monfeigneur
le Dauphin , de Madame la Dauphine ,
de Madame Adelaide , & de Mefdames Victoire ,
Sophie & Louife , par le même Introducteur,
Suivant les lettres de Toulon , le Duc de Penthievre
vifita le 29 de Septembre la galere la
Brave. Ce Prince alla le jour fuivant à l'arfenal ,
pour voir les Gardes de la Marine faire l'exercice.
A fon paffage fur le port , il fat falué par le vaiſfeau
amiral & par les galeres . L'exercice des Gardes
de la Marine étant fini , le Duc de Penthievre
fe rendit à bord du vaiffeau le Foudroyant. Le premier
Octobre ce Prince vit le parc d'artillerie,,
& fit le tour des remparts du côté de la rade ; il
alla le 3 vifiter la grande tour. Après le dîner il
vifita le Fort de la Malgue , d'où il paffa à celui
d'Artigues. Le 4 vers les trois heures après- midi ,
le Duc de Penthievre s'embarqua fur un canot , &
fut fuivi par tous les canots , ainfi que par toutes
les barques & les chaloupes qui étoient dans le
port. Dès que le Prince parut dans la rade , les
quatre galeres definées à le conduire en Italie ,
& qui étoient prêtes à partir pour aller l'attendre
à Antibes , le faluerent à fon paffage , ce que fit
auffi la Frégate la Thetis. Toute cette flotille s'avança
à deux lieues en mer , & l'on donna au Duc
de Penthievre le divertiffement de la pêche du
thon. Au retour , les galeres qui avoient déja tiré
deux coups de canon pout annoncer leur départ ,
vinrent l'une après l'autre à force de rames paffer
devant le canot du Prince , & firent une nouvelle
falve de toute leur artillerie . Le tems étoit fi fa
DECEMBRE. 1754. 197
•
vorable pour la avigation , qu'une demi-heure
après on les perdit de vite. Lorfque le foleil fut
fous l'horizon , trois galiotes à bombes placées
dans la petite rade , tirerent chacune fix bombes.
Les le Prince fit le tour des remparts en dedans
de la ville. Sur les fept heures du foir les galiotes
tirerent encore vingt- quatre bombes , & le Duc
de Penthievre vit ce fpectacle de fon appartement.
Ce Prince partit le 7 de Toulon , & alla coucher
au Luc : il s'eft rendu le lendemain à Fréjus , &
le 9 à Antibes ; le 12 il est parti d'Antibes pour
Gênes.
Les nouvelles de Marſeille du 17 portent qu'il
y étoit arrivé à bord du vaiffeau Anglois le Deptford
, vingt-fept efclaves François qui ont été embarqués
fur ce bâtiment à Gibraltar , & qui avoient
été rachetés peu de tems auparavant dans le
Royaume de Maroc par les Religieux des Ordres
de la Sainte Trinité & de Notre-Dame de la
Mercy. Ces efclaves ayant fait leur quarantaine à
Carthagene , ont eu l'entrée le 13 , & ont été reçus
par les Peres François Baurans & Paulin Gobin
, Commiffaires des deux Ordres.
Le 19 & le 20 d'Octobre , leurs Majeftés accompagnées
de la Famille Royale , aflifterent aux
Vêpres & au Salut dans la Chapelle du Château .
Le Roi foupa le 20 au grand couvert chez la
Reine .
Le même jour la Marquife de Fontange fit fes
révérences au Roi , à la Reine & à la Famille
Royale,
Leurs Majeftés fignerent le même jour le contrat
de mariage du Comte de Salvert & de la
Demoiſelle de Sabrevois , fille de M. de Sabrevois
, Maréchal des camps & armées du Roi ,
Lieutenant général d'artillerie , & Commandant
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
en chef au départément général d'Alface , de
Bourgogne & de Franche Comté.
Le 20 l'Evêque de Gap nommé à l'Evêché d'Auxerre
, fit dans l'Eglife des Miffions étrangeres
la cérémonie de bénir le nouvel Abbé de l'Abbaye
réguliere de Saint Amand.
Le Roi a nommé Chevalier de l'Ordre de Saint
Michel M. Pitot , Penfionnaire vétéran de l'Académie
Royale des Sciences , Membre de la Société
Royale de Londres , Directeur du canal & des
travaux publics de la Province de Languedoc.
Le 22 M. Gualterio , Archevêque de Mira ,
Nonce ordinaire du Pape , eut une audience particuliere
du Roi , dans laquelle il préfenta à Sa
Majesté M. Molinari , Archevêque de Damas ,
qui paffe par la France pour fe rendre à fa Nonciature
de Bruxelles . M. Guakerio fut conduit à
cette audience , ainſi qu'à celles de la Reine , de
Monfeigneur le Dauphin , de Madame la Dauphine
, de Madame Adelaide & de Mefdames
Victoire , Sophie & Louife , par M. Dufort , Introducteur
des Ambaffadeurs .
›
Le Comte Turpin , Brigadier de cavalerie , &
Colonel d'un Régiment de Huffards , a préſenté
au Roi un ouvrage de fa compoſition fur l'Ars
militaire.
La place d'Aumônier du Roi , vacante par la
mort de M. l'Abbé de Caulincourt , a été donnée à
M.l'Abbé de Scey-Montbeillard , Abbé de l'Abbaye
de Saint André , Ordre de Prémontré , Diocefe
de Clermont.
Le Roi a envoyé au Parlement de Bretagne une
Déclaration datée du 8 Octobre , qui fut enregiftrée
le 17 du même mois.
Un Juif de Metz , âgé de trente-cinq ans , refut
le 10 Octobre à Saintes , par les mains de l'EDECEMBRE.
1754 199
vêque , les Sacremens de Baptême & de la Con
firmation. Il a eu pour parrein M. de Blair de
Boifmon , Intendant de la Rochelle , nommé à
l'Intendance de Valénciennes ; & pour marreine
la Dame de Parabere , Abbeffe de l'Abbaye de
Notre-Dame de Saintes , qui lui ont donné les
noms de Louis-Marie.
Depuis le 15 Octobre on a commencé à allu→
mer toutes les nuits à Calais , deux heures avant
& deux heures après la pleine mer , un fanal au
bout de la grande jettée du côté de l'oueft. Cela
s'obfervera pendant tout le tems de la pêche du
hareng , c'est - à- dire jufqu'au mois prochain , afin
de faciliter aux Pêcheurs l'entrée du port de Calais
. On en ufera de même deformais chaque année
dans cette faiſon.
Selon les lettres de Provence , la maison des
Penfionnaires établie à Aix le premier Octobre
1753 , au College Royal - Bourbon des Jefuites ,
en vertu d'un brevet du Roi , vient d'être achevée
Elle peut contenir jufqu'à cent jeunes gens,
Moyennant une nouvelle fondation , il y a actuellement
deux Profeffeurs de Rhétorique dans
ce College.
Le 24 l'Archevêque de Sens conféra le Sacrement
de la Confirmation à onze cens enfans dans
l'Eglife de la Communauté des Filles Bleues.
Le 26 le Roi quitta le deuil que Sa Majefté avoit
pris le 6 pour laReine Douairiere de Portugal.
Le Roi foupa le 27 au grand couvert chez la
Reine avec la Famille Royale.
Il a été fait par le Lord Powerscourt une ga.
geure , qu'il viendroit à cheval en deux heures de
la derniere maifon de Fontainebleau à la premiere
barriere des Gobelins . M. Baillon ,
loger de la Reine , a été chargé d'envoyer deux
Hor
I iiij
200 MERCURE DE FRANCE.
pendules à Fontainebleau , & d'en tenir deux à la
barriere des Gobelins fur la même heure , afin de
mefurer le tems que ce Seigneur Anglois employe
roit à fa courſe. Le 29 du mois dernier le Lord
Powerscourt eft parti de Fontainebleau à fept
heures neuf minutes quarante-cinq fecondes du
matin , & il eſt arrivé à huit heures quarante- fept
minutes vingt- fept fecondes à la barriere indiquée.
Il avoit deux relais fur la route. Une des
conditions de la gageure étoit qu'il ne monteroit
pas plus de trois chevaux , & il n'en a monté que
deux.
Selon les lettres de Gênes , le Duc de Penthievre
y eft arrivé le 19 Octobre , à trois heures
après- midi. Une députation de la République eft
allée le recevoir à fa galere , & l'a conduit au Pa-
Lais Brignolé , qui avoit été préparé pour le loge.
ment de ce Prince . Les Députés doivent l'accom
pagner par-tout pendant fon féjour à Gênes.
Le 31 , veille de la Fête de Tous les Saints , le
Roi & la Reine , accompagnés de la Famille royale
, affifterent au premieres Vêpres dans la Chapelle
du Château . Elles furent chantées par la Muſique ,
& l'Evêque de Chartres y officia.
Le premier Novembre , jour de la Fête , leurs
Majeftés accompagnées comme le jour précédent,
entendirent la grande Meffe célébrée pontificament
par le même Prélat . Le Roi , la Reine & la
Famille royale affifterent l'après- midi aux Vêpres
du jour chantées par la Mufique , aufquelles
Ï'Evêque de Chartres officia , & enfuite aux Vêpres
des Morts. Avant les Vêpres , leurs Majeftés
entendirent la Prédication du Pere de Neufville ,
de la Compagnie de Jeſus.
A l'occafion de la Fête , la Reine a communié
par les mains de l'Evêque de Chartres , fon preDECEMBRE
. 1754. 201
mier Aumônier ; Monfeigneur le Dauphin, par celles
de M. l'Abbé de Chabannes , Aumônier du Roi ;
Madame la Dauphine , par celles de M. l'Abbé de
Murat , fon Aumônier en quartier ; Madame Adelaïde,
par celles de l'Evêque de Meaux , fon premier
Aumônier ; & Mefd . Victoire , Sophie & Louiſe ,
par celles de M. l'Abbé Barc , Chapelain du Roi.
Le premier & le 3 , le Roi foupa au grand couvert
chez la Reine avec la Famille royale.
M. Pitrou , Ingénieur des ponts & chauffées ,
ayant fait anciennement par ordre du Roi la vifite
de la riviere de Marne depuis Châlons jufqu'à
Charenton , a eftimé à treize millions les dépenfes
néceffaires pour faciliter la navigation de cette
riviere. Un autre Ingénieur commis auffi par Sa
Majeſté , a viſité la riviere d'Yonne : il a jugé qu'il
falloit dépenfer dix millions pour la rendre navigable
jufqu'à fon embouchure dans la Seine . M.
Macary , privilegié du Roi pour la fûreté de la
navigation , a foumis à la décision du Confeil un
projet différent , pour que le tiers au moins des
denrées deftinées à la confommation de Paris , y
foient amenées dans tous les tems de l'année ,
hors les cas extraordinaires des glaces & des débordemens
& pour que les frais de transport foient
toujours les mêmes . Selon le devis , la dépenfe ne
montera qu'à quatre millions trois cens vingtneuf
mille fix cens foixante- fix livres . Une Compagnie
fournira les fonds , & il n'en coutera rien
au Roi ni au public . L'auteur du projet , s'il eft autorifé
, demande feulement pour l'exécuter avec
La Compagnie, & pour entretenir les ouvrages , un
droit médiocre de navigation , qui fera à la charge
des Maîtres de barques.
Le mémoire de M. Macary a été renvoyé par le
Confeil à Mr de Bernage ; Confeiller d'Etat or-
Ιν
202 MERCURE DE FRANCE.
dinaire , Prévôt des Marchands , pour que le Bureau
de la ville donne fon avis fur les propoſitions
qui y font continues.
Le 9 Novembre , le Roi déclara la nomination
au chapeau de Cardinal que Madame la Dauphine
a obtenu pour l'Archevêque de Sens , fon premier
Aumônier .
Le 12 , l'ouverture du Parlement fe fit avec les
cérémonies accoutumées , par une Meffe folemnelle
, que M. l'Abbé de Sailly , Chantre de la Sainte
Chapelle , célébra dans la Chapelle de la grande
Salle du Palais , & à laquelle M. de Maupeou , premier
Préfident , & les Chambres affifterent .
Le 13 , le Marquis de Malefpina qui eft venu
pour complimenter leurs Majeftés de la part de
I'Infant Duc & de Madame Infante Ducheffe de
Parme , fur la naiffance de Monfeigneur le Duc de
Berry , prit congé du Roi , de la Reine & de la Famille
royale.
Le Roi a fixé au 18 fon départ de Fontainebleau.
Des fix places de Docteurs Aggrégés qui étoient
vacantes dans la Faculté de Droit de Paris , les
trois premieres ont été adjugées par cette Faculté
à MM. Sauvage , Boyer & Lalourcey , Docteurs
de Paris. Le concours pour les trois autres places
doit s'ouvrir le 19 de Décembre.
On mande de Strasbourg que le Margrave &
la Margrave de Brandebourg- Bareith y ont paffé
en allant à Montpellier.
Les mêmes lettres marquent qu'on a effuyé
pendant le mois dernier plufieurs facheux orages
dans une partie de l'Alface.
Le 14 de ce mois , les Actions de la Compagnie
des Indes étoient à dix - huit cens trente livres ;
les Billets de la premiere lotterie royale , à fept
cens foixante -dix livres ; & ceux de la feconde , à
fix cens foixante- dix.
Envoyé extraordinaire du Roi de Portugal , eut
une audience particuliere du Roi , dans laquelle
il préfenta à Sa Majefté une lettre de compliment
du Roi fon Maître , fur l'heureux accouchement
de Madame la Dauphine , & fur la naiffance de
Monfeigneur le Duc de Berry. Le Commandeur
de la Cerda fut conduit à cette audience par M.
Dufort , Introducteur des Ambaſſadeurs .
Le même jour leurs Majeftés accompagnées de
la Famille Royale , affifterent aux Vêpres & au
Salut dans la Chapelle du Château.
Le Roi a érigé la Terre de Marigny en Marquifat
, en faveur de M. de Vandiere , Directeur
& Ordonnateur Général des Bâtimens. Il a eu
l'honneur d'être préfenté le 9 à leurs Majeftés &
à la Famille royale , & d'entrer deux jours après
dans les carroffes du Roi.
L'ouverture de l'affemblée des Etats de Bretagne
s'eft faite à Rennes le 14 .
Le 15 , fête de Sainte Therefe , la Reine entendit
la Meffe dans l'Eglife du Couvent des Carmes
réclus des Loges.
Monfeigneur le Dauphin & Mefdames de
France affifterent l'après- midi au Salut dans la
même Eglife.
Le Comte de Sartiranne Ambaffadeur ordinaire
du Roi de Sardaigne , eut le même jour une
audience particuliere du Roi , dans laquelle il
I ij
196 MERCURE DE FRANCE.
donna part à Sa Majesté , au nom du Roi fon
Maître , de l'heureux accouchement de Madame
la Ducheffe de Savoye , & de la naiſſance d'un
Prince. Cet Ambaffadeur fut conduit à cette audience
, ainsi qu'à celles de la Reine , de Monfeigneur
le Dauphin , de Madame la Dauphine ,
de Madame Adelaide , & de Mefdames Victoire ,
Sophie & Louife , par le même Introducteur,
Suivant les lettres de Toulon , le Duc de Penthievre
vifita le 29 de Septembre la galere la
Brave. Ce Prince alla le jour fuivant à l'arfenal ,
pour voir les Gardes de la Marine faire l'exercice.
A fon paffage fur le port , il fat falué par le vaiſfeau
amiral & par les galeres . L'exercice des Gardes
de la Marine étant fini , le Duc de Penthievre
fe rendit à bord du vaiffeau le Foudroyant. Le premier
Octobre ce Prince vit le parc d'artillerie,,
& fit le tour des remparts du côté de la rade ; il
alla le 3 vifiter la grande tour. Après le dîner il
vifita le Fort de la Malgue , d'où il paffa à celui
d'Artigues. Le 4 vers les trois heures après- midi ,
le Duc de Penthievre s'embarqua fur un canot , &
fut fuivi par tous les canots , ainfi que par toutes
les barques & les chaloupes qui étoient dans le
port. Dès que le Prince parut dans la rade , les
quatre galeres definées à le conduire en Italie ,
& qui étoient prêtes à partir pour aller l'attendre
à Antibes , le faluerent à fon paffage , ce que fit
auffi la Frégate la Thetis. Toute cette flotille s'avança
à deux lieues en mer , & l'on donna au Duc
de Penthievre le divertiffement de la pêche du
thon. Au retour , les galeres qui avoient déja tiré
deux coups de canon pout annoncer leur départ ,
vinrent l'une après l'autre à force de rames paffer
devant le canot du Prince , & firent une nouvelle
falve de toute leur artillerie . Le tems étoit fi fa
DECEMBRE. 1754. 197
•
vorable pour la avigation , qu'une demi-heure
après on les perdit de vite. Lorfque le foleil fut
fous l'horizon , trois galiotes à bombes placées
dans la petite rade , tirerent chacune fix bombes.
Les le Prince fit le tour des remparts en dedans
de la ville. Sur les fept heures du foir les galiotes
tirerent encore vingt- quatre bombes , & le Duc
de Penthievre vit ce fpectacle de fon appartement.
Ce Prince partit le 7 de Toulon , & alla coucher
au Luc : il s'eft rendu le lendemain à Fréjus , &
le 9 à Antibes ; le 12 il est parti d'Antibes pour
Gênes.
Les nouvelles de Marſeille du 17 portent qu'il
y étoit arrivé à bord du vaiffeau Anglois le Deptford
, vingt-fept efclaves François qui ont été embarqués
fur ce bâtiment à Gibraltar , & qui avoient
été rachetés peu de tems auparavant dans le
Royaume de Maroc par les Religieux des Ordres
de la Sainte Trinité & de Notre-Dame de la
Mercy. Ces efclaves ayant fait leur quarantaine à
Carthagene , ont eu l'entrée le 13 , & ont été reçus
par les Peres François Baurans & Paulin Gobin
, Commiffaires des deux Ordres.
Le 19 & le 20 d'Octobre , leurs Majeftés accompagnées
de la Famille Royale , aflifterent aux
Vêpres & au Salut dans la Chapelle du Château .
Le Roi foupa le 20 au grand couvert chez la
Reine .
Le même jour la Marquife de Fontange fit fes
révérences au Roi , à la Reine & à la Famille
Royale,
Leurs Majeftés fignerent le même jour le contrat
de mariage du Comte de Salvert & de la
Demoiſelle de Sabrevois , fille de M. de Sabrevois
, Maréchal des camps & armées du Roi ,
Lieutenant général d'artillerie , & Commandant
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
en chef au départément général d'Alface , de
Bourgogne & de Franche Comté.
Le 20 l'Evêque de Gap nommé à l'Evêché d'Auxerre
, fit dans l'Eglife des Miffions étrangeres
la cérémonie de bénir le nouvel Abbé de l'Abbaye
réguliere de Saint Amand.
Le Roi a nommé Chevalier de l'Ordre de Saint
Michel M. Pitot , Penfionnaire vétéran de l'Académie
Royale des Sciences , Membre de la Société
Royale de Londres , Directeur du canal & des
travaux publics de la Province de Languedoc.
Le 22 M. Gualterio , Archevêque de Mira ,
Nonce ordinaire du Pape , eut une audience particuliere
du Roi , dans laquelle il préfenta à Sa
Majesté M. Molinari , Archevêque de Damas ,
qui paffe par la France pour fe rendre à fa Nonciature
de Bruxelles . M. Guakerio fut conduit à
cette audience , ainſi qu'à celles de la Reine , de
Monfeigneur le Dauphin , de Madame la Dauphine
, de Madame Adelaide & de Mefdames
Victoire , Sophie & Louife , par M. Dufort , Introducteur
des Ambaffadeurs .
›
Le Comte Turpin , Brigadier de cavalerie , &
Colonel d'un Régiment de Huffards , a préſenté
au Roi un ouvrage de fa compoſition fur l'Ars
militaire.
La place d'Aumônier du Roi , vacante par la
mort de M. l'Abbé de Caulincourt , a été donnée à
M.l'Abbé de Scey-Montbeillard , Abbé de l'Abbaye
de Saint André , Ordre de Prémontré , Diocefe
de Clermont.
Le Roi a envoyé au Parlement de Bretagne une
Déclaration datée du 8 Octobre , qui fut enregiftrée
le 17 du même mois.
Un Juif de Metz , âgé de trente-cinq ans , refut
le 10 Octobre à Saintes , par les mains de l'EDECEMBRE.
1754 199
vêque , les Sacremens de Baptême & de la Con
firmation. Il a eu pour parrein M. de Blair de
Boifmon , Intendant de la Rochelle , nommé à
l'Intendance de Valénciennes ; & pour marreine
la Dame de Parabere , Abbeffe de l'Abbaye de
Notre-Dame de Saintes , qui lui ont donné les
noms de Louis-Marie.
Depuis le 15 Octobre on a commencé à allu→
mer toutes les nuits à Calais , deux heures avant
& deux heures après la pleine mer , un fanal au
bout de la grande jettée du côté de l'oueft. Cela
s'obfervera pendant tout le tems de la pêche du
hareng , c'est - à- dire jufqu'au mois prochain , afin
de faciliter aux Pêcheurs l'entrée du port de Calais
. On en ufera de même deformais chaque année
dans cette faiſon.
Selon les lettres de Provence , la maison des
Penfionnaires établie à Aix le premier Octobre
1753 , au College Royal - Bourbon des Jefuites ,
en vertu d'un brevet du Roi , vient d'être achevée
Elle peut contenir jufqu'à cent jeunes gens,
Moyennant une nouvelle fondation , il y a actuellement
deux Profeffeurs de Rhétorique dans
ce College.
Le 24 l'Archevêque de Sens conféra le Sacrement
de la Confirmation à onze cens enfans dans
l'Eglife de la Communauté des Filles Bleues.
Le 26 le Roi quitta le deuil que Sa Majefté avoit
pris le 6 pour laReine Douairiere de Portugal.
Le Roi foupa le 27 au grand couvert chez la
Reine avec la Famille Royale.
Il a été fait par le Lord Powerscourt une ga.
geure , qu'il viendroit à cheval en deux heures de
la derniere maifon de Fontainebleau à la premiere
barriere des Gobelins . M. Baillon ,
loger de la Reine , a été chargé d'envoyer deux
Hor
I iiij
200 MERCURE DE FRANCE.
pendules à Fontainebleau , & d'en tenir deux à la
barriere des Gobelins fur la même heure , afin de
mefurer le tems que ce Seigneur Anglois employe
roit à fa courſe. Le 29 du mois dernier le Lord
Powerscourt eft parti de Fontainebleau à fept
heures neuf minutes quarante-cinq fecondes du
matin , & il eſt arrivé à huit heures quarante- fept
minutes vingt- fept fecondes à la barriere indiquée.
Il avoit deux relais fur la route. Une des
conditions de la gageure étoit qu'il ne monteroit
pas plus de trois chevaux , & il n'en a monté que
deux.
Selon les lettres de Gênes , le Duc de Penthievre
y eft arrivé le 19 Octobre , à trois heures
après- midi. Une députation de la République eft
allée le recevoir à fa galere , & l'a conduit au Pa-
Lais Brignolé , qui avoit été préparé pour le loge.
ment de ce Prince . Les Députés doivent l'accom
pagner par-tout pendant fon féjour à Gênes.
Le 31 , veille de la Fête de Tous les Saints , le
Roi & la Reine , accompagnés de la Famille royale
, affifterent au premieres Vêpres dans la Chapelle
du Château . Elles furent chantées par la Muſique ,
& l'Evêque de Chartres y officia.
Le premier Novembre , jour de la Fête , leurs
Majeftés accompagnées comme le jour précédent,
entendirent la grande Meffe célébrée pontificament
par le même Prélat . Le Roi , la Reine & la
Famille royale affifterent l'après- midi aux Vêpres
du jour chantées par la Mufique , aufquelles
Ï'Evêque de Chartres officia , & enfuite aux Vêpres
des Morts. Avant les Vêpres , leurs Majeftés
entendirent la Prédication du Pere de Neufville ,
de la Compagnie de Jeſus.
A l'occafion de la Fête , la Reine a communié
par les mains de l'Evêque de Chartres , fon preDECEMBRE
. 1754. 201
mier Aumônier ; Monfeigneur le Dauphin, par celles
de M. l'Abbé de Chabannes , Aumônier du Roi ;
Madame la Dauphine , par celles de M. l'Abbé de
Murat , fon Aumônier en quartier ; Madame Adelaïde,
par celles de l'Evêque de Meaux , fon premier
Aumônier ; & Mefd . Victoire , Sophie & Louiſe ,
par celles de M. l'Abbé Barc , Chapelain du Roi.
Le premier & le 3 , le Roi foupa au grand couvert
chez la Reine avec la Famille royale.
M. Pitrou , Ingénieur des ponts & chauffées ,
ayant fait anciennement par ordre du Roi la vifite
de la riviere de Marne depuis Châlons jufqu'à
Charenton , a eftimé à treize millions les dépenfes
néceffaires pour faciliter la navigation de cette
riviere. Un autre Ingénieur commis auffi par Sa
Majeſté , a viſité la riviere d'Yonne : il a jugé qu'il
falloit dépenfer dix millions pour la rendre navigable
jufqu'à fon embouchure dans la Seine . M.
Macary , privilegié du Roi pour la fûreté de la
navigation , a foumis à la décision du Confeil un
projet différent , pour que le tiers au moins des
denrées deftinées à la confommation de Paris , y
foient amenées dans tous les tems de l'année ,
hors les cas extraordinaires des glaces & des débordemens
& pour que les frais de transport foient
toujours les mêmes . Selon le devis , la dépenfe ne
montera qu'à quatre millions trois cens vingtneuf
mille fix cens foixante- fix livres . Une Compagnie
fournira les fonds , & il n'en coutera rien
au Roi ni au public . L'auteur du projet , s'il eft autorifé
, demande feulement pour l'exécuter avec
La Compagnie, & pour entretenir les ouvrages , un
droit médiocre de navigation , qui fera à la charge
des Maîtres de barques.
Le mémoire de M. Macary a été renvoyé par le
Confeil à Mr de Bernage ; Confeiller d'Etat or-
Ιν
202 MERCURE DE FRANCE.
dinaire , Prévôt des Marchands , pour que le Bureau
de la ville donne fon avis fur les propoſitions
qui y font continues.
Le 9 Novembre , le Roi déclara la nomination
au chapeau de Cardinal que Madame la Dauphine
a obtenu pour l'Archevêque de Sens , fon premier
Aumônier .
Le 12 , l'ouverture du Parlement fe fit avec les
cérémonies accoutumées , par une Meffe folemnelle
, que M. l'Abbé de Sailly , Chantre de la Sainte
Chapelle , célébra dans la Chapelle de la grande
Salle du Palais , & à laquelle M. de Maupeou , premier
Préfident , & les Chambres affifterent .
Le 13 , le Marquis de Malefpina qui eft venu
pour complimenter leurs Majeftés de la part de
I'Infant Duc & de Madame Infante Ducheffe de
Parme , fur la naiffance de Monfeigneur le Duc de
Berry , prit congé du Roi , de la Reine & de la Famille
royale.
Le Roi a fixé au 18 fon départ de Fontainebleau.
Des fix places de Docteurs Aggrégés qui étoient
vacantes dans la Faculté de Droit de Paris , les
trois premieres ont été adjugées par cette Faculté
à MM. Sauvage , Boyer & Lalourcey , Docteurs
de Paris. Le concours pour les trois autres places
doit s'ouvrir le 19 de Décembre.
On mande de Strasbourg que le Margrave &
la Margrave de Brandebourg- Bareith y ont paffé
en allant à Montpellier.
Les mêmes lettres marquent qu'on a effuyé
pendant le mois dernier plufieurs facheux orages
dans une partie de l'Alface.
Le 14 de ce mois , les Actions de la Compagnie
des Indes étoient à dix - huit cens trente livres ;
les Billets de la premiere lotterie royale , à fept
cens foixante -dix livres ; & ceux de la feconde , à
fix cens foixante- dix.
Fermer
Résumé : « Le 13 Octobre le Commandeur de la Cerda, Envoyé extraordinaire du Roi de Portugal, eut [...] »
Le 13 octobre, le Commandeur de la Cerda, envoyé extraordinaire du Roi de Portugal, a été reçu en audience privée par le Roi de France pour lui présenter une lettre de félicitations concernant l'accouchement de Madame la Dauphine et la naissance du Duc de Berry. Le même jour, Leurs Majestés et la Famille Royale ont assisté aux Vêpres et au Salut dans la Chapelle du Château. Le Roi a élevé la Terre de Marigny au rang de Marquisat en faveur de M. de Vandiere, Directeur et Ordonnateur Général des Bâtiments. Le 14 octobre, l'ouverture de l'assemblée des États de Bretagne a eu lieu à Rennes. Le 15 octobre, la Reine a entendu la messe dans l'église du Couvent des Carmes réclus des Loges, et le Dauphin ainsi que Mesdames de France ont assisté au Salut l'après-midi. Le Comte de Sartiranne, ambassadeur du Roi de Sardaigne, a informé le Roi de l'accouchement de la Duchesse de Savoie et de la naissance d'un prince. Le Duc de Penthièvre a visité plusieurs sites militaires et navals à Toulon avant de partir pour Gênes le 12 octobre. À Marseille, vingt-sept esclaves français ont été libérés et ramenés par les Religieux des Ordres de la Sainte Trinité et de Notre-Dame de la Mercy. Le 20 octobre, Leurs Majestés ont assisté aux Vêpres et au Salut, et le Roi a signé le contrat de mariage du Comte de Salvert et de Mademoiselle de Sabrevois. Le Roi a également nommé Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel M. Pitot, et a reçu en audience l'Archevêque de Mira et l'Archevêque de Damas. Divers événements religieux et cérémoniels ont eu lieu, notamment la confirmation de nombreux enfants et la fin du deuil du Roi pour la Reine Douairière de Portugal. Le Lord Powerscourt a réalisé une course à cheval entre Fontainebleau et Paris. Le Duc de Penthièvre est arrivé à Gênes le 19 octobre. Le 1er novembre, le Roi et la Famille Royale ont assisté à des cérémonies religieuses à l'occasion de la Toussaint. Le Roi a également déclaré la nomination de l'Archevêque de Sens au chapeau de Cardinal. Le Parlement a ouvert sa session avec une messe solennelle. Le Marquis de Malespina a pris congé après avoir félicité la Famille Royale pour la naissance du Duc de Berry.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
580
p. 37-38
COMPLIMENT Fait à Mademoiselle de Richelieu, par les Dames Religieuses de l'Abbaye du Trésor, dont elle avoit été quelques mois absente.
Début :
Lorsque nous avons quitté le monde il n'y en a pas une de nous qui n'ait [...]
Mots clefs :
Religieuses, Abbaye du Trésor
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMPLIMENT Fait à Mademoiselle de Richelieu, par les Dames Religieuses de l'Abbaye du Trésor, dont elle avoit été quelques mois absente.
COMPLIMENT
Fait à Mademoiselle de Richelieu , par les :
Dames Religienfes de l'Abbaye du Tréfor ,
dont elle avoit été quelques mois abfente.
Lorfque Orfque nous avons quitté le monde
il n'y en a pas une de nous qui n'ait
crû s'être fauvée de toutes les agitations
de tous les attachemens , de toutes les inquiétudes
qu'on y contracte , de toutes les
fortes d'intérêts qui viennent y furprendre :
la paix de l'ame , difions nous , eft la ré--
compenfe de celles qui habitent notre fainte
retraite ; nous n'y appartenons plus qu'à
nos tranquilles & religieux exercices ; tout
le refte eft étranger pour nous. Cependant
nous nous trompions , Mademoiſelle ; vous
38 MERCURE DE FRANCE.
nous avez appris qu'il n'y a point d'afyle
contre la néceffité de s'attacher à vous, quand
on a le bonheur de vous connoître , point
d'afyle contre l'affliction de ne vous plus voir
quand on vous a vûe ; point d'abri contre
la douce impreffion que laiffent les qualités
de votre belle ame , les graces de votre
efprit , & le charme de votre caractere.
Enfin , Mademoiſelle , vous nous avez appris
qu'il falloit encore être plus chré
tienne pour fouffrir d'être privée de vous ,
qu'il n'eft befein de l'être pour oublier
toute la terre : il eft vrai qu'en nous affligeant
de votre abfcence , notre excufe auprès
de Dieu étoit de regretter ce qu'il a
fait de plus aimable & de plus digne d'être
aimé , & ce qu'en toutes façons on
peut appeller fon plus bel ouvrage ; &
fans doute que nos pleurs ne l'ont point
offenfé , puifqu'il vous rend à nos voeux.
Sans doute il nous pardonnera l'excès de
la joie où nous fommes , comme il nous
a pardonné l'excès de la douleur où votre
départ nous avoit plongées , & que juſtifoit
auffi la trifteffe de notre chere & refpectable
Abbeffe , dont la fatisfaction redouble
encore la nôtre.
Fait à Mademoiselle de Richelieu , par les :
Dames Religienfes de l'Abbaye du Tréfor ,
dont elle avoit été quelques mois abfente.
Lorfque Orfque nous avons quitté le monde
il n'y en a pas une de nous qui n'ait
crû s'être fauvée de toutes les agitations
de tous les attachemens , de toutes les inquiétudes
qu'on y contracte , de toutes les
fortes d'intérêts qui viennent y furprendre :
la paix de l'ame , difions nous , eft la ré--
compenfe de celles qui habitent notre fainte
retraite ; nous n'y appartenons plus qu'à
nos tranquilles & religieux exercices ; tout
le refte eft étranger pour nous. Cependant
nous nous trompions , Mademoiſelle ; vous
38 MERCURE DE FRANCE.
nous avez appris qu'il n'y a point d'afyle
contre la néceffité de s'attacher à vous, quand
on a le bonheur de vous connoître , point
d'afyle contre l'affliction de ne vous plus voir
quand on vous a vûe ; point d'abri contre
la douce impreffion que laiffent les qualités
de votre belle ame , les graces de votre
efprit , & le charme de votre caractere.
Enfin , Mademoiſelle , vous nous avez appris
qu'il falloit encore être plus chré
tienne pour fouffrir d'être privée de vous ,
qu'il n'eft befein de l'être pour oublier
toute la terre : il eft vrai qu'en nous affligeant
de votre abfcence , notre excufe auprès
de Dieu étoit de regretter ce qu'il a
fait de plus aimable & de plus digne d'être
aimé , & ce qu'en toutes façons on
peut appeller fon plus bel ouvrage ; &
fans doute que nos pleurs ne l'ont point
offenfé , puifqu'il vous rend à nos voeux.
Sans doute il nous pardonnera l'excès de
la joie où nous fommes , comme il nous
a pardonné l'excès de la douleur où votre
départ nous avoit plongées , & que juſtifoit
auffi la trifteffe de notre chere & refpectable
Abbeffe , dont la fatisfaction redouble
encore la nôtre.
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Résumé : COMPLIMENT Fait à Mademoiselle de Richelieu, par les Dames Religieuses de l'Abbaye du Trésor, dont elle avoit été quelques mois absente.
Les Dames Religieuses de l'Abbaye du Tréfor adressent un compliment à Mademoiselle de Richelieu après son absence de quelques mois. Elles expriment initialement leur croyance en avoir échappé aux agitations du monde, trouvant la paix dans leur retraite. Cependant, elles reconnaissent l'irrésistible présence de Mademoiselle de Richelieu, admettant qu'il est impossible de ne pas s'attacher à elle et de ne pas souffrir de son absence. Elles soulignent ses qualités, ses grâces d'esprit et son charme, affirmant qu'il faut être très chrétienne pour supporter d'être privée de sa compagnie. Elles justifient leur affliction en regrettant la perte de quelqu'un d'aimable et digne d'être aimé, considéré comme l'œuvre la plus belle de Dieu. Elles expriment leur joie de son retour, espérant que Dieu leur pardonnera leur excès de douleur et de joie, et remercient pour la satisfaction de leur Abbesse, qui redouble leur bonheur.
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581
p. 205-209
« Le premier de Janvier, les Princes & Princesses, & les Seigneurs & Dames de la Cour, [...] »
Début :
Le premier de Janvier, les Princes & Princesses, & les Seigneurs & Dames de la Cour, [...]
Mots clefs :
Ordre, Messe, Marquis, Lieutenant, Roi, Comte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le premier de Janvier, les Princes & Princesses, & les Seigneurs & Dames de la Cour, [...] »
E premier de Janvier , les Princes & Princefeurent
l'honneur de complimenter le Roi fur la
nouvelle année .
Le Corps de Ville a rendu à cette occafion fes
refpects à leurs Majeftés & à la Famille royale.
Les Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
l'Ordre du Saint Eſprit , s'étant affemblés vers les
onze heures du matin dans le cabinet du Roi
Sa Majesté fortit de fon appartement pour aller à
la Chapelle. Le Roi , devant qui les deux Huifhiers
de la chambre portoient leurs mafles , étoit
en manteau , le collier de l'Ordre par deffus , ainfi
que celui de l'Ordre de la Toifon d'or . Sa Majefté
étoit précédée du Duc d'Orléans , du Prince
de Condé , du Comte de Charolois , dų Prince
106 MERCURE DE FRANCE.
de Conti , du Comte de la Marche , du Prince de
Dombes , du Comte d'Eu , & des Chevaliers
Commandeurs & Officiers de l'Ordre. Après la
grande Meffe , qui fut célébrée par le Prince Conftantin
, premier Aumônier du Roi , & Prélat
Commandeur de l'Ordre , le Roi fut reconduit à
fon appartement en la maniere accoutumée.
Monfeigneur le Dauphin n'affifta point à la
grande Meffe , à caufe d'une légere indifpofition .
Le Duc d'Ayen étant devenu titulaire du Gouvernement
de Saint - Germain- en- Laye par la démiffion
du Maréchal Duc de Noailles , le Roi a
accordé la furvivance de ce Gouvernement au
Comte d'Ayen , Meftre de Camp du Régiment de
Noailles Cavalerie.
M. l'Abbé de Gouyon , Vicaire Général & Archidiacre
de l'Evêché de Saint Pol de Léon , a été
nommé Aumonier de Madame Adélaïde.
Les Capitaux échus par le fort de la Lotterie
tirée le 19 du mois de Décembre dernier , pour le
remboursement annuel des rentes fur la caiffé générale
des amortiffemens , montent à la fomme
de treize cens foixante - neuf mille neuf cens foixante
livres.
"
Le Roi a difpofé de la place de Grand Croix ,
vacante dans l'Ordre royal & militaire de Saint
Louis , par la mort du Comte de Chabannes
en faveur du Marquis de Créqui , Lieutenant-Gé
néral des armées de Sa Majefté ; & Commandeur
de cet Ordre. Le Chevalier de Créqui avoit déja
les honneurs de Grand Croix.
Le Comte de Coetlogon , auffi Lieutenant- Gé
néral , a eu la place de Commandeur du Marquis
de Créqui .
Sa Majefté a donné la Compagnie des Gendar
mes Anglois , qui vaquoit par la démiffion du Vi
FEVRIER. 1758. 207
Comte de Courtomer , au Comte de Lannoy , Brigadier
de Cavalerie , & Capitaine- Lieutenant de
la Compagnie des Chevaux -Legers d'Orléans ; &
la Compagnie des Chevaux - Legers d'Orléans au
Marquis de Tracy , Sous-Lieutenant des Chevaux
Legers de Monfeigneur le Dauphin.
Sa Majesté fit le r' . Janvier , dans fa chambre , la
cérémonie de recevoir Chevaliers de l'Ordre royal
& militaire de Saint Louis , le Marquis de Bezons ,
Brigadier de Cavalerie , Meſtre de Camp du régiment
de fon nom ; le Comte de Lillebonne , Brigadier
de Dragons , Mestre de Camp du régiment
d'Harcourt ; le Marquis de la Châtre , Brigadier
d'Infanterie , Colonel du régiment de Cambrefis
; le Comte de Valentinois , Sous- Lieutenant
des Gendarmes de Monfeigneur le Duc de Bourgogne
le Chevalier de Villefort , Lieutenant de
Roi des Iles de Sainte Marguerite ; M. de Monfort
, Capitaine au régiment d'Infanterie de Provence
, & M. de Valcourt , Capitaine au régiment
de Cavalerie de la Rochefoucauld.
Le Roi a difpofé du Gouvernement de Verdun
& du Verdunois , vacant par la mort du Comte do
Chabannes , en faveur du Marquis de Chazeron ,
Lieutenant- Général de fes armées , & Lieutenant
des Gardes du Corps dans la Compagnie de Bethune.
Le Marquis de Chazeron remet fon Gou
vernement de Breft & fa Brigade dans les Gardes
du Corps. Outre le nouveau Gouvernement dont
il vient d'être pourvu , il a obtenu une penfion de
fix mille livres.
La Brigade qui vaque par la retraite , paffe au
Marquis de Sefmaifons.
Sa Majesté a accordé le Gouvernement de Ville.
franche, en Rouffillon , qu'avoit le feu Vicomte
du Chayla, au Chevalier de Muy , Lieutenant-
Général .
208 MERCURE DE FRANCE.
Le Marquis de Wignacourt , premier Cornette
de la Compagnie des Chevaux - Legers de Monfeigneur
le Dauphin , monte à la Sous- Lieutenance
de cette Compagnie , & fa Cornette a été
donnée au Comte de Vaudremont , Guidon des
Gendarmes Anglois.
L'Abbaye de Ville-Chaffon , Ordre de Saint
Benoît , Dioceſe de Sens , a été réunie , avec
tranſlation du titre , au Prieuré de Moret , du même
Ordre & du même Dioceſe , en faveur de la
Dame de Soulange , Abbeffe de Royal -Lieu , que
le Roi y a nommée
Le 7 Janvier & les jours fuivans , on a fait le
feptiéme tirage de la feconde Lotterie royale. Le
principal lot eft échu au numero 1588 ; le fecond
lot , au numero 25033 , & la premiere prime ,
numero 11651 .
au
Le 13 , pendant la Meffe du Roi , l'Evêque
d'Auxerre prêta ferment de fidélité entre les mains
de Sa Majesté.
Le 15 , le Duc & le Comte de Lauraguais remercierent
le Roi de la grace que Sa Majesté a
fait au Comte , en lui accordant un Brevet d'honneurs.
Sa Majefté a nommé Miniftre d'Etát M. Moreau
de Seychelles , Confeiller d'Etat ordinaire , & an
Confeil royal , Contrôleur Général des Finances.
Le Marquis de Langeron , Lieutenant - Général
des armées du Roi , a obtenu de Sa Majefté le
Gouvernement de Breft , vacant par la démiffion
du Marquis de Chazeron .
Pendant le cours de l'année derniere , il s'eſt
fait dans cette capitale 18909 Baptêmes , 4143
Mariages , & 21724 enterremens . Le nombre des
enfans trouvés a été de 4231 .
Le 12 de ce mois , l'Evêque de Saint Omer fut
FEVRIER. 1755. 209
facré dans l'Eglife des Religieufes de Conflans par
l'Archevêque de Paris , affifté des Evêques de Cahors
& de Senlis .
Le 18 , pendant la Meffe du Roi , l'Evêque de
Saint Omer prêta ferment de fidelité entre les
mains de Sa Majesté.
La Reine alla le 20 entendre la Meffe dans l'Eglife
de la Maifon de Saint Cyr. Sa Majesté y donna
le voile aux Dlles de Durfort & de Dormenan .
La Meffe fut célébrée par l'Evêque de Chartres ,
& ce Prélat fit la cérémonie.
Monfeigneur le Dauphin , qu'une légere indifpofition
obligeoit depuis quelque tems de gar
der fon appartement , jouit maintenant d'une parfaite
fanté.
Madame Victoire ayant été attaquée d'une fievre
violente & d'un grand mal de tête , fut fai
gnée le 16 deux fois du pied ; la premiere à fix
heures du foir , la feconde à minuit . La derniere
faignée fit tomber la fievre , & procura le fommeil.
Actuellement Madame Victoire eft auffi - bien
qu'on puifle le deſirer.
M. de Vergennes , Miniftre du Roi auprès de
PElecteur de Tréves , a été nommé par Sa Majef
té pour aller réfider en qualité d'Envoyé extraor
dinaire à la Porte Ottomane.
L'Evêque de Cahors , affifté des Evêques de Die
& de Graffe , facra le 19 l'Evêque de Bethleem
dans la hapelle du Seminaire de S. Sulpice,
Le 23 , les Actions de la Compagnie des Indes
étoient à dix - huit cens dix livres . Les billets de la
premiere lotterie royale étoient à huit cens trente.
Ceux de la feconde lotterie n'avoient point de prix
fixe.
l'honneur de complimenter le Roi fur la
nouvelle année .
Le Corps de Ville a rendu à cette occafion fes
refpects à leurs Majeftés & à la Famille royale.
Les Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
l'Ordre du Saint Eſprit , s'étant affemblés vers les
onze heures du matin dans le cabinet du Roi
Sa Majesté fortit de fon appartement pour aller à
la Chapelle. Le Roi , devant qui les deux Huifhiers
de la chambre portoient leurs mafles , étoit
en manteau , le collier de l'Ordre par deffus , ainfi
que celui de l'Ordre de la Toifon d'or . Sa Majefté
étoit précédée du Duc d'Orléans , du Prince
de Condé , du Comte de Charolois , dų Prince
106 MERCURE DE FRANCE.
de Conti , du Comte de la Marche , du Prince de
Dombes , du Comte d'Eu , & des Chevaliers
Commandeurs & Officiers de l'Ordre. Après la
grande Meffe , qui fut célébrée par le Prince Conftantin
, premier Aumônier du Roi , & Prélat
Commandeur de l'Ordre , le Roi fut reconduit à
fon appartement en la maniere accoutumée.
Monfeigneur le Dauphin n'affifta point à la
grande Meffe , à caufe d'une légere indifpofition .
Le Duc d'Ayen étant devenu titulaire du Gouvernement
de Saint - Germain- en- Laye par la démiffion
du Maréchal Duc de Noailles , le Roi a
accordé la furvivance de ce Gouvernement au
Comte d'Ayen , Meftre de Camp du Régiment de
Noailles Cavalerie.
M. l'Abbé de Gouyon , Vicaire Général & Archidiacre
de l'Evêché de Saint Pol de Léon , a été
nommé Aumonier de Madame Adélaïde.
Les Capitaux échus par le fort de la Lotterie
tirée le 19 du mois de Décembre dernier , pour le
remboursement annuel des rentes fur la caiffé générale
des amortiffemens , montent à la fomme
de treize cens foixante - neuf mille neuf cens foixante
livres.
"
Le Roi a difpofé de la place de Grand Croix ,
vacante dans l'Ordre royal & militaire de Saint
Louis , par la mort du Comte de Chabannes
en faveur du Marquis de Créqui , Lieutenant-Gé
néral des armées de Sa Majefté ; & Commandeur
de cet Ordre. Le Chevalier de Créqui avoit déja
les honneurs de Grand Croix.
Le Comte de Coetlogon , auffi Lieutenant- Gé
néral , a eu la place de Commandeur du Marquis
de Créqui .
Sa Majefté a donné la Compagnie des Gendar
mes Anglois , qui vaquoit par la démiffion du Vi
FEVRIER. 1758. 207
Comte de Courtomer , au Comte de Lannoy , Brigadier
de Cavalerie , & Capitaine- Lieutenant de
la Compagnie des Chevaux -Legers d'Orléans ; &
la Compagnie des Chevaux - Legers d'Orléans au
Marquis de Tracy , Sous-Lieutenant des Chevaux
Legers de Monfeigneur le Dauphin.
Sa Majesté fit le r' . Janvier , dans fa chambre , la
cérémonie de recevoir Chevaliers de l'Ordre royal
& militaire de Saint Louis , le Marquis de Bezons ,
Brigadier de Cavalerie , Meſtre de Camp du régiment
de fon nom ; le Comte de Lillebonne , Brigadier
de Dragons , Mestre de Camp du régiment
d'Harcourt ; le Marquis de la Châtre , Brigadier
d'Infanterie , Colonel du régiment de Cambrefis
; le Comte de Valentinois , Sous- Lieutenant
des Gendarmes de Monfeigneur le Duc de Bourgogne
le Chevalier de Villefort , Lieutenant de
Roi des Iles de Sainte Marguerite ; M. de Monfort
, Capitaine au régiment d'Infanterie de Provence
, & M. de Valcourt , Capitaine au régiment
de Cavalerie de la Rochefoucauld.
Le Roi a difpofé du Gouvernement de Verdun
& du Verdunois , vacant par la mort du Comte do
Chabannes , en faveur du Marquis de Chazeron ,
Lieutenant- Général de fes armées , & Lieutenant
des Gardes du Corps dans la Compagnie de Bethune.
Le Marquis de Chazeron remet fon Gou
vernement de Breft & fa Brigade dans les Gardes
du Corps. Outre le nouveau Gouvernement dont
il vient d'être pourvu , il a obtenu une penfion de
fix mille livres.
La Brigade qui vaque par la retraite , paffe au
Marquis de Sefmaifons.
Sa Majesté a accordé le Gouvernement de Ville.
franche, en Rouffillon , qu'avoit le feu Vicomte
du Chayla, au Chevalier de Muy , Lieutenant-
Général .
208 MERCURE DE FRANCE.
Le Marquis de Wignacourt , premier Cornette
de la Compagnie des Chevaux - Legers de Monfeigneur
le Dauphin , monte à la Sous- Lieutenance
de cette Compagnie , & fa Cornette a été
donnée au Comte de Vaudremont , Guidon des
Gendarmes Anglois.
L'Abbaye de Ville-Chaffon , Ordre de Saint
Benoît , Dioceſe de Sens , a été réunie , avec
tranſlation du titre , au Prieuré de Moret , du même
Ordre & du même Dioceſe , en faveur de la
Dame de Soulange , Abbeffe de Royal -Lieu , que
le Roi y a nommée
Le 7 Janvier & les jours fuivans , on a fait le
feptiéme tirage de la feconde Lotterie royale. Le
principal lot eft échu au numero 1588 ; le fecond
lot , au numero 25033 , & la premiere prime ,
numero 11651 .
au
Le 13 , pendant la Meffe du Roi , l'Evêque
d'Auxerre prêta ferment de fidélité entre les mains
de Sa Majesté.
Le 15 , le Duc & le Comte de Lauraguais remercierent
le Roi de la grace que Sa Majesté a
fait au Comte , en lui accordant un Brevet d'honneurs.
Sa Majefté a nommé Miniftre d'Etát M. Moreau
de Seychelles , Confeiller d'Etat ordinaire , & an
Confeil royal , Contrôleur Général des Finances.
Le Marquis de Langeron , Lieutenant - Général
des armées du Roi , a obtenu de Sa Majefté le
Gouvernement de Breft , vacant par la démiffion
du Marquis de Chazeron .
Pendant le cours de l'année derniere , il s'eſt
fait dans cette capitale 18909 Baptêmes , 4143
Mariages , & 21724 enterremens . Le nombre des
enfans trouvés a été de 4231 .
Le 12 de ce mois , l'Evêque de Saint Omer fut
FEVRIER. 1755. 209
facré dans l'Eglife des Religieufes de Conflans par
l'Archevêque de Paris , affifté des Evêques de Cahors
& de Senlis .
Le 18 , pendant la Meffe du Roi , l'Evêque de
Saint Omer prêta ferment de fidelité entre les
mains de Sa Majesté.
La Reine alla le 20 entendre la Meffe dans l'Eglife
de la Maifon de Saint Cyr. Sa Majesté y donna
le voile aux Dlles de Durfort & de Dormenan .
La Meffe fut célébrée par l'Evêque de Chartres ,
& ce Prélat fit la cérémonie.
Monfeigneur le Dauphin , qu'une légere indifpofition
obligeoit depuis quelque tems de gar
der fon appartement , jouit maintenant d'une parfaite
fanté.
Madame Victoire ayant été attaquée d'une fievre
violente & d'un grand mal de tête , fut fai
gnée le 16 deux fois du pied ; la premiere à fix
heures du foir , la feconde à minuit . La derniere
faignée fit tomber la fievre , & procura le fommeil.
Actuellement Madame Victoire eft auffi - bien
qu'on puifle le deſirer.
M. de Vergennes , Miniftre du Roi auprès de
PElecteur de Tréves , a été nommé par Sa Majef
té pour aller réfider en qualité d'Envoyé extraor
dinaire à la Porte Ottomane.
L'Evêque de Cahors , affifté des Evêques de Die
& de Graffe , facra le 19 l'Evêque de Bethleem
dans la hapelle du Seminaire de S. Sulpice,
Le 23 , les Actions de la Compagnie des Indes
étoient à dix - huit cens dix livres . Les billets de la
premiere lotterie royale étoient à huit cens trente.
Ceux de la feconde lotterie n'avoient point de prix
fixe.
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Résumé : « Le premier de Janvier, les Princes & Princesses, & les Seigneurs & Dames de la Cour, [...] »
Le 1er janvier, les princes et princesses complimentèrent le Roi pour la nouvelle année. Le Corps de Ville rendit hommage aux Majestés et à la famille royale. Les membres de l'Ordre du Saint-Esprit se réunirent dans le cabinet du Roi, qui se rendit à la chapelle accompagné de plusieurs princes et dignitaires. Après la messe, célébrée par le Prince Constantin, le Roi fut reconduit à son appartement. Le Dauphin n'assista pas à la messe en raison d'une légère indisposition. Plusieurs nominations et attributions eurent lieu. Le Duc d'Ayen devint titulaire du Gouvernement de Saint-Germain-en-Laye, et le Comte d'Ayen obtint la survivance de ce gouvernement. L'Abbé de Gouyon fut nommé aumônier de Madame Adélaïde. Les capitaux de la loterie du 19 décembre s'élevèrent à 1 369 960 livres. Le Roi nomma le Marquis de Créqui Grand Croix de l'Ordre de Saint-Louis et le Comte de Coetlogon Commandeur. Diverses compagnies et gouvernements furent attribués, notamment au Comte de Lannoy et au Marquis de Tracy. Plusieurs personnes furent reçues Chevaliers de l'Ordre de Saint-Louis, dont le Marquis de Bezons et le Comte de Lillebonne. Le Marquis de Chazeron obtint le Gouvernement de Verdun et une pension de 6 000 livres, tandis que le Marquis de Sessmaisons prit sa brigade. Le Chevalier de Muy reçut le Gouvernement de Villefranche. L'Abbaye de Ville-Chaffon fut réunie au Prieuré de Moret en faveur de la Dame de Soulange. Le 7 janvier, eut lieu le septième tirage de la seconde lotterie royale. Le 13 janvier, l'Évêque d'Auxerre prêta serment de fidélité au Roi. Le Duc et le Comte de Lauraguais remercièrent le Roi pour une grâce accordée au Comte. M. Moreau de Seychelles fut nommé Contrôleur Général des Finances. Le Marquis de Langeron obtint le Gouvernement de Brest. En 1757, Paris enregistra 18 909 baptêmes, 4 143 mariages et 21 724 enterrements, avec 4 231 enfants trouvés. Le 12 février, l'Évêque de Saint-Omer fut sacré. Le 18 février, il prêta serment de fidélité au Roi. La Reine se rendit à Saint-Cyr le 20 février. Le Dauphin recouvra la santé après une légère indisposition. Madame Victoire fut soignée pour une fièvre violente. M. de Vergennes fut nommé Envoyé extraordinaire à la Porte Ottomane. Les actions de la Compagnie des Indes étaient à 1 810 livres, et les billets de la première lotterie royale à 830 livres.
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582
p. 44
ENIGME.
Début :
Je goûtois en secret les charmes du repos, [...]
Mots clefs :
Triangle
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
E goûtois en fecret les charmes du repos ,
Révéré des mortels , adoré des héros ;
Un aſyle facré m'offroit en apparence
D'un bonheur éternel la flateufe efpérance.
Mais bravant le couroux du fouverain des Rois ,
Un mortel me foumit à de nouvelles loix.
Par une facrilege offenſe ,
Le nom du Tout- puiffant , arraché des autels
Doit-il fe voir aftreint au compas des mortels ?
Mais c'étoit encor peu dégrader ma nobleſſe
Du Géometre à peine une indigne careffe
Eut en vain effayé d'adoucir mon malheur ,
Qu'un affreux cuifinier combla mon deshonneur ,
Sans daigner me toucher me prit dans ſa pincette ;
Sur les fourneaux étincelans
11 m'établit une retraite .
Mais à des traits fi reffemblans ,
Lecteur , peux-tu me méconnoître ?
Je ne t'en dis pas plus , cherche qui je puis être.
Par M.D. L. G.
E goûtois en fecret les charmes du repos ,
Révéré des mortels , adoré des héros ;
Un aſyle facré m'offroit en apparence
D'un bonheur éternel la flateufe efpérance.
Mais bravant le couroux du fouverain des Rois ,
Un mortel me foumit à de nouvelles loix.
Par une facrilege offenſe ,
Le nom du Tout- puiffant , arraché des autels
Doit-il fe voir aftreint au compas des mortels ?
Mais c'étoit encor peu dégrader ma nobleſſe
Du Géometre à peine une indigne careffe
Eut en vain effayé d'adoucir mon malheur ,
Qu'un affreux cuifinier combla mon deshonneur ,
Sans daigner me toucher me prit dans ſa pincette ;
Sur les fourneaux étincelans
11 m'établit une retraite .
Mais à des traits fi reffemblans ,
Lecteur , peux-tu me méconnoître ?
Je ne t'en dis pas plus , cherche qui je puis être.
Par M.D. L. G.
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583
p. 63-77
« LETTRES DE M. L'ABBÉ DE *** A SES ELEVES. A Paris, chez Claude Hérissant, [...] »
Début :
LETTRES DE M. L'ABBÉ DE *** A SES ELEVES. A Paris, chez Claude Hérissant, [...]
Mots clefs :
Lettre, Lettres, Abbé, Prophétie, Israël, Ecriture Sainte
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « LETTRES DE M. L'ABBÉ DE *** A SES ELEVES. A Paris, chez Claude Hérissant, [...] »
LETTRES DE M. L'ABBÉ DE *** A SES
ÊLEVES . A Paris , chez Claude Hériſſant ,
rue neuve Notre-Dante , à la Croix d'or &
aux trois Vertus , fecond volume. in- 1 z.
•
On a rendu compte dans le Mercure
de .... 1752 , du premier volume de ces
lettres imprimées à Paris en 1751 ; chez
la veuve Colombat.
L'auteur avoit promis feize lettres . Le
premier volume en contient dix , & le fe
cond préfente les fix dernieres , dont l'ob
jet eft de prouver l'existence des termes
énigmatiques & généraux dans les ouvra
ges prophétiques , & de faire fentir qué
leur intelligence eft néceffaire pour entendre
parfaitement le fens littéral hiſtorique
des Prophetes , des Pfeaumes , de Job , des
Cantiques , & de quelques autres prophé
ties répandues dans l'Ecriture Sainte .
Ainfi la premiere lettre de ce fecond
volume , qui eft la X I dans l'ordre des
feize , eft employée à parler du ftyle prophétique
& des raifons de fon obfcurité ;
& depuis la page so jufqu'à la page 70 ,
où finit la lettre XI , l'auteur commence
à faire un effai fur une partie des termes
énigmatiques qu'il doit traiter dans la lettre
fuivante.
La XII lettre entre tout-à -fait en
matiere ; on y voit quantité de paffages
64 MERCURE DE FRANCE.
с
des livres prophétiques , développés relativement
au fens littéral exigé par l'hiſtoire ;
mais l'auteur ne fe contente pas de morceaux
détachés , qui pourroient ne pas
fatisfaire , faute de liaifon avec ce qui précede
& ce qui fuit. Il prend donc une
prophétie entiere , l'une des plus difficiles
qu'il ait pu choifir. C'eft le chapitre 14
d'Ifaïe , depuis le premier jufqu'au 22
verfet inclufivement. Cette lettre étoit
trop longue pour ne la pas divifer en deux
parties. La premiere contient deux avertif
femens ; l'un traite des quatre termes énigmatiques
, dont l'intelligence eft abfolument
effentielle à la lettre hiftorique de
cette prophétie d'lfaïe. Le fecond avertif
fement contient fept remarques grammaticales
, fuivies d'une obfervation fur l'u
fage de la profopopée dans les faints Livres.
Après les deux avertiffemens on trouve le
précis de la prophétie : elle regarde , dans
le premier fens littéral , la chute de l'empire
de Babylone ; on paffe enfuite à une
double verfion latine , dont la premiere
conferve fes termes énigmatiques , & la
feconde les développe : une verfion françoiſe
dans le même goût fuccede à la latine.
L'Auteur termine cette premiere parrie
par quelques remarques fur le peu d'ordre
avec lequel on a traité jufqu'ici ces
MAR S. 1755. 65
vingt-deux premiers verfets du chap. XIV
d'Ifaïe.
La feconde partie de la XII lettre comprend
les notes indifpenfables à l'intelligence
d'une pièce auffi difficile , quant au
fens littéral de l'ancien Ifraël ; mais afin
qu'on ne croye pas que cette explication
puiffe nuire au fens de l'Eglife chrétienne
attaché néceffairement à ce texte d'Ifaïe ,
l'auteur préfente d'autres notes relatives
au nouvel Ifraël ; elles font fuivies d'une
double verſion françoiſe , mife au - deſſous
de la verfion littérale relative à l'ancien
Ifraël. Cette lettre finit par une courte
réflexion fur la ſurpriſe que pourra cauſer
à quelques perfonnes l'établiffement d'un
double fens littéral , dont cependant les
preuves font dans les Peres , les Théologiens
, & les plus habiles commentateurs.
La XIII lettre roule fur les termes gé
néraux ou indéterminés , qu'il faut reftreindre
aux fignifications particulieres
exigées par les vues du Prophéte . On donne
en preuve les deux petits Cantiques
contenus dans le XII chapitre d'Ifaïe . Deux
fimples notes de l'auteur développent en
très- peu de mots le double fens de cette
prophétie , quant à l'ancien & quant au
nouvel Ifraël . On trouve enfuite l'examen
de plufieurs termes généraux du Pleaume
66 MERCURE DE FRANCE.
XXXVI . Heb. XXXVII , Noli amulari , &
d'un affez grand nombre d'autres , & furtout
des mots mifericorde & vérité qui ,
reftreints à leur vraie & exacte fignifica
tion , jettent un grand jour fur les paſſages
où ils fe rencontrent.
La lettre XIV eft une fuite du traité des
termes généraux .L'auteur apporte en preuve
le Pf. 1. Beatus vir , &c. qu'il regarde comme
un tiffu de termes indéterminés qui
reftreints au fens exigé par le Prophéte
s'entendent d'abord des Apoftats du tems
de la captivité de Babylone , & enfuite
de ceux de l'Eglife chrétienne ; des notes
étendues fuivent le texte , & nous paroiffent
comme démonftratives.
La X Ve lettre eft uniquement occupée
à prouver que les termes énigmatiques &
généraux qui font en ufage dans les li
vres prophétiques , entrent auffi dans la
compofition des Cantiques du N. T. On
en donne pour exemple le cantique Bene
dictus Dominus , Deus Ifraël.
La XVI ne contient point le Pf. LXVII .
Heb. LXVIII . Exurgat , Deus , promis dans
le volume I. Ce chef-d'oeuvre de la poëfie
des Hébreux , accompagné de notes , eût
donné trop d'étendue à ce fecond volume.
L'auteur à donc prié quelques - uns des
éleves qu'il a formés , de fe charger de
MARS. 1755. 67
"
l'édition de ce Pfeaame . Mais pour mieux
entendre tout ce que ceci veut dire , il eſt
néceffaire de fçavoir que depuis plus de
dix ans , il fe forme parmi les RR. PP.
Capucins de la rue faint Honoré , un petit
nombre de gens de lettres qui fe font
confacrés à l'étude du double fens litteral
de l'Ecriture Sainte . L'auteur de ces lettres
a tellement goûté leur maniere de travailler
, qu'il leur confie non-feulement fon
Exurgat , mais auffi Pexécution entiere de
fon plan , dont on lit l'efquiffe aux pages
454 & 455 de ce volume. On voit dans
cette X V I lettre , les avis qu'un pere ,
non-feulement tendre , mais éclairé , donne
à des enfans pleins d'un amour inaltérable
pour l'Ecriture Sainte , d'un courage à
toute épreuve & d'un travail infatigable.
Ils vont feconder dans peu les vûes de
leur maître , puifqu'ils donnent inceffamment
quatre volumes in- 12. pour commencer
l'exécution du travail qu'il leur
remet entre les mains .
Tel eft l'extrait du fecond volume des
lettres de M. l'Abbé de *** à fes éleves.
Quoique le mérite de cet ouvrage ne puiffe
être apprécié dans toute fa valeur que par
ceux qui ont fuivi & qui fuivent encore
fes leçons publiques ou particulieres , toujours
gratuites , il eft cependant aifé de
68 MERCURE DE FRANCE .
fentir que fon plan eft établi fur les folides
principes qu'il a puifés dans les premieres
fources pendant près de cinquante
ans d'étude.
ODES D'HORACE traduites par feu M.
l'Abbé Desfontaines , in - 12 . petit format ,
1754. A Paris , chez Chaubert , quai des
Auguftins ; avec approbation & privilege
du Roi. Nous avons vû des exemplaires de
cet ouvrage , qui au lieu de Paris portent
le nom de Berlin ; mais ils font f
femblables la forme & les caracteres ,
pour
que nous ne doutons point qu'ils ne fortent
de la même preffe ; la feule différence
que nous y avons remarquée eft que
dans les exemplaires de Paris on a retranché
les odes qui ne fe lifent point dans les
Colléges , & qu'elles fe trouvent dans ceux
de Berlin , au frontifpice defquels on lit
une épigraphe qui fait honneur aux fentimens
du Libraire qui diftribue les uns &
les autres , & à laquelle nous foufcrivons
volontiers.
Quis defideriofit pudor aut modus ,
Tam cari capitis. Hor. Od. XXIV. 1. I.
BIBLIOTHEQUE HISTORIQUE ET CRITI
QUE DU POITOU , contenant les vies des
MARS.
1755. 69
fçavans de cette province depuis le troifiéme
fiécle jufqu'à prefent ; une notice
de leurs ouvrages , avec des obfervations
pour en juger , &c . A Paris , chez Ganneau
, Libraire , rue Saint Severin , à S.
Louis & aux armes de Dombes. 1754 .
Cinq gros vol. in- 12 .
:
Il y a déja du tems que cet ouvrage a
paru cependant comme les Mercures précédens
n'en ont point parlé , nous nous
faifons un devoir de l'annoncer aujour
d'hui. Il feroit inutile d'entrer dans aucun
détail fur la forme que l'auteur a jugé
à propos de lui donner , ni fur la façon
dont il s'y eft pris pour le traiter. Le
compte exact qu'on en a rendu dans la
plupart des Journaux doit fuppléer fuffifamment
à notre filence. Nous obferverons
feulement que fi dans le nombre des
fçavans qui trouvent leur place dans cette
bibliotheque , il y en a qui fe font fait un
nom fameux dans la république des lettres ,
il s'en rencontre beaucoup auffi dont la
réputation ne paffe point les limites du
Poitou .
LA VIE DES PEINTRES FLAMANDS , ALLEMANDS
ET HOLLANDOIS , avec des portraits
gravés en taille-douce , une indication
de leurs ouvrages , & des réflexions
70 MERCURE DE FRANCE.
fur leurs différentes manieres. Par M. J. B.
Defcamps , Peintre , membre de l'Académie
royale des Sciences , Belles- Lettres &
Arts de Rouen , & Profeffeur de l'Ecole
du deffein de la même ville . A Paris ,
chez Defaint & Saillant , rue Saint Jean de
Beauvais ; Piffot , quai de Conti ; Durand
, rue du Foin , en entrant par la rue
Saint Jacques , la premiere porte cochere.
1754. Tome fecond , gros in-8 ° . Il y a
lieu d'efpérer que le public ne fera pas
un accueil moins favorable à ce volume
qu'à celui qui l'a précédé.
LE CALENDRIER DES LABOUREURS ET
DES FERMIERS , contenant les inftructions
néceffaires la conduite & pour le
pour
maniement d'une ferme dans tous les mois
de l'année ouvrage néceffaire aux per
fonnes qui vivent à la campagne , & à celles
qui font valoir leur bien. Traduit de
l'Anglois , fur la fixième édition de M.
R. Bradeley de la Société royale de
Londres , & Profeffeur de Botanique dans
l'Univerfité de Cambridge . A Paris , chez
Briaffon , Libraire , rue Saint Jacques , à
la Science. 1755 , vol. in- 12.-
ANALYSE DES DISSERTATIONS SUR PLUSIEURS
MATIÈRES MEDICO - PHYSIQUES . Par
MARS. 1755. 71
M. Olivier de Villeneuve , Docteur de la
Faculté de Médecine de Montpellier ,
Doyen des Médecins de la ville de Boulogne-
fur-mer. A Utrecht , 1754 , petit in-
12. 100 pages.
. DEMONSTRATION DE LA QUADRATURE
DU CERCLE ; par M. le Chevalier de Caufans
, ci - devant Colonel du Régiment
d'Infanterie de Conti . A Paris , chez Delaguette
, rue Saint Jacques , à l'Olivier ;
·in-4°. 22. pages.
On a toujours été jufqu'ici perfuadé
& non fans raifon , de l'inutilité des efforts
que l'on voudroit employer pour parvenir
à la découverte de la Quadrature du
cercle . On s'eft réuni à en regarder la démonftration
, non feulement comme impoffible
, mais comme impliquant les contradictions
les plus évidentes en géométrie .
Il n'eft donc pas aifé de détruire un préjugé
qui paroît fi bien fondé. Cependant
M. le Chevalier de Caufans, fans s'effrayér
des difficultés qu'on peut lui oppofer , n'a
pas laiffé de tenter la chofe en queftion .
Un grand nombre de perfonnes qui ont de
la peine à s'imaginer qu'elle foit traitée
férieufement, n'auroient pas manqué d'imputer
les tentatives de M. le Chevalier à
un pur jeu d'efprit.; il a pris la fage pré72
MERCURE DE FRANCE.
caution de leur ôter cette penfée , en propofant
la foufcription de la fomme de dix
mille livres à quiconque prouvera géométriquement
un paralogifme dans fa prétendue
quadrature du cercle qu'il s'efforce
de démontrer dans le petit ouvrage que
nous annonçons. Le prix confidérable attaché
à fa réfutation devoit néceffairement
attirer fur les bras de M. de Caufans
de puiffans adverfaires , qui fe difputaffent
à l'envi le mérite ( fi toutefois c'en eſt un )
de ruiner les conféquences fur lefquelles
il l'a bâtie ; mais il ne s'étoit peut- être pas
attendu à voir dans la foule des concur
rens entrer en lice une perfonne d'un ſexe ,
qui femble moins faite pour fe livrer à des
études épineufes & abftraites que pour
s'occuper des matieres d'agrément. Mlle
Le Mire , choquée de l'injufte prévention
où l'on eft contre les femmes , a été ja
loufe de l'honneur de les juftifier , en montrant
que leur efprit eft capable d'atteindre
aux vérités géométriques , fur lefquelles
il leur arrive de raifonner plus conféquemment
que bien des hommes. Elle a
donc jugé à propos de fe mettre fur les
rangs ; & pour cet effet elle a cru devoir
rendre public le fruit de fon travail , qui
paroît fous ce titre Le Quadricide , ou Paralogismes
prouvés géométriquement dans la
Quadrature
MARS. 1755 .
73
Quadrature de M. de Caufans. Par Mile
L.A. Le Mire , veuve J ... in- 4° . 28 pag.
chez Delaguette , & c.
Le long féjour que M. Galland a fait
dans les Etats du Grand Seigneur en qualité
d'Interpréte du Roi pour les Langues
orientales , l'a mis à portée de travailler
pour l'inftruction du public , en lui apprenant
ce qu'il a eu occafion d'y voir de plus
curieux. Comme il s'en eft rendu les langues
familieres , il n'a pas cru inutile de
commencer par la traduction de trois petites
pieces écrites par divers auteurs Mu
fulmans , dont les deux premieres tendent
à donner une idée des rits & c'es cérémonies
qui fe pratiquent au pélerinage de la
Mecque , des points fondamentaux de la
religion mahométane , & des obfervances
qu'elle impofe. On fe propofe dans la troifieme
de faire connoître la maniere dont
les Turcs cultivent les fciences. Cet ou
vrage de M. Galland eft compofé de cinq
morceaux différens , qui forment un recueil
qu'il difpofe en cet ordre. 1 ° . Rits & cérémonies
du pélerinage de la Mecque , fuivant
lafelle de l'Imam on Docteur Chafei ;
traduit de l'Arabe du Cheitch el Imam el
Aalim , & c . 2° . Catéchisme Muſulman , traduit
de l'Arabe du Cheitch on Docteur Aly
D
74 MERCURE DE FRANCE.
fils d'Iaakoub. 3. Traduction d'une differtation
de Zebny Effendi fur les fciences des
Turcs , & fur l'ordre qu'ils gardent dans le
cours de leurs études . 4° . Relation de l'ifle
de Chio , faite fur le lieu par l'auteur. 5º.
Autre relation de la Marche de la Sultane
Efma , fille de Sultan Ahmed , lorfqu'on la
conduifit à fon époux Iaakoub Pacha , grand
Maréchal de la Cour de Sultan Mahmoud ,
le 27 Février 1743. Cette relation termine
ce livre , qui fe vend à Paris , chez
Defaint & Saillant. 1754 , in- 12 . 214
pages.
COLLECTION DE DÉCISIONS NOUVELLES
& de notions relatives à la Jurifprudence
préfente ; par M. Denifart , Procureur
au Châtelet de Paris . A Paris , chez Savoye
, rue S. Jacques , à l'Eſpérance , audeffus
de la Fontaine de S. Severin ; & Le
Clerc , grande Salle du Palais , au fecond
pilier , 1754.
L'Auteur nous apprend dans la préface ,
que cet ouvrage fera compofé de cinq ou fix
volumes , dont il vient de mettre les deux
premiers au jour. Nous lui fouhaitons tout
le fuccès que l'importance de fon travail
paroît mériter. Nous ne pouvons même
nous empêcher de dire que M. Denifart
eft digne d'éloge , en ce qu'il a pris foin
MARS. 1755. 75
de développer aux yeux du public cette ingénuité
de caractere qui fied aux auteurs
libres de préjugés. On doit lui fçavoir
quelque gré de ne pas témoigner les effets
de la prévention outrée qu'on a d'ordinaire
en faveur de l'état qu'on exerce.
Il avoue que les maximes renfermées dans
le recueil qu'il publie , n'étant annoncées
que par un fimple Procureur du Châtelet
perdent beaucoup par là de la confiance qu'el
les méritent. Ce font les propres paroles de
M. Denifart , aufquelles il ne nous appartient
pas de répliquer , puifque c'eft une
perfonne de la profeffion qui fait cet aveu .
Nous ajoûterons feulement que fon exemple
eft une preuve qu'il fe trouve des Procureurs
qui ont fincerement en vûe le bien
-public.
ORAISONS CHOISIES DE CICERON ,
traduction nouvelle , avec le latin à côté ,
fur l'édition latine de Grævius , & des notes.
A Paris , chez Jofeph Barbou , rue S.
Jacques , près la fontaine S. Benoît , aux
Cigognes. 1754 , avec privilege du Roi.
2 vol . in- 12.
A juger en général de cette nouvelle
traduction , elle paroît avoir le mérite de
la fidélité. C'eft le côté par où il faut apprécier
le travail de l'auteur , puifque c'eſt
Dij
76 MERCURE DE FRANCE.
particulierement le but qu'il a cru devoir
fe propofer dans l'exécution ; il a pris la
précaution de nous avertir qu'il n'a eu
d'autre deffein que de travailler pour de
jeunes écoliers de troifieme , d'humanité ,
ou tout au plus de rhétorique.
C'eft pourquoi il s'eft attaché à rendre
mot pour mot le fens de l'Orateur latin.
On peut dire que le traducteur qui avoue
s'être borné à cet unique foin , a rempli
fon objet . Il a joint à fa verfion françoile
quelques notes dans les endroits où elles
lui ont paru néceffaires.
TRAITÉ DE LA POESIE FRANÇOISE ,
par le Pere Mourgues , Jéfuite. Nouvelle
édition , revûe , corrigée & augmentée ,
avec plufieurs obfervations fur chaque efpece
de poëfie. A Paris , chez Jofeph Barbou
, rue S. Jacques , près la fontaine faint
Benoît , aux Cigognes . 1755 , avec approbation
& privilege du Roi . in- 12 .
Livres que le fieur Barbon , Libraire &
Imprimeur , rue S. Jacques , aux Cigognes,
vient de recevoir de Hollande.
Aufonius , cum notis interpretatione
J. B. Souchay , ad ufum Delphini , in- 4°.
Homeri Ilias & Odiffea Grac . 18. 2 vol.
Recentiores Poëta Latini & Graci feletti
MARS 1785. 77
quinque , curis Jofephi Oliveti collecti ac
editi ; editio auctior & emendatior , in- 8 ° .
Pervigilium Veneris , cum notis Jufti Lipfii
, & Aufonii cupido cruci adfixus . in- 8 ° .
Théologie des Infectes , traduit de l'Al-
· lemand de M. Leffer , avec des remarques
de M. P. Lyonnet , 2 vol. in- 8 °.
Les Euvres de Machiavel , nouvelle
édition , augmentée de l'Anti- Machiavel ,
in- 12 . 6 vol.
L'Efpion Turc dans les Cours des Princes
chrétiens , in- 12 . 7 vol.
Les OEuvres de Rabelais , in - 12 . 6 Volumes.
Sermons de Caillart , in- 1 2. 2 vol .
Rob. Stephani Thefaurus lingua latine ;
in-fol. 4 vol.
Nouvelles difficultés propofées par un
Péripateticien à l'auteur du Voyage du
monde de Descartes , in- 12
ÊLEVES . A Paris , chez Claude Hériſſant ,
rue neuve Notre-Dante , à la Croix d'or &
aux trois Vertus , fecond volume. in- 1 z.
•
On a rendu compte dans le Mercure
de .... 1752 , du premier volume de ces
lettres imprimées à Paris en 1751 ; chez
la veuve Colombat.
L'auteur avoit promis feize lettres . Le
premier volume en contient dix , & le fe
cond préfente les fix dernieres , dont l'ob
jet eft de prouver l'existence des termes
énigmatiques & généraux dans les ouvra
ges prophétiques , & de faire fentir qué
leur intelligence eft néceffaire pour entendre
parfaitement le fens littéral hiſtorique
des Prophetes , des Pfeaumes , de Job , des
Cantiques , & de quelques autres prophé
ties répandues dans l'Ecriture Sainte .
Ainfi la premiere lettre de ce fecond
volume , qui eft la X I dans l'ordre des
feize , eft employée à parler du ftyle prophétique
& des raifons de fon obfcurité ;
& depuis la page so jufqu'à la page 70 ,
où finit la lettre XI , l'auteur commence
à faire un effai fur une partie des termes
énigmatiques qu'il doit traiter dans la lettre
fuivante.
La XII lettre entre tout-à -fait en
matiere ; on y voit quantité de paffages
64 MERCURE DE FRANCE.
с
des livres prophétiques , développés relativement
au fens littéral exigé par l'hiſtoire ;
mais l'auteur ne fe contente pas de morceaux
détachés , qui pourroient ne pas
fatisfaire , faute de liaifon avec ce qui précede
& ce qui fuit. Il prend donc une
prophétie entiere , l'une des plus difficiles
qu'il ait pu choifir. C'eft le chapitre 14
d'Ifaïe , depuis le premier jufqu'au 22
verfet inclufivement. Cette lettre étoit
trop longue pour ne la pas divifer en deux
parties. La premiere contient deux avertif
femens ; l'un traite des quatre termes énigmatiques
, dont l'intelligence eft abfolument
effentielle à la lettre hiftorique de
cette prophétie d'lfaïe. Le fecond avertif
fement contient fept remarques grammaticales
, fuivies d'une obfervation fur l'u
fage de la profopopée dans les faints Livres.
Après les deux avertiffemens on trouve le
précis de la prophétie : elle regarde , dans
le premier fens littéral , la chute de l'empire
de Babylone ; on paffe enfuite à une
double verfion latine , dont la premiere
conferve fes termes énigmatiques , & la
feconde les développe : une verfion françoiſe
dans le même goût fuccede à la latine.
L'Auteur termine cette premiere parrie
par quelques remarques fur le peu d'ordre
avec lequel on a traité jufqu'ici ces
MAR S. 1755. 65
vingt-deux premiers verfets du chap. XIV
d'Ifaïe.
La feconde partie de la XII lettre comprend
les notes indifpenfables à l'intelligence
d'une pièce auffi difficile , quant au
fens littéral de l'ancien Ifraël ; mais afin
qu'on ne croye pas que cette explication
puiffe nuire au fens de l'Eglife chrétienne
attaché néceffairement à ce texte d'Ifaïe ,
l'auteur préfente d'autres notes relatives
au nouvel Ifraël ; elles font fuivies d'une
double verſion françoiſe , mife au - deſſous
de la verfion littérale relative à l'ancien
Ifraël. Cette lettre finit par une courte
réflexion fur la ſurpriſe que pourra cauſer
à quelques perfonnes l'établiffement d'un
double fens littéral , dont cependant les
preuves font dans les Peres , les Théologiens
, & les plus habiles commentateurs.
La XIII lettre roule fur les termes gé
néraux ou indéterminés , qu'il faut reftreindre
aux fignifications particulieres
exigées par les vues du Prophéte . On donne
en preuve les deux petits Cantiques
contenus dans le XII chapitre d'Ifaïe . Deux
fimples notes de l'auteur développent en
très- peu de mots le double fens de cette
prophétie , quant à l'ancien & quant au
nouvel Ifraël . On trouve enfuite l'examen
de plufieurs termes généraux du Pleaume
66 MERCURE DE FRANCE.
XXXVI . Heb. XXXVII , Noli amulari , &
d'un affez grand nombre d'autres , & furtout
des mots mifericorde & vérité qui ,
reftreints à leur vraie & exacte fignifica
tion , jettent un grand jour fur les paſſages
où ils fe rencontrent.
La lettre XIV eft une fuite du traité des
termes généraux .L'auteur apporte en preuve
le Pf. 1. Beatus vir , &c. qu'il regarde comme
un tiffu de termes indéterminés qui
reftreints au fens exigé par le Prophéte
s'entendent d'abord des Apoftats du tems
de la captivité de Babylone , & enfuite
de ceux de l'Eglife chrétienne ; des notes
étendues fuivent le texte , & nous paroiffent
comme démonftratives.
La X Ve lettre eft uniquement occupée
à prouver que les termes énigmatiques &
généraux qui font en ufage dans les li
vres prophétiques , entrent auffi dans la
compofition des Cantiques du N. T. On
en donne pour exemple le cantique Bene
dictus Dominus , Deus Ifraël.
La XVI ne contient point le Pf. LXVII .
Heb. LXVIII . Exurgat , Deus , promis dans
le volume I. Ce chef-d'oeuvre de la poëfie
des Hébreux , accompagné de notes , eût
donné trop d'étendue à ce fecond volume.
L'auteur à donc prié quelques - uns des
éleves qu'il a formés , de fe charger de
MARS. 1755. 67
"
l'édition de ce Pfeaame . Mais pour mieux
entendre tout ce que ceci veut dire , il eſt
néceffaire de fçavoir que depuis plus de
dix ans , il fe forme parmi les RR. PP.
Capucins de la rue faint Honoré , un petit
nombre de gens de lettres qui fe font
confacrés à l'étude du double fens litteral
de l'Ecriture Sainte . L'auteur de ces lettres
a tellement goûté leur maniere de travailler
, qu'il leur confie non-feulement fon
Exurgat , mais auffi Pexécution entiere de
fon plan , dont on lit l'efquiffe aux pages
454 & 455 de ce volume. On voit dans
cette X V I lettre , les avis qu'un pere ,
non-feulement tendre , mais éclairé , donne
à des enfans pleins d'un amour inaltérable
pour l'Ecriture Sainte , d'un courage à
toute épreuve & d'un travail infatigable.
Ils vont feconder dans peu les vûes de
leur maître , puifqu'ils donnent inceffamment
quatre volumes in- 12. pour commencer
l'exécution du travail qu'il leur
remet entre les mains .
Tel eft l'extrait du fecond volume des
lettres de M. l'Abbé de *** à fes éleves.
Quoique le mérite de cet ouvrage ne puiffe
être apprécié dans toute fa valeur que par
ceux qui ont fuivi & qui fuivent encore
fes leçons publiques ou particulieres , toujours
gratuites , il eft cependant aifé de
68 MERCURE DE FRANCE .
fentir que fon plan eft établi fur les folides
principes qu'il a puifés dans les premieres
fources pendant près de cinquante
ans d'étude.
ODES D'HORACE traduites par feu M.
l'Abbé Desfontaines , in - 12 . petit format ,
1754. A Paris , chez Chaubert , quai des
Auguftins ; avec approbation & privilege
du Roi. Nous avons vû des exemplaires de
cet ouvrage , qui au lieu de Paris portent
le nom de Berlin ; mais ils font f
femblables la forme & les caracteres ,
pour
que nous ne doutons point qu'ils ne fortent
de la même preffe ; la feule différence
que nous y avons remarquée eft que
dans les exemplaires de Paris on a retranché
les odes qui ne fe lifent point dans les
Colléges , & qu'elles fe trouvent dans ceux
de Berlin , au frontifpice defquels on lit
une épigraphe qui fait honneur aux fentimens
du Libraire qui diftribue les uns &
les autres , & à laquelle nous foufcrivons
volontiers.
Quis defideriofit pudor aut modus ,
Tam cari capitis. Hor. Od. XXIV. 1. I.
BIBLIOTHEQUE HISTORIQUE ET CRITI
QUE DU POITOU , contenant les vies des
MARS.
1755. 69
fçavans de cette province depuis le troifiéme
fiécle jufqu'à prefent ; une notice
de leurs ouvrages , avec des obfervations
pour en juger , &c . A Paris , chez Ganneau
, Libraire , rue Saint Severin , à S.
Louis & aux armes de Dombes. 1754 .
Cinq gros vol. in- 12 .
:
Il y a déja du tems que cet ouvrage a
paru cependant comme les Mercures précédens
n'en ont point parlé , nous nous
faifons un devoir de l'annoncer aujour
d'hui. Il feroit inutile d'entrer dans aucun
détail fur la forme que l'auteur a jugé
à propos de lui donner , ni fur la façon
dont il s'y eft pris pour le traiter. Le
compte exact qu'on en a rendu dans la
plupart des Journaux doit fuppléer fuffifamment
à notre filence. Nous obferverons
feulement que fi dans le nombre des
fçavans qui trouvent leur place dans cette
bibliotheque , il y en a qui fe font fait un
nom fameux dans la république des lettres ,
il s'en rencontre beaucoup auffi dont la
réputation ne paffe point les limites du
Poitou .
LA VIE DES PEINTRES FLAMANDS , ALLEMANDS
ET HOLLANDOIS , avec des portraits
gravés en taille-douce , une indication
de leurs ouvrages , & des réflexions
70 MERCURE DE FRANCE.
fur leurs différentes manieres. Par M. J. B.
Defcamps , Peintre , membre de l'Académie
royale des Sciences , Belles- Lettres &
Arts de Rouen , & Profeffeur de l'Ecole
du deffein de la même ville . A Paris ,
chez Defaint & Saillant , rue Saint Jean de
Beauvais ; Piffot , quai de Conti ; Durand
, rue du Foin , en entrant par la rue
Saint Jacques , la premiere porte cochere.
1754. Tome fecond , gros in-8 ° . Il y a
lieu d'efpérer que le public ne fera pas
un accueil moins favorable à ce volume
qu'à celui qui l'a précédé.
LE CALENDRIER DES LABOUREURS ET
DES FERMIERS , contenant les inftructions
néceffaires la conduite & pour le
pour
maniement d'une ferme dans tous les mois
de l'année ouvrage néceffaire aux per
fonnes qui vivent à la campagne , & à celles
qui font valoir leur bien. Traduit de
l'Anglois , fur la fixième édition de M.
R. Bradeley de la Société royale de
Londres , & Profeffeur de Botanique dans
l'Univerfité de Cambridge . A Paris , chez
Briaffon , Libraire , rue Saint Jacques , à
la Science. 1755 , vol. in- 12.-
ANALYSE DES DISSERTATIONS SUR PLUSIEURS
MATIÈRES MEDICO - PHYSIQUES . Par
MARS. 1755. 71
M. Olivier de Villeneuve , Docteur de la
Faculté de Médecine de Montpellier ,
Doyen des Médecins de la ville de Boulogne-
fur-mer. A Utrecht , 1754 , petit in-
12. 100 pages.
. DEMONSTRATION DE LA QUADRATURE
DU CERCLE ; par M. le Chevalier de Caufans
, ci - devant Colonel du Régiment
d'Infanterie de Conti . A Paris , chez Delaguette
, rue Saint Jacques , à l'Olivier ;
·in-4°. 22. pages.
On a toujours été jufqu'ici perfuadé
& non fans raifon , de l'inutilité des efforts
que l'on voudroit employer pour parvenir
à la découverte de la Quadrature du
cercle . On s'eft réuni à en regarder la démonftration
, non feulement comme impoffible
, mais comme impliquant les contradictions
les plus évidentes en géométrie .
Il n'eft donc pas aifé de détruire un préjugé
qui paroît fi bien fondé. Cependant
M. le Chevalier de Caufans, fans s'effrayér
des difficultés qu'on peut lui oppofer , n'a
pas laiffé de tenter la chofe en queftion .
Un grand nombre de perfonnes qui ont de
la peine à s'imaginer qu'elle foit traitée
férieufement, n'auroient pas manqué d'imputer
les tentatives de M. le Chevalier à
un pur jeu d'efprit.; il a pris la fage pré72
MERCURE DE FRANCE.
caution de leur ôter cette penfée , en propofant
la foufcription de la fomme de dix
mille livres à quiconque prouvera géométriquement
un paralogifme dans fa prétendue
quadrature du cercle qu'il s'efforce
de démontrer dans le petit ouvrage que
nous annonçons. Le prix confidérable attaché
à fa réfutation devoit néceffairement
attirer fur les bras de M. de Caufans
de puiffans adverfaires , qui fe difputaffent
à l'envi le mérite ( fi toutefois c'en eſt un )
de ruiner les conféquences fur lefquelles
il l'a bâtie ; mais il ne s'étoit peut- être pas
attendu à voir dans la foule des concur
rens entrer en lice une perfonne d'un ſexe ,
qui femble moins faite pour fe livrer à des
études épineufes & abftraites que pour
s'occuper des matieres d'agrément. Mlle
Le Mire , choquée de l'injufte prévention
où l'on eft contre les femmes , a été ja
loufe de l'honneur de les juftifier , en montrant
que leur efprit eft capable d'atteindre
aux vérités géométriques , fur lefquelles
il leur arrive de raifonner plus conféquemment
que bien des hommes. Elle a
donc jugé à propos de fe mettre fur les
rangs ; & pour cet effet elle a cru devoir
rendre public le fruit de fon travail , qui
paroît fous ce titre Le Quadricide , ou Paralogismes
prouvés géométriquement dans la
Quadrature
MARS. 1755 .
73
Quadrature de M. de Caufans. Par Mile
L.A. Le Mire , veuve J ... in- 4° . 28 pag.
chez Delaguette , & c.
Le long féjour que M. Galland a fait
dans les Etats du Grand Seigneur en qualité
d'Interpréte du Roi pour les Langues
orientales , l'a mis à portée de travailler
pour l'inftruction du public , en lui apprenant
ce qu'il a eu occafion d'y voir de plus
curieux. Comme il s'en eft rendu les langues
familieres , il n'a pas cru inutile de
commencer par la traduction de trois petites
pieces écrites par divers auteurs Mu
fulmans , dont les deux premieres tendent
à donner une idée des rits & c'es cérémonies
qui fe pratiquent au pélerinage de la
Mecque , des points fondamentaux de la
religion mahométane , & des obfervances
qu'elle impofe. On fe propofe dans la troifieme
de faire connoître la maniere dont
les Turcs cultivent les fciences. Cet ou
vrage de M. Galland eft compofé de cinq
morceaux différens , qui forment un recueil
qu'il difpofe en cet ordre. 1 ° . Rits & cérémonies
du pélerinage de la Mecque , fuivant
lafelle de l'Imam on Docteur Chafei ;
traduit de l'Arabe du Cheitch el Imam el
Aalim , & c . 2° . Catéchisme Muſulman , traduit
de l'Arabe du Cheitch on Docteur Aly
D
74 MERCURE DE FRANCE.
fils d'Iaakoub. 3. Traduction d'une differtation
de Zebny Effendi fur les fciences des
Turcs , & fur l'ordre qu'ils gardent dans le
cours de leurs études . 4° . Relation de l'ifle
de Chio , faite fur le lieu par l'auteur. 5º.
Autre relation de la Marche de la Sultane
Efma , fille de Sultan Ahmed , lorfqu'on la
conduifit à fon époux Iaakoub Pacha , grand
Maréchal de la Cour de Sultan Mahmoud ,
le 27 Février 1743. Cette relation termine
ce livre , qui fe vend à Paris , chez
Defaint & Saillant. 1754 , in- 12 . 214
pages.
COLLECTION DE DÉCISIONS NOUVELLES
& de notions relatives à la Jurifprudence
préfente ; par M. Denifart , Procureur
au Châtelet de Paris . A Paris , chez Savoye
, rue S. Jacques , à l'Eſpérance , audeffus
de la Fontaine de S. Severin ; & Le
Clerc , grande Salle du Palais , au fecond
pilier , 1754.
L'Auteur nous apprend dans la préface ,
que cet ouvrage fera compofé de cinq ou fix
volumes , dont il vient de mettre les deux
premiers au jour. Nous lui fouhaitons tout
le fuccès que l'importance de fon travail
paroît mériter. Nous ne pouvons même
nous empêcher de dire que M. Denifart
eft digne d'éloge , en ce qu'il a pris foin
MARS. 1755. 75
de développer aux yeux du public cette ingénuité
de caractere qui fied aux auteurs
libres de préjugés. On doit lui fçavoir
quelque gré de ne pas témoigner les effets
de la prévention outrée qu'on a d'ordinaire
en faveur de l'état qu'on exerce.
Il avoue que les maximes renfermées dans
le recueil qu'il publie , n'étant annoncées
que par un fimple Procureur du Châtelet
perdent beaucoup par là de la confiance qu'el
les méritent. Ce font les propres paroles de
M. Denifart , aufquelles il ne nous appartient
pas de répliquer , puifque c'eft une
perfonne de la profeffion qui fait cet aveu .
Nous ajoûterons feulement que fon exemple
eft une preuve qu'il fe trouve des Procureurs
qui ont fincerement en vûe le bien
-public.
ORAISONS CHOISIES DE CICERON ,
traduction nouvelle , avec le latin à côté ,
fur l'édition latine de Grævius , & des notes.
A Paris , chez Jofeph Barbou , rue S.
Jacques , près la fontaine S. Benoît , aux
Cigognes. 1754 , avec privilege du Roi.
2 vol . in- 12.
A juger en général de cette nouvelle
traduction , elle paroît avoir le mérite de
la fidélité. C'eft le côté par où il faut apprécier
le travail de l'auteur , puifque c'eſt
Dij
76 MERCURE DE FRANCE.
particulierement le but qu'il a cru devoir
fe propofer dans l'exécution ; il a pris la
précaution de nous avertir qu'il n'a eu
d'autre deffein que de travailler pour de
jeunes écoliers de troifieme , d'humanité ,
ou tout au plus de rhétorique.
C'eft pourquoi il s'eft attaché à rendre
mot pour mot le fens de l'Orateur latin.
On peut dire que le traducteur qui avoue
s'être borné à cet unique foin , a rempli
fon objet . Il a joint à fa verfion françoile
quelques notes dans les endroits où elles
lui ont paru néceffaires.
TRAITÉ DE LA POESIE FRANÇOISE ,
par le Pere Mourgues , Jéfuite. Nouvelle
édition , revûe , corrigée & augmentée ,
avec plufieurs obfervations fur chaque efpece
de poëfie. A Paris , chez Jofeph Barbou
, rue S. Jacques , près la fontaine faint
Benoît , aux Cigognes . 1755 , avec approbation
& privilege du Roi . in- 12 .
Livres que le fieur Barbon , Libraire &
Imprimeur , rue S. Jacques , aux Cigognes,
vient de recevoir de Hollande.
Aufonius , cum notis interpretatione
J. B. Souchay , ad ufum Delphini , in- 4°.
Homeri Ilias & Odiffea Grac . 18. 2 vol.
Recentiores Poëta Latini & Graci feletti
MARS 1785. 77
quinque , curis Jofephi Oliveti collecti ac
editi ; editio auctior & emendatior , in- 8 ° .
Pervigilium Veneris , cum notis Jufti Lipfii
, & Aufonii cupido cruci adfixus . in- 8 ° .
Théologie des Infectes , traduit de l'Al-
· lemand de M. Leffer , avec des remarques
de M. P. Lyonnet , 2 vol. in- 8 °.
Les Euvres de Machiavel , nouvelle
édition , augmentée de l'Anti- Machiavel ,
in- 12 . 6 vol.
L'Efpion Turc dans les Cours des Princes
chrétiens , in- 12 . 7 vol.
Les OEuvres de Rabelais , in - 12 . 6 Volumes.
Sermons de Caillart , in- 1 2. 2 vol .
Rob. Stephani Thefaurus lingua latine ;
in-fol. 4 vol.
Nouvelles difficultés propofées par un
Péripateticien à l'auteur du Voyage du
monde de Descartes , in- 12
Fermer
Résumé : « LETTRES DE M. L'ABBÉ DE *** A SES ELEVES. A Paris, chez Claude Hérissant, [...] »
Le texte présente un compte rendu du second volume des 'Lettres de M. l'Abbé de *** à ses élèves', publié à Paris en 1755. Ce volume comprend six lettres supplémentaires, portant le total à douze, et se concentre sur l'interprétation des termes énigmatiques et généraux dans les œuvres prophétiques. L'objectif est de démontrer la nécessité de comprendre ces termes pour interpréter correctement le sens littéral historique des Prophètes, des Psaumes, de Job, des Cantiques et d'autres prophéties bibliques. La onzième lettre traite du style prophétique et de son obscurité. La douzième lettre analyse en détail le chapitre 14 d'Isaïe, expliquant les termes énigmatiques et fournissant des versions latines et françaises. La treizième lettre aborde les termes généraux ou indéterminés en utilisant les Cantiques du chapitre 12 d'Isaïe comme exemple. La quatorzième lettre continue l'étude des termes généraux en se basant sur le Psaume 1. La quinzième lettre prouve que ces termes sont également présents dans les Cantiques du Nouveau Testament. La seizième lettre, initialement prévue pour inclure le Psaume 67, a été modifiée pour laisser cette tâche à des élèves de l'abbé, qui travaillent sur le double sens littéral de l'Écriture Sainte. Le texte mentionne également plusieurs autres publications, telles que les 'Odes d'Horace' traduites par l'abbé Desfontaines, la 'Bibliothèque historique et critique du Poitou', la 'Vie des peintres flamands, allemands et hollandais' par M. J. B. Descamps, le 'Calendrier des laboureurs et des fermiers', l''Analyse des dissertations sur plusieurs matières médico-physiques' par M. Olivier de Villeneuve, et la 'Démonstration de la quadrature du cercle' par le chevalier de Caufans, ainsi qu'une réfutation par Mlle Le Mire. M. Galland a traduit des textes musulmans pour instruire le public sur les rites et cérémonies de la religion mahométane. Parmi les autres ouvrages et traductions publiés en 1754 et 1755, on trouve des traductions de textes musulmans, notamment le 'Pélerinage de la Mecque' selon la loi de l'Imam Chafei, traduit par Cheitch el Imam el Aalim, et un 'Catéchisme Musulman' traduit par Aly D. Le texte mentionne également une 'Traduction d'une dissertation de Zebny Effendi' sur les sciences des Turcs et une 'Relation de l'île de Chio'. Une autre relation décrit la marche de la Sultane Esma, fille de Sultan Ahmed, lors de son déplacement vers son époux, Iaakoub Pacha, en février 1743. Le texte évoque également une 'Collection de Décisions Nouvelles' par M. Denifart, Procureur au Châtelet de Paris, qui vise à développer des notions relatives à la jurisprudence. Denifart exprime son désir de présenter des maximes sans préjugés et reconnaît que son statut de Procureur peut limiter la confiance accordée à son ouvrage. Une nouvelle traduction des 'Oraisons Choisies de Cicéron' est publiée, destinée aux jeunes écoliers, avec le texte latin à côté et des notes explicatives. Le 'Traité de la Poésie Française' du Père Mourgues, Jésuite, est également mentionné, avec une nouvelle édition revue et augmentée. Enfin, le texte liste plusieurs ouvrages reçus par le sieur Barbon, libraire et imprimeur, incluant des œuvres d'Ausonius, Homère, des poètes latins et grecs, des textes théologiques, les œuvres de Machiavel, Rabelais, et des sermons de Caillart.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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584
p. 174-181
AUXERRE.
Début :
M. l'Evêque d'Auxerre attendu dans cette ville depuis long-tems, y arriva le 29 du [...]
Mots clefs :
Roi, Président, Comte, Évêque d'Auxerre, Général, Aumônier
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUXERRE.
AUXERRE.
"L'Evêque d'Auxerre attendu dans cette
mois de Janvier. Sa politeffe & fa douceur lui af
furent déja le coeur de fes Diocétains , qui ont été
charmés de leur Prélat . 2
Le 2 du mois paffé , il fut inftallé par le grand
Archidiacre de Sens , fuivi de deux Chanoines.
Ce Prélat fit enfuite un difcours rempli d'affec
tion , de nobleffe & de religión . Le peuple accou
rut de toutes párts à cette cérémonie.
* M. l'Evêque d'Auxerre voit fouvent les Chanoines
de fa Cathédrale , & ils prennent grand
plaifir à le connoître , en cela imités par les principaux
habitans de cette ville. MM . fes Grands
Vicaires ont la même façon de penfer que le Prélat
, on la reconnoît chaque jour en la perfonne
de M. l'Abbé de Lifle . Tout cela annonce combien
ce Prélat eft digne du choix que le Roi à fait
de lui. Il avoit fçu gagner le coeur de fes Diocé+
fains en Dauphiné , il leur avoit procuré la paix
dans plus d'une occafion , il la cultivera ici avec
foin ; on doit l'attendre d'un mérite reconnu , réuni
à une naiffance diftinguée , M. l'Evêque d'Auxerre
étant d'une des plus anciennes maiſons de
la Principauté d'Orange.
Fouquet de Caritat étoit Grand Prieur de Touloufe
, lors du fiége de Rhodes . N. de Caritat étoit
MARS. 1755: 175
Evêque d'Orange en 1447. Dans les actes de la
maifon de Caritat de Condorcet ils prennent les
qualités de nobles & puiffans en 1320 , vis - à- vis
le Dauphin & les Barons de Mevouillon, qui étoient
fouverains.
Dans le territoire d'Orange il y a le fief de
Caritat. Cette Maifon a encore deux branches ;
l'aînée eft repréfentée par le Comte de Condorcet,
qui a des enfans mâles ; il eft le neveu de M. l'Evêque
d'Auxerre. La branche cadette eft établie
en Picardie ; elle a pareillement des mâles qui la
repréfentent . Les alliances de la maifon de Caritat
font celles de la Roche Montauban , d'Artaud,
d'Agouet , de Montmaur , de Montpezat , & au¬
tres.
Le Sr Dulaurent de la Barre , Recteur de l'U
niverfité , accompagné des Doyens des Facultés &
des Procureurs des Nations , fe rendit le premier
Février à Trianon , & il eut l'honneur , fuivant
P'uſage , de préfenter un cierge au Roi. Il alla en
fuite à Verfailles , où il remplit le même cérémo
nial à l'égard de la Reine & de Monfeigneur le
Dauphin.
Le mêmejour , le P. Gobain , Commandeur du
Couvent de la Merci , accompagné de trois Religieux
de cette Maiſon , eut l'honneur de préſenter
un cierge à la Reine , pour fatisfaire à l'une des
conditions de leur établiſſement fait à Paris en
1615 , par la Reine Marie de Medicis.
Le 2 , Fête de la Purification de la Sainte Vierge
, les Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
POrdre du Saint-Esprit , s'étant aflemblés vers les
onze heures du matin dans le cabinet du Roi , Sa
Majeſté fortit de fon appartement pour aller à fa
Chapelle. Le Roi , devant qui les deux Huiffiers
de la Chambre portoient leurs maffes , étoit en
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE.
manteau , le collier de l'Ordre par- deſſus , ainf
que celui de l'Ordre de la Toifon d'or. Sa Majefté
étoit précédée du Duc d'Orléans , du Prince de
Condé , du Comte de Charolois , du Prince de
Conti , du Comte de la Marche , du Prince de
Dombes , du Comte d'Eu , & des Chevaliers ,
Commandeurs & Officiers de l'Ordre . Après avoir
affifté à la bénédiction des cierges & à la proceffion
, le Roi entendit la grande Meffe , à laquelle
l'Evêque Duc de Langres , Prélat , Commandeur
de l'Ordre , officia pontificalement. Lorsque la
Meffe fut finie , Sa Majeſté fut reconduite à fon
appartement en la maniere accoutumée.
Le 4 au foir , la Cour quitta le deuil qu'elle
avoit pris le 28 du mois dernier pour la mort de
Ja Margrave de Bade-Baden.
Le Marquis de Valory , Lieutenant général des
armées de Sa Majefté , Commandeur de l'Ordre
royal & militaire de S. Louis , & ci - devant Miniftre
plénipotentiaire auprès du Roi de Pruffe , a
obtenu le Gouvernement de la Citadelle de Lille. ”
Leurs Majeftés & la Famille royale fignerent le
4 le contrat de mariage de Mr le Peletier de Saint-
Fargeau , & de Dlle de Beaupré de Morfontaine.
Le 6 , le Duc de Cruffol prit féance au Parlement
, en qualité de Pair de France.
Le Préſident de Segur , Préfident du Parlement
de Bourdeaux , ayant obtenu du Roi l'agrément
de la charge de Prevôt de la ville , Prevôté & Vicomté
de Paris , vacante par la démiffion du Préfident
de Montplaifant , Préfident du Parlement
de Dijon , fur reçu hier au Parlement en cette
charge . Il fut enfuite inſtallé au Châtelet par les
Commiffaires de cette Compagnie dans les différens
fiéges de la Jurifdiction.
L'Académie royale de Peinture & de Sculpture
MARS. 1755. 177
•
a élú pour fon Secrétaire & Hiftoriographe , à la
place du feu fieur Lépicié , le Sr Cochin , Graveur
du Roi , Garde des deffeins du cabinet de Sa Majefté
, & l'un des membres de cette Académie les
plus diftingués .
2
Les Religieux de l'Abbaye royale de S. Denis
conformément à la fondation faite par le Roi ,
célébrerent le 7 Février , dans leur églife , un fervice
folennel pour le repos de l'ame de Madame
Henriette.
>
Les Commiffaires du Parlement qui ont inf
tallé le Préſident de Segur au Châtelet dans la
charge de Prevôt de Paris font le Préfident
Molé , & les fieurs de Fieuber , Langlois , Pinon
& Lamblin. Le Préfident de Segur fuccede au
feu Comte d'Efclimont dans cette charge , le
Préſident de Montplaifant , qui en avoit obtenu
Pagrément , ne s'y étant pas fait recevoir.
Le fervice fondé par Monfeigneur le Dauphin
pour Madame Henriette , fut célébré le 8 dans
l'églife de la paroiffe du château. La Reine y a
affifté , accompagnée de ce Prince & de Melda,
mes de France.
Meffire Charles de Secondat , Baron de Montefquieu
, ancien Préfident du Parlement de
Guyenne , & l'un des quarante de l'Académie
Françoife , dont il étoit un des principaux orne
mens , mourut le 10 en cette ville , âgé de foixante-
cinq ans Il étoit de la Société Royale de Lon
dres , & de l'Académie de Berlin .
Le 12 , mercredi des Cendres , le Roi reçut les
cendres des mains du Cardinal de Soubife , grands
Aumônier de France , la Reine les reçut des mains
de l'Archevêque de Rouen , grand Aumônier de:
Sa Majefté ; Monfeigneur le Dauphin , de celles
de l'Abbé du Châtel , Aumônier du Roi ; Ma
Hy
'
178 MERCURE DE FRANCE.
dame la Dauphine , de celles de l'Archevêque de
Sens , fon premier Aumônier ; Monfeigneur le
Duc de Bourgogne , Monfeigneur le Duc de
Berry , & Madame , de celles de l'Abbé Barc
Chapelain du Roi ; Madame Adelaïde , de celles
de l'Evêque de Meaux , premier Aumônier de
cette Princeffe ; Mefdames Victoire , Sophie &
Louife , de celles de l'Abbé Châtelain , Chapelaindu
Roi.
Leurs Majeftés ont entendu le 13 une Meffede
Requiem , pendant laquelle la mufique a chanté
Je De profundis pour l'anniverfaire de Madame la
Dauphine , mere du Roi.
Leurs Majeftés entendirent le 14 une Meffe de
Requiem , pendant laquelle la mufique chanta le
De profundis , pour l'anniverfaire de Madame
Henriette.
Le rs , jour anniverfaire de la naiffance du
Roi, le Comte de Noailles , Gouverneur de Verfailles
, accompagné des Officiers du Bailliage de
cette ville , fe rendit à l'égliſe de Notre-Dame ,
paroiffe du château , & il y affifta au Te Deum ;
il alluma enfuite le feu qui avoit été préparé vís➡
à-vis du portail de l'églife.
·
Le même jour Sa Majefté a envoyé par Mr, le
Marquis de Champcenetz , fon premier Valet de
chambre , à Monfieur le Duc de Bourgogne
pour fon amuſement & fon inftruction , le fyfte
me de Copernic , ouvrage de Mr. l'Abbé du But ,
Curé de Viroflay , près Verfailles , qui avoit eu
l'honneur de le préfenter au Roi le 3 du mois de
Janvier dernier. Sa Majefté l'avoit gardé jufqu'à
ce jour dans fon cabinet.
Cette machine confifte en un grand palais de
glaces , dont les colonnes cannelées font de
cryftal , les bafes & les chapiteaux d'or , le tont
MARS.
1755. 179
entrecoupé de nuages peints au naturel , & décorés
d'un grand nombre de guirlandes feintes de
pierreries : le foleil immobile , & tournant fimplement
fur fon axe , paroît au milieu de ce palais
; il eft repréſenté par des feuilles d'argent
colorées , qui répandent un éclat extraordinaire ;
les planetes de Mercure, Vénus & Mars, défignées
par leurs divinités en émail, affifes fur des globes,
tournent autour de cet aftre ; la terre perfonifiée
par Cybele , pofée fur une fphere , parcourt les
douze fignes du zodiaque , & s'arrête aux quatre
principaux points ; fçavoir , les folftices d'été & .
d'hyver , les équinoxes de printems & d'automne ;
Flore , Cérès , Bacchus & une des Parques , dé
fignent chacune un de ces points ; la terre emporte
dans fon tourbillon la lune qui la ſuit dans
un char d'argent & d'ébene ; far le devant Jupiter
& Saturne font leurs révolutions : ces planetes
font accompagnées de petits amours qui mar
quent & égalent le nombre de leurs fatellites. On
a auffi répandu dans ce palais nombre de figures:
d'émail , représentant les mois , les femaines , les
jours & les nuits , qui , fe mouvant & fe réfléchiffant
dans les glaces , font un effet furprenant.
Aux deux côtés de l'efcalier du palais s'élevent
deux rochers , où font placés les quatre vents
caractérisés par leurs différens attributs ; deux
grands cartouches hors du palais contiennent les
tems des révolutions de chaque planete für leurs
axes , & celui qu'elles emploient à parcourir leurs
orbes , leur éloignement par rapport à la terre.
Toute cette machine eft enfermée dans une
boîte composée de fix volumes de très -grands in
folio , qui portent pour intitulé le Monde.
Ce même jour Mr. le Marquis de Champcenetz
a préfenté à Madame , de la part du Roi le pa
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
lais du foleil , du même goût , & du même traẻ
vail que le précédent.
La Comteffe de Lauraguais fut préfentée le 16
à Leurs Majeftés & à la Famille Royale ; elle prit
le tabouret , en vertu du brevet d'honneurs accordé
par le Roi au Comte de Lauraguais.
Le 16 de ce mois , fur les onze heures du matin
, la Princeffe de Condé commença de fentir
quelques douleurs. L'après-midi , entre quatre
& cinq heures , elle accoucha d'une Princeffe
qui fut ondoyée le même jour , & qui fe nommera
Mademoiſelle de Bourbon . La Princeffe
de Condé & la jeune Princeffe fe portent auffi
bien qu'on puiffe le defirer.
On chanta le 18 ke De profundis , pendant la
meffe de Leurs Majeftés , pour l'anniverſaire de
Monfeigneur le Dauphin , pere du Roi . .
Le même jour Leurs Majeftés fignerent le
contrat de mariage du Comte de Thomond , Chevalier
des ordres du Roi , Lieutenant- Général des
armées de Sa Majefté , & Infpecteur de l'infanterie ,.
avec Demoifelle de Chiffreville.
Le Roi a accordé à M. Bochart de Sarron ,
Avocat général au Parlement , l'agrément de la
charge de Préfident , vacante par la mort du Préfident
Gilbert de Voifins.
M. Seguier , Avocat général au grand Con--
feil , a obtenu l'agrément de la charge d'Avocat
général au Parlement , de laquelle M.
d'Ormeflon de Noifeau le demer , pour paffer à
celle de Préfident . Celle d'Avocat général , de
M. Bochart de Sarron , eft donnée à M. Peletier
de Saint -Fargeau , Avocat du Roi au Châteler.
Sa Majesté a gratifié d'une penfion de fix mille
livres M. Joly de Fleury, qui depuis que M..
MARS. 1755. 181
d'Ormeflon de Noiſeau a quitté le parquet , ef
devenu premier Avocat général .
Le 20 les actions de la Compagnie des Indes
n'avoient point de prix fixe. Les billets de la premiere
lotterie royale étoient à huit cens treize
livres , & ceux de la feconde lotterie , à fept cens
quatorze.
"L'Evêque d'Auxerre attendu dans cette
mois de Janvier. Sa politeffe & fa douceur lui af
furent déja le coeur de fes Diocétains , qui ont été
charmés de leur Prélat . 2
Le 2 du mois paffé , il fut inftallé par le grand
Archidiacre de Sens , fuivi de deux Chanoines.
Ce Prélat fit enfuite un difcours rempli d'affec
tion , de nobleffe & de religión . Le peuple accou
rut de toutes párts à cette cérémonie.
* M. l'Evêque d'Auxerre voit fouvent les Chanoines
de fa Cathédrale , & ils prennent grand
plaifir à le connoître , en cela imités par les principaux
habitans de cette ville. MM . fes Grands
Vicaires ont la même façon de penfer que le Prélat
, on la reconnoît chaque jour en la perfonne
de M. l'Abbé de Lifle . Tout cela annonce combien
ce Prélat eft digne du choix que le Roi à fait
de lui. Il avoit fçu gagner le coeur de fes Diocé+
fains en Dauphiné , il leur avoit procuré la paix
dans plus d'une occafion , il la cultivera ici avec
foin ; on doit l'attendre d'un mérite reconnu , réuni
à une naiffance diftinguée , M. l'Evêque d'Auxerre
étant d'une des plus anciennes maiſons de
la Principauté d'Orange.
Fouquet de Caritat étoit Grand Prieur de Touloufe
, lors du fiége de Rhodes . N. de Caritat étoit
MARS. 1755: 175
Evêque d'Orange en 1447. Dans les actes de la
maifon de Caritat de Condorcet ils prennent les
qualités de nobles & puiffans en 1320 , vis - à- vis
le Dauphin & les Barons de Mevouillon, qui étoient
fouverains.
Dans le territoire d'Orange il y a le fief de
Caritat. Cette Maifon a encore deux branches ;
l'aînée eft repréfentée par le Comte de Condorcet,
qui a des enfans mâles ; il eft le neveu de M. l'Evêque
d'Auxerre. La branche cadette eft établie
en Picardie ; elle a pareillement des mâles qui la
repréfentent . Les alliances de la maifon de Caritat
font celles de la Roche Montauban , d'Artaud,
d'Agouet , de Montmaur , de Montpezat , & au¬
tres.
Le Sr Dulaurent de la Barre , Recteur de l'U
niverfité , accompagné des Doyens des Facultés &
des Procureurs des Nations , fe rendit le premier
Février à Trianon , & il eut l'honneur , fuivant
P'uſage , de préfenter un cierge au Roi. Il alla en
fuite à Verfailles , où il remplit le même cérémo
nial à l'égard de la Reine & de Monfeigneur le
Dauphin.
Le mêmejour , le P. Gobain , Commandeur du
Couvent de la Merci , accompagné de trois Religieux
de cette Maiſon , eut l'honneur de préſenter
un cierge à la Reine , pour fatisfaire à l'une des
conditions de leur établiſſement fait à Paris en
1615 , par la Reine Marie de Medicis.
Le 2 , Fête de la Purification de la Sainte Vierge
, les Chevaliers , Commandeurs & Officiers de
POrdre du Saint-Esprit , s'étant aflemblés vers les
onze heures du matin dans le cabinet du Roi , Sa
Majeſté fortit de fon appartement pour aller à fa
Chapelle. Le Roi , devant qui les deux Huiffiers
de la Chambre portoient leurs maffes , étoit en
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE.
manteau , le collier de l'Ordre par- deſſus , ainf
que celui de l'Ordre de la Toifon d'or. Sa Majefté
étoit précédée du Duc d'Orléans , du Prince de
Condé , du Comte de Charolois , du Prince de
Conti , du Comte de la Marche , du Prince de
Dombes , du Comte d'Eu , & des Chevaliers ,
Commandeurs & Officiers de l'Ordre . Après avoir
affifté à la bénédiction des cierges & à la proceffion
, le Roi entendit la grande Meffe , à laquelle
l'Evêque Duc de Langres , Prélat , Commandeur
de l'Ordre , officia pontificalement. Lorsque la
Meffe fut finie , Sa Majeſté fut reconduite à fon
appartement en la maniere accoutumée.
Le 4 au foir , la Cour quitta le deuil qu'elle
avoit pris le 28 du mois dernier pour la mort de
Ja Margrave de Bade-Baden.
Le Marquis de Valory , Lieutenant général des
armées de Sa Majefté , Commandeur de l'Ordre
royal & militaire de S. Louis , & ci - devant Miniftre
plénipotentiaire auprès du Roi de Pruffe , a
obtenu le Gouvernement de la Citadelle de Lille. ”
Leurs Majeftés & la Famille royale fignerent le
4 le contrat de mariage de Mr le Peletier de Saint-
Fargeau , & de Dlle de Beaupré de Morfontaine.
Le 6 , le Duc de Cruffol prit féance au Parlement
, en qualité de Pair de France.
Le Préſident de Segur , Préfident du Parlement
de Bourdeaux , ayant obtenu du Roi l'agrément
de la charge de Prevôt de la ville , Prevôté & Vicomté
de Paris , vacante par la démiffion du Préfident
de Montplaifant , Préfident du Parlement
de Dijon , fur reçu hier au Parlement en cette
charge . Il fut enfuite inſtallé au Châtelet par les
Commiffaires de cette Compagnie dans les différens
fiéges de la Jurifdiction.
L'Académie royale de Peinture & de Sculpture
MARS. 1755. 177
•
a élú pour fon Secrétaire & Hiftoriographe , à la
place du feu fieur Lépicié , le Sr Cochin , Graveur
du Roi , Garde des deffeins du cabinet de Sa Majefté
, & l'un des membres de cette Académie les
plus diftingués .
2
Les Religieux de l'Abbaye royale de S. Denis
conformément à la fondation faite par le Roi ,
célébrerent le 7 Février , dans leur églife , un fervice
folennel pour le repos de l'ame de Madame
Henriette.
>
Les Commiffaires du Parlement qui ont inf
tallé le Préſident de Segur au Châtelet dans la
charge de Prevôt de Paris font le Préfident
Molé , & les fieurs de Fieuber , Langlois , Pinon
& Lamblin. Le Préfident de Segur fuccede au
feu Comte d'Efclimont dans cette charge , le
Préſident de Montplaifant , qui en avoit obtenu
Pagrément , ne s'y étant pas fait recevoir.
Le fervice fondé par Monfeigneur le Dauphin
pour Madame Henriette , fut célébré le 8 dans
l'églife de la paroiffe du château. La Reine y a
affifté , accompagnée de ce Prince & de Melda,
mes de France.
Meffire Charles de Secondat , Baron de Montefquieu
, ancien Préfident du Parlement de
Guyenne , & l'un des quarante de l'Académie
Françoife , dont il étoit un des principaux orne
mens , mourut le 10 en cette ville , âgé de foixante-
cinq ans Il étoit de la Société Royale de Lon
dres , & de l'Académie de Berlin .
Le 12 , mercredi des Cendres , le Roi reçut les
cendres des mains du Cardinal de Soubife , grands
Aumônier de France , la Reine les reçut des mains
de l'Archevêque de Rouen , grand Aumônier de:
Sa Majefté ; Monfeigneur le Dauphin , de celles
de l'Abbé du Châtel , Aumônier du Roi ; Ma
Hy
'
178 MERCURE DE FRANCE.
dame la Dauphine , de celles de l'Archevêque de
Sens , fon premier Aumônier ; Monfeigneur le
Duc de Bourgogne , Monfeigneur le Duc de
Berry , & Madame , de celles de l'Abbé Barc
Chapelain du Roi ; Madame Adelaïde , de celles
de l'Evêque de Meaux , premier Aumônier de
cette Princeffe ; Mefdames Victoire , Sophie &
Louife , de celles de l'Abbé Châtelain , Chapelaindu
Roi.
Leurs Majeftés ont entendu le 13 une Meffede
Requiem , pendant laquelle la mufique a chanté
Je De profundis pour l'anniverfaire de Madame la
Dauphine , mere du Roi.
Leurs Majeftés entendirent le 14 une Meffe de
Requiem , pendant laquelle la mufique chanta le
De profundis , pour l'anniverfaire de Madame
Henriette.
Le rs , jour anniverfaire de la naiffance du
Roi, le Comte de Noailles , Gouverneur de Verfailles
, accompagné des Officiers du Bailliage de
cette ville , fe rendit à l'égliſe de Notre-Dame ,
paroiffe du château , & il y affifta au Te Deum ;
il alluma enfuite le feu qui avoit été préparé vís➡
à-vis du portail de l'églife.
·
Le même jour Sa Majefté a envoyé par Mr, le
Marquis de Champcenetz , fon premier Valet de
chambre , à Monfieur le Duc de Bourgogne
pour fon amuſement & fon inftruction , le fyfte
me de Copernic , ouvrage de Mr. l'Abbé du But ,
Curé de Viroflay , près Verfailles , qui avoit eu
l'honneur de le préfenter au Roi le 3 du mois de
Janvier dernier. Sa Majefté l'avoit gardé jufqu'à
ce jour dans fon cabinet.
Cette machine confifte en un grand palais de
glaces , dont les colonnes cannelées font de
cryftal , les bafes & les chapiteaux d'or , le tont
MARS.
1755. 179
entrecoupé de nuages peints au naturel , & décorés
d'un grand nombre de guirlandes feintes de
pierreries : le foleil immobile , & tournant fimplement
fur fon axe , paroît au milieu de ce palais
; il eft repréſenté par des feuilles d'argent
colorées , qui répandent un éclat extraordinaire ;
les planetes de Mercure, Vénus & Mars, défignées
par leurs divinités en émail, affifes fur des globes,
tournent autour de cet aftre ; la terre perfonifiée
par Cybele , pofée fur une fphere , parcourt les
douze fignes du zodiaque , & s'arrête aux quatre
principaux points ; fçavoir , les folftices d'été & .
d'hyver , les équinoxes de printems & d'automne ;
Flore , Cérès , Bacchus & une des Parques , dé
fignent chacune un de ces points ; la terre emporte
dans fon tourbillon la lune qui la ſuit dans
un char d'argent & d'ébene ; far le devant Jupiter
& Saturne font leurs révolutions : ces planetes
font accompagnées de petits amours qui mar
quent & égalent le nombre de leurs fatellites. On
a auffi répandu dans ce palais nombre de figures:
d'émail , représentant les mois , les femaines , les
jours & les nuits , qui , fe mouvant & fe réfléchiffant
dans les glaces , font un effet furprenant.
Aux deux côtés de l'efcalier du palais s'élevent
deux rochers , où font placés les quatre vents
caractérisés par leurs différens attributs ; deux
grands cartouches hors du palais contiennent les
tems des révolutions de chaque planete für leurs
axes , & celui qu'elles emploient à parcourir leurs
orbes , leur éloignement par rapport à la terre.
Toute cette machine eft enfermée dans une
boîte composée de fix volumes de très -grands in
folio , qui portent pour intitulé le Monde.
Ce même jour Mr. le Marquis de Champcenetz
a préfenté à Madame , de la part du Roi le pa
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
lais du foleil , du même goût , & du même traẻ
vail que le précédent.
La Comteffe de Lauraguais fut préfentée le 16
à Leurs Majeftés & à la Famille Royale ; elle prit
le tabouret , en vertu du brevet d'honneurs accordé
par le Roi au Comte de Lauraguais.
Le 16 de ce mois , fur les onze heures du matin
, la Princeffe de Condé commença de fentir
quelques douleurs. L'après-midi , entre quatre
& cinq heures , elle accoucha d'une Princeffe
qui fut ondoyée le même jour , & qui fe nommera
Mademoiſelle de Bourbon . La Princeffe
de Condé & la jeune Princeffe fe portent auffi
bien qu'on puiffe le defirer.
On chanta le 18 ke De profundis , pendant la
meffe de Leurs Majeftés , pour l'anniverſaire de
Monfeigneur le Dauphin , pere du Roi . .
Le même jour Leurs Majeftés fignerent le
contrat de mariage du Comte de Thomond , Chevalier
des ordres du Roi , Lieutenant- Général des
armées de Sa Majefté , & Infpecteur de l'infanterie ,.
avec Demoifelle de Chiffreville.
Le Roi a accordé à M. Bochart de Sarron ,
Avocat général au Parlement , l'agrément de la
charge de Préfident , vacante par la mort du Préfident
Gilbert de Voifins.
M. Seguier , Avocat général au grand Con--
feil , a obtenu l'agrément de la charge d'Avocat
général au Parlement , de laquelle M.
d'Ormeflon de Noifeau le demer , pour paffer à
celle de Préfident . Celle d'Avocat général , de
M. Bochart de Sarron , eft donnée à M. Peletier
de Saint -Fargeau , Avocat du Roi au Châteler.
Sa Majesté a gratifié d'une penfion de fix mille
livres M. Joly de Fleury, qui depuis que M..
MARS. 1755. 181
d'Ormeflon de Noiſeau a quitté le parquet , ef
devenu premier Avocat général .
Le 20 les actions de la Compagnie des Indes
n'avoient point de prix fixe. Les billets de la premiere
lotterie royale étoient à huit cens treize
livres , & ceux de la feconde lotterie , à fept cens
quatorze.
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Résumé : AUXERRE.
En janvier 1755, l'évêque d'Auxerre fut installé par le grand archidiacre de Sens et deux chanoines. Son discours, empreint d'affection, de noblesse et de religion, attira une grande affluence. L'évêque, issu d'une ancienne maison de la Principauté d'Orange, fréquenta régulièrement les chanoines et les principaux habitants de la ville, gagnant leur respect et leur affection. Il avait déjà prouvé ses compétences en Dauphiné, où il avait apporté la paix à plusieurs occasions. La maison de Caritat, à laquelle il appartient, possède des terres et des alliances nobles. Le 1er février, le recteur de l'Université de Paris, accompagné des doyens et procureurs, présenta un cierge au roi à Trianon et à Versailles. Le même jour, le père Gobain, commandeur du couvent de la Merci, présenta un cierge à la reine. Le 2 février, les chevaliers de l'Ordre du Saint-Esprit assistèrent à la messe à la chapelle royale, où l'évêque de Langres officia. La cour quitta le deuil le 4 février pour la mort du margrave de Bade-Baden. Plusieurs nominations et mariages furent annoncés, notamment celle du marquis de Valory au gouvernement de la citadelle de Lille et le mariage du marquis de Peletier de Saint-Fargeau. Le 6 février, le duc de Crussol prit séance au Parlement en tant que pair de France. Le président de Ségur fut installé comme prévôt de Paris. L'Académie royale de Peinture et de Sculpture élut le sieur Cochin comme secrétaire et historiographe. Les religieux de l'abbaye de Saint-Denis célébrèrent un service pour Madame Henriette. Le baron de Montesquieu, ancien président du Parlement de Guyenne, mourut le 10 février à l'âge de soixante-cinq ans. Le 12 février, le roi et la famille royale reçurent les cendres pour le mercredi des Cendres. Des messes de requiem furent célébrées pour les anniversaires de la dauphine et de Madame Henriette. Le 21 février, le roi offrit un système du monde en forme de machine à son petit-fils, le duc de Bourgogne. La comtesse de Lauraguais fut présentée à la cour et la princesse de Condé accoucha d'une princesse nommée Mademoiselle de Bourbon. Plusieurs nominations judiciaires furent également annoncées.
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585
p. 52-53
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Début :
Quel trouble agite mon cerveau ? [...]
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Marguillier
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LOGOGRYP HE.
Uel trouble agite mon cerveau ?
Ma dignité n'eft qu'un fardeau ;
Je me ruine pour l'Eglife ,
Saintement on m'y dévalife ;
On ne me parle que d'argent ,
Pour l'infirme ou pour l'indigent.
A l'Offrande , nouvelle aubaine :
Ilfaut , pour baifer la
patene
Tirer ...Je n'aurois point fini
Si je.... tu diras à ceci
Eh ! mais , chaque fête on t'encenfe.
Hélas ! je m'en pafferois bien .
C'eſt plutôt ma bourſe , je penſe :
Encenfe t'on ceux qui n'ont rien ?
Lecteur , tu peux me reconnoître .
Onze pieds foutiennent mon être ;
Si tu fçais la combinaiſon ,
Je renferme ce trifte fon
Qu'on rend à la fin de la vie :
Un chien fait à la venerie.
Trois tons. Un Saint . Un mal honteux.
Le nom d'un affaffin fameux ;
L'inftrument dont jadis Orphée
Charma le Styx & l'Elifée .
AVRIL.
1755. 53
Un terrein que bat l'océan ,
Le lit où fouffrit Saint Laurent ;
Un outil de menuiferie ,
Un autre pour la broderie.
Un vice ennemi du repos ,
Un endroit connu pour les eaux ,
Pour fes jardins , & fa machine.
La fubftance fimple & divine ,
Dont nous empruntons les refforts .
Une eau croupie , un jeu d'efforts
A qui l'on donne une étendue
Sablée , unie , entretenue.
Cette fenêtre où le pécheur
Se découvre à fon Confeffeur .
Une terre molle & fragile.
Ce qui rend un navire agile.
Un outil qui ronge fans dents.
La ville où fut élu Pontife
Le patron des petits enfans.
Lecteur , voilà mon Logogryphe.
X
L'Abbé Renaudor.
Uel trouble agite mon cerveau ?
Ma dignité n'eft qu'un fardeau ;
Je me ruine pour l'Eglife ,
Saintement on m'y dévalife ;
On ne me parle que d'argent ,
Pour l'infirme ou pour l'indigent.
A l'Offrande , nouvelle aubaine :
Ilfaut , pour baifer la
patene
Tirer ...Je n'aurois point fini
Si je.... tu diras à ceci
Eh ! mais , chaque fête on t'encenfe.
Hélas ! je m'en pafferois bien .
C'eſt plutôt ma bourſe , je penſe :
Encenfe t'on ceux qui n'ont rien ?
Lecteur , tu peux me reconnoître .
Onze pieds foutiennent mon être ;
Si tu fçais la combinaiſon ,
Je renferme ce trifte fon
Qu'on rend à la fin de la vie :
Un chien fait à la venerie.
Trois tons. Un Saint . Un mal honteux.
Le nom d'un affaffin fameux ;
L'inftrument dont jadis Orphée
Charma le Styx & l'Elifée .
AVRIL.
1755. 53
Un terrein que bat l'océan ,
Le lit où fouffrit Saint Laurent ;
Un outil de menuiferie ,
Un autre pour la broderie.
Un vice ennemi du repos ,
Un endroit connu pour les eaux ,
Pour fes jardins , & fa machine.
La fubftance fimple & divine ,
Dont nous empruntons les refforts .
Une eau croupie , un jeu d'efforts
A qui l'on donne une étendue
Sablée , unie , entretenue.
Cette fenêtre où le pécheur
Se découvre à fon Confeffeur .
Une terre molle & fragile.
Ce qui rend un navire agile.
Un outil qui ronge fans dents.
La ville où fut élu Pontife
Le patron des petits enfans.
Lecteur , voilà mon Logogryphe.
X
L'Abbé Renaudor.
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586
p. 61
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Début :
Pour un vil intérêt, pour de légers plaisirs, [...]
Mots clefs :
Absolution
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Pour un vil intérêt , pour de légers plaiſirs ,
Pour contenter fon coeur & combler fes defirs ,
Connoiflant tout mon prix l'homme ſouvent me
laiffe.
Faut -il que fa raiſon fuccombe à ſa foibleffe ?
Mes pieds décompofés offriront à tes yeux ,
Lecteur , ce qui fouvent accompagne les gueux.
Une ville en Lorraine , une autre en Amérique ,
Un fage de la Grece , un oifeau domestique ,
Et ce qui foutient l'homme ainfi que l'animal ,
Un infecte volant redouté du cheval ;
Un fleuve impétueux qui traverſe l'Afrique ,
La femme d'Athamas ; des notes de Muſique ,
Un port célebre en France ; un grand Législateur,
Et ce que tout foldat defire avec ardeur.
Enfin pour m'obtenir il faut un tête-à- tête.
Je t'en ai dit affez pour que rien ne t'arrête.
Pour un vil intérêt , pour de légers plaiſirs ,
Pour contenter fon coeur & combler fes defirs ,
Connoiflant tout mon prix l'homme ſouvent me
laiffe.
Faut -il que fa raiſon fuccombe à ſa foibleffe ?
Mes pieds décompofés offriront à tes yeux ,
Lecteur , ce qui fouvent accompagne les gueux.
Une ville en Lorraine , une autre en Amérique ,
Un fage de la Grece , un oifeau domestique ,
Et ce qui foutient l'homme ainfi que l'animal ,
Un infecte volant redouté du cheval ;
Un fleuve impétueux qui traverſe l'Afrique ,
La femme d'Athamas ; des notes de Muſique ,
Un port célebre en France ; un grand Législateur,
Et ce que tout foldat defire avec ardeur.
Enfin pour m'obtenir il faut un tête-à- tête.
Je t'en ai dit affez pour que rien ne t'arrête.
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587
p. 77-86
SECONDE LETTRE D'un Académicien de M.... à un Académicien de R.... sur la Christiade, ou le Paradis reconquis, pour servir de suite au Paradis perdu de Milton.
Début :
Une maladie longue & opiniâtre, une convalescence des plus lentes & des [...]
Mots clefs :
Poème, Christiade, Dieu, Sauveur, Paradis, Académicien
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texteReconnaissance textuelle : SECONDE LETTRE D'un Académicien de M.... à un Académicien de R.... sur la Christiade, ou le Paradis reconquis, pour servir de suite au Paradis perdu de Milton.
SECONDE LETTRE
•
D'un Académicien de M .... à un Academicien
de R.... fur la Chriftiade , ou
le Paradis reconquis , pour fervir de fuite
au Paradis perdu de Milton.
U
NE maladie longue & opiniâtre , une
convalefcence des plus lentes & des
affaires arrierées ne m'ont pas permis ,
Monfieur , de vous tenir plutôt la parole
que je vous donnai dans ma lettre du mois
de Juillet dernier , dans laquelle je vous
promettois de vous dire mon fentiment
fur le refte de la Chriftiade. Je fuis ravi
que le jugement que j'en ai porté s'accor
de avec le vôtre , & que celui de vos illuftres
confreres y mette un fceau refpectable
à tout critique. Je vais donc achever
l'analyfe de cet ouvrage avec confiance &
fans partialité.
Je vous avois laiffé au huitième chant
& c'eft de là que je reprens. Il contient
le plus grand & le plus augufte de nos
myfteres ; l'inftitution de l'Euchariftie , &
je vous affure qu'on ne peut lire rien de
plus tendre & de plus onctueux que le
difcours que le Sauveur fait à fes Difci-
Diij
78 MERCURE DE FRANCE.
ples dans fon teftament d'adieu . Le combat
de fon agonie eft un morceau théologique
, qui n'eft pas à la vérité de notre
reffort , mais nous en avons entendu difcourir
des Théologiens , qui ont affuré
qu'on ne pouvoit mieux accommoder le
dogme dans un poëme , & le mettre dans
le jour le plus favorable & le plus conforme
à la faine doctrine , fans en rien altérer
, au milieu même des fictions poëtiques.
L'épifode de Judas Iscariot qui commence
à la fin du feptieme chant , & qui
finit dans le dixieme par fa mort tragique,
eft un épiſode d'éclat qui n'a pas échappé
à votre pénétration : il eft en effet bien
fingulier ; car cet épifode feul eûr pû faire
la matiere d'un poëme par fon commen
cement , fon milieu & fa fin . L'efpece de
choc qui fe paffe dans le jardin des Oliviers
lorfque le Sauveur y eft pris , paroîtroit
d'invention romanefque , fi l'Evangélifte
ne difoit pofitivement qu'à la parole
du Sauveur , Judas & les troupes qu'il
conduifoit tomberent à la renverſe . L'em-
-portement de S. Pierre , connu par le coup
de glaive dont il frappa Malchus , & la
difpofition des autres Apôtres fes collégues
qui n'attendoient que le confentement
de leur Maître pour tirer pareilleΜΑΙ.
79 1755.
ment le glaive , eft fi bien marqué dans
l'Evangile , qu'on ne peut le regarder comme
une rodomontade de la part des compagnons
de l'Homme Dieu . Le fonge de
la femme de Pilate , qui dans le neuvieme
chant interrompt le jugement que fon
mari alloit porter contre Jefus , & la def
cription du temple de la Sibylle , font des
épifodes d'invention hiftorique , où tout
elt afforti au fujet principal. L'antre des
génies infernaux où Satan defcend par les
bouches du Vefuve , & y fait forger les
inftrumens du fupplice de Jefus- Chriſt , eſt
encore un morceau d'imagination poëtique ,
qui ravit par le détail des ouvrages aufquels
ces génies font occupés. Cette defcription
qui égaie le fombre de la mort
tragique de Judas , eft admirable. Le por
trait de la politique que Satan appelle du
haut des tours de Solime , & la politique
qui , fidele à la voix de Satan , quitte lecabinet
de l'Empereur Tibere , & accourt
à travers les airs pour venir fe prêter aux
vûes du monarque infernal , fait un bel
effet dans le onzieme chant. Le fupplice
du Sauveur & le tableau des fouffrances
qu'il endure avec une patience plus que
héroïque , contrafte fort bien avec le zéle
des Anges qui forment l'armée céleſte , &
quiau premier mouvement courent prendre
Div
80 MERCURE DE FRANCE.
1
-
les armes dans l'arfenal de Dieu pour aller
fondre fur les ennemis de fon fils , & le
délivrer des mains des impies qui s'apprêtent
à le crucifier. Ce zélé de l'armée célefte
, qui borné par l'ordre abfolu du
Tout puiffant , fe change en deuil , &
l'éclipfe de la férénité de la face brillante
de Dieu pénétré de douleur à la mort de
fon fils , éclipfe qui eft la caufe premiere
des ténébres qui obfcurciffent le foleil , &
qui couvrent toute la terre en un inſtant ,
tout cela eft d'un fublime qui étonne , ra
vit , & imprime la terreur , la crainte & le
refpect pour la majeſté de Dieu . L'éclat
qui accompagne le triomphe de la Réfurrection
du Sauveur , les vives defcriptions
de l'empire du tems , du cahos & de la
nuit , celle des enfers , dont les peintures
effrayantes font d'un nouveau coloris &
parfaitement afforties aux différens genres
de tourmens , & aux différentes efpeces
de coupables qui les endurent , la defcription
des limbes , le portrait de la tranquille
efpérance qui anime les faints perfonnages
qui l'habitent , ce doux efpoir d'un
heureux avenir qui contrafte avec la fureur
& le defefpoir des réprouvés , la beauté
du climat des limbes & l'horreur des enfers
, font des tableaux qui effrayent &
raffurent , qui troublent & qui calment,
Μ Α Ι. 1755 .
81
tour à tour le lecteur. Il fe délaffe enfin
dans les belles plaines du ciel & dans le
brillant féjour de la Divinité , dont le temple
eft peint d'une maniere d'autant plus
admirable , que l'auteur pouvant faire.
jouer fon imagination , n'a néanmoins
emprunté que les idées tracées par S. Jean
dans fon Apocalypfe. Le livre des deftinées
humaines , fcelle de fept fceaux que le
Sauveur ouvre aux yeux de fon Apôtre ,
pour lui faire connoître les hommes dont
les ames lui font confiées , eft encore emprunté
de l'Apocalypfe . L'établiffement
miraculeux de l'Eglife , & le changement
progreffif qui fe fait dans tous les états du
monde par la prédication de l'évangile ,
les portraits des premiers Souverains chré-,
tiens , & les juftes éloges donnés à leurs
fucceffeurs en qualité de protecteurs de
l'Eglife , la fucceffion invariable & non.
interrompue des fouverains Pontifes qui
ont occupé le fiége de Rome & de l'Eglife ,
& les traits fous lefquels font repréfentés
les plus grands Papes jufqu'à celui qui
remplit fi dignement la chaire de Saint .
Pierre , tout cela eft d'une invention fine
ingénieufe , délicate , qui tranfporte & ravit
le lecteur en lui rappellant les grands.
traits de l'ancien & du nouveau Teftament ,
& d'une partie de l'Hiftoire eccléfiaftique
Dy
82 MERCURE DE FRANCE.
par une narration agréable & fleurie.
On a donc bien eu raifon , Monfieur ,
de dire que la Chriftiade , bien loin de
nuire à la religion & de fcandalifer la foi
des Fideles , ne peut fervir qu'à leur donner
une grande idée de nos myfteres . Les
fictions fans nombre qui étayent ce poëme
, n'auroient point été admiffibles dans
un fujet auffi facré , & le lecteur pieux
auroit eu raifon de s'en alarmer & de les
rejetter , fi l'auteur n'eût eu la précaution
de les puifer toutes dans le fond même des
myfteres , ainfi que l'a fort bien remarqué
un célebre Journaliſte , & de les appuyer
des autorités de l'Ecriture , des faints Peres
, des Conciles , des Commentateurs
& de l'Hiftoire . C'eft de là probablement
qu'eſt venu ce déluge de notes qui a inondé
l'ouvrage , & c'eft avec la même juſteſſe
que vous avez été frappé de l'art avec lequel
les humiliations & les grandeurs de
Homme - Dieu contraftent avec dignité &
s'ennobliffent mutuellement.
En effet le poëme de la Chriftiade n'eft
que le triomphe du Chrift . Si cet objet
nous étoit moins familier , il piqueroit
plus notre curiofité ; mais un fujet dont
nos oreilles font rebattues dans nos chaires
, dont nos livres font remplis , dont
nous fommes imbus dès l'enfance , affadit
M. A I. 83
1755. .
en quelque forte , & rebute , fi l'on peut fe
fervir de ce terme , l'attention du Chrétien
tiéde , à laquelle les objets attrayans
du fiécle font fans ceffe diverfion. Dans le
monde on ne connoît communément le
Sauveur que par fa naiffance pauvre & par
fa mort ignominieufe ; ce font là les deux
points de vûe fous lefquels on le confidere
: l'éclat de fes miracles frappe , mais
l'ignominie de fa croix fcandalife , & il
faut avoir une foi bien ferme pour n'être
pas tenté d'abandonner un maître qui vit
d'une façon fi obfcure , & qui meurt du
fupplice le plus infâme . C'eft là ce qui a
donné crédit au préjugé commun , que que les
myfteres de notre religion ne fçauroient
être la matiere d'un poëme ; mais un ef
prit qui ne s'arrête point à la fuperficie ,
qui s'éleve au- deffus des préjugés , qui approfondit
tous les myfteres , qui analyſe
tous les faits , ne peut s'empêcher d'être
frappé de la Divinité , qui éclate jufques
dans les moindres actions du Sanveur ; on
voit en lui le héros des héros , le héros par
excellence , l'Homme - Dieu , le Dieu des
Dieux .
Je ne puis mieux finir cette analyfe ,
Monfieur , qu'en vous difant mon fentiment
fur le fujer des planches , vignettes
& gravûres en taille -douce qui font à la
D vj
84 MERCURE DE FRANCE.
tête de chaque chant de la Chriſtiade : il
y regne autant de poëtique & de fublime
d'idées que dans l'ouvrage même ; les allégories.
en font fines , juftes & nullement
forcées. Peut - on rien de plus beau que
l'idée du frontispice , où les trois monftres,
Satan , le péché & la mort perfonnifiés ,
font attachés au trophée du Rédempteur ;
le palais du prince de l'air , avec tous fes
attributs , & la tempête qu'il excite à la
priere de Satan ; le confeil des démons fur
le Liban , où les grands acteurs font caractérifés
; le feftin d'Hérode , où Hérodias
danfe ; Magdeleine dans fes beaux jardins.
livrée à fes illufions , & enfuite dans fon
appartement renverfant & brifant fa toilette
dans un faint emportement de converfion
; la médiation du Verbe , & Adam
& Eve pris dans les filets de la mort ; la
naiffance de la femme ; l'antre des génies
infernaux ; l'arfenal célefte ; le magnifique
temple de la Sibylle , & la femme de
Pilate dormant fur les genoux du fommeil;
l'ame du Dieu crucifié, expirant, qui fort de
fa bouche , un drapeau d'une main en figne
de fa victoire , & des foudres de l'autre , en
inftrumens de fa vengeance , qui foudroye
& précipite les légions de démons répandus
dans les airs , où ils s'applaudiffoient
de leur prétendue victoire fur le Seigneur
MA I. 1755.
85 .
& fur fon Chrift ; & enfin ce même Chriſt
fortant victorieux du tombeau , dont la
pierre énorme renversée par la puiffance
divine , écrafe la mort qui étoit affife
deffus ; & les clefs de la mort & des enfers
que le Sauveur reffufcitant tient dans
fes mains? ce font là , Monfieur , autant
d'idées nobles & poëtiques que le célebre
Eyfen a parfaitement tracées , fans doute ,
d'après l'auteur , & que les plus habiles
Graveurs de Paris ont très - bien rendues .
Tout eft poëtique , tout eft admirable dans .
ce poëme , jufqu'au crayon & au burin
du Deffinateur & des Graveurs.
"
Vous penferez peut - être , Monfieur, que
la chaleur du climat qui échauffe notre
imagination , eft la feule caufe de l'admiration
que nous avons pour la Chriftiade ;
mais defabufez-vous , les coups de foleil
aufquels on nous accufe d'être fujets , ne
dirigent point nos jugemens ; je ne vous
les produirois même pas avec tant de confiance
, fi les perfonnes les plus éclairées
de nos provinces & des Académies voifines
, & principalement un homme célebre
par quantité de bons ouvrages , qui fe
diftingue à la tête de l'Académie des Belles-
Lettres de M .... n'avoit prévenu notre
jugement par les fuffrages les plus favorables
à la Chriftiade .
86 MERCURE DE FRANCE.
Quoiqu'il en foit , notre admiration
pour ce poëme n'eft point aveugle , mais
nous faifons graces aux défauts en faveur
des beautés ; car quelques exemples & autorités
que l'auteur apporte pour fe juftifier
d'avoir écrit fon poëme en profe
cependant , comme l'ufage a prévalu , &
que par poëme on entend communément
aujourd'hui un ouvrage en vers , nous faifons
des voeux avec vous pour que quel
que heureux génie s'animant du feu poëtique
de l'auteur de la Chriftiade , fans en
amortir les faillies , veuille bien prendre
la peine de nous la rendre en beaux vers
françois , débarraffée de certains détails
qui font languir l'action , & de quelques
notes qui paroiffent fuperflues. Je fuis ,
& c.
On imprime chez Boudet , rue Saint
Jacques , au Livre d'or , un projet de
Tactique d'après le fyftême du Chevalier
Folard , & les idées de M. le Maréchal de
Saxe. Je crois que l'annonce de ce livre.
doit exciter la curiofité de nos militaires ,
que fa lecture peut leur être auffi utile
que l'ouvrage paroît intéreffant. Le Libraire
le diftribuera dans le courant de ce
mois ; 1 vol. in-4°.
•
D'un Académicien de M .... à un Academicien
de R.... fur la Chriftiade , ou
le Paradis reconquis , pour fervir de fuite
au Paradis perdu de Milton.
U
NE maladie longue & opiniâtre , une
convalefcence des plus lentes & des
affaires arrierées ne m'ont pas permis ,
Monfieur , de vous tenir plutôt la parole
que je vous donnai dans ma lettre du mois
de Juillet dernier , dans laquelle je vous
promettois de vous dire mon fentiment
fur le refte de la Chriftiade. Je fuis ravi
que le jugement que j'en ai porté s'accor
de avec le vôtre , & que celui de vos illuftres
confreres y mette un fceau refpectable
à tout critique. Je vais donc achever
l'analyfe de cet ouvrage avec confiance &
fans partialité.
Je vous avois laiffé au huitième chant
& c'eft de là que je reprens. Il contient
le plus grand & le plus augufte de nos
myfteres ; l'inftitution de l'Euchariftie , &
je vous affure qu'on ne peut lire rien de
plus tendre & de plus onctueux que le
difcours que le Sauveur fait à fes Difci-
Diij
78 MERCURE DE FRANCE.
ples dans fon teftament d'adieu . Le combat
de fon agonie eft un morceau théologique
, qui n'eft pas à la vérité de notre
reffort , mais nous en avons entendu difcourir
des Théologiens , qui ont affuré
qu'on ne pouvoit mieux accommoder le
dogme dans un poëme , & le mettre dans
le jour le plus favorable & le plus conforme
à la faine doctrine , fans en rien altérer
, au milieu même des fictions poëtiques.
L'épifode de Judas Iscariot qui commence
à la fin du feptieme chant , & qui
finit dans le dixieme par fa mort tragique,
eft un épiſode d'éclat qui n'a pas échappé
à votre pénétration : il eft en effet bien
fingulier ; car cet épifode feul eûr pû faire
la matiere d'un poëme par fon commen
cement , fon milieu & fa fin . L'efpece de
choc qui fe paffe dans le jardin des Oliviers
lorfque le Sauveur y eft pris , paroîtroit
d'invention romanefque , fi l'Evangélifte
ne difoit pofitivement qu'à la parole
du Sauveur , Judas & les troupes qu'il
conduifoit tomberent à la renverſe . L'em-
-portement de S. Pierre , connu par le coup
de glaive dont il frappa Malchus , & la
difpofition des autres Apôtres fes collégues
qui n'attendoient que le confentement
de leur Maître pour tirer pareilleΜΑΙ.
79 1755.
ment le glaive , eft fi bien marqué dans
l'Evangile , qu'on ne peut le regarder comme
une rodomontade de la part des compagnons
de l'Homme Dieu . Le fonge de
la femme de Pilate , qui dans le neuvieme
chant interrompt le jugement que fon
mari alloit porter contre Jefus , & la def
cription du temple de la Sibylle , font des
épifodes d'invention hiftorique , où tout
elt afforti au fujet principal. L'antre des
génies infernaux où Satan defcend par les
bouches du Vefuve , & y fait forger les
inftrumens du fupplice de Jefus- Chriſt , eſt
encore un morceau d'imagination poëtique ,
qui ravit par le détail des ouvrages aufquels
ces génies font occupés. Cette defcription
qui égaie le fombre de la mort
tragique de Judas , eft admirable. Le por
trait de la politique que Satan appelle du
haut des tours de Solime , & la politique
qui , fidele à la voix de Satan , quitte lecabinet
de l'Empereur Tibere , & accourt
à travers les airs pour venir fe prêter aux
vûes du monarque infernal , fait un bel
effet dans le onzieme chant. Le fupplice
du Sauveur & le tableau des fouffrances
qu'il endure avec une patience plus que
héroïque , contrafte fort bien avec le zéle
des Anges qui forment l'armée céleſte , &
quiau premier mouvement courent prendre
Div
80 MERCURE DE FRANCE.
1
-
les armes dans l'arfenal de Dieu pour aller
fondre fur les ennemis de fon fils , & le
délivrer des mains des impies qui s'apprêtent
à le crucifier. Ce zélé de l'armée célefte
, qui borné par l'ordre abfolu du
Tout puiffant , fe change en deuil , &
l'éclipfe de la férénité de la face brillante
de Dieu pénétré de douleur à la mort de
fon fils , éclipfe qui eft la caufe premiere
des ténébres qui obfcurciffent le foleil , &
qui couvrent toute la terre en un inſtant ,
tout cela eft d'un fublime qui étonne , ra
vit , & imprime la terreur , la crainte & le
refpect pour la majeſté de Dieu . L'éclat
qui accompagne le triomphe de la Réfurrection
du Sauveur , les vives defcriptions
de l'empire du tems , du cahos & de la
nuit , celle des enfers , dont les peintures
effrayantes font d'un nouveau coloris &
parfaitement afforties aux différens genres
de tourmens , & aux différentes efpeces
de coupables qui les endurent , la defcription
des limbes , le portrait de la tranquille
efpérance qui anime les faints perfonnages
qui l'habitent , ce doux efpoir d'un
heureux avenir qui contrafte avec la fureur
& le defefpoir des réprouvés , la beauté
du climat des limbes & l'horreur des enfers
, font des tableaux qui effrayent &
raffurent , qui troublent & qui calment,
Μ Α Ι. 1755 .
81
tour à tour le lecteur. Il fe délaffe enfin
dans les belles plaines du ciel & dans le
brillant féjour de la Divinité , dont le temple
eft peint d'une maniere d'autant plus
admirable , que l'auteur pouvant faire.
jouer fon imagination , n'a néanmoins
emprunté que les idées tracées par S. Jean
dans fon Apocalypfe. Le livre des deftinées
humaines , fcelle de fept fceaux que le
Sauveur ouvre aux yeux de fon Apôtre ,
pour lui faire connoître les hommes dont
les ames lui font confiées , eft encore emprunté
de l'Apocalypfe . L'établiffement
miraculeux de l'Eglife , & le changement
progreffif qui fe fait dans tous les états du
monde par la prédication de l'évangile ,
les portraits des premiers Souverains chré-,
tiens , & les juftes éloges donnés à leurs
fucceffeurs en qualité de protecteurs de
l'Eglife , la fucceffion invariable & non.
interrompue des fouverains Pontifes qui
ont occupé le fiége de Rome & de l'Eglife ,
& les traits fous lefquels font repréfentés
les plus grands Papes jufqu'à celui qui
remplit fi dignement la chaire de Saint .
Pierre , tout cela eft d'une invention fine
ingénieufe , délicate , qui tranfporte & ravit
le lecteur en lui rappellant les grands.
traits de l'ancien & du nouveau Teftament ,
& d'une partie de l'Hiftoire eccléfiaftique
Dy
82 MERCURE DE FRANCE.
par une narration agréable & fleurie.
On a donc bien eu raifon , Monfieur ,
de dire que la Chriftiade , bien loin de
nuire à la religion & de fcandalifer la foi
des Fideles , ne peut fervir qu'à leur donner
une grande idée de nos myfteres . Les
fictions fans nombre qui étayent ce poëme
, n'auroient point été admiffibles dans
un fujet auffi facré , & le lecteur pieux
auroit eu raifon de s'en alarmer & de les
rejetter , fi l'auteur n'eût eu la précaution
de les puifer toutes dans le fond même des
myfteres , ainfi que l'a fort bien remarqué
un célebre Journaliſte , & de les appuyer
des autorités de l'Ecriture , des faints Peres
, des Conciles , des Commentateurs
& de l'Hiftoire . C'eft de là probablement
qu'eſt venu ce déluge de notes qui a inondé
l'ouvrage , & c'eft avec la même juſteſſe
que vous avez été frappé de l'art avec lequel
les humiliations & les grandeurs de
Homme - Dieu contraftent avec dignité &
s'ennobliffent mutuellement.
En effet le poëme de la Chriftiade n'eft
que le triomphe du Chrift . Si cet objet
nous étoit moins familier , il piqueroit
plus notre curiofité ; mais un fujet dont
nos oreilles font rebattues dans nos chaires
, dont nos livres font remplis , dont
nous fommes imbus dès l'enfance , affadit
M. A I. 83
1755. .
en quelque forte , & rebute , fi l'on peut fe
fervir de ce terme , l'attention du Chrétien
tiéde , à laquelle les objets attrayans
du fiécle font fans ceffe diverfion. Dans le
monde on ne connoît communément le
Sauveur que par fa naiffance pauvre & par
fa mort ignominieufe ; ce font là les deux
points de vûe fous lefquels on le confidere
: l'éclat de fes miracles frappe , mais
l'ignominie de fa croix fcandalife , & il
faut avoir une foi bien ferme pour n'être
pas tenté d'abandonner un maître qui vit
d'une façon fi obfcure , & qui meurt du
fupplice le plus infâme . C'eft là ce qui a
donné crédit au préjugé commun , que que les
myfteres de notre religion ne fçauroient
être la matiere d'un poëme ; mais un ef
prit qui ne s'arrête point à la fuperficie ,
qui s'éleve au- deffus des préjugés , qui approfondit
tous les myfteres , qui analyſe
tous les faits , ne peut s'empêcher d'être
frappé de la Divinité , qui éclate jufques
dans les moindres actions du Sanveur ; on
voit en lui le héros des héros , le héros par
excellence , l'Homme - Dieu , le Dieu des
Dieux .
Je ne puis mieux finir cette analyfe ,
Monfieur , qu'en vous difant mon fentiment
fur le fujer des planches , vignettes
& gravûres en taille -douce qui font à la
D vj
84 MERCURE DE FRANCE.
tête de chaque chant de la Chriſtiade : il
y regne autant de poëtique & de fublime
d'idées que dans l'ouvrage même ; les allégories.
en font fines , juftes & nullement
forcées. Peut - on rien de plus beau que
l'idée du frontispice , où les trois monftres,
Satan , le péché & la mort perfonnifiés ,
font attachés au trophée du Rédempteur ;
le palais du prince de l'air , avec tous fes
attributs , & la tempête qu'il excite à la
priere de Satan ; le confeil des démons fur
le Liban , où les grands acteurs font caractérifés
; le feftin d'Hérode , où Hérodias
danfe ; Magdeleine dans fes beaux jardins.
livrée à fes illufions , & enfuite dans fon
appartement renverfant & brifant fa toilette
dans un faint emportement de converfion
; la médiation du Verbe , & Adam
& Eve pris dans les filets de la mort ; la
naiffance de la femme ; l'antre des génies
infernaux ; l'arfenal célefte ; le magnifique
temple de la Sibylle , & la femme de
Pilate dormant fur les genoux du fommeil;
l'ame du Dieu crucifié, expirant, qui fort de
fa bouche , un drapeau d'une main en figne
de fa victoire , & des foudres de l'autre , en
inftrumens de fa vengeance , qui foudroye
& précipite les légions de démons répandus
dans les airs , où ils s'applaudiffoient
de leur prétendue victoire fur le Seigneur
MA I. 1755.
85 .
& fur fon Chrift ; & enfin ce même Chriſt
fortant victorieux du tombeau , dont la
pierre énorme renversée par la puiffance
divine , écrafe la mort qui étoit affife
deffus ; & les clefs de la mort & des enfers
que le Sauveur reffufcitant tient dans
fes mains? ce font là , Monfieur , autant
d'idées nobles & poëtiques que le célebre
Eyfen a parfaitement tracées , fans doute ,
d'après l'auteur , & que les plus habiles
Graveurs de Paris ont très - bien rendues .
Tout eft poëtique , tout eft admirable dans .
ce poëme , jufqu'au crayon & au burin
du Deffinateur & des Graveurs.
"
Vous penferez peut - être , Monfieur, que
la chaleur du climat qui échauffe notre
imagination , eft la feule caufe de l'admiration
que nous avons pour la Chriftiade ;
mais defabufez-vous , les coups de foleil
aufquels on nous accufe d'être fujets , ne
dirigent point nos jugemens ; je ne vous
les produirois même pas avec tant de confiance
, fi les perfonnes les plus éclairées
de nos provinces & des Académies voifines
, & principalement un homme célebre
par quantité de bons ouvrages , qui fe
diftingue à la tête de l'Académie des Belles-
Lettres de M .... n'avoit prévenu notre
jugement par les fuffrages les plus favorables
à la Chriftiade .
86 MERCURE DE FRANCE.
Quoiqu'il en foit , notre admiration
pour ce poëme n'eft point aveugle , mais
nous faifons graces aux défauts en faveur
des beautés ; car quelques exemples & autorités
que l'auteur apporte pour fe juftifier
d'avoir écrit fon poëme en profe
cependant , comme l'ufage a prévalu , &
que par poëme on entend communément
aujourd'hui un ouvrage en vers , nous faifons
des voeux avec vous pour que quel
que heureux génie s'animant du feu poëtique
de l'auteur de la Chriftiade , fans en
amortir les faillies , veuille bien prendre
la peine de nous la rendre en beaux vers
françois , débarraffée de certains détails
qui font languir l'action , & de quelques
notes qui paroiffent fuperflues. Je fuis ,
& c.
On imprime chez Boudet , rue Saint
Jacques , au Livre d'or , un projet de
Tactique d'après le fyftême du Chevalier
Folard , & les idées de M. le Maréchal de
Saxe. Je crois que l'annonce de ce livre.
doit exciter la curiofité de nos militaires ,
que fa lecture peut leur être auffi utile
que l'ouvrage paroît intéreffant. Le Libraire
le diftribuera dans le courant de ce
mois ; 1 vol. in-4°.
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Résumé : SECONDE LETTRE D'un Académicien de M.... à un Académicien de R.... sur la Christiade, ou le Paradis reconquis, pour servir de suite au Paradis perdu de Milton.
La seconde lettre est une correspondance entre deux académiciens discutant de la 'Christiade', un poème épique. L'auteur de la lettre approuve le jugement de son interlocuteur et de leurs confrères sur l'œuvre. Il commence son analyse à partir du huitième chant, mettant en avant la tendresse et l'onction du discours du Sauveur lors de l'institution de l'Eucharistie. Il admire également la profondeur théologique du combat de l'agonie du Christ, bien que ce traitement ne soit pas conforme à leur ressource, il est approuvé par des théologiens. L'épître met en lumière plusieurs épisodes marquants du poème, tels que la trahison de Judas, le combat au jardin des Oliviers et l'intervention de la femme de Pilate. Elle loue également les descriptions poétiques, comme l'antre des génies infernaux et la politique de Satan. Le supplice du Sauveur et les réactions des anges sont décrits avec un sublime qui impressionne. Le poème est salué pour sa fidélité aux Écritures et aux autorités ecclésiastiques, justifiant ainsi les fictions poétiques par leur enracinement dans les mystères chrétiens. L'auteur conclut en exprimant son admiration pour les illustrations du poème, qui sont aussi poétiques et sublimes que le texte lui-même. Il espère cependant que la 'Christiade' pourrait être réécrite en vers français pour en améliorer la fluidité.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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588
p. 68-70
LOGOGRYPHE.
Début :
Tels font grand cas de moi qui n'en sont pas meilleurs ; [...]
Mots clefs :
Chapelet
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texteReconnaissance textuelle : LOGOGRYPHE.
LOGOGRYPHE.
TElsfont grand cas de moi qui n'en font pas
meilleurs ;
Je fers au vrai dévot , je fers à l'hypocrite :
Mon nom eft fort connu tant à Rome qu'ailleurs ;
Mais à Geneve , hélas ! que devient mon mérite
Faifons trêve à la plainte , & parlons de mes fils :
L'un d'eux , quoiqu'invifible , eft pire que la
peſte :
Un fecond , fans quartier , mange fes ennemis :
Un tiers compte pour rien toute la cour célefte.
Continuons , Lecteur , je ne fuis pas au bout ;
Mes dignes rejettons paffent la cinquantaine :
Tiens , prens , avec cela va fervir un ragoût ;
L'hôte eft un vieux Gaulois aux rives de la Seine,
JUIN. 1755: 69
Cherche encor , tu verras un fleuve fouterrein :
La Reine d'un Empire où chacun trouve place ,
D'un Monarque François l'aggreffeur inhumain ,
Et le furnom d'un Roi très - fameux par fa race.
Un utile arbriffeau commun dans le Levant :
Une voyelle en grec , en hébreu quatre lettres :
Un mixte plein d'odeur , léger comme le vent ,
Qu'en vain mefureroient vos plus grands Géométres,
Ce que l'on n'aime point à voir fur ſes habits :
Dans le calendrier un mot de grand uſage ;
Cet agréable effet que produit un rubis ,
Ce qui change en été la couleur du visage.
Un Poëte excellent , la gloire de Lefbos :
L'attribut d'une voie au haut des cieux tracée ;
Lieu qui frappe de loin les yeux des matelots :
Jeu de force où Hyacinthe eut la tête caffée .
Un Pape , en fa croyance auffi ferme qu'un roc :
Une pierre où Phébus aiſément s'infinue :
Une ville en Provence , une autre en Languedoc ;
Plus une chez les Turcs , des marchands bien
connue .
Ce qu'un pauvre ſujet peut préſenter au Roi ;
Ce qu'on donne au foldat , ce qu'il veut faire en
marche :
Ce que paroît un homme étant faifi d'effroi
70 MERCURE DE FRANCE.
Et ce qui dans un pont arrête ou ferme l'arche.
La Vierge qu'à la foi Paul lui- même affervit :
Une table , de fang , de carnage couverte :
L'amant qui fous les eaux fa Nymphe pourſuivit :
La maligne Déeffe , encline à votre pérte .
Une picce affez longue , en terme de blafon :
Un homme fans honneur , l'ouvrage d'un Notaire
;
Un ornement d'Eglife , un mets , une ſaiſon ,
Un meuble de jardin , une herbe potagere.
L'un de ces trois arrêts dont frémit Balthafar ,
Ce pere à qui Jafon cauſa tant de traverſes ,
Le chaffeur que
Ville
grecque
l'aurore attiroit dans fon char :
fatale à deux cens mille Perfes.
Ce que jamais Grandier ne fit avec Satan :
Lieu public , amas d'eau où vogue une nacelle :
Un vêtement gafcon ; & ce , dit la mainan ,
Qu'on voit la nuit en perche & le jour en échelle .
TElsfont grand cas de moi qui n'en font pas
meilleurs ;
Je fers au vrai dévot , je fers à l'hypocrite :
Mon nom eft fort connu tant à Rome qu'ailleurs ;
Mais à Geneve , hélas ! que devient mon mérite
Faifons trêve à la plainte , & parlons de mes fils :
L'un d'eux , quoiqu'invifible , eft pire que la
peſte :
Un fecond , fans quartier , mange fes ennemis :
Un tiers compte pour rien toute la cour célefte.
Continuons , Lecteur , je ne fuis pas au bout ;
Mes dignes rejettons paffent la cinquantaine :
Tiens , prens , avec cela va fervir un ragoût ;
L'hôte eft un vieux Gaulois aux rives de la Seine,
JUIN. 1755: 69
Cherche encor , tu verras un fleuve fouterrein :
La Reine d'un Empire où chacun trouve place ,
D'un Monarque François l'aggreffeur inhumain ,
Et le furnom d'un Roi très - fameux par fa race.
Un utile arbriffeau commun dans le Levant :
Une voyelle en grec , en hébreu quatre lettres :
Un mixte plein d'odeur , léger comme le vent ,
Qu'en vain mefureroient vos plus grands Géométres,
Ce que l'on n'aime point à voir fur ſes habits :
Dans le calendrier un mot de grand uſage ;
Cet agréable effet que produit un rubis ,
Ce qui change en été la couleur du visage.
Un Poëte excellent , la gloire de Lefbos :
L'attribut d'une voie au haut des cieux tracée ;
Lieu qui frappe de loin les yeux des matelots :
Jeu de force où Hyacinthe eut la tête caffée .
Un Pape , en fa croyance auffi ferme qu'un roc :
Une pierre où Phébus aiſément s'infinue :
Une ville en Provence , une autre en Languedoc ;
Plus une chez les Turcs , des marchands bien
connue .
Ce qu'un pauvre ſujet peut préſenter au Roi ;
Ce qu'on donne au foldat , ce qu'il veut faire en
marche :
Ce que paroît un homme étant faifi d'effroi
70 MERCURE DE FRANCE.
Et ce qui dans un pont arrête ou ferme l'arche.
La Vierge qu'à la foi Paul lui- même affervit :
Une table , de fang , de carnage couverte :
L'amant qui fous les eaux fa Nymphe pourſuivit :
La maligne Déeffe , encline à votre pérte .
Une picce affez longue , en terme de blafon :
Un homme fans honneur , l'ouvrage d'un Notaire
;
Un ornement d'Eglife , un mets , une ſaiſon ,
Un meuble de jardin , une herbe potagere.
L'un de ces trois arrêts dont frémit Balthafar ,
Ce pere à qui Jafon cauſa tant de traverſes ,
Le chaffeur que
Ville
grecque
l'aurore attiroit dans fon char :
fatale à deux cens mille Perfes.
Ce que jamais Grandier ne fit avec Satan :
Lieu public , amas d'eau où vogue une nacelle :
Un vêtement gafcon ; & ce , dit la mainan ,
Qu'on voit la nuit en perche & le jour en échelle .
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589
p. 113-119
« RÉFLÉXIONS CRITIQUES sur la méthode publiée par M. l'Abbé de Villefroy [...] »
Début :
RÉFLÉXIONS CRITIQUES sur la méthode publiée par M. l'Abbé de Villefroy [...]
Mots clefs :
Ecriture Sainte, Livres prophétiques, Abbé Villefroy
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « RÉFLÉXIONS CRITIQUES sur la méthode publiée par M. l'Abbé de Villefroy [...] »
REFLEXIONS CRITIQUES fur la
méthode publiée par M. l'Abbé de Villefroy
pour l'explication de l'Ecriture fainte,
adreffées aux auteurs des principes difcutés
, pour faciliter l'intelligence des livres
prophétiques : Ouvrage utile pour l'étude
des livres facrés. A Cologne , & fe trouve
à Paris , chez Guillyn , Libraire , quai des
Auguftins , du côté du pont S. Michel . In-
12 , de 172 pag.
Les principes que M. l'Abbé Villefroy
a prétendu établir pour l'explication des
livres prophétiques , étoient par leur fingularité
de nature à lui fufciter des adverfaires
qui ne fe borneroient point à en
contefter la folidité , mais iroient jufqu'à
les taxer de témérité dans l'application
qu'il en a faite : C'eft ce qui n'a pas manqué
d'arriver . M. Dupuy , auteur de ces
Réflexions critiques , à été un de ceux qui
fe font mis fur les rangs , pour combattre
la nouvelle méthode expofée par M. de
Villefroy dans des Lettres à fes Eleves qu'il
publia en 1751. Notre auteur fit imprimer
à ce fujet une lettre qui parut dans
le Journal de Verdun , Août & Septembre.
Après y avoir examiné attentivement le
fyfteme , que cette méthode avoit enfanté
, il penfa être en droit de qualifier
d'arbitraires , d'inutiles , & même de dan
14 MERCURE DE FRANCE.
gereux les moyens dont on s'étoit fervi
pour l'appuyer. Il difcuta les raiſons fur
lefquelles il fondoit fa critique , cependant
il eut foin de diftinguer les conféquences
fâcheufes que ce fyftême entraînoit néceffairement
après lui des motifs qui l'avoient
fait naître. Il rendit toute la juftice dûe à
la piété & à la droiture des intentions de
M. de Villefroy , qui n'avoient fans doute
point de part aux écarts de fon imagination
: néanmoins cette critique touchoit
trop au fond de fa méthode favorite pour
ne pas mériter une réponſe de lui- même ,
ou de quelques - uns de fes éleves. C'eſt
ce que les PP . Capucins qui fe font honneur
de porter ce nom , ont exécuté dans
un ouvrage que nous avons annoncé au
mois de Janvier , où ils foutiennent avec
chaleur les principes de leur Maître , &
emploient toutes les forces de leur érudi
tion à les préfenter fous l'afpect le plus
favorable . Il feroit feulement à defirer
qu'ils fe fuffent appliqués à réfuter la lettre
de M. Dupuy , fans fortir des bornes
de la modération , à laquelle l'équité naturelle
nous engage . Notre auteur a cru
en conféquence qu'il ne pouvoit fe difpenfer
de repliquer , de peur que
fon filence
ne leur fournit le fujet d'un triom
phe imaginaire . C'eft pour le tirer de cette
A O UST. 1755. TIS
penfée qu'il leur adreffe à eux- mêmes ces
Réflexions critiques , écrites en forme de
lettres qui font au nombre de huit. Il agit
avec d'autant plus de confiance dans la
caufe qu'il défend , que c'est moins la
fienne propre qu'il plaide que la caufe de
tous les interprêtes de l'Ecriture fainte généralement
eftimés , qui ont tenu une
route totalement oppofée à celle que M.
de Villefroy & fes éleves fuivent dans
l'objet de leur travail . Comme on l'avoit
recufé de n'être pas exempt des fautes qu'il
réprochoit aux autres , il commence par fe
juftifier de cette accufation , & ruine tout
ce qui peut avoir donné lieu à de fauffes
imputations. Après s'être tenu fur la défenfive
, il attaque à fon tour , & pourfuit
les auteurs de la Nouvelle Harmonie
prophétique à travers l'obfcurité des Termes
énigmatiques dans lefquels ils ont jugé à
propos de fe retrancher. Il faut convenir
qu'ils ont en tête un rude adverfaire qui
les pouffe vigoureufement , & les redrelle
dans prefque tous les pas où ils peuvent
avoir bronché. Les détours qu'ils ont pris
pour éluder la force de fes objections
n'échappent point à fa pénétration : Tout
ce qu'ils ont pu dire de plus fpécieux pour
la juftification de leur méthode n'a point
été capable de lui faire changer de fenti116
MERCURE DE FRANCE.
ment à fon égard . Il ne fe contente pas en
s'expliquant fur fon compte de réitérer les
mêmes qualifications , il en ajoute encore
de nouvelles , & n'avance rien qu'il ne tache
de prouver. Il entre dans l'analy fe du
plan fur lequel ils l'ont exécutée , & faifit
avec habileté les contradictions qui en réfultent
; il fait de plus remarquer qu'elle
introduit des interprétations bizarres &
abfurdes, qui rendent à bouleverfer l'Ecriture
, & a ouvrir la porte aux fectes les
plus folles , & qui peuvent devenir par- là
nuifibles à la religion . Il prend auffi à tache
de montrer combien elle choque la
raifon qu'elle fait dépendre des caprices
de l'imagination , outre qu'elle eft directement
contraire aux régles conftamment
reconnues dans la maniere d'interprêter
avec fuccès le fens des prophéties . Il étend
fes vues à mesure qu'il développe la fauffeté
des principes fur lefquels elle poſe :
Enfin pour ôter le moindre prétexte à la
récrimination , il laiffe à part les queftions
incidentes , & s'attache au corps du fyftême
dont il ne fe propofe rien moins que
de faper les fondemens. Si l'on veut une
pleine conviction des chofes que nous indiquons
, il n'y a qu'à la chercher dans
l'ouvrage dont nous confeillons la lecture
à tous ceux qui font une étude de l'EcriA
O UST. 1755 117
ture fainte ; ils ne pourront refufer à l'auteur
l'éloge de bien pofféder le fujet qu'il
traite. Ses raifonnemens frappent pour
ordinaire au but , & ont outre cela le
mérite de la clarté & de la préciſion . Si
pourtant il nous eft permis de dire ce que
nous penfons du travail de l'auteur , nous
avouons qu'il étoit fufceptible d'une plus
grande perfection . Il y a certains détails
que M. Dupuy n'a pas approfondis autant
qu'il auroit pu le faire. Nous trouvons
encore qu'il a trop négligé la voie de fait ,
abfolument effentielle à l'état de cette controverfe.
Nous entendons par- là le témoignage
des Peres de l'Eglife qui ont travaillé
fur l'Ecriture fainte , les éleves de
M. de Villefroy ont trop bien fenti l'importance
dont il étoit pour n'en pas faire
ufage dans leur méthode, à laquelle il peut
fervir d'appui .... On fçait que c'eſt le
moyen le plus propre à en impofer aux
lecteurs qui n'y regardent pas de fi près ,
& qui fe payent plus volontiers d'autorités
que de raifons. Comme les PP. Capucins
ont employé tous leurs efforts à mettre
dans leur parti un grand nombre des
Peres qu'on a cités , il auroit fallu s'affurer
de l'exactitude de leurs citations dans
les paffages qu'ils ont produits , en les
comparant avec le texte d'où ils les ont
118 MERCURE DE FRANCE
tirés. Un examen réfléchi auroit conduit à
fçavoir s'ils ne leur ont pas fait dire plus
que ceux- ci ne difent en effet. On a fi peu
de fcrupule fur cet article , qu'il arrive
affez fouvent de furprendre en défaut
ceux qui affectent d'accumuler autorités
fur autorités pour accréditer de nouvelles
opinions . Nous n'ignorons pas que cette
voie eft longue & pénible par les recherches
qu'elle demande ; mais nous n'avons
pas moins lieu d'être étonnés que l'Auteur
n'ait point rempli ce qu'on étoit en droit
d'attendre de lui fur ce fujet. Nous fouhaiterion's
auffi qu'il eût été plus réservé
dans le choix de fes preuves , qui ne font
pas toutes concluantes. L'emploi trop fréquent
qu'il fait des paroles empruntées des
Poëtes François , fatigue d'autant plus
qu'il eft abfolument déplacé dans un ouvrage
qui roule fur une matiere auffi grave
que l'eft celle dont il s'agit . Il eft à
craindre qu'il ne juftifie par là le reproche
qu'il s'eft attiré de la part des éleves de
M. de Villefroy , qui l'ont accufé de s'être
livré à un badinage indécent. Nous ajouterons
que fon ftyle vife quelquefois à la
déclamation , & qu'il faut le dépouiller de
ce qu'il a de trop vif contre les auteurs ,
de qui il combat les principes , pour lire
avec fruit fes réflexions . Il eſt fâcheux que
A O UST. 1755. 119
dans les écrits polémiques , on ne foit pas
toujours affez maître de fes expreffions
pour les ménager autant qu'on le devroit.
M. Dupuy ufe à la vérité du droit de repré
failles ; puifqu'il fe plaint qu'on a manqué
pour lui des égards réciproques que les
gens de lettres fe doivent en écrivant les
uns contre les autres . Nous finirons par
avertir qu'il a eu la précaution de rendre
fes objections fenfibles pour tout le monde,
en les dégageant des difcuffions relatives à
la langue Hébraïque ; quoiqu'elles foient
effentiellement du reffort de cette matiere .
Comme il peut y avoir des perfonnes qu'el
le intéreffe , & qui cependant n'ont aucu→
ne teinture des langues fçavantes , l'auteur
les a pour cet effet écarté de cette controverfe
, afin de mettre tous fes lecteurs à
portée de juger avec connoiffance de caufe ,
& d'apprécier le nouveau fyftême.
méthode publiée par M. l'Abbé de Villefroy
pour l'explication de l'Ecriture fainte,
adreffées aux auteurs des principes difcutés
, pour faciliter l'intelligence des livres
prophétiques : Ouvrage utile pour l'étude
des livres facrés. A Cologne , & fe trouve
à Paris , chez Guillyn , Libraire , quai des
Auguftins , du côté du pont S. Michel . In-
12 , de 172 pag.
Les principes que M. l'Abbé Villefroy
a prétendu établir pour l'explication des
livres prophétiques , étoient par leur fingularité
de nature à lui fufciter des adverfaires
qui ne fe borneroient point à en
contefter la folidité , mais iroient jufqu'à
les taxer de témérité dans l'application
qu'il en a faite : C'eft ce qui n'a pas manqué
d'arriver . M. Dupuy , auteur de ces
Réflexions critiques , à été un de ceux qui
fe font mis fur les rangs , pour combattre
la nouvelle méthode expofée par M. de
Villefroy dans des Lettres à fes Eleves qu'il
publia en 1751. Notre auteur fit imprimer
à ce fujet une lettre qui parut dans
le Journal de Verdun , Août & Septembre.
Après y avoir examiné attentivement le
fyfteme , que cette méthode avoit enfanté
, il penfa être en droit de qualifier
d'arbitraires , d'inutiles , & même de dan
14 MERCURE DE FRANCE.
gereux les moyens dont on s'étoit fervi
pour l'appuyer. Il difcuta les raiſons fur
lefquelles il fondoit fa critique , cependant
il eut foin de diftinguer les conféquences
fâcheufes que ce fyftême entraînoit néceffairement
après lui des motifs qui l'avoient
fait naître. Il rendit toute la juftice dûe à
la piété & à la droiture des intentions de
M. de Villefroy , qui n'avoient fans doute
point de part aux écarts de fon imagination
: néanmoins cette critique touchoit
trop au fond de fa méthode favorite pour
ne pas mériter une réponſe de lui- même ,
ou de quelques - uns de fes éleves. C'eſt
ce que les PP . Capucins qui fe font honneur
de porter ce nom , ont exécuté dans
un ouvrage que nous avons annoncé au
mois de Janvier , où ils foutiennent avec
chaleur les principes de leur Maître , &
emploient toutes les forces de leur érudi
tion à les préfenter fous l'afpect le plus
favorable . Il feroit feulement à defirer
qu'ils fe fuffent appliqués à réfuter la lettre
de M. Dupuy , fans fortir des bornes
de la modération , à laquelle l'équité naturelle
nous engage . Notre auteur a cru
en conféquence qu'il ne pouvoit fe difpenfer
de repliquer , de peur que
fon filence
ne leur fournit le fujet d'un triom
phe imaginaire . C'eft pour le tirer de cette
A O UST. 1755. TIS
penfée qu'il leur adreffe à eux- mêmes ces
Réflexions critiques , écrites en forme de
lettres qui font au nombre de huit. Il agit
avec d'autant plus de confiance dans la
caufe qu'il défend , que c'est moins la
fienne propre qu'il plaide que la caufe de
tous les interprêtes de l'Ecriture fainte généralement
eftimés , qui ont tenu une
route totalement oppofée à celle que M.
de Villefroy & fes éleves fuivent dans
l'objet de leur travail . Comme on l'avoit
recufé de n'être pas exempt des fautes qu'il
réprochoit aux autres , il commence par fe
juftifier de cette accufation , & ruine tout
ce qui peut avoir donné lieu à de fauffes
imputations. Après s'être tenu fur la défenfive
, il attaque à fon tour , & pourfuit
les auteurs de la Nouvelle Harmonie
prophétique à travers l'obfcurité des Termes
énigmatiques dans lefquels ils ont jugé à
propos de fe retrancher. Il faut convenir
qu'ils ont en tête un rude adverfaire qui
les pouffe vigoureufement , & les redrelle
dans prefque tous les pas où ils peuvent
avoir bronché. Les détours qu'ils ont pris
pour éluder la force de fes objections
n'échappent point à fa pénétration : Tout
ce qu'ils ont pu dire de plus fpécieux pour
la juftification de leur méthode n'a point
été capable de lui faire changer de fenti116
MERCURE DE FRANCE.
ment à fon égard . Il ne fe contente pas en
s'expliquant fur fon compte de réitérer les
mêmes qualifications , il en ajoute encore
de nouvelles , & n'avance rien qu'il ne tache
de prouver. Il entre dans l'analy fe du
plan fur lequel ils l'ont exécutée , & faifit
avec habileté les contradictions qui en réfultent
; il fait de plus remarquer qu'elle
introduit des interprétations bizarres &
abfurdes, qui rendent à bouleverfer l'Ecriture
, & a ouvrir la porte aux fectes les
plus folles , & qui peuvent devenir par- là
nuifibles à la religion . Il prend auffi à tache
de montrer combien elle choque la
raifon qu'elle fait dépendre des caprices
de l'imagination , outre qu'elle eft directement
contraire aux régles conftamment
reconnues dans la maniere d'interprêter
avec fuccès le fens des prophéties . Il étend
fes vues à mesure qu'il développe la fauffeté
des principes fur lefquels elle poſe :
Enfin pour ôter le moindre prétexte à la
récrimination , il laiffe à part les queftions
incidentes , & s'attache au corps du fyftême
dont il ne fe propofe rien moins que
de faper les fondemens. Si l'on veut une
pleine conviction des chofes que nous indiquons
, il n'y a qu'à la chercher dans
l'ouvrage dont nous confeillons la lecture
à tous ceux qui font une étude de l'EcriA
O UST. 1755 117
ture fainte ; ils ne pourront refufer à l'auteur
l'éloge de bien pofféder le fujet qu'il
traite. Ses raifonnemens frappent pour
ordinaire au but , & ont outre cela le
mérite de la clarté & de la préciſion . Si
pourtant il nous eft permis de dire ce que
nous penfons du travail de l'auteur , nous
avouons qu'il étoit fufceptible d'une plus
grande perfection . Il y a certains détails
que M. Dupuy n'a pas approfondis autant
qu'il auroit pu le faire. Nous trouvons
encore qu'il a trop négligé la voie de fait ,
abfolument effentielle à l'état de cette controverfe.
Nous entendons par- là le témoignage
des Peres de l'Eglife qui ont travaillé
fur l'Ecriture fainte , les éleves de
M. de Villefroy ont trop bien fenti l'importance
dont il étoit pour n'en pas faire
ufage dans leur méthode, à laquelle il peut
fervir d'appui .... On fçait que c'eſt le
moyen le plus propre à en impofer aux
lecteurs qui n'y regardent pas de fi près ,
& qui fe payent plus volontiers d'autorités
que de raifons. Comme les PP. Capucins
ont employé tous leurs efforts à mettre
dans leur parti un grand nombre des
Peres qu'on a cités , il auroit fallu s'affurer
de l'exactitude de leurs citations dans
les paffages qu'ils ont produits , en les
comparant avec le texte d'où ils les ont
118 MERCURE DE FRANCE
tirés. Un examen réfléchi auroit conduit à
fçavoir s'ils ne leur ont pas fait dire plus
que ceux- ci ne difent en effet. On a fi peu
de fcrupule fur cet article , qu'il arrive
affez fouvent de furprendre en défaut
ceux qui affectent d'accumuler autorités
fur autorités pour accréditer de nouvelles
opinions . Nous n'ignorons pas que cette
voie eft longue & pénible par les recherches
qu'elle demande ; mais nous n'avons
pas moins lieu d'être étonnés que l'Auteur
n'ait point rempli ce qu'on étoit en droit
d'attendre de lui fur ce fujet. Nous fouhaiterion's
auffi qu'il eût été plus réservé
dans le choix de fes preuves , qui ne font
pas toutes concluantes. L'emploi trop fréquent
qu'il fait des paroles empruntées des
Poëtes François , fatigue d'autant plus
qu'il eft abfolument déplacé dans un ouvrage
qui roule fur une matiere auffi grave
que l'eft celle dont il s'agit . Il eft à
craindre qu'il ne juftifie par là le reproche
qu'il s'eft attiré de la part des éleves de
M. de Villefroy , qui l'ont accufé de s'être
livré à un badinage indécent. Nous ajouterons
que fon ftyle vife quelquefois à la
déclamation , & qu'il faut le dépouiller de
ce qu'il a de trop vif contre les auteurs ,
de qui il combat les principes , pour lire
avec fruit fes réflexions . Il eſt fâcheux que
A O UST. 1755. 119
dans les écrits polémiques , on ne foit pas
toujours affez maître de fes expreffions
pour les ménager autant qu'on le devroit.
M. Dupuy ufe à la vérité du droit de repré
failles ; puifqu'il fe plaint qu'on a manqué
pour lui des égards réciproques que les
gens de lettres fe doivent en écrivant les
uns contre les autres . Nous finirons par
avertir qu'il a eu la précaution de rendre
fes objections fenfibles pour tout le monde,
en les dégageant des difcuffions relatives à
la langue Hébraïque ; quoiqu'elles foient
effentiellement du reffort de cette matiere .
Comme il peut y avoir des perfonnes qu'el
le intéreffe , & qui cependant n'ont aucu→
ne teinture des langues fçavantes , l'auteur
les a pour cet effet écarté de cette controverfe
, afin de mettre tous fes lecteurs à
portée de juger avec connoiffance de caufe ,
& d'apprécier le nouveau fyftême.
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Résumé : « RÉFLÉXIONS CRITIQUES sur la méthode publiée par M. l'Abbé de Villefroy [...] »
Le texte présente une critique des principes établis par l'Abbé de Villefroy pour l'interprétation des livres prophétiques, publiée dans 'Réflexions critiques' par M. Dupuy. Dupuy conteste la méthode de Villefroy, la jugeant arbitraire, inutile et dangereuse, tout en reconnaissant sa piété et sa droiture. Les Capucins, partisans de Villefroy, ont répondu à Dupuy en défendant les principes de leur maître. Dupuy a ensuite écrit huit lettres pour répliquer aux Capucins, défendant les interprètes traditionnels de l'Écriture sainte. Il critique la méthode de Villefroy, la qualifiant d'obscure et introduisant des interprétations bizarres et absurdes, nuisibles à la religion. Dupuy analyse le plan de la méthode de Villefroy, soulignant ses contradictions et son manque de respect pour les règles d'interprétation des prophéties. Bien que les arguments de Dupuy soient clairs et précis, son ouvrage est critiqué pour ne pas avoir suffisamment approfondi certains détails et pour avoir négligé l'usage des témoignages des Pères de l'Église, essentiels dans cette controverse. De plus, Dupuy est reproché pour l'emploi excessif de citations poétiques et pour un style parfois trop vif et déclamatoire. Malgré ces défauts, Dupuy a pris soin de rendre ses objections accessibles à un large public, en évitant les discussions techniques sur la langue hébraïque.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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590
p. 73
ENIGME.
Début :
Je suis un triple cabinet [...]
Mots clefs :
Confessionnal
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
E fuis un triple cabinet
·
murmure.
Avec une double ouverture
Par où paffe plus d'une ordure
Que chacun y porte en fecret.
Celui qui reçoit le paquet
Ne le reçoit pas fans
Deux patiens font la figure
De gens condamnés au gibet .
Pendant que l'un des deux raiſonne ,
Un tiers , fans confeils de perfonne
De tout point veut être éclairci .
Là , pour le repos de fon ame ,
Il ne faudroit pas qu'un mari
Se trouvât derriere fa femme.
Par M. le Baron de B*
E fuis un triple cabinet
·
murmure.
Avec une double ouverture
Par où paffe plus d'une ordure
Que chacun y porte en fecret.
Celui qui reçoit le paquet
Ne le reçoit pas fans
Deux patiens font la figure
De gens condamnés au gibet .
Pendant que l'un des deux raiſonne ,
Un tiers , fans confeils de perfonne
De tout point veut être éclairci .
Là , pour le repos de fon ame ,
Il ne faudroit pas qu'un mari
Se trouvât derriere fa femme.
Par M. le Baron de B*
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591
p. 229-230
DU LEVANT.
Début :
Ali Pacha Ekim Oglou étant parti pour l'isle de Chypre, [...]
Mots clefs :
Constantinople, Ali Pacha Ekim Oglou, Exil, Envoyé extraordinaire, Sa Majesté de Sicile, Église grecque, Querelle
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DU LEVANT.
DU LEVANT.
DE CONSTANTINOPLE , le 6 Juillet.
A
LI Pacha Ekim Oglou étant parti pour l'ifle de
Chypre, lieu de fon exil , la galere fur laquelle
il s'eft embarqué , a été obligée de relâcher à l'ifle
de Scio. Il à demandé la permiffion d'y paffer le
tems du Ramazan ou Carême des Mahométans ,
& le Grand Seigneur la lui a accordée . Sa Hauteffe
a difpofé du Gouvernement de la Morée en
faveur de Muftapha Pacha , qui rempliffoit avant
Ali Pacha la dignité de Grand Vifir. M. de Ludolf
, chargé ici des affaires du Roi des Deux Siciles
, vient d'apprendre que Sa Majesté Sicilienne
l'a nommé fon Envoyé extraordinaire , pour
complimenter le Grand Seigneur fur fon avénement
au trône. Il est arrivé un courier du Miniftre
, qui eft allé de la part de Sa Hauteffe à Peterbourg.
Un vailleau de guerre Vénitien , qui
étoit ici depuis quelque tems , a remis à la voile
pour retourner en Italie . Conféquemment aux
ordres de l'Ambaffadeur de Venife , il a pris fous
fon convoi tous les navires Hollandois qui ont
voulu profiter de fon eſcorte .
Il s'eft élevé daus l'Eglife Grecque un grand
différend . Un Prêtre ayant foutenu que le feul
Baptême par immerfion étoit valide , une partie
du Clergé attaque cette propofition comme hé
Kétique , & l'autre partie en embraffe la défenſe.
230 MERCURE DE FRANCE.
Les fuites de cette oppofition de fentimens font
allées fi loin, qu'on a craint que la tranquillité de
cetre capitale n'en fût troublée . Pour prévenir cet
inconvénient , le Grand Seigneur a ordonné , que
tous les Evêques qui ne penfoient pas comme le
Patriarche de Conftantinople fur l'objet de la difpute
, fe retiraffent dans leurs fièges repectifs.
DE CONSTANTINOPLE , le 6 Juillet.
A
LI Pacha Ekim Oglou étant parti pour l'ifle de
Chypre, lieu de fon exil , la galere fur laquelle
il s'eft embarqué , a été obligée de relâcher à l'ifle
de Scio. Il à demandé la permiffion d'y paffer le
tems du Ramazan ou Carême des Mahométans ,
& le Grand Seigneur la lui a accordée . Sa Hauteffe
a difpofé du Gouvernement de la Morée en
faveur de Muftapha Pacha , qui rempliffoit avant
Ali Pacha la dignité de Grand Vifir. M. de Ludolf
, chargé ici des affaires du Roi des Deux Siciles
, vient d'apprendre que Sa Majesté Sicilienne
l'a nommé fon Envoyé extraordinaire , pour
complimenter le Grand Seigneur fur fon avénement
au trône. Il est arrivé un courier du Miniftre
, qui eft allé de la part de Sa Hauteffe à Peterbourg.
Un vailleau de guerre Vénitien , qui
étoit ici depuis quelque tems , a remis à la voile
pour retourner en Italie . Conféquemment aux
ordres de l'Ambaffadeur de Venife , il a pris fous
fon convoi tous les navires Hollandois qui ont
voulu profiter de fon eſcorte .
Il s'eft élevé daus l'Eglife Grecque un grand
différend . Un Prêtre ayant foutenu que le feul
Baptême par immerfion étoit valide , une partie
du Clergé attaque cette propofition comme hé
Kétique , & l'autre partie en embraffe la défenſe.
230 MERCURE DE FRANCE.
Les fuites de cette oppofition de fentimens font
allées fi loin, qu'on a craint que la tranquillité de
cetre capitale n'en fût troublée . Pour prévenir cet
inconvénient , le Grand Seigneur a ordonné , que
tous les Evêques qui ne penfoient pas comme le
Patriarche de Conftantinople fur l'objet de la difpute
, fe retiraffent dans leurs fièges repectifs.
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Résumé : DU LEVANT.
Le 6 juillet, depuis Constantinople, il est rapporté qu'Ali Pacha Ekim Oglou, en exil à Chypre, a dû s'arrêter à l'île de Scio pour observer le Ramazan, avec la permission du Grand Seigneur. Muftapha Pacha a été nommé gouverneur de la Morée et succédé à Ali Pacha en tant que Grand Vizier. M. de Ludolf, représentant du Roi des Deux Siciles, a été nommé Envoyé extraordinaire pour féliciter le Grand Seigneur. Un courrier du ministre est arrivé de Saint-Pétersbourg. Un vaisseau de guerre vénitien, escortant des navires hollandais, a quitté Constantinople pour l'Italie. Un différend au sein de l'Église Grecque, concernant la validité du baptême par immersion, a menacé la tranquillité de Constantinople. Le Grand Seigneur a ordonné aux évêques dissidents de se retirer dans leurs sièges respectifs pour prévenir les troubles.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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592
p. 57-64
Lettre de M. l'Abbé A. P. J. à M. l'Abbé de B***.
Début :
Monsieur, vous avez beau regarder comme une plaisanterie le projet [...]
Mots clefs :
Prédicateurs, Mémoire, Discours, Méthode, Évangile
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Lettre de M. l'Abbé A. P. J. à M. l'Abbé de B***.
Lettre de M. l'Abbé A. P. J. à M. l'Abbé
de B ***.
Mconte une
Onfieur , vous avez beau regarder
comme une plaifanterie
le projet
que j'ai conçu , d'engager les Prédicateurs
à réciter leurs fermons , le papier en main ;
plus je penfe à cette nouvelle méthode ,
depuis que je vous en ai parlé pour la
premiere fois , plus j'y découvre d'avantages.
Je ne me cache point à moi même
les obftacles qu'il faudra furmonter . L'habitude
dans laquelle on eft depuis longtems
de prêcher par mémoire , fera difficile
à détruire , même chez une nation
fi portée d'ailleurs à changer de modes ;
mais nous avons vû des révolutions
plus
confidérables
, foit dans les fciences , foit
dans les moeurs, pour ne pas efperer celleci
malgré les contradicteurs
.
Ст
58 MERCURE DE FRANCE.
Je fçais qu'il ne fera jamais permis à
aucun prédicateur de changer le fond &
la matière des inftructions qu'ils doivent
annoncer aux peuples. Comme la Religion
eft invariable , fes maximes doivent
être inaltérables. Plût à Dieu qu'on eût
confervé de nos jours , en annonçant l'Evangile
, cette noble fimplicité qui en faifoit
autrefois & la force & la gloire ! mais
quelle différence des difcours des premiers
Apôtres avec ceux de leurs derniers fucceffeurs
! C'étoit autrefois aux pieds de la
Croix , & dans la méditation des diverfes
Ecritures , que les miniftres de la parole
du Seigneur puifoient les réflexions pathétiques
dont ils entretenoient fouvent
les fideles , réflexions que le zéle accompagnoit
, que l'exemple foutenoit , & que
la grace du Tout - puiffant faifoit fructifier.
Comme ils n'avoient d'autre objet
que celui d'étendre le royaume de Jefus-
Chrift , ils parloient felon que l'Efprit
divin , dont ils étoient animés , les infpiroit
; & des milliers de Juifs , de
Grecs , de Romains , & d'étrangers convertis
devenoient le fruit de leurs conquêtes
, & la récompenfe de leurs travaux
évangéliques .
Préfentement au contraire il femble que
nos Prédicateurs, contens des anciens proOCTOBRE.
1755. 59
grès de la religion , ne cherchent plus quà
faire admirer l'efprit & les graces de fes
Miniftres ; ce n'eft plus , pour la plûpart ,
dans les fources facrées qu'ils étudient les
oracles qu'ils nous débitent ; & comment
pourroient-ils fe fervit utilement de l'Ecriture
& des Peres dans les difcours qu'ils
compofent fur des ridicules de fociété ?
Auffi quel eft le fruit de ces portraits prophanes
, finon les vains applaudiffemens
de ces gens oififs , que la célébrité d'un
Prédicateur attire dans nos temples , &
que l'amufement y retient ? Perfuadés qu'il
leur fuffit de plaire à un peuple qu'ils devroient
inftruire , ces Miniftres frivoles fe
font eux-mêmes impofés un joug pefant ,
que des auditeurs délicats & critiques
ont bientôt fçu aggraver. Si ces derniers
les ont difpenfé de jetter de la folidité
& de l'onction dans leurs difcours , que
de talens n'en ont- ils pas exigé je veux
dire les agrémens de la figure , les graces
de la voix , la régularité des geftes , l'étendue
de la mémoire , la délicateffe des
expreffions , la fineffe des penfées , vains
ornemens plus propres à éblouir qu'à toucher
!
Or , dites - moi , Monfieur , comment
voulez-vous qu'un Prédicateur continuellement
occupé à compofer fon vifage , à
Cvj
60
MERCURE DE FRANCE.
animer fes bras , à modifier agréablement
les refforts de fa langue , & à inférer dans
une mémoire ingrate de magnifiques lambeaux
aufquels il n'a fouvent prêté qu'une
brillante coûture , foit propre à infpirer
de l'horreur pour le vice contre lequel il
doit tonner , ou à faire chérir la vertu
qu'il doit canonifer ?
Quoique je fois le premier à foutenir qu'il
ne fera jamais permis de toucher au fond
de la doctrine & de la morale de l'Evangile
, dois- je craindre de découvrir une nouvelle
méthode pour en publier les préceptes
& les maxîmes , fur tout fi cette nouvelle
forme eft plus facile & plus avantageufe
? Non , Monfieur ; & pour peu que
vous vouliez faire attention aux raifons
fur lefquelles je la fonde , vous conviendrez
vous - même de fon utilité. Ne vaudroit
il pas mieux qu'un Curé , occupé
pendant la plus grande partie de la femaine
à défervir une nombreuſe paroiffe ,
employât le peu de tems que la vifite des
malades , & les autres foins du gouvernement
fpirituel demandent de lui , à compofer
pour chaque Dimanche une folide
& inftructive homélie , que de le voir
paffer ce même tems à inférer dans fon
cerveau un prône de parade ? Quels fruits
peuvent faire les inftructions d'un pasteur
›
OCTOBRE 1755 . 61
qui fe borne à quelques points particuliers
de la morale évangélique , & dont
les difcours font par conféquent fi fouvent
répétés , que certain, paroiffiens affidus
feroient en état de les réciter à leur
tour ?
Au contraire , en permettant aux Prédicateurs
, & fur- tout à ceux qui font à la
tête des Paroiffes , d'avoir dans la chaire
le papier à la main , on leur laiffera le
tems de méditer les divines Ectitures ,
de s'inftruire dans les ouvrages des Saints
Peres , & par conféquent , de compofer
pour chaque femaine des homélies toujours
nouvelles ils pourront même par
ce moyen enfeigner fucceffivement un
corps de doctrine fuivie , repaffer toutes
les vérités de la religion , & en expofer
tous les devoirs . On fe plaint tous les jours
que le peuple n'eft pas inftruit ; & comment
peut- il l'être , lorfque les Prédicateurs
refférés dans un cercle étroit de matieres
frappantes , négligent ces fujets effentiels
fur lefquels le tems qu'ils perdent
à apprendre leurs difcours par mémoire ,
ne leur permet pas de travailler ? N'en doutez
pas , Monfieur : Voilà une des principales
caufes de l'ignorance des fidéles ;
& le feul moyen efficace pour y remédier ,
c'eft de leur procurer un plus grand nom62
MERCURE DE FRANCE.
bre d'inftructions , en diminuant le travail
de ceux que le Seigneur a deſtiné
pour les éclairer.
Je dis plus outre l'utilité générale que
produira la nouvelle méthode d'annoncer
l'Evangile , elle aura encore l'avantage
d'être plus agréable pour l'auditeur . Qu'un
Prédicateur peu fûr de fa mémoire fe trouble
, & qu'il foit fur le point de refter
court , que de tourmens , que d'embarras
dans l'auditoire ! mais quels font les Orateurs
Chrétiens , à qui une mémoire ingrate
ou volage , n'ait jamais joué de pareils
tours ? Combien même de jeunes
Prédicateurs , dégoûtés par un début peu
flateur de ce côté , ont abandonné un miniftere
dans lequel il fe feroient cependant
diftingués ?
N'allez pas me dire ici , Monfieur , qu'on
rira de voir un Eccléfiaftique lire d'un ton
modefte une folide inftruction . Pourquoi
riroit- on plutôt dans nos temples que dans
nos barreaux ? Ne voyons - nous pas tous
les jours dans ces dernieres affemblées les
plus célébres Avocats, le mémoire en main ,
foutenir les droits de l'orphélin , & mettre
la veuve à l'abri des ufurpateurs ? On
rira moins , Monfieur , à la lecture d'un fermon
chrétiennement appuyé fur les preuves
tirées de l'Ecriture & de la tradition ,
OCTOBRE . 1755 . 63
qu'on ne feroit en droit de le faire ( fi la
majefté du lieu le permettoit ) au récit par
mémoire de ces piéces théatrales , faites
pour nourrir en même tems , & l'amour
propre du miniftre , & la curiofité de l'auditeur
.
J'exhorte donc les Prédicateurs à fecouer
le joug du préjugé & à facrifier au
bien général le petit talent d'hommes de
mémoire. Vous appréhendez , dites- vous ,
qu'il n'en foit ici comme du confeil des
rats . Tous les intéreffés ne manqueront
pas d'approuver l'avis ; mais qui attachera
le grélot ? Qui les plus fages , & les plus
zélés. Que des Griffet , par exemple , que
des Sanfaric commencent à nous enfeigner
le papier à la main . Qui d'entre les auditeurs
ofera les tourner en ridicule ? Qui
d'entre leurs confreres ne fe fera pas gloire
de marcher fur leurs traces ? Qui feroit
même plus propre que vous , Monfieur
à faire réuflir un projet , dans lequel je
n'envifage que l'utilité publique ?
Je recommande enfin à ceux qui nous
donnent des préceptes fur l'éloquence de
la chaire , d'infifter moins fur le brillant
que fur la folidité . A quoi fert de fe conformer
aux régles prefcrites dans l'éloquence
* dis corps , tandis qu'on ignore l'éloquen-
* Ouvrage tout nouveau.
64 MERCURE DE FRANCE.
ce des moeurs , & celle du ciel 2
J'ai l'honneur d'être , & c.
Ce i5 Juillet 1755-
de B ***.
Mconte une
Onfieur , vous avez beau regarder
comme une plaifanterie
le projet
que j'ai conçu , d'engager les Prédicateurs
à réciter leurs fermons , le papier en main ;
plus je penfe à cette nouvelle méthode ,
depuis que je vous en ai parlé pour la
premiere fois , plus j'y découvre d'avantages.
Je ne me cache point à moi même
les obftacles qu'il faudra furmonter . L'habitude
dans laquelle on eft depuis longtems
de prêcher par mémoire , fera difficile
à détruire , même chez une nation
fi portée d'ailleurs à changer de modes ;
mais nous avons vû des révolutions
plus
confidérables
, foit dans les fciences , foit
dans les moeurs, pour ne pas efperer celleci
malgré les contradicteurs
.
Ст
58 MERCURE DE FRANCE.
Je fçais qu'il ne fera jamais permis à
aucun prédicateur de changer le fond &
la matière des inftructions qu'ils doivent
annoncer aux peuples. Comme la Religion
eft invariable , fes maximes doivent
être inaltérables. Plût à Dieu qu'on eût
confervé de nos jours , en annonçant l'Evangile
, cette noble fimplicité qui en faifoit
autrefois & la force & la gloire ! mais
quelle différence des difcours des premiers
Apôtres avec ceux de leurs derniers fucceffeurs
! C'étoit autrefois aux pieds de la
Croix , & dans la méditation des diverfes
Ecritures , que les miniftres de la parole
du Seigneur puifoient les réflexions pathétiques
dont ils entretenoient fouvent
les fideles , réflexions que le zéle accompagnoit
, que l'exemple foutenoit , & que
la grace du Tout - puiffant faifoit fructifier.
Comme ils n'avoient d'autre objet
que celui d'étendre le royaume de Jefus-
Chrift , ils parloient felon que l'Efprit
divin , dont ils étoient animés , les infpiroit
; & des milliers de Juifs , de
Grecs , de Romains , & d'étrangers convertis
devenoient le fruit de leurs conquêtes
, & la récompenfe de leurs travaux
évangéliques .
Préfentement au contraire il femble que
nos Prédicateurs, contens des anciens proOCTOBRE.
1755. 59
grès de la religion , ne cherchent plus quà
faire admirer l'efprit & les graces de fes
Miniftres ; ce n'eft plus , pour la plûpart ,
dans les fources facrées qu'ils étudient les
oracles qu'ils nous débitent ; & comment
pourroient-ils fe fervit utilement de l'Ecriture
& des Peres dans les difcours qu'ils
compofent fur des ridicules de fociété ?
Auffi quel eft le fruit de ces portraits prophanes
, finon les vains applaudiffemens
de ces gens oififs , que la célébrité d'un
Prédicateur attire dans nos temples , &
que l'amufement y retient ? Perfuadés qu'il
leur fuffit de plaire à un peuple qu'ils devroient
inftruire , ces Miniftres frivoles fe
font eux-mêmes impofés un joug pefant ,
que des auditeurs délicats & critiques
ont bientôt fçu aggraver. Si ces derniers
les ont difpenfé de jetter de la folidité
& de l'onction dans leurs difcours , que
de talens n'en ont- ils pas exigé je veux
dire les agrémens de la figure , les graces
de la voix , la régularité des geftes , l'étendue
de la mémoire , la délicateffe des
expreffions , la fineffe des penfées , vains
ornemens plus propres à éblouir qu'à toucher
!
Or , dites - moi , Monfieur , comment
voulez-vous qu'un Prédicateur continuellement
occupé à compofer fon vifage , à
Cvj
60
MERCURE DE FRANCE.
animer fes bras , à modifier agréablement
les refforts de fa langue , & à inférer dans
une mémoire ingrate de magnifiques lambeaux
aufquels il n'a fouvent prêté qu'une
brillante coûture , foit propre à infpirer
de l'horreur pour le vice contre lequel il
doit tonner , ou à faire chérir la vertu
qu'il doit canonifer ?
Quoique je fois le premier à foutenir qu'il
ne fera jamais permis de toucher au fond
de la doctrine & de la morale de l'Evangile
, dois- je craindre de découvrir une nouvelle
méthode pour en publier les préceptes
& les maxîmes , fur tout fi cette nouvelle
forme eft plus facile & plus avantageufe
? Non , Monfieur ; & pour peu que
vous vouliez faire attention aux raifons
fur lefquelles je la fonde , vous conviendrez
vous - même de fon utilité. Ne vaudroit
il pas mieux qu'un Curé , occupé
pendant la plus grande partie de la femaine
à défervir une nombreuſe paroiffe ,
employât le peu de tems que la vifite des
malades , & les autres foins du gouvernement
fpirituel demandent de lui , à compofer
pour chaque Dimanche une folide
& inftructive homélie , que de le voir
paffer ce même tems à inférer dans fon
cerveau un prône de parade ? Quels fruits
peuvent faire les inftructions d'un pasteur
›
OCTOBRE 1755 . 61
qui fe borne à quelques points particuliers
de la morale évangélique , & dont
les difcours font par conféquent fi fouvent
répétés , que certain, paroiffiens affidus
feroient en état de les réciter à leur
tour ?
Au contraire , en permettant aux Prédicateurs
, & fur- tout à ceux qui font à la
tête des Paroiffes , d'avoir dans la chaire
le papier à la main , on leur laiffera le
tems de méditer les divines Ectitures ,
de s'inftruire dans les ouvrages des Saints
Peres , & par conféquent , de compofer
pour chaque femaine des homélies toujours
nouvelles ils pourront même par
ce moyen enfeigner fucceffivement un
corps de doctrine fuivie , repaffer toutes
les vérités de la religion , & en expofer
tous les devoirs . On fe plaint tous les jours
que le peuple n'eft pas inftruit ; & comment
peut- il l'être , lorfque les Prédicateurs
refférés dans un cercle étroit de matieres
frappantes , négligent ces fujets effentiels
fur lefquels le tems qu'ils perdent
à apprendre leurs difcours par mémoire ,
ne leur permet pas de travailler ? N'en doutez
pas , Monfieur : Voilà une des principales
caufes de l'ignorance des fidéles ;
& le feul moyen efficace pour y remédier ,
c'eft de leur procurer un plus grand nom62
MERCURE DE FRANCE.
bre d'inftructions , en diminuant le travail
de ceux que le Seigneur a deſtiné
pour les éclairer.
Je dis plus outre l'utilité générale que
produira la nouvelle méthode d'annoncer
l'Evangile , elle aura encore l'avantage
d'être plus agréable pour l'auditeur . Qu'un
Prédicateur peu fûr de fa mémoire fe trouble
, & qu'il foit fur le point de refter
court , que de tourmens , que d'embarras
dans l'auditoire ! mais quels font les Orateurs
Chrétiens , à qui une mémoire ingrate
ou volage , n'ait jamais joué de pareils
tours ? Combien même de jeunes
Prédicateurs , dégoûtés par un début peu
flateur de ce côté , ont abandonné un miniftere
dans lequel il fe feroient cependant
diftingués ?
N'allez pas me dire ici , Monfieur , qu'on
rira de voir un Eccléfiaftique lire d'un ton
modefte une folide inftruction . Pourquoi
riroit- on plutôt dans nos temples que dans
nos barreaux ? Ne voyons - nous pas tous
les jours dans ces dernieres affemblées les
plus célébres Avocats, le mémoire en main ,
foutenir les droits de l'orphélin , & mettre
la veuve à l'abri des ufurpateurs ? On
rira moins , Monfieur , à la lecture d'un fermon
chrétiennement appuyé fur les preuves
tirées de l'Ecriture & de la tradition ,
OCTOBRE . 1755 . 63
qu'on ne feroit en droit de le faire ( fi la
majefté du lieu le permettoit ) au récit par
mémoire de ces piéces théatrales , faites
pour nourrir en même tems , & l'amour
propre du miniftre , & la curiofité de l'auditeur
.
J'exhorte donc les Prédicateurs à fecouer
le joug du préjugé & à facrifier au
bien général le petit talent d'hommes de
mémoire. Vous appréhendez , dites- vous ,
qu'il n'en foit ici comme du confeil des
rats . Tous les intéreffés ne manqueront
pas d'approuver l'avis ; mais qui attachera
le grélot ? Qui les plus fages , & les plus
zélés. Que des Griffet , par exemple , que
des Sanfaric commencent à nous enfeigner
le papier à la main . Qui d'entre les auditeurs
ofera les tourner en ridicule ? Qui
d'entre leurs confreres ne fe fera pas gloire
de marcher fur leurs traces ? Qui feroit
même plus propre que vous , Monfieur
à faire réuflir un projet , dans lequel je
n'envifage que l'utilité publique ?
Je recommande enfin à ceux qui nous
donnent des préceptes fur l'éloquence de
la chaire , d'infifter moins fur le brillant
que fur la folidité . A quoi fert de fe conformer
aux régles prefcrites dans l'éloquence
* dis corps , tandis qu'on ignore l'éloquen-
* Ouvrage tout nouveau.
64 MERCURE DE FRANCE.
ce des moeurs , & celle du ciel 2
J'ai l'honneur d'être , & c.
Ce i5 Juillet 1755-
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Résumé : Lettre de M. l'Abbé A. P. J. à M. l'Abbé de B***.
La lettre de l'Abbé A. P. J. à l'Abbé de B *** introduit une nouvelle méthode pour les prédicateurs, consistant à réciter leurs sermons en ayant le texte en main. L'auteur reconnaît les obstacles, notamment l'habitude de prêcher par mémoire, mais espère une révolution dans les pratiques religieuses, similaire à celles observées dans les sciences et les mœurs. Il souligne l'importance de conserver les maximes religieuses invariablement tout en améliorant la méthode de leur transmission. L'Abbé critique les sermons actuels, qui se concentrent souvent sur l'esprit et les grâces des ministres plutôt que sur la simplicité et la force des premiers apôtres. Il déplore que les prédicateurs modernes cherchent à plaire plutôt qu'à instruire, se concentrant sur des aspects superficiels comme l'apparence et la voix. Cette approche frivole impose un joug pesant aux prédicateurs, qui doivent répondre aux attentes critiques des auditeurs. L'auteur propose que les prédicateurs, surtout ceux à la tête des paroisses, utilisent le papier pour lire leurs homélies. Cela leur permettrait de méditer les Écritures et les œuvres des Saints Pères, et de composer des sermons nouveaux chaque semaine. Cette méthode réduirait l'ignorance parmi les fidèles, qui bénéficieraient de plus d'instructions. De plus, elle éviterait les embarras causés par les erreurs de mémoire des prédicateurs. L'Abbé compare cette pratique à celle des avocats, qui utilisent des notes en plaidant. Il exhorte les prédicateurs à abandonner le préjugé contre la lecture des sermons et à adopter cette méthode pour le bien général. Il recommande également aux enseignants de l'éloquence de la chaire de privilégier la solidité plutôt que le brillant.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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593
p. 54-57
ODE Tirée du Pseaume 99.
Début :
Foibles enfans de la poussiere ! [...]
Mots clefs :
Dieu, Cieux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ODE Tirée du Pseaume 99.
ODE
Tirée du
Pleaume 99 .
Foibles enfans de la pouffiere !
Que celui qui vous fit de rien ,
Dans cette pénible carriere
Soit votre infaillible foutien,
Saifis d'une unanime joie ,
Adorez tous le Roi des Rois ;
Goutez les biens qu'il vous envoie ,
Et n'enfreignez jamais fes loix.
Il nous a fait à fon image ,
Il eft notre vrai Créateur ;
Nous fommes fon plus cher ouvrage :
Lui feul a droit fur notre coeur.
Arrachez , d'une fainte force ,
Les vices en vous combattus :
Du plaifir ils n'ont que l'écorce
La tige en eft dans les vertus .
C.
DECEMBRE, 1755 . $52
» Des Cieux contemplez la ftructure !
» Voyez tous ces êtres divers :
» Ah ! je reconnois la nature ,
C'eft la mere de l'univers .
f
» Nous fommes les Dieux de la terre :
Nous ne dépendons que de nous.
» Mortels ! d'un maître du tonnerre
» Ne craignez point le vain courroux,
» Monftre pieux ! fageffe affreuſe !
» Tu rendrois nos jours languiffans.
» Viens , volupté délicieufe !
Sois la Déeffe de nos fens.
Homme ingrat , qui d'un front impie
Etale ces honteux difcours ,
Bientôt d'une exécrable vie
La mort interrompra le cours,
串
Déja ce corps réduit en poudre !
Par l'ordre d'un Dieu ranimé ,
Se leve , & frappé de la foudre ,
Brule fans être confumé.
Civ
56
MERCURE DE FRANCE .
Rebelle enfant , connois un pere !
Parle , pécheur ! eſt- il un Dieu ?
Oui ! ce juge intégre & févere
Sçait punir le feu par le feu.
Vous , qui d'une coupable flamme ,
Fuyant l'éclat trop féducteur ,
Pour ne point égarer votre ame ,
Marchez fous le facré paſteur .
Reftez donc fes brébis chéries ;
Et de loup bravant les fureurs ,
Paiffez dans fes faintes prairies ;
Vous n'y trouverez que des fleurs.
Le chagrin , le mépris , l'outrage
Viennent troubler votre repos
Souffrez , Chrétiens , avec courage:
Ce font de vrais biens que vos maux.
Chantez le Seigneur dans vos fêtes ;
Les hommes droits font fes amis :
Doux foldats , bornez vos conquêtes
A lui gagner les ennemis.
DECEMBRE . 1755. 57
Que l'or décore les portiques
De vos temples majestueux ;
Et joignez vos divins cantiques
Aux concerts immortels des Cieux.
Seigneur , que tu nous es propice !
Loin par toi d'être rejettés ,
Tu vois croître notre malice ,
Et nous conferves tes bontés.
$3
Adorable pere , à toute heure
Tu veilles fur tes chers enfans ;
Et dans la céleste demeure
Tu les fais entrer triomphans.
Toi , qui partout laiffe des traces ,
Et dont Dieu feul eft respecté ,
Tems , porte de races en races.
Son immuable vérité .
Ad ..... d'Arp....
Tirée du
Pleaume 99 .
Foibles enfans de la pouffiere !
Que celui qui vous fit de rien ,
Dans cette pénible carriere
Soit votre infaillible foutien,
Saifis d'une unanime joie ,
Adorez tous le Roi des Rois ;
Goutez les biens qu'il vous envoie ,
Et n'enfreignez jamais fes loix.
Il nous a fait à fon image ,
Il eft notre vrai Créateur ;
Nous fommes fon plus cher ouvrage :
Lui feul a droit fur notre coeur.
Arrachez , d'une fainte force ,
Les vices en vous combattus :
Du plaifir ils n'ont que l'écorce
La tige en eft dans les vertus .
C.
DECEMBRE, 1755 . $52
» Des Cieux contemplez la ftructure !
» Voyez tous ces êtres divers :
» Ah ! je reconnois la nature ,
C'eft la mere de l'univers .
f
» Nous fommes les Dieux de la terre :
Nous ne dépendons que de nous.
» Mortels ! d'un maître du tonnerre
» Ne craignez point le vain courroux,
» Monftre pieux ! fageffe affreuſe !
» Tu rendrois nos jours languiffans.
» Viens , volupté délicieufe !
Sois la Déeffe de nos fens.
Homme ingrat , qui d'un front impie
Etale ces honteux difcours ,
Bientôt d'une exécrable vie
La mort interrompra le cours,
串
Déja ce corps réduit en poudre !
Par l'ordre d'un Dieu ranimé ,
Se leve , & frappé de la foudre ,
Brule fans être confumé.
Civ
56
MERCURE DE FRANCE .
Rebelle enfant , connois un pere !
Parle , pécheur ! eſt- il un Dieu ?
Oui ! ce juge intégre & févere
Sçait punir le feu par le feu.
Vous , qui d'une coupable flamme ,
Fuyant l'éclat trop féducteur ,
Pour ne point égarer votre ame ,
Marchez fous le facré paſteur .
Reftez donc fes brébis chéries ;
Et de loup bravant les fureurs ,
Paiffez dans fes faintes prairies ;
Vous n'y trouverez que des fleurs.
Le chagrin , le mépris , l'outrage
Viennent troubler votre repos
Souffrez , Chrétiens , avec courage:
Ce font de vrais biens que vos maux.
Chantez le Seigneur dans vos fêtes ;
Les hommes droits font fes amis :
Doux foldats , bornez vos conquêtes
A lui gagner les ennemis.
DECEMBRE . 1755. 57
Que l'or décore les portiques
De vos temples majestueux ;
Et joignez vos divins cantiques
Aux concerts immortels des Cieux.
Seigneur , que tu nous es propice !
Loin par toi d'être rejettés ,
Tu vois croître notre malice ,
Et nous conferves tes bontés.
$3
Adorable pere , à toute heure
Tu veilles fur tes chers enfans ;
Et dans la céleste demeure
Tu les fais entrer triomphans.
Toi , qui partout laiffe des traces ,
Et dont Dieu feul eft respecté ,
Tems , porte de races en races.
Son immuable vérité .
Ad ..... d'Arp....
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Résumé : ODE Tirée du Pseaume 99.
Le texte est une ode religieuse et morale, publiée en décembre 1755 dans le Mercure de France. La première section invite les lecteurs à adorer Dieu, à profiter de ses bienfaits et à respecter ses lois. Elle souligne que l'humanité est créée à l'image divine et que les vices doivent être combattus pour révéler les vertus. La deuxième section encourage la contemplation de la structure des cieux et de la diversité des êtres, reconnaissant la nature comme la mère de l'univers. Elle met en garde contre les dangers de la volupté et de l'ingratitude. La troisième section appelle les pécheurs à reconnaître un père céleste et à suivre les enseignements du pasteur sacré. Elle encourage les chrétiens à souffrir avec courage et à chanter le Seigneur lors des fêtes, tout en limitant leurs conquêtes à gagner les ennemis pour Dieu. La dernière section prie pour que l'or décore les temples et que les cantiques divins se joignent aux concerts célestes. Elle exprime la gratitude envers Dieu pour ses bontés malgré la malice humaine et reconnaît le temps comme porteur de la vérité immuable de Dieu.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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594
p. 133-140
Lettre écrite de Belley, à l'occasion du passage de M. le Marquis de Paulmy par cette ville.
Début :
Vous avez pris, Monsieur, une trop grande part à l'établissement du College [...]
Mots clefs :
Collège, Collège du Belley, Belley, Marquis de Paulmy, Ministre, Honneur, Province, Coeur, Joie, Chanoine, Guerre, Voeux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Lettre écrite de Belley, à l'occasion du passage de M. le Marquis de Paulmy par cette ville.
Lettre écrite de Belley , à l'occafion du paſſage
de M. le Marquis de Paulmy par cette
ville.
Ous avez pris , Monfieur , une trop
grande part à l'établiffement
du Cotlege
du Belley , dont j'eus l'honneur de
vous entretenir , il y a quelques mois ( 1 ) ,
pour vous laiffer ignorer fes actions d'éclat
& fes fuccés , dans les occafions furtout
qui intéreffent particulierement
la ville
& la province. Vous conviendrez
aifément
que le paffage de M. le Marquis de
Paulmy par Belley , eft un de ces momens
précieux également propres à s'attirer
l'attention de nos Mufes , & à exciter la
joie dans le coeur de nos citoyens .
Ce Miniftre arriva ici le famedi s Juil- S
let dernier fur les dix heures du foir. La
porte de la ville par laquelle il fit fon entrée
, étoit illuminée avec gout , & chargée
d'un cartouche , où on lifoit cette infcription
, qui étoit de M. Vinfon , Chanoine
Régulier de S. Antoine , Syndic du
College.
( 1 ) Voyez le Mercure d'Avril de cette année,
Page 147.
134 MERCURE DE FRANCE.
Felici Adventui
Supremi Bellorum Moderatoris
Tanto exultans hofpite
Bellicenfis Civitas
Plaudit.
L'écuffon des armes de M. le Marquis
de Paulmy faifoit partie de la décoration
de la porte. Vous fçavez que ce font deux
lions d'or paffans fur un fond d'azur . M.
Vinfon y avoit fait ajouter ce mot , Defenfuri
incedunt ; allufion noble , qui caracrerife
heureufement les fonctions du Miniftre
occupé pour lors à la vifite de nos
places de guerre.
L'infcription qui étoit placée fur la façade
de l'Hôtel de ville , pareillement illuminée
, eft de la même main , & elle exprime
la même penfée avec plus de développement
:
Vigilantiffimo
Belli Adminiftro ,
Provincias Tutanti Prafentiá ,
Hoftes Providentia Continenti ,
Gratulatur Bellicium.
Le lendemain de fon arrivée , M. le
Marquis de Paulniy reçut les complimens
des Syndics de la province, & des Corps
DECEMBRE. 1755. 135.
de la ville. Voici celui qui fut prononcé
par M. Granier , Chanoine Régulier de S.
Antoine , Profeffeur de Rhétorique , &
qui fut également gouté du Miniftre &
du Public.
Monfeigneur , votre arrivée eft l'é-
" poque de la joie publique , & vous êtes ,
» Monfeigneur , le digne objet de notre
» admiration & de nos hommages . La na-
» ture , en vous comblant de fes dons les
plus rares , vous infpira l'ardeur de les
» cultiver. Aux talens fupérieurs vous
» joignîtes bientôt les connoiffances les
plus vaftes , les plus fublimes vertus ,
» & vous fçûtes toujours tempérer leur
» éclat par le voile attrayant des qualités
» fociables. Dans un âge encore tendre
» vous fixâtes les regards du Monarque &
" les fuffrages du public. La carriere eft
» d'abord ouverte aux grands hommes.
» Leur mérite en marque l'étendue . Une
nation prudente & notre ancienne alliée
» vous vit menager auprès d'elle les in-
" térêts de notre Monarchie . Elle eut tout
» lieu d'être furprife de trouver dans un
» Ambaſſadeur auffi jeune la pénétration
» la plus vive , la circonfpection la plus
» réfléchie , la prudence la plus confom-
» mée. Devenu depuis l'arbitre de la guer-
» re , on vous voit , Monfeigneur , avec
و ر
"
136 MERCURE DE FRANCE.
, ر
» une activité furprenante , parcourir le
» Royaume de l'une à l'autre extrêmité ,
examiner tout par vous-même , pour-
»voir à la fûreté de nos frontieres , &
faire paffer dans le coeur de nos enne-
»mis cette crainte pleine d'égards , que
la vigilance du gouvernement ne man-
" que jamais d'infpirer. Il convenoit à un
Roi conquerant & pacifique d'avoir un
Miniftre également jaloux de prévenir
» la guerre & de la faire avec fuccès . Plus
» la foudre , dont vous êtes dépofitaire ,
» caufe de terreur , moins vous aimez à
» la faire éclater. C'eft à vos foins & à vo-
» tre prudence que nos provinces doivent
» leur repos. Veuille le ciel conferver
» long - tems une vie fi précieuſe à la France
! Puiffent nos fentimens & nos voeux
» mériter au College de Belley l'honneur
»de votre protection !
Les Penfionnaires du College fignalerent
leur zele par un compliment en vers ,
de la compofition de M. Sutaine , auffi
Chanoine Régulier de S. Antoine , & Profeffeur
de Rhétorique. Ce fut M. Dugaz ,
de Lyon , l'un de ces penfionnaires , qui
devint l'interprete des fentimens communs
, qu'il exprima avec autant d'aflurance
que de bonne grace , en ces termes :
Quelle divinité puiſſante
DECEMBRE. 1755 137
Favorife ces lieux ?
Jamais fous le regne des Dieux ,
L'Univers gouta- t'il de grace plus touchante !
Nous te voyons , Paulmy , nos voeux font fatisfaits.
Le Ciel pouvoit -il mieux feconder nos fouhaits ,
Qu'en accordant à notre impatience
Le bonheur d'admirer le foutien de la France ?
Qui feroit infenfible à tes tendres égards ,
Miniftre du Dieu de la guerre ?
Pour venir dans ces lieux tu quittes ton tonnerre ;
Tu craindrois d'effrayer nos timides regards.
Autour de toi , les jeux , les ris , les
Viennent folâtrer tour à tour;
Et nous ne voyons fur tes traces ,
graces ,
Que des coeurs pénétrés de refpect & d'amour.
Sous l'ordre du plus grand des Princes ,
Ta prévoyante activité
Affure à nos riches Provinces
Une douce tranquillité.
Oui , c'eſt partes bienfaits , qu'aux bords de l'Hyppocrêne
,
Jaloux des faveurs d'Apollon ,
Nous allons cultiver dans le facré vallon
Les fruits heureux d'une innocente veine.
Tu t'en fouviens , Phoebus & les neuf Soeurs
Te répétoient encor leurs chanfons immortelles ,
Quand le plus grand des Rois , par de juftes faveurs
>
138 MERCURE DE FRANCE.
Remit entre tes mains fidelles
Le noble emploi d'aller chez des peuples prudens
( 1 )
Faire briller l'éclat qui t'environne ,
Et foutenir les droits de fa couronne.
Qui n'admira dès -lors les refforts tout puiffans
De ta fage induſtrie ›
A peine revenu dans ta chere Patrie ,
On vit de généreux rivaux , ( 2 )
On vit un corps illuftre , où regnent la ſageſſe ,
Le bon goût , les talens & le dieu du Permeffe ,
Admirer tes nobles travaux ;
Ceindre ton front du laurier de la gloire ,
Partager avec toi fes foins laborieux ;
Graver ton nom au Temple de Mémoire ,
Et t'élever au rang des Dieux.
Sans doute les neuf foeurs firent naître en ton ame
Ce feu divin dont la céleste flamme
Anime ton grand coeur.
Daigne voir leurs enfans avec un oeil flatteur ,
Reçois nos voeux & notre hommage ,
Ce fera de notre bonheur
Le garand le plus fûr , le plus précieux gage .
Ce n'eft point là l'unique témoignage
de la joie qu'a donné le College pendant
le féjour de M. le Marquis de Paulmy à
( 1 ) Ambaſſade de M. de Paulmi en Suiffe.
(2) Réception de M. de Paulmy à l'Académie
Françoile.
DECEMBRE . 1755. 139
Belley ; il a taché de l'amufer , & de le
retenir le plus longtemps qu'il étoit poffible
, par la repréfentation d'une Comédie ;
fpectacle d'autant plus agréable à nos Citoyens
, qu'il paroiffoit pour la premiere
fois dans cette ville. Pour peu que ce coup
d'effai pique votre curiofité , je me ferai
un plaifir de vous envoyer une autrefois
l'analyſe de la piece , à laquelle nous avons
unanimement accordé nos fuffrages.
J'ai l'honneur d'être , &c.
A Belley , le 15 Juillet , 1755 .
Duchefne , Libraire à Paris , rue S. Jacques
, au Temple du Gout , vient de mettre
en vente l'Année Musicale , ouvrage
périodique. Cet ouvrage d'agrément fe
diftribue toutes les femaines par une feuille
grand in 8 °. de quatre pages , contenant
des Ariettes & Vaudevilles nouveaux , &
des petits airs choifis par les plus habiles
Muficiens , tant Italiens que François.
Chaque feuille fe vend fix fols . Les amateurs
qui fouhaiteront s'abonner , payeront
pour Paris quinze livres
par année
& on les leur apportera chez eux au moment
qu'elles fortiront de deffous preffe ;
& pour la province on payera dix- huit livres
par an. Le Libraire fe charge de les
140 MERCURE DE FRANCE.
faire rendre à leur deftination , francs de
port. La premiere feuille a paru le premier
Août 1755.
de M. le Marquis de Paulmy par cette
ville.
Ous avez pris , Monfieur , une trop
grande part à l'établiffement
du Cotlege
du Belley , dont j'eus l'honneur de
vous entretenir , il y a quelques mois ( 1 ) ,
pour vous laiffer ignorer fes actions d'éclat
& fes fuccés , dans les occafions furtout
qui intéreffent particulierement
la ville
& la province. Vous conviendrez
aifément
que le paffage de M. le Marquis de
Paulmy par Belley , eft un de ces momens
précieux également propres à s'attirer
l'attention de nos Mufes , & à exciter la
joie dans le coeur de nos citoyens .
Ce Miniftre arriva ici le famedi s Juil- S
let dernier fur les dix heures du foir. La
porte de la ville par laquelle il fit fon entrée
, étoit illuminée avec gout , & chargée
d'un cartouche , où on lifoit cette infcription
, qui étoit de M. Vinfon , Chanoine
Régulier de S. Antoine , Syndic du
College.
( 1 ) Voyez le Mercure d'Avril de cette année,
Page 147.
134 MERCURE DE FRANCE.
Felici Adventui
Supremi Bellorum Moderatoris
Tanto exultans hofpite
Bellicenfis Civitas
Plaudit.
L'écuffon des armes de M. le Marquis
de Paulmy faifoit partie de la décoration
de la porte. Vous fçavez que ce font deux
lions d'or paffans fur un fond d'azur . M.
Vinfon y avoit fait ajouter ce mot , Defenfuri
incedunt ; allufion noble , qui caracrerife
heureufement les fonctions du Miniftre
occupé pour lors à la vifite de nos
places de guerre.
L'infcription qui étoit placée fur la façade
de l'Hôtel de ville , pareillement illuminée
, eft de la même main , & elle exprime
la même penfée avec plus de développement
:
Vigilantiffimo
Belli Adminiftro ,
Provincias Tutanti Prafentiá ,
Hoftes Providentia Continenti ,
Gratulatur Bellicium.
Le lendemain de fon arrivée , M. le
Marquis de Paulniy reçut les complimens
des Syndics de la province, & des Corps
DECEMBRE. 1755. 135.
de la ville. Voici celui qui fut prononcé
par M. Granier , Chanoine Régulier de S.
Antoine , Profeffeur de Rhétorique , &
qui fut également gouté du Miniftre &
du Public.
Monfeigneur , votre arrivée eft l'é-
" poque de la joie publique , & vous êtes ,
» Monfeigneur , le digne objet de notre
» admiration & de nos hommages . La na-
» ture , en vous comblant de fes dons les
plus rares , vous infpira l'ardeur de les
» cultiver. Aux talens fupérieurs vous
» joignîtes bientôt les connoiffances les
plus vaftes , les plus fublimes vertus ,
» & vous fçûtes toujours tempérer leur
» éclat par le voile attrayant des qualités
» fociables. Dans un âge encore tendre
» vous fixâtes les regards du Monarque &
" les fuffrages du public. La carriere eft
» d'abord ouverte aux grands hommes.
» Leur mérite en marque l'étendue . Une
nation prudente & notre ancienne alliée
» vous vit menager auprès d'elle les in-
" térêts de notre Monarchie . Elle eut tout
» lieu d'être furprife de trouver dans un
» Ambaſſadeur auffi jeune la pénétration
» la plus vive , la circonfpection la plus
» réfléchie , la prudence la plus confom-
» mée. Devenu depuis l'arbitre de la guer-
» re , on vous voit , Monfeigneur , avec
و ر
"
136 MERCURE DE FRANCE.
, ر
» une activité furprenante , parcourir le
» Royaume de l'une à l'autre extrêmité ,
examiner tout par vous-même , pour-
»voir à la fûreté de nos frontieres , &
faire paffer dans le coeur de nos enne-
»mis cette crainte pleine d'égards , que
la vigilance du gouvernement ne man-
" que jamais d'infpirer. Il convenoit à un
Roi conquerant & pacifique d'avoir un
Miniftre également jaloux de prévenir
» la guerre & de la faire avec fuccès . Plus
» la foudre , dont vous êtes dépofitaire ,
» caufe de terreur , moins vous aimez à
» la faire éclater. C'eft à vos foins & à vo-
» tre prudence que nos provinces doivent
» leur repos. Veuille le ciel conferver
» long - tems une vie fi précieuſe à la France
! Puiffent nos fentimens & nos voeux
» mériter au College de Belley l'honneur
»de votre protection !
Les Penfionnaires du College fignalerent
leur zele par un compliment en vers ,
de la compofition de M. Sutaine , auffi
Chanoine Régulier de S. Antoine , & Profeffeur
de Rhétorique. Ce fut M. Dugaz ,
de Lyon , l'un de ces penfionnaires , qui
devint l'interprete des fentimens communs
, qu'il exprima avec autant d'aflurance
que de bonne grace , en ces termes :
Quelle divinité puiſſante
DECEMBRE. 1755 137
Favorife ces lieux ?
Jamais fous le regne des Dieux ,
L'Univers gouta- t'il de grace plus touchante !
Nous te voyons , Paulmy , nos voeux font fatisfaits.
Le Ciel pouvoit -il mieux feconder nos fouhaits ,
Qu'en accordant à notre impatience
Le bonheur d'admirer le foutien de la France ?
Qui feroit infenfible à tes tendres égards ,
Miniftre du Dieu de la guerre ?
Pour venir dans ces lieux tu quittes ton tonnerre ;
Tu craindrois d'effrayer nos timides regards.
Autour de toi , les jeux , les ris , les
Viennent folâtrer tour à tour;
Et nous ne voyons fur tes traces ,
graces ,
Que des coeurs pénétrés de refpect & d'amour.
Sous l'ordre du plus grand des Princes ,
Ta prévoyante activité
Affure à nos riches Provinces
Une douce tranquillité.
Oui , c'eſt partes bienfaits , qu'aux bords de l'Hyppocrêne
,
Jaloux des faveurs d'Apollon ,
Nous allons cultiver dans le facré vallon
Les fruits heureux d'une innocente veine.
Tu t'en fouviens , Phoebus & les neuf Soeurs
Te répétoient encor leurs chanfons immortelles ,
Quand le plus grand des Rois , par de juftes faveurs
>
138 MERCURE DE FRANCE.
Remit entre tes mains fidelles
Le noble emploi d'aller chez des peuples prudens
( 1 )
Faire briller l'éclat qui t'environne ,
Et foutenir les droits de fa couronne.
Qui n'admira dès -lors les refforts tout puiffans
De ta fage induſtrie ›
A peine revenu dans ta chere Patrie ,
On vit de généreux rivaux , ( 2 )
On vit un corps illuftre , où regnent la ſageſſe ,
Le bon goût , les talens & le dieu du Permeffe ,
Admirer tes nobles travaux ;
Ceindre ton front du laurier de la gloire ,
Partager avec toi fes foins laborieux ;
Graver ton nom au Temple de Mémoire ,
Et t'élever au rang des Dieux.
Sans doute les neuf foeurs firent naître en ton ame
Ce feu divin dont la céleste flamme
Anime ton grand coeur.
Daigne voir leurs enfans avec un oeil flatteur ,
Reçois nos voeux & notre hommage ,
Ce fera de notre bonheur
Le garand le plus fûr , le plus précieux gage .
Ce n'eft point là l'unique témoignage
de la joie qu'a donné le College pendant
le féjour de M. le Marquis de Paulmy à
( 1 ) Ambaſſade de M. de Paulmi en Suiffe.
(2) Réception de M. de Paulmy à l'Académie
Françoile.
DECEMBRE . 1755. 139
Belley ; il a taché de l'amufer , & de le
retenir le plus longtemps qu'il étoit poffible
, par la repréfentation d'une Comédie ;
fpectacle d'autant plus agréable à nos Citoyens
, qu'il paroiffoit pour la premiere
fois dans cette ville. Pour peu que ce coup
d'effai pique votre curiofité , je me ferai
un plaifir de vous envoyer une autrefois
l'analyſe de la piece , à laquelle nous avons
unanimement accordé nos fuffrages.
J'ai l'honneur d'être , &c.
A Belley , le 15 Juillet , 1755 .
Duchefne , Libraire à Paris , rue S. Jacques
, au Temple du Gout , vient de mettre
en vente l'Année Musicale , ouvrage
périodique. Cet ouvrage d'agrément fe
diftribue toutes les femaines par une feuille
grand in 8 °. de quatre pages , contenant
des Ariettes & Vaudevilles nouveaux , &
des petits airs choifis par les plus habiles
Muficiens , tant Italiens que François.
Chaque feuille fe vend fix fols . Les amateurs
qui fouhaiteront s'abonner , payeront
pour Paris quinze livres
par année
& on les leur apportera chez eux au moment
qu'elles fortiront de deffous preffe ;
& pour la province on payera dix- huit livres
par an. Le Libraire fe charge de les
140 MERCURE DE FRANCE.
faire rendre à leur deftination , francs de
port. La premiere feuille a paru le premier
Août 1755.
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Résumé : Lettre écrite de Belley, à l'occasion du passage de M. le Marquis de Paulmy par cette ville.
La lettre, rédigée à Belley, célèbre la visite du Marquis de Paulmy dans cette ville. L'auteur exprime sa reconnaissance envers le Marquis pour son rôle dans la création du Collège de Belley et souligne l'importance de sa venue. Le Marquis est arrivé à Belley le samedi 3 juillet vers dix heures du matin. Il a été accueilli par une porte illuminée et décorée d'un cartouche portant l'inscription 'Felici Adventui Supremi Bellorum Moderatoris' et les armes du Marquis. Le lendemain, le Marquis a reçu les compliments des syndics de la province et de la ville. M. Granier, chanoine régulier de Saint-Antoine et professeur de rhétorique, a prononcé un discours en l'honneur du Marquis, mettant en avant ses talents, ses connaissances et ses vertus, ainsi que son rôle dans la diplomatie et la défense du royaume. Les pensionnaires du Collège ont également exprimé leur admiration par un compliment en vers composé par M. Sutaine. Pour marquer la joie de cette visite, le Collège a organisé une représentation théâtrale, un événement rare pour la ville. L'auteur propose d'envoyer une analyse de la pièce jouée. La lettre se conclut par une mention de la publication de l'Année Musicale par le libraire Duchefne.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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595
p. 245-248
MANDEMENT de Monseigneur l'Evêque de Saint-Malo, à l'occasion de la Conquête de l'Isle Minorque.
Début :
Les actions de graces solemnelles que nous vous annonçons, Mes [...]
Mots clefs :
Conquête de l'Ile de Minorque, Dieu, Protection divine, Louanges
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MANDEMENT de Monseigneur l'Evêque de Saint-Malo, à l'occasion de la Conquête de l'Isle Minorque.
MANDEMENT de Monseigneur l'Evêque
de Saint- Malo , à l'occasion de la Conquête de
L'Ife Minorque .
Ean
Ean - Jofeph de Fogaffes de fa Baftie , par la
miféricorde de Dieu ., & c. Salut.
Lij
246 MERCURE DE FRANCE.
Les actions de graces folemnelles que nous vous
annonçons , MES TRÈS-CHERS FRERES , ne doivent
pas être regardées comme de vaines cérémonies
, ou comme de fimples démonftrations de
la joie que nous caufent les événemens qui en
font l'objet. On protefte publiquement par ces
fignes extérieurs de reconnoiffance , que le Sei
gneur eft le Dieu des Armées ( 1 ) & que fa providence
en dirige toutes les opérations , fuivant l'ordre
de fes décrets toujours infiniment fages & infiniment
juftes , quoique fouvent impénétrables.
Les Puiffances de la terre fe glorifient en vain
dans le nombre de leurs Troupes ou de leurs Vaiffeaux
. Il y a dans le Ciel un fouverain Maître à
qui la mer & la terre appartiennent également ,
& qui déconcerte , quand il lui plaît , tous les projets
des hommes .
Comment êtes- vous tombée ( 2 ) difoit autrefois le
Seigneur par fes Prophétes à une Nation qui fe
vantoit de pofféder l'empire de la mer , Comment
êtes-vous tombée , vous , qui habitiez dans la mer,
qui étiezfiforte fur cet élement , dont les habitans
s'étoient rendus redoutables tout le monde ? vous
qui difiez ( 3 ): Je fuis placée au milieu de la mer, je
fuis le fiege du commerce du trafic des Peuples ?
vous (4) dont les Négocians étoient des Princes ,
dont les Marchands étoient les perfonnes les plus il-
(1 )Tu Domine exercituum Deus , 2 Reg. 7. ¥.27
(2) Quomodo perifti qua habitas in mari , urbs
inclyta qua fuifti fortis in mari cum habitatoribus
tuis quos formidabant univerfi. Ezech . 26. ¥. 17. ·
(3) Negociationi populorum ad infulas multas....
tu dixifti perfecti decoris ego fum & in corde maris
fita. Ezech. 17. V. 3 & 4.
(4 ) Cujus negotiatores principes , inftitores ejus
inclyti terra. Ifaie 23. V. 8 .
SEPTEMBRE . 1756. 247
luflres de la terre ? Les Vaiffeaux ( 1 ) maintenant
ferontfaijs d'étonnement , lorsque vous ferez pouse
même faifie de frayeur : les Ifles feront troublées
dans la mer , parce que perfonne ne fortira de chez
vous. C'est le Seigneur ( 2 ) qui a prononcé cet arrêt,
qui a refolu de vous traiter de la forte pour ren➡
verfer toute la gloire des fuperbes. C'eft ( 3 ) parce
que votre coeur s'eft élevé que vous avez dit : Je
fuis affis comme un Dieu au milieu de la mer : c'eſt
pour cela , dit le Seigneur , que je ferai marcher
contre vous les plus puiffans d'entre les peuples qui
viendront l'épée à la main confondre votre prétendue
fageffe.
Ces événemens , quoique predits par Pefprit
de Dieu long- temps auparavant , furent regardés
lorfqu'ils arriverent , comme les effets ordinaires
de l'ambition & de la politique . Mais fi Dieu ,
pour exercer notre foi , fe plaît à cacher les opérations
fous le voile des caufes naturelles , il n'en
eft pas moins la caufe premiere & principale à la
quelle toutes les autres font fubordonnées , & qui
les fait toutes fervir à l'exécution de fes deffeins.
C'eft lui qui préfide au Confeil des Rois & qui
eft l'auteur de la fageffe des projets qu'ils forment .
C'est lui qui répand dans le foldat cette valeur à
qui rien ne réſiſte , & cette conſtance que rien ne
›
(1 ) Nunc ftupebunt naves in die pavoris tui:
turbabuntur infula in mari , eo quòd nullus egrediatur
ex te. Ezech. 26. V. 18.
(2) Dominus exercituum cogitavit hoc, ut detraheret
fuperbiam omnis gloria. Ilaïe 23. V. .9 .
.... Toin
(3 ) Eo quòd elevatum eft cor tuum & dixifti...
Deus ego fum, & ... fedi in corde maris ... propterea
dicit Dominus .... ecce ego adducam fuper te
buftiffimos gentium , &nudabunt gladios fuosfuper
pulchritudinem fapientia tua . Ezech . 28. V. 2 , 6, 7.
248 MERCURE DE FRANCE.
rebute. C'est lui qui inſpire aux Généraux l'activité
, la prudence , le courage & la fermeté . Ceſt
lui qui les fait triompher des obftacles multipliés ..
que leur oppofent la nature , l'art , les contretemps
& la défenfe la plus opiniâtre . C'est à lui
par conféquent & à lui feul que doit fe rapporter
toute la gloire des ſuccès.
Tel eft M. T. C. F. l'efprit qui doit animer les
chants d'allégreffe & les Cantiques de louange
que nous allons offrir au Seigneur en reconnoiffance
de la conquête de l'Ile Minorque . Il eſt naturel
que cette reconnoiffance s'étende à ceux dont
Dieu s'est fervi pour une conquête fi glorieufe &
fi utile à la Nation . La Religion autorife ces fentimens
loin de les condamner , & nous avons dans
cette Province & prefque fous les murs de cette
Ville , un motif bien intéreffant de nous y livrer.
( 1 ) Mais n'oublious jamais que c'eft ( 2 ) le Šeigneur
qui, fans avoir égard à la puissance des armes , donne
la victoire , comme il lui plait , à ceux qui en
font dignes. Implorons donc fon ſecours avec confiance
demandons- lui qu'il continue de bénir
les entrepriſes du plus puiffant , du plus jufte & du
plus pacifique de tous les Rois. Après les preuves
de modération que fes Ennemis même ont dû
admirer en lui , prier pour la profpérité de fes Armes
, c'eft prier pour le repos & pour le bonheur
de toute l'Europe. A ces cauſes , &c.
( 1 ) Il y a un Camp auprè de Saint -Malo.
(2) Non fecundùm armorum potentiam , ſed, prout
ipfi placet , dat dignis victoriam. 1. Mach. 15. Ý. 21 .
de Saint- Malo , à l'occasion de la Conquête de
L'Ife Minorque .
Ean
Ean - Jofeph de Fogaffes de fa Baftie , par la
miféricorde de Dieu ., & c. Salut.
Lij
246 MERCURE DE FRANCE.
Les actions de graces folemnelles que nous vous
annonçons , MES TRÈS-CHERS FRERES , ne doivent
pas être regardées comme de vaines cérémonies
, ou comme de fimples démonftrations de
la joie que nous caufent les événemens qui en
font l'objet. On protefte publiquement par ces
fignes extérieurs de reconnoiffance , que le Sei
gneur eft le Dieu des Armées ( 1 ) & que fa providence
en dirige toutes les opérations , fuivant l'ordre
de fes décrets toujours infiniment fages & infiniment
juftes , quoique fouvent impénétrables.
Les Puiffances de la terre fe glorifient en vain
dans le nombre de leurs Troupes ou de leurs Vaiffeaux
. Il y a dans le Ciel un fouverain Maître à
qui la mer & la terre appartiennent également ,
& qui déconcerte , quand il lui plaît , tous les projets
des hommes .
Comment êtes- vous tombée ( 2 ) difoit autrefois le
Seigneur par fes Prophétes à une Nation qui fe
vantoit de pofféder l'empire de la mer , Comment
êtes-vous tombée , vous , qui habitiez dans la mer,
qui étiezfiforte fur cet élement , dont les habitans
s'étoient rendus redoutables tout le monde ? vous
qui difiez ( 3 ): Je fuis placée au milieu de la mer, je
fuis le fiege du commerce du trafic des Peuples ?
vous (4) dont les Négocians étoient des Princes ,
dont les Marchands étoient les perfonnes les plus il-
(1 )Tu Domine exercituum Deus , 2 Reg. 7. ¥.27
(2) Quomodo perifti qua habitas in mari , urbs
inclyta qua fuifti fortis in mari cum habitatoribus
tuis quos formidabant univerfi. Ezech . 26. ¥. 17. ·
(3) Negociationi populorum ad infulas multas....
tu dixifti perfecti decoris ego fum & in corde maris
fita. Ezech. 17. V. 3 & 4.
(4 ) Cujus negotiatores principes , inftitores ejus
inclyti terra. Ifaie 23. V. 8 .
SEPTEMBRE . 1756. 247
luflres de la terre ? Les Vaiffeaux ( 1 ) maintenant
ferontfaijs d'étonnement , lorsque vous ferez pouse
même faifie de frayeur : les Ifles feront troublées
dans la mer , parce que perfonne ne fortira de chez
vous. C'est le Seigneur ( 2 ) qui a prononcé cet arrêt,
qui a refolu de vous traiter de la forte pour ren➡
verfer toute la gloire des fuperbes. C'eft ( 3 ) parce
que votre coeur s'eft élevé que vous avez dit : Je
fuis affis comme un Dieu au milieu de la mer : c'eſt
pour cela , dit le Seigneur , que je ferai marcher
contre vous les plus puiffans d'entre les peuples qui
viendront l'épée à la main confondre votre prétendue
fageffe.
Ces événemens , quoique predits par Pefprit
de Dieu long- temps auparavant , furent regardés
lorfqu'ils arriverent , comme les effets ordinaires
de l'ambition & de la politique . Mais fi Dieu ,
pour exercer notre foi , fe plaît à cacher les opérations
fous le voile des caufes naturelles , il n'en
eft pas moins la caufe premiere & principale à la
quelle toutes les autres font fubordonnées , & qui
les fait toutes fervir à l'exécution de fes deffeins.
C'eft lui qui préfide au Confeil des Rois & qui
eft l'auteur de la fageffe des projets qu'ils forment .
C'est lui qui répand dans le foldat cette valeur à
qui rien ne réſiſte , & cette conſtance que rien ne
›
(1 ) Nunc ftupebunt naves in die pavoris tui:
turbabuntur infula in mari , eo quòd nullus egrediatur
ex te. Ezech. 26. V. 18.
(2) Dominus exercituum cogitavit hoc, ut detraheret
fuperbiam omnis gloria. Ilaïe 23. V. .9 .
.... Toin
(3 ) Eo quòd elevatum eft cor tuum & dixifti...
Deus ego fum, & ... fedi in corde maris ... propterea
dicit Dominus .... ecce ego adducam fuper te
buftiffimos gentium , &nudabunt gladios fuosfuper
pulchritudinem fapientia tua . Ezech . 28. V. 2 , 6, 7.
248 MERCURE DE FRANCE.
rebute. C'est lui qui inſpire aux Généraux l'activité
, la prudence , le courage & la fermeté . Ceſt
lui qui les fait triompher des obftacles multipliés ..
que leur oppofent la nature , l'art , les contretemps
& la défenfe la plus opiniâtre . C'est à lui
par conféquent & à lui feul que doit fe rapporter
toute la gloire des ſuccès.
Tel eft M. T. C. F. l'efprit qui doit animer les
chants d'allégreffe & les Cantiques de louange
que nous allons offrir au Seigneur en reconnoiffance
de la conquête de l'Ile Minorque . Il eſt naturel
que cette reconnoiffance s'étende à ceux dont
Dieu s'est fervi pour une conquête fi glorieufe &
fi utile à la Nation . La Religion autorife ces fentimens
loin de les condamner , & nous avons dans
cette Province & prefque fous les murs de cette
Ville , un motif bien intéreffant de nous y livrer.
( 1 ) Mais n'oublious jamais que c'eft ( 2 ) le Šeigneur
qui, fans avoir égard à la puissance des armes , donne
la victoire , comme il lui plait , à ceux qui en
font dignes. Implorons donc fon ſecours avec confiance
demandons- lui qu'il continue de bénir
les entrepriſes du plus puiffant , du plus jufte & du
plus pacifique de tous les Rois. Après les preuves
de modération que fes Ennemis même ont dû
admirer en lui , prier pour la profpérité de fes Armes
, c'eft prier pour le repos & pour le bonheur
de toute l'Europe. A ces cauſes , &c.
( 1 ) Il y a un Camp auprè de Saint -Malo.
(2) Non fecundùm armorum potentiam , ſed, prout
ipfi placet , dat dignis victoriam. 1. Mach. 15. Ý. 21 .
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Résumé : MANDEMENT de Monseigneur l'Evêque de Saint-Malo, à l'occasion de la Conquête de l'Isle Minorque.
Le mandement de l'évêque de Saint-Malo célèbre la conquête de l'île de Minorque. L'évêque insiste sur le fait que les actions de grâce ne sont pas de simples cérémonies, mais des manifestations de reconnaissance envers Dieu, le Seigneur des Armées, qui dirige toutes les opérations selon ses décrets sages et justes. Il rappelle que les puissances terrestres se glorifient vainement de leurs troupes et vaisseaux, car Dieu déconcerte leurs projets à sa guise. Le mandement cite des prophéties bibliques pour illustrer la chute des nations orgueilleuses, comme celle qui se vantait de son empire maritime. L'évêque explique que les événements, bien que prédits par l'Esprit de Dieu, sont souvent attribués à l'ambition et à la politique humaines. Cependant, Dieu reste la cause première et principale, présidant aux conseils des rois et inspirant valeur et constance aux soldats. Il inspire également aux généraux les qualités nécessaires pour triompher des obstacles. Le mandement conclut en appelant à la reconnaissance envers Dieu pour la conquête de Minorque et en priant pour la prospérité des armes du roi, considéré comme le plus puissant, juste et pacifique. La prière pour la réussite des entreprises du roi est vue comme une prière pour le repos et le bonheur de toute l'Europe.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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596
p. 75-76
LOGOGRYPHE.
Début :
Fille de la terreur, l'ignorance est ma mere, [...]
Mots clefs :
Superstition
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texteReconnaissance textuelle : LOGOGRYPHE.
LOGOG RYP HE.
ILLE de la terreur , l'ignorance eſt ma mere ,
Mon empire s'étend fur l'efprit des mortels ;
Vous m'avez vu fortir de l'ombre des Autels ,
Et caufer plus de maux que la pefte & la guerre
Douze pieds compofent mon tout :
Dij
76 MERCURE DE FRANCE.
Tranfpofez - les de diverfes manieres ,
Vous trouverez en France deux rivieres ;
Mais fivous cherchez jufqu'au bout,
Vous devez voir le pere de Medée ;
Un mont fameux dans la Judée ;
Le Roi dont Troyé a pris fon nom
La Meffagere de Junon ;
Un enfant qui fervit de repas à fon pere
Un nom qu'en Europe on révere ;
Un Dieu d'Egypte , un Peintre , un Empereur ,
Qui fur Jérufalem fignala fa fureur ;
Un empire d'Afie , un terme de mufique ,
Un royaume de l'Amérique ,
Où l'Espagnol par l'or fut arrêté ;
Un inftrument par Ifis inventé ;
L'endroit oùdes anciens on confervoit la cendre.....
Mais je deviens trop clair , & vous devez m'entendre
.
Par M. MOURON- DE CHATIGNY .
ILLE de la terreur , l'ignorance eſt ma mere ,
Mon empire s'étend fur l'efprit des mortels ;
Vous m'avez vu fortir de l'ombre des Autels ,
Et caufer plus de maux que la pefte & la guerre
Douze pieds compofent mon tout :
Dij
76 MERCURE DE FRANCE.
Tranfpofez - les de diverfes manieres ,
Vous trouverez en France deux rivieres ;
Mais fivous cherchez jufqu'au bout,
Vous devez voir le pere de Medée ;
Un mont fameux dans la Judée ;
Le Roi dont Troyé a pris fon nom
La Meffagere de Junon ;
Un enfant qui fervit de repas à fon pere
Un nom qu'en Europe on révere ;
Un Dieu d'Egypte , un Peintre , un Empereur ,
Qui fur Jérufalem fignala fa fureur ;
Un empire d'Afie , un terme de mufique ,
Un royaume de l'Amérique ,
Où l'Espagnol par l'or fut arrêté ;
Un inftrument par Ifis inventé ;
L'endroit oùdes anciens on confervoit la cendre.....
Mais je deviens trop clair , & vous devez m'entendre
.
Par M. MOURON- DE CHATIGNY .
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597
p. 187-189
ITALIE.
Début :
Aussi-tôt que le Pape fut mort, le Cardinal Colonne, Camerlingue de [...]
Mots clefs :
Rome, Mort du Pape, Benoit XIV, Églises, Vatican, Cortège, Chapelle, Médailles, Inscription, Bulle pontificale, Élection pontificale, Cardinaux
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texteReconnaissance textuelle : ITALIE.
ITALI E.
DE ROME ,
Auffi-tôt
le 13 Mai.
que le Pape fut mort , le Cardinal Coi
lonne , Camerlingue de l'Eglife & Majordôme du
188 MERCURE DE FRANCE:
palais Apoftolique , fe tranſporta dans le palais
Quirinal à l'appartement du Saint Pere , pour faire
la reconnoiffance du corps , & on lui remit l'Anneau
du Pécheur. Peu de temps après , la groffe
cloche du Capitole annonça la mort du Pontife ,
& enfuite toutes les cloches des Eglifes fonnerent.
Le lendemain 6 Mai , le corps du Saint Pere fut
ouvert , embaumé , & expofè fur un lit de parade
en habits pontificaux. Le foir à dix heures , on le
transféra du Quirinal au Vatican , & la marche fe
fit dans cet ordre : une compagnie de Chevaux-
Légers ; les trompettes fonnant en fourdine ; quarante
Eftafiers , & Valets d'écurie tenant des flam
beaux ; le Capitaine des Gardes Suiffes , & le Maître
des Cérémonies à cheval ; le corps du Pape
dans une fuperbe litiere découverte , les Gardes
Suiffes aux deux côtés , & les Pénitenciers de Saint
Pierre portant chacun un flambeau ; fept pieces
de canon ; une autre compagnie de Chevaux-
Légers & les Cuiraffiers , ayant leurs trompettes
& timbales drapées. Quand le convoi fut arrivé ,
le corps fut levé de la litiere & porté dans la Chapelle
Sixtine. Là , le Majordôme lui ôta le chapeau
Papal , & y fubftitua la thiarre . Le 7 ,
corps fut tranfporté à Saint Pierre dans la Chapelle
du Saint- Sacrement , & le peuple fut admis à
lui baifer les pieds. Le y au foir , le corps du Pape
fut mis dans un cercueil de bois de cedre , avec
une bourfe de velours cramoifi , où il y avoit 17
médailles d'or , 17 d'argent , & 17 de bronze. Ces
médailles , dont le nombre répond à celui des années
du Pontificat de Benoît XIV , repréfentent
d'un côté fon portrait & de Pautre les principales
actions de fon regne . Le cercueil de cedre fut embotté
dans une autre caifle de bois , & celle ci
dans un coffre de plomb avec cette infeription
le
JUILLET. 1758.
189
fimple : D. O. M. Benedictus XIV. Pont. Max,
Lambertinus Bononienfis. Vixit Annos LXXXIII.
Menfem I. Dies III. In fummo Pontificatu Ann,
XVII. Menf. VIII. Dies XVII. Obiit V Nonas
Maii. Anno M. DCC. LVIII. Des dix Congréga
tions qui doivent précéder l'entrée des Cardinaux
au Conclave , il s'en eft tenu jufqu'à préfent qua
tre. Dans la premiere qui fe tint le jour du décès
du Pontife , on lut la Bulle concernant l'élection
des Papes ; le Dataire & le Secretaire des Brefs
remirent au Saré College la caffette des Brefs
fignés & non expédiés ; le ſceau des Bulles & l'Anneau
du Pécheur furent rompus. Dans une autre
Congrégation , le Gouverneur de cette Ville fut
confirmé dans fa charge , & deux Orateurs furent
nommés , l'un pour faire l'Oraiſon funebre du
défunt Pontife , l'autre pour prononcer le Dif
cours touchant l'élection d'un Pape. Le Cardinal
d'Argenvilliers a obtenu la permiffion de refter
20 jours dans fon appartement au Quirinal , pour
rétablir fa fanté. Quoique pendant la vacance du
Saint Siege , les foldats du Capitole ayent feuls le
droit de garder les portes de la Ville , on a par
tagé cette fonction entr'eux & les foldats Corfes,
fans avoir égard aux proteftations des premiers,
Les prifonniers élargis à l'occafion de la mort du
Pape , commencent commettre du défordre ;
c'eſt pourquoi le Gouverneur a ordonné aux habi,
tans d'avoir toutes les nuits de la lumiere aux fenêtres
de leurs maiſons.
Des cinquante- cinq Cardinaux qui compoſent
aujourd'hui le Sacré College , il n'y a plus qu'une
feule créature du Pape Clément XI , une feule d'Innocent
XIII , une feule de Benoît XIII , & neuf de
Clément XII. Tous les autres ont été créés par
Benoît XIV , & il a laiffé quinze chapeaux vacaps .
DE ROME ,
Auffi-tôt
le 13 Mai.
que le Pape fut mort , le Cardinal Coi
lonne , Camerlingue de l'Eglife & Majordôme du
188 MERCURE DE FRANCE:
palais Apoftolique , fe tranſporta dans le palais
Quirinal à l'appartement du Saint Pere , pour faire
la reconnoiffance du corps , & on lui remit l'Anneau
du Pécheur. Peu de temps après , la groffe
cloche du Capitole annonça la mort du Pontife ,
& enfuite toutes les cloches des Eglifes fonnerent.
Le lendemain 6 Mai , le corps du Saint Pere fut
ouvert , embaumé , & expofè fur un lit de parade
en habits pontificaux. Le foir à dix heures , on le
transféra du Quirinal au Vatican , & la marche fe
fit dans cet ordre : une compagnie de Chevaux-
Légers ; les trompettes fonnant en fourdine ; quarante
Eftafiers , & Valets d'écurie tenant des flam
beaux ; le Capitaine des Gardes Suiffes , & le Maître
des Cérémonies à cheval ; le corps du Pape
dans une fuperbe litiere découverte , les Gardes
Suiffes aux deux côtés , & les Pénitenciers de Saint
Pierre portant chacun un flambeau ; fept pieces
de canon ; une autre compagnie de Chevaux-
Légers & les Cuiraffiers , ayant leurs trompettes
& timbales drapées. Quand le convoi fut arrivé ,
le corps fut levé de la litiere & porté dans la Chapelle
Sixtine. Là , le Majordôme lui ôta le chapeau
Papal , & y fubftitua la thiarre . Le 7 ,
corps fut tranfporté à Saint Pierre dans la Chapelle
du Saint- Sacrement , & le peuple fut admis à
lui baifer les pieds. Le y au foir , le corps du Pape
fut mis dans un cercueil de bois de cedre , avec
une bourfe de velours cramoifi , où il y avoit 17
médailles d'or , 17 d'argent , & 17 de bronze. Ces
médailles , dont le nombre répond à celui des années
du Pontificat de Benoît XIV , repréfentent
d'un côté fon portrait & de Pautre les principales
actions de fon regne . Le cercueil de cedre fut embotté
dans une autre caifle de bois , & celle ci
dans un coffre de plomb avec cette infeription
le
JUILLET. 1758.
189
fimple : D. O. M. Benedictus XIV. Pont. Max,
Lambertinus Bononienfis. Vixit Annos LXXXIII.
Menfem I. Dies III. In fummo Pontificatu Ann,
XVII. Menf. VIII. Dies XVII. Obiit V Nonas
Maii. Anno M. DCC. LVIII. Des dix Congréga
tions qui doivent précéder l'entrée des Cardinaux
au Conclave , il s'en eft tenu jufqu'à préfent qua
tre. Dans la premiere qui fe tint le jour du décès
du Pontife , on lut la Bulle concernant l'élection
des Papes ; le Dataire & le Secretaire des Brefs
remirent au Saré College la caffette des Brefs
fignés & non expédiés ; le ſceau des Bulles & l'Anneau
du Pécheur furent rompus. Dans une autre
Congrégation , le Gouverneur de cette Ville fut
confirmé dans fa charge , & deux Orateurs furent
nommés , l'un pour faire l'Oraiſon funebre du
défunt Pontife , l'autre pour prononcer le Dif
cours touchant l'élection d'un Pape. Le Cardinal
d'Argenvilliers a obtenu la permiffion de refter
20 jours dans fon appartement au Quirinal , pour
rétablir fa fanté. Quoique pendant la vacance du
Saint Siege , les foldats du Capitole ayent feuls le
droit de garder les portes de la Ville , on a par
tagé cette fonction entr'eux & les foldats Corfes,
fans avoir égard aux proteftations des premiers,
Les prifonniers élargis à l'occafion de la mort du
Pape , commencent commettre du défordre ;
c'eſt pourquoi le Gouverneur a ordonné aux habi,
tans d'avoir toutes les nuits de la lumiere aux fenêtres
de leurs maiſons.
Des cinquante- cinq Cardinaux qui compoſent
aujourd'hui le Sacré College , il n'y a plus qu'une
feule créature du Pape Clément XI , une feule d'Innocent
XIII , une feule de Benoît XIII , & neuf de
Clément XII. Tous les autres ont été créés par
Benoît XIV , & il a laiffé quinze chapeaux vacaps .
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Résumé : ITALIE.
Le 13 mai, après la mort du pape, le cardinal Colonna, en tant que Camerlingue, se rendit au palais Quirinal pour reconnaître le corps et reçut l'Anneau du Pécheur. La mort du pontife fut annoncée par les cloches des églises. Le 14 mai, le corps du pape fut embaumé et exposé en habits pontificaux. Le 15 mai, il fut transféré au Vatican, escorté par divers gardes et pénitenciers, puis placé dans la Chapelle Sixtine. Le 16 mai, le corps fut exposé à la Chapelle du Saint-Sacrement à Saint-Pierre, où le peuple put baiser ses pieds. Le 17 mai, le corps fut placé dans un cercueil de cèdre contenant des médailles représentant les actions du règne de Benoît XIV, puis dans une caisse de bois et un coffre de plomb avec une inscription. Quatre congrégations se tinrent avant le conclave, durant lesquelles l'Anneau du Pécheur et le sceau des bulles furent détruits, et des nominations furent faites. Pendant la vacance du Saint-Siège, des désordres furent commis par des prisonniers libérés, nécessitant des mesures de sécurité. Le Sacré Collège comptait 55 cardinaux, avec 15 chapeaux vacants.
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598
p. 57
LOGOGRYPHE.
Début :
Je fais presque en tous lieux le tourment de l'enfance. [...]
Mots clefs :
Catéchisme
599
p. 201-203
ITALIE.
Début :
Un Corsaire Anglois s'empara dans le mois dernier du Saint-Jean, [...]
Mots clefs :
Livourne, Corsaire anglais, Navire français, Chaloupes, Attaque, Rome, Révoltes du peuple, Election du pontife, Pape Clément XIII, Prières, Joies
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texteReconnaissance textuelle : ITALIE.
ITALI E.
DE LIVOURNE , le 24 Juin.
Un Corſaire Anglois s'empara dans le mois der
nier du Saint-Jean , Navire François de Marſeille
qui revenoitdu Levant. Les Négocians de cette
Ville , intéreſſés à la cargaiſon de ce Navire , au
premier avis de ſa priſe , dépêcherent à la hauteur
de ce Port où il devoit être conduit , deux Chaloupes
armées. Auſſi- tôt que ces Chaloupes eurent
apperçu le Corſaire , elles arborerent , l'une Pavillon
Algérien , l'autre Pavillon Eſpagnol , & elles
feignirent de ſe battre , en s'approchant toujours
du Navire Anglois. Lorſqu'elles ſe trouverent à
portée , vingt- cinq hommes de l'équipage de la
prétendue Chaloupe Eſpagnole y monterent; l'autre
Chaloupe forçant de voiles aborda preſque en
même temps l'Armateur ; il fut pris de cette maniere
, & emmené du côté de Gênes avec le Bâtiment
dont il s'étoit emparé.
DE ROME , le 9 Juillet.
ACiterna , dans les Etats de l'Eglife , le Peuple
apris les armes & s'eſt ſoulevé contre le Gouverneur
; mais cette émeute populaire doit être
actuellement appaiſée. Il y en a eu une pareille à
Citta-di-Caſtello , ſur le Tibre, contre les Sbirre's
& leur Commandant. Les mutins armés , ayant
conduit deux pieces de canon devant le Palais du
Gouverneur , à qui pourtant ils n'en vouloient
point, font ǎ bout de chaffer de laVille&
le Commandant & les Sbirres. Ces fortes d'émeutes
ſont affez fréquentes pendant la vacance du
venus
Iv
202 MERCURE DE FRANCE.
1
Saint Siége : le Pape élu , tout rentre dans l'ordre..
On avoit redoublé les prieres dans toutes les
Eglifes de cette Capitale , pour la prompte élection
d'un Pontife , lorſque le Jeudi 6 Juillet , vers
les huit heures du ſoir , les Cardinaux ayant procédé
au ſcrutin dans la Chapelle Sixtine , Charles
Rezzonico, Vénitien,Cardinal du Titre de S. Marc,
Evêque de Padoue , Créature du Pape Clement
XII , fut élu par le concours d'autant de voix qu'il
y avoit de Cardinaux au Conclave. Le nouveau
Pontife prit auffi- tôt le nom de Clement XIII. Sa
Sainteté ayant enſuite été revêtue des habits Pontificaux,
fut portée dans un fauteuil ſur les marchess
del'Autel , ou Elle reçut les adorations & les hommages
des Cardinaux. L'Anneau du Pécheur lui fut
préſenté par leCardinal Camerlingue,& le S. Pere
le remit au Premier Maître des Cérémonies ,
pour y faire graver le nom de Clement XIII.
A huit heures & demie , le Cardinal Albani
premier Diacre , étant précédé de la Croix ,
ſe rendit à la grande loge ſous le Portique de
Saint Pierre , où il publia à haute voix l'exaltation
du Pontife . A cette nouvelle toute la Ville fut
remplie de joie , & le ſon des cloches l'eut bien--
tôt répandue de tous les côtés. Vers les neuf heures,
le Saint Pere revint à la Chapelle Sixtine& les
Cardinaux revêtus de la pourpre ſacrée , firent ladeuxieme
adoration . De-là , le Pape porté dans un
fauteuil&entouré de la Garde Suiffe , fut conduit
en proceſſion à Saint Pierre par les Cardinaux , le
Gouverneur de Rome , le Connétable Colonne ,.
Prince du Trône , le Duc de Guadagnuolo , Maî
de l'Hoſpice Sacré , l'Ambaſſadeur de Bologne, les
Confervateurs & le Prieur du Peuple Romain
toute la Prélature , & une grande partie de la Nobleſſe,
au milieudes acclamations d'une foule pro--
*
AOUST. 1758. 203
digieuſe de peuple. Après que le Saint Pere eut
fait ſa prieredevant le Saint Sacrement & à l'Autel
de la Confeffion , on chanta le Te Deum , & on
lui fit la troiſieme adoration. Le Pape donna la
premiere Bénédiction folemnelle au peuple , & enfuite
fut porté dans ſa chaiſe à ſon appartement du
Vatican.
La vacance du Saint Siége a duré ſoixante - cinq
jours , & le Conclave cinquante- trois .
DE LIVOURNE , le 24 Juin.
Un Corſaire Anglois s'empara dans le mois der
nier du Saint-Jean , Navire François de Marſeille
qui revenoitdu Levant. Les Négocians de cette
Ville , intéreſſés à la cargaiſon de ce Navire , au
premier avis de ſa priſe , dépêcherent à la hauteur
de ce Port où il devoit être conduit , deux Chaloupes
armées. Auſſi- tôt que ces Chaloupes eurent
apperçu le Corſaire , elles arborerent , l'une Pavillon
Algérien , l'autre Pavillon Eſpagnol , & elles
feignirent de ſe battre , en s'approchant toujours
du Navire Anglois. Lorſqu'elles ſe trouverent à
portée , vingt- cinq hommes de l'équipage de la
prétendue Chaloupe Eſpagnole y monterent; l'autre
Chaloupe forçant de voiles aborda preſque en
même temps l'Armateur ; il fut pris de cette maniere
, & emmené du côté de Gênes avec le Bâtiment
dont il s'étoit emparé.
DE ROME , le 9 Juillet.
ACiterna , dans les Etats de l'Eglife , le Peuple
apris les armes & s'eſt ſoulevé contre le Gouverneur
; mais cette émeute populaire doit être
actuellement appaiſée. Il y en a eu une pareille à
Citta-di-Caſtello , ſur le Tibre, contre les Sbirre's
& leur Commandant. Les mutins armés , ayant
conduit deux pieces de canon devant le Palais du
Gouverneur , à qui pourtant ils n'en vouloient
point, font ǎ bout de chaffer de laVille&
le Commandant & les Sbirres. Ces fortes d'émeutes
ſont affez fréquentes pendant la vacance du
venus
Iv
202 MERCURE DE FRANCE.
1
Saint Siége : le Pape élu , tout rentre dans l'ordre..
On avoit redoublé les prieres dans toutes les
Eglifes de cette Capitale , pour la prompte élection
d'un Pontife , lorſque le Jeudi 6 Juillet , vers
les huit heures du ſoir , les Cardinaux ayant procédé
au ſcrutin dans la Chapelle Sixtine , Charles
Rezzonico, Vénitien,Cardinal du Titre de S. Marc,
Evêque de Padoue , Créature du Pape Clement
XII , fut élu par le concours d'autant de voix qu'il
y avoit de Cardinaux au Conclave. Le nouveau
Pontife prit auffi- tôt le nom de Clement XIII. Sa
Sainteté ayant enſuite été revêtue des habits Pontificaux,
fut portée dans un fauteuil ſur les marchess
del'Autel , ou Elle reçut les adorations & les hommages
des Cardinaux. L'Anneau du Pécheur lui fut
préſenté par leCardinal Camerlingue,& le S. Pere
le remit au Premier Maître des Cérémonies ,
pour y faire graver le nom de Clement XIII.
A huit heures & demie , le Cardinal Albani
premier Diacre , étant précédé de la Croix ,
ſe rendit à la grande loge ſous le Portique de
Saint Pierre , où il publia à haute voix l'exaltation
du Pontife . A cette nouvelle toute la Ville fut
remplie de joie , & le ſon des cloches l'eut bien--
tôt répandue de tous les côtés. Vers les neuf heures,
le Saint Pere revint à la Chapelle Sixtine& les
Cardinaux revêtus de la pourpre ſacrée , firent ladeuxieme
adoration . De-là , le Pape porté dans un
fauteuil&entouré de la Garde Suiffe , fut conduit
en proceſſion à Saint Pierre par les Cardinaux , le
Gouverneur de Rome , le Connétable Colonne ,.
Prince du Trône , le Duc de Guadagnuolo , Maî
de l'Hoſpice Sacré , l'Ambaſſadeur de Bologne, les
Confervateurs & le Prieur du Peuple Romain
toute la Prélature , & une grande partie de la Nobleſſe,
au milieudes acclamations d'une foule pro--
*
AOUST. 1758. 203
digieuſe de peuple. Après que le Saint Pere eut
fait ſa prieredevant le Saint Sacrement & à l'Autel
de la Confeffion , on chanta le Te Deum , & on
lui fit la troiſieme adoration. Le Pape donna la
premiere Bénédiction folemnelle au peuple , & enfuite
fut porté dans ſa chaiſe à ſon appartement du
Vatican.
La vacance du Saint Siége a duré ſoixante - cinq
jours , & le Conclave cinquante- trois .
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Résumé : ITALIE.
Le 24 juin, un corsaire anglais captura le navire français Saint-Jean en provenance du Levant. Les négociants marseillais, attirés par la cargaison, envoyèrent deux chaloupes armées à Livourne. Ces chaloupes arborèrent des pavillons algérien et espagnol pour tromper le corsaire. Vingt-cinq hommes montèrent à bord du navire anglais, tandis que l'autre chaloupe abordait l'armateur. Le corsaire fut capturé et emmené vers Gênes avec le navire qu'il avait pris. À Rome, le 9 juillet, des émeutes populaires éclatèrent à Citerna et à Citta-di-Castello contre les autorités locales. Ces troubles furent rapidement apaisés après l'élection d'un nouveau pape. Le 6 juillet, Charles Rezzonico, cardinal vénitien, fut élu pape et prit le nom de Clément XIII. La nouvelle fut annoncée publiquement et acclamée par la population. Le pape reçut les hommages des cardinaux et fut conduit en procession à la basilique Saint-Pierre, où il donna la première bénédiction solennelle avant de se retirer à son appartement au Vatican. La vacance du Saint-Siège avait duré soixante-cinq jours, et le conclave cinquante-trois.
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600
p. 71
ENIGME.
Début :
Je suis un Saint. Vous dirai-je mon nom ? [...]
Mots clefs :
Magloire
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texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
Ja fuis un Saint. Vous dirai - je mon nom ? E
Non : par humilité je cache ici ma gloire,
Je vous l'ai pourtant dit . N'allez pas dire non.
Vous l'avez fous les yeux , & vous pouvez m'en
croire.
Ja fuis un Saint. Vous dirai - je mon nom ? E
Non : par humilité je cache ici ma gloire,
Je vous l'ai pourtant dit . N'allez pas dire non.
Vous l'avez fous les yeux , & vous pouvez m'en
croire.
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