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1
p. 3-61
Extrait ou Argument de l'Iliade en forme de Table.
Début :
Cet Extrait esté fait avec tant d'exactitude, d'ordre [...]
Mots clefs :
Grecs, Achille, Jupiter, Junon, Chefs, Armée, Ulysse, Vaisseau, Paroles, Colère, Minerve, Troyens, Dieux, Prières, Songe, Menace , Iliade, Homère, Roi, Hérauts, Thétis, Ville, Paris
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texteReconnaissance textuelle : Extrait ou Argument de l'Iliade en forme de Table.
Extrait ou Argument
de l'Iliade en forme
deTable.
Et Extrait a esté
fait avec tantd'exactitude,
d'ordre
,
& de jugement,
qu'il peutsuffire pour
donner une idée generale
del'Iliade d'Homere à
ceux qui ne l'ont jamais
leuë, il peut estreutile
en mesme temps à ceux
qui possedent parfaitement
leur Homere,puisque
c'est un tableau en
racourci,ouplustost une
efquice dont le trait peut
quelquefois
,
reveiller
leurs idées, & leur aider
à jouir plus facilement
de ces peintures poëtiques
qui occupent, &
qui flattent si agréablement
leur imagination;
ceux qui craignent de
perdre de veuë la charmante
Iliade
, me doivent
sçavoir bon gré de
leur donner enmignature
le portrait de leur maistresse,
c'est leur prouver
assez que je ne blat:
me point leur attachement.
J'auray peut-estre dans
la fuite la mesme attention
pour ceux qui iont
amoureux de Rabelais,
cela dépendra du loisir
de mes amis, c'etf à la
complaisance de l'un
d'eux que j'ay obligation
de cet Extrait, qui
a deu estre aussi ennuyeux
à faire
, que je
le crois utile au Public.
Leschiffres qui ifont a
la fin de chaque article,
marquent laplace f.5 l'efitendue
des matieres. Par
exemple I. 5. c'est-à-dire
que l'invocation pour
chanter la colere d'Achille
commence au I.
vers cffinit au 5.
ARGUMENT
du premier Livre.
Le Poëte invoque la
Muse pour chanter les effets
pernicieux de la colere
d'Achille. Vers I. 5.
Sujet de la colere d'Achille.
vers 6. 11. ehryCes Pre stre d'Apol-
- lon vient au camp des
Grecs chargé de presens
pour racheter sa filleChryseis
qui estoit esclave d'Agamemnon.
vers II. 1).
,
Sa harangue aux Grecs
àce sujet. vers16.20.
ConsentementdesGrecs.
Refus d'A gamemnon. Il
menace Chryfes. Ce
vieiliardintimide se retire.
Sa priere à Apollon.
Exaucée sur le champ.
Apollon. pendant neuf
jours frappe toute l'armée
des Grecs de traits empoisonnez&
y répand la
peste. vers 21. 52.
Achille convoque une
assemblée. Il dit à Agamemnon
qu'il faut consulter
quelque Devin pour
sçavoir le sujet de la cruelle
colered'Apollon, vers
53.66.
Calchas fils de Thestor
se leve & se met en devoir
de l'expliquer. Il n'ose le
faire à moins qu'Achille
ne luy promette de le proteger
contre ceux à qui sa
déclaration pourroit de- plaire. vers 67. SI.
Achillele luy promet.
Le Devin parle. Dit qu'il
faut renvoyer Chryseis.
sansrançon,avec uneHecatombe
pour calmer Apollon.
vers83.99.
Agamemnon se fasche
contre le Devin. Tesmoigne
la repugnance qu'il a
de renvoyer Chryseis,
Declare qu'il la prefere
mesmeà la Reine Clytemnestre
sa femme
,
& pourquoy.
Prend neanmoins
la refoî ution de la renvoyer
pour le salut de son
peuple. Demande qu'on
le dedommage, vers 100.
J19.
Achille prend la parole.
Agamemnon luy respond
avec hauteur, & dit
qu'il pourroit bien luy enlever
à luy-mesme sa ca ptive
Briseis. vers 120 146
Achille s'emporte & éclatte
en injures contre
Agamemnon. vers 147.
lyo.
Agamemnon respond
avec aigreur & reitere les
menaces qu'il a faites à
Achille de luy enlever Brifeis.
vers liJ. 186.
0 Achille entre enfureur.
Delibere s'il tuëra Agamemnon.
Son épée est à
*i
demitirée. Mais Minerve
descenduë par l'ordre
de Junon, s'arreste derriere
Achille, le retient
par les Cheveux, & ne se
rend visiblequ'à luy. A>
chille se retourne. La reconnoist.
Luy demande
avec colere ce qu'elle
vient faire là. Pallasluy
respond qu'elle vient le
calmer. a Luy permet le
reproche,& luyconseille
de ne point passerauxvoyes
de fait. Achille enfonce
son épée dans le
fourreau. Minerve s'en
retourne. vers 187. m,
Achille continuë de
s'emporrer contre Agamemnon
& luy die des
injures atroces. Il jure
par; son Sceptre que jamais
les Grecs n'auront de
luy aucun secours. vers
222.24'.245.
Agamemnon qui ne
peut plus tenir contre les
invectives d'Achille, est
prest à se porter à quelque
violente extremité.
Mais le vieux Nestor se
leve, ôcse fait entendre
a ces deux Chefs irritez.
Il leur parle avec l'authorité
& le caractere que
luy donnent son grand âge
& sa longue experience.
vers246.283.
Agamemnon respond à
Nestorqu'Achille est un
homme qui veut toutemporter
par hauteur, mais
qu'il n'est pas d'humeur à
luy ceder. Achillereplique.
Apres quoy ces deux
Chefs se levent & rompent
l'assemblée. Achille
se retire dans son quartier
avec Patrocle. Agamemnon
fait mettre en mer un
de ses navires après l'avoir
pourveu de victimes pour
l'Hecatombe.Ilmene luymesme
Chryseis au Vaisseau
& l'y fait monter.
Ulysse est choisi pour la
conduites Le ,Vaisseau
part.vers 284. 311.
L'armée d'Agamemnon
se purifie. Hecatombes
offertes à Apollon sur
le rivage mesme. vers 312. 316. Agamemnon ordonne
à Talthybius & à Euribate
ses deux Herauts, d'aller
à la tente d'Achille
prendre Briseis & l'amener.
Que si Achille la
refuse il ira la prendre luymesme
bien accompagnée
vers 317.314.
Les deux Herauts arrivent
à la tente d'Achille,
& notent luy addresser la
parole. Achille qui voit
leur peine les prévient ôc
leur dit, qu'ils sont innocens
de l'affront qu'on luy
fair. Qu'il ne se plaint
que d'Agamemnon qui
envoye chercher Briseis.
En mesme temps il dit à
Patroclede laluy amener,
&
& de la remettre entre les
mains des Hérauts.Achille
reitere en leur presence
la menace qu'il a
faite à Agamemnon, de
ne jamais secourir les
Grecs. Patrocle amene
Briseis. Elle s'en va avec
les deux Herauts. vers 326.
347.
Achille va au bord de
la mer, & versant des
larmes, addresse sa plaince
à Thetis. La Déesse
fort des eaux , & luy demande
le sujet de son affliction.
Achilleluy: ep
dit la cause. La prie de
venger l'affrontqu'il a receu.
Devoir Jupiter. De
l'engager ( pour punir Agamemnon
de luyfaire
reconnoistre sa¡fatJce) :
à
secourir les Troyens,&
leur donner l'avantage sur
lesGrecs, ; ; Ilfaitressouvenir
Thetis en cet endroit
d'un service important
qu'elle rendit autrefois
à Jupiter; au,moyen
de quoy il ne -luy doit rien
refuser. Theris promet
à Achille qu'elle fera ce
qu'il luydemande, & qu'-
À*A **-
auss-tôt que Jupiter, qui
estalléàunfestin dont les
Ethiopiens l'ont prié, sera
retourné itu Ciel
,
elle ira
le voir & luy parler. Thetis
disparoift, &elle laisse
son fils tres affligé de la
perte de Briseis.vers347.
429.
Ulysse qui conduisoit
l'Hecatombe pour Apollon,
arrive dans le port de
Chrysa.Description dela
manoeuvre d'un Vaisseau
arrivé au port. Ulysse
parle à Chryfes
, & luy
presente sa fille,vers429.
Sacrifice. Priere de
Chryses à Apollon. Exaucée
dans le moment.
Festin.Libations. vers
446.470.
Les Grecs se retirent,
& paisens la nuit sur leur
Vaisseau. Le lendemain
ils retournent au Camp,
aydez d'un vent favorable
qu'Apollon leur en.
voye. lis se distribuent
dans leurs tentes,vers471.
483-
Achille se tient tousjours;
dans son quartier. Ne va
point aux assemblées.S'abandonne
entierement à
son chagrin. vers 484.491.
Le douzième jour Jupiter
estant revenu d'Ethiopie
,Thetis va le trouver
à récart au plus haut
sommet de l'Olympe.
Priere de Thetis à Jupiter.
Ju piter ne respond rien.
Thetis le presse. Jupiter
luy promet ce qu'elle demande
,
& confirme sa
promesse par un signe de
teste, donc tout l'Olympe
estébranlé, vers491.529.
•
Thetis s'en va. Ju piter
retourne dans son Palais.
Les Dieux vont au devant
deluy. Ilseplacesurson
Throne. Junon qui n'ignore
pas son dessein, parce
qu'elle l'a veu avec
Thetis,luy reproche d'un
son aigre le mystere qu'il
luy en fait. Jupiter ILy
respond d'abord avec moderation.
Junon continuë
de luy parler avec
hauteur. Jupiter la menace.
Elle se tait Vulcain
prend la parole, &
represente à sa mere qu'il
saur ménager Jupiter. Il
presente une coupe à Junon.
Il raconte la plaisante
histoire de Cacheute.
Il verteà boireaux Dieux.
Son empressement à les
servir, fait rire toute Tafsemblée
( parce qu'il boite.
) Après un repas trèsjoyeux
chaque Dieu va se
coucher dans son Appartement.
Junon couche
auprès de Jupiter.
ARG V MENT
dusecond Livre*
Jupiter pour executer
la promesse qu'il a faite
à Thetis de relever la
gloire d'Achille, & de
rendre les Troyensvictorieux
,
appuiele Songe,
luy commande d'aller
trouver Agjmernnon
,
&
de direàce Prince,qu'il
,
fasTearmer;ùj^le.Grecs,
qu'il mette toute son armée
en barri'le. Qu'il
luy fasse entendre que le
jour
jour est veuu qu'il va se
rendre maistredela Ville
deTroye. Le Songe part.
prend la forrne deNestor.
Se place sur la teste d'Agamemnon.
Luy redit les
paroles de Jupiter, & se
retire. vers 1 35.
Agamemnon se leve.
S'habille. Donne ordre
du grand matin à ses Herauts
de faire assembler
tous les Grecs. Pendant
ce temps-là il tient conseil
avec les principaux
Chefs dans le Vaisseau de
Nestor. Leur dit les parôles
du Songe. Leur fait
part du dessein qu'il a de
fonder le courage des
Grecs. Je vais,dit-il, leur
ordonner de s'enfuirsur leurs
Vaisseaux VÙUS) de vostre
cpfté vom les retiendrez par
de douces paroles. Nestor
represente qu'il faut adjousterfoy
au Songe d'Agamemnon
, parce qu'il
ne faut pas dourer que Jupiter
ne l'ait envoyé. Die
qu'il faut executer le projet
du Roy. vers 35.84.
Les Troupes arrivent.
L'armée comparée à des
Legions d'abeilles, vers 86.
5)6*
NeufHerauts font faire
silence dans l'armée. Le
Roy se leve tenant en
main son Sceptre. Histoire
de Sceptre d'Agamemnon.
vers96.109.
Agamemnon parle aux
Grecs. Il leur represente
que depuis neuf années
leur armée se consume à
attendre vainement l'effet
des promesses de Jupiter,
qui ne s'accomplissent
point. Qu'il faut prendre
le party de s'en retourner.
(Ce discoursestplein d'artifice
& ne rend qu'à persuader
aux Grecs tout le
contraire de ce qu'on leur
propose ) mais les paroles
du Roy sont prises à la Jet,
tre par la multitude qui
ive penetre pas son dessein.
Emotion de l'armée comparée
à celle des flots, &
des moissons agitées par le
vent. Les Soldats courent
à leurs Vaisseaux pour
les mettre en estat. vers
100. IJ4.
1,
Dans ce moment le retour
des Grecs estoit conclu,
si Junon ne se fust
addressée à Minerve. Elle
luyparle Luy dit d'aller
dans le Camp des Grecs,
de parcourir i leur armée,
de lesretenir, & de les
empescherdemettre leurs
Vaisseauxenmer. Minerve
obéit. Elle trouve
Ulysse qui ne donnoitaucunsordres
pour les Vaisseaux.
L'encourage à retenir
les Grecs par de douces
paroles. vers hj. 18re
Ulysse parcourt l'armée
avec diligence. Rencontre
sur son chemin Ar<smemnon
dont il prend le
Sceptre. Ce qu'il dit aux
Rois qu'il rencontre. De
quelle maniere il parleaux
Soldats seditieux quand il
en trouve. vers 182. 206.
Les discours d'Ulysse
font un puissant effet sur
toute l'armée. LesSoldats
sortent de leurs Vaisseaux
pour une seconde assemblée.
Leur bruit comparé
au mugissement des flots
irritez, LesGreess'asseient
dans un profond silence.
Le seul Thersite fait un
bruit horrible. Portrait
hideux de Thersite. Sa
taille. Son caractere d'esprit.
Il parle insolemment
d'Agamemnon en sa presence.
Veut justifier le
ressentiment d'Achille.
Est d'avis que les Grecs
retournent dans leur patrie.
Ulysseluyrespond.
Le traire ignominieusement.
Le frappe du Sce-,
ptre d'Agamemnon. Les
épaules de Thersite en
font marquez. Therfite
pleure & se tait. Les
Grecstout affligez qu'ils
sont, ne peuvent s'em pescherd'en
rire. Ce qu'ils
se disent les uns aux autres
à ce sujet. vers207.277
Ulysse s'avance au milieu
de l'assemblée. Minerve
est auprèsde luy
fous la forme d'un Heraut
& fait faire silence
:J.
afin
que l'onentende les conseilsd'Ulysse.
Ulysseparle
à Agamemnon. Luy rcpresente
que les Grecs
veulent le couvrir de confusion
par le dessein qu'ils
ont de retournerchez eux.
Luy rappelle la prophetie
de Calchas au sujet d'un
prodige qui préfageoit la
prise de Troye après neuf
ans,figurez par le nombre
de huit passereaux & de
leur mere devorez par un
dragon. Conclut que les
Grecs doivent demeurer
jusqu'à ce que laVille de
Priamsoitsaccagée. everi
278.332-
LesGrecsapplaudissent
par de grands cris aux discours
d'Ulysse. Nestorse
leve. Dit qu'il n'y a point
de temps à perd re. Est
d'avis que l'armée soit
rangée par Nations
>
afin
que l'on reconnoiffe ceux
qui auront combattu avec
courage, & ceux quin'auront
pas fait leur devoir.
vers 353.368.
Agamemnon approuve
& louë le discours de Nestor.
Convient du mauvais
effet de sa querelle avec
Achille. Advouëqu'il s'est
emporte le premier. Dit
que la perte des Troyens
est asseurée s'il est jamais
d'accord avec Achille.
Commandeauxtroupe,
de prendre de la nourritu.
re pour se disposer au combat.
Leur annonce une
grande & sanglante journée.
Menace de more tous
ceux qui demeureront
dans leurs Vaisseaux loin
du combat. Les Grecs font
descrisde joye. Leretentissement
de l'air comparé
à celuy des flots irritez.
vers 369. 399
2 Les Soldats fc levent.
Se dispersent dans leurs
tentes. Prennent leur repas.
Chacun fait des sacrifices
au Dieu qu'il adore
pour se le rendre favorable,.
Agamemnon immole
un taureau. Menelas
son frere se trouve à
ce sacrifice. Priere d'Agamemnon
àJupiter. Jupiter
reçoit son Sacrifice
sans avoir dessein d'exaucer
ses voeux. Description
du Sacrifice, ( comme au
premier Livre. ) Nestor
dit qu'il faut profiter da
temps. Ranger l'armée
en bataille,&donner enfuite
le signal du combat.
D
evers 400. 440.
Les Grecs s'assemblent,
& prennent leur rang.
Minerve est au milieu.
d'eux qui les remplie d'ardeur
& d'impatience. L'éclat
des armes compare à
celuy du feu qui ravage
une vasse forest. Bataillons
& Escadrons comparez
à des troupes nombreuses
d'oiseaux. Nombre
des Soldats comparé
à celuy des fleurs, des
feuilles, Se des mouches
qui s'assemblent autour
d'une bergerie à l'heure
qu'on remplie les vaisseaux
de lait. Les Chefs
rangent leurs Troupes &
les reconnoissent avec
autant de facilité que les
Pasteurs reconnoiffenc
leurs troupeaux de Chevres
qui se sont meslées
dans les pasturages. Agamemnon
brille ce jour-là
d'une majesté éclatante.
Ressemble à Jupiter ,
à
Mars ,ôc à Neptune. Est
comparé ensuite à un fier
taureau. vers 441. 483.
Denombrement des
Troupes Grecques & de
leurs Vaisseaux. Précedé
d'une invocation aux Muses,
vers 484. 680.
Denombrement particulier
des TroupesThessaliennes
,
qui sont celles
d'Achille. Précedé d'une
autre invocationà la Muse.
'Vers 681. 760.
Quatrième invocation
à la Muse. Pour sçavoir
qui estoit le plus vaillant
des Princes qui suivirent
Agamemnon. Et quels
estoient les meilleurs chevaux.
Eumelus Roy de
Phéres pouvoit se vanter
d'avoir les deux meilleures
cavalles de l'armée. Ajax
estoit le plus vaillant de
tous les Princes après Achille,
& les chevaux d'Achille
estoient meilleurs
que ceuxd'Eumelus.Mais
Achille ne sortoit point de
ses Vaisseaux à cause de
son ressentiment.SesTroupes
se divertissoient sur le
rivage, & les Chefs des
Troupes Thessaliennes se
promenoient dans le
Camp fort tristes de ce
que leur General ne les
menoit point au combat.
vers 761. 779.
L'armée des Grecs s'avance
en ordre de bataille.
L'éclat de leurs armes
mes comparé à celuy d'une
plaine embrasée. > La
terre qui retentit fous leurs
pieds, fait le mesme bruit
-.
que le tonnerre qui gron-
:
de. iV*r ?• vers 780. 78r.
: -." Iris la messagere des
Dieux, prend la forme de
• Polices ( un des fils de
Í" i Priam) qui estoit en fen-
1 tinelle hors des portes de -
1 la Ville, pour observe
quand les Grecs s'avanr
ceroient. Elle averti
Priam que les Grecsviennent
l'attaquer. Luv conseille
de ranger ses Trou-
.,
pesfous leurs Chefs par
Nations & par lignées.
vers786.806.
On court aux armes.
Dansun moment toute la
Cavalerie & l'infanterie
fort de la Ville & s'affenlble
fous une colline à quelque
distance des portes.
Noms des Chefs Troyens.
Etat de leurs Troupes.
*wn807.877»
ARGUMENT
du troisiéme Livre,
Les Troyens s'avancent
avec un bruit confus, 8c
des cris perçans. Comparez
à des oiseaux & des
grues. Les Grecs marchenten
silence. Lapout
fiere que les deux armées
font lever en marchant,
Comparée au brouillard.
Lesarméesfonten prefence.
Pâris s'avance à la
teste des Troyens. Comment
il est armé. Menelas
de son coite s'avance a
>
grands pas. Il estcomparé
àun Lion arrame qui
est tombé sur un Cerf.
Pâris le voyant s'enfuit.
Paris comparé à un Voyageur
qui apperçoit un Serpent
dans le fond d'une
forest.<- versI. 37.
Hedtop reproche à Paris
sa lâcheté.ver38.s57.
1
Paris respond modefl
temenc à Hedor, donr il
compare lecourage au
fer d'une hache qui nese
rebrousse jamais. Il reprend
courage. Est resolu
de se battre avec Menelas
en combat singulier. A
cesconditions: qu'Helene
& toutes les richesses
appartiendront au vainqueur;
que les Troyens,
apre'savoit fait alliance
avec les Grecs, demeureront
paisibles dans leur
Ville, & que les Grecs s'en
- retourneront. He&or
plein de joye de la resolution
de Paris
,
s'avance
à la celle des deux armées
pour en informer les TroyensSe
les Grecs. Ceuxcy
qui ignorent son deCsein,
font pleuvoir sur luy
une gresse de traits. Aga-,
memnon leur dit d'arrester.
Qu'Hector a quel.,.
que chose à leur dire. Les
Grecs cessent de tirer.
Hector parle & repete ce
que Pâris luy a dit. Menelas
respond. Declare
qu'il consent à ce que Pâris
propose, ravi de pouvoir
terminer seul une
longue guerre qui n'aesté
entreprise que pour luy.
Veut que ce son Priam
luy
-
mesme qui jure l'a}.
liance que les Grecs doivent
faire avec les Troyens.
Et pourquoy. Que
pour scéeller cet accord
il soit immolé trois agneaux
;deux de la part des
Troyens, & un de la part
des Grecs. vers 58. 110.
Cette proposition est
receuë avec joye des deux
armées. Les Grecs & les
Troyens mettent bas leurs
armes,& ran gent leurs
chevaux par file.Hedor
envoye deux Herauts à
Troye pourfaire venir
Priam
*
& pour apporter
deux agneaux. Agamennon
donne ordre à Talthybius
d'aller aux Vaisseaux
des Grecs, & den
apporter un troisiéme.
Iris prend la forme de
Laodiceune des filles de
Priam, & va avertir Helene
de rout ce quise paue.
Elle trouve Helene occupee
à un ouvrage de hrolot
derie. Elle representoit
sur un voile les combats
que les Grecs & les Troyens
livroient pour elle;
Iris luy dit de venir voir
des choses surprenantes.
Que Paris ôc Menelas
vont
vont combattre seuls
,
&
qu'elle doit estre le prix
du vainqueur. La Oéeffe
inspire dans ce moment
à Helene un très-grand
defirde retourner àLacedemone
avec son premier
mari. vers III. 140.
Helene se met en chemin
avecdeux de ses femmes.
Elles arrivent aux
portes de Scées
,
où elles
trouvent plusieurs vieillards
assis sur le haut d'une
tour, qui deliberoiententr'eux
sur les moyens de
faire cesser les malheurs
de Troye. Ces vieillards
comparez à des cigales.
Ils sont frappez d'admiration
en voyant Helene.
Ce qu'ils se disentàce sujet.
Priam qui estoit parmi
eux l'appelle. L'a fait
asseoir auprès de luy
,
&
voyant tous les Chefs de
l'armée Grecque, luy en
montre un d'abord,& luy
demande qui il est. Helene
respondque c'est Agamemnon.
Il luy en fait
voir un autre & le compare
à un belier dans tia
grand troupeau de brebis
qui le reconnoissent pour
leur Roy. Helene dit que
c'est le prudent Ulysse.
Antenor,un des vieillards,
prend la parole, & dit à
Helene qu'il se fouvienc
d'Ulysse & de Menelas ,
lorsqu'ils vinrent en qualité
d'Ambassadeurs envoyez
par les Grecs pour
la redemander. Et prend
de là occasion de dire de
quellemaniéréils parloient.
l'un & l'autre dans
lesassemblées, & quelle,
éstoit leur contenance.
Priamvoit un autre Guerrier,
& demande à Helene
qui il est. Elle dit que
c'est Ajax. Elle montre
IdomenéeàAgamemnon.
Dit qu'erereconnoift cous
les Chefs. Ettsorprised'e
ne pointvoir parmieux ses
deux freres Castor& Pollux.
Croit qu'ilsn'ont pas
daigné prendre les armes
pour elle, Elle ignore en
effet qu'ils font tous deux
morts à Lacedemone.vers
I42.Z44. ; ,-
:;
Cependant les Hérauts
traversent laVille portant
les Vi^inics3avçcvq Qutre
d'excellent vin. Ideus
estant arrivé prés dePriam
le pressede partir, luy disincque
les Généraux
Grecs &Troyens Jepriene
de venir dans la plaine, (où son fils Paris doit
combattre avec Menelas)
pour y jurer la paix entre
les deux partis. Le Vieillard
tout tremblant monte
sur son char avec Antenor.
Ils arrivent & s'avancent
entre les deux armées.
Premiere ceremonie
pour le sacrifice. Priere
d'Agamemnon. Il renouvelle
& répété les conditions
du Traité,qui sont:
que si Menelas tué. Pâris,
(ces termes sontremarquables)
il emmenera Helene
avec toutes ses richesses
; au contraire Helene
demeurera à Pâris s'il tuë
Menelas.Victimes égorgées.
Priere à Jupiter dans
les deuxarmées ( non éxaucée.)
vers 145. 302.
Les libations achevées,
Priam prend congé des
deuxarmées,disantqu'il
n'a pas la force de voir
combattre son fils avec
Menelas. Il remonte sur
son Char , em porteavec
-
luyles deuxagneaux,vers
303-1313 ?-• 'v
-t)I Hector & Ulysse mesurent
le champ de bataille.
Ils,mettent lesfores dans
uncalque & les meslent
pour les tirer,& pourvoir
lequel de Menelas ou de
Pâris doit le premier lancer
le javelot. Prièreaddressée
auxDieux par les Grecs
ôc les Troyens. Hector
mesle les forts. Celuy de
Paris fort le premier, paris.
& Menelas s'arment.
De quelle maniéré Pâris
est armé. Ils se mesurent
l'un l'autre. Paris le premier
lance un javelor. il
atteint le bouclier de Menelas
sans le percer. Me-"
nelas leve son dard.Addresse
sa priere à Jupiter.^
Lance son javelot qui va
percer le bouclier de Paris
aauussni i bien que la cuirasse,^ libienquelaculrafiè
& déchiré la tunique pres
du flanc sans blesser Paris.
Menelas tire son épée &
en décharge un grand
coup sur le casque de son
ennemy. L'épée serompe.
& luytombe de la main.
Menelas s'en prend à Jupirer
, & luy addresse la
paroleaveccolere. Se jette
sur Pâris, le prend par
le casque & le tire du costé
des Grecs. La courroye se
casse, & le casque luy demeure
dans la main. Ille
jette loin de luy du costé
des Grecs. Il veut encore
se lancer sur Pârispourluy.
oster la vie. Mais Venus
couvre Paris d'un nuage.
Le dérobe aux yeux & à
la fureur de Menelas. Le
porte dans une Chambre
du Palais de Priam toute
parfumée. Elle l'y laisse-
Elle prend la forme d'une
vieille femme qu'Helene
avoit auprés d'elle à Lacedemone
,& qu'elle aimoic
tendrement. Ellevatrouver
cette Princesse. La
prie de venirvoir Paris
qui l'attend dans le Palais,
plein d'amour & d'impatience.
Helenereconnoift
Venus malgré son deguisement.
Luy fait des reproches
de ce qu'elle veut
la tromper. La renvoye
à Paris avec mépris. Luy
declare qu'elle n'ira point
le trouver, que cette démarche
la deshonoreroic.
Venus la menace de l'abandonner
si elle ne luy
obéit. Heiene intimidée
se couvre de son voile pour
n'estre point veuë, & Ce
laisse conduire par la
Déesse. vers314.410.
.( Estant arrivées au Palais
de Paris, Venus prend
un siege pour Helene
,
ôc
le met visà-vis de Pâris.
Helene s'y place, &sans
le regarder luy fait de sanglanes
reproches de son
peu de courage. Paris respond
qu'un autre jour les
Dieux le proregeront;
comme ils ont proregé
cette fois-cy Menelas qui
doit sa victoire au secours
de Minerve. Il excite Helene
à ne plus songer qti
aux plaisirs. Illuydeclare
qu'il ne l'a jamais aimée
avec tant de passïon qu'au
moment qu'il luy parle.
Il k leve & passe dans une
autre chambre. Helene
le fuir. vers 421.447.
Pendant ce temps-là
Menelascherche partout
son ennemy qui luy estoit
échappe, & qui, pour son
bonheur,n'avoit esté veu
par aucun des Grecs ni des
Troyens: car les Troyens
eux-mesmes le haïssoient
& lauroienc livréààMenelas.
Enfin Agaraemnon
haùssant la voixdemande
aux Troyens leprix de la
victoire de Menelas, suivane
les conditions du traité.
Tous les Grecapplau.
disset àsademande
de l'Iliade en forme
deTable.
Et Extrait a esté
fait avec tantd'exactitude,
d'ordre
,
& de jugement,
qu'il peutsuffire pour
donner une idée generale
del'Iliade d'Homere à
ceux qui ne l'ont jamais
leuë, il peut estreutile
en mesme temps à ceux
qui possedent parfaitement
leur Homere,puisque
c'est un tableau en
racourci,ouplustost une
efquice dont le trait peut
quelquefois
,
reveiller
leurs idées, & leur aider
à jouir plus facilement
de ces peintures poëtiques
qui occupent, &
qui flattent si agréablement
leur imagination;
ceux qui craignent de
perdre de veuë la charmante
Iliade
, me doivent
sçavoir bon gré de
leur donner enmignature
le portrait de leur maistresse,
c'est leur prouver
assez que je ne blat:
me point leur attachement.
J'auray peut-estre dans
la fuite la mesme attention
pour ceux qui iont
amoureux de Rabelais,
cela dépendra du loisir
de mes amis, c'etf à la
complaisance de l'un
d'eux que j'ay obligation
de cet Extrait, qui
a deu estre aussi ennuyeux
à faire
, que je
le crois utile au Public.
Leschiffres qui ifont a
la fin de chaque article,
marquent laplace f.5 l'efitendue
des matieres. Par
exemple I. 5. c'est-à-dire
que l'invocation pour
chanter la colere d'Achille
commence au I.
vers cffinit au 5.
ARGUMENT
du premier Livre.
Le Poëte invoque la
Muse pour chanter les effets
pernicieux de la colere
d'Achille. Vers I. 5.
Sujet de la colere d'Achille.
vers 6. 11. ehryCes Pre stre d'Apol-
- lon vient au camp des
Grecs chargé de presens
pour racheter sa filleChryseis
qui estoit esclave d'Agamemnon.
vers II. 1).
,
Sa harangue aux Grecs
àce sujet. vers16.20.
ConsentementdesGrecs.
Refus d'A gamemnon. Il
menace Chryfes. Ce
vieiliardintimide se retire.
Sa priere à Apollon.
Exaucée sur le champ.
Apollon. pendant neuf
jours frappe toute l'armée
des Grecs de traits empoisonnez&
y répand la
peste. vers 21. 52.
Achille convoque une
assemblée. Il dit à Agamemnon
qu'il faut consulter
quelque Devin pour
sçavoir le sujet de la cruelle
colered'Apollon, vers
53.66.
Calchas fils de Thestor
se leve & se met en devoir
de l'expliquer. Il n'ose le
faire à moins qu'Achille
ne luy promette de le proteger
contre ceux à qui sa
déclaration pourroit de- plaire. vers 67. SI.
Achillele luy promet.
Le Devin parle. Dit qu'il
faut renvoyer Chryseis.
sansrançon,avec uneHecatombe
pour calmer Apollon.
vers83.99.
Agamemnon se fasche
contre le Devin. Tesmoigne
la repugnance qu'il a
de renvoyer Chryseis,
Declare qu'il la prefere
mesmeà la Reine Clytemnestre
sa femme
,
& pourquoy.
Prend neanmoins
la refoî ution de la renvoyer
pour le salut de son
peuple. Demande qu'on
le dedommage, vers 100.
J19.
Achille prend la parole.
Agamemnon luy respond
avec hauteur, & dit
qu'il pourroit bien luy enlever
à luy-mesme sa ca ptive
Briseis. vers 120 146
Achille s'emporte & éclatte
en injures contre
Agamemnon. vers 147.
lyo.
Agamemnon respond
avec aigreur & reitere les
menaces qu'il a faites à
Achille de luy enlever Brifeis.
vers liJ. 186.
0 Achille entre enfureur.
Delibere s'il tuëra Agamemnon.
Son épée est à
*i
demitirée. Mais Minerve
descenduë par l'ordre
de Junon, s'arreste derriere
Achille, le retient
par les Cheveux, & ne se
rend visiblequ'à luy. A>
chille se retourne. La reconnoist.
Luy demande
avec colere ce qu'elle
vient faire là. Pallasluy
respond qu'elle vient le
calmer. a Luy permet le
reproche,& luyconseille
de ne point passerauxvoyes
de fait. Achille enfonce
son épée dans le
fourreau. Minerve s'en
retourne. vers 187. m,
Achille continuë de
s'emporrer contre Agamemnon
& luy die des
injures atroces. Il jure
par; son Sceptre que jamais
les Grecs n'auront de
luy aucun secours. vers
222.24'.245.
Agamemnon qui ne
peut plus tenir contre les
invectives d'Achille, est
prest à se porter à quelque
violente extremité.
Mais le vieux Nestor se
leve, ôcse fait entendre
a ces deux Chefs irritez.
Il leur parle avec l'authorité
& le caractere que
luy donnent son grand âge
& sa longue experience.
vers246.283.
Agamemnon respond à
Nestorqu'Achille est un
homme qui veut toutemporter
par hauteur, mais
qu'il n'est pas d'humeur à
luy ceder. Achillereplique.
Apres quoy ces deux
Chefs se levent & rompent
l'assemblée. Achille
se retire dans son quartier
avec Patrocle. Agamemnon
fait mettre en mer un
de ses navires après l'avoir
pourveu de victimes pour
l'Hecatombe.Ilmene luymesme
Chryseis au Vaisseau
& l'y fait monter.
Ulysse est choisi pour la
conduites Le ,Vaisseau
part.vers 284. 311.
L'armée d'Agamemnon
se purifie. Hecatombes
offertes à Apollon sur
le rivage mesme. vers 312. 316. Agamemnon ordonne
à Talthybius & à Euribate
ses deux Herauts, d'aller
à la tente d'Achille
prendre Briseis & l'amener.
Que si Achille la
refuse il ira la prendre luymesme
bien accompagnée
vers 317.314.
Les deux Herauts arrivent
à la tente d'Achille,
& notent luy addresser la
parole. Achille qui voit
leur peine les prévient ôc
leur dit, qu'ils sont innocens
de l'affront qu'on luy
fair. Qu'il ne se plaint
que d'Agamemnon qui
envoye chercher Briseis.
En mesme temps il dit à
Patroclede laluy amener,
&
& de la remettre entre les
mains des Hérauts.Achille
reitere en leur presence
la menace qu'il a
faite à Agamemnon, de
ne jamais secourir les
Grecs. Patrocle amene
Briseis. Elle s'en va avec
les deux Herauts. vers 326.
347.
Achille va au bord de
la mer, & versant des
larmes, addresse sa plaince
à Thetis. La Déesse
fort des eaux , & luy demande
le sujet de son affliction.
Achilleluy: ep
dit la cause. La prie de
venger l'affrontqu'il a receu.
Devoir Jupiter. De
l'engager ( pour punir Agamemnon
de luyfaire
reconnoistre sa¡fatJce) :
à
secourir les Troyens,&
leur donner l'avantage sur
lesGrecs, ; ; Ilfaitressouvenir
Thetis en cet endroit
d'un service important
qu'elle rendit autrefois
à Jupiter; au,moyen
de quoy il ne -luy doit rien
refuser. Theris promet
à Achille qu'elle fera ce
qu'il luydemande, & qu'-
À*A **-
auss-tôt que Jupiter, qui
estalléàunfestin dont les
Ethiopiens l'ont prié, sera
retourné itu Ciel
,
elle ira
le voir & luy parler. Thetis
disparoift, &elle laisse
son fils tres affligé de la
perte de Briseis.vers347.
429.
Ulysse qui conduisoit
l'Hecatombe pour Apollon,
arrive dans le port de
Chrysa.Description dela
manoeuvre d'un Vaisseau
arrivé au port. Ulysse
parle à Chryfes
, & luy
presente sa fille,vers429.
Sacrifice. Priere de
Chryses à Apollon. Exaucée
dans le moment.
Festin.Libations. vers
446.470.
Les Grecs se retirent,
& paisens la nuit sur leur
Vaisseau. Le lendemain
ils retournent au Camp,
aydez d'un vent favorable
qu'Apollon leur en.
voye. lis se distribuent
dans leurs tentes,vers471.
483-
Achille se tient tousjours;
dans son quartier. Ne va
point aux assemblées.S'abandonne
entierement à
son chagrin. vers 484.491.
Le douzième jour Jupiter
estant revenu d'Ethiopie
,Thetis va le trouver
à récart au plus haut
sommet de l'Olympe.
Priere de Thetis à Jupiter.
Ju piter ne respond rien.
Thetis le presse. Jupiter
luy promet ce qu'elle demande
,
& confirme sa
promesse par un signe de
teste, donc tout l'Olympe
estébranlé, vers491.529.
•
Thetis s'en va. Ju piter
retourne dans son Palais.
Les Dieux vont au devant
deluy. Ilseplacesurson
Throne. Junon qui n'ignore
pas son dessein, parce
qu'elle l'a veu avec
Thetis,luy reproche d'un
son aigre le mystere qu'il
luy en fait. Jupiter ILy
respond d'abord avec moderation.
Junon continuë
de luy parler avec
hauteur. Jupiter la menace.
Elle se tait Vulcain
prend la parole, &
represente à sa mere qu'il
saur ménager Jupiter. Il
presente une coupe à Junon.
Il raconte la plaisante
histoire de Cacheute.
Il verteà boireaux Dieux.
Son empressement à les
servir, fait rire toute Tafsemblée
( parce qu'il boite.
) Après un repas trèsjoyeux
chaque Dieu va se
coucher dans son Appartement.
Junon couche
auprès de Jupiter.
ARG V MENT
dusecond Livre*
Jupiter pour executer
la promesse qu'il a faite
à Thetis de relever la
gloire d'Achille, & de
rendre les Troyensvictorieux
,
appuiele Songe,
luy commande d'aller
trouver Agjmernnon
,
&
de direàce Prince,qu'il
,
fasTearmer;ùj^le.Grecs,
qu'il mette toute son armée
en barri'le. Qu'il
luy fasse entendre que le
jour
jour est veuu qu'il va se
rendre maistredela Ville
deTroye. Le Songe part.
prend la forrne deNestor.
Se place sur la teste d'Agamemnon.
Luy redit les
paroles de Jupiter, & se
retire. vers 1 35.
Agamemnon se leve.
S'habille. Donne ordre
du grand matin à ses Herauts
de faire assembler
tous les Grecs. Pendant
ce temps-là il tient conseil
avec les principaux
Chefs dans le Vaisseau de
Nestor. Leur dit les parôles
du Songe. Leur fait
part du dessein qu'il a de
fonder le courage des
Grecs. Je vais,dit-il, leur
ordonner de s'enfuirsur leurs
Vaisseaux VÙUS) de vostre
cpfté vom les retiendrez par
de douces paroles. Nestor
represente qu'il faut adjousterfoy
au Songe d'Agamemnon
, parce qu'il
ne faut pas dourer que Jupiter
ne l'ait envoyé. Die
qu'il faut executer le projet
du Roy. vers 35.84.
Les Troupes arrivent.
L'armée comparée à des
Legions d'abeilles, vers 86.
5)6*
NeufHerauts font faire
silence dans l'armée. Le
Roy se leve tenant en
main son Sceptre. Histoire
de Sceptre d'Agamemnon.
vers96.109.
Agamemnon parle aux
Grecs. Il leur represente
que depuis neuf années
leur armée se consume à
attendre vainement l'effet
des promesses de Jupiter,
qui ne s'accomplissent
point. Qu'il faut prendre
le party de s'en retourner.
(Ce discoursestplein d'artifice
& ne rend qu'à persuader
aux Grecs tout le
contraire de ce qu'on leur
propose ) mais les paroles
du Roy sont prises à la Jet,
tre par la multitude qui
ive penetre pas son dessein.
Emotion de l'armée comparée
à celle des flots, &
des moissons agitées par le
vent. Les Soldats courent
à leurs Vaisseaux pour
les mettre en estat. vers
100. IJ4.
1,
Dans ce moment le retour
des Grecs estoit conclu,
si Junon ne se fust
addressée à Minerve. Elle
luyparle Luy dit d'aller
dans le Camp des Grecs,
de parcourir i leur armée,
de lesretenir, & de les
empescherdemettre leurs
Vaisseauxenmer. Minerve
obéit. Elle trouve
Ulysse qui ne donnoitaucunsordres
pour les Vaisseaux.
L'encourage à retenir
les Grecs par de douces
paroles. vers hj. 18re
Ulysse parcourt l'armée
avec diligence. Rencontre
sur son chemin Ar<smemnon
dont il prend le
Sceptre. Ce qu'il dit aux
Rois qu'il rencontre. De
quelle maniere il parleaux
Soldats seditieux quand il
en trouve. vers 182. 206.
Les discours d'Ulysse
font un puissant effet sur
toute l'armée. LesSoldats
sortent de leurs Vaisseaux
pour une seconde assemblée.
Leur bruit comparé
au mugissement des flots
irritez, LesGreess'asseient
dans un profond silence.
Le seul Thersite fait un
bruit horrible. Portrait
hideux de Thersite. Sa
taille. Son caractere d'esprit.
Il parle insolemment
d'Agamemnon en sa presence.
Veut justifier le
ressentiment d'Achille.
Est d'avis que les Grecs
retournent dans leur patrie.
Ulysseluyrespond.
Le traire ignominieusement.
Le frappe du Sce-,
ptre d'Agamemnon. Les
épaules de Thersite en
font marquez. Therfite
pleure & se tait. Les
Grecstout affligez qu'ils
sont, ne peuvent s'em pescherd'en
rire. Ce qu'ils
se disent les uns aux autres
à ce sujet. vers207.277
Ulysse s'avance au milieu
de l'assemblée. Minerve
est auprèsde luy
fous la forme d'un Heraut
& fait faire silence
:J.
afin
que l'onentende les conseilsd'Ulysse.
Ulysseparle
à Agamemnon. Luy rcpresente
que les Grecs
veulent le couvrir de confusion
par le dessein qu'ils
ont de retournerchez eux.
Luy rappelle la prophetie
de Calchas au sujet d'un
prodige qui préfageoit la
prise de Troye après neuf
ans,figurez par le nombre
de huit passereaux & de
leur mere devorez par un
dragon. Conclut que les
Grecs doivent demeurer
jusqu'à ce que laVille de
Priamsoitsaccagée. everi
278.332-
LesGrecsapplaudissent
par de grands cris aux discours
d'Ulysse. Nestorse
leve. Dit qu'il n'y a point
de temps à perd re. Est
d'avis que l'armée soit
rangée par Nations
>
afin
que l'on reconnoiffe ceux
qui auront combattu avec
courage, & ceux quin'auront
pas fait leur devoir.
vers 353.368.
Agamemnon approuve
& louë le discours de Nestor.
Convient du mauvais
effet de sa querelle avec
Achille. Advouëqu'il s'est
emporte le premier. Dit
que la perte des Troyens
est asseurée s'il est jamais
d'accord avec Achille.
Commandeauxtroupe,
de prendre de la nourritu.
re pour se disposer au combat.
Leur annonce une
grande & sanglante journée.
Menace de more tous
ceux qui demeureront
dans leurs Vaisseaux loin
du combat. Les Grecs font
descrisde joye. Leretentissement
de l'air comparé
à celuy des flots irritez.
vers 369. 399
2 Les Soldats fc levent.
Se dispersent dans leurs
tentes. Prennent leur repas.
Chacun fait des sacrifices
au Dieu qu'il adore
pour se le rendre favorable,.
Agamemnon immole
un taureau. Menelas
son frere se trouve à
ce sacrifice. Priere d'Agamemnon
àJupiter. Jupiter
reçoit son Sacrifice
sans avoir dessein d'exaucer
ses voeux. Description
du Sacrifice, ( comme au
premier Livre. ) Nestor
dit qu'il faut profiter da
temps. Ranger l'armée
en bataille,&donner enfuite
le signal du combat.
D
evers 400. 440.
Les Grecs s'assemblent,
& prennent leur rang.
Minerve est au milieu.
d'eux qui les remplie d'ardeur
& d'impatience. L'éclat
des armes compare à
celuy du feu qui ravage
une vasse forest. Bataillons
& Escadrons comparez
à des troupes nombreuses
d'oiseaux. Nombre
des Soldats comparé
à celuy des fleurs, des
feuilles, Se des mouches
qui s'assemblent autour
d'une bergerie à l'heure
qu'on remplie les vaisseaux
de lait. Les Chefs
rangent leurs Troupes &
les reconnoissent avec
autant de facilité que les
Pasteurs reconnoiffenc
leurs troupeaux de Chevres
qui se sont meslées
dans les pasturages. Agamemnon
brille ce jour-là
d'une majesté éclatante.
Ressemble à Jupiter ,
à
Mars ,ôc à Neptune. Est
comparé ensuite à un fier
taureau. vers 441. 483.
Denombrement des
Troupes Grecques & de
leurs Vaisseaux. Précedé
d'une invocation aux Muses,
vers 484. 680.
Denombrement particulier
des TroupesThessaliennes
,
qui sont celles
d'Achille. Précedé d'une
autre invocationà la Muse.
'Vers 681. 760.
Quatrième invocation
à la Muse. Pour sçavoir
qui estoit le plus vaillant
des Princes qui suivirent
Agamemnon. Et quels
estoient les meilleurs chevaux.
Eumelus Roy de
Phéres pouvoit se vanter
d'avoir les deux meilleures
cavalles de l'armée. Ajax
estoit le plus vaillant de
tous les Princes après Achille,
& les chevaux d'Achille
estoient meilleurs
que ceuxd'Eumelus.Mais
Achille ne sortoit point de
ses Vaisseaux à cause de
son ressentiment.SesTroupes
se divertissoient sur le
rivage, & les Chefs des
Troupes Thessaliennes se
promenoient dans le
Camp fort tristes de ce
que leur General ne les
menoit point au combat.
vers 761. 779.
L'armée des Grecs s'avance
en ordre de bataille.
L'éclat de leurs armes
mes comparé à celuy d'une
plaine embrasée. > La
terre qui retentit fous leurs
pieds, fait le mesme bruit
-.
que le tonnerre qui gron-
:
de. iV*r ?• vers 780. 78r.
: -." Iris la messagere des
Dieux, prend la forme de
• Polices ( un des fils de
Í" i Priam) qui estoit en fen-
1 tinelle hors des portes de -
1 la Ville, pour observe
quand les Grecs s'avanr
ceroient. Elle averti
Priam que les Grecsviennent
l'attaquer. Luv conseille
de ranger ses Trou-
.,
pesfous leurs Chefs par
Nations & par lignées.
vers786.806.
On court aux armes.
Dansun moment toute la
Cavalerie & l'infanterie
fort de la Ville & s'affenlble
fous une colline à quelque
distance des portes.
Noms des Chefs Troyens.
Etat de leurs Troupes.
*wn807.877»
ARGUMENT
du troisiéme Livre,
Les Troyens s'avancent
avec un bruit confus, 8c
des cris perçans. Comparez
à des oiseaux & des
grues. Les Grecs marchenten
silence. Lapout
fiere que les deux armées
font lever en marchant,
Comparée au brouillard.
Lesarméesfonten prefence.
Pâris s'avance à la
teste des Troyens. Comment
il est armé. Menelas
de son coite s'avance a
>
grands pas. Il estcomparé
àun Lion arrame qui
est tombé sur un Cerf.
Pâris le voyant s'enfuit.
Paris comparé à un Voyageur
qui apperçoit un Serpent
dans le fond d'une
forest.<- versI. 37.
Hedtop reproche à Paris
sa lâcheté.ver38.s57.
1
Paris respond modefl
temenc à Hedor, donr il
compare lecourage au
fer d'une hache qui nese
rebrousse jamais. Il reprend
courage. Est resolu
de se battre avec Menelas
en combat singulier. A
cesconditions: qu'Helene
& toutes les richesses
appartiendront au vainqueur;
que les Troyens,
apre'savoit fait alliance
avec les Grecs, demeureront
paisibles dans leur
Ville, & que les Grecs s'en
- retourneront. He&or
plein de joye de la resolution
de Paris
,
s'avance
à la celle des deux armées
pour en informer les TroyensSe
les Grecs. Ceuxcy
qui ignorent son deCsein,
font pleuvoir sur luy
une gresse de traits. Aga-,
memnon leur dit d'arrester.
Qu'Hector a quel.,.
que chose à leur dire. Les
Grecs cessent de tirer.
Hector parle & repete ce
que Pâris luy a dit. Menelas
respond. Declare
qu'il consent à ce que Pâris
propose, ravi de pouvoir
terminer seul une
longue guerre qui n'aesté
entreprise que pour luy.
Veut que ce son Priam
luy
-
mesme qui jure l'a}.
liance que les Grecs doivent
faire avec les Troyens.
Et pourquoy. Que
pour scéeller cet accord
il soit immolé trois agneaux
;deux de la part des
Troyens, & un de la part
des Grecs. vers 58. 110.
Cette proposition est
receuë avec joye des deux
armées. Les Grecs & les
Troyens mettent bas leurs
armes,& ran gent leurs
chevaux par file.Hedor
envoye deux Herauts à
Troye pourfaire venir
Priam
*
& pour apporter
deux agneaux. Agamennon
donne ordre à Talthybius
d'aller aux Vaisseaux
des Grecs, & den
apporter un troisiéme.
Iris prend la forme de
Laodiceune des filles de
Priam, & va avertir Helene
de rout ce quise paue.
Elle trouve Helene occupee
à un ouvrage de hrolot
derie. Elle representoit
sur un voile les combats
que les Grecs & les Troyens
livroient pour elle;
Iris luy dit de venir voir
des choses surprenantes.
Que Paris ôc Menelas
vont
vont combattre seuls
,
&
qu'elle doit estre le prix
du vainqueur. La Oéeffe
inspire dans ce moment
à Helene un très-grand
defirde retourner àLacedemone
avec son premier
mari. vers III. 140.
Helene se met en chemin
avecdeux de ses femmes.
Elles arrivent aux
portes de Scées
,
où elles
trouvent plusieurs vieillards
assis sur le haut d'une
tour, qui deliberoiententr'eux
sur les moyens de
faire cesser les malheurs
de Troye. Ces vieillards
comparez à des cigales.
Ils sont frappez d'admiration
en voyant Helene.
Ce qu'ils se disentàce sujet.
Priam qui estoit parmi
eux l'appelle. L'a fait
asseoir auprès de luy
,
&
voyant tous les Chefs de
l'armée Grecque, luy en
montre un d'abord,& luy
demande qui il est. Helene
respondque c'est Agamemnon.
Il luy en fait
voir un autre & le compare
à un belier dans tia
grand troupeau de brebis
qui le reconnoissent pour
leur Roy. Helene dit que
c'est le prudent Ulysse.
Antenor,un des vieillards,
prend la parole, & dit à
Helene qu'il se fouvienc
d'Ulysse & de Menelas ,
lorsqu'ils vinrent en qualité
d'Ambassadeurs envoyez
par les Grecs pour
la redemander. Et prend
de là occasion de dire de
quellemaniéréils parloient.
l'un & l'autre dans
lesassemblées, & quelle,
éstoit leur contenance.
Priamvoit un autre Guerrier,
& demande à Helene
qui il est. Elle dit que
c'est Ajax. Elle montre
IdomenéeàAgamemnon.
Dit qu'erereconnoift cous
les Chefs. Ettsorprised'e
ne pointvoir parmieux ses
deux freres Castor& Pollux.
Croit qu'ilsn'ont pas
daigné prendre les armes
pour elle, Elle ignore en
effet qu'ils font tous deux
morts à Lacedemone.vers
I42.Z44. ; ,-
:;
Cependant les Hérauts
traversent laVille portant
les Vi^inics3avçcvq Qutre
d'excellent vin. Ideus
estant arrivé prés dePriam
le pressede partir, luy disincque
les Généraux
Grecs &Troyens Jepriene
de venir dans la plaine, (où son fils Paris doit
combattre avec Menelas)
pour y jurer la paix entre
les deux partis. Le Vieillard
tout tremblant monte
sur son char avec Antenor.
Ils arrivent & s'avancent
entre les deux armées.
Premiere ceremonie
pour le sacrifice. Priere
d'Agamemnon. Il renouvelle
& répété les conditions
du Traité,qui sont:
que si Menelas tué. Pâris,
(ces termes sontremarquables)
il emmenera Helene
avec toutes ses richesses
; au contraire Helene
demeurera à Pâris s'il tuë
Menelas.Victimes égorgées.
Priere à Jupiter dans
les deuxarmées ( non éxaucée.)
vers 145. 302.
Les libations achevées,
Priam prend congé des
deuxarmées,disantqu'il
n'a pas la force de voir
combattre son fils avec
Menelas. Il remonte sur
son Char , em porteavec
-
luyles deuxagneaux,vers
303-1313 ?-• 'v
-t)I Hector & Ulysse mesurent
le champ de bataille.
Ils,mettent lesfores dans
uncalque & les meslent
pour les tirer,& pourvoir
lequel de Menelas ou de
Pâris doit le premier lancer
le javelot. Prièreaddressée
auxDieux par les Grecs
ôc les Troyens. Hector
mesle les forts. Celuy de
Paris fort le premier, paris.
& Menelas s'arment.
De quelle maniéré Pâris
est armé. Ils se mesurent
l'un l'autre. Paris le premier
lance un javelor. il
atteint le bouclier de Menelas
sans le percer. Me-"
nelas leve son dard.Addresse
sa priere à Jupiter.^
Lance son javelot qui va
percer le bouclier de Paris
aauussni i bien que la cuirasse,^ libienquelaculrafiè
& déchiré la tunique pres
du flanc sans blesser Paris.
Menelas tire son épée &
en décharge un grand
coup sur le casque de son
ennemy. L'épée serompe.
& luytombe de la main.
Menelas s'en prend à Jupirer
, & luy addresse la
paroleaveccolere. Se jette
sur Pâris, le prend par
le casque & le tire du costé
des Grecs. La courroye se
casse, & le casque luy demeure
dans la main. Ille
jette loin de luy du costé
des Grecs. Il veut encore
se lancer sur Pârispourluy.
oster la vie. Mais Venus
couvre Paris d'un nuage.
Le dérobe aux yeux & à
la fureur de Menelas. Le
porte dans une Chambre
du Palais de Priam toute
parfumée. Elle l'y laisse-
Elle prend la forme d'une
vieille femme qu'Helene
avoit auprés d'elle à Lacedemone
,& qu'elle aimoic
tendrement. Ellevatrouver
cette Princesse. La
prie de venirvoir Paris
qui l'attend dans le Palais,
plein d'amour & d'impatience.
Helenereconnoift
Venus malgré son deguisement.
Luy fait des reproches
de ce qu'elle veut
la tromper. La renvoye
à Paris avec mépris. Luy
declare qu'elle n'ira point
le trouver, que cette démarche
la deshonoreroic.
Venus la menace de l'abandonner
si elle ne luy
obéit. Heiene intimidée
se couvre de son voile pour
n'estre point veuë, & Ce
laisse conduire par la
Déesse. vers314.410.
.( Estant arrivées au Palais
de Paris, Venus prend
un siege pour Helene
,
ôc
le met visà-vis de Pâris.
Helene s'y place, &sans
le regarder luy fait de sanglanes
reproches de son
peu de courage. Paris respond
qu'un autre jour les
Dieux le proregeront;
comme ils ont proregé
cette fois-cy Menelas qui
doit sa victoire au secours
de Minerve. Il excite Helene
à ne plus songer qti
aux plaisirs. Illuydeclare
qu'il ne l'a jamais aimée
avec tant de passïon qu'au
moment qu'il luy parle.
Il k leve & passe dans une
autre chambre. Helene
le fuir. vers 421.447.
Pendant ce temps-là
Menelascherche partout
son ennemy qui luy estoit
échappe, & qui, pour son
bonheur,n'avoit esté veu
par aucun des Grecs ni des
Troyens: car les Troyens
eux-mesmes le haïssoient
& lauroienc livréààMenelas.
Enfin Agaraemnon
haùssant la voixdemande
aux Troyens leprix de la
victoire de Menelas, suivane
les conditions du traité.
Tous les Grecapplau.
disset àsademande
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Résumé : Extrait ou Argument de l'Iliade en forme de Table.
Le texte présente un extrait de l'Iliade d'Homère sous forme de tableau, destiné à offrir une vue d'ensemble de l'œuvre. Cet extrait vise à aider les lecteurs, qu'ils découvrent l'Iliade ou la connaissent déjà, en servant de rappel et d'aide à la compréhension des peintures poétiques de l'œuvre. L'auteur envisage également de créer des extraits similaires pour d'autres œuvres littéraires, comme celles de Rabelais, en fonction de son temps libre et de la complaisance de ses amis. L'argument du premier livre de l'Iliade commence par l'invocation de la Muse pour chanter la colère d'Achille. Le prêtre d'Apollon, Chryses, vient au camp des Grecs pour racheter sa fille Chryseis, esclave d'Agamemnon. Après le refus d'Agamemnon, Apollon frappe l'armée grecque de peste. Achille convoque une assemblée et le devin Calchas révèle qu'il faut renvoyer Chryseis pour apaiser Apollon. Agamemnon, furieux, accepte à contrecœur et demande une compensation, proposant de prendre Briseis, la captive d'Achille. Achille, en colère, menace de ne plus secourir les Grecs. Minerve intervient pour calmer Achille, qui jure de ne plus aider les Grecs. Nestor tente de réconcilier les deux chefs, mais en vain. Agamemnon envoie des hérauts prendre Briseis, et Achille se plaint à sa mère, Thetis, qui promet d'intercéder auprès de Jupiter. L'argument du second livre décrit comment Jupiter, après avoir promis à Thetis de soutenir Achille, envoie un songe à Agamemnon pour l'inciter à attaquer Troie. Agamemnon rassemble l'armée et tente de la persuader de combattre, mais les soldats, découragés, veulent partir. Junon demande à Minerve d'intervenir pour retenir les Grecs. Ulysse parcourt l'armée pour encourager les soldats. Agamemnon, reconnaissant son erreur, commande aux troupes de se préparer au combat. Les Grecs se rassemblent, et Minerve les remplit d'ardeur. L'armée se prépare au combat, et les chefs rangent leurs troupes. Le texte se termine par une invocation aux Muses pour connaître les détails des troupes et des chevaux des Grecs. Le texte décrit ensuite les événements de la guerre de Troie, centrés sur les préparatifs et le combat singulier entre Ménélas et Pâris. Les Grecs, bien armés et disciplinés, avancent en ordre de bataille, tandis que les Troyens, conduits par Hector, se préparent également. Iris, messagère des dieux, avertit Priam de l'avancée des Grecs. Hector organise les troupes troyennes par nations et lignées. Les deux armées se font face, les Grecs en silence et les Troyens avec des cris perçants. Pâris, à la tête des Troyens, est comparé à un voyageur effrayé par un serpent. Hector reproche à Pâris sa lâcheté, mais Pâris décide de se battre contre Ménélas en combat singulier. Les conditions du duel sont établies : le vainqueur obtiendra Hélène et les richesses, et les deux peuples feront la paix. Hector informe les deux armées, et les Grecs cessent de tirer. Priam est informé du duel et se rend sur le champ de bataille avec Anténor. Les hérauts apportent les victimes pour le sacrifice. Agamemnon renouvelle les conditions du traité. Après les prières et les libations, Hector et Ulysse mesurent le champ de bataille. Pâris lance le premier javelot, atteignant le bouclier de Ménélas sans le percer. Ménélas, après une prière à Jupiter, lance son javelot qui blesse légèrement Pâris. Dans la lutte qui suit, l'épée de Ménélas se brise. Vénus intervient pour protéger Pâris, le couvrant d'un nuage et le conduisant dans le palais de Priam.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 65-123
ARTICLE burlesque. Suite du Paralelle d'Homere & de Rabelais.
Début :
Sans interrompre le paralelle d'Homere & de Rabelais, je [...]
Mots clefs :
Homère, Rabelais, Plaisir, Médecin, Parallèle, Hommes, Mari, Oeil, Fous, Dames, Compagnons, Moutons, Caverne, Cyclope, Patience, Marchand, Femme, Dieux, Troupeaux, Paris, Jupiter, Argent, Sourd, Muette, Dissertation
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ARTICLE burlesque. Suite du Paralelle d'Homere & de Rabelais.
ARTICLE
burlesque.
Suite du Paralelle d'Homere&
deRabelais.
SAns interrompre le
paralelle d'Homere&
de Rabelais,je puis interrompre
les reflexions
comiques & serieuses
que j'ai commencéesfutcesdeux
Auteurs. Trop de réflexions
de fuite feroient
une dissertation
ennuyeuse
,
sur tout
pour les Dames, dont
j'ambitionne les suffrages;
elles ont legoût
plus delicat& plus vrai
que les hommes, dont
la pluspart se piquant
,de
<
critique profonde,
sont toûjours en garde
contre ce qui plaÎrjqui
ont, pour ainsidire,
emouue leur goût naturel
à force de science
dC de préjugez; en un
f- mot, qui jugent moins
par ce qu'ils sentent,
que par ce qu'ilssçavent.
Plusieurs Dames af.
fez contentes de quelques
endroits de mes
dissertations, se sont
plaint que les autres
netoient pas assez intelligibles
pour elles,
qui ne sont pasobligées
d'avoir lû Homere ni
Rabelais: il est vrai que
le Poete Grec est à presenttraduitenbonfrançois:
mais Rabelais est
encore du grec pour elles
; je vais donc tâcher
declaircir& de purifier
quelques morceaux de
Rabelais, pour les rendre
moins ennuyeux
aux Dames.
Ces extraits épurez
feront plaisir à celles
qui, curieuses de lire
Rabelais, n'ont jamais
voulu contenter leur
curiosité aux dépens de
leur modestie.
En donnantce qu'il
y a de meilleur dans
Rabelais, je fixerai la
curiosité de celles qui
en faveur du bon, auroient
risqué de lirele
mauvais.
Et s'il y en a quelqu'une
qui n'aiepû resister
à la tentation de
tout lire,elle pourra
citer Maître François à
l'abryde mes extraits,
sans être soupçonnée
d'auoir lu l'original.
Dans la derniere dissertation
j'ai opposé à
une harangue du sage
Nestor, une lettre écrite
à Gargantua par
Grandgousier son pere.
Vous avez vû que Rabelais
s'est mélé du fcrieux.;
Homere lemele
aussi quelquefois du
burlesque, autre sujet
de paralelle.Vousaurez
ici un conte heroïcomique
de l'Odissée, mais
commençons par un
conte de Rabelais;je ne
prétens qu'opposer le
premier coupd'oeil de
ces deuxcontes,&non.
pas les comparer exaétcment:
j'entrouverai
dans la fuite quelquestuinnss
ppluuss pprroopprreess aà eêttrree.
comparez ensemble.
Voici celui de Rabelais,
'f
donc j'ai feulement conservé
le fond, en a joûtant
& retranchant
tout ce que j'aicrû pouvoir
le rendre plus
agréable,& plusintelligible
aux Dames.
LES
LES MOUTONS
de Dindenaut.
<*. En une Naufou Navire
estoitletaciturnien.,
songe-creux,&malignement
intentionnéPanurge
: encemêmè Navire
estoit un Marchand de
moutonsnomméDindenaut,
hommegaillard,
raillard
,
grand rib leur
5
nurgetoutdébifié de mi-
Lie, 6c mal en point d'acouftrement
,
déhousillé
de chevelure
,
vesce
délabrée, éguillettes
rompues, boutons intermitans
chauffes pensantes,&:
lunettes pendues
au bonnet. Le Marchant
donc s'émancipa
en gausseriessur chaque
piece d'iceluy accoustrement,
mais specialement
sur ses lunettes : luy difarteavoir<
fçupar traciitioli
vulgaire que tout
homme arborant lunett
tes sur toûjours onc mal
voulu des femmes étranges
& vilipendé de la
siennedomestique ,sur
lesquels pronostics apostrophant
Panurge en son
honneur, l'appella je ne
sçay comment, id est,
d'un nom qui réveilla i«rPanurgedesaléthargie
^.rêveusej carrêvoitjuste
• en ce momentauxinconveniens
à venir de son
futur mariage. Holà,
holà
, mon bon Marchand
*,
dit d'abord Panurge
d'un air niais 8c
bonnasse, holà, vous disje,
car onc ne fus, ny ne
puis maintenant estre ce
-
que nul n'est que par mariage
: A quoy repart
Dindenaut, que marié
ou non mariée c'esttout
un ; car fruits de Cor-,
nuaille sont fruits précoces
j & m'est avisque
pour porter tels fruits ,
êtes fait &C moulé comme
de cire: ouy , cette
plante mordra sur~vôrre
chef comme chiendenc
sur terre graffe.
Ho ,
ho
,
ho
,
reprit
bonnement Panurge,
quartier, quartier, car
par la vertu- boeuf ou
asne que je suis, ne puis
avoir espritd'Aigle: perçant
les nuës,par quoy
gaudissez-vous de moy,
si c'est vostre plaisir ,
mais rien nerepliqueray
faute de répliqué : prenons
patience.
Patience vous duira
dit le Marchand, , comme
à tant d'autres. Patienceestvertu
maritale.
Patience soit imterrompit
Panurge, mais changeons
de propos : Vous
avez-là force beaux moutons,
m'envendriez-vous
bien un paravanture.
O le vaillant acheteur
de moutons, dit le Marchand.
Feriez volontiers
plus Convenablement
vous acheter un bon ha-,
bit pour quand vous E~
rez marié,habit de lné.)
nage ,
habit avenant ,
manteau profitable
chapeau commode, &,
panache de cerf.
Va-rience, dit Panurge,
& vendez-moy feulc,
ment un de vos Inou,
ton.
Tubleu
,
dit le Mat>
chand, ce seroit fortune
pour vous qu'un de ces
beliers. Vendriez sa fine
laine pour faire draps, sa
Mue peau pour faire cuir s
sa chair friande pour
nourrir Princes, & (i
petite-oye pieds :& teste
vous resteroient, & cornes
encore sur le marché-
Patience,dit Panurge,
tout ce que dites de cornerie
a esté corné aux
oreilles tant & tant de
fois,laissons ces vieilleties
; sottises nouvelles.
sont plus de InÍfea,
-- Ah qu'il dit bien! reprit
le Marchand, il merite
que mouton je luy
vende, ilestbon homme
: ç'a parlons daffaire.
Bon, dit Panurge eit
joye, vous venez au but,
6c n'auray plus besoinde
patience.
T C'a, dit le Marchand,
écoutez - mcy.j'écoute
dit Panurge.
LE M. Approchez cette
oreilledroite.P.
ce. LE M. Et la gauche. l P. Hé bien. LE M. En
l'autre encore. P. N'enay
quecesdeux. LE M.Ouvrez
- les donc toutes
grandes. P. A vôtre commandement.
LE MARC.
Vous allez au pays des
Lanternois? P.Ouy. LE
M. Voir le monde? P,
Certes. LE M. Joyeusement
? P. Voire. Le M,
Sans vous fâcher P. N'en
ayd'envie. LEM. Vous
avez nom Robin. P. Si
VOUS voulez. LE MARC.
Voyez-vous ce Moutons
P. Vous me l'allez vendre,
LEM.Ilanom Robin
comme vous. Ha
9 ha
, ha.Vons allez au
pays des Lanternois voir
le motide,i.oyeuCement,'
sans vous fâcher, ne vous
fâchez - donc guere si
Robin mouton n'est pas
pour vous. Bez, bez
bez; & continua ainsi
bez, bez, aux oreillesdu
pauvre Panurge
) en le
mocquant de la lourderie.
Oh,patience,patience
, reprit Panurge, bai£
sant épaules & teste en
toute humilité
,
à bon
besoin de
-
patience qui
moutons vcut avoir de
Dindenaut; maisje vois
que vous me lanternifibolisez
airtfi pource que
me croyez pauvre here,
voulant acheter sans
payer, ou payer sans argent,
ôc-en ce vous irom- -
pez à la mine, car voicy
dequoyfaire emplette :
disantcela Panurge tire
ample & longue bourse,
que par cas fortuit, contre
son naturel avoit pleine
de Ducacons, de laquelle
opulence le Marchand
fut ébahi, & incontinent
gausserie ccfTa
à l'aspectd'objet tant respectable
comme est argent.
,
Par iceluy alleché
le Marchand demanda
quatre, cinq, six fois
plus que ne valloit le
mouton;à quoy Panurge
fit comme riche enfant
de Paris, le prit au
mot, de peur que mouton
ne luy échapa
,
&
tirant desa bourse le prix
exorbitant, sans autre
mot dire que patience
,
patience, lnie les deniers
, és mains du Marchand
, & choisit à même le
troupeau un grand &
* beau maistre mouton
qu'il emporta brandi
fous son bras
- ,car de
forceautant que demalin
vouloir avoit,cependant
le mouton cryoit,
bêloit Sccn consequance
naturelle, oyant celuy-
cy bêler,bêloient
ensemblement les autres
moutons, commedisant
en leur langage moutonnois,
ou menez-vous
nostre compagnon,
de
mêmedisoient maisen
langageplus articulé les
assistants à Panurge ou
,diantre menez-vous ce
- mouton,& qu'en allezvous
faire, à quoy répond
Panurge le mouton
n'est-il pas à moyy
l'ay bien payé& chacun
de son bienfait selon
qu'il s'avise,ce mouton
s'appelle Robin comme
moy3 Dindenaut l'a dit.
Robin mouton sçait bien * nager je le voisà sa
mine
,
& ce disant subitementjetta
son mouton
en pleine mer, criantnage
Robin, nâge mon mignon
: or Robin mouton
allant à l'eau
,
criant
bêlant; tous les autres
moutons criansbêlans
en pareilleintonation,
commencerent soy jetter
après Se fauter en merà
la file, figue le debat entr'eux
estoit à qui suivroit
le premier son compagnon
dans l'eau, car
nature afait de tousanimaux
mouton le plu»*
sot, & a suivre mauvais
exemple le plus enclin,
fors l'homme.
Le Marchand tout cecy
voyant demeura ftupesait
& tout cHrayey
s'efforçant à retenir fèsmoutons
de tout foi*
pouvoir, pendant quoy
Panurge en son fang
froid rancunier, luy disoit
, patienceDindeinatit.,
patience, & ne
vous bougez, ny tourmentez.,
Robin mouton
reviendra à nâge & ses
compagnons - le refuivront;
venez Robin, venez
mon fils, & ensuite
crioit aux oreilles de
Dindenaut ,., comme avoit
par Dindenaut esté
crié aux siennes en signe
de moquerie, bez, bez,
FinablementDindenaut
voyant perir tous ses
moutons en prit un grãd
& fort par la toison, cuidant
aintl luy retenant
retenir le reste
)
mais d.
mouton puissantentraîna
Dindenaut luy -mê'
me , en l'eau
,
& ce sut
lors que Panurge redoubla
de crier, nâge Robin
, nâge Dindenaut,
bez, bez, bez,tant que
par noyement, des moutons
Sedu Marchand sut
cette avanture finie,donc
donc Panurge ne rioit
que sous barbe, parce
que jamais on ne le vit
rire en plein,queje sçache.
Jecroirois bien que le
caractere de Panurge a
servi de modele pour celuy
de la Rancune. Moliere
a pris de ce seul Con-
-
te-cy deuxou trois Jeux
de Theatre, & la Fontaine
plusieurs bons mots.
Enfin nos meilleursAutheurs
ont puisé dans Rabelais
leur excellent comique,
&les Poëtes dit
Pont -neuf en ont tiré
leursplates boufoiincries.
Les Euripides & les Se-
-
neques ont pris dans Homere
le sublime de leur
Poësie, & les Nourrices
luy doivent leurs Contes
depeau-d'asne,leurs Ogres
qui mangent la
chair fraîche, sont descendus
en ligne droite du
Cyclope dontvousallez
voir Je Conte.
Voiladonc Homere 8t
Rabelais grands modeles
pour l'excellent & dangereux
exemples pour le
mauvais du plus bas
ordre. Homere & Rabelais
occupent les beaux
esprits; mais ils amusent
les petits enfants;humiliez-
vous grands Auteurs
vousestes hommes ;
l'homme a du petit 6C
du grand du haut & du
1 bas; c'est son partage r
& si quelqu'unde nos
Sçavants S'obfbiie à
trouver tout granddans
un Ancien, petitesse
dans -ce Moderne quelque
grand qu'ilsoitd'ailleurs
il prouve ce que ja*
Vance, qu'il ya du petit
c'k., du grand dans tous
les hommes.
Revenons à nos moutons,
diroit Rabelais,
m'avez parlé des moutons
de Dindenaut, si
faut-il trouver aussi moutons
en oeuvres d'Hojnere3
puisque és miens
moutons y a , ou ne se
point mester ny ingerer
de le mettre en paralelle
àl'encontre de moy.
Ouy
Ouy dea, repliquerai
je, on trouvera prou
de moutons dans I'oeuvre
grec, & hardiment
les paralelliserai avec
les vôtres, Maître François;
car avez dit,
ou vous, ou quelqu'un
de votre école, que
chou pourchou Aubervilliers
vaut bien Paris;
& dirai de même, que
moutons pour moutons
Rabelais vaut bienHomere
: or a-t-on déja vû
comme par malignité
Panurgienne moutons
de Dindenaut sauterent
en Iller; voyons donc
commeparastuce l'iyfsienne
moutons de Ciclope
lui fauteront fous
jambe, en sortant de sa
caverne.
LES MOUTONS
DU CYCLOPE. DAns l'isle des Cyclopes
où j'avois PrIsterre,
je descendisavec les plus
vaillans hommes de mon Vaisseau
,
je trouvai une caverne
d'une largeur étonnante. Le
Çyclope qui l'habitoit étoit
aux champs,où il avoit mené
paître ses troupeaux.Toute
sa caverne étoit dans un ordreque
nousadmirions. Les
agneaux separez d'un côté,
les chevreaux d'un autre, &c.On yoyoit là de grands
pots à conserver le lait , ici
des paniers de jonc, dans lesquels
il faiioic des fromages,
&c. Nous avions aporté du vin,
pris chez les Ciconiens, &c..
Nous buvions de ce vin, &
mangions les fromages du Cy.
clope, lors qu'il arriva.
Je fus effrayé en le voyant.
C'étoit un vaste corps comme
celui d'une montagne; il n'y
eut jamais un monstre plus
épouvantable: il portoit sur
ses épaules une charge efrrbois
sec; le bruit qu'il fit en le jettant
à terre à l'entrée de la
caverne, retentit si fort, que
tous mes compagnons saisis de
crainte,secacherent en differens
endroits de cette terrible
demeure.
Il fait entrertoutes ses brebis;
il ferme sa caverne, pousfant
une roche si haute & si
forte, qu'il auroit été impossible
de la mouvoir, à
force de boeufs ou de chevaux.
Je le voyois faire tout fou
ménage,tantôt tirer le lait
de ses brebis, & Enfin il
allume ion feu, & comme
l'obscurité qui nous avoit cachez
fut dissipée par cette
clarté, il nous apperçut : Qui
êtes-vous donc, nous dit-il
d'un ton menaçant 2 des Pirates,
qui pour piller & faire
perir les autres hommes,ne
craignez pas vous-même de
vous exposer sur la mer ?
Quoy ? des Marchands que
l'avarice fait passer d'un bout
de l'U nivers à l'autre pour
s'enrichir,entretenant le luxe
de leur Patrie ? êtes-vous des
vagabons qui courez les mers
par la vaine curiosité d'apprendre
ce qui se passe chez
autruy.
Je pris la parole, & luy dis
que nous étions de l'armée
d'Agamemnon
, que je le
priois de nous traiter avec
l'hospitalité que Jupiter a
commandée,& de se souvenir
que les Etrangers font
fous la protection des Dieux
> & que l'on doit craindre de
les offenser.
Tu es bien temeraire
, me dit-ilfïerement, de venir de
si loin me discourir sur la
crainte & sur l'obeïssance
que tu dis que je dois aux
Dieux:apprens que les Cyclopes
ne craignent ni vôtre
Jupiter ni vos Dieux: pour
n'avoir été nouris d'une chevre,
ils ne s'estiment pas moins
heureux, je verray ce que je
-
dois faire de toy ,
je n'iray
point consulter l'Oracle làdessus,
c'est mon affaire de
sçavoir ce que je veux, &c.
Je lui parlai encor pour tâcher
de l'adoucir: mais dédaignant
de me répondre, il
nous regardoit avec (on oeil
terrible; (car les Cyclopcs
n'en ont qu'un.) Enfin il se
saisit tout d'un coup de deux
de mes compagnons,& a près
les avoir élevez bien haut, il
les abbatit avec violence, &
leur écrasa la tête: il les met
bientôt en pieces,la terreest
couverte de leur sang, il est
ensanglanté lui-même:ce montre
, ce cruel monstre les
mange, les devore: Jugez en
quel état nous étions 2
Aprés s'être rassasié de cette
abominable maniere
,
il
but plusieurs cruches de lait,
& s'étendit pour dormir au
milieu de ses troupeaux. Combien
de fois eus-je dessein de
plonger mon épée dans son
corps ?&c.mais il auroit salu
périr dans cette cavernes
car il étoit impossible d'ôter
la pierrequi la fermoit : il falloit
donc attendre ce que sa
cruauté decideroit de nôtre
vie.
A peine ce cruel fut-il éveillé
qu'il se prépara un déjeuner
aussi funeste que le repas du
foir précèdent, deux de mes
camarades furent dévorez de
même
, a prèsquoy il fit sortir
aupâturage ses troupeaux, &
nous laissa enfermez dans la
caverne,enrepoussant la pesante
roche qui lui servoit de
porte.
Je cherchons dans monesprit
quelque moyen de punir
ce barbare, & de nous délivrer.
Il y avoit à l'entrée
de sa caverne unemassuë aussi
longueque le mats d'un navire
, nous en coupâmes de quoi
faire une autre massuë
, que
nous aiguisâmes pour executer
mon projetquandl'occa,-
sion seroit venuë.
Le Cyclope rentra, &recommenca
un autre repas aus-
- sifuneste à deux autres de mes
compagnons, que ceux que
je vous ay racontez;je m'approchai
de lui portant en main
un vase de ce vin admirable
quenous avions. Buvez.; lui
dis-je,peut-êtremesçaurez-voui
gré du present que je vous offre,
¿y.,c.Il prit la coupe, la but,
& y ayant pris un extrême
plaisir, il voulut sçavoir mon
nom, & promit de metraiter
avec hospitalité.
Je remplis sa coupe une autre
fais, ill'avale avec plaisir,
il ne paroissoit plus avoir cet-
-
te cruauté qui nous effrayoit,
je caressois ce monstre, Cije
tâchois de le gagner par la
douceur de mes paroles, il
revenoit toûjours à me demander
mon nom.
Dans l'embarras où j'étois
je luy fis accroire que je me
nommoisPersonnes alors pour
récompense de mes caressés
& demon vin,il me dit:
Eh bien, Personne, tous tes
camarades passeront devant
toy >
je te reserve pour être
le dernier que je mangeray.
Il s'étendit à terre en me
prononçant ces terribles paroles
>
le vin & le sommeil
l'accablcrent 6c c'étoit
ce que j'attendois;j'allay
prendre ma Massuë, j'allumay
la pointe dans le feu
que le Cyclope avoit couvert
de cendres,nous a pprochons
du Cyclope, pendant que
quatre de mes compagnons
enfoncent ce bois& ce feu
dans son oeil, j'aidois à le
déraciner, &c.
Apres l'avoir aveuglé de
-
cette maniéré nous nous étions
retirez loin de luy, & nous
attendions quel seroit l'effet
de sa rage & de ses cris. Un
grand nombre deCyclopes,
qui avoient entendu les heurlemens
accoururent à sa porte,
& luy demandoient : qui
est-ce qui peut vous avoir attaquédans
vôtre Maison ?
Comme celui-cy s'étoit persuadé
que je me nommois
Personne, il ne pouvoir leur
faire comprendre qu'il yavoit
un ennemi en dedans qui l'avoit
maltraittè,ilsentendoiét
qu'iln'avoitété blessé de per- sonne.ainsi par cet équivoque
les Cyclopes se retirèrent
, en disant: c'est donc
une affiction que Jupitert'envoye
, il faut plier sous les
coups de sa colere.
Je fus ravi d'entendre que
ces Cyclopes le retiroient:
cependant celui-cy,outré de
rage,alloit de côté & d'autre
dans sa Caverne, étendant
les bras pour nous prendre
, mais rien n'étoit plus
aisé que de luy échapper,
l'espace étoit grand, & il ne
voyoit goutte, &c..-
Il prit enfin le party d'ouvrir
à demy sa Caverne, de
sortequ'il n'y avoit de place
que pour sortir trois ou quatre
ensemble, il crut qu'il nous
arrêteroit au passage: il se met
au milieu, qu'il occupoit, étendant les bras & les jambes,
& faisoit sortir ses Moutons
,qu'il tâtoit les uns aprés
les autres; nous ne donnâmes
pas dans un piége si grossier
, cependant il falloit sortir
ou périr; je repassois en
mon esprit une infinité de
stracagêmes ; Enfin ayant
choisi neuf desplus forts Beliers,
je les attachay trois à
trois, je liay fou-s leur ventre
mes neuf compagnons restez,
qui passerent de- cette sorte
ians être reconnus, je tentay
le même hasard pour moy^
il y avoitun Belier plusgrand
que tous les autres, je me cache
aussi fous son ventre, le
- Cyçlope le reconnoît à l'é- passeur de sa laine, le careslè
& le retient, comment,
disoit-il, tu n'es pas aujourd'huylepremier
au pâturage
? tu es touché de l'aÍfliél-ioa
de ton Maître, tu ne vois plus
cet oeil qui te conduisoit &:
que tu connoissois,un traître
me l'a arraché,tu me montrerois
ce traître si tu pouvois
m'exprimer ta fidélité, si jele
tenoiscesceelerat,&c.Enfin
ce monstre occupé de sa
rage & de savengeance,laisse
passerleBelier que je tenois
embrasse par la laine de son
col, & c'est ainsi. que nous
voyant tous en liberté, nous
respirâmesavec plaisir.
J'ai choisi de bonne foi
pour opposer aux contes
de Rabelais, un desmeilleurs
de l'Odiffée
; car
mon but principal est
d'orner mon paralelle, &:
non de dégrader Homere.
Convenons qu'il y a
une poësie excellente dans
les endroits même où il
manque de justesse & de
bon sens.. quel mot m'est
échappé? mais je me dédiray
quand on voudra,
ôcà force deraisonnemens
& d'interprétations
,
je
trouveray par tout du
bon sens n'en fut-il point.
On n'aura pas de peine
àen trouver beaucoup
dans
dans les discours que le
Cyclope tient à Ulysse;
le premier contient une
morale admirable. Qui
êtes-vous? luy-dit-il ,
des
Pirates, Cc. Il joint dans
le second à une noble fierté
contre Jupiter, une
raillerie fine & delicate.
se riirai point consulter
l'aracle, &c. Ce Cyclope,
ce monstre ell un
Aigle pour l'esprit
: mais,
tout a coup, avant même
que d'avoir bû, il devint
stupide comme un boeuf,
il se couche & s'endort
tranquillement au milieu:
de ses ennemis armez,aprés
avoir dévoré deux de
leurs compagnons.
Ce Cyclope establir
d'abord que les Cyclopes
ne reconnoissent
,
ni ne
craignent point Jupiter,
ni les autres Dieux: & ces
mêmes Cyclopes un moment
apres, trompezpar
l'équivoque & mauvaise
turlupinade du mot de
Personne, croyent pieusement
que les heurlemens
du monstre sont une juste
punition des Dieux, ôc
semblent même par une
crédulité respedueusen'o
fer entrer dans la caverne
du Cyclope, pour s'éclaircir
du fait. Mais j'ay
promis d'éviter la dissertation
dans ce paralelle-cy ;
nous trouverons assez
d'autres occasions de critique
dans Homere, &
beaucoup plus dans Rabelais.
Finissons par un petit
conte de ce dernier.
ES
LA FEMME
MUETE.
DAns
un certain Pays
barbare & non policé en
moeurs, y avoit aucuns
maris bourus, & à chef
mal tymbré
, ce que ne
voyons mie parmy nos
maris Parisiens, dont
grande partie, ou tous
pour le moins, sont merveilleusement
raisonnans,
& raisonnables;aussi onc
ne vit-on arriver à Paris
grabuge ni maleficeentre
maris & femmes.
Or en ce Pays-là, tant
different de celui-cinôtre,
y avoit un mary si pervers
d'entendement, qu'ayant
acquis par mariage une
femme muete,s'en ennuya
& voulant soy guerir de
cet ennuy & elle de sa
mueterie, le bon & inconsideré
mary voulut qu'-
elle parlât, & pour ce
eut recours à l'art des Medecins
& Chirurgiens, qui
pour la démuetirluiinciserent
& bistouriserent un.
enciligloteadherâtaufilet.
bref, elle recouvra santé
de langue, & icelle langue
voulant recuperer l'oysiveté
passée, elle parla tant,
tant & tant,quec'estoit
benediction
;
si
ne laissa
pourtant le mary bouru
de se lasserde si plantheureuse
parlerie : il recourut
au Medecin, le priant &
conjurant, qu'autant il
avoit mis de science en oeuvre,
pour faire caq ueter sa
femme muete, autant il en
employât pour la faire taire.
Alors le Medecin confessantque
limitéest le sçavoir
médicinal,lui dit qu'il
avoit bi^n pouvoi r de
faire
parler femme
; mais que
faudroit arc bien pluspuisfant
pour la faire taire. Ce
monobstant le mari suplia,
pressa, insista, persista, si
que le sçavantissime docteur
découvrit en un coin
des registres de son cerveau
remede unique, &
specifique contre iceluy
interminable parlement
de femme,& ce remede
c'est surdité du mary. Ouidà,
fort bien, dit le mari :
mais de ces deux maux
voyons quel fera le pire,ou
entendre sa femme parler,
ou ne rien entendre du
tout; Le cas est suspensif,
&: pendant que ce mari
là-dessus en suspens estoit,
Medecin d'operer, Medecin
de medicamenter,par
provision, sauf à consulter
par apré1s.
Bref par certain charme
de sortilege medicinal
le pauvre mari se trouva
sourd avant qu'il eût acheve
de déliberer s'il confentiroit
à surdité
:
Lyvoila
donc, & il s'y tient faute
de
de mieux, & c'est comme
il faudroit agir en opérations
de medecine, Qu'arriva-
t-il? e'cousez.ôcvous
lesçaurez. :A'J:\ -J Le Medecinàhalde besogne
demandoitforce
argent:mais c'est à quoy
ce maryne peut entendre;
car il est sourd comme
voyez, le Medecin pourtant
par beaux signes &c
gestes significatifs argent
demandait& redemadoit
jusqu'às'irriter & colerier:
mais en pareil cas gestes
ne font entendus, à peine
entent-on paroles bien articulées
,ou écritures attestées
& réiterées par Sergens
intelligibles. Le Medecin
donc se vit contraint
de rendre l'oüie au sourd,
afin qu'il entendît à payement,
& le mary de rire,
entendant qu'ilentendoit,
puis de pleurer par prévovoyance
de ce qu'il n'entendroit
pas Dieu tonner,
désqu'il entendroit parler
sa femme.Or, de tout ceci
resulte, conclusion
moralement morale, qui
dit,qu'en cas de maladie
& de femmes épousées,
le mieux est de le tenir
comme on eit de peur de
pis.
burlesque.
Suite du Paralelle d'Homere&
deRabelais.
SAns interrompre le
paralelle d'Homere&
de Rabelais,je puis interrompre
les reflexions
comiques & serieuses
que j'ai commencéesfutcesdeux
Auteurs. Trop de réflexions
de fuite feroient
une dissertation
ennuyeuse
,
sur tout
pour les Dames, dont
j'ambitionne les suffrages;
elles ont legoût
plus delicat& plus vrai
que les hommes, dont
la pluspart se piquant
,de
<
critique profonde,
sont toûjours en garde
contre ce qui plaÎrjqui
ont, pour ainsidire,
emouue leur goût naturel
à force de science
dC de préjugez; en un
f- mot, qui jugent moins
par ce qu'ils sentent,
que par ce qu'ilssçavent.
Plusieurs Dames af.
fez contentes de quelques
endroits de mes
dissertations, se sont
plaint que les autres
netoient pas assez intelligibles
pour elles,
qui ne sont pasobligées
d'avoir lû Homere ni
Rabelais: il est vrai que
le Poete Grec est à presenttraduitenbonfrançois:
mais Rabelais est
encore du grec pour elles
; je vais donc tâcher
declaircir& de purifier
quelques morceaux de
Rabelais, pour les rendre
moins ennuyeux
aux Dames.
Ces extraits épurez
feront plaisir à celles
qui, curieuses de lire
Rabelais, n'ont jamais
voulu contenter leur
curiosité aux dépens de
leur modestie.
En donnantce qu'il
y a de meilleur dans
Rabelais, je fixerai la
curiosité de celles qui
en faveur du bon, auroient
risqué de lirele
mauvais.
Et s'il y en a quelqu'une
qui n'aiepû resister
à la tentation de
tout lire,elle pourra
citer Maître François à
l'abryde mes extraits,
sans être soupçonnée
d'auoir lu l'original.
Dans la derniere dissertation
j'ai opposé à
une harangue du sage
Nestor, une lettre écrite
à Gargantua par
Grandgousier son pere.
Vous avez vû que Rabelais
s'est mélé du fcrieux.;
Homere lemele
aussi quelquefois du
burlesque, autre sujet
de paralelle.Vousaurez
ici un conte heroïcomique
de l'Odissée, mais
commençons par un
conte de Rabelais;je ne
prétens qu'opposer le
premier coupd'oeil de
ces deuxcontes,&non.
pas les comparer exaétcment:
j'entrouverai
dans la fuite quelquestuinnss
ppluuss pprroopprreess aà eêttrree.
comparez ensemble.
Voici celui de Rabelais,
'f
donc j'ai feulement conservé
le fond, en a joûtant
& retranchant
tout ce que j'aicrû pouvoir
le rendre plus
agréable,& plusintelligible
aux Dames.
LES
LES MOUTONS
de Dindenaut.
<*. En une Naufou Navire
estoitletaciturnien.,
songe-creux,&malignement
intentionnéPanurge
: encemêmè Navire
estoit un Marchand de
moutonsnomméDindenaut,
hommegaillard,
raillard
,
grand rib leur
5
nurgetoutdébifié de mi-
Lie, 6c mal en point d'acouftrement
,
déhousillé
de chevelure
,
vesce
délabrée, éguillettes
rompues, boutons intermitans
chauffes pensantes,&:
lunettes pendues
au bonnet. Le Marchant
donc s'émancipa
en gausseriessur chaque
piece d'iceluy accoustrement,
mais specialement
sur ses lunettes : luy difarteavoir<
fçupar traciitioli
vulgaire que tout
homme arborant lunett
tes sur toûjours onc mal
voulu des femmes étranges
& vilipendé de la
siennedomestique ,sur
lesquels pronostics apostrophant
Panurge en son
honneur, l'appella je ne
sçay comment, id est,
d'un nom qui réveilla i«rPanurgedesaléthargie
^.rêveusej carrêvoitjuste
• en ce momentauxinconveniens
à venir de son
futur mariage. Holà,
holà
, mon bon Marchand
*,
dit d'abord Panurge
d'un air niais 8c
bonnasse, holà, vous disje,
car onc ne fus, ny ne
puis maintenant estre ce
-
que nul n'est que par mariage
: A quoy repart
Dindenaut, que marié
ou non mariée c'esttout
un ; car fruits de Cor-,
nuaille sont fruits précoces
j & m'est avisque
pour porter tels fruits ,
êtes fait &C moulé comme
de cire: ouy , cette
plante mordra sur~vôrre
chef comme chiendenc
sur terre graffe.
Ho ,
ho
,
ho
,
reprit
bonnement Panurge,
quartier, quartier, car
par la vertu- boeuf ou
asne que je suis, ne puis
avoir espritd'Aigle: perçant
les nuës,par quoy
gaudissez-vous de moy,
si c'est vostre plaisir ,
mais rien nerepliqueray
faute de répliqué : prenons
patience.
Patience vous duira
dit le Marchand, , comme
à tant d'autres. Patienceestvertu
maritale.
Patience soit imterrompit
Panurge, mais changeons
de propos : Vous
avez-là force beaux moutons,
m'envendriez-vous
bien un paravanture.
O le vaillant acheteur
de moutons, dit le Marchand.
Feriez volontiers
plus Convenablement
vous acheter un bon ha-,
bit pour quand vous E~
rez marié,habit de lné.)
nage ,
habit avenant ,
manteau profitable
chapeau commode, &,
panache de cerf.
Va-rience, dit Panurge,
& vendez-moy feulc,
ment un de vos Inou,
ton.
Tubleu
,
dit le Mat>
chand, ce seroit fortune
pour vous qu'un de ces
beliers. Vendriez sa fine
laine pour faire draps, sa
Mue peau pour faire cuir s
sa chair friande pour
nourrir Princes, & (i
petite-oye pieds :& teste
vous resteroient, & cornes
encore sur le marché-
Patience,dit Panurge,
tout ce que dites de cornerie
a esté corné aux
oreilles tant & tant de
fois,laissons ces vieilleties
; sottises nouvelles.
sont plus de InÍfea,
-- Ah qu'il dit bien! reprit
le Marchand, il merite
que mouton je luy
vende, ilestbon homme
: ç'a parlons daffaire.
Bon, dit Panurge eit
joye, vous venez au but,
6c n'auray plus besoinde
patience.
T C'a, dit le Marchand,
écoutez - mcy.j'écoute
dit Panurge.
LE M. Approchez cette
oreilledroite.P.
ce. LE M. Et la gauche. l P. Hé bien. LE M. En
l'autre encore. P. N'enay
quecesdeux. LE M.Ouvrez
- les donc toutes
grandes. P. A vôtre commandement.
LE MARC.
Vous allez au pays des
Lanternois? P.Ouy. LE
M. Voir le monde? P,
Certes. LE M. Joyeusement
? P. Voire. Le M,
Sans vous fâcher P. N'en
ayd'envie. LEM. Vous
avez nom Robin. P. Si
VOUS voulez. LE MARC.
Voyez-vous ce Moutons
P. Vous me l'allez vendre,
LEM.Ilanom Robin
comme vous. Ha
9 ha
, ha.Vons allez au
pays des Lanternois voir
le motide,i.oyeuCement,'
sans vous fâcher, ne vous
fâchez - donc guere si
Robin mouton n'est pas
pour vous. Bez, bez
bez; & continua ainsi
bez, bez, aux oreillesdu
pauvre Panurge
) en le
mocquant de la lourderie.
Oh,patience,patience
, reprit Panurge, bai£
sant épaules & teste en
toute humilité
,
à bon
besoin de
-
patience qui
moutons vcut avoir de
Dindenaut; maisje vois
que vous me lanternifibolisez
airtfi pource que
me croyez pauvre here,
voulant acheter sans
payer, ou payer sans argent,
ôc-en ce vous irom- -
pez à la mine, car voicy
dequoyfaire emplette :
disantcela Panurge tire
ample & longue bourse,
que par cas fortuit, contre
son naturel avoit pleine
de Ducacons, de laquelle
opulence le Marchand
fut ébahi, & incontinent
gausserie ccfTa
à l'aspectd'objet tant respectable
comme est argent.
,
Par iceluy alleché
le Marchand demanda
quatre, cinq, six fois
plus que ne valloit le
mouton;à quoy Panurge
fit comme riche enfant
de Paris, le prit au
mot, de peur que mouton
ne luy échapa
,
&
tirant desa bourse le prix
exorbitant, sans autre
mot dire que patience
,
patience, lnie les deniers
, és mains du Marchand
, & choisit à même le
troupeau un grand &
* beau maistre mouton
qu'il emporta brandi
fous son bras
- ,car de
forceautant que demalin
vouloir avoit,cependant
le mouton cryoit,
bêloit Sccn consequance
naturelle, oyant celuy-
cy bêler,bêloient
ensemblement les autres
moutons, commedisant
en leur langage moutonnois,
ou menez-vous
nostre compagnon,
de
mêmedisoient maisen
langageplus articulé les
assistants à Panurge ou
,diantre menez-vous ce
- mouton,& qu'en allezvous
faire, à quoy répond
Panurge le mouton
n'est-il pas à moyy
l'ay bien payé& chacun
de son bienfait selon
qu'il s'avise,ce mouton
s'appelle Robin comme
moy3 Dindenaut l'a dit.
Robin mouton sçait bien * nager je le voisà sa
mine
,
& ce disant subitementjetta
son mouton
en pleine mer, criantnage
Robin, nâge mon mignon
: or Robin mouton
allant à l'eau
,
criant
bêlant; tous les autres
moutons criansbêlans
en pareilleintonation,
commencerent soy jetter
après Se fauter en merà
la file, figue le debat entr'eux
estoit à qui suivroit
le premier son compagnon
dans l'eau, car
nature afait de tousanimaux
mouton le plu»*
sot, & a suivre mauvais
exemple le plus enclin,
fors l'homme.
Le Marchand tout cecy
voyant demeura ftupesait
& tout cHrayey
s'efforçant à retenir fèsmoutons
de tout foi*
pouvoir, pendant quoy
Panurge en son fang
froid rancunier, luy disoit
, patienceDindeinatit.,
patience, & ne
vous bougez, ny tourmentez.,
Robin mouton
reviendra à nâge & ses
compagnons - le refuivront;
venez Robin, venez
mon fils, & ensuite
crioit aux oreilles de
Dindenaut ,., comme avoit
par Dindenaut esté
crié aux siennes en signe
de moquerie, bez, bez,
FinablementDindenaut
voyant perir tous ses
moutons en prit un grãd
& fort par la toison, cuidant
aintl luy retenant
retenir le reste
)
mais d.
mouton puissantentraîna
Dindenaut luy -mê'
me , en l'eau
,
& ce sut
lors que Panurge redoubla
de crier, nâge Robin
, nâge Dindenaut,
bez, bez, bez,tant que
par noyement, des moutons
Sedu Marchand sut
cette avanture finie,donc
donc Panurge ne rioit
que sous barbe, parce
que jamais on ne le vit
rire en plein,queje sçache.
Jecroirois bien que le
caractere de Panurge a
servi de modele pour celuy
de la Rancune. Moliere
a pris de ce seul Con-
-
te-cy deuxou trois Jeux
de Theatre, & la Fontaine
plusieurs bons mots.
Enfin nos meilleursAutheurs
ont puisé dans Rabelais
leur excellent comique,
&les Poëtes dit
Pont -neuf en ont tiré
leursplates boufoiincries.
Les Euripides & les Se-
-
neques ont pris dans Homere
le sublime de leur
Poësie, & les Nourrices
luy doivent leurs Contes
depeau-d'asne,leurs Ogres
qui mangent la
chair fraîche, sont descendus
en ligne droite du
Cyclope dontvousallez
voir Je Conte.
Voiladonc Homere 8t
Rabelais grands modeles
pour l'excellent & dangereux
exemples pour le
mauvais du plus bas
ordre. Homere & Rabelais
occupent les beaux
esprits; mais ils amusent
les petits enfants;humiliez-
vous grands Auteurs
vousestes hommes ;
l'homme a du petit 6C
du grand du haut & du
1 bas; c'est son partage r
& si quelqu'unde nos
Sçavants S'obfbiie à
trouver tout granddans
un Ancien, petitesse
dans -ce Moderne quelque
grand qu'ilsoitd'ailleurs
il prouve ce que ja*
Vance, qu'il ya du petit
c'k., du grand dans tous
les hommes.
Revenons à nos moutons,
diroit Rabelais,
m'avez parlé des moutons
de Dindenaut, si
faut-il trouver aussi moutons
en oeuvres d'Hojnere3
puisque és miens
moutons y a , ou ne se
point mester ny ingerer
de le mettre en paralelle
àl'encontre de moy.
Ouy
Ouy dea, repliquerai
je, on trouvera prou
de moutons dans I'oeuvre
grec, & hardiment
les paralelliserai avec
les vôtres, Maître François;
car avez dit,
ou vous, ou quelqu'un
de votre école, que
chou pourchou Aubervilliers
vaut bien Paris;
& dirai de même, que
moutons pour moutons
Rabelais vaut bienHomere
: or a-t-on déja vû
comme par malignité
Panurgienne moutons
de Dindenaut sauterent
en Iller; voyons donc
commeparastuce l'iyfsienne
moutons de Ciclope
lui fauteront fous
jambe, en sortant de sa
caverne.
LES MOUTONS
DU CYCLOPE. DAns l'isle des Cyclopes
où j'avois PrIsterre,
je descendisavec les plus
vaillans hommes de mon Vaisseau
,
je trouvai une caverne
d'une largeur étonnante. Le
Çyclope qui l'habitoit étoit
aux champs,où il avoit mené
paître ses troupeaux.Toute
sa caverne étoit dans un ordreque
nousadmirions. Les
agneaux separez d'un côté,
les chevreaux d'un autre, &c.On yoyoit là de grands
pots à conserver le lait , ici
des paniers de jonc, dans lesquels
il faiioic des fromages,
&c. Nous avions aporté du vin,
pris chez les Ciconiens, &c..
Nous buvions de ce vin, &
mangions les fromages du Cy.
clope, lors qu'il arriva.
Je fus effrayé en le voyant.
C'étoit un vaste corps comme
celui d'une montagne; il n'y
eut jamais un monstre plus
épouvantable: il portoit sur
ses épaules une charge efrrbois
sec; le bruit qu'il fit en le jettant
à terre à l'entrée de la
caverne, retentit si fort, que
tous mes compagnons saisis de
crainte,secacherent en differens
endroits de cette terrible
demeure.
Il fait entrertoutes ses brebis;
il ferme sa caverne, pousfant
une roche si haute & si
forte, qu'il auroit été impossible
de la mouvoir, à
force de boeufs ou de chevaux.
Je le voyois faire tout fou
ménage,tantôt tirer le lait
de ses brebis, & Enfin il
allume ion feu, & comme
l'obscurité qui nous avoit cachez
fut dissipée par cette
clarté, il nous apperçut : Qui
êtes-vous donc, nous dit-il
d'un ton menaçant 2 des Pirates,
qui pour piller & faire
perir les autres hommes,ne
craignez pas vous-même de
vous exposer sur la mer ?
Quoy ? des Marchands que
l'avarice fait passer d'un bout
de l'U nivers à l'autre pour
s'enrichir,entretenant le luxe
de leur Patrie ? êtes-vous des
vagabons qui courez les mers
par la vaine curiosité d'apprendre
ce qui se passe chez
autruy.
Je pris la parole, & luy dis
que nous étions de l'armée
d'Agamemnon
, que je le
priois de nous traiter avec
l'hospitalité que Jupiter a
commandée,& de se souvenir
que les Etrangers font
fous la protection des Dieux
> & que l'on doit craindre de
les offenser.
Tu es bien temeraire
, me dit-ilfïerement, de venir de
si loin me discourir sur la
crainte & sur l'obeïssance
que tu dis que je dois aux
Dieux:apprens que les Cyclopes
ne craignent ni vôtre
Jupiter ni vos Dieux: pour
n'avoir été nouris d'une chevre,
ils ne s'estiment pas moins
heureux, je verray ce que je
-
dois faire de toy ,
je n'iray
point consulter l'Oracle làdessus,
c'est mon affaire de
sçavoir ce que je veux, &c.
Je lui parlai encor pour tâcher
de l'adoucir: mais dédaignant
de me répondre, il
nous regardoit avec (on oeil
terrible; (car les Cyclopcs
n'en ont qu'un.) Enfin il se
saisit tout d'un coup de deux
de mes compagnons,& a près
les avoir élevez bien haut, il
les abbatit avec violence, &
leur écrasa la tête: il les met
bientôt en pieces,la terreest
couverte de leur sang, il est
ensanglanté lui-même:ce montre
, ce cruel monstre les
mange, les devore: Jugez en
quel état nous étions 2
Aprés s'être rassasié de cette
abominable maniere
,
il
but plusieurs cruches de lait,
& s'étendit pour dormir au
milieu de ses troupeaux. Combien
de fois eus-je dessein de
plonger mon épée dans son
corps ?&c.mais il auroit salu
périr dans cette cavernes
car il étoit impossible d'ôter
la pierrequi la fermoit : il falloit
donc attendre ce que sa
cruauté decideroit de nôtre
vie.
A peine ce cruel fut-il éveillé
qu'il se prépara un déjeuner
aussi funeste que le repas du
foir précèdent, deux de mes
camarades furent dévorez de
même
, a prèsquoy il fit sortir
aupâturage ses troupeaux, &
nous laissa enfermez dans la
caverne,enrepoussant la pesante
roche qui lui servoit de
porte.
Je cherchons dans monesprit
quelque moyen de punir
ce barbare, & de nous délivrer.
Il y avoit à l'entrée
de sa caverne unemassuë aussi
longueque le mats d'un navire
, nous en coupâmes de quoi
faire une autre massuë
, que
nous aiguisâmes pour executer
mon projetquandl'occa,-
sion seroit venuë.
Le Cyclope rentra, &recommenca
un autre repas aus-
- sifuneste à deux autres de mes
compagnons, que ceux que
je vous ay racontez;je m'approchai
de lui portant en main
un vase de ce vin admirable
quenous avions. Buvez.; lui
dis-je,peut-êtremesçaurez-voui
gré du present que je vous offre,
¿y.,c.Il prit la coupe, la but,
& y ayant pris un extrême
plaisir, il voulut sçavoir mon
nom, & promit de metraiter
avec hospitalité.
Je remplis sa coupe une autre
fais, ill'avale avec plaisir,
il ne paroissoit plus avoir cet-
-
te cruauté qui nous effrayoit,
je caressois ce monstre, Cije
tâchois de le gagner par la
douceur de mes paroles, il
revenoit toûjours à me demander
mon nom.
Dans l'embarras où j'étois
je luy fis accroire que je me
nommoisPersonnes alors pour
récompense de mes caressés
& demon vin,il me dit:
Eh bien, Personne, tous tes
camarades passeront devant
toy >
je te reserve pour être
le dernier que je mangeray.
Il s'étendit à terre en me
prononçant ces terribles paroles
>
le vin & le sommeil
l'accablcrent 6c c'étoit
ce que j'attendois;j'allay
prendre ma Massuë, j'allumay
la pointe dans le feu
que le Cyclope avoit couvert
de cendres,nous a pprochons
du Cyclope, pendant que
quatre de mes compagnons
enfoncent ce bois& ce feu
dans son oeil, j'aidois à le
déraciner, &c.
Apres l'avoir aveuglé de
-
cette maniéré nous nous étions
retirez loin de luy, & nous
attendions quel seroit l'effet
de sa rage & de ses cris. Un
grand nombre deCyclopes,
qui avoient entendu les heurlemens
accoururent à sa porte,
& luy demandoient : qui
est-ce qui peut vous avoir attaquédans
vôtre Maison ?
Comme celui-cy s'étoit persuadé
que je me nommois
Personne, il ne pouvoir leur
faire comprendre qu'il yavoit
un ennemi en dedans qui l'avoit
maltraittè,ilsentendoiét
qu'iln'avoitété blessé de per- sonne.ainsi par cet équivoque
les Cyclopes se retirèrent
, en disant: c'est donc
une affiction que Jupitert'envoye
, il faut plier sous les
coups de sa colere.
Je fus ravi d'entendre que
ces Cyclopes le retiroient:
cependant celui-cy,outré de
rage,alloit de côté & d'autre
dans sa Caverne, étendant
les bras pour nous prendre
, mais rien n'étoit plus
aisé que de luy échapper,
l'espace étoit grand, & il ne
voyoit goutte, &c..-
Il prit enfin le party d'ouvrir
à demy sa Caverne, de
sortequ'il n'y avoit de place
que pour sortir trois ou quatre
ensemble, il crut qu'il nous
arrêteroit au passage: il se met
au milieu, qu'il occupoit, étendant les bras & les jambes,
& faisoit sortir ses Moutons
,qu'il tâtoit les uns aprés
les autres; nous ne donnâmes
pas dans un piége si grossier
, cependant il falloit sortir
ou périr; je repassois en
mon esprit une infinité de
stracagêmes ; Enfin ayant
choisi neuf desplus forts Beliers,
je les attachay trois à
trois, je liay fou-s leur ventre
mes neuf compagnons restez,
qui passerent de- cette sorte
ians être reconnus, je tentay
le même hasard pour moy^
il y avoitun Belier plusgrand
que tous les autres, je me cache
aussi fous son ventre, le
- Cyçlope le reconnoît à l'é- passeur de sa laine, le careslè
& le retient, comment,
disoit-il, tu n'es pas aujourd'huylepremier
au pâturage
? tu es touché de l'aÍfliél-ioa
de ton Maître, tu ne vois plus
cet oeil qui te conduisoit &:
que tu connoissois,un traître
me l'a arraché,tu me montrerois
ce traître si tu pouvois
m'exprimer ta fidélité, si jele
tenoiscesceelerat,&c.Enfin
ce monstre occupé de sa
rage & de savengeance,laisse
passerleBelier que je tenois
embrasse par la laine de son
col, & c'est ainsi. que nous
voyant tous en liberté, nous
respirâmesavec plaisir.
J'ai choisi de bonne foi
pour opposer aux contes
de Rabelais, un desmeilleurs
de l'Odiffée
; car
mon but principal est
d'orner mon paralelle, &:
non de dégrader Homere.
Convenons qu'il y a
une poësie excellente dans
les endroits même où il
manque de justesse & de
bon sens.. quel mot m'est
échappé? mais je me dédiray
quand on voudra,
ôcà force deraisonnemens
& d'interprétations
,
je
trouveray par tout du
bon sens n'en fut-il point.
On n'aura pas de peine
àen trouver beaucoup
dans
dans les discours que le
Cyclope tient à Ulysse;
le premier contient une
morale admirable. Qui
êtes-vous? luy-dit-il ,
des
Pirates, Cc. Il joint dans
le second à une noble fierté
contre Jupiter, une
raillerie fine & delicate.
se riirai point consulter
l'aracle, &c. Ce Cyclope,
ce monstre ell un
Aigle pour l'esprit
: mais,
tout a coup, avant même
que d'avoir bû, il devint
stupide comme un boeuf,
il se couche & s'endort
tranquillement au milieu:
de ses ennemis armez,aprés
avoir dévoré deux de
leurs compagnons.
Ce Cyclope establir
d'abord que les Cyclopes
ne reconnoissent
,
ni ne
craignent point Jupiter,
ni les autres Dieux: & ces
mêmes Cyclopes un moment
apres, trompezpar
l'équivoque & mauvaise
turlupinade du mot de
Personne, croyent pieusement
que les heurlemens
du monstre sont une juste
punition des Dieux, ôc
semblent même par une
crédulité respedueusen'o
fer entrer dans la caverne
du Cyclope, pour s'éclaircir
du fait. Mais j'ay
promis d'éviter la dissertation
dans ce paralelle-cy ;
nous trouverons assez
d'autres occasions de critique
dans Homere, &
beaucoup plus dans Rabelais.
Finissons par un petit
conte de ce dernier.
ES
LA FEMME
MUETE.
DAns
un certain Pays
barbare & non policé en
moeurs, y avoit aucuns
maris bourus, & à chef
mal tymbré
, ce que ne
voyons mie parmy nos
maris Parisiens, dont
grande partie, ou tous
pour le moins, sont merveilleusement
raisonnans,
& raisonnables;aussi onc
ne vit-on arriver à Paris
grabuge ni maleficeentre
maris & femmes.
Or en ce Pays-là, tant
different de celui-cinôtre,
y avoit un mary si pervers
d'entendement, qu'ayant
acquis par mariage une
femme muete,s'en ennuya
& voulant soy guerir de
cet ennuy & elle de sa
mueterie, le bon & inconsideré
mary voulut qu'-
elle parlât, & pour ce
eut recours à l'art des Medecins
& Chirurgiens, qui
pour la démuetirluiinciserent
& bistouriserent un.
enciligloteadherâtaufilet.
bref, elle recouvra santé
de langue, & icelle langue
voulant recuperer l'oysiveté
passée, elle parla tant,
tant & tant,quec'estoit
benediction
;
si
ne laissa
pourtant le mary bouru
de se lasserde si plantheureuse
parlerie : il recourut
au Medecin, le priant &
conjurant, qu'autant il
avoit mis de science en oeuvre,
pour faire caq ueter sa
femme muete, autant il en
employât pour la faire taire.
Alors le Medecin confessantque
limitéest le sçavoir
médicinal,lui dit qu'il
avoit bi^n pouvoi r de
faire
parler femme
; mais que
faudroit arc bien pluspuisfant
pour la faire taire. Ce
monobstant le mari suplia,
pressa, insista, persista, si
que le sçavantissime docteur
découvrit en un coin
des registres de son cerveau
remede unique, &
specifique contre iceluy
interminable parlement
de femme,& ce remede
c'est surdité du mary. Ouidà,
fort bien, dit le mari :
mais de ces deux maux
voyons quel fera le pire,ou
entendre sa femme parler,
ou ne rien entendre du
tout; Le cas est suspensif,
&: pendant que ce mari
là-dessus en suspens estoit,
Medecin d'operer, Medecin
de medicamenter,par
provision, sauf à consulter
par apré1s.
Bref par certain charme
de sortilege medicinal
le pauvre mari se trouva
sourd avant qu'il eût acheve
de déliberer s'il confentiroit
à surdité
:
Lyvoila
donc, & il s'y tient faute
de
de mieux, & c'est comme
il faudroit agir en opérations
de medecine, Qu'arriva-
t-il? e'cousez.ôcvous
lesçaurez. :A'J:\ -J Le Medecinàhalde besogne
demandoitforce
argent:mais c'est à quoy
ce maryne peut entendre;
car il est sourd comme
voyez, le Medecin pourtant
par beaux signes &c
gestes significatifs argent
demandait& redemadoit
jusqu'às'irriter & colerier:
mais en pareil cas gestes
ne font entendus, à peine
entent-on paroles bien articulées
,ou écritures attestées
& réiterées par Sergens
intelligibles. Le Medecin
donc se vit contraint
de rendre l'oüie au sourd,
afin qu'il entendît à payement,
& le mary de rire,
entendant qu'ilentendoit,
puis de pleurer par prévovoyance
de ce qu'il n'entendroit
pas Dieu tonner,
désqu'il entendroit parler
sa femme.Or, de tout ceci
resulte, conclusion
moralement morale, qui
dit,qu'en cas de maladie
& de femmes épousées,
le mieux est de le tenir
comme on eit de peur de
pis.
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Résumé : ARTICLE burlesque. Suite du Paralelle d'Homere & de Rabelais.
Le texte compare les œuvres d'Homère et de Rabelais, deux auteurs classiques, en mettant en lumière leurs aspects comiques et sérieux. L'auteur souhaite rendre les œuvres de Rabelais plus accessibles aux dames, qui trouvent Homère plus intelligible grâce à une récente traduction en français. Pour ce faire, il entreprend de clarifier et de purifier certains passages de Rabelais afin de les rendre moins ennuyeux pour un public féminin. L'auteur présente ensuite un conte de Rabelais, 'Les Moutons de Dindenaut', qu'il a adapté pour le rendre plus agréable et intelligible. Ce conte met en scène Panurge, un personnage de Rabelais, et un marchand de moutons nommé Dindenaut. Panurge achète un mouton nommé Robin et le jette à la mer, provoquant une réaction en chaîne où tous les moutons suivent Robin et se noient. Le marchand, tentant de retenir ses moutons, se noie également. Le texte compare ce conte à un épisode de l'Odyssée d'Homère, où les moutons du Cyclope jouent un rôle similaire. L'auteur souligne que les meilleurs auteurs ont puisé dans Rabelais et Homère pour leur comique et leur sublime, respectivement. Il conclut en affirmant que ces auteurs sont des modèles pour le meilleur et le pire, et que tous les hommes ont en eux du petit et du grand. Par ailleurs, le texte relate un épisode de l'Odyssée où Ulysse et ses compagnons sont capturés par un Cyclope. Ulysse tente de convaincre le Cyclope de les traiter avec hospitalité, invoquant la protection des dieux, mais le Cyclope refuse, affirmant qu'il ne craint ni Jupiter ni les dieux. Il dévore plusieurs compagnons d'Ulysse et les laisse enfermés dans sa caverne. Ulysse, cherchant un moyen de se venger, prépare une massue avec ses compagnons. Lors du retour du Cyclope, Ulysse lui offre du vin pour l'endormir. Profitant de son sommeil, Ulysse et ses hommes lui crevent l'œil avec la massue chauffée à blanc. Aveuglé, le Cyclope appelle à l'aide, mais ses semblables, trompés par l'équivoque du nom 'Personne', ne lui portent pas secours. Ulysse et ses hommes s'échappent en s'accrochant sous les moutons du Cyclope. Le texte se termine par une réflexion sur la poésie d'Homère, soulignant la moralité et la finesse des discours du Cyclope.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 28-84
SUITE DE L'ABREGÉ de l'Iliade.
Début :
ARGUMENT du quatrième Livre. AVERTISSEMENT. On a mis dans la suite [...]
Mots clefs :
Troyens, Minerve, Grecs, Combat, Courage, Roi, Jupiter, Iliade, Bataille, Armes, Guerre, Dieu, Général, Junon, Javelot, Pandare, Diomède, Ménélas, Corps, Ordres, Char, Nestor, Chefs, Apollon, Fils, Armée, Agamemnon
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUITE DE L'ABREGÉ de l'Iliade.
SUITE DE L'ABREGE
de tjÜadc.
ARGUMENT
du quatrième Livre.
AVERTISSEMENT.
On A mis dans la suite de
cet Extrait des cedilles ainsi
marquées",,Ellessignifient
dans les endroits où elles se
trouvent,que. le Poëtey fait
parler ses Heros.
LES Dieux estanc à Table
tiennent conseil sur les
affaires de Troyes, vers
I. 4.
Jupiter raille Junon &
Minerve, de ce que de
grandes Déesses. comme
elles se tiennent à l'écart
t
loin des combats, pendant
que Venus qui n'aime que
les jeux& les plaisirs - accompagne
son favori dans
tous les penIs. Il met en
délibération s'il faut rallumer
la guerre entre les
Troyens & les Grecs, ou
les reconcilier par l'exe-
-
cution du traité qu'ils ont
_aIt,,, 'Vers. 5.
19.
Cette proposicion cause
un violent dépit aux deux
Déesses qui préparoient les
plus grands malheurs aux
Troyens. Minerve dissimule
par prudence. Junon
éclatte, & a déclaré, quelque
resolution que l'on
prenne, qu'elle ne consentira
point à la paix.,,
vers 1o. 2. 9.
Jupiter a reproché à
Junon la cruauté avec laquelle
elle poursuit les
Troyens. Ilseplaintdela
violence qu'e lleluy fait en
le forçant de luy abandonner
une Ville qu'il a honorée
sur toutes les autres.
Il l'avertit qu'en revanche,
si jamais dans sa fureur
il veut détruire quelque
Ville qu'elle ait prise
fous sa protection
,
c'est
inutilement qu'elle voudra
s'y opposer.„ vers 30.49.
Junon luy dit qu'il
peut,quandilvoudra,dit
poser d'Argos, de Mycenes
)
& de Sparte; mais
qu'il n'est pas juste qu'elle
perde le fruit de toutes ses
peines. Que tout puissant
qu'il est, il doit avoir pour
elle des égards & de la
complaisance,puisqu'elle
est sa femme & sa soeur.
Enfin elle luy demande
-
qu'il ordonne à Minerve
de descendre dans l'armée
des Troyens pour les exciter
à enfraindre le fraite.
& à insulter les Grecs.,,
vers 50. 67.
Jupiter donne cet ordre
à Minerve.„La Déesse
descend, & dansla course
rapide elle paroist fous la
forme d'une exhalaison
qui s'allume dans l'air, &
qui se partage en mille
feux. Cesigne qui est veu
dans les deuxarmées est
interprété comme un préfage
ou de la fin ou de la
continuation de la - guerre.
35 vers 68. 85.
Minerve prend la réf.
semblance de Laodocus.
fils d'Antenor. Vatrouver
Pandarus fils de Lycaon.
Luy propose « de tirer une
fleche à Menelas. L'encourage
par la gloire qu'il
aura d'avoir abbattu un si
grand guerrier, & par la
recom pense qu'il doit attendre
de Paris. Elle luy
conseille de s'addreffer auparavant
à Apollon Lycien
pour le prier de diriger
le trait.» vers 86. 103.
L'intense Pandarus se
laisse persuader. Peinture
naïve de l'action de Pandarus,
& desmesuresqu'il
prend pour frapper juste
à son but. (Son arc estoit
fait des cornes d'unechevre
sauvage qu'il avoit tuée
à l'affust; chaque corne
avoit seize paumes, c'està-
dire cinq pieds & quatre
pouces.) Il promet une
Hecatombe à Apollon. Il
tire. Le trait part avec impetuosité,
perce le baudrier
,la cuirasse & la lame
de Menelas; entre dans la
chair sans penetrer bien
avant,(car Minerve avoit
pris foin d'affoiblir le coup,
semblable à une mere qui
voyant dormir son enfant,
détourne une mouche opiniastre
qui voudroit le piquer.)
Le fang qui coule
le longdesjambes de Menejas,
compare à la pourpre
dont une femme de
Meonie a peint l'yvoire le
plus blanc, pour en faire
les boffetes d'un mords qui
fait l'admiration & le desir
des plus braves Cavaliers,
filais qui est destiné pour
un Roy. "vers 104. 119.
Agamemnon est effraié
aussi bien que Menelas.
Menelas reprend courage.
Agamemnon éclate contre
la perfidie des Troyens.
Dit que Jupiter ne la laisfera
pas impunie. Prédit
la ruine deTroye. Il s'attendrit,
& ne peut cacher
à son frere la crainte qu'il
a de le perdre - vers 120.
182.
Menelas lera ssure&le
prie de ne point allarmer
les Grecs. n Agamemnon
luy dit « qu'il faut appeller
un Medecin.» Donne ordre
à Talthybius de faire
venir Machaon fils d'Esculape.
Le Herault obeït.
Trouve Machaon & « luy
parle.» Machaon vient.
Visite la playe, & succe
le sang,& y met un appareil
que le Centaure Chiron
avoit autrefois enseigné
à Esculape. vers 183.
ii9*
Cependant les Troyens
s'avancent en bataille. Les
Grecs reprennent leurs armes
, & ne respirent plus
que lecombat. Agamemnon
laissesonchar à Eurymedon
, avec ordre de ne
le pas tenir trop éloigné.
Il parcourt à pied toute
l'armée. « Anime par ses
discours ceux qu'il trouve
disposez à bien faire».
« Réprimandé les autres,»'
les compare à des faons de
biche Arrive prés de la
Gend'armerie Cretoise, la
trouve en bon estat, Idomenée
à la teste, Merion
à la queue.» IllouëIdomenée,
le fait ressouvenir
que dans toutes les occasions;
à la guerre, dans les
festins, il l'atousjours traité
avec distinction". Idomenée
respond « qu'illuy
fera tousjours fidelle».
Agamemnoncontinue son
chemin. Il trouve les deux
Ajax deja armez au milieu
de leurs bataillons; ( ces
bataillons comparez à des
troupeaux assemblez fous
leur pasteur, qui leur cherche
un asile contre l'orage
qu'il prévoit. ) Agamemnon
louë ces deux chefs,
& leur dit qu'il n'a pas besoin
de les exhorter». Il
passe au quartier du vieux
Nestor. Le trouve qui range
ses trou pes en bataille,
& qui encourage leurs
chefs. Noms de ces chefs.
De quelle manière Nestor
disposoit sa cavalerie &son.
infanterie.« Quels conseils
il donnoit à ses cavaliers
». «Sage vieillard,
dit Agamemnon transporté
de joye, plust aux Dieux
que vos forces respondissent
à vostre grand courage
ge, &c.» Nestor respond
» qu'il n'est plus au temps
où il tua de sa main le vaillant
Ereuthalion; mais que
tout vieux qu'il est on le
verra à la teste de ses ECcadrons,
LXquïl serautile
au moins par ses ordres &
par ses conseils
, que cest
là le partage des vieillards
». Agamemnonavance.
Trouve Peteus fils de
Menefthée & Ulysse qui
ne faisoient aucun mouvement
, parce que le bruit
de ce qui estoit arrivé dans
les deux armées n'estoit pas
encore venu jusqu'à eux-
« Il leur fait de sanglants
reproches de leur inaction
». «Ulyflc respond
avec fierte». Le Roy qui
le voitirrité, change de
ton, &«luy parle obligeamment
». Il poursuit
son chemin.VoitDiomede
sur son char avec Sthelenus
fils de Capancé. Diomedene
donnoit aucun
ordre pour le combat. Agamemnon
cc
luy reproche
d'avoir degeneré dela
vertu de son pere Tydée,
luy rappelle une occasion
d'éclat, ou Tydée signala
son courage contre les
Thebains». Diomede par
respect pour le Roy ne respond
rien.Sthelenus prend
la parole & dit(( qu'ils ne
meritent ny l'unny l'autre
ie reproche qu'on leur fait,
se piquent tous deux avec
raison d'estre plus braves
encore que leur pere».
Diomede represente à
Sthelcnus que le Roy qui a
le principal interest à tout
ce qui se passe, est en droit
de leur parler comme il
fait.„ Diomede en mef-
1
me temps faute de dessus
son char. - "veys 421. 419.
On voit marcher au
combat les nonbreufes
Phalanges des Grecs, semblables
à des flots amoncelez
par les vents. Elles
suivent leurschefs dans un
profond filen-ce, pour entendre
leurs ordres. Ilsemble
3
dit le Poëre, que cette
multitude innombrable de peuples
n'ait point de njoïx. Les
Troyens au contraire,
comme des brebis qui bêlent
dans un grand patu-
Tage, sont un bruit confus
qui resulte du mélange de
leurs voix & de la diversité
des langues de toure sorte
de peuples qui forment
leurarmée, vers411.438.
Les Troyens sont animez
par le Dieu Mars, &
les Grecs par la Déesse Minerve.
Ces deux Divinitez
font suivies de la Terreur,
de la Fuite & de l'insatiable
Discorde, Image poëtique
de la Discorde. Son
progrez. Ses effets. vers
43""45.
Les deux armées se joignent
J
& en viennent aux
mains. Description de leur
choc. Le bruit des guerriers
comparé à celuy que
font d'impetueux torrens
grossis par les pluyes. vers
446, 456.
Antiloque le premier tuë
Echepolus,un des plus braves
Troyens. Elephenor
General des Abantes, voulant
le dépouiller de ses
armes,est rué par Agenor.
Il se fait en cet endroit
une cruelle boucherie des
Grecs & des Troyens qui
se jettent les uns sur les autres
comme des loups affaniez.
Simoïsius (ainsi nom.
me parce que Ía mere accoucha
de luy sur les rives
du Simoïs) est tué à la fleur
de son âge par Ajax fils
de Telamon. Il tombe sur
la poussiere comme un jeune
peuplier abbattu par le
fer d'une coignée. Antiphus
un des filsdePriam,
veut venger la mort deSimoïsius.
illance son javelot
contre Ajax; mais il
rencontre au lieu de luy
Leucus compagnond'Ulysse.
Leucus tombe sur le
corps de Simoïssus qu'il entraisnoit.
Ulysseaffligéde
cette perte, s'approche des
Troyens d'un air terrible.
Regarde autour de luy
pour chercher sa victime.
Il lance son dard. Les
Troyens effrayez se retirent
en desordre. Le javelot
va frapper Democoon
fils naturel de Priam, &
lerenverse mort. Les Troyens
reculent. Hectorluymesmeestépouventé.
Les
Grecs enflez de ces avanta
ges vont chercher les
corps morts jusqu'au milieu
de la meslée pour les
entraisner.
entraisner. Apollon irrité
de leur audace se fait entendre
aux Troyens du
hautde la forteressed'Ilion,
les exhorte & les encourage
; leur represente sur
tout qu'Achille ne combat
point„. Minerve de son
colté anime les Grecs. Pi-,
roüs General des Thraces
tuë Diorés chefdes Epéens
aprés l'avoir blessé d'un
coup de pierre. Thoas General
des Etoliens lance
son javelot contre Piroiis,
& l'acheve de son épée. Ils
vont le dépoüiller de fe$
armes, mais il en est empesché
par les Thraces qui
tombent sur luy à coups
de piques,& l'obligent de
seretirer. vers 457. 539.
-
Homere parle des ex-
FJqics de cette journée
comme d'un grand sujet
d'admiration pour un homme
que Minerve auroic
conduit par la main, & à
qui elle auroit fait parcourir
sans danger tous les endroits
de la bataille. Il auroit
veu les Troyens&les
Grecs estendus les uns prés
des autres à la mesme place
où ils avoient combat-
EU. vers544.
AKGVMENT
du cinquièmeLivre.
La jour de cette action
Minerve augmente le courage
deDiomede. Deson
calque & de son bouclier
forcoitcontinuellementun
fçjXrfemblable à celuy de
Veftoitle qui paroistà lafin
àçl'Eflre'.LaDéessè pousse
ÇÇignprr-ier au milieu dela ~n~~ j, vers 1. 8.
o.
~~q~Phesep tous deux
fils de Darés Sacrificateur
deVulcain,poussent leur
char contreDiomede qui
estoit à pied. Phegée le
premier lance ion dard
contre luy sans le blesser.
Diomede le perce de son
javelot
, ôc l'estend mort
surla place. Idée n'ayant
pas le courage de sauver
le corps de son frere, prend
la suite. Vulcain le couvre
d'un nuage & le dérobe
aux poursuites de Diomede
j pour épargner àDarés
le chagrin de perdre Ces
deui filsenun jour. Diomede
fait emmener leurs
chevaux. Les Troyens
commencent à plier. Minerve
pour augmenter leur
desordre,ditàMars«qu'il
faut laisser combattre les
Troyens & les Grecs, &
ne plus resister aux ordres
de Ju piter.„ Elle le retire
du combat, & le fait repofer
sur les rives du Scamandre.
Les Grecs enfoncent
lesTroyens. * a/fw9.37,
Odius chef des Alizoniens
est tué par Agamenvnon.
Phestus par Idomenée.
Scamandrius par Me.
nelas. (Ce Scamandrius
estoit fort entendu dans
tout ce qui concerne la
charte, & avoit esté instruit
par Minerve.) Phereclus
est tué par Merion.
( Phereclus fils d'un habile
charpentier, avoir bâti les
vaisseaux que Pâris mena
en Grece.) Pedée fils naturel
d'Antenor
,
est tué
par Megés. Eurypile blesse
Hypsenor.(Hypsenorestoit
filsde Dolophionqui
estoit Sacrificateur du Scamandre.)
rUers Î7- 83-
Idomenéesemblable à
un fleuve, qui dans ion débordement
emporte tout
ce qui s'oppose à son passage,
renverse les barait.
lons des Troyens;rien ne
luy resiste. vers 85. 94.
Pandarus, pour arrester
son audace, luy tire une
flèche qui luy traverse l'épaule
droite, & croyant
l'avoir blessé mortellement
il s'en glorifie,,, Sthele*-
jius, ( à la prière deDiomede
) luy oste cette fléche.
Diomede prie Pallas
<c de luy prester son secours
pour se venger de
Pandarus
5
& le punir de
son orguëll.,,Pallas l'exauce.
Luy redonne toutes
ses forces & route sa
legereté.Elle luy dit,
qu'il peut aller hardiment
contre les Troyens;qu'elle
a dissipé le nuage qui
l'auroit empesché de discerner
les Dieux d'avec les
hommes
:
qu'il se garde
bien de combattre contre
les Immortels, si ce n'est
contre Venus sur qui elle
luy permet de tirer.„
vers 95. 132.
Minerve se retire. Diomede
qui se sent trois fois
plus fort qu'à l'ordinaire,
se jette au milieu des ennemis.
Est comparé à un
lion qu'un berger ablesse,
& qui devenu plus furieux;
se lance sur les brebis effrayées
qui se tapissent les
unes fous les autres pendant
que le berger se cache.
Diomedetuë d'abord
Astynoüs & Hypenor.
Ensuite Abas & Poluïde,
tous deux fils du vieux Eurydamas
qui estoit Interprete
des songes. Il marcheversThoon
&Xanthe
enfans de Phenops,prive
ce pere malheureux de ses
deux filsàla fois, &luy
laisse la douleur de voir que
sa successiondoitpassèrà
des collateraux esloignez.
Diomede., comme un lion
qui se jette surun troupeau
de boeufs, tombe encore surEchemon & Chromius
enfans de Priam, les préçipite
de leur char ,les dépoüille
de leurs armes, &
prend leurs chevaux.vers
133. 16s.
Enée qui voit tous ces
ravages, cherche Pandarus
a travers les picqucs &
les javelots. Ille joint de
l'exhorte à se servir encore
deson arc& de ses
traitscontre un homme
qui cause tant de defor-
-.
dres
, ( si ce n'est que ce
guerrier dangereux soit
quelqu'un des Immortels
irrité contre lesi Grecs) ,,.
Pandarus respond qu4»I
croit reconnoistreDiomede
à sa raille & à ses armes*
Que si ce guerrier n'est pas
un Dieu,aumoinsDiomede
ne peut faire tant de
prodiges sans le secours
d'une Divinité toute puisfante.
Se repent d'avoir
laissé chez luy, contre l'avis
de son pere, onze chars
inutiles par la crainte que
ses chevaux ne souffrissent
trop dans une ville affiegée.
Se plaintd'avoir desjablessé
deux des plusvaillans
hommes, sans autre
effet que de les avoir rendus
plus furieux. Jure que
s'il revoit sa patrie, il commencera
par bruler cet
arc & ces fléches qui l'ont
si mal servi.,, Enée luy
dit cC de monter sur son
char qui est tiré par cTcxcellens
chevaux, & luy
laisse le choix ou de tenir
les resnes, ou de combattre
contre Diomede. 9%
Pandarustc conseille à Enée
de conduire luy -
mesme
ses chevaux qui connoissent
savoix & sa main;
que pourluy il recevra
Diomede avec sa lance.
Ils montent tous deux sur
le char,& vont à toute
bride contre Diomede
(quiestà pied.) Sthelenus
qtuiitles voit venir, en aver- Diomede,&" luy conseille
de les éviter.,, Diomede
'c respond qu'il n'est
pas capable de fuir, & que
ces deuxennemis si redoutables
ne retournerons
point àTroye ;luy recommande
seulement dem*
mener les chevaux d'Eiree
aussitost qu'il fera vaincu; les chevaux d'Enée ef.,
toient de la race de ceux
dont Jupiter fit presentà
Tros. ),., 0tvers16(3.zyj,
Pandarus & Enée sont
en presence. de Diomede;
Pandarus-ile, premierdità
Diomede qu'iln'a peule
vaincre avec sa fléche,
mais qu'il fera peutestre
plus heureux avec son javelot.„
En mesme temps
il lance son dard qui perce
le bouclier jusqu'à la cuirasse.
Pandarus~s'écrie~
glorieux decesuccez. Diomede
luy dit qu'il a manqué
son coup. Le frappe
de son javelot que Minerve
conduisoit
, & qui traverse
depuis l'oeil jusqu'à
la gorge. Pandarus tombe
de son char. Enée se met
en devoir de deffendre: le
corps de sonamy. Diomede
prend une grosse pierre,
telle que deux hommes à
- peinel'auroient peu lever.
Il l'a jette contre Enée, &
luy brife la cuisse. Enée
tombe sur ces genoux &
s'affoiblit. Venus le prend
entre ses bras, le couvre
de sa robe, & l'emporte.
Sthelenus, qui se souvient
des ordres de Diomede 9
prend les chevaux d'Enée
les emmeine, les remetà
son amy Deïphilus, & va
rejoindre Diomede. Diomede
,qui a reconnu Venus
,
la poursuit avec un
-
dard
dard,&la blesse à la main.
Le fang immortel coule de
sa playe. Le fang desDieux
different de celuy des hommes,
& pourquoy.Venus
laisse tomber Enée,Apollon
le releve, le couvre
d'un nuage & l'emporte,
Diomede parle en termes
picquans à Venus qui se
retire tres-affligée. Iris l'a
soustient. Elles trouvent
Mars. Venus le conjure
de luyprester ses chevaux
pour s'en retourner dans
l'Olympe.„Mars luy donna
son char. Iris le conduit.
Elles arrivent en un
moment. Iris dérelle les
chevaux, & en prend soin-
Venus se laisse tomber sur
les genoux de Dioné sa
mere. Dipné luy demande
cc qui luy a fait cette
blesseure.,, Venus respond
ic que Diomede a eu cette
audace, & que ce nretl: plus
icy une guerre des Grecs
contre les Troyens,mais
desGrecscontre les Dieux.
Dioné la console
,
luy dit
que ce n'est pas la - première
fois que les Dieux
ont esté insu Irez. par leshommes.
( Exemples, de
Mars, de Junon, &de Pluton;)
Que Diomede doit
craindre de porter quelque
jour la peine de sa temerité.„
Dionéessuye le
fang qui coule de la blesseure
de sa fille. Venus est
guene en un moment. 'Vers
275- 417.
Junon & Minerve entretiennent
Jupiter de ce qui
vient d'arriver à Venus.
Ce Plaisanterie de Minerve
a ce sujer. Jupiter foufritsappelle
Venus & u. luy recommande
de ne plus s' exposer.
4, Diomede par trois fois
se jette sur Enée.) quoy
gqnapollon l'ait pris fous
sa protection. A la quatriéme
fois ce Dieu irrité
cc luy parle d'un ton
menaçant." Diomede se
retire. Apollon porte Enée
dans son Temple sur la Citadelle
de Pergame. Latone&
Diane ont foin ellesmesmes
de le panser. ven
432. 44^
Apollon voyant que le
combat s'echauffe autour
d'un phantofme qu'il avoit
formé ressemblant à Enéc
pour tromper les Grecs,
demande à Mars, «
s'il n'y
a pas moyen d'arrester ce
Diomede qui porte sa fureur
jusqu'a poursuivre les
Dieux,,,. Ensuiteilseretire
sur la Citadelle. Mars
prend la reffernblance d'Acamas
General des Thraces.
Va de rang en rang..
«Se fait entendreaux Tro..
yens & les anime.» Sarpedon
picque le courage de
Hector par le reproche
qu'il luy fait de son inaction
, & de la lascheté de
ses freres qui tremblent
,
comme des chiens timides
en presencedun lion.»
Hector, sans repliquer
faute de son char, un jave.
lot à la main, exhorte les
Troupes. LesTroyens se
rallient. LesEscadrons des
Grecs viennent fondre sur
eux. La poussiere qu'ils élevent,&
dontilssont tout
blanchis, comparée a celle
qui couvre ces monceaux
de paille que des vanneurs
ont separée d'avec le grain.
Le combat recommence.
Enée, qu'Apollon a retiré
du Temple où il l'avoit
mis, reparoist à la reste de
ses.troupes avec toute sa
vigueur. Les soldatstransl
portezdejoyefontsurpris
en meme tem ps de le revoir
siicst ; mais l'ardeur
du combatne leur permet
pas de l'interrogersur une
si prompte guerison. ira
449.518.
: Les Grecs animez, par
lpes dIeuxlAja.x, parUlysse, attendent
les Troyens de pied ferme
,SemblablesÀ desnuages:
aÍfemblez:, qui n'attendent
que le reveil des
vents endormis pourestre
mis en mouvement. vers
Jr9. J17-
Agamemnon donne (es
ordres « Exhorte ses soldats
» Ensuite il lance son
javelot & tueDeïcoon le
pluscher compagnon d'Enée.
Enée de son costé tue
Crethon & Orsiloqueensans
de Dioclés, qui avoir
pour ayeul le' fjeuve Alphée.
Crethon & Crbiloque
com parez à deux jeunes
lions, qui aprèsavoir
laisse par tout des marques
de
de leur furie , succombent
enfin fous l'effort des pasteurs.
Ces deux jeunes
guerriers tombent fous les
coups d'Enée comme les
plus hauts sapins abbattus
par les vents. Menelas,
pour les venger, s'avance
au milieu des combattansf
pouffé par le Dieu Mars,
qui ne cherche qu'à le faire
perir de la main d'Enée.
Antiloque voyant le peril
où Menelas s'expose, court
se joindre à luy. Enée qui
voit ces deux guerriers
unis, seretire. Ilsenlevent
les corps de Crethon &
d'Orsiloque;ensuite ils retournent
dans lameslée.
Menelas tue Pylemenés
qui commandoit les Paphiagoniens.
Antiloque
blesse Mydon d'un coup
de pierre, l'acheve de Ton
épée, & emmene ses chevaux.
vers528.589
Hector ayant apperceu
Menelas & Antiloque
inarche à , eux avec impetuosiré.
Les Troyens le
suivent. Mars & Bellone
sontà leur reste.Mars accompagne
par tout Hector.
Diomede voyant ce
Dieu terrible) est saisi de
frayeur. Son estonnement
comparé à celuy d'un voyageur
qui, après avoir
traversé de vastes campagnes,
voit tout d'un coup
un grand fleuve, & retourne
sur ses pas. Diomede
se retire en disant aux
Grecs,M qu'il faut ceder
auxDieux.» WJ590.606.
LesTroyensondent sur
les Grecs. Hector tue de
sa main Menofthés & Anchiale.
Ajax fils de Telamon
s'avance pour les
Ranger, & tue Amphiusde ioix
javelot. Il accourt ensuite pour
le dépouillerj mais les Troyens
font pleuvoir sur luy une gresle
de traits, & l'obligent de se- retirer. Vers 607. 616*
Sarpedon filsde Jupiter, &
General des Lyciens, & Tle-*
poleme fils d'Hercule se ren..,
contrent.« Ils se parlent quelque
temps au sujet du parjurede
Laoimedon que Tlepoleme
reproche à Sarpedon:» Ces
deux guerriers après« s'estre
menacez fierement» lancent
leurs dards lun contre l'autre.
Les traits partent ensemble,
Sarpedonest blesséà la clÜiTe
Le dard y demeure attaché.
Tlepoleme tombe sans vie.
On emporte Sarpedon. Les
Grecs enlevent le corps de
Tlepoleme. Ulysse
, pour le
venger, tourne les armes contre
les Lyciens & en tuë un
grand nombre. Noms des Lyciens
tuez par Ulvsse. Hector
s'avance contre luy pour arrester
ses desordres.. Srrpedon
voyant Hector le prie de ne le
pas laisser en proye à ses ennemis.
» Hector passe rapidement
pour aller charger les
Grecs. Les amis de Sarpedon
le mettent fous un grand chefne.
Pelagon luy tire le javelot
de sa playe. Sarpedon s'évanouit.
Borée le rafraifchit
de son [ouille) & le ranime.
Les Grecs qui ne peuvent fouflenir
le choc du Dieu Mars
& d'Hector, se battent en re..
traite sans prendre la suite,
Noms de plusieurs braves Capitaines
tuez a cette attaque..
vers 628. 710.
Junon voyant ce qui sepasse,
dit à Minerve" qu'ilest temps
d'arrester les ravages de Mars,
& de secourir les Grecs. » Junon
prepare elle
-
mesme ses
chevaux. La Déesse Hebé luy
appresteun char superbe. Description
de ce char. Minerve
quitte ses habits pour s'armer.
Quelles font ses armes. Son
Egide. Son casque. Sa pique.
Les deux Déesses montées sur
leur char éclatant, vont à toute
bride au palais de Jupiter.
Les portes de l'Olympe,qui
font gardées par les Heures,
s'ouvrent d'elles-mesmes avec
un grand bruit. Junon parle à
Jupiter & luy demande" s'il
veut permettre de reprimer les
fureurs de Mars , & de blesser
cet insensé qui ne reconnoist
d'autre droit que la force
,,, Jupiter luy dit" de donner ce
soin à Minerve qui est accoustuméeà
le vaincre." vers 711. 766..
Junon accompagnée de Minerve
pousse ses chevaux qui
courent avec impetuositéentre
le Ciel & la terre. ( Les
chevaux des Dieux franchissent
d'un seul fault autant d'espace
qu'un homme assis sur un
cap eslevé au bord de la mer
en peutdécouvrir sur cette va- se étendue.) Les Déesses arrivent
prés de Troye. Junon
dételle les chevaux. Les environne
d'un nuage. Le Simoïs
fait naistre l'ambrosie sur ses
rives pour leur pature. Les
Déesses marchent ensemble
comme deux colombes&vont
secourir les Grecs, vers 767.
779.
Elles trouvent Diomede entouré
des plus braves guerriers
semblables aux plus frers lions,
& aux sangliers les plus terribles.
Junon s'arreste. Prend
la ressemblance de Stentor dont la , voix d'airain estoit plus
forte que celle de cinquante
hommes ensemble. Elle parle
aux Grecs, &Il les anime.,,
Minerve de son costé s'approche
de Diomedequi s'estoit retiré
un peu à l'écart pour rafraifchir
la playe que Pandarus
luy avoit faite. Elle luy
reproche de s'affoiblir quand
il faut agir, 5c de ne ressembler
gueres à son pere Tydée qu'-
elle protegeoit auAi bien que
luy
, & dont elle ne pouvoit
retenir le courage Elle luy rappelle
l'aventure de Tydée avec
les Dépendants de Cadmus.
Diomede respond
(c
qu'il ne
manque ny de force ny de resolution
,
mais qu'il se souvient
des deffenses qu'elle luy a faites
de combattre contre les
Dieux : Que Mars est maintenant
à la teste des Troyens. » Minerve luy dit de ne point
craindre Mars, 8c de le frapper
hardiment s'il vient à sa
rencontre; qu'audi bien celt
un perfide qui prend le party
des Troyens contre la promes-.
se qu'illuy avoit faite & à Junon
, de favoriser les Grecs.»
Elle fait descendre Sthelenus
& monte à sa place auprès de
Diomede sur son char. Elle
prend le casque de Pluton pour
n'estre point veuë. Pouffe les
chevaux contre Mars. Mars,,
qui vient de tuer Persphas ,
voyant Diomede
3
s'avance, &
luy veut porter un coup de sa
pique. Minervedétourne le
coup, conduit celle de Diornede
contre Mars, & la kiy fait
entrer bien avant dans les costes.
Mars la retire, & jette
un cry semblable à celuy d'une
armée de neuf ou dix mille
hommes. LesTroyens & les
Grecs en font épouvantez.
Mars retourne dans l'Olympe.
Diomede le voir s'élever comme
un nuage obscur. vers 780. 867** - Mars montrant à Jupiter le
fang qui coule de sa playe, luy
dit « qu'il a engendré une fille
pernicieusè qui se croit tout
permis, parce qu'il ne la corrige
pas pendant qu'il traite
avec severité les autres Dieux.
Que c'est Minervequi a inspiré
à Diomede l'audace debiesfer
Venus & luy ensuite.» Jupiter
rejette sa plainte, & luy
dit qu'ilest luy - mesme un
inconstant & un furieux qui
n'aime que les querelles,& que
s'il n'estoit pas son fils il y a
long-temps qu'ill'auroit precipité
dans les abylmesavec les
Titans,» Jupiter cependant
donne ordre à"'Pæon"de le guérir.
Pæonobéît& le guerit sur
le champ avec un baume exquis
qui fait sur la playe le mesme
effet & aussi promptement
que la presure sur le lait. Hebé
après avoir preparé un bain
pour Mars, luy donne des habits
magnifiques. Mars se place
auprès de Jupiter. Junon &
Minerve ne sont pas longtemps
sans remonter au Ciel.
de tjÜadc.
ARGUMENT
du quatrième Livre.
AVERTISSEMENT.
On A mis dans la suite de
cet Extrait des cedilles ainsi
marquées",,Ellessignifient
dans les endroits où elles se
trouvent,que. le Poëtey fait
parler ses Heros.
LES Dieux estanc à Table
tiennent conseil sur les
affaires de Troyes, vers
I. 4.
Jupiter raille Junon &
Minerve, de ce que de
grandes Déesses. comme
elles se tiennent à l'écart
t
loin des combats, pendant
que Venus qui n'aime que
les jeux& les plaisirs - accompagne
son favori dans
tous les penIs. Il met en
délibération s'il faut rallumer
la guerre entre les
Troyens & les Grecs, ou
les reconcilier par l'exe-
-
cution du traité qu'ils ont
_aIt,,, 'Vers. 5.
19.
Cette proposicion cause
un violent dépit aux deux
Déesses qui préparoient les
plus grands malheurs aux
Troyens. Minerve dissimule
par prudence. Junon
éclatte, & a déclaré, quelque
resolution que l'on
prenne, qu'elle ne consentira
point à la paix.,,
vers 1o. 2. 9.
Jupiter a reproché à
Junon la cruauté avec laquelle
elle poursuit les
Troyens. Ilseplaintdela
violence qu'e lleluy fait en
le forçant de luy abandonner
une Ville qu'il a honorée
sur toutes les autres.
Il l'avertit qu'en revanche,
si jamais dans sa fureur
il veut détruire quelque
Ville qu'elle ait prise
fous sa protection
,
c'est
inutilement qu'elle voudra
s'y opposer.„ vers 30.49.
Junon luy dit qu'il
peut,quandilvoudra,dit
poser d'Argos, de Mycenes
)
& de Sparte; mais
qu'il n'est pas juste qu'elle
perde le fruit de toutes ses
peines. Que tout puissant
qu'il est, il doit avoir pour
elle des égards & de la
complaisance,puisqu'elle
est sa femme & sa soeur.
Enfin elle luy demande
-
qu'il ordonne à Minerve
de descendre dans l'armée
des Troyens pour les exciter
à enfraindre le fraite.
& à insulter les Grecs.,,
vers 50. 67.
Jupiter donne cet ordre
à Minerve.„La Déesse
descend, & dansla course
rapide elle paroist fous la
forme d'une exhalaison
qui s'allume dans l'air, &
qui se partage en mille
feux. Cesigne qui est veu
dans les deuxarmées est
interprété comme un préfage
ou de la fin ou de la
continuation de la - guerre.
35 vers 68. 85.
Minerve prend la réf.
semblance de Laodocus.
fils d'Antenor. Vatrouver
Pandarus fils de Lycaon.
Luy propose « de tirer une
fleche à Menelas. L'encourage
par la gloire qu'il
aura d'avoir abbattu un si
grand guerrier, & par la
recom pense qu'il doit attendre
de Paris. Elle luy
conseille de s'addreffer auparavant
à Apollon Lycien
pour le prier de diriger
le trait.» vers 86. 103.
L'intense Pandarus se
laisse persuader. Peinture
naïve de l'action de Pandarus,
& desmesuresqu'il
prend pour frapper juste
à son but. (Son arc estoit
fait des cornes d'unechevre
sauvage qu'il avoit tuée
à l'affust; chaque corne
avoit seize paumes, c'està-
dire cinq pieds & quatre
pouces.) Il promet une
Hecatombe à Apollon. Il
tire. Le trait part avec impetuosité,
perce le baudrier
,la cuirasse & la lame
de Menelas; entre dans la
chair sans penetrer bien
avant,(car Minerve avoit
pris foin d'affoiblir le coup,
semblable à une mere qui
voyant dormir son enfant,
détourne une mouche opiniastre
qui voudroit le piquer.)
Le fang qui coule
le longdesjambes de Menejas,
compare à la pourpre
dont une femme de
Meonie a peint l'yvoire le
plus blanc, pour en faire
les boffetes d'un mords qui
fait l'admiration & le desir
des plus braves Cavaliers,
filais qui est destiné pour
un Roy. "vers 104. 119.
Agamemnon est effraié
aussi bien que Menelas.
Menelas reprend courage.
Agamemnon éclate contre
la perfidie des Troyens.
Dit que Jupiter ne la laisfera
pas impunie. Prédit
la ruine deTroye. Il s'attendrit,
& ne peut cacher
à son frere la crainte qu'il
a de le perdre - vers 120.
182.
Menelas lera ssure&le
prie de ne point allarmer
les Grecs. n Agamemnon
luy dit « qu'il faut appeller
un Medecin.» Donne ordre
à Talthybius de faire
venir Machaon fils d'Esculape.
Le Herault obeït.
Trouve Machaon & « luy
parle.» Machaon vient.
Visite la playe, & succe
le sang,& y met un appareil
que le Centaure Chiron
avoit autrefois enseigné
à Esculape. vers 183.
ii9*
Cependant les Troyens
s'avancent en bataille. Les
Grecs reprennent leurs armes
, & ne respirent plus
que lecombat. Agamemnon
laissesonchar à Eurymedon
, avec ordre de ne
le pas tenir trop éloigné.
Il parcourt à pied toute
l'armée. « Anime par ses
discours ceux qu'il trouve
disposez à bien faire».
« Réprimandé les autres,»'
les compare à des faons de
biche Arrive prés de la
Gend'armerie Cretoise, la
trouve en bon estat, Idomenée
à la teste, Merion
à la queue.» IllouëIdomenée,
le fait ressouvenir
que dans toutes les occasions;
à la guerre, dans les
festins, il l'atousjours traité
avec distinction". Idomenée
respond « qu'illuy
fera tousjours fidelle».
Agamemnoncontinue son
chemin. Il trouve les deux
Ajax deja armez au milieu
de leurs bataillons; ( ces
bataillons comparez à des
troupeaux assemblez fous
leur pasteur, qui leur cherche
un asile contre l'orage
qu'il prévoit. ) Agamemnon
louë ces deux chefs,
& leur dit qu'il n'a pas besoin
de les exhorter». Il
passe au quartier du vieux
Nestor. Le trouve qui range
ses trou pes en bataille,
& qui encourage leurs
chefs. Noms de ces chefs.
De quelle manière Nestor
disposoit sa cavalerie &son.
infanterie.« Quels conseils
il donnoit à ses cavaliers
». «Sage vieillard,
dit Agamemnon transporté
de joye, plust aux Dieux
que vos forces respondissent
à vostre grand courage
ge, &c.» Nestor respond
» qu'il n'est plus au temps
où il tua de sa main le vaillant
Ereuthalion; mais que
tout vieux qu'il est on le
verra à la teste de ses ECcadrons,
LXquïl serautile
au moins par ses ordres &
par ses conseils
, que cest
là le partage des vieillards
». Agamemnonavance.
Trouve Peteus fils de
Menefthée & Ulysse qui
ne faisoient aucun mouvement
, parce que le bruit
de ce qui estoit arrivé dans
les deux armées n'estoit pas
encore venu jusqu'à eux-
« Il leur fait de sanglants
reproches de leur inaction
». «Ulyflc respond
avec fierte». Le Roy qui
le voitirrité, change de
ton, &«luy parle obligeamment
». Il poursuit
son chemin.VoitDiomede
sur son char avec Sthelenus
fils de Capancé. Diomedene
donnoit aucun
ordre pour le combat. Agamemnon
cc
luy reproche
d'avoir degeneré dela
vertu de son pere Tydée,
luy rappelle une occasion
d'éclat, ou Tydée signala
son courage contre les
Thebains». Diomede par
respect pour le Roy ne respond
rien.Sthelenus prend
la parole & dit(( qu'ils ne
meritent ny l'unny l'autre
ie reproche qu'on leur fait,
se piquent tous deux avec
raison d'estre plus braves
encore que leur pere».
Diomede represente à
Sthelcnus que le Roy qui a
le principal interest à tout
ce qui se passe, est en droit
de leur parler comme il
fait.„ Diomede en mef-
1
me temps faute de dessus
son char. - "veys 421. 419.
On voit marcher au
combat les nonbreufes
Phalanges des Grecs, semblables
à des flots amoncelez
par les vents. Elles
suivent leurschefs dans un
profond filen-ce, pour entendre
leurs ordres. Ilsemble
3
dit le Poëre, que cette
multitude innombrable de peuples
n'ait point de njoïx. Les
Troyens au contraire,
comme des brebis qui bêlent
dans un grand patu-
Tage, sont un bruit confus
qui resulte du mélange de
leurs voix & de la diversité
des langues de toure sorte
de peuples qui forment
leurarmée, vers411.438.
Les Troyens sont animez
par le Dieu Mars, &
les Grecs par la Déesse Minerve.
Ces deux Divinitez
font suivies de la Terreur,
de la Fuite & de l'insatiable
Discorde, Image poëtique
de la Discorde. Son
progrez. Ses effets. vers
43""45.
Les deux armées se joignent
J
& en viennent aux
mains. Description de leur
choc. Le bruit des guerriers
comparé à celuy que
font d'impetueux torrens
grossis par les pluyes. vers
446, 456.
Antiloque le premier tuë
Echepolus,un des plus braves
Troyens. Elephenor
General des Abantes, voulant
le dépouiller de ses
armes,est rué par Agenor.
Il se fait en cet endroit
une cruelle boucherie des
Grecs & des Troyens qui
se jettent les uns sur les autres
comme des loups affaniez.
Simoïsius (ainsi nom.
me parce que Ía mere accoucha
de luy sur les rives
du Simoïs) est tué à la fleur
de son âge par Ajax fils
de Telamon. Il tombe sur
la poussiere comme un jeune
peuplier abbattu par le
fer d'une coignée. Antiphus
un des filsdePriam,
veut venger la mort deSimoïsius.
illance son javelot
contre Ajax; mais il
rencontre au lieu de luy
Leucus compagnond'Ulysse.
Leucus tombe sur le
corps de Simoïssus qu'il entraisnoit.
Ulysseaffligéde
cette perte, s'approche des
Troyens d'un air terrible.
Regarde autour de luy
pour chercher sa victime.
Il lance son dard. Les
Troyens effrayez se retirent
en desordre. Le javelot
va frapper Democoon
fils naturel de Priam, &
lerenverse mort. Les Troyens
reculent. Hectorluymesmeestépouventé.
Les
Grecs enflez de ces avanta
ges vont chercher les
corps morts jusqu'au milieu
de la meslée pour les
entraisner.
entraisner. Apollon irrité
de leur audace se fait entendre
aux Troyens du
hautde la forteressed'Ilion,
les exhorte & les encourage
; leur represente sur
tout qu'Achille ne combat
point„. Minerve de son
colté anime les Grecs. Pi-,
roüs General des Thraces
tuë Diorés chefdes Epéens
aprés l'avoir blessé d'un
coup de pierre. Thoas General
des Etoliens lance
son javelot contre Piroiis,
& l'acheve de son épée. Ils
vont le dépoüiller de fe$
armes, mais il en est empesché
par les Thraces qui
tombent sur luy à coups
de piques,& l'obligent de
seretirer. vers 457. 539.
-
Homere parle des ex-
FJqics de cette journée
comme d'un grand sujet
d'admiration pour un homme
que Minerve auroic
conduit par la main, & à
qui elle auroit fait parcourir
sans danger tous les endroits
de la bataille. Il auroit
veu les Troyens&les
Grecs estendus les uns prés
des autres à la mesme place
où ils avoient combat-
EU. vers544.
AKGVMENT
du cinquièmeLivre.
La jour de cette action
Minerve augmente le courage
deDiomede. Deson
calque & de son bouclier
forcoitcontinuellementun
fçjXrfemblable à celuy de
Veftoitle qui paroistà lafin
àçl'Eflre'.LaDéessè pousse
ÇÇignprr-ier au milieu dela ~n~~ j, vers 1. 8.
o.
~~q~Phesep tous deux
fils de Darés Sacrificateur
deVulcain,poussent leur
char contreDiomede qui
estoit à pied. Phegée le
premier lance ion dard
contre luy sans le blesser.
Diomede le perce de son
javelot
, ôc l'estend mort
surla place. Idée n'ayant
pas le courage de sauver
le corps de son frere, prend
la suite. Vulcain le couvre
d'un nuage & le dérobe
aux poursuites de Diomede
j pour épargner àDarés
le chagrin de perdre Ces
deui filsenun jour. Diomede
fait emmener leurs
chevaux. Les Troyens
commencent à plier. Minerve
pour augmenter leur
desordre,ditàMars«qu'il
faut laisser combattre les
Troyens & les Grecs, &
ne plus resister aux ordres
de Ju piter.„ Elle le retire
du combat, & le fait repofer
sur les rives du Scamandre.
Les Grecs enfoncent
lesTroyens. * a/fw9.37,
Odius chef des Alizoniens
est tué par Agamenvnon.
Phestus par Idomenée.
Scamandrius par Me.
nelas. (Ce Scamandrius
estoit fort entendu dans
tout ce qui concerne la
charte, & avoit esté instruit
par Minerve.) Phereclus
est tué par Merion.
( Phereclus fils d'un habile
charpentier, avoir bâti les
vaisseaux que Pâris mena
en Grece.) Pedée fils naturel
d'Antenor
,
est tué
par Megés. Eurypile blesse
Hypsenor.(Hypsenorestoit
filsde Dolophionqui
estoit Sacrificateur du Scamandre.)
rUers Î7- 83-
Idomenéesemblable à
un fleuve, qui dans ion débordement
emporte tout
ce qui s'oppose à son passage,
renverse les barait.
lons des Troyens;rien ne
luy resiste. vers 85. 94.
Pandarus, pour arrester
son audace, luy tire une
flèche qui luy traverse l'épaule
droite, & croyant
l'avoir blessé mortellement
il s'en glorifie,,, Sthele*-
jius, ( à la prière deDiomede
) luy oste cette fléche.
Diomede prie Pallas
<c de luy prester son secours
pour se venger de
Pandarus
5
& le punir de
son orguëll.,,Pallas l'exauce.
Luy redonne toutes
ses forces & route sa
legereté.Elle luy dit,
qu'il peut aller hardiment
contre les Troyens;qu'elle
a dissipé le nuage qui
l'auroit empesché de discerner
les Dieux d'avec les
hommes
:
qu'il se garde
bien de combattre contre
les Immortels, si ce n'est
contre Venus sur qui elle
luy permet de tirer.„
vers 95. 132.
Minerve se retire. Diomede
qui se sent trois fois
plus fort qu'à l'ordinaire,
se jette au milieu des ennemis.
Est comparé à un
lion qu'un berger ablesse,
& qui devenu plus furieux;
se lance sur les brebis effrayées
qui se tapissent les
unes fous les autres pendant
que le berger se cache.
Diomedetuë d'abord
Astynoüs & Hypenor.
Ensuite Abas & Poluïde,
tous deux fils du vieux Eurydamas
qui estoit Interprete
des songes. Il marcheversThoon
&Xanthe
enfans de Phenops,prive
ce pere malheureux de ses
deux filsàla fois, &luy
laisse la douleur de voir que
sa successiondoitpassèrà
des collateraux esloignez.
Diomede., comme un lion
qui se jette surun troupeau
de boeufs, tombe encore surEchemon & Chromius
enfans de Priam, les préçipite
de leur char ,les dépoüille
de leurs armes, &
prend leurs chevaux.vers
133. 16s.
Enée qui voit tous ces
ravages, cherche Pandarus
a travers les picqucs &
les javelots. Ille joint de
l'exhorte à se servir encore
deson arc& de ses
traitscontre un homme
qui cause tant de defor-
-.
dres
, ( si ce n'est que ce
guerrier dangereux soit
quelqu'un des Immortels
irrité contre lesi Grecs) ,,.
Pandarus respond qu4»I
croit reconnoistreDiomede
à sa raille & à ses armes*
Que si ce guerrier n'est pas
un Dieu,aumoinsDiomede
ne peut faire tant de
prodiges sans le secours
d'une Divinité toute puisfante.
Se repent d'avoir
laissé chez luy, contre l'avis
de son pere, onze chars
inutiles par la crainte que
ses chevaux ne souffrissent
trop dans une ville affiegée.
Se plaintd'avoir desjablessé
deux des plusvaillans
hommes, sans autre
effet que de les avoir rendus
plus furieux. Jure que
s'il revoit sa patrie, il commencera
par bruler cet
arc & ces fléches qui l'ont
si mal servi.,, Enée luy
dit cC de monter sur son
char qui est tiré par cTcxcellens
chevaux, & luy
laisse le choix ou de tenir
les resnes, ou de combattre
contre Diomede. 9%
Pandarustc conseille à Enée
de conduire luy -
mesme
ses chevaux qui connoissent
savoix & sa main;
que pourluy il recevra
Diomede avec sa lance.
Ils montent tous deux sur
le char,& vont à toute
bride contre Diomede
(quiestà pied.) Sthelenus
qtuiitles voit venir, en aver- Diomede,&" luy conseille
de les éviter.,, Diomede
'c respond qu'il n'est
pas capable de fuir, & que
ces deuxennemis si redoutables
ne retournerons
point àTroye ;luy recommande
seulement dem*
mener les chevaux d'Eiree
aussitost qu'il fera vaincu; les chevaux d'Enée ef.,
toient de la race de ceux
dont Jupiter fit presentà
Tros. ),., 0tvers16(3.zyj,
Pandarus & Enée sont
en presence. de Diomede;
Pandarus-ile, premierdità
Diomede qu'iln'a peule
vaincre avec sa fléche,
mais qu'il fera peutestre
plus heureux avec son javelot.„
En mesme temps
il lance son dard qui perce
le bouclier jusqu'à la cuirasse.
Pandarus~s'écrie~
glorieux decesuccez. Diomede
luy dit qu'il a manqué
son coup. Le frappe
de son javelot que Minerve
conduisoit
, & qui traverse
depuis l'oeil jusqu'à
la gorge. Pandarus tombe
de son char. Enée se met
en devoir de deffendre: le
corps de sonamy. Diomede
prend une grosse pierre,
telle que deux hommes à
- peinel'auroient peu lever.
Il l'a jette contre Enée, &
luy brife la cuisse. Enée
tombe sur ces genoux &
s'affoiblit. Venus le prend
entre ses bras, le couvre
de sa robe, & l'emporte.
Sthelenus, qui se souvient
des ordres de Diomede 9
prend les chevaux d'Enée
les emmeine, les remetà
son amy Deïphilus, & va
rejoindre Diomede. Diomede
,qui a reconnu Venus
,
la poursuit avec un
-
dard
dard,&la blesse à la main.
Le fang immortel coule de
sa playe. Le fang desDieux
different de celuy des hommes,
& pourquoy.Venus
laisse tomber Enée,Apollon
le releve, le couvre
d'un nuage & l'emporte,
Diomede parle en termes
picquans à Venus qui se
retire tres-affligée. Iris l'a
soustient. Elles trouvent
Mars. Venus le conjure
de luyprester ses chevaux
pour s'en retourner dans
l'Olympe.„Mars luy donna
son char. Iris le conduit.
Elles arrivent en un
moment. Iris dérelle les
chevaux, & en prend soin-
Venus se laisse tomber sur
les genoux de Dioné sa
mere. Dipné luy demande
cc qui luy a fait cette
blesseure.,, Venus respond
ic que Diomede a eu cette
audace, & que ce nretl: plus
icy une guerre des Grecs
contre les Troyens,mais
desGrecscontre les Dieux.
Dioné la console
,
luy dit
que ce n'est pas la - première
fois que les Dieux
ont esté insu Irez. par leshommes.
( Exemples, de
Mars, de Junon, &de Pluton;)
Que Diomede doit
craindre de porter quelque
jour la peine de sa temerité.„
Dionéessuye le
fang qui coule de la blesseure
de sa fille. Venus est
guene en un moment. 'Vers
275- 417.
Junon & Minerve entretiennent
Jupiter de ce qui
vient d'arriver à Venus.
Ce Plaisanterie de Minerve
a ce sujer. Jupiter foufritsappelle
Venus & u. luy recommande
de ne plus s' exposer.
4, Diomede par trois fois
se jette sur Enée.) quoy
gqnapollon l'ait pris fous
sa protection. A la quatriéme
fois ce Dieu irrité
cc luy parle d'un ton
menaçant." Diomede se
retire. Apollon porte Enée
dans son Temple sur la Citadelle
de Pergame. Latone&
Diane ont foin ellesmesmes
de le panser. ven
432. 44^
Apollon voyant que le
combat s'echauffe autour
d'un phantofme qu'il avoit
formé ressemblant à Enéc
pour tromper les Grecs,
demande à Mars, «
s'il n'y
a pas moyen d'arrester ce
Diomede qui porte sa fureur
jusqu'a poursuivre les
Dieux,,,. Ensuiteilseretire
sur la Citadelle. Mars
prend la reffernblance d'Acamas
General des Thraces.
Va de rang en rang..
«Se fait entendreaux Tro..
yens & les anime.» Sarpedon
picque le courage de
Hector par le reproche
qu'il luy fait de son inaction
, & de la lascheté de
ses freres qui tremblent
,
comme des chiens timides
en presencedun lion.»
Hector, sans repliquer
faute de son char, un jave.
lot à la main, exhorte les
Troupes. LesTroyens se
rallient. LesEscadrons des
Grecs viennent fondre sur
eux. La poussiere qu'ils élevent,&
dontilssont tout
blanchis, comparée a celle
qui couvre ces monceaux
de paille que des vanneurs
ont separée d'avec le grain.
Le combat recommence.
Enée, qu'Apollon a retiré
du Temple où il l'avoit
mis, reparoist à la reste de
ses.troupes avec toute sa
vigueur. Les soldatstransl
portezdejoyefontsurpris
en meme tem ps de le revoir
siicst ; mais l'ardeur
du combatne leur permet
pas de l'interrogersur une
si prompte guerison. ira
449.518.
: Les Grecs animez, par
lpes dIeuxlAja.x, parUlysse, attendent
les Troyens de pied ferme
,SemblablesÀ desnuages:
aÍfemblez:, qui n'attendent
que le reveil des
vents endormis pourestre
mis en mouvement. vers
Jr9. J17-
Agamemnon donne (es
ordres « Exhorte ses soldats
» Ensuite il lance son
javelot & tueDeïcoon le
pluscher compagnon d'Enée.
Enée de son costé tue
Crethon & Orsiloqueensans
de Dioclés, qui avoir
pour ayeul le' fjeuve Alphée.
Crethon & Crbiloque
com parez à deux jeunes
lions, qui aprèsavoir
laisse par tout des marques
de
de leur furie , succombent
enfin fous l'effort des pasteurs.
Ces deux jeunes
guerriers tombent fous les
coups d'Enée comme les
plus hauts sapins abbattus
par les vents. Menelas,
pour les venger, s'avance
au milieu des combattansf
pouffé par le Dieu Mars,
qui ne cherche qu'à le faire
perir de la main d'Enée.
Antiloque voyant le peril
où Menelas s'expose, court
se joindre à luy. Enée qui
voit ces deux guerriers
unis, seretire. Ilsenlevent
les corps de Crethon &
d'Orsiloque;ensuite ils retournent
dans lameslée.
Menelas tue Pylemenés
qui commandoit les Paphiagoniens.
Antiloque
blesse Mydon d'un coup
de pierre, l'acheve de Ton
épée, & emmene ses chevaux.
vers528.589
Hector ayant apperceu
Menelas & Antiloque
inarche à , eux avec impetuosiré.
Les Troyens le
suivent. Mars & Bellone
sontà leur reste.Mars accompagne
par tout Hector.
Diomede voyant ce
Dieu terrible) est saisi de
frayeur. Son estonnement
comparé à celuy d'un voyageur
qui, après avoir
traversé de vastes campagnes,
voit tout d'un coup
un grand fleuve, & retourne
sur ses pas. Diomede
se retire en disant aux
Grecs,M qu'il faut ceder
auxDieux.» WJ590.606.
LesTroyensondent sur
les Grecs. Hector tue de
sa main Menofthés & Anchiale.
Ajax fils de Telamon
s'avance pour les
Ranger, & tue Amphiusde ioix
javelot. Il accourt ensuite pour
le dépouillerj mais les Troyens
font pleuvoir sur luy une gresle
de traits, & l'obligent de se- retirer. Vers 607. 616*
Sarpedon filsde Jupiter, &
General des Lyciens, & Tle-*
poleme fils d'Hercule se ren..,
contrent.« Ils se parlent quelque
temps au sujet du parjurede
Laoimedon que Tlepoleme
reproche à Sarpedon:» Ces
deux guerriers après« s'estre
menacez fierement» lancent
leurs dards lun contre l'autre.
Les traits partent ensemble,
Sarpedonest blesséà la clÜiTe
Le dard y demeure attaché.
Tlepoleme tombe sans vie.
On emporte Sarpedon. Les
Grecs enlevent le corps de
Tlepoleme. Ulysse
, pour le
venger, tourne les armes contre
les Lyciens & en tuë un
grand nombre. Noms des Lyciens
tuez par Ulvsse. Hector
s'avance contre luy pour arrester
ses desordres.. Srrpedon
voyant Hector le prie de ne le
pas laisser en proye à ses ennemis.
» Hector passe rapidement
pour aller charger les
Grecs. Les amis de Sarpedon
le mettent fous un grand chefne.
Pelagon luy tire le javelot
de sa playe. Sarpedon s'évanouit.
Borée le rafraifchit
de son [ouille) & le ranime.
Les Grecs qui ne peuvent fouflenir
le choc du Dieu Mars
& d'Hector, se battent en re..
traite sans prendre la suite,
Noms de plusieurs braves Capitaines
tuez a cette attaque..
vers 628. 710.
Junon voyant ce qui sepasse,
dit à Minerve" qu'ilest temps
d'arrester les ravages de Mars,
& de secourir les Grecs. » Junon
prepare elle
-
mesme ses
chevaux. La Déesse Hebé luy
appresteun char superbe. Description
de ce char. Minerve
quitte ses habits pour s'armer.
Quelles font ses armes. Son
Egide. Son casque. Sa pique.
Les deux Déesses montées sur
leur char éclatant, vont à toute
bride au palais de Jupiter.
Les portes de l'Olympe,qui
font gardées par les Heures,
s'ouvrent d'elles-mesmes avec
un grand bruit. Junon parle à
Jupiter & luy demande" s'il
veut permettre de reprimer les
fureurs de Mars , & de blesser
cet insensé qui ne reconnoist
d'autre droit que la force
,,, Jupiter luy dit" de donner ce
soin à Minerve qui est accoustuméeà
le vaincre." vers 711. 766..
Junon accompagnée de Minerve
pousse ses chevaux qui
courent avec impetuositéentre
le Ciel & la terre. ( Les
chevaux des Dieux franchissent
d'un seul fault autant d'espace
qu'un homme assis sur un
cap eslevé au bord de la mer
en peutdécouvrir sur cette va- se étendue.) Les Déesses arrivent
prés de Troye. Junon
dételle les chevaux. Les environne
d'un nuage. Le Simoïs
fait naistre l'ambrosie sur ses
rives pour leur pature. Les
Déesses marchent ensemble
comme deux colombes&vont
secourir les Grecs, vers 767.
779.
Elles trouvent Diomede entouré
des plus braves guerriers
semblables aux plus frers lions,
& aux sangliers les plus terribles.
Junon s'arreste. Prend
la ressemblance de Stentor dont la , voix d'airain estoit plus
forte que celle de cinquante
hommes ensemble. Elle parle
aux Grecs, &Il les anime.,,
Minerve de son costé s'approche
de Diomedequi s'estoit retiré
un peu à l'écart pour rafraifchir
la playe que Pandarus
luy avoit faite. Elle luy
reproche de s'affoiblir quand
il faut agir, 5c de ne ressembler
gueres à son pere Tydée qu'-
elle protegeoit auAi bien que
luy
, & dont elle ne pouvoit
retenir le courage Elle luy rappelle
l'aventure de Tydée avec
les Dépendants de Cadmus.
Diomede respond
(c
qu'il ne
manque ny de force ny de resolution
,
mais qu'il se souvient
des deffenses qu'elle luy a faites
de combattre contre les
Dieux : Que Mars est maintenant
à la teste des Troyens. » Minerve luy dit de ne point
craindre Mars, 8c de le frapper
hardiment s'il vient à sa
rencontre; qu'audi bien celt
un perfide qui prend le party
des Troyens contre la promes-.
se qu'illuy avoit faite & à Junon
, de favoriser les Grecs.»
Elle fait descendre Sthelenus
& monte à sa place auprès de
Diomede sur son char. Elle
prend le casque de Pluton pour
n'estre point veuë. Pouffe les
chevaux contre Mars. Mars,,
qui vient de tuer Persphas ,
voyant Diomede
3
s'avance, &
luy veut porter un coup de sa
pique. Minervedétourne le
coup, conduit celle de Diornede
contre Mars, & la kiy fait
entrer bien avant dans les costes.
Mars la retire, & jette
un cry semblable à celuy d'une
armée de neuf ou dix mille
hommes. LesTroyens & les
Grecs en font épouvantez.
Mars retourne dans l'Olympe.
Diomede le voir s'élever comme
un nuage obscur. vers 780. 867** - Mars montrant à Jupiter le
fang qui coule de sa playe, luy
dit « qu'il a engendré une fille
pernicieusè qui se croit tout
permis, parce qu'il ne la corrige
pas pendant qu'il traite
avec severité les autres Dieux.
Que c'est Minervequi a inspiré
à Diomede l'audace debiesfer
Venus & luy ensuite.» Jupiter
rejette sa plainte, & luy
dit qu'ilest luy - mesme un
inconstant & un furieux qui
n'aime que les querelles,& que
s'il n'estoit pas son fils il y a
long-temps qu'ill'auroit precipité
dans les abylmesavec les
Titans,» Jupiter cependant
donne ordre à"'Pæon"de le guérir.
Pæonobéît& le guerit sur
le champ avec un baume exquis
qui fait sur la playe le mesme
effet & aussi promptement
que la presure sur le lait. Hebé
après avoir preparé un bain
pour Mars, luy donne des habits
magnifiques. Mars se place
auprès de Jupiter. Junon &
Minerve ne sont pas longtemps
sans remonter au Ciel.
Fermer
Résumé : SUITE DE L'ABREGÉ de l'Iliade.
Le quatrième livre de l'Iliade relate un conseil des dieux concernant la guerre de Troie. Jupiter critique Junon et Minerve pour leur absence des combats, contrairement à Vénus qui soutient son favori. Junon refuse la paix et demande à Minerve d'inciter les Troyens à rompre le traité. Minerve, déguisée en Laodocus, persuade Pandarus de tirer une flèche sur Ménélas, le blessant légèrement. Agamemnon, alarmé, appelle un médecin pour soigner Ménélas. Les Troyens avancent en bataille, et les Grecs se préparent au combat. Agamemnon encourage les soldats et réprimande les lâches. Les deux armées se rejoignent, et le combat commence, marqué par des scènes de violence et de mort. Mars soutient les Troyens, tandis que Minerve aide les Grecs. Diomède, encouragé par Minerve, se distingue par sa bravoure et tue plusieurs Troyens. Pandarus blesse Diomède, mais Minerve le guérit et l'encourage à continuer. La journée se termine par des combats acharnés, avec des pertes des deux côtés. Diomède, comparé à un lion, attaque et vainc Échémon et Chromius, fils de Priam, s'emparant de leurs armes et chevaux. Enée, voyant les ravages causés par Diomède, cherche Pandarus pour l'exhorter à utiliser son arc contre ce guerrier. Pandarus reconnaît Diomède et regrette de ne pas avoir pris plus de chars. Il jure de brûler son arc s'il revient à Troie. Enée propose à Pandarus de monter sur son char pour affronter Diomède. Pandarus conseille à Enée de conduire ses propres chevaux et se prépare à affronter Diomède avec sa lance. Diomède, malgré les conseils de Sthelenus de se retirer, décide de rester et de combattre. Pandarus lance un dard contre Diomède, qui riposte en le blessant mortellement. Enée tente de défendre le corps de Pandarus, mais Diomède le frappe à la cuisse avec une pierre, le blessant gravement. Vénus, la mère d'Enée, vient à son secours et le transporte, blessée à la main par Diomède. Apollon prend ensuite Enée sous sa protection. Diomède, encouragé par Minerve, continue de combattre avec fureur. Les dieux interviennent de manière plus directe : Junon et Minerve décident d'arrêter les ravages de Mars et de secourir les Grecs. Minerve, déguisée, incite Diomède à affronter Mars, qu'elle blesse ensuite. Mars, blessé, retourne dans l'Olympe où Jupiter le guérit. La scène se termine par la préparation des dieux pour continuer à influencer le cours de la bataille.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 145-154
SUR LES GLORIEUX succez des Armes du Roy dans la derniere campagne de Flandres. ODE Qui a remporté le Prix proposé par l'Académie Françoise.
Début :
Quelle ardeur ! quel saint delire ! [...]
Mots clefs :
Ardeur , Guerre, Héros, Victoire, Minerve, Jupiter, Triomphe, Louis, Conquêtes, Paix
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUR LES GLORIEUX succez des Armes du Roy dans la derniere campagne de Flandres. ODE Qui a remporté le Prix proposé par l'Académie Françoise.
SUR LES GLORIEUX
succez des Armes du
Roy dans la derniere
campagne de Flandres.
ODE
Qui a remporté le Prix proposépar
l'académie
Françoise. QUelle ardeur: quel
saint delire!
Tu m'inspire Dieu des
vers,
Les divins sons de ta lyre
Me transportent dans les
airs,
Pour te suivre je m'engage,
Plus temeraire qu'icare,
Je monte au plus haut des
Cieux;
Mortel, par quel privilege
Puis-je estre sans sacrilege
Admis au conseil desDieux.
Quel interest les assemble
Prés du Throsne de leurs
Rois;
Que vois-je ? l'Olympe
tremble
, Par tout y regne l'effroy,
Les maux qu'une affreuse
guerre
Eternise sur la terre,
Troublent jufquaux immortels
:
On diroit à les entendre
Qu'on veut les faire descendre
Des Cieux, ou de leurs
Autels.
Mais quelle auguste Déesse
S'avance avec majesté ?
Qu'elle inspire de sagesse!
Que mon coeur est agité!
Avec transport je l'ob- serve.
Ah je reconnois Minerve
Tout s'émeut à s,on aspect;
Quel est son pouvoir suprême
Le grand Jupiter lui-même
La regarde avec respect.
Dieu tout- puissant, luidit-
elle,
Pouvez vous voir sans horreur,
; Que la discorde cruelle
Exerce tant de fureur,
La paix par elle exilée,
Ne peur être rappellée
Que par les foins d'un Heros,
Que vôtre bras le seconde,
Qu'il vainque
,
& de tout
le monde
Vous affeurez le re pos.
Une Reine magnanime
Imite un Roy genereux,
Un mesme esprit les anime
A rendre le monde heureux.
Dans leurs conseils je préside,
La Paix où ma voix les
guide,
Estleur objet le plus doux.
Mais pour calmer tant d'allarmes,
L'un doit signaler ses armes,
L'autre suspendre ses
coups.
Tandis que sage,équitable
ANNE pese tous les droits
De la foudre redoutable,
Armez le plus grand des
Rois,
Rendez- luy toute sa gloire:
Ordonnez à la Victoire
De suivre ses étendarts.
N'éprouvez plus sa constance,
Affranchissez sa prudence
Du caprice des hazards.
Sur LOU I s, surce grand
homme,
Vivante image des Dieux,
Sans que Jupiter le nomme
Jupiter jette les yeux,
Jusqu'au Ciel sa gloire
brille,
De son immortelle fille
Il approuve le dessein,
Déja a Victoire vole,
Et sur les ailes d'Eole
S'achemine vers Denain.
C'est de là que le Batave
D'un prompt succez assure
Le fier Germain qui nous
brave,
Prête un secours préparé.
Landrecy : mais quelprésage!
Minerve s'ouvre un paf-
CageJ
Mes yeux en sontébloüis,
Je la vois decette foudre
Qui mit les Titansen poudre,
Armer le bras de LOUI s.
Que de troupes fugitives!
Combien de portes forcées
; L'Écaut voit border ses
rives
De cadavres entassez.
Quelle fuite de conquêtes!
Que de lauriers pour nos
testes !
Doüay
,
Bouchain tout se
rend,
Le Quesnoy livre ses portes
A nos rapides cohortes,
Rien n'arrête ce torrent.
Mais quelle douce harmonie
S'éleve au milieu des airs?
La guerre est-elle finie?
La discordeest-elle aux
fers?
Ah! la France est triomphante
:
Projets, que la - rage enfante,
~Disparoissez pour jamais.
Fruit heureux de la Victoire!
Lou I S ne mettra sa gloire
Qu'à faire regner la paix.
succez des Armes du
Roy dans la derniere
campagne de Flandres.
ODE
Qui a remporté le Prix proposépar
l'académie
Françoise. QUelle ardeur: quel
saint delire!
Tu m'inspire Dieu des
vers,
Les divins sons de ta lyre
Me transportent dans les
airs,
Pour te suivre je m'engage,
Plus temeraire qu'icare,
Je monte au plus haut des
Cieux;
Mortel, par quel privilege
Puis-je estre sans sacrilege
Admis au conseil desDieux.
Quel interest les assemble
Prés du Throsne de leurs
Rois;
Que vois-je ? l'Olympe
tremble
, Par tout y regne l'effroy,
Les maux qu'une affreuse
guerre
Eternise sur la terre,
Troublent jufquaux immortels
:
On diroit à les entendre
Qu'on veut les faire descendre
Des Cieux, ou de leurs
Autels.
Mais quelle auguste Déesse
S'avance avec majesté ?
Qu'elle inspire de sagesse!
Que mon coeur est agité!
Avec transport je l'ob- serve.
Ah je reconnois Minerve
Tout s'émeut à s,on aspect;
Quel est son pouvoir suprême
Le grand Jupiter lui-même
La regarde avec respect.
Dieu tout- puissant, luidit-
elle,
Pouvez vous voir sans horreur,
; Que la discorde cruelle
Exerce tant de fureur,
La paix par elle exilée,
Ne peur être rappellée
Que par les foins d'un Heros,
Que vôtre bras le seconde,
Qu'il vainque
,
& de tout
le monde
Vous affeurez le re pos.
Une Reine magnanime
Imite un Roy genereux,
Un mesme esprit les anime
A rendre le monde heureux.
Dans leurs conseils je préside,
La Paix où ma voix les
guide,
Estleur objet le plus doux.
Mais pour calmer tant d'allarmes,
L'un doit signaler ses armes,
L'autre suspendre ses
coups.
Tandis que sage,équitable
ANNE pese tous les droits
De la foudre redoutable,
Armez le plus grand des
Rois,
Rendez- luy toute sa gloire:
Ordonnez à la Victoire
De suivre ses étendarts.
N'éprouvez plus sa constance,
Affranchissez sa prudence
Du caprice des hazards.
Sur LOU I s, surce grand
homme,
Vivante image des Dieux,
Sans que Jupiter le nomme
Jupiter jette les yeux,
Jusqu'au Ciel sa gloire
brille,
De son immortelle fille
Il approuve le dessein,
Déja a Victoire vole,
Et sur les ailes d'Eole
S'achemine vers Denain.
C'est de là que le Batave
D'un prompt succez assure
Le fier Germain qui nous
brave,
Prête un secours préparé.
Landrecy : mais quelprésage!
Minerve s'ouvre un paf-
CageJ
Mes yeux en sontébloüis,
Je la vois decette foudre
Qui mit les Titansen poudre,
Armer le bras de LOUI s.
Que de troupes fugitives!
Combien de portes forcées
; L'Écaut voit border ses
rives
De cadavres entassez.
Quelle fuite de conquêtes!
Que de lauriers pour nos
testes !
Doüay
,
Bouchain tout se
rend,
Le Quesnoy livre ses portes
A nos rapides cohortes,
Rien n'arrête ce torrent.
Mais quelle douce harmonie
S'éleve au milieu des airs?
La guerre est-elle finie?
La discordeest-elle aux
fers?
Ah! la France est triomphante
:
Projets, que la - rage enfante,
~Disparoissez pour jamais.
Fruit heureux de la Victoire!
Lou I S ne mettra sa gloire
Qu'à faire regner la paix.
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Résumé : SUR LES GLORIEUX succez des Armes du Roy dans la derniere campagne de Flandres. ODE Qui a remporté le Prix proposé par l'Académie Françoise.
Le texte célèbre les succès militaires du roi Louis XV lors de la dernière campagne en Flandres. Inspirée par une divinité, la vision décrit les dieux de l'Olympe troublés par les maux de la guerre sur Terre. Minerve, déesse de la sagesse, demande à Jupiter d'intervenir pour rétablir la paix grâce à un héros soutenu par le bras divin. La reine Anne et le roi Louis XV, animés par un même esprit généreux, cherchent à rendre le monde heureux. Minerve conseille d'armer Louis XV et de lui accorder la victoire pour calmer les alarmes. La victoire vole vers Denain, assurant un succès rapide contre les ennemis. La déesse arme le bras de Louis XV, menant à une série de victoires, dont la prise de Landrecy, Douai, Bouchain et Le Quesnoy. La guerre semble terminée, et la France triomphante aspire à la paix.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 251-267
HISTOIRE de Bichon, Chienne favorite de Madame de P... presentée par Bichon mesme à sa belle Maistresse pour son Bouquet, le 21. de Janvier jour de sa Feste.
Début :
Vostre Bichon, vostre chere Maman [...]
Mots clefs :
Chien, Chienne, Amour, Jupiter, Yeux, Bichon
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texteReconnaissance textuelle : HISTOIRE de Bichon, Chienne favorite de Madame de P... presentée par Bichon mesme à sa belle Maistresse pour son Bouquet, le 21. de Janvier jour de sa Feste.
HISTO IRE
de BichonyChienne
favorite de Madame
deP.presèntée par
Bichonmejmeasa belle
Maistressepourfin
Bouquet) lezi. dejanrrjierjour
de sa Fesie.
Ostre Bichon, vostre
chere Maman *
Pour son Bouquet vous
donne son Histoire,
Qui passeroit pour Fable
ou pour Roman
S'il estrien dedisette
à croire.
Quand il s'agit du pouvoir
de vos yeux; Mais puisqu'enfin je les
prefere aux Cieux
Que deformaisnul égard
ne m'arreste,
Je doisl'aveu, mesme en
dépit des Dieux , De vostregloire au jour
de vostre feste.
Gonnoissez-moy iàu$
la peau de Bichoa*
Vous possedez une
Chienne immortelle
Qui , vous adore, & qui
veut fous ce nom
Fuïr le sejour des enfans
de Cibelle
Pourvous servir,pour
vous suivreen tous
lieux;
Pour moy ce fort a d'autant
plus de charmes ,
Que vous pouvez m'aimer
sans qu'à vos yeux
Jamais ma mort puisse
couster des larmes :
Or lisez donc la suite
sansallarmes.
Ce chien fameux, ce
chien de si haut prix
Qui fut donné par Diane
à Procris
y Et par Procrisàson Epoux
Cephale,
Qui s'en feroit heureusement
servi
Si ce beau chien de bonté
sans égale,
Du Dard fataln'avoitestésuivi.
Lelape enfin, c'est son
nom,fut mon pere :
S'il s'affranchit de la dent
de Cerbere
Ovideassez vous en in
formera,
Et comme chien, de tout
ce qu'il sçut faire;
Venons àmoy. Sous le
nom deMoera
Je fus jadiscelebre da,. ns
la Grece,
Chienne n'aima jamais,
ny n'aimera,
Comme j'aimay * ma
! Erigone. 1
premiere Maistresse:
Je la perdis. Quel fut
mon desarroy ?
Jevalus seule un funebre
convoy; J'étourdis tant VQurJe,
v
le Crepuscule,
-
Des jours, des nuits, par
maint perçant abboy,
Mes cris des airs par le
perpendicule
Frappent si fort les oreilles
du Roy,
Qui sur l'Olympe aux
autres fait la loy,
-. Que
Que Jupiter au Ciel
m'immatricule:
Ma loyauté fit un Astre
de moy
Que les Mortels nommerent
Canicule.
Tout l'U nivers sçaitquel
fut mon employ ;
Embraser tout. Mais
certaines années
Je vis pourtant que malgré
tous mes soins
Soit par malin vouloir
des Destinés, Soit autrement,je réüC
fïflois moins.
On frissonnoit quelquefois
fous mon regne >
Quoy de baiser est-il.
temps que je craigne,
M'imaginois-je ? un foir
a Í/"ïl'e::'rt':.[l
( Quand ces pensées me
rendoient triste&
sombre)
Pour mon bonheur vos.
beaux yeux par hazard
Comme un éclair tout
autravers de l'ombre,
Jusques à moy lancerent
un regard.
J'en vis ~paslir les naifsaintes
estoiles,
Et de leurs feux ses flammes
triompher,
Quoiqu'un nuage eut
opposé ses voiles
Je m'en sentis moi-filer.
-- me rechauffer.
Ho! ho! pensai-jeÏlefl
une Mortelle
--
Qui d'un regard peut
mettre tout en feu
Allons la , voir, allons
apprendre un peu
A raffiner nostre metier
prés d'elle.
Voilà comment (jevous
en fais l'aveu)
Je vins chez vous, où
fous cette figure
De
-
me cacher j'eus la
précaution,
Laissant le foin à la Vierge,
au Lion
Pour quelques jours
d'embraser la nature.
Je crus d'abord dans
chacun de vos traits-
Revoir ce Dard du malheureux.
Cephale
Seur de ses coups, Se
dont le but jamais
Ne fut soustrait à sa
pointe fatale..
Vos traits font plus, &C
par leur grand fracas
Dans tous les coeurs il y
doit bien paroistre.
Dessein
,
hazard
, tout
fert à vos appas, Et vous portez bien fouventle
trépas
Où vous n'avez jamais
visé-peut-e.stre1.
Meres tremblez pour
vos adolescens;
Sagesvieillards malgré
vostre bon sens
Dans vos glaçons craignez
de voiréclore
-
Folles ardeurs. Et vous
jeune Procris,
A qui l'hymen paroist
l'amour encore
De ma!Maistresse.efloi.
gnez vos Maris,
Elleestautant à craindre
que taurorer
Dés qu'on la voit pour
tousjours on l'adore:
Telest enfin son empire
charmant
Qu'elle pourroit (chose
impossible à Flore)
Fixer le coeur de son
volage Amant.
De tous vos traitsquand
je fus bien instruite
Un beau matin je meditois
ma fuite
Au Diable zot. Sortir
d'auprés de vous
Qui le pourroit? j'en ai
trouvé le giste
Sibon pourmoy, si commode
)
si doux,
De ses honneurs que je
tiens le Ciel quitte.
Si Jupiter voyoit ce que
je voy , Pour partager vostre lit
comme moy , Jupiter mesme en descendroit
plus viste,
Qu'il ne fit pour Alemene
& Leda j
Jamais l'amour si bien ne
le guida.
Quoyque l'amour fait sa
grande
grande Marotte,
Il paroistroitchez vous *
tel que la Motte
Vient de le peindre au
haut du mont Ida.
Pour moy , mon Ciel
n'est qu'aux lieux où
vous estes,
Aux plus huppez j'y dame
le pion,
Et mets au rang des plus
vilaines bestes
* La Cynosure avec le
Scorpion.
Dans son Iliade,l.7.
PetiteOurse.
Prés de ma Reine orgueilleuxSagittaire
Je ne vous croy qu'un
Archer mal adroit
Prenez chacun quelque
trait de Cithere
Et nous verrons qui tirera
plus droit.
Je vous verrai briller
sans jalousie,
Adieu vous dis Ecrevis-
-
jeyPoissons,
Je mangeicy * soyes gras
Sç Pigeons
* J'en mstémoin le premier del'an,
Qui valent mieux que
la maigre Ambrozie.
de BichonyChienne
favorite de Madame
deP.presèntée par
Bichonmejmeasa belle
Maistressepourfin
Bouquet) lezi. dejanrrjierjour
de sa Fesie.
Ostre Bichon, vostre
chere Maman *
Pour son Bouquet vous
donne son Histoire,
Qui passeroit pour Fable
ou pour Roman
S'il estrien dedisette
à croire.
Quand il s'agit du pouvoir
de vos yeux; Mais puisqu'enfin je les
prefere aux Cieux
Que deformaisnul égard
ne m'arreste,
Je doisl'aveu, mesme en
dépit des Dieux , De vostregloire au jour
de vostre feste.
Gonnoissez-moy iàu$
la peau de Bichoa*
Vous possedez une
Chienne immortelle
Qui , vous adore, & qui
veut fous ce nom
Fuïr le sejour des enfans
de Cibelle
Pourvous servir,pour
vous suivreen tous
lieux;
Pour moy ce fort a d'autant
plus de charmes ,
Que vous pouvez m'aimer
sans qu'à vos yeux
Jamais ma mort puisse
couster des larmes :
Or lisez donc la suite
sansallarmes.
Ce chien fameux, ce
chien de si haut prix
Qui fut donné par Diane
à Procris
y Et par Procrisàson Epoux
Cephale,
Qui s'en feroit heureusement
servi
Si ce beau chien de bonté
sans égale,
Du Dard fataln'avoitestésuivi.
Lelape enfin, c'est son
nom,fut mon pere :
S'il s'affranchit de la dent
de Cerbere
Ovideassez vous en in
formera,
Et comme chien, de tout
ce qu'il sçut faire;
Venons àmoy. Sous le
nom deMoera
Je fus jadiscelebre da,. ns
la Grece,
Chienne n'aima jamais,
ny n'aimera,
Comme j'aimay * ma
! Erigone. 1
premiere Maistresse:
Je la perdis. Quel fut
mon desarroy ?
Jevalus seule un funebre
convoy; J'étourdis tant VQurJe,
v
le Crepuscule,
-
Des jours, des nuits, par
maint perçant abboy,
Mes cris des airs par le
perpendicule
Frappent si fort les oreilles
du Roy,
Qui sur l'Olympe aux
autres fait la loy,
-. Que
Que Jupiter au Ciel
m'immatricule:
Ma loyauté fit un Astre
de moy
Que les Mortels nommerent
Canicule.
Tout l'U nivers sçaitquel
fut mon employ ;
Embraser tout. Mais
certaines années
Je vis pourtant que malgré
tous mes soins
Soit par malin vouloir
des Destinés, Soit autrement,je réüC
fïflois moins.
On frissonnoit quelquefois
fous mon regne >
Quoy de baiser est-il.
temps que je craigne,
M'imaginois-je ? un foir
a Í/"ïl'e::'rt':.[l
( Quand ces pensées me
rendoient triste&
sombre)
Pour mon bonheur vos.
beaux yeux par hazard
Comme un éclair tout
autravers de l'ombre,
Jusques à moy lancerent
un regard.
J'en vis ~paslir les naifsaintes
estoiles,
Et de leurs feux ses flammes
triompher,
Quoiqu'un nuage eut
opposé ses voiles
Je m'en sentis moi-filer.
-- me rechauffer.
Ho! ho! pensai-jeÏlefl
une Mortelle
--
Qui d'un regard peut
mettre tout en feu
Allons la , voir, allons
apprendre un peu
A raffiner nostre metier
prés d'elle.
Voilà comment (jevous
en fais l'aveu)
Je vins chez vous, où
fous cette figure
De
-
me cacher j'eus la
précaution,
Laissant le foin à la Vierge,
au Lion
Pour quelques jours
d'embraser la nature.
Je crus d'abord dans
chacun de vos traits-
Revoir ce Dard du malheureux.
Cephale
Seur de ses coups, Se
dont le but jamais
Ne fut soustrait à sa
pointe fatale..
Vos traits font plus, &C
par leur grand fracas
Dans tous les coeurs il y
doit bien paroistre.
Dessein
,
hazard
, tout
fert à vos appas, Et vous portez bien fouventle
trépas
Où vous n'avez jamais
visé-peut-e.stre1.
Meres tremblez pour
vos adolescens;
Sagesvieillards malgré
vostre bon sens
Dans vos glaçons craignez
de voiréclore
-
Folles ardeurs. Et vous
jeune Procris,
A qui l'hymen paroist
l'amour encore
De ma!Maistresse.efloi.
gnez vos Maris,
Elleestautant à craindre
que taurorer
Dés qu'on la voit pour
tousjours on l'adore:
Telest enfin son empire
charmant
Qu'elle pourroit (chose
impossible à Flore)
Fixer le coeur de son
volage Amant.
De tous vos traitsquand
je fus bien instruite
Un beau matin je meditois
ma fuite
Au Diable zot. Sortir
d'auprés de vous
Qui le pourroit? j'en ai
trouvé le giste
Sibon pourmoy, si commode
)
si doux,
De ses honneurs que je
tiens le Ciel quitte.
Si Jupiter voyoit ce que
je voy , Pour partager vostre lit
comme moy , Jupiter mesme en descendroit
plus viste,
Qu'il ne fit pour Alemene
& Leda j
Jamais l'amour si bien ne
le guida.
Quoyque l'amour fait sa
grande
grande Marotte,
Il paroistroitchez vous *
tel que la Motte
Vient de le peindre au
haut du mont Ida.
Pour moy , mon Ciel
n'est qu'aux lieux où
vous estes,
Aux plus huppez j'y dame
le pion,
Et mets au rang des plus
vilaines bestes
* La Cynosure avec le
Scorpion.
Dans son Iliade,l.7.
PetiteOurse.
Prés de ma Reine orgueilleuxSagittaire
Je ne vous croy qu'un
Archer mal adroit
Prenez chacun quelque
trait de Cithere
Et nous verrons qui tirera
plus droit.
Je vous verrai briller
sans jalousie,
Adieu vous dis Ecrevis-
-
jeyPoissons,
Je mangeicy * soyes gras
Sç Pigeons
* J'en mstémoin le premier del'an,
Qui valent mieux que
la maigre Ambrozie.
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Résumé : HISTOIRE de Bichon, Chienne favorite de Madame de P... presentée par Bichon mesme à sa belle Maistresse pour son Bouquet, le 21. de Janvier jour de sa Feste.
Le poème narratif relate l'histoire de Bichon, une chienne immortelle et favorite de Madame de P., présentée lors de la fête de sa maîtresse. Bichon exprime son amour et sa dévotion envers Madame de P., comparant son histoire à celle de chiens célèbres de la mythologie grecque, tels que Lélaps, le chien de Diane et Procris, et Moéra, la chienne d'Érigone. Moéra, après la perte de sa maîtresse, fut transformée en astre par Jupiter et devint la Canicule, responsable de la chaleur estivale. Bichon raconte comment elle fut attirée par la beauté de Madame de P. et comment elle a choisi de la servir fidèlement. Le poème souligne la puissance des regards et des traits de la maîtresse, capables de séduire et de conquérir les cœurs. Bichon exprime également son désir de rester auprès de sa maîtresse, trouvant en elle un amour et une beauté sans pareil. Elle conclut en affirmant sa loyauté et son amour, prêtant à se comparer aux astres et aux constellations pour exalter la beauté et le pouvoir de sa maîtresse.
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6
p. 1213-1217
DESCENTE AUX ENFERS, ODE.
Début :
Dieux ! quel est le projet que la douleur m'inspire ! [...]
Mots clefs :
Enfers, Jupiter, Ombre, Dieux, Destinées, Tombeau, Tristesse, Haine
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DESCENTE AUX ENFERS, ODE.
DESCENTE AUX ENFERS,
O DE.
D
Ieux quel est le projet que la douleur
m'inspire !
Je me livre aux transports que j'éprouve en co
jour ::
N'hésitons plus allons au ténébreux empire
Ravir l'aimable objet d'un malheureux amour..
Orphée à ses accords dut le rare avantage ,
De pouvoir pénétrer jusqu'au sombre rivage ;
* Le Eils de Jupiter le dut à sa valeur ::
Pour attendrir Caron , pour appaiser Cerbere ,,
Pour flêchir des enfers le Monarque severe ,,
Je ne veux employer que ma vive douleur..
$2
* Hercule.
ܬܵܐ
I. Vol. Sii A vi
1214 MERCURE DE FRANCE
Si je ne puis te rendre à la clarté celeste ,
Chere ombre ; j'y renonce et je reste avec toi ...
Mais ou suis- je ! Quel bruit ! Quel Spectacle
funefte !
La frayeur me saisit ... c'est le styx que je voi :
Que des Manes errants sur ses fatales rives !
Insensible aux regrets de ces ombres plaintives ;
Caron prête l'oreille à mes tristes accords :
Il approche , et malgré les ordres de la Parque ;
Il se rend à mes voeux , me reçoit dans sa barque,
Il me passe ; déja je touche à d'autres bords.
M
Ici , Dieux immortels , des tourmens innom→
brables ,
Vous vangent de l'abus qu'on fit de vos bienfaits.
Hé , qui ne plaindroit pas le sort de ces coupables?
Quels supplices affreux punissent leurs forfaits ?
Trois monstres , Alecton , Tisiphone & Megere,
Ont le soin de servir votre juste colere.
En leurs barbares mains vous remettez vos droits
Je fremis , et mon oeil à regret les contemple ;
Ha ! je n'ai pas besoin d'un si terrible exemple ,
Dieux justes,pour apprendre à respecter vos Loix
Fuyons : éloignons nous de ces objets funebres :
Ils me glacent d'horreur ... je tombe dans la nuit ;
Par où dois -je passer ? je suis dans les tenebres ....
I, Vol.
Mais
JUIN. 1215 1731.
à
Mais d'où vient la clarté qui tout
La cruelle Atropos à mes yeux se presente ;
Je sens à cet aspect que
ma douleur augmente
Elle tient en ses mains le terrible ciseau ,
Qui de tous les mortels regle les destinées ,
Et qui vient de trancher les plus belles années
D'un objet que j'adore au de- là du tombeau.
coup me luie?
Elevé sur un Trône , au milieu des fantômes ,
Le Gendre de Cerés vient s'offrir à mes yeux.
Terrible Souverain de ces sombres Royaumes ,
Tu connois le dessein qui m'amene en ces lieux ;
Soulage la douleur de mon ame éperduë ,
Ordonne qu'à mes voeux Camille soit rendûë :
Pluton , si -mes sanglots ne peuvent t'émouvoir¿
Și la Loi du destin s'oppose à ma tendresse
Attendri par mes pleurs , sensible à ma tristesse
Daigne permettre au moins que je puisse le voir.
Le severe Pluton n'est pas inéxorable ,
Touché de mes regrets , il ordonne à Minos
De conduire mes pas vers cet azile aimable ,
Où Camille joüit d'un éternel repos :
J'apperçois du Léthé les tranquilles rivages ;
Agréable séjour ; c'est ici que les Sages ,
Goûtent après leur mort le plus parfait bonheur g
I. Vol.
Pour
1216 MERCURE DE FRANCE -
Pour ces lieux fortunez , les Dieux nous ont faig
naître ......
Camille à mes regards tarde trop de paroître ;
Minos , que tu sers mal les transports de mon
coeur !
Hâtons-nous je la vois , elle a repris ces
charmes ,
Que la faulx de la mort avoit sçû moissonner..
Chere ombre , arrête toi sois sensible à mes
larmes ,
>
A mes chastes transports , 'daigne t'abandonner …..
Camille ! tu me fuis ! tu ne veux pas m'entendre ,
A ce nouveau malheur aurois- je dû m'attendre ,
Après avoir franchi tant d'obstacles affreux ?
Quel accueil ! Quels regards ! Quel farouche
silence !
...
9
Helas ! me faudra -t-il pleurer ton inconstance !
Les plus tendres Amans sont-ils les moins heu
reux ?
Les Dieux condamnent-ils une si belle flâme ?
As tu pûte resoudre à me manquer de foy ?
Que dis-je ! quel soupçon vient s'offrir â mon
ame !
Ah ! tel est du destin l'irrévocable Loy :
Oui , ce n'est qu'à regret que Camille m'évite ;
Mais, de tant de malheurs mon desespoir s'irrite
St
I. Vol. Je
JUIN. 173F. 1217
Je la suivrai par tout , je ne la quitte pas ....
Minos , près de Pluton vas reprendre ta place ,,
De rester en ces lieux qu'il m'accorde la grace .
Sans Camille la vie a pour moi peu d'appas .
Ay-je pû , justes Dieux , meriter votre haine ,.
Pourquoi me forcez -vous de quitter ce séjour !:
Je vous implore en vain ; et Minos qui me meine
Va me rendre bientôt à la clarté du jour .
Pour la seconde fois chere ombre on nous sépare;;
Cedons sans murmurer à cet ordre barbare ,
Et respectons les Dieux jusques dans leur rigueur;
Adieu , puisse du moins la douleur qui m'accable,
Abreger de mes jours le reste déplorable ,
Cette seule esperance adoucit mon malheur.
Par M. V. D. L. T. d'Aix..
O DE.
D
Ieux quel est le projet que la douleur
m'inspire !
Je me livre aux transports que j'éprouve en co
jour ::
N'hésitons plus allons au ténébreux empire
Ravir l'aimable objet d'un malheureux amour..
Orphée à ses accords dut le rare avantage ,
De pouvoir pénétrer jusqu'au sombre rivage ;
* Le Eils de Jupiter le dut à sa valeur ::
Pour attendrir Caron , pour appaiser Cerbere ,,
Pour flêchir des enfers le Monarque severe ,,
Je ne veux employer que ma vive douleur..
$2
* Hercule.
ܬܵܐ
I. Vol. Sii A vi
1214 MERCURE DE FRANCE
Si je ne puis te rendre à la clarté celeste ,
Chere ombre ; j'y renonce et je reste avec toi ...
Mais ou suis- je ! Quel bruit ! Quel Spectacle
funefte !
La frayeur me saisit ... c'est le styx que je voi :
Que des Manes errants sur ses fatales rives !
Insensible aux regrets de ces ombres plaintives ;
Caron prête l'oreille à mes tristes accords :
Il approche , et malgré les ordres de la Parque ;
Il se rend à mes voeux , me reçoit dans sa barque,
Il me passe ; déja je touche à d'autres bords.
M
Ici , Dieux immortels , des tourmens innom→
brables ,
Vous vangent de l'abus qu'on fit de vos bienfaits.
Hé , qui ne plaindroit pas le sort de ces coupables?
Quels supplices affreux punissent leurs forfaits ?
Trois monstres , Alecton , Tisiphone & Megere,
Ont le soin de servir votre juste colere.
En leurs barbares mains vous remettez vos droits
Je fremis , et mon oeil à regret les contemple ;
Ha ! je n'ai pas besoin d'un si terrible exemple ,
Dieux justes,pour apprendre à respecter vos Loix
Fuyons : éloignons nous de ces objets funebres :
Ils me glacent d'horreur ... je tombe dans la nuit ;
Par où dois -je passer ? je suis dans les tenebres ....
I, Vol.
Mais
JUIN. 1215 1731.
à
Mais d'où vient la clarté qui tout
La cruelle Atropos à mes yeux se presente ;
Je sens à cet aspect que
ma douleur augmente
Elle tient en ses mains le terrible ciseau ,
Qui de tous les mortels regle les destinées ,
Et qui vient de trancher les plus belles années
D'un objet que j'adore au de- là du tombeau.
coup me luie?
Elevé sur un Trône , au milieu des fantômes ,
Le Gendre de Cerés vient s'offrir à mes yeux.
Terrible Souverain de ces sombres Royaumes ,
Tu connois le dessein qui m'amene en ces lieux ;
Soulage la douleur de mon ame éperduë ,
Ordonne qu'à mes voeux Camille soit rendûë :
Pluton , si -mes sanglots ne peuvent t'émouvoir¿
Și la Loi du destin s'oppose à ma tendresse
Attendri par mes pleurs , sensible à ma tristesse
Daigne permettre au moins que je puisse le voir.
Le severe Pluton n'est pas inéxorable ,
Touché de mes regrets , il ordonne à Minos
De conduire mes pas vers cet azile aimable ,
Où Camille joüit d'un éternel repos :
J'apperçois du Léthé les tranquilles rivages ;
Agréable séjour ; c'est ici que les Sages ,
Goûtent après leur mort le plus parfait bonheur g
I. Vol.
Pour
1216 MERCURE DE FRANCE -
Pour ces lieux fortunez , les Dieux nous ont faig
naître ......
Camille à mes regards tarde trop de paroître ;
Minos , que tu sers mal les transports de mon
coeur !
Hâtons-nous je la vois , elle a repris ces
charmes ,
Que la faulx de la mort avoit sçû moissonner..
Chere ombre , arrête toi sois sensible à mes
larmes ,
>
A mes chastes transports , 'daigne t'abandonner …..
Camille ! tu me fuis ! tu ne veux pas m'entendre ,
A ce nouveau malheur aurois- je dû m'attendre ,
Après avoir franchi tant d'obstacles affreux ?
Quel accueil ! Quels regards ! Quel farouche
silence !
...
9
Helas ! me faudra -t-il pleurer ton inconstance !
Les plus tendres Amans sont-ils les moins heu
reux ?
Les Dieux condamnent-ils une si belle flâme ?
As tu pûte resoudre à me manquer de foy ?
Que dis-je ! quel soupçon vient s'offrir â mon
ame !
Ah ! tel est du destin l'irrévocable Loy :
Oui , ce n'est qu'à regret que Camille m'évite ;
Mais, de tant de malheurs mon desespoir s'irrite
St
I. Vol. Je
JUIN. 173F. 1217
Je la suivrai par tout , je ne la quitte pas ....
Minos , près de Pluton vas reprendre ta place ,,
De rester en ces lieux qu'il m'accorde la grace .
Sans Camille la vie a pour moi peu d'appas .
Ay-je pû , justes Dieux , meriter votre haine ,.
Pourquoi me forcez -vous de quitter ce séjour !:
Je vous implore en vain ; et Minos qui me meine
Va me rendre bientôt à la clarté du jour .
Pour la seconde fois chere ombre on nous sépare;;
Cedons sans murmurer à cet ordre barbare ,
Et respectons les Dieux jusques dans leur rigueur;
Adieu , puisse du moins la douleur qui m'accable,
Abreger de mes jours le reste déplorable ,
Cette seule esperance adoucit mon malheur.
Par M. V. D. L. T. d'Aix..
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Résumé : DESCENTE AUX ENFERS, ODE.
Le texte 'Descente aux enfers' narre le périple d'un personnage déterminé à retrouver son amour perdu, Camille. Motivé par une profonde douleur, il s'engage dans une expédition vers le 'ténébreux empire' pour sauver Camille. À l'instar d'Orphée et d'Hercule, il utilise sa souffrance pour apitoyer Caron et Cerbère, ainsi que pour émouvoir le souverain des enfers. Il traverse le fleuve Styx et observe les tourments infligés aux coupables, surveillés par les Furies. Il rencontre ensuite Atropos, qui lui révèle le destin scellé de Camille. Désespéré, il supplie Pluton de lui rendre Camille ou, à défaut, de lui permettre de la voir. Ému par ses larmes, Pluton ordonne à Minos de conduire le personnage vers Camille. Après l'avoir retrouvée, Camille le fuit. Désespéré, il décide de rester aux enfers avec elle. Cependant, Minos le ramène à la surface. Avant de partir, il espère que la douleur mettra fin à ses jours.
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7
p. 2770-2773
TRIOMPHE DE PLUTUS. ODE.
Début :
C'est vainement que sur la terre, [...]
Mots clefs :
Plutus, Triomphe, Jupiter, Brillante folie, Adulateurs
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texteReconnaissance textuelle : TRIOMPHE DE PLUTUS. ODE.
TRIOMPHE DE PLUTUS
O DE.
C'Est vainement que sur la terre
Jupiter , pour être adoré ,.
Tu fais entendre le Tonnerre
Tu n'en es pas plus réveré .
En vain tes rédoutables Freres
Arment contre des témeraires ,
Et les flots , et les sombres bords
L'homme brave votre puissance ,
Et n'implore que l'assistance
Du Dieu qui préside aux trésors.
Que Mars , pour tout remplir d'allarmes] .
Marche environné de Soldats.
Rien n'est plus foible que ses armes ,
Si Plutus ne les soutient pas.
Minerve , autrefois honorée ,
Est maintenant presqu'ignorée.
DECEMBRE 1731. 2778
Er voir ses Temples renversés.
Rome naissante , tes grands Hommes
Ne seroient au siécle où nous sommes
Que de celebres- insensés .
Qu'on dise que , pour la Patrie ,
Leur amour toujours indompté ,
Leur faisait immoler leur vie ,
Leurs enfans et leur liberté.
Antiques Héros d'Italie ,
Comme une brillante folie ,
Nous regardons vos plus hauts faits :
L'interêt de la République
N'est plus qu'un être chimerique ,
Qui n'excite point nós souhaits,
A ce Récit , fameuses ombres ,
De qui Plutus fut abhorré ,
Repassez les Rivages sombres ,
Pour voir comme il est adoré .
'Accourés , mais pour des prestiges
Ne prenés pas les grands prodiges
Qu'il fait éclatér à nos yeux.
Voyés comment , par sa puissance ,
Des gens sans vertu , sans naissance ,'
Sont devenus des demi-Dieux.
1. Vol
D iiij
ans
1
2772 MERCURE DE FRANCE
Dans les honneurs , dans les délices.
D'Adulateurs environnés ,
Ils triomphent sous ses auspices ;
Ils n'ont que des jours fortunés.
L'industrie en secrets féconde ,
Des fleuves fait remonter Ponde
Sur les monts qu'ils ont enrichiss
Toujours Bacchus , Flore et Pomone
Chez eux du Printemps , de l'Automne
Offrent les dons les plus exquis.
En leur faveur , Dieu des richesses ;
Que ne fais-tu pas en ce temps ?
Sans mérite , par tes largesses ,
Ils s'élevent aux plus hauts rangs .
* Si Themis contre eux prend les armes ;
Dès qu'ils sentent quelques allarmes ,
Tu sçais les mettre en sûreté.
Que peut leur faire sa vangeance ?
Quand tu veux , on voit sa balance
Prête à pancher de ton côté.
Qu'aux Mortels , le Dieu de Cyther
Ne vante plus ses traits vainqueurs ;
Plutus habile en l'art de plaire ,
Mieux que lui triomphe des coeurs
a. Vol.
Pow
DECEMBRE 1731. 2773.
Pour les allier , la Noblesse ,
L'Esprit , la beauté , la sagesse
Ne déterminent plus le choix :
Il est seul l'Arbitre suprême .
Et jusqu'auprès du Diadême ,
L'Hymen est soumis à ses loiz.
Vainement la stoïque Ecole
Condamne ses adorateurs ;
Chez nous sa morale frivole
Ne trouve plus de Sénateurs.
Quelle erreur de penser qu'Astrée ,
De chez les humains retirée ,
Puisse encore les rendre heureux ?
Ce Dieu qui la fit disparoître ,
Est le seul par qui l'on voit naître
Des siécles dignes de leurs voeux.
Par M. de Monfort l'Amaury.
O DE.
C'Est vainement que sur la terre
Jupiter , pour être adoré ,.
Tu fais entendre le Tonnerre
Tu n'en es pas plus réveré .
En vain tes rédoutables Freres
Arment contre des témeraires ,
Et les flots , et les sombres bords
L'homme brave votre puissance ,
Et n'implore que l'assistance
Du Dieu qui préside aux trésors.
Que Mars , pour tout remplir d'allarmes] .
Marche environné de Soldats.
Rien n'est plus foible que ses armes ,
Si Plutus ne les soutient pas.
Minerve , autrefois honorée ,
Est maintenant presqu'ignorée.
DECEMBRE 1731. 2778
Er voir ses Temples renversés.
Rome naissante , tes grands Hommes
Ne seroient au siécle où nous sommes
Que de celebres- insensés .
Qu'on dise que , pour la Patrie ,
Leur amour toujours indompté ,
Leur faisait immoler leur vie ,
Leurs enfans et leur liberté.
Antiques Héros d'Italie ,
Comme une brillante folie ,
Nous regardons vos plus hauts faits :
L'interêt de la République
N'est plus qu'un être chimerique ,
Qui n'excite point nós souhaits,
A ce Récit , fameuses ombres ,
De qui Plutus fut abhorré ,
Repassez les Rivages sombres ,
Pour voir comme il est adoré .
'Accourés , mais pour des prestiges
Ne prenés pas les grands prodiges
Qu'il fait éclatér à nos yeux.
Voyés comment , par sa puissance ,
Des gens sans vertu , sans naissance ,'
Sont devenus des demi-Dieux.
1. Vol
D iiij
ans
1
2772 MERCURE DE FRANCE
Dans les honneurs , dans les délices.
D'Adulateurs environnés ,
Ils triomphent sous ses auspices ;
Ils n'ont que des jours fortunés.
L'industrie en secrets féconde ,
Des fleuves fait remonter Ponde
Sur les monts qu'ils ont enrichiss
Toujours Bacchus , Flore et Pomone
Chez eux du Printemps , de l'Automne
Offrent les dons les plus exquis.
En leur faveur , Dieu des richesses ;
Que ne fais-tu pas en ce temps ?
Sans mérite , par tes largesses ,
Ils s'élevent aux plus hauts rangs .
* Si Themis contre eux prend les armes ;
Dès qu'ils sentent quelques allarmes ,
Tu sçais les mettre en sûreté.
Que peut leur faire sa vangeance ?
Quand tu veux , on voit sa balance
Prête à pancher de ton côté.
Qu'aux Mortels , le Dieu de Cyther
Ne vante plus ses traits vainqueurs ;
Plutus habile en l'art de plaire ,
Mieux que lui triomphe des coeurs
a. Vol.
Pow
DECEMBRE 1731. 2773.
Pour les allier , la Noblesse ,
L'Esprit , la beauté , la sagesse
Ne déterminent plus le choix :
Il est seul l'Arbitre suprême .
Et jusqu'auprès du Diadême ,
L'Hymen est soumis à ses loiz.
Vainement la stoïque Ecole
Condamne ses adorateurs ;
Chez nous sa morale frivole
Ne trouve plus de Sénateurs.
Quelle erreur de penser qu'Astrée ,
De chez les humains retirée ,
Puisse encore les rendre heureux ?
Ce Dieu qui la fit disparoître ,
Est le seul par qui l'on voit naître
Des siécles dignes de leurs voeux.
Par M. de Monfort l'Amaury.
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Résumé : TRIOMPHE DE PLUTUS. ODE.
Le texte 'Triumphes de Plutus' souligne la domination du dieu Plutus, associé à la richesse, sur les autres divinités et les valeurs traditionnelles. Jupiter, Mars et Minerve apparaissent impuissants face à la puissance de Plutus, qui soutient les armes et assure la prospérité. Les anciens héros de Rome et d'Italie sont perçus comme des insensés dans le contexte actuel, où l'amour pour la patrie est devenu illusoire. Plutus permet à des individus sans vertu ni naissance d'accéder à des positions élevées et de jouir de jours fortunés. L'industrie et les dieux des récoltes (Bacchus, Flore, Pomone) offrent leurs dons à ceux que Plutus favorise. Même la justice (Themis) et l'amour (le dieu de Cyther) sont subordonnés à Plutus, qui détermine les alliances et les mariages, y compris ceux proches du pouvoir royal. La morale stoïque est rejetée, et Plutus est vu comme le seul capable de créer des époques dignes des aspirations humaines. Le texte est signé par M. de Monfort l'Amaury et date de décembre 1731.
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8
p. 1117-1120
LES URNES, Ou la cause de la diversité des Esprits. Au Reverend Pere d...... Jesuite.
Début :
Quel est ce feu Divin qui m'échauffe et m'éclaire, [...]
Mots clefs :
Liqueurs, Esprits, Mercure, Jupiter, Phébus, Talents, Dieu, Qualités, Sens
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texteReconnaissance textuelle : LES URNES, Ou la cause de la diversité des Esprits. Au Reverend Pere d...... Jesuite.
LES
URNE'S ,
Ou la cause de la diversité des Esprits.
Au Reverend Pere d ...... Jefuite.
Q
>
Uel est ce feu Divin qui m'échauffe et m'éclaire
,
Qui dirige mes pas sur ce vaste hemisphere ,
Qui mesure du Ciel l'incroyable grandeur
Et sonde des Enfers l'affreuse profondeur !
Plus vite que éclair qui partage la nuë ,
Sur mille objets divers l'Esprit porte sa vûë >
Rien ne peut l'arrêter et jusque sur les Dieux
Il ose promener ses regards curieux .
Seroit-ce une matiere ou vapeur étherée ?
Est-ce le feu du Ciel surpris par Promethée ›
D'atomes un amas fortuit , ou medité?
Ou quelque écoulement de la Divinité ?
1. Vob D
Ah !
1118 MERCURE DE FRANCE
8
Ah ! c'est une substance en tout spirituelle , a
Toujours indivisible et partant immortelle.
Mais d'où vient trouve- t'on dans ce vaste Univers
Tant d'espris differens ? tant de talens divers a
En est - il des Esprits ainsi que des visages ?
Chaque Esprit a ses traits, ses dons, et ses usages ;
Tous les Esprits enfin que l'on trouve ici bas ,
Faits de la même main , ne se ressemblent pas
L'un éleve son vol vers la plaine azurée , N
L'autre vole plus bas d'une aîle mesurée
Chez Pun regne un bon sens, simple et sans or
nement ;
L'autre dans ses discours répand un sel charg
mant ;
De la naïveté l'un a le caractere
1:2
Et l'autre sçait railler d'une façon legere ;
L'un est grave , profond , savant , misterieux
L'autre toujours badin , aimable , ingenieux :
Je sens que je m'égare ; oui , plus je m'évertuë ,
Moins de ces dons divers la source m'est connuë,
Je raisonnois ainsi , quand je vis Apollon
Laissant les doctes Soeurs et le sacré vallon.
Ce Dieu vint me trouver , pour dissiper mon
doute ; I
Viens vers moi , me dit- il , et suis moi dans ma
route ,
Ecarte de tes yeux le bandeau qui te nuit ,
Et montant dans les Cieux , sois par toi - même
instruit ›
Apollon part alors , il prend un vol rapide;
I. Vel. Mor
JUIN. 1734. TII
Mon corp's devient leger, le Dieu me sert de guide,
Je franchis avec lui les espaces des airs
Et laisse sous mes pieds et la Terre et les Mers ;
Nous arrivons tous deux à la Celeste Sphere ,
Sejour des Immortels que l'Univers revere ;
Là , mille objets charmans frapent mes yeux surpris
,
De les representer que ne m'est- il permis
Sept Dieux s'offrent à moi , chacun d'eux
tient une Urne ,
Mars , Jupiter , Venus , et Mercure et Saturne
Et le brillant Phoebus , et Diane sa Soeur ,
Chaque Urne transparente enferme une liqueur,.
Et toutes ces liqueurs different en essence ;
L'une à l'amour et l'autre à la vengeance , porte
L'une nous rend subtils , l'autre tardifs , pesans
Jupiter nous départ ses nobles sentimens
Les Rayons de Phoebus rendent l'ame brillante
Et Diane produit une humeur inconstante .
Sur un trône est assis l'imperieux Destin ,
Il regle notre sort , et la Parque soudain
Plonge dans ces liqueurs de plus d'une maniere
Chaque ame qui du jour entre dans la carriere ;
Des celestes liqueurs , dotés differemment ,
Nous apportons ici divers temperamens ,
Diverses qualités et diverse nature ;
L'un est Saturnien , l'autre tient de Mercure ,
L'un a de Jupiter le vol ambitieux ,
I.Vol. Dij
Et
120 MERCURE DE FRANCE
Et l'autre de Veuus les talens gracieux ;
Souvent un même Esprit deux qualités rassemble,
On y trouve Mercure et Jupiter ensemble ;
Ici , c'est le Dieu Mars adouci par Venus;
Là,le triste Saturne animé par Phoebus.
Plus des saintes liqueurs nos ames furent teintés
Plus elles ont des Dieux les qualités empreintes ;
Comme de l'alphabet les foibles élemens
Dans leurs nombres bornez et vuiles de tout sens
Par des combinaisons et par des assemblages
Forment differens mots , diferentes images ,
Et peuvent exprimer par mille divers sons
Des Etres d'ici bas la nature et les noms ;
Ainsi de ces liqueurs la diverse teinture
Forme de nos talens l'aimable bigarrure ;
De- là naît des Esprits l'ample diversité ,
Du Destin seul dépend cette varieté ;
Il en donne la trempe ou forte , ou bien legere,
Et choisit des liqueurs pour chaque caractere ;
Ses mélanges enfin nuancés et parfaits ,
Sont toujours variés par cent differens traits ;
Des Esprits differens la source est découverte ,
Un autre dira mieux et la route est ouverte.
D ....... Vous lirez ces vers rimés pour vous
Et des tristes Censeurs vous parerez les coups ;
Aux Urnes accordez un gracieux suffrage
Ami, vous leur devez mille fois davantage,
Pierre Defrasnoy.
URNE'S ,
Ou la cause de la diversité des Esprits.
Au Reverend Pere d ...... Jefuite.
Q
>
Uel est ce feu Divin qui m'échauffe et m'éclaire
,
Qui dirige mes pas sur ce vaste hemisphere ,
Qui mesure du Ciel l'incroyable grandeur
Et sonde des Enfers l'affreuse profondeur !
Plus vite que éclair qui partage la nuë ,
Sur mille objets divers l'Esprit porte sa vûë >
Rien ne peut l'arrêter et jusque sur les Dieux
Il ose promener ses regards curieux .
Seroit-ce une matiere ou vapeur étherée ?
Est-ce le feu du Ciel surpris par Promethée ›
D'atomes un amas fortuit , ou medité?
Ou quelque écoulement de la Divinité ?
1. Vob D
Ah !
1118 MERCURE DE FRANCE
8
Ah ! c'est une substance en tout spirituelle , a
Toujours indivisible et partant immortelle.
Mais d'où vient trouve- t'on dans ce vaste Univers
Tant d'espris differens ? tant de talens divers a
En est - il des Esprits ainsi que des visages ?
Chaque Esprit a ses traits, ses dons, et ses usages ;
Tous les Esprits enfin que l'on trouve ici bas ,
Faits de la même main , ne se ressemblent pas
L'un éleve son vol vers la plaine azurée , N
L'autre vole plus bas d'une aîle mesurée
Chez Pun regne un bon sens, simple et sans or
nement ;
L'autre dans ses discours répand un sel charg
mant ;
De la naïveté l'un a le caractere
1:2
Et l'autre sçait railler d'une façon legere ;
L'un est grave , profond , savant , misterieux
L'autre toujours badin , aimable , ingenieux :
Je sens que je m'égare ; oui , plus je m'évertuë ,
Moins de ces dons divers la source m'est connuë,
Je raisonnois ainsi , quand je vis Apollon
Laissant les doctes Soeurs et le sacré vallon.
Ce Dieu vint me trouver , pour dissiper mon
doute ; I
Viens vers moi , me dit- il , et suis moi dans ma
route ,
Ecarte de tes yeux le bandeau qui te nuit ,
Et montant dans les Cieux , sois par toi - même
instruit ›
Apollon part alors , il prend un vol rapide;
I. Vel. Mor
JUIN. 1734. TII
Mon corp's devient leger, le Dieu me sert de guide,
Je franchis avec lui les espaces des airs
Et laisse sous mes pieds et la Terre et les Mers ;
Nous arrivons tous deux à la Celeste Sphere ,
Sejour des Immortels que l'Univers revere ;
Là , mille objets charmans frapent mes yeux surpris
,
De les representer que ne m'est- il permis
Sept Dieux s'offrent à moi , chacun d'eux
tient une Urne ,
Mars , Jupiter , Venus , et Mercure et Saturne
Et le brillant Phoebus , et Diane sa Soeur ,
Chaque Urne transparente enferme une liqueur,.
Et toutes ces liqueurs different en essence ;
L'une à l'amour et l'autre à la vengeance , porte
L'une nous rend subtils , l'autre tardifs , pesans
Jupiter nous départ ses nobles sentimens
Les Rayons de Phoebus rendent l'ame brillante
Et Diane produit une humeur inconstante .
Sur un trône est assis l'imperieux Destin ,
Il regle notre sort , et la Parque soudain
Plonge dans ces liqueurs de plus d'une maniere
Chaque ame qui du jour entre dans la carriere ;
Des celestes liqueurs , dotés differemment ,
Nous apportons ici divers temperamens ,
Diverses qualités et diverse nature ;
L'un est Saturnien , l'autre tient de Mercure ,
L'un a de Jupiter le vol ambitieux ,
I.Vol. Dij
Et
120 MERCURE DE FRANCE
Et l'autre de Veuus les talens gracieux ;
Souvent un même Esprit deux qualités rassemble,
On y trouve Mercure et Jupiter ensemble ;
Ici , c'est le Dieu Mars adouci par Venus;
Là,le triste Saturne animé par Phoebus.
Plus des saintes liqueurs nos ames furent teintés
Plus elles ont des Dieux les qualités empreintes ;
Comme de l'alphabet les foibles élemens
Dans leurs nombres bornez et vuiles de tout sens
Par des combinaisons et par des assemblages
Forment differens mots , diferentes images ,
Et peuvent exprimer par mille divers sons
Des Etres d'ici bas la nature et les noms ;
Ainsi de ces liqueurs la diverse teinture
Forme de nos talens l'aimable bigarrure ;
De- là naît des Esprits l'ample diversité ,
Du Destin seul dépend cette varieté ;
Il en donne la trempe ou forte , ou bien legere,
Et choisit des liqueurs pour chaque caractere ;
Ses mélanges enfin nuancés et parfaits ,
Sont toujours variés par cent differens traits ;
Des Esprits differens la source est découverte ,
Un autre dira mieux et la route est ouverte.
D ....... Vous lirez ces vers rimés pour vous
Et des tristes Censeurs vous parerez les coups ;
Aux Urnes accordez un gracieux suffrage
Ami, vous leur devez mille fois davantage,
Pierre Defrasnoy.
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Résumé : LES URNES, Ou la cause de la diversité des Esprits. Au Reverend Pere d...... Jesuite.
Le texte 'Les Urnes' examine la diversité des esprits humains. L'auteur compare les esprits à des visages uniques, chacun possédant des traits et des talents distincts. Il observe que certains esprits sont élevés et savants, tandis que d'autres sont badins et ingénieux. Apollon, le dieu, apparaît pour guider l'auteur et dissiper ses doutes. Ensemble, ils se rendent dans la sphère céleste où sept dieux — Mars, Jupiter, Vénus, Mercure, Saturne, Apollon et Diane — présentent chacun une urne contenant une liqueur différente. Ces liqueurs influencent les qualités et les tempéraments des âmes humaines. Le Destin et les Parques déterminent quelle liqueur chaque âme recevra, créant ainsi la diversité des esprits. Les âmes sont teintées par ces liqueurs, acquérant des qualités divines variées. L'auteur compare ce processus à la formation de mots à partir de lettres, soulignant que la diversité des esprits dépend du Destin, qui choisit et mélange les liqueurs pour chaque caractère.
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9
p. 18-35
LES REPUTATIONS mises au creuset.
Début :
Le monde est plein de réputations injustement acquises en mal comme [...]
Mots clefs :
Réputation, Roi, Reine, Femme, Dieux, Tantale, Taureau, Jupiter, Minos
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texteReconnaissance textuelle : LES REPUTATIONS mises au creuset.
LES REPUTATIONS
miſes au creuset.
LE fi
E monde eſt ſi plein de réputations
injuftement acquifes en mal comme
en bien , qu'il me prend envie de les mettre
dans le creufet de la vérité , pour les
réduire à leur jufte valeur. Si j'allois faire
de toutes une exacte analyfe , qu'on verroit
d'étranges métamorphofes ! pour établir
les unes il faudroit détruire les autres.
Par cette opération , je rendrois les
coquins honnêtes gens , & les honnêtes
gens coquins ; je rendrois nombre d'honnêtes
femmes ...... je n'ofe achever ; l'univers
en feroit bouleverfé . Pour éviter ce
defordre , & laiffer le fiécle tel qu'il eft ,
je me borne dans mon fyftême à blanchir
les plus célébres réputations de l'antiquité
qu'un préjugé calomnieux a noircies , & à
démafquer par contre- coup plufieurs de celles
qu'un faux éclat a déguifées, & que l'obfcurité
des tems a rendues refpectables . Je
voudrois pouvoir réhabiliter toutes les modernes
qui en ont befoin , mais j'aurois trop
à faire , & la tâche eft trop difficile. Je laiffe
cet honneur aux écrivains qui voudront
JANVIER. 1755 . 19
l'entreprendre après moi ; je me contente
de leur frayer le chemin. Cet effai fuffira
pour faire voir combien on doit être lent
à croire , encore plus timide à décider fur
les réputations , & pour prouver que fouvent
elles font plutôt l'ouvrage du hazard
malin , ou de l'opinion aveugle , que celui
de la raifon éclairée ou de la vérité bien
approfondie : c'eſt où le pyrrhonifme eſt
d'obligation.
Le danger de fréquenter plus grand quefoi .
:
TANTAL E.
Tantale étoit Roi de Phrygie . Jamais
Prince n'a été plus fauffement noirci . Fils
de Jupiter , il étoit digne de fa naiſſance ;
il réuniffoit toutes les qualités du coeur &
de l'efprit aimable , bienfaiſant , & fi
agréable convive , que les Dieux l'admirent
à leur table ; il fut de toutes leurs parties
, & devint leur ami familier . Comme
il avoit le don de plaire & d'amufer , plufieurs
Déeffes lui voulurent du bien ; en
conféquence plufieurs Dieux lui voulurent
du mal. Son trop de mérite le brouilla
avec eux , & lui caufa de fi cruelles tracafferies
qu'il fut obligé de quitter l'Qlympe
, pour ne plus vivre que fur la terre.
20 MERCURE DE FRANCE.
*
Il y devint amoureux de Taigéte , fille
d'Atlas. L'hymen les unit , il l'en aima
davantage , & retrouva les Cieux avec
elle. Il jouir d'un bonheur d'autant plus
pur , qu'il ne fut plus occupé que du plaifir
de faire du bien aux hommes : il polit
leurs moeurs , & leur apprit doublement à
vivre , en leur enfeignant à mettre du goût
dans leurs amufemens & de la délicateffe
dans leurs feftins. A l'affaifonnement des
bons mots , il joignit celui des mets exquis
, & fut par un excès de bonté le premier
maître d'hôtel du genre humain . Les
Dieux en furent jaloux , & lui en firent
un crime ; ils l'accuferent d'avoir trahi
leurs fecrets , & d'avoir dérobé le nectar &
l'ambroifie , pour en faire part aux mortels.
C'étoit peu d'avoir châtié injuftement
Promethée , pour avoir donné la vie
à l'homme , en l'animant de leur efprit ,
ils voulurent encore punir avec moins de
raifon Tantale , de lui avoir appris l'art
d'en jouir. Je parle d'après Pindare. Ils le
précipiterent dans les enfers , pour une action
qui méritoit les Champs Elifées. Le
genre de fupplice eft d'ailleurs peu convenable.
Il eft condamné à manquer de tout
au milieu de l'abondance : la générofité fit
tout fon forfait , & fon châtiment eft la
Paufanias.
JANVIER. 21
1755 .
*
peine des avares. Les uns lui font fouffrir
cette tortute pour un chien perdu ; les
autres , pour juftifier la rigueur des Dieux ,
le chargent contre toute vraisemblance de
leur avoir fervi de gaieté de coeur les membres
de fon fils Pelops . Voici l'événement
qui a donné lieu à cette noire calomnie.
Les Dieux ennuyés de ne plus voir Tantale
, allerent un jour le vifiter. Le premier
objet qui frappa leur vûe fut le petit
Pelops , qui étoit encore enfant. Jupiter
dit à Tantale , foit pour mettre fon zéle
à l'épreuve , foit par mauvaiſe plaifanterie
, dont les Dieux font quelquefois trèscapables
; Prince , votre fils eft d'un embonpoint
charmant , vous nous obligerez
tous de nous le faire fervir à fouper. Tantale
prit la propofition pour une raillerie
& lui répondit , en courtifan adroit , qu'il
faifoit trop d'honneur à fon fils , & qu'il
n'avoit rien qui ne fût au fervice de leur
divinité. Pour mieux jouer l'obéiffance ,
il donna ordre qu'on faifit Pelops ; mais
les Déeffes s'y opoferent . Venus le prit
dans fes bras , & toutes à l'envi s'emprefferent
à le careffer , en difant que ce feroit
dommage de le rôtir , qu'il étoit le
plus bel enfant du monde , & qu'il pour-
* C'étoit un chien que Jupiter lui avoit confié
pour la garde de fon temple dans l'ifle de Crete,
22 MERCURE DE FRANCE.
roit un jour les fervir plus utilement . Cerès
le trouva fi potelé qu'elle lui fit un fuçon
à l'épaule , qui étoit blanche comme
l'yvoire.
Momus , le Dieu de la médiſance , empoifonna
cette avanture , peut-être pour
faire fa cour à Jupiter , car fouvent les plus
noirs fatyriques font les plus lâches adulareurs
; ils ne déchirent méchamment les
uns que pour flater plus baffement les autres.
Momus fuivant donc ce caractere ,
donna un tour affreux à la chofe ; il publia
que Tantale leur avoit offert fon fils à
manger pour éprouver leur puiffance ; mais
qu'ayant reconnu fon horrible perfidie , ils
s'étoient tous abftenus d'y toucher ; que
la feule Cérès , aveuglée par un appétit
defordonné , avoit dévoré l'épaule droite
de l'enfant , & que Jupiter lui en avoit
fubftitué une d'yvoire , en rajuftant tous
fes membres , & leur donnant une nouvelle
vie.
Cette fable prit généralement , tant il eft
vrai que le faux merveilleux , quelqu'abfurde
qu'il foit , trouve toujours plus de foi
parmi les hommes que la fimple vérité.
La fuperftition alla plus loin. Après la mort
de Pelops , elle divulgua que fon épaule
Pindare , Ode I.
JANVIER. 1755. 23
miraculeufe guériffoit plufieurs maux différens.
Un grand nombre de malades lui
rendirent un dévôt hommage , & peutêtre
que le hazard , ou le bonheur de quelques
guérifons fortuites fervit à établir.
cette croyance , qu'il parut juftifier.
Ce que j'ai appris d'un Mythologiſte
auffi profond que fenfé , c'eft que Tantale ,
depuis ce fatal repas , avoit encouru la
difgrace du maître du ciel , fon pere , par
une raiſon fecrete que j'ai trouvée trèsvraisemblable.
Jupiter toujours prompt à s'enflammer
pour les nouveaux objets qui s'offroient à
fes yeux , ne put voir Taigete , la femme
de Tantale , fans être touché de fes charmes
; c'étoit une taille célefte , une beauté
digne des Dieux. L'enjouement & la mo
deftie formoient en elle un mêlange enchanteur
qui la rendoit adorable. Elle faifoit
les honneurs du fouper que fon époux
donnoit à la troupe immortelle. En prenant
le nectar de fa main , le Roi de l'Olympe
s'enyvra d'un amour dont il eut d'autant
plus de peine à guérir qu'il ne pût parvenir
à le rendre heureux . L'aimable Reine
de Phrygie reçut le lendemain de fa part
un billet , qui exprimoit la paffion la plus
vive ; mais à peine eut-elle jetté les yeux
fur les premieres lignes , qu'elle le rendit
24 MERCURE DE FRANCE .
fon
à Mercure qui en étoit le porteur . Il eut
beau la preffer d'y répondre , elle lui dit
en riant qu'elle ne fçavoit pas écrire , &
qu'elle prenoit toujours fon mari pour
fecrétaire. Jupiter inftruit du mauvais fuccès
de fa lettre , eut recours aux métamorphofes
qui lui avoient fouvent réuffi , &
pour lefquelles il avoit un goût particulier.
Taigete avoit trois bêtes qu'elle aimoit
fingulierement ; un perroquet , un épagneul
, & un fapajou. Le fouverain des
Cieux prit d'abord la figure du premier , &
courut béqueter la Reine . Tantale qui revenoit
de la chaffe , entra dans ce moment ;
il écarta le perroquer pour embraffer fa
femme , qui lui rendit careffe pour careffe.
L'oifeau jaloux mordit fi fort l'oreille
du mari , qu'il lui en refta un morceau
dans fon bec. Tantale fit un cri , & Taigete
effrayée de voir couler le fang du Roi,
faifit le perroquet avec indignation : elle
alloit le livrer aux griffes d'un gros matou ,
qui brûloit de l'étrangler , quand l'oifeau
s'échappa , & prit l'effor par la fenêtre.
Trois jours après , Jupiter informé que
Tantale avoit quitté fa femme pour une
affaire importante qui demandoit fa préfence
ailleurs , revint auprès d'elle fous la
forme de l'épagneul . Il comptoit que fon
époux
JANVIER. 1755. 25
Epoux feroit obligé de découcher au moins
une nuit , car dans ce tems là les maris ,
même de Cour , ne faifoient jamais lit à
part. Taigete defefperoit elle -même du
retour du Roi : elle étoit prête à fe coucher
, & l'Epagneul impatient avoit déja
pris au lit la place de Tantale , quand ce
Prince arriva fort à propos. Le chien furieux
, fort de la couche royale , & abboye
contre lui de toutes fes forces . Le Roi ennuyé
de fes cris , lui donna un fi grand
coup de pied , que l'Epagneul oubliant
fon rolle de chien , jura en Dieu , qui parle
en maître. Tantale furpris de cette nouveauté
, ordonna qu'on le faisît pour éclaircir
ce prodige ; mais le chien prit la fuite
& difparut. Le Monarque du ciel jouant
de fon refte , s'établit pour la troifieme
fois chez la Reine en qualité de Sapajou .
Il l'amufa d'abord par cent jolis tours ;
mais s'émancipant par degrés , il fauta fur
l'épaule de fa maîtreffe , & l'ofa careffer
jufqu'à fortir des bornes de la décence . La
Reine fcandalifée , appella le Roi , & le
pria de punir fon finge comme il le méritoit.
Tantale s'armant d'un cordon de foie
fe mit en devoir de le châtier ; mais le
malin Sapajou le prévint , & le prit au
colet , de façon qu'il l'eût étouffé fi fa
.femme ne fût venue au fecours , & n'eût
B
26 MERCURE DE FRANCE .
ferré fortement le col de l'animal avec
le ruban qui lui fervoit d'attache , & qui
formoit un noeud coulant. Le Dieu finge
fe fentant étrangler à fon tour , lâcha prife
; mais tout fon amour pour la Reine
s'éteignit alors , il fe transforma en haine
contre le mari . Le Sapajou s'éclipfa , &
Jupiter parut dans tout l'appareil de fa colere
. Va , dit - il au malheureux Tantale ,
va fubir aux enfers le fupplice que je viens
d'éprouver à ta Cour. Sois toujours prêt
à poffeder , fans pouvoir jamais jouir ;
meurs éternellement de foif au fein des
caux , & de faim au milieu des fruits . A
ces mots , Jupiter remonte aux cieux ;
Tantale tombe dans le Tartare , & Taigete
expire de douleur. C'eft ainfi que ce Monarque
, auffi vertueux qu'infortuné , fut
châtié de la fidélité de fa femme & de la
liaifon intime qu'il eut avec les Dieux.
Cet exemple nous prouve combien il eft
dangereux de fréquenter plus grand que
foi. Pour agir prudemment , nous ne devons
jamais voir ni au - deffus ni au- deffous
de nous. Nos inférieurs nous puniffent
de notre familiarité , & nos fupérieurs
de nos fervices : notre réputation leur eft
foumife comme notre vie ; elle reçoit la
couleur qu'ils veulent lui donner dans le
monde , & dépend moins de notre vertu
JANVIER. 1755. 27
que de leur fantaifie , ou de leur paffion .
De là je conclus que nos égaux font la
feule compagnie qui convienne à notre fûtreté
; c'eſt parmi eux qu'il faut choisir nos
amis , ou du moins nos connoiffances , par
la rareté dont fe trouvent les premiers.
Les mots font plus de tort
chofes.
PASIPHA É.
que les
PASIPHAÉ , fille du Soleil , épouſa
Minos , Roi de Crete . Ce Prince fut un
grand homme de guerre , un bon Légiflateur
, mais un mauvais mari : il ne fe
montra pas tel d'abord. Comme fa femme
joignoit l'efprit à la beauté , & qu'il
en étoit amoureux , il vêcut affez bien avec
elle les premieres années de fon mariage ;
mais ce bonheur fut troublé par la mort tragique
d'Androgée * , fon fils aîné , qu'il
aimoit tendrement ; il l'avoit eu d'une premiere
femme. Ce jeune Prince en voyageant
dans l'Attique , y fut cruellement
affaffiné. La perte d'un fils adoré fit une
fi forte révolution dans fon ame , qu'elle
Plutarque , vie de Théfée.
Bij
28 MERCURE DE FRANCE.
aigrit fon humeur , & changea fon caraçtere
: la nature en avoit fait un Roi jufte
la douleur en fit un tyran inflexible . Les
charmes de la Reine , loin d'adoucir fon
coeur , le rendirent plus farouche ; fon
amour dégénéra en jaloufie , & fa juſtice
en cruauté. Pour venger le meurtre d'Androgée
, il jura de porter la guerre dans
Athenes , & de punir une nation entiere
du crime de deux ou trois particuliers :
mais avant de remplir fon ferment , il inftitua
en l'honneur de fon fils , des jeux
funébres , qu'il fit enfuite célébrer tous les
ans. Les premiers prix furent remportés
par un Officier des plus diftingués de fa
Cour & de fon armée ; on l'appelloit Taurus
, ou Taureau , pour francifer fon nom.
C'étoit l'homme le plus fort de la Crere :
il étoit également adroit. Comme il s'étoit
fignalé dans les combats auffi bien que
dans les fêtes , le Roi en faifoit un cas
particulier. La Reine qui fut préfente à
ces jeux , ne conçut pas moins d'eftime
pour lui ; elle l'honora même d'un éloge
flateur , quand il s'approcha d'elle pour
recevoir de fa main le prix de la lutte &
de la courfe. La force , l'adreffe & la valeur
font trois qualités recommendables
auprès du beau fexe. Il eft vrai qu'elles
étoient un peu ternies en lui par une huJAN
VIE R. 1755 . 29
meur fiere & dure , pour ne pas dire
brutale ; mais c'eft l'ordinaire défaut des
gens robuftes : leur fang qui coule avec
impétuofité , ne leur permet guere d'être
polis. Un efprit doux & liant eft le partage
des complexions délicates , qui n'ont
pas la force de manquer d'égards , & qui
donnent le beau nom de fentiment à leur
foibleffe. Taurus étoit donc brufque , mais
effentiel. La Reine conféquemment n'avoit
pas tort d'être prévenue en fa faveur ;
elle y étoit autorifée par la confiance que
Minos avoit en lui . Ce Prince en donna
une preuve bien décifive en partant pour
aller lui- même faire en perfonne la guerre
aux Athéniens ; il l'établit Gouverneur de
Gnoffe , Capitale de fon Royaume , & remit
à fa garde ce qu'il avoit de plus cher ,
fon état & fa femme. Il lui recommenda
fur- tout de veiller fur la conduite de la
Reine , de doubler le nombre de fes Ar-.
gus , fous le prétexte d'augmenter fa Cour ,
& de ne lui laiffer qu'un efclavage honorable
.
Pafiphaé qui fe vit décemment prifonniere
, fe confola d'avoir pour furveillant
celui de fes Sujets qu'elle eftimoit le plus.
Elle employa tout fon art à le captiver luimême
: elle y réuffit. La rudeffe du plus
féroce s'adoucit à l'afpect de deux beaux .
:
B iij
30 MERCURE DE FRANCE.
yeux : ceux de la Reine étoient de ce nombre.
Le Taureau s'apprivoifa , & lui tine
compagnie. Un feul homme de la trempe
du Cretois fuffit pour amufer le loifir d'une
femme modefte , condamnée à la folitude.
Une conformité de goût fervit encore
à les unir d'une chaîne plus intime :
ils avoient tous deux une eftime particuliere
pour Dédale , & un amour de préfé
rence pour l'art qu'il profeffoit. Cet ingénieux
Méchanicien fat le Vaucanfon de
fon fiécle : il s'étoit déja rendu fameux à la
Cour de Crete par la conftruction du labyrinthe.
Ce furprenant édifice venoit d'être
fini par l'ordre de Minos. La Reine &
Taurus furent curieux d'en parcourir les
détours ; mais ils s'y perdirent de compagnie
, & fans le fecours de Dédale , ils
n'auroient jamais pû trouver le moyen d'en
fortir. Depuis ce moment , ils prirent tant
de goût pour les ouvrages de ce célébre
Artifte , qu'ils alloient tous les jours le voir
travailler à fon attelier. Supérieur dans fon
art , Dédale ne copioit que la Nature , &
'imitoit que les Dieux : il créoit à leur
exemple . Tantôt il animoit le marbre , tantôt
il faifoit parler le bronze , ou foupirer
le bois.
: Parmi différens chef- d'oeuvres , il conf
truifit un Taureau qui frappoit du pied la
JANVIER . 1755 . 31
terre , & refpiroit le feu : il lui donna pour
compagne une Geniffe fi parfaitement imitée
, que l'oeil s'y trompoit à la voir , elle
marchoit , elle broutoit , elle mugifloit
avec tant de vérité , qu'on la prenoit pour
une geniffe réelle. Le taureau s'enflamoit
à fa vûe , & beugloit à l'uniffon avec elle .
Pafiphaé étonnée de ce prodige , voulat
connoître le méchanifme qui l'opéroit.
Taurus eut la même curiofité . Dédale la
fatisfit ; il expofa à leurs regards l'intérieur
des deux machines , & pour leur en faire
mieux comprendre tout le jeu , il fit entrer
la Reine dans le corps de la geniffe ,
& fon Ecuyer dans le ventre du taureau .
Tous deux eurent à peine touché à un certain
fil , que la geniffe beugla , & que le
taureau lui répondit . Cette comédie les
amufa fi fort , qu'ils alloient chez Dédale
la jouer régulierement quatre fois par femaine.
Cette piéce finguliere dura fix mois,
qui fut tout le tems de l'abfence de Minos.
Ce Monarque revint triomphant des Athéniens.
Après les avoir vaincus , il les obligea
de lui envoyer en tribut fept jeunes
garçons & fept jeunes filles des plus no-
Bles familles d'Athenes , pour être enfermés
dans le labyrinthe.
La Reine accoucha trois mois après ; plu-
B iiij
32 MERCURE DE FRANCE.
*
fieurs difent de deux jumeaux , dont l'un
reffembloit au Roi de Crete , & l'autre au
Gouverneur de Gnoffe ; mais un Auteur
digne de foi , affure qu'elle ne mit au jour
qu'un feul Prince , qui avoit le fourcil noir
de Minos , & les cheveux roux de Taurus .
J'ai fuivi cette opinion comme la plus vraifemblable.
Les perfifleurs de la Cour exercerent
leurs mauvaiſes plaifanteries fur
cette double reffemblance , & donnerent
au fils de la Reine le fobriquet de Minotaure
, qui lui eft toujours refté. Le Roi
le prit en averfion , & conçut contre fa
femme un foupçon qui la perdit fans retour
; fa fureur jaloufe en redoubla. Les
ennemis que Taurus s'étoit attiré par fa
brufquerie infolente , chargerent fon hif
toire des plus noires couleurs : ils la répandirent
dans le public , elle parvint jufqu'à
Minos. Il apprit , en frémiffant , les
vifites fréquentes de fon favori & de fa
femme chez Dédale ; la promenade du labyrinthe
, où ils s'étoient égarés , & l'aventure
merveilleufe du taureau & de la
geniffe. Minos outragé , ou qui crut l'ê
tre , fignala bientôt fa vengeance. Dédale
eut pour prifon le labyrinthe , dont il étoit
l'inventeur. Le Prince Minotaure fut en-
* Servius dans fon Commentaire fur Virgile,
JANVIER.. 1755 . 33
fermé dans le même cachot ; il y fut nourri
comme une bête féroce : Taurus partagea
fon fupplice . La Reine fut enfevelie dans
un autre fouterrein . Par un raffinement de
cruauté , elle fut condamnée à ne plus voic
le jour , fans perdre la vie . Dédale eut recours
à fon art , & trouva feul le moyen
de s'échapper. Le Prince crut en force : il
devint bientôt monftrueux par fa taille gigantefque
, & fa férocité répondit à fon
éducation . Il combattoit les malheureux
Athéniens qu'on envoyoit en Crete ; on
les livroit à fa rage ; ils périffoient fous fes
coups , ou mouroient de la main de Taurus
, qui fecondoit fa fureur . Les jeunes
Grecques languiffoient dans l'efclavage.
Heureufement pour elles , Théfée , que le
fort mit du nombre des captifs , vint rompre
leurs fers. Il attaqua le redoutable Minotaure
, tua Taurus avec lui , & délivra
par cette victoire fa patrie d'un tribut auſſi
deshonorant pour l'humanité que pour
elle ; mais il ternit cette belle action par
le rapt d'Ariane , qui lui avoit enfeigné le
le_rapt
fecret de fortir du labyrinthe , en l'armant
d'un fil qui lui fervit de guide. En reconnoiffance
d'un fi grand bienfait , il l'arracha
des bras paternels , pour l'abandonner
dans une ifle déferte . Voilà de nos
brillans héros qui font le bien par nécef-
Bv
34 MERCURE DE FRANCE.
fité , & le gâtent bientôt après par le mal
qu'ils font volontairement . Minos , ce Roi
cité pour fa fagelle , s'en écarta dans cette
occafion , & flétrit fa gloire par la vengeance
éclatante qu'il tira d'une aventure
qu'il devoit plûtôt étouffer dans un profond
filence. La renommée qui groffit , &
qui déguife tout , broda fur ce fond la
plus horrible fable . Elle publia que Pafiphaé
éprife d'amour pour un taureau ,
avoit eu recours à Dédale pour fatisfaire
fon effroyable paffion , & que cet Artiſte
complaifant avoit fabriqué le corps d'une
geniffe , où il avoit introduit la Reine ,
pour lui faciliter un affreux commerce.
Les plus grands Poëtes ont confacré cette
horreur. Minos en a été puni le premier ,
puifqu'il en a partagé la honte. Sa malheureufe
époufe a été la victime d'une
équivoque. Tant il eft vrai , que les femmes
, quand elles font choix d'un amant
ne fçauroient avoir trop d'égard au nom
qu'il porte ; cette attention eft pour elles
de conféquence. Il ne faut qu'un nom ri
dicule pour donner lieu à un conte extravagant
, ou à un vaudeville malin qui
les perd de réputation : l'exemple de Pafiphaé
doit les effrayer. Si le Cretois qu'elle
eftimoit , fe fût nommé autrement que
Taureau , fon aventure n'eût été qu'une
JAN VIE R. 1755. 35
galanterie d'ufage , ou qu'une foibleffe excufable
; on n'en eût point parlé. Ce qui
fait voir que les mots font plus de tort que
les chofes. Pour moi je trouve Minos le
plus coupable , & j'ai cru devoir cette
apologie à l'honneur de Pafiphaé. Elle n'étoit
pas d'une vertu tout-à fait fans reproche
, mais elle étoit du moins fage comme
la plupart des femmes le font , ou peuvent
l'être jelle étoit d'ailleurs eftimable
par plufieurs
belles qualités ,fur-tout elle aimoit les
arts & protegeoit les talens . Suppofé qu'elle
ait eu du goût pour un autre que fon mari ,
pourquoi tant fe récrier ? la chofe n'eft pas
fans exemple , & fa paffion , après tout ,
n'eft pas fortie de l'ordre commun. La fable
a outré fur fon fujet , elle en a fait un
monftre affreux : je ramene fon hiftoire à
la vraisemblance ; j'en fais une fenime ordinaire
.
On donnera la fuite dans le mois prochain,
fi cet effai eft du goût du public. On tourne
aujourd'hui la vérité en fable ; l'Auteur
mieux intentionné tâche de tourner la fable
en vérité.
miſes au creuset.
LE fi
E monde eſt ſi plein de réputations
injuftement acquifes en mal comme
en bien , qu'il me prend envie de les mettre
dans le creufet de la vérité , pour les
réduire à leur jufte valeur. Si j'allois faire
de toutes une exacte analyfe , qu'on verroit
d'étranges métamorphofes ! pour établir
les unes il faudroit détruire les autres.
Par cette opération , je rendrois les
coquins honnêtes gens , & les honnêtes
gens coquins ; je rendrois nombre d'honnêtes
femmes ...... je n'ofe achever ; l'univers
en feroit bouleverfé . Pour éviter ce
defordre , & laiffer le fiécle tel qu'il eft ,
je me borne dans mon fyftême à blanchir
les plus célébres réputations de l'antiquité
qu'un préjugé calomnieux a noircies , & à
démafquer par contre- coup plufieurs de celles
qu'un faux éclat a déguifées, & que l'obfcurité
des tems a rendues refpectables . Je
voudrois pouvoir réhabiliter toutes les modernes
qui en ont befoin , mais j'aurois trop
à faire , & la tâche eft trop difficile. Je laiffe
cet honneur aux écrivains qui voudront
JANVIER. 1755 . 19
l'entreprendre après moi ; je me contente
de leur frayer le chemin. Cet effai fuffira
pour faire voir combien on doit être lent
à croire , encore plus timide à décider fur
les réputations , & pour prouver que fouvent
elles font plutôt l'ouvrage du hazard
malin , ou de l'opinion aveugle , que celui
de la raifon éclairée ou de la vérité bien
approfondie : c'eſt où le pyrrhonifme eſt
d'obligation.
Le danger de fréquenter plus grand quefoi .
:
TANTAL E.
Tantale étoit Roi de Phrygie . Jamais
Prince n'a été plus fauffement noirci . Fils
de Jupiter , il étoit digne de fa naiſſance ;
il réuniffoit toutes les qualités du coeur &
de l'efprit aimable , bienfaiſant , & fi
agréable convive , que les Dieux l'admirent
à leur table ; il fut de toutes leurs parties
, & devint leur ami familier . Comme
il avoit le don de plaire & d'amufer , plufieurs
Déeffes lui voulurent du bien ; en
conféquence plufieurs Dieux lui voulurent
du mal. Son trop de mérite le brouilla
avec eux , & lui caufa de fi cruelles tracafferies
qu'il fut obligé de quitter l'Qlympe
, pour ne plus vivre que fur la terre.
20 MERCURE DE FRANCE.
*
Il y devint amoureux de Taigéte , fille
d'Atlas. L'hymen les unit , il l'en aima
davantage , & retrouva les Cieux avec
elle. Il jouir d'un bonheur d'autant plus
pur , qu'il ne fut plus occupé que du plaifir
de faire du bien aux hommes : il polit
leurs moeurs , & leur apprit doublement à
vivre , en leur enfeignant à mettre du goût
dans leurs amufemens & de la délicateffe
dans leurs feftins. A l'affaifonnement des
bons mots , il joignit celui des mets exquis
, & fut par un excès de bonté le premier
maître d'hôtel du genre humain . Les
Dieux en furent jaloux , & lui en firent
un crime ; ils l'accuferent d'avoir trahi
leurs fecrets , & d'avoir dérobé le nectar &
l'ambroifie , pour en faire part aux mortels.
C'étoit peu d'avoir châtié injuftement
Promethée , pour avoir donné la vie
à l'homme , en l'animant de leur efprit ,
ils voulurent encore punir avec moins de
raifon Tantale , de lui avoir appris l'art
d'en jouir. Je parle d'après Pindare. Ils le
précipiterent dans les enfers , pour une action
qui méritoit les Champs Elifées. Le
genre de fupplice eft d'ailleurs peu convenable.
Il eft condamné à manquer de tout
au milieu de l'abondance : la générofité fit
tout fon forfait , & fon châtiment eft la
Paufanias.
JANVIER. 21
1755 .
*
peine des avares. Les uns lui font fouffrir
cette tortute pour un chien perdu ; les
autres , pour juftifier la rigueur des Dieux ,
le chargent contre toute vraisemblance de
leur avoir fervi de gaieté de coeur les membres
de fon fils Pelops . Voici l'événement
qui a donné lieu à cette noire calomnie.
Les Dieux ennuyés de ne plus voir Tantale
, allerent un jour le vifiter. Le premier
objet qui frappa leur vûe fut le petit
Pelops , qui étoit encore enfant. Jupiter
dit à Tantale , foit pour mettre fon zéle
à l'épreuve , foit par mauvaiſe plaifanterie
, dont les Dieux font quelquefois trèscapables
; Prince , votre fils eft d'un embonpoint
charmant , vous nous obligerez
tous de nous le faire fervir à fouper. Tantale
prit la propofition pour une raillerie
& lui répondit , en courtifan adroit , qu'il
faifoit trop d'honneur à fon fils , & qu'il
n'avoit rien qui ne fût au fervice de leur
divinité. Pour mieux jouer l'obéiffance ,
il donna ordre qu'on faifit Pelops ; mais
les Déeffes s'y opoferent . Venus le prit
dans fes bras , & toutes à l'envi s'emprefferent
à le careffer , en difant que ce feroit
dommage de le rôtir , qu'il étoit le
plus bel enfant du monde , & qu'il pour-
* C'étoit un chien que Jupiter lui avoit confié
pour la garde de fon temple dans l'ifle de Crete,
22 MERCURE DE FRANCE.
roit un jour les fervir plus utilement . Cerès
le trouva fi potelé qu'elle lui fit un fuçon
à l'épaule , qui étoit blanche comme
l'yvoire.
Momus , le Dieu de la médiſance , empoifonna
cette avanture , peut-être pour
faire fa cour à Jupiter , car fouvent les plus
noirs fatyriques font les plus lâches adulareurs
; ils ne déchirent méchamment les
uns que pour flater plus baffement les autres.
Momus fuivant donc ce caractere ,
donna un tour affreux à la chofe ; il publia
que Tantale leur avoit offert fon fils à
manger pour éprouver leur puiffance ; mais
qu'ayant reconnu fon horrible perfidie , ils
s'étoient tous abftenus d'y toucher ; que
la feule Cérès , aveuglée par un appétit
defordonné , avoit dévoré l'épaule droite
de l'enfant , & que Jupiter lui en avoit
fubftitué une d'yvoire , en rajuftant tous
fes membres , & leur donnant une nouvelle
vie.
Cette fable prit généralement , tant il eft
vrai que le faux merveilleux , quelqu'abfurde
qu'il foit , trouve toujours plus de foi
parmi les hommes que la fimple vérité.
La fuperftition alla plus loin. Après la mort
de Pelops , elle divulgua que fon épaule
Pindare , Ode I.
JANVIER. 1755. 23
miraculeufe guériffoit plufieurs maux différens.
Un grand nombre de malades lui
rendirent un dévôt hommage , & peutêtre
que le hazard , ou le bonheur de quelques
guérifons fortuites fervit à établir.
cette croyance , qu'il parut juftifier.
Ce que j'ai appris d'un Mythologiſte
auffi profond que fenfé , c'eft que Tantale ,
depuis ce fatal repas , avoit encouru la
difgrace du maître du ciel , fon pere , par
une raiſon fecrete que j'ai trouvée trèsvraisemblable.
Jupiter toujours prompt à s'enflammer
pour les nouveaux objets qui s'offroient à
fes yeux , ne put voir Taigete , la femme
de Tantale , fans être touché de fes charmes
; c'étoit une taille célefte , une beauté
digne des Dieux. L'enjouement & la mo
deftie formoient en elle un mêlange enchanteur
qui la rendoit adorable. Elle faifoit
les honneurs du fouper que fon époux
donnoit à la troupe immortelle. En prenant
le nectar de fa main , le Roi de l'Olympe
s'enyvra d'un amour dont il eut d'autant
plus de peine à guérir qu'il ne pût parvenir
à le rendre heureux . L'aimable Reine
de Phrygie reçut le lendemain de fa part
un billet , qui exprimoit la paffion la plus
vive ; mais à peine eut-elle jetté les yeux
fur les premieres lignes , qu'elle le rendit
24 MERCURE DE FRANCE .
fon
à Mercure qui en étoit le porteur . Il eut
beau la preffer d'y répondre , elle lui dit
en riant qu'elle ne fçavoit pas écrire , &
qu'elle prenoit toujours fon mari pour
fecrétaire. Jupiter inftruit du mauvais fuccès
de fa lettre , eut recours aux métamorphofes
qui lui avoient fouvent réuffi , &
pour lefquelles il avoit un goût particulier.
Taigete avoit trois bêtes qu'elle aimoit
fingulierement ; un perroquet , un épagneul
, & un fapajou. Le fouverain des
Cieux prit d'abord la figure du premier , &
courut béqueter la Reine . Tantale qui revenoit
de la chaffe , entra dans ce moment ;
il écarta le perroquer pour embraffer fa
femme , qui lui rendit careffe pour careffe.
L'oifeau jaloux mordit fi fort l'oreille
du mari , qu'il lui en refta un morceau
dans fon bec. Tantale fit un cri , & Taigete
effrayée de voir couler le fang du Roi,
faifit le perroquet avec indignation : elle
alloit le livrer aux griffes d'un gros matou ,
qui brûloit de l'étrangler , quand l'oifeau
s'échappa , & prit l'effor par la fenêtre.
Trois jours après , Jupiter informé que
Tantale avoit quitté fa femme pour une
affaire importante qui demandoit fa préfence
ailleurs , revint auprès d'elle fous la
forme de l'épagneul . Il comptoit que fon
époux
JANVIER. 1755. 25
Epoux feroit obligé de découcher au moins
une nuit , car dans ce tems là les maris ,
même de Cour , ne faifoient jamais lit à
part. Taigete defefperoit elle -même du
retour du Roi : elle étoit prête à fe coucher
, & l'Epagneul impatient avoit déja
pris au lit la place de Tantale , quand ce
Prince arriva fort à propos. Le chien furieux
, fort de la couche royale , & abboye
contre lui de toutes fes forces . Le Roi ennuyé
de fes cris , lui donna un fi grand
coup de pied , que l'Epagneul oubliant
fon rolle de chien , jura en Dieu , qui parle
en maître. Tantale furpris de cette nouveauté
, ordonna qu'on le faisît pour éclaircir
ce prodige ; mais le chien prit la fuite
& difparut. Le Monarque du ciel jouant
de fon refte , s'établit pour la troifieme
fois chez la Reine en qualité de Sapajou .
Il l'amufa d'abord par cent jolis tours ;
mais s'émancipant par degrés , il fauta fur
l'épaule de fa maîtreffe , & l'ofa careffer
jufqu'à fortir des bornes de la décence . La
Reine fcandalifée , appella le Roi , & le
pria de punir fon finge comme il le méritoit.
Tantale s'armant d'un cordon de foie
fe mit en devoir de le châtier ; mais le
malin Sapajou le prévint , & le prit au
colet , de façon qu'il l'eût étouffé fi fa
.femme ne fût venue au fecours , & n'eût
B
26 MERCURE DE FRANCE .
ferré fortement le col de l'animal avec
le ruban qui lui fervoit d'attache , & qui
formoit un noeud coulant. Le Dieu finge
fe fentant étrangler à fon tour , lâcha prife
; mais tout fon amour pour la Reine
s'éteignit alors , il fe transforma en haine
contre le mari . Le Sapajou s'éclipfa , &
Jupiter parut dans tout l'appareil de fa colere
. Va , dit - il au malheureux Tantale ,
va fubir aux enfers le fupplice que je viens
d'éprouver à ta Cour. Sois toujours prêt
à poffeder , fans pouvoir jamais jouir ;
meurs éternellement de foif au fein des
caux , & de faim au milieu des fruits . A
ces mots , Jupiter remonte aux cieux ;
Tantale tombe dans le Tartare , & Taigete
expire de douleur. C'eft ainfi que ce Monarque
, auffi vertueux qu'infortuné , fut
châtié de la fidélité de fa femme & de la
liaifon intime qu'il eut avec les Dieux.
Cet exemple nous prouve combien il eft
dangereux de fréquenter plus grand que
foi. Pour agir prudemment , nous ne devons
jamais voir ni au - deffus ni au- deffous
de nous. Nos inférieurs nous puniffent
de notre familiarité , & nos fupérieurs
de nos fervices : notre réputation leur eft
foumife comme notre vie ; elle reçoit la
couleur qu'ils veulent lui donner dans le
monde , & dépend moins de notre vertu
JANVIER. 1755. 27
que de leur fantaifie , ou de leur paffion .
De là je conclus que nos égaux font la
feule compagnie qui convienne à notre fûtreté
; c'eſt parmi eux qu'il faut choisir nos
amis , ou du moins nos connoiffances , par
la rareté dont fe trouvent les premiers.
Les mots font plus de tort
chofes.
PASIPHA É.
que les
PASIPHAÉ , fille du Soleil , épouſa
Minos , Roi de Crete . Ce Prince fut un
grand homme de guerre , un bon Légiflateur
, mais un mauvais mari : il ne fe
montra pas tel d'abord. Comme fa femme
joignoit l'efprit à la beauté , & qu'il
en étoit amoureux , il vêcut affez bien avec
elle les premieres années de fon mariage ;
mais ce bonheur fut troublé par la mort tragique
d'Androgée * , fon fils aîné , qu'il
aimoit tendrement ; il l'avoit eu d'une premiere
femme. Ce jeune Prince en voyageant
dans l'Attique , y fut cruellement
affaffiné. La perte d'un fils adoré fit une
fi forte révolution dans fon ame , qu'elle
Plutarque , vie de Théfée.
Bij
28 MERCURE DE FRANCE.
aigrit fon humeur , & changea fon caraçtere
: la nature en avoit fait un Roi jufte
la douleur en fit un tyran inflexible . Les
charmes de la Reine , loin d'adoucir fon
coeur , le rendirent plus farouche ; fon
amour dégénéra en jaloufie , & fa juſtice
en cruauté. Pour venger le meurtre d'Androgée
, il jura de porter la guerre dans
Athenes , & de punir une nation entiere
du crime de deux ou trois particuliers :
mais avant de remplir fon ferment , il inftitua
en l'honneur de fon fils , des jeux
funébres , qu'il fit enfuite célébrer tous les
ans. Les premiers prix furent remportés
par un Officier des plus diftingués de fa
Cour & de fon armée ; on l'appelloit Taurus
, ou Taureau , pour francifer fon nom.
C'étoit l'homme le plus fort de la Crere :
il étoit également adroit. Comme il s'étoit
fignalé dans les combats auffi bien que
dans les fêtes , le Roi en faifoit un cas
particulier. La Reine qui fut préfente à
ces jeux , ne conçut pas moins d'eftime
pour lui ; elle l'honora même d'un éloge
flateur , quand il s'approcha d'elle pour
recevoir de fa main le prix de la lutte &
de la courfe. La force , l'adreffe & la valeur
font trois qualités recommendables
auprès du beau fexe. Il eft vrai qu'elles
étoient un peu ternies en lui par une huJAN
VIE R. 1755 . 29
meur fiere & dure , pour ne pas dire
brutale ; mais c'eft l'ordinaire défaut des
gens robuftes : leur fang qui coule avec
impétuofité , ne leur permet guere d'être
polis. Un efprit doux & liant eft le partage
des complexions délicates , qui n'ont
pas la force de manquer d'égards , & qui
donnent le beau nom de fentiment à leur
foibleffe. Taurus étoit donc brufque , mais
effentiel. La Reine conféquemment n'avoit
pas tort d'être prévenue en fa faveur ;
elle y étoit autorifée par la confiance que
Minos avoit en lui . Ce Prince en donna
une preuve bien décifive en partant pour
aller lui- même faire en perfonne la guerre
aux Athéniens ; il l'établit Gouverneur de
Gnoffe , Capitale de fon Royaume , & remit
à fa garde ce qu'il avoit de plus cher ,
fon état & fa femme. Il lui recommenda
fur- tout de veiller fur la conduite de la
Reine , de doubler le nombre de fes Ar-.
gus , fous le prétexte d'augmenter fa Cour ,
& de ne lui laiffer qu'un efclavage honorable
.
Pafiphaé qui fe vit décemment prifonniere
, fe confola d'avoir pour furveillant
celui de fes Sujets qu'elle eftimoit le plus.
Elle employa tout fon art à le captiver luimême
: elle y réuffit. La rudeffe du plus
féroce s'adoucit à l'afpect de deux beaux .
:
B iij
30 MERCURE DE FRANCE.
yeux : ceux de la Reine étoient de ce nombre.
Le Taureau s'apprivoifa , & lui tine
compagnie. Un feul homme de la trempe
du Cretois fuffit pour amufer le loifir d'une
femme modefte , condamnée à la folitude.
Une conformité de goût fervit encore
à les unir d'une chaîne plus intime :
ils avoient tous deux une eftime particuliere
pour Dédale , & un amour de préfé
rence pour l'art qu'il profeffoit. Cet ingénieux
Méchanicien fat le Vaucanfon de
fon fiécle : il s'étoit déja rendu fameux à la
Cour de Crete par la conftruction du labyrinthe.
Ce furprenant édifice venoit d'être
fini par l'ordre de Minos. La Reine &
Taurus furent curieux d'en parcourir les
détours ; mais ils s'y perdirent de compagnie
, & fans le fecours de Dédale , ils
n'auroient jamais pû trouver le moyen d'en
fortir. Depuis ce moment , ils prirent tant
de goût pour les ouvrages de ce célébre
Artifte , qu'ils alloient tous les jours le voir
travailler à fon attelier. Supérieur dans fon
art , Dédale ne copioit que la Nature , &
'imitoit que les Dieux : il créoit à leur
exemple . Tantôt il animoit le marbre , tantôt
il faifoit parler le bronze , ou foupirer
le bois.
: Parmi différens chef- d'oeuvres , il conf
truifit un Taureau qui frappoit du pied la
JANVIER . 1755 . 31
terre , & refpiroit le feu : il lui donna pour
compagne une Geniffe fi parfaitement imitée
, que l'oeil s'y trompoit à la voir , elle
marchoit , elle broutoit , elle mugifloit
avec tant de vérité , qu'on la prenoit pour
une geniffe réelle. Le taureau s'enflamoit
à fa vûe , & beugloit à l'uniffon avec elle .
Pafiphaé étonnée de ce prodige , voulat
connoître le méchanifme qui l'opéroit.
Taurus eut la même curiofité . Dédale la
fatisfit ; il expofa à leurs regards l'intérieur
des deux machines , & pour leur en faire
mieux comprendre tout le jeu , il fit entrer
la Reine dans le corps de la geniffe ,
& fon Ecuyer dans le ventre du taureau .
Tous deux eurent à peine touché à un certain
fil , que la geniffe beugla , & que le
taureau lui répondit . Cette comédie les
amufa fi fort , qu'ils alloient chez Dédale
la jouer régulierement quatre fois par femaine.
Cette piéce finguliere dura fix mois,
qui fut tout le tems de l'abfence de Minos.
Ce Monarque revint triomphant des Athéniens.
Après les avoir vaincus , il les obligea
de lui envoyer en tribut fept jeunes
garçons & fept jeunes filles des plus no-
Bles familles d'Athenes , pour être enfermés
dans le labyrinthe.
La Reine accoucha trois mois après ; plu-
B iiij
32 MERCURE DE FRANCE.
*
fieurs difent de deux jumeaux , dont l'un
reffembloit au Roi de Crete , & l'autre au
Gouverneur de Gnoffe ; mais un Auteur
digne de foi , affure qu'elle ne mit au jour
qu'un feul Prince , qui avoit le fourcil noir
de Minos , & les cheveux roux de Taurus .
J'ai fuivi cette opinion comme la plus vraifemblable.
Les perfifleurs de la Cour exercerent
leurs mauvaiſes plaifanteries fur
cette double reffemblance , & donnerent
au fils de la Reine le fobriquet de Minotaure
, qui lui eft toujours refté. Le Roi
le prit en averfion , & conçut contre fa
femme un foupçon qui la perdit fans retour
; fa fureur jaloufe en redoubla. Les
ennemis que Taurus s'étoit attiré par fa
brufquerie infolente , chargerent fon hif
toire des plus noires couleurs : ils la répandirent
dans le public , elle parvint jufqu'à
Minos. Il apprit , en frémiffant , les
vifites fréquentes de fon favori & de fa
femme chez Dédale ; la promenade du labyrinthe
, où ils s'étoient égarés , & l'aventure
merveilleufe du taureau & de la
geniffe. Minos outragé , ou qui crut l'ê
tre , fignala bientôt fa vengeance. Dédale
eut pour prifon le labyrinthe , dont il étoit
l'inventeur. Le Prince Minotaure fut en-
* Servius dans fon Commentaire fur Virgile,
JANVIER.. 1755 . 33
fermé dans le même cachot ; il y fut nourri
comme une bête féroce : Taurus partagea
fon fupplice . La Reine fut enfevelie dans
un autre fouterrein . Par un raffinement de
cruauté , elle fut condamnée à ne plus voic
le jour , fans perdre la vie . Dédale eut recours
à fon art , & trouva feul le moyen
de s'échapper. Le Prince crut en force : il
devint bientôt monftrueux par fa taille gigantefque
, & fa férocité répondit à fon
éducation . Il combattoit les malheureux
Athéniens qu'on envoyoit en Crete ; on
les livroit à fa rage ; ils périffoient fous fes
coups , ou mouroient de la main de Taurus
, qui fecondoit fa fureur . Les jeunes
Grecques languiffoient dans l'efclavage.
Heureufement pour elles , Théfée , que le
fort mit du nombre des captifs , vint rompre
leurs fers. Il attaqua le redoutable Minotaure
, tua Taurus avec lui , & délivra
par cette victoire fa patrie d'un tribut auſſi
deshonorant pour l'humanité que pour
elle ; mais il ternit cette belle action par
le rapt d'Ariane , qui lui avoit enfeigné le
le_rapt
fecret de fortir du labyrinthe , en l'armant
d'un fil qui lui fervit de guide. En reconnoiffance
d'un fi grand bienfait , il l'arracha
des bras paternels , pour l'abandonner
dans une ifle déferte . Voilà de nos
brillans héros qui font le bien par nécef-
Bv
34 MERCURE DE FRANCE.
fité , & le gâtent bientôt après par le mal
qu'ils font volontairement . Minos , ce Roi
cité pour fa fagelle , s'en écarta dans cette
occafion , & flétrit fa gloire par la vengeance
éclatante qu'il tira d'une aventure
qu'il devoit plûtôt étouffer dans un profond
filence. La renommée qui groffit , &
qui déguife tout , broda fur ce fond la
plus horrible fable . Elle publia que Pafiphaé
éprife d'amour pour un taureau ,
avoit eu recours à Dédale pour fatisfaire
fon effroyable paffion , & que cet Artiſte
complaifant avoit fabriqué le corps d'une
geniffe , où il avoit introduit la Reine ,
pour lui faciliter un affreux commerce.
Les plus grands Poëtes ont confacré cette
horreur. Minos en a été puni le premier ,
puifqu'il en a partagé la honte. Sa malheureufe
époufe a été la victime d'une
équivoque. Tant il eft vrai , que les femmes
, quand elles font choix d'un amant
ne fçauroient avoir trop d'égard au nom
qu'il porte ; cette attention eft pour elles
de conféquence. Il ne faut qu'un nom ri
dicule pour donner lieu à un conte extravagant
, ou à un vaudeville malin qui
les perd de réputation : l'exemple de Pafiphaé
doit les effrayer. Si le Cretois qu'elle
eftimoit , fe fût nommé autrement que
Taureau , fon aventure n'eût été qu'une
JAN VIE R. 1755. 35
galanterie d'ufage , ou qu'une foibleffe excufable
; on n'en eût point parlé. Ce qui
fait voir que les mots font plus de tort que
les chofes. Pour moi je trouve Minos le
plus coupable , & j'ai cru devoir cette
apologie à l'honneur de Pafiphaé. Elle n'étoit
pas d'une vertu tout-à fait fans reproche
, mais elle étoit du moins fage comme
la plupart des femmes le font , ou peuvent
l'être jelle étoit d'ailleurs eftimable
par plufieurs
belles qualités ,fur-tout elle aimoit les
arts & protegeoit les talens . Suppofé qu'elle
ait eu du goût pour un autre que fon mari ,
pourquoi tant fe récrier ? la chofe n'eft pas
fans exemple , & fa paffion , après tout ,
n'eft pas fortie de l'ordre commun. La fable
a outré fur fon fujet , elle en a fait un
monftre affreux : je ramene fon hiftoire à
la vraisemblance ; j'en fais une fenime ordinaire
.
On donnera la fuite dans le mois prochain,
fi cet effai eft du goût du public. On tourne
aujourd'hui la vérité en fable ; l'Auteur
mieux intentionné tâche de tourner la fable
en vérité.
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Résumé : LES REPUTATIONS mises au creuset.
Le texte 'Les Réputations mises au creuset' examine la nature trompeuse des réputations, tant positives que négatives, et propose de les analyser à la lumière de la vérité. L'auteur souhaite révéler les métamorphoses des réputations en les soumettant à une analyse exacte, ce qui pourrait bouleverser l'univers en rendant certains coquins honnêtes et certains honnêtes gens coquins. Pour éviter ce désordre, il se limite à réhabiliter les réputations antiques injustement noircies et à démystifier celles déguisées par un faux éclat. L'auteur illustre son propos par l'exemple de Tantale, roi de Phrygie, dont la réputation a été injustement ternie. Tantale, fils de Jupiter, était bienfaisant et agréable, admiré par les Dieux qui l'invitaient à leur table. Cependant, son trop grand mérite le brouilla avec eux, et il fut puni injustement. Les Dieux l'accusèrent d'avoir révélé leurs secrets et de leur avoir servi les membres de son fils Pelops. En réalité, Tantale avait refusé de sacrifier Pelops, qui fut sauvé par les Dieux. Cette calomnie fut propagée par Momus, le Dieu de la médisance. Tantale fut condamné à souffrir de la faim et de la soif au milieu de l'abondance, un supplice injustifié selon l'auteur. L'auteur conclut que les réputations sont souvent le fruit du hasard ou de l'opinion aveugle plutôt que de la raison éclairée. Il met en garde contre le danger de fréquenter des personnes plus puissantes que soi, car elles peuvent nuire à notre réputation. Le texte relate également l'histoire de Taurus, un homme robuste mais brutal, nommé gouverneur de Gnosse par le roi Minos. Taurus est chargé de surveiller la reine Paphos et d'augmenter sa cour. Paphos, prisonnière décente, utilise son art pour captiver Taurus, qui s'adoucit à sa vue. Ils partagent une passion commune pour Dédale, un ingénieux mécanicien célèbre pour le labyrinthe. Paphos et Taurus passent du temps avec Dédale, admirant ses œuvres, notamment un taureau et une génisse mécaniques. Intrigués par ces machines, ils jouent régulièrement une comédie où ils incarnent ces animaux. Pendant l'absence de Minos, Paphos accouche d'un enfant, le Minotaure, qui présente des traits de Minos et de Taurus. La cour moque l'enfant, surnommé Minotaure, et Minos, jaloux, accuse Paphos et Taurus d'adultère. Il condamne Dédale, le Minotaure et Taurus à des supplices, et Paphos à l'emprisonnement. Thésée, captif athénien, tue le Minotaure et Taurus, libérant ainsi Athènes du tribut imposé par Minos. La renommée déforme l'histoire, accusant Paphos d'avoir aimé un taureau, ce que l'auteur conteste, la défendant comme une femme ordinaire et estimable.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
p. 5-6
A M. LE COMTE D'ARGENSON, En lui présentant un manuscrit des médaillons, sur les campagnes du Roi.
Début :
A qui pourrois-je mieux offrir [...]
Mots clefs :
Jupiter, Pallas, Arts
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texteReconnaissance textuelle : A M. LE COMTE D'ARGENSON, En lui présentant un manuscrit des médaillons, sur les campagnes du Roi.
A M. LE COMTE D'ARGENSON,
En lui préfentant un manuſcrit des médaillons
, fur les campagnes du Roi.
A qui pourrois-je mieux offrir
Çes vers , fruit du repos que vos foins ont fait
naître ?
Vous aimez les beaux arts , vous les faites fleurir ;
Vous les exerceriez en maître :
A iij
6 MERCURE DE FRANCE.
Mais , pour notre bonheur , vous manquez de
loifir.
C'eft ainfi que Pallas , des arts qu'elle difpenfe ,
Prépare les nobles fuccès ;
Un feul de fes regards oft une récompenſe ;
Le génie , ou s'annonce , ou croît par fes bien-
1 faits :
Adoptez avec elle une autre reffemblance.
Quand Jupiter , du haut des Cieux ,
Renverfoit des Titans la redoutable engeance ;
La Victoire , à pas lents , rendoit le calme aux
"
Dieux.
Pallas , prit foin de leur vengeance ;
La Foudre entre fes mains fit connoître en tous
lieux ,
2. Et Jupiter , & fa puiffance. ,
L'ame des grands fuccès , des exploits glorieux ;
C'eft le confeil & la prudence.
En lui préfentant un manuſcrit des médaillons
, fur les campagnes du Roi.
A qui pourrois-je mieux offrir
Çes vers , fruit du repos que vos foins ont fait
naître ?
Vous aimez les beaux arts , vous les faites fleurir ;
Vous les exerceriez en maître :
A iij
6 MERCURE DE FRANCE.
Mais , pour notre bonheur , vous manquez de
loifir.
C'eft ainfi que Pallas , des arts qu'elle difpenfe ,
Prépare les nobles fuccès ;
Un feul de fes regards oft une récompenſe ;
Le génie , ou s'annonce , ou croît par fes bien-
1 faits :
Adoptez avec elle une autre reffemblance.
Quand Jupiter , du haut des Cieux ,
Renverfoit des Titans la redoutable engeance ;
La Victoire , à pas lents , rendoit le calme aux
"
Dieux.
Pallas , prit foin de leur vengeance ;
La Foudre entre fes mains fit connoître en tous
lieux ,
2. Et Jupiter , & fa puiffance. ,
L'ame des grands fuccès , des exploits glorieux ;
C'eft le confeil & la prudence.
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Résumé : A M. LE COMTE D'ARGENSON, En lui présentant un manuscrit des médaillons, sur les campagnes du Roi.
L'auteur dédie un manuscrit de médaillons relatifs aux campagnes du Roi à M. le Comte d'Argenston. Il exprime sa gratitude pour le repos accordé par les faveurs du comte et souligne son amour pour les beaux-arts. Le comte est comparé à Pallas, déesse des arts, et à Jupiter, symbolisant la force et la prudence nécessaires aux grands succès.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 149-168
Suite de la Lettre de M. L. R. Desh. P. R. Sur la Chronologie de M. Newton.
Début :
M. Newton (1) confond aussi Sésac avec Osiris, mais il est aisé de montrer en [...]
Mots clefs :
Chronologie, Newton, Égypte, Hercule, Phéniciens, Égyptiens, Grèce, Peuples, Sésostris, Jupiter
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texteReconnaissance textuelle : Suite de la Lettre de M. L. R. Desh. P. R. Sur la Chronologie de M. Newton.
CHRONOLOGIE.
Suite de la Lettre de M. L. R. Desh . P. R.
fur la Chronologie de M. Newton.
M. Newton (1) confond auffi Séſac avec
Ofiris , mais il eft aifé de montrer en
deux mots qu'il fe trompe. Selon lui , Séfac
monta fur le trône d'Egypte pendant le
regne de Salomon : or il eft certain , &
tous les habiles gens en conviennent , que
le boeuf, fymbole d'Ofiris , étoit adoré dès
les tems de Moïfe. Le Géographe Eftienne
dit
que la ville de Thebes , cette fameuſe
Diofpolis appellée No-Hammon dans l'Ecriture
Sainte , avoir été bâtie par Ofiris
& Ifis. Krigua Crígid& vyù l'ord . Diodore
dit la même choſe. Or fi les peuples
de la Thébaïde font les plus anciens habitans
de l'Egypte , comme ( 2 ) les Hiftoriens
en conviennent , fi Thebes fut d'a-
( 1 ) Newton , p. 83. (2) Diodore , L. 1 .
G iij
150 MERCURE DE FRANCE.
bord le fiege des Rois d'Egypte , où en
fera M. Newton avec fon Séfac ?
Les Hiftoriens ( 1 ) nous diſent encore
qu'Ofiris enfeigna l'Agriculture aux Egyptiens
, que fon époufe leur donna l'ufage
du froment & de l'orge qui croiffoient auparavant
comme des plantes inconnues &
négligées . En un mot , ils conviennent
qu'Oficis fut le Légiflateur des Egyptiens.
Ya- t'il làquelque chofe qui puiffe regarder
Séfac ? Eft- ce que l'Egypte n'étoit pas dès
les temps de Jofeph , le grenier de tous les
peuples circonvoifins ? Cet Empire n'étoitil
pas gouverné par d'excellentes loix ? L'Ecriture
elle- même loue le
gouvernement
& la fageffe des Egyptiens dans ces temps
reculés , &c . Ces objections & plufieurs
autres que je pourrois accumuler ici , fe
préfentent naturellement à l'efprit ; pourquoi
M. Newton n'en a-t'il point fait ufage,
les croyoit- il peu dignes de fon attention
?
<< (2 ) Sous le regne d'Ammon , pere
» d'Ofiris ou Séfac, & ayeul d'Orus & de
» Bubafte , les Thébains
commencerent à
s'appliquer à la navigation & à l'Aftro-
» nomie , & par le lever & le coucher Hé-
"
(1 ) Diodore , L. 1. Plutarque dans fon Traité
d'Oliris & d'Ifis. ( 2) Newton , p. 83 .
DECEMBRE . 1755. 151
ל כ
» liaque des Etoiles , ils déterminerent la
longueur de l'année folaire ; ils ajouterent
» à la vieille année du Calendrier , cinq
» jours qu'ils confacrerent à fes cinq enfans
, & c. » .
و د
Cette détermination de l'année folaire ,
doit être attribuée à Ofiris , Prince éclairé
& très-inftruit. J'en ai de bonnes preuves ,
& fi mes réflexions donnent lieu à une réponſe
, j'aurai occafion de développer ce
poin: d'hiftoire que je ne mets point ici
pour ne pas trop m'étendre.
66
(1 ) Car il n'eft pas vraisemblable que
l'équation du mouvement du foleil ait
» été connue des l'enfance de l'Aftrono-
» mie ». Mais l'Aftronomie avoit pris fon
origine dans les plaines de Sennaar , avant
la difperfion des peuples , & il eft conftant
que cette équation a été connue & fixée
par le fondateur de la Monarchie Egyptienne.
Elle a été connue auffi des Chinois
fous leur Empereur Yao dont le regne paſſe
l'an 2000 avant Jefus-Chrift .
of
(2 ) Jules Céfar la corrigea , en y ajou
» tant un jour tous les quatre ans , & en
» fit l'année Romaine »
Cette correction étoit faite dès le tems
d'Oficis , & c'eft ce qu'il eft très- aifé de
(1 ) Newton , p. 84. (2 ) Ibid.
Giv
152 MERCURE DE FRANCE.
prouver par la compofition de la grande
période de 36525 ans qui fut dès- lors en
ufage.
( 1 ) Quand Amenophis eut fixé à l'équinoxe
du printems le commencement
» de la nouvelle année Egyptienne de 365
» jours , il mérita le monument dont on a
» parlé ci- deffus » . ( 2 ) Ce monument étoit
un cercle d'or de 365 coudées de circonférence
, divifé en 395 parties égales , pour
repréſenter tous les jours de l'année ; on
avoit auffi décrit fur chaque partie , le
lever & le coucher héliaque des étoiles .
Si l'on prouve que cet Amenophis n'eſt
pas différent du Prince Manoph ou Menès
fondateur de la Monarchie Egyptienne ,
& que Menès & Ofiris font deux noms
différens du même Prince , il fe trouvera
que M. Newton parle ici contre fon propre
fentiment. (3 ) Le Chevalier Marsham
fait voir qu'il y a eu plufieurs Amenophis ;
il dit de plus & avec raifon , que ce nom
d'Amenophis , comme celui de Memnon
ne different point du nom de Menès. Phamenophis
itaque , five Amenophis , Thebanis
is eft , qui Gracis Memnon , nomen ex Menis
, primi Regis , nómine componi videtur.
Memnoph Gracis , Euphonia gratiâ. Men-
(1 ) Newton , p. 69. ( 2 ) Diodore , L. I 、
(3 ) Marsham , P. 401 .
DECEMBRE. 1755. 153
non five Memnon. Je crois donc que cet
Amenophis dont la ftatue étoit à Thebes
dans les Syringes , & auquel on dédia le
riche monument dont on vient de parler
n'eft point différent de Menès auquel étoit
due la fixation de l'année Egyptienne . Il
eft aifé même de le faire voir
par les propres
paroles de M. Newton qui dit
104 , qu'Amenophis bâtit la ville qu'il
appella de fon nom , Amenoph ou Memphis.
Or ( 1 ) Memphis fut bâtie par Menès
fondateur de la Monarchie Egyptienne .
Amenophis & Menès font donc un feul &
même Prince.
page
« (2) Plufieurs nations célebrerent fous
» des noms différens , les louanges de Sé-
» foftris , à caufe de fes grandes conquêtes.
Les Chaldéens l'appelloient Belus , qui
» en leur langue veut dire Seigneur : les
» Arabes le nommoient Bacchus qui en
leur langue fignifie grand : les Phrygiens
& les Thraces lui donnoient le
» nom de Mafors , Mavors , Mars , qui
» veut dire vaillant , & c » .
23
Le culte de Belus exiftoit chez les Chaldéens
plufieurs fiecles avant Séfac & Séfoftris.
Je n'ignore pas auffi qu'il y a eu
plufieurs Belus , mais ils font tous anté-
( 1 ) Hérodote , L. z. ( 2) Newton , p. 101 ,
GY
154 MERCURE DE FRANCE.
rieurs aux deux Princes Egyptiens. Sans
fçavoit fi le nom de Bacchus fignifie grand
dans la langue des Arabes , je ne doute pas
que Bacchus ne foit le même qu'Oficis ,
mais non point que Bel & Séfac. Quant
au Mavors , Ares , Marts , je crois qu'il
eft le Nemrod de l'Ecriture Sainte , connu
des Grecs fous le nom de Ninus , & adoré
des Chaldéens fous le titre générique de
Baal. Ces quatre noms Ares ou Arets ,
Marts , Ninus & Nemrod , paroiffent fort
différens , il font formés cependant de la
même racine. Arats , fignifie violentiâ ufus
fuit , fortem aut violentum fe exhibuit. D'Arats
vint Arets , Tyran , Conquérant , &
avec le même du participe Marets ou Mavorts.
On remarquera que chez les Latins,
Mars fait au génitif Martis , ce qui prouve
qu'on a du prononcer dans l'origine
Marts au lieu de Mars , qui eft plus doux à
la prononciation , & que pour cette raifon
on a préferé. Dans mes réflexions fur
page 73 de M. Newton , j'ai déja remar
la
qué que le changement des lettres S , TS ,
T, étoit fort communs. Ainfi on prononçoit
indifféremment Agns , Mavorts , &
Mars ou Marts.
Dans Nemrod , nom que je crois un peu
corrompu , il doit y avoir l'n . Cette infertion
de l'n eft commune ; on en a vu un
DECEMBRE. 1755 155
exemple dans Noph , Moph , & Manoph
qui expriment la ville de Memphis . Avec
cette n inférée , on aura donc Ninmrod ,
ce qui doit être interprêté Nin , le Conquérant
ou le Tyran. On peut confulter la Dif
fertation d'un fçavant ( 1 ) Académicien ,
dans laquelle on établit un parallele auffi
ingénieux que folide entre les deux Conquérans
Ninus & Nemrod. Quelqu'un a
déja remarqué que le nom de Baal ou Bel ,
a formé le bellum des Latins , parce que
Mars eft le premier qui fe foit fervi des armes
, & qu'il eft réputé le dieu des guer
riers.
a ( 2) Les Egyptiens l'appelloient Héro
ou Hercule.
Je ne connois point ce nom de Héro ; je
ne crois point non plus que quelque Ancien
ait dit que les Egyptiens donnerent à
Ofiris le nom d'Hercule . Je pense que cet
Hercule n'eft point différent de Canaan
frere de Mifor ou Mefraim , frere par con
féquent d'Ofitis. On peut voir à cette occafion
une Differtation imprimée dans la
Bibliotheque choifie de M. le Clerc , dans
laquelle on établit ce fentiment.
( 3 ) En le déïfiant , ils lui donnerent les
(1) M. Gibert de l'Académie des Infcriptions
& Belles- Lettres . ( 2 ) Newton , p. 102. ( 3) Ibid,
P. 102.00 10:
G vj
156 MERCURE DE FRANCE.
»noms de ce fleuve ( du Nil ) , Sihor ,
» Nilus & Ægyptus " .
Sicher fignifie noir , & ce nom n'eſt
qu'une traduction ou épithete de celui de
Ham. Les Egyptiens avoient donné ce nom
de Ham , à leur royaume , à leur fleuve &
à Thebes leur ville capitale . Le nom d'Ægyptus
eft bien plus récent , il exprime en
grec un espece de Vautour extrêmement
noir il n'eft donc que la traduction du
nom de Ham .
"3
a ( 1 ) Les Grecs ayant entendu les
» Egyptiens s'exprimer ainfi dans leurs
» cantiques lugubres : O Sihor , Bou Sihor,
prirent delà occafion de l'appeller Ofiris
» & Bufiris ».
Le nom d'Ofiris ne dérive pas de Sihor ;
une lettre afpirée telle que le Cheth ne
s'éclipfe pas ainfi ; Ofiris & Siris viennent
d'une autre fource . Quant aux noms de
Bufiris , Tapofiris , on peut confulter faint
Clément d'Alexandrie.
(2) Ofiris fut donc tué la cinquieme
» année d'Afa par fon frere Japet , que les
» Egyptiens appelloient Typhon , Python
» & Neptune ce fut alors que les Lybiens
fous la conduite de Japet & de fon
fils Atlas , envahirent l'Egypte , & exci-
(1) Newton , p. 102. ( 2 ) Ibid. p . 103 .
1
DECEMBRE . 1755. 157
» terent la fameufe guerre des Dieux &
» des Géants ".
Comme M. Newton lui- même fait Japet
frere d'Ofiris , on peut juger delà ſi j'ai
eu tort de dire qu'Hammon étoit Ham ,
qu'Oficis étoit le fondateur de la Monarchie
Egyptienne ou Mefraïm . Mais Japet
qu'on ne peut méconnoître ici pour le
Patriarche Japhet étoit oncle d'Ofiris &
non point fon frere : les Grecs ont jetté
M. Newton dans cette méprife parce qu'ils
font Japet frere de Chronos ; mais il y a
eu deux Chronos comme on peut le voir
par le fragment de Sanchoniathon ancien
auteur Phénicien . Le premier Chronos eft
Noë , le fecond eſt Ham ; le Poëte Nonnus
dit auffi que le nom d'Hammon chez les
Arabes étoit Chronos. Il eft donc vrai que
Japet étoit frere du fecond Chronos &
fils du premier , par conféquent oncle
d'Ofiris.
Je penfe auffi comme M. Newton que
ce même Japet eft Neptune , mais non
point Python ou Typhon. Eft- il donc fi
difficile de reconnoître ce Python dans
Phuth , frere de Mefraïm . Ham avoit eu
l'Afrique en partage , il la diftribua à ſes
enfans. Chus eut l'Ethiopie , & depuis on
a toujours appellé les Ethiopiens des Chufites
; Mefr , Mifor , ou comme l'appelle
158 MERCURE DE FRANCE.
l'Écriture Sainte , Mefraïm , eur l'Egypte
qui porte encore aujourd'hui fon nom ;
Canaan eut le païs de ce nom , & enfin
Phuth cut les païs qui font à l'occident
de l'Egypte.
(1) Sur ces entrefaites , Amenophis
» quitta la Baffe-Egypte , & vint à Mem-
" phis fuivi par les reftes de l'armée Ethio-
»pienne de fon pere ; étant arrivé dans
» ce païs , il fit paffer le Nil dans un autre
» canal , fous un Pont neuf qu'il bâtit en-
» tre deux montagnes ; en même- tems if
»bâtit & fortifia cette ville contre Ofarfiphus
, & l'appella de fon nom Amenoph
» ou Memphis ».
Cet Amenophis comme nous l'avons
déja infinué eſt le même que Menès fondateur
de la Monarchie Egyptienne . Le nom
bien orthographié eft Manof on Menouf
comme les Arabes prononcent. Les Grecs
ont étrangement corrompu ce nom . Ils
l'ont écrit tantôt Menevis , Mnevis , Memphis
, tantôt Menophis Minevis , Meneus ,
Menes , Menon , & c . car on le trouve écrit
de toutes ces manieres. Ce nom fignifie
ville , habitation . Ainfi on appelloit MenoufMefr
ou la ville de Mefraim , celle
que les Grecs appellerent toujours Memphis
, mais que les Orientaux nomment
(1) Newton , p. 103.
DECEMBRE . 1755. 159
encore aujourd'hui Manof , Monf & Mefr.
Hérodote & Jofephe attribuent fa fondation
à Menès . En un mot , Menès n'a été
appellé ainfi que du nom de la ville qu'il
avoit fait bâtir ; car fon véritable nom
étoit Mefr , ou Mifor, comme il eft appellé
dans le fragment de Sanchoniathon .
M. Newton place cette expédition d'Amenophis
fept ans après celle des Argonautes
, c'eſt - à - dire , l'an 930. Eft- il vraifemblable
que la ville de Memphis ait été
bâtie fi tard ?
« (1 ) Il eft für que cet Hercule de Tyr
»ne fçauroit être plus ancien que la guerre
» de Troye , parce que les Tyriens ne
» commencerent à voyager fur la Médi
terranée , qu'après cette guerre..... ( 2)
Jofephe fait mention d'un autre Hercule
» plus ancien , en l'honneur duquel Hiram
fit bâtir un Temple à Tyr : peut- être y
» avoit-il auffi avant lui un Hercule de
» Tyr qui avoit établi le commerce des
Tyriens fur la Mer Rouge , du tems de
David & de Salomon »..
Sans doute il y avoit un ancien Hercule,
& bien antérieur à Salomon & à David.
Il y en avoit un comtemporain d'Oficis.
Il étoit fils du Nil , felon Ciceron , c'eſt-
( 1 ) Newton , p. 118. (2 ) Ibid. p. 119.
160 MERCURE DE FRANCE.
à - dire , fils de Ham , frere par conféquent
d'Ofiris ou Mefr .
Je dis qu'Hercule étant qualifié fils du
Ni , on doit entendre par là qu'il étoit fils
de Cham ; on en peut voir la raifon dans
la réflexion que j'ai faite précédemment
fur la page 102 de M. Newton . Le nom
d'Hercule ne fe trouve point parmi les enfans
de Ham , auffi n'étoit-ce là qu'une
épithete qui , felon la remarque ingénieufe
de M. le Clerc , paroît ne fignifier rien
autre chofe que Marchand , Négociant
Harokel . Mais écoutons l'Auteur de l'Etymologicon
Megad : Tìv H'ganaŭv qasì , x 1à
των λουπλέων διαλεκτον , ΧΩΝΑ λέγεθαι .
Hercule eft appellé Cona dans le Dialecle
1 Egyptien. Méconnoîtra t'on ici Canaan ou
Cna frere d'Ofiris ? Eufebe à la fuite du
fragment de Sanchoniathon , qualifie Ofiris
, frere de XNA , le premier , dit- il ,
qui ait été appellé Phénicien par les étrangers.
Hercule eft donc Canaan fils de Ham:
auffi les Grecs font -ils Hercule fils de Jupiter
, & en Egypte on ne connoiffoit
point d'autre Jupiter qu'Hammon ou Ham.
Quant à l'épithète d'Harokel , Marchand ,
elle n'a rien de ridicule. Canaan fe diftingua
par fon grand commerce , au point
que dans l'Ecriture même Cnani fignifie
un Marchand. Dans Etienne de Byzance
DECEMBRE. 1755. 161
XNA exprime la Phénicie , & xv un
Phénicien , ainfi on ne doit point ranget
cette étymologie au nombre des conjectures.
Hercule a été encore appellé Mélicerte
, mais ce nom ne fignifie que Roi de
la ville .
»(1 ) Après que les Phéniciens & les Grecs
» eurent reçu des Egyptiens l'art de naviger
, & la maniere de faire de longs
» vaiffeaux à voiles & à un rang de rames ,
» les Sidoniens porterent leur commerce
» dans la Gréce , & le continuerent pen-
» dant 50 ans.
Ce que dit ici M. Newton manque
d'exactitude. Les Phéniciens font les plus
anciens commerçans , & les premiers navigateurs
non -feulement ils ont les premiers
trouvé l'art de la navigation (2 ) , mais
encore ils ont appris aux autres peuples à
donner des batailles fur mer , à ufer du
droit de la royauté , & à foumettre les
peuples voifins. Le nom feul d'Hercule
qui a fait tant de bruit parmi les Grecs ,
prouve bien que les Phéniciens ont fçu
profiter d'abord de la fituation avantageufe
de leur païs pour le commerce maritime.
Marsham , page 109 , cite un paſſage
de Jofephe , qui fait voir que les Egyptiens
(1 ) Newton, p. 121. ( 2 ) Sanchoniathon . Stra
bon , L. 16. Pline , L. s . c. 12, Jofeph . Antiq.
162 MERCURE DE FRANCE.
n'ont été connus des Grecs que par le canal
des Phéniciens .
( 1 ) Du tems d'Erechthée , Roi d'A-
» thenes , & de Celeus , Roi d'Eleufis ,
» Cerès vint dans l'Attique , éleva Tripto-
» leme , fils de Celeus , & lui apprit à femer
» des grains ; elle coucha avec Jafon , &c.
Comment M. Newton n'a-t'il point vu
que cette Cerès étoit Egyptienne , & femme
d'Oɓiris , conféquemment qu'il ne s'agit
ici que de l'introduction de fon culte
dans la Grece ? (2) Erechthée étoit Egyp
tien; pendant une famine qui défoloit la
Grece , il y tranfporta des blés : il fut établi
Roi par les Athéniens en reconnoiffance
de ce bienfait. Erechthtée leur enfeigna les
facrifices de Cerès , & établit à Eleufis les
myfteres de cette Décffe , & des Prêtres
pour en obferver les pratiques fur le mo
dele de ceux d'Egypte.
Cette époque de l'introduction des myf
teres de Ĉerès dans la Grece eft fixée par
les Interprêtes des marbres d'Arondel à
Fan 1426 avant J.C. environ 280 ans avant
la guerre de Troye. M. Newton la fixe à
Pan rozo , la différence eft de 396 : est- ce
là ce qu'il appelle ne pas porrer l'exactitude
jufqu'à une année près ?
(1) Newton, p. 141. ( 2 ) Diodore.
DECEMBRE. 1755. 163
ود
» (1) Au retour de Séfoftris en Egypte ,
» fon frere Danaus attenta non-feulement
» à fa vie , comme on a déja dit , mais
» commanda encore à fes cinquante filles
qui épouferent les fils de Séfoftris , de
» tuer leurs maris , après quoi il fe fauva
d'Egypte fur un long vaiffeau , & c .
"
و ر
Dans la chronique abrégée à l'époque
956 , M. Newton dit » Séfac eft tué par
» fon frere Japet .
Si l'on fuppofe , avec M. Newton , que
Séfoftris foit le même que Séfac & qu'O
firis , il faudra dire auffi que ce Prince a
été tué par un de fes freres. Après avoir
prouvé plus haut la fauffeté de cette prétendue
identité , fi le fait fe trouvoit être
le même , ce ne pourroit être qu'un effet
du pur hazard ; mais comme il eft entiérement
faux , & que Diodore nous dit ,
» que Séfoftris ayant perdu la vue après un
>>regne de 33 ans , fe donna volontairement
» la mort » (2 ) , il eft vifible que M. Newton
ne marque cet affaffinat que pour foutenir
le parallele qu'il a établi entre Séfoftris
, Oficis & Séfac. Pourquoi tromper
fes Lecteurs , altérer les faits , & jetter de
l'obfcurité où il n'y en a point?
"
En lifant ces paffages dans M. Newton ,
( 1) Newton , p. 144. ( 2 ) Diodore , L. 1.
164 MERCURE DE FRANCE.
il me femble entendre quelqu'un qui dit ,
Louis XIV qui eft le même que Philippe
Augufte & que Clovis , eft tué par fon
frere Pharamond ; les Anachronismes de
M. Newton ne font guere moins violens.
(1 ) Hérodote dit que les Phéniciens
qui fuivirent Cadmus , introduisirent
» plufieurs fciences dans la Grece ; car il y
» avoit parmi ces Phéniciens des gens ap-
» pellés Curetes , qui étoient plus verfés
» dans les Arts & dans les fciences de la
Phénicie que d'autres les uns s'établi
» rent dans la Phrygie , où ils furent appellés
Corybantes , les autres dans la
» Crete , où on leur donna le nom d'Idoi
» Dactyli , &c.
Ces gens , appellés Curetes , Corybantes,
&c. étoient des Prêtres Phéniciens , comme
les noms qu'ils portent nous l'apprennent .
Curete , fignifie châtré , parce que ces Prêtres
, comme l'on fçait , étoient prefque
tous eunuques. Corybante fignifie Sacrificateur,
Prêtre , de Corban , facrifice , obla
tion les Chretiens Orientaux fe fervent
encore aujourd'hui de ce terme pour exprimer
le facrifice de la Meffe.
:
» (2 ) Les deux premiers Rois de Crete
qui regnerent après l'arrivée des Cure-
(1 ) Newton, p. 154. (1 ) Ibid. p . 158 .
DECEMBRE. 1755. 169
» tes , furent Afterius & Minos. Europe
» fut femme d'Afterius & mere de Minos :
» les Curetes du mont Ida furent fes compatriotes
, & vinrent avec elle ; .... par
» conféquent il faut qu'Afterius , Europe ,
» & Minos foyent le Saturne , la Rhea , &
» le Jupiter des Crétois .
Je doute que ce raifonnement foit bien
conféquent , puifque les Curetes & les Corybantes
qui fuivirent Cadmus en Grece ,
étoient des Prêtres Phéniciens : il eft , ce
me femble , plus naturel de penfer qu'a
vec la connoiffance des Arts & des fciences
, ils porterent encore celle des Divinités
qui étoient adorées dans la Phénicie ,
& dont ils étoient les Miniftres .
» ( 1 ) Car les Phéniciens dans leur pre-
» premier voyage en Grece donnoient le
» nom de Jaopater , Jupiter à tous les
» Rois.
Je doute très-fort que le nom de Jupiter
ait été connu des Phéniciens ; il n'étoit
feulement pas en ufage en Grece . Je ne
connois que les Latins qui l'aient employé
pour exprimer des Princes , fondateurs de
quelques Empires , des Héros qui par leurs
belles actions avoient mérité la déïfication
; mais jamais il n'a été un nom géné
rique de tous les Rois.
(1 ) Newton , p. 158.
166 MERCURE DE FRANCE.
Ce nom de Jupiter ne vient pas de Jaopater
, il vient du Cevs des Grecs , & le gus
des Grecs vient lui -même du Dzew des
Orientaux, qui fignifie Poffeffeur , Maître ,
Seigneur.
Les Grecs donnoient affez indiftinctement
le nom de Zeus à tous leurs Dieux ,
comme les Phéniciens donnoient aux leurs
celui de Baal , Bel .
( 1 ) Macrobe dit qu'après la mort de
» Saturne , Janus lui dreffa un autel com-
» me à un Dieu , établit des cérémonies fa-
» crées , & inftitua les Saturnales , & qu'on
» lui facrifioit des hommes , jufqu'à ce
qu'Hercule emmenant en Italie les bef-
» tiaux de Geryon , y abolît cette coutu-
» me ; on peut voir par ces facrifices hu-
» mains que Janus étoit un defcendant de
» Lycaon ; ce caractere a quelque rapport
» à notrus.
Ce que M. Newton dit ici n'eſt pas juſte :
ces facrifices inhumains qu'on faifoit en
l'honneur de Molok ou Saturne , ou Chronos
, ( car c'eft le même Dieu fous différens
noms ) avoient pris leur origine dans la
Phénicie , & n'avoient aucun rapport aux
Rois d'Italie ou de Grece . Les Phéniciens ,
Hercule lui-même , fondateur du Royau-
(1 ) Newton , p. 164.
!
:
DECEMBRE 1755. 167
me de Phénicie , porterent ces facrifices
partout où leur religion put prendre racine
, de même que Didon les porta en Afrique
, lorfqu'elle y alla fonder Carthage.
Âu refte la religion Phénicienne pouvoit
être connue en Afrique avant l'arrivée de
Didon , puifqu'Hercule avoit pouffé fes
découvertes par mer jufqu'au détroit de
Gades , où il fit élever ces fameufes colonnes
connues fous fon nom. M. Newton
convient lui-même , page 171 , que l'idolâtrie
commença dans la Chaldée & l'Egypte
, d'où elle s'étendit dans la Phénicie
& les pays voifins longtems avant qu'elle
eût été introduite en Europe.
( 1 ) Cependant du tems de Moyfe ,
» tous les charriots de l'Egypte , avec lef-
» quels Pharaon pourfuivit Ifraël , ne
» montoient qu'à 600.
"
Cela eft vrai : mais en doit-on conclure
que l'Egypte n'en poffédoit pas un nombre
beaucoup plus confiderable ? Pharaon dans
la pourfuite des Ifraelites , à laquelle il ne
pas, ne put fe fervir
charriots qui pouvoient être alors à Tanis
& dans les environs ; il n'eut pas le tems
d'en raffembler davantage.
s'attendoit
que
des
Voilà , Monfieur , les obfervations que
(1 ) Newton , p . 178 .
168 MERCURE DE FRANCE.
j'avois à faire fur la Chronologie des Grecs,
par M. Newton. Je n'ai relevé que les
Anachronifmes qui m'ont paru les plus
hardis : j'aurois pu en relever un plus grand
nombre , puifque tout eft Anachronisme
dans un ſyſtème fondé fur de pareils principes.
Je fuis réellement fâché qu'un auffi
grand homme fe foit trop prévenu en faveur
de l'obfervation d'Eudoxe pour la fixation
de l'époque des Argonautes. Avec une
lecture vafte , il étoit en état de faire d'importantes
découvertes en fait de Chronologie
: j'en juge par ce fyftême , que je crois
faux , mais qui par là même a demandé un
effort de génie d'autant plus grand . La
vérité ne coute pas tant de peines à dévoiler.
Suite de la Lettre de M. L. R. Desh . P. R.
fur la Chronologie de M. Newton.
M. Newton (1) confond auffi Séſac avec
Ofiris , mais il eft aifé de montrer en
deux mots qu'il fe trompe. Selon lui , Séfac
monta fur le trône d'Egypte pendant le
regne de Salomon : or il eft certain , &
tous les habiles gens en conviennent , que
le boeuf, fymbole d'Ofiris , étoit adoré dès
les tems de Moïfe. Le Géographe Eftienne
dit
que la ville de Thebes , cette fameuſe
Diofpolis appellée No-Hammon dans l'Ecriture
Sainte , avoir été bâtie par Ofiris
& Ifis. Krigua Crígid& vyù l'ord . Diodore
dit la même choſe. Or fi les peuples
de la Thébaïde font les plus anciens habitans
de l'Egypte , comme ( 2 ) les Hiftoriens
en conviennent , fi Thebes fut d'a-
( 1 ) Newton , p. 83. (2) Diodore , L. 1 .
G iij
150 MERCURE DE FRANCE.
bord le fiege des Rois d'Egypte , où en
fera M. Newton avec fon Séfac ?
Les Hiftoriens ( 1 ) nous diſent encore
qu'Ofiris enfeigna l'Agriculture aux Egyptiens
, que fon époufe leur donna l'ufage
du froment & de l'orge qui croiffoient auparavant
comme des plantes inconnues &
négligées . En un mot , ils conviennent
qu'Oficis fut le Légiflateur des Egyptiens.
Ya- t'il làquelque chofe qui puiffe regarder
Séfac ? Eft- ce que l'Egypte n'étoit pas dès
les temps de Jofeph , le grenier de tous les
peuples circonvoifins ? Cet Empire n'étoitil
pas gouverné par d'excellentes loix ? L'Ecriture
elle- même loue le
gouvernement
& la fageffe des Egyptiens dans ces temps
reculés , &c . Ces objections & plufieurs
autres que je pourrois accumuler ici , fe
préfentent naturellement à l'efprit ; pourquoi
M. Newton n'en a-t'il point fait ufage,
les croyoit- il peu dignes de fon attention
?
<< (2 ) Sous le regne d'Ammon , pere
» d'Ofiris ou Séfac, & ayeul d'Orus & de
» Bubafte , les Thébains
commencerent à
s'appliquer à la navigation & à l'Aftro-
» nomie , & par le lever & le coucher Hé-
"
(1 ) Diodore , L. 1. Plutarque dans fon Traité
d'Oliris & d'Ifis. ( 2) Newton , p. 83 .
DECEMBRE . 1755. 151
ל כ
» liaque des Etoiles , ils déterminerent la
longueur de l'année folaire ; ils ajouterent
» à la vieille année du Calendrier , cinq
» jours qu'ils confacrerent à fes cinq enfans
, & c. » .
و د
Cette détermination de l'année folaire ,
doit être attribuée à Ofiris , Prince éclairé
& très-inftruit. J'en ai de bonnes preuves ,
& fi mes réflexions donnent lieu à une réponſe
, j'aurai occafion de développer ce
poin: d'hiftoire que je ne mets point ici
pour ne pas trop m'étendre.
66
(1 ) Car il n'eft pas vraisemblable que
l'équation du mouvement du foleil ait
» été connue des l'enfance de l'Aftrono-
» mie ». Mais l'Aftronomie avoit pris fon
origine dans les plaines de Sennaar , avant
la difperfion des peuples , & il eft conftant
que cette équation a été connue & fixée
par le fondateur de la Monarchie Egyptienne.
Elle a été connue auffi des Chinois
fous leur Empereur Yao dont le regne paſſe
l'an 2000 avant Jefus-Chrift .
of
(2 ) Jules Céfar la corrigea , en y ajou
» tant un jour tous les quatre ans , & en
» fit l'année Romaine »
Cette correction étoit faite dès le tems
d'Oficis , & c'eft ce qu'il eft très- aifé de
(1 ) Newton , p. 84. (2 ) Ibid.
Giv
152 MERCURE DE FRANCE.
prouver par la compofition de la grande
période de 36525 ans qui fut dès- lors en
ufage.
( 1 ) Quand Amenophis eut fixé à l'équinoxe
du printems le commencement
» de la nouvelle année Egyptienne de 365
» jours , il mérita le monument dont on a
» parlé ci- deffus » . ( 2 ) Ce monument étoit
un cercle d'or de 365 coudées de circonférence
, divifé en 395 parties égales , pour
repréſenter tous les jours de l'année ; on
avoit auffi décrit fur chaque partie , le
lever & le coucher héliaque des étoiles .
Si l'on prouve que cet Amenophis n'eſt
pas différent du Prince Manoph ou Menès
fondateur de la Monarchie Egyptienne ,
& que Menès & Ofiris font deux noms
différens du même Prince , il fe trouvera
que M. Newton parle ici contre fon propre
fentiment. (3 ) Le Chevalier Marsham
fait voir qu'il y a eu plufieurs Amenophis ;
il dit de plus & avec raifon , que ce nom
d'Amenophis , comme celui de Memnon
ne different point du nom de Menès. Phamenophis
itaque , five Amenophis , Thebanis
is eft , qui Gracis Memnon , nomen ex Menis
, primi Regis , nómine componi videtur.
Memnoph Gracis , Euphonia gratiâ. Men-
(1 ) Newton , p. 69. ( 2 ) Diodore , L. I 、
(3 ) Marsham , P. 401 .
DECEMBRE. 1755. 153
non five Memnon. Je crois donc que cet
Amenophis dont la ftatue étoit à Thebes
dans les Syringes , & auquel on dédia le
riche monument dont on vient de parler
n'eft point différent de Menès auquel étoit
due la fixation de l'année Egyptienne . Il
eft aifé même de le faire voir
par les propres
paroles de M. Newton qui dit
104 , qu'Amenophis bâtit la ville qu'il
appella de fon nom , Amenoph ou Memphis.
Or ( 1 ) Memphis fut bâtie par Menès
fondateur de la Monarchie Egyptienne .
Amenophis & Menès font donc un feul &
même Prince.
page
« (2) Plufieurs nations célebrerent fous
» des noms différens , les louanges de Sé-
» foftris , à caufe de fes grandes conquêtes.
Les Chaldéens l'appelloient Belus , qui
» en leur langue veut dire Seigneur : les
» Arabes le nommoient Bacchus qui en
leur langue fignifie grand : les Phrygiens
& les Thraces lui donnoient le
» nom de Mafors , Mavors , Mars , qui
» veut dire vaillant , & c » .
23
Le culte de Belus exiftoit chez les Chaldéens
plufieurs fiecles avant Séfac & Séfoftris.
Je n'ignore pas auffi qu'il y a eu
plufieurs Belus , mais ils font tous anté-
( 1 ) Hérodote , L. z. ( 2) Newton , p. 101 ,
GY
154 MERCURE DE FRANCE.
rieurs aux deux Princes Egyptiens. Sans
fçavoit fi le nom de Bacchus fignifie grand
dans la langue des Arabes , je ne doute pas
que Bacchus ne foit le même qu'Oficis ,
mais non point que Bel & Séfac. Quant
au Mavors , Ares , Marts , je crois qu'il
eft le Nemrod de l'Ecriture Sainte , connu
des Grecs fous le nom de Ninus , & adoré
des Chaldéens fous le titre générique de
Baal. Ces quatre noms Ares ou Arets ,
Marts , Ninus & Nemrod , paroiffent fort
différens , il font formés cependant de la
même racine. Arats , fignifie violentiâ ufus
fuit , fortem aut violentum fe exhibuit. D'Arats
vint Arets , Tyran , Conquérant , &
avec le même du participe Marets ou Mavorts.
On remarquera que chez les Latins,
Mars fait au génitif Martis , ce qui prouve
qu'on a du prononcer dans l'origine
Marts au lieu de Mars , qui eft plus doux à
la prononciation , & que pour cette raifon
on a préferé. Dans mes réflexions fur
page 73 de M. Newton , j'ai déja remar
la
qué que le changement des lettres S , TS ,
T, étoit fort communs. Ainfi on prononçoit
indifféremment Agns , Mavorts , &
Mars ou Marts.
Dans Nemrod , nom que je crois un peu
corrompu , il doit y avoir l'n . Cette infertion
de l'n eft commune ; on en a vu un
DECEMBRE. 1755 155
exemple dans Noph , Moph , & Manoph
qui expriment la ville de Memphis . Avec
cette n inférée , on aura donc Ninmrod ,
ce qui doit être interprêté Nin , le Conquérant
ou le Tyran. On peut confulter la Dif
fertation d'un fçavant ( 1 ) Académicien ,
dans laquelle on établit un parallele auffi
ingénieux que folide entre les deux Conquérans
Ninus & Nemrod. Quelqu'un a
déja remarqué que le nom de Baal ou Bel ,
a formé le bellum des Latins , parce que
Mars eft le premier qui fe foit fervi des armes
, & qu'il eft réputé le dieu des guer
riers.
a ( 2) Les Egyptiens l'appelloient Héro
ou Hercule.
Je ne connois point ce nom de Héro ; je
ne crois point non plus que quelque Ancien
ait dit que les Egyptiens donnerent à
Ofiris le nom d'Hercule . Je pense que cet
Hercule n'eft point différent de Canaan
frere de Mifor ou Mefraim , frere par con
féquent d'Ofitis. On peut voir à cette occafion
une Differtation imprimée dans la
Bibliotheque choifie de M. le Clerc , dans
laquelle on établit ce fentiment.
( 3 ) En le déïfiant , ils lui donnerent les
(1) M. Gibert de l'Académie des Infcriptions
& Belles- Lettres . ( 2 ) Newton , p. 102. ( 3) Ibid,
P. 102.00 10:
G vj
156 MERCURE DE FRANCE.
»noms de ce fleuve ( du Nil ) , Sihor ,
» Nilus & Ægyptus " .
Sicher fignifie noir , & ce nom n'eſt
qu'une traduction ou épithete de celui de
Ham. Les Egyptiens avoient donné ce nom
de Ham , à leur royaume , à leur fleuve &
à Thebes leur ville capitale . Le nom d'Ægyptus
eft bien plus récent , il exprime en
grec un espece de Vautour extrêmement
noir il n'eft donc que la traduction du
nom de Ham .
"3
a ( 1 ) Les Grecs ayant entendu les
» Egyptiens s'exprimer ainfi dans leurs
» cantiques lugubres : O Sihor , Bou Sihor,
prirent delà occafion de l'appeller Ofiris
» & Bufiris ».
Le nom d'Ofiris ne dérive pas de Sihor ;
une lettre afpirée telle que le Cheth ne
s'éclipfe pas ainfi ; Ofiris & Siris viennent
d'une autre fource . Quant aux noms de
Bufiris , Tapofiris , on peut confulter faint
Clément d'Alexandrie.
(2) Ofiris fut donc tué la cinquieme
» année d'Afa par fon frere Japet , que les
» Egyptiens appelloient Typhon , Python
» & Neptune ce fut alors que les Lybiens
fous la conduite de Japet & de fon
fils Atlas , envahirent l'Egypte , & exci-
(1) Newton , p. 102. ( 2 ) Ibid. p . 103 .
1
DECEMBRE . 1755. 157
» terent la fameufe guerre des Dieux &
» des Géants ".
Comme M. Newton lui- même fait Japet
frere d'Ofiris , on peut juger delà ſi j'ai
eu tort de dire qu'Hammon étoit Ham ,
qu'Oficis étoit le fondateur de la Monarchie
Egyptienne ou Mefraïm . Mais Japet
qu'on ne peut méconnoître ici pour le
Patriarche Japhet étoit oncle d'Ofiris &
non point fon frere : les Grecs ont jetté
M. Newton dans cette méprife parce qu'ils
font Japet frere de Chronos ; mais il y a
eu deux Chronos comme on peut le voir
par le fragment de Sanchoniathon ancien
auteur Phénicien . Le premier Chronos eft
Noë , le fecond eſt Ham ; le Poëte Nonnus
dit auffi que le nom d'Hammon chez les
Arabes étoit Chronos. Il eft donc vrai que
Japet étoit frere du fecond Chronos &
fils du premier , par conféquent oncle
d'Ofiris.
Je penfe auffi comme M. Newton que
ce même Japet eft Neptune , mais non
point Python ou Typhon. Eft- il donc fi
difficile de reconnoître ce Python dans
Phuth , frere de Mefraïm . Ham avoit eu
l'Afrique en partage , il la diftribua à ſes
enfans. Chus eut l'Ethiopie , & depuis on
a toujours appellé les Ethiopiens des Chufites
; Mefr , Mifor , ou comme l'appelle
158 MERCURE DE FRANCE.
l'Écriture Sainte , Mefraïm , eur l'Egypte
qui porte encore aujourd'hui fon nom ;
Canaan eut le païs de ce nom , & enfin
Phuth cut les païs qui font à l'occident
de l'Egypte.
(1) Sur ces entrefaites , Amenophis
» quitta la Baffe-Egypte , & vint à Mem-
" phis fuivi par les reftes de l'armée Ethio-
»pienne de fon pere ; étant arrivé dans
» ce païs , il fit paffer le Nil dans un autre
» canal , fous un Pont neuf qu'il bâtit en-
» tre deux montagnes ; en même- tems if
»bâtit & fortifia cette ville contre Ofarfiphus
, & l'appella de fon nom Amenoph
» ou Memphis ».
Cet Amenophis comme nous l'avons
déja infinué eſt le même que Menès fondateur
de la Monarchie Egyptienne . Le nom
bien orthographié eft Manof on Menouf
comme les Arabes prononcent. Les Grecs
ont étrangement corrompu ce nom . Ils
l'ont écrit tantôt Menevis , Mnevis , Memphis
, tantôt Menophis Minevis , Meneus ,
Menes , Menon , & c . car on le trouve écrit
de toutes ces manieres. Ce nom fignifie
ville , habitation . Ainfi on appelloit MenoufMefr
ou la ville de Mefraim , celle
que les Grecs appellerent toujours Memphis
, mais que les Orientaux nomment
(1) Newton , p. 103.
DECEMBRE . 1755. 159
encore aujourd'hui Manof , Monf & Mefr.
Hérodote & Jofephe attribuent fa fondation
à Menès . En un mot , Menès n'a été
appellé ainfi que du nom de la ville qu'il
avoit fait bâtir ; car fon véritable nom
étoit Mefr , ou Mifor, comme il eft appellé
dans le fragment de Sanchoniathon .
M. Newton place cette expédition d'Amenophis
fept ans après celle des Argonautes
, c'eſt - à - dire , l'an 930. Eft- il vraifemblable
que la ville de Memphis ait été
bâtie fi tard ?
« (1 ) Il eft für que cet Hercule de Tyr
»ne fçauroit être plus ancien que la guerre
» de Troye , parce que les Tyriens ne
» commencerent à voyager fur la Médi
terranée , qu'après cette guerre..... ( 2)
Jofephe fait mention d'un autre Hercule
» plus ancien , en l'honneur duquel Hiram
fit bâtir un Temple à Tyr : peut- être y
» avoit-il auffi avant lui un Hercule de
» Tyr qui avoit établi le commerce des
Tyriens fur la Mer Rouge , du tems de
David & de Salomon »..
Sans doute il y avoit un ancien Hercule,
& bien antérieur à Salomon & à David.
Il y en avoit un comtemporain d'Oficis.
Il étoit fils du Nil , felon Ciceron , c'eſt-
( 1 ) Newton , p. 118. (2 ) Ibid. p. 119.
160 MERCURE DE FRANCE.
à - dire , fils de Ham , frere par conféquent
d'Ofiris ou Mefr .
Je dis qu'Hercule étant qualifié fils du
Ni , on doit entendre par là qu'il étoit fils
de Cham ; on en peut voir la raifon dans
la réflexion que j'ai faite précédemment
fur la page 102 de M. Newton . Le nom
d'Hercule ne fe trouve point parmi les enfans
de Ham , auffi n'étoit-ce là qu'une
épithete qui , felon la remarque ingénieufe
de M. le Clerc , paroît ne fignifier rien
autre chofe que Marchand , Négociant
Harokel . Mais écoutons l'Auteur de l'Etymologicon
Megad : Tìv H'ganaŭv qasì , x 1à
των λουπλέων διαλεκτον , ΧΩΝΑ λέγεθαι .
Hercule eft appellé Cona dans le Dialecle
1 Egyptien. Méconnoîtra t'on ici Canaan ou
Cna frere d'Ofiris ? Eufebe à la fuite du
fragment de Sanchoniathon , qualifie Ofiris
, frere de XNA , le premier , dit- il ,
qui ait été appellé Phénicien par les étrangers.
Hercule eft donc Canaan fils de Ham:
auffi les Grecs font -ils Hercule fils de Jupiter
, & en Egypte on ne connoiffoit
point d'autre Jupiter qu'Hammon ou Ham.
Quant à l'épithète d'Harokel , Marchand ,
elle n'a rien de ridicule. Canaan fe diftingua
par fon grand commerce , au point
que dans l'Ecriture même Cnani fignifie
un Marchand. Dans Etienne de Byzance
DECEMBRE. 1755. 161
XNA exprime la Phénicie , & xv un
Phénicien , ainfi on ne doit point ranget
cette étymologie au nombre des conjectures.
Hercule a été encore appellé Mélicerte
, mais ce nom ne fignifie que Roi de
la ville .
»(1 ) Après que les Phéniciens & les Grecs
» eurent reçu des Egyptiens l'art de naviger
, & la maniere de faire de longs
» vaiffeaux à voiles & à un rang de rames ,
» les Sidoniens porterent leur commerce
» dans la Gréce , & le continuerent pen-
» dant 50 ans.
Ce que dit ici M. Newton manque
d'exactitude. Les Phéniciens font les plus
anciens commerçans , & les premiers navigateurs
non -feulement ils ont les premiers
trouvé l'art de la navigation (2 ) , mais
encore ils ont appris aux autres peuples à
donner des batailles fur mer , à ufer du
droit de la royauté , & à foumettre les
peuples voifins. Le nom feul d'Hercule
qui a fait tant de bruit parmi les Grecs ,
prouve bien que les Phéniciens ont fçu
profiter d'abord de la fituation avantageufe
de leur païs pour le commerce maritime.
Marsham , page 109 , cite un paſſage
de Jofephe , qui fait voir que les Egyptiens
(1 ) Newton, p. 121. ( 2 ) Sanchoniathon . Stra
bon , L. 16. Pline , L. s . c. 12, Jofeph . Antiq.
162 MERCURE DE FRANCE.
n'ont été connus des Grecs que par le canal
des Phéniciens .
( 1 ) Du tems d'Erechthée , Roi d'A-
» thenes , & de Celeus , Roi d'Eleufis ,
» Cerès vint dans l'Attique , éleva Tripto-
» leme , fils de Celeus , & lui apprit à femer
» des grains ; elle coucha avec Jafon , &c.
Comment M. Newton n'a-t'il point vu
que cette Cerès étoit Egyptienne , & femme
d'Oɓiris , conféquemment qu'il ne s'agit
ici que de l'introduction de fon culte
dans la Grece ? (2) Erechthée étoit Egyp
tien; pendant une famine qui défoloit la
Grece , il y tranfporta des blés : il fut établi
Roi par les Athéniens en reconnoiffance
de ce bienfait. Erechthtée leur enfeigna les
facrifices de Cerès , & établit à Eleufis les
myfteres de cette Décffe , & des Prêtres
pour en obferver les pratiques fur le mo
dele de ceux d'Egypte.
Cette époque de l'introduction des myf
teres de Ĉerès dans la Grece eft fixée par
les Interprêtes des marbres d'Arondel à
Fan 1426 avant J.C. environ 280 ans avant
la guerre de Troye. M. Newton la fixe à
Pan rozo , la différence eft de 396 : est- ce
là ce qu'il appelle ne pas porrer l'exactitude
jufqu'à une année près ?
(1) Newton, p. 141. ( 2 ) Diodore.
DECEMBRE. 1755. 163
ود
» (1) Au retour de Séfoftris en Egypte ,
» fon frere Danaus attenta non-feulement
» à fa vie , comme on a déja dit , mais
» commanda encore à fes cinquante filles
qui épouferent les fils de Séfoftris , de
» tuer leurs maris , après quoi il fe fauva
d'Egypte fur un long vaiffeau , & c .
"
و ر
Dans la chronique abrégée à l'époque
956 , M. Newton dit » Séfac eft tué par
» fon frere Japet .
Si l'on fuppofe , avec M. Newton , que
Séfoftris foit le même que Séfac & qu'O
firis , il faudra dire auffi que ce Prince a
été tué par un de fes freres. Après avoir
prouvé plus haut la fauffeté de cette prétendue
identité , fi le fait fe trouvoit être
le même , ce ne pourroit être qu'un effet
du pur hazard ; mais comme il eft entiérement
faux , & que Diodore nous dit ,
» que Séfoftris ayant perdu la vue après un
>>regne de 33 ans , fe donna volontairement
» la mort » (2 ) , il eft vifible que M. Newton
ne marque cet affaffinat que pour foutenir
le parallele qu'il a établi entre Séfoftris
, Oficis & Séfac. Pourquoi tromper
fes Lecteurs , altérer les faits , & jetter de
l'obfcurité où il n'y en a point?
"
En lifant ces paffages dans M. Newton ,
( 1) Newton , p. 144. ( 2 ) Diodore , L. 1.
164 MERCURE DE FRANCE.
il me femble entendre quelqu'un qui dit ,
Louis XIV qui eft le même que Philippe
Augufte & que Clovis , eft tué par fon
frere Pharamond ; les Anachronismes de
M. Newton ne font guere moins violens.
(1 ) Hérodote dit que les Phéniciens
qui fuivirent Cadmus , introduisirent
» plufieurs fciences dans la Grece ; car il y
» avoit parmi ces Phéniciens des gens ap-
» pellés Curetes , qui étoient plus verfés
» dans les Arts & dans les fciences de la
Phénicie que d'autres les uns s'établi
» rent dans la Phrygie , où ils furent appellés
Corybantes , les autres dans la
» Crete , où on leur donna le nom d'Idoi
» Dactyli , &c.
Ces gens , appellés Curetes , Corybantes,
&c. étoient des Prêtres Phéniciens , comme
les noms qu'ils portent nous l'apprennent .
Curete , fignifie châtré , parce que ces Prêtres
, comme l'on fçait , étoient prefque
tous eunuques. Corybante fignifie Sacrificateur,
Prêtre , de Corban , facrifice , obla
tion les Chretiens Orientaux fe fervent
encore aujourd'hui de ce terme pour exprimer
le facrifice de la Meffe.
:
» (2 ) Les deux premiers Rois de Crete
qui regnerent après l'arrivée des Cure-
(1 ) Newton, p. 154. (1 ) Ibid. p . 158 .
DECEMBRE. 1755. 169
» tes , furent Afterius & Minos. Europe
» fut femme d'Afterius & mere de Minos :
» les Curetes du mont Ida furent fes compatriotes
, & vinrent avec elle ; .... par
» conféquent il faut qu'Afterius , Europe ,
» & Minos foyent le Saturne , la Rhea , &
» le Jupiter des Crétois .
Je doute que ce raifonnement foit bien
conféquent , puifque les Curetes & les Corybantes
qui fuivirent Cadmus en Grece ,
étoient des Prêtres Phéniciens : il eft , ce
me femble , plus naturel de penfer qu'a
vec la connoiffance des Arts & des fciences
, ils porterent encore celle des Divinités
qui étoient adorées dans la Phénicie ,
& dont ils étoient les Miniftres .
» ( 1 ) Car les Phéniciens dans leur pre-
» premier voyage en Grece donnoient le
» nom de Jaopater , Jupiter à tous les
» Rois.
Je doute très-fort que le nom de Jupiter
ait été connu des Phéniciens ; il n'étoit
feulement pas en ufage en Grece . Je ne
connois que les Latins qui l'aient employé
pour exprimer des Princes , fondateurs de
quelques Empires , des Héros qui par leurs
belles actions avoient mérité la déïfication
; mais jamais il n'a été un nom géné
rique de tous les Rois.
(1 ) Newton , p. 158.
166 MERCURE DE FRANCE.
Ce nom de Jupiter ne vient pas de Jaopater
, il vient du Cevs des Grecs , & le gus
des Grecs vient lui -même du Dzew des
Orientaux, qui fignifie Poffeffeur , Maître ,
Seigneur.
Les Grecs donnoient affez indiftinctement
le nom de Zeus à tous leurs Dieux ,
comme les Phéniciens donnoient aux leurs
celui de Baal , Bel .
( 1 ) Macrobe dit qu'après la mort de
» Saturne , Janus lui dreffa un autel com-
» me à un Dieu , établit des cérémonies fa-
» crées , & inftitua les Saturnales , & qu'on
» lui facrifioit des hommes , jufqu'à ce
qu'Hercule emmenant en Italie les bef-
» tiaux de Geryon , y abolît cette coutu-
» me ; on peut voir par ces facrifices hu-
» mains que Janus étoit un defcendant de
» Lycaon ; ce caractere a quelque rapport
» à notrus.
Ce que M. Newton dit ici n'eſt pas juſte :
ces facrifices inhumains qu'on faifoit en
l'honneur de Molok ou Saturne , ou Chronos
, ( car c'eft le même Dieu fous différens
noms ) avoient pris leur origine dans la
Phénicie , & n'avoient aucun rapport aux
Rois d'Italie ou de Grece . Les Phéniciens ,
Hercule lui-même , fondateur du Royau-
(1 ) Newton , p. 164.
!
:
DECEMBRE 1755. 167
me de Phénicie , porterent ces facrifices
partout où leur religion put prendre racine
, de même que Didon les porta en Afrique
, lorfqu'elle y alla fonder Carthage.
Âu refte la religion Phénicienne pouvoit
être connue en Afrique avant l'arrivée de
Didon , puifqu'Hercule avoit pouffé fes
découvertes par mer jufqu'au détroit de
Gades , où il fit élever ces fameufes colonnes
connues fous fon nom. M. Newton
convient lui-même , page 171 , que l'idolâtrie
commença dans la Chaldée & l'Egypte
, d'où elle s'étendit dans la Phénicie
& les pays voifins longtems avant qu'elle
eût été introduite en Europe.
( 1 ) Cependant du tems de Moyfe ,
» tous les charriots de l'Egypte , avec lef-
» quels Pharaon pourfuivit Ifraël , ne
» montoient qu'à 600.
"
Cela eft vrai : mais en doit-on conclure
que l'Egypte n'en poffédoit pas un nombre
beaucoup plus confiderable ? Pharaon dans
la pourfuite des Ifraelites , à laquelle il ne
pas, ne put fe fervir
charriots qui pouvoient être alors à Tanis
& dans les environs ; il n'eut pas le tems
d'en raffembler davantage.
s'attendoit
que
des
Voilà , Monfieur , les obfervations que
(1 ) Newton , p . 178 .
168 MERCURE DE FRANCE.
j'avois à faire fur la Chronologie des Grecs,
par M. Newton. Je n'ai relevé que les
Anachronifmes qui m'ont paru les plus
hardis : j'aurois pu en relever un plus grand
nombre , puifque tout eft Anachronisme
dans un ſyſtème fondé fur de pareils principes.
Je fuis réellement fâché qu'un auffi
grand homme fe foit trop prévenu en faveur
de l'obfervation d'Eudoxe pour la fixation
de l'époque des Argonautes. Avec une
lecture vafte , il étoit en état de faire d'importantes
découvertes en fait de Chronologie
: j'en juge par ce fyftême , que je crois
faux , mais qui par là même a demandé un
effort de génie d'autant plus grand . La
vérité ne coute pas tant de peines à dévoiler.
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Résumé : Suite de la Lettre de M. L. R. Desh. P. R. Sur la Chronologie de M. Newton.
Le texte critique la chronologie de M. Newton, notamment son identification de Sésac avec Osiris. Newton affirme que Sésac monta sur le trône d'Égypte pendant le règne de Salomon, mais le texte conteste cette affirmation en soulignant que le culte du bœuf, symbole d'Osiris, existait déjà du temps de Moïse. Des historiens comme Diodore et Plutarque sont cités pour montrer que les habitants de la Thébaïde étaient les plus anciens Égyptiens et que Thèbes était leur capitale. Le texte met en avant que les historiens attribuent à Osiris l'enseignement de l'agriculture aux Égyptiens et son rôle de législateur. Il souligne également que l'Égypte était déjà un grenier pour les peuples voisins du temps de Joseph et que son gouvernement était loué dans l'Écriture Sainte. Le texte discute de la détermination de l'année solaire par Osiris et de la correction du calendrier par Jules César. Il mentionne Amenophis, qui aurait fixé l'année égyptienne à 365 jours, et le compare à Menès, fondateur de la monarchie égyptienne. Le texte explore les différentes appellations d'Osiris dans diverses cultures et les confusions possibles entre les noms de Belus, Bacchus, Mars et Nemrod. Le texte aborde également la guerre des Dieux et des Géants, impliquant Japet et Atlas, et la fondation de Memphis par Amenophis, identifié comme Menès. Il conclut en discutant de l'ancienneté d'Hercule et de ses liens avec Osiris et Ham. Le texte critique les inexactitudes de M. Newton concernant les relations entre les Égyptiens, les Grecs et les Phéniciens. Il mentionne que les mystères de Cérès en Grèce proviennent d'Égypte et que les Phéniciens ont introduit diverses sciences en Grèce. Les Curetes, Corybantes et autres prêtres phéniciens sont décrits comme ayant joué un rôle clé dans la transmission des connaissances et des pratiques religieuses. Enfin, le texte conteste les affirmations de M. Newton sur les sacrifices humains et l'origine de l'idolâtrie, affirmant que ces pratiques proviennent de la Phénicie et de l'Égypte, bien avant leur introduction en Europe.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 204
AUTRE.
Début :
Tu ne formas jamais ni des voeux, ni d'accens, [...]
Mots clefs :
Voeux, Hommage, Jupiter, Phébus
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE.
AUTRE.
Tu ne formas jamais ni des voeux , ni d'accens ,
Plus dignes du grand homme à qui tu rends hom
mage ;
Jupiter eft jaloux de ton nouvel encens ,
Et Phébus l'eft de ton langage.
Tu ne formas jamais ni des voeux , ni d'accens ,
Plus dignes du grand homme à qui tu rends hom
mage ;
Jupiter eft jaloux de ton nouvel encens ,
Et Phébus l'eft de ton langage.
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13
p. 47-51
LE TEMPS, Ode.
Début :
QUEL est l'objet qui me frappe ? [...]
Mots clefs :
Désir, Saturne, Mort, Jupiter
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LE TEMPS, Ode.
LE TEMPS ,
ODE.
QUEL eft l'objet qui me frappe ?
Approchons : Ciel je le perds ;
Il fuit , il vole , il s'échappe
Dans l'immensité des airs.
En vain je m'ouvre un paffage ,
Il fe voile d'un nuage
Qui le dérobe à mes yeux.
48 MERCURE
DE
FRANCE
.
Téméraires que nous ſommes ,
Les Dieux puniffent les hommes
D'un defir trop curieux .
N'importe , perçons la nue.
Je vois Saturne en courroux :
Sa barbe longue & chenue
Defcend jufqu'à les genoux.
Sa Clepfidre redoutable
D'une mort inévitable
M'annonce la dure loi ;
Miniftre des deſtinées ,
Il meſure les années
F
Que Cloto file pour moi.
A fon afpect je friſſonne ;
Mon fort eft entre les mains ;
Il ne fait grace à perfonne
Ce deftructeur des humains.
De mes fens l'horreur s'empare :
En vain à ce Dieu barbare
Je voudrois avoir recours :
Armé d'une faulx tranchante ,
Au moment que je le chante ,
Il moiffonne mes beaux jours .
Contre ce Tyran du Monde
Nous nous révoltons en vain
La Tèrre en fecours féconde
A beau nous offrir fon fein.
Ce
JANVIER . 1763 . 49
*
Ce fer , ce marbre , ce cuivre ,
Pour toujours font- ils revivre
Les noms les plus éclatans !
Malgré nos pompeux hommages,
Les héros & leurs images
Sont tributaires du Temps.
Quel monument affez ferme
Des Ans brave les éfforts ?
Le Tybre a vu le Dieu * Terme
Difparoître de fes bords.
D'un grand revers , grand exemple !
Ce Dieu fi fier , dont le Temple
Ne peut être déplacé ,
Et dont le pouvoir fuprême
Réſiſte à Jupiter même ,
Par le Temps eft terraſſé.
1
Vante moins tes Pyramides ,
Memphis , oùfuyant des Cieux ;
Porterent leurs pas timides
Jupiter & tous les Dieux.
Elles montoient juſqu'aux nues :
Que font- elles devenues ?
L'oeil qui les cherche eſt ſurpris.
Tarquin ayant voulu élever un Temple à Jupiter
, fur la ruine de quelques autres , celui du
Dieu Terme fubfifta toujours dans fa même place ,
conformément à la voix des Oracles.
I. Vol. C
50 MERCURE DE FRANCE .
Un Dieu cruel les dévore ;
A peine en voit-on encore
De pitoyables débris.
Les temps vole , & fous fon aîle
Naiffent d'illuftres revers ;
Il détruit , il renouvelle
La face de l'Univers.
Changement , chûre funefte ,
Voilà tout ce qui nous reſte
Des Empires & des Rois !
Leur grandeur eft diſparue ;
Je ne vois qu'une charrue
Où Troye étoit autrefois.
Temps , n'eft-il point de barrière
Contre ta fatalité ?
Dans une noble carrière
Cherchons l'immortalité..
Oui , l'homme a le droit ſuprême
De furvivre à l'homme même :
Je me livre à cet espoir.
Je vivrai , je l'ofe croire ;
Et le Temple de Mémoire
S'ouvre pour me recevoir.
* Des champs confacrés à Flore ,
M'offrent de célébres jeux.
Lauriers , que j'y vois éclore ,
*Les Jeux Floraux.
JANVIER. 1763 . SI
Combien vous flattez mes voeux !
L'immortelle recompenfe
Qu'un jufte choix y diſpenſe ,
Eft un bien où je prétends.
Dieux ! Quelle gloire environne
Les écrits qu'on y courronne !
Seuls , ils triomphent du Temps.
Dignum laude virum Muſa vetat mori.
Horat. Lib. 4. Od. 8.
Par M. D ... ɗH ...
ODE.
QUEL eft l'objet qui me frappe ?
Approchons : Ciel je le perds ;
Il fuit , il vole , il s'échappe
Dans l'immensité des airs.
En vain je m'ouvre un paffage ,
Il fe voile d'un nuage
Qui le dérobe à mes yeux.
48 MERCURE
DE
FRANCE
.
Téméraires que nous ſommes ,
Les Dieux puniffent les hommes
D'un defir trop curieux .
N'importe , perçons la nue.
Je vois Saturne en courroux :
Sa barbe longue & chenue
Defcend jufqu'à les genoux.
Sa Clepfidre redoutable
D'une mort inévitable
M'annonce la dure loi ;
Miniftre des deſtinées ,
Il meſure les années
F
Que Cloto file pour moi.
A fon afpect je friſſonne ;
Mon fort eft entre les mains ;
Il ne fait grace à perfonne
Ce deftructeur des humains.
De mes fens l'horreur s'empare :
En vain à ce Dieu barbare
Je voudrois avoir recours :
Armé d'une faulx tranchante ,
Au moment que je le chante ,
Il moiffonne mes beaux jours .
Contre ce Tyran du Monde
Nous nous révoltons en vain
La Tèrre en fecours féconde
A beau nous offrir fon fein.
Ce
JANVIER . 1763 . 49
*
Ce fer , ce marbre , ce cuivre ,
Pour toujours font- ils revivre
Les noms les plus éclatans !
Malgré nos pompeux hommages,
Les héros & leurs images
Sont tributaires du Temps.
Quel monument affez ferme
Des Ans brave les éfforts ?
Le Tybre a vu le Dieu * Terme
Difparoître de fes bords.
D'un grand revers , grand exemple !
Ce Dieu fi fier , dont le Temple
Ne peut être déplacé ,
Et dont le pouvoir fuprême
Réſiſte à Jupiter même ,
Par le Temps eft terraſſé.
1
Vante moins tes Pyramides ,
Memphis , oùfuyant des Cieux ;
Porterent leurs pas timides
Jupiter & tous les Dieux.
Elles montoient juſqu'aux nues :
Que font- elles devenues ?
L'oeil qui les cherche eſt ſurpris.
Tarquin ayant voulu élever un Temple à Jupiter
, fur la ruine de quelques autres , celui du
Dieu Terme fubfifta toujours dans fa même place ,
conformément à la voix des Oracles.
I. Vol. C
50 MERCURE DE FRANCE .
Un Dieu cruel les dévore ;
A peine en voit-on encore
De pitoyables débris.
Les temps vole , & fous fon aîle
Naiffent d'illuftres revers ;
Il détruit , il renouvelle
La face de l'Univers.
Changement , chûre funefte ,
Voilà tout ce qui nous reſte
Des Empires & des Rois !
Leur grandeur eft diſparue ;
Je ne vois qu'une charrue
Où Troye étoit autrefois.
Temps , n'eft-il point de barrière
Contre ta fatalité ?
Dans une noble carrière
Cherchons l'immortalité..
Oui , l'homme a le droit ſuprême
De furvivre à l'homme même :
Je me livre à cet espoir.
Je vivrai , je l'ofe croire ;
Et le Temple de Mémoire
S'ouvre pour me recevoir.
* Des champs confacrés à Flore ,
M'offrent de célébres jeux.
Lauriers , que j'y vois éclore ,
*Les Jeux Floraux.
JANVIER. 1763 . SI
Combien vous flattez mes voeux !
L'immortelle recompenfe
Qu'un jufte choix y diſpenſe ,
Eft un bien où je prétends.
Dieux ! Quelle gloire environne
Les écrits qu'on y courronne !
Seuls , ils triomphent du Temps.
Dignum laude virum Muſa vetat mori.
Horat. Lib. 4. Od. 8.
Par M. D ... ɗH ...
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Résumé : LE TEMPS, Ode.
Le texte est une ode au Temps, explorant sa nature fugace et destructrice. Le poète observe que le Temps échappe à sa compréhension, se voilant d'un nuage. Il décrit Saturne, ministre des destinées, mesurant les années de la vie humaine avec une clepsydre, symbolisant l'inévitabilité de la mort. Le poète exprime sa terreur face à ce destin implacable, soulignant que même les héros et leurs monuments ne peuvent résister à la marche du Temps. Les pyramides d'Égypte, autrefois majestueuses, ne sont plus que des ruines. Le Temps détruit et renouvelle constamment l'univers, laissant seulement des vestiges des empires passés. Le poète cherche néanmoins une forme d'immortalité à travers ses œuvres, espérant que ses écrits triompheront du Temps et seront couronnés dans des concours littéraires comme les Jeux Floraux. Il cite Horace pour affirmer que la Muse empêche les hommes dignes de mourir.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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