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1
s. p.
L'HYVER, POEME.
Début :
Des froides régions du Pole [...]
Mots clefs :
Ombre, Transports, Dieu, Neiges, Glaces
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texteReconnaissance textuelle : L'HYVER, POEME.
L'HY VER ,
POEM E.
Des froides régions du Pole ES
Déchaîné contre nos climats
Le plus fier des enfans d'Eole-
Livre déja d'affreux combats
Dans nos champs d'où Zéphir s'envole ,
Et dans nos jardins fans appas ,
A iij
6 MERCURE DE FRANCE,
Où fur un trône de frimats
Régne l'hyver qui les défoles
Bientôt en proie à la rigueur
De l'ennemi qui la menace ,
La Nature dans la douleur
Préſſent la prochaine diſgrace ,
Armé de neiges & de glaces ,
.Il fond fur elle avec fureur :
Il en triomphe avec audace :
Elle tombe fous fon vainqueur ;
Et par ce tyran deſtructeur
Voit de fa beauté qui s'éfface
S'éteindre l'éclat enchanteur.
De fon ancienne fplendeur
*** Je ne découvre aucune trace ;
Ce n'eft plus qu'une informe maffe
Prèfque fans vie & fans couleur.
De leur richeffe & de leur grace ,
Tous les Arbres . font dépouillés.
Plus de Parterres émaillés ;
Il n'en eft resté que la place.
Le fommet de ces buiffons verds
Ne fe couronne plus de roſes:
Le doux parfum des fleurs éclofes
Ne s'éxhale plus dans les airs.
Ces Vergers que chargeoit Pomone ,
De tous les trésors de l'Automne ,
Ont perdu leurs charmes divers.
Ces côteaux de vignes couverts ,
"
MARS. 1763.
Ces belles & riches contrées
Où flottoient les moiffons dorées>>
Se changent en d'affreux déferts.
Dès oifeaux au fond des bocages , '
Nous n'entendons plus les ramages :
Ils ont oublié leurs concerts ,
Depuis que ces lieux font fauvages.
Des ruiffeaux qui fur ces rivages
Sembloient & fi purs & fi clairs ,
On ne voit plus couler les ondes ;
Au fond de leurs grottes profondes
Les Nayades font dans les fers.
Toi- même , Aréthufe , en ta fuite , "
Je te vois tremblante , interdite :
Les glaces enchaînent ton cours;
Alphée , ardent à ta pourſuite,,
De cet avantage profite ;
Il femble abréger fes détours ;
A gros bouillons il précipite
Ses flots poufflés par les amours.
Mais près d'atteindre fon Amante ,
Et fur le point de la faifir ,
Le fort va tromper fon attente :
Son bonheur va s'évanouir.
Tout-à-coup fa marche eft plus lente :
Il fent fon onde s'épaiſſir :
Ses Flots durciffent : il s'arrête
Et perd l'efpoir de fa conquête
Au moment même d'en jouir.
A iv
80 MERCURE DE FRANCE .
Bergers ; qui tantôt fous ces hêtres
Faifiez de vos chanſons champêtres
Retentir au loin les échos ,
Vous ne venez plus dans ces plaines ,
Suivant des routes incertaines ,
Conduire à l'écart vos troupeaux ;
Et du pied de ces arbriſſeaux
Où vous fouliez l'herbe nouvelle
Qui n'aît fur le bord des ruiffeaux ,
Tandis que votre chien fidéle ,
Infatigable fentinelle ,
Jeignoit à vos foins ſes travaux
Le fon perçant de vos pipeaux
>
Ne s'étend plus dans les campagnes ;
Par des airs & des chants nouveaux
Et des vallons & des montagnes
Vous n'égayez plus le repos.
Nous ne voyons plus ces Bergères
Auffi douces que leurs
agneaux ,
Aux accens de vos chalumeaux ,
Sur la furface des bruyeres®
Imprimant leur traces légères ,
Danfer à l'ombre des ormeaux.
Du fein des champêtres afyles ,
Un Peuple d'habitans nouveaux
Repaffe au milieu de nos Villes ,
Laiffant fes Parcs & fes châteaux.
Failons comme eux , belle Délie
MARS. 1763.
Quittons les bois & les hameaux ,
Quittons la campagne flétrie ,
Et revenons dans la Cité
Chercher cette fociété
Que des champs l'hyvex a bannie. "
Entrons dans ces cercles brillans
Et dans ces falles décorées ,
Par cent flambeaux moins éclairées
Que par l'éclat des diamans
Dont les femmes fe font parées.
Olons à leurs caquets bruyans
Mêler nos voix plus modérées :
Tenons mille propos plaifans :
Rions tout bas des fimagrées
Des airs fadement importans ,
Er des manières bigarrées
De tous ces êtres différens
Des coquettes , des mijaurées ,
Des petits- maîtres fémillans ,
Des hommes à petits talens ,
De leurs protectrices titrées ,
De leurs protecteurs ignorans,
On apporté la table verte ,
Délie , armons-nous d'un fizain :
Jouons , & fans plaindre la perte ,
Et fans nous applaudir du gain.
;
Mais l'ennui commence à nous prendre ?
Fuyons ces lieux allons nous rendre
"
A v
10 MERCURE DE FRANCE.
Au Temple du Dieu des Accords:
Quels fons flatteurs s'y font entendre !
Dans le langage le plus tendre
L'Amour exprime les tranſports .
Quelle touchante mélodie !
Au goût vanté de l'Aufonie ,
L'Art François unit les efforts ,
Et la Nymphe de l'harmonie
Se pare de tous les trésors .
La jeune & fouple Terpsichore
S'avançant d'un pas gracieux , ..
A tant de pompe ajoute encore
L'appareil brillant de ſes jeux .
Mais que vois-je ? Du haut des nuės ,
Au milieu des airs fufpendues ,
Les Dieux deſcendent fur des chars
Et quittant les Royaumes fombres ,
Les Eumenides & les Ombres
Viennent éffrayer mes regards.
A cette illufion étrange ,
Tandis que je livre mes yeux ,
D'un coup de fifflet tout fe change y
It je me trouve en d'autres lieux.
Où font ces rians payſages ,
Ces jardins fi beaux , ces ombrages .
·
Formés par des berceaux épais ?
Je vois la mer & fes rivages ,
Des rochers couverts de naufrages ,
Remplacer ces bords pleins d'attraits.
Que dis-je ? A ces horribles plages
MAR S. 1763. 11:
Succède un portique , un palais 3
Et quand j'admire ces ouvrages ,
Tout-à-coup des refforts fecrets ,
Au lieu de ces pompeux objets ,
M'offrent de lugubres images ;
Un tombeau bordé de cyprès ,
Un Autel qui s'éleve auprès ,
A l'ombre de ces noirs feuillages ; .
Et dont la Mort garde l'accès.›
De ce Spectacle magnifique ,
Eh bien , fommes- nous fatisfaits !
Les vers , la danſe , la mufique ,
Et cet affemblage magique
De tant de merveilleux effets
"
Ont fans doute , en notre âme éprife
D'une aimable & vive furpriſe-
Produit le doux faifiſſement : :
Mais tandis que l'aſpect frappant
De cette pompe enchantereffe ,.
Dans mes efprits porte fans ceffe :
Le charme du raviffement ,
Et plonge mes fens dans l'yvreffe ,
Au milieu de tant de richeſſe ,,
Lé coeur eft dans le dénûments :
He ne voit rien qui l'intéreſſe ,,
Qui flatte fa délicateffe ,'
>
Qui lui fourniffe un fentiments " .
Oui,même quand le tien palpire 5 ,
Quand il pouffe un fréquent foupit 5 ,
Asvj
12 MERCURE DE FRANCE.
Charmante Arnoult , à m'attendrir
C'eſt en vain que ta voix m'invite.
Tu fais étonner & ravir :
De tes fons j'admire les charmes ;
Mais c'eft fans répandre des larmes ,
Que tu me vois leur applaudir .
Demain nous pleurerons , Délie ,
Nous pleurerons avec Clairon :
L'Art , la Nature , le Génie
Ont monté la voix fur leur ton ,
Et mis dans fon expreffion
L'âme , la force , l'énergie ,
Tout le feu de la paſſion .
Zelmire , par elle embellie ,
Fera paffer jufqu'en nos coeurs
Le fentiment de fes douleurs.
Ou toi , Dumesnil , d'Athalie
Tu feras parler les fureurs ,
L'ambition , la rage impie :
Tu rempliras mes fens d'horreurs.
En déteftant ta barbarie ,
Je gémirai fur les malheurs
De la victime pourſuivie
Pár tes facrilèges noirceurs.
De Jofabet , d'éffroi ſaiſie ,
Je partagerai les terreurs :
Comme elle allarmé fur la vie ,
Du feul eſpoir de ſa patrie ,
MARS. 1763. 13
Je joindrai mes pleurs à fes pleurs.
Du théâtre volons à table ;
Que la joie y
vole avec nous ;
Qu'elle répande un charme aimable
Sur ce qui doit flatter nos goûts.
Eh ! qu'eft- ce que la bonne chère
Que n'anime point la gaité?
Un plaifir qui n'eft point gouté ,
L'ennui dreffant fon fanctuaire
Sur celui de la volupté.
Viens donc , viens , charmante Déeſſe
Viens avec les Ris & les jeux
Dont la troupe te fuit fans ceffe.
Ecarte , bannis de ces lieux
Le filence, le férieux ,
Ces noirs fignaux de la triſteſſe :
Qu'ils faffent place à l'allégreffe .
Viens à ces apprêts faftueux ,
De l'art aidé de la richeſſe ,
Joindre encore tes tranſports heureux !
Sans ta puiffance favorable ,
Sans toi ce fouper fomptueux
Ne feroit que délicieux :
Fais plus ; fais qu'il foit agréable;
Viens le rendre voluptueux .
De toutes parts le nectar coule,
Et l'on s'en abbreuve à longs traits
Dans le vin pétillant & frais
1
•
144 MERCURE DE FRANCE..
Les plaiſirs furnagent en foule.
Parmi les flots de ta liqueur ,
Ils s'élancent de la bouteille :
Dieu des Buveurs , Dieu de la treille ,
Ils embelliffent ta couleur.
Je vois cette troupe légère ·
Au gré d'une folâtre ardeur
Se trémouffer dans la fougère ; :
Je les fens en vuidant mon vèrre ·
Deſcendre avec toi dans mon coeur
Mais déja la nuit avancée
A fait les deux tiers de fon tour:
Bientôt à fon ombre éclipſée
Succédera le point- du-jour.
Le Peuple après un fommeil court :
Entr'ouvrant déja la paupière ,
S'apprête à revoir la lumière -
Dès qu'elle fera de retour.
Dans cette alcove folitaire
Conduis avec moi , Dieu d'Amour ,
Celle qui reflemble à ta mère ,
Qui fait l'ornement de ta cour ,
Et qu'à mon coeur to rends fi chère.
Guidés par ce Dieu tutélaire ,.
Retirons-nous fous ces rideaux ;
Que fon flambeau feul nous éclaire :
Sur ce lit couvert de pavots
Je crois voir l'Autel de Cythère..
MARS. 1763. IS
Délie , à mes tranſports nouveaux-
Ofe te livrer toute entiere ; :
En confommant l'heureux mystère ,
Tombons dans les bras du repos.
Par un nouveau Venu au Parnaſſe.
POEM E.
Des froides régions du Pole ES
Déchaîné contre nos climats
Le plus fier des enfans d'Eole-
Livre déja d'affreux combats
Dans nos champs d'où Zéphir s'envole ,
Et dans nos jardins fans appas ,
A iij
6 MERCURE DE FRANCE,
Où fur un trône de frimats
Régne l'hyver qui les défoles
Bientôt en proie à la rigueur
De l'ennemi qui la menace ,
La Nature dans la douleur
Préſſent la prochaine diſgrace ,
Armé de neiges & de glaces ,
.Il fond fur elle avec fureur :
Il en triomphe avec audace :
Elle tombe fous fon vainqueur ;
Et par ce tyran deſtructeur
Voit de fa beauté qui s'éfface
S'éteindre l'éclat enchanteur.
De fon ancienne fplendeur
*** Je ne découvre aucune trace ;
Ce n'eft plus qu'une informe maffe
Prèfque fans vie & fans couleur.
De leur richeffe & de leur grace ,
Tous les Arbres . font dépouillés.
Plus de Parterres émaillés ;
Il n'en eft resté que la place.
Le fommet de ces buiffons verds
Ne fe couronne plus de roſes:
Le doux parfum des fleurs éclofes
Ne s'éxhale plus dans les airs.
Ces Vergers que chargeoit Pomone ,
De tous les trésors de l'Automne ,
Ont perdu leurs charmes divers.
Ces côteaux de vignes couverts ,
"
MARS. 1763.
Ces belles & riches contrées
Où flottoient les moiffons dorées>>
Se changent en d'affreux déferts.
Dès oifeaux au fond des bocages , '
Nous n'entendons plus les ramages :
Ils ont oublié leurs concerts ,
Depuis que ces lieux font fauvages.
Des ruiffeaux qui fur ces rivages
Sembloient & fi purs & fi clairs ,
On ne voit plus couler les ondes ;
Au fond de leurs grottes profondes
Les Nayades font dans les fers.
Toi- même , Aréthufe , en ta fuite , "
Je te vois tremblante , interdite :
Les glaces enchaînent ton cours;
Alphée , ardent à ta pourſuite,,
De cet avantage profite ;
Il femble abréger fes détours ;
A gros bouillons il précipite
Ses flots poufflés par les amours.
Mais près d'atteindre fon Amante ,
Et fur le point de la faifir ,
Le fort va tromper fon attente :
Son bonheur va s'évanouir.
Tout-à-coup fa marche eft plus lente :
Il fent fon onde s'épaiſſir :
Ses Flots durciffent : il s'arrête
Et perd l'efpoir de fa conquête
Au moment même d'en jouir.
A iv
80 MERCURE DE FRANCE .
Bergers ; qui tantôt fous ces hêtres
Faifiez de vos chanſons champêtres
Retentir au loin les échos ,
Vous ne venez plus dans ces plaines ,
Suivant des routes incertaines ,
Conduire à l'écart vos troupeaux ;
Et du pied de ces arbriſſeaux
Où vous fouliez l'herbe nouvelle
Qui n'aît fur le bord des ruiffeaux ,
Tandis que votre chien fidéle ,
Infatigable fentinelle ,
Jeignoit à vos foins ſes travaux
Le fon perçant de vos pipeaux
>
Ne s'étend plus dans les campagnes ;
Par des airs & des chants nouveaux
Et des vallons & des montagnes
Vous n'égayez plus le repos.
Nous ne voyons plus ces Bergères
Auffi douces que leurs
agneaux ,
Aux accens de vos chalumeaux ,
Sur la furface des bruyeres®
Imprimant leur traces légères ,
Danfer à l'ombre des ormeaux.
Du fein des champêtres afyles ,
Un Peuple d'habitans nouveaux
Repaffe au milieu de nos Villes ,
Laiffant fes Parcs & fes châteaux.
Failons comme eux , belle Délie
MARS. 1763.
Quittons les bois & les hameaux ,
Quittons la campagne flétrie ,
Et revenons dans la Cité
Chercher cette fociété
Que des champs l'hyvex a bannie. "
Entrons dans ces cercles brillans
Et dans ces falles décorées ,
Par cent flambeaux moins éclairées
Que par l'éclat des diamans
Dont les femmes fe font parées.
Olons à leurs caquets bruyans
Mêler nos voix plus modérées :
Tenons mille propos plaifans :
Rions tout bas des fimagrées
Des airs fadement importans ,
Er des manières bigarrées
De tous ces êtres différens
Des coquettes , des mijaurées ,
Des petits- maîtres fémillans ,
Des hommes à petits talens ,
De leurs protectrices titrées ,
De leurs protecteurs ignorans,
On apporté la table verte ,
Délie , armons-nous d'un fizain :
Jouons , & fans plaindre la perte ,
Et fans nous applaudir du gain.
;
Mais l'ennui commence à nous prendre ?
Fuyons ces lieux allons nous rendre
"
A v
10 MERCURE DE FRANCE.
Au Temple du Dieu des Accords:
Quels fons flatteurs s'y font entendre !
Dans le langage le plus tendre
L'Amour exprime les tranſports .
Quelle touchante mélodie !
Au goût vanté de l'Aufonie ,
L'Art François unit les efforts ,
Et la Nymphe de l'harmonie
Se pare de tous les trésors .
La jeune & fouple Terpsichore
S'avançant d'un pas gracieux , ..
A tant de pompe ajoute encore
L'appareil brillant de ſes jeux .
Mais que vois-je ? Du haut des nuės ,
Au milieu des airs fufpendues ,
Les Dieux deſcendent fur des chars
Et quittant les Royaumes fombres ,
Les Eumenides & les Ombres
Viennent éffrayer mes regards.
A cette illufion étrange ,
Tandis que je livre mes yeux ,
D'un coup de fifflet tout fe change y
It je me trouve en d'autres lieux.
Où font ces rians payſages ,
Ces jardins fi beaux , ces ombrages .
·
Formés par des berceaux épais ?
Je vois la mer & fes rivages ,
Des rochers couverts de naufrages ,
Remplacer ces bords pleins d'attraits.
Que dis-je ? A ces horribles plages
MAR S. 1763. 11:
Succède un portique , un palais 3
Et quand j'admire ces ouvrages ,
Tout-à-coup des refforts fecrets ,
Au lieu de ces pompeux objets ,
M'offrent de lugubres images ;
Un tombeau bordé de cyprès ,
Un Autel qui s'éleve auprès ,
A l'ombre de ces noirs feuillages ; .
Et dont la Mort garde l'accès.›
De ce Spectacle magnifique ,
Eh bien , fommes- nous fatisfaits !
Les vers , la danſe , la mufique ,
Et cet affemblage magique
De tant de merveilleux effets
"
Ont fans doute , en notre âme éprife
D'une aimable & vive furpriſe-
Produit le doux faifiſſement : :
Mais tandis que l'aſpect frappant
De cette pompe enchantereffe ,.
Dans mes efprits porte fans ceffe :
Le charme du raviffement ,
Et plonge mes fens dans l'yvreffe ,
Au milieu de tant de richeſſe ,,
Lé coeur eft dans le dénûments :
He ne voit rien qui l'intéreſſe ,,
Qui flatte fa délicateffe ,'
>
Qui lui fourniffe un fentiments " .
Oui,même quand le tien palpire 5 ,
Quand il pouffe un fréquent foupit 5 ,
Asvj
12 MERCURE DE FRANCE.
Charmante Arnoult , à m'attendrir
C'eſt en vain que ta voix m'invite.
Tu fais étonner & ravir :
De tes fons j'admire les charmes ;
Mais c'eft fans répandre des larmes ,
Que tu me vois leur applaudir .
Demain nous pleurerons , Délie ,
Nous pleurerons avec Clairon :
L'Art , la Nature , le Génie
Ont monté la voix fur leur ton ,
Et mis dans fon expreffion
L'âme , la force , l'énergie ,
Tout le feu de la paſſion .
Zelmire , par elle embellie ,
Fera paffer jufqu'en nos coeurs
Le fentiment de fes douleurs.
Ou toi , Dumesnil , d'Athalie
Tu feras parler les fureurs ,
L'ambition , la rage impie :
Tu rempliras mes fens d'horreurs.
En déteftant ta barbarie ,
Je gémirai fur les malheurs
De la victime pourſuivie
Pár tes facrilèges noirceurs.
De Jofabet , d'éffroi ſaiſie ,
Je partagerai les terreurs :
Comme elle allarmé fur la vie ,
Du feul eſpoir de ſa patrie ,
MARS. 1763. 13
Je joindrai mes pleurs à fes pleurs.
Du théâtre volons à table ;
Que la joie y
vole avec nous ;
Qu'elle répande un charme aimable
Sur ce qui doit flatter nos goûts.
Eh ! qu'eft- ce que la bonne chère
Que n'anime point la gaité?
Un plaifir qui n'eft point gouté ,
L'ennui dreffant fon fanctuaire
Sur celui de la volupté.
Viens donc , viens , charmante Déeſſe
Viens avec les Ris & les jeux
Dont la troupe te fuit fans ceffe.
Ecarte , bannis de ces lieux
Le filence, le férieux ,
Ces noirs fignaux de la triſteſſe :
Qu'ils faffent place à l'allégreffe .
Viens à ces apprêts faftueux ,
De l'art aidé de la richeſſe ,
Joindre encore tes tranſports heureux !
Sans ta puiffance favorable ,
Sans toi ce fouper fomptueux
Ne feroit que délicieux :
Fais plus ; fais qu'il foit agréable;
Viens le rendre voluptueux .
De toutes parts le nectar coule,
Et l'on s'en abbreuve à longs traits
Dans le vin pétillant & frais
1
•
144 MERCURE DE FRANCE..
Les plaiſirs furnagent en foule.
Parmi les flots de ta liqueur ,
Ils s'élancent de la bouteille :
Dieu des Buveurs , Dieu de la treille ,
Ils embelliffent ta couleur.
Je vois cette troupe légère ·
Au gré d'une folâtre ardeur
Se trémouffer dans la fougère ; :
Je les fens en vuidant mon vèrre ·
Deſcendre avec toi dans mon coeur
Mais déja la nuit avancée
A fait les deux tiers de fon tour:
Bientôt à fon ombre éclipſée
Succédera le point- du-jour.
Le Peuple après un fommeil court :
Entr'ouvrant déja la paupière ,
S'apprête à revoir la lumière -
Dès qu'elle fera de retour.
Dans cette alcove folitaire
Conduis avec moi , Dieu d'Amour ,
Celle qui reflemble à ta mère ,
Qui fait l'ornement de ta cour ,
Et qu'à mon coeur to rends fi chère.
Guidés par ce Dieu tutélaire ,.
Retirons-nous fous ces rideaux ;
Que fon flambeau feul nous éclaire :
Sur ce lit couvert de pavots
Je crois voir l'Autel de Cythère..
MARS. 1763. IS
Délie , à mes tranſports nouveaux-
Ofe te livrer toute entiere ; :
En confommant l'heureux mystère ,
Tombons dans les bras du repos.
Par un nouveau Venu au Parnaſſe.
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Résumé : L'HYVER, POEME.
Le poème 'L'HY VER', publié dans le Mercure de France en mars 1763, décrit l'arrivée de l'hiver, personnifié comme un ennemi furieux qui déchaîne des combats dans les champs et les jardins. La Nature, vaincue par l'hiver, perd sa beauté et sa splendeur. Les arbres sont dépouillés, les parterres disparaissent, et les vergers perdent leurs charmes. Les oiseaux cessent de chanter, et les rivières se gèlent, emprisonnant les Nayades. Les bergers et bergères ne viennent plus dans les plaines, et un nouveau peuple d'habitants traverse les villes. Le poète invite ensuite à quitter la campagne flétrie pour revenir en ville, cherchant la société que l'hiver a bannie des champs. Il décrit les cercles brillants et les salles décorées, où l'on peut jouer et se divertir. Cependant, l'ennui finit par s'installer. Le poète se rend alors au Temple du Dieu des Accords, où il assiste à des spectacles magnifiques mais reste insensible. Le poème se conclut par une invitation à la table, où la joie doit voler avec les convives. La déesse de la gaieté est appelée pour écarter la tristesse et rendre le repas voluptueux. Les plaisirs abondent, et le poète imagine une nuit paisible avec sa bien-aimée, Délie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 15-21
LETTRE de Mlle *** à Madame... sur l'ÉMILE de M. ROUSSEAU. 1762.
Début :
VOUS me demandez, Madame, quels sont mes amusemens à la campagne ? [...]
Mots clefs :
Amusements, Campagne, Jeu, Lecture, Misanthropie, Vérité
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de Mlle *** à Madame... sur l'ÉMILE de M. ROUSSEAU. 1762.
LETTRE de Mlle *** à Madame...
fur l'ÉMILE de M. ROUSSEAU ..
VOUS
17628
me demandez ,, Madame
quels font mes amuſemens à la campagne
? vous pouvez vous les imaginer
fans peine , la promenade , la chaffe , la
pêche , le jeu , la table , & puis le jeu
encore , car cet éternel jeu ne finit jamais
; un peu de lecture , quelques réflexions
bonnes bonnes ou mauvaiſes ;
voilà ce qui nous occupe , non pas
fans regretter Paris : car j'aime le Spec--
tacle , il n'y en a point ici : je chéris
la liberté , on en connoît ici que le
nom : on vous l'ôte a force de fe van--
ter qu'on vous la donne. Je conviens .
qu'on a partout des devoirs de fociété
à obferver , mais ils font plus gênans
à la campagne . Si le coeur étoit.
de la partie ; fi le dévoir devenoit un
16 MERCURE DE FRANCE.
goût , il feroit plus facile à remplir.
Mais on fe voit de trop près pour ne
fe point connoître ; & il eft difficile
de s'aimer , quand on fe connoît fi
bien. Pour me fauver de la néceffité de
jouer , je fuppofe quelquefois que j'ai
des brochures à lire qu'il me faut renvoyer
à Paris , & je dis fouvent la
vérité. Je n'ai eu que quatre jours le
livre d'Emile , & vous m'avouerez que
ce n'eft pas affez .Jel'ai cependant lû tout
entier, excepté une bonne partie de la pro
feffion de foi duVicaireSavoyard.M.Rouf
feau écrit trop bien , pour qu'on puiffe
fe refufer à l'envie & au plaifir de le
lire. J'ai reconnu dans fon Emile , l'aureur
de la nouvelle Heloïfe ; mais je
ne reconnois plus l'Auteur des difcours
contre les Sciences , & fur l'égalité des
conditions , ni même de la lettre contre
les Spectacles. On pardonnoit à M.
Rouffeau , un peu de mifantropie en
faveur de la pureté de fa morale . Il
nous difoit quelquefois des vérités un
peu trop dures ; mais il les difoit avec
l'énergie qu'elles infpirent. Si la vérité
ne plaît pas toujours , elle a du moins
le droit de convaincre. M. Rouffeau
ſe plaint de nos moeurs , il a raiſon . Je
crains bien que leur maligne influence
MARS. 1763. 17
n'ait aniolli les fiennes. Ce Philofophe
févère a déridé fon front. Dans fon
Emile il difcute des matières qui ne
me paroiffent guères propre à l'éducation
d'un jeune homme . Et je crois
qu'en pareil cas les leçons intéreffent
plus le maître que l'écolier. Peut- être ,
Madame , allez -vous me taxer d'ingratitude
envers M. Rouffeau ; vous me
repréſenterez que je lui dois avec mon
fexe beaucoup de reconnoiffance , de
tout le bien qu'il en dit , de ce qu'il
daigne même en parler , foit en bien
foit en mal. Mais je ne crois pas qu'il
fe faffe pour cela beaucoup de violence.
Il aime trop les femmes pour n'y pas
penfer , & pour n'en pas parler plus
qu'il ne voudroit. On m'avoit déja
prévenue qu'il nous exaltoit beaucoup
dans fon dernier ouvrage : je n'en
puis difconvenir. Mais nous ne devons
pas , ce me femble , en tirer beaucoup
de vanité. Il a eu foin d'effacer par le
trait le plus humiliant , tout le plaifir
que cela pouvoit nous faire. Il veut
qu'une femme foit femme , & rien de
plus. Si la comparaiſon eft permiſe
Joferai représenter à M. Rouſſeau ,
qu'un homme élevé comme tout homme
l'eft felon ſon état , eft bien plus
18 MERCURE DE FRANCE.
au- deffus de fon Etre , qu'un femme.
Cependant fouvent vous le voyez qui
non content de l'éducations qu'on lui
donne , veut franchir les bornes qu'elle
lui prefcrit. Son genie tranſcendant veut
être créateur. Il ajoute aux Arts & aux
Sciences , qu'il pofféde , & veut en
produire de nouvelles . S'il s'abîme dans
dans la fpéculation , il veut lire jufques
dans l'avenir ; il interroge les aftres ,
il mefure leur étendue , leur distance ,
il prédit les révolutions qui doivent
leur arriver ; il fait plus , il veut comprendre
celui qui les a créés. Tandis
qu'il n'eft point de limites pour fon
efprit curieux , qu'il veut pénétrer ce
qui eft impénétrable , & percer le voile
que la Providence a mis fur fes décrets ;
enfin tandis qu'il s'éleve juſqu'à la Divinité
même , il ne fera pas permis à
une femme de s'élever feulement jufqu'à
l'homme , en defirant la moindre partie
de l'éducation qu'on lui donne !
Seroit- ce en l'imitant qu'on fe rendroit
indigne de lui ? je conviens qu'il faut
que chacun refte dans fa fphère ; mais
celle d'une femme eft bien étroite , &
il eft naturel de chercher à fortir de
fa prifon. Je conviens qu'il y a des devoirs
d'état à remplir ; que ceux d'une
MARS. 1763. 19
femme font éffentiels , & qu'elle doit les
préférer à toute autre occupation. Mais
enfin toutes les femmes n'ont pas
dirai-je,le bonheur ? ..le mot feroit peutêtre
hazardé : toutes les femmes , dis -je ,
Ine font pas mères; ainfi elles ne peuvent
pas toutes être entourées de hardes d'En--
fans. Que celles qui n'ont pas ce glorieux
avantage, ayent la liberté du moins
d'être entourées de brochures ; il leur ref
tera encore affez de temps pour cultiver
leurs charmes , & pour plaire même
à M. Rouleau. Mais me dira-t- il ,
elles
auront le titre de bel-efprit , & toutefille
bel- efprit , reflera fille , tant qu'ily aura
des hommes fenfes fur la terre ? Heureufement
, qu'ils ne le font pas tous , &
les Demoiſelles beaux-efprits, ne trou--
veront que trop à qui s'allier . Mais fi
elles ne trouvoient pas. ( Le Ciel nous.
offre quelquefois des Phénomènes , la
terre pourroit en offrir à fan tour , ) fi
les hommes alloient devenir raiſonna--
bles ? Eh bien , elles auroient toujours
le tire de bel efprit , & à peu de frais ,
s'il faut feulement pour l'acquérir être
entourées de brochures . Si elles font for
cées de garder le célibat : cet état peut
avoir fes douceurs ; & quoiqu'en dife
M. Diderot , dans fon Père de Famille,,
1
20 MERCURE DE FRANCE.
il ne prépare pas toujours des regrets. La
liberté qu'il laiffe , peut dédommager du
ridicule attaché au bel - efprit . Mais M.
Rouſſeau me paroît trop généreux , de
rejetter ce ridicule fur nous feules : nous
fommes trop juftes pour le recevoir
entierement ; & nous nous contentons
d'en accepter au plus la moité : car
fi l'on compte au Parnaffe neuf Mufes
pour un Apollon , à peine peut-on compter
ici-bas , une mufe pour un bien plus
grand nombre d'Apollons ; & malgré
leur rareté , M. Rouffeau femble douter
encore de leur propre éxiſtence !
Je lui pardonne de nous avoir menacées
de ne point trouver d'époux ce font
de ces malheurs qu'on peut fupporter;
d'ailleurs , l'effet ne fuit pas toujours la
menace. Je lui pardonne auffi de nous
accufer de n'avoir point de génie ; nous
nous contentons de l'efprit , puifqu'il
veut bien nous le laiffer. Mais je ne
lui pardonne point d'ofer affurer , que
toute femme qui écrit a quelqu'un
qui lui conduit la main. Il ne nous
laiffe pas même la gloire de faire du
mauvais. Je ne fçai ; mais il me femble
qu'un Auteur eft trop amoureux de
fes ouvrages , pour les donner ainfi gra
tuitement. Il auroit pourtant dû nom-
?
MARS. 1763. 21
mer les plumes élégantes qui ont bien
voulu facrifier leur gloire à celles des
Sévignés , des la Suze , & des autres
Dames illuftres du dernier fiécle.
A l'égard des modernes qui ont quelque
réputation , M. Rouffeau auroit
pû les prier de fe laiffer enfermer ſeulement
vingt-quatre heures , avec de l'encre
& du papier , & par ce qu'elles auroient
produit , il auroit jugé de leurs
talens. Vous me direz , fans doute ,
Madame , qu'on peur douter de bien
des chofes , lorfqu'on doute de la révélation
: mais tout ce que M. Rouſſeau
dira contre notre Religion , ne lui portera
aucune atteinte. Qu'il prenne le
ton férieux , où le ton ironique , fes
raiſonnemens ne pourront l'ébranler ;
la Religion fe foutient d'elle-même , &
trouve un défenfeur dans chaque confcience
. Mais nous, qui ofera nous défendre
, quand M. Rouffeau nous attaque ?
Il faut donc fe taire , car je n'ai déjà
peut- être que trop parlé. Permettez -moi
feulement, de vous affurer de la vive
fincérité des fentimens avec lesquels
J'ai l'honneur d'être , & c.
fur l'ÉMILE de M. ROUSSEAU ..
VOUS
17628
me demandez ,, Madame
quels font mes amuſemens à la campagne
? vous pouvez vous les imaginer
fans peine , la promenade , la chaffe , la
pêche , le jeu , la table , & puis le jeu
encore , car cet éternel jeu ne finit jamais
; un peu de lecture , quelques réflexions
bonnes bonnes ou mauvaiſes ;
voilà ce qui nous occupe , non pas
fans regretter Paris : car j'aime le Spec--
tacle , il n'y en a point ici : je chéris
la liberté , on en connoît ici que le
nom : on vous l'ôte a force de fe van--
ter qu'on vous la donne. Je conviens .
qu'on a partout des devoirs de fociété
à obferver , mais ils font plus gênans
à la campagne . Si le coeur étoit.
de la partie ; fi le dévoir devenoit un
16 MERCURE DE FRANCE.
goût , il feroit plus facile à remplir.
Mais on fe voit de trop près pour ne
fe point connoître ; & il eft difficile
de s'aimer , quand on fe connoît fi
bien. Pour me fauver de la néceffité de
jouer , je fuppofe quelquefois que j'ai
des brochures à lire qu'il me faut renvoyer
à Paris , & je dis fouvent la
vérité. Je n'ai eu que quatre jours le
livre d'Emile , & vous m'avouerez que
ce n'eft pas affez .Jel'ai cependant lû tout
entier, excepté une bonne partie de la pro
feffion de foi duVicaireSavoyard.M.Rouf
feau écrit trop bien , pour qu'on puiffe
fe refufer à l'envie & au plaifir de le
lire. J'ai reconnu dans fon Emile , l'aureur
de la nouvelle Heloïfe ; mais je
ne reconnois plus l'Auteur des difcours
contre les Sciences , & fur l'égalité des
conditions , ni même de la lettre contre
les Spectacles. On pardonnoit à M.
Rouffeau , un peu de mifantropie en
faveur de la pureté de fa morale . Il
nous difoit quelquefois des vérités un
peu trop dures ; mais il les difoit avec
l'énergie qu'elles infpirent. Si la vérité
ne plaît pas toujours , elle a du moins
le droit de convaincre. M. Rouffeau
ſe plaint de nos moeurs , il a raiſon . Je
crains bien que leur maligne influence
MARS. 1763. 17
n'ait aniolli les fiennes. Ce Philofophe
févère a déridé fon front. Dans fon
Emile il difcute des matières qui ne
me paroiffent guères propre à l'éducation
d'un jeune homme . Et je crois
qu'en pareil cas les leçons intéreffent
plus le maître que l'écolier. Peut- être ,
Madame , allez -vous me taxer d'ingratitude
envers M. Rouffeau ; vous me
repréſenterez que je lui dois avec mon
fexe beaucoup de reconnoiffance , de
tout le bien qu'il en dit , de ce qu'il
daigne même en parler , foit en bien
foit en mal. Mais je ne crois pas qu'il
fe faffe pour cela beaucoup de violence.
Il aime trop les femmes pour n'y pas
penfer , & pour n'en pas parler plus
qu'il ne voudroit. On m'avoit déja
prévenue qu'il nous exaltoit beaucoup
dans fon dernier ouvrage : je n'en
puis difconvenir. Mais nous ne devons
pas , ce me femble , en tirer beaucoup
de vanité. Il a eu foin d'effacer par le
trait le plus humiliant , tout le plaifir
que cela pouvoit nous faire. Il veut
qu'une femme foit femme , & rien de
plus. Si la comparaiſon eft permiſe
Joferai représenter à M. Rouſſeau ,
qu'un homme élevé comme tout homme
l'eft felon ſon état , eft bien plus
18 MERCURE DE FRANCE.
au- deffus de fon Etre , qu'un femme.
Cependant fouvent vous le voyez qui
non content de l'éducations qu'on lui
donne , veut franchir les bornes qu'elle
lui prefcrit. Son genie tranſcendant veut
être créateur. Il ajoute aux Arts & aux
Sciences , qu'il pofféde , & veut en
produire de nouvelles . S'il s'abîme dans
dans la fpéculation , il veut lire jufques
dans l'avenir ; il interroge les aftres ,
il mefure leur étendue , leur distance ,
il prédit les révolutions qui doivent
leur arriver ; il fait plus , il veut comprendre
celui qui les a créés. Tandis
qu'il n'eft point de limites pour fon
efprit curieux , qu'il veut pénétrer ce
qui eft impénétrable , & percer le voile
que la Providence a mis fur fes décrets ;
enfin tandis qu'il s'éleve juſqu'à la Divinité
même , il ne fera pas permis à
une femme de s'élever feulement jufqu'à
l'homme , en defirant la moindre partie
de l'éducation qu'on lui donne !
Seroit- ce en l'imitant qu'on fe rendroit
indigne de lui ? je conviens qu'il faut
que chacun refte dans fa fphère ; mais
celle d'une femme eft bien étroite , &
il eft naturel de chercher à fortir de
fa prifon. Je conviens qu'il y a des devoirs
d'état à remplir ; que ceux d'une
MARS. 1763. 19
femme font éffentiels , & qu'elle doit les
préférer à toute autre occupation. Mais
enfin toutes les femmes n'ont pas
dirai-je,le bonheur ? ..le mot feroit peutêtre
hazardé : toutes les femmes , dis -je ,
Ine font pas mères; ainfi elles ne peuvent
pas toutes être entourées de hardes d'En--
fans. Que celles qui n'ont pas ce glorieux
avantage, ayent la liberté du moins
d'être entourées de brochures ; il leur ref
tera encore affez de temps pour cultiver
leurs charmes , & pour plaire même
à M. Rouleau. Mais me dira-t- il ,
elles
auront le titre de bel-efprit , & toutefille
bel- efprit , reflera fille , tant qu'ily aura
des hommes fenfes fur la terre ? Heureufement
, qu'ils ne le font pas tous , &
les Demoiſelles beaux-efprits, ne trou--
veront que trop à qui s'allier . Mais fi
elles ne trouvoient pas. ( Le Ciel nous.
offre quelquefois des Phénomènes , la
terre pourroit en offrir à fan tour , ) fi
les hommes alloient devenir raiſonna--
bles ? Eh bien , elles auroient toujours
le tire de bel efprit , & à peu de frais ,
s'il faut feulement pour l'acquérir être
entourées de brochures . Si elles font for
cées de garder le célibat : cet état peut
avoir fes douceurs ; & quoiqu'en dife
M. Diderot , dans fon Père de Famille,,
1
20 MERCURE DE FRANCE.
il ne prépare pas toujours des regrets. La
liberté qu'il laiffe , peut dédommager du
ridicule attaché au bel - efprit . Mais M.
Rouſſeau me paroît trop généreux , de
rejetter ce ridicule fur nous feules : nous
fommes trop juftes pour le recevoir
entierement ; & nous nous contentons
d'en accepter au plus la moité : car
fi l'on compte au Parnaffe neuf Mufes
pour un Apollon , à peine peut-on compter
ici-bas , une mufe pour un bien plus
grand nombre d'Apollons ; & malgré
leur rareté , M. Rouffeau femble douter
encore de leur propre éxiſtence !
Je lui pardonne de nous avoir menacées
de ne point trouver d'époux ce font
de ces malheurs qu'on peut fupporter;
d'ailleurs , l'effet ne fuit pas toujours la
menace. Je lui pardonne auffi de nous
accufer de n'avoir point de génie ; nous
nous contentons de l'efprit , puifqu'il
veut bien nous le laiffer. Mais je ne
lui pardonne point d'ofer affurer , que
toute femme qui écrit a quelqu'un
qui lui conduit la main. Il ne nous
laiffe pas même la gloire de faire du
mauvais. Je ne fçai ; mais il me femble
qu'un Auteur eft trop amoureux de
fes ouvrages , pour les donner ainfi gra
tuitement. Il auroit pourtant dû nom-
?
MARS. 1763. 21
mer les plumes élégantes qui ont bien
voulu facrifier leur gloire à celles des
Sévignés , des la Suze , & des autres
Dames illuftres du dernier fiécle.
A l'égard des modernes qui ont quelque
réputation , M. Rouffeau auroit
pû les prier de fe laiffer enfermer ſeulement
vingt-quatre heures , avec de l'encre
& du papier , & par ce qu'elles auroient
produit , il auroit jugé de leurs
talens. Vous me direz , fans doute ,
Madame , qu'on peur douter de bien
des chofes , lorfqu'on doute de la révélation
: mais tout ce que M. Rouſſeau
dira contre notre Religion , ne lui portera
aucune atteinte. Qu'il prenne le
ton férieux , où le ton ironique , fes
raiſonnemens ne pourront l'ébranler ;
la Religion fe foutient d'elle-même , &
trouve un défenfeur dans chaque confcience
. Mais nous, qui ofera nous défendre
, quand M. Rouffeau nous attaque ?
Il faut donc fe taire , car je n'ai déjà
peut- être que trop parlé. Permettez -moi
feulement, de vous affurer de la vive
fincérité des fentimens avec lesquels
J'ai l'honneur d'être , & c.
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Résumé : LETTRE de Mlle *** à Madame... sur l'ÉMILE de M. ROUSSEAU. 1762.
Dans sa lettre à Madame, Mlle *** décrit ses activités à la campagne, qui incluent des promenades, la chasse, la pêche, le jeu et un peu de lecture. Elle regrette de ne pas avoir plus de temps pour lire 'Émile' de Jean-Jacques Rousseau, bien qu'elle ait lu la majeure partie du livre, à l'exception de la profession de foi du Vicaire savoyard. Elle reconnaît Rousseau comme l'auteur de 'La Nouvelle Héloïse' mais ne retrouve pas le Rousseau des 'Discours contre les Sciences' ou de la lettre contre les Spectacles. Mlle *** critique Rousseau pour avoir adouci ses positions morales et pour avoir discuté de sujets inappropriés pour l'éducation d'un jeune homme dans 'Émile'. Elle souligne que Rousseau, malgré sa misanthropie, a une vision exaltée des femmes tout en les limitant à leur rôle traditionnel. Elle argue que les femmes devraient avoir plus de liberté et d'éducation, même si elles ne sont pas mères. Elle conteste l'idée de Rousseau que les femmes écrivains sont nécessairement guidées par quelqu'un d'autre et défend la capacité des femmes à écrire et à avoir de l'esprit. Enfin, Mlle *** affirme que les attaques de Rousseau contre la religion ne l'ébranleront pas et exprime son désir de se défendre contre ses critiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 22
COUPLETS, à l'occasion d'un Ballet des ELÉMENS, à une Salamandre. AIR: Quoi, vous partez.
Début :
UN feu léger éblouit & s'échappe, [...]
Mots clefs :
Feu, Amour
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COUPLETS, à l'occasion d'un Ballet des ELÉMENS, à une Salamandre. AIR: Quoi, vous partez.
COUPLETS , à l'occafion d'un Ballet
des ELEMENS , à une Salamandre.
UN
AIR: Quoi , vous partez.
N feu léger éblouit & s'échappe ,
Un feu brulant détruit ce qu'il atteint;
Un feu plus doux en vous voyant nous frape,
L'Amour l'allume & jamais ne l'éteint.
Même on prétend que le fripon , ſous cape
Rit comme vous de celui qui s'en plaint,
des ELEMENS , à une Salamandre.
UN
AIR: Quoi , vous partez.
N feu léger éblouit & s'échappe ,
Un feu brulant détruit ce qu'il atteint;
Un feu plus doux en vous voyant nous frape,
L'Amour l'allume & jamais ne l'éteint.
Même on prétend que le fripon , ſous cape
Rit comme vous de celui qui s'en plaint,
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4
p. 22-23
A une autre Salamandre, sur tous les Élémens. AIR: Partout où régne le chagrin.
Début :
L'Amour, ce Roi de l'Univers, [...]
Mots clefs :
Amour, Vénus, Élément
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A une autre Salamandre, sur tous les Élémens. AIR: Partout où régne le chagrin.
A une autre Salamandre , fur tous
les Élémens.
A1R: Partout où régne le chagrin.
L'Amour , ce Roi de l'Univers ,
Ce Dieu dont vous êtes l'image ,
De tous les Elémeus divers
Reçoit le tribut & l'hommage.
De Vénus l'élément natal ,
Les eaux à l'Amour font bien chères ;
Auffi de leur brillant criftal
Il fit le miroir des Bergères.
Quand il vole comme un éclair
14
MARS.
23 :
Sur les pas fugitifs des Belles ,
La main des habitans de l'air
Soutient & parfume fes aîles .
La Tèrre fleurit fous fes pas ,
Et lui prépare au fein des fêtes
Des lits de fleurs pour les combats
De jennes coeurs pour les conquêtes.
Mais immortel comme les Dieux ,
Il doit cette gloire à ſa flamme.
L'Elément qui brille à vos yeux ,
Eft de l'Amour la vie & l'âme.
les Élémens.
A1R: Partout où régne le chagrin.
L'Amour , ce Roi de l'Univers ,
Ce Dieu dont vous êtes l'image ,
De tous les Elémeus divers
Reçoit le tribut & l'hommage.
De Vénus l'élément natal ,
Les eaux à l'Amour font bien chères ;
Auffi de leur brillant criftal
Il fit le miroir des Bergères.
Quand il vole comme un éclair
14
MARS.
23 :
Sur les pas fugitifs des Belles ,
La main des habitans de l'air
Soutient & parfume fes aîles .
La Tèrre fleurit fous fes pas ,
Et lui prépare au fein des fêtes
Des lits de fleurs pour les combats
De jennes coeurs pour les conquêtes.
Mais immortel comme les Dieux ,
Il doit cette gloire à ſa flamme.
L'Elément qui brille à vos yeux ,
Eft de l'Amour la vie & l'âme.
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Résumé : A une autre Salamandre, sur tous les Élémens. AIR: Partout où régne le chagrin.
L'Amour est décrit comme un roi universel et un dieu, adoré par tous les éléments naturels. Les eaux, liées à Vénus, reflètent les bergères. L'Amour se déplace vite, soutenu par les habitants de l'air. La terre fleurit sous ses pas, préparant des lits de fleurs pour les jeunes cœurs. Immortel, il doit sa gloire à sa flamme. La vie et l'âme de l'Amour brillent dans les yeux.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
5
p. 23
EPIGRAMME.
Début :
ON vantoit l'autre jour le grand sçavoir d'Argant : [...]
Mots clefs :
Aimer, Ami
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EPIGRAMME.
EPIGRAMME.
N vantoit l'autre jour le grand fçavoir d'Argant
:
Seul il valoit toute une Académie ;
Seul il eût fait une Encyclopédie ;
Salomon près de lui n'eût été qu'une enfant.
Lors , me tournant vers la jeune Iſabelle :
Pour moi , de rien fçavoir ne puis venir à bout ;
Hors vous aimer. Ah ! s'il eft vrai , dit-elle ,
Mon cher ami , vous fçavez tout.
Par M. SAUTREAU.
N vantoit l'autre jour le grand fçavoir d'Argant
:
Seul il valoit toute une Académie ;
Seul il eût fait une Encyclopédie ;
Salomon près de lui n'eût été qu'une enfant.
Lors , me tournant vers la jeune Iſabelle :
Pour moi , de rien fçavoir ne puis venir à bout ;
Hors vous aimer. Ah ! s'il eft vrai , dit-elle ,
Mon cher ami , vous fçavez tout.
Par M. SAUTREAU.
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6
p. 24-25
VERS sur le mariage de Mlle DE DROMESNIL, avec M. le Marquis DE BELSUNCE. Par M. TANEVOT.
Début :
Allez, Hymen, vous couronner de gloire, [...]
Mots clefs :
Hymen, Gloire, Berger
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : VERS sur le mariage de Mlle DE DROMESNIL, avec M. le Marquis DE BELSUNCE. Par M. TANEVOT.
VERS fur le mariage de Mlle DE
DROMESNIL , avec M. le
Marquis DE BELSUNCE.
Par M. TANEVOT.
vous couronner de
ALLEZ ,
Hymen ,
gloire ,
Allez jouir d'une double victoire ,
Et , dans un champ fertile en Myrthes ,
riers ,
Unir encor les Grâces aux Guerriers.
Ainfi les guirlandes d'Armide
en Laus
Enchaînoient de Renaud le courege intrépide;
Des feux plus purs , chaftes Epoux ,
Vous préfagent un fort plus doux.
Aimable Dromefnil , d'une Soeur fortunée ,
Goûtez la même deſtinée ;
L'on vous verra briller autant :
Telle , dans les Jardins de Flore >
Une Rofe qui vient d'éclore ,
D'une autre auffi vermeille eft fuivie à l'inftanti
S des trois Déeffes rivales ,
Quelqu'une avoit eu vos appas ,
Sur ce Mont * fameux , leurs débats ,
* Le Mont Ida.
De
MARS. 1763. 25
De tant de maux , ſources fatales ,
N'auroient pas occupé beaucoup
Ce beau Berger que l'on renomme:
La Diſcorde eût manqué fon coup,
On n'eût point diſputé la Pomme.
BELSUNCE , armé de tous les traits
Que l'on forge à Paphos , fubjugue vos attraits .
Tout applaudit dans cette fête ,
A fon bonheur , à la conquête.
Nouveau triomphe des Amours ,
Non des zéphirs , volages dans leurs cours.
*
O vous , donc , Nymphe enchantereſſe ,
Allez aux pieds d'une augufte Princeſſe ,
Cultiver des Vertus dont l'agréable odeur
Parfume votre jeune coeur :
C'est l'hommage qu'Elle defire ,
Et tout l'Encens qu'Elle refpire..
DROMESNIL , avec M. le
Marquis DE BELSUNCE.
Par M. TANEVOT.
vous couronner de
ALLEZ ,
Hymen ,
gloire ,
Allez jouir d'une double victoire ,
Et , dans un champ fertile en Myrthes ,
riers ,
Unir encor les Grâces aux Guerriers.
Ainfi les guirlandes d'Armide
en Laus
Enchaînoient de Renaud le courege intrépide;
Des feux plus purs , chaftes Epoux ,
Vous préfagent un fort plus doux.
Aimable Dromefnil , d'une Soeur fortunée ,
Goûtez la même deſtinée ;
L'on vous verra briller autant :
Telle , dans les Jardins de Flore >
Une Rofe qui vient d'éclore ,
D'une autre auffi vermeille eft fuivie à l'inftanti
S des trois Déeffes rivales ,
Quelqu'une avoit eu vos appas ,
Sur ce Mont * fameux , leurs débats ,
* Le Mont Ida.
De
MARS. 1763. 25
De tant de maux , ſources fatales ,
N'auroient pas occupé beaucoup
Ce beau Berger que l'on renomme:
La Diſcorde eût manqué fon coup,
On n'eût point diſputé la Pomme.
BELSUNCE , armé de tous les traits
Que l'on forge à Paphos , fubjugue vos attraits .
Tout applaudit dans cette fête ,
A fon bonheur , à la conquête.
Nouveau triomphe des Amours ,
Non des zéphirs , volages dans leurs cours.
*
O vous , donc , Nymphe enchantereſſe ,
Allez aux pieds d'une augufte Princeſſe ,
Cultiver des Vertus dont l'agréable odeur
Parfume votre jeune coeur :
C'est l'hommage qu'Elle defire ,
Et tout l'Encens qu'Elle refpire..
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Résumé : VERS sur le mariage de Mlle DE DROMESNIL, avec M. le Marquis DE BELSUNCE. Par M. TANEVOT.
Le poème célèbre le mariage de Mlle de Dromesnil avec le Marquis de Belsunce en mars 1763. L'auteur, M. Tanévot, invite les nouveaux époux à savourer leur bonheur et à unir les grâces aux qualités guerrières. Il compare la beauté de Mlle de Dromesnil à celle d'une rose nouvellement éclose, évoquant la rivalité des déesses sur le Mont Ida. Le Marquis de Belsunce est décrit comme ayant conquis son épouse grâce aux traits de l'amour. Le poème souligne le bonheur partagé par tous à l'occasion de cette union. Il exhorte la mariée à cultiver des vertus agréables, en hommage à une auguste princesse.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 25
ENVOI.
Début :
Pardonnez à ces vers de trop peu de valeur ; [...]
Mots clefs :
Feu, Valeur
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENVOI.
ENVOL.
Pardonnez à ces vers de trop peu de valeur ;
( Ma Mufe à chaque pas chancelle ; ).
S'ils font dépourvus de chaleur ,
C'est d'un feu qui s'éteint la derniere étincelle.
Pardonnez à ces vers de trop peu de valeur ;
( Ma Mufe à chaque pas chancelle ; ).
S'ils font dépourvus de chaleur ,
C'est d'un feu qui s'éteint la derniere étincelle.
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8
p. 26-35
L'AMOUR ET L'HYMEN RÉCONCILIÉS, CONTE EPITHALAMIQUE.
Début :
L'AMOUR ET L'HYMEN RÉCONCILIÉS, CONTE EPITHALAMIQUE. [...]
Mots clefs :
Amour, Hymen, Cœur, Sentiments, Hommes, Plaisirs, Tendresse
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : L'AMOUR ET L'HYMEN RÉCONCILIÉS, CONTE EPITHALAMIQUE.
L'AMOUR ET L'HYMEN
RÉCONCILIÉS ,
L
CONTE EPITHALAMIQUE.
E Dieu de la tendreffe perdoit infenfiblementfon
empire fur les humains .
Il ne les conduifoit plus aux Autels de
l'Hymen. Depuis longtemps ils ne le
confultoient plus , pour former ces rapides
engagemens , que fouvent un même
jour voit naître & finir,
L'Amour s'en confoloit.. Il régnoit tou
jours fur les coeurs fans éxpérience. Quand
de la premiere jeuneffe on paffe à l'âge
des defirs , on aime à fe livrer aux douces
inquiétudes du Dieu des coeurs , On
ne voit , on n'entend que par lui . On
n'exprime que ce qu'il infpire ; & ce
qu'il infpire eft le fentiment de la Volupté
même.
Le goût des frivolités lui arracha ce
refte de puiffance : Azor , l'aimable
Azor , dont le coeur étoit fait pour toutes
les vertus , ofa former des defirs ;
& ils n'étoient pas ceux de l'Amour . IĮ
dit à toutes les jolies femmes qui s'ofMARS.
1763. 27
frirent à fes regards , qu'il les adoroit ;
& il le leur juroit,fans reffentir aucune
des émotions de l'Amour. D'où provient
donc cet égarement , s'écria -t-il ?
Vangeons-nous , ou ramenons Azor ,
ou puniffons les coupables. Leur nombre
l'effraya. Ces ufages qui l'outrageoient
étoient devenus ceux de tous
les hommes du bon ton . Azor eût cru
fe perdre de réputation parmi fes pareils,
s'il eût tenté d'afficher le fentiment.
Le fils de Vénus défefpéré de ne pou
voir ni corriger Azor , ni punir les coupables
, prit le parti de les abandonner
à leur délire , & de dérober fa honte
aux Dieux même s'il le pouvoit. Dans
cette vue il parcouroit des deferts immenfes,
& partout il proféroit les plaintes
les plus touchantes. Les volages oifeaux
interrompoient leurs chants mélodieux
, pour l'entendre. Les timides
hôtes des bois oublioient leurs frayeurs
pour foupirer avec lui. Les tigres & les
lions fufpendoient leur férocité , pour
s'adoucir à fes accens. Les fiers Aquilons
calmoient leur indomptable fu-.
reur , pour s'attendrir à fa voix. Tel
eft fon pouvoir. La Nature & tous les
Etres qu'elle produit , ſe plaiſent à céder.
aux impreffions de ce Dieu. Mortels in-
Bij
28 MERCURE DE FRANCE.
grats , fe difoit-il , vous êtes donc les
feuls qui réfiftez à mes loix? Je vous déteſte
! C'étoit ainfi qu'il exhaloit fon
courroux .
Un jour qu'il s'étoit prèſqu'épuisé de
fatigue , il apperçut un bois dans un
vallon fort éloigné. Il s'y rendit. Il fut
furpris de voir que ce féjour étoit embelli
de tous les ornemens de l'Art.Quel
être intelligent, s'écria - til , a fçu fe préparer
cette riante folitude ? Il fe dérobe
aux Mortels ? Ah ! c'eſt un Sage . Cherchons-
le , je brûle de me l'attacher,& de
le combler de mes dons, s'il en eft digne.
Il pénétra dans ce bois . A l'afpect
d'une multitude de promenades artiſtement
variées , fon étonnement redoubloit.
Bientôt il arrive dans un bofquet
charmant. Des branches galament
entrelaffées en interdifoient l'entrée aux
rayons d'un foleil, brulant. Les fleurs les
plus rares & les plus vives y répandoient
un parfum enchanteur. L'Amant
de Flore y entretenoit une fraîcheur
délicieufe , par le fouffle de fon haleine .
Un gazon élevé par les Grâces faifoit
l'enfoncement de ce bofquet.
L'Amour entrevit fur ce gazon un
Etre pour lequel il s'intéreffa . Négligemment
étendu fur ce tapis émailMARS.
1763. 20
lé , il paroiffoit plongé dans les rê
veries d'un fommeil inquiet ; fes. paupiéres
entr'ouvertes laiffoient coulet
quelques larmes ; il parloit même.
» Mortels infenfés , fe difoit- il , vous
» avez méconnu mes bienfaits ; je de-
» vrois vous haïr. Ne puis- je du moins
» vous oublier ? C'eſt toi , charmante
» Félime , qui les retraces à mon fou-
» venir. Ciel ! c'eſt l'hymen , s'écria l'Amour
avec une extrême vivacité. Il fe
plaint donc auffi de l'aveuglement des
hommes ?
ود
Qui es- tu , toi , reprit l'Hymen en
» fe réveillant ? Que cherches - tu dans
» ces afyles inhabités ? Pourquoi trou-
» bles-tu mon repos ? Mais.... Que
» vois - je ? C'eſt l'Amour! .. Cruel ennemi
, qu'attens-tu de moi ? .... Fuyons.
Arrête , cher frère ! As-tu pu croire
que j'étois ton ennemi ? Quelle erreur
! Expliquons- nous ; je t'en conjure.
Je me flatte de te faire fentir l'injuſtice
de tes reproches. Mais depuis
quel temps habites- tu ces fòrets ? je te
croiois toujours occupé du fort des
humains.
» Tu le croíois , perfide ? ne font- ce
pas tes caprices qui m'ont ravi ce
» foin. N'as-tu pas ceffé d'enflammer
Biij
30 MERCURE DE FRANCE .
les coeurs que j'uniffois ? N'as - tu
» pas même employé toutes les féductions
pour traverfer la tranquille innocence
que je leur procurois , en
» les précipitant dans des liens contrai-
» re aux miens ? apprens donc les fuites
» funeftes de cette méfintelligence , fi
» tu les ignores.
» Dès que tu m'eus quitté , le fu-
» perbe Plutus s'appropria le droit de
» dicter mes loix. Je lui abandonnai
» les ames viles , & capables de fe laiffer
féduire par fon opulence . Je me
» contentois de difpofer de quelques
» coeurs fufceptibles de délicateffe .
» Félime, entr'autres, Félime , me parut
digne de toute mon attention. La
» connois-tu? Quels traits , Quel coeur ,
» Quelles beautés , Quelle âme ! Mille
» fois le jour, je me rappelle le moment
» qui l'offrit à mes regards. Elle étoit
» dans un cercle de douze jolies fem-
» mes. La moins belle de ces femmes
» eût effacé ta Mere : Félime les effaçoit
toutes. Parée des feules grâces
» que donne la Nature , elle obfcurcif-
» foit toutes celles que peut donner
» l'Art. Cher frère ! qu'elle étoit belle
» & touchante ! Les Dieux , tu le fçais,
» fe plaifent à faire le bonheur des
MARS. 1763. 31
» mortels qui font leurs images . De
» cet inftant , je me propofai de ne rien
» négliger , pour rendre celui de Fé-
» lime durable & parfait. J'avois pour
» cela befoin , non de ton art ; il
» fiéroit mal à des coeurs foumis à mes
» loix , mais de tes feux ; mais de tes
» tranſports toujours féduifans , lorſque
» le fentiment les fait naître. Je te cher-
» chai dans tous les lieux où on te foup-
» connoit. Inhumain ! tu me fuyois
» fans doute. Furieux de ne pouvoir
» te rencontrer , je te maudis mille
» fois. Je quittai le féjour des humains ;
» & depuis ce temps , je m'éfforce de
» vous oublier.
"
Tes plaintes , chere frère , font légitimes.
Les hommes font des ingrats. Ils
nous ont outragés. Je les fuis depuis
long-temps , parce que je les croiois
foumis de ton confentement , au Dieu
des richeffes. Puniffons les. Mais que ce
foit en les rendant témoins de la félicité
fuprême , dont peuvent jouir deux
coeurs unis par l'Hymen & l'Amour.
Cette vengeance digne de nous , doit
nous réunir. Je connois Félime. Qu'elle
foit le gage de notre réconciliation .
Seule elle peut me rendre fur le coeur
d'Azor, des droits qui m'ont été ufur-
Biv
32 MERCURE DE FRANCE.
pés par les frivoles ufages de ce fiécle.
Vois le trait que je leur prépare à l'un
& à l'autre.
" Quel eft cet Azor ? Mérite - t - il un
>> coeur tel que celui de Félime ? Oui ,
cher frère , j'en jure par le Styx. Si le
plus puiffant des Dieux vouloit plaire
fi moi-même je fuccombois à ce defir
j'emprunterois la figure , le coeur & l'efprit
d'Azor. Sa figure eft noble & intéreffante.
Elle féduit lorfqu'on le voit
pour la premiere fois. Lorfqu'on le revoit
, elle féduit encore plus. Son coeur
eft digne de cette figure. Il eft tendre ,
vif & compâtiffant. Les plaifirs d'Azor
feroient des vertus parmi les Immortels.
Ils confiftent à foulager des peines
, à prévenir des beſoins , à faire des
heureux . S'il ne faifit pas toujours les
occafions de goûter ces plaifirs , c'eft
que cela ne fe peut pas ; c'eft que les
devoirs de fon état s'y oppofent ; c'eſt
que le Deftin lui- même tenteroit vainement
de fatisfaire tous les hommes.
Ce coeur dont je te parle eût été fans
défauts
, s'il eût pu devenir fenfible .
Azor a de l'efprit , de la fcience , du jugement
, de la raifon , & il n'en rougit
point ; & il n'en eft pas plus avantageux.
Que ne puis-je te le faire confiMARS.
1763. 33
dérer dans les diverfes occupations de
fa vie ? Tu le verrois s'élever avec la
rapidité de l'Aigle du Dieu du Tonnèrre
, lorfqu'il s'agit de manifefter les volentés
de fon augufte Souverain. Eſtil
question de prévenir une difette , tu
le prendrois pour le Dieu du Nil , fertilifant
les vaftes campagnes de l'Egypte.
Tente-t- il d'encourager les Sciences &
les Arts , tu dirois , c'eft Apollon préfidant
à l'affemblée des chaftes Soeurs ; &
dans toutes ces fonctions , tu diftinguerois
le fentiment qui le dirige . C'eſt`
l'amour de l'humanité.
Tel eſt le Mortel que je deftine à
Félime. Rallume ton flambeau cher
frère , pour unir leurs coeurs .
>
Avant que de rien promettre ,l'Hymen
tant de fois trompé par les promeffes
de l'Amour , voulut connoître Azor.
Il partit pour aller l'examiner . Félime
& lui foupoient chez Alcandre leur
ami. Les Dieux s'y tranfportérent. Hymen
fut enchanté. » Azor & Félime
» dit- il à l'Amour , font faits l'un pour
» l'autre ; lance le trait qui doit les en-
» flammer ; mon flambeau, fera le refte.
Alcandre adreffoit alors cet impromptu
à Félime.
Du tendre Amour écoute le langage,
B v
34 MERCURE DE FRANCE .
Belle Félime , il en veut à ton coeur.
Lequel de nous obtiendra l'avantage
De voir enfin couronner fon ardeur ?
Tu t'attendris , Félime ! quel préſage !
Le tendre Amour te prépare un vainqueur.
A ces mots , Azor foupira. Un regard
de Félime acheva de triompher de fon
indifférence . Sur le champ il en fit l'aveu
dans ces termes :
Certaine de notre conftance ,
Tu dois faire un de nous heureux.
Si tu donnes la préférence
A celui qui t'aime le mieux ;
Aimable Félime , j'eſpére ,
Et j'ai des droits .
Droits charmans ! ah ! je les préfére
Au rang des Rois.
Félime ne put entendre cet aveu fans
trouble ; & fes yeux , les plus beaux
yeux que la Nature ait formés , ne purent
dérober ce trouble au trop heureux
Azor. Que dirai- je de plus ? ils
furent unis par l'Hymen & l'Amour.
Azor eft l'Amant & l'Epoux de Félime.
Il l'adore ; elle l'aime ; & ils fe fuffifent. e ;
Puiffent leurs plaifirs renouveller chaMARS.
1763. 35
que jour leur tendreffe ! Puiffe leur tendreffe
éternifer leurs plaifirs !
Préfenté le 5 de Fevrier à Paris à
M. & Mde de ...... le lendemain de
leur mariage !
RÉCONCILIÉS ,
L
CONTE EPITHALAMIQUE.
E Dieu de la tendreffe perdoit infenfiblementfon
empire fur les humains .
Il ne les conduifoit plus aux Autels de
l'Hymen. Depuis longtemps ils ne le
confultoient plus , pour former ces rapides
engagemens , que fouvent un même
jour voit naître & finir,
L'Amour s'en confoloit.. Il régnoit tou
jours fur les coeurs fans éxpérience. Quand
de la premiere jeuneffe on paffe à l'âge
des defirs , on aime à fe livrer aux douces
inquiétudes du Dieu des coeurs , On
ne voit , on n'entend que par lui . On
n'exprime que ce qu'il infpire ; & ce
qu'il infpire eft le fentiment de la Volupté
même.
Le goût des frivolités lui arracha ce
refte de puiffance : Azor , l'aimable
Azor , dont le coeur étoit fait pour toutes
les vertus , ofa former des defirs ;
& ils n'étoient pas ceux de l'Amour . IĮ
dit à toutes les jolies femmes qui s'ofMARS.
1763. 27
frirent à fes regards , qu'il les adoroit ;
& il le leur juroit,fans reffentir aucune
des émotions de l'Amour. D'où provient
donc cet égarement , s'écria -t-il ?
Vangeons-nous , ou ramenons Azor ,
ou puniffons les coupables. Leur nombre
l'effraya. Ces ufages qui l'outrageoient
étoient devenus ceux de tous
les hommes du bon ton . Azor eût cru
fe perdre de réputation parmi fes pareils,
s'il eût tenté d'afficher le fentiment.
Le fils de Vénus défefpéré de ne pou
voir ni corriger Azor , ni punir les coupables
, prit le parti de les abandonner
à leur délire , & de dérober fa honte
aux Dieux même s'il le pouvoit. Dans
cette vue il parcouroit des deferts immenfes,
& partout il proféroit les plaintes
les plus touchantes. Les volages oifeaux
interrompoient leurs chants mélodieux
, pour l'entendre. Les timides
hôtes des bois oublioient leurs frayeurs
pour foupirer avec lui. Les tigres & les
lions fufpendoient leur férocité , pour
s'adoucir à fes accens. Les fiers Aquilons
calmoient leur indomptable fu-.
reur , pour s'attendrir à fa voix. Tel
eft fon pouvoir. La Nature & tous les
Etres qu'elle produit , ſe plaiſent à céder.
aux impreffions de ce Dieu. Mortels in-
Bij
28 MERCURE DE FRANCE.
grats , fe difoit-il , vous êtes donc les
feuls qui réfiftez à mes loix? Je vous déteſte
! C'étoit ainfi qu'il exhaloit fon
courroux .
Un jour qu'il s'étoit prèſqu'épuisé de
fatigue , il apperçut un bois dans un
vallon fort éloigné. Il s'y rendit. Il fut
furpris de voir que ce féjour étoit embelli
de tous les ornemens de l'Art.Quel
être intelligent, s'écria - til , a fçu fe préparer
cette riante folitude ? Il fe dérobe
aux Mortels ? Ah ! c'eſt un Sage . Cherchons-
le , je brûle de me l'attacher,& de
le combler de mes dons, s'il en eft digne.
Il pénétra dans ce bois . A l'afpect
d'une multitude de promenades artiſtement
variées , fon étonnement redoubloit.
Bientôt il arrive dans un bofquet
charmant. Des branches galament
entrelaffées en interdifoient l'entrée aux
rayons d'un foleil, brulant. Les fleurs les
plus rares & les plus vives y répandoient
un parfum enchanteur. L'Amant
de Flore y entretenoit une fraîcheur
délicieufe , par le fouffle de fon haleine .
Un gazon élevé par les Grâces faifoit
l'enfoncement de ce bofquet.
L'Amour entrevit fur ce gazon un
Etre pour lequel il s'intéreffa . Négligemment
étendu fur ce tapis émailMARS.
1763. 20
lé , il paroiffoit plongé dans les rê
veries d'un fommeil inquiet ; fes. paupiéres
entr'ouvertes laiffoient coulet
quelques larmes ; il parloit même.
» Mortels infenfés , fe difoit- il , vous
» avez méconnu mes bienfaits ; je de-
» vrois vous haïr. Ne puis- je du moins
» vous oublier ? C'eſt toi , charmante
» Félime , qui les retraces à mon fou-
» venir. Ciel ! c'eſt l'hymen , s'écria l'Amour
avec une extrême vivacité. Il fe
plaint donc auffi de l'aveuglement des
hommes ?
ود
Qui es- tu , toi , reprit l'Hymen en
» fe réveillant ? Que cherches - tu dans
» ces afyles inhabités ? Pourquoi trou-
» bles-tu mon repos ? Mais.... Que
» vois - je ? C'eſt l'Amour! .. Cruel ennemi
, qu'attens-tu de moi ? .... Fuyons.
Arrête , cher frère ! As-tu pu croire
que j'étois ton ennemi ? Quelle erreur
! Expliquons- nous ; je t'en conjure.
Je me flatte de te faire fentir l'injuſtice
de tes reproches. Mais depuis
quel temps habites- tu ces fòrets ? je te
croiois toujours occupé du fort des
humains.
» Tu le croíois , perfide ? ne font- ce
pas tes caprices qui m'ont ravi ce
» foin. N'as-tu pas ceffé d'enflammer
Biij
30 MERCURE DE FRANCE .
les coeurs que j'uniffois ? N'as - tu
» pas même employé toutes les féductions
pour traverfer la tranquille innocence
que je leur procurois , en
» les précipitant dans des liens contrai-
» re aux miens ? apprens donc les fuites
» funeftes de cette méfintelligence , fi
» tu les ignores.
» Dès que tu m'eus quitté , le fu-
» perbe Plutus s'appropria le droit de
» dicter mes loix. Je lui abandonnai
» les ames viles , & capables de fe laiffer
féduire par fon opulence . Je me
» contentois de difpofer de quelques
» coeurs fufceptibles de délicateffe .
» Félime, entr'autres, Félime , me parut
digne de toute mon attention. La
» connois-tu? Quels traits , Quel coeur ,
» Quelles beautés , Quelle âme ! Mille
» fois le jour, je me rappelle le moment
» qui l'offrit à mes regards. Elle étoit
» dans un cercle de douze jolies fem-
» mes. La moins belle de ces femmes
» eût effacé ta Mere : Félime les effaçoit
toutes. Parée des feules grâces
» que donne la Nature , elle obfcurcif-
» foit toutes celles que peut donner
» l'Art. Cher frère ! qu'elle étoit belle
» & touchante ! Les Dieux , tu le fçais,
» fe plaifent à faire le bonheur des
MARS. 1763. 31
» mortels qui font leurs images . De
» cet inftant , je me propofai de ne rien
» négliger , pour rendre celui de Fé-
» lime durable & parfait. J'avois pour
» cela befoin , non de ton art ; il
» fiéroit mal à des coeurs foumis à mes
» loix , mais de tes feux ; mais de tes
» tranſports toujours féduifans , lorſque
» le fentiment les fait naître. Je te cher-
» chai dans tous les lieux où on te foup-
» connoit. Inhumain ! tu me fuyois
» fans doute. Furieux de ne pouvoir
» te rencontrer , je te maudis mille
» fois. Je quittai le féjour des humains ;
» & depuis ce temps , je m'éfforce de
» vous oublier.
"
Tes plaintes , chere frère , font légitimes.
Les hommes font des ingrats. Ils
nous ont outragés. Je les fuis depuis
long-temps , parce que je les croiois
foumis de ton confentement , au Dieu
des richeffes. Puniffons les. Mais que ce
foit en les rendant témoins de la félicité
fuprême , dont peuvent jouir deux
coeurs unis par l'Hymen & l'Amour.
Cette vengeance digne de nous , doit
nous réunir. Je connois Félime. Qu'elle
foit le gage de notre réconciliation .
Seule elle peut me rendre fur le coeur
d'Azor, des droits qui m'ont été ufur-
Biv
32 MERCURE DE FRANCE.
pés par les frivoles ufages de ce fiécle.
Vois le trait que je leur prépare à l'un
& à l'autre.
" Quel eft cet Azor ? Mérite - t - il un
>> coeur tel que celui de Félime ? Oui ,
cher frère , j'en jure par le Styx. Si le
plus puiffant des Dieux vouloit plaire
fi moi-même je fuccombois à ce defir
j'emprunterois la figure , le coeur & l'efprit
d'Azor. Sa figure eft noble & intéreffante.
Elle féduit lorfqu'on le voit
pour la premiere fois. Lorfqu'on le revoit
, elle féduit encore plus. Son coeur
eft digne de cette figure. Il eft tendre ,
vif & compâtiffant. Les plaifirs d'Azor
feroient des vertus parmi les Immortels.
Ils confiftent à foulager des peines
, à prévenir des beſoins , à faire des
heureux . S'il ne faifit pas toujours les
occafions de goûter ces plaifirs , c'eft
que cela ne fe peut pas ; c'eft que les
devoirs de fon état s'y oppofent ; c'eſt
que le Deftin lui- même tenteroit vainement
de fatisfaire tous les hommes.
Ce coeur dont je te parle eût été fans
défauts
, s'il eût pu devenir fenfible .
Azor a de l'efprit , de la fcience , du jugement
, de la raifon , & il n'en rougit
point ; & il n'en eft pas plus avantageux.
Que ne puis-je te le faire confiMARS.
1763. 33
dérer dans les diverfes occupations de
fa vie ? Tu le verrois s'élever avec la
rapidité de l'Aigle du Dieu du Tonnèrre
, lorfqu'il s'agit de manifefter les volentés
de fon augufte Souverain. Eſtil
question de prévenir une difette , tu
le prendrois pour le Dieu du Nil , fertilifant
les vaftes campagnes de l'Egypte.
Tente-t- il d'encourager les Sciences &
les Arts , tu dirois , c'eft Apollon préfidant
à l'affemblée des chaftes Soeurs ; &
dans toutes ces fonctions , tu diftinguerois
le fentiment qui le dirige . C'eſt`
l'amour de l'humanité.
Tel eſt le Mortel que je deftine à
Félime. Rallume ton flambeau cher
frère , pour unir leurs coeurs .
>
Avant que de rien promettre ,l'Hymen
tant de fois trompé par les promeffes
de l'Amour , voulut connoître Azor.
Il partit pour aller l'examiner . Félime
& lui foupoient chez Alcandre leur
ami. Les Dieux s'y tranfportérent. Hymen
fut enchanté. » Azor & Félime
» dit- il à l'Amour , font faits l'un pour
» l'autre ; lance le trait qui doit les en-
» flammer ; mon flambeau, fera le refte.
Alcandre adreffoit alors cet impromptu
à Félime.
Du tendre Amour écoute le langage,
B v
34 MERCURE DE FRANCE .
Belle Félime , il en veut à ton coeur.
Lequel de nous obtiendra l'avantage
De voir enfin couronner fon ardeur ?
Tu t'attendris , Félime ! quel préſage !
Le tendre Amour te prépare un vainqueur.
A ces mots , Azor foupira. Un regard
de Félime acheva de triompher de fon
indifférence . Sur le champ il en fit l'aveu
dans ces termes :
Certaine de notre conftance ,
Tu dois faire un de nous heureux.
Si tu donnes la préférence
A celui qui t'aime le mieux ;
Aimable Félime , j'eſpére ,
Et j'ai des droits .
Droits charmans ! ah ! je les préfére
Au rang des Rois.
Félime ne put entendre cet aveu fans
trouble ; & fes yeux , les plus beaux
yeux que la Nature ait formés , ne purent
dérober ce trouble au trop heureux
Azor. Que dirai- je de plus ? ils
furent unis par l'Hymen & l'Amour.
Azor eft l'Amant & l'Epoux de Félime.
Il l'adore ; elle l'aime ; & ils fe fuffifent. e ;
Puiffent leurs plaifirs renouveller chaMARS.
1763. 35
que jour leur tendreffe ! Puiffe leur tendreffe
éternifer leurs plaifirs !
Préfenté le 5 de Fevrier à Paris à
M. & Mde de ...... le lendemain de
leur mariage !
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Résumé : L'AMOUR ET L'HYMEN RÉCONCILIÉS, CONTE EPITHALAMIQUE.
Le texte 'L'Amour et l'Hymen réconciliés' est un conte épithalamique qui explore la relation entre l'Amour et l'Hymen. Initialement, l'Amour dominait les cœurs humains, mais son influence a décliné face à la frivolité et aux désirs superficiels des hommes. Azor, un jeune homme vertueux, illustre cette tendance en exprimant des sentiments sans véritable émotion amoureuse. Désespéré par cette situation, l'Amour se retire dans des déserts, exprimant sa douleur. Dans un bois enchanté, l'Amour rencontre l'Hymen, qui se plaint également de l'ingratitude des mortels. L'Hymen explique qu'il a été contraint de céder sa place à Plutus, le dieu de la richesse, et qu'il s'est retiré pour oublier les hommes. Il mentionne Félime, une jeune femme qu'il souhaite unir à Azor, un homme noble et vertueux. L'Amour et l'Hymen décident de se réconcilier et de punir les hommes en leur montrant la félicité suprême des cœurs unis par l'Hymen et l'Amour. Ils choisissent Félime et Azor pour symboliser cette réconciliation. L'Hymen examine Azor et le trouve digne de Félime. Lors d'une réunion chez Alcandre, un ami, Azor et Félime confessent leur amour mutuel et sont unis par l'Hymen et l'Amour. Leur union est célébrée, et ils vivent heureux ensemble, se suffisant l'un à l'autre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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9
p. 35
VERS sur le Tableau du ROI, représenté par les VERTUS.
Début :
PAR l'ingénieux artifice [...]
Mots clefs :
Louis, Pinceau, Optique, Amour, Français
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : VERS sur le Tableau du ROI, représenté par les VERTUS.
VERS fur le Tableau du ROI , repréfenté
par
PA
les VERTUS .
AR l'ingénieux artifice
Et de l'optique & du pinceau ,
Les Vertus , & furtout la Bonté , la Juftice ;
De Louis offrent le tableau.
Si dans un autre perſpective ,
On peignoit les coeurs des François ;
De ces coeurs réunis la peinture native
De l'Amour offriroit les traits.
Par M. l'Abbé AUBERT .
par
PA
les VERTUS .
AR l'ingénieux artifice
Et de l'optique & du pinceau ,
Les Vertus , & furtout la Bonté , la Juftice ;
De Louis offrent le tableau.
Si dans un autre perſpective ,
On peignoit les coeurs des François ;
De ces coeurs réunis la peinture native
De l'Amour offriroit les traits.
Par M. l'Abbé AUBERT .
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10
p. 35-38
CRISTALLIDE LA CURIEUSE, CONTE tiré des MILLE ET UNE NUITS.
Début :
QUI veut garder une femme, s'abuse ; [...]
Mots clefs :
Jaloux, Ruse, Fragilité, Sexe féminin, Beauté
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : CRISTALLIDE LA CURIEUSE, CONTE tiré des MILLE ET UNE NUITS.
CRISTALLIDE LA CURIEUSE ,
CONTE tiré des MILLE ET UNE
QUI
NUITS.
UI veut garder une femme ,s'abufe ;
L'art de tromper fut de tout temps leur lot ;
B vj
36 MERCURE DE FRANCE .
La moins fubtile a toujours quelque rufe ;
Et le jaloux finit par être for.
De leur vertu repofez-vous fur elle.
Mais en ce cas feront- elles fidéles ?
Oui- dà ! peut-être ; mais du moins
Vous vous épargnerez des foins.
Schariar , Roi de l'Inde & Schagenan fon frere,
Tous deux beaux & bienfaits , furprirent un matin
Leurs très -chaftes moitiés s'embarquant pour Cythère
,
L'une avec un Faquir , & l'autre avec un Nain .
Sur ces couples galans tous deux firent mainbaſſe
;
C'étoit trop de rigueur : chez nous on eût fait
grace
A la fragilité du Séxe féminin ;
Mais fur les bords groffiers du Gange ,
De Joconde & du Roi Lombard
Le cas dut fembler fort étrange ,
Si tel cas doit pourtant étonner quelque part.
Tout vengé qu'il étoit , Schariar plein de rage ,
Ne pouvoit digérer qu'on eût fait cet outrage
Au front augufte d'un Sultan.
Mon cher frére , dit-il , un jour à Schagenan ,
Sortons de ce Palais où cette horrible image
Sans ceffe eft préſente à mes yeux .
Les voilà tous deux en voyage.
Près des bords de la mer un bois délicieux
Par fa fraicheur & fon ombrage
MARS. 1763. 37
Contre les traits du jour leur prêtoit du couverr ;
Lorfque du fein des flors ouvert ,
Ils virent à grand bruit s'élever jufqu'aux nues
Un Coloffe éffrayant , qui d'écume couvert
Traverſoit les ondes émues.
D'un haut cédre à l'inftant ils gagnent le fommer,
Non fans invoquer Mahomet.
Le Coloffe aborde & prend tèrre.
Des noirs enfans d'Eblis c'étoit le plus hideur s
Son dos étoit chargé d'une caiſſe de vèrre.
Il la poſe à quelques pas d'eur ,
Ouvre avec quatre clefs tout autant de ferrures.
Il en fort une Déité
Brillante de l'éclat des plus belles parures ,
Plus brillante cent fois encor de fa beauté.
>> Dame qui plaifez feule à mon âme enchantée ,
Dit notre Poly phême à cette Galatée :
» Séyez-vous près de moi , j'ai besoin de repost
La Belle , à ce galant propos ,
S'affit ; & le Monftre difforme
Des genoux de Vénus faifant fon oreiller ,
Il repofe fa tête énorme ,
S'endort & bientôt ronfle à faire tout trembler..
La Dame étoit très - éveillée :
Sur le faîte de l'arbre elle apperçoit nos gens ,
Qui fe cachoient fous la feuillée..
Par mille geftes obligeans,,
A defcendre elle les convie.
Bux de s'en excufer , en montrant le Génie
38 MERCURE DE FRANCE.
A ce Monftre auffitôt dérobant fes genoux ,
Elle fe léve , accourt , & leur dit en courroux :
Ou defcendez , ou je l'éveille.
Ils defcendirent donc . Alors , d'un ton plus doux :
Profitons du temps qu'il fommeille.
Voyez- vous ce gazon... puis fans dire le refte ,
En rougiffant elle y guida leurs pas ;
Mais que ce fût une rougeur modeſte ,
Ami Lecteur , vous ne le croirez pas.
La Dame étoit grande caufeuſe ;
Mais je fupprime l'entretien :
Suffit qu'elle prouva très bien
Qu'on ne la nommoit pas pour rien
Criftallide la Curieufe .
De chaque Prince enfuite exigeant un anneau
En voici cent , dit - elle , en y joignant les vôtres ,
Cent de bon compte qui font nôtres ,
Cent qu'à caufer aînſi j'ai gagné bien & beau ,
Et j'efpére en gagner bien d'autres,
Malgré les foins jaloux de ce vilain brutal ;
Malgré fa prifon de criftal.
Adieu , Prince , partez , Mahomet vous le rende ;
Son paradis fans doute a des plaifirs bien doux ; .
Mais croyez-moi , tromper un furveillant jaloux >
Il n'eft point ici-bas de volupté plus grande :
C'eſt vrai plaifir de femme & le premier de tous.
Elle court à ces mots rejoindre le Génie ,
Souléve fa tête endormie ,
Et la remet fur les genoux.
CONTE tiré des MILLE ET UNE
QUI
NUITS.
UI veut garder une femme ,s'abufe ;
L'art de tromper fut de tout temps leur lot ;
B vj
36 MERCURE DE FRANCE .
La moins fubtile a toujours quelque rufe ;
Et le jaloux finit par être for.
De leur vertu repofez-vous fur elle.
Mais en ce cas feront- elles fidéles ?
Oui- dà ! peut-être ; mais du moins
Vous vous épargnerez des foins.
Schariar , Roi de l'Inde & Schagenan fon frere,
Tous deux beaux & bienfaits , furprirent un matin
Leurs très -chaftes moitiés s'embarquant pour Cythère
,
L'une avec un Faquir , & l'autre avec un Nain .
Sur ces couples galans tous deux firent mainbaſſe
;
C'étoit trop de rigueur : chez nous on eût fait
grace
A la fragilité du Séxe féminin ;
Mais fur les bords groffiers du Gange ,
De Joconde & du Roi Lombard
Le cas dut fembler fort étrange ,
Si tel cas doit pourtant étonner quelque part.
Tout vengé qu'il étoit , Schariar plein de rage ,
Ne pouvoit digérer qu'on eût fait cet outrage
Au front augufte d'un Sultan.
Mon cher frére , dit-il , un jour à Schagenan ,
Sortons de ce Palais où cette horrible image
Sans ceffe eft préſente à mes yeux .
Les voilà tous deux en voyage.
Près des bords de la mer un bois délicieux
Par fa fraicheur & fon ombrage
MARS. 1763. 37
Contre les traits du jour leur prêtoit du couverr ;
Lorfque du fein des flors ouvert ,
Ils virent à grand bruit s'élever jufqu'aux nues
Un Coloffe éffrayant , qui d'écume couvert
Traverſoit les ondes émues.
D'un haut cédre à l'inftant ils gagnent le fommer,
Non fans invoquer Mahomet.
Le Coloffe aborde & prend tèrre.
Des noirs enfans d'Eblis c'étoit le plus hideur s
Son dos étoit chargé d'une caiſſe de vèrre.
Il la poſe à quelques pas d'eur ,
Ouvre avec quatre clefs tout autant de ferrures.
Il en fort une Déité
Brillante de l'éclat des plus belles parures ,
Plus brillante cent fois encor de fa beauté.
>> Dame qui plaifez feule à mon âme enchantée ,
Dit notre Poly phême à cette Galatée :
» Séyez-vous près de moi , j'ai besoin de repost
La Belle , à ce galant propos ,
S'affit ; & le Monftre difforme
Des genoux de Vénus faifant fon oreiller ,
Il repofe fa tête énorme ,
S'endort & bientôt ronfle à faire tout trembler..
La Dame étoit très - éveillée :
Sur le faîte de l'arbre elle apperçoit nos gens ,
Qui fe cachoient fous la feuillée..
Par mille geftes obligeans,,
A defcendre elle les convie.
Bux de s'en excufer , en montrant le Génie
38 MERCURE DE FRANCE.
A ce Monftre auffitôt dérobant fes genoux ,
Elle fe léve , accourt , & leur dit en courroux :
Ou defcendez , ou je l'éveille.
Ils defcendirent donc . Alors , d'un ton plus doux :
Profitons du temps qu'il fommeille.
Voyez- vous ce gazon... puis fans dire le refte ,
En rougiffant elle y guida leurs pas ;
Mais que ce fût une rougeur modeſte ,
Ami Lecteur , vous ne le croirez pas.
La Dame étoit grande caufeuſe ;
Mais je fupprime l'entretien :
Suffit qu'elle prouva très bien
Qu'on ne la nommoit pas pour rien
Criftallide la Curieufe .
De chaque Prince enfuite exigeant un anneau
En voici cent , dit - elle , en y joignant les vôtres ,
Cent de bon compte qui font nôtres ,
Cent qu'à caufer aînſi j'ai gagné bien & beau ,
Et j'efpére en gagner bien d'autres,
Malgré les foins jaloux de ce vilain brutal ;
Malgré fa prifon de criftal.
Adieu , Prince , partez , Mahomet vous le rende ;
Son paradis fans doute a des plaifirs bien doux ; .
Mais croyez-moi , tromper un furveillant jaloux >
Il n'eft point ici-bas de volupté plus grande :
C'eſt vrai plaifir de femme & le premier de tous.
Elle court à ces mots rejoindre le Génie ,
Souléve fa tête endormie ,
Et la remet fur les genoux.
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Résumé : CRISTALLIDE LA CURIEUSE, CONTE tiré des MILLE ET UNE NUITS.
Le conte 'Cristallide la curieuse' des Mille et Une Nuits explore la difficulté de garder une femme fidèle et les dangers de la jalousie. Les rois Schariar et Schagenan, frères et souverains de l'Inde, découvrent leurs épouses avec des amants. Indignés, ils quittent leur palais et se cachent près de la mer. Ils observent un colosse effrayant transportant une caisse de verre, d'où sort une déité magnifique nommée Cristallide. Elle invite les princes à descendre et les conduit à un endroit isolé pour prouver sa réputation de grande causeuse. Cristallide exige un anneau de chaque prince en échange de ses faveurs, affirmant en avoir déjà cent. Elle les encourage à profiter des plaisirs de la vie et à tromper les jaloux, avant de rejoindre le colosse endormi.
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11
p. 39
VERS après une grande maladie de l'Auteur.
Début :
O vous, dont je peindrois, si vous n'étiez ma femme, [...]
Mots clefs :
Grâces, Talents, Éloge
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texteReconnaissance textuelle : VERS après une grande maladie de l'Auteur.
VERS après une grande maladie de
l'Auteur.
Ovous , dont je peindrois , fi vous n'étiez ma
femme ,
Les Grâces , les Talens , & furtout les Vertus 1
Qui partagez mes maux , & m'aimez encor plus
Charlotte ! recevez ce tribut de ma flamme.
Vos difcours , votre exemple , ô moitié de mon
âme !
Me font enfin braver les caprices du fort ;
Vos tendres foins m'arrachent à la mort ,
Er de mes jours renouvellent la trame......
Mais j'entends s'écrier ... L'éloge eft un peu fort !
Ah ! j'en dirois bien plus , fi vous n'étiez ma
femme.
FEUTRY.
l'Auteur.
Ovous , dont je peindrois , fi vous n'étiez ma
femme ,
Les Grâces , les Talens , & furtout les Vertus 1
Qui partagez mes maux , & m'aimez encor plus
Charlotte ! recevez ce tribut de ma flamme.
Vos difcours , votre exemple , ô moitié de mon
âme !
Me font enfin braver les caprices du fort ;
Vos tendres foins m'arrachent à la mort ,
Er de mes jours renouvellent la trame......
Mais j'entends s'écrier ... L'éloge eft un peu fort !
Ah ! j'en dirois bien plus , fi vous n'étiez ma
femme.
FEUTRY.
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Résumé : VERS après une grande maladie de l'Auteur.
Le poème célèbre Charlotte, l'épouse de l'auteur, pour ses grâces, talents et vertus. Elle partage ses souffrances et l'aime profondément, étant la moitié de son âme. Ses discours et son exemple l'aident à surmonter les épreuves. Ses soins prolongent sa vie. L'auteur admet que son éloge pourrait sembler excessif, mais il affirme qu'il en dirait davantage s'il n'était pas son époux. Le poème se termine par le nom 'FEUTRY'.
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12
p. 39-40
ODE ACREONTIQUE.
Début :
AMOUR , laisse-là ma lyre ; [...]
Mots clefs :
Lyre, Amour, Automne
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texteReconnaissance textuelle : ODE ACREONTIQUE.
ODE AN ACREONTIQUE.
AMOUR , laiffe -là ma lyre ;
Tu fûs mon maître autrefois :
Mais j'ai quitté ton empire ;
On fouffre trop fous tes Loix
J'ai dit adieu le bel âge ,
J'ai di adieu les Amours ;
40 MERCURE DE FRANCE,
Il eft bien temps d'être fage
Dans l'Autonne de ſes jours.
Connois l'erreur qui t'égare ,
M'a dit cet enfant vainqueur
Ce beau nom dont on fe pare
Couvre le néant du coeur.
Trifte fou qui te crois fage ,
Ne crains point de t'enflammer:
On ne plaît point à ton âge ;
Mais n'eft-ce rien que d'aimer?
Regarde Aminte & l'adore ;
Tout Cythère eft dans les yeux..
Son âme plus belle encore
Eft un rare don des Cieux .
Son efprit jamais ne laffe ,
Son air eft toujours nouveau.
La voit- on c'eft une Grâce 3
Parle- t- elle ? c'elt Sapho.
AMOUR , laiffe -là ma lyre ;
Tu fûs mon maître autrefois :
Mais j'ai quitté ton empire ;
On fouffre trop fous tes Loix
J'ai dit adieu le bel âge ,
J'ai di adieu les Amours ;
40 MERCURE DE FRANCE,
Il eft bien temps d'être fage
Dans l'Autonne de ſes jours.
Connois l'erreur qui t'égare ,
M'a dit cet enfant vainqueur
Ce beau nom dont on fe pare
Couvre le néant du coeur.
Trifte fou qui te crois fage ,
Ne crains point de t'enflammer:
On ne plaît point à ton âge ;
Mais n'eft-ce rien que d'aimer?
Regarde Aminte & l'adore ;
Tout Cythère eft dans les yeux..
Son âme plus belle encore
Eft un rare don des Cieux .
Son efprit jamais ne laffe ,
Son air eft toujours nouveau.
La voit- on c'eft une Grâce 3
Parle- t- elle ? c'elt Sapho.
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Résumé : ODE ACREONTIQUE.
Le poème 'Ode anacreontique' traite de l'amour et de la sagesse. Le poète, las des souffrances de l'amour, aspire à la sagesse dans sa vieillesse. Un enfant lui montre l'erreur de sa voie, soulignant que l'amour reste précieux. Le poète vante ensuite Aminte, dont la grâce et l'esprit rappellent Cythère et Sapho.
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13
p. 40-41
VERS à une jeune Demoiselle qui demandoit pourquoi le vrai mérite en amour étoit celui qui plaisoit le moins.
Début :
De l'aimable Enchanteur de toute la Nature, [...]
Mots clefs :
Enchanteur, Poète, Cœur
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texteReconnaissance textuelle : VERS à une jeune Demoiselle qui demandoit pourquoi le vrai mérite en amour étoit celui qui plaisoit le moins.
FERS à une jeune Demoiselle qui demandoit
pourquoi le vrai mérite en
amour étoit celui qui plaifoit le moins.
E Da l'aimable Enchanteur de toute la Nature ,
Dont l'empire eft fondé fur des illufions
Vous voulez que fans fictions ,
J.
MARS. 1763. 43
Le compas à la main un Poëte meſure
Les invifibles noeuds de fes féductions?
Que je dife pourquoi , chez lui le vrai mérite
Céde aux vaines lueurs que préſente le faux ?
D'Hercule , je pourrois remplir tous les travaux
Avant que mon efprit de cet ordre s'acquitte .
L'Amour eſt un enfant fans principe & ſans loix :
Dans les tendres ardeurs que ce Dieu nous infpire
,
Le caprice toujours décide de fon choix ;
Et c'est tout ce que j'en puis dire.
Votre coeur , belle Iris , en eft feul excepté ;
Au-deffus des erreurs d'une amoureuſe flamme >
Les droits du vrai mérite y font en fureté ,
Puifque vous le portez dans le fond de votre
ame.
pourquoi le vrai mérite en
amour étoit celui qui plaifoit le moins.
E Da l'aimable Enchanteur de toute la Nature ,
Dont l'empire eft fondé fur des illufions
Vous voulez que fans fictions ,
J.
MARS. 1763. 43
Le compas à la main un Poëte meſure
Les invifibles noeuds de fes féductions?
Que je dife pourquoi , chez lui le vrai mérite
Céde aux vaines lueurs que préſente le faux ?
D'Hercule , je pourrois remplir tous les travaux
Avant que mon efprit de cet ordre s'acquitte .
L'Amour eſt un enfant fans principe & ſans loix :
Dans les tendres ardeurs que ce Dieu nous infpire
,
Le caprice toujours décide de fon choix ;
Et c'est tout ce que j'en puis dire.
Votre coeur , belle Iris , en eft feul excepté ;
Au-deffus des erreurs d'une amoureuſe flamme >
Les droits du vrai mérite y font en fureté ,
Puifque vous le portez dans le fond de votre
ame.
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Résumé : VERS à une jeune Demoiselle qui demandoit pourquoi le vrai mérite en amour étoit celui qui plaisoit le moins.
Le poème 'FERS à une jeune Demoiselle' explore pourquoi le vrai mérite en amour est souvent discret. Le poète compare cette question à des travaux d'Hercule et décrit l'amour comme un enfant sans principes. Il fait exception pour Iris, qui reconnaît le vrai mérite au-delà des erreurs de l'amour.
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14
p. 41-45
PRÉCIS HISTORIQUE sur la vie DE RAIMOND LULLE,
Début :
L'ABRÉGÉ Chronologique de l'histoire Ecclésiastique, imprimé chez Hérissant [...]
Mots clefs :
Missionnaires, Langues hébraïque, arabique & chaldéenne, Conversion des infidèles, Diable, Religion chrétienne
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : PRÉCIS HISTORIQUE sur la vie DE RAIMOND LULLE,
PRÉCIS HISTORIQUE fur la vie
DE RAIMOND LULLE,
LAABRÉGÉ
Chronologique
de l'hiftoire
Eccléfiaftique
, imprimé
chez
Hériffant
, rue S. Jacques
, fait
mention
, fous l'année
1312 , d'un établiſfement
de Maîtres
en Langues
Hébraïque
, Arabique
& Chaldéenne
dans
les principales
Villes
de l'Europe
, pour
faciliter
la converfion
des Infidéles
. On
42 MERCURE DE FRANCE.
étoit fort touché dans ce tems , du
defir de faire la conquête de la Terre
Sainte , par ce pieux motif. L'Au--
teur de l'excellent Ouvrage que je viens .
de citer , attribue cette établiſſement
au zéle de Raimond Lulle , du tiers
Ordre de S. François , qui le follicitoit
depuis long- temps. On ajoute fur
le compte de ce Sçavant , qu'on en
fcait fi peu l'hiftoire , que les uns en
ont fait un Magicien , les autres un
Hérétique , & les autres un Martyr.
Ces qualités ne font incompatibles
, en même temps , dans le même
fujet , que dans la vraie acception , qui
eft la feule raiſonnable. Un même objet
peut être confideré fous plufieurs
afpects , & l'on juge ordinairement par
la maniere dont on voit , fans s'embarraffer
fi l'on a vu comme il falloit.
Il n'eft point étonnant que Raimond
Lulle ait paffé pour Magicien. Difciple
d'Arnoud de Ville Neuve dans l'Alchymie
, il s'eft fort appliqué à chercher
des fecrets extraordinaires ; il a beaucoup
travaillé & écrit fur le grand
OEuvre ; & l'on affure qu'il a fait de
l'or. Agrippa a été un de fes Sectateurs
dans des temps plus voifins de
nous ; & les lumieres d'un Siécle plus
1
MARS. 1763. 43
éclairé ne l'ont point garanti de l'accufation
de magie. Rien n'empeche que
Raimond Lulle n'ait été regardé comme
Magicien par des gens qui affùrement
ne l'étoient pas. Il est tout fimple que
ceux qui ne portoient pas la mauvaiſe opinion
fur ce laborieuxChymiſte aupoint
de le croire en commerce avec le Diable
, fe foient retranchés charitablement
à le taxer d'Héréfie ;fentiment plus favorable
qui retardoit au moins jufqu'à fa
mort fon affociation avec les Damnés. Je
ne fçais dans quelles fources on a puifé ,
pour jetter des foupçons fi injurieux
fur la mémoire d'un grand homme
qui a fouffert le martyre pour la Religion
Chrétienne ; & pourquoi on a
cru que l'on manquoit de notice fur
fa vie. Il étoit Efpagnol , né de parens
nobles , dans l'Ifle Majorque en
1235. Jeune il s'appliqua beaucoup à l'étude
de la Logique , & acquit le furnom
de Docteur illuminé. Il s'attacha enfuite
à la Chymie , fit beaucoup d'écoliers ,
& publia un grand nombre des Traités
fort connus & eftimés des Adeptes.
On fçait qu'il a vêcu jufqu'à l'âge de
quatre-vingt ans , & qu'il a été martyrifé
en Afrique par les Infideles.
On fixe même le jour de fa mort au
44 MERCURE DE FRANCE.
vingt-neuviéme Juin 1315. Il eft certain
que dès l'âge de 30 ans , les Sciences
mondaines n'eurent plus pour lui
le moindre attrait. Il fe dévoua entiérement
à la converfion des Mahométans
, & il a emploié les quarante-
cinq dernieres années de fa vie à
les prêcher avec autant de zéle que de
fuccès. Ses travaux ont été glorieufement
courronnés par la même palme
que le premier Martyr. Il fut lapidé
par ordre d'un Roi : juffu Regis Bo
gia je ne fçais fi Bogia eft le nom
du Roi , ou de fon Royaume .
Rien ne juftifie qu'il ait été Reli
gieux , comme quelques uns l'ont avancé.
Le Tiers Ordre de S. François
eft une Congrégation , cu plutôt une
Confrairie de piété, dans laquelle on admet
les gens mariés. On dit queRaimond
Lulle étoit de ce nombre . George Mathias
Profeffeur de Médecine en l'Univerfité
de Gottingen , dans un livre
imprimé en 1761 , qui a pour titre ,
Confpectus hiftoriæ medicorum chrono
logicus , prétend que Lulle abandonna
fa femme pour embraffer la regle de
S. François ; & M. Eloy , Auteur du
Dictionnaire Hiftorique de la Médeci
ne , rapporte fous la caution d'Ecri
MARS. 1763. 45
vains Efpagnols , que Lulle fut épris
pour une jeune fille , appellée Elénore ,
qui refufoit opiniatrément de l'écouter.
Un jour qu'il la preffoit & qu'il lui
demandoit la raifon de fes refus , elle
ouvrit fur le champ fon corfet , & lui
montra un fein dévoré par un cancer.
On prétend que Lulle , en amant tendre
& généreux , fut porté par cette occafion
à voyager pour étudier en Chymie
, & trouver fous les grands maîtres
en cet art , des rémedes contre
l'infirmité de fa Maîtreffe . D'autres
difent que frappé du fpectacle qu'on
lui avoit mis fous les yeux , il s'adonna
à la vertu & aux exercices
de la pénitence , & que de là eft venu
fon entier devoûment à la converfion
des Infideles . Il étudia dans cette vue
l'Arabe à l'âge de trente ans ; & Jacques,
Roi d'Arragon , fonda à fa follicitation
, un Séminaire à Majorque pour
l'inftruction des Miffionnaires.
DE RAIMOND LULLE,
LAABRÉGÉ
Chronologique
de l'hiftoire
Eccléfiaftique
, imprimé
chez
Hériffant
, rue S. Jacques
, fait
mention
, fous l'année
1312 , d'un établiſfement
de Maîtres
en Langues
Hébraïque
, Arabique
& Chaldéenne
dans
les principales
Villes
de l'Europe
, pour
faciliter
la converfion
des Infidéles
. On
42 MERCURE DE FRANCE.
étoit fort touché dans ce tems , du
defir de faire la conquête de la Terre
Sainte , par ce pieux motif. L'Au--
teur de l'excellent Ouvrage que je viens .
de citer , attribue cette établiſſement
au zéle de Raimond Lulle , du tiers
Ordre de S. François , qui le follicitoit
depuis long- temps. On ajoute fur
le compte de ce Sçavant , qu'on en
fcait fi peu l'hiftoire , que les uns en
ont fait un Magicien , les autres un
Hérétique , & les autres un Martyr.
Ces qualités ne font incompatibles
, en même temps , dans le même
fujet , que dans la vraie acception , qui
eft la feule raiſonnable. Un même objet
peut être confideré fous plufieurs
afpects , & l'on juge ordinairement par
la maniere dont on voit , fans s'embarraffer
fi l'on a vu comme il falloit.
Il n'eft point étonnant que Raimond
Lulle ait paffé pour Magicien. Difciple
d'Arnoud de Ville Neuve dans l'Alchymie
, il s'eft fort appliqué à chercher
des fecrets extraordinaires ; il a beaucoup
travaillé & écrit fur le grand
OEuvre ; & l'on affure qu'il a fait de
l'or. Agrippa a été un de fes Sectateurs
dans des temps plus voifins de
nous ; & les lumieres d'un Siécle plus
1
MARS. 1763. 43
éclairé ne l'ont point garanti de l'accufation
de magie. Rien n'empeche que
Raimond Lulle n'ait été regardé comme
Magicien par des gens qui affùrement
ne l'étoient pas. Il est tout fimple que
ceux qui ne portoient pas la mauvaiſe opinion
fur ce laborieuxChymiſte aupoint
de le croire en commerce avec le Diable
, fe foient retranchés charitablement
à le taxer d'Héréfie ;fentiment plus favorable
qui retardoit au moins jufqu'à fa
mort fon affociation avec les Damnés. Je
ne fçais dans quelles fources on a puifé ,
pour jetter des foupçons fi injurieux
fur la mémoire d'un grand homme
qui a fouffert le martyre pour la Religion
Chrétienne ; & pourquoi on a
cru que l'on manquoit de notice fur
fa vie. Il étoit Efpagnol , né de parens
nobles , dans l'Ifle Majorque en
1235. Jeune il s'appliqua beaucoup à l'étude
de la Logique , & acquit le furnom
de Docteur illuminé. Il s'attacha enfuite
à la Chymie , fit beaucoup d'écoliers ,
& publia un grand nombre des Traités
fort connus & eftimés des Adeptes.
On fçait qu'il a vêcu jufqu'à l'âge de
quatre-vingt ans , & qu'il a été martyrifé
en Afrique par les Infideles.
On fixe même le jour de fa mort au
44 MERCURE DE FRANCE.
vingt-neuviéme Juin 1315. Il eft certain
que dès l'âge de 30 ans , les Sciences
mondaines n'eurent plus pour lui
le moindre attrait. Il fe dévoua entiérement
à la converfion des Mahométans
, & il a emploié les quarante-
cinq dernieres années de fa vie à
les prêcher avec autant de zéle que de
fuccès. Ses travaux ont été glorieufement
courronnés par la même palme
que le premier Martyr. Il fut lapidé
par ordre d'un Roi : juffu Regis Bo
gia je ne fçais fi Bogia eft le nom
du Roi , ou de fon Royaume .
Rien ne juftifie qu'il ait été Reli
gieux , comme quelques uns l'ont avancé.
Le Tiers Ordre de S. François
eft une Congrégation , cu plutôt une
Confrairie de piété, dans laquelle on admet
les gens mariés. On dit queRaimond
Lulle étoit de ce nombre . George Mathias
Profeffeur de Médecine en l'Univerfité
de Gottingen , dans un livre
imprimé en 1761 , qui a pour titre ,
Confpectus hiftoriæ medicorum chrono
logicus , prétend que Lulle abandonna
fa femme pour embraffer la regle de
S. François ; & M. Eloy , Auteur du
Dictionnaire Hiftorique de la Médeci
ne , rapporte fous la caution d'Ecri
MARS. 1763. 45
vains Efpagnols , que Lulle fut épris
pour une jeune fille , appellée Elénore ,
qui refufoit opiniatrément de l'écouter.
Un jour qu'il la preffoit & qu'il lui
demandoit la raifon de fes refus , elle
ouvrit fur le champ fon corfet , & lui
montra un fein dévoré par un cancer.
On prétend que Lulle , en amant tendre
& généreux , fut porté par cette occafion
à voyager pour étudier en Chymie
, & trouver fous les grands maîtres
en cet art , des rémedes contre
l'infirmité de fa Maîtreffe . D'autres
difent que frappé du fpectacle qu'on
lui avoit mis fous les yeux , il s'adonna
à la vertu & aux exercices
de la pénitence , & que de là eft venu
fon entier devoûment à la converfion
des Infideles . Il étudia dans cette vue
l'Arabe à l'âge de trente ans ; & Jacques,
Roi d'Arragon , fonda à fa follicitation
, un Séminaire à Majorque pour
l'inftruction des Miffionnaires.
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Résumé : PRÉCIS HISTORIQUE sur la vie DE RAIMOND LULLE,
Raimond Lulle, un érudit du XIIIe siècle, est connu pour son engagement missionnaire et ses contributions intellectuelles. En 1312, il initie la création d'un établissement de maîtres en langues hébraïque, arabe et chaldéenne, visant à faciliter la conversion des infidèles. Membre du tiers-ordre de Saint-François, Lulle est perçu différemment selon les interprétations : certains le voient comme un magicien, d'autres comme un hérétique, et d'autres encore comme un martyr. Né en 1235 à Majorque, Raimond Lulle se forme en alchimie sous la tutelle d'Arnoud de Ville Neuve et rédige de nombreux traités sur ce sujet. À partir de l'âge de 30 ans, il se consacre entièrement à la conversion des mahométans. Ses efforts missionnaires se poursuivent jusqu'à sa mort, survenue le 29 juin 1315 en Afrique, où il est lapidé sur ordre d'un roi. Lulle se marie et consacre sa vie à la conversion des infidèles. Il étudie l'arabe et fonde un séminaire à Majorque pour former des missionnaires, avec le soutien du roi Jacques d'Aragon. Ses initiatives visent à préparer des missionnaires capables de dialoguer avec les musulmans dans leur propre langue, facilitant ainsi leur conversion.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 45-47
VERS à M. le Chevalier DE CHATELUS sur ceux qu'il a présentés à Mgr le Prince DE CONDÉ.
Début :
La charme de la Poësie [...]
Mots clefs :
Muse, Badinage, Raison, Anacréon
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : VERS à M. le Chevalier DE CHATELUS sur ceux qu'il a présentés à Mgr le Prince DE CONDÉ.
VERS à M. le Chevalier DE CHATELUS
fur ceux qu'il a préfentés à
Mgr le Prince DE CONDÉ
La charme de la Poëfie
46 MERCURE DE FRANCE,
Sur tout ce qui vit a des droits ;
La folide philofophie
Pour plaire en emprunte la voix s
Le Conquerant le plus illuftre
Qui voit l'Univers à ſes pieds ,
En tire encor un nouveau luftre :
Mais il faut que vous le chantiez.
Votre Mufe vive & riante
Allie avec préciſion ,
Toujours belle , toujours touchante,
Le badinage & la Raifon.
La mienne au doux repos livrée ,
Amante des eaux & des bois ,
Dans leur filence retirée ,
Jufques au fublime Empirée
N'a jamais élevé la voix .
Des Dieux adorant la puiſſance ,
Tentant peu d'efforts indiſcrets,
Sans chanter fa reconnoiffance ;
Elle jouit de leurs bienfaits.
Quelquesfois l'amour qui m'inſpire
Lui- même préfide à mes ſons :
Je chante ce jour ou Thémire
Sattendriffoit par mes chanſons.
Ce fouvenir & cette Image
Font encor ma félicité.
C'eſt ainfi que de mon jeune âge
J'amuſe la légèreté .
MARS. 1763 . 47
f Dans le repos & la moleffe
Coulent rapidement mes jours ;
Et mon indolente pareffe ,
Quoiqu'honorant fort la ſageſſe ,
S'éveille à la voix des amours.
A votre Mufe délicate
Je laiffe embellir la Raiſon ,
Et nous faire entendre Socrate ,
Par la bouche d'Anacréon.
fur ceux qu'il a préfentés à
Mgr le Prince DE CONDÉ
La charme de la Poëfie
46 MERCURE DE FRANCE,
Sur tout ce qui vit a des droits ;
La folide philofophie
Pour plaire en emprunte la voix s
Le Conquerant le plus illuftre
Qui voit l'Univers à ſes pieds ,
En tire encor un nouveau luftre :
Mais il faut que vous le chantiez.
Votre Mufe vive & riante
Allie avec préciſion ,
Toujours belle , toujours touchante,
Le badinage & la Raifon.
La mienne au doux repos livrée ,
Amante des eaux & des bois ,
Dans leur filence retirée ,
Jufques au fublime Empirée
N'a jamais élevé la voix .
Des Dieux adorant la puiſſance ,
Tentant peu d'efforts indiſcrets,
Sans chanter fa reconnoiffance ;
Elle jouit de leurs bienfaits.
Quelquesfois l'amour qui m'inſpire
Lui- même préfide à mes ſons :
Je chante ce jour ou Thémire
Sattendriffoit par mes chanſons.
Ce fouvenir & cette Image
Font encor ma félicité.
C'eſt ainfi que de mon jeune âge
J'amuſe la légèreté .
MARS. 1763 . 47
f Dans le repos & la moleffe
Coulent rapidement mes jours ;
Et mon indolente pareffe ,
Quoiqu'honorant fort la ſageſſe ,
S'éveille à la voix des amours.
A votre Mufe délicate
Je laiffe embellir la Raiſon ,
Et nous faire entendre Socrate ,
Par la bouche d'Anacréon.
Fermer
Résumé : VERS à M. le Chevalier DE CHATELUS sur ceux qu'il a présentés à Mgr le Prince DE CONDÉ.
Le poème est adressé à M. le Chevalier de Châtellus et exprime une admiration pour ses talents poétiques. L'auteur souligne le pouvoir de la poésie de charmer et de toucher même les conquérants les plus illustres. Il compare sa propre muse à celle du Chevalier, notant que la sienne préfère le repos et la nature, tandis que celle du Chevalier allie badinage et raison de manière précise et touchante. L'auteur évoque des souvenirs heureux liés à l'amour et à la poésie, mentionnant un jour où Thémire se réjouissait de ses chansons. Il conclut en exprimant que ses jours passent rapidement dans le repos et la mollesse, mais que son âme s'éveille à la voix des amours. Il laisse à la muse délicate du Chevalier le soin d'embellir la raison et de faire entendre Socrate par la bouche d'Anacréon. Le poème est daté de mars 1763.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
16
p. 47-58
ANGELIQUE, Anecdote qu'on auroit rendue plus intéressante, si elle étoit moins vraie.
Début :
Qui est là ? s'écrie la Marquiſe de *** qui a l'audace de me reveiller si matin ? [...]
Mots clefs :
Comte, Juges, Maladie, Chevalier, Marquise , Cœur, Mère
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ANGELIQUE, Anecdote qu'on auroit rendue plus intéressante, si elle étoit moins vraie.
ANGELIQUE , Anecdote qu'on au
roit rendue plus intéreſſante , fi elle
étoit moins vraie.
Qui eft là ? s'écrie la Marquiſe de ***
1
qui a l'audace de me reveiller fi matin ?
qui ofe entrer dans mon appartement
avant que j'aie fonné ? c'est vous , impertinente
qu'elle heure eft - il ? Madame
, répond Lifette , en tremblant ,
il est midi paffé ... eh bien , Mademoifelle
, doit-il être jour chez moi à
midi ? On ne tient pas à vos étourderies
réïtérées ; je vous en ai prévenue , vous
travaillez à vous faire chaffer... Je vous
demande pardon ! mais... Ne voilà-t- il
pas de vos Mais? Je vous ai dit que mais
étoit déplacé dans votre bouche.... fi
48 MERCURE DE FRANCE.
Madame vouloit permettre ... Si Madame
! Vous ne finirez point avec vos
mais & vos fi qui m'affomment.... Au
nom de Dieu , Madame ! laiffez - moi
vous dire le fujet... Je m'en doute le
Comte impatient , peu jaloux d'obſerver
l'ordre des procédés , vous aura
payée pour fe faire annoncer ? ... Non,
Madame... ce Provincial qui m'eft recommandé
eft venu pour m'entretenir
de fon procès. Je ne fçais pas un mot
de fon affaire : n'importe , j'arrangerai
un fouper avec fes Juges ; je foutiendrai
fon bon droit au deffert ; je lui réponds
d'une douzaine de voix : qu'il
foit tranquille... Ce n'eft pas cela , Madame...
C'est donc ce jeune Chanoine
dont mon Abbé m'a parlé , qui vient
me demander ce que je penfe d'un Sermon
fur l'humilité , qu'il doit prêcher
à la Cour?..Non , je ne l'ai pas vu ... C'eſt
donc cet Officier Gafcon avec qui j'ai
joué fur fa parole , qui m'enyoye les
cent piftoles qu'il a perdues ? mais cela
n'eft pas croiable Cela n'eſt pas
non plus .... Ceci commence à m'impatienter.
Vous verrez que la Préfidente
me fait prier de lui dicter ce qu'elle
doit dire de la Piéce qu'on donnera ce
foir aux François. Il fuffit de la faire
....
avertir
MARS. 1763. 2018 49
avertir que l'Auteur me l'a lue , que j'ai
retenu trois Loges , & que tous mes domeftiques
déguifés fe rendront au Parterre
pour contribuer au fuccès de cette
Piéce , en claquant des mains à tort &
à travers. Attendez ; ne feroit- ce pas
plutôt cet apprentif Financier , qui voudroit
de tout fon coeur paroitre boffu
& qui n'est que contrefait. ? J'y fuis fans
doute: il m'apporte ce joli perroquet qui
a fait tout mon amufement dans l'ennuyeufe
fête qu'il m'a donnée avanthier.
Ah , que j'aurai de peine à lui faire def
apprendre les fadeurs qu'il a entendu
débiter à fon maître ! ... Non , Madame,
il n'eft pas queftion de la Préfidente
, du Financier ni de fon Perroquet.
Une choſe bien plus férieuſe ....
Vous me faites trembler , Lifette ! ô
Ciel que voulez-vous dire ; mon Angola....
Il n'eft arrivé aucun accident à
ce cher animal, Hélas ! il vaudroit mieux
qu'il fût mort & avec lui tous les An
gola , du monde ... Treve à vos
fouhaits impertinens. Vous me pouffez
à bout , vous m'excédez ; le Chevalier
eft malade , je le vois trop , il ne fortira
pas d'aujourd'hui. Il a hier prodigieufement
foupé Quel fâcheux contre-
temps , à la veille du jour où je dois
C
2
"
50 MERCURE DE FRANCE.
couronner fa conftance ! .... J'ignore
fi M. le Chevalier a foupé & s'il eft
malade mais Mademoiſelle votre fille
´eft dans un état que je ne peux vous
celer. Elle s'eft couchée avec un mal
de tête très- violent , accompagné de
beaucoup de fiévre ; elle a eu des convulfions
pendant la nuit. Le Médecin l'a
trouvée en danger & nous a confeillé
de vous en avertir ..... Lifette , mon
Médecin eft un efprit pufillanime qui
voit du danger partout. L'indifpofition
d'Angélique n'aura pas de fuite. D'ail
leurs quel changement voulez- vous qu'opére
ma préfence ? Vous auriez pu vous
difpenfer de me réveillér. Cependant
je verraí Angélique ; allons qu'on m'habille;
& avant tout , informez -vous fi
fa maladie ..... je crains le mauvais air.
mais vous avez fans doute pris l'allarme
trop légérement.
En voilà probablement affez pour
faire connoître cette Marquife , qu'on
peut mettre au nombre de ces demimonftres
dont le nom change tous
les jours à Paris & qu'on défigne encore
en Province fous celui de petites
Maitreffes. De grands biens , une phifionomie
fans caractère , mais propre
à faifir toutes les nuances dans l'occaMARS.
1763. 51
fion , un efprit faux & un coeur gâté ;
tel doit être le partage de ces femmes à
prétentions qui aviliffent leur féxe &
le nôtre. Tel étoit auffi celui de la Marquife.
Reftée veuve à l'âge de vingt
ans , elle avoit tâché par toutes fortes
de voies, de fe dédommager de la contrainte
dans laquelle elle avoit gémi
avec un honnête homme qui avoit ofé
l'empêcher de fe déshonorer. Elle n'avoit
pu lui pardonner cet excès de févérité
; & c'étoit le motif de la haine
qu'elle gardoit à fa mémoire.
Angélique étoit le feul fruit de cet
Hymen mal afforti, fans être exactement
régulière , fa beauté frappe au premier
coup d'oeil . On ne cherche pas à détailler
fes traits ; on en admire l'enfemble
. Quoique fes yeux ayent perdur de
leur vivacité & que l'incarnat de fon
teint foit flétri par fes pleurs , on ne
la voit pas encore fans un tendre intérêt.
Je ne m'arrêterai pas à tracer l'éfquiffe
des agrémens extérieurs qu'An →
gélique tient de la Nature ; elle les dédaigna
dès qu'elle les eut connus . Ceci
conduit à l'éloge de fon âme : mais je ne
fuis que fon Hiftorien & je dois me
borner au fimple récit des faits pour ménager
au Lecteur le plaifir délicat de
prononcer lui - même. Cij
52 MERCURE DE FRANCE
2
La Marquife étoit fur le point de
prendre pour Epoux le Chevalier de
*** qu'elle préféroit à fes rivaux , à
caufe de l'éloignement qu'il avoit tou→
jours marqué pour la jaloufie. Le Che
valier n'avoit qu'un grand nom , des
efpérances de fortune & un fond d'a
mour propre inépuifable. Il avoit ai
mé Angelique avant que de s'être décla
ré pour fa mère. Il fut le premier qui
s'offrit à fes yeux , à peine ouverts à
l'amour. Une paffion d'une verité momentanée
, maniée par un habile hom →
me , n'eft que trop propre à féduire
l'innocence. Angelique eft née fenfible.
Elle fe livra à fon penchant avec fécurité.
L'abîme étoit couvert de fleurs ;
elle ne s'en apperçut qu'en s'y précipi
tant. Le Chevalier , pour furmonter fes
fcrupules , avoit eu la baffeffe de recourir
aux fermens. Il l'avoit même
obligée d'accepter une promeffe de ma
iiage. Il n'en falloit pas tant pour abufer
de fa crédulité. Elle ne concevoit
pas qu'un homme d'honneur dût jamais
en manquer. Il lui étoit refervé
d'en faire la trifte expérience & de paffer
tout-à- coup de l'eftime & de l'as
mour à l'indignation & au mépris. O
vous qui voulez mériter le doux nom
... c -iv .
MARS. 1763
de mère occupez -vous fans ceffe
montrer aux jeunes perfonnes qui fous
vos yeux commencent leur entrée ſur
la fcène du monde , tout ce qu'elles
doivent faire pour fe garantir du poifon
qu'on y verfe dans des coupes trompeufes
! arrachez le voile que l'illufion
tient fufpendu fur tous les objets qu'elles
y rencontrent. Apprenez-leur à n'eftimer
que ce qu'eftiment les gens fenfés
, qui furnagent fur cette mer ora
geufe , & qui gouvernés par une fage
défiance , évitent les écueils dont elle
eft environnée .
腻
Angélique venoit de s'appercevoir
qu'elle étoit la victime de fa créduli
té. Une feule voie lui fembloit ouverte
pour eviter l'opprobre ; elle la trouva
fermée. Elle apprit que le Chevalier
alloit jurer à fa mère , à la face des
autels , la foi qu'il lui avoit donnée."
Cette nouvelle lui fit une fi grande révolution
, qu'auffitôt après fa maladie ,
on défefpéroit qu'elle pût recouvrer fa
fanté. La Marquife vint la voir , com--
me elle l'avoit promis. Angélique fixa
fes yeux mourans fur elle. Elle prit fa'
main & la tint long-temps fur fon
coeur. Elle voulut parler ; la voix luimanqua.
Le danger ne ceffa qu'au bout
i
1
1
.
"
Cij
54 MERCURE DE FRANCE .
de quelques jours. Les Médecins' la vi
rent à leur grand regret dans cet état
de langueur , qui réfifte aux efforts de
leur art , & qui donne la mort à tout
moment fans ôter la vie.
La Marquife contracta avec le Chevalier
, ne s'imaginant pas qu'elle por
toit le coup le plus funefte à la fenfibilité
d'Angélique. Le mariage fe fit
avec ce vain appareil de réjouiffances,
qui n'eft fouvent que le fimulacre de
la joie. Les motifs du Chevalier & de la
Marquife n'étoient pas affez purs pour
leur procurer cette fatisfaction intérieure,
qui eft peut- être l'unique récompenfe
de la vertu.
Angélique n'avoit pu fe réfoudre à
déclarer à fa mère fon fatal fecret. Cependant
il ne lui étoit plus poffible
de le cacher. La douleur dans laquelle
elle étoit plongée ne lui ayant pas permis
de quitter fon appartement , elle
n'avoit pas vu le Chevalier depuis fa
maladie. Elle prit enfin le parti de lui
confier fon état. Il fe rendit chez elle
dès qu'elle lui eut fait fçavoir qu'elle.
vouloit lui parler. Il la trouva les cou-.
des appuyés fur une table , une plume
à la main , & les yeux fixés fur un pa-.
pier arrofé de fes larmes. Ses joues
MARS. 1763.
étoient colorées d'un rouge âpre qui
rendoit plus remarquable la pâleur mortelle
qui régnoit fur le refte de fon vifage.
Ses lévres étoient entr'ouvertes ;
tout en elle annonçoit un être accablé
fous le poids du malheur & prêt à ne
prendre confeil que de fon défeſpoir.
Le Chevalier , avec un air d'attendrif
fement , voulut lui témoigner fa furpriſe
de la trouver fi changée. Il ofa même
entreprendre de juftifier fon procédé &
l'affura que fon amour n'avoit fouffert
ancune altération. Mon établiſſement
lui dit-il , eft une affaire d'intérêt , à laquelle
mon coeur n'a pas pris la moindre
part. Je fuis bien éloigné de vouloir
rompre les noeuds qui nous uniffent.
L'Amour les a formés : ils font facrés
pour moi. Belle Angélique , après vous
avoir aimée , avez-vous pu croire que
la Marquife m'ait rendu inconſtant ? Non ,
je jure à vos pieds que je n'ai jamais
eu pour elle que de l'indifférence. Tant
pis , répondit Angélique ! vous n'en
êtes que plus coupable & ma mère plus
malheureufe. Mais peu m'importe que
vous m'ayez aimée , ou non. C'eft affez
qu'il ait fubfifté entre nous une
liaifon que je détefte. Je ne vous ferai
point de reproches , car je ne vous hais
Civ
56
MERCURE
DE
FRANCE
.
pas je vous méprife & me borne
vous déclarer l'état où je fuis. Vous
en êtes la caufe. Vous pouvez feul me ;
fournir les moyens d'en dérober la ,
connoiffance au Public. Je n'en ferai ;
pas moins dégradée à mes propres yeux:
mais je me dois à moi-même & à ma
famille , la trifte confolation d'avoir fait
tous mes efforts pour cacher mon opprobre
& ma honte ; foible & derniére ,
reffource d'une infortunée , que..
I le remords
pourfuivra fans ceffe & qui nel
voit d'autre terme à fes maux que ce
lui de fa vie bh , guits debit
-Ce difcours prononcé , de fang froid,
glaça d'horreur le Chevalier. Il eut peine
à bégayer quelques motsS pour faire
entendre à Angélique qu'il avoit.compris
ce qu'elle exigeoit de lui , &
qu'elle pouvoir compter fur fes foins.
Illa quitta dans un défordre dont la
Marques'apperçut. Elle lui demanda
quel lavoit été le fujet de fas donverfation
avec fa fille . Le Chevalier habile à
diffimuler, l'afflura que fa langueur fe
diffiperoit bientôt fi elle vouloit lui :
permettre d'aller refpirer l'air de la campagne.
La Marquife ne demandoit pas
mieux , & dès le lendemain , Angéli-!
que avec fa femme de chambre & un
MARS. 1763. 57
vieux domeftique , partit pour le Chateau
de ***. Le Chevalier peu de temps'
après y envoya un Chirurgien. La femme
de chambre & lui furent les feuls
qu'on mit dans la confidence : l'un
& l'autre ont répondu à la confiance
qu'on leur avoit témoignée ; & tout fut
conduit avec tant de prudence , que
perfonne ne fe douta de la trifte avanture
d'Angélique.
Avec toutes les qualités néceffaires pour
plaire dans la fociété, il eft difficile qu'on
s'ennuye avec foi- même. Angélique
paffa une année entiere dans fa retraite
fans defirer d'en fortir. Enfin la Marquife
la rappella auprès d'elle . Elle trou- '
va la maifon de fa mère dans un défordre
dont la maîtreffe feule ne s'appercevoit
pas . Le Chevalier avoit diffipé
la meilleure partie des biens de fa
femme & l'avoit même déterminée à
s'obliger pour des fommes confidérables
. Il fe préfentoit alors un parti fort
avantageux pour Angélique ; mais fa ré
folution étoit prife : elle avoit vu qu'elle
ne pouvoit reclamer le bien que fon
père lui avoit laiflé , fans ruirer fa mère
: un coeur comme le fien ne balance
guères. Elle prit de fi fages mefures
, qu'elle fit réfoudre la Marquise à
c
v
58. MERCURE DE FRANCE.
fe faire féparer d'avec fon mari , & lui fit
enfuite une donation de tout ce qu'elle
avoit droit de reclamer. La Marquife
ne put réſiſter à un procédé fi généreux .
Elle connut qu'elle étoit mère. L'amitié
dont elle commença à fentir les douceurs
, la dédommagea des vains plaifirs
qu'elle avoit perdus. Elle s'applique
aujourd'hui à réparer par une conduite
irréprochable les égaremens de fa
vie. Elle fe plaît à croire qu'elle doit
fon bonheur à fa fille & ne ceffe de
lui en témoigner fa reconnoiffance.
Angélique s'applaudit du facrifice
qu'elle a fait ; & toutes deux jouiffent
d'une tranquillité d'autant plus flateuſe,
qu'elles ont appris à leur dépens à en
connoître tout le prix.
Par M: de C *** , à Lyon.
roit rendue plus intéreſſante , fi elle
étoit moins vraie.
Qui eft là ? s'écrie la Marquiſe de ***
1
qui a l'audace de me reveiller fi matin ?
qui ofe entrer dans mon appartement
avant que j'aie fonné ? c'est vous , impertinente
qu'elle heure eft - il ? Madame
, répond Lifette , en tremblant ,
il est midi paffé ... eh bien , Mademoifelle
, doit-il être jour chez moi à
midi ? On ne tient pas à vos étourderies
réïtérées ; je vous en ai prévenue , vous
travaillez à vous faire chaffer... Je vous
demande pardon ! mais... Ne voilà-t- il
pas de vos Mais? Je vous ai dit que mais
étoit déplacé dans votre bouche.... fi
48 MERCURE DE FRANCE.
Madame vouloit permettre ... Si Madame
! Vous ne finirez point avec vos
mais & vos fi qui m'affomment.... Au
nom de Dieu , Madame ! laiffez - moi
vous dire le fujet... Je m'en doute le
Comte impatient , peu jaloux d'obſerver
l'ordre des procédés , vous aura
payée pour fe faire annoncer ? ... Non,
Madame... ce Provincial qui m'eft recommandé
eft venu pour m'entretenir
de fon procès. Je ne fçais pas un mot
de fon affaire : n'importe , j'arrangerai
un fouper avec fes Juges ; je foutiendrai
fon bon droit au deffert ; je lui réponds
d'une douzaine de voix : qu'il
foit tranquille... Ce n'eft pas cela , Madame...
C'est donc ce jeune Chanoine
dont mon Abbé m'a parlé , qui vient
me demander ce que je penfe d'un Sermon
fur l'humilité , qu'il doit prêcher
à la Cour?..Non , je ne l'ai pas vu ... C'eſt
donc cet Officier Gafcon avec qui j'ai
joué fur fa parole , qui m'enyoye les
cent piftoles qu'il a perdues ? mais cela
n'eft pas croiable Cela n'eſt pas
non plus .... Ceci commence à m'impatienter.
Vous verrez que la Préfidente
me fait prier de lui dicter ce qu'elle
doit dire de la Piéce qu'on donnera ce
foir aux François. Il fuffit de la faire
....
avertir
MARS. 1763. 2018 49
avertir que l'Auteur me l'a lue , que j'ai
retenu trois Loges , & que tous mes domeftiques
déguifés fe rendront au Parterre
pour contribuer au fuccès de cette
Piéce , en claquant des mains à tort &
à travers. Attendez ; ne feroit- ce pas
plutôt cet apprentif Financier , qui voudroit
de tout fon coeur paroitre boffu
& qui n'est que contrefait. ? J'y fuis fans
doute: il m'apporte ce joli perroquet qui
a fait tout mon amufement dans l'ennuyeufe
fête qu'il m'a donnée avanthier.
Ah , que j'aurai de peine à lui faire def
apprendre les fadeurs qu'il a entendu
débiter à fon maître ! ... Non , Madame,
il n'eft pas queftion de la Préfidente
, du Financier ni de fon Perroquet.
Une choſe bien plus férieuſe ....
Vous me faites trembler , Lifette ! ô
Ciel que voulez-vous dire ; mon Angola....
Il n'eft arrivé aucun accident à
ce cher animal, Hélas ! il vaudroit mieux
qu'il fût mort & avec lui tous les An
gola , du monde ... Treve à vos
fouhaits impertinens. Vous me pouffez
à bout , vous m'excédez ; le Chevalier
eft malade , je le vois trop , il ne fortira
pas d'aujourd'hui. Il a hier prodigieufement
foupé Quel fâcheux contre-
temps , à la veille du jour où je dois
C
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"
50 MERCURE DE FRANCE.
couronner fa conftance ! .... J'ignore
fi M. le Chevalier a foupé & s'il eft
malade mais Mademoiſelle votre fille
´eft dans un état que je ne peux vous
celer. Elle s'eft couchée avec un mal
de tête très- violent , accompagné de
beaucoup de fiévre ; elle a eu des convulfions
pendant la nuit. Le Médecin l'a
trouvée en danger & nous a confeillé
de vous en avertir ..... Lifette , mon
Médecin eft un efprit pufillanime qui
voit du danger partout. L'indifpofition
d'Angélique n'aura pas de fuite. D'ail
leurs quel changement voulez- vous qu'opére
ma préfence ? Vous auriez pu vous
difpenfer de me réveillér. Cependant
je verraí Angélique ; allons qu'on m'habille;
& avant tout , informez -vous fi
fa maladie ..... je crains le mauvais air.
mais vous avez fans doute pris l'allarme
trop légérement.
En voilà probablement affez pour
faire connoître cette Marquife , qu'on
peut mettre au nombre de ces demimonftres
dont le nom change tous
les jours à Paris & qu'on défigne encore
en Province fous celui de petites
Maitreffes. De grands biens , une phifionomie
fans caractère , mais propre
à faifir toutes les nuances dans l'occaMARS.
1763. 51
fion , un efprit faux & un coeur gâté ;
tel doit être le partage de ces femmes à
prétentions qui aviliffent leur féxe &
le nôtre. Tel étoit auffi celui de la Marquife.
Reftée veuve à l'âge de vingt
ans , elle avoit tâché par toutes fortes
de voies, de fe dédommager de la contrainte
dans laquelle elle avoit gémi
avec un honnête homme qui avoit ofé
l'empêcher de fe déshonorer. Elle n'avoit
pu lui pardonner cet excès de févérité
; & c'étoit le motif de la haine
qu'elle gardoit à fa mémoire.
Angélique étoit le feul fruit de cet
Hymen mal afforti, fans être exactement
régulière , fa beauté frappe au premier
coup d'oeil . On ne cherche pas à détailler
fes traits ; on en admire l'enfemble
. Quoique fes yeux ayent perdur de
leur vivacité & que l'incarnat de fon
teint foit flétri par fes pleurs , on ne
la voit pas encore fans un tendre intérêt.
Je ne m'arrêterai pas à tracer l'éfquiffe
des agrémens extérieurs qu'An →
gélique tient de la Nature ; elle les dédaigna
dès qu'elle les eut connus . Ceci
conduit à l'éloge de fon âme : mais je ne
fuis que fon Hiftorien & je dois me
borner au fimple récit des faits pour ménager
au Lecteur le plaifir délicat de
prononcer lui - même. Cij
52 MERCURE DE FRANCE
2
La Marquife étoit fur le point de
prendre pour Epoux le Chevalier de
*** qu'elle préféroit à fes rivaux , à
caufe de l'éloignement qu'il avoit tou→
jours marqué pour la jaloufie. Le Che
valier n'avoit qu'un grand nom , des
efpérances de fortune & un fond d'a
mour propre inépuifable. Il avoit ai
mé Angelique avant que de s'être décla
ré pour fa mère. Il fut le premier qui
s'offrit à fes yeux , à peine ouverts à
l'amour. Une paffion d'une verité momentanée
, maniée par un habile hom →
me , n'eft que trop propre à féduire
l'innocence. Angelique eft née fenfible.
Elle fe livra à fon penchant avec fécurité.
L'abîme étoit couvert de fleurs ;
elle ne s'en apperçut qu'en s'y précipi
tant. Le Chevalier , pour furmonter fes
fcrupules , avoit eu la baffeffe de recourir
aux fermens. Il l'avoit même
obligée d'accepter une promeffe de ma
iiage. Il n'en falloit pas tant pour abufer
de fa crédulité. Elle ne concevoit
pas qu'un homme d'honneur dût jamais
en manquer. Il lui étoit refervé
d'en faire la trifte expérience & de paffer
tout-à- coup de l'eftime & de l'as
mour à l'indignation & au mépris. O
vous qui voulez mériter le doux nom
... c -iv .
MARS. 1763
de mère occupez -vous fans ceffe
montrer aux jeunes perfonnes qui fous
vos yeux commencent leur entrée ſur
la fcène du monde , tout ce qu'elles
doivent faire pour fe garantir du poifon
qu'on y verfe dans des coupes trompeufes
! arrachez le voile que l'illufion
tient fufpendu fur tous les objets qu'elles
y rencontrent. Apprenez-leur à n'eftimer
que ce qu'eftiment les gens fenfés
, qui furnagent fur cette mer ora
geufe , & qui gouvernés par une fage
défiance , évitent les écueils dont elle
eft environnée .
腻
Angélique venoit de s'appercevoir
qu'elle étoit la victime de fa créduli
té. Une feule voie lui fembloit ouverte
pour eviter l'opprobre ; elle la trouva
fermée. Elle apprit que le Chevalier
alloit jurer à fa mère , à la face des
autels , la foi qu'il lui avoit donnée."
Cette nouvelle lui fit une fi grande révolution
, qu'auffitôt après fa maladie ,
on défefpéroit qu'elle pût recouvrer fa
fanté. La Marquife vint la voir , com--
me elle l'avoit promis. Angélique fixa
fes yeux mourans fur elle. Elle prit fa'
main & la tint long-temps fur fon
coeur. Elle voulut parler ; la voix luimanqua.
Le danger ne ceffa qu'au bout
i
1
1
.
"
Cij
54 MERCURE DE FRANCE .
de quelques jours. Les Médecins' la vi
rent à leur grand regret dans cet état
de langueur , qui réfifte aux efforts de
leur art , & qui donne la mort à tout
moment fans ôter la vie.
La Marquife contracta avec le Chevalier
, ne s'imaginant pas qu'elle por
toit le coup le plus funefte à la fenfibilité
d'Angélique. Le mariage fe fit
avec ce vain appareil de réjouiffances,
qui n'eft fouvent que le fimulacre de
la joie. Les motifs du Chevalier & de la
Marquife n'étoient pas affez purs pour
leur procurer cette fatisfaction intérieure,
qui eft peut- être l'unique récompenfe
de la vertu.
Angélique n'avoit pu fe réfoudre à
déclarer à fa mère fon fatal fecret. Cependant
il ne lui étoit plus poffible
de le cacher. La douleur dans laquelle
elle étoit plongée ne lui ayant pas permis
de quitter fon appartement , elle
n'avoit pas vu le Chevalier depuis fa
maladie. Elle prit enfin le parti de lui
confier fon état. Il fe rendit chez elle
dès qu'elle lui eut fait fçavoir qu'elle.
vouloit lui parler. Il la trouva les cou-.
des appuyés fur une table , une plume
à la main , & les yeux fixés fur un pa-.
pier arrofé de fes larmes. Ses joues
MARS. 1763.
étoient colorées d'un rouge âpre qui
rendoit plus remarquable la pâleur mortelle
qui régnoit fur le refte de fon vifage.
Ses lévres étoient entr'ouvertes ;
tout en elle annonçoit un être accablé
fous le poids du malheur & prêt à ne
prendre confeil que de fon défeſpoir.
Le Chevalier , avec un air d'attendrif
fement , voulut lui témoigner fa furpriſe
de la trouver fi changée. Il ofa même
entreprendre de juftifier fon procédé &
l'affura que fon amour n'avoit fouffert
ancune altération. Mon établiſſement
lui dit-il , eft une affaire d'intérêt , à laquelle
mon coeur n'a pas pris la moindre
part. Je fuis bien éloigné de vouloir
rompre les noeuds qui nous uniffent.
L'Amour les a formés : ils font facrés
pour moi. Belle Angélique , après vous
avoir aimée , avez-vous pu croire que
la Marquife m'ait rendu inconſtant ? Non ,
je jure à vos pieds que je n'ai jamais
eu pour elle que de l'indifférence. Tant
pis , répondit Angélique ! vous n'en
êtes que plus coupable & ma mère plus
malheureufe. Mais peu m'importe que
vous m'ayez aimée , ou non. C'eft affez
qu'il ait fubfifté entre nous une
liaifon que je détefte. Je ne vous ferai
point de reproches , car je ne vous hais
Civ
56
MERCURE
DE
FRANCE
.
pas je vous méprife & me borne
vous déclarer l'état où je fuis. Vous
en êtes la caufe. Vous pouvez feul me ;
fournir les moyens d'en dérober la ,
connoiffance au Public. Je n'en ferai ;
pas moins dégradée à mes propres yeux:
mais je me dois à moi-même & à ma
famille , la trifte confolation d'avoir fait
tous mes efforts pour cacher mon opprobre
& ma honte ; foible & derniére ,
reffource d'une infortunée , que..
I le remords
pourfuivra fans ceffe & qui nel
voit d'autre terme à fes maux que ce
lui de fa vie bh , guits debit
-Ce difcours prononcé , de fang froid,
glaça d'horreur le Chevalier. Il eut peine
à bégayer quelques motsS pour faire
entendre à Angélique qu'il avoit.compris
ce qu'elle exigeoit de lui , &
qu'elle pouvoir compter fur fes foins.
Illa quitta dans un défordre dont la
Marques'apperçut. Elle lui demanda
quel lavoit été le fujet de fas donverfation
avec fa fille . Le Chevalier habile à
diffimuler, l'afflura que fa langueur fe
diffiperoit bientôt fi elle vouloit lui :
permettre d'aller refpirer l'air de la campagne.
La Marquife ne demandoit pas
mieux , & dès le lendemain , Angéli-!
que avec fa femme de chambre & un
MARS. 1763. 57
vieux domeftique , partit pour le Chateau
de ***. Le Chevalier peu de temps'
après y envoya un Chirurgien. La femme
de chambre & lui furent les feuls
qu'on mit dans la confidence : l'un
& l'autre ont répondu à la confiance
qu'on leur avoit témoignée ; & tout fut
conduit avec tant de prudence , que
perfonne ne fe douta de la trifte avanture
d'Angélique.
Avec toutes les qualités néceffaires pour
plaire dans la fociété, il eft difficile qu'on
s'ennuye avec foi- même. Angélique
paffa une année entiere dans fa retraite
fans defirer d'en fortir. Enfin la Marquife
la rappella auprès d'elle . Elle trou- '
va la maifon de fa mère dans un défordre
dont la maîtreffe feule ne s'appercevoit
pas . Le Chevalier avoit diffipé
la meilleure partie des biens de fa
femme & l'avoit même déterminée à
s'obliger pour des fommes confidérables
. Il fe préfentoit alors un parti fort
avantageux pour Angélique ; mais fa ré
folution étoit prife : elle avoit vu qu'elle
ne pouvoit reclamer le bien que fon
père lui avoit laiflé , fans ruirer fa mère
: un coeur comme le fien ne balance
guères. Elle prit de fi fages mefures
, qu'elle fit réfoudre la Marquise à
c
v
58. MERCURE DE FRANCE.
fe faire féparer d'avec fon mari , & lui fit
enfuite une donation de tout ce qu'elle
avoit droit de reclamer. La Marquife
ne put réſiſter à un procédé fi généreux .
Elle connut qu'elle étoit mère. L'amitié
dont elle commença à fentir les douceurs
, la dédommagea des vains plaifirs
qu'elle avoit perdus. Elle s'applique
aujourd'hui à réparer par une conduite
irréprochable les égaremens de fa
vie. Elle fe plaît à croire qu'elle doit
fon bonheur à fa fille & ne ceffe de
lui en témoigner fa reconnoiffance.
Angélique s'applaudit du facrifice
qu'elle a fait ; & toutes deux jouiffent
d'une tranquillité d'autant plus flateuſe,
qu'elles ont appris à leur dépens à en
connoître tout le prix.
Par M: de C *** , à Lyon.
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Résumé : ANGELIQUE, Anecdote qu'on auroit rendue plus intéressante, si elle étoit moins vraie.
Le texte narre les malheurs amoureux d'Angélique, fille de la Marquise de ***. La Marquise, veuve à vingt ans, est présentée comme une femme aux mœurs légères et au cœur corrompu. Angélique, belle et sensible, est séduite par le Chevalier de ***, qui lui promet le mariage. Cependant, il finit par épouser sa mère. À l'annonce de cette nouvelle, Angélique tombe gravement malade. Le Chevalier tente de justifier son comportement mais accepte finalement d'aider Angélique à cacher sa situation. Désespérée, Angélique se retire à la campagne où elle accouche en secret. Après une année de retraite, elle revient et convainc sa mère de se séparer de son mari. Elle lui cède tous ses droits d'héritage, ce qui touche profondément la Marquise. Cette dernière change alors de comportement et s'efforce de réparer ses erreurs passées, reconnaissant la générosité de sa fille. Par la suite, le texte mentionne la satisfaction d'Angélique après un sacrifice qu'elle a accompli. Elle et une compagne jouissent d'une tranquillité particulièrement précieuse, d'autant plus appréciée qu'elles en ont appris la valeur à leurs dépens. Le texte est signé par un certain 'M: de C ***' à Lyon.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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17
p. 58
Pour le Portrait de Mlle ....
Début :
Tour céde au naturel, l'Art ne peut l'égaler : [...]
Mots clefs :
Art, Naturel, Muette
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Pour le Portrait de Mlle ....
Pour le Portrait de Mlle ....
Tour céde au naturel , l'Art ne peut l'égaler :
Cette reffemblance eſt parfaite.
Mais l'aimable.... n'eſt ici que muette ,
Et j'aime à l'entendre parler.
ParM. PASCAL , C. de G, au R. de Piémont.
Tour céde au naturel , l'Art ne peut l'égaler :
Cette reffemblance eſt parfaite.
Mais l'aimable.... n'eſt ici que muette ,
Et j'aime à l'entendre parler.
ParM. PASCAL , C. de G, au R. de Piémont.
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18
p. 59
A Son Altesse Royale Mgr LE DUC DE SAVOIE, en lui souhaitant la bonne année.
Début :
PRINCE, dont les Ayeux font retentir l'histoire [...]
Mots clefs :
Aïeux , Roi, Paix
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texteReconnaissance textuelle : A Son Altesse Royale Mgr LE DUC DE SAVOIE, en lui souhaitant la bonne année.
A Son Altele Royale Mgr LE DUC
DE SAVOIE , eenn_lluuii fouhaitant la
bonne année.
PRINCE , dont les Ayeux font retentir l'hiſtoire
Des plus hautes vertus , des plus illuftres faits
Fils d'un Roi fignalé par plus d'une victoire ,
Qui chérit & procure aux autres Rois la Paix :
D'un coeur. reconnoiſſant agréez les fouhaits.
Mécène généreux , efpoir de la Patrie ,
On voit revivre en vous l'ancien Germanicus.
Dieu , qui chéris fon coeur , fes moeurs & fes
vertus ,
Daigne le conferver ! chaque jour de fa vie
Au bonheur d'un grand Peuple ajoute un jour de
plus.
SUR
PERENOTTI , à Turin.
DE SAVOIE , eenn_lluuii fouhaitant la
bonne année.
PRINCE , dont les Ayeux font retentir l'hiſtoire
Des plus hautes vertus , des plus illuftres faits
Fils d'un Roi fignalé par plus d'une victoire ,
Qui chérit & procure aux autres Rois la Paix :
D'un coeur. reconnoiſſant agréez les fouhaits.
Mécène généreux , efpoir de la Patrie ,
On voit revivre en vous l'ancien Germanicus.
Dieu , qui chéris fon coeur , fes moeurs & fes
vertus ,
Daigne le conferver ! chaque jour de fa vie
Au bonheur d'un grand Peuple ajoute un jour de
plus.
SUR
PERENOTTI , à Turin.
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Résumé : A Son Altesse Royale Mgr LE DUC DE SAVOIE, en lui souhaitant la bonne année.
Le texte est un message de vœux adressé au Duc de Savoie pour la bonne année. Il loue ses ancêtres pour leurs vertus et exploits, et le décrit comme un prince pacifique et généreux, comparable à Germanicus. Le message exprime des vœux de bonheur et prie pour la préservation de ses qualités. Imprimé par Perenotti à Turin.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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19
p. 59-60
VERS.
Début :
SUR le nom de Méchant, je veux que l'on s'explique : [...]
Mots clefs :
Méchant, Misanthrope, Haine publique, Scélérat
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : VERS.
VERS
UR le nom de Méchant , je veux que l'on s'exiplique
:.. !!
Pour corriger un Sot par un bon mot piquant ,
Lon eft Milantrope , ou Cauftique,
Mais , à mon avis , le Méchant,
."
Eft l'homme lâche & bas qui déchire l'abfents
siq
C vj
65 MERCURE DE FRANCE.
C'eſt lui qu'il faut charger de la haine publique ,,
Ainfi qu'un Scélérat qui tue en fe cachant .
UR le nom de Méchant , je veux que l'on s'exiplique
:.. !!
Pour corriger un Sot par un bon mot piquant ,
Lon eft Milantrope , ou Cauftique,
Mais , à mon avis , le Méchant,
."
Eft l'homme lâche & bas qui déchire l'abfents
siq
C vj
65 MERCURE DE FRANCE.
C'eſt lui qu'il faut charger de la haine publique ,,
Ainfi qu'un Scélérat qui tue en fe cachant .
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20
p. 60
AUTRES.
Début :
JE connois trop l'amour, pour m'en trop occuper : [...]
Mots clefs :
Amitié, Amour
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRES.
AUTRE S.
JE connois trop l'amour , pour m'en trop occupertama
tudi zwayMerlinob povin
A l'amitié (´je crains de me tromper 3d zuig æði
L'intérêt ou la politique
Rendent ce neend problématique ,
Et les plus fins s'y laiffent attrapper."
Le Ciel l'a donc voulu scaril eût pu màrqueti
Le véritable ami par un figne phyfique. O
" ion
lov
Par Madame B.
JE connois trop l'amour , pour m'en trop occupertama
tudi zwayMerlinob povin
A l'amitié (´je crains de me tromper 3d zuig æði
L'intérêt ou la politique
Rendent ce neend problématique ,
Et les plus fins s'y laiffent attrapper."
Le Ciel l'a donc voulu scaril eût pu màrqueti
Le véritable ami par un figne phyfique. O
" ion
lov
Par Madame B.
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21
p. 60
« LE mot de la premiere Enigme du mois de Février est l'Encensoir. Celui [...] »
Début :
LE mot de la premiere Enigme du mois de Février est l'Encensoir. Celui [...]
Mots clefs :
Encensoir, Adam et Ève, Alphabet, Épine
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « LE mot de la premiere Enigme du mois de Février est l'Encensoir. Celui [...] »
LE
E mot de la premiere Enigme du
mois de Février eft l'Encenfoir. Celui
de la feconde eft Adam & Eve. Celuidu
premier Logogryphe eft Alphabet ,
où l'on trouve ah ! Baal , Beat , Apt
& Aleth , Alep , Bâle , Aba ; pâte à faire
le pain , halte , Abel , palet , pat , hale ,
table , plat & bal. Celui du fecond eft
Epine , ou en mettant la premiere ler- 1
tre après le p ; Pon trouve peine épi ,
pie & pin en retranchant la premiere &
la derniére lettre pammen! I
E mot de la premiere Enigme du
mois de Février eft l'Encenfoir. Celui
de la feconde eft Adam & Eve. Celuidu
premier Logogryphe eft Alphabet ,
où l'on trouve ah ! Baal , Beat , Apt
& Aleth , Alep , Bâle , Aba ; pâte à faire
le pain , halte , Abel , palet , pat , hale ,
table , plat & bal. Celui du fecond eft
Epine , ou en mettant la premiere ler- 1
tre après le p ; Pon trouve peine épi ,
pie & pin en retranchant la premiere &
la derniére lettre pammen! I
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22
p. 61
ENIGME.
Début :
Deux choses, quoique différentes, [...]
Mots clefs :
Glace
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
Eux chofes , quoique différentes
N'ont cependant qu'un même nom ; A
Leqeur dans des rimes faivantes mo??
Cherches- en l'explication
lá
L'une dépend du feul hazard, ? - ?
Et dans la faifon la plus dure
Eft produite par la Nature ,
L'autre eft un pur effer de l'Art. J
Celle-là ne plaît qu'en été ,
Au-lieu que dans l'hyver elle eft infupportable ;
Mais celle-ci , plus agréable , ES
Plait en toute faifon par fon utilité.
Je vais développer ce ténébreux mystères
Le Sexe fuit l'une avec foin , b .
Et de l'autre a ſouvent beſoin
Four trouver les moyens de plaite.l
Eux chofes , quoique différentes
N'ont cependant qu'un même nom ; A
Leqeur dans des rimes faivantes mo??
Cherches- en l'explication
lá
L'une dépend du feul hazard, ? - ?
Et dans la faifon la plus dure
Eft produite par la Nature ,
L'autre eft un pur effer de l'Art. J
Celle-là ne plaît qu'en été ,
Au-lieu que dans l'hyver elle eft infupportable ;
Mais celle-ci , plus agréable , ES
Plait en toute faifon par fon utilité.
Je vais développer ce ténébreux mystères
Le Sexe fuit l'une avec foin , b .
Et de l'autre a ſouvent beſoin
Four trouver les moyens de plaite.l
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23
p. 61-62
AUTRE.
Début :
J'aborde d'un air gracieux [...]
Mots clefs :
Compliment
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE.
AUTR E.
FABORDE d'un air gracieux
Celui pour qui je m'intérelle ;
J'ai néanmoins fouvent l'adrelle
De lui faire bailler les yeux .
J'ai milie tours ingénieux
軟
♫
62 MERCURE DE FRANCE.
1
Pour le bonheur , pour la Triftelle.
Par un excès de Politeffe ,
Je puis devenir ennuyeux.
J'ai droit de m'adreffer aux Princes ;
Je fuis de toutes les Provinces ,
Ainfi que de chaque Saifon .
Vous qui cherchez à me connoître ,
Mille fois vous m'avez fait naître
Par Politique , ou par Raiſon.
FABORDE d'un air gracieux
Celui pour qui je m'intérelle ;
J'ai néanmoins fouvent l'adrelle
De lui faire bailler les yeux .
J'ai milie tours ingénieux
軟
♫
62 MERCURE DE FRANCE.
1
Pour le bonheur , pour la Triftelle.
Par un excès de Politeffe ,
Je puis devenir ennuyeux.
J'ai droit de m'adreffer aux Princes ;
Je fuis de toutes les Provinces ,
Ainfi que de chaque Saifon .
Vous qui cherchez à me connoître ,
Mille fois vous m'avez fait naître
Par Politique , ou par Raiſon.
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24
p. 62
LOGOGRYPHE.
Début :
Tout Rhéteur me connoît : Cicéron m'employa ; [...]
Mots clefs :
Prosopopée
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LOGOGRYPHE.
LOGO GRYPH E.
Tour Rhéreur me connoît : Cicéron m'employas
Mais furtout avec feu contre Catilina.
On trouve en moi le nom de cette Impératrice
En laquelle Jofeph eut une Protectrice ;
Le nom d'une Déeffe , & celui d'un Auteur
Dont la Fontaine fut habile imitateur ;
Un célébre Ecrivain dont Albion s'honore ;
Un précieux objet pour Vertumne & pour Flore ;.
Un des Rois d'Ifraël ; une fleur ; ce qu'enfin
On admire en Rouleau , Fontenelle & Rollin.
Par M. de LANEVERE , ancien Moufquetaire
du Roi ; à Dax .
1. J. Rouffeau de Genève.
Tour Rhéreur me connoît : Cicéron m'employas
Mais furtout avec feu contre Catilina.
On trouve en moi le nom de cette Impératrice
En laquelle Jofeph eut une Protectrice ;
Le nom d'une Déeffe , & celui d'un Auteur
Dont la Fontaine fut habile imitateur ;
Un célébre Ecrivain dont Albion s'honore ;
Un précieux objet pour Vertumne & pour Flore ;.
Un des Rois d'Ifraël ; une fleur ; ce qu'enfin
On admire en Rouleau , Fontenelle & Rollin.
Par M. de LANEVERE , ancien Moufquetaire
du Roi ; à Dax .
1. J. Rouffeau de Genève.
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25
p. 63
AUTRE.
Début :
Je suis un des plaisirs fait pour le genre humain, [...]
Mots clefs :
Aimer
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE.
AUTRE.
Je fuis un des plaifirs fait pour le genre humain, E
Et je fuis le plus doux peut être :
Lecteur , fi tu veux me connoître ,
Le nombre de mes pieds fe trouve dans ta main,
Avec eux tu feras le nom que chacun donne
A l'objet qui charme ſon coeur ;
Un autre hélas , qui par malheur
Ne doit prèfque jamais fe donner à perfonne ;
Un autre nom révéré du Chrétien ;
Ce que tu dois fauver , & ce que l'on reſpire ;
Ce qu'un fils de Saturne avoit pour fon Empire ;
Ce que Boileau trouvoit fi bien ;
Ce qui dans les combats eft le plus néceffaire ;
D'animaux croaffans la retraite ordinaire ;
Ce que bien malgré lui le pauvre forçat tient ;
Un mot fynonyme à colère ;
D'autres encor mais je n'en dirai rien ;
"
Enfin ce que fans moi l'homme eft fouvent las
d'être .
Ne t'en étonne point , Lecteur ;
Si tu parviens à me connoître ,
Tu trouveras fans moi qu'il n'eft point de bonheur.
Je fuis un des plaifirs fait pour le genre humain, E
Et je fuis le plus doux peut être :
Lecteur , fi tu veux me connoître ,
Le nombre de mes pieds fe trouve dans ta main,
Avec eux tu feras le nom que chacun donne
A l'objet qui charme ſon coeur ;
Un autre hélas , qui par malheur
Ne doit prèfque jamais fe donner à perfonne ;
Un autre nom révéré du Chrétien ;
Ce que tu dois fauver , & ce que l'on reſpire ;
Ce qu'un fils de Saturne avoit pour fon Empire ;
Ce que Boileau trouvoit fi bien ;
Ce qui dans les combats eft le plus néceffaire ;
D'animaux croaffans la retraite ordinaire ;
Ce que bien malgré lui le pauvre forçat tient ;
Un mot fynonyme à colère ;
D'autres encor mais je n'en dirai rien ;
"
Enfin ce que fans moi l'homme eft fouvent las
d'être .
Ne t'en étonne point , Lecteur ;
Si tu parviens à me connoître ,
Tu trouveras fans moi qu'il n'eft point de bonheur.
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26
p. 63
« La Chanson notée se trouvera à l'Article des Spectacles. [...] »
Début :
La Chanson notée se trouvera à l'Article des Spectacles. [...]
Mots clefs :
Chanson notée
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « La Chanson notée se trouvera à l'Article des Spectacles. [...] »
La Chanfon notée se trouvera à
l'Article des Spectacles.
l'Article des Spectacles.
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