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1
p. 143-145
Parterre qui est au dessus de l'Orangerie & ses Figures de bronze, [titre d'après la table]
Début :
Ils vinrent le jour suivant au petit Parc, & virent tout [...]
Mots clefs :
Petit parc, Figures de bronze, Figures de marbre, Bronze, Statues, Grandeur, Beau, Parterre, Orangerie
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texteReconnaissance textuelle : Parterre qui est au dessus de l'Orangerie & ses Figures de bronze, [titre d'après la table]
Ils vinrent le jour ſuivant
an petit Barc , & virent tout
ce que le coſté gauche de ce
Parc , qui n'a le nom de pe
tit qu'à cauſe de la grandeur
extraordinaire du grand
expofe & renferme de beautez.
Ils coramencerent par
le Parterre qui eft au deſſus
de la voûte de l'Orangerie ,
& furent ſurpris de voir pluſieurs
Statuës de bronze , du
nombre deſquelles font la
130 Suite du Voyage
le
Diane d'Ephefe , & le Bachus ,
dont les Marbres ſont dans
la grande Galerie de Verſailles
, peinte par Mr le Brun.
Ils virent auſſi l'Apollon ,
& pluſieurs autres Statuës
nouvellement fondues en
bronze à l'Arcenal , par
Sieur Keiler. Mr de Louvois
qui ne cherche qu'à embellir
les Baſtimens du Roy , & à
faire paroiſtre la grandeur de
Sa Majesté , s'eft imagine
de faire fondre en bronze
tout ce que l'Antique a de
plus beau en Marbre , & fon
deſſein a parfaitement réüfli ,
ces Figures eftant venues
d'une
des Amb. de Siam.
131
- d'une netteté ſurprenante.
Ainſi la France & les Arts
devront beaucoup à ce Miniftre
, & par ce moyen nous
acheverons bien - toſt d'y
voir tout ce que l'ancienne
Grece & l'Italie ont eu de
plus beau.
an petit Barc , & virent tout
ce que le coſté gauche de ce
Parc , qui n'a le nom de pe
tit qu'à cauſe de la grandeur
extraordinaire du grand
expofe & renferme de beautez.
Ils coramencerent par
le Parterre qui eft au deſſus
de la voûte de l'Orangerie ,
& furent ſurpris de voir pluſieurs
Statuës de bronze , du
nombre deſquelles font la
130 Suite du Voyage
le
Diane d'Ephefe , & le Bachus ,
dont les Marbres ſont dans
la grande Galerie de Verſailles
, peinte par Mr le Brun.
Ils virent auſſi l'Apollon ,
& pluſieurs autres Statuës
nouvellement fondues en
bronze à l'Arcenal , par
Sieur Keiler. Mr de Louvois
qui ne cherche qu'à embellir
les Baſtimens du Roy , & à
faire paroiſtre la grandeur de
Sa Majesté , s'eft imagine
de faire fondre en bronze
tout ce que l'Antique a de
plus beau en Marbre , & fon
deſſein a parfaitement réüfli ,
ces Figures eftant venues
d'une
des Amb. de Siam.
131
- d'une netteté ſurprenante.
Ainſi la France & les Arts
devront beaucoup à ce Miniftre
, & par ce moyen nous
acheverons bien - toſt d'y
voir tout ce que l'ancienne
Grece & l'Italie ont eu de
plus beau.
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Résumé : Parterre qui est au dessus de l'Orangerie & ses Figures de bronze, [titre d'après la table]
Le texte relate une visite dans un parc, probablement celui de Versailles, où les visiteurs ont admiré diverses statues. Ils ont commencé par le parterre au-dessus de la voûte de l'Orangerie, où se trouvent plusieurs statues de bronze, telles que la Diane d'Éphèse et le Bacchus. Les originaux en marbre de ces œuvres sont exposés dans la grande Galerie de Versailles, décorée par Monsieur Le Brun. Les visiteurs ont également observé l'Apollon et d'autres statues récemment fondues en bronze à l'Arsenal par le Sieur Keiler. Monsieur de Louvois a initié ce projet pour embellir les bâtiments du roi et montrer la grandeur de Sa Majesté. Les figures provenaient d'une ambassade de Siam et étaient d'une grande netteté. Cette initiative permettra à la France et aux arts de bénéficier grandement, en exposant bientôt les plus belles œuvres de l'ancienne Grèce et de l'Italie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 171-177
Bains d'Apollon, [titre d'après la table]
Début :
Aprés que les Ambassadeurs eurent admiré la diversité de tous [...]
Mots clefs :
Bains d'Apollon, Marbre, Figures de marbre, Bosquet, Bronze, Groupes, Balustrade, Terrasse, Arbres, Pavillons
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texteReconnaissance textuelle : Bains d'Apollon, [titre d'après la table]
Aprés que les Ambaſſadeurs
curent admiré la diverſité
de tous ces jets , ils pafferent
au licu que l'on appelloit
la Renommée ,& auquel on a
donné le nom de Bains d'Apollon
,depuis qu'on y a tranf
136 Suite du Voyage
2
porté les Figures qui les reprefentent
, & qu'on les a ôtées
de la Grote quop a abatue
à cause de la grande Aile
qu'on bâtit en cet endroit
Aux deux bouts de ec Bof
queta des bains d'Apollon ,
font deux Pavillons ou Cabinets
, auſſi riches que Galans
de l'invention de M
Manſard. Ces deux Pavillons
font quarrez , & ont chacun
Euit pans , & 141anigspredsde
largeur ſur environ-20 pieds
dehauteur. Ils font de mar
breblanc &ornez chacun
de8. colomnesdematbrende
ouleur ,&de pilaftrestaillez
desAmb. de Siam.
157
dans le marbre blanc. Les
montans des petits pans dans
les encognures , font remplis
de Trophées de bronze , quí
reprefentent les Armes dont
ſe fervent pluſieurs Nations.
Il y a aum de femblables
Trophées en dehors , entre
(les pilaftres. Les dones font
enrichis de plufieurs ornemens
de metal ,& terminez
par un Vafe. Ces deux Pavil
londeplant dans les Peux
bouts , comme je viens de
marquer , on a mis dans le
milieu d'un des côtez,& visà-
vis de l'endroit par lequel
onentredans ce Bofquet; ce
Oij
168 Suite du Voyage
qu'on appelle les Bains d'A
pollon , c'eſt à dire les belles
Figures de marbre faites par
Mr Girardon il y a pluſieurs
années. Elles repreſentent le
Soleil chez Thetis , avec ſes
Nymphes qui luy lavent les
pieds , qquuii llaayy verſent de
l'eau , & qui l'effuyent. On a
placé d'autres Groupes dans
les enfoncemens des côtez.
CesGroupes repreſentent des
Tritons qui tiennent lesChevaux
d'Apollon.
Ce Boſquer eſt entouré
d'une Terraſſe , laquelle eft
ornée d'une balustrade de
marbre blanc , dont les ba
des Amb. de Siam. 169
luſtres font de bronze doré.
a
Autour de cette Terraffe ily
282 Bas- reliefs ou environ ,
où ſont repreſentées les Armes
dont toutes les Nations
de l'Europe ſe ſervent dans
les combats. Le milieu du
terrain qui eft environné par
cette Terraffe , eft occupé par
un Baffin octogone , au milieu
duquel eſtoit la Figure
de la Renommée , qu'on ca
a ôtée , parcequ'elle couvroit
une partiedes Bains d'Apollon
, & qu'elle empêchoit
qu'on ne les viſt en entrant.
CCeeBBaaffffiinn eft entouré d'une
balustrade de bronze doré ,
Oiij
F60 Suite du Voyage
d'un autre deffein quel celle
de la Terraffe . Sur chacun
des Piedeſtaux que l'on y
voit d'eſpace en efpace , s'éleveun
jet ou bouillon d'eau
qui fait une rigolle autour
de la balustrade , dont l'eau
en ſe répandant forme tout
autour une nape deau
--On travaille à quatre Groupes
de Figures de marbre ,
pour mettre fura 4. grands
Piedeſtaux qui font dans ce
Bofquet anillos
Le premier eft le Point du
Jour , reprefento par unjeune
Homme qui tient un flam
beau, & qui a des nüages à
σ
desAmb. de Siam. I
fes pieds , & un Hibou qui
paroit fuirall eſt auffi accompagné
d'un Zephire qui
foufle . Dans le ſecond de ces
Groupes paroiftra l'Aurore
répandant des Fleurs & def
cendant de fon char. Le troi
fiéme reprefentera Arion invoquant
les Dieux ,& monté
fur un Dauphin . On, veira
dans le quatriéme Leucothoć
recevant les offrandes des
Nautonniersandλής
curent admiré la diverſité
de tous ces jets , ils pafferent
au licu que l'on appelloit
la Renommée ,& auquel on a
donné le nom de Bains d'Apollon
,depuis qu'on y a tranf
136 Suite du Voyage
2
porté les Figures qui les reprefentent
, & qu'on les a ôtées
de la Grote quop a abatue
à cause de la grande Aile
qu'on bâtit en cet endroit
Aux deux bouts de ec Bof
queta des bains d'Apollon ,
font deux Pavillons ou Cabinets
, auſſi riches que Galans
de l'invention de M
Manſard. Ces deux Pavillons
font quarrez , & ont chacun
Euit pans , & 141anigspredsde
largeur ſur environ-20 pieds
dehauteur. Ils font de mar
breblanc &ornez chacun
de8. colomnesdematbrende
ouleur ,&de pilaftrestaillez
desAmb. de Siam.
157
dans le marbre blanc. Les
montans des petits pans dans
les encognures , font remplis
de Trophées de bronze , quí
reprefentent les Armes dont
ſe fervent pluſieurs Nations.
Il y a aum de femblables
Trophées en dehors , entre
(les pilaftres. Les dones font
enrichis de plufieurs ornemens
de metal ,& terminez
par un Vafe. Ces deux Pavil
londeplant dans les Peux
bouts , comme je viens de
marquer , on a mis dans le
milieu d'un des côtez,& visà-
vis de l'endroit par lequel
onentredans ce Bofquet; ce
Oij
168 Suite du Voyage
qu'on appelle les Bains d'A
pollon , c'eſt à dire les belles
Figures de marbre faites par
Mr Girardon il y a pluſieurs
années. Elles repreſentent le
Soleil chez Thetis , avec ſes
Nymphes qui luy lavent les
pieds , qquuii llaayy verſent de
l'eau , & qui l'effuyent. On a
placé d'autres Groupes dans
les enfoncemens des côtez.
CesGroupes repreſentent des
Tritons qui tiennent lesChevaux
d'Apollon.
Ce Boſquer eſt entouré
d'une Terraſſe , laquelle eft
ornée d'une balustrade de
marbre blanc , dont les ba
des Amb. de Siam. 169
luſtres font de bronze doré.
a
Autour de cette Terraffe ily
282 Bas- reliefs ou environ ,
où ſont repreſentées les Armes
dont toutes les Nations
de l'Europe ſe ſervent dans
les combats. Le milieu du
terrain qui eft environné par
cette Terraffe , eft occupé par
un Baffin octogone , au milieu
duquel eſtoit la Figure
de la Renommée , qu'on ca
a ôtée , parcequ'elle couvroit
une partiedes Bains d'Apollon
, & qu'elle empêchoit
qu'on ne les viſt en entrant.
CCeeBBaaffffiinn eft entouré d'une
balustrade de bronze doré ,
Oiij
F60 Suite du Voyage
d'un autre deffein quel celle
de la Terraffe . Sur chacun
des Piedeſtaux que l'on y
voit d'eſpace en efpace , s'éleveun
jet ou bouillon d'eau
qui fait une rigolle autour
de la balustrade , dont l'eau
en ſe répandant forme tout
autour une nape deau
--On travaille à quatre Groupes
de Figures de marbre ,
pour mettre fura 4. grands
Piedeſtaux qui font dans ce
Bofquet anillos
Le premier eft le Point du
Jour , reprefento par unjeune
Homme qui tient un flam
beau, & qui a des nüages à
σ
desAmb. de Siam. I
fes pieds , & un Hibou qui
paroit fuirall eſt auffi accompagné
d'un Zephire qui
foufle . Dans le ſecond de ces
Groupes paroiftra l'Aurore
répandant des Fleurs & def
cendant de fon char. Le troi
fiéme reprefentera Arion invoquant
les Dieux ,& monté
fur un Dauphin . On, veira
dans le quatriéme Leucothoć
recevant les offrandes des
Nautonniersandλής
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Résumé : Bains d'Apollon, [titre d'après la table]
Le texte relate la visite des Ambassadeurs de Siam à la Renommée, également appelée les Bains d'Apollon. Ce lieu est décoré de figures représentant Apollon, ses nymphes et des tritons tenant les chevaux d'Apollon. Deux pavillons, conçus par Mansard, se trouvent aux extrémités des bains. Ces pavillons sont carrés, avec huit pans et quatorze pieds de largeur sur environ vingt pieds de hauteur, construits en marbre blanc et ornés de colonnes et de pilastres. Les murs sont remplis de trophées de bronze représentant les armes de diverses nations. Les portes sont enrichies d'ornements métalliques et terminées par un vase. Au centre de l'un des côtés, face à l'entrée, se trouvent des figures de marbre réalisées par Girardon, représentant le Soleil chez Thétis, avec des nymphes lui lavant les pieds et des figures versant de l'eau. Le bosquet est entouré d'une terrasse avec une balustrade de marbre blanc, dont les bustes sont ceux des Ambassadeurs de Siam. Autour de cette terrasse, il y a environ 282 bas-reliefs représentant les armes utilisées par les nations européennes. Le centre du terrain est occupé par un bassin octogonal, autrefois orné d'une statue de la Renommée, retirée pour ne pas obstruer la vue des bains. Ce bassin est entouré d'une balustrade de bronze doré, avec des jets d'eau formant une nappe autour. Quatre groupes de figures de marbre sont en cours de réalisation pour être placés sur des piédestaux dans le bosquet, représentant le Point du Jour, l'Aurore, Arion invoquant les dieux, et Leucothoé recevant les offrandes des nautonniers.
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3
p. 286-297
Cabinet des Curiositez ou des Bijoux, [titre d'après la table]
Début :
Ils virent le Cabinet appellé des Curiositez, ou des Bijoux, [...]
Mots clefs :
Cabinet des curiosités, Cabinet des bijoux, Marbre, Cabinet, Figures, Marbre blanc, Ouvrage, Table, Carte de la France, Province, Cheminée, Vue, Bronze, Pierreries, Pièces
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texteReconnaissance textuelle : Cabinet des Curiositez ou des Bijoux, [titre d'après la table]
Ils virent le Cabinet ap
pellé des Curiofitez , ou des
Bijoux , parce qu'il en eſt tout
remply . On y entre par la
derniere piece du grand Appartement
du Roy. Il eſt de
figure octogone , avec des niches
dans les angles. La voûte
eſt en maniere de dôme ;
elle eſt éclairée par le milieu.
des Amb. de Siam.
175
à
Le deſſein qui eſt de Monſieur
Manſard en plaiſt beaucoup
, auffi- bien que celuy de
la Cheminée qui eſt tout particulier.
On ne la peut voir
ſans y tenir la veuë attachée
pendant quelque temps ,
cauſe du plaifir qu'on prend
à la regarder. Tout l'ouvrage
de ce Cabinet eſt de Sculpture
, parmy laquelle il y a
beaucoup de Bronze doré. Il
eſt entierement entouré de
Glaces , & il y a des gradins
dans les niches au devant des
Glaces. Le reſte du Cabinet
eſt remply de conſoles ,
qui toutes auffi-bien que les
Z iij
276 Suite du Voyage
د
gradins ſont couvertes de Bi
joux. On n'y voit que des
Agathes de toutes fortes &
qui forment mille chofes differentes
; des Criſtaux de
grand prix , pour la maniere
dont ils font taillez ; de petites
Figures de Bronze antiques
; des Figures d'or , cou
vertes de pierreries ; & quantité
d'ouvrages curieux & de
pieces précieuſes de diverſes
Figures. Tout ce qui eſt dans
ce Cabinet eſt d'un fi grand
prix , qu'on n'y a point trouvé
de place pour les plus
belles Porcelaines, dont il n'y
en a point du tout. On y voit
des Amb. de Siam . 277
une tres -belle Nefd'or fur la
cheminée , & un grand &
riche Bureau dans le milieu
, remply de quantité de
Medailles antiques & modernes.
Aprés que les Ambaffadeurs
eurent vû dans le mê
me lieu une Caffette remplie
de pluſieurs petites Figures
d'or , on la leva de deſſus une
Table beaucoup moins confiderable
par ſa matiere , que
pour l'art , & pour l'uſage auquel
elle eſt deſtinée. Elle a
trois pieds & demy de long
ſur deux & demy de large.
Le fond eſt d'un Marbre
Zv
278 Suite du Voyage
blanc , fur lequel on a fait de
pieces de Marbre de rapport ,
une Carte de la France, réduite
dans toutes les préciſions
des dernieres obſervations
Aftronomiques.
Chaque Province y eſt diſtinguée
par un morceau de
Marbre d'une couleur qui luy
eſt particuliere , & taillé de la a
figure irreguliere que chaque
Province forme par les enclaves
, avec les Provinces qui
la bornent. Le nom de chaque
Province eſt marqué en
Lettres d'or capitales , & le
nom de ſes principales Villes
en italiques. L'on a affecté
des Amb. de Siam. 279
de mettre proche l'un de l'autre
les couleurs de Marbre
qui coupent davantage : par
exemple, l'Ifle de France d'un
bleu clair; la Champagne ,
d'un rouge de porphire ;
l'Orleannois , opale ; la
Beauce, feüille- morte ; mais la
delicateſſe de l'ouvrage , &
l'art de l'ouvrier paroiffent
particulierement dans les découpures
que la Mer & la
Terre font enſemble , où tous
les Caps que la Terre fait
dans la Mer , & toutes les
Bayes que la Mer forme dans
la Terre , font obſervez avec
une juſteſſe inconcevable ; &
1
280 Suite du Voyage
:
dans les Lacs & Rivieres qui
font de Marbre blanc , & refervez
du fond même de la
Table , nonobſtant le peu de
largeur , qui n'eſt ſouvent
qu'un filet dans l'origine des
Rivieres , & les differens tours
qu'elles prennent dans les
Terres .
On ne ſçauroit croire com
bien ces lignes de lait qui
ferpentent au travers de ces
differens Marbres , où le brun
domine,& ces Lettres d'or qui
brillent fur le tout,font un objet
agreable à la veuë.
Dans l'eſpace du Marbre
blanc qui marque la Mer
des Amb. de Siam. 281
Mediterranée , eft une Bouffole
de different Marbre delicatement
travaillée ; & dans
l'autre eſpace qui eſt pour la
Mer Oceane , il y a deux
Cartouches , dans l'un defquels
eſt écrit , Carte de la
France , avec ces mots tirez de
Virgile,& qui font une eſpece
de deviſe dont la France eft
le Corps : HA TIBI ERUNT
ARTES , pour marquer que
de tous les Arts où le Roy
pouvoit exceller , il s'eft reſervé
le plus glorieux & le
plus difficile , qui eſt celuy de
regner. Dans l'autre Cartouche
eſt le nom de celuy qui
282 Suite duVoyage
a preſenté cette Carte au
Roy.
L'Ocean du côté du Nord
eſt borné par les côtes d'Angleterre
, qui approchent le
plus de la France ; ce que
l'on a de coûtume de mettre
dans les Cartes de France du
même ouvrage & du même
deſſein , avec la méme exactitude
que le reſte.
La bordure eſt compofée
de deux bandes de Marbre
bleu , dont l'une eſt chargée
de ſa moûlure ; & d'une de
Marbre noir, ſur laquelle ſont
marquez les degrez de Longitude
& de Latitude par de
des Amb. de Siam.
283
petits quarrez longs de Marbre
blanc , qui ont eſté auſſi
refervez du fond de la Table.
Mr Couplet Maître de
Mathematique , la preſenta
à Sa Majesté le premier jour
de l'An 1684. Le Roy la reçût
avec ſa bonté ordinaire ,
& la fit placer dans le Cabinet
dont je viens de vous parler.
Le ſecond Ambaſſadeur
ayant encore jetté les yeux
fur tout ce cabinet , qui ne
paroiſt tapiffé que de pierreries
, dit , Qu'il n'avoit juſques
icy reconnu que trois Grandeurs
Sçavoir les Grandeurs Humaines,
1
284 Suite du Voyage
les Grandeur de Dieu , & les
Grandeurs du Paradis, que prefentement
il en reconnoiffort une
quatrième , qui estoit celle de Verfailles
Comme ils parloient du
bon ordre tout ce qu'ils
virent ce jour-là , on leur dit
qu'un ſeul Homme en avoit
le ſoin , & on leur nomma
Monsieur Bontemps. Ils dirent
qu'ils admiroient ſon intelligence ,
fon exactitude &sa memoire, &
que tout ce que faisoit leRoy étoit
digne d'estre remarqué , puiſqu'il
avoit peut- eftre choisi leſeul Homme
qui fuſt capable de toutes ces
choses enſemble.
pellé des Curiofitez , ou des
Bijoux , parce qu'il en eſt tout
remply . On y entre par la
derniere piece du grand Appartement
du Roy. Il eſt de
figure octogone , avec des niches
dans les angles. La voûte
eſt en maniere de dôme ;
elle eſt éclairée par le milieu.
des Amb. de Siam.
175
à
Le deſſein qui eſt de Monſieur
Manſard en plaiſt beaucoup
, auffi- bien que celuy de
la Cheminée qui eſt tout particulier.
On ne la peut voir
ſans y tenir la veuë attachée
pendant quelque temps ,
cauſe du plaifir qu'on prend
à la regarder. Tout l'ouvrage
de ce Cabinet eſt de Sculpture
, parmy laquelle il y a
beaucoup de Bronze doré. Il
eſt entierement entouré de
Glaces , & il y a des gradins
dans les niches au devant des
Glaces. Le reſte du Cabinet
eſt remply de conſoles ,
qui toutes auffi-bien que les
Z iij
276 Suite du Voyage
د
gradins ſont couvertes de Bi
joux. On n'y voit que des
Agathes de toutes fortes &
qui forment mille chofes differentes
; des Criſtaux de
grand prix , pour la maniere
dont ils font taillez ; de petites
Figures de Bronze antiques
; des Figures d'or , cou
vertes de pierreries ; & quantité
d'ouvrages curieux & de
pieces précieuſes de diverſes
Figures. Tout ce qui eſt dans
ce Cabinet eſt d'un fi grand
prix , qu'on n'y a point trouvé
de place pour les plus
belles Porcelaines, dont il n'y
en a point du tout. On y voit
des Amb. de Siam . 277
une tres -belle Nefd'or fur la
cheminée , & un grand &
riche Bureau dans le milieu
, remply de quantité de
Medailles antiques & modernes.
Aprés que les Ambaffadeurs
eurent vû dans le mê
me lieu une Caffette remplie
de pluſieurs petites Figures
d'or , on la leva de deſſus une
Table beaucoup moins confiderable
par ſa matiere , que
pour l'art , & pour l'uſage auquel
elle eſt deſtinée. Elle a
trois pieds & demy de long
ſur deux & demy de large.
Le fond eſt d'un Marbre
Zv
278 Suite du Voyage
blanc , fur lequel on a fait de
pieces de Marbre de rapport ,
une Carte de la France, réduite
dans toutes les préciſions
des dernieres obſervations
Aftronomiques.
Chaque Province y eſt diſtinguée
par un morceau de
Marbre d'une couleur qui luy
eſt particuliere , & taillé de la a
figure irreguliere que chaque
Province forme par les enclaves
, avec les Provinces qui
la bornent. Le nom de chaque
Province eſt marqué en
Lettres d'or capitales , & le
nom de ſes principales Villes
en italiques. L'on a affecté
des Amb. de Siam. 279
de mettre proche l'un de l'autre
les couleurs de Marbre
qui coupent davantage : par
exemple, l'Ifle de France d'un
bleu clair; la Champagne ,
d'un rouge de porphire ;
l'Orleannois , opale ; la
Beauce, feüille- morte ; mais la
delicateſſe de l'ouvrage , &
l'art de l'ouvrier paroiffent
particulierement dans les découpures
que la Mer & la
Terre font enſemble , où tous
les Caps que la Terre fait
dans la Mer , & toutes les
Bayes que la Mer forme dans
la Terre , font obſervez avec
une juſteſſe inconcevable ; &
1
280 Suite du Voyage
:
dans les Lacs & Rivieres qui
font de Marbre blanc , & refervez
du fond même de la
Table , nonobſtant le peu de
largeur , qui n'eſt ſouvent
qu'un filet dans l'origine des
Rivieres , & les differens tours
qu'elles prennent dans les
Terres .
On ne ſçauroit croire com
bien ces lignes de lait qui
ferpentent au travers de ces
differens Marbres , où le brun
domine,& ces Lettres d'or qui
brillent fur le tout,font un objet
agreable à la veuë.
Dans l'eſpace du Marbre
blanc qui marque la Mer
des Amb. de Siam. 281
Mediterranée , eft une Bouffole
de different Marbre delicatement
travaillée ; & dans
l'autre eſpace qui eſt pour la
Mer Oceane , il y a deux
Cartouches , dans l'un defquels
eſt écrit , Carte de la
France , avec ces mots tirez de
Virgile,& qui font une eſpece
de deviſe dont la France eft
le Corps : HA TIBI ERUNT
ARTES , pour marquer que
de tous les Arts où le Roy
pouvoit exceller , il s'eft reſervé
le plus glorieux & le
plus difficile , qui eſt celuy de
regner. Dans l'autre Cartouche
eſt le nom de celuy qui
282 Suite duVoyage
a preſenté cette Carte au
Roy.
L'Ocean du côté du Nord
eſt borné par les côtes d'Angleterre
, qui approchent le
plus de la France ; ce que
l'on a de coûtume de mettre
dans les Cartes de France du
même ouvrage & du même
deſſein , avec la méme exactitude
que le reſte.
La bordure eſt compofée
de deux bandes de Marbre
bleu , dont l'une eſt chargée
de ſa moûlure ; & d'une de
Marbre noir, ſur laquelle ſont
marquez les degrez de Longitude
& de Latitude par de
des Amb. de Siam.
283
petits quarrez longs de Marbre
blanc , qui ont eſté auſſi
refervez du fond de la Table.
Mr Couplet Maître de
Mathematique , la preſenta
à Sa Majesté le premier jour
de l'An 1684. Le Roy la reçût
avec ſa bonté ordinaire ,
& la fit placer dans le Cabinet
dont je viens de vous parler.
Le ſecond Ambaſſadeur
ayant encore jetté les yeux
fur tout ce cabinet , qui ne
paroiſt tapiffé que de pierreries
, dit , Qu'il n'avoit juſques
icy reconnu que trois Grandeurs
Sçavoir les Grandeurs Humaines,
1
284 Suite du Voyage
les Grandeur de Dieu , & les
Grandeurs du Paradis, que prefentement
il en reconnoiffort une
quatrième , qui estoit celle de Verfailles
Comme ils parloient du
bon ordre tout ce qu'ils
virent ce jour-là , on leur dit
qu'un ſeul Homme en avoit
le ſoin , & on leur nomma
Monsieur Bontemps. Ils dirent
qu'ils admiroient ſon intelligence ,
fon exactitude &sa memoire, &
que tout ce que faisoit leRoy étoit
digne d'estre remarqué , puiſqu'il
avoit peut- eftre choisi leſeul Homme
qui fuſt capable de toutes ces
choses enſemble.
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Résumé : Cabinet des Curiositez ou des Bijoux, [titre d'après la table]
Le texte décrit un cabinet du château de Versailles, connu sous le nom de cabinet des Curiosités ou des Bijoux en raison de son contenu précieux. Ce cabinet, de forme octogonale avec des niches dans les angles, est éclairé par un dôme central. Il est entièrement décoré de sculptures, de bronze doré et de glaces, et contient divers bijoux tels que des agates, des cristaux, des figures de bronze antiques et des œuvres d'art précieuses. Parmi les objets notables, on trouve une nef d'or sur la cheminée et un riche bureau rempli de médailles. Les ambassadeurs de Siam découvrent également une cassette contenant des figures d'or et une carte de la France en marbre. Cette carte, détaillée avec précision, utilise différentes couleurs pour représenter chaque province. Elle est présentée par Monsieur Couplet en 1684 et placée dans ce cabinet. Les ambassadeurs expriment leur admiration pour l'ordre et la grandeur de Versailles, attribuant cette organisation à Monsieur Bontemps.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 297-308
Grand Escalier, [titre d'après la table]
Début :
Ils virent le mesme jour le grand Escalier de Versailles, [...]
Mots clefs :
Grand escalier, Marbre, Ornements, Degrés, Bronze, Escalier, Roi, Figures, Galeries, Monde, Paliers, Sculpture, Nations, Arcades, Pilastres, Charles Le Brun, Pierre Mignard
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texteReconnaissance textuelle : Grand Escalier, [titre d'après la table]
Ils virent le meſme jour le
grand Eſcalier de Verſailles ,
qui fait tant de bruit dans le
monde, & qui peut eſtre comparé
au plus bel Apartement
qu'il y ait fur la terre , fi toutefois
il s'en peut trouver un
auſſi riche.Cet Eſcalier a onze
toiſes de long fur cinq de large
, dans lesquelles largeurs
font compris les degrez d'en
bas , & celles des rampes.
On entre par trois Arca
des de face , dans un Veſti
bule de 39 pieds de large, fur
r3 de profondeur,dont le bas
eſt à compartiment de mar
bre ,& la Voûte d'ornemens,
Aa
286 Suite du Voyage
&trophées en Bas- relief do
ré.
On monte par trois degrez
, & trois arcades opposées
ſur le premier palier , large
de 55. pieds , & fur la profondeur
large de 18. Il eſt revétu
tout autour , comme le
bas , de compartimens de
marbre . En face de ces trois
Arcades , il y a un Eſcalier à
pans , d'onze degrez de marbre.
Le palier de deſſus eft
d'onze degrez en quarré.
-Dans la face & l'épaiffeur
du mur , eſt une niche ſurbaiflée
, & dedans un Baffin
de Marbre , foutenu de DauF
$ des Amb. de Siam. 287
phins de bronze. Deux Tritons
qui ſont deffus , ſupportent
une double coquille de
marbre , ornée d'un maſque
jettant de l'eau dans un panier
remply de coquilles. Ce
panier forme une nape qui
tombe dans le Baffinde marbre
, & qui ſe decharge par
un autre maſque , & par les
deux Dauphins , le tout de
bronze.
20.
Les rampes font de ro. pieds
de large , & chacune de
degrez de marbre ; les appuis
de meſme matiere , ſuportez
de balustres de bronze cize
lez & dorez au feu. Les deux
Aaij
288 Suite du Voyage
paliers font auſſi à compartimens
de marbre , & de 10
pieds de large . On paffe dans
les Appartemens par quatre
portes , richement ornées de
Sculpture , qui ſont ſur chacun
de ces paliers .
De deſſus les meſmes pa
liers on a élevé un Ordre
2
de d'Architecture Jonique
colomnes & pilaftres de marbre,
dont les bazes & les chapiteaux
ſont de bronze doré
au feu. Je pourrois vous parler
icy de quantité d'ornemens
de pareille matiere, qui
accompagnent un Bufſte du
Roy , fait de marbre blanc ,
A
h
des Amb. de Siam. 289
: & de ceux qui font face à un
endroit fi enrichy.
Les quatre maſſifs à coſté
de quatre portes des Appartemens
, font remplis entre
les pilaftres de feintes Tapifferies
à fond d'or , pleines
d'ornemens & de Figures.
Dans les quatre milieux il y
a pluſieurs Tableaux qui repreſentent
toutes les Conqueſtes
du Roy. Dans les places
entre ces maffifs & celles
des milieux , on a feint deux
Galeries de chaque coſté , du
meſme Ordre Jonique , & fur
le meſme plan , des paliers
dans lesquels font reprefen
Aa iij
290
Suite du Voyage
tées des Perſonnes de pluſieurs
Nations , comme fi elles paffoient
dans ces Galeries. Il y
a encore des Galeries au deffus
de la premiere corniche ,
&deux autres dans la longueur
des faces , ſupportées
par des Termes .
De grands poupes de
Vaiſſeaux font aux angles , &
fur l'extremité ; elles portent
4. Trophée d'Armes ſemblables
à celles des quatre Parties
du Monde. Ces Poupes font
foûtenuës de conſoles en arcboutant
, fortifiées de cornes
d'abondance & de coquilles
de Bronze. Aux côtez font
des Amb. de Siam. 191
des Captifs de Sculpture , &
au deſſous des Victoires .
Le Plafond eſt orné de
bas- reliefs octogones remplis
de Figures qui conviennent
au ſujet. De grands Rideaux
dont des termes tiennent les
cordons , tombent le long
des Attiques. On a encore
trouvé place dans cet Eſca
lier pour toutes les Muſes
pour la Peinture & pour la
Sculpture , pour des Captifs ,
pour les quatre Parties du
Monde avec leurs attributs ,
pour toutes les actions du
Roy , pour la Poësie , pour
belles Porcelaines , dont il n'y
en a point du tout. On y voit
,
292
هک
Suite du Voyage
mée , & pour Mercure. Joř
gnez-y les ornemens necef
faires pour lier toutes ces choſes
avec leurs attributs , &
vous vous reprefenterez tout
ceque l'Art & la Nature peuvent
produire.
Celieu est embellyde cette
maniere pour repreſenter un
jour de Fête , où les Divinitez
du Parnaſſe ſont affemblées
pour recevoir le Roy à
fon retour de la Guerre. On
fuppoſe que tout a eſté peint
par des Genies qui paroiſſent
en l'air, ornant encore la voute
de feſtons , ainſi que tout
le reſte de ce ſuperbe lieu.
Sa
des Amb. de Siam.
293
Sa Majesté eſt placée dans le
milieu
د
, pour marquer que
c'eſt pour Elle que cette Fête
ſe fait. Toutes les Nations
qui paſſerent dans les Galeries
feintes habillées diverſement
& à la maniere de leur
Païs regardent toutes ces
merveilles felon leur caractere
, en allant voir le grand
Prince dont la reputation les
a charmées. Tout ce que je
viens de vous décrire eſt de
Monfieur leBrun , & l'Eſcalier
eft du deſſein de Mr Manſard.
Le ſurprenant amas de tant
de Marbres differens , de tant
de divers ornemens de Bron-
Bb
294 Suite du Voyage
parler
,
ze doré , de tant de Figures
peintes & d'ornemens de relief,
de tant de dorure & de
tant d'action diverſes repreſentées
par le Pinceau , furprit
tellement les Ambaſſadeurs
, que l'un d'eux dit
Qu'il valoitbeaucoup mieux se
taire que de parler , quand le
grand nombre des choses qu'on
avoit à dire empéchoit que l'on
ne pût exprimer tout ce qu'on
penſoit. Ils s'attacherent beaucoup
à regarder les Figures
des differentes Nations qui
ſont peintes dans cette Galerie.
grand Eſcalier de Verſailles ,
qui fait tant de bruit dans le
monde, & qui peut eſtre comparé
au plus bel Apartement
qu'il y ait fur la terre , fi toutefois
il s'en peut trouver un
auſſi riche.Cet Eſcalier a onze
toiſes de long fur cinq de large
, dans lesquelles largeurs
font compris les degrez d'en
bas , & celles des rampes.
On entre par trois Arca
des de face , dans un Veſti
bule de 39 pieds de large, fur
r3 de profondeur,dont le bas
eſt à compartiment de mar
bre ,& la Voûte d'ornemens,
Aa
286 Suite du Voyage
&trophées en Bas- relief do
ré.
On monte par trois degrez
, & trois arcades opposées
ſur le premier palier , large
de 55. pieds , & fur la profondeur
large de 18. Il eſt revétu
tout autour , comme le
bas , de compartimens de
marbre . En face de ces trois
Arcades , il y a un Eſcalier à
pans , d'onze degrez de marbre.
Le palier de deſſus eft
d'onze degrez en quarré.
-Dans la face & l'épaiffeur
du mur , eſt une niche ſurbaiflée
, & dedans un Baffin
de Marbre , foutenu de DauF
$ des Amb. de Siam. 287
phins de bronze. Deux Tritons
qui ſont deffus , ſupportent
une double coquille de
marbre , ornée d'un maſque
jettant de l'eau dans un panier
remply de coquilles. Ce
panier forme une nape qui
tombe dans le Baffinde marbre
, & qui ſe decharge par
un autre maſque , & par les
deux Dauphins , le tout de
bronze.
20.
Les rampes font de ro. pieds
de large , & chacune de
degrez de marbre ; les appuis
de meſme matiere , ſuportez
de balustres de bronze cize
lez & dorez au feu. Les deux
Aaij
288 Suite du Voyage
paliers font auſſi à compartimens
de marbre , & de 10
pieds de large . On paffe dans
les Appartemens par quatre
portes , richement ornées de
Sculpture , qui ſont ſur chacun
de ces paliers .
De deſſus les meſmes pa
liers on a élevé un Ordre
2
de d'Architecture Jonique
colomnes & pilaftres de marbre,
dont les bazes & les chapiteaux
ſont de bronze doré
au feu. Je pourrois vous parler
icy de quantité d'ornemens
de pareille matiere, qui
accompagnent un Bufſte du
Roy , fait de marbre blanc ,
A
h
des Amb. de Siam. 289
: & de ceux qui font face à un
endroit fi enrichy.
Les quatre maſſifs à coſté
de quatre portes des Appartemens
, font remplis entre
les pilaftres de feintes Tapifferies
à fond d'or , pleines
d'ornemens & de Figures.
Dans les quatre milieux il y
a pluſieurs Tableaux qui repreſentent
toutes les Conqueſtes
du Roy. Dans les places
entre ces maffifs & celles
des milieux , on a feint deux
Galeries de chaque coſté , du
meſme Ordre Jonique , & fur
le meſme plan , des paliers
dans lesquels font reprefen
Aa iij
290
Suite du Voyage
tées des Perſonnes de pluſieurs
Nations , comme fi elles paffoient
dans ces Galeries. Il y
a encore des Galeries au deffus
de la premiere corniche ,
&deux autres dans la longueur
des faces , ſupportées
par des Termes .
De grands poupes de
Vaiſſeaux font aux angles , &
fur l'extremité ; elles portent
4. Trophée d'Armes ſemblables
à celles des quatre Parties
du Monde. Ces Poupes font
foûtenuës de conſoles en arcboutant
, fortifiées de cornes
d'abondance & de coquilles
de Bronze. Aux côtez font
des Amb. de Siam. 191
des Captifs de Sculpture , &
au deſſous des Victoires .
Le Plafond eſt orné de
bas- reliefs octogones remplis
de Figures qui conviennent
au ſujet. De grands Rideaux
dont des termes tiennent les
cordons , tombent le long
des Attiques. On a encore
trouvé place dans cet Eſca
lier pour toutes les Muſes
pour la Peinture & pour la
Sculpture , pour des Captifs ,
pour les quatre Parties du
Monde avec leurs attributs ,
pour toutes les actions du
Roy , pour la Poësie , pour
belles Porcelaines , dont il n'y
en a point du tout. On y voit
,
292
هک
Suite du Voyage
mée , & pour Mercure. Joř
gnez-y les ornemens necef
faires pour lier toutes ces choſes
avec leurs attributs , &
vous vous reprefenterez tout
ceque l'Art & la Nature peuvent
produire.
Celieu est embellyde cette
maniere pour repreſenter un
jour de Fête , où les Divinitez
du Parnaſſe ſont affemblées
pour recevoir le Roy à
fon retour de la Guerre. On
fuppoſe que tout a eſté peint
par des Genies qui paroiſſent
en l'air, ornant encore la voute
de feſtons , ainſi que tout
le reſte de ce ſuperbe lieu.
Sa
des Amb. de Siam.
293
Sa Majesté eſt placée dans le
milieu
د
, pour marquer que
c'eſt pour Elle que cette Fête
ſe fait. Toutes les Nations
qui paſſerent dans les Galeries
feintes habillées diverſement
& à la maniere de leur
Païs regardent toutes ces
merveilles felon leur caractere
, en allant voir le grand
Prince dont la reputation les
a charmées. Tout ce que je
viens de vous décrire eſt de
Monfieur leBrun , & l'Eſcalier
eft du deſſein de Mr Manſard.
Le ſurprenant amas de tant
de Marbres differens , de tant
de divers ornemens de Bron-
Bb
294 Suite du Voyage
parler
,
ze doré , de tant de Figures
peintes & d'ornemens de relief,
de tant de dorure & de
tant d'action diverſes repreſentées
par le Pinceau , furprit
tellement les Ambaſſadeurs
, que l'un d'eux dit
Qu'il valoitbeaucoup mieux se
taire que de parler , quand le
grand nombre des choses qu'on
avoit à dire empéchoit que l'on
ne pût exprimer tout ce qu'on
penſoit. Ils s'attacherent beaucoup
à regarder les Figures
des differentes Nations qui
ſont peintes dans cette Galerie.
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Résumé : Grand Escalier, [titre d'après la table]
Le texte décrit l'Escalier de Versailles, célèbre pour sa richesse et sa grandeur. Cet escalier mesure onze toises de long et cinq de large, et est accessible par trois arcades menant à un vestibule orné de marbre et de bas-reliefs. Le premier palier, large de 55 pieds, est également revêtu de marbre et comporte trois arcades opposées. Un escalier à pans de onze degrés de marbre conduit à un second palier carré, orné d'une niche contenant un bassin de marbre soutenu par des dauphins et des tritons en bronze. Les rampes, larges de dix pieds, sont bordées de balustres en bronze doré. Les paliers et les portes sont richement décorés de sculptures et de tableaux représentant les conquêtes du roi. Des galeries feintes et des statues de diverses nations sont également présentes. Le plafond est orné de bas-reliefs et de figures, et des rideaux sont tenus par des termes. L'ensemble est conçu pour représenter un jour de fête où les divinités du Parnasse accueillent le roi de retour de la guerre. Les ambassadeurs de Siam, impressionnés par la profusion de marbres, de bronzes dorés, de figures peintes et de divers ornements, ont exprimé leur admiration et leur incapacité à décrire pleinement la splendeur de l'escalier.
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5
p. 57-76
Articles contenant plusieurs curiositez qui peuvent instruire le Public & luy faire plaisir. [titre d'après la table]
Début :
Je passe d'un Article de Religion, à des Articles de Curiosité. [...]
Mots clefs :
Médailles, Bacchus, Bronze, Pierres gravées, Curiosité, Inscription grecque
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texteReconnaissance textuelle : Articles contenant plusieurs curiositez qui peuvent instruire le Public & luy faire plaisir. [titre d'après la table]
Je paffe d'un Article de Religion , à des Articles de Cu
riofité.
58 MERCURE
Entre les Pierres gravées antiques qui compofent le Cabinet du Roy , le plus riche &
le plus precieux qui foit dans
l'Europe , il y en a une gravée
en creux , &montée en bague,
qui eft un chef- d'œuvre de
l'Art. C'est une petite Cornaline tranfparente qui a efté deffinée en grand par l'illuftre
Mile le Hay , connuë fous le
nom de Mlle Cheron , &gravée
en Eſtampe par Mr Picard. On
croit que cette Pierre a fervy
de Cachet à Michel Ange , &
que Raphaël en a imité quelques figures dans fes tableaux.
GALANT 59
Elle a appartenu à Mr Bagarris , Garde du Cabinet d'Henry IV. enfuite à Mr Lothier,
Antiquaire d'Aix en Provence,
& Sa Majefté l'a acquife de fes
heritiers. L'Eftampe en a eſté
publiée dans le Journal des
Sçavans du mois de Janvier
dernier , & il y en a une explication par un fçavant Je
fuite dans les Memoires de
Trevoux de Fevrier. Mais Mr
Moreau de Mautour qui a remarqué dans ce Deffein & fur
cette Eftampe des choſes differentes de ce qui fe trouve fur
la Pierre originale , & fur les
60 MERCURE
empreintes , a pris occaſion de
faire une Differtation fur ce
fujet, & il a donné lieu à une
nouvelle Eftampe plus exacte ,
dediée à Mr l'Abbé Bignon ,
& gravée par Mr Montbard ,
ruë S. Jacques, où elle fe vend.
Il y a au bas de cette Eſtampè
un petit Extrait de fa Differ
tation. Mr Moreau de Mautour pretend que la graveure
dont l'empreinte forme un bas
relief, reprefente une espece de
Fefte de Sacrifice en l'honneur
de Bacchus , & en memoiredefa
naiffance. On voit le petit Bacchus alaité par Ino fa premiere
GALANT 61
nourrice. Prés d'elle est la belle
Hippa, autre nourrice celebréepar
Orphée dans fes Hymnes. Le
vieillard eft Athamas,ou le vieux,
Silene , ou un Faune , quifait la
fonction de Sacrificateur tient
une Patere pour les libations de
vinfur le feudeftiné pour le Sacrifice. Un Miniftre du Sacrifice
conduit un Bouc , victime qu'on
immoloit à Bacchus , &tient un
vafe destinépour recevoir lefang
de la victime. Un Satyre jouë
d'une espece de flute recourbée ,
inftrument employé dans les Sacrifices & les Feftes. Les Nymphes qui furent ainsi que les Sa
62 MERCURE
tyres , les Bacchantes &les Fau
nes de la fuire de Bacchus , portent des Corbeilles de fleurs &de
fruits , fimblables à celles
po toient fur leurs têtes les jeunes
filles d'Athenes dans les Festes
confacrées à ce Dieu , nommées
que
Canephoria. Une Bacchante enjouée prefente à un des deuxpetits
Amours, une Cimbale , efpece
d'inftrument en ufage dans les
Orgies. Les Amours conviennent
à Bacchus ; on les voit dépeints
enfemble dans Anacreon, &fur
les monumens antiques. Apollon
debout , une Patere à la main , eft
icy comme une Divinité. les que
GALANT 63
que
Egyptiens & les Grecs confondoient avec Bacchus. Les deux
arbres , dont l'un eft entouré de
pampres ,fontdela nature de ceux
Pline décrit , & qui font pro-
-prespour la vigne. Le Pefcheur
hors d'œuvre , a peut eftre raport
àune fiction ingenieufe & morale
de Theocritedans l'Idylle qui porte ce titre. Ce Poëte né à Syracufe, vivoit à la Cour de Ptolemée
Philadelphe , Roy d'Egypte , qui
inftituadans Alexandrie une Fifte
particuliere à l'honneur de Bacchus , felon Achenée , auquel
temps on peut fixer l'Epoque de
l'excellent Ouvrier de ce precieux
i
A
64 MERCURE
Monument, qui auroit prés de
deux mille ans d'antiquité.
Je dois , puifque j'ai commencé à vous parler d'antiquitez , vous entretenir de plufieurs articles curieux fur ce
fujet.
On a trouvé un Trefor de
Medailles depuis peu dans la
Terre d'un Gentilhomme peu
éloignée de cette Ville ; unCurieux qui a acheté ce qui en
reftoit , car une partie avoit
déja cfté diffipée ou fonduë
par les Auteurs de la découverte , en a eu fix mille fept
GALANT 65
censquarante , c'eſt à dire quarante livres pefant , & il a jugé
par l'examen qu'il en a fait que
les Medailles du bas Empire ,
ne font nullement à mépriſer ,
& qu'elles inftruiſent autant
que celles du haut Empire.
Aprés les avoir nettoyées il les
pefa , & il vit qu'il en falloit
communément cent foixante
pour faire une livre ; il prit enfuite quelques Medailles de
Bronze des deux premiers fic .
cles de l'Empire Romain, & il
vit que huit Medailles de ce
petit bronze eftoient à peu prés
du même poids que huit MeAvril 1710. F
66 MERCURE
dailles d'argent du haut Empire ; que quatre Medailles d'or ,
que deux Medailles de moyen
bronze , & qu'une Medaille
de grand bronze ; ce qui fournit une preuve que les Romains ont toûjours gardé des
proportions dans la fabrique
de leurs Monnoyes. Les Medailles du Trefor en queſtion
commencent à Valerien , c'eſtà dire à l'Empereur dont la
deftinée fut fi trifte , qui fuc
pris dans la guerre des Perfes ,
& qui mourut d'une maniere
tragique , & qu'elles finiffent à
Aurelien ; de forte qu'elles ne
GALANT 67
comprennent que le regne de
fix ou fept Empereurs. On
compte cependant dans cet
amas de Medailles feize ou dixfept Princes differens , car ou
tre les deux Imperatrices & les
deux jeunes Cefars qui appartiennent à la famille de Valerien , il y a des Quietus , des
Elianus , des Marius , je veux
dire quelques uns de ces Empereurs , qui ont feulement regné dans quelques Provinces
de l'Empire Romain. Les revers font admirables par leur
diverfité , & il en eft peu dans
le Recueil de Mr le Comte
Fij
68 MERCURE
Mezabarba,que l'on ne trouve
dans ce Trefor , & il y en a
même beaucoup que l'on ne
trouve dans le Recueil de ce pas
Comte , quoy qu'il foit le plus
ample & le plus fidelle qu'on
ait des Medailles Latines ; commeon le peut voir
qui en a efté fait.
par le livre
On a trouvé il у a déja
quelque temps auprés de Paris
une petite Figure de bronze
reprefentant un jeune homme
qui tient de la main gauche une
Patere & de la droite un vafc
courbe. Plufieurs Antiquaires
ont travaillé à l'explication de
GALANT 69
cette Figure , & le Pere Poupart fur tout , Religieux du
Tiers-Ordre de Saint François
à Picpus , a écrit fur ce fujet
une Lettre à Mr l'Evêque de
Soiffons , qui luy fait beaucoup
d'honneur par le tour inge
nieux & folide avec lequel il
explique cette Antique ; il pré
tend que c'eft un jeune homme qui fert à boire , & il fonde
fon fentiment fur la coûtume
des Anciens qui fe fervoient
de jeunes gens pour leur verfer à boire. Horace nous apprend que leur air eftoir gracieux , leur tefte couronnée
70 MERCURE
leur chevelure frifée, leur habit
ceint & retrouffé , tel qu'on reprefente le jeune homme de
la Figure; leur employ cftoit
de fervir le vin & de lever la
table. La coutume de fe fervir
de ces jeunes gens , ajoute le
Pere Poupart , eftoit une Imitation de la Fable deJupiter &
de Ganymede ; & les couronnes de ces jeunes gens eftoient
ordinairement de rofes & d'autres fleurs felon les Saifons.
Ciceron en parle dans une de
fes Oraifons contre Verrez.
Toutes ces chofes fetrouvant
dans la Figure en queſtion nô-
GALANT 71
tre fçavant Picpus prétend que
c'eſt un jeune homme qui fert
à boire , & non un Joueur de
Flute courbe comme quelques
autres l'ont prétendu. Il prouve enfin
par l'autorité de Stace
que c'eft une Patere dont on
fe fervoit pour faire des libations dans les repas . A l'égard
de la difficulté qui naiſt de
l'inftrument courbe que ce
jeune homme tient à la main
droite , le Pere Poupart croit
& avec fondement , que c'eſt
une de ces cornes dans leſquelles les Anciens beuvoient , &
dont Homère , Xenophon ,
72 MERCURE
P
Athenée & Plutarque parlent ,
& à l'égard de fa grandeur il
dit qu'il ne faut pas s'en étonner , parce que les Anciens
aimoient à boire de grands
coups. Le Pere Poupart parent
de Mr Poupart de l'Academie
des Sciences , mort depuis peu ,
eft connu par plufieurs ouvrages , & furtout par la Traduction Françoife de l'Apotheofe
de l'Empereur Claude par Se-
-neque avec des Notes.b
On a trouvé à Smyrne, une
ancienne Inſcription Grecque
qui donne de l'exercice à tous
les Antiquaires. C'eſt une Epitaphe
GALANT 73
taphe pour Heria Th:fbé , qui
eft qualifiée Monodiaria. C'eſt
unterme de Muſique qui fignifioit une femme qui chantoit
feule fur le Theatre. L'Auteur
de cette Epitaphe cft nommé
Choroula , c'est- à-dire Muficien , qui joüoit de la Flute pendant les chants du Choeur.
L'affemblage des voix & des
inftrumens,faifoit un des principaux agrémens des Pieces de
Theatre, & comme le dit Seneque , on ne diſtinguoit la
voix de perfonne en particulier , mais le concert de toutes
les voix charmoit les oreilles.
Avril 1710.0 G
74 MERCURE
Plufieurs Antiquaires d'Alle
magne ont publié leurs conjectures fur cette Infcription ;
mais celle qui a paru la plus autoriféc & qui a eu jufqu'à prefent le plus de partifans eft celle de Mr Gutberletti de Francker, qui a cette occafion a publié une fçavante Differtation
où il traite à fond la matiere
qui regarde les Joueurs de Flutes de Anciens. Il parle entreautres d'un certain Joueur
nommé Canus qui fit tant de
plaifir à l'Empereur Galba en
joüant de ſon inſtrument , que
c Prince luy donna defa pro-
GALANT 75
pre main cinq deniers , plutoſt
fans doute , pour luy tenir lieu
d'approbation que commeune
récompenſe. Mr Gutberlethi
parla avec beaucoup d'étenduë de la Mufique & du Chœur
des Anciens ; & il conclud que
Heria Thifbé à qui l'Infcription eſt conſacrée , eftoit une
Chanteufe , &nullement la celebre Thiſbé tant chantée par
Ovide à caufe de fes amours
& dela mort funefte avec Pyrame. Mr Gutberlethi cite
pour garent de fon fentiment
le celebre Guiter , qui dans fon
Treforparle de cette belle ChanGij
76 MERCURE
teufe à qui il donne de grandes loüanges. Cet Auteur rapporte quantité d'Infcriptions
qui fortifient fon ſentiment.
riofité.
58 MERCURE
Entre les Pierres gravées antiques qui compofent le Cabinet du Roy , le plus riche &
le plus precieux qui foit dans
l'Europe , il y en a une gravée
en creux , &montée en bague,
qui eft un chef- d'œuvre de
l'Art. C'est une petite Cornaline tranfparente qui a efté deffinée en grand par l'illuftre
Mile le Hay , connuë fous le
nom de Mlle Cheron , &gravée
en Eſtampe par Mr Picard. On
croit que cette Pierre a fervy
de Cachet à Michel Ange , &
que Raphaël en a imité quelques figures dans fes tableaux.
GALANT 59
Elle a appartenu à Mr Bagarris , Garde du Cabinet d'Henry IV. enfuite à Mr Lothier,
Antiquaire d'Aix en Provence,
& Sa Majefté l'a acquife de fes
heritiers. L'Eftampe en a eſté
publiée dans le Journal des
Sçavans du mois de Janvier
dernier , & il y en a une explication par un fçavant Je
fuite dans les Memoires de
Trevoux de Fevrier. Mais Mr
Moreau de Mautour qui a remarqué dans ce Deffein & fur
cette Eftampe des choſes differentes de ce qui fe trouve fur
la Pierre originale , & fur les
60 MERCURE
empreintes , a pris occaſion de
faire une Differtation fur ce
fujet, & il a donné lieu à une
nouvelle Eftampe plus exacte ,
dediée à Mr l'Abbé Bignon ,
& gravée par Mr Montbard ,
ruë S. Jacques, où elle fe vend.
Il y a au bas de cette Eſtampè
un petit Extrait de fa Differ
tation. Mr Moreau de Mautour pretend que la graveure
dont l'empreinte forme un bas
relief, reprefente une espece de
Fefte de Sacrifice en l'honneur
de Bacchus , & en memoiredefa
naiffance. On voit le petit Bacchus alaité par Ino fa premiere
GALANT 61
nourrice. Prés d'elle est la belle
Hippa, autre nourrice celebréepar
Orphée dans fes Hymnes. Le
vieillard eft Athamas,ou le vieux,
Silene , ou un Faune , quifait la
fonction de Sacrificateur tient
une Patere pour les libations de
vinfur le feudeftiné pour le Sacrifice. Un Miniftre du Sacrifice
conduit un Bouc , victime qu'on
immoloit à Bacchus , &tient un
vafe destinépour recevoir lefang
de la victime. Un Satyre jouë
d'une espece de flute recourbée ,
inftrument employé dans les Sacrifices & les Feftes. Les Nymphes qui furent ainsi que les Sa
62 MERCURE
tyres , les Bacchantes &les Fau
nes de la fuire de Bacchus , portent des Corbeilles de fleurs &de
fruits , fimblables à celles
po toient fur leurs têtes les jeunes
filles d'Athenes dans les Festes
confacrées à ce Dieu , nommées
que
Canephoria. Une Bacchante enjouée prefente à un des deuxpetits
Amours, une Cimbale , efpece
d'inftrument en ufage dans les
Orgies. Les Amours conviennent
à Bacchus ; on les voit dépeints
enfemble dans Anacreon, &fur
les monumens antiques. Apollon
debout , une Patere à la main , eft
icy comme une Divinité. les que
GALANT 63
que
Egyptiens & les Grecs confondoient avec Bacchus. Les deux
arbres , dont l'un eft entouré de
pampres ,fontdela nature de ceux
Pline décrit , & qui font pro-
-prespour la vigne. Le Pefcheur
hors d'œuvre , a peut eftre raport
àune fiction ingenieufe & morale
de Theocritedans l'Idylle qui porte ce titre. Ce Poëte né à Syracufe, vivoit à la Cour de Ptolemée
Philadelphe , Roy d'Egypte , qui
inftituadans Alexandrie une Fifte
particuliere à l'honneur de Bacchus , felon Achenée , auquel
temps on peut fixer l'Epoque de
l'excellent Ouvrier de ce precieux
i
A
64 MERCURE
Monument, qui auroit prés de
deux mille ans d'antiquité.
Je dois , puifque j'ai commencé à vous parler d'antiquitez , vous entretenir de plufieurs articles curieux fur ce
fujet.
On a trouvé un Trefor de
Medailles depuis peu dans la
Terre d'un Gentilhomme peu
éloignée de cette Ville ; unCurieux qui a acheté ce qui en
reftoit , car une partie avoit
déja cfté diffipée ou fonduë
par les Auteurs de la découverte , en a eu fix mille fept
GALANT 65
censquarante , c'eſt à dire quarante livres pefant , & il a jugé
par l'examen qu'il en a fait que
les Medailles du bas Empire ,
ne font nullement à mépriſer ,
& qu'elles inftruiſent autant
que celles du haut Empire.
Aprés les avoir nettoyées il les
pefa , & il vit qu'il en falloit
communément cent foixante
pour faire une livre ; il prit enfuite quelques Medailles de
Bronze des deux premiers fic .
cles de l'Empire Romain, & il
vit que huit Medailles de ce
petit bronze eftoient à peu prés
du même poids que huit MeAvril 1710. F
66 MERCURE
dailles d'argent du haut Empire ; que quatre Medailles d'or ,
que deux Medailles de moyen
bronze , & qu'une Medaille
de grand bronze ; ce qui fournit une preuve que les Romains ont toûjours gardé des
proportions dans la fabrique
de leurs Monnoyes. Les Medailles du Trefor en queſtion
commencent à Valerien , c'eſtà dire à l'Empereur dont la
deftinée fut fi trifte , qui fuc
pris dans la guerre des Perfes ,
& qui mourut d'une maniere
tragique , & qu'elles finiffent à
Aurelien ; de forte qu'elles ne
GALANT 67
comprennent que le regne de
fix ou fept Empereurs. On
compte cependant dans cet
amas de Medailles feize ou dixfept Princes differens , car ou
tre les deux Imperatrices & les
deux jeunes Cefars qui appartiennent à la famille de Valerien , il y a des Quietus , des
Elianus , des Marius , je veux
dire quelques uns de ces Empereurs , qui ont feulement regné dans quelques Provinces
de l'Empire Romain. Les revers font admirables par leur
diverfité , & il en eft peu dans
le Recueil de Mr le Comte
Fij
68 MERCURE
Mezabarba,que l'on ne trouve
dans ce Trefor , & il y en a
même beaucoup que l'on ne
trouve dans le Recueil de ce pas
Comte , quoy qu'il foit le plus
ample & le plus fidelle qu'on
ait des Medailles Latines ; commeon le peut voir
qui en a efté fait.
par le livre
On a trouvé il у a déja
quelque temps auprés de Paris
une petite Figure de bronze
reprefentant un jeune homme
qui tient de la main gauche une
Patere & de la droite un vafc
courbe. Plufieurs Antiquaires
ont travaillé à l'explication de
GALANT 69
cette Figure , & le Pere Poupart fur tout , Religieux du
Tiers-Ordre de Saint François
à Picpus , a écrit fur ce fujet
une Lettre à Mr l'Evêque de
Soiffons , qui luy fait beaucoup
d'honneur par le tour inge
nieux & folide avec lequel il
explique cette Antique ; il pré
tend que c'eft un jeune homme qui fert à boire , & il fonde
fon fentiment fur la coûtume
des Anciens qui fe fervoient
de jeunes gens pour leur verfer à boire. Horace nous apprend que leur air eftoir gracieux , leur tefte couronnée
70 MERCURE
leur chevelure frifée, leur habit
ceint & retrouffé , tel qu'on reprefente le jeune homme de
la Figure; leur employ cftoit
de fervir le vin & de lever la
table. La coutume de fe fervir
de ces jeunes gens , ajoute le
Pere Poupart , eftoit une Imitation de la Fable deJupiter &
de Ganymede ; & les couronnes de ces jeunes gens eftoient
ordinairement de rofes & d'autres fleurs felon les Saifons.
Ciceron en parle dans une de
fes Oraifons contre Verrez.
Toutes ces chofes fetrouvant
dans la Figure en queſtion nô-
GALANT 71
tre fçavant Picpus prétend que
c'eſt un jeune homme qui fert
à boire , & non un Joueur de
Flute courbe comme quelques
autres l'ont prétendu. Il prouve enfin
par l'autorité de Stace
que c'eft une Patere dont on
fe fervoit pour faire des libations dans les repas . A l'égard
de la difficulté qui naiſt de
l'inftrument courbe que ce
jeune homme tient à la main
droite , le Pere Poupart croit
& avec fondement , que c'eſt
une de ces cornes dans leſquelles les Anciens beuvoient , &
dont Homère , Xenophon ,
72 MERCURE
P
Athenée & Plutarque parlent ,
& à l'égard de fa grandeur il
dit qu'il ne faut pas s'en étonner , parce que les Anciens
aimoient à boire de grands
coups. Le Pere Poupart parent
de Mr Poupart de l'Academie
des Sciences , mort depuis peu ,
eft connu par plufieurs ouvrages , & furtout par la Traduction Françoife de l'Apotheofe
de l'Empereur Claude par Se-
-neque avec des Notes.b
On a trouvé à Smyrne, une
ancienne Inſcription Grecque
qui donne de l'exercice à tous
les Antiquaires. C'eſt une Epitaphe
GALANT 73
taphe pour Heria Th:fbé , qui
eft qualifiée Monodiaria. C'eſt
unterme de Muſique qui fignifioit une femme qui chantoit
feule fur le Theatre. L'Auteur
de cette Epitaphe cft nommé
Choroula , c'est- à-dire Muficien , qui joüoit de la Flute pendant les chants du Choeur.
L'affemblage des voix & des
inftrumens,faifoit un des principaux agrémens des Pieces de
Theatre, & comme le dit Seneque , on ne diſtinguoit la
voix de perfonne en particulier , mais le concert de toutes
les voix charmoit les oreilles.
Avril 1710.0 G
74 MERCURE
Plufieurs Antiquaires d'Alle
magne ont publié leurs conjectures fur cette Infcription ;
mais celle qui a paru la plus autoriféc & qui a eu jufqu'à prefent le plus de partifans eft celle de Mr Gutberletti de Francker, qui a cette occafion a publié une fçavante Differtation
où il traite à fond la matiere
qui regarde les Joueurs de Flutes de Anciens. Il parle entreautres d'un certain Joueur
nommé Canus qui fit tant de
plaifir à l'Empereur Galba en
joüant de ſon inſtrument , que
c Prince luy donna defa pro-
GALANT 75
pre main cinq deniers , plutoſt
fans doute , pour luy tenir lieu
d'approbation que commeune
récompenſe. Mr Gutberlethi
parla avec beaucoup d'étenduë de la Mufique & du Chœur
des Anciens ; & il conclud que
Heria Thifbé à qui l'Infcription eſt conſacrée , eftoit une
Chanteufe , &nullement la celebre Thiſbé tant chantée par
Ovide à caufe de fes amours
& dela mort funefte avec Pyrame. Mr Gutberlethi cite
pour garent de fon fentiment
le celebre Guiter , qui dans fon
Treforparle de cette belle ChanGij
76 MERCURE
teufe à qui il donne de grandes loüanges. Cet Auteur rapporte quantité d'Infcriptions
qui fortifient fon ſentiment.
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Résumé : Articles contenant plusieurs curiositez qui peuvent instruire le Public & luy faire plaisir. [titre d'après la table]
Le texte présente plusieurs objets antiques et leurs significations historiques. Une pierre gravée en creux, montée en bague, est décrite comme un chef-d'œuvre de l'art. Cette cornaline transparente, gravée par Mlle Cheron et estampée par Mr Picard, aurait appartenu à Michel-Ange et Raphaël. Elle a été acquise par le roi après avoir appartenu à plusieurs collectionneurs, dont Mr Bagarris et Mr Lothier. Une estampe de cette pierre a été publiée dans le Journal des Sçavans et les Mémoires de Trevoux, mais des divergences entre l'estampe et la pierre originale ont conduit Mr Moreau de Mautour à publier une nouvelle estampe plus exacte. La gravure représente une fête en l'honneur de Bacchus, montrant le dieu allaité par Ino, sa nourrice, ainsi que d'autres figures mythologiques comme Silène, un satyre, des nymphes et des bacchantes. Apollon est également présent, confondu avec Bacchus par les Égyptiens et les Grecs. La scène inclut des éléments comme des corbeilles de fleurs et de fruits, des instruments de musique et des victimes sacrificielles. Le texte mentionne également la découverte d'un trésor de médailles romaines, comprenant des pièces du bas Empire, jugées aussi instructives que celles du haut Empire. Ces médailles, trouvées dans la terre d'un gentilhomme, commencent avec l'empereur Valérien et se terminent avec Aurélien, couvrant le règne de six ou sept empereurs et incluant des princes ayant régné sur des provinces spécifiques. Enfin, le texte évoque une petite figure de bronze représentant un jeune homme servant à boire, interprétée par le Père Poupart comme une imitation de la fable de Jupiter et Ganymède. Une inscription grecque trouvée à Smyrne, dédiée à une chanteuse de théâtre nommée Heria Thisfbé, est également mentionnée, ainsi que les conjectures des antiquaires allemands sur cette inscription.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 1262-1275
LETTRE de M. D. L. R. écrite à M. Boyer, Docteur en Medecine de la Faculté de Montpellier, & Docteur-Regent en celle de Paris, au sujet d'une Medaille Latine de la Ville de Troade, & d'une Médaille Grecque des Dardaniens.
Début :
Ce n'est pas assez, Monsieur, d'avoir reçû avec reconnaissance les onze [...]
Mots clefs :
Médaille latine, Médaille grecque, Voyages du Levant, Bronze, Troie, Embellissements, Colonie romaine
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. D. L. R. écrite à M. Boyer, Docteur en Medecine de la Faculté de Montpellier, & Docteur-Regent en celle de Paris, au sujet d'une Medaille Latine de la Ville de Troade, & d'une Médaille Grecque des Dardaniens.
LETTRE de M. D. L. R. écrite à M.
Boyer , Docteur en Medecine de la Facul
té de Montpellier , & Docteur- Regent en
celle de Paris , au sujet d'une Medaille
Latine de la Ville de Troade , & du
ne Médaille Grecque des Dardaniens .
E n'est pas Monsieur , d'avoir
Creçu avec reconnoissance les onze
Médailles antiques , qu'il vous a plû de
me donner ces jours passés , que vous
avez rapportées de vos Voyages du Le
vant , et qui ont été trouvées aux envi
rons desDardanelles et des ruines de Troye ,
c'est- à-dire , sur les lieux du Monde les
I. Vol. plus
JUIN . 17317 r263
plus fameux dans l'Antiquité Grecque et
Romaine . La même reconnoissance m'en
gage de tenir ma parole , et de vous
marquer ce que ces Médailles peuvent
avoir de singulier , n'ayant pû , comme
vous sçavez , les examiner sur le champ .
Permettez moi d'en mettre d'abord neuf
au nombre de celles qui ne feront jamais
suer les Antiquaires , et qu'on trouve as
sez communément . En revanche , il y en
a deux qui me paroissent meriter une con
sideration particuliere , elles feront aussi
tout le sujet de cette Lettre .
La premiere est de moyen bronze , fort
nette , et bien conservée . On y voit d'un
côté une tête de femme couronnée , ou
coëffée de Tours ; comme vous savez que
•
les Anciens symbolisoient les principales
Villes avec une Enseigne Militaire derrie→
re; cette Legende est autour de la Tête CO .
ALEX TR , et encore ces deux Let
tres dans l'Enseigne Militaire CO. Sur
le revers est représentée la Louve avec les
deux Jumeaux , Fondateurs de Rome : on
lit au dessus COL AVG. et dans l'E
xergue T RO A. C'est -à -dire , d'un côté
Colonia Alexandrina Troadis , & de l'au
tre , Colonia Augusta Troadis ; avec la ré
petition du mot Colonia dans l'Enseigne
Militaire. Ainsi , M. je ne fais nul doute
I. Vol. que
1264 MERCURE
DE
FRANCE
que cette Médaille n'apartienne , et n'aig
été frapée à Troade , Ville de Phrygie ,
devenue dans la suite Colonie Romaine ;
mais cela ne suffit pas , il faut vous faire
connoitre cette Ville plus particuliere
ment , expliquer par-là notre Medaille,
et vous en faire connoître la singularité.
Troade étoit située sur les bords de
l'Hellespont dans cette Partie de la Phry
gie qui portoit aussi le nom de Troade ,
et selon le sentiment de plusieurs , elle de
voit son origine et sa fondation à la fa
meuse Troye , qui n'étoit éloignée du ter
rain occupé par cette nouvelle Ville , que
d'environ cinq ou six lieuës . Alexandre
le Grand , ajoûte- t-on , après avoir visité
les restes de l'ancienne Troye , et déploré
ses malheurs , fit bâtir une ville de ses
ruines , et pour mieux conserver la mé
moire de Troye , il donna le nom de
Troade a cette nouvelle Ville , qui porta
aussi le nom d'Alexandrie , à cause de son
Fondateur et du Restaurateur de Troye..
Dans la suite des tems , les Romains
ayant conquis la Grece , et cette partie de
l'Asie qui en dépendoit , la Ville de
Troade fut chez eux d'une grande consi
deration , et devint Colonie Romaine dès
le tems d'Auguste : d'autres Empereurs la
favoriserent en plusieurs manieres , et la
1.Vol.
dis
JUIN. 1731.
1265
distinguerent beaucoup par des Embelis
semens , des Privileges , &c. c'est pour
conserver la memoire de ces faveurs , et
pour marquer sa reconnoissance
que
Troade , à l'imitation des autres fameu
ses Villes , fit fraper plusieurs Médailles ,
dont quelques- unes se voyent encore dans
les Cabinets des Curieux , et sont rapor
tées dans les Ouvrages des Antiquaires.
M. Vaillant , qui en a composé un ex
près sur les Medailles des Colonies , a fait
graver les plus curieuses de celles de Troa
de qui étoient venuës à sa connoissance
lesquelles ont été frapées dans cette Ville
en l'honneur de plusieurs Empereurs et
Imperatrices depuis Trajan jusqu'à Gallus.
Ces Médailles ont d'un côtê la tête de
PEmpereur couronnée de laurier , ou de
l'Imperatrice , en l'honneur de qui elles
ont été frapées , avec la legende qui con
vient. Les Revers sont presque tous dif
ferens , et contiennent des symboles , qui
ont rapport à l'Histoire ancienne , et aux
motifs que ceux de Troade avoient en
fabriquant ces Monumens , ainsi que nous
le remarquerons dans la suite.Les légendes:
des Revers sont pareillement differentes ::
les unes ne contiennent que ces deux mots,,
Col. Troad , les autres Col. Aug. Troc ..
quelques unes Col. Alex. Aug. et dans l'E
.
د و
1. Vol.
xergue
1266 MERCURE DE FRANCE
xergue Tro. d'autres Col. Alexand. Aug. II
s'en trouve enfin qui portent ces mots Col.
Aur. Antoniana Alex. J'ajoûte que ces Me
dailles sont de moyen ou de petit bronze,
et que le sçavant Antiquaire qui les ra
porte , assure qu'elles sont presque tou
tes rares et quelques-unes d'une trés
grande rareté , et d'une consideration sin
guliere.
>
Si cela est , comme il y a lieu de le croi
re , j'ose vous assurer , Monsieur , que
notre Medaille de Troade surpasse toutes
celles dont nous venons de parler par sa
singularité et je crois que vous allez
en convenir. Elle n'a point été frapée pour
un Empereur, c'est une Medaille de Ville,
comme nous en voyons plusieurs de ces
Villes fameuses , qui ont fait une grande
figure dans l'Antiquité , lesquelles portent
d'un côté le Type de la Ville sous la figure
d'une Femme , ou d'une Déesse , comme
celles d'Athenes de Marseille , d'An
tioche, de Smyrne , & c. et sur le Revers ,
les symboles qui leur sont propres.
2
Comme Troade tiroit sa principale
gloire d'être Colonie Romaine , et qu'elle
vouloit plaire à ses Maîtres en faisant va
loir cette circonstance , on voit sur notre
Medaille une chose qui n'est pas ordinaí
re , sçavoir , non-seulement le nom de la
Ville , gravé sur les deux côtez , mais ce
qui est encore plus rare , le Titre de Co
lonie répété jusqu'à trois fois dans cette
même Médaille. Je sçai qu'il y a quel
ques exemples de Médailles Grecques ,
dont le nom de la Ville qui les a faites
fraper , se trouve sur les deux côtés ; mais
àPégard de la répetition du Titre de Colo
nie , je n'ai encore rien vû de semblable.
Au reste , Monsieur , je ne prétends
pas vous insinuer par ce que je viens de
vous dire ,, que les Médailles de la Ville de
Troade , comme Médailles de Villé , soient
plus rares que les Médailles Imperiales
de la même Ville , qui le sont déja as
sez , et par-là faire valoir plus que de rai
son notre découverte , qui sans cela
aura toûjours son mérite et sa singularité.
Il est cependant vrai , que dans Goltzius ,
dans Patin et dans le P. Hardouin , on
ne trouve la Médaille de Troade , que
comme frappée en l'honneur de quelque
Empereur ou Imperatrice ; mais comme il
se fait tous les jours de nouvelles décou
vertes , je trouve une Médaille de la qua
lité de la nôtre , quoiqu'elle n'ait ni les
mêmes symboles au Revers , ni les mêmes
Legendes , rapportée dans le bel Ouvrage
du Tresor de Brandebourg , composé par
Beger , T. I. p . 491. et j'aprens que M.
>
I. Vol. Le
1268 MERCURE DE FRANCE
Lebret , Conseiller d'Etat , Premier Pré
sident du Parlement d'Aix , Intendant de
Justice et du Commerce en Provence
possede dans son riche Cabinet quelques
Medailles de Troade , de la qualité de
celle dont il s'agit ici .
La Médaille du Tresor de Brandebourg
a d'un côté le Type de la Ville de Troade,
tout-à fait semblable à celui qui paroît sur
la nôtre , c'est- à - dire, une Tête de femme,
couronnée de Tours , et une Enseigne Mi
litaire derriere , avec ces Lettres autour.
ALEX TRO. l'Enseigne Militaire
ne porte aucunes Lettres. Le Revers est
tout-à- fait different. On y voit un Che
val qui paît , et cette Legende autour :
COL. AVG O , et dans l'ExergueTROĄ.
Si vous me demandez ce qu'il faut enten
dre par la Lettre O , qui suit après COL
AVG sur cette Medaille et sur quel
ques - unes semblables du Cabinet de
M. Lebret , je vous répondrai que c'est
un mistere qui a été jusqu'à present
impénétrable à tous les Antiquaires , et .
sur lequel on ne peut que hazarder des
conjectures.
→
Mais revenons à notre propre Medaille,
sur laquelle il y a encore deux observa
tions à faire. Commençons par le sym
bole de la Louve , et des deux Jumeaux
I.Vol. qui
JUIN. 1731. 1269
qui paroît sur son Revers . Rien ne con
vient mieux que ce symbole à une Me
daille de la Ville de Troade , qui , cor
sidérée seulement comme Colonie Ro
maine , devoit l'employer. Rien en effet de
plus jufte , & de plus flateur pour ses Maî
tres ,que de désigner ainsi la Ville de Rome
par le Type de sa fondation : mais le sym
bole paroit encore plus convenable , & plus
heureusement appliqué , s'il étoit vrai que
Troade ait été bâtie des débris de l'ancien
neTroye, et qu'elle représentoit en quelque
façon cette fameuse Ville , qui par Enée
Troyen, et par Remus et Romulus ses des
cendans , a , felon l'Histoire ancienne ,
donné naissance à la Ville de Rome , et au
Peuple Romain.
L'autre observation tombe sur la Legen
de de laTête CO ALEX TR.c'est- à- dire,
Colonia AlexandrinaTroadensis, ou Colonia
Alexandria Troadis . Il s'agit de sçavoir la
veritable raison de cette dénomination ..
Tous les Antiquaires qui ont parlé des Mé
dailles de Troade avec le titre ou le nom
d'Alexandriene, car toutes ne le portent pas,
comme nous le remarquerons en son lieu .
Tous les Antiquaires , dis-je , n'hésitent
point d'attribuer la fondation de la Ville:
de Troade à Alexandre le Grand.
M. Vaillant s'en explique dans ce sens .
I. Vol . même
1270 MERCURE DE FRANCE
même sur une Médaille de cette Ville
>
›
qui ne porte point le titre d'Alexan
drienne Troas urbs Phrygia minoris ab
Alexandro Magno , unde Troas Alexandri
seu Alexandria ut pluribus narrat Q
Curtius. Ce sont ces paroles ; cependant ,
le croiriez - vous Monsieur Quinte
Curce , si précisément cité , ne dit rien
là -deffus dans son Histoire. Il est seule
ment vrai que dans les Suplemens de cet
Hiftorien , Edition d'Elzevir 1664. il est
dit qu'Alexandre est venu deux fois à l'an
cienne Troye , que l'Auteur Latin ap
pelle aussi Ilium , qu'il y a visité le tom
beau d'Achille dont il se disoit issu du côté
de sa Mere , qu'il y a fait des Sacrifices , et
d'autres Ceremonies , qui sont décrites
dans le même Livre ; mais on n'y trouve
point , que ce Conquerant ait fait bâtir de
Ville dans ce Païs.
Le même M. Vaillant , prévenu sans
doute sur cette opinion , en expliquanr
dans ses Colonies,T.II. une autreMédaille
de Troade , frapée pour l'Empereur Ale
xandre Severe , avec le Titre d'Alexandri
ne,allegue encore le témoignage deQuinte
Curce , qu'il joint à celui de Strabon.sur
le même fait , Alexandria , dit - il . appet
* Medaille d'Antonin Pie , expliquée dans le
IT det Colonies de Vaillant.
1. Vol.
tationem
JUIN. 1731. 1271
lationem habet, vel ab Alexandro Magno, à
quo ex Troja ruderibus extructa est , Strabo
ne et Q. Curtio testibus , vel ab Alexandro
Severo , &c.
Nous venons de voir que la Citation
de Quinte - Curce est ici tout-à- fait gra
tuite ; celle de Strabon n'est gueres mieux
fondée ; mais elle demandera quelque exa
men , aussi - bien que ces dernieres paroles
de M. Vaillant , vel ab Alexandro Severo,
K
c. Je vous dirai cependant , que dans
Plutarque , dans Arrien , dans Êlien , et
dans les autres Auteurs qui ont parlé d'A
lexandre , je ne trouve rien qui favorise
Popinion et la citation de M. Vaillant.
Strabon a écrit
Voyons d'abord ce que
sur cette Ville : je trouve dans le second
Livre de ce celebre Auteur , la Ville dont
nous parlons , placée , comme on l'a déja
vû , dans la Phrygie , et située sur la Côte
de l'Hellespont. Dans ce même Livre , il
est aussi parlé d'une Ville d'Alexandrie
du Pays de Troade .
Strabon , en revenant dans son XIII.Li
vre à la Côte de l'Hellespont et de la
Propontide , dit expressément que Troade
est la premiere des Villes de cette Côte , il
ajoûte que sa réputation est celebre , et
que toute désolée et toute deserte qu'on la
voyoit alors , elle fourniroit la matiere
1
1
1
1
1
I
1
1
4
1
I
1
1
I
d'un ample discours.
1
1272 MERCURE DE FRANCE
En continuant la Description de l'Hel
lespont , après avoir nommé Ilium et Te
nedos , il nomme tout de suite Alexandrie
Troade , Villes , ajoûte-t'il , au- dessus des
quelles s'éleve le Mont Ida ...
Dans la suite il parle de la Ville qui
subsistoit de son tems sous le nom d'I
lium > et rapporte ce qu'on en disoit ,
sçavoir , qu'Alexandre le Grand l'ayant
visitée , après le combat du Granique ,
lui fit de grandes liberalitez , qu'il lui
donna son nom , et ordonna à ses Lieu
tenans de la réparer , ajoûtant qu'il l'a
mit au nombre des Villes libres, et qui ne
payoient aucun tribut. Enfin que ce Con
querant,après avoir vaincu les Perses, écri
vit à ces mêmes Lieutenans une Lettre
très-obligeante en faveur d'Ilium , pro
mettant d'en faire une grande Ville , d'y
bâtir un Temple superbe , et d'y établir
des Combats et es Jeux sacrez .
Après la mort d'Alexandre , c'est toû
jours Strabon qui parle , Lysimachus prit
un soin particulier de cette Ville , il y
bâtit un Temple , lui fit faire une grande
enceinte de murailles , et ordonna que
les Habitans des Villes voisines ruinées
s'y retireroient. Dans ce même tems
Lysimachus prit aussi soin de rétablir
Alexandrie , Ville qu'Antigonus avoit
1. Vol. bâtie
JUIN.
1731. 1273
bâtie au même Pays , laquelle fut d'abord
appellée Antigone , et qui changea ce
nom en celui d'Alexandrie ; cette Ville a
duré long- tems et a beaucoup prosperé.
C'est même encore aujourd'hui , dit Stra
bon , une Colonie Romaine , une Ville
enfin du nombre de celles qu'on appelle
Villes Nobles.
L'Auteur Grec revient à Ilium , pour
remarquer que quand les Romains y ar
riverent pour la premiere fois , et qu'ils
chasserent Antiochus le Grand , au-delà
du Mont Taurus , cette Ville n'étoit
gueres alors qu'un Village : il fait voir
aussi par plusieurs raisons que l'ancien
Ilium qui subsistoit du temps d'Homere ,
n'étoit point situé dans le même Lieu ,
qu'occupoit cet autre Ilium , dont il
parle .
Strabon observe de plus que le Lieu oc
cupé par cette Alexandrie,dont il est parlé
cy- dessus , étoit auparavant appellé Sigée.
Enfin il fait un peu plus bas mention
dans le même Pays d'une autre Ville nom
mée Alexandrie , bâtie au pied d'une
Montagne , et appellée aussi Antandrus.
C'est-là , ajoûte- t'il, qu'on assure qu'arriva
la celebre contestation des trois Déesses
au sujet de leur beauté , dont Pâris fut
1'Arbitre.
.
1. Vol
Il
1.274 MERCURE
DE FRANCE
Il étoit à propos , Monsieur , de vous
rapporter sommairement ce que dit Stra
bon , non-seulement au sujet de Troade;
mais encore de quelques Villes voisines ,
pour bien éclaircir la matiere dont il est ici
question . Vous voyez déja , Monsieur, que
Strabon n'a jamais dit , non plus que
Quinte- Curce , que notre Troade ait été
bâtie par Alexandre , des ruines de l'an
cienne Troye , ainsi que M. Vaillant l'a
écrit , et après lui ou avec lui , Baudrand ,
dans sa Géographie , lequel se sert à peu
près des mêmes termes , ab Alexandre
Magno excitata ut narrat Q. Curtius .
Il nous reste à voir , s'il est possible ;
ce qui peut avoir donné lieu à une er
reur de fait si considerable , à établir en
suite ce qu'il y a de certain et de plus
curieux à sçavoir sur la Ville de Troade,
principalement depuis son union à l'Em
pire Romain , et depuis que cette Ville fut
devenue une fameuse Colonie Romai ne
sans oublier ce que j'ai à vous dire sur la
Médaille des Dardaniens , que vous voyez
ici gravée avec celle de Troade .
Mais commeje prévois , Monsieur , que
cette matiere peut exceder les bornes d'une
Lettre , sans compter le peché * dont parle
In publica commoda peccem ,
· ·
Si longo sermone morer tua tempora ,
1. Vol. Horace
JUIN. 1731. . 1275
Horace , que je veux éviter , en n'arrêtant
pas trop long temps un Homme aussi dé
voué que vous à l'utilité publique ; je crois
devoir m'arrêter ici , en vous promettant
le plutôt qu'il me sera possible la suite de
ma Dissertation . Je suis , Monsieur , &c.
A Paris , le 1. Janvier 1731 .
Boyer , Docteur en Medecine de la Facul
té de Montpellier , & Docteur- Regent en
celle de Paris , au sujet d'une Medaille
Latine de la Ville de Troade , & du
ne Médaille Grecque des Dardaniens .
E n'est pas Monsieur , d'avoir
Creçu avec reconnoissance les onze
Médailles antiques , qu'il vous a plû de
me donner ces jours passés , que vous
avez rapportées de vos Voyages du Le
vant , et qui ont été trouvées aux envi
rons desDardanelles et des ruines de Troye ,
c'est- à-dire , sur les lieux du Monde les
I. Vol. plus
JUIN . 17317 r263
plus fameux dans l'Antiquité Grecque et
Romaine . La même reconnoissance m'en
gage de tenir ma parole , et de vous
marquer ce que ces Médailles peuvent
avoir de singulier , n'ayant pû , comme
vous sçavez , les examiner sur le champ .
Permettez moi d'en mettre d'abord neuf
au nombre de celles qui ne feront jamais
suer les Antiquaires , et qu'on trouve as
sez communément . En revanche , il y en
a deux qui me paroissent meriter une con
sideration particuliere , elles feront aussi
tout le sujet de cette Lettre .
La premiere est de moyen bronze , fort
nette , et bien conservée . On y voit d'un
côté une tête de femme couronnée , ou
coëffée de Tours ; comme vous savez que
•
les Anciens symbolisoient les principales
Villes avec une Enseigne Militaire derrie→
re; cette Legende est autour de la Tête CO .
ALEX TR , et encore ces deux Let
tres dans l'Enseigne Militaire CO. Sur
le revers est représentée la Louve avec les
deux Jumeaux , Fondateurs de Rome : on
lit au dessus COL AVG. et dans l'E
xergue T RO A. C'est -à -dire , d'un côté
Colonia Alexandrina Troadis , & de l'au
tre , Colonia Augusta Troadis ; avec la ré
petition du mot Colonia dans l'Enseigne
Militaire. Ainsi , M. je ne fais nul doute
I. Vol. que
1264 MERCURE
DE
FRANCE
que cette Médaille n'apartienne , et n'aig
été frapée à Troade , Ville de Phrygie ,
devenue dans la suite Colonie Romaine ;
mais cela ne suffit pas , il faut vous faire
connoitre cette Ville plus particuliere
ment , expliquer par-là notre Medaille,
et vous en faire connoître la singularité.
Troade étoit située sur les bords de
l'Hellespont dans cette Partie de la Phry
gie qui portoit aussi le nom de Troade ,
et selon le sentiment de plusieurs , elle de
voit son origine et sa fondation à la fa
meuse Troye , qui n'étoit éloignée du ter
rain occupé par cette nouvelle Ville , que
d'environ cinq ou six lieuës . Alexandre
le Grand , ajoûte- t-on , après avoir visité
les restes de l'ancienne Troye , et déploré
ses malheurs , fit bâtir une ville de ses
ruines , et pour mieux conserver la mé
moire de Troye , il donna le nom de
Troade a cette nouvelle Ville , qui porta
aussi le nom d'Alexandrie , à cause de son
Fondateur et du Restaurateur de Troye..
Dans la suite des tems , les Romains
ayant conquis la Grece , et cette partie de
l'Asie qui en dépendoit , la Ville de
Troade fut chez eux d'une grande consi
deration , et devint Colonie Romaine dès
le tems d'Auguste : d'autres Empereurs la
favoriserent en plusieurs manieres , et la
1.Vol.
dis
JUIN. 1731.
1265
distinguerent beaucoup par des Embelis
semens , des Privileges , &c. c'est pour
conserver la memoire de ces faveurs , et
pour marquer sa reconnoissance
que
Troade , à l'imitation des autres fameu
ses Villes , fit fraper plusieurs Médailles ,
dont quelques- unes se voyent encore dans
les Cabinets des Curieux , et sont rapor
tées dans les Ouvrages des Antiquaires.
M. Vaillant , qui en a composé un ex
près sur les Medailles des Colonies , a fait
graver les plus curieuses de celles de Troa
de qui étoient venuës à sa connoissance
lesquelles ont été frapées dans cette Ville
en l'honneur de plusieurs Empereurs et
Imperatrices depuis Trajan jusqu'à Gallus.
Ces Médailles ont d'un côtê la tête de
PEmpereur couronnée de laurier , ou de
l'Imperatrice , en l'honneur de qui elles
ont été frapées , avec la legende qui con
vient. Les Revers sont presque tous dif
ferens , et contiennent des symboles , qui
ont rapport à l'Histoire ancienne , et aux
motifs que ceux de Troade avoient en
fabriquant ces Monumens , ainsi que nous
le remarquerons dans la suite.Les légendes:
des Revers sont pareillement differentes ::
les unes ne contiennent que ces deux mots,,
Col. Troad , les autres Col. Aug. Troc ..
quelques unes Col. Alex. Aug. et dans l'E
.
د و
1. Vol.
xergue
1266 MERCURE DE FRANCE
xergue Tro. d'autres Col. Alexand. Aug. II
s'en trouve enfin qui portent ces mots Col.
Aur. Antoniana Alex. J'ajoûte que ces Me
dailles sont de moyen ou de petit bronze,
et que le sçavant Antiquaire qui les ra
porte , assure qu'elles sont presque tou
tes rares et quelques-unes d'une trés
grande rareté , et d'une consideration sin
guliere.
>
Si cela est , comme il y a lieu de le croi
re , j'ose vous assurer , Monsieur , que
notre Medaille de Troade surpasse toutes
celles dont nous venons de parler par sa
singularité et je crois que vous allez
en convenir. Elle n'a point été frapée pour
un Empereur, c'est une Medaille de Ville,
comme nous en voyons plusieurs de ces
Villes fameuses , qui ont fait une grande
figure dans l'Antiquité , lesquelles portent
d'un côté le Type de la Ville sous la figure
d'une Femme , ou d'une Déesse , comme
celles d'Athenes de Marseille , d'An
tioche, de Smyrne , & c. et sur le Revers ,
les symboles qui leur sont propres.
2
Comme Troade tiroit sa principale
gloire d'être Colonie Romaine , et qu'elle
vouloit plaire à ses Maîtres en faisant va
loir cette circonstance , on voit sur notre
Medaille une chose qui n'est pas ordinaí
re , sçavoir , non-seulement le nom de la
Ville , gravé sur les deux côtez , mais ce
qui est encore plus rare , le Titre de Co
lonie répété jusqu'à trois fois dans cette
même Médaille. Je sçai qu'il y a quel
ques exemples de Médailles Grecques ,
dont le nom de la Ville qui les a faites
fraper , se trouve sur les deux côtés ; mais
àPégard de la répetition du Titre de Colo
nie , je n'ai encore rien vû de semblable.
Au reste , Monsieur , je ne prétends
pas vous insinuer par ce que je viens de
vous dire ,, que les Médailles de la Ville de
Troade , comme Médailles de Villé , soient
plus rares que les Médailles Imperiales
de la même Ville , qui le sont déja as
sez , et par-là faire valoir plus que de rai
son notre découverte , qui sans cela
aura toûjours son mérite et sa singularité.
Il est cependant vrai , que dans Goltzius ,
dans Patin et dans le P. Hardouin , on
ne trouve la Médaille de Troade , que
comme frappée en l'honneur de quelque
Empereur ou Imperatrice ; mais comme il
se fait tous les jours de nouvelles décou
vertes , je trouve une Médaille de la qua
lité de la nôtre , quoiqu'elle n'ait ni les
mêmes symboles au Revers , ni les mêmes
Legendes , rapportée dans le bel Ouvrage
du Tresor de Brandebourg , composé par
Beger , T. I. p . 491. et j'aprens que M.
>
I. Vol. Le
1268 MERCURE DE FRANCE
Lebret , Conseiller d'Etat , Premier Pré
sident du Parlement d'Aix , Intendant de
Justice et du Commerce en Provence
possede dans son riche Cabinet quelques
Medailles de Troade , de la qualité de
celle dont il s'agit ici .
La Médaille du Tresor de Brandebourg
a d'un côté le Type de la Ville de Troade,
tout-à fait semblable à celui qui paroît sur
la nôtre , c'est- à - dire, une Tête de femme,
couronnée de Tours , et une Enseigne Mi
litaire derriere , avec ces Lettres autour.
ALEX TRO. l'Enseigne Militaire
ne porte aucunes Lettres. Le Revers est
tout-à- fait different. On y voit un Che
val qui paît , et cette Legende autour :
COL. AVG O , et dans l'ExergueTROĄ.
Si vous me demandez ce qu'il faut enten
dre par la Lettre O , qui suit après COL
AVG sur cette Medaille et sur quel
ques - unes semblables du Cabinet de
M. Lebret , je vous répondrai que c'est
un mistere qui a été jusqu'à present
impénétrable à tous les Antiquaires , et .
sur lequel on ne peut que hazarder des
conjectures.
→
Mais revenons à notre propre Medaille,
sur laquelle il y a encore deux observa
tions à faire. Commençons par le sym
bole de la Louve , et des deux Jumeaux
I.Vol. qui
JUIN. 1731. 1269
qui paroît sur son Revers . Rien ne con
vient mieux que ce symbole à une Me
daille de la Ville de Troade , qui , cor
sidérée seulement comme Colonie Ro
maine , devoit l'employer. Rien en effet de
plus jufte , & de plus flateur pour ses Maî
tres ,que de désigner ainsi la Ville de Rome
par le Type de sa fondation : mais le sym
bole paroit encore plus convenable , & plus
heureusement appliqué , s'il étoit vrai que
Troade ait été bâtie des débris de l'ancien
neTroye, et qu'elle représentoit en quelque
façon cette fameuse Ville , qui par Enée
Troyen, et par Remus et Romulus ses des
cendans , a , felon l'Histoire ancienne ,
donné naissance à la Ville de Rome , et au
Peuple Romain.
L'autre observation tombe sur la Legen
de de laTête CO ALEX TR.c'est- à- dire,
Colonia AlexandrinaTroadensis, ou Colonia
Alexandria Troadis . Il s'agit de sçavoir la
veritable raison de cette dénomination ..
Tous les Antiquaires qui ont parlé des Mé
dailles de Troade avec le titre ou le nom
d'Alexandriene, car toutes ne le portent pas,
comme nous le remarquerons en son lieu .
Tous les Antiquaires , dis-je , n'hésitent
point d'attribuer la fondation de la Ville:
de Troade à Alexandre le Grand.
M. Vaillant s'en explique dans ce sens .
I. Vol . même
1270 MERCURE DE FRANCE
même sur une Médaille de cette Ville
>
›
qui ne porte point le titre d'Alexan
drienne Troas urbs Phrygia minoris ab
Alexandro Magno , unde Troas Alexandri
seu Alexandria ut pluribus narrat Q
Curtius. Ce sont ces paroles ; cependant ,
le croiriez - vous Monsieur Quinte
Curce , si précisément cité , ne dit rien
là -deffus dans son Histoire. Il est seule
ment vrai que dans les Suplemens de cet
Hiftorien , Edition d'Elzevir 1664. il est
dit qu'Alexandre est venu deux fois à l'an
cienne Troye , que l'Auteur Latin ap
pelle aussi Ilium , qu'il y a visité le tom
beau d'Achille dont il se disoit issu du côté
de sa Mere , qu'il y a fait des Sacrifices , et
d'autres Ceremonies , qui sont décrites
dans le même Livre ; mais on n'y trouve
point , que ce Conquerant ait fait bâtir de
Ville dans ce Païs.
Le même M. Vaillant , prévenu sans
doute sur cette opinion , en expliquanr
dans ses Colonies,T.II. une autreMédaille
de Troade , frapée pour l'Empereur Ale
xandre Severe , avec le Titre d'Alexandri
ne,allegue encore le témoignage deQuinte
Curce , qu'il joint à celui de Strabon.sur
le même fait , Alexandria , dit - il . appet
* Medaille d'Antonin Pie , expliquée dans le
IT det Colonies de Vaillant.
1. Vol.
tationem
JUIN. 1731. 1271
lationem habet, vel ab Alexandro Magno, à
quo ex Troja ruderibus extructa est , Strabo
ne et Q. Curtio testibus , vel ab Alexandro
Severo , &c.
Nous venons de voir que la Citation
de Quinte - Curce est ici tout-à- fait gra
tuite ; celle de Strabon n'est gueres mieux
fondée ; mais elle demandera quelque exa
men , aussi - bien que ces dernieres paroles
de M. Vaillant , vel ab Alexandro Severo,
K
c. Je vous dirai cependant , que dans
Plutarque , dans Arrien , dans Êlien , et
dans les autres Auteurs qui ont parlé d'A
lexandre , je ne trouve rien qui favorise
Popinion et la citation de M. Vaillant.
Strabon a écrit
Voyons d'abord ce que
sur cette Ville : je trouve dans le second
Livre de ce celebre Auteur , la Ville dont
nous parlons , placée , comme on l'a déja
vû , dans la Phrygie , et située sur la Côte
de l'Hellespont. Dans ce même Livre , il
est aussi parlé d'une Ville d'Alexandrie
du Pays de Troade .
Strabon , en revenant dans son XIII.Li
vre à la Côte de l'Hellespont et de la
Propontide , dit expressément que Troade
est la premiere des Villes de cette Côte , il
ajoûte que sa réputation est celebre , et
que toute désolée et toute deserte qu'on la
voyoit alors , elle fourniroit la matiere
1
1
1
1
1
I
1
1
4
1
I
1
1
I
d'un ample discours.
1
1272 MERCURE DE FRANCE
En continuant la Description de l'Hel
lespont , après avoir nommé Ilium et Te
nedos , il nomme tout de suite Alexandrie
Troade , Villes , ajoûte-t'il , au- dessus des
quelles s'éleve le Mont Ida ...
Dans la suite il parle de la Ville qui
subsistoit de son tems sous le nom d'I
lium > et rapporte ce qu'on en disoit ,
sçavoir , qu'Alexandre le Grand l'ayant
visitée , après le combat du Granique ,
lui fit de grandes liberalitez , qu'il lui
donna son nom , et ordonna à ses Lieu
tenans de la réparer , ajoûtant qu'il l'a
mit au nombre des Villes libres, et qui ne
payoient aucun tribut. Enfin que ce Con
querant,après avoir vaincu les Perses, écri
vit à ces mêmes Lieutenans une Lettre
très-obligeante en faveur d'Ilium , pro
mettant d'en faire une grande Ville , d'y
bâtir un Temple superbe , et d'y établir
des Combats et es Jeux sacrez .
Après la mort d'Alexandre , c'est toû
jours Strabon qui parle , Lysimachus prit
un soin particulier de cette Ville , il y
bâtit un Temple , lui fit faire une grande
enceinte de murailles , et ordonna que
les Habitans des Villes voisines ruinées
s'y retireroient. Dans ce même tems
Lysimachus prit aussi soin de rétablir
Alexandrie , Ville qu'Antigonus avoit
1. Vol. bâtie
JUIN.
1731. 1273
bâtie au même Pays , laquelle fut d'abord
appellée Antigone , et qui changea ce
nom en celui d'Alexandrie ; cette Ville a
duré long- tems et a beaucoup prosperé.
C'est même encore aujourd'hui , dit Stra
bon , une Colonie Romaine , une Ville
enfin du nombre de celles qu'on appelle
Villes Nobles.
L'Auteur Grec revient à Ilium , pour
remarquer que quand les Romains y ar
riverent pour la premiere fois , et qu'ils
chasserent Antiochus le Grand , au-delà
du Mont Taurus , cette Ville n'étoit
gueres alors qu'un Village : il fait voir
aussi par plusieurs raisons que l'ancien
Ilium qui subsistoit du temps d'Homere ,
n'étoit point situé dans le même Lieu ,
qu'occupoit cet autre Ilium , dont il
parle .
Strabon observe de plus que le Lieu oc
cupé par cette Alexandrie,dont il est parlé
cy- dessus , étoit auparavant appellé Sigée.
Enfin il fait un peu plus bas mention
dans le même Pays d'une autre Ville nom
mée Alexandrie , bâtie au pied d'une
Montagne , et appellée aussi Antandrus.
C'est-là , ajoûte- t'il, qu'on assure qu'arriva
la celebre contestation des trois Déesses
au sujet de leur beauté , dont Pâris fut
1'Arbitre.
.
1. Vol
Il
1.274 MERCURE
DE FRANCE
Il étoit à propos , Monsieur , de vous
rapporter sommairement ce que dit Stra
bon , non-seulement au sujet de Troade;
mais encore de quelques Villes voisines ,
pour bien éclaircir la matiere dont il est ici
question . Vous voyez déja , Monsieur, que
Strabon n'a jamais dit , non plus que
Quinte- Curce , que notre Troade ait été
bâtie par Alexandre , des ruines de l'an
cienne Troye , ainsi que M. Vaillant l'a
écrit , et après lui ou avec lui , Baudrand ,
dans sa Géographie , lequel se sert à peu
près des mêmes termes , ab Alexandre
Magno excitata ut narrat Q. Curtius .
Il nous reste à voir , s'il est possible ;
ce qui peut avoir donné lieu à une er
reur de fait si considerable , à établir en
suite ce qu'il y a de certain et de plus
curieux à sçavoir sur la Ville de Troade,
principalement depuis son union à l'Em
pire Romain , et depuis que cette Ville fut
devenue une fameuse Colonie Romai ne
sans oublier ce que j'ai à vous dire sur la
Médaille des Dardaniens , que vous voyez
ici gravée avec celle de Troade .
Mais commeje prévois , Monsieur , que
cette matiere peut exceder les bornes d'une
Lettre , sans compter le peché * dont parle
In publica commoda peccem ,
· ·
Si longo sermone morer tua tempora ,
1. Vol. Horace
JUIN. 1731. . 1275
Horace , que je veux éviter , en n'arrêtant
pas trop long temps un Homme aussi dé
voué que vous à l'utilité publique ; je crois
devoir m'arrêter ici , en vous promettant
le plutôt qu'il me sera possible la suite de
ma Dissertation . Je suis , Monsieur , &c.
A Paris , le 1. Janvier 1731 .
Fermer
Résumé : LETTRE de M. D. L. R. écrite à M. Boyer, Docteur en Medecine de la Faculté de Montpellier, & Docteur-Regent en celle de Paris, au sujet d'une Medaille Latine de la Ville de Troade, & d'une Médaille Grecque des Dardaniens.
La lettre de M. D. L. R. à M. Boyer, docteur en médecine, discute de deux médailles antiques provenant des environs des Dardanelles et des ruines de Troie. L'auteur exprime sa gratitude pour les onze médailles reçues et se concentre sur l'examen de deux d'entre elles. La première médaille, en moyen bronze, présente sur une face une tête de femme couronnée avec l'inscription 'CO. ALEX TR' et une enseigne militaire. Sur l'autre face, elle montre la louve avec les jumeaux Romulus et Rémus, symbolisant la fondation de Rome, avec les inscriptions 'COL AVG.' et 'T RO A'. Cette médaille est identifiée comme appartenant à la ville de Troade, une colonie romaine en Phrygie fondée par Alexandre le Grand sur les ruines de l'ancienne Troie. Troade, située sur les bords de l'Hellespont, était une ville importante qui devint une colonie romaine sous Auguste. Plusieurs empereurs l'ont favorisée par des embellissements et des privilèges. La médaille en question est unique car elle répète le titre de 'Colonie' jusqu'à trois fois, ce qui est rare pour les médailles de ville. L'auteur mentionne également d'autres médailles de Troade, frappées en l'honneur de divers empereurs, et note que la sienne est singulière car elle n'est pas dédiée à un empereur mais à la ville elle-même. Le texte traite également de plusieurs villes historiques mentionnées par Strabon. Alexandrie, initialement nommée Antigone, a été fondée par Antigonus et est aujourd'hui une colonie romaine et une ville noble. Strabon mentionne également Ilium, qui n'était qu'un village lorsque les Romains y arrivèrent pour chasser Antiochus le Grand. Il précise que l'ancien Ilium d'Homère n'était pas situé au même endroit que celui de son époque. Strabon observe que l'emplacement d'Alexandrie était auparavant appelé Sigée. Il parle également d'une autre ville nommée Alexandrie, située au pied d'une montagne et appelée Antandrus, où aurait eu lieu la célèbre contestation des trois déesses au sujet de leur beauté, avec Pâris comme arbitre. L'auteur souligne que Strabon et Quintus Curtius n'ont jamais affirmé que la Troade avait été bâtie par Alexandre à partir des ruines de l'ancienne Troie, contrairement à ce que certains auteurs comme M. Vaillant et Baudrand ont écrit. Il promet de poursuivre sa dissertation sur la ville de Troade, son union à l'Empire romain, et sa transformation en une célèbre colonie romaine, ainsi que sur la médaille des Dardaniens.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 2277-2295
LETTRE écrite par M. D. L. R. à M ...... de l'Abbaye S. Victor de Marseille au sujet de deux Medailles antiques.
Début :
MONSIEUR, La Médaille Romaine de grand Bronze que vous m'avez envoyée depuis peu, et [...]
Mots clefs :
Abbaye, Médailles, Impératrice Lucille, Argent, Tête de Jupiter, Prêtresse, Phocéens d'Ionie, Traducteurs latins, Marseille, Bronze
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite par M. D. L. R. à M ...... de l'Abbaye S. Victor de Marseille au sujet de deux Medailles antiques.
LETTRE écrite par M. D. L. R. à
M ...... de l'Abbaye S. Victor de Marseille
au sujet de deux Medailles an
tiques .
>
MONSIE ONSIEUR ,
La Médaille Romaine de grand Bronze
que vous m'avez envoyée depuis peu , et
qui a été deterrée dans nôtre Vignoble
de S. Just , a bien son mérite . Si vous ne
l'avez pas reconnue d'abord pour ce qu'elle
est , je ne m'en étonne pas ; il auroit fallu
là nettoyer et en rétablir » pour
ain si dire
, la verité
,
la verité
, obscurcie
par les injures
du temps
, et par la qualité
du lieu
où ce monument
est resté
depuis
tant de
siécles
. Quoi
qu'il
en soit , j'ai aisément connu
, après
quelque
soin
, que c'est
une
Medaille
de l'Imperatrice
Lucille
fille du sage Marc
- Aurelle
, et de Faustine la jeune
, qui porta
en dot à son Epoux
l'Empire
Romain
, avec
une mediocre vertu
. Lucille
épousa
Luce
Vere
, associé
à l'Empire
avec son Beau-Pere.
Mais avant que de m'étendre davan-"
tage sur cette Médaille , je dois vous dire
A v que
2278 MERCURE DE FRANCE
>
que peu de jours avant que je l'eusse
reçûë , M. Vergile de la Bastide , Gentilhomme
de Languedoc , Languedoc , le même qui a
fait depuis peu la découverte d'un beau
reste de chemins des Romains entre
Beaucaire et Nismes , dont vous entendrez
parler bien- tôt dans un Memoire
que je me dispose à publier , m'ayant apporté
plusieurs Médailles qui ont été
trouvées depuis peu en ce Pays- là , je fûs
charmé de rencontrer dans ce nombre
une fort belle Médaille Grecque d'Argent
, qui regarde la Ville de Marseille
differente de toutes celles de cette ancienne
Ville , qui sont venues à ma connoissance
l'estime que j'en fais ainsi
que de la Médaille Romaine,qu'il vous a
plû de m'envoyer presqu'en même temps,
m'a engagé de faire graver l'une et l'autre
,
>
>
pour les exposer à vos yeux sur une
même Planche , et d'en faire le sujet de
cette Lettre. Par droit d'ancienneté , jet
commencerai par la Médaille Grecque ,
qui doit d'ailleurs nous interesser plus
particulierement.
Elle est , comme je l'ai déja dit , d'Argent
, et presque de la grandeur de la
gravure. On y voit d'un côté une très-
* Ce Memoire a depuis été imprimé dans le
Mercure d'Août 1731. p. 1894.
belle
OCTOBRE. 1731 . 2279
belle Tête d'Homme ,
une espece de Sautoir
et sur le revers
› avec ces deux
lettres M A commencement
du nom de
Marseille , ou de son Fondateur , qui se
trouve quelquefois tout entier , quelquefois
en diminutif , comme MAZZA , et
MA dans les Médailles qui nous restent
de cette Ville .
J'ay dit dans une Lettre imprimée
dans le Mercure de Septembre 1722 .
tout ce qu'on peut observer au sujet des
Médailles de Marseille , en fixant au
nombre de 22. celles qui étoient venuës
à ma connoissance , ou que je passedois
alors. J'ay même fait graver l'une des
plus belles de ces dernieres , et cette gravure
se trouve dans le Mercure d'Avril
1723. page 689. Ainsi point de répetition
sur les Médailles de Marseille en
general , contentons nous d'expliquer ,
s'il est possible , celle dont il s'agit ici
et qui est pour moy toute nouvelle.
La Tête d'Homme , parfaitement belle
et bien conservée , qui paroît d'un côté ,
doit faire le principal objet de notre attention
. Ce n'est ni la Tête de Jupiter ,
ni celle d'Apollon , Divinitez adorées
dans Marseille Payenne ; nul symbole
nul attribut qui les désigne comme
elles sont désignées dans d'autres Mé
A vj dailles
,
2280 MERCURE DE FRANCE
>
et
dailles de la même Ville. Ce n'est pas
celle d'Aristarcha Prêtresse de Diane ,
qui vint d'Ephese sur les côtes de la
Gaule Narbonnoise avec les Chefs des
Phocéens , Fondateurs de Marseille
qui cût beaucoup de part à cette Fondation
. On voit , si on en croit Goltzius
la Tête de cette Prêtresse , qui exerça
à Marseille les mêmes fonctions qu'à
Ephese , sur l'une des Medailles Marseilloises
rapportées dans son Recueil , c'est
la IX ; cette Tête a un certain air mâle
qui n'est pas ordinaire aux Têtes de Femmes
, et qui seule peut faire douter de la
verité de l'application de Goltzius. La
Tête au contraire , qui paroît sur nôtre
Medaille n'a rien d'ambigu ; les moins
éclairez la prendront dabord pour celle
d'un homme ; elle est d'ailleurs toute
differente de celles que Goltzius a gravées
lui - même d'après les Originaux
qu'il dit avoir vûs au nombre de dix .
و
Pour moi , après avoir examiné la chose
avec quelque attention , je crois ne
rien risquer
en pensant que c'est ici la
Tête d'un des Fondateurs de Marseille ,
Justin en nomme deux , Furius et Peranus
, qui n'ont pas les mêmes noms
dans Athenée ; plusieurs bons Auteurs
tiennent d'ailleurs que les Phocéens d'Ionie
OCTOBRE. 1731. 2281
nie ont fait deux voyages sur les côtes
du Pays des Saliens , où ils bâtirent enfin
la Ville dont nous parlons.
Selon Plutarque , dans la vie de Solon
le Chef de la premiere expedition , ou
pour me servir de ses termes ,
bien entendus
, le premier Fondateur de Marseille
avoit nom Maasaλías qui donna sans doute
son nom à la nouvelle Ville , et en
ce cas , toutes les autres étymologies qu'on
a données jusqu'ici du nom de Marseille ,
tombent d'elles- mêmes , elles paroissent
aussi pour la plus part bien forcées.
le
Je repete , Monsieur , que Plutarque
bien entendu , fait Mawanias le premier
Fondateur de Marseille ; car je n'ignore
pas que quelques Traducteurs Latins
suivis par Amiot , et par M. Dacier, font
de ce même nom celui de la Ville fondée .
M. de Ruffi le Pere s'est déclaré pour
sentiment contraire , qu'il appuye d'une
judicieuse Critique sur le Passage de
Plutarque , rapporté en entier dans la
premiere édition ( 1642. ) de son Histoire
de Marseille . Xilander , bon critique et
bon Traducteur , avoit pensé la même
chose en traduisant l'endroit en question
ὡς καὶ Μασσαλίας πρῶτος parut Massi
lias Massilia Autor ; à quoi je puis
ajoûter l'autorité d'Isidore de Seville >
qui
2282 MERCURE DE FRANCE
qui reconnoît que Marseille a pris son
nom de celui du General des Phocéens.
Г
C'est donc à ce premier Fondateur que
j'attribuerois volontiers nôtre Medaille
et toutes les raisons de convenance me
paroissent favoriser cette opinion . Quant
à Furius et à Peranus , qui après le témoignage
de Justin &c . peuvent aussi passer
pour Fondateurs de Marseille on ne
sçauroit guere , au sentiment des meilleurs
Critiques , les admettre en cette
qualité , que posterieurement et plus
d'un demi- siécle après la premiere fondation
, faite , selon le témoignage d'un
Auteur respectable , tel que Plutarque
par Μαγαλίας. Ces seconds Chefs ne peuvent
en ce cas être considerez que comme
les Ampliateurs du premier établissement
des Phocéens , qu'ils ont , sans doute, perfectionné
et fini.
Il est donc à croire que dans le temps
de Marseille Grecque et florissante , les
descendans des Phocéens qui l'avoient
bâtie , en frapant des Medailles avec les
Têtes de Jupiter , d'Apollon , de Diane,
&c. pour marquer leur pieté et leur culte
particulier en vers ces Divinitez , n'oublicrent
pas d'en fraper aussi pour immortaliser
la mémoire du Fondateur , qui avoit
donné son nom et la premiete forme à
une
OCTOBRE.
1731. 2283
une Ville , devenue depuis également
puissante et celebre.
,
Les lettres M A qui paroissent sur le
revers de la Medaille en question , peuvent
fort bien être le commencement du
nom de ce premier Fondateur et faire
ici un surcroît de preuves : elles peuvent
Erre aussi le diminutif de ΜΑΣΣΑΛΙΗΤΩΝ
qu'on
qu'on trouve ordinairement sur les Medailles
Marseilloises , ce qui est presque
la même chose . A l'égard de l'espece de
sautoir qui est sur nôtre revers , c'est un
mistere d'antiquité que personne n'est ,
selon moi , en état d'éclaircir aujourd'hui
; Caprice ou Marque du Monetaire,
et tout ce qu'il plaira d'imaginer là - dessus
paroîtra toujours hazardé aux per- ›
sonnes sensées.
C'est un autre mistere non moins impénetrable
, et qui semble exiger plus d'attention
, que parmi les grandes découvertes
qu'on a faites , et celles qu'on fait
tous les jours , en fait de Monumens Antiques
, et sur- tout de Medailles , on n'en
ait point encore trouvé de frappées en
cette Ville au nom de quelque Empereur
, depuis qu'elle tomba sous la puissance
des Romains comme on en voit
de presque toutes les Villes Grecques d'origine
qui comme Marseille fûrent
sou2284
MERCURE DE FRANCE
soumises à l'Empire Romain. M. de
Ruffy, copié là - dessus par le P. Guesnay ,
dans ses Annales Latines de Marseille
a prétendu le contraire ; mais il ne rapporte
ni Monuments
sorte de preuve.
,
>
>
ni aucune autre
Je laisse à ceux de nos sçavans Compatriotes
, qui , comme je l'apprens , ont
entrepris de travailler à une nouvelle
Histoire de Marseille , le soin d'éclaircir
ce point d'Antiquité , et de rapporter le
plus qu'il leur sera possible , de Medailles
de cette Ville en n'oubliant pas de les
faire mieux graver que ne le sont celles
que Mrs. de Ruffy ont empruntées de
Goltzius ou d'ailleurs , et en donnant de
ces Medailles des explications plus exactes
et plus étendues et ce n'est pas la seule
chose en quoi ces Messieurs seront obligez
de reformer , d'éclaircir , d'ajoûter
dans la nouvelle Histoire .
Pour ne point sortir de mon sujet , et
pour ny rien ômettre , il est bon que je
donne ici un avis , qui épargnera une
erreur de fait à ceux qui traiteront dans
la suite le même sujet , en prenant pour
une découverte une veritable méprise ou
l'effet de la préoccupation d'un Sçavant de
réputation , sçavoir , M. Baudelot de
Dairval , qui dans un petit livre de 96.
pages
OCTOBRE. 1731 2285
=
pages , imprimé à Paris en 1698. chez
Aubouin et Clousier , intitulé , Reponse
à M. G......... où l'on examine plusieurs
questions d'Antiquité & c.. nous donne à la
tête de son Ecrit plusieurs Medailles gravées
, dont la derniere de son cabinet a
été , selon lui , frappée à Marseille
l'Empereur Posthume.
pour
Cette Medaille est de grand Bronze ;
voit d'un côté une Tête d'Empe-
, reur couronnée de Laurier avec une
Inscription au tour , luë parM. Baudelot.
»
ΑΥΤΚΛΑΤΙ . Π . ETYMOCCEBACTEYCEB
Au revers est une Sirenne ou Figure de
Femme , dont le bas se termine en Poisson
pour Legende MACCAAIHTON
selon le même Antiquaire , avec cette
époque L QIZ. Anno 817. qu'il assure
aussi s'y trouver,quoique dit- il , elle n'ait
pas été découverte d'abord. Je dis que
c'est M. Baudelot qui asseure tout cela :
mais je puis assurer à mon tour , que tout
cela est très -gratuitement avancé et uniquement
fondé sur une imagination , séduite
par l'attrait de posseder une Medaille
unique et encore inconnue à tous
les Antiquaires , une Medaille , dis-je ,
frappée à Marseille au visage d'un Empereur
Romain. Mes Garands là - dessus sont
des Antiquaires du premier ordre qui
ont
2286 MERCURE DE FRANCE
ont vu avant moy cette Medaille , à la
tête desquels je dois mettre M. Galland ,
à qui M. Baudelot adresse sa lettre . Ces
connoisseurs ont tous jugé qu'il étoit d'abord
très incertain que la Medaille fût
de Posthume ; M. Galland la croyoit
d'Antonin Pie , et qu'au surplus de quel
que Empereur qu'elle soit , à moins d'une
prévention extraordinaire , on n'y voyoit
pas plus de caracteres Grecs que de caracteres
Romains , tant la Medaille étoit
fruste et méconnoissable aux yeux les
plus clair-voyans .
,
,
Ainsi encore une fois , tout ce que M.
B. a étalé d'érudition , ou employé de sagacité
pour soutenir son idée tout ce
que le sçavant P. Pezron , Abbé de la
Charmoye , qui n'avoit pas vû la Piece
a ajouté du sien dans une Lettre écrite
à notre Académicien où ce Pere s'efforce
de faire quadrer l'Epoque prétendue
L. Qiz , ou l'Année 817. d'une seconde
Fondation de Marseille , avec l'an
265 de J. C. temps auquel Posthume regnoit
dans les Gaules &c. tout cela , disje
, en y joignant encore si l'on veut ,
l'habileté du Graveur Ettinger , dont le
talent à faire revivre les Medailles , est ici
›
* Cette Lettre est Imprimée dans le méme
livre , p.77.
expeOCTOBRE.
1731. 2287
>
expressement vanté par M. de Dairval
n'operera jamais rien de certain en faveur
de celle dont il est ici question , à l'égard
de Marseille ; et il sera toujours vrai de
dire que jusqu'à present , malgré tant d'heureuses découvertes
faites depuis
près d'un siècle que la recherche et l'étude
des Medailles sont en si grande vogue
il ne s'est point encore trouvé de
Medaille frappée à Marseille pour un Empereur
Romain : il ne sera pas moins vrai
que nous ne devons rien admettre d'incertain
et de douteux pour illustrer nôtre
Histoire . Marseille se passera bien d'un
tel ornement. Il faut donc convenir que
M. B. s'est trompé , il n'avoit pas alors
toutes les lumieres qu'il a acquises depuis.
C'étoit long - temps avant son entrée à
l'Académie dont il a été un sujet des ,
plus distinguez .
Je laisse , comme je l'ay déja dit , à mes
illustres Compatriotes , Membres de la
nouvelle Académie , chargez de travailler
à l'Histoire de notre Ville , le soin
d'approfondir la singularité dont je viens
de parler , et d'en découvrir , s'il est possible
, la veritable cause ; ce soin est digne
de leurs recherches. Je les avertis
encore , en finissant , de ne point se laisser
éblouir sur ce sujet par l'autorité du
,
R
2288 MERCURE DE FRANCE
R. P. Hardouin , reclamée reclamée ici et alle-
2.
guée, en vain par M. B. pag. 75. de son
livre. Ce Pere , quelque habileté qu'il
cût d'ailleurs , a trop donné dans des
idées extraordinaires et manifestement
chimeriques sur le fait de plusieurs Medailles
, pour être crû dans celui dont il
s'agit ici.
>
?
Qui pourra , par exemple , se persuader
sur sa garantie que ces quatre lettres
DMKV qu'on trouve sur le revers
d'une Medaille par lui rapportée de Maximien
Hercule , marquent que cette
Medaille fû frappée à Marseille Il est
vrai que ce Prince , poursuivi par Constantin
, s'y réfugia ; le Héros Chrétien
dont votre Abbaye porte le nom , lui
doit la gloire de son martyre. Mais cette
retraite ne prouve rien ; au contraire ,
comme elle fût faite dans le temps de
l'entiere décadence des affaires de Maximien
, il y a tout lieu de présumer , contre
la pensée de M. B. qu'il ne s'occupa
point à y faire battre de la Monnoye , et
que les Marseillois ne songerent pas non
plus à frapper des Medailles en l'honneur
d'un Prince infortuné , qui pensa enveloper
Marseille dans son malheur , et qui
gueres , après la prise de la Ville
par Constantin , a finir tragiquement ses
ne tarda
jours.
OCTOBRE 1731. 2289
jours. Mais en voilà assès sur le sujet de
notre Medaille Grecque.
Venons à la Medaille Romaine que .
vous venez de m'envoyer , elle ne nous
occupera pas si long - temps ; je vous ay
déja dit qu'elle est de l'Imperatrice Lucille
, Fille de Marc- Antonin , et de Faustine
la jeune , laquelle , après une disgrace
éclatante , et un évenement extraordinaire
dont le recit est ici inutile ,
épousa l'Empereur Luce - Vere. On voit
d'un côté sa Tête avec cette Legende
LUCILLE AU G. ANTONINI AUG. F.
et sur le revers une figure de Femme assise
tenant d'une main une Fleur et
sur l'autre bras un petit enfant emmailloté
avec cette Inscription , JUNONI LUCINE.
A l'Exergue S. C.
,
و
C'est ce revers qui fait , selon moi , la
singularité de votre Médaille , car en general
, les Médailles de cette Imperatrice
ne sont pas rares. M. Vaillant n'en marque
que trois d'une grande rareté parmi
celles de grand Bronze , j'ai tout lieu de
croire qu'on peut joindre la nôtre à ce
petit nombre , et que ce fameux Antiquaire
avoit vû un revers tout semblable;
c'est celle dont il parle * p . 94. art . 2 .
* Numismata Imperat. Romanorum &c. vol.
4. Paris 1692.
Mais
2290 MERCURE DE FRANCE
Mais il falloit que la Médaille qu'il a vûë
fût bien fruste et bien usée par le temps ,
ce qui ne permettoit pas , sans doute ,
d'en bien fire l'inscription ; car au lieu
de JUNONI LUCILLE , M. Vaillant a imprimé
JUNONI REGINE. Il n'a pas non
plus distingué ce que la figure de Femme
portoit sur son bras. Au surplus c'est à
peu près la même chose : la Femme est
assise et tient une Fleur d'une main comme
sur notre revers.
و
En supposant même que je me trompe
dans ma conjectare , et qu'il n'y ait
point cû de méprise ou d'omission du
côté de M. Vaillant notre Medaille ,
par rapport à son revers , aura toûjours
sa rareté et son mérite. Lucille y est representée
simboliquement sous la figure
et le nom de JUNON LUCINE : excès de
flatterie de la part des Romains , qui doubloient
, pour ainsi dire , la Divinité dans
une même Personne , de quoy il y a plus
d'un exemple , et cela pour égaler leur
Imperatrice à la premiere des Déesses
et pour la considerer en même temps
comme une autre Lucine , Déesse de la
Fecondité &c. ce qui joint au Simbole de
l'Enfant emmailloté présageoit , sans
doute , que Lucille donneroit bien - tôt
un successeur à l'Empire. Il se peut faire
و
>
aussi
OCTOBRE. 1731. 2291
aussi , et je le croirois plus volontiers ,
que cette Imperatrice fût déja Mere lorsque
notre Medaille a été frappée , et en ce
cas c'étoit pour marquer cet heureux évevement
, et pour celebrer la fécondité de
Lucille ; la Fleur qu'elle tient à la main
désigneroit l'attente du Peuple Romain .
qui avoit lieu d'esperer encore d'autres
fruits de cette fécondité.
و
Ce que je viens de vous dire de la Fé- ´
condité , arrivée ou attenduë de Lucille ,
se confirme non - seulement par un Medaillon
de çerte Imperatrice , décrit ainsi
par Vaillant , p. 210. du même livre
d'un côté sa Tête avec la même Legende
que sur la notre et au revers Lucille
assise , tenant dans ses bras un petit Enfant
, mais encore par une Medaille d'Argent
, de Lucille , rapportée dans le 2 .
vol. du même Auteur , pag. 187. au revers
de laquelle est encore une figure de
Femme assise tenant entre ses bras un
petit Enfant , un autre Enfant est debout
devant elle et pour Legende FOECUNDITAS
AUGUSTE: C'est ainsi que les
Auteurs du revers de la Medaille , presentée
au Roy , le premier jour de cette année
1731. en ont usé très - à - propos pour
désigner la continuation de l'heureuse
fecondité de la Reine par la naissance du
>
Duc
2292 MERCURE DE FRANCE
Duc d'Anjou. La France assise et caracterisée
par ses Symboles , tient sur un
bras le Prince nouveau né enveloppé de
Langes , et le Dauphin de l'autre main
debout entre ses genoux , ce qui marque
le bon goût et la capacité de ces Auteurs.
Cette Medaille est gravée dans le Mercure
de Mars p. 5 74.
Je voudrois bien , au reste , pour la
rareté du fait , que parmi les Medailles
que vous m'annoncez , et que vous avez
reçûes depuis peu pour moy de Syrie , il
se trouvât la Medaille Grecque de Lucille
dont je vais parler : cela n'est pas impossible.
M. Baudelot a marqué dans son
Catalogue des Medailles Imperiales , que
les Medailles Grecques de cette Imperatrice
sont communes : ce qui n'est pas
tout-à-fait exact , puisqu'il y en a quelques-
unes de singulieres et de fort rares
en ce genre là : telle est , par exemple ,
celle qui est gravée dans le Selecta Numismata
antiqua de P. Seguin , Doyen
* Ce Catalogue est dans le a. T. de l'Utilitê
des Voyages , p. 345. derniere Edit. 1727 ,
faite après la mort de M. Baudelot , qui auroit
rendu un si bon Livre parfait en corrigeant
quelques méprises en petit nombre , et
en suppleant à plusieurs ômissions . On n'y verroit
pas non plus les fautes qui viennent des
Editeurs denuez de la capacité de M. B.
de
OCTOBRE. 1731 2293
de S. Germain de l'Auxerrois , p. 158.
Cette Medaille est d'Argent , on y
voit d'un côté la Têre de Lucille coëffée
plus galamment qu'ailleurs " avec cette
Legende AOTKIÄÄA CEBACTH . et sur
le revers la même Princesse assise et representée
sous la figure de Cerés , tenant
d'une main desEpis , et de l'autre un flambeau
, avec cette Inscription B CIAEYC
MANNOC ΦΙΛΟΡΩΜΑΙΟΣ qui indique et
qui confirme un point d'Histoire considerable.
C'est Mannus , Roy des Arabes,
qui a fait frapper cette Medaille. Il étoit
Fils ou Neveu et Successeur du Roy de
même nom , dont il est parlé dans Dion,
L. 68. qui regnoit sur les Arabes , Habitans
du Pays situé au -delà de l'Euphra
re , entre la grande Armenie et l'Osrhoëne
, lequel devint suspect à Trajan , dans
son expédition contre les Parthes , par
une manoeuvre marquée dans cette His-
Foire.
C'est le successeur de ce Prince , qui
plus avisé et plus politique que lui , nonseulement
se ménagea beaucoup avec les
Romains , mais qui affecta de les aimer
jusqu'à prendre le titre de ΦΙΛΟΡΩΜΑΙΟΣ
qui est expressement marqué dans cette
Medaille Grecque de Lucille. Elle fût
frappée par les ordres de ce Roy , vray➡
B sem2294
MERCURE DE FRANCE
,
semblablement dans le temps que Luce
Vere son epoux et elle séjournoient
à Antioche , Ville peu éloignée des
Etats du Monarque Arabe , et que l'Ar
mée Romaine , sous le commandement
de A. Cassius , agi soit contre les Parthes.
Que ce Prince eût le même nom de
Mannus , que celui qui regnoit sous
Trajan , l'usage constant de tous les Rois
voisins de la Syrie , qui portoient tous
un même nom , le prouve ,
le prouve , la Medaille
dont je viers de parler le confirme.
M. Seguin , en parlant de cette Medaille
a marqué par ces paroles le cas
qu'il en faisoit , Rarior mihi videtur bie
Nummus , tum quia Gracus tum quia Regis
Barbari nomen minus notum profitetur.
Ajoûtant que Savot , qui a écrit sur la rareté
des Medailles antiques , a mis au
nombre des plus rares les Medailles Imperiales
Grecques d'Argent. Ce que Seguin
dit avoir souvent éprouvé , sur-tout à
Pégard des Medailles d'Imperatrices.
M. Vaillant , qui n'a dit que quelques
mots sur la Medaille en question , ajoute,
après avoir renvoyé au livre de M. Se
guin , Hic Nummus eximia raritatis et elegantia
habetur. Et ce n'est point trop dire
Il croit, au reste , que c'est l'Empereur
L. Vere lui -même , qui , à la priere de
Mannus
OCTOBRE. 1731. 2295
Mannus , lui accorda ce titre d'Ami des
Romains , et que ce fût pour en marquer
sa reconnoissance , et pour faire sa Cour
à l'Empereur , que ce Prince Arabe fit
frapper une Medaille où ce titre est ex--
pressement marqué. 1105 0
Quoiqu'il en soit, ne vous lassez point,
Monsieur , de m'envoyer de pareils Monumens,
on en trouve tous les jours de singuliers
, et qui ont échapé à la recherche
de ceux qui nous ont précedé dans cette
trude , je vous rendrai bon compte de
tout ce qui me viendra de curieux de
vôtre part. Je suis ,
AParis , le 15. Mars 1731.
M ...... de l'Abbaye S. Victor de Marseille
au sujet de deux Medailles an
tiques .
>
MONSIE ONSIEUR ,
La Médaille Romaine de grand Bronze
que vous m'avez envoyée depuis peu , et
qui a été deterrée dans nôtre Vignoble
de S. Just , a bien son mérite . Si vous ne
l'avez pas reconnue d'abord pour ce qu'elle
est , je ne m'en étonne pas ; il auroit fallu
là nettoyer et en rétablir » pour
ain si dire
, la verité
,
la verité
, obscurcie
par les injures
du temps
, et par la qualité
du lieu
où ce monument
est resté
depuis
tant de
siécles
. Quoi
qu'il
en soit , j'ai aisément connu
, après
quelque
soin
, que c'est
une
Medaille
de l'Imperatrice
Lucille
fille du sage Marc
- Aurelle
, et de Faustine la jeune
, qui porta
en dot à son Epoux
l'Empire
Romain
, avec
une mediocre vertu
. Lucille
épousa
Luce
Vere
, associé
à l'Empire
avec son Beau-Pere.
Mais avant que de m'étendre davan-"
tage sur cette Médaille , je dois vous dire
A v que
2278 MERCURE DE FRANCE
>
que peu de jours avant que je l'eusse
reçûë , M. Vergile de la Bastide , Gentilhomme
de Languedoc , Languedoc , le même qui a
fait depuis peu la découverte d'un beau
reste de chemins des Romains entre
Beaucaire et Nismes , dont vous entendrez
parler bien- tôt dans un Memoire
que je me dispose à publier , m'ayant apporté
plusieurs Médailles qui ont été
trouvées depuis peu en ce Pays- là , je fûs
charmé de rencontrer dans ce nombre
une fort belle Médaille Grecque d'Argent
, qui regarde la Ville de Marseille
differente de toutes celles de cette ancienne
Ville , qui sont venues à ma connoissance
l'estime que j'en fais ainsi
que de la Médaille Romaine,qu'il vous a
plû de m'envoyer presqu'en même temps,
m'a engagé de faire graver l'une et l'autre
,
>
>
pour les exposer à vos yeux sur une
même Planche , et d'en faire le sujet de
cette Lettre. Par droit d'ancienneté , jet
commencerai par la Médaille Grecque ,
qui doit d'ailleurs nous interesser plus
particulierement.
Elle est , comme je l'ai déja dit , d'Argent
, et presque de la grandeur de la
gravure. On y voit d'un côté une très-
* Ce Memoire a depuis été imprimé dans le
Mercure d'Août 1731. p. 1894.
belle
OCTOBRE. 1731 . 2279
belle Tête d'Homme ,
une espece de Sautoir
et sur le revers
› avec ces deux
lettres M A commencement
du nom de
Marseille , ou de son Fondateur , qui se
trouve quelquefois tout entier , quelquefois
en diminutif , comme MAZZA , et
MA dans les Médailles qui nous restent
de cette Ville .
J'ay dit dans une Lettre imprimée
dans le Mercure de Septembre 1722 .
tout ce qu'on peut observer au sujet des
Médailles de Marseille , en fixant au
nombre de 22. celles qui étoient venuës
à ma connoissance , ou que je passedois
alors. J'ay même fait graver l'une des
plus belles de ces dernieres , et cette gravure
se trouve dans le Mercure d'Avril
1723. page 689. Ainsi point de répetition
sur les Médailles de Marseille en
general , contentons nous d'expliquer ,
s'il est possible , celle dont il s'agit ici
et qui est pour moy toute nouvelle.
La Tête d'Homme , parfaitement belle
et bien conservée , qui paroît d'un côté ,
doit faire le principal objet de notre attention
. Ce n'est ni la Tête de Jupiter ,
ni celle d'Apollon , Divinitez adorées
dans Marseille Payenne ; nul symbole
nul attribut qui les désigne comme
elles sont désignées dans d'autres Mé
A vj dailles
,
2280 MERCURE DE FRANCE
>
et
dailles de la même Ville. Ce n'est pas
celle d'Aristarcha Prêtresse de Diane ,
qui vint d'Ephese sur les côtes de la
Gaule Narbonnoise avec les Chefs des
Phocéens , Fondateurs de Marseille
qui cût beaucoup de part à cette Fondation
. On voit , si on en croit Goltzius
la Tête de cette Prêtresse , qui exerça
à Marseille les mêmes fonctions qu'à
Ephese , sur l'une des Medailles Marseilloises
rapportées dans son Recueil , c'est
la IX ; cette Tête a un certain air mâle
qui n'est pas ordinaire aux Têtes de Femmes
, et qui seule peut faire douter de la
verité de l'application de Goltzius. La
Tête au contraire , qui paroît sur nôtre
Medaille n'a rien d'ambigu ; les moins
éclairez la prendront dabord pour celle
d'un homme ; elle est d'ailleurs toute
differente de celles que Goltzius a gravées
lui - même d'après les Originaux
qu'il dit avoir vûs au nombre de dix .
و
Pour moi , après avoir examiné la chose
avec quelque attention , je crois ne
rien risquer
en pensant que c'est ici la
Tête d'un des Fondateurs de Marseille ,
Justin en nomme deux , Furius et Peranus
, qui n'ont pas les mêmes noms
dans Athenée ; plusieurs bons Auteurs
tiennent d'ailleurs que les Phocéens d'Ionie
OCTOBRE. 1731. 2281
nie ont fait deux voyages sur les côtes
du Pays des Saliens , où ils bâtirent enfin
la Ville dont nous parlons.
Selon Plutarque , dans la vie de Solon
le Chef de la premiere expedition , ou
pour me servir de ses termes ,
bien entendus
, le premier Fondateur de Marseille
avoit nom Maasaλías qui donna sans doute
son nom à la nouvelle Ville , et en
ce cas , toutes les autres étymologies qu'on
a données jusqu'ici du nom de Marseille ,
tombent d'elles- mêmes , elles paroissent
aussi pour la plus part bien forcées.
le
Je repete , Monsieur , que Plutarque
bien entendu , fait Mawanias le premier
Fondateur de Marseille ; car je n'ignore
pas que quelques Traducteurs Latins
suivis par Amiot , et par M. Dacier, font
de ce même nom celui de la Ville fondée .
M. de Ruffi le Pere s'est déclaré pour
sentiment contraire , qu'il appuye d'une
judicieuse Critique sur le Passage de
Plutarque , rapporté en entier dans la
premiere édition ( 1642. ) de son Histoire
de Marseille . Xilander , bon critique et
bon Traducteur , avoit pensé la même
chose en traduisant l'endroit en question
ὡς καὶ Μασσαλίας πρῶτος parut Massi
lias Massilia Autor ; à quoi je puis
ajoûter l'autorité d'Isidore de Seville >
qui
2282 MERCURE DE FRANCE
qui reconnoît que Marseille a pris son
nom de celui du General des Phocéens.
Г
C'est donc à ce premier Fondateur que
j'attribuerois volontiers nôtre Medaille
et toutes les raisons de convenance me
paroissent favoriser cette opinion . Quant
à Furius et à Peranus , qui après le témoignage
de Justin &c . peuvent aussi passer
pour Fondateurs de Marseille on ne
sçauroit guere , au sentiment des meilleurs
Critiques , les admettre en cette
qualité , que posterieurement et plus
d'un demi- siécle après la premiere fondation
, faite , selon le témoignage d'un
Auteur respectable , tel que Plutarque
par Μαγαλίας. Ces seconds Chefs ne peuvent
en ce cas être considerez que comme
les Ampliateurs du premier établissement
des Phocéens , qu'ils ont , sans doute, perfectionné
et fini.
Il est donc à croire que dans le temps
de Marseille Grecque et florissante , les
descendans des Phocéens qui l'avoient
bâtie , en frapant des Medailles avec les
Têtes de Jupiter , d'Apollon , de Diane,
&c. pour marquer leur pieté et leur culte
particulier en vers ces Divinitez , n'oublicrent
pas d'en fraper aussi pour immortaliser
la mémoire du Fondateur , qui avoit
donné son nom et la premiete forme à
une
OCTOBRE.
1731. 2283
une Ville , devenue depuis également
puissante et celebre.
,
Les lettres M A qui paroissent sur le
revers de la Medaille en question , peuvent
fort bien être le commencement du
nom de ce premier Fondateur et faire
ici un surcroît de preuves : elles peuvent
Erre aussi le diminutif de ΜΑΣΣΑΛΙΗΤΩΝ
qu'on
qu'on trouve ordinairement sur les Medailles
Marseilloises , ce qui est presque
la même chose . A l'égard de l'espece de
sautoir qui est sur nôtre revers , c'est un
mistere d'antiquité que personne n'est ,
selon moi , en état d'éclaircir aujourd'hui
; Caprice ou Marque du Monetaire,
et tout ce qu'il plaira d'imaginer là - dessus
paroîtra toujours hazardé aux per- ›
sonnes sensées.
C'est un autre mistere non moins impénetrable
, et qui semble exiger plus d'attention
, que parmi les grandes découvertes
qu'on a faites , et celles qu'on fait
tous les jours , en fait de Monumens Antiques
, et sur- tout de Medailles , on n'en
ait point encore trouvé de frappées en
cette Ville au nom de quelque Empereur
, depuis qu'elle tomba sous la puissance
des Romains comme on en voit
de presque toutes les Villes Grecques d'origine
qui comme Marseille fûrent
sou2284
MERCURE DE FRANCE
soumises à l'Empire Romain. M. de
Ruffy, copié là - dessus par le P. Guesnay ,
dans ses Annales Latines de Marseille
a prétendu le contraire ; mais il ne rapporte
ni Monuments
sorte de preuve.
,
>
>
ni aucune autre
Je laisse à ceux de nos sçavans Compatriotes
, qui , comme je l'apprens , ont
entrepris de travailler à une nouvelle
Histoire de Marseille , le soin d'éclaircir
ce point d'Antiquité , et de rapporter le
plus qu'il leur sera possible , de Medailles
de cette Ville en n'oubliant pas de les
faire mieux graver que ne le sont celles
que Mrs. de Ruffy ont empruntées de
Goltzius ou d'ailleurs , et en donnant de
ces Medailles des explications plus exactes
et plus étendues et ce n'est pas la seule
chose en quoi ces Messieurs seront obligez
de reformer , d'éclaircir , d'ajoûter
dans la nouvelle Histoire .
Pour ne point sortir de mon sujet , et
pour ny rien ômettre , il est bon que je
donne ici un avis , qui épargnera une
erreur de fait à ceux qui traiteront dans
la suite le même sujet , en prenant pour
une découverte une veritable méprise ou
l'effet de la préoccupation d'un Sçavant de
réputation , sçavoir , M. Baudelot de
Dairval , qui dans un petit livre de 96.
pages
OCTOBRE. 1731 2285
=
pages , imprimé à Paris en 1698. chez
Aubouin et Clousier , intitulé , Reponse
à M. G......... où l'on examine plusieurs
questions d'Antiquité & c.. nous donne à la
tête de son Ecrit plusieurs Medailles gravées
, dont la derniere de son cabinet a
été , selon lui , frappée à Marseille
l'Empereur Posthume.
pour
Cette Medaille est de grand Bronze ;
voit d'un côté une Tête d'Empe-
, reur couronnée de Laurier avec une
Inscription au tour , luë parM. Baudelot.
»
ΑΥΤΚΛΑΤΙ . Π . ETYMOCCEBACTEYCEB
Au revers est une Sirenne ou Figure de
Femme , dont le bas se termine en Poisson
pour Legende MACCAAIHTON
selon le même Antiquaire , avec cette
époque L QIZ. Anno 817. qu'il assure
aussi s'y trouver,quoique dit- il , elle n'ait
pas été découverte d'abord. Je dis que
c'est M. Baudelot qui asseure tout cela :
mais je puis assurer à mon tour , que tout
cela est très -gratuitement avancé et uniquement
fondé sur une imagination , séduite
par l'attrait de posseder une Medaille
unique et encore inconnue à tous
les Antiquaires , une Medaille , dis-je ,
frappée à Marseille au visage d'un Empereur
Romain. Mes Garands là - dessus sont
des Antiquaires du premier ordre qui
ont
2286 MERCURE DE FRANCE
ont vu avant moy cette Medaille , à la
tête desquels je dois mettre M. Galland ,
à qui M. Baudelot adresse sa lettre . Ces
connoisseurs ont tous jugé qu'il étoit d'abord
très incertain que la Medaille fût
de Posthume ; M. Galland la croyoit
d'Antonin Pie , et qu'au surplus de quel
que Empereur qu'elle soit , à moins d'une
prévention extraordinaire , on n'y voyoit
pas plus de caracteres Grecs que de caracteres
Romains , tant la Medaille étoit
fruste et méconnoissable aux yeux les
plus clair-voyans .
,
,
Ainsi encore une fois , tout ce que M.
B. a étalé d'érudition , ou employé de sagacité
pour soutenir son idée tout ce
que le sçavant P. Pezron , Abbé de la
Charmoye , qui n'avoit pas vû la Piece
a ajouté du sien dans une Lettre écrite
à notre Académicien où ce Pere s'efforce
de faire quadrer l'Epoque prétendue
L. Qiz , ou l'Année 817. d'une seconde
Fondation de Marseille , avec l'an
265 de J. C. temps auquel Posthume regnoit
dans les Gaules &c. tout cela , disje
, en y joignant encore si l'on veut ,
l'habileté du Graveur Ettinger , dont le
talent à faire revivre les Medailles , est ici
›
* Cette Lettre est Imprimée dans le méme
livre , p.77.
expeOCTOBRE.
1731. 2287
>
expressement vanté par M. de Dairval
n'operera jamais rien de certain en faveur
de celle dont il est ici question , à l'égard
de Marseille ; et il sera toujours vrai de
dire que jusqu'à present , malgré tant d'heureuses découvertes
faites depuis
près d'un siècle que la recherche et l'étude
des Medailles sont en si grande vogue
il ne s'est point encore trouvé de
Medaille frappée à Marseille pour un Empereur
Romain : il ne sera pas moins vrai
que nous ne devons rien admettre d'incertain
et de douteux pour illustrer nôtre
Histoire . Marseille se passera bien d'un
tel ornement. Il faut donc convenir que
M. B. s'est trompé , il n'avoit pas alors
toutes les lumieres qu'il a acquises depuis.
C'étoit long - temps avant son entrée à
l'Académie dont il a été un sujet des ,
plus distinguez .
Je laisse , comme je l'ay déja dit , à mes
illustres Compatriotes , Membres de la
nouvelle Académie , chargez de travailler
à l'Histoire de notre Ville , le soin
d'approfondir la singularité dont je viens
de parler , et d'en découvrir , s'il est possible
, la veritable cause ; ce soin est digne
de leurs recherches. Je les avertis
encore , en finissant , de ne point se laisser
éblouir sur ce sujet par l'autorité du
,
R
2288 MERCURE DE FRANCE
R. P. Hardouin , reclamée reclamée ici et alle-
2.
guée, en vain par M. B. pag. 75. de son
livre. Ce Pere , quelque habileté qu'il
cût d'ailleurs , a trop donné dans des
idées extraordinaires et manifestement
chimeriques sur le fait de plusieurs Medailles
, pour être crû dans celui dont il
s'agit ici.
>
?
Qui pourra , par exemple , se persuader
sur sa garantie que ces quatre lettres
DMKV qu'on trouve sur le revers
d'une Medaille par lui rapportée de Maximien
Hercule , marquent que cette
Medaille fû frappée à Marseille Il est
vrai que ce Prince , poursuivi par Constantin
, s'y réfugia ; le Héros Chrétien
dont votre Abbaye porte le nom , lui
doit la gloire de son martyre. Mais cette
retraite ne prouve rien ; au contraire ,
comme elle fût faite dans le temps de
l'entiere décadence des affaires de Maximien
, il y a tout lieu de présumer , contre
la pensée de M. B. qu'il ne s'occupa
point à y faire battre de la Monnoye , et
que les Marseillois ne songerent pas non
plus à frapper des Medailles en l'honneur
d'un Prince infortuné , qui pensa enveloper
Marseille dans son malheur , et qui
gueres , après la prise de la Ville
par Constantin , a finir tragiquement ses
ne tarda
jours.
OCTOBRE 1731. 2289
jours. Mais en voilà assès sur le sujet de
notre Medaille Grecque.
Venons à la Medaille Romaine que .
vous venez de m'envoyer , elle ne nous
occupera pas si long - temps ; je vous ay
déja dit qu'elle est de l'Imperatrice Lucille
, Fille de Marc- Antonin , et de Faustine
la jeune , laquelle , après une disgrace
éclatante , et un évenement extraordinaire
dont le recit est ici inutile ,
épousa l'Empereur Luce - Vere. On voit
d'un côté sa Tête avec cette Legende
LUCILLE AU G. ANTONINI AUG. F.
et sur le revers une figure de Femme assise
tenant d'une main une Fleur et
sur l'autre bras un petit enfant emmailloté
avec cette Inscription , JUNONI LUCINE.
A l'Exergue S. C.
,
و
C'est ce revers qui fait , selon moi , la
singularité de votre Médaille , car en general
, les Médailles de cette Imperatrice
ne sont pas rares. M. Vaillant n'en marque
que trois d'une grande rareté parmi
celles de grand Bronze , j'ai tout lieu de
croire qu'on peut joindre la nôtre à ce
petit nombre , et que ce fameux Antiquaire
avoit vû un revers tout semblable;
c'est celle dont il parle * p . 94. art . 2 .
* Numismata Imperat. Romanorum &c. vol.
4. Paris 1692.
Mais
2290 MERCURE DE FRANCE
Mais il falloit que la Médaille qu'il a vûë
fût bien fruste et bien usée par le temps ,
ce qui ne permettoit pas , sans doute ,
d'en bien fire l'inscription ; car au lieu
de JUNONI LUCILLE , M. Vaillant a imprimé
JUNONI REGINE. Il n'a pas non
plus distingué ce que la figure de Femme
portoit sur son bras. Au surplus c'est à
peu près la même chose : la Femme est
assise et tient une Fleur d'une main comme
sur notre revers.
و
En supposant même que je me trompe
dans ma conjectare , et qu'il n'y ait
point cû de méprise ou d'omission du
côté de M. Vaillant notre Medaille ,
par rapport à son revers , aura toûjours
sa rareté et son mérite. Lucille y est representée
simboliquement sous la figure
et le nom de JUNON LUCINE : excès de
flatterie de la part des Romains , qui doubloient
, pour ainsi dire , la Divinité dans
une même Personne , de quoy il y a plus
d'un exemple , et cela pour égaler leur
Imperatrice à la premiere des Déesses
et pour la considerer en même temps
comme une autre Lucine , Déesse de la
Fecondité &c. ce qui joint au Simbole de
l'Enfant emmailloté présageoit , sans
doute , que Lucille donneroit bien - tôt
un successeur à l'Empire. Il se peut faire
و
>
aussi
OCTOBRE. 1731. 2291
aussi , et je le croirois plus volontiers ,
que cette Imperatrice fût déja Mere lorsque
notre Medaille a été frappée , et en ce
cas c'étoit pour marquer cet heureux évevement
, et pour celebrer la fécondité de
Lucille ; la Fleur qu'elle tient à la main
désigneroit l'attente du Peuple Romain .
qui avoit lieu d'esperer encore d'autres
fruits de cette fécondité.
و
Ce que je viens de vous dire de la Fé- ´
condité , arrivée ou attenduë de Lucille ,
se confirme non - seulement par un Medaillon
de çerte Imperatrice , décrit ainsi
par Vaillant , p. 210. du même livre
d'un côté sa Tête avec la même Legende
que sur la notre et au revers Lucille
assise , tenant dans ses bras un petit Enfant
, mais encore par une Medaille d'Argent
, de Lucille , rapportée dans le 2 .
vol. du même Auteur , pag. 187. au revers
de laquelle est encore une figure de
Femme assise tenant entre ses bras un
petit Enfant , un autre Enfant est debout
devant elle et pour Legende FOECUNDITAS
AUGUSTE: C'est ainsi que les
Auteurs du revers de la Medaille , presentée
au Roy , le premier jour de cette année
1731. en ont usé très - à - propos pour
désigner la continuation de l'heureuse
fecondité de la Reine par la naissance du
>
Duc
2292 MERCURE DE FRANCE
Duc d'Anjou. La France assise et caracterisée
par ses Symboles , tient sur un
bras le Prince nouveau né enveloppé de
Langes , et le Dauphin de l'autre main
debout entre ses genoux , ce qui marque
le bon goût et la capacité de ces Auteurs.
Cette Medaille est gravée dans le Mercure
de Mars p. 5 74.
Je voudrois bien , au reste , pour la
rareté du fait , que parmi les Medailles
que vous m'annoncez , et que vous avez
reçûes depuis peu pour moy de Syrie , il
se trouvât la Medaille Grecque de Lucille
dont je vais parler : cela n'est pas impossible.
M. Baudelot a marqué dans son
Catalogue des Medailles Imperiales , que
les Medailles Grecques de cette Imperatrice
sont communes : ce qui n'est pas
tout-à-fait exact , puisqu'il y en a quelques-
unes de singulieres et de fort rares
en ce genre là : telle est , par exemple ,
celle qui est gravée dans le Selecta Numismata
antiqua de P. Seguin , Doyen
* Ce Catalogue est dans le a. T. de l'Utilitê
des Voyages , p. 345. derniere Edit. 1727 ,
faite après la mort de M. Baudelot , qui auroit
rendu un si bon Livre parfait en corrigeant
quelques méprises en petit nombre , et
en suppleant à plusieurs ômissions . On n'y verroit
pas non plus les fautes qui viennent des
Editeurs denuez de la capacité de M. B.
de
OCTOBRE. 1731 2293
de S. Germain de l'Auxerrois , p. 158.
Cette Medaille est d'Argent , on y
voit d'un côté la Têre de Lucille coëffée
plus galamment qu'ailleurs " avec cette
Legende AOTKIÄÄA CEBACTH . et sur
le revers la même Princesse assise et representée
sous la figure de Cerés , tenant
d'une main desEpis , et de l'autre un flambeau
, avec cette Inscription B CIAEYC
MANNOC ΦΙΛΟΡΩΜΑΙΟΣ qui indique et
qui confirme un point d'Histoire considerable.
C'est Mannus , Roy des Arabes,
qui a fait frapper cette Medaille. Il étoit
Fils ou Neveu et Successeur du Roy de
même nom , dont il est parlé dans Dion,
L. 68. qui regnoit sur les Arabes , Habitans
du Pays situé au -delà de l'Euphra
re , entre la grande Armenie et l'Osrhoëne
, lequel devint suspect à Trajan , dans
son expédition contre les Parthes , par
une manoeuvre marquée dans cette His-
Foire.
C'est le successeur de ce Prince , qui
plus avisé et plus politique que lui , nonseulement
se ménagea beaucoup avec les
Romains , mais qui affecta de les aimer
jusqu'à prendre le titre de ΦΙΛΟΡΩΜΑΙΟΣ
qui est expressement marqué dans cette
Medaille Grecque de Lucille. Elle fût
frappée par les ordres de ce Roy , vray➡
B sem2294
MERCURE DE FRANCE
,
semblablement dans le temps que Luce
Vere son epoux et elle séjournoient
à Antioche , Ville peu éloignée des
Etats du Monarque Arabe , et que l'Ar
mée Romaine , sous le commandement
de A. Cassius , agi soit contre les Parthes.
Que ce Prince eût le même nom de
Mannus , que celui qui regnoit sous
Trajan , l'usage constant de tous les Rois
voisins de la Syrie , qui portoient tous
un même nom , le prouve ,
le prouve , la Medaille
dont je viers de parler le confirme.
M. Seguin , en parlant de cette Medaille
a marqué par ces paroles le cas
qu'il en faisoit , Rarior mihi videtur bie
Nummus , tum quia Gracus tum quia Regis
Barbari nomen minus notum profitetur.
Ajoûtant que Savot , qui a écrit sur la rareté
des Medailles antiques , a mis au
nombre des plus rares les Medailles Imperiales
Grecques d'Argent. Ce que Seguin
dit avoir souvent éprouvé , sur-tout à
Pégard des Medailles d'Imperatrices.
M. Vaillant , qui n'a dit que quelques
mots sur la Medaille en question , ajoute,
après avoir renvoyé au livre de M. Se
guin , Hic Nummus eximia raritatis et elegantia
habetur. Et ce n'est point trop dire
Il croit, au reste , que c'est l'Empereur
L. Vere lui -même , qui , à la priere de
Mannus
OCTOBRE. 1731. 2295
Mannus , lui accorda ce titre d'Ami des
Romains , et que ce fût pour en marquer
sa reconnoissance , et pour faire sa Cour
à l'Empereur , que ce Prince Arabe fit
frapper une Medaille où ce titre est ex--
pressement marqué. 1105 0
Quoiqu'il en soit, ne vous lassez point,
Monsieur , de m'envoyer de pareils Monumens,
on en trouve tous les jours de singuliers
, et qui ont échapé à la recherche
de ceux qui nous ont précedé dans cette
trude , je vous rendrai bon compte de
tout ce qui me viendra de curieux de
vôtre part. Je suis ,
AParis , le 15. Mars 1731.
Fermer
Résumé : LETTRE écrite par M. D. L. R. à M ...... de l'Abbaye S. Victor de Marseille au sujet de deux Medailles antiques.
La lettre de M. D. L. R. à M...... de l'Abbaye Saint-Victor de Marseille discute de deux médailles antiques. La première est une médaille romaine en bronze découverte dans le vignoble de Saint-Just, attribuée à l'impératrice Lucille, fille de Marc-Aurèle et de Faustine la Jeune. Lucille avait épousé Lucius Verus, associé à l'Empire avec son beau-père. La seconde est une pièce grecque en argent trouvée dans le Languedoc par M. Vergile de la Bastide. Elle représente une tête d'homme et un sautoir, avec les lettres 'M A' au revers, probablement en référence à Marseille ou à son fondateur. L'auteur attribue cette médaille à Massalia, le premier fondateur de Marseille selon Plutarque, tout en mentionnant d'autres fondateurs potentiels comme Furius et Peranus, qu'il considère comme secondaires. Le texte aborde également une médaille attribuée à Maximien Hercule, portant les lettres DMKV sur son revers. Le Père Hardouin interprète ces lettres comme indiquant une frappe à Marseille, mais cette hypothèse est contestée car Maximien, poursuivi par Constantin, s'y réfugia durant une période de décadence, rendant improbable la frappe de monnaie en son honneur. La médaille romaine de Lucille présente sur son revers une figure féminine assise tenant une fleur et un enfant emmailloté, avec l'inscription JUNONI LUCINE. Cette représentation symbolise Lucille sous les traits de Junon Lucine, déesse de la fécondité, suggérant soit une fécondité future, soit une maternité déjà réalisée. Cette interprétation est confirmée par d'autres médailles et médaillons similaires décrits par Vaillant. Le texte mentionne aussi une médaille grecque de Lucille, frappée par le roi arabe Mannus, qui se présente comme ami des Romains. Cette médaille est rare et élégante, frappée durant le séjour de Lucius Verus et Lucille à Antioche. L'auteur encourage les savants de Marseille à approfondir ces découvertes et à publier des explications plus exactes et étendues dans la nouvelle histoire de la ville.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 773-776
Grille faite pour le Roy de Portugal, [titre d'après la table]
Début :
Le sieur Garnier, Serrurier, Entrepreneur dans les Bâtimens du Roy, a attiré dans son Attellier, [...]
Mots clefs :
Serrure, Corniche, Feuilles, Bronze, Fleurons, Grille, Barreaux, Roi de Portugal, Garnier
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Grille faite pour le Roy de Portugal, [titre d'après la table]
Le sieur Garnier , Serrurier, Entrepreneur dans
les Bâtimens du Roy, a attiré dans son Attellier,
à l'entrée de la Cour des Princes du Château des
Thuilleries, un tres -grand concours de Curieux et
de gens de distinction de la Cour et de la Ville,
ainsi que les Entrepreneurs et Architheques des
Bâtimens de S. M. pour voir une magnifique
Grille , ordonnée par le Roy de Portugal , sous
la direction de M. Mendés de Goisse , et exécutée
par ledit sieur Garnier , dont tout le monde
a paru tres- satisfait.
6. vj
Ce
774 MERCURE DE FRANCE
Ce bel Ouvrage de Serrurerie doit être posé
dans l'Eglise des Capucins de Mafre , de fondation
Royale , à six lieuës de Lisbonne , et servir
de clôture au Choeur de cette Eglise , où est la
Sépulture des Rois de Portugal.
Ce grand Ouvrage , qui fut commencé au
mois de Juin 1730. et fini au mois de Mars
1733. sera incessamment embarqué sur la Seine
, jusqu'au Havre de Grace , et de là transporté
à Lisbonne.
La Grille a 15 pieds de hauteur , compris la
Corniche , et le Socle d'en bas et de pourtour
54 pieds , compris les Pans coupez et retour.
Elle est composée de 16 Panneaux , compris
les petits des côtez , et de 14 Pilastres . Au inilieu
est une Porte , à deux Vanteaux , portant
13 pieds de haut , sur 6 de large.
Les Panneaux sont composez de 6 Balustres
par en bas, qui sont garnis de 2 Consolles coudées
, avec deux Roulleaux carrez par en bas ,
qui forment leurs bases , portant des queues de
poireaux , avec leurs ovalles entretoisez , er arriere
corps , garnis d'ornemens en bronze , fleurons
, agraphes , feuilles d'eau , rosette et des
Liens à cordons.
Au dessus des Panneaux d'en - bas est une
traverse double où est incrutée une Frise en cuivre
, ornée de feuilles de Lauriers et autres.
2
Au-dessus de cette traverse il y a 7 Barreaux,
et demi Barreaux qui forment les panneaux
du haut. Ces barreaux sont cannelés sur :
fasses , depuis le haut de la Corniche jusques sur
la traverse, où est la Frise, à 9 pieds de hauteur,
bien ajustée et profilée , tout d'égale grosseur ,
tres- bien finis et poussez au rabot et autres ouails
faits exprès,
Chaque
AVRIL: 1733. 779
Chaque barreau est monté sur 2 consolles ,
avant -corées avec leurs bases, garnies d'ornemens
de bronze , fleurons , agraphes , ovalles et feüilles
de revers.
Le haut des Barreaux est aussi garni de Consolles
sous la barre du Linteau , avec leurs bases
et avant corps , ornez de liens à cordon , agraffes
, fleurons , et feuilles de refend .
Ces Pilastres , sur quoi la Corniche est posée
ont 8 pouces de large,et sont ornez de leurs Socles
et Baze , avec une Cimaise vis-à- vis la Frise,
et un Chapiteau au - dessus ; le tout tres-bien assemblé
avec la Corniche , où lon voit des or
nemens de bronze , têtes de Cherubins , Astragalle
, grandes palmettes, coquilles et des Cadres
par en haut et par bas , avec des moulures et des
guirlandes de feuilles de Lauriers et Rosettes , le
tout à double face . En bas est un Socle , qui fait
le pourtour à deux faces , garni de moulure en
bronze.
La Corniche d'un pied de hauteur , et de deux
de largeur , à double face , faisant le pourtour
des Pans coupez et retour de la grille , avec saut
et ressaut et onglet bien assemblé , avec moulures,
congez et carderons , ornez de bronzé , Une
bordure profilée , avec moulures carrées , et carderons
regne sur la face d'en bas de cette bordure
, garnie de 200 fleurons , ainsi qu'au dessous
de la même corniche , garnie de feuilles de
revers et de refends , dans le pourtour de la
grille ,
, pans coupez et ressauts.
Sur la Corniche sont posez à l'aplomb des
Pilastres , 8 Chandeliers triangulaires, de 6 pieds
de haut , avec leurs bassins de fer, recouverts en
cuivre , et ornez de plusieurs Aeurons et têtes de
Cherubins , &c .
La
776 MERCURE DE FRANCE
La Serture de la porte , sa garniture et la Clef
en acier cizelé, ont fait l'admiration de plusieurs
personnes de goût ; le canon tournant de la clef
est canelé en trefle , limé et poli dans la plus
grande perfection ; l'anneau est formé par deux
cornes d'abondance , et la Couronne de Portugal
au-dessus ; dans le Paneton on voit d'autres attributs
de l'Ecusson de S. M. Portugaise.
les Bâtimens du Roy, a attiré dans son Attellier,
à l'entrée de la Cour des Princes du Château des
Thuilleries, un tres -grand concours de Curieux et
de gens de distinction de la Cour et de la Ville,
ainsi que les Entrepreneurs et Architheques des
Bâtimens de S. M. pour voir une magnifique
Grille , ordonnée par le Roy de Portugal , sous
la direction de M. Mendés de Goisse , et exécutée
par ledit sieur Garnier , dont tout le monde
a paru tres- satisfait.
6. vj
Ce
774 MERCURE DE FRANCE
Ce bel Ouvrage de Serrurerie doit être posé
dans l'Eglise des Capucins de Mafre , de fondation
Royale , à six lieuës de Lisbonne , et servir
de clôture au Choeur de cette Eglise , où est la
Sépulture des Rois de Portugal.
Ce grand Ouvrage , qui fut commencé au
mois de Juin 1730. et fini au mois de Mars
1733. sera incessamment embarqué sur la Seine
, jusqu'au Havre de Grace , et de là transporté
à Lisbonne.
La Grille a 15 pieds de hauteur , compris la
Corniche , et le Socle d'en bas et de pourtour
54 pieds , compris les Pans coupez et retour.
Elle est composée de 16 Panneaux , compris
les petits des côtez , et de 14 Pilastres . Au inilieu
est une Porte , à deux Vanteaux , portant
13 pieds de haut , sur 6 de large.
Les Panneaux sont composez de 6 Balustres
par en bas, qui sont garnis de 2 Consolles coudées
, avec deux Roulleaux carrez par en bas ,
qui forment leurs bases , portant des queues de
poireaux , avec leurs ovalles entretoisez , er arriere
corps , garnis d'ornemens en bronze , fleurons
, agraphes , feuilles d'eau , rosette et des
Liens à cordons.
Au dessus des Panneaux d'en - bas est une
traverse double où est incrutée une Frise en cuivre
, ornée de feuilles de Lauriers et autres.
2
Au-dessus de cette traverse il y a 7 Barreaux,
et demi Barreaux qui forment les panneaux
du haut. Ces barreaux sont cannelés sur :
fasses , depuis le haut de la Corniche jusques sur
la traverse, où est la Frise, à 9 pieds de hauteur,
bien ajustée et profilée , tout d'égale grosseur ,
tres- bien finis et poussez au rabot et autres ouails
faits exprès,
Chaque
AVRIL: 1733. 779
Chaque barreau est monté sur 2 consolles ,
avant -corées avec leurs bases, garnies d'ornemens
de bronze , fleurons , agraphes , ovalles et feüilles
de revers.
Le haut des Barreaux est aussi garni de Consolles
sous la barre du Linteau , avec leurs bases
et avant corps , ornez de liens à cordon , agraffes
, fleurons , et feuilles de refend .
Ces Pilastres , sur quoi la Corniche est posée
ont 8 pouces de large,et sont ornez de leurs Socles
et Baze , avec une Cimaise vis-à- vis la Frise,
et un Chapiteau au - dessus ; le tout tres-bien assemblé
avec la Corniche , où lon voit des or
nemens de bronze , têtes de Cherubins , Astragalle
, grandes palmettes, coquilles et des Cadres
par en haut et par bas , avec des moulures et des
guirlandes de feuilles de Lauriers et Rosettes , le
tout à double face . En bas est un Socle , qui fait
le pourtour à deux faces , garni de moulure en
bronze.
La Corniche d'un pied de hauteur , et de deux
de largeur , à double face , faisant le pourtour
des Pans coupez et retour de la grille , avec saut
et ressaut et onglet bien assemblé , avec moulures,
congez et carderons , ornez de bronzé , Une
bordure profilée , avec moulures carrées , et carderons
regne sur la face d'en bas de cette bordure
, garnie de 200 fleurons , ainsi qu'au dessous
de la même corniche , garnie de feuilles de
revers et de refends , dans le pourtour de la
grille ,
, pans coupez et ressauts.
Sur la Corniche sont posez à l'aplomb des
Pilastres , 8 Chandeliers triangulaires, de 6 pieds
de haut , avec leurs bassins de fer, recouverts en
cuivre , et ornez de plusieurs Aeurons et têtes de
Cherubins , &c .
La
776 MERCURE DE FRANCE
La Serture de la porte , sa garniture et la Clef
en acier cizelé, ont fait l'admiration de plusieurs
personnes de goût ; le canon tournant de la clef
est canelé en trefle , limé et poli dans la plus
grande perfection ; l'anneau est formé par deux
cornes d'abondance , et la Couronne de Portugal
au-dessus ; dans le Paneton on voit d'autres attributs
de l'Ecusson de S. M. Portugaise.
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Résumé : Grille faite pour le Roy de Portugal, [titre d'après la table]
Le sieur Garnier, serrurier et entrepreneur des bâtiments du roi, a attiré une grande foule à son atelier près du Château des Tuileries pour admirer une magnifique grille commandée par le roi de Portugal. Cette grille, dirigée par M. Mendès de Goisse et exécutée par Garnier, est destinée à l'église des Capucins de Mafra, près de Lisbonne, pour clôturer le chœur où reposent les rois de Portugal. La grille, commencée en juin 1730 et achevée en mars 1733, mesure 15 pieds de hauteur et 54 pieds de pourtour. Elle est composée de 16 panneaux et 14 pilastres, avec une porte centrale à deux vantaux. Les panneaux sont ornés de balustres, consoles, roulleaux, et divers ornements en bronze. La grille sera bientôt transportée par la Seine jusqu'au Havre, puis à Lisbonne. Les détails de la grille incluent des barreaux cannelés, des consoles ornées, et une corniche richement décorée avec des ornements en bronze, des têtes de chérubins, et des guirlandes. La porte, sa serrure et sa clé en acier ciselé ont également été admirées pour leur finesse et leur perfection.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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9
p. 2179-2183
LETTRE écrite de Dijon, à M. de T... sur le Cabinet de Médailles des RR. PP. Jesuites de Tournon.
Début :
MONSIEUR, Vou[s] auriez pû vous mieux adresser pour avoir l'analyse [...]
Mots clefs :
Médailles, Jésuites, Cabinet, Tournon, Revers, Bronze, Médaillon
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Dijon, à M. de T... sur le Cabinet de Médailles des RR. PP. Jesuites de Tournon.
LETTRE écrite de Dijon , à M. de
T... sur le Cabinet de Médailles des
RR. PP. Jesuites de Tournon.
MONSIEUR,
Vou auriez pû vous mieux adresser
pour avoir l'analyse des singularitez du
Médailler des P P. Jesuites de Tournon
dont on a depuis peu fait imprimer le
Catalogue à Avignon . Je n'ai eu ce Livre
que bien peu de temps
à ma disposition
, M. R. D. L. qui l'avoit apporté
de Paris , n'ayant fait ici qu'un
très petit séjour. Il auroit fallu n'être
pas si pressé pour examiner toutes les
karetez de ce Cabinet. Ce fut beaucoup
pour moi d'en remarquer une partie et
d'en faire à la hâte un Memoire. Ressouvenez-
vous- en bien , je vous prie , pour
que vous m'épargniez les justes reproches
que vous faites à ces demi - Sçavans
qui ont voulu vous faire connoître ce Médailler.
Vous ne trouverez pas du moins
dans mon Extrait ces grandes phrases
qui ne signifient rien , et qui laissent le
Lecteur aussipeu instruit qu'il l'étoit aųparavant.
Dans
2180 MERCURE DE FRANCE
Dans le Cabinet des Jesuites de Tournon
, il y a differentes suites de Médail
les ; 1 ° . de Rois , 2 ° . de Peuples et dé
Villes ; 3 ° . de Familles Romaines' ; 4º . de
l'As et de ses divisions ; 5. des Empereurs
Romains en or ; 6 ° . en argent ; 7 .
en grand ; 8 ° . moyen ; 9. et petit bronze
; 10° . de Medailles et de Monnoyes
modernes ; 11 ° . de Médailles contrefaites;
12 ° . de Pierres gravées , des Statuës , des
Urnes , &c. Il paroît qu'on ne s'est atë
taché à enrichir que les suites Imperiales
de bronze ; les autres , excepté celle
qui est en argent , sont peu nombreuses.
Dans le petit nombre on remarque cependant
des Médailles peu communes ;
il
y en a même qui n'ont pas été connues
jusques ici par les Antiquaires , et
qu'on peut avec eux appeller uniques.
Mon Mémoire me fournit une partie de
celles qui me parurent de ce genre dans
ce Cabinet. Peut-être vous feront- elles
naître le dessein de l'acheter ; on dit que
les Jésuites de Tournon veulent le vendre
pour rétablir leur Bibliotheque.
Une Chevre d'Afrique au Revers
ΠΤΟΛΕΜΑΙΟΥ ΒΑΣΙΛΕΩΣ , Une Aigle
tenant la foudre dans ses serres Æ. III.
La tête de Diane. ( BAZIAEQE DINTIAZ.
Un Sanglier. A II .
A
La
OCTOBRE . 1733. 2181 .
La tête d'Anthiochus , ornée d'un Diademe,
Ο ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΑΝΤΙΟΚΟΥ ΕΠΙ-
ΦΑΝΟΥΣ ΦΙΛΟΠΑΤΟΡΟΣ ΚΑΛΛΙΝΙΚΟΣ.
Une Victoire . Æ. 111.
Deux Médailles d'Homere.
La tête de Rome. ROMA RESTITVTA. X
Jupiter assis , la Foud e à la main : jv-
PITER LIBERATOR . Arg.
·
Parmi les Médailles Imperiales de
grand Bronze , une Contorniate d'Auguste
au revers de C. GALLVS
IIIVIRAA AFF ; dans le Champ, S. C.
Un Tibere , deux Vitellius , deux Antinous
, un Médaillon d'Aelius Caesar ,
au revers de la Concorde assise Con-
CORD . TR. POT. cos. 11. Un Antonin Pie,
qui a pour revers le Sphinx et l't poque
L. B. Un autre : EПI APXONTOC KA
ΕΝΤΙΛΙΟΥ ΧΥΖΙ ΝΕΩΚΟΡΩΝ , avec un
Temple. Pertinax , les deux Gordiens
Afriquains , un Médaillon de Gordien
Pie : L'Empereur avec Tranquilline , se
donnent la main , avec la Legende de
ΓΑΡ ΟΥ ΜΗΤΡΟΠΟΛΕΩΣ ΑΜΚ ΙΒ .
Trajan Dece au revers , LIBERTAS AVG La
ête de Q. Herennius : EPENN . ETPOYC .
MEC . AEKIOC KTINTOC KECAP ; au
vers , celle d'Hostilien ... OCTIAIAOC
KYINTOC KECAP . Deux Æmiliens.
Gallien au revers de AEQUITAS AVGG.
Un
2182 MERCURE DE FRANCE
Un autre : COL. TYRO . MET. Une Aigle
avec une Enseigne Militaire , dens laquelle
on lit ces mots : LEG. III. GAL.
Un Médaillon du même Prince : CONCORDIA
EXERCIT. La Déesse debout ,
avec une Patere à la main.
Dans le moyen Bronze , j'ai remarqué
un Othon , avec le revers d'une Tête
casquée , et l'Inscription POMH Vitellius
: IMP. VITEL. dans une contremarque
sans autre Legende 5 au revers : TPI-
ΠΟΛΕΙΤΩΝ. Les têtes accolées de Castor
et de Pollux . Hadrien : EITI COCOENOYC
APX. T. TIBEPIOHOA. Jupiter tenant
une Patere. M. Aurele : CONG. AVG. III,
TR.P. XX . IMP. 111. COS. 111. La Liberalité
debout ; elle tient une Tablette.
Un autre : MARTI VICTORI IM P. XI.
cos. 111. Le Dieu Mars , avec une Haste
et un Bouclier, Severe Alexandre : COL.
AVR. PIA. METR. SIO. au milieu d'une
Couronne, Gallien au revers de Salonine
et de Salonin. Diocletien avec cette Legende
: D. N. DIOCLETIANO AETER.
AVG. Val. Maximien : CONCORDIA FELIX
D D. N N. Val. Constantius : FORTVNAE
REDVCI AVGG NN. Deux autres Maximiens
: IMP. MAXIMIANVS JVN. AVG.
Maxence : SALVIS AVGG. Et Caess. FEL.
KART. Constantin : CONCORDIA PERPET.
DD.
NO
OCTOB
R E. 1733. 2183
Ci
DD. NN. Un autre : GENIO CAESARIS ,
un autre : TEMPORVM FELICITAS.
,
Dispensez moi , Monsieur , de m'étendre
davantage sur ces Médailles du
bas Empire. Les suites de moyen et de
petit Bronze de ces temps- là , sont trèsriches
par les têtes des Princes et par les
revers qu'elles contiennent . La plupart
sont rapportées dans le Numm sæculi
Constantiniani du P. Hardoüin , et par
le P. Bandury avec l'Etiquette , E.
Schedis D. Roman de Rives. Cet Abbé ,
à ce que m'a dit un de ses amis , a
vú plus d'une fois avec admiration ce
Cabinet. Sur l'avis qu'on en trouvoit le
Catalogue chez Bousquet , Libraire à
Geneve , j'ai pris des mesures pour en
faire venir deux Exemplaires ; il y en
aura un pour vous . La lecture que Vous
en ferez , sera plus agréable pour vous
que celle de ma Lettre. Je suis , & c.
T... sur le Cabinet de Médailles des
RR. PP. Jesuites de Tournon.
MONSIEUR,
Vou auriez pû vous mieux adresser
pour avoir l'analyse des singularitez du
Médailler des P P. Jesuites de Tournon
dont on a depuis peu fait imprimer le
Catalogue à Avignon . Je n'ai eu ce Livre
que bien peu de temps
à ma disposition
, M. R. D. L. qui l'avoit apporté
de Paris , n'ayant fait ici qu'un
très petit séjour. Il auroit fallu n'être
pas si pressé pour examiner toutes les
karetez de ce Cabinet. Ce fut beaucoup
pour moi d'en remarquer une partie et
d'en faire à la hâte un Memoire. Ressouvenez-
vous- en bien , je vous prie , pour
que vous m'épargniez les justes reproches
que vous faites à ces demi - Sçavans
qui ont voulu vous faire connoître ce Médailler.
Vous ne trouverez pas du moins
dans mon Extrait ces grandes phrases
qui ne signifient rien , et qui laissent le
Lecteur aussipeu instruit qu'il l'étoit aųparavant.
Dans
2180 MERCURE DE FRANCE
Dans le Cabinet des Jesuites de Tournon
, il y a differentes suites de Médail
les ; 1 ° . de Rois , 2 ° . de Peuples et dé
Villes ; 3 ° . de Familles Romaines' ; 4º . de
l'As et de ses divisions ; 5. des Empereurs
Romains en or ; 6 ° . en argent ; 7 .
en grand ; 8 ° . moyen ; 9. et petit bronze
; 10° . de Medailles et de Monnoyes
modernes ; 11 ° . de Médailles contrefaites;
12 ° . de Pierres gravées , des Statuës , des
Urnes , &c. Il paroît qu'on ne s'est atë
taché à enrichir que les suites Imperiales
de bronze ; les autres , excepté celle
qui est en argent , sont peu nombreuses.
Dans le petit nombre on remarque cependant
des Médailles peu communes ;
il
y en a même qui n'ont pas été connues
jusques ici par les Antiquaires , et
qu'on peut avec eux appeller uniques.
Mon Mémoire me fournit une partie de
celles qui me parurent de ce genre dans
ce Cabinet. Peut-être vous feront- elles
naître le dessein de l'acheter ; on dit que
les Jésuites de Tournon veulent le vendre
pour rétablir leur Bibliotheque.
Une Chevre d'Afrique au Revers
ΠΤΟΛΕΜΑΙΟΥ ΒΑΣΙΛΕΩΣ , Une Aigle
tenant la foudre dans ses serres Æ. III.
La tête de Diane. ( BAZIAEQE DINTIAZ.
Un Sanglier. A II .
A
La
OCTOBRE . 1733. 2181 .
La tête d'Anthiochus , ornée d'un Diademe,
Ο ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΑΝΤΙΟΚΟΥ ΕΠΙ-
ΦΑΝΟΥΣ ΦΙΛΟΠΑΤΟΡΟΣ ΚΑΛΛΙΝΙΚΟΣ.
Une Victoire . Æ. 111.
Deux Médailles d'Homere.
La tête de Rome. ROMA RESTITVTA. X
Jupiter assis , la Foud e à la main : jv-
PITER LIBERATOR . Arg.
·
Parmi les Médailles Imperiales de
grand Bronze , une Contorniate d'Auguste
au revers de C. GALLVS
IIIVIRAA AFF ; dans le Champ, S. C.
Un Tibere , deux Vitellius , deux Antinous
, un Médaillon d'Aelius Caesar ,
au revers de la Concorde assise Con-
CORD . TR. POT. cos. 11. Un Antonin Pie,
qui a pour revers le Sphinx et l't poque
L. B. Un autre : EПI APXONTOC KA
ΕΝΤΙΛΙΟΥ ΧΥΖΙ ΝΕΩΚΟΡΩΝ , avec un
Temple. Pertinax , les deux Gordiens
Afriquains , un Médaillon de Gordien
Pie : L'Empereur avec Tranquilline , se
donnent la main , avec la Legende de
ΓΑΡ ΟΥ ΜΗΤΡΟΠΟΛΕΩΣ ΑΜΚ ΙΒ .
Trajan Dece au revers , LIBERTAS AVG La
ête de Q. Herennius : EPENN . ETPOYC .
MEC . AEKIOC KTINTOC KECAP ; au
vers , celle d'Hostilien ... OCTIAIAOC
KYINTOC KECAP . Deux Æmiliens.
Gallien au revers de AEQUITAS AVGG.
Un
2182 MERCURE DE FRANCE
Un autre : COL. TYRO . MET. Une Aigle
avec une Enseigne Militaire , dens laquelle
on lit ces mots : LEG. III. GAL.
Un Médaillon du même Prince : CONCORDIA
EXERCIT. La Déesse debout ,
avec une Patere à la main.
Dans le moyen Bronze , j'ai remarqué
un Othon , avec le revers d'une Tête
casquée , et l'Inscription POMH Vitellius
: IMP. VITEL. dans une contremarque
sans autre Legende 5 au revers : TPI-
ΠΟΛΕΙΤΩΝ. Les têtes accolées de Castor
et de Pollux . Hadrien : EITI COCOENOYC
APX. T. TIBEPIOHOA. Jupiter tenant
une Patere. M. Aurele : CONG. AVG. III,
TR.P. XX . IMP. 111. COS. 111. La Liberalité
debout ; elle tient une Tablette.
Un autre : MARTI VICTORI IM P. XI.
cos. 111. Le Dieu Mars , avec une Haste
et un Bouclier, Severe Alexandre : COL.
AVR. PIA. METR. SIO. au milieu d'une
Couronne, Gallien au revers de Salonine
et de Salonin. Diocletien avec cette Legende
: D. N. DIOCLETIANO AETER.
AVG. Val. Maximien : CONCORDIA FELIX
D D. N N. Val. Constantius : FORTVNAE
REDVCI AVGG NN. Deux autres Maximiens
: IMP. MAXIMIANVS JVN. AVG.
Maxence : SALVIS AVGG. Et Caess. FEL.
KART. Constantin : CONCORDIA PERPET.
DD.
NO
OCTOB
R E. 1733. 2183
Ci
DD. NN. Un autre : GENIO CAESARIS ,
un autre : TEMPORVM FELICITAS.
,
Dispensez moi , Monsieur , de m'étendre
davantage sur ces Médailles du
bas Empire. Les suites de moyen et de
petit Bronze de ces temps- là , sont trèsriches
par les têtes des Princes et par les
revers qu'elles contiennent . La plupart
sont rapportées dans le Numm sæculi
Constantiniani du P. Hardoüin , et par
le P. Bandury avec l'Etiquette , E.
Schedis D. Roman de Rives. Cet Abbé ,
à ce que m'a dit un de ses amis , a
vú plus d'une fois avec admiration ce
Cabinet. Sur l'avis qu'on en trouvoit le
Catalogue chez Bousquet , Libraire à
Geneve , j'ai pris des mesures pour en
faire venir deux Exemplaires ; il y en
aura un pour vous . La lecture que Vous
en ferez , sera plus agréable pour vous
que celle de ma Lettre. Je suis , & c.
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Résumé : LETTRE écrite de Dijon, à M. de T... sur le Cabinet de Médailles des RR. PP. Jesuites de Tournon.
La lettre, rédigée à Dijon, s'adresse à M. de T... et présente une analyse du Cabinet de Médailles des Jésuites de Tournon. L'auteur exprime son regret de n'avoir eu que peu de temps pour examiner le catalogue, récemment imprimé à Avignon. Il décrit diverses collections de médailles présentes dans le cabinet, incluant des séries de rois, de peuples et de villes, de familles romaines, de l'as et de ses divisions, ainsi que des médailles d'empereurs romains en or, argent et bronze. Le cabinet comprend également des médailles modernes et contrefaites. Certaines pièces sont particulièrement rares et uniques, jamais décrites par les antiquaires. L'auteur mentionne la présence de pierres gravées, statues et urnes. Parmi les médailles spécifiques notées figurent celles de Ptolémée, Antiochus, Homère, et plusieurs empereurs romains. Le cabinet possède aussi des médailles impériales de grand bronze, incluant des contorniates d'Auguste et des pièces de Tibère, Vitellius, Antonin le Pieux, et d'autres empereurs. L'auteur suggère que les Jésuites de Tournon envisagent de vendre le cabinet pour rétablir leur bibliothèque. Il conclut en précisant qu'il a commandé des exemplaires du catalogue pour M. de T... et pour lui-même.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
p. 2581-2585
LETTRE d'un Habitant du Parnasse, à M. Titon du Tillet.
Début :
MONSIEUR, La Renommée nous a apporté la description de votre [...]
Mots clefs :
Parnasse, Parnasse français, Titon du Tillet, Mérite, Noms, Bronze, Apollon
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE d'un Habitant du Parnasse, à M. Titon du Tillet.
LETTRE d'un Habitant du Parnasse,
à M. Titon du Tillet
ONSIEUR,.
La Renommée nous a apporté la description
de votre Parnasse. Ce Livre a
fait à nos illustres Compatriotes , autant
de plaisir que le Parnasse même. Les Anciens
, pour lesquels leurs. Mecènes et
1. Vol.
leurs
2582 MERCURE DE FRANCE
leurs Pollions n'ont jamais rien imaginé
d'aussi honorable , ont parû souffrir forc
impatiemment cet avantage des Modernes
. On a même été sur le point de renouveller
à cette occasion les anciennes
disputes ; mais Apollon a sur le champ
appaisé le bruit par ces paroles :
O vous , qui les premiers en Grece , en Ausonie,
Favoris des doctes Soeurs ,
Sçûtes gouter les douceurs
De la divine harmonie ,
Si dé nobles Rivaux du même zele épris ,
Osent vous disputer le Prix ,
S'ils sçavent dans leurs Vers faire couler vos
Graces ,
Vos accords , vos sons les plus doux ,
Grecs et Romains n'en soyez point jaloux ,
Ce n'est qu'en marchant sur vos traces
Qu'ils s'élevent jusques à vous.
Un compliment si flateur dans la bouche
d'Apollon , contenta ceux des Anciens
dont les Ecrits sont parvenus jusqu'à
nos tems , et nous ont servi de modele;
mais il en restoit un assez grand nombre
dont les noms et les Ouvrages sont absolument
inconnus , et qui sans être comparables
aux grands Maîtres , avoient cependant
un mérite réel. Ceux-là parois-
J. Vol. soient
DECEMBR E. 1733. 2583
soient les plus échauffez et se plaignoient
amérement de l'injustice du Destin , qui
avoit réservé aux Modernes un honneur
qu'ils croyoient eux - mêmes avoir bien
mérité. Ils avoient quelque raison .
Leur siecle en beaux Esprits fertile ,
Ne vit point pour leur gloire un Amateur des
Arts ,
Un homme tel que vous , qui d'une main habile
Sçut avec choix dans un Ouvrage utile
Rassembler tous leurs noms épars.
Si les Muses alors moins avares de gloire ,
Pour éterniser leur memoire ,
Dans les Fastes sçavans les avoient consacrez ,
On y verroit encor paroître ,
dévorez ,
Des noms par le temps
Noms dans leur siecle reverez ,
Et dignes sans doute de l'être.
Vous voyez , Monsieur , que je suis
'de votre avis sur les places qu'occupent
au Parnasse bien des Poëtes , qui sans
être du premier mérite , ne sont pourtant
point méprisables.
Apollon est un Dieu sévere ;
Cependant sur le Mont sacré ,
Il est encor plus d'un degré
Au-dessous de Sapho , de Virgile et d'Homere.
I. Vol. Je
2584 MERCURE DE FRANCE
*
Je reviens aux François , qui pendant
ce temps - là , déliberoient entre eux sur
la maniere de vous témoigner leur reconnoissance.
Quelqu'un se leva et dit :
De GARNIER * la sçavante main
Asçû l'Art d'animer et le Marbre et l'Airain ;
Mais dans sa course journaliere ,
Par sa seule mobilité ,
Le temps peut réduire en poussiere ,
Le Monument le plus vanté.
Bien mieux que sur le Bronze , en ses charmans
Ouvrages ,
TITON à notre gloire éleve un Monument ,
Qui jusques au dernier moment
Du Temps bravera les outrages.
pa- Dès qu'il eut fini un autre prit la
role,et s'exprima à peu près en ces termes ::
Garnier , des Héros de notre âge ,.
Sur le Bronze docile à gravé le visage ;.
Et Du Tillet en ses Ecrits
A fait revivre leurs esprits.
Cependant on ne concluoit rien , quelqu'un
le fit remarquer à la Compagnie ,
* Le Sculpteur qui a executé le Parnasse Fran- -
feis en Bronze sur le Dessein et les ordres de
M. Titon du Tillet.
I. Vol.
qui
DECEMBRE. 1733. 2585
qui voyant que l'immortalité étoit le seul
bien dont pussent disposer les Poëtes ,
s'écria aussi - tôt :
Titon sans doute a merité
Que notre Lyre l'éternise ;
Mais déja son Ouvrage et sa noble Entreprise
L'opt assuré sans nous de l'immortalité.
Tout le monde en convint , et cette
illustre Compagnie se sépara sur le champ.
Pour moi , Monsieur , j'ai crû vous faire
plaisir de vous mander ce qui s'étoit
passé sur le Parnasse à l'occasion de votre
Livre. Je suis avec toute l'estime la plus
parfaite , &c.
Le P. R ** J.
Sur le Parnasse ce 6. Septembre 1733 .
à M. Titon du Tillet
ONSIEUR,.
La Renommée nous a apporté la description
de votre Parnasse. Ce Livre a
fait à nos illustres Compatriotes , autant
de plaisir que le Parnasse même. Les Anciens
, pour lesquels leurs. Mecènes et
1. Vol.
leurs
2582 MERCURE DE FRANCE
leurs Pollions n'ont jamais rien imaginé
d'aussi honorable , ont parû souffrir forc
impatiemment cet avantage des Modernes
. On a même été sur le point de renouveller
à cette occasion les anciennes
disputes ; mais Apollon a sur le champ
appaisé le bruit par ces paroles :
O vous , qui les premiers en Grece , en Ausonie,
Favoris des doctes Soeurs ,
Sçûtes gouter les douceurs
De la divine harmonie ,
Si dé nobles Rivaux du même zele épris ,
Osent vous disputer le Prix ,
S'ils sçavent dans leurs Vers faire couler vos
Graces ,
Vos accords , vos sons les plus doux ,
Grecs et Romains n'en soyez point jaloux ,
Ce n'est qu'en marchant sur vos traces
Qu'ils s'élevent jusques à vous.
Un compliment si flateur dans la bouche
d'Apollon , contenta ceux des Anciens
dont les Ecrits sont parvenus jusqu'à
nos tems , et nous ont servi de modele;
mais il en restoit un assez grand nombre
dont les noms et les Ouvrages sont absolument
inconnus , et qui sans être comparables
aux grands Maîtres , avoient cependant
un mérite réel. Ceux-là parois-
J. Vol. soient
DECEMBR E. 1733. 2583
soient les plus échauffez et se plaignoient
amérement de l'injustice du Destin , qui
avoit réservé aux Modernes un honneur
qu'ils croyoient eux - mêmes avoir bien
mérité. Ils avoient quelque raison .
Leur siecle en beaux Esprits fertile ,
Ne vit point pour leur gloire un Amateur des
Arts ,
Un homme tel que vous , qui d'une main habile
Sçut avec choix dans un Ouvrage utile
Rassembler tous leurs noms épars.
Si les Muses alors moins avares de gloire ,
Pour éterniser leur memoire ,
Dans les Fastes sçavans les avoient consacrez ,
On y verroit encor paroître ,
dévorez ,
Des noms par le temps
Noms dans leur siecle reverez ,
Et dignes sans doute de l'être.
Vous voyez , Monsieur , que je suis
'de votre avis sur les places qu'occupent
au Parnasse bien des Poëtes , qui sans
être du premier mérite , ne sont pourtant
point méprisables.
Apollon est un Dieu sévere ;
Cependant sur le Mont sacré ,
Il est encor plus d'un degré
Au-dessous de Sapho , de Virgile et d'Homere.
I. Vol. Je
2584 MERCURE DE FRANCE
*
Je reviens aux François , qui pendant
ce temps - là , déliberoient entre eux sur
la maniere de vous témoigner leur reconnoissance.
Quelqu'un se leva et dit :
De GARNIER * la sçavante main
Asçû l'Art d'animer et le Marbre et l'Airain ;
Mais dans sa course journaliere ,
Par sa seule mobilité ,
Le temps peut réduire en poussiere ,
Le Monument le plus vanté.
Bien mieux que sur le Bronze , en ses charmans
Ouvrages ,
TITON à notre gloire éleve un Monument ,
Qui jusques au dernier moment
Du Temps bravera les outrages.
pa- Dès qu'il eut fini un autre prit la
role,et s'exprima à peu près en ces termes ::
Garnier , des Héros de notre âge ,.
Sur le Bronze docile à gravé le visage ;.
Et Du Tillet en ses Ecrits
A fait revivre leurs esprits.
Cependant on ne concluoit rien , quelqu'un
le fit remarquer à la Compagnie ,
* Le Sculpteur qui a executé le Parnasse Fran- -
feis en Bronze sur le Dessein et les ordres de
M. Titon du Tillet.
I. Vol.
qui
DECEMBRE. 1733. 2585
qui voyant que l'immortalité étoit le seul
bien dont pussent disposer les Poëtes ,
s'écria aussi - tôt :
Titon sans doute a merité
Que notre Lyre l'éternise ;
Mais déja son Ouvrage et sa noble Entreprise
L'opt assuré sans nous de l'immortalité.
Tout le monde en convint , et cette
illustre Compagnie se sépara sur le champ.
Pour moi , Monsieur , j'ai crû vous faire
plaisir de vous mander ce qui s'étoit
passé sur le Parnasse à l'occasion de votre
Livre. Je suis avec toute l'estime la plus
parfaite , &c.
Le P. R ** J.
Sur le Parnasse ce 6. Septembre 1733 .
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Résumé : LETTRE d'un Habitant du Parnasse, à M. Titon du Tillet.
Une lettre d'un habitant du Parnasse célèbre la publication du 'Parnasse' de M. Titon du Tillet, qui a suscité l'admiration des illustres compatriotes. Les Anciens, initialement jaloux, ont été apaisés par Apollon, reconnaissant que les Modernes s'élèvent en suivant leurs traces. Cependant, certains Anciens inconnus se sont plaints de ne pas être honorés. Le siècle des Anciens, riche en beaux esprits, manquait d'un amateur des arts pour rassembler et perpétuer leurs noms. Sur le Mont Parnasse, les Français ont débattu de la reconnaissance à accorder à Titon du Tillet. Garnier, le sculpteur, a souligné que les œuvres de Titon, contrairement aux monuments de marbre ou de bronze, braveront les outrages du temps. Un autre a ajouté que Titon a fait revivre les esprits des héros de leur âge. Tous ont convenu que l'ouvrage de Titon lui assurait déjà l'immortalité. L'habitant du Parnasse conclut en partageant ces événements avec Titon du Tillet, exprimant son estime et son admiration.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 58-59
LOGOGRYPHE.
Début :
Dieu, sans doute, pour l'homme a fait les élémens ; [...]
Mots clefs :
Bronze
12
p. 55-56
LOGOGRYPHE.
Début :
Admire, ami Lecteur, l'inconstance du sort : [...]
Mots clefs :
Bronze
13
p. 388
LOGOGRIPHE.
Début :
Admire, ami Lecteur, l'inconstance du sort : [...]
Mots clefs :
Bronze