Oeuvre commentée (16)
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Détail
Liste
Résultats : 16 texte(s)
1
p. 339-351
Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la Republique [...]
Mots clefs :
Auteurs, Roi, Mémoires, Hommes illustres, Ouvrages, Histoire, Belles-lettres, Savants, Guillaume Budé, Sciences
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texteReconnaissance textuelle : Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Mémoires pour servira l'Histoire
des Hommes Illustres dans la République
des Lettres > avec un Catalogue raisonné
de leurs Ouvrages , tome 8 . de 40 8 . pages
fans les Tables. A Paris , chez. Bnaffon „
rué S. làcques , a la Science. 1730.
. A la tête de ce 8 e. volume est un coure
Avertissement , qui apprend au Lecteut
une chose auíïl agréable que nécessaire á
l'égard de ceux qui aiment Inexactitude Sc
la perfection dans les entreprises Litté
raires. L' Auteur de ces Mémoires se pré
pare, nous dit-on , à donner dans le di
xième vol. qui paroîtra fur la fin du mois
de Décembre 1729. les corrections fur les
neuf vol. qui le précédent ^ avec les Ad
ditions qu'on lui a déja données. Il invite
de plus ceux qui auront reconnu quelque
faute , quelque îegere qu'elle puisse être ,
ou qui sçauront <juelques faits oubliez ,
ou enfin qui auront quelques Additions, à
les lui communiquer , se chargeant d'in
struire le Public du nom de ceux dont il
auxar
34© MERCURE Í)E FRANGÉ,
aura receu des remarques utiles. On aver»
tic aussi que le dixième vol. contiendra en
core des Tables générales , Alphabéti
que, Nécrologique ì 6c selon l'ordre des
Matières de ce qui est contenu dans les
neuf premiers vol enfin qu'on pourrs
s'addrefler au Libraire qui vend ce Livre ^
pour tout ce qu'on voudra faire tenir ìt
l'Auteur.
Nous profiterons de l'invitation conte
nue dans cet Avertissement , pour conti
nuer de parler avec franchise en faveur de
la vérité, & pour fa perfection de cet~Ou->
Vrage , quand l'occaíìon s'en présentera.1
Le 7e. vol. en offroit une , mais il n'étfoit
pas encore rems de publier notre Re
niai que , qui n'auroit pu passer alors que
pour une conjecture. Nous. avons depuisdécouvert
que cette Remarque peut être
solidement appuyée. Voici de quoi il s'a
git1. Dans le Catalogue des Ouvrages
d'André Ducheshe , qui est à la fin du
Mémoire quile concerne dans le 7e. tome
pag. 32}'. on trouve art. 6. le Titre qui
fuit : Les Antiquitez. & Recherches des
Villes , Châteaux & Places remarquables
de toute la France■", suivant l'ordre des huit
Parlement. Paris i (íi&. in-%. On ajoute
que' cettepremiere Edition a été suivie de
celles dis années 16 14. 1611. 1619.
iôji. 1637. úv8. Item, rêvât s corri'
g"*
Lévrier. 1730. 3 4 r
gées & augmentées par François Ducbejhe.
Paris 1 £47. in 8.& 166%. z. vol.in-ii.'
L'Arciclc finit par ces paroles Ce Livre
est mal écrit , mais il contient des choses;
curieuses , la derniere Edition que Duchesne
le Fils a procure'e est la meilleure.*
Nous avons toujours cru que cet Ou
vrage, quoique publié sous le nom d'An
dré Duchesne , n'étoit point de ce célèbre'
Auteur. II ne faut que le lire avec une*'
médiocre attention pour s'en appercevoic
: Mauvais stile, défaut de critique ,>
excès de crédulité , tout sent une maint*
qui ne cherche qu'à accumuler des Phra
ses , pour produire enfin un Livre com
posé de choses communes , & qu'on trou
ve dans plusieurs autres Ouvrages', eo-'
qui est bien éloigné du génie & de la ca
pacité d'André Duchesne.
Mais ce qui a achevé de nous con
vaincre fur ce point , c'est le témoignage
d'un Sçavant du premier ordre & des plus
respectables. Il faut d'abord observer que
la première Edition de ce Livre n'est pas
celle de.i 6 l e. marquée ci dessus par no
tre Editeur. Il s'en trouve une autre de
1609. dont il y a un exemplaire dans la
Bibliothèque de S. Germain des Prez ,
faite à Paris, chez Jean Petit Pas. En
second lieu, on lit à la tête de cet Exem
plaire de 1609. les paroles qui suivent,
cuites -
$4* MERCURE DE FRANGÉ,
éiîrites de la main du célèbre Dom' Lire
Dachery ^ contemporain & ami d' André?
Ducheíne.
Ce présent Livre n'ejì point de M. Ditchefìte
, je Pai ffudesà propre bouche r
ifant venu voir quelque chose k notre Bibliothequei
On P a mis fous son nom pour
le mieux vendre , parce que de soi il nevaut
rien , ni pour l' Histoire ni pour le
Stile. Le 19. Avril 1640.
Après une attestation si précise , on ne
peut s'empêcher de convenir de ^impo
sture , laquelle a continué àvec plus d»
facilité après la mort de l' Auteur dans:
les Editions qui ont suivi , jusqu'à sou
tenir que les deux dernieres ont été re
vues & corrigées par F. Duchesne sort
Fils, &c. Quand même il seroit vrai que
le Fils ait eu quelque part à ces dernieres
Editions , ce qui est extrêmement dou
teux , il doit toujours passer pour certaia
que l'Ouvrage original n'est point de son
Père : Au reste l' Auteur des Mémoires
n'a erré Ià dessus qu'après le P. le Long ,
qui l'acopié fur l'article d'André Duches
ne , & après plusieurs autres.
Ce n'est pas la première fois que les1
Libraires , même quelques Auteurs en
ont imposé au Public , en mettant ut»
fiom respectable à la tête d'un Ouvrage
médiocre dans la vue de l'acrediter : C'est
ainsi
FEVRIER. 1730. î4j
•insi qu'on a vu paroître en l'année
1719. un Livre fort superficiel, sous le
nom de M. l'Abbé de Bellegarde , qui
ccrit si poliment , & qui a donné tant de
bons Ouvrages , lequei nous a assure' n'a»-
voir aucune part à celui dor.t on vient de
parler. Mais revenons à notre 8e. vol.
des Mémoires pour l'Histoire des Hom
mes Illustres , Sec. Ce vol. contient la
Vie & le Catalogue des Ouvrages de 37.
Sçavans, dont voici les noms.
Léon Allatius , Emeri Bigot , Lazare
André Bocquillot , Guillaume Budé , Ni*
col. Calliachi , Charles du Cange , Jean
Cocceius , Jacques Cujas , Jean Donne ,
Caffandre Fedele , Claude Fleury , Théo*
phi le Foltngo , Jean Gallois , Th. Qatar
keryijean Gravi us , Nicol. Hartfoel(er ,
Jean Htnn Hottinger , Jacques le Paulmier
de Grantemefnil , Barth. Platine ,
Jean Jovien Pontan , Louis Pontico VirUr
nio , Guill. Poftcl > Etien. Rajficod , Abel
de sainte Marthe Père & Fils , jîbel Louis
de sainte Marthe , Charles de sainte Mar
the , Claude de sainte Marthe , Pierre Sce-r
vole de sainte Marthe , Scevole de saints
Marthe , Scevole & Louis de sainte Mar
the , Jacques Sannazar , Jean-Marie de
la Marque Tilladet , Sebafiien Vaillants
Çharles'VerarÂQ. ..f . '. . v .1
1/ Article. de Guillaume Budé nous »
fan»
tajf. MERCURE* DE PRANOS.
j>aru être l'un des plus curieux de ce vdj.
'& nous croyons que nos Lecteurs nous
^■sçauront gré de le trouver ici , tel que
l'Auteur des Mémoires Ta présenté au
public. Guillaume Budé , ( en Latin Budoeus)
naquit à Paris l'an 14.67. de Jeajn
JBudé , Seigneur d'Yerre , de Villers fur
Marne , & de Marly , Grand-Audianciex
en la Chancellerie de France , & de Ca
therine le Picart*
\ On lui donna des Maîtres dès-qu'il pa,-
lut capable d'apprendre quelque choses
mais la barbarie qui regnoit alors dans lc$
.Collèges , le dégoûta , Ôc l'empêcha de
faire de grands progr.es. C'étoit la cou
tume de pafler à l'étude da Droit , dè$
qu'on sçavoit un peu de Latin , il la sui
vit comme les autres, & alla à Orléans
pour ce sujet ; mais il . y demeura trois ans
fans y rien apprendre. Il n'entendoit pres-
,que point les Auteurs Latins , il n'çtoit
J>as par conséquent eu état de comprendre
es Ecrits & les Leçons de ses Professeurs.
Ainsi il revint à Paris a,ussi ignorant qu'il
,«n éroit parti , & plus dégoûté de l'étude
jqu'il ne l'étoit auparavant. ' . ■
Les plaisirs firent alors toute son occu
pation , ôc il s'adonna particulièrement £
îa chaffe ; mais lorsque le premier feu de
la jeunesse se fût rallenti en lui , il se sentit
coat d'un coup saisi d'une oasEon si vios
FEVRIER. 175©. ?4I
tente pour l'étude , qu'il s'y donna avec
une ardeur inexprimable. Il renonça dès*
j lors à tous les divertissemens & à toutes
j les compagnies ; & regardant comme per
du tout le tems qui n'étoit point employé
àl'étude , il regrettoitles heures qu'il étoit
obligé de donner à (es repas & à son som
meil.
Ce qu'il y a voit de fâcheux pour lui t
1 c'est qu'il n'avoit personne qui pût le dí*
íiger dans ses études, & lui montrer la
route qu'il devojt tenir pour ne poinc
perdre un tems qui lui étoit si précieux»
îl ne fçavoit quels étoient les Auteurs
qu'il de voit lire les premiers , & il se trompoit
souvent dans le choix qu'il en faisoit.
Ce ne fut que dans la fuite , qu'il
apprit par fa propre expérience , & pat
son propre gout , ceux qu'il devoit préfé
rer aux autres. Ainsi il ne dut qu'à luimême
les progtès qu'il fit , par son appli-
I cation assidue dans les Belles-Lettres.
II ne fut non plus redevable qu'à son
travail de la connoissance qu'il acquk de
ia Langue Grecque , il eût, à la vérité, un
Maître nommé George Hermonyme , qui
L se disok natif de Lacédémone , "mais qui
ne sçachant pas grand chose ., ne pouvoit
lui en apprendre beaucoup. Quelques en
tretiens qu'il eut avec Jean Lascaris lui
furent plus utiles , . & les instructions dç
* 4* MERCURE DE FRANCE,
ce grand homme lui soumirent les moy em
d'avancer avec plus de succès dans les
çonnoiffances qu'il s'étoit proposé d'ac
quérir.
Les Belles -Lettres ne l'occuperent pas
jtellement, qu'il négligeât les autres Scien
ces» U apprit les Mathématiques de Jean
Faber, dont il épuisa bientôt le sçavoir ,
par la facilité qu'il ayoit à comprendre
tout ce qu'il lui disoit.
Cependant son Père n« le vòïoit qu'ar
yec peine attaché si fort à l'ctude , appré
hendant que cer attachement ne préjudifiât
à ses affaires domestiques , & ne nui
sît à fa santé ; mais tout ce qu'il pût lui
dire fur ce sujet fut inutile , fa passion
l'emporta fur les remontrances. Au reste
íes craintes de son Pere n'eureqt lieu qu'en
partie ; car il ne négligea jamais ses affai
res , il eut foin au contraire de se parta
gé» entre-elles & ses études. Mais fa santé
en souffrit , car son assiduité au travail lui
procura une maladie , qui le tourmenta à
différentes reprises , pendant plus de vingt
»ns , &c qui le rendit mélancolique & cha
grin. Le triste état où il se trouv,oit alors,
n'étoit point capable de le dégoûter de
J'érude , il profìtojt des niomens de relâ
che qu'il avoit, pour s'y livrer de nou
veau. C'est même pendant cc tems - là
qu'il a composé la plupart de ses QuÏJWgefe
Quelque*
TEVR1ER. 1730. ?4f
Quelques Auteurs on mis en question :
S'il étoit à propos pour un Homme de
Lettres de íe marier , & se sont servi de
Pexemple de Budé pour soutenir l'affirmative.
Il se maria en effet , & si l'on et»
croit un de ces Auteurs > fa femme bienloin
de l'empêcher d'étudier , lui servoit
de second , en lui cherchant les passages ,
& les Livres dont il avoit «besoin, Il falloir,
^u'il l'eût connue de ce goût-là des avant
ion mariage , puisque, le jeùr même de
ses noces il se de'roba trois heures ait
moins , pour les passer avec ses Livres.
Louis le Roy , de'crit ainsi la manière,
dont il avoit coutume de passer lá jour
née : En se levant, il se mettoit au travail,
& étudioit jusqu'à l'heure de dîner j avant
que de se mettre à table , il fáisoit un peu
d'exercice pour se donner de l'appetit.
Après le repas, il passoit deux heures »
Causer avec sa famille , ou ses amis , après
quoi il recommençoit à travailler jusqu'à»
souper. Comme ce repas íe saisott ordi
nairement fort tard , i! ne faisoit jamais
rien après. Ii avoit une Maison de Cam
pagne à saint Maur , où il demeuroic assez
volontiers , parce que son e'rude n'y étoiç
point interrompue par des visites , com
me à la Ville.
t II vécut fort long-tems dans l'obscuriré
{Le son Cabinet , mais son rne'rir,e j'eq tira:
$4 S MERCURE DE FRANCE.
Qay de Rochefort , Chancelier de Fran.
çe , le fit çonnoître au Roy Charles VIII.»
qui voalut le voir , Sc le fie venir auprès
de luiî mais il ne vécut pas assez après
çela, pour lui faire du bien, .. i
Louis XIL successeur de Charles, l'en»,
voya deux fois en Italie pour quelques;
négociations , & le mit ensuite au nombre,
de íes Secrétaires. 11 youlur aussi le fairç,
Conseiller au, Parlement de Paris ; maiç.
Budé refusa cette Charge , qui lui aurpir^
çauíé trop de distractions, ÔC qui lui auroit
enlevé un tems , qu'il aimoit mieu%
donner à ses études.
II se vit cependanc dans la fuite exposd
à ces distractions qu'il craignoit. Le Roy
Fcançois I. qui aimoit les Gens de Lettres,
k fit venir auprès de lui à Ardres » où
5'e'toit rendu en 1520. pour s'aboucher,
avec le Roy d'Angleterre. L' Auteur de fa.
vie remarque , que ce fut alors pour 1%
première fois que Budé eut accès auprès
de lui : ce qui détruit cç que Yarillas aavancé
dans son Histoire da François I<
(a) que ce Prince l'envoya à Rome etj
Ambassade en iji 5. auprès du Pap©
Léon X. fait suppose par cet Auteur ,
qu'iL accompagne d'une reflexion , qui
n'est pas plus vraie. » Budé, dit-il , n'ér
«toit pas mal adroit co négociation ,
Çà) 144$ u fi i -; "---.-< -i
\i'i.< C « quoiqu'il
I 'J TE V RIE R. 17300 j4f
B'qqoiqu'il eut vécu dans Paris , fans au-
» cre conversation que celle de ses Livres, «c
| -Comment Varillas a-r-il pu parler ainsi,
puisque Budé avoit déja e'té deux fois ea
! Italie pour différentes négociations ?
I François I. ayant pris gout à la convec*
/ation de Budé , voulut ,1'avoir toujours
attprès de lui , lui confia le foin de fa Bi
bliothèque , & lui donna une Charge de
Maître des Requêtes , dont il fut pourvu
}e2 I. Août 1522. La. Ville de Paris l'é*
lût la même anne'e Prevôc des Mar»
chands. . • ,
• Il aimoit trop les Sciences , pour ne pas
faire servir à leur avantage le crédit qu'il
> atoit auprès du Roy > il fut un des prin
cipaux Promoteurs de l'érection du CoU
lege Royal , & de la Fondation des Chai-s
res , qui y fur faite fous le Règne ^ de
François I.
, Il se brouilla avec Antoine du Prat t
Chancelier de France , ce qui l'obligea
pendant quelque temsà n'aller à la Cour,
qu'autanc que le devoir de fa Charge l'y
engageoit. M? is ce tems ne dura pas ; car
Guillaume. Po;;et qui l'aimoit , ayant e'té
fait Chancelier , voulut qu'il demeurât
continuellement auprès de lui.
Un voyage qu'il fit avec lui en 15 40.
fur les côres de Normandie , à la fuite duj!
&oy , qui y alloit chercher du rafraîchisr.,
. ^ * G ij sèment
^5<> MERCURE DE FRANCBj
íement dans les chaleurs excessives da
cette année , lui fut funeste. Il y ga*
gna une fièvre , qui lui paroissant dan»
gereuse , lui fit naître l'envie de se faire
porter chez lui , pour mourir du moins
au milieu de fa Famille.
De retour à Paris , il vit bien tôt son
mal s'augmenter , & il mourut le 23,
Août de la même année 1540. âgé de 73.
ans. Plusieurs Auteurs se sont trompés fut
la datte de fa mort La Croix du Maine
en la fixant au z 5. Août. S ponde , en la
mettant au 2©. Août , & Pierre de saint
Romuald, en l'avançant au $. Août de
la même année. Le P. Garasse dans fa
Doctrine curieuse , le fait mourir en 1 5 ; 9.
L'erreurde M. de Launoy est encore plus
considérable , puisqu'il recule (a) sa mort
jusqu'au premier Septembre 1 ç 7 3.
Budé fut enterré le x6 . Août à saint Ni»
colas des Champs 3 fans aucune pompe ,
comme il l'avoit ordonné par son Testa»
ment , ou il dit : m Je veux être porté en
«•terre de nuit , & íans semonce , à une
» Torche , ou à deux seulement , & ne
» veux être proclamé à l'Eglise , ne à la
» Ville , ne alors que je ferai inhumé s ne
>le lendemain; car je n'approuverai ja-
>mais la coutume des cérémonies lugu-
» bres , & pompes funèbres*. . . Je détens
(s) Hijì. Gjmn. ì{*v»rr. f» 8.8 xì. . -
*■ # qu'or*
LEVRIER, i^rjd. jç»
»qn'on m'en fasse, tant pour ce, quepout
»autres choses , qui ne se peuvent faire
asans scandale ; & si je ne veux qu'il y aie
^cérémonie funèbre , ne autre Représerr.
Mtarion à l'entour du lieu où je serai en*
«terré , le long de l'anne'e de mon trépas ,
«parce qu'il me semble imitation des Ce-
Dnotaphes , donc les Gentils ancienne-*
»xment ont asé#
C'étoit ici le lieu de placer rEpigram»
me , que fit Melain de saint Gelais , à
l'oecasion de la mort de Budé, & de la
disposition Testamentaire qu'on vient de
lire. 11 est à croire que l'Editeur des Mé
moires ne l'a pas connue > on ne fera pas
fâché de la trouver ici.
Qui est celui que tout le monde fuit >
tas ! c'est Budé au Cercueil étendu.
Pourquoi n'ont fait les Cloches plus grand]
bruk?
Son nom fans Cloche est aflez épanda;
Que n'a-t on plus en Torches dépendu í
Suivant la mode accoutumée & sainte »
Afin qu'il sut par l'obscur entendu
Que des François la lumière est éteinte*
Nous donnerons dans le prochain Mer*
Cure la fuite de ce Mémoire*
des Hommes Illustres dans la République
des Lettres > avec un Catalogue raisonné
de leurs Ouvrages , tome 8 . de 40 8 . pages
fans les Tables. A Paris , chez. Bnaffon „
rué S. làcques , a la Science. 1730.
. A la tête de ce 8 e. volume est un coure
Avertissement , qui apprend au Lecteut
une chose auíïl agréable que nécessaire á
l'égard de ceux qui aiment Inexactitude Sc
la perfection dans les entreprises Litté
raires. L' Auteur de ces Mémoires se pré
pare, nous dit-on , à donner dans le di
xième vol. qui paroîtra fur la fin du mois
de Décembre 1729. les corrections fur les
neuf vol. qui le précédent ^ avec les Ad
ditions qu'on lui a déja données. Il invite
de plus ceux qui auront reconnu quelque
faute , quelque îegere qu'elle puisse être ,
ou qui sçauront <juelques faits oubliez ,
ou enfin qui auront quelques Additions, à
les lui communiquer , se chargeant d'in
struire le Public du nom de ceux dont il
auxar
34© MERCURE Í)E FRANGÉ,
aura receu des remarques utiles. On aver»
tic aussi que le dixième vol. contiendra en
core des Tables générales , Alphabéti
que, Nécrologique ì 6c selon l'ordre des
Matières de ce qui est contenu dans les
neuf premiers vol enfin qu'on pourrs
s'addrefler au Libraire qui vend ce Livre ^
pour tout ce qu'on voudra faire tenir ìt
l'Auteur.
Nous profiterons de l'invitation conte
nue dans cet Avertissement , pour conti
nuer de parler avec franchise en faveur de
la vérité, & pour fa perfection de cet~Ou->
Vrage , quand l'occaíìon s'en présentera.1
Le 7e. vol. en offroit une , mais il n'étfoit
pas encore rems de publier notre Re
niai que , qui n'auroit pu passer alors que
pour une conjecture. Nous. avons depuisdécouvert
que cette Remarque peut être
solidement appuyée. Voici de quoi il s'a
git1. Dans le Catalogue des Ouvrages
d'André Ducheshe , qui est à la fin du
Mémoire quile concerne dans le 7e. tome
pag. 32}'. on trouve art. 6. le Titre qui
fuit : Les Antiquitez. & Recherches des
Villes , Châteaux & Places remarquables
de toute la France■", suivant l'ordre des huit
Parlement. Paris i (íi&. in-%. On ajoute
que' cettepremiere Edition a été suivie de
celles dis années 16 14. 1611. 1619.
iôji. 1637. úv8. Item, rêvât s corri'
g"*
Lévrier. 1730. 3 4 r
gées & augmentées par François Ducbejhe.
Paris 1 £47. in 8.& 166%. z. vol.in-ii.'
L'Arciclc finit par ces paroles Ce Livre
est mal écrit , mais il contient des choses;
curieuses , la derniere Edition que Duchesne
le Fils a procure'e est la meilleure.*
Nous avons toujours cru que cet Ou
vrage, quoique publié sous le nom d'An
dré Duchesne , n'étoit point de ce célèbre'
Auteur. II ne faut que le lire avec une*'
médiocre attention pour s'en appercevoic
: Mauvais stile, défaut de critique ,>
excès de crédulité , tout sent une maint*
qui ne cherche qu'à accumuler des Phra
ses , pour produire enfin un Livre com
posé de choses communes , & qu'on trou
ve dans plusieurs autres Ouvrages', eo-'
qui est bien éloigné du génie & de la ca
pacité d'André Duchesne.
Mais ce qui a achevé de nous con
vaincre fur ce point , c'est le témoignage
d'un Sçavant du premier ordre & des plus
respectables. Il faut d'abord observer que
la première Edition de ce Livre n'est pas
celle de.i 6 l e. marquée ci dessus par no
tre Editeur. Il s'en trouve une autre de
1609. dont il y a un exemplaire dans la
Bibliothèque de S. Germain des Prez ,
faite à Paris, chez Jean Petit Pas. En
second lieu, on lit à la tête de cet Exem
plaire de 1609. les paroles qui suivent,
cuites -
$4* MERCURE DE FRANGÉ,
éiîrites de la main du célèbre Dom' Lire
Dachery ^ contemporain & ami d' André?
Ducheíne.
Ce présent Livre n'ejì point de M. Ditchefìte
, je Pai ffudesà propre bouche r
ifant venu voir quelque chose k notre Bibliothequei
On P a mis fous son nom pour
le mieux vendre , parce que de soi il nevaut
rien , ni pour l' Histoire ni pour le
Stile. Le 19. Avril 1640.
Après une attestation si précise , on ne
peut s'empêcher de convenir de ^impo
sture , laquelle a continué àvec plus d»
facilité après la mort de l' Auteur dans:
les Editions qui ont suivi , jusqu'à sou
tenir que les deux dernieres ont été re
vues & corrigées par F. Duchesne sort
Fils, &c. Quand même il seroit vrai que
le Fils ait eu quelque part à ces dernieres
Editions , ce qui est extrêmement dou
teux , il doit toujours passer pour certaia
que l'Ouvrage original n'est point de son
Père : Au reste l' Auteur des Mémoires
n'a erré Ià dessus qu'après le P. le Long ,
qui l'acopié fur l'article d'André Duches
ne , & après plusieurs autres.
Ce n'est pas la première fois que les1
Libraires , même quelques Auteurs en
ont imposé au Public , en mettant ut»
fiom respectable à la tête d'un Ouvrage
médiocre dans la vue de l'acrediter : C'est
ainsi
FEVRIER. 1730. î4j
•insi qu'on a vu paroître en l'année
1719. un Livre fort superficiel, sous le
nom de M. l'Abbé de Bellegarde , qui
ccrit si poliment , & qui a donné tant de
bons Ouvrages , lequei nous a assure' n'a»-
voir aucune part à celui dor.t on vient de
parler. Mais revenons à notre 8e. vol.
des Mémoires pour l'Histoire des Hom
mes Illustres , Sec. Ce vol. contient la
Vie & le Catalogue des Ouvrages de 37.
Sçavans, dont voici les noms.
Léon Allatius , Emeri Bigot , Lazare
André Bocquillot , Guillaume Budé , Ni*
col. Calliachi , Charles du Cange , Jean
Cocceius , Jacques Cujas , Jean Donne ,
Caffandre Fedele , Claude Fleury , Théo*
phi le Foltngo , Jean Gallois , Th. Qatar
keryijean Gravi us , Nicol. Hartfoel(er ,
Jean Htnn Hottinger , Jacques le Paulmier
de Grantemefnil , Barth. Platine ,
Jean Jovien Pontan , Louis Pontico VirUr
nio , Guill. Poftcl > Etien. Rajficod , Abel
de sainte Marthe Père & Fils , jîbel Louis
de sainte Marthe , Charles de sainte Mar
the , Claude de sainte Marthe , Pierre Sce-r
vole de sainte Marthe , Scevole de saints
Marthe , Scevole & Louis de sainte Mar
the , Jacques Sannazar , Jean-Marie de
la Marque Tilladet , Sebafiien Vaillants
Çharles'VerarÂQ. ..f . '. . v .1
1/ Article. de Guillaume Budé nous »
fan»
tajf. MERCURE* DE PRANOS.
j>aru être l'un des plus curieux de ce vdj.
'& nous croyons que nos Lecteurs nous
^■sçauront gré de le trouver ici , tel que
l'Auteur des Mémoires Ta présenté au
public. Guillaume Budé , ( en Latin Budoeus)
naquit à Paris l'an 14.67. de Jeajn
JBudé , Seigneur d'Yerre , de Villers fur
Marne , & de Marly , Grand-Audianciex
en la Chancellerie de France , & de Ca
therine le Picart*
\ On lui donna des Maîtres dès-qu'il pa,-
lut capable d'apprendre quelque choses
mais la barbarie qui regnoit alors dans lc$
.Collèges , le dégoûta , Ôc l'empêcha de
faire de grands progr.es. C'étoit la cou
tume de pafler à l'étude da Droit , dè$
qu'on sçavoit un peu de Latin , il la sui
vit comme les autres, & alla à Orléans
pour ce sujet ; mais il . y demeura trois ans
fans y rien apprendre. Il n'entendoit pres-
,que point les Auteurs Latins , il n'çtoit
J>as par conséquent eu état de comprendre
es Ecrits & les Leçons de ses Professeurs.
Ainsi il revint à Paris a,ussi ignorant qu'il
,«n éroit parti , & plus dégoûté de l'étude
jqu'il ne l'étoit auparavant. ' . ■
Les plaisirs firent alors toute son occu
pation , ôc il s'adonna particulièrement £
îa chaffe ; mais lorsque le premier feu de
la jeunesse se fût rallenti en lui , il se sentit
coat d'un coup saisi d'une oasEon si vios
FEVRIER. 175©. ?4I
tente pour l'étude , qu'il s'y donna avec
une ardeur inexprimable. Il renonça dès*
j lors à tous les divertissemens & à toutes
j les compagnies ; & regardant comme per
du tout le tems qui n'étoit point employé
àl'étude , il regrettoitles heures qu'il étoit
obligé de donner à (es repas & à son som
meil.
Ce qu'il y a voit de fâcheux pour lui t
1 c'est qu'il n'avoit personne qui pût le dí*
íiger dans ses études, & lui montrer la
route qu'il devojt tenir pour ne poinc
perdre un tems qui lui étoit si précieux»
îl ne fçavoit quels étoient les Auteurs
qu'il de voit lire les premiers , & il se trompoit
souvent dans le choix qu'il en faisoit.
Ce ne fut que dans la fuite , qu'il
apprit par fa propre expérience , & pat
son propre gout , ceux qu'il devoit préfé
rer aux autres. Ainsi il ne dut qu'à luimême
les progtès qu'il fit , par son appli-
I cation assidue dans les Belles-Lettres.
II ne fut non plus redevable qu'à son
travail de la connoissance qu'il acquk de
ia Langue Grecque , il eût, à la vérité, un
Maître nommé George Hermonyme , qui
L se disok natif de Lacédémone , "mais qui
ne sçachant pas grand chose ., ne pouvoit
lui en apprendre beaucoup. Quelques en
tretiens qu'il eut avec Jean Lascaris lui
furent plus utiles , . & les instructions dç
* 4* MERCURE DE FRANCE,
ce grand homme lui soumirent les moy em
d'avancer avec plus de succès dans les
çonnoiffances qu'il s'étoit proposé d'ac
quérir.
Les Belles -Lettres ne l'occuperent pas
jtellement, qu'il négligeât les autres Scien
ces» U apprit les Mathématiques de Jean
Faber, dont il épuisa bientôt le sçavoir ,
par la facilité qu'il ayoit à comprendre
tout ce qu'il lui disoit.
Cependant son Père n« le vòïoit qu'ar
yec peine attaché si fort à l'ctude , appré
hendant que cer attachement ne préjudifiât
à ses affaires domestiques , & ne nui
sît à fa santé ; mais tout ce qu'il pût lui
dire fur ce sujet fut inutile , fa passion
l'emporta fur les remontrances. Au reste
íes craintes de son Pere n'eureqt lieu qu'en
partie ; car il ne négligea jamais ses affai
res , il eut foin au contraire de se parta
gé» entre-elles & ses études. Mais fa santé
en souffrit , car son assiduité au travail lui
procura une maladie , qui le tourmenta à
différentes reprises , pendant plus de vingt
»ns , &c qui le rendit mélancolique & cha
grin. Le triste état où il se trouv,oit alors,
n'étoit point capable de le dégoûter de
J'érude , il profìtojt des niomens de relâ
che qu'il avoit, pour s'y livrer de nou
veau. C'est même pendant cc tems - là
qu'il a composé la plupart de ses QuÏJWgefe
Quelque*
TEVR1ER. 1730. ?4f
Quelques Auteurs on mis en question :
S'il étoit à propos pour un Homme de
Lettres de íe marier , & se sont servi de
Pexemple de Budé pour soutenir l'affirmative.
Il se maria en effet , & si l'on et»
croit un de ces Auteurs > fa femme bienloin
de l'empêcher d'étudier , lui servoit
de second , en lui cherchant les passages ,
& les Livres dont il avoit «besoin, Il falloir,
^u'il l'eût connue de ce goût-là des avant
ion mariage , puisque, le jeùr même de
ses noces il se de'roba trois heures ait
moins , pour les passer avec ses Livres.
Louis le Roy , de'crit ainsi la manière,
dont il avoit coutume de passer lá jour
née : En se levant, il se mettoit au travail,
& étudioit jusqu'à l'heure de dîner j avant
que de se mettre à table , il fáisoit un peu
d'exercice pour se donner de l'appetit.
Après le repas, il passoit deux heures »
Causer avec sa famille , ou ses amis , après
quoi il recommençoit à travailler jusqu'à»
souper. Comme ce repas íe saisott ordi
nairement fort tard , i! ne faisoit jamais
rien après. Ii avoit une Maison de Cam
pagne à saint Maur , où il demeuroic assez
volontiers , parce que son e'rude n'y étoiç
point interrompue par des visites , com
me à la Ville.
t II vécut fort long-tems dans l'obscuriré
{Le son Cabinet , mais son rne'rir,e j'eq tira:
$4 S MERCURE DE FRANCE.
Qay de Rochefort , Chancelier de Fran.
çe , le fit çonnoître au Roy Charles VIII.»
qui voalut le voir , Sc le fie venir auprès
de luiî mais il ne vécut pas assez après
çela, pour lui faire du bien, .. i
Louis XIL successeur de Charles, l'en»,
voya deux fois en Italie pour quelques;
négociations , & le mit ensuite au nombre,
de íes Secrétaires. 11 youlur aussi le fairç,
Conseiller au, Parlement de Paris ; maiç.
Budé refusa cette Charge , qui lui aurpir^
çauíé trop de distractions, ÔC qui lui auroit
enlevé un tems , qu'il aimoit mieu%
donner à ses études.
II se vit cependanc dans la fuite exposd
à ces distractions qu'il craignoit. Le Roy
Fcançois I. qui aimoit les Gens de Lettres,
k fit venir auprès de lui à Ardres » où
5'e'toit rendu en 1520. pour s'aboucher,
avec le Roy d'Angleterre. L' Auteur de fa.
vie remarque , que ce fut alors pour 1%
première fois que Budé eut accès auprès
de lui : ce qui détruit cç que Yarillas aavancé
dans son Histoire da François I<
(a) que ce Prince l'envoya à Rome etj
Ambassade en iji 5. auprès du Pap©
Léon X. fait suppose par cet Auteur ,
qu'iL accompagne d'une reflexion , qui
n'est pas plus vraie. » Budé, dit-il , n'ér
«toit pas mal adroit co négociation ,
Çà) 144$ u fi i -; "---.-< -i
\i'i.< C « quoiqu'il
I 'J TE V RIE R. 17300 j4f
B'qqoiqu'il eut vécu dans Paris , fans au-
» cre conversation que celle de ses Livres, «c
| -Comment Varillas a-r-il pu parler ainsi,
puisque Budé avoit déja e'té deux fois ea
! Italie pour différentes négociations ?
I François I. ayant pris gout à la convec*
/ation de Budé , voulut ,1'avoir toujours
attprès de lui , lui confia le foin de fa Bi
bliothèque , & lui donna une Charge de
Maître des Requêtes , dont il fut pourvu
}e2 I. Août 1522. La. Ville de Paris l'é*
lût la même anne'e Prevôc des Mar»
chands. . • ,
• Il aimoit trop les Sciences , pour ne pas
faire servir à leur avantage le crédit qu'il
> atoit auprès du Roy > il fut un des prin
cipaux Promoteurs de l'érection du CoU
lege Royal , & de la Fondation des Chai-s
res , qui y fur faite fous le Règne ^ de
François I.
, Il se brouilla avec Antoine du Prat t
Chancelier de France , ce qui l'obligea
pendant quelque temsà n'aller à la Cour,
qu'autanc que le devoir de fa Charge l'y
engageoit. M? is ce tems ne dura pas ; car
Guillaume. Po;;et qui l'aimoit , ayant e'té
fait Chancelier , voulut qu'il demeurât
continuellement auprès de lui.
Un voyage qu'il fit avec lui en 15 40.
fur les côres de Normandie , à la fuite duj!
&oy , qui y alloit chercher du rafraîchisr.,
. ^ * G ij sèment
^5<> MERCURE DE FRANCBj
íement dans les chaleurs excessives da
cette année , lui fut funeste. Il y ga*
gna une fièvre , qui lui paroissant dan»
gereuse , lui fit naître l'envie de se faire
porter chez lui , pour mourir du moins
au milieu de fa Famille.
De retour à Paris , il vit bien tôt son
mal s'augmenter , & il mourut le 23,
Août de la même année 1540. âgé de 73.
ans. Plusieurs Auteurs se sont trompés fut
la datte de fa mort La Croix du Maine
en la fixant au z 5. Août. S ponde , en la
mettant au 2©. Août , & Pierre de saint
Romuald, en l'avançant au $. Août de
la même année. Le P. Garasse dans fa
Doctrine curieuse , le fait mourir en 1 5 ; 9.
L'erreurde M. de Launoy est encore plus
considérable , puisqu'il recule (a) sa mort
jusqu'au premier Septembre 1 ç 7 3.
Budé fut enterré le x6 . Août à saint Ni»
colas des Champs 3 fans aucune pompe ,
comme il l'avoit ordonné par son Testa»
ment , ou il dit : m Je veux être porté en
«•terre de nuit , & íans semonce , à une
» Torche , ou à deux seulement , & ne
» veux être proclamé à l'Eglise , ne à la
» Ville , ne alors que je ferai inhumé s ne
>le lendemain; car je n'approuverai ja-
>mais la coutume des cérémonies lugu-
» bres , & pompes funèbres*. . . Je détens
(s) Hijì. Gjmn. ì{*v»rr. f» 8.8 xì. . -
*■ # qu'or*
LEVRIER, i^rjd. jç»
»qn'on m'en fasse, tant pour ce, quepout
»autres choses , qui ne se peuvent faire
asans scandale ; & si je ne veux qu'il y aie
^cérémonie funèbre , ne autre Représerr.
Mtarion à l'entour du lieu où je serai en*
«terré , le long de l'anne'e de mon trépas ,
«parce qu'il me semble imitation des Ce-
Dnotaphes , donc les Gentils ancienne-*
»xment ont asé#
C'étoit ici le lieu de placer rEpigram»
me , que fit Melain de saint Gelais , à
l'oecasion de la mort de Budé, & de la
disposition Testamentaire qu'on vient de
lire. 11 est à croire que l'Editeur des Mé
moires ne l'a pas connue > on ne fera pas
fâché de la trouver ici.
Qui est celui que tout le monde fuit >
tas ! c'est Budé au Cercueil étendu.
Pourquoi n'ont fait les Cloches plus grand]
bruk?
Son nom fans Cloche est aflez épanda;
Que n'a-t on plus en Torches dépendu í
Suivant la mode accoutumée & sainte »
Afin qu'il sut par l'obscur entendu
Que des François la lumière est éteinte*
Nous donnerons dans le prochain Mer*
Cure la fuite de ce Mémoire*
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Résumé : Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Le texte est un extrait des 'Mémoires pour servira l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres', tome 8, publié à Paris en 1730. L'auteur annonce des corrections et des additions pour les neuf volumes précédents dans le dixième volume, prévu pour décembre 1729, et invite les lecteurs à signaler toute erreur ou information erronée. Le septième volume contenait une remarque confirmée depuis, concernant une erreur sur un ouvrage attribué à André Duchesne. Le catalogue des œuvres de Duchesne mentionne 'Les Antiquitez & Recherches des Villes, Châteaux & Places remarquables de toute la France', avec plusieurs éditions. Cependant, l'auteur des Mémoires affirme que cet ouvrage n'est pas de Duchesne, en se basant sur le témoignage de Dom Louis D'Achery, qui a déclaré que le livre n'était pas de Duchesne et avait été publié sous son nom pour mieux se vendre. Le texte mentionne également d'autres cas où des libraires ou des auteurs ont attribué des œuvres médiocres à des noms respectables pour les accréditer. Le huitième volume des Mémoires contient les vies et les catalogues des œuvres de 37 savants, dont Guillaume Budé. La vie de Budé est détaillée, soulignant son parcours académique, son assiduité dans les études, et son rôle dans la promotion des sciences sous le règne de François I. Budé a refusé des charges qui auraient pu le distraire de ses études, mais a finalement été nommé maître des requêtes et prévôt des marchands de Paris. Il a également joué un rôle clé dans la création du Collège Royal et la fondation des chaires sous François I. Le texte relate la mort de Budé, survenue en 1540. Budé, âgé de 73 ans, contracta une fièvre lors d'un séjour en Normandie et décida de retourner à Paris pour mourir entouré de sa famille. Il décéda le 23 août 1540. Plusieurs auteurs ont commis des erreurs sur la date de sa mort, la situant entre le 25 et le 31 août, ou même en 1573. Budé fut enterré le 26 août à Saint-Nicolas-des-Champs sans cérémonie, conformément à ses volontés exprimées dans son testament. Il souhaitait une inhumation discrète, sans pompe funèbre, et sans proclamation à l'église ou à la ville. Il comparait les cérémonies funèbres à des pratiques païennes. Le texte mentionne également une épigramme de Melchior de Saint-Gelais sur la mort de Budé et ses dispositions testamentaires.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 947-959
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres. Avec un Catalogue raisonné de leurs Ouvrages, Tome IX. de 410. pages sans les Tables. A Paris, chez Briasson, rüe S. Jacques, à la Science, MDCC. XXIX.
Début :
MARTIAL D'AUVERGNE, l'un des 27. Sçavans dont il est parlé dans [...]
Mots clefs :
Amour, Ouvrage, Auteurs, Martial d'Auvergne, Savant, Paris, Parlement, Arrêts
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres. Avec un Catalogue raisonné de leurs Ouvrages, Tome IX. de 410. pages sans les Tables. A Paris, chez Briasson, rüe S. Jacques, à la Science, MDCC. XXIX.
MEMOIRES pour fervir à l'Hiftoire
des Hommes Illuftres dans la République
des Lettres. Avec un Catalogue raisonné
de leurs Ouvrages , Tome IX. de
pages fans les Tables. A Paris , chez
Briaffon , rue S. Jacques , à la Science ,
M. DCC . XXIX .
Ma ,
410 .
ARTIAL D'AUVERGNE , l'un des
27. Sçavans dont il eft parlé dans
le IX Volume , nous a paru mériter une
E iiij
atten1948
MERCURE DE FRANCE
attention particuliere , par le genre &
par la gayeté de fes Ouvrages. Voici ce
qu'en rapporte le P. Niceron , p . 171 .
Cet Auteur eft peu connu ; on ne convient
pas même du Pays dont il étoit. La
Croix du Maine prétend , que quoiqu'il
portât le nom de Martial d'Auvergne , il
étoit cependant Limoufin ; mais il eft feul
de ce fentiment , & l'on fçait qu'il eft peu
exact , & que fouvent il n'eft pas fûr de
s'en rapporter à lui. Il s'eft peut- être imaginé
que cela étoit ainfi cela étoit ainsi , parce que Martial
eft un nom de Baptême fort commun
aux Limoufins , à caufe de S. Martial
Apôtre du Pays. Benoît le Court , Commentateur
de fes Arrêts d'Amour , dit
au contraire qu'il étoit du Pays , dont il
portoit le nom , & la chofe eft affez croyable.
Il est vrai qu'il finit fes Vigiles du
Roi Charles VII. par ces mots.
O vous , Meffeigneurs , qui verrez
Les Vigiles , & les lirez ,
Ne prenez pas garde à l'Acteur ,
Car grand faultes y trouverez ;
Mais , s'il vous plaît , le excuferez ,
Veu qu'il eft un nouveau Facteur. /
Martial de Paris.
→
Mais il eſt à croire qu'il ne s'eft furnommé
MAY. 1730. 949
nommé de Paris , que parce qu'il s'y étoit
tranfplanté & marié , comme le dit la
Chronique fcandaleufe .
Ce qu'il y a de fûr , c'eft qu'il étoit
Procureur au Parlement & Notaire au
Châtelet de Paris.
La Croix du Maine dit qu'il fe fouvient
d'avoir lû dans les Hiftoires de France
, qu'il mourut à Paris d'une fievre
chaude , & qu'il fe précipita dans l'eau ,
étant preffé de la fureur de fon mal ;
nouvelle preuve de l'inexactitude de cet
Auteur , qui copie d'imagination ce qu'il
fe fouvient confufément d'avoir lû , fans
pouvoir fe reffouvenir en quel endroit.
Le Livre où la Croix du Maine avoit
lû quelque chofe d'approchant , à ce qu'il
dit , eft la Chronique fcandaleufe. Voici ce
qu'on y trouve touchant notre Auteur.
» Au mois de Juin ( 1466. ) advint que
>> plufieurs hommes & femmes perdirent
>> leur bon entendement , & mêmement à
» Paris il y eut entre autres ung jeune
>> homme nommé Maître Martial d'Au-
» vergne , Procureur en la Cour de Parle-
>> ment , & Notaire au Châtelet de Paris ,
»lequel après qu'il eut été marié trois
»femaines avefques une des filles de Maî-
» tre Jacques Fournier , Confeiller du Roi
» en fadite Cour de Parlement , perdit fon
>> entendement en telle maniere , que
E v jour
le
950 MERCURE DE FRANCE
»jour de S. Jean -Baptifte , environ neuf
heures du matin , une telle frenaifie le
"print , qu'il fe jetta par la fenêtre de fa
» Chambre en la ruë , & fe rompit une
» cuiffe & froiffa tout le corps , & fut en
» grant dangier de mourir.
Il n'en mourut donc pas , comme le dit
la Croix du Maine , qui par une autrefaute
le fait vivre en 1480. pendant qu'il
le fait mourir d'une chute arrivée en
1466 .
Le P. le Long , met fa mort en 1558 ..
je ne fçai fur quelle autorité.
Voila tout ce qu'on fçait de cet Auteur,
qui étoit un des hommes de fon fiecle qui
écrivoit le mieux & avec plus d'efprit ,
& qui eft plus connu par fes Ouvrages
que par les circonftances de fa vie..
Ces Ouvrages font :
1. Les Arrêts d'Amour. Ils furent imprimez
à Paris en 1528. & même auparavant
, fuivant la Croix du Maine , qui
eft toûjours négligent à marquer exactement
l'année des Editions & leur forme..
Mais ils ne parurent accompagnez des
Commentaires Latins de Benoît le Court
qu'en 1533. à Lyon , chez Seb. Gryphius,
in-4. Ces Commentaires ſe trouvent dans :
la plupart des Editions fuivantes , qui font
celles de Lyon , 1538. in-4 de Paris , 1544..
in-8. de Lyon , 1546. in- 8..
M.
MAY. 1730. 951
M. le Duchat croit que c'eft la premiere
où l'on trouve le cinquante-deuxiéme
Arrêt & l'Ordonnance fur le fait des
Mafques. Celle de Paris , 1555. in- 16 , une
in- 16. en 1566. chez Jerôme Mamel , où
je ne fçai pourquoi on à obmis l'Arrêt
52. & l'Ordonnance fur le fait des Mafques.
L'Edition la plus ample de toutes eſt
celle de Rouen , 1587. in- 16 , parce qu'ou
tre les 51. Arrêts compofez originairement
par Martial d'Auvergne , & commentez
par Benoît le Court , outre le
52e Arrêt & l'Ordonnance fur le fait des
Mafques , qui font deux Pieces de l'invention
de Gilles d'Avrigny , dit le Pamphile
, Avocat au Parlement de Paris , elle
contient de plus un 53 Arrêt rendu par
l'Abbé des Cornars , en fes grands jours tenus
à Rouen , pourfervir de Reglement touchant
les arrerages requis par les femmes à
l'encontre des Maris.
Les Arrêts d'Amour le trouvent encore
dans un Recueil intitulé : Proceffus Juris
Jocoferius. Hanoria , 1611. in - 8 . Ce font
des Pieces purement badines , où regne
une grande naïveté , & ç'a été une plaifante
imagination que de les aller commenter
férieuſement , comme a fait Benoit
le Court , qui étale beaucoup d'éru
dition dans fon Commentaire , & y dés
veloppe £ vj
952 MERCURE DE FRANCE
veloppe fort-bien plufieurs queſtions du
Droit Civil , mais dont peu de perſonnes
s'aviſeront d'y aller chercher la folution.
Les Arrêts font écrits en Profe , mais
l'Ouvrage commence par des Vers , dont
je rapporterai ici quelques- uns.
Environ la fin de Septembre ,
Que faillent Violettes & Flours ,
Je me trouvai en la Grand'Chambre ,
Du noble Parlement d'Amours ;
Et advint fi bien qu'on vouloit ,
Les derniers Arrêts prononcer ,
Et que à cette heure on appelloit
Le Greffier pour les commencer.
Si eftoient illec bien fix ,
A les rapporter, & avoir ,
Au milieu defquels je m'affis,
Pour en faire comme eux devoir .'
Le Prefident tout de Drap d'or
Avoit Robbe fourée d'Ermines ,
Et fur le cou un camail d'or ,
Tout couvert d'Emeraudes fines ...
Plufieurs Amans & Amoureux ,
Illec vinrent de divers lieux ,
Et d'Amans courroucez , joyeux.
Par derriere les bancz j'en vis ,
Qui lefdits Arrêts écoutoient ,
Dont les coeurs étoient tant ravis
Qu'il
MAY. 1730. 95.3
Qu'ils ne fçavoient où ils étoient.
Les uns de paour ferroient leurs dens
Les autres emûs & ardens ,
Tremblans comme la feuille en l'arbre
Nul n'eft fi fage , ne parfait ,
Que , quand il oit fon Jugement ,
Il ne foit à moitié deffait ,
Et troublé à l'entendement.
Je laifferai cette matiere ,
Car de cela peu me chaloit
Et raconterai la maniere ,
Comme le Préfident parloit.
Pour donner une idée de ces Arrêts ,
qui ne font pas communs , malgré toutes
les Editions qui s'en font faites , j'en
mettrai ici un , qui eſt le trentiéme.
» Un ami fe plainct de ce que pour fer-
»vir à fa Dame , il ha tout defpendu : la-
»quelle depuis n'a tenu compte de lui :
»concluant à ce qu'elle fuft condamnée à
»l'entretenir comme devant.
» Ceans s'eft plainct un Amoureux d'une
>> fienne Dame , que la ha longuement fer-
>> vie. Difoit que du temps qu'il eût premierement
cognoiffance à elle , il étoit
» bien aife , & avoit du fien largement.
Et quand elle lui demandoit aucune
>>chofe à prêter ou donner , jamais ne lui
euft refufée. Or étoit vrai que pour toujours
954 MERCURE DE FRANCE
» jours fournir aux fraiz & aux grandes
" cheres , chevance y avoit été employée ,
» & tellement que fes caues étoient deve-
» nuës bien baffes . Mais il cuydoit qu'elle
» dueft foubvenir , comme il ha faict à
» elle , & la pria de lui aider & de l'en-
>> tretenir , dont n'a rien voulu faire : ains
» lui ha plainement répondu qu'il përdoit
fon temps , & que puifqu'il n'avoit plus
» de quoi , elle n'en tenoit compte . Et non
>> contente de ce , lui ha faict dire qu'il
"fe retire de chez fes amis ; car plus n'a-
>> voit intention de l'aimer ni de lui faire:
>> aucun bien. Et encore, qui pis eft, fe mocque
de lui devant les autres , en le monf
» trant au doigt : qui lui eft plus de mar-
»tyre , que qui le frapperoit d'un cou-
»teau parmi le coeur. Si requeroit fina-
»
blement ledict Amant , que fadicte Da--
» me fut condemnée , nonobftant fon ad-
» verfité , de l'entretenir feulement en
» amour , & lui faire chere , comme eller
>> fouloit , & qu'il fût préferé devant tous
les autres , attendu mêmement qu'il
» étoit des premiers venus & des anciens
>> Serviteurs..
» De la partie de cette Defendereffe
» fut défendu au contraire , & difoit pour
» fon proffit , que quiconque veult d'a-
>> mours jouir , baille l'argent devant la
main , & que c'eft grande folie de
que
» s'atMA
Y. 1730 9:55
s'attendre à l'éfcuelle d'autruy , s'il ne
» fournit & remplit. Difoit avec ce , que
» le Galand au temps de fa fortune , &
» que les biens luy venoient en dormant ,
» s'eft mefcongneu , & en ha feftoyé un
» & autre , dont il fe fuft bien paffe ;:
» maintenant s'il a difette , il n'eft pas
» trop mal employé ; & quant eft de l'ai-
» mer , elle difoit qu'elle n'y eftoit pas
» tenue ; car les biens & vertus qui ſou-
» loient être en luy n'y font plus. Et ne
» falloit ja ramentevoir les bonnes che-
» res du temps paffé ; car fi ledict Amant
» luy ha faict tant de plaifirs & fervices,.
» auffi lui en ha elle fait plufieurs autres,
qu'il n'eft ja befoin de déclairer . Et puif
» que
il eft ainfi que pauvreté maintenant
» le guerroye , adonc elle n'en veut plus;
>> car auffi au lieu où elle habite , n'y a
» que toute malheureté , & jamais ne s'y
» treuve joye . Et quant eft au furplus pour
» les biens , qu'elle lui offroit un povre
» bâton en fa main pour s'en aller avec :
» la prébende de Va-t'en , pour récom-
» penfe de fes fervices. En concluant que
» à tort fe plaignoit d'elle , & en deman
>> doit dépens.
›
Après lefquelles deffenfes propofées ,
» les Gens d'Amours qui s'étoient adjoint
avec leditAmant, difoient que cette femme
n'étoit pas digne qu'on parlaft d'elle
39
devant
056 MERCURE DE FRANCE
»
» devant les gens de bien ; car par fon
propos jamais n'aymoit que pour ar-
» gent ,
& ainfi confeffoit avoir vendu les
" biens d'Amours . Et qu'elle en ha mef-
» chamment ufé en fon tems , & auffi pa-
>> reillement étoit voix & commune re-
» nommée qu'elle aime toûjours trois ou
» quatre , & qu'elle les fucce jufqu'aux
" os , & puis encore s'en mocque , qui
» eft pis ; car quelque femme que ce foit
jamais ne doibt defprifer le ferviteur
» qui l'a fervie , combien qu'il lui fou-
» vienne de beaucoup de fortunes . Et
» requeroient lefdictes Gens d'Amours à
» l'encontre d'elle qu'elle fut condemnée
» à faire amende honorable , & à lui ren-
» dre & reftituer tout ce qu'elle ha eu de
» luy , & dont il devoit être crû par fon
» ferment , veu la maniere de proceder.
» Et avec ce , qu'elle foit bannie à tou-
» jours dudict Royaume d'Amours , com-
» me indigne d'y converfer.
>>
25
Ce povre Amant pour fes repliques
" difoit qu'en tant qu'il luy touche qu'il
>> eftoit encore content , que tous les biens
qu'il luy avoit donnez demouraffent
pour elle , comme fiens , & ne vouloit
» qu'on luy en oftât rien ; mais requeroit
»feulement qu'elle l'aimaft comme de-
» vant ; & encore promettoit de luy en
» faire. A quoy elle répondit , que quand
elle
MAY. 1730. 957
» elle le verroit , en feroit fon debvoir ;
» mais jufques alors lui confeilloit de
» changer air pour recouvrer fanté
» & obvier qu'il ne fuft pas mala-
» de : & difoit oultre qu'à la contrain-
» dre d'aimer l'on ne sçauroit , & auffi tel
>> amour qui feroit donné par force ne du-
» reroit point ; mais plus de mal faict à
» celuy qui l'obtient , que s'il n'en avoit
» point.
>>
>>
Si ont été les parties ou yes appointées
>> en droit & confeil . Finablement veu le
» Procez & confideré tout ce qu'il falloit
>> confiderer en cette matiere , la Cour dit
» qu'elle condemne cette rebelle femme
» à rendre & reftituer audict Amoureux
tout ce qu'il affermera en fa confcience
» lui avoir baillé & donné , nonobftant
» l'offre
par luy faite de ne luy en vou-
>> loir demander aucune chofe. A laquelle
offre la Cour n'y obtempere point , veu
» que ladicte Defendereffe ne l'accepte ,
& qu'elle s'eft renduë ingrate , & or-
» donne qu'à ce faire fera contrainte par
>> la prinfe de fes biens & emprisonnement
» de fon corps. Et à toûjours la bannit des
» biens & fervice d'amours , en diſant
» avoir forfaict de corps & de biens ; en
» maniere qu'elle fera abandonnée à un
>> chacun pour déformais fervir le com-
>> mun , & devenir à tous publique .
>>
>>
.
Za
958 MERCURE DE FRANCE
2. Les Vigiles de la mort du Roi Charles
VII. à neuf Pfeaumes & neuf Leçons , contenant
la Chronique & les faits advenus
durant la vie dudit Roi . Paris 1493. in-4.
It. Paris 1505 & 1528. Item Paris 1724.
in 8. 2. Vol. Cet Ouvrage qui eft en Vers
contient la Vie du Roi Charles VII. La
Verfification n'en eft pas exacte , mais
l'Auteur Y fait paroître de l'invention .
On y voit comment ce Roi chaffa les
Anglois de la France , dont ils occupoient
une bonne partie. Martial d'Auvergne
étoit l'homme de fon fiecle qui écrivoit
le mieux & avec le plus d'efprit. Cet Ou
vrage lui acquit beaucoup de réputation.
3. Les dévotes louanges à la Vierge Marie.
Paris , Jean du Pré 1492. It . Paris
Simon Votre 1509. in 8. Cet Ouvrage eft
encore en Vers.
4. L'Amant rendu Cordelier à l'obfer
vance d'Amour. Lyon 1545. in 15. La
Croix du Maine ne parle point de cet
Ouvrage qui eft cité au N° 1701 , de la
Bibliotheque de M. Brochard ,
Voici les noms des autres Sçavans ,
dont on trouve la Vie & le Catalogue
des Ouvrages dans ce IX. Tome.
Antoine , Jean Beverovicius , Barnabé
Briffon , Samuel Butler , Louis Caftelvetro,
Henri de Cocceji , Batifte Fulgofe , Joſeph
Gazola , Janus Gruter , Claude Joly , Jac
ques
MAY. 1730. 959
ques Lenfant , Jean Mery , Jean Morin ,
Gabriel Naudé , M. Antoine Oudinet ,
Gui Pancirole , Antoine Panormita , Nicolas
Perot , Poggio Bracciolini , Denis de
Salle , Jacques Savary , Barth. Scala , Jean
André Schmid , Antoine de Solis , Jac
ques Augufte de Thou , & Olaus Vormius.
des Hommes Illuftres dans la République
des Lettres. Avec un Catalogue raisonné
de leurs Ouvrages , Tome IX. de
pages fans les Tables. A Paris , chez
Briaffon , rue S. Jacques , à la Science ,
M. DCC . XXIX .
Ma ,
410 .
ARTIAL D'AUVERGNE , l'un des
27. Sçavans dont il eft parlé dans
le IX Volume , nous a paru mériter une
E iiij
atten1948
MERCURE DE FRANCE
attention particuliere , par le genre &
par la gayeté de fes Ouvrages. Voici ce
qu'en rapporte le P. Niceron , p . 171 .
Cet Auteur eft peu connu ; on ne convient
pas même du Pays dont il étoit. La
Croix du Maine prétend , que quoiqu'il
portât le nom de Martial d'Auvergne , il
étoit cependant Limoufin ; mais il eft feul
de ce fentiment , & l'on fçait qu'il eft peu
exact , & que fouvent il n'eft pas fûr de
s'en rapporter à lui. Il s'eft peut- être imaginé
que cela étoit ainfi cela étoit ainsi , parce que Martial
eft un nom de Baptême fort commun
aux Limoufins , à caufe de S. Martial
Apôtre du Pays. Benoît le Court , Commentateur
de fes Arrêts d'Amour , dit
au contraire qu'il étoit du Pays , dont il
portoit le nom , & la chofe eft affez croyable.
Il est vrai qu'il finit fes Vigiles du
Roi Charles VII. par ces mots.
O vous , Meffeigneurs , qui verrez
Les Vigiles , & les lirez ,
Ne prenez pas garde à l'Acteur ,
Car grand faultes y trouverez ;
Mais , s'il vous plaît , le excuferez ,
Veu qu'il eft un nouveau Facteur. /
Martial de Paris.
→
Mais il eſt à croire qu'il ne s'eft furnommé
MAY. 1730. 949
nommé de Paris , que parce qu'il s'y étoit
tranfplanté & marié , comme le dit la
Chronique fcandaleufe .
Ce qu'il y a de fûr , c'eft qu'il étoit
Procureur au Parlement & Notaire au
Châtelet de Paris.
La Croix du Maine dit qu'il fe fouvient
d'avoir lû dans les Hiftoires de France
, qu'il mourut à Paris d'une fievre
chaude , & qu'il fe précipita dans l'eau ,
étant preffé de la fureur de fon mal ;
nouvelle preuve de l'inexactitude de cet
Auteur , qui copie d'imagination ce qu'il
fe fouvient confufément d'avoir lû , fans
pouvoir fe reffouvenir en quel endroit.
Le Livre où la Croix du Maine avoit
lû quelque chofe d'approchant , à ce qu'il
dit , eft la Chronique fcandaleufe. Voici ce
qu'on y trouve touchant notre Auteur.
» Au mois de Juin ( 1466. ) advint que
>> plufieurs hommes & femmes perdirent
>> leur bon entendement , & mêmement à
» Paris il y eut entre autres ung jeune
>> homme nommé Maître Martial d'Au-
» vergne , Procureur en la Cour de Parle-
>> ment , & Notaire au Châtelet de Paris ,
»lequel après qu'il eut été marié trois
»femaines avefques une des filles de Maî-
» tre Jacques Fournier , Confeiller du Roi
» en fadite Cour de Parlement , perdit fon
>> entendement en telle maniere , que
E v jour
le
950 MERCURE DE FRANCE
»jour de S. Jean -Baptifte , environ neuf
heures du matin , une telle frenaifie le
"print , qu'il fe jetta par la fenêtre de fa
» Chambre en la ruë , & fe rompit une
» cuiffe & froiffa tout le corps , & fut en
» grant dangier de mourir.
Il n'en mourut donc pas , comme le dit
la Croix du Maine , qui par une autrefaute
le fait vivre en 1480. pendant qu'il
le fait mourir d'une chute arrivée en
1466 .
Le P. le Long , met fa mort en 1558 ..
je ne fçai fur quelle autorité.
Voila tout ce qu'on fçait de cet Auteur,
qui étoit un des hommes de fon fiecle qui
écrivoit le mieux & avec plus d'efprit ,
& qui eft plus connu par fes Ouvrages
que par les circonftances de fa vie..
Ces Ouvrages font :
1. Les Arrêts d'Amour. Ils furent imprimez
à Paris en 1528. & même auparavant
, fuivant la Croix du Maine , qui
eft toûjours négligent à marquer exactement
l'année des Editions & leur forme..
Mais ils ne parurent accompagnez des
Commentaires Latins de Benoît le Court
qu'en 1533. à Lyon , chez Seb. Gryphius,
in-4. Ces Commentaires ſe trouvent dans :
la plupart des Editions fuivantes , qui font
celles de Lyon , 1538. in-4 de Paris , 1544..
in-8. de Lyon , 1546. in- 8..
M.
MAY. 1730. 951
M. le Duchat croit que c'eft la premiere
où l'on trouve le cinquante-deuxiéme
Arrêt & l'Ordonnance fur le fait des
Mafques. Celle de Paris , 1555. in- 16 , une
in- 16. en 1566. chez Jerôme Mamel , où
je ne fçai pourquoi on à obmis l'Arrêt
52. & l'Ordonnance fur le fait des Mafques.
L'Edition la plus ample de toutes eſt
celle de Rouen , 1587. in- 16 , parce qu'ou
tre les 51. Arrêts compofez originairement
par Martial d'Auvergne , & commentez
par Benoît le Court , outre le
52e Arrêt & l'Ordonnance fur le fait des
Mafques , qui font deux Pieces de l'invention
de Gilles d'Avrigny , dit le Pamphile
, Avocat au Parlement de Paris , elle
contient de plus un 53 Arrêt rendu par
l'Abbé des Cornars , en fes grands jours tenus
à Rouen , pourfervir de Reglement touchant
les arrerages requis par les femmes à
l'encontre des Maris.
Les Arrêts d'Amour le trouvent encore
dans un Recueil intitulé : Proceffus Juris
Jocoferius. Hanoria , 1611. in - 8 . Ce font
des Pieces purement badines , où regne
une grande naïveté , & ç'a été une plaifante
imagination que de les aller commenter
férieuſement , comme a fait Benoit
le Court , qui étale beaucoup d'éru
dition dans fon Commentaire , & y dés
veloppe £ vj
952 MERCURE DE FRANCE
veloppe fort-bien plufieurs queſtions du
Droit Civil , mais dont peu de perſonnes
s'aviſeront d'y aller chercher la folution.
Les Arrêts font écrits en Profe , mais
l'Ouvrage commence par des Vers , dont
je rapporterai ici quelques- uns.
Environ la fin de Septembre ,
Que faillent Violettes & Flours ,
Je me trouvai en la Grand'Chambre ,
Du noble Parlement d'Amours ;
Et advint fi bien qu'on vouloit ,
Les derniers Arrêts prononcer ,
Et que à cette heure on appelloit
Le Greffier pour les commencer.
Si eftoient illec bien fix ,
A les rapporter, & avoir ,
Au milieu defquels je m'affis,
Pour en faire comme eux devoir .'
Le Prefident tout de Drap d'or
Avoit Robbe fourée d'Ermines ,
Et fur le cou un camail d'or ,
Tout couvert d'Emeraudes fines ...
Plufieurs Amans & Amoureux ,
Illec vinrent de divers lieux ,
Et d'Amans courroucez , joyeux.
Par derriere les bancz j'en vis ,
Qui lefdits Arrêts écoutoient ,
Dont les coeurs étoient tant ravis
Qu'il
MAY. 1730. 95.3
Qu'ils ne fçavoient où ils étoient.
Les uns de paour ferroient leurs dens
Les autres emûs & ardens ,
Tremblans comme la feuille en l'arbre
Nul n'eft fi fage , ne parfait ,
Que , quand il oit fon Jugement ,
Il ne foit à moitié deffait ,
Et troublé à l'entendement.
Je laifferai cette matiere ,
Car de cela peu me chaloit
Et raconterai la maniere ,
Comme le Préfident parloit.
Pour donner une idée de ces Arrêts ,
qui ne font pas communs , malgré toutes
les Editions qui s'en font faites , j'en
mettrai ici un , qui eſt le trentiéme.
» Un ami fe plainct de ce que pour fer-
»vir à fa Dame , il ha tout defpendu : la-
»quelle depuis n'a tenu compte de lui :
»concluant à ce qu'elle fuft condamnée à
»l'entretenir comme devant.
» Ceans s'eft plainct un Amoureux d'une
>> fienne Dame , que la ha longuement fer-
>> vie. Difoit que du temps qu'il eût premierement
cognoiffance à elle , il étoit
» bien aife , & avoit du fien largement.
Et quand elle lui demandoit aucune
>>chofe à prêter ou donner , jamais ne lui
euft refufée. Or étoit vrai que pour toujours
954 MERCURE DE FRANCE
» jours fournir aux fraiz & aux grandes
" cheres , chevance y avoit été employée ,
» & tellement que fes caues étoient deve-
» nuës bien baffes . Mais il cuydoit qu'elle
» dueft foubvenir , comme il ha faict à
» elle , & la pria de lui aider & de l'en-
>> tretenir , dont n'a rien voulu faire : ains
» lui ha plainement répondu qu'il përdoit
fon temps , & que puifqu'il n'avoit plus
» de quoi , elle n'en tenoit compte . Et non
>> contente de ce , lui ha faict dire qu'il
"fe retire de chez fes amis ; car plus n'a-
>> voit intention de l'aimer ni de lui faire:
>> aucun bien. Et encore, qui pis eft, fe mocque
de lui devant les autres , en le monf
» trant au doigt : qui lui eft plus de mar-
»tyre , que qui le frapperoit d'un cou-
»teau parmi le coeur. Si requeroit fina-
»
blement ledict Amant , que fadicte Da--
» me fut condemnée , nonobftant fon ad-
» verfité , de l'entretenir feulement en
» amour , & lui faire chere , comme eller
>> fouloit , & qu'il fût préferé devant tous
les autres , attendu mêmement qu'il
» étoit des premiers venus & des anciens
>> Serviteurs..
» De la partie de cette Defendereffe
» fut défendu au contraire , & difoit pour
» fon proffit , que quiconque veult d'a-
>> mours jouir , baille l'argent devant la
main , & que c'eft grande folie de
que
» s'atMA
Y. 1730 9:55
s'attendre à l'éfcuelle d'autruy , s'il ne
» fournit & remplit. Difoit avec ce , que
» le Galand au temps de fa fortune , &
» que les biens luy venoient en dormant ,
» s'eft mefcongneu , & en ha feftoyé un
» & autre , dont il fe fuft bien paffe ;:
» maintenant s'il a difette , il n'eft pas
» trop mal employé ; & quant eft de l'ai-
» mer , elle difoit qu'elle n'y eftoit pas
» tenue ; car les biens & vertus qui ſou-
» loient être en luy n'y font plus. Et ne
» falloit ja ramentevoir les bonnes che-
» res du temps paffé ; car fi ledict Amant
» luy ha faict tant de plaifirs & fervices,.
» auffi lui en ha elle fait plufieurs autres,
qu'il n'eft ja befoin de déclairer . Et puif
» que
il eft ainfi que pauvreté maintenant
» le guerroye , adonc elle n'en veut plus;
>> car auffi au lieu où elle habite , n'y a
» que toute malheureté , & jamais ne s'y
» treuve joye . Et quant eft au furplus pour
» les biens , qu'elle lui offroit un povre
» bâton en fa main pour s'en aller avec :
» la prébende de Va-t'en , pour récom-
» penfe de fes fervices. En concluant que
» à tort fe plaignoit d'elle , & en deman
>> doit dépens.
›
Après lefquelles deffenfes propofées ,
» les Gens d'Amours qui s'étoient adjoint
avec leditAmant, difoient que cette femme
n'étoit pas digne qu'on parlaft d'elle
39
devant
056 MERCURE DE FRANCE
»
» devant les gens de bien ; car par fon
propos jamais n'aymoit que pour ar-
» gent ,
& ainfi confeffoit avoir vendu les
" biens d'Amours . Et qu'elle en ha mef-
» chamment ufé en fon tems , & auffi pa-
>> reillement étoit voix & commune re-
» nommée qu'elle aime toûjours trois ou
» quatre , & qu'elle les fucce jufqu'aux
" os , & puis encore s'en mocque , qui
» eft pis ; car quelque femme que ce foit
jamais ne doibt defprifer le ferviteur
» qui l'a fervie , combien qu'il lui fou-
» vienne de beaucoup de fortunes . Et
» requeroient lefdictes Gens d'Amours à
» l'encontre d'elle qu'elle fut condemnée
» à faire amende honorable , & à lui ren-
» dre & reftituer tout ce qu'elle ha eu de
» luy , & dont il devoit être crû par fon
» ferment , veu la maniere de proceder.
» Et avec ce , qu'elle foit bannie à tou-
» jours dudict Royaume d'Amours , com-
» me indigne d'y converfer.
>>
25
Ce povre Amant pour fes repliques
" difoit qu'en tant qu'il luy touche qu'il
>> eftoit encore content , que tous les biens
qu'il luy avoit donnez demouraffent
pour elle , comme fiens , & ne vouloit
» qu'on luy en oftât rien ; mais requeroit
»feulement qu'elle l'aimaft comme de-
» vant ; & encore promettoit de luy en
» faire. A quoy elle répondit , que quand
elle
MAY. 1730. 957
» elle le verroit , en feroit fon debvoir ;
» mais jufques alors lui confeilloit de
» changer air pour recouvrer fanté
» & obvier qu'il ne fuft pas mala-
» de : & difoit oultre qu'à la contrain-
» dre d'aimer l'on ne sçauroit , & auffi tel
>> amour qui feroit donné par force ne du-
» reroit point ; mais plus de mal faict à
» celuy qui l'obtient , que s'il n'en avoit
» point.
>>
>>
Si ont été les parties ou yes appointées
>> en droit & confeil . Finablement veu le
» Procez & confideré tout ce qu'il falloit
>> confiderer en cette matiere , la Cour dit
» qu'elle condemne cette rebelle femme
» à rendre & reftituer audict Amoureux
tout ce qu'il affermera en fa confcience
» lui avoir baillé & donné , nonobftant
» l'offre
par luy faite de ne luy en vou-
>> loir demander aucune chofe. A laquelle
offre la Cour n'y obtempere point , veu
» que ladicte Defendereffe ne l'accepte ,
& qu'elle s'eft renduë ingrate , & or-
» donne qu'à ce faire fera contrainte par
>> la prinfe de fes biens & emprisonnement
» de fon corps. Et à toûjours la bannit des
» biens & fervice d'amours , en diſant
» avoir forfaict de corps & de biens ; en
» maniere qu'elle fera abandonnée à un
>> chacun pour déformais fervir le com-
>> mun , & devenir à tous publique .
>>
>>
.
Za
958 MERCURE DE FRANCE
2. Les Vigiles de la mort du Roi Charles
VII. à neuf Pfeaumes & neuf Leçons , contenant
la Chronique & les faits advenus
durant la vie dudit Roi . Paris 1493. in-4.
It. Paris 1505 & 1528. Item Paris 1724.
in 8. 2. Vol. Cet Ouvrage qui eft en Vers
contient la Vie du Roi Charles VII. La
Verfification n'en eft pas exacte , mais
l'Auteur Y fait paroître de l'invention .
On y voit comment ce Roi chaffa les
Anglois de la France , dont ils occupoient
une bonne partie. Martial d'Auvergne
étoit l'homme de fon fiecle qui écrivoit
le mieux & avec le plus d'efprit. Cet Ou
vrage lui acquit beaucoup de réputation.
3. Les dévotes louanges à la Vierge Marie.
Paris , Jean du Pré 1492. It . Paris
Simon Votre 1509. in 8. Cet Ouvrage eft
encore en Vers.
4. L'Amant rendu Cordelier à l'obfer
vance d'Amour. Lyon 1545. in 15. La
Croix du Maine ne parle point de cet
Ouvrage qui eft cité au N° 1701 , de la
Bibliotheque de M. Brochard ,
Voici les noms des autres Sçavans ,
dont on trouve la Vie & le Catalogue
des Ouvrages dans ce IX. Tome.
Antoine , Jean Beverovicius , Barnabé
Briffon , Samuel Butler , Louis Caftelvetro,
Henri de Cocceji , Batifte Fulgofe , Joſeph
Gazola , Janus Gruter , Claude Joly , Jac
ques
MAY. 1730. 959
ques Lenfant , Jean Mery , Jean Morin ,
Gabriel Naudé , M. Antoine Oudinet ,
Gui Pancirole , Antoine Panormita , Nicolas
Perot , Poggio Bracciolini , Denis de
Salle , Jacques Savary , Barth. Scala , Jean
André Schmid , Antoine de Solis , Jac
ques Augufte de Thou , & Olaus Vormius.
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Résumé : MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres. Avec un Catalogue raisonné de leurs Ouvrages, Tome IX. de 410. pages sans les Tables. A Paris, chez Briasson, rüe S. Jacques, à la Science, MDCC. XXIX.
Le texte fournit des informations sur Martial d'Auvergne, un écrivain du XVe siècle dont l'origine est incertaine. Certains le considèrent Limousin, tandis que d'autres pensent qu'il était Auvergnat. Il exerçait les fonctions de procureur au Parlement et de notaire au Châtelet de Paris. En 1466, il subit une perte temporaire de raison et se jeta par une fenêtre, mais il ne mourut pas de cet incident. Martial d'Auvergne est principalement connu pour ses œuvres littéraires. Ses principaux ouvrages incluent 'Les Arrêts d'Amour', publiés pour la première fois en 1528 et accompagnés de commentaires latins par Benoît le Court en 1533. Ces textes sont des pièces badines écrites en prose, commençant par des vers et traitant de questions juridiques de manière ludique. Un autre ouvrage notable est 'Les Vigiles de la mort du Roi Charles VII', publié en 1493, qui relate la vie du roi Charles VII et sa victoire contre les Anglais. Bien que la versification de cet ouvrage soit imparfaite, il lui valut une grande réputation. Martial d'Auvergne est ainsi reconnu pour son esprit et son talent littéraire. Le document mentionne également une liste d'ouvrages et de savants. Parmi les ouvrages cités figurent 'Les dévotes louanges à la Vierge Marie', imprimé à Paris par Jean du Pré en 1492 et réédité par Simon Votre en 1509, écrit en vers, et 'L'Amant rendu Cordelier à l'obférance d'Amour', publié à Lyon en 1545. Le texte énumère également les noms de divers savants dont les vies et les catalogues d'ouvrages sont mentionnés dans le neuvième tome. Parmi ces savants figurent Antoine, Jean Beverovicius, Barnabé Briffon, Samuel Butler, Louis Castelvetro, Henri de Cocceji, Baptiste Fulgosé, Joseph Gazola, Janus Gruter, Claude Joly, Jacques Lenfant, Jean Mery, Jean Morin, Gabriel Naudé, M. Antoine Oudinet, Gui Pancirole, Antoine Panormita, Nicolas Perot, Poggio Bracciolini, Denis de Salle, Jacques Savary, Barthélemy Scala, Jean André Schmid, Antoine de Solis, Jacques Auguste de Thou, et Olaus Vormius.
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3
p. 1574-1575
Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, &c. [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République [...]
Mots clefs :
Histoire, Mémoire, Hommes illustres
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, &c. [titre d'après la table]
NOUVELLES LITTERAIRES
M
DES BEAUX ARTS & c.
EMOIRES pour fervir à l'Hiftoire
des Hommes Illuftres dans la Répu
blique des Lettres , avec un Catalogue raifonné
de leurs Ouvrages. Tome X. de 190.
pages , fans la Préface & les Tables. A Paris
, chez Briaffon , ruë S, Jacques , à la
Science . M. DCC. XXX.
L'Auteur commence de s'acquiter d'un
engagement qu'il a pris avec le Public
& que nous avons annoncé avec plaifir
dans un de nos Journaux. La moitié de
ce 10. Volume eft employée en changemens
, en corrections & additions pour
le premier Tome des Mémoires . L'autre
moitié contient une Table genérale des
Matieres qui ont été traitées par les Auteurs
contenus dans les dix premiers Volumes
, & une Table Nécrologique des
'Auteurs contenus dans ces mêmes dix
premiers Volumes. Il ne faut pas douter
que ces changemens , corrections & additions
ne foient en general bien neceffaires
pour la perfection de tout l'Ouvrage ;
mais elles ne font pas toutes d'une égale
importance ; on peut même dire qu'il y
en
JUILLET . 1730. 1575
en a de peu neceffaires , & que quelques
corrections auroient elles - mêmes befoin
- d'être corrigées : telle eft celle qui regarde
Louis Ferrand ; l'Auteur des Mémoires
s'exprime ainfi fur ſon ſujet : » On a dit
fur l'autorité du Journal des Sçavans
» qu'il avoit étudié au College des Prêtres
» de l'Oratoire de Toulon ; mais comme
>> ils n'ont point de College en ce lieu , il
» faut mettre feulement qu'il étudia dans
le College de Toulon . L'Editeur auroit
pû s'épargner cette prétendue correction ;
car il eft de notorieté publique que les
PP. de l'Oratoire ont un College à
Toulon , établi par des Lettres Patentes
depuis plus d'un fiecle.
M
DES BEAUX ARTS & c.
EMOIRES pour fervir à l'Hiftoire
des Hommes Illuftres dans la Répu
blique des Lettres , avec un Catalogue raifonné
de leurs Ouvrages. Tome X. de 190.
pages , fans la Préface & les Tables. A Paris
, chez Briaffon , ruë S, Jacques , à la
Science . M. DCC. XXX.
L'Auteur commence de s'acquiter d'un
engagement qu'il a pris avec le Public
& que nous avons annoncé avec plaifir
dans un de nos Journaux. La moitié de
ce 10. Volume eft employée en changemens
, en corrections & additions pour
le premier Tome des Mémoires . L'autre
moitié contient une Table genérale des
Matieres qui ont été traitées par les Auteurs
contenus dans les dix premiers Volumes
, & une Table Nécrologique des
'Auteurs contenus dans ces mêmes dix
premiers Volumes. Il ne faut pas douter
que ces changemens , corrections & additions
ne foient en general bien neceffaires
pour la perfection de tout l'Ouvrage ;
mais elles ne font pas toutes d'une égale
importance ; on peut même dire qu'il y
en
JUILLET . 1730. 1575
en a de peu neceffaires , & que quelques
corrections auroient elles - mêmes befoin
- d'être corrigées : telle eft celle qui regarde
Louis Ferrand ; l'Auteur des Mémoires
s'exprime ainfi fur ſon ſujet : » On a dit
fur l'autorité du Journal des Sçavans
» qu'il avoit étudié au College des Prêtres
» de l'Oratoire de Toulon ; mais comme
>> ils n'ont point de College en ce lieu , il
» faut mettre feulement qu'il étudia dans
le College de Toulon . L'Editeur auroit
pû s'épargner cette prétendue correction ;
car il eft de notorieté publique que les
PP. de l'Oratoire ont un College à
Toulon , établi par des Lettres Patentes
depuis plus d'un fiecle.
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Résumé : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, &c. [titre d'après la table]
Le texte décrit un ouvrage intitulé 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres', publié par Briaffon à Paris. Le tome X, de 190 pages, est divisé en deux parties. La première moitié présente des changements, corrections et additions pour le premier tome des Mémoires. La seconde moitié inclut une table générale des matières des dix premiers volumes et une table nécrologique des auteurs de ces volumes. Certaines corrections sont jugées inutiles. Par exemple, une correction concernant Louis Ferrand est critiquée. L'auteur des Mémoires avait corrigé une information selon laquelle Ferrand avait étudié au Collège des Prêtres de l'Oratoire de Toulon, affirmant qu'il n'y avait pas de tel collège à Toulon. Cependant, il est noté que les Pères de l'Oratoire possèdent effectivement un collège à Toulon, établi par des lettres patentes depuis plus d'un siècle.
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Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 2223-2232
Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, &c. [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des hommes illustres dans la République des Lettres [...]
Mots clefs :
Mémoires, Histoire des hommes illustres, République des Lettres, Armée, Roi, Évêque, Jean de Sponde, Cardinal, Pape, Église
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, &c. [titre d'après la table]
MEMOIRES pourfervir à l'Hiftoire des
hommes illuftres dans la République des Lettres
avec un Catalogue raisonné de leurs
Ouvrages. Tome XI . Vol. in 12. pages 405.
fans les Tables. A Paris, chez Briaſſon , ruë
S. Jacques , à la Science. 1730.
On trouve dans ce volume les Vies de
trente-fept Sçavans , qui font Profper Alpin
, Annius de Viterbe , François de Belle
foreft , Pierre Bembo , Pierre le Brun , Louis
Bulteau , Jean Cajus , Jean Cheke , Urbain
Chevreau , Daniel le Clerc , François
Combefis , Angelo di Coftanzo , Abraham
Cowley, Jean Deslions , Claude de Ferrieres,
Antoine Galateo , François Hotman ,
Auguftin Inveges , Philippe de Limborch ,
Baptifte Nani , Ferôme Oforio , Mathieu
Palmieri , Mathias Palmieri , Antoine Pa
rent , Paul Paruta , Pierre Petit , François
Poupart , Certorio Quatromani , Jean Raulin
, Maturin Regnier , Jean Chilter , Michel
Servet , Henry de Sponde Auguftin.
Torniel , Pierre Varignon Claude de Vert ,
Jean Facq. Vepher.
,
Nous donnerons, felon notre coutume,
une de ces Vies pour faire connoître le
ftile & l'ordre de l'Auteur des Mémoires,
Nous avons choifi celle du fameux Sponde
Evêque de Pamiers.
Henri de Sponde naquit le 6. Janvier
1568. à Mauleon , petite ville du Païs de
1226 MERCURE DE FRANCE
Soulle , entre la Navarre & le Bearn.
Son pere qui étoit Secretaire & Confeiller
de la Reine de Navarre , Jeanne
d'Albret , le fit tenir fur les fonts de Baptême
par Henri de Bourbon fon fils , qui
fut depuis Roy de France & comme il
faifoit profeffion du Calviniſme , il l'éleva
dans les mêmes fentimens .
I alla faire fes études à Ortez , où les
Réformez avoient alors un College , & il
s'y diftingua par la facilité avec laquelle
il apprit les Langues Latine & Grecque.
Il fit enfuite un voyage en Ecoffe à la
fuite de Guillaume Salufte du Bartas , Ambaffadeur
du Roy de Navarre , & y apprit
en peu de tems la langue du Païs.
De retour en France , il s'appliqua à
Fétude du Droit civil , & du Droit Canon
, dont il lût prefque tous les Livres.
lalla à Tours , où le Parlement de Paris
avoit été transferé ; fon fçavoir , &
fon éloquence dans le Barreau porterent
le Roy Henri IV. à le faire Maître des Requêtes
de la Navarre .
Les Livres de controverfe de Bellarmin
& de du Perron qu'il lut alors avec
avidité , commencerent à lui ouvrir les
yeux fur les erreurs , dans lesquelles il
avoit été engagé ; il fe prêta aux impref
fions de la grace , qui agirent fur lui , &
animé par l'exemple de fon frere aîné
Jean!
OCTOBRE. 1730. 2227
Jean de Sponde , qui avoit déja abandonné
Pheréfie , il en fit abjuration à Paris le 21 .
Septembre 1599. à l'âge de vingt- fept
ans ,
De Sponde réuni à l'Eglife Catholique'
voulut s'engager dans l'Etat Eccléfiaftique
, & obtinten 1599. de l'Evêque d'Oferon
un démiffoire pour recevoir les Ordres
, même hors du Royaume. Cette
derniere claufe étoit neceffaire , parce qu'il
avoit deffein d'aller à Rome gagner le
-Indulgences de l'année fainte.
Il alla effectivement en 1600. à la fuite
du Cardinal de Sourdis , & demeura quel
ques années dans cette Ville , où il reçut
Ordre de Prêtrife le 27 Mars 1606.
La connoiffance qu'il eût du Cardinal
Baronius , & l'étroite amitié qu'il'lia avec
lui , lui fit naître le deffein de faire un
Abregé de fes Annales ; deffein qu'il
exécuta dans la fuite , après avoir obtenu
fon agrément pour cela.
Il revint à Paris en 1606. mais il retourna
quelque tems après à Rome , où
le Pape Paul V.qui l'aimoit beaucoup, lui
commit la révifion des expéditions du
Tribunal de la Pénitencerie.
La confideration qu'on avoit pour lui
en Italie , l'avoit porté à s'y fixer pour le
refte de fes jours , & il ne fongeoit plus
à revenir en France ; mais le Seigneur en
difpofa
1228 MERCURE DE FRANCE
difpofa autrement. Le Roy Louis XIII .
le nomma à l'Eveché de Pamiers au commencement
de l'année 1626. Il fit d'abord
quelque difficulté d'accepter cette dignité
; mais le Pape Urbain VIII. le lui ayant
ordonné , il fe foumit à fes ordres , & fut
facréà Rome par le Cardinal de Marquemont
, Archevêque de Lyon dans l'Eglife
de S. Louis , dont il avoit eu longtems
la conduite , le 16. Août de la même
année , & non pas le 17 Septembre
comme le marque M. Perrault , qui n'a
pas pris garde à l'expreffion latine de fa
vie , die decima feptima Cal. Septembris:
De Sponde vint peu de tems après à
Paris , où le Roy le reçut avec des marques
fingulieres d'eftime. Il fe rendit de- là
a Pamiers , où il fit fon entrée le 23 May
1627. Il s'y appliqua avec beaucoup d'ardeur
à procurer le falut des ames , qui lui
avoient été confiées , & à retirer de l'erreur
ceux qui y étoient engagez. Il faifoit
fréquemment des vifites dans fon
Diocéfe , & y rétablit la diſcipline trop
négligée en quelques endroits.
Le Duc de Rohan, chefdes Huguenots ,
étant entré au mois de Novembre de l'année
de fon inſtallation dans Pamiers par
trahison , de Sponde fe fauva par un trou
qu'on fit aux murailles. L'année fuivante
le Prince de Condé ayant repris la Ville ,
&
OCTOBRE . 1730. 22 29
& les Huguenots ayant été chaffez , le
Pape Urbain VIII, en écrivit à de Sponde
des lettres de compliment , qui marquoient
une eftime extraordinaire de fon
mérite.
Son grand âge lui ayant fait prendre
Jean de Sponde fon neveu pour Coadjuteur
, il revint à Paris dans le deffein de
ſe donner tout entier à l'Edition de fes
Annalles.
Il quitta cette ville en 1642. pour aller
à Toulouſe , où il mourut le 18 May 1643. -
âgé de 75. ans
Il laiffa par fon Teftament , qu'il fit
peu de jours avant la mort , fa Bibliotheque
aux Minimes de Toulouſe , & tous
fes biens à Pierre Frizon de Rheims , Docteur
de la Maiſon de Navarre , avec lequel
il avoit vêcu dans une étroite amitié pen
dant quinze ans,tant à Rome , qu'à Paris,
Son corps fut inhumé dans l'Eglife Cathedrale
de Toulouſe . & on mit fur fon
tombeau cette Epitaphe qu'il s'étoit faite
lui-même.
Hicjacet corpus Henrici Spondani , quona
dam Epifcopi Apamiarum , cujus anima requiefcat
in pace.
Catalogue de fes Ouvrages.
1. Les Cimetieres facrez , Bourdeaux.
1596. in 12. fixième Edition augmentée.
Paris
2230 MERCURE DE FRANCE
Paris 1600. in 12. Item , trad. en Latin
avec de grandes augmentations . Paris
1638. in. 4° . Le but de l'Auteur eft de
faire voir que les Cimetieres ayant toûjours
été regardés comme facrez chez toutes
les Nations & dans toutes fortes de
Religions , les Proteftans avoient tort de
traiter d'injuftice le refus que faifoient , &
qu'avoient toûjours fait les Catholiques
de fouffrir que les Cimetieres de leurs
Eglifes fuffent communs entre eux & les
Proteftans.
2. Annales Ecclefiaftici Cafaris Baronii in
Epitomen redacti¸ Parifiis 1612. fol. L'Auteur
dédia cette premiere Edition au
Clergé de France qui approuva l'ouvrage
, & marqua l'eftime qu'il en faifoit
par plufieurs gratifications confiderables
dont il honora l'Auteur. Il a été imprimé
plufieurs fois depuis. La bonne Edition
felon M. l'Abbé Lenglet , eft celle qui a
paru à Paris chez la Noue en 1639. en fix
volumes in fol. avec la continuation , &
les Annales facrées. La meilleure après
celle- la eft celle qui a été donnée par la
Compagnie des Libraires, à Paris 1647.
fol. 2. vol. & la moindre eft celle de Lyon
de l'an 1660 fol. 2. vol. Il y en a une traduction
Françoife , de même que des Annales
facrées faite par Pierre Coppin , &
imprimée à Paris en 1654. 55. & 57. en
6.vol infol.
3.
OCTOBRE. 1730. 2231
3. Annalesfacri à Mundi creatione ad
ejufdem Redemptionem . Parifiis 1637. fol.
Item . Ibidem 1699. Item Colonia Agr.
1640. fol. Item , Parifiis 1660. ces Annales
font un Abregé de celles de Torniel .
4 Annalium Baronii Continuatio ab anno
1197. quo is defiit ad annum 1640. Pas
rifiis 1639. fol. 2. vol. Il y en a eu plu
fieurs autres Editions depuis .
5. Ordonnances Synodales. Toulouse
1630 in 8° .
6. M. de la Monnoye , dans fa Lettre
fur le prétendu Livre des trois Impofteurs,
attribue à Henri de Sponde un petit
Livre intitulé Le Magot Genevois 1613 .
in 8. p. 98. fans nom de Lieu.
Voyez la vie par Pierre Frizon à la tête
de fa continuation des Annales de Baronius
, dans les Editions faites après fa
mort , & les Hommes illuftres de Perrault.
L'Auteur des Mémoires nous permettra
d'ajoûter ici deux ou trois faits , qui
concernent le fçavant Evêque de Pamiers
& qui fans doute ne font pas venus à fa
connoiffance. Il eft certain que c'eft au
Cardinal du Perron que l'Eglife doit la
converfion d'Henry de Sponde , avant
même que ce Cardinal fût dans les Ordres
facrez : de Sponde & Jean de Salertes
, l'un & l'autre Bearnois , s'attacherent
à M. du Perron dans fon premier
voyage
2232 MERCURE DE FRANCE
voyage de Rome , où ils lui rendirent de
grands fervices pour le grand ouvrage de
la converfion de Henry IV. & ce Prince
ayant nommé du Perron à l'Evêché d'Evreux
en 1595. les deux premiers Canonicats
, dont le nouveau Prélat fut le maître
dans fa Cathedrale , furent donnez à
ces deux fçavans avant l'année 1600. Salettes
fut nommé Evêque de Lefcar en
1609. & mourut en 1632. & Sponde ,
comme on l'a vû ci-deflus , fut Evêque
de Pamiers en 1626. & mouruten 1643 ,
Evreux ne fut , pour ainfi dire , qu'un Cabinet
d'étude pour ce dernier , comme
Condé Maifon de campagne des Evêques
d'Evreux , le fut pour le Cardinal fon
Protecteur , jufqu'à ce qu'il fut nommé à
l'Archevêché de Sens.
hommes illuftres dans la République des Lettres
avec un Catalogue raisonné de leurs
Ouvrages. Tome XI . Vol. in 12. pages 405.
fans les Tables. A Paris, chez Briaſſon , ruë
S. Jacques , à la Science. 1730.
On trouve dans ce volume les Vies de
trente-fept Sçavans , qui font Profper Alpin
, Annius de Viterbe , François de Belle
foreft , Pierre Bembo , Pierre le Brun , Louis
Bulteau , Jean Cajus , Jean Cheke , Urbain
Chevreau , Daniel le Clerc , François
Combefis , Angelo di Coftanzo , Abraham
Cowley, Jean Deslions , Claude de Ferrieres,
Antoine Galateo , François Hotman ,
Auguftin Inveges , Philippe de Limborch ,
Baptifte Nani , Ferôme Oforio , Mathieu
Palmieri , Mathias Palmieri , Antoine Pa
rent , Paul Paruta , Pierre Petit , François
Poupart , Certorio Quatromani , Jean Raulin
, Maturin Regnier , Jean Chilter , Michel
Servet , Henry de Sponde Auguftin.
Torniel , Pierre Varignon Claude de Vert ,
Jean Facq. Vepher.
,
Nous donnerons, felon notre coutume,
une de ces Vies pour faire connoître le
ftile & l'ordre de l'Auteur des Mémoires,
Nous avons choifi celle du fameux Sponde
Evêque de Pamiers.
Henri de Sponde naquit le 6. Janvier
1568. à Mauleon , petite ville du Païs de
1226 MERCURE DE FRANCE
Soulle , entre la Navarre & le Bearn.
Son pere qui étoit Secretaire & Confeiller
de la Reine de Navarre , Jeanne
d'Albret , le fit tenir fur les fonts de Baptême
par Henri de Bourbon fon fils , qui
fut depuis Roy de France & comme il
faifoit profeffion du Calviniſme , il l'éleva
dans les mêmes fentimens .
I alla faire fes études à Ortez , où les
Réformez avoient alors un College , & il
s'y diftingua par la facilité avec laquelle
il apprit les Langues Latine & Grecque.
Il fit enfuite un voyage en Ecoffe à la
fuite de Guillaume Salufte du Bartas , Ambaffadeur
du Roy de Navarre , & y apprit
en peu de tems la langue du Païs.
De retour en France , il s'appliqua à
Fétude du Droit civil , & du Droit Canon
, dont il lût prefque tous les Livres.
lalla à Tours , où le Parlement de Paris
avoit été transferé ; fon fçavoir , &
fon éloquence dans le Barreau porterent
le Roy Henri IV. à le faire Maître des Requêtes
de la Navarre .
Les Livres de controverfe de Bellarmin
& de du Perron qu'il lut alors avec
avidité , commencerent à lui ouvrir les
yeux fur les erreurs , dans lesquelles il
avoit été engagé ; il fe prêta aux impref
fions de la grace , qui agirent fur lui , &
animé par l'exemple de fon frere aîné
Jean!
OCTOBRE. 1730. 2227
Jean de Sponde , qui avoit déja abandonné
Pheréfie , il en fit abjuration à Paris le 21 .
Septembre 1599. à l'âge de vingt- fept
ans ,
De Sponde réuni à l'Eglife Catholique'
voulut s'engager dans l'Etat Eccléfiaftique
, & obtinten 1599. de l'Evêque d'Oferon
un démiffoire pour recevoir les Ordres
, même hors du Royaume. Cette
derniere claufe étoit neceffaire , parce qu'il
avoit deffein d'aller à Rome gagner le
-Indulgences de l'année fainte.
Il alla effectivement en 1600. à la fuite
du Cardinal de Sourdis , & demeura quel
ques années dans cette Ville , où il reçut
Ordre de Prêtrife le 27 Mars 1606.
La connoiffance qu'il eût du Cardinal
Baronius , & l'étroite amitié qu'il'lia avec
lui , lui fit naître le deffein de faire un
Abregé de fes Annales ; deffein qu'il
exécuta dans la fuite , après avoir obtenu
fon agrément pour cela.
Il revint à Paris en 1606. mais il retourna
quelque tems après à Rome , où
le Pape Paul V.qui l'aimoit beaucoup, lui
commit la révifion des expéditions du
Tribunal de la Pénitencerie.
La confideration qu'on avoit pour lui
en Italie , l'avoit porté à s'y fixer pour le
refte de fes jours , & il ne fongeoit plus
à revenir en France ; mais le Seigneur en
difpofa
1228 MERCURE DE FRANCE
difpofa autrement. Le Roy Louis XIII .
le nomma à l'Eveché de Pamiers au commencement
de l'année 1626. Il fit d'abord
quelque difficulté d'accepter cette dignité
; mais le Pape Urbain VIII. le lui ayant
ordonné , il fe foumit à fes ordres , & fut
facréà Rome par le Cardinal de Marquemont
, Archevêque de Lyon dans l'Eglife
de S. Louis , dont il avoit eu longtems
la conduite , le 16. Août de la même
année , & non pas le 17 Septembre
comme le marque M. Perrault , qui n'a
pas pris garde à l'expreffion latine de fa
vie , die decima feptima Cal. Septembris:
De Sponde vint peu de tems après à
Paris , où le Roy le reçut avec des marques
fingulieres d'eftime. Il fe rendit de- là
a Pamiers , où il fit fon entrée le 23 May
1627. Il s'y appliqua avec beaucoup d'ardeur
à procurer le falut des ames , qui lui
avoient été confiées , & à retirer de l'erreur
ceux qui y étoient engagez. Il faifoit
fréquemment des vifites dans fon
Diocéfe , & y rétablit la diſcipline trop
négligée en quelques endroits.
Le Duc de Rohan, chefdes Huguenots ,
étant entré au mois de Novembre de l'année
de fon inſtallation dans Pamiers par
trahison , de Sponde fe fauva par un trou
qu'on fit aux murailles. L'année fuivante
le Prince de Condé ayant repris la Ville ,
&
OCTOBRE . 1730. 22 29
& les Huguenots ayant été chaffez , le
Pape Urbain VIII, en écrivit à de Sponde
des lettres de compliment , qui marquoient
une eftime extraordinaire de fon
mérite.
Son grand âge lui ayant fait prendre
Jean de Sponde fon neveu pour Coadjuteur
, il revint à Paris dans le deffein de
ſe donner tout entier à l'Edition de fes
Annalles.
Il quitta cette ville en 1642. pour aller
à Toulouſe , où il mourut le 18 May 1643. -
âgé de 75. ans
Il laiffa par fon Teftament , qu'il fit
peu de jours avant la mort , fa Bibliotheque
aux Minimes de Toulouſe , & tous
fes biens à Pierre Frizon de Rheims , Docteur
de la Maiſon de Navarre , avec lequel
il avoit vêcu dans une étroite amitié pen
dant quinze ans,tant à Rome , qu'à Paris,
Son corps fut inhumé dans l'Eglife Cathedrale
de Toulouſe . & on mit fur fon
tombeau cette Epitaphe qu'il s'étoit faite
lui-même.
Hicjacet corpus Henrici Spondani , quona
dam Epifcopi Apamiarum , cujus anima requiefcat
in pace.
Catalogue de fes Ouvrages.
1. Les Cimetieres facrez , Bourdeaux.
1596. in 12. fixième Edition augmentée.
Paris
2230 MERCURE DE FRANCE
Paris 1600. in 12. Item , trad. en Latin
avec de grandes augmentations . Paris
1638. in. 4° . Le but de l'Auteur eft de
faire voir que les Cimetieres ayant toûjours
été regardés comme facrez chez toutes
les Nations & dans toutes fortes de
Religions , les Proteftans avoient tort de
traiter d'injuftice le refus que faifoient , &
qu'avoient toûjours fait les Catholiques
de fouffrir que les Cimetieres de leurs
Eglifes fuffent communs entre eux & les
Proteftans.
2. Annales Ecclefiaftici Cafaris Baronii in
Epitomen redacti¸ Parifiis 1612. fol. L'Auteur
dédia cette premiere Edition au
Clergé de France qui approuva l'ouvrage
, & marqua l'eftime qu'il en faifoit
par plufieurs gratifications confiderables
dont il honora l'Auteur. Il a été imprimé
plufieurs fois depuis. La bonne Edition
felon M. l'Abbé Lenglet , eft celle qui a
paru à Paris chez la Noue en 1639. en fix
volumes in fol. avec la continuation , &
les Annales facrées. La meilleure après
celle- la eft celle qui a été donnée par la
Compagnie des Libraires, à Paris 1647.
fol. 2. vol. & la moindre eft celle de Lyon
de l'an 1660 fol. 2. vol. Il y en a une traduction
Françoife , de même que des Annales
facrées faite par Pierre Coppin , &
imprimée à Paris en 1654. 55. & 57. en
6.vol infol.
3.
OCTOBRE. 1730. 2231
3. Annalesfacri à Mundi creatione ad
ejufdem Redemptionem . Parifiis 1637. fol.
Item . Ibidem 1699. Item Colonia Agr.
1640. fol. Item , Parifiis 1660. ces Annales
font un Abregé de celles de Torniel .
4 Annalium Baronii Continuatio ab anno
1197. quo is defiit ad annum 1640. Pas
rifiis 1639. fol. 2. vol. Il y en a eu plu
fieurs autres Editions depuis .
5. Ordonnances Synodales. Toulouse
1630 in 8° .
6. M. de la Monnoye , dans fa Lettre
fur le prétendu Livre des trois Impofteurs,
attribue à Henri de Sponde un petit
Livre intitulé Le Magot Genevois 1613 .
in 8. p. 98. fans nom de Lieu.
Voyez la vie par Pierre Frizon à la tête
de fa continuation des Annales de Baronius
, dans les Editions faites après fa
mort , & les Hommes illuftres de Perrault.
L'Auteur des Mémoires nous permettra
d'ajoûter ici deux ou trois faits , qui
concernent le fçavant Evêque de Pamiers
& qui fans doute ne font pas venus à fa
connoiffance. Il eft certain que c'eft au
Cardinal du Perron que l'Eglife doit la
converfion d'Henry de Sponde , avant
même que ce Cardinal fût dans les Ordres
facrez : de Sponde & Jean de Salertes
, l'un & l'autre Bearnois , s'attacherent
à M. du Perron dans fon premier
voyage
2232 MERCURE DE FRANCE
voyage de Rome , où ils lui rendirent de
grands fervices pour le grand ouvrage de
la converfion de Henry IV. & ce Prince
ayant nommé du Perron à l'Evêché d'Evreux
en 1595. les deux premiers Canonicats
, dont le nouveau Prélat fut le maître
dans fa Cathedrale , furent donnez à
ces deux fçavans avant l'année 1600. Salettes
fut nommé Evêque de Lefcar en
1609. & mourut en 1632. & Sponde ,
comme on l'a vû ci-deflus , fut Evêque
de Pamiers en 1626. & mouruten 1643 ,
Evreux ne fut , pour ainfi dire , qu'un Cabinet
d'étude pour ce dernier , comme
Condé Maifon de campagne des Evêques
d'Evreux , le fut pour le Cardinal fon
Protecteur , jufqu'à ce qu'il fut nommé à
l'Archevêché de Sens.
Fermer
Résumé : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, &c. [titre d'après la table]
Le volume XI des mémoires pour l'histoire des hommes illustres dans la République des Lettres, publié à Paris en 1730, présente les vies de trente-sept savants, parmi lesquels Prosper Alpin, Annius de Viterbe et Henri de Sponde, évêque de Pamiers. Henri de Sponde naquit le 6 janvier 1568 à Mauleon, dans le Pays de Soule, entre la Navarre et le Béarn. Son père, secrétaire et conseiller de la reine de Navarre Jeanne d'Albret, l'éleva dans le calvinisme. Sponde fit ses études à Orthez, où il apprit le latin et le grec, puis voyagea en Écosse et étudia le droit civil et canonique. En 1599, à l'âge de vingt-sept ans, il abjura le calvinisme et se convertit au catholicisme, influencé par les écrits de Bellarmin et du Perron ainsi que par l'exemple de son frère aîné. Devenu prêtre en 1606, Sponde se lia d'amitié avec le cardinal Baronius et entreprit d'abréger ses annales. Il revint à Paris en 1606, mais retourna à Rome où il fut chargé de la révision des expéditions du Tribunal de la Pénitencerie. En 1626, le roi Louis XIII le nomma évêque de Pamiers. Sponde s'appliqua à procurer le salut des âmes et à rétablir la discipline dans son diocèse. Il mourut à Toulouse le 18 mai 1643, à l'âge de 75 ans. Ses œuvres principales incluent 'Les Cimetières sacrés' et les 'Annales ecclésiastiques' de Baronius en abrégé. Il laissa également des ordonnances synodales et un petit livre intitulé 'Le Magot Genevois'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 2453-2459
Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres &c. [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République [...]
Mots clefs :
Hommes illustres, Histoire des hommes illustres, République des Lettres, Académie, Mémoires, Eusèbe Renaudot
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres &c. [titre d'après la table]
MEMOIRES pour fervir à l'Hiftoire
des Hommes Illuftres , dans la République
des Lettres , avec un Catalogu: raisonné de
leurs Ouvrages , tom . 12. vol. 8. de 405
pages , fans les Tables. A Paris, chez Briaffon
, rue S. Jacques , à la Science. 1730 .
La premiere Table de ce Volume indique
les Noms des Sçavans au nombre de
34. qui en font le fujet , & que nous rapporterons
icy, pour la fatisfaction de ceux
qui ne font pas à portée de voir le Livres
même , & qui ne fe déterminent pour
Facquerir qu'après quelque inftruction.
Benoit Bacchini , Jean de Barrus , Char
les Cefar Baudelot de Dairval, Jean Bau-'
douin , Jacques Boileau , François Bofquet,
Jean de la Cafa , Ferone Colonna , Diego
Fiij de
2434 MERCURE DE FRANCE
de Couto , Jean Devaux , Michel- Ange
Fardella , Michel Fofcanni , Pierre Franeius
, Adam Fumano , Jean Guiddiccione ,
Jan Guintier', Nicolas Henrion , George-
Mathias Koenig , Jean - Marie Lancifi ,
Pierre de Marca , Guill. Maffien , Jean'
Menofius, Daniel- Guill. Mollerus , Etienne
Morin , Louis Morin , André Morofini ,
Louis Nogarola , Pierre Paaw , Ifaac la
Peyrere , Roger de Liles , Eufebe Renaudot,
Marc- Antoine Coccius , Sabellicus - Martin
Schoockius , Jean- François Simon .
L'Article qui concerne Eufebe Renau
dot nous ayant paru l'un des plus curieux
& des mieux remplis , nous le prefenterons
icy à nos Lecteurs , tel que
l'Editeur des Mémoires l'a publié , &
nous prendrons la liberté de fuppléer à
quelques omiffions , &c.
Eufebe Renaudot naquit à Paris le 20
Juillet 1646. & fût l'aîné de quatorze
freres ou foeurs , fon pere après avoir
acquis beaucoup de réputation dans la
pratique de la Medecine , mourut en
1679. premier Medecin de Monſeigneur
le Dauphin.
Il entra à l'âge de onze ans au College
des Jéfuites , où il fit fes Humanitez ;
& paffa enfuite à celui d'Harcourt ; pour
y faire fa Philofophie , dont il foûtint publiquement
des Théfes en Grec & en Latin
C
鹰
NOVEMBRE. 1730. 2455
tin , qui firent beaucoup d'honneur au
College & à l'Ecolier.
pren
On croit que l'envie de pouffer les étu
des bien au - delà du terme , qu'y mettent
ordinairement les gens du monde , fut le
feul motif qui l'engagea pour lors à
dre l'habit Ecclefiaftique ; car il ne fongea
jamais , ni à entrer plus avant dans les
Ordres , ni à prendre des dégrez en Sorbonne
, ni même à fe charger d'aucun Bé,
nefice.
Il fe livra donc par choix & par gout
l'Etude de la Théologie la plus profon
de , où négligeant de fuivre les fentiers
communs de l'Ecole , il fe jetta d'abord
dans la connoiffance des Langues Orien
tales , qui lui fût fi utile dans la fuite.
L'Emploi de premier Medecin , que
fon pere exerçoit auprès de Monfeigneur,
le produifit de bonne heure à la Cour, où
il acquit une politeffe & des manieres
aifécs , qui accompagnent rarement les
études férieufes. M. le Duc de Montaufier
, & M. Boffuet lui accorderent leur
eftime dès qu'ils le connurent. M. Colbert,
M.de Seignelay & M.de Croiffy l'honorerent
d'une amitié finguliere. Le Prince
de Condé , & les deux Princes de Conti ,
fes neveux , lui donnerent leur confiance,
& l'admirent à leur familiarité. Le Roy,
même trouva bon que fes Miniftres lui
Fiiij com
2456 MERCURE DE FRANCE
communicaffent certaines affaires , & luf
fent fes Mémoires au Confeil.
En 1689. l'Academie Françoiſe le choifit
pour y remplacer Monfieur Doujat, &
deux ans après , c'est- à- dire en 1691. il fue
reçu à l'Academie des Infcriptions , à la
place de M. Quinault , mort dès l'an
1688.
En 1700. il accompagna à Rome M. le
Cardinal de Noailles , & entra avec lui
dans le Conclave . Clement XI . qui y fur
élu , prévenu depuis long-temps fur fon
mérite , lui donna dès les premiers jours
de fon Pontificat , des marques publiques
de fa confidération : Il l'engagea à refter
à Rome , fept ou huit mois encore après
le départ du Cardinal . Outre les Audiances
réglées qu'il avoit au Palais , Sa Sainteté
ordonna qu'il y fut admis toutes les
fois qu'il le préfenteroit , grace des plus
diftinguées , & qui n'avoit encore été accordée
à aucun François . Il lui donna pendant
fon féjour à Rome un Prieuré en
Bretagne , que l'Abbé Renaudot eut de
la peine à accepter , s'en deffendant fur le
plan de vie qu'il avoit pris. Mais l'empreffement
du Pape , la modicité du revenu
& l'efpece d'ordre qu'il reçut de la
part du Cardinal de Noailles , furmonte--
rent fa délicateffe fur l'acceptation de ce
Benefice.
Lorf
NOVEMBRE . 1730. 2457-
Lorfqu'il fut parti de Rome , le Grand
Duc ayant fçû qu'il prenoit la route de
Florence , envoya fort loin au-devant de
lui , le retint dans fon Palais un mois entier
, pendant lequel il fut reçu à l'Academie
de la Crufca , & après l'avoir char
gé de riches prefents de Litterature , il lui
donna des Félouques pour le ramener à
Marſeille.
4. L'Académie des Infcriptions avoit
éprouvé un grand changement en fon
abfence. Quand il partit, elle n'étoit com--
pofée que de huit perfonnes , dont les
conferences ne demandoient prefque aucune
préparation . A fon retour il trouva
ce nombre augmenté jufqu'à quarante
par le Reglement de 1701. qui donnoit
d'ailleurs une face toute nouvelle aux
exercices de l'Académie. Il fut un des
Anciens qui accepta le plus volontiers la
reforme , & un des plus exacts à en remplir
dans la fuire les devoirs , comme il
paroît par les Mémoires qu'il compoſa
jufqu'à l'année 1711. où il demanda le
Titre de Veteran , pour ne plus s'occuper,,
du moins effentiellement , que des ma
tieres de la Religion ..
Il mourut le Septembre 1720. épuifé
par de violens accès de colique & de fiévre
, qu'il avoit méprifez & même cachez
dans Fy
2458 MERCURE DE FRANCE
dans les commencemens. Il avoit alors
foixante & quatorze ans .
Il étoit d'un jugement net & folide, ſa
critique étoit sûre , exacte & d'un tour
aifé , & naturel , quoique méthodique &
preffante. L'aufterité de fes moeurs , loin
de le fequeftrer de la fociété civile , ne
fervoit qu'à le rendre plus cher & plus
défiré dans celle des gens capables & vertueux.
Il ne fe défendoit pas d'y être le
fléau des Efprits forts , des Eſprits vains ›
& des hypocrites , parce qu'il croyoit
qu'il étoit du bien public de les démafquer;
& perfonne n'étoit plus heureux à
leur appliquer, à chacun dans fon efpece,
ces qualifications , qui peignent les caracteres
d'après nature. Dans le commerce
de l'amitié,il étoit d'une tendreffe & d'une
fidelité à toute épreuve.
Sa piété marquée dans tous fes Ou
vrages , l'étoit encore bien plus dans fa
conduite. Il avoit d'abord eu un appar
tement à S. Denys , & puis à S. Germain
dés Prez , où fuivant les faifons , il ſe retiroit
le Samedy & la veille des grandes
Fêtes ,,
pour y affifter avec les Religieux
aux Offices du jour & de la nuit . Tous
les mois on diftribuoit chez lui des aumônes
confiderables, & perfonellement il ne
refufoit jamais un pauvre, ni ne le laiſſoir
aller fans lui avoir donné ces inftructions
&
NOVEMBRE . 1730. 2455
& ces avis , que les malheureux ne reçoivent
bien que de ceux qui foulagent leur
mifere.
Il a laiffe aux Benedictins de l'Abbaye
de S. Germain des Prez fa Biblioteque
qui étoit de 8 à 9000 volumes , avec les
Ouvrages manufcrits , dont le nombre
paffe de beaucoup celui des imprimez.
Nous venvoyons au mois prochain le Ca-.
talogue de fes Ouvrages , & c.
des Hommes Illuftres , dans la République
des Lettres , avec un Catalogu: raisonné de
leurs Ouvrages , tom . 12. vol. 8. de 405
pages , fans les Tables. A Paris, chez Briaffon
, rue S. Jacques , à la Science. 1730 .
La premiere Table de ce Volume indique
les Noms des Sçavans au nombre de
34. qui en font le fujet , & que nous rapporterons
icy, pour la fatisfaction de ceux
qui ne font pas à portée de voir le Livres
même , & qui ne fe déterminent pour
Facquerir qu'après quelque inftruction.
Benoit Bacchini , Jean de Barrus , Char
les Cefar Baudelot de Dairval, Jean Bau-'
douin , Jacques Boileau , François Bofquet,
Jean de la Cafa , Ferone Colonna , Diego
Fiij de
2434 MERCURE DE FRANCE
de Couto , Jean Devaux , Michel- Ange
Fardella , Michel Fofcanni , Pierre Franeius
, Adam Fumano , Jean Guiddiccione ,
Jan Guintier', Nicolas Henrion , George-
Mathias Koenig , Jean - Marie Lancifi ,
Pierre de Marca , Guill. Maffien , Jean'
Menofius, Daniel- Guill. Mollerus , Etienne
Morin , Louis Morin , André Morofini ,
Louis Nogarola , Pierre Paaw , Ifaac la
Peyrere , Roger de Liles , Eufebe Renaudot,
Marc- Antoine Coccius , Sabellicus - Martin
Schoockius , Jean- François Simon .
L'Article qui concerne Eufebe Renau
dot nous ayant paru l'un des plus curieux
& des mieux remplis , nous le prefenterons
icy à nos Lecteurs , tel que
l'Editeur des Mémoires l'a publié , &
nous prendrons la liberté de fuppléer à
quelques omiffions , &c.
Eufebe Renaudot naquit à Paris le 20
Juillet 1646. & fût l'aîné de quatorze
freres ou foeurs , fon pere après avoir
acquis beaucoup de réputation dans la
pratique de la Medecine , mourut en
1679. premier Medecin de Monſeigneur
le Dauphin.
Il entra à l'âge de onze ans au College
des Jéfuites , où il fit fes Humanitez ;
& paffa enfuite à celui d'Harcourt ; pour
y faire fa Philofophie , dont il foûtint publiquement
des Théfes en Grec & en Latin
C
鹰
NOVEMBRE. 1730. 2455
tin , qui firent beaucoup d'honneur au
College & à l'Ecolier.
pren
On croit que l'envie de pouffer les étu
des bien au - delà du terme , qu'y mettent
ordinairement les gens du monde , fut le
feul motif qui l'engagea pour lors à
dre l'habit Ecclefiaftique ; car il ne fongea
jamais , ni à entrer plus avant dans les
Ordres , ni à prendre des dégrez en Sorbonne
, ni même à fe charger d'aucun Bé,
nefice.
Il fe livra donc par choix & par gout
l'Etude de la Théologie la plus profon
de , où négligeant de fuivre les fentiers
communs de l'Ecole , il fe jetta d'abord
dans la connoiffance des Langues Orien
tales , qui lui fût fi utile dans la fuite.
L'Emploi de premier Medecin , que
fon pere exerçoit auprès de Monfeigneur,
le produifit de bonne heure à la Cour, où
il acquit une politeffe & des manieres
aifécs , qui accompagnent rarement les
études férieufes. M. le Duc de Montaufier
, & M. Boffuet lui accorderent leur
eftime dès qu'ils le connurent. M. Colbert,
M.de Seignelay & M.de Croiffy l'honorerent
d'une amitié finguliere. Le Prince
de Condé , & les deux Princes de Conti ,
fes neveux , lui donnerent leur confiance,
& l'admirent à leur familiarité. Le Roy,
même trouva bon que fes Miniftres lui
Fiiij com
2456 MERCURE DE FRANCE
communicaffent certaines affaires , & luf
fent fes Mémoires au Confeil.
En 1689. l'Academie Françoiſe le choifit
pour y remplacer Monfieur Doujat, &
deux ans après , c'est- à- dire en 1691. il fue
reçu à l'Academie des Infcriptions , à la
place de M. Quinault , mort dès l'an
1688.
En 1700. il accompagna à Rome M. le
Cardinal de Noailles , & entra avec lui
dans le Conclave . Clement XI . qui y fur
élu , prévenu depuis long-temps fur fon
mérite , lui donna dès les premiers jours
de fon Pontificat , des marques publiques
de fa confidération : Il l'engagea à refter
à Rome , fept ou huit mois encore après
le départ du Cardinal . Outre les Audiances
réglées qu'il avoit au Palais , Sa Sainteté
ordonna qu'il y fut admis toutes les
fois qu'il le préfenteroit , grace des plus
diftinguées , & qui n'avoit encore été accordée
à aucun François . Il lui donna pendant
fon féjour à Rome un Prieuré en
Bretagne , que l'Abbé Renaudot eut de
la peine à accepter , s'en deffendant fur le
plan de vie qu'il avoit pris. Mais l'empreffement
du Pape , la modicité du revenu
& l'efpece d'ordre qu'il reçut de la
part du Cardinal de Noailles , furmonte--
rent fa délicateffe fur l'acceptation de ce
Benefice.
Lorf
NOVEMBRE . 1730. 2457-
Lorfqu'il fut parti de Rome , le Grand
Duc ayant fçû qu'il prenoit la route de
Florence , envoya fort loin au-devant de
lui , le retint dans fon Palais un mois entier
, pendant lequel il fut reçu à l'Academie
de la Crufca , & après l'avoir char
gé de riches prefents de Litterature , il lui
donna des Félouques pour le ramener à
Marſeille.
4. L'Académie des Infcriptions avoit
éprouvé un grand changement en fon
abfence. Quand il partit, elle n'étoit com--
pofée que de huit perfonnes , dont les
conferences ne demandoient prefque aucune
préparation . A fon retour il trouva
ce nombre augmenté jufqu'à quarante
par le Reglement de 1701. qui donnoit
d'ailleurs une face toute nouvelle aux
exercices de l'Académie. Il fut un des
Anciens qui accepta le plus volontiers la
reforme , & un des plus exacts à en remplir
dans la fuire les devoirs , comme il
paroît par les Mémoires qu'il compoſa
jufqu'à l'année 1711. où il demanda le
Titre de Veteran , pour ne plus s'occuper,,
du moins effentiellement , que des ma
tieres de la Religion ..
Il mourut le Septembre 1720. épuifé
par de violens accès de colique & de fiévre
, qu'il avoit méprifez & même cachez
dans Fy
2458 MERCURE DE FRANCE
dans les commencemens. Il avoit alors
foixante & quatorze ans .
Il étoit d'un jugement net & folide, ſa
critique étoit sûre , exacte & d'un tour
aifé , & naturel , quoique méthodique &
preffante. L'aufterité de fes moeurs , loin
de le fequeftrer de la fociété civile , ne
fervoit qu'à le rendre plus cher & plus
défiré dans celle des gens capables & vertueux.
Il ne fe défendoit pas d'y être le
fléau des Efprits forts , des Eſprits vains ›
& des hypocrites , parce qu'il croyoit
qu'il étoit du bien public de les démafquer;
& perfonne n'étoit plus heureux à
leur appliquer, à chacun dans fon efpece,
ces qualifications , qui peignent les caracteres
d'après nature. Dans le commerce
de l'amitié,il étoit d'une tendreffe & d'une
fidelité à toute épreuve.
Sa piété marquée dans tous fes Ou
vrages , l'étoit encore bien plus dans fa
conduite. Il avoit d'abord eu un appar
tement à S. Denys , & puis à S. Germain
dés Prez , où fuivant les faifons , il ſe retiroit
le Samedy & la veille des grandes
Fêtes ,,
pour y affifter avec les Religieux
aux Offices du jour & de la nuit . Tous
les mois on diftribuoit chez lui des aumônes
confiderables, & perfonellement il ne
refufoit jamais un pauvre, ni ne le laiſſoir
aller fans lui avoir donné ces inftructions
&
NOVEMBRE . 1730. 2455
& ces avis , que les malheureux ne reçoivent
bien que de ceux qui foulagent leur
mifere.
Il a laiffe aux Benedictins de l'Abbaye
de S. Germain des Prez fa Biblioteque
qui étoit de 8 à 9000 volumes , avec les
Ouvrages manufcrits , dont le nombre
paffe de beaucoup celui des imprimez.
Nous venvoyons au mois prochain le Ca-.
talogue de fes Ouvrages , & c.
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Résumé : Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres &c. [titre d'après la table]
Le texte présente les 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres', un ouvrage de 405 pages publié à Paris en 1730. Cet ouvrage liste 34 savants, dont Eufebe Renaudot est particulièrement mis en avant. Né à Paris le 20 juillet 1646, Renaudot était l'aîné de quatorze enfants. Son père, médecin du Dauphin, mourut en 1679. Renaudot entra au Collège des Jésuites à onze ans, puis au Collège d'Harcourt pour étudier la philosophie. Il se distingua par des thèses en grec et en latin. Renaudot choisit la vie ecclésiastique sans entrer dans les ordres ni prendre de bénéfices. Il se consacra à l'étude approfondie de la théologie et des langues orientales. Grâce à son père, il fréquenta la cour et acquit une politesse rare. Il fut estimé par des personnalités comme le Duc de Montausier, Bossuet, Colbert, et le Roi, qui lui confia certaines affaires. En 1689, il fut élu à l'Académie Française et en 1691 à l'Académie des Inscriptions. En 1700, Renaudot accompagna le Cardinal de Noailles à Rome et fut reçu en audience par le Pape Clément XI. Il reçut un prieuré en Bretagne et fut retenu par le Grand-Duc de Toscane à Florence. À son retour, il trouva l'Académie des Inscriptions réformée et augmentée. Renaudot accepta les réformes et continua ses travaux jusqu'en 1711. Il mourut en septembre 1720 à l'âge de soixante-quatorze ans, après avoir souffert de violentes coliques et fièvres. Renaudot était connu pour son jugement solide et sa critique précise. Sa piété et sa générosité étaient marquées par des aumônes régulières et des instructions aux pauvres. Il légua sa bibliothèque de 8 000 à 9 000 volumes aux Bénédictins de l'Abbaye de Saint-Germain-des-Prés.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 2652-2665
Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, &c. [titre d'après la table]
Début :
SECONDE PARTIE de l'Extrait des Mémoires pour servir à l'Histoire des [...]
Mots clefs :
Jugement, Bibliothèque, Ouvrage, Histoire, Relations, Académie, Mémoires, Eusèbe Renaudot
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, &c. [titre d'après la table]
ECONDE PARTIE de l'Extrait des
Mémoires pour fervir à l'Hiftoire des
Hommes Illuftres.
Catalogue des Ouvrages d'Eufebe Renaudot.
1. Il a traduit en Latin dès l'âge de 25 .
I. Vol. ans
DECEMBRE. 1730.. 265 3
ans les Atteftations des Eglifes d'Orient
touchant leur créance fur l'Euchariftie
que M. de Nointel , Ambaffadeur de
France à Conftantinople , envoya à M. de
Pomponne , pour être inferées dans le Livre
de la Perpetuité de la Foi fur l'Euchariftie
, & fa Traduction fe trouve dans
le troifiéme Volume , dans la Préface duquel
M. Arnauld s'exprime ainfi à fon
fujet » Ce feroit tout-à- fait manquer à
»la reconnoiffance & à la juftice , que de .
ne pas rendre un témoignage public
» de l'obligation qu'on a à celui qui a
» rendu ces Actes utiles à l'Eglife par la
» traduction qu'il en a faite , & la peine
qu'il a prife d'extraire lui - même des
>> Livres Orientaux tous les Paffages qui
» font rapportés dans cet Ouvrage . C'eft
» M. l'Abbé Renaudot , dont la modeftie
ne permet pas d'en dire davantage ;
» mais la diverfité de ces Actes & des
>> Livres dont fes Extraits ont été tirés ,
» qui font écrits les uns en Grec vul-
>> gaire , les autres en Arabe , les autres
» en Syriac , les autres en Copte , les autres
en Ethiopien , font affez connoître
>> l'intelligence qu'il a dans toutes ces Lan
» gues.
Défenfe de la Perpetuité de la Foi contre
les calomnies & les fauffetés du Livre
intitulé : Monumens authentiques de la
JVol
Ev Religion
2654 * MERCURE DE FRANCE
Religion des Grecs. Paris 1708. in 8. Jean
Aymon , Auteur des Monumens autentiques
que M. Renaudot entreprend ici
de réfuter , étoit né en Dauphiné ; après
avoir été ordonné Prêtre , il fut Aumônier
d'un Evêque de Maurienne qu'il
fuivit dans un Voyage de Rome où il acquit
un titre de Protonotaire Apoftolique
, & deffervit quelque tems une Cure
de Campagne. Il quitta enfuite Eglife
Romaine pour embraffer le Calviniſme,
& paffa en Hollande , d'où il vint à Paris
en 1705. fous prétexte de rentrer
'dans le fein de l'Eglife ; il s'acquit par fà
de la protection , & eut un libre accès à
la Bibliotheque du Roi , où il avoit la
liberté de parcourir les Manufcrits précieux
qui y font ; mais il ſe ſervit de cette
liberté pour en mutiler quelques- uns ,
& pour voler l'original d'un Synode de
Jerufalem , tenu en 1672. fous le Patriarche
Dofithée , qu'il emporta en Hollande,
& qu'il y fit imprimer en 1708. avec des
Notes de fa façon . Ce Livre tiffu de calomnies
, de raifonnemers abfurdes &
de bévûcs ridicules excita tellement l'indignation
de M.Renaudot, qu'il travailla
auffi- tôt à renverfer ces prétendus Monumens
, ce qu'il exécuta d'une maniere
également folide & fçavante . Le Manuſcrit
volé eft revenu dans la Bibliotheque
1. Vol du
DECEMBRE. 1730. 2655
du Roi , les Etats Generaux l'ayant retiré
de la Bibliotheque de Leyde , ou le
fieur Aymon l'avoit déposé pour le
rendre à fon premier Maître .
3. Gennadii Patriarcha Conftantinopoli
-tani Homilia de Sacramento Euchariftia ,
Meletii Alexandrini , Nectarii Hierofoly
mitani , Meletii Syrigi & aliorum de eodem
argumento Opufcula , gracè & Latinè , feu
Appendix ad Acta , qua circa Græcorum
de Tranfubftantiatione fidem relata funt in
opere de Perpetuitate Fidei. Eufebius Renaudotius
, Parifinus , ex Codd . Mff. edidit
, latinè vertit , Differtationes & Ob
fervationes adjecit. Paris , 1709. in 4.
4. La Perpetuité de la Foi de l'Eglife
Catholique touchant l'Euchariftie . Tome
-IV. contenant un Examen particulier
de la conformité de la Doctrine des Grecs
& de tous les Chrétiens Orientaux avec
celle de l'Eglife Latine , plufieurs nouveaux
Eclairciffemens touchant les Auteurs
& les faits allegués dans les Volumes
précedens , & la réfutation de tout
ce qui a été objecté contre les Atteftations
& autres Piéces qui y ont été produites.
Paris , 1711. in 4.
5. La Perpetuité de la Foi de l'Eglife Caª
tholique fur les Sacremens , & fur tous les
autres points de Religion & de Difcipline
que les premiers Réformateurs ont pris pour
I. Vol
5°
· prétexte
2656 MERCURE DE FRANCE
prétexte de leur Schifme , prouvée par le
confentement des Eglifes Orientales . Paris ,
1713. in 4. Il y a beaucoup d'érudition
dans ces deux Volumes .
6. Hiftoria Patriarcharum Alexandrinorum
Facobitarum à D. Marco ufque ad finem
faculi XIII. cum Catalogo fequentium
Patriarcharum , & collectaneis Hiftoricis ad
ultima tempora fpectantibus . Inferuntur multa
ad res Ecclefiafticas Facobitarum Patriarchatus
Antiocheni , Æthiopia , Nubia &
Armeniæ pertinentia. Accedit Epitome Hif
toria Muhamedane ad illuftrandas res
Ægyptiacas ; omnia collecta ex Autoribus
Arabicis , Severo , Epifcopo Afchmonie ,
Michaële , Epifcopo Taneos , Ephrem
filio Zaraa , Abulbircat & aliis Anonimisz
tum ex editis Eutichio , Elmacino , Abulfaragio
, Chronico Orientali , diverfifque
Hiftoria Muhamedana Scriptoribus Arabicis
& Perficis. Paris, 1713. in 8. On n'avoit
encore rien vû de fi exact ni de fr
recherché fur l'Histoire des Patriarches.
Jacobites d'Alexandrie.
7. Liturgiarum Orientalium Collectio
Parifiis, 1716. in 4. 2. tom.C'eft le Recueil
le plus ample qui ait jamais été fait des
Liturgies Orientales à l'ufage des Coptes,
des Jacobites , des Melchites de Syrie &
des Neftoriens . M. Renaudot s'eft contenté
de faire imprimer fa Traduction ,
I. Vol. fans
DECEMBRE 1730. 2657
fans y joindre le Texte original , don't
Pimpreffion auroit demandé une dépenfe
exceffive , & auroit rebuté beaucoup de
gens. Les Differtations qui accompagnent
La Traduction font très fçavantes .
8. Défenfe de l'Hiftoire des Patriarches
d'Alexandrie & de la Collection des Litur
gies Orientales , contre un Ecrit intitulé :
Défenſe de la Mémoire de M. Ludolf.
Paris , 1717. in 12. pp. 193. M. l'Abbé
Renaudot en donnant au Public l'Hif
toire des Patriarches d'Alexandrie & la
Collection des Liturgies Orientales crût
être obligé de réfuter quelques endroits
de l'Hiftoire d'Ethiopie de Ludolf & du
Commentaire que le même Auteur a
publié fur cette Hiftoire. C'est ce qui a
donné lieu au Mémoire inferé dans le
neuviéme Tome du Journal Litteraire ,,
page 217. où l'on prétend défendre Lu
dolf contre les accufations de M. Renaudot.
Ce fçavant Abbé s'y voyant accufe
à fon tour de mauvaiſe foi avec beau
coup de vivacité , publia cet Ouvrage
pour repouffer les attaques de cet Advesfaire
, qui lui a répondu avec la même
vivacité que la premiere fois dans un
Ecrit intitulé Examen défintereffe du
Livre de M. Renaudot , & inferé dans
PEurope Sçavante , Tome 1o. p. 23.1 . &
Tome 11. p . 28 .
I. Vol.
ބ
2658 MERCURE DE FRANCE
9. Anciennes Relations des Indes & de
la Chine , de deux Voyageurs Mahometans
qui y allerent dans le IX. fiecle , traduites
d Arabe , avec des Remarques fur les principaux
endroits de ces Relations . Paris , 1718.
in 8. Ces Relations font fimples & convenables
au tems , où elles ont été écrites.
Leurs Auteurs paroiffent inftruits &
finceres. Les Obfervations de M. Renaudot
les rendent plus inftructives & plus
utiles ; on n'y remarque ni l'aigreur qu'on
lui a reproché dans d'autres Ouvrages ,
ni une profufion exceffive d'érudition
affez ordinaire à ceux qui ont beaucoup
lû & fur- tout des Livres que peu de
perfonnes peuvent lire : c'eft le jugement
qu'on porte de cet Ouvrage dans PEu-
Fope Sçavante , tome 6. p. 95. Mais ce
jugement eft contredit par le Pere de
Prémare , Jefuite , Miffionnaire à la Chine
, qui dans une Lettre inferée dans le
dix- neuvième Recueil des Lettres édifiantes
& curieuſes , écrites des Miffions
Etrangeres par quelques Miffionnaires de
la Compagnie de Jefus , fait voir que
ces Relations font remplies de fables &
de contes , & que M. Renaudot , noncontent
d'adopter toutes les faufletés qu'il
s'eft donné la peine de traduire , eft tombé
lui -même dans une infinité de mépri
fes confiderables dans les Eclairciffemens
qu'il y a ajoûtés.
10.
DECEMBRE. 1730. 2659
10. De l'origine de la Sphere. Cette
Differtation qui fe trouve dans le premier
Tome des Mémoires de l'Académie des
Infcriptions , page 1. a été attaquée par
M. Des Vignoles dans des Remarquesfort
fçavantes , inferées dans le cinquié
meTome de la Bibliotheque Germanique,
page 153.
1. De l'origine des Lettres Grecques?
Les deux Mémoires où M. Renaudot
examine cette matiere,font contenus dans
le fecond Volume de l'Hiftoire de l'Académie
des Inſcriptions , page 246. Il y'
foutient , à l'exemple de Jofeph Jufte
Scaliger , que les Lettres Grecques tirent
feur origine , non point des Egyptiennes
mais des Phéniciennes ou anciennes Hebraïques.
3
12. Eclairciffement fur les Explications
que les Anglois ont données de quelques
Inferiptions de Palmyre & des Remarques
fur une qui fe trouve à Heliopolis de Syrie,
appellée communément Baalbek. Hiftoire de
' Académie des Infcriptions. Tom. 2. p.
-509.
13. Eclairciffement fur le nom de Septimia
qui eft joint à celui de Zenobia fur les Médailles
de cette Princeffe. Ibid. p. 567.
14. Lettre à M. Dacier fur les Verfions
Syriaques & Arabes d'Hippocrate , inferée
dans la Traduction d'Hippocrate par
Dacier
M
DS.
4660 MERCURE DE FRANCE
15. Les Libraires de Paris voyant l'empreffement
avec lequel on recherchoit le
Dictionnaire de M. Bayle , lorfqu'il parût
pour la premiere fois , formerent le deffein
de le réimprimer , & s'addrefferent
à M. le Chancelier pour avoir un pri
vilege ; M. le Chancelier ordonna à
M. l'Abbé Renaudot d'examiner l'Ouvrage
, pour voir s'il n'y avoit rien contre
la France ou contre la Religion , & M.
Renaudot dreffa un Mémoire où il en
donna une idée très défavantageuſe. Ce
Mémoire étant tombé entre les mains de
M. Jurieu , qui haïffoit M. Bayle , il le
fit imprimer avec quelques Extraits de
Lettres anonymes fur le même fujet , &
y ajoûta des Remarques fort vives ; le
tout parut fous le titre de fugement du
Public, & particulierement de M. l'Abbé
Renaudot fur le Dictionnaire Critique du
Sieur Bayle. Rotterdam, 1697. in 4. pp. 47.
M. Bayle y répondit par un Ecrit inti
tulé : Réflexions fur un Imprimé qui a pour
titre Jugement du Public &c. in 4. pp.
16. Il fut réfuté à fon tour par M. Jurieu
dans une Lettre fur les Réflexions
publiées contre le Jugement du Public
fur le Dictionnaire du ficur Bayle , in 44
pp. 16.
M. Bayle marque dans fa Lettre 2307
à M. Des Maizeaux que M. de Witt +
I. Vola
grand
DECEMBRE. 1730. 2661
à
grand ami de l'Abbé Renaudot , ayant
reçû une de ſes Lettres , où il lui marquoit
qu'il n'entroit qu'avec regret dans
des démêlés de cette nature , & qu'il
haïffoit naturellement les guerres Litte
raires , ménagea la paix entr'eux , & l'engagea
mettre tout en oubli , ce qui
fit qu'il ne dit pas un mot de leur differend
dans la feconde Edition de fon
Dictionnaire. D'un autre côté , M. de
Saint-Evremont compofa une petite Piéce
contre le Jugement de M. Renaudot , où
il le raille affez finement. On la trouve
parmi fes Oeuvres.
16. Il a préfidé pendant plufieurs années
à la compofition des Gazettes qui
doivent leur établiffement à Theophrafte
Renaudot , fon ayeul , lequel en fit en
1631. agréer le projet au Cardinal de
Richelieu , & dont il a eu le privilege
après fon pere.
Voyez fon Eloge par M. de Boze daus
Hiftoire de l'Académie des Infcriptions
tome 5. p. 384.
Mémoires pour fervir à l'Hiftoire des
Hommes Illuftres.
Catalogue des Ouvrages d'Eufebe Renaudot.
1. Il a traduit en Latin dès l'âge de 25 .
I. Vol. ans
DECEMBRE. 1730.. 265 3
ans les Atteftations des Eglifes d'Orient
touchant leur créance fur l'Euchariftie
que M. de Nointel , Ambaffadeur de
France à Conftantinople , envoya à M. de
Pomponne , pour être inferées dans le Livre
de la Perpetuité de la Foi fur l'Euchariftie
, & fa Traduction fe trouve dans
le troifiéme Volume , dans la Préface duquel
M. Arnauld s'exprime ainfi à fon
fujet » Ce feroit tout-à- fait manquer à
»la reconnoiffance & à la juftice , que de .
ne pas rendre un témoignage public
» de l'obligation qu'on a à celui qui a
» rendu ces Actes utiles à l'Eglife par la
» traduction qu'il en a faite , & la peine
qu'il a prife d'extraire lui - même des
>> Livres Orientaux tous les Paffages qui
» font rapportés dans cet Ouvrage . C'eft
» M. l'Abbé Renaudot , dont la modeftie
ne permet pas d'en dire davantage ;
» mais la diverfité de ces Actes & des
>> Livres dont fes Extraits ont été tirés ,
» qui font écrits les uns en Grec vul-
>> gaire , les autres en Arabe , les autres
» en Syriac , les autres en Copte , les autres
en Ethiopien , font affez connoître
>> l'intelligence qu'il a dans toutes ces Lan
» gues.
Défenfe de la Perpetuité de la Foi contre
les calomnies & les fauffetés du Livre
intitulé : Monumens authentiques de la
JVol
Ev Religion
2654 * MERCURE DE FRANCE
Religion des Grecs. Paris 1708. in 8. Jean
Aymon , Auteur des Monumens autentiques
que M. Renaudot entreprend ici
de réfuter , étoit né en Dauphiné ; après
avoir été ordonné Prêtre , il fut Aumônier
d'un Evêque de Maurienne qu'il
fuivit dans un Voyage de Rome où il acquit
un titre de Protonotaire Apoftolique
, & deffervit quelque tems une Cure
de Campagne. Il quitta enfuite Eglife
Romaine pour embraffer le Calviniſme,
& paffa en Hollande , d'où il vint à Paris
en 1705. fous prétexte de rentrer
'dans le fein de l'Eglife ; il s'acquit par fà
de la protection , & eut un libre accès à
la Bibliotheque du Roi , où il avoit la
liberté de parcourir les Manufcrits précieux
qui y font ; mais il ſe ſervit de cette
liberté pour en mutiler quelques- uns ,
& pour voler l'original d'un Synode de
Jerufalem , tenu en 1672. fous le Patriarche
Dofithée , qu'il emporta en Hollande,
& qu'il y fit imprimer en 1708. avec des
Notes de fa façon . Ce Livre tiffu de calomnies
, de raifonnemers abfurdes &
de bévûcs ridicules excita tellement l'indignation
de M.Renaudot, qu'il travailla
auffi- tôt à renverfer ces prétendus Monumens
, ce qu'il exécuta d'une maniere
également folide & fçavante . Le Manuſcrit
volé eft revenu dans la Bibliotheque
1. Vol du
DECEMBRE. 1730. 2655
du Roi , les Etats Generaux l'ayant retiré
de la Bibliotheque de Leyde , ou le
fieur Aymon l'avoit déposé pour le
rendre à fon premier Maître .
3. Gennadii Patriarcha Conftantinopoli
-tani Homilia de Sacramento Euchariftia ,
Meletii Alexandrini , Nectarii Hierofoly
mitani , Meletii Syrigi & aliorum de eodem
argumento Opufcula , gracè & Latinè , feu
Appendix ad Acta , qua circa Græcorum
de Tranfubftantiatione fidem relata funt in
opere de Perpetuitate Fidei. Eufebius Renaudotius
, Parifinus , ex Codd . Mff. edidit
, latinè vertit , Differtationes & Ob
fervationes adjecit. Paris , 1709. in 4.
4. La Perpetuité de la Foi de l'Eglife
Catholique touchant l'Euchariftie . Tome
-IV. contenant un Examen particulier
de la conformité de la Doctrine des Grecs
& de tous les Chrétiens Orientaux avec
celle de l'Eglife Latine , plufieurs nouveaux
Eclairciffemens touchant les Auteurs
& les faits allegués dans les Volumes
précedens , & la réfutation de tout
ce qui a été objecté contre les Atteftations
& autres Piéces qui y ont été produites.
Paris , 1711. in 4.
5. La Perpetuité de la Foi de l'Eglife Caª
tholique fur les Sacremens , & fur tous les
autres points de Religion & de Difcipline
que les premiers Réformateurs ont pris pour
I. Vol
5°
· prétexte
2656 MERCURE DE FRANCE
prétexte de leur Schifme , prouvée par le
confentement des Eglifes Orientales . Paris ,
1713. in 4. Il y a beaucoup d'érudition
dans ces deux Volumes .
6. Hiftoria Patriarcharum Alexandrinorum
Facobitarum à D. Marco ufque ad finem
faculi XIII. cum Catalogo fequentium
Patriarcharum , & collectaneis Hiftoricis ad
ultima tempora fpectantibus . Inferuntur multa
ad res Ecclefiafticas Facobitarum Patriarchatus
Antiocheni , Æthiopia , Nubia &
Armeniæ pertinentia. Accedit Epitome Hif
toria Muhamedane ad illuftrandas res
Ægyptiacas ; omnia collecta ex Autoribus
Arabicis , Severo , Epifcopo Afchmonie ,
Michaële , Epifcopo Taneos , Ephrem
filio Zaraa , Abulbircat & aliis Anonimisz
tum ex editis Eutichio , Elmacino , Abulfaragio
, Chronico Orientali , diverfifque
Hiftoria Muhamedana Scriptoribus Arabicis
& Perficis. Paris, 1713. in 8. On n'avoit
encore rien vû de fi exact ni de fr
recherché fur l'Histoire des Patriarches.
Jacobites d'Alexandrie.
7. Liturgiarum Orientalium Collectio
Parifiis, 1716. in 4. 2. tom.C'eft le Recueil
le plus ample qui ait jamais été fait des
Liturgies Orientales à l'ufage des Coptes,
des Jacobites , des Melchites de Syrie &
des Neftoriens . M. Renaudot s'eft contenté
de faire imprimer fa Traduction ,
I. Vol. fans
DECEMBRE 1730. 2657
fans y joindre le Texte original , don't
Pimpreffion auroit demandé une dépenfe
exceffive , & auroit rebuté beaucoup de
gens. Les Differtations qui accompagnent
La Traduction font très fçavantes .
8. Défenfe de l'Hiftoire des Patriarches
d'Alexandrie & de la Collection des Litur
gies Orientales , contre un Ecrit intitulé :
Défenſe de la Mémoire de M. Ludolf.
Paris , 1717. in 12. pp. 193. M. l'Abbé
Renaudot en donnant au Public l'Hif
toire des Patriarches d'Alexandrie & la
Collection des Liturgies Orientales crût
être obligé de réfuter quelques endroits
de l'Hiftoire d'Ethiopie de Ludolf & du
Commentaire que le même Auteur a
publié fur cette Hiftoire. C'est ce qui a
donné lieu au Mémoire inferé dans le
neuviéme Tome du Journal Litteraire ,,
page 217. où l'on prétend défendre Lu
dolf contre les accufations de M. Renaudot.
Ce fçavant Abbé s'y voyant accufe
à fon tour de mauvaiſe foi avec beau
coup de vivacité , publia cet Ouvrage
pour repouffer les attaques de cet Advesfaire
, qui lui a répondu avec la même
vivacité que la premiere fois dans un
Ecrit intitulé Examen défintereffe du
Livre de M. Renaudot , & inferé dans
PEurope Sçavante , Tome 1o. p. 23.1 . &
Tome 11. p . 28 .
I. Vol.
ބ
2658 MERCURE DE FRANCE
9. Anciennes Relations des Indes & de
la Chine , de deux Voyageurs Mahometans
qui y allerent dans le IX. fiecle , traduites
d Arabe , avec des Remarques fur les principaux
endroits de ces Relations . Paris , 1718.
in 8. Ces Relations font fimples & convenables
au tems , où elles ont été écrites.
Leurs Auteurs paroiffent inftruits &
finceres. Les Obfervations de M. Renaudot
les rendent plus inftructives & plus
utiles ; on n'y remarque ni l'aigreur qu'on
lui a reproché dans d'autres Ouvrages ,
ni une profufion exceffive d'érudition
affez ordinaire à ceux qui ont beaucoup
lû & fur- tout des Livres que peu de
perfonnes peuvent lire : c'eft le jugement
qu'on porte de cet Ouvrage dans PEu-
Fope Sçavante , tome 6. p. 95. Mais ce
jugement eft contredit par le Pere de
Prémare , Jefuite , Miffionnaire à la Chine
, qui dans une Lettre inferée dans le
dix- neuvième Recueil des Lettres édifiantes
& curieuſes , écrites des Miffions
Etrangeres par quelques Miffionnaires de
la Compagnie de Jefus , fait voir que
ces Relations font remplies de fables &
de contes , & que M. Renaudot , noncontent
d'adopter toutes les faufletés qu'il
s'eft donné la peine de traduire , eft tombé
lui -même dans une infinité de mépri
fes confiderables dans les Eclairciffemens
qu'il y a ajoûtés.
10.
DECEMBRE. 1730. 2659
10. De l'origine de la Sphere. Cette
Differtation qui fe trouve dans le premier
Tome des Mémoires de l'Académie des
Infcriptions , page 1. a été attaquée par
M. Des Vignoles dans des Remarquesfort
fçavantes , inferées dans le cinquié
meTome de la Bibliotheque Germanique,
page 153.
1. De l'origine des Lettres Grecques?
Les deux Mémoires où M. Renaudot
examine cette matiere,font contenus dans
le fecond Volume de l'Hiftoire de l'Académie
des Inſcriptions , page 246. Il y'
foutient , à l'exemple de Jofeph Jufte
Scaliger , que les Lettres Grecques tirent
feur origine , non point des Egyptiennes
mais des Phéniciennes ou anciennes Hebraïques.
3
12. Eclairciffement fur les Explications
que les Anglois ont données de quelques
Inferiptions de Palmyre & des Remarques
fur une qui fe trouve à Heliopolis de Syrie,
appellée communément Baalbek. Hiftoire de
' Académie des Infcriptions. Tom. 2. p.
-509.
13. Eclairciffement fur le nom de Septimia
qui eft joint à celui de Zenobia fur les Médailles
de cette Princeffe. Ibid. p. 567.
14. Lettre à M. Dacier fur les Verfions
Syriaques & Arabes d'Hippocrate , inferée
dans la Traduction d'Hippocrate par
Dacier
M
DS.
4660 MERCURE DE FRANCE
15. Les Libraires de Paris voyant l'empreffement
avec lequel on recherchoit le
Dictionnaire de M. Bayle , lorfqu'il parût
pour la premiere fois , formerent le deffein
de le réimprimer , & s'addrefferent
à M. le Chancelier pour avoir un pri
vilege ; M. le Chancelier ordonna à
M. l'Abbé Renaudot d'examiner l'Ouvrage
, pour voir s'il n'y avoit rien contre
la France ou contre la Religion , & M.
Renaudot dreffa un Mémoire où il en
donna une idée très défavantageuſe. Ce
Mémoire étant tombé entre les mains de
M. Jurieu , qui haïffoit M. Bayle , il le
fit imprimer avec quelques Extraits de
Lettres anonymes fur le même fujet , &
y ajoûta des Remarques fort vives ; le
tout parut fous le titre de fugement du
Public, & particulierement de M. l'Abbé
Renaudot fur le Dictionnaire Critique du
Sieur Bayle. Rotterdam, 1697. in 4. pp. 47.
M. Bayle y répondit par un Ecrit inti
tulé : Réflexions fur un Imprimé qui a pour
titre Jugement du Public &c. in 4. pp.
16. Il fut réfuté à fon tour par M. Jurieu
dans une Lettre fur les Réflexions
publiées contre le Jugement du Public
fur le Dictionnaire du ficur Bayle , in 44
pp. 16.
M. Bayle marque dans fa Lettre 2307
à M. Des Maizeaux que M. de Witt +
I. Vola
grand
DECEMBRE. 1730. 2661
à
grand ami de l'Abbé Renaudot , ayant
reçû une de ſes Lettres , où il lui marquoit
qu'il n'entroit qu'avec regret dans
des démêlés de cette nature , & qu'il
haïffoit naturellement les guerres Litte
raires , ménagea la paix entr'eux , & l'engagea
mettre tout en oubli , ce qui
fit qu'il ne dit pas un mot de leur differend
dans la feconde Edition de fon
Dictionnaire. D'un autre côté , M. de
Saint-Evremont compofa une petite Piéce
contre le Jugement de M. Renaudot , où
il le raille affez finement. On la trouve
parmi fes Oeuvres.
16. Il a préfidé pendant plufieurs années
à la compofition des Gazettes qui
doivent leur établiffement à Theophrafte
Renaudot , fon ayeul , lequel en fit en
1631. agréer le projet au Cardinal de
Richelieu , & dont il a eu le privilege
après fon pere.
Voyez fon Eloge par M. de Boze daus
Hiftoire de l'Académie des Infcriptions
tome 5. p. 384.
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Résumé : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, &c. [titre d'après la table]
Le document présente un catalogue des œuvres d'Eusèbe Renaudot, un érudit du XVIIIe siècle. Renaudot a traduit en latin les attestations des Églises d'Orient sur l'Eucharistie, envoyées par l'ambassadeur de France à Constantinople, M. de Nointel, à M. de Pomponne. Cette traduction, publiée dans le troisième volume de la 'Perpetuité de la Foi', a été saluée par M. Arnauld pour son utilité et la diversité des langues maîtrisées par Renaudot, incluant le grec, l'arabe, le syriaque, le copte et l'éthiopien. Renaudot a également écrit une défense contre les calomnies et les faussetés du livre 'Monumens authentiques de la Religion des Grecs' de Jean Aymon. Aymon, après avoir été prêtre et protonotaire apostolique, s'était converti au calvinisme et avait volé des manuscrits précieux de la Bibliothèque du Roi, notamment un synode de Jérusalem de 1672. Renaudot a réfuté les prétendus monuments d'Aymon et a contribué à la restitution du manuscrit volé. Parmi les autres œuvres de Renaudot figurent des homélies et des opuscules sur l'Eucharistie, des examens de la conformité des doctrines des Grecs et des Chrétiens orientaux avec celle de l'Église latine, et une histoire des patriarches jacobites d'Alexandrie. Il a également compilé une collection de liturgies orientales et traduit des relations anciennes des Indes et de la Chine. Renaudot a été impliqué dans des controverses littéraires, notamment avec Pierre Bayle et Jacques Jurieu, concernant le 'Dictionnaire Critique' de Bayle. Il a présidé à la composition des gazettes fondées par son aïeul, Théophraste Renaudot, et a été honoré par un éloge dans l'Histoire de l'Académie des Inscriptions.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 508-514
Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, &c. T. [...]
Mots clefs :
Dialectique, Aristote, Dispute académique, Philosophie, Jugement, Injustice, François I, Logique, Pierre Ramus
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
M
EMOIRES pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres , &c.
T. XIII. de 408. pages. A Paris , chez
Bríasson , à la Science , M. DCC. XXX.
Voici les noms des Sçavans dont les
Vies et le Catalogue des Ouvrages remplissent
ce Volume. Louis Alamanni; Guill.
Amontons ; Jean Barbier d'Aucour; Pierre
de Boissat ; Jean Boscan ; Jean Coras ;
Claude d'Epences ; Melchior Guillandin ;
George - Abraham Merklinus : Etienne le
Moine ; André Navagero ; Bernard Nieu-
Wentit : Sertorio Orsato ; Conrad Peuttinger.
Pierre Ramus ; Jean Russellay ; Joseph
Pompée Sacco ; Nic. Sanson ; Benoît de
Spinosa Guill. Temple ; Robert Titi ; Bernard
Trivisano ; Garsilasso ; de la Vega ;
Gerard Vossius ; Gerard-Jean Vossius; Isaac
Vossius ; André- Chrisostome Zaluski.
Nous exposerons ici à nos Lecteurs ce
que
MARS. 1731. 509
que
l'Editeur des Mémoires rapporte au
sujet du fameux Pierre Ramus , cet article
nous ayant parû l'un des plus curieux
et des plus travaillez.
Pierre Ramus , ou de la Ramée , nâquit
l'an 1515. dans un Village de Vermandois
en Picardie,nommé Cuth . Son Aycul,
qui étoit d'une bonne famille du Pays de
Liege , s'étoit retiré dans ces quartiers-là ,
après avoir perdu tous ses biens , lorsque
sa Patrie fut réduite en cendres par Charles
Duc de Bourgogne. Le triste état où
il se vit alors , l'obligea à gagner sa vie
le reste de ses jours , à faire et à vendre
du Charbon . Il laissa un fils qui gagna
la sienne à labourer , et qui fut le Pere
de celui dont il s'agit ici .
Pierre Ramus ne fut gueres plus heureux
que son Pere et son Ayeul , car sa
vie a été une alternative perpetuelle d'élevation
et d'abaissement , et il a été en
toutes manieres le jouet de la fortune.
A peine étoit-il hors du berceau , qu'il
fut attaqué deux fois de la Peste . A l'âge
de huit ans l'envie d'apprendre le fit ve
nir à Paris ; mais la misere l'ayant obligé
d'en sortir , il y revint le plutôt qu'il put,
et n'y trouvant point les moyens d'y subsister
, il en partit une seconde fois. La
mauvaise réussite de ces deux voyages
ne le découragea pas cependant ; sa pas-
E sion
510 MERCURE DE FRANCE
sion pour l'étude lui en fit entreprendre
un troisième qui fut plus heureux .
Il fut d'abord entretenu pendant quelques
mois par un de ses oncles ; mais ce
secours lui ayant manqué , il fut contraint
d'être Valet au Collegé de Navarre.
Le service qu'il rendoit à son Maître , ne
l'empêchoit pas de s'appliquer à l'étude ,
car il y employoit une partie de la nuit ,
et il y fit
par ce moyen , des progrès considerables
en peu de tems.
Il n'y a aucune vrai- semblance à ce qu'on
Jit dans le premier Scaligeriana , qu'il vécut
jusqu'à l'âge de dix- neuf ans sans sçavoir
lire , qu'il avoit l'esprit hébêté , pesant
et stupide , et qu'il avoit trente ans
lorsqu'il écrivit contre Aristote. Ce dernier
fait est incontestablement faux ; car
son Livre contre Aristote fut condamné
après mille contestations , le 10.May'1543 .
or il n'avoit encore que vingt- huit ans.
Après ses études d'Humanitez et de
Rhéthorique , il fit son cours de Philosophie
, qui dura , selon l'usage de son
tems , trois ans et demi. La These qu'il
soutint pour se faire recevoir Maître- ès-
Arts , révolta bien du monde ; il s'y proposa
de soutenir cette Propostion , que
tout ce qu' Aristote avoit dit étoit faux.
Tous les Professeurs,quine connoissoient
d'autre Philosophe qu'Aristote , & qui
croyoient
MAR S. 173. 511
croyoient qu'on ne pouvoit sans crime aller
contre son autorité, prirent feu, et vinrent
attaquer la These avec toute la force que
leur habileté pouvoit leur fournir.Mais le
Répondant repoussa pendant un jour entier
leurs attaques avec tant de subtilité
et d'adresse , que tout Paris en fut dans
l'étonnement .
Ce succès enhardit Ramus , et lui fit
naître l'envie d'examiner plus à fond la
Doctrine d'Aristote , et de la combattre
vigoureusement ; il se borna cependant à
la Logique , à laquelle il rapporta toutes
ses lectures , et même les leçons d'Eloquence
, qu'il commença alors à faire à
la jeunesse .
- Les deux premiers Livres qu'il publia
sur cette matiere , causerent de grands
troubles dans l'Université de Paris . On le
cita devant les Juges Criminels , comme
un homme qui vouloit renverser la Religion
et les Sciences. Le Parlement voyant
le vacarme que causoit cette affaire , voulut
en prendre connoissance ; mais ses Adversaires
, persuadez qu'elle y seroit examinée
dans toutes les formes et selon les
regles de l'équité , la tirerent de ce Tribunal
, par leurs intrigues , et la firent
évoquer au Conseil du Roi , où ils espe
roient que leur crédit leur seroit d'un .
grand usage.
}
E ij
Le
512 MERCURE DE FRANCE
Le Roi ordonna donc qu'Antoine Govea,
qui étoit son principal Adversaire, et
Ramus choisiroient chacun deux personnes
habiles pour être,avec celui qu'il nommeroit
lui-même , Juges de leur dispute.
En conséquence de cette Ordonnance ,
Govea choisit Pierre Danés et François
à Vincercato, et Ramus nomma Jean Quintin
, Docteur en Droit , et Jean de Beaumont
, Docteur en Medecine. Le Député
de la part du Roi , fut Jean de Salignac ,
Docteur en Théologic.
Ramus , pour obeïr aux ordres du Roi,
comparut
devant les cinq Juges , quoiqu'il
y en eût trois qui fussent ses ennemis
déclarez ; on disputa pendant deux
jours. Il soutint que la Dialectique
d'Aristote
étoit imparfaite , parce qu'elle ne
contenoit
ni définition
ni division . Les
deux Juges qu'il avoit choisis , déclarerent
le premier jour que la définition
étoit necessaire
dans toute dispute bien
reglée ; les trois autres déclarerent
, au
contraire , que la Dialectique
peut être
parfaite sans définition . Le lendemain
ces
derniers reconurent
que la division y étoit
nécessaire ; mais voyant que Ramus en
concluoit
qu'il avoit raison de condamner
la Logique d'Aristote
, puisqu'elle
n'en avoit point , ils renvoyerent
l'affaire
à un autre jour. S'apMARS.
1731. 513
S'appercevant ensuite qu'ils s'étoient
jettez dans un embarras dont ils ne pouvoient
sortir avec honneur , ils déclarerent
qu'il falloit recommencer la dispute
, et tenir pour non avenu tout ce qui
s'étoit passé pendant les deux jours . Ramus
se plaignit hautement de ce procedé,
par lequel les Juges , non - seulement faisoient
paroître ouvertement qu'ils vouloient
le condamner , mais cassoient aussi
eux-mêmes leur Jugement , il les récusa
et appella de tout ce qu'ils pourroient
faire.
Son Appel fut déclaré nul par François
I. qui ordonna que les cinq Juges
prononceroient en dernier ressort et définitivement
sur cette affaire . Les Juges
nommez par Ramus ne voulurent point
assister au Jugement , pour n'être point
témoins de l'injustice qu'on alloit lui faire.
Ainsi les trois autres prononcerent
tout ce que la passion et la prévention
leur suggererent , sans avoir attendu davantage
Ramus , qui ne voulut plus paroître
devant eux , et ils prévinrent tellement
l'esprit du Roi , par de faux rap-.
ports , qu'ils obtinrent de lui la confirmation
de leur Jugement.
C'est ainsi que ce fait est raconté par
Omer Talon , dans un Livre qu'il dédia
au Cardinal de Lorraine. Si on s'arrête à
E iij
son
514 MERCURE DE FRANCE
son récit , comme il y a tout lieu de le
faire , on rejettera comme une Fable ce
qui est rapporté par Pierre Galland , dans
la Vie de Castellan , où il dit que François
I. ayant appris les invectives continuelles
d'un certain Sophiste , contre Aris ,
tote , contre Ciceron et contre Quintilien
, avoit résolu de l'envoyer aux Galeres
; mais que Castellan lui suggera un
autre genre de punition , qui fut d'engager
ce Sophiste à une dispute , où il
feroit voir sa folie par le silence , auquel
on le réduiroit ; que le Roi goûta cet
expedient , et que lorsqu'il eut sçû la confusion
que ce Personnage avoit reçûë , il
se contenta de cette peine. C'est de Ramus
que Galland vouloit parler , mais il
est bon de se souvenir que c'étoit son
grand Ennemi.
EMOIRES pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres , &c.
T. XIII. de 408. pages. A Paris , chez
Bríasson , à la Science , M. DCC. XXX.
Voici les noms des Sçavans dont les
Vies et le Catalogue des Ouvrages remplissent
ce Volume. Louis Alamanni; Guill.
Amontons ; Jean Barbier d'Aucour; Pierre
de Boissat ; Jean Boscan ; Jean Coras ;
Claude d'Epences ; Melchior Guillandin ;
George - Abraham Merklinus : Etienne le
Moine ; André Navagero ; Bernard Nieu-
Wentit : Sertorio Orsato ; Conrad Peuttinger.
Pierre Ramus ; Jean Russellay ; Joseph
Pompée Sacco ; Nic. Sanson ; Benoît de
Spinosa Guill. Temple ; Robert Titi ; Bernard
Trivisano ; Garsilasso ; de la Vega ;
Gerard Vossius ; Gerard-Jean Vossius; Isaac
Vossius ; André- Chrisostome Zaluski.
Nous exposerons ici à nos Lecteurs ce
que
MARS. 1731. 509
que
l'Editeur des Mémoires rapporte au
sujet du fameux Pierre Ramus , cet article
nous ayant parû l'un des plus curieux
et des plus travaillez.
Pierre Ramus , ou de la Ramée , nâquit
l'an 1515. dans un Village de Vermandois
en Picardie,nommé Cuth . Son Aycul,
qui étoit d'une bonne famille du Pays de
Liege , s'étoit retiré dans ces quartiers-là ,
après avoir perdu tous ses biens , lorsque
sa Patrie fut réduite en cendres par Charles
Duc de Bourgogne. Le triste état où
il se vit alors , l'obligea à gagner sa vie
le reste de ses jours , à faire et à vendre
du Charbon . Il laissa un fils qui gagna
la sienne à labourer , et qui fut le Pere
de celui dont il s'agit ici .
Pierre Ramus ne fut gueres plus heureux
que son Pere et son Ayeul , car sa
vie a été une alternative perpetuelle d'élevation
et d'abaissement , et il a été en
toutes manieres le jouet de la fortune.
A peine étoit-il hors du berceau , qu'il
fut attaqué deux fois de la Peste . A l'âge
de huit ans l'envie d'apprendre le fit ve
nir à Paris ; mais la misere l'ayant obligé
d'en sortir , il y revint le plutôt qu'il put,
et n'y trouvant point les moyens d'y subsister
, il en partit une seconde fois. La
mauvaise réussite de ces deux voyages
ne le découragea pas cependant ; sa pas-
E sion
510 MERCURE DE FRANCE
sion pour l'étude lui en fit entreprendre
un troisième qui fut plus heureux .
Il fut d'abord entretenu pendant quelques
mois par un de ses oncles ; mais ce
secours lui ayant manqué , il fut contraint
d'être Valet au Collegé de Navarre.
Le service qu'il rendoit à son Maître , ne
l'empêchoit pas de s'appliquer à l'étude ,
car il y employoit une partie de la nuit ,
et il y fit
par ce moyen , des progrès considerables
en peu de tems.
Il n'y a aucune vrai- semblance à ce qu'on
Jit dans le premier Scaligeriana , qu'il vécut
jusqu'à l'âge de dix- neuf ans sans sçavoir
lire , qu'il avoit l'esprit hébêté , pesant
et stupide , et qu'il avoit trente ans
lorsqu'il écrivit contre Aristote. Ce dernier
fait est incontestablement faux ; car
son Livre contre Aristote fut condamné
après mille contestations , le 10.May'1543 .
or il n'avoit encore que vingt- huit ans.
Après ses études d'Humanitez et de
Rhéthorique , il fit son cours de Philosophie
, qui dura , selon l'usage de son
tems , trois ans et demi. La These qu'il
soutint pour se faire recevoir Maître- ès-
Arts , révolta bien du monde ; il s'y proposa
de soutenir cette Propostion , que
tout ce qu' Aristote avoit dit étoit faux.
Tous les Professeurs,quine connoissoient
d'autre Philosophe qu'Aristote , & qui
croyoient
MAR S. 173. 511
croyoient qu'on ne pouvoit sans crime aller
contre son autorité, prirent feu, et vinrent
attaquer la These avec toute la force que
leur habileté pouvoit leur fournir.Mais le
Répondant repoussa pendant un jour entier
leurs attaques avec tant de subtilité
et d'adresse , que tout Paris en fut dans
l'étonnement .
Ce succès enhardit Ramus , et lui fit
naître l'envie d'examiner plus à fond la
Doctrine d'Aristote , et de la combattre
vigoureusement ; il se borna cependant à
la Logique , à laquelle il rapporta toutes
ses lectures , et même les leçons d'Eloquence
, qu'il commença alors à faire à
la jeunesse .
- Les deux premiers Livres qu'il publia
sur cette matiere , causerent de grands
troubles dans l'Université de Paris . On le
cita devant les Juges Criminels , comme
un homme qui vouloit renverser la Religion
et les Sciences. Le Parlement voyant
le vacarme que causoit cette affaire , voulut
en prendre connoissance ; mais ses Adversaires
, persuadez qu'elle y seroit examinée
dans toutes les formes et selon les
regles de l'équité , la tirerent de ce Tribunal
, par leurs intrigues , et la firent
évoquer au Conseil du Roi , où ils espe
roient que leur crédit leur seroit d'un .
grand usage.
}
E ij
Le
512 MERCURE DE FRANCE
Le Roi ordonna donc qu'Antoine Govea,
qui étoit son principal Adversaire, et
Ramus choisiroient chacun deux personnes
habiles pour être,avec celui qu'il nommeroit
lui-même , Juges de leur dispute.
En conséquence de cette Ordonnance ,
Govea choisit Pierre Danés et François
à Vincercato, et Ramus nomma Jean Quintin
, Docteur en Droit , et Jean de Beaumont
, Docteur en Medecine. Le Député
de la part du Roi , fut Jean de Salignac ,
Docteur en Théologic.
Ramus , pour obeïr aux ordres du Roi,
comparut
devant les cinq Juges , quoiqu'il
y en eût trois qui fussent ses ennemis
déclarez ; on disputa pendant deux
jours. Il soutint que la Dialectique
d'Aristote
étoit imparfaite , parce qu'elle ne
contenoit
ni définition
ni division . Les
deux Juges qu'il avoit choisis , déclarerent
le premier jour que la définition
étoit necessaire
dans toute dispute bien
reglée ; les trois autres déclarerent
, au
contraire , que la Dialectique
peut être
parfaite sans définition . Le lendemain
ces
derniers reconurent
que la division y étoit
nécessaire ; mais voyant que Ramus en
concluoit
qu'il avoit raison de condamner
la Logique d'Aristote
, puisqu'elle
n'en avoit point , ils renvoyerent
l'affaire
à un autre jour. S'apMARS.
1731. 513
S'appercevant ensuite qu'ils s'étoient
jettez dans un embarras dont ils ne pouvoient
sortir avec honneur , ils déclarerent
qu'il falloit recommencer la dispute
, et tenir pour non avenu tout ce qui
s'étoit passé pendant les deux jours . Ramus
se plaignit hautement de ce procedé,
par lequel les Juges , non - seulement faisoient
paroître ouvertement qu'ils vouloient
le condamner , mais cassoient aussi
eux-mêmes leur Jugement , il les récusa
et appella de tout ce qu'ils pourroient
faire.
Son Appel fut déclaré nul par François
I. qui ordonna que les cinq Juges
prononceroient en dernier ressort et définitivement
sur cette affaire . Les Juges
nommez par Ramus ne voulurent point
assister au Jugement , pour n'être point
témoins de l'injustice qu'on alloit lui faire.
Ainsi les trois autres prononcerent
tout ce que la passion et la prévention
leur suggererent , sans avoir attendu davantage
Ramus , qui ne voulut plus paroître
devant eux , et ils prévinrent tellement
l'esprit du Roi , par de faux rap-.
ports , qu'ils obtinrent de lui la confirmation
de leur Jugement.
C'est ainsi que ce fait est raconté par
Omer Talon , dans un Livre qu'il dédia
au Cardinal de Lorraine. Si on s'arrête à
E iij
son
514 MERCURE DE FRANCE
son récit , comme il y a tout lieu de le
faire , on rejettera comme une Fable ce
qui est rapporté par Pierre Galland , dans
la Vie de Castellan , où il dit que François
I. ayant appris les invectives continuelles
d'un certain Sophiste , contre Aris ,
tote , contre Ciceron et contre Quintilien
, avoit résolu de l'envoyer aux Galeres
; mais que Castellan lui suggera un
autre genre de punition , qui fut d'engager
ce Sophiste à une dispute , où il
feroit voir sa folie par le silence , auquel
on le réduiroit ; que le Roi goûta cet
expedient , et que lorsqu'il eut sçû la confusion
que ce Personnage avoit reçûë , il
se contenta de cette peine. C'est de Ramus
que Galland vouloit parler , mais il
est bon de se souvenir que c'étoit son
grand Ennemi.
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Résumé : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Le texte extrait des 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres' présente une liste de savants, dont les vies et les œuvres sont détaillées dans le volume XIII. L'article se concentre sur Pierre Ramus, né en 1515 dans un village de Picardie. Son grand-père, originaire de Liège, avait perdu tous ses biens lors de la destruction de sa patrie par Charles Duc de Bourgogne et s'était réfugié en Picardie où il gagnait sa vie en vendant du charbon. Le père de Ramus était paysan. La vie de Ramus fut marquée par des alternances de succès et d'échecs. À l'âge de huit ans, il vint à Paris pour étudier, mais dut quitter la ville à plusieurs reprises en raison de la misère. Grâce à un oncle, il put revenir à Paris et, manquant de ressources, il devint valet au Collège de Navarre tout en continuant ses études la nuit. Contrairement à certaines rumeurs, Ramus savait lire dès son jeune âge et avait écrit contre Aristote avant ses trente ans. Après ses études d'humanité et de rhétorique, Ramus soutint une thèse controversée affirmant que tout ce qu'Aristote avait dit était faux. Cette thèse provoqua un grand émoi parmi les professeurs parisiens, qui défendaient l'autorité d'Aristote. Ramus publia ensuite deux livres sur la logique, ce qui lui valut d'être accusé de vouloir renverser la religion et les sciences. Le Parlement et le Conseil du Roi furent impliqués dans cette affaire, mais les adversaires de Ramus réussirent à influencer le jugement en sa défaveur. Malgré les efforts de Ramus pour se défendre, il fut finalement condamné par un jugement partial.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 1943-1951
Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des [...]
Mots clefs :
Mémoires, Hommes illustres, Savants, Caporal, Compagnie, Botaniste
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, [titre d'après la table]
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des
Hommes Illustres dans la République des
Lettres ; avec un Catalogue raisonné de
leurs ouvrages , Tom. 14. de 401 pages sans
les Tables. A Paris , chez Briasson , ruë
S.Jacques, à la Science . 1731 .
On trouve dans la premiere Table les
noms des Sçavans qui sont contenus dans
ce volume. Ils sont au nombre deXXIX .
en voici les noms : Ermolao Barbaro :
Isaac de Benserade ; Adrien de Beverland ;
Edme Boursault ; Jean Bugen -hagen ; Fa •
cio Cardan ; Jerôme Cardan ; Jean- Baptiste
Cardan ; Louis Carré Elizabeth Se-
E vj
phie
1944 MERCURE DE FRANCE
phie Cheron ; Martin Crusius ; facques
Eveillon ; Auguste Herman Francke ;
Charles Alphonse du Fresnoy Jean Gervais
; Bernard de Girard du Haillan ;
Guillaume Homberg ; Jean le Laboureur ;
Louis le Laboureur ; Claude le Laboureur;
Claude Mignault ; Jean Nicolai ; Gabriël
du Pinau , Martin Polonus ; Marc Antoine
Gerard de S. Amand ; Jean Jerôme
Sparaglia; Daniel Sennert ; Georges de
TrebiZonde ; et Louis Videl.
Entre tous ces Sçavans , nous avons
choisi Guillaume Hombert , dont l'article
nous a paru curieux et bien rempli ,
nous le présenterons ici à nos Lecteurs
tel l'Editeur des Mémoires l'a puque
blié.
Guillaume Homberg, naquit le 8. Janvier
1652. à Batavia dans l'Isle de Java.
Jean Homberg son Pere étoit un Gentilhomme
Saxon , originaire de Quedlimbourg
, qui dans sa jeunesse avoit perdu
tout son bien dans la Guerre des Suedois.
en Allemagne. Quelques-uns de ses parens
avoient eu soin de son éducation . Cè
qu'il apprit de Mathématique le mit ex
état d'aller chercher fortune au service
de la Compagnie Hollandoise des Indes
Orientales. Il parvint à avoir le commandement
de l'Arsenal de Batavia , et se
maria
A O UST. 1731. 1945
maria avec la veuve d'un Officier , nommée
Barbe Van hedemar : de quatre enfans
qui vinrent de ce mariage , M. Homberg
fut le second.
Son Pere pour l'avancer dans le service
le fit Caporal d'une Compagnie dès
l'âge de 4. ans. Il eut bien voulu le faire
étudier , mais les chaleurs excessives et
perpetuelles du climat ne permettant pas
beaucoup d'application ni aux enfans ,
ni même aux hommes faits , il ne pût se
satisfaire en ce point. Au reste il est bon
de remarquer que le corps profite ordinairement
de ce que perd l'esprit. M.
Homberg avoit une soeur qui fût mariée
à huit ans et mere à neuf.
Son Pere ayant quitté les Indes et le
service de la Compagnie Hollandoise
alla à Amsterdam où il demeura pendant
plusieurs années avec toute sa famille.
M. Homberg parût être dans son veritable
air natal , lorsqu'il fût dans un Pays
où il pouvoit étudier. La vivacité naturelle
de son esprit lui fit regagner
vîte le tems qu'il avoit perdu jusques - là .
bien
Il étudia en Droit à Jêne et à Leipsic ,
et en 1694. il fut reçu Avocat à Magdebourg.
Quoyqu'il se donnât sincerementà
sa profession , les choses naturelles
commencerent bientôt à attirer sc
regards
1946 MERCURE DE FRANCE
regards et à interesser sa curiosité. Il alloit
chercher des Plantes sur les montagnes ,
s'instruisoit de leurs noms et de leurs
proprietés , et la nuit il observoit le
cours des astres et apprenoit les noms et
la disposition des differentes Constellations.
Il devenoit ainsi Botaniste et Astronome
sans y penser , et en quelque maniere
malgré luy , parcequ'il s'engageoir
toûjours dans ces Sciences plus qu'il ne
vouloit.
Il poussa assés loin son étude des Plantes,
et dans le même tems il se fit un Globe
celeste , creux en façon de Lanterne , où
à la faveur d'une petite lumiere placée
au dedans on voyoit les principales
Etoiles fixes emportées du même mouvement
dont elles paroissent l'être dans
- le Ciel.
Otto Guericke , Bourgue - Maître de
Magdebourg étoit alors fameux par ses
experiences du vuide et par l'invention de
la Machine Pneumatique. M. Homberg
s'attacha à lui pour s'instruire dans sa
Phisine experimentale , et cet habile
home , quoyque fort mysterieux , ou
ui revela ses secrets en faveur de son géie
, ou ne pût les dérober à sa pénétration
. Les amis de M. Homberg qui le
voyoient s'éloigner du Barreau toujours
de
A O UST. 1731. 1947
!
de plus en plus , songerent à le marier
pour le fixer dans sa profession ; mais resolu
à être maître de lui même, il se mit à
voyager , et alla d'abord en Italie.
Il s'arrêta un peu à Padoüe où il s'appliqua
à la Médecine , et particulierement
à l'Anatomie et à la Botanique . A Boulogne
il travailla sur la pierre qui porte
le nom de cette Ville , et lui rendit sa
lumiere dont le secret étoit presque perdu
. A Rome il se lia particulièrement
avec Marc Antoine Celio , Gentil- homme
Romain , Mathématicien , Astronome
et Machiniste , qui reüssissoit fort
bien à faire de grands verres de Lunettes.
Il s'y appliqua avec lui , et y trouva
pas
de
quoy exercer les lumieres de son esprit
et son addresse à opérer. Il ne negligea
la Peinture , la Sculture , et la Musi
que , dans lesquelles il se rendit assés connoisseur
pour pouvoir s'en faire un
merite .
D'Italie il vint en France pour la premiere
fois , et il ne manqua pas d'y chercher
la connoissance , et de s'y er
l'estime des Sçavans : il passa ensuite en
Angleterre où il travailla quelque tems
avec M. Boyle , dont le Laboratoire étoit
une des plus sçavantes Ecoles de Physique
.
De
1948 MERCURE DE FRANCE
De-là il retourna en Hollande où il se
perfectionna encore dans l'Anatomie sous
M. Graaf , aprés quoy il alla rejoindre
sa famille qui demeuroit alors à Quedlimbourg.
Quelque tems après il alla prendre
à Vittemberg le dégré de Docteur
en Medecine ..
Ses parens vouloient qu'il songeat à
P'utile , et que puisqu'il étoit Medecin
il se mit en état de tirer du profit de cette
qualité ; mais son goût particulier le
portoit à acquerir de nouvelles connoissances.
Il voulut voir encore les Sçavans
de l'Allemagne et du Nord ; et comme
il avoit déja un fonds considerable de curiosités
Physiques , il songea à en faire
commerce , et à s'en procurer de nouvelles
par des échanges. Les Phosphores
faisoient alors du bruit : Christian- Adolphe
Balduinus , et Kunkel Chimiste de
P'Electeur de Saxe en avoit trouvé un
different et un nouveau , chacun de leur
côté , et M. Homberg les alla chercher.
Il vit Balduinus le premier , et trouva
son Phosphore fort beau et de la nature
de la pierre de Boulogne , quoyqu'un
peu plus foible en lumiere. il l'acheta
par quelque autre expérience , mais il
falloit avoir celui de Kunkel qui avoit
beaucoup de réputation . Il trouva Kunkel
A O UST. 1949 1731 .
kel à Berlin , et par bonheur celui - ci
avoit fort envie d'avoir le petit homme
d'Otto Guericke qui se cache dans un
tuyau quand le tems doit être pluvieux ,
et qui en sort quand il doit faire beau.
Le marché fût bientôt conclu entre les
deux Curieux , et M. Homberg donna
le petit homme pour le Phosphore. C'étoit
le Phosphore d'Urine présentement assès
connu.
Les Métaux avoient touché particulierement
la curiosité de M. Homberg ,
qui alla voir ensuite les Mines de Saxe ,
de Bohême , de Hongrie et de Suede.
Le Roy de Suede alors regnant venoit
d'établir à Stokolm un Laboratoire de
Chimie. M. Homberg y travailla` avec
M. Hierna , premier Médecin du Roy, et
il eut le plaisir de contribuer beaucoup
aux premiers succès de ce nouvel établis
sement. On s'addressoit souvent à lui ,
ou pour lui demander des décisions sur
des difficultés qui
partageoient les
plus
habiles , ou pour l'engager à des recherches
qu'ils n'osoient entreprendre , et
les Journaux de Hambourg , de ces tems
là , sont pleins de Mémoires qui venoient
de lui.
Son Pere souhaitoit avec passion qu'il
terminât enfin ses courses sçavantes , et
qu'il
1950 MERCURE DE FRANCE
qu'il revînt se fixer dans son Pays , où il
avoit dessein de le marier pour l'y attirer
davantage. Mais l'amour des Sciences et
de la liberté l'emporta encore du fond
du Nord en Hollande , et de Hollande
en France , où il vit les Provinces {qu'il
n'avoit pas vûes dans son premier voyage .
Ces retardemens impatientoient son
Pere qui lui faisoit tous les jours de nouvelles
instances hâter son retour.و
pour
Enfin il étoit prêt à lui obéir , et le jour
de son départ étoit arrivé, lorsque M.Col.
bert l'envoya chercher de la part du Roy.
Ce Ministre lui fit , pour l'arrêter , des
offres si avantageuses , que M. Homberg
demeura quelque tems pour prendre son
parti , et pritenfin celui de demeurer.
La plus forte raison étoit que la pratique
familiere aux Protestans de lire tous
les jours un Chapitre de l'Ecriture Sainte
lui avoit rendu fort suspecte l'Eglise
protestante dans laquelle il étoit né , et
qu'il se sentoit fort ébranlé pour rentrer
dans l'Eglise Catholique , ce qu'il fit en
1682. L'année suivante il perdit M. Colbert
, et de plus il fût déshérité
Pere, pour avoir changé de Religion.
par son
Il entraen grande liaison avec M.l'Abbé
de Chalucet , depuis Evêque de Toulon
, fort curieux de Chymie. M. l'Abbé
Homberg
A O UST. 1731. 1951
Homberg y étoit trop habile pour aspirer
à la Pierre Philosophale , et trop sincere
pour entêter personne de cette vaine idée.
Mais un autre Chymiste avec qui il travailloit
chez ce Prélat , voulant convaincre
l'incrédulité de son associé, lui donna
en pur don un Lingot d'or prétendu
Philosophique , mais toujours de bon or ,
qui valoit bien quatre cens francs , tromperie
qui , comme il l'avoüoit lui même
lui vint alors assés à
propos.
Des raisons particulieres l'engagerent
quelque tems aprés , c'est-à-dire en 1585.
à aller pour la seconde fois à Rome. Il y
porta toute sa recolte du Nord , et l'y
mit à profit par une pratique de Médecine
peu connue en ce Païs- là et heureuse.
Le reste de cet Article pour le mois prochain
.
Hommes Illustres dans la République des
Lettres ; avec un Catalogue raisonné de
leurs ouvrages , Tom. 14. de 401 pages sans
les Tables. A Paris , chez Briasson , ruë
S.Jacques, à la Science . 1731 .
On trouve dans la premiere Table les
noms des Sçavans qui sont contenus dans
ce volume. Ils sont au nombre deXXIX .
en voici les noms : Ermolao Barbaro :
Isaac de Benserade ; Adrien de Beverland ;
Edme Boursault ; Jean Bugen -hagen ; Fa •
cio Cardan ; Jerôme Cardan ; Jean- Baptiste
Cardan ; Louis Carré Elizabeth Se-
E vj
phie
1944 MERCURE DE FRANCE
phie Cheron ; Martin Crusius ; facques
Eveillon ; Auguste Herman Francke ;
Charles Alphonse du Fresnoy Jean Gervais
; Bernard de Girard du Haillan ;
Guillaume Homberg ; Jean le Laboureur ;
Louis le Laboureur ; Claude le Laboureur;
Claude Mignault ; Jean Nicolai ; Gabriël
du Pinau , Martin Polonus ; Marc Antoine
Gerard de S. Amand ; Jean Jerôme
Sparaglia; Daniel Sennert ; Georges de
TrebiZonde ; et Louis Videl.
Entre tous ces Sçavans , nous avons
choisi Guillaume Hombert , dont l'article
nous a paru curieux et bien rempli ,
nous le présenterons ici à nos Lecteurs
tel l'Editeur des Mémoires l'a puque
blié.
Guillaume Homberg, naquit le 8. Janvier
1652. à Batavia dans l'Isle de Java.
Jean Homberg son Pere étoit un Gentilhomme
Saxon , originaire de Quedlimbourg
, qui dans sa jeunesse avoit perdu
tout son bien dans la Guerre des Suedois.
en Allemagne. Quelques-uns de ses parens
avoient eu soin de son éducation . Cè
qu'il apprit de Mathématique le mit ex
état d'aller chercher fortune au service
de la Compagnie Hollandoise des Indes
Orientales. Il parvint à avoir le commandement
de l'Arsenal de Batavia , et se
maria
A O UST. 1731. 1945
maria avec la veuve d'un Officier , nommée
Barbe Van hedemar : de quatre enfans
qui vinrent de ce mariage , M. Homberg
fut le second.
Son Pere pour l'avancer dans le service
le fit Caporal d'une Compagnie dès
l'âge de 4. ans. Il eut bien voulu le faire
étudier , mais les chaleurs excessives et
perpetuelles du climat ne permettant pas
beaucoup d'application ni aux enfans ,
ni même aux hommes faits , il ne pût se
satisfaire en ce point. Au reste il est bon
de remarquer que le corps profite ordinairement
de ce que perd l'esprit. M.
Homberg avoit une soeur qui fût mariée
à huit ans et mere à neuf.
Son Pere ayant quitté les Indes et le
service de la Compagnie Hollandoise
alla à Amsterdam où il demeura pendant
plusieurs années avec toute sa famille.
M. Homberg parût être dans son veritable
air natal , lorsqu'il fût dans un Pays
où il pouvoit étudier. La vivacité naturelle
de son esprit lui fit regagner
vîte le tems qu'il avoit perdu jusques - là .
bien
Il étudia en Droit à Jêne et à Leipsic ,
et en 1694. il fut reçu Avocat à Magdebourg.
Quoyqu'il se donnât sincerementà
sa profession , les choses naturelles
commencerent bientôt à attirer sc
regards
1946 MERCURE DE FRANCE
regards et à interesser sa curiosité. Il alloit
chercher des Plantes sur les montagnes ,
s'instruisoit de leurs noms et de leurs
proprietés , et la nuit il observoit le
cours des astres et apprenoit les noms et
la disposition des differentes Constellations.
Il devenoit ainsi Botaniste et Astronome
sans y penser , et en quelque maniere
malgré luy , parcequ'il s'engageoir
toûjours dans ces Sciences plus qu'il ne
vouloit.
Il poussa assés loin son étude des Plantes,
et dans le même tems il se fit un Globe
celeste , creux en façon de Lanterne , où
à la faveur d'une petite lumiere placée
au dedans on voyoit les principales
Etoiles fixes emportées du même mouvement
dont elles paroissent l'être dans
- le Ciel.
Otto Guericke , Bourgue - Maître de
Magdebourg étoit alors fameux par ses
experiences du vuide et par l'invention de
la Machine Pneumatique. M. Homberg
s'attacha à lui pour s'instruire dans sa
Phisine experimentale , et cet habile
home , quoyque fort mysterieux , ou
ui revela ses secrets en faveur de son géie
, ou ne pût les dérober à sa pénétration
. Les amis de M. Homberg qui le
voyoient s'éloigner du Barreau toujours
de
A O UST. 1731. 1947
!
de plus en plus , songerent à le marier
pour le fixer dans sa profession ; mais resolu
à être maître de lui même, il se mit à
voyager , et alla d'abord en Italie.
Il s'arrêta un peu à Padoüe où il s'appliqua
à la Médecine , et particulierement
à l'Anatomie et à la Botanique . A Boulogne
il travailla sur la pierre qui porte
le nom de cette Ville , et lui rendit sa
lumiere dont le secret étoit presque perdu
. A Rome il se lia particulièrement
avec Marc Antoine Celio , Gentil- homme
Romain , Mathématicien , Astronome
et Machiniste , qui reüssissoit fort
bien à faire de grands verres de Lunettes.
Il s'y appliqua avec lui , et y trouva
pas
de
quoy exercer les lumieres de son esprit
et son addresse à opérer. Il ne negligea
la Peinture , la Sculture , et la Musi
que , dans lesquelles il se rendit assés connoisseur
pour pouvoir s'en faire un
merite .
D'Italie il vint en France pour la premiere
fois , et il ne manqua pas d'y chercher
la connoissance , et de s'y er
l'estime des Sçavans : il passa ensuite en
Angleterre où il travailla quelque tems
avec M. Boyle , dont le Laboratoire étoit
une des plus sçavantes Ecoles de Physique
.
De
1948 MERCURE DE FRANCE
De-là il retourna en Hollande où il se
perfectionna encore dans l'Anatomie sous
M. Graaf , aprés quoy il alla rejoindre
sa famille qui demeuroit alors à Quedlimbourg.
Quelque tems après il alla prendre
à Vittemberg le dégré de Docteur
en Medecine ..
Ses parens vouloient qu'il songeat à
P'utile , et que puisqu'il étoit Medecin
il se mit en état de tirer du profit de cette
qualité ; mais son goût particulier le
portoit à acquerir de nouvelles connoissances.
Il voulut voir encore les Sçavans
de l'Allemagne et du Nord ; et comme
il avoit déja un fonds considerable de curiosités
Physiques , il songea à en faire
commerce , et à s'en procurer de nouvelles
par des échanges. Les Phosphores
faisoient alors du bruit : Christian- Adolphe
Balduinus , et Kunkel Chimiste de
P'Electeur de Saxe en avoit trouvé un
different et un nouveau , chacun de leur
côté , et M. Homberg les alla chercher.
Il vit Balduinus le premier , et trouva
son Phosphore fort beau et de la nature
de la pierre de Boulogne , quoyqu'un
peu plus foible en lumiere. il l'acheta
par quelque autre expérience , mais il
falloit avoir celui de Kunkel qui avoit
beaucoup de réputation . Il trouva Kunkel
A O UST. 1949 1731 .
kel à Berlin , et par bonheur celui - ci
avoit fort envie d'avoir le petit homme
d'Otto Guericke qui se cache dans un
tuyau quand le tems doit être pluvieux ,
et qui en sort quand il doit faire beau.
Le marché fût bientôt conclu entre les
deux Curieux , et M. Homberg donna
le petit homme pour le Phosphore. C'étoit
le Phosphore d'Urine présentement assès
connu.
Les Métaux avoient touché particulierement
la curiosité de M. Homberg ,
qui alla voir ensuite les Mines de Saxe ,
de Bohême , de Hongrie et de Suede.
Le Roy de Suede alors regnant venoit
d'établir à Stokolm un Laboratoire de
Chimie. M. Homberg y travailla` avec
M. Hierna , premier Médecin du Roy, et
il eut le plaisir de contribuer beaucoup
aux premiers succès de ce nouvel établis
sement. On s'addressoit souvent à lui ,
ou pour lui demander des décisions sur
des difficultés qui
partageoient les
plus
habiles , ou pour l'engager à des recherches
qu'ils n'osoient entreprendre , et
les Journaux de Hambourg , de ces tems
là , sont pleins de Mémoires qui venoient
de lui.
Son Pere souhaitoit avec passion qu'il
terminât enfin ses courses sçavantes , et
qu'il
1950 MERCURE DE FRANCE
qu'il revînt se fixer dans son Pays , où il
avoit dessein de le marier pour l'y attirer
davantage. Mais l'amour des Sciences et
de la liberté l'emporta encore du fond
du Nord en Hollande , et de Hollande
en France , où il vit les Provinces {qu'il
n'avoit pas vûes dans son premier voyage .
Ces retardemens impatientoient son
Pere qui lui faisoit tous les jours de nouvelles
instances hâter son retour.و
pour
Enfin il étoit prêt à lui obéir , et le jour
de son départ étoit arrivé, lorsque M.Col.
bert l'envoya chercher de la part du Roy.
Ce Ministre lui fit , pour l'arrêter , des
offres si avantageuses , que M. Homberg
demeura quelque tems pour prendre son
parti , et pritenfin celui de demeurer.
La plus forte raison étoit que la pratique
familiere aux Protestans de lire tous
les jours un Chapitre de l'Ecriture Sainte
lui avoit rendu fort suspecte l'Eglise
protestante dans laquelle il étoit né , et
qu'il se sentoit fort ébranlé pour rentrer
dans l'Eglise Catholique , ce qu'il fit en
1682. L'année suivante il perdit M. Colbert
, et de plus il fût déshérité
Pere, pour avoir changé de Religion.
par son
Il entraen grande liaison avec M.l'Abbé
de Chalucet , depuis Evêque de Toulon
, fort curieux de Chymie. M. l'Abbé
Homberg
A O UST. 1731. 1951
Homberg y étoit trop habile pour aspirer
à la Pierre Philosophale , et trop sincere
pour entêter personne de cette vaine idée.
Mais un autre Chymiste avec qui il travailloit
chez ce Prélat , voulant convaincre
l'incrédulité de son associé, lui donna
en pur don un Lingot d'or prétendu
Philosophique , mais toujours de bon or ,
qui valoit bien quatre cens francs , tromperie
qui , comme il l'avoüoit lui même
lui vint alors assés à
propos.
Des raisons particulieres l'engagerent
quelque tems aprés , c'est-à-dire en 1585.
à aller pour la seconde fois à Rome. Il y
porta toute sa recolte du Nord , et l'y
mit à profit par une pratique de Médecine
peu connue en ce Païs- là et heureuse.
Le reste de cet Article pour le mois prochain
.
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Résumé : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes illustres, [titre d'après la table]
Le texte est un extrait des 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres', publié en 1731 à Paris. Ce volume de 401 pages liste les noms de 29 savants, avec une mise en avant particulière de Guillaume Homberg. Guillaume Homberg naquit le 8 janvier 1652 à Batavia, sur l'île de Java. Son père, Jean Homberg, était un gentilhomme saxon ayant perdu ses biens lors de la guerre des Suédois en Allemagne. À l'âge de quatre ans, Guillaume fut engagé dans la Compagnie Hollandaise des Indes Orientales et devint commandant de l'arsenal de Batavia. Il étudia ensuite le droit à Genève et à Leipzig, et fut reçu avocat à Magdebourg en 1694. Cependant, sa curiosité naturelle le poussa vers les sciences naturelles, notamment la botanique et l'astronomie. Homberg se lia avec Otto Guericke, célèbre pour ses expériences sur le vide, et s'intéressa à la physique expérimentale. Il voyagea en Italie, où il étudia la médecine, l'anatomie et la botanique à Padoue, et travailla sur la pierre de Boulogne. À Rome, il se lia avec Marc Antoine Celio, un mathématicien et astronome. Il visita ensuite la France et l'Angleterre, où il travailla avec Robert Boyle. De retour en Hollande, il se perfectionna en anatomie sous la direction de M. Graaf. Homberg obtint son doctorat en médecine à Wittemberg et continua ses voyages pour acquérir de nouvelles connaissances. Il s'intéressa particulièrement aux phosphores et aux métaux, visitant les mines de Saxe, de Bohême, de Hongrie et de Suède. Il contribua aux premiers succès du laboratoire de chimie établi par le roi de Suède à Stockholm. En France, il fut retenu par Colbert, qui lui fit des offres avantageuses. Homberg se convertit au catholicisme en 1682 et fut déshérité par son père pour ce changement de religion. Il entra en liaison avec l'abbé de Chalucet, évêque de Toulon, et travailla sur la chimie. Des raisons particulières le poussèrent à retourner à Rome en 1585.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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9
p. 2163-2170
Continuation de l'Art. de Guillaume Homberd. [titre d'après la table]
Début :
CONTINUATION de l'Article de Guill. Hombert. Extrait du XIV . Tome des Memoires [...]
Mots clefs :
Histoire, Langues, Académie des sciences, Phosphore, Végétations, Évaporation de l'air
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texteReconnaissance textuelle : Continuation de l'Art. de Guillaume Homberd. [titre d'après la table]
CONTINUATION de l'Article de Guill .
Hombert. Extrait du XIV . Tome des Memoires
, pour servir à l'Histoire des Hommes
Illustres &c..
Il revint à Paris au bout de quelques
années ; et tant de connoissances qu'il
avoit acquises , ses Posphores , une Machine
Pneumatique de son invention plus
parfaite que celle de Guerike et que celle
de Boile , qu'il avoit vûë à Londres , les
nouveaux Phenomenes qu'elle lui produisoit
tous les jours , des Microscopes de sa
façon très simples , très - commodes et
très- exacts autre source inépuisable de
Phenomênes une infinité d'Operations
rares , ou de découvertes de Chymie , lui
donnerent bien- tôt une des premieres places
entre les premiers Sçavans.
-
>
,
M. l'Abbé Bignon ayant eû en 1691. la
direction de l'Académie des Sciences , y
fit
2164 MERCURE DE FRANCE
fit entrer M. Homberg , et lui donna le
Laboratoire de l'Académie , et par là une
entiere liberté de travailler en Chimie
sans inquiétude.
3
M. le Duc d'Orleans , qui se livroit au
goût et au talent qu'il avoit pour les
Sciences ayant voulu entrer dans les
mysteres de la Chymie et de la Physique
experimentale , prit en 1702. M. Hombert
auprès de lui en qualité de son Physicien
, et lui donna une Pension et un Laboratoire
le mieux fourni et le plus su
perbe que la Chymie eût jamais eû.
Ce Prince ayant aussi fait venir d'Alle
magne la même année , ce grand Miroir
ardent convexe , qui est si connu : M.
Homberg s'en servit pour faire un grand
nombre d'experiences entierement nou
yelles .
L'an 1704 ce Prince le choisit pour son
premier Medecin . Ce choix n'étoit pas
encore declaré , lors qu'on vînt offrir à
M. Homberg de la part de l'Electeur Pa
latin , et même d'une manière très- pressante
des avantages plus considerables
que ceux même qui l'attendoient. M. le
Duc d'Orleans ne lui permit pas de les
accepter. Un autre attachement d'une espece
differente s'y joignit encore. Il songeoit
à se marier , et y songcoit depuis si
›
longSEPTEMBRE.
1731. 215
long- emps , que l'amour seul , sans une
forte estime , n'eût pas produit tant de
constance.
En devenant Premier Medecin de M. le
Duc d'Orleans , il tomboit dans le cas
d'une des Loix de l'Académie des Sciences
, qui porte que toute charge demandant
résidence hors de Paris , est incompatible
avec une place d'Académicien
Pensionnaire ; il déclara nettement que
s'il étoit réduit à opter , il se détermineroit
pour l'Académie ; mais le Roi le jugea
digne d'exception ; ainsi il conserva
les deux Postes en même temps.
En 1708. il se maria , et épousa Marguerite-
Angelique Dodart fille de M.
Dodart , Medecin , pour qui il avoit été
si constant.
2
Quelques années après , il devint sujet
à une petite Dissenterie , dont il se guérissoit
, et qui revenoit de tems en tems.
Le mal s'augmenta toûjours , et il en
mourut le 24. Septembre 1715. âgé de
63. ans. Quoiqu'il fût d'une complexion
foible , il étoit fort laborieux et d'un courage
qui lui tenoit lieu de force . Outre
une quantité de faits curieux de Physique
rassemblez dans sa tête , et presens
à sa mémoire , il avoit de quoi faire un
sçavant ordinaire en Histoire et en Langues
2766 MERCURE DE FRANCE
gues. Il sçavoit même de l'Hebreu . Son
caractere d'esprit est marqué dans tout ce
qu'on a de lui ; il avoit une attention ingenieuse
sur tout ce qui lui faisoit faire des
observations où les autres ne voyent rien ,
une adresse extrême pour demêler les routes
qui menent aux découvertes , de la singularité
dans ses experiences. Sa maniere
de s'expliquer étoit simple , mais méthodique
et précise ; soit que le François fûr
toûjours pour lui une langue étrangere
soit que naturellement il ne fût pas abondant
en paroles , il cherchoit son mot
presque à chaque moment , mais enfin il
le trouvoit. Il n'a point publié de corps
d'ouvrage. On trouve seulement dans
l'histoire de l'Académie des Sciences plusieurs
Memoires de sa façon , qui sont
tous singuliers , curieux et interessans ,
et dont je vais donner la liste .
1. Maniere de faire le Phosphore brûlant de
Kunkel. Année 1692.
2. Diverses expériences du Phosphore. Ibid.
3. Réflexions sur differentes Vegetations Mé
talliques. Ibid.
4. Maniere d'extraire un sel volatile mineral
en forme séche. Ibid.
5. Réflexions sur l'expérience des larmes de
verre , qui se brisent dans le vuide. Ibid.
G₁
SEPTEMBRE . 1731. 2167
·
7. Expérience sur la glace dans le vuide.
An. 1693.
7. Expérience du ressort de l'Air dans le
vuide. Ibid.
8. Expérience de l'Evaporation de l'Eau
dans le vuide avec des Réflexions. Ibid.
9. Expériences sur la Germination des Plan
tes. Ibid.
10. Observations de la difference du poids
de certains corps dans l'Air , libre et dans
le vuide. Ibid.
11. Observation curieuse sur une infusion
d'Antimoine. Ibid.
12. Réflexions sur unfait extraordinaire ar
rivé dans une Coupelle d'or. Ibid.
13. Nouveau Phosphore . Ibid.
14. Observation sur la quantité exacte des
sels volatiles , acides , contenus dans les
differens esprits acides . An . 1694 .
15. Essais pour examiner les sels des Plantes.
Ibid.
16. Observations sur cette sorte d'Insectes ,
qui s'appellent ordinairement Demoiselles.
Ibid.
17. Essais sur les Injections Anatomiques.
Ibid.
18. Observations sur la quantité des Acides
, absorbés par les Alcalis Terreux.
"
An .
1700.
19. Observations sur les Dissolvans du
Mercure. Ibid .
Ob2568
MERCURE
DE FRANCE
20. Observations sur les Huiles des Plantes.
Ibid .
21. Surl'Acide de l'Antimoine. Ibid.
22. Observations
sur le Raffinage de l'Ar
gent. An. 1701 .
23. Observations sur quelques effets de Fer
mentations. Ibid.
24. Observations sur les Analyses des Plan
tes. Ibid.
25. Observations sur les Sels Volatiles des
Plantes. Ibid.
26. Essais de Chimie. An. 1702.
27. Observations faites par
verre ardent. Ibid.
le
moyen
du
a8 . Essai de l'Analyse du Souffre commun.
29.
An. 1703 .
Observations sur un battement de vei
nes semblables au battement des Arteres
An . 1704.
30. Suite des Essais de Chymie , Article 3 .
du Souffre principe. An . 1705 .
31. Observation sur une Dissolution de
l'Argent. An . 1706.
32. Observations sur le fer qu verre ardent
Ibid.
33. Suite de l'Article 3. des Essais de Chy
mie du Souffre principe. Ibid.
34. Eclaircissemens
touchant la Vitrifica
tion de l'Or au verre ardent. An . 1707.
35. Observations
sur les Araignées . Ibid.
36. MeSEPTEMBRE.
1731. 2169
6. Mémoire touchant les Acides et les Alcalis.
An. 1708 .
37. Suite des Essais de Chymie. Article 4.
-du Mercure. An , 1709.
8.
Observations touchant l'effet de certains
Acides sur les Alcalis volatiles. Ibid.
39.
Observations sur les matieres sulphu
reuses , et sur la facilité, de les changer
d'une espece de souffre en une autre . An.
1710.
40.
Memoire touchant les Vegetations Artificielles.
Ibid.
41.
Observations sur la matiere fecale. And
1711.
42. Phosphore nouveau , on suite des obser
vations sur la matiere fecale. Ibid .
43.
Observations sur l'Acide qui se trouve
dans le Sang et dans les autres par-.
ties des
Animaux. Deux Memoires. An.
1712.
44. Maniere de copier sur le verre coloré
les Pierres gravées . Ibid .
45.
Observation sur une séparation de l'Or
avec l'Argent par la fonte. An . 1713 .
46.
Observation sur une
sublimation da
Mercure. Ibid.
+
: 47.
Observations sur des Matieres qui pénetrent
et qui traversent les métaux sans
les fondre. Ibid.
48. Mémoire touchant la
volatilisation des
Sels fixes des Plantes . An . 1714.
F
Voyez
1170 MERCURE
DE FRANCE
.
Voyez son Eloge dans l'histoire de l'Aca
démie des Sciences. An. 1715.
Hombert. Extrait du XIV . Tome des Memoires
, pour servir à l'Histoire des Hommes
Illustres &c..
Il revint à Paris au bout de quelques
années ; et tant de connoissances qu'il
avoit acquises , ses Posphores , une Machine
Pneumatique de son invention plus
parfaite que celle de Guerike et que celle
de Boile , qu'il avoit vûë à Londres , les
nouveaux Phenomenes qu'elle lui produisoit
tous les jours , des Microscopes de sa
façon très simples , très - commodes et
très- exacts autre source inépuisable de
Phenomênes une infinité d'Operations
rares , ou de découvertes de Chymie , lui
donnerent bien- tôt une des premieres places
entre les premiers Sçavans.
-
>
,
M. l'Abbé Bignon ayant eû en 1691. la
direction de l'Académie des Sciences , y
fit
2164 MERCURE DE FRANCE
fit entrer M. Homberg , et lui donna le
Laboratoire de l'Académie , et par là une
entiere liberté de travailler en Chimie
sans inquiétude.
3
M. le Duc d'Orleans , qui se livroit au
goût et au talent qu'il avoit pour les
Sciences ayant voulu entrer dans les
mysteres de la Chymie et de la Physique
experimentale , prit en 1702. M. Hombert
auprès de lui en qualité de son Physicien
, et lui donna une Pension et un Laboratoire
le mieux fourni et le plus su
perbe que la Chymie eût jamais eû.
Ce Prince ayant aussi fait venir d'Alle
magne la même année , ce grand Miroir
ardent convexe , qui est si connu : M.
Homberg s'en servit pour faire un grand
nombre d'experiences entierement nou
yelles .
L'an 1704 ce Prince le choisit pour son
premier Medecin . Ce choix n'étoit pas
encore declaré , lors qu'on vînt offrir à
M. Homberg de la part de l'Electeur Pa
latin , et même d'une manière très- pressante
des avantages plus considerables
que ceux même qui l'attendoient. M. le
Duc d'Orleans ne lui permit pas de les
accepter. Un autre attachement d'une espece
differente s'y joignit encore. Il songeoit
à se marier , et y songcoit depuis si
›
longSEPTEMBRE.
1731. 215
long- emps , que l'amour seul , sans une
forte estime , n'eût pas produit tant de
constance.
En devenant Premier Medecin de M. le
Duc d'Orleans , il tomboit dans le cas
d'une des Loix de l'Académie des Sciences
, qui porte que toute charge demandant
résidence hors de Paris , est incompatible
avec une place d'Académicien
Pensionnaire ; il déclara nettement que
s'il étoit réduit à opter , il se détermineroit
pour l'Académie ; mais le Roi le jugea
digne d'exception ; ainsi il conserva
les deux Postes en même temps.
En 1708. il se maria , et épousa Marguerite-
Angelique Dodart fille de M.
Dodart , Medecin , pour qui il avoit été
si constant.
2
Quelques années après , il devint sujet
à une petite Dissenterie , dont il se guérissoit
, et qui revenoit de tems en tems.
Le mal s'augmenta toûjours , et il en
mourut le 24. Septembre 1715. âgé de
63. ans. Quoiqu'il fût d'une complexion
foible , il étoit fort laborieux et d'un courage
qui lui tenoit lieu de force . Outre
une quantité de faits curieux de Physique
rassemblez dans sa tête , et presens
à sa mémoire , il avoit de quoi faire un
sçavant ordinaire en Histoire et en Langues
2766 MERCURE DE FRANCE
gues. Il sçavoit même de l'Hebreu . Son
caractere d'esprit est marqué dans tout ce
qu'on a de lui ; il avoit une attention ingenieuse
sur tout ce qui lui faisoit faire des
observations où les autres ne voyent rien ,
une adresse extrême pour demêler les routes
qui menent aux découvertes , de la singularité
dans ses experiences. Sa maniere
de s'expliquer étoit simple , mais méthodique
et précise ; soit que le François fûr
toûjours pour lui une langue étrangere
soit que naturellement il ne fût pas abondant
en paroles , il cherchoit son mot
presque à chaque moment , mais enfin il
le trouvoit. Il n'a point publié de corps
d'ouvrage. On trouve seulement dans
l'histoire de l'Académie des Sciences plusieurs
Memoires de sa façon , qui sont
tous singuliers , curieux et interessans ,
et dont je vais donner la liste .
1. Maniere de faire le Phosphore brûlant de
Kunkel. Année 1692.
2. Diverses expériences du Phosphore. Ibid.
3. Réflexions sur differentes Vegetations Mé
talliques. Ibid.
4. Maniere d'extraire un sel volatile mineral
en forme séche. Ibid.
5. Réflexions sur l'expérience des larmes de
verre , qui se brisent dans le vuide. Ibid.
G₁
SEPTEMBRE . 1731. 2167
·
7. Expérience sur la glace dans le vuide.
An. 1693.
7. Expérience du ressort de l'Air dans le
vuide. Ibid.
8. Expérience de l'Evaporation de l'Eau
dans le vuide avec des Réflexions. Ibid.
9. Expériences sur la Germination des Plan
tes. Ibid.
10. Observations de la difference du poids
de certains corps dans l'Air , libre et dans
le vuide. Ibid.
11. Observation curieuse sur une infusion
d'Antimoine. Ibid.
12. Réflexions sur unfait extraordinaire ar
rivé dans une Coupelle d'or. Ibid.
13. Nouveau Phosphore . Ibid.
14. Observation sur la quantité exacte des
sels volatiles , acides , contenus dans les
differens esprits acides . An . 1694 .
15. Essais pour examiner les sels des Plantes.
Ibid.
16. Observations sur cette sorte d'Insectes ,
qui s'appellent ordinairement Demoiselles.
Ibid.
17. Essais sur les Injections Anatomiques.
Ibid.
18. Observations sur la quantité des Acides
, absorbés par les Alcalis Terreux.
"
An .
1700.
19. Observations sur les Dissolvans du
Mercure. Ibid .
Ob2568
MERCURE
DE FRANCE
20. Observations sur les Huiles des Plantes.
Ibid .
21. Surl'Acide de l'Antimoine. Ibid.
22. Observations
sur le Raffinage de l'Ar
gent. An. 1701 .
23. Observations sur quelques effets de Fer
mentations. Ibid.
24. Observations sur les Analyses des Plan
tes. Ibid.
25. Observations sur les Sels Volatiles des
Plantes. Ibid.
26. Essais de Chimie. An. 1702.
27. Observations faites par
verre ardent. Ibid.
le
moyen
du
a8 . Essai de l'Analyse du Souffre commun.
29.
An. 1703 .
Observations sur un battement de vei
nes semblables au battement des Arteres
An . 1704.
30. Suite des Essais de Chymie , Article 3 .
du Souffre principe. An . 1705 .
31. Observation sur une Dissolution de
l'Argent. An . 1706.
32. Observations sur le fer qu verre ardent
Ibid.
33. Suite de l'Article 3. des Essais de Chy
mie du Souffre principe. Ibid.
34. Eclaircissemens
touchant la Vitrifica
tion de l'Or au verre ardent. An . 1707.
35. Observations
sur les Araignées . Ibid.
36. MeSEPTEMBRE.
1731. 2169
6. Mémoire touchant les Acides et les Alcalis.
An. 1708 .
37. Suite des Essais de Chymie. Article 4.
-du Mercure. An , 1709.
8.
Observations touchant l'effet de certains
Acides sur les Alcalis volatiles. Ibid.
39.
Observations sur les matieres sulphu
reuses , et sur la facilité, de les changer
d'une espece de souffre en une autre . An.
1710.
40.
Memoire touchant les Vegetations Artificielles.
Ibid.
41.
Observations sur la matiere fecale. And
1711.
42. Phosphore nouveau , on suite des obser
vations sur la matiere fecale. Ibid .
43.
Observations sur l'Acide qui se trouve
dans le Sang et dans les autres par-.
ties des
Animaux. Deux Memoires. An.
1712.
44. Maniere de copier sur le verre coloré
les Pierres gravées . Ibid .
45.
Observation sur une séparation de l'Or
avec l'Argent par la fonte. An . 1713 .
46.
Observation sur une
sublimation da
Mercure. Ibid.
+
: 47.
Observations sur des Matieres qui pénetrent
et qui traversent les métaux sans
les fondre. Ibid.
48. Mémoire touchant la
volatilisation des
Sels fixes des Plantes . An . 1714.
F
Voyez
1170 MERCURE
DE FRANCE
.
Voyez son Eloge dans l'histoire de l'Aca
démie des Sciences. An. 1715.
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Résumé : Continuation de l'Art. de Guillaume Homberd. [titre d'après la table]
Le texte décrit la vie et les contributions scientifiques de M. Homberg. Après avoir acquis diverses connaissances et inventé une machine pneumatique améliorée, Homberg revint à Paris et devint rapidement un des premiers savants grâce à ses découvertes en chimie et ses instruments, tels que les microscopes et les phosphores. En 1691, l'abbé Bignon, directeur de l'Académie des Sciences, lui offrit un laboratoire, lui permettant de travailler librement en chimie. En 1702, le duc d'Orléans, intéressé par la chimie et la physique expérimentale, engagea Homberg comme son physicien, lui fournissant une pension et un laboratoire bien équipé. Cette même année, Homberg utilisa un miroir ardent convexe pour de nouvelles expériences. En 1704, il fut nommé premier médecin du duc d'Orléans, malgré des offres plus avantageuses de l'Électeur Palatin. Homberg conserva ses postes à l'Académie des Sciences et auprès du duc grâce à une exception royale. Il se maria en 1708 avec Marguerite-Angélique Dodart. Homberg souffrit d'une dissenterie qui s'aggrava et causa sa mort le 24 septembre 1715, à l'âge de 63 ans. Malgré une constitution faible, il était très laborieux et avait une mémoire exceptionnelle pour les faits de physique. Il maîtrisait plusieurs langues, y compris l'hébreu. Homberg n'a pas publié de grands ouvrages, mais plusieurs mémoires de ses recherches furent publiés dans l'histoire de l'Académie des Sciences. Ces mémoires couvrent une large gamme de sujets, allant des expériences sur le phosphore et les végétations métalliques aux observations sur les acides et les alcalis.
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10
p. 2810-2821
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République des Lettres, avec un Catalogue raisonné de leurs Ouvrages. Tome XV. de 409 pages sans les Tables. A Paris, chez Briasson, Libraire, ruë S. Jacques, à la Science. 1731.
Début :
On trouve à la tête de ce tome la Fable alphabetique des Sçavans qui [...]
Mots clefs :
Hommes illustres, Savants, Vol, Lettres, Maladie, Disgrâces
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République des Lettres, avec un Catalogue raisonné de leurs Ouvrages. Tome XV. de 409 pages sans les Tables. A Paris, chez Briasson, Libraire, ruë S. Jacques, à la Science. 1731.
MEMOIRES pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres , dans la République
des Lettres, avec un Catalogue raisonné de
leurs Ouvrages. Tome XV.de 409 pages
sans les Tables . A Paris , chez Briasson,
Libraire , rue S. Jacques , à la Science.
1731.
N trouve à la tête de ce tome la
Fable alphabetique des Sçavans qui
y sont contenus. Le P. Niceron n'en a
point mis qui expose leurs noms ,
selon
l'ordre qu'ils tiennent dans ce volume.
Il y a dans ce Tome , comme dans les
autres , un nombre de Sçavans , du pre
mier ordre , entre lesquels il est difficile
de choisir. Nous nous sommes déterminez
en faveur d'Olympia Fulvia Morata,
dont l'article nous a paru très -singulier ,
parce qu'elle a été une Dame sçavante , et
par les différentes révolutions qui ont accompagné
sa vie.Le voicy tel qu'il est rapporté
dans les Mémoires.
Olympia Fulvia Morata , nâquit à Ferrare
, l'an 1526, Fulvio Peregrino Morato
son pere ,
natif de Mantouë , avoit professé
les belles Lettres en plusieurs Villes
I. Vol.
(d'Italic
-
DECEMBRE . 1731. 2811
d'Italie , et son mérite et sa capacité Pavoient
fait choisir pour Précepteur des
Princes de Ferrare, Hyppoliteet François ,
fils d'Alphonse.
On trouve une de ses Lettres sur la pro
nonciation de la Langue Latine , à la tête
de celles de Fluvia Morata sa fille , à qui
elle est addressée.
Les grandes dispositions qu'il remarqua
dans sa fille pour les Sciences , l'engagerent
à les cultiver ; il l'instruisit avec beaucoup
de soin , et elle fit en peu de temps
de si grands progrès , qu'elle devint l'admiration
de tout le monde.
La Princesse de Ferrare , Anne , fille
d'Hercule II. étudioit alors les Lettres
sous la conduite de Jean Sinapius , et l'on
jugea à propos de mettre auprès d'elle Ful
via Morata , afin que l'émulation que sa
compagnie lui inspireroit , la fit avancer
davantage dans les sciences qu'on lui enseignoit.
Le séjour de la Cour fût avanta
geux à notre sçavante,pour la même raison
, et on l'y vit , avec étonnement , réciter
des Discours Latins , parler Grec
expliquer les Paradoxes de Ciceron , et répondre
à toutes les questions qu'on lui
faisoit.
Mais l'affection que lui témoigna la Duchesse
de Ferrare , Renée de France , mere
1.Vol.
de
2012 MERCURE DE FRANCE
de la Princesse Anne , lui fut funeste ; car
elle lui communiqua le goût qu'elle avoit
pour les nouvelles opinions , au sujet de
Ia Religion , qu'elle favorisoit secretement
, et que Fulvia Morata embrassa
dans la suite.
Après avoir demeuré quelques années.
auprès de la jeune Princesse qui l'aimoit
beaucoup , elle retourna dans la maison
paternelle , pour assister son pere dans la
maladie dont il mourut. Elle ne retourna
plus après à la Cour , parce que sa mere
étant fort valetudinaire , elle se trouvoit
obligée , en qualité d'aînée de la famille ,
d'avoir soin de l'éducation de ses trois
soeurs et de son frere .
Une autre raison s'y joignit encore , celle,
dit- elle dans une de ses Lettres à Cælius
Secundus Curion , avec qui elle étoit liée
depuis long- temps d'une étroite amitié ,
qui auroit dû nous proteger , prévenuë par
les discours calomnieux de quelques personnes
mal intentionnées , nous a abandonnées et
maltraitées. Il eſt à présumer qu'elle veut
entendre , par là , la Duchesse de Ferrare
qui changea alors de dispositions à son
égard.
Quoiqu'il en soit , un jeune Allemand ,
nommé André Grunthler , qui étudioit
alors en Medecine à Ferrare , où il se fit
I.Vol. rece
DECEMBRE 1731. 2813
recevoir Docteur en cette Faculté , ayant
eu occasion de la voir et de la connoître ,
fut si touché de son mérite, qu'il l'épousa.
Il paroît incontestablement par ses Lettres
, que ce Mariage se fit avant leur dé
part pour l'Allemagne , c'est - à - dire , à
Ferrare ; mais M. de Thou veut qu'il ne
se soit fait qu'en Allemagne ; et ce qu'il
dit là- dessus semble s'accorder avec ce
que Grunthler assure dans une Lettre à
Curion , sur la mort de Fulvia -Morata sa
femme, qu'ils n'avoient pas vécu ensemble
cinq années. Si cela est , ils ont dû se
marier en 1550. c'est - à - dire , deux ans
après leur arrivée en Allemagne ; mais
cela ne paroît gueres probable ; il est
plutôt à croire que Grunthler n'a voulu
parler que du temps qu'ils ont été effectivement
ensemble , ses fréquens voyages
l'ayant obligé d'être souvent séparé d'elle.
Peut- être aussi y a-t-il faute d'impression
dans sa Lettre.
Fulvia- Morata laissa à Ferrare , sa mere,
nommée Lucrece , qu'elle aima toûjours
tendrement , et qu'elle n'oublia pas dans
toutes ses disgraces . Car on voit par une
de ses Lettres , que quoiqu'elle eût perdu
elle-même tout son bien dans les Guerres
d'Allemagne , elle prenoit parc à l'état .
E d'indigence où elle avoit appris qu'elle
I. Vol. F étoit
1814 MERCURE DE FRANCE
"
étoit réduite , en lui envoyant une somme
d'argent pour l'aider à subsister. Elle laissa
aussi en Italie ses trois soeurs , dont l'une
fut mariée quelque-temps après à un jeune
homme fort riche , qui l'épousa pour
son mérite , et les deux autres entrerent
au service de quelques Dames de considération
.
Pour ce qui est de son frere Emile , qui
n'avoit alors que huit ans , elle l'emmena
en Allemagne , et l'instruisit elle- même
dans les Langues Grecque et Latine.
Fulvia-Morata et son mari arriverent
en Allemagne , le 12 Juin 1548. et firent
quelque séjour à Ausbourg, chez une personne
de considération , nommée George
Herman, que Grunthler guérit d'une maladie
fâcheuse . Ils se rendirent ensuite à
Schweinfurt , Ville Impériale de Franconie
, dont ce Medecin étoit natif.
Il n'y avoit pas long- temps qu'ils y
étoient , lorsque les Troupes des Evêques
de Bamberg et de Wirtzbourg , de l'Elecfeur
de Saxe , du Duc de Brunswic et de
la Ville de Nuremberg vinrent l'assiéger,
parce que le Marquis de Brandebourg
contre qui ils étoient en Guerre , s'y étoit
retiré avec son armée. Ce Siége dura quatorze
mois , pendant lesquels on eût à
souffrir la famine et la peste. Près de la
Vol. moitié
DECEMBRE . 1731 . 2815.
moitié des habitans moururent de cette
maladie , et Gunthler en fut attaqué si
dangereusement , qu'on désespera de sa.
vie , cependant il en revint .
La résolution que prit le Marquis de
Brandebourg de faire sortir ses Troupes
secrettement de la Ville pendant la nuit,
fit croire qu'elle alloit voir la fin de ses
disgraces ; mais on fut trompé dans cette
pensée. Car à peine en fut il dehors, que
l'armée des deux Evêques et de Nuremberg
la prit d'assaut , la saccagea et y mit
le feu.
Au premier tumulte , Morata et son
mari se retirerent dans une Eglise pour se
mettre à couvert de l'insolence et de la
fureur des Soldats ; mais ils sortirent de
cet azile sur l'avis que leur donna un
Soldat inconnu , qu'on alloit réduire la
Ville en cendre. Avis d'autant plus important
, que s'ils fussent demeurez dans
ce lieu , ils y eussent été étouffez par la
fumée , de même que les autres qui s'y
étoient réfugiez.
› Comme ils sortoient de la Ville , ils furent
dépouillez entierement par les Soldats
, qui ne laisserent à Morata que sa
chemise ; son mari fut même arrêté deux
fois , mais il s'échappa heureusement à
chacune
Fij Le 1. Vol.
2816 MERCURE DE FRANCE
Le mari et la femme s'étant réunis
furent d'abord incertains du parti qu'ils
prendroient ; mais enfin ils se déterminerent
à se retirer à Hamelbourg. Comme
cette Ville étoit éloignée de trois mille
d'Allemagne de Schweinfurt
, Morata
eut bien de la peine à s'y rendre , étant
nuds pieds , toute déeḥevelée et n'ayant
qu'un mechant habit tout déchiré , qu'on
lui avoit prêté dans sa route. Les habitans
firent d'abord difficulté de les y laisser
entrer , parce qu'il leur avoit été défendu
de recevoir ceux qui sortiroient de
Schweinfurt , et tout ce qui purent obfut
la permission d'y demeurer
و
quatre jours , après lesquels ils furent
obligez d'en sortir , quoique Morata fût
actuellement malade de la fièvre que lui
avoient causé les fatigues de son voyage.
Echappez de tous ces dangers , ils en
coururent un nouveau , en passant par
une Ville dépendante d'un Evêque , que
Morata qui nous instruit de ce détail , ne
nomme point , mais qui ne peut être
autre que celui de Wirtzbourg. Celui qui
y commandoit pour ce Prélat , fit arrêter
Grunthler , à qui il déclara qu'il avoit
ordre de lui , de fiire mourir tous les habitans
de Schvveinfutt qui tomberoient
entre ses mains ; mais cet ordre n'eût
1. Vol.
poing
DECEMBRE. 1731. 2817
point d'execution , parce qu'il vint dès
Lettres de l'Evêque , qui lui procurerent
la liberté.
Le Comte de Reineck et celui d'Erbach
, chez qui ils passerent ensuite , les
reçurent avec beaucoup d'humanité.
Comme ils professoient la nouvelle Religion
aussi bien qu'eux , ils n'oublierent
rien pour leur faite oublier les disgraces
passées , et leur fournirent abondamment
des habits et tout ce qui leur étoit né
cessaire .
Ils commençoient alors à respirer, lorsque
l'Electeur Palatin appella Grunthler à
Heidelberg , pour professer la Medecine.
Ils allerent donc demeurer dans cette Ville
, où le nouveau Professeur entra en
exercice la même année , c'es-à- dire en
1554.
Les maux que Morata avoit eu à souffrir
, avoient alteré son temperament , et
elle ne fut pas long- temps sans ressentir
des effets de cette altération . Sa santé fut
toujours depuis tres- chancellante , et après
avoir langui quelques mois , elle mourut
le 26 Octobre 1555. n'ayant pas encore
29 ans complets.
1
Son mari et son frere la suivirent de'
bien près , et ils furent ensevelis tous trois
en un même tombeau , dans l'Eglise de
saint Pierre.
1. Vol.
Fiij Voicy
2818 MERCURE DE FRANCE
Voici son Epitaphe :
DEO IMM . S.
Et virtuti ac memoria Olympia Fulvia
Morata , Fulvii Morati Mantuani , viri
Doctiss. filia , Andrea Grunthleri Medici
conjugis lectissima , foemina cujus ingenium
ac singularis utriusque lingua cognitio , in
moribus autem probitas , summumque pietatis
studium , suprà communem modum semper
existimata sunt. Quod de ejus vita hominum
judicium , beata mors sanctissimè ac pacatistimé
ab ea obita , divino quoque confir
mavit testimonio . Obiit mutato solo à salute
DEV. suprà mille. Sua atatis XXIX. hic cum
Marito et Emilio fratre sepulta Heidelberga.
Guillelmus Rascalonus M. D. B. B. MM . Pr.
le
L'Epitaphe de son mari , faite par
même Auteur , merite d'être rapportée ,
d'autant plus qu'elle contient quelques
particularitez de sa mort.
D. O. M. Trino et Uni S.
'Andrea Zunthlero Swinfordiano , magne
peritia viro Medico et Philosopho qui simul
atque schola , in qua vix dum ab exilio
, profiteri artem coeperat , pestis metu hic
I. Vol. dissi
ป
ย
"
DECEMBRE . 1731. 2819
dissiparetur , solvi à corpore exoptavit ,proque
voto solutus est , non tadio solo amissa
incomparabilis exempli socia ac conjugis
Minerva sua ( erat enim in omni fortuna
homo modestissimus ) sed ut ex densâ hâc
cælestium ignoratione in lucem traductus , ab
errationibus Deum non ampliùs off.nderet ,
hic in spem resurrectionis quiescenti sodalis
sodali, Medicus Medico , Guillelmus Rascalonus
posuit.
Olympia Fulvia Morata avoit composé
plusieurs Ouvrages , dont la plûpart pés
rirent dans l'Incendie de la Ville de
Schvveinfert. Le peu qui s'est conservé , a
été ramassé par Cælius Secundus Curion ,
qui les publia sous ce titre.
Olympia Fulvia Morate , Foemina doctissima
ac planè divina , Opera omnia que
hactenus inveniri potuerunt ; quibus Coelii
secundi Curionis Epistola ac Orationes accesserunt.
Basilea 1558. in 8. C'est la premiere
édition, qui a été suivie de plusieurs
autres , faites aussi à Bâle dans la même
forme , en 1562 , 1570 , 1580 , & c.
Les Ouvrages de Morata consistent dans
les pieces suivantes .
1. Trois Discours prononcez en presence
de la Princesse Anne de Ferrare
1. Vol.
Fiiij . d'unc
2820 MERCURE DE FRANCE
d'une assemblée choisie , à qui elle expliquoit
les Paradoxes de Ciceron ..
2. L'Eloge de Q. Mutius Scevola, en Grec.
et en Latin.
3.
4.
•
S.
Les deux premieres Nouvelles de Bocace
, traduites en Latin.
Deux Dialogues.
Deux Livres de Lettres. On y apprend
plusieurs particularitez de sa vie . C'est
une négligence impardonnable à Curion
de ne les avoir pas rangées selon
l'ordre des temps , et d'avoir obmis les
dattes à la plupart.
6. Deux Livres de Poësies Grecques.
Voyez ses Lettres . Melchior Adam vi
ta Philosophorum Germanorum .
Les Eloges de M. de Thou , et les additions
de Teissier.
Voicy les noms des Scavans , contenus
dans la Table Alphabetique , du même
quinziéme Tome.
Jean Boscager, Tycho-Brahé, Guillaume
Caoursin , Hyacinthe Cestoni , Pierre
Corneille , Louis de Courcillon de Dangeau
, Pierre Delfini , Louis de Dieu
Charles Drelincourt , Guillaume Dugdale
, Jacques Esprit , Alberic Gentilis ,
Scipion Gentilis, François Genet, Ulric de
1. Vol. Hutten,
DECEMBRE. 1731. 2821
Hutten , Pierre la Sena , François de Launay
, Thomas Lydiat , Henry de Monantheüil
, Olympia Fulvia Morata , Christophle
Persona , Gobelin Persona , Jacques
Picolomini , Jacques Pilarino , Jean Pitseus
, Antoine Sanderus , Nicolas Sanderus
, Michel Scot , George de Scudery ,
Madeleine de Scudery , Philippe Sidney
Sebastien le Nain de Tillemont, Evangeliste
Torriceli , Thomas Willis , Henry
V varton .
des Hommes Illustres , dans la République
des Lettres, avec un Catalogue raisonné de
leurs Ouvrages. Tome XV.de 409 pages
sans les Tables . A Paris , chez Briasson,
Libraire , rue S. Jacques , à la Science.
1731.
N trouve à la tête de ce tome la
Fable alphabetique des Sçavans qui
y sont contenus. Le P. Niceron n'en a
point mis qui expose leurs noms ,
selon
l'ordre qu'ils tiennent dans ce volume.
Il y a dans ce Tome , comme dans les
autres , un nombre de Sçavans , du pre
mier ordre , entre lesquels il est difficile
de choisir. Nous nous sommes déterminez
en faveur d'Olympia Fulvia Morata,
dont l'article nous a paru très -singulier ,
parce qu'elle a été une Dame sçavante , et
par les différentes révolutions qui ont accompagné
sa vie.Le voicy tel qu'il est rapporté
dans les Mémoires.
Olympia Fulvia Morata , nâquit à Ferrare
, l'an 1526, Fulvio Peregrino Morato
son pere ,
natif de Mantouë , avoit professé
les belles Lettres en plusieurs Villes
I. Vol.
(d'Italic
-
DECEMBRE . 1731. 2811
d'Italie , et son mérite et sa capacité Pavoient
fait choisir pour Précepteur des
Princes de Ferrare, Hyppoliteet François ,
fils d'Alphonse.
On trouve une de ses Lettres sur la pro
nonciation de la Langue Latine , à la tête
de celles de Fluvia Morata sa fille , à qui
elle est addressée.
Les grandes dispositions qu'il remarqua
dans sa fille pour les Sciences , l'engagerent
à les cultiver ; il l'instruisit avec beaucoup
de soin , et elle fit en peu de temps
de si grands progrès , qu'elle devint l'admiration
de tout le monde.
La Princesse de Ferrare , Anne , fille
d'Hercule II. étudioit alors les Lettres
sous la conduite de Jean Sinapius , et l'on
jugea à propos de mettre auprès d'elle Ful
via Morata , afin que l'émulation que sa
compagnie lui inspireroit , la fit avancer
davantage dans les sciences qu'on lui enseignoit.
Le séjour de la Cour fût avanta
geux à notre sçavante,pour la même raison
, et on l'y vit , avec étonnement , réciter
des Discours Latins , parler Grec
expliquer les Paradoxes de Ciceron , et répondre
à toutes les questions qu'on lui
faisoit.
Mais l'affection que lui témoigna la Duchesse
de Ferrare , Renée de France , mere
1.Vol.
de
2012 MERCURE DE FRANCE
de la Princesse Anne , lui fut funeste ; car
elle lui communiqua le goût qu'elle avoit
pour les nouvelles opinions , au sujet de
Ia Religion , qu'elle favorisoit secretement
, et que Fulvia Morata embrassa
dans la suite.
Après avoir demeuré quelques années.
auprès de la jeune Princesse qui l'aimoit
beaucoup , elle retourna dans la maison
paternelle , pour assister son pere dans la
maladie dont il mourut. Elle ne retourna
plus après à la Cour , parce que sa mere
étant fort valetudinaire , elle se trouvoit
obligée , en qualité d'aînée de la famille ,
d'avoir soin de l'éducation de ses trois
soeurs et de son frere .
Une autre raison s'y joignit encore , celle,
dit- elle dans une de ses Lettres à Cælius
Secundus Curion , avec qui elle étoit liée
depuis long- temps d'une étroite amitié ,
qui auroit dû nous proteger , prévenuë par
les discours calomnieux de quelques personnes
mal intentionnées , nous a abandonnées et
maltraitées. Il eſt à présumer qu'elle veut
entendre , par là , la Duchesse de Ferrare
qui changea alors de dispositions à son
égard.
Quoiqu'il en soit , un jeune Allemand ,
nommé André Grunthler , qui étudioit
alors en Medecine à Ferrare , où il se fit
I.Vol. rece
DECEMBRE 1731. 2813
recevoir Docteur en cette Faculté , ayant
eu occasion de la voir et de la connoître ,
fut si touché de son mérite, qu'il l'épousa.
Il paroît incontestablement par ses Lettres
, que ce Mariage se fit avant leur dé
part pour l'Allemagne , c'est - à - dire , à
Ferrare ; mais M. de Thou veut qu'il ne
se soit fait qu'en Allemagne ; et ce qu'il
dit là- dessus semble s'accorder avec ce
que Grunthler assure dans une Lettre à
Curion , sur la mort de Fulvia -Morata sa
femme, qu'ils n'avoient pas vécu ensemble
cinq années. Si cela est , ils ont dû se
marier en 1550. c'est - à - dire , deux ans
après leur arrivée en Allemagne ; mais
cela ne paroît gueres probable ; il est
plutôt à croire que Grunthler n'a voulu
parler que du temps qu'ils ont été effectivement
ensemble , ses fréquens voyages
l'ayant obligé d'être souvent séparé d'elle.
Peut- être aussi y a-t-il faute d'impression
dans sa Lettre.
Fulvia- Morata laissa à Ferrare , sa mere,
nommée Lucrece , qu'elle aima toûjours
tendrement , et qu'elle n'oublia pas dans
toutes ses disgraces . Car on voit par une
de ses Lettres , que quoiqu'elle eût perdu
elle-même tout son bien dans les Guerres
d'Allemagne , elle prenoit parc à l'état .
E d'indigence où elle avoit appris qu'elle
I. Vol. F étoit
1814 MERCURE DE FRANCE
"
étoit réduite , en lui envoyant une somme
d'argent pour l'aider à subsister. Elle laissa
aussi en Italie ses trois soeurs , dont l'une
fut mariée quelque-temps après à un jeune
homme fort riche , qui l'épousa pour
son mérite , et les deux autres entrerent
au service de quelques Dames de considération
.
Pour ce qui est de son frere Emile , qui
n'avoit alors que huit ans , elle l'emmena
en Allemagne , et l'instruisit elle- même
dans les Langues Grecque et Latine.
Fulvia-Morata et son mari arriverent
en Allemagne , le 12 Juin 1548. et firent
quelque séjour à Ausbourg, chez une personne
de considération , nommée George
Herman, que Grunthler guérit d'une maladie
fâcheuse . Ils se rendirent ensuite à
Schweinfurt , Ville Impériale de Franconie
, dont ce Medecin étoit natif.
Il n'y avoit pas long- temps qu'ils y
étoient , lorsque les Troupes des Evêques
de Bamberg et de Wirtzbourg , de l'Elecfeur
de Saxe , du Duc de Brunswic et de
la Ville de Nuremberg vinrent l'assiéger,
parce que le Marquis de Brandebourg
contre qui ils étoient en Guerre , s'y étoit
retiré avec son armée. Ce Siége dura quatorze
mois , pendant lesquels on eût à
souffrir la famine et la peste. Près de la
Vol. moitié
DECEMBRE . 1731 . 2815.
moitié des habitans moururent de cette
maladie , et Gunthler en fut attaqué si
dangereusement , qu'on désespera de sa.
vie , cependant il en revint .
La résolution que prit le Marquis de
Brandebourg de faire sortir ses Troupes
secrettement de la Ville pendant la nuit,
fit croire qu'elle alloit voir la fin de ses
disgraces ; mais on fut trompé dans cette
pensée. Car à peine en fut il dehors, que
l'armée des deux Evêques et de Nuremberg
la prit d'assaut , la saccagea et y mit
le feu.
Au premier tumulte , Morata et son
mari se retirerent dans une Eglise pour se
mettre à couvert de l'insolence et de la
fureur des Soldats ; mais ils sortirent de
cet azile sur l'avis que leur donna un
Soldat inconnu , qu'on alloit réduire la
Ville en cendre. Avis d'autant plus important
, que s'ils fussent demeurez dans
ce lieu , ils y eussent été étouffez par la
fumée , de même que les autres qui s'y
étoient réfugiez.
› Comme ils sortoient de la Ville , ils furent
dépouillez entierement par les Soldats
, qui ne laisserent à Morata que sa
chemise ; son mari fut même arrêté deux
fois , mais il s'échappa heureusement à
chacune
Fij Le 1. Vol.
2816 MERCURE DE FRANCE
Le mari et la femme s'étant réunis
furent d'abord incertains du parti qu'ils
prendroient ; mais enfin ils se déterminerent
à se retirer à Hamelbourg. Comme
cette Ville étoit éloignée de trois mille
d'Allemagne de Schweinfurt
, Morata
eut bien de la peine à s'y rendre , étant
nuds pieds , toute déeḥevelée et n'ayant
qu'un mechant habit tout déchiré , qu'on
lui avoit prêté dans sa route. Les habitans
firent d'abord difficulté de les y laisser
entrer , parce qu'il leur avoit été défendu
de recevoir ceux qui sortiroient de
Schweinfurt , et tout ce qui purent obfut
la permission d'y demeurer
و
quatre jours , après lesquels ils furent
obligez d'en sortir , quoique Morata fût
actuellement malade de la fièvre que lui
avoient causé les fatigues de son voyage.
Echappez de tous ces dangers , ils en
coururent un nouveau , en passant par
une Ville dépendante d'un Evêque , que
Morata qui nous instruit de ce détail , ne
nomme point , mais qui ne peut être
autre que celui de Wirtzbourg. Celui qui
y commandoit pour ce Prélat , fit arrêter
Grunthler , à qui il déclara qu'il avoit
ordre de lui , de fiire mourir tous les habitans
de Schvveinfutt qui tomberoient
entre ses mains ; mais cet ordre n'eût
1. Vol.
poing
DECEMBRE. 1731. 2817
point d'execution , parce qu'il vint dès
Lettres de l'Evêque , qui lui procurerent
la liberté.
Le Comte de Reineck et celui d'Erbach
, chez qui ils passerent ensuite , les
reçurent avec beaucoup d'humanité.
Comme ils professoient la nouvelle Religion
aussi bien qu'eux , ils n'oublierent
rien pour leur faite oublier les disgraces
passées , et leur fournirent abondamment
des habits et tout ce qui leur étoit né
cessaire .
Ils commençoient alors à respirer, lorsque
l'Electeur Palatin appella Grunthler à
Heidelberg , pour professer la Medecine.
Ils allerent donc demeurer dans cette Ville
, où le nouveau Professeur entra en
exercice la même année , c'es-à- dire en
1554.
Les maux que Morata avoit eu à souffrir
, avoient alteré son temperament , et
elle ne fut pas long- temps sans ressentir
des effets de cette altération . Sa santé fut
toujours depuis tres- chancellante , et après
avoir langui quelques mois , elle mourut
le 26 Octobre 1555. n'ayant pas encore
29 ans complets.
1
Son mari et son frere la suivirent de'
bien près , et ils furent ensevelis tous trois
en un même tombeau , dans l'Eglise de
saint Pierre.
1. Vol.
Fiij Voicy
2818 MERCURE DE FRANCE
Voici son Epitaphe :
DEO IMM . S.
Et virtuti ac memoria Olympia Fulvia
Morata , Fulvii Morati Mantuani , viri
Doctiss. filia , Andrea Grunthleri Medici
conjugis lectissima , foemina cujus ingenium
ac singularis utriusque lingua cognitio , in
moribus autem probitas , summumque pietatis
studium , suprà communem modum semper
existimata sunt. Quod de ejus vita hominum
judicium , beata mors sanctissimè ac pacatistimé
ab ea obita , divino quoque confir
mavit testimonio . Obiit mutato solo à salute
DEV. suprà mille. Sua atatis XXIX. hic cum
Marito et Emilio fratre sepulta Heidelberga.
Guillelmus Rascalonus M. D. B. B. MM . Pr.
le
L'Epitaphe de son mari , faite par
même Auteur , merite d'être rapportée ,
d'autant plus qu'elle contient quelques
particularitez de sa mort.
D. O. M. Trino et Uni S.
'Andrea Zunthlero Swinfordiano , magne
peritia viro Medico et Philosopho qui simul
atque schola , in qua vix dum ab exilio
, profiteri artem coeperat , pestis metu hic
I. Vol. dissi
ป
ย
"
DECEMBRE . 1731. 2819
dissiparetur , solvi à corpore exoptavit ,proque
voto solutus est , non tadio solo amissa
incomparabilis exempli socia ac conjugis
Minerva sua ( erat enim in omni fortuna
homo modestissimus ) sed ut ex densâ hâc
cælestium ignoratione in lucem traductus , ab
errationibus Deum non ampliùs off.nderet ,
hic in spem resurrectionis quiescenti sodalis
sodali, Medicus Medico , Guillelmus Rascalonus
posuit.
Olympia Fulvia Morata avoit composé
plusieurs Ouvrages , dont la plûpart pés
rirent dans l'Incendie de la Ville de
Schvveinfert. Le peu qui s'est conservé , a
été ramassé par Cælius Secundus Curion ,
qui les publia sous ce titre.
Olympia Fulvia Morate , Foemina doctissima
ac planè divina , Opera omnia que
hactenus inveniri potuerunt ; quibus Coelii
secundi Curionis Epistola ac Orationes accesserunt.
Basilea 1558. in 8. C'est la premiere
édition, qui a été suivie de plusieurs
autres , faites aussi à Bâle dans la même
forme , en 1562 , 1570 , 1580 , & c.
Les Ouvrages de Morata consistent dans
les pieces suivantes .
1. Trois Discours prononcez en presence
de la Princesse Anne de Ferrare
1. Vol.
Fiiij . d'unc
2820 MERCURE DE FRANCE
d'une assemblée choisie , à qui elle expliquoit
les Paradoxes de Ciceron ..
2. L'Eloge de Q. Mutius Scevola, en Grec.
et en Latin.
3.
4.
•
S.
Les deux premieres Nouvelles de Bocace
, traduites en Latin.
Deux Dialogues.
Deux Livres de Lettres. On y apprend
plusieurs particularitez de sa vie . C'est
une négligence impardonnable à Curion
de ne les avoir pas rangées selon
l'ordre des temps , et d'avoir obmis les
dattes à la plupart.
6. Deux Livres de Poësies Grecques.
Voyez ses Lettres . Melchior Adam vi
ta Philosophorum Germanorum .
Les Eloges de M. de Thou , et les additions
de Teissier.
Voicy les noms des Scavans , contenus
dans la Table Alphabetique , du même
quinziéme Tome.
Jean Boscager, Tycho-Brahé, Guillaume
Caoursin , Hyacinthe Cestoni , Pierre
Corneille , Louis de Courcillon de Dangeau
, Pierre Delfini , Louis de Dieu
Charles Drelincourt , Guillaume Dugdale
, Jacques Esprit , Alberic Gentilis ,
Scipion Gentilis, François Genet, Ulric de
1. Vol. Hutten,
DECEMBRE. 1731. 2821
Hutten , Pierre la Sena , François de Launay
, Thomas Lydiat , Henry de Monantheüil
, Olympia Fulvia Morata , Christophle
Persona , Gobelin Persona , Jacques
Picolomini , Jacques Pilarino , Jean Pitseus
, Antoine Sanderus , Nicolas Sanderus
, Michel Scot , George de Scudery ,
Madeleine de Scudery , Philippe Sidney
Sebastien le Nain de Tillemont, Evangeliste
Torriceli , Thomas Willis , Henry
V varton .
Fermer
Résumé : MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République des Lettres, avec un Catalogue raisonné de leurs Ouvrages. Tome XV. de 409 pages sans les Tables. A Paris, chez Briasson, Libraire, ruë S. Jacques, à la Science. 1731.
Le texte est un extrait des 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République des Lettres', publié en 1731 à Paris. Il présente une fable alphabétique des savants contenus dans le tome XV, qui compte 409 pages. Parmi les savants mentionnés, Olympia Fulvia Morata est particulièrement mise en avant. Olympia Fulvia Morata naquit à Ferrare en 1526. Son père, Fulvio Peregrino Morato, était un érudit qui avait été précepteur des princes de Ferrare. Reconnaissant les dispositions exceptionnelles de sa fille pour les sciences, il l'instruisit avec soin. Elle devint rapidement admirée pour ses compétences en latin, grec et philosophie. Elle fut ensuite placée auprès de la princesse Anne de Ferrare pour stimuler son éducation. Cependant, l'affection de la duchesse de Ferrare, Renée de France, pour Morata lui fut funeste, car elle lui transmit son goût pour les nouvelles opinions religieuses. Après avoir quitté la cour pour s'occuper de sa famille, Morata épousa André Grunthler, un médecin allemand. Ils se réfugièrent en Allemagne en 1548 et vécurent des périodes de grande détresse, notamment lors du siège de Schweinfurt. Malgré les épreuves, Morata continua à écrire et à instruire son frère. Elle mourut en 1555 à l'âge de 29 ans. Ses œuvres, en grande partie perdues lors de l'incendie de Schweinfurt, furent rassemblées et publiées par Cælius Secundus Curion. Elles incluent des discours, des traductions, des dialogues, des lettres et des poèmes. Le texte mentionne également trois autres figures historiques : Torricelli, Thomas Willis et Henry Varton. Torricelli est connu pour ses contributions scientifiques, notamment dans le domaine de la physique et de la mécanique des fluides. Thomas Willis est célèbre pour ses travaux en médecine, en particulier dans le domaine de la neurologie et de l'anatomie du cerveau. Henry Varton est mentionné sans détails supplémentaires sur ses contributions spécifiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
11
p. 2618-2625
Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République [...]
Mots clefs :
Histoire, Savants, Mémoires, Hommes illustres, R. P. Niceron, Jacques Sirmond
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
EMOIRES pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres dans la République des Lettres , &c. T. XVIl. de 408.
pages , sans les Tables. A Paris , chez
Briasson , rue S. Jacques , à la Science
M. DCC. XXXII.
Voici les noms des Sçavans dont il est
fait mention dans le xv11. Volume des
Mémoires du R. P. Niceron , qui continuent d'être bien reçûs du Public,
Henri Corneille Agrippa. Pierre Ayrault. Guillaume Barclay. Jean Barclay.
Gaspard Bauhin. Jean Baukin. Jordanus
1. vol.
Bru
DECEMBRE. 1732 2619
Brunus. Jean Chapeauville. Hilarion de
Coste. André Dudith. Charles Riviere Dufreny. Jacques Philippe Foresta. Jerôme Fracastor. Conrad Gesner. DenisGodefroy l'His>`·
torien. Jacques Godefroy. Theodore Godefroy. François Guichardin. Louis Guichardin. Jean Henri Heidedger. J. Gentien
Hervet. Christophe de Longueil. Gilbert
de Longüeil. Charles Paschal. Claude Pocquet Delivonniere. Modesta Pozzo. Eri→
cius Puteanus. Jean Savaron. Jacques Sirmond. Luc Tozzi.
Nous insererons ici , selon notre coûtume , l'un des articles de ces Mémoires ,
& nous croyons faire plaisir à nos Lectcurs , de choisir par préférence celui qui:
regarde le sçavant Pere Sirmond.
Jacques Sirmond nâquit le 12 Octobre 1559. à Riom en Auvergne , de Jean
Sirmond , Magistrat de cette Ville , et
d'Amable Barrier. Lorsqu'il eut 10 ans ,
ses parens l'envoyerent à Billon , Ville de
la basse Auvergne , pour y étudier dans
le College des Jésuites , qui est le premier qu'ils ayent eu en France.
Après qu'il eut fait ses Humanitez , il
entra dans leur Compagnie le 26 Juillet
1576. et en reçût l'Habit le 21 Août suivant dans sa 17 année. Il commença son
Noviciat à Verdun , dont il acheva les
I. Vol. E iij deux
620 MERCURE DE FRANCE
deux années à Pont-à-mousson , où il fir
ses vœux.
Il étudia ensuite en Philosophie, après
quoi sesSuperieurs connoissant ses talens,
le firent venir à Paris , où il professa deux
ans les Humanitez , et trois ans la Rhetorique. Il eut alors l'honneur d'avoir
pour Disciples Charles de Valois , Duc
d'Angoulême , Fils naturel de Charles IX.
et S. François de Sales.
Ce fut pendant ce peu de tems qu'il
acquit une parfaite connoissance des Langues Latine et Grecque , et qu'il se forma ce beau stile , qui joint à la solidité
de son jugement , et à la justesse de ses
pensées , a fait estimer tout ce qui est
sorti de sa plume. M. Cousin nous apprend dans le Journal des Sçavans , qu'il
avoit pris Muret pour son modele , et
qu'il ne laissoit passer aucun jour sans en
lire quelques pages.
En 1586. il commença son Cours de
Theologie , qui dura quatre ans , pendant lesquels il eut pour compagnon d'études le célébre Fronton du Duc. Il ne
se contenta pas d'une Scholastique séche
et décharnée telle qu'on l'enseignoit
alors , il lût avec soin les Saints Peres et
les Auteurs Ecclesiastiques , et entreprit
même dès lors de traduire en Latin quelو
I.Vel ques
DECEMBRE. 1732 2621
ques Ouvrages des Peres Grecs , et de
composer des Remarques sur Sidonius.
A peine fut- il sorti de Theologie , que
le P. Claude Aquaviva , General de sa
Compagnie , l'appella en 1590. à Rome,
pour être son Secretaire , et il s'acquitta
pendant plus de seize ans de cet emploi
avec un succès qui répondit parfaitement
aux espérances qu'on avoit conçues de
lui.
Ses heures de loisir étoient employées à
l'étude de l'Antiquité : il visitoit les Bibliotheques , et en consultoit les Manuscrits , il s'appliquoit aussi à l'étude des
Antiques , des Médailles et des Inscriptions ; et les Italiens , quoique jaloux de
la gloire de leur Nation , ne se faisoient
point une honte de le consulter fur ces
sortes de matieres , persuadez que ses connoissances pouvoient suppléer aux lumie
res qui leur manquoient.
Le P. Sirmond pendant fon séjour en
Italie , lia un commerce d'amitié avec
les Sçavans les plus illustres , qui y vivoient alors , & particulierement avec
Bellarmin et Tolet , qui étoient de sa Societé et avec les Cardinaux Baronius,d'Ossal et du Perron, Le Cardinal Baronius
tira même de lui de grands fecours pour
ses Annales Ecclesiastiques , principale
I. Vol. E iiij ment
2622 MERCURE DE FRANCE
ment par rapport à l'Histoire Grecque ,
sur laquelle il lui fournit un grand nombre de Piéces traduites de Grec en Latin.
Il revint à Paris en 1608. et depuis
ce temps-là il ne cessa point d'enrichir
le Public de nouveaux Ouvrages. Il demeura d'abord environ quatre ans dans
la Maison Professe , d'où il passa sur la
fin de 1612. au College , où il devoit être
plus commodément pour travailler à la
collection des Conciles de France , qu'il
avoit entreprise , et cinq ans après il en
fut fait Recteur.
Le Pape Urbain VIII. qui connoissoit
depuis long-temps son mérite , voulut
l'attirer de nouveau à Rome , et fit écrire
pour cela en France par le P. Vitelleschi,
qui étoit alors General de la Compagnie;
mais Louis XIII. ne voulut pas souffrir
qu'on lui ravit un Homme qui faisoit tant
d'honneur à son Royaume , et qui pouvoit lui rendre de grands services.
Sur la fin du mois de Décembre de l'an
1637. il fut choisi pour être Confesseur
du Roi à la place du P. Caussin. Il eut de
la peine à accepter un poste si délicat ;
quelques-uns même de ses amis , qui ne
songeoient qu'au tems qu'il leur alloit
dérober , jugeoient qu'il lui convenoit
moins qu'à un autre ; mais enfin obligé
I.Vol. de
- DECEMBR E. 1732: 2623
,
de se soumettre au choix qui avoit été
fait de lui , il se conduisit à la Cour avec
tant de précautions et de prudence , qu'il
n'y donna jamais à personne le moindre
sujet de plainte. Renfermé dans les bornes de son Ministere , il ne s'y mêla d'aucune affaire temporelle , et témoigna un
désinteressement si parfait , qu'il n'avança aucun de ses parens , et ne demanda
qu'un petit Benefice pour M. de la Lande,
son Neveu , auquel même il fut contesté.
Après la mort de Louis XIII. arrivée le
14 Mai 1643. il quitta la Cour , et reprit
ses occupations ordinaires avec la même
tranquillité , que s'il ne fut jamais sorti
de sa Retraite. 10
,
En 1645. il voulut bien , malgré son
grand âge , aller encore à Rome en qualité de Député des Jésuites de France
pour y assister à l'élection d'un General
à la place du P. Vitelleschi , comme il avoit fait trente ans auparavant , après
la mort du Pere Aquaviva , son prédécesseur.
De retour en France , il donna encore
quelques Ouvrages au Public , et il se préparoit à en mettre d'autres sous la presse ,
lorsqu'au retour d'une Assemblée tenue
à la Maison Professe , où il s'étoit un peu
I.Vol. Ev échauffé
2624 MERCURE DE FRANCE
échauffé, en soûtenant son avis, il fut attaqué d'une maladie , qui peu de jours
après se trouva accompagnée d'un débordement de bîle par tout le corps. Il en
mourut le 7. Octobre 1651. âgé de 92.
ans.
» Il avoit sçu joindre une grande dé-
» licatesse d'esprit et un discernement
très-juste , avec une profonde érudi-
» tion. Il sçavoit en perfection le Grec, le
» Latin , les Auteurs Profanes , l'Histoi-
» re et, tout ce qui s'appelle Belles- Let-
» tres. Il avoit une connoissance fort
étendue de l'Antiquité Ecclesiastique ,
» et avoit étudié avec soin les Auteurs du
» moyen âge. Son stile est pur , concis et
»serré. Il affecte néanmoins trop , de se
servir de certains mots des Poëtes
» Comiques. Il méditoit beaucoup sur ce
» qu'il écrivoit , et avoit un art tout par-
» ticulier de le réduire en une Note qui
»comprenoit bien des choses en peu de
mots , sans être chargée de rien d'inu-
» tile ou d'étranger. Il est éxact , judi-
» cieux , simple , et cependant . n'omet
»rien de ce qui est nécessaire. Ses Disser-
» tations ont passé pour un modele sur
»lequel il seroit à souhaitter qu'on se
»format. Quand il traitoit une matiere
» il ne disoit jamais d'abord tout ce qu'il
I. Vol. sça-
DECEMBRE. 1732. 2625
» sçavoit , et se réservoit toujours de nous.
» veaux argumens pour la réplique , com-
»me des troupes auxiliaires , pour venir
» au secours du corps de bataille. Il étoit
» désinteressé , équitable , moderé , sin-
» cere , modeste , laborieux , et cepen-
» dant familier , conversant agréablement
» avec ses amis , et appliqué à ses devoirs.
Il s'étoit attiré par son érudition et par
>> ses manieres , l'estime non seulement
» des Sçavans , mais encore de tous les
»honnêtes gens. Il a laissé après lui une
>> réputation qui durera pendant plusieurs
"siécles. C'est le jugement que M. Dupin
porte de cet Auteur.
»
Suit le Catalogue raisonné des Ouvrages
du P. Sirmond , qu'on ne sçauroit lire
sans admiration et sans profit. D'un côté ,
le fonds des matieres , et de l'autre l'arrangement et les Remarques de l'Editeur
ont de quoi satisfaire les Lecteurs intelli.
gens. Nous sommes fâchez de ne pouvoir
rapporter ce Catalogue à cause de sa prolixité. Il contient 55 Articles bien rem
plis. Les Antiquaires doivent s'interesser
aux Art. 43. 44. et 45.
des Hommes Illustres dans la République des Lettres , &c. T. XVIl. de 408.
pages , sans les Tables. A Paris , chez
Briasson , rue S. Jacques , à la Science
M. DCC. XXXII.
Voici les noms des Sçavans dont il est
fait mention dans le xv11. Volume des
Mémoires du R. P. Niceron , qui continuent d'être bien reçûs du Public,
Henri Corneille Agrippa. Pierre Ayrault. Guillaume Barclay. Jean Barclay.
Gaspard Bauhin. Jean Baukin. Jordanus
1. vol.
Bru
DECEMBRE. 1732 2619
Brunus. Jean Chapeauville. Hilarion de
Coste. André Dudith. Charles Riviere Dufreny. Jacques Philippe Foresta. Jerôme Fracastor. Conrad Gesner. DenisGodefroy l'His>`·
torien. Jacques Godefroy. Theodore Godefroy. François Guichardin. Louis Guichardin. Jean Henri Heidedger. J. Gentien
Hervet. Christophe de Longueil. Gilbert
de Longüeil. Charles Paschal. Claude Pocquet Delivonniere. Modesta Pozzo. Eri→
cius Puteanus. Jean Savaron. Jacques Sirmond. Luc Tozzi.
Nous insererons ici , selon notre coûtume , l'un des articles de ces Mémoires ,
& nous croyons faire plaisir à nos Lectcurs , de choisir par préférence celui qui:
regarde le sçavant Pere Sirmond.
Jacques Sirmond nâquit le 12 Octobre 1559. à Riom en Auvergne , de Jean
Sirmond , Magistrat de cette Ville , et
d'Amable Barrier. Lorsqu'il eut 10 ans ,
ses parens l'envoyerent à Billon , Ville de
la basse Auvergne , pour y étudier dans
le College des Jésuites , qui est le premier qu'ils ayent eu en France.
Après qu'il eut fait ses Humanitez , il
entra dans leur Compagnie le 26 Juillet
1576. et en reçût l'Habit le 21 Août suivant dans sa 17 année. Il commença son
Noviciat à Verdun , dont il acheva les
I. Vol. E iij deux
620 MERCURE DE FRANCE
deux années à Pont-à-mousson , où il fir
ses vœux.
Il étudia ensuite en Philosophie, après
quoi sesSuperieurs connoissant ses talens,
le firent venir à Paris , où il professa deux
ans les Humanitez , et trois ans la Rhetorique. Il eut alors l'honneur d'avoir
pour Disciples Charles de Valois , Duc
d'Angoulême , Fils naturel de Charles IX.
et S. François de Sales.
Ce fut pendant ce peu de tems qu'il
acquit une parfaite connoissance des Langues Latine et Grecque , et qu'il se forma ce beau stile , qui joint à la solidité
de son jugement , et à la justesse de ses
pensées , a fait estimer tout ce qui est
sorti de sa plume. M. Cousin nous apprend dans le Journal des Sçavans , qu'il
avoit pris Muret pour son modele , et
qu'il ne laissoit passer aucun jour sans en
lire quelques pages.
En 1586. il commença son Cours de
Theologie , qui dura quatre ans , pendant lesquels il eut pour compagnon d'études le célébre Fronton du Duc. Il ne
se contenta pas d'une Scholastique séche
et décharnée telle qu'on l'enseignoit
alors , il lût avec soin les Saints Peres et
les Auteurs Ecclesiastiques , et entreprit
même dès lors de traduire en Latin quelو
I.Vel ques
DECEMBRE. 1732 2621
ques Ouvrages des Peres Grecs , et de
composer des Remarques sur Sidonius.
A peine fut- il sorti de Theologie , que
le P. Claude Aquaviva , General de sa
Compagnie , l'appella en 1590. à Rome,
pour être son Secretaire , et il s'acquitta
pendant plus de seize ans de cet emploi
avec un succès qui répondit parfaitement
aux espérances qu'on avoit conçues de
lui.
Ses heures de loisir étoient employées à
l'étude de l'Antiquité : il visitoit les Bibliotheques , et en consultoit les Manuscrits , il s'appliquoit aussi à l'étude des
Antiques , des Médailles et des Inscriptions ; et les Italiens , quoique jaloux de
la gloire de leur Nation , ne se faisoient
point une honte de le consulter fur ces
sortes de matieres , persuadez que ses connoissances pouvoient suppléer aux lumie
res qui leur manquoient.
Le P. Sirmond pendant fon séjour en
Italie , lia un commerce d'amitié avec
les Sçavans les plus illustres , qui y vivoient alors , & particulierement avec
Bellarmin et Tolet , qui étoient de sa Societé et avec les Cardinaux Baronius,d'Ossal et du Perron, Le Cardinal Baronius
tira même de lui de grands fecours pour
ses Annales Ecclesiastiques , principale
I. Vol. E iiij ment
2622 MERCURE DE FRANCE
ment par rapport à l'Histoire Grecque ,
sur laquelle il lui fournit un grand nombre de Piéces traduites de Grec en Latin.
Il revint à Paris en 1608. et depuis
ce temps-là il ne cessa point d'enrichir
le Public de nouveaux Ouvrages. Il demeura d'abord environ quatre ans dans
la Maison Professe , d'où il passa sur la
fin de 1612. au College , où il devoit être
plus commodément pour travailler à la
collection des Conciles de France , qu'il
avoit entreprise , et cinq ans après il en
fut fait Recteur.
Le Pape Urbain VIII. qui connoissoit
depuis long-temps son mérite , voulut
l'attirer de nouveau à Rome , et fit écrire
pour cela en France par le P. Vitelleschi,
qui étoit alors General de la Compagnie;
mais Louis XIII. ne voulut pas souffrir
qu'on lui ravit un Homme qui faisoit tant
d'honneur à son Royaume , et qui pouvoit lui rendre de grands services.
Sur la fin du mois de Décembre de l'an
1637. il fut choisi pour être Confesseur
du Roi à la place du P. Caussin. Il eut de
la peine à accepter un poste si délicat ;
quelques-uns même de ses amis , qui ne
songeoient qu'au tems qu'il leur alloit
dérober , jugeoient qu'il lui convenoit
moins qu'à un autre ; mais enfin obligé
I.Vol. de
- DECEMBR E. 1732: 2623
,
de se soumettre au choix qui avoit été
fait de lui , il se conduisit à la Cour avec
tant de précautions et de prudence , qu'il
n'y donna jamais à personne le moindre
sujet de plainte. Renfermé dans les bornes de son Ministere , il ne s'y mêla d'aucune affaire temporelle , et témoigna un
désinteressement si parfait , qu'il n'avança aucun de ses parens , et ne demanda
qu'un petit Benefice pour M. de la Lande,
son Neveu , auquel même il fut contesté.
Après la mort de Louis XIII. arrivée le
14 Mai 1643. il quitta la Cour , et reprit
ses occupations ordinaires avec la même
tranquillité , que s'il ne fut jamais sorti
de sa Retraite. 10
,
En 1645. il voulut bien , malgré son
grand âge , aller encore à Rome en qualité de Député des Jésuites de France
pour y assister à l'élection d'un General
à la place du P. Vitelleschi , comme il avoit fait trente ans auparavant , après
la mort du Pere Aquaviva , son prédécesseur.
De retour en France , il donna encore
quelques Ouvrages au Public , et il se préparoit à en mettre d'autres sous la presse ,
lorsqu'au retour d'une Assemblée tenue
à la Maison Professe , où il s'étoit un peu
I.Vol. Ev échauffé
2624 MERCURE DE FRANCE
échauffé, en soûtenant son avis, il fut attaqué d'une maladie , qui peu de jours
après se trouva accompagnée d'un débordement de bîle par tout le corps. Il en
mourut le 7. Octobre 1651. âgé de 92.
ans.
» Il avoit sçu joindre une grande dé-
» licatesse d'esprit et un discernement
très-juste , avec une profonde érudi-
» tion. Il sçavoit en perfection le Grec, le
» Latin , les Auteurs Profanes , l'Histoi-
» re et, tout ce qui s'appelle Belles- Let-
» tres. Il avoit une connoissance fort
étendue de l'Antiquité Ecclesiastique ,
» et avoit étudié avec soin les Auteurs du
» moyen âge. Son stile est pur , concis et
»serré. Il affecte néanmoins trop , de se
servir de certains mots des Poëtes
» Comiques. Il méditoit beaucoup sur ce
» qu'il écrivoit , et avoit un art tout par-
» ticulier de le réduire en une Note qui
»comprenoit bien des choses en peu de
mots , sans être chargée de rien d'inu-
» tile ou d'étranger. Il est éxact , judi-
» cieux , simple , et cependant . n'omet
»rien de ce qui est nécessaire. Ses Disser-
» tations ont passé pour un modele sur
»lequel il seroit à souhaitter qu'on se
»format. Quand il traitoit une matiere
» il ne disoit jamais d'abord tout ce qu'il
I. Vol. sça-
DECEMBRE. 1732. 2625
» sçavoit , et se réservoit toujours de nous.
» veaux argumens pour la réplique , com-
»me des troupes auxiliaires , pour venir
» au secours du corps de bataille. Il étoit
» désinteressé , équitable , moderé , sin-
» cere , modeste , laborieux , et cepen-
» dant familier , conversant agréablement
» avec ses amis , et appliqué à ses devoirs.
Il s'étoit attiré par son érudition et par
>> ses manieres , l'estime non seulement
» des Sçavans , mais encore de tous les
»honnêtes gens. Il a laissé après lui une
>> réputation qui durera pendant plusieurs
"siécles. C'est le jugement que M. Dupin
porte de cet Auteur.
»
Suit le Catalogue raisonné des Ouvrages
du P. Sirmond , qu'on ne sçauroit lire
sans admiration et sans profit. D'un côté ,
le fonds des matieres , et de l'autre l'arrangement et les Remarques de l'Editeur
ont de quoi satisfaire les Lecteurs intelli.
gens. Nous sommes fâchez de ne pouvoir
rapporter ce Catalogue à cause de sa prolixité. Il contient 55 Articles bien rem
plis. Les Antiquaires doivent s'interesser
aux Art. 43. 44. et 45.
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Résumé : Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Le texte présente les 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres', volume XVII, publié en 1732 à Paris par Briasson. Ce volume mentionne plusieurs savants, dont Henri Corneille Agrippa, Pierre Ayrault, Guillaume Barclay, et Jacques Sirmond. Jacques Sirmond, né le 12 octobre 1559 à Riom en Auvergne, a étudié au Collège des Jésuites à Billom. Il est entré dans la Compagnie de Jésus en 1576 et a commencé son noviciat à Verdun, le terminant à Pont-à-Mousson. Il a enseigné les humanités et la rhétorique à Paris, comptant parmi ses disciples Charles de Valois et François de Sales. Sirmond a acquis une maîtrise du latin et du grec, et a adopté un style influencé par Muret. En 1586, il a commencé ses études de théologie, durant lesquelles il a traduit des œuvres des Pères grecs et a composé des remarques sur Sidonius. En 1590, il a été appelé à Rome par le Père Claude Aquaviva pour devenir son secrétaire, poste qu'il a occupé pendant seize ans. À Rome, il a étudié l'antiquité, visité des bibliothèques, et consulté des manuscrits. Il a également collaboré avec des savants italiens comme Bellarmin et Baronius. De retour à Paris en 1608, Sirmond a continué à publier des ouvrages et a été nommé recteur du Collège en 1617. En 1637, il est devenu confesseur du roi Louis XIII, poste qu'il a occupé avec prudence et désintéressement. Après la mort du roi en 1643, il a repris ses occupations habituelles. En 1645, il est retourné à Rome pour l'élection d'un général des Jésuites. De retour en France, il a continué à publier jusqu'à sa mort le 7 octobre 1651, à l'âge de 92 ans. Sirmond est décrit comme un érudit polyglotte, maîtrisant le grec, le latin, et les auteurs profanes. Son style est pur et concis, et ses dissertations sont considérées comme des modèles. Il était désintéressé, équitable, et modeste, et a laissé une réputation durable. Le texte mentionne également un catalogue des œuvres de Sirmond, contenant 55 articles, et note l'intérêt des antiquaires pour certains articles spécifiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 2842-2850
Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République [...]
Mots clefs :
Hommes illustres, République des Lettres, Mémoires, Godeau, Diocèse
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
MEMOIRES pour servir à PHistoire
des Hommes Illustres dans la République
des Lettres , &c. Tome XVIII. de 411.
pages , sans les Tables. A Paris , chez
Briasson , rue S. Jacques , à la Science ,
M. DCC. XXXII.
,
Les Memoires qui font la matiere de
ce XVIIIe Volume , contiennent la Vie
et le Catalogue des Ouvrages de trentecinq Auteurs , entre lesquels nous avons
choisi l'article d'Antoine Godeau , pour
suivre notre coûtume , et pour ne point
exceder, les bornes prescrites dans notre
Journal.
Antoine Godeau nâquit à Dreux , Ville
du Diocèse de Chartres , où son pere
étoit Elû , et d'une des meilleures familles du Lieu , vers l'an 1605.
Il s'adonna de bonne heure à la Poësie
Françoise , et se fit connoître avantageusement de ce côté-là. Il étoit un peu pa11. Vol.
.rent
DECEMBRE. 1732: 2843
rent de M. Conrart , et logeoit chez lui
lorsqu'il venoit à Paris. Les Poësies qu'il
y apportoit de Dreux , donnerent lieu à
M. Conrart d'assembler dans sa Maison
quelques Gens de Lettres , pour en entendre la lecture , et ces Assemblées furent
proprement l'origine de l'établissement
de l'Académie Françoise , dans laquelle
M. Godeau eut entrée des premiers.
Ses vûës tendirent d'abord vers le mariage , et il rechercha la fille du Lieutenant General de Dreux ; mais se voyant
rejetté , parce qu'il étoit petit et laid , il
quitta sa Patrie et vint s'établir à Paris.
M. Conrart l'ayant fait connoître à
M. Chapelain ; celui- cy le produisit à
l'Hôtel de Rambouillet , qui étoit alors
le Tribunal où il falloit faire preuve d'esprit et de mérite pour être admis au
rang des Illustres ; il y fut goûté , et c'étoit de lui que Mademoiselle de Ramboüillet ( Julie d'Angennes ) disoit dans
une de ses Lettres à Voiture : Il y
y a ici
un homme plus petit que vous d'une coudée.
et je vous jure , mille fois plus galint. Sa
taille et l'affection que cette Demoiselle
lui témoignoit , lui firent alors donner
le nom de Nain de Julie.
On voit par-là que si M.Godeau n'avoit
du côté du corps rien qui méritât de l'atII. Vol. tention
2814 MERCURE DE FRANCE
tention , les qualitez de son esprit et son
mérite suppléoient à ce deffaut. Quelque
temps après qu'il se fûr fixé à Paris , it
embrassa l'Etat Ecclesiastique ; et l'esprie
de pieté qui lui avoit inspiré ce dessein ,
lui inspira aussi celui de ne plus exercer
le talent et l'inclination qu'il avoit pour
la Poësie , que sur des sujets chrétiens.
Il fit en 1636. une Paraphrase du Cantique : Benedicite omnia opera Domini Domin , qui étant bien versifiée et écrite
d'un stile noble et riche , lui attira un
applaudissement general. Elle plut si fort
au Cardinal de Richelieu , à qui il l'avoit
présentée , qu'après l'avoir luë et reluë
en sa présence , il lui dit : Vous me donnez le Benedicite , et moije vous donne
Grasse. Jeu de mots , que l'occasion fit
naître ; car l'Evêché de Grasse vaquoit
alors , et le Cardinal qui connoissoit d'ail
leurs son mérite et sçavoit le bruit que
faisoient ses Prédications , fut par-là déterminé à le placer sur le champ.
Il fut nommé à cet Evêché l'an 1536.
et fut sacré à S. Magloire au mois de Décembre de la même année , par Eleonor
d'Estampes , Evêque de Chartres , et depuis Archevêque de Reims , assisté d'Etienne Pouget , Evêque de Dardanie et *
* Ce nom est defiguré , il faut dire Etienne de Puget.
DECEMBRE. 1732. 2845
depuis de Marseille , et de Bertrand Des
pruotz , Evêque de S. Papoul.
-Aussi-tôt après son Sacre , il se retira
dans son Diocèse , pour s'appliquer tout
entier aux fonctions de l'Episcopat. Il y
annonça avec zele la parole de Dieu , y
tint plusieurs Synodes , composa quantité
d'Instructions Pastorales pour son Clergé
et y rétablit la discipline Ecclesiastique.
Il réunit à l'Evêché de Grasse , par
droit de Patronage , l'Eglise d'Antibes ,
qui depuis que le Siege Episcopal en
avoit été transferé à Grasse , n'avoit été
d'aucun Diocèse , et par ce moyen il
fit revivre la discipline Ecclesiastique ,
dont il ne restoit presque plus aucun
vestige.
y
Il obtint du Pape Innocent X. des Bul.
les d'union de l'Evêché de Vence , avec
celui de Grasse , comme son Predecesseur
Guillaume le Blanc en avoit obtenu de
Clement VIII. Cette union n'étoit pas
contraire aux Canons , et paroissoit bien
fondée , parce que ces deux Evêchez ensemble n'étoient que de dix mille livres
de revenu ; qu'ils n'avoient aussi ensemblee que trente Paroisses , et que les Villes de Vence et de Grasse n'étoient éloignées l'une de l'autre que de trois licües.
Cependant voyant que le Peuple et le
II Vol. Clergé
2046 MERCURE DE FRANCE
Clergé de Vence , s'opposoient à cette
union , il aima mieux ceder son droit
que de n'être pas agréable à quelquesuns de ces Diocesains , et d'avoir à poursuivre un Procès , et se contenta de l'E
glise de Vence.
Il assista aux Assemblées generales du
Clergé , tenues en 1645. et 1656. Dans
la premiere il composa et récita , par ordre du Clergé , l'Eloge de Petrus Aurelius,
qui avoit soutenu vivement les droits des
Evêques contre quelques Réguliers. Dans
la seconde , il fut un des Prélats qui témoignerent le plus de zele et d'indignation contre les Propositions de Morale
relâchée, qui avoient été dénoncez à cette
Assemblée , et ce fut par son avis qu'elle
fit imprimer les Instructions de S. Charles Borromée , dont il avoit inseré une
partie dans ses Statuts Synodaux.
Il passa le reste de sa vie dans son Diocèse ,continuellement occupé, soit à faire
ses visites , soit à prêcher , soit à lire ou à
composer , soit à vacquer aux affaires Ecclesiastiques ou temporelles de son Diocèse.
J'ai trouvé dans un Livre peu connu ,
intitulé : Le Confiteor de l'infidele Voyageur , parfeu George Martin , Renegat ;
Extrait de ses Voyages. Lyon , 1680. in 8.
II. Vol. à
DECEMBRE. 1732 2847
à la page 244. qu'en passant à Vence ,
il vit M. Godeau , qui en étoit Evêque ,
et que Dieu l'avoit éprouvé par la perte
de la vûë , qu'il enduroit avec beaucoup
de tranquillité d'esprit ; particularité dont
je n'ai vû faire mention en aucun autre
endroit.
Il eut une attaque d'apoplexie le 17
Avril 1672. qui étoit le jour de Pâques , et il en mourut à Vence le 21 du
même mois , âgé de 67 ans.
Les occupations de son Ministere ne
l'ont pas empêché de composer un grand
nombre d'Ouvrages considerables , tant
en Prose qu'en Vers. Aussi avoit- il une
facilité et une fécondité prodigieuse. Il
disoit ordinairement que le Paradis d'un
Auteur est de composer , que son Purgatoire est de relire et de retoucher ses
compositions ; mais que son Enfer est
de corriger les Epreuves de l'Imprimeur.
M. Boileau Despreaux n'a pas jugé trop
favorablement de sa Poësie , voici com
me il en parle dans sa Lettre neuviéme à
M. de Maucrois. » Je suis persuadé
>> aussi- bien que vous , que M. Godeau est
>>un Poëte fort estimable. Il me semble
pourtant qu'on peut dire de lui ce que
» Longin dit d'Hyperide , qu'il est touII. Vol. »jours
2848 MERCURE DE FRANCE
»jours à jeun , et qu'il n'a rien qui remuë
>> ni qui échauffe ; en un mot , qu'il n'a
"point cette force du stile , et cette vivacité d'expression , qu'on cherche dans
»les Ouvrages , et qui les font durer. Je
»ne sçai point s'il passera à la Posterité;
» mais il faudra pour cela qu'il réssuscite;
puisqu'on peut dire qu'il est déja mort ,
»n'étant presque plus maintenant lû de
» personne.
>>
M. de Maucroix , dans sa Réponse à
cette Lettre de Despreaux , s'exprime ain
si sur son sujet. Je tombe d'accord que
>> M. Godeau écrivoit avec beaucoup de
» facilité , disons avec trop de facilité. Il
faisoit deux ou trois Vers , comme dit
»Horace , Stans pede in uno. Ce n'est pas
ainsi que se font les bons Vers. Je m'en
rapporte volontiers à votre propre ex-
» périence. Néanmoins parmi les Vers
négligez de M. Godeau , il y en a de
»beaux qui lui échappent. Dès notre
>> jeunesse nous nous sommes apperçus
» qu'il ne varie pas assez. La plupart de
» ses Ouvrages sont comme des Logogryphes ; car il commence toujours par
»'exprimer les circonstances d'une chose,
» et puis il y joint le mor ; on ne voit
»point d'autre figure dans son Benedicité,
20
II. Vol » dans
DECEMBRE. 1732. 2849
dans son Laudate , et dans ses Canti-
» ques.
Le P. Vavasseur , Jesuite , a porté un
jugement encore plus désavantageux de
la Poësie de M. Godeau , dans l'Ouvrage
qu'il a publié contre lui , sous le nom de
Candidus Hesychius , et sous ce titre : An,
tonius Godellus Episcopus Grassensis , an
Elogii Aureliani scriptor idoneus , idemque utrum Poëta ? Constantia ( ou plutôt )
Paris , 1650. in 8. Mais cet Auteur y outre les choses , et fait voir par ce qu'il dit
contre la personne même de M. Godeau
que la passion avoit la principale part à
sa Critique.
Nous n'ajouterons point ici le Catalogue des Ouvrages de M. Godeau fort bien
raisonné et composé de LIX. Articles ,
parce que ce détail nous meneroit trop
Join..
Voici les noms des autres Sçavans dont
la Vie et les Ouvrages sont rapportez dans
ce XVIII. Tome des Mémoires,
Jean Jacques Boissard. Jean Alphonse.
Borelli, Jean Broekhuisen. Guillaume Burton. Isaac Casaubon. Meric Casaubon.
Pierre de Caseneuve. Gautier Charlton.
Louis Cousin. Janus Dousa. Janus Dousa
le fils. George Dousa. Jean de la Fontaine,
Claude François Fraguier. Leonard FuchII. Vol. sius.
2850 MERCURE DE FRANCE
sius. Jean-Baptiste Gelli. Edouart Herbert.
Maurice Hilaret. François- Michel Janicon. Fean de Labadie. Christian Longomontan. Jerôme Maggi. Henri Meibonius.
RobertMaurison. Augustin Niphus. Severin
Pineau. Bilibald Pirckheimer. Michel Poccianti, Samuel de Pufendorf. Jean Racine.
Richard Staniburst. Louis Transillo. André
Valladier. Jacques Ware.
des Hommes Illustres dans la République
des Lettres , &c. Tome XVIII. de 411.
pages , sans les Tables. A Paris , chez
Briasson , rue S. Jacques , à la Science ,
M. DCC. XXXII.
,
Les Memoires qui font la matiere de
ce XVIIIe Volume , contiennent la Vie
et le Catalogue des Ouvrages de trentecinq Auteurs , entre lesquels nous avons
choisi l'article d'Antoine Godeau , pour
suivre notre coûtume , et pour ne point
exceder, les bornes prescrites dans notre
Journal.
Antoine Godeau nâquit à Dreux , Ville
du Diocèse de Chartres , où son pere
étoit Elû , et d'une des meilleures familles du Lieu , vers l'an 1605.
Il s'adonna de bonne heure à la Poësie
Françoise , et se fit connoître avantageusement de ce côté-là. Il étoit un peu pa11. Vol.
.rent
DECEMBRE. 1732: 2843
rent de M. Conrart , et logeoit chez lui
lorsqu'il venoit à Paris. Les Poësies qu'il
y apportoit de Dreux , donnerent lieu à
M. Conrart d'assembler dans sa Maison
quelques Gens de Lettres , pour en entendre la lecture , et ces Assemblées furent
proprement l'origine de l'établissement
de l'Académie Françoise , dans laquelle
M. Godeau eut entrée des premiers.
Ses vûës tendirent d'abord vers le mariage , et il rechercha la fille du Lieutenant General de Dreux ; mais se voyant
rejetté , parce qu'il étoit petit et laid , il
quitta sa Patrie et vint s'établir à Paris.
M. Conrart l'ayant fait connoître à
M. Chapelain ; celui- cy le produisit à
l'Hôtel de Rambouillet , qui étoit alors
le Tribunal où il falloit faire preuve d'esprit et de mérite pour être admis au
rang des Illustres ; il y fut goûté , et c'étoit de lui que Mademoiselle de Ramboüillet ( Julie d'Angennes ) disoit dans
une de ses Lettres à Voiture : Il y
y a ici
un homme plus petit que vous d'une coudée.
et je vous jure , mille fois plus galint. Sa
taille et l'affection que cette Demoiselle
lui témoignoit , lui firent alors donner
le nom de Nain de Julie.
On voit par-là que si M.Godeau n'avoit
du côté du corps rien qui méritât de l'atII. Vol. tention
2814 MERCURE DE FRANCE
tention , les qualitez de son esprit et son
mérite suppléoient à ce deffaut. Quelque
temps après qu'il se fûr fixé à Paris , it
embrassa l'Etat Ecclesiastique ; et l'esprie
de pieté qui lui avoit inspiré ce dessein ,
lui inspira aussi celui de ne plus exercer
le talent et l'inclination qu'il avoit pour
la Poësie , que sur des sujets chrétiens.
Il fit en 1636. une Paraphrase du Cantique : Benedicite omnia opera Domini Domin , qui étant bien versifiée et écrite
d'un stile noble et riche , lui attira un
applaudissement general. Elle plut si fort
au Cardinal de Richelieu , à qui il l'avoit
présentée , qu'après l'avoir luë et reluë
en sa présence , il lui dit : Vous me donnez le Benedicite , et moije vous donne
Grasse. Jeu de mots , que l'occasion fit
naître ; car l'Evêché de Grasse vaquoit
alors , et le Cardinal qui connoissoit d'ail
leurs son mérite et sçavoit le bruit que
faisoient ses Prédications , fut par-là déterminé à le placer sur le champ.
Il fut nommé à cet Evêché l'an 1536.
et fut sacré à S. Magloire au mois de Décembre de la même année , par Eleonor
d'Estampes , Evêque de Chartres , et depuis Archevêque de Reims , assisté d'Etienne Pouget , Evêque de Dardanie et *
* Ce nom est defiguré , il faut dire Etienne de Puget.
DECEMBRE. 1732. 2845
depuis de Marseille , et de Bertrand Des
pruotz , Evêque de S. Papoul.
-Aussi-tôt après son Sacre , il se retira
dans son Diocèse , pour s'appliquer tout
entier aux fonctions de l'Episcopat. Il y
annonça avec zele la parole de Dieu , y
tint plusieurs Synodes , composa quantité
d'Instructions Pastorales pour son Clergé
et y rétablit la discipline Ecclesiastique.
Il réunit à l'Evêché de Grasse , par
droit de Patronage , l'Eglise d'Antibes ,
qui depuis que le Siege Episcopal en
avoit été transferé à Grasse , n'avoit été
d'aucun Diocèse , et par ce moyen il
fit revivre la discipline Ecclesiastique ,
dont il ne restoit presque plus aucun
vestige.
y
Il obtint du Pape Innocent X. des Bul.
les d'union de l'Evêché de Vence , avec
celui de Grasse , comme son Predecesseur
Guillaume le Blanc en avoit obtenu de
Clement VIII. Cette union n'étoit pas
contraire aux Canons , et paroissoit bien
fondée , parce que ces deux Evêchez ensemble n'étoient que de dix mille livres
de revenu ; qu'ils n'avoient aussi ensemblee que trente Paroisses , et que les Villes de Vence et de Grasse n'étoient éloignées l'une de l'autre que de trois licües.
Cependant voyant que le Peuple et le
II Vol. Clergé
2046 MERCURE DE FRANCE
Clergé de Vence , s'opposoient à cette
union , il aima mieux ceder son droit
que de n'être pas agréable à quelquesuns de ces Diocesains , et d'avoir à poursuivre un Procès , et se contenta de l'E
glise de Vence.
Il assista aux Assemblées generales du
Clergé , tenues en 1645. et 1656. Dans
la premiere il composa et récita , par ordre du Clergé , l'Eloge de Petrus Aurelius,
qui avoit soutenu vivement les droits des
Evêques contre quelques Réguliers. Dans
la seconde , il fut un des Prélats qui témoignerent le plus de zele et d'indignation contre les Propositions de Morale
relâchée, qui avoient été dénoncez à cette
Assemblée , et ce fut par son avis qu'elle
fit imprimer les Instructions de S. Charles Borromée , dont il avoit inseré une
partie dans ses Statuts Synodaux.
Il passa le reste de sa vie dans son Diocèse ,continuellement occupé, soit à faire
ses visites , soit à prêcher , soit à lire ou à
composer , soit à vacquer aux affaires Ecclesiastiques ou temporelles de son Diocèse.
J'ai trouvé dans un Livre peu connu ,
intitulé : Le Confiteor de l'infidele Voyageur , parfeu George Martin , Renegat ;
Extrait de ses Voyages. Lyon , 1680. in 8.
II. Vol. à
DECEMBRE. 1732 2847
à la page 244. qu'en passant à Vence ,
il vit M. Godeau , qui en étoit Evêque ,
et que Dieu l'avoit éprouvé par la perte
de la vûë , qu'il enduroit avec beaucoup
de tranquillité d'esprit ; particularité dont
je n'ai vû faire mention en aucun autre
endroit.
Il eut une attaque d'apoplexie le 17
Avril 1672. qui étoit le jour de Pâques , et il en mourut à Vence le 21 du
même mois , âgé de 67 ans.
Les occupations de son Ministere ne
l'ont pas empêché de composer un grand
nombre d'Ouvrages considerables , tant
en Prose qu'en Vers. Aussi avoit- il une
facilité et une fécondité prodigieuse. Il
disoit ordinairement que le Paradis d'un
Auteur est de composer , que son Purgatoire est de relire et de retoucher ses
compositions ; mais que son Enfer est
de corriger les Epreuves de l'Imprimeur.
M. Boileau Despreaux n'a pas jugé trop
favorablement de sa Poësie , voici com
me il en parle dans sa Lettre neuviéme à
M. de Maucrois. » Je suis persuadé
>> aussi- bien que vous , que M. Godeau est
>>un Poëte fort estimable. Il me semble
pourtant qu'on peut dire de lui ce que
» Longin dit d'Hyperide , qu'il est touII. Vol. »jours
2848 MERCURE DE FRANCE
»jours à jeun , et qu'il n'a rien qui remuë
>> ni qui échauffe ; en un mot , qu'il n'a
"point cette force du stile , et cette vivacité d'expression , qu'on cherche dans
»les Ouvrages , et qui les font durer. Je
»ne sçai point s'il passera à la Posterité;
» mais il faudra pour cela qu'il réssuscite;
puisqu'on peut dire qu'il est déja mort ,
»n'étant presque plus maintenant lû de
» personne.
>>
M. de Maucroix , dans sa Réponse à
cette Lettre de Despreaux , s'exprime ain
si sur son sujet. Je tombe d'accord que
>> M. Godeau écrivoit avec beaucoup de
» facilité , disons avec trop de facilité. Il
faisoit deux ou trois Vers , comme dit
»Horace , Stans pede in uno. Ce n'est pas
ainsi que se font les bons Vers. Je m'en
rapporte volontiers à votre propre ex-
» périence. Néanmoins parmi les Vers
négligez de M. Godeau , il y en a de
»beaux qui lui échappent. Dès notre
>> jeunesse nous nous sommes apperçus
» qu'il ne varie pas assez. La plupart de
» ses Ouvrages sont comme des Logogryphes ; car il commence toujours par
»'exprimer les circonstances d'une chose,
» et puis il y joint le mor ; on ne voit
»point d'autre figure dans son Benedicité,
20
II. Vol » dans
DECEMBRE. 1732. 2849
dans son Laudate , et dans ses Canti-
» ques.
Le P. Vavasseur , Jesuite , a porté un
jugement encore plus désavantageux de
la Poësie de M. Godeau , dans l'Ouvrage
qu'il a publié contre lui , sous le nom de
Candidus Hesychius , et sous ce titre : An,
tonius Godellus Episcopus Grassensis , an
Elogii Aureliani scriptor idoneus , idemque utrum Poëta ? Constantia ( ou plutôt )
Paris , 1650. in 8. Mais cet Auteur y outre les choses , et fait voir par ce qu'il dit
contre la personne même de M. Godeau
que la passion avoit la principale part à
sa Critique.
Nous n'ajouterons point ici le Catalogue des Ouvrages de M. Godeau fort bien
raisonné et composé de LIX. Articles ,
parce que ce détail nous meneroit trop
Join..
Voici les noms des autres Sçavans dont
la Vie et les Ouvrages sont rapportez dans
ce XVIII. Tome des Mémoires,
Jean Jacques Boissard. Jean Alphonse.
Borelli, Jean Broekhuisen. Guillaume Burton. Isaac Casaubon. Meric Casaubon.
Pierre de Caseneuve. Gautier Charlton.
Louis Cousin. Janus Dousa. Janus Dousa
le fils. George Dousa. Jean de la Fontaine,
Claude François Fraguier. Leonard FuchII. Vol. sius.
2850 MERCURE DE FRANCE
sius. Jean-Baptiste Gelli. Edouart Herbert.
Maurice Hilaret. François- Michel Janicon. Fean de Labadie. Christian Longomontan. Jerôme Maggi. Henri Meibonius.
RobertMaurison. Augustin Niphus. Severin
Pineau. Bilibald Pirckheimer. Michel Poccianti, Samuel de Pufendorf. Jean Racine.
Richard Staniburst. Louis Transillo. André
Valladier. Jacques Ware.
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Résumé : Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, [titre d'après la table]
Le texte présente les mémoires sur des hommes illustres dans la République des Lettres, en particulier le XVIIIe volume, qui retrace la vie et les œuvres de trente-cinq auteurs. L'article choisi est celui d'Antoine Godeau, né vers 1605 à Dreux, dans le diocèse de Chartres. Godeau s'est distingué par ses talents en poésie française et a été introduit dans les cercles littéraires par M. Conrart, contribuant ainsi à la fondation de l'Académie Française. Rejeté pour un mariage en raison de son apparence, Godeau s'est établi à Paris où il a été présenté à l'Hôtel de Rambouillet. Malgré sa petite taille, il a gagné l'estime de Mademoiselle de Rambouillet. Il a ensuite embrassé la vie ecclésiastique et s'est consacré à la poésie chrétienne. En 1636, il a écrit une paraphrase du Cantique 'Benedicite omnia opera Domini Dominus', qui a été bien accueillie par le Cardinal de Richelieu, lui valant l'évêché de Grasse. Godeau a exercé ses fonctions épiscopales avec zèle, rétablissant la discipline ecclésiastique et unifiant les diocèses de Grasse et d'Antibes. Il a également participé aux assemblées du clergé et a composé de nombreux ouvrages en prose et en vers. Sa poésie a été critiquée par des contemporains comme Boileau et M. de Maucroix, qui ont jugé son style trop facile et manquant de force. Godeau est décédé le 21 avril 1672 à Vence, à l'âge de 67 ans, après avoir souffert d'une attaque d'apoplexie. Le texte mentionne également d'autres savants dont les vies et œuvres sont rapportées dans ce volume.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
13
p. 532-544
Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, &c. [titre d'après la table]
Début :
MEMOIRES pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République [...]
Mots clefs :
Elena Cornaro Piscopia, Grecque, Valbonnais, Padoue, Catalogue, Épitaphe, Rigord, Docteur, Journal, République
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, &c. [titre d'après la table]
MEMOIRES pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres dans la République
des Lettres , & c. Tome XIX . de 408.
pages . A Paris , chez Briasson , à la
Science , M. DCC . XXXII.
Dans ce nouveau Volume des Memoires
du R. P. Niceron , executé sur le
même plan de ceux qui ont precedé , on
trouve un abregé de la vie de XXIX.
Sçavans en divers genres d'érudition ,
avec un Catalogue raisonné de leurs Ouvrages
, ce qui fait la matiere d'une lecture
également agréable et instructive ;
on en pourra juger par le nom et le
mérite de ces Sçavans , qui sont ainsi rangez
dans la Table qui suit le Frontispice
' du Livre .
Ambroise Camaldule , Marc Battaglini ,
Olans
MARS. 1733.
$33
Olaus Borrichius , fean de la Bruyere , Joachim
Camerarius, Herman Conringius, Jean
de Cordes , Helene Lucrece Cornara Piscopia
, Quinto Mario Corrado , Sébastien
Corrado , Pierre Danés , Antoine Faure
Claude Faure de Vaugelas , foachim Frideric
Feller , Nicodême Frischlin , Jacques
Goar, Hugues Grotius , Pierre Guilleband
Chrétien Huygens , Thomas James , Engelbert
Kaemfer , Martin Lippenius , Hippolyte
Jule Pilet de la Menardiere , François
de la Mothe le Vayer , Bernardin Ochin ,
Jean- Isaac Pontamus , Jean- Pierre de Valbonnais
, Degorée Whear , Guillaume Xi ,
lander.
Le plus ancien de tous ces Sçavans est
Ambroise Camaldule , qui étant né en
1378. mourut en l'année 1439. C'est aussi
l'un des plus recommandables par sa pieté
et par son Erudition.L'Article qui le concerne
est fort bien rempli , ct le Catalogue
de ses Ouvrages travaillé avec soin .
L'Article de Bernardin Ochin , mort
en 1564. est curieux dans son genre. Ce
Personnage est une espece de Problême,
parmi les Sçavans ; on peut en dire du
bien et du mal sans s'écarter de la verité.
Notre Editeur n'a rien oublié pour débrouiller
tout ce qui regarde Ochin , en
quoi on peut dire qu'il a réussi beaucoup
Fii mieux
634 MERCURE DE FRANCE
mieux que les Critiques qui l'ont precedé
, sans en excepter M. Bayle , qui dans
son Dictionnaire s'est fort égayé sur
son Chapitre. Au reste , loin qu'Ochin ait
été l'Instituteur des Capucins , selon l'erreur
de plusieurs Ecrivains , on soutient
ici qu'il n'entra chez eux qu'en l'année
1534. dans le temps que cette Réforme
de l'Ordre de S. François commençoit
à faire du bruit. On avertit en mêmetemps
que pour être bien et sûrement
instruit au sujet de cet Auteur , il ne
faut point se fier tout- à - fait à l'Ecrivain
des Annales des Capucins.
Parmi les plus modernes d'entre les
Sçavans , dont il est fait mention dans
ce Volume , il n'en est point dont l'Article
fasse plus de plaisir à lire que celui
de Jean Pierre Moret de Bourchenu , Marquis
de Valbonnais , né à Grenoble en
1651. et mort le 2. Mars 1730. Premier
Président de la Chambre des Comp-"
tes de Dauphiné. Il a tenu un rang considerable
dans la République des Lettres
et il l'a enrichie de plusieurs Ouvrages ,
dont le Catalogue paroît ici avec une
Critique exacte de la part de l'Editeur.
L'Article VIII . de ce Catalogue indique
une Lettre de notre sçavant Magistrat
sur une Epitaphe Grecque, inserée dans
les
MARS. 1733.
535
les Memoires de Trévoux, Décembre 1715.
page 2246. Cette Epitaphe , pour le dire
en passant et par occasion , est celle d'une
Dame Grecque , trouvée à Marseille il
y a déja bien des années , sur une petite
Colomne de Marbre blanc , que M. Rigord
, Subdelegué de l'Intendant de Provence
en cette Ville , fit enlever et placer
à l'entrée de son Cabinet. Il en envoya
peu de temps après une copie à
Paris à un de ses Amis , pour la communiquer
aux Antiquaires .
Cet Ami l'ayant examinée , il en envoya
une Explication à M. Rigord dans
ane Lettre qui fut imprimée dans le Journal
de Trévoux du mois d'Octobre 1714.
à laquelle les Auteurs du Journal donnerent
en même- temps une autre Expli
cation .
M. Rigord , de son côté , ayant trouvé
quelque difficulté dans ces deux Explications
, en proposa une autre dans une
Dissertation adressée à M.le PrésidentBon,
qui fut rendue publique dans le même
Journal , Juillet 1715 .
Ces differentes Explications réveillerent
l'attention de M. de Valbonnais , qui dans
une Lettre aussi adressée au Président
Bon , et imprimée dans le mois de Décembre
1716. du même Journal , prit le
Fiiij ton
536 MERCURE DE FRANCE
ton de Maître , et censurant tout ce qui
avoit parû sur ce sujet , donna sa propre
Explication de l'Epitaphe Grecque ,
Explication qui , pour ne rien dissimuler
, ne fut pas heureuse .
Car l'Auteur de la premiere Interpretation
dont le sens avoit paru le plus
naturel à M. Rigord , à M. Galland et
à d'autres Antiquaires distinguez , démontra
par une Lettre imprimée dans le
Mercure du mois d'Août 1721. que celle
de M. de Valbonnais étoit insoutenable,
en ce que , pour l'admettre , il falloit admettre
aussi un Paradoxe capable de ré
volter tous les Antiquaires , sçavoir que
du temps de Marseille Payenne , temps
de la composition de l'Epitaphe , la Langue
Grecque étoit éttangere dans cette
Ville , et qu'un Grec n'entendoit rien
dans la Langue qu'on y parloit ; à Marseille
Colonie Grecque , où l'on a trouvé
tant de Monumens Grecs , et où encore
aujourd'hui on reconnoît des traces
de son origine dans la Langue vulgaire
qu'on y parle , &c.
Il faut rendre ici justice à M. de Valbonnais
, qui ayant vécu encore près de
dix ans depuis la publication de cette Lettre
dans le Mercure , n'a pas jugé à propos
d'y répondre , plus amateur de la
verité
MARS. 1733 .
537
verité , qu'il avoit sans doute reconnue
la reflexion , qu'attaché à ses propres
sentimens.
par
Pour ne pas déroger à notre coûtume
, sans exceder les bornes qui nous sont
prescrites , nous employerons ici l'Article
entier qui précede celui de M. de Valbonnais
et qui regarde l'Illustre Lucrece Cornara,
prasuadez que tous nos Lecteurs , et
surtout les Dames , nous en sçaurons gré.
HELENE Lucrece Cornara Piscopia,
naquit à Venise le 5. Juin 1646. de Jean-
Baptiste Cornaro , Procurateur de Saint
Marc. Dès sa plus tendre Enfance elle
donna des marques de ce qu'elle devien
droit un jour. Jean - Baptiste Fabris , homme
docte , et ami de son pere , ayant remarqué
en elle des dispositions heureuses
pour les Sciences , l'engagea à s'y appliquer.
A peine avoit elle sept ans -
qu'on lui donna des Maîtres pour lui apprendre
la Langue Latine. Ce furent Jean
Valesio , Chanoine de S. Marc , et le Docteur
Bartolotti . Les progrès qu'elle fit
bien-tôt en cette Langue par leurs instructions
, déterminerent son Pere à lui
faire apprendre aussi la Langue Grecque.
Fabris lui en donna les premieres leçons;
mais étant mort peu de temps après , Loüis
Gradenigo , Préfet de la Bibliotheque pu-
Fy blique
$ 38 MERCURE DE FRANCE
blique de Venise , prit sa place et continua
ce qu'il avoit commencé.
La june Cornara apprit ces Langues
avec beaucoup de facilité, et passa ensuite
à l'Hébraïque , à la Grecque vulgaire , à
l'Espagnole et à la Françoise , dans lesquelles
elle ne fit pas de moindres progrès
, elle voulut aussi sçavoir quelque
chose de l'Arabe.
Lorsqu'elle fut suffisamment instruite
de ce côté là , on l'appliqua à la Philosophie
et aux Mathématiques , dans lesquelles
elle eut pour Maître Charles Ri
naldini , qui les professoit à Padoue , et
ensuite à la Théologie , dont Hipolite
Marcheti , Prêtre de l'Oratoire , lui donna
des leçons.
Cette science lui plut particulierement
et elle s'y rendit si habile , que l'on consulta
les plus habiles gens de la France
et de l'Italie , pour sçavoir si l'on pouvoit
lui donner les degrez du Doctorat
en Théologie ; quelques Italiens composerent
même des Dissertations pour prouver
que cela se pouvoit , et que ce n'étoit
pas une chose opposée au précepte de l'Apôtre,
qui deffend aux femmes de parler
dans l'Eglise Charles Rinaldini son
Maître de Philosophie , fut de ce nombre.
Mais quelques obstacles qui se rencontrerent
MARS. 1733. 539
trerent dans cette affaire , obligerent le
Pere de la jeune Cornara , qui souhaitoit
avec passion de voir sa fille honorée
d'un titre singulier , à renoncer à son
premier dessein et à se tourner du côté
de la Philosophie , où il esperoit trouver
moins d'oppositions.
Il songea donc alors à la faire recevoir
Docteur en Philosophie dans l'Université
de Padoüe ; l'exemple étoit nouveau.
On n'avoit point encore vû de
Fille élevée au Doctorat. On sçavoit bien
que sainte Gertrude parloit souvent des
Mysteres de la Religion dans des Assemblées
nombreuses , et que sainte Catherine
de Sienne avoit harangué un jour
le Pape en présence des Cardinaux ; mais
ces actions particulieres étoicnt quelque
chose de moins considerable que de donner
en forme le Bonnet de Docteur à
une Fille . Quelques inconveniens qu'il y
cût à craindre de celle - cy, on crut devoir
passer par- dessus. On marquà le jour pour
la leçon d'épreuve de Lucrece Cornara ,
qui aussi humble que sçavante , eut d'abord
de la peine à accepter l'honneur que
l'on vouloit lui faire , et ne se rendit
que par obéîssance pour la volonté de
son Pere.
Ce jour qui étoit le 25. Juin 1678 .
Fvj étant
$40 MERCURE DE FRANCE
étant venu , on s'assembla , non point
dans les Ecoles publiques , suivant la coûtume
mais dans une Chip lle de la Cathédrale
, dédiée à la Vierge , que l'on
crut plus propre à contenir l'affluence
du Monde que la nouveauté du Spectacle
sembloit devoir y attirer. Cornara
y fit un Discours très-sc vant et trèséloquent
sur un Texte d'Aristote , qui
mérita les applaudissemens de toute l'Assemblée
et reçut ensuite le Bonnet de
Docteur , avec toutes les ceremonies usitées
en cette occasion .
Cette action attira sur elle les
yeux de toute l'Europe , et depuis ce
temps là elle fut visitée par tous les Curieux
qui voyagerent en Italie.
Elle avoit déja été auparavant aggrégée
à plusieurs Académies comme à celles
des Infecondi de Rome , des Intronati
de Sienne , & c .
Plusieurs personnes de mérite la rechercherent
en mariage , mais elle avoit
fait voeu de virginité dès l'âge d'onze ans,
et elle persista toute sa vie , dans le dessein
de l'observer quoique ses paren en
eussent obtenu la dispense de Rome
pour l'engager à se marier Elle vouloit
même se retirer entierement du Monde ;
mais la répugnance que sa famille témoigna
MARS .
540 1733
permoigna
pour cette résolution , ne lui
mit pas de l'exécuter; elle se contenta donc
de faire des voeux simples de Religion , en
qualité d'Oblate, de l'Ordre de S Benoît ,
entre les mains de Corneille Codanini
Abbé de S. George , et de recevoir de lui
l'habit des Religieuses de cet Ordre , qu'el
le porta toujours depuis , sous ses habits,
séculiers.
Son attachement extraordinaire à l'étu
de , et particulierement à celle des Langues
Grecque et Hébraïque , affoiblir si
fort sa complexion , qui étoit déja foible
d'elle - même, qu'elle tomba dans une langueur
et dans differentes infirmitez , qui
la conduisirent peu à peu au tombeau.
Elle mourut le 25 Juillet 1604. dans la
38 année de son âge , et fut enterrée à
Sainte Justine de Padoue , avec cette Epitaphe.
D. O. M.
HELENA Lucretia Cornelia Piscopia
, Joan. Bapti te D Marci Procuratoris
Filia , que moribus et Doctrina supra sexum
, et Laurea ad memoriam Posteritatis.
insignis , privatis votis coram Cornelio Codanino
Abbate S. Georgii Majoris emissis,
S. Benedicti Institutum ab ineunte alate
complexa , et religiosè prosecuta , in Monachorum
$42 MERCURE DE FRANCE
chorum Conditorium ut vivens optaverat ,
post acerba fata , admissa est Monachis H.
M. PP. Anno D. 1684.
Les Académies dont elle étoit , s'empresserent
à lui faire des Pompes Funebres
, et l'on a sur ce sujet l'Ouvrage suivant
: Le Pompe Funebri celebrate da Signori
Academici Infecondi in Roma per la
morte dell' Illust. Sign. Elena Lucretia Cornara
Piscopia , Accademica detta linalterabile.
In Padoua 1685. infol.
Catalogue de ses Ouvrages.
1º . Lettera o vero colloquio di Christo nostro
Redentore all' Anima devota composta
dal R.P. D. Giovanni Lanspergio Cartusiano
in Lingua Latina Transportata poscia
in idioma Spagnuolo dal P. F. Andrea Capiglia
, Monaco della Certosa , Prior del
Paular: Or vien tradotte di Spagnulo in
Italiano dall' Ill. Sign . Elena Lucretia Cornara
Piscopia , In Venezia , 1673. in 24.
Cette traduction a été réimprimée dans le
Recueil suivant .
2º . Helena Lucretia ( que et Scholastica)
Cornelia Piscopia l'irginis pietate et eruditione
admirabilis Ordinis D. Benedicti privatis
votis adscripta Opera que quidem haberi
potuerunt. Parma 1688. in 8. pag. 310
Cette
MARS. 1733.
548
Cette Edition des Ouvrages de Cornara
donnée par Benoit Bacchini , qui a mis
la tête une vie fort ample de cette Sças
vante , est divisée en trois Parties ; la
premiere contient un Panégyrique Italien
de la République de Venise , tout
rempli de Fleurs et de Saillies Italiennes ,
et l'Explication de deux Problêmes de
Politique , aussi en Italien . On voit dans
la seconde , des Eloges Latins , en Stile
Lapidaire , de l'Empereur , du Roy de
Pologne , du Pape Innocent XI . &c. Enfin
la troisiéme renferme quelques Lettres
Latines et Italiennes de notre Sçavante
, ou qui lui ont été écrites , avec
la Traduction dont il est parlé cydessus.
C'est à cela que se termine tout le
contenu de ce Recueil . Le nom de Scholastique
, qu'elle porte dans le titre , lui
avoit été donné par l'Abbé Codadini, lorsqu'elle
fit ses voeux entre ses mains .
Voyez sa Vie par Benoît Bicchini , à la
tête de ses Oeuvres , et dans un Recueil
intitulé , Vita Selecta Vratislavia , 1711.
in 8. Sa Vie écrite en Italien pir Maximilien
Deza , et imprimée en 1617 Les
Pompes, funebres des Infecondi de Rome.
Gregorio Leti Italia Regnante; T. 4. p. 44 .
Nous ajoûterons , avec la permission
du
344 MERCURE DE FRANCE
du R. P. Niceron , que cette celebre Fille
étant aussi aggregée à l'Académie des Ricovrati
de Padoüe , on fit son Eloge dans
cette Académie , dans une Assemblée publique
à laquelle présida un illustre Acadé
micien François; sçavoir Charles Patin ,fils
du fameux Guy , Professeur en Medecine
dans l'Université de Padoüe et Chevalier
de S. Marc .
des Hommes Illustres dans la République
des Lettres , & c. Tome XIX . de 408.
pages . A Paris , chez Briasson , à la
Science , M. DCC . XXXII.
Dans ce nouveau Volume des Memoires
du R. P. Niceron , executé sur le
même plan de ceux qui ont precedé , on
trouve un abregé de la vie de XXIX.
Sçavans en divers genres d'érudition ,
avec un Catalogue raisonné de leurs Ouvrages
, ce qui fait la matiere d'une lecture
également agréable et instructive ;
on en pourra juger par le nom et le
mérite de ces Sçavans , qui sont ainsi rangez
dans la Table qui suit le Frontispice
' du Livre .
Ambroise Camaldule , Marc Battaglini ,
Olans
MARS. 1733.
$33
Olaus Borrichius , fean de la Bruyere , Joachim
Camerarius, Herman Conringius, Jean
de Cordes , Helene Lucrece Cornara Piscopia
, Quinto Mario Corrado , Sébastien
Corrado , Pierre Danés , Antoine Faure
Claude Faure de Vaugelas , foachim Frideric
Feller , Nicodême Frischlin , Jacques
Goar, Hugues Grotius , Pierre Guilleband
Chrétien Huygens , Thomas James , Engelbert
Kaemfer , Martin Lippenius , Hippolyte
Jule Pilet de la Menardiere , François
de la Mothe le Vayer , Bernardin Ochin ,
Jean- Isaac Pontamus , Jean- Pierre de Valbonnais
, Degorée Whear , Guillaume Xi ,
lander.
Le plus ancien de tous ces Sçavans est
Ambroise Camaldule , qui étant né en
1378. mourut en l'année 1439. C'est aussi
l'un des plus recommandables par sa pieté
et par son Erudition.L'Article qui le concerne
est fort bien rempli , ct le Catalogue
de ses Ouvrages travaillé avec soin .
L'Article de Bernardin Ochin , mort
en 1564. est curieux dans son genre. Ce
Personnage est une espece de Problême,
parmi les Sçavans ; on peut en dire du
bien et du mal sans s'écarter de la verité.
Notre Editeur n'a rien oublié pour débrouiller
tout ce qui regarde Ochin , en
quoi on peut dire qu'il a réussi beaucoup
Fii mieux
634 MERCURE DE FRANCE
mieux que les Critiques qui l'ont precedé
, sans en excepter M. Bayle , qui dans
son Dictionnaire s'est fort égayé sur
son Chapitre. Au reste , loin qu'Ochin ait
été l'Instituteur des Capucins , selon l'erreur
de plusieurs Ecrivains , on soutient
ici qu'il n'entra chez eux qu'en l'année
1534. dans le temps que cette Réforme
de l'Ordre de S. François commençoit
à faire du bruit. On avertit en mêmetemps
que pour être bien et sûrement
instruit au sujet de cet Auteur , il ne
faut point se fier tout- à - fait à l'Ecrivain
des Annales des Capucins.
Parmi les plus modernes d'entre les
Sçavans , dont il est fait mention dans
ce Volume , il n'en est point dont l'Article
fasse plus de plaisir à lire que celui
de Jean Pierre Moret de Bourchenu , Marquis
de Valbonnais , né à Grenoble en
1651. et mort le 2. Mars 1730. Premier
Président de la Chambre des Comp-"
tes de Dauphiné. Il a tenu un rang considerable
dans la République des Lettres
et il l'a enrichie de plusieurs Ouvrages ,
dont le Catalogue paroît ici avec une
Critique exacte de la part de l'Editeur.
L'Article VIII . de ce Catalogue indique
une Lettre de notre sçavant Magistrat
sur une Epitaphe Grecque, inserée dans
les
MARS. 1733.
535
les Memoires de Trévoux, Décembre 1715.
page 2246. Cette Epitaphe , pour le dire
en passant et par occasion , est celle d'une
Dame Grecque , trouvée à Marseille il
y a déja bien des années , sur une petite
Colomne de Marbre blanc , que M. Rigord
, Subdelegué de l'Intendant de Provence
en cette Ville , fit enlever et placer
à l'entrée de son Cabinet. Il en envoya
peu de temps après une copie à
Paris à un de ses Amis , pour la communiquer
aux Antiquaires .
Cet Ami l'ayant examinée , il en envoya
une Explication à M. Rigord dans
ane Lettre qui fut imprimée dans le Journal
de Trévoux du mois d'Octobre 1714.
à laquelle les Auteurs du Journal donnerent
en même- temps une autre Expli
cation .
M. Rigord , de son côté , ayant trouvé
quelque difficulté dans ces deux Explications
, en proposa une autre dans une
Dissertation adressée à M.le PrésidentBon,
qui fut rendue publique dans le même
Journal , Juillet 1715 .
Ces differentes Explications réveillerent
l'attention de M. de Valbonnais , qui dans
une Lettre aussi adressée au Président
Bon , et imprimée dans le mois de Décembre
1716. du même Journal , prit le
Fiiij ton
536 MERCURE DE FRANCE
ton de Maître , et censurant tout ce qui
avoit parû sur ce sujet , donna sa propre
Explication de l'Epitaphe Grecque ,
Explication qui , pour ne rien dissimuler
, ne fut pas heureuse .
Car l'Auteur de la premiere Interpretation
dont le sens avoit paru le plus
naturel à M. Rigord , à M. Galland et
à d'autres Antiquaires distinguez , démontra
par une Lettre imprimée dans le
Mercure du mois d'Août 1721. que celle
de M. de Valbonnais étoit insoutenable,
en ce que , pour l'admettre , il falloit admettre
aussi un Paradoxe capable de ré
volter tous les Antiquaires , sçavoir que
du temps de Marseille Payenne , temps
de la composition de l'Epitaphe , la Langue
Grecque étoit éttangere dans cette
Ville , et qu'un Grec n'entendoit rien
dans la Langue qu'on y parloit ; à Marseille
Colonie Grecque , où l'on a trouvé
tant de Monumens Grecs , et où encore
aujourd'hui on reconnoît des traces
de son origine dans la Langue vulgaire
qu'on y parle , &c.
Il faut rendre ici justice à M. de Valbonnais
, qui ayant vécu encore près de
dix ans depuis la publication de cette Lettre
dans le Mercure , n'a pas jugé à propos
d'y répondre , plus amateur de la
verité
MARS. 1733 .
537
verité , qu'il avoit sans doute reconnue
la reflexion , qu'attaché à ses propres
sentimens.
par
Pour ne pas déroger à notre coûtume
, sans exceder les bornes qui nous sont
prescrites , nous employerons ici l'Article
entier qui précede celui de M. de Valbonnais
et qui regarde l'Illustre Lucrece Cornara,
prasuadez que tous nos Lecteurs , et
surtout les Dames , nous en sçaurons gré.
HELENE Lucrece Cornara Piscopia,
naquit à Venise le 5. Juin 1646. de Jean-
Baptiste Cornaro , Procurateur de Saint
Marc. Dès sa plus tendre Enfance elle
donna des marques de ce qu'elle devien
droit un jour. Jean - Baptiste Fabris , homme
docte , et ami de son pere , ayant remarqué
en elle des dispositions heureuses
pour les Sciences , l'engagea à s'y appliquer.
A peine avoit elle sept ans -
qu'on lui donna des Maîtres pour lui apprendre
la Langue Latine. Ce furent Jean
Valesio , Chanoine de S. Marc , et le Docteur
Bartolotti . Les progrès qu'elle fit
bien-tôt en cette Langue par leurs instructions
, déterminerent son Pere à lui
faire apprendre aussi la Langue Grecque.
Fabris lui en donna les premieres leçons;
mais étant mort peu de temps après , Loüis
Gradenigo , Préfet de la Bibliotheque pu-
Fy blique
$ 38 MERCURE DE FRANCE
blique de Venise , prit sa place et continua
ce qu'il avoit commencé.
La june Cornara apprit ces Langues
avec beaucoup de facilité, et passa ensuite
à l'Hébraïque , à la Grecque vulgaire , à
l'Espagnole et à la Françoise , dans lesquelles
elle ne fit pas de moindres progrès
, elle voulut aussi sçavoir quelque
chose de l'Arabe.
Lorsqu'elle fut suffisamment instruite
de ce côté là , on l'appliqua à la Philosophie
et aux Mathématiques , dans lesquelles
elle eut pour Maître Charles Ri
naldini , qui les professoit à Padoue , et
ensuite à la Théologie , dont Hipolite
Marcheti , Prêtre de l'Oratoire , lui donna
des leçons.
Cette science lui plut particulierement
et elle s'y rendit si habile , que l'on consulta
les plus habiles gens de la France
et de l'Italie , pour sçavoir si l'on pouvoit
lui donner les degrez du Doctorat
en Théologie ; quelques Italiens composerent
même des Dissertations pour prouver
que cela se pouvoit , et que ce n'étoit
pas une chose opposée au précepte de l'Apôtre,
qui deffend aux femmes de parler
dans l'Eglise Charles Rinaldini son
Maître de Philosophie , fut de ce nombre.
Mais quelques obstacles qui se rencontrerent
MARS. 1733. 539
trerent dans cette affaire , obligerent le
Pere de la jeune Cornara , qui souhaitoit
avec passion de voir sa fille honorée
d'un titre singulier , à renoncer à son
premier dessein et à se tourner du côté
de la Philosophie , où il esperoit trouver
moins d'oppositions.
Il songea donc alors à la faire recevoir
Docteur en Philosophie dans l'Université
de Padoüe ; l'exemple étoit nouveau.
On n'avoit point encore vû de
Fille élevée au Doctorat. On sçavoit bien
que sainte Gertrude parloit souvent des
Mysteres de la Religion dans des Assemblées
nombreuses , et que sainte Catherine
de Sienne avoit harangué un jour
le Pape en présence des Cardinaux ; mais
ces actions particulieres étoicnt quelque
chose de moins considerable que de donner
en forme le Bonnet de Docteur à
une Fille . Quelques inconveniens qu'il y
cût à craindre de celle - cy, on crut devoir
passer par- dessus. On marquà le jour pour
la leçon d'épreuve de Lucrece Cornara ,
qui aussi humble que sçavante , eut d'abord
de la peine à accepter l'honneur que
l'on vouloit lui faire , et ne se rendit
que par obéîssance pour la volonté de
son Pere.
Ce jour qui étoit le 25. Juin 1678 .
Fvj étant
$40 MERCURE DE FRANCE
étant venu , on s'assembla , non point
dans les Ecoles publiques , suivant la coûtume
mais dans une Chip lle de la Cathédrale
, dédiée à la Vierge , que l'on
crut plus propre à contenir l'affluence
du Monde que la nouveauté du Spectacle
sembloit devoir y attirer. Cornara
y fit un Discours très-sc vant et trèséloquent
sur un Texte d'Aristote , qui
mérita les applaudissemens de toute l'Assemblée
et reçut ensuite le Bonnet de
Docteur , avec toutes les ceremonies usitées
en cette occasion .
Cette action attira sur elle les
yeux de toute l'Europe , et depuis ce
temps là elle fut visitée par tous les Curieux
qui voyagerent en Italie.
Elle avoit déja été auparavant aggrégée
à plusieurs Académies comme à celles
des Infecondi de Rome , des Intronati
de Sienne , & c .
Plusieurs personnes de mérite la rechercherent
en mariage , mais elle avoit
fait voeu de virginité dès l'âge d'onze ans,
et elle persista toute sa vie , dans le dessein
de l'observer quoique ses paren en
eussent obtenu la dispense de Rome
pour l'engager à se marier Elle vouloit
même se retirer entierement du Monde ;
mais la répugnance que sa famille témoigna
MARS .
540 1733
permoigna
pour cette résolution , ne lui
mit pas de l'exécuter; elle se contenta donc
de faire des voeux simples de Religion , en
qualité d'Oblate, de l'Ordre de S Benoît ,
entre les mains de Corneille Codanini
Abbé de S. George , et de recevoir de lui
l'habit des Religieuses de cet Ordre , qu'el
le porta toujours depuis , sous ses habits,
séculiers.
Son attachement extraordinaire à l'étu
de , et particulierement à celle des Langues
Grecque et Hébraïque , affoiblir si
fort sa complexion , qui étoit déja foible
d'elle - même, qu'elle tomba dans une langueur
et dans differentes infirmitez , qui
la conduisirent peu à peu au tombeau.
Elle mourut le 25 Juillet 1604. dans la
38 année de son âge , et fut enterrée à
Sainte Justine de Padoue , avec cette Epitaphe.
D. O. M.
HELENA Lucretia Cornelia Piscopia
, Joan. Bapti te D Marci Procuratoris
Filia , que moribus et Doctrina supra sexum
, et Laurea ad memoriam Posteritatis.
insignis , privatis votis coram Cornelio Codanino
Abbate S. Georgii Majoris emissis,
S. Benedicti Institutum ab ineunte alate
complexa , et religiosè prosecuta , in Monachorum
$42 MERCURE DE FRANCE
chorum Conditorium ut vivens optaverat ,
post acerba fata , admissa est Monachis H.
M. PP. Anno D. 1684.
Les Académies dont elle étoit , s'empresserent
à lui faire des Pompes Funebres
, et l'on a sur ce sujet l'Ouvrage suivant
: Le Pompe Funebri celebrate da Signori
Academici Infecondi in Roma per la
morte dell' Illust. Sign. Elena Lucretia Cornara
Piscopia , Accademica detta linalterabile.
In Padoua 1685. infol.
Catalogue de ses Ouvrages.
1º . Lettera o vero colloquio di Christo nostro
Redentore all' Anima devota composta
dal R.P. D. Giovanni Lanspergio Cartusiano
in Lingua Latina Transportata poscia
in idioma Spagnuolo dal P. F. Andrea Capiglia
, Monaco della Certosa , Prior del
Paular: Or vien tradotte di Spagnulo in
Italiano dall' Ill. Sign . Elena Lucretia Cornara
Piscopia , In Venezia , 1673. in 24.
Cette traduction a été réimprimée dans le
Recueil suivant .
2º . Helena Lucretia ( que et Scholastica)
Cornelia Piscopia l'irginis pietate et eruditione
admirabilis Ordinis D. Benedicti privatis
votis adscripta Opera que quidem haberi
potuerunt. Parma 1688. in 8. pag. 310
Cette
MARS. 1733.
548
Cette Edition des Ouvrages de Cornara
donnée par Benoit Bacchini , qui a mis
la tête une vie fort ample de cette Sças
vante , est divisée en trois Parties ; la
premiere contient un Panégyrique Italien
de la République de Venise , tout
rempli de Fleurs et de Saillies Italiennes ,
et l'Explication de deux Problêmes de
Politique , aussi en Italien . On voit dans
la seconde , des Eloges Latins , en Stile
Lapidaire , de l'Empereur , du Roy de
Pologne , du Pape Innocent XI . &c. Enfin
la troisiéme renferme quelques Lettres
Latines et Italiennes de notre Sçavante
, ou qui lui ont été écrites , avec
la Traduction dont il est parlé cydessus.
C'est à cela que se termine tout le
contenu de ce Recueil . Le nom de Scholastique
, qu'elle porte dans le titre , lui
avoit été donné par l'Abbé Codadini, lorsqu'elle
fit ses voeux entre ses mains .
Voyez sa Vie par Benoît Bicchini , à la
tête de ses Oeuvres , et dans un Recueil
intitulé , Vita Selecta Vratislavia , 1711.
in 8. Sa Vie écrite en Italien pir Maximilien
Deza , et imprimée en 1617 Les
Pompes, funebres des Infecondi de Rome.
Gregorio Leti Italia Regnante; T. 4. p. 44 .
Nous ajoûterons , avec la permission
du
344 MERCURE DE FRANCE
du R. P. Niceron , que cette celebre Fille
étant aussi aggregée à l'Académie des Ricovrati
de Padoüe , on fit son Eloge dans
cette Académie , dans une Assemblée publique
à laquelle présida un illustre Acadé
micien François; sçavoir Charles Patin ,fils
du fameux Guy , Professeur en Medecine
dans l'Université de Padoüe et Chevalier
de S. Marc .
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Résumé : Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, &c. [titre d'après la table]
Le Tome XIX des 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres' du R. P. Niceron, publié en 1732 à Paris, présente des résumés biographiques de 29 savants de divers domaines, accompagnés d'un catalogue raisonné de leurs œuvres. Parmi les savants mentionnés figurent Ambroise Camaldule, Bernardin Ochin, et Jean-Pierre de Valbonnais. Ambroise Camaldule, né en 1378 et mort en 1439, est particulièrement recommandé pour sa piété et son érudition. L'article sur Bernardin Ochin, mort en 1564, est noté pour sa complexité et les divergences d'opinions qu'il suscite. Jean-Pierre de Valbonnais, né en 1651 et mort en 1730, est souligné pour ses contributions significatives à la République des Lettres. Le texte mentionne également une controverse académique concernant une épitaphe grecque trouvée à Marseille, à laquelle Valbonnais a participé. Le texte inclut également une biographie détaillée de Hélène Lucrece Cornara Piscopia, née en 1646 à Venise, qui a reçu un doctorat en philosophie à l'Université de Padoue en 1678. Elle était polyglotte et a traduit plusieurs œuvres. Cornara est décédée en 1684 et a été honorée par diverses académies. Par ailleurs, le texte traite de la vie et des œuvres d'une femme nommée Scholastique. Le nom de Scholastique lui a été donné par l'Abbé Codadini lors de ses vœux. Plusieurs sources documentent sa vie, notamment une biographie par Benoît Bicchini, publiée dans un recueil intitulé 'Vita Selecta Vratislavia' en 1711. Une autre biographie en italien a été écrite par Maximilien Deza et imprimée en 1617. Les pompes funèbres des Infecondi de Rome, décrites par Gregorio Leti dans 'Italia Regnante', volume 4, page 44, mentionnent également Scholastique. Le texte mentionne aussi que Scholastique était membre de l'Académie des Ricovrati de Padoue. Un éloge en son honneur a été prononcé lors d'une assemblée publique présidée par Charles Patin, fils du célèbre Guy Patin, professeur de médecine à l'Université de Padoue et chevalier de Saint-Marc.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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14
p. 2011-2021
MEMOIRE pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République des Lettres, &c. Tom. 20 et 21. A Paris, chez Briasson, ruë S. Jacques, à la Science. 1732.
Début :
Le premier de ces deux volumes contient les changemens, les corrections et [...]
Mots clefs :
Pontus de Tyard, Paris, Lyon, France, Jean de Tournes, Ouvrage, Volumes, Savants, Écrit, Traité, Français, Mamert Patisson
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MEMOIRE pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République des Lettres, &c. Tom. 20 et 21. A Paris, chez Briasson, ruë S. Jacques, à la Science. 1732.
MEMOIRE pour servir à l'Histoire des Hommes
Illustres, dans la République des Let
tres, & c. Tom. 20 et 21. A Paris , chez.
Briasson , rue S. Jacques , à la Science..
173.2.
Le premier de ces deux volumes contient
les changemens , les corrections et
les additions que l'Auteur a trouvées à
propos de faire pour les Tomes 11. 11 .
13. 14. 15. 16. 17. et 18. précedens . Ony
remarque par tout son exactitude et
son amour pour la verité ; et qu'il ne
tient pas à ses soins infatigables , que
nous n'ayons en ce genre un Ouvrage
parfait. Ce vingtiéme tome contient aussi
trois Tables qui sont d'une grande utilité
dans un pareil Recueil ; sçavoir , une
Table Générale des Matiéres qni ont été
traitées par les Auteurs dont il est parlé
dans les neuf volumes précédens ; une
Table alphabétique des Auteurs , contenus
dans les 20 volumes de ces Mémoires;
et une Table Nécrologique, qui marque
la date de la mort des Sçavans contenus
dans les neuf volumes précédens.
Le
1012 MERCURE DE FRANCE
Le 21. dont nous avons icy à rendrè
compte , contient les Noms , l'Eloge et
le Catalogue raisonné de 36 Sçavans , qui
ont vécu en différens temps , et qui se
sont distinguez pour la plupart , dans la
République des Lettres. Tels sont , entre
les autres , le Cardinal Bessarion
Pontus de Tyard, Philippe Cluvier , Jean
Louis Vivés , Edouard Pocock , Nicolas
Rigault , Gilles - André de la Roque, Jean
Fronteau , et Louis Boivin.Pour ne point
exceder certaines bornes , nous nous contenterons
de rapporter icy ce que l'Auteur
expose au sujet de Pontus de Tyard .
PONTus de Tyard , Seigneur de Bissy ,
nâquit vers l'an 1521. au Château de Bissy
, dans le Diocèse de Mâcon , de Jean
de Tyard , Lieutenant General au Bailliage
du Mâconnois, et de Jeanne de Ganay
, fille d'un Chancelier de France.
Son nom est écrit tantôt Tyard , et
tantôt Thiard ; mais cette orthographe
est vicieuse il doit s'écrire Tyard ; c'est
ainsi que les meilleurs Auteurs l'ont écrit,
-et c'est ainsi qu'il l'a écrit lui- même.
Pour ce qui est du nom de Ponthus
c'est celui d'un Héros fabuleux , sur lequel
on a un Roman , qui est fort peu
connu , et qui se trouve dans le Catalogue
de la Bibliotheque de M. du Fay ,
Sous
SEPTEMBRE , 1733. 2013
Bous ce titre: Le Roman du noble Roy Ponthus
, fils du Roy de Galice , et de la belle
Sidoine, fille du Roy de Bretagne , in 4.sans
date , en Lettre Gothique . On étoit autrefois
dans l'usage de donner de semblables
noms aux Enfans ; ainsi Jamin , Poëte
comtemporain de Pontus de Tyard ,
a porté celui d'Amadis , dont le Roman
n'est ignoré de personne. M. de la Monnoye
, qui nous apprend ces particularitez
dans ses Additions , aux Jugemens des
Sçavans de Baillet , rapporte dans le Ménagiana
, tom. I. pag. 236. une plaisanterie
sur ce sujet , qu'il ne faut pas omettre,
Pontus de Tyard étant , dit- il , à la
» cérémonie d'un Baptême, en qualité de
>>Parrain ; le Curé faisoit difficulté de
» nommer l'Enfant , Pontus , sur ce qu'il
» ne connoissoit point de Saint de ce
» nom- là. Comment , lui dit l'Evêque 2
M. le Curé ,vous ne songez donc pas au
» Saint , dont l'Eglise fait mention dans
» l'Hymne : Quem terra , Pontus, athera ?
» A ces mots , le bon Curé , qui ne s'étoit
jamais fort chargé de latin ; Monsei-
» gneur , lui dit- il , je vous demande par
» don , il est vrai que je n'y songeois pas.
» Et là- dessus il baptisa l'enfant sous ce
» nom.
2014 MERCURE DE FRANCE
Il fut instruit avec beaucoup de soin ,
dès son enfance, dans les Langues Latine
et Grecque , et même dans l'Hebraïques
mais quoiqu'il affecte de faire parade de
cette derniere, dans son Traité : De recta
nominum impositione , ce qu'il en sçavoit
étoit fort peu de chose ; ce peu lui a fait
cependant trouver place dans la Gallia
Orientalis , de Colomies , parmi les Sçavans
Hébraïsans François.
La Poësie Françoise l'occupa aussi dans
sa jeunesse , et il acquit par là de la réputation.
Ronsard lui attribuë même la
gloire d'avoir le premier introduit les
Sonnets en France. Mais la fortune n'a
point été dans la suite aussi riante à l'égard
de ses Poësies, qu'elle le fut d'abord.
Il a contribué lui-même à les faire disgracier
, par le mépris qu'il en fit ,et qu'il
en inspira aux autres dans un âge plus
mûr.
Il quitta la Poësie , pour se donner
à des Etudes plus sérieuses , et passa à
la Philosophie , aux Mathématiques , et
enfin à la Théologie. La plupart de ses
Ouvrages sont des preuves des connoissances
qu'il avoit acquises dans toutes
ses Sciences. Mais elles étoient alors si
imparfaites , ou la maniere dont on s'y
prenoit pour les apprendre étoit si mauvaise
,
SEPTEMBRE. 1733. 2015
yaise , que tout ce qui nous reste de lui
est un cahos d'érudition mal dirigée , où
Il n'y a presque rien à apprendre.
passa quelques années à la Cour
Roy Henri III . qui conçut de l'afection
pour lui , et lui donna l'Evêché
de Châlons sur Saone , dont il prit possession
le 16. Juin 1578. après avoir été
quelques années Archidiacre de cette
Église et Protonotaire Apostolique.
S'étant trouvé le premier des Dépu
tez de sa Province , dans l'Assemblée
des Etats qui fut tenuë à Blois l'an 1588.
il soutint l'autorité du Roy contre le
reste du Clergé , qui favorisoit la ligue ,
et il parla en sa faveur avec tant de force
et de dignité , qu'il fit de fortes impressions
sur l'esprit de ceux qui assistoient
à cette Assemblée , et en ramena
plusieurs à leur devoir,
Après 20. ans d'Episcopat , se voyant
accablé par les années et affligé des troubles
qui agitoient le Royaume , il se démit
de son Evêché et en fit pourvoir
Cyrus de Tyard , son neveu . S'étant ensuite
retiré dans une de ses Terres , il
ne s'occupa plus que du soin de son saat
. Ce fut là qu'il mourut le 23. Sepembre
1605. âgé de 84. ans.
Il exprima ses sentimens sur sa mort
dans
2018 MERCURE DE FRANCE
dans ces Vers , qu'il composa lui - même
avant que de mourir .
Non teneor longe dulcisque cupidine vita
Sat vixit , cui non vita pudenda fuit.
Nec fama illustris me tangit gloria , forsan ;
Per genium vivent sat mea scripta suum.
Nil
que moror quo sint mea membra tegenda se
pulchro ;
Hac propria baredis sit pia cura mei.
Sed cupio ut tandem mens Christo inixa levetur;
Peccati duro pondere , ad Astra vehar.
Ces Vers ont été gravez sur un Monument
qu'on lui a rigé dans le Choeur
de l'Eglise Cathédrale de Châlons , avec
ces mots au bas .
Pontus Tyardaus Bissianus Ep. Cabil.
Extremum hoc voveb, scribebat,
Il conserva jusqu'à la fin de sa vie là
vigueur de son corps et de son esprit.
Comme il avoit un grand corps et qu'il
étoit assidu à l'étude , il mangeoit beaucoup
et bûvoit de- même , sans mettre
jamais d'eau dans son vin , si violent que
soient ceux qui croissent sur le bord de
La Saône. Ce qu'il y a de singulier , c'est
qu'en se mettant au lit , il avaloit toûjours
un grand verre de vin pur , sans
que
SEPTEMBRE. 1733. 2017
uc sa santé en fût jamais alterée. Baillet et
1x qui l'ont suivi , ont trouvé que ce
coit point assez , et ont substitué mal
propos , au grand verre dont parle
M. Thou , un pot , en disant qu'il avoit
coûtume de boire un pot de vin pur
avant que de s'endormir..
Catalogue de ses Ouvrages.
1. Erreurs Amoureuses. Lyon , Jean de
Tournes , 1549 . in 8.Il n'a pas mis son nom
à cet Ouvrage , qui contient plusieurs
Sonnets , divisez en trois Livres.
2. Solitaire premier , ou Prose des Mu
ses et de la Fureur Poëtique . Avec des Vers
Lyriques sur la fin . Lyon , Jean de Tournes
, 1552. in fol.
3. Solitaire second , on Prose des Muses.
Avec des Vers Lyriques sur la fin .
Lyon , Jean de Tournes , 1552. in 8.
4. Les Oeuvres Poëtiques de Pontus de
Tyard. A sçavoir , trois Livres des Erreurs,
Amoureuses. Un Livre de Vers
Lyriques. Un Recueil de ses nouvelles
Euvres Poëtiques . Paris , Galiot du Pré,
1573. in 4, Tout cela n'est plus recher
ché , ni presque connu de personne.
5. Leon Hebreu , de l'Amour , Dialo
gue, Lyon , Jean de Tournes
, issi.
in 8. Il parut la même année une autre
Tra
2018 MERCURE DE FRANCE
Traduction de l'Ouvrage de Leon , sous
ce titre La sainte Philosophie de l'Amour
de Leon Hebreu , traduite de l'Italien
par le sieur du Parc (Denis Sauvage.)
Lyon , Guillaume Roville , 1551. in 8.
Ce Livre ne méritoit pas qu'on prît tant
de peine pour lui.
6. Discours du Temps , de l'An et de
ses parties. Lyon , Jean de Tournes, 1556.
in & . It. Paris , et Mamert Patisson , 1556.
in 4. C'est l'Edition que du Verdier a
mise mal à propos , in folio.
7. L'Univers , on Discours des parties
et de la nature du Monde. Lyon , Jean
de Tournes , 1557. in 4. Il y a dans ce
Livre , au rapport de du Verdier , quelques
pages prises et traduites mot à mot
du Livre du Monde de Philon , Juif.
L'Auteur l'ayant depuis revû et augmenté
, le publia de nouveau sous le
titre suivant.
8. Deux Discours de la nature du Mon
de et de ses parties ; à sçavoir , le premier
Curieux , traitant des choses matérielles ; et
le second Curieux , des intellectuelles. Paris,
Mamert Patisson , 1578. in 4. On voit
à la tête un avant- Discours par J. D. du
Perron , Professeur du Roy aux Langues,
aux Mathématiques et en la Philosophic,
qui fut ensuite Cardinal.
9.
SEPTEMBRE 1733. 2019
9. Mantice , on Discours de la verité
divination par Astrologie. Lyon , Jean
de Tournes , 1558. in 4.
to. Ephemerides Octava Sphere , seu
Tabelle Diaria Ortus , Occasus , et mediationis
coeli illustrium stellarum inerransium
, pro universâ Galliâ , et his regionibus
que Polum Boreum elevatum habent
ad so, grad. Lugduni , Joan. Torà
39.
pasius
, 1562.
in
fol.
11. De Coelestibus Asterismis Poematium
ad Petrum Ronsardum. Paris , apud
Galeotum à Prato , 1573. in 4.
12. Homelies sur les Evangiles. Paris ;
Mamert Patisson , 1586. in 8.
13. Duodecim Fabula Fluviorum vel
Fontium : unà cum Descriptione pro Pictura
et Epigrammatis. Paris , Joan . Richer,
1586. in 8. Je ne sçai ce que c'est que
cet Ouvrage , ni en quelle Langue il est
écrits le P. Louis Jacob en rapporte ainsi
le titre , mais sans marquer s'il est écrit
en Latin ou en François.
14. Les Discours Philosophiques de Pontus
de Tyard. Paris , 1587. in 4. C'est un
Recueil des Ouvrages que j'ai marquez
au N° 2. 3. 6. E. 9.
15. Homelies sur le Décalogue. Paris ,
1588. in 8.
16. Extrait de la Généalogie de Hugues
Capes
2020 MERCURE DE FRANCE
Capet , Roy de France , et des premiers
Successeurs de la Race de Charlemagne en
France. Paris , Mamert Patisson , 1594.
in 8. M. de Thou , dans le 77. Livre de
son Histoire , attribue à Pontus de Tyard
cet Ouvrage , qui est anonyme , et Duchêne
, à la page 30. de sa Bibliotheque
des Historiens de France , dit qu'il l'a
fait pour servir de Réponse au Livre de
François de Rosieres, intitulé : Stemmata
Ducum Lotharingia. Paris , 1580. in fol.
17. Derecta nominum impositione . Lugduni
, Jacobus Roussin ; 1603. in 8 .
Pontus de Tyard , marque dans l'Epitre
à Louis de Tyard , son neveu , qui est
à la tête de ce petit Traité , que dans
le commencement des troubles de la
France , il avoit traduit du Grec deux
Opuscules de Philon , et qu'il avoit composé
ce Traité pour servir de Préface à
sa Traduction ; mais que Fréderic Morel
l'ayant prévenu en publiant une Version
Latine d'un de ces mêmes Opuscules
, et en promettant la Version de
l'autre , il avoit supprimé la sienne , et
sé contentoit de donner au Public l'Ouvrage
qu'il lui adressoit , avec quelques
Notes sur les Livres qu'il avoit traduits.
18. Annotationes in Libros Philonis Judai
, de Transnominatis , et Allegoria Sa
STR.
SEPTEMBRE . 1733. 2021
cra . A la suite du Traité précedent .
19. Fragmentum Epistola pii cujusdam
Episcopi , quo Pseudo -Jesuita Caroli , et
ejs Congerronum maledicta repellit. Hanovix
, 1604. in 8. A la suite de Caroli
Molinai Consilium super commodis et in-
Commodis nova Secta Jesuitarum . Item.
dans la Bibliothecâ Pontificia , editâ à
Joanne Scherzero, Lipsiæ , 1677. in 4.
avec la Souscription P. T. E. C. qui signifie
Pontus Tyardaus Episcopus Cabilonensis.
Item. Traduit en François à la
page 378. du Livre de David Homme
intitulé : Le Contr' Assassin. Lyon , 1612 .
Illustres, dans la République des Let
tres, & c. Tom. 20 et 21. A Paris , chez.
Briasson , rue S. Jacques , à la Science..
173.2.
Le premier de ces deux volumes contient
les changemens , les corrections et
les additions que l'Auteur a trouvées à
propos de faire pour les Tomes 11. 11 .
13. 14. 15. 16. 17. et 18. précedens . Ony
remarque par tout son exactitude et
son amour pour la verité ; et qu'il ne
tient pas à ses soins infatigables , que
nous n'ayons en ce genre un Ouvrage
parfait. Ce vingtiéme tome contient aussi
trois Tables qui sont d'une grande utilité
dans un pareil Recueil ; sçavoir , une
Table Générale des Matiéres qni ont été
traitées par les Auteurs dont il est parlé
dans les neuf volumes précédens ; une
Table alphabétique des Auteurs , contenus
dans les 20 volumes de ces Mémoires;
et une Table Nécrologique, qui marque
la date de la mort des Sçavans contenus
dans les neuf volumes précédens.
Le
1012 MERCURE DE FRANCE
Le 21. dont nous avons icy à rendrè
compte , contient les Noms , l'Eloge et
le Catalogue raisonné de 36 Sçavans , qui
ont vécu en différens temps , et qui se
sont distinguez pour la plupart , dans la
République des Lettres. Tels sont , entre
les autres , le Cardinal Bessarion
Pontus de Tyard, Philippe Cluvier , Jean
Louis Vivés , Edouard Pocock , Nicolas
Rigault , Gilles - André de la Roque, Jean
Fronteau , et Louis Boivin.Pour ne point
exceder certaines bornes , nous nous contenterons
de rapporter icy ce que l'Auteur
expose au sujet de Pontus de Tyard .
PONTus de Tyard , Seigneur de Bissy ,
nâquit vers l'an 1521. au Château de Bissy
, dans le Diocèse de Mâcon , de Jean
de Tyard , Lieutenant General au Bailliage
du Mâconnois, et de Jeanne de Ganay
, fille d'un Chancelier de France.
Son nom est écrit tantôt Tyard , et
tantôt Thiard ; mais cette orthographe
est vicieuse il doit s'écrire Tyard ; c'est
ainsi que les meilleurs Auteurs l'ont écrit,
-et c'est ainsi qu'il l'a écrit lui- même.
Pour ce qui est du nom de Ponthus
c'est celui d'un Héros fabuleux , sur lequel
on a un Roman , qui est fort peu
connu , et qui se trouve dans le Catalogue
de la Bibliotheque de M. du Fay ,
Sous
SEPTEMBRE , 1733. 2013
Bous ce titre: Le Roman du noble Roy Ponthus
, fils du Roy de Galice , et de la belle
Sidoine, fille du Roy de Bretagne , in 4.sans
date , en Lettre Gothique . On étoit autrefois
dans l'usage de donner de semblables
noms aux Enfans ; ainsi Jamin , Poëte
comtemporain de Pontus de Tyard ,
a porté celui d'Amadis , dont le Roman
n'est ignoré de personne. M. de la Monnoye
, qui nous apprend ces particularitez
dans ses Additions , aux Jugemens des
Sçavans de Baillet , rapporte dans le Ménagiana
, tom. I. pag. 236. une plaisanterie
sur ce sujet , qu'il ne faut pas omettre,
Pontus de Tyard étant , dit- il , à la
» cérémonie d'un Baptême, en qualité de
>>Parrain ; le Curé faisoit difficulté de
» nommer l'Enfant , Pontus , sur ce qu'il
» ne connoissoit point de Saint de ce
» nom- là. Comment , lui dit l'Evêque 2
M. le Curé ,vous ne songez donc pas au
» Saint , dont l'Eglise fait mention dans
» l'Hymne : Quem terra , Pontus, athera ?
» A ces mots , le bon Curé , qui ne s'étoit
jamais fort chargé de latin ; Monsei-
» gneur , lui dit- il , je vous demande par
» don , il est vrai que je n'y songeois pas.
» Et là- dessus il baptisa l'enfant sous ce
» nom.
2014 MERCURE DE FRANCE
Il fut instruit avec beaucoup de soin ,
dès son enfance, dans les Langues Latine
et Grecque , et même dans l'Hebraïques
mais quoiqu'il affecte de faire parade de
cette derniere, dans son Traité : De recta
nominum impositione , ce qu'il en sçavoit
étoit fort peu de chose ; ce peu lui a fait
cependant trouver place dans la Gallia
Orientalis , de Colomies , parmi les Sçavans
Hébraïsans François.
La Poësie Françoise l'occupa aussi dans
sa jeunesse , et il acquit par là de la réputation.
Ronsard lui attribuë même la
gloire d'avoir le premier introduit les
Sonnets en France. Mais la fortune n'a
point été dans la suite aussi riante à l'égard
de ses Poësies, qu'elle le fut d'abord.
Il a contribué lui-même à les faire disgracier
, par le mépris qu'il en fit ,et qu'il
en inspira aux autres dans un âge plus
mûr.
Il quitta la Poësie , pour se donner
à des Etudes plus sérieuses , et passa à
la Philosophie , aux Mathématiques , et
enfin à la Théologie. La plupart de ses
Ouvrages sont des preuves des connoissances
qu'il avoit acquises dans toutes
ses Sciences. Mais elles étoient alors si
imparfaites , ou la maniere dont on s'y
prenoit pour les apprendre étoit si mauvaise
,
SEPTEMBRE. 1733. 2015
yaise , que tout ce qui nous reste de lui
est un cahos d'érudition mal dirigée , où
Il n'y a presque rien à apprendre.
passa quelques années à la Cour
Roy Henri III . qui conçut de l'afection
pour lui , et lui donna l'Evêché
de Châlons sur Saone , dont il prit possession
le 16. Juin 1578. après avoir été
quelques années Archidiacre de cette
Église et Protonotaire Apostolique.
S'étant trouvé le premier des Dépu
tez de sa Province , dans l'Assemblée
des Etats qui fut tenuë à Blois l'an 1588.
il soutint l'autorité du Roy contre le
reste du Clergé , qui favorisoit la ligue ,
et il parla en sa faveur avec tant de force
et de dignité , qu'il fit de fortes impressions
sur l'esprit de ceux qui assistoient
à cette Assemblée , et en ramena
plusieurs à leur devoir,
Après 20. ans d'Episcopat , se voyant
accablé par les années et affligé des troubles
qui agitoient le Royaume , il se démit
de son Evêché et en fit pourvoir
Cyrus de Tyard , son neveu . S'étant ensuite
retiré dans une de ses Terres , il
ne s'occupa plus que du soin de son saat
. Ce fut là qu'il mourut le 23. Sepembre
1605. âgé de 84. ans.
Il exprima ses sentimens sur sa mort
dans
2018 MERCURE DE FRANCE
dans ces Vers , qu'il composa lui - même
avant que de mourir .
Non teneor longe dulcisque cupidine vita
Sat vixit , cui non vita pudenda fuit.
Nec fama illustris me tangit gloria , forsan ;
Per genium vivent sat mea scripta suum.
Nil
que moror quo sint mea membra tegenda se
pulchro ;
Hac propria baredis sit pia cura mei.
Sed cupio ut tandem mens Christo inixa levetur;
Peccati duro pondere , ad Astra vehar.
Ces Vers ont été gravez sur un Monument
qu'on lui a rigé dans le Choeur
de l'Eglise Cathédrale de Châlons , avec
ces mots au bas .
Pontus Tyardaus Bissianus Ep. Cabil.
Extremum hoc voveb, scribebat,
Il conserva jusqu'à la fin de sa vie là
vigueur de son corps et de son esprit.
Comme il avoit un grand corps et qu'il
étoit assidu à l'étude , il mangeoit beaucoup
et bûvoit de- même , sans mettre
jamais d'eau dans son vin , si violent que
soient ceux qui croissent sur le bord de
La Saône. Ce qu'il y a de singulier , c'est
qu'en se mettant au lit , il avaloit toûjours
un grand verre de vin pur , sans
que
SEPTEMBRE. 1733. 2017
uc sa santé en fût jamais alterée. Baillet et
1x qui l'ont suivi , ont trouvé que ce
coit point assez , et ont substitué mal
propos , au grand verre dont parle
M. Thou , un pot , en disant qu'il avoit
coûtume de boire un pot de vin pur
avant que de s'endormir..
Catalogue de ses Ouvrages.
1. Erreurs Amoureuses. Lyon , Jean de
Tournes , 1549 . in 8.Il n'a pas mis son nom
à cet Ouvrage , qui contient plusieurs
Sonnets , divisez en trois Livres.
2. Solitaire premier , ou Prose des Mu
ses et de la Fureur Poëtique . Avec des Vers
Lyriques sur la fin . Lyon , Jean de Tournes
, 1552. in fol.
3. Solitaire second , on Prose des Muses.
Avec des Vers Lyriques sur la fin .
Lyon , Jean de Tournes , 1552. in 8.
4. Les Oeuvres Poëtiques de Pontus de
Tyard. A sçavoir , trois Livres des Erreurs,
Amoureuses. Un Livre de Vers
Lyriques. Un Recueil de ses nouvelles
Euvres Poëtiques . Paris , Galiot du Pré,
1573. in 4, Tout cela n'est plus recher
ché , ni presque connu de personne.
5. Leon Hebreu , de l'Amour , Dialo
gue, Lyon , Jean de Tournes
, issi.
in 8. Il parut la même année une autre
Tra
2018 MERCURE DE FRANCE
Traduction de l'Ouvrage de Leon , sous
ce titre La sainte Philosophie de l'Amour
de Leon Hebreu , traduite de l'Italien
par le sieur du Parc (Denis Sauvage.)
Lyon , Guillaume Roville , 1551. in 8.
Ce Livre ne méritoit pas qu'on prît tant
de peine pour lui.
6. Discours du Temps , de l'An et de
ses parties. Lyon , Jean de Tournes, 1556.
in & . It. Paris , et Mamert Patisson , 1556.
in 4. C'est l'Edition que du Verdier a
mise mal à propos , in folio.
7. L'Univers , on Discours des parties
et de la nature du Monde. Lyon , Jean
de Tournes , 1557. in 4. Il y a dans ce
Livre , au rapport de du Verdier , quelques
pages prises et traduites mot à mot
du Livre du Monde de Philon , Juif.
L'Auteur l'ayant depuis revû et augmenté
, le publia de nouveau sous le
titre suivant.
8. Deux Discours de la nature du Mon
de et de ses parties ; à sçavoir , le premier
Curieux , traitant des choses matérielles ; et
le second Curieux , des intellectuelles. Paris,
Mamert Patisson , 1578. in 4. On voit
à la tête un avant- Discours par J. D. du
Perron , Professeur du Roy aux Langues,
aux Mathématiques et en la Philosophic,
qui fut ensuite Cardinal.
9.
SEPTEMBRE 1733. 2019
9. Mantice , on Discours de la verité
divination par Astrologie. Lyon , Jean
de Tournes , 1558. in 4.
to. Ephemerides Octava Sphere , seu
Tabelle Diaria Ortus , Occasus , et mediationis
coeli illustrium stellarum inerransium
, pro universâ Galliâ , et his regionibus
que Polum Boreum elevatum habent
ad so, grad. Lugduni , Joan. Torà
39.
pasius
, 1562.
in
fol.
11. De Coelestibus Asterismis Poematium
ad Petrum Ronsardum. Paris , apud
Galeotum à Prato , 1573. in 4.
12. Homelies sur les Evangiles. Paris ;
Mamert Patisson , 1586. in 8.
13. Duodecim Fabula Fluviorum vel
Fontium : unà cum Descriptione pro Pictura
et Epigrammatis. Paris , Joan . Richer,
1586. in 8. Je ne sçai ce que c'est que
cet Ouvrage , ni en quelle Langue il est
écrits le P. Louis Jacob en rapporte ainsi
le titre , mais sans marquer s'il est écrit
en Latin ou en François.
14. Les Discours Philosophiques de Pontus
de Tyard. Paris , 1587. in 4. C'est un
Recueil des Ouvrages que j'ai marquez
au N° 2. 3. 6. E. 9.
15. Homelies sur le Décalogue. Paris ,
1588. in 8.
16. Extrait de la Généalogie de Hugues
Capes
2020 MERCURE DE FRANCE
Capet , Roy de France , et des premiers
Successeurs de la Race de Charlemagne en
France. Paris , Mamert Patisson , 1594.
in 8. M. de Thou , dans le 77. Livre de
son Histoire , attribue à Pontus de Tyard
cet Ouvrage , qui est anonyme , et Duchêne
, à la page 30. de sa Bibliotheque
des Historiens de France , dit qu'il l'a
fait pour servir de Réponse au Livre de
François de Rosieres, intitulé : Stemmata
Ducum Lotharingia. Paris , 1580. in fol.
17. Derecta nominum impositione . Lugduni
, Jacobus Roussin ; 1603. in 8 .
Pontus de Tyard , marque dans l'Epitre
à Louis de Tyard , son neveu , qui est
à la tête de ce petit Traité , que dans
le commencement des troubles de la
France , il avoit traduit du Grec deux
Opuscules de Philon , et qu'il avoit composé
ce Traité pour servir de Préface à
sa Traduction ; mais que Fréderic Morel
l'ayant prévenu en publiant une Version
Latine d'un de ces mêmes Opuscules
, et en promettant la Version de
l'autre , il avoit supprimé la sienne , et
sé contentoit de donner au Public l'Ouvrage
qu'il lui adressoit , avec quelques
Notes sur les Livres qu'il avoit traduits.
18. Annotationes in Libros Philonis Judai
, de Transnominatis , et Allegoria Sa
STR.
SEPTEMBRE . 1733. 2021
cra . A la suite du Traité précedent .
19. Fragmentum Epistola pii cujusdam
Episcopi , quo Pseudo -Jesuita Caroli , et
ejs Congerronum maledicta repellit. Hanovix
, 1604. in 8. A la suite de Caroli
Molinai Consilium super commodis et in-
Commodis nova Secta Jesuitarum . Item.
dans la Bibliothecâ Pontificia , editâ à
Joanne Scherzero, Lipsiæ , 1677. in 4.
avec la Souscription P. T. E. C. qui signifie
Pontus Tyardaus Episcopus Cabilonensis.
Item. Traduit en François à la
page 378. du Livre de David Homme
intitulé : Le Contr' Assassin. Lyon , 1612 .
Fermer
Résumé : MEMOIRE pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République des Lettres, &c. Tom. 20 et 21. A Paris, chez Briasson, ruë S. Jacques, à la Science. 1732.
Le texte présente deux volumes d'une œuvre intitulée 'Mémoire pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres, dans la République des Lettres'. Le vingtième volume inclut des corrections et des additions pour les tomes précédents, ainsi que trois tables utiles : une Table Générale des Matières, une Table alphabétique des Auteurs et une Table Nécrologique. Le vingt-et-unième volume éloge 36 savants, dont Pontus de Tyard. Pontus de Tyard, né vers 1521 au Château de Bissy, reçut une éducation précoce en langues anciennes et en poésie. Il est reconnu pour avoir introduit les sonnets en France. Par la suite, il se consacra à des études plus sérieuses telles que la philosophie, les mathématiques et la théologie. Sa carrière le mena à la cour de Henri III, où il obtint l'évêché de Châlons-sur-Saône. Il soutint l'autorité royale lors des États de Blois en 1588. Après vingt ans d'épiscopat, il se retira et mourut en 1605 à l'âge de 84 ans. Le texte mentionne également plusieurs des œuvres de Tyard, qui couvrent une large gamme de genres, allant des poèmes à des traités théologiques et philosophiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 729-741
LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
Début :
Les Memoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la [...]
Mots clefs :
Jean-François Niceron, Lettres, Ogier Ghislain de Busbecq, Empereur, Constantinople, Ambassade , Affaires, Lettre, Roi, Turquie, Mort, Pierandrea Mattioli, Flandres, Voyage, Autriche, Mémoires
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
LETTRE de M.... sur la Continuation
des Memoires du R. P. Niceron.
L
Es Memoires pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres dans la
Képublique des Lettres , &c. continuent ,
Monsieur , d'être publiez ici avec succès
, et c'est toujours le sieur Briasson ,
Libraire , rue S. Jacques , qui les imprime.
J'ai à vous parler ici du XXII. votume
, vous ayant rendu compte de tous
les précedens.
C'est toûjours le même plan et le même
ordre , ainsi il me suffira de vous
dire que ce Tome , de 410. pages sans
les Tables , contient la Vie et le Catalogue
de 45. Sçavans , entre lesquels j'ai
choisi Auger Gislen de Busbeg , comme
un sujet qui , je m'assure , sera de votre
goût , et qui conviendra d'ailleurs pour
ne point trop exceder les bornes d'une
Lettre. Voici comment en parle notre
Auteur , page 350. de son Livre.
AUGER Gislen de Busbeq , naquit Fan
15220
730 MERCURE DE FRANCE
1522. à Comines en Flandres sur la Lys,
et fut fils naturel de Gilles Gislen , Seigneur
de Busbeq , Château sur la Lys
entre Comines et Menin , qui l'eut d'une
fille de basse condition .
Les heureuses dispositions qu'il fit voir
dès sa premiere jeunesse pour les Sciences
, engagerent son pere , qui l'élevoit
dans sa maison , à ne rien oublier pour
son instruction , et à le faire légitimer
par un Rescrit de l'Empereur Charles
Quint.
Il l'envoya étudier dans les plus celebres
Universitez , à Louvain , à Paris ,
à Venise , à Boulogne et à Padoüe , et
le jeune Busbeq fit de grands progrès
dans toutes ces Villes sous les fameux
Professeurs qu'il y suivit.
>
En 1554 il fut en Angleterre à la suite
de Pierre Lasso , que Ferdinand , Roy des
Romains , y envoyoit en Ambassade
pour assister aux Nôces de la Reine Marie
avec Philippe , fils de l'Empereur
Charles-Quint , qui se celebrerent le 5 .
Juillet 1554.
De retour en Flandres , il reçut à Lille
le 3. Novembre suivant , une Lettre de
Ferdinand par laquelle ce Prince lui
marquoit de se rendre à Vienne , pour
aller en Ambassade à Constantinople.
"
II
AVRIL 1734 731
Il ne differa de partir qu'autant de
temps qu'il lui en fallut pour aller dire
adieu à son Pere , que Valere André
peu exact sur son chapitre , a supposé
mal à propos , mort en ce temps - là ;
aussi bien qu'à ses amis.
Arrivé àVienne , il en partit aussi - tôt
pour Constantinople , où il arriva le
20. Janvier 1555. Soliman II . étoit alors
à Amasie à la tête de son Armée , et ayant
sçû son arrivée , il lui fit dire de le venir
trouver.
Il sortit de Constantinople le 5. Mars
et arriva auprès du Grand Seigneur le
7. Avril ; mais il n'eut pas grande satisfaction
de lui .
Il avoit été envoyé à la Porte pour
y demeurer en qualité d'Ambassadeur
ordinaire ; cependant il y fit très peu
de séjour. Il ne put obtenir de Soliman
qu'une Tréve de six mois ; et on jugea
à propos qu'il retournât promptement
vers Ferdinand , pour lui porter la Lettre
de l'Empereur Turc.
Il partit donc d'Amasie le 2. Juin , et
eut presque toujours la fievre jusqu'au 24.
qu'il arriva à Constantinople , d'où après
quatorze jours de repos , il reprit le chemin
de Vienne.
Le Roy des Romains le renvoya au
mois
732 MERCURE DE FRANCE
mois de Novembre à Constantinople ,
où il arriva en Janvier 1556.
Cette seconde Ambassade fut plus longue
et plus heureuse que la premiere ;
car elle dura sept ans , et finit par un
Traité contenant une Tréve de huit ans:
Busbeq , quoiqu'appliqué aux affaires
de son Ambassade , ne laissa pas de travailler
pendant son séjour en Turquie
pour la République des Lettres . Il ramassoit
des Inscriptions , acheptoit des
Manuscrits , recherchoit les Plantes rares
, et s'informoit de la nature des Animaux.
A ce second voyage il avoit mené
avec lui un Peintre , pour dessiner les
Plantes et les Animaux qui nous sont
inconnus ; et il communiqua dans la suite
ces Desseins à Pierre- André Mathiole',
qui en fit qui en fit usage dans les Livres qu'il
donna au Public.
Quelques- uns se sont imaginez que
Mathiole avoit été à son service , fondez
sur la quatriéme Lettre de Busbeq ,
écrite en 1562. où il est dit : Nihil pene
stirpium neque herbarum retuli , nisi depictarum,
quas Mathiolo servo mandaram,
et alia pleraque , & c. mais il est visible
que la ponctuation est vicieuse dans cet
endroit , et qu'il faut lire : quas Mathiolo
servo, Mandaram et alia pleraque, & c.
Fest
AVRIL. 1734:
733
c'est-à - dire qu'il gardoit ces Desseins
pour Mathiole. Ajoûtez à cela que Mathiole
dit dans l'Epitre Décicatoire de
son Commentaire sur Dioscoride , écrite
l'an 1568. qu'il y avoit 17. ans de suite
qu'il étoit Medecin de Ferdinand d'Autriche
, second fils de Maximilien I. II
a donc commencé à l'être en 1551. et
n'a pû durant ce temps servir Busbeq .
Busbeq eut pendant son séjour en Turquie
un Medecin , dont il est bon do
dire quelque chose. Il s'appelloit Guillaume
Quacquelben , et étoit natif de
Courtray en Flandres. Il fut appellé en
1548. de Louvain pour professer la Medecine
à Vienne en Autriche . Il passa
de-là à Constantinople en 1552. et y
mourut en 1561. C'étoit un homme de
Lettres , et curieux en Médailles , et Busbeq
assure dans ses Lettres , que la République
des Lettres perdit par sa mort
quantité de Remarques curieuses qu'il
vouloit mettre au jour. Mathiole , dans
ses Observations sur Dioscoride , reconnoît
qu'il lui en avoit envoyé plusieurs
qu'il avoit inserées dans son Ouvrage.
Ce Medecin avoit pour principe qu'il ne
falloit pas craindre la Peste , parce que
la crainte seule pouvoit la donner ; cependant
il la gagna et en mourut sans
vouloir
734 MERCURE DE FRANCE
vouloir presque démordre de son prémier
sentiment. Busbeq le croyoit capable
de tenir sa place à Constantinople
, quand il en seroit parti .
Busbeq ayant terminé les affaires qui
l'avoient amené en Turquie , partit de
Constantinople à la fin du mois d'Août
de l'an 1562. avec Ebrahim Strotschen ,
Polonois , que Soliman II. envoyoit à
l'Empereur Ferdinand II . et arriva en
Autriche au commencement d'Octobre;
mais comme l'Empereur étoit alors à la
Diette de Francfort , il s'y transporta par
ses ordres pour lui rendre compte de
ses Négociations . Son dessein étoit de
passer après cela le reste de ses jours dans
une vie privée ; mais il fallut qu'il se
rembarquât plus que jamais à la Cour.
On lui confia le gouvernement des
jeunes Princes , fils de Maximilien II .
que ce Prince , devenu Empereur par la
mort de Ferdinand I. son Pere , arrivée
le 25. Juillet 1564. envoya en Espagne
auprès de Philippe II. leur Oncle , sous
sa conduite .
Lorsque la Princesse Elisabeth d'Autriche
, fille du même Empereur Maximilien
, fut mariée en 1570. avec Char
les IX. Roy de France , il fut chargé
de la conduire dans ce Royaume , et demeura
AVRIL 1734 735
meura auprès d'elle , avec l'Intendance
de sa Maison et de ses affaires ; et quand
cette Princesse sortit de France après la
mort de son Mary , arrivée le 30. May
1574. elle l'y laissa pour y avoir soin de
ses affaires.
·
L'Empereur Rodolphe II . le choisit
aussi pour être son Ambassadeur à la
Cour de France ; et l'on a les Lettres qu'il
lui écrivit en cette qualité depuis le 25.
Mars 1582. jusqu'à la fin de 1585.
En 1592. il obtint de l'Empereur un
Congé de six mois pour faire un voyage
en Flandres , où sa presence étoit nécessaire
par rapport à ses affaires domestiques.
Mais quoiqu'il eût pris pour faire
ce voyage plus sûrement , des passeports
du Roy et de la Ligue , il fut volé et
maltraité dans le Village de Cailly à quatre
lieues de Rouen , par un Parti de
Ligueurs , qui cependant , sur les représentations
qu'il leur fit par rapport à son
caractere , le laisserent libre et lui rendirent
tout ce qu'ils lui avoient pris.
Le Gouverneur de Rouen ayant sçû
cette avanture , lui en fit des excuses et
lui promit de punir ceux qui l'avoient
insulté , mais Busbeq lui répondit qu'il
songeoit plutôt à se tranquiliser l'esprit
qu'à se venger de l'injure qu'on avoit
faite à sa qualité.
736 MERCURE DE FRANCE
Il ne continua pas cependant son voyage
; car se sentant incommodé , il se fit
porter au Château de Mailloc , dans le
voisinage de Cailly.
Il y mourut onze jours après , le 28.
Octobre 1592. âgé d'environ 70. ans.Son
corps fut enterré honorablement dans
l'Eglise du Lieu , et son coeur fut porté
aux Bays - Bas , pour y être mis dans le
Tombeau de ses Ancêtres.
Le bruit courut alors qu'il avoit été
tué dans un bois par des voleurs , et c'est
conformément à ce bruit qu'en ont parlé
Philippe Camérarius dans ses Méditations
historiques, Scaliger, dans le Scaligeriana,
et Juste Lipse , dans l'Epitaphe qu'il lui
a faite.
L'Archiduc Albert , Gouverneur et
puis Souverain des Pays - Bas Epagnols ,
érigea en Baronie la Terre de Busbeq ,
pour honorer la mémoire de son Gouverneur
et lui témoigner sa reconnoissance.
Maximilien , Pere de ce Prince ,
lui avoit conferé l'Ordre de Chevalerie ,
et les Lettres Patentes qu'il lui accorda
pour cela , le 3. Avril 1554. lui sont très .
honorables .
Il avoit eu dessein de se fixer en Fran
ce , dont le séjour lui plaisoit extréme
ment , et il y avoit dans ce dessein acheté
quelques Terres.
AVRIL. 1734. 737
On dit qu'il parloit sept Langues en
perfection , la Latine l'Italienne , la
Françoise , l'Espagnole , l'Allemande , la
Flamande et la Sclavone.
>
Catalogue de ses Ouvrages.
1. Itinera II. Constantinopolitanum , et
Amasianum. Antuerpia , 1581. in 8. Ces
Voyages sont contenus en deux Lettres
que Busbeq adressa à NicolasMicaut , Sieur
d'Indevel , avec qui il avoit autrefois
étudié en Italie. Louis Carrion , qui en
fit faire cette premiere Edition , la dédia
au même Micaut.
2. Legationis Turcice Epistola quatuor,
quarum priores due prodierunt sub titulo
itinerum Constantinopolitani et Amasiani.
Paris. 1595. in 8. Il y a plusieurs autres
Editions de ces Lettres. Dans celle de
Francfort de l'an 1605. in 8. on a ajoûté
l'Ambassade d'Ebrahim Strotschen , dont
j'ai parlé cy-dessus. Ces Lettres qui sont
très-curieuses et très - instructives ont
été traduites en François sous ce titre :
Ambassades et Voyages en Turquie et Amasie
, de M. Busbequius , depuis l'an 1554.
jusqu'en 1562. traduit du Latin par le
S. Gaudon. Paris 1646. in 8. On en a
aussi une Traduction Allemande , imprimée
à Francfort en 1596. in 8.
3.
738 MERCURE DE FRANCE
3. De re Militari contra Turcam instituenda
Consilium A la suite des Lettres
sur son Ambassade de Turquie , tant
dans la premiere Edition de 1681. que
dans les suivantes. Item. à la page 18 .
du quatrième volume du Recueil de Nicolas
Reusner , intitulé : De Bello Turcico
selectissima Orationes et Consultationes.
Leipsia , 1596. in 4. Busbeq avoit examiné
avec beaucoup de soin l'état de la
Monarchie Ottomane et les veritables
moyens de l'attaquer avec succès
c'est ce qui fait la matiere de ce petit
Discours.
›
3
4. Augerii Gislenii Busbequii , Casaris
apud Regem Gallorum Legati , Epistola ad
Rudolphum. II. Imperatorem. è Bibliotheca
Joannis Bapt. Houvart J. C. Patricii
Bruxellensis. Louvanii , 1630. in 8.
Ces Lettres , qui sont au nombre de 53 .
s'étendent depuis le 25. Mars 1582. jusqu'à
la fin de 1585. elles ont été tradui .
tes en François par M. l'Abbé Bechet ;
Chanoine d'Usez , natif de Clermont en
Auvergne , Auteur de la Vie du Cardinal
Martinuzius , mort en 1722. âgé de
73. ans , et cette Traduction a été inserée
dans le II . Tome des Memoires de
Litterature du P. Desmolets , pag. 249 .
» Ces Lettres , dit Vigneul de Marville ,
Tom .
AVRIL. 1734. 739
❤
>
» Tom. I. de ses Melanges , pag. 52. sont
>> mieux remplies et plus utiles que celles
de Bongars . C'est un Portrait au
>> naturel des affaires de France sous le
» Regne de Henry III . Il raconte les cho-
» ses avec une naïveté si grande qu'elies
semblent se passer sous nos yeux . On ne
» trouve point ailleurs tant de faits his-
» toriques on si peu de discours . Les
» grands mouvemens comme la conspiration
d'Anvers et les petites intri-
» gues de la Cour y sont également bien.
marqués. Les attitudes , pour ainsi dire ,
» dans lesquelles il met Henry III , la .
» Reine Mere , le Duc d'Alençon , le Roy
» de Navarre , la Reine Marguerite , le
>> Duc de Guise , le Duc d'Epernon , et
» les autres Courtisans et Favoris de ce
» temps - là,nous les montrent du côté qui
» nous en découvre , à coup sûr , le fort
» et le foible , le bon et le mauvais. En
un mot , les Lettres de Busbeq sont un
modele de bien écrire pour les Ambassadeurs
qui rendent compte à leurs
Maîtres de ce qui se passe dans les
Cours où ils résident .
>>
5. Omnia quæ extant , seu Epistola ipsius
Legationum et alii Tractatus historici , et
Politici. Lugd. Bat. Elzevir , 1633. in 24.
Item . Amstelodami. Elzevir , 1660. in 24.
Voyez
740 MERCURE DE FRANCE
Voyez ses Lettres . C'est- là qu'on trouve
un détail exact de ce qui le regarde.
Bayle , Dictionnaire , son article est fait
avec beaucoup de soin. Tous les autres
Auteurs qui ont parlé de lui, sont tombez
dans des fautes grossieres et ont donné
une Relation de sa Vie , qui contredit
souvent ce qu'on trouve dans ses Let
tres. Tels sont les suivants. Valere André
, Bibliotheca Belgica : l'Auteur de sa
Vie qui est à la tête de ses Lettres à l'Empereur
Rodolphe , et que M. l'Abbé Bechet
a traduite de même que les Lettres.
Melchioris Adami vita Jurisconsultorum
Germanorum. p. 145. Freheri Theatrum Virorum
Doctorum , p. 931. Bullart , Académie
des Sciences , Tom. I. p. 80. Les
Eloges de M. de Thou , et les Additions
de Teissier.
Les autres Sçavans qui remplissent ce Volume
sont, Barthelemi Aneau, Elie Ashmole
,Jean d'Aubry, Guillaume de Baillou, Jacques
de Billy,Geoffroy et Jean de Billy, Adam
Blacvod , Edouard Brereword,RobertBurhill,
Louis Cappel, Louis Cappel lejeune,Jacques
Cappel, Scipion Carteromaco , Jacques Cassagne
, Antoine de Chandien, Nicolas Cisner,
Gaspard Contarini, Martin Antoine Delrio,
Antoine Densingius, Jeremie Drexelius,Jean
Drusius,Varino Favorino,Jean Gelida, Gilbert
AVRIL. 1734. 741
"
bert Genebrard, François Godwin , Laurent
Humphrey , Jean Marsham , Nicolas Hugues
Menard , Isaac Newton , François
Pinsson Arnaud de Pontac , Antoine
Possevin , Pierre du Ryer , François Sansovino,
J.Théodore Schenkius , Joseph Marie
Suarez , Paul et François Tallemant ,
J. F. Foy Vaillant , N. Durand de Villegagnon
, Burcher de Volder , Adolphe et
Everard Vorstius.
des Memoires du R. P. Niceron.
L
Es Memoires pour servir à l'Histoire
des Hommes Illustres dans la
Képublique des Lettres , &c. continuent ,
Monsieur , d'être publiez ici avec succès
, et c'est toujours le sieur Briasson ,
Libraire , rue S. Jacques , qui les imprime.
J'ai à vous parler ici du XXII. votume
, vous ayant rendu compte de tous
les précedens.
C'est toûjours le même plan et le même
ordre , ainsi il me suffira de vous
dire que ce Tome , de 410. pages sans
les Tables , contient la Vie et le Catalogue
de 45. Sçavans , entre lesquels j'ai
choisi Auger Gislen de Busbeg , comme
un sujet qui , je m'assure , sera de votre
goût , et qui conviendra d'ailleurs pour
ne point trop exceder les bornes d'une
Lettre. Voici comment en parle notre
Auteur , page 350. de son Livre.
AUGER Gislen de Busbeq , naquit Fan
15220
730 MERCURE DE FRANCE
1522. à Comines en Flandres sur la Lys,
et fut fils naturel de Gilles Gislen , Seigneur
de Busbeq , Château sur la Lys
entre Comines et Menin , qui l'eut d'une
fille de basse condition .
Les heureuses dispositions qu'il fit voir
dès sa premiere jeunesse pour les Sciences
, engagerent son pere , qui l'élevoit
dans sa maison , à ne rien oublier pour
son instruction , et à le faire légitimer
par un Rescrit de l'Empereur Charles
Quint.
Il l'envoya étudier dans les plus celebres
Universitez , à Louvain , à Paris ,
à Venise , à Boulogne et à Padoüe , et
le jeune Busbeq fit de grands progrès
dans toutes ces Villes sous les fameux
Professeurs qu'il y suivit.
>
En 1554 il fut en Angleterre à la suite
de Pierre Lasso , que Ferdinand , Roy des
Romains , y envoyoit en Ambassade
pour assister aux Nôces de la Reine Marie
avec Philippe , fils de l'Empereur
Charles-Quint , qui se celebrerent le 5 .
Juillet 1554.
De retour en Flandres , il reçut à Lille
le 3. Novembre suivant , une Lettre de
Ferdinand par laquelle ce Prince lui
marquoit de se rendre à Vienne , pour
aller en Ambassade à Constantinople.
"
II
AVRIL 1734 731
Il ne differa de partir qu'autant de
temps qu'il lui en fallut pour aller dire
adieu à son Pere , que Valere André
peu exact sur son chapitre , a supposé
mal à propos , mort en ce temps - là ;
aussi bien qu'à ses amis.
Arrivé àVienne , il en partit aussi - tôt
pour Constantinople , où il arriva le
20. Janvier 1555. Soliman II . étoit alors
à Amasie à la tête de son Armée , et ayant
sçû son arrivée , il lui fit dire de le venir
trouver.
Il sortit de Constantinople le 5. Mars
et arriva auprès du Grand Seigneur le
7. Avril ; mais il n'eut pas grande satisfaction
de lui .
Il avoit été envoyé à la Porte pour
y demeurer en qualité d'Ambassadeur
ordinaire ; cependant il y fit très peu
de séjour. Il ne put obtenir de Soliman
qu'une Tréve de six mois ; et on jugea
à propos qu'il retournât promptement
vers Ferdinand , pour lui porter la Lettre
de l'Empereur Turc.
Il partit donc d'Amasie le 2. Juin , et
eut presque toujours la fievre jusqu'au 24.
qu'il arriva à Constantinople , d'où après
quatorze jours de repos , il reprit le chemin
de Vienne.
Le Roy des Romains le renvoya au
mois
732 MERCURE DE FRANCE
mois de Novembre à Constantinople ,
où il arriva en Janvier 1556.
Cette seconde Ambassade fut plus longue
et plus heureuse que la premiere ;
car elle dura sept ans , et finit par un
Traité contenant une Tréve de huit ans:
Busbeq , quoiqu'appliqué aux affaires
de son Ambassade , ne laissa pas de travailler
pendant son séjour en Turquie
pour la République des Lettres . Il ramassoit
des Inscriptions , acheptoit des
Manuscrits , recherchoit les Plantes rares
, et s'informoit de la nature des Animaux.
A ce second voyage il avoit mené
avec lui un Peintre , pour dessiner les
Plantes et les Animaux qui nous sont
inconnus ; et il communiqua dans la suite
ces Desseins à Pierre- André Mathiole',
qui en fit qui en fit usage dans les Livres qu'il
donna au Public.
Quelques- uns se sont imaginez que
Mathiole avoit été à son service , fondez
sur la quatriéme Lettre de Busbeq ,
écrite en 1562. où il est dit : Nihil pene
stirpium neque herbarum retuli , nisi depictarum,
quas Mathiolo servo mandaram,
et alia pleraque , & c. mais il est visible
que la ponctuation est vicieuse dans cet
endroit , et qu'il faut lire : quas Mathiolo
servo, Mandaram et alia pleraque, & c.
Fest
AVRIL. 1734:
733
c'est-à - dire qu'il gardoit ces Desseins
pour Mathiole. Ajoûtez à cela que Mathiole
dit dans l'Epitre Décicatoire de
son Commentaire sur Dioscoride , écrite
l'an 1568. qu'il y avoit 17. ans de suite
qu'il étoit Medecin de Ferdinand d'Autriche
, second fils de Maximilien I. II
a donc commencé à l'être en 1551. et
n'a pû durant ce temps servir Busbeq .
Busbeq eut pendant son séjour en Turquie
un Medecin , dont il est bon do
dire quelque chose. Il s'appelloit Guillaume
Quacquelben , et étoit natif de
Courtray en Flandres. Il fut appellé en
1548. de Louvain pour professer la Medecine
à Vienne en Autriche . Il passa
de-là à Constantinople en 1552. et y
mourut en 1561. C'étoit un homme de
Lettres , et curieux en Médailles , et Busbeq
assure dans ses Lettres , que la République
des Lettres perdit par sa mort
quantité de Remarques curieuses qu'il
vouloit mettre au jour. Mathiole , dans
ses Observations sur Dioscoride , reconnoît
qu'il lui en avoit envoyé plusieurs
qu'il avoit inserées dans son Ouvrage.
Ce Medecin avoit pour principe qu'il ne
falloit pas craindre la Peste , parce que
la crainte seule pouvoit la donner ; cependant
il la gagna et en mourut sans
vouloir
734 MERCURE DE FRANCE
vouloir presque démordre de son prémier
sentiment. Busbeq le croyoit capable
de tenir sa place à Constantinople
, quand il en seroit parti .
Busbeq ayant terminé les affaires qui
l'avoient amené en Turquie , partit de
Constantinople à la fin du mois d'Août
de l'an 1562. avec Ebrahim Strotschen ,
Polonois , que Soliman II. envoyoit à
l'Empereur Ferdinand II . et arriva en
Autriche au commencement d'Octobre;
mais comme l'Empereur étoit alors à la
Diette de Francfort , il s'y transporta par
ses ordres pour lui rendre compte de
ses Négociations . Son dessein étoit de
passer après cela le reste de ses jours dans
une vie privée ; mais il fallut qu'il se
rembarquât plus que jamais à la Cour.
On lui confia le gouvernement des
jeunes Princes , fils de Maximilien II .
que ce Prince , devenu Empereur par la
mort de Ferdinand I. son Pere , arrivée
le 25. Juillet 1564. envoya en Espagne
auprès de Philippe II. leur Oncle , sous
sa conduite .
Lorsque la Princesse Elisabeth d'Autriche
, fille du même Empereur Maximilien
, fut mariée en 1570. avec Char
les IX. Roy de France , il fut chargé
de la conduire dans ce Royaume , et demeura
AVRIL 1734 735
meura auprès d'elle , avec l'Intendance
de sa Maison et de ses affaires ; et quand
cette Princesse sortit de France après la
mort de son Mary , arrivée le 30. May
1574. elle l'y laissa pour y avoir soin de
ses affaires.
·
L'Empereur Rodolphe II . le choisit
aussi pour être son Ambassadeur à la
Cour de France ; et l'on a les Lettres qu'il
lui écrivit en cette qualité depuis le 25.
Mars 1582. jusqu'à la fin de 1585.
En 1592. il obtint de l'Empereur un
Congé de six mois pour faire un voyage
en Flandres , où sa presence étoit nécessaire
par rapport à ses affaires domestiques.
Mais quoiqu'il eût pris pour faire
ce voyage plus sûrement , des passeports
du Roy et de la Ligue , il fut volé et
maltraité dans le Village de Cailly à quatre
lieues de Rouen , par un Parti de
Ligueurs , qui cependant , sur les représentations
qu'il leur fit par rapport à son
caractere , le laisserent libre et lui rendirent
tout ce qu'ils lui avoient pris.
Le Gouverneur de Rouen ayant sçû
cette avanture , lui en fit des excuses et
lui promit de punir ceux qui l'avoient
insulté , mais Busbeq lui répondit qu'il
songeoit plutôt à se tranquiliser l'esprit
qu'à se venger de l'injure qu'on avoit
faite à sa qualité.
736 MERCURE DE FRANCE
Il ne continua pas cependant son voyage
; car se sentant incommodé , il se fit
porter au Château de Mailloc , dans le
voisinage de Cailly.
Il y mourut onze jours après , le 28.
Octobre 1592. âgé d'environ 70. ans.Son
corps fut enterré honorablement dans
l'Eglise du Lieu , et son coeur fut porté
aux Bays - Bas , pour y être mis dans le
Tombeau de ses Ancêtres.
Le bruit courut alors qu'il avoit été
tué dans un bois par des voleurs , et c'est
conformément à ce bruit qu'en ont parlé
Philippe Camérarius dans ses Méditations
historiques, Scaliger, dans le Scaligeriana,
et Juste Lipse , dans l'Epitaphe qu'il lui
a faite.
L'Archiduc Albert , Gouverneur et
puis Souverain des Pays - Bas Epagnols ,
érigea en Baronie la Terre de Busbeq ,
pour honorer la mémoire de son Gouverneur
et lui témoigner sa reconnoissance.
Maximilien , Pere de ce Prince ,
lui avoit conferé l'Ordre de Chevalerie ,
et les Lettres Patentes qu'il lui accorda
pour cela , le 3. Avril 1554. lui sont très .
honorables .
Il avoit eu dessein de se fixer en Fran
ce , dont le séjour lui plaisoit extréme
ment , et il y avoit dans ce dessein acheté
quelques Terres.
AVRIL. 1734. 737
On dit qu'il parloit sept Langues en
perfection , la Latine l'Italienne , la
Françoise , l'Espagnole , l'Allemande , la
Flamande et la Sclavone.
>
Catalogue de ses Ouvrages.
1. Itinera II. Constantinopolitanum , et
Amasianum. Antuerpia , 1581. in 8. Ces
Voyages sont contenus en deux Lettres
que Busbeq adressa à NicolasMicaut , Sieur
d'Indevel , avec qui il avoit autrefois
étudié en Italie. Louis Carrion , qui en
fit faire cette premiere Edition , la dédia
au même Micaut.
2. Legationis Turcice Epistola quatuor,
quarum priores due prodierunt sub titulo
itinerum Constantinopolitani et Amasiani.
Paris. 1595. in 8. Il y a plusieurs autres
Editions de ces Lettres. Dans celle de
Francfort de l'an 1605. in 8. on a ajoûté
l'Ambassade d'Ebrahim Strotschen , dont
j'ai parlé cy-dessus. Ces Lettres qui sont
très-curieuses et très - instructives ont
été traduites en François sous ce titre :
Ambassades et Voyages en Turquie et Amasie
, de M. Busbequius , depuis l'an 1554.
jusqu'en 1562. traduit du Latin par le
S. Gaudon. Paris 1646. in 8. On en a
aussi une Traduction Allemande , imprimée
à Francfort en 1596. in 8.
3.
738 MERCURE DE FRANCE
3. De re Militari contra Turcam instituenda
Consilium A la suite des Lettres
sur son Ambassade de Turquie , tant
dans la premiere Edition de 1681. que
dans les suivantes. Item. à la page 18 .
du quatrième volume du Recueil de Nicolas
Reusner , intitulé : De Bello Turcico
selectissima Orationes et Consultationes.
Leipsia , 1596. in 4. Busbeq avoit examiné
avec beaucoup de soin l'état de la
Monarchie Ottomane et les veritables
moyens de l'attaquer avec succès
c'est ce qui fait la matiere de ce petit
Discours.
›
3
4. Augerii Gislenii Busbequii , Casaris
apud Regem Gallorum Legati , Epistola ad
Rudolphum. II. Imperatorem. è Bibliotheca
Joannis Bapt. Houvart J. C. Patricii
Bruxellensis. Louvanii , 1630. in 8.
Ces Lettres , qui sont au nombre de 53 .
s'étendent depuis le 25. Mars 1582. jusqu'à
la fin de 1585. elles ont été tradui .
tes en François par M. l'Abbé Bechet ;
Chanoine d'Usez , natif de Clermont en
Auvergne , Auteur de la Vie du Cardinal
Martinuzius , mort en 1722. âgé de
73. ans , et cette Traduction a été inserée
dans le II . Tome des Memoires de
Litterature du P. Desmolets , pag. 249 .
» Ces Lettres , dit Vigneul de Marville ,
Tom .
AVRIL. 1734. 739
❤
>
» Tom. I. de ses Melanges , pag. 52. sont
>> mieux remplies et plus utiles que celles
de Bongars . C'est un Portrait au
>> naturel des affaires de France sous le
» Regne de Henry III . Il raconte les cho-
» ses avec une naïveté si grande qu'elies
semblent se passer sous nos yeux . On ne
» trouve point ailleurs tant de faits his-
» toriques on si peu de discours . Les
» grands mouvemens comme la conspiration
d'Anvers et les petites intri-
» gues de la Cour y sont également bien.
marqués. Les attitudes , pour ainsi dire ,
» dans lesquelles il met Henry III , la .
» Reine Mere , le Duc d'Alençon , le Roy
» de Navarre , la Reine Marguerite , le
>> Duc de Guise , le Duc d'Epernon , et
» les autres Courtisans et Favoris de ce
» temps - là,nous les montrent du côté qui
» nous en découvre , à coup sûr , le fort
» et le foible , le bon et le mauvais. En
un mot , les Lettres de Busbeq sont un
modele de bien écrire pour les Ambassadeurs
qui rendent compte à leurs
Maîtres de ce qui se passe dans les
Cours où ils résident .
>>
5. Omnia quæ extant , seu Epistola ipsius
Legationum et alii Tractatus historici , et
Politici. Lugd. Bat. Elzevir , 1633. in 24.
Item . Amstelodami. Elzevir , 1660. in 24.
Voyez
740 MERCURE DE FRANCE
Voyez ses Lettres . C'est- là qu'on trouve
un détail exact de ce qui le regarde.
Bayle , Dictionnaire , son article est fait
avec beaucoup de soin. Tous les autres
Auteurs qui ont parlé de lui, sont tombez
dans des fautes grossieres et ont donné
une Relation de sa Vie , qui contredit
souvent ce qu'on trouve dans ses Let
tres. Tels sont les suivants. Valere André
, Bibliotheca Belgica : l'Auteur de sa
Vie qui est à la tête de ses Lettres à l'Empereur
Rodolphe , et que M. l'Abbé Bechet
a traduite de même que les Lettres.
Melchioris Adami vita Jurisconsultorum
Germanorum. p. 145. Freheri Theatrum Virorum
Doctorum , p. 931. Bullart , Académie
des Sciences , Tom. I. p. 80. Les
Eloges de M. de Thou , et les Additions
de Teissier.
Les autres Sçavans qui remplissent ce Volume
sont, Barthelemi Aneau, Elie Ashmole
,Jean d'Aubry, Guillaume de Baillou, Jacques
de Billy,Geoffroy et Jean de Billy, Adam
Blacvod , Edouard Brereword,RobertBurhill,
Louis Cappel, Louis Cappel lejeune,Jacques
Cappel, Scipion Carteromaco , Jacques Cassagne
, Antoine de Chandien, Nicolas Cisner,
Gaspard Contarini, Martin Antoine Delrio,
Antoine Densingius, Jeremie Drexelius,Jean
Drusius,Varino Favorino,Jean Gelida, Gilbert
AVRIL. 1734. 741
"
bert Genebrard, François Godwin , Laurent
Humphrey , Jean Marsham , Nicolas Hugues
Menard , Isaac Newton , François
Pinsson Arnaud de Pontac , Antoine
Possevin , Pierre du Ryer , François Sansovino,
J.Théodore Schenkius , Joseph Marie
Suarez , Paul et François Tallemant ,
J. F. Foy Vaillant , N. Durand de Villegagnon
, Burcher de Volder , Adolphe et
Everard Vorstius.
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Résumé : LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
La lettre traite de la publication continue des 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres', imprimés par le sieur Briasson à Paris. Le vingt-deuxième volume contient la vie et le catalogue de 45 savants, parmi lesquels Auger Gislen de Busbeq. Né en 1522 à Comines en Flandres, Busbeq est le fils naturel de Gilles Gislen, seigneur de Busbeq. Grâce à ses dispositions pour les sciences, son père l'envoya étudier dans plusieurs universités célèbres, telles que Louvain, Paris, Venise, Boulogne et Padoue. En 1554, Busbeq se rendit en Angleterre à la suite de Pierre Lasso pour assister aux noces de la reine Marie avec Philippe, fils de l'empereur Charles Quint. De retour en Flandres, il reçut une lettre de Ferdinand, roi des Romains, l'envoyant en ambassade à Constantinople. Il arriva à Constantinople en janvier 1555 et rencontra Soliman II à Amasie. Sa première ambassade fut brève, obtenant seulement une trêve de six mois. Il retourna à Vienne et fut renvoyé à Constantinople en novembre 1555, où il resta sept ans et négocia une trêve de huit ans. Pendant son séjour en Turquie, Busbeq collecta des inscriptions, acheta des manuscrits, rechercha des plantes rares et s'informa sur la nature des animaux. Il ramena des dessins de plantes et d'animaux inconnus en Europe, qu'il communiqua à Pierre-André Matthiole pour ses ouvrages. Il eut également un médecin, Guillaume Quacquelben, qui mourut à Constantinople en 1561. Après avoir terminé ses affaires en Turquie, Busbeq retourna en Autriche en 1562. Il fut ensuite chargé de diverses missions diplomatiques, notamment la conduite des jeunes princes fils de Maximilien II en Espagne et l'escorte de la princesse Élisabeth d'Autriche en France. Il fut également ambassadeur à la cour de France pour Rodolphe II. En 1592, Busbeq obtint un congé pour se rendre en Flandres, mais fut attaqué et volé par des ligueurs près de Rouen. Il mourut peu après, le 28 octobre 1592, à l'âge d'environ 70 ans. Son corps fut enterré honorablement et son cœur porté aux Pays-Bas pour être placé dans le tombeau de ses ancêtres. Busbeq parlait sept langues et laissa plusieurs ouvrages, dont des lettres sur ses voyages et ambassades en Turquie, traduites en français et en allemand. Ses lettres sont considérées comme un modèle de rapport diplomatique. Le volume mentionne également une série de savants, parmi lesquels figurent Valère André, auteur de la 'Bibliotheca Belgica' et de lettres adressées à l'empereur Rodolphe, traduites par l'abbé Bechet. D'autres ouvrages cités incluent 'Melchioris Adami vita Jurisconsultorum Germanorum' et 'Freheri Theatrum Virorum Doctorum'. Le texte fait référence aux éloges de M. de Thou et aux additions de Teissier. La liste des savants inclut Barthelemi Aneau, Elie Ashmole, Jean d'Aubry, Guillaume de Baillou, Jacques de Billy, Geoffroy et Jean de Billy, Adam Blacvod, Edouard Brereword, Robert Burhill, Louis Cappel, Louis Cappel le jeune, Jacques Cappel, Scipion Carteromaco, Jacques Cassagne, Antoine de Chandien, Nicolas Cisner, Gaspard Contarini, Martin Antoine Delrio, Antoine Densingius, Jerémie Drexelius, Jean Drusius, Varino Favorino, Jean Gelida, Gilbert Genebrard, François Godwin, Laurent Humphrey, Jean Marsham, Nicolas Hugues Menard, Isaac Newton, François Pinsson, Arnaud de Pontac, Antoine Possevin, Pierre du Ryer, François Sansovino, J. Théodore Schenkius, Joseph Marie Suarez, Paul et François Tallemant, J. F. Foy Vaillant, N. Durand de Villegagnon, Burcher de Volder, Adolphe et Everard Vorstius. Le texte est daté d'avril 1734.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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16
p. 1159-1174
LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
Début :
J'ai à vous parler ici, Monsieur, du XXIII. et du XXIV. volumes des Memoires [...]
Mots clefs :
Jérôme Bignon, Paris, Louis XIII, Mémoires, Avocat, Homme, Ouvrages, Fils, Ans, Temps, Voyage, Faveur, Jean-Pierre Niceron, Emmius, Mérite, Cardinal, Savants, Érudition, Roland Bignon, Thomas Browne
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
LETTRE de M.... sur la Continuation
des Memoires du R. P. Niceron.
J'ai à vous parler ici , Monsieur , du
XXIII. et du XXIV. volumes des Memoires
pour servir à l'Histoire des Hommes
Illustres dans la République des Lettres que
le Sr Briasson , Libraire rue S. Jacques ',
continuë de publier avec succè . Voici
les noms des Scavans dont il est parlé
dans le premier de ces deux Volumes.
Rodolphe Agricola , Jean- Louis Guez
de Balzac, François Bernier, Jean Bernier,
Jerome Bignon , Henri Blount , Denis de
Salvaing de Boissieu , Thomas Brovvne le
Médecin , Thomas Brovvne le Théologien,
Guillaume Camden , Marc- Antoine Ca-
1 Vol.
pelli
1160 MERCURE DE FRANCE
pelli , Thomas Corneille , Robert Creyghton,
Cristophe Davenport , Louis Duret , Ubo
Emmius,Guillaume Estius, Gabriel Fano,
Nicolas Faret, Pierre Gilles , George- Henri
Goetze , Louise Labé , Adam Littleton
Nicolas Lloyd , Olivier Maillard , Jean
Maldonat ,Pierre - Martyr d'Anghiera
Pierre- Martyr Vermilio , Etienne Pavillon,
Alexandre Piccolomini , François Piccolo
mini , Jean Price , Jules - Cesar Scaliger ;
Joseph-Juste Scaliger , Jean- Ginés de Sepulveda
, Antoine Sherley , Thomas Sher-
Ley , et André Thevet.
Entre tous ces Sçavants je n'en trouve
aucun de plus distingué et de plus Illustre
, que notre célébre Jerôme Bignon,
dont l'article par conséquent soit et plus
curieux & plus agréable à lire. Vous nie
sçaurez sans doute bon gré de l'avoir
choisi par préférence , et de le voir ici
tel qu'on le trouve dans nôtre Auteur,
JEROME BIGNon.
Jerôme Bignon , nâquit à Paris , l'an
1590. de Rolland Bignon , Avocat au
Parlement , d'une ancienne Famille originaire
d'Anjou , et de Marie Ogier ,
fille de Christophe Ogier aussi Avocat au
Parlement.
Rolland Bignon , qui est mal appellé
t
1
I Vol.
JcJUIN.
1734- 1161
Jerôme dans les opuscules de Loysel
page 582. né au mois de Fevrier de l'an
15. fut un des plus Sçavans hommes
de son siècle. Il avoit été Disciple de
Mrs Roaldés et Maran , fameux Jurisconsultes
de l'Université de Toulouze ;
et lorsque le premier se retira dans celle
de Cahors il laissa sa Chaire de Professeur
en Droit à Rolland Bignon, qui , comme
cetteProfession étoit alors très honorable,
y enseigna publiquement pendant une
année , et dicta d'excellents Paratitles sur
les 5 Livres des Décretales ; étant ensuite
venu à Paris il exerça avec beaucoup
de réputation la Profession d'Avocat ,
laquelle se bornoient alors plusieurs personnes
de naissance et de merite , qui
conservoient la modération des anciennes
Moeurs , et qui étoient prévenus d'une
espece d'aversion contre la validité des
charges introduite depuis peu . Après
avoir brillé dans le Bareau il devint celébre
dans les Consultations, et fut generalement
estimé comme un homme d'une
rare suffisance, etd'une probité singuliere .
Persuadé qu'il étoit plus redevable à
son fils qu'à tout autre il ne voulut confier
son éducation qu'à lui - même. Jerôme
Bignon n'eût pas besoin d'aller chercher
une autre Ecole pour aprendre les Lan
1Vol.
gues
1162 MERCURE DE FRANCE
gues , les Humanitez , l'Eloquence , la
Philosophie , les Mathematiques , l'Histoire
, la Jurisprudence , & la Theologie .
Il aprit sous un si excellent Maître toutes
ces Sciences avec une rapidité extraordinaire
, et se vit presque à la fin de ses
Etudes dans un âge où l'on ne commence.
gueres qu'à délibérer sur les
faire étudier les Enfans .
V
moyens
dev
Dès l'âge de dix ans il donna au Public
un essai de son Erudition qui lui fit dèslors
mériter la qualité d'Auteur . C'est
une Chorographie on Description de la Terre
Sainte , qui fût une preuve des conroissances
qu'il avoit déja acquises dans l'Histoire
, la Geographie et l'Ecriture Sainte,
il n'en demeura pas là , et on fût encore
surpris de voir trois ans après paroître
deux autres Ouvrages de sa composition ,
Ouvrages qui le firent connoître à tout
ce qu'il y avoit de personnes habiles et
considerables dans la France .
Le Roy Henry IV. ayant entendu
patler de lui voulut le voir , et le choisit
pour être en qualité d'Enfant d'Honneur
auprès du Dauphin qui fut depuis
le Roy Louis XIII .
Le jeune Bignon parût à la Cour avec
des manieres tout à fait aisées et polies.
L'austerité d'une Etude assidue n'avoit
I Vol. point
JUIN 1734.
1163
" 2
point obscurci les dispositions naturelles
qu'il avoit pour paroître dans le grand
monde , et le Tumulte et les Engagements
de la Cour ne fû ent point capables
d'affoiblir l'inclination qu'il se sentoit
pour les Sciences.
Il composa en ce tems- là un Traité de
l'Excellence des Rois et du Royaume de
France , pour prouver que les Rois de
France doivent avoir la préséance sur
tous les autres Rois , qui lui attira bien
des aplaudissements. Il le dédia au Roy
Henry IV. qui l'engagea par ordre exprès
à pousser plus loin ses recherches
sur cette matiere .
Mais la Mort funeste de ce Prince arrivée
peu de tems après interrompit ce.
Projet , et détermina même M.Bignon à se
retirer de la Cour. Ce ne fut pas cependant
pour long tems , il y fut bien tôt
rapellé à la sollicitation de Nicolas le
Fevre , nouveau Précepteur du Roy Louis
XIII. et ne put se défendre d'y demeufer
jusqu'à la mort de cet ami, Il travailla
dans cet intervale à l'Edition des Formules
de Marculphe.
En 1614. il fir un voyage en Italie ;
et y visita par tout les plus Illustres d'entre
les Sçavants , qu'il convainquit par
sa présence de ce que la Renommée leur
1. Vol. avoit
1164 MERCURE DE FRANCE
avoit apris de plus incroyable en sa faveur.
Le Pape Paul V. lui donna des marques
singulieres de son estime ; le Cardinal
de Sainte Suzanne , qui n'étoit alors
qne Sécretaire des Brefs , établit avec lui
un commerce d'amitié très étroit , et le
célébre Fra - Paolo charmé de sa conver
sation , l'arrêta quelque tems à Venise
pour en profiter.
Au retour de ce voyage M. Bignon se
donna tout entier aux exercices du Barreau
, où ses premieres actions eûrent un
grand succès .
Son pere le fit pourvoir en 16 20. d'une
Charge d'Avocat General au Grand Conseil
, dans les fonctions de laquelle il surpassa
tout ce qu'on pouvoit attendre de
lui , et il s'acquit une si grande réputation
, que le Roy quelque tems après lo
nomma Conseiller d'Etat , et enfin Avocat
General au Parlement à la place de
M. Servin sur la fin de l'année 1625 .
3
Tout le monde aplaudit à ce choix . Le
Clergé même qui avoit nommé des Députez
pour prier le Roy de faire revivre
en sa faveur l'Ancien Droit , suivant lequel
un des Avocats Generaux devoit
être Clerc , ayant sçû le choix que le
Roy avoit fait de M. Bignon , ne se
I Vol.
conJUIN.
1734. 1165
Contenta pas de renoncer à ses prétentions
on faveur de cet Illustre Magistrat , mais
députa encore vers Sa Majesté pour lui
en faire des remerciments, et vers M. Bignon
pour l'en féliciter.
En effet jamais cette importante place
n'avoit été remplie plus dignement 3 car
sans parler de ses talents naturels qu'on y
vit briller dans toute leur étendue, il signala
en mille occasions sa vigueur à soutenir
les interêts du Parlement , son zele inviolable
pour la justice et sa fermeté inébranlable
contre toutes les attaques de la
faveur. Vertus dont ses envieux entrepri
rent de lui faire des crimes ; après la harangue
sincere , quoique respectueuse
qu'il prononça devant le Roy Louis XIII.
séant en son Lit de Juftice pour la vérification
de quelques Edits . Mais ce Prince
justement prévenu en sa faveur , oposa
la parfaite connoissance qu'il avoit de ses
bonnes intentions aux complots et à l'avidité
des gens d'affaires déchaînez contre
sa trop grande probité.
En 1641. résolu de ne plus vaquer
qu'aux Emplois qu'il occupoit dans le
Conseil d'Etat , il céda sa Chargé d'Avocat
General à M. Briquet son Gendre .
L'année suivante le Cardinal de Richelieu
, quoiqu'assez mal intentionné à son
égard
1. Vol. F
1165 MERCURE DE FRANCE
que
égard , le fit nommer Grand- Maître de
la Bibliothéque duRoy , dans la persuasion
le Public le destinoit par avance à
cette Charge , et seroit choqué qu'elle
fut remplie par un autre. L'amour que
M. Bignon avoit pour les Lettres la lui
fit accepter , et son désinteressement lui
fit refuser dans la suite celle de Sur - Intendant
des Finances.
M. Briquet son Gendre étant mort en
1645. il fut obligé de reprendre sa Charge
pour la conserver à son fils , et continua
de l'exercer jusqu'à sa mort , quoique
de Premier Avocat General,il fut des
venu le second.
Il fut outre cela employé à d'autres
Affaires importantes pour l'Etat ; on sçait
combien il eût de part à l'Ordonnance
de 1639. et avec combien d'équité il
exerça les Commissions de l'Arriereban ,
des Amortissemens et du Domaine , qui
lui furent confiées en differents temps.
La Reine Anne d'Autriche l'apella pen
dant sa Regence aux Conseils les plus
importants.
Ce fut lui qui accommoda, les differends
de Mrs d'Avau et Servien , Plenipotentiaires
à Munster , et qui travailla
avec Mrs de Brienne et d'Emery au
Traité d'Alliance avec la Hollande en
IVol. 1649.
JUIN 1734. 1167
1649. Il fut aussi choisi en l'année 1651 .
pour regler la grande Affaire de la Succession
de Mantoüe , et en 1654. pour
conclure le Traité avec les Villes Anseatiques.
Enfin ce grand Homme qui avoit
toujours fait servir la pieté de baze aux
autres vertus qu'il avoit constamment
pratiqué , finit par une mort précieuse
devant Dieu , le cours d'une vie si glo-.
rieuse aux yeux des hommes. Il mourut
le 7 Avril 1656. d'un Asthme dont il
avoit été attaqué dès l'Automne précédent
, mais qui ne lui fit point cesser
ses fonctions ordinaires . Il étoit alors dans
sa 67, année. Il fut enterré à S. Nicolas
du Chardonnet , où vous avez vû son
Buste de Marbre , fait de la main de Gi
rardon , avec une longue Epitaphe qui
^ commence par ces mots : Hieronimus Bignon
,sui sæculi Amor , Decus , Exemplum,
Miraculum & c.
Iln'avoitjamais voulu permettre qu'on
fit son portrait , mais on le tira pendant
qu'il portoit la parole à la grand- Chambre
; c'est pour cela que Lochon qui l'a
gravé , a mis au bas ces mots. R. Lochon
ad vivumfurtim delineavit.
Voici le Catalogue de ses Ouvrages.
1. Chorographie on Description de la
Terre Sainte, Paris 1600. Cette Description-
A. 1 Vol. Fij . qu'il
1168 MERCURE DE FRANCE
qu'il publia à l'âge de 10 ans , est plus
exacte que toutes celles qui avoient paru
auparavant.
2. Discours de la Ville de Rome Prin
cipales Antiquitez , et singularitez d'icelle.
Paris 1604. in 8. Livre peu commun , dit
l'Abbé Lenglet , et qui vient d'une personne
qui joignoit à un grand goût une
extrême exactitude.
3. Traité Sommaire de l'Election des Pa
pes. Plus le Plan du Conclave. Paris 1605,
in 8. Il y a bien de l'érudition dans ce
petit Ouvrage.
4. De l'Excellence des Rois et du Royaume
de France , traitant de la Preséance et des
Prérogatives des Rois de France par dessus
tous les autres , et des causes d'icelles.
Paris 161c . in 8. Cet Ouvrage a été fait
pour refuter celui que Diego Valdès Con
seiller de la Chambre
Royale de Grenade
,
avoit publié pour soutenir
la Preséance
des Rois d'Espagne
, sous ce Titre : de
Dignitate
Regum Hispania. Granata 1602 . in fol
5. Marculfi Monachi Formula ex Biblioteca
Regia Hier. Bignonius edidit , es
Notis illustravit . Paris 1613. in 8.Idem Are.
gentorati.1655 in 4.Id. Editio.auctior. Accessit
Liber Legis Salica, a. f. R. Pithao , et
calem BignonisNotis illustratus.Paris 1666,
I Vol.
ink
JUIN. 1734- 1189
in 4. Cette seconde Edition qui est con
sidérablement augmentée , a paru par les
soins de ses Fils . Les Notes de M.Bignon
sont si remplies d'érudition et si justes
qu'elles font encore l'admiration des
Sçavants cependant il n'avoit que 23
ans lorsqu'il les donna pour la premiere
fois.
6.Voyage de François Pyrard de Laval,
contenant sa navigation aux Indes Orien
tales , Maldives , Moluques et au Brezil
Paris 1615. in 8. Id. nouvelle Edition augmentée
de divers Traitez. Paris 1679.in 8.
C'est à Jerôme Bignon que nous sommes
redevables de la publication de ce Voyage.
Les Découvertes de Pyrard , homme de
bon sens, mais incapable de s'énoncer par
écrit , seroient demeurées ensevelies dans
l'oubli , si M. Bignon ne l'eût attiré chez
lui , l'invitant même à sa table , et n'eût
pris soin de mettre tous les soirs sur le
papier , ce qu'il tiroit à différentes reprises
de ses entretiens.
Ubbo Emmius , Sçavant Hollandois du
XVI. siécle , fait encore une très bonne
figure dans ce 23. vol. desMem . du P.Niceron,
et l'article mérite d'être lû avec attention
. Il mourut à Groningue le 9 Decem
. 1625. dans sa 79 année. Il a composé
plusieurs bons Ouvrages , dont le plus
Fiij im- I. Vol.
170 MERCURE DE FRANCE
important est celui qui concerne l'An
cienne Grece , et dont voici le titre Vetus
Gracia illustrata complectens Descriptionem
Gracia , res gestas Græcorum, statum Rerumpublicarum
Græcarum. Lugd. Bat. Elzevir.
1626. 3. vol. 8.
>
, Emmius , dit l'Auteur des Memoires ,
qui vit commencer et peut- être finir cette
Edition mit écrit le 6 Decembre
par
1625. trois jours avant sa mort ce qu'il
en pensoit. L'Imprimeur , dit- il , a fait
deux fautes. 1. İl a mis mon Ouvrage
in 8. contre la promesse qu'il m'avoit
faite de l'imprimer in folio , et a rendu
ainsi inutiles des Tables Chorographiques
que j'avois dressées avec beaucoup de soin
en cette forme , pour y être inserées et
dont le Livre a indispensablement besoin,
2º. Il a fait traîner si fort en longueur
l'impression , que le chagrin qui m'est
survenu par la mort de mon fils Egbert,
et ensuite mes infirmitez m'ont empêché
de travailler à une ample Préface que
j'avois dessein de composer lorsque le
Livre seroit prêt à paroître , et dans laquelle
j'aurois fait une comparaison entre
les anciennes Republiques Grecques [ et
celles d'à- présent , montrant ce qu'il y a
* Ce Fils mourut à Orleans
Epitaphe que son Pere lui fit &c.
et on rapporte
1Vol. de
JUIN. 1734 7171
de bon et de mauvais dans les unes et
les autres.
L'Ouvrage d'Emmius a été inseré dans
les Antiquitez Grecques de Gronovius ,
tome 4. page 85. avec des additions
Anecdotes de sa façon . Le troisiéme tome
qui contient l'Etat des principales Republiques
de la Grece , a été imprimé séparement
l'an 1632. à Leyde , chez Elzevir
en 2 vol. in 24. pour être joint au corps
des petites Républiques .
Quand ce Sçavant Homme mourut il
travailloit à l'Histoire de Philippe Roy
de Macédoine et son dessein étoit d'y
montrer pour l'usage des Provinces unies,
par quels moyens ce Prince avoit opprimé
la liberté de la Grece. Il avoit déja
conduit l'Histoire jusqu'à la 15. année du
Regne de ce Monarque.
Au reste on doit sçavoir gré au P. Niceron
d'avoir donné à cet Auteur une/
place dans ces Memoires ; car je trouve
que malgré tout son mérite il n'est guere
connu du commun des Gens de Lettres ,
sur tout dans les Provinces. L'Auteur de
la * Dissertation Historique sur l'ancienne
* Cette Dissertation est dans le Recueil des
Piéces présentées à l'Académie de Marseille pour le
Prix de l'année 1727. avec les Distours prononcez
&c. A Marseille chez Jean- Baptiste Boy , e.
$727. Fiij Aca→
172 MERCURE DE FRANCE
Académie de Marseille, n'avoit sans doute
jamais rien vû par lui même de notre
Ubbe Emmins , puisqu'en le citant il fait
du même homme deux Auteurs différents.
C'est dans la même citation que du Boulay
en latin Bullaus , Auteur de l'Histoire Latine
de l'Université de Paris , est nommé
Bouilland , par une assez plaisante méprise.
>
Passons au XXIV. Tome des Memoires.
De trente-sept Articles de Sçavans
qui le composent , je ne vous nommerai
que ceux pour lesquels je prévois que vous
vous interesserez , tels sont Juste Lipse
Pierre Belon , Pierre Patrix on Patris de
Caën , Provençal d'origine , Honorat de
Beuil de Racan , Nicolas Boileau Despreaux
et Jean Baptiste- Henri du Trousset de Valincourt.
Les autres Articles ont aussi le
mérite d'instruire agréablement , et par
conséquent leur utilité .
J'avois dessein d'insérer ici celui de
Pierre Belon du Mans , le plus grand et
le plus curieux voyageur de son temps ,
mais j'aurois excedé les bornes d'une Lettre.
Deux ou trois Remarques que je ferai
sur son sujet suffiront ici. Belon étoit
grand Physicien , bon Médecin et habile
Botaniste mais il faut convenir qu'il
n'étoit ni Geographe ni Antiquaire , ni
I Vol.
bon
JUIN. 1734. 1173**
bon Critique , cela paroît par les differentes
méprises dans lesquelles il est tombé
à cet égard, et dont j'ai donné des preuve
ailleurs , dans le Livre de ses Observations
de plusieurs singularitez et choses memorables
trouvées en Grece , Asie , Judée ,
Egypte , Arabie et autres Pays étrangers
redigees en trois Livres , avec des Figures ,
imprimé pour la premiere fois à Paris
1553. in 4. C'est cependant un bon Livre
P'exactitude de l'Auteur et par sa capacité
dans tout ce qui concerne l'Histoire
naturelle des Pays qu'il a parcourus. Il a
été traduit en latin par Charles Clusius
d'Arras et imprimé à Anvers.en 1589 .
1. vol. 8 .
par
Belon étoit l'Eleve de Pierre Gilles
attaché au Cardinal d'Armagnac , lequel
a fait deux beauxOuvrages sur le Bosphore
de Thrace , et sur la Ville de Constantinople
, mais on prétend qu'il avoit
péu profité sous un si bon Maître pour
les autres connoissances qui lui manquoient.
De retour de ses voyages , il se
retira à l'Abbaye de S. Germain des Prez,
dont étoit alors Abbé le Cardinal de
Tournon , à qui il étoit fort étroitement
* P. Gilles a aussi écrit sur d'autres sujets . Son
Article est curieux dans le XXIII . T. des Memoires
p. 403.
: I. Vol. Fv attaché
174 MERCURE DE FRANCE
attaché. Suivant les Memoires du P. Niceron
, Belon fut assassiné près de Paris)
par un de ses ennemis , l'an 1564. étant
âgé d'environ 47. ans .
Outre son Voyage du Levant , sous
le nom d'Observations , & c. nous avons
du même Auteur plusieurs autres bons
Ouvrages sur differens sujets de l'Histoire
Naturelle , qui ont été publiés de son
vivant , les uns en Latin , les autres en
François.
des Memoires du R. P. Niceron.
J'ai à vous parler ici , Monsieur , du
XXIII. et du XXIV. volumes des Memoires
pour servir à l'Histoire des Hommes
Illustres dans la République des Lettres que
le Sr Briasson , Libraire rue S. Jacques ',
continuë de publier avec succè . Voici
les noms des Scavans dont il est parlé
dans le premier de ces deux Volumes.
Rodolphe Agricola , Jean- Louis Guez
de Balzac, François Bernier, Jean Bernier,
Jerome Bignon , Henri Blount , Denis de
Salvaing de Boissieu , Thomas Brovvne le
Médecin , Thomas Brovvne le Théologien,
Guillaume Camden , Marc- Antoine Ca-
1 Vol.
pelli
1160 MERCURE DE FRANCE
pelli , Thomas Corneille , Robert Creyghton,
Cristophe Davenport , Louis Duret , Ubo
Emmius,Guillaume Estius, Gabriel Fano,
Nicolas Faret, Pierre Gilles , George- Henri
Goetze , Louise Labé , Adam Littleton
Nicolas Lloyd , Olivier Maillard , Jean
Maldonat ,Pierre - Martyr d'Anghiera
Pierre- Martyr Vermilio , Etienne Pavillon,
Alexandre Piccolomini , François Piccolo
mini , Jean Price , Jules - Cesar Scaliger ;
Joseph-Juste Scaliger , Jean- Ginés de Sepulveda
, Antoine Sherley , Thomas Sher-
Ley , et André Thevet.
Entre tous ces Sçavants je n'en trouve
aucun de plus distingué et de plus Illustre
, que notre célébre Jerôme Bignon,
dont l'article par conséquent soit et plus
curieux & plus agréable à lire. Vous nie
sçaurez sans doute bon gré de l'avoir
choisi par préférence , et de le voir ici
tel qu'on le trouve dans nôtre Auteur,
JEROME BIGNon.
Jerôme Bignon , nâquit à Paris , l'an
1590. de Rolland Bignon , Avocat au
Parlement , d'une ancienne Famille originaire
d'Anjou , et de Marie Ogier ,
fille de Christophe Ogier aussi Avocat au
Parlement.
Rolland Bignon , qui est mal appellé
t
1
I Vol.
JcJUIN.
1734- 1161
Jerôme dans les opuscules de Loysel
page 582. né au mois de Fevrier de l'an
15. fut un des plus Sçavans hommes
de son siècle. Il avoit été Disciple de
Mrs Roaldés et Maran , fameux Jurisconsultes
de l'Université de Toulouze ;
et lorsque le premier se retira dans celle
de Cahors il laissa sa Chaire de Professeur
en Droit à Rolland Bignon, qui , comme
cetteProfession étoit alors très honorable,
y enseigna publiquement pendant une
année , et dicta d'excellents Paratitles sur
les 5 Livres des Décretales ; étant ensuite
venu à Paris il exerça avec beaucoup
de réputation la Profession d'Avocat ,
laquelle se bornoient alors plusieurs personnes
de naissance et de merite , qui
conservoient la modération des anciennes
Moeurs , et qui étoient prévenus d'une
espece d'aversion contre la validité des
charges introduite depuis peu . Après
avoir brillé dans le Bareau il devint celébre
dans les Consultations, et fut generalement
estimé comme un homme d'une
rare suffisance, etd'une probité singuliere .
Persuadé qu'il étoit plus redevable à
son fils qu'à tout autre il ne voulut confier
son éducation qu'à lui - même. Jerôme
Bignon n'eût pas besoin d'aller chercher
une autre Ecole pour aprendre les Lan
1Vol.
gues
1162 MERCURE DE FRANCE
gues , les Humanitez , l'Eloquence , la
Philosophie , les Mathematiques , l'Histoire
, la Jurisprudence , & la Theologie .
Il aprit sous un si excellent Maître toutes
ces Sciences avec une rapidité extraordinaire
, et se vit presque à la fin de ses
Etudes dans un âge où l'on ne commence.
gueres qu'à délibérer sur les
faire étudier les Enfans .
V
moyens
dev
Dès l'âge de dix ans il donna au Public
un essai de son Erudition qui lui fit dèslors
mériter la qualité d'Auteur . C'est
une Chorographie on Description de la Terre
Sainte , qui fût une preuve des conroissances
qu'il avoit déja acquises dans l'Histoire
, la Geographie et l'Ecriture Sainte,
il n'en demeura pas là , et on fût encore
surpris de voir trois ans après paroître
deux autres Ouvrages de sa composition ,
Ouvrages qui le firent connoître à tout
ce qu'il y avoit de personnes habiles et
considerables dans la France .
Le Roy Henry IV. ayant entendu
patler de lui voulut le voir , et le choisit
pour être en qualité d'Enfant d'Honneur
auprès du Dauphin qui fut depuis
le Roy Louis XIII .
Le jeune Bignon parût à la Cour avec
des manieres tout à fait aisées et polies.
L'austerité d'une Etude assidue n'avoit
I Vol. point
JUIN 1734.
1163
" 2
point obscurci les dispositions naturelles
qu'il avoit pour paroître dans le grand
monde , et le Tumulte et les Engagements
de la Cour ne fû ent point capables
d'affoiblir l'inclination qu'il se sentoit
pour les Sciences.
Il composa en ce tems- là un Traité de
l'Excellence des Rois et du Royaume de
France , pour prouver que les Rois de
France doivent avoir la préséance sur
tous les autres Rois , qui lui attira bien
des aplaudissements. Il le dédia au Roy
Henry IV. qui l'engagea par ordre exprès
à pousser plus loin ses recherches
sur cette matiere .
Mais la Mort funeste de ce Prince arrivée
peu de tems après interrompit ce.
Projet , et détermina même M.Bignon à se
retirer de la Cour. Ce ne fut pas cependant
pour long tems , il y fut bien tôt
rapellé à la sollicitation de Nicolas le
Fevre , nouveau Précepteur du Roy Louis
XIII. et ne put se défendre d'y demeufer
jusqu'à la mort de cet ami, Il travailla
dans cet intervale à l'Edition des Formules
de Marculphe.
En 1614. il fir un voyage en Italie ;
et y visita par tout les plus Illustres d'entre
les Sçavants , qu'il convainquit par
sa présence de ce que la Renommée leur
1. Vol. avoit
1164 MERCURE DE FRANCE
avoit apris de plus incroyable en sa faveur.
Le Pape Paul V. lui donna des marques
singulieres de son estime ; le Cardinal
de Sainte Suzanne , qui n'étoit alors
qne Sécretaire des Brefs , établit avec lui
un commerce d'amitié très étroit , et le
célébre Fra - Paolo charmé de sa conver
sation , l'arrêta quelque tems à Venise
pour en profiter.
Au retour de ce voyage M. Bignon se
donna tout entier aux exercices du Barreau
, où ses premieres actions eûrent un
grand succès .
Son pere le fit pourvoir en 16 20. d'une
Charge d'Avocat General au Grand Conseil
, dans les fonctions de laquelle il surpassa
tout ce qu'on pouvoit attendre de
lui , et il s'acquit une si grande réputation
, que le Roy quelque tems après lo
nomma Conseiller d'Etat , et enfin Avocat
General au Parlement à la place de
M. Servin sur la fin de l'année 1625 .
3
Tout le monde aplaudit à ce choix . Le
Clergé même qui avoit nommé des Députez
pour prier le Roy de faire revivre
en sa faveur l'Ancien Droit , suivant lequel
un des Avocats Generaux devoit
être Clerc , ayant sçû le choix que le
Roy avoit fait de M. Bignon , ne se
I Vol.
conJUIN.
1734. 1165
Contenta pas de renoncer à ses prétentions
on faveur de cet Illustre Magistrat , mais
députa encore vers Sa Majesté pour lui
en faire des remerciments, et vers M. Bignon
pour l'en féliciter.
En effet jamais cette importante place
n'avoit été remplie plus dignement 3 car
sans parler de ses talents naturels qu'on y
vit briller dans toute leur étendue, il signala
en mille occasions sa vigueur à soutenir
les interêts du Parlement , son zele inviolable
pour la justice et sa fermeté inébranlable
contre toutes les attaques de la
faveur. Vertus dont ses envieux entrepri
rent de lui faire des crimes ; après la harangue
sincere , quoique respectueuse
qu'il prononça devant le Roy Louis XIII.
séant en son Lit de Juftice pour la vérification
de quelques Edits . Mais ce Prince
justement prévenu en sa faveur , oposa
la parfaite connoissance qu'il avoit de ses
bonnes intentions aux complots et à l'avidité
des gens d'affaires déchaînez contre
sa trop grande probité.
En 1641. résolu de ne plus vaquer
qu'aux Emplois qu'il occupoit dans le
Conseil d'Etat , il céda sa Chargé d'Avocat
General à M. Briquet son Gendre .
L'année suivante le Cardinal de Richelieu
, quoiqu'assez mal intentionné à son
égard
1. Vol. F
1165 MERCURE DE FRANCE
que
égard , le fit nommer Grand- Maître de
la Bibliothéque duRoy , dans la persuasion
le Public le destinoit par avance à
cette Charge , et seroit choqué qu'elle
fut remplie par un autre. L'amour que
M. Bignon avoit pour les Lettres la lui
fit accepter , et son désinteressement lui
fit refuser dans la suite celle de Sur - Intendant
des Finances.
M. Briquet son Gendre étant mort en
1645. il fut obligé de reprendre sa Charge
pour la conserver à son fils , et continua
de l'exercer jusqu'à sa mort , quoique
de Premier Avocat General,il fut des
venu le second.
Il fut outre cela employé à d'autres
Affaires importantes pour l'Etat ; on sçait
combien il eût de part à l'Ordonnance
de 1639. et avec combien d'équité il
exerça les Commissions de l'Arriereban ,
des Amortissemens et du Domaine , qui
lui furent confiées en differents temps.
La Reine Anne d'Autriche l'apella pen
dant sa Regence aux Conseils les plus
importants.
Ce fut lui qui accommoda, les differends
de Mrs d'Avau et Servien , Plenipotentiaires
à Munster , et qui travailla
avec Mrs de Brienne et d'Emery au
Traité d'Alliance avec la Hollande en
IVol. 1649.
JUIN 1734. 1167
1649. Il fut aussi choisi en l'année 1651 .
pour regler la grande Affaire de la Succession
de Mantoüe , et en 1654. pour
conclure le Traité avec les Villes Anseatiques.
Enfin ce grand Homme qui avoit
toujours fait servir la pieté de baze aux
autres vertus qu'il avoit constamment
pratiqué , finit par une mort précieuse
devant Dieu , le cours d'une vie si glo-.
rieuse aux yeux des hommes. Il mourut
le 7 Avril 1656. d'un Asthme dont il
avoit été attaqué dès l'Automne précédent
, mais qui ne lui fit point cesser
ses fonctions ordinaires . Il étoit alors dans
sa 67, année. Il fut enterré à S. Nicolas
du Chardonnet , où vous avez vû son
Buste de Marbre , fait de la main de Gi
rardon , avec une longue Epitaphe qui
^ commence par ces mots : Hieronimus Bignon
,sui sæculi Amor , Decus , Exemplum,
Miraculum & c.
Iln'avoitjamais voulu permettre qu'on
fit son portrait , mais on le tira pendant
qu'il portoit la parole à la grand- Chambre
; c'est pour cela que Lochon qui l'a
gravé , a mis au bas ces mots. R. Lochon
ad vivumfurtim delineavit.
Voici le Catalogue de ses Ouvrages.
1. Chorographie on Description de la
Terre Sainte, Paris 1600. Cette Description-
A. 1 Vol. Fij . qu'il
1168 MERCURE DE FRANCE
qu'il publia à l'âge de 10 ans , est plus
exacte que toutes celles qui avoient paru
auparavant.
2. Discours de la Ville de Rome Prin
cipales Antiquitez , et singularitez d'icelle.
Paris 1604. in 8. Livre peu commun , dit
l'Abbé Lenglet , et qui vient d'une personne
qui joignoit à un grand goût une
extrême exactitude.
3. Traité Sommaire de l'Election des Pa
pes. Plus le Plan du Conclave. Paris 1605,
in 8. Il y a bien de l'érudition dans ce
petit Ouvrage.
4. De l'Excellence des Rois et du Royaume
de France , traitant de la Preséance et des
Prérogatives des Rois de France par dessus
tous les autres , et des causes d'icelles.
Paris 161c . in 8. Cet Ouvrage a été fait
pour refuter celui que Diego Valdès Con
seiller de la Chambre
Royale de Grenade
,
avoit publié pour soutenir
la Preséance
des Rois d'Espagne
, sous ce Titre : de
Dignitate
Regum Hispania. Granata 1602 . in fol
5. Marculfi Monachi Formula ex Biblioteca
Regia Hier. Bignonius edidit , es
Notis illustravit . Paris 1613. in 8.Idem Are.
gentorati.1655 in 4.Id. Editio.auctior. Accessit
Liber Legis Salica, a. f. R. Pithao , et
calem BignonisNotis illustratus.Paris 1666,
I Vol.
ink
JUIN. 1734- 1189
in 4. Cette seconde Edition qui est con
sidérablement augmentée , a paru par les
soins de ses Fils . Les Notes de M.Bignon
sont si remplies d'érudition et si justes
qu'elles font encore l'admiration des
Sçavants cependant il n'avoit que 23
ans lorsqu'il les donna pour la premiere
fois.
6.Voyage de François Pyrard de Laval,
contenant sa navigation aux Indes Orien
tales , Maldives , Moluques et au Brezil
Paris 1615. in 8. Id. nouvelle Edition augmentée
de divers Traitez. Paris 1679.in 8.
C'est à Jerôme Bignon que nous sommes
redevables de la publication de ce Voyage.
Les Découvertes de Pyrard , homme de
bon sens, mais incapable de s'énoncer par
écrit , seroient demeurées ensevelies dans
l'oubli , si M. Bignon ne l'eût attiré chez
lui , l'invitant même à sa table , et n'eût
pris soin de mettre tous les soirs sur le
papier , ce qu'il tiroit à différentes reprises
de ses entretiens.
Ubbo Emmius , Sçavant Hollandois du
XVI. siécle , fait encore une très bonne
figure dans ce 23. vol. desMem . du P.Niceron,
et l'article mérite d'être lû avec attention
. Il mourut à Groningue le 9 Decem
. 1625. dans sa 79 année. Il a composé
plusieurs bons Ouvrages , dont le plus
Fiij im- I. Vol.
170 MERCURE DE FRANCE
important est celui qui concerne l'An
cienne Grece , et dont voici le titre Vetus
Gracia illustrata complectens Descriptionem
Gracia , res gestas Græcorum, statum Rerumpublicarum
Græcarum. Lugd. Bat. Elzevir.
1626. 3. vol. 8.
>
, Emmius , dit l'Auteur des Memoires ,
qui vit commencer et peut- être finir cette
Edition mit écrit le 6 Decembre
par
1625. trois jours avant sa mort ce qu'il
en pensoit. L'Imprimeur , dit- il , a fait
deux fautes. 1. İl a mis mon Ouvrage
in 8. contre la promesse qu'il m'avoit
faite de l'imprimer in folio , et a rendu
ainsi inutiles des Tables Chorographiques
que j'avois dressées avec beaucoup de soin
en cette forme , pour y être inserées et
dont le Livre a indispensablement besoin,
2º. Il a fait traîner si fort en longueur
l'impression , que le chagrin qui m'est
survenu par la mort de mon fils Egbert,
et ensuite mes infirmitez m'ont empêché
de travailler à une ample Préface que
j'avois dessein de composer lorsque le
Livre seroit prêt à paroître , et dans laquelle
j'aurois fait une comparaison entre
les anciennes Republiques Grecques [ et
celles d'à- présent , montrant ce qu'il y a
* Ce Fils mourut à Orleans
Epitaphe que son Pere lui fit &c.
et on rapporte
1Vol. de
JUIN. 1734 7171
de bon et de mauvais dans les unes et
les autres.
L'Ouvrage d'Emmius a été inseré dans
les Antiquitez Grecques de Gronovius ,
tome 4. page 85. avec des additions
Anecdotes de sa façon . Le troisiéme tome
qui contient l'Etat des principales Republiques
de la Grece , a été imprimé séparement
l'an 1632. à Leyde , chez Elzevir
en 2 vol. in 24. pour être joint au corps
des petites Républiques .
Quand ce Sçavant Homme mourut il
travailloit à l'Histoire de Philippe Roy
de Macédoine et son dessein étoit d'y
montrer pour l'usage des Provinces unies,
par quels moyens ce Prince avoit opprimé
la liberté de la Grece. Il avoit déja
conduit l'Histoire jusqu'à la 15. année du
Regne de ce Monarque.
Au reste on doit sçavoir gré au P. Niceron
d'avoir donné à cet Auteur une/
place dans ces Memoires ; car je trouve
que malgré tout son mérite il n'est guere
connu du commun des Gens de Lettres ,
sur tout dans les Provinces. L'Auteur de
la * Dissertation Historique sur l'ancienne
* Cette Dissertation est dans le Recueil des
Piéces présentées à l'Académie de Marseille pour le
Prix de l'année 1727. avec les Distours prononcez
&c. A Marseille chez Jean- Baptiste Boy , e.
$727. Fiij Aca→
172 MERCURE DE FRANCE
Académie de Marseille, n'avoit sans doute
jamais rien vû par lui même de notre
Ubbe Emmins , puisqu'en le citant il fait
du même homme deux Auteurs différents.
C'est dans la même citation que du Boulay
en latin Bullaus , Auteur de l'Histoire Latine
de l'Université de Paris , est nommé
Bouilland , par une assez plaisante méprise.
>
Passons au XXIV. Tome des Memoires.
De trente-sept Articles de Sçavans
qui le composent , je ne vous nommerai
que ceux pour lesquels je prévois que vous
vous interesserez , tels sont Juste Lipse
Pierre Belon , Pierre Patrix on Patris de
Caën , Provençal d'origine , Honorat de
Beuil de Racan , Nicolas Boileau Despreaux
et Jean Baptiste- Henri du Trousset de Valincourt.
Les autres Articles ont aussi le
mérite d'instruire agréablement , et par
conséquent leur utilité .
J'avois dessein d'insérer ici celui de
Pierre Belon du Mans , le plus grand et
le plus curieux voyageur de son temps ,
mais j'aurois excedé les bornes d'une Lettre.
Deux ou trois Remarques que je ferai
sur son sujet suffiront ici. Belon étoit
grand Physicien , bon Médecin et habile
Botaniste mais il faut convenir qu'il
n'étoit ni Geographe ni Antiquaire , ni
I Vol.
bon
JUIN. 1734. 1173**
bon Critique , cela paroît par les differentes
méprises dans lesquelles il est tombé
à cet égard, et dont j'ai donné des preuve
ailleurs , dans le Livre de ses Observations
de plusieurs singularitez et choses memorables
trouvées en Grece , Asie , Judée ,
Egypte , Arabie et autres Pays étrangers
redigees en trois Livres , avec des Figures ,
imprimé pour la premiere fois à Paris
1553. in 4. C'est cependant un bon Livre
P'exactitude de l'Auteur et par sa capacité
dans tout ce qui concerne l'Histoire
naturelle des Pays qu'il a parcourus. Il a
été traduit en latin par Charles Clusius
d'Arras et imprimé à Anvers.en 1589 .
1. vol. 8 .
par
Belon étoit l'Eleve de Pierre Gilles
attaché au Cardinal d'Armagnac , lequel
a fait deux beauxOuvrages sur le Bosphore
de Thrace , et sur la Ville de Constantinople
, mais on prétend qu'il avoit
péu profité sous un si bon Maître pour
les autres connoissances qui lui manquoient.
De retour de ses voyages , il se
retira à l'Abbaye de S. Germain des Prez,
dont étoit alors Abbé le Cardinal de
Tournon , à qui il étoit fort étroitement
* P. Gilles a aussi écrit sur d'autres sujets . Son
Article est curieux dans le XXIII . T. des Memoires
p. 403.
: I. Vol. Fv attaché
174 MERCURE DE FRANCE
attaché. Suivant les Memoires du P. Niceron
, Belon fut assassiné près de Paris)
par un de ses ennemis , l'an 1564. étant
âgé d'environ 47. ans .
Outre son Voyage du Levant , sous
le nom d'Observations , & c. nous avons
du même Auteur plusieurs autres bons
Ouvrages sur differens sujets de l'Histoire
Naturelle , qui ont été publiés de son
vivant , les uns en Latin , les autres en
François.
Fermer
Résumé : LETTRE de M.... sur la Continuation des Memoires du R. P. Niceron.
La lettre traite des volumes XXIII et XXIV des 'Mémoires pour servir à l'Histoire des Hommes Illustres dans la République des Lettres', publiés par le libraire Briasson. Elle met en lumière plusieurs savants, notamment Jérôme Bignon, né à Paris en 1590. Fils de Rolland Bignon, avocat au Parlement, et de Marie Ogier, Jérôme Bignon reçut une éducation complète incluant les langues, les humanités, l'éloquence, la philosophie, les mathématiques, l'histoire, la jurisprudence et la théologie. À dix ans, il publia une 'Chorographie ou Description de la Terre Sainte', suivie de deux autres ouvrages à treize ans. Le roi Henri IV, impressionné par son érudition, le nomma Enfant d'Honneur auprès du Dauphin. Bignon composa un traité sur l'excellence des rois de France, dédié à Henri IV. Après la mort du roi, il se retira temporairement de la cour avant d'y revenir à la demande de Nicolas Le Fèvre, précepteur de Louis XIII. En 1614, il voyagea en Italie, où il rencontra plusieurs savants illustres et reçut des marques d'estime du pape Paul V et du cardinal de Sainte Suzanne. De retour en France, Bignon reprit ses activités au barreau et fut nommé avocat général au Grand Conseil en 1620. En 1625, il devint conseiller d'État et avocat général au Parlement. Il céda sa charge d'avocat général en 1641 et fut nommé grand-maître de la Bibliothèque du Roi par le cardinal de Richelieu en 1642. Bignon fut impliqué dans plusieurs affaires importantes pour l'État, notamment l'ordonnance de 1639 et les traités de Munster et d'Alliance avec la Hollande. Il mourut le 7 avril 1656 à l'âge de 67 ans. Ses œuvres incluent la 'Chorographie de la Terre Sainte', des discours sur Rome, un traité sur l'élection des papes, et des éditions de textes juridiques. La lettre mentionne également Ubbo Emmius, un savant hollandais du XVIe siècle, connu pour son ouvrage sur l'ancienne Grèce. L'auteur exprime sa gratitude au Père Niceron pour avoir donné une place à cet auteur dans ses mémoires, notant qu'Emmius est peu connu parmi les gens de lettres. Le texte évoque également l'œuvre d'Emmius, insérée dans les 'Antiquités Grecques' de Gronovius, et mentionne ses travaux sur les républiques grecques et l'histoire de Philippe II de Macédoine. Le texte traite également de Pierre Belon, un grand voyageur, physicien, médecin et botaniste. Bien que ses compétences en géographie, antiquités et critique soient jugées insuffisantes, Belon a rédigé plusieurs ouvrages sur l'histoire naturelle des pays qu'il a visités, traduits en latin par Charles Clusius. Le texte mentionne également Pierre Gilles, maître de Belon, et ses œuvres sur le Bosphore de Thrace et Constantinople. Belon a été assassiné près de Paris en 1564 à l'âge d'environ 47 ans.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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