Résultats : 344 texte(s)
Détail
Liste
251
p. 1192-1201
Tragédie d'Adelaïde, &c. [titre d'après la table]
Début :
Sur les plaintes qu'on a faites, de n'avoir fait qu'annoncer la Tragedie [...]
Mots clefs :
Duc de Vendôme, Adélaïde du Guesclin, Duc de Nemours, Coucy, Frère, Amour, Gardes, Mort, Prison, Vengeance, Voltaire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Tragédie d'Adelaïde, &c. [titre d'après la table]
Ur les plaintes qu'on a faites , de n'avoir
fait qu'annoncer la Tragedie
d'Adelaide de M. de Voltaire , après
avoir promis d'en parler plus au long :
nous avons composé l'Extrait qu'on va
lire , avec le plus de soin qu'il nous a été
possible.
Adelaïde du Guesclin , niéce du Conétable
de ce nom , est l'Heroine de ce Poëme.
L'époque de l'action Theatrale , est
le tems des guerres de Charles VII . contre
les Anglois , et la Ville de Lille est
le lieu de la Scene .
.
Adelaide commence la Piece avec le
1. Vol -Sire
JUIN. 1734. 1193
-
Sire de Coucy , Seigneur François . Ce der
nier a aimé Adelaïde avant qu'elle fût
aimée du Duc de Vendôme ; son amitié
pour ce Prince du Sang des Bourbons le
porte non seulement à sacrifier son
amour , mais encore à parler en faveur
de son Rival . Quelques Critiques auroient
souhaité que son amitié ne fut pas allée
plus loin , et jusqu'à lui fire prendre les
armes contre son Maître legitime. Adelaïde
lui fait presser.tir qu'elle ne sçauroit
donner ni son coeur , ni sa main au
Duc de Vendôme , et le prie de détourner
son Ami d'une passion qui le rendroit
malheureux ; Coucy se refuse à ce
bon office , sous prétexte
, sous prétexte qu'il ne veut
pas affliger Vendôme.
Adelaïde allarmée d'un faux bruit qui
court sur la mort du Duc de Nemours ,
Frere du Duc de Vendôme , fait connoî
tre par sa frayeur qu'elle aime Nemours,
elle l'avoue même à Jaise d'Aglure , sa
confidente.
Vendôme vient , il parle d'amour à
Adelaide ; elle lui demande si Coucy ne
lui a point parlé ; le nom de Nemours
lui échappe elle n'en dit pas davantage
, ou plutôt elle pallie ce demi aveu
par une feinte ingenieuse , en lui disant
que le bruit de la mort d'un frere si cher
1.Vol.
Giij ne
194 MERCURE DE FRANCE
ne lui permet pas de parler d'Hymen .
Heureusement pour elle Coucy vient annoncer
à Vendôme que les Troupes du
Dauphin s'avancent à grand pas . Vendôme
est obligé de partir incertain de son
sort.
Adelaïde , ayant appris dans la Scene
précedente , que non- seulement son cher
Nemours n'est pas mort , mais qu'il est
à la tête des Troupes qui s'avancent vers
Lille , flotte entre l'esperance et la crainte .
Vendôme et Coucy ouvrent la Scene
du II . Acre , et font entendre que les
Assiegeans ont été repoussez vigoureusement.
Vendôme rend justice à la valeur
d'un de leurs Chefs qu'il n'a fait prisonnier
qu'après l'avoir blessé ; il dit même
qu'en le combattant il a senti des mouvemens
de pitié qu'il attribuë à l'amour
qu'il sent pour Adelaide , qui ne lui permet
plus cette ferocité qu'il avoit autrefois
dans les combats .
On amene le Prisonnier blessé , c'est
Nemours lui même;Vendôme court l'embrasser
; Nemours se refuse à ses caresses ;
il lui reproche sa rebellion contre son
Prince , et son union avec les Ennemis.
de sa Patrie ; Vendôme ne peut entendre
ces reproches sans colere , et prie son Frere
de les lui épargner ; il l'invite à la fêre
I. Vol.
qui ..
JUIN. 1734.
1195
qui se prépare pour son Hymen avec Ade
laïde. Nemours lui reproche son amour
comme violent et même effrené ; Vendô
me lui répond que la vûë de cet aimable
objet va suffire pour justifier la violence
de sa passion : Il ordonne qu'on fasse venir
Adelaïde.
A la vûë d'Adelaïde , la blessure de
Nemours se rouvre , Vendôme en est allarmé
, il suit ce malheureux Frere qu'on
em porte.
Adelaïde se plaint au Ciel de ce qu'il
ne lui rend son Amant que pour le lui
faire perdre une seconde fois .
Vendôme revient , Adelaïde lui demande
avec empressement des nouvelles de
Nemours ; il lui répond qu'il a arrêté son
sang et Ini reparle d'Amour et d'Hymen.
Adelaïde lui répond fierement
qu'elle ne donnera jamais ni sa main , ni
son coeur à un Prince armé contre son
Roi Vendôme éclate de colere contre
elle. Adelaide le quitte avec une noble
intrépidité , et en l'assurant qu'elle sera
toujours la même. Vendôme ne sçait à
quoi attribuer la resolution d'Adelaïde ,
il en soupçonne quelque secrette inclination;
le silense que Coucy a gardé depuis
qu'il l'a prié de disposer le coeur d'Adelaïde
en sa faveur , lui fait croire qu'il est
I. Vol.
Giljson
1198 MERCURE DE FRANCE
sa parole , il ne peut la suivre sans se deshonorer
; elle lui dit tendrement que la
fortune jalouse lui a toujours envié le nom
de son Epouse ; Nemours lui dir que la
foi qu'il a donnée n'a pas besoin de l'appareil
pompeux qui ne sert qu'à la rendre
plus éclatante sans la rendre plus sûre`s
il atteste les Manes des Rois ses Ayeux ,
et l'ombre du Grand - du Guesclin
dont la cendre repose avec celle de ses
Maîtres ; et c'est sur de si Illustres Garans
qu'il lui jure une foi immortelle.
Adelaide rassurée par de si augustes sermens
, se resout à partir d'un lieu qui
peut lui devenir fatal...
>
Vendôme entre sur le champ , et il
ordonne à ses Gardes de saisir Nemours : *
c'est alors que Nemours croit n'avoir plus
rien à dissimuler ; il brave la colere de
son Frere , le traite d'infidele à son Roi
et à sa Patrie ; Vendôme ordonne à ses
Gardes de le conduire en lien de sûreté
Nemours continuëà le braver , et renouvellant
son serment à Adélaïde , il dit fiement
à leur commun Tyran , qu'il l'en
rend témoin malgré lui. Adelaïde en
pleurs n'oublie rien pour desarmer son fu
bon
que
Vendo
* Les Critiques ne trouvent pas
me ne dise rien aux Spectateurs , de ce qu'il a appris
dans l'entr Acte.
1. Vel. rieux
JUIN. 1734 1199
rieux Amant ; il lui répond que la grace
de Nemours est à l'Autel , et que si elle
balance à l'y suivre , c'est fait de ce trop
heureux Rival.
Un Officier lui vient annoncer qu'on
le trahit , et que c'est le Duc de Nemours
qui est l'Auteur de la trahison
Coucy vient l'inviter à se défendre , il
répond à Coucy qu'il n'est présentement
Occupé que de sa vengeance contre son
Rival , et que dès qu'il l'aura remplie ',
il ira chercher la mort parmi ses ennemis ;
Coucy fremit de cette resolution ; Vendôme
lui dit qu'il n'attend pas ce service
de sa main , et qu'il en trouvera de plus
sûres ; Coucy craignant d'être prévenu
lui promet de lui donner des preuves de
sou zele dont il n'aura plus à douter .
Vendôme le reconnoît pour son veritable
Ami , et lui dit de l'avertir par un
coup de canon de l'execution de sa promesse.
Au V. Acte , Vendôme , tout plein de
sa vengeance dont il n'a pas voulu se reposer
sur un Ami aussi vertueux que
Coucy , demande à un de ses gardes si le
Soldat qu'il a choisi pour tuer Nemours
est prêt à executer ses ordres ; ce Garde
lui répond qu'il n'en doit point douterjet
qu'on a vû ce Soldat s'avancer vers
1. Vol.
G vj la
1200 MERCURE DE FRANCE
la prison ; Vendôme ordonne qu'on se
retire .
C'est ici le premier moment où la nature
lui fait sentir des remords , il flotte assez
long tems entre la haine et l'amitié. Il
se détermine enfin en faveur du sang ; il
appelle ses Gardes, un Officier vient; Vendôme
lui ordonne d'aller faire revoquer
l'ordre sanglant qu'il a donné contre son
Frere ; cet Officier lui fait connoître qu'il
craint qu'ikn'en soit plus tems , et qu'on
vient de transporter un Cadavre de la
Prison par l'ordre de Coucy. Vendôme
ne doute point que Coucy ne l'ait trop
bien servi ; un coup de canon qu'il entend
, ou qu'il croit entendre ne lui permet
plus de douter de l'assassinat ; il se
livre tout entier aux plus vifs remords .
Adelaïde , qui ignore ce qui peut s'être
passé , vient le trouver prête à le suivre à
'Autel , puisque la vie de son Amant
est à ce prix ; Vendôme ne lui répond que
par des gemissemens , et lui dit enfin que
Nemours n'est plus . Adelaide l'accable
de reproches et d'injures ; il veut se donner
la mort ; Coucy arrive et lui retient
le bras ; Vendôme lui reproche d'avoir
exccuté un Arrêt dicté par la jalousie s
Coucy lui répond que le crime n'en auroit
pas été moins commis , puisqu'une
1. Vola autre
JUIN. 1734. 1201
autre main en alloit être chargée. Adelaide
fait des reproches très touchans à
Coucy , dont elle n'auroit jamais soupçonné
qu'un coup si funeste pût partir.
Coucy se justifie enfin envers tous les
il déclare que le corps qu'on a vû
deux ,
sortir de la Prison est celui du Soldat qui
avoit déja le bras levé pour le poignarder
, et qui auroit achevé le crime s'il
n'avoit pas été poignardé lui même . Il ordonne
qu'on fasse venir Nemours ; ce
Prince vient , son Frere le reçoit à bras
ouverts ; il se punit des ordres cruels
qu'il avoit donnés , en se privant d'Adelaïde
, et se reconcilie avec son Frere , en
lui cedant cet objet de son Amour. La
Tragedie finit par une ferme resolution
que Vendôme fait de faire oublier ses égaremens
à force de vertus ; il consent à
rentrer sous l'obéissance de son Maître.
La fin de cette Piece à paru très- touchante.
Les principaux Roles qui sont celui
de Vendôme , d'Adelaïde , de Nemours,
et de Coucy , ont été patfaitement bien
remplis , par le sieur du Frêne , la Dlle
Gossin , le sieur Grandval , et le sieur le
Grand.
fait qu'annoncer la Tragedie
d'Adelaide de M. de Voltaire , après
avoir promis d'en parler plus au long :
nous avons composé l'Extrait qu'on va
lire , avec le plus de soin qu'il nous a été
possible.
Adelaïde du Guesclin , niéce du Conétable
de ce nom , est l'Heroine de ce Poëme.
L'époque de l'action Theatrale , est
le tems des guerres de Charles VII . contre
les Anglois , et la Ville de Lille est
le lieu de la Scene .
.
Adelaide commence la Piece avec le
1. Vol -Sire
JUIN. 1734. 1193
-
Sire de Coucy , Seigneur François . Ce der
nier a aimé Adelaïde avant qu'elle fût
aimée du Duc de Vendôme ; son amitié
pour ce Prince du Sang des Bourbons le
porte non seulement à sacrifier son
amour , mais encore à parler en faveur
de son Rival . Quelques Critiques auroient
souhaité que son amitié ne fut pas allée
plus loin , et jusqu'à lui fire prendre les
armes contre son Maître legitime. Adelaïde
lui fait presser.tir qu'elle ne sçauroit
donner ni son coeur , ni sa main au
Duc de Vendôme , et le prie de détourner
son Ami d'une passion qui le rendroit
malheureux ; Coucy se refuse à ce
bon office , sous prétexte
, sous prétexte qu'il ne veut
pas affliger Vendôme.
Adelaïde allarmée d'un faux bruit qui
court sur la mort du Duc de Nemours ,
Frere du Duc de Vendôme , fait connoî
tre par sa frayeur qu'elle aime Nemours,
elle l'avoue même à Jaise d'Aglure , sa
confidente.
Vendôme vient , il parle d'amour à
Adelaide ; elle lui demande si Coucy ne
lui a point parlé ; le nom de Nemours
lui échappe elle n'en dit pas davantage
, ou plutôt elle pallie ce demi aveu
par une feinte ingenieuse , en lui disant
que le bruit de la mort d'un frere si cher
1.Vol.
Giij ne
194 MERCURE DE FRANCE
ne lui permet pas de parler d'Hymen .
Heureusement pour elle Coucy vient annoncer
à Vendôme que les Troupes du
Dauphin s'avancent à grand pas . Vendôme
est obligé de partir incertain de son
sort.
Adelaïde , ayant appris dans la Scene
précedente , que non- seulement son cher
Nemours n'est pas mort , mais qu'il est
à la tête des Troupes qui s'avancent vers
Lille , flotte entre l'esperance et la crainte .
Vendôme et Coucy ouvrent la Scene
du II . Acre , et font entendre que les
Assiegeans ont été repoussez vigoureusement.
Vendôme rend justice à la valeur
d'un de leurs Chefs qu'il n'a fait prisonnier
qu'après l'avoir blessé ; il dit même
qu'en le combattant il a senti des mouvemens
de pitié qu'il attribuë à l'amour
qu'il sent pour Adelaide , qui ne lui permet
plus cette ferocité qu'il avoit autrefois
dans les combats .
On amene le Prisonnier blessé , c'est
Nemours lui même;Vendôme court l'embrasser
; Nemours se refuse à ses caresses ;
il lui reproche sa rebellion contre son
Prince , et son union avec les Ennemis.
de sa Patrie ; Vendôme ne peut entendre
ces reproches sans colere , et prie son Frere
de les lui épargner ; il l'invite à la fêre
I. Vol.
qui ..
JUIN. 1734.
1195
qui se prépare pour son Hymen avec Ade
laïde. Nemours lui reproche son amour
comme violent et même effrené ; Vendô
me lui répond que la vûë de cet aimable
objet va suffire pour justifier la violence
de sa passion : Il ordonne qu'on fasse venir
Adelaïde.
A la vûë d'Adelaïde , la blessure de
Nemours se rouvre , Vendôme en est allarmé
, il suit ce malheureux Frere qu'on
em porte.
Adelaïde se plaint au Ciel de ce qu'il
ne lui rend son Amant que pour le lui
faire perdre une seconde fois .
Vendôme revient , Adelaïde lui demande
avec empressement des nouvelles de
Nemours ; il lui répond qu'il a arrêté son
sang et Ini reparle d'Amour et d'Hymen.
Adelaïde lui répond fierement
qu'elle ne donnera jamais ni sa main , ni
son coeur à un Prince armé contre son
Roi Vendôme éclate de colere contre
elle. Adelaide le quitte avec une noble
intrépidité , et en l'assurant qu'elle sera
toujours la même. Vendôme ne sçait à
quoi attribuer la resolution d'Adelaïde ,
il en soupçonne quelque secrette inclination;
le silense que Coucy a gardé depuis
qu'il l'a prié de disposer le coeur d'Adelaïde
en sa faveur , lui fait croire qu'il est
I. Vol.
Giljson
1198 MERCURE DE FRANCE
sa parole , il ne peut la suivre sans se deshonorer
; elle lui dit tendrement que la
fortune jalouse lui a toujours envié le nom
de son Epouse ; Nemours lui dir que la
foi qu'il a donnée n'a pas besoin de l'appareil
pompeux qui ne sert qu'à la rendre
plus éclatante sans la rendre plus sûre`s
il atteste les Manes des Rois ses Ayeux ,
et l'ombre du Grand - du Guesclin
dont la cendre repose avec celle de ses
Maîtres ; et c'est sur de si Illustres Garans
qu'il lui jure une foi immortelle.
Adelaide rassurée par de si augustes sermens
, se resout à partir d'un lieu qui
peut lui devenir fatal...
>
Vendôme entre sur le champ , et il
ordonne à ses Gardes de saisir Nemours : *
c'est alors que Nemours croit n'avoir plus
rien à dissimuler ; il brave la colere de
son Frere , le traite d'infidele à son Roi
et à sa Patrie ; Vendôme ordonne à ses
Gardes de le conduire en lien de sûreté
Nemours continuëà le braver , et renouvellant
son serment à Adélaïde , il dit fiement
à leur commun Tyran , qu'il l'en
rend témoin malgré lui. Adelaïde en
pleurs n'oublie rien pour desarmer son fu
bon
que
Vendo
* Les Critiques ne trouvent pas
me ne dise rien aux Spectateurs , de ce qu'il a appris
dans l'entr Acte.
1. Vel. rieux
JUIN. 1734 1199
rieux Amant ; il lui répond que la grace
de Nemours est à l'Autel , et que si elle
balance à l'y suivre , c'est fait de ce trop
heureux Rival.
Un Officier lui vient annoncer qu'on
le trahit , et que c'est le Duc de Nemours
qui est l'Auteur de la trahison
Coucy vient l'inviter à se défendre , il
répond à Coucy qu'il n'est présentement
Occupé que de sa vengeance contre son
Rival , et que dès qu'il l'aura remplie ',
il ira chercher la mort parmi ses ennemis ;
Coucy fremit de cette resolution ; Vendôme
lui dit qu'il n'attend pas ce service
de sa main , et qu'il en trouvera de plus
sûres ; Coucy craignant d'être prévenu
lui promet de lui donner des preuves de
sou zele dont il n'aura plus à douter .
Vendôme le reconnoît pour son veritable
Ami , et lui dit de l'avertir par un
coup de canon de l'execution de sa promesse.
Au V. Acte , Vendôme , tout plein de
sa vengeance dont il n'a pas voulu se reposer
sur un Ami aussi vertueux que
Coucy , demande à un de ses gardes si le
Soldat qu'il a choisi pour tuer Nemours
est prêt à executer ses ordres ; ce Garde
lui répond qu'il n'en doit point douterjet
qu'on a vû ce Soldat s'avancer vers
1. Vol.
G vj la
1200 MERCURE DE FRANCE
la prison ; Vendôme ordonne qu'on se
retire .
C'est ici le premier moment où la nature
lui fait sentir des remords , il flotte assez
long tems entre la haine et l'amitié. Il
se détermine enfin en faveur du sang ; il
appelle ses Gardes, un Officier vient; Vendôme
lui ordonne d'aller faire revoquer
l'ordre sanglant qu'il a donné contre son
Frere ; cet Officier lui fait connoître qu'il
craint qu'ikn'en soit plus tems , et qu'on
vient de transporter un Cadavre de la
Prison par l'ordre de Coucy. Vendôme
ne doute point que Coucy ne l'ait trop
bien servi ; un coup de canon qu'il entend
, ou qu'il croit entendre ne lui permet
plus de douter de l'assassinat ; il se
livre tout entier aux plus vifs remords .
Adelaïde , qui ignore ce qui peut s'être
passé , vient le trouver prête à le suivre à
'Autel , puisque la vie de son Amant
est à ce prix ; Vendôme ne lui répond que
par des gemissemens , et lui dit enfin que
Nemours n'est plus . Adelaide l'accable
de reproches et d'injures ; il veut se donner
la mort ; Coucy arrive et lui retient
le bras ; Vendôme lui reproche d'avoir
exccuté un Arrêt dicté par la jalousie s
Coucy lui répond que le crime n'en auroit
pas été moins commis , puisqu'une
1. Vola autre
JUIN. 1734. 1201
autre main en alloit être chargée. Adelaide
fait des reproches très touchans à
Coucy , dont elle n'auroit jamais soupçonné
qu'un coup si funeste pût partir.
Coucy se justifie enfin envers tous les
il déclare que le corps qu'on a vû
deux ,
sortir de la Prison est celui du Soldat qui
avoit déja le bras levé pour le poignarder
, et qui auroit achevé le crime s'il
n'avoit pas été poignardé lui même . Il ordonne
qu'on fasse venir Nemours ; ce
Prince vient , son Frere le reçoit à bras
ouverts ; il se punit des ordres cruels
qu'il avoit donnés , en se privant d'Adelaïde
, et se reconcilie avec son Frere , en
lui cedant cet objet de son Amour. La
Tragedie finit par une ferme resolution
que Vendôme fait de faire oublier ses égaremens
à force de vertus ; il consent à
rentrer sous l'obéissance de son Maître.
La fin de cette Piece à paru très- touchante.
Les principaux Roles qui sont celui
de Vendôme , d'Adelaïde , de Nemours,
et de Coucy , ont été patfaitement bien
remplis , par le sieur du Frêne , la Dlle
Gossin , le sieur Grandval , et le sieur le
Grand.
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Résumé : Tragédie d'Adelaïde, &c. [titre d'après la table]
Le texte présente un résumé de la tragédie 'Adelaïde' de Voltaire. L'action se déroule durant les guerres de Charles VII contre les Anglais, à Lille, et met en scène Adelaïde du Guesclin, nièce du Conétable du Guesclin. La pièce commence avec le sire de Coucy, François, qui aime Adelaïde mais renonce à elle pour le duc de Vendôme, son ami et rival. Adelaïde, alarmée par une fausse rumeur sur la mort du duc de Nemours, frère de Vendôme, avoue son amour pour Nemours à sa confidente. Vendôme, ignorant ces sentiments, déclare son amour à Adelaïde, qui lui demande s'il a parlé à Coucy. Nemours, blessé, est capturé et amené devant Vendôme, qui organise un mariage avec Adelaïde. Nemours, gravement blessé, est soigné, et Adelaïde refuse Vendôme, révélant son amour pour Nemours. Vendôme, jaloux, ordonne l'assassinat de Nemours, mais Coucy empêche l'exécution. Nemours survit, et Vendôme, rongé par les remords, se réconcilie avec son frère en lui cédant Adelaïde. La pièce se termine par la résolution de Vendôme de se racheter par des vertus et de se soumettre à son maître. Les rôles principaux ont été interprétés par le sieur du Frêne, la Dlle Gossin, le sieur Grandval, et le sieur le Grand.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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252
p. 1201-1202
« La Dlle Conel, nouvelle Actrice, dont on a parlé dans le dernier Mercure a reparu [...] »
Début :
La Dlle Conel, nouvelle Actrice, dont on a parlé dans le dernier Mercure a reparu [...]
Mots clefs :
Mademoiselle Connell, Agathe, École des femmes, Tragédie, Didon, La Pupille
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « La Dlle Conel, nouvelle Actrice, dont on a parlé dans le dernier Mercure a reparu [...] »
La Dlle Conel , nouvelle Actrice , dont
on a parlé dans le dernier Mercure , a re-
I. Vol. paru
1202 MERCURE DE FRANCE
•
paru sur la Scene au commencement de
cc mois et a rempli avec succès les
Rôles d'Agnés , dans l'Ecole des Femmes ;
d'Agathe, dans les Folies Amoureuses ; de
Monime , dans Mithridate ; d'Isabelle
dans l'Ecole des Maris ; d'Andromaque ,
dans la Tragedie de ce nom ; d'Aricie ,
dans le Phedre ; d'Agathe , dans Attendezmoi
sous l'Orme ; d'Irene , dans Andronic
, et de Chimene , dans le Cid.
On a donné le Lundi 21. de ce mois, la
premiereReprésention d'Enée et de Didon,
Tragedie que le Puplic a reçûë avec de
très grands applaudissemens ; nous en
parlerons plus au long.
On doit donner sur le même Théatre
une petite Comédie en Prose , en un Acte ,
intitulée , La Pupile , dont nous rendrons
compte.
on a parlé dans le dernier Mercure , a re-
I. Vol. paru
1202 MERCURE DE FRANCE
•
paru sur la Scene au commencement de
cc mois et a rempli avec succès les
Rôles d'Agnés , dans l'Ecole des Femmes ;
d'Agathe, dans les Folies Amoureuses ; de
Monime , dans Mithridate ; d'Isabelle
dans l'Ecole des Maris ; d'Andromaque ,
dans la Tragedie de ce nom ; d'Aricie ,
dans le Phedre ; d'Agathe , dans Attendezmoi
sous l'Orme ; d'Irene , dans Andronic
, et de Chimene , dans le Cid.
On a donné le Lundi 21. de ce mois, la
premiereReprésention d'Enée et de Didon,
Tragedie que le Puplic a reçûë avec de
très grands applaudissemens ; nous en
parlerons plus au long.
On doit donner sur le même Théatre
une petite Comédie en Prose , en un Acte ,
intitulée , La Pupile , dont nous rendrons
compte.
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Résumé : « La Dlle Conel, nouvelle Actrice, dont on a parlé dans le dernier Mercure a reparu [...] »
Le texte mentionne la Dlle Conel, nouvelle actrice dont la carrière a été présentée dans le Mercure de France. Elle a interprété plusieurs rôles, dont Agnès dans 'L'École des Femmes' et Chimène dans 'Le Cid'. Le 21 du mois, la tragédie 'Enée et Didon' a été applaudie. La comédie 'La Pupille' est également prévue.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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253
p. 1202-1203
MADRIGAL. POUR Mlle P...... qui joua le Role de Teglis dans la Tragedie de Pyrrhus et Teglis, représentée à l'Arsenal.
Début :
Quand sous l'habit de Melpomene, [...]
Mots clefs :
Pyrrhus et Téglis, Tragédie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MADRIGAL. POUR Mlle P...... qui joua le Role de Teglis dans la Tragedie de Pyrrhus et Teglis, représentée à l'Arsenal.
MADRIGAL.
POUR Mlle P .... qui joua le Role de
Teglis dans la Tragedie de Pyrrhus et
Teglis , représentée à l'Arsenal.
Uand sous l'habit de Melpomene ,
Attirant tous les coeurs à vous ,
L'Amour vous , voit verser des larmes sur la
Scene ;
Il vous croit tendre , et tombe à vos genoux ,
>
I. Vol.
Yous
JUIN. $ 734. 1203
Vous entretenir de sa peine ;
Mais bien loin deflater son amoureux tourment ,
Voyant qu'on ne veut pas l'écouter seulement ;
Ah ! dit ce petit Dieu , fondant en pleurs luimême
,
Vous feignez de pleurer , charmant objet que
j'aime ,
Et je pleure sincerement.
Mlle Malcrais de la Vigne.
POUR Mlle P .... qui joua le Role de
Teglis dans la Tragedie de Pyrrhus et
Teglis , représentée à l'Arsenal.
Uand sous l'habit de Melpomene ,
Attirant tous les coeurs à vous ,
L'Amour vous , voit verser des larmes sur la
Scene ;
Il vous croit tendre , et tombe à vos genoux ,
>
I. Vol.
Yous
JUIN. $ 734. 1203
Vous entretenir de sa peine ;
Mais bien loin deflater son amoureux tourment ,
Voyant qu'on ne veut pas l'écouter seulement ;
Ah ! dit ce petit Dieu , fondant en pleurs luimême
,
Vous feignez de pleurer , charmant objet que
j'aime ,
Et je pleure sincerement.
Mlle Malcrais de la Vigne.
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Résumé : MADRIGAL. POUR Mlle P...... qui joua le Role de Teglis dans la Tragedie de Pyrrhus et Teglis, représentée à l'Arsenal.
Le madrigal, daté de juin 1734, est dédié à Mlle Malcrais de la Vigne, qui joue Teglis dans 'Pyrrhus et Teglis'. L'Amour, ému par ses larmes sur scène, comprend qu'elles sont feintes pour toucher le public. Déçu, il pleure en reconnaissant son talent.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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254
p. 1203-1204
« L'Académie Royale de Musique, continuë toujours avec succès les Représentations [...] »
Début :
L'Académie Royale de Musique, continuë toujours avec succès les Représentations [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique, Ballet des Éléments, Comédiens-Italiens, Petit Maître amoureux, Ballet, Musique, Succès, Opéra
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « L'Académie Royale de Musique, continuë toujours avec succès les Représentations [...] »
L'Académie Royale de Musique , continue
toujours avec succès les Représentations
du Ballet des Elemens ; c'est le même
qui fut dansé par le Roi en son Château
des Thuilleries au mois de Decembre
1721. Nous avons déja donné un Extrait
du Poëme , de la composition de
M.Roy, qu'on peut voir dans le Mercure
de Janvier 1722. Ce Ballet qui fut remis
ensuite au Theatre de l'Opera en Mai
1625. et en Fevrier 1727. est toujours
composé d'un Prologue , dont le sujet est.
·le Cabos, et de quatre differentes Entrées ,
l'Air , le Feu , l'Eau , et laTerre . Les Dlles
Antier , le Maure et Petitpas remplissent
parfaitement bien les principaux Rôles
les Sieurs Dun ,
que
Tribou et Jeliot. Le Ballet composé par le
Sr. Blondi , fait beaucoup de plaisir , et
les danses en particulier sont très- bien cade
même
I. Vol.
Chassé ,
racte1204
MERCURE DE FRANCE
racterisées , distribuées avec art et parfaitement
executées par les meilleurs Sujets
de l'Académie.Cet Opera a un fort grand
succès , la Musique est de M. Destouches .
Les Comediens Italiens préparent une
Comedie nouvelle , sous le titre du Petit
Maître Amoureux , dont on parlera en
son tems.
toujours avec succès les Représentations
du Ballet des Elemens ; c'est le même
qui fut dansé par le Roi en son Château
des Thuilleries au mois de Decembre
1721. Nous avons déja donné un Extrait
du Poëme , de la composition de
M.Roy, qu'on peut voir dans le Mercure
de Janvier 1722. Ce Ballet qui fut remis
ensuite au Theatre de l'Opera en Mai
1625. et en Fevrier 1727. est toujours
composé d'un Prologue , dont le sujet est.
·le Cabos, et de quatre differentes Entrées ,
l'Air , le Feu , l'Eau , et laTerre . Les Dlles
Antier , le Maure et Petitpas remplissent
parfaitement bien les principaux Rôles
les Sieurs Dun ,
que
Tribou et Jeliot. Le Ballet composé par le
Sr. Blondi , fait beaucoup de plaisir , et
les danses en particulier sont très- bien cade
même
I. Vol.
Chassé ,
racte1204
MERCURE DE FRANCE
racterisées , distribuées avec art et parfaitement
executées par les meilleurs Sujets
de l'Académie.Cet Opera a un fort grand
succès , la Musique est de M. Destouches .
Les Comediens Italiens préparent une
Comedie nouvelle , sous le titre du Petit
Maître Amoureux , dont on parlera en
son tems.
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Résumé : « L'Académie Royale de Musique, continuë toujours avec succès les Représentations [...] »
L'Académie Royale de Musique présente avec succès le Ballet des Éléments, initialement dansé par le Roi au Château des Tuileries en décembre 1721. Un extrait du poème de M. Roy a été publié dans le Mercure de janvier 1722. Ce ballet a été repris au Théâtre de l'Opéra en mai 1625 et en février 1727. Il comprend un prologue sur le Chaos et quatre entrées représentant l'Air, le Feu, l'Eau et la Terre. Les rôles principaux sont interprétés par les demoiselles Antier, le Maure et Petitpas, ainsi que par les sieurs Dun, Tribou et Jeliot. Le ballet, chorégraphié par M. Blondi, est apprécié pour ses danses bien exécutées par les meilleurs sujets de l'Académie. La musique est composée par M. Destouches. Par ailleurs, les Comédiens Italiens préparent une nouvelle comédie intitulée 'Le Petit Maître Amoureux'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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255
p. 1407-1415
MARIE STUART, Reine d'Ecosse, Tragédie de M. ***.
Début :
Voicy l'Extrait que nous avons promis de cette Piece, représentée depuis [...]
Mots clefs :
Marie Stuart, Reine Élisabeth, Duc de Norfolk, Palais, Amant, Entendre, Ministre, Coeur, Juges, Pièce
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MARIE STUART, Reine d'Ecosse, Tragédie de M. ***.
MARIE STUART , Reine d'Ecosse ,
Tragédie de M. * * * .
VoOicy l'Extrait que nous avons promis
de cette Piece , représentée depuis
peu au Théatre François.
ACTERS.
Elisabeth, Reine d'Angleterre. La Dlle de
Balicourt.
Marie Stuatd , Reine d'Ecosse , La Dlle
11. Vol.
du Fresne.
Le
1408 MERCURE DE FRANCE
Le Duc de Norfolck ,
Dudley , Comte
le Sr Dufresne.
le Sr Grandval.
Lle S.Sarrazin
de
Leycestre,
d'Elisabeth' Ministres
S
Cecil ,
Heliton , l'un des Principaux Officiers
du Palais , ami du Duc de Norfolck
le Sr le Grand
Monros , Ami d'Helton , le Sr Dubreuil.
Chelsey, Confidente d'Elizabeth, la Dlle
Fouvenot.
Un Officier des Gardes d'Elizabeth , le Sr
Un Garde ,
de la 7 horilliere.
le Sr d'Angeville , jeune.
La Scene est à Londres dans une Sale
'du Palais d'Elizabeth.
>
Quoique cette Tragédie dont l'Auteur
ne s'est pas encore fait connoître , n'ait
pas eu beaucoup de succès , on n'a pas
laissé de rendre justice à la plume dont
elle est sortie. On en a trouvé la versification
noble soutenue et élegante.
On n'a pas été , à beaucoup près , aussi
content de l'action Theatrale , non plus
que des caractéres ; celui d'Elizabeth a
été mieux rendu que tous les autres . Au
reste , comme les Représentations n'en
ont pas été assez nombreuses , nous
n'avons pû retenir l'ordre de la Piéce
Scene par Scene : ainsi nous esperons que
II. Vol. le
JUIN 1734. 1409
le Public voudra bien nous excuser , si
nous ne faisons pas un détail assez exact
de ce Poëme .
Il commence par une Scene déliberative
entre Elizabeth et ses deux Ministres ,
et Cecil. La Reine expose les raisons qui
la portent à les consulter. Il s'agit de faire
périr Marie Stuard , son ennemie et sa
prisonniere , ou de la renvoyer à son
Royaume d'Ecosse. Dudley amoureux de
cette Reine opprimée , opine pour son
rétablissement sur le Trône , et Cecil fait
entendre qu'il importe à la Reine d'Angleterre
de perdre une si redoutable Rivale
; Elizabeth se rend en apparence au
Conseil de Dudley , et lui ordonne d'aller
délivrer Marie Stuard. A peine ce Ministre
est-il sorti pour aller exécuter sa
commission , que Cecil , pour se vanger
de ce qu'il l'a emporté sur lui , ou pour
d'autres interêts qu'il n'explique pas ,
fait entendre à Elizabeth que Dudley a
moins parlé en Ministre, qu'en Amant de
Marie Stuard , quand il a pris si hautement
şon parti. Elizabeth qui aime secretement
Dudley , et qui a trop de fierté
pour ne s'en croire pas aimée , est mortellement
frappée de la double infidelité
qu'on lui fait ; elle se détermine dans un
monologue à approfondir cette fatale dé-
G.Y Avant couverte.
1410 MERCURE DE FRANCE
que
Avant Marie Stuard eut été mise
en liberré , il y a apparence que le Duc
de Norfolck , son Partisan et son Amant
déclaré , avoit conspiré pour la tirer de
prison à force ouverte. Il est introduit
secretement par Helton son ami , et l'un
des principaux Officiers du Palais dans
un Appartement des moins fréquentez.
Marie Stuard est agréablement surprise
de le trouver au sortir de sa prison , mais,
à ce premier mouvement de joye succede
un sentiment de vertu , quand elle apprend
que le Duc ne parle pas moins
que de déthrôner Elizabeth et de la faire
périr. Norfolck ne peut s'empêcher d'admirer
la noblesse du coeur d'une si illustre
Amante ; il lui promet de ne s'attacher
uniquement qu'à la rendre à ses sujets
et à la rétablir sur le Trône paternel ; il
la quitte pour aller mettre la derniere
main à un projet si glorieux.
Dudley instruit de la conjuration de
Norfolck par un perfide Ami à qui ce
Duc s'est inprudemment confié , veut
tirer parti de ce secret , pour s'insinuer
dans les bonnes graces de Marie Stuard
qu'il aime , comme nous l'avons déja fait
remarquer il lui fait valoir les services
qu'il lui a déja rendus et ceux qu'il peut
encore lui rendre. Marie Stuard qui le
11 Vol
Croir
JUIN. 1734. 1411
que,
croit dans les interêts d'Elizabeth , dont
il est Ministre , se défie de lui ; Dudley
lui proteste qu'il est entierement à elle ,
quoique Ministre de sa Rivale ; Marie
Stuard toujours plus défiante, lui dit
soit qu'il trahisse Elizabeth , soit qu'il
vueille la tromper elle - même, il est ég lement
coupable : Dudley lui répond qu'il ne
peut mieux prouver son innocence que
par l'aveu d'un crime qu'elle a ignoré
jusqu'à ce jour , et ce crime s'explique
par une déclaration d'amour ; M Stuard
prend cette déclaration pour un dernier
pige qu'il lui tend par l'ordre d'Eli
Zabeth ; par malheur Elizabeth atrive
dans ce premier mouvement de colere
et de défiance . M. Stuard lui fait entendre
qu'elle a découvert son artifice et
qu'elle ne doute point que Dudley , qui
a porté l'audace jusqu'à lui parlerd'amour,
ne l'ait fait, pour la faire expliquer avec
plus d'ouverture de coeur.
M. Stuard s'étant retirée avec assez de
hauteur ; Elizabeth éclate contre Dudley
dont elle s'est toujours crûe aimée ; Dudley
a recours à l'artifice , et répond à
Elizabeth que c'est uniquement pour
mieux sonder le coeur de M. Stuard qu'il
lui a parlé d'amour ; Elizabeth le congédie
sans lui faire l'honneur de le croire..
IL Vol.
Gvj Elle:
1412 MERCURE DE FRANCE
Elle est plus indignée contre Dudley
comme sujet perfide , que comme Amant
infidele ; son coeur se tourne tout entier
du côté de l'ambition et paroît craindre
beaucoup plus de perdre le Trône, qu'un
coeur si peu digne d'elle.
Dans l'Acte suivant , Dudley fait une
seconde tentative auprès de M. Stuard ;
il est plus précisement instruit des démarches
du Duc de Norfolck , par le
même traître qui s'est déja ouvert à lui
il dit à M. Stuard qu'il ne tient
qu'à lui de perdre son Rival qu'il
ne tient qu'à elle de se sauver elle même,
en acceptant ses services ; M. Stuard
emportée par son amour,lui répond, que
la premiere loi qu'elle lui impose c'est de
sauver Norfolck ; Dudley frémit à cette
proposition et se retire , la menace à la
bouche ; il ne tarde pas à consommer sa
trahison ; Elizabeth ne le reconnoît que
trop à l'arrivée de Cecil : Ce Ministre
dont on a parlé dans la premiere Scene ,
Jui fait entendre qu'on vient de lui dire
que le Duc de Norfolck a de l'intelligence
dans le Palais et qu'il va en instruire Elizabeth.
M. Stuard l'arrête , et croit ne
pouvoir mieux sauver son Amant qu'en
s'accusant elle- même. Cecil , au comble
de ses voeux , va tout dire à Elizabeth ;
II. Vola M.
JUIN. 1734- 1413
M. Stuard en est dans la consternation .
Pour surcroît de malheur elle voit approcher
le Duc ; elle frémit du peril où
il est exposé : elle lui apprend qu'on sçait
tout ; et qu'il a été trahi par quelqu'un
des conjurez ; elle lui ordonne de sortir
du Palais ; Norfolck vent perir avec elle;
mais elle l'oblige enfin de sortir , après lui
avoir dit que sa qualité de Reine met sa
vie en seureté .
Voilà le noeud de la Piéce arrivé à son
plus haut point , tout ce qui suit s'achemine
à grand pas à un dénouement des
plus funestes pour l'un et pour l'autre.
Amant.
Chelsey Confidente d'Elizabeth , ouvre
la Scene du quatrième Acte avec Marie
Stuard elle lui fait entendre que la
Reine sa maîtresse est toute disposée à
la recevoir entre ses bras , poutvû qu'elle.
vucille bien s'y jetter ; elle ajoute que
c'est le seul azile qui lui reste contre ses
juges, qui vont s'assembler pour lui faire.
son Procès ; au nom de Juge, M. Stuard
ne peut se contenir ; elle ne reconnoît
point de Tribunal qui puisse interroger
une Reine , encore moins la condamner;
elle consent cependant à voir Elizabeth :
cette derniere vient , et après un préam
bule d'indulgence et mênie de tendresse ;
11. Vol.
elle
1414 MERCURE DE FRANCE
elle fait un détail de tous les crimes dont
elle prétend que M. Stuard s'est noircie.
On a trouvé cette Scene très - belle , à la
longueur près ; M. Stuard ,sans répondre
d'une maniere détaillée à chaque chef
d'accusation , nie tout et parle avec tant
d'aigreur à Elizabeth , qu'elle l'oblige à
lui répondre sur le même ton et à se retirer
dans le dessein de lui faire subir le
honteux interrogatoire dont on l'a déja
menacée. Cecil vient l'avertir qu'il est
tems qu'elle paroisse devant ses Juges ;
il veut même lui donner des conseils ;
elle lui ferme la bouche et lui dit en sortant
que ses indignes Juges ne soutiendront
pas un seul de ses regards.
Marie Stuard ayant comparu devant le
Tribunal qu'elle a meprisé , et en ayant
été renvoyée par Cecil , qui a craint que
sa présence n'imposât à ses Juges, apprend
par des avis confus que le Duc de Norfolck
a déja subi l'arrêt de mort qui a
été prononcé contre lui ; elle ne songe
plus qu'à le suivre au tombeau . Monros
ami d'Helton , dont on a déja parlé
comme entierement attaché aux interêts
de Norfolck , vient lui donner une fausse
joye ; il lui dir que le Duc suivi d'une
nombreuse et vaillante escorte ,
vers le Palais d'une maniere à faire trem-
11. Vol. bier
JUIN. 1734. 1419
à se
bler et ses Juges et la Reine même ;
M. Stuard en rend graces au Ciel et se
livre à la douceur de l'espérance ; mais
Helton qui arrive un moment après , la
replonge dans le désespoir , par le funeste
récit qu'il lui fait de la mort de
Norfolck , qui s'est percé le sein sur la
fausse nouvelle qu'on lui a donnée que
sa chereReine venoit de perdre la vie sur
un échafaut : on vient avertir M. Stuard
qu'il est tems d'exécuter l'arrêt de sa
condamnation . Elle ne balance pas
résoudre à la mort pour ne pas survivreà
son Amant. Au reste dans les deux
premieres Représentations on fiitoit reparoître
Elizabeth , résolue en apparen
ce à révoquer Parrêt prononcé contre
M. Stuard , qu'elle traite de soeur dans
tout le cours de la Piéce ; mais cette fin
de Tragédie ayant paru trop ressemblanteaux
dernieres Scenes du Comte d'Essex ,
on a jugé à propos de retrancher une
imitation qui avoit indisposé la plupart
des Spectateurs.
Tragédie de M. * * * .
VoOicy l'Extrait que nous avons promis
de cette Piece , représentée depuis
peu au Théatre François.
ACTERS.
Elisabeth, Reine d'Angleterre. La Dlle de
Balicourt.
Marie Stuatd , Reine d'Ecosse , La Dlle
11. Vol.
du Fresne.
Le
1408 MERCURE DE FRANCE
Le Duc de Norfolck ,
Dudley , Comte
le Sr Dufresne.
le Sr Grandval.
Lle S.Sarrazin
de
Leycestre,
d'Elisabeth' Ministres
S
Cecil ,
Heliton , l'un des Principaux Officiers
du Palais , ami du Duc de Norfolck
le Sr le Grand
Monros , Ami d'Helton , le Sr Dubreuil.
Chelsey, Confidente d'Elizabeth, la Dlle
Fouvenot.
Un Officier des Gardes d'Elizabeth , le Sr
Un Garde ,
de la 7 horilliere.
le Sr d'Angeville , jeune.
La Scene est à Londres dans une Sale
'du Palais d'Elizabeth.
>
Quoique cette Tragédie dont l'Auteur
ne s'est pas encore fait connoître , n'ait
pas eu beaucoup de succès , on n'a pas
laissé de rendre justice à la plume dont
elle est sortie. On en a trouvé la versification
noble soutenue et élegante.
On n'a pas été , à beaucoup près , aussi
content de l'action Theatrale , non plus
que des caractéres ; celui d'Elizabeth a
été mieux rendu que tous les autres . Au
reste , comme les Représentations n'en
ont pas été assez nombreuses , nous
n'avons pû retenir l'ordre de la Piéce
Scene par Scene : ainsi nous esperons que
II. Vol. le
JUIN 1734. 1409
le Public voudra bien nous excuser , si
nous ne faisons pas un détail assez exact
de ce Poëme .
Il commence par une Scene déliberative
entre Elizabeth et ses deux Ministres ,
et Cecil. La Reine expose les raisons qui
la portent à les consulter. Il s'agit de faire
périr Marie Stuard , son ennemie et sa
prisonniere , ou de la renvoyer à son
Royaume d'Ecosse. Dudley amoureux de
cette Reine opprimée , opine pour son
rétablissement sur le Trône , et Cecil fait
entendre qu'il importe à la Reine d'Angleterre
de perdre une si redoutable Rivale
; Elizabeth se rend en apparence au
Conseil de Dudley , et lui ordonne d'aller
délivrer Marie Stuard. A peine ce Ministre
est-il sorti pour aller exécuter sa
commission , que Cecil , pour se vanger
de ce qu'il l'a emporté sur lui , ou pour
d'autres interêts qu'il n'explique pas ,
fait entendre à Elizabeth que Dudley a
moins parlé en Ministre, qu'en Amant de
Marie Stuard , quand il a pris si hautement
şon parti. Elizabeth qui aime secretement
Dudley , et qui a trop de fierté
pour ne s'en croire pas aimée , est mortellement
frappée de la double infidelité
qu'on lui fait ; elle se détermine dans un
monologue à approfondir cette fatale dé-
G.Y Avant couverte.
1410 MERCURE DE FRANCE
que
Avant Marie Stuard eut été mise
en liberré , il y a apparence que le Duc
de Norfolck , son Partisan et son Amant
déclaré , avoit conspiré pour la tirer de
prison à force ouverte. Il est introduit
secretement par Helton son ami , et l'un
des principaux Officiers du Palais dans
un Appartement des moins fréquentez.
Marie Stuard est agréablement surprise
de le trouver au sortir de sa prison , mais,
à ce premier mouvement de joye succede
un sentiment de vertu , quand elle apprend
que le Duc ne parle pas moins
que de déthrôner Elizabeth et de la faire
périr. Norfolck ne peut s'empêcher d'admirer
la noblesse du coeur d'une si illustre
Amante ; il lui promet de ne s'attacher
uniquement qu'à la rendre à ses sujets
et à la rétablir sur le Trône paternel ; il
la quitte pour aller mettre la derniere
main à un projet si glorieux.
Dudley instruit de la conjuration de
Norfolck par un perfide Ami à qui ce
Duc s'est inprudemment confié , veut
tirer parti de ce secret , pour s'insinuer
dans les bonnes graces de Marie Stuard
qu'il aime , comme nous l'avons déja fait
remarquer il lui fait valoir les services
qu'il lui a déja rendus et ceux qu'il peut
encore lui rendre. Marie Stuard qui le
11 Vol
Croir
JUIN. 1734. 1411
que,
croit dans les interêts d'Elizabeth , dont
il est Ministre , se défie de lui ; Dudley
lui proteste qu'il est entierement à elle ,
quoique Ministre de sa Rivale ; Marie
Stuard toujours plus défiante, lui dit
soit qu'il trahisse Elizabeth , soit qu'il
vueille la tromper elle - même, il est ég lement
coupable : Dudley lui répond qu'il ne
peut mieux prouver son innocence que
par l'aveu d'un crime qu'elle a ignoré
jusqu'à ce jour , et ce crime s'explique
par une déclaration d'amour ; M Stuard
prend cette déclaration pour un dernier
pige qu'il lui tend par l'ordre d'Eli
Zabeth ; par malheur Elizabeth atrive
dans ce premier mouvement de colere
et de défiance . M. Stuard lui fait entendre
qu'elle a découvert son artifice et
qu'elle ne doute point que Dudley , qui
a porté l'audace jusqu'à lui parlerd'amour,
ne l'ait fait, pour la faire expliquer avec
plus d'ouverture de coeur.
M. Stuard s'étant retirée avec assez de
hauteur ; Elizabeth éclate contre Dudley
dont elle s'est toujours crûe aimée ; Dudley
a recours à l'artifice , et répond à
Elizabeth que c'est uniquement pour
mieux sonder le coeur de M. Stuard qu'il
lui a parlé d'amour ; Elizabeth le congédie
sans lui faire l'honneur de le croire..
IL Vol.
Gvj Elle:
1412 MERCURE DE FRANCE
Elle est plus indignée contre Dudley
comme sujet perfide , que comme Amant
infidele ; son coeur se tourne tout entier
du côté de l'ambition et paroît craindre
beaucoup plus de perdre le Trône, qu'un
coeur si peu digne d'elle.
Dans l'Acte suivant , Dudley fait une
seconde tentative auprès de M. Stuard ;
il est plus précisement instruit des démarches
du Duc de Norfolck , par le
même traître qui s'est déja ouvert à lui
il dit à M. Stuard qu'il ne tient
qu'à lui de perdre son Rival qu'il
ne tient qu'à elle de se sauver elle même,
en acceptant ses services ; M. Stuard
emportée par son amour,lui répond, que
la premiere loi qu'elle lui impose c'est de
sauver Norfolck ; Dudley frémit à cette
proposition et se retire , la menace à la
bouche ; il ne tarde pas à consommer sa
trahison ; Elizabeth ne le reconnoît que
trop à l'arrivée de Cecil : Ce Ministre
dont on a parlé dans la premiere Scene ,
Jui fait entendre qu'on vient de lui dire
que le Duc de Norfolck a de l'intelligence
dans le Palais et qu'il va en instruire Elizabeth.
M. Stuard l'arrête , et croit ne
pouvoir mieux sauver son Amant qu'en
s'accusant elle- même. Cecil , au comble
de ses voeux , va tout dire à Elizabeth ;
II. Vola M.
JUIN. 1734- 1413
M. Stuard en est dans la consternation .
Pour surcroît de malheur elle voit approcher
le Duc ; elle frémit du peril où
il est exposé : elle lui apprend qu'on sçait
tout ; et qu'il a été trahi par quelqu'un
des conjurez ; elle lui ordonne de sortir
du Palais ; Norfolck vent perir avec elle;
mais elle l'oblige enfin de sortir , après lui
avoir dit que sa qualité de Reine met sa
vie en seureté .
Voilà le noeud de la Piéce arrivé à son
plus haut point , tout ce qui suit s'achemine
à grand pas à un dénouement des
plus funestes pour l'un et pour l'autre.
Amant.
Chelsey Confidente d'Elizabeth , ouvre
la Scene du quatrième Acte avec Marie
Stuard elle lui fait entendre que la
Reine sa maîtresse est toute disposée à
la recevoir entre ses bras , poutvû qu'elle.
vucille bien s'y jetter ; elle ajoute que
c'est le seul azile qui lui reste contre ses
juges, qui vont s'assembler pour lui faire.
son Procès ; au nom de Juge, M. Stuard
ne peut se contenir ; elle ne reconnoît
point de Tribunal qui puisse interroger
une Reine , encore moins la condamner;
elle consent cependant à voir Elizabeth :
cette derniere vient , et après un préam
bule d'indulgence et mênie de tendresse ;
11. Vol.
elle
1414 MERCURE DE FRANCE
elle fait un détail de tous les crimes dont
elle prétend que M. Stuard s'est noircie.
On a trouvé cette Scene très - belle , à la
longueur près ; M. Stuard ,sans répondre
d'une maniere détaillée à chaque chef
d'accusation , nie tout et parle avec tant
d'aigreur à Elizabeth , qu'elle l'oblige à
lui répondre sur le même ton et à se retirer
dans le dessein de lui faire subir le
honteux interrogatoire dont on l'a déja
menacée. Cecil vient l'avertir qu'il est
tems qu'elle paroisse devant ses Juges ;
il veut même lui donner des conseils ;
elle lui ferme la bouche et lui dit en sortant
que ses indignes Juges ne soutiendront
pas un seul de ses regards.
Marie Stuard ayant comparu devant le
Tribunal qu'elle a meprisé , et en ayant
été renvoyée par Cecil , qui a craint que
sa présence n'imposât à ses Juges, apprend
par des avis confus que le Duc de Norfolck
a déja subi l'arrêt de mort qui a
été prononcé contre lui ; elle ne songe
plus qu'à le suivre au tombeau . Monros
ami d'Helton , dont on a déja parlé
comme entierement attaché aux interêts
de Norfolck , vient lui donner une fausse
joye ; il lui dir que le Duc suivi d'une
nombreuse et vaillante escorte ,
vers le Palais d'une maniere à faire trem-
11. Vol. bier
JUIN. 1734. 1419
à se
bler et ses Juges et la Reine même ;
M. Stuard en rend graces au Ciel et se
livre à la douceur de l'espérance ; mais
Helton qui arrive un moment après , la
replonge dans le désespoir , par le funeste
récit qu'il lui fait de la mort de
Norfolck , qui s'est percé le sein sur la
fausse nouvelle qu'on lui a donnée que
sa chereReine venoit de perdre la vie sur
un échafaut : on vient avertir M. Stuard
qu'il est tems d'exécuter l'arrêt de sa
condamnation . Elle ne balance pas
résoudre à la mort pour ne pas survivreà
son Amant. Au reste dans les deux
premieres Représentations on fiitoit reparoître
Elizabeth , résolue en apparen
ce à révoquer Parrêt prononcé contre
M. Stuard , qu'elle traite de soeur dans
tout le cours de la Piéce ; mais cette fin
de Tragédie ayant paru trop ressemblanteaux
dernieres Scenes du Comte d'Essex ,
on a jugé à propos de retrancher une
imitation qui avoit indisposé la plupart
des Spectateurs.
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Résumé : MARIE STUART, Reine d'Ecosse, Tragédie de M. ***.
La pièce 'Marie Stuart, Reine d'Écosse' est une tragédie jouée au Théâtre Français. Elle met en scène Élisabeth, Reine d'Angleterre, et Marie Stuart, Reine d'Écosse, détenue par Élisabeth. Les personnages clés incluent Dudley, Comte de Leicester, Cecil, et le Duc de Norfolk, tous impliqués dans des intrigues politiques et amoureuses. L'intrigue commence par une délibération entre Élisabeth et ses ministres sur le sort de Marie Stuart. Dudley, amoureux de Marie Stuart, plaide pour sa libération, tandis que Cecil suggère son élimination. Élisabeth ordonne initialement la libération de Marie Stuart, mais Cecil la convainc que Dudley agit par amour pour Marie Stuart. Jalouse, Élisabeth décide d'enquêter sur cette trahison. Le Duc de Norfolk, partisan de Marie Stuart, conspire pour la libérer. Dudley, informé de cette conjuration, tente de gagner la confiance de Marie Stuart en lui offrant ses services, mais elle rejette ses avances. Élisabeth, découvrant la déclaration d'amour de Dudley à Marie Stuart, le congédie. Dans les actes suivants, Dudley trahit Norfolk en révélant sa conjuration à Élisabeth. Marie Stuart, pour protéger Norfolk, s'accuse elle-même. Norfolk est exécuté après avoir appris la fausse nouvelle de la mort de Marie Stuart. Marie Stuart, condamnée à mort, refuse de survivre à son amant et accepte son exécution. La pièce se termine par l'exécution de Marie Stuart, sans la réapparition d'Élisabeth, contrairement aux premières représentations.
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256
p. 172-174
« L'Académie royale de Musique continue les Fêtes de Thalie. Ce spectacle, depuis le brillant [...] »
Début :
L'Académie royale de Musique continue les Fêtes de Thalie. Ce spectacle, depuis le brillant [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français, Tragédie, Rôle, Académie royale de musique
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « L'Académie royale de Musique continue les Fêtes de Thalie. Ce spectacle, depuis le brillant [...] »
'Académie royale de Mufique continue les Fé
tes de Thalie. Ce fpectacle , depuis le brillant
début de Mile Cohendet , attire plus de monde
qu'il n'en attiroit d'abord. Le goût du Public
pour la voix & le talent de la nouvelle Actrice eft
toujours très-vif. On retirera le 3 Décembre les
Fêtes de Thalie , pour mettre Thésée.
Les Comédiens François font tous réunis depuis
le 18 de Novembre. Tandis qu'une partie faifoit
les délices de la Cour à Fontainebleau , ceux qui
étoient restés à Paris , foutenoient le théatre avec
fuccès ; & ils avoient de très-fortes repréfentations,
quoiqu'ils ne donnaffent que des pieces de répertoire
. Mlle Clairon a beaucoup joué , & toujours
fupérieurement. Les rolles qu'elle a repréſentés
pendant l'abfence , font Agrippine dans Britannicus
, Zaire , Roxane dans Bajazet , Cléopatre dans
Rodogune , Ariane , Pauline dans Polieudte , Phédre
, la Reine dans Guftave , Alzire , Penelope &
Médée. Ces deux dernieres tragédies font très -médiocres
; on les donne moins fréquemment que
celles des bons Auteurs . Penelope eut une chute
marquée dans la nouveauté , à peine put-elle fupporter
fix représentations , & elle a eu bien de la
peine à fe relever. Il y a apparence que cette tragédie
auroit été abandonnée, fi Baron , à la rentrée
au théatre , n'avoit voulu jouer les trois reconnoiffances
qui fe trouvent dans le rolle d'U
lyffe . Les deux premiers actes de Penelope font
extrêmement froids , la verfification de toute la
DECEMBRE. 1754 173
piece eft dure , profaïque & prefque toujours platte
, les rolles épifodiques font infupportables ; il y
a un perfonnage d'Yphife qu'on devroit fupprimer,
il eft abfolument inutile ; & l'amour de Telemaque
pour cette Princefle eft ridicule. Il y a des endroits
touchans dans les trois derniers actes ; la
reconnoiffance du cinquiéme fait fur- tout un
grand effet. Cette piece eft difficile à bien rendre ;
elle exige le plus grand foin de la part des Ateurs
, & principalement de la part de Penelope .
Mlle Clairon y ravit tous les fpectateurs . M. La-
Doue qui eft chargé du rolle d'Ulyſſe , s'en acquitte
auffi très-bien . Le dénouement de Penelope
devroit être en action au lieu d'être en récit. Il
y a un autre défaut dans ce dénouement , c'eſt
qu'Ulyffe n'y paroît pas : on feroit bien aife de le
revoir triomphant de fes ennemis , & paifible poffeffeur
de fes Etats .
Il nous paroît que les connoiffeurs eftiment plus.
Médée que Penelope ; les deux grands refforts de
la tragédie , la terreur & la pitié , s'y font fentir
plus vivement. Il n'y a point de perfonnage épi
fodique ; l'action en eft fimple & grande , & le
fujet bien traité. Il y a des beautés dans tous les
actes. Le quatrieme eft frappant. Médée prête à
poignarder fes enfans , & retenue par l'amour maternel
, remplit tous les fpectateurs d'effroi . Il
feroit à fouhaiter que le rolle de Jafon fût moins
foible & moins odieux . Les prétextes dont il fe
fert abandonner Médée , font miférables ;
ils excitent une indignation générale . Les rolles
de Créon & de Créufe ne font gueres mieux faits ,
Longepierre a tout facrifié à celui de Médée. Il
ya quelquefois de l'élévation dans les vers de
cette piece, il y a même des tours naturels & heureux
, mais le ftyle n'eft pas foutenu . On voit que
Hiij
174 MERCURE DE FRANCE:
P'Auteur s'eft fatigué quand il a voulu mettre de la
force & de la nobleffe dans l'expreffion ; fon imagination
s'épuife promptement . La tragédie de
Médée fut reçue froidement lorfqu'elle fut mife
au théatre en 1694 , & cet ouvrage étoit preſque
oublié , lorfque les Comédiens en rifquerent une
repriſe au mois de Septembre 1728. Mlle Balicour
y rempliffoit le principal rolle , & le fuccès
en fut prodigieux , quoiqu'on ne le repréfentât
que les Mardis & Vendredis , les deux jours de
fa femaine ou la Comédie eft le moins fréquentée.
Depuis la retraite de Mlle Balicour , la tragédie
de Médée s'eft foutenue par les talens de Miles
Dumefnil & Clairon ; & tant qu'il y aura de grandes
Actrices au théatre , elle s'y maintiendra.
M. Molé a continué fon début par les rollesd'Horace
dans l'Ecole des femmes , de Seleucus
dans Rodogune , de Fréderic dans Guſtave , du
Chevalier dans le Diftrait , & de Charmant dans
l'Oracle,
On a donné le Samedi 16 , à la fuite du Ma
homet de M. de Voltaire , la petite Comédie de
la Pupille. Mlle Guéant y a débuté pour la troifieme
fois par le rolle de la Pupille ; elle a joué le
lendemain Mélite dans le Philofophe marié. On
a trouvé qu'elle avoit la figure plus agréable &
plus noble que jamais , & qu'elle avoit beaucoup
acquis du côté du fentiment & de l'expreffion . Le
public paroît defirer qu'elle foit reçue pour les
rolles de feconde amoureuſe.
tes de Thalie. Ce fpectacle , depuis le brillant
début de Mile Cohendet , attire plus de monde
qu'il n'en attiroit d'abord. Le goût du Public
pour la voix & le talent de la nouvelle Actrice eft
toujours très-vif. On retirera le 3 Décembre les
Fêtes de Thalie , pour mettre Thésée.
Les Comédiens François font tous réunis depuis
le 18 de Novembre. Tandis qu'une partie faifoit
les délices de la Cour à Fontainebleau , ceux qui
étoient restés à Paris , foutenoient le théatre avec
fuccès ; & ils avoient de très-fortes repréfentations,
quoiqu'ils ne donnaffent que des pieces de répertoire
. Mlle Clairon a beaucoup joué , & toujours
fupérieurement. Les rolles qu'elle a repréſentés
pendant l'abfence , font Agrippine dans Britannicus
, Zaire , Roxane dans Bajazet , Cléopatre dans
Rodogune , Ariane , Pauline dans Polieudte , Phédre
, la Reine dans Guftave , Alzire , Penelope &
Médée. Ces deux dernieres tragédies font très -médiocres
; on les donne moins fréquemment que
celles des bons Auteurs . Penelope eut une chute
marquée dans la nouveauté , à peine put-elle fupporter
fix représentations , & elle a eu bien de la
peine à fe relever. Il y a apparence que cette tragédie
auroit été abandonnée, fi Baron , à la rentrée
au théatre , n'avoit voulu jouer les trois reconnoiffances
qui fe trouvent dans le rolle d'U
lyffe . Les deux premiers actes de Penelope font
extrêmement froids , la verfification de toute la
DECEMBRE. 1754 173
piece eft dure , profaïque & prefque toujours platte
, les rolles épifodiques font infupportables ; il y
a un perfonnage d'Yphife qu'on devroit fupprimer,
il eft abfolument inutile ; & l'amour de Telemaque
pour cette Princefle eft ridicule. Il y a des endroits
touchans dans les trois derniers actes ; la
reconnoiffance du cinquiéme fait fur- tout un
grand effet. Cette piece eft difficile à bien rendre ;
elle exige le plus grand foin de la part des Ateurs
, & principalement de la part de Penelope .
Mlle Clairon y ravit tous les fpectateurs . M. La-
Doue qui eft chargé du rolle d'Ulyſſe , s'en acquitte
auffi très-bien . Le dénouement de Penelope
devroit être en action au lieu d'être en récit. Il
y a un autre défaut dans ce dénouement , c'eſt
qu'Ulyffe n'y paroît pas : on feroit bien aife de le
revoir triomphant de fes ennemis , & paifible poffeffeur
de fes Etats .
Il nous paroît que les connoiffeurs eftiment plus.
Médée que Penelope ; les deux grands refforts de
la tragédie , la terreur & la pitié , s'y font fentir
plus vivement. Il n'y a point de perfonnage épi
fodique ; l'action en eft fimple & grande , & le
fujet bien traité. Il y a des beautés dans tous les
actes. Le quatrieme eft frappant. Médée prête à
poignarder fes enfans , & retenue par l'amour maternel
, remplit tous les fpectateurs d'effroi . Il
feroit à fouhaiter que le rolle de Jafon fût moins
foible & moins odieux . Les prétextes dont il fe
fert abandonner Médée , font miférables ;
ils excitent une indignation générale . Les rolles
de Créon & de Créufe ne font gueres mieux faits ,
Longepierre a tout facrifié à celui de Médée. Il
ya quelquefois de l'élévation dans les vers de
cette piece, il y a même des tours naturels & heureux
, mais le ftyle n'eft pas foutenu . On voit que
Hiij
174 MERCURE DE FRANCE:
P'Auteur s'eft fatigué quand il a voulu mettre de la
force & de la nobleffe dans l'expreffion ; fon imagination
s'épuife promptement . La tragédie de
Médée fut reçue froidement lorfqu'elle fut mife
au théatre en 1694 , & cet ouvrage étoit preſque
oublié , lorfque les Comédiens en rifquerent une
repriſe au mois de Septembre 1728. Mlle Balicour
y rempliffoit le principal rolle , & le fuccès
en fut prodigieux , quoiqu'on ne le repréfentât
que les Mardis & Vendredis , les deux jours de
fa femaine ou la Comédie eft le moins fréquentée.
Depuis la retraite de Mlle Balicour , la tragédie
de Médée s'eft foutenue par les talens de Miles
Dumefnil & Clairon ; & tant qu'il y aura de grandes
Actrices au théatre , elle s'y maintiendra.
M. Molé a continué fon début par les rollesd'Horace
dans l'Ecole des femmes , de Seleucus
dans Rodogune , de Fréderic dans Guſtave , du
Chevalier dans le Diftrait , & de Charmant dans
l'Oracle,
On a donné le Samedi 16 , à la fuite du Ma
homet de M. de Voltaire , la petite Comédie de
la Pupille. Mlle Guéant y a débuté pour la troifieme
fois par le rolle de la Pupille ; elle a joué le
lendemain Mélite dans le Philofophe marié. On
a trouvé qu'elle avoit la figure plus agréable &
plus noble que jamais , & qu'elle avoit beaucoup
acquis du côté du fentiment & de l'expreffion . Le
public paroît defirer qu'elle foit reçue pour les
rolles de feconde amoureuſe.
Fermer
Résumé : « L'Académie royale de Musique continue les Fêtes de Thalie. Ce spectacle, depuis le brillant [...] »
En décembre 1754, les activités théâtrales étaient marquées par plusieurs événements notables. L'Académie royale de Musique poursuivait les 'Fêtes de Thalie', attirant un public de plus en plus nombreux grâce à la performance de Mile Cohendet. Cependant, à partir du 3 décembre, ces fêtes ont été remplacées par la représentation de 'Thésée'. Parallèlement, les Comédiens Français, réunis depuis le 18 novembre, ont donné des représentations tant à la cour de Fontainebleau qu'à Paris, malgré un répertoire limité. Ces représentations ont été couronnées de succès. Mlle Clairon a interprété plusieurs rôles prestigieux, notamment dans 'Britannicus', 'Zaire', 'Bajazet', 'Rodogune', 'Polyeucte', 'Gustave', 'Alzire', 'Pénélope' et 'Médée'. Parmi ces pièces, les tragédies 'Pénélope' et 'Médée' ont reçu des critiques mitigées. 'Pénélope' a été accueillie tièdement et a été sauvée par l'interprétation de Baron. La pièce a été critiquée pour sa versification dure et ses rôles épisodiques insupportables. En revanche, 'Médée' a été mieux appréciée pour ses effets de terreur et de pitié, bien que certains rôles aient été jugés faibles. Cette tragédie a connu un succès renouvelé grâce à des actrices comme Mlle Balicour, Duménil et Clairon. M. Molé a également interprété plusieurs rôles avec succès. Quant à Mlle Guéant, elle a fait ses débuts dans 'La Pupille' et 'Mélite', recevant des éloges pour son jeu et son expression.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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257
p. 174-185
« Les Comédiens Italiens ont fait l'ouverture de leur théatre le Mercredi 13 Novembre par l'Heureux [...] »
Début :
Les Comédiens Italiens ont fait l'ouverture de leur théatre le Mercredi 13 Novembre par l'Heureux [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Air, Capitaine, Servante, Vieillard, Chocolat, Personnages, Maître, Époux, Yeux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Les Comédiens Italiens ont fait l'ouverture de leur théatre le Mercredi 13 Novembre par l'Heureux [...] »
Les Comédiens Italiens ont fait l'ouverture de
leur théatre le Mercredi 13 Novembre par l'Heu
reux ftratagême , très -ingénieufe Comédie Françoife
, en trois actes , de M. de Marivaux ; elle a
été fuivie de Baftien de Baftienne . Le Jeudi 14
DECEMBRE. 1754. 175
ils ont repris , toujours avec fuccès , la Servante
Maitreffe, dont voici l'extrait .
ACTEURS.
Pandolfe , vieillard ,
Zerbine , fa fervante ,
Scapin , fon valet ,
M. Rochard.
Mlle Favart.
Perfonnage muet.
Pandolfe ouvre la fcene par le monologue fuivant
; il eſt affis devant une petite table.
AIR.
Long-tems attendre
Sans voir venir ;
Au lit s'étendre ,
Ne point dormir ;
Grand'peine prendre
Sans parvenir ;
Sont trois fujets d'aller fe pendre.
C'eft auffi ſe mocquer des gens ;
Voilà trois heures que j'attends
Que ma fervante enfin m'apporte
Mon chocolat ; elle n'a pas le tems.
Cependant il faut que je forte :
Elle me dira , que m'importe ?
Oh ! c'en eft trop ; je fuis trop bon ;
Mais je vais prendre un autre ton .
Le vieillard appelle Zerbine de toutes les for
ces. En fe retournant il apperçoit Scapin , qui eft
entré fans dire mot , & qui fe tient tranquillement
derriere lui. Comme malgré les cris de fon
Hiiij
176 MERCURE DE FRANCE .
maître , il ne s'empreffe pas d'aller chercher Zerbine
, Pandolphe eft obligé de le pouffer dehors
par les épaules. Il continue enfuite de fe plaindre
de fa fervante.
Récitatif accompagné .
Voilà pourtant , voilà comment
On fait foi-même fon tourment.
Je trouve cette enfant qui me paroît gentille ;
Je la demande à fa famille ;
On ! me la donne , & depuis ce moment
Je l'éleve comme ma fille .
Que m'en revient-il à préfent ?
Mes bontés l'ont rendue à tel point infolente ,
Capricieuſe , impertinente ,
Qu'il faut avant qu'il foit long- tems ,
S'attendre enfin que la fervante
Sera la maîtreffe céans.
Oh ! tout ceci m'impatiente.
Zerbine entre en difputant avec Scapin , & lui
dit :
AIR.
Eh bien , finiras - tu , deux fois , trois fois ;.
Je n'en ai pas le tems , cela te doit fuffire.
Fort bien.
Pandolfe , à part.
Zerbine.
Combien de fois faut-il te le redire ?
DECEMBRE. 1754. 177
Si ton maître eft preffé faut- il que je le fois
A merveille.
Pandolfe , à part.
Zerbine.
Finis , Scapin , fi tu m'en crois ,
Ma patience enfin ſe laffe ;
Si tu la réduis aux abois ,
Je vais faire pleuvoir vingt foufflets fur ta face.
Elle fe met en devoir de fouffleter Scapin :
Pandolfe l'arrête , & lui demande ce qui peut la
mettre fi fort en courroux ; elle lui répond qu'elle
ne veut pas fouffrir que Scapin lui donne des leçons.
Pandolfe a beau lui dire que c'eſt de fa
part , & qu'il veut avoir fon chocolat . Ce chocolat
n'eft point fait , & Zerbine n'a pas le tems
d'en faire . Pandolfe impatienté , & hors de luimême
, fait beaucoup rire Scapin ; Zerbine s'en
offenfe , & Pandolfe avoue qu'on a raiſon de ſe
mocquer de lui , mais il affure que tout ceci finira.
AIR.
Sans fin , fans ceffe ,
Nouveaux procès ;
Et fi , & mais ,
Et oui , & non ,
Tout fur ce ton ;
Jamais , jamais , au grand jamais ,
On n'eft en paix,
Hv
178 MERCURE DE FRANCE.
Mais que t'en femble à toi ?
Dois-je en crever , moi ?
Non , par ma foi.
Un jour viendra ,
Qu'on fe plaindra ,
Qu'on gémira ,
Quand on fera
Dans la détreffe ;
On maudira
à Scapin.
Son trifte fort ,
On fentira
Qu'on avoit tort .
à Scapin
Qu'en penfes-tu ? n'eft - il pas vrai è
Hai ,
Dis , toi ,
Quoi !
Oui , oui fur ma foi.
Sans fin , fans ceffe , & c:
Pandolfe demande à Scapin fa canne & fon épée
pour fortir. Zerbine 's'y oppofe ; il faut encore
que le vieillard en paffe par là. L'infolence de fa
fervante lui fait prendre la réfolution de fe marier
, fût-ce à une guenon. Zerbine le raille fur
ce prétendu mariage , & lui dit que s'il fe marie
, il n'aura pas d'autre femme qu'elle . Cette
imprudence redouble la colere de Pandolfe ; Zerbine
infifte fur fon projet.
DECEMBRE. 1754 179
Duo en Dialogue.
Je devine
Zerbine.
A ces yeux , à cette mine
Fine ,
Lutine ,
Affaffine ;
Vous avez beau dire non ;
Bon , bon ;
Vos yeux me difent que fi ,
Et je veux le croire ainfi .
Pandolfe.
Ma divine ,
Vous vous trompez à ma mine
Très-fort ;
Prenez un peu moins l'effor ,
Mes yeux avec moi d'accord ,
Vous diront vous avez tort.
Zerbine.
Mais comment ! mais pourquoi
Je fuis jolie ,
Mais très-jolie ,
Douce , polie :
Voulez-vous de l'agrément , de la fineffe
Des bons airs de toute espéce ,
Gentilleffe ,,
Nobleffe ?
Regardez-moi.
Hvj
480. MERCURE DE FRANCE.
Pandolfe , à part.
Sur mon ame , elle me tente ;
Elle eft charmante.
Zerbine , à
part.
Pour le coup il devient tendre .
Il faut fe rendre.
Pandolfe.
Ah ! laiffes-moi.
Zerbine.
Il faut me prendre.
Pandolfe.
Tu rêves , je crois.
Zerbine.
à Pandolfe.
Tu veux en vain t'en défendre :
11 faut que tu fois à moi.
Zerbine,
Je t'aime ,
Je fuis à toi ,
Sois donc à moi.
Pandolfe?
O peine extrême !
Je fuis , ma foi ,
Tout hors de moi.
Le fecond acte commence par un air que
Zerbine chante feule , & dont les paroles conviennent
à toutes les filles qui pourront fe trouves
dans le cas où elle est.
DECEMBRE. 1754. 181
AIR.
Vous gentilles ,
Jeunes filles ,
'Aux vieillards qui tendez vos filets ;
Qui cherchez des maris , beaux ou laids ,
Apprenez , retenez bien mes fecrets ;
Vous allez voir comme je fais.
Tour à tour avec adreffe ,
Je menace , je careffe ;
Quelque tems
Je me défends ,
Mais enfin je me rends.
Elle a mis Scapin dans fes intérêts ; il confent
à faire le perfonnage d'un Capitaine déguifé qui
la demande en mariage. Zerbine appercevant
Pandolfe , fait femblant de fe repentir de fes infolences
& de fa témérité , & elle lui dit qu'elle eft
recherchée par le Capitaine Tempête , auquel
elle a promis fa foi . Elle chante enfuite les paroles
qui fuivent.
Récitatif accompagné .
Jouiffez cependant du deftin le plus doux ;
Soyez long- tems l'heureux époux
De celle que le Ciel aujourd'hui vous deftine .
Souvenez -vous quelquefois de Zerbine ,
Qui tant qu'elle vivra ſe ſouviendra de vous .
AIR , tendrement.
A Zerbine laiff ez , par grace,
Sz MERCURE DEFRANCE,
Quelque place
En votre fouvenir ;
L'en bannir ;
Quelle difgrace !
Eh comment la foutenir ?
Pandolfe s'attendrit par dégrés , & veut cacherfo
attendrisjement.
Zerbine à part , gaiement.
Il eft , ma foi , dupe de ma grimace ,
Je le vois déja s'attendrir.
à Pandolfe , tendrement.
De Zerbine gardez , par grace
Quelque trace ;
L'oublier , quelle diſgrace !
Eh , comment le foutenir ?
* part , gaiement
Il y va venir.
Pandolfe s'attendrit de plus en pluss
Il ne peut long-tems tenir.
Pandolfe , tendrement.
Si je fus impertinente ,
Contrariante ,
Vous m'en voyez repentante ,
Pardonnez-moi.
Elle fejette auxgenoux de Pandolfe , qui luiprend
la main comme en cachette.
à part , gaiement.
Mais..... il me prend la main ,
DECEMBRE. 1754 183
Ma foi l'affaire eft en bon train.
Zerbine demande enfuite à Pandolfe la permiffion
de lui préfenter fon prétendu ; Pandolfe y
confent. Cet homme lui fait peur par fon air
bourru & par les grimaces. Le vieillard commence
à plaindre Zerbine de tomber en de pareilles
mains. Le Capitaine garde un filence obftiné
en préfence de Pandolfe , qui s'en étonne.
Zerbine promet en le tirant à l'écart de le faire
parler ; la réponſe qu'elle rapporte eft que le Capitaine
demande à Pandolfe la dot de fa future ,
puifqu'il lui a tenu lieu de pere : Pandolfe , plus
furpris quejamais , dit qu'il aille fe promener . Le
faux Capitaine fait femblant d'entrer en fureur , &
menace Pandolfe en grinçant les dents . Pandolfe
appelle Scapin à fon fecours : Scapin qui ne
fonge plus au perfonnage de Capitaine qu'il étoit
obligé de faire , veut accourir , & Zerbine le retient.
Pandolfe qui a perdu tout à fait la tête , fe
propofe pour époux à Zerbine fi elle veut congé
dier le Capitaine.
Zerbine , en le regardant tendrement.
Vous , Monfieur !
Pandolfe , vivement .
Oui , ma chere , il n'eft plus tems de feindre
A cet aveu tu fçais à la fin me contraindre.
Je t'aime , je t'adore , & je fuis comme un fou :
Prends ma main , prends mon coeur , prends mon
bien , & renvoie
Ce maudit fpadaffin , ce franc oifeau de proie
A qui Satan puiffe tordre le cou.
184 MERCURE DE FRANCE,
Zerbine.
Ah ! mon cher maître , en confcience ,
Vous méritez la préférence ;
Je vous la donne , & c'eft de très -grand coeur :
Voilà ma main , vous êtes le vainqueur.
Pandolfe.
Il ne faut pas non plus braver le Capitaine ;
Attends qu'il foit forti de ma maifon.
Zerbine.
Oh ! ne vous mettez pas en peine ;
Je vais d'un mot le mettre à la raiſon.
à Scapin.
Scapin , tu peux quitter cet attirail fantafque ;
Nous n'avons plus befoin de maſque.
Scapin fe découvre en riant aux éclats.
Pandolfe.
Comment , coquin , c'est toi !
Zerbine.
De quoi vous plaignez-vous ;
Quand vous devez ma main à ſon adreſſe ?
Pandolfe.
left vrai , je ne puis me fàcher d'une piece
Qui met le comble à mesvoeux les plus doux.
DECEMBRE , 1754. 185
Zerbine.
Elle remplit auffi les miens , mon cher époux.
à part.
J'étois fervante , & je deviens maîtrefle.
La piece finit par un duo en dialogue de Pan-
'dolfe & de Zerbine.
Tous les amateurs ont été fi contens de la traduction
de la Serva padrona , qu'ils invitent M.
Borans à vouloir bien traduire les autres intermedes
Italiens qui ont réuſſi .
leur théatre le Mercredi 13 Novembre par l'Heu
reux ftratagême , très -ingénieufe Comédie Françoife
, en trois actes , de M. de Marivaux ; elle a
été fuivie de Baftien de Baftienne . Le Jeudi 14
DECEMBRE. 1754. 175
ils ont repris , toujours avec fuccès , la Servante
Maitreffe, dont voici l'extrait .
ACTEURS.
Pandolfe , vieillard ,
Zerbine , fa fervante ,
Scapin , fon valet ,
M. Rochard.
Mlle Favart.
Perfonnage muet.
Pandolfe ouvre la fcene par le monologue fuivant
; il eſt affis devant une petite table.
AIR.
Long-tems attendre
Sans voir venir ;
Au lit s'étendre ,
Ne point dormir ;
Grand'peine prendre
Sans parvenir ;
Sont trois fujets d'aller fe pendre.
C'eft auffi ſe mocquer des gens ;
Voilà trois heures que j'attends
Que ma fervante enfin m'apporte
Mon chocolat ; elle n'a pas le tems.
Cependant il faut que je forte :
Elle me dira , que m'importe ?
Oh ! c'en eft trop ; je fuis trop bon ;
Mais je vais prendre un autre ton .
Le vieillard appelle Zerbine de toutes les for
ces. En fe retournant il apperçoit Scapin , qui eft
entré fans dire mot , & qui fe tient tranquillement
derriere lui. Comme malgré les cris de fon
Hiiij
176 MERCURE DE FRANCE .
maître , il ne s'empreffe pas d'aller chercher Zerbine
, Pandolphe eft obligé de le pouffer dehors
par les épaules. Il continue enfuite de fe plaindre
de fa fervante.
Récitatif accompagné .
Voilà pourtant , voilà comment
On fait foi-même fon tourment.
Je trouve cette enfant qui me paroît gentille ;
Je la demande à fa famille ;
On ! me la donne , & depuis ce moment
Je l'éleve comme ma fille .
Que m'en revient-il à préfent ?
Mes bontés l'ont rendue à tel point infolente ,
Capricieuſe , impertinente ,
Qu'il faut avant qu'il foit long- tems ,
S'attendre enfin que la fervante
Sera la maîtreffe céans.
Oh ! tout ceci m'impatiente.
Zerbine entre en difputant avec Scapin , & lui
dit :
AIR.
Eh bien , finiras - tu , deux fois , trois fois ;.
Je n'en ai pas le tems , cela te doit fuffire.
Fort bien.
Pandolfe , à part.
Zerbine.
Combien de fois faut-il te le redire ?
DECEMBRE. 1754. 177
Si ton maître eft preffé faut- il que je le fois
A merveille.
Pandolfe , à part.
Zerbine.
Finis , Scapin , fi tu m'en crois ,
Ma patience enfin ſe laffe ;
Si tu la réduis aux abois ,
Je vais faire pleuvoir vingt foufflets fur ta face.
Elle fe met en devoir de fouffleter Scapin :
Pandolfe l'arrête , & lui demande ce qui peut la
mettre fi fort en courroux ; elle lui répond qu'elle
ne veut pas fouffrir que Scapin lui donne des leçons.
Pandolfe a beau lui dire que c'eſt de fa
part , & qu'il veut avoir fon chocolat . Ce chocolat
n'eft point fait , & Zerbine n'a pas le tems
d'en faire . Pandolfe impatienté , & hors de luimême
, fait beaucoup rire Scapin ; Zerbine s'en
offenfe , & Pandolfe avoue qu'on a raiſon de ſe
mocquer de lui , mais il affure que tout ceci finira.
AIR.
Sans fin , fans ceffe ,
Nouveaux procès ;
Et fi , & mais ,
Et oui , & non ,
Tout fur ce ton ;
Jamais , jamais , au grand jamais ,
On n'eft en paix,
Hv
178 MERCURE DE FRANCE.
Mais que t'en femble à toi ?
Dois-je en crever , moi ?
Non , par ma foi.
Un jour viendra ,
Qu'on fe plaindra ,
Qu'on gémira ,
Quand on fera
Dans la détreffe ;
On maudira
à Scapin.
Son trifte fort ,
On fentira
Qu'on avoit tort .
à Scapin
Qu'en penfes-tu ? n'eft - il pas vrai è
Hai ,
Dis , toi ,
Quoi !
Oui , oui fur ma foi.
Sans fin , fans ceffe , & c:
Pandolfe demande à Scapin fa canne & fon épée
pour fortir. Zerbine 's'y oppofe ; il faut encore
que le vieillard en paffe par là. L'infolence de fa
fervante lui fait prendre la réfolution de fe marier
, fût-ce à une guenon. Zerbine le raille fur
ce prétendu mariage , & lui dit que s'il fe marie
, il n'aura pas d'autre femme qu'elle . Cette
imprudence redouble la colere de Pandolfe ; Zerbine
infifte fur fon projet.
DECEMBRE. 1754 179
Duo en Dialogue.
Je devine
Zerbine.
A ces yeux , à cette mine
Fine ,
Lutine ,
Affaffine ;
Vous avez beau dire non ;
Bon , bon ;
Vos yeux me difent que fi ,
Et je veux le croire ainfi .
Pandolfe.
Ma divine ,
Vous vous trompez à ma mine
Très-fort ;
Prenez un peu moins l'effor ,
Mes yeux avec moi d'accord ,
Vous diront vous avez tort.
Zerbine.
Mais comment ! mais pourquoi
Je fuis jolie ,
Mais très-jolie ,
Douce , polie :
Voulez-vous de l'agrément , de la fineffe
Des bons airs de toute espéce ,
Gentilleffe ,,
Nobleffe ?
Regardez-moi.
Hvj
480. MERCURE DE FRANCE.
Pandolfe , à part.
Sur mon ame , elle me tente ;
Elle eft charmante.
Zerbine , à
part.
Pour le coup il devient tendre .
Il faut fe rendre.
Pandolfe.
Ah ! laiffes-moi.
Zerbine.
Il faut me prendre.
Pandolfe.
Tu rêves , je crois.
Zerbine.
à Pandolfe.
Tu veux en vain t'en défendre :
11 faut que tu fois à moi.
Zerbine,
Je t'aime ,
Je fuis à toi ,
Sois donc à moi.
Pandolfe?
O peine extrême !
Je fuis , ma foi ,
Tout hors de moi.
Le fecond acte commence par un air que
Zerbine chante feule , & dont les paroles conviennent
à toutes les filles qui pourront fe trouves
dans le cas où elle est.
DECEMBRE. 1754. 181
AIR.
Vous gentilles ,
Jeunes filles ,
'Aux vieillards qui tendez vos filets ;
Qui cherchez des maris , beaux ou laids ,
Apprenez , retenez bien mes fecrets ;
Vous allez voir comme je fais.
Tour à tour avec adreffe ,
Je menace , je careffe ;
Quelque tems
Je me défends ,
Mais enfin je me rends.
Elle a mis Scapin dans fes intérêts ; il confent
à faire le perfonnage d'un Capitaine déguifé qui
la demande en mariage. Zerbine appercevant
Pandolfe , fait femblant de fe repentir de fes infolences
& de fa témérité , & elle lui dit qu'elle eft
recherchée par le Capitaine Tempête , auquel
elle a promis fa foi . Elle chante enfuite les paroles
qui fuivent.
Récitatif accompagné .
Jouiffez cependant du deftin le plus doux ;
Soyez long- tems l'heureux époux
De celle que le Ciel aujourd'hui vous deftine .
Souvenez -vous quelquefois de Zerbine ,
Qui tant qu'elle vivra ſe ſouviendra de vous .
AIR , tendrement.
A Zerbine laiff ez , par grace,
Sz MERCURE DEFRANCE,
Quelque place
En votre fouvenir ;
L'en bannir ;
Quelle difgrace !
Eh comment la foutenir ?
Pandolfe s'attendrit par dégrés , & veut cacherfo
attendrisjement.
Zerbine à part , gaiement.
Il eft , ma foi , dupe de ma grimace ,
Je le vois déja s'attendrir.
à Pandolfe , tendrement.
De Zerbine gardez , par grace
Quelque trace ;
L'oublier , quelle diſgrace !
Eh , comment le foutenir ?
* part , gaiement
Il y va venir.
Pandolfe s'attendrit de plus en pluss
Il ne peut long-tems tenir.
Pandolfe , tendrement.
Si je fus impertinente ,
Contrariante ,
Vous m'en voyez repentante ,
Pardonnez-moi.
Elle fejette auxgenoux de Pandolfe , qui luiprend
la main comme en cachette.
à part , gaiement.
Mais..... il me prend la main ,
DECEMBRE. 1754 183
Ma foi l'affaire eft en bon train.
Zerbine demande enfuite à Pandolfe la permiffion
de lui préfenter fon prétendu ; Pandolfe y
confent. Cet homme lui fait peur par fon air
bourru & par les grimaces. Le vieillard commence
à plaindre Zerbine de tomber en de pareilles
mains. Le Capitaine garde un filence obftiné
en préfence de Pandolfe , qui s'en étonne.
Zerbine promet en le tirant à l'écart de le faire
parler ; la réponſe qu'elle rapporte eft que le Capitaine
demande à Pandolfe la dot de fa future ,
puifqu'il lui a tenu lieu de pere : Pandolfe , plus
furpris quejamais , dit qu'il aille fe promener . Le
faux Capitaine fait femblant d'entrer en fureur , &
menace Pandolfe en grinçant les dents . Pandolfe
appelle Scapin à fon fecours : Scapin qui ne
fonge plus au perfonnage de Capitaine qu'il étoit
obligé de faire , veut accourir , & Zerbine le retient.
Pandolfe qui a perdu tout à fait la tête , fe
propofe pour époux à Zerbine fi elle veut congé
dier le Capitaine.
Zerbine , en le regardant tendrement.
Vous , Monfieur !
Pandolfe , vivement .
Oui , ma chere , il n'eft plus tems de feindre
A cet aveu tu fçais à la fin me contraindre.
Je t'aime , je t'adore , & je fuis comme un fou :
Prends ma main , prends mon coeur , prends mon
bien , & renvoie
Ce maudit fpadaffin , ce franc oifeau de proie
A qui Satan puiffe tordre le cou.
184 MERCURE DE FRANCE,
Zerbine.
Ah ! mon cher maître , en confcience ,
Vous méritez la préférence ;
Je vous la donne , & c'eft de très -grand coeur :
Voilà ma main , vous êtes le vainqueur.
Pandolfe.
Il ne faut pas non plus braver le Capitaine ;
Attends qu'il foit forti de ma maifon.
Zerbine.
Oh ! ne vous mettez pas en peine ;
Je vais d'un mot le mettre à la raiſon.
à Scapin.
Scapin , tu peux quitter cet attirail fantafque ;
Nous n'avons plus befoin de maſque.
Scapin fe découvre en riant aux éclats.
Pandolfe.
Comment , coquin , c'est toi !
Zerbine.
De quoi vous plaignez-vous ;
Quand vous devez ma main à ſon adreſſe ?
Pandolfe.
left vrai , je ne puis me fàcher d'une piece
Qui met le comble à mesvoeux les plus doux.
DECEMBRE , 1754. 185
Zerbine.
Elle remplit auffi les miens , mon cher époux.
à part.
J'étois fervante , & je deviens maîtrefle.
La piece finit par un duo en dialogue de Pan-
'dolfe & de Zerbine.
Tous les amateurs ont été fi contens de la traduction
de la Serva padrona , qu'ils invitent M.
Borans à vouloir bien traduire les autres intermedes
Italiens qui ont réuſſi .
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Résumé : « Les Comédiens Italiens ont fait l'ouverture de leur théatre le Mercredi 13 Novembre par l'Heureux [...] »
Les Comédiens Italiens ont inauguré leur théâtre le 13 novembre 1754 avec la pièce 'Le Faux Fratagem' de Marivaux, suivie de 'Bastien et Bastienne'. Le 14 décembre 1754, ils ont repris avec succès 'La Servante Maîtresse' de Marivaux. Cette pièce met en scène trois personnages principaux : Pandolfe, un vieillard, Zerbine, sa servante, et Scapin, le valet de Zerbine. Pandolfe, impatient d'attendre son chocolat, se plaint de l'insolence de Zerbine. Zerbine et Scapin se disputent, et Zerbine menace de le gifler. Exaspéré, Pandolfe décide de se marier, même avec une guenon. Zerbine le raille et insiste sur son projet. Dans le deuxième acte, Zerbine chante un air où elle conseille aux jeunes filles de se défendre tout en se rendant. Elle manipule Pandolfe en lui faisant croire qu'un capitaine, en réalité Scapin déguisé, la demande en mariage. Pandolfe, attendri, finit par avouer son amour à Zerbine. Zerbine accepte et révèle que Scapin était déguisé. La pièce se termine par un duo entre Pandolfe et Zerbine, qui deviennent mari et femme. Les spectateurs ont apprécié la traduction de 'La Servante Maîtresse' et souhaitent que d'autres intermèdes italiens soient traduits.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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258
p. 185
CONCERT SPIRITUEL.
Début :
Le Concert Spirituel qui fut exécuté le premier Novembre, fête de tous les Saints, commença [...]
Mots clefs :
Concert spirituel
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : CONCERT SPIRITUEL.
CONCERT SPIRITUEL.
E Concert Spirituel qui fut exécuté le premier
Novembre , fête de tous les Saints , commença
par une fymphonie de M. Labbé fils ; enfuite
Cantate Domino , motet à grand choeur de Lalande
, dans lequel Mlle Cohendet chanta le récit
Viderunt. Mile Lepri chanta un air Italien . M.
Palanca joua un concerto de la compofition del
Signor Beffozzi. Mlle Lepri chanta un fecond air
Italien . Le Concert finit par De profundis , motet à
grand choeur de M. Mondonville.
E Concert Spirituel qui fut exécuté le premier
Novembre , fête de tous les Saints , commença
par une fymphonie de M. Labbé fils ; enfuite
Cantate Domino , motet à grand choeur de Lalande
, dans lequel Mlle Cohendet chanta le récit
Viderunt. Mile Lepri chanta un air Italien . M.
Palanca joua un concerto de la compofition del
Signor Beffozzi. Mlle Lepri chanta un fecond air
Italien . Le Concert finit par De profundis , motet à
grand choeur de M. Mondonville.
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259
p. 187-189
« L'Académie royale de Musique a donné le Dimanche premier Décembre, la [...] »
Début :
L'Académie royale de Musique a donné le Dimanche premier Décembre, la [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français, Comédiens-Italiens, Académie royale de musique
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texteReconnaissance textuelle : « L'Académie royale de Musique a donné le Dimanche premier Décembre, la [...] »
Académie royale de Mufique a donné
le Dimanche premier Décembre , la
derniere repréſentation des Fêtes de Thalie.
M. Vallée avoit débuté dans ce ballet , le
19 Novembre , par un air qu'on avoit
ajouté dans le troifiéme acte , & il a depuis
chanté dans le prologue . Le nouvel acteur
peut , avec beaucoup de travail & le fecours
des bons maîtres , devenir une jolie haute-
contre.
Le public commençoit à trouver un peu
lents les progrès de Mlle Davaux , dont la
figure , la voix & le talent avoient d'abord
donné de fi grandes efpérances. Cette actrice
a fait de fes cenfeurs autant de partifans
, le 19 Novembre . Elle a ce jour- là , &
les repréſentations fuivantes , fi bien chanté
& joué avec tant de fineffe & d'intelligence
le rolle de Califte dans le troifieme acte
des Fêtes de Thalie , qu'elle a réuni tous les
188 MERCURE DE FRANCE.
fuffrages. Nous efperons que Mlle Davaux
ne regardera pas ce fuccès comme une
preuve qu'elle ait atteint le point de perfection
qu'on defiroit d'elle , mais comme
une certitude qu'elle y arrivera , fi elle
continue à travailler opiniâtrément , & à
fe livrer avec docilité aux foins de l'excellent
maître qui la dirige.
LES Comédiens François ont repris le
Mercredi 20 Novembre , les Troyennes, Tragédie
de M. de Châteaubrun , mife pour
la premiere fois au théatre avec un fuccès
éclatant , le Lundi 11 Mars de cette année.
On ne l'a jouée que cinq fois à cette reprife.
Le Samedi 30 , jour de la derniere
repréſentation , il s'eft préfenté an fpectacle
trois fois plus de monde que la falle
n'en pouvoit contenir. Tout eft naturel
dans cette Tragédie ; il n'y a ni de ces coups
imprévus ni de ces fituations forcées qui
éblouiffent d'abord & qui révoltent enfuite.
La vérité , qui doit être l'effence de tout
poëme dramatique , eft peinte dans tous
les actes , avec une fimplicité noble & touchante
. On s'attendrit par dégrés. Les malheurs
dont la famille de Priam eft accablée,
fe fuccédent fans effort les uns aux autres ,
& les Spectateurs croyent être transportés
devant Troye brûlée & faccagée.
. DECEMBRE . 1754. 189
Nous avons remarqué une chofe qui
doit paroître extraordinaire , & qui prouve
que les acteurs de la Comédie Françoife
font tous leurs efforts pour varier les amufemens
du public . Ils ont repréfenté vingtfept
tragédies depuis le 22 Avril , jour de
l'ouverture du théatre , jufques & compris
le 2 Décembre ; fçavoir , le Cid , les Horaces
, Rodogune , & Polieucte , de Pierre
Corneille ; Andromaque , Britannicus
Bajazet , Mithridate , Phédre , & Athalie
de Racine ; Ariane , de Thomas Corneille ;
Fénelope , de l'Abbé Geneft ; Manlius , de
la Foffe ; Médée , de Longepierre ; Inès de
Caftro , de Lamotte ; Radamiſte & Zénobie
, de M. de Crébillon ; OEdipe , Herode
& Mariamne , Brutus , Zaïre , Ālzire , Mérope,
& Mahomet , de M. de Voltaire ; Guftave
, de M. Piron ; Didon , de M. Lefranc ;
les Troyennes , de M. de Châteaubrun ; &
Amalazonte , de M. le Marquis de Ximenès.
LES Comédiens Italiens continuent avec
un fuccès toujours foutenu , la Servante
maîtreffe. Cet ouvrage eft à fa quarantieme
repréſentation .
le Dimanche premier Décembre , la
derniere repréſentation des Fêtes de Thalie.
M. Vallée avoit débuté dans ce ballet , le
19 Novembre , par un air qu'on avoit
ajouté dans le troifiéme acte , & il a depuis
chanté dans le prologue . Le nouvel acteur
peut , avec beaucoup de travail & le fecours
des bons maîtres , devenir une jolie haute-
contre.
Le public commençoit à trouver un peu
lents les progrès de Mlle Davaux , dont la
figure , la voix & le talent avoient d'abord
donné de fi grandes efpérances. Cette actrice
a fait de fes cenfeurs autant de partifans
, le 19 Novembre . Elle a ce jour- là , &
les repréſentations fuivantes , fi bien chanté
& joué avec tant de fineffe & d'intelligence
le rolle de Califte dans le troifieme acte
des Fêtes de Thalie , qu'elle a réuni tous les
188 MERCURE DE FRANCE.
fuffrages. Nous efperons que Mlle Davaux
ne regardera pas ce fuccès comme une
preuve qu'elle ait atteint le point de perfection
qu'on defiroit d'elle , mais comme
une certitude qu'elle y arrivera , fi elle
continue à travailler opiniâtrément , & à
fe livrer avec docilité aux foins de l'excellent
maître qui la dirige.
LES Comédiens François ont repris le
Mercredi 20 Novembre , les Troyennes, Tragédie
de M. de Châteaubrun , mife pour
la premiere fois au théatre avec un fuccès
éclatant , le Lundi 11 Mars de cette année.
On ne l'a jouée que cinq fois à cette reprife.
Le Samedi 30 , jour de la derniere
repréſentation , il s'eft préfenté an fpectacle
trois fois plus de monde que la falle
n'en pouvoit contenir. Tout eft naturel
dans cette Tragédie ; il n'y a ni de ces coups
imprévus ni de ces fituations forcées qui
éblouiffent d'abord & qui révoltent enfuite.
La vérité , qui doit être l'effence de tout
poëme dramatique , eft peinte dans tous
les actes , avec une fimplicité noble & touchante
. On s'attendrit par dégrés. Les malheurs
dont la famille de Priam eft accablée,
fe fuccédent fans effort les uns aux autres ,
& les Spectateurs croyent être transportés
devant Troye brûlée & faccagée.
. DECEMBRE . 1754. 189
Nous avons remarqué une chofe qui
doit paroître extraordinaire , & qui prouve
que les acteurs de la Comédie Françoife
font tous leurs efforts pour varier les amufemens
du public . Ils ont repréfenté vingtfept
tragédies depuis le 22 Avril , jour de
l'ouverture du théatre , jufques & compris
le 2 Décembre ; fçavoir , le Cid , les Horaces
, Rodogune , & Polieucte , de Pierre
Corneille ; Andromaque , Britannicus
Bajazet , Mithridate , Phédre , & Athalie
de Racine ; Ariane , de Thomas Corneille ;
Fénelope , de l'Abbé Geneft ; Manlius , de
la Foffe ; Médée , de Longepierre ; Inès de
Caftro , de Lamotte ; Radamiſte & Zénobie
, de M. de Crébillon ; OEdipe , Herode
& Mariamne , Brutus , Zaïre , Ālzire , Mérope,
& Mahomet , de M. de Voltaire ; Guftave
, de M. Piron ; Didon , de M. Lefranc ;
les Troyennes , de M. de Châteaubrun ; &
Amalazonte , de M. le Marquis de Ximenès.
LES Comédiens Italiens continuent avec
un fuccès toujours foutenu , la Servante
maîtreffe. Cet ouvrage eft à fa quarantieme
repréſentation .
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Résumé : « L'Académie royale de Musique a donné le Dimanche premier Décembre, la [...] »
L'Académie royale de Musique a présenté la dernière représentation des 'Fêtes de Thalie' le 1er décembre. M. Vallée, débutant le 19 novembre, a montré un potentiel prometteur en tant que haute-contre. Mlle Davaux, après des progrès jugés lents, a gagné des partisans en interprétant le rôle de Calife avec finesse et intelligence. Les Comédiens Français ont repris 'Les Troyennes' de M. de Châteaubrun le 20 novembre, après un succès initial le 11 mars. La dernière représentation, le 30 novembre, a attiré trois fois plus de monde que la salle ne pouvait en contenir. La tragédie se distingue par sa naturalité et sa simplicité touchante, transportant les spectateurs devant Troie en flammes. Depuis l'ouverture du théâtre le 22 avril, les Comédiens Français ont représenté vingt-sept tragédies différentes. Les Comédiens Italiens continuent de présenter 'La Servante maîtresse' avec succès, à sa quarantième représentation.
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260
p. 190-191
SPECTACLES DE FONTAINEBLEAU; pendant le sejour de leurs Majestés en 1754.
Début :
Le goût, la magnificience & le zèle se sont réunis cette année pour rendre [...]
Mots clefs :
Spectacles, Fontainebleau
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SPECTACLES DE FONTAINEBLEAU; pendant le sejour de leurs Majestés en 1754.
SPECTACLES DE FONTAINEBLEAU ;
pendant lefejour de leurs Majeftés en 1754.
L
Egoût , la magnificence & le zéle ſe
font réunis cette année pour rendre
les différens fpectacles qu'on a donnés à
Fontainebleau , auffi agréables à la Cour
qu'honorables pour les lettres , les talens
& les arts. Les fuccès qu'ils ont mérité ,
ont déja éclaté aux yeux du public ; il doit
être avide d'en connoître les détails , nous
nous hâtons de le fatisfaire.
Le 8 Octobre , les Comédiens François
repréſenterent le Curieux impertinent , Comédie
en vers de M. Deftouches , qui fut
fuivie de l'Etourderie , Comédie en profe
de M. Fagan.
Le 9 , les Comédiens Italiens repréſenterent
le Joueur , Comédie italienne en
trois actes.
Le 10 , le Duc de Foix , Tragédie de M.
de Voltaire , de l'Académie Françoiſe ; & le
Rendez-vous , petite piece de M. Fagan ,
furent repréſentés par les acteurs de la Comédie
Françoiſe.
Ce ne fut que le Samedi 12 que l'Opéra
commença fes premieres repréfentations
. Le théatre de Fontainebleau n'a été
1
DECEMBRE. 1754. 191
fait
que pour y jouer la Comédie , & l'efpace
qu'il occupe eft refferré par de gros
murs , dont l'extérieur tient à la décoration
générale du Château : mais les recherches
& les efforts de l'art ont furmonté les obf
tacles qui naiffoient de la petiteffe forcée
du local ; & le théatre , tout refferré qu'il
eſt , a été mis en état de fournir au jeu des
différentes machines que l'exécution de
l'Opéra François exige.
L'ouverture de ce fpectacle fut faite par
uhe premiererepréſentation de la Naiſſance
d'Ofiris , ballet allégorique nouveau , en
un acte ; de l'acte des Incas , un de ceux
des Indesgalantes , & de Pigmalion.
Ces deux derniers ouvrages font déja
fort connus & dans une poffeffion conftante
de plaire : il fuffit de dire à leur
égard qu'ils furent parfaitement rendus
par M. de Chaffé , qui étoit chargé du
rolle de l'Inca ; par Mlle Chevalier , qui
repréfentoit celui de Phanny ; & par M.
Jeliote , qui jouoit le rolle de Pigmalion .
Mais nous croyons devoir entrer dans
le détail du premier , dont M. de Cahufac
, de l'Académie royale des Sciences &
Belles Lettres de Pruffe , & M. Rameau
font les auteurs .
pendant lefejour de leurs Majeftés en 1754.
L
Egoût , la magnificence & le zéle ſe
font réunis cette année pour rendre
les différens fpectacles qu'on a donnés à
Fontainebleau , auffi agréables à la Cour
qu'honorables pour les lettres , les talens
& les arts. Les fuccès qu'ils ont mérité ,
ont déja éclaté aux yeux du public ; il doit
être avide d'en connoître les détails , nous
nous hâtons de le fatisfaire.
Le 8 Octobre , les Comédiens François
repréſenterent le Curieux impertinent , Comédie
en vers de M. Deftouches , qui fut
fuivie de l'Etourderie , Comédie en profe
de M. Fagan.
Le 9 , les Comédiens Italiens repréſenterent
le Joueur , Comédie italienne en
trois actes.
Le 10 , le Duc de Foix , Tragédie de M.
de Voltaire , de l'Académie Françoiſe ; & le
Rendez-vous , petite piece de M. Fagan ,
furent repréſentés par les acteurs de la Comédie
Françoiſe.
Ce ne fut que le Samedi 12 que l'Opéra
commença fes premieres repréfentations
. Le théatre de Fontainebleau n'a été
1
DECEMBRE. 1754. 191
fait
que pour y jouer la Comédie , & l'efpace
qu'il occupe eft refferré par de gros
murs , dont l'extérieur tient à la décoration
générale du Château : mais les recherches
& les efforts de l'art ont furmonté les obf
tacles qui naiffoient de la petiteffe forcée
du local ; & le théatre , tout refferré qu'il
eſt , a été mis en état de fournir au jeu des
différentes machines que l'exécution de
l'Opéra François exige.
L'ouverture de ce fpectacle fut faite par
uhe premiererepréſentation de la Naiſſance
d'Ofiris , ballet allégorique nouveau , en
un acte ; de l'acte des Incas , un de ceux
des Indesgalantes , & de Pigmalion.
Ces deux derniers ouvrages font déja
fort connus & dans une poffeffion conftante
de plaire : il fuffit de dire à leur
égard qu'ils furent parfaitement rendus
par M. de Chaffé , qui étoit chargé du
rolle de l'Inca ; par Mlle Chevalier , qui
repréfentoit celui de Phanny ; & par M.
Jeliote , qui jouoit le rolle de Pigmalion .
Mais nous croyons devoir entrer dans
le détail du premier , dont M. de Cahufac
, de l'Académie royale des Sciences &
Belles Lettres de Pruffe , & M. Rameau
font les auteurs .
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Résumé : SPECTACLES DE FONTAINEBLEAU; pendant le sejour de leurs Majestés en 1754.
En 1754, les spectacles de Fontainebleau ont combiné goût, magnificence et zèle pour offrir des divertissements agréables à la cour et honorables pour les lettres, les talents et les arts. Les succès obtenus ont suscité l'intérêt du public, avide de connaître les détails. Le 8 octobre, les Comédiens Français ont joué 'Le Curieux impertinent' de Destouches et 'L'Étourderie' de Fagan. Le 9 octobre, les Comédiens Italiens ont représenté 'Le Joueur'. Le 10 octobre, les acteurs de la Comédie Française ont interprété 'Le Duc de Foix' de Voltaire et 'Le Rendez-vous' de Fagan. L'Opéra a commencé ses représentations le 12 octobre. Le théâtre de Fontainebleau, initialement conçu pour la comédie, a été adapté pour accueillir les machines nécessaires à l'Opéra Français. La première représentation a inclus 'La Naissance d'Osiris', un ballet allégorique nouveau, ainsi que des extraits des 'Incas', des 'Indes galantes' et de 'Pigmalion'. Ces derniers ouvrages, déjà connus et appréciés, ont été parfaitement interprétés par Chassé, Mlle Chevalier et Jéliote. Le ballet 'La Naissance d'Osiris' a été créé par Cahusac et Rameau.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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261
p. 192-196
Extrait de la Naissance d'Osiris, ou la Fête Pamilie.
Début :
La naissance de Monseigneur le Duc de Berry, les différens spectacles qu'on préparoit [...]
Mots clefs :
Naissance du Duc de Berry, Bergers, Amour, Ciel
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Extrait de la Naissance d'Osiris, ou la Fête Pamilie.
Extrait de la Naiffance d'Ofiris , on la Fête
Pamilie.
La naiffance de Monfeigneur le Duc de
Berry , les différens fpectacles qu'on préparoit
pour leurs Majeftés , les cris de joie
d'un peuple heureux du bonheur de fes
maîtres , voilà ce que l'auteur de ce ballet
nouveau paroît s'être propofé de peindre
par une allégorie . On n'a point la reffource
des louanges directes auprès d'un
Roi auffi modefte que bienfaifant .
Une femme de Thebes , nommée Pamilie
, en fortant du temple de Jupiter , entendit
une voix qui lui annonçoit la naiffance
d'un héros qui devoit faire un jour
la félicité de l'Egypte . C'étoit Ofiris , qu'elle
éleva , & qui fut dans les fuites un des
plus illuftres bienfacteurs de l'humanité.
Pour conferver la mémoire de cet événement
, les Egyptiens inftituerent la Fête
Pamilie , dans laquelle on avoit le foin de
leretracer , & c'eft fur cette ancienne fable
que M. de Cahufac a bâti la fienne.
Le théatre repréfente le devant du temple
de Jupiter. Une troupe de bergers célebre
par leurs danfes & leurs chants la paix
dont ils jouiffent. Pour être parfaitement
heureux , il ne leur manque qu'un feul
bien : mais , difent-ils ,
Chaque
DECEMBRE.
1754. 193
Chaque inftant vole & nous l'amene.
C'est dans ce premier
divertiffement
que Mlle Fel , qui repréfentoit le rolle de
Pamilie , chantoit cette Ariette , dont le
chant fimple exprime d'une maniere ſi
neuve la naïveté des paroles.
Non , non , une flamme volage
Ne peut me ravir mon berger ;
Ce n'eft point un goût paffager
Qui nous enchaîne & nous engage ,
Qui pourroit l'aimer davantage ?
Que gagneroit-il à changer ?
Tout-à - coup un bruit éclatant de tonherre
trouble la fète . Les bergers s'écrient.
du ton dont M. Rameau fçait peindre les
grands mouvemens.
Jupiter s'arme de la foudre ;
Son char brulant s'élance & roule dans les airs:
Quels coups redoublés ! quels éclairs !
O Dieux ! le feu du ciel va nous réduire en poudre
Pendant ce choeur , la danfe ( qu'il ne doit
pas être permis à M. de Cahufac de laiſſer
oifive ou inutile dans fes ballets ) , formoit
des tableaux rapides d'effroi , qui donnoient
une force nouvelle à cette fituation .
Cependant les bergers effrayés & prêts
à partir , font retenus par le Grand Prêtre
du Dieu dont ils redoutoient la colere.
Raffurés par fa préfence & par fes difcours ,
une nouvelle harmonie les frappe & les ar-
II. Vol. I
194 MERCURE DE FRANCE.
rête. Ce font des éclats de tonnerre mêlés
de traits de fymphonie les plus mélodieux.
Le ciel s'ouvre ; Jupiter paroît dans tout
l'éclat de fa gloire , ayant à fes pieds les
graces & l'amour , & il dit :
Qu'il eft doux de regner dans une paix profonde !
Que le fort aux mortels prépare de beaux jours !
Rien ne peut plus troubler le ciel , la terre &
l'onde ,
L'amour qui me feconde ,
De leur félicité vient d'affûrer le cours.
Il eſt né , ce héros que vos voeux me demandent
&c.
Les bergers lui répondent par un choeur
d'allégreffe ; les Prêtres lui rendent hommage
par leurs danfes , & Pamilie & fon
berger lui adreffent les vers fuivans.
Enfemble.
Paroiffez , doux tranfports , éclatez en ce jour
Aux regards d'un Dieu qui nous aime.
Pamilie.
L'éclat de la grandeur fuprême
Le flate moins que notre amour.
Enfemble.
Il bannit loin de nous la difcorde & la guerre
Offrons lui tous les jeux que raflemble la paix.
Pamilie.
Qu'il jouiffe de ſes bienfaits ,
En voyant le bonheur qu'il répand fur la terre?
DECEMBRE . 1754 195
Jupiter alors s'exprime ainfi :
Mortels , le foin de ma grandeur
Au féjour des Dieux me rappelle ;
Mais la terre eft l'objet le plus cher à mon coeur :
Je lui laiffe l'Amour. Il en fait le bonheur ;
Que fans ceffe il régne fur elle.
Au moment qu'il remonte dans les cieux ,
l'Amour & les Graces defcendent fur la
terre. Les Bergers les environnent ; mais
l'Amour qui veut lancer fes fléches fur eux ,
les effraye. Une jeune Bergere affronte le
danger , & lui réfifte : il la pourfuit ; il eſt
fur le point de l'atteindre , lorfqu'elle a l'adreffe
de lui ravir la flèche dont il vouloit
la bleffer. Déja la Bergere triomphe ; mais
l'Amour faifit un nouveau trait. Ils levent
tous deux le bras , & font prêts à fe frapper
, lorfque Pamilie les fépare , en difant :
Régne , Amour , fans nous alarmer ;
Quitte tes armes : tout foupire .
Tu n'as befoin pour nous charmer ,
Que de folâtrer & de rire , & c.
Ce premier tableau de danfe , exécuté
par Mile Puvigné , repréfentant la Bergere,
& Mlle Catinon , repréfentant l'Amour ,
ne pouvoit pas manquer de produire un
effet agréable , & il en amenoit naturellement
un fecond , qui termine fort heureufement
cette fête .
L'Amour fe laiffe défarmer : les Graces
Lij
196 MERCURE DE FRANCE.
lui préfentent des guirlandes de fleurs . Il
leur ordonne d'en faire des chaînes pour
les Bergers , & il en prend une qu'il offre à
la jeune Bergere : elle la reçoit avec ingé,
nuité , & dans le moment que l'Amour y
fongé le moins , elle en forme une chaîne
pour lui-même. Tous les Bergers alors les
entourent & les reconduifent , comme en
triomphe , hors du théâtre.
Tel eft ce ballet allégorique , dont la
fimplicité de l'action , l'analogie du fait antique
avec les circonftances du moment ,
le choix des perfonnages , concourent pour
en rendre la compofition heureufe , & l'application
facile.
Pamilie.
La naiffance de Monfeigneur le Duc de
Berry , les différens fpectacles qu'on préparoit
pour leurs Majeftés , les cris de joie
d'un peuple heureux du bonheur de fes
maîtres , voilà ce que l'auteur de ce ballet
nouveau paroît s'être propofé de peindre
par une allégorie . On n'a point la reffource
des louanges directes auprès d'un
Roi auffi modefte que bienfaifant .
Une femme de Thebes , nommée Pamilie
, en fortant du temple de Jupiter , entendit
une voix qui lui annonçoit la naiffance
d'un héros qui devoit faire un jour
la félicité de l'Egypte . C'étoit Ofiris , qu'elle
éleva , & qui fut dans les fuites un des
plus illuftres bienfacteurs de l'humanité.
Pour conferver la mémoire de cet événement
, les Egyptiens inftituerent la Fête
Pamilie , dans laquelle on avoit le foin de
leretracer , & c'eft fur cette ancienne fable
que M. de Cahufac a bâti la fienne.
Le théatre repréfente le devant du temple
de Jupiter. Une troupe de bergers célebre
par leurs danfes & leurs chants la paix
dont ils jouiffent. Pour être parfaitement
heureux , il ne leur manque qu'un feul
bien : mais , difent-ils ,
Chaque
DECEMBRE.
1754. 193
Chaque inftant vole & nous l'amene.
C'est dans ce premier
divertiffement
que Mlle Fel , qui repréfentoit le rolle de
Pamilie , chantoit cette Ariette , dont le
chant fimple exprime d'une maniere ſi
neuve la naïveté des paroles.
Non , non , une flamme volage
Ne peut me ravir mon berger ;
Ce n'eft point un goût paffager
Qui nous enchaîne & nous engage ,
Qui pourroit l'aimer davantage ?
Que gagneroit-il à changer ?
Tout-à - coup un bruit éclatant de tonherre
trouble la fète . Les bergers s'écrient.
du ton dont M. Rameau fçait peindre les
grands mouvemens.
Jupiter s'arme de la foudre ;
Son char brulant s'élance & roule dans les airs:
Quels coups redoublés ! quels éclairs !
O Dieux ! le feu du ciel va nous réduire en poudre
Pendant ce choeur , la danfe ( qu'il ne doit
pas être permis à M. de Cahufac de laiſſer
oifive ou inutile dans fes ballets ) , formoit
des tableaux rapides d'effroi , qui donnoient
une force nouvelle à cette fituation .
Cependant les bergers effrayés & prêts
à partir , font retenus par le Grand Prêtre
du Dieu dont ils redoutoient la colere.
Raffurés par fa préfence & par fes difcours ,
une nouvelle harmonie les frappe & les ar-
II. Vol. I
194 MERCURE DE FRANCE.
rête. Ce font des éclats de tonnerre mêlés
de traits de fymphonie les plus mélodieux.
Le ciel s'ouvre ; Jupiter paroît dans tout
l'éclat de fa gloire , ayant à fes pieds les
graces & l'amour , & il dit :
Qu'il eft doux de regner dans une paix profonde !
Que le fort aux mortels prépare de beaux jours !
Rien ne peut plus troubler le ciel , la terre &
l'onde ,
L'amour qui me feconde ,
De leur félicité vient d'affûrer le cours.
Il eſt né , ce héros que vos voeux me demandent
&c.
Les bergers lui répondent par un choeur
d'allégreffe ; les Prêtres lui rendent hommage
par leurs danfes , & Pamilie & fon
berger lui adreffent les vers fuivans.
Enfemble.
Paroiffez , doux tranfports , éclatez en ce jour
Aux regards d'un Dieu qui nous aime.
Pamilie.
L'éclat de la grandeur fuprême
Le flate moins que notre amour.
Enfemble.
Il bannit loin de nous la difcorde & la guerre
Offrons lui tous les jeux que raflemble la paix.
Pamilie.
Qu'il jouiffe de ſes bienfaits ,
En voyant le bonheur qu'il répand fur la terre?
DECEMBRE . 1754 195
Jupiter alors s'exprime ainfi :
Mortels , le foin de ma grandeur
Au féjour des Dieux me rappelle ;
Mais la terre eft l'objet le plus cher à mon coeur :
Je lui laiffe l'Amour. Il en fait le bonheur ;
Que fans ceffe il régne fur elle.
Au moment qu'il remonte dans les cieux ,
l'Amour & les Graces defcendent fur la
terre. Les Bergers les environnent ; mais
l'Amour qui veut lancer fes fléches fur eux ,
les effraye. Une jeune Bergere affronte le
danger , & lui réfifte : il la pourfuit ; il eſt
fur le point de l'atteindre , lorfqu'elle a l'adreffe
de lui ravir la flèche dont il vouloit
la bleffer. Déja la Bergere triomphe ; mais
l'Amour faifit un nouveau trait. Ils levent
tous deux le bras , & font prêts à fe frapper
, lorfque Pamilie les fépare , en difant :
Régne , Amour , fans nous alarmer ;
Quitte tes armes : tout foupire .
Tu n'as befoin pour nous charmer ,
Que de folâtrer & de rire , & c.
Ce premier tableau de danfe , exécuté
par Mile Puvigné , repréfentant la Bergere,
& Mlle Catinon , repréfentant l'Amour ,
ne pouvoit pas manquer de produire un
effet agréable , & il en amenoit naturellement
un fecond , qui termine fort heureufement
cette fête .
L'Amour fe laiffe défarmer : les Graces
Lij
196 MERCURE DE FRANCE.
lui préfentent des guirlandes de fleurs . Il
leur ordonne d'en faire des chaînes pour
les Bergers , & il en prend une qu'il offre à
la jeune Bergere : elle la reçoit avec ingé,
nuité , & dans le moment que l'Amour y
fongé le moins , elle en forme une chaîne
pour lui-même. Tous les Bergers alors les
entourent & les reconduifent , comme en
triomphe , hors du théâtre.
Tel eft ce ballet allégorique , dont la
fimplicité de l'action , l'analogie du fait antique
avec les circonftances du moment ,
le choix des perfonnages , concourent pour
en rendre la compofition heureufe , & l'application
facile.
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Résumé : Extrait de la Naissance d'Osiris, ou la Fête Pamilie.
Le texte présente un ballet intitulé 'La Naissance d'Ofiris, ou la Fête Pamilie', qui commémore la naissance du Duc de Berry. L'auteur utilise une allégorie pour éviter les louanges directes au roi. L'intrigue s'inspire d'une légende égyptienne où Pamilie, une femme de Thèbes, apprend la naissance d'Ofiris, un héros destiné à apporter la félicité à l'Égypte. Les Égyptiens instituèrent la Fête Pamilie pour célébrer cet événement. Le ballet se déroule devant le temple de Jupiter. Une troupe de bergers célèbre la paix, mais attend un bien supplémentaire. Mlle Fel, interprétant Pamilie, chante une ariette exprimant la naïveté et la sincérité de l'amour. Un bruit de tonnerre interrompt la fête, et Jupiter apparaît, annonçant la naissance du héros et la paix durable. Les bergers et les prêtres rendent hommage à Jupiter, qui laisse l'Amour régner sur terre. L'Amour et les Grâces descendent sur terre, et une bergère affronte l'Amour, qui finit par se désarmer. Le ballet se termine par une danse où l'Amour et la bergère sont triomphalement reconduits hors du théâtre. La simplicité de l'action et l'analogie avec les circonstances contemporaines rendent la composition du ballet heureuse et son application facile.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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262
p. 196-197
« Le 14 du même mois d'Octobre, les Comédiens François représenterent le [...] »
Début :
Le 14 du même mois d'Octobre, les Comédiens François représenterent le [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français, Comédiens-Italiens
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le 14 du même mois d'Octobre, les Comédiens François représenterent le [...] »
Le 14 du même mois d'Octobre , les
Comédiens François repréfenterent le
Muet , de Brueys , avec Crifpin Medecin ,
de Hauteroche.
L'Opera donna le 15 une feconde repréfentation
de la Naiſſance d'Ofiris , de
' Acte des Incas , & de Pigmalion.
Le 16 Herode & Mariamne , tragédie
de M. de Voltaire , & le Legs , petite comé
die de M. de Marivaux , un des quarante
de l'Académie Françoife , furent repréfentées
par les Comédiens François.
Le Vendredi 18 , on repréfenta Thefee,
célébre Opéra de Quinault & de Lulli
avec la plus grande magnificence , & avec
DECEMBRE . 1754. 197
toute la dignité dont cet excellent ouvrage
eft fufceptible . On avoit pris le foin de
l'embellir encore par quelques morceaux
de chant , & plufieurs fymphonies du choix
de MM. Rebel & Francoeur , dont le public
a fi fouvent applaudi le goût , l'intelligence
, & les talens. Les principaux rolles
en furent remplis avec tout le pathétique
, la nobleffe , & l'énergie qu'on eft en
droit d'attendre des talens fupérieurs ; fçavoir
, Médée , par Mlle Chevalier ; Eglé ,
par Mlle Fel ; Théfee , par M. Jeliote ;
Egée , par M. de Chaffé.
Le Lundi fuivant 21 , on exécuta le même
fpectacle avec autant de zéle & de
fuccès.
Le 23 l'Opéra repréfenta Anacréon ,
ballet héroïque nouveau en un acte , précédé
du Mari garçon , Comédie de M. de
Boiffy , de l'Académie Françoife , qui fut
repréfentée par les Comédiens Italiens.
Comédiens François repréfenterent le
Muet , de Brueys , avec Crifpin Medecin ,
de Hauteroche.
L'Opera donna le 15 une feconde repréfentation
de la Naiſſance d'Ofiris , de
' Acte des Incas , & de Pigmalion.
Le 16 Herode & Mariamne , tragédie
de M. de Voltaire , & le Legs , petite comé
die de M. de Marivaux , un des quarante
de l'Académie Françoife , furent repréfentées
par les Comédiens François.
Le Vendredi 18 , on repréfenta Thefee,
célébre Opéra de Quinault & de Lulli
avec la plus grande magnificence , & avec
DECEMBRE . 1754. 197
toute la dignité dont cet excellent ouvrage
eft fufceptible . On avoit pris le foin de
l'embellir encore par quelques morceaux
de chant , & plufieurs fymphonies du choix
de MM. Rebel & Francoeur , dont le public
a fi fouvent applaudi le goût , l'intelligence
, & les talens. Les principaux rolles
en furent remplis avec tout le pathétique
, la nobleffe , & l'énergie qu'on eft en
droit d'attendre des talens fupérieurs ; fçavoir
, Médée , par Mlle Chevalier ; Eglé ,
par Mlle Fel ; Théfee , par M. Jeliote ;
Egée , par M. de Chaffé.
Le Lundi fuivant 21 , on exécuta le même
fpectacle avec autant de zéle & de
fuccès.
Le 23 l'Opéra repréfenta Anacréon ,
ballet héroïque nouveau en un acte , précédé
du Mari garçon , Comédie de M. de
Boiffy , de l'Académie Françoife , qui fut
repréfentée par les Comédiens Italiens.
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Résumé : « Le 14 du même mois d'Octobre, les Comédiens François représenterent le [...] »
Du 14 au 23 octobre, une série de représentations théâtrales et musicales ont été organisées. Le 14 octobre, les Comédiens Français ont joué 'Le Muet' de Brueys et 'Crispin Médecin' de Hauteroche. Le 15 octobre, l'Opéra a présenté 'La Naissance d'Osiris', 'Acte des Incas' et 'Pigmalion'. Le 16 octobre, les Comédiens Français ont interprété 'Hérode et Mariamne' de Voltaire et 'Le Legs' de Marivaux, membre de l'Académie Française. Le 18 octobre, l'Opéra a donné une représentation somptueuse de 'Théée', œuvre de Quinault et Lully, enrichie de morceaux de chant et de symphonies de Rebel et Francoeur. Les rôles principaux ont été interprétés par Mlle Chevalier, Mlle Fel, M. Jéliote et M. de Chassé. Le 21 octobre, cette représentation a été répétée avec succès. Le 23 octobre, l'Opéra a présenté 'Anacréon', ballet héroïque en un acte, précédé de 'Le Mari garçon', comédie de Boissy, interprétée par les Comédiens Italiens.
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263
p. 197-203
Extrait d'Anacréon, nouveau Ballet en un Acte, de MM. de Cabusac & Rameau.
Début :
On s'est proposé dans ce ballet de peindre un caractere ; & celui d'Anacréon, le [...]
Mots clefs :
Ballet, Amour, Plaisir
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Extrait d'Anacréon, nouveau Ballet en un Acte, de MM. de Cabusac & Rameau.
Extrait d'Anacréon , nouveau Ballet en un
Acte , de MM. de Cabufac & Rameau.jį
On s'eft propofé dans ce ballet de peindre
un caractere ; & celui d'Anacréon , le
Poëte des graces & de l'enjouement , n'étoit
pas aifé à développer fur le théâtre lyrique.
Le nom d'Anacréon nous repréſenté
l'idée d'un vieillard , fort aimable à la vé-
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
rité , mais c'est toujours l'idée d'un vieillard
; & un pareil perfonnage amoureux ,
ou comme le dit M. de C. , jouant fans
celle avec les Amours , touche de bien près
au comique , peut - être même au ridicule.
Il falloit éviter ce premier écueil . On a
mis en scène , à côté même d'Anacréon ,
Batyle , ce perfonnage fi connu dans les
chroniques du Parnaffe . Il étoit indifpenfable
d'imaginer des prétextes honnêtes
qui puffent autorifer une pareille entreprife
, & c'eft ce qu'on a eu l'art de faire
ici , par un ppllaann tthhééaattrraall , qui a tout le mérite
de la difficulté adroitement vaincue .
On fuppofe qu'Anacréon a élevé Batyle
& Chloé , avec tous les foins & la tendreffe
de l'amitié. Ces jeunes enfans inf
truits par cet aimable Maître , faits l'un
pour l'autre , ne fe quittant jamais , s'aiment
, fe le difent , & croyent leur liaiſon
tout-à fait ignorée. Anacréon a facilement
apperçu leur intelligence , il en eft flaté ,
& il s'en amufe. Voici comme il en parle
dans le monologue qui ouvre la fcène .
Myrtes fleuris , naiffant feuillage ,
Où Flore & les Amours ont fixé les zéphirs ;
Berceaux charmans , que votre ombrage
Me promet encor de plaifirs !
Deux cecurs que j'ai formés , qu'un doux penchant
engage ,
Penfent qu'Anacréon ignore leurs foupirs.
DECEMBRE. 1754. 199
D'ici je vois leur trouble , & j'entens leur langage;
J'alarme tour à tour & fate leurs défirs
J'aime à jouir de mon ouvrage ;
Et cet innocent badinage
De l'hyver de mes ans embellit les loifirs.
Une grande fête fe prépare , Chloé &
& Batyle doivent y chanter des vers nouveaux
d'Anacréon ; mais on ignore quel
eft l'objet fecret de tous ces préparatifs :
Chloé arrive pour s'en informer.
Anacreon , qui dans fon monologue a
déja annoncé une partie de fon projet , ne
lui répond que d'une maniere détournée ,
& par des galanteries legeres . Il lui dit enfin
qu'elle eft appellée par l'hymen pour
former une chaîne digne d'elle , & bientôt
après :
En vain le poids des ans me preffe,
Mon coeur n'eft jamais fans defirs ;
Au charme de vos yeux , au feu de ma tendreffe
Je dois ma vie & mes plaifirs.
C'eſt Hébé , fous vos traits , qui me rend la jeu◄
neffe.
Chloé , qui connoît Anacréon , craint
avec raifon que cet hymen ne le regarde :
le vieillard jouit de fon trouble , & pour
l'augmenter , il lui adreffe ce difcours équivoque
en la quittant :
Auprès de cent beautés que j'aimai tour à tour
L'amour a comblé mon attente ;
I iiij
100 MERCURE DE FRANCE.
Mais ce jour eft mon plus beau jour ,
Chloé , j'y veux former une chaîne conſtante ,
Qui de tous fes bienfaits m'acquitte envers l'amour.
Au moment qu'Anacréon fort , Batyle
paroît dans l'enchantement que lui caufent
les vers dont Anacréon l'a chargé pour
la fère qu'on prépare , il apperçoit Chloé ,
& dans fon enthoufiafme , il lui dit :
Ah ma Chloé , daignez entendre
Ce que je chante dans nos jeux.
Et tout de fuite il chante :
» Des zéphirs que Flore rappelle \
» Je voulois chanter le retour.
» Je vis Chloé : qu'elle étoit belle !
» Je ne pus chanter que l'amour.
» Je lui confacrai dès ce jour
>> Tous mes voeux , mes vers , & malyre.
C'est pour Chloé que je refpire ,
Je ne chante qu'elle & l'amour.
Batyle alors tourne fes regards fur elle :
il la voit fondante en larmes ; il frémit. Elle
lui déclare le deffein d'Anacréon . Les vers
que Batyle vient de chanter , le lui confirment
; ceux qu'elle doit chanter elle - même
en font une preuve nouvelle . Ils font en
effet , les uns & les autres , tournés de façon
qu'ils peuvent convenir & à la pofition
qu'ils craignent , & au but fecret d'Anacréon.
Cette fcène vive & touchante eft
DECEMBRE . 1754. 201
interrompue par la fète. La jeuneffe de
Théos environne Anacréon qui joue de fa
lyre , le couronne de rofes , & le pare de
fleurs nouvelles . C'est là qu'on a place
quelques traits de la philofophie aimable
d'Anacréon. Il dit au milieu de cette jeuneffe
, que le plaifir anime :
Mettre à profit tous les inftans
Eft l'unique foin du vrai fage.
11 naît des fleurs dans tous les tems ;
Il eft des plaifirs à tout âge.
Et plus bas ,
Des caprices du fort je crains peu les retours ;
Je jouis du préfent , j'en connois l'avantage.
Je retrouve au déclin de l'âge
Les jeux rians de mes beaux jours.
Livrons au doux plaifir chaque inftant qui nous
refte ,
Et courons au terme funefte ,
En jouant avec les Amours .
Cependant Anacréon ne perd point de
vûe Batyle & Chloé : ils font l'un & l'autre
dans un trouble dont il fe plaît à jouir.
Tous ces préparatifs , ces fleurs dont on le
pare , les vers qu'ils font chargés de chanter
, leur infpirent des alarmes qu'il redouble
en preffant Chloé de commencer .
Il y a dans cet endroit une fcène de trèspeu
de vers , tendre & badine de la part
d'Anacréon , théatrale & naïve de la part
Iy
202 MERCURE DE FRANCE
des deux jeunes amans , qui conduit enfin
à l'explication fuivante.
Anacréon.
J'ai voulu quelque tems jouir de vos foupirs.
Rendre heureux ce qu'on aime eft l'amour de mor
âge.
Qu'a former vos deux coeurs j'ai goûté de plaifirs !
Mais c'eſt en comblant vos defirs
Que je couronne mon ouvrage.
En chantant les derniers vers , il les unit;
& ce dénouement heureux eft fuivi d'un
divertiffement auffi neuf que faillant.
La Ferme du fond s'ouvre. Une terraffe
qui forme un fecond théâtre eft remplie
de jeunes Danfeurs qui fuivent les mouvemens
du ballet qu'on voit fur le devant
du théatre. Cette fète eft formée par une
troupe de jeunes Théoniens , qui repréfentent
une orgie galante . Le ballet , dans lequel
on a vû fucceffivement des pas de 2 , de
3 , de 4 , & de 7 , fort ingénieux , & trèsgais
, fans ceffer d'être nobles , eft pour la
mufique & la danfe , de la plus forte & de
la plus agréable compofition , & il eft terminé
par un choeur de bacchanales , digne
de la réputation de M. Rameau. Ce font
MM. de Chaffé & Jeliote qui ont rempli
les rolles d'Anacréon & de Batyle. Mile
Fel étoit chargée de celui de Chloé.
Le 26 , Anacréon fut donné
pour
la for
DECEMBRE . 1754 203
-
conde fois avec Cenie , comédie de Mad.
de Graffigni ; & le 29 l'Opéra , fans avoir
befoin d'une plus longue préparation , repréfenta
pour la premiere fois Daphnis &
Alcimadure , paftorale Languedocienne ,
en trois actes , précédée d'un prologue.
Acte , de MM. de Cabufac & Rameau.jį
On s'eft propofé dans ce ballet de peindre
un caractere ; & celui d'Anacréon , le
Poëte des graces & de l'enjouement , n'étoit
pas aifé à développer fur le théâtre lyrique.
Le nom d'Anacréon nous repréſenté
l'idée d'un vieillard , fort aimable à la vé-
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
rité , mais c'est toujours l'idée d'un vieillard
; & un pareil perfonnage amoureux ,
ou comme le dit M. de C. , jouant fans
celle avec les Amours , touche de bien près
au comique , peut - être même au ridicule.
Il falloit éviter ce premier écueil . On a
mis en scène , à côté même d'Anacréon ,
Batyle , ce perfonnage fi connu dans les
chroniques du Parnaffe . Il étoit indifpenfable
d'imaginer des prétextes honnêtes
qui puffent autorifer une pareille entreprife
, & c'eft ce qu'on a eu l'art de faire
ici , par un ppllaann tthhééaattrraall , qui a tout le mérite
de la difficulté adroitement vaincue .
On fuppofe qu'Anacréon a élevé Batyle
& Chloé , avec tous les foins & la tendreffe
de l'amitié. Ces jeunes enfans inf
truits par cet aimable Maître , faits l'un
pour l'autre , ne fe quittant jamais , s'aiment
, fe le difent , & croyent leur liaiſon
tout-à fait ignorée. Anacréon a facilement
apperçu leur intelligence , il en eft flaté ,
& il s'en amufe. Voici comme il en parle
dans le monologue qui ouvre la fcène .
Myrtes fleuris , naiffant feuillage ,
Où Flore & les Amours ont fixé les zéphirs ;
Berceaux charmans , que votre ombrage
Me promet encor de plaifirs !
Deux cecurs que j'ai formés , qu'un doux penchant
engage ,
Penfent qu'Anacréon ignore leurs foupirs.
DECEMBRE. 1754. 199
D'ici je vois leur trouble , & j'entens leur langage;
J'alarme tour à tour & fate leurs défirs
J'aime à jouir de mon ouvrage ;
Et cet innocent badinage
De l'hyver de mes ans embellit les loifirs.
Une grande fête fe prépare , Chloé &
& Batyle doivent y chanter des vers nouveaux
d'Anacréon ; mais on ignore quel
eft l'objet fecret de tous ces préparatifs :
Chloé arrive pour s'en informer.
Anacreon , qui dans fon monologue a
déja annoncé une partie de fon projet , ne
lui répond que d'une maniere détournée ,
& par des galanteries legeres . Il lui dit enfin
qu'elle eft appellée par l'hymen pour
former une chaîne digne d'elle , & bientôt
après :
En vain le poids des ans me preffe,
Mon coeur n'eft jamais fans defirs ;
Au charme de vos yeux , au feu de ma tendreffe
Je dois ma vie & mes plaifirs.
C'eſt Hébé , fous vos traits , qui me rend la jeu◄
neffe.
Chloé , qui connoît Anacréon , craint
avec raifon que cet hymen ne le regarde :
le vieillard jouit de fon trouble , & pour
l'augmenter , il lui adreffe ce difcours équivoque
en la quittant :
Auprès de cent beautés que j'aimai tour à tour
L'amour a comblé mon attente ;
I iiij
100 MERCURE DE FRANCE.
Mais ce jour eft mon plus beau jour ,
Chloé , j'y veux former une chaîne conſtante ,
Qui de tous fes bienfaits m'acquitte envers l'amour.
Au moment qu'Anacréon fort , Batyle
paroît dans l'enchantement que lui caufent
les vers dont Anacréon l'a chargé pour
la fère qu'on prépare , il apperçoit Chloé ,
& dans fon enthoufiafme , il lui dit :
Ah ma Chloé , daignez entendre
Ce que je chante dans nos jeux.
Et tout de fuite il chante :
» Des zéphirs que Flore rappelle \
» Je voulois chanter le retour.
» Je vis Chloé : qu'elle étoit belle !
» Je ne pus chanter que l'amour.
» Je lui confacrai dès ce jour
>> Tous mes voeux , mes vers , & malyre.
C'est pour Chloé que je refpire ,
Je ne chante qu'elle & l'amour.
Batyle alors tourne fes regards fur elle :
il la voit fondante en larmes ; il frémit. Elle
lui déclare le deffein d'Anacréon . Les vers
que Batyle vient de chanter , le lui confirment
; ceux qu'elle doit chanter elle - même
en font une preuve nouvelle . Ils font en
effet , les uns & les autres , tournés de façon
qu'ils peuvent convenir & à la pofition
qu'ils craignent , & au but fecret d'Anacréon.
Cette fcène vive & touchante eft
DECEMBRE . 1754. 201
interrompue par la fète. La jeuneffe de
Théos environne Anacréon qui joue de fa
lyre , le couronne de rofes , & le pare de
fleurs nouvelles . C'est là qu'on a place
quelques traits de la philofophie aimable
d'Anacréon. Il dit au milieu de cette jeuneffe
, que le plaifir anime :
Mettre à profit tous les inftans
Eft l'unique foin du vrai fage.
11 naît des fleurs dans tous les tems ;
Il eft des plaifirs à tout âge.
Et plus bas ,
Des caprices du fort je crains peu les retours ;
Je jouis du préfent , j'en connois l'avantage.
Je retrouve au déclin de l'âge
Les jeux rians de mes beaux jours.
Livrons au doux plaifir chaque inftant qui nous
refte ,
Et courons au terme funefte ,
En jouant avec les Amours .
Cependant Anacréon ne perd point de
vûe Batyle & Chloé : ils font l'un & l'autre
dans un trouble dont il fe plaît à jouir.
Tous ces préparatifs , ces fleurs dont on le
pare , les vers qu'ils font chargés de chanter
, leur infpirent des alarmes qu'il redouble
en preffant Chloé de commencer .
Il y a dans cet endroit une fcène de trèspeu
de vers , tendre & badine de la part
d'Anacréon , théatrale & naïve de la part
Iy
202 MERCURE DE FRANCE
des deux jeunes amans , qui conduit enfin
à l'explication fuivante.
Anacréon.
J'ai voulu quelque tems jouir de vos foupirs.
Rendre heureux ce qu'on aime eft l'amour de mor
âge.
Qu'a former vos deux coeurs j'ai goûté de plaifirs !
Mais c'eſt en comblant vos defirs
Que je couronne mon ouvrage.
En chantant les derniers vers , il les unit;
& ce dénouement heureux eft fuivi d'un
divertiffement auffi neuf que faillant.
La Ferme du fond s'ouvre. Une terraffe
qui forme un fecond théâtre eft remplie
de jeunes Danfeurs qui fuivent les mouvemens
du ballet qu'on voit fur le devant
du théatre. Cette fète eft formée par une
troupe de jeunes Théoniens , qui repréfentent
une orgie galante . Le ballet , dans lequel
on a vû fucceffivement des pas de 2 , de
3 , de 4 , & de 7 , fort ingénieux , & trèsgais
, fans ceffer d'être nobles , eft pour la
mufique & la danfe , de la plus forte & de
la plus agréable compofition , & il eft terminé
par un choeur de bacchanales , digne
de la réputation de M. Rameau. Ce font
MM. de Chaffé & Jeliote qui ont rempli
les rolles d'Anacréon & de Batyle. Mile
Fel étoit chargée de celui de Chloé.
Le 26 , Anacréon fut donné
pour
la for
DECEMBRE . 1754 203
-
conde fois avec Cenie , comédie de Mad.
de Graffigni ; & le 29 l'Opéra , fans avoir
befoin d'une plus longue préparation , repréfenta
pour la premiere fois Daphnis &
Alcimadure , paftorale Languedocienne ,
en trois actes , précédée d'un prologue.
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Résumé : Extrait d'Anacréon, nouveau Ballet en un Acte, de MM. de Cabusac & Rameau.
Le ballet 'Anacréon', créé par MM. de Cabufac et Rameau, met en scène Anacréon, un poète connu pour ses grâces et son enjouement. Pour éviter les aspects comiques ou ridicules d'un vieillard amoureux, les auteurs introduisent Batyle et Chloé, deux jeunes personnes élevés par Anacréon et secrètement amoureux l'un de l'autre. Anacréon, conscient de leur amour, décide de les unir. L'intrigue se déroule lors d'une grande fête où Chloé et Batyle doivent chanter des vers d'Anacréon. Par des monologues et des discours équivoques, Anacréon laisse entendre à Chloé qu'elle est destinée à un hymen, augmentant ainsi son trouble. Batyle, en chantant les vers d'Anacréon, révèle involontairement ses sentiments à Chloé. La fête est interrompue par des danses et des chants, durant lesquels Anacréon exprime sa philosophie de jouir du présent et de profiter de chaque instant. Finalement, Anacréon révèle son plan de les unir, comblant ainsi leurs désirs. Le ballet se termine par un divertissement avec des danses et des chants, mettant en scène des jeunes Théoniens dans une orgie galante. Les rôles principaux sont interprétés par MM. de Chaffé et Jeliote, ainsi que Mlle Fel. Le ballet a été représenté pour la première fois le 26 décembre 1754, suivi de la pastorale 'Daphnis et Alcimadure' le 29 décembre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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264
p. 203-211
Extrait de Daphnis & Alcimadure.
Début :
Cet opéra nouveau nous rappelle le premier âge en France des lettres & des arts. [...]
Mots clefs :
Opéra, Amour, Coeur, Prologue, Langage, Chants, Peuple, Divertissement
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Extrait de Daphnis & Alcimadure.
Extrait de Daphnis & Alcimadure.
Cet opéra nouveau nous rappelle le premier
âge en France des lettres & des arts.
M. Mondonville , poëte tout à la fois &.
muficien , eft l'auteur des paroles & de
la mufique tels étoient autrefois nos fameux
Troubadours.
La paftorale eft écrite en langage Tou-,
loufain , le prologue l'eft en notre langue.
L'inftitution des Jeux Floraux , que nous,
devons à Clémence Ifaure , eft le fujet du
prologue , & ce perfonnage eft le feul
chantant qui y paroiffe. Ifaure eft entourée
de peuples , de jardiniers & de jardi
nieres , & elle dit :
Dans ce féjour riant & fortuné
Phébus , Flore & l'Amour ont fixé leur empire
On y voit de leurs mains le printems couronné
Les coeurs font adoucis par l'air qu'on y reſpire.
On n'y craint point la rigueur des hyvers ,
On n'y craint point l'inconftance des belles ;
Nos arbres y font toujours verds ,,
Et nos amans toujours fideles.
Ces chants d'Ifaure très- bien rendus pa
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
Mlle Chevalier , & coupés de danſes &
de choeurs , amenent le développement du
projet qu'elle a formé ; elle dit :
Peuples , il faut dans ce beau jour ,
D'un fiécle fi chéri tranſmettre la mémoire ,
Et je veux que des prix couronnent la victoire
De ceux qui fçauront mieux chanter le tendre
amour.
On voit paroître en effet les nobles , formant
une entrée , & portant les différens
prix que la célébre Académie de Toulouſe
diftribue tous les ans. Ifaure enfuite propofe
de retracer en langage du pays , les
amours de Daphnis & d'Alcimadure ; elle
dit :
Traçons par quel bonheur
Daphnis fçut attendrir la fiere Alcimadure :
De leur fimplicité la naïve peinture
Eft l'image de notre coeur ..
Les peuples lui répondent par des chants
de triomphe & d'allégreffe , & c'eft ainfi
que finit d'une maniere fort noble ce joli
prologue.
La Paftorale roule fur trois acteurs :
Daphnis , qui aime Alcimadure ; celle - ci
qui n'aime encore rien , & qui s'eft dé cidée
pour fuir toujours l'amour ; & Jean net
fon frere , perfonnage toujours gai , qui
prend vivement les intérêts de fa foeur
qui cherche en s'amufant à lui ménager un
&
DECEMBRE . 1754. 205
établiffement qu'il croit fort convenable.
Daphnis en fe montrant , développe la
fituation de fon ame par un monologue ,
dont le chant peint fort bien la tendreffe
naïve des paroles.
Hélas ! pauret que farey jou !
Tant m'a blaffat l'ou Dion d'amou.
Defpey que l'el d'Alcimadouro
A dedins mon cor amourous
Allucat milo fougairous ,
Souffri la peno la pu duro.
Hélas ! & c.
Alcimadure paroît , & il s'éloigne pour
découvrir ce qui l'amene . Voici la maniere
vive dont elle s'anonce.
Gazouillats , auzelets , à l'umbro del feuillatge ;
Quant bous fiulats moun cor es encantat.
Entendi bé qué din boftré lengatgé .
Bous célébrats la libertat .
El' es lou plazé de ma bido ,
Car y ou la canti coumo bous.
Tabé fan ceflo èlo mé crido
Qu'elo foulo pot rend' huroux .
Après cette ariette d'un chant léger &
très-agréable , Daphnis paroît , & ces deux
perfonnages foutiennent dans la fcene , l'un
le ton de la tendreffe , l'autre le ton de
gaieté que leurs monologues avoient annoncé.
Daphnis y déclare fon amour ; Alcimadure
l'écoute fans le croire , elle le
206 MERCURE DE FRANCE.
rebute même , & paroît refolue à le fuir ,
mais il l'arrête en lui propofant une petite
fête où l'on doit danfer pour elle , & court
chercher les bergers du village pour la lui
donner. Jeannet , frere d'Alcimadure , arrive
alors ; elle lui fait confidence d'un
amour dont elle fe feroit bien paffée. Il combat
cette répugnance , & trouve Daphnis
un parti fortable ; mais Alcimadure n'entend
point raifon fur ce point ; elle dit :
L'ou plazé de la bido
A cos la gayetat ;
E quand on fe marido
On perdla libertat ..
Et plus bas.
Nou boli pas douna moun cor
A qui pot de reni boulatgé.
Qui fe contento de fon for
Nou defiro res dabantagé.
Jeannet infifte , & il fe propofe s'il
rencontre Daphnis dont il n'eft pas connu ,
de l'éprouver fi bien , qu'il ne lui fera pas
poffible de le tromper . Alors le divertiffement
annoncé dans la fcene précédente
arrive. Il eft compofé de bergers & de
bergeres, & les chants qui coupent la danfe
font tous adroitement placés dans la bouche
de Daphnis , & relatifs à la fituation
de fon coeur.-
་
DECEMBRE . 1754. 207
Qui bey la bello Alcimaduro
Bey l'aftré lou pu bel ;
Per charma touto la naturo
Nou li cal qu'un cop d'el.
Per aquelo Benus noubelo
On bey lous amours enfantets
Boultija fan ceffo après elo
Coumo une troupo d'auzelets.
Cette jolie chanfon eft bientôt fuivie
d'une autre , qui peint une image tout auffi
agréable.
Bezets Pourmel per las flouretos
Boulega fous jouinés ramels.
Efcoutats des pichots auzels
Las amouroufos canfounetos.
Per tout charma lou Diu nenet
Tiro fan ceffo de l'arquet.
N'oublido res dins la naturo ,
Hormis lou cor d'Alcimaduro .
Daphnis ne fe laffe point de chanter
l'amour. Ce refrein paroît déplaire à Alcimadure
; elle interrompt brufquement la
fête , & prend pour prétexte qu'elle eft
obligée d'aller joindre fon frere , ce qui
termine le premier acte.
Le ſecond débute par une troupe de vil
lageois conduits par Jeannet , armés pour
une chaffe au loup. Iis s'animent par un
choeur brillant à la chaffe qu'ils doivent
faire , & Jeannet les renvoye après , en
leur difant fierement de l'avertir lofqu'it
208 MERCURE DE FRANCE.
faudra commencer d'entrer en danfe . Avec
les armes qu'il porte , il fe flate d'en impofer
affez à Daphnis pour éprouver fon
amour , & il fe propofe de le fervir auprès
de fa foeur , s'il le trouve fidéle . Daphnis
paroît ; l'explication fe fait par des difcours
naïfs de la part de l'un , & par des bravades
de la part de l'autre . M. M. pour varier
, a voulu jetter du comique dans ce
perfonnage fort bien chanté par M. Delatour.
Sur ce que Daphnis lui dit des
rigueurs qu'il éprouve , il lui répond :
On pot , quand on es malhuroux ,
Se difpenfa d'eftré fidelo .
'Anats , benets , paffejats bous ,
Arpentats coulinos , montagnos ;
Per eftr' encaro pus hurous
Fazets tres ou quatré campagnos.
Daphnis lui réplique :
A qué tout aquo ferbira ,
Per-tout l'amour me ſeguira.
Jeannet fait alors l'étonné. Quoi ! lui
dit-il , vous n'avez jamais vû de batailles ,
de canons , de bombes , &c ?
Daphnis.
Ni lous clarins , ni las troumpetos
Nou troublon pas noftrés hamels.
L'écho n'es rébeillat que per noftros muzetos
E lou ramargé des auzels :
DECEMBRE. 1754 209
Lous els fouls de las paftouretos
Blaffoun lou cor des paftourels.
L'éclairciffement arrive enfuite . Jeannet
feint d'être fur le point de fe marier
avec Alcimadure ; on juge de l'effet d'une
pareille confidence fur Daphnis . Il déclare
avec fermeté qu'il aime cette cruelle. Jeannet
veut le forcer à n'y plus penfer ; il
leve le bras & fon épieu pour l'y contraindre
: mais le berger fidele aime mieux mourir
.... Dans ce moment on entend crier
au fecours : c'eft Alcimadure poursuivie
par un loup prêt à la dévorer . Daphnis arrache
des mains de Jeannet , qui s'enfuit ,
l'épieu dont il étoit armé , combat le loup ,
le tue , revient , & trouve Alcimadure
évanouie. Il lui parle , lui dit que le loup eft
mort , & s'efforce de l'attendrir. Elle n'eft
que reconnoiffante & point tendre. Jeannet
furvient pour faire une nouvelle fanfaronade
tout le village le fuit , & il fe
forme alors un divertiffement qui a pour
objet de célébrer la valeur de Daphnis .
Alcimadure & Jeannet , par ce moyen , fe
trouvent chargés de toutes les chanfons
que M. M. y a placées. L'acte finit par le
projet d'aller préfenter Daphnis en triomphe
au Seigneur du village.
Alcimadure ouvre le troifiéme acte par
un monologue , dans lequel fon coeur dif210
MERCURE DE FRANCE.
pute encore contre l'amour. Jeannet qui
arrive , lui apprend qu'il a éprouvé fon
amant , tâche de vaincre fon indifférence
n'y réuffit pas , & fe retire appercevant
Daphnis. Celui ci fait de nouveaux efforts
, il parle de mourir : Alcimadure fe
trouble , & fe plaint d'avoir été quittée
par Jeannet. A ce nom , que Daphnis croit
être celui de fon rival , il fort au defef
poir , bien réfolu de ne plus vivre. C'eft
alors qu'Alcimadure ne fuit plus que les
mouvemens de fon coeur ; fon amour fe
déclare par fes craintes. Jeannet revient ,
& lui affure que Daphnis eft mort. Elle
ne fe poffede plus à cette nouvelle ; elle
part pour aller percer fon fein du même
couteau qui a percé le coeur de fon amant .
Daphnis paroît alors . Le defefpoir
d'Alcimadure fe change en une joie auffi
vive que tendre. Un duo charmant couronne
le plaifir que caufe tout cet acte ,
& un divertiffement formé par les compagnons
de Daphnis & les compagnes d'Alcimadure
, termine fort heureufement cet
ouvrage , qui joint le piquant de la fingularité
aux graces naïves d'un genre toutà-
fait inconnu . Nous avons déja dit la maniere
dont Mr Delatour s'eft acquitté du
rolle de Jeannet ; ceux d'Alcimadure & de
Daphnis ont été rendus par Mlle Fel & Mr
DE CEM BR E.
1754. 211
Jeliote. Ils font fi fupérieurs l'un & l'autre
, lorfqu'ils chantent le François , qu'il
eft aifé de juger du charme de leur voix ,
de la fineffe de leur expreffion , de la
fection de leurs traits , en rendant le langage
du pays riant auquel nous devons
leur naiffance.
Cet opéra nouveau nous rappelle le premier
âge en France des lettres & des arts.
M. Mondonville , poëte tout à la fois &.
muficien , eft l'auteur des paroles & de
la mufique tels étoient autrefois nos fameux
Troubadours.
La paftorale eft écrite en langage Tou-,
loufain , le prologue l'eft en notre langue.
L'inftitution des Jeux Floraux , que nous,
devons à Clémence Ifaure , eft le fujet du
prologue , & ce perfonnage eft le feul
chantant qui y paroiffe. Ifaure eft entourée
de peuples , de jardiniers & de jardi
nieres , & elle dit :
Dans ce féjour riant & fortuné
Phébus , Flore & l'Amour ont fixé leur empire
On y voit de leurs mains le printems couronné
Les coeurs font adoucis par l'air qu'on y reſpire.
On n'y craint point la rigueur des hyvers ,
On n'y craint point l'inconftance des belles ;
Nos arbres y font toujours verds ,,
Et nos amans toujours fideles.
Ces chants d'Ifaure très- bien rendus pa
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
Mlle Chevalier , & coupés de danſes &
de choeurs , amenent le développement du
projet qu'elle a formé ; elle dit :
Peuples , il faut dans ce beau jour ,
D'un fiécle fi chéri tranſmettre la mémoire ,
Et je veux que des prix couronnent la victoire
De ceux qui fçauront mieux chanter le tendre
amour.
On voit paroître en effet les nobles , formant
une entrée , & portant les différens
prix que la célébre Académie de Toulouſe
diftribue tous les ans. Ifaure enfuite propofe
de retracer en langage du pays , les
amours de Daphnis & d'Alcimadure ; elle
dit :
Traçons par quel bonheur
Daphnis fçut attendrir la fiere Alcimadure :
De leur fimplicité la naïve peinture
Eft l'image de notre coeur ..
Les peuples lui répondent par des chants
de triomphe & d'allégreffe , & c'eft ainfi
que finit d'une maniere fort noble ce joli
prologue.
La Paftorale roule fur trois acteurs :
Daphnis , qui aime Alcimadure ; celle - ci
qui n'aime encore rien , & qui s'eft dé cidée
pour fuir toujours l'amour ; & Jean net
fon frere , perfonnage toujours gai , qui
prend vivement les intérêts de fa foeur
qui cherche en s'amufant à lui ménager un
&
DECEMBRE . 1754. 205
établiffement qu'il croit fort convenable.
Daphnis en fe montrant , développe la
fituation de fon ame par un monologue ,
dont le chant peint fort bien la tendreffe
naïve des paroles.
Hélas ! pauret que farey jou !
Tant m'a blaffat l'ou Dion d'amou.
Defpey que l'el d'Alcimadouro
A dedins mon cor amourous
Allucat milo fougairous ,
Souffri la peno la pu duro.
Hélas ! & c.
Alcimadure paroît , & il s'éloigne pour
découvrir ce qui l'amene . Voici la maniere
vive dont elle s'anonce.
Gazouillats , auzelets , à l'umbro del feuillatge ;
Quant bous fiulats moun cor es encantat.
Entendi bé qué din boftré lengatgé .
Bous célébrats la libertat .
El' es lou plazé de ma bido ,
Car y ou la canti coumo bous.
Tabé fan ceflo èlo mé crido
Qu'elo foulo pot rend' huroux .
Après cette ariette d'un chant léger &
très-agréable , Daphnis paroît , & ces deux
perfonnages foutiennent dans la fcene , l'un
le ton de la tendreffe , l'autre le ton de
gaieté que leurs monologues avoient annoncé.
Daphnis y déclare fon amour ; Alcimadure
l'écoute fans le croire , elle le
206 MERCURE DE FRANCE.
rebute même , & paroît refolue à le fuir ,
mais il l'arrête en lui propofant une petite
fête où l'on doit danfer pour elle , & court
chercher les bergers du village pour la lui
donner. Jeannet , frere d'Alcimadure , arrive
alors ; elle lui fait confidence d'un
amour dont elle fe feroit bien paffée. Il combat
cette répugnance , & trouve Daphnis
un parti fortable ; mais Alcimadure n'entend
point raifon fur ce point ; elle dit :
L'ou plazé de la bido
A cos la gayetat ;
E quand on fe marido
On perdla libertat ..
Et plus bas.
Nou boli pas douna moun cor
A qui pot de reni boulatgé.
Qui fe contento de fon for
Nou defiro res dabantagé.
Jeannet infifte , & il fe propofe s'il
rencontre Daphnis dont il n'eft pas connu ,
de l'éprouver fi bien , qu'il ne lui fera pas
poffible de le tromper . Alors le divertiffement
annoncé dans la fcene précédente
arrive. Il eft compofé de bergers & de
bergeres, & les chants qui coupent la danfe
font tous adroitement placés dans la bouche
de Daphnis , & relatifs à la fituation
de fon coeur.-
་
DECEMBRE . 1754. 207
Qui bey la bello Alcimaduro
Bey l'aftré lou pu bel ;
Per charma touto la naturo
Nou li cal qu'un cop d'el.
Per aquelo Benus noubelo
On bey lous amours enfantets
Boultija fan ceffo après elo
Coumo une troupo d'auzelets.
Cette jolie chanfon eft bientôt fuivie
d'une autre , qui peint une image tout auffi
agréable.
Bezets Pourmel per las flouretos
Boulega fous jouinés ramels.
Efcoutats des pichots auzels
Las amouroufos canfounetos.
Per tout charma lou Diu nenet
Tiro fan ceffo de l'arquet.
N'oublido res dins la naturo ,
Hormis lou cor d'Alcimaduro .
Daphnis ne fe laffe point de chanter
l'amour. Ce refrein paroît déplaire à Alcimadure
; elle interrompt brufquement la
fête , & prend pour prétexte qu'elle eft
obligée d'aller joindre fon frere , ce qui
termine le premier acte.
Le ſecond débute par une troupe de vil
lageois conduits par Jeannet , armés pour
une chaffe au loup. Iis s'animent par un
choeur brillant à la chaffe qu'ils doivent
faire , & Jeannet les renvoye après , en
leur difant fierement de l'avertir lofqu'it
208 MERCURE DE FRANCE.
faudra commencer d'entrer en danfe . Avec
les armes qu'il porte , il fe flate d'en impofer
affez à Daphnis pour éprouver fon
amour , & il fe propofe de le fervir auprès
de fa foeur , s'il le trouve fidéle . Daphnis
paroît ; l'explication fe fait par des difcours
naïfs de la part de l'un , & par des bravades
de la part de l'autre . M. M. pour varier
, a voulu jetter du comique dans ce
perfonnage fort bien chanté par M. Delatour.
Sur ce que Daphnis lui dit des
rigueurs qu'il éprouve , il lui répond :
On pot , quand on es malhuroux ,
Se difpenfa d'eftré fidelo .
'Anats , benets , paffejats bous ,
Arpentats coulinos , montagnos ;
Per eftr' encaro pus hurous
Fazets tres ou quatré campagnos.
Daphnis lui réplique :
A qué tout aquo ferbira ,
Per-tout l'amour me ſeguira.
Jeannet fait alors l'étonné. Quoi ! lui
dit-il , vous n'avez jamais vû de batailles ,
de canons , de bombes , &c ?
Daphnis.
Ni lous clarins , ni las troumpetos
Nou troublon pas noftrés hamels.
L'écho n'es rébeillat que per noftros muzetos
E lou ramargé des auzels :
DECEMBRE. 1754 209
Lous els fouls de las paftouretos
Blaffoun lou cor des paftourels.
L'éclairciffement arrive enfuite . Jeannet
feint d'être fur le point de fe marier
avec Alcimadure ; on juge de l'effet d'une
pareille confidence fur Daphnis . Il déclare
avec fermeté qu'il aime cette cruelle. Jeannet
veut le forcer à n'y plus penfer ; il
leve le bras & fon épieu pour l'y contraindre
: mais le berger fidele aime mieux mourir
.... Dans ce moment on entend crier
au fecours : c'eft Alcimadure poursuivie
par un loup prêt à la dévorer . Daphnis arrache
des mains de Jeannet , qui s'enfuit ,
l'épieu dont il étoit armé , combat le loup ,
le tue , revient , & trouve Alcimadure
évanouie. Il lui parle , lui dit que le loup eft
mort , & s'efforce de l'attendrir. Elle n'eft
que reconnoiffante & point tendre. Jeannet
furvient pour faire une nouvelle fanfaronade
tout le village le fuit , & il fe
forme alors un divertiffement qui a pour
objet de célébrer la valeur de Daphnis .
Alcimadure & Jeannet , par ce moyen , fe
trouvent chargés de toutes les chanfons
que M. M. y a placées. L'acte finit par le
projet d'aller préfenter Daphnis en triomphe
au Seigneur du village.
Alcimadure ouvre le troifiéme acte par
un monologue , dans lequel fon coeur dif210
MERCURE DE FRANCE.
pute encore contre l'amour. Jeannet qui
arrive , lui apprend qu'il a éprouvé fon
amant , tâche de vaincre fon indifférence
n'y réuffit pas , & fe retire appercevant
Daphnis. Celui ci fait de nouveaux efforts
, il parle de mourir : Alcimadure fe
trouble , & fe plaint d'avoir été quittée
par Jeannet. A ce nom , que Daphnis croit
être celui de fon rival , il fort au defef
poir , bien réfolu de ne plus vivre. C'eft
alors qu'Alcimadure ne fuit plus que les
mouvemens de fon coeur ; fon amour fe
déclare par fes craintes. Jeannet revient ,
& lui affure que Daphnis eft mort. Elle
ne fe poffede plus à cette nouvelle ; elle
part pour aller percer fon fein du même
couteau qui a percé le coeur de fon amant .
Daphnis paroît alors . Le defefpoir
d'Alcimadure fe change en une joie auffi
vive que tendre. Un duo charmant couronne
le plaifir que caufe tout cet acte ,
& un divertiffement formé par les compagnons
de Daphnis & les compagnes d'Alcimadure
, termine fort heureufement cet
ouvrage , qui joint le piquant de la fingularité
aux graces naïves d'un genre toutà-
fait inconnu . Nous avons déja dit la maniere
dont Mr Delatour s'eft acquitté du
rolle de Jeannet ; ceux d'Alcimadure & de
Daphnis ont été rendus par Mlle Fel & Mr
DE CEM BR E.
1754. 211
Jeliote. Ils font fi fupérieurs l'un & l'autre
, lorfqu'ils chantent le François , qu'il
eft aifé de juger du charme de leur voix ,
de la fineffe de leur expreffion , de la
fection de leurs traits , en rendant le langage
du pays riant auquel nous devons
leur naiffance.
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Résumé : Extrait de Daphnis & Alcimadure.
L'opéra 'Daphnis & Alcimadure' de Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville illustre le premier âge des lettres et des arts en France. Mondonville, à la fois poète et musicien, en est l'auteur des paroles et de la musique, s'inspirant des troubadours d'antan. La pastorale est écrite en langage toulousain, tandis que le prologue est en français. Ce prologue célèbre l'institution des Jeux Floraux, fondée par Clémence Isaure, et la met en scène entourée de peuples, de jardiniers et de jardinières. Clémence Isaure propose de célébrer l'amour à travers des concours de chant et de poésie. L'intrigue se concentre sur trois personnages principaux : Daphnis, amoureux d'Alcimadure, Alcimadure, qui refuse l'amour, et Jeannet, le frère d'Alcimadure, toujours gai et bienveillant. Daphnis exprime son amour pour Alcimadure, qui le repousse initialement. Jeannet tente de convaincre Alcimadure des qualités de Daphnis, mais elle reste réticente, préférant sa liberté. Une fête est organisée, durant laquelle Daphnis chante son amour. Alcimadure interrompt la fête, prétextant devoir rejoindre son frère. Dans le second acte, Jeannet et des villageois partent chasser le loup. Jeannet rencontre Daphnis et le défie, mais finit par reconnaître la sincérité de son amour. Alcimadure est attaquée par un loup, et Daphnis la sauve. Le village célèbre alors la bravoure de Daphnis. Dans le troisième acte, Alcimadure lutte contre ses sentiments amoureux. Jeannet révèle à Alcimadure que Daphnis est mort, la poussant à vouloir se suicider. Daphnis réapparaît, et Alcimadure, folle de joie, lui avoue son amour. Un duo charmant et un divertissement final concluent l'opéra, mettant en scène les compagnons de Daphnis et les compagnes d'Alcimadure. Les rôles de Jeannet, Alcimadure et Daphnis sont interprétés par des artistes dont les performances sont saluées pour leur charme et leur authenticité.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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265
p. 211-215
« Le lendemain 30 Octobre, la Comédie Françoise représenta Cinna, de P. Corneille [...] »
Début :
Le lendemain 30 Octobre, la Comédie Françoise représenta Cinna, de P. Corneille [...]
Mots clefs :
Comédie-Française, Opéra
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Le lendemain 30 Octobre, la Comédie Françoise représenta Cinna, de P. Corneille [...] »
Le lendemain 30 Octobre , la Comédie
Françoife repréfenta Cinna , de P. Corneille
; & le Fat puni , petite piece , en un acte
& en profe de M ****
Les Fêtes de la Touffaint
fufpendirent
pour peu de jours le cours de tous ces brillans
fpectacles . On le reprit le 4 Novembre
, par une feconde
repréſentation d'Alcimadure
, dans laquelle on chanta deux
fois le duo du dernier acte , ainfi que la
Cour avoit paru le defirer .
Le 7 , c'est- à-dire après deux jours d'intervalle
feulement , on repréſenta Alcefte
ou le Triomphe d'Alcide , un des plus beaux
Opéra de Quinault & de Lulli.
du
Cet ouvrage a un mérite qui lui eft
propre
, & qui lui avoit toujours été contraire.
On ne l'avoit gueres envisagé que
côté du tendre intérêt dont il eft rempli ,
fans s'appercevoir que Quinault avoit en
le deffein d'en faire un chef- d'oeuvre de
grand fpectacle. Ainfi , foit défaut de goût ,
foit économie mal raiſonnée , les différens
212 MERCURE DE FRANCE.
objets que ce bel Opéra raffemble n'avoient
point encore été foignés avec l'habileté
qu'ils exigent , on en avoit toujours
négligé certaines parties ; celles qui dans
l'exécution avoient paru trop difficiles
avoient été mutilées ; quelques autres qui
demandent de la dépenſe , avoient été fupprimées
; d'autres enfin , telles que le Siége
de Scyros , n'avoient été rendues que
d'une maniere ou peu noble ou ridicule .
Les fautes paffées ont été réparées cette
année , & ce bel Opéra a été enfin exécuté
, comme Quinault auroit mérité de le
voir & de l'entendre.
L'orage fufcité par Thétis & calmé par Eole
, traité en grand ; le fiége de Scyros formé
de plufieurs belles manoeuvres de guerre
des anciens , conduit avec art, exécuté avec
chaleur ; les fleuves des enfers & la barque
à Caron préfentés fous des couleurs impofantes
, qui ennobliffoient par un chef.
d'oeuvre de l'art cette fituation hazardée ;
le paffage rapide du rivage fombre au palais
éclatant de Pluton ; les rideaux du fond
prolongeant toujours les perfpectives ; une
derniere décoration de génie , les ballets
animés de tout ce que la danfe peut fournir
de plus pittorefque & de plus brillant ,
la magnificence & la variété des habits ,
le jeu exact des machines , l'accord furDECEMBRE.
1754 213
prenant d'une foule d'exécutans en fousordre
, l'expreffion , les talens marqués &
le feu des premiers acteurs , tout s'eft réuni
pour faire d'Alcefte le fpectacle le mieux
ordonné & le plus étonnant qui eût encore
paru fur les théatres de la nation .
Mile Chevalier & Mile Fel repréſentoient
les rolles d'Alcefte & de Céphife.
Mr de Chaffé , celui d'Alcide ; & Mr Jéliote
, celui d'Admete .
Le lendemain de cette repréſentation
brillante , les Comédiens François donnerent
le Complaifant , Comédie en cinq actes
en profe , du même auteur que celle du
Fat puni ; & l'Impromptu de campagne , de
Poiffon.
Le 9 , l'Opéra repréfenta une feconde
fois Alcefte , avec cet enſemble admirable
dont on avoit été frappé à la premiere repréfentation
; auffi le fuccès fut- il égal . Ik
auroit été plus grand , s'il avoit
tre.
pu croî
On préparoit cependant l'Opéra de Thétis
, qui avoit été demandé quelques jours
auparavant. Rien n'eft impoffible au vrai
zéle ; car après que le 12 , la Comédie
Françoiſe eut repréfenté Amalazonte , Tra→
gédie de M. le Marquis de Ximenès , & le
Préjugé vaincu , petite Comédie de Mr
de Marivaux , on prit deux jours pour l'ar
214 MERCURE DE FRANCE.
rangement du théatre ; & le 14 Thétis &
Pélée , Opéra de M. de Fontenelle & de
Colaffe , fut repréſenté avec tout fon fpectacle
, comme ſi on avoit eu beaucoup
de tems pour le préparer . La fcene du fecond
acte dans laquelle le tonnerre , s'il
eft permis de s'exprimer ainfi , joue un fi
beau rolle , n'a jamais peut- être été rendue
avec tant de feu , de précifion & de
tendreffe , qu'elle le fut par Mlle Chevalier
& Mr Jéliore. Les principaux rolles
de cet Opéra furent exécutés ; fçavoir ,
Thétis par Mlle Chevalier , Doris par
Mlle Fel , Jupiter par Mr Gelin , Neptune
par Mr de Chaffé , & Pélée par Mr
Jéliote .
Le is , la Comédie Françoife repréfenta
les Debors trompeurs , Comédie en vers ,
en cinqactes , de Mr de Boiffy ; & le Mariage
fait & rompu , Comédie en vers , en
trois actes , de Dufrefni ; & le 16 l'Opéra
fit la clôture du théatre par une feconde
repréſentation de Thétis & Pélée , dont
l'exécution fut auffi agréable que la premiere
.
..MM. Slodtz , de l'Académie royale de
Peinture & de Sculpture , Décorateurs des
théatres de S. M , ont été les Décorateurs
de tous ces fpectacles.
Mr. Arnoult Machiniſte du Roi , a
7
DECEMBRE.
1754. 215
conftruit & fait jouer les belles machines
qu'on y a vûes.
Mr de Laval , Compofiteur des ballets
de S. M , a fait les ballets des cinq premiers
Opéras ; & Mr de Laval fon fils eft
entré pour moitié dans la compofition de
ceux de Thétis .
MM . Rebel & Francoeur , Surintendans
de la Mufique du Roi , qui ont fait le
choix des differens morceaux de chant ou
de fymphonies dont on a embelli les ouvrages
anciens , étoient chargés de l'exécution.
Tous ces différens fpectacles ont été ordonnés
par M. le Duc d'Aumont , premier
Gentilhomme de la Chambre de S. M , en
exercice ; & conduits par les foins de M.
Blondel de Gagny , Intendant des menus
plaifirs du Roi , en exercice .
Françoife repréfenta Cinna , de P. Corneille
; & le Fat puni , petite piece , en un acte
& en profe de M ****
Les Fêtes de la Touffaint
fufpendirent
pour peu de jours le cours de tous ces brillans
fpectacles . On le reprit le 4 Novembre
, par une feconde
repréſentation d'Alcimadure
, dans laquelle on chanta deux
fois le duo du dernier acte , ainfi que la
Cour avoit paru le defirer .
Le 7 , c'est- à-dire après deux jours d'intervalle
feulement , on repréſenta Alcefte
ou le Triomphe d'Alcide , un des plus beaux
Opéra de Quinault & de Lulli.
du
Cet ouvrage a un mérite qui lui eft
propre
, & qui lui avoit toujours été contraire.
On ne l'avoit gueres envisagé que
côté du tendre intérêt dont il eft rempli ,
fans s'appercevoir que Quinault avoit en
le deffein d'en faire un chef- d'oeuvre de
grand fpectacle. Ainfi , foit défaut de goût ,
foit économie mal raiſonnée , les différens
212 MERCURE DE FRANCE.
objets que ce bel Opéra raffemble n'avoient
point encore été foignés avec l'habileté
qu'ils exigent , on en avoit toujours
négligé certaines parties ; celles qui dans
l'exécution avoient paru trop difficiles
avoient été mutilées ; quelques autres qui
demandent de la dépenſe , avoient été fupprimées
; d'autres enfin , telles que le Siége
de Scyros , n'avoient été rendues que
d'une maniere ou peu noble ou ridicule .
Les fautes paffées ont été réparées cette
année , & ce bel Opéra a été enfin exécuté
, comme Quinault auroit mérité de le
voir & de l'entendre.
L'orage fufcité par Thétis & calmé par Eole
, traité en grand ; le fiége de Scyros formé
de plufieurs belles manoeuvres de guerre
des anciens , conduit avec art, exécuté avec
chaleur ; les fleuves des enfers & la barque
à Caron préfentés fous des couleurs impofantes
, qui ennobliffoient par un chef.
d'oeuvre de l'art cette fituation hazardée ;
le paffage rapide du rivage fombre au palais
éclatant de Pluton ; les rideaux du fond
prolongeant toujours les perfpectives ; une
derniere décoration de génie , les ballets
animés de tout ce que la danfe peut fournir
de plus pittorefque & de plus brillant ,
la magnificence & la variété des habits ,
le jeu exact des machines , l'accord furDECEMBRE.
1754 213
prenant d'une foule d'exécutans en fousordre
, l'expreffion , les talens marqués &
le feu des premiers acteurs , tout s'eft réuni
pour faire d'Alcefte le fpectacle le mieux
ordonné & le plus étonnant qui eût encore
paru fur les théatres de la nation .
Mile Chevalier & Mile Fel repréſentoient
les rolles d'Alcefte & de Céphife.
Mr de Chaffé , celui d'Alcide ; & Mr Jéliote
, celui d'Admete .
Le lendemain de cette repréſentation
brillante , les Comédiens François donnerent
le Complaifant , Comédie en cinq actes
en profe , du même auteur que celle du
Fat puni ; & l'Impromptu de campagne , de
Poiffon.
Le 9 , l'Opéra repréfenta une feconde
fois Alcefte , avec cet enſemble admirable
dont on avoit été frappé à la premiere repréfentation
; auffi le fuccès fut- il égal . Ik
auroit été plus grand , s'il avoit
tre.
pu croî
On préparoit cependant l'Opéra de Thétis
, qui avoit été demandé quelques jours
auparavant. Rien n'eft impoffible au vrai
zéle ; car après que le 12 , la Comédie
Françoiſe eut repréfenté Amalazonte , Tra→
gédie de M. le Marquis de Ximenès , & le
Préjugé vaincu , petite Comédie de Mr
de Marivaux , on prit deux jours pour l'ar
214 MERCURE DE FRANCE.
rangement du théatre ; & le 14 Thétis &
Pélée , Opéra de M. de Fontenelle & de
Colaffe , fut repréſenté avec tout fon fpectacle
, comme ſi on avoit eu beaucoup
de tems pour le préparer . La fcene du fecond
acte dans laquelle le tonnerre , s'il
eft permis de s'exprimer ainfi , joue un fi
beau rolle , n'a jamais peut- être été rendue
avec tant de feu , de précifion & de
tendreffe , qu'elle le fut par Mlle Chevalier
& Mr Jéliore. Les principaux rolles
de cet Opéra furent exécutés ; fçavoir ,
Thétis par Mlle Chevalier , Doris par
Mlle Fel , Jupiter par Mr Gelin , Neptune
par Mr de Chaffé , & Pélée par Mr
Jéliote .
Le is , la Comédie Françoife repréfenta
les Debors trompeurs , Comédie en vers ,
en cinqactes , de Mr de Boiffy ; & le Mariage
fait & rompu , Comédie en vers , en
trois actes , de Dufrefni ; & le 16 l'Opéra
fit la clôture du théatre par une feconde
repréſentation de Thétis & Pélée , dont
l'exécution fut auffi agréable que la premiere
.
..MM. Slodtz , de l'Académie royale de
Peinture & de Sculpture , Décorateurs des
théatres de S. M , ont été les Décorateurs
de tous ces fpectacles.
Mr. Arnoult Machiniſte du Roi , a
7
DECEMBRE.
1754. 215
conftruit & fait jouer les belles machines
qu'on y a vûes.
Mr de Laval , Compofiteur des ballets
de S. M , a fait les ballets des cinq premiers
Opéras ; & Mr de Laval fon fils eft
entré pour moitié dans la compofition de
ceux de Thétis .
MM . Rebel & Francoeur , Surintendans
de la Mufique du Roi , qui ont fait le
choix des differens morceaux de chant ou
de fymphonies dont on a embelli les ouvrages
anciens , étoient chargés de l'exécution.
Tous ces différens fpectacles ont été ordonnés
par M. le Duc d'Aumont , premier
Gentilhomme de la Chambre de S. M , en
exercice ; & conduits par les foins de M.
Blondel de Gagny , Intendant des menus
plaifirs du Roi , en exercice .
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Résumé : « Le lendemain 30 Octobre, la Comédie Françoise représenta Cinna, de P. Corneille [...] »
Du 30 octobre au 16 décembre 1754, une série de représentations théâtrales et opératiques ont été organisées. Le 30 octobre, la Comédie-Française a présenté 'Cinna' de Pierre Corneille et 'Le Fat puni'. Les festivités de la Toussaint ont interrompu les spectacles pendant quelques jours. Le 4 novembre, 'Alcimadure' a été joué, avec des reprises de duos. Le 7 novembre, 'Alceste ou le Triomphe d'Alcide' de Quinault et Lully a été représenté, avec des améliorations notables dans la mise en scène et les décors. Les acteurs principaux étaient Mlle Chevalier, Mlle Fel, Mr de Chassé et Mr Jéliote. Le 8 novembre, la Comédie-Française a présenté 'Le Complaisant' et 'L'Impromptu de campagne'. Le 9 novembre, 'Alceste' a été rejoué avec le même succès. Le 14 novembre, l'opéra 'Thétis et Pélée' de Fontenelle et Colasse a été représenté, avec une scène du tonnerre particulièrement remarquée. Les 15 et 16 novembre, la Comédie-Française a joué 'Les Dehors trompeurs' et 'Le Mariage fait et rompu', tandis que l'Opéra a clôturé avec une seconde représentation de 'Thétis et Pélée'. Les décorations étaient réalisées par MM. Slodtz, les machines par Mr. Arnoult, et les ballets par Mr. de Laval et son fils. La musique était dirigée par MM. Rebel et Francoeur, sous la supervision de M. le Duc d'Aumont et M. Blondel de Gagny.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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266
p. 193
OPERA.
Début :
L'Académie royale de musique a donné le 3 Décembre la premiere représentation [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique, Opéra
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA .
'Académie royale de mufique a donné
le 3 Décembre la premiere repréfentation
de Thefee , qu'elle avoit executé à
Fontainebleau le 18 & le 21 Octobre. Comme
il a paru ici avec moins de magnificence
qu'à la Cour , on lui a fait un accueil trèsinférieur
à fon mérite ; cependant il attire
de nombreuſes affemblées , les Vendredis
fur- tout font très- beaux . Les Dimanches
font moins brillans : on ne le joue que ces
deux jours de la femaine. On a repris
les Elémens le Mardi & le Jeudi , pour
ne pas fatiguer le grand Opéra. Les de ce
mois on doit donner à fa place Daphnis &
Alcimadure , Paftorale Languedocienne
en trois actes , précédée d'un Prologue . Je
n'entrerai dans aucun détail de ces Opera ,
le dernier volume de Décembre a tout dit
fur ce fujer dans l'article des Spectacles de
Fontainebleau .
'Académie royale de mufique a donné
le 3 Décembre la premiere repréfentation
de Thefee , qu'elle avoit executé à
Fontainebleau le 18 & le 21 Octobre. Comme
il a paru ici avec moins de magnificence
qu'à la Cour , on lui a fait un accueil trèsinférieur
à fon mérite ; cependant il attire
de nombreuſes affemblées , les Vendredis
fur- tout font très- beaux . Les Dimanches
font moins brillans : on ne le joue que ces
deux jours de la femaine. On a repris
les Elémens le Mardi & le Jeudi , pour
ne pas fatiguer le grand Opéra. Les de ce
mois on doit donner à fa place Daphnis &
Alcimadure , Paftorale Languedocienne
en trois actes , précédée d'un Prologue . Je
n'entrerai dans aucun détail de ces Opera ,
le dernier volume de Décembre a tout dit
fur ce fujer dans l'article des Spectacles de
Fontainebleau .
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Résumé : OPERA.
L'Académie royale de musique a présenté 'Théée' à Paris le 3 décembre. Cet opéra, déjà joué à Fontainebleau, attire un public nombreux les vendredis et dimanches. Pour éviter la fatigue du public, 'Les Éléments' sont repris les mardis et jeudis. En décembre, 'Daphnis et Alcimadure' remplacera 'Théée'. Les détails sont dans l'article des Spectacles de Fontainebleau de décembre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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267
p. 194-198
COMEDIE FRANÇOISE.
Début :
Le 11 Décembre les Comédiens François ont remis Nicomede, Tragédie du [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français, Comédie-Française, Nicomède, Nanine, Tragédie, Comédie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE.
COMÉDIE FRANÇOISE.
Le Décembre les Comédiens François
ont remis Nicomede , Tragédie du
grand Corneille , & très digne d'en être :
elle n'avoit point été reprife depuis la mort
du célébre Baron , arrivée en 1729 le 22
Décembre . Parmi la foule des beautés fu--
périeures dont cette piece étincelle , il fe
trouve beaucoup de chofes , ou plutôt d'expreffions
familieres , qu'on doit moins attribuer
à l'Auteur qu'au tems où il a vêcu .
Les deux premieres fois le public paroiffoit
indécis & comme partagé entre les éclats
de rire & les applaudiffemens , mais à la
troifiéme repréſentation ces familiarités ne
T'ont plus frappé , il n'a été fenfible qu'au
mérite fingulier de l'ouvrage , où la politique
joue le premier rôle , & qu'on peut
appeller une Tragédie de caractere. Nitomede
y paroît un digne éleve d'Annibal .
L'ironie eft fa figure favorite , il l'employe
fur-tout dans toute fa force vis- à vis de
Flaminius. Ce ton railleur paroît un peu
bleffer la dignité du cothurne ; le fpectateur
furpris n'a fçu d'abord s'il devoit applaudir
Nicomede comme un homme d'efprit
, ou l'admirer comme un grand homme.
Quelques-uns même l'ont qualifié de
JANVIER. 1755. 195
héros perfifleur , mais on a fenti par réflexion
que ce langage ironique partoit
d'une ame fiere , & qu'il convenoit à un
Prince jaloux de fes droits , & juftement
indigné de voir qu'un Romain vint impofer
la loi à Prufias fon pere , dans les propres
Etats. Il femble que Corneille ait voulu
dans cette piece , venger les Rois de la
fupériorité qu'il avoit donnée fur eux aux
Romains dans fes autres Tragédies. L'Ambaffadeur
de Rome y eft auffi petit devant
Nicomede que le Roi d'Egypte l'eft deyant
Cefar dans la mort de Pompée. M.
Grandval eft irès-bien dans le rôle de Nicomede
, & Mlle Clairon parfaitement
dans celui de Laodice . Le Samedi 15 , on
a joué cette Tragédie avec Nanine , Comédie
remife en trois actes , de M. de Voltaire.
Le Samedi 21 , on a redonné les
deux mêmes pieces. La chambrée étoit complette
pour parler le langage des Comédiens.
Le Lundi 23 , ils ont repréfenté pour la
premiere fois le Triumvirat , de M. de
Crébillon . Toute la France y étoit : il fut
écouté & reçu avec tous les égards , &
j'ofe dire , le reſpect qu'on doit au Sopho-
* Les Comédiens ont été les premiers à s'y méprendre
; ils ont affiché la piéce fous le titre nouveau
de Tragédie héroï- comique.
Iij
196 MERCURE DE FRANCE.
:
de
cle de nos jours. Il eft beau à 81 ans de
paroître encore dans la carriere : c'eſt un
fpectacle non-feulement digne de la curiofité
publique , mais encore de l'acclamation
univerfelle . On eft forcé d'avouer que
le quatriéme acte & une partie du cinquiéme
ont paru d'abord inférieurs aux trois
premiers , qui ont reçu de grands applau
diffemens. C'est peut-être la faute des Comédiens
, dont le feu s'eft rallenti : le froid
des Acteurs eft fouvent mis fur le compte
la piéce ; quand ils manquent de concert &
de chaleur , elle paroît manquer d'enfemble
& d'intérêt. Tullie eft le perfonnage qui
a le plus frappé faut- il s'en étonner ? c'eft
Mlle Clairon qui le joue. L'éloquence de
fon jeu y a peut-être autant contribué que
la fupériorité du rôle ; ce qui a fait dire
que la fille de Ciceron étoit plus diferte
que fon pere. Sextus eft encore un beau
caractere il fe montre un digne fils de
Pompée. Les connoiffeurs les plus rigides ,
mais qui jugent fans partialité , conviennent
tous qu'il y a dans cette tragédie des
béautés du premier ordre , & des traits
marqués au coin du grand maître. On y
reconnoît l'auteur d'Electre & de Rhadamifte
: c'est un beau foleil couchant , il
darde encore des rayons qui ont toute la
force de fon midi ; ils doivent échauffer le
public en fa faveur.
:
JANVIER. 1755. 197
Ils l'ont fait à la deuxième repréfentation.
La piece a été mieux jouée , en conféquence
mieux fentie . La cataſtrophe furtout
a fait la plus grande impreffion.
L'inftant où Fullie découvre le voile qui
cache la tête de fon pere fur la tribune
aux harangues , & la précifion admirable
avec laquelle l'actrice rend toute la
force de cette pofition terrible , former t
un coup de théatre qui arrache les lar-.
mes & qui déchire l'ame de tous les
fpectateurs. J'en parlerai plus au long le
mois prochain dans l'extrait que j'en donnerai.
On a oublié dans les deux derniers volumes
de Décembre de parler de la repriſe
des Tuteurs , qui ont été joués avec les
Troyennes. Sans entrer dans aucun détail , `
je vais fuppléer à ce filence. Cette Comédie
en deux actes , ou plutôt le talent qu'elle
annonce , mérite qu'on en faffe mention .
Les trois premieres fcenes montrent que
le jeune auteur de cette petite piéce eft appellé
au Comique , fon vers eft facile , &
fon dialogue naturel ; mais le difcours
qu'il adreffe à Madame la Comteffe de la
Marck prouve encore mieux fa vocation
pour ce genre. Quand on penfe à fon âge
auffi jufte fur l'art que l'on embraffe ,
& qu'on a comme lui le talent d'écrite ,
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
on eft für d'y faire un progrès rapide.
Le genre moyen de la Comédie , où les
moeurs purement bourgeoifes qu'il fe propofe
de traiter , me femblent comme à lui
les plus théatrales . Il faut fur la fcene des
ridicules de perfpective , fi j'ofe m'exprimer
ainfi ; il faut que leurs traits foient
gros pour exciter un vrai rire , ou un rire
machinal ; c'eft celui de la nature : ne rire
que de l'efprit , c'eft à peine fourire. J'aime
mieux pour mon amufement , rire avec
la bonne foi d'un bourgeois ingenu , ou la
groffe franchife d'un bon payfan , qu'avec
la circonfpection d'un homme du monde
qui craint d'éclater , & qui regle tous fes
mouvemens fur les loix exactes de la froide
décènce . Ce rire compaffé , qui en naiffant
expire fur les levres , ne part jamais
de l'ame , il n'eft qu'un raffinement de
l'art , ou plutôt qu'un ennui déguisé.
Le Décembre les Comédiens François
ont remis Nicomede , Tragédie du
grand Corneille , & très digne d'en être :
elle n'avoit point été reprife depuis la mort
du célébre Baron , arrivée en 1729 le 22
Décembre . Parmi la foule des beautés fu--
périeures dont cette piece étincelle , il fe
trouve beaucoup de chofes , ou plutôt d'expreffions
familieres , qu'on doit moins attribuer
à l'Auteur qu'au tems où il a vêcu .
Les deux premieres fois le public paroiffoit
indécis & comme partagé entre les éclats
de rire & les applaudiffemens , mais à la
troifiéme repréſentation ces familiarités ne
T'ont plus frappé , il n'a été fenfible qu'au
mérite fingulier de l'ouvrage , où la politique
joue le premier rôle , & qu'on peut
appeller une Tragédie de caractere. Nitomede
y paroît un digne éleve d'Annibal .
L'ironie eft fa figure favorite , il l'employe
fur-tout dans toute fa force vis- à vis de
Flaminius. Ce ton railleur paroît un peu
bleffer la dignité du cothurne ; le fpectateur
furpris n'a fçu d'abord s'il devoit applaudir
Nicomede comme un homme d'efprit
, ou l'admirer comme un grand homme.
Quelques-uns même l'ont qualifié de
JANVIER. 1755. 195
héros perfifleur , mais on a fenti par réflexion
que ce langage ironique partoit
d'une ame fiere , & qu'il convenoit à un
Prince jaloux de fes droits , & juftement
indigné de voir qu'un Romain vint impofer
la loi à Prufias fon pere , dans les propres
Etats. Il femble que Corneille ait voulu
dans cette piece , venger les Rois de la
fupériorité qu'il avoit donnée fur eux aux
Romains dans fes autres Tragédies. L'Ambaffadeur
de Rome y eft auffi petit devant
Nicomede que le Roi d'Egypte l'eft deyant
Cefar dans la mort de Pompée. M.
Grandval eft irès-bien dans le rôle de Nicomede
, & Mlle Clairon parfaitement
dans celui de Laodice . Le Samedi 15 , on
a joué cette Tragédie avec Nanine , Comédie
remife en trois actes , de M. de Voltaire.
Le Samedi 21 , on a redonné les
deux mêmes pieces. La chambrée étoit complette
pour parler le langage des Comédiens.
Le Lundi 23 , ils ont repréfenté pour la
premiere fois le Triumvirat , de M. de
Crébillon . Toute la France y étoit : il fut
écouté & reçu avec tous les égards , &
j'ofe dire , le reſpect qu'on doit au Sopho-
* Les Comédiens ont été les premiers à s'y méprendre
; ils ont affiché la piéce fous le titre nouveau
de Tragédie héroï- comique.
Iij
196 MERCURE DE FRANCE.
:
de
cle de nos jours. Il eft beau à 81 ans de
paroître encore dans la carriere : c'eſt un
fpectacle non-feulement digne de la curiofité
publique , mais encore de l'acclamation
univerfelle . On eft forcé d'avouer que
le quatriéme acte & une partie du cinquiéme
ont paru d'abord inférieurs aux trois
premiers , qui ont reçu de grands applau
diffemens. C'est peut-être la faute des Comédiens
, dont le feu s'eft rallenti : le froid
des Acteurs eft fouvent mis fur le compte
la piéce ; quand ils manquent de concert &
de chaleur , elle paroît manquer d'enfemble
& d'intérêt. Tullie eft le perfonnage qui
a le plus frappé faut- il s'en étonner ? c'eft
Mlle Clairon qui le joue. L'éloquence de
fon jeu y a peut-être autant contribué que
la fupériorité du rôle ; ce qui a fait dire
que la fille de Ciceron étoit plus diferte
que fon pere. Sextus eft encore un beau
caractere il fe montre un digne fils de
Pompée. Les connoiffeurs les plus rigides ,
mais qui jugent fans partialité , conviennent
tous qu'il y a dans cette tragédie des
béautés du premier ordre , & des traits
marqués au coin du grand maître. On y
reconnoît l'auteur d'Electre & de Rhadamifte
: c'est un beau foleil couchant , il
darde encore des rayons qui ont toute la
force de fon midi ; ils doivent échauffer le
public en fa faveur.
:
JANVIER. 1755. 197
Ils l'ont fait à la deuxième repréfentation.
La piece a été mieux jouée , en conféquence
mieux fentie . La cataſtrophe furtout
a fait la plus grande impreffion.
L'inftant où Fullie découvre le voile qui
cache la tête de fon pere fur la tribune
aux harangues , & la précifion admirable
avec laquelle l'actrice rend toute la
force de cette pofition terrible , former t
un coup de théatre qui arrache les lar-.
mes & qui déchire l'ame de tous les
fpectateurs. J'en parlerai plus au long le
mois prochain dans l'extrait que j'en donnerai.
On a oublié dans les deux derniers volumes
de Décembre de parler de la repriſe
des Tuteurs , qui ont été joués avec les
Troyennes. Sans entrer dans aucun détail , `
je vais fuppléer à ce filence. Cette Comédie
en deux actes , ou plutôt le talent qu'elle
annonce , mérite qu'on en faffe mention .
Les trois premieres fcenes montrent que
le jeune auteur de cette petite piéce eft appellé
au Comique , fon vers eft facile , &
fon dialogue naturel ; mais le difcours
qu'il adreffe à Madame la Comteffe de la
Marck prouve encore mieux fa vocation
pour ce genre. Quand on penfe à fon âge
auffi jufte fur l'art que l'on embraffe ,
& qu'on a comme lui le talent d'écrite ,
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
on eft für d'y faire un progrès rapide.
Le genre moyen de la Comédie , où les
moeurs purement bourgeoifes qu'il fe propofe
de traiter , me femblent comme à lui
les plus théatrales . Il faut fur la fcene des
ridicules de perfpective , fi j'ofe m'exprimer
ainfi ; il faut que leurs traits foient
gros pour exciter un vrai rire , ou un rire
machinal ; c'eft celui de la nature : ne rire
que de l'efprit , c'eft à peine fourire. J'aime
mieux pour mon amufement , rire avec
la bonne foi d'un bourgeois ingenu , ou la
groffe franchife d'un bon payfan , qu'avec
la circonfpection d'un homme du monde
qui craint d'éclater , & qui regle tous fes
mouvemens fur les loix exactes de la froide
décènce . Ce rire compaffé , qui en naiffant
expire fur les levres , ne part jamais
de l'ame , il n'eft qu'un raffinement de
l'art , ou plutôt qu'un ennui déguisé.
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Résumé : COMEDIE FRANÇOISE.
En décembre 1754, les comédiens français ont repris la tragédie 'Nicomède' de Pierre Corneille, qui n'avait pas été jouée depuis la mort de l'auteur en 1729. La pièce, riche en beautés littéraires, contient des expressions familières attribuables à l'époque de Corneille. Lors des premières représentations, le public était partagé entre le rire et les applaudissements, mais à la troisième représentation, il a reconnu le mérite de l'œuvre, qualifiée de tragédie de caractère où la politique joue un rôle central. Nicomède y apparaît comme un digne élève d'Annibal, utilisant l'ironie, notamment envers Flaminius. Certains spectateurs ont vu en lui un héros persifleur, mais cette ironie reflète la fierté et l'indignation d'un prince défendant ses droits. Corneille semble vouloir venger les rois dans cette pièce, contrairement à ses autres tragédies. Les acteurs M. Grandval et Mlle Clairon ont été particulièrement applaudis dans leurs rôles respectifs de Nicomède et Laodice. Le 15 janvier 1755, 'Nicomède' a été jouée avec 'Nanine', une comédie de Voltaire. Le 21 janvier, les deux pièces ont été rejouées devant une salle comble. Le 23 janvier, les comédiens ont présenté pour la première fois 'Le Triumvirat' de M. de Crébillon, reçu avec respect et admiration malgré des réserves sur les quatrième et cinquième actes. Mlle Clairon a particulièrement impressionné dans le rôle de Tullie, et Sextus a été salué pour son interprétation. La pièce a été mieux jouée lors de la deuxième représentation, notamment la catastrophe où Tullie découvre la tête de son père, suscitant une grande émotion chez les spectateurs. En décembre, la reprise des 'Tuteurs' a été omise, mais cette comédie en deux actes, écrite par un jeune auteur talentueux, mérite mention pour son dialogue naturel et son potentiel comique.
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268
p. 198-200
COMEDIE ITALIENNE.
Début :
Les Comédiens Italiens ont donné le 5 Décembre, la premiere représentation [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Opéra, Comédie
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texteReconnaissance textuelle : COMEDIE ITALIENNE.
COMEDIE ITALIENNE.
Les Comédiens Italiens ont donné le
Décembre , la premiere repréſentation
de la Fête d'Amour , petite piéce en un
acte , & en vers , avec un divertiſſement.
Elle eft de Madame Favart * . On peut dire
qu'elle en fait les honneurs , & que c'eft
fa propre fête , non - feulement par la fa-
Et de M. Chevalier qui l'a rimée.
*
1755. 199
JANVIER.
çon dont elle y joue , mais encore par l'amour
que le public a pour elle. Jamais
actrice n'en fut plus aimée , ni plus digne
de l'être . Comme Mme Favart a autant de
docilité que de connoiffance du théatre ,
elle a fait plufieurs corrections ou retranchemens
à fa Comédie dès la feconde repréfentation
; depuis ce jour la Fête d'Amour
a été auffi fuivie qu'applaudie , le
talent de l'actrice y fert bien l'efprit de
l'auteur ; on voit que , l'un & l'autre partent
du même fujet . M. Favart , fous le
titre de parodies , ou fous le nom d'opera
comiques , nous a donné d'agréables Bergeries
, & l'aimable Baftienne fa femme ,
pat une émulation louable , nous donne
de jolies payfanneries.
La Fête d'Amour eft conftamment accompagnée
de la Servanie Maitreffe , qui
fert fi bien les autres & qui ne s'ufe point.
Cette piece finguliere femble former un
nouveau genre , Comme le fonds eſt un vrai
fujet de Comédie , & que l'ariette ou le
chant y font mêlés au dialogue fimplement
déclamé , je trouve qu'elle mérite mieux
que le titre d'Opera comique , & qu'on
doit plutôt l'appeller Comédie Opera. On
la joue avec la Fête d'amour le Lundi , le
*
* Nous donnerons l'extrait de cette piece en
Fevrier.
Iiiij
200 MERCURE DE FRANCE.
Mercredi & le Samedi . On repréſente le
Jeudi & le Dimanche Coraline Magicienne
, Comédie Italienne remiſe , avec des
divertiffemens.
Ces divertiffemens font de M. Deheffe ;
ils font auffi agréables que diverfifiés . Le
dernier eft un Ballet Polonois parfaitement
caracterifé. Cet habile compofiteur eft non
feulement le Teniers , mais encore le Vateau
de la danfe. Dans tous fes tableaux , it
prend pour modele la nature , il eſt toujours
nouveau & varié comme elle .
Les Comédiens Italiens ont donné le
Décembre , la premiere repréſentation
de la Fête d'Amour , petite piéce en un
acte , & en vers , avec un divertiſſement.
Elle eft de Madame Favart * . On peut dire
qu'elle en fait les honneurs , & que c'eft
fa propre fête , non - feulement par la fa-
Et de M. Chevalier qui l'a rimée.
*
1755. 199
JANVIER.
çon dont elle y joue , mais encore par l'amour
que le public a pour elle. Jamais
actrice n'en fut plus aimée , ni plus digne
de l'être . Comme Mme Favart a autant de
docilité que de connoiffance du théatre ,
elle a fait plufieurs corrections ou retranchemens
à fa Comédie dès la feconde repréfentation
; depuis ce jour la Fête d'Amour
a été auffi fuivie qu'applaudie , le
talent de l'actrice y fert bien l'efprit de
l'auteur ; on voit que , l'un & l'autre partent
du même fujet . M. Favart , fous le
titre de parodies , ou fous le nom d'opera
comiques , nous a donné d'agréables Bergeries
, & l'aimable Baftienne fa femme ,
pat une émulation louable , nous donne
de jolies payfanneries.
La Fête d'Amour eft conftamment accompagnée
de la Servanie Maitreffe , qui
fert fi bien les autres & qui ne s'ufe point.
Cette piece finguliere femble former un
nouveau genre , Comme le fonds eſt un vrai
fujet de Comédie , & que l'ariette ou le
chant y font mêlés au dialogue fimplement
déclamé , je trouve qu'elle mérite mieux
que le titre d'Opera comique , & qu'on
doit plutôt l'appeller Comédie Opera. On
la joue avec la Fête d'amour le Lundi , le
*
* Nous donnerons l'extrait de cette piece en
Fevrier.
Iiiij
200 MERCURE DE FRANCE.
Mercredi & le Samedi . On repréſente le
Jeudi & le Dimanche Coraline Magicienne
, Comédie Italienne remiſe , avec des
divertiffemens.
Ces divertiffemens font de M. Deheffe ;
ils font auffi agréables que diverfifiés . Le
dernier eft un Ballet Polonois parfaitement
caracterifé. Cet habile compofiteur eft non
feulement le Teniers , mais encore le Vateau
de la danfe. Dans tous fes tableaux , it
prend pour modele la nature , il eſt toujours
nouveau & varié comme elle .
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Résumé : COMEDIE ITALIENNE.
En décembre 1755, les Comédiens Italiens ont présenté 'La Fête d'Amour', une pièce en un acte et en vers de Madame Favart, qui en joue également le rôle principal. La pièce, rimée par M. Chevalier, a été améliorée dès la seconde représentation, devenant très populaire. Madame Favart est louée pour son talent et sa docilité, complétant l'esprit de l'auteur. M. Favart a créé des bergeries agréables, tandis que Madame Favart offre des pastorales charmantes. 'La Fête d'Amour' est accompagnée de 'La Servante Maîtresse', interprétée par un acteur polyvalent, introduisant un nouveau genre de 'Comédie Opéra'. Cette pièce est jouée les lundis, mercredis et samedis. Les jeudis et dimanches, la troupe présente 'Coraline Magicienne', une comédie italienne révisée avec des divertissements composés par M. Deheffe, incluant un ballet polonais. M. Deheffe est comparé à Teniers et Vateau pour ses créations dansées, toujours inspirées par la nature et novatrices.
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269
p. 200-201
SPECTACLES DE LA COUR.
Début :
Le 27 Novembre, les Comédiens Italiens donnerent en présence du Roi & [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Ballet
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texteReconnaissance textuelle : SPECTACLES DE LA COUR.
SPECTACLES DE LA COUR.
E 27 Novembre , les Comédiens Italiens
donnerent en préſence du Roi &
de toute la Famille royale , Arlequin veleur
, Prévôt & Juge.
:
Le 4 Décembre , le Retour d'Arlequin &
la Servante Maîtreffe. A la fin de la premiere
piece on donna un divertiffement
exécuté par Mlle Catinon & M. Balletti
cadet en pas de deux à la fin de la Servante
Maitreffe on ajouta le Colin maillard
, danfé par Mlle Camille & M. Billioni
, en pas de deux ; Mlle Marine feule
; Mlle Maffon & M. Berquelor en pas
de deux .
JANVIER. 1755. 201
Corps de Ballet.
MESSIEURS.
Rouſſeau ,
Martin ,
MESDEMOISELLES .
Gotton ,
Rouffelet ,
Foulquier , Granger
Giguet ,
Defmartins.
Rouffe ,
Verfian.
Le 11 , Monfeigneur le Dauphin fir
donner la repréſentation d'Arlequin perſecuté
par la Dame invisible . Hauteroche en
a tiré l'Esprit follet , que les Comédiens
François avoient donné huit jours auparavant.
Le 18 , on repréſenta les Déguisemens
amoureuxx Comédie Italienne en trois
actes.
E 27 Novembre , les Comédiens Italiens
donnerent en préſence du Roi &
de toute la Famille royale , Arlequin veleur
, Prévôt & Juge.
:
Le 4 Décembre , le Retour d'Arlequin &
la Servante Maîtreffe. A la fin de la premiere
piece on donna un divertiffement
exécuté par Mlle Catinon & M. Balletti
cadet en pas de deux à la fin de la Servante
Maitreffe on ajouta le Colin maillard
, danfé par Mlle Camille & M. Billioni
, en pas de deux ; Mlle Marine feule
; Mlle Maffon & M. Berquelor en pas
de deux .
JANVIER. 1755. 201
Corps de Ballet.
MESSIEURS.
Rouſſeau ,
Martin ,
MESDEMOISELLES .
Gotton ,
Rouffelet ,
Foulquier , Granger
Giguet ,
Defmartins.
Rouffe ,
Verfian.
Le 11 , Monfeigneur le Dauphin fir
donner la repréſentation d'Arlequin perſecuté
par la Dame invisible . Hauteroche en
a tiré l'Esprit follet , que les Comédiens
François avoient donné huit jours auparavant.
Le 18 , on repréſenta les Déguisemens
amoureuxx Comédie Italienne en trois
actes.
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Résumé : SPECTACLES DE LA COUR.
En novembre 1754 et janvier 1755, la cour a assisté à plusieurs spectacles. Les Comédiens Italiens ont joué 'Arlequin veleur, Prévôt & Juge' le 27 novembre et 'Le Retour d'Arlequin & la Servante Maîtreffe' le 4 décembre. En janvier 1755, 'Arlequin persecuté par la Dame invisible' et 'Les Déguisemens amoureux' ont été représentés. Divers danseurs et membres du corps de ballet ont participé à ces divertissements.
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270
p. 201-202
CONCERT SPIRITUEL.
Début :
Le Concert spirituel qui fut exécuté le 9 Décembre, jour de la Conception de la Vierge [...]
Mots clefs :
Concert spirituel, Académie royale de musique, Choeur
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texteReconnaissance textuelle : CONCERT SPIRITUEL.
CONCERT SPIRITUEL.
១
E Concert fpirituel qui fut exécuté le 9 Décembre
, jour de la Conception de la Vierge
, commença par une fymphonie à cor- dechaffe
; elle fut fuivie d'Exaltabo te , PL. 144.
motet à grand choeur de la Lande . Mlle Cohender
y chanta le récit Miferator. M. l'Abbé Renaud
baffe- taille de Notre-Dame , chanta Diligam te ,,
petit motet de la compofition de M. Goulet ,
Maître de mufique de Notre-Dame. M. Canavas
joua un concerto de violon . Mme Tedeſchini chan-
"'
202 MERCURE DE FRANCE.
ta un air Italien , enſuite un duo Italien avec M.
Ranieri . Le concert finit par Deus venerunt gentes
, motet à grand - choeur de M. Fanton . Mile Fel
chanta les récits Ne memineris , Nos autem , &
l'ariette In generationem , avec le dernier choeur.
Le Concert du 24 Décembre , veille de Noël ,.
commença par une fymphonie de M. Caraffe le
jeune , ordinaire de la mufique de la Chambre du
Roi. Enfuite Judica , Domine , nocentes me , moter
nouveau à grand choeur de M. Fanton . Mlle Duperey
chanta le Venite exultemus , petit motet de
M. Mouret. M. Soret le fils joua un concerto de la
compofition de M. Guignon . Mme Tedeſchini
chanta des airs Italiens . MM . Salantin& Bureau
Labbé le fils & Perrier , exécuterent une fuite d'airs
arrangés par M. Labbé le fils , à deux hautbois
une viole d'amour & une quinte. Le Concert finit
par Fugit nox , motet à grand choeur mêlé de
Noëls , de M. Boimortier , dans lequel M. Daquin
, Organiſte du Roi , joua ſeul . Mile Fel
chanta l'ariette Surgite Paftores & le récit Vocabitur
nomen ejus.
Le Concert du jour de Noël commença par
une fymphonie de M. Labbé le fils , ordinaire de
l'Académie royale de mufique. Enfuite Fugit nox ,
motet à grand choeur , mêlé de Noëls de M. Boimortier
, dans lequel M. Daquin , Organiſte du
Roi , joua feul . Mlle Fel chanta l'ariette Surgite
Paftores , & le récit Vocabitur nomen ejus. MM.
Salantin & Bureau , Labbé le fils & Perrier executerent
une fuite d'airs arrangés par M. Labbé
le fils . Mlle Fel chanta Laudate pueri Dominum ,
petit motet de M. Fioco. Mr Canavas joua un
concerto de violon. Le Concert finit par Deus
venerunt gentes , motet à grand choeur de M.
Fanton. Mlle Fel chanta le récit Ne memineris , le
récit Nos autem , & l'ariette In generationem
avec le dernier 'cho ur.
១
E Concert fpirituel qui fut exécuté le 9 Décembre
, jour de la Conception de la Vierge
, commença par une fymphonie à cor- dechaffe
; elle fut fuivie d'Exaltabo te , PL. 144.
motet à grand choeur de la Lande . Mlle Cohender
y chanta le récit Miferator. M. l'Abbé Renaud
baffe- taille de Notre-Dame , chanta Diligam te ,,
petit motet de la compofition de M. Goulet ,
Maître de mufique de Notre-Dame. M. Canavas
joua un concerto de violon . Mme Tedeſchini chan-
"'
202 MERCURE DE FRANCE.
ta un air Italien , enſuite un duo Italien avec M.
Ranieri . Le concert finit par Deus venerunt gentes
, motet à grand - choeur de M. Fanton . Mile Fel
chanta les récits Ne memineris , Nos autem , &
l'ariette In generationem , avec le dernier choeur.
Le Concert du 24 Décembre , veille de Noël ,.
commença par une fymphonie de M. Caraffe le
jeune , ordinaire de la mufique de la Chambre du
Roi. Enfuite Judica , Domine , nocentes me , moter
nouveau à grand choeur de M. Fanton . Mlle Duperey
chanta le Venite exultemus , petit motet de
M. Mouret. M. Soret le fils joua un concerto de la
compofition de M. Guignon . Mme Tedeſchini
chanta des airs Italiens . MM . Salantin& Bureau
Labbé le fils & Perrier , exécuterent une fuite d'airs
arrangés par M. Labbé le fils , à deux hautbois
une viole d'amour & une quinte. Le Concert finit
par Fugit nox , motet à grand choeur mêlé de
Noëls , de M. Boimortier , dans lequel M. Daquin
, Organiſte du Roi , joua ſeul . Mile Fel
chanta l'ariette Surgite Paftores & le récit Vocabitur
nomen ejus.
Le Concert du jour de Noël commença par
une fymphonie de M. Labbé le fils , ordinaire de
l'Académie royale de mufique. Enfuite Fugit nox ,
motet à grand choeur , mêlé de Noëls de M. Boimortier
, dans lequel M. Daquin , Organiſte du
Roi , joua feul . Mlle Fel chanta l'ariette Surgite
Paftores , & le récit Vocabitur nomen ejus. MM.
Salantin & Bureau , Labbé le fils & Perrier executerent
une fuite d'airs arrangés par M. Labbé
le fils . Mlle Fel chanta Laudate pueri Dominum ,
petit motet de M. Fioco. Mr Canavas joua un
concerto de violon. Le Concert finit par Deus
venerunt gentes , motet à grand choeur de M.
Fanton. Mlle Fel chanta le récit Ne memineris , le
récit Nos autem , & l'ariette In generationem
avec le dernier 'cho ur.
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Résumé : CONCERT SPIRITUEL.
Le texte relate trois concerts spirituels organisés les 9 et 24 décembre, ainsi que le jour de Noël. Le premier concert, le 9 décembre, débuta par une symphonie suivie du motet 'Exaltabo te' de la Lande. Mlle Cohender chanta 'Miserator', et l'Abbé Renaud interpréta 'Diligam te' de Goulet. M. Canavas joua un concerto de violon, et Mme Tedeschini chanta des airs italiens, accompagnée de M. Ranieri pour un duo. Le concert se termina par 'Deus venerunt gentes' de M. Fanton, avec Mlle Fel chantant plusieurs récits et ariettes. Le concert du 24 décembre commença par une symphonie de M. Caraffe le jeune, suivie du motet 'Judica, Domine' de M. Fanton. Mlle Duperey chanta 'Venite exultemus' de M. Mouret, et M. Soret joua un concerto de M. Guignon. Mme Tedeschini interpréta des airs italiens, et plusieurs musiciens exécutèrent une suite d'airs arrangés par M. Labbé le fils. Le concert se conclut par 'Fugit nox' de M. Boimortier, avec M. Daquin à l'orgue, et Mlle Fel chantant plusieurs pièces. Le concert du jour de Noël débuta par une symphonie de M. Labbé le fils, suivie de 'Fugit nox' de M. Boimortier, avec M. Daquin à l'orgue. Mlle Fel chanta plusieurs pièces, et MM. Salantin, Bureau, Labbé le fils et Perrier exécutèrent une suite d'airs. Mlle Fel interpréta également 'Laudate pueri Dominum' de M. Fioco, et M. Canavas joua un concerto de violon. Le concert se termina par 'Deus venerunt gentes' de M. Fanton, avec Mlle Fel chantant plusieurs récits et ariettes.
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271
p. 175
OPERA.
Début :
L'Académie royale de Musique a donné le 19 Janvier la premiere représentation [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
,
L'Académie royale de Mufique a donné
le 19 Janvier la premiere repréfentation
de Daphnis & Alcimadure
Paftorale languedocienne , en trois actes ,
précédée d'un prologue , intitulé les Jeux
Floraux. Les paroles & la Mufique font de
M. de Mondonville , qui réunit les deux
talens. Cer Opéra n'a pas moins de fuccèsà
la ville qu'il en a eu à la Cour : je parle
d'après la voix publique. On le joue trois
fois la femaine ; le Vendredi , le Dimanche
& le Mardi . On continue les Elémens le
Jeudi. Comme le fecond Mercure de Décembre
a fait un extrait détaillé d'Alcimadure
, j'y renvoie ceux qui feront curieux
de le lire.
,
L'Académie royale de Mufique a donné
le 19 Janvier la premiere repréfentation
de Daphnis & Alcimadure
Paftorale languedocienne , en trois actes ,
précédée d'un prologue , intitulé les Jeux
Floraux. Les paroles & la Mufique font de
M. de Mondonville , qui réunit les deux
talens. Cer Opéra n'a pas moins de fuccèsà
la ville qu'il en a eu à la Cour : je parle
d'après la voix publique. On le joue trois
fois la femaine ; le Vendredi , le Dimanche
& le Mardi . On continue les Elémens le
Jeudi. Comme le fecond Mercure de Décembre
a fait un extrait détaillé d'Alcimadure
, j'y renvoie ceux qui feront curieux
de le lire.
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Résumé : OPERA.
L'Académie royale de Musique a présenté le 19 janvier 'Daphnis et Alcimadure', une pastorale languedocienne en trois actes de M. de Mondonville. L'œuvre, précédée d'un prologue, a connu un succès égal à la ville et à la cour. Elle est jouée trois fois par semaine. Les représentations des 'Éléments' continuent le jeudi. Des détails supplémentaires sont disponibles dans le second Mercure de décembre.
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272
p. 176-192
COMEDIE FRANÇOISE.
Début :
Les Comédiens François ont donné le 13 de ce mois la dixiéme représentation [...]
Mots clefs :
Cicéron, Sextus, César, Comédiens-Français, Père, Mécène, Yeux, Pompée, Fille, Mourir, Dieux, Octave
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE.
COMEDIE FRANÇOISE.
Lis
Es Comédiens François ont donné le
13 de ce mois la dixiéme repréfentation
du Triumvirat. On peut dire qu'il a
eu ce fuccès d'estime que l'ouvrage &
l'auteur ont fi bien mérité , & qu'on refuſe
fouvent à des pieces plus heureufes , qui
comptent plus de repréfentations que de
fuffrages. Cette Tragédie eft imprimée
fous ce double titre : Le Triumvirat , ou la
mort de Ciceron , avec une épitre dédicatoire
à Mme Bignon , & une préface . Elle
fe vend chez Hochereau , quai de Conti , au
Phénix ; le prix eft de 30 f. en voici l'extrait .
EXTRAIT DU TRIUMVIRÁT.
Tullie , fille de Ciceron , ouvre feule
la fcene qui eft au Capitole , par un début
digne d'elle & du fujet. Elle s'écrie ,
Effroyable féjour des horreurs de la guerre ,
Lieux inondés du fang des maîtres de la terre ,
Lieux , dont le feul afpect fit trembler tant de
Rois ,
Palais où Ciceron triompha tant de fois ;
Deformais trop heureux de cacher ce grand homme
,
Sauvez le feul Romain qui foit encor dans Rome.
FEVRIER. 1755. 177
A
Elle ajoûte avec effroi , en jettant les
yeux fur le tableau des profcrits :
Que vois-je , à la lueur de ce cruel flambeau !
Ah ! que de noms facrés profcrits fur ce tableau !
Rome , il ne manque plus , pour combler ta mifere
,
Que d'y tracer le nom de mon malheureux pere.
Enfuite elle apoftrophe ainfi la ftatue de
Céfar.
Toi , qui fis en naiffant honneur à la nature ,
Sans avoir , des vertus , que l'heureufe impofture ,
Trop aimable tyran , illuftre ambitieux ,
Qui triomphas du fort , de Caton & des Dieux...
Sous un joug ennobli par l'éclat de tes armes ,
Nous refpirions du moins fans honte & fans allármes
:
Loin de rougir des fers qu'illuftroit ta valeur ,
On fe croyoit paré des lauriers du vainqueur.
Mais fous le joug honteux & d'Antoine & d'Octave
>
Rome , arbitre des Rois , va gémir en eſclave.
Se tournant après vers la ftatue de Pompée
, elle lui adreffe ces triftes paroles .
Ah ! Pompée , eft -ce là ce qui refte de toi
Miférables débris de la grandeur . humaine ,
Hy
178 MERCURE DE FRANCE.
Douloureux monument de vengeance & de haine !
6
Pour nous venger d'Octave ,, accours , vaillant
Sextus ,,
A ce nouveau Céfar , fois un nouveau. Brutus.
Ce monologue me paroît admirable ; il
égale , à mon gré , celui d'Electre , s'il ne
le furpaffe pas , & forme la plus belle expofition
. Il eft terminé par l'arrivée de
Sextus , qui fe cache même aux yeux de
Tullie qu'il aime , fous le nom de Clodomir
, chef des Gaulois . Il lui fait un récit
affreux des horreurs du Triumvirat dont il
vient d'être le témoin , & finit un fi noir
tableau par ces beaux vers , qu'on croiroit
d'un auteur de trente ans , à la force du
coloris.
Un fils , prefque à mes yeux , vient de livrer fon
Le
pere ;
J'ai vu ce même fils égorgé par fa mere :
On ne voit que des corps mutilés & fanglans ,
Des efclaves traîner leurs maîtres expirans ;
affouvi réchauffe le carnage ;
carnage
J'ai vu des furieux dont la haine & la rage
Se difputoient des cours encor tout palpitans:
On diroit à les voir l'un l'autre s'excitans ,
Déployer à l'envi leur fureur meurtrière ,
Que c'est le derniér jour de la nature entiere. {
FEVRIER. , 1755. 179
que
Dans ce péril preffant il offre à Tullie une
retraite dans Oftie pour fon pere & pour
elle . Elle la refufe ; il frémit du danger
Ciceron va courir , fi près de Fulvie
qui a juré fa perte. Il exprime en même
tems la douleur qu'il a de la perdre & de
la voir près d'être unie aux jours d'Octave
qui l'aime , ajoutant que fon fang fcellera
cet hymen. Tullie le raffure fur cette crain--
te , en lui difant :
Un tyran à
Ne craignez rien d'Octave' :
mes yeux ne vaut pas un esclave.
Un rival plus heureux va caufer vos allarmes ...
Le fils du grand Pompée . Hélas ! que n'est- ce vous !!
Que j'euffe avec plaifir accepté mon époux !
Ces deux amans font interrompus par
Lepide qui entre : Clodomir fe retire . Le
Triumvir fait entendre à Tullie , que ne
pouvant chaffer de Rome fes collegues impies
, il prend le parti de s'en exiler luimême
, & qu'il va chercher un afyle en
Efpagne pour y fauver fa vertu. Tullie l'interrompt
par cette noble réponſe , qui a
toujours été fi juftement applaudie :
Ah ! la vertu quifuit ne vaut pas le courage
Du crime audacieux qui fçait braver l'orage .
Que peut craindre un Romain des,caprices.du fort,
Tant qu'il lui refte un bras pour fe donner la mort
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
Avez-vous oublié que Rome eft votre mere
Demeurez , imitez l'exemple de mon pere ,
Et de votre vertu në nous vantez l'éclat
Qu'après une victoire , ou du moins un combat.
On n'encenfa jamais la vertu fugitive ,
Et celle d'un Romain doit être plus active.
On ne le reconnoît qu'à fon dernier foupir ;
Son honneur eft de vaincre , & vaincu de mourir.
ger
Elle fort.
Ciceron arrive. Lapide tâche de l'engaà
le fuivre pour fe dérober à la fureur
d'Antoine & de Fulvie , qui veulent le profcrire.
Ciceron rejette cette offre. Lepide le
quitte , en lui déclarant qu'il vient de rencontrer
Sextus , & qu'il l'a reconnu . Ce
Triumvir l'avertit d'en craindre la fuite ,
& de prendre garde à lui. Ciceron reſté
feul , dit qu'il eft tems qu'il apprenne
ce fecret à fa fille , que Clodomir devenu
le fils du grand Pompée , ne pourra l'en
blâmer , qu'il veut les unir & donner à Céfar
un rival , dont le nom feul pourra lui
devenir funefte.
Octave commence avec Mecene le fecond
acte. Après avoir d'abord tâché d'excufer
fes cruautés , il lui marque fon
amour pour Tullie , & fon eftime pour fon
pere , ajoûtant qu'il veut le fauver & fe
l'attacher. Mecene l'affermit dans ce defFEVRIER.
1755. 181
fein , & le laiffe avec Ciceron qui paroît ,
& qui lui témoigne ainfi fa furpriſe :
Céſar , en quel état vous offrez-vous à moi ?
Ah ! ce n'eft ni fon fils , ni Céfar que je vois.
O! Céfar , ce n'eft pas ton fang qui l'a fait naître :
Brutus qui l'a verfé , méritoit mieux d'en être.
Le meurtre des vaincus ne fouilloit point tes pas ;
Ta valeur fubjuguoit , mais ne profcrivoit pas.
Octave, pour fe juftifier , répond qu'il
pourfuit les meurtriers du grand Céfar , &
que fa vengeance eft légitime. Ciceron l'interrompt
pour lui reprocher l'abus affreux
qu'il fait de ce prétexte , & lui dit :
Rendre le glaive feul l'interprête des loix ,
Employer pour venger le meurtre de fon pere
Des flammes & du fer l'odieux miniftere ;
Donner à fes profcrits pour juges fes foldats ,
Du neveu de Céfar voilà les magiftrats.
Octave lui réplique que c'eft une néceffité
, que l'univers demande une forme
nouvelle , qu'il lui faut un Empereur , que
Ciceron doit le choifir , qu'ils doivent s'allier
pour mieux détruire Antoine ; il le
conjure enfin de l'aimer , & de devenir
fon
pere.
Abdique, je t'adopte , & ma fille eft à toi,
382 MERCURE DE FRANCE.
repart Ciceron. Des oreilles trop délicates
ont trouvé ce vers dur ; pour moi je ne le
trouve que fort ;je crois qu'un Romain ne
peut pas mieux répondre ni en moins de
mots . Tullie paroît , & fon pere fort eix
difant à Octave , qu'il la confulte ; & que
s'il l'aime , il la prenne pour modele .
Tullie traite Octave encore avec plus.
de fierté que n'a fait fon pere. Céfar , luis
dit-elle :
Regnez , fi vous l'ofez; mais croyez que Tullie
Sçaura bien ſe ſoustraire à votre tyrannie :
Si du fort des tyrans vous bravez les hazards
Il naîtra des Brutus autant que des Céfars.
Sur ce qu'il infifte , elle lui déclare fierement
qu'elle ne l'aime point , qu'elle eft
cependant prête à l'époufer , pourvû qu'il
renonce à l'Empire ; mais que s'il veut ufurper
l'autorité fuprême , il peut teindre le
diadême de fon fang. Cette hauteur romaine
oblige Octave de la quitter & de la
menacer de livrer fon pere à Fulvie. Sextus
, qu'elle reconnoît alors pour le fils de
Pompée , entre fur la fcéne , & demande à
Tullie le fujer de fa douleur. Elle l'inftruit
du danger preffant où font les jours de
fon pere , qui veut les unir avant fa mort.
Sextus finit le fecond acte , en la preffant
d'engager Ciceron à fuir fur fes vaiffeaux
FEVRIER. 1755. 183
-il eft honteux pour lui , ajoute-t- il , de fe
laiffer profcrire.
S'il veut m'accompagner je répons de fa vie,
El'amour couronné répondra de Tullie..
Il faut convenir que cet acte eft un peu
vuide d'action .
Ciceron , Tullie & Sextus ouvrent le troifieme.
Ciceron veut unir le fils de Pompée:
à fa fille ; mais elle s'y oppofe dans ce cruel
moment & le conjure de la fuivre en
Sicile avec Sextus il s'écrie ::
>-
Pour braver mes tyrans je veux mourir dáns Ro
me ;
En implorant les Dieux , c'eft moi fenl qu'elles
nomme:
Sextus lui parle alors en vrai fils de Pompée
, & lui dit :
Rome n'eft plus qu'un ſpectre , une ombre en Ita
lie ,
Dont le corps tout entier eft paffé dans l'Afie :
C'est là que noure honneur nous appelle aujour
d'hui ,
Rendons- nous à ſa voix , & marchons avec lui.
Ce n'eft pas le climat qui lui donna la vie;
C'eſt le coeur du Romain qui forme fa patrie.
184 MERCURE DE FRANCE.
2
Il vaut mieux fe flater d'un eſpoir téméraire
Que de céder au fort dès qu'il nous eft contraire.
Il faut du moins mourir les armes à la main ,
Le feul gente de mort digne d'un vrai Romain,
Mais mourir pour mourir n'eft qu'une folle
yvreffe ,
Trifte enfant de l'orgueil , que nourrit la pareffe.
où
Ciceron fort en leur difant qu'il ne
peut fe réfoudre à quitter l'Italie , mais
qu'il confent de fe rendre à Tufculum ,
il ira les joindre pour les unir enfemble ,
& qu'avant tout il veut revoir Mecene. A
peine eft- il parti qu'Octave entre ; & jaloux
de Sextus qu'il prend pour un chef
des Gaulois , il adreffe ainfi la parole à
Tullie .
Qu'il retourne en fon camp ,
C'eft parmi fes foldats qu'il trouvera fon rang,
Le faux Clodomir lui répond , avec une
fierté plus que Gauloife ,
Le fort de mes pareils ne dépend point de toi
Je ne releve ici que des Dieux & de moi.
Aux loix du grand Céfar nous rendîmes hommage
,
Mais ce ne fut jamais à titre d'efclavage.
Comme de la valeur il connoiffoit le prix ,
Il cftimoit en nous ce qui manque à ſon fils.
FEVRIER. 1755. 185
Octave à ces mots appelle les Licteurs ,
& il faut avouer que fon emportement
paroît fondé.
Tullie s'oppofe à fa rigueur , & prend
vivement la défenſe de Sextus . Le courroux
d'Octave en redouble ; il . lui répond
que ce Gaulois brave l'autorité des Triumvirs
, qu'il a fauvé plufieurs profcrits , &
qu'il mérite d'être puni comme un traître .
Sextus lui réplique :
Toi-même , applaudifſant à mes foins magnanimes
,
Tu devrois me louer de t'épargner des crimes ,
Et rougir , quand tu crois être au- deffus de moi ,
Qu'un Gaulois à tes yeux foit plus Romain que
toi,
Tullie lui demande fa vie. Octave forcé
par fon amour de la lui accorder , fe retire
en déguifant fon dépit. Sextus raffure Tullie
fur la crainte qu'elle a que fon rival
ne l'immole , & lui fait entendre qu'Octave
eft un tyran encore mal affermi, qu'il
le croit Gaulois , & qu'ayant beſoin du ſecours
de cette nation , il eft trop bon politique
pour ne la pas ménager. La frayeur
de Tullie s'accroît à l'afpect de Philippe ,
qu'elle prend pour un miniftre des vengeances
d'Octave. Philippe reconnoît Sex186
MERCURE DE FRANCE.
tus qu'il a élevé , & marque autant de
douleur que de furprife. Le fils de Pompée
reconnoît Philippe à fon tour , & lui
reproche d'avoir dégénéré de fa premiere
vertu. Cet affranchi fe jette à fes genoux ,
& lui dit qu'il ne les quittera pas qu'il n'ait
obtenu de lui la grace d'être écouté . Sextuş
le force de fe lever. Philippe lui raconte
qu'Octave inftruit de fa fidélité l'a pris
à fon fervice , mais qu'il n'a jamais trempé
dans fes forfaits. Il ajoute que ce Triumvir
ne croit plus que Sextus foit un Gaulois
, mais un ami de Brutus , & qu'il l'a
chargé du cruel emploi de l'affaffiner dans
la nuit . Il vient , continue- t-il , de paffer
chez Fulvie : je crains qu'il n'en coute la
vie à Ciceron .
Les momens nous font chers , & c'eſt fait de vos
jours ,
Și de ceux du tyran , je n'abrege le cours,
Choififfez du trépas de Célar , ou du vôtre ;-
Rien n'eft facré pour moi quand il s'agit de vous..
Sextus lui répond
L'affafinat , Philippe , eft indigne de nous
Avant que d'éclater il falloit l'entreprendre
Mais inftruit du projet je dois te le défendre .
Ce trait eft hiſtorique , & M. de Cré
FEVRIER. 1755. 187
billon s'en est heureufement fervi . Tullie
approuve Sextus , & termine l'acte en difant
:
Allons trouver mon pere , & remettons aux Dieux
Le foin de nous fauver de ces funeftes lieux.
Le quatrieme acte s'ouvre par un monologue
de Ciceron , qui jette les yeux fur
le tableau des profcriptions , & qui dit
avec tranſport , lorfqu'il y voir fon nom
Enfin je fuis profcrit , que mon ame eft ravie !
Je renais au moment qu'on m'arrache ma vie.
Mecene furvient , & le preffe de s'allier
à Céfar. Ciceron lui demande s'il lui fait
efperer que l'inftant de leur alliance fera la
fin de la profeription . Mecene lui répond
qu'Octave l'a fufpendue pour lui . Ciceron
pour réplique , lui montre fon nom écrit
fur le tableau.
Mecene fe récrie : ...
Dieux quelle trahison
S'il eft vrai que Céfar ait voulu vous proferire ,
Sur ce même tableau je vais me faire inferire.
Adieu : fi je ne puis vous fauver de fes coups ,
Vous me verrez combattre & mourir avec vous.
Octave paroît. Ciceron veut lui faire
189 MERCURE DE FRANCE.
de nouveaux reproches ; mais Octave lui
répond qu'il n'eft pas venu pour fe faire
juger , & qu'il lui demande Tullie pour
la derniere fois. Ciceron lui réplique que
c'eft moins fon amour que fa politique qui
lui fait fouhaiter la main de fa fille , &
qu'il veut par ce noeud les affocier à fes
fureurs. Octave offenfé , lui repart :
Ingrat , fi tu jouis de la clarté du jour ,
Apprens que tu ne dois ce bien qu'à mon amour .
Vois ton nom.
Ciceron lui dit avec un phlegme vraiment
Romain :
Je l'ai vû . Céfar , je t'en rends graces.
Octave alors fe dévoile tout entier , &
lui reproche qu'il protége Clodomir , &
qu'il veut l'unir à Tullie. Ciceron ne s'en
défend pas , & Céfar tranfporté de colere ,
fort en lui déclarant qu'il l'abandonne à
fon inimitié. Ciceron refté feul , dit qu'il
la préfere à une pitié qui deshonore celui
qu'elle épargne , & celui qui l'invoque. Il
eft inquiet fur le fort de fa fille & fur celui
de Sextus , mais il eft raffuré par leur
préfence ; il leur apprend qu'il eft profcrit.
Tous deux le conjurent de partir &
de profiter du moment qu'Octave lui laiſſe ;
FEVRIER. 1755.. 159
mais il s'obſtine à mourir . Philippe vient
avertir Sextus que fes amis font déja loin
des portes , & preffe Tullie de fuivre les
pas du fils de Pompée , en l'affurant qu'elle
n'a rien à craindre pour Ciceron , qu'il eft
chargé de veiller für fes jours , & qu'il va
le conduire à Tufculum. Ciceron quitte
Sextus & Tullie , en leur difant :
i
Adieu , triftes témoins de més voeux fuperflus.
Palais infortuné , je ne vous verrai plus.
Octave qui vient d'apprendre que le faux
Clodomir eft Sextus , fait éclater toute fa
colere , & jure d'immoler le fils de Pompée
, & Tullie même. Mecene entre tout
éploré. Octave effrayé , lui demande quel
eft le fujet de fa douleur. Mecene lui répond
, les yeux baignés de larmes :
Ingrat ! qu'avez-vous fait ?
Hélas ! hier encore il exiſtoit un homme
Qui fit par fes vertus les délices de Rome ;
Mémorable à jamais par fes talens divers ,
Dont le génie heureux éclairoit l'univers.
Il n'eft plus .... fon falut vous eût couvert de
gloire ,
Et de vos cruautés , effacé la mémoire.
Qu'ai -je beſoin encor de vous dire fon nom ?
Ahlaillez-moi vous fuir , & pleurer Ciceron.
190 MERCURE DE FRANCE.
Octave témoigne fa furprife , & rejette
ce crime fur Antoine. Mecene continue
ainfi :
L'intrepide Orateur a vu fans s'ébranler ,
Lever fur lui lebras qui l'alloit immoler :
C'eſt toi , Lena , dit-il ; que rien ne te retienne ;
J'ai défendu ta vie , atrache-moi la mienne.
Je ne me repens point d'avoir ſauvé tes jours ,
Puifque des miens , c'est toi qui dois trancher le
cours.
que
A ces mots , Ciceron lui préfente la tête ,
En s'écriant , Lena , frappe , la voilà prête.
Lena , tandis Pair retentiffoit de cris ,
L'abbat , court chez Fulvie en demander le prix.
Un objet fi touchant , loin d'attendrir ſon ame ,
N'a fait que redoubler le courroux qui l'enflam
me :
Les yeux étincelans de rage & de fureur ,
Elle embraffe Lena fans honte & fans pudeur ,
Saifit avec tranſport cette tête divine ,
Qui femble avec les Dieux difputer d'origine ,
En arrache . ... Epargnez à ma vive douleur
La fuite d'un récit qui vous feroit horreur.
Nous ne l'entendrons plus , du feu de fon génie ,
Répandre dans nos coeurs le charme & l'harmonie
:
Fulvie a déchiré de fes indignes mains
Cet objet précieux , l'oracle des humains.
Ce récit m'a paru trop beau pour en rien
FEVRIER. 1755. 191
retrancher. L'acteur * qui a joué le rolle de
Mecene , en a fenti tout le pathétique , &
l'a très-bien rendu. Tullie qui n'eft pas encore
inftruite de la mort de fon pere , vient
implorer pour lui la puiffance d'Octave ;
elle paroît un peu defcendre de fon caractere
, elle s'humilie même au point d'offrir ſa
main à Céfar, pourvû qu'elle foit le prix des
jours de Ciceron . Comme Octave ne peut
cacher fon embarras , & qu'il veut fortir ,
Tullie l'arrête ; & tournant fes regards
vers la tribune , elle s'écrie avec terreur :
Plus je l'ofe obferver , plus ma frayeur augmente.
Mecene ! la Tribune ... elle eſt toute fanglante.
Ce voile encor fumant cache quelque forfait.
N'importe , je veux voir. Dieux ! quel affreux
objet !
La tête de mon pere ! .. Ah! monftre impitoyable ,
A quels yeux offres- tu ce fpectacle effroyable ?
Elle fe tue , & tombe en expirant auprès
d'une tête fi chere.
Je n'ai point vû au théatre de dénoument
plus frappant ; je ne me laffe point
de le répéter . Ce tableau rendu par l'action
admirable de Mlle Clairon , infpire la terreur
la plus forte , & la pitié la plus tendre
. Ces deux fentimens réunis enfemble .
font la perfection du genre. La beauté du
M. de Bellecour
192 MERCURE DE FRANCE.
cinquiéme acte répond à celle du premier
& la catastrophe remplit tout ce que l'expofition
a promis ; elle a toute la force
Angloife , fans en avoir la licence. Pour
en convaincre le lecteur , je veux lui comparer
le dénouement de Philoclée , dont je
vais donner le programme , d'après l'extrait
inferé dans le Journal Etranger du
mois de Janvier.
Lis
Es Comédiens François ont donné le
13 de ce mois la dixiéme repréfentation
du Triumvirat. On peut dire qu'il a
eu ce fuccès d'estime que l'ouvrage &
l'auteur ont fi bien mérité , & qu'on refuſe
fouvent à des pieces plus heureufes , qui
comptent plus de repréfentations que de
fuffrages. Cette Tragédie eft imprimée
fous ce double titre : Le Triumvirat , ou la
mort de Ciceron , avec une épitre dédicatoire
à Mme Bignon , & une préface . Elle
fe vend chez Hochereau , quai de Conti , au
Phénix ; le prix eft de 30 f. en voici l'extrait .
EXTRAIT DU TRIUMVIRÁT.
Tullie , fille de Ciceron , ouvre feule
la fcene qui eft au Capitole , par un début
digne d'elle & du fujet. Elle s'écrie ,
Effroyable féjour des horreurs de la guerre ,
Lieux inondés du fang des maîtres de la terre ,
Lieux , dont le feul afpect fit trembler tant de
Rois ,
Palais où Ciceron triompha tant de fois ;
Deformais trop heureux de cacher ce grand homme
,
Sauvez le feul Romain qui foit encor dans Rome.
FEVRIER. 1755. 177
A
Elle ajoûte avec effroi , en jettant les
yeux fur le tableau des profcrits :
Que vois-je , à la lueur de ce cruel flambeau !
Ah ! que de noms facrés profcrits fur ce tableau !
Rome , il ne manque plus , pour combler ta mifere
,
Que d'y tracer le nom de mon malheureux pere.
Enfuite elle apoftrophe ainfi la ftatue de
Céfar.
Toi , qui fis en naiffant honneur à la nature ,
Sans avoir , des vertus , que l'heureufe impofture ,
Trop aimable tyran , illuftre ambitieux ,
Qui triomphas du fort , de Caton & des Dieux...
Sous un joug ennobli par l'éclat de tes armes ,
Nous refpirions du moins fans honte & fans allármes
:
Loin de rougir des fers qu'illuftroit ta valeur ,
On fe croyoit paré des lauriers du vainqueur.
Mais fous le joug honteux & d'Antoine & d'Octave
>
Rome , arbitre des Rois , va gémir en eſclave.
Se tournant après vers la ftatue de Pompée
, elle lui adreffe ces triftes paroles .
Ah ! Pompée , eft -ce là ce qui refte de toi
Miférables débris de la grandeur . humaine ,
Hy
178 MERCURE DE FRANCE.
Douloureux monument de vengeance & de haine !
6
Pour nous venger d'Octave ,, accours , vaillant
Sextus ,,
A ce nouveau Céfar , fois un nouveau. Brutus.
Ce monologue me paroît admirable ; il
égale , à mon gré , celui d'Electre , s'il ne
le furpaffe pas , & forme la plus belle expofition
. Il eft terminé par l'arrivée de
Sextus , qui fe cache même aux yeux de
Tullie qu'il aime , fous le nom de Clodomir
, chef des Gaulois . Il lui fait un récit
affreux des horreurs du Triumvirat dont il
vient d'être le témoin , & finit un fi noir
tableau par ces beaux vers , qu'on croiroit
d'un auteur de trente ans , à la force du
coloris.
Un fils , prefque à mes yeux , vient de livrer fon
Le
pere ;
J'ai vu ce même fils égorgé par fa mere :
On ne voit que des corps mutilés & fanglans ,
Des efclaves traîner leurs maîtres expirans ;
affouvi réchauffe le carnage ;
carnage
J'ai vu des furieux dont la haine & la rage
Se difputoient des cours encor tout palpitans:
On diroit à les voir l'un l'autre s'excitans ,
Déployer à l'envi leur fureur meurtrière ,
Que c'est le derniér jour de la nature entiere. {
FEVRIER. , 1755. 179
que
Dans ce péril preffant il offre à Tullie une
retraite dans Oftie pour fon pere & pour
elle . Elle la refufe ; il frémit du danger
Ciceron va courir , fi près de Fulvie
qui a juré fa perte. Il exprime en même
tems la douleur qu'il a de la perdre & de
la voir près d'être unie aux jours d'Octave
qui l'aime , ajoutant que fon fang fcellera
cet hymen. Tullie le raffure fur cette crain--
te , en lui difant :
Un tyran à
Ne craignez rien d'Octave' :
mes yeux ne vaut pas un esclave.
Un rival plus heureux va caufer vos allarmes ...
Le fils du grand Pompée . Hélas ! que n'est- ce vous !!
Que j'euffe avec plaifir accepté mon époux !
Ces deux amans font interrompus par
Lepide qui entre : Clodomir fe retire . Le
Triumvir fait entendre à Tullie , que ne
pouvant chaffer de Rome fes collegues impies
, il prend le parti de s'en exiler luimême
, & qu'il va chercher un afyle en
Efpagne pour y fauver fa vertu. Tullie l'interrompt
par cette noble réponſe , qui a
toujours été fi juftement applaudie :
Ah ! la vertu quifuit ne vaut pas le courage
Du crime audacieux qui fçait braver l'orage .
Que peut craindre un Romain des,caprices.du fort,
Tant qu'il lui refte un bras pour fe donner la mort
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
Avez-vous oublié que Rome eft votre mere
Demeurez , imitez l'exemple de mon pere ,
Et de votre vertu në nous vantez l'éclat
Qu'après une victoire , ou du moins un combat.
On n'encenfa jamais la vertu fugitive ,
Et celle d'un Romain doit être plus active.
On ne le reconnoît qu'à fon dernier foupir ;
Son honneur eft de vaincre , & vaincu de mourir.
ger
Elle fort.
Ciceron arrive. Lapide tâche de l'engaà
le fuivre pour fe dérober à la fureur
d'Antoine & de Fulvie , qui veulent le profcrire.
Ciceron rejette cette offre. Lepide le
quitte , en lui déclarant qu'il vient de rencontrer
Sextus , & qu'il l'a reconnu . Ce
Triumvir l'avertit d'en craindre la fuite ,
& de prendre garde à lui. Ciceron reſté
feul , dit qu'il eft tems qu'il apprenne
ce fecret à fa fille , que Clodomir devenu
le fils du grand Pompée , ne pourra l'en
blâmer , qu'il veut les unir & donner à Céfar
un rival , dont le nom feul pourra lui
devenir funefte.
Octave commence avec Mecene le fecond
acte. Après avoir d'abord tâché d'excufer
fes cruautés , il lui marque fon
amour pour Tullie , & fon eftime pour fon
pere , ajoûtant qu'il veut le fauver & fe
l'attacher. Mecene l'affermit dans ce defFEVRIER.
1755. 181
fein , & le laiffe avec Ciceron qui paroît ,
& qui lui témoigne ainfi fa furpriſe :
Céſar , en quel état vous offrez-vous à moi ?
Ah ! ce n'eft ni fon fils , ni Céfar que je vois.
O! Céfar , ce n'eft pas ton fang qui l'a fait naître :
Brutus qui l'a verfé , méritoit mieux d'en être.
Le meurtre des vaincus ne fouilloit point tes pas ;
Ta valeur fubjuguoit , mais ne profcrivoit pas.
Octave, pour fe juftifier , répond qu'il
pourfuit les meurtriers du grand Céfar , &
que fa vengeance eft légitime. Ciceron l'interrompt
pour lui reprocher l'abus affreux
qu'il fait de ce prétexte , & lui dit :
Rendre le glaive feul l'interprête des loix ,
Employer pour venger le meurtre de fon pere
Des flammes & du fer l'odieux miniftere ;
Donner à fes profcrits pour juges fes foldats ,
Du neveu de Céfar voilà les magiftrats.
Octave lui réplique que c'eft une néceffité
, que l'univers demande une forme
nouvelle , qu'il lui faut un Empereur , que
Ciceron doit le choifir , qu'ils doivent s'allier
pour mieux détruire Antoine ; il le
conjure enfin de l'aimer , & de devenir
fon
pere.
Abdique, je t'adopte , & ma fille eft à toi,
382 MERCURE DE FRANCE.
repart Ciceron. Des oreilles trop délicates
ont trouvé ce vers dur ; pour moi je ne le
trouve que fort ;je crois qu'un Romain ne
peut pas mieux répondre ni en moins de
mots . Tullie paroît , & fon pere fort eix
difant à Octave , qu'il la confulte ; & que
s'il l'aime , il la prenne pour modele .
Tullie traite Octave encore avec plus.
de fierté que n'a fait fon pere. Céfar , luis
dit-elle :
Regnez , fi vous l'ofez; mais croyez que Tullie
Sçaura bien ſe ſoustraire à votre tyrannie :
Si du fort des tyrans vous bravez les hazards
Il naîtra des Brutus autant que des Céfars.
Sur ce qu'il infifte , elle lui déclare fierement
qu'elle ne l'aime point , qu'elle eft
cependant prête à l'époufer , pourvû qu'il
renonce à l'Empire ; mais que s'il veut ufurper
l'autorité fuprême , il peut teindre le
diadême de fon fang. Cette hauteur romaine
oblige Octave de la quitter & de la
menacer de livrer fon pere à Fulvie. Sextus
, qu'elle reconnoît alors pour le fils de
Pompée , entre fur la fcéne , & demande à
Tullie le fujer de fa douleur. Elle l'inftruit
du danger preffant où font les jours de
fon pere , qui veut les unir avant fa mort.
Sextus finit le fecond acte , en la preffant
d'engager Ciceron à fuir fur fes vaiffeaux
FEVRIER. 1755. 183
-il eft honteux pour lui , ajoute-t- il , de fe
laiffer profcrire.
S'il veut m'accompagner je répons de fa vie,
El'amour couronné répondra de Tullie..
Il faut convenir que cet acte eft un peu
vuide d'action .
Ciceron , Tullie & Sextus ouvrent le troifieme.
Ciceron veut unir le fils de Pompée:
à fa fille ; mais elle s'y oppofe dans ce cruel
moment & le conjure de la fuivre en
Sicile avec Sextus il s'écrie ::
>-
Pour braver mes tyrans je veux mourir dáns Ro
me ;
En implorant les Dieux , c'eft moi fenl qu'elles
nomme:
Sextus lui parle alors en vrai fils de Pompée
, & lui dit :
Rome n'eft plus qu'un ſpectre , une ombre en Ita
lie ,
Dont le corps tout entier eft paffé dans l'Afie :
C'est là que noure honneur nous appelle aujour
d'hui ,
Rendons- nous à ſa voix , & marchons avec lui.
Ce n'eft pas le climat qui lui donna la vie;
C'eſt le coeur du Romain qui forme fa patrie.
184 MERCURE DE FRANCE.
2
Il vaut mieux fe flater d'un eſpoir téméraire
Que de céder au fort dès qu'il nous eft contraire.
Il faut du moins mourir les armes à la main ,
Le feul gente de mort digne d'un vrai Romain,
Mais mourir pour mourir n'eft qu'une folle
yvreffe ,
Trifte enfant de l'orgueil , que nourrit la pareffe.
où
Ciceron fort en leur difant qu'il ne
peut fe réfoudre à quitter l'Italie , mais
qu'il confent de fe rendre à Tufculum ,
il ira les joindre pour les unir enfemble ,
& qu'avant tout il veut revoir Mecene. A
peine eft- il parti qu'Octave entre ; & jaloux
de Sextus qu'il prend pour un chef
des Gaulois , il adreffe ainfi la parole à
Tullie .
Qu'il retourne en fon camp ,
C'eft parmi fes foldats qu'il trouvera fon rang,
Le faux Clodomir lui répond , avec une
fierté plus que Gauloife ,
Le fort de mes pareils ne dépend point de toi
Je ne releve ici que des Dieux & de moi.
Aux loix du grand Céfar nous rendîmes hommage
,
Mais ce ne fut jamais à titre d'efclavage.
Comme de la valeur il connoiffoit le prix ,
Il cftimoit en nous ce qui manque à ſon fils.
FEVRIER. 1755. 185
Octave à ces mots appelle les Licteurs ,
& il faut avouer que fon emportement
paroît fondé.
Tullie s'oppofe à fa rigueur , & prend
vivement la défenſe de Sextus . Le courroux
d'Octave en redouble ; il . lui répond
que ce Gaulois brave l'autorité des Triumvirs
, qu'il a fauvé plufieurs profcrits , &
qu'il mérite d'être puni comme un traître .
Sextus lui réplique :
Toi-même , applaudifſant à mes foins magnanimes
,
Tu devrois me louer de t'épargner des crimes ,
Et rougir , quand tu crois être au- deffus de moi ,
Qu'un Gaulois à tes yeux foit plus Romain que
toi,
Tullie lui demande fa vie. Octave forcé
par fon amour de la lui accorder , fe retire
en déguifant fon dépit. Sextus raffure Tullie
fur la crainte qu'elle a que fon rival
ne l'immole , & lui fait entendre qu'Octave
eft un tyran encore mal affermi, qu'il
le croit Gaulois , & qu'ayant beſoin du ſecours
de cette nation , il eft trop bon politique
pour ne la pas ménager. La frayeur
de Tullie s'accroît à l'afpect de Philippe ,
qu'elle prend pour un miniftre des vengeances
d'Octave. Philippe reconnoît Sex186
MERCURE DE FRANCE.
tus qu'il a élevé , & marque autant de
douleur que de furprife. Le fils de Pompée
reconnoît Philippe à fon tour , & lui
reproche d'avoir dégénéré de fa premiere
vertu. Cet affranchi fe jette à fes genoux ,
& lui dit qu'il ne les quittera pas qu'il n'ait
obtenu de lui la grace d'être écouté . Sextuş
le force de fe lever. Philippe lui raconte
qu'Octave inftruit de fa fidélité l'a pris
à fon fervice , mais qu'il n'a jamais trempé
dans fes forfaits. Il ajoute que ce Triumvir
ne croit plus que Sextus foit un Gaulois
, mais un ami de Brutus , & qu'il l'a
chargé du cruel emploi de l'affaffiner dans
la nuit . Il vient , continue- t-il , de paffer
chez Fulvie : je crains qu'il n'en coute la
vie à Ciceron .
Les momens nous font chers , & c'eſt fait de vos
jours ,
Și de ceux du tyran , je n'abrege le cours,
Choififfez du trépas de Célar , ou du vôtre ;-
Rien n'eft facré pour moi quand il s'agit de vous..
Sextus lui répond
L'affafinat , Philippe , eft indigne de nous
Avant que d'éclater il falloit l'entreprendre
Mais inftruit du projet je dois te le défendre .
Ce trait eft hiſtorique , & M. de Cré
FEVRIER. 1755. 187
billon s'en est heureufement fervi . Tullie
approuve Sextus , & termine l'acte en difant
:
Allons trouver mon pere , & remettons aux Dieux
Le foin de nous fauver de ces funeftes lieux.
Le quatrieme acte s'ouvre par un monologue
de Ciceron , qui jette les yeux fur
le tableau des profcriptions , & qui dit
avec tranſport , lorfqu'il y voir fon nom
Enfin je fuis profcrit , que mon ame eft ravie !
Je renais au moment qu'on m'arrache ma vie.
Mecene furvient , & le preffe de s'allier
à Céfar. Ciceron lui demande s'il lui fait
efperer que l'inftant de leur alliance fera la
fin de la profeription . Mecene lui répond
qu'Octave l'a fufpendue pour lui . Ciceron
pour réplique , lui montre fon nom écrit
fur le tableau.
Mecene fe récrie : ...
Dieux quelle trahison
S'il eft vrai que Céfar ait voulu vous proferire ,
Sur ce même tableau je vais me faire inferire.
Adieu : fi je ne puis vous fauver de fes coups ,
Vous me verrez combattre & mourir avec vous.
Octave paroît. Ciceron veut lui faire
189 MERCURE DE FRANCE.
de nouveaux reproches ; mais Octave lui
répond qu'il n'eft pas venu pour fe faire
juger , & qu'il lui demande Tullie pour
la derniere fois. Ciceron lui réplique que
c'eft moins fon amour que fa politique qui
lui fait fouhaiter la main de fa fille , &
qu'il veut par ce noeud les affocier à fes
fureurs. Octave offenfé , lui repart :
Ingrat , fi tu jouis de la clarté du jour ,
Apprens que tu ne dois ce bien qu'à mon amour .
Vois ton nom.
Ciceron lui dit avec un phlegme vraiment
Romain :
Je l'ai vû . Céfar , je t'en rends graces.
Octave alors fe dévoile tout entier , &
lui reproche qu'il protége Clodomir , &
qu'il veut l'unir à Tullie. Ciceron ne s'en
défend pas , & Céfar tranfporté de colere ,
fort en lui déclarant qu'il l'abandonne à
fon inimitié. Ciceron refté feul , dit qu'il
la préfere à une pitié qui deshonore celui
qu'elle épargne , & celui qui l'invoque. Il
eft inquiet fur le fort de fa fille & fur celui
de Sextus , mais il eft raffuré par leur
préfence ; il leur apprend qu'il eft profcrit.
Tous deux le conjurent de partir &
de profiter du moment qu'Octave lui laiſſe ;
FEVRIER. 1755.. 159
mais il s'obſtine à mourir . Philippe vient
avertir Sextus que fes amis font déja loin
des portes , & preffe Tullie de fuivre les
pas du fils de Pompée , en l'affurant qu'elle
n'a rien à craindre pour Ciceron , qu'il eft
chargé de veiller für fes jours , & qu'il va
le conduire à Tufculum. Ciceron quitte
Sextus & Tullie , en leur difant :
i
Adieu , triftes témoins de més voeux fuperflus.
Palais infortuné , je ne vous verrai plus.
Octave qui vient d'apprendre que le faux
Clodomir eft Sextus , fait éclater toute fa
colere , & jure d'immoler le fils de Pompée
, & Tullie même. Mecene entre tout
éploré. Octave effrayé , lui demande quel
eft le fujet de fa douleur. Mecene lui répond
, les yeux baignés de larmes :
Ingrat ! qu'avez-vous fait ?
Hélas ! hier encore il exiſtoit un homme
Qui fit par fes vertus les délices de Rome ;
Mémorable à jamais par fes talens divers ,
Dont le génie heureux éclairoit l'univers.
Il n'eft plus .... fon falut vous eût couvert de
gloire ,
Et de vos cruautés , effacé la mémoire.
Qu'ai -je beſoin encor de vous dire fon nom ?
Ahlaillez-moi vous fuir , & pleurer Ciceron.
190 MERCURE DE FRANCE.
Octave témoigne fa furprife , & rejette
ce crime fur Antoine. Mecene continue
ainfi :
L'intrepide Orateur a vu fans s'ébranler ,
Lever fur lui lebras qui l'alloit immoler :
C'eſt toi , Lena , dit-il ; que rien ne te retienne ;
J'ai défendu ta vie , atrache-moi la mienne.
Je ne me repens point d'avoir ſauvé tes jours ,
Puifque des miens , c'est toi qui dois trancher le
cours.
que
A ces mots , Ciceron lui préfente la tête ,
En s'écriant , Lena , frappe , la voilà prête.
Lena , tandis Pair retentiffoit de cris ,
L'abbat , court chez Fulvie en demander le prix.
Un objet fi touchant , loin d'attendrir ſon ame ,
N'a fait que redoubler le courroux qui l'enflam
me :
Les yeux étincelans de rage & de fureur ,
Elle embraffe Lena fans honte & fans pudeur ,
Saifit avec tranſport cette tête divine ,
Qui femble avec les Dieux difputer d'origine ,
En arrache . ... Epargnez à ma vive douleur
La fuite d'un récit qui vous feroit horreur.
Nous ne l'entendrons plus , du feu de fon génie ,
Répandre dans nos coeurs le charme & l'harmonie
:
Fulvie a déchiré de fes indignes mains
Cet objet précieux , l'oracle des humains.
Ce récit m'a paru trop beau pour en rien
FEVRIER. 1755. 191
retrancher. L'acteur * qui a joué le rolle de
Mecene , en a fenti tout le pathétique , &
l'a très-bien rendu. Tullie qui n'eft pas encore
inftruite de la mort de fon pere , vient
implorer pour lui la puiffance d'Octave ;
elle paroît un peu defcendre de fon caractere
, elle s'humilie même au point d'offrir ſa
main à Céfar, pourvû qu'elle foit le prix des
jours de Ciceron . Comme Octave ne peut
cacher fon embarras , & qu'il veut fortir ,
Tullie l'arrête ; & tournant fes regards
vers la tribune , elle s'écrie avec terreur :
Plus je l'ofe obferver , plus ma frayeur augmente.
Mecene ! la Tribune ... elle eſt toute fanglante.
Ce voile encor fumant cache quelque forfait.
N'importe , je veux voir. Dieux ! quel affreux
objet !
La tête de mon pere ! .. Ah! monftre impitoyable ,
A quels yeux offres- tu ce fpectacle effroyable ?
Elle fe tue , & tombe en expirant auprès
d'une tête fi chere.
Je n'ai point vû au théatre de dénoument
plus frappant ; je ne me laffe point
de le répéter . Ce tableau rendu par l'action
admirable de Mlle Clairon , infpire la terreur
la plus forte , & la pitié la plus tendre
. Ces deux fentimens réunis enfemble .
font la perfection du genre. La beauté du
M. de Bellecour
192 MERCURE DE FRANCE.
cinquiéme acte répond à celle du premier
& la catastrophe remplit tout ce que l'expofition
a promis ; elle a toute la force
Angloife , fans en avoir la licence. Pour
en convaincre le lecteur , je veux lui comparer
le dénouement de Philoclée , dont je
vais donner le programme , d'après l'extrait
inferé dans le Journal Etranger du
mois de Janvier.
Fermer
Résumé : COMEDIE FRANÇOISE.
Le texte critique la dixième représentation de la tragédie 'Le Triumvirat, ou la mort de Cicéron' par les Comédiens Français, qui a connu un succès mérité. La pièce, disponible chez Hochereau, raconte l'histoire de Tullie, fille de Cicéron, qui cherche à protéger son père des persécutions du Triumvirat. Tullie exprime son désespoir face aux horreurs de cette période et reproche à César et Pompée leurs actions. Elle révèle également la menace que représente Octave. Sextus, déguisé en Clodomir, propose une retraite à Tullie, mais elle refuse. Lepide suggère à Cicéron de s'exiler, mais Tullie l'encourage à rester et à affronter ses ennemis. Octave, accompagné de Mécène, tente de gagner la faveur de Cicéron en lui offrant de l'adopter et de protéger Tullie, mais ils rejettent ces propositions avec fierté. Sextus, reconnu comme le fils de Pompée, presse Cicéron de fuir. La pièce se poursuit avec des confrontations entre les personnages, chacun défendant ses valeurs et loyautés. Cicéron refuse de quitter Rome et exprime son désir de mourir en héros. Octave, jaloux de Sextus, menace de le punir, mais finit par lui accorder la vie. Philippe, un affranchi, révèle un complot contre Cicéron, et Sextus décide de le protéger. Tullie et Sextus se préparent à trouver Cicéron pour le sauver des dangers qui le menacent. La pièce se poursuit avec une confrontation dramatique entre Octave, Cicéron et d'autres personnages. Octave demande la main de Tullie, mais Cicéron refuse, accusant Octave de motivations politiques. Octave, offensé, rappelle à Cicéron qu'il lui doit la vie. Cicéron, imperturbable, avoue protéger Clodomir et vouloir l'unir à Tullie. Octave, furieux, déclare abandonner Cicéron à son inimitié. Cicéron, inquiet pour ses enfants, apprend qu'il est proscrit mais refuse de partir. Philippe avertit Sextus et Tullie de partir, assurant qu'il veillera sur Cicéron. Cicéron dit adieu à ses enfants et quitte le palais. Octave, apprenant que Sextus est le faux Clodomir, jure de les immoler. Mécène révèle à Octave la mort de Cicéron, tué par Lena sur ordre de Fulvie. Tullie, découvrant la tête de son père, meurt de chagrin. La pièce se conclut par un dénouement tragique, soulignant la terreur et la pitié inspirées par la mort de Cicéron.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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273
p. 192-199
PROGRAMME PHILOCLÉE, Tragédie Angloise.
Début :
Le théatre représente une forêt. Bazile, Roi d'Arcadie, renonçant aux affaires, [...]
Mots clefs :
Tragédie, Théâtre, Yeux, Baiser, Comédie-Française, Princesses, Tragédie anglaise
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : PROGRAMME PHILOCLÉE, Tragédie Angloise.
PROGRAMME DE PHILOCLÉE ,
Tragédie Angloife .
Lie ,Roi d'Arcadie , fenonçant aux af-
E théatre repréſente une forêt. Bazifaires
, s'eft retiré dans cette retraite avec
Ginecie fa feconde femme , & fes deux
filles , Philoclée & Pamela , qu'il a eues
d'un premier mariage. Il eſt défendu d'y
pénétrer fous peine de la vie , hors à des
bergers employés à leurs fervices . Il a déclaré
en même tems que ces deux Princeffes
ne feroient jamais mariées de fon
vivant , fans dévoiler le motif d'une rigueur
fi bizarre. Mais Mufidore , Prince
de Theffalie , a pénétré ce myftere . Le
Grand Prêtre de Delphes , gagné par fes
préfens , lui a révélé qu'on avoit prédit à
Bazile qu'il mourroit le jour même que
fes filles feroient mariées . Cet oracle eft
un
FEVRIER . 1755. 193
un vol qu'on a fait aux Danaïdes . Mufidore
, amoureux de Pamela , fe déguiſe en
berger pour s'introduire auprès d'elle ; &
Pyroclès fon ami , Prince de Macédoine ,
épris des charmes de Philoclée , vient d'arborer
auffi la houlette. Ils ont tous deux
formé le projet de déclarer leur amour à
ces Princeffes , & s'ils font écoutés , d'obtenir
leur aveu pour les enlever.
Pyroclès trouve le premier l'occafion favorable
: il voit dans un jardin Philoclée
endormie ; il exprime ainfi fon tranſport :
mes yeux ne me trompent point , c'eſt
» elle , couchée fur un lit de fleurs ... elle
» dort .... Son haleine eft plus douce que
» l'odeur qu'elles exhalent .... heureuſes
fleurs qui fervez d'oreiller à fes joues
» charmantes ! ah ! j'en vois une qui s'éleve
jufqu'à fa bouche vermeille ; elle
» s'efforce de la baifer. Embaumée de få
> refpiration , elle en reçoit plus de parfums
que Flore n'en a verfé fur toutes
» fes compagnes . Ah !
que ma main ja-
» louſe l'arrache de fa tige ! que je fuce
>> comme l'abeille cette précieufe rofée « .
Langage trop figuré pour une tragédie !
vers d'Idylle , & fituation d'opéra. Ce fommeil
paroît même copié d'après celui d'Iffé.
» Qui m'arrête ? ajoute- t-il , amant trop
timide , ne puis - je moi -même dérober
و ر
و د
...
I
194 MERCURE DE FRANCE.
"
» un baifer ? & ce tendre larcin diminuera-
t-il un tréfor où s'accumulent tant de
» charmes « réflexion fenfée qui le déter
mine à prendre un baifer. Cette liberté feroit
excufable dans une comédie ; mais le
tragique eft plus févere fur les bienséances.
Il permet , ou plutôt il adopte les plus
grands crimes , & ne pardonne pas les plus
petites familiarités. On peut empoifonner ,
& même poignarder aujourd'hui fur notre
théatre avec décence ; mais un baiſer
feroit fcandaleux , ou tout au moins ridi
cule dans une tragédie françoife. Le réveil
de Philoclée engage l'aveu que Pyroclès
lui fait de fa paffion & de fon rang ;
il est très-bien . reçu . Mufidore a le même
fuccès près de Pamela , à la faveur d'un
portrait & d'une médaille qui le repréfentent
, & qui occafionnent une déclara
tion . Petit moyen, accompagné d'autres incidens
, qui chargent la piece fans avancer
Faction. Je les fupprime pour arriver plu
tôt au point de comparaifon , c'eft-à -dire à
la fituation qui reffemble à la cataſtrophe
du Triumvirat. En conféquence , je paffe
à l'événement du troifiéme acte , qui doit
l'amener : c'eft où commence proprement
la tragédie comme l'a judicieuſement
remarqué M. l'Abbé P.
On apprend au Roi qu'Amphiale fon
FEVRIER. 1755. 195
neveu , qu'il n'a pas voulu accepter pour
gendre, vient d'enlever les deux Princefles ;
que Pyroclès a tué plufieurs des raviffeurs ,
mais qu'accablé fous le nombre , il a été
fait prifonnier. Le Roi fort de fa retraite
& court affiéger Amphiale dans un château
où il s'eft retiré avec fa proye. Ce Prince
foutient le fiége. Cecropie , fa mere , veut
qu'il époufe fur le champ , de force ou de
gré , l'une des deux Princeffes , ou qu'il les
faffe mourir. Comme toutes les deux refufent
fon fils , cette cruelle femme va trouver
Philoclée dans fon appartement , & lui
dit de choisir de cet hymen ou d'un prompt
fupplice. La Princeffe répond qu'elle préfere
la mort : eh bien , lui réplique Cecropie
, jette les yeux dans la cour , l'échafaud
eft dreffé ; vois dans le fort de ta foeur
celui qui t'attend. Elle donne le fignal , &
l'on fait voler une tête. A cette affreuſe
vûe , Philoclée s'évanouit. Un pareil fpectacle
me femble plus propre à repaître
les regards d'une populace cruelle , qu'à
étonner l'efprit , ou qu'à remuer le coeur
d'un public délicat .
Dans le cinquiéme acte un Officier vient
annoncer à Pyroclès , dans fa prifon , la
mort de Philoclée , & pour ne lui laiſſer
aucun doute , il lui dit de le fuivre . Le.
théatre change ; on voit au milieu d'une
I ij
196 MERCURE DE FRANCE .
fale tendue de noir , un corps expofé fut
un lit de parade : Pyroclès leve le drap qui
le couvre , & s'écrie : Dieux ! un tronc
fanglant ! quoi ! Philoclée ! ... Ah ! barbares
affaffins ! Il tombe faifi de douleur ,
& les fanglots lui coupent la parole . Cette
pofition et prefque la même que celle qui
termine le Triumvirat ; mais l'auteur Anglois
n'en demeure pas là . Dans le tems
que Pyroclès déplore la perte de la Princeffe
, elle paroît vêtue de blanc ; il la
prend pour fon ombre : elle le defabuſe ,
& lui apprend que ce corps mort eſt celui
d'une malheureufe confidente immolée à
la place , & fous les habits de Pamela ;
ftratagême imaginé par Cecropie , pour réfoudre
Philoclée à époufer fon fils , & plus
digne de figurer dans un tome de Caffandre
, d'où il a été pris , que d'être employé
dans une piéce dramatique. Pendant cet
éclairciffement on entend le bruit d'un
combat ; c'eft Mufidore qui vient de furprendre
le château , & de tuer Amphiale .
Les quatre amans fe trouvent réunis : on
leur apprend la mort de Cecropie , qui
s'eft précipitée du haut des murs , & celle
de Bazile , percé d'une fleche lancée au has
żard , au moment qu'il entroit dans la
place. C'eft ainfi que s'accomplit l'oracle ,
que finit la piece. Pour la Reine , on &
FEVRIER . 1755. 197
ne fçait , dit le Journaliſte , ce qu'elle eft
devenue. Les deux couples * fortunées ne
s'en embarraffent gueres , ni moi non plus ,
qui ai furprimé fon rôle.
Que l'on compare à préfent les deux cataftrophes
; l'une eft amenée à force d'incidens
romanefques , & compliquée audelà
de la vraisemblance ; l'autre eft prife
dans la nature , affortie à la vérite hiftorique
, & renfermée dans fa précifion : qu'on
juge en même tems les deux ouvrages.
On ne peut difconvenir qu'il n'y ait des
beautés fingulieres & des coups de force
dans le drame Anglois ; mais ils font frappés
fans deffein , & paroiffent ifolés ; c'eft
un pur roman , encore eſt-il mal tiffu , &
trop chargé. La piece françoife a des traits
qui n'ont pas moins d'audace , & qui fortent
mieux du fujet . C'eſt une vraie tragédie
; fi elle eft un peu foible d'action **,
elle eft forte de penſées , brillante par les
détails , & foutenue par les caracteres .
Pour tout dire , en un mot , Philoclée eft
* Je crois que ce mot couple eft maſculin dans
cette acception, & qu'on doit dire les deux couples
fortunés ; peut- être eft- ce une faute d'impreffion ?
** Le plus grand défaut du Triumvirat eft dans
le fujet, qui eft trop fimple ; la fuite de Ciceron en
fait tout le fond : partira-t-il ? ne partira-t-il
point ? voilà fur quoi roule toute l'action juſqu'au
dénouement.
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
l'ouvrage du talent aux dépens de toutes
les regles ; le Triumvirat eft celui du génie
éclairé par l'art , & foumis aux bienféances.
M. l'Abbé P. nous apprend que cette
tragédie angloife eft le coup d'effai de M.
Machamara Morgan , jeune étudiant en
Droit ; il ajoute qu'on peut tout attendre
de lui , & qu'il s'empreffe d'en publier
l'augure ce préfage feroit plus flateur
pour nous , s'il nous annonçoit un digne
fucceffeur de M. de Crébillon & de M. de
Voltaire .
Le 19 , les Comédiens François ont remis
Efope à la Cour , comédie en cinq actes
& en vers , de Bourfault. Cette piece
eftimable
a reçu du public l'accueil favorable
qu'elle mérite. M. de Lanoue eft fupérieur
dans le rôle d'Efope ; on ne peut
pas le rendre avec plus d'efprit & de vérité.
Cette comédie eft intéreffante autant
que peut l'être une piéce épifodique. La
fcene de Rodope avec fa mere eft une des
plus touchantes qui foient au théatre , &
des mieux jouées par Mlle Gauffin & Mlle
Dumefnil. Après l'Andrienne voilà le premier
& le vrai modele du comique larmoyant
; il eft puifé dans la nature. Le
dénouement eft encore d'une grande beauré
, il laiffe pour l'auteur une forte imFEVRIER.
1755.. 199
preffion d'eftime. Je voudrois que Bourfault
n'eût pas bleffé le coftume en parlant
de Procureurs & de Greffiers , qui n'avoient
pas lieu heureuſement pour ce temslà.
Mes yeux font encore plus choqués que
les acteurs ne refpectent pas mieux ce même
coſtume , en habillant des Lydiens à la
Françoife : ils l'ont toujours fait ; mais un
abus de foixante dix ans n'eft pas moins
un abus ; ils ne font pas moins dans l'obligation
de s'en corriger.
Tragédie Angloife .
Lie ,Roi d'Arcadie , fenonçant aux af-
E théatre repréſente une forêt. Bazifaires
, s'eft retiré dans cette retraite avec
Ginecie fa feconde femme , & fes deux
filles , Philoclée & Pamela , qu'il a eues
d'un premier mariage. Il eſt défendu d'y
pénétrer fous peine de la vie , hors à des
bergers employés à leurs fervices . Il a déclaré
en même tems que ces deux Princeffes
ne feroient jamais mariées de fon
vivant , fans dévoiler le motif d'une rigueur
fi bizarre. Mais Mufidore , Prince
de Theffalie , a pénétré ce myftere . Le
Grand Prêtre de Delphes , gagné par fes
préfens , lui a révélé qu'on avoit prédit à
Bazile qu'il mourroit le jour même que
fes filles feroient mariées . Cet oracle eft
un
FEVRIER . 1755. 193
un vol qu'on a fait aux Danaïdes . Mufidore
, amoureux de Pamela , fe déguiſe en
berger pour s'introduire auprès d'elle ; &
Pyroclès fon ami , Prince de Macédoine ,
épris des charmes de Philoclée , vient d'arborer
auffi la houlette. Ils ont tous deux
formé le projet de déclarer leur amour à
ces Princeffes , & s'ils font écoutés , d'obtenir
leur aveu pour les enlever.
Pyroclès trouve le premier l'occafion favorable
: il voit dans un jardin Philoclée
endormie ; il exprime ainfi fon tranſport :
mes yeux ne me trompent point , c'eſt
» elle , couchée fur un lit de fleurs ... elle
» dort .... Son haleine eft plus douce que
» l'odeur qu'elles exhalent .... heureuſes
fleurs qui fervez d'oreiller à fes joues
» charmantes ! ah ! j'en vois une qui s'éleve
jufqu'à fa bouche vermeille ; elle
» s'efforce de la baifer. Embaumée de få
> refpiration , elle en reçoit plus de parfums
que Flore n'en a verfé fur toutes
» fes compagnes . Ah !
que ma main ja-
» louſe l'arrache de fa tige ! que je fuce
>> comme l'abeille cette précieufe rofée « .
Langage trop figuré pour une tragédie !
vers d'Idylle , & fituation d'opéra. Ce fommeil
paroît même copié d'après celui d'Iffé.
» Qui m'arrête ? ajoute- t-il , amant trop
timide , ne puis - je moi -même dérober
و ر
و د
...
I
194 MERCURE DE FRANCE.
"
» un baifer ? & ce tendre larcin diminuera-
t-il un tréfor où s'accumulent tant de
» charmes « réflexion fenfée qui le déter
mine à prendre un baifer. Cette liberté feroit
excufable dans une comédie ; mais le
tragique eft plus févere fur les bienséances.
Il permet , ou plutôt il adopte les plus
grands crimes , & ne pardonne pas les plus
petites familiarités. On peut empoifonner ,
& même poignarder aujourd'hui fur notre
théatre avec décence ; mais un baiſer
feroit fcandaleux , ou tout au moins ridi
cule dans une tragédie françoife. Le réveil
de Philoclée engage l'aveu que Pyroclès
lui fait de fa paffion & de fon rang ;
il est très-bien . reçu . Mufidore a le même
fuccès près de Pamela , à la faveur d'un
portrait & d'une médaille qui le repréfentent
, & qui occafionnent une déclara
tion . Petit moyen, accompagné d'autres incidens
, qui chargent la piece fans avancer
Faction. Je les fupprime pour arriver plu
tôt au point de comparaifon , c'eft-à -dire à
la fituation qui reffemble à la cataſtrophe
du Triumvirat. En conféquence , je paffe
à l'événement du troifiéme acte , qui doit
l'amener : c'eft où commence proprement
la tragédie comme l'a judicieuſement
remarqué M. l'Abbé P.
On apprend au Roi qu'Amphiale fon
FEVRIER. 1755. 195
neveu , qu'il n'a pas voulu accepter pour
gendre, vient d'enlever les deux Princefles ;
que Pyroclès a tué plufieurs des raviffeurs ,
mais qu'accablé fous le nombre , il a été
fait prifonnier. Le Roi fort de fa retraite
& court affiéger Amphiale dans un château
où il s'eft retiré avec fa proye. Ce Prince
foutient le fiége. Cecropie , fa mere , veut
qu'il époufe fur le champ , de force ou de
gré , l'une des deux Princeffes , ou qu'il les
faffe mourir. Comme toutes les deux refufent
fon fils , cette cruelle femme va trouver
Philoclée dans fon appartement , & lui
dit de choisir de cet hymen ou d'un prompt
fupplice. La Princeffe répond qu'elle préfere
la mort : eh bien , lui réplique Cecropie
, jette les yeux dans la cour , l'échafaud
eft dreffé ; vois dans le fort de ta foeur
celui qui t'attend. Elle donne le fignal , &
l'on fait voler une tête. A cette affreuſe
vûe , Philoclée s'évanouit. Un pareil fpectacle
me femble plus propre à repaître
les regards d'une populace cruelle , qu'à
étonner l'efprit , ou qu'à remuer le coeur
d'un public délicat .
Dans le cinquiéme acte un Officier vient
annoncer à Pyroclès , dans fa prifon , la
mort de Philoclée , & pour ne lui laiſſer
aucun doute , il lui dit de le fuivre . Le.
théatre change ; on voit au milieu d'une
I ij
196 MERCURE DE FRANCE .
fale tendue de noir , un corps expofé fut
un lit de parade : Pyroclès leve le drap qui
le couvre , & s'écrie : Dieux ! un tronc
fanglant ! quoi ! Philoclée ! ... Ah ! barbares
affaffins ! Il tombe faifi de douleur ,
& les fanglots lui coupent la parole . Cette
pofition et prefque la même que celle qui
termine le Triumvirat ; mais l'auteur Anglois
n'en demeure pas là . Dans le tems
que Pyroclès déplore la perte de la Princeffe
, elle paroît vêtue de blanc ; il la
prend pour fon ombre : elle le defabuſe ,
& lui apprend que ce corps mort eſt celui
d'une malheureufe confidente immolée à
la place , & fous les habits de Pamela ;
ftratagême imaginé par Cecropie , pour réfoudre
Philoclée à époufer fon fils , & plus
digne de figurer dans un tome de Caffandre
, d'où il a été pris , que d'être employé
dans une piéce dramatique. Pendant cet
éclairciffement on entend le bruit d'un
combat ; c'eft Mufidore qui vient de furprendre
le château , & de tuer Amphiale .
Les quatre amans fe trouvent réunis : on
leur apprend la mort de Cecropie , qui
s'eft précipitée du haut des murs , & celle
de Bazile , percé d'une fleche lancée au has
żard , au moment qu'il entroit dans la
place. C'eft ainfi que s'accomplit l'oracle ,
que finit la piece. Pour la Reine , on &
FEVRIER . 1755. 197
ne fçait , dit le Journaliſte , ce qu'elle eft
devenue. Les deux couples * fortunées ne
s'en embarraffent gueres , ni moi non plus ,
qui ai furprimé fon rôle.
Que l'on compare à préfent les deux cataftrophes
; l'une eft amenée à force d'incidens
romanefques , & compliquée audelà
de la vraisemblance ; l'autre eft prife
dans la nature , affortie à la vérite hiftorique
, & renfermée dans fa précifion : qu'on
juge en même tems les deux ouvrages.
On ne peut difconvenir qu'il n'y ait des
beautés fingulieres & des coups de force
dans le drame Anglois ; mais ils font frappés
fans deffein , & paroiffent ifolés ; c'eft
un pur roman , encore eſt-il mal tiffu , &
trop chargé. La piece françoife a des traits
qui n'ont pas moins d'audace , & qui fortent
mieux du fujet . C'eſt une vraie tragédie
; fi elle eft un peu foible d'action **,
elle eft forte de penſées , brillante par les
détails , & foutenue par les caracteres .
Pour tout dire , en un mot , Philoclée eft
* Je crois que ce mot couple eft maſculin dans
cette acception, & qu'on doit dire les deux couples
fortunés ; peut- être eft- ce une faute d'impreffion ?
** Le plus grand défaut du Triumvirat eft dans
le fujet, qui eft trop fimple ; la fuite de Ciceron en
fait tout le fond : partira-t-il ? ne partira-t-il
point ? voilà fur quoi roule toute l'action juſqu'au
dénouement.
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
l'ouvrage du talent aux dépens de toutes
les regles ; le Triumvirat eft celui du génie
éclairé par l'art , & foumis aux bienféances.
M. l'Abbé P. nous apprend que cette
tragédie angloife eft le coup d'effai de M.
Machamara Morgan , jeune étudiant en
Droit ; il ajoute qu'on peut tout attendre
de lui , & qu'il s'empreffe d'en publier
l'augure ce préfage feroit plus flateur
pour nous , s'il nous annonçoit un digne
fucceffeur de M. de Crébillon & de M. de
Voltaire .
Le 19 , les Comédiens François ont remis
Efope à la Cour , comédie en cinq actes
& en vers , de Bourfault. Cette piece
eftimable
a reçu du public l'accueil favorable
qu'elle mérite. M. de Lanoue eft fupérieur
dans le rôle d'Efope ; on ne peut
pas le rendre avec plus d'efprit & de vérité.
Cette comédie eft intéreffante autant
que peut l'être une piéce épifodique. La
fcene de Rodope avec fa mere eft une des
plus touchantes qui foient au théatre , &
des mieux jouées par Mlle Gauffin & Mlle
Dumefnil. Après l'Andrienne voilà le premier
& le vrai modele du comique larmoyant
; il eft puifé dans la nature. Le
dénouement eft encore d'une grande beauré
, il laiffe pour l'auteur une forte imFEVRIER.
1755.. 199
preffion d'eftime. Je voudrois que Bourfault
n'eût pas bleffé le coftume en parlant
de Procureurs & de Greffiers , qui n'avoient
pas lieu heureuſement pour ce temslà.
Mes yeux font encore plus choqués que
les acteurs ne refpectent pas mieux ce même
coſtume , en habillant des Lydiens à la
Françoife : ils l'ont toujours fait ; mais un
abus de foixante dix ans n'eft pas moins
un abus ; ils ne font pas moins dans l'obligation
de s'en corriger.
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Résumé : PROGRAMME PHILOCLÉE, Tragédie Angloise.
Le texte présente une critique de la tragédie 'Programme de Philoclée' d'un auteur anglois. L'intrigue se déroule dans une forêt où Bazile, roi d'Arcadie, s'est retiré avec sa femme Ginécie et ses deux filles, Philoclée et Pamela. Bazile a interdit l'accès à cette retraite et déclaré que ses filles ne se marieraient pas de son vivant, craignant une prédiction selon laquelle il mourrait le jour du mariage de ses filles. Deux princes, Mufidore de Thessalie et Pyroclès de Macédoine, amoureux respectivement de Pamela et Philoclée, se déguisent en bergers pour approcher les princesses. Pyroclès trouve Philoclée endormie et exprime son amour, recevant une réponse favorable. Mufidore obtient également l'affection de Pamela grâce à un portrait et une médaille. Le roi Bazile apprend que son neveu Amphiale a enlevé les princesses et que Pyroclès a été fait prisonnier. Bazile assiège Amphiale, qui refuse de se rendre. Cecropie, la mère d'Amphiale, ordonne de tuer Philoclée si elle refuse d'épouser son fils. Philoclée préfère la mort et s'évanouit à la vue d'une exécution simulée. Pyroclès, informé de la mort de Philoclée, est dévasté mais découvre que la morte est une confidente sacrifiée à sa place. Mufidore surprend Amphiale et le tue. Les couples amoureux se retrouvent, et l'oracle se réalise avec la mort de Bazile. La pièce se termine sans mentionner le sort de la reine. La critique compare cette tragédie à une autre œuvre, le 'Triumvirat', en soulignant les différences dans la construction des intrigues et la vraisemblance des événements.
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274
p. 199
COMEDIE ITALIENNE.
Début :
Les Comédiens Italiens ont donné le 25, la dix-huitiéme représentation de [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens
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texteReconnaissance textuelle : COMEDIE ITALIENNE.
COMEDIE ITALIENNE.
L
Es Comédiens Italiens ont donné le
25 , la dix-huitiéme repréſentation de
la Fête de l'Amour , toujours fuivie de la
Servante Maîtreſſe , & précédée fucceffivement
des Incas , & des Amans inquiers ,
parodies repriſes . Voici des vers adreffés
à Mme Favard , en attendant l'extrait de
fa piece , que le peu d'efpace qui me reſte
m'oblige encore à remettre au mois de
Mars.
L
Es Comédiens Italiens ont donné le
25 , la dix-huitiéme repréſentation de
la Fête de l'Amour , toujours fuivie de la
Servante Maîtreſſe , & précédée fucceffivement
des Incas , & des Amans inquiers ,
parodies repriſes . Voici des vers adreffés
à Mme Favard , en attendant l'extrait de
fa piece , que le peu d'efpace qui me reſte
m'oblige encore à remettre au mois de
Mars.
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275
p. 199-200
A Mme FAVARD.
Début :
Aimable Auteur, te falloit-il encore [...]
Mots clefs :
Actrice de l'opéra
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A Mme FAVARD.
A Mme FA VAR D.
AImable Auteur , te falloit- il encore
Ce titre , pour charmer & la Ville & la Cour
Iiv
200 MERCURE DE FRANCE .
On trouve en toi Thalie & Terpfico re ,
Sous un maintien deffiné par l'Amour.
De ton art , la douce impoſture
Offre à mon efprit abuſe
Des images d'après nature ,
De maint caractere oppofé.
Mon coeur fe livre à chaque perſonnage
Qu'à mes yeux tu fais admirer ,
Et tu fçais le rendre volage ,
Sans qu'il cefle de t'adorer .
>
Cette penſée n'eft pas abfolument nouvelle
, mais elle eftrajeunie par l'expreffion.
On avoit donné autrefois la même
louange à une célébre actrice de l'Opera ;
mais je doute qu'elle l'eut mieux mérités
que Mme Favard.
AImable Auteur , te falloit- il encore
Ce titre , pour charmer & la Ville & la Cour
Iiv
200 MERCURE DE FRANCE .
On trouve en toi Thalie & Terpfico re ,
Sous un maintien deffiné par l'Amour.
De ton art , la douce impoſture
Offre à mon efprit abuſe
Des images d'après nature ,
De maint caractere oppofé.
Mon coeur fe livre à chaque perſonnage
Qu'à mes yeux tu fais admirer ,
Et tu fçais le rendre volage ,
Sans qu'il cefle de t'adorer .
>
Cette penſée n'eft pas abfolument nouvelle
, mais elle eftrajeunie par l'expreffion.
On avoit donné autrefois la même
louange à une célébre actrice de l'Opera ;
mais je doute qu'elle l'eut mieux mérités
que Mme Favard.
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Résumé : A Mme FAVARD.
L'auteur adresse une lettre à Mme Favard, actrice, pour louer ses talents. Il admire sa capacité à incarner divers personnages et à captiver le public. Son art crée des 'images d'après nature' et des 'caractères opposés'. L'auteur reconnaît avoir déjà exprimé cette pensée à une autre actrice célèbre de l'Opéra, mais estime que Mme Favard mérite davantage cette louange.
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276
p. 159
OPERA.
Début :
L'Académie royale de musique continue Daphnis & Alcimadure les Vendredis [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
'Académie royale de mufique continue
& les Dimanches ; elle donne les Fragmens
les Mardis & les Jeudis , en attendant
la repriſe de Thefée , que l'indifpofition
de plufieurs acteurs a retardé .
'Académie royale de mufique continue
& les Dimanches ; elle donne les Fragmens
les Mardis & les Jeudis , en attendant
la repriſe de Thefée , que l'indifpofition
de plufieurs acteurs a retardé .
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277
p. 159-160
COMEDIE FRANÇOISE,
Début :
Les Comédiens François ont donné le 7 de ce mois le Tartuffe & les Folies [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français, Roi
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texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE,
COMEDIE FRANÇOISE.
L
Es Comédiens François ont donné le
de ce mois le Tartuffe & les Folies
amoureufes. Mme Novere , femme de M.
Novere , fi connu par le Ballet Chinois &
par celui de la Fontaine de Jouvence , a
débuté dans ces deux pièces , où elle joue
le rôle de la Soubrette. Le public lui a
fait un accueil favorable. Elle a repréſenté
fucceffivement Cléantis dans Démocrite ,
& Finettte dans le Philoſophe marié.
Le 8 , les mêmes Comédiens ont remis.
avec fuccès, Venceslas , tragédie de Rotrou..
160 MERCURE DE FRANCE.
Elle eft poftérieure au Cid , qui a été joué
en 1636. Venceflas n'a paru qu'en 1648 .
On voit par là que Rotrou , loin d'avoir
fervi de modele à Corneille , s'eft perfectionné
d'après lui . Cette piéce a de grandes
beautés. Le premier acte , le quatriéme
& le cinquiéme ne feroient pas indignes de
l'auteur de Cinna. Ladiflas eft un caractere
vraiment théatral ; il a ce mêlange de
vertus & de vices qui intéreffe fur la
fcene. Si ce Prince commet des crimes , le
feu de l'âge , & l'impétuofité d'une paffion
contredite , l'y forcent malgré lui ; le péril
même où ils le jettent , excitent en fa faveur
d'autant plus la pitié , qu'il ne tue fon
frere que par une méprife. Dans l'obfcurité
, il l'a pris pour Fédéric qu'il croyoit
fon rival. Venceflas qui lui pardonne
après l'avoir condamné , eft tout à la fois le
modele des peres & des monarques. Obligé
par fa juftice à punir Ladiflas , comme Roi
il prend l'héroïque parti de lui céder la
couronne , & de l'abfoudre alors comme
pere. Ce noble procédé forme un dénoument
d'autant plus heureux qu'il eft inattendu
, & qu'il eft en même tems dans la
nature. François de Roxas , auteur Efpagnol
, avoit traité , avant Rotrou , le même
fujet fous un titre moral qui l'annonce :
On ne peut être ✔ Roi.
L
Es Comédiens François ont donné le
de ce mois le Tartuffe & les Folies
amoureufes. Mme Novere , femme de M.
Novere , fi connu par le Ballet Chinois &
par celui de la Fontaine de Jouvence , a
débuté dans ces deux pièces , où elle joue
le rôle de la Soubrette. Le public lui a
fait un accueil favorable. Elle a repréſenté
fucceffivement Cléantis dans Démocrite ,
& Finettte dans le Philoſophe marié.
Le 8 , les mêmes Comédiens ont remis.
avec fuccès, Venceslas , tragédie de Rotrou..
160 MERCURE DE FRANCE.
Elle eft poftérieure au Cid , qui a été joué
en 1636. Venceflas n'a paru qu'en 1648 .
On voit par là que Rotrou , loin d'avoir
fervi de modele à Corneille , s'eft perfectionné
d'après lui . Cette piéce a de grandes
beautés. Le premier acte , le quatriéme
& le cinquiéme ne feroient pas indignes de
l'auteur de Cinna. Ladiflas eft un caractere
vraiment théatral ; il a ce mêlange de
vertus & de vices qui intéreffe fur la
fcene. Si ce Prince commet des crimes , le
feu de l'âge , & l'impétuofité d'une paffion
contredite , l'y forcent malgré lui ; le péril
même où ils le jettent , excitent en fa faveur
d'autant plus la pitié , qu'il ne tue fon
frere que par une méprife. Dans l'obfcurité
, il l'a pris pour Fédéric qu'il croyoit
fon rival. Venceflas qui lui pardonne
après l'avoir condamné , eft tout à la fois le
modele des peres & des monarques. Obligé
par fa juftice à punir Ladiflas , comme Roi
il prend l'héroïque parti de lui céder la
couronne , & de l'abfoudre alors comme
pere. Ce noble procédé forme un dénoument
d'autant plus heureux qu'il eft inattendu
, & qu'il eft en même tems dans la
nature. François de Roxas , auteur Efpagnol
, avoit traité , avant Rotrou , le même
fujet fous un titre moral qui l'annonce :
On ne peut être ✔ Roi.
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Résumé : COMEDIE FRANÇOISE,
En décembre, les Comédiens Français ont présenté plusieurs pièces. Le 20 décembre, ils ont joué 'Le Tartuffe' et 'Les Folies amoureuses', avec Mme Novere dans le rôle de la soubrette, puis dans 'Démocrite' et 'Le Philosophe marié'. Le 8 décembre, ils ont repris 'Venceslas', une tragédie de Jean de Rotrou écrite en 1648, après 'Le Cid' de Corneille. Rotrou s'est inspiré de Corneille pour perfectionner sa pièce. 'Venceslas' est acclamée pour ses qualités, notamment les actes premier, quatrième et cinquième, comparables à celles de 'Cinna' de Corneille. Ladislas, personnage théâtral, mêle vertus et vices, poussé par la passion et l'erreur à commettre des crimes. Venceslas incarne le modèle des pères et des monarques en pardonnant et en abdiquant en faveur de Ladislas. Le sujet de 'Venceslas' avait déjà été traité par l'auteur espagnol François de Roxas sous le titre 'On ne peut être Roi'.
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278
p. 161-162
COMÉDIE ITALIENNE.
Début :
Les Comédiens Italiens ont donné le 12, pour la premiere fois, le Caprice [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens
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texteReconnaissance textuelle : COMÉDIE ITALIENNE.
COMÉDIE ITALIENNE.
L
Es Comédiens Italiens ont donné le
&
12 , pour la premiere fois , le Caprice
amoureux , ou Ninette à la Cour , comédie
en trois actes en vers , mêlée d'ariettes ,
parodiée de Bertholde à la Cour . C'eſt une
foeur de la Servante maîtreffe , mais qui
n'eft pas du même pere : M. Favard en eft
l'auteur ; on y reconnoît fa maniere & fon
coloris. Le public l'a très-bien reçue ; elle
attire de fortes chambrées ; ce qui confirme
le fuccès , & le juftifie mieux , fur- tout
aux yeux des Comédiens , que les applaudiffemens
, qui ne font pas toujours fuivis
de l'affluence. Cette nouveauté eft termi- .
née par un bal , qui eft fans contredit le
meilleur de l'année . Cet agréable divertiffement
eft de M. Deheffe , qui poffede
l'art de Médée. Il rajeunit les fujets les
plus vieux , & place fi bien fes différens
danfeurs , qu'ils brillent tous fans fe nuire ,
& varient toujours le tableau fans le charger.
J'applaudis d'abord la précifion brillante
de Mlle Catinon dans fon pas avec
les deux Negres ; j'admire enfuite la force
du fieur Saudi en Scaramouche. La gaité
légere du jeune Baletti me tranfporte à fon
162 MERCURE DE FRANCE.
tour , & je fuis en même tems enchanté
des graces vives de Mlle Camille , qui dif
pute avec lui d'enjoument.
L
Es Comédiens Italiens ont donné le
&
12 , pour la premiere fois , le Caprice
amoureux , ou Ninette à la Cour , comédie
en trois actes en vers , mêlée d'ariettes ,
parodiée de Bertholde à la Cour . C'eſt une
foeur de la Servante maîtreffe , mais qui
n'eft pas du même pere : M. Favard en eft
l'auteur ; on y reconnoît fa maniere & fon
coloris. Le public l'a très-bien reçue ; elle
attire de fortes chambrées ; ce qui confirme
le fuccès , & le juftifie mieux , fur- tout
aux yeux des Comédiens , que les applaudiffemens
, qui ne font pas toujours fuivis
de l'affluence. Cette nouveauté eft termi- .
née par un bal , qui eft fans contredit le
meilleur de l'année . Cet agréable divertiffement
eft de M. Deheffe , qui poffede
l'art de Médée. Il rajeunit les fujets les
plus vieux , & place fi bien fes différens
danfeurs , qu'ils brillent tous fans fe nuire ,
& varient toujours le tableau fans le charger.
J'applaudis d'abord la précifion brillante
de Mlle Catinon dans fon pas avec
les deux Negres ; j'admire enfuite la force
du fieur Saudi en Scaramouche. La gaité
légere du jeune Baletti me tranfporte à fon
162 MERCURE DE FRANCE.
tour , & je fuis en même tems enchanté
des graces vives de Mlle Camille , qui dif
pute avec lui d'enjoument.
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Résumé : COMÉDIE ITALIENNE.
Le 12 du mois a eu lieu la première représentation de la comédie italienne 'Le Caprice amoureux, ou Ninette à la Cour'. Cette pièce, en trois actes et en vers, intègre des ariettes et parodie 'Bertholde à la Cour'. Elle s'inspire de 'La Servante maîtresse', mais les personnages principaux ne sont pas du même père. L'auteur, M. Favard, est identifiable par son style et son 'coloris'. La pièce a rencontré un grand succès auprès du public, attirant un nombre significatif de spectateurs. La soirée s'est conclue par un bal, considéré comme le meilleur de l'année, chorégraphié par M. Deheffe. Ce dernier est reconnu pour sa capacité à renouveler des sujets anciens et à coordonner les danseurs. Les performances des artistes, notamment Mlle Catinon, M. Saudi, le jeune Baletti et Mlle Camille, ont été saluées pour leur précision, leur force et leur enjouement.
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279
p. 162-163
OPERA COMIQUE.
Début :
L'Opéra comique a fait l'ouverture de son théatre le 1r. de Février, par la [...]
Mots clefs :
Opéra, Opéra comique
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : OPERA COMIQUE.
OPERA COMI QU E.
L'Opéra comique a fait l'ouverture de
fon théatre le 1. de Février , par la
premiere repréſentation des Troyennes de
Champagne.Il l'a continuée alternativement
avec la Nouvelle Baftienne , la Servante
juftifiée , Bertholde à la ville , &c. jufqu'au
18 , qu'il a donné Jerôme & Fanchonete ,
paftorale de la Grenouillere , parodiée de
l'opéra Languedocien , & précédée de la
Chercheufe d'efprit & du Suffifant . Ce ba
dinage a été univerfellement applaudi , &
mérite de l'être ; il a ramené fur ce théatre
la gaité folle qui lui convient. Il fait rire
aux éclats ; il eft vrai qu'il eft très- bien
rendu par les acteurs , & fur-tout par
Mlle Rofaline , qui a faifi parfaitement
toutes les graces du genre. Il y avoit longtems
que nous n'avions ri de bonne foi
à aucun fpectacle. C'eſt un plaifir fi doux ,
& qu'on goûte aujourd'hui fi rarement
dans la capitale , qu'on doit franchement
s'y livrer , fans examiner s'il eft dans les
ségles de la décence , & remercier plutôt
MARS. 1755 163
Factrice & l'auteur qui nous le procurent.
M. Monet ne doit pas être oublié ; c'eſt à
fon zéle actif que ce fpectacle doit tout
fon éclat & fes fuccès. Je ne doute pas que
Jerôme & Fanchonette n'y attirent la foule
jufqu'à la clôture . Le baler des Matelots
dont cette parodie eft fuivic , eft de M.
Novere , & finit par une contredanſe qui
renvoye tous les fpectateurs contens.
Je reçois dans ce moment un exemplaire
de la pièce , qui fe vend chez Duchefne ,
Libraire , rue S. Jacques , au - deffous de la
fontaine S. Benoît , au Temple du goût : le
prix eft de 24 f. avec la Mufique : nous en
donnerons l'extrait le mois prochain. Elle
eſt de M. Vadé ; nous lui avons l'obligation
de nous avoir donné une Paftorale qui
n'eſt point une moutonnade. On ne lui reprochera
point la fadeur , ni la vanité de
vouloir être un émule férieux du grand
Opéra. Il a pris le ton convenable au théâ
tre pour lequel il travaille ; une charge
plaifante y eft toujours préférable à une
prévention ridicule , fans être rifible.
L'Opéra comique a fait l'ouverture de
fon théatre le 1. de Février , par la
premiere repréſentation des Troyennes de
Champagne.Il l'a continuée alternativement
avec la Nouvelle Baftienne , la Servante
juftifiée , Bertholde à la ville , &c. jufqu'au
18 , qu'il a donné Jerôme & Fanchonete ,
paftorale de la Grenouillere , parodiée de
l'opéra Languedocien , & précédée de la
Chercheufe d'efprit & du Suffifant . Ce ba
dinage a été univerfellement applaudi , &
mérite de l'être ; il a ramené fur ce théatre
la gaité folle qui lui convient. Il fait rire
aux éclats ; il eft vrai qu'il eft très- bien
rendu par les acteurs , & fur-tout par
Mlle Rofaline , qui a faifi parfaitement
toutes les graces du genre. Il y avoit longtems
que nous n'avions ri de bonne foi
à aucun fpectacle. C'eſt un plaifir fi doux ,
& qu'on goûte aujourd'hui fi rarement
dans la capitale , qu'on doit franchement
s'y livrer , fans examiner s'il eft dans les
ségles de la décence , & remercier plutôt
MARS. 1755 163
Factrice & l'auteur qui nous le procurent.
M. Monet ne doit pas être oublié ; c'eſt à
fon zéle actif que ce fpectacle doit tout
fon éclat & fes fuccès. Je ne doute pas que
Jerôme & Fanchonette n'y attirent la foule
jufqu'à la clôture . Le baler des Matelots
dont cette parodie eft fuivic , eft de M.
Novere , & finit par une contredanſe qui
renvoye tous les fpectateurs contens.
Je reçois dans ce moment un exemplaire
de la pièce , qui fe vend chez Duchefne ,
Libraire , rue S. Jacques , au - deffous de la
fontaine S. Benoît , au Temple du goût : le
prix eft de 24 f. avec la Mufique : nous en
donnerons l'extrait le mois prochain. Elle
eſt de M. Vadé ; nous lui avons l'obligation
de nous avoir donné une Paftorale qui
n'eſt point une moutonnade. On ne lui reprochera
point la fadeur , ni la vanité de
vouloir être un émule férieux du grand
Opéra. Il a pris le ton convenable au théâ
tre pour lequel il travaille ; une charge
plaifante y eft toujours préférable à une
prévention ridicule , fans être rifible.
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Résumé : OPERA COMIQUE.
L'Opéra comique a ouvert sa saison le 1er février 1755 avec 'Les Troyennes de Champagne'. Les représentations suivantes ont inclus 'La Nouvelle Baftienne', 'La Servante justifiée' et 'Bertholde à la ville'. Le 18 février, la pastorale parodiée 'Jérôme et Fanchonette', inspirée de l'opéra 'Languedocien', a été jouée après 'La Chercheuse d'esprit' et 'Le Suffisant'. Cette représentation a été acclamée pour son humour et sa gaieté, ramenant la joie au théâtre après une longue période sans rire sincère. Les acteurs, notamment Mlle Rosaline, ont été particulièrement applaudis. Le ballet des Matelots, chorégraphié par M. Novere, a clôturé la soirée avec une contredanse. La pièce, écrite par M. Vadé, est disponible chez le libraire Duchefne, rue Saint-Jacques, au prix de 24 sous avec la musique. Vadé a été remercié pour avoir évité la fadeur et la prétention dans sa pastorale divertissante.
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280
p. 164
CONCERT SPIRITUEL.
Début :
Le Dimanche 2 Février, jour de la Purification, le Concert commença par [...]
Mots clefs :
Concert, Roi
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : CONCERT SPIRITUEL.
CONCERT SPIRITUEL.
E Dimanche 2 Février , jour de la Purification
, le Concert commença par
une fymphonie nouvelle ; enfuite Landa
Jerufalem , Pf. 147. de M. Philidor , motet
à grand choeur , qui a été exécuté à la
Chapelle du Roi. M. Richer , Page de la
mufique du Roi , chanta un petit moter.
M. Matthieu , ordinaire de la Chapelle &
de la Chambre du Roi , joua un concerto
de fa compofition. M. Albaneze chanta un
air Italien. Le Concert finit par Dominus
regnavit, motet à grand choeur de M. Mondonville
, Maître de mufique de la Chapelle
du Roi
E Dimanche 2 Février , jour de la Purification
, le Concert commença par
une fymphonie nouvelle ; enfuite Landa
Jerufalem , Pf. 147. de M. Philidor , motet
à grand choeur , qui a été exécuté à la
Chapelle du Roi. M. Richer , Page de la
mufique du Roi , chanta un petit moter.
M. Matthieu , ordinaire de la Chapelle &
de la Chambre du Roi , joua un concerto
de fa compofition. M. Albaneze chanta un
air Italien. Le Concert finit par Dominus
regnavit, motet à grand choeur de M. Mondonville
, Maître de mufique de la Chapelle
du Roi
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Résumé : CONCERT SPIRITUEL.
Le 2 février, un concert spirituel a eu lieu. Il a commencé par une symphonie nouvelle et l'exécution de 'Jerusalem, Ps. 147' de Philidor. Richer a chanté un petit motet, Matthieu a joué un concerto, et Albaneze a interprété un air italien. Le concert s'est terminé par 'Dominus regnavit' de Mondonville.
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281
p. 177
OPERA.
Début :
L'Académie royale de musique a fermé son théatre le 15 Mars par Castor & [...]
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
114
'Académie royale de mufique a fermé
L for theatre le 15 Mars par Caftor &
Pollux , Tragédie qu'elle a donnée trois
fois pour les acteurs. Elle avoit repréſenté
la veille Thefée qu'elle continuera après
Pâques.
114
'Académie royale de mufique a fermé
L for theatre le 15 Mars par Caftor &
Pollux , Tragédie qu'elle a donnée trois
fois pour les acteurs. Elle avoit repréſenté
la veille Thefée qu'elle continuera après
Pâques.
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282
p. 177-178
COMEDIE FRANÇOISE.
Début :
Le premier Mars les Comédiens François ont donné la premiere représentation [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE.
COMEDIE FRANÇOISE.
E premier Mars les Comédiens Fran
çois ont donné la premiere repréfentation
de Philoctete , tragédie de M. de
Châteaubrun , auteur des Troyennes . On
n'a point vû depuis long- tems de piéce
mieux jouée , ni de fuccès plus unanime
& mieux mérité ; il eft d'autant plus glorieux
pour l'auteur , qu'on peut appeller
fa tragédie la difficulté vaincue. Pour nous
intéreffer avec un fujet fi fimple & fi
étranger à nos moeurs , il falloit créer ; c'é-
Hy
•
178 MERCURE DE FRANCE.
toit le comble de l'art ; M. de Châteaubrun
y eft parvenu fans s'écarter de Sophacle.
Son triomphe eft celui des anciens ;
en les embellifant il ne les a point déguifés
, il les a rendus dans cette beauté
fimple qui les caractériſe , & qui ne perd
jamais fes droits fur les coeurs : elle eft intéreffante
dans tous les tems , & même
dans les lieux où la mode a le plus d'autorité
Philoctete en eft la preuve ; dès
qu'il a paru , il a réuni tous les fuffrages.
Ce qu'il y a de plus eftimable dans
M. de Châteaubrun , les maximes qu'il
met dans la bouche de fes héros font toujours
dictées par la vertu , & les fentimens
qui regnent dans fa piéce font puifés dans
l'humanité , dont on peut dire fans flaterie
qu'il eft le poëte.
Le 15 , les Comédiens ont fermé leur
fpectacle par la feptiéme repréſentation de
cette tragédie , avec un grand concours ;
nous en parlerons plus au long à fa reprife
. Nous ofons avancer , d'après le fentiment
général , qu'elle est faite pour ouvrir
non feulement le théatre avec gloire ,
mais pour y refter avec diftinction .
M. de Bellecourt a fait le compliment
au gré du public.
E premier Mars les Comédiens Fran
çois ont donné la premiere repréfentation
de Philoctete , tragédie de M. de
Châteaubrun , auteur des Troyennes . On
n'a point vû depuis long- tems de piéce
mieux jouée , ni de fuccès plus unanime
& mieux mérité ; il eft d'autant plus glorieux
pour l'auteur , qu'on peut appeller
fa tragédie la difficulté vaincue. Pour nous
intéreffer avec un fujet fi fimple & fi
étranger à nos moeurs , il falloit créer ; c'é-
Hy
•
178 MERCURE DE FRANCE.
toit le comble de l'art ; M. de Châteaubrun
y eft parvenu fans s'écarter de Sophacle.
Son triomphe eft celui des anciens ;
en les embellifant il ne les a point déguifés
, il les a rendus dans cette beauté
fimple qui les caractériſe , & qui ne perd
jamais fes droits fur les coeurs : elle eft intéreffante
dans tous les tems , & même
dans les lieux où la mode a le plus d'autorité
Philoctete en eft la preuve ; dès
qu'il a paru , il a réuni tous les fuffrages.
Ce qu'il y a de plus eftimable dans
M. de Châteaubrun , les maximes qu'il
met dans la bouche de fes héros font toujours
dictées par la vertu , & les fentimens
qui regnent dans fa piéce font puifés dans
l'humanité , dont on peut dire fans flaterie
qu'il eft le poëte.
Le 15 , les Comédiens ont fermé leur
fpectacle par la feptiéme repréſentation de
cette tragédie , avec un grand concours ;
nous en parlerons plus au long à fa reprife
. Nous ofons avancer , d'après le fentiment
général , qu'elle est faite pour ouvrir
non feulement le théatre avec gloire ,
mais pour y refter avec diftinction .
M. de Bellecourt a fait le compliment
au gré du public.
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Résumé : COMEDIE FRANÇOISE.
Le 1er mars, les Comédiens Français ont présenté la tragédie 'Philoctète' de M. de Châteaubrun, auteur des 'Troyennes'. La pièce a été acclamée pour sa qualité de jeu et son succès unanime, malgré la difficulté du sujet. 'Philoctète' traite d'un thème simple et étranger aux mœurs contemporaines, nécessitant une création artistique exceptionnelle. M. de Châteaubrun a su embellir les anciens sans les dénaturer, conservant leur beauté simple et intemporelle. La pièce a immédiatement remporté l'adhésion du public. Les maximes et sentiments exprimés par les héros sont dictés par la vertu et l'humanité, faisant de M. de Châteaubrun un poète remarquable. Le 15 mars, la tragédie a été jouée pour la septième fois avec un grand succès et est considérée comme digne d'ouvrir et de rester au répertoire. M. de Bellecourt a reçu les compliments du public pour sa performance.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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283
p. 179
COMÉDIE ITALIENNE.
Début :
Les Comédiens Italiens ont joué le 6 Camille, Esprit follet, comédie Italienne [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMÉDIE ITALIENNE.
COMÉDIE ITALIEN NE.
Es Comédiens Italiens ont joué le 6
Camille,Espritfollet , comédie Italienne
en quatre aches , remife , avec deux
divertiffemens. Mlle Coraline y a beaubrillé
dans fon début. Mlle Camille
fa foeur , remplit aujourd'hui fon rôle avec
une égale réuffite : cette piece eft une heureufe
fucceffion dans la famille.
coup
Le 15 , les mêmes Comédiens ont donné
pour la clôture de leur théatre , la
quatorziéme repréfentation de Ninette à la
Cour, qu'on a vue avec plaifir & en nombreufe
compagnie. Mme Favart & Arlequin
ont fait le compliment de la clôture
en dialogue & en plaifanterie : le public
s'y eft prêté avec bonté , & l'a applaudi .
Voici l'extrait de Ninette à la Cour , qui
fe vend chez la veuve Delormel , rue du
Foin ; & Prault fils , quai de Conti . Prix
trente fols . Cette édition eft ornée d'une
eftampe , qui repréfente Mme Favart en
villageoife . Elle mérite bien cette diftinction
, par la maniere charmante dont elle
rend fon rôle
Es Comédiens Italiens ont joué le 6
Camille,Espritfollet , comédie Italienne
en quatre aches , remife , avec deux
divertiffemens. Mlle Coraline y a beaubrillé
dans fon début. Mlle Camille
fa foeur , remplit aujourd'hui fon rôle avec
une égale réuffite : cette piece eft une heureufe
fucceffion dans la famille.
coup
Le 15 , les mêmes Comédiens ont donné
pour la clôture de leur théatre , la
quatorziéme repréfentation de Ninette à la
Cour, qu'on a vue avec plaifir & en nombreufe
compagnie. Mme Favart & Arlequin
ont fait le compliment de la clôture
en dialogue & en plaifanterie : le public
s'y eft prêté avec bonté , & l'a applaudi .
Voici l'extrait de Ninette à la Cour , qui
fe vend chez la veuve Delormel , rue du
Foin ; & Prault fils , quai de Conti . Prix
trente fols . Cette édition eft ornée d'une
eftampe , qui repréfente Mme Favart en
villageoife . Elle mérite bien cette diftinction
, par la maniere charmante dont elle
rend fon rôle
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Résumé : COMÉDIE ITALIENNE.
Le 6, les comédiens italiens ont joué 'Camille, Esprit follet'. Mlle Coraline et Mlle Camille ont brillé. Le 15, ils ont donné la quatorzième représentation de 'Ninette à la Cour'. Mme Favart et Arlequin ont clôturé la représentation. Un extrait de la pièce est en vente chez la veuve Delormel et Prault fils.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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284
p. 180-193
EXTRAIT du Caprice amoureux, ou Ninette à la Cour.
Début :
Le théatre représente au premier acte une campagne agréable, coupée d'arbres [...]
Mots clefs :
Prince, Princesse, Coeur, Théâtre, Cour, Amour, Nature, Plaisir
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT du Caprice amoureux, ou Ninette à la Cour.
EXTRAIT du Caprice amoureux ,
Ninette àla Cour.
on
. Le théatre repréfente au premier acte
une campagne agréable , coupée d'arbres
fruitiers , avec des cabannes de païfans
fur les aîles. On les voit travailler à différens
ouvrages.
Ninette , en filant au rouer , ouvre la
premiere fcene avec Colas , & débute par
cette ariette .
Travaillons de bon courage ;
· La fraîcheur
De cet ombrage,.
La douceur
De ce ramage
Nous donne coeur
A l'ouvrage.
Près de l'objet, qui m'attendrit ,,
Je file à merveille ;
Quand la fatigue m'afſoupit ,.
L'amour me réveille.
Elle prie en même tems Colas d'aller
cueillir du fruit pour elle : il monte fur
un arbre , & voit la plaine couverte de
chiens & de piqueurs ; il defcend alors.
tour allarmé , & dit à Ninette :
Rentrez , rentsez morgué ces malins drilles ,,
AVRIL 1755. 181
Comme au gibier fefont la guerre aux filles.
Aftolphe , Roi de Lombardie , paroît
avec Fabrice , fon confident , & lui fait
l'aveu de fa paffion pour Ninette , par cette
jolie ariette ::
Oui , je l'aime pour jamais ;
Rien n'égale fes attraits.
De fon teint , la fleur naïve ,
Toujours fraîche , toujours vive ,
Confond les efforts de l'art.
C'eft la nature
Simple & pure ,
Elle enchante d'un regard.
Dans fon coeur eft l'innocence ';;
Dans les yeux eft la candeur ;
Sa parure eft la décence ,,
Et fon fard eft la pudeur.
Fabrice:fort , & Ninette revient em
chantant. Aftolphe lui témoigne fa furprife
de la voir fi contente dans un état fi
borné , & lui offre une fortune éclatante ,
en lui déclarant qu'il l'adore. Ninette qui
le prend pour un Officier de fa Cour , lui
répond naïvement que cette déclaration lui
fait grand plaifir gardez , lui dit-elle
Gardez tous vos tréfors ;je ne veux qu'une grace ;
• Vous fçavez que lpn chaffe
182 MERCURE DE FRANCE.
Tous les jours en ces lieux , du matin juſqu'au
foir.
Si vous avez quelque pouvoir ,
Parlez au Prince , afin que l'on nous débarraffe
De tout le train font fes gens.
que
Je ne comprens point quelle fievre
Peut faire ainfi courir les champs ;
Pour le plaifir de prendre un lievre
On ravage quarante arpens.
1 Elle le prie en conféquence de ne plus
revenir , en lui avouant franchement qu ' elle
aime Colas . Le Prince lui dit de mieux
placer fon ardeur , ajoutant qu'un fort
brillant l'attend à la Cour , & que les
charmes d'une toilette la rendront encore
plus belle. Qu'est- ce qu'une toilette , lui
demande Ninette ? Il lui en fait cette ingénieufe
defcription,
C'est un trône où triomphe Part :;
C'eft un autel que l'on érige aux graces;
C'est là qu'on peut , des tems rapprocher les ef
paces
Par l'heureux preftige d'un fard ,
Qui des ans applanit les traces.
Des couleurs du plaifir on ranime fon teint ;
Et le pinceau , rival de la nature ,
Par une agréable impofture , vrsti so'nd
Fait éclore la fleur d'un vilage enfantin.
AVRIL
$755. 183
Chaque jour on eft auf belle ;
D'un air plus triomphant la jeuneffe y fourit ,
La beauté même s'embellit
Se fixe , & devient immortelle .
Un tableau fi flateur pique la vanité curieufe
de Ninette ; mais elle craint de fâcher
Colas : il furvient dans cette irréfolution
, & fait éclater fa jalousie. Elle
l'avertit tout bas de la cacher , de
peur
d'irriter Aftolphe . Le Prince qui s'en apperçoit
, la raffure , en lui difant :
Si Colas vous eft cher , je deviens fon ami
Colas lui réplique : >
On n'eft guere ami du mari
Quand on yeut l'être de la femme.
Le Prince fort après avoir dit à Ni
-nette :
L'heureux Colas vous intéreſſe.
Paiffe-t-il mieux que moi faire votre bonheur !
Ninette reproche à Colas fa groffiereté ,
vis-à-vis d'un Seigneur fi poli , qui la veut
mener à la Cour : il lui répond qu'Aftolphe
lui parloit d'amour , & que cela ne
convient pas. Elle lui répart avec une ingénuité
rare aujourd'hui , même dans une
jeune païfanne.
184 MERCURE DE FRANCE .
Les Meffieurs de la Cour font trop bien élevés
Pour entreprendre rien contre la bienféance.
Colas qui apperçoit dans ce moment le
Prince qui revient , & qui la regarde de
loin , veut obliger Ninette à rentrer malgré
elle : elle refifte ; il la tire par le bras :
elle crie - alors , & chante avec toutes les
graces d'une jolie enfant qui pleure , cette
ariette fi , heureufement parodiée de Ber--
tholde à la Cour.
Ahi ahi ! il me fait grand mal ;:
Le brutal le brutal !
COLAS
Oui , je vous ai fait grand mal.
NINETTE.
Le Seigneur viant_ici ,
Ahi ! ahi ! puifqu'on me traite ainfi
Je vais me plaindre de ce pas..
COLAS.
Ninon..
NINETTENon
, non.
COLAS.
1
Morgué , quel embarras !
Ninon ,
A V.R IL
1.851 1755
Jte d'mande pardon. ,
NINETTE.
८
Non , non Y
Point de pardon.
Ahi ahi ! il m'a fait grand mal.
ASTOLPHE s'approchant , à Ninette.
Qu'avez -vous ?
NINETTE .
): Le brutal !
Ah ! qu'il m'a fait grand mal !
Ahi ! Ahi
NINETTE.
Ah ! j'ai bien du guignon . I'
ASTOLPH E.
O Dieux ! qu'avez-vous donc
NINETTE, ! |
Monfeigneur , c'eff Colas
Qui m'a , m'a , m'a demis le bras .
Hélas ! hélas !
à Colas.
Tu t'en repentiras.
Hélas ! hélas !
Oui , tu me le paîras.
KIM » Alii? ahiuvabi, le brash 10 4 alo
186 MERCURE DE FRANCE.
Aftolphe témoigne fa furprife en s'écriant
:
Eft-ce là ce tendre Colas ?
Colas veut s'emporter ; mais Fabrice lui
apprend qu'Aftolphe eft le Prince . Ninette
& Colas font furpris à leur tour . Le Prince
preffe Ninette de venir embellir fa Cour.
Elle y confent , en difant tout bas qu'elle
veut punir Colas fans lui manquer de foi .
Elle le quitte en lui adreffant cette Ariette
boufonne , qui commence par ces vers
Colas , je renonce au village ;
La cour me convient davantage.
& qui finit ainfi : JA
Quelque jour tu viendras
Tu verras. (bis.).
Sans ceffe
La preffe
Arrêtera tes pas ;
Et de loin , tu diras ,
Ah, Princeffe , Princeffe !
En t'inclinant bien bas
Protegez Colas ,
Ne l'oubliez pas.
Adieu , pauvre Colas,
1.
Colas fe defefpere , & veut fuivre NiAVRIL.
1755. 187
nette , mais il eft arrêté par une troupe de
chaffeurs . Ils le forcent à s'éloigner , &
forment une danfe qui termine le premier
acte. Il eſt brillant par le jeu & par le choix
des ariettes qui font parfaitement rendues
par Mme Favart & M. Rochart .
Le théatre change au fecond acte , & repréfente
un appartement du palais d'Aftolphe.
Ninette paroît en habit de Cour ; elle
eft fuivie de plufieurs femmes de chambre ,
qui portent chacune différentes parures ;
fan pannier l'embarraffe , & lui donne un
air gauche. Elle refufe le rouge dont on
veur l'embellir , & laiffe tomber les diamans
qu'on lui préfente, pour prendre des
fleurs artificielles , qu'elle jette un inſtant
après , en difant :
Elles ne fentent rien
Içi l'on ne doit rien qu'à l'arts
La beauté n'eft qu'une peinture ,
Jufqu'aux fleurs tout eſt impoſture.
Fabrice veut lui donner des leçons de
politeffe , mais elle le rebute , & prie le
Prince qui entre , de la débarrafler de cet
homme qui l'ennuie , ajoûtant qu'elle aimeroit
mieux voir Colas. Aftolphe lui répond
:
188 MERCURE DE FRANCE.
#
Vous allez voir Colas ; j'efpere qu'en ce jour
Vous mettrez entre nous un peu de différence ;
Je ne veux qu'à force d'amour
Lui difputer la préférence.
Il donne enfuite des ordres pour qu'on
montre à Ninette toute la magnificence
de fa Cour ; & voyant paroître la Princeffe
il fort pour l'éviter . Emilie ( c'eft le nom
de la Princeffe qui lui eft deftinée , ) tế-
moigne fes craintes à Clarice , fa confidente
, & la charge d'examiner les pas du Prince
& de Ninette. Elle exprime enfuite fes
fentimens par une ariette.
Viens , efpoir enchanteur ,
Viens confoler mon coeur , &c.
Voyant revenir Aftolphe avec fa petite
payfane , elle s'éloigne pour les obferver.
Le Prince demande à Ninette ce qu'elle
penfe de la Cour ; Ninette lui répond avec
une franchiſe fpirituelle.
J'ai vu de toute part de beaux petits objets
A talons rouges , en plumets ;
Ne font-ce pas des femmes en épées ?
J'ai vu trotter auffi de gentilles poupées ,
Qui portent des petits colets...
Ah ! que de plaifans perfonnages ,
AVRIL. 1755. 189
Crainte de déranger l'ordre de leurs vifages ,
Ils parlent tous comme des flageolets.
Tu , tu , tu tu. Dans nos villages -
2
Nous n'avons jamais vu de tels colifichets ,
Et puis j'ai vu de graves fréluquets ,
Qui prenoient un air d'importance.
Et de jolis vieillards coquets ,
Qui fembloient marcher en cadence ;
L'un d'eux , pour me voir de plus près ,
Jufques fous mon menton s'approche ,
En tirant un oeil de fa poche ;
C'eft un bijou , c'eft un Ange. Eh ! mais , mais..
Emilie s'avance , & fait un compliment
ironique à Ninette fur fes charmes , & la
félicite d'avoir fait la conquête d'Aſtolphe ,
qui s'en défend devant la Princeffe. Ninet
te répond qu'elle aime Colas . Le Prince
pour appuyer ce difcours , dit qu'il a donné
des ordres pour le faire venir. Ninette
réplique qu'elle aime mieux retourner au
village , & fort en chantant
ARI ETT E.
Dans nos prairies
Toujours fleuries ,
On voit fourire
Un doux zéphire , &c.
190 MERCURE DE FRANCE .
Le Prince raffare Emilie , & lui promet
de renvoyer Ninette ; mais dès qu'il eft
feul il peint fon irréfolution par une ariette.
Lé Nocher , loin du rivage
Lutte en vain contre l'orage , &c.
& fe retire fans fçavoir ce qu'il doit fai-
're.
Colas entre paré à peu - près comme Taler
dans Démocrite , & fe plaint comme
lui de la réception ridicule qu'on lui a
faite à la Cour . Ninette qui furvient , &
qui apperçoit Colas , baiffe fa coëffe , ſe
couvre le vifage de fon éventail , & contrefait
fa voix en grafféyant , pour éprou
ver Colas , & n'en être point reconnue .
Cette fcene a beſoin du jeu des acteurs
pour être fentie. Ninette en jouant les
vapeurs , déclare à Colas qu'elle eft épriſe
de fes charmes , & lui propofe de répondre
à fon ardeur , en l'affûrant que fa fortune
fera faite. Colas' qui la prend pour
une Dame de la Cour , répond qu'il y confent
, en difant tout bas :
Je ne veux qu'alarmer Ninette ,
Et le dépit me la ramenera.
Ninette alors fe dévoile , & fait éclater
fa colere contre Colas ; il a beau vouAVRIL
1755. 191
loir fe juſtifier , elle ne veut plus l'entendte.
Ce qui occafionne un duo dialogué
à l'Italienne , dont le contrafte toujours
foutenu , finit vivement le fecond acte.
20 Ninette ouvre feule le troifieme dans
le même appartement , où l'on voit des
lumieres fur une table. Elle fait entendre
dans une ariette qu'elle tirera bien-
-tôt vengeance d'un ingrat qui l'a trahie.
Fabrice vient l'avertir que le Prince doir
arriver dans un moment ; elle lui demande
fi Colas eft prévenu qu'elle doit parler
au Prince tête à tête ; Fabrice lui répond
qu'oui , & qu'il fait de gros foupirs . Emilie
entre , & paroit furpriſe de retrouver
encore Ninette , qui lui protefte qu'elle
eft à la Cour contre fon gré , & lui avoue
en riant qu'Aftolphe lui a demandé un
rendez - vous , qu'elle s'y trouvera , par la
raifon qu'une fille de bien ne craint rien.
Cette maxime n'eft pas toujours fure.
Comme on entend du bruit , Ninette en-
-gage la Princeffe à s'éloigner avec elle ,
ajoutant qu'elle a fur ce point un fecret
? à lui dire.
Colas arrive , guidé par fa jaloufie , & fe
cache fous la table pour entendre , › fans
cêtre vu l'entretien nocturne du Prince
avec Ninette , qui revient & qui éteint
les bougies en voyant entrer Aftolphe. Le
192 MERCURE DE FRANCE.
Prince lui en demande la raifon , & mon
tre une pudeur qu'elle paroît oublier. Elle
répond que fon coeur eft bien gardé la nuit
comme le jour , & le prie de lui apprendre
ce qu'il fouhaite d'elle. Il replique que fes
foupirs lui expliquent fes voeux : elle lui
repart qu'elle veut faire fon bonheur , &
qu'il attende un moment. Elle va chercher
la Princeffe ; & la met à fa place : le Prince
dit à Emilie , qu'il prend pour Ninette ,
J'ai defiré long-tems un coeur fans impofture ,
Un coeur fimple , ingenu , formé par la nature.
)
Ninette , en apportant des lumieres , répond
au Prince qu'il a trouvé ce thréfor
dans Emilie qui eft devant lui. Aftolphe ,
honteux de fon inconftance , rend fon
coeur à la Princeffe , qui lui pardonne. Colas
forti de deffous la table , paffe des plus
vives alarmes à la plus grande joie. Af-
-tolphe s'unit à la Princeffe , & Colas à Ninette.
Un bal dont nous avons rendu compte
, couronne agréablement ce troifieme
acte , dont le dénouement a paru moins
heureux que le refte de la piece : on peut
dire qu'elle eft pleine d'ingénieux détails ,
& qu'elle forme un recueil choisi d'ariettes
: italiennes en jolis vers françois.
Sila Servante Maîtrefle a fait des amans
paffionnés ,
AVRIL. 17558 193
paffionnés , Ninette à la Cour a trouvé
de zélés partifans ; chacune a fon mérite
particulier ; l'aînée eft peut - être mieux
faite , & la cadette eft plus fpirituelle.
Ninette àla Cour.
on
. Le théatre repréfente au premier acte
une campagne agréable , coupée d'arbres
fruitiers , avec des cabannes de païfans
fur les aîles. On les voit travailler à différens
ouvrages.
Ninette , en filant au rouer , ouvre la
premiere fcene avec Colas , & débute par
cette ariette .
Travaillons de bon courage ;
· La fraîcheur
De cet ombrage,.
La douceur
De ce ramage
Nous donne coeur
A l'ouvrage.
Près de l'objet, qui m'attendrit ,,
Je file à merveille ;
Quand la fatigue m'afſoupit ,.
L'amour me réveille.
Elle prie en même tems Colas d'aller
cueillir du fruit pour elle : il monte fur
un arbre , & voit la plaine couverte de
chiens & de piqueurs ; il defcend alors.
tour allarmé , & dit à Ninette :
Rentrez , rentsez morgué ces malins drilles ,,
AVRIL 1755. 181
Comme au gibier fefont la guerre aux filles.
Aftolphe , Roi de Lombardie , paroît
avec Fabrice , fon confident , & lui fait
l'aveu de fa paffion pour Ninette , par cette
jolie ariette ::
Oui , je l'aime pour jamais ;
Rien n'égale fes attraits.
De fon teint , la fleur naïve ,
Toujours fraîche , toujours vive ,
Confond les efforts de l'art.
C'eft la nature
Simple & pure ,
Elle enchante d'un regard.
Dans fon coeur eft l'innocence ';;
Dans les yeux eft la candeur ;
Sa parure eft la décence ,,
Et fon fard eft la pudeur.
Fabrice:fort , & Ninette revient em
chantant. Aftolphe lui témoigne fa furprife
de la voir fi contente dans un état fi
borné , & lui offre une fortune éclatante ,
en lui déclarant qu'il l'adore. Ninette qui
le prend pour un Officier de fa Cour , lui
répond naïvement que cette déclaration lui
fait grand plaifir gardez , lui dit-elle
Gardez tous vos tréfors ;je ne veux qu'une grace ;
• Vous fçavez que lpn chaffe
182 MERCURE DE FRANCE.
Tous les jours en ces lieux , du matin juſqu'au
foir.
Si vous avez quelque pouvoir ,
Parlez au Prince , afin que l'on nous débarraffe
De tout le train font fes gens.
que
Je ne comprens point quelle fievre
Peut faire ainfi courir les champs ;
Pour le plaifir de prendre un lievre
On ravage quarante arpens.
1 Elle le prie en conféquence de ne plus
revenir , en lui avouant franchement qu ' elle
aime Colas . Le Prince lui dit de mieux
placer fon ardeur , ajoutant qu'un fort
brillant l'attend à la Cour , & que les
charmes d'une toilette la rendront encore
plus belle. Qu'est- ce qu'une toilette , lui
demande Ninette ? Il lui en fait cette ingénieufe
defcription,
C'est un trône où triomphe Part :;
C'eft un autel que l'on érige aux graces;
C'est là qu'on peut , des tems rapprocher les ef
paces
Par l'heureux preftige d'un fard ,
Qui des ans applanit les traces.
Des couleurs du plaifir on ranime fon teint ;
Et le pinceau , rival de la nature ,
Par une agréable impofture , vrsti so'nd
Fait éclore la fleur d'un vilage enfantin.
AVRIL
$755. 183
Chaque jour on eft auf belle ;
D'un air plus triomphant la jeuneffe y fourit ,
La beauté même s'embellit
Se fixe , & devient immortelle .
Un tableau fi flateur pique la vanité curieufe
de Ninette ; mais elle craint de fâcher
Colas : il furvient dans cette irréfolution
, & fait éclater fa jalousie. Elle
l'avertit tout bas de la cacher , de
peur
d'irriter Aftolphe . Le Prince qui s'en apperçoit
, la raffure , en lui difant :
Si Colas vous eft cher , je deviens fon ami
Colas lui réplique : >
On n'eft guere ami du mari
Quand on yeut l'être de la femme.
Le Prince fort après avoir dit à Ni
-nette :
L'heureux Colas vous intéreſſe.
Paiffe-t-il mieux que moi faire votre bonheur !
Ninette reproche à Colas fa groffiereté ,
vis-à-vis d'un Seigneur fi poli , qui la veut
mener à la Cour : il lui répond qu'Aftolphe
lui parloit d'amour , & que cela ne
convient pas. Elle lui répart avec une ingénuité
rare aujourd'hui , même dans une
jeune païfanne.
184 MERCURE DE FRANCE .
Les Meffieurs de la Cour font trop bien élevés
Pour entreprendre rien contre la bienféance.
Colas qui apperçoit dans ce moment le
Prince qui revient , & qui la regarde de
loin , veut obliger Ninette à rentrer malgré
elle : elle refifte ; il la tire par le bras :
elle crie - alors , & chante avec toutes les
graces d'une jolie enfant qui pleure , cette
ariette fi , heureufement parodiée de Ber--
tholde à la Cour.
Ahi ahi ! il me fait grand mal ;:
Le brutal le brutal !
COLAS
Oui , je vous ai fait grand mal.
NINETTE.
Le Seigneur viant_ici ,
Ahi ! ahi ! puifqu'on me traite ainfi
Je vais me plaindre de ce pas..
COLAS.
Ninon..
NINETTENon
, non.
COLAS.
1
Morgué , quel embarras !
Ninon ,
A V.R IL
1.851 1755
Jte d'mande pardon. ,
NINETTE.
८
Non , non Y
Point de pardon.
Ahi ahi ! il m'a fait grand mal.
ASTOLPHE s'approchant , à Ninette.
Qu'avez -vous ?
NINETTE .
): Le brutal !
Ah ! qu'il m'a fait grand mal !
Ahi ! Ahi
NINETTE.
Ah ! j'ai bien du guignon . I'
ASTOLPH E.
O Dieux ! qu'avez-vous donc
NINETTE, ! |
Monfeigneur , c'eff Colas
Qui m'a , m'a , m'a demis le bras .
Hélas ! hélas !
à Colas.
Tu t'en repentiras.
Hélas ! hélas !
Oui , tu me le paîras.
KIM » Alii? ahiuvabi, le brash 10 4 alo
186 MERCURE DE FRANCE.
Aftolphe témoigne fa furprife en s'écriant
:
Eft-ce là ce tendre Colas ?
Colas veut s'emporter ; mais Fabrice lui
apprend qu'Aftolphe eft le Prince . Ninette
& Colas font furpris à leur tour . Le Prince
preffe Ninette de venir embellir fa Cour.
Elle y confent , en difant tout bas qu'elle
veut punir Colas fans lui manquer de foi .
Elle le quitte en lui adreffant cette Ariette
boufonne , qui commence par ces vers
Colas , je renonce au village ;
La cour me convient davantage.
& qui finit ainfi : JA
Quelque jour tu viendras
Tu verras. (bis.).
Sans ceffe
La preffe
Arrêtera tes pas ;
Et de loin , tu diras ,
Ah, Princeffe , Princeffe !
En t'inclinant bien bas
Protegez Colas ,
Ne l'oubliez pas.
Adieu , pauvre Colas,
1.
Colas fe defefpere , & veut fuivre NiAVRIL.
1755. 187
nette , mais il eft arrêté par une troupe de
chaffeurs . Ils le forcent à s'éloigner , &
forment une danfe qui termine le premier
acte. Il eſt brillant par le jeu & par le choix
des ariettes qui font parfaitement rendues
par Mme Favart & M. Rochart .
Le théatre change au fecond acte , & repréfente
un appartement du palais d'Aftolphe.
Ninette paroît en habit de Cour ; elle
eft fuivie de plufieurs femmes de chambre ,
qui portent chacune différentes parures ;
fan pannier l'embarraffe , & lui donne un
air gauche. Elle refufe le rouge dont on
veur l'embellir , & laiffe tomber les diamans
qu'on lui préfente, pour prendre des
fleurs artificielles , qu'elle jette un inſtant
après , en difant :
Elles ne fentent rien
Içi l'on ne doit rien qu'à l'arts
La beauté n'eft qu'une peinture ,
Jufqu'aux fleurs tout eſt impoſture.
Fabrice veut lui donner des leçons de
politeffe , mais elle le rebute , & prie le
Prince qui entre , de la débarrafler de cet
homme qui l'ennuie , ajoûtant qu'elle aimeroit
mieux voir Colas. Aftolphe lui répond
:
188 MERCURE DE FRANCE.
#
Vous allez voir Colas ; j'efpere qu'en ce jour
Vous mettrez entre nous un peu de différence ;
Je ne veux qu'à force d'amour
Lui difputer la préférence.
Il donne enfuite des ordres pour qu'on
montre à Ninette toute la magnificence
de fa Cour ; & voyant paroître la Princeffe
il fort pour l'éviter . Emilie ( c'eft le nom
de la Princeffe qui lui eft deftinée , ) tế-
moigne fes craintes à Clarice , fa confidente
, & la charge d'examiner les pas du Prince
& de Ninette. Elle exprime enfuite fes
fentimens par une ariette.
Viens , efpoir enchanteur ,
Viens confoler mon coeur , &c.
Voyant revenir Aftolphe avec fa petite
payfane , elle s'éloigne pour les obferver.
Le Prince demande à Ninette ce qu'elle
penfe de la Cour ; Ninette lui répond avec
une franchiſe fpirituelle.
J'ai vu de toute part de beaux petits objets
A talons rouges , en plumets ;
Ne font-ce pas des femmes en épées ?
J'ai vu trotter auffi de gentilles poupées ,
Qui portent des petits colets...
Ah ! que de plaifans perfonnages ,
AVRIL. 1755. 189
Crainte de déranger l'ordre de leurs vifages ,
Ils parlent tous comme des flageolets.
Tu , tu , tu tu. Dans nos villages -
2
Nous n'avons jamais vu de tels colifichets ,
Et puis j'ai vu de graves fréluquets ,
Qui prenoient un air d'importance.
Et de jolis vieillards coquets ,
Qui fembloient marcher en cadence ;
L'un d'eux , pour me voir de plus près ,
Jufques fous mon menton s'approche ,
En tirant un oeil de fa poche ;
C'eft un bijou , c'eft un Ange. Eh ! mais , mais..
Emilie s'avance , & fait un compliment
ironique à Ninette fur fes charmes , & la
félicite d'avoir fait la conquête d'Aſtolphe ,
qui s'en défend devant la Princeffe. Ninet
te répond qu'elle aime Colas . Le Prince
pour appuyer ce difcours , dit qu'il a donné
des ordres pour le faire venir. Ninette
réplique qu'elle aime mieux retourner au
village , & fort en chantant
ARI ETT E.
Dans nos prairies
Toujours fleuries ,
On voit fourire
Un doux zéphire , &c.
190 MERCURE DE FRANCE .
Le Prince raffare Emilie , & lui promet
de renvoyer Ninette ; mais dès qu'il eft
feul il peint fon irréfolution par une ariette.
Lé Nocher , loin du rivage
Lutte en vain contre l'orage , &c.
& fe retire fans fçavoir ce qu'il doit fai-
're.
Colas entre paré à peu - près comme Taler
dans Démocrite , & fe plaint comme
lui de la réception ridicule qu'on lui a
faite à la Cour . Ninette qui furvient , &
qui apperçoit Colas , baiffe fa coëffe , ſe
couvre le vifage de fon éventail , & contrefait
fa voix en grafféyant , pour éprou
ver Colas , & n'en être point reconnue .
Cette fcene a beſoin du jeu des acteurs
pour être fentie. Ninette en jouant les
vapeurs , déclare à Colas qu'elle eft épriſe
de fes charmes , & lui propofe de répondre
à fon ardeur , en l'affûrant que fa fortune
fera faite. Colas' qui la prend pour
une Dame de la Cour , répond qu'il y confent
, en difant tout bas :
Je ne veux qu'alarmer Ninette ,
Et le dépit me la ramenera.
Ninette alors fe dévoile , & fait éclater
fa colere contre Colas ; il a beau vouAVRIL
1755. 191
loir fe juſtifier , elle ne veut plus l'entendte.
Ce qui occafionne un duo dialogué
à l'Italienne , dont le contrafte toujours
foutenu , finit vivement le fecond acte.
20 Ninette ouvre feule le troifieme dans
le même appartement , où l'on voit des
lumieres fur une table. Elle fait entendre
dans une ariette qu'elle tirera bien-
-tôt vengeance d'un ingrat qui l'a trahie.
Fabrice vient l'avertir que le Prince doir
arriver dans un moment ; elle lui demande
fi Colas eft prévenu qu'elle doit parler
au Prince tête à tête ; Fabrice lui répond
qu'oui , & qu'il fait de gros foupirs . Emilie
entre , & paroit furpriſe de retrouver
encore Ninette , qui lui protefte qu'elle
eft à la Cour contre fon gré , & lui avoue
en riant qu'Aftolphe lui a demandé un
rendez - vous , qu'elle s'y trouvera , par la
raifon qu'une fille de bien ne craint rien.
Cette maxime n'eft pas toujours fure.
Comme on entend du bruit , Ninette en-
-gage la Princeffe à s'éloigner avec elle ,
ajoutant qu'elle a fur ce point un fecret
? à lui dire.
Colas arrive , guidé par fa jaloufie , & fe
cache fous la table pour entendre , › fans
cêtre vu l'entretien nocturne du Prince
avec Ninette , qui revient & qui éteint
les bougies en voyant entrer Aftolphe. Le
192 MERCURE DE FRANCE.
Prince lui en demande la raifon , & mon
tre une pudeur qu'elle paroît oublier. Elle
répond que fon coeur eft bien gardé la nuit
comme le jour , & le prie de lui apprendre
ce qu'il fouhaite d'elle. Il replique que fes
foupirs lui expliquent fes voeux : elle lui
repart qu'elle veut faire fon bonheur , &
qu'il attende un moment. Elle va chercher
la Princeffe ; & la met à fa place : le Prince
dit à Emilie , qu'il prend pour Ninette ,
J'ai defiré long-tems un coeur fans impofture ,
Un coeur fimple , ingenu , formé par la nature.
)
Ninette , en apportant des lumieres , répond
au Prince qu'il a trouvé ce thréfor
dans Emilie qui eft devant lui. Aftolphe ,
honteux de fon inconftance , rend fon
coeur à la Princeffe , qui lui pardonne. Colas
forti de deffous la table , paffe des plus
vives alarmes à la plus grande joie. Af-
-tolphe s'unit à la Princeffe , & Colas à Ninette.
Un bal dont nous avons rendu compte
, couronne agréablement ce troifieme
acte , dont le dénouement a paru moins
heureux que le refte de la piece : on peut
dire qu'elle eft pleine d'ingénieux détails ,
& qu'elle forme un recueil choisi d'ariettes
: italiennes en jolis vers françois.
Sila Servante Maîtrefle a fait des amans
paffionnés ,
AVRIL. 17558 193
paffionnés , Ninette à la Cour a trouvé
de zélés partifans ; chacune a fon mérite
particulier ; l'aînée eft peut - être mieux
faite , & la cadette eft plus fpirituelle.
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Résumé : EXTRAIT du Caprice amoureux, ou Ninette à la Cour.
L'extrait du 'Caprice amoureux' intitulé 'Ninette à la Cour' se compose de trois actes. Dans le premier acte, Ninette, une jeune fille vivant dans une campagne agréable, chante son amour pour Colas. Astolphe, roi de Lombardie, apparaît et avoue sa passion pour Ninette. Il lui propose une fortune et une vie à la cour, mais Ninette, fidèle à Colas, refuse et demande seulement que les chasseurs cessent de perturber leur village. Colas, jaloux, intervient et est rassuré par Astolphe. Ninette accepte finalement d'aller à la cour pour punir Colas, mais elle est arrêtée par des chasseurs et forcée de partir. Dans le deuxième acte, Ninette se trouve dans un appartement du palais d'Astolphe. Elle refuse les parures et les leçons de politesse, préférant la simplicité. Emilie, la princesse destinée à Astolphe, observe la situation et exprime ses craintes. Ninette décrit avec franchise et humour les personnages de la cour. Colas, déguisé, tente de séduire Ninette pour la tester, ce qui conduit à une dispute entre eux. Le troisième acte voit Ninette préparer sa vengeance contre Colas. Emilie et Astolphe se réconcilient après une méprise. Colas, caché, assiste à la scène et finit par se réjouir. Astolphe et Emilie se marient, et Colas se réconcilie avec Ninette. La pièce se termine par un bal. 'Ninette à la Cour' est décrite comme une pièce pleine d'ingéniosité et de détails, avec des ariettes italiennes en vers français.
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285
p. 193-194
OPERA COMIQUE.
Début :
Le 15, on donna sur ce théatre les Jeunes Mariés. On les annonça comme [...]
Mots clefs :
Spectacle, Opéra comique
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texteReconnaissance textuelle : OPERA COMIQUE.
OPERA COMIQUE.
Les
E is , on donna fur ce théatre les Jeunes
Maries. On les annonça comme
une nouveauté , mais ils ne font que remis
: c'eſt un ancien Opéra comique de
M. Favart . On ne peut s'y méprendre ; il
eft trop bien fait pour être d'un autre .
On l'a joué le 16 , le 17 , le 18 & le
19 , avec les Troqueurs , & Jerôme &
Fanchonnette , que l'on a continués jufqu'au
Samedi 22 , jour de la cloture de
ce fpectacle. Les Troqueurs ont toujours
charmé les connoiffeurs , Fanchonnette a
conftamment diverti le public ; & la falle
tous les jours pleine , a fait rite M. Monet.
O
Na donné le Mardi 18 Mars , la
premiere repréſentation
du Triomphe
de l'Amour conjugal ; fpectacle tiré
d'Alcefte , par le fieur Servandoni , Peintre
& Architecte ordinaire du Roi.
I
194 MERCURE DE FRANCE.
Les premieres repréfentations d'un fi
grand fpectacle font toujours imparfaites.
Nous attendrons que celui- ci ait été exécuté
dans toutes les parties & dans l'exacte
précifion qu'il exige , avant que d'en dire
notre fentiment , ou plutôt celui du public ,
que nous devons prendre pour regle .
Les
E is , on donna fur ce théatre les Jeunes
Maries. On les annonça comme
une nouveauté , mais ils ne font que remis
: c'eſt un ancien Opéra comique de
M. Favart . On ne peut s'y méprendre ; il
eft trop bien fait pour être d'un autre .
On l'a joué le 16 , le 17 , le 18 & le
19 , avec les Troqueurs , & Jerôme &
Fanchonnette , que l'on a continués jufqu'au
Samedi 22 , jour de la cloture de
ce fpectacle. Les Troqueurs ont toujours
charmé les connoiffeurs , Fanchonnette a
conftamment diverti le public ; & la falle
tous les jours pleine , a fait rite M. Monet.
O
Na donné le Mardi 18 Mars , la
premiere repréſentation
du Triomphe
de l'Amour conjugal ; fpectacle tiré
d'Alcefte , par le fieur Servandoni , Peintre
& Architecte ordinaire du Roi.
I
194 MERCURE DE FRANCE.
Les premieres repréfentations d'un fi
grand fpectacle font toujours imparfaites.
Nous attendrons que celui- ci ait été exécuté
dans toutes les parties & dans l'exacte
précifion qu'il exige , avant que d'en dire
notre fentiment , ou plutôt celui du public ,
que nous devons prendre pour regle .
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Résumé : OPERA COMIQUE.
Du 16 au 19 mars, le théâtre de l'Opéra Comique a présenté 'Les Jeunes Mariés', un opéra comique de M. Favart, accompagné de 'Les Troqueurs' et 'Jérôme et Fanchonette'. Cette dernière pièce a continué jusqu'au 22 mars. 'Les Troqueurs' ont été appréciés par les connaisseurs, tandis que 'Fanchonnette' a diverti le public, assurant une salle comble et satisfaisant M. Monet. Le 18 mars, le 'Triomphe de l'Amour conjugal', adaptation d'Alceste par Servandoni, a été présenté pour la première fois. Servandoni, peintre et architecte du Roi, a réalisé cette œuvre. Le Mercure de France a souligné que les premières représentations d'un grand spectacle sont souvent imparfaites et préfère attendre une exécution complète avant de donner son avis.
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286
p. 194-196
CONCERTS SPIRITUELS.
Début :
Après la mort du sieur Royer, Inspecteur du Concert spirituel, avec le [...]
Mots clefs :
Concert, Choeur, Concert spirituel
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texteReconnaissance textuelle : CONCERTS SPIRITUELS.
CONCERTS SPIRITUELS.
Près la mort du fieur Royer , Inf-
A pecteur du Concert fpirituel , avec le
fieur Capperan , ce dernier a fait choix
du fieur Mondonville , fi connu par fes talens
& fur-tout par fes moters , pour
remplacer le fieur Royer. Ce Concert demeure
en fociété entre la veuve & ces
deux Meffieurs , qui par leurs foins ne
laiffent rien à defirer au public.
> Le Dimanche de la Paffion , 16 Mars ,
le concert commença par une fymphonie
de M. Martin ; enfuite Omnes gentes , motet
à grand choeur de M. Cordelet ; le
Signor Avolio joua un concerto de violon
. On donna après Diligam te , motet à
grand choeur de M. Giles , où Mlle Chevalier
chanta le récit Beata gens , de M. de
Lalande. Mme Pompeati chanta deux airs
Italiens avec l'applaudiffement général . Le
F 195 AVRIL. ~ 1755.
moter à
concert finit par Cæli enarrant
,
grand choeur de M. de Mondonville
. Mlle
Chevalier
, & M. Richer , Page de la mufique
du Roi , chanterent
le duo Non funt
loquela , & furent juftement
applaudis .
Le Mardi 18 le concert commença par
une fymphonie nouvelle de M. Davefne ;
enfuite Cantate Domino , motet à grand
choeur du même auteur. Mlle Duperey
chanta un petit moter ; enfuite Confitebor
motet à grand choeur de M. de Lalande ,
où Mlle Chevalier chanta feule . M. Canavas
joua un concerto . Le concert finit par
In exitu , motet nouveau à grand choeur de
M. de Mondonville , qui eut l'approbation
des connoiffeurs. Ils y ont reconnu les traits
& les tableaux du grand maître.
Le Vendredi de la Paffion , 21 Mars ,
le concert commença par une fymphonie
enfuite Exaltabo te , moter à grand choeur
de M. de Lalande. Mme Pompeati chanta
deux airs Italiens avec le même fuccès. M.
Guenin joua un concerto de violon . Le
concert finit par In exitu , motet nouveau
à grand choeur de M. de Mondonville .
Mlle Chevalier , Mrs Benoît , Poirier &
Befche chanterent feuls .
Le Dimanche , jour des Rameaux , 23
Mars , le concert commença' par une fymphonie
; enfuite Diligam te , motet à grand
I ij
196 MERCURE DE FRANCE.
choeur de M. Madin. M. Jannfon , âgé de
13 ans , joua une fonate de violoncelle , &
charma toute l'affemblée . Enfuite Deus venerunt
gentes , motet à grand choeur de M.
Fanton , qui eut tout le fuccès qu'il métite.
On eut la fatisfaction d'y applaudir
Mlle Fel , qui parut pour la premiere fois ;
une indifpofition avoit privé le public du
plaifir de l'entendre plutôt. Elle chanta
feule un petit motet. Le concert finit par
De profundis , de M. Mondonville , & renvoya
tous les auditeurs très -fatisfaits .
Près la mort du fieur Royer , Inf-
A pecteur du Concert fpirituel , avec le
fieur Capperan , ce dernier a fait choix
du fieur Mondonville , fi connu par fes talens
& fur-tout par fes moters , pour
remplacer le fieur Royer. Ce Concert demeure
en fociété entre la veuve & ces
deux Meffieurs , qui par leurs foins ne
laiffent rien à defirer au public.
> Le Dimanche de la Paffion , 16 Mars ,
le concert commença par une fymphonie
de M. Martin ; enfuite Omnes gentes , motet
à grand choeur de M. Cordelet ; le
Signor Avolio joua un concerto de violon
. On donna après Diligam te , motet à
grand choeur de M. Giles , où Mlle Chevalier
chanta le récit Beata gens , de M. de
Lalande. Mme Pompeati chanta deux airs
Italiens avec l'applaudiffement général . Le
F 195 AVRIL. ~ 1755.
moter à
concert finit par Cæli enarrant
,
grand choeur de M. de Mondonville
. Mlle
Chevalier
, & M. Richer , Page de la mufique
du Roi , chanterent
le duo Non funt
loquela , & furent juftement
applaudis .
Le Mardi 18 le concert commença par
une fymphonie nouvelle de M. Davefne ;
enfuite Cantate Domino , motet à grand
choeur du même auteur. Mlle Duperey
chanta un petit moter ; enfuite Confitebor
motet à grand choeur de M. de Lalande ,
où Mlle Chevalier chanta feule . M. Canavas
joua un concerto . Le concert finit par
In exitu , motet nouveau à grand choeur de
M. de Mondonville , qui eut l'approbation
des connoiffeurs. Ils y ont reconnu les traits
& les tableaux du grand maître.
Le Vendredi de la Paffion , 21 Mars ,
le concert commença par une fymphonie
enfuite Exaltabo te , moter à grand choeur
de M. de Lalande. Mme Pompeati chanta
deux airs Italiens avec le même fuccès. M.
Guenin joua un concerto de violon . Le
concert finit par In exitu , motet nouveau
à grand choeur de M. de Mondonville .
Mlle Chevalier , Mrs Benoît , Poirier &
Befche chanterent feuls .
Le Dimanche , jour des Rameaux , 23
Mars , le concert commença' par une fymphonie
; enfuite Diligam te , motet à grand
I ij
196 MERCURE DE FRANCE.
choeur de M. Madin. M. Jannfon , âgé de
13 ans , joua une fonate de violoncelle , &
charma toute l'affemblée . Enfuite Deus venerunt
gentes , motet à grand choeur de M.
Fanton , qui eut tout le fuccès qu'il métite.
On eut la fatisfaction d'y applaudir
Mlle Fel , qui parut pour la premiere fois ;
une indifpofition avoit privé le public du
plaifir de l'entendre plutôt. Elle chanta
feule un petit motet. Le concert finit par
De profundis , de M. Mondonville , & renvoya
tous les auditeurs très -fatisfaits .
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Résumé : CONCERTS SPIRITUELS.
Après la mort de M. Royer, M. Capperan désigne M. Mondonville pour diriger le Concert Spirituel, en collaboration avec la veuve de Royer. Le Concert Spirituel se distingue par ses efforts pour satisfaire le public. Le 16 mars, le concert débuta avec une symphonie de M. Martin, suivie de motets et d'airs chantés par Mlle Chevalier et Mme Pompeati. Il se conclut par un grand chœur de M. Mondonville. Le 18 mars, une symphonie de M. Davenne ouvrit le concert, incluant des motets de M. Lalande et M. Mondonville. Mlle Duperey et Mlle Chevalier se distinguèrent par leurs performances vocales. Le 21 mars, une symphonie et un motet de M. Lalande inaugurèrent le concert, avec des applaudissements pour Mme Pompeati et M. Guenin. Le 23 mars, jour des Rameaux, une symphonie et des motets de M. Madin et M. Fanton furent interprétés. Mlle Fel fit ses débuts et fut acclamée. Le concert se termina par un motet de M. Mondonville, laissant les auditeurs très satisfaits.
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287
p. 177-178
COMEDIE FRANÇOISE.
Début :
Les Comédiens François ont ouvert leur théatre le 8 de ce mois par [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français, Tragédie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE.
COMEDIE FRANÇOISE.
LES
Es Comédiens François ont ouvert
leur théatre le 8 de ce mois par
Athalie . Cette Tragédie a été précédée ,
felon l'uſage , d'un compliment prononcé
par M. de Bellecourt , & applaudi par
le Parterre , fuivant la coutume,
Le 10 , ils ont donné la huitieme repréſentation
de Philoctete ; & le 19 , ils
L'ont joué pour la douzieme & derniere
fois. Le public l'a reçu avec toute la
chaleur & les applaudiffemens du premier
jour. Voici des vers de M. Tannevot
fur cette Tragédie .
Difparoiffez Romans , fléau de Melpomene ,
Qui depuis fi long- tems defigurez la ſcène ;
Le Cothurne français par vous dépayſé ,
A retrouvé la fource où Sophocle a puiſé.
Queljeu des paffions ! quelles moeurs héroïques !
Quels nobles fentimens que de traits pathétitiques
!
Hv
178 MERCURE DE FRANCE .
Quel refpect pour les Dieux ! & quelle vérité
A de fages crayons fournit l'antiquité !
Zele , force , courage , amour de la patrie ,
Celeftes alimens dont notre ame eft nourrie ,
Germent dans un fujet fimple , & toujours fé
cond ,
Plein de grands mouvemens , pour un efprit pro♣
fond.
Les incidens nombreux découvrent l'indigence
L'action ifolée indique l'abondance.
Philoctete obftiné dans fes reffentimens ,
Suffit pour enlever nos applaudiffemens.
La clémence toujours oppoſée à la haine ,
La combat conftamment , en triomphe & l'en
chaîne.
Dans le jeune Pyrrhus l'amour cede au devoirs
L'éloquente raiſon fignale fon pouvoir.
Combien aux voeux des Grecs devient - elle propice
!
Il falloit Chateaubrun pour bien nous peindre
Ulyffe.
Auteur judicieux , il te falloit far-tour
Pour guider le génie , & ramener le goû
LES
Es Comédiens François ont ouvert
leur théatre le 8 de ce mois par
Athalie . Cette Tragédie a été précédée ,
felon l'uſage , d'un compliment prononcé
par M. de Bellecourt , & applaudi par
le Parterre , fuivant la coutume,
Le 10 , ils ont donné la huitieme repréſentation
de Philoctete ; & le 19 , ils
L'ont joué pour la douzieme & derniere
fois. Le public l'a reçu avec toute la
chaleur & les applaudiffemens du premier
jour. Voici des vers de M. Tannevot
fur cette Tragédie .
Difparoiffez Romans , fléau de Melpomene ,
Qui depuis fi long- tems defigurez la ſcène ;
Le Cothurne français par vous dépayſé ,
A retrouvé la fource où Sophocle a puiſé.
Queljeu des paffions ! quelles moeurs héroïques !
Quels nobles fentimens que de traits pathétitiques
!
Hv
178 MERCURE DE FRANCE .
Quel refpect pour les Dieux ! & quelle vérité
A de fages crayons fournit l'antiquité !
Zele , force , courage , amour de la patrie ,
Celeftes alimens dont notre ame eft nourrie ,
Germent dans un fujet fimple , & toujours fé
cond ,
Plein de grands mouvemens , pour un efprit pro♣
fond.
Les incidens nombreux découvrent l'indigence
L'action ifolée indique l'abondance.
Philoctete obftiné dans fes reffentimens ,
Suffit pour enlever nos applaudiffemens.
La clémence toujours oppoſée à la haine ,
La combat conftamment , en triomphe & l'en
chaîne.
Dans le jeune Pyrrhus l'amour cede au devoirs
L'éloquente raiſon fignale fon pouvoir.
Combien aux voeux des Grecs devient - elle propice
!
Il falloit Chateaubrun pour bien nous peindre
Ulyffe.
Auteur judicieux , il te falloit far-tour
Pour guider le génie , & ramener le goû
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Résumé : COMEDIE FRANÇOISE.
Les comédiens français ont inauguré leur théâtre le 8 du mois avec la tragédie 'Athalie', précédée d'un compliment de M. de Bellecourt, acclamé par le public. Le 10, ils ont présenté la huitième représentation de 'Philoctète', et le 19, ils l'ont jouée pour la douzième et dernière fois. La pièce a été accueillie avec enthousiasme et applaudissements constants. M. Tannevot a écrit des vers élogieux sur 'Philoctète', soulignant la force et l'authenticité des passions et des mœurs héroïques présentées. Il critique les Romains pour avoir défiguré la scène et loue le retour du cothurne français à la source de Sophocle. Les personnages de la pièce, notamment Philoctète et Pyrrhus, sont loués pour leurs nobles sentiments et leur respect des dieux. L'action est décrite comme riche en incidents et en profondeur, avec une opposition constante entre clémence et haine. L'éloquence et la raison triomphent dans le personnage d'Ulysse, interprété par Chateaubrun.
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288
p. 178-179
COMEDIE ITALIENNE.
Début :
Les Comédiens Italiens ont fait l'ouverture de leur spectacle par Arlequin [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Comédie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMEDIE ITALIENNE.
COMEDIE ITALIENNE.
Es Comédiens Italiens ont fait l'ou
Lverture de leur fpectacle par priem
lequin Voleur , Juge & Prévât , ComéM
A I 1735. 179
die Italienne. Mme Favart fait avec Arlequin
un compliment dialogue dans le goût
de celui de la clôture.
Le 17 les mêmes Comédiens donnerent
la premiere repréſentation des Deux
Soeurs , Comédie en vers , en trois actes ,
de M. Yon. Les deux premiers furent applaudis
; on fut moins fatisfait du troifieme.
En général on a trouvé la piéce bien
écrité , & les détails bien faits ; mais on y
eut defiré plus d'action & de gaieté. Cet
te Comédie fut fuivie des Amours de Baftien
, & de la Matinée Villageoife , nouveau
Ballet de M. Deheffe. Il y a un pas de
trois charmant ; il eft exécuté par Mlle Ca
tinon , Mlle Camille , & Mr. Saudi ,
avec une précision qui ne laiffe rien à defirer.
Es Comédiens Italiens ont fait l'ou
Lverture de leur fpectacle par priem
lequin Voleur , Juge & Prévât , ComéM
A I 1735. 179
die Italienne. Mme Favart fait avec Arlequin
un compliment dialogue dans le goût
de celui de la clôture.
Le 17 les mêmes Comédiens donnerent
la premiere repréſentation des Deux
Soeurs , Comédie en vers , en trois actes ,
de M. Yon. Les deux premiers furent applaudis
; on fut moins fatisfait du troifieme.
En général on a trouvé la piéce bien
écrité , & les détails bien faits ; mais on y
eut defiré plus d'action & de gaieté. Cet
te Comédie fut fuivie des Amours de Baftien
, & de la Matinée Villageoife , nouveau
Ballet de M. Deheffe. Il y a un pas de
trois charmant ; il eft exécuté par Mlle Ca
tinon , Mlle Camille , & Mr. Saudi ,
avec une précision qui ne laiffe rien à defirer.
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Résumé : COMEDIE ITALIENNE.
En 1735, des comédiens italiens ont présenté 'L'Équin Voleur, Juge & Prévôt' le 17 janvier, avec Mme Favart dans un dialogue de clôture. Le même jour, ils ont joué 'Les Deux Soeurs', une comédie en vers en trois actes de M. Yon, jugée bien écrite mais manquant d'action et de gaieté. La représentation a inclus 'Les Amours de Bastien' et 'La Matinée Villageoise', un ballet de M. Deheffe. Un pas de trois a été particulièrement apprécié.
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289
p. 180-184
CONCERT SPIRITUEL.
Début :
Le Lundi Saint 24 Mars, le Concert commença par une symphonie, qui [...]
Mots clefs :
Concert spirituel, Choeur, Symphonie, Concert, Concerto, Orgue
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texteReconnaissance textuelle : CONCERT SPIRITUEL.
CONCERT SPIRITUEL.
LE
E Lundi Saint 24 Mars , le Concert
commença par une fymphonie , qui
fur fuivie du Venite exultemus , motet à grand
choeur de M. Davefne. Mme Pompeati
chanta un air italien . Mlle Fel chanta
un concerto accompagné de voix . Mme
Pompeati chanta un air italien. Le Concert
finit par Jubilate , motet à grand
choeur de M. de Mondonville.
Le Concert du Mardi Saint fut trèsbeau
; il commença par une fymphonie
de Jumelli , enfuite Domini eft terra ,
motet à grand choeur de M. le Febvre ,
organiſte de S. Louis. Le jeune M. Jannfon
jouaune fonate devioloncelle avec l'ap
plaudiffement général . M. Godard chanta
un petit motet au gré des auditeurs. M.
Balbatre joua un concerto d'orgue de fa
compofition , qui furprit & enchanta
toute l'affemblée ; fon jeu brillant fit
parler cet inftrument en maître , & fit
fentir qu'il a feul le droit de commander
à tous les autres. On ne peut faire
un trop grand éloge de cette nouveauté
& du talent fingulier de M. Balbatre à
qui nous la devons. Le Concert finit par
MAI. 1755 181-
Magnus Dominus, motet à grand choeur de
M. de Mondonville.
Le Mercredi Saint 26 , le Concert commença
par une fymphonie de Geminiani
; enfuite Nifi Dominus , motet à grand
choeur de M. de Mondonville. Mme . Pompeati
chanta un air Italien ; il fut fuivi
d'une fymphonie de Stamich , avec clarinets
& cors de chaffe . Mme. Pompeati
chanta un fecond air Italien. M, Balbatre
joua fon concerto d'orgue avec le
même fuccès. Le Concert finit par le Miferere
de M. de Lalande .
Le Jeudi Saint 27 , on commença par
une fymphonie del Signor Zanni , enfuite
Deus nofter , motet à grand choeur
de M. Cordelet . M. Albaneze chanta
deux airs Italiens . M. Godard chanta un
petit motet de M. le Febvre , organiſte de
S. Louis. Mlle Fel chanta un concerto
accompagné de voix . M. Beche en chanta
l'Adagio. On finit par In exitu , motet
nouveau de M. de Mondonville , qui fut
très applaudi.
Le Vendredi Saint 28 , on commença
par une fymphonie de M. Guillemain ;
enfuite Stabat de Pergoleze . M. Canavas
joua un concerto. Mme Pompeati chanta
un air Italien. M. Balbatre joua fur l'orgue
une fonnate des pieces de Clavecin
1821 MERCURE DE FRANCE:
de M. de Mondonville . On finit par le De
profundis de M. de Mondonville ...
Le Samedi Saint 29 , on commença
par une fymphonie del Signor Haffe ,
qui fut fuivie du Stabat de Pergoleze. M.
Gelin chanta un petit motet. Ön exécuta
une fymphonie del Signor Holzbaur.
Mme Veftris de Giardini chanta deux
airs Italiens ; elle fut applaudie à plus
d'un titre ; elle joint à un bel organe
une figure très aimable : on finit par
Bonum eft , motet à grand choeur de M. de
Mondonville.
Le Dimanche jour de Pâques 30 Mars ,
on commença par une fymphonie de M.
de Mondonville ; enfuite Cantate , moter à
grand choeur de M. de Lalande . Mme
Pompeati chanta deux airs Italiens . Mlle
Fel chanta un petit motet del Signor Fifco.
M. Balbatre joua un concerto d'orgue
de fa compofition. On finit par enite
exultemus , moter à grand choeur de
M. de Mondonville.
Le Lundi de Pâques 31 , on commença
par une fymphonie; enfuite Domine , in
virtute tua , motet à grand choeur de M.
Cordeler. Mme Veftris de Giardini chanta
deux airs. Mlle Fel chanta un nouveau
Regina cæli. M. Balbatre joua un concerto
d'orgue de fa compofition. On finit par
MAI 17551 183
Dominus regnavit , de M. de Mondonville .
Le Mardi de Pâques premier Avril , on
commença par une fymphonic ; enſuite
Dominus regnavit , motet à grand choeur
de M. de Lalande . Mme Pompeati chanta
un air Italien, M. Taillard joua un concerto
de Alûte. Mme Pompeati chanta
un fecond air Italien . M. Balbatre joua
de l'orgue . On finit par In exitu , motet
à grand choeur de M. de Mondonville.
Le Vendredi de Pâques 4 Avril , on
commença par une fymphonie de Mrs
Pla ; enfuite Exaltabo te , moter à grand
choeur de M. de Lalande . M. Moria joua
un concerto de violon . Mlle Fel chanta
avec un grand fuccès Exultate Deo , petit
motet nouveau . M. Balbatre joua fur
l'orgue l'ouverture de l'Opéra Languedocien.
On finit par Coeli enarrant , motet
à grand choeur de M. de Mondonville.
Le Dimanche de Quafimodo 6 , on
commença par une fymphonie de Jumelli
; enfuite Cantate , moter à grand
choeur de M. de Lalande. Mme Veftris
de Giardini chanta deux airs Italiens. M.
Moria joua un concerto de violon . Mlle
Fel chanta le nouveau Regina coeli. M.
Balbatre joua un concerto d'orgue de fa
compofition . On finit par Venite exultemus
, de M. de Mondonville.
184 MERCURE DE FRANCE.
Le Lundi 7 Avril , jour de l'Annonciation
, on commença par une fymphonie
nouvelle ; enfuite Cantate , motet à grand
choeur de M. Martin. Mme Pompeati
chanta un air Italien . M. Godard chanta
le petit motet de M. le Febvre. M. Tarrade
joua un concerto de violon . Mlle
Fel chanta pour la feconde fois Exultate
Deo , qui eut une nouvelle réuffite . Pour
rendre le Concert parfait , M. Balbatre
joua un concerto d'orgue de fa compofition
; & l'on finit par In exitu , de M. de
Mondonville,
* Voyez l'article IV , au mot Muſique.
LE
E Lundi Saint 24 Mars , le Concert
commença par une fymphonie , qui
fur fuivie du Venite exultemus , motet à grand
choeur de M. Davefne. Mme Pompeati
chanta un air italien . Mlle Fel chanta
un concerto accompagné de voix . Mme
Pompeati chanta un air italien. Le Concert
finit par Jubilate , motet à grand
choeur de M. de Mondonville.
Le Concert du Mardi Saint fut trèsbeau
; il commença par une fymphonie
de Jumelli , enfuite Domini eft terra ,
motet à grand choeur de M. le Febvre ,
organiſte de S. Louis. Le jeune M. Jannfon
jouaune fonate devioloncelle avec l'ap
plaudiffement général . M. Godard chanta
un petit motet au gré des auditeurs. M.
Balbatre joua un concerto d'orgue de fa
compofition , qui furprit & enchanta
toute l'affemblée ; fon jeu brillant fit
parler cet inftrument en maître , & fit
fentir qu'il a feul le droit de commander
à tous les autres. On ne peut faire
un trop grand éloge de cette nouveauté
& du talent fingulier de M. Balbatre à
qui nous la devons. Le Concert finit par
MAI. 1755 181-
Magnus Dominus, motet à grand choeur de
M. de Mondonville.
Le Mercredi Saint 26 , le Concert commença
par une fymphonie de Geminiani
; enfuite Nifi Dominus , motet à grand
choeur de M. de Mondonville. Mme . Pompeati
chanta un air Italien ; il fut fuivi
d'une fymphonie de Stamich , avec clarinets
& cors de chaffe . Mme. Pompeati
chanta un fecond air Italien. M, Balbatre
joua fon concerto d'orgue avec le
même fuccès. Le Concert finit par le Miferere
de M. de Lalande .
Le Jeudi Saint 27 , on commença par
une fymphonie del Signor Zanni , enfuite
Deus nofter , motet à grand choeur
de M. Cordelet . M. Albaneze chanta
deux airs Italiens . M. Godard chanta un
petit motet de M. le Febvre , organiſte de
S. Louis. Mlle Fel chanta un concerto
accompagné de voix . M. Beche en chanta
l'Adagio. On finit par In exitu , motet
nouveau de M. de Mondonville , qui fut
très applaudi.
Le Vendredi Saint 28 , on commença
par une fymphonie de M. Guillemain ;
enfuite Stabat de Pergoleze . M. Canavas
joua un concerto. Mme Pompeati chanta
un air Italien. M. Balbatre joua fur l'orgue
une fonnate des pieces de Clavecin
1821 MERCURE DE FRANCE:
de M. de Mondonville . On finit par le De
profundis de M. de Mondonville ...
Le Samedi Saint 29 , on commença
par une fymphonie del Signor Haffe ,
qui fut fuivie du Stabat de Pergoleze. M.
Gelin chanta un petit motet. Ön exécuta
une fymphonie del Signor Holzbaur.
Mme Veftris de Giardini chanta deux
airs Italiens ; elle fut applaudie à plus
d'un titre ; elle joint à un bel organe
une figure très aimable : on finit par
Bonum eft , motet à grand choeur de M. de
Mondonville.
Le Dimanche jour de Pâques 30 Mars ,
on commença par une fymphonie de M.
de Mondonville ; enfuite Cantate , moter à
grand choeur de M. de Lalande . Mme
Pompeati chanta deux airs Italiens . Mlle
Fel chanta un petit motet del Signor Fifco.
M. Balbatre joua un concerto d'orgue
de fa compofition. On finit par enite
exultemus , moter à grand choeur de
M. de Mondonville.
Le Lundi de Pâques 31 , on commença
par une fymphonie; enfuite Domine , in
virtute tua , motet à grand choeur de M.
Cordeler. Mme Veftris de Giardini chanta
deux airs. Mlle Fel chanta un nouveau
Regina cæli. M. Balbatre joua un concerto
d'orgue de fa compofition. On finit par
MAI 17551 183
Dominus regnavit , de M. de Mondonville .
Le Mardi de Pâques premier Avril , on
commença par une fymphonic ; enſuite
Dominus regnavit , motet à grand choeur
de M. de Lalande . Mme Pompeati chanta
un air Italien, M. Taillard joua un concerto
de Alûte. Mme Pompeati chanta
un fecond air Italien . M. Balbatre joua
de l'orgue . On finit par In exitu , motet
à grand choeur de M. de Mondonville.
Le Vendredi de Pâques 4 Avril , on
commença par une fymphonie de Mrs
Pla ; enfuite Exaltabo te , moter à grand
choeur de M. de Lalande . M. Moria joua
un concerto de violon . Mlle Fel chanta
avec un grand fuccès Exultate Deo , petit
motet nouveau . M. Balbatre joua fur
l'orgue l'ouverture de l'Opéra Languedocien.
On finit par Coeli enarrant , motet
à grand choeur de M. de Mondonville.
Le Dimanche de Quafimodo 6 , on
commença par une fymphonie de Jumelli
; enfuite Cantate , moter à grand
choeur de M. de Lalande. Mme Veftris
de Giardini chanta deux airs Italiens. M.
Moria joua un concerto de violon . Mlle
Fel chanta le nouveau Regina coeli. M.
Balbatre joua un concerto d'orgue de fa
compofition . On finit par Venite exultemus
, de M. de Mondonville.
184 MERCURE DE FRANCE.
Le Lundi 7 Avril , jour de l'Annonciation
, on commença par une fymphonie
nouvelle ; enfuite Cantate , motet à grand
choeur de M. Martin. Mme Pompeati
chanta un air Italien . M. Godard chanta
le petit motet de M. le Febvre. M. Tarrade
joua un concerto de violon . Mlle
Fel chanta pour la feconde fois Exultate
Deo , qui eut une nouvelle réuffite . Pour
rendre le Concert parfait , M. Balbatre
joua un concerto d'orgue de fa compofition
; & l'on finit par In exitu , de M. de
Mondonville,
* Voyez l'article IV , au mot Muſique.
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Résumé : CONCERT SPIRITUEL.
Le Concert Spirituel s'est tenu du 24 mars au 7 avril 1755. Chaque jour, les concerts débutaient par une symphonie, suivie de divers motets à grand chœur, airs italiens et concertos. Parmi les compositeurs et interprètes notables figuraient M. Daveine, M. de Mondonville, M. le Febvre, M. Balbastre, Mme Pompeati, Mlle Fel et Mme Vestrys de Giardini. Les œuvres de M. de Mondonville, telles que 'Jubilate', 'Magnus Dominus' et 'In exitu', ont été fréquemment exécutées et acclamées par le public. Les performances de M. Balbastre à l'orgue ont été particulièrement saluées pour leur brillance et leur maîtrise. D'autres moments marquants incluaient les interprétations de M. Jannson au violoncelle et de M. Godard en chant, ainsi que divers concertos de violon et de flûte. Chaque concert se concluait par un motet à grand chœur, souvent composé par M. de Mondonville.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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290
p. 211-212
COMEDIE FRANÇOISE.
Début :
Les Comédiens françois ont repris le 28 Avril Andronic, tragédie de Campistron [...]
Mots clefs :
Comédie-Française, Comédie, Tragédie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE.
-COMEDIE FRANÇOISE.:
3
ES Comédiens françois ont repris le
L28 Avril Andronic , tragédié de Campiftron.
Le fieur Clavareau de Rochebelle
y a débuté par le rolle d'Andronic , avec un
applaudiffement général , & qui plus eft ,
mérité. On doit d'autant plus attendre de
fon talent , qu'il eft fondé fur beaucoup
d'intelligence avec cette partie on eft für
du progrès. S'illa l'organe un peu foible ,
ce défaut eft réparé par une prononciation
nette & diftincte ; on ne perd pas un mor
de ce qu'il dit. Un Comédien qui eft doué
d'une grande voix , en abufe fouvent , &
crie fans fe faire entendre , faute d'avoir
l'art de bien articuler, JEMOD
L'acteur nouveau a joué fucceffivement
les rolles de Guftave , de Zamore: & du
Comte d'Effex : il a fait plaifir dans tous ;
mais il a particulierement réuffi dans celui
ede Zamore. On ne peut pas rendre avec
plus d'anes de force & dervérité 2 le beau
214 MERCURE DE FRANCE.
morceau du troifieme acte qu'il adreffe à
Alvarès & à Gufman. Les Comédiens ont
interrompu fon début , pour donner le 15
Mai la premiere repréſentation du Jaloux ,
Comédie en vers , en cinq actes : elle eſt de
M. Bret.
Quoique cette piéce n'ait pas réuffi , on
ne peut difconvenir qu'il n'y ait des beautés
des détails . L'épiſode de la foeur du Jaloux
eft des plus heureux. Au fecond acte la
fcene de la fauffe jaloufie qui lui a été confeillée
par fon frere pour éprouver fon
amant , eft une fcene bien faite par l'auteur
, & très-bien rendue par l'actrice. *
Je crois que M. Bret eût mieux fait , s'il
eût moins fuivi le Roman ; il faut au théatre
un caractere plus général & plus vrai.
L'auteur a voulu éviter le Jaloux defabufé,
& il est tombé dans le Curieux impertiment
, qui eft un plus grand écueil .
* Mlle Guéant.
3
ES Comédiens françois ont repris le
L28 Avril Andronic , tragédié de Campiftron.
Le fieur Clavareau de Rochebelle
y a débuté par le rolle d'Andronic , avec un
applaudiffement général , & qui plus eft ,
mérité. On doit d'autant plus attendre de
fon talent , qu'il eft fondé fur beaucoup
d'intelligence avec cette partie on eft für
du progrès. S'illa l'organe un peu foible ,
ce défaut eft réparé par une prononciation
nette & diftincte ; on ne perd pas un mor
de ce qu'il dit. Un Comédien qui eft doué
d'une grande voix , en abufe fouvent , &
crie fans fe faire entendre , faute d'avoir
l'art de bien articuler, JEMOD
L'acteur nouveau a joué fucceffivement
les rolles de Guftave , de Zamore: & du
Comte d'Effex : il a fait plaifir dans tous ;
mais il a particulierement réuffi dans celui
ede Zamore. On ne peut pas rendre avec
plus d'anes de force & dervérité 2 le beau
214 MERCURE DE FRANCE.
morceau du troifieme acte qu'il adreffe à
Alvarès & à Gufman. Les Comédiens ont
interrompu fon début , pour donner le 15
Mai la premiere repréſentation du Jaloux ,
Comédie en vers , en cinq actes : elle eſt de
M. Bret.
Quoique cette piéce n'ait pas réuffi , on
ne peut difconvenir qu'il n'y ait des beautés
des détails . L'épiſode de la foeur du Jaloux
eft des plus heureux. Au fecond acte la
fcene de la fauffe jaloufie qui lui a été confeillée
par fon frere pour éprouver fon
amant , eft une fcene bien faite par l'auteur
, & très-bien rendue par l'actrice. *
Je crois que M. Bret eût mieux fait , s'il
eût moins fuivi le Roman ; il faut au théatre
un caractere plus général & plus vrai.
L'auteur a voulu éviter le Jaloux defabufé,
& il est tombé dans le Curieux impertiment
, qui eft un plus grand écueil .
* Mlle Guéant.
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Résumé : COMEDIE FRANÇOISE.
En avril et mai, la Comédie Française a présenté plusieurs pièces. Le 28 avril, les comédiens ont joué 'Andronic' de Campistron, avec Clavareau de Rochebelle dans le rôle principal. Malgré une voix faible, il a été applaudi pour sa prononciation claire. Il a également interprété Gustave, Zamore et le Comte d'Essling, se distinguant particulièrement dans le rôle de Zamore. Le 15 mai, la troupe a interrompu ses débuts pour la première représentation du 'Jaloux', une comédie en vers en cinq actes de M. Bret. Bien que la pièce n'ait pas été un grand succès, elle contenait des moments remarquables, notamment une scène de fausse jalousie interprétée par Mlle Guéant. L'auteur a été critiqué pour avoir trop suivi le modèle romanesque, manquant ainsi de caractère général et vrai au théâtre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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291
p. 214-215
COMEDIE ITALIENNE.
Début :
Le 3 de ce mois, les Comédiens italiens donnerent la premiere représentation de [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens
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texteReconnaissance textuelle : COMEDIE ITALIENNE.
COMEDIE ITALIENNE. -
E35de ce mois , les Comédiens italiens
donnerent la premiere repréſentation de
la Rancune , fans l'avoir annoncée . C'eſt
une parodie de Philoctete , dont l'auteur ne
s'eft pas nommé. Quel qu'il fait , il ne doit
JUI N. 1755. 215
*
pas rougir de l'ouvrage , c'eft celui d'un
homme d'efprit ; il y a des vers heureux &
des tirades bien faites : le traveftiffement
d'ailleurs eft affez bien faift . L'Opéra de
Lyon , en concurrence avec la Comédie ;
la Rancune , acteur difficile à vivre , mais
d'un talent diftingué , que fes camarades
ont abandonné , & qu'ils viennent chercher
dans leur décadence, comme leur derniere
reffource , parodient aſſez natutellement
le fujet de la tragédie ; mais une tracafferie
de Comédiens n'intéreffe pas affez
de gros du public qui ne vit pas avec eux ;
ce tableau des viciffitudes théatrales ne
peut être bien amusant que pour ceux qui
Fréquentent journalierement les foyers , &
qui font initiés dans tous les mysteres de
la Comédie. La Servante Maîtreſſe eft
encore venue au fecours ; on l'a donnée
le 19 pour la cent quarante- unieme fois.
E35de ce mois , les Comédiens italiens
donnerent la premiere repréſentation de
la Rancune , fans l'avoir annoncée . C'eſt
une parodie de Philoctete , dont l'auteur ne
s'eft pas nommé. Quel qu'il fait , il ne doit
JUI N. 1755. 215
*
pas rougir de l'ouvrage , c'eft celui d'un
homme d'efprit ; il y a des vers heureux &
des tirades bien faites : le traveftiffement
d'ailleurs eft affez bien faift . L'Opéra de
Lyon , en concurrence avec la Comédie ;
la Rancune , acteur difficile à vivre , mais
d'un talent diftingué , que fes camarades
ont abandonné , & qu'ils viennent chercher
dans leur décadence, comme leur derniere
reffource , parodient aſſez natutellement
le fujet de la tragédie ; mais une tracafferie
de Comédiens n'intéreffe pas affez
de gros du public qui ne vit pas avec eux ;
ce tableau des viciffitudes théatrales ne
peut être bien amusant que pour ceux qui
Fréquentent journalierement les foyers , &
qui font initiés dans tous les mysteres de
la Comédie. La Servante Maîtreſſe eft
encore venue au fecours ; on l'a donnée
le 19 pour la cent quarante- unieme fois.
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Résumé : COMEDIE ITALIENNE.
Le 21 juin 1755, les Comédiens italiens ont présenté la première représentation de 'La Rancune' sans préavis. Cette pièce, une parodie anonyme de 'Philoctète', est appréciée pour ses vers et ses tirades bien construites. Elle met en scène l'Opéra de Lyon en concurrence avec la Comédie et le personnage de La Rancune, un acteur talentueux mais difficile, abandonné puis réintégré par ses camarades. Cependant, les intrigues des comédiens n'intéressent pas le grand public, peu familier avec leur mode de vie. Ce spectacle est amusant uniquement pour ceux qui fréquentent régulièrement les foyers théâtraux. Par ailleurs, 'La Servante Maîtresse' a été jouée le 19 juin pour la 141e fois.
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292
p. 215-216
CONCERT SPIRITUEL.
Début :
Le 8 de ce mois, jour de l'Ascension, le concert commença par une symphonie [...]
Mots clefs :
Symphonie, Concert
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texteReconnaissance textuelle : CONCERT SPIRITUEL.
CONCERT SPIRITUEL.
de ce mois , jour de l'Afcenfion ,
L'le concert commença par une fymphonie
del Signor Croës, enfuite Nifi Dominus,
motet à grand choeur de M. de Mondonville.
M. Dupont joua un concerto de violon.
Madame Veftris de Giardini chanta
7216 MERCURE DE FRANCE.
deux airs italiens , & fut très- applaudie.
M. Balbatre joua fur l'orgue l'Ouverture
de Pigmalion qui fit le plus grand effet.
Cet agréable concert finit par Dominus
regnavit , motetà grand choeur de M. de
Mondonville.b
Le Dimanche 18 jour de la Pentecôte,
le concert commença par,une fymphonie ,
enfuite Diligamates, motet à grandschoeur
de M. Giles . M.:Godard chanta le petit mo
tet de M. le Febvre . MM. Bureau & Saldantin
jouerent un concerto à deux , hautbois.
Mile Riviere chanta un petit motet de
de M. Mouret. M. Balbatre joua fur l'orgue
jun nouveau concerto , de fa compoſition.
Le concert finit par In exitu , moter à grand.
schoeur de M. de Mondonville , qui réunic
tous les fuftrages , & fut jugé digne d'un
A grand Maître .
de ce mois , jour de l'Afcenfion ,
L'le concert commença par une fymphonie
del Signor Croës, enfuite Nifi Dominus,
motet à grand choeur de M. de Mondonville.
M. Dupont joua un concerto de violon.
Madame Veftris de Giardini chanta
7216 MERCURE DE FRANCE.
deux airs italiens , & fut très- applaudie.
M. Balbatre joua fur l'orgue l'Ouverture
de Pigmalion qui fit le plus grand effet.
Cet agréable concert finit par Dominus
regnavit , motetà grand choeur de M. de
Mondonville.b
Le Dimanche 18 jour de la Pentecôte,
le concert commença par,une fymphonie ,
enfuite Diligamates, motet à grandschoeur
de M. Giles . M.:Godard chanta le petit mo
tet de M. le Febvre . MM. Bureau & Saldantin
jouerent un concerto à deux , hautbois.
Mile Riviere chanta un petit motet de
de M. Mouret. M. Balbatre joua fur l'orgue
jun nouveau concerto , de fa compoſition.
Le concert finit par In exitu , moter à grand.
schoeur de M. de Mondonville , qui réunic
tous les fuftrages , & fut jugé digne d'un
A grand Maître .
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Résumé : CONCERT SPIRITUEL.
Le document relate deux concerts spirituels. Le premier, sans date précise, débuta par une symphonie de Croës et le motet 'Nisi Dominus' de Mondonville. Dupont joua un concerto de violon, et Vestris chanta deux airs italiens, acclamés par le public. Balbatre interpréta l'ouverture de 'Pygmalion' à l'orgue, suscitant une grande impression. Le concert se conclut par le motet 'Dominus regnavit' de Mondonville. Le second concert, le 18 juin, jour de la Pentecôte, commença par une symphonie et le motet 'Diligamus Deum' de Gilles. Godard chanta un motet de Febvre, et Bureau et Saldantin jouèrent un concerto pour deux hautbois. Rivière interpréta un motet de Mouret, et Balbatre joua un concerto de sa composition à l'orgue. Le concert se termina par le motet 'In exitu' de Mondonville, salué comme digne d'un grand maître.
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293
p. 179-180
COMEDIE FRANÇOISE.
Début :
Le 24 Mai le Sr Calvareau de Rochebelle reprit son début par l'Enfant prodigue [...]
Mots clefs :
Comédie-Française, Comédiens
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE.
COMEDIE FRANÇOISE.
E 24 Mai le Sr Clavareau de Roche-
L'belle reprit fon début par l'Enfant prodigue
, dont il joua le rolle avec un plein
fuccès ; il n'eft pas poffible de mieux rendre
la fcene de la reconnoiffance : il y mit
toute la vérité , tout le pathétique & tonte
la précifion qu'elle demande ; il paroît
propre aux rolles de fentiment dans le
comique noble ; à un extérieur décent
il joint beaucoup de fineffe , il faifit les
nuances , il fent auffi -bien qu'il détaille ;
toujours attentif à la fcene , il poffede le
jeu muet , & ne fait jamais de contre-fens ,
qualité d'autant plus rare dans un acteur
qui débute , qu'elle manque fouvent au
Comédien qui a le plus d'ufage & qui eſt
le mieux établi.
Le 26 , le même acteur joua Seide dans
Mahomet , tragédie de M. de Voltaire ; il
y a été justement applaudi, Par la maniere
dont il a rendu la grande fituation du
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
quatrieme acte , il a montré qu'on n'a jamais
l'organe foible quand on a l'art de le
conduire , & que la vraie force eft plus
dans l'ame que dans les poumons.
Le 28 , les Comédiens françois donnerent
l'Homme à bonnes fortunes. L'acteur
nouveau y repréfenta Moncade , mais il
a l'air trop fenfé pour bien jouer la fatuité;
il a mieux rendu Durval dans le Préjugé à
la mode.
Le 31 , les mêmes Comédiens donnerent
une repréfentation des Troyennes , de
M. de Chateaubrun ; elles leur avoient été
demandées par des perfonnes de diftinction
, & furent applaudies par une affemblée
auffi brillante que nombreuſe. Voici
Pextrait de fon Philoctete .
E 24 Mai le Sr Clavareau de Roche-
L'belle reprit fon début par l'Enfant prodigue
, dont il joua le rolle avec un plein
fuccès ; il n'eft pas poffible de mieux rendre
la fcene de la reconnoiffance : il y mit
toute la vérité , tout le pathétique & tonte
la précifion qu'elle demande ; il paroît
propre aux rolles de fentiment dans le
comique noble ; à un extérieur décent
il joint beaucoup de fineffe , il faifit les
nuances , il fent auffi -bien qu'il détaille ;
toujours attentif à la fcene , il poffede le
jeu muet , & ne fait jamais de contre-fens ,
qualité d'autant plus rare dans un acteur
qui débute , qu'elle manque fouvent au
Comédien qui a le plus d'ufage & qui eſt
le mieux établi.
Le 26 , le même acteur joua Seide dans
Mahomet , tragédie de M. de Voltaire ; il
y a été justement applaudi, Par la maniere
dont il a rendu la grande fituation du
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
quatrieme acte , il a montré qu'on n'a jamais
l'organe foible quand on a l'art de le
conduire , & que la vraie force eft plus
dans l'ame que dans les poumons.
Le 28 , les Comédiens françois donnerent
l'Homme à bonnes fortunes. L'acteur
nouveau y repréfenta Moncade , mais il
a l'air trop fenfé pour bien jouer la fatuité;
il a mieux rendu Durval dans le Préjugé à
la mode.
Le 31 , les mêmes Comédiens donnerent
une repréfentation des Troyennes , de
M. de Chateaubrun ; elles leur avoient été
demandées par des perfonnes de diftinction
, & furent applaudies par une affemblée
auffi brillante que nombreuſe. Voici
Pextrait de fon Philoctete .
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Résumé : COMEDIE FRANÇOISE.
En mai, l'acteur Clavareau de Roche-Lebelle se distingue au sein de la troupe de la Comédie Française. Le 24 mai, il incarne l'Enfant prodigue avec succès, notamment dans la scène de la reconnaissance, où il montre une grande vérité, un pathétique et une précision. Il est particulièrement adapté aux rôles de sentiment dans le comique noble, grâce à sa finesse et son attention aux nuances. Le 26 mai, il joue Seide dans la tragédie 'Mahomet' de Voltaire et reçoit des applaudissements pour sa gestion du quatrième acte, démontrant que la force vocale véritable réside dans l'âme plutôt que dans les poumons. Le 28 mai, il interprète Moncade dans 'L'Homme à bonnes fortunes', mais son apparence trop sérieuse ne convient pas au rôle de fat. Il est plus convaincant dans le rôle de Durval dans 'Le Préjugé à la mode'. Le 31 mai, la troupe présente 'Les Troyennes' de Chateaubrun à la demande de personnes distinguées et reçoit des applaudissements d'une assemblée nombreuse et brillante.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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294
p. 180-196
EXTRAIT DE PHILOCTETE.
Début :
Ulysse & Pyrrhus accompagnés de Démas, ouvrent la scene, qui est dans l'isle [...]
Mots clefs :
M. de Chateaubrun, Dieux, Amour, Grecs, Guerrier, Gloire, Héros, Seigneur, Comédie-Française
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT DE PHILOCTETE.
EXTRAIT DE PHILOCTETE.
Ulyffe & Pyrrhus accompagnés de Démas
, ouvrent la fcene , qui eft dans l'ifle
de Lemnos , à vue de la caverne qui fert
de retraite à Philoctete . Le premier dit au
fils d'Achille , que Philoctete refpire dans
ce defert affreux , & que les Grecs ne peuvent
triompher de Troye fans le bras de ce
guerrier , uni à la valeur de Pyrrhus. Les
Dieux l'ont déclaré par la bouche de Calchas'
; cet Oracle eft un arrêt dont on ne
peut appeller. Si Philoctete n'eft ramené
JUIN. 1755. 181
dans l'armée , elle va périr dans l'opprobre
& dans la mifere. Pyrrhus impatient veut
courir vers Philoctete , mais Ulyffe le retient
, & l'inftruit du jufte courroux de ce
Prince contre les Grecs . Il lui apprend que
dès les premiers jours du fiége d'Ilion ,
Un Troyen le bleffa d'un dard envenimé
Par d'horribles douleurs le poiſon ſe déclare :
Mais fon ardeur s'éteint dans un profond fommeil,
Et jamais la douleur ne fuccéde au réveil.
A peine ce guerrier revoit-il la lumière ,
Qu'il retrouve fa voix &. fa force premiere ;
Jufqu'à d'autres accès fans ceffe renaiſſans ,
L'art épuifa fur lui fes fecours impuiffans.
Ce mal cruel rendit Philoctete fi farouche
qu'il devint infupportable à tous les
chefs , & particulierement aux Atrides
qu'il accabloit de reproches amers. Le Roi
d'Itaque , pour les en délivrer , joua le mécontent,
engagea Philoctete à le fuivre dans
l'ifle de Lemnos où il feignit de fe retirer ,
& l'abandonna feul dans ce defert pendant
fon fommeil. Ulyffe , après ce récit
recommande à Pyrrhus de ne pas le nommer
il lui confeille , pour arracher ce héros
de fa retraite , de feindre que la tempête
l'a pouflé fur ce rivage , qu'il à quitté
182 MERCURE DE FRANCE.
le camp des Grecs , & qu'il retourne à Scyros
, révolté contre un fiége fi lent , & indigné
de l'avarice fordide des chefs qui
ont fruftré fa valeur de fes droits . Pyrrhus
réfifte d'abord à ce confeil , la feinte répugne
à fon grand coeur ; mais Ulyffe lui
en fait fentir la néceffité & s'éloigne
pour le laiffer agir .
›
Pyrrhus refte avec Démas , & s'écrie en
jettant les regards fur l'entrée de la caverne
,
Mon oeil foutient à peine
Cet horrible tableau de la miſere humaine ;
Quelques vafes groffiers que le befoin conftruit ,
Des feuilles , des lambeaux qui lui fervent de lit.
Il voit fortir du fond de cet antre fauvage
une jeune beauté ; il eft frappé de
fes charmes , il l'aborde , & apprend d'elle
que fon nom eft Sophie , & qu'elle eft la
fille de Philoctete. Så tendreffe l'a conduite
dans cette ifle déferte pour y partager
le malheur de fon pere ; elle y aborda par
un naufrage. Nous allions périr , dit- elle ,
Hercule nous fecourut .
Il retint dans nos coeurs notre ame fugitive ,
Et fon bras bienfaiſant nous pouffa fur la rive.
Nous appellons mon pere , il s'avance vers nous.
Que n'éprouvai -je point dans un moment fi doux !
Avec quelle tendreffe il efluya mes larmes ↓
JUIN.
183 1755.
Combien für mon état témoigna-t- il d'allarmes !
Quels mouvemens confus de joie & de pitié ,
De fanglots mutuels qu'exhaloit l'amitié !
Les périls de la mer , mes craintes , ma mifere ,
J'oubliai tout , Seigneur , en embraffant mon pere
;
Voilà le langage naïf de la nature. Les
vers les plus pompeux valent - ils ceux
qu'elle infpire ? Cette fimplicité charmante
qui rend fi bien le fentiment , n'eſtelle
pas la vraie éloquence ? Pyrrhus témoigne
le defir qu'il a de voir Philoctete
Sophie répond, qu'armé d'un arc qui pourvoit
à leur fubfiftance , il erre dans les
bois , & qu'elle va le chercher. Pyrrhus
devant Démas fait éclater pour Sophie une
pitié qui laiffe entrevoir le premier trait
de l'amour. Démas lui repréfente qu'il ne
doit s'occuper que du foin de rendre Philoctete
aux Grecs prêts à périr.
Philoctete paroît avec Sophie , & marque
fa furprife à Pyrrhus , qu'il n'a jamais
vu , de le voir dans des lieux fi fauvages.
11 exprime en même tems fon reffentiment
contre les chefs de la Grece , & leur ingratitude
, par ces deux vers juftement applaudis
,
Les bienfaits n'avoient pu m'attacher les Atrides
:
Je fous apprivoifer jufqu'aux monftres avides.
184 MERCURE DE FRANCE.
Pyrrhus fe nomme ; Philoctere montre
une joie très- vive de voir en lui le fils
d'Achille dont il a toujours été l'ami ; mais
apprenant la mort de ce héros par la bouche
de fon fils , il s'écrie avec douleur
2
Achille eft mort , grands Dieux , & les Atrides
vivent
! Y
7 25377
Pyrrhus s'offre à conduire Philoctete &
fa fille dans leur patrie. Ce guerrier y
confent ; mais dans le moment qu'il veut
partir , il eft arrêté par un accès de fon
mal , qui l'oblige à rentrer dans fon antre
, & qui termine le premier acte. Y
101-20
Pyrrhus ouvre le fecond acte par ce beau
monologue , qui peint avec des couleurs
fi touchantes l'état de mifere & de douleur
où il vient de voir Philoctete dans la
caverne , ayant près de lui fa fille qui arrofoit
fes mains de larmes. Quel contraſte ,
dit- il , avec l'éducation qu'on nous donne !
p , cody courqu
"P
On écarte de nous juſqu'à l'ombre des maux
On n'offre à nos regards que de fiants tableaux
Pour ne point nous déplaire , on nous cache à
nous - mêmes ; ovo zng , ol mbase C
On ne nous entretient que de grandeurs fupre
-kot mes.unim un saciera'n aistroid as S11
On ajoûte à nos noms des noms ambitieux :
Autant que l'on le peut on fait de nous des Dieur.
JUIN.
185
1755 .
Victimes des flateurs , malheureux que nous fom
mes ,
Que ne nous apprend-t-on que les Rois font des
hommes !
·Démas furvient ; il exhorte Pyrrhus à
diffimuler encore pour engager Philoctete
à partir. La générofité de Pyrrhus attendri
s'en offenfe , & marque un vrai remords
d'avoir employé la feinte . Philoctete paroît
avec Sophie , & veut fe rendre au rivage.
Pyrrhus l'arrête. Philoctete furpris , lui en
demande la raifon . Le fatal fecret échappe
de la bouche du fils d'Achille, qui rougit de
commettre une perfidie , & lui déclare
qu'il le méne aux Atrides . A cet aveu le Roi
d'Eubée devient furieux. Pyrrhus l'inftruit
de la pofition des Grecs , & du befoin
qu'ils ont de fon bras pour renverfer
Troye , & s'arracher à une mort honteuſe ;
il le preffe en même tems d'immoler fon
reffentiment au falut de l'Etat. Philoctete
refufe de fe rendre , & fait des imprécations
contre Ulyffe & les autres chefs. Pyrrhus
lui répond , qu'il ne peut fe venger plus
noblement d'eux qu'en faifant triompher
fa patrie , & qu'en voyant Agamemnon
lui-même ramper à fes pieds. Philoctete
perfifte à ne point prêter fon fecours au
Roi d'Argos ; mais il propofe à Pyrrhus
186 MERCURE DE FRANCE.
d'aller combattre avec leurs foldats , & d'a
voir feuls la gloire de vaincre les Troyens.
Pyrrhus approuve ce parti ; mais comme il
entend du bruit , il s'éloigne avec Philoctete.
Démas qui les écoutoit , veut inftruire
Ulyffe du projet que ces deux guerriers
viennent de former ; mais le Roi d'Itaque
lui dit que les Grecs cachés avec lui fous
un rocher l'ont entendu , qu'ils ont réſolu
de les en punir ; & que s'il n'eût retenu
leur fureur , ils alloient fondre fur eux &
les immoler. Démas ajoûte qu'il craint encore
plus la fille que le pere . Ulyffe lui en
demande la raifon ; l'autre lui répond
que Pyrrhus adore Sophie."
›
Ulyffe en paroit allarmé , & quitte la
fcene en difant qu'il va voir avec les
Grecs ce qu'on doit oppofer à ce fatal
amour qui peut tout détruire.
I
Ulyffe ouvre le troifieme acte avec Démas.
Il tient un papier à la main , & dit à
Démas que les Grecs veulent entraîner
au camp Philoctete mort ou vivant , que
tel eft l'arrêt qu'ils viennent de figner ; &
que fi ce Prince refifte , ils veulent exterminer
fa famille , & faire fubir à fa fille
le fort d'Iphigénie . Ulyffe craint que Pyrrhus
ne prenne leur défenſe ; mais Démas
lui répond que fa résistance fera vaine , &
JUIN 1755. 187
que les Grecs viennent d'envelopper Philoctete
de toutes parts:
Pyrrhus paroît ; Ulyffe le preffe de partir
fans Philoctete , en difant qu'il ne veut
pas lui-même qu'on emmene ce guerrier au
camp . Pyrrhus s'excufe fur la pitié. Ulyffe
lui dit que la pitié dont il eft ému , n'eft
qu'un amour déguifé. Le premier répond
que l'amour n'eft pas un crime. Non , réplique
le Roi d'Itaque ,
Quand élevant le coeur , loin de l'humilier ,
Aux régles du devoir l'amour fçait le plier ,
Et ne l'enyvre point de fon poifon funefte :
Il eft fublime alors , la fource en eft céleste ,
Et c'eſt de cet amour que les Dieux font heureux.
Mais , Seigneur , quand l'amour , le bandeau fur
les yeux ,
Enchaîne le devoir aux pieds d'une maîtreffe ,
A des coeurs généreux n'infpire que foibleffe ,
Tient fous un joug d'airain leur courage foumis ,
Leur fait facrifier gloire , patrie , amis ,
Et des droits les plus faints rompt le noeud légitime
;
Alors , Seigneur , alors cet amour eft an crime.
Pyrrhus veut fe juftifier en difant qu'Achille
aima comme lui . Ulyffe lui repart
qu'il n'aima point aux dépens de fa gloire ,
& qu'il quitta tout pour elle. Il lui fait en
188 MERCURE DE FRANCE.
même tems une peinture pathétique de
l'état affreux où l'armée des Grecs fe trouve
réduite , ajoûtant qu'il va la joindre ,
& mourir fur le tombeau d'Achille , tandis
que fon fils refte tranquille à Lemnos
par l'amour. Ce trait réveille le
courage de Pyrrhus , & l'adroit Ulyffe pour
achever de le déterminer à le fuivre , lui
rapporte ainfi les dernieres paroles d'Achille
expirant , après qu'il l'eut arraché
lui-même des mains des Troyens .
enchaîné
Cher ami , me dit-il , cache-moi tes alarmes ;
Et laiffe- moi mourir parmi le bruit des armes. T
Par tes foins je fuis libre , & je refpire encor
Tu m'épargnes l'affront dont je flétris Hector.:
Que mon fils à jamais en garde la mémoire ,
Et te rende les foins que tu prens de ma gloire.
Sers-lui de pere , amis qu'il te ferve de fils . ' ; i
Voilà fes derniers voeux ; les avez-vous remplis
:
Pyrrhus eft prêt à partir , quand la préfence
de Sophie le retient il fe trouve
alors entre la gloire & l'amour, La premiere
foutenue par l'art d'Ulyffe , femble
d'abord l'emporter ; mais l'amour mieux
déféndu par les larmes de Sophie ', triomphe
enfin de Pyrrhus , & l'entraîne de fon
côté. Ce jeune héros en tournant les yeux
vers elle , s'écrie :
JUIN.
183 1755.
Quoi vous pleurez , courons à votre pere.
Il vole fur les pas de Sophie. Ulyffe fo
retire avec Démas , en difant que Pyrrhus
va fe perdre & combler le malheur de
Philoctete & de fa fille . Ce troifiéme Acte
eft d'une grande beauté .
Z Sophie commence le quatriéme Acte avec
Palmire fa gouvernante , & lui dit que fans
Pyrrhus les Grecs auroient furpris & enlevé
fon pere. Elle avoue avec cette ingé
nuité qui accompagne l'innocence , que
ce jeune héros lui a déclaré qu'il l'adoroit
, & qu'elle y a été fenfible par reconnoiffance
pour
le fervice qu'il a rendu à
fon pere. Palmire l'avertit de redouter les
effets de fa beauté . Je n'ai pas oublié , lui
répond Sophie , vos fages leçons.
Hélas ! cette beauté , ce charme fouverain ;
Dont le fexe s'honore , & qui le rend fi vain
Si la vertu n'en fait un ornement célefte ,
Eft , des Dieux irrités , le don le plus funefte.
" Philoctete arrive , & dit à fa fille qu'il
faut fauver l'honneur d'un pere infortuné ,
& lui remet un poignard. Sophie lui demande
quel ufage elle en doit faire : il répond
qu'il a vécu comme Hercule , &
qu'il veut mourir de même , ajoutant que
Le poifon peut encore lui porter une at
190 MERCURE DE FRANCE.
teinte , que les Grecs pourroient faifir, ce
moment pour le charger de fers , & qu'elle
doit le fouftraire à leur fureur , en faisant
ce qu'Hercule exigea de fon fils. Elle frémit
de commettre un parricide . Philoctete
defeſpéré de ce refus , s'écrie
s'écrie que dans
cette extrêmité il va lancer ces flèches redoutables
qui portent d'inévitables coups ,
& qu'il va commencer par Pyrrhus . Sophie
allarmée l'arrête , & lui apprend que
c'eft le fecours de Pyrrhus qui l'a dérobé à
l'audace des Grecs , & qu'elle en eft aimée.
Philoctete raffuré par l'amour de Pyrrhus
pour fa fille , la preffe de lui déclarer que
La flamme eft connue de fon pere , qui l'approuve
; mais que fi ce jeune guerrier ne
fe joint à lui pour les venger ,
elle rejette
avec dédain les offres de fa foi. Sophie le
lui jure , en lui difant tendrement qu'après
avoir partagé fa gloire , il eft jufte qu'elle
partage fon affront. Philoctete qui voit
venir Pyrrhus, rentre dans fon afyle , & recommande
à Sophie d'éprouver le coeur de
fon amant.
Pyrrhus dit à Sophie qu'il a fait retirer
les foldats , mais qu'elle engage fon pere
à remplir leurs voeux ; que le falut public
doit être un de fes bienfaits,, & qu'il ofe à
çe motif preffant joindre l'intérêt de fon
amour. Elle lui répond que Philoctete eft
JUI N. 1755. 191*
·
inftruit de fes feux , qu'il confent que
l'hymen les couronne , mais qu'il veut que
ces noeuds foient formés dans fes états .
Pyrrhus lui réplique en foupirant , que la
Grece l'implore , & qu'il ne peut l'abandonner,
Elle l'interrompt en lui difant que
puifque l'intérêt de fon pere & le fien lui
font moins chers que celui des Atrides ,
elle rend à fon amour les fermens qui le
lient. Seigneur , ajoute- t -elle ':
Plus grands dans nos deferts que vous ,
trône ,
fur votre
L'honneur nous tiendra lieu de fceptre & de cou
ronne.
Partez , laiffez -nous feuls dans ces fauvages lieux
La vertų pour témoin n'a befoin que des Dieux..
Pyrrhus lui fait entendre que Philoctete
a tout à craindre de la rage des Grecs. Sophie
répond que fa main va mettre un
frein à leurs droits prétendus , que fon
pere vient de l'armer d'un poignard , &
que fi les Grecs s'avançoient pour le pren
are , elle a juré de le plonger dans le coeur
de Philoctete
,› pour prévenir fa honte.
Pourriez-vous , lui dit Pyrrhus , verfer le
fang d'un pere ? elle s'écrie :
Que fçais-je leurs fureurs me ferviront de guid
des ? >
191 MERCURE DE FRANCE.
Un mortel fans honneur n'eſt plus qu'un monſtrë
affreux ,
Que tout autre homme abhorre , & qui craint
tous les yeux ;
Chaque regard l'infulte , & réveillant fa honte ;
De fon honneur perdu , lui redemande compte
Lui fait baiffer la vûe , & femble l'avertir
De fuir dans le tombeau qui devroit l'engloutir.
Pyrrhus frappé de ce tableau promet à
Sophie de périr plutôt mille fois que de
fouffrir que leurs foldats en viennent à
cette violence . Elle le quitte en lui re-.
commandant ainſi les jours de fon pere :
Etes-vous à l'abri du deſtin qui l'accable ›
Si les hommes , hélas ! réfléchiffoient fur eux ;
Ils répandroient des pleurs fur tous les malheu
reux.
Ulyffe vient apprendre à Pyrrhus que
les Troyens inftruits de l'oracle , ont profité
du tems de fon abſence pour attaquer
le camp , qu'ils font près de forcer fi luimême
ne vole au fecours des Grecs ; qu'ils
ont déja bleffé plufieurs chefs de l'armée
& qu'ils ont fouillé dans le tombeau d'Achille
, & difperfé les reftes de fon corps ,
qui font devenus la proie des chiens & des
vautours.
JUIN. 1755. 193
yautours. Pyrrhus devient furieux à cette
nouvelle , & veut voler au camp . Ulyffe
infifte alors pour enlever Philoctete , &
montre les foldats qui l'ont fuivi pour
cette exécution. Mais Pyrrhus s'écrie qu'ils
n'avancent point , que Philoctete eft armé
des traits du defefpoir , & que fa mort va
tromper leur eſpérance. Il termine le quatriéme
acte , en difant qu'il va tenter un
dernier effort auprès du pere de Sophie ,
& qu'après il s'abandonne tout entier aux
confeils d'Ulyffe.
Pyrrhus paroît d'abord feul au cinquiéme
acte , & dit à Ulyffe qui furvient , qu'il
n'a pu fléchir Philoctete. Le Roi d'Itaque
lui montre l'arrêt que la Grece a dicté contre
ce guerrier indomptable. Pyrrhus lui
repréfente qu'en livrant Philoctete à la
mort on venge la patrie , mais qu'on ne
la fauve pas. Ulyffe répond qu'avant
d'exécuter l'arrêt , il veut tout effayer , &
qu'il veut voir Philoctete , qui arrive dans
ce moment avec Sophie. C'eft ici cette admirable
fcene qui forme non feulement
un dénouement des plus heureux , mais
qui fait encore elle feule un des plus beaux
cinquiémes actes qui foient au théâtre :
il faudroit la tranfcrire toute entiere pour
en faire fentir toutes les beautés . Philoctete
à l'afpect d'Ulyffe s'écrie dans fa fu-
II.Vol. I
194 MERCURE DE FRANCE.
reur qu'on lui rende fes armes. Ce der
nier lui donne les fiennes. Philoctete veut
l'en percer , mais Pyrrhus l'arrête . Ce
guerrier les brave par ces deux vers , dont
le dernier eft digne de Corneille :
Un oracle accablant vous à glacés d'effroi.
Vous vous trouvez preffés entre les Dieux & moi.
Ulyffe lui dit de ne punir que lai , &
d'avoir pitié de fa patrie :
Graces à mon exil , cruel je n'en ai plus ,
Lui répond Philoctete :
•
Je voue à vos fureurs les Grecs que je détefte ;
Dieux ! épargnez Pyrrhus & foudroyez le refte .
Le fils d'Achille eſt révolté de cette imprécation
; mais Ulyffe combat alors Philoctete
avec tous les traits de fon éloquen-.
ce. Il l'attaque par fon foible , c'eſt - à- dire
par l'endroit le plus fenfible à fa gloire.p
Vous ofez (lui dit- il ) confpirer contre votre pays...
Quand un homme a formé ce projet parricide ,
On dévoue aux tourmens ce citoyen perfide :
Son opprobre s'attache aux flancs qui l'ont posté ,
Et fa honte le fuit dans fa poftérité .
A fes concitoyens fon nom eft exécrable ;
On recherche avec foin les traces dy coupable.
JUIN. 1755. 195
Rebut de l'univers , à foi- même odieux :
Il vit errant , fans loix , fans amis & fans Dieux.
Son fupplice aux mortels offre un exemple horri
ble ;
Le tombeau lui refuſe un afyle paifible ,
Et la terre abandonne aux monftres dévorans ,
De fon corps déchiré , les reftes expirans.
Ses manes agités d'une éternelle rage ,
En vain parmi les morts fe cherchent un paffage ;
L'enfer même l'enfer fe rend fourd à fes cris.
Si vous l'ofez , cruel , vengez - vous à ce prix.
Philoctete eft effrayé de cette image.
Ulyffe pour achever de le defarmer , &
pour frapper le dernier coup , preffe Pyrrhus
de partir. Renvoyez , dit - il , des
vaiffeaux qui puiffent tranfporter ce héros
par-tout où il voudra aller :
Maître du fort des Grecs , qu'il le foit de lui- mê
me.
Emmenez tous nos Grecs ; je refte près de lui.
Philoctete à ces mots s'écrie :
Ulyffe près de moi ! retire-toi barbare .
Ulyffe lui fait cette réplique admirable ,
qui le met pour ainfi dire au pied du mur .
Si votre coeur pour moi ne peut être adouci ,
Suivez les Grecs , Seigneur , & me laiffez ici.
I ij
196 MERCURE DE FRANCE.
Philoctete à ce trait demeure interdit.
Sa fille fe joint à Ulyffe , & embraſſe ſes
genoux pour le fléchir . Ce guerrier attendri
par les larmes de fa fille , céde à cette
derniere inftance . Il lui facrifie fon reffentiment
, conſent de l'unir à Pyrrhus , &
termine la piece en difant :
Le Ciel m'ouvre les yeux fur la vertu d'Ulyffe ,
Et femble m'annoncer la fin de mon fupplice :
En marchant fur les pas au rivage Troyen ,
Nous fuivrons le grand homme & le vrai citoyen.
On ne peut pas conduire ni dénouer
une piece avec plus d'art. Que M. de Châteaubrun
a tiré fur tout un heureux parti
de l'épifode de Sophie ! 'que fon Ulyffe eft
beau ! & que M. de la Noue l'a bien
rendu !
Ulyffe & Pyrrhus accompagnés de Démas
, ouvrent la fcene , qui eft dans l'ifle
de Lemnos , à vue de la caverne qui fert
de retraite à Philoctete . Le premier dit au
fils d'Achille , que Philoctete refpire dans
ce defert affreux , & que les Grecs ne peuvent
triompher de Troye fans le bras de ce
guerrier , uni à la valeur de Pyrrhus. Les
Dieux l'ont déclaré par la bouche de Calchas'
; cet Oracle eft un arrêt dont on ne
peut appeller. Si Philoctete n'eft ramené
JUIN. 1755. 181
dans l'armée , elle va périr dans l'opprobre
& dans la mifere. Pyrrhus impatient veut
courir vers Philoctete , mais Ulyffe le retient
, & l'inftruit du jufte courroux de ce
Prince contre les Grecs . Il lui apprend que
dès les premiers jours du fiége d'Ilion ,
Un Troyen le bleffa d'un dard envenimé
Par d'horribles douleurs le poiſon ſe déclare :
Mais fon ardeur s'éteint dans un profond fommeil,
Et jamais la douleur ne fuccéde au réveil.
A peine ce guerrier revoit-il la lumière ,
Qu'il retrouve fa voix &. fa force premiere ;
Jufqu'à d'autres accès fans ceffe renaiſſans ,
L'art épuifa fur lui fes fecours impuiffans.
Ce mal cruel rendit Philoctete fi farouche
qu'il devint infupportable à tous les
chefs , & particulierement aux Atrides
qu'il accabloit de reproches amers. Le Roi
d'Itaque , pour les en délivrer , joua le mécontent,
engagea Philoctete à le fuivre dans
l'ifle de Lemnos où il feignit de fe retirer ,
& l'abandonna feul dans ce defert pendant
fon fommeil. Ulyffe , après ce récit
recommande à Pyrrhus de ne pas le nommer
il lui confeille , pour arracher ce héros
de fa retraite , de feindre que la tempête
l'a pouflé fur ce rivage , qu'il à quitté
182 MERCURE DE FRANCE.
le camp des Grecs , & qu'il retourne à Scyros
, révolté contre un fiége fi lent , & indigné
de l'avarice fordide des chefs qui
ont fruftré fa valeur de fes droits . Pyrrhus
réfifte d'abord à ce confeil , la feinte répugne
à fon grand coeur ; mais Ulyffe lui
en fait fentir la néceffité & s'éloigne
pour le laiffer agir .
›
Pyrrhus refte avec Démas , & s'écrie en
jettant les regards fur l'entrée de la caverne
,
Mon oeil foutient à peine
Cet horrible tableau de la miſere humaine ;
Quelques vafes groffiers que le befoin conftruit ,
Des feuilles , des lambeaux qui lui fervent de lit.
Il voit fortir du fond de cet antre fauvage
une jeune beauté ; il eft frappé de
fes charmes , il l'aborde , & apprend d'elle
que fon nom eft Sophie , & qu'elle eft la
fille de Philoctete. Så tendreffe l'a conduite
dans cette ifle déferte pour y partager
le malheur de fon pere ; elle y aborda par
un naufrage. Nous allions périr , dit- elle ,
Hercule nous fecourut .
Il retint dans nos coeurs notre ame fugitive ,
Et fon bras bienfaiſant nous pouffa fur la rive.
Nous appellons mon pere , il s'avance vers nous.
Que n'éprouvai -je point dans un moment fi doux !
Avec quelle tendreffe il efluya mes larmes ↓
JUIN.
183 1755.
Combien für mon état témoigna-t- il d'allarmes !
Quels mouvemens confus de joie & de pitié ,
De fanglots mutuels qu'exhaloit l'amitié !
Les périls de la mer , mes craintes , ma mifere ,
J'oubliai tout , Seigneur , en embraffant mon pere
;
Voilà le langage naïf de la nature. Les
vers les plus pompeux valent - ils ceux
qu'elle infpire ? Cette fimplicité charmante
qui rend fi bien le fentiment , n'eſtelle
pas la vraie éloquence ? Pyrrhus témoigne
le defir qu'il a de voir Philoctete
Sophie répond, qu'armé d'un arc qui pourvoit
à leur fubfiftance , il erre dans les
bois , & qu'elle va le chercher. Pyrrhus
devant Démas fait éclater pour Sophie une
pitié qui laiffe entrevoir le premier trait
de l'amour. Démas lui repréfente qu'il ne
doit s'occuper que du foin de rendre Philoctete
aux Grecs prêts à périr.
Philoctete paroît avec Sophie , & marque
fa furprife à Pyrrhus , qu'il n'a jamais
vu , de le voir dans des lieux fi fauvages.
11 exprime en même tems fon reffentiment
contre les chefs de la Grece , & leur ingratitude
, par ces deux vers juftement applaudis
,
Les bienfaits n'avoient pu m'attacher les Atrides
:
Je fous apprivoifer jufqu'aux monftres avides.
184 MERCURE DE FRANCE.
Pyrrhus fe nomme ; Philoctere montre
une joie très- vive de voir en lui le fils
d'Achille dont il a toujours été l'ami ; mais
apprenant la mort de ce héros par la bouche
de fon fils , il s'écrie avec douleur
2
Achille eft mort , grands Dieux , & les Atrides
vivent
! Y
7 25377
Pyrrhus s'offre à conduire Philoctete &
fa fille dans leur patrie. Ce guerrier y
confent ; mais dans le moment qu'il veut
partir , il eft arrêté par un accès de fon
mal , qui l'oblige à rentrer dans fon antre
, & qui termine le premier acte. Y
101-20
Pyrrhus ouvre le fecond acte par ce beau
monologue , qui peint avec des couleurs
fi touchantes l'état de mifere & de douleur
où il vient de voir Philoctete dans la
caverne , ayant près de lui fa fille qui arrofoit
fes mains de larmes. Quel contraſte ,
dit- il , avec l'éducation qu'on nous donne !
p , cody courqu
"P
On écarte de nous juſqu'à l'ombre des maux
On n'offre à nos regards que de fiants tableaux
Pour ne point nous déplaire , on nous cache à
nous - mêmes ; ovo zng , ol mbase C
On ne nous entretient que de grandeurs fupre
-kot mes.unim un saciera'n aistroid as S11
On ajoûte à nos noms des noms ambitieux :
Autant que l'on le peut on fait de nous des Dieur.
JUIN.
185
1755 .
Victimes des flateurs , malheureux que nous fom
mes ,
Que ne nous apprend-t-on que les Rois font des
hommes !
·Démas furvient ; il exhorte Pyrrhus à
diffimuler encore pour engager Philoctete
à partir. La générofité de Pyrrhus attendri
s'en offenfe , & marque un vrai remords
d'avoir employé la feinte . Philoctete paroît
avec Sophie , & veut fe rendre au rivage.
Pyrrhus l'arrête. Philoctete furpris , lui en
demande la raifon . Le fatal fecret échappe
de la bouche du fils d'Achille, qui rougit de
commettre une perfidie , & lui déclare
qu'il le méne aux Atrides . A cet aveu le Roi
d'Eubée devient furieux. Pyrrhus l'inftruit
de la pofition des Grecs , & du befoin
qu'ils ont de fon bras pour renverfer
Troye , & s'arracher à une mort honteuſe ;
il le preffe en même tems d'immoler fon
reffentiment au falut de l'Etat. Philoctete
refufe de fe rendre , & fait des imprécations
contre Ulyffe & les autres chefs. Pyrrhus
lui répond , qu'il ne peut fe venger plus
noblement d'eux qu'en faifant triompher
fa patrie , & qu'en voyant Agamemnon
lui-même ramper à fes pieds. Philoctete
perfifte à ne point prêter fon fecours au
Roi d'Argos ; mais il propofe à Pyrrhus
186 MERCURE DE FRANCE.
d'aller combattre avec leurs foldats , & d'a
voir feuls la gloire de vaincre les Troyens.
Pyrrhus approuve ce parti ; mais comme il
entend du bruit , il s'éloigne avec Philoctete.
Démas qui les écoutoit , veut inftruire
Ulyffe du projet que ces deux guerriers
viennent de former ; mais le Roi d'Itaque
lui dit que les Grecs cachés avec lui fous
un rocher l'ont entendu , qu'ils ont réſolu
de les en punir ; & que s'il n'eût retenu
leur fureur , ils alloient fondre fur eux &
les immoler. Démas ajoûte qu'il craint encore
plus la fille que le pere . Ulyffe lui en
demande la raifon ; l'autre lui répond
que Pyrrhus adore Sophie."
›
Ulyffe en paroit allarmé , & quitte la
fcene en difant qu'il va voir avec les
Grecs ce qu'on doit oppofer à ce fatal
amour qui peut tout détruire.
I
Ulyffe ouvre le troifieme acte avec Démas.
Il tient un papier à la main , & dit à
Démas que les Grecs veulent entraîner
au camp Philoctete mort ou vivant , que
tel eft l'arrêt qu'ils viennent de figner ; &
que fi ce Prince refifte , ils veulent exterminer
fa famille , & faire fubir à fa fille
le fort d'Iphigénie . Ulyffe craint que Pyrrhus
ne prenne leur défenſe ; mais Démas
lui répond que fa résistance fera vaine , &
JUIN 1755. 187
que les Grecs viennent d'envelopper Philoctete
de toutes parts:
Pyrrhus paroît ; Ulyffe le preffe de partir
fans Philoctete , en difant qu'il ne veut
pas lui-même qu'on emmene ce guerrier au
camp . Pyrrhus s'excufe fur la pitié. Ulyffe
lui dit que la pitié dont il eft ému , n'eft
qu'un amour déguifé. Le premier répond
que l'amour n'eft pas un crime. Non , réplique
le Roi d'Itaque ,
Quand élevant le coeur , loin de l'humilier ,
Aux régles du devoir l'amour fçait le plier ,
Et ne l'enyvre point de fon poifon funefte :
Il eft fublime alors , la fource en eft céleste ,
Et c'eſt de cet amour que les Dieux font heureux.
Mais , Seigneur , quand l'amour , le bandeau fur
les yeux ,
Enchaîne le devoir aux pieds d'une maîtreffe ,
A des coeurs généreux n'infpire que foibleffe ,
Tient fous un joug d'airain leur courage foumis ,
Leur fait facrifier gloire , patrie , amis ,
Et des droits les plus faints rompt le noeud légitime
;
Alors , Seigneur , alors cet amour eft an crime.
Pyrrhus veut fe juftifier en difant qu'Achille
aima comme lui . Ulyffe lui repart
qu'il n'aima point aux dépens de fa gloire ,
& qu'il quitta tout pour elle. Il lui fait en
188 MERCURE DE FRANCE.
même tems une peinture pathétique de
l'état affreux où l'armée des Grecs fe trouve
réduite , ajoûtant qu'il va la joindre ,
& mourir fur le tombeau d'Achille , tandis
que fon fils refte tranquille à Lemnos
par l'amour. Ce trait réveille le
courage de Pyrrhus , & l'adroit Ulyffe pour
achever de le déterminer à le fuivre , lui
rapporte ainfi les dernieres paroles d'Achille
expirant , après qu'il l'eut arraché
lui-même des mains des Troyens .
enchaîné
Cher ami , me dit-il , cache-moi tes alarmes ;
Et laiffe- moi mourir parmi le bruit des armes. T
Par tes foins je fuis libre , & je refpire encor
Tu m'épargnes l'affront dont je flétris Hector.:
Que mon fils à jamais en garde la mémoire ,
Et te rende les foins que tu prens de ma gloire.
Sers-lui de pere , amis qu'il te ferve de fils . ' ; i
Voilà fes derniers voeux ; les avez-vous remplis
:
Pyrrhus eft prêt à partir , quand la préfence
de Sophie le retient il fe trouve
alors entre la gloire & l'amour, La premiere
foutenue par l'art d'Ulyffe , femble
d'abord l'emporter ; mais l'amour mieux
déféndu par les larmes de Sophie ', triomphe
enfin de Pyrrhus , & l'entraîne de fon
côté. Ce jeune héros en tournant les yeux
vers elle , s'écrie :
JUIN.
183 1755.
Quoi vous pleurez , courons à votre pere.
Il vole fur les pas de Sophie. Ulyffe fo
retire avec Démas , en difant que Pyrrhus
va fe perdre & combler le malheur de
Philoctete & de fa fille . Ce troifiéme Acte
eft d'une grande beauté .
Z Sophie commence le quatriéme Acte avec
Palmire fa gouvernante , & lui dit que fans
Pyrrhus les Grecs auroient furpris & enlevé
fon pere. Elle avoue avec cette ingé
nuité qui accompagne l'innocence , que
ce jeune héros lui a déclaré qu'il l'adoroit
, & qu'elle y a été fenfible par reconnoiffance
pour
le fervice qu'il a rendu à
fon pere. Palmire l'avertit de redouter les
effets de fa beauté . Je n'ai pas oublié , lui
répond Sophie , vos fages leçons.
Hélas ! cette beauté , ce charme fouverain ;
Dont le fexe s'honore , & qui le rend fi vain
Si la vertu n'en fait un ornement célefte ,
Eft , des Dieux irrités , le don le plus funefte.
" Philoctete arrive , & dit à fa fille qu'il
faut fauver l'honneur d'un pere infortuné ,
& lui remet un poignard. Sophie lui demande
quel ufage elle en doit faire : il répond
qu'il a vécu comme Hercule , &
qu'il veut mourir de même , ajoutant que
Le poifon peut encore lui porter une at
190 MERCURE DE FRANCE.
teinte , que les Grecs pourroient faifir, ce
moment pour le charger de fers , & qu'elle
doit le fouftraire à leur fureur , en faisant
ce qu'Hercule exigea de fon fils. Elle frémit
de commettre un parricide . Philoctete
defeſpéré de ce refus , s'écrie
s'écrie que dans
cette extrêmité il va lancer ces flèches redoutables
qui portent d'inévitables coups ,
& qu'il va commencer par Pyrrhus . Sophie
allarmée l'arrête , & lui apprend que
c'eft le fecours de Pyrrhus qui l'a dérobé à
l'audace des Grecs , & qu'elle en eft aimée.
Philoctete raffuré par l'amour de Pyrrhus
pour fa fille , la preffe de lui déclarer que
La flamme eft connue de fon pere , qui l'approuve
; mais que fi ce jeune guerrier ne
fe joint à lui pour les venger ,
elle rejette
avec dédain les offres de fa foi. Sophie le
lui jure , en lui difant tendrement qu'après
avoir partagé fa gloire , il eft jufte qu'elle
partage fon affront. Philoctete qui voit
venir Pyrrhus, rentre dans fon afyle , & recommande
à Sophie d'éprouver le coeur de
fon amant.
Pyrrhus dit à Sophie qu'il a fait retirer
les foldats , mais qu'elle engage fon pere
à remplir leurs voeux ; que le falut public
doit être un de fes bienfaits,, & qu'il ofe à
çe motif preffant joindre l'intérêt de fon
amour. Elle lui répond que Philoctete eft
JUI N. 1755. 191*
·
inftruit de fes feux , qu'il confent que
l'hymen les couronne , mais qu'il veut que
ces noeuds foient formés dans fes états .
Pyrrhus lui réplique en foupirant , que la
Grece l'implore , & qu'il ne peut l'abandonner,
Elle l'interrompt en lui difant que
puifque l'intérêt de fon pere & le fien lui
font moins chers que celui des Atrides ,
elle rend à fon amour les fermens qui le
lient. Seigneur , ajoute- t -elle ':
Plus grands dans nos deferts que vous ,
trône ,
fur votre
L'honneur nous tiendra lieu de fceptre & de cou
ronne.
Partez , laiffez -nous feuls dans ces fauvages lieux
La vertų pour témoin n'a befoin que des Dieux..
Pyrrhus lui fait entendre que Philoctete
a tout à craindre de la rage des Grecs. Sophie
répond que fa main va mettre un
frein à leurs droits prétendus , que fon
pere vient de l'armer d'un poignard , &
que fi les Grecs s'avançoient pour le pren
are , elle a juré de le plonger dans le coeur
de Philoctete
,› pour prévenir fa honte.
Pourriez-vous , lui dit Pyrrhus , verfer le
fang d'un pere ? elle s'écrie :
Que fçais-je leurs fureurs me ferviront de guid
des ? >
191 MERCURE DE FRANCE.
Un mortel fans honneur n'eſt plus qu'un monſtrë
affreux ,
Que tout autre homme abhorre , & qui craint
tous les yeux ;
Chaque regard l'infulte , & réveillant fa honte ;
De fon honneur perdu , lui redemande compte
Lui fait baiffer la vûe , & femble l'avertir
De fuir dans le tombeau qui devroit l'engloutir.
Pyrrhus frappé de ce tableau promet à
Sophie de périr plutôt mille fois que de
fouffrir que leurs foldats en viennent à
cette violence . Elle le quitte en lui re-.
commandant ainſi les jours de fon pere :
Etes-vous à l'abri du deſtin qui l'accable ›
Si les hommes , hélas ! réfléchiffoient fur eux ;
Ils répandroient des pleurs fur tous les malheu
reux.
Ulyffe vient apprendre à Pyrrhus que
les Troyens inftruits de l'oracle , ont profité
du tems de fon abſence pour attaquer
le camp , qu'ils font près de forcer fi luimême
ne vole au fecours des Grecs ; qu'ils
ont déja bleffé plufieurs chefs de l'armée
& qu'ils ont fouillé dans le tombeau d'Achille
, & difperfé les reftes de fon corps ,
qui font devenus la proie des chiens & des
vautours.
JUIN. 1755. 193
yautours. Pyrrhus devient furieux à cette
nouvelle , & veut voler au camp . Ulyffe
infifte alors pour enlever Philoctete , &
montre les foldats qui l'ont fuivi pour
cette exécution. Mais Pyrrhus s'écrie qu'ils
n'avancent point , que Philoctete eft armé
des traits du defefpoir , & que fa mort va
tromper leur eſpérance. Il termine le quatriéme
acte , en difant qu'il va tenter un
dernier effort auprès du pere de Sophie ,
& qu'après il s'abandonne tout entier aux
confeils d'Ulyffe.
Pyrrhus paroît d'abord feul au cinquiéme
acte , & dit à Ulyffe qui furvient , qu'il
n'a pu fléchir Philoctete. Le Roi d'Itaque
lui montre l'arrêt que la Grece a dicté contre
ce guerrier indomptable. Pyrrhus lui
repréfente qu'en livrant Philoctete à la
mort on venge la patrie , mais qu'on ne
la fauve pas. Ulyffe répond qu'avant
d'exécuter l'arrêt , il veut tout effayer , &
qu'il veut voir Philoctete , qui arrive dans
ce moment avec Sophie. C'eft ici cette admirable
fcene qui forme non feulement
un dénouement des plus heureux , mais
qui fait encore elle feule un des plus beaux
cinquiémes actes qui foient au théâtre :
il faudroit la tranfcrire toute entiere pour
en faire fentir toutes les beautés . Philoctete
à l'afpect d'Ulyffe s'écrie dans fa fu-
II.Vol. I
194 MERCURE DE FRANCE.
reur qu'on lui rende fes armes. Ce der
nier lui donne les fiennes. Philoctete veut
l'en percer , mais Pyrrhus l'arrête . Ce
guerrier les brave par ces deux vers , dont
le dernier eft digne de Corneille :
Un oracle accablant vous à glacés d'effroi.
Vous vous trouvez preffés entre les Dieux & moi.
Ulyffe lui dit de ne punir que lai , &
d'avoir pitié de fa patrie :
Graces à mon exil , cruel je n'en ai plus ,
Lui répond Philoctete :
•
Je voue à vos fureurs les Grecs que je détefte ;
Dieux ! épargnez Pyrrhus & foudroyez le refte .
Le fils d'Achille eſt révolté de cette imprécation
; mais Ulyffe combat alors Philoctete
avec tous les traits de fon éloquen-.
ce. Il l'attaque par fon foible , c'eſt - à- dire
par l'endroit le plus fenfible à fa gloire.p
Vous ofez (lui dit- il ) confpirer contre votre pays...
Quand un homme a formé ce projet parricide ,
On dévoue aux tourmens ce citoyen perfide :
Son opprobre s'attache aux flancs qui l'ont posté ,
Et fa honte le fuit dans fa poftérité .
A fes concitoyens fon nom eft exécrable ;
On recherche avec foin les traces dy coupable.
JUIN. 1755. 195
Rebut de l'univers , à foi- même odieux :
Il vit errant , fans loix , fans amis & fans Dieux.
Son fupplice aux mortels offre un exemple horri
ble ;
Le tombeau lui refuſe un afyle paifible ,
Et la terre abandonne aux monftres dévorans ,
De fon corps déchiré , les reftes expirans.
Ses manes agités d'une éternelle rage ,
En vain parmi les morts fe cherchent un paffage ;
L'enfer même l'enfer fe rend fourd à fes cris.
Si vous l'ofez , cruel , vengez - vous à ce prix.
Philoctete eft effrayé de cette image.
Ulyffe pour achever de le defarmer , &
pour frapper le dernier coup , preffe Pyrrhus
de partir. Renvoyez , dit - il , des
vaiffeaux qui puiffent tranfporter ce héros
par-tout où il voudra aller :
Maître du fort des Grecs , qu'il le foit de lui- mê
me.
Emmenez tous nos Grecs ; je refte près de lui.
Philoctete à ces mots s'écrie :
Ulyffe près de moi ! retire-toi barbare .
Ulyffe lui fait cette réplique admirable ,
qui le met pour ainfi dire au pied du mur .
Si votre coeur pour moi ne peut être adouci ,
Suivez les Grecs , Seigneur , & me laiffez ici.
I ij
196 MERCURE DE FRANCE.
Philoctete à ce trait demeure interdit.
Sa fille fe joint à Ulyffe , & embraſſe ſes
genoux pour le fléchir . Ce guerrier attendri
par les larmes de fa fille , céde à cette
derniere inftance . Il lui facrifie fon reffentiment
, conſent de l'unir à Pyrrhus , &
termine la piece en difant :
Le Ciel m'ouvre les yeux fur la vertu d'Ulyffe ,
Et femble m'annoncer la fin de mon fupplice :
En marchant fur les pas au rivage Troyen ,
Nous fuivrons le grand homme & le vrai citoyen.
On ne peut pas conduire ni dénouer
une piece avec plus d'art. Que M. de Châteaubrun
a tiré fur tout un heureux parti
de l'épifode de Sophie ! 'que fon Ulyffe eft
beau ! & que M. de la Noue l'a bien
rendu !
Fermer
Résumé : EXTRAIT DE PHILOCTETE.
L'extrait de 'Philoctète' se déroule sur l'île de Lemnos, où Ulysse et Pyrrhus discutent de la nécessité de ramener Philoctète, un guerrier essentiel à la victoire contre Troie. Philoctète, abandonné sur l'île en raison d'une blessure empoisonnée incurable, est décrit comme farouche et insupportable. Ulysse conseille à Pyrrhus de feindre un naufrage pour approcher Philoctète sans éveiller sa méfiance. Pyrrhus rencontre Sophie, la fille de Philoctète, et apprend son histoire. Philoctète apparaît ensuite, exprimant son ressentiment contre les Grecs. Pyrrhus se propose de les conduire, lui et Sophie, dans leur patrie, mais un accès de douleur oblige Philoctète à rentrer dans sa caverne. Dans le second acte, Pyrrhus exprime sa pitié pour la misère de Philoctète. Ulysse révèle à Pyrrhus que les Grecs sont prêts à tout pour ramener Philoctète. Philoctète, furieux, refuse de se rendre aux Grecs. Pyrrhus propose alors de combattre avec lui contre les Troyens, sans les autres Grecs. Dans le troisième acte, Ulysse et Démas discutent de la manière de capturer Philoctète. Pyrrhus, partagé entre son amour pour Sophie et son devoir, finit par choisir l'amour. Sophie avoue à sa gouvernante qu'elle aime Pyrrhus. Dans le quatrième acte, Sophie révèle à Philoctète l'amour de Pyrrhus et son aide contre les Grecs. Philoctète accepte leur union à condition que Pyrrhus les aide à se venger. Pyrrhus, pressé par Sophie, accepte de rejoindre Philoctète pour combattre les Troyens, malgré les appels de la Grèce. Dans le cinquième acte, Ulysse montre à Philoctète un arrêt de mort dicté par la Grèce. Philoctète, face à Ulysse, exige ses armes mais est arrêté par Pyrrhus. Ulysse utilise son éloquence pour convaincre Philoctète de renoncer à sa vengeance, en lui décrivant les horreurs réservées aux traîtres. Touché par les larmes de sa fille Sophie, Philoctète cède et accepte de se réconcilier. La pièce se termine par l'union de Sophie et Pyrrhus, et Philoctète reconnaît la vertu d'Ulysse.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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295
p. 196-200
COMEDIE ITALIENNE.
Début :
Le 22 Mai les Comédiens Italiens ont remis, ou plutôt donné pour la premiere [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Comédie en danse, Ballet
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texteReconnaissance textuelle : COMEDIE ITALIENNE.
COMEDIE ITALIENNE.
LE 22 Mai les Comédiens Italiens ont
remis , ou plutôt donné pour la premiere
fois , le Mai , Ballet mêlé de chants . Il eft
changé & embelli de façon qu'on peut
l'annoncer comme un divertiffement nouveau
; on peut même dire qu'il forme une
petitè Comédie en danfe. J'ajouterai qu'on
JUI N. 1755. 197
*
en voit peu qui faffent autant de plaifir au
théâtre par la variété & par la gaieté continue.
Je crois obliger le lecteur de lui en
donner ici le Programme .
Le fond du théâtre repréfente la porte
d'un château , au - deffus l'on découvre
une terraffe ornée de baluftrades & de fontaines
& garnie de vafes remplis de
fleurs.
>
PREMIERE ENTRÉE .
Le Ballet commence au point du jour ;
plufieurs Payfans viennent pour donner
des bouquets à leurs maîtreffes , d'autres
apportent des échelles à un fignal ; plufieurs
jeunes Payfans & Payfannes garniffent
la terraffe & reçoivent les bouquets.
Les Amans témoignent leur joie par une
danfe vive.
SECONDE ENTRÉE.
Les Payfannes fortent du château avec
leurs bouquets, & remercient les Payfans de
leur galanterie ; ils vont tous pour rentrer
dans le château , un Payfan retient deux
des Payfannes & danfe avec elles un pas
de trois .
TROISIEME ENTRE E.
Une autre troupe de Payfans & Payfan
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
nes viennent planter le Mai devant la
porte du château ; tous danfent autour ,
pendant que la jeuneffe forme une danfe
gaie fur la terraffe , de forte que l'on voit
en même tems deux corps de Ballets . Un
Payfan chante les agrémens du mois de
Mai.
QUATRIEME ENTRÉE.
La porte du château s'ouvre ; le Seigneur
& la Dame vêtus en Berger & Bergere
, & fuivis de tous les habitans , forment
une marche autour du Mai ; une
Bergere chante , un Payfan & une Payſanne
danfent un pas deux.
Le Seigneur & la Dame chantent une
Mufette , elle invite après un Berger à la
danfer avec elle . Ils exécutent enfuite un
Tambourin.
Le pas de deux eft coupé par un pas de
trois , qui à fon tour l'eft par un autre pas
de deux tous les Payfans & Payfannes
chantent & danfent une ronde.
CINQUIEME ENTRÉE.
Contredanfe.
Ce Divertiffement eft compofé de trois
corps de Ballets , le premier commence la
contredanſe.
JUIN. 1755-
199
Danfé par
Second Couplet.
les amans & leurs maîtreffes .
Troifiéme Couplet.
Danfé par la jeuneſſe du village .
Danfé
Quatrieme Couplet.
par le Seigneur & la Dame.
Cinquième Couplet.
Les trois corps de Ballets fe joignent
enfemble . La jeuneffe occupe toujours le
centre , & fe trouve fouvent fous les bras
des deux autres corps de Ballets , ce qui
multiplie les figures de façon qu'il paroît
beaucoup plus de monde qu'il n'y en a.
La Contredanfe finit par une lutte d'entrechats.
Premier pas de trois.
Mlle Camille . M. Sody. Mile Catinop
Premier
pas
de deux.
Mlle Camille. M. Balletti ( cadet . )
Deuxieme pas
de deux.
Mlle Favart. M. Balletti ( aîné . )
Deuxieme pas de trois.
M. Berquelor. Mlle Marine. M. Dupuis.
I iv
200 MERCURE DE FRANCE .
Troisieme pas de deux.
Mlle Catinon . M. Billioni.
Troifieme pas de trois.
M. Vifintini. Mlle Artus. M. Artus.
LE 22 Mai les Comédiens Italiens ont
remis , ou plutôt donné pour la premiere
fois , le Mai , Ballet mêlé de chants . Il eft
changé & embelli de façon qu'on peut
l'annoncer comme un divertiffement nouveau
; on peut même dire qu'il forme une
petitè Comédie en danfe. J'ajouterai qu'on
JUI N. 1755. 197
*
en voit peu qui faffent autant de plaifir au
théâtre par la variété & par la gaieté continue.
Je crois obliger le lecteur de lui en
donner ici le Programme .
Le fond du théâtre repréfente la porte
d'un château , au - deffus l'on découvre
une terraffe ornée de baluftrades & de fontaines
& garnie de vafes remplis de
fleurs.
>
PREMIERE ENTRÉE .
Le Ballet commence au point du jour ;
plufieurs Payfans viennent pour donner
des bouquets à leurs maîtreffes , d'autres
apportent des échelles à un fignal ; plufieurs
jeunes Payfans & Payfannes garniffent
la terraffe & reçoivent les bouquets.
Les Amans témoignent leur joie par une
danfe vive.
SECONDE ENTRÉE.
Les Payfannes fortent du château avec
leurs bouquets, & remercient les Payfans de
leur galanterie ; ils vont tous pour rentrer
dans le château , un Payfan retient deux
des Payfannes & danfe avec elles un pas
de trois .
TROISIEME ENTRE E.
Une autre troupe de Payfans & Payfan
I iij
198 MERCURE DE FRANCE.
nes viennent planter le Mai devant la
porte du château ; tous danfent autour ,
pendant que la jeuneffe forme une danfe
gaie fur la terraffe , de forte que l'on voit
en même tems deux corps de Ballets . Un
Payfan chante les agrémens du mois de
Mai.
QUATRIEME ENTRÉE.
La porte du château s'ouvre ; le Seigneur
& la Dame vêtus en Berger & Bergere
, & fuivis de tous les habitans , forment
une marche autour du Mai ; une
Bergere chante , un Payfan & une Payſanne
danfent un pas deux.
Le Seigneur & la Dame chantent une
Mufette , elle invite après un Berger à la
danfer avec elle . Ils exécutent enfuite un
Tambourin.
Le pas de deux eft coupé par un pas de
trois , qui à fon tour l'eft par un autre pas
de deux tous les Payfans & Payfannes
chantent & danfent une ronde.
CINQUIEME ENTRÉE.
Contredanfe.
Ce Divertiffement eft compofé de trois
corps de Ballets , le premier commence la
contredanſe.
JUIN. 1755-
199
Danfé par
Second Couplet.
les amans & leurs maîtreffes .
Troifiéme Couplet.
Danfé par la jeuneſſe du village .
Danfé
Quatrieme Couplet.
par le Seigneur & la Dame.
Cinquième Couplet.
Les trois corps de Ballets fe joignent
enfemble . La jeuneffe occupe toujours le
centre , & fe trouve fouvent fous les bras
des deux autres corps de Ballets , ce qui
multiplie les figures de façon qu'il paroît
beaucoup plus de monde qu'il n'y en a.
La Contredanfe finit par une lutte d'entrechats.
Premier pas de trois.
Mlle Camille . M. Sody. Mile Catinop
Premier
pas
de deux.
Mlle Camille. M. Balletti ( cadet . )
Deuxieme pas
de deux.
Mlle Favart. M. Balletti ( aîné . )
Deuxieme pas de trois.
M. Berquelor. Mlle Marine. M. Dupuis.
I iv
200 MERCURE DE FRANCE .
Troisieme pas de deux.
Mlle Catinon . M. Billioni.
Troifieme pas de trois.
M. Vifintini. Mlle Artus. M. Artus.
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Résumé : COMEDIE ITALIENNE.
Le 22 mai 1755, les Comédiens Italiens ont présenté pour la première fois le ballet 'Le Mai', un spectacle mêlant chants et danses, annoncé comme un divertissement nouveau et comparable à une petite comédie en danse. Ce ballet, salué pour sa variété et sa gaieté, se déroule devant la porte d'un château orné de balustrades, fontaines et vases de fleurs. Il se compose de cinq entrées distinctes. La première entrée montre des valets apportant des bouquets à leurs maîtresses et dansant avec eux. La deuxième entrée voit les valets et valettes sortir du château pour remercier les valets et danser. La troisième entrée présente une autre troupe de valets et valettes plantant le Mai et dansant autour. La quatrième entrée voit le seigneur et la dame, vêtus en bergers, ouvrir la porte du château et danser avec les habitants. La cinquième entrée est une contredanse composée de trois corps de ballets, incluant les amants, la jeunesse du village et le seigneur et la dame. Les principaux danseurs incluent Mlle Camille, M. Sody, Mlle Catinon, M. Balletti, Mlle Favart, M. Berquelor, Mlle Marine, M. Dupuis, Mlle Artus et M. Artus.
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296
p. 200-203
VAUDEVILLE SUR LA CONTREDANSE.
Début :
Allons gai : [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Mois de mai, Comédie, Musique
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texteReconnaissance textuelle : VAUDEVILLE SUR LA CONTREDANSE.
VAUDEVILLE SUR LA CONTREDANSE.
•
PREMIER COUPLET.
Allons gai:
Voici le mois de Mai ,
Le doux mois d'amourette.
Commençons
Nos jeux & nos chanfons ,
Et, danfops fur l'herbette .
Colin
Prend Colinette ;
De violette
Pare fon fein.
Le coeur
Le plus fauvage
Souvent s'engage . ¡
Par une fleur.
Allons gai , &c.
Bergers , une fleurette
De vos feux devient l'interprête
Et Flore
Fait éclore
Ses préfens
JUIN. 1755. 201
VILLA
Pour fervir les amans.
Allons gai , & c.
SECOND
Allons gai , & c.
Plaiſirs ,
COUPLE T.
Bonheur champêtre ,
Vous allez naître
De nos foupirs.
Tout rit
Dans ces afyles ,
Ces lieux tranquilles
Qu'amour chérit.
Allons gai , & c.
Déja tout fent les flammes ,
Tendre amour , printems de nos ames
Tu charmes ,
Tu defarmes
Nos rigueurs
Par tes attraits vainqueurs;
Allons gai , & c .
TROISIEME COUPLET.
Allons gai , & c .
Le fon
De la mufette
Séduit Lifette
Sur le gazon .
Tirfis
LYON
Iv
202 MERCURE DE FRANCE.
Par cette adreffe ,
De fa tendreffe
Reçoit le prix.
Allons gai , & c.
L'amour fous nos fougères
Tend des lacs aux jeunes Bergeres .
Fillette
Joliette ,
En ce mois.
N'allez point feule aux bois.
Allons gai , &c.
QUATRIEME COUPLET.
Palfangué ,
Voici le mois de mai , &c.
Vien çà ,
Vien çà , Paquette ,
A la franquette ,
Mets ta main là.
Morgue ,
De t'voir fi fiare ;
Sçais-tu que Piare
Eft fatigué ?
Jarnigué , voici , &c .
Faut-il que j'aille au piautre ,
Quand j'avons un coeur comme un autre ?
Mais ... fille ...
Ton oeil brille ,
Et je fens
JUIN. 1755 203
Naître en moi le printems.
Sarpegué , voici , &c.
Les paroles de ce Vaudeville font de
M. Favart. Les danfes du Ballet font de la
compofition de M. Deheffe , & la mufique
eft de M. Defbroffes ,
Le 31 Mai les Comédiens Italiens donnerent
la premiere repréſentation du Maître
de Musique , Comédie nouvelle en
deux actes , mêlée d'arietes , & parodiée
de l'Italien , avec un divertiffement. Cette
piece eft de M. Borand , Auteur de la
Servante Maitreffe ; le public lui a fait un
accueil favorable. Le premier acte paroît
avoir le plus réuffi , nous en rendrons un
compte plus détaillé dans la fuite des repréfentations
•
PREMIER COUPLET.
Allons gai:
Voici le mois de Mai ,
Le doux mois d'amourette.
Commençons
Nos jeux & nos chanfons ,
Et, danfops fur l'herbette .
Colin
Prend Colinette ;
De violette
Pare fon fein.
Le coeur
Le plus fauvage
Souvent s'engage . ¡
Par une fleur.
Allons gai , &c.
Bergers , une fleurette
De vos feux devient l'interprête
Et Flore
Fait éclore
Ses préfens
JUIN. 1755. 201
VILLA
Pour fervir les amans.
Allons gai , & c.
SECOND
Allons gai , & c.
Plaiſirs ,
COUPLE T.
Bonheur champêtre ,
Vous allez naître
De nos foupirs.
Tout rit
Dans ces afyles ,
Ces lieux tranquilles
Qu'amour chérit.
Allons gai , & c.
Déja tout fent les flammes ,
Tendre amour , printems de nos ames
Tu charmes ,
Tu defarmes
Nos rigueurs
Par tes attraits vainqueurs;
Allons gai , & c .
TROISIEME COUPLET.
Allons gai , & c .
Le fon
De la mufette
Séduit Lifette
Sur le gazon .
Tirfis
LYON
Iv
202 MERCURE DE FRANCE.
Par cette adreffe ,
De fa tendreffe
Reçoit le prix.
Allons gai , & c.
L'amour fous nos fougères
Tend des lacs aux jeunes Bergeres .
Fillette
Joliette ,
En ce mois.
N'allez point feule aux bois.
Allons gai , &c.
QUATRIEME COUPLET.
Palfangué ,
Voici le mois de mai , &c.
Vien çà ,
Vien çà , Paquette ,
A la franquette ,
Mets ta main là.
Morgue ,
De t'voir fi fiare ;
Sçais-tu que Piare
Eft fatigué ?
Jarnigué , voici , &c .
Faut-il que j'aille au piautre ,
Quand j'avons un coeur comme un autre ?
Mais ... fille ...
Ton oeil brille ,
Et je fens
JUIN. 1755 203
Naître en moi le printems.
Sarpegué , voici , &c.
Les paroles de ce Vaudeville font de
M. Favart. Les danfes du Ballet font de la
compofition de M. Deheffe , & la mufique
eft de M. Defbroffes ,
Le 31 Mai les Comédiens Italiens donnerent
la premiere repréſentation du Maître
de Musique , Comédie nouvelle en
deux actes , mêlée d'arietes , & parodiée
de l'Italien , avec un divertiffement. Cette
piece eft de M. Borand , Auteur de la
Servante Maitreffe ; le public lui a fait un
accueil favorable. Le premier acte paroît
avoir le plus réuffi , nous en rendrons un
compte plus détaillé dans la fuite des repréfentations
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Résumé : VAUDEVILLE SUR LA CONTREDANSE.
Le texte présente un vaudeville intitulé 'Vaudeville sur la contredanse', composé de plusieurs couplets célébrant l'arrivée du mois de mai et les plaisirs champêtres associés à l'amour et à la nature. Le premier couplet invite à la gaieté et à la danse, mettant en scène Colin et Colinette qui s'engagent par une fleur. Le second couplet évoque les plaisirs et le bonheur champêtre, charmé par l'amour et le printemps. Le troisième couplet décrit l'amour qui tend des pièges aux jeunes bergères, tandis que le quatrième couplet est une invitation plus directe et familière à la danse et à l'amour. Les paroles sont de M. Favart, les danses du ballet de M. Deheffe, et la musique de M. Desbroffes. Le 31 mai 1755, les Comédiens Italiens ont donné la première représentation de 'Le Maître de Musique', une comédie en deux actes mêlée d'ariettes et parodiée de l'italien, avec un divertissement. Cette pièce, écrite par M. Borand, auteur de 'La Servante Maîtresse', a reçu un accueil favorable du public, notamment pour son premier acte.
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297
p. 203-204
CONCERT SPIRITUEL.
Début :
Le Concert qui fut exécuté le Jeudi 29 Mai, jour de la Fête-Dieu, fut très-beau [...]
Mots clefs :
Concert spirituel, Concert
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texteReconnaissance textuelle : CONCERT SPIRITUEL.
CONCERT SPIRITUEL.
LE
E Concert qui fut exécuté le Jeudi
29 Mai , jour de la Fête- Dieu , fut trèsbeau
& très- varié . Il commença par la
premiere fuite des pieces de clavecin de
M. Clement , mife en fymphonie par luimême
; enfuite Cantate à grand choeur de
M. Davefne. Mme Veftris de Giardini
chanta deux airs Italiens. On s'apperçoit
I vj
204 MERCURE DE FRANCE .
du progrès qu'elle fait chaque jour ; elle
met à profit les bons confeils qu'on lui
donne , & mérite de plus en plus l'applaudiffement
des connoiffeurs . Mlle Sixte , qui
a chanté au Concert de la Reine , débuta
avec le plus brillant fuccès dans Ufquequò ,
petit motet de M. Mouret. Le public a
conçu de fon talent les plus grandes efpérances
; l'accueil qu'elle en a reçu doit raffurer
fa timidité , & l'engager à tenir tout
ce qu'elle promet.
M. Balbatre joua fur l'orgue l'ouverture
de Pigmalion , fuivie des Sauvages , & fit
toujours un nouveau plaifir. Le Concert
finit par Magnus Dominus , motet à grand
choeur de M. de Mondonville.
LE
E Concert qui fut exécuté le Jeudi
29 Mai , jour de la Fête- Dieu , fut trèsbeau
& très- varié . Il commença par la
premiere fuite des pieces de clavecin de
M. Clement , mife en fymphonie par luimême
; enfuite Cantate à grand choeur de
M. Davefne. Mme Veftris de Giardini
chanta deux airs Italiens. On s'apperçoit
I vj
204 MERCURE DE FRANCE .
du progrès qu'elle fait chaque jour ; elle
met à profit les bons confeils qu'on lui
donne , & mérite de plus en plus l'applaudiffement
des connoiffeurs . Mlle Sixte , qui
a chanté au Concert de la Reine , débuta
avec le plus brillant fuccès dans Ufquequò ,
petit motet de M. Mouret. Le public a
conçu de fon talent les plus grandes efpérances
; l'accueil qu'elle en a reçu doit raffurer
fa timidité , & l'engager à tenir tout
ce qu'elle promet.
M. Balbatre joua fur l'orgue l'ouverture
de Pigmalion , fuivie des Sauvages , & fit
toujours un nouveau plaifir. Le Concert
finit par Magnus Dominus , motet à grand
choeur de M. de Mondonville.
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Résumé : CONCERT SPIRITUEL.
Le concert spirituel du jeudi 29 mai, jour de la Fête-Dieu, fut marqué par une grande diversité et une haute qualité musicale. Il débuta avec la première suite des pièces de clavecin de M. Clément, orchestrée par lui-même, suivie d'une cantate à grand chœur de M. Davenne. Mme Vestris de Giardini interpréta deux airs italiens, révélant un progrès quotidien et méritant les applaudissements des connaisseurs. Mlle Sixte, déjà connue pour ses performances au Concert de la Reine, fit ses débuts dans le petit motet 'Usquequò' de M. Mouret, suscitant de grandes attentes. M. Balbastre joua à l'orgue l'ouverture de 'Pigmalion' suivie des 'Sauvages', offrant un nouveau plaisir aux auditeurs. Le concert se conclut par 'Magnus Dominus', un motet à grand chœur de M. de Mondonville.
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298
p. 193-194
COMEDIE FRANÇOISE.
Début :
Le 7 Juin les Comédiens François donnerent Britannicus. Le sieur Rosimont [...]
Mots clefs :
Comédiens-Français
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texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE.
COMEDIE FRANÇOISE.
L
E7 Juin les Comédiens François
donnerent Britannicus . Le fieur Rofimont
, qui avoit déja débuté l'année paffée
, y joua le rôle de Burrhus. Le 14 , il
repréſenta Agamemnon dans Iphigenie , &
le 19 Dom Diegue , dans le Cid. Il a un
pathétique qui peut toucher en province
mais qui n'a pas eu le même bonheur à
Paris .
la
>
Le 23 un nouveau Roi parut fur la
ſcène : c'eſt le fieur Dumenil qui étoit de
troupe de Compiegne. Il a débuté pour
la premiere & derniere fois par le rôle de
Palamede dans Electre. Pour me renfermer
dans le bien qu'on en peut dire , il a une
très belle voix.
On annonce encore pour Samedi prochain
28 , un troifieme Acteur qui doit
jouer Mitridate. Je fouhaite pour le bien
du théâtre françois que fon regne foit plus
long.
I
194 MERCURE DE FRANCE.
Le Jeudi 26 on donna la premiere repréfentation
de Zelide , Comédie en un
acte , en vers avec un divertiſſement . Elle
fut précédée de Manlius , Tragédie de
la Foffe . M. Renout eft l'auteur de cette
petite Féérie qui a été très- bien reçue du
public , & qui annonce du talent.
L
E7 Juin les Comédiens François
donnerent Britannicus . Le fieur Rofimont
, qui avoit déja débuté l'année paffée
, y joua le rôle de Burrhus. Le 14 , il
repréſenta Agamemnon dans Iphigenie , &
le 19 Dom Diegue , dans le Cid. Il a un
pathétique qui peut toucher en province
mais qui n'a pas eu le même bonheur à
Paris .
la
>
Le 23 un nouveau Roi parut fur la
ſcène : c'eſt le fieur Dumenil qui étoit de
troupe de Compiegne. Il a débuté pour
la premiere & derniere fois par le rôle de
Palamede dans Electre. Pour me renfermer
dans le bien qu'on en peut dire , il a une
très belle voix.
On annonce encore pour Samedi prochain
28 , un troifieme Acteur qui doit
jouer Mitridate. Je fouhaite pour le bien
du théâtre françois que fon regne foit plus
long.
I
194 MERCURE DE FRANCE.
Le Jeudi 26 on donna la premiere repréfentation
de Zelide , Comédie en un
acte , en vers avec un divertiſſement . Elle
fut précédée de Manlius , Tragédie de
la Foffe . M. Renout eft l'auteur de cette
petite Féérie qui a été très- bien reçue du
public , & qui annonce du talent.
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Résumé : COMEDIE FRANÇOISE.
En juin, la Comédie Française a présenté plusieurs pièces. Le 7 juin, les comédiens français jouèrent 'Britannicus', avec le sieur Rofimont dans le rôle de Burrhus. Le 14 juin, il interpréta Agamemnon dans 'Iphigénie', et le 19 juin, il joua Dom Diegue dans 'Le Cid'. Son jeu, bien que touchant en province, n'eut pas le même succès à Paris. Le 23 juin, le sieur Dumenil, de la troupe de Compiègne, débuta dans le rôle de Palamède dans 'Électre' et fut salué pour sa belle voix. Un autre acteur est annoncé pour jouer 'Mithridate' le 28 juin. Le 26 juin, la première représentation de 'Zélide', une comédie en un acte et en vers avec un divertissement, fut donnée. Elle fut précédée de 'Manlius', une tragédie de La Fosse. L'auteur, M. Renout, reçut un accueil favorable du public, indiquant un certain talent.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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299
p. 194
COMEDIE ITALIENNE.
Début :
Les Comédiens Italiens continuent le Maître de Musique. Ils l'ont joué le [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens
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texteReconnaissance textuelle : COMEDIE ITALIENNE.
COMEDIE ITALIENNE.
Es Comédiens Italiens continuent le
Maitre de Mufique . Ils l'ont joué le
21 Juin pour la dixieme fois. Il étoit précédé
de la Fête d'Amour & fuivi du Mai
ce qui formoit un fpectacle auffi varié
qu'amufant. Plus on voit ce drame , plus
on en trouve les détails agréables .
Le 28 on en donna la treizieme repréfentation.
Nous promettons l'extrait
le Mercure d'Août.
pour
dans Le 19 un nouveau docteur parut
Jes Anneaux magiques , Comédie italienne ,
& fut généralement applaudi. Une nouvelle
Actrice italienne joua dans la même
-piece un rôle d'amoureufe . Le public la
reçut avec bonté. Les débuts gagnent tous
les théâtres. Nous en parlerons plus au
long le mois prochain , fuppofé qu'ils durent.
Es Comédiens Italiens continuent le
Maitre de Mufique . Ils l'ont joué le
21 Juin pour la dixieme fois. Il étoit précédé
de la Fête d'Amour & fuivi du Mai
ce qui formoit un fpectacle auffi varié
qu'amufant. Plus on voit ce drame , plus
on en trouve les détails agréables .
Le 28 on en donna la treizieme repréfentation.
Nous promettons l'extrait
le Mercure d'Août.
pour
dans Le 19 un nouveau docteur parut
Jes Anneaux magiques , Comédie italienne ,
& fut généralement applaudi. Une nouvelle
Actrice italienne joua dans la même
-piece un rôle d'amoureufe . Le public la
reçut avec bonté. Les débuts gagnent tous
les théâtres. Nous en parlerons plus au
long le mois prochain , fuppofé qu'ils durent.
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Résumé : COMEDIE ITALIENNE.
Le texte évoque des représentations de pièces de théâtre par des comédiens italiens. 'Le Maître de Musique' a été joué le 21 et le 28 juin, précédé de la 'Fête d'Amour' et suivi du 'Mai'. Le 19 juin, 'Les Anneaux magiques' a été présenté, avec une nouvelle actrice italienne bien accueillie. Des extraits seront publiés dans le Mercure d'Août.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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300
p. 221-222
COMEDIE FRANÇOISE.
Début :
Le 28 Juin, les Comédiens françois donnerent la seconde représentation [...]
Mots clefs :
Comédie-Française, Théâtre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : COMEDIE FRANÇOISE.
COMEDIE FRANÇOISE.
E 28 Juin , les Comédiens françois
donnerent la feconde repréfentation
de Zélide qui fut précédée de Mithridate.
Le fieur de Raucourt y débuta par le rôle
de Mithridate . Il a joué fucceffivement
Agamemnon , dans Iphigénie , & Burrhus
dans Britannicus. Le parterre l'a reçu avec
beaucoup de bonté. Cet acteur mérite
d'autant plus d'indulgence , qu'il n'a jamais
paru fur aucun théâtre.
On a continué Zelide jufqu'au 16 Juillet
qu'on l'a jouée pour la neuvieme fois.
L'auteur l'a retirée pour la redonner l'hiver
prochain . Je ne doute pas qu'on ne la
revoye avec le même plaifir. Mlle Gauffin
y eft charmante. Elle y paroît telle qu'on
la voit dans l'Oracle & dans Zéneïde , c'eftà
- dire , avec ces graces ingénues qu'on
tâche de copier & que perfonne n'imite.
Quoique le théâtre françois ne foit pas
celui de la danfe , ce talent peut quelque-
K iij
222 MERCURE DE FRANCE.
fois y paroître dans fon aurore . Le fieur
Dauberval en eft un exemple. Ce jeune
danfeur s'y eft annoncé d'une façon diſtinguée
, furtout dans les caracteres de la
danfe , il les a exécutés avec tant de
grace ,
de nobleffe & de variété , qu'il s'eft montré
un digne éleve du fieur Veftris , & qu'il
a mérité l'approbation du plus grand maître
de l'art (a) .
Le 14 , une actrice nouvelle joua pour
la premiere fois le rôle d'Azitre . Sa figure
prévient en fa faveur . Elle eft bien au theâtre
, & nous paroît mériter l'encouragement
du public. Le Samedi 19 , elle a repréfenté
Pauline dans Poliente. Comme
elle étoit plus raffurée , fon jeu a été plus
animé , il y a plufieurs détails qu'elle a
très- bien rendus. On l'a furtout applaudie
avec juftice au quatrieme acte , dans la
fcene , où elle demande à Severe la grace
de fon mari . Elle a mis dans fa priere toute
la décence & en même tems toute la
force qu'éxige la fituation.
E 28 Juin , les Comédiens françois
donnerent la feconde repréfentation
de Zélide qui fut précédée de Mithridate.
Le fieur de Raucourt y débuta par le rôle
de Mithridate . Il a joué fucceffivement
Agamemnon , dans Iphigénie , & Burrhus
dans Britannicus. Le parterre l'a reçu avec
beaucoup de bonté. Cet acteur mérite
d'autant plus d'indulgence , qu'il n'a jamais
paru fur aucun théâtre.
On a continué Zelide jufqu'au 16 Juillet
qu'on l'a jouée pour la neuvieme fois.
L'auteur l'a retirée pour la redonner l'hiver
prochain . Je ne doute pas qu'on ne la
revoye avec le même plaifir. Mlle Gauffin
y eft charmante. Elle y paroît telle qu'on
la voit dans l'Oracle & dans Zéneïde , c'eftà
- dire , avec ces graces ingénues qu'on
tâche de copier & que perfonne n'imite.
Quoique le théâtre françois ne foit pas
celui de la danfe , ce talent peut quelque-
K iij
222 MERCURE DE FRANCE.
fois y paroître dans fon aurore . Le fieur
Dauberval en eft un exemple. Ce jeune
danfeur s'y eft annoncé d'une façon diſtinguée
, furtout dans les caracteres de la
danfe , il les a exécutés avec tant de
grace ,
de nobleffe & de variété , qu'il s'eft montré
un digne éleve du fieur Veftris , & qu'il
a mérité l'approbation du plus grand maître
de l'art (a) .
Le 14 , une actrice nouvelle joua pour
la premiere fois le rôle d'Azitre . Sa figure
prévient en fa faveur . Elle eft bien au theâtre
, & nous paroît mériter l'encouragement
du public. Le Samedi 19 , elle a repréfenté
Pauline dans Poliente. Comme
elle étoit plus raffurée , fon jeu a été plus
animé , il y a plufieurs détails qu'elle a
très- bien rendus. On l'a furtout applaudie
avec juftice au quatrieme acte , dans la
fcene , où elle demande à Severe la grace
de fon mari . Elle a mis dans fa priere toute
la décence & en même tems toute la
force qu'éxige la fituation.
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Résumé : COMEDIE FRANÇOISE.
Du 28 juin au 16 juillet, les Comédiens françois ont présenté la pièce 'Zélide', précédée de 'Mithridate'. Le sieur de Raucourt a interprété Mithridate, Agamemnon dans 'Iphigénie' et Burrhus dans 'Britannicus', malgré son inexpérience, il a été bien accueilli par le public. 'Zélide' a été jouée neuf fois avant d'être retirée pour être reprise l'hiver suivant. Mlle Gauffin a été particulièrement remarquée pour ses performances charmantes et ses grâces ingénues. Le théâtre français a également vu émerger des talents en danse, notamment le sieur Dauberval, apprécié pour sa grâce et sa noblesse. Le 14 juillet, une nouvelle actrice a joué Azitre, impressionnant par sa présence scénique. Le 19 juillet, elle a interprété Pauline dans 'Poliente', démontrant une meilleure assurance et un jeu plus animé, notamment dans une scène où elle demande la grâce de son mari.
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