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Détail
Liste
1
p. 115-121
Avanture, [titre d'après la table]
Début :
On dit qu'un bienfait n'est jamais perdu, & cela se justifie [...]
Mots clefs :
Gentilhomme, Cavalier, Valets, Chambre, Campagne, Voyage, Récit, Dispute, Rumeurs, Prison
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texteReconnaissance textuelle : Avanture, [titre d'après la table]
On dit qu'un bienfait n'eft
Kij
116 MERCURE
jamais perdu , & cela ſe juſtifie
par beaucoup d'exemples.
En voicy un auffi récent qu'il
eft remarquable. Un Gentilhomme
qui demeure à la
Campagne , retournant chez
luy un foir , rencontra deux
Cavaliers reformez , qui le
priérent fort civilement de
les fecourir dans le befoin
d'argent où ils fe trouvoient
pour achever leur Voyage.
Le Gentilhomme
les voyant
affez bien faits , & jugeant
de leur naiffance par la maniere
honnefte dont ils luy
parlérent , ne fe contenta
GALANT. 117
pas de leur donner. Il leur
dit qu'il eftoit tard , & qu'ils
feroient bien de venir chez
luy , où ils pafferoient la nuit
plus cómodement que dans
un Village. Le Party fut accepté
, les Cavaliers le fuivirent
, & payérent le Soupé
qu'il leur donna , par
la complaifance
d'écouter le long
récit de quelques Campagnes
qu'il avoit faites pendant
fes jeunes années. Apres
un entretien de trois heures,
il les conduifit dans une
Chambre qui n'eftoit ſéparée
d'une autre que par une
118 MERCURE
Cloifon d'ais. Ils fe couchérent,
mais heureuſement pour
le Gentilhomme , ils ne pûrents'endormir.
Unprofond
filence régnoit dans tout le
Logis, quand la voix de deux
Perfonnes qui parloient à
demy bas dans l'autre Chambre
, commença à les fraper.
Chacun d'eux prefta l'oreille ;
& quoy qu'ils perdiffent plufieurs
mots , ils ne laifferent
pas d'en entendre affez pour
comprendre qu'il y avoit difpute
entre deux Valets, fur le
complot d'aller égorger leur
Maitre. Il avoit vendu de
GALANT. 119
puis peu de jours pour huit
cens écus de Bled , & il s'agiffoit
entr'eux d'avoir cet
argent . L'un trembloit d'eftre
furpris en executant le crime
dont ils eftoient demeurez
d'accord, & l'autre tâchoit de
l'encourager. Enfin , ayant
entendu que ces Miserables
fortoient de leur Chambre,
ils fe leverent le plus doucement
qu'ils pûrent , & ſe jetterent
fur eux lors qu'ils entroient
dans celle du Gentilhomme
. Il s'éveilla à ce bruit,
& demanda ce qu'on luy vouloit
. Toute la Maifon fut en
120 MERCURE
rumeur. On fit aporter de la
lumiere , & les deux Valets
troublez , quoy qu'ils n'avoüaffent
rien , firent affez
voir par leur defordre & par
leur pâleur , qu'ils étoient
coupables . On leur trouva
des rafoirs , & des coût aux
fort tranchans , & on les mit
en lieu feur jufqu'au lendemain,
qu'on les mena en prifon.
Vous pouvez croire que
le Gentilhomme n'auroit pas
fi - toft congedié les Cavaliers
qui luy ont fauvé la vie, quand
leur prefence n'eût pas efté
néceffaire pour l'inftruct on
de
GALANT. 121
de ce Procez criminel . Je
m'informeray de l'évenement
pour vous le faire fçavoir.
Kij
116 MERCURE
jamais perdu , & cela ſe juſtifie
par beaucoup d'exemples.
En voicy un auffi récent qu'il
eft remarquable. Un Gentilhomme
qui demeure à la
Campagne , retournant chez
luy un foir , rencontra deux
Cavaliers reformez , qui le
priérent fort civilement de
les fecourir dans le befoin
d'argent où ils fe trouvoient
pour achever leur Voyage.
Le Gentilhomme
les voyant
affez bien faits , & jugeant
de leur naiffance par la maniere
honnefte dont ils luy
parlérent , ne fe contenta
GALANT. 117
pas de leur donner. Il leur
dit qu'il eftoit tard , & qu'ils
feroient bien de venir chez
luy , où ils pafferoient la nuit
plus cómodement que dans
un Village. Le Party fut accepté
, les Cavaliers le fuivirent
, & payérent le Soupé
qu'il leur donna , par
la complaifance
d'écouter le long
récit de quelques Campagnes
qu'il avoit faites pendant
fes jeunes années. Apres
un entretien de trois heures,
il les conduifit dans une
Chambre qui n'eftoit ſéparée
d'une autre que par une
118 MERCURE
Cloifon d'ais. Ils fe couchérent,
mais heureuſement pour
le Gentilhomme , ils ne pûrents'endormir.
Unprofond
filence régnoit dans tout le
Logis, quand la voix de deux
Perfonnes qui parloient à
demy bas dans l'autre Chambre
, commença à les fraper.
Chacun d'eux prefta l'oreille ;
& quoy qu'ils perdiffent plufieurs
mots , ils ne laifferent
pas d'en entendre affez pour
comprendre qu'il y avoit difpute
entre deux Valets, fur le
complot d'aller égorger leur
Maitre. Il avoit vendu de
GALANT. 119
puis peu de jours pour huit
cens écus de Bled , & il s'agiffoit
entr'eux d'avoir cet
argent . L'un trembloit d'eftre
furpris en executant le crime
dont ils eftoient demeurez
d'accord, & l'autre tâchoit de
l'encourager. Enfin , ayant
entendu que ces Miserables
fortoient de leur Chambre,
ils fe leverent le plus doucement
qu'ils pûrent , & ſe jetterent
fur eux lors qu'ils entroient
dans celle du Gentilhomme
. Il s'éveilla à ce bruit,
& demanda ce qu'on luy vouloit
. Toute la Maifon fut en
120 MERCURE
rumeur. On fit aporter de la
lumiere , & les deux Valets
troublez , quoy qu'ils n'avoüaffent
rien , firent affez
voir par leur defordre & par
leur pâleur , qu'ils étoient
coupables . On leur trouva
des rafoirs , & des coût aux
fort tranchans , & on les mit
en lieu feur jufqu'au lendemain,
qu'on les mena en prifon.
Vous pouvez croire que
le Gentilhomme n'auroit pas
fi - toft congedié les Cavaliers
qui luy ont fauvé la vie, quand
leur prefence n'eût pas efté
néceffaire pour l'inftruct on
de
GALANT. 121
de ce Procez criminel . Je
m'informeray de l'évenement
pour vous le faire fçavoir.
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Résumé : Avanture, [titre d'après la table]
Un gentilhomme, de retour chez lui à la campagne, rencontre deux cavaliers réformés en difficulté financière. Ému par leur apparence et leur honnêteté, il les invite à passer la nuit chez lui. Pendant la nuit, les cavaliers entendent deux valets comploter pour assassiner leur maître afin de voler de l'argent. Ils interviennent et neutralisent les valets, sauvant ainsi la vie du gentilhomme. Reconnaissant, ce dernier ne les congédie pas immédiatement, leur présence étant nécessaire pour instruire le procès des valets. L'auteur mentionne qu'il se renseignera sur l'issue de l'affaire pour en informer les lecteurs.
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2
p. 3-16
TRAIT D'HISTOIRE Arabe.
Début :
Hataya, Poëte, raconte de lui-même, qu'ayant renoncé à la poësie, [...]
Mots clefs :
Calife, Dieu, Poète, Vieillard, Poésie, Prison, Vers, Prophète, Frayeur, Hataya, Hacler
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texteReconnaissance textuelle : TRAIT D'HISTOIRE Arabe.
TRAIT D'HISTOIRE
Arabe.
Ataya , Poëte ,
raconte de lui-
H même, qu'ayant
DE
LA
VILLE
noncé à la poëfie , le
Calife ordonna qu'on le
Mars 1714.
A ij
4 MERCURE
mit dans la prifon des
criminels. En entrant ,
dit- il , dans cette prifon ,
j'apperçus un vieillard ,
qui me parut un honnête
homme ; car les caracteres
de la vertu paroiffoient
fur fon viſage .
J'allai m'affeoir auprés
de lui fans le faluer ,
tant le chagrin & la
frayeur m'avoient troublé
l'efprit. Je demeurai
quelque temps en cet
état : mais le vieillard ,
GALANT .
S
pour diffiper ma frayeur,
me recita ces deux diftiques.
Les adverfitez
viennent de Dieu , &
l'impatience vient de
nous . Dieu m'a ôté ce
EZ
qui venoit de moy ,
m'a laiffé ce qui venoit
de luis c'est ce qui mefait
fouffrir
avec joye. Pourquoy
donc es-tu trifte ?
Entate
voyant
que j'étois
frapé de ce diftique
,
il me dit : fe fuis prêt
d'être condamné
à mort ,
A iij
6 MERCURE
,
€5 aprés ma mortje n'aurai
plus befoin de patien
се je te la laiſſe , 5
commence à enjouir pendant
ta vie à mon exemple.
Je rappellai mes tens
& mes efprits , & je le
priai de continuer à me
confoler. Ifmaël , me répondit
le vieillard , commencez
par me rendre le
falut & la civilité que .
vous devez aux Mufulmans
. Alors m'étant excufe
fur ma frayeur &
GALANT. 7
mon étonnement , il reilareprit
: On va m'appeller
tout à l'heure , pour me
demander où eft Hyla de
la race du Prophete . Si
je dis où il eft , j'offenferai
Dieu ; & fi je ne
le dis pas , on me fera
mourir. Ainfi je devrois
être dans un plus grand
étonnement que vous :
cependant vous voyez
ma patience & ma refignation
à la volonté de
Dieu. Je lui répondis :
A iiij
8 MERCURE
Que Dieu vous confole,
il vous fuffit. Je ne vous
reprendrai plus , me dit
le vieillard , & vous repeterai
le diftique autant
que vous le fouhaiterez ;
ce qu'il fit , & me dit
enfuite : Qui vous a
obligé de quitter la poëfie
, qui faifoit vôtre fortune
auprés des Grands ?
Il faut que vous continuiez
à faire des vers ,
& que vous leur donniez
cette fatisfaction ;
GALANT . 9
vous leur devez cette reconnoiffance
, & vous la
devez à vôtre
reputation
. A peine cut - il fini
ce difcours , qu'on nous
appella l'un & l'autre ,
& l'on nous mena dans
la chambre du Calife .
Quand nous fumes en ſa
prefence , il dit à Hacler :
(c'étoit le nom du vicillard
) Où eft Hila ? Vous
m'avez fait mettre en
prifon , répondit Hacler,
comment pourrois - je
io MERCURE
#
fçavoir de ſes nouvelles ?
Aprés quelques autres ,
demandes Almohdi en
colere dit à Hacler : Vous
m'indiquerez où il eft ,
ou bien je vais vous faire
couper la tête. Vous ferez
de moy tout ce qu'il
vous plaira , répondit
Hacler , je ne vous dirai
point où eft le fils du Prophete
; je ne veux point
offenfer Dieu ni le Prophete
en trahiffant fon
fils , & quand mefine il
GALANT . I
feroit entre ma chemiſe
& ma peau , je ne vous
dirois pas où il eft. Qu'-
on lui coupe la tefte, dit
le Calife , & auffitôt cela
fut executé. Enfuite ce
Prince me fit approcher
& me dit : Ou vous ferez
des vers , ou je vous
traiterai comme j'ai fait
Hacler. Je lui répondis :
Seigneur , fçais - tu ce
que c'est que poëfie ?
Sçais- tu que poëſie n'eſt
point ouvrage de main
12 MERCURE
mecanique qui fe puiſſe
faire de commande? Ainfi
, en te defobciffant je
ne fais point coupable :
un Poëte eft un homme
infpiré, non par fon Prince
, mais par le Seigneur
des genies ; cette infpration
ne vient que par
periodes. Tout ce que je
puis , c'eft de te promettre
de faire des vers
quand elle viendra. Hé
bien , répondit le Calife ,
retourne en priſon juſGALANT.
13
qu'à ce qu'elle te foit
venuë. Mais , repliqua le
Poëte , tu me permets
donc auffi de fuivre mon
infpiration telle qu'elle
me viendra , bonne ou
mauvaiſe , tu t'en contenteras
, & me donneras
la liberté ? Oui je te
le promets , répondit le
Calife. Le Poete rentra
dans la prifon d'où l'on
venoit de tirer Hacler à
aqui on avoit coupé la
tefte. Il prit ce fujer pour
14 MERCURE
fa poefie , & fit une fatyre
violente & inftructive
fur ce fujet , pour
blâmer la cruauté du Calife
, & auffitoft fe fit
mener devant lui , & lui
recita fa fatyre , lui difant
: Ton action injufte
contre Hacler m'a frapé
fi fort l'imagination dans
¡ce moment, que la verve
abondante eft venue qui
a inondé ma raiſon & ma
timidité ; maintenant je
fuis un infenfé qui ne
GALANT . 15
crains point la mort ;
fais- la moy donner , &
corrige - toy .Je ne regretteray
point la vie , fi j'ap
prens là - haut que c'eſt
la derniere dont tu auras
difpofé injuftement.
Cette
magnanimité de
Hataya toucha fi fort
le Calife , qu'il devint
plus humain , & recompenfa
magnifiquement
le Pocte , en faifant
pourtant brûler fes
vers , afin qu'on oubliât
16 MERCURE
entierement fes cruau
tez paffées.
Arabe.
Ataya , Poëte ,
raconte de lui-
H même, qu'ayant
DE
LA
VILLE
noncé à la poëfie , le
Calife ordonna qu'on le
Mars 1714.
A ij
4 MERCURE
mit dans la prifon des
criminels. En entrant ,
dit- il , dans cette prifon ,
j'apperçus un vieillard ,
qui me parut un honnête
homme ; car les caracteres
de la vertu paroiffoient
fur fon viſage .
J'allai m'affeoir auprés
de lui fans le faluer ,
tant le chagrin & la
frayeur m'avoient troublé
l'efprit. Je demeurai
quelque temps en cet
état : mais le vieillard ,
GALANT .
S
pour diffiper ma frayeur,
me recita ces deux diftiques.
Les adverfitez
viennent de Dieu , &
l'impatience vient de
nous . Dieu m'a ôté ce
EZ
qui venoit de moy ,
m'a laiffé ce qui venoit
de luis c'est ce qui mefait
fouffrir
avec joye. Pourquoy
donc es-tu trifte ?
Entate
voyant
que j'étois
frapé de ce diftique
,
il me dit : fe fuis prêt
d'être condamné
à mort ,
A iij
6 MERCURE
,
€5 aprés ma mortje n'aurai
plus befoin de patien
се je te la laiſſe , 5
commence à enjouir pendant
ta vie à mon exemple.
Je rappellai mes tens
& mes efprits , & je le
priai de continuer à me
confoler. Ifmaël , me répondit
le vieillard , commencez
par me rendre le
falut & la civilité que .
vous devez aux Mufulmans
. Alors m'étant excufe
fur ma frayeur &
GALANT. 7
mon étonnement , il reilareprit
: On va m'appeller
tout à l'heure , pour me
demander où eft Hyla de
la race du Prophete . Si
je dis où il eft , j'offenferai
Dieu ; & fi je ne
le dis pas , on me fera
mourir. Ainfi je devrois
être dans un plus grand
étonnement que vous :
cependant vous voyez
ma patience & ma refignation
à la volonté de
Dieu. Je lui répondis :
A iiij
8 MERCURE
Que Dieu vous confole,
il vous fuffit. Je ne vous
reprendrai plus , me dit
le vieillard , & vous repeterai
le diftique autant
que vous le fouhaiterez ;
ce qu'il fit , & me dit
enfuite : Qui vous a
obligé de quitter la poëfie
, qui faifoit vôtre fortune
auprés des Grands ?
Il faut que vous continuiez
à faire des vers ,
& que vous leur donniez
cette fatisfaction ;
GALANT . 9
vous leur devez cette reconnoiffance
, & vous la
devez à vôtre
reputation
. A peine cut - il fini
ce difcours , qu'on nous
appella l'un & l'autre ,
& l'on nous mena dans
la chambre du Calife .
Quand nous fumes en ſa
prefence , il dit à Hacler :
(c'étoit le nom du vicillard
) Où eft Hila ? Vous
m'avez fait mettre en
prifon , répondit Hacler,
comment pourrois - je
io MERCURE
#
fçavoir de ſes nouvelles ?
Aprés quelques autres ,
demandes Almohdi en
colere dit à Hacler : Vous
m'indiquerez où il eft ,
ou bien je vais vous faire
couper la tête. Vous ferez
de moy tout ce qu'il
vous plaira , répondit
Hacler , je ne vous dirai
point où eft le fils du Prophete
; je ne veux point
offenfer Dieu ni le Prophete
en trahiffant fon
fils , & quand mefine il
GALANT . I
feroit entre ma chemiſe
& ma peau , je ne vous
dirois pas où il eft. Qu'-
on lui coupe la tefte, dit
le Calife , & auffitôt cela
fut executé. Enfuite ce
Prince me fit approcher
& me dit : Ou vous ferez
des vers , ou je vous
traiterai comme j'ai fait
Hacler. Je lui répondis :
Seigneur , fçais - tu ce
que c'est que poëfie ?
Sçais- tu que poëſie n'eſt
point ouvrage de main
12 MERCURE
mecanique qui fe puiſſe
faire de commande? Ainfi
, en te defobciffant je
ne fais point coupable :
un Poëte eft un homme
infpiré, non par fon Prince
, mais par le Seigneur
des genies ; cette infpration
ne vient que par
periodes. Tout ce que je
puis , c'eft de te promettre
de faire des vers
quand elle viendra. Hé
bien , répondit le Calife ,
retourne en priſon juſGALANT.
13
qu'à ce qu'elle te foit
venuë. Mais , repliqua le
Poëte , tu me permets
donc auffi de fuivre mon
infpiration telle qu'elle
me viendra , bonne ou
mauvaiſe , tu t'en contenteras
, & me donneras
la liberté ? Oui je te
le promets , répondit le
Calife. Le Poete rentra
dans la prifon d'où l'on
venoit de tirer Hacler à
aqui on avoit coupé la
tefte. Il prit ce fujer pour
14 MERCURE
fa poefie , & fit une fatyre
violente & inftructive
fur ce fujet , pour
blâmer la cruauté du Calife
, & auffitoft fe fit
mener devant lui , & lui
recita fa fatyre , lui difant
: Ton action injufte
contre Hacler m'a frapé
fi fort l'imagination dans
¡ce moment, que la verve
abondante eft venue qui
a inondé ma raiſon & ma
timidité ; maintenant je
fuis un infenfé qui ne
GALANT . 15
crains point la mort ;
fais- la moy donner , &
corrige - toy .Je ne regretteray
point la vie , fi j'ap
prens là - haut que c'eſt
la derniere dont tu auras
difpofé injuftement.
Cette
magnanimité de
Hataya toucha fi fort
le Calife , qu'il devint
plus humain , & recompenfa
magnifiquement
le Pocte , en faifant
pourtant brûler fes
vers , afin qu'on oubliât
16 MERCURE
entierement fes cruau
tez paffées.
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Résumé : TRAIT D'HISTOIRE Arabe.
Le texte relate l'histoire d'Ataya, un poète arabe emprisonné sur ordre du Calife pour avoir renoncé à la poésie. En prison, Ataya rencontre un vieillard nommé Hacler, qui lui enseigne la patience et la résignation face à l'adversité. Hacler refuse de révéler la cachette de Hila, fils du Prophète, même sous la menace de mort, préférant mourir plutôt que de trahir sa foi. Le Calife fait exécuter Hacler et propose à Ataya de choisir entre écrire des vers ou subir le même sort. Ataya explique que la poésie ne se commande pas et promet de composer des vers lorsqu'il sera inspiré. Le Calife accepte et libère Ataya après qu'il ait écrit une satire contre la cruauté du Calife. Touché par la magnanimité d'Ataya, le Calife le récompense et fait brûler ses vers pour effacer ses cruautés passées.
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3
p. 1678-1682
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Rouen, le 1 Juin 1730. au sujet de la Cérémonie de la FIERTE.
Début :
La Cérémonie de la FIERTE s'est faite icy le jour de l'Ascension comme à l'ordinaire [...]
Mots clefs :
Criminels, Absolution, Cérémonie, Rouen, Église, Prison
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Rouen, le 1 Juin 1730. au sujet de la Cérémonie de la FIERTE.
EXTRAIT d'une Lettre écrite de Rouen,
le 1 Juin 1730.anfujet de la Cérémonie de
la FIERTE.
A Cérémonie de la FIERTE s'eft faite
Licy lejeme det de la FUERTE s'eft
LA
dinaire , avec un grand concours de Peuple
& d'Etrangers , que cette curiofité attire
tous les ans , pour voir ce qui fe paffe
au fujet du Prifonnier qu'on y délivre.
C'eſt un des plus anciens monumens de
la piété de nos Rois , & une conceffion des.
plus authentiques qu'ils ayent jamais faite
aucune Eglife de leur Royaume.
Ca
JUILLET. 1730. 1679
Ce Privilege de la ( a ) Fierte, ou Châſſe
de S. Romain , confifte dans l'abfolution
d'un Criminel & de fes complices , à la
Fête de l'Afcenfion ; pourvu qu'il ne foit
pas accufé de crime de Léze- Majefté, d'Héréfie
, de Faufle monnoye,de Viol ou d'Aſfaffinat
de guet-à-pens . Dans le choix que
le Chapitre de l'Eglife Métropolitaine &
Primatialle de Rouen , fait de celui qui
doit jouir de ce Privilege , il obſerve tresreligieufement
la forme ancienne de cette
ceremonie.
"
Le Lundy quinziéme jour avant les Rogations
, il députe au Parlement,à la Cour
des Aydes & au Préfidial quatre Chanoines
pour vérifier & infinuer le Privilege
afin que depuis ce jour- là jufqu'à ce qu'il
ait eu fon effet , aucun Criminel des Prifons
de la Ville & des Faubourgs ne foit
transféré , mis à la queſtion , ni exécuté.
Pendant les trois jours des Rogations, le
Chapitre nomme deux Chanoines Prêtres,
qui le tranfportent dans les Prifons avec
fe Greffier , pour y entendre les confeſfions
des Criminels qui prétendent au Privilege,
& pour recevoir leurs déclarations
fur les cas dont on les accufe.
Le jour de l'Afcenfion , le Chapitre
compofé feulement des Chanoines- Prê
( a ) Flerte , mot corrompu du Latin , Feretrum
, Cereneil , &cg
Tres
1680 MERCURE DE FRANCE
tres , s'affemble
pour
l'élection
du criminel
qui doit
être
délivré
. Après
avoir
invoqué
le S. Efprit
, & fait
ferment
de
garder
le fecret
, on fait
la lecture
des
confeffions
des
prifonniers
, qui
font
brûlées
dans
le même
lieu
, fi - tôt
que
la
Grace
du criminel
eft admife
.
L'Election faite , le nom du criminel
eft porté au Parlement , qui ordonne à
deux Huiffiers d'aller avec le Chapelain
de S. Romain , le prendre dans la prifone
Ils le conduifent au Parlement , où il eft
mis fur la fellette. Après qu'il a été
interrogé , & que fes informations ont été
rapportées , fa remiffion eft admife fur les
Conclufions du Procureur General . Enfuite
le Premier Préfident luy fait une
correction ; & l'ayant déclaré abſous , il
le renvoye au Chapitre , pour le faire
joüir du Privilege de S. Romain ..
L'Eglife Metropolitaine va enfuite proceffionnellement
à la vieille Tour , ancien
Palais des Ducs de Normandie . On y
conduit le prifonnier , & il y reçoit une
feconde correction du Celebrant , qui luifait
porter la Fierte ou Châffe de S. Romain
jufqu'à la grande Eglife, où il feprof
terne aux pieds de chaque Chanoine ; il
quitte fes fers à la Chappelle de S. Romain
; & après avoir entendu la Meffe
qui eft quelquefois differée jufqu'à fix
heures
و
JUILLET . 1730. 1687
heures du foir , à caufe des conteftations
qui furviennent touchant fon élection
il va à la Vicomté de l'Eau , où le Prieur
du Monaftere de Bonnes - Nouvelles , Ordre
de S. Benoît , luy fait encore une remontrance
.
Le lendemain il reçoit une derniere
correction en plein Chapitre , devant tout
le peuple , tête nue , & à genoux . Delà il
eft conduit au Confeffionnal du Grand-
Penitencier qui entend fa confeffion .
Après cette efpece d'amende honorable il
eft renvoyé.
,
Ce qui a donné lieu à ce Privilege , ſelon
la tradition , c'eft que Saint Romain,
Archevêque de Rouen , ayant été averti
que dans la forêt de Rouvray , près des
faubourgs de la Ville , un ferpent d'une
grandeur monstrueufe faifoit des dégats
horribles , il réfolut de l'aller chaffer , &
demanda pour l'accompagner deux hommes
retenus dans les prifons , l'un con
vaincu de meurtre , & l'autre de vol. Le
voleur s'enfuit fi-tôt qu'il vit le ferpent,
le meurtrier demeura & ne quitta point
le faint Prélat , qui jetta fon Etole au cou
de la bête , la fit conduire par ce prifonnier
jufqu'à la Place publique de la Ville,
où elle fe laiffa attacher , & fut brûlée ;
après quoy on fit grace au meurtrier qui
ne s'étoit point épouventé. S. Ouen, fucceffeur
1682 MERCURE DE FRANCE
3
,
ceffeur de S. Romain , pour conferver la
memoire de ce miracle , obtint du Roy ,
Dagobert , dont il étoit Chancelier , le
Privilege en queftion , tel qu'il s'obferve
encore aujourd'huy.
le 1 Juin 1730.anfujet de la Cérémonie de
la FIERTE.
A Cérémonie de la FIERTE s'eft faite
Licy lejeme det de la FUERTE s'eft
LA
dinaire , avec un grand concours de Peuple
& d'Etrangers , que cette curiofité attire
tous les ans , pour voir ce qui fe paffe
au fujet du Prifonnier qu'on y délivre.
C'eſt un des plus anciens monumens de
la piété de nos Rois , & une conceffion des.
plus authentiques qu'ils ayent jamais faite
aucune Eglife de leur Royaume.
Ca
JUILLET. 1730. 1679
Ce Privilege de la ( a ) Fierte, ou Châſſe
de S. Romain , confifte dans l'abfolution
d'un Criminel & de fes complices , à la
Fête de l'Afcenfion ; pourvu qu'il ne foit
pas accufé de crime de Léze- Majefté, d'Héréfie
, de Faufle monnoye,de Viol ou d'Aſfaffinat
de guet-à-pens . Dans le choix que
le Chapitre de l'Eglife Métropolitaine &
Primatialle de Rouen , fait de celui qui
doit jouir de ce Privilege , il obſerve tresreligieufement
la forme ancienne de cette
ceremonie.
"
Le Lundy quinziéme jour avant les Rogations
, il députe au Parlement,à la Cour
des Aydes & au Préfidial quatre Chanoines
pour vérifier & infinuer le Privilege
afin que depuis ce jour- là jufqu'à ce qu'il
ait eu fon effet , aucun Criminel des Prifons
de la Ville & des Faubourgs ne foit
transféré , mis à la queſtion , ni exécuté.
Pendant les trois jours des Rogations, le
Chapitre nomme deux Chanoines Prêtres,
qui le tranfportent dans les Prifons avec
fe Greffier , pour y entendre les confeſfions
des Criminels qui prétendent au Privilege,
& pour recevoir leurs déclarations
fur les cas dont on les accufe.
Le jour de l'Afcenfion , le Chapitre
compofé feulement des Chanoines- Prê
( a ) Flerte , mot corrompu du Latin , Feretrum
, Cereneil , &cg
Tres
1680 MERCURE DE FRANCE
tres , s'affemble
pour
l'élection
du criminel
qui doit
être
délivré
. Après
avoir
invoqué
le S. Efprit
, & fait
ferment
de
garder
le fecret
, on fait
la lecture
des
confeffions
des
prifonniers
, qui
font
brûlées
dans
le même
lieu
, fi - tôt
que
la
Grace
du criminel
eft admife
.
L'Election faite , le nom du criminel
eft porté au Parlement , qui ordonne à
deux Huiffiers d'aller avec le Chapelain
de S. Romain , le prendre dans la prifone
Ils le conduifent au Parlement , où il eft
mis fur la fellette. Après qu'il a été
interrogé , & que fes informations ont été
rapportées , fa remiffion eft admife fur les
Conclufions du Procureur General . Enfuite
le Premier Préfident luy fait une
correction ; & l'ayant déclaré abſous , il
le renvoye au Chapitre , pour le faire
joüir du Privilege de S. Romain ..
L'Eglife Metropolitaine va enfuite proceffionnellement
à la vieille Tour , ancien
Palais des Ducs de Normandie . On y
conduit le prifonnier , & il y reçoit une
feconde correction du Celebrant , qui luifait
porter la Fierte ou Châffe de S. Romain
jufqu'à la grande Eglife, où il feprof
terne aux pieds de chaque Chanoine ; il
quitte fes fers à la Chappelle de S. Romain
; & après avoir entendu la Meffe
qui eft quelquefois differée jufqu'à fix
heures
و
JUILLET . 1730. 1687
heures du foir , à caufe des conteftations
qui furviennent touchant fon élection
il va à la Vicomté de l'Eau , où le Prieur
du Monaftere de Bonnes - Nouvelles , Ordre
de S. Benoît , luy fait encore une remontrance
.
Le lendemain il reçoit une derniere
correction en plein Chapitre , devant tout
le peuple , tête nue , & à genoux . Delà il
eft conduit au Confeffionnal du Grand-
Penitencier qui entend fa confeffion .
Après cette efpece d'amende honorable il
eft renvoyé.
,
Ce qui a donné lieu à ce Privilege , ſelon
la tradition , c'eft que Saint Romain,
Archevêque de Rouen , ayant été averti
que dans la forêt de Rouvray , près des
faubourgs de la Ville , un ferpent d'une
grandeur monstrueufe faifoit des dégats
horribles , il réfolut de l'aller chaffer , &
demanda pour l'accompagner deux hommes
retenus dans les prifons , l'un con
vaincu de meurtre , & l'autre de vol. Le
voleur s'enfuit fi-tôt qu'il vit le ferpent,
le meurtrier demeura & ne quitta point
le faint Prélat , qui jetta fon Etole au cou
de la bête , la fit conduire par ce prifonnier
jufqu'à la Place publique de la Ville,
où elle fe laiffa attacher , & fut brûlée ;
après quoy on fit grace au meurtrier qui
ne s'étoit point épouventé. S. Ouen, fucceffeur
1682 MERCURE DE FRANCE
3
,
ceffeur de S. Romain , pour conferver la
memoire de ce miracle , obtint du Roy ,
Dagobert , dont il étoit Chancelier , le
Privilege en queftion , tel qu'il s'obferve
encore aujourd'huy.
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite de Rouen, le 1 Juin 1730. au sujet de la Cérémonie de la FIERTE.
La cérémonie de la FIERTE, ou Châsse de Saint Romain, se tient annuellement à Rouen et rassemble un grand nombre de participants. Ce privilège, l'un des plus anciens monuments de la piété des rois de France, permet l'absolution d'un criminel et de ses complices lors de la fête de l'Ascension. Cependant, cette grâce n'est pas accordée aux criminels accusés de lèse-majesté, d'hérésie, de fausse monnaie, de viol ou d'assassinat de guet-à-pens. La procédure débute le lundi quinzième jour avant les Rogations, lorsque quatre chanoines sont envoyés au Parlement, à la Cour des Aydes et au Présidial pour vérifier et insérer le privilège. Pendant les trois jours des Rogations, deux chanoines et un greffier recueillent les confessions des criminels prétendant au privilège. Le jour de l'Ascension, les chanoines se réunissent pour élire le criminel à délivrer. Après lecture des confessions, le nom du criminel est porté au Parlement, qui ordonne son transfert et son interrogatoire. Une fois sa rémission admise, il est conduit en procession à la vieille Tour, où il reçoit une correction et porte la châsse de Saint Romain jusqu'à la grande église. Il y reçoit une messe et est finalement renvoyé après une confession et une amende honorable. Selon la tradition, ce privilège trouve son origine dans un miracle attribué à Saint Romain, archevêque de Rouen, qui délivra un prisonnier ayant fait preuve de courage face à un serpent monstrueux. Son successeur, Saint Ouen, obtint du roi Dagobert le privilège qui est encore observé de nos jours.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 567-578
Les Quatre Semblables, Comédie [titre d'après la table]
Début :
Le 5. Mars, les Comédiens Italiens donnerent la premiere Représentation des Quatre Semblables, [...]
Mots clefs :
Coups de bâton, Arlequin, Lélio, Fabrice, Léonore, Hortense, Étranger, Demande, Chrisante, Scapin, Maison, Prison, Naples, Citadin, Épouser, Maître, Valet
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texteReconnaissance textuelle : Les Quatre Semblables, Comédie [titre d'après la table]
Le 5. Mars , les Comédiens Italiens donnerent™
la premiere Représentation des Quatre Semblables
, ou les deux Lelio et les deux Arlequins ; ancienne
Piece jouée ici en Prose en 1716. et composée
à l'imitation des Menechmes de Plaute ; Lelio
y joue les deux Lelio comme Arlequins.Arlequin
y joue les deux Arlequins , avec quelque sorte de
difference dans les habits. Le sicur Dominique
vient de mettre cette Piece en Vers François
laquelle a été reçûë très -favorablement du Public
; il y a fait plusieurs changemens , pour s'accommoder
aux regles de ce Théatre , et pour
conserver et mettre dans tout leur jour les situations
picquantes de cette ingénieuse Comédie.
On en jugera par l'Extrait que voicy.
Chrisante .
ACTEURS.
Hortenfe, Fille de Chrisante.
Lisette , Suivante d'Hortense.
Fabrice.
Les deux Lelio , Fils Jumeaux de Fabrice.
Leonore .
Leandre , Frere de Leonore.
Les deux Arlequins , Valets Jumeaux.
Scapin , Aubergiste.
La Scene est à Naples
Chrisante , dont le caractere est simple et in
genu , ouvre la Scene avec Hortense , sa fille , à
qui il demande le sujet de sa mélancolie , et lui
propose
568 MERCURE DE FRANCE
propose , pour la réjouir , des Livres nouveaux
des ajustemens , des bijoux , &c. Lisette , qui
s'impatiente de tous ces raisonnemens qui ne
vont point au fait , lui dit brusquement .
Comment vous n'êtes pas encor assez habile
Pour sçavoir ce que veut une fille nubile ? ...
"
Chrisante dit qu'il n'entend point ce que signifie
ce terme , Lisette le lui explique en disant
que c'est un mary qu'il faut à sa fille . Chrisante
demande quel est l'objet de sa tendresse , et on
lui apprend que c'est Lélio qu'elle aime. Chrisante
dit que son Pere est son ancien ami ; on
l'oblige d'en aller faire la demande , & c.
Hortense remercie Lisette , en ces termes :
Je ne puis trop payer tes soins officieux ;
Tu m'as fort bien instruite
mieux ;
et je m'en trouve
Avant qu'à tes leçons je me fusse prêtée ,
D'une extrême langueur sans cesse tourmentée ,
Je ne connoissois point ce trouble interieur
Qui souvent , malgré moi , s'élevoit dans mon coeur;
De mes fréquens soupirs la douce violence ,
Ces pleurs qui m'échappoient , ces desirs, ce silence,
Cette mélancolie et ces chagrins secrets ,
Ces jours longs écoulez , ces ennuis , ces regrets ,
Enfin de tous les maux ausquels l'Amour expose ,
Sans toi , sans ton secours j'ignorerois la cause
Hortense rentre ; Lisette apperçoit Arlequin ,
son Amant , et lui témoigne le plaisir que sa
présence
MARS. 1733.
569
présence lui cause ; Arlequin lui demande avec
empressement , quand arrivera le jour tant souhaité
de leur mariage , et l'assure qu'elle sera fort
heureuse avec lui , qu'il sera un mari fort commode
, & c.
Et pourvû qu'au logis je fasse bonne chere .
Que je ne manque pas sur tout du nécessaire ,
Qu'il me soit quelquefois permis de m'enyvrer ,
Sans crainte à ton penchant tu pourras te livrer.
Lisette satisfaite , se retire . Lélio arrive et dit à
Arlequin qu'il devient bien rare ; il répond que
c'est son amour pour Lisette qui en est cause ,
&c. Leonore paroît ; Lelio lui fait les protestations
les plus vives , Arlequin P'interrompt et dit
bas à Leonore que son Maître ne pense pas sérieusement
à tout ce qu'il lui dit , de quoi Leonore
est fort allarmée ; Lelio la rassure et lui
témoigne son impatience d'être unie avec elle .
& c.
Fabrice qui survient , arrête Arlequin qui veut
l'éviter , et lui demande la raison pourquoi il ne
voit presque plus son fils Lélio , Arlequin répond
que l'amour qu'il a pour Léonore en est cause ;
Fabrice lui dit qu'il est fort content de cette alliance
, & c.
Il parle ensuite de son autre fils Lelio , dont il
ignore le sort depuis plus de vingt ans qu'il a
quitté la Maison paternelle ; ce souvenir lui arrache
des larmes ; il ajoûte que cette perte fut
cause qu'il quitta Venise sa Patrie , pour venir
s'établir à Naples. Arlequin se rappelle en même
temps le départ de son frere qui avoit suivi Lelio;
Fabrice ne doute point qu'ils ne soient morts
tous deux. Il expose le sujet de la Piece en ces
termes :
570 MERCURE DE FRANCÉ
Tous deux le même jour reçurent là naissance ;
Ils avoient mêmes traits et même ressemblance ,
Ta mere , qui chez moi servoit fidellement ,
Mit au monde deux fils dans le même moment
Tonpere en ressentit une allegresse extrême ,
Et suivant mon exemple il les nomma de même ;
Tonfrere s'appelloit Arlequin comme toi ...
Fabrice ajoûte qu'il veut aussi reprendre un
femme, puisque son fils Lelio épouse Leonore ; i
nomme Hortense , fille de son ami Chrysante
qu'il trouve fort à son gré.
Lelio étranger arrive à Naples avec son Vale
Arlequin aussi étranger , chargé d'une valise
il témoigne la joye qu'il ressent d'être heureuse
ment débarqué , après vingt ans d'absense , i
se livre tout entier à l'espoir de revoir bien
tôt à Venise , sa Patrie , et son pere et son frer
qu'il y a laissez , et ne veut , dit - il , rester qu
deux jours à Naples.
Scapin , qui les reçoit dans son Hôtellerie , le
appelle d'abord par leurs noms , croyant pat
ler à Lelio et à Arlequin qui sont à Naples e
qu'il connoît depuis long - temps , leur fait de
offres de service , & c. Lelio est fort étonné de s
voir déja connu à Naples ; Arlequin ne l'est pa
moins de voir que son Hôte l'appelle mon che
ami , &c. ils arrêtent un Appartement , Arlequi
y porte la valise et ils y commandent à dîner.
Lelio étranger reste snr la Scene , Leonore 1
prenant pour son Amant , vient lui demande
avec empressement s'il a vû son Pere , et l'assur
que son frere Leandre souhaite avec ardeur leu
union. Lelio étonné prend Leonore pour un
Avanturiere et lui répond dans des termes pe
graciou
MARS. 1733:
571
剿
acieux. Leonore irritée , se repent d'avoir été
op crédule , et de n'avoir pas profité des avis
Arlequin et se retire. Leandre , frere de Leopre
, paroît ensuite et court embrasser Lelio en
ippellant son beaufrere futur ; Lelio le désabuse
r le champ en l'assurant qu'il ne sera jamais
n parent , ne le connoissant pas , non plus que
soeur , et se retire avec Arlequin .
Scapin vient avertir Lelio et Arlequin que le
né est prêt , mais il ne trouve personne ; un
oment après Arlequin Citadin arrive et court
abrasser son ami Scapin , qui lui annonce un
ès- bon dîné et qu'il n'a pas oblié les Macarrons.
lequin est charmé de cette agreable nouvelle ,
autant mieux qu'il ne s'y attendoit nullement.
apin lui apporte le dîné dans uu panier court
, qu'Arlequin emporte .
Lelio et Arlequin Etrangers , arrivent ; Lelio
parle que de l'aimable personne qu'il a vûë
promenade et dont les appas ont touché son
eur ; Scapin vient un moment après et demanà
Arlequin si les Macarrons étoient bons ;
lio dit à Scapin de ne pas plaisanter et de le
vir à dîner , celui- cy soutient qu'Arlequin a
porté le dîner , &c. Cette dispute devient trèsve
et finit le premier Acte par des coups de
ton dont Arlequin régale Scapin.
Au second Acte , Fabrice confie à son ami
hrisante , la passion qu'il a pour Hortense sa
le , et le dessein qu'il a de l'épouser ; Chrisante
t fort surpris de cette proposition , d'autant plus
ie sa fille , dit-il , aime Lelio son fils, je venois,
oute-t'il , vous proposer cette alliance ; Fabrice
rejette , d'autant plus que Lélio est sur le point
épouser Leonore, et enfin Chrisante lui dit qu'il
donnera son consentement , pourvû que
le Hortense y donne le sien
572 MERCURE DE FRANCE
Fabrice écrit à Hortense pour lui déclarer son
amour ; il ne sçait comment faire pour lui faire
rendre sa Lettre ; il apperçoit Arlequin Citadin
qui s'en charge, et promet de la rendre ,
nant quatre ducats que Fabrice lui donne.
moyen-
Arlequin va pour rendre la Lettre à Hortense
qui est dabord charmée de voir Arlequin , ne dou
tant nullement qu'il ne vienne de la part de Lelio,
mais elle est bien surprise après avoir lû la Lettre
de voir qu'elle vient de la part de l'Amoureux
Fabrice. La maniere dont cette Lettre est renduë
et lûë et la finesse avec laquelle cette Scene est
jouée par la Dile Silvia et par le sieur Thomassin
, fait un extrême plaisir . Hortense régale le
Porteur de coups de bâton , et lui ordonne de porter
cette réponse à Fabrice , lequel arrivant dans
le moment , demande avec empressement des
nouvelles de sa Lettre ; Arlequin l'assure qu'Hortense
l'a reçûë avec de grands transports de joye
et ajoûte :
Que mon sort est heureux !
J'aipú , m'a-t'elle dit , faire naître ses feux!
A mafélicité, non , rien n'est comparable ....
Fabrice , persuadé que c'est de lui qu'Hortense
a parlé , est au comble de sa joye , il récompense
largement Arlequin , mais il est bien surpris en
apprenant qu'Hortense a changé de visage en
lisant la fin de la Lettre et qu'elle a reconnu
qu'elle étoit de lui ; mais enfin a-t'elle fait réponse
, dit Fabrice ? oui , très - exactement ,
pond Arlequin , et en même- temps il rend à ce
Vieillard les coups de bâton dont il a été luimême
régalé. Fabrice transporté de colere contre
ce Valet , jure de s'en yenger ; il trouve un
rémoment
MARS. 1733. 573
rnoment après Arlequin étranger , qu'il charge
de mille coups , abusé par la ressemblance , et
dit en s'en allant ;
Faquin , apprend à me connoître ,
On ne maltraite pas impunément son Maître.
મે
soeur ,
Arlequin étranger est fort étonné de se vois
maltraité sans rime ni raison , son Maître ,
à qui il s'en plaint , n'y peut rien comprendre ,
& c. Lelio dit ensuite qu'il ne veut plus rester
dans l'Auberge de Scapin , à qui il ordonne de
remettre sa valise à son Valet Arlequin , &c .
Léandre , outré du procedé de Lelio avec sa
vient dans le dessein de s'en venger ; il
voit Arlequin étranger , qu'il prend pour le Citadin
, instruit des mauvais discours qu'il a tenus;
le maltraite. Arlequin étranger prend la fuite ;
Lelio Citadin surpris de voir courir Arlequin
avec tant de vitesse , veut l'arrêter , et un instant
après Arlequin Citadin arrive ; Lelio lui demande
par quelle raison il couroit si vîte il n'y a
qu'un moment ; Arlequin ne sçait ce qu'il veut
dire , & c.
Leonore vient faire des reproches à Lelio-
Citadin , sur la maniere dont il l'a reçû ; Lelio
veut en vain se justifier , et ne sçai à quoi
attribuer un si prompt changement ; Leonore le
quitte avec indignation , &c.
Scapin sort de son Auberge et rend à Lelio et
à Arlequin Citadins la Valise qui lui a été remise
par l'autre Lelio , &c. ils ne comprennent
pas pourquoi Scapin leur remet cette Valise ,
qu'Arlequin emporte , en disant qu'il en sera
quitte pour la rendre. Lelio Citadin reste ; plus
s'examine et moins il peut comprendre co
qui
$74 MERCURE DE FRANCE
qui peut lui avoir attiré les reproches de Leonore.
Chrisante appercevant Lelio veut lui parler
et lui proposer sa fille , il ne fait nulle attention
aux discours de Chrisante , tant il est accablé
de chagrin d'avoir pû déplaire à sa Maîtresse;
il se plaint ensuite à Leandre du retardement
de son bonheur , lui témoigne l'impatience qu'il
a d'être uni avec sa soeur , et le prie de le presenter
à elle pour la désabuser de ses soupçons injustes
. Leandre entre avec Lelio chez Leonore
et Arlequin - Citadin reste. Lelio étranger paroît;
Arlequin lui demande pourquoi il quitte si -tôt
Leonore , Lelio croit qu'il veut parler de l'Inconnue
qu'il a rencontrée à la promenade , et
dont il est si éperduement amoureux ; Arlequin
lui dit qu'il parle de Leonore , ce qui irrite fort
Lelio ; il lui ordonne de ne lui en parler jamais ,
et s'en va ; Arlequin reste .
Lelio Citadin sort de la maison de Leonore et
vient apprendre à Arlequin qu'elle est appaisée ,
et qu'elle ne doute plus de sa fidelité ; Arlequin
demande ensuite à son Maître des nouvelles de
P'Inconnue , Lelio ne comprend rien à cette demande
, et lui dit qu'il n'est occupé que de Leonore
, et il rentre dans sa maison , et Arlequin
reste. Lelio Etranger survient et trouve Arlequin
qui lui parle encore de Leonore , de Scapin
, &c. A tous ces discours extravagans Lelio
croit que son Valet est devenu fou, et celuici
croit la même chose de son Maître , &c . Le
Lecteur comprend aisément que toutes ces situations
sont tres- comiques et fort propres à
faire rire le Spectateur de l'erreur dans laquelle
sont tous les Acteurs.
Fabrice , pour se vanger des coups de bâtons
qu'Arlequin Cîtadin lui a donné au commencemeat
MARS. 1733.
ment de l'Acte , fait arrêter Arlequin Etranger
575
par des Archers qui le menent en prison.
Au troisiéme Acte , Hortense , à qui son Pere,
vient d'apprendre que Lelio épouse Leonore, témoigne
la douleur qu'elle en ressent , et voyant
paroître Lelio Etranger, veut se retirer, mais elle
ne sçauroit s'y résoudre à la vûë de son Amant ;
celui -ci la reconnoît pour la personne qu'il a
rencontrée à la promenade ; il l'aborde poliment
et lui fait un compliment des plus gracieux . Hortense
surprise de cette politesse, lui déclare qu'el
le a appris qu'il va bien- tôt épouser Leonore.Lelio
la désabuse et lui declare en même temps la
passion qu'elle lui a inspirée , cet aveu charme,
Hortense. Lelio lui demande son nom et sa demeure
, et ajoûte :
Belle Hortense , l'Amour me soumet à ses Loix ,
Je n'avois pas encor éprouvé sa puissance ,
Et mes premiers soupirs vous doivent leur naissance
•
Hortense étonnée , lui dit que ce n'est que par
l'Hymen qu'il peut obtenir et son coeur et sa
main. Lelio promet de la demander à son Pere
&c.
2
Lelio est fort surpris en rentrant , de voir Arlequin
en prison ; il croit que Scapin l'y a fait
mettre,par rapport à toutes les discussions qu'ils
ont eu ensemble , et promet de l'en retirer,
Chrisante et Fabrice arrivent , ce dernier s'applaudit
d'avoir fait mettre Arlequin en prison
pour les coups de bâton qu'il en a reçus , Arlequin
l'accable d'injures à travers sa grille. Un
moment après Arlequin Citadin arrive , et demande
ses gages à Fabrice ; ils sont fort surpris
de le voir en liberté , Payant vû un instant aupara
376 MERCURE DE FRANCE
paravant dans la prison; il se retire , et l'Etranger
reparoît en prison ; ce qui étonne si fort ces
deux vieillards , qu'ils croyent que c'est un enchantement,
et ils sont bien plus étonnez lorsqu'ils
le revoyent un moment après dans la prison.
Lelio Citadin vient prier son pere de hâter son
bonheur en l'unissant à Leonore ; Fabrice lui
donne avec plaisir son consentement. Lelio apprend
en même- temps à Leonore , qui survient ,
cette agreable nouvelle , et rentre avec elle dans
sa maison. Lelio Etranger arrive presque aussitôt
, et Fabrice lui reproche son impolitesse d'avoir
quitté si-tôt Leonore ; le même Lelio ne
comprend encore rien à ce raisonnement. Il frappe
en même temps chez Hortense et lui dit :
Pour vous prouver l'excès de l'ardeur qui me presse,
Hortense , je suis prêt à remplir ma promesse ,
Acceptez- vous ma main ?
Hortense répond qu'elle en fait tout son bonheun
, Lelio la quitte pour dire aux deux Vieillards
:
Allez dire à present à votre Leonore ,
Que la charmante Hortense est celle que j'adore ,
Et que de notre Hymen vous êtes les témoins ,
Croyez moi , desormais , employez mieux vos
soins.
Chrisante et Fabrice restent interdits , tandis
que Lelio Citadin, sortant de la maison de Leonore,
prie son pere avec instance d'envoyer chercher
le Notaire pour dresser le Contrat ; Fabrice
y consent , mais il demande en même- temps à
SON
MARS. 1733.
577
son fils , si c'est pour Hortense qu'il parle , on
pour Leonare ; Lelio assure que c'est pour Leonore
, et que son pere même ne doit pas l'ignorer,
Fabrice dit qu'il ne comprend plus rien à tant
de contrariétez , et que la tête commence à lui
tourner.
Lelio Etranger sortant de la maison d'Hortense
pour procurer la liberté à son Valet , a dit aux
vieillards qu'il va revenir dans l'instant auprès
de sa chere Hortense ; il revient en effet aussi
tot avec Arlequin qu'il a fait sortir de prison ;
Arlequin voyant Scapin et les deux Vieillards ,
s'emporte encore contre enx , et dit à son Maî→
tre ( en montrant Fabrice ) que c'est lui qui l'a
fait emprisonner. Lelio lui demande quel droit i
asur son Valet , et Fabrice lui demande à son
tour quel est le motif qui l'engage à épouser
deux femmes dans un mêmë jour , et lui dit :
Je suis las à la fin d'éprouver ton caprice :
Pour un homme d'honneur on reconnoît Fabrice.
A ce nom de Fabrice , Lelio étonné , lui dit
Fabrice est votre nom , ah ! vous êtes mon pere.
Fabrice.
Vraiment oui , je le suis , à ce que dit ta mere.
Veus voyez Lelio.
Lelio .
Fabrice .
La grande nouveauté!
Lelio.
Qüi , je suis Lelio , cefils si regretté,
H Qu'
Qu'a toujours poursuivi la Fortune cruelle
Depuis qu'il a quitté la Maison Paternelle.
Cette reconnoissance arrache des larmes à fa¬
brice , qui embrasse tendrement son fils en disant
à son ami Chrisante.
Du plus parfait bonheur le Ciel m'a donc comblé
Le voilà ce cher fils , dont je vous ai parlé ,
Dont la trop longue absence a causé mes allarmes ,
Et qui tarit enfin la source de mes larme:.
Lelio demande à son pere des nouvelles de son
frere ; Arlequin fait la même chose ; ils apprennent
qu'ils sont encore vivans et courent l'un et
l'autre pour les embrasser . Ils reviennent et témoignent
à Fabrice combien ils ont été sensibles
à cette entrevûë. Enfin Lelio supplie son pere de
consentir à son bonheur , en lui permettant d'épouser
sa chere Hortense , puisque son frere doit
épouser Leonore ; le plaisir qu'à Fabrice d'avoir
retrouvé son fils , le fait consentir à tout ; Arlequin
veut aussi , dit - il , celebrer ce grand jous
en épousant son aimable Lisette , ils entrent to
chez Hortense , par où la Piece finit.
la premiere Représentation des Quatre Semblables
, ou les deux Lelio et les deux Arlequins ; ancienne
Piece jouée ici en Prose en 1716. et composée
à l'imitation des Menechmes de Plaute ; Lelio
y joue les deux Lelio comme Arlequins.Arlequin
y joue les deux Arlequins , avec quelque sorte de
difference dans les habits. Le sicur Dominique
vient de mettre cette Piece en Vers François
laquelle a été reçûë très -favorablement du Public
; il y a fait plusieurs changemens , pour s'accommoder
aux regles de ce Théatre , et pour
conserver et mettre dans tout leur jour les situations
picquantes de cette ingénieuse Comédie.
On en jugera par l'Extrait que voicy.
Chrisante .
ACTEURS.
Hortenfe, Fille de Chrisante.
Lisette , Suivante d'Hortense.
Fabrice.
Les deux Lelio , Fils Jumeaux de Fabrice.
Leonore .
Leandre , Frere de Leonore.
Les deux Arlequins , Valets Jumeaux.
Scapin , Aubergiste.
La Scene est à Naples
Chrisante , dont le caractere est simple et in
genu , ouvre la Scene avec Hortense , sa fille , à
qui il demande le sujet de sa mélancolie , et lui
propose
568 MERCURE DE FRANCE
propose , pour la réjouir , des Livres nouveaux
des ajustemens , des bijoux , &c. Lisette , qui
s'impatiente de tous ces raisonnemens qui ne
vont point au fait , lui dit brusquement .
Comment vous n'êtes pas encor assez habile
Pour sçavoir ce que veut une fille nubile ? ...
"
Chrisante dit qu'il n'entend point ce que signifie
ce terme , Lisette le lui explique en disant
que c'est un mary qu'il faut à sa fille . Chrisante
demande quel est l'objet de sa tendresse , et on
lui apprend que c'est Lélio qu'elle aime. Chrisante
dit que son Pere est son ancien ami ; on
l'oblige d'en aller faire la demande , & c.
Hortense remercie Lisette , en ces termes :
Je ne puis trop payer tes soins officieux ;
Tu m'as fort bien instruite
mieux ;
et je m'en trouve
Avant qu'à tes leçons je me fusse prêtée ,
D'une extrême langueur sans cesse tourmentée ,
Je ne connoissois point ce trouble interieur
Qui souvent , malgré moi , s'élevoit dans mon coeur;
De mes fréquens soupirs la douce violence ,
Ces pleurs qui m'échappoient , ces desirs, ce silence,
Cette mélancolie et ces chagrins secrets ,
Ces jours longs écoulez , ces ennuis , ces regrets ,
Enfin de tous les maux ausquels l'Amour expose ,
Sans toi , sans ton secours j'ignorerois la cause
Hortense rentre ; Lisette apperçoit Arlequin ,
son Amant , et lui témoigne le plaisir que sa
présence
MARS. 1733.
569
présence lui cause ; Arlequin lui demande avec
empressement , quand arrivera le jour tant souhaité
de leur mariage , et l'assure qu'elle sera fort
heureuse avec lui , qu'il sera un mari fort commode
, & c.
Et pourvû qu'au logis je fasse bonne chere .
Que je ne manque pas sur tout du nécessaire ,
Qu'il me soit quelquefois permis de m'enyvrer ,
Sans crainte à ton penchant tu pourras te livrer.
Lisette satisfaite , se retire . Lélio arrive et dit à
Arlequin qu'il devient bien rare ; il répond que
c'est son amour pour Lisette qui en est cause ,
&c. Leonore paroît ; Lelio lui fait les protestations
les plus vives , Arlequin P'interrompt et dit
bas à Leonore que son Maître ne pense pas sérieusement
à tout ce qu'il lui dit , de quoi Leonore
est fort allarmée ; Lelio la rassure et lui
témoigne son impatience d'être unie avec elle .
& c.
Fabrice qui survient , arrête Arlequin qui veut
l'éviter , et lui demande la raison pourquoi il ne
voit presque plus son fils Lélio , Arlequin répond
que l'amour qu'il a pour Léonore en est cause ;
Fabrice lui dit qu'il est fort content de cette alliance
, & c.
Il parle ensuite de son autre fils Lelio , dont il
ignore le sort depuis plus de vingt ans qu'il a
quitté la Maison paternelle ; ce souvenir lui arrache
des larmes ; il ajoûte que cette perte fut
cause qu'il quitta Venise sa Patrie , pour venir
s'établir à Naples. Arlequin se rappelle en même
temps le départ de son frere qui avoit suivi Lelio;
Fabrice ne doute point qu'ils ne soient morts
tous deux. Il expose le sujet de la Piece en ces
termes :
570 MERCURE DE FRANCÉ
Tous deux le même jour reçurent là naissance ;
Ils avoient mêmes traits et même ressemblance ,
Ta mere , qui chez moi servoit fidellement ,
Mit au monde deux fils dans le même moment
Tonpere en ressentit une allegresse extrême ,
Et suivant mon exemple il les nomma de même ;
Tonfrere s'appelloit Arlequin comme toi ...
Fabrice ajoûte qu'il veut aussi reprendre un
femme, puisque son fils Lelio épouse Leonore ; i
nomme Hortense , fille de son ami Chrysante
qu'il trouve fort à son gré.
Lelio étranger arrive à Naples avec son Vale
Arlequin aussi étranger , chargé d'une valise
il témoigne la joye qu'il ressent d'être heureuse
ment débarqué , après vingt ans d'absense , i
se livre tout entier à l'espoir de revoir bien
tôt à Venise , sa Patrie , et son pere et son frer
qu'il y a laissez , et ne veut , dit - il , rester qu
deux jours à Naples.
Scapin , qui les reçoit dans son Hôtellerie , le
appelle d'abord par leurs noms , croyant pat
ler à Lelio et à Arlequin qui sont à Naples e
qu'il connoît depuis long - temps , leur fait de
offres de service , & c. Lelio est fort étonné de s
voir déja connu à Naples ; Arlequin ne l'est pa
moins de voir que son Hôte l'appelle mon che
ami , &c. ils arrêtent un Appartement , Arlequi
y porte la valise et ils y commandent à dîner.
Lelio étranger reste snr la Scene , Leonore 1
prenant pour son Amant , vient lui demande
avec empressement s'il a vû son Pere , et l'assur
que son frere Leandre souhaite avec ardeur leu
union. Lelio étonné prend Leonore pour un
Avanturiere et lui répond dans des termes pe
graciou
MARS. 1733:
571
剿
acieux. Leonore irritée , se repent d'avoir été
op crédule , et de n'avoir pas profité des avis
Arlequin et se retire. Leandre , frere de Leopre
, paroît ensuite et court embrasser Lelio en
ippellant son beaufrere futur ; Lelio le désabuse
r le champ en l'assurant qu'il ne sera jamais
n parent , ne le connoissant pas , non plus que
soeur , et se retire avec Arlequin .
Scapin vient avertir Lelio et Arlequin que le
né est prêt , mais il ne trouve personne ; un
oment après Arlequin Citadin arrive et court
abrasser son ami Scapin , qui lui annonce un
ès- bon dîné et qu'il n'a pas oblié les Macarrons.
lequin est charmé de cette agreable nouvelle ,
autant mieux qu'il ne s'y attendoit nullement.
apin lui apporte le dîné dans uu panier court
, qu'Arlequin emporte .
Lelio et Arlequin Etrangers , arrivent ; Lelio
parle que de l'aimable personne qu'il a vûë
promenade et dont les appas ont touché son
eur ; Scapin vient un moment après et demanà
Arlequin si les Macarrons étoient bons ;
lio dit à Scapin de ne pas plaisanter et de le
vir à dîner , celui- cy soutient qu'Arlequin a
porté le dîner , &c. Cette dispute devient trèsve
et finit le premier Acte par des coups de
ton dont Arlequin régale Scapin.
Au second Acte , Fabrice confie à son ami
hrisante , la passion qu'il a pour Hortense sa
le , et le dessein qu'il a de l'épouser ; Chrisante
t fort surpris de cette proposition , d'autant plus
ie sa fille , dit-il , aime Lelio son fils, je venois,
oute-t'il , vous proposer cette alliance ; Fabrice
rejette , d'autant plus que Lélio est sur le point
épouser Leonore, et enfin Chrisante lui dit qu'il
donnera son consentement , pourvû que
le Hortense y donne le sien
572 MERCURE DE FRANCE
Fabrice écrit à Hortense pour lui déclarer son
amour ; il ne sçait comment faire pour lui faire
rendre sa Lettre ; il apperçoit Arlequin Citadin
qui s'en charge, et promet de la rendre ,
nant quatre ducats que Fabrice lui donne.
moyen-
Arlequin va pour rendre la Lettre à Hortense
qui est dabord charmée de voir Arlequin , ne dou
tant nullement qu'il ne vienne de la part de Lelio,
mais elle est bien surprise après avoir lû la Lettre
de voir qu'elle vient de la part de l'Amoureux
Fabrice. La maniere dont cette Lettre est renduë
et lûë et la finesse avec laquelle cette Scene est
jouée par la Dile Silvia et par le sieur Thomassin
, fait un extrême plaisir . Hortense régale le
Porteur de coups de bâton , et lui ordonne de porter
cette réponse à Fabrice , lequel arrivant dans
le moment , demande avec empressement des
nouvelles de sa Lettre ; Arlequin l'assure qu'Hortense
l'a reçûë avec de grands transports de joye
et ajoûte :
Que mon sort est heureux !
J'aipú , m'a-t'elle dit , faire naître ses feux!
A mafélicité, non , rien n'est comparable ....
Fabrice , persuadé que c'est de lui qu'Hortense
a parlé , est au comble de sa joye , il récompense
largement Arlequin , mais il est bien surpris en
apprenant qu'Hortense a changé de visage en
lisant la fin de la Lettre et qu'elle a reconnu
qu'elle étoit de lui ; mais enfin a-t'elle fait réponse
, dit Fabrice ? oui , très - exactement ,
pond Arlequin , et en même- temps il rend à ce
Vieillard les coups de bâton dont il a été luimême
régalé. Fabrice transporté de colere contre
ce Valet , jure de s'en yenger ; il trouve un
rémoment
MARS. 1733. 573
rnoment après Arlequin étranger , qu'il charge
de mille coups , abusé par la ressemblance , et
dit en s'en allant ;
Faquin , apprend à me connoître ,
On ne maltraite pas impunément son Maître.
મે
soeur ,
Arlequin étranger est fort étonné de se vois
maltraité sans rime ni raison , son Maître ,
à qui il s'en plaint , n'y peut rien comprendre ,
& c. Lelio dit ensuite qu'il ne veut plus rester
dans l'Auberge de Scapin , à qui il ordonne de
remettre sa valise à son Valet Arlequin , &c .
Léandre , outré du procedé de Lelio avec sa
vient dans le dessein de s'en venger ; il
voit Arlequin étranger , qu'il prend pour le Citadin
, instruit des mauvais discours qu'il a tenus;
le maltraite. Arlequin étranger prend la fuite ;
Lelio Citadin surpris de voir courir Arlequin
avec tant de vitesse , veut l'arrêter , et un instant
après Arlequin Citadin arrive ; Lelio lui demande
par quelle raison il couroit si vîte il n'y a
qu'un moment ; Arlequin ne sçait ce qu'il veut
dire , & c.
Leonore vient faire des reproches à Lelio-
Citadin , sur la maniere dont il l'a reçû ; Lelio
veut en vain se justifier , et ne sçai à quoi
attribuer un si prompt changement ; Leonore le
quitte avec indignation , &c.
Scapin sort de son Auberge et rend à Lelio et
à Arlequin Citadins la Valise qui lui a été remise
par l'autre Lelio , &c. ils ne comprennent
pas pourquoi Scapin leur remet cette Valise ,
qu'Arlequin emporte , en disant qu'il en sera
quitte pour la rendre. Lelio Citadin reste ; plus
s'examine et moins il peut comprendre co
qui
$74 MERCURE DE FRANCE
qui peut lui avoir attiré les reproches de Leonore.
Chrisante appercevant Lelio veut lui parler
et lui proposer sa fille , il ne fait nulle attention
aux discours de Chrisante , tant il est accablé
de chagrin d'avoir pû déplaire à sa Maîtresse;
il se plaint ensuite à Leandre du retardement
de son bonheur , lui témoigne l'impatience qu'il
a d'être uni avec sa soeur , et le prie de le presenter
à elle pour la désabuser de ses soupçons injustes
. Leandre entre avec Lelio chez Leonore
et Arlequin - Citadin reste. Lelio étranger paroît;
Arlequin lui demande pourquoi il quitte si -tôt
Leonore , Lelio croit qu'il veut parler de l'Inconnue
qu'il a rencontrée à la promenade , et
dont il est si éperduement amoureux ; Arlequin
lui dit qu'il parle de Leonore , ce qui irrite fort
Lelio ; il lui ordonne de ne lui en parler jamais ,
et s'en va ; Arlequin reste .
Lelio Citadin sort de la maison de Leonore et
vient apprendre à Arlequin qu'elle est appaisée ,
et qu'elle ne doute plus de sa fidelité ; Arlequin
demande ensuite à son Maître des nouvelles de
P'Inconnue , Lelio ne comprend rien à cette demande
, et lui dit qu'il n'est occupé que de Leonore
, et il rentre dans sa maison , et Arlequin
reste. Lelio Etranger survient et trouve Arlequin
qui lui parle encore de Leonore , de Scapin
, &c. A tous ces discours extravagans Lelio
croit que son Valet est devenu fou, et celuici
croit la même chose de son Maître , &c . Le
Lecteur comprend aisément que toutes ces situations
sont tres- comiques et fort propres à
faire rire le Spectateur de l'erreur dans laquelle
sont tous les Acteurs.
Fabrice , pour se vanger des coups de bâtons
qu'Arlequin Cîtadin lui a donné au commencemeat
MARS. 1733.
ment de l'Acte , fait arrêter Arlequin Etranger
575
par des Archers qui le menent en prison.
Au troisiéme Acte , Hortense , à qui son Pere,
vient d'apprendre que Lelio épouse Leonore, témoigne
la douleur qu'elle en ressent , et voyant
paroître Lelio Etranger, veut se retirer, mais elle
ne sçauroit s'y résoudre à la vûë de son Amant ;
celui -ci la reconnoît pour la personne qu'il a
rencontrée à la promenade ; il l'aborde poliment
et lui fait un compliment des plus gracieux . Hortense
surprise de cette politesse, lui déclare qu'el
le a appris qu'il va bien- tôt épouser Leonore.Lelio
la désabuse et lui declare en même temps la
passion qu'elle lui a inspirée , cet aveu charme,
Hortense. Lelio lui demande son nom et sa demeure
, et ajoûte :
Belle Hortense , l'Amour me soumet à ses Loix ,
Je n'avois pas encor éprouvé sa puissance ,
Et mes premiers soupirs vous doivent leur naissance
•
Hortense étonnée , lui dit que ce n'est que par
l'Hymen qu'il peut obtenir et son coeur et sa
main. Lelio promet de la demander à son Pere
&c.
2
Lelio est fort surpris en rentrant , de voir Arlequin
en prison ; il croit que Scapin l'y a fait
mettre,par rapport à toutes les discussions qu'ils
ont eu ensemble , et promet de l'en retirer,
Chrisante et Fabrice arrivent , ce dernier s'applaudit
d'avoir fait mettre Arlequin en prison
pour les coups de bâton qu'il en a reçus , Arlequin
l'accable d'injures à travers sa grille. Un
moment après Arlequin Citadin arrive , et demande
ses gages à Fabrice ; ils sont fort surpris
de le voir en liberté , Payant vû un instant aupara
376 MERCURE DE FRANCE
paravant dans la prison; il se retire , et l'Etranger
reparoît en prison ; ce qui étonne si fort ces
deux vieillards , qu'ils croyent que c'est un enchantement,
et ils sont bien plus étonnez lorsqu'ils
le revoyent un moment après dans la prison.
Lelio Citadin vient prier son pere de hâter son
bonheur en l'unissant à Leonore ; Fabrice lui
donne avec plaisir son consentement. Lelio apprend
en même- temps à Leonore , qui survient ,
cette agreable nouvelle , et rentre avec elle dans
sa maison. Lelio Etranger arrive presque aussitôt
, et Fabrice lui reproche son impolitesse d'avoir
quitté si-tôt Leonore ; le même Lelio ne
comprend encore rien à ce raisonnement. Il frappe
en même temps chez Hortense et lui dit :
Pour vous prouver l'excès de l'ardeur qui me presse,
Hortense , je suis prêt à remplir ma promesse ,
Acceptez- vous ma main ?
Hortense répond qu'elle en fait tout son bonheun
, Lelio la quitte pour dire aux deux Vieillards
:
Allez dire à present à votre Leonore ,
Que la charmante Hortense est celle que j'adore ,
Et que de notre Hymen vous êtes les témoins ,
Croyez moi , desormais , employez mieux vos
soins.
Chrisante et Fabrice restent interdits , tandis
que Lelio Citadin, sortant de la maison de Leonore,
prie son pere avec instance d'envoyer chercher
le Notaire pour dresser le Contrat ; Fabrice
y consent , mais il demande en même- temps à
SON
MARS. 1733.
577
son fils , si c'est pour Hortense qu'il parle , on
pour Leonare ; Lelio assure que c'est pour Leonore
, et que son pere même ne doit pas l'ignorer,
Fabrice dit qu'il ne comprend plus rien à tant
de contrariétez , et que la tête commence à lui
tourner.
Lelio Etranger sortant de la maison d'Hortense
pour procurer la liberté à son Valet , a dit aux
vieillards qu'il va revenir dans l'instant auprès
de sa chere Hortense ; il revient en effet aussi
tot avec Arlequin qu'il a fait sortir de prison ;
Arlequin voyant Scapin et les deux Vieillards ,
s'emporte encore contre enx , et dit à son Maî→
tre ( en montrant Fabrice ) que c'est lui qui l'a
fait emprisonner. Lelio lui demande quel droit i
asur son Valet , et Fabrice lui demande à son
tour quel est le motif qui l'engage à épouser
deux femmes dans un mêmë jour , et lui dit :
Je suis las à la fin d'éprouver ton caprice :
Pour un homme d'honneur on reconnoît Fabrice.
A ce nom de Fabrice , Lelio étonné , lui dit
Fabrice est votre nom , ah ! vous êtes mon pere.
Fabrice.
Vraiment oui , je le suis , à ce que dit ta mere.
Veus voyez Lelio.
Lelio .
Fabrice .
La grande nouveauté!
Lelio.
Qüi , je suis Lelio , cefils si regretté,
H Qu'
Qu'a toujours poursuivi la Fortune cruelle
Depuis qu'il a quitté la Maison Paternelle.
Cette reconnoissance arrache des larmes à fa¬
brice , qui embrasse tendrement son fils en disant
à son ami Chrisante.
Du plus parfait bonheur le Ciel m'a donc comblé
Le voilà ce cher fils , dont je vous ai parlé ,
Dont la trop longue absence a causé mes allarmes ,
Et qui tarit enfin la source de mes larme:.
Lelio demande à son pere des nouvelles de son
frere ; Arlequin fait la même chose ; ils apprennent
qu'ils sont encore vivans et courent l'un et
l'autre pour les embrasser . Ils reviennent et témoignent
à Fabrice combien ils ont été sensibles
à cette entrevûë. Enfin Lelio supplie son pere de
consentir à son bonheur , en lui permettant d'épouser
sa chere Hortense , puisque son frere doit
épouser Leonore ; le plaisir qu'à Fabrice d'avoir
retrouvé son fils , le fait consentir à tout ; Arlequin
veut aussi , dit - il , celebrer ce grand jous
en épousant son aimable Lisette , ils entrent to
chez Hortense , par où la Piece finit.
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Résumé : Les Quatre Semblables, Comédie [titre d'après la table]
Le 5 mars 1716, les Comédiens Italiens ont présenté 'Les Quatre Semblables', une pièce inspirée des 'Ménéchmes' de Plaute et jouée en prose. Dominique a adapté cette pièce en vers français, introduisant des changements pour respecter les règles du théâtre et accentuer les situations comiques. L'intrigue se déroule à Naples et implique plusieurs personnages principaux, notamment Lelio, Hortense, Fabrice, Chrisante, Arlequin et Leonore. La pièce commence avec Chrisante et sa fille Hortense. Hortense est mélancolique et Lisette, sa suivante, révèle qu'Hortense est amoureuse de Lelio. Chrisante décide alors de demander la main de Lelio pour Hortense. Hortense remercie Lisette pour ses conseils, et Lisette exprime son plaisir de voir son amant Arlequin. Arlequin parle de leur mariage imminent. Lelio arrive et discute avec Arlequin, qui explique que son amour pour Lisette le rend rare. Leonore apparaît et Lelio lui fait des déclarations d'amour. Arlequin interrompt pour dire à Leonore que Lelio ne pense pas sérieusement à ses paroles, ce qui alarme Leonore. Lelio la rassure et exprime son impatience de l'épouser. Fabrice, le père de Lelio, interroge Arlequin sur l'absence de son fils. Arlequin répond que Lelio est amoureux de Leonore, ce qui satisfait Fabrice. Fabrice parle ensuite de son autre fils Lelio, disparu depuis vingt ans, et de son départ de Venise pour Naples. Arlequin se rappelle le départ de son frère, qui avait suivi Lelio. Un Lelio étranger arrive à Naples avec son valet Arlequin, chargé d'une valise. Ils sont accueillis par Scapin, l'aubergiste, qui les confond avec les Lelio et Arlequin locaux. Lelio étranger est surpris d'être reconnu à Naples et Arlequin l'est également. Ils commandent à dîner et restent sur scène. Leonore, prenant Lelio étranger pour son amant, lui demande des nouvelles de son père et exprime le désir de son frère Leandre de les voir unis. Lelio étranger, étonné, la prend pour une aventurière et lui répond de manière peu gracieuse. Leonore, irritée, se retire. Leandre apparaît et embrasse Lelio étranger, qu'il croit être son futur beau-frère. Lelio étranger le détrompe et se retire avec Arlequin. Scapin annonce que le dîner est prêt, mais ne trouve personne. Arlequin Citadin arrive et embrasse Scapin, qui lui annonce un bon dîner avec des macaronis. Arlequin est ravi et emporte le dîner. Lelio et Arlequin étrangers reviennent et discutent avec Scapin, qui les confond avec les autres. Une dispute éclate et se termine par des coups de bâton. Au second acte, Fabrice confie à Chrisante son amour pour Hortense et son désir de l'épouser. Chrisante est surpris, car Hortense aime Lelio. Fabrice rejette cette alliance, car Lelio va épouser Leonore. Chrisante accepte finalement si Hortense est d'accord. Fabrice écrit une lettre à Hortense pour lui déclarer son amour et la confie à Arlequin Citadin. Hortense, surprise, apprend que la lettre vient de Fabrice. Elle régale Arlequin de coups de bâton et lui ordonne de porter une réponse à Fabrice. Fabrice, ravi, récompense Arlequin, mais est surpris d'apprendre qu'Hortense a changé d'expression en lisant la lettre. Arlequin rend à Fabrice les coups de bâton. Fabrice, furieux, maltraite Arlequin étranger par erreur. Lelio étranger décide de quitter l'auberge de Scapin. Leandre, furieux contre Lelio Citadin, maltraite Arlequin étranger. Scapin rend la valise à Lelio et Arlequin Citadins, qui ne comprennent pas. Chrisante propose à Lelio Citadin de l'épouser, mais celui-ci est accablé de chagrin. Lelio Citadin demande à Leandre de le présenter à Leonore pour la désabuser de ses soupçons. Leonore, apaisée, ne doute plus de la fidélité de Lelio Citadin. Lelio étranger et Arlequin Citadin se croisent et se prennent pour fous. Fabrice fait arrêter Arlequin étranger par des archers.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 1192-1201
Tragédie d'Adelaïde, &c. [titre d'après la table]
Début :
Sur les plaintes qu'on a faites, de n'avoir fait qu'annoncer la Tragedie [...]
Mots clefs :
Duc de Vendôme, Adélaïde du Guesclin, Duc de Nemours, Coucy, Frère, Amour, Gardes, Mort, Prison, Vengeance, Voltaire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Tragédie d'Adelaïde, &c. [titre d'après la table]
Ur les plaintes qu'on a faites , de n'avoir
fait qu'annoncer la Tragedie
d'Adelaide de M. de Voltaire , après
avoir promis d'en parler plus au long :
nous avons composé l'Extrait qu'on va
lire , avec le plus de soin qu'il nous a été
possible.
Adelaïde du Guesclin , niéce du Conétable
de ce nom , est l'Heroine de ce Poëme.
L'époque de l'action Theatrale , est
le tems des guerres de Charles VII . contre
les Anglois , et la Ville de Lille est
le lieu de la Scene .
.
Adelaide commence la Piece avec le
1. Vol -Sire
JUIN. 1734. 1193
-
Sire de Coucy , Seigneur François . Ce der
nier a aimé Adelaïde avant qu'elle fût
aimée du Duc de Vendôme ; son amitié
pour ce Prince du Sang des Bourbons le
porte non seulement à sacrifier son
amour , mais encore à parler en faveur
de son Rival . Quelques Critiques auroient
souhaité que son amitié ne fut pas allée
plus loin , et jusqu'à lui fire prendre les
armes contre son Maître legitime. Adelaïde
lui fait presser.tir qu'elle ne sçauroit
donner ni son coeur , ni sa main au
Duc de Vendôme , et le prie de détourner
son Ami d'une passion qui le rendroit
malheureux ; Coucy se refuse à ce
bon office , sous prétexte
, sous prétexte qu'il ne veut
pas affliger Vendôme.
Adelaïde allarmée d'un faux bruit qui
court sur la mort du Duc de Nemours ,
Frere du Duc de Vendôme , fait connoî
tre par sa frayeur qu'elle aime Nemours,
elle l'avoue même à Jaise d'Aglure , sa
confidente.
Vendôme vient , il parle d'amour à
Adelaide ; elle lui demande si Coucy ne
lui a point parlé ; le nom de Nemours
lui échappe elle n'en dit pas davantage
, ou plutôt elle pallie ce demi aveu
par une feinte ingenieuse , en lui disant
que le bruit de la mort d'un frere si cher
1.Vol.
Giij ne
194 MERCURE DE FRANCE
ne lui permet pas de parler d'Hymen .
Heureusement pour elle Coucy vient annoncer
à Vendôme que les Troupes du
Dauphin s'avancent à grand pas . Vendôme
est obligé de partir incertain de son
sort.
Adelaïde , ayant appris dans la Scene
précedente , que non- seulement son cher
Nemours n'est pas mort , mais qu'il est
à la tête des Troupes qui s'avancent vers
Lille , flotte entre l'esperance et la crainte .
Vendôme et Coucy ouvrent la Scene
du II . Acre , et font entendre que les
Assiegeans ont été repoussez vigoureusement.
Vendôme rend justice à la valeur
d'un de leurs Chefs qu'il n'a fait prisonnier
qu'après l'avoir blessé ; il dit même
qu'en le combattant il a senti des mouvemens
de pitié qu'il attribuë à l'amour
qu'il sent pour Adelaide , qui ne lui permet
plus cette ferocité qu'il avoit autrefois
dans les combats .
On amene le Prisonnier blessé , c'est
Nemours lui même;Vendôme court l'embrasser
; Nemours se refuse à ses caresses ;
il lui reproche sa rebellion contre son
Prince , et son union avec les Ennemis.
de sa Patrie ; Vendôme ne peut entendre
ces reproches sans colere , et prie son Frere
de les lui épargner ; il l'invite à la fêre
I. Vol.
qui ..
JUIN. 1734.
1195
qui se prépare pour son Hymen avec Ade
laïde. Nemours lui reproche son amour
comme violent et même effrené ; Vendô
me lui répond que la vûë de cet aimable
objet va suffire pour justifier la violence
de sa passion : Il ordonne qu'on fasse venir
Adelaïde.
A la vûë d'Adelaïde , la blessure de
Nemours se rouvre , Vendôme en est allarmé
, il suit ce malheureux Frere qu'on
em porte.
Adelaïde se plaint au Ciel de ce qu'il
ne lui rend son Amant que pour le lui
faire perdre une seconde fois .
Vendôme revient , Adelaïde lui demande
avec empressement des nouvelles de
Nemours ; il lui répond qu'il a arrêté son
sang et Ini reparle d'Amour et d'Hymen.
Adelaïde lui répond fierement
qu'elle ne donnera jamais ni sa main , ni
son coeur à un Prince armé contre son
Roi Vendôme éclate de colere contre
elle. Adelaide le quitte avec une noble
intrépidité , et en l'assurant qu'elle sera
toujours la même. Vendôme ne sçait à
quoi attribuer la resolution d'Adelaïde ,
il en soupçonne quelque secrette inclination;
le silense que Coucy a gardé depuis
qu'il l'a prié de disposer le coeur d'Adelaïde
en sa faveur , lui fait croire qu'il est
I. Vol.
Giljson
1198 MERCURE DE FRANCE
sa parole , il ne peut la suivre sans se deshonorer
; elle lui dit tendrement que la
fortune jalouse lui a toujours envié le nom
de son Epouse ; Nemours lui dir que la
foi qu'il a donnée n'a pas besoin de l'appareil
pompeux qui ne sert qu'à la rendre
plus éclatante sans la rendre plus sûre`s
il atteste les Manes des Rois ses Ayeux ,
et l'ombre du Grand - du Guesclin
dont la cendre repose avec celle de ses
Maîtres ; et c'est sur de si Illustres Garans
qu'il lui jure une foi immortelle.
Adelaide rassurée par de si augustes sermens
, se resout à partir d'un lieu qui
peut lui devenir fatal...
>
Vendôme entre sur le champ , et il
ordonne à ses Gardes de saisir Nemours : *
c'est alors que Nemours croit n'avoir plus
rien à dissimuler ; il brave la colere de
son Frere , le traite d'infidele à son Roi
et à sa Patrie ; Vendôme ordonne à ses
Gardes de le conduire en lien de sûreté
Nemours continuëà le braver , et renouvellant
son serment à Adélaïde , il dit fiement
à leur commun Tyran , qu'il l'en
rend témoin malgré lui. Adelaïde en
pleurs n'oublie rien pour desarmer son fu
bon
que
Vendo
* Les Critiques ne trouvent pas
me ne dise rien aux Spectateurs , de ce qu'il a appris
dans l'entr Acte.
1. Vel. rieux
JUIN. 1734 1199
rieux Amant ; il lui répond que la grace
de Nemours est à l'Autel , et que si elle
balance à l'y suivre , c'est fait de ce trop
heureux Rival.
Un Officier lui vient annoncer qu'on
le trahit , et que c'est le Duc de Nemours
qui est l'Auteur de la trahison
Coucy vient l'inviter à se défendre , il
répond à Coucy qu'il n'est présentement
Occupé que de sa vengeance contre son
Rival , et que dès qu'il l'aura remplie ',
il ira chercher la mort parmi ses ennemis ;
Coucy fremit de cette resolution ; Vendôme
lui dit qu'il n'attend pas ce service
de sa main , et qu'il en trouvera de plus
sûres ; Coucy craignant d'être prévenu
lui promet de lui donner des preuves de
sou zele dont il n'aura plus à douter .
Vendôme le reconnoît pour son veritable
Ami , et lui dit de l'avertir par un
coup de canon de l'execution de sa promesse.
Au V. Acte , Vendôme , tout plein de
sa vengeance dont il n'a pas voulu se reposer
sur un Ami aussi vertueux que
Coucy , demande à un de ses gardes si le
Soldat qu'il a choisi pour tuer Nemours
est prêt à executer ses ordres ; ce Garde
lui répond qu'il n'en doit point douterjet
qu'on a vû ce Soldat s'avancer vers
1. Vol.
G vj la
1200 MERCURE DE FRANCE
la prison ; Vendôme ordonne qu'on se
retire .
C'est ici le premier moment où la nature
lui fait sentir des remords , il flotte assez
long tems entre la haine et l'amitié. Il
se détermine enfin en faveur du sang ; il
appelle ses Gardes, un Officier vient; Vendôme
lui ordonne d'aller faire revoquer
l'ordre sanglant qu'il a donné contre son
Frere ; cet Officier lui fait connoître qu'il
craint qu'ikn'en soit plus tems , et qu'on
vient de transporter un Cadavre de la
Prison par l'ordre de Coucy. Vendôme
ne doute point que Coucy ne l'ait trop
bien servi ; un coup de canon qu'il entend
, ou qu'il croit entendre ne lui permet
plus de douter de l'assassinat ; il se
livre tout entier aux plus vifs remords .
Adelaïde , qui ignore ce qui peut s'être
passé , vient le trouver prête à le suivre à
'Autel , puisque la vie de son Amant
est à ce prix ; Vendôme ne lui répond que
par des gemissemens , et lui dit enfin que
Nemours n'est plus . Adelaide l'accable
de reproches et d'injures ; il veut se donner
la mort ; Coucy arrive et lui retient
le bras ; Vendôme lui reproche d'avoir
exccuté un Arrêt dicté par la jalousie s
Coucy lui répond que le crime n'en auroit
pas été moins commis , puisqu'une
1. Vola autre
JUIN. 1734. 1201
autre main en alloit être chargée. Adelaide
fait des reproches très touchans à
Coucy , dont elle n'auroit jamais soupçonné
qu'un coup si funeste pût partir.
Coucy se justifie enfin envers tous les
il déclare que le corps qu'on a vû
deux ,
sortir de la Prison est celui du Soldat qui
avoit déja le bras levé pour le poignarder
, et qui auroit achevé le crime s'il
n'avoit pas été poignardé lui même . Il ordonne
qu'on fasse venir Nemours ; ce
Prince vient , son Frere le reçoit à bras
ouverts ; il se punit des ordres cruels
qu'il avoit donnés , en se privant d'Adelaïde
, et se reconcilie avec son Frere , en
lui cedant cet objet de son Amour. La
Tragedie finit par une ferme resolution
que Vendôme fait de faire oublier ses égaremens
à force de vertus ; il consent à
rentrer sous l'obéissance de son Maître.
La fin de cette Piece à paru très- touchante.
Les principaux Roles qui sont celui
de Vendôme , d'Adelaïde , de Nemours,
et de Coucy , ont été patfaitement bien
remplis , par le sieur du Frêne , la Dlle
Gossin , le sieur Grandval , et le sieur le
Grand.
fait qu'annoncer la Tragedie
d'Adelaide de M. de Voltaire , après
avoir promis d'en parler plus au long :
nous avons composé l'Extrait qu'on va
lire , avec le plus de soin qu'il nous a été
possible.
Adelaïde du Guesclin , niéce du Conétable
de ce nom , est l'Heroine de ce Poëme.
L'époque de l'action Theatrale , est
le tems des guerres de Charles VII . contre
les Anglois , et la Ville de Lille est
le lieu de la Scene .
.
Adelaide commence la Piece avec le
1. Vol -Sire
JUIN. 1734. 1193
-
Sire de Coucy , Seigneur François . Ce der
nier a aimé Adelaïde avant qu'elle fût
aimée du Duc de Vendôme ; son amitié
pour ce Prince du Sang des Bourbons le
porte non seulement à sacrifier son
amour , mais encore à parler en faveur
de son Rival . Quelques Critiques auroient
souhaité que son amitié ne fut pas allée
plus loin , et jusqu'à lui fire prendre les
armes contre son Maître legitime. Adelaïde
lui fait presser.tir qu'elle ne sçauroit
donner ni son coeur , ni sa main au
Duc de Vendôme , et le prie de détourner
son Ami d'une passion qui le rendroit
malheureux ; Coucy se refuse à ce
bon office , sous prétexte
, sous prétexte qu'il ne veut
pas affliger Vendôme.
Adelaïde allarmée d'un faux bruit qui
court sur la mort du Duc de Nemours ,
Frere du Duc de Vendôme , fait connoî
tre par sa frayeur qu'elle aime Nemours,
elle l'avoue même à Jaise d'Aglure , sa
confidente.
Vendôme vient , il parle d'amour à
Adelaide ; elle lui demande si Coucy ne
lui a point parlé ; le nom de Nemours
lui échappe elle n'en dit pas davantage
, ou plutôt elle pallie ce demi aveu
par une feinte ingenieuse , en lui disant
que le bruit de la mort d'un frere si cher
1.Vol.
Giij ne
194 MERCURE DE FRANCE
ne lui permet pas de parler d'Hymen .
Heureusement pour elle Coucy vient annoncer
à Vendôme que les Troupes du
Dauphin s'avancent à grand pas . Vendôme
est obligé de partir incertain de son
sort.
Adelaïde , ayant appris dans la Scene
précedente , que non- seulement son cher
Nemours n'est pas mort , mais qu'il est
à la tête des Troupes qui s'avancent vers
Lille , flotte entre l'esperance et la crainte .
Vendôme et Coucy ouvrent la Scene
du II . Acre , et font entendre que les
Assiegeans ont été repoussez vigoureusement.
Vendôme rend justice à la valeur
d'un de leurs Chefs qu'il n'a fait prisonnier
qu'après l'avoir blessé ; il dit même
qu'en le combattant il a senti des mouvemens
de pitié qu'il attribuë à l'amour
qu'il sent pour Adelaide , qui ne lui permet
plus cette ferocité qu'il avoit autrefois
dans les combats .
On amene le Prisonnier blessé , c'est
Nemours lui même;Vendôme court l'embrasser
; Nemours se refuse à ses caresses ;
il lui reproche sa rebellion contre son
Prince , et son union avec les Ennemis.
de sa Patrie ; Vendôme ne peut entendre
ces reproches sans colere , et prie son Frere
de les lui épargner ; il l'invite à la fêre
I. Vol.
qui ..
JUIN. 1734.
1195
qui se prépare pour son Hymen avec Ade
laïde. Nemours lui reproche son amour
comme violent et même effrené ; Vendô
me lui répond que la vûë de cet aimable
objet va suffire pour justifier la violence
de sa passion : Il ordonne qu'on fasse venir
Adelaïde.
A la vûë d'Adelaïde , la blessure de
Nemours se rouvre , Vendôme en est allarmé
, il suit ce malheureux Frere qu'on
em porte.
Adelaïde se plaint au Ciel de ce qu'il
ne lui rend son Amant que pour le lui
faire perdre une seconde fois .
Vendôme revient , Adelaïde lui demande
avec empressement des nouvelles de
Nemours ; il lui répond qu'il a arrêté son
sang et Ini reparle d'Amour et d'Hymen.
Adelaïde lui répond fierement
qu'elle ne donnera jamais ni sa main , ni
son coeur à un Prince armé contre son
Roi Vendôme éclate de colere contre
elle. Adelaide le quitte avec une noble
intrépidité , et en l'assurant qu'elle sera
toujours la même. Vendôme ne sçait à
quoi attribuer la resolution d'Adelaïde ,
il en soupçonne quelque secrette inclination;
le silense que Coucy a gardé depuis
qu'il l'a prié de disposer le coeur d'Adelaïde
en sa faveur , lui fait croire qu'il est
I. Vol.
Giljson
1198 MERCURE DE FRANCE
sa parole , il ne peut la suivre sans se deshonorer
; elle lui dit tendrement que la
fortune jalouse lui a toujours envié le nom
de son Epouse ; Nemours lui dir que la
foi qu'il a donnée n'a pas besoin de l'appareil
pompeux qui ne sert qu'à la rendre
plus éclatante sans la rendre plus sûre`s
il atteste les Manes des Rois ses Ayeux ,
et l'ombre du Grand - du Guesclin
dont la cendre repose avec celle de ses
Maîtres ; et c'est sur de si Illustres Garans
qu'il lui jure une foi immortelle.
Adelaide rassurée par de si augustes sermens
, se resout à partir d'un lieu qui
peut lui devenir fatal...
>
Vendôme entre sur le champ , et il
ordonne à ses Gardes de saisir Nemours : *
c'est alors que Nemours croit n'avoir plus
rien à dissimuler ; il brave la colere de
son Frere , le traite d'infidele à son Roi
et à sa Patrie ; Vendôme ordonne à ses
Gardes de le conduire en lien de sûreté
Nemours continuëà le braver , et renouvellant
son serment à Adélaïde , il dit fiement
à leur commun Tyran , qu'il l'en
rend témoin malgré lui. Adelaïde en
pleurs n'oublie rien pour desarmer son fu
bon
que
Vendo
* Les Critiques ne trouvent pas
me ne dise rien aux Spectateurs , de ce qu'il a appris
dans l'entr Acte.
1. Vel. rieux
JUIN. 1734 1199
rieux Amant ; il lui répond que la grace
de Nemours est à l'Autel , et que si elle
balance à l'y suivre , c'est fait de ce trop
heureux Rival.
Un Officier lui vient annoncer qu'on
le trahit , et que c'est le Duc de Nemours
qui est l'Auteur de la trahison
Coucy vient l'inviter à se défendre , il
répond à Coucy qu'il n'est présentement
Occupé que de sa vengeance contre son
Rival , et que dès qu'il l'aura remplie ',
il ira chercher la mort parmi ses ennemis ;
Coucy fremit de cette resolution ; Vendôme
lui dit qu'il n'attend pas ce service
de sa main , et qu'il en trouvera de plus
sûres ; Coucy craignant d'être prévenu
lui promet de lui donner des preuves de
sou zele dont il n'aura plus à douter .
Vendôme le reconnoît pour son veritable
Ami , et lui dit de l'avertir par un
coup de canon de l'execution de sa promesse.
Au V. Acte , Vendôme , tout plein de
sa vengeance dont il n'a pas voulu se reposer
sur un Ami aussi vertueux que
Coucy , demande à un de ses gardes si le
Soldat qu'il a choisi pour tuer Nemours
est prêt à executer ses ordres ; ce Garde
lui répond qu'il n'en doit point douterjet
qu'on a vû ce Soldat s'avancer vers
1. Vol.
G vj la
1200 MERCURE DE FRANCE
la prison ; Vendôme ordonne qu'on se
retire .
C'est ici le premier moment où la nature
lui fait sentir des remords , il flotte assez
long tems entre la haine et l'amitié. Il
se détermine enfin en faveur du sang ; il
appelle ses Gardes, un Officier vient; Vendôme
lui ordonne d'aller faire revoquer
l'ordre sanglant qu'il a donné contre son
Frere ; cet Officier lui fait connoître qu'il
craint qu'ikn'en soit plus tems , et qu'on
vient de transporter un Cadavre de la
Prison par l'ordre de Coucy. Vendôme
ne doute point que Coucy ne l'ait trop
bien servi ; un coup de canon qu'il entend
, ou qu'il croit entendre ne lui permet
plus de douter de l'assassinat ; il se
livre tout entier aux plus vifs remords .
Adelaïde , qui ignore ce qui peut s'être
passé , vient le trouver prête à le suivre à
'Autel , puisque la vie de son Amant
est à ce prix ; Vendôme ne lui répond que
par des gemissemens , et lui dit enfin que
Nemours n'est plus . Adelaide l'accable
de reproches et d'injures ; il veut se donner
la mort ; Coucy arrive et lui retient
le bras ; Vendôme lui reproche d'avoir
exccuté un Arrêt dicté par la jalousie s
Coucy lui répond que le crime n'en auroit
pas été moins commis , puisqu'une
1. Vola autre
JUIN. 1734. 1201
autre main en alloit être chargée. Adelaide
fait des reproches très touchans à
Coucy , dont elle n'auroit jamais soupçonné
qu'un coup si funeste pût partir.
Coucy se justifie enfin envers tous les
il déclare que le corps qu'on a vû
deux ,
sortir de la Prison est celui du Soldat qui
avoit déja le bras levé pour le poignarder
, et qui auroit achevé le crime s'il
n'avoit pas été poignardé lui même . Il ordonne
qu'on fasse venir Nemours ; ce
Prince vient , son Frere le reçoit à bras
ouverts ; il se punit des ordres cruels
qu'il avoit donnés , en se privant d'Adelaïde
, et se reconcilie avec son Frere , en
lui cedant cet objet de son Amour. La
Tragedie finit par une ferme resolution
que Vendôme fait de faire oublier ses égaremens
à force de vertus ; il consent à
rentrer sous l'obéissance de son Maître.
La fin de cette Piece à paru très- touchante.
Les principaux Roles qui sont celui
de Vendôme , d'Adelaïde , de Nemours,
et de Coucy , ont été patfaitement bien
remplis , par le sieur du Frêne , la Dlle
Gossin , le sieur Grandval , et le sieur le
Grand.
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Résumé : Tragédie d'Adelaïde, &c. [titre d'après la table]
Le texte présente un résumé de la tragédie 'Adelaïde' de Voltaire. L'action se déroule durant les guerres de Charles VII contre les Anglais, à Lille, et met en scène Adelaïde du Guesclin, nièce du Conétable du Guesclin. La pièce commence avec le sire de Coucy, François, qui aime Adelaïde mais renonce à elle pour le duc de Vendôme, son ami et rival. Adelaïde, alarmée par une fausse rumeur sur la mort du duc de Nemours, frère de Vendôme, avoue son amour pour Nemours à sa confidente. Vendôme, ignorant ces sentiments, déclare son amour à Adelaïde, qui lui demande s'il a parlé à Coucy. Nemours, blessé, est capturé et amené devant Vendôme, qui organise un mariage avec Adelaïde. Nemours, gravement blessé, est soigné, et Adelaïde refuse Vendôme, révélant son amour pour Nemours. Vendôme, jaloux, ordonne l'assassinat de Nemours, mais Coucy empêche l'exécution. Nemours survit, et Vendôme, rongé par les remords, se réconcilie avec son frère en lui cédant Adelaïde. La pièce se termine par la résolution de Vendôme de se racheter par des vertus et de se soumettre à son maître. Les rôles principaux ont été interprétés par le sieur du Frêne, la Dlle Gossin, le sieur Grandval, et le sieur le Grand.
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7
p. 120-121
LOGOGRYPHE.
Début :
On a beau me parer, je ne suis jamais belle. [...]
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Prison