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4
p. 51-53
« Il y a dans la Ville de Rennes proche de la Porte de Morlaix [...] »
Début :
Il y a dans la Ville de Rennes proche de la Porte de Morlaix [...]
Mots clefs :
Rennes, Eau, Puits
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texteReconnaissance textuelle : « Il y a dans la Ville de Rennes proche de la Porte de Morlaix [...] »
Ilya dans la Ville de Rennesproche
laPorte de Morlaix
un Puitsfait en 1698. dans
lequel un Maçonqui travailloit
au haut laissa tomberson
marteau.Unhomme dejournéey
estant descendu pourle
chercher, fut étouffé en approchant
de l'eau. Ily endescendit
unsecondpour tirer le corps
mort, qui eut la mêmedestinée
ainsiqu'un troisiéme. Ony en
descendit unquatriémeà demi
•yvrebien liéàquion rçcommanda
de crier quand il
fentiroit quelque chose qui l'incommoderoit.
Il cria dés qu'il
fut prés de l'eau
, & on le retijra
promptement;maisil mourut
trois jours aprés. Ilditqu'il
avoitsentiunechaleur qui luy
brûloit lesentrailles.Ony descendit
un chien quicria au même
endroit, &quimourutpeu
de temps aprés quil eut esté retiré.
Quand onjettoit de l'eausur
ce chien mourant il revenoit de
même que ceuxqui ont étéjettés
dans lafameusegrottedu Chien
prés de Naples. On retira ensuite
lescadavresavecdes crocs; on
lesou-irit.,eon neputreconnOl/
Ire aucune cause de leur
mort. Ce qu'ily a de plussurprenantc'est
que ce nefont point
des terres nouvellement remuées
qui causent ces accidens,
& que l'on boit tous les jours
de l'eau de ce Puitssans aucune
incommodité.
','.,
laPorte de Morlaix
un Puitsfait en 1698. dans
lequel un Maçonqui travailloit
au haut laissa tomberson
marteau.Unhomme dejournéey
estant descendu pourle
chercher, fut étouffé en approchant
de l'eau. Ily endescendit
unsecondpour tirer le corps
mort, qui eut la mêmedestinée
ainsiqu'un troisiéme. Ony en
descendit unquatriémeà demi
•yvrebien liéàquion rçcommanda
de crier quand il
fentiroit quelque chose qui l'incommoderoit.
Il cria dés qu'il
fut prés de l'eau
, & on le retijra
promptement;maisil mourut
trois jours aprés. Ilditqu'il
avoitsentiunechaleur qui luy
brûloit lesentrailles.Ony descendit
un chien quicria au même
endroit, &quimourutpeu
de temps aprés quil eut esté retiré.
Quand onjettoit de l'eausur
ce chien mourant il revenoit de
même que ceuxqui ont étéjettés
dans lafameusegrottedu Chien
prés de Naples. On retira ensuite
lescadavresavecdes crocs; on
lesou-irit.,eon neputreconnOl/
Ire aucune cause de leur
mort. Ce qu'ily a de plussurprenantc'est
que ce nefont point
des terres nouvellement remuées
qui causent ces accidens,
& que l'on boit tous les jours
de l'eau de ce Puitssans aucune
incommodité.
','.,
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Résumé : « Il y a dans la Ville de Rennes proche de la Porte de Morlaix [...] »
En 1698, à Rennes, près de la Porte de Morlaix, un puits fut construit. Un maçon y laissa tomber son marteau. Un homme envoyé pour le récupérer fut étouffé en approchant de l'eau. Deux autres personnes subirent le même sort. Un quatrième homme, bien attaché et recommandé de crier s'il sentait quelque chose, cria dès qu'il fut près de l'eau et mourut trois jours plus tard, affirmant avoir senti une chaleur lui brûler les entrailles. Un chien descendu dans le puits cria au même endroit et mourut peu après. L'eau jetée sur le chien mourant le faisait réagir comme les chiens jetés dans la grotte du Chien près de Naples. Les cadavres furent retirés et examinés, mais aucune cause de leur mort ne put être identifiée. Les accidents ne sont pas causés par des terres nouvellement remuées, et l'eau du puits est consommée quotidiennement sans problème.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 145-178
Examen des Eaux de Bourbon par Monsieur Burlet.
Début :
Les chaleurs excessives qu'il a faites les deux premieres semaines / Les Eaux chaudes de Bourbon n'estoient autrefois en usage que [...]
Mots clefs :
Eaux de Bourbon, Eaux , Eau, Acides, Bains, Sel, Chaleur, Médecins, Évaporation, Boisson, Liqueur, Esprit, Malades, Vitriol, Papier, Puits
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texteReconnaissance textuelle : Examen des Eaux de Bourbon par Monsieur Burlet.
Les chaleurs excessives qu'il
a faites les deux premiereS' semairiesde
ce mois,m'bnrdé*'
terminé à préférer à plusieurs
MémoiresLittéraires qu'onm'a
donné, un Examen des
Eaux de Bourbon. J'ay crû
quequ'onpetit tirer
de leurs vertus, malgré la-i
connoissance & lexperience
qu'on en a déja, meritoit
qu'on fit le détail de leurs proprierez,
avant que la faifott*
où les bains font d'un usage
plus salutaire, fut plus avancée..
L'examen qu'onen va
lire est un ouvrage du sçavant
Monficur Burlet, de la Facul.
té de Paris, & premier Medecindu
Roy d'Espagne.
.'! i- Examen desEaux de Bourbonj
;, par MonjteurBurlct.
, LesEauxchaudes deBaurbon
n'estoient autrefois; en
ufogfi que pour baigner: peu
de personnes osoient en boire.
C'eû pour cela qu'on appelle
q-pcorc aujourd'huy Bourbon t/tfrrhambauhjBourbonlesBains
Ces Eaux avant Messieurs
«**Dc*lotme & Aubri, Medecins;
celebres de Moulins
n'estoient point dans cette
réputation où elles sontaujourd'huy.
Ce sont euxqui
en ont étendu, appuque
l'usageà un grand nombre de
maladies intérieures, & qui
ont appris à n'en pas redouter
l'abondante boisson.
Il y a trois puits à Bourbon
contigus, & placez sur la me*
me ligne,qui communiquent
les uns aux autres pardes
ouvertures, & unemême
source fournit également
l'eau à ces trois puits. Elle est
presque toûjours à la même
hauteur de sept pieds ou en*.
viron, & elle ne décroit pas
rume. dans les chaleurs & les
sécheresseslesplus, grandes.
L'eaudeces puitsbout dune
manieresensible,&elleexhale
une fuméeassez abondante.
Onremarque que la surface
decetteeauquand "cllq
n'estpointagitée paroistun
peu terne, & qu'il s'y forme
commeunepelliculegrasse&
onctueuse, si mince néanmoins
& si superficielle, que
quelques efforts qu'on fasse,
& quelque soin qu'on prenne,
on ne peut lareccuillir.
L'Eau de Bourbon en: çres-
»i
claire & tres limpide dans le
verre sans presque aucune
odeur, d'une chaleur vive,
mais qui n'a rien d'acre ni de
brûlant : d'une faveur qui tire
sur le falin lixiviel, bien
plus foible & bien moins sensible
que dans l'eau de Vichi.
Ayant plongélemême
Thcrmometre dont je me
fuis servi à Vichi dans le Puits
du milieu
,
la liqueur a monté
à prés de cinquante-quatre
lignes; de maniere que l'eau
de Bourbon à deux degrez de
chaleur sur l'eau la plus chaude
de VicbL
Cette chaleur des eaux de
Bourbon se conserve tres-longtemps,
& une eau commune
chauffée au mêmedegré,
& la plus boüillante même e si:
refroidie, quand celle cy est
encore plus que tiede.
Tout le monde sçait que
ces eaux tirées de leur source
& remisesincessamment sur
le feu ne boüillent pas plus
promptement que l'eau commune
la plus froide. Onsçait
encore que dans ces eaux,
quoique très chaudesles plances
ne s'y flétrissent point.
Pour découvrir le principe
,
minerai des eaux de Bourbon,
je me fuis fcrvi des mêmes
essais, & ay presque fait les
mêmes expériences quej'ay
faites sur les eaux de Vichi.
Voilà1la différence que j'ay trouve.
Ayant meslé de l'eau dans
des bains avec la dissolution
du sel de Nitre filtrée, il ne
s'y est fait ni lait virginal ni
caillé, ni précipitation, l'eau
est demeurée claire.
Ayant ajouté à ce mélange
quelques goûtes d'esprit de Vitriol
,il s'y en fair d'abord un
lait virginal, qui s'est précipité
enfuitc, en une cfpcccde
caillé blanc. La même chofc
est arrivée en faisant cette experience
sur les eaux de Vichi.
La dissolution de couperose
qui avoit la couleur d'un
vcrd naissant, meslée avec
l'eau des bains, l'a jaunie d'abord
y
puis y a fait un caillé
par floccons, lesquels se précipitant
peu à peu ont pris
une couleur rougeâtre. Le
même changement cft arrivé,
mais bien plus promptement
& plus fenfibleraent dans les
eaux de Viclit.
L'eau deBourbon, non plus
que celle de Vichin'a point
changé la couleur de sa rolution
du Tournefol.
L'eau de Bourbon menée
avec le vinaigre distillé,l'aigre
de souffre & les autres acides,
bouillonne & fomente, mais
plus obfcurcment que l'eau
de Vichi,
Le papier bleu rougi par
l'esprit de Vitriol, a repris
aussi sa couleur dans l'eau de
Bourbon.
La poudre de Noix de Galles
qui donne une couleur de
vin pailler à leau de Vichi n'a
point ou peu changé l'eau de
Bourbon,
L'eau de litchi verdit le
sirop violat, celle de Bouts
bon ne lui donnequ'une couleur
de gris de lin.
Cette mêmeeaumeslée avec
l'infusion de rosesrouges
sans acides ne la point changée,
mais l'ayanc meslée avec
la teinture de roses rougies par
l'esprit de Vitriol,elle l'a
rendued'un beau violet amarante.
Par tous ces premiers essais
la raison fait d'abord concevoir,
que le mineral qui domine
dans les eaux de Bourbon
ca aussi un sel alkali, qui
ne paroist gucres dirent du
sel alkali des eaux de Vichi.
Pour s'en affurcr davantage,
,& demesser les autres principes
de ces eaux, j'en ay fait faire
l'analise de la maniéré suivan.
te.
J'ay fait mettre douze liv.
d'eau de bains dans une ferrine
pourla faire évaporer lentement
sur le feu. Dés qu'ellc
a commencé à chauffer, elle
a donné une odeur de mout
de vin cuit; & à mesure qu'elle
s'est évaporée, l'eau s'est rendue
de plus en plus salée au goût. Il est relié aux bords
de la terrine une refidencq
blancbâcre, inlipide) & qu1
croquoit fous la dcnr.
L'eau conlumée & reduird
à huic ou neuf onces, je l'ay
fait filtrer, il s'en ca réparé 6^
attaché au papier gris une matierc
épaisse, grasse & comme
muctlagineufc, qui après la,
filtrationfinie pesoit une?
dragmc, & quinze grains
pour le moins.
La liqueur filtrée remisesur
le feu s'cil encore évaporée,
& quand elle a commencée à
faire une pellicule) je l'ay fait
porter à la cave:il s'est formé
quelques cristaux fort brilans,
tres..minces & qui paroislenttaillez
à facettes. Ce que
j'en ay pu ramasser quand ils
ont cfté dessechez, ne pesoit
que cinq ou six grains: leur
faveur estoit fort douceatrc,
&d'un vray goûclixiviet.
Enfin l'evaporation faite
jusqu'à siccité
,
il est resté au
fond de la terrine trois gros
& plus de deux scrupules de
residence saline.
J'ayexamine ensuite toutes
ces portions dont la somme
monte à cinqdragmes ou
environ:sçavoir
, une dragme
& quinze grains de matiere
mucilagineu se adhérente au
papier gris, cinq ou six grains
de cristau
,
trois dragmes, &
deux scru pules de residence,
& dix ou douze grains de
substance blanchâtre ratissée
sur les, parois de la terrine à
mesure que l'eau décroissoir.
Mr Duclos, par son examen
a trouve que ces eaux
transportées avoient cinquante
- neuf grains de residence
par pinte.
Mr Geoffroy, qui les aexaminées
sur les lieux en a trouvésoixante-
trois, ôcpar nôtre
calcul nous trouvons la
même chose à fort peu de
différence prés.
Par l'examen de ces portions
sé parées, il m'a paru
que cette substance blanchâtre
adherente & qui craque;
fous la dent, n'etf qu'une pu-f
re terre alKaline, car elle fermente
un peu avec les acides.
Que la matière mucilagineuse
attachée au papier gris,
est encore cette mêmeTerre,
mais meslée de matiere sulphureuse
& de quelque legere portion,
de fer.
La substance fulphurcufe
dans cette portion se mani
feste d'nne manièresensible
en engraissant le pa pier, &y
laissant une impression d'huile,
d'ailleurs jettée sur lescharbons
ardens, elle y rougit
d'abord,noircit ensuite en
cjetteanttquielcquess p.etites étwu ¡ Avec le coûteau émanté
j'ay enlevé quelques particules
de fer de la tetre noire qui
est restée aprèsl'avoir calcinée.
Les trois gros & deux scrupulesde
residence salines contenoient
un sel lixiviel,meslé
lé de quelque portion de
terre;& ce sel par tous les esfais
n'a pas paru différent du
sel des eaux de Vichi,tiré
aussi par évaporation. Il l'a
fermente violemmentavec les
acides de toutes especes.
Par cette analise on trouveroic
prcfque les mêmes principes
dans Les eaux de Bourbon
que dans celles de Vichi;
-mais dans des propositions. différentes*.
Mr Saignette, prétend qu'apres
avoir examiné avec une
grande attention la residence
saline des eaux de Bourbon,
& après avoir demeslé les différens
sels qui la composent, il
a trouvé, sans pouvoir en
douter,-presque portion égale
de sel marin& de sel alkali ;
que ces deux fcls luy ont
paru fort distincts & par leur
figure & par les épreuves qu'il
en a faites.
- Qu'ayant mis quatorze liv*
des eaux de Bourbon évaporer
il avoit eu après une suffisante
évaporation par la cristallisation
à froid, des cristaux
pentagones & hexagones
longs, de la figure & du goût
du sel sucrin, ou sel calcarius
décrit dans Mr Lister, faisant
le maroquin entre les dents,
d'une tegerc stipticité, douceatte,
& qui Ce bourfouffloient
au feu comme l'alun,
sans avoir d'acidité apparente,
non plus que de saveur alkaline.
Qu'ayant ensuite fait évaporer
la liqueur davantage,
il avoit eu descristaux de sel
alkalidistinct,& du sel falin
ou marin grumelé, qui se trou-
-
voient tels sans équivoque.
<
Je n'ay pû vérifier cette experience
dans toutes ces circonstances
marquées; & dans
les trois dragmes & deux
scrupules de residence saline
qui m'est restées je n'ay pû,
démesler par les essais & reconnoistre
qu'un sel alkali,
comme je viens de le dire,
dont le mélange avec toute
forted'acides excite de violentes
fermentations.
,,
Mr Geoffroi, dans le mémoire
qu'il m'acommuniqué,
assure qu'après beaucoup de
recherches,&après l'examen
le plus exact du sel contenu
dans la re sidence de ces eaux;
il avoit reconnu un peu de
fcl marin meslé avec le sel afc
kalimineral deeaux
-
, Il me relle encore quatre
ou cinqoncesde residence que
j'ay cû la précaution d'apporter;
je l'examinerai avec Mr
Geoffroi, quand il lui plaira,
afin de déterminer, s'il est possible,
fous quelle quantité &
fous quelle proportion ce sel
se trouve meslé dans les eaux
de Bourbon. Car qu'il y soit
presque en partie égale avec
l'alkali mineral; il y a beaucoup
lieu d'en doutèr, quoi
quendise Mr Saignette, & les
Medecins des lieux qui ont
souvent fait l'anali se de leurs
, eaux, le nientfort positive-
"lent.
Un Auteur moderne, qui
depuis quelquesannées fous
le nom de Pascal, a donné un
Traitédes Eaux de Bourbon., rejette
la pluspart des anahfes
de ces eaux faites par le secours
du feu. Il prétend que
si l'on fait évaporer ces caux
au Soleil, le sel tiré par cette
evaporation lente & douce,
est fort differenr de celui tiré
par le moyen du feu; qu'il
touche les acides, sans les exciter
à aucune fermentation
sensible; qu'il ne précipite aucune
dissolution faite par un
menstrueacide, & en un mot
qu'il n'cft point alkali. Il avance
que le sel des eaux de
Bourbonale caractered'un
sel Androgin,& qu'il est composé
d'unacide volatil & d'ul)
alkali sixe, dont l'alliage qui
n'est pas à l'épreuve du ftut
à cause qu'il est trop acre, &
trop penetrant, resiste à la
chaleur du Soleilqui évapore
ces eaux d'une maniere lente
de douce, & fait ou que ce
sel demeure dans son entier
ou qu'une partie de son volatil
s'y conserve
, & que ce
qu'ily a de fixe en demeurant
empreint, il n'est capable
d'aucuns de ces effets qui
conviennent aux fels lixivieux
que le feu a rendus ouverts,
vuides & permeables aux
acides.
Il ajoûte qquu'»i'ill y a dans les
eaux de Bourbon un autre
principe actifintimement répandu
,un souffrevif, mobile,
animé, quin'est sensible
que par la chaleur,que par subtilité
& sa dissipation prompte
échappe à toutes les recherchesanalitiques
de la Chimie,
qui pour la pluspart sont très*
infideles, & qui par consequent
ne peuvent nous rien
donner
donner que de fausses ou tresimparfaites
connoissances des
principes des mixtes.C'eû
donc selon luy un sel vitreux,
purifié rempli des parties volatiles,
qui eû le sel naturel
des eaux de Bourbon& non
ce sel alkali fixe qui nous
reste aprés l'évaporation, &
fqeuui.n'est tel que par l'aéèion du
Cet Auteur soûtient son
hypothcfe par beaucoup de
preuves & d'experiences bien
raisonnées.
Il seroit inutile de s'étendre
davantage sur la discussion &
la recherche des principes mineraux
des eaux de Bourbon.
Dans ces matières il est des
bornesqu'on ne peut gueres outre-passer. <
Il me reste àdire quelque
chose des vertus medecinales
deces eaux; maiselles font si
universellement reconnues,&
-orken a cléiaécrit.ique
jeme contenteray de rapporter
quelques observations que
@ j'ay eu lieu de faire, qui peuvent
estrede quelque utilité
dans la pratique deces eaux.
Comme elles sont fort peu
purgatives &qu'il estd'usage
de les aider, où par le me'
lange des eaux deVichi, qui
le sont beaucoup plus, ou par
l'addition de quelques fels
comme le sel vegetal, la crême
de Tartre, le sel Polychreste
de la Rochelle, &c.
j'aytrouvé que l'Arcanum duplicatum
de Mynsiche, qu'il
nomme autrement Sal è duobus,
Stl sapientioe
,
leur donnoit
une efficacité bien superieure
à celle de tous ces autres
sels,& que les per sonnes
qui n'estoient point purgées
avec le secours de ces fels ordinaires
,
l'estoient beaucoup
par l'addition de ccluy
- cy.
On ne le connoissoit point dia
toutàVichi,& à Bourbon&
aucun des Medecins n'en avoit
fait usage. On sçait que
ce sel cA: tiré de lateste morte
de la distillation de l'eau
forte
,
& que c'est par consequent
un sellixiviel bien alkasisé,
quiresultedela partie fixe
du nitre & du vitriol. Il y a
une legere stipticité meslée de
quelque amertume, qui le rend
sottsubtil & fort,pénétrant.
Illefond tres-aisement, il sallle
avec le sel naturel de ces
eaux, dont il augmenre de
beaucoup la vertu purgative
sans qu'elles en agissent moins
pour cela par les voyes des uunes,
& celles de la transpiration.
J'en aivû de merveilleux
effets, & je ne doure
point que dans la suite ce sel
ne devienne à Vichi & à Bourbon
d'un usage tres familier.
La dose est d'ordinaire d'un
gros & demi, à deux gros dans
les deux premiers verres de
boisson, deux jours l'un, ou
même tous les jours quand les
eaux sont lentes ou qu'elles ne
ptirgfnt point, comme il ar..
tive tres- souvent.
J'ay remarqué qu'on vomie
aisément ces eaux quand on
en boit, sur tout les premiers
jours, & qu'on en presse la
boisson.
L'eau de Bourbon prise en
lavement, adoucit beaucoup
elle resserre même, & on s'en
sert dans les diflfenteries, aussi
bien que dans les coliques. On
la donne chaude comme elle
fort des Puits, sans que les
Malades se plaignent de sa
trop grande chaleur. On ne
pourroit recevoir ny retenir
une eau commune chauffée au
mêmedegré.
Quand il faut fondre, redonner
auxliqueurs leur première
fluidité, ranimer dans le
fang & dans les visceres les levains
quis'y trouvent déprimer
& languissans; c'est pour
lors qu'elles agissent presqueà
coup sûr: mais si elles trouvent
des humeurs trop mobiles,
& des sermens agitez,
elles causent le plus souvent
du desordre, & on en obligé
d'en fairecesser l'usage. Elles
font cependant bien moins
vives, & ont quelque chose
de plus doux & de plus balsamique
que celles de Vichy,
Le merite de ces eaux, comme
de tous les autres remedes,
dépend beaucoup de la juficI:
se de leur application.
,
Il est bien important que
les malades qui ont bu & pris
les Bains de Bourbon, évitent
pendant quelque temps avec
toutes fortes de précautions
les injures de l'air, & sur tout
les vents du Nord, les pluyes,
les brouillards;parce que leurs
corps par l'action de ces eaux
animées, se trouvans tout ouverts
& comme percez à jour,
sû m'est permis de me servir
de cette expression, la xnoiadre
imprcffion du froid les
resserre, il se fait des reflux de
la matière transpirable, d'où
naissent de grandes & subites
maladies. C'est pour cette raison
que la saison printanniere
qui devance l'Eté ,est preferable
à celle de l'Automne,que
l'Hyver suit de si prés, & les
Malades n'ont pas les mêmes
accidens à craindre au retour
de ces eaux. Tous les Praticiens
qui ont manié les eaux,
n'ont pas manqué de fairecette
observation ; & elle m'a
bien esté confirmée par ce
qui arriva & que je ne pus
empêcherà l'illustre Malade
quej'avois l'honneur d'accompagner.
En revenant de Bourbon
il ne ressentit que trcs..,
legerement l'impressiond'un
broüillardpouravoir eu fort
peudetemps une des glaces
de son carosse baissée;&dans
le moment il eut une fluxion
considerable sur, le visage,
& la langue, qui ne cessa qua
mesure qu'on le réchauffa,
& que la transpiration interceptée
fcut rétabbJl"ie.
a faites les deux premiereS' semairiesde
ce mois,m'bnrdé*'
terminé à préférer à plusieurs
MémoiresLittéraires qu'onm'a
donné, un Examen des
Eaux de Bourbon. J'ay crû
quequ'onpetit tirer
de leurs vertus, malgré la-i
connoissance & lexperience
qu'on en a déja, meritoit
qu'on fit le détail de leurs proprierez,
avant que la faifott*
où les bains font d'un usage
plus salutaire, fut plus avancée..
L'examen qu'onen va
lire est un ouvrage du sçavant
Monficur Burlet, de la Facul.
té de Paris, & premier Medecindu
Roy d'Espagne.
.'! i- Examen desEaux de Bourbonj
;, par MonjteurBurlct.
, LesEauxchaudes deBaurbon
n'estoient autrefois; en
ufogfi que pour baigner: peu
de personnes osoient en boire.
C'eû pour cela qu'on appelle
q-pcorc aujourd'huy Bourbon t/tfrrhambauhjBourbonlesBains
Ces Eaux avant Messieurs
«**Dc*lotme & Aubri, Medecins;
celebres de Moulins
n'estoient point dans cette
réputation où elles sontaujourd'huy.
Ce sont euxqui
en ont étendu, appuque
l'usageà un grand nombre de
maladies intérieures, & qui
ont appris à n'en pas redouter
l'abondante boisson.
Il y a trois puits à Bourbon
contigus, & placez sur la me*
me ligne,qui communiquent
les uns aux autres pardes
ouvertures, & unemême
source fournit également
l'eau à ces trois puits. Elle est
presque toûjours à la même
hauteur de sept pieds ou en*.
viron, & elle ne décroit pas
rume. dans les chaleurs & les
sécheresseslesplus, grandes.
L'eaudeces puitsbout dune
manieresensible,&elleexhale
une fuméeassez abondante.
Onremarque que la surface
decetteeauquand "cllq
n'estpointagitée paroistun
peu terne, & qu'il s'y forme
commeunepelliculegrasse&
onctueuse, si mince néanmoins
& si superficielle, que
quelques efforts qu'on fasse,
& quelque soin qu'on prenne,
on ne peut lareccuillir.
L'Eau de Bourbon en: çres-
»i
claire & tres limpide dans le
verre sans presque aucune
odeur, d'une chaleur vive,
mais qui n'a rien d'acre ni de
brûlant : d'une faveur qui tire
sur le falin lixiviel, bien
plus foible & bien moins sensible
que dans l'eau de Vichi.
Ayant plongélemême
Thcrmometre dont je me
fuis servi à Vichi dans le Puits
du milieu
,
la liqueur a monté
à prés de cinquante-quatre
lignes; de maniere que l'eau
de Bourbon à deux degrez de
chaleur sur l'eau la plus chaude
de VicbL
Cette chaleur des eaux de
Bourbon se conserve tres-longtemps,
& une eau commune
chauffée au mêmedegré,
& la plus boüillante même e si:
refroidie, quand celle cy est
encore plus que tiede.
Tout le monde sçait que
ces eaux tirées de leur source
& remisesincessamment sur
le feu ne boüillent pas plus
promptement que l'eau commune
la plus froide. Onsçait
encore que dans ces eaux,
quoique très chaudesles plances
ne s'y flétrissent point.
Pour découvrir le principe
,
minerai des eaux de Bourbon,
je me fuis fcrvi des mêmes
essais, & ay presque fait les
mêmes expériences quej'ay
faites sur les eaux de Vichi.
Voilà1la différence que j'ay trouve.
Ayant meslé de l'eau dans
des bains avec la dissolution
du sel de Nitre filtrée, il ne
s'y est fait ni lait virginal ni
caillé, ni précipitation, l'eau
est demeurée claire.
Ayant ajouté à ce mélange
quelques goûtes d'esprit de Vitriol
,il s'y en fair d'abord un
lait virginal, qui s'est précipité
enfuitc, en une cfpcccde
caillé blanc. La même chofc
est arrivée en faisant cette experience
sur les eaux de Vichi.
La dissolution de couperose
qui avoit la couleur d'un
vcrd naissant, meslée avec
l'eau des bains, l'a jaunie d'abord
y
puis y a fait un caillé
par floccons, lesquels se précipitant
peu à peu ont pris
une couleur rougeâtre. Le
même changement cft arrivé,
mais bien plus promptement
& plus fenfibleraent dans les
eaux de Viclit.
L'eau deBourbon, non plus
que celle de Vichin'a point
changé la couleur de sa rolution
du Tournefol.
L'eau de Bourbon menée
avec le vinaigre distillé,l'aigre
de souffre & les autres acides,
bouillonne & fomente, mais
plus obfcurcment que l'eau
de Vichi,
Le papier bleu rougi par
l'esprit de Vitriol, a repris
aussi sa couleur dans l'eau de
Bourbon.
La poudre de Noix de Galles
qui donne une couleur de
vin pailler à leau de Vichi n'a
point ou peu changé l'eau de
Bourbon,
L'eau de litchi verdit le
sirop violat, celle de Bouts
bon ne lui donnequ'une couleur
de gris de lin.
Cette mêmeeaumeslée avec
l'infusion de rosesrouges
sans acides ne la point changée,
mais l'ayanc meslée avec
la teinture de roses rougies par
l'esprit de Vitriol,elle l'a
rendued'un beau violet amarante.
Par tous ces premiers essais
la raison fait d'abord concevoir,
que le mineral qui domine
dans les eaux de Bourbon
ca aussi un sel alkali, qui
ne paroist gucres dirent du
sel alkali des eaux de Vichi.
Pour s'en affurcr davantage,
,& demesser les autres principes
de ces eaux, j'en ay fait faire
l'analise de la maniéré suivan.
te.
J'ay fait mettre douze liv.
d'eau de bains dans une ferrine
pourla faire évaporer lentement
sur le feu. Dés qu'ellc
a commencé à chauffer, elle
a donné une odeur de mout
de vin cuit; & à mesure qu'elle
s'est évaporée, l'eau s'est rendue
de plus en plus salée au goût. Il est relié aux bords
de la terrine une refidencq
blancbâcre, inlipide) & qu1
croquoit fous la dcnr.
L'eau conlumée & reduird
à huic ou neuf onces, je l'ay
fait filtrer, il s'en ca réparé 6^
attaché au papier gris une matierc
épaisse, grasse & comme
muctlagineufc, qui après la,
filtrationfinie pesoit une?
dragmc, & quinze grains
pour le moins.
La liqueur filtrée remisesur
le feu s'cil encore évaporée,
& quand elle a commencée à
faire une pellicule) je l'ay fait
porter à la cave:il s'est formé
quelques cristaux fort brilans,
tres..minces & qui paroislenttaillez
à facettes. Ce que
j'en ay pu ramasser quand ils
ont cfté dessechez, ne pesoit
que cinq ou six grains: leur
faveur estoit fort douceatrc,
&d'un vray goûclixiviet.
Enfin l'evaporation faite
jusqu'à siccité
,
il est resté au
fond de la terrine trois gros
& plus de deux scrupules de
residence saline.
J'ayexamine ensuite toutes
ces portions dont la somme
monte à cinqdragmes ou
environ:sçavoir
, une dragme
& quinze grains de matiere
mucilagineu se adhérente au
papier gris, cinq ou six grains
de cristau
,
trois dragmes, &
deux scru pules de residence,
& dix ou douze grains de
substance blanchâtre ratissée
sur les, parois de la terrine à
mesure que l'eau décroissoir.
Mr Duclos, par son examen
a trouve que ces eaux
transportées avoient cinquante
- neuf grains de residence
par pinte.
Mr Geoffroy, qui les aexaminées
sur les lieux en a trouvésoixante-
trois, ôcpar nôtre
calcul nous trouvons la
même chose à fort peu de
différence prés.
Par l'examen de ces portions
sé parées, il m'a paru
que cette substance blanchâtre
adherente & qui craque;
fous la dent, n'etf qu'une pu-f
re terre alKaline, car elle fermente
un peu avec les acides.
Que la matière mucilagineuse
attachée au papier gris,
est encore cette mêmeTerre,
mais meslée de matiere sulphureuse
& de quelque legere portion,
de fer.
La substance fulphurcufe
dans cette portion se mani
feste d'nne manièresensible
en engraissant le pa pier, &y
laissant une impression d'huile,
d'ailleurs jettée sur lescharbons
ardens, elle y rougit
d'abord,noircit ensuite en
cjetteanttquielcquess p.etites étwu ¡ Avec le coûteau émanté
j'ay enlevé quelques particules
de fer de la tetre noire qui
est restée aprèsl'avoir calcinée.
Les trois gros & deux scrupulesde
residence salines contenoient
un sel lixiviel,meslé
lé de quelque portion de
terre;& ce sel par tous les esfais
n'a pas paru différent du
sel des eaux de Vichi,tiré
aussi par évaporation. Il l'a
fermente violemmentavec les
acides de toutes especes.
Par cette analise on trouveroic
prcfque les mêmes principes
dans Les eaux de Bourbon
que dans celles de Vichi;
-mais dans des propositions. différentes*.
Mr Saignette, prétend qu'apres
avoir examiné avec une
grande attention la residence
saline des eaux de Bourbon,
& après avoir demeslé les différens
sels qui la composent, il
a trouvé, sans pouvoir en
douter,-presque portion égale
de sel marin& de sel alkali ;
que ces deux fcls luy ont
paru fort distincts & par leur
figure & par les épreuves qu'il
en a faites.
- Qu'ayant mis quatorze liv*
des eaux de Bourbon évaporer
il avoit eu après une suffisante
évaporation par la cristallisation
à froid, des cristaux
pentagones & hexagones
longs, de la figure & du goût
du sel sucrin, ou sel calcarius
décrit dans Mr Lister, faisant
le maroquin entre les dents,
d'une tegerc stipticité, douceatte,
& qui Ce bourfouffloient
au feu comme l'alun,
sans avoir d'acidité apparente,
non plus que de saveur alkaline.
Qu'ayant ensuite fait évaporer
la liqueur davantage,
il avoit eu descristaux de sel
alkalidistinct,& du sel falin
ou marin grumelé, qui se trou-
-
voient tels sans équivoque.
<
Je n'ay pû vérifier cette experience
dans toutes ces circonstances
marquées; & dans
les trois dragmes & deux
scrupules de residence saline
qui m'est restées je n'ay pû,
démesler par les essais & reconnoistre
qu'un sel alkali,
comme je viens de le dire,
dont le mélange avec toute
forted'acides excite de violentes
fermentations.
,,
Mr Geoffroi, dans le mémoire
qu'il m'acommuniqué,
assure qu'après beaucoup de
recherches,&après l'examen
le plus exact du sel contenu
dans la re sidence de ces eaux;
il avoit reconnu un peu de
fcl marin meslé avec le sel afc
kalimineral deeaux
-
, Il me relle encore quatre
ou cinqoncesde residence que
j'ay cû la précaution d'apporter;
je l'examinerai avec Mr
Geoffroi, quand il lui plaira,
afin de déterminer, s'il est possible,
fous quelle quantité &
fous quelle proportion ce sel
se trouve meslé dans les eaux
de Bourbon. Car qu'il y soit
presque en partie égale avec
l'alkali mineral; il y a beaucoup
lieu d'en doutèr, quoi
quendise Mr Saignette, & les
Medecins des lieux qui ont
souvent fait l'anali se de leurs
, eaux, le nientfort positive-
"lent.
Un Auteur moderne, qui
depuis quelquesannées fous
le nom de Pascal, a donné un
Traitédes Eaux de Bourbon., rejette
la pluspart des anahfes
de ces eaux faites par le secours
du feu. Il prétend que
si l'on fait évaporer ces caux
au Soleil, le sel tiré par cette
evaporation lente & douce,
est fort differenr de celui tiré
par le moyen du feu; qu'il
touche les acides, sans les exciter
à aucune fermentation
sensible; qu'il ne précipite aucune
dissolution faite par un
menstrueacide, & en un mot
qu'il n'cft point alkali. Il avance
que le sel des eaux de
Bourbonale caractered'un
sel Androgin,& qu'il est composé
d'unacide volatil & d'ul)
alkali sixe, dont l'alliage qui
n'est pas à l'épreuve du ftut
à cause qu'il est trop acre, &
trop penetrant, resiste à la
chaleur du Soleilqui évapore
ces eaux d'une maniere lente
de douce, & fait ou que ce
sel demeure dans son entier
ou qu'une partie de son volatil
s'y conserve
, & que ce
qu'ily a de fixe en demeurant
empreint, il n'est capable
d'aucuns de ces effets qui
conviennent aux fels lixivieux
que le feu a rendus ouverts,
vuides & permeables aux
acides.
Il ajoûte qquu'»i'ill y a dans les
eaux de Bourbon un autre
principe actifintimement répandu
,un souffrevif, mobile,
animé, quin'est sensible
que par la chaleur,que par subtilité
& sa dissipation prompte
échappe à toutes les recherchesanalitiques
de la Chimie,
qui pour la pluspart sont très*
infideles, & qui par consequent
ne peuvent nous rien
donner
donner que de fausses ou tresimparfaites
connoissances des
principes des mixtes.C'eû
donc selon luy un sel vitreux,
purifié rempli des parties volatiles,
qui eû le sel naturel
des eaux de Bourbon& non
ce sel alkali fixe qui nous
reste aprés l'évaporation, &
fqeuui.n'est tel que par l'aéèion du
Cet Auteur soûtient son
hypothcfe par beaucoup de
preuves & d'experiences bien
raisonnées.
Il seroit inutile de s'étendre
davantage sur la discussion &
la recherche des principes mineraux
des eaux de Bourbon.
Dans ces matières il est des
bornesqu'on ne peut gueres outre-passer. <
Il me reste àdire quelque
chose des vertus medecinales
deces eaux; maiselles font si
universellement reconnues,&
-orken a cléiaécrit.ique
jeme contenteray de rapporter
quelques observations que
@ j'ay eu lieu de faire, qui peuvent
estrede quelque utilité
dans la pratique deces eaux.
Comme elles sont fort peu
purgatives &qu'il estd'usage
de les aider, où par le me'
lange des eaux deVichi, qui
le sont beaucoup plus, ou par
l'addition de quelques fels
comme le sel vegetal, la crême
de Tartre, le sel Polychreste
de la Rochelle, &c.
j'aytrouvé que l'Arcanum duplicatum
de Mynsiche, qu'il
nomme autrement Sal è duobus,
Stl sapientioe
,
leur donnoit
une efficacité bien superieure
à celle de tous ces autres
sels,& que les per sonnes
qui n'estoient point purgées
avec le secours de ces fels ordinaires
,
l'estoient beaucoup
par l'addition de ccluy
- cy.
On ne le connoissoit point dia
toutàVichi,& à Bourbon&
aucun des Medecins n'en avoit
fait usage. On sçait que
ce sel cA: tiré de lateste morte
de la distillation de l'eau
forte
,
& que c'est par consequent
un sellixiviel bien alkasisé,
quiresultedela partie fixe
du nitre & du vitriol. Il y a
une legere stipticité meslée de
quelque amertume, qui le rend
sottsubtil & fort,pénétrant.
Illefond tres-aisement, il sallle
avec le sel naturel de ces
eaux, dont il augmenre de
beaucoup la vertu purgative
sans qu'elles en agissent moins
pour cela par les voyes des uunes,
& celles de la transpiration.
J'en aivû de merveilleux
effets, & je ne doure
point que dans la suite ce sel
ne devienne à Vichi & à Bourbon
d'un usage tres familier.
La dose est d'ordinaire d'un
gros & demi, à deux gros dans
les deux premiers verres de
boisson, deux jours l'un, ou
même tous les jours quand les
eaux sont lentes ou qu'elles ne
ptirgfnt point, comme il ar..
tive tres- souvent.
J'ay remarqué qu'on vomie
aisément ces eaux quand on
en boit, sur tout les premiers
jours, & qu'on en presse la
boisson.
L'eau de Bourbon prise en
lavement, adoucit beaucoup
elle resserre même, & on s'en
sert dans les diflfenteries, aussi
bien que dans les coliques. On
la donne chaude comme elle
fort des Puits, sans que les
Malades se plaignent de sa
trop grande chaleur. On ne
pourroit recevoir ny retenir
une eau commune chauffée au
mêmedegré.
Quand il faut fondre, redonner
auxliqueurs leur première
fluidité, ranimer dans le
fang & dans les visceres les levains
quis'y trouvent déprimer
& languissans; c'est pour
lors qu'elles agissent presqueà
coup sûr: mais si elles trouvent
des humeurs trop mobiles,
& des sermens agitez,
elles causent le plus souvent
du desordre, & on en obligé
d'en fairecesser l'usage. Elles
font cependant bien moins
vives, & ont quelque chose
de plus doux & de plus balsamique
que celles de Vichy,
Le merite de ces eaux, comme
de tous les autres remedes,
dépend beaucoup de la juficI:
se de leur application.
,
Il est bien important que
les malades qui ont bu & pris
les Bains de Bourbon, évitent
pendant quelque temps avec
toutes fortes de précautions
les injures de l'air, & sur tout
les vents du Nord, les pluyes,
les brouillards;parce que leurs
corps par l'action de ces eaux
animées, se trouvans tout ouverts
& comme percez à jour,
sû m'est permis de me servir
de cette expression, la xnoiadre
imprcffion du froid les
resserre, il se fait des reflux de
la matière transpirable, d'où
naissent de grandes & subites
maladies. C'est pour cette raison
que la saison printanniere
qui devance l'Eté ,est preferable
à celle de l'Automne,que
l'Hyver suit de si prés, & les
Malades n'ont pas les mêmes
accidens à craindre au retour
de ces eaux. Tous les Praticiens
qui ont manié les eaux,
n'ont pas manqué de fairecette
observation ; & elle m'a
bien esté confirmée par ce
qui arriva & que je ne pus
empêcherà l'illustre Malade
quej'avois l'honneur d'accompagner.
En revenant de Bourbon
il ne ressentit que trcs..,
legerement l'impressiond'un
broüillardpouravoir eu fort
peudetemps une des glaces
de son carosse baissée;&dans
le moment il eut une fluxion
considerable sur, le visage,
& la langue, qui ne cessa qua
mesure qu'on le réchauffa,
& que la transpiration interceptée
fcut rétabbJl"ie.
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Résumé : Examen des Eaux de Bourbon par Monsieur Burlet.
Le texte examine les eaux thermales de Bourbon, initialement utilisées pour des bains, mais dont l'usage a été étendu à diverses maladies internes par les médecins Declot et Aubri. Ces eaux proviennent de trois puits contigus alimentés par une même source, dont le niveau reste constant indépendamment des conditions climatiques. Elles sont chaudes, limpides et ont une saveur saline faible. L'auteur a mené des expériences pour analyser les propriétés des eaux de Bourbon. Il a constaté que ces eaux ne bouillent pas plus rapidement que l'eau ordinaire et que les plantes ne se flétrissent pas en leur présence. Des tests chimiques ont révélé la présence d'un sel alcalin, similaire à celui des eaux de Vichy, mais avec des proportions différentes. Plusieurs experts, dont Monsieur Burlet, Monsieur Saignette et Monsieur Geoffroy, ont confirmé la présence de sel alcalin et, dans certains cas, de sel marin. Un auteur moderne, Pascal, propose une composition différente, suggérant un sel androgyne composé d'un acide volatil et d'un alcalin fixe. Les eaux de Bourbon sont reconnues pour leurs vertus médicinales. Elles sont peu purgatives et sont souvent mélangées avec d'autres substances pour augmenter leur efficacité. L'Arcanum duplicatum de Mynsiche améliore significativement leurs effets purgatifs. Les eaux de Bourbon, administrées en lavement, adoucissent et resserrent, et sont utilisées pour traiter les dysentéries et les coliques. Elles sont moins vives et plus douces que celles de Vichy. Les malades doivent éviter les intempéries après avoir pris les bains de Bourbon, car leurs corps deviennent sensibles au froid, ce qui peut provoquer des reflux et des maladies subites. La saison printanière est préférable à l'automne pour éviter ces risques. Cette observation a été confirmée par l'expérience d'un malade qui a développé une fluxion après avoir été exposé à un brouillard.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 1653-1668
SECONDE LETTRE de M. Capperon sur la Méthode d'observer les Sels qui se trouvent dans les Terres, dans les Plantes, dans les Humeurs, &c.
Début :
MONSIEUR, Vous sçavez mieux que moi, qu'il y a long-tems qu'on cherche un moyen de [...]
Mots clefs :
Sels, Mixtes, Hippocrate, Analyse chimique, Académie royale des sciences de Paris, Sel volatile, Distillation, Terre glaise, Puits, Blanchisseurs
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SECONDE LETTRE de M. Capperon sur la Méthode d'observer les Sels qui se trouvent dans les Terres, dans les Plantes, dans les Humeurs, &c.
SECONDE LETTRE de M. Capperon
sur la Méthode d'observer les Sels qui
se trouvent dans les Terres , dans les
Plantes , dans les Humeurs , &c.
MONSIEUR ,
Vous sçavez mieux que moi , qu'il y a
long- tems qu'on cherche un moyen de
connoître la qualité des Mixtes , pour ju
ger des effets qu'ils doivent naturellement
operer. Comme on étoit d'abord persuadé
que les Mixtes
n'opéroient
que parce
qu'on
appelloit
leurs qualitez
; sçavoir
, le
chaud
, le sec , le froid
, et l'humide
; on
B iij
1574 MERCURE DE FRANCE
crut avoir fait beaucoup , que d'assigner à
chaque Mixte , jusqu'à quel degré il étoit
chaud , sec , froid , ou humide ; ce dont
on jugeoit par les effets qu'on lui voyoit
produire , et par- là on se flatoit d'avoir
un moyen suffisant pour connoître le
bien ou le mal que ces Mixtes pouvoient
faire.
Quoique cette Méthode fut en usage
avant le tems d'Hypocrate , et qu'elle l'ait
été presque jusqu'à nos jours : * cet habile
Homme reconnut néanmoins , qu'on ne
pouvoit pas aller loin avec cette Découverte.
Il crut qu'il pouvoit y mieux réüssir
, en enseignant que les Mixtes n'opéroient
qu'entant qu'ils contenoient quelque
chose de plus ou moins amer , ou salé,
ou doux , ou âpre , ou acerbe , ou adoucissant
, ** &c.En quoi , sans doute , il
pensoit plus juste que ceux qui l'avoient
précedé , mais après tout , ce n'étoit connoître
la nature des Mixtes que par leurs
seuls effets , même par leurs effets senfibles
; par consequent il falloit les avoir
souvent éprouvez , avant que d'en fixer
les qualitez.
Enfin la Chymie étant devenue com-
* On la peut voir bien marquée dans Matthi
Comment. sur Dioscoride.
** Lib. de prisca Medicina.
mune
JUILLET.
1731. 1575
mune , on a crû avoir trouvé le moyen
infaillible pour découvrir primitivement
ce que chaque Mixte devoit naturellement
opérer , parce que ceux qui cultivoient
cet art , prétendant avoir une Méthode
assurée pour décomposer les Mixtes par
le moyen du feu , séparer les Principes
dont ils étoient composez , pour les voir
ensuite à leur aise séparément , et connoître
leurs opérations, ils n'ont nullement
douté , qu'à proportion que quelques- uns
de ces principes se trouveroient dominer
plus ou moins dans les Mixtes , leurs Effets
devoient se diversifier differemment :
c'est ce qui a même donné lieu à l'Académie
Royale des Sciences de Paris , de
faire travailler à l'Analyse Chymique des
Plantes , dans l'esperance qu'on auroit
par là une connoissance assurée des effets
qu'elles doivent naturellement produire.
Mais les personnes éclairées , même les
plus habiles dans cette Profession , sont
tombées d'accord , qu'on ne pouvoit pas
encore sé flatter d'être arrivé par cette
voye au but qu'on se proposoit depuis si
long - tems. M. Lemery , cet habile Chymiste
, avoue lui- même dans le Discours
qu'il a fait sur la Chymie en général , et
qui est à la tête de son cours de Chymie ,
B iiij que
1656 MERCURE DE FRANCE
que, si l'on veut considerer sans préoccupation
, comment le feu agit lorsqu'on
s'en sert pour anatomiser les plantes , ( on
;
doit dire la même chose des autres Mixtes
) : on avouera , dit- il , qu'il détruit et
confond la plupart des choses qu'il disseque
qu'il n'y a pas lieu de croire qu'il
rende les substances en leur état naturel :
aussi n'hésite - t- il pas à dire , parlant des
Sels des Plantes , qu'il n'y a que leur Sel
essentiel qui se tire de leur Suc exprimé ,
et filtré , et christalisé , qui soit le veritable
Sel qui étoit dans la Plante , ce qu'on
ne peut pas dire ( ajoûte t- il ) des deux autres
; sçavoir , le Sel volatile , et le Sel
fixescar eû égard à la violence du feu dont
on s'est servi pour les faire , il y agrande
apparence qu'ils ont été déguisez .
Tous ceux qui ont parlé sans prévention
de cette Analise des Mixtes,faite par
la voye du feu , en ont pensé de même.
Le Medecin de Montpellier qui a fait des
Notes sur l'Anatomie d'Heister , dit . que
ce n'est pas par l'Analyse Chymique qu'on
peut connoître les veritables principes
des
corps ; puisque le feu change les matieres
, et qu'il les décompose ; que ceuxqui
veulent en juger par cette Analyse ,
n'ont pas plus de raison , que ceux qui
voudroient connoître la nature des Caillous
JUILLET. 1731. 1657.
lous par la chaux . En effet , c'est une
chose certaine , dit M. Lemery dans son
Mémoire sur les Analyses des Plantes , inseré
dans l'Histoire de l'Académie
, que
quoique l'Oseille ait un Suç naturellement
aigre dans la Distilation , neanmoins
elle donne beaucoup moins d'acide , que
plusieurs autres Plantes qui n'en manifestent
pas tant.
Il me paroît donc , que voulant connoître
ce que la plupart des Mixtes peuvent
opérer, on peut aller plus surement
au but par la Méthode que j'ai découverte,
que par cette Analyse Chymique à laquelle
on s'est attaché depuis ces derniers
tems ; car dans la plupart des Mixtes ,
quelle est la chose qui opére les plus
grands & les plus sensibles effets ? ne sontce
pas les Sels qui sont contenus dans ces
Mixtes , lorsque venant à se déveloper , et
s'insinuant dans les pores des autres Corps
ils les dilatent , les ouvrent , en remplissent
les vuides , ou rompent & dérangent
la contexture de leurs parties ? Ainsi , on
ne peut disconvenir , que de toutes les
parties , ou , si l'on veut, de tous les principes
qui forment les Mixtes , les particules
salines étant les plus roides
Ait, Des Mamelles,
, et les
plus
1658 MERCURE DE FRANCE
plus figurées , leur opération doit être
la plus sensible et la plus considerable.
Ainsi le moyen incontestablement le
plus sûr pour juger quels effets la plûpart
des Mixtes doivent naturellement produire
, consiste à connoître parfaitement
quels Sels dominent en eux , et quelles
sont les Figures specifiques de chacun de
ces Sels : puisque , comme j'ai déja dit , ils
opérent toûjours conformément à leur Figure
et à leur mouvement : or on ne peut
pas douter , que par ma Méthode , on ne
connoisse parfaitement quels sont les Sels
qui sont contenus dans la plupart des
Mixtes, et quelles en sont les Figures spécifiques
par consequent ma Méthode est
celle qui est la meilleure et la plus
sûre pour juger des effets que ces Mixtes
doivent naturellement produire .
Tout ceci préalablement établi , entrons
maintenant en matiere ; et voyons en particulier
comment il faut s'y prendre pour
connoître quels sont les Sels qui peuvent
être contenus, soit dans les Terres, soit dans
les Eaux , soit dans les Plantes , soit dans les
Humeurs ; car il me paroit que quand on
aura poussé jusques- là ses connoissances ,
on aura trouvé suffisamment de quoi se satisfaire
.
Voulant donc découvrir quel est le Sel
qui
JUILLET. 1731. 1659
qui peut être contenu dans telle Terre que
ce puisse être , voici comme je m'y prends
pour y réüssir. Je mêle avec de l'eau la
Terre en question , observant qu'il n'y ait
pas trop d'eau ; et aprés l'avoir laissée
quelque tems en infusion , je lui donne un
leger bouillon sur le feu ; ensuite ayant
filtré cette eau par le papier gris , pour la
rendre claire , je la fais christaliser sur
mes petits vers ronds , conformément à
ma Méthode. C'est ainsi que je m'y suis
pris pour voir et connoître les Sels difrens
du Terreau de fumier , de la bonne
Terre des champs , et de la Terre glaise ,
desquels je vous envoye les desseins. Mais
avant que je finisse ce qui regarde les Terres,
il est à propos que j'avertisse, que par rap-
•port à celles qui sont exposées à la Pluye,
Jes Sels qu'on y peut trouver , peuvent
souvent varier à raison des pluyes
des rosées , des brouillards , des neiges ,
ou des grêles , qui peuvent y tomber ,
et y déposer les differens Sels qui s'y rencontrent.
, ›
Pour les Eaux des puits , des rivieres et
des fontalnes, je ies christalise telles qu'elles
sont , lorsqu'elles sont pures et claires :
mais je dois aussi faire observer , que celles
des puits et des fontaines ne donnent
pas toûjours les mêmes Sels , ce que j'ai
B vj même
1660 MERCURE DE FRANCE
même remarqué dans les Eaux de Forges.
Certe variation mérite bien d'être plus
exactement observée que je n'ai fait, pour
en tirer toutes les conséquences convenables
à un pareil sujet.
,
et
Il est vrai que la même chose arrive à
l'égard de l'Eau des rivieres : mais la cause
en est évidente , sçavoir les pluyes , les
neiges, les grêles , & c. qui y tombent ,
les differentes Terres qui y sont souvent
entraînées , et qui y portent leurs Sels
avec elles . C'est par cette raison que j'ai
rrouvé des deux sortes de Sels dans l'eau
de la mer l'un est le Sel marin ordinaire
; et l'autre un Sel plus délié , dont
les pointes font plus fines. Ce qui rend
cette eau plus corrosive que celle où le
Sel marin seul est dissout . J'ai de même
trouvé de deux sortes de Sel dans l'eau
de riviere du mois de Mars , prise à dif
rens 'tems , le premier a quelque rapport
au Nitre , et le second au Borax ; mais
parce que je n'ai pas trouvé ce dernier Sel
avant ou après le tems marqué , cela
me fait soupçonner que c'est cette
espece de Sel qui rend les Eaux du mois
de Mars plus fortes et plus âpres que
les autres , qu'elles rendent le Linge plus
blanc , et qu'elles rongent davantage les
mains des Blanchisseuses , & c.
>
A
JUILLET
. 1731. 1661
'A l'égard des Plantes , voulant connoître
leurs veritables Sels , et voir quelles
sont leurs figures specifiques
,tout consiste
à piler la plante dans un mortier , y verser
ensuite ce qu'il convient d'eau , pour
donner plus de fluidité au suc , et donner
au Sel plus de facilité pour se dégager de
la viscosité dans laquelle il est souvent
renfermé : puis ayant laissé le tout poser
pendant quelque peu de tems , le filtrer
par le papier gris , et le faire ensuite christaliser
sur le verre. On peut bien juger
que plus le Suc de la Plante est visqueux , plus on doit y mêler d'eau . Je dirai aussi
que j'ai observé, que prenant les Plantes , dans le tems qu'elles sont dans leur for- ce , leurs Sels se font mieux connoître
.
>
Voilà de quelle maniere on peut voir
et connoitre les Sels des Plantes , quelles
sont leurs figures specifiques : par où l'on
peut juger des effets qu'elles doivent naturellement
produire : puisque comme
j'ai dit , c'est principalement
par les Sels
que tous les Mixtes font leurs plus puissantes
opérations ; et qu'en connoissant
les figures sensibles que prennent
les Sels en se christalisant
sur le verre
on connoît les figures invisibles de leurs
plus petites parties par lesquelles elles
opérent.
C'est
1662 MERCURE DE FRANCE
C'est ce qu'il m'est aisé de justifier par
un grand nombre de Plantes , dont j'ai
découvert et connu les Sels par cette
Méthode on peut en être persuadé , en
voyant seulement les trois desseins que
j'ai tiré de Sels , de l'Oseille , du Marübe
blanc , et de la Christe - Marine ; par - lesquels
il est très-facile de connoître les effets
que ces trois Plantes doivent naturellement
opérer : car trouvant dans l'Oseille
les principaux Sels formez en figures d'épines
, d'autres en petites éguilles , et d'autres
enfin en figure de lozanges pointuës
par les deux bouts , n'a-t- on pas une
marque assurée , que cette Plante doit
piquer par son acidité , et être tant soit
peu corrosive , comme on le reconnoît
par ces effets ; puisque chacun sçait
qu'elle dissipe les taches d'encre , lorsqu'il
en est tombé sur le Linge ? elle
doit aussi être rafraîchissante et pénétrante
, ce qu'on ne peut jamais reconnoître
( ainsi que je l'ai dit par son Analyse
Chymique.
Il en est de même du Marube blanc : les
Sels de cette Plante vûs et découverts par
ma Méthode sont visiblement un Sel ammoniac
très-abondant mêlé d'un peu deNître;
puisqu'ils ont l'un et l'autre des figures
sem
JUILLET. 1731. 1 1663
semblables à celles de ces deux Sels ; par où
il est aisé de juger que cette Plante doit
être volatile et désopilante , conformément
à ces deux Sels. Enfin j'ai trouvé les Sels
provenant de la Christe - Marine , où le Sel
marin se fait voir , accompagné de l'armoniac.
Je pourrois entrer dans un plus
grand détail , si je voulois rapporter comment
sont figurés les differens Sels des
Plantes , que je me suis donné le plaisir
d'examiner : je dis le plaisir , car c'en
est un veritable , que de voir cette differente
Palingénésie des Sels , et cet agréable
arrangement qu'ils prennent d'eux- mêmes
sur le Verre.
Passons maintenant aux humeurs , ou
liquides les plus considerables du Corps
humain,pour connoître les Sels contenus
dans la salive ; il est necessaire d'observer
qu'étant ordinairement trés visqueuses , il
faut pour en dissoudre la viscosité , pour en
détacher les Sels qui sont enfevelis , y mêler
au moins une fois autant d'eau ; et afin
que la dissolution se puisse mieux faire , il
est à propos de laisser poser le tout pendant
quelques heures ; et la laisser christaliser
aprés l'avoir filtrée : c'est alors, que , quoiqu'il
s'y trouve quelquefois des Sels differens
, on a presque toûjours le plaisir de
voir de ses yeux la verité de ce qu'on a dit,
sçavoir ,
1664 MERCURE DE FRANCE
sçavoir, que la Salive est ordinairement
remplie de Sel armoniac , ainsi qu'il est facile
de le voir par le dessein que j'ai tiré
d'après celle que j'ai christalisée.
Pour ce qui est du sang ; comme c'est
dans sa sérosité que les Sels sont dissous ,
ce n'est aussi que dans cette seule sérosité
qu'il les faut chercher. Il faut donc pour
cet effet , prendre celle qui se sépare d'ellemême
après la saignée . Mais comme elle
est extrêmement visqueuse et gluante
elle a besoin pour en débarasser les Sels ,
qu'on y mêle beaucoup plus d'eau que
dans la Salive , ensorte qu'il en faut mettre
environ sept à huit fois plus qu'il n'y a
de sérosite ayant ensuite laissé poser le
tout trois ou quatre heures , filtrer et
christaliser.C'a été en agissant de la sorte,
que
voulant connoître les Sels du sang
d'une personne legerement indisposée ,
j'y ai trouvai , comme on peut voir dans
le dessein , beaucoup de Sel armoniac
très-pen de Nitre , et quelques Globules ,
que je croyois être échapez dans la filtration.
Quant à l'urine , il faut s'y prendre
d'une maniere fort differente de celle
dont on use pour la Salive et pour le Sang
* Ettmuller, sur la Pharm. de Schoder. de la
Salive de l'Homme. liv z.
puisJUILLET.
1731. 1665
puisqu'à celles - là , il fant , si l'on veut en
voirles Sels , y adjoûter de l'eau ; au lieu
quepour voir ceux des urines , it convient
d'en faire évaporer une partře. On peut
voir dans la Planche la figure du Sel , que
j'ai observée dans l'urine d'une personne
saine.
Il me reste maintenant à faire quelques
Observations neceffaires ; et qu'il convient
de sçavoir , pour mieux réussir
en usant de cette Methode , pour ne s'y
pas tromper.
La premiere regarde l'eau dont on
doit se servir , soit pour dissoudre les
Sels , ou pour rendre les sucs des Plantes
, ou la salive et les serosités du sang
plus liquides : car soit qu'elle soit de
Fontaine , de Riviere , ou de Puits ; comme
ces differentes eaux peuvent avoir
leurs Sels propres et particuliers , il est
à propos , toutes les fois qu'on fait christaliser
ces choses mélangées d'eau , de
mettre en même temps de cette même
eau sur un autre verre , afin que si étant
elle - même christalisée , et y remarquant
quelque Sel particulier , on puisse le distinguer
d'avec ceux de la Plante , ou de
telle autre chose dont on veut connoître
le Sel propre.
La seconde Observation consiste à sçavoir
,
1666 MERCURE DE FRANCE
"
voir , que souvent et plus particulierement
à l'égard des sucs des Plantes , de la
salive , et de la serosité du sang , les Selssevoyent
et se distinguent d'autant mieux
qu'on met sur le verre une moindre quan ,
tité de ces liqueurs , la trop grande abondance
des Sels qui s'y rencontrent apportant
souvent de la confusion dans leur
christalisation , et les empêchant de prendre
exactement leut figure specifique..
C'est pourquoy
il est à propos d'en mettre
une plus ou moins grande quantité
sur deux ou trois des petits verres dont
on use à cet effet ; et pour le faire facilement
, on peut se setvir, comme je fais ,
pour prendre et pour poser ces liqueurs ,
d'une espece de petite cueilliere de cuivre
, dont le creux n'a pas plus de largeur
que la moitié de l'écaille d'une noisette
, ayant trés peu de profondeur.
La troisiéme Observation , est par
rapport à la serosité du sang , où l'on
peut aisement se tromper : car quoyqu'on
y mêle beaucoup d'eau , cela n'empêche
pas qu'à cause de sa grande viscosité
venant à se secher sur le verre , il ne s'y
fasse au moins à quelque endroit , une
pellicule , laquelle se sechant fortement , il
s'y fait diverses crevasses , lesquelles se
reünissent le plus souvent en forme de
lozanges :
JUILLET. 1731. 1667
lozanges : on en peut voir quelques-unes
tracées dans le dessein qui représente les
Sels du sang : et lorsqu'on vient â regarder
au jour avec le Microscope , les, Sels
de cette serosité , ces fentes ou crevasses
étant moins opaques , on peut aisement
les prendre pour des Sels plus transparens.
Enfin la quatrième et la derniere Observation
que j'ai à faire , est pour indiquer
le moyen de mieux connoître quels
sont les Sels qui paroissent sur le verre
aprés que la cristalisation est faite : Car
la premiere chose qu'on doit observer
c'est de voir si les cristaux qui paroissent ,
sont semblables à quelqu'un des Sels qui
sont connus , et dont les figures sont dessinées
dans la Planche qui est jointe à
ma Lettre parce qu'au moment qu'on
les verra semblables , on peut s'assurer
que ce sont les mêmes Sels , ce qui peut
arriver souvent ; puisque,comme j'ai dit ,
ces Sels connus de tout le monde , sont
aussi les plus communs dans la nature.
Néanmoins , parcequ'on ne peut pas dire
qu'ils soient les seuls , au cas qu'on en remarque
, soit dans certaines ter es , certaines
eaux , certaines plantes &c. qui
prennent constamment des figures particulieres
, il convient alors de les observer
1668 MERCURE DE FRANCE
ver exactement , pourjuger par leur figu
re des effets particuliers qu'ils doivent
pareillement produire.
Je me crois d'ailleurs obligé d'avertir ,
que je n'ai pas tellement perfectionné
cette découverte , qu'il ne reste plus rien
à faire pour découvrir géneralement tous
les Sels , et plus particulierement ceux
de toutes les Plantes et de toutes les humeurs
. Je ne donne tout ce qui est contenu
dans ces deux Lettres , que comme
un essai , dans lequel je me flatte d'avoir
réûssi ; s'il est poussé aussi loin qu'il le
peut être par des mains plus habiles , il
pourra devenir trés avantageux au public.
Je suis Monsieur & c.
On trouvera les Figures gravées de
ces Sels , dans la premiere Lettre de M.
Capperon , inserée dans le precedent
Mercure.
sur la Méthode d'observer les Sels qui
se trouvent dans les Terres , dans les
Plantes , dans les Humeurs , &c.
MONSIEUR ,
Vous sçavez mieux que moi , qu'il y a
long- tems qu'on cherche un moyen de
connoître la qualité des Mixtes , pour ju
ger des effets qu'ils doivent naturellement
operer. Comme on étoit d'abord persuadé
que les Mixtes
n'opéroient
que parce
qu'on
appelloit
leurs qualitez
; sçavoir
, le
chaud
, le sec , le froid
, et l'humide
; on
B iij
1574 MERCURE DE FRANCE
crut avoir fait beaucoup , que d'assigner à
chaque Mixte , jusqu'à quel degré il étoit
chaud , sec , froid , ou humide ; ce dont
on jugeoit par les effets qu'on lui voyoit
produire , et par- là on se flatoit d'avoir
un moyen suffisant pour connoître le
bien ou le mal que ces Mixtes pouvoient
faire.
Quoique cette Méthode fut en usage
avant le tems d'Hypocrate , et qu'elle l'ait
été presque jusqu'à nos jours : * cet habile
Homme reconnut néanmoins , qu'on ne
pouvoit pas aller loin avec cette Découverte.
Il crut qu'il pouvoit y mieux réüssir
, en enseignant que les Mixtes n'opéroient
qu'entant qu'ils contenoient quelque
chose de plus ou moins amer , ou salé,
ou doux , ou âpre , ou acerbe , ou adoucissant
, ** &c.En quoi , sans doute , il
pensoit plus juste que ceux qui l'avoient
précedé , mais après tout , ce n'étoit connoître
la nature des Mixtes que par leurs
seuls effets , même par leurs effets senfibles
; par consequent il falloit les avoir
souvent éprouvez , avant que d'en fixer
les qualitez.
Enfin la Chymie étant devenue com-
* On la peut voir bien marquée dans Matthi
Comment. sur Dioscoride.
** Lib. de prisca Medicina.
mune
JUILLET.
1731. 1575
mune , on a crû avoir trouvé le moyen
infaillible pour découvrir primitivement
ce que chaque Mixte devoit naturellement
opérer , parce que ceux qui cultivoient
cet art , prétendant avoir une Méthode
assurée pour décomposer les Mixtes par
le moyen du feu , séparer les Principes
dont ils étoient composez , pour les voir
ensuite à leur aise séparément , et connoître
leurs opérations, ils n'ont nullement
douté , qu'à proportion que quelques- uns
de ces principes se trouveroient dominer
plus ou moins dans les Mixtes , leurs Effets
devoient se diversifier differemment :
c'est ce qui a même donné lieu à l'Académie
Royale des Sciences de Paris , de
faire travailler à l'Analyse Chymique des
Plantes , dans l'esperance qu'on auroit
par là une connoissance assurée des effets
qu'elles doivent naturellement produire.
Mais les personnes éclairées , même les
plus habiles dans cette Profession , sont
tombées d'accord , qu'on ne pouvoit pas
encore sé flatter d'être arrivé par cette
voye au but qu'on se proposoit depuis si
long - tems. M. Lemery , cet habile Chymiste
, avoue lui- même dans le Discours
qu'il a fait sur la Chymie en général , et
qui est à la tête de son cours de Chymie ,
B iiij que
1656 MERCURE DE FRANCE
que, si l'on veut considerer sans préoccupation
, comment le feu agit lorsqu'on
s'en sert pour anatomiser les plantes , ( on
;
doit dire la même chose des autres Mixtes
) : on avouera , dit- il , qu'il détruit et
confond la plupart des choses qu'il disseque
qu'il n'y a pas lieu de croire qu'il
rende les substances en leur état naturel :
aussi n'hésite - t- il pas à dire , parlant des
Sels des Plantes , qu'il n'y a que leur Sel
essentiel qui se tire de leur Suc exprimé ,
et filtré , et christalisé , qui soit le veritable
Sel qui étoit dans la Plante , ce qu'on
ne peut pas dire ( ajoûte t- il ) des deux autres
; sçavoir , le Sel volatile , et le Sel
fixescar eû égard à la violence du feu dont
on s'est servi pour les faire , il y agrande
apparence qu'ils ont été déguisez .
Tous ceux qui ont parlé sans prévention
de cette Analise des Mixtes,faite par
la voye du feu , en ont pensé de même.
Le Medecin de Montpellier qui a fait des
Notes sur l'Anatomie d'Heister , dit . que
ce n'est pas par l'Analyse Chymique qu'on
peut connoître les veritables principes
des
corps ; puisque le feu change les matieres
, et qu'il les décompose ; que ceuxqui
veulent en juger par cette Analyse ,
n'ont pas plus de raison , que ceux qui
voudroient connoître la nature des Caillous
JUILLET. 1731. 1657.
lous par la chaux . En effet , c'est une
chose certaine , dit M. Lemery dans son
Mémoire sur les Analyses des Plantes , inseré
dans l'Histoire de l'Académie
, que
quoique l'Oseille ait un Suç naturellement
aigre dans la Distilation , neanmoins
elle donne beaucoup moins d'acide , que
plusieurs autres Plantes qui n'en manifestent
pas tant.
Il me paroît donc , que voulant connoître
ce que la plupart des Mixtes peuvent
opérer, on peut aller plus surement
au but par la Méthode que j'ai découverte,
que par cette Analyse Chymique à laquelle
on s'est attaché depuis ces derniers
tems ; car dans la plupart des Mixtes ,
quelle est la chose qui opére les plus
grands & les plus sensibles effets ? ne sontce
pas les Sels qui sont contenus dans ces
Mixtes , lorsque venant à se déveloper , et
s'insinuant dans les pores des autres Corps
ils les dilatent , les ouvrent , en remplissent
les vuides , ou rompent & dérangent
la contexture de leurs parties ? Ainsi , on
ne peut disconvenir , que de toutes les
parties , ou , si l'on veut, de tous les principes
qui forment les Mixtes , les particules
salines étant les plus roides
Ait, Des Mamelles,
, et les
plus
1658 MERCURE DE FRANCE
plus figurées , leur opération doit être
la plus sensible et la plus considerable.
Ainsi le moyen incontestablement le
plus sûr pour juger quels effets la plûpart
des Mixtes doivent naturellement produire
, consiste à connoître parfaitement
quels Sels dominent en eux , et quelles
sont les Figures specifiques de chacun de
ces Sels : puisque , comme j'ai déja dit , ils
opérent toûjours conformément à leur Figure
et à leur mouvement : or on ne peut
pas douter , que par ma Méthode , on ne
connoisse parfaitement quels sont les Sels
qui sont contenus dans la plupart des
Mixtes, et quelles en sont les Figures spécifiques
par consequent ma Méthode est
celle qui est la meilleure et la plus
sûre pour juger des effets que ces Mixtes
doivent naturellement produire .
Tout ceci préalablement établi , entrons
maintenant en matiere ; et voyons en particulier
comment il faut s'y prendre pour
connoître quels sont les Sels qui peuvent
être contenus, soit dans les Terres, soit dans
les Eaux , soit dans les Plantes , soit dans les
Humeurs ; car il me paroit que quand on
aura poussé jusques- là ses connoissances ,
on aura trouvé suffisamment de quoi se satisfaire
.
Voulant donc découvrir quel est le Sel
qui
JUILLET. 1731. 1659
qui peut être contenu dans telle Terre que
ce puisse être , voici comme je m'y prends
pour y réüssir. Je mêle avec de l'eau la
Terre en question , observant qu'il n'y ait
pas trop d'eau ; et aprés l'avoir laissée
quelque tems en infusion , je lui donne un
leger bouillon sur le feu ; ensuite ayant
filtré cette eau par le papier gris , pour la
rendre claire , je la fais christaliser sur
mes petits vers ronds , conformément à
ma Méthode. C'est ainsi que je m'y suis
pris pour voir et connoître les Sels difrens
du Terreau de fumier , de la bonne
Terre des champs , et de la Terre glaise ,
desquels je vous envoye les desseins. Mais
avant que je finisse ce qui regarde les Terres,
il est à propos que j'avertisse, que par rap-
•port à celles qui sont exposées à la Pluye,
Jes Sels qu'on y peut trouver , peuvent
souvent varier à raison des pluyes
des rosées , des brouillards , des neiges ,
ou des grêles , qui peuvent y tomber ,
et y déposer les differens Sels qui s'y rencontrent.
, ›
Pour les Eaux des puits , des rivieres et
des fontalnes, je ies christalise telles qu'elles
sont , lorsqu'elles sont pures et claires :
mais je dois aussi faire observer , que celles
des puits et des fontaines ne donnent
pas toûjours les mêmes Sels , ce que j'ai
B vj même
1660 MERCURE DE FRANCE
même remarqué dans les Eaux de Forges.
Certe variation mérite bien d'être plus
exactement observée que je n'ai fait, pour
en tirer toutes les conséquences convenables
à un pareil sujet.
,
et
Il est vrai que la même chose arrive à
l'égard de l'Eau des rivieres : mais la cause
en est évidente , sçavoir les pluyes , les
neiges, les grêles , & c. qui y tombent ,
les differentes Terres qui y sont souvent
entraînées , et qui y portent leurs Sels
avec elles . C'est par cette raison que j'ai
rrouvé des deux sortes de Sels dans l'eau
de la mer l'un est le Sel marin ordinaire
; et l'autre un Sel plus délié , dont
les pointes font plus fines. Ce qui rend
cette eau plus corrosive que celle où le
Sel marin seul est dissout . J'ai de même
trouvé de deux sortes de Sel dans l'eau
de riviere du mois de Mars , prise à dif
rens 'tems , le premier a quelque rapport
au Nitre , et le second au Borax ; mais
parce que je n'ai pas trouvé ce dernier Sel
avant ou après le tems marqué , cela
me fait soupçonner que c'est cette
espece de Sel qui rend les Eaux du mois
de Mars plus fortes et plus âpres que
les autres , qu'elles rendent le Linge plus
blanc , et qu'elles rongent davantage les
mains des Blanchisseuses , & c.
>
A
JUILLET
. 1731. 1661
'A l'égard des Plantes , voulant connoître
leurs veritables Sels , et voir quelles
sont leurs figures specifiques
,tout consiste
à piler la plante dans un mortier , y verser
ensuite ce qu'il convient d'eau , pour
donner plus de fluidité au suc , et donner
au Sel plus de facilité pour se dégager de
la viscosité dans laquelle il est souvent
renfermé : puis ayant laissé le tout poser
pendant quelque peu de tems , le filtrer
par le papier gris , et le faire ensuite christaliser
sur le verre. On peut bien juger
que plus le Suc de la Plante est visqueux , plus on doit y mêler d'eau . Je dirai aussi
que j'ai observé, que prenant les Plantes , dans le tems qu'elles sont dans leur for- ce , leurs Sels se font mieux connoître
.
>
Voilà de quelle maniere on peut voir
et connoitre les Sels des Plantes , quelles
sont leurs figures specifiques : par où l'on
peut juger des effets qu'elles doivent naturellement
produire : puisque comme
j'ai dit , c'est principalement
par les Sels
que tous les Mixtes font leurs plus puissantes
opérations ; et qu'en connoissant
les figures sensibles que prennent
les Sels en se christalisant
sur le verre
on connoît les figures invisibles de leurs
plus petites parties par lesquelles elles
opérent.
C'est
1662 MERCURE DE FRANCE
C'est ce qu'il m'est aisé de justifier par
un grand nombre de Plantes , dont j'ai
découvert et connu les Sels par cette
Méthode on peut en être persuadé , en
voyant seulement les trois desseins que
j'ai tiré de Sels , de l'Oseille , du Marübe
blanc , et de la Christe - Marine ; par - lesquels
il est très-facile de connoître les effets
que ces trois Plantes doivent naturellement
opérer : car trouvant dans l'Oseille
les principaux Sels formez en figures d'épines
, d'autres en petites éguilles , et d'autres
enfin en figure de lozanges pointuës
par les deux bouts , n'a-t- on pas une
marque assurée , que cette Plante doit
piquer par son acidité , et être tant soit
peu corrosive , comme on le reconnoît
par ces effets ; puisque chacun sçait
qu'elle dissipe les taches d'encre , lorsqu'il
en est tombé sur le Linge ? elle
doit aussi être rafraîchissante et pénétrante
, ce qu'on ne peut jamais reconnoître
( ainsi que je l'ai dit par son Analyse
Chymique.
Il en est de même du Marube blanc : les
Sels de cette Plante vûs et découverts par
ma Méthode sont visiblement un Sel ammoniac
très-abondant mêlé d'un peu deNître;
puisqu'ils ont l'un et l'autre des figures
sem
JUILLET. 1731. 1 1663
semblables à celles de ces deux Sels ; par où
il est aisé de juger que cette Plante doit
être volatile et désopilante , conformément
à ces deux Sels. Enfin j'ai trouvé les Sels
provenant de la Christe - Marine , où le Sel
marin se fait voir , accompagné de l'armoniac.
Je pourrois entrer dans un plus
grand détail , si je voulois rapporter comment
sont figurés les differens Sels des
Plantes , que je me suis donné le plaisir
d'examiner : je dis le plaisir , car c'en
est un veritable , que de voir cette differente
Palingénésie des Sels , et cet agréable
arrangement qu'ils prennent d'eux- mêmes
sur le Verre.
Passons maintenant aux humeurs , ou
liquides les plus considerables du Corps
humain,pour connoître les Sels contenus
dans la salive ; il est necessaire d'observer
qu'étant ordinairement trés visqueuses , il
faut pour en dissoudre la viscosité , pour en
détacher les Sels qui sont enfevelis , y mêler
au moins une fois autant d'eau ; et afin
que la dissolution se puisse mieux faire , il
est à propos de laisser poser le tout pendant
quelques heures ; et la laisser christaliser
aprés l'avoir filtrée : c'est alors, que , quoiqu'il
s'y trouve quelquefois des Sels differens
, on a presque toûjours le plaisir de
voir de ses yeux la verité de ce qu'on a dit,
sçavoir ,
1664 MERCURE DE FRANCE
sçavoir, que la Salive est ordinairement
remplie de Sel armoniac , ainsi qu'il est facile
de le voir par le dessein que j'ai tiré
d'après celle que j'ai christalisée.
Pour ce qui est du sang ; comme c'est
dans sa sérosité que les Sels sont dissous ,
ce n'est aussi que dans cette seule sérosité
qu'il les faut chercher. Il faut donc pour
cet effet , prendre celle qui se sépare d'ellemême
après la saignée . Mais comme elle
est extrêmement visqueuse et gluante
elle a besoin pour en débarasser les Sels ,
qu'on y mêle beaucoup plus d'eau que
dans la Salive , ensorte qu'il en faut mettre
environ sept à huit fois plus qu'il n'y a
de sérosite ayant ensuite laissé poser le
tout trois ou quatre heures , filtrer et
christaliser.C'a été en agissant de la sorte,
que
voulant connoître les Sels du sang
d'une personne legerement indisposée ,
j'y ai trouvai , comme on peut voir dans
le dessein , beaucoup de Sel armoniac
très-pen de Nitre , et quelques Globules ,
que je croyois être échapez dans la filtration.
Quant à l'urine , il faut s'y prendre
d'une maniere fort differente de celle
dont on use pour la Salive et pour le Sang
* Ettmuller, sur la Pharm. de Schoder. de la
Salive de l'Homme. liv z.
puisJUILLET.
1731. 1665
puisqu'à celles - là , il fant , si l'on veut en
voirles Sels , y adjoûter de l'eau ; au lieu
quepour voir ceux des urines , it convient
d'en faire évaporer une partře. On peut
voir dans la Planche la figure du Sel , que
j'ai observée dans l'urine d'une personne
saine.
Il me reste maintenant à faire quelques
Observations neceffaires ; et qu'il convient
de sçavoir , pour mieux réussir
en usant de cette Methode , pour ne s'y
pas tromper.
La premiere regarde l'eau dont on
doit se servir , soit pour dissoudre les
Sels , ou pour rendre les sucs des Plantes
, ou la salive et les serosités du sang
plus liquides : car soit qu'elle soit de
Fontaine , de Riviere , ou de Puits ; comme
ces differentes eaux peuvent avoir
leurs Sels propres et particuliers , il est
à propos , toutes les fois qu'on fait christaliser
ces choses mélangées d'eau , de
mettre en même temps de cette même
eau sur un autre verre , afin que si étant
elle - même christalisée , et y remarquant
quelque Sel particulier , on puisse le distinguer
d'avec ceux de la Plante , ou de
telle autre chose dont on veut connoître
le Sel propre.
La seconde Observation consiste à sçavoir
,
1666 MERCURE DE FRANCE
"
voir , que souvent et plus particulierement
à l'égard des sucs des Plantes , de la
salive , et de la serosité du sang , les Selssevoyent
et se distinguent d'autant mieux
qu'on met sur le verre une moindre quan ,
tité de ces liqueurs , la trop grande abondance
des Sels qui s'y rencontrent apportant
souvent de la confusion dans leur
christalisation , et les empêchant de prendre
exactement leut figure specifique..
C'est pourquoy
il est à propos d'en mettre
une plus ou moins grande quantité
sur deux ou trois des petits verres dont
on use à cet effet ; et pour le faire facilement
, on peut se setvir, comme je fais ,
pour prendre et pour poser ces liqueurs ,
d'une espece de petite cueilliere de cuivre
, dont le creux n'a pas plus de largeur
que la moitié de l'écaille d'une noisette
, ayant trés peu de profondeur.
La troisiéme Observation , est par
rapport à la serosité du sang , où l'on
peut aisement se tromper : car quoyqu'on
y mêle beaucoup d'eau , cela n'empêche
pas qu'à cause de sa grande viscosité
venant à se secher sur le verre , il ne s'y
fasse au moins à quelque endroit , une
pellicule , laquelle se sechant fortement , il
s'y fait diverses crevasses , lesquelles se
reünissent le plus souvent en forme de
lozanges :
JUILLET. 1731. 1667
lozanges : on en peut voir quelques-unes
tracées dans le dessein qui représente les
Sels du sang : et lorsqu'on vient â regarder
au jour avec le Microscope , les, Sels
de cette serosité , ces fentes ou crevasses
étant moins opaques , on peut aisement
les prendre pour des Sels plus transparens.
Enfin la quatrième et la derniere Observation
que j'ai à faire , est pour indiquer
le moyen de mieux connoître quels
sont les Sels qui paroissent sur le verre
aprés que la cristalisation est faite : Car
la premiere chose qu'on doit observer
c'est de voir si les cristaux qui paroissent ,
sont semblables à quelqu'un des Sels qui
sont connus , et dont les figures sont dessinées
dans la Planche qui est jointe à
ma Lettre parce qu'au moment qu'on
les verra semblables , on peut s'assurer
que ce sont les mêmes Sels , ce qui peut
arriver souvent ; puisque,comme j'ai dit ,
ces Sels connus de tout le monde , sont
aussi les plus communs dans la nature.
Néanmoins , parcequ'on ne peut pas dire
qu'ils soient les seuls , au cas qu'on en remarque
, soit dans certaines ter es , certaines
eaux , certaines plantes &c. qui
prennent constamment des figures particulieres
, il convient alors de les observer
1668 MERCURE DE FRANCE
ver exactement , pourjuger par leur figu
re des effets particuliers qu'ils doivent
pareillement produire.
Je me crois d'ailleurs obligé d'avertir ,
que je n'ai pas tellement perfectionné
cette découverte , qu'il ne reste plus rien
à faire pour découvrir géneralement tous
les Sels , et plus particulierement ceux
de toutes les Plantes et de toutes les humeurs
. Je ne donne tout ce qui est contenu
dans ces deux Lettres , que comme
un essai , dans lequel je me flatte d'avoir
réûssi ; s'il est poussé aussi loin qu'il le
peut être par des mains plus habiles , il
pourra devenir trés avantageux au public.
Je suis Monsieur & c.
On trouvera les Figures gravées de
ces Sels , dans la premiere Lettre de M.
Capperon , inserée dans le precedent
Mercure.
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Résumé : SECONDE LETTRE de M. Capperon sur la Méthode d'observer les Sels qui se trouvent dans les Terres, dans les Plantes, dans les Humeurs, &c.
La lettre de M. Capperon explore une méthode d'observation des sels présents dans les terres, les plantes et les humeurs. Historiquement, les mixtes étaient classés selon leurs qualités (chaud, sec, froid, humide) ou leurs saveurs (amer, salé, doux). Cependant, ces méthodes étaient limitées aux effets observables. Avec l'avènement de la chimie, on a tenté de décomposer les mixtes par le feu, mais cette approche altérait les substances, rendant l'analyse imparfaite. Capperon propose une méthode alternative basée sur l'observation des sels cristallisés. Il affirme que les sels, en se développant et en s'insinuant dans les pores des corps, produisent des effets sensibles et considérables. Pour observer ces sels, il mélange les substances avec de l'eau, les filtre et les cristallise sur des verres. Cette méthode est appliquée aux terres, eaux, plantes et humeurs, notant que les sels peuvent varier en fonction des conditions environnementales. Pour les plantes, Capperon pile la plante, ajoute de l'eau, filtre le suc et observe la cristallisation. Il illustre cette méthode avec des exemples comme l'oseille, le marube blanc et la christe-marine, montrant comment les formes des cristaux révèlent les propriétés des plantes. Pour la salive, il dissout la viscosité avec de l'eau et observe les cristaux formés. Le texte décrit également une méthode pour analyser les sels présents dans le sang, la salive et l'urine. Pour le sang, il est nécessaire de séparer la sérosité après une saignée, de la mélanger avec une grande quantité d'eau, de laisser reposer le mélange, puis de filtrer et cristalliser. Cette méthode a permis de découvrir du sel armoniac et du nitre dans le sang d'une personne légèrement indisposée. Pour l'urine, il faut évaporer une partie du liquide pour observer les sels. L'auteur souligne l'importance d'utiliser de l'eau de même source pour éviter la confusion des sels et de reconnaître les sels connus. Il mentionne que sa découverte est un essai et espère qu'elle pourra être perfectionnée par d'autres.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 1935-1938
LETTRE sur une Machine pour élever l'eau, &c. écrite de Villeneuve-lès-Avignon, le 14. Août, par M. Soumille, Prêtre.
Début :
Ayant lû, Monsieur, dans votre dernier volume du Mercure de Juin, [...]
Mots clefs :
Poids, Machine, Livres, Élever, Remonter, Ouvrages, Honneur, Puits, Eau
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE sur une Machine pour élever l'eau, &c. écrite de Villeneuve-lès-Avignon, le 14. Août, par M. Soumille, Prêtre.
LETTRE sur une Machine pour pour élever
l'eau , & c. écrite de Villeneuve - lès-
Avignon , le 14. Août , par M. Sou
mille , Prêtre..
Yant lû , Monsieur , dans votre
Aderniervolume du Mercure de Juin;
page 1418. un article d'un Particulier
qui croit rendre service au Public en
proposant de faire une Machine dans
Le goût des grosses Horloges , pour pouvoir
, au moyen de certains poids , faire
monter l'eau des Puits , &c. J'ai crû de
mon côté , rendre un meilleur service
à ce même Public , en lui conseillant de
ne rien essayer sur ces sortes d'Ouvrages.
Les plus parfaits et les mieux executez
seroient inutiles. Que seroit ce de ceux.
où la main de l'Ouvrier laisseroit quelque
imperfection ? mais pour qu'on ne croye
pas que j'avance cette proposition au
hazard ,
1937 MERCURE DE FRANCE
hazard , souffrez que j'aye l'honneur de
vous présenter les Refléxions suivantes ,
pour en faire l'usage que vous jugesez
à propos.
De quelle utilité pourroit être pour les
arrosages , &c. une Machine de cette espece
, laquelle après avoir coûté considérablement
, ne pourroit élever qu'une
quantité d'eau au - dessous de la pesanteur
de son poids ? Je m'explique ; supposons
pour un moment qu'un de ces
Ouvrages , executé dans sa derniere perfection
, puisse agir avec un poids de
100. livres , qu'il soit élevé au niveau
du bassin où l'on veut faire monter l'eau ;
il est très- certain que ce poids de 100 .
livres dans toute sa descente ne pourra
élever que moins de 100 liv. d'eau ; et
toutes les fois qu'on prendra la peine
de le remonter , il n'élevera jamais dans
sa descente que moins d'eau que ce qu'il
pese. Eh ! ne vaudroit - il pas mieux que
la personne destinée à remonter ce poids ,
employât ses forces à élever de l'eau
par les moyens usitez jusqu'aujourd'hui ,
et qu'elle n'usât point une Machine trèscouteuse
qui ne serviroit qu'à rendre
inutile une partie de ses forces, puisqu'au
lieu de remonter un poids de 100 liv.
elle pourroit puiser 100. livres d'eau , et
que
SEPTEMBRE . 1733. 1937
que le poids n'en sçauroit faire monter
autant ?
On ne peut pas douter un moment de
ce que je viens de dire , quand on examine
de près les loix immuables de l'équilibre.
La plus simple de toutes les Ma-
Achines , à mon sens , est celle qu'on voit
à tous les Puits , je veux dire deux sceaux
et une poulie ; mais si vous mettez 100 .
livres d'eau dans un des sceaux et 100 .
livres de poids dans l'autre , ils resteront
sans mouvement , et le poids n'emportera
l'eau qu'après en avoir ôté une partie
suffisante pour rompre l'équilibre . Or
comme cette Machine est la plus simple ,
elle est , sans contredit , la meilleure et
elle fournit un préjugé contre les Machines
composées de ce genre. On peut ,
si vous voulez , par une Machine composée
adoucir la peine de celui qui puise
l'eau , mais il faudra plus de temps pour
en puiser la même quantité. On peut
aussi faire une Machine à poids qui agira
pendant long-temps , mais l'eau qu'elle
fournira pendant cet espace de temps ,
quelque long qu'il soit , sera roujours
moindre que la pesanteur du poids de
la Machine.
Il est inutile de s'étendre davantage
sur une Machine en general , il suffit
d'avoir
1938 MERCURE DE FRANCE
touché le principe et montré l'inutilité
de pareils Ouvrages. Si quelqu'un à l'avenir
proposoit un modele , je m'offre
de démontrer en détail ce que je n'ay pû
dire qu'en general. J'ay l'honneur d'être
avec toute la consideration possible ,
Monsieur , &c.
l'eau , & c. écrite de Villeneuve - lès-
Avignon , le 14. Août , par M. Sou
mille , Prêtre..
Yant lû , Monsieur , dans votre
Aderniervolume du Mercure de Juin;
page 1418. un article d'un Particulier
qui croit rendre service au Public en
proposant de faire une Machine dans
Le goût des grosses Horloges , pour pouvoir
, au moyen de certains poids , faire
monter l'eau des Puits , &c. J'ai crû de
mon côté , rendre un meilleur service
à ce même Public , en lui conseillant de
ne rien essayer sur ces sortes d'Ouvrages.
Les plus parfaits et les mieux executez
seroient inutiles. Que seroit ce de ceux.
où la main de l'Ouvrier laisseroit quelque
imperfection ? mais pour qu'on ne croye
pas que j'avance cette proposition au
hazard ,
1937 MERCURE DE FRANCE
hazard , souffrez que j'aye l'honneur de
vous présenter les Refléxions suivantes ,
pour en faire l'usage que vous jugesez
à propos.
De quelle utilité pourroit être pour les
arrosages , &c. une Machine de cette espece
, laquelle après avoir coûté considérablement
, ne pourroit élever qu'une
quantité d'eau au - dessous de la pesanteur
de son poids ? Je m'explique ; supposons
pour un moment qu'un de ces
Ouvrages , executé dans sa derniere perfection
, puisse agir avec un poids de
100. livres , qu'il soit élevé au niveau
du bassin où l'on veut faire monter l'eau ;
il est très- certain que ce poids de 100 .
livres dans toute sa descente ne pourra
élever que moins de 100 liv. d'eau ; et
toutes les fois qu'on prendra la peine
de le remonter , il n'élevera jamais dans
sa descente que moins d'eau que ce qu'il
pese. Eh ! ne vaudroit - il pas mieux que
la personne destinée à remonter ce poids ,
employât ses forces à élever de l'eau
par les moyens usitez jusqu'aujourd'hui ,
et qu'elle n'usât point une Machine trèscouteuse
qui ne serviroit qu'à rendre
inutile une partie de ses forces, puisqu'au
lieu de remonter un poids de 100 liv.
elle pourroit puiser 100. livres d'eau , et
que
SEPTEMBRE . 1733. 1937
que le poids n'en sçauroit faire monter
autant ?
On ne peut pas douter un moment de
ce que je viens de dire , quand on examine
de près les loix immuables de l'équilibre.
La plus simple de toutes les Ma-
Achines , à mon sens , est celle qu'on voit
à tous les Puits , je veux dire deux sceaux
et une poulie ; mais si vous mettez 100 .
livres d'eau dans un des sceaux et 100 .
livres de poids dans l'autre , ils resteront
sans mouvement , et le poids n'emportera
l'eau qu'après en avoir ôté une partie
suffisante pour rompre l'équilibre . Or
comme cette Machine est la plus simple ,
elle est , sans contredit , la meilleure et
elle fournit un préjugé contre les Machines
composées de ce genre. On peut ,
si vous voulez , par une Machine composée
adoucir la peine de celui qui puise
l'eau , mais il faudra plus de temps pour
en puiser la même quantité. On peut
aussi faire une Machine à poids qui agira
pendant long-temps , mais l'eau qu'elle
fournira pendant cet espace de temps ,
quelque long qu'il soit , sera roujours
moindre que la pesanteur du poids de
la Machine.
Il est inutile de s'étendre davantage
sur une Machine en general , il suffit
d'avoir
1938 MERCURE DE FRANCE
touché le principe et montré l'inutilité
de pareils Ouvrages. Si quelqu'un à l'avenir
proposoit un modele , je m'offre
de démontrer en détail ce que je n'ay pû
dire qu'en general. J'ay l'honneur d'être
avec toute la consideration possible ,
Monsieur , &c.
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Résumé : LETTRE sur une Machine pour élever l'eau, &c. écrite de Villeneuve-lès-Avignon, le 14. Août, par M. Soumille, Prêtre.
Dans une lettre du 14 août, M. Soumille, prêtre, critique un article du Mercure de Juin qui propose une machine pour élever l'eau à l'aide de poids. Soumille affirme que ces machines, même bien conçues, sont inefficaces car elles ne peuvent élever qu'une quantité d'eau inférieure à la pesanteur de leur poids. Par exemple, un poids de 100 livres ne peut soulever que moins de 100 livres d'eau, ce qui est moins efficace que de soulever directement l'eau avec la même force. Il illustre son propos avec l'exemple d'une poulie et de deux seaux, montrant que le poids n'emportera l'eau qu'après en avoir ôté une partie pour rompre l'équilibre. Soumille conclut que les machines complexes gaspillent une partie des forces humaines et fournissent moins d'eau que leur poids ne le permettrait. Il se propose de démontrer en détail l'inutilité de telles machines si un modèle est proposé à l'avenir.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 168-184
Lettre de M. l'Abbé J*** à M. le Chevalier de B*** sur les pétrifications d'Albert.
Début :
Monsieur, je n'aurois jamais pensé à répondre aux remarques critiques [...]
Mots clefs :
Pétrifications, Pieds, Eau, Coquillages, Fougère, Hauteur, Profondeur, Cascade, Puits, Roseaux
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texteReconnaissance textuelle : Lettre de M. l'Abbé J*** à M. le Chevalier de B*** sur les pétrifications d'Albert.
Lettre de M. l'Abbé J *** à M. le Chevalier
de B *** fur les pétrifications d'Albert.
Onfieur , je n'aurois jamais penſé à
répondre aux remarques critiques
que le prétendu Obfervateur de Peronne a
fait inférer dans le Mercure de Juillet dernier
, fi vous n'aviez pas exigé de moi cette
preuve de complaifance. Je n'avois même
fait
DECEMBRE 1755. 169
fait jufqu'alors que me divertir avec mes
amis des découvertes qui rempliffent fa
lettre. Je croyois que le parti le plus raifonnable
étoit de voir d'un oeil indifférent
cer adverfaire , m'imaginant bien que le
public judicieux ne manqueroit pas , en
comparant la differtation avec la critique ,
de me rendre juſtice ; mais vous me confeillez
de répliquer , parce que vous craignez
dites - vous , Monfieur , que l'imputation
de faux , dont on m'accuſe , ne faſſe
impreffionfur ceux qui ne font pas en état de
faire la difference d'un obfervateur attentif ,
d'avec un critique auffi prévenu que peu
éclairé : Il eft , ajoutez - vous , des accufations
qu'il n'est pas permis à un Auteur de
négliger , telle qu'eft en particulier celle d'avoir
trahi la vérité.
,
Perfuadé de la jufteffe de cette réflexion
, je vais examiner , Monfieur , avec
la plus exacte recherche les remarques du
critique.
Reprenons , Monfieur , les fix articles.
de l'anonyme de Peronne .
1°. Il fe trompe , lorfqu'il avoue avec
moi , que l'eau du puits du fieur Decalogne
eft effectivement à trente- cing pieds jusqu'à
fon niveau . Je n'ai pas dit cela dans ma
defcription , puifque je me fuis fervi du
terme de déduction faite du niveau de l'ean
11. Vol.
H
170 MERCURE DE FRANCE.
à celui de la carriere. Si l'Anonyme avoit
mefuré exactement la hauteur du puits depuis
le rez-de- chauffée de la cour jufqu'au
niveau de l'eau , il auroit trouvé trentehuit
pieds , fur lefquels , pour avoir la
jufte profondeur de la carrière de pétrifications
, au niveau du commencement de
fon ouverture , il faut ôter fept pieds , ce
qui fait trente-un pieds pour la hauteur
de cette carriere du niveau de la cour , au
niveau de fon entrée ; mais comme de
l'entrée de la carriere de pétrifications jufque
vers le milieu , il y a une pente douce
qui peut avoir quatre pieds , qu'il faut
joindre avec les trente- un pieds déja ſuppofés
, j'ai eu raifon d'avancer dans ma
differtation , que la carriere de pétrifications
avoit environ 35 à 36 pieds de profondeur.
Ce qui a trompé l'Anonyme de
Peronne , ( ce qui trompe encore tous les
jours plufieurs de ceux que la curiofité ,
plutôt que l'amour de la recherche, conduit
à Albert ) c'eft qu'il a confondu la car
riere dans laquelle le propriétaire a commencé
à tirer de la pierre , laquelle carriere
n'a en effet à fon entrée que vingtquatre
pieds de profondeur , c'est - à - dire
quatorze , depuis le niveau de la cour jufques
dans la cave du propriétaire , & dix
du niveau de cette cave au niveau de la
DECEMBRE. 1755. 171
premiere carriere ; mais pour avoir la véritable
profondeur de la carriere dans laquelle
fe trouvent les pétrifications , il
falloit de plus mefurer l'efcalier de terre
qui conduit de la premiere carriere de
pierres jufques dans celle de pétrifications,
& il auroit trouvé qu'il y a fept pieds ; ce
qui , ajouté aux vingt- quatre déja connus,
donne trente-un pieds de profondeur : enfin
il falloit remarquer & ajouter à ces
trente-un pieds les quatre pieds de pente
que la carriere de pétrifications a depuis le
niveau du fol de fon entrée , jufques vers
fon milieu , ce qui , avec les trente- un
pieds , produit les trente - cinq pieds de
profondeur que j'ai affignés à la carriere
de pétrifications. Ce n'eft pas avec moins.
de raifon que j'ai ajouté dans ma differta-,
tion , que la partie de la pétrification qui
s'étend fous le jardin , eft bien plus profonde
, par rapport au niveau du jardin.
Si l'Anonyme de Peronne s'étoit donné la
peine de paffer dans ce jardin , & d'obferver
que pour y parvenir , il faut monter
un efcalier de pierre qui porte plus de dix
pieds au-deffus du niveau de la cour , &
que de plus le terrein du jardin va en montant
depuis fon entrée jufqu'au foffé qui
le borne à fon extrêmité , il ne fe feroit
pas embrouillé dans une prétendue dé-
Hij ,
172 MERCURE DE FRANCE.
monſtration inutile par rapport à la queftion
préfente , & parfaitement contraire
aux principes d'une bonne Phyfique. Je dis
d'abord inutile par rapport à la queſtion
préfente , puifque ne donnant que trentecinq
pieds de profondeur à la carriere de
pétrifications , dans fon niveau le plus bas ,
comparé avec la profondeur du niveau de
l'eau du puits au niveau de la cour , l'eau
du puits qui eft à trente- huit pieds de profondeur
, ne peut pas , dans mon obfervation
, pénétrer dans la carriere & la remplir
d'eau ; ce que l'Anonyme prétend cependant
devoir arriver dans mon fentiment.
Je dis en fecond lieu , que quand
bien même la carriere feroit plus profonde
que le niveau de l'eau du puits , il pourroit
encore fe faire que la carriere n'en fût pas
plus humide : Il ne faut qu'une couche de
glaife pour retenir l'eau : C'eft ce qu'on
remarque dans quelques maifons où les
caves font plus profondes que les puits qui
en font voilins . Je m'étonne même que
l'habitant d'une ville auffi environnée
d'eau , comme l'eft Peronne , n'ait pas remarqué
qu'il y a chez lui beaucoup de
caves , dont le niveau eft inférieur à celui
des étangs & des foffés remplis d'eau , qui
en font cependant très- proches . Enfin , fi
l'Anonyme avoit quelque connoiffance de
DECEMBRE. 1755. 173
l'origine des fontaines , & des miracles
naturels que les eaux ramaffées dans les
différens réfervoirs des montagnes , produifent
dans ces fontaines ( 1 ) minérales ,
qui , prenant leurs fources dans la même
montagne , & coulant par des canaux voifins
les uns des autres , confervent cependant
des qualités différentes , il n'auroit
pas raifonné fur un principe auffi faux en
bonne Phyfique , qu'éloigné du point de
la queftion préfente.
2º. On ne voit pas quel peut être le but de
l'Anonyme de Peronne. Qu'entend-il , lorfqu'il
dit , que les ponts qui font fur la riviere
d'Albert , n'ont pas , à vue d'oeil , plus de dix
piedsfous voute ? Parle- t'il de la hauteur du
milieu de l'arche des ponts au niveau de
l'eau , ou du niveau de l'eau au fond de la
riviere ? Au reste qu'il entende ce qu'il voudra
par cette phraſe inintelligible , quid ad
me? Que m'importe cette hauteur dont je
n'ai point parlé dans ma differtation, & qui
eft auffi étrangere à mon fyftême , que ce
( 1 ) Si l'Anonyme ne veut point aller faire cette
remarque à Forges , il lui fera facile de fatisfaire
fa curiofité à Corbie . Il verra dans cette ville
voifine de Peronne, trois fontaines minérales, différentes
dans leurs dégrés , conler cependant à
trois pieds de diſtance les unes des autres , fans fe
confondre.
· H iij
174 MERCURE DE FRANCE.
que l'Anonyme de Peronne ajoute, lorſqu'il
dit que la riviere eft pleine de fources ? Encore
une fois quel rapport ces deux obfervations
ont-elles avec ce que j'ai avancé
? Pourvu que depuis l'endroit où l'on
a commencé à couper les terres de la colline
pour bâtir la ville & le fort d'Albert
, on ait tracé un nouveau lit à la riviere
pour la faire couler en forme de canal
, autour de la nouvelle habitation , &
la faire paffer dans la ville. Que m'importe
qu'elle ait à vue d'oeil dix pieds fous voute
, & qu'ellefoit pleine de fources ? il fuffit
d'examiner le cours de cette riviere lorfqu'elle
paffe autour & dans Albert , & en
particulier à l'endroit où elle coule à côté
de la place , fous quelques -maifons , pour
fe perfuader qu'elle n'eft pas là dans fon
lit naturel , & qu'elle forme un canal factice
: Voilà où tend & où fe borne mon
obfervation fur cette riviere.
3°. La troifieme remarque de l'Anonyme
de Peronne n'eft pas moins inutile que la
feconde. En difant , que les terres de la pétrification
font de différentes nuances brunes
, mais qu'il eft vrai qu'elles blanchiſſent
à l'air , que prétend- it contre mon obfervation
? S'il avoit eu l'attention de remarquer
qu'il n'y a que la glaiſe qui blanchit
à l'air , en perdant une partie de cette hui-
1
DECEMBRE. 1755. 175
.
le graffe dont elle eft emprégnée , ce
qui n'arrive pas aux autres couches de terres
, ni aux pétrifications , il nous auroit
épargné une remarque auffi fauffe qu'inutile.
-
4°. Je placerois la quatrieme remarque
de l'Anonyme de Peronne dans le même
dégré d'inutilité que les deux précédentes
, fi elle ne m'avoit pas donné occafion
dans le dernier voyage que je viens de
faire à Albert , de chercher des coquillages
avec plus d'attention que la premiere
fois , & par là de faire une découverte
nouvelle . L'Anonyme de Peronne m'accufe
de paroître infinuer que les coquillages
qu'on trouve dans la carriere , font pétrifiés
, tandis qu'ils font au naturel : mais
où ai - je dit dans ma differtation que ces
coquillages font pétrifiés ? où ai - je infinué
cette affertion ? Au contraire , en envoyant
à quelques perfonnes diftinguées , & en
particulier à Monfieur le Duc de Chaulnes
, des morceaux de ces pétrifications ,
j'ai toujours fait remarquer que les coquillages
inférés dans les rofeaux & autres
herbes pétrifiées , étoient , ainfi
que ceux
que j'ai envoyés féparément , fans aucun
changement vifible . D'ailleurs , il n'y a
rien dans ma differtation qui puiffe faire
ſoupçonner que j'aie voulu infinuer que
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE
ces coquillages font pétrifiés. C'est dans
cet intervalle qui eft entre les rofeaux & la
glaife , ai - je dit , qu'on trouve certains coquillages
dont j'ai ramaffé de trois efpeces.
Les plus curieux font ceux qui s'élevent en
pyramides : on découvre auffi de ces coquil-
Lages entre les branches des rofeaux pétrifiés.
Voilà , Monfieur , les termes dont je me
fuis fervi. Je vous demande préfentement
fi un homme qui connoît la force de fa
langue , peut tirer de cet endroit , qui eft
le feul dans lequel je parle des coquillages,
que j'ai voulu infinuer qu'ils font pétrifiés
? J'ajouterai ici la nouvelle découverte
que j'ai faite de plufieurs coquillages
incruftés d'une matiere de pierre qui leur
eft intimement adhérent , fans cependant
pénétrer dans leurs pores . J'en ai rapporté
plufieurs , & entr'autres deux d'une grandeur
affez confidérable . A la vue de cette
découverte , je me fuis perfuadé que le
principe pétrifiant , qui a roulé & qui roule
encore ( comme je le dirai à la fin de
cette lettre ) dans cette carriere , ne s'eft
attaché qu'aux corps , dont les pores ont
été propres pour le recevoir , & que les
coquillages étant compofés d'une matiere
ferrée , ce principe n'a pu que s'attacher
autour d'eux fans les pénétrer .
5 °. L'Anonyme de Peronne regarde
DECEMBRE. 1755 177
fans doute la cinquieme remarque , comme
une des plus importantes de toutes
celles qu'il a faites fur ma differtation ,
parce qu'elle femble venger l'honneur
d'un Almanach qu'il paroît vouloir défendre
envers & contre tous. En difant dans
mes obfervations que c'étoit en vain que
j'avois cherché de la fougere pétrifiée dans
la carriere , d'Albert , j'ai rapporté les raifons
pour lefquelles je n'en ai pas même
dû trouver. L'Anonyme de Peronne ne dit
pas qu'il y en ait trouvé , ce qu'il falloit
cependant avancer pour foutenir l'honneur
de l'Almanach d'Amiens : c'eſt un fait fur
lequel il devoit prononcer hardiment , fi
réellement il a été plus heureux que moi
dans cette recherche. Mais au lieu de
finir la difpute par une affirmation , il fe
retranche fur des raifons de convenance
qui ne prouvent que mieux la foibleffe de
fa caufe. Il m'accufe de ne pas avoir bien
vifité les marais d'Albert , parce que , ditil
, fi je l'avois fait avec attention , j'y aurois
trouvé des fougeres. La raifon qu'il en apporte
, c'eft qu'il y a des arbres ,
fol eft fablonneux. En vérité peut-on raifonner
de la forte ? Parce que dans la partie
fupérieure d'un marais il pourra fe
trouver du fable & de la fougere ( ce qui
cependant n'eſt pas ordinaire , puifque les
ق ب
que
le
Hv
178 MERCURE DE FRANCE.
marais font toujours des terreins fangeux)
doit-il s'enfuivre qu'il y en ait aufli dans
la partie baile de ces mêmes marais , furtout
fi on y fuppofe un ruiffeau rempli
d'eau ? La preuve tirée des arbres qui fe
trouvent dans les marais d'Albert , pour
appuyer la poffibilité de la fougere dans
la carriere de pétrifications , n'eft - elle pas
encore auffi rifible que contraire à l'expérience
? Ne voit- on pas tous les jours dans
les marais & autour des prés , de l'ofier ,
des faules , des peupliers , & d'autres arbres
qui fe plaifent dans les terreins humides
, fans que pour cela on trouve de
la fougere dans ces mêmes marais & dans
ces mêmes prés ? Ce feroit perdre le tems
inutilement que de s'arrêter davantage à
répondre férieufement à une pareille remarque.
Il fuffit de la réduire à fa jufte
valeur , en difant d'après l'Anonyme de
Peronne , que partout où il y a des arbres ,
il doit y avoir de la J fougere , pour en fentir
tout le faux & tout le ridicule.
Quelques magnifiques morceaux de pétrifications
que j'ai choifis dans le corps
de la carriere , furtout dans l'endroit où
l'on m'a affuré que les obfervateurs cités
dans l'almanach d'Amiens , & quelques
autres curieux , ont depuis vifité la carriere
, me convainquent de plus en plus
DECEMBRE. 1755. 179
que ce qu'ils ont pris pour de la fougere ,
n'eft que de l'argentine : la grandeur ,
l'arrangement & la forme des feuilles fautent
manifeftement aux yeux. Tous ceux
qui m'ont honoré de leur vifite depuis
mon retour d'Albert , ont reconnu cette
vérité . J'ai cependant trouvé un connoiffeur
, qui d'abord ne vouloit reconnoître ,
dans ces différens grouppes de pétrifications
, ni argentine , ni fougere , ni aucune
autre herbe pétrifiée. Il les regardoit
comme une pure ftalagmite fi connue dans
la lithologie , mais fes doutes fe font bientôt
diffipés , lorfque je lui ai fait remarquer
à la bafe de chaque morceau les trous
des fibres qui fe confervent vuides dans
toutes les plantes pétrifiées , ce qui les diftingue
de la pure ftalagmite. Enfin , Monfieur
, je me fuis encore appliqué de bonne
foi , pendant l'efpace de plufieurs heures ,
à chercher de la fougere pétrifiée , fans
avoir été plus heureux qu'à mon premier
voyage. Après un fcrupuleux examen fait
en préfence de plufieurs témoins refpectables
, puis-je ne pas refter dans mon in
crédulité fur la fougere pétrifiée , juſqu'à
ce que quelqu'un de ceux qui ont eu le
bonheur d'en trouver , me faffe la grace
de m'en montrer ? A ce prix je fuis prêt à
tout croire.
H vj
1So MERCURE DE FRANCE.
6º. La derniere remarque de l'Anonyme
de Peronne regarde la hauteur de la
calcade d'Albert. J'ai donné dans ma differtation
environ foixante pieds à cette magnifique
cafcade : C'eft fur cette meſure
que l'Anonyme s'écrie , qu'il faut fçavoir
exagérer pour lui donner cette hauteur , &
me confeille de retourner fur les lieux , la
toife à la main, pour donner des dimenfions
juftes. Comme il eft probable qu'il a fait
ce voyage , au lieu de cette exclamation
qui ne dit rien , il lui étoit facile , en donnant
la juſte mefure de la caſcade , de détromper
le public qu'il fuppofe que j'ai
abufe : car ou l'Anonyme a mefuré la cafcade,
ou il ne l'a pas mefurée. S'il s'eft contenté
de la toifer à vue d'oeil , comme il
avoue lui-même avoir mefuré les ponts qui
font fur la riviere d'Albert , il n'a pas droit
d'attaquer la meſure que j'ai donnée à cette
cafcade. Si au contraire il a mefuré
exactement la cafcade , il y a dû trouver
cinquante-fept pieds de hauteur perpendiculaire.
Il a donc compris qu'il manqueroit
l'occafion de me badiner , & de me
donner l'avis de retourner à Albert , s'il
affignoit la véritable mefure de la cafcade.
Malgré le peu d'exactitude vifible de l'Anonyme
de Peronne , j'ai fuivi fon confeil.
J'ai retourné fur les lieux , & dans la
1
DECEMBRE . 1755 181
crainte de m'être trompé la premiere fois
j'ai mefuré la caſcade : j'y ai trouvé cinquante-
fept pieds de hauteur perpendiculaire
du niveau du bord fupérieur au niveau
de l'eau d'enbas , & foixante- fept
pieds en fuivant la pente. Cette double.
mefure eft conforme à celle de M. de la
Combe ( 1 ) , qui a eu occafion de faire travailler
plufieurs fois à cette cafcade.
Jugez à préfent , Monfieur , de quel
côté eft l'erreur , & à qui doit s'appliquer
à plus jufte titre le reproche que l'Anonyme
de Peronne m'a adreffé au commencement
de fa lettre. Qu'il me foit permis de
rétorquer contre lui - même l'argument
qu'il m'a fi injuſtement adreffé. De quelque
façon qu'on enrichiſſe la République des Lettres
( ne fût - ce que par de petites remarques
) il faut être vrai ; & c'est ce qui manque
à un Auteur qui , animé de la feule
envie de contredire , donne au public des
obfervations dont les unes font abfolument
fauffes , & les autres auffi inutiles
que ridicules. En effet , quand bien même
celles de fes remarques qui paroiffent les
moins étrangeres à la caufe des pétrifications
, feroient vraies , que s'enfuivroit-il
contre le fyftême que j'ai établi , & fur la
(1 ) Prevôt Général de la Maréchauffée de Pi
cardic.
182 MERCURE DE FRANCE.
caufe & fur l'origine de ce phénomene naturel
? En fuppofant , par exemple , avec
l'Anonyme de Peronne , que la carriere
de pétrifications ne feroit qu'à vingt - deux
pieds de profondeur , & que la cafcade
n'auroit pas cinquante- fept pieds de hau
teur perpendiculaire , que conclure contre
mon fentiment ? Au contraire , n'est - il pas
vifible que moins la carriere auroit de
profondeur & la cafcade de hauteur , plus
mon opinion devient foutenable , puifque
dèflors le remuement des terres fur lefquelles
elle eft appuyée, a dû être moins confidérable
? Mais il falloit à l'Anonyme de
Peronne une connoiffance plus étendue de
la Phyfique pour fentir cette vérité.
Jufqu'à préfent mon fyftême refte donc,
Monfieur , dans fon entier. Ce n'eft pas
au reste que j'aie envie de le foutenir avec
cette opiniâtreté que le préjugé feul peut
donner , & que nouveau Pancrace , je fois
difpofé à le défendre ( 1 ) pugnis & calcibus ,
unguibus & roftro Non , Monfieur , mais
jufqu'à ce qu'on me donne des remarques
plus certaines & plus conféquentes que
celles de l'Anonyme de Peronne , je ne
crois pas devoir en changer. Au refte , fi
l'envie de contredire le prend dorénavant ,
(1 ) Le Mariage forcé.
DECEMBR E. 1755 183
il aura beau jeu ; je le laifferai parler ſeul .
Les ouvrages polémiques ne font agréables
qu'à ceux qui ne fçavent pas s'occuper plus
utilement . Il me fuffit d'avoir montré que
c'est à tort que l'Anonyme de Peronne
m'accufe de faux.
Je ne nierai pas cependant qu'outre
la découverte des coquillages incrultés , je
ne fois redevable à l'Anonyme d'une nouvelle
obſervation , puifque fans lui je neferois
pas retourné fur les lieux. Vers le
milieu de la carriere , fur la droite en allant
, je fentis , environ à la hauteur de
deux pieds & demi de terre , quelque cho
fe d'humide & de mol . Ayant approché
ma lumiere de cet endroit , j'y apperçus
une cavité , de laquelle j'ai retiré quelques
morceaux de rofeaux qui étoient encore
dans un état actuel de pétrification : Ces
morceaux reffembloient à une pâte trèsmolle
. Ceux que j'ai apportés à l'air , fe
font un peu affermis , mais pas affez cependant
pour être tranfportables . Ce qui
m'avoit paru mol & humide au bord de la
tranchée , n'étoit qu'un petit banc de glaife
, fur laquelle il y avoit encore un peu
d'eau qui couloit des morceaux de rofeaux
qui fe pétrifioient. Cette derniere décou
verte m'a confirmé dans l'opinion dans
laquelle j'étois déja , que le principe pé184
MERCURE DE FRANCE .
trifiant réfide encore actuellement dans
cette carriere : Ainfi , Monfieur , je penſe
que les morceaux de bois , de rofeaux , &
que d'autres corps dont les pores fe trouveront
analogues aux corpufcules pierreux
qui roulent dans ce fouterrein , pourront
réellement fe pétrifier , pourvu qu'on ait
foin de les mettre immédiatement au - deffus
de la glaife.
J'ai l'honneur d'être , &c.
A Amiens , ce 28 Août 1755.
de B *** fur les pétrifications d'Albert.
Onfieur , je n'aurois jamais penſé à
répondre aux remarques critiques
que le prétendu Obfervateur de Peronne a
fait inférer dans le Mercure de Juillet dernier
, fi vous n'aviez pas exigé de moi cette
preuve de complaifance. Je n'avois même
fait
DECEMBRE 1755. 169
fait jufqu'alors que me divertir avec mes
amis des découvertes qui rempliffent fa
lettre. Je croyois que le parti le plus raifonnable
étoit de voir d'un oeil indifférent
cer adverfaire , m'imaginant bien que le
public judicieux ne manqueroit pas , en
comparant la differtation avec la critique ,
de me rendre juſtice ; mais vous me confeillez
de répliquer , parce que vous craignez
dites - vous , Monfieur , que l'imputation
de faux , dont on m'accuſe , ne faſſe
impreffionfur ceux qui ne font pas en état de
faire la difference d'un obfervateur attentif ,
d'avec un critique auffi prévenu que peu
éclairé : Il eft , ajoutez - vous , des accufations
qu'il n'est pas permis à un Auteur de
négliger , telle qu'eft en particulier celle d'avoir
trahi la vérité.
,
Perfuadé de la jufteffe de cette réflexion
, je vais examiner , Monfieur , avec
la plus exacte recherche les remarques du
critique.
Reprenons , Monfieur , les fix articles.
de l'anonyme de Peronne .
1°. Il fe trompe , lorfqu'il avoue avec
moi , que l'eau du puits du fieur Decalogne
eft effectivement à trente- cing pieds jusqu'à
fon niveau . Je n'ai pas dit cela dans ma
defcription , puifque je me fuis fervi du
terme de déduction faite du niveau de l'ean
11. Vol.
H
170 MERCURE DE FRANCE.
à celui de la carriere. Si l'Anonyme avoit
mefuré exactement la hauteur du puits depuis
le rez-de- chauffée de la cour jufqu'au
niveau de l'eau , il auroit trouvé trentehuit
pieds , fur lefquels , pour avoir la
jufte profondeur de la carrière de pétrifications
, au niveau du commencement de
fon ouverture , il faut ôter fept pieds , ce
qui fait trente-un pieds pour la hauteur
de cette carriere du niveau de la cour , au
niveau de fon entrée ; mais comme de
l'entrée de la carriere de pétrifications jufque
vers le milieu , il y a une pente douce
qui peut avoir quatre pieds , qu'il faut
joindre avec les trente- un pieds déja ſuppofés
, j'ai eu raifon d'avancer dans ma
differtation , que la carriere de pétrifications
avoit environ 35 à 36 pieds de profondeur.
Ce qui a trompé l'Anonyme de
Peronne , ( ce qui trompe encore tous les
jours plufieurs de ceux que la curiofité ,
plutôt que l'amour de la recherche, conduit
à Albert ) c'eft qu'il a confondu la car
riere dans laquelle le propriétaire a commencé
à tirer de la pierre , laquelle carriere
n'a en effet à fon entrée que vingtquatre
pieds de profondeur , c'est - à - dire
quatorze , depuis le niveau de la cour jufques
dans la cave du propriétaire , & dix
du niveau de cette cave au niveau de la
DECEMBRE. 1755. 171
premiere carriere ; mais pour avoir la véritable
profondeur de la carriere dans laquelle
fe trouvent les pétrifications , il
falloit de plus mefurer l'efcalier de terre
qui conduit de la premiere carriere de
pierres jufques dans celle de pétrifications,
& il auroit trouvé qu'il y a fept pieds ; ce
qui , ajouté aux vingt- quatre déja connus,
donne trente-un pieds de profondeur : enfin
il falloit remarquer & ajouter à ces
trente-un pieds les quatre pieds de pente
que la carriere de pétrifications a depuis le
niveau du fol de fon entrée , jufques vers
fon milieu , ce qui , avec les trente- un
pieds , produit les trente - cinq pieds de
profondeur que j'ai affignés à la carriere
de pétrifications. Ce n'eft pas avec moins.
de raifon que j'ai ajouté dans ma differta-,
tion , que la partie de la pétrification qui
s'étend fous le jardin , eft bien plus profonde
, par rapport au niveau du jardin.
Si l'Anonyme de Peronne s'étoit donné la
peine de paffer dans ce jardin , & d'obferver
que pour y parvenir , il faut monter
un efcalier de pierre qui porte plus de dix
pieds au-deffus du niveau de la cour , &
que de plus le terrein du jardin va en montant
depuis fon entrée jufqu'au foffé qui
le borne à fon extrêmité , il ne fe feroit
pas embrouillé dans une prétendue dé-
Hij ,
172 MERCURE DE FRANCE.
monſtration inutile par rapport à la queftion
préfente , & parfaitement contraire
aux principes d'une bonne Phyfique. Je dis
d'abord inutile par rapport à la queſtion
préfente , puifque ne donnant que trentecinq
pieds de profondeur à la carriere de
pétrifications , dans fon niveau le plus bas ,
comparé avec la profondeur du niveau de
l'eau du puits au niveau de la cour , l'eau
du puits qui eft à trente- huit pieds de profondeur
, ne peut pas , dans mon obfervation
, pénétrer dans la carriere & la remplir
d'eau ; ce que l'Anonyme prétend cependant
devoir arriver dans mon fentiment.
Je dis en fecond lieu , que quand
bien même la carriere feroit plus profonde
que le niveau de l'eau du puits , il pourroit
encore fe faire que la carriere n'en fût pas
plus humide : Il ne faut qu'une couche de
glaife pour retenir l'eau : C'eft ce qu'on
remarque dans quelques maifons où les
caves font plus profondes que les puits qui
en font voilins . Je m'étonne même que
l'habitant d'une ville auffi environnée
d'eau , comme l'eft Peronne , n'ait pas remarqué
qu'il y a chez lui beaucoup de
caves , dont le niveau eft inférieur à celui
des étangs & des foffés remplis d'eau , qui
en font cependant très- proches . Enfin , fi
l'Anonyme avoit quelque connoiffance de
DECEMBRE. 1755. 173
l'origine des fontaines , & des miracles
naturels que les eaux ramaffées dans les
différens réfervoirs des montagnes , produifent
dans ces fontaines ( 1 ) minérales ,
qui , prenant leurs fources dans la même
montagne , & coulant par des canaux voifins
les uns des autres , confervent cependant
des qualités différentes , il n'auroit
pas raifonné fur un principe auffi faux en
bonne Phyfique , qu'éloigné du point de
la queftion préfente.
2º. On ne voit pas quel peut être le but de
l'Anonyme de Peronne. Qu'entend-il , lorfqu'il
dit , que les ponts qui font fur la riviere
d'Albert , n'ont pas , à vue d'oeil , plus de dix
piedsfous voute ? Parle- t'il de la hauteur du
milieu de l'arche des ponts au niveau de
l'eau , ou du niveau de l'eau au fond de la
riviere ? Au reste qu'il entende ce qu'il voudra
par cette phraſe inintelligible , quid ad
me? Que m'importe cette hauteur dont je
n'ai point parlé dans ma differtation, & qui
eft auffi étrangere à mon fyftême , que ce
( 1 ) Si l'Anonyme ne veut point aller faire cette
remarque à Forges , il lui fera facile de fatisfaire
fa curiofité à Corbie . Il verra dans cette ville
voifine de Peronne, trois fontaines minérales, différentes
dans leurs dégrés , conler cependant à
trois pieds de diſtance les unes des autres , fans fe
confondre.
· H iij
174 MERCURE DE FRANCE.
que l'Anonyme de Peronne ajoute, lorſqu'il
dit que la riviere eft pleine de fources ? Encore
une fois quel rapport ces deux obfervations
ont-elles avec ce que j'ai avancé
? Pourvu que depuis l'endroit où l'on
a commencé à couper les terres de la colline
pour bâtir la ville & le fort d'Albert
, on ait tracé un nouveau lit à la riviere
pour la faire couler en forme de canal
, autour de la nouvelle habitation , &
la faire paffer dans la ville. Que m'importe
qu'elle ait à vue d'oeil dix pieds fous voute
, & qu'ellefoit pleine de fources ? il fuffit
d'examiner le cours de cette riviere lorfqu'elle
paffe autour & dans Albert , & en
particulier à l'endroit où elle coule à côté
de la place , fous quelques -maifons , pour
fe perfuader qu'elle n'eft pas là dans fon
lit naturel , & qu'elle forme un canal factice
: Voilà où tend & où fe borne mon
obfervation fur cette riviere.
3°. La troifieme remarque de l'Anonyme
de Peronne n'eft pas moins inutile que la
feconde. En difant , que les terres de la pétrification
font de différentes nuances brunes
, mais qu'il eft vrai qu'elles blanchiſſent
à l'air , que prétend- it contre mon obfervation
? S'il avoit eu l'attention de remarquer
qu'il n'y a que la glaiſe qui blanchit
à l'air , en perdant une partie de cette hui-
1
DECEMBRE. 1755. 175
.
le graffe dont elle eft emprégnée , ce
qui n'arrive pas aux autres couches de terres
, ni aux pétrifications , il nous auroit
épargné une remarque auffi fauffe qu'inutile.
-
4°. Je placerois la quatrieme remarque
de l'Anonyme de Peronne dans le même
dégré d'inutilité que les deux précédentes
, fi elle ne m'avoit pas donné occafion
dans le dernier voyage que je viens de
faire à Albert , de chercher des coquillages
avec plus d'attention que la premiere
fois , & par là de faire une découverte
nouvelle . L'Anonyme de Peronne m'accufe
de paroître infinuer que les coquillages
qu'on trouve dans la carriere , font pétrifiés
, tandis qu'ils font au naturel : mais
où ai - je dit dans ma differtation que ces
coquillages font pétrifiés ? où ai - je infinué
cette affertion ? Au contraire , en envoyant
à quelques perfonnes diftinguées , & en
particulier à Monfieur le Duc de Chaulnes
, des morceaux de ces pétrifications ,
j'ai toujours fait remarquer que les coquillages
inférés dans les rofeaux & autres
herbes pétrifiées , étoient , ainfi
que ceux
que j'ai envoyés féparément , fans aucun
changement vifible . D'ailleurs , il n'y a
rien dans ma differtation qui puiffe faire
ſoupçonner que j'aie voulu infinuer que
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE
ces coquillages font pétrifiés. C'est dans
cet intervalle qui eft entre les rofeaux & la
glaife , ai - je dit , qu'on trouve certains coquillages
dont j'ai ramaffé de trois efpeces.
Les plus curieux font ceux qui s'élevent en
pyramides : on découvre auffi de ces coquil-
Lages entre les branches des rofeaux pétrifiés.
Voilà , Monfieur , les termes dont je me
fuis fervi. Je vous demande préfentement
fi un homme qui connoît la force de fa
langue , peut tirer de cet endroit , qui eft
le feul dans lequel je parle des coquillages,
que j'ai voulu infinuer qu'ils font pétrifiés
? J'ajouterai ici la nouvelle découverte
que j'ai faite de plufieurs coquillages
incruftés d'une matiere de pierre qui leur
eft intimement adhérent , fans cependant
pénétrer dans leurs pores . J'en ai rapporté
plufieurs , & entr'autres deux d'une grandeur
affez confidérable . A la vue de cette
découverte , je me fuis perfuadé que le
principe pétrifiant , qui a roulé & qui roule
encore ( comme je le dirai à la fin de
cette lettre ) dans cette carriere , ne s'eft
attaché qu'aux corps , dont les pores ont
été propres pour le recevoir , & que les
coquillages étant compofés d'une matiere
ferrée , ce principe n'a pu que s'attacher
autour d'eux fans les pénétrer .
5 °. L'Anonyme de Peronne regarde
DECEMBRE. 1755 177
fans doute la cinquieme remarque , comme
une des plus importantes de toutes
celles qu'il a faites fur ma differtation ,
parce qu'elle femble venger l'honneur
d'un Almanach qu'il paroît vouloir défendre
envers & contre tous. En difant dans
mes obfervations que c'étoit en vain que
j'avois cherché de la fougere pétrifiée dans
la carriere , d'Albert , j'ai rapporté les raifons
pour lefquelles je n'en ai pas même
dû trouver. L'Anonyme de Peronne ne dit
pas qu'il y en ait trouvé , ce qu'il falloit
cependant avancer pour foutenir l'honneur
de l'Almanach d'Amiens : c'eſt un fait fur
lequel il devoit prononcer hardiment , fi
réellement il a été plus heureux que moi
dans cette recherche. Mais au lieu de
finir la difpute par une affirmation , il fe
retranche fur des raifons de convenance
qui ne prouvent que mieux la foibleffe de
fa caufe. Il m'accufe de ne pas avoir bien
vifité les marais d'Albert , parce que , ditil
, fi je l'avois fait avec attention , j'y aurois
trouvé des fougeres. La raifon qu'il en apporte
, c'eft qu'il y a des arbres ,
fol eft fablonneux. En vérité peut-on raifonner
de la forte ? Parce que dans la partie
fupérieure d'un marais il pourra fe
trouver du fable & de la fougere ( ce qui
cependant n'eſt pas ordinaire , puifque les
ق ب
que
le
Hv
178 MERCURE DE FRANCE.
marais font toujours des terreins fangeux)
doit-il s'enfuivre qu'il y en ait aufli dans
la partie baile de ces mêmes marais , furtout
fi on y fuppofe un ruiffeau rempli
d'eau ? La preuve tirée des arbres qui fe
trouvent dans les marais d'Albert , pour
appuyer la poffibilité de la fougere dans
la carriere de pétrifications , n'eft - elle pas
encore auffi rifible que contraire à l'expérience
? Ne voit- on pas tous les jours dans
les marais & autour des prés , de l'ofier ,
des faules , des peupliers , & d'autres arbres
qui fe plaifent dans les terreins humides
, fans que pour cela on trouve de
la fougere dans ces mêmes marais & dans
ces mêmes prés ? Ce feroit perdre le tems
inutilement que de s'arrêter davantage à
répondre férieufement à une pareille remarque.
Il fuffit de la réduire à fa jufte
valeur , en difant d'après l'Anonyme de
Peronne , que partout où il y a des arbres ,
il doit y avoir de la J fougere , pour en fentir
tout le faux & tout le ridicule.
Quelques magnifiques morceaux de pétrifications
que j'ai choifis dans le corps
de la carriere , furtout dans l'endroit où
l'on m'a affuré que les obfervateurs cités
dans l'almanach d'Amiens , & quelques
autres curieux , ont depuis vifité la carriere
, me convainquent de plus en plus
DECEMBRE. 1755. 179
que ce qu'ils ont pris pour de la fougere ,
n'eft que de l'argentine : la grandeur ,
l'arrangement & la forme des feuilles fautent
manifeftement aux yeux. Tous ceux
qui m'ont honoré de leur vifite depuis
mon retour d'Albert , ont reconnu cette
vérité . J'ai cependant trouvé un connoiffeur
, qui d'abord ne vouloit reconnoître ,
dans ces différens grouppes de pétrifications
, ni argentine , ni fougere , ni aucune
autre herbe pétrifiée. Il les regardoit
comme une pure ftalagmite fi connue dans
la lithologie , mais fes doutes fe font bientôt
diffipés , lorfque je lui ai fait remarquer
à la bafe de chaque morceau les trous
des fibres qui fe confervent vuides dans
toutes les plantes pétrifiées , ce qui les diftingue
de la pure ftalagmite. Enfin , Monfieur
, je me fuis encore appliqué de bonne
foi , pendant l'efpace de plufieurs heures ,
à chercher de la fougere pétrifiée , fans
avoir été plus heureux qu'à mon premier
voyage. Après un fcrupuleux examen fait
en préfence de plufieurs témoins refpectables
, puis-je ne pas refter dans mon in
crédulité fur la fougere pétrifiée , juſqu'à
ce que quelqu'un de ceux qui ont eu le
bonheur d'en trouver , me faffe la grace
de m'en montrer ? A ce prix je fuis prêt à
tout croire.
H vj
1So MERCURE DE FRANCE.
6º. La derniere remarque de l'Anonyme
de Peronne regarde la hauteur de la
calcade d'Albert. J'ai donné dans ma differtation
environ foixante pieds à cette magnifique
cafcade : C'eft fur cette meſure
que l'Anonyme s'écrie , qu'il faut fçavoir
exagérer pour lui donner cette hauteur , &
me confeille de retourner fur les lieux , la
toife à la main, pour donner des dimenfions
juftes. Comme il eft probable qu'il a fait
ce voyage , au lieu de cette exclamation
qui ne dit rien , il lui étoit facile , en donnant
la juſte mefure de la caſcade , de détromper
le public qu'il fuppofe que j'ai
abufe : car ou l'Anonyme a mefuré la cafcade,
ou il ne l'a pas mefurée. S'il s'eft contenté
de la toifer à vue d'oeil , comme il
avoue lui-même avoir mefuré les ponts qui
font fur la riviere d'Albert , il n'a pas droit
d'attaquer la meſure que j'ai donnée à cette
cafcade. Si au contraire il a mefuré
exactement la cafcade , il y a dû trouver
cinquante-fept pieds de hauteur perpendiculaire.
Il a donc compris qu'il manqueroit
l'occafion de me badiner , & de me
donner l'avis de retourner à Albert , s'il
affignoit la véritable mefure de la cafcade.
Malgré le peu d'exactitude vifible de l'Anonyme
de Peronne , j'ai fuivi fon confeil.
J'ai retourné fur les lieux , & dans la
1
DECEMBRE . 1755 181
crainte de m'être trompé la premiere fois
j'ai mefuré la caſcade : j'y ai trouvé cinquante-
fept pieds de hauteur perpendiculaire
du niveau du bord fupérieur au niveau
de l'eau d'enbas , & foixante- fept
pieds en fuivant la pente. Cette double.
mefure eft conforme à celle de M. de la
Combe ( 1 ) , qui a eu occafion de faire travailler
plufieurs fois à cette cafcade.
Jugez à préfent , Monfieur , de quel
côté eft l'erreur , & à qui doit s'appliquer
à plus jufte titre le reproche que l'Anonyme
de Peronne m'a adreffé au commencement
de fa lettre. Qu'il me foit permis de
rétorquer contre lui - même l'argument
qu'il m'a fi injuſtement adreffé. De quelque
façon qu'on enrichiſſe la République des Lettres
( ne fût - ce que par de petites remarques
) il faut être vrai ; & c'est ce qui manque
à un Auteur qui , animé de la feule
envie de contredire , donne au public des
obfervations dont les unes font abfolument
fauffes , & les autres auffi inutiles
que ridicules. En effet , quand bien même
celles de fes remarques qui paroiffent les
moins étrangeres à la caufe des pétrifications
, feroient vraies , que s'enfuivroit-il
contre le fyftême que j'ai établi , & fur la
(1 ) Prevôt Général de la Maréchauffée de Pi
cardic.
182 MERCURE DE FRANCE.
caufe & fur l'origine de ce phénomene naturel
? En fuppofant , par exemple , avec
l'Anonyme de Peronne , que la carriere
de pétrifications ne feroit qu'à vingt - deux
pieds de profondeur , & que la cafcade
n'auroit pas cinquante- fept pieds de hau
teur perpendiculaire , que conclure contre
mon fentiment ? Au contraire , n'est - il pas
vifible que moins la carriere auroit de
profondeur & la cafcade de hauteur , plus
mon opinion devient foutenable , puifque
dèflors le remuement des terres fur lefquelles
elle eft appuyée, a dû être moins confidérable
? Mais il falloit à l'Anonyme de
Peronne une connoiffance plus étendue de
la Phyfique pour fentir cette vérité.
Jufqu'à préfent mon fyftême refte donc,
Monfieur , dans fon entier. Ce n'eft pas
au reste que j'aie envie de le foutenir avec
cette opiniâtreté que le préjugé feul peut
donner , & que nouveau Pancrace , je fois
difpofé à le défendre ( 1 ) pugnis & calcibus ,
unguibus & roftro Non , Monfieur , mais
jufqu'à ce qu'on me donne des remarques
plus certaines & plus conféquentes que
celles de l'Anonyme de Peronne , je ne
crois pas devoir en changer. Au refte , fi
l'envie de contredire le prend dorénavant ,
(1 ) Le Mariage forcé.
DECEMBR E. 1755 183
il aura beau jeu ; je le laifferai parler ſeul .
Les ouvrages polémiques ne font agréables
qu'à ceux qui ne fçavent pas s'occuper plus
utilement . Il me fuffit d'avoir montré que
c'est à tort que l'Anonyme de Peronne
m'accufe de faux.
Je ne nierai pas cependant qu'outre
la découverte des coquillages incrultés , je
ne fois redevable à l'Anonyme d'une nouvelle
obſervation , puifque fans lui je neferois
pas retourné fur les lieux. Vers le
milieu de la carriere , fur la droite en allant
, je fentis , environ à la hauteur de
deux pieds & demi de terre , quelque cho
fe d'humide & de mol . Ayant approché
ma lumiere de cet endroit , j'y apperçus
une cavité , de laquelle j'ai retiré quelques
morceaux de rofeaux qui étoient encore
dans un état actuel de pétrification : Ces
morceaux reffembloient à une pâte trèsmolle
. Ceux que j'ai apportés à l'air , fe
font un peu affermis , mais pas affez cependant
pour être tranfportables . Ce qui
m'avoit paru mol & humide au bord de la
tranchée , n'étoit qu'un petit banc de glaife
, fur laquelle il y avoit encore un peu
d'eau qui couloit des morceaux de rofeaux
qui fe pétrifioient. Cette derniere décou
verte m'a confirmé dans l'opinion dans
laquelle j'étois déja , que le principe pé184
MERCURE DE FRANCE .
trifiant réfide encore actuellement dans
cette carriere : Ainfi , Monfieur , je penſe
que les morceaux de bois , de rofeaux , &
que d'autres corps dont les pores fe trouveront
analogues aux corpufcules pierreux
qui roulent dans ce fouterrein , pourront
réellement fe pétrifier , pourvu qu'on ait
foin de les mettre immédiatement au - deffus
de la glaife.
J'ai l'honneur d'être , &c.
A Amiens , ce 28 Août 1755.
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Résumé : Lettre de M. l'Abbé J*** à M. le Chevalier de B*** sur les pétrifications d'Albert.
L'Abbé J*** répond à des critiques formulées par un anonyme de Peronne concernant ses observations sur les pétrifications d'Albert. Il explique qu'il n'avait pas initialement l'intention de répliquer, mais il le fait à la demande du Chevalier de B***. L'Abbé conteste les accusations de faux et de trahison de la vérité, affirmant que le public judicieux saura lui rendre justice. L'Abbé examine les remarques de l'anonyme point par point. Premièrement, il corrige les erreurs de mesure de la profondeur de la carrière de pétrifications, expliquant que l'anonyme a confondu plusieurs carrières et n'a pas pris en compte la pente et les escaliers. Deuxièmement, il ignore les observations sur la hauteur des ponts et le cours de la rivière, car elles sont sans rapport avec ses observations. Troisièmement, il note que les différentes nuances des terres de pétrification ne contredisent pas ses observations. Quatrièmement, il clarifie qu'il n'a jamais affirmé que les coquillages trouvés dans la carrière étaient pétrifiés, mais qu'ils sont naturels. Cinquièmement, il réfute l'accusation de ne pas avoir bien visité les marais d'Albert pour y trouver de la fougère pétrifiée, jugeant la remarque ridicule et sans fondement. Le texte relate une discussion scientifique concernant des observations faites dans une carrière et une cascade à Albert. L'auteur affirme que ce qui a été pris pour de la fougère pétrifiée est en réalité de l'argentine, une conclusion soutenue par plusieurs visiteurs et un examen minutieux des feuilles. Un connaisseur a d'abord douté, mais ses doutes ont été dissipés par la présence de trous de fibres dans les pétrifications, distinguant ainsi l'argentine de la stalagmite. L'auteur mentionne également une controverse sur la hauteur de la cascade d'Albert. Il avait initialement mesuré environ soixante pieds, mais un anonyme de Peronne a contesté cette mesure. L'auteur a donc refait les mesures, trouvant cinquante-sept pieds de hauteur perpendiculaire et soixante-sept pieds en suivant la pente, confirmant ainsi ses précédentes observations. L'auteur rejette les critiques de l'anonyme, soulignant que ses remarques sont souvent fausses ou inutiles. Il note que, même si certaines observations de l'anonyme sont correctes, elles ne remettent pas en cause son système sur les pétrifications. Il mentionne également une découverte de roseliers en cours de pétrification, confirmant la présence d'un principe pétrifiant actif dans la carrière. L'auteur conclut en exprimant sa disponibilité à changer d'avis face à des remarques plus certaines et conséquentes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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