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p. 1653-1668
SECONDE LETTRE de M. Capperon sur la Méthode d'observer les Sels qui se trouvent dans les Terres, dans les Plantes, dans les Humeurs, &c.
Début :
MONSIEUR, Vous sçavez mieux que moi, qu'il y a long-tems qu'on cherche un moyen de [...]
Mots clefs :
Sels, Mixtes, Hippocrate, Analyse chimique, Académie royale des sciences de Paris, Sel volatile, Distillation, Terre glaise, Puits, Blanchisseurs
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texteReconnaissance textuelle : SECONDE LETTRE de M. Capperon sur la Méthode d'observer les Sels qui se trouvent dans les Terres, dans les Plantes, dans les Humeurs, &c.
SECONDE LETTRE de M. Capperon
sur la Méthode d'observer les Sels qui
se trouvent dans les Terres , dans les
Plantes , dans les Humeurs , &c.
MONSIEUR ,
Vous sçavez mieux que moi , qu'il y a
long- tems qu'on cherche un moyen de
connoître la qualité des Mixtes , pour ju
ger des effets qu'ils doivent naturellement
operer. Comme on étoit d'abord persuadé
que les Mixtes
n'opéroient
que parce
qu'on
appelloit
leurs qualitez
; sçavoir
, le
chaud
, le sec , le froid
, et l'humide
; on
B iij
1574 MERCURE DE FRANCE
crut avoir fait beaucoup , que d'assigner à
chaque Mixte , jusqu'à quel degré il étoit
chaud , sec , froid , ou humide ; ce dont
on jugeoit par les effets qu'on lui voyoit
produire , et par- là on se flatoit d'avoir
un moyen suffisant pour connoître le
bien ou le mal que ces Mixtes pouvoient
faire.
Quoique cette Méthode fut en usage
avant le tems d'Hypocrate , et qu'elle l'ait
été presque jusqu'à nos jours : * cet habile
Homme reconnut néanmoins , qu'on ne
pouvoit pas aller loin avec cette Découverte.
Il crut qu'il pouvoit y mieux réüssir
, en enseignant que les Mixtes n'opéroient
qu'entant qu'ils contenoient quelque
chose de plus ou moins amer , ou salé,
ou doux , ou âpre , ou acerbe , ou adoucissant
, ** &c.En quoi , sans doute , il
pensoit plus juste que ceux qui l'avoient
précedé , mais après tout , ce n'étoit connoître
la nature des Mixtes que par leurs
seuls effets , même par leurs effets senfibles
; par consequent il falloit les avoir
souvent éprouvez , avant que d'en fixer
les qualitez.
Enfin la Chymie étant devenue com-
* On la peut voir bien marquée dans Matthi
Comment. sur Dioscoride.
** Lib. de prisca Medicina.
mune
JUILLET.
1731. 1575
mune , on a crû avoir trouvé le moyen
infaillible pour découvrir primitivement
ce que chaque Mixte devoit naturellement
opérer , parce que ceux qui cultivoient
cet art , prétendant avoir une Méthode
assurée pour décomposer les Mixtes par
le moyen du feu , séparer les Principes
dont ils étoient composez , pour les voir
ensuite à leur aise séparément , et connoître
leurs opérations, ils n'ont nullement
douté , qu'à proportion que quelques- uns
de ces principes se trouveroient dominer
plus ou moins dans les Mixtes , leurs Effets
devoient se diversifier differemment :
c'est ce qui a même donné lieu à l'Académie
Royale des Sciences de Paris , de
faire travailler à l'Analyse Chymique des
Plantes , dans l'esperance qu'on auroit
par là une connoissance assurée des effets
qu'elles doivent naturellement produire.
Mais les personnes éclairées , même les
plus habiles dans cette Profession , sont
tombées d'accord , qu'on ne pouvoit pas
encore sé flatter d'être arrivé par cette
voye au but qu'on se proposoit depuis si
long - tems. M. Lemery , cet habile Chymiste
, avoue lui- même dans le Discours
qu'il a fait sur la Chymie en général , et
qui est à la tête de son cours de Chymie ,
B iiij que
1656 MERCURE DE FRANCE
que, si l'on veut considerer sans préoccupation
, comment le feu agit lorsqu'on
s'en sert pour anatomiser les plantes , ( on
;
doit dire la même chose des autres Mixtes
) : on avouera , dit- il , qu'il détruit et
confond la plupart des choses qu'il disseque
qu'il n'y a pas lieu de croire qu'il
rende les substances en leur état naturel :
aussi n'hésite - t- il pas à dire , parlant des
Sels des Plantes , qu'il n'y a que leur Sel
essentiel qui se tire de leur Suc exprimé ,
et filtré , et christalisé , qui soit le veritable
Sel qui étoit dans la Plante , ce qu'on
ne peut pas dire ( ajoûte t- il ) des deux autres
; sçavoir , le Sel volatile , et le Sel
fixescar eû égard à la violence du feu dont
on s'est servi pour les faire , il y agrande
apparence qu'ils ont été déguisez .
Tous ceux qui ont parlé sans prévention
de cette Analise des Mixtes,faite par
la voye du feu , en ont pensé de même.
Le Medecin de Montpellier qui a fait des
Notes sur l'Anatomie d'Heister , dit . que
ce n'est pas par l'Analyse Chymique qu'on
peut connoître les veritables principes
des
corps ; puisque le feu change les matieres
, et qu'il les décompose ; que ceuxqui
veulent en juger par cette Analyse ,
n'ont pas plus de raison , que ceux qui
voudroient connoître la nature des Caillous
JUILLET. 1731. 1657.
lous par la chaux . En effet , c'est une
chose certaine , dit M. Lemery dans son
Mémoire sur les Analyses des Plantes , inseré
dans l'Histoire de l'Académie
, que
quoique l'Oseille ait un Suç naturellement
aigre dans la Distilation , neanmoins
elle donne beaucoup moins d'acide , que
plusieurs autres Plantes qui n'en manifestent
pas tant.
Il me paroît donc , que voulant connoître
ce que la plupart des Mixtes peuvent
opérer, on peut aller plus surement
au but par la Méthode que j'ai découverte,
que par cette Analyse Chymique à laquelle
on s'est attaché depuis ces derniers
tems ; car dans la plupart des Mixtes ,
quelle est la chose qui opére les plus
grands & les plus sensibles effets ? ne sontce
pas les Sels qui sont contenus dans ces
Mixtes , lorsque venant à se déveloper , et
s'insinuant dans les pores des autres Corps
ils les dilatent , les ouvrent , en remplissent
les vuides , ou rompent & dérangent
la contexture de leurs parties ? Ainsi , on
ne peut disconvenir , que de toutes les
parties , ou , si l'on veut, de tous les principes
qui forment les Mixtes , les particules
salines étant les plus roides
Ait, Des Mamelles,
, et les
plus
1658 MERCURE DE FRANCE
plus figurées , leur opération doit être
la plus sensible et la plus considerable.
Ainsi le moyen incontestablement le
plus sûr pour juger quels effets la plûpart
des Mixtes doivent naturellement produire
, consiste à connoître parfaitement
quels Sels dominent en eux , et quelles
sont les Figures specifiques de chacun de
ces Sels : puisque , comme j'ai déja dit , ils
opérent toûjours conformément à leur Figure
et à leur mouvement : or on ne peut
pas douter , que par ma Méthode , on ne
connoisse parfaitement quels sont les Sels
qui sont contenus dans la plupart des
Mixtes, et quelles en sont les Figures spécifiques
par consequent ma Méthode est
celle qui est la meilleure et la plus
sûre pour juger des effets que ces Mixtes
doivent naturellement produire .
Tout ceci préalablement établi , entrons
maintenant en matiere ; et voyons en particulier
comment il faut s'y prendre pour
connoître quels sont les Sels qui peuvent
être contenus, soit dans les Terres, soit dans
les Eaux , soit dans les Plantes , soit dans les
Humeurs ; car il me paroit que quand on
aura poussé jusques- là ses connoissances ,
on aura trouvé suffisamment de quoi se satisfaire
.
Voulant donc découvrir quel est le Sel
qui
JUILLET. 1731. 1659
qui peut être contenu dans telle Terre que
ce puisse être , voici comme je m'y prends
pour y réüssir. Je mêle avec de l'eau la
Terre en question , observant qu'il n'y ait
pas trop d'eau ; et aprés l'avoir laissée
quelque tems en infusion , je lui donne un
leger bouillon sur le feu ; ensuite ayant
filtré cette eau par le papier gris , pour la
rendre claire , je la fais christaliser sur
mes petits vers ronds , conformément à
ma Méthode. C'est ainsi que je m'y suis
pris pour voir et connoître les Sels difrens
du Terreau de fumier , de la bonne
Terre des champs , et de la Terre glaise ,
desquels je vous envoye les desseins. Mais
avant que je finisse ce qui regarde les Terres,
il est à propos que j'avertisse, que par rap-
•port à celles qui sont exposées à la Pluye,
Jes Sels qu'on y peut trouver , peuvent
souvent varier à raison des pluyes
des rosées , des brouillards , des neiges ,
ou des grêles , qui peuvent y tomber ,
et y déposer les differens Sels qui s'y rencontrent.
, ›
Pour les Eaux des puits , des rivieres et
des fontalnes, je ies christalise telles qu'elles
sont , lorsqu'elles sont pures et claires :
mais je dois aussi faire observer , que celles
des puits et des fontaines ne donnent
pas toûjours les mêmes Sels , ce que j'ai
B vj même
1660 MERCURE DE FRANCE
même remarqué dans les Eaux de Forges.
Certe variation mérite bien d'être plus
exactement observée que je n'ai fait, pour
en tirer toutes les conséquences convenables
à un pareil sujet.
,
et
Il est vrai que la même chose arrive à
l'égard de l'Eau des rivieres : mais la cause
en est évidente , sçavoir les pluyes , les
neiges, les grêles , & c. qui y tombent ,
les differentes Terres qui y sont souvent
entraînées , et qui y portent leurs Sels
avec elles . C'est par cette raison que j'ai
rrouvé des deux sortes de Sels dans l'eau
de la mer l'un est le Sel marin ordinaire
; et l'autre un Sel plus délié , dont
les pointes font plus fines. Ce qui rend
cette eau plus corrosive que celle où le
Sel marin seul est dissout . J'ai de même
trouvé de deux sortes de Sel dans l'eau
de riviere du mois de Mars , prise à dif
rens 'tems , le premier a quelque rapport
au Nitre , et le second au Borax ; mais
parce que je n'ai pas trouvé ce dernier Sel
avant ou après le tems marqué , cela
me fait soupçonner que c'est cette
espece de Sel qui rend les Eaux du mois
de Mars plus fortes et plus âpres que
les autres , qu'elles rendent le Linge plus
blanc , et qu'elles rongent davantage les
mains des Blanchisseuses , & c.
>
A
JUILLET
. 1731. 1661
'A l'égard des Plantes , voulant connoître
leurs veritables Sels , et voir quelles
sont leurs figures specifiques
,tout consiste
à piler la plante dans un mortier , y verser
ensuite ce qu'il convient d'eau , pour
donner plus de fluidité au suc , et donner
au Sel plus de facilité pour se dégager de
la viscosité dans laquelle il est souvent
renfermé : puis ayant laissé le tout poser
pendant quelque peu de tems , le filtrer
par le papier gris , et le faire ensuite christaliser
sur le verre. On peut bien juger
que plus le Suc de la Plante est visqueux , plus on doit y mêler d'eau . Je dirai aussi
que j'ai observé, que prenant les Plantes , dans le tems qu'elles sont dans leur for- ce , leurs Sels se font mieux connoître
.
>
Voilà de quelle maniere on peut voir
et connoitre les Sels des Plantes , quelles
sont leurs figures specifiques : par où l'on
peut juger des effets qu'elles doivent naturellement
produire : puisque comme
j'ai dit , c'est principalement
par les Sels
que tous les Mixtes font leurs plus puissantes
opérations ; et qu'en connoissant
les figures sensibles que prennent
les Sels en se christalisant
sur le verre
on connoît les figures invisibles de leurs
plus petites parties par lesquelles elles
opérent.
C'est
1662 MERCURE DE FRANCE
C'est ce qu'il m'est aisé de justifier par
un grand nombre de Plantes , dont j'ai
découvert et connu les Sels par cette
Méthode on peut en être persuadé , en
voyant seulement les trois desseins que
j'ai tiré de Sels , de l'Oseille , du Marübe
blanc , et de la Christe - Marine ; par - lesquels
il est très-facile de connoître les effets
que ces trois Plantes doivent naturellement
opérer : car trouvant dans l'Oseille
les principaux Sels formez en figures d'épines
, d'autres en petites éguilles , et d'autres
enfin en figure de lozanges pointuës
par les deux bouts , n'a-t- on pas une
marque assurée , que cette Plante doit
piquer par son acidité , et être tant soit
peu corrosive , comme on le reconnoît
par ces effets ; puisque chacun sçait
qu'elle dissipe les taches d'encre , lorsqu'il
en est tombé sur le Linge ? elle
doit aussi être rafraîchissante et pénétrante
, ce qu'on ne peut jamais reconnoître
( ainsi que je l'ai dit par son Analyse
Chymique.
Il en est de même du Marube blanc : les
Sels de cette Plante vûs et découverts par
ma Méthode sont visiblement un Sel ammoniac
très-abondant mêlé d'un peu deNître;
puisqu'ils ont l'un et l'autre des figures
sem
JUILLET. 1731. 1 1663
semblables à celles de ces deux Sels ; par où
il est aisé de juger que cette Plante doit
être volatile et désopilante , conformément
à ces deux Sels. Enfin j'ai trouvé les Sels
provenant de la Christe - Marine , où le Sel
marin se fait voir , accompagné de l'armoniac.
Je pourrois entrer dans un plus
grand détail , si je voulois rapporter comment
sont figurés les differens Sels des
Plantes , que je me suis donné le plaisir
d'examiner : je dis le plaisir , car c'en
est un veritable , que de voir cette differente
Palingénésie des Sels , et cet agréable
arrangement qu'ils prennent d'eux- mêmes
sur le Verre.
Passons maintenant aux humeurs , ou
liquides les plus considerables du Corps
humain,pour connoître les Sels contenus
dans la salive ; il est necessaire d'observer
qu'étant ordinairement trés visqueuses , il
faut pour en dissoudre la viscosité , pour en
détacher les Sels qui sont enfevelis , y mêler
au moins une fois autant d'eau ; et afin
que la dissolution se puisse mieux faire , il
est à propos de laisser poser le tout pendant
quelques heures ; et la laisser christaliser
aprés l'avoir filtrée : c'est alors, que , quoiqu'il
s'y trouve quelquefois des Sels differens
, on a presque toûjours le plaisir de
voir de ses yeux la verité de ce qu'on a dit,
sçavoir ,
1664 MERCURE DE FRANCE
sçavoir, que la Salive est ordinairement
remplie de Sel armoniac , ainsi qu'il est facile
de le voir par le dessein que j'ai tiré
d'après celle que j'ai christalisée.
Pour ce qui est du sang ; comme c'est
dans sa sérosité que les Sels sont dissous ,
ce n'est aussi que dans cette seule sérosité
qu'il les faut chercher. Il faut donc pour
cet effet , prendre celle qui se sépare d'ellemême
après la saignée . Mais comme elle
est extrêmement visqueuse et gluante
elle a besoin pour en débarasser les Sels ,
qu'on y mêle beaucoup plus d'eau que
dans la Salive , ensorte qu'il en faut mettre
environ sept à huit fois plus qu'il n'y a
de sérosite ayant ensuite laissé poser le
tout trois ou quatre heures , filtrer et
christaliser.C'a été en agissant de la sorte,
que
voulant connoître les Sels du sang
d'une personne legerement indisposée ,
j'y ai trouvai , comme on peut voir dans
le dessein , beaucoup de Sel armoniac
très-pen de Nitre , et quelques Globules ,
que je croyois être échapez dans la filtration.
Quant à l'urine , il faut s'y prendre
d'une maniere fort differente de celle
dont on use pour la Salive et pour le Sang
* Ettmuller, sur la Pharm. de Schoder. de la
Salive de l'Homme. liv z.
puisJUILLET.
1731. 1665
puisqu'à celles - là , il fant , si l'on veut en
voirles Sels , y adjoûter de l'eau ; au lieu
quepour voir ceux des urines , it convient
d'en faire évaporer une partře. On peut
voir dans la Planche la figure du Sel , que
j'ai observée dans l'urine d'une personne
saine.
Il me reste maintenant à faire quelques
Observations neceffaires ; et qu'il convient
de sçavoir , pour mieux réussir
en usant de cette Methode , pour ne s'y
pas tromper.
La premiere regarde l'eau dont on
doit se servir , soit pour dissoudre les
Sels , ou pour rendre les sucs des Plantes
, ou la salive et les serosités du sang
plus liquides : car soit qu'elle soit de
Fontaine , de Riviere , ou de Puits ; comme
ces differentes eaux peuvent avoir
leurs Sels propres et particuliers , il est
à propos , toutes les fois qu'on fait christaliser
ces choses mélangées d'eau , de
mettre en même temps de cette même
eau sur un autre verre , afin que si étant
elle - même christalisée , et y remarquant
quelque Sel particulier , on puisse le distinguer
d'avec ceux de la Plante , ou de
telle autre chose dont on veut connoître
le Sel propre.
La seconde Observation consiste à sçavoir
,
1666 MERCURE DE FRANCE
"
voir , que souvent et plus particulierement
à l'égard des sucs des Plantes , de la
salive , et de la serosité du sang , les Selssevoyent
et se distinguent d'autant mieux
qu'on met sur le verre une moindre quan ,
tité de ces liqueurs , la trop grande abondance
des Sels qui s'y rencontrent apportant
souvent de la confusion dans leur
christalisation , et les empêchant de prendre
exactement leut figure specifique..
C'est pourquoy
il est à propos d'en mettre
une plus ou moins grande quantité
sur deux ou trois des petits verres dont
on use à cet effet ; et pour le faire facilement
, on peut se setvir, comme je fais ,
pour prendre et pour poser ces liqueurs ,
d'une espece de petite cueilliere de cuivre
, dont le creux n'a pas plus de largeur
que la moitié de l'écaille d'une noisette
, ayant trés peu de profondeur.
La troisiéme Observation , est par
rapport à la serosité du sang , où l'on
peut aisement se tromper : car quoyqu'on
y mêle beaucoup d'eau , cela n'empêche
pas qu'à cause de sa grande viscosité
venant à se secher sur le verre , il ne s'y
fasse au moins à quelque endroit , une
pellicule , laquelle se sechant fortement , il
s'y fait diverses crevasses , lesquelles se
reünissent le plus souvent en forme de
lozanges :
JUILLET. 1731. 1667
lozanges : on en peut voir quelques-unes
tracées dans le dessein qui représente les
Sels du sang : et lorsqu'on vient â regarder
au jour avec le Microscope , les, Sels
de cette serosité , ces fentes ou crevasses
étant moins opaques , on peut aisement
les prendre pour des Sels plus transparens.
Enfin la quatrième et la derniere Observation
que j'ai à faire , est pour indiquer
le moyen de mieux connoître quels
sont les Sels qui paroissent sur le verre
aprés que la cristalisation est faite : Car
la premiere chose qu'on doit observer
c'est de voir si les cristaux qui paroissent ,
sont semblables à quelqu'un des Sels qui
sont connus , et dont les figures sont dessinées
dans la Planche qui est jointe à
ma Lettre parce qu'au moment qu'on
les verra semblables , on peut s'assurer
que ce sont les mêmes Sels , ce qui peut
arriver souvent ; puisque,comme j'ai dit ,
ces Sels connus de tout le monde , sont
aussi les plus communs dans la nature.
Néanmoins , parcequ'on ne peut pas dire
qu'ils soient les seuls , au cas qu'on en remarque
, soit dans certaines ter es , certaines
eaux , certaines plantes &c. qui
prennent constamment des figures particulieres
, il convient alors de les observer
1668 MERCURE DE FRANCE
ver exactement , pourjuger par leur figu
re des effets particuliers qu'ils doivent
pareillement produire.
Je me crois d'ailleurs obligé d'avertir ,
que je n'ai pas tellement perfectionné
cette découverte , qu'il ne reste plus rien
à faire pour découvrir géneralement tous
les Sels , et plus particulierement ceux
de toutes les Plantes et de toutes les humeurs
. Je ne donne tout ce qui est contenu
dans ces deux Lettres , que comme
un essai , dans lequel je me flatte d'avoir
réûssi ; s'il est poussé aussi loin qu'il le
peut être par des mains plus habiles , il
pourra devenir trés avantageux au public.
Je suis Monsieur & c.
On trouvera les Figures gravées de
ces Sels , dans la premiere Lettre de M.
Capperon , inserée dans le precedent
Mercure.
sur la Méthode d'observer les Sels qui
se trouvent dans les Terres , dans les
Plantes , dans les Humeurs , &c.
MONSIEUR ,
Vous sçavez mieux que moi , qu'il y a
long- tems qu'on cherche un moyen de
connoître la qualité des Mixtes , pour ju
ger des effets qu'ils doivent naturellement
operer. Comme on étoit d'abord persuadé
que les Mixtes
n'opéroient
que parce
qu'on
appelloit
leurs qualitez
; sçavoir
, le
chaud
, le sec , le froid
, et l'humide
; on
B iij
1574 MERCURE DE FRANCE
crut avoir fait beaucoup , que d'assigner à
chaque Mixte , jusqu'à quel degré il étoit
chaud , sec , froid , ou humide ; ce dont
on jugeoit par les effets qu'on lui voyoit
produire , et par- là on se flatoit d'avoir
un moyen suffisant pour connoître le
bien ou le mal que ces Mixtes pouvoient
faire.
Quoique cette Méthode fut en usage
avant le tems d'Hypocrate , et qu'elle l'ait
été presque jusqu'à nos jours : * cet habile
Homme reconnut néanmoins , qu'on ne
pouvoit pas aller loin avec cette Découverte.
Il crut qu'il pouvoit y mieux réüssir
, en enseignant que les Mixtes n'opéroient
qu'entant qu'ils contenoient quelque
chose de plus ou moins amer , ou salé,
ou doux , ou âpre , ou acerbe , ou adoucissant
, ** &c.En quoi , sans doute , il
pensoit plus juste que ceux qui l'avoient
précedé , mais après tout , ce n'étoit connoître
la nature des Mixtes que par leurs
seuls effets , même par leurs effets senfibles
; par consequent il falloit les avoir
souvent éprouvez , avant que d'en fixer
les qualitez.
Enfin la Chymie étant devenue com-
* On la peut voir bien marquée dans Matthi
Comment. sur Dioscoride.
** Lib. de prisca Medicina.
mune
JUILLET.
1731. 1575
mune , on a crû avoir trouvé le moyen
infaillible pour découvrir primitivement
ce que chaque Mixte devoit naturellement
opérer , parce que ceux qui cultivoient
cet art , prétendant avoir une Méthode
assurée pour décomposer les Mixtes par
le moyen du feu , séparer les Principes
dont ils étoient composez , pour les voir
ensuite à leur aise séparément , et connoître
leurs opérations, ils n'ont nullement
douté , qu'à proportion que quelques- uns
de ces principes se trouveroient dominer
plus ou moins dans les Mixtes , leurs Effets
devoient se diversifier differemment :
c'est ce qui a même donné lieu à l'Académie
Royale des Sciences de Paris , de
faire travailler à l'Analyse Chymique des
Plantes , dans l'esperance qu'on auroit
par là une connoissance assurée des effets
qu'elles doivent naturellement produire.
Mais les personnes éclairées , même les
plus habiles dans cette Profession , sont
tombées d'accord , qu'on ne pouvoit pas
encore sé flatter d'être arrivé par cette
voye au but qu'on se proposoit depuis si
long - tems. M. Lemery , cet habile Chymiste
, avoue lui- même dans le Discours
qu'il a fait sur la Chymie en général , et
qui est à la tête de son cours de Chymie ,
B iiij que
1656 MERCURE DE FRANCE
que, si l'on veut considerer sans préoccupation
, comment le feu agit lorsqu'on
s'en sert pour anatomiser les plantes , ( on
;
doit dire la même chose des autres Mixtes
) : on avouera , dit- il , qu'il détruit et
confond la plupart des choses qu'il disseque
qu'il n'y a pas lieu de croire qu'il
rende les substances en leur état naturel :
aussi n'hésite - t- il pas à dire , parlant des
Sels des Plantes , qu'il n'y a que leur Sel
essentiel qui se tire de leur Suc exprimé ,
et filtré , et christalisé , qui soit le veritable
Sel qui étoit dans la Plante , ce qu'on
ne peut pas dire ( ajoûte t- il ) des deux autres
; sçavoir , le Sel volatile , et le Sel
fixescar eû égard à la violence du feu dont
on s'est servi pour les faire , il y agrande
apparence qu'ils ont été déguisez .
Tous ceux qui ont parlé sans prévention
de cette Analise des Mixtes,faite par
la voye du feu , en ont pensé de même.
Le Medecin de Montpellier qui a fait des
Notes sur l'Anatomie d'Heister , dit . que
ce n'est pas par l'Analyse Chymique qu'on
peut connoître les veritables principes
des
corps ; puisque le feu change les matieres
, et qu'il les décompose ; que ceuxqui
veulent en juger par cette Analyse ,
n'ont pas plus de raison , que ceux qui
voudroient connoître la nature des Caillous
JUILLET. 1731. 1657.
lous par la chaux . En effet , c'est une
chose certaine , dit M. Lemery dans son
Mémoire sur les Analyses des Plantes , inseré
dans l'Histoire de l'Académie
, que
quoique l'Oseille ait un Suç naturellement
aigre dans la Distilation , neanmoins
elle donne beaucoup moins d'acide , que
plusieurs autres Plantes qui n'en manifestent
pas tant.
Il me paroît donc , que voulant connoître
ce que la plupart des Mixtes peuvent
opérer, on peut aller plus surement
au but par la Méthode que j'ai découverte,
que par cette Analyse Chymique à laquelle
on s'est attaché depuis ces derniers
tems ; car dans la plupart des Mixtes ,
quelle est la chose qui opére les plus
grands & les plus sensibles effets ? ne sontce
pas les Sels qui sont contenus dans ces
Mixtes , lorsque venant à se déveloper , et
s'insinuant dans les pores des autres Corps
ils les dilatent , les ouvrent , en remplissent
les vuides , ou rompent & dérangent
la contexture de leurs parties ? Ainsi , on
ne peut disconvenir , que de toutes les
parties , ou , si l'on veut, de tous les principes
qui forment les Mixtes , les particules
salines étant les plus roides
Ait, Des Mamelles,
, et les
plus
1658 MERCURE DE FRANCE
plus figurées , leur opération doit être
la plus sensible et la plus considerable.
Ainsi le moyen incontestablement le
plus sûr pour juger quels effets la plûpart
des Mixtes doivent naturellement produire
, consiste à connoître parfaitement
quels Sels dominent en eux , et quelles
sont les Figures specifiques de chacun de
ces Sels : puisque , comme j'ai déja dit , ils
opérent toûjours conformément à leur Figure
et à leur mouvement : or on ne peut
pas douter , que par ma Méthode , on ne
connoisse parfaitement quels sont les Sels
qui sont contenus dans la plupart des
Mixtes, et quelles en sont les Figures spécifiques
par consequent ma Méthode est
celle qui est la meilleure et la plus
sûre pour juger des effets que ces Mixtes
doivent naturellement produire .
Tout ceci préalablement établi , entrons
maintenant en matiere ; et voyons en particulier
comment il faut s'y prendre pour
connoître quels sont les Sels qui peuvent
être contenus, soit dans les Terres, soit dans
les Eaux , soit dans les Plantes , soit dans les
Humeurs ; car il me paroit que quand on
aura poussé jusques- là ses connoissances ,
on aura trouvé suffisamment de quoi se satisfaire
.
Voulant donc découvrir quel est le Sel
qui
JUILLET. 1731. 1659
qui peut être contenu dans telle Terre que
ce puisse être , voici comme je m'y prends
pour y réüssir. Je mêle avec de l'eau la
Terre en question , observant qu'il n'y ait
pas trop d'eau ; et aprés l'avoir laissée
quelque tems en infusion , je lui donne un
leger bouillon sur le feu ; ensuite ayant
filtré cette eau par le papier gris , pour la
rendre claire , je la fais christaliser sur
mes petits vers ronds , conformément à
ma Méthode. C'est ainsi que je m'y suis
pris pour voir et connoître les Sels difrens
du Terreau de fumier , de la bonne
Terre des champs , et de la Terre glaise ,
desquels je vous envoye les desseins. Mais
avant que je finisse ce qui regarde les Terres,
il est à propos que j'avertisse, que par rap-
•port à celles qui sont exposées à la Pluye,
Jes Sels qu'on y peut trouver , peuvent
souvent varier à raison des pluyes
des rosées , des brouillards , des neiges ,
ou des grêles , qui peuvent y tomber ,
et y déposer les differens Sels qui s'y rencontrent.
, ›
Pour les Eaux des puits , des rivieres et
des fontalnes, je ies christalise telles qu'elles
sont , lorsqu'elles sont pures et claires :
mais je dois aussi faire observer , que celles
des puits et des fontaines ne donnent
pas toûjours les mêmes Sels , ce que j'ai
B vj même
1660 MERCURE DE FRANCE
même remarqué dans les Eaux de Forges.
Certe variation mérite bien d'être plus
exactement observée que je n'ai fait, pour
en tirer toutes les conséquences convenables
à un pareil sujet.
,
et
Il est vrai que la même chose arrive à
l'égard de l'Eau des rivieres : mais la cause
en est évidente , sçavoir les pluyes , les
neiges, les grêles , & c. qui y tombent ,
les differentes Terres qui y sont souvent
entraînées , et qui y portent leurs Sels
avec elles . C'est par cette raison que j'ai
rrouvé des deux sortes de Sels dans l'eau
de la mer l'un est le Sel marin ordinaire
; et l'autre un Sel plus délié , dont
les pointes font plus fines. Ce qui rend
cette eau plus corrosive que celle où le
Sel marin seul est dissout . J'ai de même
trouvé de deux sortes de Sel dans l'eau
de riviere du mois de Mars , prise à dif
rens 'tems , le premier a quelque rapport
au Nitre , et le second au Borax ; mais
parce que je n'ai pas trouvé ce dernier Sel
avant ou après le tems marqué , cela
me fait soupçonner que c'est cette
espece de Sel qui rend les Eaux du mois
de Mars plus fortes et plus âpres que
les autres , qu'elles rendent le Linge plus
blanc , et qu'elles rongent davantage les
mains des Blanchisseuses , & c.
>
A
JUILLET
. 1731. 1661
'A l'égard des Plantes , voulant connoître
leurs veritables Sels , et voir quelles
sont leurs figures specifiques
,tout consiste
à piler la plante dans un mortier , y verser
ensuite ce qu'il convient d'eau , pour
donner plus de fluidité au suc , et donner
au Sel plus de facilité pour se dégager de
la viscosité dans laquelle il est souvent
renfermé : puis ayant laissé le tout poser
pendant quelque peu de tems , le filtrer
par le papier gris , et le faire ensuite christaliser
sur le verre. On peut bien juger
que plus le Suc de la Plante est visqueux , plus on doit y mêler d'eau . Je dirai aussi
que j'ai observé, que prenant les Plantes , dans le tems qu'elles sont dans leur for- ce , leurs Sels se font mieux connoître
.
>
Voilà de quelle maniere on peut voir
et connoitre les Sels des Plantes , quelles
sont leurs figures specifiques : par où l'on
peut juger des effets qu'elles doivent naturellement
produire : puisque comme
j'ai dit , c'est principalement
par les Sels
que tous les Mixtes font leurs plus puissantes
opérations ; et qu'en connoissant
les figures sensibles que prennent
les Sels en se christalisant
sur le verre
on connoît les figures invisibles de leurs
plus petites parties par lesquelles elles
opérent.
C'est
1662 MERCURE DE FRANCE
C'est ce qu'il m'est aisé de justifier par
un grand nombre de Plantes , dont j'ai
découvert et connu les Sels par cette
Méthode on peut en être persuadé , en
voyant seulement les trois desseins que
j'ai tiré de Sels , de l'Oseille , du Marübe
blanc , et de la Christe - Marine ; par - lesquels
il est très-facile de connoître les effets
que ces trois Plantes doivent naturellement
opérer : car trouvant dans l'Oseille
les principaux Sels formez en figures d'épines
, d'autres en petites éguilles , et d'autres
enfin en figure de lozanges pointuës
par les deux bouts , n'a-t- on pas une
marque assurée , que cette Plante doit
piquer par son acidité , et être tant soit
peu corrosive , comme on le reconnoît
par ces effets ; puisque chacun sçait
qu'elle dissipe les taches d'encre , lorsqu'il
en est tombé sur le Linge ? elle
doit aussi être rafraîchissante et pénétrante
, ce qu'on ne peut jamais reconnoître
( ainsi que je l'ai dit par son Analyse
Chymique.
Il en est de même du Marube blanc : les
Sels de cette Plante vûs et découverts par
ma Méthode sont visiblement un Sel ammoniac
très-abondant mêlé d'un peu deNître;
puisqu'ils ont l'un et l'autre des figures
sem
JUILLET. 1731. 1 1663
semblables à celles de ces deux Sels ; par où
il est aisé de juger que cette Plante doit
être volatile et désopilante , conformément
à ces deux Sels. Enfin j'ai trouvé les Sels
provenant de la Christe - Marine , où le Sel
marin se fait voir , accompagné de l'armoniac.
Je pourrois entrer dans un plus
grand détail , si je voulois rapporter comment
sont figurés les differens Sels des
Plantes , que je me suis donné le plaisir
d'examiner : je dis le plaisir , car c'en
est un veritable , que de voir cette differente
Palingénésie des Sels , et cet agréable
arrangement qu'ils prennent d'eux- mêmes
sur le Verre.
Passons maintenant aux humeurs , ou
liquides les plus considerables du Corps
humain,pour connoître les Sels contenus
dans la salive ; il est necessaire d'observer
qu'étant ordinairement trés visqueuses , il
faut pour en dissoudre la viscosité , pour en
détacher les Sels qui sont enfevelis , y mêler
au moins une fois autant d'eau ; et afin
que la dissolution se puisse mieux faire , il
est à propos de laisser poser le tout pendant
quelques heures ; et la laisser christaliser
aprés l'avoir filtrée : c'est alors, que , quoiqu'il
s'y trouve quelquefois des Sels differens
, on a presque toûjours le plaisir de
voir de ses yeux la verité de ce qu'on a dit,
sçavoir ,
1664 MERCURE DE FRANCE
sçavoir, que la Salive est ordinairement
remplie de Sel armoniac , ainsi qu'il est facile
de le voir par le dessein que j'ai tiré
d'après celle que j'ai christalisée.
Pour ce qui est du sang ; comme c'est
dans sa sérosité que les Sels sont dissous ,
ce n'est aussi que dans cette seule sérosité
qu'il les faut chercher. Il faut donc pour
cet effet , prendre celle qui se sépare d'ellemême
après la saignée . Mais comme elle
est extrêmement visqueuse et gluante
elle a besoin pour en débarasser les Sels ,
qu'on y mêle beaucoup plus d'eau que
dans la Salive , ensorte qu'il en faut mettre
environ sept à huit fois plus qu'il n'y a
de sérosite ayant ensuite laissé poser le
tout trois ou quatre heures , filtrer et
christaliser.C'a été en agissant de la sorte,
que
voulant connoître les Sels du sang
d'une personne legerement indisposée ,
j'y ai trouvai , comme on peut voir dans
le dessein , beaucoup de Sel armoniac
très-pen de Nitre , et quelques Globules ,
que je croyois être échapez dans la filtration.
Quant à l'urine , il faut s'y prendre
d'une maniere fort differente de celle
dont on use pour la Salive et pour le Sang
* Ettmuller, sur la Pharm. de Schoder. de la
Salive de l'Homme. liv z.
puisJUILLET.
1731. 1665
puisqu'à celles - là , il fant , si l'on veut en
voirles Sels , y adjoûter de l'eau ; au lieu
quepour voir ceux des urines , it convient
d'en faire évaporer une partře. On peut
voir dans la Planche la figure du Sel , que
j'ai observée dans l'urine d'une personne
saine.
Il me reste maintenant à faire quelques
Observations neceffaires ; et qu'il convient
de sçavoir , pour mieux réussir
en usant de cette Methode , pour ne s'y
pas tromper.
La premiere regarde l'eau dont on
doit se servir , soit pour dissoudre les
Sels , ou pour rendre les sucs des Plantes
, ou la salive et les serosités du sang
plus liquides : car soit qu'elle soit de
Fontaine , de Riviere , ou de Puits ; comme
ces differentes eaux peuvent avoir
leurs Sels propres et particuliers , il est
à propos , toutes les fois qu'on fait christaliser
ces choses mélangées d'eau , de
mettre en même temps de cette même
eau sur un autre verre , afin que si étant
elle - même christalisée , et y remarquant
quelque Sel particulier , on puisse le distinguer
d'avec ceux de la Plante , ou de
telle autre chose dont on veut connoître
le Sel propre.
La seconde Observation consiste à sçavoir
,
1666 MERCURE DE FRANCE
"
voir , que souvent et plus particulierement
à l'égard des sucs des Plantes , de la
salive , et de la serosité du sang , les Selssevoyent
et se distinguent d'autant mieux
qu'on met sur le verre une moindre quan ,
tité de ces liqueurs , la trop grande abondance
des Sels qui s'y rencontrent apportant
souvent de la confusion dans leur
christalisation , et les empêchant de prendre
exactement leut figure specifique..
C'est pourquoy
il est à propos d'en mettre
une plus ou moins grande quantité
sur deux ou trois des petits verres dont
on use à cet effet ; et pour le faire facilement
, on peut se setvir, comme je fais ,
pour prendre et pour poser ces liqueurs ,
d'une espece de petite cueilliere de cuivre
, dont le creux n'a pas plus de largeur
que la moitié de l'écaille d'une noisette
, ayant trés peu de profondeur.
La troisiéme Observation , est par
rapport à la serosité du sang , où l'on
peut aisement se tromper : car quoyqu'on
y mêle beaucoup d'eau , cela n'empêche
pas qu'à cause de sa grande viscosité
venant à se secher sur le verre , il ne s'y
fasse au moins à quelque endroit , une
pellicule , laquelle se sechant fortement , il
s'y fait diverses crevasses , lesquelles se
reünissent le plus souvent en forme de
lozanges :
JUILLET. 1731. 1667
lozanges : on en peut voir quelques-unes
tracées dans le dessein qui représente les
Sels du sang : et lorsqu'on vient â regarder
au jour avec le Microscope , les, Sels
de cette serosité , ces fentes ou crevasses
étant moins opaques , on peut aisement
les prendre pour des Sels plus transparens.
Enfin la quatrième et la derniere Observation
que j'ai à faire , est pour indiquer
le moyen de mieux connoître quels
sont les Sels qui paroissent sur le verre
aprés que la cristalisation est faite : Car
la premiere chose qu'on doit observer
c'est de voir si les cristaux qui paroissent ,
sont semblables à quelqu'un des Sels qui
sont connus , et dont les figures sont dessinées
dans la Planche qui est jointe à
ma Lettre parce qu'au moment qu'on
les verra semblables , on peut s'assurer
que ce sont les mêmes Sels , ce qui peut
arriver souvent ; puisque,comme j'ai dit ,
ces Sels connus de tout le monde , sont
aussi les plus communs dans la nature.
Néanmoins , parcequ'on ne peut pas dire
qu'ils soient les seuls , au cas qu'on en remarque
, soit dans certaines ter es , certaines
eaux , certaines plantes &c. qui
prennent constamment des figures particulieres
, il convient alors de les observer
1668 MERCURE DE FRANCE
ver exactement , pourjuger par leur figu
re des effets particuliers qu'ils doivent
pareillement produire.
Je me crois d'ailleurs obligé d'avertir ,
que je n'ai pas tellement perfectionné
cette découverte , qu'il ne reste plus rien
à faire pour découvrir géneralement tous
les Sels , et plus particulierement ceux
de toutes les Plantes et de toutes les humeurs
. Je ne donne tout ce qui est contenu
dans ces deux Lettres , que comme
un essai , dans lequel je me flatte d'avoir
réûssi ; s'il est poussé aussi loin qu'il le
peut être par des mains plus habiles , il
pourra devenir trés avantageux au public.
Je suis Monsieur & c.
On trouvera les Figures gravées de
ces Sels , dans la premiere Lettre de M.
Capperon , inserée dans le precedent
Mercure.
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Résumé : SECONDE LETTRE de M. Capperon sur la Méthode d'observer les Sels qui se trouvent dans les Terres, dans les Plantes, dans les Humeurs, &c.
La lettre de M. Capperon explore une méthode d'observation des sels présents dans les terres, les plantes et les humeurs. Historiquement, les mixtes étaient classés selon leurs qualités (chaud, sec, froid, humide) ou leurs saveurs (amer, salé, doux). Cependant, ces méthodes étaient limitées aux effets observables. Avec l'avènement de la chimie, on a tenté de décomposer les mixtes par le feu, mais cette approche altérait les substances, rendant l'analyse imparfaite. Capperon propose une méthode alternative basée sur l'observation des sels cristallisés. Il affirme que les sels, en se développant et en s'insinuant dans les pores des corps, produisent des effets sensibles et considérables. Pour observer ces sels, il mélange les substances avec de l'eau, les filtre et les cristallise sur des verres. Cette méthode est appliquée aux terres, eaux, plantes et humeurs, notant que les sels peuvent varier en fonction des conditions environnementales. Pour les plantes, Capperon pile la plante, ajoute de l'eau, filtre le suc et observe la cristallisation. Il illustre cette méthode avec des exemples comme l'oseille, le marube blanc et la christe-marine, montrant comment les formes des cristaux révèlent les propriétés des plantes. Pour la salive, il dissout la viscosité avec de l'eau et observe les cristaux formés. Le texte décrit également une méthode pour analyser les sels présents dans le sang, la salive et l'urine. Pour le sang, il est nécessaire de séparer la sérosité après une saignée, de la mélanger avec une grande quantité d'eau, de laisser reposer le mélange, puis de filtrer et cristalliser. Cette méthode a permis de découvrir du sel armoniac et du nitre dans le sang d'une personne légèrement indisposée. Pour l'urine, il faut évaporer une partie du liquide pour observer les sels. L'auteur souligne l'importance d'utiliser de l'eau de même source pour éviter la confusion des sels et de reconnaître les sels connus. Il mentionne que sa découverte est un essai et espère qu'elle pourra être perfectionnée par d'autres.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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