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1
p. [1]-9
LE ROMAN COMIQUE, CHAPITRE SECOND. POEME. Quel homme étoit le Sieur de la Rapiniere.
Début :
Ayant donc pris quelque repos, [...]
Mots clefs :
Sieur de la Rapinière, Humour, Comédie, Troupe de théâtre , Ville du Mans, Mésaventures , Improvisation, Costumes , Représentation, Tumulte
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texteReconnaissance textuelle : LE ROMAN COMIQUE, CHAPITRE SECOND. POEME. Quel homme étoit le Sieur de la Rapiniere.
LE ROMAN COMIQUE,
CHAPITRE SECOND.
.
POEM E.
Quel homme étoit le Sieur de la Rapiniere:
ADIO Yant donc pris quelque repos ,
A Je vais vous dire en peu
de mots
Que le sieur de la Rapiniere ,
Etoit le Rieur ordinaire
De la bonne Ville du Mans ;
L'on trouve partout de ces gens ,
C'ef
2 MERCURE DE FRANCE.
1
C'est une race trés- fertile ,
Il n'est point de petite Ville ,
Qui n'ait son Rieur importun
Et Paris n'en a pas pour un ;
Souvent le nombre en est extrême`,
Dans chaque quartier , & moi-même ,
Si j'avois voulu , l'on sçait bien ,
Que je le serois dans le mien ,
Mais depuis trop long-tems je gronde ,
Contre les vanitez du monde ,
Et c'eft un fort vilain métier
2
D'être le Rieur d'un quartier.
Revenons à la Rapiniere ,
Qui pour mieux entrer en matiere ,
Reprit la conversation ,
Que les coups et l'émotion ,
Avoient d'abord interrompuë ,
Dans le beau milieu de la ruë
Et s'adressant au sieur Destin ,?
'
" Qui décrotoit son Brodequin ,
Lui conta mainte baliverne ,
Et demanda si la Caverne ,´
Monsieur de la Rancune et lui ,
Dont il vouloit être l'appui ,
Pouvoient composer une Troupe ,
Et s'ils avoient le vent en poupe ;
Notre Troupe , répondit- il ,
En fronçant un peu le sourcil ,
Vaut
JANVIER. 1731.
Vaut bien , sans outrer la louange
Et celle du Prince d'Orange,
Et celle du Duc d'Epernon .
Nous ne manquons pas
de renom
*
Nous déclamons tous avec grace ;
Mais , hélas ! par une disgrace
Qui nous est arrivée à Tours
Je m'en ressouviendrai toujours ,
Car la récolte étoit fertile ,
Dans cette grande et belle,Ville ,
Ou notre étourdi de Portier ,
A mis à mort un Fuzelier ,
De l'Intendant de la Province ,
Sçachant l'Ordonnance du Prince
Chacun s'est enfui tout ému
2
Le pied droit chaussé , l'autre nu ,
Dans un assez triste équipage ,
Comme vous voyez , j'en enrage ;
Les Fuzeliers de l'Intendant ,
A la Fleche en on fait autant ,,
Dit le sieur de la Rapiniere ,
Ventrebleu , dit la Tripotiere ,,
Ces gens me causent des transports .
Que le diable soit dans leurs corps ,
Qu'après mainte et mainte nazarde
Le feu S. Antoine les arde.
Ils méritent ce châtiment ;
Quel terrible dérangement }
97
Au
1
4
MERCURE DE FRANCE.
Aujourd'hui par leur perfidie,
Nous n'aurons point la Comedie ;
Ah ! tout cela ne seroit rien ,
Répond le vieux Comédien ,
Ma peine seroit moins fatale ,
Si j'avois la clef d'une Male,
Où sont la plupart des habits ;
Je serais vraiment bien d'avis ,
De ne pas rester inutile ,
Pour plaire à Messieurs de la Ville ,
Trois ou quatre jours sans faço n ,
Avant de gagner Alençon ,
Où notre Troupe doit se rendre.
Comme on ne devoit pas s'attendre
A cette réponse , aussi - tôt ,
Le sieur Lieutenant de Prévôt ,
Offrit
gayement à la Caverne ,
Robbe qui n'étoit pas moderne ,
Puisque sa femme et ses enfans ,
S'en servoient depuis quatorze ans ;
De son côté la Tripotiere ,
Qui cherchoit à se satisfaire ,
Dit que chez elle on avoit mis ,
gage deux ou trois habits ,
Fort propres pour la Mascarade ,
Que Destin et son Camarade ,
Pouvoient aisément s'en saisir,
Que cela lui feroit plaisir ;
En
Mais
JANVIER.
1731.
Mais quelqu'un de la Compagnie',
Ajoûta que la Comedie ,
Seroit tout d'un coup
aux abois ,
N'étant pour cet effet que
trois ;
Oh oh ! s'écria la Rancune ,
L'avanture est assez commune
Sur les leçons de mon Ayeul ,
Je joue une Piece moi seul ,
Je puis faire sans grande peine ,'
En même-temps le Roi , la Reine ,
Aussi-bien que l'Ambassadeur ;
Je sçai tous les Rôies par coeur
Par exemple dans une Scene ,
Qui doit commencer par la Reine ,
Je garde un moment le tacet ,
Après quoi je parle en faucet ;
Pour l'Ambassadeur je nazonne ,
En me tournant vers ma Couroe ,
Que je mets sur un Tabouret ;
Cependant admirez ce trait :
Pour le Roi , sans aucun cortege ,
Je prens ma Couronne et mon Siege ,
Et grossissant un peu ma voix ,
Je
MERCURE DE FRANCE.
Je parle avec beaucoup de poids ,
Mais qu'ainsi ne soit pour vous plaire ,
Nous voulons bien vous satisfaire
Par un plat de notre métier ;
Messieurs contentez le Chartier ,
Avant qu'il aille à l'Ecurie ,
Et payez notre Hôtellerie J
*
Fournissez à chacun l'habit ,
Et nous joueront avant la nuit ;
Sur ma parole on m'en doit croire ,
Ou bien ma foi nous allons boire ,
Chacun quatre coups seulement ,
Puis reposer tranquilement ;
Car nous n'avons point de l'année
Fait une si grande journée.
Un tel parti si bien conçu ,
Unanimement fut reçû ,
Et le diable de Rapiniere ,
Malicieux à l'ordinaire ,
Dit que sans chercher au taudis ,
Il falloit prendre les habits ,
De deux jeunes gens de la Ville ,
Que la chose étoit fort facile ,
Parce
JANVIER. 1731 .
>
Farce que ces deux jeunes gens ,
Dans le Tripot joüeroient long-temps;
Que la Caverne pourroit faire ,
Avec son habit ordinaire ,
Tel personnage qu'on voudroit ,
Que partout elle passeroit ,
Soit dans une Piece tragique ,
Soit dans une Piece comique ;
Aussi-tôt dit , aussi-tôt fait
Les Comédiens en effet ,
Vuiderent bien vîte une pinte ,
La mesure parut succinte ,
Et s'emparant desdits habits ,
Ils furent bien- tôt travestis ;
L'Assemblée étant fort grossie ,
Par la meilleure Bourgeoisie ,
Prit place dans un Galetas ,
Dont le plancher étoit très-bas ;
On leva d'abord un drap sale ,
D'une maniere originale ,
Et l'on vit sur un matelas ,
Le Destin qui paroissoit las ,
Le Corbillon de quelque Nonne ,
Lui servoit alors de Couronne ,
Il n'avoit pas de quoi choisir ,
Donc il faloit bien s'en servir ;
Se frotant les yeux et l'oreille ,
Comme un homme qui se réveille ,
's MERCURE DE FRANCE.
Il fit un peu le rencheri ,
Et sur un ton de Mondori ,
Parce qu'il étoit à la mode ,
Récita le Rôle d'Herode ,
Qui commence par ces cinq mots ,
Ombre qui troubles mon repos.
Il déclama d'un grand courage ;
Et l'emplâtre de son visage ,
N'empêcha pas qu'on ne vît bien ,
Qu'il étoit bon Comedien ;
La Caverne fit à merveille ,
L'on n'avoit point vû sa pareille ,
Et tout le monde l'approuva ,
Dans les Rôles qu'elle joua ,
De Mariane et de Salome ;
La Rancune n'étoit pas homme ,
A ne point plaire au Spectateur ,
Aussi parut-il bon Acteur ,
En montrant beaucoup de noblesse ,
Dans plusieurs Rôles de la Piece ,
On alloit tirer le Rideau
Ce n'étoit pas la le moins beau ,
Quand le diable , qui rien n'oublie ,
Fit finir cette Tragedie ,
Non-pas par la cruelle mort ,
De Mariane qu'on plaint fort
Ni par les desespoirs d'Hérode ;
Mais si le sieur Scaron ne brode ,
Y
Ce
JANVIER.
1731 .
Ce fut par mille coups complets ,
Du poing , des pieds , sans les soufflets
Par des juremens effroyables ,
Que n'auroient pas fait tous les diables
Dans une telle occasion ,
Et par une information ,
Que fit le sieur la Rapiniere ,
Fort expert en cette matiere ,
Et plus sçavant que .... mais ,
hola !
Notre Chapitre finit là.
Par M. le Tellier d'Orvilliers , Lieutenant
General d'Epée à Vernon.
La suite pour les Mercures suivans.
CHAPITRE SECOND.
.
POEM E.
Quel homme étoit le Sieur de la Rapiniere:
ADIO Yant donc pris quelque repos ,
A Je vais vous dire en peu
de mots
Que le sieur de la Rapiniere ,
Etoit le Rieur ordinaire
De la bonne Ville du Mans ;
L'on trouve partout de ces gens ,
C'ef
2 MERCURE DE FRANCE.
1
C'est une race trés- fertile ,
Il n'est point de petite Ville ,
Qui n'ait son Rieur importun
Et Paris n'en a pas pour un ;
Souvent le nombre en est extrême`,
Dans chaque quartier , & moi-même ,
Si j'avois voulu , l'on sçait bien ,
Que je le serois dans le mien ,
Mais depuis trop long-tems je gronde ,
Contre les vanitez du monde ,
Et c'eft un fort vilain métier
2
D'être le Rieur d'un quartier.
Revenons à la Rapiniere ,
Qui pour mieux entrer en matiere ,
Reprit la conversation ,
Que les coups et l'émotion ,
Avoient d'abord interrompuë ,
Dans le beau milieu de la ruë
Et s'adressant au sieur Destin ,?
'
" Qui décrotoit son Brodequin ,
Lui conta mainte baliverne ,
Et demanda si la Caverne ,´
Monsieur de la Rancune et lui ,
Dont il vouloit être l'appui ,
Pouvoient composer une Troupe ,
Et s'ils avoient le vent en poupe ;
Notre Troupe , répondit- il ,
En fronçant un peu le sourcil ,
Vaut
JANVIER. 1731.
Vaut bien , sans outrer la louange
Et celle du Prince d'Orange,
Et celle du Duc d'Epernon .
Nous ne manquons pas
de renom
*
Nous déclamons tous avec grace ;
Mais , hélas ! par une disgrace
Qui nous est arrivée à Tours
Je m'en ressouviendrai toujours ,
Car la récolte étoit fertile ,
Dans cette grande et belle,Ville ,
Ou notre étourdi de Portier ,
A mis à mort un Fuzelier ,
De l'Intendant de la Province ,
Sçachant l'Ordonnance du Prince
Chacun s'est enfui tout ému
2
Le pied droit chaussé , l'autre nu ,
Dans un assez triste équipage ,
Comme vous voyez , j'en enrage ;
Les Fuzeliers de l'Intendant ,
A la Fleche en on fait autant ,,
Dit le sieur de la Rapiniere ,
Ventrebleu , dit la Tripotiere ,,
Ces gens me causent des transports .
Que le diable soit dans leurs corps ,
Qu'après mainte et mainte nazarde
Le feu S. Antoine les arde.
Ils méritent ce châtiment ;
Quel terrible dérangement }
97
Au
1
4
MERCURE DE FRANCE.
Aujourd'hui par leur perfidie,
Nous n'aurons point la Comedie ;
Ah ! tout cela ne seroit rien ,
Répond le vieux Comédien ,
Ma peine seroit moins fatale ,
Si j'avois la clef d'une Male,
Où sont la plupart des habits ;
Je serais vraiment bien d'avis ,
De ne pas rester inutile ,
Pour plaire à Messieurs de la Ville ,
Trois ou quatre jours sans faço n ,
Avant de gagner Alençon ,
Où notre Troupe doit se rendre.
Comme on ne devoit pas s'attendre
A cette réponse , aussi - tôt ,
Le sieur Lieutenant de Prévôt ,
Offrit
gayement à la Caverne ,
Robbe qui n'étoit pas moderne ,
Puisque sa femme et ses enfans ,
S'en servoient depuis quatorze ans ;
De son côté la Tripotiere ,
Qui cherchoit à se satisfaire ,
Dit que chez elle on avoit mis ,
gage deux ou trois habits ,
Fort propres pour la Mascarade ,
Que Destin et son Camarade ,
Pouvoient aisément s'en saisir,
Que cela lui feroit plaisir ;
En
Mais
JANVIER.
1731.
Mais quelqu'un de la Compagnie',
Ajoûta que la Comedie ,
Seroit tout d'un coup
aux abois ,
N'étant pour cet effet que
trois ;
Oh oh ! s'écria la Rancune ,
L'avanture est assez commune
Sur les leçons de mon Ayeul ,
Je joue une Piece moi seul ,
Je puis faire sans grande peine ,'
En même-temps le Roi , la Reine ,
Aussi-bien que l'Ambassadeur ;
Je sçai tous les Rôies par coeur
Par exemple dans une Scene ,
Qui doit commencer par la Reine ,
Je garde un moment le tacet ,
Après quoi je parle en faucet ;
Pour l'Ambassadeur je nazonne ,
En me tournant vers ma Couroe ,
Que je mets sur un Tabouret ;
Cependant admirez ce trait :
Pour le Roi , sans aucun cortege ,
Je prens ma Couronne et mon Siege ,
Et grossissant un peu ma voix ,
Je
MERCURE DE FRANCE.
Je parle avec beaucoup de poids ,
Mais qu'ainsi ne soit pour vous plaire ,
Nous voulons bien vous satisfaire
Par un plat de notre métier ;
Messieurs contentez le Chartier ,
Avant qu'il aille à l'Ecurie ,
Et payez notre Hôtellerie J
*
Fournissez à chacun l'habit ,
Et nous joueront avant la nuit ;
Sur ma parole on m'en doit croire ,
Ou bien ma foi nous allons boire ,
Chacun quatre coups seulement ,
Puis reposer tranquilement ;
Car nous n'avons point de l'année
Fait une si grande journée.
Un tel parti si bien conçu ,
Unanimement fut reçû ,
Et le diable de Rapiniere ,
Malicieux à l'ordinaire ,
Dit que sans chercher au taudis ,
Il falloit prendre les habits ,
De deux jeunes gens de la Ville ,
Que la chose étoit fort facile ,
Parce
JANVIER. 1731 .
>
Farce que ces deux jeunes gens ,
Dans le Tripot joüeroient long-temps;
Que la Caverne pourroit faire ,
Avec son habit ordinaire ,
Tel personnage qu'on voudroit ,
Que partout elle passeroit ,
Soit dans une Piece tragique ,
Soit dans une Piece comique ;
Aussi-tôt dit , aussi-tôt fait
Les Comédiens en effet ,
Vuiderent bien vîte une pinte ,
La mesure parut succinte ,
Et s'emparant desdits habits ,
Ils furent bien- tôt travestis ;
L'Assemblée étant fort grossie ,
Par la meilleure Bourgeoisie ,
Prit place dans un Galetas ,
Dont le plancher étoit très-bas ;
On leva d'abord un drap sale ,
D'une maniere originale ,
Et l'on vit sur un matelas ,
Le Destin qui paroissoit las ,
Le Corbillon de quelque Nonne ,
Lui servoit alors de Couronne ,
Il n'avoit pas de quoi choisir ,
Donc il faloit bien s'en servir ;
Se frotant les yeux et l'oreille ,
Comme un homme qui se réveille ,
's MERCURE DE FRANCE.
Il fit un peu le rencheri ,
Et sur un ton de Mondori ,
Parce qu'il étoit à la mode ,
Récita le Rôle d'Herode ,
Qui commence par ces cinq mots ,
Ombre qui troubles mon repos.
Il déclama d'un grand courage ;
Et l'emplâtre de son visage ,
N'empêcha pas qu'on ne vît bien ,
Qu'il étoit bon Comedien ;
La Caverne fit à merveille ,
L'on n'avoit point vû sa pareille ,
Et tout le monde l'approuva ,
Dans les Rôles qu'elle joua ,
De Mariane et de Salome ;
La Rancune n'étoit pas homme ,
A ne point plaire au Spectateur ,
Aussi parut-il bon Acteur ,
En montrant beaucoup de noblesse ,
Dans plusieurs Rôles de la Piece ,
On alloit tirer le Rideau
Ce n'étoit pas la le moins beau ,
Quand le diable , qui rien n'oublie ,
Fit finir cette Tragedie ,
Non-pas par la cruelle mort ,
De Mariane qu'on plaint fort
Ni par les desespoirs d'Hérode ;
Mais si le sieur Scaron ne brode ,
Y
Ce
JANVIER.
1731 .
Ce fut par mille coups complets ,
Du poing , des pieds , sans les soufflets
Par des juremens effroyables ,
Que n'auroient pas fait tous les diables
Dans une telle occasion ,
Et par une information ,
Que fit le sieur la Rapiniere ,
Fort expert en cette matiere ,
Et plus sçavant que .... mais ,
hola !
Notre Chapitre finit là.
Par M. le Tellier d'Orvilliers , Lieutenant
General d'Epée à Vernon.
La suite pour les Mercures suivans.
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Résumé : LE ROMAN COMIQUE, CHAPITRE SECOND. POEME. Quel homme étoit le Sieur de la Rapiniere.
Le texte extrait du 'Roman Comique' intitulé 'Quel homme étoit le Sieur de la Rapinière' présente le Sieur de la Rapinière comme le 'Rieur ordinaire' de la ville du Mans, une figure connue dans de nombreuses villes. Il fait partie d'une troupe de comédiens qui se retrouvent en difficulté après qu'un portier ait tué un Fuzelier à Tours, forçant les comédiens à fuir. La troupe, composée de la Rapinière, Destin, la Caverne, la Tripotiere et la Rancune, se trouve confrontée à un problème : ils manquent d'habits pour jouer. Ils décident alors d'emprunter les vêtements de deux jeunes gens de la ville pour se déguiser et monter une pièce devant une assemblée de bourgeois. La représentation commence, mais elle est interrompue par une bagarre déclenchée par le diable, mettant fin à la tragédie. Le chapitre se termine sans conclusion définitive, laissant la suite des événements à découvrir dans les prochains numéros du Mercure de France.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 9-30
HUITIEME Lètre sur la bibliotèque des enfans, etc.
Début :
Monsieur, La plupart des lecteurs ne cherchant qu'à s'amuser [...]
Mots clefs :
Éducation, Enfants, Bureau typographique, Lecture, Écriture, Orthographe, Grammaire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : HUITIEME Lètre sur la bibliotèque des enfans, etc.
HUITIEME Lètre sur la bibliotèque
des enfans , etc.
MONSIEUR ,
La plupart des lecteurs ne cherchant
qu'à s'amuser , parcourent un Mercure
sans beaucoup d'atention , au hazard de
ne pas entendre ce qu'ils lisent . Le mal
ne seroit pas grand s'ils s'en tenoìent-là ;
mais ils veulent ensuite parler , raisoner
et mème juger de ce qu'ils avouent
n'avoir
* MERCURE DE FRANCE.
n'avoir pas bien compris : leur défaut,
d'aplication leur fait souvent acuser d'obscurité
et de négligence l'auteur le plus
clair et le plus laborieus ; car la critique
verbale bien ou mal fondée , sera
toujours plus aisée à pratiquer , que la
composition de quelque ouvrage ; il est
dificile de parer le coup. cependant en
faveur des persones bien intentionées qui
n'ont pas le tems de lire tout , et des
persones indulgentes qui voudront bien
me pardoner des repetitions necessaires
sur l'importante matiere de la premiere
éducation des enfans , je vaì récapituler
ici le plus succintement qu'il me sera
possible , ce qui dans les précedentes lètres
a été dit , pour faire voir 1 ° . que
les enfans de deus à trois ans sont capables
des prémières operations litéraìres ; 2 ° .
que les métodes vulgaires ne sont ni sufisantes
, ni proportionées à l'age et à la
foiblesse de la prémière enfance ; 3 ° . que
la métode du bureau tipografique a les
conditions convenables et proportionées
à tout age d'enfant ou d'home mis aus
premiers élémens des lètres .
L'ordre métodique et géométrique n'est
par malheur guere utile que pour le petit
nombre de lecteurs capables de saisir , de
retenir la suite , la liaison et l'enchainement
des idées ; de voir et d'envisager
en
JANVIER. 1731. IF
en mème- tems les principes et les consequences
; mais le comun des lecteurs
à l'exemple des enfans , conte et détache,
pour ainsi- dire , les mots et les idées
sans faire atention aus principes , aus raports
et aus conséquences qu'on en peut
tirer. Les répetitions serviront donc ici
quelquefois à éclaircir les choses , et mème
à rendre souvent plus atentif un lecteur
distrait. que je dise , par exemple ,
à un lecteur vulgaire qu'il y a quatre
triangles dans un quaré divisé par ses deust
diagonales , il m'entendra d'abord ; si je
dis qu'il y en a sis , il comencera à ne
plus voir ; et si j'ajoute qu'il y en a huit ,
il n'en vera peut ètre pas plus clair : mais
si je continue à répeter qu'il y a huit
triangles dans ce quaré , le lecteur obligé
par cète répetition de revenir sur ses pas ,
et d'y penser avec plus de soin , parviendra
enfin sans éfort de génie , à la petite
découverte des huit triangles de ce quaré,
savoir , des quatre grans come des quatre
petits : j'espere que sans beaucoup de sagacité
, on fera à peu près la mème chose
sur le détail des avantages de la métode
du bureau tipografique.
Ceus qui dans l'éducation ne content
presque pour rien la diference de deus
ou trois ans entre des enfans comencés -
plutot ou plus tard , voudront bien me
permètre
12 MERCURE DE FRANCE.
permètre ici une comparaison : je suposo
donc deus enfans comencés l'un de bone
heure par la métode du bureau tipografique
, et l'autre plus tard par la métode
vulgaire , et je dis que , si le premier maitre
a bien semé et bien recueilli la
premiere
anée , il poura semer et recueillir
encore plus la segonde anée , et encore
plus la troisième anée. or , par quel moyen
le segond maitre semant plus tard et recueillant
peut-ètre moins , poura-t'il jamais
ratraper la progression des avantages
réels du bureau tipografique ? Dirat'on
que
la terre négligée , inculte et en
friche , sera ensuite plus fertile ? il faudra
examiner si cète fécondité sera en
bon ou en mauvais grain ; car il y a bien
des chams dont on ne peut jamais extirper
totalement les mauvaises herbes.
Autre comparaison ; un courier , fut- il
des plus robustes , qui part plus tard , qui
prend la plus longue route et qui va plus
lentement , poura- t'il jamais ateindre un
autre courier parti plutot , qui a pris le
chemin le plus court et qui va plus vite ?
il s'agit donc de savoir si la métode du
bureau tipografique a tant d'avantages sur
la métode vulgaire , et c'est ce que je
vai démontrer au lecteur atentif et nulement
prévenu,
1.L'experience m'aïant fait voir depuis
lontems
JANVIER. 1731. 13
,
lontems l'imperfection des métodes vulgaires
qui faute de pouvoir faire
mieus , regardent come perdu le tems .
de la premiere enfance , j'ai cherché
les moyens d'employer utilement les premieres
anées de l'enfant , et j'ai trouvé
qu'on pouvoit sans danger pour le corps,
lui montrer la figure des lètres , et ranger
ces lètres devant lui sur la table du
bureau , mème avant qu'il sut articuler
la moindre silabe , il voudra bientot ,
come les singes , faire la mème chose par
un mouvement organique et machinal ,
sur tout si l'on a la précaution de le presenter
souvent devant le bureau tipografique
, et de lui doner à manger et à
jouer sur cète mème table faite exprès pour
lui , et c'est là un des premiers avantages
du bureau tipografique sur la métode vulgaire
, qui afecte de mépriser cetè diligence
, et se flate de pouvoir ensuite également
enseigner tout , quoique plus tard
et avec plus de tems ou plus de vie.
Dès que l'enfant articulera des sons et
qu'il fera bien l'Eco , on poura lui apren
dre come à un peroquet la veritable
dénomination des lètres , et cète dénomination
metra peu à peu les enfans en état
de lire à trois et à quatre ans , bien mieus
que ne lisent ordinairement les enfans
de sis à sèt ans , par la métode vulg ire.
B LC
14 MERCURE DE FRANCE.
Le premier aïant d'abord été mis dans
l'agréable , la bone et la nouvele route ,
-va toujours gaìment son chemin ; au lieu
que les autres mis dans la triste , l'anciene
et souvent la mauvaise voie , ont
peine à revenir sur leurs pas , et ne sacrifient
pas volontiers leurs amusemens
agréables , quoique frivoles , aus ocupations
literaires qu'ils trouvent pénibles
dans un age plus avancé. Les peres et les
meres sont toujours contens des petits.
enfans qu'ils gâtent , mais ils trouvent
mauvais ensuite qu'un gouverneur ou un
précepteur n'ait pas le talent d'en faire
un prodige : il y a bien du préjugé et de
l'aveuglement sur cet article.
3. Selon la métode du bureau tipografique
un enfant , avant que de savoir lire,
poura imprimer toutes sortes de langues
mortes ou vivantes , il ne faut avoir pour
cela que des ïeus et des mains , car il est
bien plus aisé d'imprimer , par exemple ,
du latin et du françois , qu'il n'est aisé
de les lire. La grande ignorance de la
plupart des compositeurs d'une imprimerie
ne le prouve que trop ; d'ailleurs il
est clair qu'un sourd voyant , pouroit
ètre imprimeur , mème chès M. Ballard
pour la musique.
4. Un enfant de trois à quatre ans
qui conoit par les feus la figure des
lètres,
JANVIER. 1730. IS
>
lètres , et ensuite par l'oreille , le son des
caracteres simples ou combinés , saura
bientot écrire ou imprimer les sons qu'on
lui donera sur des cartes , et ceus qu'on
lui dictera il poura s'ocuper pour lors
avec autant de plaisir que les autres enfans
ont ordinairement de dégout par
les métodes vulgaires . Le premier nouri
dans les lètres , en fait ses amusemens
pendant que les autres , au contraire n'y
trouvent que des crois et des épines . si
les persones zelées et charitables , qui
dirigent les écoles des pauvres , conoissolent
donc le mérite et l'utilité de la métode
tipografique , elles en introduiroìent
bientot l'usage dans les paroisses et dans
les Monasteres , en fesant bâtir ou construire
des amfiteatres où les petits enfans
aprendro ent pour lors presque seuls et
d'eus mèmes , en voyant travailler les
que les grans. J'oserai donc dire
parens
et les maitres bien intentionés , aprouveront
et pratiqueront l'usage du bureau,
dès qu'ils en auront vu les avantages réels,
pratiques , et superieurs à ceus des métodes
vulgaires.
5. Selon cète métode , l'enfant aprendra
facilement et par des principes surs
non captieus ni équivoques , l'ortografe
des sons ou de l'oreille ; ce que la plupart
des maitres ignorent toute leur vie .
Bij L'enj
16 MERCURE DE FRANCE.
L'enfant aprendra par pratique et par téorie
l'ortografe courante et d'usage , anciene
et nouvelle, d'une maniere à bien lire
dans toute sorte de livres , et à se rendre
ensuite capable de faire un bon chois
d'ortografe françoise.
6. L'enfant saura lire dans le manuscrit
en mème- tems que dans les livres ,
et cela par la pratique journalière d'avoir
imprimé des tèmes interlinéaires sur la
table du bureau , non - seulement avec
des caractères romains , mais encore avec
des caracteres italiques et manuscrits.
7. Le petit enfant poura savoir bien
lire le françois , le latin et le grec avant
l'age auquel , selon la métode vulgaire , la
plupart des enfans ne sont pas encore mis
à l'A BC ; avantage inexprimable , qui influe
, non- seulement dans toute la suite
des études , mais dans toute la vie.
8.Les A BC ordinaires , faus ,équivoques
et captieus,induisent les enfans en êreur et
les exposent souvent à des chatimens injustes;
desorte que, sans diminuer en rien le
mérite et la juste réputation des bons
maitres , on peut dire que la métode vulgaire
dans toute l'Europe n'a pas les raports
necessaires entre les lètres et les
sons , ou entre les signes et les sons des
choses signifiées ; au lieu que la métode
du bureau tipografique n'étant fondée que
sur
JANVIER. 1731. 17
sur la verité et sur la justesse de ces mè
mes raports remarqués il y a plus d'un
siecle, par de très - habiles maitres , cète
métode , dis je , atache agréablement au
jeu tipografique le mème enfant qui venoit
de pleurer à la seule vue de la persone
qui lui montroit les lètres selon la
métode des écoles.on ne doit pas craindre,
au reste , que l'enfant ignore dans la suite
la fausse et vulgaire dénomination des
lètres ; il ne l'aprendra que trop tot , en
vironé de persones souvent oficieuses à
contre-tems , quand il s'agit de bien nomer
les lètres.
9. La lecture est d'abord mise à profit
sur la table du bureau : on y aprend à
conoìtre et à sentir les parties du discours
indéclinables , déclinables et conjugables
de la langue françoise et de la langue la
tine , laquelle conoissance dispose les enfans
à employer plutot leur loisir et
d'une maniere plus aisée , plus utile ,
plus sure et plus agréable. Bien des
maitres indépendament de l'usage du
bureau tipografique , ont abandoné la
métode vulgaire des rudimens téoriques,
pour suivre celle du rudiment pratique
dont j'ai doné l'essaì aprouvé des meilleurs
métodistes , filosofes non prévenust
10. Fesant imprimer à l'enfant les deus
langues en glose interlinéaire et mot à
B iij mot
18 MERCURE DE FRANCE.
mot , on dispose et prépare plu - tot son
imagination aus grandes operations literaires
et grammaticales que la métode
vulgaire n'entreprend pas ordinairement
d'enseigner à des enfans de deus à trois.
et à quatre ans.
11. L'enfant aprend par pratique les
terminaisons des noms et des verbes , et
enfin à décliner et à conjuguer ; il aprend
les genres , les déclinaisons , les prêterits
et les supins , les concordances , et partie
de la sintaxe , par les principales règles
donées sur des cartes en glose interlinealre
, et par les exemples pratiques donés
aussi sur des cartes , et expliqués peu à
peu et de vive vois , à mesure qu'il les
imprime sur sa table.
12. On écrit ce qu'on veut dans les
tèmes donés sur des cartes : chaque jour
fournit son sujet , et l'on met à profit
le chois des programes , des afiches , des
placars , des tèses , des avis , des anonces,
des enseignes , et enfin de tous les écritaus
publics ; la table du bureau devient un livre
ouvert à tous les spectateurs ; livre
cheri de l'enfant qui en est le composi
teur , et livre qui n'est jamais nuisible à
sa posture come le sont ordinairement
les petits livres élementaires .
13. Par le moyen du dictionaire du bu--
reau tipografique , l'enfant fera provision
de
JANVIER. 1731 . 19
de plusieurs miliers de mots latins et françois
avant l'age de cinq à sis ans ; avan
tage qui doit nécessairement influer sur
toute la suite des études , et qu'on n'aquiert
que
fort tard par la routine vulgaire.
14. L'enfant aprendra , non -seulement
Portografe de l'oreille et des ïeus par ra
port aus lètres , mais encore l'accentuation
, la ponctuation , les petites abrevia
rions françoises , latines et greques , et
la quantité latine , par la pratique jour
nalière du bureau , où il trouvera les signes
, les voyèles longues et brèves
come caracteres utiles et necessaires pour
Fimpression de la glose interlinéaire ; ce
que la métode vulgaire ne peut faire pratiquer
à l'enfant que lorsqu'il sait écrire,
c'est-à-dire fort tard.
15. L'enfant qui imprimera du latin
avec de beaus caracteres manuscrits , disposera
et préparera son imagination pour
mieus faire imiter ensuite à sa main , les
traits , les figures et les lètres , dont la
parfaite image sera vivement , distinc
tement et profondément gravée dans son
cerveau.
16. Par l'impression des tèmes donés à
l'enfant , il poura aprendre de bone heu
re les élémens de tout ce qu'on pourolt
lui montrer par le moyen de l'écriture ;
B iiij
c'est18
MERCURE DE FRANCE.
mot , on dispose et prépare plu-tot son
imagination aus grandes operations literaires
et grammaticales que la métode
vulgaire n'entreprend pas ordinairement
d'enseigner à des enfans de deus à trois.
et à quatre ans.
11. L'enfant aprend par pratique les
terminaisons des noms et des verbes , et
enfin à décliner et à conjuguer ; il aprend
les genres , les déclinaisons , les prêterits
et les supins , les concordances , et partie
de la sintaxe , par les principales règles
donées sur des cartes en glose interlinéal
re , et par les exemples pratiques donés
aussi sur des cartes , et expliqués peu
peu et de vive vois , à mesure qu'il les
imprime sur sa table.
à
12. On écrit ce qu'on veut dans les
tèmes donés sur des cartes : chaque jour
fournit son sujet , et l'on met à profit
le chois des programes , des afiches , des
placars , des tèses , des avis , des anonces,
des enseignes, et enfin de tous les écritaus
publics ; la table du bureau devient un livre
ouvert à tous les spectateurs ; livre
cheri de l'enfant qui en est le compositeur
, et livre qui n'est jamais nuisible à
sa posture come le sont ordinairement
les petits livres élementaires .
13. Par le moyen du dictionaire du bureau
tipografique , l'enfant fera provision
de
JANVIER. 1731 . 19
de plusieurs miliers de mots latins et françois
avant l'age de cinq à sis ans ; avan➡
tage qui doit nécessairement influer sur
toute la suite des études , et qu'on n'a→
quiert que fort tard par la routine vulgaire.
14. L'enfant aprendra , non-seulement
Portografe de l'oreille et des feus par raport
aus lètres , mais encore l'accentuation
, la ponctuation , les petites abreviations
françoises , latines et greques , et
la quantité latine , par la pratique jour
nalière du bureau , où il trouvera les signes
, les voyèles longues et brèves
come caracteres utiles et necessaires pour
Fimpression de la glose interlinéaire ; ce
que la métode vulgaire ne peut faire pratiquer
à l'enfant que lorsqu'il sait écrire,
c'est-à-dire fort tard.
15. L'enfant qui imprimera du latin
avec de beaus caracteres manuscrits , disposera
et préparera son imagination pour
mieus faire imiter ensuite à sa main , les
traits , les figures et les lètres , dont la
parfaite image sera vivement , distinc
tement et profondément gravée dans son
cerveau.
16. Par l'impression des tèmes donés à
l'enfant , il poura aprendre de bone heu
re les élémens de tout ce qu'on pourolt
lui montrer par le moyen de l'écriture ;
Biiij c'est20
MERCURE DE FRANCE
c'est-à- dire , qu'on poura lui enseigner
tous les principes sensibles , et lui doner
par là les premieres notions des arts et
des siences. Il a été déja démontré que
les enfans de deus à trois ans sont capables
de ces premières notions , par le
moyens des idées et des mèmes opérations
dont il se servent pour aprendre
leur langue ; verité à laquelle les seuls
préjugés empêchent de faire toute l'atention
necessaire. L'experience et l'aveu
des maîtres qui en faveur du corps négligent
, éloignent , diferent et retardent
les premiers soins literaires , au préjudice
de l'esprit prouvent l'insufisance des
métodes vulgaires dans l'éducation diligente
et hâtée des enfans. or la métode
du Bureau tipografique alant toujours ,
pour ainsi dire , de niveau avec l'enfant ,
done les moyens surs et infaillibles de le
suivre pas à pas ,
et de comancer sans
danger , à lui former plutot l'esprit et le
coeur. on peut donc , sans temerité
avancer cète proposition , que les enfans
étant capables d'aprendre , plutot que la
métode vulgaire n'est propre à les enseigner
, on doit aprouver et préferer cele
du Bureau tipogràfique ; ce que je vai tacher
de confirmer encore par le détail
des choses sensibles , que l'on peut montrer
à un petit enfant , avant qu'il soit en
état
JANVIER. 1731 . 21
état d'y ètre conduit par les métodes
ordinaires.
17. Quoique l'erreur , le mensonge ,
l'imposture , la charlatanerie , la chicane
et l'injustice , abusent des mots et dés
expressions de la langue françoise , il
ne s'ensuit pas que dans un ouvrage la
verité , la justice , et la bone foi doivent
s'abstenir de ces mèmes mots et
de ces mèmes expressions ; le zèle pour
le bien public ne perd jamais ses droits ;
c'est pourquoi je demande un peu d'indulgence
, ou de tolerance de la part des
maitres trop prévenus , et qui mal à
propos s'identifiant , pour ainsi dire ,
avec les métodes vulgaires qu'ils pratiquent
, ont le courage de mètre sur leur
conte , ce que je n'ai jamais pretendų
dire que contre les métodes sur l'abus.
desqueles , il y a toujours eu liberté d'écrire
, malgré le respect et le préjugé en
faveur du DESPAUTERE du .......
De tout ce que j'aí , dit jusqu'ici on peut
conclure qu'il sera aisé d'enseigner à l'enfant
le latin , des mèmes mots qu'il aprendra
d'abord en françois , et pour cet éfet
on essayera de suivre peu à peu l'ordre et:
la métode qu'indiquera la langue mater
nele ou d'usage .
etc.
18. On donera à l'enfant , et sur des
cartes , les noms des persones et des ob
By Jets
22 MERCURE DE FRANCE
jets qu'il voit et qu'il conoìt ; cela servira
à le familiariser avec les raports des signes
et des choses signifiées.
19. Les figures de la Bible fournissent
la liste des noms propres des patriarches ,
des juges, des Rois , des pontifes , des grans
homes, etc. ces listes ou suites historiques,
généalogiques , cronologiques et géografiques,
devienent la base de l'histoire universéle
pour un enfant de 3 à 4 ans.
20. La Fable , les Métamorfoses d'ovide
, les Dieus , les Déesses , les demi - Dieus
les Heros du Paganisme fournissent aussi
dequoi varier agréablement l'exercice
tipografique .
21. L'histoire profane fournit également
des époques , des listes , des suites
qui amusent et instruisent l'enfant de 3
à 4 ans. Toutes les cartes étant numé
rotées , pouront ètre lues , et rangées selon
l'ordre cronologique sur la table du
Bureau.
22. On poura doner ainsi les souve-.
rains et les capitales de tous les Etats du
monde , et les capitales des provinces ou
des Gouvernemens de France ; et à l'ocasion
des mots , des choses ou des racines
historiques , on poura amuser et instruire
l'enfant , en essayant peu à peu de lui
doner de tems en tems des idées sensibles
sur le bien et le mal , sur le vice et
la:
JANVIER. 1731 . 23
fa vertu , sur le juste et l'injuste , et sur
Fe vrat et le faus.
23. On peut doner des cartes de bla
son , faire imprimer sur la table du Bureau
les termes héraldiques , et en montrer
tous les objets sensibles quand l'ocasion
s'en presentera.
24. On pratiquera facilement les premières
règles de l'aritmétique et de l'algèbre
sur la table du Bureau , aiant sur
des cartes les chifres et les signes nécessaires
pour ces petites opérations , et
pouvant d'ailleurs employer utilement
des jetons , des marques , et des dés ;
pour rendre les nombres plus sensibles.
25. On peut également doner la conoissance
des premiers élémens de géométrie
sur les lignes , les surfaces et les solides
des corps réguliers , avec lesquels
un enfant se familiarise , et se rend peu
à peu capable de toutes les parties sen
sibles des matématiques , sans en excepter
les sections coniques donées aussi en
relief.
26. La Musique mème trouvera son
avantage sur la table du Bureau. on pou .
ra montrer à l'enfant la game et le dia
pason , sur la tringle ou la règle de bois
mobile qui a servi à l'enfant pour le jeu
de la première classe. on y poura done
mètre les clés , les notes et les signes , que
B.vj L'en
24 MERCURE DE FRANCE
l'enfant aura également sur des cartes ;
qu'il poura ranger vis-à - vis de ces mèmes
signes marqués sur la tringle ou re
gle de bois , il se metra par là en état de
lire et de conoître le clavier d'une épinete
ou d'un clavecin , qui pouront lui
doner ensuite le son et le ton des figures
ou des notes conues, et colées sur les touches
d'un clavier.
,
27. Chaque art peut également ètre
rendu sensible à un petit enfant , si l'on
veut bien prendre la peine de lui démontrer
l'usage des choses , et de lui faire
imprimer le nom des outils , des objets
et des pièces des machines qu'on lui présentera
; c'est ainsi que l'anatomiste , le
botaniste et le machiniste, pouront amuser
et instruire de bone heure leurs petits
enfans ; l'ainé deviendra ensuite le maitre
de ses frères .. Des os , des plantes , des
Machines , des outils , des instrumens
des Balances , des poids , des mesures, des
Jétons , des Dés , des monoies , des médailes
, etc. Tout cela fournit l'abondance.,
la variété , le plaisir du chois, et done par
consequent les moyens de mètre bien à
profit les premieres anées de l'enfance ,.
par toute sorte de métodes , mais non
pas si - tot ni si-bien que par la métode
du Bureau tipografique.
28. On peut faire aprendre l'A , B , C.
Grec
JAVIER. 1731. 25
crec , Ebreu , Arabe , etc. avec l'A , B , C ,
François; faire imprimer du françois avec
les caracteres grecs , et avec les lètres
ébraïques , de droit à gauche , et montrer
ensuite la casse des imprimeurs, avec des
caracteres renversés , lus à rebours ; avantage
considérable pour les enfans des im
primeurs et des graveurs,ausquels on pou
ra doner un casseau , dont les cartes seront
distribuées come les lètres d'un casseau
d'imprimerie , et pour lors en peu de
mois on poura leur enseigner à imprimer
sur le Bureau les racines latines , gre--
ques , ébraïques , caldaïques , et arabes ;
de mème qu'aus enfans destinés à l'église
ou à l'étude des langues saintes et
orientales.
29. On poura faire imprimer en fran
çois , des rimes ou des vers de peu de
silabes , pour sonder , essayer et former
l'oreille de l'enfant dans la lecture soutenue
et dans la déclamation . on poura
jouer au jeu des rimes après avoir fait
déviner les sons et les lètres des mots ..
on peut doner de petites anagrames , et
mème des vers latins , examètres et pen-.
tamètres , pour faire aprendre à conoìtre
, à sentir et à ranger les piés de cète
structure de vers , dont on trouvera tous
les mots sur autant de cartes diférentes
dans la derniere logète du se rang sous.
cele de la
syntaxe
-
26 MERCURE DE FRANCE.
Exemple :
Tot tibi sunt dotes , Virgo , quot sïdërå.
coelo.
omnia sunt hominum , tenůī pēndentia filo
Et subito casu , que valuere ruunt.
30. On metra donc d'abord un en--
fant en état . d'imprimer des mots ,
des lignes , des frases en glose interli
naire , en latin et en françois ; 2° . d'imprimer
et de faire lui - mème la construc
tion du texte de rhèdre chifré ou numeroté.
3 ° . de faire de petites versions.
4. d'imprimer aussi de petites compositions
; et ces quatre exercices fourni
ront au maitre Focasion de doner à l'enfant
plus d'idées et de conoissances literaires
et grammaticales , qu'aucun rudiment
vulgaire n'en poura jamais doner sitôt
et en si peu de tems .
31. Les enfans du Bureau tipografique
seront plutot en état d'exercer leur mé
moire et d'aprendre quelque chose par
coeur , non seulement par Foreille , étant
siflés come des oiseaus , mais encore par
les ïeus , dès qu'ils sauront lire seuls.
32. Un enfant sera plutot en état de
travailler seul avec un domestique ou
avec d'autres persones , pendant que le
maître sera absent , ou ocupé à quelque
autre chose et l'enfant , plutot que de
A
Bester
JANVIER. 1731. 27
et à
rester oisif, vera toujours avec plaisir un
domestique employé à imprimer les cartes
de la garniture du bureau , ou à tailler
rogner des cartes sur un modele de
fer -blanc proportioné aus logetes des petits
bureaus portatifs de 4 piés de long
dont les cartes apelées Etrenes mignones
auront is lignes de largeur , et 2 pouces.
de hauteur , ainsi qu'on l'a déja pratiqué.
33. Non seulement les enfans qui parlent
, mais encore les sours et les muets
pouront aprendre presque tout , excepté
les sons , par les combinaisons pratiques
des signes sensibles , extérieurs , soumis à
la vue, et en passant , pour ainsi dire , des
ïeus du corps à ceus de l'esprit..
34. Les abécédaires de tout age seront
moins honteus sur la table d'un bureau ,.
que sur la crois de pardieu , leur intelligence
et leur empressement les feront lire.
passablement dans un mois ou deus..
35. L'enfant du Bureau conservera_sa
main en aprenant à écrire , et poura sans
préjudicier à l'étude des langues , n'écrire
jamais au comencement que sous
les ieus et sous la main d'un bon maître.
Je parleraí ailleurs d'une métode tres - utile
pour aprendre à écrire en assés peu de
tems.
36. L'enfant conoìtra plu-tot l'usage
des livres , des dictionaires , et des tables
des :
28 MERCURE DE FRANCE.
des matières , qu'on lui aprendra à parcourir
et à feuilleter tout seul ; il aquêra
aussi plu-tôt le gout de la lecture , de
l'étude , du travail , des livres , et des savans
; et il sera enfin plutot et beaucoup
plus sensible à la gloire et à l'émulation
literaire , que ne le sont ordinai
rement les enfans conduits et dirigés par
la métode vulgaire et tardive.
qua-
37. L'enfant aura plu - tôt l'adresse des
doits et des mains ; adresse qui manque
souvent à la plupart des enfans de
lité , peu exercés à l'action de la maîn ;
l'enfant aura plutot le gout , le coup
d'euil , l'esprit d'ordre et l'esprit rangé
si rares parmi les homes , et plus rares encore
parmi les jeunes gens.
38. L'enfant du Bureau est mis en état
d'aler plutot et plus fort au colege, et parconsequent
d'entrer plutot à l'académic
pour y faire tous ses exercices , avantage
considerable pour la jeunesse destinée et
apelée au noble et glorieus métier des
armes.
39. Beaucoup de savans par principe
de santé , travaillent debout , à l'exemple
des imprimeurs et de plusieurs autres nobles
artisans ; or l'action , l'exercice et le
mouvement du jeu tipografique , entre
tenant aussi le corps en santé , done en
mème- tems à l'esprit la meilleure culture
possi
JANVIER. 1730. 2
possible de l'aveu des medecins et de
'ESCULAPE de notre siècle . on ne prétend
pas dire par là que l'exercice du Bureau
rende immortel ou invulnerable ; cette
remarque est pour les bones gens qui ne
jugent des choses que par l'évenement, et
qui regardent souvent come un éfet necessaire
, ce qui n'est qu'un pur accident
40. La métode du Bureau tipografique
donera lieu aus bons maitres d'ètre encore
plus atachés et plus atentifs à leur de
voir , et plus utiles à leurs éleves ; ils auront
plus souvent ocasion de precher
d'exemple ; article essentiel dont se dispensent
volontiers bien des maîtres négligens
et indiferens sur l'éducation d'un
enfant , ou trop ocupés du seul esprit
mercenaire, ces derniers ne manqueront
pas de faire leurs éforts contre la métode
du Bureau , qui les remet,pour ainsi dire,
à l'A , B, C , et qui demande de leur part,
au moins au comancement , plus d'assiduité
et de soins que n'en paroit exiger
la routine vulgaire.
41. Persuadé de la verité , de l'utilité et
de la diligence de cete métode , j'ose assurer
et prédire que toutes choses dail
leurs égales , les viles qui les premieres
feront usage du Bureau tipografique , seront
dans la suite , à proportion des écoles
et des écoliers , les premieres à produi
re
30 MERCURE DE FRANCE.
>
re le plus grand nombre d'enfans et
d'homes celebres dans les arts et dans les
siences.
Si on ne goute point la métode du Bureau
tipografique , je m'en étone , et si on la
goute , je m'en étone de même.
des enfans , etc.
MONSIEUR ,
La plupart des lecteurs ne cherchant
qu'à s'amuser , parcourent un Mercure
sans beaucoup d'atention , au hazard de
ne pas entendre ce qu'ils lisent . Le mal
ne seroit pas grand s'ils s'en tenoìent-là ;
mais ils veulent ensuite parler , raisoner
et mème juger de ce qu'ils avouent
n'avoir
* MERCURE DE FRANCE.
n'avoir pas bien compris : leur défaut,
d'aplication leur fait souvent acuser d'obscurité
et de négligence l'auteur le plus
clair et le plus laborieus ; car la critique
verbale bien ou mal fondée , sera
toujours plus aisée à pratiquer , que la
composition de quelque ouvrage ; il est
dificile de parer le coup. cependant en
faveur des persones bien intentionées qui
n'ont pas le tems de lire tout , et des
persones indulgentes qui voudront bien
me pardoner des repetitions necessaires
sur l'importante matiere de la premiere
éducation des enfans , je vaì récapituler
ici le plus succintement qu'il me sera
possible , ce qui dans les précedentes lètres
a été dit , pour faire voir 1 ° . que
les enfans de deus à trois ans sont capables
des prémières operations litéraìres ; 2 ° .
que les métodes vulgaires ne sont ni sufisantes
, ni proportionées à l'age et à la
foiblesse de la prémière enfance ; 3 ° . que
la métode du bureau tipografique a les
conditions convenables et proportionées
à tout age d'enfant ou d'home mis aus
premiers élémens des lètres .
L'ordre métodique et géométrique n'est
par malheur guere utile que pour le petit
nombre de lecteurs capables de saisir , de
retenir la suite , la liaison et l'enchainement
des idées ; de voir et d'envisager
en
JANVIER. 1731. IF
en mème- tems les principes et les consequences
; mais le comun des lecteurs
à l'exemple des enfans , conte et détache,
pour ainsi- dire , les mots et les idées
sans faire atention aus principes , aus raports
et aus conséquences qu'on en peut
tirer. Les répetitions serviront donc ici
quelquefois à éclaircir les choses , et mème
à rendre souvent plus atentif un lecteur
distrait. que je dise , par exemple ,
à un lecteur vulgaire qu'il y a quatre
triangles dans un quaré divisé par ses deust
diagonales , il m'entendra d'abord ; si je
dis qu'il y en a sis , il comencera à ne
plus voir ; et si j'ajoute qu'il y en a huit ,
il n'en vera peut ètre pas plus clair : mais
si je continue à répeter qu'il y a huit
triangles dans ce quaré , le lecteur obligé
par cète répetition de revenir sur ses pas ,
et d'y penser avec plus de soin , parviendra
enfin sans éfort de génie , à la petite
découverte des huit triangles de ce quaré,
savoir , des quatre grans come des quatre
petits : j'espere que sans beaucoup de sagacité
, on fera à peu près la mème chose
sur le détail des avantages de la métode
du bureau tipografique.
Ceus qui dans l'éducation ne content
presque pour rien la diference de deus
ou trois ans entre des enfans comencés -
plutot ou plus tard , voudront bien me
permètre
12 MERCURE DE FRANCE.
permètre ici une comparaison : je suposo
donc deus enfans comencés l'un de bone
heure par la métode du bureau tipografique
, et l'autre plus tard par la métode
vulgaire , et je dis que , si le premier maitre
a bien semé et bien recueilli la
premiere
anée , il poura semer et recueillir
encore plus la segonde anée , et encore
plus la troisième anée. or , par quel moyen
le segond maitre semant plus tard et recueillant
peut-ètre moins , poura-t'il jamais
ratraper la progression des avantages
réels du bureau tipografique ? Dirat'on
que
la terre négligée , inculte et en
friche , sera ensuite plus fertile ? il faudra
examiner si cète fécondité sera en
bon ou en mauvais grain ; car il y a bien
des chams dont on ne peut jamais extirper
totalement les mauvaises herbes.
Autre comparaison ; un courier , fut- il
des plus robustes , qui part plus tard , qui
prend la plus longue route et qui va plus
lentement , poura- t'il jamais ateindre un
autre courier parti plutot , qui a pris le
chemin le plus court et qui va plus vite ?
il s'agit donc de savoir si la métode du
bureau tipografique a tant d'avantages sur
la métode vulgaire , et c'est ce que je
vai démontrer au lecteur atentif et nulement
prévenu,
1.L'experience m'aïant fait voir depuis
lontems
JANVIER. 1731. 13
,
lontems l'imperfection des métodes vulgaires
qui faute de pouvoir faire
mieus , regardent come perdu le tems .
de la premiere enfance , j'ai cherché
les moyens d'employer utilement les premieres
anées de l'enfant , et j'ai trouvé
qu'on pouvoit sans danger pour le corps,
lui montrer la figure des lètres , et ranger
ces lètres devant lui sur la table du
bureau , mème avant qu'il sut articuler
la moindre silabe , il voudra bientot ,
come les singes , faire la mème chose par
un mouvement organique et machinal ,
sur tout si l'on a la précaution de le presenter
souvent devant le bureau tipografique
, et de lui doner à manger et à
jouer sur cète mème table faite exprès pour
lui , et c'est là un des premiers avantages
du bureau tipografique sur la métode vulgaire
, qui afecte de mépriser cetè diligence
, et se flate de pouvoir ensuite également
enseigner tout , quoique plus tard
et avec plus de tems ou plus de vie.
Dès que l'enfant articulera des sons et
qu'il fera bien l'Eco , on poura lui apren
dre come à un peroquet la veritable
dénomination des lètres , et cète dénomination
metra peu à peu les enfans en état
de lire à trois et à quatre ans , bien mieus
que ne lisent ordinairement les enfans
de sis à sèt ans , par la métode vulg ire.
B LC
14 MERCURE DE FRANCE.
Le premier aïant d'abord été mis dans
l'agréable , la bone et la nouvele route ,
-va toujours gaìment son chemin ; au lieu
que les autres mis dans la triste , l'anciene
et souvent la mauvaise voie , ont
peine à revenir sur leurs pas , et ne sacrifient
pas volontiers leurs amusemens
agréables , quoique frivoles , aus ocupations
literaires qu'ils trouvent pénibles
dans un age plus avancé. Les peres et les
meres sont toujours contens des petits.
enfans qu'ils gâtent , mais ils trouvent
mauvais ensuite qu'un gouverneur ou un
précepteur n'ait pas le talent d'en faire
un prodige : il y a bien du préjugé et de
l'aveuglement sur cet article.
3. Selon la métode du bureau tipografique
un enfant , avant que de savoir lire,
poura imprimer toutes sortes de langues
mortes ou vivantes , il ne faut avoir pour
cela que des ïeus et des mains , car il est
bien plus aisé d'imprimer , par exemple ,
du latin et du françois , qu'il n'est aisé
de les lire. La grande ignorance de la
plupart des compositeurs d'une imprimerie
ne le prouve que trop ; d'ailleurs il
est clair qu'un sourd voyant , pouroit
ètre imprimeur , mème chès M. Ballard
pour la musique.
4. Un enfant de trois à quatre ans
qui conoit par les feus la figure des
lètres,
JANVIER. 1730. IS
>
lètres , et ensuite par l'oreille , le son des
caracteres simples ou combinés , saura
bientot écrire ou imprimer les sons qu'on
lui donera sur des cartes , et ceus qu'on
lui dictera il poura s'ocuper pour lors
avec autant de plaisir que les autres enfans
ont ordinairement de dégout par
les métodes vulgaires . Le premier nouri
dans les lètres , en fait ses amusemens
pendant que les autres , au contraire n'y
trouvent que des crois et des épines . si
les persones zelées et charitables , qui
dirigent les écoles des pauvres , conoissolent
donc le mérite et l'utilité de la métode
tipografique , elles en introduiroìent
bientot l'usage dans les paroisses et dans
les Monasteres , en fesant bâtir ou construire
des amfiteatres où les petits enfans
aprendro ent pour lors presque seuls et
d'eus mèmes , en voyant travailler les
que les grans. J'oserai donc dire
parens
et les maitres bien intentionés , aprouveront
et pratiqueront l'usage du bureau,
dès qu'ils en auront vu les avantages réels,
pratiques , et superieurs à ceus des métodes
vulgaires.
5. Selon cète métode , l'enfant aprendra
facilement et par des principes surs
non captieus ni équivoques , l'ortografe
des sons ou de l'oreille ; ce que la plupart
des maitres ignorent toute leur vie .
Bij L'enj
16 MERCURE DE FRANCE.
L'enfant aprendra par pratique et par téorie
l'ortografe courante et d'usage , anciene
et nouvelle, d'une maniere à bien lire
dans toute sorte de livres , et à se rendre
ensuite capable de faire un bon chois
d'ortografe françoise.
6. L'enfant saura lire dans le manuscrit
en mème- tems que dans les livres ,
et cela par la pratique journalière d'avoir
imprimé des tèmes interlinéaires sur la
table du bureau , non - seulement avec
des caractères romains , mais encore avec
des caracteres italiques et manuscrits.
7. Le petit enfant poura savoir bien
lire le françois , le latin et le grec avant
l'age auquel , selon la métode vulgaire , la
plupart des enfans ne sont pas encore mis
à l'A BC ; avantage inexprimable , qui influe
, non- seulement dans toute la suite
des études , mais dans toute la vie.
8.Les A BC ordinaires , faus ,équivoques
et captieus,induisent les enfans en êreur et
les exposent souvent à des chatimens injustes;
desorte que, sans diminuer en rien le
mérite et la juste réputation des bons
maitres , on peut dire que la métode vulgaire
dans toute l'Europe n'a pas les raports
necessaires entre les lètres et les
sons , ou entre les signes et les sons des
choses signifiées ; au lieu que la métode
du bureau tipografique n'étant fondée que
sur
JANVIER. 1731. 17
sur la verité et sur la justesse de ces mè
mes raports remarqués il y a plus d'un
siecle, par de très - habiles maitres , cète
métode , dis je , atache agréablement au
jeu tipografique le mème enfant qui venoit
de pleurer à la seule vue de la persone
qui lui montroit les lètres selon la
métode des écoles.on ne doit pas craindre,
au reste , que l'enfant ignore dans la suite
la fausse et vulgaire dénomination des
lètres ; il ne l'aprendra que trop tot , en
vironé de persones souvent oficieuses à
contre-tems , quand il s'agit de bien nomer
les lètres.
9. La lecture est d'abord mise à profit
sur la table du bureau : on y aprend à
conoìtre et à sentir les parties du discours
indéclinables , déclinables et conjugables
de la langue françoise et de la langue la
tine , laquelle conoissance dispose les enfans
à employer plutot leur loisir et
d'une maniere plus aisée , plus utile ,
plus sure et plus agréable. Bien des
maitres indépendament de l'usage du
bureau tipografique , ont abandoné la
métode vulgaire des rudimens téoriques,
pour suivre celle du rudiment pratique
dont j'ai doné l'essaì aprouvé des meilleurs
métodistes , filosofes non prévenust
10. Fesant imprimer à l'enfant les deus
langues en glose interlinéaire et mot à
B iij mot
18 MERCURE DE FRANCE.
mot , on dispose et prépare plu - tot son
imagination aus grandes operations literaires
et grammaticales que la métode
vulgaire n'entreprend pas ordinairement
d'enseigner à des enfans de deus à trois.
et à quatre ans.
11. L'enfant aprend par pratique les
terminaisons des noms et des verbes , et
enfin à décliner et à conjuguer ; il aprend
les genres , les déclinaisons , les prêterits
et les supins , les concordances , et partie
de la sintaxe , par les principales règles
donées sur des cartes en glose interlinealre
, et par les exemples pratiques donés
aussi sur des cartes , et expliqués peu à
peu et de vive vois , à mesure qu'il les
imprime sur sa table.
12. On écrit ce qu'on veut dans les
tèmes donés sur des cartes : chaque jour
fournit son sujet , et l'on met à profit
le chois des programes , des afiches , des
placars , des tèses , des avis , des anonces,
des enseignes , et enfin de tous les écritaus
publics ; la table du bureau devient un livre
ouvert à tous les spectateurs ; livre
cheri de l'enfant qui en est le composi
teur , et livre qui n'est jamais nuisible à
sa posture come le sont ordinairement
les petits livres élementaires .
13. Par le moyen du dictionaire du bu--
reau tipografique , l'enfant fera provision
de
JANVIER. 1731 . 19
de plusieurs miliers de mots latins et françois
avant l'age de cinq à sis ans ; avan
tage qui doit nécessairement influer sur
toute la suite des études , et qu'on n'aquiert
que
fort tard par la routine vulgaire.
14. L'enfant aprendra , non -seulement
Portografe de l'oreille et des ïeus par ra
port aus lètres , mais encore l'accentuation
, la ponctuation , les petites abrevia
rions françoises , latines et greques , et
la quantité latine , par la pratique jour
nalière du bureau , où il trouvera les signes
, les voyèles longues et brèves
come caracteres utiles et necessaires pour
Fimpression de la glose interlinéaire ; ce
que la métode vulgaire ne peut faire pratiquer
à l'enfant que lorsqu'il sait écrire,
c'est-à-dire fort tard.
15. L'enfant qui imprimera du latin
avec de beaus caracteres manuscrits , disposera
et préparera son imagination pour
mieus faire imiter ensuite à sa main , les
traits , les figures et les lètres , dont la
parfaite image sera vivement , distinc
tement et profondément gravée dans son
cerveau.
16. Par l'impression des tèmes donés à
l'enfant , il poura aprendre de bone heu
re les élémens de tout ce qu'on pourolt
lui montrer par le moyen de l'écriture ;
B iiij
c'est18
MERCURE DE FRANCE.
mot , on dispose et prépare plu-tot son
imagination aus grandes operations literaires
et grammaticales que la métode
vulgaire n'entreprend pas ordinairement
d'enseigner à des enfans de deus à trois.
et à quatre ans.
11. L'enfant aprend par pratique les
terminaisons des noms et des verbes , et
enfin à décliner et à conjuguer ; il aprend
les genres , les déclinaisons , les prêterits
et les supins , les concordances , et partie
de la sintaxe , par les principales règles
donées sur des cartes en glose interlinéal
re , et par les exemples pratiques donés
aussi sur des cartes , et expliqués peu
peu et de vive vois , à mesure qu'il les
imprime sur sa table.
à
12. On écrit ce qu'on veut dans les
tèmes donés sur des cartes : chaque jour
fournit son sujet , et l'on met à profit
le chois des programes , des afiches , des
placars , des tèses , des avis , des anonces,
des enseignes, et enfin de tous les écritaus
publics ; la table du bureau devient un livre
ouvert à tous les spectateurs ; livre
cheri de l'enfant qui en est le compositeur
, et livre qui n'est jamais nuisible à
sa posture come le sont ordinairement
les petits livres élementaires .
13. Par le moyen du dictionaire du bureau
tipografique , l'enfant fera provision
de
JANVIER. 1731 . 19
de plusieurs miliers de mots latins et françois
avant l'age de cinq à sis ans ; avan➡
tage qui doit nécessairement influer sur
toute la suite des études , et qu'on n'a→
quiert que fort tard par la routine vulgaire.
14. L'enfant aprendra , non-seulement
Portografe de l'oreille et des feus par raport
aus lètres , mais encore l'accentuation
, la ponctuation , les petites abreviations
françoises , latines et greques , et
la quantité latine , par la pratique jour
nalière du bureau , où il trouvera les signes
, les voyèles longues et brèves
come caracteres utiles et necessaires pour
Fimpression de la glose interlinéaire ; ce
que la métode vulgaire ne peut faire pratiquer
à l'enfant que lorsqu'il sait écrire,
c'est-à-dire fort tard.
15. L'enfant qui imprimera du latin
avec de beaus caracteres manuscrits , disposera
et préparera son imagination pour
mieus faire imiter ensuite à sa main , les
traits , les figures et les lètres , dont la
parfaite image sera vivement , distinc
tement et profondément gravée dans son
cerveau.
16. Par l'impression des tèmes donés à
l'enfant , il poura aprendre de bone heu
re les élémens de tout ce qu'on pourolt
lui montrer par le moyen de l'écriture ;
Biiij c'est20
MERCURE DE FRANCE
c'est-à- dire , qu'on poura lui enseigner
tous les principes sensibles , et lui doner
par là les premieres notions des arts et
des siences. Il a été déja démontré que
les enfans de deus à trois ans sont capables
de ces premières notions , par le
moyens des idées et des mèmes opérations
dont il se servent pour aprendre
leur langue ; verité à laquelle les seuls
préjugés empêchent de faire toute l'atention
necessaire. L'experience et l'aveu
des maîtres qui en faveur du corps négligent
, éloignent , diferent et retardent
les premiers soins literaires , au préjudice
de l'esprit prouvent l'insufisance des
métodes vulgaires dans l'éducation diligente
et hâtée des enfans. or la métode
du Bureau tipografique alant toujours ,
pour ainsi dire , de niveau avec l'enfant ,
done les moyens surs et infaillibles de le
suivre pas à pas ,
et de comancer sans
danger , à lui former plutot l'esprit et le
coeur. on peut donc , sans temerité
avancer cète proposition , que les enfans
étant capables d'aprendre , plutot que la
métode vulgaire n'est propre à les enseigner
, on doit aprouver et préferer cele
du Bureau tipogràfique ; ce que je vai tacher
de confirmer encore par le détail
des choses sensibles , que l'on peut montrer
à un petit enfant , avant qu'il soit en
état
JANVIER. 1731 . 21
état d'y ètre conduit par les métodes
ordinaires.
17. Quoique l'erreur , le mensonge ,
l'imposture , la charlatanerie , la chicane
et l'injustice , abusent des mots et dés
expressions de la langue françoise , il
ne s'ensuit pas que dans un ouvrage la
verité , la justice , et la bone foi doivent
s'abstenir de ces mèmes mots et
de ces mèmes expressions ; le zèle pour
le bien public ne perd jamais ses droits ;
c'est pourquoi je demande un peu d'indulgence
, ou de tolerance de la part des
maitres trop prévenus , et qui mal à
propos s'identifiant , pour ainsi dire ,
avec les métodes vulgaires qu'ils pratiquent
, ont le courage de mètre sur leur
conte , ce que je n'ai jamais pretendų
dire que contre les métodes sur l'abus.
desqueles , il y a toujours eu liberté d'écrire
, malgré le respect et le préjugé en
faveur du DESPAUTERE du .......
De tout ce que j'aí , dit jusqu'ici on peut
conclure qu'il sera aisé d'enseigner à l'enfant
le latin , des mèmes mots qu'il aprendra
d'abord en françois , et pour cet éfet
on essayera de suivre peu à peu l'ordre et:
la métode qu'indiquera la langue mater
nele ou d'usage .
etc.
18. On donera à l'enfant , et sur des
cartes , les noms des persones et des ob
By Jets
22 MERCURE DE FRANCE
jets qu'il voit et qu'il conoìt ; cela servira
à le familiariser avec les raports des signes
et des choses signifiées.
19. Les figures de la Bible fournissent
la liste des noms propres des patriarches ,
des juges, des Rois , des pontifes , des grans
homes, etc. ces listes ou suites historiques,
généalogiques , cronologiques et géografiques,
devienent la base de l'histoire universéle
pour un enfant de 3 à 4 ans.
20. La Fable , les Métamorfoses d'ovide
, les Dieus , les Déesses , les demi - Dieus
les Heros du Paganisme fournissent aussi
dequoi varier agréablement l'exercice
tipografique .
21. L'histoire profane fournit également
des époques , des listes , des suites
qui amusent et instruisent l'enfant de 3
à 4 ans. Toutes les cartes étant numé
rotées , pouront ètre lues , et rangées selon
l'ordre cronologique sur la table du
Bureau.
22. On poura doner ainsi les souve-.
rains et les capitales de tous les Etats du
monde , et les capitales des provinces ou
des Gouvernemens de France ; et à l'ocasion
des mots , des choses ou des racines
historiques , on poura amuser et instruire
l'enfant , en essayant peu à peu de lui
doner de tems en tems des idées sensibles
sur le bien et le mal , sur le vice et
la:
JANVIER. 1731 . 23
fa vertu , sur le juste et l'injuste , et sur
Fe vrat et le faus.
23. On peut doner des cartes de bla
son , faire imprimer sur la table du Bureau
les termes héraldiques , et en montrer
tous les objets sensibles quand l'ocasion
s'en presentera.
24. On pratiquera facilement les premières
règles de l'aritmétique et de l'algèbre
sur la table du Bureau , aiant sur
des cartes les chifres et les signes nécessaires
pour ces petites opérations , et
pouvant d'ailleurs employer utilement
des jetons , des marques , et des dés ;
pour rendre les nombres plus sensibles.
25. On peut également doner la conoissance
des premiers élémens de géométrie
sur les lignes , les surfaces et les solides
des corps réguliers , avec lesquels
un enfant se familiarise , et se rend peu
à peu capable de toutes les parties sen
sibles des matématiques , sans en excepter
les sections coniques donées aussi en
relief.
26. La Musique mème trouvera son
avantage sur la table du Bureau. on pou .
ra montrer à l'enfant la game et le dia
pason , sur la tringle ou la règle de bois
mobile qui a servi à l'enfant pour le jeu
de la première classe. on y poura done
mètre les clés , les notes et les signes , que
B.vj L'en
24 MERCURE DE FRANCE
l'enfant aura également sur des cartes ;
qu'il poura ranger vis-à - vis de ces mèmes
signes marqués sur la tringle ou re
gle de bois , il se metra par là en état de
lire et de conoître le clavier d'une épinete
ou d'un clavecin , qui pouront lui
doner ensuite le son et le ton des figures
ou des notes conues, et colées sur les touches
d'un clavier.
,
27. Chaque art peut également ètre
rendu sensible à un petit enfant , si l'on
veut bien prendre la peine de lui démontrer
l'usage des choses , et de lui faire
imprimer le nom des outils , des objets
et des pièces des machines qu'on lui présentera
; c'est ainsi que l'anatomiste , le
botaniste et le machiniste, pouront amuser
et instruire de bone heure leurs petits
enfans ; l'ainé deviendra ensuite le maitre
de ses frères .. Des os , des plantes , des
Machines , des outils , des instrumens
des Balances , des poids , des mesures, des
Jétons , des Dés , des monoies , des médailes
, etc. Tout cela fournit l'abondance.,
la variété , le plaisir du chois, et done par
consequent les moyens de mètre bien à
profit les premieres anées de l'enfance ,.
par toute sorte de métodes , mais non
pas si - tot ni si-bien que par la métode
du Bureau tipografique.
28. On peut faire aprendre l'A , B , C.
Grec
JAVIER. 1731. 25
crec , Ebreu , Arabe , etc. avec l'A , B , C ,
François; faire imprimer du françois avec
les caracteres grecs , et avec les lètres
ébraïques , de droit à gauche , et montrer
ensuite la casse des imprimeurs, avec des
caracteres renversés , lus à rebours ; avantage
considérable pour les enfans des im
primeurs et des graveurs,ausquels on pou
ra doner un casseau , dont les cartes seront
distribuées come les lètres d'un casseau
d'imprimerie , et pour lors en peu de
mois on poura leur enseigner à imprimer
sur le Bureau les racines latines , gre--
ques , ébraïques , caldaïques , et arabes ;
de mème qu'aus enfans destinés à l'église
ou à l'étude des langues saintes et
orientales.
29. On poura faire imprimer en fran
çois , des rimes ou des vers de peu de
silabes , pour sonder , essayer et former
l'oreille de l'enfant dans la lecture soutenue
et dans la déclamation . on poura
jouer au jeu des rimes après avoir fait
déviner les sons et les lètres des mots ..
on peut doner de petites anagrames , et
mème des vers latins , examètres et pen-.
tamètres , pour faire aprendre à conoìtre
, à sentir et à ranger les piés de cète
structure de vers , dont on trouvera tous
les mots sur autant de cartes diférentes
dans la derniere logète du se rang sous.
cele de la
syntaxe
-
26 MERCURE DE FRANCE.
Exemple :
Tot tibi sunt dotes , Virgo , quot sïdërå.
coelo.
omnia sunt hominum , tenůī pēndentia filo
Et subito casu , que valuere ruunt.
30. On metra donc d'abord un en--
fant en état . d'imprimer des mots ,
des lignes , des frases en glose interli
naire , en latin et en françois ; 2° . d'imprimer
et de faire lui - mème la construc
tion du texte de rhèdre chifré ou numeroté.
3 ° . de faire de petites versions.
4. d'imprimer aussi de petites compositions
; et ces quatre exercices fourni
ront au maitre Focasion de doner à l'enfant
plus d'idées et de conoissances literaires
et grammaticales , qu'aucun rudiment
vulgaire n'en poura jamais doner sitôt
et en si peu de tems .
31. Les enfans du Bureau tipografique
seront plutot en état d'exercer leur mé
moire et d'aprendre quelque chose par
coeur , non seulement par Foreille , étant
siflés come des oiseaus , mais encore par
les ïeus , dès qu'ils sauront lire seuls.
32. Un enfant sera plutot en état de
travailler seul avec un domestique ou
avec d'autres persones , pendant que le
maître sera absent , ou ocupé à quelque
autre chose et l'enfant , plutot que de
A
Bester
JANVIER. 1731. 27
et à
rester oisif, vera toujours avec plaisir un
domestique employé à imprimer les cartes
de la garniture du bureau , ou à tailler
rogner des cartes sur un modele de
fer -blanc proportioné aus logetes des petits
bureaus portatifs de 4 piés de long
dont les cartes apelées Etrenes mignones
auront is lignes de largeur , et 2 pouces.
de hauteur , ainsi qu'on l'a déja pratiqué.
33. Non seulement les enfans qui parlent
, mais encore les sours et les muets
pouront aprendre presque tout , excepté
les sons , par les combinaisons pratiques
des signes sensibles , extérieurs , soumis à
la vue, et en passant , pour ainsi dire , des
ïeus du corps à ceus de l'esprit..
34. Les abécédaires de tout age seront
moins honteus sur la table d'un bureau ,.
que sur la crois de pardieu , leur intelligence
et leur empressement les feront lire.
passablement dans un mois ou deus..
35. L'enfant du Bureau conservera_sa
main en aprenant à écrire , et poura sans
préjudicier à l'étude des langues , n'écrire
jamais au comencement que sous
les ieus et sous la main d'un bon maître.
Je parleraí ailleurs d'une métode tres - utile
pour aprendre à écrire en assés peu de
tems.
36. L'enfant conoìtra plu-tot l'usage
des livres , des dictionaires , et des tables
des :
28 MERCURE DE FRANCE.
des matières , qu'on lui aprendra à parcourir
et à feuilleter tout seul ; il aquêra
aussi plu-tôt le gout de la lecture , de
l'étude , du travail , des livres , et des savans
; et il sera enfin plutot et beaucoup
plus sensible à la gloire et à l'émulation
literaire , que ne le sont ordinai
rement les enfans conduits et dirigés par
la métode vulgaire et tardive.
qua-
37. L'enfant aura plu - tôt l'adresse des
doits et des mains ; adresse qui manque
souvent à la plupart des enfans de
lité , peu exercés à l'action de la maîn ;
l'enfant aura plutot le gout , le coup
d'euil , l'esprit d'ordre et l'esprit rangé
si rares parmi les homes , et plus rares encore
parmi les jeunes gens.
38. L'enfant du Bureau est mis en état
d'aler plutot et plus fort au colege, et parconsequent
d'entrer plutot à l'académic
pour y faire tous ses exercices , avantage
considerable pour la jeunesse destinée et
apelée au noble et glorieus métier des
armes.
39. Beaucoup de savans par principe
de santé , travaillent debout , à l'exemple
des imprimeurs et de plusieurs autres nobles
artisans ; or l'action , l'exercice et le
mouvement du jeu tipografique , entre
tenant aussi le corps en santé , done en
mème- tems à l'esprit la meilleure culture
possi
JANVIER. 1730. 2
possible de l'aveu des medecins et de
'ESCULAPE de notre siècle . on ne prétend
pas dire par là que l'exercice du Bureau
rende immortel ou invulnerable ; cette
remarque est pour les bones gens qui ne
jugent des choses que par l'évenement, et
qui regardent souvent come un éfet necessaire
, ce qui n'est qu'un pur accident
40. La métode du Bureau tipografique
donera lieu aus bons maitres d'ètre encore
plus atachés et plus atentifs à leur de
voir , et plus utiles à leurs éleves ; ils auront
plus souvent ocasion de precher
d'exemple ; article essentiel dont se dispensent
volontiers bien des maîtres négligens
et indiferens sur l'éducation d'un
enfant , ou trop ocupés du seul esprit
mercenaire, ces derniers ne manqueront
pas de faire leurs éforts contre la métode
du Bureau , qui les remet,pour ainsi dire,
à l'A , B, C , et qui demande de leur part,
au moins au comancement , plus d'assiduité
et de soins que n'en paroit exiger
la routine vulgaire.
41. Persuadé de la verité , de l'utilité et
de la diligence de cete métode , j'ose assurer
et prédire que toutes choses dail
leurs égales , les viles qui les premieres
feront usage du Bureau tipografique , seront
dans la suite , à proportion des écoles
et des écoliers , les premieres à produi
re
30 MERCURE DE FRANCE.
>
re le plus grand nombre d'enfans et
d'homes celebres dans les arts et dans les
siences.
Si on ne goute point la métode du Bureau
tipografique , je m'en étone , et si on la
goute , je m'en étone de même.
Fermer
Résumé : HUITIEME Lètre sur la bibliotèque des enfans, etc.
Le texte aborde les défis liés à la lecture et à la compréhension des lecteurs du Mercure de France, qui souvent ne prêtent pas suffisamment attention aux textes, ce qui les rend incapables de les analyser ou d'en parler de manière éclairée. Cette inattention conduit à des critiques injustes envers les auteurs, car il est plus facile de critiquer que de créer. L'auteur récapitule les points essentiels de ses lettres précédentes sur l'éducation des enfants. Il souligne que les enfants de deux à trois ans sont capables des premières opérations littéraires et que les méthodes vulgaires sont inadaptées à leur âge. Il recommande la méthode du bureau typographique, qui est proportionnée à tous les âges et permet une meilleure éducation. Le texte compare les avantages de commencer l'éducation tôt avec la méthode du bureau typographique par rapport à une initiation tardive avec des méthodes vulgaires. Il utilise des analogies, comme celle du coureur, pour illustrer que commencer tôt et par la bonne méthode permet de progresser plus rapidement et efficacement. L'auteur décrit les étapes de la méthode du bureau typographique : montrer les lettres aux enfants dès leur jeune âge, leur apprendre à les nommer comme un perroquet, et les faire imprimer différentes langues. Cette méthode rend l'apprentissage agréable et évite les difficultés rencontrées avec les méthodes traditionnelles. Le texte détaille également les avantages spécifiques de la méthode du bureau typographique, tels que l'apprentissage précoce de la lecture et de l'écriture, la maîtrise de l'orthographe, la capacité de lire manuscrits et imprimés, et l'acquisition de vocabulaire latin et français. Cette méthode prépare les enfants aux opérations littéraires et grammaticales de manière plus efficace que les méthodes vulgaires. Les enfants, dès l'âge de deux à quatre ans, apprennent les terminaisons des noms et des verbes, les genres, les déclinaisons, les préterits, les supins, les concordances et la syntaxe par des cartes et des exemples pratiques. Ils écrivent sur des cartes des sujets variés, comme des programmes, des affiches ou des annonces, transformant la table du bureau en un livre ouvert. Grâce à un dictionnaire typographique, ils acquièrent plusieurs milliers de mots latins et français avant l'âge de cinq ou six ans. La méthode enseigne également la ponctuation, les abréviations et la quantité latine par la pratique quotidienne. Les enfants impriment du latin avec des caractères manuscrits, préparant ainsi leur imagination pour imiter ensuite des traits et des lettres. Ils apprennent les éléments de divers arts et sciences par l'écriture, démontrant que les enfants de deux à trois ans sont capables de ces premières notions. Le texte critique les méthodes vulgaires, jugées insuffisantes et tardives, et vante les avantages de la méthode du bureau typographique, qui suit l'enfant pas à pas et forme son esprit et son cœur dès le plus jeune âge. Les enfants apprennent également les noms des personnes et des objets, les figures de la Bible, les fables, les métamorphoses d'Ovide, et l'histoire profane. Ils pratiquent les règles de l'arithmétique, de l'algèbre, de la géométrie et même de la musique sur la table du bureau. La méthode permet aussi d'enseigner plusieurs langues, comme le grec, l'hébreu et l'arabe, et de former l'oreille des enfants à la lecture et à la déclamation. Les enfants du bureau typographique sont capables de travailler seuls et d'apprendre par cœur, développant ainsi leur mémoire et leur adresse manuelle. Ils acquièrent également le goût de la lecture et de l'étude, et sont plus sensibles à la gloire et à l'émulation littéraire.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
3
p. 30-35
LA HAINE. ODE
Début :
Sçavantes Nymphes du Parnasse, [...]
Mots clefs :
Haine, Vengeance, Indulgence, Amitié, Guerre, Justice, Muses
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LA HAINE. ODE
L.A HAINE
ODE
S Cavantes Nymphes du Parnasse ,
Si jamais vous cûtes pitié ,
Des malheurs qu'à l'humaine race
Causa souvent l'Inimitié ;
Déesses , soyez- moi propices.
Contre le plus cruel des vices ,
Armez votre sévérité ;
D'une voix pénétrante et forte,
Blâmez les excès ou se porte ,
L'homme contre l'homme irrité.
Pour le désir de la vengeance ,
Muses , donnez lui tant d'horreur
Qu'enfin une noble indulgence
Succede à sa lâche fureur ;
2
Qu'en ses yeux desormais l'on voye ,
Briller
JANVIER. 1731. 31
Briller l'assurance et la joye ,
Au lieu du trouble et de l'ennui ;
Et qu'au mépris d'un faux sistême
Il devienne ami de soi- même ,
In cessant de hair autrui.
Peuples , dont un instinct sauvage ,
Regle les sentimens pervers ,
Et dont cet orgueilleux rivage.
Est séparé par tant de Mers :
Vous , chez qui l'homme impitoyable
Du corps fumant de son semblable
Se fait de monstrueux festins ;
De vos forfaits , Peuples impies ,
On voit les fidelles copies ,
Dans nos désordres intestins.
•
Oui , ce seroit peu que la Guerre ,
Employant le souphre et le fer ;
Eût tant de fois rendu la Terre ,
L'horrible image de l'Enfer ,
Si l'Entêtement , l'Hérésie ,
L'Ambition , la Jalousie ,
Les faux soupçons , les noirs complots ,
Tirans implacables des Hommes ,
Du triste climat où nous sommes
Ne bannissoient pas le repos.
>
Com(
32 MERCURE
DE FRANCE .
Combien de fois cet Hémisphère ,
Non sans en frémir , a- t-il vú ,
Du sang de son malhûreux frere ,
Le frere indignement repû ?
Est- il parjures , sacriléges ,
Intrigues , fureurs , sortiléges ,
Trahisons , souplesses , détours ,
A qui , dans nos projets iniques ,
Honteux , criminels Politiques ,
Nous n'ayons sans cesse recours ?
Sur tout , quand l'Interêt nous guide ,
Ses absolus commandemens
De l'amitié la plus solide ,
Sappent toûjours les fondemens.
D'Alecton , sanguinaire éleve ,
Il aiguisa le premier Glaive
Et chassant l'équité des coeurs ;
Il substitua par ses ruses ;
Un vil amas de Loix confuses ,
A l'empire des bonnes moeurs.
Et toi , dont l'éloquence outrée ,
Consiste en des cris infernaux ,
Qui de la fugitive Astrée ,
Usurpas les saints Tribunaux ,
Hydre , qu'anime la vengeance ,
Que suit la fatale indigence ,
Que
JANVIER . 1731. 33
Que conduit
l'obstination ,
Chicane , indomtable Génie ,
Quels objets offre ta manie ,
A ma juste indignation !
Les Loix les plus sages détruites ,
Par des Sophismes effrontez ;
Des veuves aux portes réduites ,
Des Orphelins déshéritez ;
L'Impunité vendue au crime
A son possesseur légitime
Un bien pour jamais interdit
L'Innocence qu'on persécute ,
Et le droit le plus ferme en butte
A l'oppression
du crédit.
›
Mais quelle voix audacieuse ,
Eclate , en discours menaçans ?
Quelle langue malicieuse ,
Exerce ici ses traits perçans ?
Lâches Auteurs de ces tempêtes ,
Craignez d'attirer sur vos têtes ,
Les rigueurs du courroux divin ,
Et que le Ciel en sa justice ,
D'Etéocle et de Polinice ,
Ne vous ait réservé la fin.
Témoins d'un Spectacle barbare ;
Que dis-je ! Nous n'esperons pas ,
Que
34 MERCURE DE FRANCE.
Que la haine qui nous sépare ,
Puisse ceder même au trépàs.
L'aigreur qui partage vos ames ,
Un jour partagera les flâmes
Qui doivent consumer vos corps ;
Un jour , vos Ombres fratricides ,
Iront se joindre aux Eumenides ,
- Pour troubler l'Empire des Morts.
=
•
Ainsi donc cedant à la force ,
Du plus exécrable poison ,
Vous faites un honteux divorce ,
Avec votre propre raison.
Malheureux ! prenez pour modeles .
Les Colombes , les Tourterelles ,
Qu'un tendre amour unit toujours ;
Ou bien dans quelque affreux bocage ,
Allez écouter le langage ,
Des Loups , des Tigres et des Ours.
Vous , Muses , allez les premieres ,
Vers ces Animaux ravissans ,
Et daignez de quelques lumieres ,
Eclairer leurs aveugles sens .
Instruits de nos moeurs intraitables ,
De cent reproches équitables .
Ils sçauront bien- tôt nous combler ,
Plus épouvantez de connoître ,
L'Or
JANVIER . 1-31 .
35
i
L'Orgueilleux, qui se dit leur Maître ,
Qu'envieux de lui ressembler.
C'en est trop ; gardez le silence ,
Barbares , hôtes des Forêts ,"
Hélas ! de notre ressemblance ,
Il suffit d'avouer les traits.
Quand la Terre ignoroit encore ,
Les malheurs qu'apporta Pandore.
Les crimes de Thebe et d'Argos ,
L'Homme goûtoit un sort celeste :
Mais quoi ! la discorde funeste ,
Nous a tous rendus vos égaux .
F. M. F. DE VAL GNE
ODE
S Cavantes Nymphes du Parnasse ,
Si jamais vous cûtes pitié ,
Des malheurs qu'à l'humaine race
Causa souvent l'Inimitié ;
Déesses , soyez- moi propices.
Contre le plus cruel des vices ,
Armez votre sévérité ;
D'une voix pénétrante et forte,
Blâmez les excès ou se porte ,
L'homme contre l'homme irrité.
Pour le désir de la vengeance ,
Muses , donnez lui tant d'horreur
Qu'enfin une noble indulgence
Succede à sa lâche fureur ;
2
Qu'en ses yeux desormais l'on voye ,
Briller
JANVIER. 1731. 31
Briller l'assurance et la joye ,
Au lieu du trouble et de l'ennui ;
Et qu'au mépris d'un faux sistême
Il devienne ami de soi- même ,
In cessant de hair autrui.
Peuples , dont un instinct sauvage ,
Regle les sentimens pervers ,
Et dont cet orgueilleux rivage.
Est séparé par tant de Mers :
Vous , chez qui l'homme impitoyable
Du corps fumant de son semblable
Se fait de monstrueux festins ;
De vos forfaits , Peuples impies ,
On voit les fidelles copies ,
Dans nos désordres intestins.
•
Oui , ce seroit peu que la Guerre ,
Employant le souphre et le fer ;
Eût tant de fois rendu la Terre ,
L'horrible image de l'Enfer ,
Si l'Entêtement , l'Hérésie ,
L'Ambition , la Jalousie ,
Les faux soupçons , les noirs complots ,
Tirans implacables des Hommes ,
Du triste climat où nous sommes
Ne bannissoient pas le repos.
>
Com(
32 MERCURE
DE FRANCE .
Combien de fois cet Hémisphère ,
Non sans en frémir , a- t-il vú ,
Du sang de son malhûreux frere ,
Le frere indignement repû ?
Est- il parjures , sacriléges ,
Intrigues , fureurs , sortiléges ,
Trahisons , souplesses , détours ,
A qui , dans nos projets iniques ,
Honteux , criminels Politiques ,
Nous n'ayons sans cesse recours ?
Sur tout , quand l'Interêt nous guide ,
Ses absolus commandemens
De l'amitié la plus solide ,
Sappent toûjours les fondemens.
D'Alecton , sanguinaire éleve ,
Il aiguisa le premier Glaive
Et chassant l'équité des coeurs ;
Il substitua par ses ruses ;
Un vil amas de Loix confuses ,
A l'empire des bonnes moeurs.
Et toi , dont l'éloquence outrée ,
Consiste en des cris infernaux ,
Qui de la fugitive Astrée ,
Usurpas les saints Tribunaux ,
Hydre , qu'anime la vengeance ,
Que suit la fatale indigence ,
Que
JANVIER . 1731. 33
Que conduit
l'obstination ,
Chicane , indomtable Génie ,
Quels objets offre ta manie ,
A ma juste indignation !
Les Loix les plus sages détruites ,
Par des Sophismes effrontez ;
Des veuves aux portes réduites ,
Des Orphelins déshéritez ;
L'Impunité vendue au crime
A son possesseur légitime
Un bien pour jamais interdit
L'Innocence qu'on persécute ,
Et le droit le plus ferme en butte
A l'oppression
du crédit.
›
Mais quelle voix audacieuse ,
Eclate , en discours menaçans ?
Quelle langue malicieuse ,
Exerce ici ses traits perçans ?
Lâches Auteurs de ces tempêtes ,
Craignez d'attirer sur vos têtes ,
Les rigueurs du courroux divin ,
Et que le Ciel en sa justice ,
D'Etéocle et de Polinice ,
Ne vous ait réservé la fin.
Témoins d'un Spectacle barbare ;
Que dis-je ! Nous n'esperons pas ,
Que
34 MERCURE DE FRANCE.
Que la haine qui nous sépare ,
Puisse ceder même au trépàs.
L'aigreur qui partage vos ames ,
Un jour partagera les flâmes
Qui doivent consumer vos corps ;
Un jour , vos Ombres fratricides ,
Iront se joindre aux Eumenides ,
- Pour troubler l'Empire des Morts.
=
•
Ainsi donc cedant à la force ,
Du plus exécrable poison ,
Vous faites un honteux divorce ,
Avec votre propre raison.
Malheureux ! prenez pour modeles .
Les Colombes , les Tourterelles ,
Qu'un tendre amour unit toujours ;
Ou bien dans quelque affreux bocage ,
Allez écouter le langage ,
Des Loups , des Tigres et des Ours.
Vous , Muses , allez les premieres ,
Vers ces Animaux ravissans ,
Et daignez de quelques lumieres ,
Eclairer leurs aveugles sens .
Instruits de nos moeurs intraitables ,
De cent reproches équitables .
Ils sçauront bien- tôt nous combler ,
Plus épouvantez de connoître ,
L'Or
JANVIER . 1-31 .
35
i
L'Orgueilleux, qui se dit leur Maître ,
Qu'envieux de lui ressembler.
C'en est trop ; gardez le silence ,
Barbares , hôtes des Forêts ,"
Hélas ! de notre ressemblance ,
Il suffit d'avouer les traits.
Quand la Terre ignoroit encore ,
Les malheurs qu'apporta Pandore.
Les crimes de Thebe et d'Argos ,
L'Homme goûtoit un sort celeste :
Mais quoi ! la discorde funeste ,
Nous a tous rendus vos égaux .
F. M. F. DE VAL GNE
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Résumé : LA HAINE. ODE
L'ode 'La Haine', publiée en janvier 1731 dans le Mercure de France, est une supplique adressée aux muses et aux nymphes du Parnasse pour qu'elles condamnent la haine et l'inimitié entre les hommes. L'auteur aspire à voir la vengeance remplacée par une noble indulgence et souhaite que les hommes apprennent à se pardonner et à s'aimer eux-mêmes. L'auteur dénonce les peuples barbares qui se nourrissent de la chair de leurs semblables et compare leurs actes aux désordres internes des sociétés civilisées. Il critique la guerre, l'entêtement, l'hérésie, l'ambition, la jalousie, les faux soupçons et les complots qui perturbent la paix. Il accuse également l'intérêt personnel de corrompre les amitiés et de substituer des lois confuses à l'empire des bonnes mœurs. L'auteur s'indigne contre les abus de la justice, les sophismes qui détruisent les lois sages, et l'impunité du crime. Il met en garde les auteurs de ces tempêtes contre la colère divine et prédit que la haine persistera même après la mort. Enfin, l'auteur invite les hommes à prendre exemple sur les colombes et les tourterelles, unies par un tendre amour, plutôt que sur les animaux sauvages. Il appelle les muses à éclairer les sens des hommes, aveugles par leurs mœurs intraitables, et à leur faire connaître leur propre barbarie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 35-48
LETTRE d'un Grammairien de Provence, sur le Bureau Tipographique.
Début :
Est-il licite de vous demander, Monsieur, pourquoi et comment [...]
Mots clefs :
Charlatans, Bureau typographique, Méthode vulgaire, Grammaire, Apprentissage, Scepticisme, Mémoire, Rigueur, Langues
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE d'un Grammairien de Provence, sur le Bureau Tipographique.
LETTRE d'un Grammairien de Provence
, fur le Bureau Tipographique.
E
St-il licite de vous demander , Monsieur
>
pourquoi et comment tant de
charlatans de la République des Lettres
sont écoutés à la Cour et à la Ville ? Votre
Mercure parle toujours de quelqu'un
de ces Messieurs ; divertissent- ils donc le
Public à ses dépens ? Jadis des fols et des
bouffons augmentoient le nombre des
domes
36 MERCURE DE FRANCE.
domestiques des grands Seigneurs , ensuite
par un meilleur goût , on préfera
les Menétriers , les Troubadours , les Baladins
et les Saltinbanques ; ne seroit- ce
point aujourd'hui le tour des Charlatans ?
il semble qu'ils soient devenus à la mode,
( car en France , comme vous sçavez ) la
mode est l'ame et le mobile presque de
tout , et on dit que Paris seul pourroit
fournir plus de troupes de Charlatans
que tout le Royaume ensemble.
·
Je ne vous parle point ici , Monsieur ,
des prétendus inventeurs de la Pierre.
Philosophale , de la Quadrature du Cercle
, du mouvement perpetuel , des longitudes
etc. je n'y prens aucun interêt ;
mais je vous avouë que je ne puis comprendre
comment des gens de Lettres
donnent dans de pareils travers , et comment
ils peuvent être non -seulement tolerés
et protegés, mais encore quelquefois
récompensés.
On dit que tous les jours vous êtes regalés
d'Affiches nouvelles qui annoncent
au Public des Phénomenes litteraires ;
par l'une on promer de mettre une femme
, une nourisse , un Suisse même , en
état de montrer à un François la Langue
Latine en peu de tems , par le secret ou
le moyen de quelques Monosillabes techniques
et de quelques signe sou herissons
hyeroglifiques.
Un
JANVIER. 1731. 37
Un autre Auteur donne les Sciences
dévoilées et le moyen d'apprendre le Latin
et les Sciences sans le secours d'aucun
Maître ; il donne l'art d'enseigner
le Latin aux petits enfans en les divertissant
, et sans qu'ils s'en apperçoivent :
ce même Auteur dit qu'il ne faut pas
plus de six mois pour apprendre le Latin
et faire son droit , six mois pour être en
état d'entrer dans un Seminaire
mois pour le Latin qui regarde la Medecine.
Je m'imagine qu'avec de tels secrets
on ne manque pas de faire rouler carosse
& c .
trois
Ce qui me revolte le plus en lisant votre
Mercure , c'est d'y trouver un de ces
Charlatans qui affecte de décrier les méthodes
des autres pour donner plus de
crédit à la sienne , et l'élever sur le débris
des autres. Il parle toujours d'un
rudiment pratique de bois , par le moyen
duquel il promet de mieux montrer que
les autres la silabisation , l'orthographe
et les rudimens de la Langue Latine . On
dit que ce Bureau pour un enfant de
deux à trois ans a plus d'une toise de
long , et si ce Bureau si nécessaire pour
l'instruction d'un enfant , croit à mesure
que l'écolier avance en âge , il lui
faudra cinq ou six toises avant que
l'enfant
en quitte l'usage ; à ce
compte là
C le
38 MERCURE DE FRANCE
les jeux de paume vont devenir prodigieusement
chers , car où placer ces machines
de bois à moins qu'on n'ait de
grandes Sales , ou des Galeries telles que
celles des Princes et des grands Seigneurs
une voye plus abregée , à mon avis , ce
seroit d'habiter une Bibliotheque. En atrendant
que je sçache bien la construction
de cette machine , je vous suplie de ne pas
me refuser les éclaircissemens que je vous
demande ; car il appert visiblement que
tet Auteur ignore lui-même ce qu'il veur
montrer aux autres .
Quelle plaisante route n'est- ce point
de faire pratiquer une fausse orthographe
qu'il appelle l'orthographe de l'oreille,
pour parvenir enfin à la veritable or
thographe des yeux ou de l'usage ? A quoi
bon ce détour ? Est-ce là cette simplicité
dont il se pique tant ? La méthode vulgaire
n'est- elle pas plus simple d'aller
droit à la veritable orthographe , sans
chercher les détours qu'indique ce rudiment
de bois car enfin c'est abuser de
la tolerance et de la liberté dont on jouit
dans la République des Lettres , que de
donner ainsi au Public une méthode bizarre
et embarassante sur le nom des lettres
, sur la sillabisation , sur l'ortographe
et sur le rudiment de la Langue Latine
, pendant que nous avons d'excellentes
JANVIER. 1731. 39
lentes méthodes sur chacune de ces parties.
Pourquoi les abandonne - t'on , et
pourquoi leur préferer le - sistême de la
chienne lettrée de la Foire , puisque selon
l'exposé de l'Auteur , un enfant travaille
à ce nouveau Bureau de la même
maniere que la chienne en question ; l'enfant
, à ce qu'on dit , prend dans son Bureau
les lettres dont il a besoin pour composer
un mot tout comme la chienne les
prend sur le pavé ou sur le plancher , et
les donne à son Maître,suivant l'ordre de
l'orthographe
, ainsi que l'enfant
les range
l'une après l'autre sur la table de son
Bureau ; et si l'un et l'autre fait est bien
constant , n'y auroit- il point quelque mistere
que nous ne sçaurions penetrer , et
qui n'est entendu que par ces nouveaux
maîtres et par leurs éleves ? Je me défie
extrêmement
de ces merveilles .
Quoiqu'à la rigueur , je ne doute nullement
qu'on ne puisse dresser un enfant
à ces sortes de jeux comme on dresse un
chien ou tout autre animal. Il me reste
toujours un scrupule dont je sens bien
que je ne guerirai que par ma propre experience
, ou par le témoignage de personnes
sensées , et sans prévention ; je
serois curieux , par exemple , de sçavoir
si un enfant dressé par cette nouvelle.
façon pourroit lire dans un Livre impricij
mé
MERCURE DE FRANCE
mé à Paris , et qu'il n'auroit jamais vû ?
ces faits une fois posés , je passe à ce
prétendu rudiment pratique , et je voudrois
sçavoir si ce rudiment de bois , futil
d'ébene , ou de quelqu'autre bois plus
précieux , apprendra à l'enfant les principes
de la Langue Latine suivis , observés
, et scrupuleusement pratiqués depuis
tant de siecles ? nos maîtres qui n'avoient
point ces moyens prestigieux , ne sontils
pas parvenus à un dégré de sçavoir
auquel nous avons bien de la peine à atteindre
, et finalement auquel tous ces
beaux esprits à rechercher ne parviendront
jamais ? Quoi ! nous aurons passé
bien des années à nous tourmenter pour
apprendre des choses que nous sentons
ne sçavoir pas encore bien dans un âge
avancé , et des enfans de quatre ou cinq
des Gouvernantes , des domestiques
apprendront en jouant ce qui nous a
couté tant de peines , tant de pleurs et
et de fatigues ? nous faudra- t'il remettre
à la Croix de pardieu , sous peine d'être
repris par des enfans ?
ans ,
Que je crains , Monsieur , qu'à force
de vouloir rendre les Sciences aisées , on
ne les rende trop communes , et qu'on
ne méprise les Sçavans par la facilité que
l'on aura à tout âge et en toute condition
de se mettre de niveau avec eux.
En
JANVIER. 1731. 41
En verité , Monsieur , on a bien peu d'é
gard pour des personnes qui ont vieilli
sur les livres , et qui se livrent avec tant
de zele à l'instruction de la jeunesse. On
se livre trop aisément à de nouveaux
venus qui nous ravissent nos droits par
des jeux et par des prestiges , car je ne
sçaurois nommer autrement ces inventions
phantastiques.
Despautere , Hannibal Quadret , le
P. Pomey et tant d'autres auront donc
travaillé inutilement pour la Jeunesse
si l'on suit d'autres routes que celles qu'ils
nous ont marquées. L'experience journaliere
nous apprend que la voye de la récitation
et d'apprendre par coeur est la
plus sure pour exercer la mémoire des
enfans ; nous voyons avec satisfaction que
des enfans sçavent à peine lire qu'ils
nous recitent sans faute leur Mufa , leur
Penelope , la femme d'Ulisse , leur Templum
, Pater, Fructus , Cornu , Dies , et
tous les Paradigmes des Rudimens , nous
voyons qu'ils retiennent avec un succès
égal toutes les concordances , les difficultes
sur la particule On , sur le Que relatif
ou particule , les quatre Questions de
lieu , celles de tems , les régimes des Verbes
Celo , rogo , doceo , moneo , posco , flagito
, ceux de refert et interest , des Verbes ,
piget , pudet , penitet , enfin tout ce qu'il,
Ciij y
42 MERCURE DE FRANCE
ya de plus épineux dans la Grammaire
et dans la Syntaxe , et après cela on viendra
nous débiter des préceptes qui sont
de vrais paradoxes , pour ne rien dire
de plus , ceux qui les débitent seront
crus , seront suivis , tandis que l'on rira
de nos raisonnemens et que nos Ecoles
seront desertes : Que deviendra le fruit
de nos veilles et de nos travaux ? Permettez
-moi , Monsieur , de m'écrier ici avec
un Ancien : 0 tempora ! ô mores !
Avant que de finir ma Lettre
, agréez
,
Monsieur
, que je vous demande
un éclaircissement
sur le titre ridicule
que cet Au-
`teur
avoit
dabord
donné
à sa nouvelle
méthode
, l'A , B , C de Candiac
; ce titre
porte
bien
avec
lui un caractere
de
vision
; car ou ce Candiac
est un nom
propre
de Ville
, ou de personne
, quelque
ce puisse
être des deux
, je dis qu'il
est absurde
de vouloir
ériger
ses visions
en dogmes
litteraires
, au préjudice
de
la doctrine
reçuë
depuis
tant de tems
par
lés plus habiles
Maîtres
; et si cette
voye
a lieu il sera donc
permis
à chacun
de
donner
ses idées
au Public
comme
des
régles
infaillibles
. Je n'aurai
donc
qu'à
donner
må maniere
de montrer
à lire et
le Latin
sous le nom de l'A , B , C , ou
du rudiment
de Ventabrén
, un autre
donnera
la Grammaire
d'Auron
, et quelqu'autre
1
JANVIER. 1731. 43
qu'autre aussi la Sintaxe de Vitrole ; tour
le monde doit sentir les inconveniens d'un
tel abus et le ridicule de pareilles maximes.
Cette reflexion m'en fait naître une
autre que je ne dois pas obmettre , vous
jugerez de sa valeur . Toute personne qui
n'est point née à Paris ou à Blois a mauvaise
grace de vouloir donner des regles
d'orthographe françoise , et qui ne possede
pas le Grec et le Latin ne peut écrire
correctement et suivant l'étimologie des
mots françois qui dérivent de ces deux
Langues. Laissons donc à nos Professeurs
des Universités du Royaume , et sur tout
à ceux de notre Capitale , le soin de nous
donner des regles pour la prononciation
et pour l'orthographe françoise ; nourris
depuis leur enfance dans les Langues oríginales
, ils sçavent mieux que tout au
tre la vraye source du françois , ils en
sçavent mieux la prononciation , ils ont
vieilli dans l'étude du Grec et du Latin .
Plus j'y pense , plus je suis frappé de
la singularité du titre de ce nouveau sistême
, l'A , B , C de Candiac , la Biblio
theque des enfans ; un livre ne sçauroit
être une Bibliotheque , car une Bibliotheque
est une grande chambre , ou appartement
où l'on met des livres de touté
de tout genre ; or un Livre sur
C iiij
espece ,
l'a
4 MERCURE DE FRANCE
l'a , b , c , pour des enfans ne sçauroit
composer une Bibliotheque. Ce titre me
fait ressouvenir d'une Epigramme du fameux
Owen , le Martial Anglois , contre.
un certain Rider , Auteur d'un Lexicon
qu'il avoit donné au Public sous le titre
de Bibliotheque ; ne pourroit on pas en
faire une application à ce nouveau sistême
? La voici :
Quid sibi ridendi vult Bibliotheca , Rideri
Unus enim non est Bibliotheca liber ;
Verborum cum theca fit hac , non theca Librorum
,
Lexicon hoc dici , Dictio theca potest.
Un Livre seul est- il une Bibliotheque
Ma foi , Rider , cette pensée est Grecque ;
Tu ne me comprens pas ; voici donc mes raisons;
Ton Livre tout au plus est de mots un repaire ;.
Une aire au plus de Dictions ;
Nommons-le donc Dictionnaire .
Ce Bureau à niches de bois peut encore
moins passer pour une Bibliotheque
puisqu'on n'y doit mettre que des verbes
, des noms substantifs , des adjectifs ,
des indéclinables ; et ces niches continssent-
elles tous les substantifs imaginables ,
ne donneront jamais à un enfant la connoissance
de la nature du substantif , de
l'adjectif, du verbe &c.
Ca
JANVIER. 1731 45
Ce Bureau , ce Colombier , puisque
Colombier y a , ne rendra jamais un enfant
imperturbable sur les déclinaisons ,
les conjugaisons et les genres , sur les concordances
, car si , par exemple , je viens à
lui demander de quel genre est pileus
sçaura t'il me le dire ? et s'il le dit , sera:
t'il en état de répondre au da regulam ?
ce sera là pour lui un langage inconnu
son Bureau ne pouvant lui fournir cette:
maxime si courte , si usitée dans nos Ecoles
, et qui est le fruit des veilles du co…
riphée des Grammairiens.
Omne viro soli quod convenit esto virile .
Mais sans entrer dans ce détail qui
mettroit en déroute ces nouveaux Maîtres
, et leur Bureau en éclats , je me
borne à un raisonnement que peu de
personnes sont en état de faire , parceque
peu de gens prennent un aussi grand
interêt à ces sortes de matieres.
Tout ce qu'un enfant instruit par cette
méthode acquerra de connoissance de la
Langue Latine , de la Grammaire et de
la Syntaxe, ne sera qu'une mémoire locale:
artificielle et méchanique du substantif ,
de l'adjectif et de toutes les parties d'o
raison ; mais il n'aura jamais ce qu'on
appelle la mémoire spirituelle et métaphisique
de ce que ces mots signifient..
Cv Car
46 MERCURE DE FRANCE
Car enfin , lors qu'on lui aura ôté son
Bureau , ses logettes , et qu'on lui demandera
ce que c'est qu'un substantif , un
adjectif , un Verbe &c. il sera entierement
dérouté , et manquant de l'outil
ou de l'instrument qui lui donnoit ce
dont il avoit besoin , il ne sçaura que
devenir. Mais quelle difference à l'égard
d'un enfant instruit par l'ingénieuse méthode
du Rudiment ? avec son Quadret ,
et sans son Quadret , avec son Despautere
, ou sans son Despautere , il répondra
positivement , et ad rem , sur tout ce
qu'on pourra lui demander , parce qu'il
sçaura que ces définitions sont dans ces
Livres , qu'on les lui a expliquées , qu'il
les a apprises par coeur , et vous les recitera
même sans faute , sa mémoire qu'on
a cultivée avec tant de soin ne sçauroit
lui manquer dans une pareille occasion.
C'est , au reste , se tromper lourdement
et donner dans une erreur manifeste , de
croire qu'il faille cultiver autre chose que
la mémoire dans les enfans ; c'est là tout
leur fonds , leur ame , leur esprit n'est
point encore assez formé pour pouvoir
faire toutes les opérations qui conduisent
à l'intelligence . Donnez leur donc beaucoup
de mots beaucoup de termes à
apprendre par coeur , faites les leur recizer
souvent , et vous en ferez des prodi-
>
ga
JANVIER. 1731. 47
ges . On perdra son tems et sa peine quand
on voudra leur donner l'intelligence des
définitions , leur en faire comprendre le
sens ; le tems de les entendre viendra
toujours assez tôt , ne vint-il qu'à l'âge
de quinze ou vingt ans , et c'est justement
alors que leur esprit formé commence
à sentir la valeur des termes qu'ils
ont appris avant ce tems là , et que leur
mémoire conserve comme en depôt ; car
ce n'est que la mémoire qui nous rend
sçavans , et nous fait paroître tels . Autant
que je puis m'en ressouvenir un Ancien
Fa dit avant moi nous ne sommes sçavans
qu'autant que nous avons de la mémoire.
Que ces Tipographistes me font de compassion
, et que je plains les personnes
qui ont à essuyer leurs visions ! Tenonsnous-
en à nos anciennes maximes ; sui
vons les traces qu'on nous a frayées , et
marchons par la voye qu'ils nous ont
indiquée , dussions nous ne jamais arteindre
au but où nous tendons. Et quoique
puisse dire' Seneque , les hommes font
toujours bien de suivre la foule : errer
avec de grands Maîtres , c'est suivre la
bonne tou
, et j'ose le dire , c'e
jours ou presque toujours errer , que
suivre de nouvelles routes . En attendant
C vj
de
l'hort
48 MERCURE DE FRANCE
l'honneur de votre Réponse , j'ai celui
d'être &c.
A Ventabrén , ce 2. Octobre 1730 .
, fur le Bureau Tipographique.
E
St-il licite de vous demander , Monsieur
>
pourquoi et comment tant de
charlatans de la République des Lettres
sont écoutés à la Cour et à la Ville ? Votre
Mercure parle toujours de quelqu'un
de ces Messieurs ; divertissent- ils donc le
Public à ses dépens ? Jadis des fols et des
bouffons augmentoient le nombre des
domes
36 MERCURE DE FRANCE.
domestiques des grands Seigneurs , ensuite
par un meilleur goût , on préfera
les Menétriers , les Troubadours , les Baladins
et les Saltinbanques ; ne seroit- ce
point aujourd'hui le tour des Charlatans ?
il semble qu'ils soient devenus à la mode,
( car en France , comme vous sçavez ) la
mode est l'ame et le mobile presque de
tout , et on dit que Paris seul pourroit
fournir plus de troupes de Charlatans
que tout le Royaume ensemble.
·
Je ne vous parle point ici , Monsieur ,
des prétendus inventeurs de la Pierre.
Philosophale , de la Quadrature du Cercle
, du mouvement perpetuel , des longitudes
etc. je n'y prens aucun interêt ;
mais je vous avouë que je ne puis comprendre
comment des gens de Lettres
donnent dans de pareils travers , et comment
ils peuvent être non -seulement tolerés
et protegés, mais encore quelquefois
récompensés.
On dit que tous les jours vous êtes regalés
d'Affiches nouvelles qui annoncent
au Public des Phénomenes litteraires ;
par l'une on promer de mettre une femme
, une nourisse , un Suisse même , en
état de montrer à un François la Langue
Latine en peu de tems , par le secret ou
le moyen de quelques Monosillabes techniques
et de quelques signe sou herissons
hyeroglifiques.
Un
JANVIER. 1731. 37
Un autre Auteur donne les Sciences
dévoilées et le moyen d'apprendre le Latin
et les Sciences sans le secours d'aucun
Maître ; il donne l'art d'enseigner
le Latin aux petits enfans en les divertissant
, et sans qu'ils s'en apperçoivent :
ce même Auteur dit qu'il ne faut pas
plus de six mois pour apprendre le Latin
et faire son droit , six mois pour être en
état d'entrer dans un Seminaire
mois pour le Latin qui regarde la Medecine.
Je m'imagine qu'avec de tels secrets
on ne manque pas de faire rouler carosse
& c .
trois
Ce qui me revolte le plus en lisant votre
Mercure , c'est d'y trouver un de ces
Charlatans qui affecte de décrier les méthodes
des autres pour donner plus de
crédit à la sienne , et l'élever sur le débris
des autres. Il parle toujours d'un
rudiment pratique de bois , par le moyen
duquel il promet de mieux montrer que
les autres la silabisation , l'orthographe
et les rudimens de la Langue Latine . On
dit que ce Bureau pour un enfant de
deux à trois ans a plus d'une toise de
long , et si ce Bureau si nécessaire pour
l'instruction d'un enfant , croit à mesure
que l'écolier avance en âge , il lui
faudra cinq ou six toises avant que
l'enfant
en quitte l'usage ; à ce
compte là
C le
38 MERCURE DE FRANCE
les jeux de paume vont devenir prodigieusement
chers , car où placer ces machines
de bois à moins qu'on n'ait de
grandes Sales , ou des Galeries telles que
celles des Princes et des grands Seigneurs
une voye plus abregée , à mon avis , ce
seroit d'habiter une Bibliotheque. En atrendant
que je sçache bien la construction
de cette machine , je vous suplie de ne pas
me refuser les éclaircissemens que je vous
demande ; car il appert visiblement que
tet Auteur ignore lui-même ce qu'il veur
montrer aux autres .
Quelle plaisante route n'est- ce point
de faire pratiquer une fausse orthographe
qu'il appelle l'orthographe de l'oreille,
pour parvenir enfin à la veritable or
thographe des yeux ou de l'usage ? A quoi
bon ce détour ? Est-ce là cette simplicité
dont il se pique tant ? La méthode vulgaire
n'est- elle pas plus simple d'aller
droit à la veritable orthographe , sans
chercher les détours qu'indique ce rudiment
de bois car enfin c'est abuser de
la tolerance et de la liberté dont on jouit
dans la République des Lettres , que de
donner ainsi au Public une méthode bizarre
et embarassante sur le nom des lettres
, sur la sillabisation , sur l'ortographe
et sur le rudiment de la Langue Latine
, pendant que nous avons d'excellentes
JANVIER. 1731. 39
lentes méthodes sur chacune de ces parties.
Pourquoi les abandonne - t'on , et
pourquoi leur préferer le - sistême de la
chienne lettrée de la Foire , puisque selon
l'exposé de l'Auteur , un enfant travaille
à ce nouveau Bureau de la même
maniere que la chienne en question ; l'enfant
, à ce qu'on dit , prend dans son Bureau
les lettres dont il a besoin pour composer
un mot tout comme la chienne les
prend sur le pavé ou sur le plancher , et
les donne à son Maître,suivant l'ordre de
l'orthographe
, ainsi que l'enfant
les range
l'une après l'autre sur la table de son
Bureau ; et si l'un et l'autre fait est bien
constant , n'y auroit- il point quelque mistere
que nous ne sçaurions penetrer , et
qui n'est entendu que par ces nouveaux
maîtres et par leurs éleves ? Je me défie
extrêmement
de ces merveilles .
Quoiqu'à la rigueur , je ne doute nullement
qu'on ne puisse dresser un enfant
à ces sortes de jeux comme on dresse un
chien ou tout autre animal. Il me reste
toujours un scrupule dont je sens bien
que je ne guerirai que par ma propre experience
, ou par le témoignage de personnes
sensées , et sans prévention ; je
serois curieux , par exemple , de sçavoir
si un enfant dressé par cette nouvelle.
façon pourroit lire dans un Livre impricij
mé
MERCURE DE FRANCE
mé à Paris , et qu'il n'auroit jamais vû ?
ces faits une fois posés , je passe à ce
prétendu rudiment pratique , et je voudrois
sçavoir si ce rudiment de bois , futil
d'ébene , ou de quelqu'autre bois plus
précieux , apprendra à l'enfant les principes
de la Langue Latine suivis , observés
, et scrupuleusement pratiqués depuis
tant de siecles ? nos maîtres qui n'avoient
point ces moyens prestigieux , ne sontils
pas parvenus à un dégré de sçavoir
auquel nous avons bien de la peine à atteindre
, et finalement auquel tous ces
beaux esprits à rechercher ne parviendront
jamais ? Quoi ! nous aurons passé
bien des années à nous tourmenter pour
apprendre des choses que nous sentons
ne sçavoir pas encore bien dans un âge
avancé , et des enfans de quatre ou cinq
des Gouvernantes , des domestiques
apprendront en jouant ce qui nous a
couté tant de peines , tant de pleurs et
et de fatigues ? nous faudra- t'il remettre
à la Croix de pardieu , sous peine d'être
repris par des enfans ?
ans ,
Que je crains , Monsieur , qu'à force
de vouloir rendre les Sciences aisées , on
ne les rende trop communes , et qu'on
ne méprise les Sçavans par la facilité que
l'on aura à tout âge et en toute condition
de se mettre de niveau avec eux.
En
JANVIER. 1731. 41
En verité , Monsieur , on a bien peu d'é
gard pour des personnes qui ont vieilli
sur les livres , et qui se livrent avec tant
de zele à l'instruction de la jeunesse. On
se livre trop aisément à de nouveaux
venus qui nous ravissent nos droits par
des jeux et par des prestiges , car je ne
sçaurois nommer autrement ces inventions
phantastiques.
Despautere , Hannibal Quadret , le
P. Pomey et tant d'autres auront donc
travaillé inutilement pour la Jeunesse
si l'on suit d'autres routes que celles qu'ils
nous ont marquées. L'experience journaliere
nous apprend que la voye de la récitation
et d'apprendre par coeur est la
plus sure pour exercer la mémoire des
enfans ; nous voyons avec satisfaction que
des enfans sçavent à peine lire qu'ils
nous recitent sans faute leur Mufa , leur
Penelope , la femme d'Ulisse , leur Templum
, Pater, Fructus , Cornu , Dies , et
tous les Paradigmes des Rudimens , nous
voyons qu'ils retiennent avec un succès
égal toutes les concordances , les difficultes
sur la particule On , sur le Que relatif
ou particule , les quatre Questions de
lieu , celles de tems , les régimes des Verbes
Celo , rogo , doceo , moneo , posco , flagito
, ceux de refert et interest , des Verbes ,
piget , pudet , penitet , enfin tout ce qu'il,
Ciij y
42 MERCURE DE FRANCE
ya de plus épineux dans la Grammaire
et dans la Syntaxe , et après cela on viendra
nous débiter des préceptes qui sont
de vrais paradoxes , pour ne rien dire
de plus , ceux qui les débitent seront
crus , seront suivis , tandis que l'on rira
de nos raisonnemens et que nos Ecoles
seront desertes : Que deviendra le fruit
de nos veilles et de nos travaux ? Permettez
-moi , Monsieur , de m'écrier ici avec
un Ancien : 0 tempora ! ô mores !
Avant que de finir ma Lettre
, agréez
,
Monsieur
, que je vous demande
un éclaircissement
sur le titre ridicule
que cet Au-
`teur
avoit
dabord
donné
à sa nouvelle
méthode
, l'A , B , C de Candiac
; ce titre
porte
bien
avec
lui un caractere
de
vision
; car ou ce Candiac
est un nom
propre
de Ville
, ou de personne
, quelque
ce puisse
être des deux
, je dis qu'il
est absurde
de vouloir
ériger
ses visions
en dogmes
litteraires
, au préjudice
de
la doctrine
reçuë
depuis
tant de tems
par
lés plus habiles
Maîtres
; et si cette
voye
a lieu il sera donc
permis
à chacun
de
donner
ses idées
au Public
comme
des
régles
infaillibles
. Je n'aurai
donc
qu'à
donner
må maniere
de montrer
à lire et
le Latin
sous le nom de l'A , B , C , ou
du rudiment
de Ventabrén
, un autre
donnera
la Grammaire
d'Auron
, et quelqu'autre
1
JANVIER. 1731. 43
qu'autre aussi la Sintaxe de Vitrole ; tour
le monde doit sentir les inconveniens d'un
tel abus et le ridicule de pareilles maximes.
Cette reflexion m'en fait naître une
autre que je ne dois pas obmettre , vous
jugerez de sa valeur . Toute personne qui
n'est point née à Paris ou à Blois a mauvaise
grace de vouloir donner des regles
d'orthographe françoise , et qui ne possede
pas le Grec et le Latin ne peut écrire
correctement et suivant l'étimologie des
mots françois qui dérivent de ces deux
Langues. Laissons donc à nos Professeurs
des Universités du Royaume , et sur tout
à ceux de notre Capitale , le soin de nous
donner des regles pour la prononciation
et pour l'orthographe françoise ; nourris
depuis leur enfance dans les Langues oríginales
, ils sçavent mieux que tout au
tre la vraye source du françois , ils en
sçavent mieux la prononciation , ils ont
vieilli dans l'étude du Grec et du Latin .
Plus j'y pense , plus je suis frappé de
la singularité du titre de ce nouveau sistême
, l'A , B , C de Candiac , la Biblio
theque des enfans ; un livre ne sçauroit
être une Bibliotheque , car une Bibliotheque
est une grande chambre , ou appartement
où l'on met des livres de touté
de tout genre ; or un Livre sur
C iiij
espece ,
l'a
4 MERCURE DE FRANCE
l'a , b , c , pour des enfans ne sçauroit
composer une Bibliotheque. Ce titre me
fait ressouvenir d'une Epigramme du fameux
Owen , le Martial Anglois , contre.
un certain Rider , Auteur d'un Lexicon
qu'il avoit donné au Public sous le titre
de Bibliotheque ; ne pourroit on pas en
faire une application à ce nouveau sistême
? La voici :
Quid sibi ridendi vult Bibliotheca , Rideri
Unus enim non est Bibliotheca liber ;
Verborum cum theca fit hac , non theca Librorum
,
Lexicon hoc dici , Dictio theca potest.
Un Livre seul est- il une Bibliotheque
Ma foi , Rider , cette pensée est Grecque ;
Tu ne me comprens pas ; voici donc mes raisons;
Ton Livre tout au plus est de mots un repaire ;.
Une aire au plus de Dictions ;
Nommons-le donc Dictionnaire .
Ce Bureau à niches de bois peut encore
moins passer pour une Bibliotheque
puisqu'on n'y doit mettre que des verbes
, des noms substantifs , des adjectifs ,
des indéclinables ; et ces niches continssent-
elles tous les substantifs imaginables ,
ne donneront jamais à un enfant la connoissance
de la nature du substantif , de
l'adjectif, du verbe &c.
Ca
JANVIER. 1731 45
Ce Bureau , ce Colombier , puisque
Colombier y a , ne rendra jamais un enfant
imperturbable sur les déclinaisons ,
les conjugaisons et les genres , sur les concordances
, car si , par exemple , je viens à
lui demander de quel genre est pileus
sçaura t'il me le dire ? et s'il le dit , sera:
t'il en état de répondre au da regulam ?
ce sera là pour lui un langage inconnu
son Bureau ne pouvant lui fournir cette:
maxime si courte , si usitée dans nos Ecoles
, et qui est le fruit des veilles du co…
riphée des Grammairiens.
Omne viro soli quod convenit esto virile .
Mais sans entrer dans ce détail qui
mettroit en déroute ces nouveaux Maîtres
, et leur Bureau en éclats , je me
borne à un raisonnement que peu de
personnes sont en état de faire , parceque
peu de gens prennent un aussi grand
interêt à ces sortes de matieres.
Tout ce qu'un enfant instruit par cette
méthode acquerra de connoissance de la
Langue Latine , de la Grammaire et de
la Syntaxe, ne sera qu'une mémoire locale:
artificielle et méchanique du substantif ,
de l'adjectif et de toutes les parties d'o
raison ; mais il n'aura jamais ce qu'on
appelle la mémoire spirituelle et métaphisique
de ce que ces mots signifient..
Cv Car
46 MERCURE DE FRANCE
Car enfin , lors qu'on lui aura ôté son
Bureau , ses logettes , et qu'on lui demandera
ce que c'est qu'un substantif , un
adjectif , un Verbe &c. il sera entierement
dérouté , et manquant de l'outil
ou de l'instrument qui lui donnoit ce
dont il avoit besoin , il ne sçaura que
devenir. Mais quelle difference à l'égard
d'un enfant instruit par l'ingénieuse méthode
du Rudiment ? avec son Quadret ,
et sans son Quadret , avec son Despautere
, ou sans son Despautere , il répondra
positivement , et ad rem , sur tout ce
qu'on pourra lui demander , parce qu'il
sçaura que ces définitions sont dans ces
Livres , qu'on les lui a expliquées , qu'il
les a apprises par coeur , et vous les recitera
même sans faute , sa mémoire qu'on
a cultivée avec tant de soin ne sçauroit
lui manquer dans une pareille occasion.
C'est , au reste , se tromper lourdement
et donner dans une erreur manifeste , de
croire qu'il faille cultiver autre chose que
la mémoire dans les enfans ; c'est là tout
leur fonds , leur ame , leur esprit n'est
point encore assez formé pour pouvoir
faire toutes les opérations qui conduisent
à l'intelligence . Donnez leur donc beaucoup
de mots beaucoup de termes à
apprendre par coeur , faites les leur recizer
souvent , et vous en ferez des prodi-
>
ga
JANVIER. 1731. 47
ges . On perdra son tems et sa peine quand
on voudra leur donner l'intelligence des
définitions , leur en faire comprendre le
sens ; le tems de les entendre viendra
toujours assez tôt , ne vint-il qu'à l'âge
de quinze ou vingt ans , et c'est justement
alors que leur esprit formé commence
à sentir la valeur des termes qu'ils
ont appris avant ce tems là , et que leur
mémoire conserve comme en depôt ; car
ce n'est que la mémoire qui nous rend
sçavans , et nous fait paroître tels . Autant
que je puis m'en ressouvenir un Ancien
Fa dit avant moi nous ne sommes sçavans
qu'autant que nous avons de la mémoire.
Que ces Tipographistes me font de compassion
, et que je plains les personnes
qui ont à essuyer leurs visions ! Tenonsnous-
en à nos anciennes maximes ; sui
vons les traces qu'on nous a frayées , et
marchons par la voye qu'ils nous ont
indiquée , dussions nous ne jamais arteindre
au but où nous tendons. Et quoique
puisse dire' Seneque , les hommes font
toujours bien de suivre la foule : errer
avec de grands Maîtres , c'est suivre la
bonne tou
, et j'ose le dire , c'e
jours ou presque toujours errer , que
suivre de nouvelles routes . En attendant
C vj
de
l'hort
48 MERCURE DE FRANCE
l'honneur de votre Réponse , j'ai celui
d'être &c.
A Ventabrén , ce 2. Octobre 1730 .
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Résumé : LETTRE d'un Grammairien de Provence, sur le Bureau Tipographique.
Un grammairien de Provence critique la prolifération de charlatans dans la République des Lettres, notant qu'ils sont écoutés à la Cour et en ville. Il compare ces individus aux fous et bouffons d'antan, soulignant que la mode en France favorise leur ascension. Le grammairien exprime son incompréhension face à la tolérance et au soutien accordés à ces charlatans, qui promettent des méthodes révolutionnaires pour apprendre le latin et d'autres sciences. Il mentionne des affiches annonçant des méthodes rapides pour apprendre le latin, telles que l'utilisation de monosyllabes techniques et de signes hiéroglyphiques. Un auteur prétend enseigner le latin et les sciences sans maître, en divertissant les enfants. Un autre charlatan utilise un rudiment pratique de bois pour enseigner la syllabisation et l'orthographe, mais le grammairien trouve cette méthode absurde et inutile. Le grammairien déplore que ces méthodes soient préférées aux méthodes traditionnelles éprouvées. Il craint que la facilité d'accès aux connaissances ne dévalue les savants et leurs efforts. Il critique également le titre ridicule donné à une nouvelle méthode, 'l'A, B, C de Candiac', et compare cette méthode à un dictionnaire plutôt qu'à une bibliothèque. Le grammairien conclut que les connaissances acquises par ces méthodes ne seront que mécaniques et locales, sans véritable compréhension des concepts. Le texte oppose ensuite un enfant non instruit à un enfant formé par la méthode du 'Rudiment', utilisant des ouvrages comme le 'Quadret' et le 'Despautere'. L'enfant instruit peut répondre précisément aux questions grâce à sa mémoire bien cultivée, où il a appris par cœur les définitions expliquées dans ces livres. L'auteur affirme que se concentrer uniquement sur la mémoire est essentiel chez les enfants, car leur esprit n'est pas encore suffisamment développé pour comprendre les définitions. Il recommande d'apprendre beaucoup de mots et de termes par cœur et de les réciter souvent pour en faire des prodiges. Selon lui, essayer de donner aux enfants une compréhension des définitions est une perte de temps, car ils comprendront leur sens plus tard, vers quinze ou vingt ans. L'auteur exprime également sa compassion pour les imprimeurs qui propagent des idées nouvelles et préfère suivre les anciennes maximes et les traces des maîtres. Il conclut en soulignant que suivre la foule et les méthodes éprouvées est préférable à explorer de nouvelles voies.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 48-49
EPITRE A Mlle de Malcrais de la Vigne, du Croisic en Bretagne, sur son Idille des Hirondelles, inserée dans le premier Volume du Mercure de Decembre 1730.
Début :
N'Allez point vous fâcher de ce qu'un inconnu [...]
Mots clefs :
Épître, Mlle de Malcrais de la Vigne, Hirondelles, Idylle, Parnasse, Apollon
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EPITRE A Mlle de Malcrais de la Vigne, du Croisic en Bretagne, sur son Idille des Hirondelles, inserée dans le premier Volume du Mercure de Decembre 1730.
EPITRE
A Mile de Malcrais de la Vigne , du
Croisic en Bretagne , sur son Idille des
Hirondelles , inserée dans le premier Volume
du Mercure de Decembre 1730 .
N'Allez point vous facher de ce qu'un inconnu
Sans quelque aveu de vous ose ainsi vous écrire ,
Donnez - vous la peine de lire ,
Vous lui pardonnerez quand vous aurez tout lû..
On est zelé quand on estime ;
Clidamis vous l'apprit ; le dirai - je en passant >-
Votre Hirondelle nous l'apprend .
C'est par vous que l'amour avec la raison rime
Ah ! que l'on aime la raison
-
Quand ce Dieu lui fait sa leçon !
Mais je reviens bien vîte au motif qui m'anime
Il vous regarde de trop près.
Je crains qu'en ce moment sur vos jours on n'át→
tente ;
Votre Hirondelle , helas ! cette Idille charmante
Vous fait sur le Parnasse un terrible procés..
Vous
JANVIER. 1731. 49
Vous sçaurez qu'elle est parvenuë
En droite ligne au Mont facré ;.
Apollon après l'avoir luë
Aux doctes Soeurs a déclaré
Qu'il nommoit sa dixiéme Muse:
L'aimable & digne de Malcrais ;
C'est le plus juste des Arrêts ..
Chacune cependant est comme une „ Méduse ;;
On ne voit plus que des serpens
En place des lauriers qui leur ceignoient la tête ,
Et j'ai lû sur leurs fronts et dans leurs yeux ar
dens
Contre vous tout ce qui s'apprête.
La jalouse fureur porte par tout leurs pas ;
Une femme est alors capable de tout faire ;
Plus d'un Neftor l'a dit ; mais je ne le crois pas,
Quoiqu'il en soit , on doit prevenir leur colere :
L'avis est important ; voyez ce qu'il faut faire ; .
Mais s'il y falloit joindre & mon zele & mes
soins ,
De mon foible pouvoir je romprois la limite
Pour rendre vos yeux les témoins
Du cas que je fais du mérite.
Carrelet d'Hauteculle.
A Mile de Malcrais de la Vigne , du
Croisic en Bretagne , sur son Idille des
Hirondelles , inserée dans le premier Volume
du Mercure de Decembre 1730 .
N'Allez point vous facher de ce qu'un inconnu
Sans quelque aveu de vous ose ainsi vous écrire ,
Donnez - vous la peine de lire ,
Vous lui pardonnerez quand vous aurez tout lû..
On est zelé quand on estime ;
Clidamis vous l'apprit ; le dirai - je en passant >-
Votre Hirondelle nous l'apprend .
C'est par vous que l'amour avec la raison rime
Ah ! que l'on aime la raison
-
Quand ce Dieu lui fait sa leçon !
Mais je reviens bien vîte au motif qui m'anime
Il vous regarde de trop près.
Je crains qu'en ce moment sur vos jours on n'át→
tente ;
Votre Hirondelle , helas ! cette Idille charmante
Vous fait sur le Parnasse un terrible procés..
Vous
JANVIER. 1731. 49
Vous sçaurez qu'elle est parvenuë
En droite ligne au Mont facré ;.
Apollon après l'avoir luë
Aux doctes Soeurs a déclaré
Qu'il nommoit sa dixiéme Muse:
L'aimable & digne de Malcrais ;
C'est le plus juste des Arrêts ..
Chacune cependant est comme une „ Méduse ;;
On ne voit plus que des serpens
En place des lauriers qui leur ceignoient la tête ,
Et j'ai lû sur leurs fronts et dans leurs yeux ar
dens
Contre vous tout ce qui s'apprête.
La jalouse fureur porte par tout leurs pas ;
Une femme est alors capable de tout faire ;
Plus d'un Neftor l'a dit ; mais je ne le crois pas,
Quoiqu'il en soit , on doit prevenir leur colere :
L'avis est important ; voyez ce qu'il faut faire ; .
Mais s'il y falloit joindre & mon zele & mes
soins ,
De mon foible pouvoir je romprois la limite
Pour rendre vos yeux les témoins
Du cas que je fais du mérite.
Carrelet d'Hauteculle.
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Résumé : EPITRE A Mlle de Malcrais de la Vigne, du Croisic en Bretagne, sur son Idille des Hirondelles, inserée dans le premier Volume du Mercure de Decembre 1730.
L'épître est adressée à Mile de Malcrais de la Vigne, du Croisic en Bretagne, et traite de son œuvre 'Idille des Hirondelles' publiée dans le premier volume du Mercure de décembre 1730. L'auteur inconnu exprime son admiration pour le travail de Mile de Malcrais, soulignant l'harmonie entre l'amour et la raison. Il manifeste une inquiétude pour la sécurité de Mile de Malcrais, craignant des menaces en raison du succès de son œuvre. L'auteur rapporte que l''Idille des Hirondelles' a été acclamée par Apollon, qui l'a déclarée digne d'être sa dixième Muse, suscitant ainsi la jalousie des autres Muses. Comparées à Méduse, elles voient des serpents à la place de lauriers. L'auteur met en garde contre la fureur jalouse des femmes et offre son soutien pour protéger Mile de Malcrais. L'épître est datée de janvier 1731 et signée Carrelet d'Hauteculle.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 50-53
EXTRAIT d'une Lettre écrite par M. Bourgoin, Maître Chirurgien Juré à Auxerre, le 26. Decembre 1730. au sujet d'un enfant monstrueux.
Début :
Il y a six jours qu'on m'envoya un [...]
Mots clefs :
Chirurgien, Monstruosité, Crâne
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'une Lettre écrite par M. Bourgoin, Maître Chirurgien Juré à Auxerre, le 26. Decembre 1730. au sujet d'un enfant monstrueux.
EXTRAIT d'une Lettre écrite par M.
Bourgoin , Maître Chirurgien Juré à
Auxerre , le 26. Decembre 1730. au sujet
d'un enfant monstrueux.
I
Ly a six jours qu'on m'envoya un enfant
de sexe feminin , dont une pauvre
femme venoit d'accoucher. Cet enfant
estoit monstrueux , non par sa grosseur
, puisqu'il étoit comme les autres enfans
nés à neuf mois , mais parcequ'il étoit
sans crâne , sans col , sans moëlle épiniere
, et par conséquent sans nerfs , le
visage étoit situé immédiatement au dessus
des clavicules , à la partie superieure
et anterieure de la poitrine , sans aucune
marque ni vestige de cou , pas même le
moindre espace pour le jeu et le mouvement
de la mâchoire inférieure , qui
étoit immobile , et qui l'auroit toujours
été si cet enfant avoit pû vivre , nonseulement
par l'adherence de la mâchoire
inférieure avec le sternum par le moyen
de la peau et d'autres parties , mais encore
par le défaut du muscle pterigoïdien,
moteur de la mâchoire. Ses deux oreilles
étoient situées à peu près comme dans
l'état naturel , étant seulement plus allongées
JANVIER. 1731. SI
longées et plus saillantes qu'elles ne sont
d'ordinaire aux autres enfans, elles avoient
la conque rabaissée , et retournée en devant
comme celle d'un chat , à la difference
qu'elles n'étoient ni veluës ni
pointues. Le conduit pour l'air externe
n'alloit point se rendre dans des parties
osseuses , telle que la roche , mais seulement
dans une masse de glandes , de
chairs , de graisse , le tout confondu ensemble
, sans pouvoir faire aucune distinction
de parties.
>
Le nez étoit posé presque au sommet
du visage , n'ayant qu'environ une ligne
de saillie dans l'endroit le plus éminent;
les deux narines assez bien disposées communiquoient
dans les fosses nazales sur
la cloison du palais et dans la bouche,
Au côté de la racine du nez tout au
haut du visage , paroissoient vers les paupieres
deux vessies de figure un peu conique
comme deux olives , sous lesquelles
étoient renfermés les yeux , ce qui représentoit
comme deux cornes , principalement
quand on examinoit cet enfant par
sa partie posterieure.
Quant à la bouche , on n'y remarquoit
rien de particulier , sinon qu'elle étoit
toujours ouverte et béante , parceque les
deux levres étoient tendues autour des
gencives , et que le menton étoit attaché
52 MERCURE DE FRANCE
- au sternum , de maniere que cette bouche
étoit plus ronde qu'ovale , et que la
commissure des levres étoit à peine marquée.
Comme cet enfant n'avoit point de
crâne , et par conséquent point de front,
non plus que de parietaux temporaux.
ctc. Il y avoit derriere ce visage , au lieu
et place du crâne , une partie de figure:
triangulaire platte , recouverte de peau
seulement , qui renfermoit un os assez.
dur de la même figure , lequel sembloit
servir de baze et d'appui à ce visage ..
Cette peau étoit couverte de cheveux
assez courts et clairement plantés , qui bordoient
une ouverture oblongue avec de
grosses levres , dans laquelle on introduisoit
facilement une grosse sonde , qui
descendoit tout le long du canal de Pépine
du dos et qui ne contenoit ni
matiere solide ni liquide .
,
J'aurois bien des particularités à faire
observer sur le squelette de cet enfant
tant sur le derriere de la tête qui paroît
être un crâne renversé , que sur la grande
ouverture à la partie supérieure de l'épine
qui regne , comme je viens de le dire
dans tout ce canal , mais je sortirois des
bornes que je me suis prescrites ; je reserve
ce détail pour une description plus
détaillée que j'espere faire du squelette
JANVIER. 1731. 53
lette en question . Ce monstre , au reste,
a attiré tous les curieux de notre Villet
qui ont été surpris de voir un enfant non
corrompu , avec de l'embonpoint et toutes
les parties au-dessous du col bien figurées
, né sans cerveau , sans moële de
l'épine , et sans nerfs .
Bourgoin , Maître Chirurgien Juré à
Auxerre , le 26. Decembre 1730. au sujet
d'un enfant monstrueux.
I
Ly a six jours qu'on m'envoya un enfant
de sexe feminin , dont une pauvre
femme venoit d'accoucher. Cet enfant
estoit monstrueux , non par sa grosseur
, puisqu'il étoit comme les autres enfans
nés à neuf mois , mais parcequ'il étoit
sans crâne , sans col , sans moëlle épiniere
, et par conséquent sans nerfs , le
visage étoit situé immédiatement au dessus
des clavicules , à la partie superieure
et anterieure de la poitrine , sans aucune
marque ni vestige de cou , pas même le
moindre espace pour le jeu et le mouvement
de la mâchoire inférieure , qui
étoit immobile , et qui l'auroit toujours
été si cet enfant avoit pû vivre , nonseulement
par l'adherence de la mâchoire
inférieure avec le sternum par le moyen
de la peau et d'autres parties , mais encore
par le défaut du muscle pterigoïdien,
moteur de la mâchoire. Ses deux oreilles
étoient situées à peu près comme dans
l'état naturel , étant seulement plus allongées
JANVIER. 1731. SI
longées et plus saillantes qu'elles ne sont
d'ordinaire aux autres enfans, elles avoient
la conque rabaissée , et retournée en devant
comme celle d'un chat , à la difference
qu'elles n'étoient ni veluës ni
pointues. Le conduit pour l'air externe
n'alloit point se rendre dans des parties
osseuses , telle que la roche , mais seulement
dans une masse de glandes , de
chairs , de graisse , le tout confondu ensemble
, sans pouvoir faire aucune distinction
de parties.
>
Le nez étoit posé presque au sommet
du visage , n'ayant qu'environ une ligne
de saillie dans l'endroit le plus éminent;
les deux narines assez bien disposées communiquoient
dans les fosses nazales sur
la cloison du palais et dans la bouche,
Au côté de la racine du nez tout au
haut du visage , paroissoient vers les paupieres
deux vessies de figure un peu conique
comme deux olives , sous lesquelles
étoient renfermés les yeux , ce qui représentoit
comme deux cornes , principalement
quand on examinoit cet enfant par
sa partie posterieure.
Quant à la bouche , on n'y remarquoit
rien de particulier , sinon qu'elle étoit
toujours ouverte et béante , parceque les
deux levres étoient tendues autour des
gencives , et que le menton étoit attaché
52 MERCURE DE FRANCE
- au sternum , de maniere que cette bouche
étoit plus ronde qu'ovale , et que la
commissure des levres étoit à peine marquée.
Comme cet enfant n'avoit point de
crâne , et par conséquent point de front,
non plus que de parietaux temporaux.
ctc. Il y avoit derriere ce visage , au lieu
et place du crâne , une partie de figure:
triangulaire platte , recouverte de peau
seulement , qui renfermoit un os assez.
dur de la même figure , lequel sembloit
servir de baze et d'appui à ce visage ..
Cette peau étoit couverte de cheveux
assez courts et clairement plantés , qui bordoient
une ouverture oblongue avec de
grosses levres , dans laquelle on introduisoit
facilement une grosse sonde , qui
descendoit tout le long du canal de Pépine
du dos et qui ne contenoit ni
matiere solide ni liquide .
,
J'aurois bien des particularités à faire
observer sur le squelette de cet enfant
tant sur le derriere de la tête qui paroît
être un crâne renversé , que sur la grande
ouverture à la partie supérieure de l'épine
qui regne , comme je viens de le dire
dans tout ce canal , mais je sortirois des
bornes que je me suis prescrites ; je reserve
ce détail pour une description plus
détaillée que j'espere faire du squelette
JANVIER. 1731. 53
lette en question . Ce monstre , au reste,
a attiré tous les curieux de notre Villet
qui ont été surpris de voir un enfant non
corrompu , avec de l'embonpoint et toutes
les parties au-dessous du col bien figurées
, né sans cerveau , sans moële de
l'épine , et sans nerfs .
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Résumé : EXTRAIT d'une Lettre écrite par M. Bourgoin, Maître Chirurgien Juré à Auxerre, le 26. Decembre 1730. au sujet d'un enfant monstrueux.
Le 20 décembre 1730, M. Bourgoin, Maître Chirurgien Juré à Auxerre, examina un enfant femelle né six jours plus tôt avec plusieurs anomalies. Cet enfant était dépourvu de crâne, de cou, de moelle épinière et de nerfs. Son visage était situé directement au-dessus des clavicules, sans espace pour le mouvement de la mâchoire inférieure, qui était immobile. Les oreilles étaient allongées et saillantes, avec une conque retournée. Le nez était presque au sommet du visage, avec des narines communiquant avec les fosses nasales et la bouche. Deux vessies coniques, semblables à des olives, renfermaient les yeux, donnant l'apparence de cornes. La bouche était toujours ouverte et béante, les lèvres tendues autour des gencives. À la place du crâne, il y avait une partie triangulaire plate recouverte de peau, avec un os dur servant de base au visage. Cette peau était couverte de cheveux courts bordant une ouverture oblongue menant au canal de l'épine. L'enfant a attiré de nombreux curieux à Auxerre, étonnés de voir un enfant sans cerveau, moelle épinière et nerfs, mais avec un embonpoint et des parties bien formées en dessous du cou.
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7
p. 53
ETRENNES à Madame la Comtesse de ***
Début :
Trouver un cœur bienfait n'est pas chose facile ; [...]
Mots clefs :
Étrennes, Comtesse, Coeur, Reconnaissance, Hommage, Sincérité
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ETRENNES à Madame la Comtesse de ***
ETRENNES à Madame la
Comtesse de ***
Rouver un coeur bienfait n'est pas chose fa .
cile ;
On court pour le chercher au bout de l'Univers
Et de ses voyages divers
On n'emporte souvent qu'une peine inutile.
Puisse le mien être digne de vous ;
Vous l'avez rencontré sans prendre tant de peine
De l'honneur de vous plaire uniquement jaloux ,
Au votre il s'est lié d'une secrete chaîne ,
Et c'eft dans mes malheurs un remede bien doux
Ma parfaite reconnoissance
S'exprime mieux par un humble silence
Que par les longs détours d'un éloge apprêté ;
L'esprit n'a point de part à mon sincere hommage
Il est du coeur le pur langage ;
Le langage du coeur est toujours écouté.
Comtesse de ***
Rouver un coeur bienfait n'est pas chose fa .
cile ;
On court pour le chercher au bout de l'Univers
Et de ses voyages divers
On n'emporte souvent qu'une peine inutile.
Puisse le mien être digne de vous ;
Vous l'avez rencontré sans prendre tant de peine
De l'honneur de vous plaire uniquement jaloux ,
Au votre il s'est lié d'une secrete chaîne ,
Et c'eft dans mes malheurs un remede bien doux
Ma parfaite reconnoissance
S'exprime mieux par un humble silence
Que par les longs détours d'un éloge apprêté ;
L'esprit n'a point de part à mon sincere hommage
Il est du coeur le pur langage ;
Le langage du coeur est toujours écouté.
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Résumé : ETRENNES à Madame la Comtesse de ***
Le poème est dédié à une comtesse et exprime la difficulté de trouver un cœur bienveillant. L'auteur espère que son propre cœur soit digne de la comtesse, rencontrée sans effort. Leur lien est secret et apaisant. La reconnaissance de l'auteur se manifeste par un silence humble plutôt que par des éloges. Son hommage est sincère et vient du cœur.
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8
p. 54-57
DISCOURS de M. l'Olivier, Avocat au Parlement, Substitut de M. le Procureur General, et l'un des deux Substituts des Procureurs Generaux, Sindics des Etats de Bretagne, prononcé dans l'Assemblée des Etats.
Début :
Messieurs, Depuis l'élection que vous avez bien voulu faire en [...]
Mots clefs :
Discours, Assemblée, Prélat, Épiscopat, Honneur, Magistrat, Reconnaissance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DISCOURS de M. l'Olivier, Avocat au Parlement, Substitut de M. le Procureur General, et l'un des deux Substituts des Procureurs Generaux, Sindics des Etats de Bretagne, prononcé dans l'Assemblée des Etats.
DISCOURS de M. l'Olivier , Avocat
au Parlement , Substitut de M. le
Procureur General , et l'un des deux
Substituts des Procureurs Generaux ,
Sindics des Etats de Bretagne , prononcé
dans l'Assemblée des Etats.
MESSI ESSIEURS ,
Depuis l'élection que vous avez bien voulu
faire en ma faveur , j'ai 'souhaité avec
empressement qu'il se présentat quelque occasion
de vous en faire mes trés
remercimens.
respectueux
Penetré de la reconnoissance la plus vive,
je m'étois flatté que les expressions qui pou
voient la rendre sensible suivroient de près
les mouvemens de mon coeur ; mais le
respect
at la crainte dont je me sens penetré à la vuë
de cette auguste assemblée , ne me permettent
qu'à peine de vous faire entendre ma timide
voix.
Je ne trouve rien , Messieurs , de comparable
pour moi à la grace dont vous avez
bien voulu m'honorer. La préference que
vous m'avez donnée sur une foule de concurrens
distingués par leur mérite , en rehausse
infiniment le prix . Quelle gloire ne reçois-je
pas
JANVIER. 1731. 58
pas d'une place où je suis chargé de veiller
à la conservation des droits de la patrie ?
quelle satisfaction de pouvoir chaque jour
trouver de nouvelles occasions de la servir ?
L'honneur d'être admis dans vos assemblées
est encore un avantage qui me rend
cette place très précieuse ; c'est cette prérogative
, Messieurs , qui me met à portée de
connoître et d'admirer en même tems la superiorité
de vos lumieres , la penétration de
vos esprits , la sagesse de vos déliberations
c'est cette prérogative qui me rend témoin de
Fart et de la prudence avec lesquels vous
Scavez , Messieurs , concilier le service du
Roi avec les franchises et les libertés de cette
grande Province.
C'est enfin cette prérogative qui me procure
l'inestimable honneur d'approcher les augustes
personnages qui président à vos déliberations.
Un Prélat nourri dans la sagesse et dans
la pieté , également instruit de tous ses devoirs,
et fidele à les observer , qui joignant aux
vertus de l'Episcopat une parfaite connoissance
des affaires , et destiné à remplir
un jour les plus sublimes emplois de l'Eglise
et de l'Etat.
Un Seigneur aussi grand par sa haute
naissance , qu'il est aimable par les graces
naturelles qui l'accompagnent ; un Seigneur
qui dans un âge de tout tems consacré auxe
plaisirs
56 MERCURE DE FRANCE
plaisirs sçait s'occuper avec autant de dignité
que de succès des affaires les plus importantes
d'une Nation dont il est tout à la fois les délices
et la gloire.
Un Magistrat habile , prudent , équitable
qui par ses lumieres et une longue experience
s'est acquis une profonde connoissance des affaires
de la Province , et s'est tant de fois
distingué dans la place qu'il occupe si dignement.
Quelle gloire n'est ce pas pour moi , Messieurs
, de devoir à vos suffrages une place
qui me procure l'honneur de parler devant
des Personnes si illustres .
"
Des témoignages de bonté si marqués et si
éclatans exigent sans doute de ma part des
hommages pleins de respect pour cette majestueuse
assemblée , un zele à toute épreuve
pour les interêts qu'elle confie et une exactitude
scrupuleuse à tous mes devoirs.
C'est aussi , Messieurs , ce que je vous
supplie d'agréer , et en même tems tout ce
que je puis vous offrir. Quoique jeune , jose
esperer et le désir de répondre à votre choix
est le garant de mon esperance , que par mes:
soins et par mon attention à consulter les
maximes et à suivre les exemples de Messieurs
vos Procureurs Generaux Sindics , je
serai dans peu en état de travailler utilement
sous leurs ordres , et de vous donner des preuves
de mon inviolable dévouëment et de ma
respecineuse reconnoissance- Le
JANVIER. 1731. 57
Le Collegue de M. l'Olivier , dans la
même Charge de Subsitut des Procureurs
Generaux Sindics des Etats , est M. Odye,
Avocat au Parlement , et d'une réputation
distinguée.
au Parlement , Substitut de M. le
Procureur General , et l'un des deux
Substituts des Procureurs Generaux ,
Sindics des Etats de Bretagne , prononcé
dans l'Assemblée des Etats.
MESSI ESSIEURS ,
Depuis l'élection que vous avez bien voulu
faire en ma faveur , j'ai 'souhaité avec
empressement qu'il se présentat quelque occasion
de vous en faire mes trés
remercimens.
respectueux
Penetré de la reconnoissance la plus vive,
je m'étois flatté que les expressions qui pou
voient la rendre sensible suivroient de près
les mouvemens de mon coeur ; mais le
respect
at la crainte dont je me sens penetré à la vuë
de cette auguste assemblée , ne me permettent
qu'à peine de vous faire entendre ma timide
voix.
Je ne trouve rien , Messieurs , de comparable
pour moi à la grace dont vous avez
bien voulu m'honorer. La préference que
vous m'avez donnée sur une foule de concurrens
distingués par leur mérite , en rehausse
infiniment le prix . Quelle gloire ne reçois-je
pas
JANVIER. 1731. 58
pas d'une place où je suis chargé de veiller
à la conservation des droits de la patrie ?
quelle satisfaction de pouvoir chaque jour
trouver de nouvelles occasions de la servir ?
L'honneur d'être admis dans vos assemblées
est encore un avantage qui me rend
cette place très précieuse ; c'est cette prérogative
, Messieurs , qui me met à portée de
connoître et d'admirer en même tems la superiorité
de vos lumieres , la penétration de
vos esprits , la sagesse de vos déliberations
c'est cette prérogative qui me rend témoin de
Fart et de la prudence avec lesquels vous
Scavez , Messieurs , concilier le service du
Roi avec les franchises et les libertés de cette
grande Province.
C'est enfin cette prérogative qui me procure
l'inestimable honneur d'approcher les augustes
personnages qui président à vos déliberations.
Un Prélat nourri dans la sagesse et dans
la pieté , également instruit de tous ses devoirs,
et fidele à les observer , qui joignant aux
vertus de l'Episcopat une parfaite connoissance
des affaires , et destiné à remplir
un jour les plus sublimes emplois de l'Eglise
et de l'Etat.
Un Seigneur aussi grand par sa haute
naissance , qu'il est aimable par les graces
naturelles qui l'accompagnent ; un Seigneur
qui dans un âge de tout tems consacré auxe
plaisirs
56 MERCURE DE FRANCE
plaisirs sçait s'occuper avec autant de dignité
que de succès des affaires les plus importantes
d'une Nation dont il est tout à la fois les délices
et la gloire.
Un Magistrat habile , prudent , équitable
qui par ses lumieres et une longue experience
s'est acquis une profonde connoissance des affaires
de la Province , et s'est tant de fois
distingué dans la place qu'il occupe si dignement.
Quelle gloire n'est ce pas pour moi , Messieurs
, de devoir à vos suffrages une place
qui me procure l'honneur de parler devant
des Personnes si illustres .
"
Des témoignages de bonté si marqués et si
éclatans exigent sans doute de ma part des
hommages pleins de respect pour cette majestueuse
assemblée , un zele à toute épreuve
pour les interêts qu'elle confie et une exactitude
scrupuleuse à tous mes devoirs.
C'est aussi , Messieurs , ce que je vous
supplie d'agréer , et en même tems tout ce
que je puis vous offrir. Quoique jeune , jose
esperer et le désir de répondre à votre choix
est le garant de mon esperance , que par mes:
soins et par mon attention à consulter les
maximes et à suivre les exemples de Messieurs
vos Procureurs Generaux Sindics , je
serai dans peu en état de travailler utilement
sous leurs ordres , et de vous donner des preuves
de mon inviolable dévouëment et de ma
respecineuse reconnoissance- Le
JANVIER. 1731. 57
Le Collegue de M. l'Olivier , dans la
même Charge de Subsitut des Procureurs
Generaux Sindics des Etats , est M. Odye,
Avocat au Parlement , et d'une réputation
distinguée.
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Résumé : DISCOURS de M. l'Olivier, Avocat au Parlement, Substitut de M. le Procureur General, et l'un des deux Substituts des Procureurs Generaux, Sindics des Etats de Bretagne, prononcé dans l'Assemblée des Etats.
M. l'Olivier, avocat au Parlement et substitut du Procureur Général, adresse un discours aux États de Bretagne après son élection. Il exprime sa gratitude pour l'honneur reçu et la préférence accordée parmi de nombreux concurrents. Il se réjouit de pouvoir veiller sur les droits de la patrie et servir quotidiennement la province. L'honneur d'être admis dans les assemblées lui permet d'admirer la sagesse et la prudence des délibérations des États, ainsi que leur capacité à concilier le service du Roi avec les franchises et libertés de la Bretagne. M. l'Olivier admire également les personnalités présentes, notamment un prélat sage et pieux, un seigneur distingué par sa naissance et ses compétences, et un magistrat expérimenté. Il promet de faire preuve de respect, de zèle et de scrupule dans l'exercice de ses devoirs. Bien que jeune, il espère, en suivant les exemples de ses prédécesseurs, pouvoir travailler utilement et prouver son dévouement et sa reconnaissance. Son collègue, M. Odye, est également mentionné pour sa réputation distinguée.
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9
p. 57
CONTE EPIGRAMMATIQUE.
Début :
Certain Pédant fut choisi par un Fat [...]
Mots clefs :
Pédant, Conte épigrammatique, Fat, Moquerie, Gloire
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : CONTE EPIGRAMMATIQUE.
CONTE
EPIGRAMMATIQUE.
CErt Ertain Pédant fut choisi par un Fat
Pour vanter ses hauts faits et son vaste génie ,
Sans avoir fait marché , la besogne finie ,
Entr'eux survint un grand débat :
Sur le prix le fat se récrie ,
Payer si cher des Vers ! c'est une mocquerie ,
Pour le particulier il faut être plus doux,
Monsieur , dit le Pédant , vous êtes bon et sage ,
Faites attention , s'il vous plaît , à l'Ouvrage ,
Je ferois moins payer Alexandre que vous ;
J'eusse pour le louer mis en vers son Histoire ;
Mais pour vous j'ai fait du nouveau ,
Et foi d'homme d'honneur en chantant votre
gloire ,
?
J'ai tout tiré de mon cerveau.
EPIGRAMMATIQUE.
CErt Ertain Pédant fut choisi par un Fat
Pour vanter ses hauts faits et son vaste génie ,
Sans avoir fait marché , la besogne finie ,
Entr'eux survint un grand débat :
Sur le prix le fat se récrie ,
Payer si cher des Vers ! c'est une mocquerie ,
Pour le particulier il faut être plus doux,
Monsieur , dit le Pédant , vous êtes bon et sage ,
Faites attention , s'il vous plaît , à l'Ouvrage ,
Je ferois moins payer Alexandre que vous ;
J'eusse pour le louer mis en vers son Histoire ;
Mais pour vous j'ai fait du nouveau ,
Et foi d'homme d'honneur en chantant votre
gloire ,
?
J'ai tout tiré de mon cerveau.
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Résumé : CONTE EPIGRAMMATIQUE.
Un conte relate un désaccord entre un pédant et un fat. Le fat avait demandé au pédant de vanter ses hauts faits sans contrat. Un débat éclate sur le prix des vers. Le fat trouve le prix élevé, mais le pédant affirme avoir créé un travail original et unique.
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10
p. 58-59
LETTRE écrite de S. Ouïn en Picardie, le 20. Novembre 1730. sur les Perce-oreilles.
Début :
Vous avez bien voulu, Messieurs, inserer dans les Mercures les [...]
Mots clefs :
Perce-oreilles, Eau-de-vie, Maladie, Insectes
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de S. Ouïn en Picardie, le 20. Novembre 1730. sur les Perce-oreilles.
LETTRE écrite de S. Ouin en Picardie,
Le 20. Novembre 1730. sur les Perceoreilles.
1
Ous avez bien voulu , Messieurs ,
inserer dans les Mercures les lettres.
que je me suis donné l'honneur de vous
écrire au sujet du fils du sieur Lafitte
Chirurgien , demeurant au Bourg de Domart-
les-Ponthieu. Ce jeune homme qui
a été incommodé pendant cinq à six ans
par le grand nombre de Perce -oreilles
qui se sont engendrés successivement dans
sa tête , et qui sortoient par ses oreilles et
en partie par le nez , se trouve aujourd'hui
gueri parfaitement , et cela par l'effet
du pur hazard ensorte qu'on peut
dire que sa guerison est aussi surprenante
la maladie même , si toutefois on
que
peut qualifier cette incommodité de maladie.
Voici comme la chose est arrivée.
,
Etant chez un des amis de son pere ,
au mois de Janvier dernier , où on buvoit
de l'Eau de vie , boisson trop familiere
dans notre Province , sur tout parmi
les petites gens , on lui en fit boire
plusieurs verres dont il s'est trouvé yvre,
et cette boisson meurtriere ayant porté
sa fumée à la tête , on en vit sortir une
quantité
JANVIER. 1731. 59
quantité prodigieuse de ces insectes , ce
qui surprit étrangement les personnes
qui étoient présentes , et depuis ce tems
jusqu'à la fin d'Avril il ne ressentit aucun
des piquottemens qui lui faisoient souffrir
de très vives douleurs ; mais enfin il
en restoit un seul qui sortit alors , et depuis
il n'en a plus paru . Son teint devient
beaucoup meilleur , et ses cheveux qui
étoient bruns , et par les extrémités à demi
blancs , reprennent une couleur égale,
J'ai crû , Messieurs , vous faire plaisir de
vous informer de cet évenement. Je suis
toujours etc.
De Savoye , Curé de S. Ouin et Doyen
Rural de Vinacourt.
Le 20. Novembre 1730. sur les Perceoreilles.
1
Ous avez bien voulu , Messieurs ,
inserer dans les Mercures les lettres.
que je me suis donné l'honneur de vous
écrire au sujet du fils du sieur Lafitte
Chirurgien , demeurant au Bourg de Domart-
les-Ponthieu. Ce jeune homme qui
a été incommodé pendant cinq à six ans
par le grand nombre de Perce -oreilles
qui se sont engendrés successivement dans
sa tête , et qui sortoient par ses oreilles et
en partie par le nez , se trouve aujourd'hui
gueri parfaitement , et cela par l'effet
du pur hazard ensorte qu'on peut
dire que sa guerison est aussi surprenante
la maladie même , si toutefois on
que
peut qualifier cette incommodité de maladie.
Voici comme la chose est arrivée.
,
Etant chez un des amis de son pere ,
au mois de Janvier dernier , où on buvoit
de l'Eau de vie , boisson trop familiere
dans notre Province , sur tout parmi
les petites gens , on lui en fit boire
plusieurs verres dont il s'est trouvé yvre,
et cette boisson meurtriere ayant porté
sa fumée à la tête , on en vit sortir une
quantité
JANVIER. 1731. 59
quantité prodigieuse de ces insectes , ce
qui surprit étrangement les personnes
qui étoient présentes , et depuis ce tems
jusqu'à la fin d'Avril il ne ressentit aucun
des piquottemens qui lui faisoient souffrir
de très vives douleurs ; mais enfin il
en restoit un seul qui sortit alors , et depuis
il n'en a plus paru . Son teint devient
beaucoup meilleur , et ses cheveux qui
étoient bruns , et par les extrémités à demi
blancs , reprennent une couleur égale,
J'ai crû , Messieurs , vous faire plaisir de
vous informer de cet évenement. Je suis
toujours etc.
De Savoye , Curé de S. Ouin et Doyen
Rural de Vinacourt.
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Résumé : LETTRE écrite de S. Ouïn en Picardie, le 20. Novembre 1730. sur les Perce-oreilles.
Le 20 novembre 1730, une lettre de S. Ouin en Picardie relate le cas d'un jeune homme, fils du chirurgien Lafitte à Domart-les-Ponthieu, souffrant depuis cinq à six ans d'une infestation de perce-oreilles dans sa tête. Ces insectes sortaient par ses oreilles et son nez. En janvier 1730, après avoir bu plusieurs verres d'eau-de-vie chez un ami de son père, une grande quantité de perce-oreilles est sortie de sa tête, surprenant les témoins. Par la suite, il n'a plus ressenti de douleurs jusqu'à avril, date à laquelle le dernier perce-oreille est sorti. Depuis, il est guéri et son teint s'est amélioré. Ses cheveux, auparavant brun avec des extrémités blanches, reprennent une couleur uniforme. L'auteur de la lettre, le curé de S. Ouin et doyen rural de Vinacourt, informe les destinataires de cet événement.
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11
p. 59-60
VERS Faits par un Partisan du Celibat.
Début :
Veut-on que je prenne une femme ? [...]
Mots clefs :
Célibat, Complaisance, Sincérité, Jalousie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : VERS Faits par un Partisan du Celibat.
VERS
Faits par un Partisan du Celibat,
VEut- on que je prenne une femme ?
J'y veux trouver ensemble et jeunesse et beauté ,
L'esprit bienfait , une belle ame ,
Agrément et simplicité ,
Coeur sensible sans jalousie ,
Complaisance et sincerité ,
Vivacité sans fantaisie ,
Sagesse
小
o MERCURE DE FRANCE
Sagesse sans austerité ;
Enfin , pour la rendre parfaite ,
A toutes les vertus joignez tous les appas ;
Voila celle que je souhaite ;
Trop heureux cependant de ne la trouver pas !
Faits par un Partisan du Celibat,
VEut- on que je prenne une femme ?
J'y veux trouver ensemble et jeunesse et beauté ,
L'esprit bienfait , une belle ame ,
Agrément et simplicité ,
Coeur sensible sans jalousie ,
Complaisance et sincerité ,
Vivacité sans fantaisie ,
Sagesse
小
o MERCURE DE FRANCE
Sagesse sans austerité ;
Enfin , pour la rendre parfaite ,
A toutes les vertus joignez tous les appas ;
Voila celle que je souhaite ;
Trop heureux cependant de ne la trouver pas !
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12
p. 60-75
LETTRE écrite à M. Ziorcal au sujet de sa Réponse à M. Barrés, inserée dans le Mercure du mois d'Octobre 1730. sur l'usage interieur de l'Eau de vie.
Début :
Il n'est pas juste, Monsieur, d'établir sur les [...]
Mots clefs :
Eau-de-vie, Santé, Alcool, Digestion, Critique, Médecine
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite à M. Ziorcal au sujet de sa Réponse à M. Barrés, inserée dans le Mercure du mois d'Octobre 1730. sur l'usage interieur de l'Eau de vie.
LETTRE écrite à M. Ziorcal au sujet
de sa Réponse à M. Barrés , inserée dans
le Mercure du mois d'Octobre 1730. sur
l'usage interieur de l'Eau de vie.
L n'est pas juste , Monsieur , d'éta-
I blir sur les débris que vous faites de
nos bons sentimens pour le Public , le
grand air de confiance qu'on découvre
d'abord dans votre Réponse à ma Lettre;
pardon , peut- être ne sçavez vous pas que
les gens raisonnables ne se laissent jamais
prévenir follement , & que le ton imposant
d'un Auteur insipide pour s'assurer
leurs suffrages , est moins capable de les
séduire que de les rendre plus scrupuleux
dans leurs décisions . Cela soit dit néanmoins
sans blesser en aucune maniere
l'honneur que vous avez bien voulu nous
faire , en nous proposant brievement vos
doutes , que vous auriez pû , à la verité,
épargner aux dépens d'une plus sérieuse
attenJANVIER.
1731. 61
attention , si sans doute elle n'eut été
trop penible pour vous , ce qui fait que
sans nous détourner beaucoup des devoirs
de notre profession , nous esperons de
vous ramener de votre pirrhonisme.
En premier lieu , quoiqu'on soit assuré
que tous les raisonnemens vagues ne sçauroient
convaincre les personnes raisonnables
de la verité des propositions qu'on
avance , il n'est pas moins à propos cependant
de s'en servir quelquefois , et de
les placer dès l'entrée de la question , où
on les dévelope ensuite , et qu'on ne fait
devancer uniquement que pour disposer
l'esprit du lecteur à la concevoir plus aisément.
Notre Lettre peut fort bien être
l'exemple d'un pareil cas , d'ailleurs ces
grands mots qui vous choquent si rude--
ment n'ont pourtant point blessé le goût:
ni les oreilles des plus fameux Medecins .
de ce tems qui les ont introduits dans leurs
Ouvrages qu'êtes vous , Monsieur
pour ne pas les souffrir ? et pouvez- vous
penser de bonne foi que ces grands Maîtres
de l'Art s'en rapportent à vous quicondamnez
leurs expressions sans les entendre.
Pour moi , je me tiens à l'abri .
des justes reproches qu'on seroit en droit.
de me faire, si j'osois temerairement rien
entreprendre là- dessus , et il me suffit de
trouver dans leur signification autant
D d'éner
-
62 MERCURE DE FRANCE
ト
d'énergie et de force qu'il m'en faut
dans le besoin , pour ne pas en désaprouver
le
sçavant usage ; ainsi vous nous permettrez
, sans doute , de nous en accommoder
dans toutes les occasions favorables
dont vous profiterez aussi , si vous le
pouvez , par la même licence que nous
vous donnons à notre tour . Je serois
beaucoup moins éloigné de bannir des
questions les raisonnemens dénués d'experience
; mais vous ne nous faites jamais
voir que ceux qui viennent de notre part
méritent la rigueur de cet exil. Au reste,
on n'a pas toujours besoin de raisons
fondées sur des principes mathématiques
pour convaincre , ce seroit faire tort à
bien des gens d'esprit qui ne sont point
dans ce goût , quoique pourtant trèsraisonnables
et très judicieux , que de leur
ravir le droit d'une question qui les interesse
avec tout le reste des hommes.
Maintenant sans perdre notre tems à
disputer des termes qu'on peut apprendre.
à l'Ecole , et à discuter de vains raisonnemens
, venons au fait de la question .
Nous assurons que l'Eau de vie est une
eau de mort sur ce qu'elle ne releve les forcés
que pour les abattre peu après , parceque cette
liqueurport: les puissances ou les ressorts des
solides au delà de leur tonus , ou de cettejuste
étendue que la nature leur a donnée,d'où étant
de
JANVIER. 1731. 63
>
on n'ide
retour sur eux mêmes , ils tombent dans la
langueur. Voyons si ce trait de notre Lettre
doit passer justement pour obscur.
Tout le monde sçait ce qu'on entend
par le tonus des parties solides
gnore pas même qu'il n'aille jusqu'à un
certain point , ou qu'il n'ait une, juste
étenduë ; qu'importe qu'on vous l'assigne?
Keil ( a ) et Borelli ( b ) n'ont pas sçû nous
éclaircir touchant l'étendue de la force du
coeur ; a-t'on moins de raison de se persuader
que les ressorts des solides sont
contraints bien souvent de se porter au
delà ? la vessie trop remplie d'urine se
porte au delà de son tonus , les vaisseaux
engorgés de sang souffrent aussi quelquefois
de semblables distensions , dans ces
violens tiraillemens qu'on pratique pour
remettre les os luxés à leur place les
fibres musculaires revenant ensuite sur
elles mêmes, ont-elles cette force d'un arc
bandé qui se débande ? et les membranes
dont elles composent le tissu joüissentt'elles
d'abord après leur retour de leur
premiere vigueur dans le jeu de leur contraction
? qu'en pensez vous , M. le Doc
teur ? Ainsi les ressorts des solides débridés
, pour ainsi dire , ou portés au delà
›
( a ) Jacques Keil donne au coeur une force
de cinq onces.
(b) Alphonse Borelli de trois mille livres.
Dij
de
64 MERCURE DE FRANCE
de leur juste étenduë , se trouvent dans
la langueur ou l'abattement qu'on se sent
après de violens exercices , et après même
l'usage des liqueurs ardentes. En effet , le
corps ayant souffert de trop rudes travaux
se sent fatigué , languissant , ou
pour éviter de passer chez vous pour
obscur , ses ressorts par le jeu continuel
qu'ils ont exercé pendant un assez lorg
tems , se sont comme relâchés , ensorte
que revenant sur eux-mêmes ils ont perdu
leur premiere vigueur , ce qui se fait
infailliblement par l'effort réïteré que
font les liqueurs contre les parois membraneuses
des vaisseaux qu'elles poussent
en dehors avec violence dans leurs cours
acceleré par la contraction continuelle
des muscles qui les envoye au coeur , et
que le coeur leur renvoye de même. Ce
' est donc point ici un arc qui acquiert
d'autant plus de force à se remettre, qu'on
le resserre jusqu'à un certain point , mais
c'est un arc qui en a d'autant moins , que
sa flexion est portée au delà , ou qu'on
le courbe trop , delà vient que dans les
premiers tems de son jeu il se redresse
avec beaucoup de vitesse et de force , et
que dans les derniers elle se trouve molle,
foible et languissante.
Il en est à peu près de même touchant
l'effet que les liqueurs ardentes produisent
JANVIER. 1731. 65
ร
sent dans leur usage interieur ( ce qu'on
reconnoit par le poulx ) d'abord le sang
se gonfle , les parois des vaisseaux sont
repoussées en dehors en tout sens ; les
ressorts des fibres musculaires des tuniques
portés alors au delà de leur tonus ne
pouvant rester constamment dans la même
distension , ni aller plus loin , par l'absence
de la cause qui les a mis en jeu
et qui à force de perdre de son énergie
s'est retirée ( ce qui arrive dans le second
tems de l'action de cette liqueur ) il faut
non seulement que ces puissances revien
nent sur elles- mêmes mais encore que
leur vigueur soit moindre qu'auparavant
pour deux raisons. 1º Parceque les fibres
après cette distension outrée se trouvent
lâches et incapables de repren
dre leur état naturel , si ce n'est après
un certain tems qui est celui de la lan~
gueur.. 20 Que les liqueurs épaissies
étant inhabiles au mouvement , obéïssent
moins à la pression des solides relâ
chés , et leur opposent de plus grandes
résistances à surmonter ; pour lors le sang
ralenti dans son cours passe dans le tissu
des muscles , rend leur contraction laborieuse
qui se force de les en dégager ; delà
ces lassitudes ces langueurs qui ne
manquent jamais de succeder à la force
à la fureur même qu'on observe d'abord
D iij
,
dans
66 MERCURE DE FRANCE
dans ceux qui ont usé des liqueurs ardentes
. Ajoutez à cela que le terme de
tout ce desordre étant le racornissement
des solides et l'épaississement des liquides,
ces langueurs perseverent , augmentent
même tous les jours avec l'usage des eauxde
vie , d'où suit ce nombre prodigieux
de maux qui retranchent une bonne partie
des jours de la durée de l'homme.
L'Eau de vie produit moins cette distension
dont il s'agit par sa quantité que
par sa nature , et vous devriez , Monsieur,
avoir ici plus de honte que dans tout autre
endroit de votre Réponse à ma Lettre,
de sentir mieux que personne qu'un de
mes confreres ne sçache point que ce n'est
pas le seul remede qui pris à petite dose
produit dans le corps de très sensibles
effets. Qu'est - ce qu'un grain d'opium
dans un corps de 160. livres ? Est- ce la
1600 partie de ce même corps ? soyez
surpris après cela , tant qu'il vous plaira ,
qu'on prenne 128. onces d'alimens sans
craindre cette distension qui se fait tou
jours appréhender avec juste raison dans
l'usage de l'Eau de vie qui rarefie le sang,
et qui l'épaissit dans des tems differens.
Le terme des tems que l'Eau de vie parcourt
dans sa maniere d'agir étant surve→
nu , les parties solides se trouvent dépourvues
des sucs lymphatiques qui en
humecJANVIER
. 1731. 67 humectent
le tissu , elles en deviennent
plus seches , plus compactes
, plus fortes,
mais aussi plus rebelles aux causes de leurs
mouvemens
, ou plus difficiles à se mettre
en jeu , ce qui fait voir que la langueur
est une suite de ce qui arrive dans
l'usage des liqueurs ardentes , malgré ces
prétendues
contradictions
dont vous nous
faites un crime , dans le tems que nous
si vous eussiez rapsommes
assurés que
porté plus au long ce trait de notre Lettre
, ou que vous eussiez aimé à méditer
plus attentivement
ce qui se passe dans les differens tems de l'action de l'Eau de
vie , vous auriez été moins scrupuleux
sur vos doutes.
{
Permettez
moi , Monsieur , de vous
dire ici qu'il faut ou que vous n'ayez
jamais pris par excès des liqueurs ardentes
, ou que vous n'ayez jamais vu des
gens
livrés à la débauche de l'Eau de vie
et du vin , pour nier la langueur , l'abattement
qui les ensevelit dans le sommeil,
et qui se fait sentir même quelque tems
après le repos ; sans cela il ne vous seroit
pas difficile par ces grands effets qu'une
quantité considerable
de ces liqueurs peut
produire très sensiblement
, d'inferer ma
thematiquement
par des calculs exacts
que vous faites si bien , quel doit être ce
lui d'une plus petite dose ; que si cepen-
Diiij dant
68
MERCURE DE
FRANCE.
faire
dant l'experience qu'un chacun peut
à ses propres dépens n'est pas un moyen
assuré pour vous convaincre du fait dont
il s'agit, tenez vous en à Regnier qui sçait,
sans doute , mieux que Sidenham & c.
Qu'un jeune Medecin vit moins qu'un vieil yvrogne.
C'est sur ce Vers que le Poëte n'a pas
crû , en le faisant , devoir servir de regle
dans la
Medecine , que vous croyez tout
de bon que le témoignage des buveurs
d'Eau de vie ou de vin ne nous est pas
avantageux , fondé veritablement encore
sur ce que s'ils sont exposés aux maladies
rapportées dans notre Lettre , les buveurs
d'eau n'en sont point exemts . Mais je vous
demande ( à part , s'il vous plaît , votre
grand air de confiance ) lesquels de ces
deux sortes de gens sont plus sujets à ces
mêmes maladies ? parlez sans vous émouvoir.
Quoique vous en disiez , on sçait
fort bien que dans le Pays du Nord ou
l'on se permet trop librement ces sortes
de liqueurs , les habitans se voyent tourmentés
de mille maladies , plus rares dans
tout autre climat où l'on est plus reservé
sur leur usage. Il n'est point question de
l'abus de l'eau simple ou de l'Eau de vie ,
on ne nous apprendra rien là dessus ; il
s'agit seulement de cet usage des Eaux
de
JANVIER. 1731. 69.
de vie qui a scû s'introduire parmi les
hommes , et qui fait voir bien souvent
au prix de la perte de la santé d'un très .
grand nombre , qu'il vaudroit mieux suivre
la saine pratique de Fernel de Sydenham
&c. que toutes les rêveries des
Poëtes que vous pouviez rapporter en,
grand nombre contre de si grands Medecins.
Qu'on ne nous accuse point ici cependant
de desaprouver l'Eau de vie ; nous.
sçavons aussi bien que ceux qui semblent
présomptueusement vouloir nous instruire
sur ce sujet , les bons usages que cette
liqueur spiritueuse remplit dans la Mcdecine
comme remede , soit qu'on l'employe
exterieurement ou interieurement,
nais qu'on la regarde comme necessaire
pour la santé. C'est ce que la Medecine,
ne pardonnera jamais à ceux qui font profession
de suivre sa saine doctrine ; il,
n'est pas possible de penser combien j'ai
été touché de reconnoitre dans un de mes
confreres un si fier ennemi contre un sentiment
qui ne peut qu'être salutaire à
l'homme dans le tems que le sien lui
est très dangereux ; en effet , puisque nous
voyons tous les jours des gens dans l'usage
de l'eau douce route pure joüir d'une
parfaite santé , l'homme ne pourroit-il
pas se passer de l'Eau de vie et se bien
DV porter
70 MERCURE DE FRANCE
porter ? dans les siecles plus reculés où
cette liqueur n'étoit point connue , vivoiton
moins qu'aujourd'hui ? les vieux yvrognes
du tems présent ont-ils une plus
belle vieillesse que ceux qui les ont devancés
loin de l'usage du vin où des liqueurs
ardentes ? que peut- on penser sur
cela ? Enfin doute qui voudra que
la maladie
doive plus à l'Eau de vie que la
santé parfaite dans un doute si dangereux
, il n'y aura que des témeraires et
des insensés qui se livreront au danger.
Malgré toute la sagesse de ces précautions
séduisantes que vous exigez dans l'usage
de l'Eau de vie après des grands repas , sous
le faux prétexte d'aider à la digestion
bien loin d'approuver votre pratique en
pareil cas , nous regardons cette liqueur
comme très contraire à cette fonction ;
et la méchanique que vous faites jouer
dans le secours qu'elle y apporte est toutà
fait ridicule. Cette liqueur acide et spiritueuse
, dites vous , tombant dans l'estomac
, perd son activité dans les parties
graisseuses des alimens , et ne garde qu'une
legere force pour exciter la contraction
de ce viscere affaissé sous leur poids ; comme
s'il se trouvoit dans les alimens divic
sés de petites celulles capables de retenir
ces parties spiritueuses , qu'une bouteille
bien bouchée laissé souvent échaper , et
d'en
JANVIER. 1731 7I
d'en refrener l'énergie. Les rapports vi
neux après une débauche semblent nous
montrer assez vrai semblablement qu'il
doit se passer pour lors dans l'estomac
échauffé en tout sens , farci d'alimens et
de vin , ce qui se passe à peu près dans
un alambic sur le feu , où les parties les
plus volatiles de ce qu'on distile ne sçauroient
se tenir cantonnées , intriquées
bien avant dans la texture du mixte , mais
se trouvent forcées d'obéir aux secousses.
du feu , et de donner lateralement en tout
sens contre ses parois , ou de sortir à la
faveur de la premiere issuë qui se présente.
Maintenant si notre conjecture n'est
pas trop hardie , et si on doit attendre un
semblable effet dans l'estomac après l'usage
du vin , quel sera celui des liqueurs
plus volatiles ? c'est alors que les parois.
de ce viscere continuellement agacées ,
arcelées par un nombre infini de petits
corps rigides effarouchés , qui ne peuvent
que les tourmenter considerablement dans
Feurs rudes et fréquentes atteintes , sont
obligées d'exercer des contractions vio→
lentes et extraordinaires dont la digestion
se passeroit plutôt que d'en recevoir du
secours. Vous direz , sans doute , que lesromac
affaissé sous le poids de trop d'alimens
a besoin d'être reveillé pour s'em
dégager.
D vj
Om
72 MERCURE DE FRANCE
>
On répond à cela que comme cette inhabileté
dans le jeu de ces contractions
ne vient que de trop de résistance qui
s'y oppose il ne faut pour les rendre
plus libres , plus aisées , que la diminuer .
Est- ce par le secours des Liqueurs ardentes
qu'on doit esperer d'y réussir ? Mais
au contraire , elles ne serviroient qu'à
dessecher ou durcir davantage cette masse
d'alimens , soit en interceptant le cours
de la Lymphe stomacale , soit en tarissant
la source de la salive et des autres
sucs lymphatiques qui vaquent à la dijestion
; ce qui augmenteroit la résistance
et rendroit les contractions plus laborieuses
; un bon délayant insipide , propre
à s'insinuer dans la masse des alimens
divisez , à la ramolir , à la détremper ,
à la liquefier et à la rendre ainsi docile
aux pressions de ce Viscere et des parties
voisines , suffit pour l'ouvrage de la digestion
; et comme de tous ceux que la
Nature a toujours offerts à l'homme , il
n'en est point de plus capable de s'acquiter
benignement de cet emploi , que
l'eau douce toute pure ; nous la regardons
comme très - salutaire dans cet usage;
alors les alimens en pâte plus détrempée,
plus mole , résistent moins et cedent aisément
aux contractions de ce Viscere
qui s'en dégage sans peine.
Les:
JANVIER. 1731. 73
·
que la
Les Acides de l'Eau de vie ( continuezvous
) fermentant avec les alimens , se
changent en Sels salez , aident à la division
des viandes , passent dans le sang ,
en accelerent le cours et les sécretions.
Croyez vous de bonne foi
chose se passe de même , et pouvezvous
sur votre même air de confiance
nous proposer publiquement une Méchanique
si mal établie ; de semblables.
raisonnemens ne méritent point de réponse
aux preuves que l'on apporte pour
les soutenir ; car outre qu'il se peut fort.
bien que ces Acides ne rencontrant que
des Acides dans les alimens , vous aurez
beau attendre pour lors de la fermentation
et des changemens en Sels salez
que d'ailleurs le chyle qui résulte après.
la dijestion , étant acide et non point salé,
votre changement est imaginaire , c'est
qu'on ne sçauroit convenir avec vous que
l'Eau de vie est un veritable Acide , et.
que prenant les routes du sang , s'il étoit
vrai que cela fût , loin d'en accelerer le
cours , elle ne dût plutôt le ralentir . Enfin
quand même vous auriez droit d'accuser
votre Sel salé d'augmenter le mouvement
des Liqueurs et des sécretions ,
vous avez oublié, sans doute , qu'on ap-.
prend sur les bancs que le cours des Liqueurs
augmenté , est une maladie dans
leurs
བྱ་
74 MERCURE DE FRANCE
leurs mouvemens que l'Eau de vie occasionne
dans son usage , suivant même
Votre sentiment , qui voudroit la faire
passer pour une Eau de santé.
Puisque vous avez pû vous dispenser
de citer les Auteurs de vos fameuses Experiences
, vous auriez pû aussi beaucoup
mieux vous épargner cette délicatesse affectée
qui vous rend si honteux pour ceux
qui les ignorent , et qui n'en font aucun
cas dans des faits étrangers à notre sujet.
On doit regarder l'Eau de vie dans son
usage interieur , quelque moderé qu'il
soit , comme un remede qui altere le
corps , Pharmaca sunt venena , et non
comme un aliment. Ainsi on peut , sans
craindre de perdre un secours pour
la santé
, s'en priver totalement ; et je conseille
à ceux qui se portent bien sans son usage ,
de ne point envier de se mieux porter
en la pratiquant ; Ovide n'est point une
regle pour nous dans la Medecine`, nous
consultons moins ses Ecrits dans l'Art
de guérir , que dans l'Art de plaire ; et il
faut , à la verité , ou que vous ne connoissiez
nullement vos Auteurs , dont vous
auriez pû préferer l'autorité , ou que vous
croyez que les Poëtes ont droit sur des
hypotheses comme la vôtre .
On reconnoît assez maintenant , sans
no en avertir vous -même , que tout ce
que
JANVIER. 1731.
75
que vous nous dites sur l'Eau de vie , n'est
pas si démonstratif que vous le donnez ;
mais plutôt , puisque vous avoüez ingénument
qu'il vous reste encore bien des
doutes sur ce sujet , n'a-t'on pas raison
de penser que dans cette incertitude des
choses où vous vous trouvez , les gens
raisonnables ne s'en rapportent plus à
vos belles paroles , ainsi ayant déja perdu
par un aveu si sincere de votre part , unebonne
partie de leur confiance , nos éclaircissemens
sur vos doutes , vous ayant entierement
desabusé de la votre propre ;
sera-t'il surprenant qu'il n'en reste à present
du tout point à personne ?
Au reste , Monsieur , on auroit grand
fort de ne pas vous juger digne d'excuse ,
vos doutes ne nous ont amusés que très-peu
de tems , et nous n'avons dérobé à nos
Malades que quelques momens pour les
éclaircir quelque grand que soit cet air
de confiance que vous voulez vous donner
en les proposant , ils ne nous ont
pas paru plus recommandables ; tout au
plus de semblables productions d'esprit ,
suivies d'un si grand bruit , ont sçu nous
rappeller la Fable dont parle Horace.
Quid dignum tanto feret hic promissor hiatus
Parturient montes , nascetur ridiculus mus.
A Pezenas , ce 24. Decembre 1730 .
de sa Réponse à M. Barrés , inserée dans
le Mercure du mois d'Octobre 1730. sur
l'usage interieur de l'Eau de vie.
L n'est pas juste , Monsieur , d'éta-
I blir sur les débris que vous faites de
nos bons sentimens pour le Public , le
grand air de confiance qu'on découvre
d'abord dans votre Réponse à ma Lettre;
pardon , peut- être ne sçavez vous pas que
les gens raisonnables ne se laissent jamais
prévenir follement , & que le ton imposant
d'un Auteur insipide pour s'assurer
leurs suffrages , est moins capable de les
séduire que de les rendre plus scrupuleux
dans leurs décisions . Cela soit dit néanmoins
sans blesser en aucune maniere
l'honneur que vous avez bien voulu nous
faire , en nous proposant brievement vos
doutes , que vous auriez pû , à la verité,
épargner aux dépens d'une plus sérieuse
attenJANVIER.
1731. 61
attention , si sans doute elle n'eut été
trop penible pour vous , ce qui fait que
sans nous détourner beaucoup des devoirs
de notre profession , nous esperons de
vous ramener de votre pirrhonisme.
En premier lieu , quoiqu'on soit assuré
que tous les raisonnemens vagues ne sçauroient
convaincre les personnes raisonnables
de la verité des propositions qu'on
avance , il n'est pas moins à propos cependant
de s'en servir quelquefois , et de
les placer dès l'entrée de la question , où
on les dévelope ensuite , et qu'on ne fait
devancer uniquement que pour disposer
l'esprit du lecteur à la concevoir plus aisément.
Notre Lettre peut fort bien être
l'exemple d'un pareil cas , d'ailleurs ces
grands mots qui vous choquent si rude--
ment n'ont pourtant point blessé le goût:
ni les oreilles des plus fameux Medecins .
de ce tems qui les ont introduits dans leurs
Ouvrages qu'êtes vous , Monsieur
pour ne pas les souffrir ? et pouvez- vous
penser de bonne foi que ces grands Maîtres
de l'Art s'en rapportent à vous quicondamnez
leurs expressions sans les entendre.
Pour moi , je me tiens à l'abri .
des justes reproches qu'on seroit en droit.
de me faire, si j'osois temerairement rien
entreprendre là- dessus , et il me suffit de
trouver dans leur signification autant
D d'éner
-
62 MERCURE DE FRANCE
ト
d'énergie et de force qu'il m'en faut
dans le besoin , pour ne pas en désaprouver
le
sçavant usage ; ainsi vous nous permettrez
, sans doute , de nous en accommoder
dans toutes les occasions favorables
dont vous profiterez aussi , si vous le
pouvez , par la même licence que nous
vous donnons à notre tour . Je serois
beaucoup moins éloigné de bannir des
questions les raisonnemens dénués d'experience
; mais vous ne nous faites jamais
voir que ceux qui viennent de notre part
méritent la rigueur de cet exil. Au reste,
on n'a pas toujours besoin de raisons
fondées sur des principes mathématiques
pour convaincre , ce seroit faire tort à
bien des gens d'esprit qui ne sont point
dans ce goût , quoique pourtant trèsraisonnables
et très judicieux , que de leur
ravir le droit d'une question qui les interesse
avec tout le reste des hommes.
Maintenant sans perdre notre tems à
disputer des termes qu'on peut apprendre.
à l'Ecole , et à discuter de vains raisonnemens
, venons au fait de la question .
Nous assurons que l'Eau de vie est une
eau de mort sur ce qu'elle ne releve les forcés
que pour les abattre peu après , parceque cette
liqueurport: les puissances ou les ressorts des
solides au delà de leur tonus , ou de cettejuste
étendue que la nature leur a donnée,d'où étant
de
JANVIER. 1731. 63
>
on n'ide
retour sur eux mêmes , ils tombent dans la
langueur. Voyons si ce trait de notre Lettre
doit passer justement pour obscur.
Tout le monde sçait ce qu'on entend
par le tonus des parties solides
gnore pas même qu'il n'aille jusqu'à un
certain point , ou qu'il n'ait une, juste
étenduë ; qu'importe qu'on vous l'assigne?
Keil ( a ) et Borelli ( b ) n'ont pas sçû nous
éclaircir touchant l'étendue de la force du
coeur ; a-t'on moins de raison de se persuader
que les ressorts des solides sont
contraints bien souvent de se porter au
delà ? la vessie trop remplie d'urine se
porte au delà de son tonus , les vaisseaux
engorgés de sang souffrent aussi quelquefois
de semblables distensions , dans ces
violens tiraillemens qu'on pratique pour
remettre les os luxés à leur place les
fibres musculaires revenant ensuite sur
elles mêmes, ont-elles cette force d'un arc
bandé qui se débande ? et les membranes
dont elles composent le tissu joüissentt'elles
d'abord après leur retour de leur
premiere vigueur dans le jeu de leur contraction
? qu'en pensez vous , M. le Doc
teur ? Ainsi les ressorts des solides débridés
, pour ainsi dire , ou portés au delà
›
( a ) Jacques Keil donne au coeur une force
de cinq onces.
(b) Alphonse Borelli de trois mille livres.
Dij
de
64 MERCURE DE FRANCE
de leur juste étenduë , se trouvent dans
la langueur ou l'abattement qu'on se sent
après de violens exercices , et après même
l'usage des liqueurs ardentes. En effet , le
corps ayant souffert de trop rudes travaux
se sent fatigué , languissant , ou
pour éviter de passer chez vous pour
obscur , ses ressorts par le jeu continuel
qu'ils ont exercé pendant un assez lorg
tems , se sont comme relâchés , ensorte
que revenant sur eux-mêmes ils ont perdu
leur premiere vigueur , ce qui se fait
infailliblement par l'effort réïteré que
font les liqueurs contre les parois membraneuses
des vaisseaux qu'elles poussent
en dehors avec violence dans leurs cours
acceleré par la contraction continuelle
des muscles qui les envoye au coeur , et
que le coeur leur renvoye de même. Ce
' est donc point ici un arc qui acquiert
d'autant plus de force à se remettre, qu'on
le resserre jusqu'à un certain point , mais
c'est un arc qui en a d'autant moins , que
sa flexion est portée au delà , ou qu'on
le courbe trop , delà vient que dans les
premiers tems de son jeu il se redresse
avec beaucoup de vitesse et de force , et
que dans les derniers elle se trouve molle,
foible et languissante.
Il en est à peu près de même touchant
l'effet que les liqueurs ardentes produisent
JANVIER. 1731. 65
ร
sent dans leur usage interieur ( ce qu'on
reconnoit par le poulx ) d'abord le sang
se gonfle , les parois des vaisseaux sont
repoussées en dehors en tout sens ; les
ressorts des fibres musculaires des tuniques
portés alors au delà de leur tonus ne
pouvant rester constamment dans la même
distension , ni aller plus loin , par l'absence
de la cause qui les a mis en jeu
et qui à force de perdre de son énergie
s'est retirée ( ce qui arrive dans le second
tems de l'action de cette liqueur ) il faut
non seulement que ces puissances revien
nent sur elles- mêmes mais encore que
leur vigueur soit moindre qu'auparavant
pour deux raisons. 1º Parceque les fibres
après cette distension outrée se trouvent
lâches et incapables de repren
dre leur état naturel , si ce n'est après
un certain tems qui est celui de la lan~
gueur.. 20 Que les liqueurs épaissies
étant inhabiles au mouvement , obéïssent
moins à la pression des solides relâ
chés , et leur opposent de plus grandes
résistances à surmonter ; pour lors le sang
ralenti dans son cours passe dans le tissu
des muscles , rend leur contraction laborieuse
qui se force de les en dégager ; delà
ces lassitudes ces langueurs qui ne
manquent jamais de succeder à la force
à la fureur même qu'on observe d'abord
D iij
,
dans
66 MERCURE DE FRANCE
dans ceux qui ont usé des liqueurs ardentes
. Ajoutez à cela que le terme de
tout ce desordre étant le racornissement
des solides et l'épaississement des liquides,
ces langueurs perseverent , augmentent
même tous les jours avec l'usage des eauxde
vie , d'où suit ce nombre prodigieux
de maux qui retranchent une bonne partie
des jours de la durée de l'homme.
L'Eau de vie produit moins cette distension
dont il s'agit par sa quantité que
par sa nature , et vous devriez , Monsieur,
avoir ici plus de honte que dans tout autre
endroit de votre Réponse à ma Lettre,
de sentir mieux que personne qu'un de
mes confreres ne sçache point que ce n'est
pas le seul remede qui pris à petite dose
produit dans le corps de très sensibles
effets. Qu'est - ce qu'un grain d'opium
dans un corps de 160. livres ? Est- ce la
1600 partie de ce même corps ? soyez
surpris après cela , tant qu'il vous plaira ,
qu'on prenne 128. onces d'alimens sans
craindre cette distension qui se fait tou
jours appréhender avec juste raison dans
l'usage de l'Eau de vie qui rarefie le sang,
et qui l'épaissit dans des tems differens.
Le terme des tems que l'Eau de vie parcourt
dans sa maniere d'agir étant surve→
nu , les parties solides se trouvent dépourvues
des sucs lymphatiques qui en
humecJANVIER
. 1731. 67 humectent
le tissu , elles en deviennent
plus seches , plus compactes
, plus fortes,
mais aussi plus rebelles aux causes de leurs
mouvemens
, ou plus difficiles à se mettre
en jeu , ce qui fait voir que la langueur
est une suite de ce qui arrive dans
l'usage des liqueurs ardentes , malgré ces
prétendues
contradictions
dont vous nous
faites un crime , dans le tems que nous
si vous eussiez rapsommes
assurés que
porté plus au long ce trait de notre Lettre
, ou que vous eussiez aimé à méditer
plus attentivement
ce qui se passe dans les differens tems de l'action de l'Eau de
vie , vous auriez été moins scrupuleux
sur vos doutes.
{
Permettez
moi , Monsieur , de vous
dire ici qu'il faut ou que vous n'ayez
jamais pris par excès des liqueurs ardentes
, ou que vous n'ayez jamais vu des
gens
livrés à la débauche de l'Eau de vie
et du vin , pour nier la langueur , l'abattement
qui les ensevelit dans le sommeil,
et qui se fait sentir même quelque tems
après le repos ; sans cela il ne vous seroit
pas difficile par ces grands effets qu'une
quantité considerable
de ces liqueurs peut
produire très sensiblement
, d'inferer ma
thematiquement
par des calculs exacts
que vous faites si bien , quel doit être ce
lui d'une plus petite dose ; que si cepen-
Diiij dant
68
MERCURE DE
FRANCE.
faire
dant l'experience qu'un chacun peut
à ses propres dépens n'est pas un moyen
assuré pour vous convaincre du fait dont
il s'agit, tenez vous en à Regnier qui sçait,
sans doute , mieux que Sidenham & c.
Qu'un jeune Medecin vit moins qu'un vieil yvrogne.
C'est sur ce Vers que le Poëte n'a pas
crû , en le faisant , devoir servir de regle
dans la
Medecine , que vous croyez tout
de bon que le témoignage des buveurs
d'Eau de vie ou de vin ne nous est pas
avantageux , fondé veritablement encore
sur ce que s'ils sont exposés aux maladies
rapportées dans notre Lettre , les buveurs
d'eau n'en sont point exemts . Mais je vous
demande ( à part , s'il vous plaît , votre
grand air de confiance ) lesquels de ces
deux sortes de gens sont plus sujets à ces
mêmes maladies ? parlez sans vous émouvoir.
Quoique vous en disiez , on sçait
fort bien que dans le Pays du Nord ou
l'on se permet trop librement ces sortes
de liqueurs , les habitans se voyent tourmentés
de mille maladies , plus rares dans
tout autre climat où l'on est plus reservé
sur leur usage. Il n'est point question de
l'abus de l'eau simple ou de l'Eau de vie ,
on ne nous apprendra rien là dessus ; il
s'agit seulement de cet usage des Eaux
de
JANVIER. 1731. 69.
de vie qui a scû s'introduire parmi les
hommes , et qui fait voir bien souvent
au prix de la perte de la santé d'un très .
grand nombre , qu'il vaudroit mieux suivre
la saine pratique de Fernel de Sydenham
&c. que toutes les rêveries des
Poëtes que vous pouviez rapporter en,
grand nombre contre de si grands Medecins.
Qu'on ne nous accuse point ici cependant
de desaprouver l'Eau de vie ; nous.
sçavons aussi bien que ceux qui semblent
présomptueusement vouloir nous instruire
sur ce sujet , les bons usages que cette
liqueur spiritueuse remplit dans la Mcdecine
comme remede , soit qu'on l'employe
exterieurement ou interieurement,
nais qu'on la regarde comme necessaire
pour la santé. C'est ce que la Medecine,
ne pardonnera jamais à ceux qui font profession
de suivre sa saine doctrine ; il,
n'est pas possible de penser combien j'ai
été touché de reconnoitre dans un de mes
confreres un si fier ennemi contre un sentiment
qui ne peut qu'être salutaire à
l'homme dans le tems que le sien lui
est très dangereux ; en effet , puisque nous
voyons tous les jours des gens dans l'usage
de l'eau douce route pure joüir d'une
parfaite santé , l'homme ne pourroit-il
pas se passer de l'Eau de vie et se bien
DV porter
70 MERCURE DE FRANCE
porter ? dans les siecles plus reculés où
cette liqueur n'étoit point connue , vivoiton
moins qu'aujourd'hui ? les vieux yvrognes
du tems présent ont-ils une plus
belle vieillesse que ceux qui les ont devancés
loin de l'usage du vin où des liqueurs
ardentes ? que peut- on penser sur
cela ? Enfin doute qui voudra que
la maladie
doive plus à l'Eau de vie que la
santé parfaite dans un doute si dangereux
, il n'y aura que des témeraires et
des insensés qui se livreront au danger.
Malgré toute la sagesse de ces précautions
séduisantes que vous exigez dans l'usage
de l'Eau de vie après des grands repas , sous
le faux prétexte d'aider à la digestion
bien loin d'approuver votre pratique en
pareil cas , nous regardons cette liqueur
comme très contraire à cette fonction ;
et la méchanique que vous faites jouer
dans le secours qu'elle y apporte est toutà
fait ridicule. Cette liqueur acide et spiritueuse
, dites vous , tombant dans l'estomac
, perd son activité dans les parties
graisseuses des alimens , et ne garde qu'une
legere force pour exciter la contraction
de ce viscere affaissé sous leur poids ; comme
s'il se trouvoit dans les alimens divic
sés de petites celulles capables de retenir
ces parties spiritueuses , qu'une bouteille
bien bouchée laissé souvent échaper , et
d'en
JANVIER. 1731 7I
d'en refrener l'énergie. Les rapports vi
neux après une débauche semblent nous
montrer assez vrai semblablement qu'il
doit se passer pour lors dans l'estomac
échauffé en tout sens , farci d'alimens et
de vin , ce qui se passe à peu près dans
un alambic sur le feu , où les parties les
plus volatiles de ce qu'on distile ne sçauroient
se tenir cantonnées , intriquées
bien avant dans la texture du mixte , mais
se trouvent forcées d'obéir aux secousses.
du feu , et de donner lateralement en tout
sens contre ses parois , ou de sortir à la
faveur de la premiere issuë qui se présente.
Maintenant si notre conjecture n'est
pas trop hardie , et si on doit attendre un
semblable effet dans l'estomac après l'usage
du vin , quel sera celui des liqueurs
plus volatiles ? c'est alors que les parois.
de ce viscere continuellement agacées ,
arcelées par un nombre infini de petits
corps rigides effarouchés , qui ne peuvent
que les tourmenter considerablement dans
Feurs rudes et fréquentes atteintes , sont
obligées d'exercer des contractions vio→
lentes et extraordinaires dont la digestion
se passeroit plutôt que d'en recevoir du
secours. Vous direz , sans doute , que lesromac
affaissé sous le poids de trop d'alimens
a besoin d'être reveillé pour s'em
dégager.
D vj
Om
72 MERCURE DE FRANCE
>
On répond à cela que comme cette inhabileté
dans le jeu de ces contractions
ne vient que de trop de résistance qui
s'y oppose il ne faut pour les rendre
plus libres , plus aisées , que la diminuer .
Est- ce par le secours des Liqueurs ardentes
qu'on doit esperer d'y réussir ? Mais
au contraire , elles ne serviroient qu'à
dessecher ou durcir davantage cette masse
d'alimens , soit en interceptant le cours
de la Lymphe stomacale , soit en tarissant
la source de la salive et des autres
sucs lymphatiques qui vaquent à la dijestion
; ce qui augmenteroit la résistance
et rendroit les contractions plus laborieuses
; un bon délayant insipide , propre
à s'insinuer dans la masse des alimens
divisez , à la ramolir , à la détremper ,
à la liquefier et à la rendre ainsi docile
aux pressions de ce Viscere et des parties
voisines , suffit pour l'ouvrage de la digestion
; et comme de tous ceux que la
Nature a toujours offerts à l'homme , il
n'en est point de plus capable de s'acquiter
benignement de cet emploi , que
l'eau douce toute pure ; nous la regardons
comme très - salutaire dans cet usage;
alors les alimens en pâte plus détrempée,
plus mole , résistent moins et cedent aisément
aux contractions de ce Viscere
qui s'en dégage sans peine.
Les:
JANVIER. 1731. 73
·
que la
Les Acides de l'Eau de vie ( continuezvous
) fermentant avec les alimens , se
changent en Sels salez , aident à la division
des viandes , passent dans le sang ,
en accelerent le cours et les sécretions.
Croyez vous de bonne foi
chose se passe de même , et pouvezvous
sur votre même air de confiance
nous proposer publiquement une Méchanique
si mal établie ; de semblables.
raisonnemens ne méritent point de réponse
aux preuves que l'on apporte pour
les soutenir ; car outre qu'il se peut fort.
bien que ces Acides ne rencontrant que
des Acides dans les alimens , vous aurez
beau attendre pour lors de la fermentation
et des changemens en Sels salez
que d'ailleurs le chyle qui résulte après.
la dijestion , étant acide et non point salé,
votre changement est imaginaire , c'est
qu'on ne sçauroit convenir avec vous que
l'Eau de vie est un veritable Acide , et.
que prenant les routes du sang , s'il étoit
vrai que cela fût , loin d'en accelerer le
cours , elle ne dût plutôt le ralentir . Enfin
quand même vous auriez droit d'accuser
votre Sel salé d'augmenter le mouvement
des Liqueurs et des sécretions ,
vous avez oublié, sans doute , qu'on ap-.
prend sur les bancs que le cours des Liqueurs
augmenté , est une maladie dans
leurs
བྱ་
74 MERCURE DE FRANCE
leurs mouvemens que l'Eau de vie occasionne
dans son usage , suivant même
Votre sentiment , qui voudroit la faire
passer pour une Eau de santé.
Puisque vous avez pû vous dispenser
de citer les Auteurs de vos fameuses Experiences
, vous auriez pû aussi beaucoup
mieux vous épargner cette délicatesse affectée
qui vous rend si honteux pour ceux
qui les ignorent , et qui n'en font aucun
cas dans des faits étrangers à notre sujet.
On doit regarder l'Eau de vie dans son
usage interieur , quelque moderé qu'il
soit , comme un remede qui altere le
corps , Pharmaca sunt venena , et non
comme un aliment. Ainsi on peut , sans
craindre de perdre un secours pour
la santé
, s'en priver totalement ; et je conseille
à ceux qui se portent bien sans son usage ,
de ne point envier de se mieux porter
en la pratiquant ; Ovide n'est point une
regle pour nous dans la Medecine`, nous
consultons moins ses Ecrits dans l'Art
de guérir , que dans l'Art de plaire ; et il
faut , à la verité , ou que vous ne connoissiez
nullement vos Auteurs , dont vous
auriez pû préferer l'autorité , ou que vous
croyez que les Poëtes ont droit sur des
hypotheses comme la vôtre .
On reconnoît assez maintenant , sans
no en avertir vous -même , que tout ce
que
JANVIER. 1731.
75
que vous nous dites sur l'Eau de vie , n'est
pas si démonstratif que vous le donnez ;
mais plutôt , puisque vous avoüez ingénument
qu'il vous reste encore bien des
doutes sur ce sujet , n'a-t'on pas raison
de penser que dans cette incertitude des
choses où vous vous trouvez , les gens
raisonnables ne s'en rapportent plus à
vos belles paroles , ainsi ayant déja perdu
par un aveu si sincere de votre part , unebonne
partie de leur confiance , nos éclaircissemens
sur vos doutes , vous ayant entierement
desabusé de la votre propre ;
sera-t'il surprenant qu'il n'en reste à present
du tout point à personne ?
Au reste , Monsieur , on auroit grand
fort de ne pas vous juger digne d'excuse ,
vos doutes ne nous ont amusés que très-peu
de tems , et nous n'avons dérobé à nos
Malades que quelques momens pour les
éclaircir quelque grand que soit cet air
de confiance que vous voulez vous donner
en les proposant , ils ne nous ont
pas paru plus recommandables ; tout au
plus de semblables productions d'esprit ,
suivies d'un si grand bruit , ont sçu nous
rappeller la Fable dont parle Horace.
Quid dignum tanto feret hic promissor hiatus
Parturient montes , nascetur ridiculus mus.
A Pezenas , ce 24. Decembre 1730 .
Fermer
Résumé : LETTRE écrite à M. Ziorcal au sujet de sa Réponse à M. Barrés, inserée dans le Mercure du mois d'Octobre 1730. sur l'usage interieur de l'Eau de vie.
L'auteur répond à une lettre de M. Ziorcal publiée dans le Mercure d'octobre 1730, qui traitait de l'usage intérieur de l'eau-de-vie. Il critique l'attitude confiante de M. Ziorcal et souligne que les personnes raisonnables ne se laissent pas facilement convaincre par des arguments imposants mais vagues. L'auteur défend l'utilisation de termes techniques, soutenus par des médecins célèbres, et rejette les critiques de M. Ziorcal sur ces expressions. L'auteur explique que l'eau-de-vie, bien qu'elle relève temporairement les forces, les abat ensuite en poussant les ressorts des solides au-delà de leur tonus naturel, entraînant une langueur. Il illustre ce phénomène par des exemples physiologiques et compare les effets de l'eau-de-vie à ceux des exercices violents. Il souligne que même en petites quantités, l'eau-de-vie peut produire des effets significatifs, similaires à ceux d'un grain d'opium. L'auteur critique M. Ziorcal pour son manque de compréhension des effets à long terme de l'eau-de-vie, qui assèche les parties solides et épaissit les liquides, entraînant diverses maladies. L'auteur discute également des effets de l'eau-de-vie après les repas, la qualifiant d'acide et spiritueuse, et décrivant son action dans l'estomac comme ridicule. Il compare l'effet du vin et des liqueurs volatiles dans l'estomac à celui d'un alambic, où les parties volatiles sont forcées de se déplacer ou de sortir. Il soutient que les liqueurs ardentes ne font que dessécher ou durcir la masse des aliments, augmentant ainsi la résistance et rendant les contractions de l'estomac plus laborieuses. Il recommande l'eau douce comme un délayant insipide pour faciliter la digestion. L'auteur critique les arguments selon lesquels les acides de l'eau-de-vie fermentent avec les aliments pour se transformer en sels salés, accélérant ainsi la digestion. Il conclut en déconseillant l'usage de l'eau-de-vie comme remède, la considérant plutôt comme un médicament altérant le corps. Il invite ceux qui se portent bien sans elle à ne pas l'utiliser et critique les arguments présentés comme non démonstratifs et incertains. L'auteur affirme que, bien que l'eau-de-vie ait des usages médicaux, son abus est dangereux et qu'il vaut mieux suivre les pratiques de médecins comme Fernel et Sydenham. Il invite M. Ziorcal à reconnaître les dangers de l'eau-de-vie et à promouvoir une meilleure hygiène de vie.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
13
p. 76-87
RÉPONSE à l'Esprit en if, de M. l'Abbé L*** inserée dans le Mercure du mois d'Août 1730.
Début :
Parbleu ! vous faites l'apprentif, [...]
Mots clefs :
Satire, Critique, Inventif, Ironie, Grammaire, Style, Excessif
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE à l'Esprit en if, de M. l'Abbé L*** inserée dans le Mercure du mois d'Août 1730.
REPONSE à l'Epitre en If , de
M. l'Abbé L *** inserée dans le Mercure
du mois d'Août 1730 .
Parbleu Arbleu ! vous faites l'apprentif ,
Et vous montrez le plus chetif,
Malgré l'amusant narratif,
Et le parfait compositif ,
De votre versificatif !
Quoi ! sans aucun émulatif,
Et quittant tout ostentatif ,
Yous êtes annonciatif¸
Que votre renonciatif ,
Est causé par le défestif ,
Du litteraire plumitif ,
Qui n'ayant plus de munitif ,λ
De ces mots qui riment en If ,
Vous rend assez peu restrictif a
Et vous vous tenez inactif ,
Dans ce honteux limitatif?
Mais dans votre imaginatif ,
Ou si l'on veut intellectif ,
Vous n'avez donc pas d'argent vif
Le Dieu Phoebus inspiratif ,
Est donc sourd à tout rogatif
Et d'Hélicon le libatif ,
N'est
JANVIER.
77 1731.
N'est pas pour vous excitatif?
Sans quoi votre cerveau fictif,
Cedant à son operatif,
Auroit été plus inventif;
Et de bien des mots créatif
Dans ce même terminatif,
Dont par aisé cumulatif ,
Vous auriez fait un productif,
A notre gré prolongatif ,
Et de tout Lecteur adoptif.
Des Noms et Pronoms l'ablatif
Auffi bien que le genitif ,
Et des Verbes le gerondif ,
Sans oublier le fubjonctif ,
Et même tout nom possessif ,
Auroient par incorporatif ,
Beaucoup augmenté l'électif,,
De votre borné collectif.
En nous décrivant l'ornatif
Et l'arrangé décoratif ,
De ce repas saturatif,
Qui se trouvant appetitif ,
Vous rendit par trop repletif ,
Ce gros Prieur figuratif,
De son corps peu maceratif ,
"
Ains pour le repas propensif,
L'auroit rendu prorogatif ,
En faisant faire innovatif,
D'assiete , avec exhibitif,
D
D'um
48 MERCURE DE FNANCE
D'un plat garni d'un rôt de bif,
Délicieux et tentatif ,
Malgré le surérogatif ,
Dont son couteau très-incisif
Ayant fait un prompt dissectif,
Vous auriez eu le traditif
Avec pressant invitatif ,
Poussé jusques à l'injonctif ,
D'un morceau très - manducatif ,
Et d'appétit imitatif,
Le vin non falsificatif ,
Dans un sceau de glace immersif ,
Et dans votre verre effusif,
Frais et non réverberatif,
Eut été plus incitatif,
De boire par iteratif , 愿
Et vous cût rendu locutif,
Par forme de gratulatif.
Sur sa fraîcheur exclamatif.
Puis du dessert expectatif ,
Il falloit être informatif,
De quel Vignoble émanatif ,
Ce vin étoit transpositif ;
A combien par supputatif ,
Se montoit le rétributif ,
Du Prieural habitatif ,
S'il avoit un attributif ,
De quelque revenu censif ;
Que coutoit le réparatik ; -
Et
JANVIER.
79 1731.
1
Et de combien par exactif ,
Aux Décimes contributif ,
Il en souffroit le vexatif ,
Sous quel bon Saint invocatif ,
De son Clocher dominatif,
Il se trouvoit occupatif,
Et depuis quel tems obtentif;
Si dans l'Eglise un positif, *
Au maître Autel oppositif ,
Avoit un Jeu bien diversif,
Et de tous sons imitatif;
Si lors de son visitatif ,
Son jeune cheval impassif ,
Faisoit frequent évolutif ,
S'il avoit pas bien progressif.
Et de ce discours mutatif,
Vous l'auriez comme indignatif,
Vû faire le renovatif,
De fait au long explicatif ,
( Avec plus d'un imprécatif,
En terme non mitigatif , )
De certain procès dévictif ,
Qu'un Chicaneur supplicatif,
En Cour de Rome impétratif,
D'un Bref dont l'intitulatif,
Est celui de dévolutif,
Lui fit jadis comme intrusif,
* Petite Orgue posée au bas de la grande.
Par
80 MERCURE DE FRANCE
Par exploit interpellatif,
En haîne du révocatif ,
D'un sien accord permutatif ,
Et contre les Loix extorsif ;
Sur quoi par trop inattentif
Le Chicaneur machinatif ,
Surprit Jugement forclusif;
Mais que par un évocatif,
Suivi d'un examinatif ,
Et d'un très - exact révisif ,
De son droit verificatif ,
Il avoit le procuratif,
D'un bon Arrêt manutentif,
Et de frais adjudicatif,
Dont il étoit exultatif,
Et son Plaideur tribulatif;
Que pourtant fort inclinatif ,
A prévenir tout discussif ,
Et d'âge non retrogressif,
Il formoit le méditatif”,
De faire son résignatif ,
Avec un sur moderatif,
Irritament stipulatif,
Et dans l'Acte même insertif,,
D'une pension rétentif ,
Revétu d'homologatif ,
Non sujet à rétractatif.
- Là , cessant le contemplatif ,
Et de son discours irruptif,.
Votre
JANVIER.
< 1731 .
Votre perçant lamentatif ,
L'auroit rendu stupefactif,
Et vraiment mortificatif ,
De ses fàcheux révolutif,
Vous voyant plaindre d'excessif ,
Et trop incommode oppressif,
D'un violent suffocatif
D'estomac extenuatif;
Qu'en Medecin transformatif,
Et toujours irrésolutif ,
Dans son avis vacillatif ,
Il eût traité d'opilatif,
Et même de vaporatif ,
Venant de ventre inflammatif.
Votre pouls moins élevatif ,
Votre coeur peu palpitatif ,
Eût fait son préoccupatif ;
Sans songer au fomentatif ,
Il eût proposé l'inflictif ,
D'un sanglant scarificatif ;
Et malgré votre déjectif ,
Selon vous , évacuatif ,
Vous auriez par intercessif,
Crainte d'aucun imputatif,
Avalé l'amer infusif ,
D'un gros de Séné transfusif ,
Violent et répercussif,
Avec Sel évaporatif,
Mineral
82 MERCURE DE FRANCE
Mineral et vegetatif,
Qu'il eût dit spécificatif,
Pour operer le digestif,
Par son effet dissolutif,
Et parfaitement abstersif.
Après ce premier purgatif,
Votre sang peu circulatif ,
Et devenu fermentatif ,
Auroit souffert l'introductif
Du remede carminatif ,
Et même du palliatif ;
Quoique du mal peu suppreffif,
Et presque toujours abusif ,
Pour n'être assez liberatif.
Enfin rendant le relatif ,
( A l'aide d'un suppositif ,
Un peu forcé , mais extensif. )
Pour le Lecteur désolatif,
Vous vous seriez , par disjonctif ,
De la terre en mer translatif ,
Embarqué près du Château- d'If , *
Dans un Vaisseau navigatif,
Dont un gros tems tempestatif ,
Ayant fait un rude implusif,
Sur un Rocher laceratif,
Vous auriez , peur du sumèrsif,
Sauté promptement dans l'esquif,
Au gré des eaux dérivatif,
Isle près de Marseille,
酥
JANVIER.
83 1731. Et de
tout secous privatif ,
Ne portant jamais Papefif , *
Et n'ayant besoin d'accoursif ;
Ou seul , et très - anxiatif ,
De mort prochaine appréhensif,
Au bon saint Nicolas votif ,
Et de tous Saints imploratif ,
Mécreant , après maint estrif,
Fer à la main décolatif,
Et très-souvent mutilatif,
Ayant Pair exterminatif ,
Et le geste verberatif,
Vous auroient pris comme furtif
Et comme espion putatif
De son fait dissimulatif,
Mis avec cordon coactif
Vos mains enserré conjonctif ,
Presque jusqu'au dislocatif ;
Et par l'effet consecutif,
Aussi l'on veut subsecutif,
D'un secret déliberatif ,
De votre sort définitif ,
Vous auroient sans exhortatif ,
Et differant votre occisif ,
Traîné dans leur Ville Eleatif.
Là vous auriez vû le Cherif ,
* Partie superieure de la grand Voile.
Passage de la Proie à la Poupe.
* Elcatif, Ville d'Arabie.
Qu'on
84 MERCURE DE FRANCE.
Qu'on dit se nommer Ilgerif ,
Plus fier qu'en France aucun Baillif
L'oeil fixe et jamais conversif
Avec un air rebarbatif
Et le verbe haut et jussif ,
Sans le moindre salutatif,
Vous faire l'abord primitif,
( Ainsi qu'on traite un fugitif, )
Don cruel et numératif,
Sans aucun modificatif ,•
De cent coups d'un bâton massif
Qui des pieds est le destructif ,
Ensuite un interrogatif
Très- sec & très-instigatif,
Par quel veritable motif
Chez lui vous étiez adventif,
De quel Pays étiez natif,
De quel Peuple fréquentatif,
De quel pere generatif,
Et de quel nom appellatif,
Avec certain observatif,
Que fussiez surtout attentif
Dans tout votre déclaratif ,
A n'être du vrai corruptif ,
Mais bien très fidele instructif :
Qu'autrement très reprehensif,
Il feroit faire un erectif,
De votre col très - suspensif ,
Après quoi du corps divisif
Chaque
JANVIER.
85 1731.
Chaque membre séparatif
Occuperoit son locatif
Au bout d'un piquet plantatif .
Si mieux vous n'aimiez l'éversif
D'un plomb fondu plus que frictif ,
Ou qu'un grand brasier très- arsif,
De tout votre corps abstractif,
Fût de vos os calcinatif.
A ce barbare conclusif,
De l'un et l'autre alternatif,
Votre fang coagulatif
Vous eut causé le convulsif ;
Et n'étant rien moins qu'obstructif ,
Un subit et promt soustractif ,
Pour chaque nez très-offensif,
Tout autant qu'un suppuratif ,
Auroit par multiplicatif,
Gâté le purificatif
De votre linge deffensif.
Puis sur la fin constitutif,
Après un simple affirmatif,
De verité confirmatif ,
Vous auriez fait un responsif
Pour votre salut solutif ,
Et votre représentatif
N'ayant rien que de probatif,
Et pas aucun fait négatif ,
Nous aurions vû notre Cherif,
Devenu plus adulatif,
E Yous
8 % MERCURE DE FRANCE.
Vous faire communicatif ,
Ou plutôt gratificatif ,
Par forme de restauratif ,
D'un Sorbet bon et potatif,
Et nullement alteratif .
Dieu vous donne bon reversif ,
Et vous garde du suggestif ,
De tout heritier présomptif ,
Qui , sous un faux démonstratif.
N'aimant que votre successif ,
Et craignant le subrogatif ,
De tout Acte substitutif,
Voudroit avoir l'institutif,
Sans aucun mot dérogatif ,
D'un testament nuncupatif
Pour l'universel lucratif
De maint contract pignoratif.
Or sus , pour peu que processif
Soyez , ou bien vindicatif,
Vous me rendrez le respectif ,
Lequel ( sauf le restitutif )
J'attends en froid speculatif.
Auteur de ces Rimes en If ,
Soyez un peu mémoratif,
Que par avis iteratif,
On affranchit tout productif,
Au Mercure destinatif,
Sans
JANVIER. 1731
Sans quoi le plus bel inventif,
Sera mis au rebutatif.
Soyez aussi plus attentif ,
A ne broncher sur l'élisif ;
Cela rend le Vers bien chetif ,
Mais nous avons fait corrrectif.
M. l'Abbé L *** inserée dans le Mercure
du mois d'Août 1730 .
Parbleu Arbleu ! vous faites l'apprentif ,
Et vous montrez le plus chetif,
Malgré l'amusant narratif,
Et le parfait compositif ,
De votre versificatif !
Quoi ! sans aucun émulatif,
Et quittant tout ostentatif ,
Yous êtes annonciatif¸
Que votre renonciatif ,
Est causé par le défestif ,
Du litteraire plumitif ,
Qui n'ayant plus de munitif ,λ
De ces mots qui riment en If ,
Vous rend assez peu restrictif a
Et vous vous tenez inactif ,
Dans ce honteux limitatif?
Mais dans votre imaginatif ,
Ou si l'on veut intellectif ,
Vous n'avez donc pas d'argent vif
Le Dieu Phoebus inspiratif ,
Est donc sourd à tout rogatif
Et d'Hélicon le libatif ,
N'est
JANVIER.
77 1731.
N'est pas pour vous excitatif?
Sans quoi votre cerveau fictif,
Cedant à son operatif,
Auroit été plus inventif;
Et de bien des mots créatif
Dans ce même terminatif,
Dont par aisé cumulatif ,
Vous auriez fait un productif,
A notre gré prolongatif ,
Et de tout Lecteur adoptif.
Des Noms et Pronoms l'ablatif
Auffi bien que le genitif ,
Et des Verbes le gerondif ,
Sans oublier le fubjonctif ,
Et même tout nom possessif ,
Auroient par incorporatif ,
Beaucoup augmenté l'électif,,
De votre borné collectif.
En nous décrivant l'ornatif
Et l'arrangé décoratif ,
De ce repas saturatif,
Qui se trouvant appetitif ,
Vous rendit par trop repletif ,
Ce gros Prieur figuratif,
De son corps peu maceratif ,
"
Ains pour le repas propensif,
L'auroit rendu prorogatif ,
En faisant faire innovatif,
D'assiete , avec exhibitif,
D
D'um
48 MERCURE DE FNANCE
D'un plat garni d'un rôt de bif,
Délicieux et tentatif ,
Malgré le surérogatif ,
Dont son couteau très-incisif
Ayant fait un prompt dissectif,
Vous auriez eu le traditif
Avec pressant invitatif ,
Poussé jusques à l'injonctif ,
D'un morceau très - manducatif ,
Et d'appétit imitatif,
Le vin non falsificatif ,
Dans un sceau de glace immersif ,
Et dans votre verre effusif,
Frais et non réverberatif,
Eut été plus incitatif,
De boire par iteratif , 愿
Et vous cût rendu locutif,
Par forme de gratulatif.
Sur sa fraîcheur exclamatif.
Puis du dessert expectatif ,
Il falloit être informatif,
De quel Vignoble émanatif ,
Ce vin étoit transpositif ;
A combien par supputatif ,
Se montoit le rétributif ,
Du Prieural habitatif ,
S'il avoit un attributif ,
De quelque revenu censif ;
Que coutoit le réparatik ; -
Et
JANVIER.
79 1731.
1
Et de combien par exactif ,
Aux Décimes contributif ,
Il en souffroit le vexatif ,
Sous quel bon Saint invocatif ,
De son Clocher dominatif,
Il se trouvoit occupatif,
Et depuis quel tems obtentif;
Si dans l'Eglise un positif, *
Au maître Autel oppositif ,
Avoit un Jeu bien diversif,
Et de tous sons imitatif;
Si lors de son visitatif ,
Son jeune cheval impassif ,
Faisoit frequent évolutif ,
S'il avoit pas bien progressif.
Et de ce discours mutatif,
Vous l'auriez comme indignatif,
Vû faire le renovatif,
De fait au long explicatif ,
( Avec plus d'un imprécatif,
En terme non mitigatif , )
De certain procès dévictif ,
Qu'un Chicaneur supplicatif,
En Cour de Rome impétratif,
D'un Bref dont l'intitulatif,
Est celui de dévolutif,
Lui fit jadis comme intrusif,
* Petite Orgue posée au bas de la grande.
Par
80 MERCURE DE FRANCE
Par exploit interpellatif,
En haîne du révocatif ,
D'un sien accord permutatif ,
Et contre les Loix extorsif ;
Sur quoi par trop inattentif
Le Chicaneur machinatif ,
Surprit Jugement forclusif;
Mais que par un évocatif,
Suivi d'un examinatif ,
Et d'un très - exact révisif ,
De son droit verificatif ,
Il avoit le procuratif,
D'un bon Arrêt manutentif,
Et de frais adjudicatif,
Dont il étoit exultatif,
Et son Plaideur tribulatif;
Que pourtant fort inclinatif ,
A prévenir tout discussif ,
Et d'âge non retrogressif,
Il formoit le méditatif”,
De faire son résignatif ,
Avec un sur moderatif,
Irritament stipulatif,
Et dans l'Acte même insertif,,
D'une pension rétentif ,
Revétu d'homologatif ,
Non sujet à rétractatif.
- Là , cessant le contemplatif ,
Et de son discours irruptif,.
Votre
JANVIER.
< 1731 .
Votre perçant lamentatif ,
L'auroit rendu stupefactif,
Et vraiment mortificatif ,
De ses fàcheux révolutif,
Vous voyant plaindre d'excessif ,
Et trop incommode oppressif,
D'un violent suffocatif
D'estomac extenuatif;
Qu'en Medecin transformatif,
Et toujours irrésolutif ,
Dans son avis vacillatif ,
Il eût traité d'opilatif,
Et même de vaporatif ,
Venant de ventre inflammatif.
Votre pouls moins élevatif ,
Votre coeur peu palpitatif ,
Eût fait son préoccupatif ;
Sans songer au fomentatif ,
Il eût proposé l'inflictif ,
D'un sanglant scarificatif ;
Et malgré votre déjectif ,
Selon vous , évacuatif ,
Vous auriez par intercessif,
Crainte d'aucun imputatif,
Avalé l'amer infusif ,
D'un gros de Séné transfusif ,
Violent et répercussif,
Avec Sel évaporatif,
Mineral
82 MERCURE DE FRANCE
Mineral et vegetatif,
Qu'il eût dit spécificatif,
Pour operer le digestif,
Par son effet dissolutif,
Et parfaitement abstersif.
Après ce premier purgatif,
Votre sang peu circulatif ,
Et devenu fermentatif ,
Auroit souffert l'introductif
Du remede carminatif ,
Et même du palliatif ;
Quoique du mal peu suppreffif,
Et presque toujours abusif ,
Pour n'être assez liberatif.
Enfin rendant le relatif ,
( A l'aide d'un suppositif ,
Un peu forcé , mais extensif. )
Pour le Lecteur désolatif,
Vous vous seriez , par disjonctif ,
De la terre en mer translatif ,
Embarqué près du Château- d'If , *
Dans un Vaisseau navigatif,
Dont un gros tems tempestatif ,
Ayant fait un rude implusif,
Sur un Rocher laceratif,
Vous auriez , peur du sumèrsif,
Sauté promptement dans l'esquif,
Au gré des eaux dérivatif,
Isle près de Marseille,
酥
JANVIER.
83 1731. Et de
tout secous privatif ,
Ne portant jamais Papefif , *
Et n'ayant besoin d'accoursif ;
Ou seul , et très - anxiatif ,
De mort prochaine appréhensif,
Au bon saint Nicolas votif ,
Et de tous Saints imploratif ,
Mécreant , après maint estrif,
Fer à la main décolatif,
Et très-souvent mutilatif,
Ayant Pair exterminatif ,
Et le geste verberatif,
Vous auroient pris comme furtif
Et comme espion putatif
De son fait dissimulatif,
Mis avec cordon coactif
Vos mains enserré conjonctif ,
Presque jusqu'au dislocatif ;
Et par l'effet consecutif,
Aussi l'on veut subsecutif,
D'un secret déliberatif ,
De votre sort définitif ,
Vous auroient sans exhortatif ,
Et differant votre occisif ,
Traîné dans leur Ville Eleatif.
Là vous auriez vû le Cherif ,
* Partie superieure de la grand Voile.
Passage de la Proie à la Poupe.
* Elcatif, Ville d'Arabie.
Qu'on
84 MERCURE DE FRANCE.
Qu'on dit se nommer Ilgerif ,
Plus fier qu'en France aucun Baillif
L'oeil fixe et jamais conversif
Avec un air rebarbatif
Et le verbe haut et jussif ,
Sans le moindre salutatif,
Vous faire l'abord primitif,
( Ainsi qu'on traite un fugitif, )
Don cruel et numératif,
Sans aucun modificatif ,•
De cent coups d'un bâton massif
Qui des pieds est le destructif ,
Ensuite un interrogatif
Très- sec & très-instigatif,
Par quel veritable motif
Chez lui vous étiez adventif,
De quel Pays étiez natif,
De quel Peuple fréquentatif,
De quel pere generatif,
Et de quel nom appellatif,
Avec certain observatif,
Que fussiez surtout attentif
Dans tout votre déclaratif ,
A n'être du vrai corruptif ,
Mais bien très fidele instructif :
Qu'autrement très reprehensif,
Il feroit faire un erectif,
De votre col très - suspensif ,
Après quoi du corps divisif
Chaque
JANVIER.
85 1731.
Chaque membre séparatif
Occuperoit son locatif
Au bout d'un piquet plantatif .
Si mieux vous n'aimiez l'éversif
D'un plomb fondu plus que frictif ,
Ou qu'un grand brasier très- arsif,
De tout votre corps abstractif,
Fût de vos os calcinatif.
A ce barbare conclusif,
De l'un et l'autre alternatif,
Votre fang coagulatif
Vous eut causé le convulsif ;
Et n'étant rien moins qu'obstructif ,
Un subit et promt soustractif ,
Pour chaque nez très-offensif,
Tout autant qu'un suppuratif ,
Auroit par multiplicatif,
Gâté le purificatif
De votre linge deffensif.
Puis sur la fin constitutif,
Après un simple affirmatif,
De verité confirmatif ,
Vous auriez fait un responsif
Pour votre salut solutif ,
Et votre représentatif
N'ayant rien que de probatif,
Et pas aucun fait négatif ,
Nous aurions vû notre Cherif,
Devenu plus adulatif,
E Yous
8 % MERCURE DE FRANCE.
Vous faire communicatif ,
Ou plutôt gratificatif ,
Par forme de restauratif ,
D'un Sorbet bon et potatif,
Et nullement alteratif .
Dieu vous donne bon reversif ,
Et vous garde du suggestif ,
De tout heritier présomptif ,
Qui , sous un faux démonstratif.
N'aimant que votre successif ,
Et craignant le subrogatif ,
De tout Acte substitutif,
Voudroit avoir l'institutif,
Sans aucun mot dérogatif ,
D'un testament nuncupatif
Pour l'universel lucratif
De maint contract pignoratif.
Or sus , pour peu que processif
Soyez , ou bien vindicatif,
Vous me rendrez le respectif ,
Lequel ( sauf le restitutif )
J'attends en froid speculatif.
Auteur de ces Rimes en If ,
Soyez un peu mémoratif,
Que par avis iteratif,
On affranchit tout productif,
Au Mercure destinatif,
Sans
JANVIER. 1731
Sans quoi le plus bel inventif,
Sera mis au rebutatif.
Soyez aussi plus attentif ,
A ne broncher sur l'élisif ;
Cela rend le Vers bien chetif ,
Mais nous avons fait corrrectif.
Fermer
Résumé : RÉPONSE à l'Esprit en if, de M. l'Abbé L*** inserée dans le Mercure du mois d'Août 1730.
Le texte est une réponse à une épître de l'abbé L*** publiée dans le Mercure d'août 1730. L'auteur critique l'épître pour son manque d'originalité et d'inspiration, soulignant ce point en utilisant des termes rimant en 'if'. Il reproche à l'abbé de ne pas avoir exploité pleinement les ressources linguistiques disponibles, telles que les noms, pronoms, verbes et autres formes grammaticales. L'auteur imagine ensuite diverses situations où l'abbé aurait pu enrichir son texte en décrivant des détails spécifiques, comme un repas, un procès ou une maladie. Il critique également l'abbé pour son manque d'imagination et de créativité, le comparant à un médecin incapable de diagnostiquer correctement. L'auteur raconte ensuite une histoire fictive où l'abbé, après avoir été capturé et torturé, finit par obtenir une récompense sous forme de sorbet. Il conclut en conseillant à l'abbé d'être plus attentif et productif dans ses écrits pour éviter que ses efforts ne soient rejetés.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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14
p. 87-93
RÉFLEXIONS sur la conjecture proposée, touchant la correction d'un endroit des traductions d'Horace.
Début :
En raisonnant ces jours passez avec un Grammairien, sur la [...]
Mots clefs :
Traduction, Horace, Grammaire, Traducteurs, Cornicula, Conjecture, Journal des savants, Hésiode
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texteReconnaissance textuelle : RÉFLEXIONS sur la conjecture proposée, touchant la correction d'un endroit des traductions d'Horace.
REFLEXIONS sur la conjecture
proposée , touchant la correction d'un endroit
des traductions d'Horace.
N raisonnant ces jours passez avec
ENun Gramairien , sur la remarque inprimée
dans le Mercure de Juin , page
1350. la premiere pensée qui m'est venue
a été , qu'il n'est nullement deffendu de
s'opposer au torrent des Traducteurs ou
Interpretes des Aureurs Classiques. Je suis
ensuite allé plus loin , et j'ai cru qu'il
étoit necessaire de faire sentir aux Imprimeurs
le tort qu'ils ont de faire copier
souvent les fautes des manuscrits. Il n'est
pas
étonnant
, disois
-je , que
ceux
qui
lisent
Cornicula
dans
Horace
, traduisent
ce terme
par
celui
de Corneille
. Peut
-être
n'ont
-ils pas
bien
examiné
s'il
faut
veritablement
lire
Cornicula
dans
ce Poëte
,
et si ce
mot
a toujours
été
écrit
ainsi
.
Dès
lors
je
suis
tombé
d'accord
avec
E ij
l'Au-
-
88 MERCURE DE FRANCE.
sert pour
l'Auteur de la conjecture proposée , que
le mot Cornix écarte tout- à- fait l'idée de
Geai ; mais sans user du détour dont il se
faire valoir son sentiment, voicy
la pensée que je hazardois. Je ne prétendois
point qu'il en dût être autrement
de Cornicula par rapport à Cornix , que
de graculus par rapport à gracus et de
hædulus par rapport à heedus. Je présumois
seulement que le substantif corvus
avoit pû avoir dans l'antiquité ses diminutifs
, de même que ces trois autres coravec
l'autre avant
nix ,, gracus et hædus , et qu'ainsi on a pû
'dire corviculus et corvicula. Il seroit ennuyeux
de produire une infinité d'exemples
où l'on voit que la lettre n a été
prise pour la lettre . Ces méprises sont
venues de la ressemblance que l'une avoit
que dans l'écriture latine
on eut inventé une v consone pour
le besoin , et chez les grecs même la ressemblance
de ces deux caracteres est si
grande, que je lisois encore dernierement
dans le Journal des Sçavans du mois de
Juillet, que c'est sur le principe de cette
conformité que M. l'Abbé Sévin s'appuye
pour avoir la veritable lecture d'un
passage d'Hésiode ; ensorte qu'au lieu
de Dion genos , il faut lire, selon lui , Dion
genos.
Dans le texte de notre Poëte , il ne s'agit
JANVIER. 1731. 89
git point de race divine , mais de race.
corvine. Le Geai étant donc compris sub
genere corvino , selon l'Auteur de la Remarque
, qui me paroissoit suffisainment
autorisée , en ce que les bons Dictionaires
rendent le xoλe d'Esope , par le
terme Graculus . J'en concluois que si
Graculus signifie un Geai , xoxoids est
surement cet oiseau , et non pas la Corneille.
Mais comme il n'est pas certain
que graculus soit le Geai . C'est ce qui
doit arrêter toutes les consequences qu'on
pourroit tirer en supposant la chose.
D'ailleurs , la conjecture par laquelle on
prétendoit qu'Horace a mis originaire
ment corvicula, ne peut se soutenir , parce
que le Poëte , pour faire son vers , a
du mettre un mot dont la seconde syllabe
fût longue. Or la seconde de corvi
cula ( si ce mot existoit ) seroit breve , suivant
les regles des dérivez.
Comment donc ajuster tout cela : Ce
ne sera point en suivant l'auteur de la
conjecture dans tous les raisonnemens
qu'il fait , mais seulement dans quelques-
uns. Il a raison d'improuver ceux
qui croyent qu'Horace et Phédre ont
voulu désigner un oiseau different , et ilne
faut pas s'imaginer que le graculus
de celui- ci , soit different du cornicula du
premier.
E iij L'Augo
MERCURE DE FRANCE.
L'Auteur doit , selon moi , revenir au
sentiment de Furetiere , qui dit que
graculus n'est point le Geai. A la verité
son Dictionaire ne renferme point de
Dissertation pour le prouver ; mais je
suis persuadé qu'il n'a pas pris la négative
sur cet article sans avoir de bonnes
raisons . Laissons donc les Traducteurs
d'Horace dans l'usage de prendre l'oiseau
de la fable pour une corneille ; et
tâchons seulement d'empêcher ceux qui
dans la suite traduiront Phédre , de rendre
le mot graculus par celui de Geai .
Déja il faut avouer que le terme latin
n'a pas grande affinité avec le françois
et c'est un assez grand fondement pour
douter.
J'avoue encore une fois que le noλorde
κολοιός
des Grees , et le graculus des Latins sont
le même oiseau. Il faut attribuer à
gram
eulus tout ce que les Grecs ont dit du ca
quet importun et désagréable du xoxoide.
figure des grands parleurs , qui cherchent
leurs semblables, et qui se plaisent à s'at-
Troupper pour faire grand bruit. Si le
Geai aime à jazer , le Graculus se plait à
grailler. Ces deux sortes d'oiseaux sont
loquaces, pour ainsi dire , et cependant ils
sont differens. Je n'ai point dans ma solitude
tous les Livres des Auteurs Payens
des premiers temps , qui ont parlé de ces
SOEJANVIER.
1731. 9:19
sortes d'animaux ; mais parmi quelques
collections que j'ai faites des Ecrivains
des moyens temps , je trouve un Historien
du huitième siècle , Auteur de la
Vie de S. Frichoux ou Fructueux , Archevêque
de Brague , en Portugal , mort
en 665 , lequel s'exprime ainsi : Nigras
parvasque aves quas usitato nomine vulgus
graculas vocitat , mansuetas in Monasterio
babuisse perhibetur. Il est important de
remarquer icy que selon ce texte , graculus
ou gracula est un oiseau de couleur
noire. Or le Geai n'est pas un oiseau
noir ; il est varié dans sa couleur.
Outre cela le but de l'Auteur de la
fable n'eût pas été assez sensible , ni le
sujer assez exactement traité , s'il eut
pris pour le fond de sa moralité un oi
seau qui eut eu un plumage de diver
ses couleurs , et qui n'eut point été laid
à voir. Il vouloit representer un oiseau
different du Paon, generalement en tou
tes choses , un oiseau peu agréable à la
uë , un oiseau d'un plumage uniforme
et de couleur lugubre et triste , lequet
dégouté de sa propre laideur , qui le faisoit
mépriser , avoit entrepris de se mé
tamorphoser en un autre oiseau infiniment
mieux habillé .
Sur le fondement de la disproportion
des deux oiseaux , la morale étoit ensuite
E iiij bien
92 MERCURE DE FRANCE.
*
bien plus sensible, et tomboit bien plus
visiblement sur ceux qui honteux de leur
pauvreté ou de la sterilité de leurs_talens
, se parent et s'ornent des biens et
des productions d'autrui . Je conclus
donc tout au contraire de la remarque.
inserée dans le Mercure , que ce sont les
Traducteurs de Phédre qui ont tort , et
non pas ceux d'Horace ; et qu'il ne faudroit
point intituler cette fable du Geai
glorieux , mais de la Corneille glorieuſe. Il
me paroît que l'Auteur a eu intention
de parler d'un oiseau semblable à nos
Corneilles. Il ne seroit peut-être pas même
hors de vrai-semblance que cet oinommé
par l'un de nos Auteurs
Latins , graculus , et par l'autre cornicula,
fut la Pie. On trouve dans cet oiseau
la loquacité reconnue par les Anciens.
dans le graculus , et elle est d'une espece
noire. Outre cela c'est un oiseau
qu'on apprivoise facilement ; cela convient
avec le texte de l'Auteur de la
Vie de S, Fructueux , qui écrivoit il y a
mille ans .
seau ,
. La Corneille dont il est fait mention
dans la Vie de S. Sour , Hermite en Périgord
, au sixième siècle , étoit un oiseau
domestique ; mais le nom de Cornicula
employé par l'Ecrivain de cette Vie , fait
croire qu'elle étoit de la couleur de nos
"
CorJANVIER.
1731. 93
Corneilles , et par consequent si on veut
allier en quelque maniere la domesticité
de cet oiseau avec sa couleur , on peut
dire que c'est la Pie . Il est vrai que la Pie:
et le Geal se ressemblent aussi du côté
de la domesticité ; peut-être est- ce pour
cela que les vocabulaires du moyen
temps , tels que celui de Papias de Lom.
bardie , identifient Gaius , Gaia , avec
Picus et Pica. Mais il y a trop de difference
du côté de la couleur , pour pou-.
voir dire que l'un soit l'autre. Et comme
dans la fable , c'est de la variété du
plumage qu'il est question , autant ques
principe de la beauté, je reviens toujours
à dire que l'animal le plus triste en couleur
et le plus laid en plumage , est celui
que nos Poëtes ont eu en vue , et non cefui
dont le plumage est aussi varié que
l'est celui du Geai . Et puisqu'il n'est pas .
rare de trouver des Geais blancs , trèsagréables
à la vue ; c'est une justice
qu'on doit rendre à cette espece d'oiseau
que de ne la pas mettre dans la catégorie:
des oiseaux naturellement laids , qui ont
besoin d'emprunter du Paon ,de quoi se
farder et s'embellir ..
que
Ce 2. Aouft 1730 ..
proposée , touchant la correction d'un endroit
des traductions d'Horace.
N raisonnant ces jours passez avec
ENun Gramairien , sur la remarque inprimée
dans le Mercure de Juin , page
1350. la premiere pensée qui m'est venue
a été , qu'il n'est nullement deffendu de
s'opposer au torrent des Traducteurs ou
Interpretes des Aureurs Classiques. Je suis
ensuite allé plus loin , et j'ai cru qu'il
étoit necessaire de faire sentir aux Imprimeurs
le tort qu'ils ont de faire copier
souvent les fautes des manuscrits. Il n'est
pas
étonnant
, disois
-je , que
ceux
qui
lisent
Cornicula
dans
Horace
, traduisent
ce terme
par
celui
de Corneille
. Peut
-être
n'ont
-ils pas
bien
examiné
s'il
faut
veritablement
lire
Cornicula
dans
ce Poëte
,
et si ce
mot
a toujours
été
écrit
ainsi
.
Dès
lors
je
suis
tombé
d'accord
avec
E ij
l'Au-
-
88 MERCURE DE FRANCE.
sert pour
l'Auteur de la conjecture proposée , que
le mot Cornix écarte tout- à- fait l'idée de
Geai ; mais sans user du détour dont il se
faire valoir son sentiment, voicy
la pensée que je hazardois. Je ne prétendois
point qu'il en dût être autrement
de Cornicula par rapport à Cornix , que
de graculus par rapport à gracus et de
hædulus par rapport à heedus. Je présumois
seulement que le substantif corvus
avoit pû avoir dans l'antiquité ses diminutifs
, de même que ces trois autres coravec
l'autre avant
nix ,, gracus et hædus , et qu'ainsi on a pû
'dire corviculus et corvicula. Il seroit ennuyeux
de produire une infinité d'exemples
où l'on voit que la lettre n a été
prise pour la lettre . Ces méprises sont
venues de la ressemblance que l'une avoit
que dans l'écriture latine
on eut inventé une v consone pour
le besoin , et chez les grecs même la ressemblance
de ces deux caracteres est si
grande, que je lisois encore dernierement
dans le Journal des Sçavans du mois de
Juillet, que c'est sur le principe de cette
conformité que M. l'Abbé Sévin s'appuye
pour avoir la veritable lecture d'un
passage d'Hésiode ; ensorte qu'au lieu
de Dion genos , il faut lire, selon lui , Dion
genos.
Dans le texte de notre Poëte , il ne s'agit
JANVIER. 1731. 89
git point de race divine , mais de race.
corvine. Le Geai étant donc compris sub
genere corvino , selon l'Auteur de la Remarque
, qui me paroissoit suffisainment
autorisée , en ce que les bons Dictionaires
rendent le xoλe d'Esope , par le
terme Graculus . J'en concluois que si
Graculus signifie un Geai , xoxoids est
surement cet oiseau , et non pas la Corneille.
Mais comme il n'est pas certain
que graculus soit le Geai . C'est ce qui
doit arrêter toutes les consequences qu'on
pourroit tirer en supposant la chose.
D'ailleurs , la conjecture par laquelle on
prétendoit qu'Horace a mis originaire
ment corvicula, ne peut se soutenir , parce
que le Poëte , pour faire son vers , a
du mettre un mot dont la seconde syllabe
fût longue. Or la seconde de corvi
cula ( si ce mot existoit ) seroit breve , suivant
les regles des dérivez.
Comment donc ajuster tout cela : Ce
ne sera point en suivant l'auteur de la
conjecture dans tous les raisonnemens
qu'il fait , mais seulement dans quelques-
uns. Il a raison d'improuver ceux
qui croyent qu'Horace et Phédre ont
voulu désigner un oiseau different , et ilne
faut pas s'imaginer que le graculus
de celui- ci , soit different du cornicula du
premier.
E iij L'Augo
MERCURE DE FRANCE.
L'Auteur doit , selon moi , revenir au
sentiment de Furetiere , qui dit que
graculus n'est point le Geai. A la verité
son Dictionaire ne renferme point de
Dissertation pour le prouver ; mais je
suis persuadé qu'il n'a pas pris la négative
sur cet article sans avoir de bonnes
raisons . Laissons donc les Traducteurs
d'Horace dans l'usage de prendre l'oiseau
de la fable pour une corneille ; et
tâchons seulement d'empêcher ceux qui
dans la suite traduiront Phédre , de rendre
le mot graculus par celui de Geai .
Déja il faut avouer que le terme latin
n'a pas grande affinité avec le françois
et c'est un assez grand fondement pour
douter.
J'avoue encore une fois que le noλorde
κολοιός
des Grees , et le graculus des Latins sont
le même oiseau. Il faut attribuer à
gram
eulus tout ce que les Grecs ont dit du ca
quet importun et désagréable du xoxoide.
figure des grands parleurs , qui cherchent
leurs semblables, et qui se plaisent à s'at-
Troupper pour faire grand bruit. Si le
Geai aime à jazer , le Graculus se plait à
grailler. Ces deux sortes d'oiseaux sont
loquaces, pour ainsi dire , et cependant ils
sont differens. Je n'ai point dans ma solitude
tous les Livres des Auteurs Payens
des premiers temps , qui ont parlé de ces
SOEJANVIER.
1731. 9:19
sortes d'animaux ; mais parmi quelques
collections que j'ai faites des Ecrivains
des moyens temps , je trouve un Historien
du huitième siècle , Auteur de la
Vie de S. Frichoux ou Fructueux , Archevêque
de Brague , en Portugal , mort
en 665 , lequel s'exprime ainsi : Nigras
parvasque aves quas usitato nomine vulgus
graculas vocitat , mansuetas in Monasterio
babuisse perhibetur. Il est important de
remarquer icy que selon ce texte , graculus
ou gracula est un oiseau de couleur
noire. Or le Geai n'est pas un oiseau
noir ; il est varié dans sa couleur.
Outre cela le but de l'Auteur de la
fable n'eût pas été assez sensible , ni le
sujer assez exactement traité , s'il eut
pris pour le fond de sa moralité un oi
seau qui eut eu un plumage de diver
ses couleurs , et qui n'eut point été laid
à voir. Il vouloit representer un oiseau
different du Paon, generalement en tou
tes choses , un oiseau peu agréable à la
uë , un oiseau d'un plumage uniforme
et de couleur lugubre et triste , lequet
dégouté de sa propre laideur , qui le faisoit
mépriser , avoit entrepris de se mé
tamorphoser en un autre oiseau infiniment
mieux habillé .
Sur le fondement de la disproportion
des deux oiseaux , la morale étoit ensuite
E iiij bien
92 MERCURE DE FRANCE.
*
bien plus sensible, et tomboit bien plus
visiblement sur ceux qui honteux de leur
pauvreté ou de la sterilité de leurs_talens
, se parent et s'ornent des biens et
des productions d'autrui . Je conclus
donc tout au contraire de la remarque.
inserée dans le Mercure , que ce sont les
Traducteurs de Phédre qui ont tort , et
non pas ceux d'Horace ; et qu'il ne faudroit
point intituler cette fable du Geai
glorieux , mais de la Corneille glorieuſe. Il
me paroît que l'Auteur a eu intention
de parler d'un oiseau semblable à nos
Corneilles. Il ne seroit peut-être pas même
hors de vrai-semblance que cet oinommé
par l'un de nos Auteurs
Latins , graculus , et par l'autre cornicula,
fut la Pie. On trouve dans cet oiseau
la loquacité reconnue par les Anciens.
dans le graculus , et elle est d'une espece
noire. Outre cela c'est un oiseau
qu'on apprivoise facilement ; cela convient
avec le texte de l'Auteur de la
Vie de S, Fructueux , qui écrivoit il y a
mille ans .
seau ,
. La Corneille dont il est fait mention
dans la Vie de S. Sour , Hermite en Périgord
, au sixième siècle , étoit un oiseau
domestique ; mais le nom de Cornicula
employé par l'Ecrivain de cette Vie , fait
croire qu'elle étoit de la couleur de nos
"
CorJANVIER.
1731. 93
Corneilles , et par consequent si on veut
allier en quelque maniere la domesticité
de cet oiseau avec sa couleur , on peut
dire que c'est la Pie . Il est vrai que la Pie:
et le Geal se ressemblent aussi du côté
de la domesticité ; peut-être est- ce pour
cela que les vocabulaires du moyen
temps , tels que celui de Papias de Lom.
bardie , identifient Gaius , Gaia , avec
Picus et Pica. Mais il y a trop de difference
du côté de la couleur , pour pou-.
voir dire que l'un soit l'autre. Et comme
dans la fable , c'est de la variété du
plumage qu'il est question , autant ques
principe de la beauté, je reviens toujours
à dire que l'animal le plus triste en couleur
et le plus laid en plumage , est celui
que nos Poëtes ont eu en vue , et non cefui
dont le plumage est aussi varié que
l'est celui du Geai . Et puisqu'il n'est pas .
rare de trouver des Geais blancs , trèsagréables
à la vue ; c'est une justice
qu'on doit rendre à cette espece d'oiseau
que de ne la pas mettre dans la catégorie:
des oiseaux naturellement laids , qui ont
besoin d'emprunter du Paon ,de quoi se
farder et s'embellir ..
que
Ce 2. Aouft 1730 ..
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Résumé : RÉFLEXIONS sur la conjecture proposée, touchant la correction d'un endroit des traductions d'Horace.
Le texte traite d'une conjecture sur la correction d'un terme dans les traductions d'Horace, en se concentrant sur le mot 'Cornicula' et sa possible confusion avec 'Corneille'. L'auteur souligne que les traducteurs et imprimeurs reproduisent souvent les erreurs des manuscrits, ce qui peut entraîner des traductions incorrectes. Il examine la possibilité que 'Cornicula' soit un diminutif de 'corvus' (corbeau), de même que 'graculus' est un diminutif de 'gracus' (geai). Il mentionne des erreurs courantes dans l'écriture latine et grecque, où la lettre 'n' est souvent confondue avec la lettre 'u'. Le texte aborde également la fable d'Ésope et la traduction du terme grec 'xoλe' par 'Graculus'. L'auteur conclut que 'graculus' ne désigne pas le geai mais plutôt la corneille, en se basant sur des descriptions historiques et des dictionnaires. Il cite un historien du VIIIe siècle qui décrit 'graculus' comme un oiseau noir, ce qui correspond mieux à la corneille qu'au geai. L'auteur critique les traducteurs de Phèdre qui traduisent 'graculus' par 'geai' et propose que la fable devrait être intitulée 'La Corneille glorieuse' plutôt que 'Le Geai glorieux'. Il suggère que l'oiseau en question pourrait être la pie, qui est noire et loquace, et qui correspond mieux aux descriptions historiques. Enfin, l'auteur insiste sur l'importance de la couleur et de l'apparence des oiseaux dans la fable, concluant que l'oiseau décrit est probablement la pie, en raison de son plumage uniforme et sombre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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15
p. 94
EXPLICATION de l'Enigme du I vol. du Mercure du mois de Decembre, & des deux premiers Logogryphes.
Début :
Un doux maintien, une agréable humeur, [...]
Mots clefs :
Dents, Coucou, Cul
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texteReconnaissance textuelle : EXPLICATION de l'Enigme du I vol. du Mercure du mois de Decembre, & des deux premiers Logogryphes.
XPLICATION de l'Enigme du
I vol. du Mercure du mois de Decem-
bre ,
&
des
deux
premiers
Logogryphes
.
UN
doux
maintien
,
une
agréable
humeur
„
Souris
flateur
,
simple parure
,
Un
beau
Chef
-
d'œuvre
de nature ,
Beaucoup
d'esprit
,
d'enjoüment
,
de douceur
.
Un teint vermeil , un brillant coloris ,
"
.
Des
Dents
plus blanches
que
l'ivoire
,
Gorge
d'albâtre
,
et
point
de
gloire
C'est
le
portrait
de
l'aimable
Phylis
.
Je
crois
En
vain m'appelle
-
t
-
on Hibou
,
que
c'est
un
avantage
,
De
porter
le
nom
de Sauvage
,
Plutot
que
celui
de Cousou
.
Le Cul
assis
près
de
mon
feu
Je
laisse
passer
la
gelée
,
Je
dors
la
grasse
matinée
;
Je dîne bien
,
et
soupe peu
..
F. M. Nic H
I vol. du Mercure du mois de Decem-
bre ,
&
des
deux
premiers
Logogryphes
.
UN
doux
maintien
,
une
agréable
humeur
„
Souris
flateur
,
simple parure
,
Un
beau
Chef
-
d'œuvre
de nature ,
Beaucoup
d'esprit
,
d'enjoüment
,
de douceur
.
Un teint vermeil , un brillant coloris ,
"
.
Des
Dents
plus blanches
que
l'ivoire
,
Gorge
d'albâtre
,
et
point
de
gloire
C'est
le
portrait
de
l'aimable
Phylis
.
Je
crois
En
vain m'appelle
-
t
-
on Hibou
,
que
c'est
un
avantage
,
De
porter
le
nom
de Sauvage
,
Plutot
que
celui
de Cousou
.
Le Cul
assis
près
de
mon
feu
Je
laisse
passer
la
gelée
,
Je
dors
la
grasse
matinée
;
Je dîne bien
,
et
soupe peu
..
F. M. Nic H
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Résumé : EXPLICATION de l'Enigme du I vol. du Mercure du mois de Decembre, & des deux premiers Logogryphes.
Le texte explique une énigme et des logogryphes du Mercure de décembre. Il idéalise Phyllis, la décrivant comme douce, enjouée et belle, avec un teint vermeil et des dents blanches. L'auteur se compare à un hibou et préfère être appelé 'Sauvage'. Il décrit ses habitudes : rester près du feu, dormir tard, bien dîner et peu souper. Le texte se termine par les initiales 'F. M. Nic H'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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16
p. 95
« On a dû expliquer le dernier Logogrife du premier vol. du mois dernier, [...] »
Début :
On a dû expliquer le dernier Logogrife du premier vol. du mois dernier, [...]
Mots clefs :
Aigle, Dés, Maire, Collecteur
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « On a dû expliquer le dernier Logogrife du premier vol. du mois dernier, [...] »
a
dû
expliquer
le
dernier
Logo-
grife
du
premier
vol
.
du
mois
dernier
par
Aigle
.
L'Enigme du
deuxième
volume
s'ex-
plique par
Dez
;
et
les
Logogrifes
par
Maire
et
Collecteur
.
dû
expliquer
le
dernier
Logo-
grife
du
premier
vol
.
du
mois
dernier
par
Aigle
.
L'Enigme du
deuxième
volume
s'ex-
plique par
Dez
;
et
les
Logogrifes
par
Maire
et
Collecteur
.
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17
p. 95
ENIGME.
Début :
Je vas vîte, et je vas toujours, [...]
Mots clefs :
Temps
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : ENIGME.
ENIGM E.
E vas vite , et je vas toujours ,
Je ne trouve rien qui m'arrête :
Le vent , la pluye , la tempête ,
S'opposeroient en vain à mon rapide
cours.
Je donne et ravis les richesses ,
Je renverse les Forteresses.
Et mets l'intelligence entre les ennemis ,
Que l'on désesperoit de voir jamais unis.
Contre ses crean ciers , tel mon secours implore ,
Qui se verroit persécuté ,
Si par
bonheur pour lui je n'avois acquité ,
Ce qu'au fond il leur doit encore,
E vas vite , et je vas toujours ,
Je ne trouve rien qui m'arrête :
Le vent , la pluye , la tempête ,
S'opposeroient en vain à mon rapide
cours.
Je donne et ravis les richesses ,
Je renverse les Forteresses.
Et mets l'intelligence entre les ennemis ,
Que l'on désesperoit de voir jamais unis.
Contre ses crean ciers , tel mon secours implore ,
Qui se verroit persécuté ,
Si par
bonheur pour lui je n'avois acquité ,
Ce qu'au fond il leur doit encore,
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18
p. 96
LOGOGRYPHE.
Début :
Je fais la nourriture, [...]
Mots clefs :
Chardon
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texteReconnaissance textuelle : LOGOGRYPHE.
LOGOGRYPHE.
E fais la nourriture ,
Des plus vils animaux.
Un pied de moins , je change de nature ;
Sur la table des Grands , je vais après le rost ,な
Me ranger par figure ;
Partagez ma structure ,
Sur moi jadis , plus d'un Héros
Dans Rome , à ce qu'en dit l'Histoire ,
'Après mille dangers , après mille travaux
Promena son renom , ses exploits et sa gloire.
A qui compte chez soy maint et maint Ducaton,
Je sçais faire rouler Carosse et Phaeton
Deux pieds de plus en font l'affaire ;
Otez-en deux , hélas ! Riches , Grands de la
terre ,
Un jour sera que dans votre saison
Moissonnez par la Parque
Vous quitterez le Phaëton ,
Pour prendre place dans ma Barque.
D.. D..
E fais la nourriture ,
Des plus vils animaux.
Un pied de moins , je change de nature ;
Sur la table des Grands , je vais après le rost ,な
Me ranger par figure ;
Partagez ma structure ,
Sur moi jadis , plus d'un Héros
Dans Rome , à ce qu'en dit l'Histoire ,
'Après mille dangers , après mille travaux
Promena son renom , ses exploits et sa gloire.
A qui compte chez soy maint et maint Ducaton,
Je sçais faire rouler Carosse et Phaeton
Deux pieds de plus en font l'affaire ;
Otez-en deux , hélas ! Riches , Grands de la
terre ,
Un jour sera que dans votre saison
Moissonnez par la Parque
Vous quitterez le Phaëton ,
Pour prendre place dans ma Barque.
D.. D..
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19
p. 97
DEUXIÈME LOGOGRYPHE.
Début :
Je suis un breuvage connu, [...]
Mots clefs :
Cidre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DEUXIÈME LOGOGRYPHE.
DEUXIE ME LOGOGRYPHE.
J E suis un breuvage conmu
Mais , qui n'est point par tout egalement couru ;
Une Lettre de moins , je change de substance ,
Et suis divers en forme , aussi bien qu'en cou
1
leur ,
Mais
, si d'un
Element
j'éprouve
la rigueur
C'en est fait de ma consistance :
Si dans cet état actuel ,
Vous abbatez mon chef , je suis péché mortel ;
Qu'autre tête me soit donnée ,
Mon propre est d'expliquer , quand on veut la
pensée.
Arrangez-moi d'un autre sens ,
Je suis la marque des vieux ans.
Choisissez sur mon tout deux membres à ras
battre ,
Je serai piéce de Théatre.
A la Fere , le 16 Aoust 1730,-
D ...
J E suis un breuvage conmu
Mais , qui n'est point par tout egalement couru ;
Une Lettre de moins , je change de substance ,
Et suis divers en forme , aussi bien qu'en cou
1
leur ,
Mais
, si d'un
Element
j'éprouve
la rigueur
C'en est fait de ma consistance :
Si dans cet état actuel ,
Vous abbatez mon chef , je suis péché mortel ;
Qu'autre tête me soit donnée ,
Mon propre est d'expliquer , quand on veut la
pensée.
Arrangez-moi d'un autre sens ,
Je suis la marque des vieux ans.
Choisissez sur mon tout deux membres à ras
battre ,
Je serai piéce de Théatre.
A la Fere , le 16 Aoust 1730,-
D ...
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