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Liste
1
p. 221-238
A Siam le 28. Novembre 1683.
Début :
Je me suis informé des Habillemens qu'on vous a dit que les [...]
Mots clefs :
Roi, Siam, Chinois, Pays, Terre, Prince, Gouverneur, Japon, Étrangers, Peine, Navires, Port, Ville, Empereur, Empire, Portugais, Langue, Chine, Cheveux, Vêtements
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texteReconnaissance textuelle : A Siam le 28. Novembre 1683.
A Siam le 28. Novembre 1683 .
les
E mefuis informé des Habillemens
qu'on vous a dit que
Soldats Faponnois portoient lars
qu'ils alloient à la Guerre , &
qui font à l'épreuve de toutesfor-
Tij
222 MERCURE
tes d'armes ; mais tous ceux qui
m'ont paru le dewair frayjoin le
mieux, pour avoir demeuré longtemps
dans le Japon , n'ont pú
m'en inftruire. Ils m'ont ſeulement
dit , qu'ils croyoient que ces
Soldats fe feruoient dans leurs
expéditions militaires des mefmes
Veftemens que les Chinois, qui les
font de plufieurs Erofes de foye
cousies enfemble , & piquées
fort prés à prés , e qui mettent
quelquefois foixante de ces Erofes
es unes fur les autres, avec du
coton ou de l'ouate entre deux.
Els difent que ces Habillemens réfiftent
mefme aux coups de Moufa.
GALANT 223
les
quet ; mais il n'y a que les Grands
qui s'en fervent & Les Gens du
commun ufent de Cuiraffes. Il
eft tres difficile d'avoir des nouvelles
füres de ce qui fe paſſe au
Fapon , parce qu'il n'y a que
Hollandois les Chinois qui y
trafiquent. Tous les Etrangers,
particuliérement ces premiers,
Ifont fi peu en liberté, que j'en
ay connu quelques - uns , qui y
avoient fairfix oùfept voyages,
qui à peine pouvoient rendre
raison de certaines chofes , qui ne
peuvent eftre ignorées d'une Per-
Sonne qui a demeuré quelque
temps dans un Pais. Vous fçan
T. iiij.
224 MERCURE
4
vez que la Compagnie de Hol
lande ne tire plus du Fapon ces
grands pr fus qu'elle y faifoit autrefois
les vexations qu'y fou
frent fes Officiers ont beaucoup
diminué ce Trafic. Il part chaque
année de Barravia trois ou
pour
le
quatre
grands
Navires
Japon , chargez
de toutes fortes
de Marchandifes
; & l'ordre
le
plus exprés qu'ont les Officiers
de
ces Bâtimens
, est de fe donner
bien de garde de montrer
aucun
figne de Chriftianifme
qu'ils demeureront
en ce Pais- là.
Le Gouverneur
de Nangazaqui
,
qui est le Port où les Navires
·tant⋅
GALANT 225
le
Etrangers arrivent , les force à
luy vendre toutes les Marchan
difes qu'ils apportent , au prix
qu'il fouhaite s'ils ne veulent
pas les donner , ilfaut qu'ils
rembarquent auffi tost , fans pouvoir
davantageles expofer en
vents. Ils voyent enfuite que
Gouverneur revend mefmes
Marchandifes de la main à la
main , avec un tres-grand profit,
fans qu'ils ofent en murmurer.
Auffi dit- on la Compagnie
Hollandoife est réfolie d'abandonner
ce Commerce , fi elle ne
peut avoir raison de ces awanies.
La Loge des Hollandois eft fituée
que
Ges
226 MERCURE
1
dans une petite Ifle qui eft dans
la Riviere de Nangazaqui , &
qui n'a de communication avec
La Ville, ou Terre ferme , que par
un Pont. Le Gouverneur a le
foin de leur fare fournir toutes
Les chofes dont ils ont besoin , &
il leur est défendu fous peine de
la vie, d'aller en Terre-ferme, on
à la Ville , fans fa permiffion
&fans avoir quelques Gardes.
Cet ordre est refpectif à l'égard
des Faponnois , qui ne peuvent
aller en la Loge des Hollandais
fans la permiffion du Gouverneur.
Tant que leurs Navires demeu
rent en ce Port of Riviere , le
GALANT 227
Gouvernail , la Poudre , & les
principales Armes , font à terre ;
codes,le moment qu'on leur a
rende ces chafes , il faut qu'ilsfe
mettent à la voile , quelque vent
qu'ilfaffe. Quand mefme ils auroient
la plus rude tempefte à effuyer,
ils ne peuventfans rifque
de la vie rentrer dans un Port
du Japon. Il faut que la Com
pagnie change toutes les années
Le Chef & Second de fon Comp
toir ; d'abord que les Japonnois
remarquent que quelque Hol
landois commence à fçavoir leur
Langue ou leurs Coutumes , ils
le renvoyent hors de leur Païs.
228 MERCURE
On efpéroit que la mort du vieil
Empereur , qui eftoit celuy qui
avoit entiérement coupé les fortes
racines que la Religion des Chré
tiens avoit jettées dans leJapon,
mettroit quelque fin aux précautions
pleines d'impieté qu'apportent
les Japonnois , pour empef
cher qu'on ne leur annonce une
autre fois l'Evangile ; mais les
Miniftres de fon Fils , qui a fuc-"
cedé à l'Empire
, n'en apportent
pas de moindres , t) femblent
ôter toute efpérance de pouvoir
voir de nos jours un fi grand
bien. Les Portugais publient ,
que leur Viceroy qui arriva l'an
GALANT 229
paffé à Goa , a deffein d'envoyer
une Fregate aufapon , avec des
Ambassadeurs , pour féliciter ce
nouvel Empereur fur fon heureux
avenement à la Couronne,
en mefme temps ménager le
rétabliſſement de la bonne correfpondance
qu'il y a eu autrefois
entre ces deux Nations ; mais je
ne croy pas qu'il envoye cette
Fregate , encore moins, qu'il
puiffe reüffirdansfesprojets,quand
il le feroit. Les Portugais s'attendent
de voir d'auffi grandes
chofes fous le Gouvernement de
ce Viceroy , que leurs Prédeseffeurs
en ont vu fous celuy
230 MERCURE
des Albuquerques . Il eft een
tain que c'est un Homme d'un
fort grand mérite , & qui täcke
d'établir toutes chofes fur le bon
pied. Le Prince Regent lay a
"donné un pouvoir , qu'aucun Va
ceroy n'a eu avant luy , qui eft
de faire châtier de peine capitalejufques
aus Fidalgués, quand
le mériteront , fans les renvoyer
en Portugal , comme on
faifoit autrefois.
M Evefque d'Heliopolis
partir de mois de fuiller dernier
far une Soume Chinoïfe , pour
aller à la Chine . Il est à craindre
que ce ware Prelarn'yforpas
GALANT. 231
1
reçû , à caufe des nouveaux orl'Empereur
a fait pudres
que
blier, par lesquels il défend l'entrée
le négoce dans fon Empire
à tous les Etrangers , à l'exception
des Portugais de Macao ,
qui peuvent le faire feulement
par terre.
Toutes les Provinces de la
Chine obeiffent préfentement au
Tartare , & il n'y a aucun Chinois
dans ce vafte Empire , qui
n'ait les cheveux coupez . Il ne
refte plus que l'Ile de Formofe;
mais on ne croit pas qu'elle puiffe
refifter contre les grandes forces
que l'EmpereurTartarepeut met232
MERCURE
a
tre fur terre & fur mer. Il y
a plufieurs Chinois qui demeurent
en ce Royaume de Siam. Ils
portent les cheveux longs ;
comme le Roy vouloit envoyer
une Ambaffade folemnelle à la
Chine , il nomma l'und'euxpour
un de fes Ambaffadeurs. Ce
Chinois fit tout ce qu'il pût pour
s'en excufer , parce qu'il auroit
efté obligé de couper fes cheveux;
mais voyant que le Roy vouloit
abfolument qu'il y allaft , il aima
mieux fe couper la
de confentir à cet affront.
J'envoye une petite Relation:
de Cochinchine , dont le Royau
gorge , que
4
GALANT. 233
me eft fameux en ces quartiers,
non feulement par la valeur de
fes Peuples , mais auffi par le progrés
qu'y a fait l'Evangile, Je
lay drefféefur quelques Mémoi
res que m'a fourny un Miffionnaire
François qui en fait par
faitement la Langue , pour y
avoir demeuré long- temps. Ilfe
nomme M Vachet, & eft affez
renommé dans les Relations que
M des Miffions Etrangeres
donnent de temps en temps au
Public Fe la croy affez jufte,
Je
j'espère que vous la lirez avec
plaifir. J'avois commencé une
autre Relation de mon Voyage
V Octobre
1684.
234
MERCURE
co
de Surate à la Cofte Coroman
delle , Malaca, Siam ; mais
elle n'est pas en état d'eftre envayée
, parce que jay encore
quelque chofe à y ajoûter , afin
depouvoir donner en meſme temps
une legere idée de l'état de ce
dernier Royaume.
Kone aure appris que depuis
les premiers honneurs que j'avois
reçûs du Rey de Siam à mon ar
rivée en fe Cour , j'en reçûs de
bien plus particuliers l'an paffé,
lors que ce Prince me donna audience
en fon Palais. It eftoit
affis en fon Trône , & ily avoit
enmefme temps des Ambaſſadeurs
-
GALANT 235
du Roy deFamby, à qui il donnoit
auffi audience ; mais il voulut par
la lieu où il me fi placer , faire
connoiftre la diférence qu'il wettoit
entre un Sujet du plus grand.
Prince du monde , & les
baffadeurs d'un Roy fon Voifin
Il me fit préfent d'un Juſtan
corps ou Vefte d'un Brocard d'Eu
rope tres-riche , d'un Sabre &
à la maniere des Indes , dont la
Garde & le Fourreau eftoient
garnis d'or ; & j'eus encore l'hon- -
neur de luy faire la reverence ·
le mois d'Avril dernier , & j'en
reçûs unſecond Préfent. C'efpit
un autre Juftaincoups › tres-beaus. ·
Vvijo
236 MERCURE
rares
Il feroit mal- aifé de raconter
les hautes idées que ce Roy a
de la puiffance , de la valeur,
& de la magnificence de noftre
invincible Monarque. Il ne fe
peutfur tout laffer d'admirer ces
qualitez qui le rendent auffi
recommandable en Paix qu'en \
Guerre, Vous voyez bien que las
Vie de Sa Majesté me fournit
affez de matiere pour pouvoir en_ ).
tretenir ce Prince dans cesfentimens
d'admiration. C'est ce que
je fais par quantité d actions particulieres
de cette illuftre Vie que
je fais traduire en fa Langue,
qu'un Mandarin de mes Amis,
GALANT. 237
lors
que
&fort en faveur aupres de luy,
a foin de luy préfenter. Le Roy
de Stam espere que Sa Majesté
tuy envoyera des Ambaſſadeurs,
les fiens reviendront. It
fait batir une Maiſon , qu'on
peut nommer magnifique pour le
Pais pour les recevoir & défrayer.
Dans ce deffein , on prépare
toutes les Uftancilles pour
la meubler à la maniere d'Europe:
Les faveurs que ce Prince
fait de jour en jour à M ™s les
Evefques François , Vicaires du
S. Siege en ces Païs , font tresparticulieres.
Il leur fait bâtir
une grande Eglife proche le beau
238 MERCURE
Seminaire qu'il leur fit conftruire
il y a quelques années ; & depuis
peu de jours iill lleeuurr aa fait
demander le modelle d'une autre
Eglife qu'il veut leur faire batir
à Lavau. C'est une Ville où il
fait fon fejour pendant fept ou
huit mois de l'année , & qui eft
éloignée de Siam de quinze à
feize lieües.
les
E mefuis informé des Habillemens
qu'on vous a dit que
Soldats Faponnois portoient lars
qu'ils alloient à la Guerre , &
qui font à l'épreuve de toutesfor-
Tij
222 MERCURE
tes d'armes ; mais tous ceux qui
m'ont paru le dewair frayjoin le
mieux, pour avoir demeuré longtemps
dans le Japon , n'ont pú
m'en inftruire. Ils m'ont ſeulement
dit , qu'ils croyoient que ces
Soldats fe feruoient dans leurs
expéditions militaires des mefmes
Veftemens que les Chinois, qui les
font de plufieurs Erofes de foye
cousies enfemble , & piquées
fort prés à prés , e qui mettent
quelquefois foixante de ces Erofes
es unes fur les autres, avec du
coton ou de l'ouate entre deux.
Els difent que ces Habillemens réfiftent
mefme aux coups de Moufa.
GALANT 223
les
quet ; mais il n'y a que les Grands
qui s'en fervent & Les Gens du
commun ufent de Cuiraffes. Il
eft tres difficile d'avoir des nouvelles
füres de ce qui fe paſſe au
Fapon , parce qu'il n'y a que
Hollandois les Chinois qui y
trafiquent. Tous les Etrangers,
particuliérement ces premiers,
Ifont fi peu en liberté, que j'en
ay connu quelques - uns , qui y
avoient fairfix oùfept voyages,
qui à peine pouvoient rendre
raison de certaines chofes , qui ne
peuvent eftre ignorées d'une Per-
Sonne qui a demeuré quelque
temps dans un Pais. Vous fçan
T. iiij.
224 MERCURE
4
vez que la Compagnie de Hol
lande ne tire plus du Fapon ces
grands pr fus qu'elle y faifoit autrefois
les vexations qu'y fou
frent fes Officiers ont beaucoup
diminué ce Trafic. Il part chaque
année de Barravia trois ou
pour
le
quatre
grands
Navires
Japon , chargez
de toutes fortes
de Marchandifes
; & l'ordre
le
plus exprés qu'ont les Officiers
de
ces Bâtimens
, est de fe donner
bien de garde de montrer
aucun
figne de Chriftianifme
qu'ils demeureront
en ce Pais- là.
Le Gouverneur
de Nangazaqui
,
qui est le Port où les Navires
·tant⋅
GALANT 225
le
Etrangers arrivent , les force à
luy vendre toutes les Marchan
difes qu'ils apportent , au prix
qu'il fouhaite s'ils ne veulent
pas les donner , ilfaut qu'ils
rembarquent auffi tost , fans pouvoir
davantageles expofer en
vents. Ils voyent enfuite que
Gouverneur revend mefmes
Marchandifes de la main à la
main , avec un tres-grand profit,
fans qu'ils ofent en murmurer.
Auffi dit- on la Compagnie
Hollandoife est réfolie d'abandonner
ce Commerce , fi elle ne
peut avoir raison de ces awanies.
La Loge des Hollandois eft fituée
que
Ges
226 MERCURE
1
dans une petite Ifle qui eft dans
la Riviere de Nangazaqui , &
qui n'a de communication avec
La Ville, ou Terre ferme , que par
un Pont. Le Gouverneur a le
foin de leur fare fournir toutes
Les chofes dont ils ont besoin , &
il leur est défendu fous peine de
la vie, d'aller en Terre-ferme, on
à la Ville , fans fa permiffion
&fans avoir quelques Gardes.
Cet ordre est refpectif à l'égard
des Faponnois , qui ne peuvent
aller en la Loge des Hollandais
fans la permiffion du Gouverneur.
Tant que leurs Navires demeu
rent en ce Port of Riviere , le
GALANT 227
Gouvernail , la Poudre , & les
principales Armes , font à terre ;
codes,le moment qu'on leur a
rende ces chafes , il faut qu'ilsfe
mettent à la voile , quelque vent
qu'ilfaffe. Quand mefme ils auroient
la plus rude tempefte à effuyer,
ils ne peuventfans rifque
de la vie rentrer dans un Port
du Japon. Il faut que la Com
pagnie change toutes les années
Le Chef & Second de fon Comp
toir ; d'abord que les Japonnois
remarquent que quelque Hol
landois commence à fçavoir leur
Langue ou leurs Coutumes , ils
le renvoyent hors de leur Païs.
228 MERCURE
On efpéroit que la mort du vieil
Empereur , qui eftoit celuy qui
avoit entiérement coupé les fortes
racines que la Religion des Chré
tiens avoit jettées dans leJapon,
mettroit quelque fin aux précautions
pleines d'impieté qu'apportent
les Japonnois , pour empef
cher qu'on ne leur annonce une
autre fois l'Evangile ; mais les
Miniftres de fon Fils , qui a fuc-"
cedé à l'Empire
, n'en apportent
pas de moindres , t) femblent
ôter toute efpérance de pouvoir
voir de nos jours un fi grand
bien. Les Portugais publient ,
que leur Viceroy qui arriva l'an
GALANT 229
paffé à Goa , a deffein d'envoyer
une Fregate aufapon , avec des
Ambassadeurs , pour féliciter ce
nouvel Empereur fur fon heureux
avenement à la Couronne,
en mefme temps ménager le
rétabliſſement de la bonne correfpondance
qu'il y a eu autrefois
entre ces deux Nations ; mais je
ne croy pas qu'il envoye cette
Fregate , encore moins, qu'il
puiffe reüffirdansfesprojets,quand
il le feroit. Les Portugais s'attendent
de voir d'auffi grandes
chofes fous le Gouvernement de
ce Viceroy , que leurs Prédeseffeurs
en ont vu fous celuy
230 MERCURE
des Albuquerques . Il eft een
tain que c'est un Homme d'un
fort grand mérite , & qui täcke
d'établir toutes chofes fur le bon
pied. Le Prince Regent lay a
"donné un pouvoir , qu'aucun Va
ceroy n'a eu avant luy , qui eft
de faire châtier de peine capitalejufques
aus Fidalgués, quand
le mériteront , fans les renvoyer
en Portugal , comme on
faifoit autrefois.
M Evefque d'Heliopolis
partir de mois de fuiller dernier
far une Soume Chinoïfe , pour
aller à la Chine . Il est à craindre
que ce ware Prelarn'yforpas
GALANT. 231
1
reçû , à caufe des nouveaux orl'Empereur
a fait pudres
que
blier, par lesquels il défend l'entrée
le négoce dans fon Empire
à tous les Etrangers , à l'exception
des Portugais de Macao ,
qui peuvent le faire feulement
par terre.
Toutes les Provinces de la
Chine obeiffent préfentement au
Tartare , & il n'y a aucun Chinois
dans ce vafte Empire , qui
n'ait les cheveux coupez . Il ne
refte plus que l'Ile de Formofe;
mais on ne croit pas qu'elle puiffe
refifter contre les grandes forces
que l'EmpereurTartarepeut met232
MERCURE
a
tre fur terre & fur mer. Il y
a plufieurs Chinois qui demeurent
en ce Royaume de Siam. Ils
portent les cheveux longs ;
comme le Roy vouloit envoyer
une Ambaffade folemnelle à la
Chine , il nomma l'und'euxpour
un de fes Ambaffadeurs. Ce
Chinois fit tout ce qu'il pût pour
s'en excufer , parce qu'il auroit
efté obligé de couper fes cheveux;
mais voyant que le Roy vouloit
abfolument qu'il y allaft , il aima
mieux fe couper la
de confentir à cet affront.
J'envoye une petite Relation:
de Cochinchine , dont le Royau
gorge , que
4
GALANT. 233
me eft fameux en ces quartiers,
non feulement par la valeur de
fes Peuples , mais auffi par le progrés
qu'y a fait l'Evangile, Je
lay drefféefur quelques Mémoi
res que m'a fourny un Miffionnaire
François qui en fait par
faitement la Langue , pour y
avoir demeuré long- temps. Ilfe
nomme M Vachet, & eft affez
renommé dans les Relations que
M des Miffions Etrangeres
donnent de temps en temps au
Public Fe la croy affez jufte,
Je
j'espère que vous la lirez avec
plaifir. J'avois commencé une
autre Relation de mon Voyage
V Octobre
1684.
234
MERCURE
co
de Surate à la Cofte Coroman
delle , Malaca, Siam ; mais
elle n'est pas en état d'eftre envayée
, parce que jay encore
quelque chofe à y ajoûter , afin
depouvoir donner en meſme temps
une legere idée de l'état de ce
dernier Royaume.
Kone aure appris que depuis
les premiers honneurs que j'avois
reçûs du Rey de Siam à mon ar
rivée en fe Cour , j'en reçûs de
bien plus particuliers l'an paffé,
lors que ce Prince me donna audience
en fon Palais. It eftoit
affis en fon Trône , & ily avoit
enmefme temps des Ambaſſadeurs
-
GALANT 235
du Roy deFamby, à qui il donnoit
auffi audience ; mais il voulut par
la lieu où il me fi placer , faire
connoiftre la diférence qu'il wettoit
entre un Sujet du plus grand.
Prince du monde , & les
baffadeurs d'un Roy fon Voifin
Il me fit préfent d'un Juſtan
corps ou Vefte d'un Brocard d'Eu
rope tres-riche , d'un Sabre &
à la maniere des Indes , dont la
Garde & le Fourreau eftoient
garnis d'or ; & j'eus encore l'hon- -
neur de luy faire la reverence ·
le mois d'Avril dernier , & j'en
reçûs unſecond Préfent. C'efpit
un autre Juftaincoups › tres-beaus. ·
Vvijo
236 MERCURE
rares
Il feroit mal- aifé de raconter
les hautes idées que ce Roy a
de la puiffance , de la valeur,
& de la magnificence de noftre
invincible Monarque. Il ne fe
peutfur tout laffer d'admirer ces
qualitez qui le rendent auffi
recommandable en Paix qu'en \
Guerre, Vous voyez bien que las
Vie de Sa Majesté me fournit
affez de matiere pour pouvoir en_ ).
tretenir ce Prince dans cesfentimens
d'admiration. C'est ce que
je fais par quantité d actions particulieres
de cette illuftre Vie que
je fais traduire en fa Langue,
qu'un Mandarin de mes Amis,
GALANT. 237
lors
que
&fort en faveur aupres de luy,
a foin de luy préfenter. Le Roy
de Stam espere que Sa Majesté
tuy envoyera des Ambaſſadeurs,
les fiens reviendront. It
fait batir une Maiſon , qu'on
peut nommer magnifique pour le
Pais pour les recevoir & défrayer.
Dans ce deffein , on prépare
toutes les Uftancilles pour
la meubler à la maniere d'Europe:
Les faveurs que ce Prince
fait de jour en jour à M ™s les
Evefques François , Vicaires du
S. Siege en ces Païs , font tresparticulieres.
Il leur fait bâtir
une grande Eglife proche le beau
238 MERCURE
Seminaire qu'il leur fit conftruire
il y a quelques années ; & depuis
peu de jours iill lleeuurr aa fait
demander le modelle d'une autre
Eglife qu'il veut leur faire batir
à Lavau. C'est une Ville où il
fait fon fejour pendant fept ou
huit mois de l'année , & qui eft
éloignée de Siam de quinze à
feize lieües.
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Résumé : A Siam le 28. Novembre 1683.
Le document est une lettre datée du 28 novembre 1683 à Siam, traitant des habits des soldats japonais et des difficultés de commerce avec le Japon. L'auteur note que les soldats japonais portent des vêtements similaires à ceux des Chinois, résistants aux armes à feu, mais il n'a pas pu obtenir de détails précis. Il souligne les restrictions imposées aux étrangers, notamment les Hollandais, qui sont surveillés et limités dans leurs mouvements. Le gouverneur de Nangazaqui contrôle strictement le commerce, forçant les navires étrangers à vendre leurs marchandises à des prix imposés. La Compagnie hollandaise envisage d'abandonner ce commerce en raison des vexations subies. La loge des Hollandais est située sur une île isolée, et les Japonais interdisent toute communication non autorisée. Les navires étrangers doivent quitter le port immédiatement après avoir récupéré leurs armes et poudre. La Compagnie hollandaise change annuellement ses chefs pour éviter qu'ils ne s'imprègnent de la langue ou des coutumes locales. La mort de l'empereur japonais n'a pas modifié les restrictions contre les chrétiens. Les Portugais prévoient d'envoyer une frégate pour rétablir les relations, mais cela semble peu probable. Le document mentionne également des événements en Chine, où les Tartares contrôlent les provinces, et en Cochinchine, connue pour la valeur de ses peuples et la progression de l'Évangile. L'auteur a reçu des honneurs du roi de Siam, qui admire la puissance et la magnificence du monarque français. Le roi de Siam prépare une maison pour recevoir des ambassadeurs français et construit des églises pour les missionnaires français.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 283-287
Ce qui s'est passé à la Comedie Italienne la premiere fois qu'ils ont esté à ce Theatre. [titre d'après la table]
Début :
Quand ils allerent à la Comedie Italienne, & qu'on [...]
Mots clefs :
Comédie-Italienne, Interprète, Paris, Roi, France, Portugais, Compliment italien, Giovanni Veneroni
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Ce qui s'est passé à la Comedie Italienne la premiere fois qu'ils ont esté à ce Theatre. [titre d'après la table]
Quand ils allerent à la
Comedie Italienne , &
qu'on leur voulut faire :
remarquer la Salle qui eft
tres-belle , ils dirent qu'el
le estoit à Paris es que cela
Suffifoit , Paris eftant ca
pable de produire tout ce
qu'on peut s'imaginer de
plus beau. Voicy à peu prés
le fujet du Compliments
Italien que leur fit M
Aaij
284 Voyage des Amb.
Cinthio . Il dit , Que c'étorent
de ſages & illustres
Minſtres , qui portoient
imprimée ſur leurfront la
grandeurde leur Roy , qu'ils
eftoient venus en France du
ford des Indes pour nous
découvrir les merveilles de
IAfie , que leur Royaume
eftoit divſé en onze Provinces
qu'onpouvoit appeller
autant de Royaumes, &
que tout estoit d'unfi grand
exemple dans le Gouvernement
de Siam , que si les
de Siam. 285
Ecoles de la Prudence &
de la Politique estoient neceffaires
en France , ils
pourroient en donner les
premiers enfeignemens ; à
quoy il ajouta , qu'il les
prioit defouffrirqu' au nom
de toute la Troupe , il leur
rend ft graces de l'honneur
qu'il leur avoit plû de faire
à leur Theatre , cơ quà
leurretour à Siam ils daignaſſont
dire à leur Souverain
Seigneur , que les Nations
les plus éloignées don
286 Voyage des Amb.
nent un tribut de loüanges
àſa grandeur, 5 reverent
fa Puiſſance , d'autant
plus confiderable qu'elle a
merité l'estime de noftre
Monarque , toûjours Invincible
LOUIS XIV. 5.
que cependant ils attendroient
d'eux de nouveaux
ordres ponr leur donner de
nouvelles marques de leur
zele & de leur obeiffance.
CeCompliment fut interpreté
en François parM
Veneroni , Interprete du
de Siam. 287
Roy en Langue Italienne,
qui parle Portugais auffibien
que l'Interprete des
Ambaffadeurs qui eft né à
Siam , & Fils d'un Portugais
qui s'y eft habitué.
Comedie Italienne , &
qu'on leur voulut faire :
remarquer la Salle qui eft
tres-belle , ils dirent qu'el
le estoit à Paris es que cela
Suffifoit , Paris eftant ca
pable de produire tout ce
qu'on peut s'imaginer de
plus beau. Voicy à peu prés
le fujet du Compliments
Italien que leur fit M
Aaij
284 Voyage des Amb.
Cinthio . Il dit , Que c'étorent
de ſages & illustres
Minſtres , qui portoient
imprimée ſur leurfront la
grandeurde leur Roy , qu'ils
eftoient venus en France du
ford des Indes pour nous
découvrir les merveilles de
IAfie , que leur Royaume
eftoit divſé en onze Provinces
qu'onpouvoit appeller
autant de Royaumes, &
que tout estoit d'unfi grand
exemple dans le Gouvernement
de Siam , que si les
de Siam. 285
Ecoles de la Prudence &
de la Politique estoient neceffaires
en France , ils
pourroient en donner les
premiers enfeignemens ; à
quoy il ajouta , qu'il les
prioit defouffrirqu' au nom
de toute la Troupe , il leur
rend ft graces de l'honneur
qu'il leur avoit plû de faire
à leur Theatre , cơ quà
leurretour à Siam ils daignaſſont
dire à leur Souverain
Seigneur , que les Nations
les plus éloignées don
286 Voyage des Amb.
nent un tribut de loüanges
àſa grandeur, 5 reverent
fa Puiſſance , d'autant
plus confiderable qu'elle a
merité l'estime de noftre
Monarque , toûjours Invincible
LOUIS XIV. 5.
que cependant ils attendroient
d'eux de nouveaux
ordres ponr leur donner de
nouvelles marques de leur
zele & de leur obeiffance.
CeCompliment fut interpreté
en François parM
Veneroni , Interprete du
de Siam. 287
Roy en Langue Italienne,
qui parle Portugais auffibien
que l'Interprete des
Ambaffadeurs qui eft né à
Siam , & Fils d'un Portugais
qui s'y eft habitué.
Fermer
Résumé : Ce qui s'est passé à la Comedie Italienne la premiere fois qu'ils ont esté à ce Theatre. [titre d'après la table]
Des ambassadeurs visitèrent la Comédie Italienne et admirèrent sa beauté, la comparant aux salles parisiennes. M. Aaij, représentant, les qualifia de sages et illustres ministres, soulignant la grandeur de leur roi. Il mentionna leur voyage depuis les Indes pour découvrir les merveilles de l'Asie et décrivit leur royaume, divisé en onze provinces ou royaumes, gouverné avec sagesse. M. Aaij exprima l'admiration pour leur gouvernement et demanda aux ambassadeurs de transmettre leurs louanges au souverain de Siam, Louis XIV. Le compliment fut interprété en français par M. Veneroni, interprète du roi en langue italienne et portugais, et par l'interprète des ambassadeurs, né à Siam et fils d'un Portugais.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
3
p. 175-197
LETTRE d'un Capitaine de Vaisseau qui a esté present à l'expedition de Rio-Janeiro.
Début :
Le 12. Septembre à la faveur d'une bruine fort épaisse, nous parusmes sur [...]
Mots clefs :
Rio de Janeiro, Pièces de canon, Vaisseau, Capitulation, Expédition, Portugais, Monsieur du Clerc, Canon, Sucre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE d'un Capitaine de Vaisseau qui a esté present à l'expedition de Rio-Janeiro.
L E TTR E
d'un Capitaine de Vaiffeau
qui a eflé prefent à l'expedition de Rio Janeiro.
Lee 12. 12. Septembre à la «
faveur d'une bruine fort
épaiffe nous parufmes furles dix heures du matin «
proche l'entrée de Rio
Janeiro , ayant reconnu “
Piiij.
176 MERCURE
la Terre deux jours aupa 03
3
→ravant , dès que le temps
1029
03/
09
30
commença à´ss'éclaircir
Mr Du Gué fit le fignal
pour entrer tous en li-
" gne fuivant l'ordre qu'il
- en avoit donné , fçavoir
» le Magnanime , le Lys ,
le Brillant , l'Achille , le
Glorieux , le Mars , le Fidele , l'Argonaute , l'A-
→ mazone, la Bellone , l'Aigle , l'Aftrée , le Chance-
» lier, la Glorieufe , la Con-
- corde & les deux Traverfiers, nous entraẩmes tous
avec un vent de Sud Eft
*
GALANT 177
beau & frais en forçant le
grandfort de fainteCroix
qui eft le premier en en- «
trant & d'autres forts
dont il nous fallut effuyer
le feu nous allafmesmoüil
ler , nonobftant leur feu ,
proche la ville hors la por--
tée du canon , nous y avons trouvé quatre Vaiffeaux de guerre Portugais
de 64, 62. 60. à 58. canons , dont la moitié de«
leur artillerie eftoit de «
fonte. Mr du Gué, avec «
le Confeil de guerre , re
folut qu'il falloit fe rendre
178 MERCURE
" maiftres de l'Ifle aux Che
vres, & que c'eftoit le feul
endroit où on pourroit
eftablir fes batteries. Mr
du Gué ordonna qu'on fe
tint preft à debarquer
avec une partie des trou
pes à la petite pointe du
* jour. Mr de Gouyon ,
commeeftant le plus ancien , commanda la defcente & fat avec toutes
les chalouppes & canots
armez , dans lefquels il y
avoit cinq cens hommes ,
#& s'en rendit maiftre. Les
Portugais s'y eftoient des
GALANT. 179
ja eftablis, &avoient com-*
mencé à faire des batteries , dont ils avoient desja fix pieces de canon de «
fer qu'ils enclouérent
quand ils furent obligez
d'abandonner.Aprés cet
te expedition faite , Mr
Gouyonfe rembarqua, &
en laiffa le commande- &
mentau Marquis de faint •
Simon Lieutenant de
Vaiffeau, avec trois cens •
foldats , & ila donné des
marques de ſa valeur, &
a tousjours tres bien fait.
Le 13. dudit mois deux de «
180 MERCURE
03
ces Vaiffeaux Portugais
fe bruflerent , le Cheva-
»lier de Veaurealle cut ordre d'aller avec fa Chaloupe à bord d'un autre
qui en vouloit faire au,
tant , il s'en rendit maif,
etre , mais il ne put point
le haller au large , parce
qu'un Fort faifoit conti,
" nuellement feu deffus ne
voyant aucun espoir de
le fauver , parce qu'il ef
toit crible de coups de
& qu'il faifoit • canon
beaucoup d'eau , tout ce
qu'il put faire ce fut de
GALANT. 181
ce
се
Téchouer proche de la
pointe de l'Ifle aux Ché
vres , il ne s'y eft trouvé -
que feize piecesde canon «
de fonte de vingt quatre,
qu'on tranſporta la nuit
à terres quant à l'autre
Vaiffeau il fe brufla deux
jours aprés , on ne put
point l'aller prendre où
i eftoit proche une batterie de quatre pieces de
canon de quarante huit ,
Mr Du Gué ordonna
tous nos mortiers fuffent
mis à terre en batterie à«e
l'ffle aux Chevres. Leque C
се
сс
182 MERCURE
»
22 Chevalier de la Ruffinie
➡re qui commandoit l'artillerie , y fut tué la nuit
13. au 14. De Beauve
fut à la faveur de la nuit
23
33
» du
avec huit Chalouppes &
cinq canots armez , enle
→ ver cinqà fix Baſtiments
qui eftoient moüillez proche de terre , qui pouvoient empeſcher noftre
defcente generale , ils
avoient du dix - huit fur
deux de ces navires, dont
» un eftoit de 44. & l'autre
»detrente- fix, tous eftoient
chargez de beau fucre
57
GALANT. 183
CC
blanc de Brefil , on eftime ces carguaifons , ain- «
fi que ces Vaiffeaux plus
de cent mille écus. Le14.
nous filmes noftre defcen- «
te generale au nombre.
de trois mille hommes , «
toutes nos troupes furent
à terre à midy , & nous «
marchaſmes dans la plus .
grande ardeur du Soleil ,
& fufmes à une grande «
lieue pour pouvoir nous «
rendre maiftres d'une ri «,
viere qui fournit la legarde d'eau , mais nous ne «
pufmes paffer, parce que
се
CR
184 MERCURE
»
→cet endroit eft ifolé &
qu'il y avoit un bras de
riviere qui le rendoit inacceffible , nous fufmes
obligez de nous en retourner proche le debar-
» quement où nous cam-
→pafmes par brigades, nous
» y reftames huit jours fans
faire grand mouvement.
Le 19. Mr du Gué envoya
»un Tambour au Gouver-
» neur de la Ville avec une
»
35
"
Lettre pour luy deman-
» der juftice des mauvais
»traitements & des cruau-
» tez qu'on avoit fait àtous
les
GALANT. 185
les prifonniers de Mr le
Clerc, & defon affaffinat, "
& qu'il le fommoit de fe «
rendre , il fit refponfe
qu'il avoit des forces fuperieures de beaucoup
aux noftres pour fe def
fendre , & qu'à l'égard de
l'affaffinat deMr duClerc Ce
«
il n'y avoit eu aucune
part , & qu'il avoit fait «
les perquifitions neceffi
res pour en fçavoir les «
complices.
Quand Mr du Gué eut«
receu cette Lettre il envo «
ya un canot à l'ifle des «
Février. 1712. Q
186 MERCURE
Chevres avec ordre de
» commencerà tirer , alors
→ on ouvrit toutes nos batteries ; fur les fix heures
» du foir , l'on tira detren
>> te pieces de trente fix , &
le lendemain de dix au.
tres de vingt quatre & de
» dix- huit. Le 22. les Jefui-
» tes envoyerent Mr de la
Salle Volontaire de Mr
du Clerc à Mr du Gué
pour l'avertir que le Gou25
verneur avec toute la
garuifon & les habitants
»avoient pris la fuite pen-
» dant la nuit , & qu'ils
GALANT. 187
fe
ce
avoient abandonné la -
Ville de Rio Janeiro &
tous les Forts ; qu'ils euffent à s'y rendre pour en «
prendre poffeffion. On «
s'affura des portes les plus
importantes. La Brigade
de MrGouyonfut aux Be- .
nedictins , & l'on prit le
Fort & tout ce qui en dépend. Nous n'avons perdu en cette occafion que
vingt hommes. Par les «
avis de plufieurs priſon
niers de Mr du Clerc , «
qui fe fauvoient de la Ville, nous avons appris que
co
Qij
188 MERCURE
*
30
53
les Ennemis avoient plus
de dix mille hommes por
tant les armes , y compre
" nant des Negres libres
qui font auffi agueris que
des Soldats. Sitoft que
nous fufmes à la Ville on
diftribua noftre petite armée en cinq Brigades
pour occuper les poftes
les plus avantageux auffi-
>bien que les dehors où
l'on fe campa. Mr du Gué
fe logea à la maifon de
l'Evefque. I nous vint
360. Soldats de Mr du
Clerc qui fortirent de
30
"
39
53
227
GALANT. 189
се
ec
RE
prifon quel'on incorpora
dans nos Troupes. Le 23.
tous les Fortsfe rendirent
par capitulation , & on y "
envoya des garnifons.
Mr du Gué voyant que
le Gouverneur ne vouloit
point compoſer pour fa
Ville luy écrivit pour luy
reprefenter que tout fon «
pays eftoit en noftre puif
fance, preft d'eftre ruiné , «
& qu'ilcherchoit évidem «
ment fa perte ; que fon
Roy le puniroit toft ou
tard de n'avoir pas ména
gé fes interefts ; il l'avere
LC
the
190 MERCURE
* tiffoit d'envoyer chercher fes bleffez & les
malades pour leur éviter
d'eftre embrafez dans les
* ruines de fa Ville qu'il
alloit bruler & miner les
Forts pour les faire fauter,
Il fit réponſe qu'il vouloit
» confulter fes Generaux ,
& demanda deux jours.
Le 28. voyant qu'il ne
répondoit point on fit
» marcher toute l'Armée
»vers lesfix heures du matin. On ne laiffa que trespeu de monde pour gar- 20
» der les Forts que nous
GALANT. 191
occupions. Nous fulmes a
droit à l'ennemyqui eftoit «
campé à deux lieuës de la
Ville. On les furprit fi à «
propos que fi on les avoit
attaqués onles auroit dé- ➡
faits entierement ; nos
deux Armées eftoient en «
veuë à la portée du canon: mais le Gouverneur
demanda à capituler. Le «
premier Article fut que
l'on nous donneroit en
poudre d'or 1600000, li- «
vres poids de France en
trois payements afin -
qu'on confervaft la Ville , «
19 MERCURE
33
دو
$
33
les Couvents des Jefuites,
& des Benedictins , fous
condition qu'on leur donneroit des oftages pour
feureté. Nous leur laiffames le Chevalier de la
Grange Enfeigne de Vaif
feau , qui a efté autrefois
au Port Louis. Ils nous
» envoyerent leur Préfi
» dent , & un Mestre de
Camp de Cavalerie que
→ nous amenames à laVille.
» Ils nous accorderent cent
quaiffes de fucre blanc
53
de neuf cens livres chacune s'obligerent de
nous
CALANT. 193
cc
+
«
nous fournir gratis 200. «
boeufs fous condition
qu'on leur rendroit tous «
les Forts , & tout ce qui
en dépend , l'artillerie
avecfix coupspar canon ; «
que la Ville ne feroit «
point brulée , & qu'ils s'o- «
bligeoient de nous ache- «
ter toutes les poudres qui
cftoient en grande quanrité & toutes les mar- «
chandifes pourpeu qu'on
leur en fit bonne compofition. Il ne s'eft donné «
que deux efcarmouches
où nous avons tué aux «
Février 1712.
R
ec
ec
сс
EC
194 MERCURE
59
33
52
ဘ
32
Ennemis plus de 150.
hommes;nous n'en avons
perdu que quatre ou cinq,
Nonobftant la capitulation faite on ne laiffoit
point de fe tenir fur fes
gardes. Nous recevions
fouvent des avis qu'on
devoit nous furprendre..
Quand on nous eut fait
le premier payement
→ nous ne primes plus tant:
de précaution. Comme
les Portugais mouroient
defaim , on leur permet-
» toit d'entrer dans la Ville
» pour y prendre des fari37
32
22.
50
GALANT. 195
EC
nes de magniottes qu'ils -
avoient dans leurmaifon
ayant avec eux des fauve- c
gardesqui les ramenoient
dehors ; nous recevions «
d'eux tous les jours des
rafraifchiffements qui
.co :
nous eftoient d'un tres. «
4
OC
ce
grand' fecours. Le bruit
commun porte qu'on a «
trouvé dans les monta- Le
gnes un trefor d'environ
deux millions cinq cent «
mille livres en lingots
d'or , poudre , & vaiſſelle
d'argent , & trois mille .
quaiffes de fucre blanc «
>
cc
Rij
196 MERCURE
دو qui font de neuf cens li.:
vres chacune , eftimées
trois cens mille écus
» trente pieces de canon de
fonte de vingt - quatre
eftimées deux cens dix
mille livres ; l'on a vendu
plufieurs Navires pour
53
SP
دو
50
38
"
22
»7 cent foixante mille livres;
l'on a vendu les poudres
» cent vingt mille livres , &
des marchandifes vendues dans tous les vaiffeaux au profit de l'arme-
» ment vingt mille livres ;
le tout enfemble compre5
57
دو
- nant ce qu'on a receu
GALANT. 197
(C
f5 ས
CC
pour la capitulation , on
compte que nous avons «
cu de Rio Janeiro huit
millions. Tous nos Soldats ont donné beaucoup
de marques de leur va- «
leur eſtant remplis tous "
de bonne volonté ; la «
ce
"
ce plufpart ont fait de gros
butins & ceux qui n'ont *
pas profité dans cette oc- «
cafion , c'eft qu'ils fe font
trop attachés à boire.
d'un Capitaine de Vaiffeau
qui a eflé prefent à l'expedition de Rio Janeiro.
Lee 12. 12. Septembre à la «
faveur d'une bruine fort
épaiffe nous parufmes furles dix heures du matin «
proche l'entrée de Rio
Janeiro , ayant reconnu “
Piiij.
176 MERCURE
la Terre deux jours aupa 03
3
→ravant , dès que le temps
1029
03/
09
30
commença à´ss'éclaircir
Mr Du Gué fit le fignal
pour entrer tous en li-
" gne fuivant l'ordre qu'il
- en avoit donné , fçavoir
» le Magnanime , le Lys ,
le Brillant , l'Achille , le
Glorieux , le Mars , le Fidele , l'Argonaute , l'A-
→ mazone, la Bellone , l'Aigle , l'Aftrée , le Chance-
» lier, la Glorieufe , la Con-
- corde & les deux Traverfiers, nous entraẩmes tous
avec un vent de Sud Eft
*
GALANT 177
beau & frais en forçant le
grandfort de fainteCroix
qui eft le premier en en- «
trant & d'autres forts
dont il nous fallut effuyer
le feu nous allafmesmoüil
ler , nonobftant leur feu ,
proche la ville hors la por--
tée du canon , nous y avons trouvé quatre Vaiffeaux de guerre Portugais
de 64, 62. 60. à 58. canons , dont la moitié de«
leur artillerie eftoit de «
fonte. Mr du Gué, avec «
le Confeil de guerre , re
folut qu'il falloit fe rendre
178 MERCURE
" maiftres de l'Ifle aux Che
vres, & que c'eftoit le feul
endroit où on pourroit
eftablir fes batteries. Mr
du Gué ordonna qu'on fe
tint preft à debarquer
avec une partie des trou
pes à la petite pointe du
* jour. Mr de Gouyon ,
commeeftant le plus ancien , commanda la defcente & fat avec toutes
les chalouppes & canots
armez , dans lefquels il y
avoit cinq cens hommes ,
#& s'en rendit maiftre. Les
Portugais s'y eftoient des
GALANT. 179
ja eftablis, &avoient com-*
mencé à faire des batteries , dont ils avoient desja fix pieces de canon de «
fer qu'ils enclouérent
quand ils furent obligez
d'abandonner.Aprés cet
te expedition faite , Mr
Gouyonfe rembarqua, &
en laiffa le commande- &
mentau Marquis de faint •
Simon Lieutenant de
Vaiffeau, avec trois cens •
foldats , & ila donné des
marques de ſa valeur, &
a tousjours tres bien fait.
Le 13. dudit mois deux de «
180 MERCURE
03
ces Vaiffeaux Portugais
fe bruflerent , le Cheva-
»lier de Veaurealle cut ordre d'aller avec fa Chaloupe à bord d'un autre
qui en vouloit faire au,
tant , il s'en rendit maif,
etre , mais il ne put point
le haller au large , parce
qu'un Fort faifoit conti,
" nuellement feu deffus ne
voyant aucun espoir de
le fauver , parce qu'il ef
toit crible de coups de
& qu'il faifoit • canon
beaucoup d'eau , tout ce
qu'il put faire ce fut de
GALANT. 181
ce
се
Téchouer proche de la
pointe de l'Ifle aux Ché
vres , il ne s'y eft trouvé -
que feize piecesde canon «
de fonte de vingt quatre,
qu'on tranſporta la nuit
à terres quant à l'autre
Vaiffeau il fe brufla deux
jours aprés , on ne put
point l'aller prendre où
i eftoit proche une batterie de quatre pieces de
canon de quarante huit ,
Mr Du Gué ordonna
tous nos mortiers fuffent
mis à terre en batterie à«e
l'ffle aux Chevres. Leque C
се
сс
182 MERCURE
»
22 Chevalier de la Ruffinie
➡re qui commandoit l'artillerie , y fut tué la nuit
13. au 14. De Beauve
fut à la faveur de la nuit
23
33
» du
avec huit Chalouppes &
cinq canots armez , enle
→ ver cinqà fix Baſtiments
qui eftoient moüillez proche de terre , qui pouvoient empeſcher noftre
defcente generale , ils
avoient du dix - huit fur
deux de ces navires, dont
» un eftoit de 44. & l'autre
»detrente- fix, tous eftoient
chargez de beau fucre
57
GALANT. 183
CC
blanc de Brefil , on eftime ces carguaifons , ain- «
fi que ces Vaiffeaux plus
de cent mille écus. Le14.
nous filmes noftre defcen- «
te generale au nombre.
de trois mille hommes , «
toutes nos troupes furent
à terre à midy , & nous «
marchaſmes dans la plus .
grande ardeur du Soleil ,
& fufmes à une grande «
lieue pour pouvoir nous «
rendre maiftres d'une ri «,
viere qui fournit la legarde d'eau , mais nous ne «
pufmes paffer, parce que
се
CR
184 MERCURE
»
→cet endroit eft ifolé &
qu'il y avoit un bras de
riviere qui le rendoit inacceffible , nous fufmes
obligez de nous en retourner proche le debar-
» quement où nous cam-
→pafmes par brigades, nous
» y reftames huit jours fans
faire grand mouvement.
Le 19. Mr du Gué envoya
»un Tambour au Gouver-
» neur de la Ville avec une
»
35
"
Lettre pour luy deman-
» der juftice des mauvais
»traitements & des cruau-
» tez qu'on avoit fait àtous
les
GALANT. 185
les prifonniers de Mr le
Clerc, & defon affaffinat, "
& qu'il le fommoit de fe «
rendre , il fit refponfe
qu'il avoit des forces fuperieures de beaucoup
aux noftres pour fe def
fendre , & qu'à l'égard de
l'affaffinat deMr duClerc Ce
«
il n'y avoit eu aucune
part , & qu'il avoit fait «
les perquifitions neceffi
res pour en fçavoir les «
complices.
Quand Mr du Gué eut«
receu cette Lettre il envo «
ya un canot à l'ifle des «
Février. 1712. Q
186 MERCURE
Chevres avec ordre de
» commencerà tirer , alors
→ on ouvrit toutes nos batteries ; fur les fix heures
» du foir , l'on tira detren
>> te pieces de trente fix , &
le lendemain de dix au.
tres de vingt quatre & de
» dix- huit. Le 22. les Jefui-
» tes envoyerent Mr de la
Salle Volontaire de Mr
du Clerc à Mr du Gué
pour l'avertir que le Gou25
verneur avec toute la
garuifon & les habitants
»avoient pris la fuite pen-
» dant la nuit , & qu'ils
GALANT. 187
fe
ce
avoient abandonné la -
Ville de Rio Janeiro &
tous les Forts ; qu'ils euffent à s'y rendre pour en «
prendre poffeffion. On «
s'affura des portes les plus
importantes. La Brigade
de MrGouyonfut aux Be- .
nedictins , & l'on prit le
Fort & tout ce qui en dépend. Nous n'avons perdu en cette occafion que
vingt hommes. Par les «
avis de plufieurs priſon
niers de Mr du Clerc , «
qui fe fauvoient de la Ville, nous avons appris que
co
Qij
188 MERCURE
*
30
53
les Ennemis avoient plus
de dix mille hommes por
tant les armes , y compre
" nant des Negres libres
qui font auffi agueris que
des Soldats. Sitoft que
nous fufmes à la Ville on
diftribua noftre petite armée en cinq Brigades
pour occuper les poftes
les plus avantageux auffi-
>bien que les dehors où
l'on fe campa. Mr du Gué
fe logea à la maifon de
l'Evefque. I nous vint
360. Soldats de Mr du
Clerc qui fortirent de
30
"
39
53
227
GALANT. 189
се
ec
RE
prifon quel'on incorpora
dans nos Troupes. Le 23.
tous les Fortsfe rendirent
par capitulation , & on y "
envoya des garnifons.
Mr du Gué voyant que
le Gouverneur ne vouloit
point compoſer pour fa
Ville luy écrivit pour luy
reprefenter que tout fon «
pays eftoit en noftre puif
fance, preft d'eftre ruiné , «
& qu'ilcherchoit évidem «
ment fa perte ; que fon
Roy le puniroit toft ou
tard de n'avoir pas ména
gé fes interefts ; il l'avere
LC
the
190 MERCURE
* tiffoit d'envoyer chercher fes bleffez & les
malades pour leur éviter
d'eftre embrafez dans les
* ruines de fa Ville qu'il
alloit bruler & miner les
Forts pour les faire fauter,
Il fit réponſe qu'il vouloit
» confulter fes Generaux ,
& demanda deux jours.
Le 28. voyant qu'il ne
répondoit point on fit
» marcher toute l'Armée
»vers lesfix heures du matin. On ne laiffa que trespeu de monde pour gar- 20
» der les Forts que nous
GALANT. 191
occupions. Nous fulmes a
droit à l'ennemyqui eftoit «
campé à deux lieuës de la
Ville. On les furprit fi à «
propos que fi on les avoit
attaqués onles auroit dé- ➡
faits entierement ; nos
deux Armées eftoient en «
veuë à la portée du canon: mais le Gouverneur
demanda à capituler. Le «
premier Article fut que
l'on nous donneroit en
poudre d'or 1600000, li- «
vres poids de France en
trois payements afin -
qu'on confervaft la Ville , «
19 MERCURE
33
دو
$
33
les Couvents des Jefuites,
& des Benedictins , fous
condition qu'on leur donneroit des oftages pour
feureté. Nous leur laiffames le Chevalier de la
Grange Enfeigne de Vaif
feau , qui a efté autrefois
au Port Louis. Ils nous
» envoyerent leur Préfi
» dent , & un Mestre de
Camp de Cavalerie que
→ nous amenames à laVille.
» Ils nous accorderent cent
quaiffes de fucre blanc
53
de neuf cens livres chacune s'obligerent de
nous
CALANT. 193
cc
+
«
nous fournir gratis 200. «
boeufs fous condition
qu'on leur rendroit tous «
les Forts , & tout ce qui
en dépend , l'artillerie
avecfix coupspar canon ; «
que la Ville ne feroit «
point brulée , & qu'ils s'o- «
bligeoient de nous ache- «
ter toutes les poudres qui
cftoient en grande quanrité & toutes les mar- «
chandifes pourpeu qu'on
leur en fit bonne compofition. Il ne s'eft donné «
que deux efcarmouches
où nous avons tué aux «
Février 1712.
R
ec
ec
сс
EC
194 MERCURE
59
33
52
ဘ
32
Ennemis plus de 150.
hommes;nous n'en avons
perdu que quatre ou cinq,
Nonobftant la capitulation faite on ne laiffoit
point de fe tenir fur fes
gardes. Nous recevions
fouvent des avis qu'on
devoit nous furprendre..
Quand on nous eut fait
le premier payement
→ nous ne primes plus tant:
de précaution. Comme
les Portugais mouroient
defaim , on leur permet-
» toit d'entrer dans la Ville
» pour y prendre des fari37
32
22.
50
GALANT. 195
EC
nes de magniottes qu'ils -
avoient dans leurmaifon
ayant avec eux des fauve- c
gardesqui les ramenoient
dehors ; nous recevions «
d'eux tous les jours des
rafraifchiffements qui
.co :
nous eftoient d'un tres. «
4
OC
ce
grand' fecours. Le bruit
commun porte qu'on a «
trouvé dans les monta- Le
gnes un trefor d'environ
deux millions cinq cent «
mille livres en lingots
d'or , poudre , & vaiſſelle
d'argent , & trois mille .
quaiffes de fucre blanc «
>
cc
Rij
196 MERCURE
دو qui font de neuf cens li.:
vres chacune , eftimées
trois cens mille écus
» trente pieces de canon de
fonte de vingt - quatre
eftimées deux cens dix
mille livres ; l'on a vendu
plufieurs Navires pour
53
SP
دو
50
38
"
22
»7 cent foixante mille livres;
l'on a vendu les poudres
» cent vingt mille livres , &
des marchandifes vendues dans tous les vaiffeaux au profit de l'arme-
» ment vingt mille livres ;
le tout enfemble compre5
57
دو
- nant ce qu'on a receu
GALANT. 197
(C
f5 ས
CC
pour la capitulation , on
compte que nous avons «
cu de Rio Janeiro huit
millions. Tous nos Soldats ont donné beaucoup
de marques de leur va- «
leur eſtant remplis tous "
de bonne volonté ; la «
ce
"
ce plufpart ont fait de gros
butins & ceux qui n'ont *
pas profité dans cette oc- «
cafion , c'eft qu'ils fe font
trop attachés à boire.
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Résumé : LETTRE d'un Capitaine de Vaisseau qui a esté present à l'expedition de Rio-Janeiro.
Le texte décrit l'expédition de Rio de Janeiro dirigée par le capitaine de vaisseau M. Du Gué. Le 12 septembre, la flotte française pénétra dans la baie de Rio de Janeiro malgré la résistance des forts portugais. M. Du Gué ordonna la prise de l'île aux Chèvres pour y installer des batteries. M. de Gouyon, commandant la descente, s'empara de l'île malgré la résistance portugaise. Le 13 septembre, deux vaisseaux portugais furent incendiés. Le 14 septembre, les Français tentèrent une descente générale mais furent arrêtés par une rivière. Le 19 septembre, M. Du Gué envoya un tambour au gouverneur portugais pour demander justice pour les mauvais traitements infligés aux prisonniers de M. du Clerc. Le gouverneur refusa, affirmant disposer de forces supérieures. Le 22 septembre, les Jésuites informèrent les Français que le gouverneur avait fui. Les Français prirent alors possession de la ville et des forts sans rencontrer de résistance significative. Le 23 septembre, tous les forts se rendirent par capitulation. Le gouverneur, après avoir demandé deux jours pour consulter ses généraux, accepta de capituler le 28 septembre. Les termes de la capitulation incluaient le paiement de 1 600 000 livres en poudre d'or, la livraison de sucre et de bœufs, ainsi que la restitution des forts et de l'artillerie. La prise de Rio de Janeiro rapporta environ huit millions de livres aux Français.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 142-146
Nouvelles d'Espagne.
Début :
Le Roy a donné au Prince de Masseran, Pere du [...]
Mots clefs :
Espagne, Roi, Troupes, Portugais, Armée
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles d'Espagne.
Nouvelles d'Espagne. T
Le Roy adonné au Prince
de Mafferan , Pere du Marquis de Crevecoeur , la Grandeffe de la premiere Claffe
&à DonFranciſco Antonio
de Salcedo & Aguirré Corredigor de Cordoue , le titre
de Caftille & la Surintendance generale des revenus
142 MERCURE
du Roy en Andaloufic.
Le Roy a fait donner
quatre mille piftolles auMarquis deMonteleon troifiéme
Plenipotentiaire de Sa Majesté qui eft parti pour aller
à Paris joindre les deux autres Plenipotentiaire accom
pagné du Duc d'Atri & de
plufieurs perfonnes dequalité. On mandede Catalogne
que les Troupes du Roy y
joüiffent dune grande tran-
•quilité , que le Duc de Ven
dome fait la vifite des places
qui font fur les côtes du
Royaume de Valence &
GALANT. 143
qu'on attend fon arrivée en
Catalogne pour commencer la Campagne, que les
Troupes Angloifes vendoient tous leurs Equipages
-& n'attendent que les Vailfeauxpour s'embarquer. On
mande d'Eftramadure que
l'Armées'aflemble & qu'elle
doit camper le premier de
May en front de bandiere
tau voifinage de Badajoz au
nombre de trente- cinq baraillons & de foizante oréize
Escadrons pour commencer
Ja Campagne. Onvécrit de
Valencequele Duc de Vent
144 MERCURE
dome y étoit arrivé , où ila
été reçû avec des acclamations extraordinaires , il a
logé au Palais de l'Archevefque où il n'a refté que
deux jours étant allé demcurer au Grao entre la Ville &
la mere. On mande de Cartagene qu'on a vu paffer une
Elcadre Françoile commandée par le fieur Caffart compofée de douze Vaiffeaux de
guerre avec deux Galliotes
a bombes & quinze cens
hommes de débarquement
faifant voile vers le Détroit.
Les lettres de Cadix affurent
7
quel
GALANT. 145
que cette Escadre étoit entréé dans le Port fans qu'on
fçût fon deffein , qu'il y
étoit auffi arrivé un Vaiffeau
Portugais pris du côté de
l'Ile de Madere avec cent
Francois prifonniers de
guerre qu'il amenoit à Lif
bonne. On mande de Ca17
talogne que les ennemis
avoient faits avancer quel
ques troupes vers Mequinenca à l'embouchure de la
Segre pour empêcher la
navigation fur l'Ebro , mais
le Comte de Muret Lieute
nant general fe preparoit à
May 1712.
N
146 MERCURE
les combattre. Les lettres
d'Eftramadure allurent que
dés le 25. d'Avril quelques
Regiments étoient campez
présde Badajoz , que le refte
des troupes étoient en marche pour les joindre , que
les Portugais s'affembloient
aux environs d Eftremoz.
On mande de Cadix qu'-
outre l'Eſcadre Francoife
commandée par le fieur,
Caffard qui étoit dans ce
port , il y en étoit encore
arrivé un autre dans les
ports de l'Ocean fans qu'on
fsut pour quel deffein
Le Roy adonné au Prince
de Mafferan , Pere du Marquis de Crevecoeur , la Grandeffe de la premiere Claffe
&à DonFranciſco Antonio
de Salcedo & Aguirré Corredigor de Cordoue , le titre
de Caftille & la Surintendance generale des revenus
142 MERCURE
du Roy en Andaloufic.
Le Roy a fait donner
quatre mille piftolles auMarquis deMonteleon troifiéme
Plenipotentiaire de Sa Majesté qui eft parti pour aller
à Paris joindre les deux autres Plenipotentiaire accom
pagné du Duc d'Atri & de
plufieurs perfonnes dequalité. On mandede Catalogne
que les Troupes du Roy y
joüiffent dune grande tran-
•quilité , que le Duc de Ven
dome fait la vifite des places
qui font fur les côtes du
Royaume de Valence &
GALANT. 143
qu'on attend fon arrivée en
Catalogne pour commencer la Campagne, que les
Troupes Angloifes vendoient tous leurs Equipages
-& n'attendent que les Vailfeauxpour s'embarquer. On
mande d'Eftramadure que
l'Armées'aflemble & qu'elle
doit camper le premier de
May en front de bandiere
tau voifinage de Badajoz au
nombre de trente- cinq baraillons & de foizante oréize
Escadrons pour commencer
Ja Campagne. Onvécrit de
Valencequele Duc de Vent
144 MERCURE
dome y étoit arrivé , où ila
été reçû avec des acclamations extraordinaires , il a
logé au Palais de l'Archevefque où il n'a refté que
deux jours étant allé demcurer au Grao entre la Ville &
la mere. On mande de Cartagene qu'on a vu paffer une
Elcadre Françoile commandée par le fieur Caffart compofée de douze Vaiffeaux de
guerre avec deux Galliotes
a bombes & quinze cens
hommes de débarquement
faifant voile vers le Détroit.
Les lettres de Cadix affurent
7
quel
GALANT. 145
que cette Escadre étoit entréé dans le Port fans qu'on
fçût fon deffein , qu'il y
étoit auffi arrivé un Vaiffeau
Portugais pris du côté de
l'Ile de Madere avec cent
Francois prifonniers de
guerre qu'il amenoit à Lif
bonne. On mande de Ca17
talogne que les ennemis
avoient faits avancer quel
ques troupes vers Mequinenca à l'embouchure de la
Segre pour empêcher la
navigation fur l'Ebro , mais
le Comte de Muret Lieute
nant general fe preparoit à
May 1712.
N
146 MERCURE
les combattre. Les lettres
d'Eftramadure allurent que
dés le 25. d'Avril quelques
Regiments étoient campez
présde Badajoz , que le refte
des troupes étoient en marche pour les joindre , que
les Portugais s'affembloient
aux environs d Eftremoz.
On mande de Cadix qu'-
outre l'Eſcadre Francoife
commandée par le fieur,
Caffard qui étoit dans ce
port , il y en étoit encore
arrivé un autre dans les
ports de l'Ocean fans qu'on
fsut pour quel deffein
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Résumé : Nouvelles d'Espagne.
En 1712, plusieurs événements militaires et politiques marquent l'Espagne. Le roi accorde la Grandeffe de la première classe à Don Francisco Antonio de Salcedo et Aguirre, ainsi que le titre de Castille et la surintendance générale des revenus du roi en Andalousie. Le marquis de Monteleon, plénipotentiaire de Sa Majesté, se rend à Paris avec le duc d'Atri. En Catalogne, les troupes royales maintiennent la tranquillité, tandis que le duc de Vendôme inspecte les places sur les côtes du royaume de Valence. Les troupes anglaises se préparent à embarquer. En Estrémadure, l'armée se rassemble près de Badajoz. À Valence, le duc de Vendôme est accueilli avec enthousiasme. À Carthagène, une escadre française de douze vaisseaux de guerre et quinze cents hommes de débarquement se dirige vers le Détroit. À Cadix, cette escadre entre dans le port, accompagnée d'un vaisseau portugais capturant des prisonniers français. En Catalogne, les ennemis avancent vers Mequinenza pour bloquer la navigation sur l'Èbre, mais le comte de Muret se prépare à les combattre. En Estrémadure, des régiments campent près de Badajoz et les Portugais se rassemblent près d'Estremoz. À Cadix, une autre escadre française arrive dans les ports de l'Océan.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 121-151
RELATION envoyée à Monsieur le Comte de Pontchartrin.
Début :
Ayant eu le malheur d'estre du nombre de ceux qui [...]
Mots clefs :
Portugais, Troupes, Rio de Janeiro, Monsieur du Clerc, Bataille, Magasins
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texteReconnaissance textuelle : RELATION envoyée à Monsieur le Comte de Pontchartrin.
RELATIO N
envoyée à Monfieur
Le Comte de Pontchartrin.
MONSEIGNEUR,
A
I
Yant eu le malheur
d'eftre du nombre de
ceux qui ont efté faits prifonniers dans la defcente de
Mr du Clerc à Rio deJaneiro ; je crois qu'il eft de
mon devoir de rendre
Juin 1712.
L •
122 MERCURE
compte à Voftre Grandeur
de mon retour en France
auffi bien que de ce qui
s'eft paffé de plus remarquable dans cette occafion.
Le Samedy 6 Aouſt
1710. On commença à voir
la terre à huit heures du
matin , d'un vent affez frais .
on n'eut pas courru deffus
trois heures , qu'on découvrit le pain de fucre; c'est
une Montagne fort élevéc
qui eft à l'entrée de la Baye
de Rio de Janeiro , & qui
fert de marque pour la ret
connoiftre : elle cft ainfi
GALANT. 123
nommée à caufe de fa
figure.
.
Amidy le Commandant
fit fon fignal, pour apelles
rousles Gardes de la Marine,
& tous les Grenadiers de
l'Eſcadre à fon bord, afin
d'entrer ce jour- là nean
moinsil étoit déja 3 heures
qu'on eftoit encore à plus
d'une lieuë de l'entrée : ainfi
on pritleparti de moüiller,
pour ne pas s'engager la
nuit dans un pays qu'on ne
connoift pas.
La Brife que l'on s'étoit
flatté d'avoir le lendemain
Lij
114 MERGURE
huit heures du matin , ne
commença qu'à deux heures
aprés midy, on leva d'abord l'Ancre pour en pro
fiter , & chacun étant bien
difpofé par l'ordre que tous
avoient receu de Mr du
Clerc de fe tenir prefts à
faire la defcente, nous nous
preſentâmes à la Barre de
Rio de Janeiro pour entrer
dans le Port avecdes Navires
du Roy, le Dimanche 17
Aouft 1710. entre trois &
quatre heures du foir; mais
le vent nous ayant manqué,
Tout à coup, dés que nous
GALANT 125
fumes à l'abry des terres, on
fut contraint de mouiller à
une grande portée de canon
du grand Fort de S, Croix
Nous n'eumes pas pluſtoſt
jetté l'Ancre, qu'il le pre5 fenta une Soumaque , petit
Baftiment venant de la Baye
de tous les Saints , qui në
balança point d'entrer fur
la foy de nos Pavillons An
glois , qu'elle nous vit à
tous : mais Mr du Clerc
jugea à propos de l'arrefter,
en paffant, afin de tirer s'il
fe pouvoit quelque éclaircif.
fement pour fon entreprife,
A
Liij
126 MERCURE
Le grand Fort , qui depuis
que nous étions moüillez ,
paroiffoit fufpendre fon jugement, & nefçavoir encore
fi nous cftions amis on ennemis , ne douta plus que
nous ne fuflions François ,
lorfquil vit arrefter le petit
Baſtiment. Il commença
déflors à tirer du canon fur
les Vaiffeaux, ce qui étoit
affez mal fervi , mettant une
intervalle confiderable entre chaque coup qu'il tiroits
enfin lorfque la nuit furvint,
& qu'il fut obligé de ceffer ,
il n'avoit pas tiré plus de
GALANT 127
1
quinze ou vinge coups de
canon qui n'avoient incommodé aucun Navire.
Mr du Clerc aprés avoir
interrogé les Portuguais
qu'il venoit de prendre, af
fembla pendant la nuit le
confeil de fes Officiers pour
fçavoir ce qu'il étoit le plus
à propos de faire , quoyque
fon avis fut de faire la def
cente cette nuit meſme qui
étoit fort obfcure , & trespropre à favorifer l'entreprife , les Chaloupes pouvant paffer à la faveur des
tenebres devant tous les
1
Liiij
128 MERCURE
Forts fans avoir rien à crain
dre,cequiauroit fans doute
furpris les ennemis qui ne
pourroient pas encore eftre
rous raffemblez , il fut ce
pendant refolu de l'avis de
fon confeil d'aller à l'IfleGrande fe rafraichir , &
qu'enfuite on iroit furpren
dre la Ville , par terre.
Il fit embarquer rout fon
monde dans les deux Fregat
tes, la Diane & l'Attalante;
* C'eft une Iſle qui eft à zo lieues
de Rio de Janeiro , où les Vaiffeaux
ont coûtume d'aller faire de l'Eau ,
& du Bois.
GALANT 125
qu'il choifir pour le tranft
port des Troupes , & ceux
qui ne purene y trouver
place fuivirent dans les Cha
loupes , & dans deux Bri
gantins.
Les trois Vaiffeaux du
Roy , l'Oriflame , la Valeur
&la Venus, refterent à l'IleGrande , fous le comman
dement de Mr de Champagnu , Lieutenant de Vaif.
feaux; & nous en partîmes
dans l'ordre que je viens de
dire le Samedy 6. Septembre, fous la conduite de
trois Noirs qui s'étant écha
M
130 MERCURE
"T
pez de la maifon de leur
Maiftres , s'étoient venus
rendre à Mr du Clerc: ils
affuroient qu'il n'y avoit à
Ja Ville que cinq à fix cens
hommes de Troupes à
combattre , & s'offrirent de
nous y conduire par terre
fans aucun obftacle.
Nousmines pied à terre
un petit Village, à douze
ou quinze lieues de Rio de
Jineiro , ce fut là que nous
scommençames la deſcenté,
Je Dimanche au foir 14. du
mois, &le Lundy matin le
refte des Troupes étant auffi
i
GALANT. 131
S
FAD
3
#
deſcendu , nous marchâmes
droit à la Ville , au nombre
de prés dehuiccens hommes
fur la bonne foy des trois
Noirs qui nous y conduifi,
fent. 20 N
Les trois premiers jours
de marche ne furent trou
blez par aucun ennemy,
ayant trouvé dans les Campagnes toutes les habita
tions defertes ; foit que les
habitans fe fuffent retirez à
la Ville comme dans un lieude feureté, foit qu'ils s'y
fuffent affemblez pour la
mieux deffendre , mais le
132 MERGURE
quatrième jour qui fut le
Jeudy 18. du mefme mois
étant arrivez avec beaucoup
de peine fur le fommet
d'une Montagne fort éle véc, peu de temps avant
midy nous y trouvâmes un
abbatis d'arbres confidera
ble, ce qui barroit entiere
ment tout le chemin , qui
étoit de luy mefme fort
étroit , mais nous étant aperceus qu'il n'y avoit perfonne derriere qui s'oppoſat
à noftre paffage , comme
nous l'avions crû d'abord ,
nousnousenfimes bien toft
GALANT. 133
un autre dans le bois à la
faveur des haches d'armes
L'aprés
que portoit la Compagnie
des Canonniers.
midy environ les deux
heures à peine la moitié des
Troupes avoit defcendu la
Montagne que la Compa
gnie des Gardes de la Marine
marchoit à la tefte fut falüée
5 de quelques coups de fuzils
qui partirent in opinement
du Bois dont , trois Gardes
de la Marine furent bleſſez
fans qu'on pût découvrir
cenx qui les venoient de
tirer. L'on fit grand feu fur
# 34 MERCURE
Pendroit d'où on avoit veu
fortir celuy des ennemis , &
l'on doubla le pas pour
pouvoir pluftaft trouver la
fin du Bois qui avoit encore
demie- lieue , & où l'on ne
pouvoit marcher au plus
que deux depfront: les
Troupes qui fuivirent ef
fuyerent encore plufieurs
coups de fuzils , dont il n'y
eut cependant que deux
Soldats bleffez , car les déb
charges continuelles que
l'on faifoit à droit & à la
gauche, par tout où l'on
paffoit , impoferent biens
GALANT. 135
toft filence à ceux qui
étoient cachez , & les ren-.
dirent bien plus mal adroits
à tirer qu'ils n'avoient eſté
dens fe commencement, ou
ils choifirent leurs objets
fans qu'on fe deffiat d'eux.
Erantenfin arrivez, caw
deboucher , &n'ayant point
trouvé d'ennemis qui nous
difputaffent l'entrée dans la
Plaine , nous nous y mîmes
en bataille à mefurd que
nous fortions du Bois , &
nous marchâmes roûjours
en bon ordre , autant que
les chemins & les lieux par
136 MERCURE
où nous paffames enfuite
nous le peurent permettre.
Sur le foir le Soleil étant
preft de fe coucher , on
apperceut de loin une Compagnie de Cavalerie qui
fembloit nous attendre dans
une grande prairie prés
d'une des maiſon des Je
fuites , qui eft à une grande
demie lieuë de la Ville : l'on
marcha droit à elle croyant
que les Portuguais avoient
toutes leurs forces prés de
cet endroit à deffein de
nous combattre ; mais
voyant ces Cavaliers ſe reM
i
GALANT. 137
tirer à mesure que nous
avancions, on jugea bien
qu'ils étoient là pour nous
obferver feulement , & non
pas pour nous engager à au.
cune affaire. Mr du Clerc
ayant jugé àpropos de faire
prendre quelque repos aux
Troupes qui étoient extre
mement fatiguées , l'on s'ar
3 refta à cette maifon des Jfuires , & l'on y paffà la
nuit.
Le lendemain toutes les
Troupes furent en bataille
à la pointe dujour, & aprés
les Prieres accoutumées on
Juin 1712 M
138 MERCURE
fe miten marche . La Com
pagnie de Cavalerie Portugaife que nousavions veuë le
Loir, fembloit nous vouloir
enfeigner les chemins qui
conduifoient à la ville &
marcha longtemps devant
nous à grande portée de canon, nous obfervant toû
jours à veuëde, moment en
moment, ilfe détachoit un
Cavalier d'entr'eux pour aller annoncer au Gouverneur
notreaproche , &l'informer
autant qu'ils en pourroient
juger du nombre que nous
étions, & des routes par lef
GALANT. 139
1
I
quelles nous marchions à lui.
Mr du Clerc ayant veu
fur une hauteur une Eglife ,
nommée Notre- Dame des
Elton , où il aprit que les
ennemis étoient retranchez,
y enuoya deux Compagnies
de Grenadiers qui s'en rendirent bien-toft Maitres
malgré le grand nombre
de ceux qui la gardoient
la plupart des Portuguais ,
s'en étant enfuys dans le
Bois aprés leur premiere
décharge ; ceux qui refterent
furent faits prifonniers. On
apprit depuis qu'ils y étoient
Mij-
140 MERCURE
retranchez, au nombre de
deux cens hommes ; onper
dit dans cette action un
Capitaine de Grenadiers , &
cinq ou fix Soldats qui y
furent tuez.
Un gros de Portugais
étant fortis de la Ville , ils
parurent le longde quelques
arcades qui n'en font qu'à
demic portée du fuzil , &
firent mine d'en vouloir
difputer l'entrée à nos
Troupes qui s'avançoient à
grands pas ; mais ils ne fou
tinrent pas long temps la
furcur Françoife; car ils
"1
GALANT 147.
1
lacherent le pied aprés leur
feconde décharge , & ren.
trerent auffi-toft en defor
dre.
Jamais Troupes ne montrerent un courage plus in
trepide que ceux qui fuivi
rent Mr du Clerc dans cette
•
entrepife ; malgré le feu
continuel des ennemis qui
faifoit tomber nos gens de
rous coſtez, ayant du monde
caché dans tous les endroits "
par où nous paffions nous
entrâmes dans la Ville avec
autant d'ardeur & d'audace
que fi le peril n'eut pas efte
142 MERCURE
pour nous, & que nous
fuffions venus dans nos propres maifons; toutfuyoit devant nous par tout où nous
nous prefentions : Cependant nous n'y marchames
pas longtemps fans êrre fort
incommodez du feu qui
nous venoit des coins de ruës
dont nos gens étoient affaf,
finez fans que nous viffions
perfonne , contre qui nous
puiffions prendre noftre revanche. Dans cette fituation
on crut devoir chercher
quelque endroit favorable
pour le mettre à couvert,
2
GALANT. 43
1
& où l'on ſe pût retrancher,
ce ne fut pas fans peine , &
fans qu'il en coûtat beaucoup, que Mr du Clerc fe
rendit Maiſtre d'un Magaſin
àfucre proche de la Merque
l'on nommele Trepiche , &
où il y avoit quantité de
Portugais retranchez qu'il
fallut forcer , on y trouva
quatre pieces de canon avec
lefquels onfit bonfeu ; mais
ne s'y érant rencontré que
fort peu de munitions , on
ne s'en pût pas fervir long
temps.at
Pendant que ces chofes
144 MERCURE
fe paffoient dans la Ville ; la
Compagnie des Canonniers
qui avoient refté derriere ,
fe trouvant féparée du gros
des Troupes; parce qu'elle
n'avoit pas pû fuivre, tomba entreles mains des ennemis, qui aprés leur avoir
fait mettre bas les armes en
་
leur promettant bon quar
tier ; par la plus lâche per
fidic , dont on ait guère
vû d'exemple , furent affez
barbares pour leur arracher
à tous la vie. Ils en firent
un horrible carnage & leur
firent fouffrir les tourmens
less
GALANT 145
les plus rigoureux que leur
eruauté leur pûr faire
inventer.
En ce moment quelques
Officiers bleffez du nombre
: defquels étoit Mr de Ruys
Lieutenant de Vailleaux
Commandant de la Colon.
nelle, s'étant retitez dans
une maison pour le faire
pånfer , y furent furpris par
les Portugais , & furent em
menez prifonniers dans une
Chapelle qui eft au dehors
de la Ville nommée Noftre
Damedu Rozaire, oùétoient
les autres François que l'or
Juin 1712.
N
1
46 MERGURE
avoit arreltez. Le Gouver
neur y vint auffi toft avec
quantité d'Officiers Portugais ; il interrogea ces nouyeaux priſonniers avec le
moins de douceur qu'il luy
fur poffible. Enfin apres
bien des façons , les Officiers
François pour éviter le fuplice de la mort, dont on
les menaçoit, furent obligez
dedéclarer que le nombrede
Troupes qui étoient defcendues à terre étoit d'environ
huit cens hommes, le Gouverneur s'étant fait rendre
compte des morts à peu
M
GALANT 47
prés autant que l'on en pourroit juger , & de tous les
prifonniers qu'il avoit déja
faits , n'eut pasde peine à
deviner que le nombre de
ceux qui étoient encore avec Mr du Clerc ne pouvoit
pas eftre bien confiderable
alors 7 ou 8 mille hommes
de Troupes Portugaifes
& qui n'avoient pas ofez
venir à noftre rencontre
pour nous empefcher d'entrer dans leut Ville ', commencerent à fe fentir quelque courage.
Mais ne fe confiants pas
Nij
148 MERCURE
encore tout à fait à ce qu'ils,
venoient d'entendre de la
bouche des prifonniers; le
Gouverneur engagea Mr de
Ruys d'écrire à Mr du
Clerc , pour luy aprendre,
combien les forces Portu
gaifes étoient confiderables , & pour le foliciter de
fe rendre.
Mr du Clerc répondit
qu'il avoit encore de la poudre & des balles , & que
tandis qu'elles dureroient ,
il ne fe rendroit point; cependant il n'étoit point fans
affaires & fans embarras
GALANT. 149
dans le Trepiche depuis que
nous l'y avions laiffe , étant
obligé d'effuyer le feu continuel de deux Fregattes qui
s'étant avancées fort prés du
Magafin où nous étions ,
firent de grandes bréches ,
à l'aide de leur canon qu'elles
tiroient fans ceffe , & qui
nousfaifoit perdre toûjours
du monde, & en incommodoit beaucoup par les éclats.
Fevvous pafferay icy un long
détail d'une defenfe qui coûta
aux Portugais dixfoldats pour
un des noſtres ; mais ils
eftoient encore en trop grand
"
N iij
150 MERCURE
nombre pour leur reſiſter. On
leur fit pourtant fignifier qu'on
alloitfortirfur euxlabayonette
au bout dufufil, ce qu'ils crait
gnirent tant qu'ils firent une
Capitulation tres-vantageufe:
mais ils la rompirent enfuite
avec une perfidie dont il n'y a
jamais eu d'exemples , en fai
fans fauffrir avec des crùautez
inoüies à leurs Prifonniers tous
les indignitez
C
Les tourmens
imaginables.
Voila en peu de mors
ane legere peinture de ce
qui s'eſt paſſé à Rio de Janeiro entre les François &
GALANT 156
les Portugais , le Vendredy
19. Septembre 17.no) val
Cette action qui dura
depuis les dix heures du matin , jufqu'à cinq heures du
foir , à été de plus chaudes ,
& des plus fanglantes done
on ait our parler, depuis
fort longtemps : il refta
deux cens hommes de tuez
fur la place , huic Officiers
Be trois Gardesde la Marine ;
deux cens autres furent
Bleffez , avec quinze Officiers & deux Gardes de la
Marine.
envoyée à Monfieur
Le Comte de Pontchartrin.
MONSEIGNEUR,
A
I
Yant eu le malheur
d'eftre du nombre de
ceux qui ont efté faits prifonniers dans la defcente de
Mr du Clerc à Rio deJaneiro ; je crois qu'il eft de
mon devoir de rendre
Juin 1712.
L •
122 MERCURE
compte à Voftre Grandeur
de mon retour en France
auffi bien que de ce qui
s'eft paffé de plus remarquable dans cette occafion.
Le Samedy 6 Aouſt
1710. On commença à voir
la terre à huit heures du
matin , d'un vent affez frais .
on n'eut pas courru deffus
trois heures , qu'on découvrit le pain de fucre; c'est
une Montagne fort élevéc
qui eft à l'entrée de la Baye
de Rio de Janeiro , & qui
fert de marque pour la ret
connoiftre : elle cft ainfi
GALANT. 123
nommée à caufe de fa
figure.
.
Amidy le Commandant
fit fon fignal, pour apelles
rousles Gardes de la Marine,
& tous les Grenadiers de
l'Eſcadre à fon bord, afin
d'entrer ce jour- là nean
moinsil étoit déja 3 heures
qu'on eftoit encore à plus
d'une lieuë de l'entrée : ainfi
on pritleparti de moüiller,
pour ne pas s'engager la
nuit dans un pays qu'on ne
connoift pas.
La Brife que l'on s'étoit
flatté d'avoir le lendemain
Lij
114 MERGURE
huit heures du matin , ne
commença qu'à deux heures
aprés midy, on leva d'abord l'Ancre pour en pro
fiter , & chacun étant bien
difpofé par l'ordre que tous
avoient receu de Mr du
Clerc de fe tenir prefts à
faire la defcente, nous nous
preſentâmes à la Barre de
Rio de Janeiro pour entrer
dans le Port avecdes Navires
du Roy, le Dimanche 17
Aouft 1710. entre trois &
quatre heures du foir; mais
le vent nous ayant manqué,
Tout à coup, dés que nous
GALANT 125
fumes à l'abry des terres, on
fut contraint de mouiller à
une grande portée de canon
du grand Fort de S, Croix
Nous n'eumes pas pluſtoſt
jetté l'Ancre, qu'il le pre5 fenta une Soumaque , petit
Baftiment venant de la Baye
de tous les Saints , qui në
balança point d'entrer fur
la foy de nos Pavillons An
glois , qu'elle nous vit à
tous : mais Mr du Clerc
jugea à propos de l'arrefter,
en paffant, afin de tirer s'il
fe pouvoit quelque éclaircif.
fement pour fon entreprife,
A
Liij
126 MERCURE
Le grand Fort , qui depuis
que nous étions moüillez ,
paroiffoit fufpendre fon jugement, & nefçavoir encore
fi nous cftions amis on ennemis , ne douta plus que
nous ne fuflions François ,
lorfquil vit arrefter le petit
Baſtiment. Il commença
déflors à tirer du canon fur
les Vaiffeaux, ce qui étoit
affez mal fervi , mettant une
intervalle confiderable entre chaque coup qu'il tiroits
enfin lorfque la nuit furvint,
& qu'il fut obligé de ceffer ,
il n'avoit pas tiré plus de
GALANT 127
1
quinze ou vinge coups de
canon qui n'avoient incommodé aucun Navire.
Mr du Clerc aprés avoir
interrogé les Portuguais
qu'il venoit de prendre, af
fembla pendant la nuit le
confeil de fes Officiers pour
fçavoir ce qu'il étoit le plus
à propos de faire , quoyque
fon avis fut de faire la def
cente cette nuit meſme qui
étoit fort obfcure , & trespropre à favorifer l'entreprife , les Chaloupes pouvant paffer à la faveur des
tenebres devant tous les
1
Liiij
128 MERCURE
Forts fans avoir rien à crain
dre,cequiauroit fans doute
furpris les ennemis qui ne
pourroient pas encore eftre
rous raffemblez , il fut ce
pendant refolu de l'avis de
fon confeil d'aller à l'IfleGrande fe rafraichir , &
qu'enfuite on iroit furpren
dre la Ville , par terre.
Il fit embarquer rout fon
monde dans les deux Fregat
tes, la Diane & l'Attalante;
* C'eft une Iſle qui eft à zo lieues
de Rio de Janeiro , où les Vaiffeaux
ont coûtume d'aller faire de l'Eau ,
& du Bois.
GALANT 125
qu'il choifir pour le tranft
port des Troupes , & ceux
qui ne purene y trouver
place fuivirent dans les Cha
loupes , & dans deux Bri
gantins.
Les trois Vaiffeaux du
Roy , l'Oriflame , la Valeur
&la Venus, refterent à l'IleGrande , fous le comman
dement de Mr de Champagnu , Lieutenant de Vaif.
feaux; & nous en partîmes
dans l'ordre que je viens de
dire le Samedy 6. Septembre, fous la conduite de
trois Noirs qui s'étant écha
M
130 MERCURE
"T
pez de la maifon de leur
Maiftres , s'étoient venus
rendre à Mr du Clerc: ils
affuroient qu'il n'y avoit à
Ja Ville que cinq à fix cens
hommes de Troupes à
combattre , & s'offrirent de
nous y conduire par terre
fans aucun obftacle.
Nousmines pied à terre
un petit Village, à douze
ou quinze lieues de Rio de
Jineiro , ce fut là que nous
scommençames la deſcenté,
Je Dimanche au foir 14. du
mois, &le Lundy matin le
refte des Troupes étant auffi
i
GALANT. 131
S
FAD
3
#
deſcendu , nous marchâmes
droit à la Ville , au nombre
de prés dehuiccens hommes
fur la bonne foy des trois
Noirs qui nous y conduifi,
fent. 20 N
Les trois premiers jours
de marche ne furent trou
blez par aucun ennemy,
ayant trouvé dans les Campagnes toutes les habita
tions defertes ; foit que les
habitans fe fuffent retirez à
la Ville comme dans un lieude feureté, foit qu'ils s'y
fuffent affemblez pour la
mieux deffendre , mais le
132 MERGURE
quatrième jour qui fut le
Jeudy 18. du mefme mois
étant arrivez avec beaucoup
de peine fur le fommet
d'une Montagne fort éle véc, peu de temps avant
midy nous y trouvâmes un
abbatis d'arbres confidera
ble, ce qui barroit entiere
ment tout le chemin , qui
étoit de luy mefme fort
étroit , mais nous étant aperceus qu'il n'y avoit perfonne derriere qui s'oppoſat
à noftre paffage , comme
nous l'avions crû d'abord ,
nousnousenfimes bien toft
GALANT. 133
un autre dans le bois à la
faveur des haches d'armes
L'aprés
que portoit la Compagnie
des Canonniers.
midy environ les deux
heures à peine la moitié des
Troupes avoit defcendu la
Montagne que la Compa
gnie des Gardes de la Marine
marchoit à la tefte fut falüée
5 de quelques coups de fuzils
qui partirent in opinement
du Bois dont , trois Gardes
de la Marine furent bleſſez
fans qu'on pût découvrir
cenx qui les venoient de
tirer. L'on fit grand feu fur
# 34 MERCURE
Pendroit d'où on avoit veu
fortir celuy des ennemis , &
l'on doubla le pas pour
pouvoir pluftaft trouver la
fin du Bois qui avoit encore
demie- lieue , & où l'on ne
pouvoit marcher au plus
que deux depfront: les
Troupes qui fuivirent ef
fuyerent encore plufieurs
coups de fuzils , dont il n'y
eut cependant que deux
Soldats bleffez , car les déb
charges continuelles que
l'on faifoit à droit & à la
gauche, par tout où l'on
paffoit , impoferent biens
GALANT. 135
toft filence à ceux qui
étoient cachez , & les ren-.
dirent bien plus mal adroits
à tirer qu'ils n'avoient eſté
dens fe commencement, ou
ils choifirent leurs objets
fans qu'on fe deffiat d'eux.
Erantenfin arrivez, caw
deboucher , &n'ayant point
trouvé d'ennemis qui nous
difputaffent l'entrée dans la
Plaine , nous nous y mîmes
en bataille à mefurd que
nous fortions du Bois , &
nous marchâmes roûjours
en bon ordre , autant que
les chemins & les lieux par
136 MERCURE
où nous paffames enfuite
nous le peurent permettre.
Sur le foir le Soleil étant
preft de fe coucher , on
apperceut de loin une Compagnie de Cavalerie qui
fembloit nous attendre dans
une grande prairie prés
d'une des maiſon des Je
fuites , qui eft à une grande
demie lieuë de la Ville : l'on
marcha droit à elle croyant
que les Portuguais avoient
toutes leurs forces prés de
cet endroit à deffein de
nous combattre ; mais
voyant ces Cavaliers ſe reM
i
GALANT. 137
tirer à mesure que nous
avancions, on jugea bien
qu'ils étoient là pour nous
obferver feulement , & non
pas pour nous engager à au.
cune affaire. Mr du Clerc
ayant jugé àpropos de faire
prendre quelque repos aux
Troupes qui étoient extre
mement fatiguées , l'on s'ar
3 refta à cette maifon des Jfuires , & l'on y paffà la
nuit.
Le lendemain toutes les
Troupes furent en bataille
à la pointe dujour, & aprés
les Prieres accoutumées on
Juin 1712 M
138 MERCURE
fe miten marche . La Com
pagnie de Cavalerie Portugaife que nousavions veuë le
Loir, fembloit nous vouloir
enfeigner les chemins qui
conduifoient à la ville &
marcha longtemps devant
nous à grande portée de canon, nous obfervant toû
jours à veuëde, moment en
moment, ilfe détachoit un
Cavalier d'entr'eux pour aller annoncer au Gouverneur
notreaproche , &l'informer
autant qu'ils en pourroient
juger du nombre que nous
étions, & des routes par lef
GALANT. 139
1
I
quelles nous marchions à lui.
Mr du Clerc ayant veu
fur une hauteur une Eglife ,
nommée Notre- Dame des
Elton , où il aprit que les
ennemis étoient retranchez,
y enuoya deux Compagnies
de Grenadiers qui s'en rendirent bien-toft Maitres
malgré le grand nombre
de ceux qui la gardoient
la plupart des Portuguais ,
s'en étant enfuys dans le
Bois aprés leur premiere
décharge ; ceux qui refterent
furent faits prifonniers. On
apprit depuis qu'ils y étoient
Mij-
140 MERCURE
retranchez, au nombre de
deux cens hommes ; onper
dit dans cette action un
Capitaine de Grenadiers , &
cinq ou fix Soldats qui y
furent tuez.
Un gros de Portugais
étant fortis de la Ville , ils
parurent le longde quelques
arcades qui n'en font qu'à
demic portée du fuzil , &
firent mine d'en vouloir
difputer l'entrée à nos
Troupes qui s'avançoient à
grands pas ; mais ils ne fou
tinrent pas long temps la
furcur Françoife; car ils
"1
GALANT 147.
1
lacherent le pied aprés leur
feconde décharge , & ren.
trerent auffi-toft en defor
dre.
Jamais Troupes ne montrerent un courage plus in
trepide que ceux qui fuivi
rent Mr du Clerc dans cette
•
entrepife ; malgré le feu
continuel des ennemis qui
faifoit tomber nos gens de
rous coſtez, ayant du monde
caché dans tous les endroits "
par où nous paffions nous
entrâmes dans la Ville avec
autant d'ardeur & d'audace
que fi le peril n'eut pas efte
142 MERCURE
pour nous, & que nous
fuffions venus dans nos propres maifons; toutfuyoit devant nous par tout où nous
nous prefentions : Cependant nous n'y marchames
pas longtemps fans êrre fort
incommodez du feu qui
nous venoit des coins de ruës
dont nos gens étoient affaf,
finez fans que nous viffions
perfonne , contre qui nous
puiffions prendre noftre revanche. Dans cette fituation
on crut devoir chercher
quelque endroit favorable
pour le mettre à couvert,
2
GALANT. 43
1
& où l'on ſe pût retrancher,
ce ne fut pas fans peine , &
fans qu'il en coûtat beaucoup, que Mr du Clerc fe
rendit Maiſtre d'un Magaſin
àfucre proche de la Merque
l'on nommele Trepiche , &
où il y avoit quantité de
Portugais retranchez qu'il
fallut forcer , on y trouva
quatre pieces de canon avec
lefquels onfit bonfeu ; mais
ne s'y érant rencontré que
fort peu de munitions , on
ne s'en pût pas fervir long
temps.at
Pendant que ces chofes
144 MERCURE
fe paffoient dans la Ville ; la
Compagnie des Canonniers
qui avoient refté derriere ,
fe trouvant féparée du gros
des Troupes; parce qu'elle
n'avoit pas pû fuivre, tomba entreles mains des ennemis, qui aprés leur avoir
fait mettre bas les armes en
་
leur promettant bon quar
tier ; par la plus lâche per
fidic , dont on ait guère
vû d'exemple , furent affez
barbares pour leur arracher
à tous la vie. Ils en firent
un horrible carnage & leur
firent fouffrir les tourmens
less
GALANT 145
les plus rigoureux que leur
eruauté leur pûr faire
inventer.
En ce moment quelques
Officiers bleffez du nombre
: defquels étoit Mr de Ruys
Lieutenant de Vailleaux
Commandant de la Colon.
nelle, s'étant retitez dans
une maison pour le faire
pånfer , y furent furpris par
les Portugais , & furent em
menez prifonniers dans une
Chapelle qui eft au dehors
de la Ville nommée Noftre
Damedu Rozaire, oùétoient
les autres François que l'or
Juin 1712.
N
1
46 MERGURE
avoit arreltez. Le Gouver
neur y vint auffi toft avec
quantité d'Officiers Portugais ; il interrogea ces nouyeaux priſonniers avec le
moins de douceur qu'il luy
fur poffible. Enfin apres
bien des façons , les Officiers
François pour éviter le fuplice de la mort, dont on
les menaçoit, furent obligez
dedéclarer que le nombrede
Troupes qui étoient defcendues à terre étoit d'environ
huit cens hommes, le Gouverneur s'étant fait rendre
compte des morts à peu
M
GALANT 47
prés autant que l'on en pourroit juger , & de tous les
prifonniers qu'il avoit déja
faits , n'eut pasde peine à
deviner que le nombre de
ceux qui étoient encore avec Mr du Clerc ne pouvoit
pas eftre bien confiderable
alors 7 ou 8 mille hommes
de Troupes Portugaifes
& qui n'avoient pas ofez
venir à noftre rencontre
pour nous empefcher d'entrer dans leut Ville ', commencerent à fe fentir quelque courage.
Mais ne fe confiants pas
Nij
148 MERCURE
encore tout à fait à ce qu'ils,
venoient d'entendre de la
bouche des prifonniers; le
Gouverneur engagea Mr de
Ruys d'écrire à Mr du
Clerc , pour luy aprendre,
combien les forces Portu
gaifes étoient confiderables , & pour le foliciter de
fe rendre.
Mr du Clerc répondit
qu'il avoit encore de la poudre & des balles , & que
tandis qu'elles dureroient ,
il ne fe rendroit point; cependant il n'étoit point fans
affaires & fans embarras
GALANT. 149
dans le Trepiche depuis que
nous l'y avions laiffe , étant
obligé d'effuyer le feu continuel de deux Fregattes qui
s'étant avancées fort prés du
Magafin où nous étions ,
firent de grandes bréches ,
à l'aide de leur canon qu'elles
tiroient fans ceffe , & qui
nousfaifoit perdre toûjours
du monde, & en incommodoit beaucoup par les éclats.
Fevvous pafferay icy un long
détail d'une defenfe qui coûta
aux Portugais dixfoldats pour
un des noſtres ; mais ils
eftoient encore en trop grand
"
N iij
150 MERCURE
nombre pour leur reſiſter. On
leur fit pourtant fignifier qu'on
alloitfortirfur euxlabayonette
au bout dufufil, ce qu'ils crait
gnirent tant qu'ils firent une
Capitulation tres-vantageufe:
mais ils la rompirent enfuite
avec une perfidie dont il n'y a
jamais eu d'exemples , en fai
fans fauffrir avec des crùautez
inoüies à leurs Prifonniers tous
les indignitez
C
Les tourmens
imaginables.
Voila en peu de mors
ane legere peinture de ce
qui s'eſt paſſé à Rio de Janeiro entre les François &
GALANT 156
les Portugais , le Vendredy
19. Septembre 17.no) val
Cette action qui dura
depuis les dix heures du matin , jufqu'à cinq heures du
foir , à été de plus chaudes ,
& des plus fanglantes done
on ait our parler, depuis
fort longtemps : il refta
deux cens hommes de tuez
fur la place , huic Officiers
Be trois Gardesde la Marine ;
deux cens autres furent
Bleffez , avec quinze Officiers & deux Gardes de la
Marine.
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Résumé : RELATION envoyée à Monsieur le Comte de Pontchartrin.
En juin 1712, un individu capturé lors de la descente de M. du Clerc à Rio de Janeiro en 1710 envoya une relation au Comte de Pontchartrain. Le 6 août 1710, les navires français aperçurent la terre et le Pain de Sucre, repère pour l'entrée de la baie de Rio de Janeiro. Le commandant rassembla les gardes et les grenadiers, mais le vent manqua, obligeant les navires à mouiller loin du fort de Saint-Croix. Une soumaque portugaise fut arrêtée pour obtenir des informations. Le fort ouvrit le feu sans causer de dommages significatifs. M. du Clerc, après avoir interrogé des prisonniers portugais, décida de se rendre à l'île Grande pour se rafraîchir avant d'attaquer la ville. Les troupes furent transportées par des frégates et des chaloupes, guidées par trois Noirs évadés qui affirmèrent que Rio de Janeiro n'avait que cinq à six cents hommes de troupes. Le 14 septembre, les troupes débarquèrent et marchèrent vers Rio de Janeiro. Après trois jours de marche sans encombre, elles rencontrèrent un abattis d'arbres le quatrième jour. Malgré quelques tirs de fusils, les troupes françaises continuèrent leur avancée et se mirent en bataille dans une plaine. Le lendemain, les troupes françaises attaquèrent et prirent une église où étaient retranchés les ennemis, faisant plusieurs prisonniers. Un groupe de Portugais tenta de défendre l'entrée de la ville mais recula après une seconde décharge. Les troupes françaises entrèrent dans la ville malgré le feu ennemi caché dans les coins de rues. M. du Clerc prit un magasin à sucre près de la mer, où il trouva des canons et des munitions. Cependant, la compagnie des canonniers, séparée du gros des troupes, fut capturée et massacrée par les Portugais. Quelques officiers français, blessés, furent faits prisonniers et interrogés par le gouverneur. Ce dernier, informé du nombre réduit de troupes françaises restantes, tenta de négocier avec M. du Clerc, mais ce dernier affirma qu'il avait encore de la poudre et des balles. Le 19 septembre 1710, une bataille intense eut lieu à Rio de Janeiro. Les Français, positionnés dans le Trepiche, subissaient des attaques continues de deux frégates portugaises, causant des pertes humaines et des dommages importants. Malgré les efforts des Français pour se défendre, les Portugais, en surnombre, infligeaient des pertes lourdes. Les Français menacèrent d'attaquer à la baïonnette, poussant les Portugais à accepter une capitulation avantageuse. Cependant, les Portugais violèrent cette capitulation en infligeant des cruautés à leurs prisonniers. La bataille, qui dura de 10 heures du matin à 5 heures du soir, fut particulièrement sanglante, laissant 200 hommes tués sur le champ de bataille, dont huit officiers et trois gardes de la marine, ainsi que 200 autres blessés, dont quinze officiers et deux gardes de la marine.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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