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1
p. 119-121
A MON COUSIN LE DUC de S. Aignan, Pair de France.
Début :
Le Roy luy fit l'honneur de luy envoyer cette Réponse / Mon Cousin, Vous avez un Art admirable pour me témoigner [...]
Mots clefs :
Valenciennes, Éloges
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texteReconnaissance textuelle : A MON COUSIN LE DUC de S. Aignan, Pair de France.
LeRoy luy fit l'honneurdeluy envoyer cette reſponſe de ſa
main.
LE MERCURE
A MON COVSIN LE DVC
de S. Aignan , Pair de France.
On cousin , Vous avez un Art admirablepourmeté.
moigner vostre joyedans laprof- peritédemes armes. C'estoit au- trefoispardes Eloges, maintenant c'est par desfrayeurs du peril &
des fatigues où vous dites que ie me suis exposé pour me rendre maistre de Valenciennes. Maisie
n'ay pas depeine àdemefler ces differens mouvemens, ie les reünis
tous dans leſeulprincipedevôtre zelepourma Personne , &ie les
reçois avec unagrémentdontvous devez eltre fatisfait. Cependant
ieprie Diew qu'ilvous ait , mon cousin, enjasainte &digne gar- de. AnCamp devant Cambray le 27. de Mars 1677.
Signé , LOVIS.
main.
LE MERCURE
A MON COVSIN LE DVC
de S. Aignan , Pair de France.
On cousin , Vous avez un Art admirablepourmeté.
moigner vostre joyedans laprof- peritédemes armes. C'estoit au- trefoispardes Eloges, maintenant c'est par desfrayeurs du peril &
des fatigues où vous dites que ie me suis exposé pour me rendre maistre de Valenciennes. Maisie
n'ay pas depeine àdemefler ces differens mouvemens, ie les reünis
tous dans leſeulprincipedevôtre zelepourma Personne , &ie les
reçois avec unagrémentdontvous devez eltre fatisfait. Cependant
ieprie Diew qu'ilvous ait , mon cousin, enjasainte &digne gar- de. AnCamp devant Cambray le 27. de Mars 1677.
Signé , LOVIS.
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Résumé : A MON COUSIN LE DUC de S. Aignan, Pair de France.
Dans une lettre du 27 mars 1677, Louis XIV remercie le Duc de Saint-Aignan pour sa joie et son inquiétude après la prise de Valenciennes. Le roi interprète ces sentiments comme une preuve de sollicitude. Il prie pour la santé de son cousin et signe 'LOVIS'.
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2
p. 139-145
« Apres la lecture de ces Vers l'on passa de la [...] »
Début :
Apres la lecture de ces Vers l'on passa de la [...]
Mots clefs :
Cabinet de l'Aurore, Assemblée, Abbé Tallement, M. Perrault, Esprit, Éloges, Livres, M. Colbert
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texteReconnaissance textuelle : « Apres la lecture de ces Vers l'on passa de la [...] »
Apres la lecture ces Vers
LYON
90 LE MERCVRE
Fon paſſa de la Salle où l'on eſtoitdans un lieu apellé le Ca- binet de l'Aurore. Ce fut là que
Monfieur Quinaut recita cinq ou fix cens Vers ſur les Peintures de cette charmante Maiſon.
M. l'Abbé Tallemant le jeune enloüa les Eaux par un Poëme dont il fit part à l'Aſſemblée. II eſt fort à lagloire deM. leJon- gleur,qui a trouvé le ſecretd'en faire venir où il n'y en a point ,
&où il n'y a pas meſime d'appa- rence qu'il y ait moyen de les conduire. M. Perraut Intendant
des Baſtimens , parla ledernier.
Il ne dit que peu de Stances ,
mais qui réveillerent les atten- tions. Les fréquens applaudiffe- mensqu'elles reçeurent, fontune preuve incontestable de leur beauté. Il n'y a point lieu d'ené- tre furpris..M² Perraut eſt ce qui
GALANT. 91
.
s'appelle unEſprit de bon gouft,
qui ne donne jamais dans le faux brillant. Il écrit , &ſçait comme on doit écrire. Il poſſe- de toutes les belles Connoiſſances , & fes Ouvrages ont toû- jours eu un fort grand fuccés.
Il ſeroit àſouhaiter que nous en cuſſions davantage, mais ſes oc- cupations ne luy permettent pas de travailler. Au fortir du
Cabinet , on alla voir les Ap- partemens,& on ſe promena en- fuite de tous côtez dans le Jardin. Ces Meſſicurs eurent par tout ſujet d'admirer ; mais quel- ques beautez qu'il découvrif- fent , rien ne leur parut fi digne de leurs éloges , que celuy qui les avoit reçeus fi obligeam- ment. Avoüez-le, Madame.Pour aimer ainſi les Gens d'eſprit , il faut eſtre parfaitement honne
92 LE MERCVRE
ſte Homme. Il faut ſe détacher
de la grandeur &dubien , pour fe regarder en Philofophe , &
chercher la veritable ſolidité
dans les Sciences. Il eſt certain
qu'on ne peut les aimer davan- tages que fait Me Colbert. Hne ſe contente pas d'eſtre de l'A- cadémie Françoiſe , il y a un nombre de ces Meſſieurs qui compoſe une autre perite Aca- démie qui s'aſſemble toutes les Semaines fous ſon Nom. C'eſt
avec eux qu'il s'entretient fort
fouvent fur les plus hautes ma- tieres.. On aveu de tout temps la plupart de ceux qui ont fait une figure conſidérable dans le monde , avoir de grandes Bi- blioteques, &donner même des Penſions à pluſieurs Perſonnes d'eſprit , mais c'eſtoient d'igno- Fans Ambitieux qui ne fai
GALANT. 93 foient l'un & l'autre que par oftentation , & qui ſe mettoient
peu en peine de voir les Livres &les Sçavans. M' Colbertn'en uſe pas de cette forte. Il ne dé- daigne point de ſe familiarifer
avec les Gens de Lettres , de
s'abaiſſer juſqu'à ceux qui ſont fort éloignez de fonRang, &de ſe dépoüiller de la Grandeur qui l'environne , pour ſe rendre en quelque façon leur égal.
Comme il a toutes les lumieres
qui peuvent luy en faire aimer l'entretien , doit on s'étonner fi
ſe rendant le Pere & le Protecteur des Sciences &des beaux
Arts , il ſeconde ſi bien le Roy qui les fait fleurir, &qui n'a pas merité le Nom de LoürsLE
GRAND par ſa ſeule valeur ,
mais encore par toutes les
actions de ſa vie
LYON
90 LE MERCVRE
Fon paſſa de la Salle où l'on eſtoitdans un lieu apellé le Ca- binet de l'Aurore. Ce fut là que
Monfieur Quinaut recita cinq ou fix cens Vers ſur les Peintures de cette charmante Maiſon.
M. l'Abbé Tallemant le jeune enloüa les Eaux par un Poëme dont il fit part à l'Aſſemblée. II eſt fort à lagloire deM. leJon- gleur,qui a trouvé le ſecretd'en faire venir où il n'y en a point ,
&où il n'y a pas meſime d'appa- rence qu'il y ait moyen de les conduire. M. Perraut Intendant
des Baſtimens , parla ledernier.
Il ne dit que peu de Stances ,
mais qui réveillerent les atten- tions. Les fréquens applaudiffe- mensqu'elles reçeurent, fontune preuve incontestable de leur beauté. Il n'y a point lieu d'ené- tre furpris..M² Perraut eſt ce qui
GALANT. 91
.
s'appelle unEſprit de bon gouft,
qui ne donne jamais dans le faux brillant. Il écrit , &ſçait comme on doit écrire. Il poſſe- de toutes les belles Connoiſſances , & fes Ouvrages ont toû- jours eu un fort grand fuccés.
Il ſeroit àſouhaiter que nous en cuſſions davantage, mais ſes oc- cupations ne luy permettent pas de travailler. Au fortir du
Cabinet , on alla voir les Ap- partemens,& on ſe promena en- fuite de tous côtez dans le Jardin. Ces Meſſicurs eurent par tout ſujet d'admirer ; mais quel- ques beautez qu'il découvrif- fent , rien ne leur parut fi digne de leurs éloges , que celuy qui les avoit reçeus fi obligeam- ment. Avoüez-le, Madame.Pour aimer ainſi les Gens d'eſprit , il faut eſtre parfaitement honne
92 LE MERCVRE
ſte Homme. Il faut ſe détacher
de la grandeur &dubien , pour fe regarder en Philofophe , &
chercher la veritable ſolidité
dans les Sciences. Il eſt certain
qu'on ne peut les aimer davan- tages que fait Me Colbert. Hne ſe contente pas d'eſtre de l'A- cadémie Françoiſe , il y a un nombre de ces Meſſieurs qui compoſe une autre perite Aca- démie qui s'aſſemble toutes les Semaines fous ſon Nom. C'eſt
avec eux qu'il s'entretient fort
fouvent fur les plus hautes ma- tieres.. On aveu de tout temps la plupart de ceux qui ont fait une figure conſidérable dans le monde , avoir de grandes Bi- blioteques, &donner même des Penſions à pluſieurs Perſonnes d'eſprit , mais c'eſtoient d'igno- Fans Ambitieux qui ne fai
GALANT. 93 foient l'un & l'autre que par oftentation , & qui ſe mettoient
peu en peine de voir les Livres &les Sçavans. M' Colbertn'en uſe pas de cette forte. Il ne dé- daigne point de ſe familiarifer
avec les Gens de Lettres , de
s'abaiſſer juſqu'à ceux qui ſont fort éloignez de fonRang, &de ſe dépoüiller de la Grandeur qui l'environne , pour ſe rendre en quelque façon leur égal.
Comme il a toutes les lumieres
qui peuvent luy en faire aimer l'entretien , doit on s'étonner fi
ſe rendant le Pere & le Protecteur des Sciences &des beaux
Arts , il ſeconde ſi bien le Roy qui les fait fleurir, &qui n'a pas merité le Nom de LoürsLE
GRAND par ſa ſeule valeur ,
mais encore par toutes les
actions de ſa vie
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Résumé : « Apres la lecture de ces Vers l'on passa de la [...] »
À Lyon, une réunion rassemble plusieurs personnalités qui récitent des poèmes et des vers. Monsieur Quinaut présente des vers sur les peintures d'une maison, tandis que l'abbé Tallemant le Jeune enchante l'assemblée avec un poème sur les eaux. Monsieur Perraut, Intendant des Bastiments, prononce des stances acclamées par l'audience, démontrant son esprit et son talent littéraire. Après la réunion, les participants visitent les appartements et le jardin, admirant les beautés des lieux. Le texte loue particulièrement Monsieur Colbert pour son amour des gens d'esprit et des sciences. Colbert, membre de l'Académie Française, se distingue par son intérêt authentique pour les lettres et les savants, contrairement à d'autres mécènes motivés par l'ostentation. Il se familiarise avec les gens de lettres, indépendamment de leur rang, et soutient les sciences et les beaux-arts, secondant ainsi le roi Louis XIV.
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3
p. 180-185
SONNET POUR LE ROY.
Début :
Voyez, Madame, ce que fait le Nom du Roy. / Destins, veuillez toûjours pour conserver ce Roy, [...]
Mots clefs :
Roi, Victoire, Gloire, Triomphes, Éloges
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texteReconnaissance textuelle : SONNET POUR LE ROY.
Voyez, Madame, ce que fait le Nomdu Roy.Il ſedeclare,
&la Victoire devient infaillible,
mais ſi ces Armes ſe font redouter par tout, ſes Triomphes font en meſme temps l'inépuiſable matiere des Eloges de tout le monde , &ceux que l'embarras des Affaires du Public oblige à
rompre commerce avec les Mu- ſes,cherchent à le renoüerpour ne demeurerpas muetsquand il -
s'agit de la gloire de ce grand
120 LE MERCVRE
Monarque. Vousn'en douterez pointquand vous aurez leu ce Sonnetde M.de BrionConſeiller
au Parlement.
Sonnet pour le Roy.
Destins, veillez toûjours pourconſerver
ceRoy,
Devosſoins affidus leplus parfait onvrage.
Ne l'abandonnez point , lorſque ſon grand courage Luyfait porter par tout la terreur l'effroy.
Quoy qu'il traiſne toûjours la Victoire
apresfoy,
Comme il court ſans rien craindre ou la
gloire l'engage,
Dans les divers perils que fon grand
cœur partage,
Du ſoinde le garder faites-nous une
Loy.
Vous
GALANT. 121
Vous avez employéplus decing mille années
Aformer de Loüis les nobles deſtinées ;
Vostreplus grandeffort nous paroistau- jourd'huy.
Ne livrez doncjamais àla fureur des Parques CeRoy victorieux , lagloire des Monarques,
Vous nesçauriez donner unplus grand Royque luy.
- Cette verité eſt ſi conſtante,
que leplaiſird'admirer ſes gran- des Actions adoucit les mauxde
ceux qui ſouffrent; &cet autre Sonnetde M² l'Abbé Flanc arreſté dans la Conciergerie par ſes malheurs , en eſt une mar...
que.
TomeX. F
122 LE MERCVRE
Au ROY, Sonnet. ***
Royd'eftre feulimité de tous , les Roys digne
Ta grandeur m'ébloüit , OmaMuse tremblante
S'égare&se confond de voir, lors qu'on
tevante,
Ton meriteplus grandque tafelicité.
Tuportes tous les traitsde la Divinité,
Au ſeul bruit de ton Nom l'Europe s'épouvanteد
Etles Faits inoüls de tamain fipuis- Sante Feront l'étonnement de la Pofterité. 7
Mais lors que'tu parois environné de gloire,
Qu'entout tempstes Drapeaux devan- cent la Victoire ,
Qu'un seul de tes deſſeins suspendtout
l'Univers ;
GALANT. 123
QuedufierEspagnol les Villesſont con- quiſes,
Qu'à l'éclat de tes Lys les Aigles font Soumiſes,
:
At'admirer , Grand Roy , j'adoucis tous mesfers.
&la Victoire devient infaillible,
mais ſi ces Armes ſe font redouter par tout, ſes Triomphes font en meſme temps l'inépuiſable matiere des Eloges de tout le monde , &ceux que l'embarras des Affaires du Public oblige à
rompre commerce avec les Mu- ſes,cherchent à le renoüerpour ne demeurerpas muetsquand il -
s'agit de la gloire de ce grand
120 LE MERCVRE
Monarque. Vousn'en douterez pointquand vous aurez leu ce Sonnetde M.de BrionConſeiller
au Parlement.
Sonnet pour le Roy.
Destins, veillez toûjours pourconſerver
ceRoy,
Devosſoins affidus leplus parfait onvrage.
Ne l'abandonnez point , lorſque ſon grand courage Luyfait porter par tout la terreur l'effroy.
Quoy qu'il traiſne toûjours la Victoire
apresfoy,
Comme il court ſans rien craindre ou la
gloire l'engage,
Dans les divers perils que fon grand
cœur partage,
Du ſoinde le garder faites-nous une
Loy.
Vous
GALANT. 121
Vous avez employéplus decing mille années
Aformer de Loüis les nobles deſtinées ;
Vostreplus grandeffort nous paroistau- jourd'huy.
Ne livrez doncjamais àla fureur des Parques CeRoy victorieux , lagloire des Monarques,
Vous nesçauriez donner unplus grand Royque luy.
- Cette verité eſt ſi conſtante,
que leplaiſird'admirer ſes gran- des Actions adoucit les mauxde
ceux qui ſouffrent; &cet autre Sonnetde M² l'Abbé Flanc arreſté dans la Conciergerie par ſes malheurs , en eſt une mar...
que.
TomeX. F
122 LE MERCVRE
Au ROY, Sonnet. ***
Royd'eftre feulimité de tous , les Roys digne
Ta grandeur m'ébloüit , OmaMuse tremblante
S'égare&se confond de voir, lors qu'on
tevante,
Ton meriteplus grandque tafelicité.
Tuportes tous les traitsde la Divinité,
Au ſeul bruit de ton Nom l'Europe s'épouvanteد
Etles Faits inoüls de tamain fipuis- Sante Feront l'étonnement de la Pofterité. 7
Mais lors que'tu parois environné de gloire,
Qu'entout tempstes Drapeaux devan- cent la Victoire ,
Qu'un seul de tes deſſeins suspendtout
l'Univers ;
GALANT. 123
QuedufierEspagnol les Villesſont con- quiſes,
Qu'à l'éclat de tes Lys les Aigles font Soumiſes,
:
At'admirer , Grand Roy , j'adoucis tous mesfers.
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Résumé : SONNET POUR LE ROY.
La lettre célèbre les exploits et la gloire du roi, dont les victoires sont décrites comme infaillibles et universellement admirées. Même les personnes occupées par les affaires publiques cherchent à exalter sa renommée. La lettre inclut un sonnet de M. de Brion, conseiller au Parlement, qui appelle les destins à protéger le roi, soulignant son courage et ses triomphes constants. Ce sonnet exprime le souhait de voir le roi continuer à inspirer la terreur et l'admiration. Un autre sonnet, écrit par l'Abbé Flancar depuis la Conciergerie, admire la grandeur et le mérite du roi, comparant sa divinité et son impact sur l'Europe. Les faits héroïques du roi sont destinés à étonner la postérité. La lettre se conclut en mentionnant que l'admiration pour les actions du roi adoucit les maux des souffrants.
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4
p. 138-139
Retour de M. le Marquis de Torcy, [titre d'après la table]
Début :
Mr le Marquis de Torcy, Fils de Mr Colbert de Croissy, [...]
Mots clefs :
Marquis de Torcy, Envoyé extraordinaire, Cour, Portugal, Espagne, Éloges
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Retour de M. le Marquis de Torcy, [titre d'après la table]
M'le Marquis de Torcy,
Fils de Me Colbert de Croiffy,
eft de retour de Portugal ,
où il a eſté Envoyé Extraordinaire
pour le Roy. Il a paflé
par l'Eſpagne en revenant
en France, & il s'eſt acquis
tant d'eſtime dans l'une &
dans l'autre Cour , qu'on en
a écrit icy avec de fort grands
Eloges. Sa Majesté , à qui
GALANT. 139
fon merite eſt fort connu ,
en eſt ſi perfuadée , qu'Elle
l'a nommé preſque aufli-toft
aprés fon retour , EnvoyéExtraordinaire
auprés du Roy
de Dannemark , pour aller
faire des Complimens de
Condoleance à ce Monarque
ſur la Mort de la Reine
fa Mere. Quand on matche
de fi bonne heure fur les
traces des grands Hommes ,
* & que l'on continue comme
l'on a commencé , il n'y a
rien que l'on ne doive eſpeprende
fon merite & de far
Fortunell
Fils de Me Colbert de Croiffy,
eft de retour de Portugal ,
où il a eſté Envoyé Extraordinaire
pour le Roy. Il a paflé
par l'Eſpagne en revenant
en France, & il s'eſt acquis
tant d'eſtime dans l'une &
dans l'autre Cour , qu'on en
a écrit icy avec de fort grands
Eloges. Sa Majesté , à qui
GALANT. 139
fon merite eſt fort connu ,
en eſt ſi perfuadée , qu'Elle
l'a nommé preſque aufli-toft
aprés fon retour , EnvoyéExtraordinaire
auprés du Roy
de Dannemark , pour aller
faire des Complimens de
Condoleance à ce Monarque
ſur la Mort de la Reine
fa Mere. Quand on matche
de fi bonne heure fur les
traces des grands Hommes ,
* & que l'on continue comme
l'on a commencé , il n'y a
rien que l'on ne doive eſpeprende
fon merite & de far
Fortunell
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5
p. 5-8
Lettre d'un Provincial. [titre d'après la table]
Début :
MONSIEUR, Quoyque Mercure ait des aîles, aussi bien que la [...]
Mots clefs :
Louanges, Éloges
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Lettre d'un Provincial. [titre d'après la table]
MONSIEVR,
QuoyqueMercureait desailes,
aîles, aauuJjJjil bien que la
Renommée; néanmoins
rvoftrc renomméeprenant
un rvolplus prompta druancé
rvojfre Mercure
dans nos trovinees, &
rvojlrl mérite.
Par ce début flateur
je devine que ce Provin
cial voudroit établir entre
luy de moy un commerce
de louanges rcci--
proques.
jiyantappris Ojuevous
avez,fuccedc à Monfieur
Devizé, je vous demande
une petite place pour
unpetiteloge, dunpetit f4n petit elq
Officier dunepetiteElec.
tlon.
Ne l'ay-je pas deviné:
ce sont des éloges donc
on a besoin; on viendra
les chercher chez moy.
Croit-on que j'entienne
Bureau ? Non, je n'ay
point d'éloges à vendre;
j'en donnerois volontiers,
mais ce feroit à
ceux qui n'en ont pas
besoin c'est-à-dire qui
ont assez de réputation,
pour se passer de loüanges
ou assez de vertu
pour les mépriser.
QuoyqueMercureait desailes,
aîles, aauuJjJjil bien que la
Renommée; néanmoins
rvoftrc renomméeprenant
un rvolplus prompta druancé
rvojfre Mercure
dans nos trovinees, &
rvojlrl mérite.
Par ce début flateur
je devine que ce Provin
cial voudroit établir entre
luy de moy un commerce
de louanges rcci--
proques.
jiyantappris Ojuevous
avez,fuccedc à Monfieur
Devizé, je vous demande
une petite place pour
unpetiteloge, dunpetit f4n petit elq
Officier dunepetiteElec.
tlon.
Ne l'ay-je pas deviné:
ce sont des éloges donc
on a besoin; on viendra
les chercher chez moy.
Croit-on que j'entienne
Bureau ? Non, je n'ay
point d'éloges à vendre;
j'en donnerois volontiers,
mais ce feroit à
ceux qui n'en ont pas
besoin c'est-à-dire qui
ont assez de réputation,
pour se passer de loüanges
ou assez de vertu
pour les mépriser.
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Résumé : Lettre d'un Provincial. [titre d'après la table]
L'auteur d'une lettre compare la Renommée à Mercure et devine que le destinataire souhaite des louanges. Il mentionne avoir appris que le destinataire a succédé à Monsieur Devizé et demande une place pour loger un fan et un officier. Il précise qu'il ne vend pas d'éloges et les accorde seulement à ceux qui n'en ont pas besoin.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 8-12
Loüanges. [titre d'après la table]
Début :
Les loüanges excessives font tort à ceux qui les reçoivent [...]
Mots clefs :
Louanges, Éloges, Résolution
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Loüanges. [titre d'après la table]
Les loüanges excessives
font tort à ceux qui
les reçoivent & à ceux
qui les donnent: les
loüanges moderées offencent
ceux qui en vou-*"
droient de plus grandes;
n'en point donner du
tout c'est une extremité
vicieuse. Je fuis bien tenté
de tomber dans ce
vice-là.
Un simple raconteur
de Nouvelles doit s'abstenir
des Panegyriques
comme il doit renoncer
à la Satyre. C'enest fait,
je prens la resolution de
ne jamais loüer ni médire
; je renonce de bon
coeur au plaisir de médire
; maisj'avouë, que je
ne fcray beaucoup de
violence pour ne point
loüer.
La premiere violence
que je vais me faire , ce
fera celle de ne pas rendre
à mon Predecesseur
toute la justice qui luy
est dûë. Je luy dois un
éloge. Ouy, je niabstiens
avec peine de
loüer feu Mr Devizé
1 dont la probité, dont le
ze le ,
dontl'exactitude
infatigable, dont le.
Maisj'oubliois pourlui
ma resolution. le veuK
prouver en m'abstenant
d'un éloge si necessaire,
que je tiendray au Public
tout ce que je luy promettray.
Ce n'est point par humeur
chagrine que j'ay
pris la resolution de ne
loüer personne. C'est seulement
pour faire plaisir
à ceux qui meritent de
vrayes loüanges. Je raconteray
simplement les
actions louables qu'ils
aurontfaites: leurs actions
feront leur éloge
,
& je ne seray point
obligé de les confondre
avec ceux qu'on ne peut
loüer que par des loüanges
verbales.
font tort à ceux qui
les reçoivent & à ceux
qui les donnent: les
loüanges moderées offencent
ceux qui en vou-*"
droient de plus grandes;
n'en point donner du
tout c'est une extremité
vicieuse. Je fuis bien tenté
de tomber dans ce
vice-là.
Un simple raconteur
de Nouvelles doit s'abstenir
des Panegyriques
comme il doit renoncer
à la Satyre. C'enest fait,
je prens la resolution de
ne jamais loüer ni médire
; je renonce de bon
coeur au plaisir de médire
; maisj'avouë, que je
ne fcray beaucoup de
violence pour ne point
loüer.
La premiere violence
que je vais me faire , ce
fera celle de ne pas rendre
à mon Predecesseur
toute la justice qui luy
est dûë. Je luy dois un
éloge. Ouy, je niabstiens
avec peine de
loüer feu Mr Devizé
1 dont la probité, dont le
ze le ,
dontl'exactitude
infatigable, dont le.
Maisj'oubliois pourlui
ma resolution. le veuK
prouver en m'abstenant
d'un éloge si necessaire,
que je tiendray au Public
tout ce que je luy promettray.
Ce n'est point par humeur
chagrine que j'ay
pris la resolution de ne
loüer personne. C'est seulement
pour faire plaisir
à ceux qui meritent de
vrayes loüanges. Je raconteray
simplement les
actions louables qu'ils
aurontfaites: leurs actions
feront leur éloge
,
& je ne seray point
obligé de les confondre
avec ceux qu'on ne peut
loüer que par des loüanges
verbales.
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Résumé : Loüanges. [titre d'après la table]
Le texte aborde les risques des louanges excessives et modérées, qui peuvent être préjudiciables tant pour ceux qui les reçoivent que pour ceux qui les donnent. L'auteur reconnaît la tentation de tomber dans l'excès de louanges et choisit de s'abstenir de toute forme de panégyrique ou de satire. Il décide de ne jamais louer ni médire, bien que cela lui semble difficile. L'auteur mentionne qu'il ne rendra pas justice à son prédécesseur, M. Devizé, malgré ses qualités de probité, de zèle et d'exactitude infatigable. Cette décision est motivée par le désir de tenir ses promesses au public et d'éviter les louanges verbales. L'auteur préfère relater simplement les actions louables des personnes méritantes, laissant leurs actions parler d'elles-mêmes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 209-220
PIECE FUGITIVE. / LETTRES A une Damoiselle Suedoise sur son Portrait.
Début :
Je ne sçai, Mademoiselle, si en me donnant l'honneur de [...]
Mots clefs :
Suédoise, Éloges, Amour
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : PIECE FUGITIVE. / LETTRES A une Damoiselle Suedoise sur son Portrait.
PIECE FVGITIVE.
J'ignore l'autheur &
la datte de cette piece
, maisellem'a paru jolie,
& je ne pense pas qu'elle
foit imprimée
,
il n'en
faut pas davantage pour
me persuader qu'elle fera plaisir au public.
LETTRE
A une Damoiselle Suedoise
surfin Portrait.
Je ne fçaijMadcixioifcllCj
si en me donnant l'honneur de vousécrire j'écris
à quelqu'un.Sur vôtre nom
qui efl: fortillustre il faut
que je vous croye Suédoise,
sur les grands yeux noirs
due j'ai veus portrait dans vôtre
& quidoivent être
pleinsde feu dans l'original ,je vous crois Espagnole;surde fortjolis versFrançoisqu'oj}uCa montrez de
vous, je voriscroisFrançoise;sur d'autres vers Italiens, jevous crois Itapenne, ssir tout cela ensemblevous n-êtes a'auc,hri
pays.
Pour rendre le miracle eneor plusachevé.
Dix-septans à, ptll prés, cejl
l'âge qu'on vous donne.
Dix - ¡ ftpt ans jusqu'ici n'a-
- voientgatéperfonne,
Pour vous ils vousfont tort, ïefpritJî cultivé
Et dixfèpt ans font que je
voussoupçonne
Denêtre, Dieume le par-
"- donne, -'
Qluequelque objet
en
qu'unPoëteàrivé.t'ait
Cependantiléftcertaîh
que M. L.,.. de.« S.
prend l'affaire fort serieusement, & si l'on a
à écrire desprodiges ce doit être
sur son authorité plusque
sur celle des autres.Il foutient que vous êtes à Stokolm, quemille gensvous
yont vue36c
yous y ont
parlé, ildit même quevôtre Portrait,quirepresente le plus charmantvisage
du monde, ne represente
pas le vôtredanstoute sa.
beauté
,
Çc que les Peintres
de Suede ne flattent pas.
Maispourquoynousqui
sommes danslePays-
beauté, del'esprit, & des
agrémens,n'aurions-nous
jamais vu rien de pareil à
une personne si accomplie?Voila ce que la va- nitéFrançoise nous fait dire aussitôt; à cela je ne
sçai qu'une réponse, qui
paroîtnous aider à croire
tout ce que l'onditdevous.
VÀmorn ailleurs si redouta-
.)
,. yte -
Netrouvepassans doute un ci,tvorable
Sous le Ci.èîde Suide & si
*
plws 1a1/e'sLà^ttm\s^
Les cœurs y
sontglacez, &':
pour fondre ces
glaces
N'a-t-il pas dû produire un
Chef-d'œuvre où les Graces
Eussent répandu tous leurs
,
Dons ?
Si nos Climats n'ont rien quix
ne vous cedey
Soiten esprit,soit en attraits,
C'est qu'Amourysoumet les
cœursà moindre frais
Qu'il ne pourroit faire ce
Suede.
Voila, MademoifeIIe"
tout ceque je puis mimaginer pour me persuader
que vous soyez une choses
vrai-semblable, tirez-moy
d'embarras, je ': vous en
conjure ,.' & ayez la bonté
de me faire sçavoir si vou£
êtes
; que vôtre modestie
ne 'vo\is\ empêche pas de
me l'avouernaturellemet,
je vous promets de n'en
parlerà personne, je me
pique d'être bon François,
& jenevoudrois pas qu'on
Fçût que j'eusse intelligence avec une etrangere, qui
triompheroitde toutes -les,
Françoises, & qui effaceroit l'honneur de la Na-
tion. Ce seroit là un aÍfez
grand crime contre ma
Patrie, cependant je m'accoûtume peu à peu à en
faire un plus grand, tous
mes soupirs à l'heure qu'il
est sortent de France, &
vont du côté du Nord:
Lieux defoleX^y
ou PHyver
- tient son fiêgc
Sur devastes amas de neige,
Où lesaquillons violens,
Où les frimats, & les ours
blancs
Composent un trisse cortége,
Mer glaciale; affreux climats, C'efl
"ejlapré's vous que jesoupire,
Les lieux où regne un éternel Zephire,
Le séjour de Venus, Cypre
nevousvautpas.
Vous voyez, Mademoiselle, que mon cœur a
déja
bien fait du chemin, quoique je doute encore que
vous soyiez au monde:
Mais c'estdestendres caurs
l'ordinaire deffaut,
Ilssebâtenttoûjours unpeu
1<
-
plus qu'il ne faut
Desuivre une agreable idée.
Avec ardeur ils courent la
saisir,
Et des( charmes trompeur.
leur otent le loisir
De s'assurer qu'elle foit bien
:', fondée.
Cette idée seule,quej'ai
de vous, a
fait sur moj
l'effetque pourroient faire
les belles même decePaïs,
Vous pouvez conquerir la
Suede par vous-même, &
lerestedu monde par les
deux Portraits que nous
avons, car je compte pour
un Portrait les vers où vôtre esprits'est si bien peint.
Je meflatte que mes hommages,qui ne feroient asseurement pas dignes de
vous à Stokolm
,
deviendront de quelque prix en
traversant cinq cent lieuës
de Païs pour aller jusqu'à
vous, & que s'il est triste
de vous adorer de si loin,
ce me fera du moins une
espece de méritéauprés de
vous ; je n'en ai point d'au- treà vous faire ~valoir) &
je ne croispasmême que
vouspuissiez jamais sça-
voir qui je suis,
Si ce n'est que peut-être un
coup de lafortune.
AitportéjufIuefir nos bords
Le nom de l'enchanteur, qui
fait parler les morts,
Et qui voyage dAnl la Lune.
J'ignore l'autheur &
la datte de cette piece
, maisellem'a paru jolie,
& je ne pense pas qu'elle
foit imprimée
,
il n'en
faut pas davantage pour
me persuader qu'elle fera plaisir au public.
LETTRE
A une Damoiselle Suedoise
surfin Portrait.
Je ne fçaijMadcixioifcllCj
si en me donnant l'honneur de vousécrire j'écris
à quelqu'un.Sur vôtre nom
qui efl: fortillustre il faut
que je vous croye Suédoise,
sur les grands yeux noirs
due j'ai veus portrait dans vôtre
& quidoivent être
pleinsde feu dans l'original ,je vous crois Espagnole;surde fortjolis versFrançoisqu'oj}uCa montrez de
vous, je voriscroisFrançoise;sur d'autres vers Italiens, jevous crois Itapenne, ssir tout cela ensemblevous n-êtes a'auc,hri
pays.
Pour rendre le miracle eneor plusachevé.
Dix-septans à, ptll prés, cejl
l'âge qu'on vous donne.
Dix - ¡ ftpt ans jusqu'ici n'a-
- voientgatéperfonne,
Pour vous ils vousfont tort, ïefpritJî cultivé
Et dixfèpt ans font que je
voussoupçonne
Denêtre, Dieume le par-
"- donne, -'
Qluequelque objet
en
qu'unPoëteàrivé.t'ait
Cependantiléftcertaîh
que M. L.,.. de.« S.
prend l'affaire fort serieusement, & si l'on a
à écrire desprodiges ce doit être
sur son authorité plusque
sur celle des autres.Il foutient que vous êtes à Stokolm, quemille gensvous
yont vue36c
yous y ont
parlé, ildit même quevôtre Portrait,quirepresente le plus charmantvisage
du monde, ne represente
pas le vôtredanstoute sa.
beauté
,
Çc que les Peintres
de Suede ne flattent pas.
Maispourquoynousqui
sommes danslePays-
beauté, del'esprit, & des
agrémens,n'aurions-nous
jamais vu rien de pareil à
une personne si accomplie?Voila ce que la va- nitéFrançoise nous fait dire aussitôt; à cela je ne
sçai qu'une réponse, qui
paroîtnous aider à croire
tout ce que l'onditdevous.
VÀmorn ailleurs si redouta-
.)
,. yte -
Netrouvepassans doute un ci,tvorable
Sous le Ci.èîde Suide & si
*
plws 1a1/e'sLà^ttm\s^
Les cœurs y
sontglacez, &':
pour fondre ces
glaces
N'a-t-il pas dû produire un
Chef-d'œuvre où les Graces
Eussent répandu tous leurs
,
Dons ?
Si nos Climats n'ont rien quix
ne vous cedey
Soiten esprit,soit en attraits,
C'est qu'Amourysoumet les
cœursà moindre frais
Qu'il ne pourroit faire ce
Suede.
Voila, MademoifeIIe"
tout ceque je puis mimaginer pour me persuader
que vous soyez une choses
vrai-semblable, tirez-moy
d'embarras, je ': vous en
conjure ,.' & ayez la bonté
de me faire sçavoir si vou£
êtes
; que vôtre modestie
ne 'vo\is\ empêche pas de
me l'avouernaturellemet,
je vous promets de n'en
parlerà personne, je me
pique d'être bon François,
& jenevoudrois pas qu'on
Fçût que j'eusse intelligence avec une etrangere, qui
triompheroitde toutes -les,
Françoises, & qui effaceroit l'honneur de la Na-
tion. Ce seroit là un aÍfez
grand crime contre ma
Patrie, cependant je m'accoûtume peu à peu à en
faire un plus grand, tous
mes soupirs à l'heure qu'il
est sortent de France, &
vont du côté du Nord:
Lieux defoleX^y
ou PHyver
- tient son fiêgc
Sur devastes amas de neige,
Où lesaquillons violens,
Où les frimats, & les ours
blancs
Composent un trisse cortége,
Mer glaciale; affreux climats, C'efl
"ejlapré's vous que jesoupire,
Les lieux où regne un éternel Zephire,
Le séjour de Venus, Cypre
nevousvautpas.
Vous voyez, Mademoiselle, que mon cœur a
déja
bien fait du chemin, quoique je doute encore que
vous soyiez au monde:
Mais c'estdestendres caurs
l'ordinaire deffaut,
Ilssebâtenttoûjours unpeu
1<
-
plus qu'il ne faut
Desuivre une agreable idée.
Avec ardeur ils courent la
saisir,
Et des( charmes trompeur.
leur otent le loisir
De s'assurer qu'elle foit bien
:', fondée.
Cette idée seule,quej'ai
de vous, a
fait sur moj
l'effetque pourroient faire
les belles même decePaïs,
Vous pouvez conquerir la
Suede par vous-même, &
lerestedu monde par les
deux Portraits que nous
avons, car je compte pour
un Portrait les vers où vôtre esprits'est si bien peint.
Je meflatte que mes hommages,qui ne feroient asseurement pas dignes de
vous à Stokolm
,
deviendront de quelque prix en
traversant cinq cent lieuës
de Païs pour aller jusqu'à
vous, & que s'il est triste
de vous adorer de si loin,
ce me fera du moins une
espece de méritéauprés de
vous ; je n'en ai point d'au- treà vous faire ~valoir) &
je ne croispasmême que
vouspuissiez jamais sça-
voir qui je suis,
Si ce n'est que peut-être un
coup de lafortune.
AitportéjufIuefir nos bords
Le nom de l'enchanteur, qui
fait parler les morts,
Et qui voyage dAnl la Lune.
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Résumé : PIECE FUGITIVE. / LETTRES A une Damoiselle Suedoise sur son Portrait.
La lettre est adressée à une demoiselle suédoise dont l'auteur ignore l'identité précise. L'auteur exprime son admiration pour cette jeune femme, mentionnant divers indices qui la rendent mystérieuse : son nom illustre, ses traits physiques et ses talents poétiques en plusieurs langues. Malgré ces indices, il doute de son existence réelle. La lettre évoque également des rumeurs selon lesquelles un portrait de la demoiselle circule à Stockholm, mais ne représente pas fidèlement sa beauté. L'auteur se demande comment une personne aussi accomplie peut exister et imagine que son portrait et ses vers témoignent de ses charmes. Il exprime son admiration et ses soupirs, qui le mènent vers le nord, loin de la France. Il conclut en espérant que ses hommages, bien que modestes, puissent atteindre la demoiselle et qu'elle puisse un jour connaître son identité.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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8
p. 220-236
NOMINATION du Roy.
Début :
Messire Louis lePeleteir, premier President du Parlement, s'est démis volontairement [...]
Mots clefs :
Parlement, Président, Nomination, Généalogie, Famille, Éloges, Hommage
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : NOMINATION du Roy.
NOMINATION
du Roy.
Messire Louis lePeletier,
premier President du Parlement, s'est demis volontairement de cette Charge
entre les mains du Roy.
Il est fils de Claude Le
Peletier, Conseiller d'Etat
Ordinaire, President holoraire du Parlement,Ministre d'Etat, Controlleur
General des Finances, cidevant Prevôt, des Marchands de Paris, & SurIntendant des Postes &
Relais de France, mort le
10. Aoust de l'année derniere.
SAMAJESTE'achoisi, pour remplir cette importante Charge, Messire
Jean-Antoine de Mesmes,
Comte d'Avaux, & de
Neufchâtel, Seigneur d'Irval & de Cramoyelle, cidevant Prévôt&Grand
MaîtredesCeremonies,
des Ordres du Roy. Cet
illustre Magistrat àété
ConcilierauParlement
en 1687.Presidenta Mor-* -,,' tier en 1689. Prevôt &Me
des Ceremonies des ordres
du Royen1703delaquelle charge il s'est demit.,en,.
1709.
en faveurdeM.le
Comte de Pontçhanx^jji.
Ilestfils de M.JeanJacquesdeMesmes Préfid^nt/
à Mortier, & de Dame
Marguerite Bertrand de la
Basiniere,&petit-fils de M.
Jean-Antoine de Mesme,
seigneur d'Yrval
,
Baron
deBreüil, Vicomte de
Vandeüil, Conseiller d'E-,
tat ordinaire, & de Dame
Anne Courtin, & arriérépetit-fils de Jean-Jacques
de Mesmes, Maistre des
Requestes, & ,Conseiller
d'Etat, & de Dame Antoi.
nette de Grossaine, fille
unique & heritiere deHierôme deGrossaine, Ecuyer
Seigneur d'Yrval&d'Avaux. Baron de Breûil, &
,.
Vicomte de Vandeüil, lequel Jean-Jacques de Mesmes fut envoyé en plusieurs négociationsimportantes, il est mort fort
âgé en 1642.
M. le premier President
avoit pour Oncle Messire
Jean-Jacques de Mesmes,
Comte d'Avaux,Conseiller d'Etat ordinaire, Prévôt & Maître des Ceremonies de l'Ordre du St
Esprit, lequel s'est distingué en quantité de negociations importantes,ayant
été deux fois Plenipoten-
tiaire pour la Paix. La première, au Traitté de Nimegue en 1675. Laseconde,au Traitté de Risvick
en 1697.
Cette famille a
produit
beaucoup de grands hommes, entre lesquelsse sont
distinguez Henry de Mesmes & Claude de Mesmes,
tous deux Grands-Oncles
de M.le premier President.
Henry de Mesmes, Ecuyer
Seigneur de Roissy, Marquis de Moigneville, &c
d'Everly, qui fut President àMortier en 1627. aprés
avoir occupé long-temps
les premieres Charges, &:
servi l'Etat en plusieurs occassons importantes.
il fut député aux Etats
Généraux tenus à Paris en
1617. & à l'assemblée des
Notables à Rouën: Il fut
marié deux fois, la premiere
,
avec Jeanne de
Montluc, fille du MaréchalBalagny',delaquelle
il neut point d'ensans
:
La
seconde, avec Marie Fossez
,
fille duMarquis d'Everly,Chevalier des Ordres du Roy, de laquelle
il eut plusieurs enfans, &
il n'én est resté que Dame
Antoinette de Mefn-les
épouse de Louise de Rochechoüart-, Duc de Vivonne,Maréchal de France. ", Claudede Mesmes CheValler3 Comte d'Avaux,
Maistre des Requestes ôc
conseillerid'EtatfutAmbassadeur en piufieurs
Cours de l'Europe
: Sçavoq ?à.Venifq,à Roipe3a
Mantouë, florencecà1
Savoye,deuxfois en Allemagne, en Dannemarck,
en Pologne & Suede: la
derniere fois qu'il fut en
Allemagne, il traitta des
Préliminaires de la Paix
generale,&fut un des Plénipotentiaires au Traité de
Munster; il fut aussi Secretaire des Ordres du Roy,
& Surintendant des Finances avec M. le President
de Bailleul, & il mourut
sans alliance.
Cette famille de Mesmes
est originaire de Bearn,
sortie
de
Pierre Chevalier,
Seigneur de Mesmes, qui
est nommé entre les pre-
miers & plus apparens du
Bailliage de Roquefort en
la Vicomté de Marsan; ce
Pierre de Mesmes vivoit
en 1179. & avoit pour frere Guillaume de Mesmes
pour Aumônier du Roy S.
Louis;il eut pour fils Roger de Mesmes, dit Coudun Chevalier, Seigneur
de Mesmes, pere d'Arnauld premier du Nom,
Seigneur de Caixchen en
l'Evêché d'Aire, duquel est
descendu M. le premier
President aprés neuf degrez de générations.
Cette famille a
donné
un premier President à
<' Rouën, qui fut aussi deux
fois Ambassadeur en Allemagnej un Chancelier de
Navarre; desPresidens au
grand Conseil,à la Chambre descomptes,un Prévôt
des Marchands à Paris,
trois Presidens à Mortier,
plusieurs Conseillers au
Parlement, Maistres des
Requestes & Conseillers
d'Etat, & quatre Officiers
* de l'Ordredu S. Esprit.
Cette Famille atoûjours protégé les belles
lettres. Voiture écrit à
Monsieur d'Avaux, à
propos de sa Maison,
qui efl: à presentl'Hôtel de Bauviliers.
je me réjoüis avec
*vous au nom des Penates
de Jean Jacques de Mesmes ftl de tant degrands
hommes vos ayeuls Àu
nom de ces Penates qui
ont été les Dieux tutelaires de P~~ de
tous les sçavants de ce
siécle-la~de celui-ci, de
ce que vous avez renouvelle& embelli leur ancienne demeure, &c.
Non feulement Messieurs de Mesmes &
d'Avaux ont protégé
les belles Lettres, mais
ils les ont cultivées euxmêmes. Il rfeft pas honnête, dit encor Voiture,
à un personnage
,
aussi
grand que vous têtes,
d'êtreplus éloquent que
nous.
Je pourrois repeter
icy
ici pour M. le premier
President,tous les éloges que Voiture donne
à ses Prédecesseurs,
puis qu'il rassemble en
lui toutes leurs grandes
qualitez. Mais j'ai banni du Mercure les Panegyriques.
J'ajoûterai feulement
quelques quadrins au
premier de ceux que
Voiture envoya à M.
d'Avaux, à la mode de
Neufgermain. Les lct-
tres du Nom finissant
les Vers
:
L'autre jour:}pf1Îtejf
Par Mercure tt) Parrses :
lesDieuxeur
Ton*ksDteuxféfktir
command-a.
Qu'on fit honneur ati grandd'Avaux, Themis,quicetordre
approuv-a,
A ses côtez ïnfadçfljty,
0; }
Pour le siécle suivant
¡ plaç-a ,,'
Un premier President
, ,/
Oui,ditThemis,ces d'Avauxl-a
a- Detouttempsmefurent de-vots, 1
Pour l'an où la Paix fè fer-a Jegarde à Paris un
àyA<vaux.
Enmérité il égaler-a
Suos Avos & Pro-avoS)
Peuple, Senat, tout aimer-A,
Ce successeur du grand à'Avaux.
du Roy.
Messire Louis lePeletier,
premier President du Parlement, s'est demis volontairement de cette Charge
entre les mains du Roy.
Il est fils de Claude Le
Peletier, Conseiller d'Etat
Ordinaire, President holoraire du Parlement,Ministre d'Etat, Controlleur
General des Finances, cidevant Prevôt, des Marchands de Paris, & SurIntendant des Postes &
Relais de France, mort le
10. Aoust de l'année derniere.
SAMAJESTE'achoisi, pour remplir cette importante Charge, Messire
Jean-Antoine de Mesmes,
Comte d'Avaux, & de
Neufchâtel, Seigneur d'Irval & de Cramoyelle, cidevant Prévôt&Grand
MaîtredesCeremonies,
des Ordres du Roy. Cet
illustre Magistrat àété
ConcilierauParlement
en 1687.Presidenta Mor-* -,,' tier en 1689. Prevôt &Me
des Ceremonies des ordres
du Royen1703delaquelle charge il s'est demit.,en,.
1709.
en faveurdeM.le
Comte de Pontçhanx^jji.
Ilestfils de M.JeanJacquesdeMesmes Préfid^nt/
à Mortier, & de Dame
Marguerite Bertrand de la
Basiniere,&petit-fils de M.
Jean-Antoine de Mesme,
seigneur d'Yrval
,
Baron
deBreüil, Vicomte de
Vandeüil, Conseiller d'E-,
tat ordinaire, & de Dame
Anne Courtin, & arriérépetit-fils de Jean-Jacques
de Mesmes, Maistre des
Requestes, & ,Conseiller
d'Etat, & de Dame Antoi.
nette de Grossaine, fille
unique & heritiere deHierôme deGrossaine, Ecuyer
Seigneur d'Yrval&d'Avaux. Baron de Breûil, &
,.
Vicomte de Vandeüil, lequel Jean-Jacques de Mesmes fut envoyé en plusieurs négociationsimportantes, il est mort fort
âgé en 1642.
M. le premier President
avoit pour Oncle Messire
Jean-Jacques de Mesmes,
Comte d'Avaux,Conseiller d'Etat ordinaire, Prévôt & Maître des Ceremonies de l'Ordre du St
Esprit, lequel s'est distingué en quantité de negociations importantes,ayant
été deux fois Plenipoten-
tiaire pour la Paix. La première, au Traitté de Nimegue en 1675. Laseconde,au Traitté de Risvick
en 1697.
Cette famille a
produit
beaucoup de grands hommes, entre lesquelsse sont
distinguez Henry de Mesmes & Claude de Mesmes,
tous deux Grands-Oncles
de M.le premier President.
Henry de Mesmes, Ecuyer
Seigneur de Roissy, Marquis de Moigneville, &c
d'Everly, qui fut President àMortier en 1627. aprés
avoir occupé long-temps
les premieres Charges, &:
servi l'Etat en plusieurs occassons importantes.
il fut député aux Etats
Généraux tenus à Paris en
1617. & à l'assemblée des
Notables à Rouën: Il fut
marié deux fois, la premiere
,
avec Jeanne de
Montluc, fille du MaréchalBalagny',delaquelle
il neut point d'ensans
:
La
seconde, avec Marie Fossez
,
fille duMarquis d'Everly,Chevalier des Ordres du Roy, de laquelle
il eut plusieurs enfans, &
il n'én est resté que Dame
Antoinette de Mefn-les
épouse de Louise de Rochechoüart-, Duc de Vivonne,Maréchal de France. ", Claudede Mesmes CheValler3 Comte d'Avaux,
Maistre des Requestes ôc
conseillerid'EtatfutAmbassadeur en piufieurs
Cours de l'Europe
: Sçavoq ?à.Venifq,à Roipe3a
Mantouë, florencecà1
Savoye,deuxfois en Allemagne, en Dannemarck,
en Pologne & Suede: la
derniere fois qu'il fut en
Allemagne, il traitta des
Préliminaires de la Paix
generale,&fut un des Plénipotentiaires au Traité de
Munster; il fut aussi Secretaire des Ordres du Roy,
& Surintendant des Finances avec M. le President
de Bailleul, & il mourut
sans alliance.
Cette famille de Mesmes
est originaire de Bearn,
sortie
de
Pierre Chevalier,
Seigneur de Mesmes, qui
est nommé entre les pre-
miers & plus apparens du
Bailliage de Roquefort en
la Vicomté de Marsan; ce
Pierre de Mesmes vivoit
en 1179. & avoit pour frere Guillaume de Mesmes
pour Aumônier du Roy S.
Louis;il eut pour fils Roger de Mesmes, dit Coudun Chevalier, Seigneur
de Mesmes, pere d'Arnauld premier du Nom,
Seigneur de Caixchen en
l'Evêché d'Aire, duquel est
descendu M. le premier
President aprés neuf degrez de générations.
Cette famille a
donné
un premier President à
<' Rouën, qui fut aussi deux
fois Ambassadeur en Allemagnej un Chancelier de
Navarre; desPresidens au
grand Conseil,à la Chambre descomptes,un Prévôt
des Marchands à Paris,
trois Presidens à Mortier,
plusieurs Conseillers au
Parlement, Maistres des
Requestes & Conseillers
d'Etat, & quatre Officiers
* de l'Ordredu S. Esprit.
Cette Famille atoûjours protégé les belles
lettres. Voiture écrit à
Monsieur d'Avaux, à
propos de sa Maison,
qui efl: à presentl'Hôtel de Bauviliers.
je me réjoüis avec
*vous au nom des Penates
de Jean Jacques de Mesmes ftl de tant degrands
hommes vos ayeuls Àu
nom de ces Penates qui
ont été les Dieux tutelaires de P~~ de
tous les sçavants de ce
siécle-la~de celui-ci, de
ce que vous avez renouvelle& embelli leur ancienne demeure, &c.
Non feulement Messieurs de Mesmes &
d'Avaux ont protégé
les belles Lettres, mais
ils les ont cultivées euxmêmes. Il rfeft pas honnête, dit encor Voiture,
à un personnage
,
aussi
grand que vous têtes,
d'êtreplus éloquent que
nous.
Je pourrois repeter
icy
ici pour M. le premier
President,tous les éloges que Voiture donne
à ses Prédecesseurs,
puis qu'il rassemble en
lui toutes leurs grandes
qualitez. Mais j'ai banni du Mercure les Panegyriques.
J'ajoûterai feulement
quelques quadrins au
premier de ceux que
Voiture envoya à M.
d'Avaux, à la mode de
Neufgermain. Les lct-
tres du Nom finissant
les Vers
:
L'autre jour:}pf1Îtejf
Par Mercure tt) Parrses :
lesDieuxeur
Ton*ksDteuxféfktir
command-a.
Qu'on fit honneur ati grandd'Avaux, Themis,quicetordre
approuv-a,
A ses côtez ïnfadçfljty,
0; }
Pour le siécle suivant
¡ plaç-a ,,'
Un premier President
, ,/
Oui,ditThemis,ces d'Avauxl-a
a- Detouttempsmefurent de-vots, 1
Pour l'an où la Paix fè fer-a Jegarde à Paris un
àyA<vaux.
Enmérité il égaler-a
Suos Avos & Pro-avoS)
Peuple, Senat, tout aimer-A,
Ce successeur du grand à'Avaux.
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Résumé : NOMINATION du Roy.
Le texte relate la nomination de Messire Jean-Antoine de Mesmes au poste de premier Président du Parlement, succédant à Messire Louis Le Peletier qui a démissionné volontairement. Jean-Antoine de Mesmes est présenté comme un magistrat éminent ayant occupé plusieurs fonctions prestigieuses, notamment Conseiller au Parlement en 1687, Président à Mortier en 1689, et Prévôt et Grand Maître des Cérémonies des Ordres du Roy en 1703. Il provient d'une famille distinguée, dont les membres ont joué des rôles importants dans l'administration et la diplomatie françaises. Parmi ses ancêtres notables, on trouve Jean-Jacques de Mesmes, qui a été Plénipotentiaire pour la Paix lors des traités de Nimègue en 1675 et de Ryswick en 1697. La famille de Mesmes est également reconnue pour ses contributions aux belles-lettres et son soutien aux arts. Le texte met en lumière la lignée et les exploits de plusieurs membres de cette famille, soulignant leur engagement dans les affaires de l'État et leur protection des lettres.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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9
p. 173-185
EXTRAIT de ce qui s'est passé à l'ouverture de l'Academie des Sciences, le 16. Novembre 1712.
Début :
L'Académie Royale des Sciences fit l'ouverture de ses [...]
Mots clefs :
Académie royale des sciences, Assemblée publique, Fontenelles, Cassini, Éloges, Mémoires, Machine, Réaumur, Abeilles, Crabes, Écrevisses
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT de ce qui s'est passé à l'ouverture de l'Academie des Sciences, le 16. Novembre 1712.
AIT
de ce qui s'est pallé à
lowjcrture de l'Academie des Sciences, le
16. Novembre 1712.
L Académie Royale des
Sciences fie l'ouverture de
ses Exercices par une assem-
blée publique qui se tint le
Mercredy iG. de Novembre. Monsieur de Fonrenelles y
fit l'éloge de deux
Académiciens morts pendant le cours de l'année.
L'un estoit Monsieur Berger Medecin, & Eleve de
Monsieur Rombery, pour
la Chymie
;
l'autre estoit
Monsieur Cassini celebre
par ses découvertes astronomiques. Jamais Panegyjfiite n'avoit peuc-estre eu
un si beau cha-rr,p, & peutestre jamais aussi Panegyriste n'a-t'il mieux rempli
l'attente du public. On fou,
haitteroit pouvoir donner
au public l'extrait del'éloge queMonsieur de Foncenelles fit de cegrand homme ; mais ce font de ces
choses qui perdent trop de
leurs graces dans unExtrait.
D'ailleurs on espere que les
amis de Monsieur Cassini
engagerent Monsieur de
Fontenelles à prévenirl'empressement du public sur cela
,
& à laisser imprimer cet
Eloge avant les Memoires
de l'Académie qui ne pa4*
roistront pas de quelqaeé
a
nées d'icy.
Monsieurde la Hire l'aisné lut enfuire la description
d'une machine par le moyen de laquelle un homme
dans (on carrosse peut détacher les chevaux qui tirent le carrosse loriqu'ils
prennent le mors aux dents,
& cela très promptemenc
& sans embarras.
Apres luy Monsieur Maraldi lut un Memoire contenant des observationstrés
curieuses sur les Abeilles.
Il les divise en trois classes,
les masles, les femelles ôc
les fieslons. Il raconta la
maniere dontelles s'y prennent pour construire leurs
cellules avec la cire, comment les femelles escortées
chacune de cinq ou six autres abeilles vont pondre
un œuf dans chaque cellule, comment celles qui les
accompagnent fermentla
cellule avec de la cire dans
un certain temps & la r'ouvrent ensuite pour en laisser
sortir la nouvelle mouche
qui vient d'éclorre
; comment au bout de quelque
temps elles chassent ou
tuent tous lesfreslons; comment elles chargent leurs
cuisses de cire qu'elles recueillent sur lesfleurs,avec
quel artificecelles qui sont
dans la ruche déchargent
celles qui viennent chargées, comment ellesremplissent de miel leurs magasins pour l'hyver, & plusieurs autres pareilles obfervations.
La (canee finit par la lecture d'un Memoire deMonsieur de Reaumur
,
sur la
reproduction des pattes des
Ecrevisses & des Crables. Il
fit voir que les Sçavants,
tout sçavants qu'ils sont,
font sujets à de faux préjugez de mesme que le vulgaire ignorant. Les paysans
qui ont coustume de pescher desEcrevisses,remarquent qu'ils en trouvent
tres-souvent dont les pattes
ou l'une des serres de devant sont plus courtes &
plus petites l'une que l'aurre. La premiere idée qui
leur vientsurcela, est que
c'estune jeune patte qui repouffe à la place d'une autre qu'elles ont perduë, &
cela leur avoit paru d'autant plus vray semblable
que la crouste ou espece
d'écaille qui couvre cette
jeune patte, est beaucoup
plus tendre que la crouste
du reste du corps. Un Sçavant vient qui prétend convaincre mon paysan par un
argument ex absurdo.Cela
n'est pas,luy dit-il,carcela ne se peut pas; la patte
de l'Ecrevisse est composée
demuscles, d'arteres, de
veines, de nerfs, tous rangez & disposez d'une certaine maniere, pour pou-
voir accomplir les mouvements de cette partie. Or
toute cettestructure organique ne peut estre l'effet
que d'un developpement,&
non point l'effet d'une reproduction. Ce n'est point
l'effet d'une reproduction
,
car il faudroit il) pposerune
infinité de chacune des parties propres à former les
differents organes de l'Ecrevisse, & renferméestoutes dans l'Ecrevisse,
ce qui
est absurde.Ce ne peut donc
estre que l'effet d'un developpement. Mais ce deve-
loppement ne se peurfaire
qu'une fois à la sortie de
l'œuf qui renferme l'Ecrevisse en raccourci, & par
consequent lapatteunefois
coupée ne se reproduit
plus. Le paysan ne sceut
que respondre à cet argument dans lequel il se
perd ,& il est tout prest de
croire quil a tort. Monsieur
de Reaumur termine la diC.
pute par l'experiencequi eflr
le juste Juge dans cette affaire comme dans beaucoup d'autres qui se trouvent vrayes sans estre vray-
semblables. Il enferme des
Ecrevisses après leur avoir
coupé les serres ou les pattes, & au bout de six sermaines on en voit reparoistre de nouvelles, qui dans
l'espace de quelques mois
acquierent la grosseur & la
perfeaion des premieres.
Voila le Sçavant confondu
avec tout son raisonnement. Monsieur de Reaumur cherche à le sauver par
quelque conjecture; mais
toutes ces conjectures font
fort foibles, & il faut convenir que sur la formation
j<
des corps organisez nous
sommes encore tres
-
ignorans. Il seroit feulement à
souhaitter que tant de braves gens qui ont perdu dans
ces dernieres guerres leurs
bras & leursjambes pussent
les voir renaistre de la mesme maniere.
A la fin de chaque le£tu-'
re Monsieur l'Abbé Bignon
Président de rAssemble'e,
donna des loüanges tresobligeantes à l'autheur de
chaque Memoire, & fit sentir au public avec beaucoup
de netteté & d'élegance
tout
tout ce qu'il y
avoir de beau
& d'utile dans ce qu'on venoit de lire.
On donnera separement dans
les kltrcures suivants les Extraits des Discours les plus curieux ~& les plus solides entre
ceux qu'on a prononcez dans
cette djemblée.
de ce qui s'est pallé à
lowjcrture de l'Academie des Sciences, le
16. Novembre 1712.
L Académie Royale des
Sciences fie l'ouverture de
ses Exercices par une assem-
blée publique qui se tint le
Mercredy iG. de Novembre. Monsieur de Fonrenelles y
fit l'éloge de deux
Académiciens morts pendant le cours de l'année.
L'un estoit Monsieur Berger Medecin, & Eleve de
Monsieur Rombery, pour
la Chymie
;
l'autre estoit
Monsieur Cassini celebre
par ses découvertes astronomiques. Jamais Panegyjfiite n'avoit peuc-estre eu
un si beau cha-rr,p, & peutestre jamais aussi Panegyriste n'a-t'il mieux rempli
l'attente du public. On fou,
haitteroit pouvoir donner
au public l'extrait del'éloge queMonsieur de Foncenelles fit de cegrand homme ; mais ce font de ces
choses qui perdent trop de
leurs graces dans unExtrait.
D'ailleurs on espere que les
amis de Monsieur Cassini
engagerent Monsieur de
Fontenelles à prévenirl'empressement du public sur cela
,
& à laisser imprimer cet
Eloge avant les Memoires
de l'Académie qui ne pa4*
roistront pas de quelqaeé
a
nées d'icy.
Monsieurde la Hire l'aisné lut enfuire la description
d'une machine par le moyen de laquelle un homme
dans (on carrosse peut détacher les chevaux qui tirent le carrosse loriqu'ils
prennent le mors aux dents,
& cela très promptemenc
& sans embarras.
Apres luy Monsieur Maraldi lut un Memoire contenant des observationstrés
curieuses sur les Abeilles.
Il les divise en trois classes,
les masles, les femelles ôc
les fieslons. Il raconta la
maniere dontelles s'y prennent pour construire leurs
cellules avec la cire, comment les femelles escortées
chacune de cinq ou six autres abeilles vont pondre
un œuf dans chaque cellule, comment celles qui les
accompagnent fermentla
cellule avec de la cire dans
un certain temps & la r'ouvrent ensuite pour en laisser
sortir la nouvelle mouche
qui vient d'éclorre
; comment au bout de quelque
temps elles chassent ou
tuent tous lesfreslons; comment elles chargent leurs
cuisses de cire qu'elles recueillent sur lesfleurs,avec
quel artificecelles qui sont
dans la ruche déchargent
celles qui viennent chargées, comment ellesremplissent de miel leurs magasins pour l'hyver, & plusieurs autres pareilles obfervations.
La (canee finit par la lecture d'un Memoire deMonsieur de Reaumur
,
sur la
reproduction des pattes des
Ecrevisses & des Crables. Il
fit voir que les Sçavants,
tout sçavants qu'ils sont,
font sujets à de faux préjugez de mesme que le vulgaire ignorant. Les paysans
qui ont coustume de pescher desEcrevisses,remarquent qu'ils en trouvent
tres-souvent dont les pattes
ou l'une des serres de devant sont plus courtes &
plus petites l'une que l'aurre. La premiere idée qui
leur vientsurcela, est que
c'estune jeune patte qui repouffe à la place d'une autre qu'elles ont perduë, &
cela leur avoit paru d'autant plus vray semblable
que la crouste ou espece
d'écaille qui couvre cette
jeune patte, est beaucoup
plus tendre que la crouste
du reste du corps. Un Sçavant vient qui prétend convaincre mon paysan par un
argument ex absurdo.Cela
n'est pas,luy dit-il,carcela ne se peut pas; la patte
de l'Ecrevisse est composée
demuscles, d'arteres, de
veines, de nerfs, tous rangez & disposez d'une certaine maniere, pour pou-
voir accomplir les mouvements de cette partie. Or
toute cettestructure organique ne peut estre l'effet
que d'un developpement,&
non point l'effet d'une reproduction. Ce n'est point
l'effet d'une reproduction
,
car il faudroit il) pposerune
infinité de chacune des parties propres à former les
differents organes de l'Ecrevisse, & renferméestoutes dans l'Ecrevisse,
ce qui
est absurde.Ce ne peut donc
estre que l'effet d'un developpement. Mais ce deve-
loppement ne se peurfaire
qu'une fois à la sortie de
l'œuf qui renferme l'Ecrevisse en raccourci, & par
consequent lapatteunefois
coupée ne se reproduit
plus. Le paysan ne sceut
que respondre à cet argument dans lequel il se
perd ,& il est tout prest de
croire quil a tort. Monsieur
de Reaumur termine la diC.
pute par l'experiencequi eflr
le juste Juge dans cette affaire comme dans beaucoup d'autres qui se trouvent vrayes sans estre vray-
semblables. Il enferme des
Ecrevisses après leur avoir
coupé les serres ou les pattes, & au bout de six sermaines on en voit reparoistre de nouvelles, qui dans
l'espace de quelques mois
acquierent la grosseur & la
perfeaion des premieres.
Voila le Sçavant confondu
avec tout son raisonnement. Monsieur de Reaumur cherche à le sauver par
quelque conjecture; mais
toutes ces conjectures font
fort foibles, & il faut convenir que sur la formation
j<
des corps organisez nous
sommes encore tres
-
ignorans. Il seroit feulement à
souhaitter que tant de braves gens qui ont perdu dans
ces dernieres guerres leurs
bras & leursjambes pussent
les voir renaistre de la mesme maniere.
A la fin de chaque le£tu-'
re Monsieur l'Abbé Bignon
Président de rAssemble'e,
donna des loüanges tresobligeantes à l'autheur de
chaque Memoire, & fit sentir au public avec beaucoup
de netteté & d'élegance
tout
tout ce qu'il y
avoir de beau
& d'utile dans ce qu'on venoit de lire.
On donnera separement dans
les kltrcures suivants les Extraits des Discours les plus curieux ~& les plus solides entre
ceux qu'on a prononcez dans
cette djemblée.
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Résumé : EXTRAIT de ce qui s'est passé à l'ouverture de l'Academie des Sciences, le 16. Novembre 1712.
Le 16 novembre 1712, l'Académie Royale des Sciences inaugura ses exercices par une assemblée publique. Monsieur de Fontenelle prononça l'éloge de deux académiciens décédés : Monsieur Berger, médecin et chimiste, et Monsieur Cassini, renommé pour ses découvertes astronomiques. L'éloge de Cassini fut particulièrement apprécié mais ne fut pas publié pour en préserver l'intégralité. Monsieur de la Hire présenta une machine permettant à un homme dans son carrosse de détacher rapidement les chevaux qui prennent le mors aux dents. Monsieur Maraldi exposa un mémoire sur les abeilles, les classant en mâles, femelles et faussaires. Il décrivit leur mode de construction des cellules, la ponte des œufs, la fermeture et l'ouverture des cellules, l'élimination des faussaires, et le stockage de miel pour l'hiver. Monsieur de Reaumur lut un mémoire sur la reproduction des pattes des écrevisses et des crabes. Il démontra que les savants, comme le vulgaire, peuvent avoir des préjugés. Les paysans observaient souvent des écrevisses avec des pattes plus courtes, pensant qu'elles repoussaient. Un savant contesta cette idée, affirmant que la structure des pattes ne permettait pas leur reproduction. Reaumur prouva par expérience que les pattes coupées repoussaient effectivement, confondant ainsi le savant et son raisonnement. L'abbé Bignon, président de l'assemblée, conclut en louant les auteurs des mémoires et en soulignant la beauté et l'utilité des discours présentés. Les extraits des discours les plus curieux et solides seront publiés séparément dans les lettres suivantes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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10
p. 1873-1882
LETTRE écrite de Marseille, le 1. Juillet 1731. A M. de la R. au sujet des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
Début :
Je n'ay pû lire sans étonnement, Monsieur, les Eloges avec lesquels [...]
Mots clefs :
Comédie, Éloges, Molière, Nourriture des passions, Assemblage des ruses, Obscènes, Profanes, Anathèmes, Tolérance, Conciles
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Marseille, le 1. Juillet 1731. A M. de la R. au sujet des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
LETTRE écrite de Marseille , le 1.
Juillet 1731. A M. de la R. au sujet
des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
E n'ay pû lire sans étonnement ,
Monsieur , les Eloges avec lesquels
vous annoncés dans votre Mercure du
mois de May dernier les Discours du P.
le Brun sur la Comédie. Si le P.. le Brun
a refuté si solidement la Lettre du P.
Caffaro, qui a justifié les Comédies telles
qu'on les représente depuis Moliere , si
le P. le Brun a raison de dépeindre nôtre
>> Théatre comme l'Ecole de l'impureté
» la nourriture des passions , l'assem
» blage des ruses du Demon pour les re-
» veiller , ou les yeux sont environnés
» d'objets seducteurs , les oreilles ouvertes
à des Discours souvent obscénes .
et toujours prophanes , qui infectent »
9
» le
1874 MERCURE DE FRANCE
» le coeur , et l'esprit , pourquoy , homme
pieux et rigoriste , comme vous le
paroissés dans cet Extrait , nous donnezvous
dans tous vos Mercures des Analises
de toutes les pieces de Théatre , si vives
, et si expressives , que vous engagez
la plupart de vos Lecteurs à aller partieiper
à ces Spectacles que le P. le Brun
soutient si pernicieux et si criminels ?
une personne d'esprit doit toujours parler
, et agir par principes. La Comédie
telle qu'on la représente depuis plus de
30. ans sur nôtre Théatre est un mal en
elle-même , ou elle n'en est pas un . Si elleest
encore un mal en elle-même , comme
elle étoit lorsque les Peres de l'Eglise et
les Conciles Pont condamnée avec tant
sagesse , non seulement les Comédiens
meritent toujours les Anathémes que
PEglise a autrefois prononcés contre eux ,
mais la conduite de quelques Rigoristes
qui refusent d'absoudre tous ceux qui assistent
à la Comédie est reguliere , et doit
absolument être suivie par tous les Directeurs.
La tolerance du P. le Brun qui n'ose:
condamner ceux qui y assistent , est donc
contraire aux principes , puisqu'il n'a
pu ignorer qu'une chose qui est crimi
nelle en elle - même , ne doit jamais être
tolerée et l'on seroit mieux fondé à lu
de
demander
A O UST. 1731. 1.877
demander une retractation , s'il vivoit
encore , qu'on ne l'a été à en exiger
une du P. Caffaro , qui après avoir éta
bli et démontré , par des principes , et
par des faits incontestables , que nôtre
Comédie n'est pas un mal en elle - même
a conclu qu'on y pouvoit assister très - innocemment.
Si la Comédie épurée et châtiée , comme
elle est sur nôtre Théatre , n'est plus
un mal en elle -même , ceux qui la représentent
ne meritent plus les foudres de
PEglise , et ils sont en droit depuis longtems
de faire à ce sujet de très-humbles
remontrances à ceux de nos Evêques qui
continuent à faire prononcer contre eux
des Anathémes dans les Eglises Paroissia
les de leurs Diocèses.
Le P. Caffaro n'a entrepris de justifier
nos Comédies qu'en faisant un juste pa
rallele entre les anciennes et celles de notre
tems. Il a mis en fait que les Peres et
les Conciles n'ont prononcé des Anathémes
contre les Comédies , que parce
que ce n'étoient de leur tems que des
assemblées d'impudicité , où l'on n'approuvoit
que ce qui étoit vicieux , où
Les Acteurs jouoient avec les gestes les
plus honteux , où les hommes et les femes
méprisoient toutes les regles de la
pudeus,
1876 MERCURE DE FRANCE
pudeur, et où l'on prononçoit souvent des
blasphemes contre le saint Nom de Dieu :
ce qu'il a prouvé par les témoignages
de Tertulien , de Salvien , de Lactance
de S. Cyprien , et de S. Chrisostome. It a
remarqué qu'à mesure que le Théatre
s'est purgé de ses ordures , et de ses impietés
, les Peres de l'Eglise l'ont traité
avec plus d'indulgence que S. Thomas
dans la 2. partie de sa Somme , art. 2 .
quest. 168. soutient que dans les jeux
et les divertissemens , lorsqu'ils sont modérez
, non seulement il n'y croît point
de mal , mais même qu'il y trouve quelque
bien , parcequ'il est necessaire
l'homme relâche quelquefois son esprit
trop attaché aux affaires : que ce Pere
ajoute que ce délassement de l'esprit ne
se fait que par des paroles ou des actions
divertissantes ou ingenieuses. Ce que j'ai
trouvé en effet dans sa conclusion , où il
dit précisement : Sed ista remissio anime à
rebus agendis fit per ludicra verba et facta ;
'd'où ce Docteur de l'Eglise , qui dans un
autre endroit justifie l'emploi des Comédiens
, conclut que la Comédie , qui ne
consiste qu'en de pareils divertissemens
ne sçauroit passer pour criminelle , pourvû
qu ' lle soit renferniée dans les bornes
de la pudeur , et de la moderation : que
que
A O UST . 1731. 1877
S.Bonaventure , Dist. 16. Dub . 13. dit
formellement que les Spectacles sons
bons , et permis , s'ils s'ont accompagnés
des précautions nécessaires : Doctrine
qu'il avoit apprise de son Maître Albert
le Grand , qui l'a publié hautement
dans ses ouvrages : que S. Antonin decide
la même chose que S. François de
Sales , ce grand Directeur des ames devotes
ne deffendoit point les Comédies , quofqu'elles
fussent très - communes de son
tems : et que l'illustre S. Charles Borromée
les permit dans son Diocèse par une
Ordonnance de 1583. à condition qu'elles
seroient examinées et approuvées par
son grand Vicaire , afin qu'il ne s'y glissat
rien de deshonnête. A quoy il auroit
pû ajouter que la plupart des Casuistes
modernes les plus éclairés ont soutenu
que la Comédie étoit permise , entre
autres les Cardinaux de Turrecremata ,
et Cajetan , Jean Viguier , Medina , Silvester
, Comitolius , Henriques , Bonacina
, Tabiena : et que les Censeurs Rcmains
ont condamné dans l'Histoire Ecelesiastique
du P. Alexandre cette proposition
Comedia sunt illicita.
Le P. Caffaro a mis aussi en fait que
la Comédie étoit à present si châtiée et
si épurée sur le Théatre François , qu'il
n'y
1878 MERCURE DE FRANCE
n'y avoit rien que les oreilles les plus
chastes ne pussent entendre , et qu'elle
étoit même capable de corriger beaucoup
de vices et d'abus dans la conduite des
hommes.
*
Le P. le Brun ne pouvoit refuter solidement
la Lettre du P. Caffaro qu'en démontrant
la fausseté de tous ces faits .
et en prouvant que nos Comédies sont
encore aussi dissolues , et aussi impies ,
que celles qu'on représentoit dans les
tems que les Peres de l'Eglise les ont anathematisées.
L'a- t- il fait ? l'a- t-il pû faire?
je vous en laisse juge vous - même , et
toutes les personnes éclairées qui se trou
vent dans le Public.
Le P. le Brun , que j'ai connu particu
fierement , avoit beaucoup de zele , et de
pieté. Il a professé avec succès la Théologie
positive à S. Magloire , où il parloit
facilement et avec beaucoup de netteté ;
mais il ne s'étoit pas accoutumé à raisonner
par principes : et il n'avoit jamais étudié
la bonne Phisique , comme il n'a que
trop paru dans le Traité qu'il composa
sur la baguette divinatoire , au sujet de
l'Avanture du fameux Jacques Aimard ,
arrivée à Lyon en 1692. qu'il ne put
expliquer qu'en l'attribuant au pouvoir
duDemon . C'est cet ouvrage dont on nous
promer
A O UST. 1731. 1879
promet une seconde Edition sous le titre
de Traité du Discernement des effets naturels
d'avec ceux qui ne le sont pas.
Pour en juger sçavamment il faut lire la
Phisique occulte de l'Abbé de Vallemont,
qui raisonne sur des Principes bien diffe
rens , et qui connoissant les ressorts se
crets de la nature , et ses agens invisibles
, n'a pas eu besoin du secours du
Prince des ténebres pour expliquer cet
évenement , non plus qu'une infinité
d'autres des plus extraordinaires.
Mais pour vous convaincre entierement
du peu de justesse des invectives
du P. le Brun contre notre Théatre
qu'il me soit permis , Monsieur , d'ajoûter
encore quelques Reflexions sur ce su→
jet , qui est d'autant plus important , que
ce Traité sur la Comédie , qui vous a
paru si solide , pourroit causer du scrupule
, et de l'embarras à plusieurs de nos
Directeurs , qui croyant comme l'auteur ,
que notre Comédie est une des plus pernicieuses
inventions du Demon , pourroient
ne pas croire comme lui qu'on la
puisse tolerer , et permettre aux Chré
tiens d'y assister .
Quoy de plus grand ! quoy de plus noble
que tous les sentimens qui regnent
dans les Tragedies de Corneille , et ide
Racine
1880 MERCURE DE FRANCE
›
Racine , où l'on voit toujours la vertu
applaudie , et triomphante ? toutes les
Pieces de Moliere , et des autres Auteurs
modernes , ont- elles d'autre but que de
combattre les vices , en les représentant
aux yeux des Spectateurs avec tous les
traits capables de les rendre ridicules , et
odieux ; mais , disent le P.le Brun et quelques
autres Rigoristes , il n'y a point de
Tragedie , ni de Comédie où il n'y ait
quelque intrigue d'Amour , et où l'ambition
, la jalousie , la vangeance , ou la harne
ne paroissent dans tout leur jour. Cette
objection se détruit en remarquant
que toutes ces passions ne sont étalées sur
notre Théatre que pour les rendre odieuses
: et que quand elles seroient capables
de faire impression dans quelque coeur
foible , il faut bien distinguer les choses
qui peuvent par hazard exciter les passions
, d'avec celles qui naturellement
les excitent en effet. Les dernieres sont
criminelles , et déffendues : mais pour
les premieres , il faudroit fuir dans les
deserts pour les éviter. On ne sçauroit
faire un pas , entrer dans les lieux les
plus saints , lire un Livre d'Histoire ,
enfin vivre dans le monde , sans rencontrer
mille objets capables d'exciter les
passions. Faut- il qu'une belle femme
'aille
A O UST. 1731. 1881
n'aille jamais aux promenades , ni même
à l'Eglise que les personnes de la Cour
les Prelats , et les personnes constituées
en dignité quittent un éclat qui leur est
à présent de bienséance , et même de necessité
? et que personne ne porte d'épée,
à cause des mauvais effets que tout cela
peut produire ? cette pensée seroit ridicnle.
Faut-il , disoit le sage Licurgus ,
arracher les vignes , parcequ'il se trouve
des personnes qui boivent trop de leur
jus ? faut- il aussi deffendre la Comédie
qui sert aux hommes d'un honnête divertissement
, parce qu'il y a quelques
personnes qui ne la peuvent voir sans
ressentir interieurement les passions qu'on
y représente ?
On doit donc conclure que la Comédie
, avec les conditions marquées par
S. Charles , et par les autres Docteurs
que nous avons citez , est de sa nature
indifferente , et même a son utilité : que
les personnes trop susceptibles , à qui
elle est dangereuse , la doivent éviter :
et que les autres ne se la doivent permettre
que comme un plaisir innocent pour
se délasser de leurs occupations.
Enfin une derniere raison sans replique
contre les invectives du P. le Brun
c'est que dans un Royaume aussi Chrétien
que
882 MERCURE DE FRANCE
que la France , dans une Ville aussi bien
policée que Paris , sous les yeux de differens
Evêques recommandables
par leurs
lumieres et par leur zele , de tant de Magistrats
si graves et si vertueux , et
en particulier
de celui qui préside à la
Police , dont la pieté est aussi connue
que
l'étendue
de ses lumieres , la Comédie
établie par Lettres Patentes dès l'an 1402 .
et autorisée par Arrêts du Parlement
, ne seroit pas entretenue
aux dépens du Roy ,
et soutenue comme un établissement
necessaire
au bien public , et que leurs Majestés
si récommandables
par leur religion
, et
par leur vertu exemplaire
, ne la feroient
pas représenter
devant elles fi elle
étoit regardée
comme une pernicieuse
invention
du demon . Je suis toujours
Monsieur
, avec toute l'estime possible ,
Votre très humble & c. P. D. L. Ì.
Juillet 1731. A M. de la R. au sujet
des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
E n'ay pû lire sans étonnement ,
Monsieur , les Eloges avec lesquels
vous annoncés dans votre Mercure du
mois de May dernier les Discours du P.
le Brun sur la Comédie. Si le P.. le Brun
a refuté si solidement la Lettre du P.
Caffaro, qui a justifié les Comédies telles
qu'on les représente depuis Moliere , si
le P. le Brun a raison de dépeindre nôtre
>> Théatre comme l'Ecole de l'impureté
» la nourriture des passions , l'assem
» blage des ruses du Demon pour les re-
» veiller , ou les yeux sont environnés
» d'objets seducteurs , les oreilles ouvertes
à des Discours souvent obscénes .
et toujours prophanes , qui infectent »
9
» le
1874 MERCURE DE FRANCE
» le coeur , et l'esprit , pourquoy , homme
pieux et rigoriste , comme vous le
paroissés dans cet Extrait , nous donnezvous
dans tous vos Mercures des Analises
de toutes les pieces de Théatre , si vives
, et si expressives , que vous engagez
la plupart de vos Lecteurs à aller partieiper
à ces Spectacles que le P. le Brun
soutient si pernicieux et si criminels ?
une personne d'esprit doit toujours parler
, et agir par principes. La Comédie
telle qu'on la représente depuis plus de
30. ans sur nôtre Théatre est un mal en
elle-même , ou elle n'en est pas un . Si elleest
encore un mal en elle-même , comme
elle étoit lorsque les Peres de l'Eglise et
les Conciles Pont condamnée avec tant
sagesse , non seulement les Comédiens
meritent toujours les Anathémes que
PEglise a autrefois prononcés contre eux ,
mais la conduite de quelques Rigoristes
qui refusent d'absoudre tous ceux qui assistent
à la Comédie est reguliere , et doit
absolument être suivie par tous les Directeurs.
La tolerance du P. le Brun qui n'ose:
condamner ceux qui y assistent , est donc
contraire aux principes , puisqu'il n'a
pu ignorer qu'une chose qui est crimi
nelle en elle - même , ne doit jamais être
tolerée et l'on seroit mieux fondé à lu
de
demander
A O UST. 1731. 1.877
demander une retractation , s'il vivoit
encore , qu'on ne l'a été à en exiger
une du P. Caffaro , qui après avoir éta
bli et démontré , par des principes , et
par des faits incontestables , que nôtre
Comédie n'est pas un mal en elle - même
a conclu qu'on y pouvoit assister très - innocemment.
Si la Comédie épurée et châtiée , comme
elle est sur nôtre Théatre , n'est plus
un mal en elle -même , ceux qui la représentent
ne meritent plus les foudres de
PEglise , et ils sont en droit depuis longtems
de faire à ce sujet de très-humbles
remontrances à ceux de nos Evêques qui
continuent à faire prononcer contre eux
des Anathémes dans les Eglises Paroissia
les de leurs Diocèses.
Le P. Caffaro n'a entrepris de justifier
nos Comédies qu'en faisant un juste pa
rallele entre les anciennes et celles de notre
tems. Il a mis en fait que les Peres et
les Conciles n'ont prononcé des Anathémes
contre les Comédies , que parce
que ce n'étoient de leur tems que des
assemblées d'impudicité , où l'on n'approuvoit
que ce qui étoit vicieux , où
Les Acteurs jouoient avec les gestes les
plus honteux , où les hommes et les femes
méprisoient toutes les regles de la
pudeus,
1876 MERCURE DE FRANCE
pudeur, et où l'on prononçoit souvent des
blasphemes contre le saint Nom de Dieu :
ce qu'il a prouvé par les témoignages
de Tertulien , de Salvien , de Lactance
de S. Cyprien , et de S. Chrisostome. It a
remarqué qu'à mesure que le Théatre
s'est purgé de ses ordures , et de ses impietés
, les Peres de l'Eglise l'ont traité
avec plus d'indulgence que S. Thomas
dans la 2. partie de sa Somme , art. 2 .
quest. 168. soutient que dans les jeux
et les divertissemens , lorsqu'ils sont modérez
, non seulement il n'y croît point
de mal , mais même qu'il y trouve quelque
bien , parcequ'il est necessaire
l'homme relâche quelquefois son esprit
trop attaché aux affaires : que ce Pere
ajoute que ce délassement de l'esprit ne
se fait que par des paroles ou des actions
divertissantes ou ingenieuses. Ce que j'ai
trouvé en effet dans sa conclusion , où il
dit précisement : Sed ista remissio anime à
rebus agendis fit per ludicra verba et facta ;
'd'où ce Docteur de l'Eglise , qui dans un
autre endroit justifie l'emploi des Comédiens
, conclut que la Comédie , qui ne
consiste qu'en de pareils divertissemens
ne sçauroit passer pour criminelle , pourvû
qu ' lle soit renferniée dans les bornes
de la pudeur , et de la moderation : que
que
A O UST . 1731. 1877
S.Bonaventure , Dist. 16. Dub . 13. dit
formellement que les Spectacles sons
bons , et permis , s'ils s'ont accompagnés
des précautions nécessaires : Doctrine
qu'il avoit apprise de son Maître Albert
le Grand , qui l'a publié hautement
dans ses ouvrages : que S. Antonin decide
la même chose que S. François de
Sales , ce grand Directeur des ames devotes
ne deffendoit point les Comédies , quofqu'elles
fussent très - communes de son
tems : et que l'illustre S. Charles Borromée
les permit dans son Diocèse par une
Ordonnance de 1583. à condition qu'elles
seroient examinées et approuvées par
son grand Vicaire , afin qu'il ne s'y glissat
rien de deshonnête. A quoy il auroit
pû ajouter que la plupart des Casuistes
modernes les plus éclairés ont soutenu
que la Comédie étoit permise , entre
autres les Cardinaux de Turrecremata ,
et Cajetan , Jean Viguier , Medina , Silvester
, Comitolius , Henriques , Bonacina
, Tabiena : et que les Censeurs Rcmains
ont condamné dans l'Histoire Ecelesiastique
du P. Alexandre cette proposition
Comedia sunt illicita.
Le P. Caffaro a mis aussi en fait que
la Comédie étoit à present si châtiée et
si épurée sur le Théatre François , qu'il
n'y
1878 MERCURE DE FRANCE
n'y avoit rien que les oreilles les plus
chastes ne pussent entendre , et qu'elle
étoit même capable de corriger beaucoup
de vices et d'abus dans la conduite des
hommes.
*
Le P. le Brun ne pouvoit refuter solidement
la Lettre du P. Caffaro qu'en démontrant
la fausseté de tous ces faits .
et en prouvant que nos Comédies sont
encore aussi dissolues , et aussi impies ,
que celles qu'on représentoit dans les
tems que les Peres de l'Eglise les ont anathematisées.
L'a- t- il fait ? l'a- t-il pû faire?
je vous en laisse juge vous - même , et
toutes les personnes éclairées qui se trou
vent dans le Public.
Le P. le Brun , que j'ai connu particu
fierement , avoit beaucoup de zele , et de
pieté. Il a professé avec succès la Théologie
positive à S. Magloire , où il parloit
facilement et avec beaucoup de netteté ;
mais il ne s'étoit pas accoutumé à raisonner
par principes : et il n'avoit jamais étudié
la bonne Phisique , comme il n'a que
trop paru dans le Traité qu'il composa
sur la baguette divinatoire , au sujet de
l'Avanture du fameux Jacques Aimard ,
arrivée à Lyon en 1692. qu'il ne put
expliquer qu'en l'attribuant au pouvoir
duDemon . C'est cet ouvrage dont on nous
promer
A O UST. 1731. 1879
promet une seconde Edition sous le titre
de Traité du Discernement des effets naturels
d'avec ceux qui ne le sont pas.
Pour en juger sçavamment il faut lire la
Phisique occulte de l'Abbé de Vallemont,
qui raisonne sur des Principes bien diffe
rens , et qui connoissant les ressorts se
crets de la nature , et ses agens invisibles
, n'a pas eu besoin du secours du
Prince des ténebres pour expliquer cet
évenement , non plus qu'une infinité
d'autres des plus extraordinaires.
Mais pour vous convaincre entierement
du peu de justesse des invectives
du P. le Brun contre notre Théatre
qu'il me soit permis , Monsieur , d'ajoûter
encore quelques Reflexions sur ce su→
jet , qui est d'autant plus important , que
ce Traité sur la Comédie , qui vous a
paru si solide , pourroit causer du scrupule
, et de l'embarras à plusieurs de nos
Directeurs , qui croyant comme l'auteur ,
que notre Comédie est une des plus pernicieuses
inventions du Demon , pourroient
ne pas croire comme lui qu'on la
puisse tolerer , et permettre aux Chré
tiens d'y assister .
Quoy de plus grand ! quoy de plus noble
que tous les sentimens qui regnent
dans les Tragedies de Corneille , et ide
Racine
1880 MERCURE DE FRANCE
›
Racine , où l'on voit toujours la vertu
applaudie , et triomphante ? toutes les
Pieces de Moliere , et des autres Auteurs
modernes , ont- elles d'autre but que de
combattre les vices , en les représentant
aux yeux des Spectateurs avec tous les
traits capables de les rendre ridicules , et
odieux ; mais , disent le P.le Brun et quelques
autres Rigoristes , il n'y a point de
Tragedie , ni de Comédie où il n'y ait
quelque intrigue d'Amour , et où l'ambition
, la jalousie , la vangeance , ou la harne
ne paroissent dans tout leur jour. Cette
objection se détruit en remarquant
que toutes ces passions ne sont étalées sur
notre Théatre que pour les rendre odieuses
: et que quand elles seroient capables
de faire impression dans quelque coeur
foible , il faut bien distinguer les choses
qui peuvent par hazard exciter les passions
, d'avec celles qui naturellement
les excitent en effet. Les dernieres sont
criminelles , et déffendues : mais pour
les premieres , il faudroit fuir dans les
deserts pour les éviter. On ne sçauroit
faire un pas , entrer dans les lieux les
plus saints , lire un Livre d'Histoire ,
enfin vivre dans le monde , sans rencontrer
mille objets capables d'exciter les
passions. Faut- il qu'une belle femme
'aille
A O UST. 1731. 1881
n'aille jamais aux promenades , ni même
à l'Eglise que les personnes de la Cour
les Prelats , et les personnes constituées
en dignité quittent un éclat qui leur est
à présent de bienséance , et même de necessité
? et que personne ne porte d'épée,
à cause des mauvais effets que tout cela
peut produire ? cette pensée seroit ridicnle.
Faut-il , disoit le sage Licurgus ,
arracher les vignes , parcequ'il se trouve
des personnes qui boivent trop de leur
jus ? faut- il aussi deffendre la Comédie
qui sert aux hommes d'un honnête divertissement
, parce qu'il y a quelques
personnes qui ne la peuvent voir sans
ressentir interieurement les passions qu'on
y représente ?
On doit donc conclure que la Comédie
, avec les conditions marquées par
S. Charles , et par les autres Docteurs
que nous avons citez , est de sa nature
indifferente , et même a son utilité : que
les personnes trop susceptibles , à qui
elle est dangereuse , la doivent éviter :
et que les autres ne se la doivent permettre
que comme un plaisir innocent pour
se délasser de leurs occupations.
Enfin une derniere raison sans replique
contre les invectives du P. le Brun
c'est que dans un Royaume aussi Chrétien
que
882 MERCURE DE FRANCE
que la France , dans une Ville aussi bien
policée que Paris , sous les yeux de differens
Evêques recommandables
par leurs
lumieres et par leur zele , de tant de Magistrats
si graves et si vertueux , et
en particulier
de celui qui préside à la
Police , dont la pieté est aussi connue
que
l'étendue
de ses lumieres , la Comédie
établie par Lettres Patentes dès l'an 1402 .
et autorisée par Arrêts du Parlement
, ne seroit pas entretenue
aux dépens du Roy ,
et soutenue comme un établissement
necessaire
au bien public , et que leurs Majestés
si récommandables
par leur religion
, et
par leur vertu exemplaire
, ne la feroient
pas représenter
devant elles fi elle
étoit regardée
comme une pernicieuse
invention
du demon . Je suis toujours
Monsieur
, avec toute l'estime possible ,
Votre très humble & c. P. D. L. Ì.
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Résumé : LETTRE écrite de Marseille, le 1. Juillet 1731. A M. de la R. au sujet des Discours du P. le Brun sur la Comédie.
La lettre datée du 1er juillet 1731 critique les éloges du Père le Brun sur la comédie, publiés dans le Mercure de mai précédent. L'auteur exprime son étonnement face à la contradiction entre les discours rigoristes du Père le Brun et les analyses détaillées des pièces de théâtre dans le Mercure, qui encouragent les lecteurs à assister à des spectacles que le Père le Brun considère comme pernicieux. L'auteur soutient que la comédie, telle qu'elle est représentée depuis Molière, n'est pas intrinsèquement mauvaise. Il argue que les Pères de l'Église et les Conciles ont condamné les comédies en raison de leur impudicité et de leur immoralité, mais que les comédies modernes sont épurées et peuvent même corriger des vices. Le Père Caffaro, qui a justifié les comédies, a comparé les anciennes comédies aux modernes, notant que les premières étaient des assemblées d'impudicité, tandis que les secondes sont modérées et divertissantes. Le Père le Brun, connu pour son zèle et sa piété, n'a pas réussi à réfuter solidement les arguments du Père Caffaro. L'auteur critique également le Père le Brun pour son manque de raisonnement par principes et son recours au démon pour expliquer des phénomènes naturels. La lettre conclut en affirmant que la comédie, sous certaines conditions, est indifférente et même utile. Elle souligne que les autorités religieuses et civiles en France tolèrent et soutiennent la comédie, ce qui montre qu'elle n'est pas considérée comme une invention pernicieuse du démon.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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11
p. 2868-2869
« Jean Dessaint, Libraire à Paris, va débiter un Ouvrage qui paroît mériter l'attention [...] »
Début :
Jean Dessaint, Libraire à Paris, va débiter un Ouvrage qui paroît mériter l'attention [...]
Mots clefs :
Basse, Poème, Musique, Éloges, Chasse, Oraisons funèbres, Poésies spirituelles et morales
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Jean Dessaint, Libraire à Paris, va débiter un Ouvrage qui paroît mériter l'attention [...] »
Jean Dessaint , Libraire à Paris , va débiter
un Ouvrage qui paroît mériter l'at
tention des Curieux . C'est un Poëme sur
la Musique , et un autre sur la Chasse.
Une partie du premier Poëme a déja paru
à Lyon et en Hollande , et a reçu des
II.Vol.
éloges
DECEMBRE. 1733. 2869
éloges tres flateurs pour l'Auteur. Nous
ne doutons pas que ce que l'on donne de
nouveau ne soit favorablement
accueilli
par le Public. On n'a rien négligé du côté
de l'exécution
pour flater agréablement
les yeux . On y trouvera plusieurs Estampes
dessinées par Mrs de Troyes et Oudry
et gravées par M. Debats.Le Papier d'ailleurs
, le Caractere et l'Impression
vont
de pair avec ce que nous avons de mieux
en ce genre.
Le même Libraire débite une nouvelle
Edition de ce que nous avons de meilleur
en Oraisons Funebres ; c'est- à - dire
celles de Mrs Bossuet , Fléchier et Mascaron
, en 3 vol. in 12. avec le Portrait de
ces deux derniers , gravé par Edelinck. Le
prix de chaque vol . de ces Oraisons Funebres
est de 2 liv . 1o f. relié.
2
›
NOUVELLES POESIES SPIRITUELLES ct
Morales sur les plus beaux Airs de la
Musique Françoise et Italienne , avec la
Basse . A Paris , chez P. N. Lottin rue
S. Jacques 1733. in 4 en large de 44 pages
et 12 pages pour les Fables sur de
petits Airs et sur des Vaudevilles choisis ,
avec la Basse et une Basse en musette ,
prix 3 livres .
un Ouvrage qui paroît mériter l'at
tention des Curieux . C'est un Poëme sur
la Musique , et un autre sur la Chasse.
Une partie du premier Poëme a déja paru
à Lyon et en Hollande , et a reçu des
II.Vol.
éloges
DECEMBRE. 1733. 2869
éloges tres flateurs pour l'Auteur. Nous
ne doutons pas que ce que l'on donne de
nouveau ne soit favorablement
accueilli
par le Public. On n'a rien négligé du côté
de l'exécution
pour flater agréablement
les yeux . On y trouvera plusieurs Estampes
dessinées par Mrs de Troyes et Oudry
et gravées par M. Debats.Le Papier d'ailleurs
, le Caractere et l'Impression
vont
de pair avec ce que nous avons de mieux
en ce genre.
Le même Libraire débite une nouvelle
Edition de ce que nous avons de meilleur
en Oraisons Funebres ; c'est- à - dire
celles de Mrs Bossuet , Fléchier et Mascaron
, en 3 vol. in 12. avec le Portrait de
ces deux derniers , gravé par Edelinck. Le
prix de chaque vol . de ces Oraisons Funebres
est de 2 liv . 1o f. relié.
2
›
NOUVELLES POESIES SPIRITUELLES ct
Morales sur les plus beaux Airs de la
Musique Françoise et Italienne , avec la
Basse . A Paris , chez P. N. Lottin rue
S. Jacques 1733. in 4 en large de 44 pages
et 12 pages pour les Fables sur de
petits Airs et sur des Vaudevilles choisis ,
avec la Basse et une Basse en musette ,
prix 3 livres .
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Résumé : « Jean Dessaint, Libraire à Paris, va débiter un Ouvrage qui paroît mériter l'attention [...] »
Jean Dessaint, libraire à Paris, propose deux ouvrages notables. Le premier est un poème sur la musique, dont une partie a déjà été publiée à Lyon et en Hollande avec des éloges. Cette édition inclut des estampes dessinées par les sieurs de Troyes et Oudry, et gravées par M. Debats, sur un papier de haute qualité. Le second ouvrage est une nouvelle édition des meilleures oraisons funèbres, incluant celles de Bossuet, Fléchier et Mascaron, en trois volumes in-12. Cette édition contient les portraits de Fléchier et Mascaron gravés par Edelinck, et chaque volume est vendu 2 livres 10 sols, relié. Par ailleurs, P. N. Lottin publie des 'Nouvelles Poésies Spirituelles et Morales' sur les plus beaux airs de la musique française et italienne, avec la basse. Cet ouvrage, en format in-4, comprend 44 pages de poésies et 12 pages de fables sur des petits airs et des vaudevilles choisis, avec une basse en musette, au prix de 3 livres.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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12
p. 203-216
MORTS. ÉLOGE HISTORIQUE DE M. LE MARQUIS DE MONTCALM.
Début :
Si l'on doit apprécier les hommes par les sacrifices qu'ils font à la société, [...]
Mots clefs :
Marquis de Montcalm, Sacrifices, Éloges, Vertu, Lieutenant général des armées du roi, Études, Littérature, Carrière militaire, Régiment, Ardeur , Talents, Amérique, Capitaine, Prodige, Campagnes militaires, Exploits, Gloire, Canada, Homme illustre
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MORTS. ÉLOGE HISTORIQUE DE M. LE MARQUIS DE MONTCALM.
MORT S.
ÉLOGE HISTORIQUE
DEM.
LE MARQUIS DE MONTCALM.
SI
&
I l'on doit apprécier les hommes par les facrifices
qu'ils font à la fociété , & par les fervices
qu'ils lui rendent , qui jamais fut plus digne que
M. le Marquis de Montcalm de nos éloges & de
nos regrets ? Immoler fon repos à l'Etat , fe féparer
pour lui de rout ce qu'on a de plus cher
lui donner fon fang & fa vie , eft un devoir attaché
à la noble profeffion des armes , & ce dévoûment
héroïque eft la vertu des Guerriers de
tous les pays & de tous les temps . Mais cette
vertu reçoit un nouveau luftre des talens qui la
fecondent , & des circonftances qui l'éprouvent ;
& jamais elle n'a été ni plus éprouvée ni mieux
foutenue que dans le héros que nous pleurons.
LOUIS-JOSEPH , MARQUIS DE MONTCALMGOZON
DE SAINT VÉRAN , Seigneur de Gabriac
& c. Lieutenant - Général des Armées du Roi ,
Commandeur honoraire de l'Ordre Royal & Mi-
I vi
204 MERCURE
DE FRANCE.
litaire de Saint- Louis , commandant en Chef les :
Troupes Françoifes dans l'Amérique Septentrionale
, étoit né en 1712 d'une très- ancienne famille
de Rouergue . ( a )
le
Elève de M. Dumas , Inventeur du Bureau Typographique
, il ne fit pas moins d'honneur aux
leçons de ce Maître habile que Jeune Candiac
fon frere cader , mort à l'âge de ſept ans , & mis
au nombre des enfans célèbres . (b)
"
M. de Montcalm employa fes premieres années
à l'étude des Langues; & perfonne n'étoit.
plus verfé dans la Littérature Grecque & Latine.
La mémoire eft la nourrice de l'efprit , &
celle de M. de Montcalm étoit fi heureuſe , qu'il
n'oublioit rien de ce qu'il avoit appris une fois.
Il a confervé le goût de l'étude au milieu de
tous les travaux ; & parmi les agrémens de fa
retraite , il comptoit pour beaucoup l'efpérance
d'être reçu
à l'Académie des Belles- Lettres .
Il avoit fervi pendant dix fept ans dans le Régiment
de Hainault Infanterie , où il avoit été
fucceffivement Enfeigne , Lieutenant & Capitaine.
Il fut fait Colonel du Régiment d'Auxerrois
Infanterie , en. 1743 ; Brigadier des Armées du
Roi en 1747 ; Meſtre de Camp d'un nouveau
Régiment de Cavalerie de fon nom , en 1749 ;
a voit ( a ) Jean de Montcalm , l'un de fes ancêtres ,
éponfé Jeanne de Gozon , petite nièce du Grand Maître
Diodat de Gozon , vainqueur du dragon qui defoloit l'Iffs
de Rhodes.
( b ) Jean -Louis- Pierre - Elifabeth de Montcalm de Can
diac , né à Candiac le 7 Novembre 1739 , mort à Paris
le 8 Octobre 1726. Il avoit fait des progrès furprenans
dans les langues Hébraïque , Grecque & Latine , & acquis
des connoiffances prodigieufes pour fon âge. L'Auteur du Bureau typographique avoit fait fur lui la
première expérience de cette nouvelle méthode. Voyez le
Supplément de Moreri à l'Article CANDIA· C.
JANVIER. 1760. 205
Maréchal de Camp & Commandant des Troupes
Françoiles en Amérique , en 1756-3 Commandeur
par honneur de l'Ordre de Saint- Louis , en
175 ; & Lieutenant Général , en 1758 .
Dans les grades inférieurs il le diftingua par
une ardeur & une application fans relâche ; attentif
à recueillir dans chacun de ces emplois les
lumières & l'expérience qui leur font propres &
qui compofent par degrés le fyftême de l'Art
militaire.
Devenu Colonel ' , la connoiffance qu'on avoit
de fes talens & de fon activité , lui fit confier
dans toutes les occafions des commandemens
particuliers ; & il y foutine avec éclat la réputation
qu'il avoit acquife . Il reçut trois bleffures à
la bataille fous Plaifance , donnée le 13 Juin
1746 ; & comme il fe faifoit guérir à Montpellier
de deux coups de fabre à la tête , il apprit
que fon Régiment marchoit pour aller attaquer
le pofte de l'affiette où M. le Chevalier de Belleifle
fut tué. Il part , la tête enveloppée , & , fest
bleffures encore ouvertes , joint fon Corps , fe
trouve à l'attaque , & y reçoit deux coups de feu.
Mais c'eft en Amérique furtout que les qualités
de ce grand Capitaine ont paru dans tour
leur jour. C'est là qu'il a fait voir à quel degré
il réuniſſoit la bravoure du Soldat & la grandeur
d'ame du héros ; la prudence du confeil & l'activité
de l'exécution ; ce fang- froid que rien n'altére
, cette patience que rien ne rebute , & cette
réfolution courageule qui ofe répondre du fuccès
dans des circonftances où la timide (péculation
auroit à peine entrevu des refources. C'eft
là qu'au milieu des Sauvages dont il étoit devenu
le pere , on l'a vu fe plier à leur caractère
féroce , s'endurcir aux mêmes travaux , & fe reftreindre
aux mémes befoins , les apprivoiler par
200 MERCURE DE FRANCE.
la douceur, les attirer par la confiance, les attendrir
par tous les foins de l'humanité compâtiffante , &
faire dominer le refpect & l'amour fur des ames
également indociles au joug de l'obéiffance & au
frein de la difcipline militaire ( c) . C'est là que des
fatigues & des dangers fans nombre & inconnus en
Europe n'ontjamais rallenti fon zèle . Tantôt préfent
à des fpectacles dont l'idée feule fait frémir
la nature tantôt expofé à manquer de
tout , & fouvent à mourir de faim ; réduit pendant
onze mois à quatre onces de pain par
jour ; mangeant du cheval pour donner l'exem
ple , il fut le même dans tous les temps , fati
fait de tout endurer pour la caufe de la Patrie &
pour la gloire de fon Roi. C'eſt là qu'il a exécuté
des chofes prefque incroyables , & que nós
Ennemis eux- mêmes ont regardées comme des
prodiges ; qu'avec fix bataillons François & quelques
troupes de la Colonie , non feulement il a
fait tête à trente , quarante , cinquante mille
hommes , mais qu'il leur en a impofé partout , les
a vaincus , les a diffipés , jufqu'à la malheureufe
journée où vient de périr ce grand homme.
Arrivé dans la Colonie en 1756 , il arrête par
fes bonnes difpofitions l'armée du Général Lou-
( c ) Il étoit venu à bout de les conduire fans leur donner
ni vin , ni eau - de - vie , ni même les chofes dont ils
avoient un befoin réel , & dont on manquoit à l'armée ;
mais il avoit le plus grand foin de leurs malades & de
leurs bleffés . Il connoît , difoient -ils , nos ufages & nos
manières comme s'il avoit été élevé au milieu de nos cabanes.
Loriqu'il reçut à Choueguen la nouvelle que le
Roi l'avoit honoré du Cordon rouge , ils vinrent le complimenter.
Nous fommes charmés ; lui dirent - ils , de la
grace que le grand Onowthio vient de t'accorder , parce
que nous fçavons qu'elle te caufe de la joie. Pour nous ,
nous ne t'en aimons ni ne t'en eftimons davantage , car
F'eft ta perfonne que nous eftimons & que nous aimons.
JANVIER 1760 . 207
don au lac Saint - Sacrement , laiffe des inftruce
tions au Chevalier de Lévi , Commandant en ?
fecond , revient à Montréal & marche rapidement
au lac Ontario , où il trouve trois bataillons
François & environ douze cens hommes de milices .
du pays. Avec cette petite armée qu'il allemble à
Frontenac, il court à Choueguen, y aborde fous le
feu de huit barques de dix , douze & vingt pièces
de canon que l'Anglois avoit fur ce lac , forme
un fiége , ouvre une tranchée , & enlève en cinq ,
jours les trois Forts de l'ennemi ( d ). Il y faic
dix-fept cens quarante-deux prifonniers , parmi
lefquels fe trouvoient quatre-vingt Officiers , &
deux Régimens de cette brave Infanterie Angloife.
qui avoit combattu à Fontenoy. Il rafe les Forts ,
revient à Montréal & retourne au lac Saint-Sacrement
avec les troupes victorieufes. Là il fait.
face de nouveau au Général Loudon qui eft obligé
de fe retirer à Albani , fans avoir ofé l'attaquer
malgré la fupériorité de fes forces . Il revint de
cette expédition à la fin de Novembre fur les
glaces , fouffrant depuis plus de deux mois unfroid
exceffif , & ayant parcouru depuis le mois
de Juin environ huit cens lieues de pays déferts.
C'eft ainfi que les François animés par fon exemple
ont fait la guerre en Amérique.
La campagne de 1757 ne fut pas moins furprenante
. M. de Montcalm réunit fes forces , confiftant
en fix bataillons de troupes régléesc , en
viron deux mille hommes de milice , & dix- huit
cens Sauvages de trente- deux Nations différen
tes , à la chute du lac Saint - Sacrement . Là il diviſe
fon armée en deux parties ; l'une marche
par terre , fe frayant une route à travers des
montagnes & dans des bois jufqu'alors incon
(d ) Le fort Ontario, le fort Chouëguen & le fort Georget
208 MERCURE DE FRANCE.
nus ; l'autre eſt embarquée fur le lac. Après
quatorze lieues de marche il entreprend de forcer
l'Ennemi retranché dans fon camp fous le
Fort Guillaume - Henry. Ce Fort eſt défendu par
une garnison de cinq cens hommes continuellement
rafraîchie par les troupes du camp : il l'attaque
, il le détruit , & s'il ne retint pas la garniton
prifonniere , ce ne fut que dans l'impoffibilité
où l'on étoit de la nourrir ( e ) . Peut- être
n'en feroit- il pas refté là s'il n'avoit été obligé
de renvoyer les Milices pour faire la récolte , &
de lailler partir les Sauvages dont quelques- uns
étoient venus de huit cent lieues uniquement
pour voir par eux-mêmes ce que la renommée
leur avoit appris de cet homme prodigieux.
Mais fi l'on ajoute à la circonftance du départ
des Sauvages & des Colons le défaut de munitions
de guerre & de bouché , l'extrême difficulté
du transport de tout ce qu'exige l'appareil
d'un fiége , à fix lieues de diftance , & à bras
d'hommes , avec une armée épuisée de fatigue,
& plus affoiblie encore par la mauvaiſe nourriture
, que penfera- t- on du reproche qu'on lui
fit alors de n'avoir pas marché du Fort Guillau
me au Fort Edouard ? Il fe vengea de fes Ennemis
en grand homme : il mit le comble à faréputation
dans la Campagne de 1758 , & les
accabla du poids de fa gloire.
La difette affreufe de l'Automne 1757 , qui
dura jufqu'a la fin du Printemps 1758 , mit la
Colonie à deux doigts de fa perte. M. de Montcalm
avoit reçu de France le fecours de deux
bataillons très-affoiblis par une maladie épidémi-,
que qui les avoit attaqués fur la iner, Les Anglois
( e ) Les habitans de Québec étoient alors réduits à un
quarteron de pain par jour ,
JANVIE R. 1760. 209
toujours infiniment fupérieurs en nombre & ea
moyens , avoient été renforcés de plufieurs régimens
envoyés d'Europe. Le Lord Loudon venoit
d'être rappellé pendant l'Hiver & remplacé par
le Général Abercromby. Celui-ci fait tous fes
préparatifs pour entrer de bonne heure en campa
gne & prévenir le Marquis de Montcalm . Retardé
par le défaut de vivres , le Général François ne
put mettre en mouvement qu'au mois de Juin
les huit bataillons affoiblis, les uns par les pertes de
la Campagne précédente , les autres par la maladie.
Ces bataillons ne formoient en total que trois
mille trois cens hommes. M. de Montcalm fe
porta avec cette poignée de monde fur la frontière
du Lac Saint - Sacrement ; le Général Anglois
marchoit à lui avec une armée de plus de vingtfept
mille hommes. Si M. de Montcalm étoit
battu , il n'avoit aucune retraite ; l'Ennemi pouvoit
s'avancer jufqu'a Montréal & couper en deux
la Colonie. Le Héros du canada prend dans cette
extrémité le feul parti qu'il y avoit à prendre. Il
reconnoit & choifit lui-même une polition avantageufe
fur les hauteurs de Carillon ; il y fait
tracer un retranchement en abattis , laiffe un
bataillon pour commencer l'ouvrage, & en même
temps pour garder le fort , fait avec fa petite-
Armée un mouvement audacieux , en fe portant
à quatre lieues en avant , envoie reconnoître &
reconnoît lui - même la marche de l'Ennemi ,
l'examine , le tâte , lui en impofe par fa conte
nance. Cette manoeuvre digne des plus grands
Maîtres rallentit l'ardeur de la multitude ennemie,&
occafionne dans fes mouvemens une lenteur
dont M. de Montcalm fçait tirer avantage.
Ceci fe palloit le 6 Juillet 17 58. Il écrivit le
foir en ces termes à M. Doreil , Commillaire Or210
MERCURE DE FRANCE.
donnateur. Je n'ai que pour huit jours de vivres,
> point de Canadiens (f) , pas un feul Sauvage ;
> ils ne font point arrivés : j'ai affaire à une armée
i formidable ; malgré cela je ne défefpere de
> rien , j'ai de bonnes troupes. A la contenance
» de l'ennemi je vois qu'il tatonne ; fi , par fa
lenteur , il me donne le temps de gagner la
pofition que j'ai choifie fur les hauteurs de
» Carillon , & de m'y retrancher , je le battrai . ››
M. de Montcalmrfe replia dans la nuit du 6 au 7 ,
& fit faire à la hâte fon retranchement auquel
il travailla lui- même. L'abattis n'étoit pas encore
entierement achevé , lorfqu'il fut attaqué le 8-
Juillet par dix- huit mille hommes , avec la plus
grande valeur (g) . L'ennemi toujours repouffé
revient fept fois à la charge , où plutôt on combat
fept heures préfque fans relâche depuis` midi jufqu'à
la nuit : alors le découragement & l'effroi
s'emparent des Anglois ; & , cherchant leur falut
dans la fuite , il fe retirent l'efpace de douze lieues
jufques vers les ruines du fort George , laiffant
en chemin leurs bleffés , leurs vivres & leurs équi
pages. ( h)
Cettejournée à jamais glorieuſe pour la nation
(f) Quelques relations dífent qu'il avoit 1 5 ſauvages &
450 hommes , tant de la Colonie que de la marine , mais
que les fauvages abandonnèrent dans les montagnes le détachement
auquel ils fervoient de guide , & que les 450
hommes de la Colonie & de la marine demeurèrent postés
dans la plaine , & n'y furent point attaqués.
(g) M. le Chevalier de Lévi commandoit la droite de
notre armée , M. de Bourlamaque la gauche , M. de Montcalm
le centre.
(b) Le lendemain du combat , àla pointe du jour , M.
de Montcalm envoya M. le Chevalier de Lévi , fi digne de
fa confiance par fa valeur & fon habileté ; reconnoître ce
qu'étoit devenue l'armée Anglaife . Partout M de Léyi nẹ
trouva que les traces d'une fuite précipitée.
JANVIE R. 1760. 217
Françoife couta à l'ennemi , de fon aveu , fix
mille morts ou bleffés , dont trois mille cadavres
étoient au pied de l'abattis . Le Marquis de Montcalm
étoit partout ; fes difpofitions avoient préparé
la victoire , fon exemple la décida : ni les
Canadiens ni les Sauvages ne participèrent à
l'honneur de cette journée ; ils ne joignirent l'Armée
que cinq jours après. Les foldats , pendant
le combat crioient à chaque inftant : Vive le
Roi & notre Général ! C'elt cette confiance por-`
tée jufqu'à l'entoufiafme qui fait le fort des batail-'
les : une Armée eft presque toujours affurée de
vaincre quand elle le croit invincible , & l'opinion
qu'elle a d'elle-même dépend furtout de
l'idée qu'elle a de ſon Chef.
..
לכ
En écrivant au mêine M. Doreil , dù champ
de bataille à huit heures du foir , voici comment
s'exprimoit ce Vainqueur auffi modefte dans le
triomphe qu'intrépide dans le combat : » l'Armée
»& trop petite Armée du Roi vient de battre fes>
>> ennemis. Quelle journée pour la France ! Siv
» j'avois eu deux cens Sauvages pour fervir de
» tête à un détachement de mille hommes d'élite ,
>> dont j'aurois confié le commandement au
>> Chevalier de Lévi , il n'en feroit pas échappé
» beaucoup dans leur fuite . Ah ! quelles troupes ,
>> mon cher Doreil , que les nôtres ! je n'en ai
»jamais vu de pareilles : que n'étoient- elles à
Louifbourg » Cette lettre eft digne de M. de
Turenne comme l'action qui en eft le fujet.
Dans la relation qu'il envoya le lendemain à
M. le Marquis de Vaudreuil après avoir fait
l'éloge des troupes en général , celui de MM. de
Lévi , de Bourlamaque , Officiers fupérieurs &
de la plus grande diftinction , des Commandans
des Corps , & pour ainfi dire de chaque Officier
en particulier , il ajoutoit Pour moi je n'ai
λ
2
212 MERCURE DE FRANCE.
que le mérite de m'être trouvé Général de
aufli valeureuſes.
>> troupes
Il eut toujours la même attention de rendre à
chacun de fes Officiers la part qu'ils avoient à
fa gloire. J'ai lu dans une lettre qu'il écrivit du
Camp de Carillon le 28 Septembre . » M. le Che-
» valier de Lévi qui connoît très- bien cette fron-
» tière , y a fait les meilleures difpofitions du
» monde , & je les ai fuivies.
.
Il y a de lui une infinité de traits qui caractérifent
le patriote , le guerrier , l'homme jufte ,
vertueux & modefte ; mais la diſtance des lieux
ne m'a pas permis d'en recueillir les preuves 3
& comme je ne veux dire que la vérité , je n'ai
pas cru devoir m'en tenir à la tradition , qui s'altere
de bouche en bouche.
La conftance & la réfolution furent de toutes
fes vertus les plus éprouvées & les plus éclatanres
; mais elles n'avoient rien d'une présomption
aveugle ; & perfonne ne voyoit mieux que lui
les dangers qu'il alloit courir.
Il écrivoit de Montréal le 14 Avril 1759 , » Le
» nouveau Général Anglois Amherſt a de gran-
» des forces & de grands moyens , 22 bataillons
de troupes réglées , plus de 30000 hommes de
milices auffi les Anglois comptent attaquer
» le Canada par plufieurs endroits & l'envahir.
Nous avons fauvé cette Colonie l'année der-
> nière par un fuccès qui tient quafi du prodige.
Faut il en efpérer un pareil ? il faudra au
> moins le tenter. Quel dommage que nous
n'ayons pas un plus grand nombre d'auffi va-
>> leureux foldats ! » L'arrivée de l'Efcadre Angloife
, en mettant le comble aux dangers qui
menaçoient la Colonie , ne fit que redoubler le
courage & le zèle de fon défenſeur .
On n'eft que trop inftruit du détail du combat
JANVIER . 1760. 213
qui a précédé la prife de Québec , & dans lequel
a péri M. de Montcalm. Tous les effets qu'on
peut attendre de la prudence , de la valeur , de
l'activité d'un Général , avoient été employés
par celui- ci , foit pour défendre à l'Ennemi l'approche
de la Ville , foit pour conferver la communication
de l'armée avec les vailleaux qui
avoient remonté le fleuve , & où les vivres
étoient déposés.
Le combat du 31 Juillet , où huit cens Grenadiers
Anglois refterent fur la place à l'attaque du
camp de Beauport qu'ils ne purent jamais forcer ,
quoique la gauche du camp qu'ils attaquoient
efit à foutenir en même temps le feu croiſé de
plus de 80 pièces d'artillerie ; ce combat , dis-je ,
prouve affez la bonté du pofte & l'intrépide réfolution
de celui qui le défendoit ( i ) .
La communication avec les vivres ne fut pas
moins courageufement défendue . Quatre fois
les Anglois tenterent de débarquer au- deffous de
Québec , & quatre fois M. de Bougainville chargé
du foin pénible & critique de couvrir quinze
lieues de pays avec une poignée de monde répandue
fur le rivage , les repouffe & les oblige
de s'éloigner , quoique toujours fupérieurs en
nombre , & foutenus par le feu des frégates qui
les protégeoient. Mais comment une Armée de
huit à neuf mille hommes répandue fur la rivé
d'un fleuve immenfe auroit - elle pu la rendre
inacceffible dans toute fon étendue à dix mille
hommes de troupes réglées , qui , au moyen d'une
flotte de vingt cinq vaiffeaux de guerre , de trente
(i) Je ne dois pas négliger de dire , à la gloire de M. le
Chevalier de Lévi , que c'etoit lui qui avoit demandé que
se camp , dont la gauche n'étoit d'abord appuyée qu'au
ruiffeau de Beauport , fût étendu juſqu'à la riviere de Montmorenci
, dont le paffage étoit plus difficile .
214 MERCURE DE FRANCE
frégates & d'environ cent quatre-vingt bâtimens
de tranfport , exécutoient fur le fleuve & à la faveur
de la marée & de la nuit , des mouvemens
continuels & rapides qu'il étoit impotlible à nos
troupes de terre de prévoir , d'obferver & de
fuivre? Ces infatigables troupes n'avoient , pas
aillé que de faire face partout , de défendre ce
rivage pendant plus de deux mois , prodige incroyable
de vigilance ( k) & d'activité , Torfqu'enfin
le 13 Septembre , tandis que M. de
Bougainville étoit occupé au Cap- rouge , trois
lieues au-deflus de Québec , par les démonftrations
d'une attaque , les Anglois furprirent &
forcerent pendant la nuit un pofte à demie lieue
de la Ville & s'y établirent avant le jour.
M. de Montcalm accourut du camp de Beauport
avec trois mille hommes ; il en trouva
fix mille de débarqués ; & plein de cette noble
ardeur qui avoit toujours décidé la victoire , il
réfolut de les attaquer avant qu'ils fuffent en
plus grand nombre. Dans cette action décifive &
meurtriere , il fut bleflé de deux coups de feu ;
& ce moment fatal fut le premier où la victoire
l'abandonna ( 1 ) . Quoique bleffé mortellement
il eut le courage de refter à cheval , & fit luianême
la retraite de l'armée fous les murailles
de Québec , ou plutôt fur les débris de ces murailles
que l'artillerie Angloife battoit fans relâche
( k ) Le détachement de M. de Bougainville avoit paſſé
trois mois au Bivouac .
( 2 ) Il est très - certain que M. de Bougainville ne fut
averti au Cap rouge du débarquement des Anglois qu'à
zeuf heures du matin , & qu'ayant plus de trois lieues de
chemin à faire , il ne put arriver fur le champ de bataille
qu'après la déroute. Il n'en fit pas moins bonne contenance
, & fa retraite comme fa conduite dans cette pénible
campagne , a justifié pleinement la confiance que M. de
Montcalm avoit en lui.
JAN VIER. 1760. LIS
د ر
depuis deux mois. Il entra dans cette Ville ruinée ,
donna les ordres à tout , fe fit panfer , interrogea
le Chirurgien ; & fur la réponſe , dit au Lieutenant
de Roi & au Commandant de Royal Rouffillon
, Meffieurs , je vous recommande de
ménager l'honneur de la France , & de tâcher
»que ma petite armée puiffe fe retirer cette nuit
» au delà de la riviere du Cap- rouge , pour joindre
le Corps aux ordres de M. de Bougainville
: pour moi je vais la paller avec Dieu , &
me préparer à la mort . Qu'on ne me parle
» plus d'autres chofes. » Il mourut en Héros le
lendemain 14 Septembre à cinq heures du matin,
& fut enterré fans fafte dans un trou de bombe ,
fépulture digne d'un homme qui avoit réfolu de
défendre le Canada ou de s'enfevelir fous fes
ruines ( m ).
Je n'ai eu qu'à raconter les faits dans toute
lear fimplicité , pour faire des talents & des vertus
militaires de M. le Marquis de Montcalm un
éloge peut-être unique. L'Hiftoire les atteftera ,
& la postérité aura peine à les croire ; mais la
Colonie qu'il a défendue , les Guerriers qu'il a
commandés (n ) , les ennemis qu'il a vaincus
tant de fois, en rendront d'éclatans témoignages ;
& ces mêmes Sauvages qu'il a étonnés par des
prodiges de conftance , de réfolution & de valeur
, montreront à leurs enfans dans leurs dé-
(m)Les Anglois lui ont rendu les mêmes honneurs funébres
qu'au Général Wolf tué dans le même combat .
( n) L'un d'eux écrit du Canada : » Je ne me confo-
" lerai jamais de la perte de mon Général ; qu'elle eft
grande & pour nous & pour ce pays & pour l'Etat !
,, C'étoit un bon Général , un Citoyen zélé , un ami folide ,
,, un Pere pour nous tous. Il a été enlevé au moment de
,, jouir du fruit d'une campagne que M. de Turenne n'au
défavouée. Tous les jours je le chercherai , &
tous les jours ma douleur fera plus vive,
23 roit
pas
216 MERCURE DE FRANCE.
ferts inhabités les traces de ce Guerrier qui les
menoit à la victoire , & les lieux où ils ont eu
la gloire de combattre & de vaincre avec lui .
C'elt furtout dans le coeur des François que M.
de Montcalm doit fe furvivre . Notre Nation
qu'on accufe d'oublier trop ailément les grands
hommes qu'elle a perdus , eft profondément
frappée de la mort de celui-ci , & lui donne les
plus juftes larmes.
ÉLOGE HISTORIQUE
DEM.
LE MARQUIS DE MONTCALM.
SI
&
I l'on doit apprécier les hommes par les facrifices
qu'ils font à la fociété , & par les fervices
qu'ils lui rendent , qui jamais fut plus digne que
M. le Marquis de Montcalm de nos éloges & de
nos regrets ? Immoler fon repos à l'Etat , fe féparer
pour lui de rout ce qu'on a de plus cher
lui donner fon fang & fa vie , eft un devoir attaché
à la noble profeffion des armes , & ce dévoûment
héroïque eft la vertu des Guerriers de
tous les pays & de tous les temps . Mais cette
vertu reçoit un nouveau luftre des talens qui la
fecondent , & des circonftances qui l'éprouvent ;
& jamais elle n'a été ni plus éprouvée ni mieux
foutenue que dans le héros que nous pleurons.
LOUIS-JOSEPH , MARQUIS DE MONTCALMGOZON
DE SAINT VÉRAN , Seigneur de Gabriac
& c. Lieutenant - Général des Armées du Roi ,
Commandeur honoraire de l'Ordre Royal & Mi-
I vi
204 MERCURE
DE FRANCE.
litaire de Saint- Louis , commandant en Chef les :
Troupes Françoifes dans l'Amérique Septentrionale
, étoit né en 1712 d'une très- ancienne famille
de Rouergue . ( a )
le
Elève de M. Dumas , Inventeur du Bureau Typographique
, il ne fit pas moins d'honneur aux
leçons de ce Maître habile que Jeune Candiac
fon frere cader , mort à l'âge de ſept ans , & mis
au nombre des enfans célèbres . (b)
"
M. de Montcalm employa fes premieres années
à l'étude des Langues; & perfonne n'étoit.
plus verfé dans la Littérature Grecque & Latine.
La mémoire eft la nourrice de l'efprit , &
celle de M. de Montcalm étoit fi heureuſe , qu'il
n'oublioit rien de ce qu'il avoit appris une fois.
Il a confervé le goût de l'étude au milieu de
tous les travaux ; & parmi les agrémens de fa
retraite , il comptoit pour beaucoup l'efpérance
d'être reçu
à l'Académie des Belles- Lettres .
Il avoit fervi pendant dix fept ans dans le Régiment
de Hainault Infanterie , où il avoit été
fucceffivement Enfeigne , Lieutenant & Capitaine.
Il fut fait Colonel du Régiment d'Auxerrois
Infanterie , en. 1743 ; Brigadier des Armées du
Roi en 1747 ; Meſtre de Camp d'un nouveau
Régiment de Cavalerie de fon nom , en 1749 ;
a voit ( a ) Jean de Montcalm , l'un de fes ancêtres ,
éponfé Jeanne de Gozon , petite nièce du Grand Maître
Diodat de Gozon , vainqueur du dragon qui defoloit l'Iffs
de Rhodes.
( b ) Jean -Louis- Pierre - Elifabeth de Montcalm de Can
diac , né à Candiac le 7 Novembre 1739 , mort à Paris
le 8 Octobre 1726. Il avoit fait des progrès furprenans
dans les langues Hébraïque , Grecque & Latine , & acquis
des connoiffances prodigieufes pour fon âge. L'Auteur du Bureau typographique avoit fait fur lui la
première expérience de cette nouvelle méthode. Voyez le
Supplément de Moreri à l'Article CANDIA· C.
JANVIER. 1760. 205
Maréchal de Camp & Commandant des Troupes
Françoiles en Amérique , en 1756-3 Commandeur
par honneur de l'Ordre de Saint- Louis , en
175 ; & Lieutenant Général , en 1758 .
Dans les grades inférieurs il le diftingua par
une ardeur & une application fans relâche ; attentif
à recueillir dans chacun de ces emplois les
lumières & l'expérience qui leur font propres &
qui compofent par degrés le fyftême de l'Art
militaire.
Devenu Colonel ' , la connoiffance qu'on avoit
de fes talens & de fon activité , lui fit confier
dans toutes les occafions des commandemens
particuliers ; & il y foutine avec éclat la réputation
qu'il avoit acquife . Il reçut trois bleffures à
la bataille fous Plaifance , donnée le 13 Juin
1746 ; & comme il fe faifoit guérir à Montpellier
de deux coups de fabre à la tête , il apprit
que fon Régiment marchoit pour aller attaquer
le pofte de l'affiette où M. le Chevalier de Belleifle
fut tué. Il part , la tête enveloppée , & , fest
bleffures encore ouvertes , joint fon Corps , fe
trouve à l'attaque , & y reçoit deux coups de feu.
Mais c'eft en Amérique furtout que les qualités
de ce grand Capitaine ont paru dans tour
leur jour. C'est là qu'il a fait voir à quel degré
il réuniſſoit la bravoure du Soldat & la grandeur
d'ame du héros ; la prudence du confeil & l'activité
de l'exécution ; ce fang- froid que rien n'altére
, cette patience que rien ne rebute , & cette
réfolution courageule qui ofe répondre du fuccès
dans des circonftances où la timide (péculation
auroit à peine entrevu des refources. C'eft
là qu'au milieu des Sauvages dont il étoit devenu
le pere , on l'a vu fe plier à leur caractère
féroce , s'endurcir aux mêmes travaux , & fe reftreindre
aux mémes befoins , les apprivoiler par
200 MERCURE DE FRANCE.
la douceur, les attirer par la confiance, les attendrir
par tous les foins de l'humanité compâtiffante , &
faire dominer le refpect & l'amour fur des ames
également indociles au joug de l'obéiffance & au
frein de la difcipline militaire ( c) . C'est là que des
fatigues & des dangers fans nombre & inconnus en
Europe n'ontjamais rallenti fon zèle . Tantôt préfent
à des fpectacles dont l'idée feule fait frémir
la nature tantôt expofé à manquer de
tout , & fouvent à mourir de faim ; réduit pendant
onze mois à quatre onces de pain par
jour ; mangeant du cheval pour donner l'exem
ple , il fut le même dans tous les temps , fati
fait de tout endurer pour la caufe de la Patrie &
pour la gloire de fon Roi. C'eſt là qu'il a exécuté
des chofes prefque incroyables , & que nós
Ennemis eux- mêmes ont regardées comme des
prodiges ; qu'avec fix bataillons François & quelques
troupes de la Colonie , non feulement il a
fait tête à trente , quarante , cinquante mille
hommes , mais qu'il leur en a impofé partout , les
a vaincus , les a diffipés , jufqu'à la malheureufe
journée où vient de périr ce grand homme.
Arrivé dans la Colonie en 1756 , il arrête par
fes bonnes difpofitions l'armée du Général Lou-
( c ) Il étoit venu à bout de les conduire fans leur donner
ni vin , ni eau - de - vie , ni même les chofes dont ils
avoient un befoin réel , & dont on manquoit à l'armée ;
mais il avoit le plus grand foin de leurs malades & de
leurs bleffés . Il connoît , difoient -ils , nos ufages & nos
manières comme s'il avoit été élevé au milieu de nos cabanes.
Loriqu'il reçut à Choueguen la nouvelle que le
Roi l'avoit honoré du Cordon rouge , ils vinrent le complimenter.
Nous fommes charmés ; lui dirent - ils , de la
grace que le grand Onowthio vient de t'accorder , parce
que nous fçavons qu'elle te caufe de la joie. Pour nous ,
nous ne t'en aimons ni ne t'en eftimons davantage , car
F'eft ta perfonne que nous eftimons & que nous aimons.
JANVIER 1760 . 207
don au lac Saint - Sacrement , laiffe des inftruce
tions au Chevalier de Lévi , Commandant en ?
fecond , revient à Montréal & marche rapidement
au lac Ontario , où il trouve trois bataillons
François & environ douze cens hommes de milices .
du pays. Avec cette petite armée qu'il allemble à
Frontenac, il court à Choueguen, y aborde fous le
feu de huit barques de dix , douze & vingt pièces
de canon que l'Anglois avoit fur ce lac , forme
un fiége , ouvre une tranchée , & enlève en cinq ,
jours les trois Forts de l'ennemi ( d ). Il y faic
dix-fept cens quarante-deux prifonniers , parmi
lefquels fe trouvoient quatre-vingt Officiers , &
deux Régimens de cette brave Infanterie Angloife.
qui avoit combattu à Fontenoy. Il rafe les Forts ,
revient à Montréal & retourne au lac Saint-Sacrement
avec les troupes victorieufes. Là il fait.
face de nouveau au Général Loudon qui eft obligé
de fe retirer à Albani , fans avoir ofé l'attaquer
malgré la fupériorité de fes forces . Il revint de
cette expédition à la fin de Novembre fur les
glaces , fouffrant depuis plus de deux mois unfroid
exceffif , & ayant parcouru depuis le mois
de Juin environ huit cens lieues de pays déferts.
C'eft ainfi que les François animés par fon exemple
ont fait la guerre en Amérique.
La campagne de 1757 ne fut pas moins furprenante
. M. de Montcalm réunit fes forces , confiftant
en fix bataillons de troupes régléesc , en
viron deux mille hommes de milice , & dix- huit
cens Sauvages de trente- deux Nations différen
tes , à la chute du lac Saint - Sacrement . Là il diviſe
fon armée en deux parties ; l'une marche
par terre , fe frayant une route à travers des
montagnes & dans des bois jufqu'alors incon
(d ) Le fort Ontario, le fort Chouëguen & le fort Georget
208 MERCURE DE FRANCE.
nus ; l'autre eſt embarquée fur le lac. Après
quatorze lieues de marche il entreprend de forcer
l'Ennemi retranché dans fon camp fous le
Fort Guillaume - Henry. Ce Fort eſt défendu par
une garnison de cinq cens hommes continuellement
rafraîchie par les troupes du camp : il l'attaque
, il le détruit , & s'il ne retint pas la garniton
prifonniere , ce ne fut que dans l'impoffibilité
où l'on étoit de la nourrir ( e ) . Peut- être
n'en feroit- il pas refté là s'il n'avoit été obligé
de renvoyer les Milices pour faire la récolte , &
de lailler partir les Sauvages dont quelques- uns
étoient venus de huit cent lieues uniquement
pour voir par eux-mêmes ce que la renommée
leur avoit appris de cet homme prodigieux.
Mais fi l'on ajoute à la circonftance du départ
des Sauvages & des Colons le défaut de munitions
de guerre & de bouché , l'extrême difficulté
du transport de tout ce qu'exige l'appareil
d'un fiége , à fix lieues de diftance , & à bras
d'hommes , avec une armée épuisée de fatigue,
& plus affoiblie encore par la mauvaiſe nourriture
, que penfera- t- on du reproche qu'on lui
fit alors de n'avoir pas marché du Fort Guillau
me au Fort Edouard ? Il fe vengea de fes Ennemis
en grand homme : il mit le comble à faréputation
dans la Campagne de 1758 , & les
accabla du poids de fa gloire.
La difette affreufe de l'Automne 1757 , qui
dura jufqu'a la fin du Printemps 1758 , mit la
Colonie à deux doigts de fa perte. M. de Montcalm
avoit reçu de France le fecours de deux
bataillons très-affoiblis par une maladie épidémi-,
que qui les avoit attaqués fur la iner, Les Anglois
( e ) Les habitans de Québec étoient alors réduits à un
quarteron de pain par jour ,
JANVIE R. 1760. 209
toujours infiniment fupérieurs en nombre & ea
moyens , avoient été renforcés de plufieurs régimens
envoyés d'Europe. Le Lord Loudon venoit
d'être rappellé pendant l'Hiver & remplacé par
le Général Abercromby. Celui-ci fait tous fes
préparatifs pour entrer de bonne heure en campa
gne & prévenir le Marquis de Montcalm . Retardé
par le défaut de vivres , le Général François ne
put mettre en mouvement qu'au mois de Juin
les huit bataillons affoiblis, les uns par les pertes de
la Campagne précédente , les autres par la maladie.
Ces bataillons ne formoient en total que trois
mille trois cens hommes. M. de Montcalm fe
porta avec cette poignée de monde fur la frontière
du Lac Saint - Sacrement ; le Général Anglois
marchoit à lui avec une armée de plus de vingtfept
mille hommes. Si M. de Montcalm étoit
battu , il n'avoit aucune retraite ; l'Ennemi pouvoit
s'avancer jufqu'a Montréal & couper en deux
la Colonie. Le Héros du canada prend dans cette
extrémité le feul parti qu'il y avoit à prendre. Il
reconnoit & choifit lui-même une polition avantageufe
fur les hauteurs de Carillon ; il y fait
tracer un retranchement en abattis , laiffe un
bataillon pour commencer l'ouvrage, & en même
temps pour garder le fort , fait avec fa petite-
Armée un mouvement audacieux , en fe portant
à quatre lieues en avant , envoie reconnoître &
reconnoît lui - même la marche de l'Ennemi ,
l'examine , le tâte , lui en impofe par fa conte
nance. Cette manoeuvre digne des plus grands
Maîtres rallentit l'ardeur de la multitude ennemie,&
occafionne dans fes mouvemens une lenteur
dont M. de Montcalm fçait tirer avantage.
Ceci fe palloit le 6 Juillet 17 58. Il écrivit le
foir en ces termes à M. Doreil , Commillaire Or210
MERCURE DE FRANCE.
donnateur. Je n'ai que pour huit jours de vivres,
> point de Canadiens (f) , pas un feul Sauvage ;
> ils ne font point arrivés : j'ai affaire à une armée
i formidable ; malgré cela je ne défefpere de
> rien , j'ai de bonnes troupes. A la contenance
» de l'ennemi je vois qu'il tatonne ; fi , par fa
lenteur , il me donne le temps de gagner la
pofition que j'ai choifie fur les hauteurs de
» Carillon , & de m'y retrancher , je le battrai . ››
M. de Montcalmrfe replia dans la nuit du 6 au 7 ,
& fit faire à la hâte fon retranchement auquel
il travailla lui- même. L'abattis n'étoit pas encore
entierement achevé , lorfqu'il fut attaqué le 8-
Juillet par dix- huit mille hommes , avec la plus
grande valeur (g) . L'ennemi toujours repouffé
revient fept fois à la charge , où plutôt on combat
fept heures préfque fans relâche depuis` midi jufqu'à
la nuit : alors le découragement & l'effroi
s'emparent des Anglois ; & , cherchant leur falut
dans la fuite , il fe retirent l'efpace de douze lieues
jufques vers les ruines du fort George , laiffant
en chemin leurs bleffés , leurs vivres & leurs équi
pages. ( h)
Cettejournée à jamais glorieuſe pour la nation
(f) Quelques relations dífent qu'il avoit 1 5 ſauvages &
450 hommes , tant de la Colonie que de la marine , mais
que les fauvages abandonnèrent dans les montagnes le détachement
auquel ils fervoient de guide , & que les 450
hommes de la Colonie & de la marine demeurèrent postés
dans la plaine , & n'y furent point attaqués.
(g) M. le Chevalier de Lévi commandoit la droite de
notre armée , M. de Bourlamaque la gauche , M. de Montcalm
le centre.
(b) Le lendemain du combat , àla pointe du jour , M.
de Montcalm envoya M. le Chevalier de Lévi , fi digne de
fa confiance par fa valeur & fon habileté ; reconnoître ce
qu'étoit devenue l'armée Anglaife . Partout M de Léyi nẹ
trouva que les traces d'une fuite précipitée.
JANVIE R. 1760. 217
Françoife couta à l'ennemi , de fon aveu , fix
mille morts ou bleffés , dont trois mille cadavres
étoient au pied de l'abattis . Le Marquis de Montcalm
étoit partout ; fes difpofitions avoient préparé
la victoire , fon exemple la décida : ni les
Canadiens ni les Sauvages ne participèrent à
l'honneur de cette journée ; ils ne joignirent l'Armée
que cinq jours après. Les foldats , pendant
le combat crioient à chaque inftant : Vive le
Roi & notre Général ! C'elt cette confiance por-`
tée jufqu'à l'entoufiafme qui fait le fort des batail-'
les : une Armée eft presque toujours affurée de
vaincre quand elle le croit invincible , & l'opinion
qu'elle a d'elle-même dépend furtout de
l'idée qu'elle a de ſon Chef.
..
לכ
En écrivant au mêine M. Doreil , dù champ
de bataille à huit heures du foir , voici comment
s'exprimoit ce Vainqueur auffi modefte dans le
triomphe qu'intrépide dans le combat : » l'Armée
»& trop petite Armée du Roi vient de battre fes>
>> ennemis. Quelle journée pour la France ! Siv
» j'avois eu deux cens Sauvages pour fervir de
» tête à un détachement de mille hommes d'élite ,
>> dont j'aurois confié le commandement au
>> Chevalier de Lévi , il n'en feroit pas échappé
» beaucoup dans leur fuite . Ah ! quelles troupes ,
>> mon cher Doreil , que les nôtres ! je n'en ai
»jamais vu de pareilles : que n'étoient- elles à
Louifbourg » Cette lettre eft digne de M. de
Turenne comme l'action qui en eft le fujet.
Dans la relation qu'il envoya le lendemain à
M. le Marquis de Vaudreuil après avoir fait
l'éloge des troupes en général , celui de MM. de
Lévi , de Bourlamaque , Officiers fupérieurs &
de la plus grande diftinction , des Commandans
des Corps , & pour ainfi dire de chaque Officier
en particulier , il ajoutoit Pour moi je n'ai
λ
2
212 MERCURE DE FRANCE.
que le mérite de m'être trouvé Général de
aufli valeureuſes.
>> troupes
Il eut toujours la même attention de rendre à
chacun de fes Officiers la part qu'ils avoient à
fa gloire. J'ai lu dans une lettre qu'il écrivit du
Camp de Carillon le 28 Septembre . » M. le Che-
» valier de Lévi qui connoît très- bien cette fron-
» tière , y a fait les meilleures difpofitions du
» monde , & je les ai fuivies.
.
Il y a de lui une infinité de traits qui caractérifent
le patriote , le guerrier , l'homme jufte ,
vertueux & modefte ; mais la diſtance des lieux
ne m'a pas permis d'en recueillir les preuves 3
& comme je ne veux dire que la vérité , je n'ai
pas cru devoir m'en tenir à la tradition , qui s'altere
de bouche en bouche.
La conftance & la réfolution furent de toutes
fes vertus les plus éprouvées & les plus éclatanres
; mais elles n'avoient rien d'une présomption
aveugle ; & perfonne ne voyoit mieux que lui
les dangers qu'il alloit courir.
Il écrivoit de Montréal le 14 Avril 1759 , » Le
» nouveau Général Anglois Amherſt a de gran-
» des forces & de grands moyens , 22 bataillons
de troupes réglées , plus de 30000 hommes de
milices auffi les Anglois comptent attaquer
» le Canada par plufieurs endroits & l'envahir.
Nous avons fauvé cette Colonie l'année der-
> nière par un fuccès qui tient quafi du prodige.
Faut il en efpérer un pareil ? il faudra au
> moins le tenter. Quel dommage que nous
n'ayons pas un plus grand nombre d'auffi va-
>> leureux foldats ! » L'arrivée de l'Efcadre Angloife
, en mettant le comble aux dangers qui
menaçoient la Colonie , ne fit que redoubler le
courage & le zèle de fon défenſeur .
On n'eft que trop inftruit du détail du combat
JANVIER . 1760. 213
qui a précédé la prife de Québec , & dans lequel
a péri M. de Montcalm. Tous les effets qu'on
peut attendre de la prudence , de la valeur , de
l'activité d'un Général , avoient été employés
par celui- ci , foit pour défendre à l'Ennemi l'approche
de la Ville , foit pour conferver la communication
de l'armée avec les vailleaux qui
avoient remonté le fleuve , & où les vivres
étoient déposés.
Le combat du 31 Juillet , où huit cens Grenadiers
Anglois refterent fur la place à l'attaque du
camp de Beauport qu'ils ne purent jamais forcer ,
quoique la gauche du camp qu'ils attaquoient
efit à foutenir en même temps le feu croiſé de
plus de 80 pièces d'artillerie ; ce combat , dis-je ,
prouve affez la bonté du pofte & l'intrépide réfolution
de celui qui le défendoit ( i ) .
La communication avec les vivres ne fut pas
moins courageufement défendue . Quatre fois
les Anglois tenterent de débarquer au- deffous de
Québec , & quatre fois M. de Bougainville chargé
du foin pénible & critique de couvrir quinze
lieues de pays avec une poignée de monde répandue
fur le rivage , les repouffe & les oblige
de s'éloigner , quoique toujours fupérieurs en
nombre , & foutenus par le feu des frégates qui
les protégeoient. Mais comment une Armée de
huit à neuf mille hommes répandue fur la rivé
d'un fleuve immenfe auroit - elle pu la rendre
inacceffible dans toute fon étendue à dix mille
hommes de troupes réglées , qui , au moyen d'une
flotte de vingt cinq vaiffeaux de guerre , de trente
(i) Je ne dois pas négliger de dire , à la gloire de M. le
Chevalier de Lévi , que c'etoit lui qui avoit demandé que
se camp , dont la gauche n'étoit d'abord appuyée qu'au
ruiffeau de Beauport , fût étendu juſqu'à la riviere de Montmorenci
, dont le paffage étoit plus difficile .
214 MERCURE DE FRANCE
frégates & d'environ cent quatre-vingt bâtimens
de tranfport , exécutoient fur le fleuve & à la faveur
de la marée & de la nuit , des mouvemens
continuels & rapides qu'il étoit impotlible à nos
troupes de terre de prévoir , d'obferver & de
fuivre? Ces infatigables troupes n'avoient , pas
aillé que de faire face partout , de défendre ce
rivage pendant plus de deux mois , prodige incroyable
de vigilance ( k) & d'activité , Torfqu'enfin
le 13 Septembre , tandis que M. de
Bougainville étoit occupé au Cap- rouge , trois
lieues au-deflus de Québec , par les démonftrations
d'une attaque , les Anglois furprirent &
forcerent pendant la nuit un pofte à demie lieue
de la Ville & s'y établirent avant le jour.
M. de Montcalm accourut du camp de Beauport
avec trois mille hommes ; il en trouva
fix mille de débarqués ; & plein de cette noble
ardeur qui avoit toujours décidé la victoire , il
réfolut de les attaquer avant qu'ils fuffent en
plus grand nombre. Dans cette action décifive &
meurtriere , il fut bleflé de deux coups de feu ;
& ce moment fatal fut le premier où la victoire
l'abandonna ( 1 ) . Quoique bleffé mortellement
il eut le courage de refter à cheval , & fit luianême
la retraite de l'armée fous les murailles
de Québec , ou plutôt fur les débris de ces murailles
que l'artillerie Angloife battoit fans relâche
( k ) Le détachement de M. de Bougainville avoit paſſé
trois mois au Bivouac .
( 2 ) Il est très - certain que M. de Bougainville ne fut
averti au Cap rouge du débarquement des Anglois qu'à
zeuf heures du matin , & qu'ayant plus de trois lieues de
chemin à faire , il ne put arriver fur le champ de bataille
qu'après la déroute. Il n'en fit pas moins bonne contenance
, & fa retraite comme fa conduite dans cette pénible
campagne , a justifié pleinement la confiance que M. de
Montcalm avoit en lui.
JAN VIER. 1760. LIS
د ر
depuis deux mois. Il entra dans cette Ville ruinée ,
donna les ordres à tout , fe fit panfer , interrogea
le Chirurgien ; & fur la réponſe , dit au Lieutenant
de Roi & au Commandant de Royal Rouffillon
, Meffieurs , je vous recommande de
ménager l'honneur de la France , & de tâcher
»que ma petite armée puiffe fe retirer cette nuit
» au delà de la riviere du Cap- rouge , pour joindre
le Corps aux ordres de M. de Bougainville
: pour moi je vais la paller avec Dieu , &
me préparer à la mort . Qu'on ne me parle
» plus d'autres chofes. » Il mourut en Héros le
lendemain 14 Septembre à cinq heures du matin,
& fut enterré fans fafte dans un trou de bombe ,
fépulture digne d'un homme qui avoit réfolu de
défendre le Canada ou de s'enfevelir fous fes
ruines ( m ).
Je n'ai eu qu'à raconter les faits dans toute
lear fimplicité , pour faire des talents & des vertus
militaires de M. le Marquis de Montcalm un
éloge peut-être unique. L'Hiftoire les atteftera ,
& la postérité aura peine à les croire ; mais la
Colonie qu'il a défendue , les Guerriers qu'il a
commandés (n ) , les ennemis qu'il a vaincus
tant de fois, en rendront d'éclatans témoignages ;
& ces mêmes Sauvages qu'il a étonnés par des
prodiges de conftance , de réfolution & de valeur
, montreront à leurs enfans dans leurs dé-
(m)Les Anglois lui ont rendu les mêmes honneurs funébres
qu'au Général Wolf tué dans le même combat .
( n) L'un d'eux écrit du Canada : » Je ne me confo-
" lerai jamais de la perte de mon Général ; qu'elle eft
grande & pour nous & pour ce pays & pour l'Etat !
,, C'étoit un bon Général , un Citoyen zélé , un ami folide ,
,, un Pere pour nous tous. Il a été enlevé au moment de
,, jouir du fruit d'une campagne que M. de Turenne n'au
défavouée. Tous les jours je le chercherai , &
tous les jours ma douleur fera plus vive,
23 roit
pas
216 MERCURE DE FRANCE.
ferts inhabités les traces de ce Guerrier qui les
menoit à la victoire , & les lieux où ils ont eu
la gloire de combattre & de vaincre avec lui .
C'elt furtout dans le coeur des François que M.
de Montcalm doit fe furvivre . Notre Nation
qu'on accufe d'oublier trop ailément les grands
hommes qu'elle a perdus , eft profondément
frappée de la mort de celui-ci , & lui donne les
plus juftes larmes.
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Résumé : MORTS. ÉLOGE HISTORIQUE DE M. LE MARQUIS DE MONTCALM.
Le Marquis de Montcalm, né en 1712, fut un militaire français distingué pour son dévouement et ses sacrifices pour l'État. Il débuta sa carrière au Régiment de Hainault Infanterie et gravit les échelons jusqu'à devenir Lieutenant-Général des Armées du Roi et commandant en chef des troupes françaises en Amérique septentrionale. Montcalm était également un érudit, maîtrisant les langues grecque et latine, et conservant un goût pour l'étude tout au long de sa carrière. Montcalm servit avec distinction dans plusieurs campagnes en Europe et en Amérique. En Amérique, il montra une bravoure exceptionnelle, une grande prudence et une résolution courageuse, menant des troupes françaises et des alliés autochtones contre des forces ennemies supérieures en nombre. Ses campagnes, notamment autour du lac Saint-Sacrement et du fort Carillon, furent marquées par des victoires stratégiques et des manœuvres audacieuses. En 1759-1760, Montcalm et ses troupes, sous les ordres de Lévi et Bourlamaque, remportèrent une victoire significative contre les forces ennemies. La bataille coûta à l'ennemi environ six mille morts ou blessés, avec trois mille cadavres près de l'abattis. Les Canadiens et les Sauvages ne participèrent pas à cette victoire, rejoignant l'armée cinq jours plus tard. Les soldats crièrent 'Vive le Roi et notre Général!' durant le combat, reflétant leur confiance en Montcalm. Montcalm écrivit à Doreil pour exprimer sa satisfaction de la victoire et regretta de ne pas avoir plus de troupes pour poursuivre l'ennemi. Il loua également ses officiers et soldats, soulignant leur valeur et leur discipline. Dans une lettre à Vaudreuil, il attribua la victoire aux dispositions prises et à l'exemple donné par lui-même. La défense de Québec contre les forces anglaises fut marquée par des combats acharnés pour protéger les vivres et les communications. Montcalm fut blessé mortellement lors d'une bataille décisive près de Québec et mourut le 14 septembre 1760. Ses dernières paroles furent de recommander à ses officiers de préserver l'honneur de la France. Les ennemis et les alliés de Montcalm témoignèrent de ses talents militaires et de ses vertus.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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13
p. 199-200
SUPPLÉMENT à l'Art. des Beaux-Arts. LETTRE À M. DE LA PLACE.
Début :
Je vous prie, Monsieur, d'annoncer au Public le Portrait de M. Rousseau [...]
Mots clefs :
Portrait, Rousseau, Poète, Gravure, Éloges
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texteReconnaissance textuelle : SUPPLÉMENT à l'Art. des Beaux-Arts. LETTRE À M. DE LA PLACE.
SUPPLÉMENT à l'Art. des Beaux-Arts.
LETTRE A M. DE LA PLACE.
JE vous prie , Monfieur , d'annoncer au Public
lePortrait de M. Rouffeau . l'un des plus célébres
Poëtes François , gravé par M. Ficquet ,
dont le burin ſçavant & délicat s'eſt déja fi
avantageuſement fait connoître par les beaux
Portraits de MM. Delafontaine & Voltaire . Cette
dernière production mérite les plus grands éloges
, & vous en jugerez vous-même , Monfieur ,
par l'epreuve que j'ai l'honneur de vous envoyer.
Ces trois Portraits de même grandeur ſe trouvent
, enſemble ou féparément , chez les principaux
Marchands d'Eſtampes , chez Duchesne ,
I iv
200 MERCURE DE FRANCE.
Libraire , chez Lattré , Graveur , rue S. Jacques:
àla Ville de Bordeaux.
J'ai l'honneur d'être , &c.
Paris , ce. 2.Décembre 1763 .
LETTRE A M. DE LA PLACE.
JE vous prie , Monfieur , d'annoncer au Public
lePortrait de M. Rouffeau . l'un des plus célébres
Poëtes François , gravé par M. Ficquet ,
dont le burin ſçavant & délicat s'eſt déja fi
avantageuſement fait connoître par les beaux
Portraits de MM. Delafontaine & Voltaire . Cette
dernière production mérite les plus grands éloges
, & vous en jugerez vous-même , Monfieur ,
par l'epreuve que j'ai l'honneur de vous envoyer.
Ces trois Portraits de même grandeur ſe trouvent
, enſemble ou féparément , chez les principaux
Marchands d'Eſtampes , chez Duchesne ,
I iv
200 MERCURE DE FRANCE.
Libraire , chez Lattré , Graveur , rue S. Jacques:
àla Ville de Bordeaux.
J'ai l'honneur d'être , &c.
Paris , ce. 2.Décembre 1763 .
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Résumé : SUPPLÉMENT à l'Art. des Beaux-Arts. LETTRE À M. DE LA PLACE.
La lettre du 2 décembre 1763 annonce la publication du portrait de M. Rouffeau, gravé par M. Ficquet. Ce graveur est célèbre pour ses portraits de MM. Delafontaine et Voltaire. Les portraits de Rouffeau, Delafontaine et Voltaire sont disponibles chez Duchesne, Lattré et à Bordeaux. Une épreuve du portrait de Rouffeau est incluse pour jugement.
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